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Version finale

33e législature, 2e session
(8 mars 1988 au 9 août 1989)

Le mardi 3 mai 1988 - Vol. 30 N° 6

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation générale sur les projets de loi 106 - Loi sur les élections scolaires et 107 - Loi sur l'instruction publique


Journal des débats

 

(Dix heures sept minutes)

Le Président (M. Parent, Sauvé): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission permanente de l'éducation va entreprendre ses travaux.

M. le secrétaire, est-ce que nous avons quorum pour commencer nos travaux?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Si nous avons quorum, je déclare la séance ouverte.

Je rappelle aux participants et à nos invités que la commission permanente de l'éducation est réunie ce matin pour procéder à une consultation générale et tenir des auditions publiques dans le cadre de l'étude détaillée du projet de loi 106 et du projet de loi 107, Loi sur l'instruction publique.

M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements au sein des membres de la commission?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Jacques Chagnon, député de Saint-Louis, remplace M. Khelfa, député de Richelieu.

Organisation des travaux

Le Président (M. Parent, Sauvé): Très bien. Avant de procéder aux auditions, je voudrais rappeler aux membres de la commission et à nos invités l'ordre du jour. À 10 heures, ce matin, nous commencerons par les déclarations d'ouverture du ministre de l'Éducation et ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science et du porte-parole officiel de l'Opposition, Mme la députée de Chicoutimi. Vers 11 h 30, nous entendrons la Fédération québécoise des directeurs et directrices d'école. Cet après-midi, s'il y a lieu, nous continuerons la rencontre avec la Fédération québécoise des directeurs et directrices d'école. Si nous terminons nos discussions à l'ajournement de nos travaux, nous enchaînerons vers 15 h 30, avec l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires. Nous continuerons en soirée, vers 20 heures, avec l'Association des directeurs et des directrices d'école de la région 03. À 21 heures, nous terminerons cette première journée de travail en accueillant l'Association des administrateurs des écoles catholiques du Québec.

La commission entend siéger à partir de maintenant jusqu'au 26 mai prochain. S'il y avait lieu, et nous croyons qu'il y aura lieu, la commission devrait reprendre ses travaux dans la deuxième semaine de septembre, pas la semaine immédiatement après la fête du Travail, mais la semaine après, soit vers le 12 ou le 13 septembre, pour tâcher d'entendre le plus grand nombre de personnes possible. Je vous informe immédiatement que le secrétaire a déjà reçu près d'une centaine de demandes de groupements ou d'associations qui veulent se faire entendre à cette commission parlementaire.

Lors d'une réunion de travail, nous avons déterminé le temps alloué aux différents organismes qui viendront se faire entendre. Aux organismes reconnus à caractère national ou à ceux revêtant une importance particulière dans le monde de l'éducation, nous avons alloué une période d'une heure et demie et, pour les autres organismes, une période d'une heure. Nous suggérons fortement à nos invités de diviser cette période de temps en tiers, c'est-à-dire un tiers pour la présentation de leur mémoire et les deux autres tiers répartis également entre les deux formations politiques.

Le 15 décembre dernier, la commission permanente de l'éducation a reçu le mandat de tenir une consultation générale sur les projets de loi 106 et 107 et de commencer les auditions publiques à compter du 15 mars 1988. C'est donc dire que nous aurions dû commencer nos travaux il y a déjà un mois et demi. Étant donné qu'une consultation générale constitue un forum privilégié où tous les points de vue peuvent être exprimés, la commission a acquiescé à la demande formulée par de nombreux organismes afin que la période pour préparer et soumettre les mémoires soit prolongée. C'est pour cette raison que la commission a accepté des mémoires jusqu'au 15 avril dernier et que nous commençons nos auditions aujourd'hui.

Avant de commencer, je voudrais aussi informer la presse et nos invités que cette commission permanente de l'éducation est formée de membres qui ont déjà l'expérience d'une autre consultation générale tenue en septembre, il y a deux ans, sur le financement des universités. C'est donc dire que vous avez des commissaires d'expérience qui sont là tout yeux, tout oreilles pour entendre les remarques et les préoccupations des gens impliqués directement dans le monde de l'éducation.

Sont membres de cette commission: le député d'Argenteuil et ministre de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la Science; le député de Charlevoix; le député de Verchères; Mme la députée de Jacques-Cartier, adjointe parlementaire au ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science; le député d'Arthabas-ka; le député d'Abitibi-Ouest; le député de Saint-Henri; pour cette consultation, en remplacement du député de Richelieu, le député de Saint-Louis; vice-président de la commission; il me fait plaisir de vous présenter le député de Shefford qui sera avec nous durant toutes ces discussions; le député de Rimouski et la députée de Marie-Victorin.

Est-ce que j'ai nommé le porte-parole

officiel de l'Opposition? Alors, le porte-parole officiel de l'Opposition, est Mme la députée de Chicoutimi, qui est le pilier de l'Opposition à cette commission permanente de l'éducation. Nous sommes très heureux de l'avoir parmi nous.

Sans plus de préambule, nous allons immédiatement commencer nos travaux. Je cède la parole au député d'Argenteuil, membre de cette commission et qui agit aussi à titre de ministre de l'Éducation à cette commission. M. le ministre.

Déclarations d'ouverture M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, la série d'auditions publiques que la commission parlementaire de l'éducation inaugure aujourd'hui est appelée à exercer une influence décisive sur l'avenir de notre régime scolaire public.

Les projets de loi 106 et 107 sont les deux volets d'un même diptyque. Ils forment ensemble une synthèse. Ils ont pour objet de favoriser une plus grande participation des citoyens à la chose scolaire et surtout d'instituer des structures de direction et un partage des responsabilités qui correspondent mieux aux besoins de notre époque.

À la suite des nombreux changements survenus à l'époque contemporaine, notre système d'enseignement public est demeuré étonnamment conforme aux grandes orientations qui !e caractérisaient lors des débuts de la Confédération. Malgré des illogismes apparents, il a conservé une logique interne qui a maintes fois eu raison des projets de changement des réformateurs. Il y a, dans cette continuité, une force qui commande l'admiration et le respect.

Par contre, les structures de base du système ont vieilli. À bien des égards, elles ne correspondent plus aux réalités d'aujourd'hui. Aussi, le gouvernement a conclu qu'après plusieurs tentatives infructueuses des gouvernements précédents le moment était venu de tenter de nouveau de mettre notre système d'enseignement à l'heure d'aujourd'hui, sans renier pour autant maintes caractéristiques qui ont fait sa vitalité et sa force.

À l'occasion des auditions publiques de la commission parlementaire de l'éducation, nous aurons amplement le temps d'ausculter les quelque 834 articles que contiennent les projets de loi 106 et 107. En ce début de nos travaux, je me bornerai à résumer les grandes orientations, les objectifs essentiels des deux projets de loi, ainsi que les motifs qui sous-tendent les propositions gouvernementales.

Une première caractéristique du projet de loi 107 lui vient de l'importance qu'il accorde à l'école, lieu premier et fondamental de l'action éducative. Sur ce sujet capital, on trouve dans le projet de loi environ 60 articles. Ces articles contribueront à faire mieux comprendre la mission propre de l'école et à lui procurer une marge mieux définie de légitime autonomie en vue d'une action plus efficace auprès des élèves.

En vertu du projet de loi, l'école demeure une entité établie par la commission scolaire et fonctionnant sous l'autorité générale de celle-ci. Un acte d'établissement consacrera cependant l'existence propre de l'école et viendra du même coup l'assurer d'une certaine permanence. Cet acte d'établissement pourra certes être modifié, voire être révoqué par la commission scolaire. Tout acte de cette nature devra toutefois intervenir dans le cadre du plan triennal de répartition et de distribution de ses immeubles que la commission scolaire sera tenue de se donner.

Ainsi que l'a toujours préconisé le Parti libéral du Québec, l'école sera dotée d'une direction claire, unie et efficace en tout ce qui touche son fonctionnement quotidien. Cette direction sera assurée par un directeur ou une directrice nommé par la commission scolaire et oeuvrant sous l'autorité du directeur général de la commission scolaire. À l'intérieur de l'école, l'autorité pédagogique et administrative du directeur ou de la directrice sera clairement définie. Le lien que le titulaire de cette fonction sera tenu de maintenir avec le directeur général de la commission scolaire assurera de plus que l'école fonctionnera non pas comme une entité séparée, mais plutôt comme partie d'un ensemble plus large au sein duquel son action sera facilitée et enrichie par un processus continu d'échanges de toutes sortes, tout en étant largement autonome.

Autant le directeur ou la directrice aura la responsabilité de la gestion pédagogique et administrative de l'école, autant il faudra assurer que les orientations générales de l'école répondront aux voeux des parents, des élèves, des enseignants et des autres intervenants. À cette fin, un conseil d'orientation sera constitué. Sa première tâche sera de déterminer les orientations propres de l'école dans le projet éducatif qu'il lui appartiendra de mettre au point. En plus d'être appelé à se prononcer sur le caractère confessionnel de l'école et les valeurs devant être intégrées dans le projet éducatif, le conseil d'orientation jouera un rôle important de conseiller auprès de la direction de l'école et de la commission scolaire, dans les matières reliées au statut, à la vie pédagogique, à la gestion administrative et au rayonnement communautaire de l'école.

Afin de bien assurer que le conseil d'orientation sera l'affaire de tous les intervenants, le projet de loi prévoit qu'il comprendra des représentants des parents, des enseignants et des autres personnels. Au deuxième cycle du secondaire, le conseil comprendra également une représentation des élèves. Les parents occuperont, au sein du conseil d'orientation, une place très importante, détenant au moins la moitié des sièges et se voyant confier, en outre, la prési-

dence du conseil. Afin d'assurer qu'il possédera son existence propre, le conseil d'orientation se verra doter, chaque année, d'un budget approprié par la commission scolaire. Il pourra également se voir déléguer certains pouvoirs par la commission scolaire.

Certains jugent que la création du conseil d'orientation assurera, d'une manière suffisante, la participation des parents à la vie de l'école. Ils ne voient pas la nécessité de maintenir, en plus du conseil d'orientation, un comité d'école regroupant uniquement les parents. D'autres sont d'avis contraire: ils estiment qu'il faut maintenir le comité d'école, même si les parents seront appelés à participer au conseil d'orientation. Il eut été difficile de trancher ce débat d'une manière uniforme pour tout le Québec, car les situations et les mentalités varient beaucoup d'une école à l'autre. Aussi, le gouvernement a-t-il préféré laisser le choix aux parents eux-mêmes. Là où les parents le voudront, ils pourront se doter d'un comité d'école. Là où ils préféreront centrer toute leur énergie sur leur participation au conseil d'orientation, ils ne seront pas tenus d'instituer un comité d'école dont ils ne voudraient pas.

Pour la première fois dans l'histoire de notre législation, les enseignants se voient consacrer un chapitre traitant de leurs droits et de leurs devoirs. La loi 3 avait abordé ce sujet, mais à peu près uniquement sous l'angle de certains droits qu'elle reconnaissait aux enseignants. La logique exige que, si l'on veut parler de droits, on parle aussi de devoirs et vice versa. Une fois qu'on a tout dit sur les parents, les commissaires et la direction de l'école, il faut bien se rendre à l'évidence: c'est l'enseignant qui est en contact quotidien avec l'élève, c'est avec lui que se déroule dans la classe l'essentiel de l'expérience pédagogique vécue par l'élève.

Sous peine de passer à côté des vraies réalités de l'éducation, le législateur ne saurait passer sous silence le rôle clé et la responsabilité éminente de l'enseignant dans le système éducatif. Dès qu'on traite de ce sujet, il faut le faire avec honnêteté. Il ne faut pas craindre de parler et des droits et des obligations des enseignants. Le gouvernement le fait avec d'autant plus d'aisance dans le projet de loi 107 qu'il s'est employé depuis le début de son mandat à traiter les enseignants comme des partenaires responsables et qu'il entend continuer, à le faire.

L'enseignant se voit reconnaître une légitime autonomie dans l'exercice de son activité professionnelle. Il aura, notamment, le droit d'arrêter les modalités d'intervention pédagogiques qu'il jugera opportunes suivant les besoins de ses élèves et les objectifs fixés pour chaque groupe d'élèves; le droit de choisir les instruments d'évaluation des élèves qui lui sont confiés afin de permettre de mesurer les progrès accomplis par ces derniers; le droit de régler la conduite de chaque groupe d'élèves qui lui est confié.

En contrepartie, le projet de loi énonce certaines obligations qui découlent pour l'enseignant du caractère éminemment public et communautaire de sa mission. Il incombera, notamment, à l'enseignant de contribuer au développement intégral de l'élève; de cultiver chez celui-ci le respect des droits de la personne; de prendre les moyens nécessaires pour assurer la qualité de la langue parlée et écrite chez l'élève; d'appliquer loyalement les décisions et les règlements du gouvernement, du ministre, de la commission scolaire, du conseil d'orientation et de la direction de l'école. Ainsi, tout en étant assuré d'une mesure raisonnable de liberté dans l'exercice de sa tâche professionnelle, l'enseignant sera invité à se souvenir qu'il oeuvre au sein d'un ensemble dont les contraintes normales ne sauraient le laisser indifférent.

Pour toutes les grandes tâches qui incombent au système d'enseignement, notamment pour le renforcement des apprentissages de base et plus particulièrement pour l'amélioration du français langue maternelle, le gouvernement mise beaucoup sur l'école. Des écoles mieux structurées, dotées d'une direction forte et unifiée et de mécanismes efficaces de participation, seront mieux en mesure de répondre aux attentes très fortes que la population nourrit à leur endroit. Dans des lieux de plus en plus nombreux, l'école publique se montre résolue à être la première école, la meilleure école, celle à laquelle se réfèrent spontanément les citoyens. Les améliorations que propose le projet de loi 107 viendront renforcer cette tendance que le gouvernement épouse sans réserve.

Ainsi qu'il s'y était engagé, le gouvernement réaffirme, avec les projets de loi 106 et 107, sa conviction voulant que la gestion concrète des écoles continue d'être assurée par des commissions scolaires formées de membres démocratiquement élus à cette fin par la population. Suivant le projet de loi 107, tous les commissaires, à l'exception des personnes choisies pour représenter les parents au sein de la commission scolaire, seront élus au suffrage universel dans leur quartier respectif. Le Parti libéral du Québec ayant toujours défendu cette position, le gouvernement n'éprouve aucun malaise à la réaffirmer. Nous voulons que les écoles soient organisées, gérées et dirigées sous l'autorité de commissions scolaires détenant, à cette fin, un mandat direct de la population. Tel est le message que l'on trouve dans les projets de loi 106 et 107.

Au lieu d'être organisées suivant une base confessionnelle, les commissions scolaires seront toutefois, à l'avenir, organisées suivant une base linguistique. À travers le territoire du Québec, nous comptons, aujourd'hui, un réseau de commissions scolaires pour catholiques et un réseau de commissions scolaires pour protestants. Chaque réseau recouvre l'ensemble du territoire québécois. En lieu et place de ces commissions scolaires et dans le respect des droits confes-

sionnels garantis par la Loi constitutionnelle de 1867 et réaffirmés dans la Loi constitutionnelle de 1982, il y aura désormais un réseau de commissions scolaires francophones et un réseau de commissions scolaires anglophones. (10 h 30)

Pourquoi ce changement? Parce qu'il nous apparaît plus conforme à la réalité du Québec d'aujourd'hui. Dans le Québec de 1867, on était, de manière générale, soit catholique, soit protestant. Ces deux catégories suffisaient à regrouper à peu près toute la population. D'où le mode ingénieux qui fut alors retenu pour l'organisation de commissions scolaires communes à l'intention du groupe formant la majorité de la population et de commissions scolaires dissidentes à l'intention de la minorité religieuse.

Mais les distinctions qui présidèrent à l'organisation de notre système scolaire il y a plus d'un siècle n'ont plus de nos jours la même clarté et la même force. Le nombre des personnes de religion autre que catholique ou protestante n'a cessé d'augmenter. À l'intérieur même des communautés catholiques et protestantes, il s'est également produit une évolution très importante des mentalités et des comportements, par suite de laquelle bien des choses qui étaient claires autrefois le sont beaucoup moins aujourd'hui. Bien naïf serait celui qui voudrait prétendre que des commissions scolaires confessionnelles suivant la ligne que nous avons connue sont encore aptes à répondre de nos jours aux besoins et aux attentes d'une population dont les valeurs morales et les allégeances religieuses se sont de plus en plus diversifiées.

N'est-ce pas la vocation des commissions scolaires que de regrouper et de servir toute la population et non pas seulement certaines catégories de citoyens, et d'offrir à toutes et à tous des chances égaies de participation à la direction des affaires scolaires.

Pour des raisons économiques et fonctionnelles évidentes, on ne saurait multiplier à l'infini les modèles de commission scolaire. Vu le caractère relativement peu nombreux et dispersé de la population québécoise, nous ne pouvons pas nous offrir plus de deux réseaux publics de commission scolaire sans risquer de créer toutes sortes de complications fonctionnelles, administratives et financières. Dans le contexte actuel, le gouvernement considère que la formule des commissions scolaires linguistiques répondra mieux aux besoins de notre population que la formule des commissions scolaires confessionnelles.

Du côté des milieux intéressés à la confes-sionnalité, plusieurs se préoccupent à juste titre de ce qu'il arrivera des valeurs auxquelles ils tiennent dans l'éducation de l'élève. À ceux-là, nous répondons que le projet de loi 107 contient de nombreuses dispositions visant précisément à assurer la présence efficace des valeurs morales et religieuses dans l'école sous le nouveau type de commissions scolaires que propose le gouver- nement. Au niveau national, l'autorité des sous-ministres associés de foi catholique et protestante sera mieux définie. Les comités confessionnels du Conseil supérieur de l'éducation seront maintenus, de même que les pouvoirs dont ils sont investis. L'action des comités confessionnels pourra même s'appuyer désormais sur de nouveaux règlements, plus clairs et plus réalistes en matière de confessionnalité scolaire, lesquels entreront en vigueur dès juillet prochain. En vertu de ces règlements, la compétence des enseignants chargés de l'enseignement moral et religieux confessionnel sera sujette à des exigences plus fortes.

Au niveau de la commission scolaire, de nombreuses dispositions du projet de loi 107 précisent les obligations des commissions scolaires en matière d'enseignement religieux et d'animation pastorale. La commission scolaire devra notamment compter dans son personnel-cadre une personne expressément responsable du soutien à l'administration des écoles confessionnelles et au service de l'enseignement moral et religieux confessionnel; la personne ainsi choisie devra détenir un mandat de l'évêque du diocèse où est situé le siège social de la commission scolaire.

Au niveau de l'école, enfin, les parents seront périodiquement appelés à se prononcer sur le caractère confessionnel de l'école. Là où les parents le voudront, l'école pourra être confessionnelle. Là où ils ne le voudront pas, elle pourra, évidemment, ne pas être confessionnelle. Dans le cas où les parents choisiraient l'école confessionnelle, les valeurs de la confession religieuse concernée pourront être intégrées dans le projet éducatif de l'école, moyennant le respect des libertés garanties dans la Charte des droits et libertés de la personne. Le choix entre l'enseignement moral et religieux confessionnel et l'enseignement moral laïque sera libre dans toutes les écoles, tout comme sera respecté le droit de l'enseignant de refuser, pour motif de liberté de conscience, de dispenser l'enseignement moral et religieux d'une confession.

Ces garanties sont précises et substantielles. Elles répondent, selon nous, aux attentes formulées ces dernières années par l'Assemblée des évêques du Québec. Elles permettront de mieux assurer la présence des valeurs morales et religieuses dans l'école, en même temps qu'elles permettront aussi d'établir une nette distinction entre la religion et la politique scolaire.

Du côté protestant, on se dit volontiers enclin à préférer la formule linguistique à la formule confessionnelle en matière de commissions scolaires. On ajoute toutefois qu'on tient par-dessus tout à préserver la protection garantie dans la constitution en matière de droits scolaires des protestants. Certains ne consentiraient, en conséquence, à des commissions scolaires linguistiques que moyennant un changement constitutionnel qui permettrait de transférer à la communauté anglophone, sous forme de

droits linguistiques garantis, les droits confessionnels présentement garantis à la communauté protestante.

Aux personnes et aux organismes qui soutiennent ce point de vue, je soumets les considérations suivantes. En premier lieu, sous le système actuel, des milliers d'élèves francophones doivent relever de commissions scolaires à majorité anglophone. Dans un Québec à 80 % francophone, cela n'est ni logique, ni normal. Il serait beaucoup plus normal que tous les élèves francophones puissent être regroupés dans des commissions scolaires francophones.

En second lieu, sous le système actuel, des milliers d'élèves catholiques anglophones doivent de toute manière être confiés à des commissions scolaires protestantes pour leur instruction. Plusieurs commissions scolaires catholiques, desservant une clientèle presque entièrement francophone, n'ont pas les moyens d'offrir à leur clientèle anglophone des services appropriés. En vertu d'ententes permises par la loi, elles confient en conséquence cette clientèle à des commissions scolaires protestantes, lesquelles sont de fait surtout anglophones. C'est le cas, par exemple, dans mon comté d'Argenteuil où la commission scolaire du Long Sault ne peut pas fournir les services éducatifs à sa clientèle catholique de langue anglaise. Elle a conclu, en conséquence, une entente avec le Laurentian School Board, en vertu de laquelle cette commission scolaire protestante, qui est presque intégralement anglophone, assure l'instruction des élèves catholiques de langue anglaise. Et c'est le cas, de manière très générale, dans la région des Laurentides. Ne serait-il pas normal que les structures des commissions scolaires soient davantage calquées sur ces réalités que nous observons?

En troisième lieu, quel que soit le système retenu, les droits confessionnels garantis par la constitution continueront, jusqu'à nouvel ordre, d'exister. Aucune loi statutaire ne peut effacer un droit constitutionnel. En cas de situation pouvant l'exiger, ces droits pourront toujours être invoqués, même si nous options aujourd'hui pour des commissions scolaires linguistiques. La meilleure façon d'évoluer vers d'éventuelles modifications constitutionnelles dans le sens souhaité par plusieurs ne serait-elle pas de faire dès maintenant l'expérience de commissions scolaires linguistiques, quitte à consigner plus tard dans la constitution les fruits de cette expérience et les leçons que nous pourrons en retirer?

Si nous voulons regarder la réalité en face et convenir qu'un système public d'enseignement doit exister pour toute la population, offrir des services appropriés à toute la population et favoriser la participation de tous les citoyens, sur un pied d'égalité, à la gestion de la chose scolaire, nous conviendrons sans hésiter que la formule des commissions scolaires linguistiques est celle qui peut le mieux convenir au Québec d'aujourd'hui et de demain. Vu les garanties constitutionnelles dont jouissent les communautés catholique et protestante, le gouvernement, une fois adoptés les projets de loi 106 et 107, verra à faire vérifier leur validité juridique par les tribunaux avant de mettre en application les dispositions traitant des structures à donner aux commissions scolaires en matière confessionnelle et linguistique. Mais il est convaincu que les commissions scolaires linguistiques seront mieux aptes à assurer la scolarisation de toute notre population dans un esprit d'unité, de respect des droits fondamentaux de chacun et de saine démocratie.

De manière générale, le projet de loi 107 maintient, en le précisant et en l'ajustant sur plusieurs sujets aux réalités d'aujourd'hui, le partage des responsabilités que nous connaissons déjà entre le ministre de l'Éducation et le gouvernement, d'une part, et les commissions scolaires, d'autre part. Du côté des commissions scolaires, deux principales critiques ont été adressées au projet de loi 107. On lui reproche de ne pas attribuer de pouvoirs additionnels aux commissions scolaires. On lui reproche également d'accroître dangereusement les pouvoirs dévolus au ministre de l'Éducation et au gouvernement. Le gouvernement écoutera avec respect les arguments qu'on voudra lui soumettre à ce sujet dans le cadre des travaux de la commission parlementaire. Là où des changements s'avéreront nécessaires ou souhaitables, il procédera volontiers à des modifications de son projet de loi dans le but de le rendre meilleur. Mais en ce début des travaux de la commission parlementaire, la position du gouvermement doit être énoncée dans les termes suivants.

Tout d'abord, il n'y a pas lieu, à l'heure actuelle, de procéder à des changements majeurs dans le partage des responsabilités entre les commissions scolaires et le gouvernement. Au niveau des orientations financières, administratives et pédagogiques, le partage actuel des tâches permet d'assurer une direction forte et équilibrée du système d'enseignement à travers, d'une part, les orientations et les ressources émanant du ministère de l'Éducation et, d'autre part, la gestion décentralisée qu'assurent les commissions scolaires. Ce partage général est sain et efficace. Le projet de loi 107 ne le remet pas en cause.

En second lieu, il est vrai que le projet de loi 107 confère au ministre de l'Éducation et au gouvernement un certain nombre de pouvoirs que l'on ne trouve pas dans la Loi actuelle sur l'instruction publique. Mais la plupart de ces pouvoirs supposément nouveaux sont déjà existants dans la réglementation et dans la pratique courante. Ainsi, le projet de loi 107 attribue au ministre de l'Éducation plusieurs pouvoirs qui étaient définis à ce jour dans les régimes pédagogiques plutôt que dans la loi. Ce transfert n'a ni pour objet ni pour effet d'augmenter les pouvoirs du ministre, mais de leur conférer une

assise juridique plus solide. On trouve d'ailleurs dans le projet de loi 107 bon nombre de dispositions semblables à l'avantage des commissions scolaires. Celles-ci se voient attribuer dans le texte législatif bon nombre d'attributions qu'elles exercent déjà sous l'empire des régimes pédagogiques ou d'autres règlements qui n'étaient pas définis clairement dans la Loi sur l'instruction publique. Si l'on fait la somme des changements qu'apporte le projet de loi 107 en matière de partage des responsabilités, on devra conclure que la très grande majorité sont de cette nature.

Parmi les pouvoirs nouveaux que se voit attribuer le ministre de l'Éducation, examinons ceux qui, à juste titre, retiennent davantage l'attention. Il y a d'abord le pouvoir d'établir la liste des spécialités professionnelles qu'une commission scolaire est autorisée à dispenser. Pour qui a vécu l'expérience toute récente de rétablissement de la carte des options professionnelles dans le cadre de la réforme de l'enseignement professionnel secondaire, la nécessité d'un tel pouvoir ne saurait faire de doute. Autant la concertation préalable des commissions scolaires en ces matières est souhaitable et a été favorisée de toutes les manières par le ministère, autant, finalement, il reste un certain nombre de décisions qui ne peuvent être prises que par le ministre de l'Éducation et autant il est nécessaire que des orientations soient fournies aux commissions scolaires quant aux critères qui devront guider leur choix en ces matières. Si ce pouvoir est nécessaire, et je pense que personne ne le contestera, mieux vaut l'inscrire clairement dans la loi afin d'éviter toute contestation inutile et toute décision judiciaire éventuelle qui pourrait nous étonner et nous déconcerter.

En second lieu, il y a le pouvoir d'établir la liste des commissions scolaires qui pourront organiser des services éducatifs pour les adultes. On compte actuellement 82 services d'éducation des adultes, alors qu'il y a au Québec 213 commissions scolaires. L'expérience enseigne qu'il ne serait pas rentable que chaque commission scolaire possède son propre service d'éducation des adultes. Celui-ci fonctionnera d'une façon plus efficace sur une base régionale. Même en misant d'abord sur la concertation entre les commissions scolaires pour l'établissement de tels services régionaux, il faut compter en dernière analyse sur l'intervention décisive du ministre dans les dossiers de cette nature. Encore quelques dossiers sont présentement sur la table du ministre en provenance de commissions scolaires énonçant des demandes de cette nature; il y a certaines demandes auxquelles il faut poser une réponse négative et d'autres qui sont acceptables, mais la décision doit être prise quelque part et elle ne saurait être prise ailleurs que là où elle réside déjà actuellement. (10 h 45)

Troisièmement, le pouvoir d'arbitrer en dernière analyse les litiges relatifs à l'intégration des enseignements primaire et secondaire. Le processus d'intégration des enseignements primaire et secondaire est maintenant engagé depuis quatre ans. Or, dans plusieurs endroits, il tarde toujours à se réaliser. Dans certaines régions, le refus d'une seule commission scolaire suffit à empêcher la réalisation d'une volonté nettement exprimée par toutes les autres commissions scolaires faisant partie d'une commission scolaire régionale. Pareille situation ne saurait se prolonger indéfiniment sans qu'il n'en découle des injustices inacceptables pour la population. Qui d'autre que le ministre de l'Éducation peut trancher en dernier ressort des litiges de cette nature?

En quatrième lieu, le pouvoir de définir les conditions devant présider à la consultation des parents d'une école par la commission scolaire relativement au caractère confessionnel de l'école. Cette disposition fait suite à un voeu fortement répandu qui fut exprimé par de nombreux organismes devant la commission parlementaire de l'éducation lors des auditions publiques sur les projets de règlements des comités confessionnels touchant la confession-nalité des écoles. Il fut fortement demandé à cène occasion de voir à ce que le sérieux des consultations soit garanti par un règlement ministériel.

Il y a ensuite le pouvoir d'exiger, pendant la tenue d'une vérification ou d'une enquête, que la commission scolaire suspende la prise de décision ou l'application d'une décision prise. Cette disposition découle de l'expérience vécue ces dernières années. Elle vise à éloigner le recours au moyen extrême qu'est la tutelle. Lorsqu'une décision prise par une commission scolaire a créé une situation exigeant la tenue d'une vérification ou d'une enquête, il est logique que la commission scolaire puisse être invitée, au besoin, à surseoir à cette décision pendant la durée de la vérification ou de l'enquête car, souvent, la décision est la source du problème porté à l'attention du ministre. De même, si, pendant la durée de l'enquête, la commission scolaire voulait prendre une décision dont l'effet serait d'annuler, à toutes fins utiles, la portée de l'enquête, il serait souhaitable qu'elle puisse être invitée à surseoir à pareille décision. À défaut d'un recours de cette nature, le seul moyen d'action dont dispose présentement le ministre est celui qui l'habilite à recommander au gouvernement la mise en tutelle. Entre l'impuissance totale et le recours à la tutelle, il est apparu sage d'introduire une formule intermédiaire qui assure l'efficacité de l'enquête tout en évitant le recours à la tutelle.

Enfin, le pouvoir d'établir la liste des services particuliers aux élèves handicapés et aux élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage qu'une commission scolaire est autorisée à dispenser. Ce pouvoir dérive de la nature même des services qui doivent être offerts à ces clientèles. Le caractère coûteux de ces services

et la répartition inégale des clientèles entre les commissions scolaires requièrent qu'un rôle de planification et d'orientation soit exercé en ces matières par le ministre de l'Éducation.

Parmi les pouvoirs du ministre que plusieurs commissions scolaires auraient souhaité voir réduire, il y a les pouvoirs relatifs aux contrôles exercés par le ministre en ce qui touche les finances et la gestion des commissions scolaires. Quelques-uns de ces pouvoirs sont allégés ou réduits par le projet de loi 107. En contrepartie, très rares sont ceux qui sont augmentés. La solution de stabilité et de continuité que retient surtout à cet égard le projet de loi 107 s'explique par deux raisons: en premier lieu, dans l'état actuel des choses, 92 % des revenus des commissions scolaires leur proviennent de subventions directes du gouvernement. Afin d'assurer que ces subventions serviront à assurer partout des services de qualité comparable - c'est le but même de cette intervention massive du gouvernement dans le financement des commissions scolaires, afin d'assurer partout des services de qualité comparable - il est nécessaire que des indications assez précises soient fournies aux commissions scolaires quant à la destination des subventions et que des contrôles efficaces soient exercés quant à leur utilisation.

Les principaux moyens de contrôle dont nous disposons à ce sujet sont, d'un côté, les règles budgétaires qui contiennent les indications quant à la manière dont doivent être utilisés les fonds mis à la disposition des commissions scolaires et, deuxièmement, les rapports financiers périodiques que les commissions scolaires doivent soumettre au gouvernement et qui permettent de vérifier la manière dont ont été appliquées les politiques en matière de gestion financière et administrative.

Il est permis de souhaiter qu'éventuellement un partage différent de l'assiette fiscale permette aux commissions scolaires de financer une plus grande part de leurs dépenses par des impôts qu'elles percevront directement. Il en découlerait logiquement, tôt ou tard, des ajustements significatifs au chapitre du partage des responsabilités. Mais, à court terme, pareil changement n'est pas possible politiquement. Les deux partis qui se sont succédé au pouvoir ces dernières années ont contribué tour à tour à retourner aux municipalités la presque totalité de l'impôt foncier et personne ne pourrait soumettre sérieusement, à l'heure actuelle, des propositions de changement à cet égard. Il y aurait une véritable mutinerie de la part des municipalités. Je pense qu'aucun des deux partis ne serait prêt à mettre sur la table des propositions significatives de ce côté. J'aime mieux qu'on le dise clairement et franchement, mais c'est un objectif que je trouve souhaitable en soi et, dans la mesure où l'opinion évoluera dans ce sens, je pense qu'il pourrait être bienfaisant à bien des points de vue que le Québec s'oriente davantage vers le modèle de répartition fiscale qui est en vigueur dans toutes les provinces canadiennes à l'ouest du Québec en ces matières.

Malgré ses inconvénients, le système actuel a permis d'établir - c'est la deuxième raison pour laquelle nous ne voulons pas trop modifier l'équilibre que nous connaissons actuellement - dans le réseau des commissions scolaires une situation financière à la fois limpide et saine, laquelle se traduit, selon les données les plus récentes du ministère de l'Éducation, par un surplus cumulatif de près de 160 000 000 $. Ce résultat obtenu par-delà les effets souvent pénibles des compressions qui n'ont pas été épargnées aux commissions scolaires ces dernières années ne saurait être dissocié du système de relation commissions scolaires-gouvernement qui l'a rendu possible. Le gouvernement n'est pas prêt à l'abandonner, du moins quant à l'essentiel.

J'ajoute une remarque, à ce stade-ci, à l'intention des critiques que l'on adresse au projet de loi 107 en matière de confessionnalité. Je lisais dans les journaux, ce matin, que l'on reproche au projet de loi 107 de renforcer le dispositif confessionnel dans notre système scolaire. Je pense qu'on oublie un changement fondamental introduit à la fois par les nouveaux règlements des comités confessionnels et par le projet de loi. Désormais, il incombera aux parents de chaque école d'exprimer en ces matières un jugement qui aura toutes les chances d'être décisif alors que, jusqu'à maintenant, nous avions un système où les décisions procédaient d'en haut jusqu'en bas. Sauf dans le cas des nouvelles écoles qui sont construites à l'occasion de l'ouverture desquelles on procède à une consultation auprès des parents pour savoir ce qu'il en sera de la confessionnal ité.

En vertu du système combiné que permettra la loi 107 et permettront le projet de loi 107 adopté et les nouveaux règlements qui doivent entrer en vigueur en juillet de cette année, il y aura périodiquement une vérification du vécu confessionnel dans chaque école et cela pourra entraîner des changements de statut qui sont très difficiles à l'heure actuelle. Par conséquent, de ce côté, je pense que nous franchissons une étape très importante et nous la franchissons dans le souci de respecter également la préoccupation de ceux qui veulent que les valeurs morales et religieuses soient présentes dans nos écoles publiques.

Au cours des dernières années, nous avons tous déploré le faible taux de participation à la gestion des affaires scolaires. Tandis que les parents manifestaient un intérêt de plus en plus grand pour la vie de l'école et l'action éducative auprès de leurs enfants, la participation des citoyens aux élections scolaires se maintenait à un taux décevant. Aux élections scolaires de novembre dernier, les trois quarts des quelque 2400 postes à combler ont donné lieu a une élection par acclamation. Là où il y a eu scrutin, le taux de participation a été de 19 % pour l'ensemble du Québec et de 13 % sur l'île de

Montréal. Que des élus appelés à gérer les budgets considérables de l'enseignement public doivent s'appuyer sur des mandats populaires aussi faibles, cela témoigne d'un malaise qu'on ne saurait laisser se prolonger sans mettre en péril le système lui-même. Il faut absolument hausser le niveau de participation des citoyens à la gestion de la chose scolaire. Négliger cet objectif en même temps que l'on prétendrait conserver les commissions scolaires, ce serait pratiquer une dangereuse politique de l'autruche.

Déjà, le gouvernement a institué plusieurs mesures visant à favoriser la participation populaire aux élections scolaires. Le report des élections de juin à novembre, l'élimination de dispositions qui rendaient difficile la participation de certaines catégories de citoyens au scrutin, autant de mesures qui visaient à améliorer la participation aux élections, mais dont l'effet est demeure plutôt faible.

La réforme de la Loi sur l'instruction publique fournissait au gouvernement l'occasion de jeter un regard frais sur ce sujet. Le projet de loi 106 propose à cet égard une véritable réforme dont les résultats devraient s'avérer bienfaisants. Le projet de loi assure la plus grande harmonisation possible de la législation électorale en matière scolaire avec la loi générale sur les élections, de manière que les citoyens puissent s'y retrouver plus aisément. Il permet à une commission scolaire de créer des circonscriptions électorales additionnelles là où ce peut être de nature à favoriser une meilleure représentation de tous les secteurs de la population et de toutes les parties du territoire d'une commission scolaire. Il permet aux candidats à une élection scolaire de se regrouper en équipes reconnues. Il prévoit le remboursement des dépenses électorales des candidats ayant obtenu au moins 20 % des votes exprimés à l'occasion d'une élection. Il élargit les critères donnant accès à la qualité d'électeur ou de candidat à un poste de commissaire.

Autant de dispositions qui visent à ranimer la démocratie scolaire au Québec, autant de dispositions qui visent à faire en sorte que la gestion des affaires scolaires soit de plus en plus l'affaire de tout le monde.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous remercie, M. le ministre de l'Éducation. Je reconnais le porte-parole de l'Opposition en matière d'éducation, Mme la députée de Chicou-timi.

Mme Jeanne L. Blackburn

Mme Blackburn: Merci. M. le Président, M. le ministre, membres de la commission parlementaire, mesdames, messieurs, il me fait plaisir, à titre de porte-parole de l'Opposition officielle en matière d'éducation, de participer à cette consultation générale touchant les projets de loi 106 et 107. J'aimerais dire brièvement aux membres des différents organismes nationaux qui participent à cette consultation de bien en profiter parce que, si je comprends bien le projet de loi, ils seront de moins en moins consultés.

Il s'agit là de projets de loi d'importance majeure, dont l'impact sur le fonctionnement et l'organisation du système québécois d'éducation ne pourra être que considérable pour de nombreuses années à venir. La démarche du gouvernement mérite donc d'être scrutée de très près. Elle ne laisse évidemment pas l'Opposition indifférente, pas plus que tous les milieux qui ont à coeur le développement d'un système d'éducation de haute qualité.

La quantité impressionnante de mémoires, soit environ 120, soumis à l'attention de cette commission parlementaire, aussi bien de la part de divers partenaires impliqués au premier chef dans l'oeuvre éducative (enseignants, parents, personnel de direction, commissions scolaires) que d'organismes intéressés aux questions d'éducation, témoigne du vif intérêt de toute la population pour ce domaine si intimement relié à son développement et à son progrès.

En matière de réforme scolaire, le gouvernement actuel n'est évidemment pas un pionnier. Tous et toutes se rappelleront les débats longs et passionnés auxquels avaient donné lieu le livre blanc sur l'école québécoise, le projet de loi 40 et, enfin, l'adoption du projet de loi 3. De multiples intervenants et organismes avaient alors eu l'occasion de faire valoir leurs opinions. Ces discussions ont favorisé un cheminement important de tous les partenaires du monde de l'éducation et permis d'établir certains consensus assez larges, sinon quant aux modalités, tout au moins sur le plan des principes devant guider l'entreprise de modernisation des lois et des structures scolaires québécoises. Comme chacun le sait, des obstacles juridiques, liés à des privilèges constitutionnels datant de quelque 120 ans, ont compromis cette entreprise.

La démarche qui est maintenant proposée à l'Assemblée nationale comme à l'ensemble de la population ne tombe donc pas du ciel, mais se situe dans la foulée des exercices précédents. Je ne dirais cependant pas qu'elle en constitue l'aboutissement logique ou souhaité, du moins pas en ce qui nous concerne. Si le projet, article par article, de refonte de la Loi sur l'instruction publique reprend, par exempte, plusieurs dispositions de la loi 3, il s'en démarque aussi très nettement à maints égards.

Je n'ai pas l'intention de procéder maintenant à une critique exhaustive de l'ensemble des dispositions du projet de loi 107. L'étude détaillée de ce projet qui suivra les audiences publiques fournira le cadre approprié pour ce faire. J'entends plutôt profiter de l'occasion pour dégager ce qui paraissent être les grands enjeux d'une réforme du système scolaire et pour tenter de voir si le projet de loi mis sur la table apporte des réponses adéquates. Ces enjeux majeurs sont de trois ordres: l'accessibilité aux

services éducatifs, la responsabilisation des partenaires, la modernisation des structures scolaires. (11 heures)

Ces enjeux ne sont évidemment pas désincarnés; ils gravitent autour d'une préoccupation centrale qui ne peut qu'être celle de la qualité de l'enseignement. Dans le domaine de l'éducation, comme dans les autres domaines, on ne procède pas à une révision législative, à des changements de structures pour le plaisir de le faire. Une telle opération draine trop d'énergie de la part de toutes les parties impliquées pour ne pas être canalisée vers un objectif. Dans le cas qui nous préoccupe ici, nous chercherons donc à savoir si les divers changements proposés permettront d'améliorer notre système d'enseignement, afin qu'il dispense à nos jeunes comme à l'ensemble de la population une éducation de plus grande qualité.

L'accessibilité de tous et de toutes aux services éducatifs doit, selon nous, constituer la pierre angulaire de notre système d'enseignement public. Qui dit accessibilité dit gratuité. C'est là un des principes qui a fondé tout le processus de la réforme scolaire des années soixante. Il y a donc là un acquis qui ne saurait être compromis. Il faut cependant constater que l'accès gratuit et universel aux services de formation ne visait alors que les jeunes. Le développement prodigieux de l'éducation des adultes dans les années soixante-dix et quatre-vingt, sous la poussée des besoins d'une population adulte encore nettement sous-scolarisée, devait ensuite poser la question de la gratuité des services pour la population adulte. Celle-ci sera finalement reconnue en 1985 par l'instauration d'une enveloppe ouverte pour l'éducation des adultes dans les commissions scolaires.

Nous nous serions donc attendus que le projet de loi consacre le principe de l'accès gratuit des adultes aux services éducatifs. Force est cependant de constater que cet accès est compromis par plusieurs clauses restrictives. Le plus étonnant de tout cela est que l'actuel ministre de l'Éducation reprochait précisément au projet de loi 3 de ne pas aller assez loin à ce chapitre. Le député d'Argenteuil, qui siégeait alors dans l'Opposition, en faisait même un des trois principaux volets de sa critique et même de son opposition au projet de loi 3. L'examen du libellé de son propre projet révèle, en fait, qu'il est plus restrictif que celui de l'ancien gouvernement. Ou bien le ministre a des trous de mémoire, et dans ce cas il peut compter sur nous pour y remédier, ou il renie tout simplement les principes qui fondaient ses discours. Une fois de plus, nous sommes obligés de déplorer que les gestes du ministre ne suivent pas les discours de l'ex-critique de l'Opposition.

Que lit-on dans le projet de loi 107? D'abord, à l'article 4, il est écrit: 'Tout résident du Québec a droit à la gratuité des services éducatifs offerts en application de la présente loi". Dans la loi 3, l'article s'arrêtait là. Dans le projet de loi 107, il se poursuit ainsi: "Une personne visée à l'article 2, à savoir un adulte ou un étranger, a droit à cette gratuité dans la mesure où le permettent les ressources de la commission scolaire où elle est inscrite". Voilà une première restriction, une disposition qu'il sera facile d'invoquer pour refuser des services ou exiger des frais. À cet égard, la loi 3 précisait à l'article 204 qu'une commission scolaire peut, conformément aux règles d'attribution des ressources financières établies par le ministre, exiger des frais d'inscription et de scolarité d'un adulte s'il suit des cours qui ne conduisent pas à l'obtention d'un diplôme décerné par le ministre. Selon l'article 199 du présent projet, une commission scolaire peut exiger une contribution financière d'un adulte, sans autre spécification, ce qui signifie que ce pourrait être fait même dans le cadre de cours ne conduisant pas à un diplôme décerné par le ministre.

Il est bon, je crois, de rappeler les propos du ministre lors des débats autour du projet de loi 3, en novembre 1984. Je cite les propos de l'actuel ministre, critique de l'Opposition d'alors: "L'accès, disait le député d'Argenteuil, aux services éducatifs sera disponible aux adultes, lit-on dans le projet de loi, mais - et je cite le projet de loi - "dans le cadre des programmes offerts par la commission scolaire". "Comme, selon le projet de loi 3, c'est la commission scolaire qui doit déterminer les services éducatifs qui seront dispensés et cela, dans le cadre de règles budgétaires imposées par le gouvernement, on n'a aucunement la garantie que ces services seront réellement offerts par toutes les commissions scolaires, à tous les adultes qui en auront besoin... En outre, les commissions scolaires resteront libres, en vertu de l'article 264 du projet de loi, d'exiger des frais de scolarité et d'inscription des élèves adultes qui suivront dans leurs écoles - et je cite le projet de loi, quelle faute, quel scandale! - des cours qui ne conduiraient pas à l'obtention d'un diplôme décerné par le ministre. " Débats de l'Assemblée nationale, le 29 novembre 1984, à la page 1148.

Au sujet de la spécification concernant la disponibilité des services éducatifs "dans le cadre des programmes offerts par la commission scolaire", elle se retrouve textuellement dans le présent projet de sorte qu'il est tentant de retourner contre le député d'Argenteuil son propre argument: on n'a aucunement la garantie que ces services seront réellement offerts par toutes les commissions scolaires, à tous les adultes qui en auront besoin. Un autre article octroie de plus au ministre le pouvoir d'établir la liste des commissions scolaires qui peuvent organiser des services éducatifs pour les adultes résidant sur le territoire qu'il détermine.

Quant aux frais de scolarité, s'il était scandaleux, au dire du député d'Argenteuil, d'en exiger dans le cas de cours ne conduisant pas à

un diplôme, comment qualifier son projet qui permet d'en exiger pour n'importe quelle activité de formation, y compris celles conduisant à un diplôme?

En somme, le projet de loi 107 va beaucoup moins loin que le projet de loi 3, si ouvertement décrié par le ministre. Comment, dès lors, croire à la sincérité du ministre? Si la loi 3 comportait des lacunes à ce chapitre - nous sommes prêts à en convenir - alors, le projet du ministre devrait et aurait dû permettre d'y remédier. Il a plutôt choisi d'aller dans le sens contraire et de restreindre l'accès gratuit aux services éducatifs pour les adultes. Nous sommes très impatients d'entendre les justifications du ministre.

Toujours au chapitre des clauses restrictives quant à l'accès aux services éducatifs, le critique de l'Opposition d'alors invoquait la question du matériel scolaire et du transport scolaire. Il faut croire que ses réserves ne devaient pas être très sérieuses puisque son propre projet comporte des dispositions semblables alors que, de l'avis de tous, les frais pour matériel scolaire croissent d'année en année de façon importante et que le transport scolaire fait de plus en plus problème.

J'aimerais cependant insister sur d'autres reculs ou lacunes de la mouture que nous présente le ministre de l'Éducation. D'abord, on n'y retrouve aucune définition des services éducatifs dans leurs différentes dimensions: services de formation et d'éveil, services d'enseignement, services complémentaires et services particuliers. Si on veut que le principe de la gratuité des services éducatifs soit reconnu, encore faut-il savoir de quoi il s'agit et ce que cette notion englobe. Il n'y a aucune référence aux services complémentaires, à l'exception des services d'animation pastorale catholique et d'animation religieuse protestante. Pas un mot sur les services d'orientation scolaire et professionnelle, de santé et de services sociaux, de psychologie, de psycho-éducation, de promotion des droits et responsabilités de l'élève, de placement étudiant.

Quant aux services particuliers, on ne fait état que des services aux élèves handicapés et en difficulté d'adaptation et d'apprentissage, mais rien au sujet des services de soutien linguistique en français, des services d'accueil à l'école dont la langue d'enseignement est le français. Le projet de loi 107 est complètement muet vis-à-vis de cette réalité maintenant très présente de l'ouverture des écoles québécoises à de nombreux jeunes d'origines ethniques très variées. Il ne prévoit aucune obligation pour les commissions scolaires d'offrir des services d'animation et d'éducation interculturels aux Néo-Québécois et aux jeunes Québécois dits "de souche". L'intégration harmonieuse des nouveaux arrivants à la société québécoise ne saurait pourtant être possible si l'école ne relève pas ce défi de l'éducation et de l'animation interculturelles.

Un mot, enfin, au sujet des services de garde. Le projet de loi 107 ne fait aucune obligation aux commissions scolaires de dispenser des services de garde pour les élèves de l'éducation préscolaire et de l'enseignement primaire. Il fait aussi disparaître - il vient confirmer ce fait - des fonctions du directeur d'école, les fonctions de voir à la mise en place et au fonctionnement des services de garde en milieu scolaire. Il s'agit là d'un autre recul par rapport à la loi 3 et d'un refus de prendre en compte les besoins croissants de la société sur le plan des services de garde.

En somme, sur le plan de l'accès aux services éducatifs, notamment pour les adultes, et sur le plan de la définition et de l'extension de ces services, le projet de loi 107 demeure très insatisfaisant.

Le second volet que je désire aborder est celui de la responsabilisation des partenaires et, par conséquent, de l'équilibre à établir quant au partage des pouvoirs et des responsabilités entre les divers intervenants du système scolaire: dans l'école, entre les élèves, les enseignants et les enseignantes, les autres membres du personnel, la direction et les parents, comme entre l'école, la commission scolaire et le ministre de l'Éducation.

Sur ce dernier aspect, le projet de loi est particulièrement décevant dans la mesure où il vient consacrer un net accroissement des pouvoirs du ministre, une accentuation des contrôles gouvernementaux, notamment réglementaires au détriment des paliers locaux que sont les commissions scolaires. De la part du ministre, cette volonté de centralisation ne surprend pas; elle demeure cependant inacceptable. Elle ne reçoit évidemment pas la caution des milieux concernés, comme en témoignent les critiques vives énoncées dans les mémoires de la majorité des organismes. Elle va nettement à rencontre d'un courant de plus en plus fort au sein de la société québécoise et des sociétés contemporaines en faveur d'une décentralisation des responsabilités, d'une prise en charge des milieux par les citoyens et les citoyennes. Ceux qui s'attendaient à une valorisation du rôle des commissions scolaires seront amèrement déçus.

Normes, contrôles, autorisations, règlements, plutôt que de connaître un allégement, se trouvent multipliés et renforcés. Dans certains cas, il s'agit de consacrer dans le texte législatif des pratiques et des pouvoirs existants, notamment en vertu des régimes pédagogiques et des règles budgétaires, et, dans d'autres cas, le projet alloue au ministre de nouveaux moyens de contrôle sur l'organisation des services éducatifs.

Le Parti libéral faisait pourtant figurer parmi ses engagements électoraux la responsabilisation des institutions d'enseignement à tous les niveaux et la participation active de tous les agents aux plans local et régional.

Je me permets, encore une fois, de rappeler au ministre ses propres propos de critique de l'Opposition vis-à-vis du projet de loi 3: "Les pouvoirs, disait-il, que le gouvernement entend

réserver au ministre de l'Éducation sont également pour nous une source de préoccupation... Nous ne saurions souscrire à une activité qui consisterait à augmenter les pouvoirs du ministre de l'Éducation dans le contexte actuel."

Le député d'Argenteuil reprochait au projet de loi 3 de ne pas concrétiser l'allégement souhaité des modes d'intervention du ministère de l'Éducation. Comment, dès lors, comprendre que son propre projet comporte au moins, selon un relevé rapide, une quinzaine d'articles qui confèrent au ministre des pouvoirs additionnels et des possibilités accrues d'intervention par rapport à la loi 3 dans les affaires des commissions scolaires, directement ou par voie de réglementation, qu'il s'agisse, pour ne donner que quelques exemples, des instructions à suivre quant à la tenue des livres et registres, de la nomination de plus d'un directeur adjoint, des normes pour la conclusion d'ententes avec d'autres institutions, de l'approbation des plans et devis relatifs aux travaux sur l'immeuble, de l'organisation des services éducatifs pour les adultes, les élèves handicapés en difficulté d'adaptation et d'apprentissage, des modalités d'autorisation d'emprunt, de la libération d'une commission scolaire de ses fonctions quant à l'offre de services éducatifs, de la suspension d'une prise de décision ou de l'application d'une décision pendant la tenue d'une enquête ou d'une vérification.

Nous avons déjà entendu la Fédération des commissions scolaires catholiques dénoncer le caractère centralisateur et interventionniste du projet de loi. Selon la fédération, le projet accorde plus de pouvoirs au ministre de l'Éducation qu'aucun autre projet ne l'a fait jusqu'ici, incluant les projets de loi 40 et 3. Ce n'est pas nous qui le disons, c'est la fédération. La fédération a relevé, je crois, une trentaine d'articles qui viennent obliger les commissions scolaires à obtenir l'autorisation du ministre pour des décisions qui, jusqu'ici, ne relevaient que d'elles-mêmes. Une telle accentuation de la mainmise du ministre ne témoigne pas d'une grande confiance dans ces corps locaux dont le ministre voulait pourtant, il n'y a pas si longtemps, valoriser le rôle. Nous sommes bien loin de l'autonomie et de la responsabilisation des milieux. Le ministre, par son projet de loi, vient augmenter ses pouvoirs réglementaires et, donc, son emprise sur le système scolaire. (11 h 15)

Personne ne plaide en faveur de la disparition du ministère de l'Éducation. On reconnaît que celui-ci doit conserver des fonctions importantes: identification des priorités nationales, distribution des ressources, coordination et réglementation afin d'assurer une égalité de services pour la population sur l'ensemble du territoire. Mais il nous semble que la bureaucratisation du système d'enseignement a atteint ses limites et qu'il faut y introduire davantage de souplesse afin d'établir un équilibre des pouvoirs et des responsabilités au profit des capacités, de la créativité des milieux qui suivent de près la réalisation du projet éducatif. Le ministre a, contre toute attente, choisi la direction opposée. Encore là, le député d'Argenteuil a oublié les principes qu'il défendait naguère en s'asseyant sur le siège du ministre de l'Éducation.

Par ailleurs, non content d'étendre la portée de la réglementation, le ministre fait disparaître une disposition importante de la loi 3 selon laquelle il devait consulter les associations ou fédérations nationales de parents, de commissions scolaires, de salariés ou de personnel-cadre sur les règlements qu'il élabore. C'est là une lacune significative, mais qui traduit bien la personnalité du ministre. La consultation, c'est pour les autres ou quand on le consulte.

Nous ne sommes pas convaincus non plus que le projet de loi 107 réalise l'équilibre souhaité quant au partage des pouvoirs et responsabilités à l'intérieur même de l'école. Je n'entrerai pas ici dans le détail, mais je désire formuler certaines réserves, notamment en ce qui concerne les fonctions du conseil d'orientation, maintenant réduit à un rôle consultatif, et sur l'étendue des pouvoirs du directeur d'école par rapport au respect de l'autonomie professionnelle des enseignants. Ceux-ci se voient investis de devoirs très larges dont l'interprétation est loin d'aller de soi et dont on ne retrouve aucune contrepartie au niveau des autres intervenants. De plus, le projet ne prévoit pas la constitution de comités pédagogiques investis de fonctions propres à assurer une participation effective des enseignants, des enseignantes et des professionnels à la détermination des orientations de l'école comme de tout ce qui concourt à la réalisation du projet éducatif dans ses dimensions pédagogiques.

Le projet ne prévoit pas plus l'existence d'un comité ou d'une association d'élèves ayant pour fonction de les représenter auprès des instances de l'école, tout comme il fait fi de la possibilité de recours pour faire respecter les droits de l'élève, par exemple, devant le Protecteur du citoyen. Dans la mesure où l'on accepte que l'élève a, comme tout autre citoyen, des droits à faire valoir et à protéger, il faut lui fournir les mécanismes appropriés pour ce faire. Dans le contexte social actuel, une telle omission est inacceptable bien qu'encore une fois elle n'étonne pas de la part du ministre si peu enclin, dans un autre dossier, à associer les étudiants aux réformes les concernant. Sur ce dernier point, comme sur les modalités de participation des enseignants, des professionnels, des parents et des étudiants à l'intérieur de l'école, les consultations permettront, nous l'espérons, d'approfondir la réflexion et de conduire aux ajustements nécessaires.

Abordons maintenant un autre enjeu central auquel la présente refonte de la Loi sur l'instruction publique devrait apporter des réponses, à savoir: la modernisation des structures scolai-

res. Comme chacun le sait, le Québec de 1988 offre, comme le rappelait le ministre, peu de ressemblances avec celui de 1867. Depuis le branle-bas des réformes du système d'éducation des années soixante, il a aussi poursuivi son évolution. La société québécoise s'est diversifiée sur le plan des valeurs, religieuses et autres, comme dans sa composition ethnique. On ne retrouve plus, d'un côté, des francophones en quasi-totalité catholiques et, de l'autre, des anglophones protestants. Dans la foulée des phénomènes de laïcisation de la société, de désaffection religieuse et d'émergence d'autres croyances, le Québec francophone ne constitue plus un bloc monoTrthique.

De plus, l'adoption de la loi 101 a eu pour effet de draîner dans les écoles françaises un nombre de plus en plus grand de jeunes d'origines ethniques variées, porteurs d'un bagage culturel souvent fort différent du nôtre. Cette tendance va en s'accentuant, notamment à Montréal où près du tiers des élèves inscrits à l'école française sont de langue maternelle autre que le français. Quant au réseau protestant, si le pluralisme n'y constitue pas une réalité nouvelle, le phénomène tend là aussi à s'accroître notamment du fait de l'émergence d'un secteur français qui a connu, depuis une dizaine d'années, une progression constante, alimentée par les inscriptions toujours plus nombreuses d'allophones, bien sûr, mais aussi de francophones. Selon les plus récentes données, près des deux tiers des élèves du secteur français des commissions scolaires protestantes ne sont pas de religion protestante.

Pendant que la diversité et le pluralisme venaient de plus en plus caractériser le milieu scolaire, les structures et l'organisation du système d'enseignement, fondées sur la confes-sionnalité, demeuraient figées. Une volonté s'est dessinée au sein de la population québécoise, chez de très nombreux organismes, en faveur de l'établissement de commissions scolaires linguistiques plutôt que confessionnelles. Des discussions autour des projets de loi 40 et 3 ont fait ressortir l'ampleur du consensus social qui s'est créé autour de cette question, ralliant aussi bien l'Assemblée des évêques qu'Alliance-Québec, la Fédération des commissions scolaires catholiques aussi bien que celle des directeurs d'école, les centrales syndicales et, faut-il le rappeler, les deux grands partis politiques québécois. Des obstacles d'ordre constitutionnel sont cependant venus paralyser l'expression de cette volonté populaire majoritaire.

La question qui se pose dès lors est de savoir si le projet que nous soumet le gouvernement répond à cette attente et permet de consacrer, comme il l'affirmait encore tout à l'heure, la modernisation de nos structures scolaires dans le sens de l'ouverture au pluralisme et du respect des différences. Avant d'examiner le contenu du projet de loi 107, arrêtons-nous un moment à la démarche privilégiée par le gouvernement.

Il faut d'abord rappeler que le ministre a suspendu les procédures d'appel instituées en vertu du jugement Brossard quant à l'incons-titutionnalité de la loi 3 et de la cause impliquant l'école Notre-Dame-des-Neiges. Le ministre a justifié cette décision par le fait qu'il ne souscrivait pas au contenu de la loi 3 et qu'il voulait adresser aux cours ses propres questions, sur la base d'une nouvelle loi adoptée par l'Assemblée nationale. On pourrait lui rétorquer que le Procureur général a décidé - à son corps défendant, mais il l'a quand même fait - d'aller en Cour suprême sur les causes relatives à l'affichage unilingue français. Pourquoi alors n'a-t-il pas procédé tout de suite par renvoi en Cour d'appel sur la base des clarifications juridiques et constitutionnelles qu'il désire requérir? Le ministre n'avait pas besoin d'une loi adoptée en Chambre pour procéder. En effet, en vertu de l'article 1 de la Loi sur les renvois à la Cour d'appel, "le gouvernement peut soumettre à la Cour d'appel, pour audition et examen, toutes questions quelconques qu'il juge à propos et, sur ce, la cour les entend et les examine".

Compte tenu de la connaissance qu'a le ministre de tous les tenants et aboutissants de l'actuel imbroglio juridico-confessionnel, il aurait pu procéder rapidement après son arrivée au pouvoir et renvoyer à la Cour d'appel ces questions touchant la capacité du Québec d'établir des commissions scolaires linguistiques sur tout le territoire du Québec. Il n'avait pas à attendre la présentation du présent projet de loi. Il ne l'a pas fait, il a tergiversé et il est ainsi responsable d'un délai supplémentaire d'au moins trois ans dans la résolution de cette question. En effet, le renvoi en Cour d'appel ne peut, dans les meilleures probabilités, se faire avant le début de l'année 1989, alors que si le ministre avait décidé de renvoyer la question à la Cour d'appel dès qu'il a pris la direction du ministère, on aurait pu ainsi épargner trois ans.

Le ministre a donc annoncé qu'il procédera par renvoi à la Cour d'appel après l'adoption du projet de loi 107, donc, au mieux, au début de l'année 1989. Comme il est déjà assuré que la question se rendra en Cour suprême et compte tenu des délais engendrés par l'éventuelle transition, les commissions scolaires linguistiques ne pourraient voir le jour avant 1992 et ceci, dans la meilleure des hypothèses. Car il demeure possible que le gouvernement québécois n'ait pas gain de cause et que, par exemple, il ne puisse abolir les commissions scolaires pour protestants et pour catholiques. Je ne parle pas ici des commissions scolaires confessionnelles protégées en vertu de l'article 93 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique et que le ministre veut maintenir dans leurs frontières actuelles.

Dans le propos du ministre tout à l'heure - je me permets de sortir du texte - on a bien compris qu'il a évité de parler des deux commissions scolaires et des deux secteurs qui sont protégés en vertu de l'article 93 de l'acte,

c'est-à-dire la CECM, le PSBGM et les commissions scolaires catholiques et protestantes à Québec. Les vrais problèmes se trouvent là. Malgré les propos du ministre, malgré sa volonté d'établir dès maintenant, nous dit-il, des commissions scolaires linguistiques sur tout le territoire du Québec, ce qui va lui permettre de régler les cas où l'on connaît effectivement le plus de problèmes, je rappelle que dans ces cas il s'agit des commissions scolaires protégées qui se trouvent sur le territoire de l'île de Montréal et à Québec.

Dans l'éventualité où le ministre n'aurait pas gain de cause devant les cours, le ministre laisse entendre qu'il se résignera à entamer des pourparlers constitutionnels au sujet du fameux article 93, avec les nouveaux délais que cela implique. Mais pourquoi le ministre n'a-t-il pas accepté de mener ces démarches concurremment, comme nous le lui avions suggéré?

Dès janvier 1986, par ailleurs, le Conseil supérieur de l'éducation lui recommandait de faire en sorte que "lors des négociations constitutionnelles dont on a annoncé l'ouverture prochaine le gouvernement du Québec, et je cite le conseil supérieur, inclue la question de la confessionnalité scolaire dans son dossier de position". Il a négligé de le faire lors des négociations qui ont conduit à l'accord du lac Meech. On laisse entendre que l'article 93 pourrait faire l'objet d'une deuxième ronde de négociations constitutionnelles, bien hypothétique dans les circonstances actuelles, le ministre le reconnaîtra. Il apparaît d'ailleurs que les priorités à l'agenda ne sont pas déterminées par le Québec. L'exercice plein et entier par le gouvernement québécois de sa compétence exclusive en matière d'éducation passe pourtant par la levée des entraves posées par une constitution désuète, vieille de 120 ans. Le gouvernement libéral n'a pas la volonté politique de régler cette question, ayant omis de procéder tout de suite par renvoi à la Cour d'appel, ayant omis de revendiquer l'abrogation des privilèges octroyés à certaines confessions religieuses par la constitution lors des dernières négociations.

Même si le gouvernement se voit reconnaître par les tribunaux le pouvoir de créer des commissions scolaires linguistiques sur tout le territoire, ceci ne permettra en rien, je le rappelle, de régler la situation qui prévaut à Montréal, étant donné la protection constitutionnelle dont la CECM et le PSBGM continueront alors de bénéficier. En somme, là où la diversité ethnique, culturelle et religieuse est le plus en émergence, les structures scolaires vont demeurer figées dans leur état actuel. C'est tout à fait inacceptable. j'en arrive donc au contenu même du projet gouvernemental et à ses implications. Concernant d'abord la situation à Montréal et à Québec, le ministre a laissé entendre qu'il n'a pas l'intention de modifier les limites territoriales des commissions scolaires confessionnelles même s'il en avait la possibilité. Par ailleurs, dans l'éventualité où l'on y procéderait à la création de commissions scolaires linguistiques il y aurait superposition sur un même territoire de quatre commissions scolaires et de six secteurs et types d'écoles: anglaise, française, anglo-catholique, franco-catholique, anglo-protestante et franco-protestante, dans un même secteur. Le ministre n'a pas indiqué clairement s'il a l'intention de procéder de cette façon. De deux choses l'une: ou il ne crée pas sur les territoires de Montréal et Québec des commissions scolaires linguistiques, en contradiction avec la diversité des communautés et la nécessité de répondre à leurs besoins éducatifs sans porter atteinte à leurs droits en matière de liberté de conscience; ou il superpose les commissions scolaires avec les difficultés qui vont en résulter sur le plan de l'organisation scolaire, qu'il s'agisse de l'affectation du personnel, de l'utilisation des bâtiments, du transport scolaire, sans compter les complications reliées à la tenue des élections scolaires. Si l'enfant doit fréquenter l'école française, ses parents devront choisir entre l'école française catholique, l'école française protestante et l'école française non confessionnelle. À qui iront-ils payer leurs taxes scolaires? (11 h 30)

En dehors de Montréal et de Québec, le projet prévoit la création de commissions scolaires linguistiques, mais il confirme l'existence des commissions scolaires dissidentes existantes et ne remet pas en question l'exercice du droit à la dissidence dans l'avenir. On retrouve encore ici la possibilité d'une superposition sur un même territoire de commissions scolaires linguistiques, anglaises et françaises, et de commissions scolaires dissidentes, anglo-catholiques et franco-protestantes. Si on ajoute à cela le maintien des commissions scolaires régionales et locales, puisque le projet du ministre ne garantit pas l'intégration des commissions scolaires sur l'ensemble du territoire - ce qui constitue une autre lacune grave du projet de loi 107 - nous risquons de nous retrouver avec un véritable fouillis sur le plan des structures scolaires.

Dans un tel contexte, comment souhaiter une utilisation la plus rationnelle et la plus efficace des ressources humaines et financières? Dans un tel contexte, comment comprendre l'affirmation que vient de faire le ministre, à savoir qu'il désire et qu'il entend instituer des commissions scolaires linguistiques sur tout le territoire du Québec sans négocier l'article 93?

Je conclus sur ce point en soulignant que fa prétendue création de commissions scolaires linguistiques ne constitue dans les faits, en tenant compte à la fois de la démarche du ministre et du contenu même de son projet, qu'un écran de fumée, il est impossible d'y trouver la réponse urgente et appropriée à la nécessaire modernisation du système scolaire québécois. Alors que la déconfessionnalisation des structures scolaires est remise aux calendes

grecques, le ministre n'a pas hésité à procéder au renforcement du caractère confessionnel du système d'enseignement par l'adoption de nouveaux règlements sur la reconnaissance du caractère confessionnel des écoles. C'est carrément mettre la charrue devant les boeufs et cela témoigne éloquemment des priorités véritables de l'actuel ministre de l'Éducation.

Sur ces trois enjeux majeurs que constituent l'accessibilité aux services éducatifs, la responsabilisation des partenaires et la modernisation des structures scolaires, je crois avoir démontré que le projet de loi sur l'instruction publique comporte des lacunes majeures. À première analyse, le texte actuel ne saurait donc obtenir l'appui de l'Opposition. Les réserves très sérieuses déjà énoncées par de nombreux intervenants et pas des moins importants confirment nos appréhensions. Les audiences qui débutent aujourd'hui nous permettront, par la présentation des points de vue et des recommandations de divers organismes, d'affiner notre perception du projet gouvernemental, de ses mérites et manquements, comme elles donneront au ministre l'occasion de justifier ses choix et, souhaitons-le, d'apporter les modifications nécessaires afin que notre système d'enseignement soit mieux en mesure de relever les défis exigeants auxquels il se trouve confronté.

Je terminerai en formulant quelques commentaires sur l'autre projet qui fait l'objet de la consultation, celui sur les élections scolaires. Il vise, pour l'essentiel, à regrouper sous un "chapeau" distinct les dispositions à cet effet déjà contenues dans l'actuelle Loi sur l'instruction publique ainsi qu'à harmoniser les dispositions législatives relatives aux élections scolaires avec la Loi électorale. Nous souscrivons au sens général de cette démarche, ce qui n'exclut pas la nécessité d'apporter d'éventuelles modifications afin que les procédures établies assurent le caractère authentiquement démocratique de l'exercice électoral et permettent de maximiser la participation de la population.

L'introduction de clauses quant au remboursement des dépenses électorales d'un candidat et la reconnaissance d'équipes méritent bien entendu notre appui. Nous regrettons néanmoins que le ministre n'ait pas, conformément à nos représentations, profité des occasions qui lui ont été fournies lors des démarches antérieures de révision des dispositions relatives aux élections scolaires - je pense aux projets de loi 24 et 13 - pour agir à ce niveau avant la tenue des élections de l'automne dernier. D'autre part, il faudra aussi s'interroger sur la pertinence de reconnaître dans le projet deux autres principes fondamentaux qui sont pourtant reconnus aux niveaux provincial et municipal, à savoir: le plafonnement des dépenses électorales et des contributions individuelles.

Par ailleurs, la création de circonscriptions électorales pour les minorités linguistiques dans le cadre des commissions scolaires confessionnel- les appelle aussi de sérieuses réserves. Présenté comme transitoire, un tel aménagement offre une solution bâtarde aux problèmes aigus que pose l'existence de secteurs linguistiques sous-repré-sentés et, à maints égards, défavorisés à l'intérieur des commissions scolaires confessionnelles. Je pense ici à la situation du secteur français, en rapide expansion, des commissions scolaires protestantes et, notamment, à la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal. En vertu de l'article 9 du projet de loi 106, il y aurait donc superposition des circonscriptions électorales sur le territoire de Montréal. On voit tout de suite les problèmes que cela pose sur le plan de la confection des listes électorales, au nombre de quatre, à savoir: deux pour la CECM et deux pour le PSBGM. Pensons à la complexité de l'opération pour les citoyens qui n'ont pas d'enfant. Toute cette mécanique semble avoir été pensée pour désamorcer la tension que crée le maintien de structures scolaires confessionnelles là où elles sont le plus anachroniques. Compte tenu à la fois du contenu du projet de loi 107 en matière de restructuration scolaire et de la démarche privilégiée par le ministre, cette mesure transitoire risque de prendre un caractère permanent et même de venir cautionner l'incapacité de créer des commissions scolaires linguistiques.

On remarque enfin, à la lecture des mémoires déposés, que de nombreux articles du projet de loi 106 suscitent des réserves. Plusieurs intervenants, en effet, formulent des recommandations de modifications qu'il faudra examiner attentivement, dans la perspective de conférer aux élections scolaires une teneur hautement démocratique. Merci, M. le Président.

Auditions

Le Président (M. Parent, Sauvé): C'est moi qui vous remercie, Mme la députée de Chicoutimi et porte-parole de l'Opposition en matière d'éducation. Nous allons maintenant commencer nos travaux proprement dits en accueillant le premier groupe, la Fédération québécoise des directeurs et directrices d'école, que j'invite à prendre place aux sièges prévus à cet effet.

Je vous rappelle qu'il avait été prévu une période d'une heure et trente minutes pour entendre la Fédération québécoise des directeurs et directrices d'école. J'informe aussi celle-ci que les membres de la commission ont reçu son mémoire, qu'ils en ont pris connaissance et qu'ils sont prêts, si elle le juge à propos, à entamer immédiatement la discussion.

La Fédération québécoise des directeurs et directrices d'école est représentée par son président, M. Réal de Guire, que je salue. M. de Guire, soyez le bienvenu. Je tiens à vous remercier non pas au nom des formations politiques, mais au nom de la commission de l'éducation d'avoir répondu à l'appel de venir aider la commission à avoir un meilleur éclairage sur les

projets de loi 106 et 107. Vous ne comparaissez pas devant une commission, vous êtes ici de plein gré pour nous aider à nous faire une meilleure idée des éléments positifs et peut-être négatifs de tels projets de loi. C'est en ce sens que nous entendons établir avec vous un dialogue et une conversation de façon à bonifier l'administration de la loi scolaire au Québec.

M. de Guire, si vous voulez bien nous présenter les gens qui vous accompagnent et enchaîner immédiatement avec la présentation de votre mémoire.

Fédération québécoise des directeurs et directrices d'école

M. de Guire (Réal): M. le Président, d'abord, merci de nous accueillir ici à la commission parlementaire de l'éducation. Je salue mesdames et messieurs les membres de l'Assemblée nationale.

Immédiatement à ma gauche, se trouve le vice-président de notre fédération, M. Marcel Lebel de la région de Rimouski; M. Laval Cavanagh, secrétaire-trésorier de notre fédération et qui vient de la région de la Gaspésie; à mon extrême-gauche, M. Luc Harvey, conseiller en relations du travail à notre fédération; à mon extrême-droite, M. Jean-Marc Mathieu de l'Abiti-bi-Témiscamingue et, immédiatement à mes côtés, M. Gaston Frechette, conseiller en relations professionnelles entre fédérations.

Le Président (M. Parent, Sauvé): À tous, nous souhaitons la bienvenue. M. le président, nous vous écoutons.

M. de Guire: Je vous remercie, M. le Président. Dans le cadre des lois et règlements en vigueur, le mandat des directeurs et directrices d'école, adjoints et adjointes, est de gérer les établissements scolaires publics d'éducation préscolaire, primaire et secondaire chargés de voir à l'éducation des jeunes Québécois et Québécoises.

C'est en s'inspirant de ce mandat public que le personnel de direction des écoles que nous représentons s'est penché sur ses préoccupations concernant la Loi sur l'instruction publique, surtout le projet de loi 107. Chacune - c'est important pour nous de le souligner - des associations de la Fédération québécoise des directeurs et directrices d'école a consulté ses membres "sur le terrain" et c'est le résultat de cette consultation, discuté au niveau provincial, que nous transmettons aujourd'hui au législateur.

Notre mémoire fait état, dans un premier temps, de quelques considérations générales portant sur l'ensemble du projet de loi. Par la suite, nous formulons une série de commentaires et de réflexions plus spécifiques portant sur le texte lui-même. Pour ce faire, nous abordons séparément cinq chapitres qui sont ceux traitant de l'élève, de l'enseignant, de l'école, de la commission scolaire, puis du gouvernement et du ministre. Nos complétons nos considérations avec des propos touchant divers sujets reliés à d'autres chapitres du projet de loi. Enfin, après avoir tiré nos conclusions, nous résumons notre mémoire.

Avant d'entreprendre l'examen détaillé du texte du projet de loi 107, il nous apparaît important de faire valoir un certain nombre de considérations plus générales portant sur son ensemble.

Il faut d'abord souligner que ce projet de loi impressionnant a le mérite de rassembler, dans ses grandes orientations, plusieurs des larges consensus antérieurement atteints dans le réseau de l'éducation lors des discussions et des travaux sur le projet de loi 3. Ses auteurs méritent, à cet effet, des félicitations pour leur réalisme et leur sagesse. Entre autres, nous trouvons important de relever le fait que le projet de loi vise principalement à donner à l'école une plus grande autonomie juridique sans briser les liens organiques qui l'unissent à la commission scolaire et au réseau des écoles de la commission scolaire.

Nous trouvons aussi intéressant qu'il veuille reconnaître formellement à l'école et à ses agents une meilleure participation dans l'élaboration des décisions de la commission scolaire. Nous croyons, de plus, qu'il poursuit à nouveau l'effort de clarification et d'affirmation du rôle et des fonctions du directeur ou de la directrice d'école déjà entrepris antérieurement.

Toutefois, le texte du projet de loi pourrait, à plusieurs endroits, être plus explicite afin d'éviter certaines ambiguïtés et afin de tenir compte plus concrètement de réalités vécues dans le milieu. Dans certains cas, il faudrait, pour les mêmes raisons, y apporter aussi des modifications substantielles. C'est donc en nous inspirant de ces quelques considérations générales que nous formulons maintenant des commentaires plus détaillés portant sur le contenu même des articles du projet de loi.

L'élève. Globalement, nous partageons les grandes orientations préconisées dans le chapitre traitant de l'élève, tout particulièrement en ce qui a trait à ses droits, parce que nous considérons que le contenu de ce chapitre constitue vraiment un fondement de la démocratisation scolaire, si l'on tient compte avant tout du fait que l'école existe d'abord pour l'élève qui est le premier agent de sa propre éducation. Nous avons, cependant, quelques réserves à exprimer sur la question des âges de fréquentation scolaire.

À propos des âges de fréquentation scolaire, aux articles 1 et 11, l'expérience des directeurs et directrices d'école les amène à souhaiter que la fréquentation de la maternelle soit obligatoire mais à s'interroger, par contre, sur les raisons du report de l'âge maximum à seize ans. C'est pourquoi nous proposons de rendre obligatoire la fréquentation scolaire à cinq ans, au niveau de la

maternelle, tout en maintenant l'âge maximum à quinze ans. Dans le premier cas, nous croyons qu'il s'agit tout simplement de reconnaître dans la loi le bien-fondé d'une situation de fait largement répandue et de l'officialiser. Dans le même ordre d'idées, si l'on voulait faire un peu de prospective, on pourrait déjà commencer à mettre en place certains services pour la prématernelle où l'on décèle des besoins et des attentes indéniables.

Par ailleurs, les principaux éléments que nous retenons pour justifier notre deuxième volet sur l'âge maximum sont, entre autres: l'ampleur du phénomène du "décrochage" de l'école vers seize ans, la complexité des services requis pour ces jeunes lorsqu'ils fréquentent l'école et l'ajustement auquel il faudrait que tende nécessairement le gouvernement entre ses différentes lois. Nous pensons, par exemple, au droit de se marier à partir de quatorze ans et au droit de requérir, sans le consentement des parents, des services médicaux à partir du même âge.

Concernant, en particulier, le phénomène du "décrochage", nous croyons qu'il faudrait actuellement mettre à la disposition de l'école des moyens beaucoup plus élaborés afin de développer une action préventive chez les jeunes de quinze ans et moins. Cela suppose, évidemment, des moyens financiers additionnels; il faudrait que le ministre soit persuasif auprès du Conseil du trésor. (11 h 45)

Au sujet des droits, à l'article 6, nous ne voulons pas revenir ici sur une modalité de choix qui devrait réellement être différente au primaire et au secondaire et qui n'a pas été retenue dans le projet de règlement sur la reconnaissance comme catholique et sur le caractère confessionnel des écoles primaires et des écoles secondaires du système public, mais nous voulons plutôt proposer de spécifier que ce droit de choisir entre l'enseignement moral et religieux devrait se faire "en conformité avec les dispositions prévues aux règlements des comités catholique et protestant." C'est probablement, d'ailleurs, l'esprit de cet article.

Nous avons noté, en outre, l'ouverture faite dans cet article à la possibilité de dispenser un enseignement moral et religieux d'une confession autre que catholique ou protestante. C'est là une orientation positive que nous avions évoquée devant le comité catholique il y a quelques années. Il faudra cependant préciser les moyens concrets à mettre en place pour l'actualiser dans la réalité.

L'enseignant. Globalement, même si nous sommes persuadés que le chapitre traitant de l'enseignant sera sans doute abondamment commenté par les représentants des premiers intéressés, nous exprimons tout de même notre accord général sur son contenu et ses principales orientations, parce que nous croyons qu'il contribue à une plus grande clarification des rôles et à une valorisation du travail de l'ensei- gnant. Cependant, lorsqu'on traite de l'évaluation des élèves, à l'article 16, il nous apparaît important d'insister pour que ce processus soit situé dans son contexte général, en fonction des rôles et responsabilités de chacun des intervenants tels qu'ils sont précisés dans d'autres articles du projet de loi.

À notre avis, il ne faut pas perdre de vue que l'objectif premier est de faire profiter l'élève de l'évaluation. Donc, pour éviter le chaos, il faut s'assurer de la concordance des rôles et responsabilités à tous les paliers, entre autres, aux articles 43, 213 et 450 qui touchent aux fonctions du directeur d'école, aux fonctions de la commission scolaire et à celles du ministre. En ce sens, nous croyons qu'il serait opportun, au deuxième alinéa de cet article 16, de préciser que l'évaluation des élèves est faite par l'enseignant dans le cadre des politiques déjà définies par le ministère, la commission scolaire et l'école.

Au sujet des obligations de l'enseignant à l'article 19, nous désirons soulever deux points. D'abord, au premier alinéa, nous croyons que l'esprit de participation et de responsabilité partagée qui inspire l'ensemble du projet de loi serait mieux rendu avec le libellé suivant: "de contribuer avec les autres intervenants éducatifs à la formation intellectuelle et au développement intégral de chaque élève qui lui est confié."

Au sixième alinéa, il nous apparaît important d'insister sur la nécessité qu'il y ait pour les enseignants des "politiques globales de perfectionnement" plutôt que "simplement des acquisitions de scolarité additionnelle".

L'école. Sans reprendre tous les commentaires émis précédemment dans nos considérations générales, il nous apparaît quand même utile de rappeler, pour le chapitre traitant de l'école, que nos considérations vont s'inspirer fortement, entre autres, de l'esprit de partenariat déjà présent entre les intervenants, des liens organiques établis et de la participation recherchée aux divers paliers de la structure ainsi que des précisions apportées au rôle et aux fonctions des directeurs et directrices d'école que nous représentons.

Globalement, nous partageons la plupart des grandes orientations préconisées dans ce chapitre ainsi que la conception de l'école qui les sous-tend. De façon plus précise, nous acceptons le principe et l'existence du conseil d'orientation dans l'école tout en souhaitant clarifier davantage son rôle et son fonctionnement. Nous voulons mieux préciser certains aspects du rôle et des fonctions du directeur ou de la directrice d'école et nous préconisons la disparition du comité d'école.

Concernant l'acte d'établissement de l'école dont on traite, entre autres, à l'article 37 ainsi que plus loin aux articles 87 et 193, il serait important, étant donné l'expérience parfois difficile déjà vécue par des directeurs et directrices d'école, que la notion légale d'école ne

soit pas confondue à certains endroits, volontairement ou non, avec celle "d'établissement" ou "d'immeuble" de façon que des directeurs et directrices d'école se retrouvent à la tête de plusieurs établissements ayant chacun leur structure de participation différente. Selon nous, cela entraînerait de sérieux problèmes de fonctionnement et d'organisation qui nous semblent tout à fait étrangers à l'esprit du projet de loi.

C'est ainsi qu'au sujet du responsable nommé pour chaque immeuble, à l'article 39, nous croyons que le rôle du directeur ou de la directrice d'école serait mieux assuré et mieux compris si le texte se lisait plutôt: "sur recommandation du. directeur ou de la directrice d'école, la commission scolaire peut nommer un responsable."

À propos de l'ensemble de la section II, traitant du directeur d'école, nous sommes particulièrement heureux de constater qu'on a tenu compte, dans sa rédaction, de plusieurs représentations de la Fédération québécoise des directeurs et directrices d'école sur le projet de loi et antérieurement, ce qui a pour résultat, à notre avis, de mieux clarifier les rôles et responsabilités des directeurs et directrices d'école afin qu'ils soient plus en mesure de répondre aux besoins qu'ils ont à combler dans l'exercice de leurs fonctions et aussi de s'occuper avec plus d'efficacité de la qualité des services dispensés par l'école. Loin de nous l'idée de voir nos pouvoirs accentués; ce qui nous a guidés dans toutes nos démarches était une clarification importante des rôles qui étaient dévolus au directeur d'école. Très souvent dans le passé, il a été coincé, il a été mal placé pour agir, pour jouer efficacement son rôle. C'est pourquoi nous avons demandé une clarification des rôles et je pense que, dans le projet de loi, c'est fait.

Concernant l'article 72, le quorum aux séances du conseil d'orientation, nous croyons que le fonctionnement du conseil d'orientation serait facilité et allégé sur le plan de la paperasse et de l'administration si l'on changeait "huit semaines consécutives" par "deux convocations consécutives".

Quant aux articles 80 et 81, au sujet des canaux de communication du conseil d'orientation avec la commission scolaire, nous croyons, tout en reconnaissant à chacun la liberté de communiquer avec les interlocuteurs de son choix, qu'il devrait aller de soi, dans la logique des rôles et responsabilités dévolus à chacun, que ce soit la direction de l'école qui véhicule les représentations du conseil d'orientation tant à l'administration générale qu'au pouvoir politique.

Aux articles 84 à 93, nous préconisons la disparition du comité d'école et de toutes les dispositions prévues à ce sujet. Nous tenons à préciser qu'il ne faut aucunement voir dans cette proposition un désir de négation de la participation des parents, mais plutôt un souci pratique d'accroître leur influence en concentrant leur participation significative au niveau du conseil d'orientation où seront discutés les projets de l'école qui les préoccupent en priorité. Il ne faut pas perdre de vue non plus que la disponibilité des parents n'est pas chose facile et qu'il ne faut pas diluer ou éparpiller leur participation nécessaire.

La section V concernant les visiteurs d'école nous pose aussi certaines interrogations. Au départ, nous sommes d'emblée en faveur du principe de l'ouverture et de la transparence de l'école. Mais quel est au juste l'objectif visé par ces quelques articles sur les visiteurs? Une fois l'objectif connu, il serait probablement plus facile d'en préciser les modalités à travers ces articles. Par exemple, avec le texte actuel, verra-t-on les membres de l'Assemblée nationale faire campagne électorale dans les écoles? Verra-t-on des visiteurs d'un peu partout au Québec, députés, prêtres ou ministres - il s'agit ici de ministres du culte, je le précise bien, il s'agit de ministres du culte - du culte aller dans les écoles sans distinction de territoire? On ne distingue pas les territoires. Comment agira-t-on, par hypothèse, par rapport à l'accès d'un prêtre catholique, membre du Conseil supérieur de l'éducation, qui voudra visiter une école protestante? Voilà pourquoi nous croyons qu'il y a lieu de revoir cette section et- d'y apporter des précisions.

La commission scolaire. Globalement, même si nous sommes encore une fois persuadés que le chapitre traitant de la commission scolaire sera sans doute abondamment commenté par les représentants des commissions scolaires, nous exprimons tout de même notre accord général sur son contenu et ses principales orientations. D'une façon particulière, nous tenons à exprimer notre satisfaction, étant donné nos représentations antérieures à ce sujet, en regard des dispositions concernant le comité consultatif de gestion prévu à l'article 165.

Nous tenons tout d'abord à formuler un commentaire général au début de ce chapitre sur la question de l'intégration des commissions scolaires. En effet, nous sommes surpris que le projet de loi n'aborde pas cette préoccupation, car le principe d'une telle intégration - c'est vrai que M. le ministre en a traité un peu dans son discours d'ouverture, mais au moment où j'ai rédigé cela je n'avais pas encore entendu ce discours - demeure toujours valable alors qu'il restera, en juillet prochain, probablement quatorze commissions scolaires non encore intégrées. Nous sommes donc d'avis que le ministre devrait accentuer ce processus de façon à le rendre à terme au plus tôt.

Nous désirons soulever un point, à l'article 167, au sujet du comité consultatif des services aux élèves handicapés et aux élèves en difficulté d'adaptation ou d'apprentissage. En effet, étant donné les fonctions de direction à la fois pédagogique et administrative que l'on reconnaît au directeur ou à la directrice d'école et étant

donné l'application des politiques à assurer, nous proposons ici d'inclure la présence à ce comité "d'un représentant des directeurs et directrices d'école" pour faire valoir un peu l'applicabilité de recommandations ou de décisions.

Nous tenons à souligner, en passant, l'importance de l'article 184 sur les fonctions du directeur général de la commission scolaire. Nous trouvons qu'il fait bien ressortir ses champs de juridiction dans la gestion de la commission scolaire et qu'il confirme clairement, dans la logique de l'unité de direction, le lien de fonctionnement administratif existant entre l'école et la commission scolaire par l'entremise du directeur général. Pour nous, cette clarification-là est importante. Le directeur d'école relève bien du directeur général et le directeur général a un rôle à jouer. Cela nous apparaît important de le souligner et surtout d'insister pour que ces articles ne soient pas modifiés pour les restreindre.

À la lecture de l'article 194 sur les services éducatifs aux adultes, il est un peu regrettable de constater que le projet de loi traite si peu des adultes, alors que leurs besoins en éducation se développent de plus en plus et que les services qu'on leur dispense sont souvent organisés dans les écoles. Comment se fera l'utilisation du matériel, des locaux? Quel sera le lien de gestion entre le secteur adultes et le secteur jeunes? Ces questions et bien d'autres demeurent sans réponse actuellement dans le projet de loi.

À l'article 228, concernant les fonctions reliées aux services à la communauté, on traite de la mise en place de services de garde. Nous croyons encore une fois, ici, qu'il faut insister pour retrouver dans des dispositions de ce genre une cohérence évidente entre la création de services de garde et l'instauration de moyens correspondants pour les dispenser. Nous ajouterons une autre remarque. Dans la tâche du directeur d'école, nous avons vu disparaître une de ses fonctions qui était celle de mettre en place le service de garde. Nous croyons qu'il serait nécessaire de la remettre de façon à éviter, d'une part, que n'importe qui puisse être chargé à l'intérieur de l'école d'établir ce service de garde et que, d'autre part, on se mette à chercher au moment où on voudra l'appliquer. On pense que ce que le projet de loi a apporté de clarification devrait continuer ici dans le sens du service de garde. On s'interroge aussi pour savoir si les moyens à l'article 228 sont compris dans l'article 229. C'est une interrogation que nous avons et cela demande sûrement des précisions.

L'article 264, concernant le transport des élèves et l'organisation du dîner à l'école, peut laisser supposer dans sa rédaction actuelle que les parents ont le choix absolu entre un dîner à l'école ou à domicile pour leurs enfants. Nous ne croyons pas que ce soit le sens du texte; sinon, avec quelles ressources les directeurs et direc- trices d'école pourraient-ils organiser cette activité? Il faudrait retourner, encore une fois, au Conseil du trésor. Cet article aurait avantage à être plus précis dans sa formulation.

Le gouvernement et le ministre. Globalement, nous sommes d'accord avec la plupart des grandes orientations préconisées dans le chapitre traitant du gouvernement et du ministre. Nous n'avons pas l'intention et nos membres ne nous ont pas demandé d'entrer dans les détails, si cela devrait être matière à réglementation ou matière à législation. Nos membres ont étudié nos textes et c'est ce rapport-là que nous apportons aujourd'hui. Nous avons remarqué, cependant, l'absence d'une disposition générale de principe qui avait été retenue dans le projet de loi 3, à savoir que le ministre s'engage à consulter les associations ou fédérations nationales avant de faire usage de son pouvoir de réglementation. Nous croyons qu'un tel engagement clarifiant les règles du jeu devrait à nouveau apparaître dans le projet de loi. (12 heures)

Je pense que, jusqu'à ce jour, le ministre de l'Éducation a toujours consulté les associations ou fédérations nationales, mais je pense aussi qu'il est important que ce soit écrit dans un projet de loi. Le ministre de l'Éducation peut changer, alors je pense qu'il faut prévoir ces choses. À notre sens, il faut que les consultations soient prévues au règlement.

Au premier alinéa de l'article 415 concernant le pouvoir de réglementation du gouvernement en matière de classification des emplois, de postes, de conditions de travail, nous proposons de remplacer le terme "maximum" par celui de "minimum" en ce qui a trait à l'établissement du nombre de postes pour chaque classe d'emploi. Nous comprenons qu'il s'agit là d'une question de prévision dans les dépenses du gouvernement. Or, strictement en matière de réglementation, nous croyons que le gouvernement doit certes décider des ressources essentielles allouées pour donner les services, mais aussi laisser à la commission scolaire une marge de manoeuvre pour tenir compte, le cas échéant, de sa situation particulière.

À l'article 424 concernant l'établissement par le ministre de la liste des manuels scolaires et du matériel didactique, nous croyons qu'il faudrait remplacer "le ministre peut" par "le ministre doit". Que l'on pense simplement à l'exemple des bottines dans les ateliers et à celui des ciseaux à la maternelle et l'on comprendra que cette nécessité peut être ressentie encore plus fortement dans le secteur de la formation professionnelle et des écoles spécialisées où la définition de "matériel didactique" est de plus en plus difficile à cerner. Il faudrait peut-être préciser, comme on l'a fait à l'article 8 sur la gratuité, "utilisés dans les classes ou ateliers et qui sont requis pour l'enseignement des programmes d'études".

Au sujet des épreuves uniques imposées aux

élèves à l'article 430, nous voulons insister sur l'importance à accorder à la pondération et à la modération dans tout ce processus d'administration d'épreuves aux élèves. Nous trouvons que le texte n'est pas suffisamment explicite à ce sujet et nous souhaiterions qu'il soit revu pour mettre plus d'emphase sur ces deux éléments.

Globalement, la lecture des autres chapitres du projet de loi nous a également confirmés dans notre appréciation fort positive de son contenu. Selon nous, deux éléments méritent, entre autres, une attention particulière dans ces chapitres. À l'article 457, au chapitre du régime provisoire pour les commissions scolaires, nous proposons, entre le moment où le projet de loi sera adopté et la formation du conseil provisoire, la création d'un comité de vigilpnce qui pourrait intervenir dans l'allocation des ressources et assurer ainsi le maintien de l'équité entre francophones et anglophones. Étant donné l'importance que revêt la question linguistique au Québec, nous croyons qu'une telle disposition s'inspirerait d'une saine prudence et éviterait les abus et les déséquilibres possibles dans certains milieux.

À propos du chapitre IX sur l'organisation des commissions scolaires francophones et anglophones, nous voulons simplement revenir sur des propos que nous adressions au ministre lors de l'étude des règlements du comité catholique l'automne dernier et qui nous apparaissent toujours valables, c'est-à-dire que l'organisation des commissions scolaires sur une base linguistique répondrait mieux, selon nous, aux besoins scolaires du Québec d'aujourd'hui et de demain qu'une organisation sur une base confessionnelle. Nous croyons donc que cette orientation est à maintenir et à concrétiser sans se placer à la remorque des résultats juridiques ou constitutionnels qui risquent de tarder à venir.

Voilà le résultat de la consultation que nous avons effectuée concernant cet important projet de loi ainsi que la réflexion qu'il a suscitée au sein de la Fédération québécoise des directeurs et directrices d'école. Nous souhaitons que nos représentations contribuent à faire progresser la réflexion collective déjà engagée et nous assurons à nouveau le législateur de notre entière collaboration en vue de l'amélioration de ce qui deviendra la nouvelle Loi sur l'instruction publique. Nous sommes prêts maintenant à répondre à vos questions, M. le Président.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci beaucoup, M. de Guire. Je veux également vous féliciter pour l'intérêt que, certainement, votre association a à l'égard de ces deux projets de loi.

J'informe maintenant les membres de la commission qu'il reste environ 65 minutes aux deux formations politiques pour discuter avec nos invités. Alors, tel qu'il a été entendu avant le début de nos travaux, le temps sera partagé de façon égale entre les deux formations politiques et je respecterai en tout temps la règle de l'alternance. À la fin des périodes dévolues à chaque formation politique, je demanderai aux porte-parole s'ils veulent se prévaloir de trois ou quatre minutes pour le mot de la fin, comme on l'a fait quand on a mené - j'espère à bien - la consultation sur le financement des universités.

Je reconnais le ministre de l'Éducation. M. le ministre.

M. Ryan: M. le Président, je remercie la Fédération québécoise des directeurs et directrices d'école de sa contribution très positive aux travaux que nous entreprenons aujourd'hui. J'ai pris connaissance avec beaucoup d'intérêt du mémoire de la fédération, tout d'abord, parce qu'il provient d'un organisme qui a suivi de très près les débats que nous avons eus sur ces questions depuis de nombreuses années et, deuxièmement, parce qu'il émane de praticiens de l'éducation qui ont les pieds solidement plantés dans le sol scolaire et qui parlent des réalités scolaires non pas de manière théorique ou abstraite, mais toujours en fonction des besoins concrets avec lesquels ils sont aux prises tous les jours. Le mémoire de la fédération se ressent de cette caractéristique et je l'apprécie vivement.

Je voudrais faire quelques brefs commentaires sur certains points qui ont été soulevés. Ensuite, j'aurai peut-être une ou deux questions. Pendant la période qui nous est impartie, le député de Saint-Henri complétera aussi par des questions celles que j'aurais pu vous poser, vu qu'il est un membre de la confrérie des directrices et directeurs d'école. Il l'a été pendant longtemps. Il l'était lorsque j'ai fait sa connaissance. Je le remercie d'être avec nous pour cette commission parlementaire.

En ce qui touche l'école, je remarque les commentaires très intéressants que vous avez faits. Il y a plusieurs propositions particulières visant à améliorer le projet de loi dont nous tiendrons compte avec beaucoup d'intérêt. Je vous adresserai une ou deux questions là-dessus. J'avais hâte de connaître le point de vue de votre fédération sur les structures proposées pour l'école, vu que c'est vous qui serez appelés à fonctionner avec ces structures-là. Il est bien important que nous préconisions des structures qui puissent fonctionner pour le bien de l'éducation.

Sur l'ensemble du projet, je crois que votre vision est intéressante pour le gouvernement parce que, au lieu de faire de l'interprétation, je crois que vous avez fait une lecture réaliste du projet de loi en ce qui touche, en particulier, le partage des pouvoirs. Quand on regarde cette question de près, en toute impartialité, on constate que le projet de loi, de manière générale, traduit dans la loi des choses qui existent déjà dans les régimes pédagogiques, dans d'autres règlements gouvernementaux ou ministériels ou dans la pratique. Nous nous sommes souvent fait dire par les services juridiques du gouvernement et par des personnes qui soulevaient des contes-

tations de l'extérieur que, quand une chose est dans les règlements et que la possibilité de l'inclure dans les règlements n'est pas clairement inscrite dans la loi, nous sommes dans un régime illégitime ou illégal. C'est parce que nous avons voulu renforcer les assises juridiques de certaines fonctions qui incombent selon une longue habitude maintenant au ministère de l'Éducation et aux commissions scolaires d'ailleurs que nous avons inscrit dans la loi beaucoup de dispositions qui ne se trouvent pas dans l'actuelle Loi sur l'instruction publique. Je pense que cela a été bien compris de votre fédération. Je veux vous en remercier, parce que c'est un des éléments qui vont polariser nos discussions au cours des semaines à venir.

Vous vous êtes étonnés de ne pas trouver beaucoup de mentions de l'éducation des adultes dans le projet de loi. C'est vrai que le projet de loi est un peu laconique sur l'éducation des adultes. Je voudrais seulement signaler à votre attention deux points qui m'apparaissent importants. Tout d'abord, nous donnons une définition plus généreuse de l'adulte. Si vous avez remarqué dans le projet de loi, un adulte est toute personne qui a laissé l'école depuis six mois ou plus. Avant, la période était d'au moins un an et cela a été de deux ans. Avec six mois, on abrège cette période de manière à ne pas faire perdre de temps à une personne qui serait sortie de l'école et qui voudrait reprendre les études. Deuxièmement, dans un article très important du projet de loi, nous prévoyons la possibilité d'un régime pédagogique distinct pour les adultes. Je pense que là résidera probablement la clé de la politique gouvernementale de l'avenir en matière d'éducation des adultes. Dans nos cartons, nous avons un projet de régime pédagogique qui s'adresserait plus spécialement aux adultes et qui viendrait préciser à l'intention des adultes toutes les dispositions qu'on trouve à l'article 413 définissant les choses confiées au ministre, les choses qu'il importe au ministre de faire. Vous remarquerez, à la fin de cet article, que le gouvernement peut aussi instituer un régime pédagogique propre pour les adultes. Je pense que c'est dans cette direction que nous pourrons éventuellement apporter des précisions, mais j'admets que, pour le moment, cela puisse sembler incomplet. Je pense que c'est une bonne chose qu'on nous l'ait signalé. Nous allons examiner la possibilité d'améliorer cet aspect.

En ce qui touche l'intégration des commissions scolaires, la préoccupation de la fédération me semble avoir trouvé sa réponse principale dans une disposition du projet de loi. Je pense que c'est à l'article - je le mentionne - 105 où on dit qu'en cas de litige, dans le partage des biens et des passifs, dans le partage de l'actif et du passif des commissions scolaires régionales en cas d'intégration, le ministre pourra trancher le différend. Jusqu'à maintenant, il ne pouvait pas le faire. Nous étions en face de situations où, s'il y a conflit, il faut le laisser perdurer sans qu'il existe de possibilité directe de le résoudre. Maintenant, il y a cette disposition du projet de loi. C'est là une des dispositions qui vont être contestées par certains milieux, je les comprends, mais, nous autres, nous pensons que c'est important de mettre cela. Si nous sommes sérieux avec l'intégration des enseignements secondaire et primaire, il faut que cela se fasse tôt ou tard. Je pense que c'est cela que vous avez voulu dire. Je crois que la clé se trouve à cette disposition du projet de loi à laquelle j'ai fait allusion.

Vous vous êtes étonnés aussi de ce qu'on ne trouve pas dans le projet de loi - je pense que la députée de Chicoutimi avait fait la même observation - une disposition prévoyant une consultation des organismes nationaux avant qu'une réglementation soit instituée par le gouvernement. Deux remarques à ce sujet. Tout d'abord, comme vous l'avez dit justement, je pense, les organismes nationaux n'ont peut-être jamais été aussi systématiquement consultés qu'ils l'ont été sous le gouvernement actuel. Toutes les fois que des initiatives nouvelles ont été prises, nous avons consulté les organismes nationaux. Nous avons même une structure permanente de consultation en ce qui touche les questions administratives et financières concernant les commissions scolaires, en particulier. Nous entendons continuer dans cette voie.

Si nous n'avons pas réinscrit dans le projet de loi cette disposition qu'on trouvait dans la loi 3, c'est pour la raison suivante. C'est que, sous le gouvernement actuel, l'Assemblée nationale a adopté la Loi sur les règlements et, dans la Loi sur les règlements, il est prévu qu'aucun règlement ne peut être adopté sans qu'il ait d'abord été publié pour consultation pendant un intervalle, je pense que c'est de 45 jours. Alors, la consultation officielle, la consultation prévue dans la loi, c'est là qu'elle doit se faire, au moment où le règlement est publié. Que d'autres consultations puissent intervenir librement par-delà ce que la loi prévoit, oui, mais il ne nous a pas semblé que ce serait une bonne chose de garder cela dans la loi elle-même, vu les dispositions de précaution qui sont désormais inscrites dans la Loi sur les règlements.

Maintenant, j'en viens à quelques questions qui m'intéressent plus particulièrement et qui peuvent peut-être recevoir un éclairage spécial de votre part, étant donné le rôle capital que jouent les directrices et les directeurs d'école dans le fonctionnement concret de notre système d'enseignement. Vous avez dit, par exemple, en matière de reconnaissance du caractère confessionnel de l'école, votre regret de constater qu'on ne fasse pas la distinction entre l'école primaire et l'école secondaire. Je ne sais pas si vous pourriez préciser cette préoccupation que vous avez exprimée et nous dire ce qui pourrait être envisagé de ce côté et qu'on ne trouve pas actuellement dans le projet de loi.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M.

de Guire.

M. de Guire: Nous, au sujet de l'article 6, nous voudrions qu'au primaire le choix de l'élève se fasse à chaque cycle, alors qu'au secondaire nous considérons qu'il devrait se faire chaque année. C'est au sujet de ces droits-là que nous sommes intervenus et nous disons que la modalité de choix devrait être différente au primaire et au secondaire. Les élèves ne sont pas du même âge, d'une part, et, d'autre part, en dehors de la question de l'âge, il y a toute la question de l'organisation scolaire. C'est pour cela que nous croyons que la modalité de choix devrait, par exemple, au primaire, se faire au niveau de chaque cycle et non pas chaque année et, au secondaire, elle devrais se faire chaque année, puisque l'organisation scolaire peut le permettre, d'une part, et que, d'autre part, les élèves vieillissent et peuvent avoir besoin de faire des choix. C'est ce que nous avons voulu dire ici par "modalité de choix". (12 h 15)

Le Président (M. Parent, Sauvé): Cela va?

M. Ryan: Très bien, je vous remercie. Juste une autre question. Vous dites dans votre mémoire au sujet du comité d'école, étant donné qu'on aura un conseil d'orientation et une définition peut-être plus claire des responsabilités de la directrice ou du directeur d'école, qu'il faudrait le laisser tomber. Nous disons: Gardons-le de manière facultative au gré des parents. Pourriez-vous nous dire pourquoi ce serait mieux de le laisser tomber comme vous le proposez dans votre mémoire?

Le Président (M. Parent, Sauvé): Allez!

M. de Guire: Nous, nous croyons important de bien regarder la réalité de la participation des parents au Québec. Il y a dans les écoles primaires, de façon générale, une plus grande participation des parents qu'au secondaire. Quand on regarde le pourcentage des présences, on a l'impression que cela ne sera qu'une duplication, parce que cela ne pourra faire autrement que d'avoir les mêmes personnes qui vont s'asseoir à l'un et à l'autre. Loin de nous l'idée d'enlever aux parents le fait qu'il y a des comités d'école, ce n'est pas notre objectif. Notre objectif, c'est d'éviter que les gens se sentent frustrés à la longue de faire les mêmes choses, de recommencer les mêmes affaires et de discuter des mêmes sujets. Cela ne pourra faire autrement. Tout ce qui va se discuter au comité d'école, qui concerne le projet d'école, devra être rediscuté au conseil d'orientation. Comme les parents n'ont pas la disponibilité des enseignants, du personnel de l'école et qu'ils ne sont pas à l'école toute la journée, il va y avoir, à notre sens, à la longue de la frustration, du mécontentement de ce côté-là qu'il faudra gérer. Nous, nous pensons que cela n'a pas de sens d'instituer cette frustration, même si, aujourd'hui, il est certain que les parents veulent l'avoir. Nous comprenons cela et nous respectons le point de vue des parents, mais nous pensons qu'à la longue, cela pourrait être beaucoup plus négatif du fait qu'il y aura toujours répétition.

Le Président (M. Parent, Sauvé): On vous remercie beaucoup, M. le président. Je reconnais maintenant, en fonction de la règle de l'alternance, Mme la députée de Chicoutimi. J'ai également une demande d'intervention de la part du député de Saint-Henri. Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. de Guire, messieurs... J'allais dire madame, mais je constate qu'elles sont "sous-représentées" chez vous.

M. de Guire: Ce n'est pas nous qui faisons la démocratie, vous savez. Si les femmes ne sont pas élues, ce n'est pas moi qui en suis responsable.

Mme Blackburn: Ce sont les commissions scolaires.

M. de Guire: Non, ce ne sont pas les commissions scolaires, ce sont nos membres, puisque ce sont tous des membres élus qui sont ici à cette table.

Mme Blackburn: Oui? En fait, c'est une boutade. Probablement qu'elles sont un peu moins compétentes.

Messieurs, je voudrais vous souhaiter...

M. de Guire:... dire que je le regrette, madame.

Mme Blackburn:... la bienvenue au nom de l'Opposition et vous dire, comme vous le rappelait le ministre, que votre participation est appréciée parce que vous êtes, avec les enseignants, les personnes les plus directement responsables de la qualité de la formation dispensée dans nos écoles.

Vous soulevez, dans votre mémoire, un certain nombre de questions extrêmement importantes. Je ne voudrais pas refaire le tour de ces questions. Par ailleurs, l'analyse que vous faites de certains aspects du projet de loi me laisse assez songeuse. Alors, je me permettrais, pour ne pas trop prendre de mon temps à commenter votre mémoire que vous nous avez bien présenté, de passer plus de temps sur les questions, de manière à mieux comprendre le sens de votre mémoire.

Dans les considérations générales, en page 4, au quatrième paragraphe, vous dites en commentant le projet de loi: "Nous trouvons aussi intéressant qu'il veuille reconnaître formellement à l'école et à ses agents une meilleure

participation dans l'élaboration des décisions de la commission scolaire." Comment, selon vous, et dans quels articles cela se traduit-il? Selon la connaissance que j'ai du projet de loi, celui-ci enlève certains pouvoirs, qui étaient prévus dans la loi 3, aux enseignants sur les comités pédagogiques. Les conseils d'école avaient certains pouvoirs décisionnels. Il y avait ne serait-ce que l'obligation faite au ministre de consulter au sujet des règlements. À partir de quels articles du projet de loi lisez-vous cette réalité?

M. de Guire: Disons qu'il y a, tout d'abord, l'article 165 dans lequel on précise la participation du directeur d'école à la table de gestion ou au comité de gestion de la commission scolaire, le directeur d'école devant avoir fait, au préalable, dans son école toutes les consultations nécessaires et avoir eu toute la participation nécessaire pour présenter ses positions à la commission. Il y a aussi tous les comités de la commission. Quand vous parlez du comité pédagogique dans l'école, il existe toujours. Les conventions collectives prévoient déjà des modes de participation avec les enseignants. La différence avec le projet de loi 3 ou les autres projets antérieurs, c'est qu'on les inscrivait dans la loi, mais ceci n'empêche pas actuellement les modes de participation à l'intérieur des conventions collectives qui sont toujours là.

À l'école, il y a d'abord le conseil d'orientation qui est, à mon sens, l'élément majeur de la participation, puisque le conseil d'orientation regroupe l'ensemble des partenaires de l'école, mais le conseil d'orientation a aussi un pouvoir de recommandation à la commission scolaire, donc un pouvoir de participation, d'influence sur les politiques de la commission. Alors, c'est par là qu'on retrouvera une meilleure participation.

Maintenant, quand on pense à une meilleure participation, on pense toujours à la loi actuelle, à la loi existante et non pas au projet de loi. Bien sûr, par le passé, on a eu le projet de loi 40 qui était tout à fait différent et le projet de loi 3 qui était différent aussi. La situation actuelle face au conseil d'orientation, même s'il est prévu dans la Loi sur l'instruction publique, c'est qu'il n'a jamais été mis en application. Je ne voudrais pas revenir sur l'histoire là-dessus, mais on sait qu'il n'a pas pu être mis en application.

Dans le cas présent, le conseil d'orientation qui, normalement, devrait être mis en application favorise le partenariat, favorise la concertation. C'est pourquoi on dit qu'on va reconnaître formellement chacun des agents de l'école que sont les enseignants, les parents, les directeurs d'école et les autres membres du personnel. Ils vont formellement travailler au conseil d'orientation. C'est le premier endroit où ils pourront et où ils peuvent travailler, sans compter tous les autres comités et sous-comités qui devront être mis en place à la suite de i'instauration du conseil d'orientation, plus les comités institués à la commission scolaire même. Je pense, par exemple, au comité sur les handicapés et il y peut y avoir d'autres comités. Et, il y a celui auquel le directeur d'école, comme représentant de l'école, va siéger et où il devra véhiculer les opinions de son milieu, au niveau de la commission.

C'est dans ce sens que nous avons dit qu'il y avait une nette amélioration. Je ne sais pas si mes collègues ont quelque chose à ajouter.

M. Lebel (Marcel): On pourrait peut-être se référer à l'article 52 où, de façon très précise, on avise que le directeur d'école participe à l'élaboration des politiques de la commission scolaire de même qu'à l'élaboration de la réglementation. En partant de cet autre article de loi, la meilleure représentation, la meilleure participation et la meilleure influence auprès de la commission nous paraissent trouver un chemin convenable. C'est dans cet esprit que nous sentons effectivement que les besoins des écoles vont trouver un écho qui va s'approcher de l'action, du terre à terre que souhaitent les directeurs d'école. On aura des lieux de convergence pour mettre nos objectifs ensemble.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. Lebel. M. le président, pour les besoins du Journal des débats, lorsque vous demandez à une des personnes qui vous accompagnent de prendre la parole, j'aimerais que vous l'identifiiez.

M. de Guire: M. Marcel Lebel.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Madame.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. D'abord, je dois dire que j'ai probablement mal posé ma question. J'aurais voulu qu'on puisse établir les différences entre la loi 3 et la participation des agents du milieu qu'elle aurait permise et l'actuel projet de loi. Il est évident que, si on se réfère à la situation de la loi qui nous régit actuellement, la Loi sur l'instruction publique, il est souhaitable qu'il y ait des progrès, parce que cela commence à être désuet sous plusieurs rapports. Je suis heureuse de constater, cependant, que les deux articles dont vous signalez la présence dans le projet de loi actuel sont repris textuellement de la loi 3. Je vais peut-être poser ma question autrement. Dans la loi 3, on donnait et on reconnaissait au comité d'orientation, aux enseignants au sein du comité pédagogique - comité pédagogique au sein de l'école - certains pouvoirs. Actuellement, le conseil d'orientation n'est que consultatif. On reconnaissait aussi un certain nombre de droits aux élèves. Cela n'apparaît plus dans la loi. On ne retrouve rien quant à l'obligation pour le directeur d'école, au niveau secondaire à tout le moins, de reconnaître les associations d'élèves. Et là, évidemment, je pourrais continuer. Et c'est davantage dans ce sens que je voulais poser ma

question. Jusqu'à quel point, par rapport à la loi 3 - parce que c'est une loi - est-ce que cela ne constitue pas un recul en matière de participation?

M. de Guire: Je ne sais pas, madame, si on peut parler de recul. Il me semble que le projet de loi 3 était aménagé, dans son ensemble, différemment de celui du projet de loi 107 actuel. Dans le projet de loi 3, on avait beaucoup de comités à l'intérieur de l'école, ce qui faisait - je ne dirai pas disséquer - qu'on avait un certain éparpillement. Il y avait, par exemple, le comité pédagogique auquel personne d'autre que les enseignants et le directeur n'avaient accès, alors qu'il existe toujours présentement des comités dits pédagogiques dans chacune des écoles secondaires. Ils sont là même si le projet de loi n'est pas là. Une école secondaire ne peut pas fonctionner sans cela. Ce que le conseil d'orientation apporte de différent, c'est qu'on y discute du projet éducatif d'une école. On y discute de l'ensemble des mesures et on ne veut pas faire faire au conseil d'orientation l'évaluation ou, si l'on veut, le travail d'un comité en particulier, mais d'un projet d'ensemble. On ne voudrait pas non plus que le conseil d'orientation devienne une espèce de conseil d'administration qui, par exemple, pourrait juger le travail des enseignants. Au contraire, ce n'est pas l'objet, même si on est déjà allé loin par le passé dans d'autres projets de loi. Je pense à la loi 40 où on allait très loin en ce qui concerne le conseil d'administration. Le projet de loi 107 parle d'un conseil d'orientation où on va parler des orientations générales de l'école. L'esprit général fait que c'est cela le focus, l'objet principal de la création du conseil d'orientation. Il nous semble que tous les travaux en matière de pédagogie doivent être discutés au comité pédagogique avec les spécialistes en pédagogie que sont les enseignants, bien sûr, mais aussi le directeur d'école. C'est là qu'on va continuer à travailler avec cela. Il ne faut pas oublier que la convention collective prévoit aussi des comités de participation pour les enseignants. Cela ne nous apparaît pas modifié. Le projet de loi ne vient pas limiter les conventions collectives.

Donc, si on se réfère à l'esprit global du projet de loi qui est d'augmenter le partenariat à chacun des niveaux... C'est pour cela d'ailleurs que je disais tantôt que, même au niveau du ministre, il doit y avoir la consultation des organismes nationaux, au niveau de la commission, il doit y avoir une consultation de chacun des partenaires que sont les écoles et au niveau de l'école on a aussi une concertation de l'ensemble des groupes qui oeuvrent à l'intérieur de l'école.

Mme Blackburn: Mais vous n'estimez pas utile que ces groupes-là aient un certain pouvoir décisionnel. La consultation est suffisante et suffisamment dynamique. Vous n'avez pas com- menté la composition du conseil d'orientation mais je voudrais revenir brièvement sur le comité pédagogique. Il n'est pas prévu dans la loi, ce comité pédagogique. Si cela a une telle importance, la présence de ces comités pédagogiques, est-ce qu'il ne serait pas important qu'on le retrouve dans la loi?

Tout à l'heure le ministre justifiait l'apparition de nombreux pouvoirs qui lui sont conférés, sous prétexte qu'ils existaient déjà par le biais de la réglementation, que c'était plus fort si on les incluait dans la loi. Par ailleurs, il ne tient pas le même discours par rapport à la définition des services (éducatifs complémentaires, particuliers, etc.), de même que pour la définition des services qui sont accessibles gratuitement aux adultes. On les voit par exclusion. Alors certains services (matériel scolaire) ne sont pas gratuits pour les adultes, ils le sont seulement pour les jeunes. Mais on ne voit pas cette volonté d'inscrire ce grand morceau d'activité, de consultation, de participation, en ce qui concerne le comité pédagogique, dans la loi.

Je dirais la même chose en ce qui concerne la consultation - on y reviendra - et en ce qui concerne l'éducation des adultes. Il me semble que ce sont des grands pans d'activité qui ont contribué à animer le milieu, qui ont contribué à assurer une participation réelle des principaux agents à la dynamique de l'école, puis au projet éducatif, à sa concrétisation. Est-ce que cela ne vous inquiète pas de ne pas retrouver ces éléments-là dans le projet de loi?

M. de Guire: II est vrai, madame, qu'il existait, dans le projet de loi 3 comme dans le projet de loi 40, dans la loi 3 comme dans le projet de loi 40, des comités beaucoup plus précis et distincts qu'il n'y en a dans le projet de loi 107 actuellement.

C'est vrai, là-dessus, vous avez parfaitement raison. Je ne nie pas cela. Sauf que nous avons fait, tout au long des discussions, au cours des dernières années... Vous savez, même depuis la loi 3, les gens ont beaucoup discuté et se sont demandé s'il était nécessaire, à l'intérieur des écoles, par exemple, d'instituer obligatoirement un comité pédagogique alors que les gens veulent avoir un comité multipartite, alors que dans d'autres milieux cela n'est pas possible d'avoir autre chose que des enseignants. C'est un peu pour respecter le fonctionnement de chacune des écoles qu'on s'est toujours, nous, opposés à la création de comités très précis. On n'est pas plus d'accord avec ceux qui nous obligent à avoir ces comités-là par le biais de conventions collectives. Cela n'est pas plus vrai dans un sens que dans l'autre. On pense que ce qui est important, c'est d'assurer le partenariat et de l'assurer globalement à l'intérieur de chaque école. L'importance, à notre point de vue, c'est la qualité des services éducatifs. Puis les directeurs d'école sont responsables d'assurer les

services éducatifs, évidemment, selon les moyens qu'ils ont toujours. Les moyens pourraient être plus élevés. Encore une fois, je dois dire que M. le ministre pourrait aller chercher plus de moyens au Conseil du trésor. Mais l'objectif fondamental, c'est la qualité des services éducatifs à l'école. Et au conseil d'orientation, si les gens, tout en discutant de l'ensemble des services éducatifs offerts, demandent la création de tel ou tel comité d'étude, à ce moment-là, dans l'école, on le fera.

Ce qu'on voudrait, nous, en tout cas, par rapport aux comités, c'est qu'on trouve qu'il faudrait répondre aux besoins de chacun des milieux. Si je prends une petite école de 225 élèves puis une école de 2000 élèves vous savez, on ne peut pas les obliger à avoir le même nombre de comités. D'ailleurs, au sujet des comités, on pourrait en parier... Ce n'est pas dans notre esprit d'empêcher que les gens qui veulent avoir voix au chapitre puissent le faire. Ce n'est pas cela du tout qui est notre objectif. Parce que je ne connais pas de directeur d'école qui n'a pas de comité où l'on discute de pédagogie régulièrement, chaque semaine, chaque quinze jours. Selon moi, c'est l'objectif premier de l'école, puis si cela ne se faisait pas, je ne vois pas comment une école pourrait fonctionner. Sauf que de nous obliger à l'avoir... Par exemple, le conseil d'orientation nous donne un cadre, un modèle; c'est un moule, il faut passer dans cela, mais on ne voudrait pas qu'il y ait beaucoup de moules à l'intérieur des écoles.

Les écoles, au Québec, je ne me souviens plus de la statistique, mais vous savez, les écoles de moins de 300 élèves, c'est une grande majorité. C'est une réalité à laquelle on doit faire face et, nous, on ne souhaite pas la multiplication des comités. C'est pour cela, d'ailleurs, qu'on n'a pas relevé ce fait-là.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. de Guire. La commission permanente de l'éducation doit suspendre ses travaux jusqu'après la période des affaires courantes à l'Assemblée nationale, alors que nous continuerons à entendre la Fédération des directeurs et directrices d'école du Québec.

M. de Guire: À quelle heure?

Le Président (M. Parent, Sauvé): Vers 15 h 30 environ. On ne peut jamais présumer de la longueur de la période de questions et des débats qui...

Une voix: Cela dépend de la longueur de la réponse des ministres.

Le Président (M. Parent, Sauvé): ...se passent à l'Assemblée nationale. Alors, on se donne rendez-vous ici, vers 15 h 15 ou 15 h 30.

(Suspension de la séance à 12 h 36)

(Reprise à 15 h 24)

Le Président (M. Parent, Sauvé): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission permanente de l'éducation poursuit ses travaux et je vous rappelle qu'au moment de la suspension des travaux, nous discutions avec la Fédération québécoise des directeurs et directrices d'école. M. le ministre, vous avez demandé d'intervenir.

M. Ryan: Oui, M. le Président, si vous vouliez me permettre de dire un mot pour saluer la présence parmi nous, comme nous discutons d'une loi sur l'instruction publique, d'un magnifique groupe de jeunes élèves d'une de nos belles écoles du comté d'Argenteuil qui sont ici en compagnie de leur enseignante, Mme Hilda Langevin; un groupe de la région de Sainte-Scholastique, de Sainte-Monique, de Saint-Augustin, mais leur école est à Sainte-Scholasti-que. Mme Langevin amène chaque année un groupe d'étudiants de sa classe visiter le parlement. Cela fait partie de leur expérience. Ils m'ont fait part d'un beau cahier de textes qu'ils ont rédigés dans un français magnifique pour marquer cette expérience de voyage à Québec. Je voudrais vous dire bonjour au nom de tous les députés qui sont ici et vous féliciter, Mme Langevin, souhaiter bonne chance à vos élèves qui seront encore probablement dans nos écoles quand la loi sera en vigueur. Merci.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le ministre. Bienvenue aux gens du comté d'Argenteuil. Je reconnais immédiatement, dans un premier temps, le député de Saint-Henri. M. le député.

M. Hains: Nous sommes heureux, et moi tout spécialement comme ancien directeur d'école, de vous saluer ainsi que les membres de votre exécutif. Votre mémoire est vraiment digne de mention par sa présentation, sa pondération, ses remarques judicieuses sur tous les différents points que vous avez traités. Comme directeur d'école j'accole une étoile d'or à votre devoir bien accompli. C'est un document vraiment gratifiant pour M. le ministre. À cette satisfaction que vous avez témoignée, vous joignez une série de remarques et vous suggérez des améliorations qui sont toujours possibles. Je suis sûr que ces demandes ne seront pas vaines et que M. le ministre va les étudier avec beaucoup de discernement.

Voici maintenant quelques petites questions. À la page 6, vous demandez que l'âge maximum de quinze ans soit maintenu pour la fréquentation scolaire. Comme argument, vous parlez de décrocheurs. Évidemment, c'est un problème qui est très angoissant. Vous serait-il possible de me donner en général le nombre de décrocheurs, dans combien de classes ou d'écoles seraient-ils répartis et quelles sont les cotes de succès ou

d'insuccès dans cette vaste opération?

M. de Guire: Si vous permettez, je vais demander à notre vice-président, M. Marcel Lebel, de répondre à votre question.

M. Hains: Merci.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Lebel.

M. Lebel: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Le président vous écoute.

M. Lebel: M. Id député nous pose des questions qui ont un caractère chiffré. Cela peut vous décevoir, je ne vous donnerai pas de chiffres. Je ne peux pas vous donner de chiffres parce qu'on n'a pas fait d'enquête exhaustive. Ce qui nous inquiète - c'est ce qu'on a voulu vous dire - c'est le climat, ces jeunes de quinze ans, seize ans, dans notre société, qui ont le goût de quitter l'école secondaire. Il y a des motifs autour de cela, il y a des jeunes qui ont des insuccès scolaires, il y a des jeunes qui vivent des situations familiales tendues, il y a des jeunes qui vivent des situations de motivation à l'apprentissage des matières académiques qui font qu'ils auraient le goût de partir; il y en a qui partent. Quelquefois, les chiffres peuvent être difficiles à établir, mais on peut dire que 2 % des jeunes de quinze et seize ans décrochent. On pourrait faire une enquête, on mettra des ordinateurs en chasse et on trouvera la réponse.

L'inquiétude concerne aussi ceux qui ne décrochent pas réellement de toute l'école, mais qui décrochent d'une, deux, trois ou quatre matières, qui sont passifs dans leur apprentissage. Ils peuvent être à l'école physiquement, mais ils ne sont pas présents activement, pédago-giquement. On n'a pas quantifié cela, mais cela nous inquiète aussi. C'est pour cela qu'on vous dit notre inquiétude au sujet des jeunes de quinze ans. Si le jeune n'est pas heureux à l'école, il faut lui trouver des moyens pour être heureux.

Ce qu'on disait ce matin avant de se quitter, c'est: On va demander à M. Ryan d'aller chercher des ressources pour donner un soutien à ce type de jeunes et peut-être qu'à seize ans il va l'accrocher à son cou... On a besoin de services, de services sociaux. Actuellement, ce sont des ententes que les ministères de l'Éducation et de la Santé et des Services sociaux ont. Il y a environ un mois, je lisais que M. Ryan avec sa collègue, Mme Lavoie-Roux, avaient l'intention de ressusciter une bonne révision du dossier des ententes MEQ-MAS. On applaudit à cette orientation du ministre d'aller chercher une meilleure clarification des rôles pour aider les élèves qui auraient le goût de décrocher de J'école, mais on n'a pas les outils pour les accrocher à l'école.

On a besoin aussi de travailler la question du nombre d'élèves par groupe dans les cheminements particuliers. Le ministre a développé une politique de formation professionnelle, mais pour les cheminements particuliers on a besoin de les appuyer et il ne faudrait pas que les cheminements particuliers alourdissent le système. Si on a vu la disparition de l'enseignement professionnel court, qui était une voie de soutien à des élèves qui n'avaient pas décroché de l'école, il faut trouver des avenues similaires. On est disponible pour examiner ces avenues avec le ministère. Si les commissions scolaires sont petites et ont besoin du soutien de psychologues, de psycho-éducateurs, il va falloir trouver des moyens pour aider les petites commissions scolaires. C'est ce type de clientèle de quinze, seize ans qui nous amène à penser que cela prend du soutien. Les jeunes ont des problèmes de drogue, des difficultés dans les familles monoparentales; il y a des jeunes qui ont un certain appât du gain.

Tous ces phénomènes sociaux nous conduisent à vous dire qu'on est inquiet et c'est dans cet esprit qu'on vous a communiqué notre inquiétude. On attend de vous un soutien pour garder les jeunes jusqu'à seize ans, si on est capable, avec de l'aide. Garder quelqu'un de force, en pédagogie, c'est difficile, mais le garder avec motivation, encadrement et soutien, on va être là, au rendez-vous, pour l'aider.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous remercie, M. Lebel. M. le député de Saint-Henri.

M. Hains: Au bas de la page 6, vous parlez encore des jeunes. Je crois que vous parlez, à ce moment-là, des jeunes filles qui, sans le consentement des parents, ont droit à des services médicaux. Cette question m'intéresse beaucoup parce que ma femme est infirmière et qu'elle est souvent confrontée à ce problème. Alors, si je ne m'abuse, on veut parler des jeunes filles qui, à l'âge de quatorze ans, ont le droit, sans le consentement de leurs parents, à l'avortement. C'est un sujet brûlant dans plusieurs écoles et j'aimerais connaître quelle est l'attitude des principaux d'école là-dessus.

M. de Guire: Évidemment, la seule... Ici, nous avons traité de cette question pour donner un exemple puisqu'on voudrait que le législateur soit...

M. Hains: Oui, oui, je le sais.

M. de Guire: ...cohérent dans chacune de ses lois et qu'on parle des mêmes âges partout. On n'a pas voulu développer ici, de façon particulière, le problème qui peut nous arriver à l'école par rapport à la question des services médicaux. Je pense que c'était uniquement pour

illustrer et non pas pour témoigner ici, devant la commission parlementaire, des difficultés qu'on peut avoir face à cela.

M. Hains: Cela m'aurait intéressé quand même de connaître votre attitude. Vous savez comme moi que c'est très contesté, mais je comprends très bien votre discrétion.

Alors, en page 9, vous parlez de la nécessité de politiques globales pour le perfectionnement des enseignants. Sous quel angle voyez-vous ces politiques globales, comme vous dites, au lieu de simples acquisitions de scolarité additionnelle? C'est à la page 9.

M. de Guire: Oui. Il nous apparaît important d'insister sur la nécessité d'établir dans notre système des politiques globales de perfectionnement pour l'ensemble du personnel. Évidemment, ici, il est question des enseignants, mais je pourrais appliquer ce que je dis aux directeurs d'école ou à n'importe quel autre membre du personnel. Il nous apparaît important qu'on n'ait pas des politiques qui donnent des acquisitions de connaissances pour des acquisitions de connaissances, mais que nos politiques de perfectionnement soient préparées de façon à permettre aux personnes qui bénéficient de perfectionnement que cela aboutisse à un meilleur service, à une meilleure compétence, mais pour le service qu'on a à donner. Donc, que le perfectionnement soit relié à la fonction ou à ce qu'on a à faire et non pas un perfectionnement pour un perfectionnement. Pour cela, il faudrait établir des politiques globales de perfectionnement. Évidemment, on ne donne pas de modèle précis...

M. Hains: Oui.

M. de Guire: ...mais on dit qu'on devrait s'asseoir pour travailler dans ce sens-là.

M. Hains: Quant à l'éducation des adultes, ce matin, M. le ministre a relevé votre intervention. Vous-même, comment entrevoyez-vous cela? Je sais que cela à toujours été un problème, l'utilisation du matériel - c'est à la page 14, je crois - l'utilisation des locaux et le lien de gestion, comme vous dites, entre le secteur adulte et le secteur des jeunes. Est-ce qu'on pourrait connaître un peu votre vision des choses?

M. de Guire: Notre vision de la chose, nous revendiquons depuis plusieurs années déjà qu'il y ait unité de direction dans la gestion des utilisateurs des écoles, qu'ils soient des adultes ou des jeunes. On n'a pas d'objection que des cours soient organisés le soir ou le jour. Ce qu'on voudrait, c'est qu'il y ait unité dans la gestion de nos établissements scolaires, de façon qu'on n'ait pas de difficulté, par exemple, sur le plan de l'utilisation du matériel ou de l'utilisation des locaux. Actuellement, dans beaucoup d'en- droits - évidemment, pas partout - l'éducation des adultes dans l'école, c'est exactement comme si on louait l'école au service des loisirs. Il n'y a pas plus de différence. Ce sont des choses complètement séparées, compartimentées, cela n'a pas de sens. Quel est le lien de gestion entre le secteur des adultes et le secteur des jeunes? Quel est l'intérêt?

Par exemple, si on a un appariteur dans un laboratoire le soir qui n'est pas le même que le jour, quel est l'intérêt de celui du soir de préparer les locaux? Il y a un certain nombre de complications, et c'est ce qu'on a voulu donner ici. C'est évident que les problèmes qu'on a soulevés ne touchaient pas uniquement l'utilisation du matériel et des locaux, cela va beaucoup plus loin. Pour nous, c'est une question de principe, d'unité de gestion, d'unité d'administration, d'unité dans les services offerts. Qu'on ait une personne qui relève du directeur d'école qui s'occupe des adultes le soir ou qui s'occupe des adultes le jour, il y aura une unité dans l'unité administrative.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Cela va, merci. J'ai eu une demande d'intervention dans le même sens que celle du député de Saint-Henri, qui a trait aux décrocheurs. De façon à respecter l'homogénéité du débat, permettez-vous à Mme la députée de Jacques-Cartier de poser sa question? Mme la députée de Jacques-Cartier.

Mme Dougherty: Merci, M. le Président. En ce qui concerne l'âge obligatoire de fréquentation, j'ai de la difficulté à suivre votre argumentation. Il me semble que c'est précisément à cause des problèmes particuliers des jeunes à risque que les commissions scolaires doivent garder la responsabilité de les servir. Oui, c'est complexe. Oui, c'est difficile. Oui, on a besoin d'outils spéciaux qui n'existent pas toujours mais c'est pire de les abandonner. Alors, je me demande pourquoi vous avez insisté sur l'âge de quinze ans.

M. de Guire: On ne veut pas les abandonner, madame. Dans notre mémoire, l'objectif est de rendre la scolarité obligatoire jusqu'à quinze ans mais de mettre en place, en parallèle, des services adéquats, spécialisés, avec des outils et des moyens qui correspondent à ces jeunes qui ne veulent plus venir à l'école. C'est dans ce sens-là qu'il faut bien l'interpréter. Nous disons: Qu'est-ce qui vaut mieux pour l'élève qui ne veut pas venir à l'école: que nous le forcions, par une loi, à venir à l'école ou que nous établissions des moyens particuliers pour aller le chercher, pour l'intéresser davantage à l'école? Et c'est ça notre position. On croit qu'il est préférable de mettre des moyens à la disposition des écoles de façon à récupérer ces élèves-là plutôt que de les garder de force alors qu'ils ne viennent pas.

Mme Dougherty: Si on maintient l'âge de quinze ans comme limite, le maximum de l'obligation, alors la responsabilité de la commission scolaire se termine après quinze ans. Et c'est simplement parce que je crois que, dans la loi, il faut garder la responsabilité. Pas nécessairement dans les cours réguliers, il pourrait y avoir toutes sortes de services dans l'école, hors de l'école, etc. Qui sera responsable de ces enfants après quinze ans?

M. de Guire: En fait, ce qu'on voudrait, c'est faire une distinction entre l'âge obligatoire de fréquentation scolaire et la responsabilité de la commission de servir ces élèves. La commission scolaire, par exemple, a la responsabilité de servir les adultes. On le dit dans la loi. Alors, on pourrait dire qu'il peut y avoir une responsabilité de la commission scolaire d'offrir des services à des élèves qui présentent un certain nombre de problèmes. Mais il nous apparaît différent de donner la responsabilité de bien servir les décrocheurs que d'obliger l'école, la société, à garder à l'école des gens qui ne veulent pas y venir du tout. Ce sont toutes les complications qu'il y a autour de cela. On pense qu'il est préférable d'investir à l'entrée, c'est-à-dire d'avoir la fréquentation obligatoire dès l'âge de cinq ans, plutôt que d'investir inutilement auprès des gens. Je ne pense pas que ce soit inutile, parce que le jour où on n'aura plus l'obligation de fréquenter l'école jusqu'à quinze ans, on va mettre en place d'autres mesures qui vont, à notre point de vue, inciter probablement davantage les élèves à fréquenter les écoles, parce que ce sera une autre façon de voir, une autre façon de procéder.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. J'aborderais très brièvement la question de savoir s'il faut fixer à quinze ans ou à seize ans l'âge de la fréquentation scolaire obligatoire. Les questions posées par la députée de Jacques-Cartier, je les trouve pertinentes. Ce n'est pas parce que l'école éprouve des difficultés à encourager et à garder dans ses murs sa clientèle qu'il faut pour autant suggérer de réduire l'âge d'admission à quinze ans, d'autant plus que la définition de l'étudiant adulte qui est donnée, contrairement à ce qu'affirme le ministre, n'est pas un acte de générosité. Ce n'est pas certain que les adultes auront droit à des services gratuits - comme une générosité à rebours - étant donné également que les services éducatifs complémentaires et particuliers ne sont pas définis dans la loi. Par rapport à l'âge de fréquentation scolaire, j'aurais également beaucoup de réserve et je ne serais pas prête à endosser votre position, et les arguments que vous invoquez me semblaient... On aurait pu avancer des arguments qui auraient été tout à fait à l'inverse, à savoir qu'on peut maintenir les enfants plus longtemps, j'allais dire, sous la tutelle parentale. Même si les enfants peuvent se présenter et avoir des soins médicaux dès l'âge de quatorze ans, on sait, par exemple, qu'ils sont dépendants de leurs parents pour les prêts et bourses, jusqu'à 90 crédits universitaires, jusqu'à l'âge de trente ans. On sait également que, même s'ils ont le droit de vote, cela n'enlève pas toutes leurs responsabilités. C'est pourquoi je pense qu'il va falloir revenir sur cette question. Je maintiendrais que s'il y a un point dans le projet de loi sur lequel le ministre peut être assuré de mon appui, c'est de porter l'âge de la fréquentation scolaire jusqu'à seize ans. Cependant, il est faux de prétendre que c'est par générosité qu'on accorde une définition de l'adulte qui le rende admissible plus jeune, au service d'éducation des adultes car je pense, au contraire, qu'exiger des frais de scolarité vient réduire l'accès à ces services.

Je vais me permettre une question d'une portée un peu plus générale. Si l'on observe la trame du projet de loi, elle est à peu près la suivante: le ministre renforce ses pouvoirs; là où il y avait pouvoir de réglementation du ministre en matière de pédagogie et de finances, il légifère sous prétexte que cela évite les contestations et que c'est plus fort dans la loi que dans les règlements. Je dirais qu'en même temps que c'est plus fort, c'est aussi plus contraignant. On change plus facilement un règlement qu'une loi; on n'a qu'à penser à la Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique. Il crée davantage d'obligations aux commissions scolaires qui sont tenues de demander de plus en plus d'autorisations - une trentaine, prétend la fédération des commissions scolaires. Il y a un renforcement des contrôles et de ce fait, une réduction des marges de manoeuvre des commissions scolaires, y compris des services d'éducation des adultes, puisque rien ne vient fixer en même temps les obligations des commissions scolaires en matière de services éducatifs.

Il réduit également ses obligations parce qu'il n'a plus besoin de consulter et, selon l'interprétation qu'il fait ce matin de la disparition de ce qui était dans la loi 3, c'est-à-dire l'obligation de consulter lorsqu'il adopte de nouveaux règlements, il dit que c'est déjà prévu dans une loi. Mais la loi à laquelle il fait allusion est de portée générale et ne vient pas spécifier les responsabilités précises des ministres, à savoir qui ils doivent consulter. Je ne pense pas qu'on puisse se reporter à cette loi pour justifier la disparition, dans le présent projet de loi, de l'obligation du ministre de consulter.

Par ailleurs, une fois qu'il a comme enlevé aux commissions scolaires de plus en plus de pouvoirs, il leur donne, par le biais de leurs directeurs généraux, la responsabilité de distribuer les règles, directives et contrôles aux écoles; il donne un pouvoir réel aux directeurs

d'école. Tout se passe comme si le ministre, sans le dire, était en train de court-circuiter complètement les commissions scolaires, parce que la marge de manoeuvre de la commission scolaire sera de plus en plus réduite. La loi a pour effet de faire du ministre de l'Éducation le p. -d. g des écoles du Québec qui pourrait, à la limite, être autorisé à intervenir directement dans les écoles. (15 h 45)

Ma question est la suivante: Dans une telle situation, est-ce qu'on a besoin d'un intermédiaire qui s'appelle la commission scolaire? Un solide bureau régional de l'éducation, bien structuré, avec une petite équipe, ne serait-il pas suffisant?

M. de Guire: Je pense, M. le Président, madame, que dans le projet de loi actuel, il y a une répartition des pouvoirs entre le ministre, les commissions scolaires et les écoles. La loi donne l'autorité là où se passe l'action. C'est ce qu'on y voit. Il nous apparaît essentiel que les commissions scolaires continuent d'exister et soient bien maintenues. Il nous apparaît important que la commission scolaire puisse desservir une clientèle régionale ou locale. Il nous apparaît aussi essentiel que le directeur général de la commission, tel que je le précisais ce matin, ait un rôle bien défini dans la loi, pour qu'il soit en relation directe avec chacune des écoles et que dans l'école la loi nous incite au partenariat. Ce partenariat se concrétise dans le conseil d'orientation qui, dans un bon climat, devrait apporter dans une école des bons choix et, par conséquent, à l'autre bout, une qualité de l'éducation.

Il est bien évident que je pourrais répondre plus à fond à votre question. Cependant, je dois ici faire une mise au point qui m'apparaît importante. Nous avons étudié le projet de loi 107 avec nos associations en tenant compte de la situation actuelle, c'est-à-dire à partir de la Loi sur l'instruction publique. Nos membres n'ont pas voulu étudier la loi en parallèle avec la loi 3 ou le projet de loi 40, mais strictement en fonction de la situation actuelle. Pour nous, il est clair que le projet de loi 107 est un progrès par rapport à la situation actuelle. Si chacun joue son rôle tout au long de la structure actuelle, on devrait avoir en fin de compte une augmentation de la qualité de l'éducation.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Oui, M. le Président. En fait, tout ce que je voulais vous faire remarquer, c'est qu'étant donné qu'on exerce de plus en plus de contrôle sur toutes les activités de la commission scolaire, qu'il s'agisse de donner de l'éducation aux adultes, d'affecter, de modifier ou d'effectuer des travaux sur des immeubles, de conclure des ententes avec d'autres établissements, on a l'impression que les commissions scolaires auront de plus en plus comme respon- sabilité exclusive celle de gérer des règles. A-ton besoin d'un tel appareillage pour gérer des règlements, des règles, des directives et exercer un contrôle? C'était là le sens de ma question.

Une question qui vous concerne un peu plus à présent. Je me demandais comment vous allez pouvoir vous sentir à l'aise dans cette situation. Le directeur de l'école, si je peux m'exprimer ainsi, relève du directeur général, mais en même temps un peu beaucoup du conseil d'orientation. Il y a, je dirais, comme une double appartenance. Comment vous sentiriez-vous dans la situation où, par exemple, le directeur de la commission scolaire ne partagerait pas les avis du conseil d'orientation touchant le projet éducatif?

M. de Guire: En fait, la dynamique de la loi - une fois le conseil d'orientation créé -suppose la mise en place de tout un processus de consultation, de participation par l'entremise du directeur d'école en vue de l'établissement d'un projet éducatif que va sanctionner le conseil d'orientation. Par la suite, le directeur d'école devra mettre en place ce projet qu'il aura lui-même mis en oeuvre à l'origine, de toute façon. Il verra à le mettre en place par la suite. Dans tout ce processus, normalement, il ne devrait pas y avoir de difficulté, puisque l'ensemble des discussions ou de ce qu'il peut y avoir au niveau du conseil d'orientation, c'est, encore une fois, selon les politiques de la commission, selon les politiques aussi qui pourraient découler ou de lois ou de règlements venant également du ministère. Il pourra arriver que des gens veuillent décider ou discuter de choses qui ne relèvent pas nommément du conseil d'orientation. À ce moment-là, le rôle du directeur d'école est de bien éclairer les gens du conseil d'orientation et de leur dire que cela ne relève pas de nous, que ce n'est pas de notre juridiction, etc. Comment peut-il se sentir mal à l'aise dans cela? Si toute la dynamique préalable est bien faite, je ne vois pas ce qui pourrait rendre la situation difficile par la suite.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le président. Madame, une dernière intervention.

Mme Blackburn: Oui, une dernière intervention. Somme toute, en dépit de la Loi sur l'instruction publique dont, on le sait, bon nombre d'articles sont dépassés - d'autres ne sont plus mis en application - qui est désuète sous plusieurs rapports, le système scolaire s'est relativement bien adapté. Compte tenu de la qualité des services offerts dans nos écoles dans tout le Québec, même s'il y a des hauts et des bas ou que cela varie d'une école à l'autre, on ne peut pas imputer à la Loi sur l'instruction publique les problèmes ou les difficultés qui se posent actuellement en matière de qualité de l'éducation ou d'accessibilité à l'éducation. Compte tenu du problème le plus criant sur lequel de nombreux intervenants ont prié le

gouvernement d'agir, c'est-à-dire l'établissement de commissions scolaires linguistiques, quand on sait que le projet de loi qui est sur la table ne règle en rien cette question des structures scolaires, y a-t-il, selon vous, urgence nationale de se pencher sur une réforme de la Loi sur l'instruction publique, alors que somme toute, ça va, on a réussi à s'adapter, on s'est donné un certain nombre de règles, de règlements, de procédures qui nous ont permis d'atteindre le niveau de performance qu'on a actuellement? Du moment qu'on ne touche pas à ce qui fait problème au Québec, c'est-à-dire les structures scolaires, est-ce que pour vous il y avait urgence de réviser la Loi sur l'instruction publique au moment où l'on se parle? Est-ce que la loi telle que proposée va changer considérablement ou de façon notable les rapports entre les différents intervenants des commissions scolaires? Est-ce que cela aura des effets réels sur la qualité de la formation?

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. de

Guire.

M. de Guire: M. le Président, c'est vrai qu'il y a des problèmes, c'est vrai qu'il y a des difficultés qui nous viennent du fait que les commissions scolaires, les écoles manquent de moyens, de ressources. Il est bien évident qu'il faudrait que le Conseil du trésor puisse bien comprendre qu'en éducation il y a des manques. Est-ce qu'il était nécessaire de faire une loi? Je pense que, depuis plusieurs années, il y a un débat dans le milieu de l'éducation et les gens demandent des modifications. Je ne veux pas parler des gens qui sont peut-être quotidiennement comme nous, directeurs d'école ou directeurs généraux de commissions scolaires... Sans parler nécessairement de nous, prenons les parents qui veulent jouer un rôle plus grand dans l'école. On veut instaurer le partenariat au niveau de l'école. Les élèves veulent jouer un rôle, les enseignants... Je pense aux personnes handicapées... Quand je pense à toutes ces personnes, on s'aperçoit qu'il y a eu une demande de beaucoup de groupes pour qu'il y ait des améliorations. Y a-t-il urgence nationale? Moi, je pense qu'il y a autant urgence nationale de modifier la Loi sur l'instruction publique qu'il y en a une à ce que le Conseil du trésor investisse de l'argent dans notre système, ou vice versa. Il y a des choses à corriger.

L'objectif que nous visons... Évidemment, vous avez remarqué que notre intervention n'a pas touché chacun des articles du projet de loi, parce qu'on pense qu'il y a d'autres partenaires en éducation qui vont toucher, de façon plus précise, des articles qui les concernent. Nous, on pense que, selon l'objectif que nous avions d'améliorer la qualité de l'éducation, il y a des choses à corriger. La création du conseil d'orientation dans l'école nous paraît une chose positive, une chose qui était souhaitée. Pour répon- dre à votre question, à savoir si c'était une urgence nationale, je suis bien obligé de répondre: Non, ce n'est pas une urgence nationale. Cependant, je pense que, dans les milieux concernés, c'est quelque chose qui est souhaité.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. de Guire. Le temps dévolu au parti de l'Opposition est terminé. Mme la députée de Chicoutimi, avez-vous quelque chose à ajouter pour conclure?

Mme Blackburn: Je voudrais remercier M. de Guire et ses collègues d'avoir participé à cette commission et d'être venus nous présenter leur point de vue sur le rôle qu'ils veulent et souhaitent jouer au sein du système de l'éducation au Québec.

Je partage leur avis, à savoir qu'il faut le plus possible rapprocher le pouvoir de ces lieux d'exercice. En même temps que je dis qu'il est souhaitable de donner le plus de pouvoirs possible aux directeurs d'école, je pense que le même voeu, les mêmes pouvoirs devraient être décentralisés vers les commissions scolaires. Celles-ci ne peuvent pas déléguer un pouvoir qu'elles n'ont pas et moins elles ont de pouvoirs, moins elles ont la capacité d'en déléguer. En ce sens, les voeux et les modifications que vous proposez, qui vont dans le sens d'un renforcement des pouvoirs des directeurs d'écoles; on peut les endosser dans la mesure où on a la pareille pour les autres niveaux d'intervention et les autres niveaux de pouvoir, plus particulièrement en ce qui concerne, je le rappelle, le rôle et les pouvoirs du directeur de la commission scolaire comme de la commission scolaire elle-même. Je vous remercie infiniment.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, Mme la députée de Chicoutimi. Pour le mot de la fin, j'inviterais le ministre de l'Éducation. M. le ministre.

M. Ryan: M. le Président, je veux remercier la Fédération québécoise des directeurs et directrices d'école par son excellente contribution à notre tâche commune. Je pense que l'échange de vues que nous avons eu avec M. de Guire et ses collègues nous a permis de bien camper la place de l'école dans le réaménagement des structures scolaires que nous envisageons et, dans l'école, le rôle de première importance du directeur ou de la directrice d'école. Il y a encore des ajustements qu'il reste à faire dans les structures que nous prévoyons; il y a des points qu'il va falloir continuer de travailler au cours des semaines à venir. Je pense que, sur la ligne de fond, les points de vue qui nous ont été présentés par la fédération vont dans le même sens général que les orientations définies dans le projet de loi. Par conséquent, je m'en réjouis et j'espère que nous pourrons, avec la collaboration

des directeurs et des directrices d'école, apporter au projet de loi les précisions qui permettront de le rendre encore plus fonctionnel, mieux équilibré et plus efficace. Merci beaucoup.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, merci, M. le ministre. M. de Guire et les personnes qui vous accompagnent, les membres de la commission vous remercient de votre apport à leurs travaux.

Nous accueillons immédiatement le groupe suivant, l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires. Nous allons suspendre pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 15 h 59)

(Reprisée 16 h 1)

Le Président (M. Parent, Sauvé): La commission permanente de l'éducation poursuit ses travaux et accueille, comme deuxième groupe aujourd'hui, l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires, dans le cadre du mandat qui lui a été confié par l'Assemblée nationale, à savoir de poursuivre des consultations publiques en regard des projets de loi 106 et 107.

L'Association des directeurs généraux des commissions scolaires est représentée par M. Jacquelin Bergeron. M. Bergeron, nous vous souhaitons la bienvenue et nous vous remercions d'avoir répondu à l'invitation de la commission. Je vous informe que la commission a prévu de vous entendre durant une heure trente. Il est 16 heures et, jusqu'à 17 h 30, la période vous appartient. Les membres de la commission ont déjà reçu votre mémoire et ils en ont pris connaissance. Libre à vous de choisir de quelle façon vous voulez le présenter, soit globalement ou en faire un résumé, vous en êtes maître. Pour que nos travaux se déroulent d'une façon harmonieuse et enrichissante pour tout le monde, nous vous suggérons de procéder comme suit. Environ un tiers de la période sera réservé à la présentation du mémoire et, par la suite, chaque formation politique aura une période égale pour discuter avec vous, de façon à mieux se renseigner sur vos préoccupations. Cela permettra également au parti ministériel de faire connaître ses raisons de présenter son projet de loi de la façon dont il l'a été.

Avant de vous donner la parole, je veux souligner la présence dans la salle d'un excollègue de Roberval, ce qui prouve que l'ennui n'a pas d'âge, il nous fait plaisir de vous accueillir, M. Gauthier, et de vous voir parmi nous.

M. le président, si vous voulez nous présenter les gens qui vous accompagnent et enchaîner immédiatement avec la présentation de votre mémoire.

Association des directeurs généraux des commissions scolaires

M. Bergeron (Jacquelin): À ma gauche, M. Marcel Théorêt, vice-président de l'association et directeur général de la commission scolaire des Manoirs. À mon extrême gauche, M. André Perron, directeur général de la commission scolaire régionale Louis-Hémon, jusqu'au 30 juin, et trésorier de notre association et, à ma droite, M. Normand Lapointe, secrétaire de notre association et directeur général de la commission scolaire du Goéland. Votre ex-collègue, M. Gauthier, est l'un de nos honorables membres depuis quelque temps.

Je voudrais tout d'abord présenter notre association qui regroupe les directeurs généraux, directrices générales, directeurs généraux adjoints et directrices générales adjointes à temps plein des commissions scolaires du Québec. Nous regroupons dans notre association 238 membres sur une possibilité de 245 et nous représentons les directeurs généraux francophones, anglophones, catholiques et protestants.

Nous allons tenir quelques brefs propos sur le projet de loi 106, mais la majeure partie de notre intervention portera sur le projet de loi 107.

Quant au projet de loi 106, comme le souligne notre mémoire, nous accueillons très favorablement ce projet de loi. Or, il y a six remarques particulières que nous voudrions faire aujourd'hui. Quant au nombre de circonscriptions, nous souhaitons que ce soit basé sur le nombre d'électeurs et non sur le nombre d'élèves. Concernant la confection de la liste électorale, notre association pense qu'une seule liste pour tous les niveaux de gouvernement, avec un organisme responsable de cette confection, au Québec serait souhaitable.

Quant à la possibilité pour des parents d'élèves scolarisés de voter dans une autre commission scolaire nous pensons que ce n'est pas là une idée à retenir, pour trois raisons majeures. Tout d'abord, cela donne deux droits de vote et deux possibilités de se faire élire à un même citoyen. Nous pensons que la confection de la liste électorale serait complexe dans ce cas-là et, également, que cela apporterait à ces gens un mandat fragile qui serait lié à la scolarisation de leur enfant.

La quatrième remarque concerne les déclarations de mise en candidature. Après avoir vécu novembre dernier, nous vous proposons de restreindre cette période de mise en candidature à une journée ou à une autre formule, peut-être du type gouvernement municipal, et, surtout, nous pensons que le législateur devrait laisser le loisir d'allonger cette période aux commissions scolaires qui le désirent.

Contrairement à l'article 131 qui prévoit qu'ils seront faits le lendemain, nous privilégions que le rencensement et le recomptage des votes soient faits le soir même par le président

d'élection. À l'article 135, nous vous suggérons qu'en cas d'égalité des voix le président détermine le vainqueur au lieu de référer cela à la Cour provinciale.

En ce qui a trait au projet de loi 107, nous voulons d'abord vous rappeler que l'ADIGECS a toujours été très présente dans les débats de restructuration scolaire. Déjà en octobre 1982, nous avions fait connaître notre position sur le livre blanc. En novembre 1983, nous étions présents à la commission permanente de l'éducation avec un mémoire sur le projet de loi 40 et nous étions présents également en novembre 1984.

Nous vous affirmons, d'entrée de jeu, que nous souhaitons vivement qu'une réforme satisfaisante pour nos élèves, jeunes et adultes, et pour les principaux groupes d'intervenants du réseau de l'éducation prenne place dans les meilleurs délais. Dans ce projet de réforme, l'ADIGECS estime qu'un certain nombre d'éléments proposés ont atteint un niveau de consensus suffisant pour être adoptés. Nous tenons pour exemple un meilleur arrimage des attentes et de la collaboration des parents, une meilleure reconnaissance du rôle des enseignants et un espace pour créer un projet éducatif d'école qui réponde aux attentes de chacun des milieux.

D'autres éléments ont été profondément débattus. C'est le cas des commissions scolaires linguistiques que le gouvernement entend soumettre au jugement des tribunaux. D'autres, enfin, n'ont pas atteint le même niveau de maturité chez le ministre de l'Éducation et chez les partenaires du réseau de l'éducation. Nous pensons ici à une meilleure reconnaissance de la responsabilité des citoyens, dans chacun des milieux, à l'égard de l'éducation de leurs jeunes. Nous pensons aussi à une meilleure reconnaissance des institutions locales que sont les commissions scolaires et de leur rôle politique prééminent pour assurer les services éducatifs sur un territoire donné.

En page 4, nous vous présentons les fondements de notre argumentation. Si, en quelques phrases, on trace l'histoire du système d'éducation, on trouve inévitablement à l'origine des parents qui désirent le meilleur avenir possible pour leurs enfants. C'est au moment où les enfants grandissants éprouvent le besoin d'élargir le cercle de leurs connaissances que les parents se regroupent pour se donner une école. Ils donnent alors à des maîtres en qui ils ont confiance la charge de les aider à mener à bien cette difficile entreprise de préparer leurs enfants pour la vie adulte. Les commissions scolaires émergent de ce désir des citoyens d'une communauté de conduire leur jeunesse vers un âge adulte responsable. Toute éducation véritable doit conduire les jeunes à l'exercice responsable de la liberté.

L'omniprésence de l'État dans le domaine de l'éducation est venue beaucoup plus tard. C'était une époque de croissance rapide et, à la demande des citoyens, le rôle de l'État s'est amplifié et a envahi tous les champs de l'activité humaine, que ce soit celui de la santé, des services sociaux ou de l'économie. L'éducation a été emportée dans ce courant. L'État, selon nous, a maintenant accompli l'essentiel des tâches qu'on attendait de lui. La structuration des services et leur démocratisation sont réalisées.

Aujourd'hui, les citoyens veulent exercer, par leurs institutions locales, une influence plus directe et cherchent à se réapproprier les responsabilités qui leur appartiennent. Cette motivation représente une valeur de changement considérable. Il s'agit, selon notre compréhension, du début d'un temps de développement nouveau. L'État moderne dans le courant néolibéraliste comprend mieux aussi l'importance d'assurer aux citoyens l'exercice de leurs responsabilités et de respecter les formes et les orientations qu'ils veulent se donner. Le rôle de l'État, en éducation comme ailleurs, consiste maintenant davantage à stimuler la réflexion sur les grands enjeux, à supporter les communautés locales et à animer les forces vives des citoyens plutôt qu'à décider et à contrôler.

Voilà une approche axée sur la reconnaissance de la capacité et de la compétence des milieux à se donner des orientations et des moyens. Cette approche nous paraît le meilleur ferment pour assurer l'avenir de l'éducation. L'ADIGECS, pour sa part, croit que le rôle de l'État en éducation doit être revu et elle se déclare favorable à une approche qui stimule la créativité et valorise une prise en charge par les citoyens d'un milieu du projet qui les anime.

En page 6, nous vous parlons de la responsabilisation des écoles qui nous apparaît une chose souhaitable. Pour nous, les avantages de ce nouveau dynamisme sont nombreux. Les communautés-écoles peuvent s'interroger sur leur mission, s'impliquer dans la recherche de solutions, se sentir responsables de leur destinée. Selon nous, à ce moment-là, les citoyens se réapproprient leurs responsabilités.

Notre position, notre thèse s'appuie, entre autres, sur un avis du Conseil supérieur de l'éducation qui a d'ailleurs consacré entièrement son propos au rôle primordial de l'établissement scolaire dans l'atteinte de la réussite en éducation. Le Conseil supérieur de l'éducation nous déclare que, sans une prise en charge plus marquée par les principaux acteurs, enseignants et directions, on ne saurait rêver de réussite éducative. Comme l'affirmait le mémoire, nous partageons pleinement cet avis, comme association.

Un élément majeur, un principe auquel nous croyons beaucoup, c'est que le cadre légal que nous souhaitons doit décrire les champs de responsabilité et laisser à chaque milieu le soin de se donner les moyens qu'il privilégie pour les assumer.

À la page 8, nous vous parlons quelque peu de la question de l'intégration des ordres d'en-

seignement primaire et secondaire des commissions scolaires pour vous dire que l'on pense, comme association, que cette intégration est souhaitable. Nous souhaitons également que le présent projet de loi soit explicite sur cette volonté, sur cette question. Nous suggérons au législateur que la règle politique actuelle d'unanimité soit remplacée par une règle de majorité pour favoriser la création de commissions scolaires intégrées sur un territoire donné.

Nous déplorons qu'une certaine évolution tarde à prendre forme. Nous trouvons que !e projet de loi propose un modèle organisationnel qui fait du gouvernement et du ministre de l'Éducation les pivots du système scolaire en accordant, à l'un ou à l'autre, des pouvoirs généraux importants et un pouvoir de réglementation presque illimité.

À la page 9, nous avons voulu vous le démontrer par les différents pouvoirs que le gouvernement et le ministre se gardent. Le couronnement de tous ces pouvoirs du gouvernement et du ministre, c'est le pouvoir d'enquête et de mise en tutelle qu'on veut élargir, avec ce projet de loi, à tout motif qu'on peut imaginer. Nous nous opposons donc fortement à cette accumulation des pouvoirs du gouvernement et du ministre. Nous jugeons impertinent que le ministre prenne occasion du projet de loi pour augmenter ses pouvoirs réglementaires et, par là, son emprise sur le système scolaire.

L'ADIGECS est fermement convaincue qu'il y a des avantages certains pour le bien-être du système scolaire québécois, à revoir le partage des pouvoirs entre le gouvernement et le ministère de l'Éducation, d'une part, et les commissions scolaires, d'autre part. La remise aux citoyens et aux institutions du milieu des responsabilités qui leur reviennent, le respect des partenaires et l'instauration d'un climat de confiance sont les axes majeurs à prendre en considération pour faire cette révision. On doit réhabiliter la foi dans la créativité de 70 000 enseignants, professionnels scolaires et cadres, et de parents de plus d'un million d'élèves et mettre un frein à cette tendance à édicter et à normaliser, qui a prévalu trop longtemps.

Concernant la réglementation, nous nous opposons à ce que le projet de loi propose d'augmenter, de façon inconsidérée, le nombre de sujets sur lesquels les commissions scolaires devraient faire des règlements. Au haut de la page 11, nous vous énumérons une série d'articles de loi qui nous donneraient cette obligation. Les directeurs généraux s'opposent donc à cette tendance à vouloir multiplier les règlements, que ce soit ceux du gouvernement et du ministre ou des commissions scolaires.

Nous réitérons, pour l'essentiel, les deux recommandations que nous avons faites, en novembre 1983 et en novembre 1984, devant la commission permanente de l'éducation. Premièrement, nous demandons que le gouvernement s'engage résolument, avec les partenaires du milieu dont nous sommes, à la création d'un modèle de fonctionnement axé sur la confiance et la reconnaissance de la capacité des milieux de se gérer et de s'orienter. Deuxièmement, nous demandons que les commissions scolaires, en collaboration avec tous les intervenants impliqués dans leur milieu respectif, poursuivent le développement du modèle de décentralisation qui convient à leur milieu.

Concernant les différents comités de consultation et de participation, l'orientation de l'ADIGECS est que ces mécanismes de participation devraient être établis en collaboration avec tous les agents d'un milieu donné, dans un processus de détermination d'un modèle qui convient à nos besoins plutôt que par l'imposition d'un modèle unique au Québec.

Quant à la multiplication des comités obligatoires, le projet de loi propose d'institutionnaliser divers comités pour toutes les commissions scolaires du Québec, de les doter de budgets particuliers et de leur donner le pouvoir d'ester ou d'intervenir en justice. On vous donne une série d'exemples de ces comités.

Notre association s'oppose à ce que la loi édicté et normalise les modalités de consultation et de travail entre partenaires d'un milieu. Il suffit d'emblée que la loi indique que les commissions scolaires ont la responsabilité de s'assurer de la participation de leurs partenaires aux décisions qui les affectent. Ce sont les commissions scolaires qui sont à même de développer chez les partenaires de leur milieu respectif le consensus social nécessaire à la réussite. Pour ce faire, il n'y a pas qu'un modèle, qu'une façon de faire. Le succès de l'entreprise est lié à l'exercice de la volonté des personnes dans un milieu donné et non à un texte de loi qui, malgré sa générosité initiale, devient vite pour les acteurs un corset inutile et embarrassant. (16 h 15)

Quant au pouvoir d'intervenir en justice, le projet de loi voudrait reconnaître à plusieurs comités ce pouvoir. Cette proposition du projet nous apparaît proprement inacceptable. L'éducation des jeunes au Québec requiert un environnement serein et ouvert au dialogue. On ne peut imaginer que des partenaires en éducation se menacent de recourir aux tribunaux ou y recourent dans des situations plus difficiles. Les séquelles éventuelles de telles démarches sont disproportionnées par rapport aux avantages qu'on pourrait en retirer. La poursuite commune des objectifs d'éducation doit conduire les partenaires du monde scolaire à utiliser les voies du dialogue. Nous n'acceptons pas qu'on ouvre la porte à des recours abusifs aux tribunaux et ce, aux frais des commissions scolaires. Quant au budget particulier des comités, nous estimons que cette modalité devrait être du ressort des commissions scolaires et que la proposition du projet de loi à cet effet est malvenue.

Concernant divers éléments du projet, voici

certains commentaires que nous voudrions apporter concernant, d'abord, l'élève. Nous sommes à la page 15 de notre mémoire. Nous sommes globalement d'accord avec le chapitre que le projet de loi consacre à l'élève. La reconnaissance de son droit de choisir l'enseignement religieux, catholique ou protestant, ou l'enseignement moral, de même que la possibilité de choisir l'école qui répond à ses préférences nous apparaissent des mesures propices dans un contexte moderne qui valorise l'expression des attentes individuelles. Nous sommes aussi d'avis qu'introduire des notions relatives à l'éducation des adultes constitue un pas en avant et une reconnaissance des efforts que les commissions scolaires consacrent à cet égard.

Concernant le volet sur l'enseignant, notre association est heureuse de retrouver un chapitre qui lui est consacré. Nous sommes d'avis que la qualité des services éducatifs dépend essentiellement des enseignants qui les prodiguent. Il n'est que normal, dans une refonte de la Loi sur l'instruction publique, qu'on y consacre cette reconnaissance. Nous souhaitons cependant que l'affirmation des droits et devoirs des enseignants soit faite dans un contexte qui permette à la commission scolaire d'exercer les responsabilités qui lui sont définies, nommément à l'article 211 sur l'implantation de nouvelles méthodes pédagogiques et le choix des manuels scolaires, de même qu'à l'article 213 sur les modalités d'évaluation des apprentissages; une commission scolaire est, de par sa mission, responsable de la pédagogie.

En rapport avec l'école, nous manifestons notre accord avec le libellé et nous sommes heureux que le projet de loi dote l'école de mécanismes propres à lui assurer une autonomie dans la conception de la qualité de ses services. Toutefois, en regard de la mission de l'école, nous avons quelques remarques. Selon l'article 35, l'école est destinée - nous sommes à la page 17 - à assurer la formation de l'élève autre que l'adulte. Nous sommes d'avis que la restriction à l'égard des adultes devrait être éliminée puisqu'elle est inapplicable, par exemple, à des écoles professionnelles où l'on accueille des jeunes et des adultes.

Quant au conseil d'orientation, nous souhaitons qu'il exerce son rôle de leadership sur les orientations, mais qu'il l'exerce dans le cadre des politiques et des règlements de la commission scolaire. Les articles 36, 44 et 45 devraient, à notre avis, être modifiés en ce sens pour bien marquer le lien nécessaire entre l'école et la commission scolaire. Nous demandons également au législateur d'insérer dans le projet de loi la possibilité d'instituer plus d'un conseil d'orientation par école.

Quant au plan triennal pour la vocation des écoles, nous vous signalons qu'on ne doit pas contraindre les administrations scolaires à prendre des décisions dans un cadre de plan triennal. Si on veut gérer sagement et sainement les actifs publics, on conçoit mal qu'une décision de rationalisation ne puisse se prendre pour le seul motif qu'elle ne se situe pas dans un plan triennal. La loi devrait plus simplement indiquer qu'il est de la responsabilité des commissions scolaires de consulter les personnes et groupes intéressés avant de prendre des décisions à cet égard.

En ce qui a trait à la direction d'école, en page 19, nous souhaitons tout d'abord que soit prévu dans la loi le maintien de la fonction de responsable d'école qui pourrait être rattachée directement au directeur générai là où la situation le justifie. Pour qu'il soit possible au directeur d'école d'exercer pleinement son rôle, nous souhaitons qu'il soit celui qui préside aux orientations de l'école comme le veut la loi actuelle. Dans la loi actuelle, on dit qu'il procède aux orientations de l'école. Il ne saurait être un simple exécutant et il ne pourrait, non plus, exercer ses fonctions sous l'autorité de deux mandants, soit le directeur général et le conseil d'orientation. L'exercice de sa tâche doit se réaliser sous l'autorité du directeur d'école.

En ce qui a trait au comité d'école, nous réitérons qu'à notre avis les mécanismes de participation devraient être établis en collaboration avec tous les agents d'un milieu donné, dans un processus de détermination d'un modèle de décentralisation qui convient à leurs besoins plutôt que par l'imposition d'un modèle unique et, dans ce cadre, le projet de loi aurait avantage à ne pas faire état du comité d'école.

En ce qui regarde la commission scolaire, l'ADIGECS manifeste toujours son accord avec la proposition de créer des commissions scolaires linguistiques. Cependant, la lecture parallèle du chapitre sur les commissions scolaires et du chapitre traitant du gouvernement et du ministre de l'Éducation nous montre qu'il y a encore beaucoup de chemin à parcourir avant d'en arriver à un partage valable des responsabilités entre l'État, le ministère de l'Éducation et la commission scolaire. Nous sommes à une étape de maturité sociale telle qu'on doit rendre aux commissions scolaires les pouvoirs nécessaires à l'exercice de leur pleine compétence. Dans une logique de réussite, on ne doit pas continuer à uniformiser et à contrôler. On doit favoriser la prise de responsabilités des citoyens dans les institutions qui leur appartiennent. Un travail conjoint entre les commissions scolaires et le ministère de l'Éducation est à faire pour clarifier cet enjeu essentiel au développement de l'éducation. Ceci étant, nous vous soumettons certaines recommandations spécifiques au chapitre des commissions scolaires.

Quant à la composition du conseil, par le passé, notre association a recommandé que le conseil soit formé de commissaires élus au suffrage universel et, pour une autre partie, des parents désignés par le comité de parents. À cet égard, le projet de loi nous satisfait. Toutefois, nous continuons de soutenir que seuls les

commissaires élus au suffrage universel doivent avoir le droit de vote.

Concernant le comité exécutif, le projet de loi propose de rendre optionnelle la formation du comité exécutif et, dans le cas de son existence, l'oblige à faire entériner ses décisions par le conseil des commissaires. L'ADIGECS est d'accord avec la proposition de rendre optionnelle la formation d'un comité exécutif. Cependant, dans la mesure où il est créé et qu'il se voit déléguer par le conseil des commissaires des fonctions et des pouvoirs, les décisions devraient avoir un caractère exécutoire. Si te! n'était pas le cas, on ne voit pas à quoi servirait de prendre des décisions temporaires.

Quant au directeur général, le projet de loi indique que le directeur général assure l'administration courante de la commission scolaire. Nous sommes très heureux de cette clarification qui, en regard des pouvoirs et responsabilités du directeur général, démêle l'écheveau pratiquement inextricable de la loi actuelle. Il y avait là un problème auquel il fallait s'attaquer. Il était de première importance que nos membres aient un cadre juridique clair qui permette l'exercice normal des fonctions et responsabilités quotidiennes.

En ce qui a trait à la disposition sur l'effectif-cadre, nous estimons que la commission scolaire doit déterminer elle-même le nombre et le type d'effectif-cadre dont elle doit se doter pour assumer ses responsabilités. Encore une fois, qu'il nous soit permis de réitérer que nous considérons les modalités universelles comme inappropriées dans un contexte de responsabilisation. Nous souhaitons que les responsabilités de la commission scolaire soient indiquées dans la loi, mais que la détermination des modalités soit laissée à chacun des milieux.

Nous sommes à la page 23, le gouvernement et le ministre. Ce dernier chapitre est celui qui suscite chez nous la réaction de déception la plus complète. À notre avis, le projet ne tient pas compte de la maturité sociale actuelle qui exige une remise aux citoyens des responsabilités qui sont les leurs et une meilleure emprise des milieux sur les enjeux de l'éducation. Si on veut donner une assise au développement de services de qualité, il faut que ceux qui oeuvrent en éducation, parents et enseignants au premier titre, sachent qu'il leur est possible de concevoir des façons différentes de faire et qu'ils se sentent invités à exercer leur créativité et leur sens critique. Il faut libérer l'éducation du poids extravagant et étouffant des normes et des règlements de tous ordres qui l'afflige.

Dans une perspective de développement de la société, le ministère de l'Éducation a tout intérêt, à notre avis, à définir ses rôles et fonctions en termes de proposer des idées, de stimuler la réflexion des milieux, de réaliser des bilans et des diagnostics, de supporter les communautés locales. Un système scolaire ne saurait se développer sous le mode d'édiction de directives et de contrôles administratifs. Le chapitre mériterait donc d'être révisé en profondeur. Nous demandons, en conséquence, que le texte de la nouvelle loi reflète une intention ferme d'avancer dans ce sens.

En page 24, nous voulons vous signaler que certains coûts supplémentaires seraient engendrés par le présent projet de loi. Au passage, nous notons les propositions suivantes: la gratuité des services aux adultes, les budgets des comités de participation, le plan triennal de répartition et de destination des immeubles, le droit d'ester et d'intervenir en justice aux frais de la commission scolaire, la généralisation de la procédure d'adoption de règlements, le transport et la surveillance à l'heure du dîner.

Quant au financement des commissions scolaires, en page 25, dernier paragraphe, comme association, nous vous disons qu'il faut faire une plus large place à la capacité des milieux de prendre en charge leur destinée dans un cadre qui leur convient. Dans cette perspective, nous demandons une remise aux commissions scolaires d'un champ de taxation significatif et l'élimination des plafonds et des référendums qui privent les citoyens de leur droit de se donner des services à leur mesure.

En conclusion, M. le Président, le rôle de l'État en éducation doit être revu en profondeur. Le projet de loi n'a pas pris fait et acte de la maturité sociale qui exige un changement des mentalités de la part de l'État. L'ADIGECS est d'avis que le temps est venu de concevoir des rôles nouveaux pour le ministère de l'Éducation. Celui-ci doit stimuler une réflexion prospective, réaliser des bilans et des diagnostics et supporter les communautés locales dans leur cheminement.

Pour que se développent des services de qualité en éducation, il faut adopter une approche de confiance dans la compétence des partenaires de chaque milieu. Les citoyens doivent retrouver des commissions scolaires capables d'exercer l'entièreté de leur champ de compétence et de responsabilités.

Nous réitérons notre souhait que soit adopté un projet de loi sur l'instruction publique et que ce projet ait la sagesse de ne pas imposer aux communautés locales une seule et bonne façon de faire. Merci.

Le Président (M. Parent, Sauvé): C'est moi qui vous remercie, M. Bergeron. Je reconnais comme premier intervenant le député d'Argenteuil et ministre de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la Science. M. le ministre.

M. Ryan: M. le Président, je salue avec plaisir la délégation de l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires. Les membres de cette association sont des interlocuteurs continus du ministère de l'Éducation. Nous apprécions vivement leur apport au travail de l'éducation. Nous écoutons leurs vues avec intérêt parce qu'elles procèdent d'une expérience

quotidienne de la mise en oeuvre de la Loi sur l'instruction publique.

J'ai remarqué que, dans l'ensemble, les observations favorables au projet de loi sont plus nombreuses et généralement plus importantes que les observations accompagnées de réserves ou d'objections. Je m'en félicite et j'en remercie l'association. Je me dispenserai de commenter les points sur lesquels l'association exprime son accord avec le gouvernement ou la tendance générale du projet de loi, de l'un ou l'autre des deux projets de loi. Je pense que ce serait faire de la répétition qui ne ferait pas avancer le débat. Par conséquent, je vais en venir assez vite à certains sujets de désaccord réel ou apparent.

À un moment donné, j'ai cru lire dans le mémoire que vous regrettiez qu'on ne traite pas de l'intégration des enseignements primaire et secondaire. Je pense que ce n'est pas vrai. Nous avons une clause très importante dans le projet de loi qui prévoit que... Là où une commission scolaire voudrait procéder à l'intégration de ses enseignements primaire et secondaire et qu'elle se heurterait à une opposition invincible de la part de commissions scolaires qui forment avec elle une commission scolaire régionale, nous manquions d'une clé dans la loi existante pour procéder au partage des actifs et des passifs qui doit nécessairement accompagner un mouvement d'intégration. Nous avons mis la clé dans le projet de loi 107. Il n'y a pas un chapitre, il y a trois lignes. Mais ces trois lignes sont peut-être plus importantes que 25 autres pages. À l'avenir, si le projet de loi est adopté, quand il y aura une intégration qui bloquera quelque part pour des raisons artificielles, il y aura une possibilité de trancher le différend.

Vous dites dans votre mémoire que cela devrait être à la majorité des commissions scolaires. On a pensé à cela. On aimerait bien que cela puisse se faire comme cela. Mais trois commissions scolaires contre deux pour décider de l'intégration de cinq, c'est un problème. Cela ne se pose pas comme ça dans la pratique. Parfois, il peut arriver que ce soit trois commissions scolaires moins importantes que les deux autres qui sont réfractaires ou qui ont une position contraire. Après des examens répétés, nous avons dû conclure que ce n'était pas la façon la plus pratique et même la plus juste de procéder.

Il nous reste à continuer d'insister pour que le processus émane des commissions scolaires elles-mêmes, comme nous avons voulu que ce soit jusqu'à maintenant, et qu'en cas d'impasse invincible il y ait une clé quelque part qui permette de régler le problème. C'est entendu, si c'est la politique du gouvernement de favoriser l'intégration, il va falloir qu'elle se fasse. Si le gouvernement est là seulement pour faire des exhortations aux gens, il y a une partie de son rôle qui est castrée, qui est amputée, ce n'est pas normal. Je pense qu'on résout ce point de manière satisfaisante dans le projet de loi. Je pense que c'est l'article 105.

Vous avez exprimé une inquiétude à propos des comités qui seront autorisés à ester en justice. Je regarde cela avec intérêt. Mais, tantôt, un de nos conseillers portait à mon attention un jugement rendu par la Cour supérieure en 1980 dans lequel il est dit en toutes lettres qu'une fois que le législateur a constitué ses comités, même s'il n'a pas écrit en toutes lettres qu'ils vont être autorisés à ester en justice, ils peuvent le faire à la rigueur. Il y a un jugement très clair ici. Je pense qu'avant de monter aux barricades, en tout cas, ou de penser qu'il y a un gros gros problème là-dedans, il va falloir regarder tout le contexte. Peut-être qu'on va s'apercevoir que c'est normal d'avoir des appréhensions à ce stade-ci. Mais si le tribunal nous dit clairement: Voici ce qui en est... Je pourrai vous donner la référence tantôt. C'est un jugement qui a été rendu en 1980 dans un litige opposant le comité de parents de la régionale Jean-Talon, le syndicat des enseignants Chauveau-Charlesbourg, et la commission scolaire régionale Jean-Talon. Ce sont des points sur lesquels on pourra s'entendre, parce que, si on s'entend de part et d'autre sur la signification juridique de tel organisme ou de tel statut... On peut même discuter et vous pourrez peut-être nous dire: Dans ces conditions, cela ne serait peut-être pas nécessaire que vous le mettiez si cela y est par voie d'implication. On est prêt à discuter de cela, ce n'est pas une question de vie ou de mort. Ce n'est pas ce que j'appellerais dans notre projet un "casus belli". (16 h 30)

Vous parlez de la multiplication des comités de participation et de consultation. Au niveau de l'école, on en met seulement un obligatoire, c'est le conseil d'orientation. Si vous vous rappelez de ce qu'il y avait dans la loi 3 et dans le projet de loi 40, je pense qu'il y a un énorme allégement. Je ne veux pas porter de jugement d'amélioration, mais il y a un énorme allégement. Là où les parents voudront se doter d'un comité d'école en plus, on écoute les points de vue actuellement, on va voir ce que cela donnera à la fin. Notre position de départ, c'est que si les parents tiennent à se doter d'un comité d'école, ce serait peut-être une bonne chose qu'ils puissent l'avoir. Encore là, on va écouter les points de vue mais, à ce niveau, je pense qu'il y a un allégement considérable.

Au niveau de la commission scolaire, on en met davantage. On va les examiner l'un après l'autre, mais un comité sur les élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage me paraît très difficile à refuser. Je pense qu'il faut qu'il y ait une présence auprès de la commission scolaire pour ces problèmes. Les directeurs d'école nous disaient ce matin qu'ils voudraient qu'il y ait une représentation des directions d'école là-dessus et je trouve que c'est très judicieux. Mais il faudrait qu'on me fasse la preuve que cela ne

sera pas une bonne chose d'avoir ça. A priori, en tout cas, notre position est très fermement favorable à ce comité. Il y a un comité pour le transport. Je pense qu'il est bien difficile de concevoir qu'on n'en aurait pas non plus. S'il y en a qui sont de trop, on va nous en faire la démonstration. Nous sommes parfaitement ouverts à écouter les points de vue là-dessus et, si on peut améliorer le projet de loi, tant mieux!

Vous faites des observations au sujet du budget qui serait dévolu au conseil d'orientation du comité d'école. C'est une question d'application pratique, ça aussi. On va écouter les deux points de vue là-dessus. Il n'y pas de position rigide dans notre esprit sur ces questions, nous avons mis cela parce que cela traduisait notre opinion. Ce sont des questions d'application qui pourront faire l'objet de considérations sérieuses en cours de route.

Là où mon attention est retenue d'une manière toute spéciale, c'est par le jugement que vous portez sur le partage des responsabilités que propose le projet de loi 107 entre le ministre et le gouvernement d'un côté et les commissions scolaires de l'autre. J'ai été étonné, quand vous avez fait votre présentation, de ne pas trouver une liste de tous les pouvoirs nouveaux qu'on donne aux commissions scolaires dans le projet de loi 107; j'en ai compté au moins 25. Ce ne sont pas tous des pouvoirs nouveaux en substance. Dans bien des cas, ce sont des pouvoirs qu'exerce déjà la commission scolaire en vertu du régime pédagogique ou d'un règlement mais non pas en vertu de la loi. Des pouvoirs, par conséquent, qui pourraient être modifiés au gré du gouvernement ou remis en cause. En les inscrivant dans la loi, nous les renforçons, nous leur donnons une assise juridique plus solide. Comme je l'ai dit, j'en ai compté au moins 25, j'ai toute la liste avec les numéros, on pourra la présenter en cours de route. Si on veut faire un examen de ce que signifie le projet de loi, il va falloir regarder tout cela, faire les colonnes "commissions scolaires", "pour", "moins"; "gouvernement et ministères", "pour" et "plus". Finalement, on va être placé pour porter un jugement. Mais des affirmations générales, à mesure qu'on va avancer dans le débat, vont avoir de moins en moins de portée. Ce qui va compter, ce seront les affirmations fonctionnelles étayées sur une démonstration solide.

Dans cette perspective, tout en rappelant que le projet de loi, en ce qui touche le ministre et le gouvernement, vient inscrire dans la loi bien des choses qui sont déjà dans la réalité réglementaires ou vécues, celui-ci ajoute un certain nombre de pouvoirs. Je l'ai dit ce matin dans ma présentation, je pense que je ne pouvais pas le dire plus franchement et plus clairement. Mais la question que je voudrais vous poser est la suivante. On va prendre le premier de ces pouvoirs, celui d'établir la liste des spécialités professionnelles qu'une commission scolaire est autorisée à dispenser. Nous avons vécu ensemble, au cours des dernières semaines, l'expérience de la carte des enseignements professionnels. Pouvez-vous soutenir sérieusement que cela ne devrait pas être un pouvoir confié au ministre, finalement? C'est ma première question.

M. Bergeron: Avant d'y aller avec une réponse directe concernant ce pouvoir spécifique que vous nous donnez, j'aimerais vous dire que l'approche qu'on vous présente dans notre réponse à votre projet de loi... On trouve qu'il y a beaucoup de bonnes idées dans ce projet de loi qui peuvent être appliquées, qu'on souhaiterait appliquer de façon différente d'une commission scolaire à l'autre, alors que vous vous apprêtez à nous dire qu'autant dans le domaine des comités de participation que dans les domaines de la taxation, de l'effectif-cadre, des régimes pédagogiques, des conventions collectives où on pourrait en parler, vous avez une approche qui va dans le sens que, partout au Québec, on devrait procéder de la même manière. Je relève vos phrases concernant les comités de participation et de consultation de l'école; vous avez raison. Mais pour ce qui est de la commission scolaire, vous en créez, de loi et de fait, de nouveaux, les rendant de rigueur.

Nous, l'approche que nous vous disons, c'est qu'il faudrait avoir une confiance au milieu, à la dynamique de chacun des milieux, au génie de chacun des milieux et, au lieu d'imposer une formule, un modèle qui serait identique partout au Québec, nous pensons qu'il y aurait avantage à laisser aller encore une fois la créativité de ces gens-là, la maturité que nous avons dans chacun des milieux. Cela pourrait revêtir et cela revêtirait des façons différentes, d'un milieu à l'autre, de connaître le pouls de la population, de faire participer nos parents, notre personnel, etc.

Vous faites référence à la carte de l'enseignement professionnel. Notre association s'était montrée favorable à votre objectif de rationaliser cela. Quand on fige dans un projet de loi, que c'est de rigueur et qu'il y a seulement le ministre qui peut déterminer cela, on trouve que cela va peut-être un peu loin. Il pourrait arriver que dans un milieu une commission scolaire ait de l'équipement et du personnel; elle pourrait avoir des clientèles. Pourquoi, cette commission scolaire, à même ses taxes, ses budgets et les priorités qu'elle déterminerait avec sa population, n'aurait-elle pas le droit de dispenser un service éducatif qui est demandé par sa population? Je ne vous dis pas que cela devrait se répéter de façon exhaustive. Nous avons aussi, les commissions scolaires, les administrateurs politiques et les employés, une certaine sagesse. Je ne pense pas qu'on assisterait là à une grande débâcle et à une multiplication à l'infini des options professionnelles. Mais de là à empêcher tout espoir ou toute créativité à une population, je pense, pour l'avoir déjà vécu comme directeur général avec un milieu qui

voulait donner un service professionnel minimal à sa clientèle, cela étant reconnu comme de l'équité, que c'est une avenue qui est dangereuse, dévalorisante et déresponsabilisante pour les gens.

On ne peut pas bâtir de projet éducatif dans l'enseignement professionnel dans un milieu... Ce n'est pas parce que c'est en haut, au 600 Fullum ou au Complexe G, à Québec, que cela va se décider. Nous pensons que c'est une approche dévalorisante face aux citoyens du Québec. Sur le plan de la pédagogie, nous osons vous soumettre que les gens devraient être capables de mener ces débats, de faire des choix de priorités dans les commissions scolaires et, encore une fois, qu'il y ait un plan global auquel nous souscrivons pour le rationaliser et pour un meilleur service à l'élève, nous en sommes. De là à empêcher totalement tout effort de créativité dans un milieu, pour différentes bonnes raisons, et que les parents, le personnel et les élèves le veulent, nous pensons que c'est un volet du projet de loi qui va un peu trop loin.

En justice, si vous me permettez, ce que nous disons simplement, c'est que de le mettre dans la loi pourrait peut-être être un incitatif à avoir recours à un modèle de relations entre les citoyens et la commission scolaire que je ne pense pas que vous non plus, M. le ministre, vous souhaitiez. Je pense que les négociations, les bonnes relations, l'harmonie et la bonne entente, c'est préférable à dire: Bien, écoute, on va aller en justice. Comme vous le souligniez tantôt, si c'est déjà reconnu de fait, laissons vivre cela comme on l'a vécu depuis au-delà de 100 ans dans les commissions scolaires sans, encore une fois, mettre ce privilège ou ce droit qui pourrait inciter de façon indue et nuire à de bonnes relations positives entre le citoyen et la commission scolaire.

M. Ryan: Je reviens à mes points. Sur les spécialités professionnelles, en fin de compte, je vous réaffirme, après avoir écouté vos explications, qu'il faut qu'il y ait une autorité qui puisse décider. Il y a des commissions scolaires qui sont en conflit dans une région; il y en a quatre qui veulent avoir Techniques d'usinage, il y a de la place pour une. Elles ne se sont pas entendues. Il faut bien que quelqu'un décide. Il faut bien que quelqu'un décide s'il va y en avoir une ou quatre. Ce ne sera pas décidé seulement par le budget ou les ressources de chaque commission scolaire, cela va être décidé par les ressources de l'ensemble du Québec. En fin de compte, la commission scolaire peut bien être capable de le faire une année ou deux, mais, tôt ou tard - je pense que nous le savons tous - elle va se présenter au ministère et elle va dire: Là, on l'a fait depuis un an ou deux, pourriez-vous nous mettre sur la norme qui existe pour tout le monde? Parce que c'est un coût plus élevé pour l'enseignement professionnel, nous le savons tous. Au Québec, nous devons faire face, pendant encore plusieurs années, à ce fait que, compte tenu de la richesse relative, nos coûts en éducation sont encore beaucoup plus élevés qu'ailleurs. Il faut un effort de rationalisation qui va durer encore de nombreuses années.

Sur ce point, on aura besoin d'une démonstration forte parce que peut-être que la formulation pourrait être retouchée, mais sur le fond je pense que c'est bien difficile de le contester. En matière d'intégration, nous avons proposé une solution. Je ne sais pas ce que vous en pensez, si c'est une solution qui peut vous paraître acceptable. La formule de la majorité dont vous nous parliez crée des problèmes parce que, en définitive, la vraie majorité dans une démocratie, c'est la majorité numérique des citoyens. Ce serait difficile à vérifier dans ces cas. Si nous sommes en cas de litige invincible, la formule qui est proposée là serait pratique et acceptable. On pourrait finir de régler ce problème d'ici à deux ou trois ans.

M. Bergeron: Effectivement, je pense que vous avez là une formule intéressante. On se souvient que ce mouvement a démarré en 1971 et qu'il y a eu différentes expériences heureuses et certaines ratées. Nous souhaitions qu'il y ait un énoncé bien clair, favorable à cela, une intégration des ordres. Ce pouvoir que le ministre se garde, c'est advenant un litige dans le partage des actifs et des passifs. Avant de commencer à parler de partage, il y a la question de l'expression d'une volonté de s'intégrer. C'est là qu'on dit que, si la règle de la majorité était prévue par la loi, on pense que ce serait préférable à seulement se garder cette clé, cette poignée pour régler un litige, mais avant d'être en litige, si trois commissions scolaires sur quatre, ou cinq sur six expriment leur volonté de s'intégrer il n'y a rien, dans le projet de loi, qui permettrait d'enclencher tout le processus. C'est là notre nuance.

M. Ryan: Je comprends. Je vais ajouter un autre point là-dessus, si vous me le permettez. Ce sera le dernier, mais j'aime mieux en venir aux questions de fond parce que cela fait une discussion profitable. Vous parlez du pouvoir d'enquête, du pouvoir de suspension d'une décision pendant la tenue d'une vérification ou d'une enquête. Ce matin, j'ai essayé d'expliquer dans quel sens nous avons inscrit cette disposition dans le projet de loi. Jusqu'à maintenant, quand il y a eu une enquête, c'est parce que des décisions ont provoqué une situation. L'enquête ne vient pas de la cervelle du ministre ou des fonctionnaires à Québec, il y a des citoyens qui l'ont demandée, ou des commissaires, parfois, qui étaient en minorité chez eux, ou parfois des fonctionnaires de la commission scolaire. C'est comme cela que viennent, les enquêtes.

L'enquête est déclenchée et les gens ont pris une décision qui est à l'origine du problème. On leur dit: II faudrait bien suspendre cette

décision pendant la durée de l'enquête. Ils disent: Non, on l'a prise et elle doit être exécutée. Ce n'est pas ce qu'il y a de plus judicieux. Le recours du ministre est de recommander la tutelle au gouvernement. J'essaie d'éviter cela par tous les moyens. Je n'en ai pas recommandé une dans le cas des commissions scolaires. Pourquoi? Vous allez peut-être dire que cela plaide contre notre position, mais j'essaie... Je leur ai dit: II faudrait que vous suspendiez cette décision. Dans une année, il y a trois, quatre ou cinq vérifications ou enquêtes. On ne peut pas éviter cela, il y a 213 commissions scolaires. Parfois, on conclut qu'il n'y avait pas de problème. Notre politique, c'est que le citoyen voie clair dans les choses et, quand il s'adresse au gouvernement, que cela marche, que cela ne traîne pas dans le fond d'un tiroir.

Au cours de la dernière année, dans une couple d'endroits, cela a été tout près de la rupture. Il y a des gens qui étaient presque disposés à envoyer promener le gouvernement. Est-ce que c'est mieux de garder seulement le recours de la tutelle? Je vais vous dire une chose, si l'opinion générale n'est pas favorable à ce moyen-ci, nous allons garder le moyen extrême qui est la tutelle, pour toutes les situations où elle pourrait être requise. Le gouvernement peut vivre avec cela, et le ministre aussi. C'est une recommandation qui est insérée dans le projet de loi afin d'adoucir le processus dans ces situations. Si cela devait être compris autrement, je vous dis, en tant que responsable de ce projet de loi, ce n'est pas ce que j'appelle un "casus belli". Si vous me disiez: Vous allez être ministre de l'Éducation et vous n'aurez pas de responsabilité dans la détermination des listes de spécialités professionnelles qui seront offertes sur le territoire, je donnerais ma démission tout de suite, demain matin. Si vous me dites que je n'aurai pas d'autorité pour déterminer où seront implantés les services d'éducation des adultes... On ne peut pas en avoir un dans chaque commission scolaire. Là, vous me créez un gros problème, et pas seulement pour moi, parce que nous sommes tous de passage, mais pour les futurs titulaires de cette situation-là. Nous avons actuellement, dans nos dossiers, quelques requêtes de commissions scolaires qui veulent avoir leur service d'éducation des adultes et, dans certains cas, il va falloir dire non parce qu'elles n'ont pas les ressources pour avoir un service comme celui-là. Cela entraînerait des coûts élevés, à des risques de qualité moindre. Alors, je vous dis que cela est nécessaire. (16 h 45)

En matière de services pour les élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage, vous savez qu'on a énormément de plaintes de la part des parents qui disent: - on reçoit des lettres à toutes les semaines - On a un enfant qui est en difficulté d'adaptation; il n'y a pas moyen d'avoir les services qu'il faudrait. Est-ce qu'éventuellement il va falloir établir une liste de base, quitte à ce que ce soit accompagné des ressources financières correspondantes? Nous pensons que oui. Finalement, nous pensons que oui, si cela ne peut se faire autrement. C'est un pouvoir qui est là. Mais dès qu'il s'agit de la qualité de l'éducation, encore une fois, de la rationalité et de l'égalité des chances, il devient plus difficile de contester la nécessité d'un ministre qui va avoir des pouvoirs assez forts au même point de vue. Je vous soumets le problème. Pour le pouvoir d'enquête, c'est une chose. C'est de l'ordre des améliorations souhaitables, mais pas du nécessaire.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Une remarque, M. Bergeron?

M. Bergeron: Oui. Concernant la question du pouvoir d'enquête ou de plaintes des parents, nous pensons qu'effectivement vous n'avez pas utilisé, comme ministre de l'Éducation, la mise en tutelle. C'est déjà arrivé. On pense que ce doit être un pouvoir, oui, extrême, pour des situations et des cas extrêmes. Parce que si vous lisez, encore une fois, notre mémoire, nous partons avec l'optique qu'il y a vraiment une prise en charge par le milieu, une responsabilisation, une confiance aux gens du milieu. Et si le ministre de l'Éducation ou le ministère de l'Éducation pouvait nous aider à apprendre aux citoyens, dans tous les milieux au Québec, à se prendre en main et à se prendre en charge, et non seulement à se référer constamment à Québec pour régler quelque litige que ce soit, on pense que ce serait la faire oeuvre de bonne éducation. Si les citoyens avaient plus leur mot à dire sur leur gouvernement local scolaire qu'est la commission scolaire, on pense qu'il y aurait là aussi, une participation plus accrue lors des élections scolaires. Actuellement, là les gens ont plus ou moins d'intérêt parce que, quand il y a un problème, effectivement, on appelle au ministère. Et, selon votre expression de tantôt, cela ne traîne pas, vous y voyez. À ce moment-là, les citoyens s'habituent à s'en référer à d'autres. Leurs élus scolaires sont plus ou moins importants parce que, lorsqu'ils ne seront pas d'accord, ils auront juste à se référer à Québec et quelqu'un viendra.

Notre approche est différente. On a développé beaucoup d'expertise, beaucoup de compétence. Il y a de l'intégrité et de l'honnêteté dans le milieu. Vous souligniez ce matin, dans votre discours, et à juste titre, qu'il y a également une bonne gestion des fonds publics dans le monde scolaire. Je pense qu'on est rendus à un degré de maturité où les élus et les administrateurs méritent que vous nous fassiez confiance et que vous disiez aux gens: Au lieu de me référer cela, et là je vais suspendre les décisions des commissaires, faites des pressions et battez-les aux prochaines élections si vous n'êtes pas contents. Et si leurs directeurs généraux font mal leur travail, vous les changerez. Il faut

retourner la balle là où elle doit être, dans la très grande majorité des cas.

M. Ryan: Je vais ajouter juste un mot là-dessus.

M. Bergeron: Oui.

M. Ryan: S'il s'agissait de trottoirs ou de services auxiliaires à caractère matériel, je pourrais comprendre. Mais quand il s'agit de l'éducation...

M. Bergeron: Oui.

M. Ryan: ...vous ne pouvez pas demander au ministre de l'Éducation de rester assis sur son fauteuil, quand il y a un problème brûlant dans un endroit, et de dire aux gens: Attendez à la prochaine élection et vous réglerez cela. Dans certains cas, il est obligé de faire cela. Mais il ne faut pas que cela soit sa politique habituelle. S'il arrive qu'il réponde à un citoyen qui lui a écrit deux fois plus vite que la commission scolaire qui ne lui a pas répondu, c'est une sacrée bonne chose. La prochaine fois, la commission scolaire va plus vite. C'est là qu'il y a une émulation de bon aloi. N'oubliez pas que nous sommes tous élus par les mêmes citoyens.

M. Bergeron: Oui.

M. Ryan: Celui qui vote pour le gouvernement est le citoyen qui reste sur la rue où il y a une école. C'est la même personne. Et elle va dire: Bien j'ai un ministre ou j'ai un premier ministre - que de fois le premier ministre m'envoie des lettres qu'il reçoit. On ne peut pas se borner uniquement à servir de bureau de poste et à dire: On vous transmets cela et nous sommes bien tranquilles et cela ne nous regarde pas. Cela nous regarde. Chaque fois que la qualité de l'éducation est concernée, cela regarde le ministre de l'Éducation et son équipe. Il faut qu'il s'en occupe dans l'ordre de préoccupations. Il faut que cet intérêt se traduise d'une manière verifiable pour le citoyen.

M. Bergeron: En tout grand respect pour la compétence du ministre et des personnes responsables au ministère, quelle preuve avez-vous que la façon de régler un problème est meilleure que ce que nous aurions trouvé dans le milieux? Quand la balle sort de notre camp, qu'elle est référée à Québec, que vous voulez intervenir et que vous donnez certaines orientations, c'est sûr qu'il se prend une décision. Les décisions miraculeuses et sans aucune nuance, on sait que cela n'existe pas. L'orientation que vous lui faites prendre, c'est une orientation qui est vue avec vos yeux, avec les yeux des gens qui sont venus faire des enquêtes. Est-ce que c'est préférable à ce que les gens du milieu se sont donné? Je pense qu'à l'occasion cela l'est sûrement, mais cela ne doit pas l'être toujours. Nous disons à ce moment-là: Donnez donc plus la chance au coureur, au milieu. À part cela, on va apprendre, on va développer ce sens de l'autonomie et de la responsabilisation chez les gens et ils vont arrêter de toujours aller pleurer dans le manteau du ministère, à Québec. Ils vont vraiment prendre leurs choses en main. Là-dessus, le vice-président a des choses à vous dire.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Qui est le vice-président? C'est pour les besoins du Journal des débats. C'est M. Théorêt.

M. Théorêt (Marcel): M. le ministre, quand on regarde l'ensemble des éléments du projet de loi et vos interventions dans le réseau, on constate que vous avez énormément de bonnes idées. On arrive à avoir le goût de vous dire: M. le ministre, vous avez trop de bonnes idées pour une seule commission scolaire. On vous dit, M. le ministre, qu'il faut que toutes vos bonnes idées soient clairement exprimées. On pense que le rôle de leadership du ministre de l'Éducation dort être présent. On est heureux d'avoir un ministre de l'Education qui joue ce rôle. Par contre, M. le ministre, on pense que vos bonnes idées ne peuvent pas être applicables partout. On pense qu'il est important que les milieux fassent des choix parmi vos bonnes idées et retiennent celles qui sont les plus applicables et qui ont le plus de chances, dans l'immédiat, d'être efficaces. C'est une question de capacité des milieux. On ne peut pas prendre toutes vos bonnes idées; vous en avez trop. On peut se les partager.

Tantôt, vous nous avez parlé de l'enseignement professionnel. On peut reconnaître aujourd'hui qu'il était nécessaire que le ministre, en mars et avril derniers, se penche sur la question de la répartition des options professionnelles dans l'ensemble du territoire du Québec. On peut reconnaître qu'on était rendus dans une situation qui exigeait cela, sauf que s'il y a un secteur d'activité qui doit être collé sur l'évolution du marché, du besoin de main-d'oeuvre et des entreprises, je ne suis pas certain que la meilleure formule soit que, périodiquement, le ministre regarde l'évolution des secteurs professionnels et décrète les options d'un milieu à l'autre. Il me semble que c'est un secteur qui doit suivre l'évolution du marché et que, rapidement, il doit s'adapter dans les meilleurs délais. La méthode actuelle ne peut pas être celle qui soit la plus rapide.

Vous avez un bon nombre d'engagements qui exigent que vous puissiez véhiculer votre message dans tous les domaines. Quand vous faites un exercice comme celui-là, qui est de décréter une option de secteur professionnel dans un milieu donné et, en même temps, de décréter un engagement ministériel pour l'appuyer, il me semble qu'il faudrait prévoir un modèle qui fasse en sorte que les décisions soient confrontées aux réalités qui se développent. Si, dans un milieu

donné, on a implanté une option et qu'en pratique les données de base se révèlent différentes, il faut que ça bouge. Il faut que ce soit capable de se fermer, une option, si cela ne fonctionne pas, si ce n'est pas rentable, pour qu'on puisse en ouvrir d'autres.

Notre préoccupation de faire une bonne gestion des ressources en éducation suppose qu'on est constamment dans un processus de remise en question des décisions qu'on a prises et des zones d'investissement qu'on a privilégiées. On est très préoccupés par cela et on pense que la meilleure façon pour qu'il y ait des remises en question, c'est que les milieux aient la mainmise sur les décisions. Récemment, je pense que c'est l'association des cadres qui tenait un colloque. On retrouvait, dans le cadre de leur présentation générale, comme préoccupation majeure, ce qu'on peut faire à l'intérieur des conventions collectives, des régimes pédagogiques et des règles budgétaires, les grands encadrements. Quand on est rendus à se préoccuper du développement de la qualité de l'éducation et que notre principale préoccupation est de voir ce qu'on peut faire malgré ces grands encadrements, on se dit: II me semble qu'il y a des pas à faire. Si on réagit dans notre mémoire, peut-être de façon un peu brutale, aux énoncés d'intentions concernant l'intégration de nouvelles mesures, c'est plutôt parce qu'on était à la recherche, à l'intérieur du projet de loi, de messages de reconnaissance, de ce qu'on a appelé la maturité des milieux. On s'attendait à voir, dans le projet de loi, un certain signe de cette approche privilégiée un peu plus par le ministère, soit: il faut que les milieux assument pleinement leurs responsabilités et, comme gouvernement, comme ministère de l'Éducation, on énonce notre croyance dans cette option.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, monsieur. Une dernière réaction de la part du ministre.

M. Ryan: Je m'excuse, mais on touche à des sujets tellement importants. Prenons l'enseignement professionnel, encore une fois... Je voudrais bien suivre le conseil que vous donnez, M. Théorêt, mais les problèmes venaient précisément du fait que les milieux immédiatement concernés, dans bien des cas, ne voulaient pas reconnaître que telle option n'avait plus sa rentabilité. Ils voulaient y rester attachés et ils disaient: L'année prochaine, cela va aller mieux; dans deux ans, cela va aller mieux. S'il avait fallu écouter toutes les représentations qu'on recevait, on n'aurait presque rien changé. On serait restés avec le statu quo, avec une étiquette de changement.

Il a fallu faire comprendre à un bon nombre de commissions scolaires qu'elles n'étaient plus en mesure de donner cette option-là et que cela ne répondait plus à la demande chez elles. C'est ce que je vous dis. Finalement, il faut bien que quelqu'un le dise. Chaque fois que les commissions scolaires l'ont fait entre elles, nous avons été très heureux d'appuyer leurs démarches et je pense que, dans le cas de votre commission scolaire, vous n'avez pas eu de problème; cela s'est très bien réglé. Dans certaines parties du territoire, cela est allé tout seul. Pour d'autres, cela a été extrêmement compliqué. Les gens venaient nous voir. Les députés communiquaient avec moi et me disaient: M. Ryan, il y a un problème dans mon comté; le président de la commission scolaire téléphone aussi; les parents écrivent. Il faut bien que cela se tranche d'une manière ou d'une autre, et c'est ce que j'essaie de faire comprendre clairement. On ne peut pas seulement dire: On va faire confiance au dynamisme des milieux; on verra en l'an 2000 si cette merveille est arrivée. Il faut que les décisions soient prises année après année, mois après mois et, parfois, semaine après semaine, tout en ayant confiance qu'avec le temps - j'ai dit la condition ce matin - quand on aura un partage de ressources différent de celui qui existe actuellement, à ce moment-là, l'autre problème se posera dans des perspectives bien différentes. Mais nous sommes sous le régime actuel qui, je pense, entraîne certaines conséquences de cet ordre, qui sont presque inéluctables dans l'avenir prévisible.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci.

Je reconnais maintenant la députée de Chicoutimi et porte-parole de l'Opposition officielle en matière d'éducation. Mme la députée.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président.

M. Bergeron, M. Théorêt, messieurs, il me fait plaisir de vous accueillir à la commission au nom de l'Opposition officielle, de vous remercier également d'avoir à nouveau voulu participer à une nouvelle consultation. Au cours des dernières années, elles ont été nombreuses et certainement fructueuses parce qu'elles ont permis de faire avancer un peu les mentalités. Mais je suis forcée de reconnaître, avec certains directeurs généraux que j'ai rencontrés, que ces débats finissent par être épuisants dans la mesure où, finalement, on n'arrive pas à des résultats concrets. On pense plus particulièrement à tout ce qui a été investi dans la préparation et dans l'adoption du projet de loi 3.

Concernant les propos que vous tenez touchant le centralisme de ce projet de loi et ses effets de déresponsabilisation sur la communauté, dans les écoles, dans les commissions scolaires, chez les membres du conseil scolaire, je les partage en totalité. On ne peut tenir un double discours, c'est-à-dire prétendre vouloir valoriser l'école publique, valoriser les enseignants et vider les commissions scolaires de leurs pouvoirs sous prétexte qu'on fait mieux à Québec que ce qu'on est capable de faire dans les régions.

Le ministre utilise beaucoup cet exemple de

la formation professionnelle. On sait qu'il y a une diminution dans les demandes d'admission, dans ce secteur, ce qui provoque fatalement une diminution dans les services à offrir, avec une nécessité de rationaliser un peu. Je crois beaucoup à la capacité des milieux de s'organiser. Je ne suis pas certaine que de décider, de Québec, où vont se donner certaines options professionnelles ne vienne pas toucher et porter atteinte à toute la question de l'accessibilité. Cela peut sembler relativement simple, vu de Québec, de faire déménager des jeunes de la commission scolaire Valin, juste au nord de la rivière Saguenay, à Jonquière. Comme il n'y a pas de transport - le transport en commun est ordinaire dans ma région - cela vous donne des temps de déplacement extrêmement longs et les parents disent: Trouve-toi donc une option dans l'école, indépendamment de l'attirance de l'enfant et de ses désirs. (17 heures)

Je partage tout à fait votre avis. Vous l'avez mieux exprimé que je ne saurais le faire. Le ministre a fait de ce projet de loi quelque chose de beaucoup à son image. Je pense qu'il faut le lui dire. C'est un projet de loi centralisateur et très dirigiste. Dans le fond, ce que le ministre fait aujourd'hui, il ne faisait pas confiance à son prédécesseur. Il disait: Je ne peux pas endosser un projet de loi qui viendrait renforcer les pouvoirs du ministre. Le ministre fait comme s'il était ministre de l'Éducation pour 500 ans, c'est-à-dire qu'il pourrait toujours y avoir la même personne à la direction du ministère, assuré qu'il est de toujours prendre les bonnes décisions. Quand on adopte un projet de loi, on n'a aucune idée de qui sera titulaire du ministère dans deux ans, trois ans, dix ans, et encore moins dans vingt ans.

C'est faire un pari considérable, quel que soit le parti, que de penser que tout le monde aura sa conception de la gestion de ses activités quand il sera titulaire du ministère. C'est le danger, dans les lois qu'on adopte, d'avoir cette attitude de vouloir mouler le projet de loi selon nos valeurs de gestion personnelles sans penser que le projet de loi sera tantôt géré par quelqu'un d'autre. Je pense, là, à toute la question touchant la tutelle. C'est bon de rappeler que le ministre disait alors à M. Bérubé qui était ministre de l'Éducation: Je ne peux pas accepter que vous renforciez vos pouvoirs au détriment des commissions scolaires. On peut penser, dans le discours du député d'Argenteuil et critique de l'Opposition à l'époque, qu'il ne faisait pas vraiment confiance au ministre alors en poste pour s'approprier de nouveaux pouvoirs. Le ministre n'est pas plus garant de ce que sera le ministre dans cinq ans. Et il n'est pas éternel.

Je trouve que les projets de loi ont avantage à toujours conserver cette perspective. On n'adopte pas un projet de loi pour régler quelques problèmes conjoncturels. C'est pourquoi un projet de toi doit être le plus large possible, le moins tatillon possible et qu'il évite surtout, comme le fait le présent projet de loi, de tomber dans des objets qui relèvent plus de la réglementation que de la législation.

Sur ces questions, je trouve que le discours du ministre a ce travers qui vient porter un jugement sur la capacité d'autres élus de gérer leur propre gouvernement. C'est un peu comme si, tout à coup, on décidait, parce que le gouvernement du Québec est incompétent en matière linguistique, qu'il faut le faire mettre en tutelle par Ottawa. C'est le même genre de raisonnement et c'est inacceptable lorsqu'on pense que le gouvernement scolaire est aussi un gouvernement élu. Il y a des carences, on les connaît, par rapport au vote exprimé à l'occasion des suffrages universels a l'occasion des élections scolaires. Mais c'est là d'un autre ordre d'idées. Je pense que vous avez raison de tenir ferme et fort là-dessus.

Sur des questions, le ministre invoque la qualité de l'éducation et l'égalité des chances pour justifier d'introduire dans la loi des questions qui faisaient l'objet de règlements antérieurement. Dans le projet de loi 107, on s'étonne de l'absence de définition de services complémentaires qui apparaissaient dans la loi 3. Je ne pense pas avoir vu, dans votre mémoire, de remarques touchant l'absence de ces définitions de services complémentaires. Dans la loi 3, vous avez la liste de services: de participation de l'élève à la vie de l'école, encadrement et surveillance, orientation scolaire et professionnelle, santé et services sociaux, animation pastorale - on le retrouve dans la présente, c'est même le seul qu'on retrouve - services de psychologie, d'orthophonie, services de recherche d'emploi. On pourrait ajouter: services d'intégration socio-linguistique pour tenir compte des réalités actuelles.

Vous ne commentez pas cette absence. Estimez-vous qu'il était superflu de les indiquer dans la loi 3 ou si cela ne vous paraît pas important? Cela ne risque-t-il pas de créer précisément des disparités en matière de qualité et de quantité de services offerts, quand on parle des services complémentaires?

M. Bergeron: II faut dire, Mme la critique de l'Opposition, que sur cet aspect il y a déjà de bonnes balises ou de bonnes orientations qui sont données par le ministère de l'Éducation dans différentes parutions. Je pense qu'il y a une approche, par rapport aux services complémentaires, assez commune au Québec. Il ne nous est pas apparu comme étant prioritaire d'indiquer cela dans le projet de loi 107.

Mme Blackburn: Mais les services complémentaires et les services particuliers, je veux dire, cela fait partie des services éducatifs.

M. Bergeron: Oui.

Mme Blackburn: En l'absence de définition des services éducatifs dans la loi, qu'est-ce qui vous garantit que les ressources financières vous permettront de maintenir ou d'exiger des ressources nécessaires pour le maintien de tels services?

M. Bergeron: Une fois que le projet de loi affirme les services que l'on doit rendre à la partie élèves, les droits et devoirs des enseignants, le développement intégral de l'enfant, vu l'évolution de la société, il nous apparaît implicite que cet ensemble de vocations ou de missions de la commission scolaire ou des écoles est reconnu, et on doit le dispenser. Quant au niveau de ressources, on pense que l'évolution de ce dossier est, bien sûr, reliée à un ensemble de services qu'on a donnés, mais également à une évolution de la mission de l'école. Si vous vous rappelez les états généraux - d'ailleurs, on s'était interrogés comme société sur la mission de l'école et l'école fourre-tout - je pense que c'est un dossier en évolution. Les commissions scolaires sont toujours présentes dans ce genre de dossier.

Nous, on ne relie pas forcément les allocations de ressources avec ce qu'on peut retrouver de façon très détaillée dans un projet de loi. Encore une fois, notre approche d'évolution de ce genre de services nous ferait privilégier le contraire: de ne pas trop en définir et de ne pas trop en limiter les services dans le projet de loi.

Mme Blackburn: Donc, vous dites que même si cela n'apparaît pas, si ce n'est pas défini dans le projet de loi, cela ne vient pas menacer la gratuité de ces services et leur accessibilité.

M. Bergeron: Sans que ce soit déterminé de façon pointue, je pense que les grands axes du projet de loi concernant les services à l'élève jeune, adulte, par exemple, la partie des droits et devoirs des enseignants, des commissions scolaires, cela nous apparaît une garantie favorable.

Mme Blackburn: Bien. Vous avez abordé la question du droit d'ester en justice pour les différents comités et le conseil d'orientation. Il y a un avis, il y a un mémoire - malheureusement, je ne saurais vous dire lequel - qui prétend que, légalement, ce n'est pas possible parce que le comité est un comité de la commission scolaire et c'est comme si la commission scolaire se poursuivait. Je veux bien croire que c'est possible lorsqu'il s'agit de la loi 101, mais il semble qu'en matière de ce qui a été fait, au moment où on paie les avocats qui contestent la loi 101, cela peut peut-être se faire dans ce sens, mais selon un mémoire on prétend que cela ne serait pas possible légalement de leur donner un tel pouvoir. Vous n'avez pas vérifié...

M. Bergeron: Non. On n'a pas vérifié cela et le message qu'on vous lançait là-dessus, ce n'était pas tellement de vouloir fouiller, nous autres, l'aspect légal, à savoir: Cela peut-il se faire ou non? C'était plutôt de lancer un message au législateur, en disant: N'introduisez pas cette dynamique de relations entre la population et son gouvernement local scolaire. On pense que c'est provocateur, c'est de la confrontation. Cela mène à des affrontements inutiles et stériles. On dit: II ne faut pas orienter le type de relations et de participation de nos milieux sur une base comme celle-là. Si cela ne fait pas notre affaire, on peut vous poursuivre en justice. On veut beaucoup plus que l'orientation soit positive de participation significative, mais de ne pas introduire cette espèce d'épée de Damoclès ou de menace envers les gestionnaires scolaires et les politiciens scolaires.

Mme Blackburn: D'accord. Peut-être pour illustrer un peu ce que cela pourrait représenter chez vous, je ne sais pas... De quelle commission scolaire êtes-vous?

M. Bergeron: Taillon.

Mme Blackburn: De Taillon. Cela va vous donner combien de comités et de conseils d'orientation dans votre commission scolaire, à peu près?

M. Bergeron: Présentement, c'est une commission scolaire locale qui est en voie de réaliser son intégration, nous l'espérons. Présentement, il y a dix-sept écoles primaires: une anglophone, seize francophones. Cela fait dix-sept conseils d'orientation. Ensuite, vous avez la panoplie...

Mme Blackburn: De comités.

M. Bergeron: ...de comités qui sont suggérés là.

Mme Blackburn: Donc, cela vous donne plus d'une vingtaine de possibilités, annuellement, d'être contestés en justice. C'est ce que c'est. Vous vous opposez au droit de vote des parents qui siègent au conseil des commissaires. Étant donné qu'il y en a seulement un, est-ce que cela vous apparaît important à ce moment-ci?

M. Bergeron: Important, dites-vous?

Mme Blackburn: Oui, de vous opposer à ce qu'ils aient le droit de vote? S'ils formaient le tiers ou la parité, je pourrais peut-être poser un autre genre de question, mais...

M. Bergeron: Mme la députée, on pense que ce n'est pas souhaitable et cela, pour permettre à ces représentants des parents de garder toujours un oeil critique et de garder par rapport aux élus une espèce de rôle de chien de

garde ou de conscience, si vous voulez, des parents. On pense que le fait de leur donner une part entière dans toutes les décisions pourrait leur enlever un certain recul par rapport aux décisions politiques, mais le grand fondement, comme on vous l'écrit dans le mémoire, c'est que les élus au suffrage universel sont les gens qui ont le droit de taxer et qui ont à répondre devant toute la population de leur gestion. Alors, on propose, à partir de ce principe, que seulement eux aient le droit de vote, parce que ce sont seulement eux qui en répondent devant la population.

Concrètement, Mme la députée, ce ne serait pas une disposition qui empêcherait les commissions scolaires de bien fonctionner si le parent avait le droit de vote Pour employer les termes latins de M. le ministre, pour notre association, ce ne serait pas là une grande guerre mais nous pensons que cela protège la volonté des parents, leur rôle, leur mission. Nous trouvons que la tradition, ce que l'on vient de vivre dans les dernières années, a bien servi la cause des parents en ayant ce statut-là. Voilà notre position.

Mme Blackburn: Concernant la composition du conseil d'orientation, il est prévu un minimum de sept et de dix. Si vous êtes au primaire, il y a au moins trois postes qui sont obligatoires: deux enseignants et une personne représentant les professionnels et les membres du personnel de soutien. Si vous êtes au secondaire, il s'ajoute deux élèves. Comme les parents doivent être en nombre égal, cela veut dire cinq parents. Est-ce que cela vous apparaît suffisant d'avoir trois parents au primaire au conseil d'orientation, parce que, là, de plus en plus semble se dégager une volonté, je ne dirais pas des parents, mais chez plusieurs intervenants, de ne pas créer et de ne pas encourager la création d'un comité de parents au sein de l'école? Est-ce suffisant pour représenter les parents, de trois à cinq parents?

M. Bergeron: Encore là, je pense que la sagesse devrait vous amener à une loi qui fixerait cela comme un minimum, mais pas comme une balise rigoureuse. Le milieu qui voudrait se donner un plus gros comité, une plus grande participation, en réponse à votre question, je pense que c'est souhaitable. Pour moi et notre association, nous pensons que c'est un strict minimum. Nous pensons qu'il y a avantage à laisser encore une fois les milieux déterminer leur forme et, s'ils souhaitent un conseil d'orientation avec plus de participation, en règle générale, cela pourrait être plus riche.

Si on prend l'expérience des comités d'école, cela varie beaucoup. Il y a des comités d'école de vingt personnes comme il y en a de seulement cinq, mais pour le conseil d'orientation, pour nous, ce serait un minimum sûrement.

Mme Blackburn: J'ai une autre question. En page 17 de votre mémoire... M. Bergeron: Pardon?

Mme Blackburn: En page 17 de votre mémoire, parlant de l'article 35, vous dites: "L'article 35 destine l'école à assurer la formation de l'élève autre que l'adulte. Nous sommes d'avis que la restriction à l'égard des adultes devrait être éliminée puisqu'elle est inapplicable, par exemple, à des écoles professionnelles où on accueille des jeunes et des adultes." Cela m'amène à la question suivante: Êtes-vous en faveur, oui ou non, de la gratuité pour les étudiants adultes qui sont inscrits dans les cours qui mènent à une "diplômation"?

M. Bergeron: Tout à fait, madame, et on l'a exprimé dans notre mémoire. Nous sommes favorables à la gratuité pour les adultes en formation générale et en formation professionnelle en "diplômation", tout à fait.

Mme Blackburn: Mais également pour les autres services, parce que, dans la loi, il est clair qu'ils n'auraient pas accès aux autres services?

M. Bergeron: Nous disons qu'il serait plus prudent de leur donner accès aux autres services, mais de ne pas inscrire dans la loi que tout sera gratuit, par exemple, l'éducation populaire. On pense qu'il y a là avantage à une participation des gens du milieu. Alors, pour la "diplômation", c'est clair, on pense que c'est un devoir de la société. Pour d'autres services, on pense que cela variera selon les milieux, selon les projets éducatifs des milieux, selon les choix et les priorités qu'on se sera donnés dans les milieux et, bien sûr, M. Lapointe ajoute: Et selon les ressources que l'on reçoit. (17 h 15)

Mme Blackburn: Je pense que c'est au début de votre mémoire, parlant des droits de l'élève, vous parlez des gains que celui-ci fait, en particulier, le choix de l'école... Il y avait deux éléments, si je me rappelle bien?

M. Bergeron: L'enseignement religieux aussi.

Mme Blackburn: Oui, de choisir l'enseignement religieux ou moral. Mais, au sujet de ce choix de l'école et même de l'enseignement religieux ou moral, est-ce qu'il y a effectivement une possibilité de choix ou est-ce que le choix ou les choix sont plutôt théoriques? J'essaie de voir le parent qui va décider, le voisin de chez nous, d'envoyer son enfant, parce qu'il aime mieux le voisinage, à une demi-heure ou trois quarts d'heure ou encore parce que cela lui donne accès au service d'autobus, par exemple.

M. Bergeron: Oui.

Mme Blackburn: C'est un mille, je pense... Comment allez-vous gérer cela? Est-ce que ce n'est pas juste théorique, plus de l'ordre des voeux que de quelque chose de plus réalisable?

M. Bergeron: Cela nous semble une piste de travail pour laquelle les commissions scolaires ont avantage à avoir plus d'imagination, à être plus à l'écoute des besoins des parents. Tout d'abord, c'est bien sûr qu'il y aura des limites géographiques dans certains endroits du Québec qui seront vraiment contraignantes au point de presque annuler ce privilège, mais, dans beaucoup d'autres milieux au Québec, je pense qu'on aurait avantage... D'ailleurs, il y en a qui se réalisent, quelques exemples trop limités à ce qu'on entend dire. Je pense qu'on aurait avantage, comme commissions scolaires... Nous trouvons que c'est un principe à inscrire dans la loi, c'est un principe qui va donner une toute nouvelle obligation aux commissions scolaires et, comme je vous le disais, va nous forcer à imaginer de nouvelles approches. On pense que cela serait très salutaire. D'ailleurs, il se tente quelques expériences au niveau secondaire ou primaire. Il y en a qui appellent cela écoles internationales; d'autres vont appeler cela sports, études, musique et cours académiques. Il s'en tente, mais je pense que ce n'est pas assez répandu. Dans les milieux, si on avait cette obligation, cette incitation, on pourrait développer davantage cette formule et cela passerait d'un droit qui est limité actuellement à un droit un peu plus répandu. Les gens connaîtraient la couleur, les valeurs qui sont porteuses d'un projet plus spécifique dans une école. Bien sûr qu'il y aurait des limites dans les capacités d'inscription des écoles, on comprend tout cela, comme les questions de transport, sauf qu'il nous semble qu'on peut développer davantage ce type de services au Québec. C'est bien de donner ce genre d'orientation et de ne pas nous dire comment le faire. Dites-nous vers où on devrait aller, qu'il y ait une sorte de consensus de société.

Mme Blackburn: En conclusion de votre mémoire, vous dites: "Nous réitérons notre souhait que soit adopté un projet de loi sur l'instruction publique et que ce projet ait la sagesse de ne pas imposer aux communautés locales une seule et bonne façon de faire." Dans sa facture actuelle, si ce projet devait être adopté, est-ce qu'on aurait toujours besoin de commissions scolaires au Québec? C'est vraiment la question que je me pose chaque fois, parce que je ne vois plus ce qu'il leur reste. Quand on est en train de décider du nombre de cadres qu'elles vont pouvoir engager, qu'est-ce qu'il reste à quelqu'un? Qu'est-ce qu'il reste à gérer dans une commission scolaire? Je me rappelle avoir eu longtemps le même sentiment à l'endroit des collègues. Il reste peu ou rien à régler dans un collège. Le directeur général applique les directives, règles et règlements qui viennent du ministère. Cela date d'avant le présent ministre. Cela ne s'est pas amélioré avec lui par contre. C'est une situation qui est celle des collèges.

On sait que les collèges n'ont pas un gouvernement élu. On peut comprendre que ce sort cela leur situation. Dans le cas des commissions scolaires, est-ce que c'est une comédie, une farce que de maintenir un gouvernement élu si on le vide de ses pouvoirs? La lecture du projet de loi m'a laissé cette impression.

M. Bergeron: En réponse à votre question, je pense que ce serait effectivement démobilisant et démotivant si le projet de loi était adopté tel quel, dans sa facture actuelle. Mais je pense également que l'ensemble des citoyens au Québec, une fois la prise de conscience de la nouvelle façon de vivre faite, aurait probablement un sursaut et devrait réclamer à court terme, à l'Assemblée nationale, des modifications pour redonner plus de pouvoirs aux citoyens. Nous voulons qu'une fois dans les milieux, une fois dans la population locale, ce projet de loi manifeste l'état des bonnes relations que le ministère de l'Éducation entretient avec les commissions scolaires et manifeste donc une confiance dans l'institution sociale que sont les commissions scolaires.

Je me rappelle, lors des débats sur les projets de loi 40 et 3, qu'il y avait eu des sondages, je pense que c'est SORECOM, sur... Même si la participation aux élections scolaires est faible, je me souviens que la population s'était exprimée comme voulant garder sa commission scolaire et une commission scolaire forte. I! me semblait que, comme institution sociale, le sondage avait démontré que c'était une institution à laquelle les citoyens du Québec tenaient.

Alors, je ne suis pas prêt à dire que, demain matin, les commissions scolaires disparaîtraient, mais je pense que ce serait démobilisant dans sa facture actuelle.

Mme Blackburn: Une question que vous n'avez pas abordée, sauf tout juste effleurée, celle des structures linguistiques, les structures confessionnelles scolaires et la possibilité, pas la possibilité, la loi, les articles de la loi qui prévoient l'établissement de commissions scolaires linguistiques, en même temps que la même loi maintient le droit à la dissidence et ne touche pas aux structures scolaires sur le territoire de la CECM, de la PSBGM et de la Commission des écoles catholiques de Québec.

Je voudrais savoir ceci: Vous, avec l'expérience que vous avez, est-ce que c'est "gérable" et "administrable" au Québec la superposition de commissions scolaires? Dans le cas, par exemple, de commissions scolaires sur la rive sud de Montréal, vous pourriez avoir une commission scolaire française, une autre anglaise et vous pourriez avoir une dissidente protestante française et une autre dissidente catholique anglaise.

Cela vous donnerait, sur un même territoire, quatre commissions scolaires. Donc, pour un enfant au moins ou pour les parents d'un enfant, il y a la possibilité de trois choix: le partage des ressources, la taille de ces commissions scolaires... Est-ce que c'est "gérable"?

M. Bergeron: Pour répondre à votre question de façon brute comme cela, cela pourrait être "gérable", parce que de la superposition, on en vit présentement, catholique-protestant. On vivrait deux superpositions avec les linguistiques aussi. Est-ce que c'est souhaitable? Nous nous interrogeons beaucoup, sauf que pour cet aspect du projet de loi nous n'avions pas toute l'expertise juridique pour fouiller cela. C'est ce qui a fait qu'on l'a esquivé. Effectivement, c'est inquiétant. Est-ce que l'émiettement des administrations scolaires est une bonne chose au Québec? À première vue - là, je parle en mon nom personnel parce qu'il n'y a pas de volonté d'association d'exprimée - cela ne m'apparaft pas souhaitable, cet endettement; on pourrait avoir, comme vous le dites, quatre administrations scolaires.

Sur le plan théorique, oui, cela pourrait se vivre. À première vue aussi, quand on lit cette disposition, on se dit: Les dissidentes, il me semble qu'il doit y en avoir suffisamment au Québec, d'autant plus que leur taille, règle générale, est très réduite. Juridiquement, je ne suis pas capable d'asseoir une argumentation solide là-dessus. Alors, cela peut se vivre, mais un éparpillement et un émiettement, cela ne m'apparaît pas souhaitable.

Mme Blackburn: Est-ce que l'émiettement des commissions scolaires se vit mieux du moment où elles n'ont plus de pouvoirs?

M. Bergeron: Pardon?

Mme Blackburn: En fait, c'est un peu cela. Est-ce que l'émiettement des commissions scolaires pourrait avoir des effets beaucoup moindres dans la mesure où elles sont ou presque sans pouvoirs?

M. Bergeron: Cela me tenterait de laisser le ministre répondre à celle-là!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bergeron: À votre réponse, posée comme cela, cette hypothèse-là, je ne suis pas un politicien, je peux répondre aux questions hypothétiques, puisque vous, vous n'y répondez pas.

Mme Blackburn: Non, c'est juste.

M. Bergeron: À la question telle que formulée, madame, la réponse est oui, cela se vivrait mieux si cela signifiait presque pas de pouvoirs.

Le Président (M. Parent, Sauvé): D'autres interventions?

Mme Blackburn: Est-ce que j'ai encore...

Le Président (M. Parent, Sauvé): Ah! Vous avez encore du temps, madame.

Mme Blackburn: J'ai encore du temps! Le Président (M. Parent, Sauvé): Ah oui!

Mme Blackburn: Alors, il n'y a vraiment pas de problème. Je n'ai pas vu non plus dans votre mémoire de préoccupation touchant la place de l'élève, je pense particulièrement à ceux du secondaire. La responsabilité des commissions scolaires ou des écoles, à savoir de favoriser rétablissement d'associations d'élèves...

M. Bergeron: Oui.

Mme Blackburn: ...pour la défense de leurs droits, ne serait-ce aussi que pour leur apprendre à participer? J'estime que cela fait partie de l'éducation...

M. Bergeron: À la page 15, en bas, Mme la députée, et à la page 16, en haut, nous exprimions que nous favorisions une large utilisation de différents mécanismes de consultation et, selon les milieux, la formation de conseils étudiants. Même, on privilégie cette formule, ce modèle de participation pour les élèves au lieu de les associer avec des adultes de façon forcée. On pense que cette voie est plus propice à l'expression de la volonté des jeunes.

Mme Blackburn: Vous ne voyez pas d'avantage à les faire siéger - à titre d'expérience pour les élèves concernés - obligatoirement au conseil d'orientation.

M. Bergeron: M. Lapointe veut vous faire part d'une expérience.

M. Lapointe (Normand): Je n'ai pas eu une expérience, c'est une conviction. Nous croyons que c'est plutôt frustrant pour deux élèves, par exemple, dans une polyvalente de 2000 ou 2500 élèves, de devoir représenter ces élèves dans un organisme formé d'adultes qui a ses propres préoccupations. C'est très difficile d'établir des liens, des communications formelles avec un ensemble de 2500 étudiants, évidemment, pour ces représentants. Cela crée de part et d'autre, aussi bien pour ceux qui tentent de représenter que pour ceux qu'ils représentent, un phénomène d'impossibilité de participation adéquate ou de se sentir partie prenante. Nous croyons, à ce moment-là, que c'est plus sage d'avoir un mécanisme formel qui regroupe les étudiants et de mettre en place, dans les milieux, un mécanisme de consultation, par exemple, obligatoire

du conseil étudiant, par le conseil d'orientation, pour les écoles de deuxième cycle du secondaire. Nous croyons que cette association permettrait une meilleure expression des étudiants. Si vous parlez d'enrichissement individuel des participants, cela permettra à plus de participants de vivre une expérience enrichissante dans ce sens, plutôt que de limiter cela à deux.

Mme Blackburn: Sur la question des enseignants, à la page 16, vous vous dites heureux de retrouver un chapitre consacré à l'enseignant. Dans ce chapitre, on énumère un certain nombre de devoirs, au nombre de sept. Ce qui me fait sourire, c'est qu'un de ces devoirs pour l'enseignant est de prendre les moyens appropriés pour développer chez ses élèves le respect des droits de la personne. Comment peut-on faire devoir aux enseignants de développer chez les élèves les droits de la personne dans une école, dans une classe qui a un projet confessionnel, pour un enfant qui n'est pas de même dénomination religieuse et qui a d'autres valeurs, d'autres croyances?

Vous dites dans votre mémoire: Nous souhaitons cependant que l'affirmation des droits et devoirs de l'enseignant soit faite dans un contexte qui permette à la commission scolaire d'exercer des responsabilités qui sont définies nommément à l'article 211 par... l'évaluation. Une fois ces sept devoirs définis, à la page 11, article 19, comment une commission scolaire peut-elle évaluer la performance d'un enseignant? Dans le cas où la démonstration qui serait faite qu'un enseignant n'aurait pas accompli ses devoirs dans l'une ou l'autre des matières, quels sont les recours? Ce n'est pas tout de donner des devoirs, encore faut-il se donner les moyens pour sanctionner...

M. Bergeron: Cette partie sanction, on ne la retrouve pas dans le projet de loi, et nous pensons que c'est heureux. On trouvait positif que l'on reconnaisse un statut avec des droits et une partie devoirs à l'enseignant. C'est un peu comme les chartes des droits, ces énoncés-là. Je pense que la commission scolaire... À moins de cas flagrants de gestes posés allant à l'encontre de ce devoir - il faudrait que ce soient des gestes assez spectaculaires - je pense que ce n'est pas là-dessus que la commission scolaire devrait évaluer la performance d'un enseignant. Comme association, on ne s'est pas attachés à cette partie concernant toute la question des devoirs, pour dire à l'enseignant: Si tu ne fais pas cela, c'est une façon pour nous de te traquer ou de t'évaluer. Ce n'est pas sous cet angle qu'on voulait voir cela. On prend cela un peu comme un code d'éthique, si vous voulez.

Il est bon que le statut professionnel de l'enseignant soit reconnu dans nos écoles au Québec et qu'on dise que, comme société, on fait consensus que les grands encadrements de sa tâche, en termes de droits et devoirs, se situent autour des expressions qu'on voit, qui nous conviennent.

(17 h 30)

Mme Blackburn: Les droits des enseignants sont relativement limités. Ils sont limités à ceux de ne pas enseigner la religion, d'utiliser les modalités d'intervention pédagogiques qui correspondent aux besoins et objectifs visés par chacun des groupes, de choisir les instruments d'évaluation qui leur sont confiés. Alors, je pense que c'est sur cette question que vous estimez aussi avoir un droit de regard.

M. Bergeron: Non, ce n'était pas tellement cela, Mme la députée comme de dire: La commission scolaire qui est responsable de l'acte pédagogique dans un territoire donné... Nous voulons bien que les droits et les devoirs du personnel enseignant soient reconnus dans les écoles, dans les commissions scolaires. Nous voulons aussi qu'ils soient soumis aux encadrements de la commission scolaire parce que le sens même de notre action, ce n'est pas l'équipement, les finances et payer des salaires. C'est vraiment l'acte pédagogique. Et les articles 211 et 213 nous donnent l'obligation d'une commission scolaire. On veut s'assurer que les droits des enseignants et leurs devoirs s'insèrent à l'intérieur de cette mission qu'on a et dont on ne veut pas se voir dépouillés. C'était simplement là-dessus qu'on voulait attirer l'attention.

Mme Blackburn: Quels sont les pouvoirs réels de la commission scolaire? En 211, "la commission scolaire peut adopter, par règlement, des critères sur l'implantation de nouvelles méthodes pédagogiques - cela va parce que cela relève de votre responsabilité - le choix du matériel scolaire et du matériel didactique requis pour l'enseignement des programmes d'études officiels, des programmes d'études adoptés par la commission scolaire. " Quel est le choix réel de la commission scolaire? Est-ce qu'il n'y a pas, au départ, une sélection ou un choix qui est fait par le ministère?

M. Bergeron: II y a ce qu'on appelle des manuels agréés et je pense que, comme société, cela convient. Règle générale, l'éventail est assez large pour permettre aussi aux commissions scolaires d'y aller à la suite des consultations et des analyses, des conseils de nos experts, nos professionnels en pédagogie. Règle générale aussi, l'approche, dans les commissions scolaires, est d'y aller dans une liste non limitative, c'est-à-dire limitative, mais en donnant au moins un choix à notre personnel enseignant. Encore une fois, parfois, c'est pour respecter le projet éducatif d'une école, respecter les orientations pédagogiques, l'évaluation, par exemple. Alors, ce qu'on dit là-dedans, c'est qu'il est bon que ce droit-là s'intègre aux manuels agréés par le ministère de l'Éducation et le pendant dans une commission scolaire. Et, règle générale, encore

une fois les commissions scolaires laissent un certain choix aux écoles là-dedans.

Mme Blackburn: Lorsqu'on parle de gratuité du matériel didactique, est-ce que vous pouvez m'expliquer pourquoi on ne considère pas les cahiers d'exercices comme étant du matériel didactique?

M. Bergeron: Je vais vous exprimer une opinion personnelle. C'est tout d'abord, avec les nouvelles approches pédagogiques, dans le respect des programmes au primaire et au secondaire et tous les outils de référence que l'on peut mettre à la disposition de nos maîtres. Je suis de l'école et de ceux qui pensent que les cahiers d'exercices sont inutiles, ne sont pas obligatoires, ne sont pas nécessaires pour donner l'enseignement au Québec. Sauf que, dans cela, il faut respecter d'autres croyances, respecter un certain rythme d'adaptation de notre personnel enseignant dans beaucoup d'écoles. Mais l'approche pédagogique que nous avons développée avec les nouveaux programmes permet à des enseignants - et une très vaste partie le réalise - d'enseigner sans les cahiers d'exercices. Et je pense que c'est une incitation positive à une bonne dynamique pédagogique que de dire: Les cahiers d'exercices, c'est un peu une béquille, si vous voulez, qui n'est pas essentielle et nécessaire. Donc, l'État ne les paie pas. Voilà l'explication que je vous donne.

Mme Blackburn: Est-ce que les cahiers d'exercices ne sont pas en voie d'être remplacés par les ordinateurs, finalement?

M. Bergeron: Vous avez raison. Certains logiciels font faire les exercices pédagogiques tout à fait corrects. Mais, à tout le moins, le logiciel n'est pas périssable de mois en mois et année après année. On a cet avantage.

Mme Blackburn: M. le Président, j'ai terminé. Vous allez me permettre de dire à M. Bergeron et aux personnes qui l'accompagnent toute mon appréciation pour leur participation aux travaux de cette commission. Dans les travaux des commissions, ce que j'ai pu constater - et je dois dire que c'est la quatrième grosse commission, si je peux m'exprimer ainsi, à laquelle je participe, depuis deux ans - et ce que j'apprécie beaucoup, c'est que les organismes qui se présentent nous permettent de nous rafraîchir la mémoire et d'avoir une vision un peu plus intégrée des questions qui nous sont présentées. Je pense que la constance dont vous faites preuve par rapport aux revendications que vous faites et que vous avez faites antérieurement, au moment des discussions sur les projets de loi précédents, 40 et 3, démontre qu'en dépit des changements qu'il a pu y avoir dans les têtes dirigeantes de l'organisme il y a un souci constant de vous assurer qu'on vous donne les moyens de réaliser au mieux vos obligations touchant l'éducation.

Ce qu'on oublie souvent, c'est la personne, dans une commission scolaire, qui est constamment obligée de rendre des comptes. Je dirais quasiment qu'il n'y en a qu'une et c'est le directeur général. C'est la personne dont on peut remettre en question le contrat d'engagement, les conditions d'engagement. Quand on parie d'im-putabilité et d'évaluation, je pense que c'est vraiment le directeur général qui en est le plus souvent et le plus systématiquement l'objet. C'est pourquoi il faut être à l'écoute des revendications des directeurs généraux parce que lorsqu'ils réclament un certain... On ne peut pas leur demander d'être "imputables" vis-à-vis de l'autorité de la commission scolaire et du ministre s'ils n'ont pas les pouvoirs qui leur permettent de réaliser au mieux la ou les missions qui leur sont confiées. Je vous dirai que c'est pourquoi j'ai été assez attentive, que j'ai lu votre mémoire avec beaucoup de soin. Encore une fois, je vous remercie de votre participation.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, Mme la députée de Chicoutimi.

Afin d'équilibrer le partage du temps entre les deux formations politiques, je vais demander s'il y a une autre intervention du côté ministériel avant de demander au ministre de conclure. Est-ce qu'il y a une autre intervention du côté ministériel?

M. Tremblay (Rimouski): M. le Président, je voudrais seulement faire une brève intervention. La compréhension que j'ai du rapport que vous avez déposé, c'est une espèce de remise en question des pouvoirs, le pouvoir d'arbitrage que le ministre devrait posséder ou devrait avoir et aussi le pouvoir de planification que le ministère de l'Éducation devrait, à mon sens, détenir pour pouvoir planifier l'ensemble du système éducatif au Québec. Vous arrivez avec une affirmation qui m'intrigue. À la page 4 de votre rapport, vous dites: Aujourd'hui, les citoyens veulent exercer, par leurs institutions locales, une influence plus directe et cherchent à se réapproprier des responsabilités, etc. Je voudrais savoir sur quel critère ou encore sur quel rapport ou quel sondage vous vous basez pour affirmer cela.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Bergeron.

M. Bergeron: II faut faire référence aux premières parties de notre texte où on part du regroupement de parents qui géraient totalement leur système d'éducation, pour aller à l'autre pendant de l'horloge où le ministère ou l'État a pris davantage de place. On n'a pas d'autres sondages scientifiques que la consultation qui a eu lieu à l'occasion du livre vert. Je faisais référence, tantôt, au sondage SORECOM qui a eu lieu lors de l'étude des projets de loi 40 et 3 et

à d'autres sondages publics, si vous voulez, les assemblées générales de la fédération des commissions scolaires ou les assemblées de cadres scolaires, de directeurs généraux, où, de façon unanime, vous retrouvez une manifestation. Vous avez des assemblées générales de commissaires qui représentent beaucoup de personnes et ces gens-là ont des mandats de leur conseil respectif élu pour aller revendiquer ce genre de prise en charge, de prise en main de leur gestion et de leur politique en éducation.

On n'a pas de sondage scientifique pour vous dire qu'en date du dernier mois telle était la volonté de la population, mais il y a quand même certaines expressions, comme je vous le dis, des différentes associations partenaires en éducation qui le démontrent. Je pense que la consultation sur le livre vert l'avait démontré également, il y a une dizaine d'années. Nous pensons qu'il y a une constante dans cela. Je ne pense pas qu'un législateur puisse nous adresser des reproches parce que les milieux veulent être dynamiques, ont une volonté de se prendre en main, de retrousser leurs manches et de travailler. Si on affirmait le contraire et qu'on voulait donner tout le paquet à Québec, vous seriez davantage inquiets.

C'est sûr que c'est le juste équilibre entre nos revendications et certaines visées du ministère qui apportera plus d'efficacité à nos services d'école, mais il reste qu'on a foi en nous et on pense que le réseau a atteint, comme on le disait, une certaine maturité. On est prêt à en prendre davantage et, bien sûr, encore une fois, à faire une concertation et à respecter le fait que le ministère de l'Éducation ait, entre autres, certains grands encadrements à nous donner - on n'a pas remis cela en cause - mais on lui demande de faire davantage confiance au milieu. En réponse à votre question, c'est la constante qui se dégage des dernières années, en tout cas de nos membres, qui nous fait dire qu'on doit prendre cette expression, parce que la consultation a été très sérieuse pour en arriver à ce mémoire.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. Bergeron. En conclusion, de brèves remarques du ministre de l'Éducation.

M. Ryan: Je serai très bref. Je pense que, dans l'ensemble, il y a certains points à clarifier au sujet du partage des responsabilités. Sur l'ensemble des autres points, je pense qu'il y a un accord assez considérable qu'on doit souligner. Les modalités peuvent faire l'objet de précisions ici ou là, mais, dans l'ensemble, je crois qu'il y a une concordance très grande.

Sur la question des pouvoirs et des responsabilités, je serais porté à proposer à votre association un double exercice complémentaire, si vous me permettez cette suggestion. Premièrement, si vous pouviez faire une revue de tout ce qui vient préciser et renforcer les pouvoirs des commissions scolaires dans le projet de loi, je pense que vous feriez un acte de vérité et de justice qui compléterait l'examen très intéressant que vous avez fait, mais qui demeure incomplet à mon humble point de vue.

Deuxièmement, si vous pouviez nous adresser une note complémentaire. Vous dites qu'il faudrait réviser les pouvoirs, qu'il faudrait remettre des pouvoirs aux commissions scolaires. Lesquels? Il faudrait que ce soit peut-être plus précis, parce que, dans votre mémoire, il n'y a pas d'illustration de cela, il y a seulement des remarques très générales et on ne peut pas légiférer dans la généralité, il faut légiférer autour d'objets très concrets. S'il y a des points dans les attributions qui incombent présentement ou incomberaient au ministre de l'Éducation ou au gouvernement dont vous êtes convaincus qu'ils devraient être transférés aux commissions scolaires, si vous pouviez les énumérer et dire pourquoi dans chaque cas, je pense que cela enrichirait la discussion. Nous sommes prêts à écouter les représentations parce que nous n'avons pas d'autre idée faite que celle qui nous vient de l'expérience vécue. Il est évident qu'il y a des choses que j'ai constatées depuis deux ou trois ans que je n'étais pas placé pour constater de la même manière auparavant. En toute honnêteté, je suis obligé de les enregistrer. S'il y a des points, sur ces deux questions, sur lesquels vous pouviez nous adresser des observations complémentaires, ce serait très intéressant.

Je rappelle en terminant, pour le service de la vérité, que j'ai toujours dit aux commissions scolaires, depuis déjà quatre ou cinq ans, que je ne voyais pas de grandes possibilités de dévolution de pouvoirs du ministère de l'Éducation aux commissions scolaires. Je l'avais dit du temps où M. Chagnon était le président de l'association - il est maintenant député. Les commissions scolaires venaient nous dire: On veut avoir une dévolution de pouvoirs et je demandais: Lesquels? Je vous pose la question encore aujourd'hui. Si vous pouviez nous transmettre un complément de mémoire là-dessus, accompagné de toutes les implications que vos recommandations pourraient comporter, je pense que cela pourrait nous aider à aller plus au fond du problème, quant à être engagé.

Cela dit, je vous remercie très cordialement non seulement de votre mémoire, mais aussi de votre collaboration continuelle au travail de l'éducation.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci beaucoup, M. le ministre. Merci beaucoup, M. Bergeron. La commission permanente de l'éducation suspend ses travaux jusqu'à 20 heures, ce soir, alors qu'elle accueillera l'Association des directeurs et directrices d'école de ta région 03 et l'Association des administrateurs des écoles catholiques du Québec.

(Suspension de la séance à 17 h 44)

(Reprise à 20 h 13)

Le Président (M. Parent, Sauvé): À l'ordre, s'il vous plaît!

Si vous voulez prendre place. J'invite les membres de la commission à prendre place. Nous accusons déjà près de onze minutes de retard sur nos travaux. Je vous rappelle que nous avons une dure journée demain, qui devrait normalement commencer à l'heure juste.

La commission permanente de l'éducation poursuit ses travaux et accueille, comme premier invité ce soir, l'Association des directeurs et des directrices d'école de la région 03. Alors, ils sont représentés par leur président, M. Michel Longchamps. M. Longchamps, bonsoir, et au nom des membres de la commission permanente de l'éducation je vous souhaite la bienvenue. Je vous remercie aussi de venir apporter un éclairage sur le projet de loi 107.

Alors, M. Longchamps, il y a une heure qui est répartie, d'une part, pour entendre votre mémoire et, d'autre part, pour discuter avec vous. Nous vous suggérons une façon de procéder, mais libre à vous de l'accepter ou de la refuser. Je veux que vous vous sentiez bien à votre aise. Étant donné que tous les membres de la commission ont reçu votre mémoire, et je prends pour acquis qu'ils l'ont lu, vous pourriez peut-être en faire un résumé ou le lire, de la façon que vous voulez. Après cela, nous allons répartir le temps également entre les deux formations politiques. Ce sera un moment où nous allons discuter entre nous de l'objet des préoccupations qui sont ressorties de votre mémoire. Alors, peut-être que vous pouvez prendre 20 minutes pour le présenter, ou moins, et la balance du temps sera répartie entre les membres des deux formations politiques.

M. Longchamps, avant de commencer, pour les besoins du Journal des débats et aussi pour la connaissance des membres de la commission, j'aimerais que vous nous présentiez les gens qui vous accompagnent et après, enchaîner immédiatement avec la présentation de votre mémoire.

Association des directrices et des directeurs d'école de la région 03

M. Longchamps (Michel): Merci beaucoup, M. le Président. Il me fait plaisir de vous présenter les membres qui m'accompagnent: d'abord, à ma gauche, M. Robert Giroux qui est le vice-président de notre association. Il vient de la commission scolaire de Baie-Saint-Paul.

Une voix: Commission scolaire du Gouffre.

M. Longchamps: Du Gouffre, M. Adalbert Guay, ici à ma droite, qui est vice-président également aux relations du travail, qui vient de la commission scolaire Louis-Fréchette et qui travaille comme directeur adjoint à l'école polyvalente Benoît-Vachon de Sainte-Marie; Mme Huguette Chevalier, qui est directrice de la commission scolaire Beauport.

Une voix: De Côte-de-Beaupré.

M. Longchamps: De Côte-de-Beaupré.

Le Président (M. Parent, Sauvé): La belle côte de Beaupré.

M. Longchamps: La belle côte de Beaupré, et M. Louis-Georges Héroux, qui est directeur de la commission scolaire...

Une voix: Grand-Bois.

M. Longchamps: Grand-Bois.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, madame et messieurs, soyez les bienvenus et M. Longchamps, nous vous écoutons.

M. Longchamps: Étant donné que je crains d'oublier des points que mes membres considèrent comme importants, si vous me pardonnez, je me permettrai une lecture.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Allez-y, soyez bien à l'aise. Vous venez ici pour aider la commission, ce n'est pas la commission qui est ici pour vous aider.

M. Longchamps: Nous n'avons pas la prétention de tout régler, mais nous avons quand même le plaisir de venir vous livrer une réflexion de nos membres, à la suite d'une vaste consultation qui a été menée. Je dois vous dire que nous sommes très fiers du style de consultation que nous avons menée auprès de nos membres. Dans un premier temps, nous avons rencontré les auteurs du projet de loi 107, du moins ceux qu'on prétendait avoir participé à sa préparation, qui sont venus nous expliquer l'esprit du projet de loi. Dans un deuxième temps, nous avons rencontré les membres de notre association pour leur faire part de l'exposé qui nous avait été livré. Ces membres nous ont livré leur première réaction. À la suite de cette première réaction, nous avons préparé un avant-projet, lequel a été en consultation, très précise, auprès de chacun de nos membres, et le résultat de leur réflexion apparaît dans le document que nous allons vous présenter.

L'Association des directrices et des directeurs d'école de la région 03, représentant quelque 500 membres, tient à vous présenter ses observations et ses recommandations à l'égard du projet de loi 107 déposé par le ministre de l'Éducation à l'Assemblée nationale en décembre 1987. Je crois que ce n'est une surprise pour personne de constater que les directeurs d'école sont un peu las de discuter sans résultat, des mêmes sujets depuis plusieurs années. On se

rappelle les délibérations et les consultations qui ont été menées au sujet de la loi 71, de la loi 40 et de la loi 3; maintenant, c'est le projet de loi 107. Ils ne sont pas non plus sans inquiétude face à une remise en question de l'autonomie nécessaire à une gestion efficace des écoles. Après avoir été qualifiés tour à tour de "pivots du système", de "maîtres d'oeuvre" et "d'artisans du partenariat en éducation", plusieurs ont le sentiment que le projet de loi 107 les réduit à un simple rôle de gérants-exécutants d'une entreprise.

L'école qu'ils dirigent devient une entité très contrôlée, trop bien contrôlée. On veut la contrôler de partout: par le haut et par le bas. Par le haut, le ministère de l'Éducation et la commission scolaire conservent pratiquement tous les pouvoirs de décision. Par le bas, le projet de loi impose des mécanismes qui ralentissent souvent le fonctionnement de l'école par une politisation que l'on qualifie d'extravagante. À notre point de vue, l'école a besoin d'être oxygénée. Elle a besoin d'un climat de confiance qui favorise l'atteinte des objectifs recherchés par tous les agents de l'éducation.

Dans nos discussions, nous continuons également à nous interroger sur les nombreuses vocations de l'école publique. On sait qu'elle est devenue la responsable de tous les maux et de tous les remèdes. Les directions d'école, en plus des volets éducatifs, doivent tenir compte des volets socio-affectif et sociocommunautaire de la clientèle provenant d'une société qui est en constante évolution. Ils doivent aussi compenser pour les faiblesses de la société et même de ia famille. On se pose la question: Jusqu'où devra-ton aller?

Il est de plus en plus évident pour nos membres que l'accroissement des difficultés connues par l'école est Inversement proportionnel au temps que les directeurs d'école ont pu consacrer, ces dernières années, au volet pédagogique de leurs fonctions. Notre intervention d'aujourd'hui se veut positive dans le sens que nous voulons une bonification, et les propositions ou recommandations que nous faisons vont dans le sens d'une amélioration des textes qui nous ont été déposés et sont entièrement axées sur une amélioration possible et souhaitée de cet environnement éducatif où se situe principalement notre action professionnelle.

Pour faciliter l'expression et la compréhension de notre point de vue, nous avons choisi de les Indiquer en suivant l'ordre même des chapitres du projet de loi et de livrer, pour chacun d'eux, les observations et les recommandations qui font consensus parmi nos membres. Ces derniers, comme je vous le disais tout à l'heure, ont tous eu l'occasion de s'exprimer, soit verbalement ou par écrit, sur ce projet de loi. Nous vous demandons de considérer sérieusement les propositions des directrices et directeurs d'école de la région 03 à l'endroit de chacun des chapitres du projet de loi. Nos opinions manifes- tent la nécessité d'une autonomie suffisante à l'exercice de notre rôle. Nous voulons être dispensés de toute tracasserie politique ou de contrôles tatillons qui sont loin de nous aider à travailler à l'atteinte des objectifs mêmes de l'éducation des jeunes qui nous sont confiés.

Le chapitre I du projet de loi nous apparaît bref et bien présenté. Les changements et les précisions qu'il fournit à l'égard de la clientèle sont clairs. Cependant, nous recommandons que l'âge limite de fréquentation soit précisé davantage à l'article 1. En regard des articles 14 et 15, nous recommandons que la responsabilité de la fréquentation scolaire d'un enfant doive incomber d'abord à lui-même et à ses parents; que la directrice ou le directeur de l'école ait la responsabilité de contrôler l'absence des élèves, de signaler aux parents les absences répétées de leur enfant et de les aviser de prendre les moyens nécessaires pour que leur enfant fréquente assidûment l'école. Nous recommandons également que le Directeur de la protection de la jeunesse jouisse des pouvoirs et des moyens qui lui permettent d'agir rapidement et efficacement dans de tels cas.

Nous constatons que le chapitre II a le mérite de reconnaître le rôle important et déterminant de l'enseignante ou de l'enseignant dans le développement de l'enfant.

À l'article 19, 7°, nous comprenons que le législateur confirme le droit de regard de la directrice ou du directeur d'école sur le travail de l'enseignante ou de l'enseignant et sur la façon de remplir ses obligations.

Nous recommandons, cependant, que l'article 16, 2° soit complété et se lise comme suit: 2° "de choisir les instruments d'évaluation des élèves qui lui sont confiés afin de mesurer et d'évaluer constamment et périodiquement les besoins et l'atteinte des objectifs par rapport à chacun des élèves qui lui sont confiés en se basant sur les progrès réalisés." Nous aimerions voir ajouter: "le tout conformément aux politiques définies par la direction d'école ou par la commission scolaire."

Nous recommandons que le deuxième paragraphe de l'article 18 soit complété et se lise comme suit: "Le refus de dispenser l'enseignement moral et religieux d'une confession vaut jusqu'à ce que le directeur de l'école reçoive un avis écrit à l'effet contraire." Nous aimerions voir ajouter: "pour l'année scolaire suivante".

Nous accordons une très grande importance à l'ensemble du chapitre III. Nous notons - du moins les membres nous le manifestent - une tendance du législateur vers la politisation de cette instance qu'est l'école. Nous constatons également qu'il est attribué à la directrice et au directeur d'école beaucoup de fonctions, mais qu'on lui reconnaît bien peu de droits, pas même celui de participer au choix de son adjoint ou de son adjointe.

Nous nous opposons, comme directeurs d'école, à la multiplication des écoles composées de plusieurs immeubles - voir à l'article 39.

Nous exigeons que les critères de sélection établis dans les politiques de gestion issues des règlements régissant nos conditions d'emploi soient considérés comme suffisants pour choisir la directrice ou le directeur d'une école. Il en va de même concernant la nomination d'une directrice adjointe ou d'un directeur adjoint - voir ies articles 40 et 41. Nous sommes également en désaccord avec l'existence d'un conseil d'orientation imposé par la loi.

À l'article 46, nous voulons signaler au législateur que le plus beau plan d'intervention adapté à un élève handicapé a peu de chances de réussir si ce plan ne peut s'appuyer sur des ressources appropriées et suffisantes.

Nous sommes pleinement d'accord avec l'article 47 dont le contenu est estimé très important et concordant avec les responsabilités de la direction pédagogique confiées à la directrice ou au directeur d'école.

À l'article 48, nous voulons rappeler aux auteurs du texte de la loi que c'est l'un des rôles de la directrice et du directeur d'école que d'assurer l'application des conventions collectives et des règlements. À notre point de vue, on n'a donc pas à insister sur les ressources humaines affectées à une matière en particulier, comme l'enseignement moral et religieux. Nous acceptons les termes de l'article 53 à condition, bien sûr, que les fonctions déléguées ou confiées à la directrice ou au directeur d'école soient compatibles avec sa profession.

Nous recommandons que le deuxième paragraphe de l'article 35 précise que le rôle communautaire de l'école soit défini par les politiques de la commission scolaire; qu'à l'article 36 on remplace l'expression "projet éducatif' par une autre expression pour éviter toute confusion. Aux articles 37 et 38, nous recommandons que l'on fasse abstraction de tout ce qui concerne le conseil d'orientation. À l'article 39, nous recommandons que le nombre maximal d'immeubles, pour constituer une école, soit de deux. Nous recommandons également qu'il soit spécifié que la commission scolaire doit nommer une ou un responsable qualifié pour le deuxième immeuble, si le ratio de la clientèle totale des deux immeubles ne permet pas la nomination d'une directrice adjointe ou d'un directeur adjoint.

Nous recommandons que l'article 40 soit modifié et se lise comme suit: "Le directeur de l'école est nommé par la commission scolaire selon les critères de sélection établis par les règlements régissant les conditions d'emploi des directeurs d'école." Il en va de même pour l'article 41, de façon concordante. Nous recommandons qu'on ajoute également à l'article 41 le texte suivant: "Le directeur d'école participe à la sélection d'un directeur ou d'une directrice adjointe", car c'est lui son supérieur immédiat.

Nous recommandons que, dans l'établissement d'un plan d'intervention adapté à un élève handicapé, la consultation de l'élève ne soit pas imposée comme condition sine qua non à l'article 46; que le deuxième paragraphe de l'article 48 soit enlevé du texte puisque la directrice ou le directeur d'école doit tenir compte des qualifications et de la préparation de chacun des membres du personnel enseignant avant de l'affecter à une matière quelconque, dont l'enseignement moral et religieux. Par ailleurs, selon l'opinion de nos membres, le règlement du comité catholique est suffisamment clair à ce sujet.

Nous recommandons que l'article 50 déclare ies besoins de l'école prioritaires à toute autre utilisation; que l'article 51 fasse le silence sur l'obligation de consulter le conseil d'orientation concernant le budget annuel de l'école; que la directrice ou le directeur d'école soft protégé contre les poursuites en justice pour un acte accompli de bonne foi dans l'exercice de ses fonctions; que toute allusion au conseil d'orientation soit éliminée du texte du projet de loi 107. Nous ne voyons pas la pertinence d'imposer ce mécanisme par force de loi.

Nous n'avons cependant aucune objection au fait que le milieu se dote d'un mécanisme de nature semblable à celle d'un conseil d'orientation, lorsque le milieu en sent le besoin. Si tel est le cas, ce genre d'organisme doit être, à notre point de vue, rattaché exclusivement et uniquement à l'école, seule mandataire.

Nous recommandons que l'article 93 soit aboli. Il en serait de même pour l'article 77, s'il devait demeurer. Nous ne pouvons imaginer les circonstances où ces articles pourraient s'appliquer. Il serait dommage, par exemple, que la pratique amène des situations conflictuelles au sein d'un même organisme. On voit mal, par exemple, le comité d'école poursuivre une enseignante ou un enseignant, un directeur ou une directrice, un commissaire où même le ministre.

Nous recommandons que les articles 94, 95 et 96 soient abolis, car nous croyons que ces articles font l'objet de règles de gestion interne. Je pense que toutes les personnes indiquées dans ces articles seront toujours les bienvenues dans nos écoles.

Concernant les autres chapitres, certaines articles ont été également analysés par nos membres et méritent des commentaires. Nous avons cependant choisi de souligner ceux qui ont une influence sur notre vécu.

À l'article 163, nous nous opposons à l'obligation faite à l'exécutif de faire entériner toutes ses décisions par le conseil des commissaires, ce qui, à notre point de vue, alourdit la procédure.

Les articles 207 à 210 sont inapplicables dans le contexte actuel des restrictions budgétaires. À notre avis, l'école devrait offrir l'enseignement religieux de la majorité des élèves qui la fréquentent.

Nous recommandons que le "peut" de l'article 161 soit remplacé par "doit" dans le premier paragraphe. Nous considérons qu'il est du devoir de l'employeur que de contracter une assurance-responsabilité au bénéfice de ses employés. (20 h 30)

Nous recommandons que toutes les directrices et tous les directeurs d'école d'une commission scolaire fassent partie du comité de gestion de la commission scolaire par rapport à l'article 165. À notre point de vue, ce comité ne doit pas se limiter à la consultation. Les directrices et les directeurs d'école doivent participer à l'élaboration des politiques de la commission scolaire.

Nous recommandons que les directrices ou les directeurs d'école soient représentés au comité consultatif des services aux élèves handicapés, à l'article 167, puisque le plan d'intervention adapté à chacun des élèves relève de la directrice ou du directeur d'école, à l'article 46. Aussi, que le troisième paragraphe de l'article 167 soit aboli. L'expérience nous a démontré que les préoccupations de ces organismes et celles de l'école sont souvent contradictoires.

Nous recommandons que le dernier paragraphe de l'article 169 soit également aboli. Nous ne pouvons concevoir l'application de cet article où le comité jugerait du plan d'intervention particulier à un élève handicapé établi par un directeur ou une directrice d'école pour en faire rapport à la commission scolaire.

Nous recommandons que les articles 227, 228 et 229 ne fassent pas obligation aux directrices et aux directeurs d'école d'organiser des services pour une clientèle autre que la clientèle régulière de leur école; que ies articles 233 et 234 ne fassent pas partie de la Loi sur l'instruction publique, mais plutôt d'un règlement qui traite des conditions d'emploi de ce type de personnel.

En guise de conclusion, nous voulons répéter au législateur que la directrice ou le directeur d'école est très préoccupé par l'éducation des jeunes. L'école a besoin de ressources, c'est sûr. Elle a surtout besoin de respirer à l'aise pour remplir le rôle qu'on attend d'elle. Nous ne pouvons accepter qu'elle soit embarrassée par des artifices politiques et administratifs qui, bien souvent, n'ont rien à voir avec sa mission éducative.

De quoi les élèves ont-ils besoin? Ils ont besoin d'une école agréable à fréquenter, agréable à vivre, d'une école où des services sont de qualité, d'une école où on retrouve du personnel accueillant, ouvert, professionnel, dévoué et heureux d'y travailler. Nous sommes convaincus que ce type d'école est réalisable si on lui donne suffisamment d'oxygène. Ne l'étouffons-nous pas par le souci de contrôles excessifs?

L'oxygène nécessaire à une école pourrait peut-être se traduire par la confiance qu'on y mettrait en lui assurant une marge de manoeuvre adéquate et en appuyant ceux qui y oeuvrent. La clientèle ne s'en porterait que mieux dans un organisme rendu efficace pédagogiquement.

Nous réclamons cet environnement favorable à une école de qualité, une école basée sur la pédagogie et non sur la politique. La directrice ou le directeur ne veut pas être obligé de négocier avec des instances de tous ordres les pouvoirs dont elle ou il a besoin pour assurer les responsabilités qui lui sont confiées.

Les directrices et les directeurs d'école de l'ADER-03 veulent clairement diriger leur école avec !a plus grande autonomie possible à l'intérieur des cadres fixés par la commission scolaire dont ils relèvent pour favoriser la meilleure éducation possible. Merci.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. Longchamps. Dans un premier temps, je reconnais le député d'Argenteuil, ministre de l'Éducation. M. le ministre.

M. Ryan: M. Longchamps, il me fait plaisir de vous saluer ainsi que la délégation qui vous accompagne. Je vous remercie des propositions que vous apportez avec votre mémoire. J'en ai pris connaissance avec beaucoup d'intérêt. Certaines me semblent aller de soi et pourront sûrement être retenues.

Vous dites, par exemple, que l'exécutif de la commission scolaire ne devrait pas être sujet à ce que toutes ses décisions soient entérinées par la suite par le conseil des commissaires. Cela nous a été dit à une couple de reprises déjà aujourd'hui. Je pense que c'est un point dont le bon sens saute aux yeux. Si le comité exécutif devait voir toutes ses décisions soumises à la confirmation de la commission scolaire, autant ne pas en avoir, parce qu'on double l'utilisation du temps. Je pense que c'est une chose qui s'explique très bien.

À un moment donné, vous demandez que les directrices et les directeurs participent à l'élaboration des politiques de la commission scolaire et que la table de gestion dont il est question dans le projet de loi ne soit pas simplement de consultation. Si vous relisez l'article 165 en conjonction avec l'article 52, vous allez voir que c'est exactement ce que nous proposons. À l'article 165, c'est le moyen qui est proposé pour permettre de réaliser la participation des directeurs et directrices à l'élaboration des politiques de la commission scolaire. Par conséquent, nous sommes d'accord avec vous sur ce point et c'est bon que vous nous l'ayez rappelé.

À un autre moment, vous dites que les directeurs et directrices d'école devraient être représentés au sein du comité consultatif qui devra être formé auprès de la commission scolaire pour les élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage. C'est une suggestion qui a été faite ce matin également et que je retiens avec beaucoup d'intérêt. Je pense, étant donné les

obligations qu'on crée pour le directeur et la directrice d'école d'établir un plan pour chaque élève en difficulté, que le moins qu'on puisse reconnaître en retour, c'est qu'il soit présent dans le comité qui sera chargé de conseiller la commission scolaire en ces matières. Ce sont des exemples que je donne, il y en a d'autres également. Pour toutes ces suggestions qui permettront de bonifier le projet de loi 107, je vous remercie sans aucune espèce d'arrière-pensée ou de réserve.

Il y a d'autres idées dans votre mémoire qui me surprennent quelque peu et je vais vous demander des explications avant de vous faire part d'une opinion, s'il y a lieu. Lorsque vous dites que vous ne voudriez pas de conseil d'orientation dans l'écrle - ce n'est pas exactement ce que vous dites, vous dites que vous ne voudriez pas que ce soit prescrit par la loi - cela veut dire, si je comprends bien, que ce n'est pas nécessairement mauvais à vos yeux, mais que vous aimeriez mieux que ce soit décidé dans chaque endroit. Si on a dans un endroit un directeur qui est un petit potentat, qui veut tout diriger lui-même, qui ne veut avoir l'avis de personne, qu'est-ce qu'on fait? Est-ce qu'il y a vraiment des inconvénients, un danger de politisation à mettre une formule aussi simple, aussi élémentaire dans un texte de loi?

M. Longchamps: Concernant le conseil d'orientation, nous ne voyons pas d'objection à ce que cela puisse exister, mais, comme bien d'autres organismes ou structures qui peuvent être implantés, nous pensons qu'il n'est peut-être pas nécessaire d'imposer des choses par la loi. Le conseil d'orientation est un moyen, mais peut-être y a-t-il autre chose que les milieux pourraient se donner pour atteindre les mêmes objectifs ou fonctionner un peu mieux. À notre point de vue, le conseil d'orientation, pour vous traduire le plus simplement possible l'opinion de bien des gens, nous paraît comme une minicommission scolaire rattachée aux écoles. Il y a des pouvoirs qui sont donnés au directeur d'école, mais on dirait qu'on regrette un peu de les lui avoir donnés. On se donne toutes sortes de mécanismes par en arrière. Par exemple, en matière de budget, il faut aller au conseil d'orientation. Cela nous paraît comme une duplication.

Nous croyons qu'il est important - et on y croit sincèrement - que l'école puisse avoir un dialogue avec son milieu. Je pense que personne ne va le contester. Mais est-ce qu'on doit implanter ce dialogue par force de loi? Nous ne pensons pas, en tout cas, pour le peu de contact ou du moins les contacts que nous avons assez fréquemment, que les parents désirent absolument administrer l'école. Nous pensons que les parents sont drôlement intéressés à pouvoir influencer la vie de l'école et les orientations de l'école. Ils sont intéressés à avoir de l'information de l'école, mais, à notre point de vue, nous ne pensons pas qu'ils soient intéressés nécessairement à administrer l'école.

Si on prend seulement un exemple, l'aspect des budgets ou encore l'aspect des règlements disciplinaires, mettez-vous dans la peau d'un directeur d'école et regardez ce qu'il faut faire pour faire adopter un règlement disciplinaire dans une école. Les conventions collectives vous obligent à consulter chacune des parties, chacun des secteurs du personnel concernés, les enseignants, les professionnels dans l'enseignement. Si vous êtes dans une école secondaire, je pense qu'il va de soi que vous consultiez également le conseil étudiant. Il y a le comité d'école. Ensuite, il faudrait soumettre tout cela au conseil d'orientation. De là, il faudrait soumettre cela à la commission scolaire pour fins d'approbation.

On pense qu'il y a moyen d'avoir des moyens, des mécanismes et des structures en ce qui concerne chacune des écoles qui permettraient la participation des parents, mais pas nécessairement un article de loi.

M. Ryan: Vous voudriez qu'on recule par rapport à la loi actuelle. Dans la loi actuelle, il y en a déjà des mécanismes qui sont prévus. Le comité d'école, c'est prévu.

M. Longchamps: Les comités d'école, on n'en parle pas. Si vous avez remarqué dans notre mémoire, nous ne parlons pas des comités d'école, parce que nous sommes d'accord. Disons que c'est une réalité avec laquelle nous composons présentement. Je pense qu'il faut un mécanisme. Maintenant, est-ce qu'un milieu ne pourrait pas se donner quelque chose d'autre ou la même chose, mais sur une base volontaire à partir de besoins ressentis dans le milieu?

M. Ryan: Seulement une autre question, si vous me le permettez. Vous dites que des dispositions prévoyant une certaine contribution de l'école à la vie communautaire devraient être enlevées du texte de loi. Cela ne devrait pas concerner le directeur ou la directrice de l'école. Pouvez-vous m'expliquer votre position? Cela m'étonne un petit peu.

M. Longchamps: Concernant les services communautaires, bien, nos membres craignent que, par l'article du projet de loi tel que défini, ils ne deviennent un peu les responsables d'à peu près tout ce que la communauté ne veut pas avoir. Nous avons connu l'expérience des garderies. Est-ce qu'on devra devenir tantôt les directeurs des loisirs de la municipalité? Alors, les réflexions vont jusque-là, dans le sens où nous ne connaissons pas la portée du texte de loi et où nos directeurs d'école considèrent qu'ils ont une charge suffisamment lourde sans avoir à se préoccuper de tous les autres problèmes municipaux ou sociaux que la société voudrait donner à l'école. On pense que notre devoir,

notre travail en ce qui concerne l'éducation est suffisamment lourd dans le cadre actuel.

M. Ryan: Merci.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Est-ce qu'il y a d'autres interventions du côté ministériel? M. le député de Charlevoix, excusez-moi.

M. Bradet: Merci, M. le Président. Alors, permettez-moi, M. le Président, de saluer de mes commettants, de vous saluer tous, messieurs, mais particulièrement les gens de la côte de Beaupré. Vous devez savoir que Charlevoix n'est pas seulement reconnu pour la qualité de son tourisme, mais aussi pour l'excellence de l'éducation qu'on y donne. Nos élèves sont toujours bien cotés quand ils viennent ici à Québec. Quant à M. Giroux, je n'ai pas besoin de vous dire que j'ai un lien direct avec lui, c'est le directeur de mon épouse. Je vais faire attention à mes questions, M. Giroux.

Une question générale. À la page 2 de votre mémoire, vous dites, au deuxième paragraphe: "Nous continuons à nous interroger sur les nombreuses vocations de l'école publique. Elle est devenue responsable de tous les maux et de tous les remèdes." Vous continuez en parlant au volet socio-affectif et de la direction d'école, etc. Comment conciliez-vous cela avec le fait que, quand on regarde les résultats des examens du ministère, on trouve à peu près le contraire, c'est-à-dire que les élèves de l'école publique y réussissent bien? Cela devrait plutôt être le contraire.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Monsieur.

M. Longchamps: Je dois dire que je trouve votre intervention très intéressante, je suis un des défenseurs de cette théorie, parce qu'elle se traduit concrètement dans la pratique. Je dois dire que l'école publique reçoit actuellement de très bons élèves et ces très bons élèves font leur marque. On n'a qu'à faire le suivi, comme on l'a fait dans notre milieu, au niveau collégial et on voit les résultats qui sont très probants. Vous admettrez également que l'école publique n'a pas le choix de sa clientèle, elle reçoit les enfants de la société. Dans notre société, vous comprendrez facilement que nous en avons de toutes les gammes et de toutes les couleurs. C'est clair, pour moi en tout cas, que l'école publique a le mérite de pouvoir traiter avec le plus d'efficacité possible tous les élèves qui lui sont présentés. C'est vrai que des élèves de l'école publique réussissent très bien aux examens du ministère, j'en conviens, mais nous avons aussi, II faut l'admettre, des élèves qui y réussissent moins bien, parce qu'ils n'ont peut-être pas eu l'avantage d'avoir les mêmes qualités que ceux qui y réussissent très bien.

Lorsqu'on parle de toutes les vocations, en fait, je pense qu'il n'y a de cachette pour personne. Ce qu'on veut dire, c'est que, dès qu'il y a un problème, il y a une tendance à s'orienter vers l'école pour sensibiliser les gens, qu'il s'agisse de l'éducation sexuelle, qu'il s'agisse de tout ce que vous voudrez. De toute façon, dans nos remarques, on fait allusion beaucoup plus aux conclusions des états généraux, lorsqu'on a parlé de l'école fourre-tout à un moment donné.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le député de Charlevoix. (20 h 45)

M. Bradet: Une autre question, M. le Président. Vous comprendrez que je vous pose une question sur le volet enseignant. À la page 5, vous dites: "nous comprenons que le législateur - au deuxième paragraphe - confirme le droit de regard de la directrice ou du directeur d'école sur le travail de l'enseignante ou de l'enseignant et sur sa façon de remplir ses obligations." Est-ce que vous sentez, vous de votre groupe, que, de plus en plus, il y a une demande de souplesse face aux enseignants? C'est-à-dire que le corps enseignant vieillit. On dirait qu'il est un peu démotivé. Très souvent, quand on rencontre des enseignants, ils nous disent: C'est de moins en moins souple dans nos écoles. Est-ce que ce sont seulement des contraintes syndicales? Si on veut donner cet enseignement de qualité, d'abord, l'enseignant doit être heureux dans son milieu.

Est-ce que vous sentez, partout dans la région 03, qu'il y a de moins en moins de souplesse et qu'il y a beaucoup plus de critères, de minutes ou de choses comme celles-là qui enlèvent à l'enseignant son professionnalisme?

M. Longchamps: Nous sommes très convaincus qu'un bon enseignant est un enseignant heureux de faire son travail. À ce moment-là, si l'enseignant est heureux de faire son travail, normalement - en tout cas, les enseignants que l'on connaît ne comptent pas leur temps de façon générale. Mais je crois personnellement que les enseignants ont cessé d'être heureux, comme n'importe quelle personne, quand ils ont commencé à compter. Le riche n'est jamais assez riche, etc. Je pense que c'est un peu un malheur. Et je vous assure, lorsqu'on vient pour faire la distribution des tâches des enseignants au début de l'année et qu'on est obligé de compter cela en minutes, qu'il faut le faire. Je trouve que cette comptabilisation est une chose pénible.

Maintenant, vous dites: Est-ce qu'ils manquent de souplesse? Peut-être. Mais il faut dire qu'on a des gens qui commencent à être essoufflés aussi.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Alors je vais maintenant reconnaître le porte-parole officiel de l'Opposition en matière d'éducation, Mme la députée de Chicoutimi. Mme la députée.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. Longchamps, madame, messieurs, il me fait plaisir de vous souhaiter la bienvenue au nom de l'Opposition officielle et de vous remercier aussi d'avoir bien voulu participer aux travaux de cette commission parlementaire. Les directeurs d'école sont les personnes les plus près de l'action, mais les enseignants demeurent vraiment les plus proches.

J'ai remarqué un certain nombre de choses dans votre mémoire que j'ai lu avec attention. Vous qualifiez le rôle qui vous est confié par le projet de loi 107, vous dites qu'il vous réduit au simple rôle de "gérants-exécutants". Par ailleurs, j'ai aussi l'impression que cela réduit les enseignants à un rôle d'exécutants dont les qualités professionnelles ne sont pas nécessairement utilisées comme on le fait généralement ou comme on le reconnaît dans d'autres types de professions.

Dans votre conclusion, vous parlez de conditions qui permettraient à l'école de retrouver un second souffle, si je peux m'exprimer ainsi, en demandant qu'on lui donne suffisamment d'oxygène et qu'on ne l'étouffe pas par un souci de contrôles excessifs. Je pense que je partage tout à fait votre avis là-dessus.

Par ailleurs, il y a un certain nombre de points qui ne laissent pas de m'étonner et vous allez me permettre de les souligner. Le ministre en a souligné quelques-uns et je vais me permettre de poursuivre l'énumération. Vous dites que l'école ne devrait pas avoir à s'occuper de la vie communautaire. Vous dites - là, je ne les ai pas pris vraiment dans l'ordre et au fur à mesure que vous les présentiez - l'enseignement religieux ou moral, non. À ceux qui sont à l'école, on doit donner l'enseignement religieux de la majorité de tous ceux qui sont à l'école. Pas de conseil d'orientation imposé. Quant aux handicapés, vous dites qu'il est inutile de consulter l'élève. Ne pas être tenus d'organiser des services pour d'autres clientèles que la clientèle régulière de l'école. Évidemment, on ne vous a pas non plus entendu soulever la question de l'obligation qui était faite antérieurement aux directeurs d'école de mettre en place des services de garde pour leur clientèle.

Vous allez me le pardonner certainement, mais, quand je reprends ces arguments-là, cela ressemble à une école de huit à quatre. Cela ressemble à une école qui ne laisse pas l'oxygène entrer, précisément comme vous le réclamez. Cela ne laisse pas de m'étonner, ce discours qui parle d'oxygéner l'école en lui laissant plus de responsabilités, plus de marge de manoeuvre et, en même temps, qui vient réduire l'implication sociale de l'école et de son directeur.

M. Longchamps: Quand vous dites que nous ne voulons pas de vie communautaire, je pense que vous... En tout cas, nous n'avons pas été aussi loin. Nous sommes prêts à aller au niveau de la vie communautaire; d'ailleurs, cela se fait quotidiennement. Il est difficile d'avoir une école dans un milieu sans qu'il n'y ait implication. Ce que nous craignons par rapport au projet de loi 107, c'est qu'on ne nous fasse l'obligation de devenir responsables de tout ce que la société voudrait verser à l'école. Cela me surprendrait qu'un directeur d'école puisse diriger une école sans avoir une implication dans son milieu.

Vous dites aussi que nous demandons d'enseigner la religion de la majorité à tout le monde. Je crois que la signification de ceci est un peu différente pour nous, en ce sens que nous disons que nous devrions offrir l'enseignement religieux à la majorité, mais, par contre, on sous-entend que ceux qui ne sont pas de cette dénomination religieuse, selon les règlements qui sont en vigueur, ont droit à l'enseignement moral et peut-être nous ne devrions pas être obligés d'organiser des cours de religion pour chacune des dénominations religieuses. S'il y a un élève d'une dénomination religieuse différente, est-ce que nous devrions être obligés d'organiser les ressources? Nous disons que nos ressources présentes ne nous le permettent pas.

Concernant les élèves handicapés, j'apprécie que vous me donniez l'occasion de concrétiser ou de préciser notre pensée. Nous ne disons pas que nous ne voulons pas consulter les élèves handicapés, mais nous disons que nous ne voyons pas, dans certaines circonstances, la possibilité de le faire. Il y a des élèves handicapés qui ne sont à peu près pas capables d'être consultés. C'est dans ce sens-là. Autrement dit, nous sommes d'accord pour les consulter lorsqu'il y a possibilité, mais lorsqu'il y a vraiment impossibilité...

Mme Blackburn: D'accord pour cela.

M. Longchamps: D'accord?

Une voix: Cela nuance notre propos.

M. Longchamps: Je vous en remercie. Quand vous nous dites qu'on ne veut pas amener de l'oxygène à l'école, je pense qu'on peut le faire, mais peut-être que, tantôt, il faudra penser à des ressources parce que 24 heures dans une journée, c'est vrai pour un directeur d'école comme pour d'autres types de personnel. On a beau être beau, fin et s'appeler directeur d'école en même temps, mais, à un moment donné, trop c'est trop.

Mme Blackburn: Je termine ma question sur les articles 207 à 210 touchant l'enseignement religieux. J'ai probablement mal compris votre texte. Je le relis: "Les articles 207 à 210 sont inapplicables dans le contexte actuel des restrictions budgétaires. L'école, à notre avis, devrait offrir l'enseignement religieux de la majorité des élèves qui la fréquentent. " La compréhension que j'en avais, c'est que tout le monde, veux, veux

pas, était soumis au même enseignement religieux et je trouvais cela un peu excessif.

M. Longchamps: Vous avez raison sur le texte. Je vous donne raison là-dessus, mais notre pensée ne se traduit pas de cette façon.

Mme Blackburn: Très bien. Concernant les devoirs des enseignants, vous insistez sur le septième de ces devoirs que je trouvais un peu énorme. Il y a une petite note que j'avais prise à côté de ce septième devoir: L'enseignant a comme devoir, alors qu'on sait qu'il n'a pas beaucoup de droits autres que ceux d'enseigner et de choisir sa méthode pédagogique, "d'appliquer les décisions et les règlements du gouvernement et du ministre, de la commission scolaire, du conseil d'orientation et du directeur de l'école". Cela fait bien du monde. J'imagine que l'enseignant qui voudrait se tenir informé des décisions et des règlements de tout ce beau monde passerait une partie de son temps, le matin, juste à relire ce qui s'est décidé la veille à la commission scolaire, la veille au conseil d'orientation, et à essayer de décoder dans les journaux ce que le ministre a pu décider. Cela ne vous apparaît-il pas énorme?

M. Longchamps: C'est vrai que cela fait beaucoup de monde. Je vous le concède, cela fait beaucoup de monde pour un seul enseignant.

Nous pensons que l'enseignant doit être maître dans sa classe et que l'intervention qu'il doit faire est très importante. C'est sûr qu'ii faut lui laisser une marge de manoeuvre. Quand on parle de règlements, cela paraît beaucoup: règlements du ministre, règlements de la commission scolaire, règlements du directeur d'école, mais il faut comprendre que, dans l'école, tous ces règlements apparaissent dans une règle générale. On n'a pas d'un côté le règlement du ministre et à côté de ça le règlement de la commission scolaire et le règlement du directeur. Habituellement, nous avons une règle de conduite qui synthétise l'ensemble de ces choses.

Mme Blackburn: Je n'ai pas essayé de faire l'exercice, mais qu'est-ce que cela pourrait représenter? Prenez quelqu'un qui a dans sa classe, dans une école reconnue confessionnelle - projet catholique, selon la définition qu'en donne le comité catholique, donc, dont le projet s'inspire des valeurs de la morale catholique - des enfants de d'autres dénominations religieuses et quelques enfants handicapés et vous vous retrouvez déjà avec une multitude de règles et de règlements qui touchent ces quelques élèves, puis vous avez une majorité, évidemment, catholique, et vous demandez à l'enseignant de tenir compte de tout cela à la fois. Je me demande si cela valait d'être inscrit là-dedans ou s'il ne fallait pas faire un peu plus confiance au sens commun et au professionnalisme des enseignants. La gamme de devoirs qui sont indiqués comme étant les devoirs de l'enseignant, on aurait quasiment pu la donner aussi au directeur général en disant: II a la responsabilité de s'assurer que, il a la responsabilité de - je pense toujours au troisième devoir - prendre les moyens appropriés pour développer chez les élèves le respect des droits de la personne. Comment est-ce possible, dans une école commune, religieuse, confessionnelle? Le fait que personne ne souligne qu'on fasse obligation ou qu'on donne un certain nombre de devoirs à l'enseignant qui, pour une partie d'entre eux, semblent aller de soi, c'est qu'on ne fait pas confiance à son professionnalisme pour être capable, par exemple, de contribuer à la formation intellectuelle et au développement intégral de la personnalité, de développer chez chaque enfant qui lui est confié le goût d'apprendre. Un professeur qui ne donne pas le goût d'apprendre à ses enfants n'est pas à sa place. On n'avait pas besoin de l'écrire dans une loi, non?

M. Longchamps: Comme directeurs d'école, nous n'avons pas beaucoup creusé le chapitre des enseignants, tout comme nous n'avons pas beaucoup creusé celui de la participation des parents ou d'autres, parce que nous nous sommes dit que ces gens-là auront la possibilité de se présenter. Par contre, les allusions que nous faisons concernant l'article 19.7 sont pour demander une confirmation du rôle de superviseur pédagogique qui nous est alloué. Nous avons beaucoup investi au Québec dans la supervision pédagogique et nous pensons que cela devrait apparaître dans le projet de loi 107. Par ailleurs, je dois vous dire, Mme Blackburn, que je partage votre opinion en très grande partie.

Mme Blackburn: D'accord. A la page 7 de votre mémoire, vous dites: "Qu'à l'article 36 on remplace l'expression "projet éducatif' par une autre expression plus significative, évitant ainsi toute confusion." À quoi pensez-vous?

M. Longchamps: Cela fait des années qu'on parle de projet éducatif et, chaque année, il y a une signification différente. Ce serait peut-être intéressant qu'on pense à autre chose, peut-être à un plan d'action, à un projet d'école, à quelque chose qui ait une consonnance différente. Vous admettrez que, dans le milieu, "projet éducatif', ce sont des mots qui commencent à être brûlés, si vous me permettez l'expression.

Mme Blackburn: En page 9 de votre mémoire, à l'avant-dernier paragraphe, vous dites: "Que la directrice ou le directeur d'école soit protégé contre les poursuites en justice pour un acte accompli de bonne foi dans l'exercice de ses fonctions." Par ailleurs, vous demandez de remplacer le "peut" au premier paragraphe de l'article 161 par "doit", afin que l'employeur puisse contracter une assurance-responsabilité au bénéfice de ses employés.

(21 heures)

Si cette assurance-responsabilité existe déjà comme cela pour les enseignants, pourquoi demander une telle protection? Est-ce que cette protection contre les poursuites en justice pour un acte accompli de bonne foi dans l'exercice de leurs fonctions ne devrait pas s'étendre à ce moment-là à tout le personnel, y compris les enseignants?

M. Longchamps: C'est que nous avons remarqué, lors de notre étude du projet de loi, qu'on parlait effectivement de tous les autres catégories de personnel sauf du personnel de direction en ce qui concerne cette protection.

Mme Blackburn: Les enseignants également? Je n'ai pas...

M. Longchamps: Oui. Mme Blackburn: Oui?

M. Longchamps: On parle du personnel. En tout cas, je ne relève pas les articles. On parle des comités d'école, des conseils d'orientation. Il me semble qu'il y a aussi le personnel enseignant.

Mme Blackburn: II me semble qu'on parle des comités: comité consultatif, comité d'orientation, comité des commissaires et ainsi de suite, mais pas du personnel.

M. Longchamps: En tout cas, nous avons remarqué que nous avions été oubliés à ce sujet-là.

Mme Blackburn: D'accord.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Y a-t-il d'autres questions de la part de l'Opposition?

Mme Blackburn: Oui. En page 10, quand vous demandez l'abolition de l'article 93 et également de d'autres articles qui sont de la même eau, vous dites que vous ne pouvez pas imaginer les circonstances où ces articles pourraient s'appliquer. J'allais dire un peu naïvement que, s'il n'y a pas de circonstances où cela pourra s'appliquer, ce n'est pas dangereux de le laisser.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Longchamps: Dans le sens que nous voyons très difficilement... Je pense que c'est sûr qu'il pourrait y avoir des circonstances. On pourrait en créer, mais on ne voudrait pas voir apparaître ce genre de choses.

Mme Blackburn: En page 12, parlant de l'article 167, vous dites: "Que le troisième paragraphe de l'article 167 soit aboli. L'expé- rience nous a démontré que les préoccupations de ces organismes - ce sont ies organismes de personnes handicapées - et celles de l'école sont souvent contradictoires." Je n'ai pas très bien compris le sens de votre "contradictoire". J'imagine que tout le monde veut le bien de l'élève, de l'enfant handicapé.

M. Longchamps: Oui, mais les préoccupations ne sont pas les mêmes dans le fond. Si on regarde, par exemple, les organismes comme l'OPHQ, les CSS ou les CLSC, ce sont tous des organismes utiles. Je dois le dire, je dois admettre qu'ils sont utiles, parce qu'ils apportent une aide, ils apportent des ressources favorables au bien de l'enfant handicapé. Mais vous admettrez avec moi que la préoccupation de ces organismes est beaucoup plus vers l'intégration sociale que vers la formation intégrale, dans ce sens qu'ils sont beaucoup plus préoccupés par l'intégration sociale des élèves que par la formation socio-affective, intellectuelle, morale, physique, etc. C'est une remarque que nous ont faite nos membres.

À ce sujet, nous disons qu'on devrait apporter des précisions dans le sens de dire que ces organismes sont utiles et qu'on croit à leur valeur, mais que, peut-être on pourrait les consulter sur appel. Question d'ordre pratico-pratique, on se demande comment tous ces organismes vont pouvoir siéger à toutes les commissions scolaires du Québec. Est-ce une chose concevable avec le temps et les ressources dont ils disposent?

Mme Blackburn: Pourtant, le paragraphe 3 est assez large: "de représentants des organismes qui ont une expérience dans la prestation de ces services, désignés par le conseil des commissaires après consultation de ces organismes." On peut penser qu'il y en aura un de représenté, deux peut-être dans certaines commissions scolaires, de tous les services y compris hospitaliers, d'accueil et ainsi de suite. L'impression qui se dégage de votre mémoire, je ne crois pas que ce soit votre volonté, mais c'en est une plus de fermeture. Sur les contrôles, je pense que je vous donne raison, je vous l'ai dit tantôt, mais tout ce qui touche la consultation semble être évacué.

M. Longchamps: C'est que, dans notre tâche de tous les jours, si on faisait la consultation telle que souhaitée par tous et chacun, on ne ferait pratiquement que cela. Cela devient lourd à la longue. On croit à la consultation, mais on se demande s'il n'y aurait pas moyen de simplifier. C'est tellement réparti et tellement éparpillé. Les enseignants veulent être consultés, les parents veulent être consultés, les PME veulent être consultées, les employés de soutien veulent être consultés, on n'en finit plus. Si, en plus, il faut consulter les organismes extérieurs...

Mme Blackburn: Une toute dernière question. Vous dites qu'il ne faudrait pas plus de deux établissements pour constituer une école, mais je pense à cette question. Je pense à des situations dans mon comté où vous avez une petite école qui est à 22 milles, une trentaine de kilomètres de sa voisine et aux parents qui ont des besoins, ont une attente particulière à l'endroit de cette école. Ne devrait-il pas y avoir aussi un comité ou deux comités pour une même école, par exemple?

M. Longchamps: Nous n'avons pas d'objection à cela. Remarquez bien que cela suppose des rencontres en double, mais ce que nous disons, c'est ce que nous voulons éviter, parce que le texte de loi est très large. Celui-ci peut même vouloir dire, à la limite, qu'une commission scolaire pourrait nommer une école pour l'ensemble de ses immeubles. Il n'y a aucune restriction dans le fond. Nous nous disons, s'il y a deux bâtisses ou deux immeubles, comme vous dites, par exemple, et il y a beaucoup de directions d'école surtout dans les parties rurales qui ont à administrer deux immeubles aussi distants que ceux que vous mentionnez, qu'il faut penser au temps que ces personnes doivent mettre sur la route: Elles ne sont pas dans les écoles pour donner le service qu'elles doivent donner. Si on va au-delà de deux écoles, ces personnes ne vont faire que passer à vol d'oiseau et les gens, à notre point de vue, ont droit à des services de qualité. Ce n'est pas parce qu'ils sont dans une petite école qu'ils doivent se priver des services de supervision pédagogique adéquats.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous remercie, M. Longchamps. Mme la députée en conclusion.

Mme Blackburn: Oui, en conclusion, je dois dire que je partage assez votre avis là-dessus. Il ne faudrait pas multiplier le nombre d'établissements pour une même école, parce que cela pose vraiment des problèmes de rapports et de contacts entre les différents groupes de personnel et parce que les besoins, les attentes des écoles varient selon les milieux. Écoutez, je conclurai là-dessus en vous remerciant à nouveau de votre participation à cette commission parlementaire. Je dirais que le complément d'information que vous nous avez donné nous permet de faire une lecture un peu plus juste de votre mémoire et de vos attentes. Je vous remercie.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, Mme la députée. Je reconnais maintenant le ministre de l'Éducation pour la conclusion au nom de sa formation politique. M. le ministre.

M. Ryan: Brièvement. Je vous remercie tout d'abord au nom de i'équipe ministérielle, mais franchement je conserve l'impression que vous êtes un peu trop conservateurs sur la question des comités de travail, cela bien simplement. Je pense qu'on doit tous s'attendre à travailler avec des comités aujourd'hui. C'est comme cela que cela se fait partout. La fonction de directeur d'école, c'est une fonction qui a un caractère politique aussi. Qu'on le veuille ou non, c'est une fonction qui est conférée par un corps politique qui s'appelle la commission scolaire. Il y a cette dimension-là. On ne peut pas en faire abstraction, à mon point de vue. Sur les modalités, on peut discuter à l'infini. On en propose un minimum. Il n'y en a qu'une qui est obligatoire dans le projet de loi au niveau de l'école, le conseil d'orientation qui permet de faire la synthèse.

La question, c'est toujours: II y a bien des écoles et on n'a pas besoin de loi là-dessus, c'est entendu. Il y en a d'autres où on en a besoin, parce qu'il ne se ferait rien. Je vous ai posé la question tantôt sur cela et je n'ai pas eu de réponse claire. Nous autres, il faut que nous pensions à l'ensemble. Il y a celles qui marchent très bien. Parfois, elles vont en avoir deux, trois comités et elles vont les faire fonctionner très bien. À la commission scolaire, je crois qu'on ajoute deux comités, en fait. L'exécutif, cela existe déjà dans la plupart des endroits. La table de gestion, cela existe déjà dans la plupart des endroits. On ajoute un comité pour les élèves en difficulté d'adaptation ou d'apprentissage. Je pense que tout le monde convient que c'était assez nécessaire d'avoir un comité comme cela au niveau de la commission scolaire. On en ajoute un pour les questions de transport. À part cela, y en a-t-il un autre? S'il y en a trop... Si vous me disiez: Celui-là n'est pas nécessaire, cela va ennuyer tout le monde, cela ne produira rien. Là, je vais être influencé. Mais on a essayé de réduire cela au minimum encore une fois et, s'il y en a trop, faites-nous la preuve que l'un ou l'autre n'est pas nécessaire et, moi, cela va me faire plaisir de le faire disparaître, parce qu'on a essayé de réduire cela au minimum. Si vous regardez le projet de loi 107 comparativement à la loi 3, il y en a déjà beaucoup moins. Dans la loi 3, il y en avait moins que dans la loi 40. On s'en va dans la bonne direction, mais il ne faudrait pas qu'on arrive à zéro, parce que là on retournerait à l'âge prédiluvien.

Merci beaucoup. C'est très agréable de vous avoir rencontrés, parce que vous venez du champ directement. Je pense que vous nous apportez des aperçus fort utiles sur beaucoup de sujets. Merci beaucoup.

M. Longchamps: Au nom des membres, nous tenons à remercier les membres de la commission parlementaire pour l'honneur que vous nous avez accordé de venir vous traduire l'opinion de nos membres. Merci beaucoup.

Le Président (M. Parent, Sauvé): L'honneur fut pour nous, M. le président. Bon voyage de retour et merci beaucoup.

J'inviterais immédiatement l'Association des administrateurs des écoles catholiques du Québec à occuper les places qui sont actuellement occupées par l'Association des directrices et des directeurs d'école de la région 03. Nous allons immédiatement enchaîner avec l'audition de son mémoire.

À l'ordre, s'il vous plaît!

J'invite les membres de cette commission à prendre place et j'invite aussi, par le fait même, les représentants de l'Association des administrateurs des écoles catholiques du Québec à prendre place. L'association est représentée par M. F.L. Tomei, qui en est le président. Il est accompagné par M. Anthony Buccongello, qui est membre de l'Association des administrateurs des écoles catholiques du Québec. M. Tomei, bienvenue. Il me fait plaisir de vous accueillir à cette commission parlementaire. Do you speak French or do you prefer to speak English?

Association des administrateurs des écoles catholiques du Québec

M. Tomei (Fred): We are going to present our brief in English but should you wish to ask your questions in French, we should be able to handle them.

Le Président (M. Parent, Sauvé): D'accord. Monsieur, la commission va vous consacrer une heure. Les membres ont pris connaissance de votre mémoire. Alors, nous vous suggérons de nous en faire une brève présentation et après cela, le reste de la période sera consacré à une discussion entre vous et les membres de la commission et le temps sera réparti également entre les deux formations politiques. M. Tomei, nous vous écoutons. (21 h 15)

M. Tomei: Merci. Our association, by definition, is an English Catholic association of administrators. Therefore, the major thrust of our brief is to measure the bills, both 106 and 107, against the concerns of our community. We wish, first of all, to thank the parliamentary commission and the Assembly for this opportunity to be here to present our views.

The views of the association have been placed in brief and it is not my intention to read that brief nor to speak entirely to both bills, but to mainly highlight the areas that are of major concern to us. What we are directly concerned with is making certain that our constituency, that is the students, the parents, the administrators and teachers of the English Catholic community, are well represented by our views. For that end, I think, throughout the entire brief, we wish to make note of the following points.

The role of the principal as defined in Bill 107 is first and foremost as a pedagogical leader. Yet we feel that the number of committees which the principal must attend to, the demands which are made upon his ime both in terms of pedagogy, costodial, guardianship of his building, the presence on all committees both within and outside the school and at the board level, do in fact sap his strength and begin to immobilize him in terms of his operational leadership.

We wish the committee would take a closer look at the demands that are presently made upon the principal. We wish that an evaluation, both of his time and of his competence, be regarded in terms of what he has to do to exercise pedagogical leadership.

We are more than concerned with the confessional ity of the schools, both prior to and after the establishment of the proposed language boards. As English Catholics, we are quickly coming to the conclusion that we are being forced to make a choice between our language and our religion, that the option of maintaining both might, in fact, be a luxury that may not be afforded to us.

We are particularly concerned, prior to the establishment of linguistic boards, with Section 6 of Bill 107 which, in essence, in our estimation, permits any school board and any school to, in fact, advertize itself as being available to any denomination of students. The end result of this cannot be the establishment of a confessional board. While we may full be arted by endorse the Minister's thrust to establish linguistic boards with confessional guarantees, we find that sections like Section 6 will inevitably create possibly linguistic boards de facto, but in fact not provide for the confessional guarantees that we find most necessary.

The ententes which accompany Section 6 and elsewhere in the Bill purport to allow students who are normally Catholic to be absorbed into language boards, into English schools and to receive religious instruction. We maintain that a two or three-period week of 50 minute periods of instruction in religion do not constitute religious instruction, do not create a religious milieu where the faith can thrive and grow. What it does is purport to be able to give religious instruction without allowing the growth within a religious environment.

We therefore find that Section 6 and similar sections which do not provide for the transfer, along with these students, of qualified religious instructors or animators will, in fact, create a burdensome situation. What we are faced with, at least from our perspective, is parents looking at the transfer of students to a language situation where they feel that they will receive proper instruction in the language of their choice. They have no fears about allowing then to go to a different denominational school, knowing full well, or, at least, feeling on their part that they can take care of the religious instruction. It is our feeling that, while the intention of the parents may be proper, again, the atmosphere for religious guardianship is not going to be present.

So, in conclusion to that particular section, we feel that Section 6 creates and contains a serious flaw and should be very seriously looked after.

In other sectors, where we will eventually have the establishment of linguistic boards, there is a provision for the transfer of personnel from schools into the new boards. We would hope prior to the establishment of language boards, if these ententes continue to exist, that some sort of reassignment clause would be placed in effect prior to the establishment of language boards, so that personnel displaced by the transfer of students may be absorbed into these new surroundings.

We are a little concerned that the Minister might, in fact, be requesting discretionary powers. While we can appreciate the need for discretionary powers, while we can applaud the efforts to reshape and to make more efficient the structures whithin which we must exist, we are a little bit concerned that a precedent may be established in the granting of discretionary powers which, under different conditions, might become burdensome. If we could be assured that some third party ombudsman might be available, then it is conceivable that the awarding of discretionary powers might, in fact, be a palatable situation.

In general, we applaud the efforts of the Minister In attempting to establish language boards. We would urge that this be engaged posthaste. We would earnestly implore that no delay be employed in seeking the language board situation, because while we await the establishment of language boards, our schools, the English Catholic milieu, are subject to erosion and possible disappearance.

That is it. Thank you.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Tomei, ]e vous remercie. Now, Mr. Tomei, the rest of the period will be used for exchanges between the commissioners and you. I want you to feel free to express yourself in English or in French. In other words, use the language in which you feel more comfortable and more secure.

Maintenant, je vais reconnaître le ministre de l'Éducation. M. le ministre.

M. Ryan: Excuse me, I had a fine glass of tea in front of me. I cannot miss that before we start discussing. Do you want to share that? Ask the gentleman.

It is a great pleasure for me to welcome you to this session of the parliamentary committee on education. I think that the performance of the English Catholic school system has been outstanding over the years. It showed a remarkable ability to absorbe into its ranks students of all origins for many many years, If it had not been for the changes which were made necessary for other reasons in the past two years, I think it would have continued to grow, but we are faced with a new situation which we must accept, I am afraid, and which must be used to the best benefit of the English Catholic community. I think they have their rights. They have their aspirations which are noble and it is the obligation of the Government to heed its aspirations with great attention.

There is one question in your brief which appears to me to be central and which I should like to address in my first question. You say, on the one hand, that you want to have language-based school boards but, on the other hand, you want to have linguistic school boards with confessional guarantees provincially legislated. But nowhere in the brief do I find a list of those guarantees which you would find essential for the accomplishment of the first purpose. Would you please elaborate on what kind of guarantees would be needed in the law in order to make sure that you are satisfied.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Mr. Tomei.

M. Tomei: I thought we pointed out elsewhere that, particularly in terms of absorption of staff, in those areas where we are going to have confessional schools under language boards, that the pedagogical leader within those confes-sionally designated schools would, in fact, be of the same denomination as the students of which he is responsible, that the majority of the staff within those institutions would, in fact, be of the same denomination as the students, that the ecclesiastical or pastoral services that are available to those students would, in fact, be administered by someone of the same denomination. In fact, at the board level, the "cadre" person, that is established, would in fact have line authority extending into the schools to make certain that we would have the adequate representation. Those are the types of confessional guarantees that we are concerned about.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre.

M. Ryan: Yes, Mr. Chairman.

M. Buccongello (Anthony): Could I add something as well?

M. Ryan: Of course. Go ahead.

M. Buccongello: When we speak of the linguistic boards, the English and French boards, and we speak of the confessional guarantees, the confessional guarantees that we are referring to, at this particular point, it is basically at the school level; to ask for confessional guarantees at the board level. It would, at this time, be quite ludicrous to ask for a Catholic English board or an English Protestant board per se, even though the Protestant boards do exist and wish to maintain as such. But the English

Catholic has always been in two fields. He has been in the French field by virtue of his religion and he has been in the Protestant field by virtue of his language. So, the English Catholic finds himself always caught between two dimensions and, as Fred has signified earlier, at this particular time in our history it becomes crucial to gather the English Catholic into one section rather than have some educated within a French majority board and others within a Protestant majority board. So this is where we find it necessary and we applaud the Minister on his desire to go into linguistic boards.

However, our need is also manifested in the maintenance of our religion that we find equally as important. So, if we have schools that are designated as Catholic by acts of establishment or by decisions of orientation committees, I do not think this is the kind of guarantee we want because any decision could be based on a whim. Our guarantee would be if a school could be designated by the English board as Catholic and saying: There is an English Catholic school and parents are able to send their children to it, or there is an English Protestant school and parents are able to send their children to it.

In the report issued by the Superior Council 1986-1987 dealing with the state and needs of education, The Quality of Education, a Challenge for Each Educational Institution", one of the elements of the vitality of an institution dealt with what they referred to as the culture of the organization. This is where we feel the Catholic school is vital and dynamic because of its culture, because of the values that hold it together. If it remains to be a matter of continuing choice, then our fear perhaps might be something of a weakening of this dynamic vitality that we see within our schools to be a type of school that would cater to all different aspects and therefore lose - quote - that guarantee for which we are looking.

M. Ryan: May I ask another question? Would you go so far as to suggest that you do not find in the Bill as it stands the kind of guarantees that you are looking for?

M. Buccongello: Within the Bill presently?

M. Ryan: Yes.

(21 h 30)

M. Buccongello: Within the Bill presently, there is the choice of stating the confessionality of the school done every year, every three years, which would be the result of a parental vote or a parental decision. It could be a guarantee but perhaps not an explicite guarantee. There is the presence of an administrator in an English board of the minority religion, if there is. I guess this could be classified as a guarantee as well. There is the guarantee of an animator within the board to look after the pedagogical needs of Catholic students or the students that would be of a minority, but perhaps what we were looking for is explicitely stated that if, where possible. Catholic schools were able to exist, then they should. English Catholic schools should.

M. Ryan: Thank you very much.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Est-ce qu'il y a d'autres interventions du côté ministériel? Mme la députée de Jacques-Cartier.

Mme Dougherty: I would like to pursue this question a little further because I think that your brief is really a very strong brief in favour of the survival of the Anglo-Catholic community for which you see the Anglo-Catholic school as an essential condition.

What I am concerned about, for instance, is when I read on page 2 that you deplore the decline... You mention an English Catholic high school, you did not mention which one you were talking about, but it does not matter. You say that there is an 82 % decline whereas there is a neighbouring Protestant school, I guess, that has not suffered the same decline. Where you have very small enrolments - and I know the figures, I have seen Alliance Quebec's analysis of the English community off-Island and both the Protestants and the Catholics are in deep trouble in terms of numbers. Where we have small numbers of English community, whether Catholic or Protestant, how do you see the language boards working?

I am asking you that in view of your very strong feeling about the need for a total school environment rather than just religious and moral education or a course or whatever. How do you see the language boards helping your situation? To what extent are the English going to have to compromise, and I am talking about the Catholics and the Protestants, in order to create the critical mass of students which is viable to create schools? Or are you going to favour that children be regrouped as much as possible, which could mean large travelling distances, into Catholic schools, and I presume Protestant schools or English schools, neutral schools, in order that the religious and moral environment be more homogeneous? On the practical level, I have a lot of concerns about how language boards are really going to work.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Mr Tomei.

M. Tomei: I do not want to establish language boards myself tonight. I think that this is up to the Minister. But, the area that I was referring to is in terms of the decline in population, that is near off-Island Montreal where the population is still rather dense, where you do have large concentrations of English students in both Catholic and Protestant schools. In those areas, and I can think of the South Shore and

the North Shore, there are sufficient bodies of students where you could establish a language board and have, within that language board, a Catholic designated school and a Protestant designated school or non-denomination designation. Where numbers are sufficient within those areas, and there are sufficient areas in the province to pinpoint, there is no reason why you could not have; the parents make a choice to send their children... In fact, I would guarantee that if the language issue were there for them to be able to relate to, they would have English schools and then have a choice within. I would guarantee that we would have strong denominational schools within that structure.

Mme Dougherty: My problem is when we have small groups neither of which are big enough to create a school. I am talking about the coming together of English, Catholics, Protestants - I do not know who else - within a school. How is it going to work? In view of your orientation in this brief, are you going to be satisfied? I mean, you are not very happy with the entente situation according to the brief, where the Catholics go to the Protestant schools off-Island. How are you going to work it out? How is it going to work so that you will be satisfied that your Catholic needs are met within a language board where there are small numbers, where obviously they have to combine under one roof?

M. Buccongello: I think where possible... We have to be realistic. Where possible, and I think this Is the key point... When we look at off-Island, either North shore or South, we see a great deal of English Catholics right now who are attending Protestant schools by virtue of an entente.

This phenomenon, seeing that that particular school magnifies by getting greater enrolments, continues to draw other students, and less and less students then go to Catholic schools. But I think where possible, if we look at the four Catholic boards on the Island of Montreal, Verdun, Le Royer, Saint-Louis and Sainte-Croix, there are English students in those boards who get service from information, from MCSC and Baldwin-Cartier, not from the four boards. So, we are looking at service and if they are better served by virtue of a linguistic board, then fine. And where possible to have confessional schools, fine. But, if we get to a situation where the numbers are small enough, where it is not geographically or physically possible, then we recognize the need for both confessional entities to be in the same school and this, we accept.

Mme Dougherty: In other words, are you saying - it just occurred to me now - that perhaps the law should provide for biconfessional schools? I think we are going to have a lot of problems where the parents, for instance, might vote 60 % to 40 % for one or the other confessional or non-confessional, but you might have a situation where the only reasonable situation, without imposing a law lot of bussing on the parents, would be a biconfessional school.

M. Buccongello: On Island, schools are very close together.

Mme Dougherty: On Island I do not think this is the problem. I am talking about off-Island. I think that is where is the problem.

M. Buccongello: No. Off-Island, we have to go wherever possible.

Mme Dougherty: Okay. Thank you.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Est-ce qu'il y a d'autres questions du côté ministériel?

Je reconnais maintenant Mme la députée de Chicoutimi et porte-parole officiel de l'Opposition en matière d'éducation. Mme la députée.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Bonsoir messieurs. Bien qu'on n'ait eu qu'une version anglaise on m'a informée qu'on pouvait quand même poser les questions en français. Cela vous va? Je ne commenterai pas plus longuement votre mémoire. Je voudrais aller directement aux questions. Je comprends particulièrement vos préoccupations quand on voit la diminution de vos clientèles, quand on constate que cela diminue rapidement et les craintes que vous éprouvez devant la nécessité dans laquelle vous vous trouvez de passer des ententes de services avec des commissions scolaires protestantes et les effets que cela a effectivement, ou à long terme, sur la formation religieuse de vos clientèles.

Je me demandais une chose. En vertu de la présente loi, est-ce que le droit à la dissidence est maintenu dans le projet de loi 107? Selon vous, est-ce que vous pourriez utiliser ce droit de création de commissions scolaires dissidentes, évidemment dans le cadre établi par la présente loi, c'est-à-dire dans le cadre de commissions scolaires linguistiques? Alors, vous avez une commission scolaire linguistique francophone, une anglophone. Donc, à l'intérieur de la commission scolaire anglophone, pourriez-vous établir en vertu de la présente loi une commission scolaire dissidente catholique anglaise?

M. Buccongello: Je ne sais pas. Je n'ai pas assez d'information ou de renseignements pour une chose aussi légale. Je ne peux pas répondre exactement à votre question.

Mme Blackburn: Ah! Vous n'avez pas réfléchi à cette éventualité.

M. Buccongello: Non.

Mme Blackburn: D'accord. Pour vous, le

problème se pose en dehors de la CECM. J'imagine que le secteur de la CECM est assez gros pour pouvoir avoir une gamme de services appropriés.

M. Buccongello: Oui.

Mme Blackburn: Dans un autre ordre d'idées, dans votre mémoire, parlant des pouvoirs du ministre vous êtes en désaccord avec les pouvoirs discrétionnaires qui sont octroyés ou accordés au ministre de l'Éducation. Faisiez-vous plus particulièrement référence à la pratique touchant l'âge d'entrée à l'école, parce que vous recommandez que l'âge d'entrée à l'école soit ramené au 31 décembre, en même temps que vous contestez les pouvoirs discrétionnaires du ministre? Est-ce que c'était précisément au sujet de cette pratique touchant les dérogations à l'âge d'admission?

M. Buccongello: À quelle page, madame?

Mme Blackburn: Les pouvoirs discrétionnaires, à la page 6. L'âge d'admission, c'est en page 9. Alors, pages 6 et 9.

M. Buccongello: Basically, the powers that at least immediately come to mind are the discretionary powers that the Minister has relative to recognition of various groups, the ability to suspend board decisions, the ability to pass on teacher qualification. It is not a precise reference to ministerial discretionary powers for which we become somewhat hesitant, but it is simply the philosophy of discretionary powers that creates a heaviness with us. It is the establishment of a precedent where powers are granted unbridled to any particular person, whatever the end may be, that allows us to stand back and say: We would like someone to go slowly with the assuming of powers because discretionary powers, while valid for a particular item, once established in precedent can in fact become used later on in a matter that might become burdensome to us. So, it is a philosophical argument to which we are referring at this stage of the game.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Une autre question?

Mme Blackburn: Cela ira pour moi.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Terminé. M. le ministre de l'Éducation.

M. Ryan: About discretionary powers, just one additional remark. I think those which you list on top of the paragraph in which you deal with this matter are not outstanding illustrations of your philosophy. In the first case, in the case of possible cancellation of a teacher's permit, for instance, the Minister cannot act unless he has received a formal recommendation from the Board of inquiry. Once you have had the proper inquiry and then further examination by the Minister, I think it is time that a decision be made.

The two other examples deal with regulations, not with ministerial powers. One gives the Government the right to regulate jobs in the non-unionized sector of a school board. That exists at the moment, that is part of our existing legislation and has just been transferred here for purposes of unification. There is nothing new here, nothing discretionary in so far as the Minister is concerned.

The Minister would be entitled to define by regulation the rules which should preside over decisions regarding confessional status of schools. He would not make the decisions himself, they would be made by the Catholic committee or the Protestant committee of the Superior Council of Education. But he would enact a regulation to make sure that consultations are done the proper way all across the Province and not at the discretionary whim of school boards or school principals, as some cases have been reported in the past.

Thirdly, there is the right to ask that a decision be suspended pending an inquiry, which may be underway. This is a point on which I would grant some validity to your doubts. I said, this afternoon, that this is one matter on which the Government is willing to listen, even to change its view. We inserted that clause in order to soften another provision whereby the Minister can ask for much more radical recourse, that the school board be put under tutorship. This would be milder, but some people interpret it differently and if it were to arouse too many objections, we are willing to drop it. It was inserted there in order to smooth things over, but if the effect should be the opposite, we are not interested in keeping it there. But the general philosophy here is fully conversed into my own views. I have no difficulties with the opinions which are expressed here, but the examples must be scrutinized very carefully in order to make sure that they truly make your point.

Thank you very much for your remarks. I think they will be helpful and I will particularly remember your insistance upon some kind of concrete guarantees as to the possibility of having English schools wherever the numbers justify. English Catholic schools, of course. Thank you very much.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le ministre. La commission permanente de l'éducation suspend ses travaux jusqu'à demain alors que nous accueillerons la Centrale de l'enseignement du Québec suivie de l'Alliance des professeurs de Montréal. Merci beaucoup, MM. Tomei et Buccongello.

(Fin de la séance à 21 h 48)

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