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(Dix heures huit minutes)
Le Président (M. Parent, Sauvé): À l'ordre,
s'il vous plaît! J'inviterais les membres de la commission à
prendre place. La commission permanente de l'éducation reprend ses
travaux.
M. le secrétaire, est-ce que nous avons quorum?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Si nous avons
quorum, je déclare officiellement ouverte cette séance de
travail. Je vous rappelle que la commission permamente de l'éducation se
réunit ce matin pour procéder à une consultation
générale et tenir des auditions publiques dans le cadre de
l'étude des projets de loi 106 et 107, projets de loi ayant trait aux
élections scolaires et à la Loi sur l'instruction publique.
M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements à
cette commission?
Le Secrétaire: Non, M. le Président.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, s'il n'y a
pas de remplacements, nous allons immédiatement procéder avec
l'ordre du jour que nous avons aujourd'hui, à savoir l'accueil du
premier groupe invité qui a répondu à l'invitation de la
commission, l'Association des cadres de la Commission des écoles
catholiques de Montréal. J'invite les représentants de
l'association des cadres à prendre place sur les banquettes à
l'avant et nous allons immédiatement commencer cette session de
travail.
L'Association des cadres de la Commission des écoles catholiques
de Montréal est représentée par M. Marcel Vaillancourt,
qui en est le président. M. Vaillancourt, au nom des membres de cette
commission, je veux vous remercier d'avoir répondu à notre
invitation et de venir nous apporter l'éclairage de votre association et
vos remarques et de nous faire connaître vos préoccupations en ce
qui a trait à ces deux projets de loi.
La commission permanente de l'éducation va vous consacrer une
heure qui pourrait être divisée comme suit, mais je vous laisse
juge et libre d'utiliser le temps qui vous est imparti comme bon vous semble;
pour la bonne marche de la commission, je vous suggérerais de prendre
une période de quinze à vingt minutes peut-être pour nous
présenter votre mémoire, lequel d'ailleurs a été lu
par tous les membres de la commission. Après cela, nous pourrions
procéder à une période de discussions entre les membres de
la commission, vous et les gens qui vous accompagnent.
Alors, pour les besoins de l'enregistrement du Journal des
débats, j'aimerais que vous nous présentiez les personnes qui
vous accompagnent à la table et, immédiatement après cela,
vous pourrez commencer la présentation du mémoire de votre
association. M. Vaillancourt, nous vous écoutons.
Association des cadres de la Commission des
écoles catholiques de Montréal
M. Vaillancourt (Marcel): Je vous remercie, M. le
Président, de l'invitation que vous nous avez faite de venir nous
exprimer ici à la commission. Je vous présente les
collègues qui m'accompagnent. Il y a M- Robert Mathieu, à ma
gauche, qui est le vice-président de l'association des cadres. Il y a
Mme Micheline Poirier, qui est conseillère à l'exécutif de
l'association des cadres. On avait prévu et on avait annoncé
trois personnes. On a du renfort ce matin. On a M. Germain Goyer qui est
présent et qui est aussi à l'exécutif de l'association
comme conseiller. Il est avocat de formation. On a dit: On aura avec lui tout
le renfort dont on aura besoin.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Madame, messieurs
et le renfort, soyez les bienvenus.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Parent, Sauvé): Nous vous
écoutons.
M. Vaillancourt (Marcel): Je vais suivre passablement le
mémoire qu'on vous a fait parvenir en choisissant un certain nombre de
textes. Je ne vous présenterai pas tout, mais l'essentiel de notre
mémoire.
Le ministre de l'Éducation a présenté à
l'Assemblée nationale le projet de loi 107 visant à assurer
l'instruction publique au Québec. Dans les notes explicatives, il est
mentionné que ce projet vise principalement à donner à
l'école une plus grande autonomie juridique, sans briser les liens
organiques qui l'unissent à la commission scolaire et au réseau
des écoles de la commission scolaire. Les cadres de la CECM, à
l'intérieur des entités que forment l'école et la
commission scolaire, ont su accumuler une expertise riche en savoir et en
expérience. L'association qui représente ces cadres est
convaincue que cette expertise peut être profitable à l'ensemble
des administrateurs scolaires. Elle souhaite ainsi partager avec vous cette
richesse.
L'Association des cadres de la CECM estime opportun, dans ia
première partie de son mémoire, de rappeler sa vision de
l'école et de la commission scolaire en fonction des lignes directrices
du projet de loi 107. Dans la deuxième partie du mémoire, nous
examinerons successivement les dispositions de ce projet en formulant un
certain nombre de commentaires dont
plusieurs revêtent un caractère plutôt technique.
Ce matin, je vais surtout vous présenter la première
partie et quelques points de la deuxième partie. Tout cela devrait
rentrer à l'intérieur des vingt minutes pour la
présentation.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Sentez-vous bien
à votre aise, si vous pensez que vous allez déborder. Vous
êtes ici pour nous faire connaître votre point de vue. Alors, ne
vous sentez pas limités par les suggestions que je vous ai faites au
début.
M. Vaillancourt (Marcel): D'accord. Merci.
Vous allez voir, on ne maintiendra pas le suspense longtemps. De toute
façon il est rompu par le fait que vous avez lu notre mémoire. On
vous livre tout de suite notre position, dès le départ du
mémoire.
On vous dit: Nous sommes d'accord avec le projet de loi 107, puisqu'il
présente des améliorations en termes de présence et
d'influence des parents, une précision du rôle de l'école,
des droits et obligations de l'enseignant et de l'élève. Nous
supportons l'orientation retenue de diviser le territoire en commissions
scolaires francophones et anglophones. Toutefois, nous considérons que
de nombreuses modifications doivent être apportées au projet de
loi 107 afin d'assurer le leadership du directeur d'école, d'harmoniser
l'influence des divers intervenants d'un milieu scolaire et de permettre aux
commissions scolaires l'exercice réel d'une plus grande
responsabilité. Le mémoire de l'Association des cadres de la CECM
veut donc apporter sa contribution dans la recherche du système
d'éducation et des modalités d'organisations les plus
démocratiques et les plus appropriées à la situation du
Québec d'aujourd'hui.
Je passe à !a première partie qui comprend des
considérations générales sur l'école et la
commission scolaire.
Les points, 1.1, 1.2, 1.3 et 1.4 de notre mémoire
représentent la vision que nous avons, comme cadres, et celle que
l'association a de l'école et même si ce n'est pas directement des
commentaires sur le projet de loi 107, nous avons considéré qu'il
était important de vous livrer notre vision de l'école.
Le fondement de l'école. L'école doit exister, en premier
lieu et avant toute chose, comme milieu éducatif
privilégié et tout son personnel devrait avant tout être
guidé par les besoins des enfants qu'elle sert, par l'organisation d'une
pédagogie qui réponde de façon optimale à ces
besoins. Toutes mesures administratives et législatives devraient
n'avoir que ce seul objectif. Pour le réaliser, il faut que les milieux
d'éducation recherchent et entretiennent un climat propice à
l'apprentissage et à l'acquisition de connaissances nouvelles. Il faut
également que ces milieux maintiennent et assurent une qualité de
services axée prioritairement sur les objectifs d'éducation.
Nous rappelons quelques objectifs de l'école.
Premièrement, l'école devrait permettre que chaque enfant puisse
développer de façon optimale tout son potentiel humain, qu'il
soit physique, cognitif, émotif, social et spirituel. Un tel objectif
bien compris suppose une organisation scolaire personnalisée et
positive, toujours interprétée par rapport à un milieu
donné.
Un deuxième objectif: l'école devrait graduellement amener
les enfants à se détacher des adultes. Il faut de plus en plus
centrer les efforts sur les apprentissages qui permettent aux
élèves d'apprendre eux-mêmes et à devenir plus
autonomes en regard de ieur propre cheminement scolaire et, par voie de
conséquence, de leur propre vie.
Troisièmement, si l'école est vraiment le lieu
privilégié de la formation totale de l'enfant et non pas
simplement celui de l'acquisition de techniques scolaires, on doit envisager
également la poursuite d'objectifs plus larges tels que l'apprentissage
de la sociabilité et de la capacité de vivre en harmonie avec un
milieu social donné, éventuellement, le développement de
la capacité de vivre avec son handicap et non pas de vivre de son
handicap ou par son handicap. En fait, permettre à l'enfant de devenir
dans la société un adulte agissant et responsable.
Toujours dans notre vision de l'école, on voit l'école en
lien avec un milieu. Il faut que l'école devienne de plus en plus
responsable de l'organisation des stratégies éducatives de
première ligne et en ait les moyens. Il faut qu'elle s'inscrive
nettement comme partenaire et en étroite collaboration avec toutes les
autres instances de sa communauté immédiate et puisse même
graduellement étendre cette relation aux communautés plus larges
et plus englobantes. Il faut donc rendre possible à tous les agents de
l'éducation une participation à la définition de l'acte
pédagogique, à l'identification des moyens et à l'action
concrète dans l'école. Il faut présenter une structure qui
permettrait une collaboration et la mise en place d'une véritable
complémentarité des rôles et non fournir l'occasion d'un
affrontement perpétuel et le déplacement d'un contrôle
absolu qui peut être détenu actuellement par un groupe vers un
autre groupe intéressé.
L'école doit être au service des élèves. Pour
qu'une telle école s'inscrive réellement dans son milieu social,
elle devrait répondre de tous les enfants de son territoire
géographique. C'est l'enfant qui détient un droit et
l'école ne devrait exister qu'en réponse à ce droit.
À ce titre, elle devra être responsable de chacun de ses
élèves et tout mettre en oeuvre pour mieux servir chaque
personne. Toute situation d'échec, tout handicap décelé
chez l'un ou l'autre de ses élèves est pris en charge par
l'école qui doit essayer avant toute chose d'organiser à
l'interne les réponses adéquates à leurs besoins, sinon
cette situation d'échec ou ce handicap devront être assumés
par les services centraux de la
commission scolaire.
Pour les enfants issus de groupes ethniques, l'école devra
reconnàilre son devoir de bien les intégrer et de bien les
servir. Pour les milieux socio-économiquement
désavantagés, cette école devra obligatoirement prendre
racine dans leur milieu et, plus que tout autre, devra se mandater pour une
action réellement communautaire.
Il est urgent pour l'école de définir clairement son
projet éducatif, qui deviendra la formule permettant de respecter les
données globales auxquelles elle doit répondre et les
particularités du milieu auxquelles elle doit se soumettre.
C'est brossé rapidement et, pour vous, cela ne doit pas
être tellement du milieu si vous êtes, comme nous, des
habitués des projets de loi en éducation. Cela fait quelques
fois, je pense, que l'association se présente ici pour exprimer sa
position. Sa vision de l'école est toujours restée la même.
Pour le reste aussi je pense, c'est en continuité avec des
présentations antérieures qu'on a déjà faites.
L'école et le projet de loi 107. On entre ici davantage dans des
commentaires en lien avec le projet de loi 107.
Pour l'association, le projet de loi 107 répond de manière
satisfaisante à ses préoccupations concernant l'école et
son projet éducatif. Nous sommes heureux de retrouver dans ce projet la
réalisation de la mission de l'école liée à son
projet éducatif. De plus, nous sommes satisfaits de voir que le projet
éducatif sera le résultat d'un travail collectif et continuel des
principaux intervenants auprès de l'école. Nous formulons une
restriction quant au rôle du directeur d'école. L'association
souhaiterait voir la fonction du directeur d'école
imprégnée des caractéristiques propres à un leader.
Malheureusement, nous constatons que le projet de loi 107 limite la fonction
d'un directeur d'école à celle d'un coordonnateur dans plusieurs
cas.
Par ailleurs, l'association a déjà exprimé son
désir de voir dans une école une structure à deux paliers:
au premier palier, le conseil d'école, qui dispose par
délégation de l'autorité requise pour assurer toutes les
décisions à partir des propositions du comité
pédagogique, qui constituerait le second palier dont nous ferons mention
dans un prochain paragraphe.
Pour bien comprendre le reste de notre texte, vous allez voir qu'on
privilégie le conseil d'école et qu'on emploie un peu
indifféremment dans le texte les termes "conseil d'école" et
"conseil d'orientation". Il y a une nuance qu'on met entre les deux, qui nous
semble importante, mais dans le texte on parle un peu indifféremment du
conseil d'école ou du conseil d'orientation. Ce sont des paliers qu'on
trouve assez semblables. On introduit une nouvelle notion, qui était
d'ailleurs présente lors de notre réaction au projet de loi 40,
celle du comité pédagogique.
Nous retrouvons, dans le projet de loi 107, une structure à deux
paliers: le conseil d'orienta- tion et le comité d'école. Nous
sommes relativement satisfaits des dispositions touchant le conseil
d'orientation, bien qu'il aurait été de loin
préférable d'y lire les fonctions d'un conseil d'école te!
que défini dans le projet de loi 40. Toutefois, nous croyons en la
possibilité de voir se réaliser en partie ce conseil par une
délégation de fonctions de la commission scolaire. Partant du
principe que la participation des parents est essentielle à la gestion
scolaire, l'association souhaite que cette participation se réalise au
plus haut niveau de l'organisation scolaire, c'est-à-dire au niveau du
conseil des commissaires. Nous verrons plus loin ce qu'il en est lorsque nous
parlerons de la commission scolaire. En conséquence, nous ne trouvons
pas opportun de maintenir la structure du comité d'école. Pour
nous, c'est clair que cela ne pourrait être que source de conflits. Ce
qu'on suggère à la place, c'est le comité
pédagogique. Pour l'association, le comité d'école devrait
être remplacé par un comité pédagogique qui verrait
à identifier les besoins de formation de chacun des élèves
et à aménager les ressources disponibles afin d'y répondre
le plus adéquatement possible. Ainsi, l'application du régime
pédagogique, le développement des services d'enseignement et des
services complémentaires ou particuliers relèveraient du
comité pédagogique. L'existence d'un conseil d'école et
d'un comité pédagogique formé en partie de membres issus
du conseil d'école constitue le modèle le plus apte à
répondre aux exigences d'une école intégrée dans
son milieu et aux services des élèves.
La commission scolaire. Les commissions scolaires francophones et
anglophones. L'Association des cadres de la CECM a déjà, devant
cette commission parlementaire, donné son assentiment à
l'établissement des commissions scolaires linguistiques. Sur ce dernier
point, la position de l'association n'a pas changé. L'association
considère que cette division organisationnelle des commissions scolaires
favorise un plus grand respect des individus, des mentalités et des
modes d'agir. De plus, cette mesure se fonde sur des critères
distinctifs fondamentaux qu'on ne peut ignorer dans une perspective
organisationnelle des structures scolaires et correspond davantage aux
aspirations de la population québécoise. Nous sommes convaincus
de cela.
Territoire de la CECM. Le projet de loi 107 maintient le territoire
actuel de la CECM. Encore là, l'association ne peut que se
réjouir devant l'introduction d'une telle disposition. Toutefois, nous
déplorons que le motif qui a suscité cette disposition
législative réside dans la garantie constitutionnelle dont
bénéficient les commissions scolaires confessionnelles.
L'association aurait de loin préféré et souhaité
voir la reconnaissance des particularités des régions urbaines
comme le seul et véritable motif du maintien du territoire de la CECM.
Les régions urbaines présentent des caractéristiques de
population que l'on ne retrouve pas avec la même intensité dans
les
régions rurales ou semi-rurales et notamment la mobilité
de la population, ia concentration multiethnique, la formation de zones
socio-économiquement défavorisées. Sur le plan scolaire,
on assiste à la manifestation de certains phénomènes tels:
l'usage de drogues, la violence, l'abandon scolaire, etc. Les
caractéristiques et l'expression de ces phénomènes doivent
être étudiés de façon globale afin d'y apporter des
solutions satisfaisantes. Ce sont là les véritables raisons qui
incitent au maintien de la CECM sur son territoire actuel.
Le caractère confessionnel. Nous ne pouvons que déplorer
la lenteur démontrée par les différents gouvernements dans
la mise en place des commissions scolaires linguistiques. Rien ne nous indique
un changement prochain et nous croyons que le statu quo prévaudra encore
pour un bon moment, à tout le moins en ce qui regarde
l'élément distinctif d'une commission scolaire souhaitée
par le projet de loi 107.
Nous comprenons que, pour pallier à la situation, le projet de
loi assure la représentation de la minorité linguistique à
l'intérieur d'un conseil de commissaires issu d'une commission scolaire
confessionnelle. Nous partageons cette préoccupation et souscrivons
d'emblée au principe voulant une meilleure
représentativité d'un conseil de commissaires. Toutefois, la mise
en place de ce principe, quoique très louable avons-nous dit, va
assurément créer des difficultés énormes
d'application. À titre d'exemple, et il y en aurait d'autres, nous
mentionnons la confection des listes multiples d'électeurs sur un
même territoire. Il est admis que l'un des facteurs explicatifs du
désintéressement de l'électeur réside dans la
complexité du mécanisme électoral. Or, il s'avère,
selon nous, que la superposition de circonscriptions électorales
destinées à la minorité linguistique ajoutera à
cette complexité. Comment peut-on blâmer un électeur de ne
pas vouloir participer à quelque chose qu'il ne comprend pas? Loin
d'augmenter le taux de participation aux élections scolaires, nous
croyons que ces mesures provoqueront encore plus l'éloignement de
l'électeur.
La commission scolaire régionale. Nous nous interrogeons sur
l'opportunité de maintenir dans ce projet de loi 107 la commission
scolaire régionale lorsque nous retrouvons dans ses fonctions, entre
autres, l'éducation préscolaire et l'enseignement primaire.
L'association, encore une fois, a déjà exprimé son
désir de voir intégrer à l'intérieur d'une
commission scolaire les niveaux primaire et secondaire. Encore là, ia
position de l'association n'a pas changé. (10 h 30)
Nous considérons comme essentiel que le ministre maintienne,
réunis sous un même organisme de gestion, les niveaux primaire et
secondaire. La coordination qui doit s'établir entre ces niveaux en est
considérablement simplifiée et il devient possible d'assurer une
continuité sur le plan pédagogique lors du passage des
élèves d'un niveau à l'autre. De plus, il est logique de
regrouper sous une même administration des écoles qui desservent
une même collectivité. L'expérience que nous avons acquise
à la CECM nous incite à favoriser cette voie. Les divisions
régionales et sous-régionales dont la CECM s'est dotée
satisfont à la fois les besoins de participation locale, tout en
ménageant des services centralisés qui ne pourraient être
offerts autrement.
Définition et composition d'une commission scolaire. Nous
déplorons que le projet de loi 107 ne comporte pas de dispositions ayant
trait à la création et à la définition d'une
commission scolaire. Par contre, il est heureux de constater que le ministre a
jugé bon de reconnaître les droits des élèves et les
droits de l'enseignant. En ce sens, il aurait sûrement été
intéressant de voir étendre cette reconnaissance de droits aux
collectivités locales et ainsi reconnaître le droit de former une
commission scolaire et le droit d'être reconnu comme tel par le ministre,
moyennant la rencontre d'un certain nombre de critères et l'appartenance
à l'un des deux groupes linguistiques officiellement reconnus.
Il existe présentement au Québec une situation pour le
moins confuse quant à l'existence des commissions scolaires. D'une part,
on maintient en place un gouvernement local et l'on tente, par tous les moyens,
d'inciter la participation des parents à l'intérieur des
structures de ce gouvernement local. D'autre part, on continue avec constance
à gruger tout ce qui peut subsister d'autonomie locale. Le projet de loi
107 ne règle rien et accentue cette confusion. L'absence de structures
intermédiaires, ayant une réelle autonomie, aura certainement un
effet défavorable sur l'innovation pédagogique, la participation
des parents ainsi que les réponses à apporter à des
besoins particuliers.
Pour un modèle de commission scolaire. L'association
réitère que la seule façon d'assurer une participation
active et réelle des parents à la gestion scolaire, c'est en leur
accordant un nombre important de sièges au sein d'un conseil de
commissaires.
La commission scolaire devrait être un véritable
gouvernement local qui assure l'administration d'un certain nombre
d'écoles primaires et secondaires et de centres pour adultes. La
commission scolaire, selon l'association, devrait être composée
d'un conseil d'administration et d'un comité exécutif. Nous
retrouvons, dans le conseil d'administration, une composition
pluridimensionnelle. L'équilibre visé devrait permettre de
retrouver le directeur général, nommé d'office, mais sans
droit de vote, des commissaires élus au suffrage universel, des
commissaires élus par les parents composant les conseils
d'école.
Nous sommes d'accord pour que le droit de vote soit accordé aux
commissaires issus des conseils d'école et, par ailleurs, nous voulons
voir augmenter leur nombre au sein du conseil des commissaires. Pour
l'association, une majorité
de commissaires seraient élus au suffrage universel et, de leur
côté, des conseils d'école réunis en sous-bassins
éliraient leurs représentants commissaires.
Le conseil d'administration ainsi composé du directeur
général et des commissaires pourrait, par la suite, augmenter le
nombre de ses membres, en invitant les différents syndicats et
associations de personnel de la commission scolaire à y
déléguer un ou des représentants. Il pourrait
également y inviter un ou des des représentants des groupes
socio-économiques de la communauté. Ici, ce n'est pas
mentionné, mais on reconnaît aussi à ces
représentants, !e droit de vote au conseil des commissaires.
Malgré ce qui précède, les commissaires élus
au suffrage universel devraient être majoritaires au conseil
d'administration qui ne dépasserait pas 25 membres. Le conseil
d'administration peut mettre sur pied, à sa discrétion, le nombre
de comités consultatifs dont il a besoin, mais il doit obligatoirement
former un comité exécutif et y déléguer un certain
nombre de fonctions, tout en laissant l'administration courante au directeur
général de la commission scolaire.
L'exécutif serait composé d'un président, d'un
vice-président et de cinq commmissaires dont deux devraient être
des commissaires issus des conseils d'école. Le directeur
général serait également nommé d'office, mais
n'aurait pas le droit de vote.
Participation accrue des parents. Nous notons que le ministre, afin
d'assurer une participation des parents, a prévu la mise en place par la
commission scolaire de différents comités et a également
prévu une diffusion accrue des règlements de la commission
scolaire.
Pour l'association des cadres, la seule façon d'amener ou
d'inciter la participation des parents à la gestion scolaire demeure
dans l'exercice d'une réelle responsabilité. Une revue des
différentes fonctions qu'exercerait une commission scolaire, selon la
loi 107, comparées aux fonctions du ministre et au pouvoir de
réglementation du gouvernement, nous porte à croire qu'il y aura
très peu de liberté d'exercice confiée aux commissions
scolaires. Ces dernières devront constamment se référer
aux directives et règlements pour assurer leur aménagement, leur
gestion et leurs services. Cet état de fait ne peut que contribuer au
désintéressement généra! de la commission
scolaire.
Tant et aussi longtemps que le principal centre de décision
demeure au niveau gouvernemental, il nous apparaît difficile de susciter,
sur le plan local, l'initiative propre à créer une participation
de tous les intéressés. Ainsi, sur le plan pédagogique, le
ministre de l'Éducation devrait continuer de définir les
programmes, mais en ce qui concerne les autres aspects pédagogiques, les
manuels scolaires, le matériel didactique de même que
l'enseignement aux élèves en difficulté d'adaptation et
d'apprentissage, l'enseignement aux élèves en milieu
socio-économi- quement désavantagé, le secteur
professionnel ainsi que les services aux adultes, le ministre de
l'Éducation devrait se limiter à donner les grandes orientations
et à élargir les responsabilités des commissions scolaires
et des écoles. Particulièrement sur le plan de l'animation
directe, du soutien dû aux écoles, de l'encadrement
pédagogique, le ministère devrait faire confiance aux
autorités locales et pourvoir les commissions scolaires d'outils propres
à assumer ces rôles. Étant, de toute façon, beaucoup
plus proche de leurs écoles et connaissant beaucoup mieux leurs besoins
que le ministère de l'Éducation, l'association
réitère son souhait de voir l'apparition d'une école
responsable et issue de son milieu social, d'une commission scolaire
responsable et issue de la collectivité locale.
Je pense qu'avec cette présentation l'essentiel de notre position
est connu.
La deuxième partie concerne d'une façon plus pointue un
article ou l'autre du projet de loi 107. Peut-être qu'il n'est pas
nécessaire de les rappeler ici. On peut peut-être souligner
rapidement des choses qui seraient moins présentes dans la
première partie.
Dans ia section qui concerne l'élève, on note avec
intérêt que l'article 2 affirme le droit pour
l'élève qui a atteint 16 ou 22 ans de poursuivre ses
études à l'éducation des adultes. Parce que nous avons une
expérience à la CECM qui est dans ce sens, nous recommandons
toutefois que la commission scolaire puisse permettre à
l'élève de poursuivre ses études dans le cadre d'un
régime d'un programme de raccrochage scolaire, avec le régime
pédagogique applicable aux jeunes.
Dans la section sur l'enseignant, là aussi on a noté avec
intérêt que c'est intéressant de retrouver dans ce chapitre
de lois les droits et obligations des enseignants. Toutefois, ces droits de
l'enseignant décrits à l'article 16 devraient s'exercer dans le
cadre des responsabilités du directeur d'école - c'est un exemple
où on pense que le leadership du directeur d'école devrait
être davantage affirmé - et de son mandat de supervision
pédagogique. Nous déplorons, de plus, qu'il n'y ait pas de
mécanisme prévu pour régler les différents qui
peuvent surgir entre, d'une part, l'autonomie professionnelle des enseignants
que nous considérons essentielle et, d'autre part, la
nécessité pour un organisme de pouvoir agir sur l'action
quotidienne de ses employés.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M.
Vail-lancourt.
M. Vaillancourt (Marcel): Oui.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je ne veux pas
brimer votre droit de parole, loin de moi cette pensée. Je dois quand
même vous informer qu'il reste à peine douze minutes à
chacune des formations politiques avec lesquelles vous pourriez discuter.
Encore une fois, le but principal de
votre présence est de nous faire connaître votre
éclairage. Si vous jugez plus opportun de nous présenter d'une
façon plus précise votre mémoire, libre à vous de
le faire. Je dois vous informer qu'à l'heure où je vous parle, il
ne reste plus que onze à douze minutes à chaque formation
politique pour pouvoir discuter avec vous.
M. Vaillancourt (Marcel): Très bien.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Libre à
vous de prendre la décision.
M. Vaillancourt (Marcel): Bon! C'est rapide. En terminant,
peut-être on peut vous souligner qu'on a une position, sur le conseil
scolaire de ITle de Montréal, où on propose, à toutes fins
utiles, l'élimination de cette structure. Ensuite, vous retrouvez
à la fin de notre mémoire les recommandations qui concluent.
Peut-être pour-rais-je les rappeler rapidement: que l'école
réalise sa mission dans le cadre d'un projet éducatif, cela va de
soi; que le directeur d'école, nommé par la commission scolaire,
exerce un réel leadership pédagogique; que l'organisation de
l'école repose sur un conseil dont ferait partie un comité
pédagogique; que les commissions scolaires soient désormais
établies selon l'appartenance à l'un des deux groupes
linguistiques; que la CECM soit maintenue intégralement sur son
territoire comme la commission scolaire francophone de Montréal; qu'on
favorise la participation aux élections scolaires en supprimant la
confusion qu'entretient la dualité confessionnelle lors de la confection
des listes électorales; qu'on reconnaisse un seul type de commission
scolaire, soit une commission scolaire intégrant les niveaux primaire et
secondaire; que la commission scolaire constitue un véritable
gouvernement local possédant I exercice réel de sa gestion et de
ses services; que la participation des parents à la gestion scolaire
trouve une place significative au sein du conseil des commissaires; que le
ministre redonne aux commissions scolaires l'autonomie nécessaire
à la réalisation de leur aménagement, de leur gestion et
de leurs services; que le ministre se limite à définir les
programmes et à identifier les orientations nécessaires au
système scolaire du Québec.
Alors, là-dessus, nous sommes prêts à
répondre à vos questions. Merci.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci beaucoup, M.
Vaillancourt. Je reconnais immédiatement le ministre de
l'Éducation. M. le ministre.
M. Ryan: M. le Président, comme le mémoire, dans sa
teneur générale, est favorable au projet de loi, je me
dispenserai de commenter les passages qui sont plutôt favorables, sinon
pour vous en remercier et pour vous dire que je les apprécie vivement.
Je voudrais en venir tout de suite à quelques points qui doivent, selon
moi, faire l'objet, soit de précisions, soit de nuances. Tout d'abord,
quand vous parlez de l'école, vous apportez une suggestion qui
m'intéresse et que je voudrais vous voir expliquer quelque peu. Vous
dites: Ce ne serait pas une bonne chose d'avoir d'un côté le
conseil d'orientation et de l'autre côté le comité
d'école, au sens traditionnel du terme le comité de
parents. Vous dites qu'il faudrait plutôt envisager un comité
pédagogique. Voulez-vous nous expliquer comment vous verriez cela?
M. Vaillancourt (Marcel): Pour ce qui est de l'école,
quand on faisait la distinction, ce qu'on voyait c'est que le milieu, les
parents doivent être très présents. C'est pour cela qu'on
était d'accord avec la structure du conseil d'orientation qu'il y ait
une majorité de parents dans le conseil d'orientation ou le conseil
d'école. Cette partie-là, cela va. Ce qui nous apparaissait plus
faible ou ce qui manquait, c'était l'aspect expertise sur le plan
pédagogique. Alors, on dit: Le comité d'école ou le
comité d'orientation devrait pouvoir être alimenté par un
groupe qui a une expertise reconnue sur le plan pédagogique. Au
comité pédagogique, naturellement, ce serait essentiellement des
pédagogues qui se retrouveraient là, mais avec aussi des
représentants du conseil d'école ou du comité
d'orientation. C'est le groupe d'experts qui pourrait alimenter et enrichir la
réflexion du conseil d'école, pour lui permettre de prendre des
meilleures décisions, des décisions plus
éclairées.
M. Ryan: Très bien, cela va. Je vous remercie.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Y a-t-il une
intervention du côté ministériel?
M. Ryan: Oui.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre.
M. Ryan: Oui. Ensuite, je voudrais dire un petit mot des
commissions scolaires. Vous êtes d'accord sur le choix de la formule de
commissions scolaires basées sur la langue. Il n'y a pas de débat
entre nous là-dessus. Du point de vue du cheminement, évidemment,
nous devons tenir compte de l'avis que pourront émettre les tribunaux
là-dessus, parce que, si nous ne le faisions pas de notre propre
initiative, d'autres s'en chargeraient pour nous et cela retarderait
considérablement les procédures. En prenant l'initiative, le
gouvernement va pouvoir épargner du temps. Il n'y a rien de plus long
qu'une procédure qui commence au niveau du premier tribunal et qui monte
graduellement. Cela peut prendre de nombreuses années, tandis que la
procédure que nous envisageons sera plus expé-
ditive. (10 h 45)
Au sujet des commissions scolaires, je ne sais pas si nous serions
portés à être d'accord avec vous. La formule que vous
proposez, c'est qu'il y aurait une majorité de commissaires élus
au suffrage universel et, ensuite, il y aurait des parents en nombre plus grand
et des représentants de syndicats ou d'autres groupes. Cela fait une
formule qui m'apparait un petit peu hétéroclite. Je ne sais pas
si on peut envisager de mêler comme cela deux sortes de
représentations dans un même organisme. Il me semble qu'au point
de vue de la logique démocratique c'est assez difficile à
accepter. Je ne sais pas si vous tenez mordicus à cette suggestion ou si
c'est une suggestion que vous faites de bonne foi sans l'avoir soumise à
des politicologues.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M.
Vaillancourt.
M. Vaillancourt (Marcel): II est certain, M. le Président,
qu'on n'est pas allé chercher toute l'expertise partout
là-dessus. On était conscients que la suggestion qu'on faisait
était originale mais qu'elle était intéressante aussi.
Pour nous, presque tous les gens qui se retrouveraient au conseil des
commissaires seraient quand même des gens élus, soit au niveau
d'une communauté locale, soit au niveau de groupes présents dans
l'éducation. Or, ce sont quand même tous des gens élus qui
se retrouveraient là. On trouvait extrêmement intéressant
de réunir à la même table décisionnelle tous les
agents ou les principaux acteurs du milieu de l'éducation pour que les
décisions se prennent dans le meilleur éclairage et avec la
meilleure expertise. Or, on était conscients quand même qu'on
sortait des sentiers battus, mais on croit que ce serait quelque chose
d'extrêmement valable et de probablement très riche aussi.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. M. Ryan:
Très bien. Merci.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le
ministre.
M. Ryan: J'ai deux autres points que je voudrais soulever.
À la page 18, vous parlez des pouvoirs du ministre de l'Éducation
et des commissions scolaires. Vous dites qu'en matière
pédagogique le ministre de l'Éducation devrait se limiter
à certaines fonctions, notamment l'élaboration des programmes.
Dans toutes les autres choses, dans les autres aspects pédagogiques,
tels que les manuels scolaires, le matériel didactique, l'enseignement
aux élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage,
le secteur professionnel et les services aux adultes, il devrait se limiter
à donner des grandes orientations. J'ai l'impression que cette partie de
votre mémoire n'est pas très pratique. Je vais vous donner
quelques exemples. Prenez les manuels. Actuellement, ce sont les commissions
scolaires, même les directions d'école qui choisissent les
manuels. Il faut bien qu'ils soient approuvés quelque part. Si on laisse
entrer n'importe quelle sorte de manuels dans les écoles, tout de suite,
les parents, même les journalistes, vont critiquer. Ils vont dire: II n'y
a personne qui voit à cela au Québec. C'est un pouvoir qui est
donné au ministre, l'approbation des manuels, mais ce n'est pas lui qui
les impose dans les commissions scolaires. Je ne sais pas si on peut faire
beaucoup mieux que cela. Je trouve que ce partage est convenable. Si vous avez
mieux que cela là-dessus, j'aimerais que vous le disiez.
Pour prendre les options professionnelles, mettons-nous les pieds
à terre. On a fait la carte des enseignements récemment. Je pense
bien que la Commission des écoles catholiques de Montréal a eu
une très grande marge d'initiative pour proposer tout ce qu'elle voulait
donner. Au bout de la ligne, comme il y a une addition à laquelle il
faut faire face, il faut bien que quelqu'un prenne la décision, soit
à savoir si cela va être la CECM, si cela va être la CEPGM,
si cela va être la Commission scolaire Sault-Saint-Louis, si cela va
être Sainte-Croix, qui va avoir cela. Est-ce que vous ne trouvez pas
qu'il faut qu'il y ait une décision qui se prenne quelque part, dans la
mesure où les commissions scolaires se révéleraient
incapables de se concerter entre elles, en accord avec les orientations
générales du ministère? Cela dit - je vous donne ces deux
exemples - si vous avez des réponses à ces deux exemples, vous
allez m'éclairer beaucoup. Si vous n'en avez pas, je vais être
obligé de vous dire: Cette partie de votre mémoire est plus
faible. Alors, je laisse la démonstration à votre charge.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Monsieur.
M. Goyer (Germain): II y a peut-être également
d'autres aspects à considérer. Peut-être que l'exemple que
vous donnez est exact et bon. Par contre, en ce qui regarde
l'aménagement plutôt physique d'une commission scolaire, je pense
qu'on devrait donner aux commissions scolaires une plus grande autonomie. J'en
viens entre autres aux écoles, à la construction des
écoles, au financement des commissions scolaires. Est-ce qu'il n'y
aurait pas lieu de revenir à une plus grande autonomie par rapport aux
gouvernements locaux que sont les commissions scolaires et de vraiment avoir un
gouvernement local?
M. Ryan: Je vais vous donner juste un élément de
réponse et je vais passer à une autre question ensuite. Ce n'est
pas parce que je veux fermer le débat, mais c'est parce que le
président me regarde déjà avec un oeil de travers, au
point de vue du temps.
Dans le cas de la CECM, cela doit être à peu près 92
% ou 93 % de ses revenus qui lui
viennent de subventions gouvernementales. Les subventions versées
par le gouvernement, nous devons en rendre compte, nous aussi. Ce sont des
taxes payées par les contribuables à Québec. On nous
demande des comptes. La politique du gouvernement, c'est d'établir des
normes de reddition de comptes qui vont s'appliquer un peu partout de
manière semblable dans les grandes orientations, autant dans le secteur
des hôpitaux que dans le secteur des commissions scolaires, des
collèges ou d'autres institutions gouvernementales ou
paragouvernementales. Si on ne le faisait pas, dès qu'il arriverait une
irrégularité quelque part, ils diraient: On le sait bien, le
gouvernement n'avait pas de normes. On l'a vu dans les hôpitaux
récemment. Dès qu'on s'est aperçu qu'il y avait des
salaires qui débordaient certaines normes. Tout de suite, la tendance,
c'est de dire: Qu'est-ce que Québec faisait? On ne peut pas laisser
aller cela complètement, vu que les fonds viennent de Québec et
deuxièmement qu'ils sont limités. Il faut bien s'assurer que cela
va aller à l'essentiel. C'est ce qui explique le système actuel.
Je ne vois pas comment on va pouvoir le changer tant que, et cela va prendre
pas mal de temps, il n'y aura pas un partage différent des sources de
perception de taxes. Dans l'immédiat, on ne voit pas de
possibilité de changement sur cela.
Je passe à un autre sujet. Ce sera ma dernière question.
Ce n'est pas parce qu'il n'y en aurait pas d'autres, mais c'est à cause
du temps. Vous avez un passage sur le conseil scolaire de l'île de
Montréal qui a retenu mon attention. D'après ce que je comprends
de votre mémoire, vous semblez considérer que, si cet organisme
n'existait pas à Montréal, les choses pourraient fonctionner
quand même. Est-ce que vous allez aussi loin que cela?
M. Goyer: Presque aussi loin.
Le Président (M. Parent, Sauvé): S'il vous
plaît.
M. Goyer: Oui, presque aussi loin. Finalement, si on regarde la
part de services que nous octroie le conseil, si on met de côté le
plan financement, et encore là vous avez répondu tantôt en
amenant le pourcentage, donc, la part est infime. D'un autre côté,
on n'a pas fait d'étude, mais ce serait peut-être souhaitable d'en
faire, de savoir combien nous coûte ce financement que nous apporte le
conseil? Est-ce que, effectivement en 1988, lorsqu'on veut réaliser des
économies, à un moment donné, il ne serait pas bon de
s'interroger pour savoir quel est le coût de ce financement? Et partant
de là, voir s'il n'y aurait pas lieu de rapatrier au niveau d'une
commission scolaire ce service probablement dans le but également de
réaliser des économies.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Mme la
députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le
président, madame et messieurs, il me fait plaisir de vous souhaiter la
bienvenue au nom de l'Opposition officielle. C'est de bonne guerre, le ministre
dit que votre mémoire est assez favorable au projet de loi
déposé. Je ne ferai pas le tour des points sur lesquels il y a
divergence d'opinions, mais ils me semblent assez majeurs, si je pense, en
particulier à la composition du conseil des commissaires, aux
problèmes posés par la superposition de structures linguistiques
et confessionnelles sur le même territoire et plus
particulièrement à l'accroissement des pouvoirs du ministre et du
gouvernement au détriment de celui des commissions scolaires.
Je voudrais vous dire que, au moment où on a examiné le
projet de loi, nous l'avons fait dans la perspective suivante: La grille
d'analyse qu'on s'est donnée était d'examiner le projet de loi en
se demandant: Est-ce qu'il permet une plus grande démocratisation de
l'éducation? Est-ce qu'il permet une plus grande responsabilisation des
différents partenaires et une réelle modernisation des
structures? Sur tous ces points, on rejoint assez la lecture que vous
faites.
Vous allez me permettre cependant de vous interroger et de vous entendre
un peu en partant de ces trois éléments: la
démocratisation, la responsabilisation et la modernisation. En
matière de démocratisation, deux points ont retenu notre
attention. D'abord, le fait que le matériel autre que... en tout cas,
c'est du matériel pédagogique mais pédagogique
approuvé, ne soit pas gratuit. Dans la grande région de
Montréal, l'an passé, et c'était vrai également
pour la région de Québec, on estimait que selon le niveau
d'enseignement il pouvait en coûter entre 35 $ et 100 $ à un
enfant pour son entrée à l'école à l'automne.
Là évidemment, cela n'inclut pas les espadrilles. Cela comprend
exclusivement des cahiers d'exercice, etc. Alors, au moment où le
député d'Argenteuil était dans l'Opposition, il
réclamait que ce matériel soit gratuit, parce qu'il estimait que
même les cahiers dans lesquels les enfants découpaient, il
était anormal qu'ils soient aux frais des parents. De même, en
matière de démocratisation, parmi les trois
éléments, les trois points sur lesquels il s'appuyait pour
refuser de voter pour le projet de loi 3, le premier touchait la
gratuité qui n'est pas assez nettement et pleinement affirmée
dans le projet de loi. Il parlait ici de la gratuité à
l'éducation des adultes. Je reprends ses propos qui sont dans le Journal
des débats du 29 novembre 1984.
Sur cette question de la gratuité du matériel scolaire de
même que de la gratuité de l'éducation des adultes,
j'imagine que vous l'avez vue, vous avez vu cela passer, mais est-ce que cela
vous apparaît important? Parce que la loi 3 qui était dûment
adoptée et formellement adoptée par l'Assemblée nationale
permettait ces acquis importants en matière de gratuité à
l'éducation des adultes. Quelle est votre position là-dessus
ou en avez-vous une?
M. Vaillancourt (Marcel): Non, pour l'éducation des
adultes, on n'a pas regardé cet aspect de gratuité. Ce qui nous
semblait important pour l'éducation des adultes, c'est que ce soit
davantage relié à l'école. On trouvait qu'il y avait une
dichotomie entre l'éducation des adultes... Quand on parle de
l'école, on exclut un peu l'éducation des adultes. Nous, on
aurait vu qu'il aurait été avantageux, dans le cadre de
l'harmonisation de l'éducation aux adultes, qu'on retrouve, quand on
parle de l'école, davantage la possibilité de services aux
adultes.
Mais la question du financement comme telle pour l'éducation des
adultes, ce n'est pas une question qu'on a regardée. Effectivement,
c'est juste, ce que vous avez mentionné, qu'il en coûte
probablement entre 30 $ et 100 $ annuellement par enfant pour la
fréquentation et pour le matériel. Dans certains milieux, cela
pose sûrement des problèmes, cette question-là. Pour
d'autres milieux, on en entend moins parler. Mais certains milieux, il y a des
difficultés qui viennent de cela.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme la
députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: L'accessibilité ou l'accès à
l'éducation, la démocratisation, c'est assuré dans la
mesure où on lève les difficultés ou les contraintes qui
se posent à la fréquentation scolaire. Selon des statistiques
assez récentes, on sait, par exemple, que 20 % des enfants qui naissent
actuellement au Québec naissent dans une famille qui vit d'assistance
sociale ou qui vit en dessous du seuil de la pauvreté.
On sait que la réforme Paradis touchant l'aide sociale ne
contient pas de mesure - d'après ce qui nous a été permis
de constater jusqu'ici - pour augmenter les allocations scolaires pour les
enfants de ces milieux défavorisés. C'est à 35 $,
l'allocation scolaire par année.
Dans un tout autre ordre d'idées concernant la
responsabilisation, je partage votre avis, et cela, depuis fort longtemps, en
ce sens que la responsabilité de l'État, c'est de fixer les
grands objectifs nationaux qui touchent la gratuité, qui touchent la
démocratisation de l'accessibilité, un partage équitable,
en quantité et en qualité, des ressources et des services. C'est
fondamentalement la responsabilité de l'État.
En partant de cela, un certain nombre de règles qui permettent de
donner les moyens et les ressources humaines et financières aux
organismes ou aux agents locaux pour qu'il puissent s'acquitter au mieux de
cette responsabilité et atteindre des grands objectifs nationaux dont on
est un peu plus loin... Et le ministre invoque souvent des arguments qui vont
dans le sens de favoriser ou d'accroître le pouvoir du ministre en
matière d'établissement de la carte des enseignements
professionnels et des services de l'éducation des adultes. (11
heures)
Je me dis que, dans ces deux secteurs particulièrement, il est
extrêmement délicat de vouloir établir d'ici, de
Québec, ce qui convient le mieux dans une région. Dans ia grande
région de Montréal, au moins le transport en commun est à
peu près adéquat et très efficace, ce qui n'est pas le cas
dans nos régions et ce qui pose des problèmes sérieux
lorsqu'on pense, de Québec, détenir la bonne clé pour
déterminer comment les enseignements professionnels vont se distribuer,
à Chicoutimi, Jonquière, Normandin, ou encore dans le
Bas-du-Fleuve et la Gaspésie. Je pense que l'argument "on pourrait
retourner au ministre"... je n'aurais pas besoin de chercher longtemps. Dans
mon comté, actuellement il y a des problèmes touchant le partage
des enseignements professionnels. On cède à la commission
scolaire de Chicoutimi des équipements du centre de formation
professionnelle, les bâtisses, etc., dans lesquelles il y a des
équipements complets pour donner certains programmes d'enseignement
professionnel. Les programmes pour lesquels ils ont les équipements vont
se donner à Jonquière. Il y a un minimum là. Si on avait
examiné cela un peu, on aurait constaté que ce n'était
peut-être pas la meilleure décision.
Un groupe est venu ici en disant "Le ministre a des bonnes
idées". Il faudrait savoir si les bonnes idées ne sont pas aussi
bonnes et applicables partout également. Vous touchez un point majeur
quant à la déresponsabilisation des commissions scolaires et des
intervenants. Le ministre, pour justifier qu'il intervienne davantage dans les
orientations en matière de réglementation et de directives dans
les commissions scolaires, dit que 95 % du revenu des commissions scolaires
vient du gouvernement. Je lui concède cela. Il dit à titre
d'exemple: il faut intervenir, il faut contrôler lorsqu'il s'agit des
montants qui sont dépensés, dans les hôpitaux ou les
collèges, et là il dit: les commissions scolaires. Je serais
d'accord avec lui à condition qu'il aille aussi loin que sa
pensée est en train de nous mener et qu'il dise: Les commissions
scolaires, on n'en a plus besoin. Un bon conseil d'administration, comme il y
en a dans les hôpitaux, comme il y en a dans les collèges, cela
devrait être suffisant. En effet, il n'y a plus de pouvoir entre les
deux. Il y a des directives, des règles, des règlements, mais il
n'y a plus de pouvoir entre les deux. Je pense que, si le ministre avait le
courage politique, il dirait qu'il faut aller aussi loin que cela, parce que,
entre les deux, il n'y a rien. Je maintiens qu'on est en train de vider les
commissions scolaires de tout ce qui leur reste de pouvoir réel, y
compris sur le matériel pédagogique. Le ministre dit: On ne peut
pas laisser cela à tout le monde. Il faut absolument que cela soit
décidé ici à Québec.
Dans une certaine mesure, on peut reconnaître qu'il a raison en
partie, je ne dirais pas
en totalité, mais en partie. Cela permet au moins d'éviter
qu'on engraisse certains éditeurs parce qu'ils sont les amis du
régime dans certaines régions, peut-être. Peut-être
que cela permet d'en engraisser d'autres, mais c'est une autre question.
Le ministre était contre la centralisation, alors qu'il
était dans l'Opposition. Je voudrais seulement vous rappeler, ainsi
qu'aux intervenants, que la structure vers laquelle on se dirige, est une
structure où on a vidé de ses pouvoirs le gouvernement local que
constitue une commission scolaire. Dans la perspective où vous
présenter le conseil d'administration de la commission scolaire, cela
ressemble, dans sa composition, un peu à ce qu'on retrouve dans les
hôpitaux, dans les CSS, dans les collèges, dans les CLSC. Cela me
semble plus correspondre à ce qui est la réalité quant aux
pouvoirs qu'on laisse à ces instances.
Vous avez abordé, en troisième lieu, la modernisation des
structures scolaires en disant, et je reprends une partie de votre texte: Tout
porte à croire que cela va prendre du temps. Vous dites: Tout porte
à croire qu'il y a peu de liberté d'exercice confiée aux
commissions scolaires. Mais dans une autre partie de votre texte, vous dites
que la réforme risque d'attendre longtemps et que rien ne nous indique
un changement prochain, et nous croyons que le statu quo prévaudra
encore pour un bon moment.
Vous parlez des problèmes posés par la superposition des
structures scolaires. Comment vous sentiriez-vous si, comme cadre scolaire,
à la CECM, commission des écoles catholiques, donc avec des
écoles catholiques, on superposait une commission scolaire linguistique
française sur votre territoire?
Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme Poirier.
Mme Poirier (Micheline): II est clair que, lorsqu'on prône
la mise en place d'une structure linguistique et que l'on est obligé
d'admettre également la présence de garanties constitutionnelles
quant à la commission scolaire confessionnelle, on s'interroge à
savoir comment on peut arriver à obtenir la commission scolaire
linguistique si on n'a pas gain de cause sur le plan juridique concernant la
commission scolaire confessionnelle. Donc, ou on sacrifie notre idée
d'une commission scolaire linguistique, ou on doit y aller sur une
superposition de commissions scolaires. Il est évident qu'une telle
situation créerait sûrement des tensions dans le milieu. Les
édifices en place, les services qui sont déjà là,
le secteur anglophone de la commission scolaire de Montréal qui a pris
l'espace qu'il prend souvent grâce au secteur francophone de la
commission scolaire, si on arrive à subdiviser tout cela et essayer de
prendre chacun le morceau ou la juste part qui nous revient, il est clair
qu'à ce moment quelqu'un se sentira dépossédé et
qu'il y aura sûrement des difficultés d'application. Mais on ne
voit pas comment on pourrait y arriver si la décision des tribunaux
était que le droit juridique demeure et doit être
respecté.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, madame. Le
temps étant écoulé, j'invite la députée
Chicoutimi à conclure au nom de sa formation politique.
Mme Blackburn: M. le Président, comme il me reste quelques
minutes pour conclure, je voudrais davantage les sacrifier pour les
entendre.
Le Président (M. Parent, Sauvé): II ne vous reste
plus que quelques minutes. Il vous reste quelques minutes pour conclure.
Mme Blackburn: Alors, je vais conclure par deux brèves
questions Une première: vous dites que la section V de la partie I n'a
pas sa raison d'être et semble tout droit sortie d'un autre âge.
Cela concerne les visiteurs dans les écoles. Vous abordez les services
complémentaires mais exclusivement par le biais, en ne notant pas leur
disparition dans l'actuel projet de loi, alors qu'on les retrouvait
définis clairement dans la loi 3. Vous parlez également de
l'élève en disant: Nous recommandons toutefois que la commission
scolaire puisse permettre à l'élève de poursuivre ses
études dans le cadre d'un programme de raccrochage scolaire avec le
régime pédagogique applicable aux jeunes. Je me demandais comment
cela pouvait s'harmoniser avec la prétendue harmonisation jeunes et
adultes en enseignement professionnel.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Voulez-vous
répondre très brièvement, s'il vous plaît?
Mme Blackburn: Je termine là-dessus.
M. Vaillancourt (Marcel): Pour la dernière question, on a
déjà des expériences qui sont nées à la
Commission scolaire de Montréal, particulièrement dans une de nos
écoles, l'école Marie-Anne, où on reçoit des jeunes
entre 16 et 25 ans et où on fait vivre ensemble cette population de
jeunes adultes et de jeunes enfants en appliquant le régime
pédagogique pour les jeunes. C'est une expérience qui, pour nous,
est concluante. On devrait avoir la possibilité de la continuer et de
l'étendre à d'autres milieux qui voudraient la vivre.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. J'invite le
ministre de l'Éducation à conclure au nom de sa formation
politique.
M. Ryan: Je vous remercie cordialement de votre contribution
à notre recherche. Je pense que vous avez apporté plusieurs
éléments inté-
ressants que nous allons examiner de près. Si vous avez des
précisions à apporter sur la question qui a fait l'objet de nos
échanges tantôt, vous nous rendrez service. Je pars avec
l'impression que vous n'avez pas fait une démonstration
irréfutable des raisons pour lesquelles vous semblez vous opposer
à certaines dispositions traitant des pouvoirs du ministre et du
gouvernement. Si vous avez davantage à nous dire sur cela, j'en serais
très reconnaissant. Je ne pourrais pas vous laisser partir sans vous
exprimer mon désaccord au sujet de propos que j'ai entendus tantôt
sur les lèvres de la députée de Chicoutimi. Elle disait
que les commissions scolaires deviennent de plus en plus des corps vides de
pouvoirs. Je pense que votre présence ici témoigne du contraire.
Une commission scolaire qui a toute une armée de cadres comme vous
l'êtes, une armée de directeurs d'école, d'enseignants,
au-delà de 11 000 salariés à son service, je crois, qui
organise des écoles de sa propre initiative et qui procède
à l'engagement de tout ce monde, qui supervise leur travail, qui fait
des affectations, qui organise, en somme, les services éducatifs sur
tout son territoire, je trouve que ce sont des responsabilités
très importantes. Maintenant, là où il arrive une
confusion, c'est qu'il y en a qui voudraient que la commission scolaire soit un
gouvernement souverain. Cela est impensable dans notre système parce que
nous avons un système d'enseignement avec une direction politique
commune pour tout le système, une direction politique régionale
aussi pour les fins régionales. Je crois que l'équilibre qui est
proposé est le meilleur possible. Mais, encore une fois, s'il y a des
points précis sur lesquels il y a des démonstrations que vous
pouvez nous offrir quant à des améliorations souhaitables, nous
les accueillerons avec énormément d'intérêt.
Je vous remercie. Vous avez apporté une contribution très
utile à notre travail.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Cela va? Alors,
merci beaucoup, M. le ministre, Mme ia porte-parole, M. Vaillancourt et les
gens de la CECM.
Nous allons suspendre pour quelques minutes. Nous accueillerons,
immédiatement après, l'Association des directeurs d'école
de Montréal.
(Suspension de la séance à 11 h 11)
(Reprise à 11 h 13)
Le Président (M. Parent, Sauvé): À l'ordre,
s'il vous plaît!
J'invite les membres de la commission permanente de l'éducation
à prendre place. La commission accuse déjà douze minutes
de retard dans ses travaux. Ce matin, nous n'avons pas de possibilité de
compresser ou d'allonger...
Une voix: C'est la plus ponctuelle...
Le Président (M. Parent, Sauvé): Pas encore
à mon goût...
Alors, j'invite M. Houle à prendre place.
À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses
travaux et j'invite M. Houle à prendre place ainsi que les membres de la
commission. Nous accueillons l'Association des directeurs d'école de
Montréal représentée par M. André Houle. Est-ce que
M. Houle est ici? Ils ne sont pas là? Faites revenir M. Vaillancourt, on
va lui donner une demi-heure. Ha, ha, ha!
M. Vaillancourt, si vous voulez vous rasseoir, on peut vous donner une
demi-heure encore.
Une voix: II s'en vient.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je m'excuse
d'avoir précipité. Ah! Ils sont là.
J'invite M. Houle à prendre place et les membres de la commission
à faire de même.
M. Houle, bienvenue. Nous vous remercions beaucoup d'avoir
répondu à l'invitation de la commission. La commission accuse
déjà du retard. Nous allons essayer de terminer dans les
délais prévus. Par contre, vous avez droit à une heure. M.
Houle, je vous invite à nous présenter les gens qui vous
accompagnent et à nous présenter immédiatement votre
mémoire.
Association des directeurs d'école de
Montréal
M. Houle (André): Merci, M. le Président. Merci
à la commission d'avoir accepté de recevoir l'ADEM qui est une
association qui regroupe les gens uniquement de Montréal.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je m'excuse, M.
Houle. À l'ordre, s'il vous plaît dans la salle! M. Houle.
M. Houle: J'en profite pour présenter les gens qui
m'accompagnent: à l'extrême gauche, Mme Pauline Bilodeau,
secrétaire trésorière de l'association; M. Michel Hinton,
deuxième vice-président; Mme Lise Robitaille, première
vice-présidente. À ma droite ici tout près, M. Michel
Dubé, conseiller spécial et M. Jacques Monette, secrétaire
permanent.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Bienvenue.
M. Houle: L'exposé ne durera pas plus de 20 minutes. On
aimerait bien avoir des questions et on vous annonce immédiatement que
le mémoire porte sur des dimensions uniquement pédagogiques. On
est les premiers répondants de la pédagogie dans les
écoles en tant que directeurs d'école et on a essayé de
voir le mémoire du côté pédagogique
prioritairement.
L'Association des directeurs d'école de Montréal regroupe
tous les directeurs, directeurs adjoints et ajoints administratifs des
écoles françaises et des centres d'éducation des adultes
de la Commission des écoles catholiques de Montréal.
L'ADEM remercie la commission parlementaire de l'éducation de la
recevoir en audition à l'occasion de l'étude du projet de loi 107
sur l'instruction publique.
Le texte que nous vous soumettons n'a rien d'une thèse; il est
seulement le fruit de réflexions de pédagogues, artisans et
gestionnaires d'un renouvellement de la pédagogie qui s'effectue
actuellement à Montréal.
Nous vous transmettons donc nos réactions à ce projet de
loi à titre de praticiens ayant une bonne expérience du
vécu des écoles montréalaises et en ayant toujours
à l'esprit ce qui pourrait permettre d'améliorer le rendement de
nos élèves.
Nous sommes globalement d'accord avec le projet de loi 107. Nous avions
formulé des réserves importantes à l'occasion de la
présentation des projets de loi 40 et 3, sur des aspects fondamentaux de
ces projets de loi. Nous devons dire, en toute cohérence avec nos
opinions d'alors, que les projets de loi 106 et 107 corrigent la plupart des
lacunes que nous soulignions à l'époque et que les directeurs
d'école de Montréal se sentent à l'aise face aux
modifications que le législateur propose.
Nous endossons le principe de la division linguistique des commissions
scolaires et nous regrettons que cet aspect du projet de loi ne puisse
s'appliquer à Montréal. Nous comprenons cependant la prudence du
ministre dans ce dossier et nous préférons la paix scolaire avant
tout. Il n'en demeure pas moins que le secteur anglais de la C£CM
coûte de plus en plus cher et que nos écoles françaises en
supportent une partie des coûts.
Nous ne sommes pas sans savoir non plus que les écoles
françaises sont créées, administrées et
supervisées par une structure majoritairement anglophone du
côté protestant. Nous souhaitons ardemment que le ministre puisse
un jour régler le problème qui existe à Montréal,
d'autant plus que le projet de loi 107 accorde aux écoles le droit
d'être confessionnelles avec tous les services inhérents à
ce statut.
Nous préférons des écoles confessionnelles dans une
commission scolaire linguistique aux écoles linguistiques actuelles dans
une commission scolaire confessionnelle.
L'introduction de parents au conseil des commissaires, avec les
mêmes droits que les commissaires élus, nous paraît juste et
raisonnable; nous recevons aussi de bonne part une plus grande implication des
parents et des membres du personnel dans la vie de l'école, d'autant
plus que le projet de loi 107 nous semble respecter les niveaux de
compétence des différents intervenants.
Nous souscrivons au fait que le législateur place l'école
sous l'autorité du directeur et qu'il donne à ce dernier les
moyens d'assumer ses responsabilités. Nous sommes d'accord
également pour que le directeur d'école relève du
directeur général de la commission scolaire. Nous avons, par
contre, certaines interrogations et parfois même des réticences
face à quelques articles du projet de loi, et nous désirons les
soumettre à votre considération.
En ce qui concerne les élèves, nous sommes d'accord avec
les articles du projet de loi qui traitent des élèves. Cependant,
nous divergeons d'opinion avec le législateur en ce qui concerne
l'article 15. Nous aurions préféré que l'on retienne les
dispositions pénales de la Loi sur l'instruction publique, en plus de
l'obligation pour le directeur d'école de signaler la
non-fréquentation d'un élève à la DPJ. La Direction
de la protection de la jeunesse est constamment débordée et
parfois n'arrive même pas à intervenir dans des cas urgents de
protection. Nous croyons qu'il serait préférable d'inclure dans
le projet de loi d'autres moyens d'intervention coercitifs pour les parents
fautifs.
L'enseignant. Il nous paraît important que les droits et les
obligations des enseignants soient spécifiés dans la loi comme on
le propose dans le projet de loi 107. Nous souhaitons, entre autres, que le
législateur retienne le paragraphe 5° de l'article 19 qui fait
obligation à tous les enseignants d'assurer la qualité de l'usage
correct de la langue écrite et pariée.
En ce qui concerne la possibilité de révocation ou de
suspension de l'autorisation à enseigner aux articles 23 à 34,
nous suggérons d'ajouter aux motifs invoqués à l'article
23 l'incompétence dûment démontrée comme pouvant
entraîner une révocation, une suspension ou un maintien sous
condition du brevet d'enseignement ou du permis d'enseigner. À l'article
24, ne devrait-on pas inclure la commission scolaire, comme personne pouvant
porter plainte au ministre?
L'école. Constitution. L'article 36 nous apparaît bien
encadrer et bien définir le projet éducatif de chaque
école. Il tient compte des niveaux de compétence et de
responsabilité des différents intervenants.
Le directeur d'école. Nous sommes d'accord pour que la nomination
du directeur et de ses adjoints soit faite par la commission scolaire
après consultation du conseil d'orientation sur les critères de
sélection. Cependant, nous tenons à ce qu'il soit prévu
dans la loi l'obligation pour la commission scolaire d'impliquer directement le
directeur d'école dans le choix de ses adjoints. Étant
donné qu'il définit lui-même les tâches des adjoints
en fonction de son organisation, il nous apparaît essentiel au bon
fonctionnement de l'équipe de direction que le directeur puisse choisir
ses collaborateurs immédiats en respectant, bien entendu, les
critères établis par la commission scolaire après
consultation du conseil
d'orientation.
Nous apprécions grandement le fait que le projet de loi
précise que le directeur d'école rende compte de sa gestion au
directeur général, qu'il lui donne des pouvoirs
décisionnels sur le plan pédagogique, ce qui lui permet d'assurer
ses responsabilités de premier pédagogue de son école, et
qu'il détermine de façon claire le cadre de ses relations avec le
conseil d'orientation.
Le directeur d'école détermine, en vertu de l'article 50,
l'utilisation des locaux sous certaines réserves. N'y aurait-il pas lieu
d'ajouter à cet article l'obligation pour la commission scolaire de
consulter le conseil d'orientation de l'école concernée avant de
conclure des ententes extérieures sur l'utilisation des locaux ou d'une
partie des locaux d'une école et ce, dans le but de respecter les
besoins de chaque milieu?
À l'article 51, il faudrait préciser de quel type de
budget il s'agit. À Montréal, le directeur ne prépare pas
le budget annuel de son école. Il gère surtout un budget de
consommation et la récupération salariale est rendue possible par
le non-remplacement d'employés absents autres que les enseignants. Nous
tenons aussi à souligner que nous apprécions le fait que
l'article 52 reconnaisse au directeur d'école le droit de participer
à l'élaboration des politiques, programmes et règlements
de la commission scolaire.
Le conseil d'orientation. À l'occasion de la présentation
de la Loi sur l'enseignement primaire et secondaire public, le projet de loi 40
de l'ancien gouvernement, nous avions fait part de façon non
équivoque à la commission parlementaire de l'époque de
notre opposition à la création de conseils d'école. Nous
proposions plutôt des conseils d'orientation. Par la suite, au moment de
la parution du projet de loi 3, nous avions émis plusieurs
réserves quant à la formation, au fonctionnement et aux fonctions
du conseil d'école. Le projet de loi actuel propose un conseil
d'orientation et corrige de façon significative ce que nous
considérions, dans les projets de loi antérieurs, comme des
entraves au bon fonctionnement d'une école. C'est donc dire que nous
sommes d'accord avec le ministre de l'Éducation en ce qui concerne la
création d'un conseil d'orientation dans chaque école.
Le projet de loi 107 ne mentionne pas de nombre maximum de personnes
pouvant composer le conseil d'orientation. Nous recommandons qu'il soit
fixé à quinze membres dans le but de favoriser le travail
d'équipe et de faciliter l'atteinte de consensus. Nous suggérons
toutefois qu'un employé d'une commission scolaire à laquelle
appartient une école ne puisse pas faire partie du conseil d'orientation
de cette école comme représentant des parents, de façon
à éviter des conflits de rôle possibles.
Nous acceptons, par ailleurs, que le directeur d'école n'ait pas
le droit de vote au conseil d'orientation. Cependant, le législateur
devrait, lui, prévoir un droit de veto accompagné d'une
possibilité de recours du conseil d'orientation auprès du
directeur général de la commission scolaire.
Notre expérience nous permet d'affirmer que, en période de
négociations ou à l'occasion de conflits syndicaux, les parents
sont souvent la proie de manipulations de toutes sortes. Nous constatons aussi
le même phénomène, lorsque le directeur d'école fait
face à des résistances aux changements de la part des
enseignants. Ce droit de veto nous paraît donc essentiel.
Nous recommandons aussi que les représentants des
élèves répondent à certains critères pour
avoir le droit de siéger au conseil d'orientation. Il pourrait s'agir,
par exemple, d'avoir fait preuve de bonne conduite ou d'un intérêt
certain pour l'étude.
Enfin, la présence du commissaire de la circonscription
électorale au conseil d'orientation d'une école ne nous
paraît pas souhaitable, à moins qu'il n'y soit invité ou
qu'il en fasse la demande à certaines occasions. Nous voulons ainsi
éviter toute ingérence politique.
À l'article 59, nous croyons que l'élection des
représentants des enseignants ne devraient pas faire l'objet de
négociations et que, par conséquent, les modalités
d'élection ne devrait pas faire partie de la convention collective. Il
faudrait éviter, le plus possible, la possibilité de noyautage
des conseils d'orientation par les équipes syndicales,
particulièrement en période de négociations. L'article 60
ne mentionne pas, d'ailleurs, que les modalités d'élection des
représentants des professionnels et du personnel de soutien puissent
être prévues dans leur convention collective et nous croyons qu'il
devrait en être ainsi pour les enseignants.
En ce qui a trait au quorum, il nous semblerait primordial qu'il
comprenne obligatoirement une majorité de parents.
En ce qui a trait aux fonctions du conseil d'orientation, l'ADEM est
d'accord, dans l'ensemble, avec les fonctions dévolues au conseil
d'orientation. Cependant, à l'article 81, nous croyons fermement. que
les modalités d'application du régime pédagogique,
l'adaptation des programmes d'études officiels et les critères de
choix de manuels ou de matériel didactique devraient relever de la
compétence du directeur de l'école. Celui-ci devrait avoir toute
liberté d'agir dans ces domaines, pour autant qu'il le fasse à
l'intérieur des politiques et des règlements de la commission
scolaire, ce qui n'empêcherait pas le conseil d'orientation de lui faire
les suggestions qu'il jugerait à propos.
Comité d'école. L'ADEM s'interroge sur la pertinence de la
formation d'un comité d'école, même si elle n'est pas
obligatoire. Étant donné l'existence d'un conseil d'orientation
au sein duquel les parents auront prépondérance, nous croyons que
c'est faire double emploi que de créer, en plus, un comité
d'école. Nous ne comprenons pas l'objectif poursuivi ici par le
législateur. Nous n'y voyons qu'une source possible de conflits et un
alourdissement des
mécanismes de consultation qui ne serviront pas mieux l'ensemble
des parents ou des élèves.
Conseil des commissaires. Comme nous l'avons dit plus haut, nous sommes
d'accord sur le fait que les parents soient représentés au
conseil des commissaires avec les mêmes droits que les commissaires
élus au suffrage universel. Nous sommes convaincus que ces parents
commissaires représentent aussi légitimement la population que
les autres et que la démocratie s'en trouve mieux servie. Il serait
même souhaitable, dans les commissions scolaires importantes, qu'il y ait
plus que deux ou trois parents commissaires sans toutefois qu'ils soient
majoritaires.
En ce qui concerne l'élection du conseil des commissaires, telle
que prévue dans le projet de loi 106, nous nous interrogeons sur la
pertinence de nommer d'office le directeur général comme
président d'élection. Nous croyons qu'il pourrait parfois faire
l'objet de pressions indues pouvant le placer dans des situations
délicates, face à l'impartialité totale dont il doit faire
preuve en temps d'élection. Enfin, le remboursement des dépenses
électorales des candidats incitera probablement beaucoup plus de
personnes intéressées au progrès de l'éducation
à se présenter.
Comités de la commission scolaire. Il existe, à la CECM,
un comité consultatif de gestion relevant du directeur
général et des tables de gestion régionales. Nous devons
dire, en général, que nous sommes satisfaits du fonctionnement de
ces comités. Nous apprécions le fait que des comités
semblables soient prévus dans le projet de loi et que les directeurs
d'école doivent y être en majorité. Mais il nous semblerait
plus profitable que la loi se limite à créer l'obligation, pour
une commission scolaire, de mettre sur pied un comité consultatif au
directeur général et des comités régionaux, s'il y
a iieu, composés majoritairement de directeurs d'école
désignés par l'association qui les représente. Le
législateur devrait laisser plus de latitude aux commissions scolaires
et aux associations de cadres et de directeurs d'école pour qu'elles
s'entendent sur une structure de consultation qui leur convienne, à
défaut de quoi elles devraient adopter obligatoirement celle qui est
proposée dans le projet de loi 101. (11 h 30)
À l'article 167, nous demandons au ministre d'inclure des
directeurs d'école dans la composition du comité consultatif des
services aux élèves handicapés ou en difficulté
d'adaptation ou d'apprentissage. Plusieurs de nos directeurs d'école
bénéficient d'une formation et d'une expérience qui leur
permet d'apporter un point de vue qui nous paraît non négligeable
pour l'efficacité de ce comité.
Fonctions reliées aux services éducatifs. L'ADEM est
pleinement d'accord avec les articles 207 à 210 qui garantissent aux
élèves l'enseignement religieux ou moral et des services de
pastorale selon le choix des élèves ou de leurs parents. Nous
croyons que le contenu de ces articles, ajouté à l'article 80 qui
permet qu'une école soit confessionnelle, respecte bien les droits
traditionnels des Québécois catholiques ou protestants tout en
permettant aux élèves d'autres confessionnalités de se
sentir chez eux dans nos écoles. Nous sommes convaincus que ce qui est
proposé dans le projet de loi est préférable à une
multiplication de réseaux d'écoles selon les dénominations
religieuses qui pourraient le désirer, comme le proposent parfois
certains groupes sociaux. À ce compte-là, le ministère
serait appelé à créer des commissions scolaires
catholiques, protestantes, jéhoviennes, scien-tologistes, bouddhistes,
musulmanes, etc. Nous endossons donc pleinement la proposition du
ministère de l'Éducation parce qu'elle nous paraît
réaliste et respectueuse des droits de chacun.
Fonctions reliées aux services à la communauté.
L'ADEM croit que l'école peut et doit rendre des services à la
communauté en plus de s'acquitter de sa mission prioritaire qui est
d'instruire et d'éduquer Nous voulons, cependant, profiter de l'occasion
pour sensibiliser le ministre sur le fait que la tâche des directeurs
d'école s'est transformée considérablement depuis quelques
années et qu'on ne tient pas compte, entre autres dans les règles
d'effectifs à la direction, du rôle social beaucoup plus
étendu que joue l'école d'aujourd'hui. On détermine encore
aujourd'hui le nombre de personnes à la direction d'une école
comme il y a 20 ans, en se basant uniquement sur le nombre
d'élèves. Or, la réalité est tout autre, à
tel point que le législateur croit bon d'en tenir compte dans son projet
de loi. Pouvons-nous demander au ministre d'attacher une attention
particulière au chapitre qui traite des règles d'effectifs dans
l'arrêté en conseil qui régit nos conditions de travail?
Nous croyons qu'il est urgent de revoir en profondeur cet aspect des conditions
de travail des directeurs d'école à la lumière du
rôle social de plus en plus élaboré que joue l'école
dans la communauté.
Règlements et résolutions. L'obligation pour une
commission scolaire de faire précéder l'adoption prévue
d'un règlement d'un avis public de quinze jours et d'en transmettre une
copie à chaque conseil d'orientation nous apparaît comme un bon
moyen d'intéresser et d'impliquer les différents milieux à
l'ensemble de la chose scolaire et de susciter des interventions et des avis
qui ne manqueront pas d'éclairer les conseils des commissaires; ce qui,
à notre avis, ne peut que favoriser l'adoption d'un règlement
mieux adapté aux besoins du réseau d'écoles,
particulièrement dans les grandes commissions scolaires. Nous
considérons aussi que la transmission aux différents conseils
d'orientation d'une copie des règlements adoptés par la
commission scolaire permettra d'éviter que des écoles agissent en
dehors des règles par manque d'information.
Régimes provisoires. Le fait de prévoir la
représentation des parents des élèves francophones
d'une commission scolaire confessionnelle à majorité anglophone
ou vice versa nous paraît de bon aloi. Cependant, l'ADEM insiste
auprès du ministre pour qu'il aide encore plus les francophones
obligés, à cause de la confessionnalité, de
fréquenter des écoles françaises d'une commission scolaire
à majorité anglophone, à se faire entendre et à
obtenir la même qualité de services que s'ils appartenaient
à une commission scolaire à majorité francophone. En fait,
la division confessionnelle des commissions scolaires des villes de
Montréal et Québec place les minoritaires, qu'ils soient
anglophones ou francophones, dans une situation qui pourrait facilement
s'avérer injuste pour ces groupes.
En terminant, l'Association des directeurs d'école de
Montréal est favorable au projet de loi 107 et en souhaite l'adoption
avec les changements mineurs qu'elle propose. Elle croit que la population
aurait été mieux servie si la division linguistique des
commissions scolaires avait pu être appliquée
intégralement. Les directeurs d'école de Montréal auraient
préféré que les législateurs prévoient des
dispositions particulières pour la CECM en dehors de la
confessionnalité. La ville de Montréal a changé
énormément ces dernières années et elle ressemble
de moins en moins au reste de la province. Les quartiers
défavorisés, les allophones, la violence, la mobilité de
la population, etc., militent en faveur d'un traitement différent de la
réalité montréalaise, ce qui n'apparaît pas dans le
projet de loi. L'important, pour nous, n'est pas que le pouvoir soit à
Montréal ou à Québec, mais qu'il tienne compte du
vécu et des problèmes de nos écoles, qui sont
différents de ceux des autres écoles de la province. Dans cette
optique, nous souhaitons la plus grande collaboration possible entre le
ministère et notre commission scolaire, tant dans le domaine politique
que pour ce qui est des fonctionnaires. Cependant, nous voudrions souligner au
gouvernement qu'il a le devoir de faire en sorte que Montréal ne
connaisse jamais les problèmes de New York, Chicago ou Détroit
dans le domaine de l'éducation, même si notre tissu urbain
ressemble de plus en plus à celui de ces grandes villes
américaines.
En terminant, l'ADEM assure le ministre de l'Éducation de la
collaboration des directeurs d'école de Montréal lors de la mise
en application du projet de loi 107 et elle remercie la commission
parlementaire de l'avoir reçue.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, M. Houle,
c'est la commission parlementaire qui vous remercie d'être venus apporter
un éclairage sur ces deux projets de loi. Elle vous remercie aussi de
façon spéciale, parce que les gens de Montréal, vous
représentez une particularité. J'ai toujours dit que
l'école publique en milieu urbain n'était pas comme les autres.
Je pense que vous apportez une dimension très enrichissante à
cette commission en soulignant la problématique et la
particularité du milieu social dans lequel vous vivez, dans une grande
ville comme Montréal.
Dans un premier temps, je vais reconnaître le ministre de
l'Éducation.
M. Ryan: M. le Président, je voudrais tout d'abord
remercier l'Association des directeurs d'école de Montréal de
l'appui qu'elle est venue apporter au projet de loi. Je pense que la position
est claire dès le début. J'ai lu dans le mémoire: Nous
sommes globalement en accord avec le projet de ioi 107. Je l'apprécie
d'autant plus que nous tenions énormément à
connaître le point de vue des directeurs et des directrices
d'école sur les dispositions du projet de loi qui traitent plus
particulièrement de l'école et de la pédagogie.
Sur les grandes structures générales, votre point de vue
nous intéresse autant que celui de tout autre organisme. Il est
évident que votre compétence particulière porte plus
immédiatement sur le vécu de l'école et sur le vécu
pédagogique dans notre système d'enseignement. De ce point de
vue, je suis extrêmement intéressé. Je dirais aussi que je
suis encouragé par l'appui que vous apportez au projet de loi. Je
constate que nous avons mis, à la suite de tous les débats qui
avaient eu lieu ces dernières années, plusieurs dispositions
nouvelles dans le projet de loi et vous les avez fort bien saisies, dans bien
des cas, comme la différence entre le conseil d'orientation et le
conseil d'école originel, par exemple. Je pense que vous l'avez
très bien campée dans votre mémoire. Je suis heureux de
constater qu'il y a une sorte de convergence à ce point de vue qui est
prometteuse de bons résultats lorsque le projet de loi sera devenu loi
et que nous en commencerons l'application.
Il y a bien des points que vous soulignez dans votre mémoire, M.
le Président, qui vont faire l'objet d'un examen attentif de notre part.
Je ne suis pas en mesure de vous donner une réponse ce matin, mais,
quand vous demandez, par exemple, que nous revisions la disposition
prévoyant la participation des commissaires élus aux
réunions du conseil d'orientation, je pense que vous formulez une
difficulté sérieuse. On va l'examiner attentivement. Nous avons
fait cela pour bien faire. S'il y a des obstacles importants, nous allons les
examiner attentivement. Je tiens à vous dire, en tout cas, que j'ai
remarqué cela.
Lorsque vous parlez de la nécessaire participation du directeur
au choix de ses adjoints, en principe, je suis porté à être
d'accord avec vous. Il peut arriver que la direction veuille adjoindre à
un directeur une personne qui va le compléter, mais que le directeur ne
se rende pas très bien compte du genre de complément dont il a
besoin. Est-ce que c'est bon de mettre cela dans la loi? En tout cas, on n'a
pas d'objection à mettre la consultation dans la loi. Il n'y a pas de
problème là-dessus. Lorsque vous dites qu'il faudrait fixer
un
nombre maximum de membres au conseil d'orientation, je pense que c'est
excellent aussi. Nous allons examiner cela avec attention.
Vous demandez que les directeurs d'école aient une
représentation au comité consultatif qui devra être
formé auprès de la commission scolaire concernant les
élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage. Cela
nous a déjà été recommandé par d'autres
organismes qui se sont présentés devant la commission. Je pense
que ce sont toutes des choses que nous allons examiner avec beaucoup
d'attention. Vous nous apportez des points qui vont nous permettre de mettre
encore un petit peu plus de précision dans le projet de loi. Je
l'apprécie.
Je voudrais vous poser peut-être une couple de questions. Il y a
mon collègue et député de Richelieu qui en aurait à
vous adresser également. Les autres en auraient beaucoup, mais c'est
parce que nous avons un temps limité. Nous essayons de nous en tenir
vraiment à l'essentiel.
Tantôt, les cadres de la CECM nous ont proposé qu'au niveau
de l'école, en plus du conseil d'orientation, nous prévoyions un
comité pédagogique. Vous, comme eux, trouvez que le comité
d'école ne serait pas absolument nécessaire, que cela pourrait
même créer une duplication de fonctions. Mais comment
réagiriez-vous à cette proposition d'un comité
pédagogique qui a été formulée par l'association
des cadres tantôt?
M. Houle: Pour nous, le comité pédagogique existe
déjà dans toutes les écoles. Pour un directeur
d'école, son comité pédagogique, c'est d'abord ses
enseignants. C'est son plus beau comité pédagogique. On travaille
en collaboration étroite avec nos enseignants. Dans les polyvalentes,
nous avons ce qu'on appelle un comité pédagogique qui est
formé de chefs de section ou de chefs de division ou de chefs de groupe
tel qu'appelés dans la convention collective. On a cet argument et cet
organisme est déjà en place. Ce sont des spécialistes qui,
avec le directeur d'école qui est le premier répondant de la
pédagogie, prennent des décisions pédagogiques qui ensuite
sont acheminées au conseil d'orientation ou au conseil
d'école.
M. Ryan: Est-ce que je dois comprendre de votre réponse
que ce n'est pas nécessaire, selon vous, que ce soit inscrit dans la
loi?
M. Houle: Non seulement ce n'est pas nécessaire, mais je
pense que cela viendrait alourdir la mécanique. Cela ne faciliterait pas
les choses surtout si on pense à des écoles de premier cycle ou
du primaire, par exemple, où il y a douze ou treize professeurs. Si on
multiplie les comités, on va passer notre temps à nous
réunir, à nous questionner, mais on va oublier d'agir
pédagogiquement.
M. Ryan: Très bien. Je vais vous poser une autre question.
Vous écrivez à la page 4 de votre mémoire la phrase
suivante qui résume votre position sur les commissions scolaires
linguistiques, et je cite: "Nous préférons des écoles
confessionnelles dans une commission scolaire linguistique aux écoles
linguistiques actuelles dans une commission scolaire confessionnelle"
J'aimerais que vous m'expliquiez en quoi la création de commissions
scolaires linguistiques sur le territoire de Montréal améliorera
les choses pour tout le monde.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Monsieur. M. Houle: M.
Dubé.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Monsieur. C'est
monsieur?
M. Dubé (Michel): En fait, on croit qu'il est
complètement inutile que la structure soit confessionnelle, mais qu'il
faut que la confessionnalité soit au niveau de l'école, que ce
soit la que les gens décident. D'ailleurs, le projet de loi
prévoit toutes les garanties imaginables pour les parents, qu'ils soient
catholiques ou protestants, de recevoir les services aussi bien en enseignement
religieux qu'en pastorale. Or, on dit que ce qui est important, c'est que ce
qui devrait être confessionnel, c'est vraiment l'école. C'est
presque une caricature qu'on fait là quand on dit: On a peut-être
une structure confessionnelle, mais les écoles sont linguistiques, un
point c'est tout. Plusieurs ne sont probablement même pas
confessionnelles, si on parle de la réalité.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. Dubé.
C'est terminé.
M. le député de Richelieu.
M. Khelfa: Merci, M. le Président. Ma question est
à deux volets. Si on prend le chapitre II de la page 6, vous mentionnez
là que l'autorisation d'enseigner peut être
révoquée. J'aimerais vous poser la question: Pourquoi avez-vous
inscrit cela à l'intérieur de ce chapitre? Pour quelle raison?
Qu'est-ce que cette notion inclut pour vous? Par qui peut-elle être
révoquée et comment? Quel est le cadre d'après vous?
Le deuxième volet de ma question, c'est que toujours dans la
même page vous dites: "À l'article 24, ne devrait-on pas inclure
la commission scolaire "? Qui voudriez-vous inclure à la place?
Le Président (M. Parent, Sauvé): Qui? M. Dubé ou M.
Houle?
M. Houle: M. Dubé.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M Monet- te?
M. Houle: Oui, j'ai assez parlé. (11 h 45)
M. Dubé: D'abord, sur la dernière partie de
l'article 24, on dit: "... ne devrait-on pas inclure la commission scolaire...
"? C'est parce que, dans le projet de loi, on ne fait pas mention de la
commission scolaire comme pouvant porter plainte auprès du ministre. Or,
on aimerait que la commission scolaire puisse aussi porter plainte
auprès du ministre dans le cas, bien sûr, d'enseignants qui
fonctionneraient vraiment mal. Or, sur l'autre aspect, on parle dans le projet
de loi, si je me souviens bien, de comportements un peu particuliers qui
pourraient conduire à une suspension ou au maintien du brevet à
certaines conditions. Nous disons: Pourquoi ne pas ajouter aussi
l'incompétence dûment démontrée? Un peu comme ce qui
se passe par exemple du côté d'autres, professions, des
médecins ou des avocats, où il y a des corporations. On ne veut
pas faire du corporatisme, mais il y a tout de même des corporations qui
interviennent et qui encadrent certains professionnels, mais dans
l'enseignement cela ne se fait pas. On pense que dans certains cas cela devrait
se faire parce qu'il y a, et heureusement c'est très minoritaire,
certains enseignants qui nuisent et pour lesquels on est mai
équipés pour intervenir. Si on peut intervenir auprès du
ministre pour porter plainte, dans des cas comme cela aussi, on pense que ce
serait valable pour les écoles.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le
député.
M. Khelfa: Pour terminer, d'après vous par qui? Qui doit
faire cette évaluation?
M. Dubé: Qui doit faire l'évaluation? On pense que
c'est le ministre qui devrait faire l'évaluation.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Un instant, je
m'excuse. M. le député de Richelieu, est-ce que votre question
était: Qui doit faire l'évaluation du prof.
M. Khelfa: C'est cela
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je pense que je
vous donne encore une chance de répondre.
M. Dubé: Je pense que c'est bien sûr le directeur de
l'école qui doit faire l'évaluation du prof. Mais le projet de
loi prévoit qu'à peu près tout citoyen peut porter
plainte. C'est dans ce cadre. Maintenant l'évaluation, je pense
qu'à ce moment-là c'est au ministre de décider à
partir de quelle évaluation. Je pense bien que normalement cela devrait
être le supérieur immédiat du professeur qui devrait faire
l'évaluation.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. Dube. Je
reconnais la porte-parole officielle de l'Opposition en matière
d'éducation, Mme la députée de Chicoutimi. Mme la
députée.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le
président, mesdames et messieurs, il me fait plaisir de vous accueillir
au nom de l'Opposition à cette commission parlementaire. J'aimerais
peut-être dire, comme je l'ai fait au moment où l'on a
rencontré des directeurs d'école, que je suis assez sensible aux
remarques et aux commentaires que me font les directeurs d'école,
sachant qu'ils sont les plus près de l'action.
Comme j'ai besoin de beaucoup d'éclaircissements sur votre
mémoire, je vais passer tout de suite aux questions. La première,
c'est: L'impression que dégage votre mémoire, et vous
n'êtes pas les seuls cependant, mais je dirais que j'ai plus senti cela
chez les directeurs d'école, c'est que c'est un débat de
structures qu'on fait. C'est-à-dire: Comment se partagent les pouvoirs?
Dans quelles conditions il serait préférable de les exercer? Il
ne semble pas y avoir de préoccupations chez vous, par rapport aux
moyens qu'ils ont mis à votre disposition et à ceux de l'enfant
pour qu'il puisse, effectivement, recevoir une formation de qualité.
Là, je pense à la gratuité du matériel scolaire.
Vous avez à la CECM des couches de population très
défavorisées chez qui ce n'est sans doute pas sans poser un
certain nombre de problèmes.
Dans le projet de loi 107, on ne décrit nulle part ce que
seraient les services particuliers et les services complémentaires,
à l'exception de ceux pour les personnes handicapées et en
difficulté d'apprentissage. On sait que les services particuliers et
complémentaires - je pense, M. le directeur vous pourriez me dire cela -
devraient contribuer à améliorer la qualité de la
pédagogie. C'est la même chose pour les services de garde en
milieu scolaire. L'enfant qui est "insécure" parce qu'il part avec sa
clé dans le cou et que ses parents rentrent une heure ou une heure et
demie plus tard que lui, et qu'il n'a que cinq, six, sept ou huit ans, il me
semble qu'il ne bénéficie pas tout à fait de conditions
qui lui permettent d'être suffisamment attentif et réceptif en
classe. Vous n'abordez pas du tout ces questions.
M. Houle: Je crois qu'on les aborde, mais on ne les a pas
disséquées comme vous le faites actuellement. Quand vous parlez
de gratuité, c'est évident qu'on a des problèmes, nous
aussi, à Montréal en ce qui concerne les achats de
matériel pédagogique, c'est clair. Quand on dit que
Montréal n'est pas le reste de la province, on sous-entend les services
de garde et les services particuliers et complémentaires. C'est pour
cela qu'on alerte le ministre en disant: II faudrait venir voir de très
près ce qu'est Montréal, ce qu'est devenu Montréal et
quels sont maintenant les besoins montréalais, qui sont sûrement
différents des besoins de Trois-Rivières ou de Drummondville. On
ne peut plus être nivelés à tous les paliers. C'est
extrêmement
différent. Actuellement, à Montréal, par exemple,
dans les polyvalentes, il y a des polyvalentes qui ont 70 % ou 75 %
d'allophones. il y a des polyvalentes où on doit se battre dans les
corridors pour faire parler les élèves en français parce
que la seule place où ils parlent français, c'est dans la classe.
Dès qu'ils sont dans les corridors, ils parlent anglais. Ce sont des
phénomènes urbains uniques. À Montréal, une
école primaire commence à 7 heures et se termine à 18
heures le soir. Ce n'est pas comme cela dans toute la province. On en a 83 qui
fonctionnent comme cela, actuellement.
C'est sûr que cela nous crée des besoins et que ce sont des
besoins nouveaux. C'est le milieu urbain qui fait... Je pense que plusieurs de
mes confrères, ici, autour de la table, pourraient compléter
à ce sujet et on pourrait en énumérer plusieurs comme
cela.
Mme Blackburn: Vous pourriez peut-être me dire en
même temps, si vous estimez qu'il serait important qu'on retrouve dans le
projet de loi 107 ce qu'on trouvait dans ia loi 3, c'est-à-dire une
définition des services complémentaires et particuliers.
C'était une loi, je vous le rappelle... La loi 3, ce n'était pas
une vague promesse électorale. C'était une loi dûment
adoptée en Chambre. Elle a été invalidée en raison
de quelques-uns de ses articles et !e jugement a rendu inapplicables toutes les
dispositions de la loi. Mais c'était une loi.
Est-ce qu'il serait souhaitable qu'on retrouve la définition des
services particuliers et complémentaires dans la loi, tel que Se faisait
la loi 3? Par rapport aux services de garde, dans la loi 3, c'était:
L'école doit organiser des services de garde au niveau
préscolaire et primaire. Dans, le projet actuel, c'est "peut.
Le Président (M. Gardner): M. Houle, madame ou monsieur.
M. Hinton.
M. Hinton (Michel): Je vais revenir à nos propos de
tantôt. Je ne répondrai pas précisément à
votre question. Cependant, lorsqu'on dit qu'on souhaiterait qu'on tienne compte
de la réalité montréalaise, là, on touche certains
éléments que vous venez de soulever. On n'a pas
retrouvé... C'est un peu pour cela qu'en page 20, pour ce qui est de la
conclusion, on dit: "... auraient préféré que le
législateur prévoit les dispositions particulières pour la
CECM en dehors de la confessionnalité. " Là, on parle du tissu
urbain.
Alors, vous avez touché plusieurs éléments. Je ne
pourrais pas vous dire si on souhaiterait revenir au libellé de certains
articles de la loi 3. Mais il n'en reste pas moins que ce que l'on souhaite
très fortement, c'est qu'on reconnaisse, que le ministère
reconnaisse qu'à Montréal il y a une situation
particulière, qu'il y a certains paramètres qui ne peuvent pas
s'appliquer à cette région, mais qui peuvent peut-être
s'appliquer à la province. Mais à Montréal, cela ne peut
pas s'appliquer de cette façon.
Alors, on pourrait toucher des éléments... Vous avez
parlé de matériel didactique. Il y a aussi les services de garde,
les garderies. On a parlé de la multiethnicité. On parle aussi
d'alourdissement de la clientèle dans un milieu comme Montréal,
lorsqu'on pense aux enfants en difficulté d'adaptation et
d'apprentissage. Il y a une concentration - c'est clair - à
Montréal qu'on ne retrouve pas ailleurs dans la province.
Ce sont tous des éléments pour lesquels on souhaiterait
voir certaines dispositions apparaître dans le projet de loi qui pourrait
être modifié.
Mme Blackburn: Dans votre mémoire, vous reconnaissez - et
je pense que cela fait l'unanimité que les fonctions du directeur
d'école sont mieux définies. Pour certains, il s'agit simplement
d'exécutants. Mais votre perception est que cela viendrait vous
faciliter la tâche; vous le dites. Cependant, vous trouvez que ce n'est
pas suffisant et je dois dire que j'ai été - peut-être
parce que j'ai fait une lecture un peu rapide - frappée par le nombre de
fois où vous utilisez des termes comme questionné,
renforcé, être plus coercitif par rapport aux obligations ou aux
exigences.
Là, évidemment, vous parlez de l'incompétence
dûment démontrée comme pouvant entraîner une
révocation et vous demandez que le ministre intervienne
là-dessus. Je dois vous dire que cela correspond un peu à la
perception que j'avais. On va finir par avoir, dans notre système
d'éducation au Québec, un ministre gérant des milliers
d'écoles, parce que cela va finir par passer directement comme cela. Je
prétends qu'il ne reste plus rien entre les deux. Quand le ministre nous
parle de la grande responsabilité qu'à la commission scolaire de
donner des services sur son territoire, cela correspond à la grande
responsabilité de mon hôpital, à Chicoutimi, de donner des
services de santé sur ce territoire.
Alors, je trouve qu'il n'y a pas de grosse distinction entre la
responsabilité qui est confiée à la commission scolaire de
Chicoutimi et celle qui est confiée à l'hôpital. Je dirais
même que, sur le territoire de l'hôpital de Chicoutimi, il y a
trois commissions scolaires. Donc, il faudra qu'on révise cet exemple.
Il me paraît simplement illustrer le fait que, dans la situation
actuelle, et du moment où on érode les pouvoirs des commissions
scolaires, on n'a plus vraiment besoin d'un gouvernement local.
Mais je reviens à votre mémoire. Il y a une chose qui m'a
frappée. Vous demandez en page 10 un droit de veto sur les
décisions du conseil d'orientation qui, lui, est consultatif. Pourquoi
un droit de veto sur un conseil consultatif? Je dois dire que cela m'a surpris.
Dans le paragraphe suivant, vous dites qu'en période de
négociations les parents sont souvent la proie de manipulations de
toutes sortes. J'imagine que cela doit
être le fait d'à peu près tous les personnels, y
compris les directeurs d'école. Là vous demandez encore un droit
de veto qui devient essentiel pour cette raison. Vous dites que, pour
l'élève, il faudrait certains critères, donc, de bonne
conduite. Vous parlez de la présence d'un commissaire et vous dites
qu'il y a un risque d'ingérence politique. Ce n'est pas sale, la
politique. J'imagine que le ministre pourrait vous dire cela, bien qu'il vous
ait donné raison, à mon grand étonnement. Il dit: Cela
peut poser de sérieuses difficultés. Je n'ai pas vu ces
difficultés, à savoir qu'un commissaire puisse participer
à un conseil d'orientation.
Vous dites également que l'élection des
représentants des enseignants ne devrait pas faire l'objet de
négociations et que, par conséquent, les modalités
d'élection ne devraient pas faire partie de la convention collective.
Par ailleurs, vous estimez que, dans votre cas, c'est votre association qui
devrait vous déléguer avec instances consultatives de la
commission scolaire. Vous ajoutez ensuite qu'il faudrait éviter le
noyautage des conseils d'orientation pour des équipes syndicales,
particulièrement en période de négociations.
Je suis un peu mal à l'aise. C'est comme s'il y avait bien des
épouvantails dans les écoles et bien des difficultés.
Chaque fois que l'on essaie de tout prévoir... Je connais un vieux
notaire qui dit: Plus on en écrit, plus on en oublie, parce qu'on
pourrait toujours en ajouter. Alors, est-ce que ce ne serait pas
préférable de laisser un peu plus de souplesse et plus
d'oxygène entrer dans tout ce système?
Le Président (M. Gardner): M. Houle.
M. Houle: II y a plusieurs questions. Il doit sûrement y
avoir plusieurs réponses. Je vais essayer d'en élaborer
quelques-unes. Que mes confrères ne se gênent pas pour intervenir.
On parle de droit de veto au niveau du conseil d'orientation. Il faut bien
connaître un milieu comme le milieu montréalais pour savoir
qu'à un moment donné, dans une ville comme Montréal, il y
a des noyaux et des systèmes organisés qui s'installent, et qui,
à un certain moment, prennent pour cible une, deux, trois, quatre ou
cinq écoles. Pour le directeur d'école qui a à vivre cela,
c'est pénible. Il devrait au moins avoir un droit de veto dans un
conseil d'orientation qui serait plutôt un peu spécial, pour
pouvoir dire: Écoutez, cela ne marche pas. À qui va-t-il faire
appel pour se défendre? Dans un conseil d'orientation, on prend des
orientations. L'orientation d'une école, si elle est autre que
pédagogique, c'est malheureux mais moi, comme directeur d'école,
j'ai de la difficulté à m'en accommoder. Pour mon droit de veto
ou mon droit d'appel, je m'adresse à mon supérieur,
c'est-à-dire à mon directeur général. C'est le
style que l'on développe ici.
Vous parlez, par exemple, de la bonne conduite pour
l'élève. J'ai vécu à Montréal et j'y vis
encore. On a vu à un moment donné des gens, payés par un
mouvement à l'extérieur de l'école, pour venir à
l'école, travailler dans l'école, dans le milieu et en faire un
milieu politique. Mais l'école, ce n'est pas un milieu politique, c'est
un milieu pédagogique. Il faut prévoir dans le projet de loi
qu'à un moment donné on peut avoir un droit de recours.
L'ingérence politique. Ce n'est pas malsain ce que je dis
là. Je dis tout simplement qu'un commissaire a un rôle de
commissaire, et qu'un comité d'orientation d'école a un
rôle pédagogique. Le commissaire a un rôle plus politique.
Je ne dis pas qu'il ne peut pas venir à l'occasion, donner, sa position
et faire valoir ses influences, etc., mais il n'a pas, je pense, à
devenir ex officio membre d'un conseil d'orientation. On mêle deux
paliers: il y a un palier politique et un palier pédagogique. (12
heures)
L'enseignant et la convention collective. On trouve déjà,
comme directeurs d'école, que la convention collective des enseignants
est suffisamment épaisse. On se dit: En ajouter plus, ce serait encore
quelques lignes qu'on serait obligé de lire et d'appliquer. On trouve
qu'elle est suffisamment élaborée. Nous ne pensons pas que ce
soit très nécessaire d'inclure cela dans une convention
collective des enseignants.
Et l'autre question, je pense que c'était... Est-ce que j'en
oublie, M. Dubé? Il y avait une question de noyautage aussi que je
voulais... Il faut être prudent, vous savez. Peut-être qu'on est
trop prudents, comme directeurs d'école. Je vous ai dit, tout à
l'heure, qu'on intervenait uniquement au niveau pédagogique. On ne veut
pas faire de politique; on ne veut pas influencer autre chose que la
pédagogie. On est très prudents et je pense qu'on a raison de
l'être, parce que notre pédagogie a besoin d'un bon coup vers le
haut. Je pense que la prudence est nécessaire dans les temps qu'on vit
actuellement. En tout cas, c'est une position de directeur d'école,
encore une fois, et non pas une position politique.
Le Président (M. Gardner): Mme la députée de
Chicoutimi, pour une dernière question.
Mme Blackburn: Oui, M. le Président. On pourrait
longuement discuter là-dessus, à savoir si l'école oppose
politique et pédagogie. Je pense que les écoles secondaires - les
écoles primaires, c'est une autre question et j'imagine que ce n'est pas
là que cela se passe non plus - ou nos collèges, que ces
institutions d'enseignement ont une responsabilité lorsqu'il s'agit
d'initier à la politique. La politique, c'est quelque chose qui nous
gère, qu'on le veuille ou non, et chaque fois qu'on laisse planer cette
espèce de connotation péjorative, lorsqu'on parle de politiser
les débats et qu'on laisse entendre que c'est chaque fois
négatif, il y a quelque chose qui est malsain.
Et on constate de plus en plus, au Québec, pour des raisons qui
nous échappent un peu, qui m'échappent, à tout le moins -
je voulais attirer l'attention du ministre là-dessus - que, dans les
collèges, on laisse de moins en moins de place à l'organisation
de comités des deux partis politiques, libéral, NPD, sous
prétexte que cela perturbe. Bien, si on tient nos élèves
en dehors de la politique, sous prétexte qu'il ne faut pas qu'il s'en
fasse à l'école, là je pense qu'on commence à avoir
des problèmes. Ce qu'il faut favoriser, c'est la présence des
différentes formations politiques; il ne faut pas les exclure de
l'école. En tout cas, c'est une opinion et je pense que
là-dessus, ii faudrait... Au Québec, lorsqu'on parle de
politique... On a fini par donner à cette expression un caractère
très péjoratif, de sorte que, si c'est politique, ce n'est pas
propre. Et je trouve que c'est très malheureux qu'on laisse aussi planer
cela dans nos débats, actuellement, en disant: il ne faut pas politiser
des choses.
Un autre aspect maintenant touchant la confessionnalité et le
respect des droits de chacun. Il me semble qu'il y a comme une espèce de
contradiction dans votre mémoire et vous me permettrez de le soulever.
Vous dites, en page 16, "Fonctions reliées au service éducatif:
Nous endossons pleinement la proposition du ministre de l'Éducation,
parce qu'elle nous paraît réaliste et respectueuse des droits de
chacun... ". Et vous faites allusion à la reconnaissance des
écoles, comme catholiques ou protestantes, et non pas aux
hypothèses avancées selon lesquelles on pourrait créer
autant d'écoles qu'il y a de confessions religieuses. Mais, en
même temps, vous dites, en page; 9: "Cependant, l'ADEM insiste
auprès du ministre pour qu'il aide encore plus les francophones,
obligés, à cause de la confessionnalité... - ex la, cela
ne respecterait plus leurs droits -... de fréquenter des écoles
françaises d'une commission scolaire à majorité
anglophone, à se faire entendre et à obtenir la même
qualité de service que s'ils appartenaient à une commission
scolaire à majorité francophone". Vous savez qu'à la
section française de la PSBGM 60 % des élèves qui s'y
retrouvent ne sont pas protestants, lis sont de toutes dénominations
religieuses, mêmes catholiques. Alors, pourquoi y a-t-il un glissement
comme cela? Comment peut-on affirmer à la fois que !e droit de ces
personnes, le droit de chacun est respecté et que cela provoque un tel
glissement de clientèle en faveur de ia commission scolaire
protestante?
Le Président (M. Parent, Sauvé): M.
Dubé.
M. Dubé: Ce qu'on dit, en fait, c'est que le droit de
chacun est respecté dans le projet de loi qui propose une division
linguistique. À Montréal, en fait, il n'est pas respecté.
Si on conserve l'aspect confessionnel de la Commission scolaire de
Montréal, le droit n'est pas respecté.
Sauf qu'on dit au ministre: On préfère la paix scolaire.
Attendez, on préfère la paix scolaire à cela. On
préférerait qu'à Montréal cela soit une division
totalement linguistique, mais pas à n'importe quel prix.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme la
députée.
Mme Blackburn: Écoutez, là-dessus, je conclurais.
C'est parce que je croyais qu'il y avait une espèce de contradiction en
disant que cela respectait les droits de chacun, actuellement, alors que vous
dites un peu plus loin que cela pose des problèmes, ce que je vous
accorde. Je fais là-dessus la même lecture que vous. Je maintiens
qu'il est difficile d'être respectueux des droits de la personne dans une
loi qui, pour éviter précisément d'être
contestée, a des clauses "nonobstant" qui la font échapper
à la Charte des droits et libertés de la personne du
Québec.
Il y a une proposition qui a été avancée ici:
Plutôt que d'avoir des écoles confessionnelles, pourquoi
n'envisagerait-on pas que chacun des groupes confessionnels puisse recevoir un
enseignement religieux de sa confession? Est-ce qu'on ne pourrait pas envisager
cela, surtout à Montréal où, vous l'avez bien
signalé, la situation est fort différente de ce qui passe dans ma
région, par exemple?
Je voudrais vous remercier de votre participation aux travaux de cette
commission et vous dire que j'ai apprécié votre
présentation. Je suis très consciente que les problèmes
dans la région de Montréal sont différents, plus
particulièrement à cause d'une présence accrue des
nouveaux Québécois, des Néo-Québécois,
situation qu'on ne retrouve pas dans les autres régions et je dirais
malheureusement, cependant. Par ailleurs, la pauvreté sévit
autant ailleurs qu'à Montréal, de même que la
délinquance. Il y a un certain nombre de problèmes reliés
à ces situations. Je vous remercie d'avoir porté à notre
attention les situations plus particulières qui sont celles de votre
région.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre, en guise
de conclusion.
M. Ryan: M. le Président, je n'ai pas beaucoup de
commentaires à faire. On a eu une présentation claire et nette.
J'apprécie les commentaires qu'on nous a apportés ce matin. Il y
a plusieurs des observations qui nous ont été faites qui sont
acceptables d'emblée. Il y en a d'autres qui feront l'objet d'un examen
attentif. J'ai mentionné tantôt les principales. il y en a une sur
laquelle je reviendrai peut-être brièvement. C'est celle qui a
retenu l'attention du député de Richelieu tantôt,
suggestion voulant qu'on ajoute le motif d'incompétence aux motifs pour
lesquels le ministre, sur recommandation d'un comité d'enquête,
pourrait décider de la révocation d'un permis d'enseigner. Je ne
serais
pas porté à aller jusque-là et je vais vous dire
pourquoi. Je pense que, dans la loi actuelle, c'est un recours tout à
fait extraordinaire. Cela va aller pour motif d'inconduite, motif
d'immoralité, motif d'infraction grave dans l'exercice de ses fonctions.
S'il arrive qu'un enseignant se présente au travail en état
d'ébriété, par exemple, c'est une infraction grave dans
l'exercice de ses fonctions. Cela peut tomber sous le coup de l'article 23,
comme il est formulé. Mais si c'est une question d'incompétence,
il me semble qu'elle doit être traitée à l'intérieur
de ces rapports salarié-employeur, en tenant compte des dispositions de
la convention collective qui ont toutes sortes d'éléments
traitant de ces questions. Je ne pense pas qu'on puisse soustraire les
interventions au titre de la compétence du régime de la
convention collective. Je sais que c'est plus embarrassant, mais je ne pense
pas qu'on puisse avoir deux régimes parrallèles. Ici, c'est tout
à fait extraordinaire, exceptionnel, et je ne serais pas porté
par conséquent à accéder à cette recommandation,
quoique je la comprenne. Je me suis dit moi-même, comme employeur, que
j'aurais bien aimé des fois disposer de recours plus vigoureux pour me
débarrasser de gens qui étaient beaucoup plus des parasites
qu'autre chose. Mais, on est mieux d'être régi par des
règles un peu plus sévères là-dessus, même si
cela entraîne parfois des prolongations de situations regrettables.
Cela dit, je vous remercie encore une fois. Je pense que le
succès de la réforme proposée dans le projet de loi 107
dépendra énormément de la manière dont elle sera
reçue et appliquée par les directions d'école. C'est
pourquoi je me réjouis de l'adhésion que vous apportez au projet
de loi. La Fédération québécoise des directeurs
d'école a fait la même chose la semaine dernière. Elle a
apporté une adhésion assez globale, très encourageante
pour nous. Alors, on va continuer de collaborer avec vous et j'espère
qu'on va pouvoir perfectionner le projet de loi au point de le rendre encore
davantage acceptable.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. M. Houle,
la commission vous remercie de votre présence et de votre collaboration
à ses travaux.
Nous suspendons pour quelques minutes, alors que nous accueillerons le
groupe suivant, le Mouvement laïque québécois. Merci.
(Suspension de la séance à 12 h 10)
(Reprise à 12 h 12)
Le Président (M. Parent, Sauvé): À l'ordre,
s'il vous plaît!
J'invite les membres de la commission à prendre place et je leur
rappelle que nos travaux devront se terminer à 13 heures et qu'il est
déjà 12 h 10.
J'invite les représentants du Mouvement laïque
québécois à prendre place sur les banquettes qui leur sont
réservées, à l'avant. Le Mouvement laïque
québécois est représenté par M. Paul Drouin, qui en
est le président.
À l'ordre, s'il vous plaît! J'invite les membres de la
commission à prendre place et j'invite immédiatement M. Drouin,
qui est le porte-parole du Mouvement laïque québécois. M.
Drouin, je vous remercie d'abord d'avoir bien voulu répondre à
notre invitation. Vous m'avez informé qu'il y avait trois porte-parole
qui feraient la présentation en trois temps. Je n'ai pas d'objection.
Cela nous permet d'avoir le plaisir d'entendre vos représentants. Par
contre, je dois vous informer que la commission a une heure à vous
consacrer et qu'on ne pourra pas dépasser la période de temps,
étant donné que les députés ministériels ont
un caucus spécial ce midi. C'est pour cela que, depuis ce matin, je
tâche de reprendre le temps perdu.
Alors, M. Drouin, si vous voulez nous présenter les gens qui vous
accompagnent et enchaîner immédiatement avec la
présentation de votre mémoire. Je vous suggère une
chose... c'est que tous les membres de la commission ont reçu votre
mémoire et ils l'ont lu. Alors, c'est à vous de juger de quelle
façon vous voulez le présenter, de façon globale ou en
abrégé. Nous vous écoutons.
Mouvement laïque québécois
M. Drouin (Paul): Tous les gens ici sont au conseil national du
Mouvement laïque québécois. En commençant par ma
droite, c'est Hélène Chapleau, Daniel Baril, Jean-Paul de
LaGrave, Réjeanne Cyr-Read, qui est représentante pour la
région de Québec, et Lucie Fillion, de Montréal.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Mesdames et
messieurs, bienvenue. Nous vous écoutons.
M. Drouin: Tout d'abord, j'aimerais signaler ce que nous avons
écrit en exergue de notre mémoire. Je cite - c'est tiré
des propos de M. Fernand Séguin - "La pensée du ministère
de l'Éducation, actuellement, n'est pas très différente de
la pensée des Jésuites des années quarante. Ce sont des
cléricaux qui ont gardé du cléricalisme l'horreur de la
remise en question."
M. le Président, M. le ministre de l'Éducation, mesdames
et messieurs les députés, membres de la commission parlementaire
de l'éducation, je voudrais tout d'abord dire, au nom du Mouvement
laïque québécois, que nous avons constaté,
après une lecture attentive du projet de loi, que nous n'avons pas du
tout affaire, à notre avis, à une réforme de
l'enseignement, mais beaucoup plus à une contre-réforme. C'est
une réforme qui n'en est pas une pour la simple raison qu'on maintient
et qu'on consolide davantage la confessionnalité et que tout cela est,
à notre avis, incompatible complètement avec le terme et l'esprit
même de ce que signifie le mot réforme. Alors, on ne peut
pas parler, selon nous, de réforme véritable, étant
donné que confessionnalité et réforme, c'est effectivement
incompatible.
On a pu constater que les dispositions du projet de loi 107 sont en
parfaite concordance, en parfaite conformité avec les nouveaux
règlements confessionnels adoptés le 9 décembre dernier
par le Conseil des ministres. En réalité, malgré l'annonce
de la déconfessionnalisation des commissions scolaires, puisque c'est
cela qu'on proclame haut et fort, tous les éléments
confessionnels de la structure actuelle sont maintenus et accentués
selon les voeux, et seulement ceux-là, des autorités religieuses:
sous-ministres associés de foi catholique et protestante, comités
catholique et protestant du Conseil supérieur de l'éducation,
conseillers en éducation chrétienne, enseignement religieux,
pastorale, projets éducatifs confessionnels et reconnaissance
confessionnelle pour les écoles. On ne voit pas là
véritablement de réforme. Il s'agit finalement... On annonce une
déconfessionnalisation, mais il s'agit en fait et dans la
réalité d'un paravent, d'un immense paravent linguistique qu'on
nous sert pour accentuer la confessionnalité.
Regardons maintenant quelques articles du projet de loi 107. Je vais
tout de suite à la page 4 de notre mémoire. Les prismes
catholique et protestant continuent toujours d'exister dans le projet de loi
107. Les comités confessionnels, dont les membres sont nommés ou
agréés par les autorités religieuses, continueront de
disposer de pouvoirs exorbitants, dont celui d'approuver tout programme ou tout
matériel didactique pour quelque cours que ce soit (article 212). Tels
des missionnaires, les membres de ces deux comités ainsi que les
représentants du clergé catholique et du clergé protestant
ont tous le droit de visiter les écoles non confessionnelles (article
95). La Commission des droits de la personne vous annoncera qu'elle trouve,
elie aussi, que c'est tout à fait inadmissible.
Toutes les commissions scolaires devront s'assurer que chaque
école offre, au besoin, un cours d'enseignement religieux catholique, un
cours d'enseignement religieux protestant (article 207) ainsi que deux services
de pastorale, l'un catholique et l'autre protestant (article 208). Cela est
même exigé des écoles déclarées non
confessionnelles. Chaque commission scolaire devra avoir à son service
deux cadres, un catholique et un protestant, responsables de l'enseignement
religieux confessionnel et mandatés par les autorités religieuses
(articles 233 et 234). On crée ainsi des mini-comités
confessionnels dans chaque commission scolaire.
Le directeur de l'école devra voir, quant à lui, à
l'application des règlements des comités confessionnels
concernant l'engagement des enseignants (article 48) et, comme si tout cela ne
suffisait pas, les sous-ministres de foi catholique et de foi protestante
restent en place afin de veiller aux droits des catholiques et des protestants.
Personne évidemment ne veillera aux droits des non-catholiques et des
non-protestants.
Avec l'article 222 - il ne faut pas confondre avec les pilules qui sont
sur le marché -l'adhésion au projet éducatif confessionnel
d'une école devient un critère de sélection pour
l'inscription des élèves. Cet article sonne le glas de
l'école de quartier et inaugure l'ère de l'école ghetto
pour les non-catholiques.
Par ailleurs, le gouvernement n'annonce aucune intention de
réclamer les amendements nécessaires à l'article 93 de
l'Acte de l'Amérique du Nord britannique. Les commissions scolaires
confessionnelles restent donc en place à Québec et à
Montréal, là où le problème confessionnel est le
plus criant. À Montréal, un élève sur deux sera
néo-québécois d'ici le début des années
quatre-vingt-dix et le maintien du droit de dissidence pour les catholiques et
les protestants, là où ils sont minoritaires, pourra conduire au
morcellement du système scolaire.
La confessionnalité scolaire reste donc entière dans le
projet de loi 107 et sera désormais plus forte que jamais, accentuant
ainsi les éléments discriminatoires de notre système
d'école publique.
Je vais passer sur le projet global d'endoctrinement puisque vous m'avez
dit que vous avez lu le mémoire, et je vous en remercie. Cela va pouvoir
accélérer les choses. Je ne passerai quand même pas sous
silence la page 6 en ce qui concerne la tradition et, d'ailleurs, M. de LaGrave
y reviendra un instant, tout à l'heure.
On a souvent entendu, de la part du ministre de l'Éducation et
d'autres confession-nalistes de toutes tendances, que la
confessionnalité scolaire se justifie au nom de la tradition et de
l'histoire. Cet argument qui nous enferme dans l'immobilisme et la
sclérose sociale n'est pas nouveau pour justifier des situations de
discrimination. En 1922, par exemple, Mgr Paul-Eugène Roy,
archevêque de Québec, déclarait: "Une législation
qui ouvrirait les portes au suffrage des femmes serait un attentat contre les
traditions fondamentales de notre race et de notre foi." À cause de
cette opposition, les Québécoises ont obtenu le droit de vote 25
ans plus tard que les femmes des autres provinces. Lorsqu'une tradition,
pensons-nous, est antidémocratique, il est du devoir de l'État et
du législateur de la corriger et non de se laisser guider par elie. Nous
avons maintenant des chartes qui définissent les droits fondamentaux et
c'est à la lumière de ces droits que l'État doit
légiférer.
L'autre argument qui est invoqué souvent, c'est celui de la
majorité. Étant donné qu'il y a beaucoup de catholiques,
on devrait avoir un système qui fasse une grande place à
l'enseignement de la religion catholique, par exemple. Selon nous, il doit
être bien compris par le législateur que la liberté de
conscience est, d'abord et avant tout, un droit individuel et cela a
été très bien marqué par le juge Wilson tout
récemment, le 28 janvier dernier, à Ottawa, en
Cour suprême.
Je passe à la page 8. La responsabilité de l'État,
au sujet de la majorité, est de légiférer en s'assurant
que cette liberté individuelle puisse s'exercer également pour
tous les membres de la société, d'où l'impérieuse
nécessité de n'accorder aucun privilège à un groupe
d'individus au détriment des autres sous peine de remettre en cause le
principe du respect de la liberté de conscience qui est un droit
fondamental individuel reconnu à tous, indépendamment d'une
majorité ou d'une minorité, puisque toutes les fois que la
majorité est utilisée pour créer une hiérarchie
entre les droits fondamentaux, cela conduit à des situations
discriminatoires envers ceux et celles qui ne partagent pas les mêmes
croyances ou les mêmes opinions.
Cela nous mène rapidement à la page 9, l'option et la
discrimination systémique, où nous reviendrons tout à
l'heure, M. Baril va nous faire un petit exposé là-dessus.
Ensuite, situations discriminatoires, même chose, M. Baril va nous
entretenir un instant là-dessus.
J'aimerais, quant à moi, insister sur les pages 11, 12 et 13, pas
en lisant tout mais simplement en signalant les articles 577 et 578 du projet
de loi 107 que nous n'hésitons pas à qualifier d'odieux,
finalement, dans une démocratie. Nous l'avons dit la semaine
passée, en conférence de presse, et nous pensons vraiment que ces
articles doivent être retirés, qu'ils méprisent les droits
fondamentaux de la personne, et c'est tout à fait inadmissible dans une
démocratie, dans une société libre et démocratique.
Tout cela est expliqué aux pages 11, 12, 13 et 14. À la page 12,
je cite: Les droits fondamentaux énoncés dans les chartes des
droits doivent être effectivement respectés par les gouvernements.
La liberté de conscience est un droit inaliénable et indivisible,
c'est-à-dire un droit dont l'individu ne peut se départir ou
être privé par d'autres, sans nier, du fait même, l'essence
de la dignité humaine. C'est d'ailleurs la signification qu'il faut
donner au premier attendu de la charte québécoise qui dit: 'Tout
être humain possède des droits et libertés
intrinsèques destinés à assurer sa protection et son
épanouissement. "
Il est inacceptable, dans une démocratie, de proclamer la
jouissance pour tous et chacun de droits inaliénables, tout en y
dérogeant en même temps. C'est pourtant l'attitude qu'adopte le
ministre de l'Éducation en proposant l'adoption des articles 577 et 578
contenus dans le projet de loi à la fin complètement.
Toute cette réforme n'en est pas une, selon nous, parce que le
gouvernement, le ministère de l'Éducation et le ministre de
l'Éducation - cela reprend un peu ce que Fernand Séguin disait
sont animés de convictions cléricales, finalement. On
retrouve cela aux pages 14, 15 et 16. Ce qui résume le mieux
peut-être, à notre avis, la position cléricale du
gouvernement, c'est le discours qu'a prononcé M. Ryan lui-même
à l'Assemblée nationale au mois de décembre 1986, lors de
l'adoption de la loi 131. Là, la Commission des droits de la personne,
comme elle viendra vous le dire d'ailleurs à cette commission, avait dit
que les projets de loi ne résistaient pas au test de la charte des
droits - c'est écrit à la page 14 - et qu'il fallait changer
radicalement l'économie de nos lois scolaires. Ce n'est pas ce que vous
avez fait. De façon inconditionnelle et complètement sans poser
de question, vous avez seulement écouté et consulté les
autorités religieuses qui sont, selon vous, les seules autorités
habilitées à prononcer un jugement sur ces questions et vous avez
décidé, entre autres, de passer outre aux droits fondamentaux de
la personne - c'est écrit à la page 14 - parce que tout cela
était en parfaite communion de préoccupation avec les
responsables de la dimension religieuse de notre système
d'enseignement.
Quelle fut donc l'opinion de ces chefs autorisés? Il aurait
été surprenant que ces chefs autorisés demandent la
suppression de leur privilège. Et là, M. le ministre avait
cité en Chambre les propos du cardinal Vachon et du président du
Comité catholique qui disait que l'on devait éviter - page 15 -
que s'instaure une dynamique suivant laquelle une revendication
unilatérale et abstraite des droits individuels en viendrait à
rendre illusoires des droits collectifs bien établis. Là,
à notre avis, réside le fond du problème confessionnel et
de la discrimination honteuse qui perdure depuis trop longtemps dans le
régime scolaire au Québec.
Alors que nous évoluons, en principe, dans une
société libre et démocratique, on observe un responsable
important de la société civile n'écouter que ses
convictions, à toutes fins utiles, personnelles et s'en tenir avant
toute autre considération aux orientations théocratiques
dictées par l'Église en matière d'éducation. Je
crois que c'est très clair, cela ressort très clairement dans
notre mémoire. Plusieurs personnes en ont pris connaissance et se sont
bien rendu compte qu'objectivement, dans les faits, c'est ce qui se produit
actuellement. En véritable ambassadeur - page 16 - des
intérêts et des objectifs de la hiérarchie catholique
romaine au sein du gouvernement, le ministre de l'Éducation n'endosse
que les propositions intéressées soumises par les
représentants de l'Église et il demande maintenant à
l'Assemblée nationale d'entériner et de voter les articles 577 et
578. Selon nous, il faudrait enfin - et c'est là que l'on pourrait
parler effectivement de réforme - que le gouvernement civil prenne
définitivement ses distances d'avec l'Église. On n'est plus au
Moyen Âge et, finalement, il faudrait effectivement tenir compte des
mutations profondes de notre société. L'abolition complète
de l'union entre l'école et l'Église est une mesure au plus haut
point urgente et nécessaire pour le Québec d'aujourd'hui.
Porteuse de discrimination, cette politique scolaire cléricale
se situe aux antipodes de la laïcité et puise dans une
conception rétrograde pour la société
québécoise à l'aube de l'an 2000.
Alors, j'en arrive aux recommandations finales. Par conséquent,
nous vous demandons instamment de retirer le projet de loi 107 tel que
rédigé. Le Mouvement laïque québécois
réclame une réforme de la Loi sur l'instruction publique qui soit
conforme au respect des libertés fondamentales. Cette nouvelle loi devra
garantir que les orientations générales de toute école
publique répondent aux impératifs de ces libertés. Cette
loi devra, premièrement, évacuer tout contenu confessionnel dans
les écoles publiques: l'enseignement religieux, la pastorale, les
projets éducatifs confessionnels: Deuxièmement, abolir les
comités confessionnels, catholique et protestant, du Conseil
supérieur de l'éducation. Troisièmement, supprimer les
postes des sous-ministres associés de foi catholique et protestante.
Enfin, nous rappelons au gouvernement la nécessité de
réclamer des amendements à l'article 93 de l'Acte de
l'Amérique du Nord britannique de 1867 afin que ces objectifs soient
réalisés dans toutes les écoles publiques du
Québec. (12 h 30)
M. de LaGrave, historien, a quelque chose à ajouter sur la
question de la tradition.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Vous pouvez
demeurer assis là, M. de LaGrave. Alors, c'est vous qui prenez la
relève. Allez!
M. de LaGrave (Jean-Paul): Vous vous réclamez, M. le
ministre...
Le Président (M. Parent, Sauvé): Adressez-vous au
président, s'il vous plaît! Moi, je ne me réclame de
rien!
M. de LaGrave: M. le ministre se réclame, M. le
Président, de la tradition pour justifier le verrouillage confessionnel
des écoles du Québec. Est-ce de la tradition de ceux qui ont
aboli le ministère de l'Instruction publique, en 1875? Est-ce de la
tradition de ceux qui ont lutté férocement contre l'enseignement
obligatoire? Est-ce de la tradition de ceux qui se sont toujours opposés
à l'instruction gratuite? Est-ce de la tradition de ceux qui ont
écarté si longtemps la femme de l'enseignement supérieur?
Pour notre part, la tradition qui nous inspire est celle de la
tolérance. Beaucoup de nos devanciers, disons-le honnêtement, sans
détour, ont été persécutés par les
mainteneurs d'une tradition qui s'est sans cesse levée contre les
progrès de l'esprit humain. Rappelez-vous, M. le Président, les
cris d'indignation de Jean-Charles Harvey! Souvenez-vous des interventions
courageuses de T.D. Bouchard et du sénateur Raoul Dandurand! L'histoire
du Québec, faut-il le rappeler, n'est pas l'histoire d'une religion, si
édifiante soit-elle, mais d'une collectivité où diverses
croyances et philosophies ont leur part.
Le Québec catholique monolithique n'existe plus que dans les
romans passéistes. Le maintien de ce mythe est la cause d'une grave
injustice sociale. Une société juste, au Québec comme
ailleurs, doit s'appuyer, entre autres, sur la liberté de conscience.
Dès 1790, le gouverneur Dorchester l'avait compris. C'est alors qu'a
commencé le combat pour l'instauration d'un système public
d'enseignement au Québec. Cette lutte s'est poursuivie avec Louis-Joseph
Papineau et le Parti patriote, avec l'Institut canadien et la Ligue canadienne
de l'enseignement. Le combat pour la séparation de l'Église et de
l'école est une manifestation constante dans notre histoire.
Le mouvement de déconfessionnalisation des écoles est
aussi irréversible que l'était le mouvement pour l'école
obligatoire en 1938, alors que Jean-Charles Harvey écrivait dans Le
Jour: "Quoi qu'on dise et quoi qu'on fasse, la province de Québec
en viendra là un jour. Le plus tôt sera le mieux. Ceux-là
porteront devant le peuple une grave responsabilité qui, par leur
entêtement ou leur ignorance volontaire des faits, auront retardé
l'avènement de cette ère de salut." La résistance en est
une d'arrière-garde. Comme disait Galilée aux théologiens
qui s'entêtaient à croire la terre plantée sur quatre
colonnes, pourtant la terre tourne autour du soleil. C'était
l'évidence contre laquelle aucun préjugé ne put finalement
triompher. Ainsi, comme dans la plupart des pays d'Occident, l'école est
appelée au Québec à se déconfessionnaliser. Il faut
permettre chez nous, sans aucune hypocrisie, l'établissement
d'écoles publiques laïques dignes du nouveau siècle qui
approche, dignes de nos fils et de nos filles, dignes de notre patrie et de la
liberté de l'esprit.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. de
LaGrave. Maintenant, je vais reconnaître, dans un troisième temps,
M. Daniel Baril. M. Baril.
M. Baril (Daniel): Rapidement, pour illustrer de façon
concrète les situations sur lesquelles on se base, parce qu'on ne part
pas uniquement d'une lecture théorique. On était venus ici
s'opposer à l'adoption du nouveau règlement des comités
confessionnels. Le règlement du comité catholique dit, par
exemple, que les écoles catholiques doivent intégrer les
croyances et les valeurs catholiques dans le respect des libertés de
conscience et de religion.
Voici comment cela se manifeste, en pratique. Je vous donne tout
simplement trois cas qui illustrent l'ensemble des problèmes qu'on
rencontre. Premier exemple à la Commission scolaire des Chenaux, on a
avisé récemment les parents des élèves de
l'école Madeleine-de-Verchères qui ont inscrit leurs enfants en
option morale qu'ils devront les changer d'école l'année
prochaine parce qu'il y avait un surplus de quatre élèves dans
cette école.
Le résultat: plus aucun parent ne veut demander l'exemption de
l'enseignement religieux. Donc, ces enfants-là se retrouveront en
enseignement religieux non pas par choix, mais par contrainte. En ce qui
concerne l'école Louis-Riel de la CECM, les parents ont reçu des
formulaires d'inscription à l'école, avec le choix de
l'enseignement religieux déjà fait par la direction de
l'école. Le prétexte: les enfants dans une option en
français allégé ne pouvaient pas bénéficier,
eux, de l'option pour l'enseignement moral. Un parent a dû s'opposer et
résister à trois occasions pour essayer de faire
reconnaître ses droits: refuser le formulaire déjà
signé et déjà rempli par la direction de l'école,
refuser l'aménagement qu'on lui proposait, c'est-à-dire la
bibliothèque et refuser la conception de l'école qui lui disait
qu'il n'y avait pas d'aménagement, qu'il n'y avait pas d'option possible
dans le groupe où était l'enfant. Parmi les parents qui
résistent, combien y en a-t-il qui abdiquent? Combien ignorent qu'ils
ont des droits à faire valoir?
Vous voyez dans quelles conditions on les place? Si le parent accepte
l'enseignement religieux pour son enfant, il ne peut pas se plaindre qu'il y a
un endoctrinement religieux contre sa conscience. S'il choisit la
bibliothèque, il ne peut pas s'en plaindre non plus. Mais vous voyez
dans quel contexte la liberté de conscience s'applique dans une
école qui intègre les valeurs et les croyances religieuses. Cela
s'applique dans un contexte de contraintes continuellement.
À l'école Louis-Riel, la mesure que je vous signale
là est contraire aux règlements du comité catholique. Un
des directeurs, membre du comité catholique, ne voit donc pas à
l'application de son propre règlement dans son institution. À
l'école Saint-Roch, ici, à Québec, c'est le curé de
la paroisse qui fait sa tournée lors du mercredi des Cendres pour aller
imposer les cendres à tous les enfants, sans se soucier de qui est
catholique ou non.
Donc, il y a des enfants non catholiques qui ont été
soumis au rituel catholique dans nos écoles publiques. Quand vous nous
dites que la charte est maintenue, les parents pourraient protester contre une
mesure comme celle-là, mais ils ne peuvent pas protester contre les lois
qui permettent à ces choses de se produire avec la loi 131.
Alors, c'est comme cela, les écoles confessionnelles dans le
respect des libertés de conscience... On a des dizaines de plaintes. On
est convaincus que la situation est généralisée. Ce ne
sont pas des cas isolés. D'ailleurs, on a déjà
demandé au ministre de l'Éducation et au Conseil supérieur
de l'éducation d'aller voir sur place les conditions dans lesquelles on
plaçait les enfants qui ne sont pas catholiques ou les enfants qui
choisissent l'enseignement moral.
Allez faire parler les parents et les enseignants pour voir si la
situation est aussi rose que certains le prétendent. On attend toujours
la réponse du Conseil supérieur ou du ministre
là-dessus.
Le problème, c'est une discrimination systématique,
systématisée dans le système scolaire. Pour vous faire
comprendre, imaginons ce que ce serait la situation inverse d'une école
confessionnelle. Un système scolaire athée, par exemple, imaginez
deux secondes ce que cela pourrait donner à l'image de ce qu'on a
actuellement. Une école avec un projet éducatif athée,
avec des enseignants athées, avec une reconnaissance athée, avec
un comité athée au ministère de l'Éducation, avec
un sous-ministre athée, des enseignants athées et tout l'appareil
qu'on a actuellement. Aux enfants qui ne partageraient pas l'athéisme de
l'institution, on donnerait un cours de morale qui, lui, devrait être
respectueux de l'athéisme de l'institution. Est-ce que, dans un contexte
comme celui-là, vous considéreriez que votre liberté de
conscience est respectée?
Est-ce que vous accepteriez, comme mesure, de vous faire dire: Si vous
ne l'acceptez pas, changez d'école. C'est la situation qu'on impose
actuellement, au Québec. Mais ce n'est pas ce que nous voulons.
Évidemment, on ne veut pas un système scolaire athée. On
s'oppose à des mesures confessionnelles qui briment la liberté de
conscience. Ce qu'on demande, c'est un système public où tous les
enfants pourraient être ensemble: les catholiques, les protestants, les
juifs, les musulmans et les athées. Il me semble que ce n'est pas
extrémiste, cela. Ce n'est pas trop demander, actuellement, à
l'école publique au Québec, en 1988.
Et, finalement, le choix qu'on a actuellement, c'est un choix de
société. Vous avez adopté, en décembre 1986, une
déclaration sur l'égalité culturelle et ethnique. Comment
penser à l'égalité culturelle et ethnique si on divise les
enfants à l'école, sur la base de l'appartenance religieuse? Le
système scolaire est à l'image de la société qu'on
veut développer. Une fois que chaque groupe aura ses écoles, que
reste-t-il? Ils vont développer leurs institutions, leurs organisations
professionnelles, leurs hôpitaux, leurs partis politiques? Des situations
comme on en voit dans d'autres pays, cela n'apparaît pas du jour au
lendemain et on en voit le germe, dans la politique scolaire, une politique de
ségrégation. C'est du développement séparé.
Si cela se passe en Afrique du Sud et que cela vise le non-blanc, on appelle
cela de l'apartheid. Et tous les états démocratiques partent en
guerre contre cela. Si cela se passe au Québec et que cela vise les
non-catholiques, ce n'est pas plus acceptable et ce n'est pas plus
démocratique.
Alors, ce qu'on vous demande, c'est cela, c'est un système
scolaire démocratique, qui respecte les libertés fondamentales de
tous et on pense que c'est le temps maintenant de le faire, avant que la
situation ne dégénère. Merci.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, messieurs,
je vous remercie de votre témoignage
au nom de la commission et je reconnais, comme premier intervenant, le
ministre de l'Éducation. Monsieur le ministre.
M. Ryan: M. le Président, j'écoutais, avec
intérêt, les représentations que le Mouvement laïque
québécois est venu soumettre à la commission
parlementaire.
Il n'y a pas de nouveau en ce qui concerne le thème de fond. Nous
l'avons entendu à plusieurs reprises depuis une vingtaine
d'années. Je pense que, de ce côté-là, on peut au
moins noter une continuité impressionnante dans la position fondamentale
qui est présentée. Je ne suis pas du tout d'accord avec la
position fondamentale que le Mouvement laïque adopte et je vais essayer
d'expliquer brièvement pourquoi.
Je soulignerai, tout d'abord, que le Mouvement laïque nous rend
service, quand même, dans l'exercice que nous faisons, parce qu'il nous
permet de voir clairement qu'il y a deux grandes sources d'opposition au projet
de loi 107. Il y a, d'un côté, ceux qui sont attachés de
manière absolument intransigeante, à la lettre, aux
privilèges confessionnels garantis par la loi constitutionnelle de 1887;
certains du côté catholique, d'autres du côté
protestant. Et, à l'autre pôle, il y a les tenants d'une
laïcité doctrinaire, comme celle que vous êtes venus nous
exposer, ce matin. Et, entre les deux, je crois que se trouve l'immense
majorité de la population du Québec, qui a toujours compris et
professé qu'entre les valeurs religieuses et les valeurs de la vie
civique et communautaire, il n'y a pas d'opposition, mais une saine
complémentarité, qui doit s'exprimer dans des structures
adaptées aux réalités et aux conditions de chaque
époque.
J'étais très heureux d'entendre M. de LaGrave retracer la
filiation historique du courant de pensée que vous représentez.
Il a toujours été présent dans l'histoire du
Québec, depuis 1840. Il a fait des contestations sur le plan
électoral. Il a même été représenté
dans les parlements, à certaines époques, par des porte-parole
dont on nous a donné quelques exemples. Mais je pense qu'historiquement
la preuve est là, chaque fois qu'ils se sont présentés
clairement devant la population, certains ont pu être élus
à titre exceptionnel, mais jamais ils n'ont été capables
de former une majorité au gouvernement parce que ce n'est pas la
conception que le peuple québécois voulait installer aux
commandes, sur le plan politique et social. Ils l'ont tenté à
d'autres plans également, sur le plan des commissions scolaires: les
commissions scolaires n'étaient pas confessionnelles pendant très
longtemps, sauf celles qui jouissaient du privilège garanti par la
constitution. On n'a pas élu là des représentants du
courant de pensée que vous représentez ici, aujourd'hui. Les gens
préféraient autre chose et c'est leur droit le plus strict. Et,
fondamentalement, c'est cela la vraie démocratie. Ce n'est pas
l'affirmation d'une idéologie: c'est un aspect particulier, cela. La
vraie démocratie, c'est celle par laquelle les citoyens,
concrètement, indiquent, par le choix de leurs dirigeants, comment ils
veulent être gouvernés. Et ils ont indiqué, avec une
continuité remarquable, au cours des générations, qu'ils
veulent être gouvernés par les gens dont les opinions sont assez
proches des leurs, à différents points de vue. Alors, de ce point
de vue, je pense qu'il y a une opposition profonde entre nous. (12 h 45)
Vous avez cité John Locke à la fin de votre
mémoire. Cela m'a intéressé, cela m'a rappelé un
petit souvenir. Je me rappelle la première réunion à
laquelle M. Trudeau avait participé en revenant de ses études
prolongées à l'étranger. On avait eu un symposium
organisé par l'Institut canadien d'éducation des adultes.
À un moment donné, M, Trudeau nous avait dit que John Locke avait
écrit: Toutes vos petites associations de ci puis de ça, ce sont
toutes des émanations de la volonté de l'État. Si
l'État ne voulait pas qu'elles existent, elles n'existeraient pas. Il
faut qu'il leur donne un cadre légal. Puis, j'avais dit à M.
Trudeau: Pauvre vous, on n'ira jamais demander la permission au gouvernement
pour former un petit club dans la paroisse de X ou de Y. Cela peut être
une congrégation mariale, n'importe quoi, pas besoin du gouvernement
pour cela, et j'espère qu'on n'en aura jamais besoin. Mais
fondamentalement, John Locke était un grand logicien, et ce que vous
citez de lui, ici, est tout à fait dans la ligne de ce que j'en connais.
Ce n'est pas ma conception, ni celle du gouvernement ni celle de la
démocratie libérale. C'est un très grand auteur, mais je
pense que cela ne nous éclaire pas beaucoup. Fondamentalement, le
gouvernement veut continuer à construire un système scolaire qui
laisse une place de plus en plus grande aux libertés fondamentales
auxquelles vous tenez.
Avec le système que nous avons inscrit dans le projet de loi 107,
si les citoyens veulent que les valeurs religieuses soient présentes,
dans l'école, de manière différente de ce que cela a
été jusqu'à maintenant, s'ils veulent même qu'elles
ne le soient pas, ils auront beaucoup de moyens pour le faire valoir. C'est un
processus qui sera long et vous remarquez qu'une partie très importante
des choix en ces matières va de plus en plus se faire par le truchement
de consultations sérieuses, systématiques, avec les principaux
concernés, c'est-à-dire les parents. Cela est un progrès
considérable. Vous ne le signalez pas dans votre mémoire, je ne
vous en demandais pas autant, mais c'est la. Les commissions scolaires, elles
seront linguistiques. Vous pouvez bien dire ce que vous voudrez à ce
sujet-là, elles seront linguistiques et non pas confessionnelles. Je
pense que ce sont des changements très importants qui sont
proposés et, pour ma part, j'en suis très heureux.
Vous avez parlé des clauses 577 et 578. Il faut qu'on
précise certaines choses là-dessus. La
clause 577 est une clause interprétative et non pas une clause
dérogatoire. Elle n'a pas pour effet, contrairement à vos
prétentions, de priver les citoyens de leur recours fondé sur les
articles 3 et 10 de la charte québécoise. Elle déclare la
loi compatible avec ces articles malgre le fait qu'elle accorde des droits et
privilèges à une confession religieuse. Une contestation qui
serait fondée sur le seul motif que la loi accorde des droits et
privilèges à une confession devrait donc être
rejetée, selon ces articles. Mais un projet éducatif qui
intégrerait les croyances et valeurs religieuses d'une confession
pourrait être invalidé et contesté si, dans les faits, il
est prouvé qu'il ne respecte pas la liberté de conscience et de
religion des personnes qui, dans l'école, ne professent pas ces
croyances et ces valeurs. Il n'y a aucun empêchement à une
contestation à ce titre-là, mais ce qu'on dit, c'est qu'avoir une
forme de reconnaissance des valeurs religieuses dans l'école, ce n'est
pas en soi violer les principes fondamentaux. Nous le disons
expressément parce que nous ne voulons pas, je l'ai dit souvent, passer
tout notre temps à plaider devant les tribunaux des choses qui sont pour
nous des vérités assez évidentes sur le plan politique
concret.
Quant à l'autre, l'article 578, il s'agit d'une clause
dérogatoire dans ce cas-ci, mais par rapport à la charte
canadienne. C'est une dérogation limitée et seules, encore une
fois, les dispositions de la loi qui accordent des droits et privilèges
à une confession religieuse sont placées à l'abri d'une
contestation judiciaire, et non pas toutes les autres applications qu'on
pourrait faire de la loi à rencontre des droits et libertés
fondamentaux des citoyens.
Je veux vous dire en terminant - puis j'aurai seulement une question
à vous poser - que nous sommes très soucieux des droits et
libertés fondamentaux des citoyens et je ne voudrais pas que vous
commettiez l'erreur grossière de penser que vous en êtes les seuls
propriétaires. Nous avons une manière différente de les
voir dans la pratique, mais nous sommes capables de les défendre et nous
sommes capables de les appliquer dans le plein respect de la liberté
à laquelle nous tenons autant que vous.
Maintenant, je voudrais vous poser une question - il est tard,
malheureusement, c'est un débat qu'on aurait dû pouvoir faire
pendant plusieurs heures, je l'eusse apprécié vivement - Est-ce
qu'il y a des différences majeures, selon vous, entre la loi 3, qui
avait été adoptée sous l'ancien gouvernement, et le projet
de loi 107 en matière d'aménagements touchant les questions
religieuses et morales et lesquelles?
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Baril, M.
Drouin, M. de LaGrave? M. Baril.
M. Baril (Daniel): En particulier, la loi 3, par exemple,
prévoyait que trois ans après la mise en vigueur de la loi, les
statuts confession- nels disparaissaient et ils étaient maintenus
uniquement si les parents de l'école le demandaient. On n'a pas cela
dans le projet de loi 107. Dans le projet de loi 107, on ne retourne pas
à la case zéro sur la question confessionnelle. Toutes les
écoles sont actuellement confessionnelles, sauf peut-être de rares
exceptions, et j'attends toujours qu'on me les montre. Or, cela veut dire que
la confessionnalité s'applique intégralement partout. Il y a
toujours évidemment la possibilité de révoquer le statut
confessionnel, mais cela appartient au Comité catholique. C'est dans le
règlement du Comité catholique, et c'est lui qui va
décider des règles du jeu, des critères pour la
consultation des parents, des critères pour la révocation du
statut. Finalement, même s'il y avait une école non
confessionnelle, avec toutes les mesures qu'il y a dans la loi, on ne voit pas
la différence, c'est-à-dire que l'école sera
obligée d'avoir l'enseignement confessionnel, d'avoir deux services de
pastorale et les enseignants de cette école seront toujours soumis aux
règlements d'embauché du Comité catholique, pour les
titulaires qui dispensent l'enseignement religieux. Donc, une école avec
de la pastorale qui monopolise à peu près toutes les
activités sociales à l'école... on ne voit pas la
différence entre une école non confessionnelle prévue par
la loi et une école confessionnelle intégrale mur à mur.
On est complètement bloqué. Il y avait, je pense, plus
d'ouverture, dans la loi 3, sur la question de la pastorale, entre autres.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Mme
Fillion, voulez-vous intervenir?
Mme Fillion (Lucie): C'est seulement pour dire qu'effectivement
la présentation du projet de loi 107 et des règlements qui ont
été présentés aux parents des comités
confessionnels ont eu pour effet de détruire ce qui était en
pratique une école laïque au Québec, c'est-à-dire les
écoles du réseau protestant à Montréal où,
dans les faits, il n'y avait pas d'enseignement confessionnel ni religieux ni
moral, dans l'immense majorité des écoles. À ma
connaissance, il y a peut-être eu une école où il y a eu de
l'enseignement moral et religieux. C'était une école qui
répondait de façon très, très adéquate aux
besoins et aux voeux des parents, et où les enfants apprenaient à
vivre ensemble, peu importe les religions et peu importe les convictions
qu'avaient, la plupart du temps, non pas eux-mêmes, mais leurs parents.
À sept ou huit ans, les enfants ne sont pas à un âge
où ils peuvent discuter beaucoup de théologie. Alors, l'effet du
projet de loi 107 et de ces règlements a été de faire
rétrograder l'école protestante et l'aspect laïque, l'aspect
de tolérance qu'elle comportait beaucoup.
Auparavant, si vous me le permettez, je voudrais signaler que l'article
8 de la loi 3 prévoyait une exemption totale, ce qui était en
pratique ce qui se passait dans les écoles protes-
tantes. Maintenant, avec les nouveaux règlements, on aura le
choix entre l'enseignement religieux ou moral. Donc, on nous impose des choses.
On nous impose de prendre du temps qui était parfois employé
à former les enfants pour des besoins très exigeants de la
société, comme apprendre à utiliser un ordinateur, les
principes du civisme ou toutes sortes de choses comme cela. Alors,
c'était mon intervention. Je voulais signaler particulièrement le
côté protestant.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, madame. M.
le ministre.
M. Ryan: Est-ce qu'il y avait une autre dame qui voulait...
Le Président (M. Parent, Sauvé): Madame,
excusez-moi. Mme Read.
Mme Cyr-Read (Réjeanne): Oui. M. le Président, je
suis certaine que M. le ministre sait de quoi je vais parler. Alors, je vais y
aller. M. Ryan a dit qu'on avait des positions doctrinales et qu'il
n'était pas d'accord avec notre interprétation de la
démocratie. Alors, je vais demander à M. Ryan si cela fait partie
de la philosophie libérale de priver des citoyens de leur droit de
citoyen de se présenter comme commissaire. C'est ce qui se passe
à la Commission des écoles catholiques de Québec, depuis
des années, et on évoque l'Acte de l'Amérique du Nord
britannique sur cela. Alors, votre gouvernement avait l'occasion, lors de
l'entente du lac Meech, de faire réparation. Vous nous dites constamment
que vous faites des démarches pour corriger cette situation. Mais vous
n'en faites pas puisque, pour la corriger, il faut demander des amendements
à l'article 93. Vous aviez l'occasion de le faire, vous ne l'avez pas
fait. Alors, si nous sommes doctrinaires, nous sommes vos victimes, monsieur,
parce que je ne peux pas me présenter comme commissaire et, sur le
territoire, vous jouez toujours la question majorité-minorité
contre cette interprétation. Je suis contre la liberté de
conscience, comme le dit le mouvement ici. C'est un privilège, c'est un
droit individuel, mais nous sommes majoritaires dans la haute ville. Il y a 52
% des parents qui demandent l'exemption de leurs enfants parce que certains
sont forcés d'aller en catéchèse à cause des
conflits d'horaire dans les écoles secondaires, ce qui est inacceptable.
Donc, il y a plus que 52 %. Ces gens ne peuvent pas se présenter comme
commissaire. Nous sommes des contribuables. Vous ne reconnaissez pas nos droits
de citoyen et vous laissez à l'Église le soin de
déterminer quels sont ces droits. Je vous dit que cette
philosophie-là est beaucoup plus doctrinaire que la nôtre.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le
ministre, voulez-vous réagir? Si vous voulez... M. Drouin?
M. Drouin: Bien moi, je ne partage pas du tout
l'appréciation de M. le ministre quand il dit qu'on est doctrinaires.
Nous croyons avoir démontré que c'est effectivement le ministre
qui est doctrinaire et qui suit une seule ligne théocratique. Quand vous
prenez l'histoire de la pensée occidentale, c'est très clair que
vous vous inspirez seulement de penseurs théocratiques, au sens strict
du terme, et les penseurs libéraux sont complètement
écartés. Cela, c'est absolument certain. On a demandé
à quelques personnes, à des experts, d'essayer de trouver des
principes libéraux dans les propos du gouvernement et du ministre de
l'Éducation, ils n'en ont jamais trouvés. Il n'y en a pas. C'est
une conception doctrinaire, théocratique. C'est plutôt le
gouvernement qui est doctrinaire. Là, nous regrettons. Nous favorisons
la tolérance, l'ouverture, nous avons une politique et nous
avançons une prise de position modérée, et la position
radicale, c'est la position confessionnelle, que vous soutenez. Il faut faire
les différences qui s'imposent, quand même.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. Drouin.
Cela suppose une intervention, M. le ministre.
M. Ryan: J'aurais bien des choses à dire. Mais tout
d'abord, en ce qui regarde le règlement du Comité protestant,
puisque c'est lui qui s'applique aux écoles dont vous nous avez
parlé, il prévoit un enseignement moral. Si vous ne voulez pas
d'enseignement moral dans les écoles, vous n'êtes pas d'accord
avec le gouvernement actuel. Nous autres, nous trouvons que c'est une
discipline qui a sa place dans les écoles, qu'on ne peut pas avoir
d'existence humaine s'il n'y a pas une dimension morale. Pas
nécessairement confessionnel ou religieux, cela c'est une autre chose.
Mais c'est cela, qui est demandé, pas d'autre chose, par ce
règlement-là. Et si vous trouvez que le règlement du
Comité protestant est étouffant, j'aimerais beaucoup que vous
m'en fassiez la preuve. Et cela n'a pas chambardé, contrairement
à ce que vous laissez entendre, l'orientation fondamentale de ces
écoles-là, du moins à ma connaissance. Si c'était
le cas, j'aimerais bien en être informé. Et encore là je
réitère ma conviction de la place de l'enseignement de la morale
dans les écoles, même publiques. Je pense qu'on va être
d'accord au moins là-dessus. Et quand vous dites qu'on devrait sortir
toute religion des écoles, je trouve que c'est une position doctrinaire,
je m'en excuse.
Et je peux vous apporter de nombreux exemples de législateurs
contemporains, qui n'agissent pas dans cette voie-là. Vous savez ce que
le gouvernement de l'Ontario a fait depuis quelques années. Assez
curieusement, cela a été commencé par un gouvernement
conservateur, cela a été continué par un gouvernement
libéral, et adopté à l'Assemblée de l'Ontario par
les trois
partis représentés là. Peut-être que ce sont
trois partis de mentalité étroite et réactionnaire, qu'il
y a seulement les autres qui ont raison; les autres n'ont pas un sacré
député dans l'Assemblée législative de l'Ontario.
En Alberta, il y a une loi qui est à l'étude actuellement; on
prévoit une place pour les valeurs religieuses dans l'école. En
Angleterre, j'ai des extraits du texte d'un projet de loi qui est à
l'étude actuellement, c'est la même chose. Mais ce n'est pas
être antilibéral que de prévoir des choses comme cela.
À ce moment-là, le libéralisme serait devenu une jolie
chapelle à laquelle je ne tiendrais pas du tout à appartenir.
Là-dessus je pense qu'on peut... des sources, je pense qu'on en
aurait plus que vous à apporter de ce côté-là. Dans
l'application, il faut être extrêmement prudent et
méticuleux, pour que les droits soient respectés. Cela j'en
conviens avec vous, à fond, mais sur le chemin qui doit être
emprunté pour en arriver là, j'ai des divergences profondes, et
j'estime n'avoir pas reçu de réponse satisfaisante à la
question que j'ai posée, quant à la comparaison entre la loi 3 et
le projet de loi 107. Vous avez mentionné un point, M. Baril, c'est
vrai, cela. Mais, depuis ce temps-là, on a introduit des
règlements de comités confessionnels qui prévoient une
révision périodique du statut confessionnel de l'école. Et
à part cela, je pense que, si vous regardez les dispositions des deux
projets, elles sont très semblables. Ce qui voudrait dire qu'il y avait
un consensus assez fort à l'Assemblée nationale, au moins sur ces
dispositions-là.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, merci, M.
le ministre. Maintenant je vais reconnaître la porte-parole officielle de
l'Opposition, Mme la députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le ministre nous
dit souvent, en vantant les mérites de son parti, qu'ils sont
très libéraux, et je pense que, à la suite des propos
qu'on vient d'entendre, les vrais penseurs libéraux seraient
plutôt au Parti québécois. (13 heures)
Le ministre a essayé de vous amener sur le terrain, à
savoir si le projet de loi actuel se démarquait suffisamment du projet
de loi 3. Il y a une chose certaine, c'est que j'ai eu l'occasion de m'y
objecter. Les règlements du Comité catholique et de comité
protestant viennent renforcer le caractère confessionnel de
l'école. À mon avis, dans la situation actuelle, c'était
inacceptable et cela demeure inacceptable. Le ministre connaît ma
position là-dessus. Le ministre sait aussi ce que cela veut dire dans
une classe où il y a un projet catholique, où l'enfant de six,
sept ou huit ans voit ses petits copains, ses petites copines participer
à des activités auxquelles il ne participe pas; il sait la
pression importante que cela fait peser sur ces enfants. Le ministre sait
également les problèmes de famille que cela peut poser lorsque
l'école porte des valeurs ou imprègne des valeurs qui ne sont pas
partagées par la famille. Là-dessus je vous rejoins, je trouve
cela préoccupant et je suis d'accord avec vous.
On accepte le principe que la majorité vienne dicter ses
règles en matière de services publics. Je trouve que c'est
hautement contestable, parce que cela vient rejoindre la position qu'on a sur
la langue. C'est la majorité anglophone qui viendrait dicter à la
minorité. Au Québec, c'est toujours se leurrer que de penser
qu'on est majoritaires. Lorsqu'on discute de ces questions, c'est sur le plan
canadien. Sur le plan canadien, on est minoritaire, et on est traités en
minorité. On le sait, on l'a toujours été. C'est pourquoi
il faudrait peut-être développer cette espèce de
tolérance à l'endroit de nos propres minorités, de
respect. Là-dessus, je vous rejoins.
Il me semble qu'il y a un débat qu'on n'a pas fait. Du moment
où on est en train de donner au Comité catholique et au
Comité protestant de solides moyens pour pénétrer dans
toutes les écoles du Québec, il faudrait que, au moins, en
même temps, on donne les mêmes moyens à ceux qui
défendent l'école neutre et l'enseignement exclusivement moral,
et qu'on s'assure que, dans chacune des commissions scolaires, il y ait au
moins deux personnes qui soient responsables de s'assurer qu'on respecte le
choix des parents, des enfants qui veulent de l'enseignement moral et qu'il y
ait un personnel compétent pour ce faire. Il me semble qu'il pourrait au
moins y avoir cette contrepartie. On ne peut pas continuer dans cette
direction. Je l'ai dit et répété à de multiples
reprises.
Le renforcement du caractère confessionnel de l'école est
préoccupant surtout dans la mesure où il est écrit dans le
règlement que le projet de l'école catholique s'inspire des
valeurs et de la morale catholique. Je ne vois pas comment on peut tenir ce
discours en parlant de respect des autres. Je l'ai dit et je le
répète.
Par ailleurs, on a eu un exemple assez frappant hier lorsque M. Jean-Guy
Tremblay - si je me rappelle bien - qui était le porte-parole de
l'Association québécoise des conseillers au service de
l'éducation chrétienne est venu nous parler d'un sondage qu'ils
avaient réalisés, ici, dans deux écoles, à
Québec et à Sillery. Il parlait des moyens qu'ils avaient pour
aller informer les parents et pour faire le sondage. Il n'y a aucune commune
mesure et il n'y a pas en contrepartie des moyens équivalents pour dire
aux gens ce qu'ils pourraient réclamer et ce qu'ils pourraient obtenir
dans une école qui ne serait pas confessionnelle. C'est ce qui est
inacceptable. Les moyens qui sont donnés à ceux qui
défendent l'école confessionnelle sont disproportionnés
par rapport à ceux qui sont fournis aux autres. C'est pourquoi le
ministre dit... Et je comprends qu'il le défende de cette façon.
Je respecte ses valeurs également, sauf qu'il faut
être honnête et se dire ici que, bien sûr, la
population surinformée et très sollicitée pour un projet
d'école catholique répond plus favorablement dans cette
direction, parce qu'elle n'a pas l'information, en contrepartie, qui lui
permettrait de réclamer le respect de ses droits.
Le système scolaire public ne peut pas être soumis aux
diktats d'une majorité, qui ne l'est peut-être pas autant qu'on le
croit, au moment où on se parle, sauf qu'elle a des pouvoirs
démesurés.
Le ministre parle de la vraie démocratie et dit que nous sommes
démocrates, mais une démocratie qui impose ses diktats à
la minorité, je ne pense pas que ce soit une démocratie qui soit
respectable. Je pense que...
M. Ryan: Question de règlement, M. le
Président...
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre,
sur une question de règlement.
M. Ryan: Je n'ai point dit cela.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre, je
n'ai pas ici la transcription des débats. Je ne peux donc pas vous dire
si vous avez raison ou non. Votre remarque étant faite, je reconnais Mme
la députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. On trouve
l'attitude de certains pays intégristes totalement inacceptable, selon
notre conception présumée plus ouverte. Mais lorsqu'on regarde
une telle situation dans les faits, on pourrait se retrouver - et, ce n'est pas
complètement farfelu ce que je vais dire - dans certaines écoles
avec un directeur d'école qui, ayant de plus en plus de pouvoirs,
pourrait dicter des conduites et contrôler, dans une classe, si le
professeur de français respecte bien la morale chrétienne dans
son enseignement. Il y a tous ces pouvoirs dans une école. Moi, je suis
comme vous préoccupée du renforcement du caractère
confessionnel de l'école. Devant les pressions de ceux qui ont toujours
eu ces privilèges, les protestants et les catholiques, la question se
pose en toute honnêteté et en toute simplicité: Est-ce que
le gouvernement pouvait ne pas leur donner un certain nombre de garanties? Je
pense qu'il était un peu beaucoup forcé de le faire, mais il
n'était pas obligé d'en ajouter. C'est ce que je reproche
à l'actuel gouvernement. Il en a ajouté avec le renforcement du
caractère confessionnel des écoles et, cela, il n'était
pas obligé de le faire!
Vous avez cité un certain nombre de cas où les parents ou
les élèves se voyaient contraints de participer aux cours ou aux
activités touchant l'enseignement religieux catholique ou protestant.
C'est sûr que les gens qui défendent le droit à
l'école neutre, non confessionnelle, ne sont pas équipés
pour nous faire mettre plus fréquemment sur la table ces cas qui
finiraient peut-être par faire un peu pencher la balance par rapport
à ces tendances qui viennent renforcer le caractère catholique de
l'école. L'Alliance des professeures et professeurs de Montréal
nous apportait en commission parlementaire, la semaine dernière, un
exemple de la Belgique, si je ne me trompe. La Belgique donnerait dans des
écoles non confessionnelles des enseignements pour toutes les
communautés religieuses se trouvant dans son école. Est-ce que
vous seriez d'accord avec cela?
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Baril.
M. Baril (Daniel): On ne serait pas nécessairement
d'accord. Moi, je suis précisément allé voir quelle
était la situation en Belgique et c'est tout à fait ce qu'on
craint qu'il arrive ici avec la multiplication des cours de religion.
C'est-à-dire qu'en multipliant le type d'enseignement religieux, on
multiplie le problème confessionnel et on en arrive à des
situations où il y a un certain type de ces enseignements si on reste
avec l'exemple de la Belgique, où il y a l'enseignement catholique,
protestant, juif, musulman et la formation morale. Les gens qui demandent la
formation morale... Il faut d'abord dire que c'est la minorité de la
population qui est a l'école publique en Belgique. Ces gens qui
demandent la formation morale sont encore écrasés par le poids
des structures et des mentalités, exactement comme ici. L'option existe
depuis plus longtemps qu'ici, mais c'est le même problème
d'application qu'on retrouve là-bas. Des enfants, à qui on ne
donne pas le choix, à cause d'une prétendue majorité. Des
options qui viennent en contradiction avec certains types d'horaire. Pire que
cela, il y a certains enseignements religieux qui vont à rencontre des
valeurs fondamentales de la société belge. Entre autres, ils ont
eu de nombreux problèmes avec l'enseignement musulman à
l'école. Qu'est-ce qu'on fait dans une situation comme cela? On va
maintenir des privilèges pour deux religions. On va dire aux autres:
Non, quant à vous, il y a des affaires qu'on aime plus ou moins. On ne
vous permet pas de l'enseigner dans nos écoles. Ce n'est pas une avenue
à notre sens.
Le plus loin où on pourrait aller, ce serait de permettre que les
écoles servent à cela, mais en dehors de la grille horaire. Cela
ne doit pas faire partie du "curriculum" de l'école publique. On ne voit
pas pourquoi un enseignant qui est là pour voir à l'instruction
des enfants doit, en même temps, voir à la formation de la foi,
parce que c'est cela.
Ce qu'on a actuellement et ce qu'il y a en Belgique, ce ne sont pas des
cours d'éducation aux valeurs religieuses ou aux valeurs spirituelles au
sens très large. Ce qu'on a ici, ce sont des cours rattachés - on
l'a démontré dans une partie de notre mémoire -
directement à la doctrine catholique et qui visent la formation de la
foi.
Donc, qu'est-ce que l'enseignant a à faire là-dedans? En
quoi le rôle de financer les gens qui enseignent cela appartient-il
à l'État? Multiplier ce type d'enseignement, c'est donc
multiplier le problème.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. Baril.
Mme la députée.
Mme Blackburn: M. le Président, je dois vous avouer que
cette idée d'enseignement religieux selon les besoins des
élèves dans les classes, selon leur appartenance religieuse
m'était apparue séduisante. Mais vos remarques m'amènent
à penser que cela pourrait également contribuer à
marginaliser. Cela ne règle pas les problèmes
d'intégration qu'on connaît particulièrement dans la
région de Montréal.
Je suis assez d'accord avec vous, et j'ai eu l'occasion de l'exprimer.
C'est pourquoi je me sens peut-être un peu sans réaction devant
votre mémoire. L'Église catholique, en particulier - parce que je
vais parler de celle-là - s'est sentie faussement rassurée par le
privilège qu'elle avait de voir la foi enseignée et
perpétuée par l'enseignement dans les écoles. Ce qui n'a
pas empêché tous les changements de valeurs qu'on connaît et
le fait, par exemple, qu'il y a au moins 40 % - cela doit être plus
élevé que cela dans certains milieux - de catholiques qui ne
pratiquent plus ou qui ont peu à voir dans leur comportement, dans leur
attitude ou dans leurs valeurs avec ce qui est actuellement prêché
par l'Église catholique.
J'ai toujours prétendu que l'enseignement de la foi devrait
appartenir à la communauté religieuse, entendue dans le sens
d'Église et que c'est à cette condition qu'elle sera vivante,
fortement imprégnée et dynamique. Autrement, ce sont des
privilèges que je trouve douteux et qui finiraient, et qui finiront, je
pense, si on n'y prend garde, si on se repose là-dessus, par
atténuer, pour ne pas dire voir complètement disparaître
toute forme d'engagement religieux. Je pense que ce ne serait pas
souhaitable.
Évidemment, quand vous avez des privilèges de cette
nature, quand vous vous retrouvez avec le droit reconnu d'être
payés avec les deniers publics pour enseigner une religion, j'imagine
que cela doit être assez difficile de passer par-dessus ce
droit-là et, à un moment donné, du jour au lendemain, de
dire: Non, c'est la communauté religieuse qui supporte cet enseignement.
Cela pose un problème, mais cela pose, actuellement, plus
particulièrement un problème de rapport de forces entre des
tendances qui sont moins équipées que d'autres pour faire valoir
leurs droits et les faire respecter.
Vous disiez tout à l'heure, en rappelant l'histoire, que
l'humanité a toujours dû progresser par contestation, par remise
en question des valeurs établies. Cela ne se fait pas autrement. Les
discussions qu'on a aujourd'hui, le début, l'amorce de ce questionnement
a tout près d'un demi-siècle. Je souhaite seulement que cela ne
nous demande pas un autre demi-siècle pour reconnaître que tout ce
qui relève d'un service public doit être aussi neutre que
possible, au sens des valeurs qu'il véhicule. Je vous remercie.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. M. le
ministre, en guise de conclusion.
M. Ryan: Juste une brève conclusion, M. le
Président. J'écoutais la députée de Chicoutimi.
Elle nous a dit, à plusieurs reprises depuis le début des
auditions: Vous auriez dû appliquer la loi 3, cela aurait
été bien plus vite. Là, je l'écoute parler
aujourd'hui et je me dis: Ce qu'elle nous dit, ce n'est pas ce qui est dans la
loi 3. Ce qui est dans la loi 3, c'est à peu près exactement ce
qui est dans le projet de loi 107, sur ces questions-là. Je pense que
c'est important de le consigner pour l'information de tout le monde.
Si la députée de Chicoutimi veut changer l'orientation de
son parti, on pourra nous en informer par les voies régulières,
mais je cite encore un article de la loi 3 qui allait plus loin que le projet
de loi 107: "Le conseil d'école peut intégrer dans le projet
éducatif de l'école les croyances et les valeurs religieuses
d'une confession particulière ou de plusieurs confessions." C'est en
toutes lettres dans la loi 3. Nous l'avons nuancé dans le
règlement que nous avons adopté. Nous avons mis: "dans le respect
des droits et libertés individuelles", pas parce que nous étions
plus fins que le gouvernement précédent, mais parce qu'on nous
l'avait dit, il y a eu une discussion un peu plus élaborée
là-dessus. Nous l'avons ajouté, mais il ne faut pas faire
semblant d'être surpris aujourd'hui. C'est ce qui avait été
inscrit dans une loi qui a été adoptée, il y a à
peine trois ou quatre ans.
Nous croyons que ce que nous faisons s'inscrit dans la grande tradition
québécoise d'accueil des valeurs religieuses de la population,
dans les institutions éducatives. Ce qui ne veut pas dire encore une
fois: exclusivisme, rejet de l'autre ou imposition. Il n'est pas question
d'imposition là-dedans. Nous l'avons dit clairement et nous verrons
à ce qu'il en soit ainsi.
De plus, qu'il y ait des situations particulières, ici ou
là, qui demanderont des ajustements et de la vigilance, c'est
inévitable. À l'Assemblée nationale, je suis
député d'une circonscription qui est à la fois urbaine et
rurale et je tiens à déclarer que je suis très rarement
saisi de problèmes en relation avec ces choses, parce que les
Québécois ont mis au point, à travers les
générations, des modes de comportement, des attitudes qui
tiennent compte de toutes ces sinuosités du réel, de
manière peut-être beaucoup plus subtile que nous ne voulons leur
prêter l'aptitude à le faire. C'est là-dessus que le
gouvernement s'appuie, sur cette sagesse pratique, fondamentale des
Québécois, autant comme parents que comme éducateurs ou
comme
administrateurs scolaires ou comme homme ou femme politique, qui les
incite à trouver des accommodements pratiques qui traduiront ces
choses-là par des modes de fonctionnement qui respecteront à la
fois les valeurs auxquelles tient la population. Ne pas les respecter serait un
déni de ces valeurs et des valeurs auxquelles peuvent tenir d'autres
parties de la population. C'est une philosophie de fond que nous essayons de
traduire.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le
ministre. Merci messieurs et mesdames, représentants du Mouvement
laïque québécois.
La commission permanente de l'éducation ajourne ses travaux
à demain matin, 10 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau.
(Fin de la séance à 13 h 18)