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Version finale

33e législature, 2e session
(8 mars 1988 au 9 août 1989)

Le mardi 8 novembre 1988 - Vol. 30 N° 28

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude détaillée du projet de loi 107 - Loi sur l'instruction publique


Journal des débats

 

(Quinze heures quarante-sept minutes)

Le Président (M. Parent, Sauvé): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission permanente de l'éducation commence ses travaux. M. le secrétaire, est-ce que nous avons quorum?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Si nous avons quorum, je déclare cette séance de travail ouverte et je vous rappelle que la commission se réunit actuellement, comme dans les jours qui vont suivre, pour étudier le projet de loi 107, Loi sur l'instruction publique.

M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Oui M. le Président. Du côté de l'Opposition, le député de Dubuc, M. Desbiens, remplace le député de Saint-Jacques, M. Boulerice, et le député de Mercier, M. Godin, remplace le député de Taillon, M. Filion. Merci.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Du côté ministériel, est-ce qu'il y a des remplacements?

M. Gendron: J'ai été distrait. On vient d'annoncer les remplacements du côté de l'Opposition alors, du côté ministériel, non, soyez sans crainte.

Le Président (M. Parent, Sauvé): On n'en a pas. Cela va à votre goût, M. le député? Il n'y a pas de changement.

M. Gendron: J'aurai l'occasion d'en faire un peu plus tard. Je n'en ferai pas tout de suite.

Le Président (M. Parent, Sauvé): D'accord. S'il n'y a pas de remplacement, avant de commencer la séance et de donner la parole au ministre et au porte-parole de l'Opposition officielle, je veux souhaiter la bienvenue au porte-parole de l'Opposition officielle, M. le député d'Abitibi-Ouest, qu'on a le plaisir d'accueillir pour la première fois à cette commission permanente de l'éducation à titre de porte-parole de l'Opposition officielle. M. le député d'Abitibi-Ouest, sentez-vous le bienvenu. Il nous fait plaisir de travailler avec vous et de vous assurer de notre collaboration.

M. Gendron: Je vous remercie rapidement, M. le Président, de vos meilleurs voeux d'étroite collaboration et, pour ce qui me concerne, il est clair que cela me fera plaisir de travailler avec les membres de cette commission qui, normalement, s'intéressent aux questions d'éducation. C'est une question qui m'intéresse et je vais essayer de travailler le plus sérieusement possible et le plus professionnellement possible à véhiculer les éléments qui m'apparaissent devoir être véhiculés pour maximiser l'offre éducative que, comme société, on se doit d'offrir et qui doit être de la meilleure qualité. C'est dans ce sens que je vais travailler. Alors, je vous remercie de votre collaboration comme président et je remercie ies membres de m'accueillir aussi gentiment.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Cela va. Maintenant, comme le veut non pas la coutume, mais le règlement, je demande à M. le ministre de l'Éducation de faire ses remarques préliminaires concernant les buts de l'examen de ce projet de loi article par article. M. le ministre de l'Éducation.

Remarques préliminaires M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, c'est avec beaucoup de plaisir et d'optimisme que nous entreprenons, du côté du gouvernement, cette nouvelle phase dans l'examen du projet de loi 107. Nous avons franchi avec succès et ouverture, je le pense bien, jusqu'à maintenant les étapes qui étaient indiquées avant celle-ci. Nous avons, entre autres, tenu une série d'audiences de la commission parlementaire de l'éducation qui furent très fructueuses, qui furent marquées d'une large et fort constructive participation de la part des milieux concernés.

Nous avons également eu un débat à l'Assemblée nationale sur le principe du projet de loi qui a donné lieu à des échanges de vues vigoureux de la part du gouvernement et de l'Opposition. J'ai eu l'occasion de signaler, à l'Assemblée nationale, l'excellente qualité des contributions apportées par les participants au débat, notamment ceux du côté gouvernemental qui avaient tous soigneusement préparé leur intervention, qui nous ont permis de mieux comprendre différents aspects de ce projet de loi aux innombrables facettes, comme l'est d'ailleurs notre système d'enseignement.

Nous entreprenons aujourd'hui l'étude en comité, article par article. Je pense que l'occasion est bonne pour rappeler brièvement les grandes caractéristiques du projet de loi et je voudrais ensuite m'attarder principalement à des explications sur les amendements que nous projetons d'apporter au projet de loi, afin de tenir compte de tous les points de vue dont nous avons été saisis en cours de route jusqu'à ce jour et d'améliorer le projet, de manière qu'il puisse devenir, dans toute la mesure possible, le bien de toute la communauté et non pas simplement l'affaire du gouvernement et de sa majo-

rité.

Les objectifs du projet de loi sont bien connus, nous les avons réitérés à plusieurs reprises. Nous voulons d'abord moderniser, clarifier et rendre plus cohérente notre vieille Loi sur l'instruction publique. J'ai fait part, à maintes reprises, de mon attachement pour cette vieille loi qui est l'une de nos institutions les plus précieuses, mais cela ne doit pas nous empêcher de conclure que, dans plusieurs de ses dispositions, la loi est devenue désuète, que plusieurs dispositions qui se sont ajoutées ou superposées les unes aux autres, au cours des générations, ont créé un édifice dont la simplicité des lignes n'est pas toujours la caractéristique principale. Alors, nous avons voulu faire un effort afin de donner à la communauté québécoise une législation scolaire qui soit à l'image du progrès que nous avons accompli ensemble depuis de nombreuses années et de la vision que nous nous faisons aujourd'hui de notre système d'enseignement. C'est l'un des objets fondamentaux du projet de loi.

Nous avons voulu donner une nouvelle définition des frontières de l'accessibilité à plusieurs égards. Nous ne pouvions pas innover sérieusement en matière de gratuité universelle, parce que, déjà, l'instruction publique primaire et secondaire est accessible à toute la population de manière gratuite. Une fois qu'on a dit cette chose, on doit se contenter d'envisager des avancées plutôt complémentaires. On ne peut pas refaire l'essentiel de cette partie de l'édifice. Mais il y a quand même bon nombre de secteurs de la population qui ne jouissent pas de l'accessibilité avec autant d'intensité que d'autres et nous avons voulu, dans le projet de loi, faire reculer les frontières de l'accessibilité dans les secteurs que nous jugions particulièrement vitaux. Je pense à l'éducation des adultes, en particulier, où nous n'aHons pas aussi loin qu'on pourrait idéalement le souhaiter, j'en conviens dès le départ. Mais nous faisons des progrès sensibles, nous ouvrons des portes nouvelles aux adultes et je pense qu'il s'agit là de progrès appréciables, surtout quand on tient compte de l'obligation où nous sommes de mesurer soigneusement les implications financières de chaque nouveau pas que nous entreprenons. Parmi les progrès que nous proposons à ce sujet, il y a notamment les suivants: nous laissons tomber la définition de l'adulte, qui obligeait une personne à avoir été coupée de l'école pendant une période autrefois d'un an, dans la version originelle du projet de loi de six mois, avant d'être admissible aux services éducatifs. Maintenant, l'admissibilité sera ouverte à toute personne qui a quitté l'école. Il n'y aura pas de perte de temps; par conséquent, il n'y aura pas de gaspillage d'expérience entre le moment où une personne quitte l'école et celui où elle deviendra admissible au service d'éducation des adultes.

Nous insérons dans le projet de loi le principe de la gratuité des services d'alphabétisa- tion et des services éducatifs pour les adultes. Cette gratuité ne peut pas être absolue et totale, tout le monde en convient. Je n'ai jamais entendu l'Opposition préconiser que l'éducation des adultes de niveau secondaire devait être complètement gratuite. Et même dans la loi 3, que nos vis-à-vis de l'Opposition aiment souvent citer, on garantissait !a gratuité de l'éducation des adultes dans le cas des adultes inscrits à des cours devant conduire à l'obtention du diplôme d'études secondaires. Cela, c'est facile à dire dans un texte législatif de deux lignes, mais c'est extrêmement difficile à interpréter. Et, si nous ne l'avons pas inséré dans le texte même du projet de loi, c'est parce qu'il se pose des problèmes de définition pratique, de vérification administrative, qui n'ont pas reçu à ce jour de solution complètement satisfaisante.

C'est pour cela que nous devrons nous donner une période d'un an ou deux pour mettre au point le régime pédagogique des adultes, dont il est question dans le projet de loi, dans lequel nous préciserons les conditions auxquelles la gratuité sera accessible aux adultes. Mais je puis déclarer aussi explicitement que j'en suis capable, à ce moment-ci, que le principe de la gratuité, pour les adultes inscrits à des cours en vue de l'obtention du diplôme d'études secondaires, est accepté par le gouvernement et sera incorporé dans ce régime pédagogique pour les adultes. C'est tellement vrai que le principe est accepté par le gouvernement que nous l'observons déjà dans la pratique et il n'est aucunement question du moindre recul à ce sujet. La mise au point d'un régime pédagogique propre pour les adultes répondra à un voeu maintes fois exprimé par les représentants des organismes engagés dans l'éducation des adultes. Nous avons déjà un projet qui est très avancé de ce côté. Encore une fois, il faut en mesurer soigneusement les implications administratives.

Je me permets une parenthèse, M. le Président. Le gouvernement précédent introduisait, il y a environ cinq ans, le principe de l'enveloppe ouverte pour les adultes inscrits aux services éducatifs offerts par les commissions scolaires. C'est un principe auquel le gouvernement actuel fut heureux de souscrire, mais nous constatons qu'en pratique l'application de ce principe donne lieu chaque année à des augmentations de dépenses qui sont tout à fait disproportionnées par rapport à celles qu'on observe dans d'autres secteurs comparables du monde de l'éducation. Il est évident qu'on n'a pas trouvé encore le moyen d'assurer les contrôles administratifs normaux qui doivent être exercés dans ce secteur comme dans tous les autres secteurs de l'administration publique. Nous travaillons à ces choses.

Je vous donne seulement un exemple: sous le régime que nous avons connu depuis des années, une personne s'inscrivait à des cours d'éducation des adultes au début de l'année et, si elle s'y était Inscrite à la fin de septembre, II

était de coutume qu'elle soit considérée comme une personne inscrite aux cours jusqu'à la fin de l'année. Or, nous constatons qu'il y a un taux d'abandon très élevé. Il faut tenir compte de cela. Si la personne n'est plus là pour suivre des cours au mois de janvier, février ou mars, il n'est pas normal que le gouvernement continue aveuglément de verser des subventions à la commission scolaire comme si la personne était encore là.

Alors, il y a des ajustements qui s'imposent. Nous avons cherché plusieurs solutions, nous faisons l'essai de plusieurs méthodes de contrôle, nous ne sommes par parvenus à régler tous les problèmes, et c'est pour cela que nous préférons réserver pour le débat que nous aurons sur le régime pédagogique des adultes l'examen de certaines modalités qui devront être observées en ce qui touche l'application du principe de la gratuité pour les adultes. (16 heures)

En matière d'accessibilité, j'ai eu l'occasion de souligner antérieurement les avantages nouveaux qui seront offerts par le projet de loi aux élèves considérés comme handicapés ou en difficulté ou en trouble d'adaptation ou d'apprentissage. Nous inscrivons dans le projet de loi - ceci est une nouveauté, ce n'était pas dans la loi 3 - le principe selon lequel tout enfant handicapé ou en trouble d'adaptation ou d'apprentissage aura droit à un plan d'intervention personnel à propos duquel ses parents devront être consultés au préalable. Cela, nous le maintenons dans le texte.

Nous donnons également aux parents le droit d'être entendus de la commission scolaire par le truchement d'un comité consultatif au sein duquel ils représenteront une partie très importante des membres. Nous voulons que les parents soient entendus par la commission scolaire. Nous créons pour la commission scolaire l'obligation de dévoiler la partie de son budget qu'elle consacrera chaque année aux services offerts aux élèves en difficulté d'adaptation ou d'apprentissage. Actuellement, le gouvernement verse des subsides aux commissions scolaires pour les élèves en difficulté d'adaptation ou d'apprentissage, mais il n'existe pas de moyen de contrôler si ces sommes sont vraiment affectées aux services mis à la disposition de ces enfants. Ce sont d'autres améliorations que l'on trouvera dans le projet de loi.

Un des soucis majeurs du gouvernement en relation avec le projet de loi 107, c'est le souci d'assurer une meilleure organisation interne de l'école, un fonctionnement plus harmonieux, plus en conformité avec les réalités d'aujourd'hui. Le projet de loi donne à l'école un statut juridique plus clair. L'école devient un établissement au sens fort du terme. Sa mise sur pied donne lieu à un acte juridique de la part de la commission scolaire qui ne peut être résilié ou annulé que par un acte semblable, lequel doit être précédé d'une consultation des parents concernés et des responsables de l'école.

À l'intérieur de l'école, nous établissons clairement le principe de l'unité de direction. L'école doit être dirigée, en fin de compte, par un directeur, tout comme un gouvernement doit être dirigé par un premier ministre ou par un président. On peut bien faire les thèses que l'on voudra, à la fin, il faut s'assurer qu'il y ait unité de direction et unité de décision. Ce principe est clairement établi dans le projet de loi, il n'y a pas de doute possible quant à la volonté du gouvernement. Nous ne voulons pas que l'autorité du directeur ou de la directrice d'école s'exerce de manière capricieuse, solitaire ou impériale. Nous voulons qu'elle soit partagée et exercée dans un esprit de collégialité et, à cette fin, nous prévoyons en particulier la création de deux mécanismes très importants. I! y aura d'abord un comité d'école, dont la création sera obligatoire, réunissant un nombre de parents à déterminer, mais qui seront élus par les parents pour assurer la participation des parents à la vie de l'école. En plus, il y aura un conseil d'orientation auquel seront représentés des parents désignés par le comité d'école et, en plus, les autres personnels intéressés: le personnel enseignant, le personnel de soutien, les professionnels non enseignants là où il y en aura et toujours, évidemment, le directeur ou la directrice. Les rôles respectifs de ces deux organismes sont définis dans le projet de loi avec autant de clarté que possible.

Nous nous sommes longuement interrogés sur la possibilité de n'avoir qu'un seul organisme. C'eût été préférable à bien des égards, mais les parents, par le truchement de la Fédération des comités de parents de la province de Québec, tenaient beaucoup à ce que nous maintenions le comité d'école et, après étude approfondie de cette question, nous avons conclu que leur point de vue était valable, parce que nous avons pris pratiquement un quart de siècle à construire cette structure qu'est le comité d'école dans nos écoles publiques du Québec. C'est une structure qui est maintenant implantée dans pratiquement toutes les écoles du Québec et qui fonctionne très bien, surtout dans les écoles primaires, non seulement en ce qui touche la vie quotidienne de l'école, mais aussi comme lieu d'expérience et de formation pour les parents intéressés à la chose scolaire.

Hier, M. le Président, j'ai passé la journée dans la région de Montmagny, L'Islet, Saint-Pamphile et La Pocatière. J'ai rencontré les membres de quatre commissions scolaires, tour à tour, pour discuter de problèmes d'intérêt commun. J'ai constaté une fois de plus, comme l'a sans doute fait le député d'Abitibi-Ouest avant moi lorsqu'il était ministre de l'Éducation, que de plus en plus nos commissions scolaires sont composées de membres qui ont fait leur noviciat, leur apprentissage, si ce terme vous est préférable MM. de l'Opposition...

M. Gendron: II me semble que j'ai passé par là.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Ryan:... dans des comités d'école ou des comités de parents. Ce ne sont pas des gens qui sont venus directement de la Banque Nationale, d'un syndicat ou de toutes sortes d'organismes extérieurs à l'école; ils ont fait leur apprentissage de la chose scolaire dans l'école, ce qu'ils considèrent comme une étape normale. D'ailleurs, généralement, ce choix leur a été proposé par leurs concitoyens parents qui considèrent comme normal de se porter candidat à des élections scolaires. De plus en plus, comme je le disais, nos commissions scolaires sont formées de personnes qui émanent des comités d'école et des comités de parents, ce qui entraîne chez elles une tendance de plus en plus forte à se préoccuper en priorité de pédagogie et non pas uniquement de finances. Nous constatons que le climat de nos commissions scolaires a beaucoup évolué à cause de cela. Je m'en réjouis et c'est parce que nous respectons ce point de vue des parents que nous avons décidé de tenir compte de la recommandation qui nous avait été faite par la Fédération des comités de parents du Québec en ce qui touche le comité d'école.

En ce qui touche le conseil d'orientation, j'ai pris soin, à l'occasion d'une tournée que j'ai faite dans au-delà d'une trentaine de commissions scolaires au cours des mois d'août et de septembre, de me renseigner surtout auprès de parents de petites commissions scolaires et de petites écoles quant à la possibilité d'avoir deux comités qui coexisteraient à l'intérieur de la même école. Je m'inquiétais un petit peu de la possibilité matérielle d'un objectif comme celui-là et je me souviens très bien - je donne un exemple, M. le Président, qui est très simple - d'une très petite communauté, Sainte-Thérèse-de-Gaspé, qui a un comité d'école très actif. On m'a assuré chez les parents que c'était tout à fait concevable d'avoir les deux organismes à condition que chacun fonctionne à son niveau et qu'il n'y ait pas de parallélisme ou de coupure entre les deux. C'est pourquoi nous avons prévu que le comité d'école sera formé d'abord, qu'il sera appelé à désigner ses représentants au conseil d'orientation, les enseignants feront de même, les autres membres du personnel feront de même et il n'y aura pas de duplication de la manière dont les choses sont conçues.

En ce qui touche l'école, on s'était beaucoup inquiétés du pouvoir d'ester en justice que le projet de loi 107 attribuait aux comités d'école et aux conseils d'orientation. L'intention était droite et tout à fait justifiable à mon point de vue. Il s'agissait de donner à ces organismes l'assurance que, dans l'hypothèse où une direction d'école ne voudrait pas reconnaître les droits qui leur sont reconnus dans la loi, ils disposeraient d'un recours en loi. On nous a fait comprendre que, même si ce n'était pas inscrit dans la loi, ce recours-là est là quand même de manière implicite et des jugements rendus dans un passé récent en donnent l'indication claire. Pour éviter de créer une tentation possible pour des gens qui seraient des fauteurs de chicanes, nous laissons tomber les dispositions qui créaient ce pouvoir d'ester en justice. Je pense que cela va peut-être faire l'affaire d'un grand nombre de personnes.

On s'était inquiétés - je pense au mouvement laïc en particulier, si mes souvenirs sont bons - du pouvoir de visite des écoles qui était donné à certains personnages. Nous tenons, du côté du gouvernement, à ce que les députés puissent aller visiter une école si cela fait leur affaire. L'école est une institution publique. Dans la loi 3, on supprimait ce droit séculaire qui a toujours été reconnu aux élus du peuple et nous le restaurons dans le projet de loi 107, j'en suis sûr, avec l'approbation de l'Opposition.

On s'inquiétait du droit qui était donné à des ministres du culte ou à des membres des comités confessionnels de visiter n'importe quelle école. Alors, pour éviter toute confusion, il est indiqué dans les amendements que je suis heureux de communiquer à cette commission aujourd'hui que les ministres du culte catholique ne seront autorisés à visiter que des écoles catholiques, de même que les ministres du culte protestant ne seront autorisés à visiter que des écoles protestantes. Il en ira de même pour les membres des deux comités confessionnels concernés. On ne met pas quelqu'un dans un comité confessionnel à Québec pour qu'il soit enfermé dans une tour d'ivoire sans contact avec la réalité. Le moins qu'on doive reconnaître, c'est la possibilité pour cette personne, qui accepte de servir au sein d'un comité confessionnel, d'aller visiter des écoles confessionnelles si le coeur lui en dit, si elle trouve que cela peut être utile pour le meilleur exercice de sa charge. Ce n'est pas un caprice, c'est parce que nous trouvons que c'est une affaire de convenance élémentaire.

Une innovation que nous introduisons, dont les amendements ont été portés à la connaissance de la commission aujourd'hui, c'est la réalité qu'on appelle centre d'éducation des adultes. Nous insérons cette réalité dans le projet de loi de manière qu'il soit clair que le lieu juridique où l'adulte sera appelé à recevoir des services éducatifs sera un lieu conçu spécialement pour lui et en fonction de ses besoins. Il pourra arriver que le centre d'éducation des adultes coïncide physiquement avec un lieu qui sera en même temps considéré comme une école. Il pourra arriver également, pour des raisons pratiques que l'on comprendra, que la direction d'un centre d'éducation des adultes soit également assumée par une personne qui sera directeur ou directrice d'école, mais la distinction est inscrite dans le texte de loi. Je pense que nous continuerons, comme nous l'avons fait ces dernières années, d'évoluer vers une situation où,

de plus en plus, les lieux où est dispensée l'éducation des adultes seront des lieux distinctement conçus et gérés en fonction des besoins des adultes.

En ce qui touche les commissions scolaires, nous avons accepté d'apporter bon nombre d'amendements au projet de loi 107 afin de le rendre plus acceptable à tout le monde. Le gouvernement - je pense qu'on peut le dire sans fausser la réalité - n'est pas entêté ni obstiné. Il a des principes, il a des convictions fermes qu'il défend avec toute la force nécessaire mais, lorsqu'on lui fait valoir sur un point ou l'autre que des améliorations seraient souhaitables, je pense qu'il a fait la preuve maintes fois qu'il est capable d'écouter et d'ajuster son tir.

Or, en ce qui touche les commissions scolaires, nous n'avons pas modifié notre position fondamentale suivant laquelle il n'y a pas lieu de procéder actuellement à des changements radicaux dans le partage des responsabilités entre les commissions scolaires, d'une part, et le gouvernement et le ministère ou le ministre de l'Éducation, d'autre part. On peut faire les thèses qu'on voudra là-dessus, on peut faire de la démagogie facile, mais je pense que si on regarde la réalité en face on est obligés de convenir que le partage que nous avons est, dans l'ensemble, un partage fort convenable, un partage qui permet à chacun de ces deux pôles d'autorité dans notre système scolaire de fournir sa contribution respective pour le meilleur équilibre de l'ensemble du système.

En tout cas, c'est l'hypothèse que nous avions dès le départ et que nous avons été obligés de maintenir en cours de route, faute de démonstration de bien des arguments que nous avons entendus de la part de nos opposants. Que de fois j'ai demandé à des témoins qui sont venus en commission parlementaire et à l'Opposition: Cessez les affaires générales, les généralités vagues et dites des choses précises. Quelles sont les attributions précises que vous voudriez confier aux commissions scolaires, disons, quand elles sont exercées présentement par le gouvernement? Franchement, les réponses furent extrêmement minces. Vous vous souvenez tous de scènes dont nous avons été témoins à la commission parlementaire. Je ne porte pas de jugement sur les personnes ni sur les organismes, mais sur les idées qui ont été émises, c'est mon devoir de porter un jugement et je n'ai jamais reculé devant non seulement l'obligation, mais le plaisir de le faire.

À titre d'exemple des assouplissements que nous apportons au projet de loi, je voudrais donner quelques illustrations. Tout d'abord, il y avait de nombreux articles dans le projet de loi qui créaient une obligation nouvelle de réglementation pour les commissions scolaires. On disait: La commission scolaire sera responsable de ceci et il faudra qu'elle procède par règlement. Nous savons tous que l'obligation de procéder par règlement est beaucoup plus lourde dans ses implications administratives et politiques que l'obligation de procéder par simple résolution ou décision. Alors, on alourdissait à bien des endroits le processus décisionnel à l'intérieur des commissions scolaires. Devant les représentations qu'on nous a faites là-dessus, nous avons décidé à plusieurs endroits de laisser tomber l'obligation de réglementation. (16 h 15)

Je voudrais donner une liste des articles où cela se produit. Vous pourrez regarder les articles suivants du projet de loi 107: 87, 158, 166, 173, 193, 211, 221 et 262 et vous y constaterez, en regardant la version amendée qui est proposée par le gouvernement, que nous faisons tomber beaucoup d'obligations réglementaires pour les commissions scolaires en ce qui touche des sujets comme la composition, les fonctions et les modalités de fonctionnement des comités d'école, des conseils d'orientation ou des comités de parents, la rémunération des commissaires d'écoles, la composition et les modalités de fonctionnement des comités consultatifs rattachés aux commissions scolaires, les critères qui permettront d'établir un plan triennal de répartition et de destination des immeubles de la commission scolaire, les critères pour l'implantation de nouvelles méthodes pédagogiques et le choix des manuels, les critères d'inscription des élèves, les normes d'organisation du transport des élèves. Sur tous ces sujets, nous faisons tomber l'obligation de réglementation qui était imposée aux commissions scolaires dans le projet de loi 107, version originelle. Les commissions scolaires auront les mêmes responsabilités, sauf qu'elles pourront s'en acquitter par voie de résolution ou de décision ordinaire plutôt que par voie de réglementation.

On avait entendu beaucoup de représentations au sujet du droit de vote que le projet de loi 107 accordait aux parents élus par les comités d'école pour siéger au sein de la commission scolaire à titre de parents-commissaires. Les commissions scolaires s'opposaient vigoureusement à cette disposition. La Fédération des comités de parents du Québec s'y opposait également avec fermeté, même si un certain nombre de comités de parents individuels sont venus soutenir des idées contraires. Il en est venu, peut-être, entre cinq et dix au maximum. Franchement, j'ai suivi toute la correspondance qui m'a été adressée sur cela. J'ai reçu, peut-être, une ou deux lettres additionnelles à ce sujet. Donc, j'ai toutes les raisons d'en conclure ainsi, à ce moment-ci, quant au point de vue des parents qui sont actifs à l'intérieur des structures scolaires et à celui dont nous a saisis la Fédération des comités de parents de la province de Québec. En conséquence, dans les amendements que nous portons à l'attention des membres de la commission, nous laissons tomber ce droit de vote qui était envisagé pour les parents-commissaires.

Dans le même ordre d'idées, je voudrais souligner que nous avions prévu dans la version

originelle du projet de loi l'élection de commissaires spécialement choisis au suffrage démocratique pour représenter des parents de la communauté linguistique minoritaire au sein d'une commission scolaire confessionnelle. Si, par exemple, une commission scolaire confessionnelle est anglophone dans sa majorité, nous voulions assurer la présence dans son sein de commissaires représentant la minorité linguistique. Mais il s'est révélé que la méthode que nous proposions pour atteindre ce but était très compliquée, soulevait des questions de principe difficiles et nous avons conclu finalement qu'il serait plus simple de remplacer le commissaire élu dont nous avions entrevu l'élection par un commissaire-parent qui serait désigné par les parents appartenant a la communauté linguistique minoritaire. Il y aurait donc, suivant les amendements que nous proposons, représentation des parents de la commission scolaire minoritaire, de la communauté linguistique minoritaire, mais par voie d'un parent-commissaire plutôt que par voie d'un commissaire élu au suffrage universel.

On nous avait parlé du comité exécutif. Dans le projet de loi, nous disions qu'une commission scolaire était libre de se donner un comité exécutif, mais que les décisions de cet organisme devraient ensuite être ratifiées par le conseil des commissaires siégeant au complet. On nous a dit que cette proposition était contraire à la pratique implantée depuis de nombreuses années. C'est vrai. On nous a dit qu'on ne voulait pas de ce changement. Nous l'avons compris. C'est pourquoi dans les amendements que nous proposons, il est recommandé que la formation de l'exécutif soit obligatoire au sein de chaque commission scolaire et qu'il ne soit pas nécessaire que les décisions de l'exécutif soient toujours et universellement entérinées par le conseil des commissaires au complet.

On s'est beaucoup inquiété, à juste titre, d'ailleurs, des pouvoirs qui étaient confiés aux commissions scolaires dans le projet de loi. Je vais parler d'un, en particulier, qui a fait couler beaucoup d'encre et qui est absolument central dans le projet de loi. Il s'agissait d'un changement qui venait augmenter l'autorité du ministre. Nous l'avons toujours reconnu. Nous n'en avons jamais disconvenu. En matière de formation professionnelle, nous disions qu'il appartiendrait au ministre de dresser la liste des options professionnelles qui pourraient être offertes dans les commissions scolaires chaque année et nous concluions que les commissions scolaires qui ne seraient pas autorisées à dispenser ces enseignements professionnels devraient se retirer plus ou moins de ce champ.

Or, cela a soulevé des objections compréhensibles. Ce que voulait dire le législateur, de toute évidence, c'est que le ministre pouvait dresser, pour fins de subventions, une liste des commissions scolaires autorisées à dispenser tel ou tel enseignement professionnel, mais il ne voulait pas enlever sa compétence de fond à une commission scolaire en ces matières. Et nous avons rédigé un amendement - nous l'avons fait en consultation avec la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec, d'ailleurs - qui prévoit que le ministre pourra dresser une liste des commissions scolaires autorisées à dispenser des enseignements professionnels pour fins de subventions. Si une commission scolaire peut s'arranger et veut s'arranger pour offrir tel ou tel enseignement à ses propres frais ou à ses propres charges, elle pourra le faire, le pouvoir ne lui est pas enlevé, mais nous maintenons quand même la responsabilité du ministre quant à la distribution des subventions pour fins d'enseignement professionnel. J'ajoute cette explication, qui est bien familière aux membres de la commission, que nous ne pouvons pas envisager un régime de laisser-aller général en ces matières. Il faut absolument qu'une autorité décide et cette autorité ne peut être autre, dans l'état actuel des choses, que celle du ministre de l'Éducation.

La même remarque s'applique pour l'éducation des adultes. Nous savons tous qu'il est impossible que toutes et chacune des 213 commissions scolaires du Québec offrent des services régulièrement organisés d'éducation des adultes à leur population respective. C'est pourquoi, depuis des années d'ailleurs, un nombre limité de commissions scolaires sont habilitées à offrir l'éducation des adultes. Le nombre de commissions scolaires ainsi autorisées s'établit actuellement autour de 80; je pense que le chiffre exact est 82. Alors, il faut bien qu'on reconnaisse l'autorité qui appartient au ministre de choisir ces commissions scolaires. Mais, ici encore, nous indiquerons dans les amendements qu'il s'agit d'un pouvoir qui est donné au ministre pour fins de subventions. Cela n'enlève pas le pouvoir fondamental de la commission scolaire, sa responsabilité fondamentale en matière d'éducation des adultes, mais cela veut dire que cette partie de sa responsabilité pour fins de financement sera exercée par une commission scolaire voisine avec laquelle, d'ailleurs, elle sera appelée à entretenir des rapports de collaboration.

Alors, c'est un exemple d'un problème qui a fait couler beaucoup d'encre, c'est un des points les plus litigieux dans les discussions que nous avons eues avec les commissions scolaires et je suis heureux d'affirmer aujourd'hui qu'à ma connaissance ce problème est réglé dans l'esprit des deux parties. J'en ai causé encore la semaine dernière avec nul autre que le président de la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec. Je crois que la fédération accepte la nouvelle formulation que nous proposons pour l'article 428 et l'article précédent, qui traite de l'éducation des adultes, se verra apporter le même genre de modifications, de manière que les objections qui existaient à propos de cet article soient également appelées à se dissiper.

On créait à la commission scolaire l'obligation de se doter d'un plan triennal d'utilisation

de ses immeubles, sans autre nuance. Cette disposition a provoqué des réactions compréhensibles. On nous a dit: Vous allez nous figer dans un plan de trois ans. On aura décidé que telle école servira à telle fin et la commission scolaire ne pourra plus rien faire pendant trois ans. C'était exagéré et nous revenons à une norme plus simple, qui est familière à ceux qui ont déjà exercé des fonctions ministérielles. La commission scolaire devra se donner un plan triennal, mais renouvenable chaque année, si paradoxal que cela soit. Alors, de ce côté-là, je pense que le problème est réglé également, mais nous ne voulons pas qu'une commission scolaire puisse décider du haut de sa grandeur de fermer une école, à un moment donné, ou de modifier la vocation d'une école sans passer par un minimum de procédures témoignant d'un respect élémentaire pour les personnes qui en seront affectées, autant dans les clientèles jeunes et adultes que dans les personnels. La disposition que nous introduisons permet de respecter la volonté tout à fait légitime de souplesse dont nous ont fait part les commissions scolaires et, en même temps, d'assurer que les droits fondamentaux des personnes seront également pris en compte.

Nous donnons aux commissions scolaires des pouvoirs élargis en matière de programmes locaux, en matière d'adaptation ou d'enrichissement des programmes établis par le ministre. On n'a pas souligné beaucoup cet aspect, nous aurons l'occasion de le faire en cours de route, pendant les travaux de la commission, mais je suis très heureux de souligner avec force que le pouvoir d'initiative attribué aux commissions scolaires par des articles comme les articles 204 et 205 du projet de loi élargit sensiblement les perspectives d'action créatrice de la part des commissions scolaires. On dit clairement: Si une commission scolaire se rend compte qu'un élève n'est pas capable de suivre tel programme, par exemple, qu'il n'en est vraiment pas capable, elle pourra l'en dispenser et remplacer ce programme par un autre pendant un certain temps. C'est que la commission scolaire pourra instituer des programmes optionnels dans les matières de son choix qui tiendront compte de la réalité locale, des besoins de la communauté et elle ne sera pas obligée de se référer toujours à Québec pour des choses comme celle-là. Alors, il y a des améliorations très intéressantes que nous apportons de ce point de vue.

En ce qui touche les opérations matérielles des commissions scolaires, en particulier ta gestion de leurs biens immeubles, l'acquisition de biens immeubles, la réparation de leurs écoles, les ventes d'écoles, les constructions d'écoles, certaines dispositions du projet de loi ont donné lieu à des critiques. Je pense qu'elles avaient été souvent mal comprises et, quand une disposition donne lieu à des critiques procédant d'une mauvaise intelligence, if y a problème. Il faut au moins clarifier les choses et, si possible, les améliorer. Or, dans certains cas, on nous a laissé entendre qu'on préférait maintenir le régime qui existe actuellement. Nous avons tenu compte de ces représentations dans une mesure appréciable. Il y a d'autres cas où il fallait absolument que nous introduisions certaines améliorations. Nous le faisons, je pense, avec modération et après avoir pesé soigneusement toutes les implications de la politique proposée.

Il y a une chose qui a fait parler beaucoup de monde, il existe dans la loi actuelle de l'instruction publique une disposition suivant laquelle le ministre peut retenir une subvention versable à une commission scolaire parce qu'il a des raisons sérieuses de le faire. Et, nous, nous disions dans le projet de loi 107 que le ministre serait habilité non seulement à retenir, mais aussi à diminuer, voire à annuler une subvention qui serait versabie à une commission scolaire. On a dit, évidemment, que le ministre, en se voyant attribuer des pouvoirs aussi considérables, pourrait exercer un chantage presque continuel sur l'administration des commissions scolaires.

En écoutant les représentations qui nous ont été faites là-dessus, nous ne pouvions rester indifférents. C'est vrai qu'il y a un danger inhérent. Même si l'intention était droite, je pense bien, il pourrait arriver que, dans l'application, elle se traduise par des écarts qui seraient regrettables. Et tenant compte de ces représentations qui nous ont été faites, nous travaillons encore à cet article afin de le formuler d'une manière telle qu'il puisse tenir compte des justes représentations qui nous ont été faites.

En même temps, il faut être réaliste, il faut se mettre les pieds par terre. Il faut savoir qu'il est arrivé des cas, dans le passé, où on a même parfois triché sur les clientèles, où on a fait des calculs erronés, parfois de manière inconsciente, parfois de manière consciente, en vue d'augmenter le montant des subventions. À supposer qu'on ait versé une subvention dans ces conditions, est-ce qu'il ne faut pas prévoir un certain pouvoir de récupération ou de rétention des subventions à venir? J'ai encore des cas à trancher, actuellement, la loi n'est pas claire de ce côté-là. Le seul recours qu'on ait actuellement, c'est souvent d'aller devant les tribunaux, puis traîner un organisme scolaire devant les tribunaux, ce n'est pas la chose la plus agréable à faire. Il faut qu'il y ait des pouvoirs plus clairement définis dans la loi et je pense qu'en travaillant honnêtement nous pourrons nous entendre sur une formulation qui serait acceptable et aux commissions scolaires et au gouvernement et, je l'espère, à l'Opposition.

Il avait été question du pouvoir d'enquête du ministre qui inquiétait beaucoup de monde, à tort, en grande partie, parce qu'il existe déjà dans la Loi sur l'instruction publique. Le pouvoir d'enquête du ministre est considérable selon les dispositions actuelles de la Loi sur l'instruction publique. Nous avions visé à l'assouplir en insérant une disposition nouvelle suivant laquelle,

lorsqu'il institue une enquête dans une commission scolaire ou dans une école, le ministre aurait été habilité à demander que soit suspendue l'exécution de la décision ayant donné lieu à l'enquête. Il me semble que c'est une chose tout à fait élémentaire, c'est une affaire de bon sens élémentaire. Mais cela n'a pas été compris de cette manière-là et on n'est pas ici pour porter des jugements sur le degré d'intelligence de chacun, c'est un fait politique. Quand une chose n'a pas été comprise, c'est un fait politique et il appartient à celui qui fut à l'origine de l'incompréhension d'essayer de clarifier les choses. C'est ce que le gouvernement fait une fois de plus, dans ce cas-ci, avec sa bonne volonté habituelle. (16 h 30)

Nous laissons tomber cette disposition qui avait suscité des appréhensions exagérées et nous revenons au régime qui existe actuellement sur ce point, le pouvoir d'enquête demeurera intact, intégral. Il n'est pas question de l'émasculer. Lorsque les choses ne marcheront pas, le ministre pourra toujours soumettre au cabinet une recommandation visant des mesures encore plus sévères. Je pense qu'on peut vivre avec ça pendant un bon nombre d'années. Comme le but d'une législation est de faire en sorte que les choses fonctionnent bien et de ne pas donner raison à une personne ou à une autre, je pense que, de ce point de vue, les critiques qui existaient tombent d'elles-mêmes. Vu que la source des critiques s'évanouit, la critique s'en va avec. C'est l'avantage des adaptations qu'on peut apporter à des projets qui ont pu être conçus avec sincérité, mais pas toujours avec la justesse qu'il fallait.

Je mentionne un autre point, j'allais l'oublier. On nous a beaucoup parlé de l'absence d'un droit de recours dans la loi. À un moment donné, j'ai même reçu une lettre du Protecteur du citoyen, dont je n'ai pas eu l'occasion de faire état devant la commission parlementaire parce qu'elle m'est arrivée après les audiences de la commission. Le Protecteur du citoyen voudrait qu'on l'habilite à entendre des représentations de personnes qui se sentiraient frustrées dans leurs droits fondamentaux, par l'application de cette loi, de la part de différents intervenants. Nous sommes très sensibles à cette recommandation du Protecteur du citoyen. Je ne suis pas enclin, parlant au nom du gouvernement, à recommander que le mandat du Protecteur du citoyen soit élargi de manière à l'habiliter à intervenir dans ces choses. D'autre part, je suis très sensible au principe du droit de recours qu'on a fait valoir et je pense que nous pourrons ensemble, à l'occasion des travaux de la commission, trouver d'autres moyens par lesquels pourraient être assurés des recours convenables aux parents ou aux élèves qui auraient été victimes de violation de leurs droits fondamentaux.

J'ai pris note de cette représentation qui nous a été faite à plusieurs reprises. J'avais le plaisir de rencontrer, hier, à La Pocatière, la personne qui a peut-être été l'avocat le plus ardent de ce principe du droit de recours, M. Alain Bellemare, un directeur d'école de la commission scolaire de La Pocatière, avec qui j'ai discuté à nouveau, hier, à ce sujet. M. Bellemare me disait que lui-même, après avoir entendu les difficultés auxquelles j'ai fait écho tantôt, était enclin à considérer, comme il l'avait dit vers la fin de son témoignage en commission parlementaire, qu'il serait peut-être plus utile que ce recours soit institué à l'intérieur de la commission scolaire et sous la responsabilité générale de celle-ci. Nous aurons l'occasion d'en discuter et je pense que nous pourrons, en temps utile, proposer ou recevoir des amendements qui pourraient être pertinents.

Un dernier mot à propos du Conseil scolaire de l'île de Montréal. J'avais fait mention à quelques reprises de conversations qui avaient eu lieu avec les représentants du Conseil scolaire de l'île de Montréal en vue de trouver des solutions aux problèmes qui ont plus ou moins paralysé, depuis déjà plusieurs années, le fonctionnement de cet organisme. Il me fait plaisir de confirmer que, parmi les amendements que nous portons à l'attention des membres de la commission parlementaire, certains apportent, je pense, des réponses généralement acceptables aux difficultés qui avaient surgi de ce côté.

Un premier problème se posait quant au statut même des représentants des commissions scolaires concernées au sein du Conseil scolaire de l'île de Montréal. À la suite d'une loi adoptée sous le parrainage de l'ancien gouvernement, et même de l'ancien ministre de l'Éducation, qui nous fait l'honneur de nous retrouver en commission parlementaire de l'éducation, le statut juridique des représentants des commissions scolaires confessionnelles au sein du Conseil scolaire de l'île de Montréal était mis en question. Des avis juridiques reçus par le Conseil scolaire de l'île de Montréal établissaient que les représentants de la CECM et de la CEPGM n'avaient pas statut de membre au sein du Conseil scolaire de l'île de Montréal et ne pouvaient participer aux décisions qu'autour des questions sur lesquelles leur organisme avait accepté de participer à l'activité du conseil. Si bien qu'à plusieurs reprises, lorsqu'est venu le moment de prendre des décisions au conseil, des débats juridiques interminables, inextricables se sont élevés concernant le droit des représentants de la CECM et de la CEPGM, lesquels représentent les deux tiers de la clientèle scolaire de l'île de Montréal, de participer au vote. Finalement, la décision qui fut prise les privait du droit de vote, en vertu de l'interprétation qui avait été faite de la loi.

Alors, avec le projet de loi 107, nous corrigeons cette anomalie, et les représentants des commissions scolaires confessionnelles auront plein droit au sein du Conseil scolaire de l'île de Montréal; c'est une première amélioration très importante.

Deuxièmement, nous maintenons l'équilibre actuel de la composition du Conseil scolaire de l'île de Montréal et nous établissons, pour l'avenir, des critères de représentation fondés sur le nombre d'élèves de chaque commission scolaire. Ceci permettra d'assurer que, dans l'hypothèse où les clientèles scolaires de l'une ou l'autre commission scolaire évolueraient, soit à la hausse, soit à la baisse, chacune aurait une représentation proportionnée à son nombre d'élèves, à son importance réelle. Alors, de cette manière, on assure la stabilité et, en même temps, on assure la justice de la représentation pour l'avenir. C'est un critère qui m'apparaît plus judicieux que la simple inscription de nombres absolus de représentants dans le texte législatif.

Une grande source de difficulté au Conseil scolaire de l'île de Montréal gravitait autour de la délégation de pouvoirs. Dans le système que nous avions, comme les deux commissions scolaires principales n'avaient pas droit de vote suivant une interprétation donnée par les autres commissions scolaires et par les conseillers techniques du conseil, il pouvait arriver que des commissions scolaires décident de conférer au Conseil scolaire de l'île de Montréal certaines fonctions ou pouvoirs normalement attribués aux commissions scolaires individuelles. Après ça, il exerçait ces fonctions-là, il pouvait dépenser des sommes en conséquence, puis la majorité n'avait même pas été impliquée dans la décision. Or, nous autres, nous avons trouvé une formule beaucoup plus simple en vertu de laquelle, lorsqu'il y aura vote des deux tiers des membres dûment accrédités au conseil, une fonction pourra être exercée par le conseil et, en outre, une commission scolaire qui ne serait pas d'accord pourra exercer un droit de retrait. Par conséquent, il n'y aura pas de brimade, il n'y aura pas de frustration pour qui que ce soit, les choses pourront fonctionner.

Dans fa version originelle du projet de loi, nous avions des critères beaucoup plus stricts: en plus des deux tiers, nous demandions le consentement unanime, par résolution, de chacune des commissions scolaires concernées. J'admets que ça aurait pu conduire à la paralysie. Et, encore une fois, le gouvernement aura été sensible et attentif aux représentations qui lui ont été présentées.

Je ne pense pas avoir autre chose à ajouter en ce qui touche les pouvoirs du ministre et du gouvernement, je pense qu'ils sont définis clairement. J'ai indiqué tantôt les principales modifications que nous apportons aux articles traitant de l'éducation des adultes, de la formation professionnelle et des pouvoirs d'enquête du ministre. Je pense que nous en avons dit beaucoup.

Il me reste à conclure, M. le Président, tout d'abord, en exprimant une fois de plus l'appréciation du gouvernement pour les concours très larges, très diversifiés qui ont été apportés au gouvernement et à l'Assemblée nationale dans les efforts en vue d'améliorer la teneur et la formulation concrète du projet de loi. Je pense que tous les députés membres de cette commission ont apporté une contribution fort utile. Les organismes et les personnes qui sont venus témoigner en commission parlementaire l'ont fait également. Les organismes, en particulier les médias, qui ont publié des analyses ou des critiques du projet de loi, ont rendu également un service essentiel en démocratie ouverte comme la nôtre. Les nombreux citoyens et les nombreuses citoyennes qui m'ont écrit ou qui ont écrit aux députés pour faire part de leurs opinions sur tel ou tel aspect du projet du loi ont également apporté une contribution fort utile.

Je pense que nous avons évolué beaucoup vers la mise au point de divers compromis qui permettront d'arriver à un document capable de donner lieu à un large consensus. C'est l'esprit dans lequel nous avons travaillé depuis déjà plusieurs mois et l'esprit dans lequel nous entendons travailler jusqu'à la fin. Et j'ose espérer qu'avec chaque jour qui passera nous pourrons nous rapprocher de l'objectif commun qui est de donner à la population québécoise une législation scolaire adaptée aux réalités d'aujourd'hui, mais en même temps capable d'assurer la continuité avec une tradition historique qui fut riche, qui fut grande et que nous n'avons pas le droit d'abandonner sans considération, que nous devons prolonger, enrichir, adapter, mais que nous n'avons pas le droit de nier, d'oublier ou de laisser tomber purement et simplement.

Je n'ai pas parlé dans mes remarques, M. le Président, de l'objectif que nous poursuivons concernant le caractère des commissions scolaires. Nous maintenons cet objectif qui est de transformer nos commissions scolaires pour catholiques ou pour protestantes en commissions scolaires linguistiques. Je pense que cet objectif donne lieu à un très large accord dans la population et je pense que nous pourrons le réaliser par étapes. La poursuite de cet objectif se double, évidemment, de l'engagement que nous avons pris de soumettre au jugement des tribunaux certaines dispositions du projet de loi qui peuvent comporter des implications constitutionnelles en relation avec l'article 93 de la Loi constitutionnelle de 1867. Il me fait plaisir d'informer la commission qu'à la suite de conversations que nous avons eues à ce sujet avec les commissions scolaires concernées nous achevons de mettre au point une liste d'articles du projet de loi qui seront référés aux tribunaux pour interprétation, dès que nous aurons terminé le processus d'approbation du projet de loi à l'Assemblée nationale. Nous procéderons avec loyauté. Nous ne voulons pas faire un exercice de byzantinisme. Il ne s'agit pas de soumettre aux tribunaux tous les articles qui pourraient, de près ou de loin, donner lieu à un scrupule constitutionnel dans l'esprit de certains qui ont

plutôt des vues étroites et limitées en ces choses. Il s'agit d'aller à l'essentiel, de dégager du projet de loi les articles qui comportent vraiment des implications fondamentales.

J'en donne un, par exemple, qui distingue le projet de loi radicalement de la loi 3 et c'est le point sur lequel la loi 3 avait été annulée par la Cour supérieure. Dans la loi 3, on instituait des commissions scolaires linguistiques et, sans autre examen, on dépouillait littéralement les commissions scolaires existantes des biens accumulés au cours des générations. On disait aux commissions scolaires pour protestants ou pour catholiques: Vos biens, c'est fini; I! y a un processus qui va s'implanter à compter de maintenant et ça va s'en alter à telle commission scolaire linguistique.

Nous ne faisons pas ça avec le projet de loi 107. Avant de toucher aux biens des commissions scolaires, nous irons d'abord devant les tribunaux chercher un arbitrage et, si l'arbitrage confirme les hypothèses que nous avons de notre côté, nous pourrons procéder assez rapidement à des transferts de biens qui seront nécessaires pour assurer le passage des commissions scolaires pour catholiques et pour protestants à des commissions scolaires linguisti ques. Mais nous ne mettrons pas la charrue devant les boeufs, parce que nous avons entendu la leçon qui nous est venue de la Cour supérieure et que nous ne trouvions pas du tout nécessaire d'aller plus loin pour nous faire confirmer cette vérité de justice élémentaire. La leçon était ciaire. C'est pour ça que nous ne sommes pas allés plus loin parce que le message essentiel que nous apportait la Cour supérieure répondait à la conviction du gouvernement. C'est ça l'argument central. Lisez le jugement du juge Brossard. Vous verrez que c'est ça qui a justifié la décision qu'il a prise.

Avec le projet de loi que nous présentons, je pense que ce danger est écarté. Je ne porte pas de Jugement sur le gouvernement antérieur. Je dis simplement que nous essayons de tirer profit de la leçon qu'il s'est fait servir par les tribunaux. Avec ces précautions que nous prenons, je pense que nous pourrons évoluer graduellement vers la réalisation complète de l'objectif que nous poursuivons.

Je lisais un article dans Le Soleil ces jours-ci qui m'a Intéressé, à propos du projet de loi 107. Le chroniqueur, après avoir fait état de bien des difficultés qu'on peut entrevoir, disait: Mais il y a le facteur politique aussi; peut-être qu'au lieu de toujours chialer contre la constitution, puis de toujours vouloir bâtir des châteaux en Espagne on pourrait descendre un petit peu plus souvent sur le terrain des vaches et assumer des responsabilités qui permettraient d'effectuer des changements aussi. Rien n'empêche les gens qui chialent à l'année longue contre nos structures scolaires de se mettre les pieds dans l'appareil et d'essayer de changer des choses. Je pense que c'est un objectif qu'il ne faudrait pas perdre de vue et nous l'avons tous fait en nous engageant dans la politique. Il y en a qui gagneraient à le faire mais, des fois, d'une manière plus efficace que ça n'a été fait dans le passé. Si c'est vrai que, dans certaines commissions scolaires, ceux qui sont en position de commandement représentent des vues archaïques, comment se fait-il qu'on n'en ait pas fait la démonstration auprès des citoyens? Comment se fait-Il qu'on se borne à crier du bord de la bande pendant que la partie se joue sur la glace? (16 h 45)

Aiors, je pense que, de ce côté-là, une fois que le projet de loi aura été adopté, chacun aura ses responsabilités à prendre et, moi, je suis très conscient de cette dimension du problème. Je suis convaincu qu'on ne réglera jamais une question scolaire en se référant uniquement à la constitution. En temps utile, s'il le faut, après que nous aurons clarifié la compétence véritable du gouvernement en matière de législation scolaire, tant sous l'angle linguistique que sous l'angle religieux, nous verrons s'il y a lieu d'envisager des modifications constitutionnelles. Je rappelle à ce sujet ce que disait le premier ministre dans une entrevue au Devoir il y a quelques mois, que loin de rejeter cette possibilité, nous l'envisageons positivement. Mais in tempore opportuno, en temps opportun.

M. le Président je vous remercie. J'assure les membres de la commission de ma cordiale collaboration et je crois qu'ensemble nous devrions être capables d'accomplir un travail qui permettra d'ouvrir un nouveau chapitre dans l'histoire scolaire du Québec.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le ministre de l'Éducation. Toujours à l'étape des remarques préliminaires, je reconnais maintenant le député d'Abitibi-Ouest, qui est le porte-parole officiel de l'Opposition en matière d'éducation. M. le député.

M. François Gendron

M. Gendron: Alors, moi, M. le Président, je voudrais profiter effectivement de l'ordre de la Chambre qui nous convoque à cette commission pour apprécier les éléments ponctuels et précis du projet de loi 107, ce qu'on appelle communément l'étude article par article, pour faire en début de nos travaux les remarques préliminaires suivantes.

Je ne suis pas ministre de l'Éducation pour l'instant et il ne m'appartient pas, je pense, de présenter l'esprit des principaux amendements qui ont donné suite aux nombreuses remarques et revendications des groupes qui sont venus s'exprimer lors des audiences. Il m'appartiendra cependant de les commenter, d'en faire une très succincte analyse, parce que ce n'est pas dans le contexte de travail qu'on nous a donné qu'il nous sera permis d'apprécier ces amendements-là d'une façon très détaillée, avec énormément de pertinence, et je dirai pourquoi tantôt.

Cependant, je ne pense pas qu'il soit logique de faire des remarques préliminaires si on ne situe pas le cadre de ce projet de loi, son importance, et si on ne fait pas un minimum de rétrospective. Ce que je veux rappeler, c'est que le projet de loi 107 avait des caractéristiques et les groupes qui ont été invités à venir rencontrer le ministre et à donner leur point de vue se sont largement et précisément exprimés sous la forme que vous connaissez. À peu près tous ont eu à apprécier, à tort ou à raison, parce que ce n'est pas important pour tout de suite, les remarques qui ont été faites par les concernés, y compris bien sûr celui qui vous parle au nom de sa formation politique, pas comme personne impliquée directement, puisque je n'ai pas eu cette chance extraordinaire de participer à tous ces fructueux débats sur les modifications souhaitées au projet de loi 107, mais comme nouveau critique en matière d'éducation, membre d'une formation politique qui s'appelle le Parti québécois. C'est clair que celui qui vous parle aura des points de vue à exprimer, aura des choses à dire précisément.

Or, je persiste à croire que ce qui est peut-être important que je communique aux membres de cette commission et aux citoyens et citoyennes du Québec, c'est ce que j'appellerais un courant de pensée qui peut être différent de celui que le ministre vient de véhiculer. C'est ça le rôle de l'Opposition, de véhiculer de temps à autre des orientations, des points de vue qui ne représentent pas uniquement notre problème personnel ou nos opinions personnelles, mais, de temps en temps, il faut au moins se donner la peine de véhiculer des courants de pensée qui nous viennent de groupes, d'organismes, d'individus intéressés par des questions fondamentales.

Le projet de loi 107 a été qualifié de projet de loi le plus centralisateur qui soit, encore là à tort ou à raison, je ne fais que le rappeler. Je veux seulement rappeler que, même si on me disait aujourd'hui que non, ce n'est pas comme cela, malheureusement, il y a des, gens qui n'ont pas compris exactement l'objectif du ministre, il n'en demeure pas moins que, tout récemment encore, dans des discussions que j'avais avec les concernés, ces gens-là prenaient la peine de me refaire des papiers, pas de me donner les mêmes papiers qu'ils avaient produits lors des consultations particulières ou générales sur le projet de loi 107, mais de me refaire certains documents. Et je ne veux pas le faire tout de suite - j'aurai l'occasion de le faire - mais quand je vois ici cet exemple, parce que ça me tombe dessus: le 12 octobre 1988... Que je sache, le 12 octobre 1988, les audiences avaient eu lieu, les gens avaient péroré pendant énormément d'heures, les concernés aussi, et on avait dit ce que je suis en train de vous dire. Or, le 12 octobre on répétait: "Nous désirons également vous manifester que les neuf commissions scolaires de l'Abitibi sont en accord avec les mémoires que cela fédération des commissions scolaires a présentés et maintiennent toujours que, quant à elles, elles se doivent de dénoncer le caractère hypercentra-lisateur et technocratique du projet de loi 107. " Elles sont probablement dans les patates, et ce sera notre job de prouver qu'elles sont dans les patates au cours de l'évolution de nos travaux, mais je me dois de rappeler cela.

Je me dois de rappeler que le projet de loi 107, à des égards précis, il y a une série de commissions scolaires qui - j'en notais une tantôt en feuilletant mes documents - me parlaient de recul et de centralisation abusive à des chapitres précis et spécifiques. Je ne veux pas le faire aujourd'hui, mais elles me pariaient de l'article 400 - c'est un exemple parce que je ne l'ai pas exactement. Ah! je l'ai! Ce sont les articles 428, 439, 437, etc. Je ne veux pas les lire tout de suite, je veux juste vous dire qu'au chapitre de ces articles ces commissions scolaires prétendaient que les pouvoirs du ministre sont exorbitants et placent souvent la commission scolaire en situation de tutelle permanente et répétée. Ce n'est pas moi qui l'écris.

Je pourrais faire comme le ministre, prendre beaucoup de temps pour illustrer que, pour ce qui me concerne, je veux juste établir le fait que le projet de loi 107 que j'ai lu, le projet de loi 107 que nous avons adopté grâce à la majorité ministérielle - sûrement pas à cause de l'Opposition, parce que nous avons voté contre l'adoption du principe du projet de loi 107 - a fait que c'est exact que nous avons franchi certaines étapes. Le ministre rappelait ceci au début, et c'est important de le rappeler; il a dit, et je le cite: On a travaillé fort. Je félicite tous ceux qui y ont travaillé, ces gens-là sont tous de bonne foi. Je ne nie pas cela. Cela n'a rien à voir avec le débat, pour ce qui me concerne. Je veux dire, il ne faut pas avoir toujours le même discours, même si on prend une heure pour le répéter. C'est clair que les gens sont de bonne foi. C'est clair qu'il y a des gens qui ont travaillé fort pour bonifier la vieille Loi sur l'instruction publique qui n'est plus appropriée, qui n'est pas opportune, qui ne correspond plus à ce que j'appelle cette réalité de 1988, que ce soit en matière d'éducation des adultes, que ce soit en matière de nouveaux pouvoirs concernant l'intégration et les difficultés qu'éprouvent ces nombreux mésadaptés, que ce soient des difficultés d'apprentissage ou d'adaptation.

Cela, c'est une difficulté réelle. Je ne vois pas de professeurs aujourd'hui qui ne me parlent pas des difficultés qu'ils ont avec tout ce phénomène-là, qui est un phénomène de société parce qu'il y a les gouvernements qui ont parlé et qui ont dit: Dorénavant, il faut faciliter l'intégration des handicapés. Là, je ne définis pas les types de handicap: socio-affectifs, déficients mentaux légers, etc. Peu importe. On ne peut pas avoir deux ou trois discours. On ne peut pas. prêcher une intégration plus réelle, plus souple à une société et ne pas se préparer pour que cela

se passe comme cela. Comme le milieu de l'école est un milieu de vie passager, en termes de formation pour des jeunes qui vont devenir les hommes et les femmes de demain, c'est clair qu'il faut commencer là.

Je voulais rappeler qu'on a dit - il me reste quelques minutes pour cet aspect - du projet de loi 107: Recul important quant à la loi 3. La loi 3, je n'en fais pas une maladie, je veux juste vous dire, par exemple, que dans la loi 3 il y a eu de très longs débats. Ce n'est pas il y a 25 semaines ou 10 jours, c'est il y a 4 ans ou 5 ans qu'on a fait des débats d'envergure là-dessus et il s'est dégagé un large consensus. Je n'accepte pas qu'on laisse des pans de mur entiers de la loi 3. C'est mon devoir de le rappeler et je vais revenir concrètement à des étapes données.

En matière d'accessibilité aux services éducatifs, notamment, pour les adultes, je sais, le ministre nous dit: Faites-moi confiance, je vous dis que je suis sérieux, je suis rendu là, il y aura un chapitre particulier et un régime pour l'éducation des adultes. Il nous a expliqué tantôt, parce que c'était son rôle de le faire et il l'a fait correctement, en présentant ses amendements: Écoutez, M. Gendron et membres de cette commission, le contexte du projet de loi 107 eu égard aux dispositifs concernant l'éducation des adultes n'est plus le même que celui de mon projet de loi 107. Il a raison. C'est clair, ce n'est plus le même, mais il va falloir que j'apprécie si c'est parce qu'il a changé que c'est satisfaisant, que c'est convaincant, que cela répond aux objectifs d'une société en développement et en croissance, qui est constamment en éducation permanente et doit l'être.

J'aurai tantôt des applications concrètes là-dessus. Tout ce que je dis aujourd'hui - il faut que je revienne un peu au début - comme remarques préliminaires sur le projet de loi 107 que j'ai lu, que je connais, c'est qu'il a été décrié et dénoncé partout. C'est de même qu'on commence un nouveau travail et c'est cela qui a été adopté en Chambre, malheureusement pour ce qui me concerne.

Il y a des lacunes majeures également sur le plan de la participation des parents. Le conseil d'orientation, très affaibli, est devenu presque consultatif. Il a perdu une série de pouvoirs qui étaient prévus à la loi 3. J'y reviendrai pour les illustrer concrètement. Ce sont des pouvoirs majeurs. Moi, cela m'intéresse qu'un conseil consultatif, si on décide qu'il y en a un, ait l'occasion de se prononcer sur énormément de choses qui le concernent. Ce n'est pas parce que le ministre a fini avec quelque chose de correct... Il nous a fait exactement le même plaidoyer logique, implacable, selon la logique du Parti libéral, qu'on a appris beaucoup du jugement Brossard et qu'en conséquence il ne faudrait pas répéter les mêmes erreurs. Donc, il faut avoir cet esprit de soumission, d'abandon, de régler une fois pour toutes le problème fondamental.

De me faire dire que ce projet de loi permet dorénavant de dire que l'organisation scolaire, au Québec, se fera sur une base linguistique plutôt que confessionnelle, ce n'est pas une réalité. Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise? Ce n'est pas vrai, c'est faux, c'est erroné. Ce n'est pas vrai que le Parti libéral a épousé cette cause. Ce n'est pas parce qu'il va me dire: Écoutez, oui, M. Gendron, nous autres, on ne peut pas faire ce que vous avez fait, se faire invalider, etc... Je comprends, c'est facile aujourd'hui de dire cela et de dire, en latin ou en français, qu'en temps utile, en temps opportun, etc., mais, moi, cela ne change pas la réalité dans laquelle nous vivons. On est pris avec l'article 93 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique. Ces gens, dans les négociations constitutionnelles, n'ont jamais voulu partir avec un petit paquet sous le bras qui aurait compris des dispositions en ce sens que le premier ministre du Québec, dans ses négociations, aurait dit: Écoutez, il faut regarder cela aussi. Je ne veux même pas, pour l'instant, présumer de la résultante. Je veux juste dire: Au moins, il me semble que je serais un peu plus convaincu du beau discours du ministre sur cela si le premier ministre du Québec, dans les négociations constitutionnelles qu'il a eues avec le premier ministre et qu'il va continuer d'avoir, de temps en temps, aurait laissé voir que cela l'intéressait de regarder cela sérieusement, ce qu'on peut faire pour consacrer la responsabilité exclusive du Québec dans le domaine de l'éducation.

Ce n'est pas cela que je sais et ce n'est pas par cela que je serai convaincu de leur degré d'intérêt, surtout quand on me dit: Ce n'est pas le temps! En temps utile, en l'an 4000. Moi, écoutez, en l'an 4000, façonner un système d'éducation sur la base de commissions scolaires linguistiques, je ne sais pas si cela va être de même. Je ne suis pas capable de dessiner le Québec de ces années. C'est toujours ce qu'ils nous ont dit: II n'est pas question de mettre la charrue avant les boeufs, on aurait l'air fin. On aurait l'air fin si on le faisait dans le projet de loi 107. Mais, parce que ces questions sont traitées dans le projet de loi 107, nous estimons que le projet de loi 107 n'est pas venu comme cela. Vous l'avez dit vous-même, avec raison: C'est un long cheminement de collaboration de toutes les personnes, de tous les groupes pour le modifier. S'il y avait eu au préalable une espèce de démarche volontaire, déterminée qui aurait prouvé que M. le ministre et son gouvernement étaient d'accord pour regarder les choses en ce sens et dire: "Bon, là, on va essayer de se donner un cadre juridique ou constitutionnel qui permettra d'offrir un régime où l'ensemble des commissions scolaires du Québec sera sur une base linguistique plutôt que confessionnelle", là, on aurait une crédibilité. Le problème est à Montréal et à Québec, et on dit: Cela va être cela partout où il n'y a pas de problème. C'est cela qu'on est en train de dire dans le projet de

loi 107. Partout où le problème ne se pose pas, dorénavant, on va fonctionner sur une base linguistique plutôt que sur une base confessionnelle, c'est-à-dire à l'extérieur du territoire protégé de Montréal et de Québec en vertu de la constitution. Globalement - je m'arrête sur l'analyse du projet de loi 107 - il a changé. Le projet de loi 107 qu'on a connu, c'est un projet de loi qui a été sévèrement critiqué par la quasi-totalité des intervenants. Là, on nous commande de travailler à l'étude du projet de loi 107, article, par article sachant très bien que c'est impossible de faire cela parce que, entretemps, le ministre avait promis une série d'amendements. Il a donné suite à sa promesse, peut-être pas dans les délais qu'il avait prévus - cela, il faut le comprendre, il a eu des problèmes. Il a eu des problèmes avec son comité de législation, il a eu des problèmes avec le gouvernement, cela a pris plus de temps que prévu et ce sont des choses normales. Mais, jeudi dernier, le ministre de l'Éducation nous a livré une encyclopédie en trois cahiers, tout en reconnaissant qu'il en manque une série et il nous a fait parvenir une lettre, que j'ai respectée intégralement, en passant, parce que j'ai eu vent de certains bobards auxquels je ne souscris pas, en ce sens que j'aurais manqué à l'engagement que j'avais donné au ministre, à savoir que les amendements étaient d'ordre privé, personnel et confidentiel. Je tiens à signaler à tous les membres de la commission que je n'ai jamais livré les amendements à qui que ce soit, sauf à moi-même et à mon recherchiste, comme on en avait deux copies. (17 heures)

Alors, le ministre nous dit ceci: Je vous transmets par la présente, pour votre usage privé et confidentiel, le texte des amendements que je proposerai. Le recueil des amendements est complet, sauf qu'il ne comporte pas ceux qui touchent les chapitres VIII à XI, imaginez, et ça donne ce que tout le monde sait, c'est-à-dire cette minceur de document. Et on nous dit: Voilà les amendements proposés au projet de loi 107, mais il en manque encore la moitié.

Tout cela pour dire que le projet de loi 107 qu'on nous demande d'étudier en commission parlementaire, je reconnais que ce n'est probablement pas le même qu'on a discuté longuement à l'Assemblée nationale, pour lequel des groupes sont venus s'exprimer. Je suis tellement convaincu de ce que je viens de dire que c'est important, à ce moment-ci, de dire: Dans le court délai qui nous était imparti, parce que ce n'est pas en une fin de semaine - si on avait exclusivement cette responsabilité, peut-être que cela se ferait - qu'on peut faire une analyse fine, détaillée, comparative... Alors, je le dis, je n'ai pas eu le temps de faire tout ce que j'aurais souhaité faire dans ce domaine-là. J'ai eu le temps d'en prendre connaissance, de le lire et de faire travailler, comme c'est normal de le faire, des gens qui ont cette responsabilité d'évalua- tion.

Encore là, comme je n'ai pas l'habitude de cacher les choses qu'on fait, oui, dans un court petit document interne à l'Opposition officielle on a fait une évaluation des amendements du projet de loi 107, en partant des amendements que j'appellerais bonificateurs, positifs. On a fait une évaluation des amendements que j'appellerais à caractère d'omission, les lacunes qu'on n'a pas comblées et les sujets sur lesquels, volontairement ou involontairement, on a décidé de ne pas donner suite. Il y a également des amendements que j'appellerais, pour ce qui me concerne, purement négatifs, des amendements qui ne donnent pas suite aux revendications des groupes, à cette nécessité d'avoir un projet de loi qui réponde adéquatement à ce que j'appellerais l'évaluation de ce que nous faisons des besoins de 1988 dans le monde de l'éducation.

Avant de parler de la démarche du ministre, je voudrais apprécier, comme il le fait un peu, les amendements proposés, pas en détail, on le fera en détail article par article, mais globalement. Jamais je ne prétendrai aujourd'hui, puisque c'est aujourd'hui qu'on nous envoie en commission, de ne pas convenir qu'il y a un certain nombre d'amendements qui vont dans la voie souhaitée par les intervenants. Oui, il y a des amendements qui répondent à des demandes précises: le comité d'école obligatoire, la suppression du droit des comités d'ester en justice, un chapitre plus sélectif, plus approprié, plus précis concernant toute une politique de gestion et de droits concernant les commissions scolaires. Pour ce qui est de l'éducation des adultes, oui, il y a de quoi de plus valable que ce que l'on connaissait. Oui, c'est vrai qu'il y a un certain nombre d'articles du projet de loi 107 qui ont été allégés de leurs dispositions fatigantes pour des mandataires qui ont la responsabilité de donner suite au mandat qu'ils ont reçu. Oui, il y a eu la suppression d'une disposition, pour ce qui me concerne complètement farfelue, à l'effet d'envisager d'exiger l'unanimité des commissions scolaires pour le conseil de l'île de Montréal, ce qui l'aurait rendu pratiquement inopérant avant même de commencer. Le ministre nous dit: J'ai réglé cela, et bravo! C'est vrai. Je ne dis pas qu'il a réglé cela, mais il y a des dispositions qui ont enlevé cette image complètement inexplicable dans le fonctionnement.

Cependant, dans les amendements proposés - il y en a d'autres - on verra, je le sais, car j'en ai fait une analyse assez exhaustive, mais ce n'est pas le moment... On dit: Composition du conseil d'orientation modifiée pour inclure un représentant des professionnels non enseignants, un représentant des employés de soutien, toute la dimension concernant les personnes qui ont des problèmes d'adaptation scolaire ou des difficultés d'apprentissage. Sauf que par hasard, je les ai rencontrés ce matin et rapidement ils ont pris connaissance... Ce matin, pas avant ce qui était convenu, mais ce matin, à

11 heures, je rencontrais ces gens-là et on en reparlera plus en détail tantôt. Or, c'est drôle, je ne les ai pas trouvés emballés et aussi confiants que vous l'étiez tantôt dans la présentation des nombreux amendements les concernant.

Je vais mettre ça sur le dos du temps. Quand on les rencontre à 11 heures, je comprends qu'à 11 h 15, c'est difficile pour eux de nous dire: On est complètement satisfait. Prenez-en connaissance. Mais je peux vous dire que rapidement - ils savaient comment fonctionner; je parle de la COPHAN, un organisme qui regroupe une série d'autres organismes plus fins, plus décentralisés pour ce qui est des difficultés d'apprentissage, que j'ai trouvé immensément crédible, immensément préparé - ils savaient de quoi ils parlaient et ils sont allés voir les articles qui les touchaient. Rapidement, ils n'ont pas pu convenir qu'il s'agissait là, dans une première impression ou une première appréciation, d'un projet de loi qui donnerait suite aux nombreuses demandes qu'ils ont exprimées avec justesse, avec énormément de conviction et de sagesse, parce qu'ils sont des mandataires réels des divers intervenants qui leur font confiance.

Je pourrais dire aussi que j'apprévie le fait qu'on ait adopté pour le conseil d'orientation et le comité d'école un budget de fonctionnement qui va leur permettre un peu plus d'autonomie. Il y a aussi des dispositions concernant les restrictions de droit de visite des membres des comités confessionnels, du clergé aux écoles de leur confession. Ce sont effectivement des dispositions intéressantes, parce qu'elles ont été soulignées par des organismes. Votre nouvelle section sur la constitution d'un centre d'éducation des adultes - je l'ai dit tantôt - c'est intéressant, de même que l'ajout d'un représentant des parents de la minorité linguistique de la commission scolaire confessionnelle et dissidente.

Je le dis comme je l'ai dit à quelques-uns qui sont très proches de vous, effectivement, dans le document qu'on a apprécié rapidement, s'il fallait le faire uniquement quant à la longueur de la liste, la longueur de liste de certains éléments positifs est appréciable par rapport à des choses mineures. Cependant, sur des questions fondamentales, sur l'aspect le plus unanimement décrié du projet de loi 107, à savoir la répartition des pouvoirs entre les commissions scolaires et le ministre, c'est mince, c'est mince franc, c'est mince ouvert. Le ministre dit: Écoutez, nous - je le cite - au gouvernement, on n'est pas un gouvernement entêté. On est souple, très ouvert. Il parlait du gouvernement, par exemple.

Cela, on pourra l'apprécier. On va avoir l'occasion de l'apprécier et on va avoir pas mal d'heures pour le faire. Mais, au-delà de ça, le ministre dit: Je vous le dis, là-dessus, il n'y a pas d'ouverture, parce qu'on est convaincu qu'au Québec le ministère de l'Éducation et le ministre, c'est sérieux et le ministre doit garder à peu près tous les pouvoirs. Vous êtes des mandataires, mais pour ce que je vais décider et on le verra, encore sur des articles.

De toute façon, supposons qu'encore là je sois complètement dans les patates, j'aimerais ça me faire dire aujourd'hui par des concernés qu'effectivement, entre ce qu'ils vous ont dit à vous, M. le ministre, et à vous, M. le Président, et à vous, chers membres de la commission, au moment des audiences et ce qu'ils auraient le goût de dire après avoir apprécié les nombreux amendements proposés suivant votre présentation - je parle en termes de qualité, de délestage, de souplesse et d'ouverture - j'aimerais ça les entendre aujourd'hui dire: On pense, M. le député d'Abitibi-Ouest, on pense, M. le Président et chers membres, qu'effectivement M. le ministre a été comme son gouvernement, c'est-à-dire non entêté, d'une souplesse indescriptible et, en conséquence, on trouve que le projet de loi 107 qu'il nous présente est alléchant, est intéressant. Il ne nous plaît pas pour partir en croisière, mais il nous agrée à ce point que, pour faire oeuvre utile collectivement, on décide qu'ensemble on va essayer de se doter d'une nouvelle loi concernant la gestion de l'ensemble du domaine de l'éducation au Québec, plus moderne, plus articulée, plus adaptée, qui répond davantage aux besoins d'éducation de 1988.

Est-ce qu'aujourd'hui, moi, comme membre de cette commission, je peux porter un tel jugement d'analyse en ce sens que ces gens, les concernés, la COPHAN, la CEQ qui est quand même assez touchée - les membres de la centrale de l'enseignement, que je sache, ce sont des professeurs, ce sont des enseignants, des enseignantes qui oeuvrent à tous les jours dans le milieu de l'éducation... Peut-être que, par leur centrale, ils aimeraient nous redonner un signal, à savoir qu'il y a là un projet de loi heureux, Intéressant qui correspond à leurs attentes.

C'est plus cela, à ce moment-ci, que je veux dire, même si, moi, dans ma lunette, je continuerais à nous présenter une série de modifications importantes. Il y a des positions qui étaient maintenues par des organismes, des groupes, des instances qui ne sont pas nécessairement les mêmes aujourd'hui, mais tant que je ne serai pas en mesure d'avoir une appréciation un peu plus large de ceux qui sont touchés par la réforme, de ceux qui auront à vivre avec la réforme et de ceux qui auront à l'appliquer, mis à part, bien sûr, le ministre et son gouvernement, je ne suis pas sûr que je m'acquitte convenablement de ma responsabilité. C'est-à-dire que je suis plus sûr de l'inverse, que ce n'est pas comme ça qu'on doit oeuvrer et travailler, surtout pas dans un projet de loi aussi déterminant.

Encore là, le ministre de l'Éducation, avec raison, a martelé, dans son discours de deuxième lecture lors de l'adoption du principe du projet

de loi 107, l'importance d'adapter la Loi sur l'instruction publique, même si la vieille loi, il l'a dit à plusieurs reprises, il la trouve intéressante, valable et qu'il y a de très bons principes dans cette vieille loi, ce que je reconnais sincèrement. Je ne pense pas qu'on ait un système d'éducation qu'on doit entièrement débâtir ou rebâtir aux deux ou trois ans. On a un système d'éducation qui a fait ses preuves. J'ai confiance, personnellement, à l'école publique. Cependant, ce n'est pas parce qu'un système a fait ses preuves qu'il n'y a pas lieu de le rafraîchir et de le moderniser, et c'est dans cet esprit que se sont inscrits les travaux conduisant au dépôt du projet de loi 107.

Sur la démarche - c'est important d'avoir en remarques préliminaires quelques commentaires là-dessus - le ministre nous avait dit, au mois d'août, à la fin de la commission parlementaire: Je vais déposer mes amendements au début ou à la fin de septembre, mais à coup sûr avant le début de la session. Il n'a pas pu le faire. Je ne porte pas de jugement là-dessus. Je dis seulement que, factuellement, cela ne s'est pas passé comme cela. On a reçu, comme je l'ai mentionné, une série d'amendements jeudi après-midi et on n'a vraiment pas eu le temps d'en faire un examen aussi approfondi que je le souhaiterais. On ne peut pas seulement parier des amendements en termes de contenu, il faut en parler aussi en termes numériques pour donner une image - il y a peut-être quelques gens qui peuvent nous écouter - et on aura également à faire référence quelquefois à des propos.

Les amendements, il y en a au-dessus de 400, pour ceux qui veulent avoir des chiffres. Et cela touche les 7 premiers chapitres, en passant, donc, il en manque 4 sur 11. Il y a 340 articles de modifiés, donc les trois quarts, 155 articles sont remplacés, 25 articles sont biffés et 60 sont complètement nouveaux. Or, je veux bien croire, qu'on pourrait commencer tout de suite. On me dira: Écoutez, M. le député, il s'agit quelquefois uniquement d'adaptation, de correction; il s'agit seulement, à d'autres reprises, de faire ce qu'on appelle des ajustements, parce qu'à un moment donné un même article peut se répéter à plusieurs endroits et, en conséquence, il faut lui apporter le même correctif.

Je sais tout cela. Après douze ans de vie parlementaire, je pense qu'on a une petite idée de la façon dont cela fonctionne. Il n'en demeure pas moins que, de deux choses l'une: si c'était un projet de loi majeur et qu'il a tellement changé, il n'est plus du tout le même et, en conséquence, le ministre est convaincu qu'on doit procéder - il a le droit, lui, de souhaiter l'adoption de ce projet de loi - sous prétexte qu'il répond et qu'il correspond aux besoins de la population du Québec. J'ai le même droit, je pense, de dire: Un ministre qui veut cela, qui veut s'asseoir pour adopter un projet de loi avec un consensus minimal, doit essayer de faire exprimer ce consensus. L'a-t-il eu dans les consultations? La réponse est non. L'a-t-il présentement sur les amendements proposés? Je ne le sais pas. Le sait-il? Ma prétention est qu'il ne le sait pas lui non plus. Il peut être convaincu qu'il l'a, mais je ne prétends pas qu'il l'ait.

En conséquence, si le même ministre est toujours très sérieux et souhaite toujours que ce projet de loi soit adopté et réponde a une volonté collective, il faut s'en assurer et il serait souhaitable que les intervenants qui auront à vivre avec puissent s'exprimer au préalable. Ce ne se fera sûrement pas dans un cadre comme celui qui nous est imposé ce matin ou cet après-midi, alors que nous commencerions nos travaux. Le ministre avait le droit de faire ce qu'il a fait, il avait le droit de procéder comme il l'a fait, mais, ce matin, il aurait dû dire à son leader du gouvernement: Je regrette, je ne convoque pas la commission parlementaire cet après-midi pour étudier un projet de loi de cette envergure et aussi majeur, pour lequel j'ai moi-même 400 amendements. Les instances concernées n'en ont pas pris connaissance, elles n'ont pas eu le temps d'avoir quelque réaction. C'est surtout ce genre de commentaires que je recevais. M. le député, allez-vous essayer de faire quelque chose pour nous donner l'occasion, le temps de réagir et de vous indiquer que... Oui, moi, je m'engage à faire ma "job"; je m'engage à assumer ma responsabilité, bien que j'aurais aimé mieux que ce soit le gouvernement qui assume sa responsabilité de procéder, à tout le moins, correctement.

Il est clair, M. le Président, que nous serions dans de bien meilleures dispositions et je serais beaucoup plus convaincu d'un travail utile, efficace qui corresponde à nos mandats, si j'avais l'assurance que les amendements seront rendus publics aujourd'hui. Ensuite, on verrait, au début de la semaine prochaine, à ce que la commission en fasse l'étude article par article. Là, tous les groupes auront eu le temps d'en prendre connaissance, tous les groupes auront eu le temps de réagir, tous les groupes auront eu le temps de parler aux députés ministériels et aux membres de l'Opposition et auront eu le temps de communiquer leurs réactions.

Là, ce n'est plus uniquement le point de vue du critique. Faisons l'hypothèse que nous commencions dans quelques minutes l'étude de l'article 1, parce c'est ce à quoi le leader membre du gouvernement nous a convoqués. J'ai des opinions sur l'article 1. Possiblement - cela m'étonnerait, par exemple, qu'ils s'expriment -que les gens ici en ont aussi; je parle surtout du côté ministériel, ils ont sûrement des opinions sur l'article 1. En quoi, aujourd'hui, est-ce si significatif que ça de répéter ce que vous avez dit quand les gens sont venus en commission parlementaire? À propos de l'article 1, vous avez entendu les commentaires des concernés, mais vous n'avez pas entendu les commentaires des gens concernés par le nouvel article 1. Que le

ministre ait la vérité et que le ministre ait fait ses consultations, c'est son droit le plus strict, mais, moi, j'ai le droit, il me semble, comme parlementaire, d'exiger que nous puissions, nous aussi, comme membres de l'Opposition, avoir l'occasion de recevoir un minimum - je ne demande pas deux semaines, trois semaines ou un mois, je demande un minimum - de réactions des concernés et, là, je vais m'ajuster.

Cela ne veut même pas dire, M. le Président et M. le ministre, qu'il faut que, moi, je vienne en commission parlementaire uniquement avec la réaction du milieu, mais j'ai le droit comme parlementaire, par exemple, membre d'une formation politique, de prétendre... Que je sache, on n'a pas été élus uniquement pour véhiculer les opinions de sa petite personne. Dans le régime démocratique qu'on connaît tous, en tout cas pour l'instant, il y a deux formations politiques majeures au Québec: la formation politique ministérielle du Parti libéral et celle du Parti québécois, qui forme l'Opposition officielle. L'Opposition officielle a le droit et le devoir de véhiculer les courants de pensée qui ne sont pas nécessairement véhiculés par !e parti ministériel. Mais, pour le faire, il faut que j'aie l'occasion de les voir, il faut que j'aie l'occasion de discuter, il faut que j'aie l'occasion de les rencontrer.

Là encore, j'en profite: Contrairement à ce que certains ont véhiculé, je n'ai pas véhiculé les amendements, parce que j'avais donné ma parole au ministre qu'il n'était pas question de faire cela. Il disait: C'est pour votre usage privé et confidentiel. Donc, je n'ai consulté personne sur les amendements proposés. Tout ce que j'ai fait ce matin, c'est dire l'attitude que nous aurions à l'ouverture des travaux de cette commission à quelques journalistes intéressés par ces questions, mais je n'ai pas rencontré d'intervenant, sauf, comme je l'ai mentionné tantôt, la COPHAN, à 11 heures cet avant-midi, un rendez-vous qui était fixé de toute façon depuis deux semaines. Et, bien sûr, parce que c'était de l'actualité, ils en ont profité pour me parler des amendements proposés.

Dans ce cadre-là, M. le Président, je pourrais continuer pendant des heures mes remarques préliminaires, mais j'estime que nous sommes légitimés... Non seulement nous sommes légitimés, mais nous avons le devoir, pour permettre que nous fassions notre travail convenablement, de nous prévaloir d'une disposition prévue à notre règlement, qui est l'article 175, que je vous lis tout de suite. L'article 175 nous dit: Toute commission peut déposer un rapport intérimaire à l'Assemblée. Il ne peut être présenté à cette fin qu'une seule motion par séance. "

Motion proposant le dépôt d'un rapport intérimaire

sur les amendements du ministre

Donc, avant de discuter de la motion, je dépose, conformément à notre règlement et à l'article 175, la motion suivante: "Conformément à l'article 175 de nos règles de procédure, je propose que cette commission fasse un rapport intérimaire à l'Assemblée nationale afin de permettre aux groupes intéressés de prendre connaissance des projets d'amendement du ministre concernant le projet de loi 107. "

Je ferai juste deux phrases d'explication. Moi, dans mon esprit, c'est une motion recevable. Je ne la plaiderai pas à ce moment-ci, à moins que vous ne le souhaitiez. Je donne un élément d'explication additionnel: quand je dis, dans la motion, "permettre aux groupes intéressés de prendre connaissance des projets d'amendement du ministre", pour ce qui me concerne, ce serait au maximum pour la semaine dans laquelle nous sommes. Je tiens à donner cette indication supplémentaire au ministre et que son leader convoque cette commission pour qu'on puisse commencer nos travaux mardi, après la période des questions, ce qui nous permettrait d'avoir deux ou trois jours de réactions des groupes concernés et, d'après moi, de travailler plus convenablement parce que, entre-temps, nous aurions eu l'occasion de prendre connaissance des réactions des groupes concernés à l'égard des amendements proposés.

Un instant, M. le Président, j'ai une remarque. Je veux tout simplement vous indiquer cependant que nous, avant de faire cette motion, on a pris le temps de l'analyser. Je souhaiterais que vous preniez le temps de la regarder quelques minutes avant d'en disposer, puisque je suis convaincu que c'est une disposition qui est prévue à notre règlement en commission parlementaire justement pour permettre occasionnellement à des parlementaires qui prétendent qu'ils ne sont pas dans un cadre de travail pour s'acquitter convenablement de leurs responsabilités de faire un rapport intérimaire, comme l'article le dit, à l'Assemblée nationale.

Le rapport, c'est tout simplement qu'on va dire: Le ministre a fait ses remarques préliminaires, il a présenté ses amendements, le critique de l'Opposition a fait ses remarques préliminaires et ils ont convenu, après leurs remarques préliminaires, que pour avancer plus et faire une appréciation plus fine des articles lors de l'étude article par article, tel que le propose le règlement, ils se devaient de donner l'occasion aux organismes les plus touchés par la planification éventuelle du projet de loi 107 d'en prendre connaissance. Je vous indique qu'il y a eu des précédents. J'aimerais que la décision que vous prendrez tienne compte, effectivement, des précédents en cette matière. Je vous remercie.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. M. le député d'Abitibi-Ouest, est-ce que je comprends bien que le fait de déposer une motion met fin au droit de votre formation politique de continuer les remarques préliminaires?

M. Gendron: Non, M. le Président. De façon

très claire, je tenais à faire, comme le ministre l'a fait, mes remarques préliminaires pour donner un sens à ce rapport intérimaire que nous ferions comme commission. J'ai rarement vu une commission faire un rapport de l'expression d'une seule formation politique en Chambre, puisqu'on sait que nous sommes dans un régime bipartiste et qu'en conséquence il faut que je m'exprime dans mes remarques préliminaires avant de faire la motion.

Pour répondre à votre question, cependant, j'estime que celui qui vous parle a terminé ses remarques préliminaires en faisant cette motion. Dans la perspective où vous décideriez, comme président de commission, de ne pas recevoir cette motion, je vais finir, terminer, conclure mes remarques préliminaires, tel que le règlement le prescrit, et mes collègues auront également des remarques préliminaires à faire avant de commencer l'étude des articles pour laquelle le leader du gouvernement nous a convoqués.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Bon. Avant de me prononcer sur la recevabilité de votre motion, j'ai une demande d'intervention de la part du député de Rimouski.

M. Tremblay (Rimouski): M. le Président, compte tenu de la proposition de l'Opposition officielle, est-ce qu'il n'y aurait pas moyen de suspendre quelques minutes pour pouvoir prendre connaissance de la proposition?

Le Président (M. Parent, Sauvé): Oui. Par contre, je n'ai pas encore reçu l'avis de motion par écrit.

M. Gendron: Je le dépose officiellement. M. le Président, au-delà de vos responsabilités comme président, si les députés du parti ministériel souhaitent une suspension pour y réfléchir sérieusement, moi, pour ce qui me concerne, je n'ai pas d'objection à ce qu'on revienne avec une décision à 20 heures, vu qu'il est 17 h 30.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Non, on va suspendre pour quelques minutes. La commission suspend ses travaux pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 17 h 24)

(Reprise 17 h 45)

Le Président (M. Parent, Sauvé): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission reprend ses travaux. Pendant cette période de suspension, j'ai demandé les avis de nos conseillers juridiques à l'Assemblée nationale relativement à la recevabilité ou au rejet de la motion présentée par M. le député d'Abitibi-Ouest. Les avis, actuellement, sont partagés parce qu'on ne trouve pas de précédent auquel on puisse faire référence; un précédent qui concorde avec la situation que nous vivons aujourd'hui.

D'un autre côté, la façon dont la motion est présentée, il est dit: Que cette commission fasse un rapport intérimaire à l'Assemblée nationale afin de permettre aux groupes intéressés de prendre connaissance des projets d'amendement du ministre. Est-ce que c'est un avis de motion pour retarder les travaux de façon que l'Opposition ou les groupes intéressés puissent prendre connaissance des amendements ou si c'est dans le but de faire un rapport à l'Assemblée nationale? Mais un rapport sur quoi? C'est là-dessus qu'on s'interroge. Faire un rapport sur les remarques préliminaires? Je ne pense pas qu'on puisse demander d'une façon sérieuse à une commission parlementaire de faire un rapport à l'Assemblée nationale - je vous dis cela, de prime abord - sur des remarques préliminaires, même si elles ont pris beaucoup de temps et si elles ont été bien explicites.

Étant donné l'heure - il est déjà 17 h 50 -j'attends encore des avis de la part de nos conseillers juridiques. Je vais suspendre les travaux jusqu'à 20 heures et, à 20 heures, je rendrai ma décision sur la recevabilité de cette motion. Maintenant, étant donné qu'il reste dix minutes, je pourrais peut-être inviter le proposeur et quelqu'un du côté ministériel à me faire connaître leur opinion sur la recevabilité de la motion. Alors, je vous écoute, M. le proposeur.

M. Gendron: J'ai deux éléments additionnels, M. le Président, dont je voudrais qu'on tienne compte. Le premier, c'est quand vous dites que, selon les premières vérifications, il n'existerait pas de précédent. Je fais référence au fait que j'ai dit qu'il y en avait, puisque nous avons l'information qu'il y en a, à la suite de vérifications qu'on a faites, bien sûr. Ce n'est pas selon les mêmes dispositions dont dispose un président de commission bien bardé. On faisait référence aux dispositions de l'ancien règlement.

Le Président (M. Parent, Sauvé): L'ancien règlement. On l'a celui-là.

M. Gendron: Et nous sommes convaincus, encore là toujours pour des raisons de longue expérience, que même si nous avons réécrit un nouveau règlement la plupart des dispositions que nous avons reprises dans le règlement qui nous régit ont tenu compte dans les faits de ce qui s'est passé en ce qui concerne les travaux en commission.

L'autre aspect que je voudrais que vous preniez en compte davantage, c'est quand vous dites - j'en suis vraiment étonné... Je lis le règlement: Toute commission peut déposer un rapport intérimaire à l'Assemblée nationale. Or, là, vous laissez voir que vous ne savez pas de quel rapport il s'agirait. Je voudrais vous rappeler que, d'abord, cet article-là est inscrit dans

le règlement, dans la partie concernant les commissions, les consultations particulières et les rapports de commission. Un rapport intérimaire déposé à l'Assemblée nationale peut tenir compte uniquement de ce qui a été fait, et c'est prévu comme tel. Si on a mis la disposition de l'article 175, ce n'est pas pour dire: Oui, mais, écoutez, le rapport intérimaire va obligatoirement nous conduire à autre chose ultérieurement. La disposition de l'article 175, c'était pour marquer un temps d'arrêt dans un mandat d'un leader du gouvernement qui convoque une commission pour dire: Voici votre travail. Les membres d'une commission peuvent, en vertu de l'article 175, marquer un temps d'arrêt. Il n'est pas dit que ce temps d'arrêt doive être marqué à la septième séance, après la vingt-septième heure, la quarante-cinquième heure ou après les deux premières heures du début de la commission.

Le sens du rapport intérimaire - c'est là-dessus que je voudrais que vous vous interrogiez - c'est pour porter un jugement à savoir si, oui ou non, des membres d'une commission peuvent être légitimés de marquer ce temps d'arrêt dans la perspective où, lorsqu'ils seront convoqués à nouveau par le même leader pour exécuter la démarche subséquente, ils ne pourront plus invoquer, à mon avis, la justification d'un autre temps d'arrêt pour soutenir la même justification de s'arrêter. Quand je dis que je voudrais qu'on fasse rapport d'une façon intérimaire, c'est parce que je sais que nos travaux confirmant le mandat du leader ne sont pas terminés et je prétends que, pour faire convenablement ce à quoi il nous a conviés, il serait intéressant, comme membres de la commission, que nous ayons les réactions des groupes concernés.

Je tiens à ajouter pour le bénéfice des collègues, parce que je n'ai pas eu le temps de le dire, que dans mon esprit si, effectivement, la commission donnait suite au rapport intérimaire à l'Assemblée nationale, oui, il pourrait y avoir subséquemment d'autres remarques préliminaires, mais, pour ce qui me concerne, on commencerait tout de suite les travaux d'étude article par article et il n'y aurait pas usage d'autres mesures que vous connaissez. Je prétends que c'est pour faire la distinction entre ce qui est prévu à l'article 175 et autre chose que je n'ai pas besoin de vous signaler qui peut être prévu et que je n'ai pas l'intention d'utiliser si ces dispositions étaient utilisées.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Est-ce que vos remarques sont terminées, M. le proposeur de la motion? Est-ce qu'il y a une réaction de la part des députés ministériels?

M. Gendron: Excusez, mais il y a un petit élément que j'ai oublié parce que j'aimerais aussi que vous preniez note de la dernière phrase: II ne peut être présenté à cette fin qu'une seule motion par séance. Si on a pris la peine d'écrire "par séance", je prétends que le législateur ou ceux qui ont rédigé le règlement voulaient tout de suite laisser voir que vous n'aviez pas à vous interroger, à savoir: Est-ce que le rapport va être assez mince, assez significatif pour le faire à l'Assemblée nationale? Autrement, on n'aurait pas écrit "par séance".

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre de l'Éducation.

M. Ryan: En attendant que vous statuiez sur la recevabilité de la motion au début de la séance de ce soir, je voudrais poser une question naïve au député d'Abitibi-Ouest. Je pense que s'il pouvait nous dire...

Le Président (M. Parent, Sauvé): Si elle est naïve, elle n'est peut-être pas recevable.

M. Ryan: Vous en déciderez. Une voix: Ha,ha, ha!

M. Ryan: Si le député d'Abitibi-Ouest pouvait nous dire avec un peu plus de limpidité quels sont ses motifs véritables et à quoi il veut en venir, avec un peu plus de précisions, cela pourrait faciliter la réflexion qu'on fera de notre côté pendant la suspension du souper.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le...

M. Ryan: Tout cela a été présenté dans des termes passablement enveloppés...

M. Gendron: En tout cas, je n'ai pas...

M. Ryan:... et qui ne nous ont pas éclairés beaucoup sur la substance de l'attitude que veut défendre le député d'Abitibi-Ouest. Alors, je lui pose la question en toute candeur.

M. Gendron: Oui.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: La réponse est en toute candeur aussi. Je n'ai pas d'appareil photo, mais je veux dire que c'est simple et c'est très précis quant au fond. Écoutez, je ne trouve pas du tout convenable qu'on nous demande d'étudier un projet de loi de l'ampleur soulignée par le ministre, article par article, quand on sait que c'est aujourd'hui qu'on a rendu publics des amendements d'envergure majeure - ç'a été la prétention du ministre. D'abord, il n'y en a pas beaucoup, on a juste à regarder ça! Et on essaierait de me faire croire que j'ai des motifs cachés? Je n'ai pas de motifs cachés. Mon seul motif, c'est - je l'ai dit à plusieurs reprises - que je ne suis pas ici pour représenter uniquement mes convictions personnelles. Je suis

ici pour représenter des courants d'opinion que l'Opposition officielle doit véhiculer à partir d'un minimum de discussions avec les concernés. Comme je n'ai eu aucun lien, c'est clair, avec les concernés, j'ai le choix de dire: Je joue le jeu, puis je vais le jouer, puis on va jouer correctement mais, dans les faits, on ne sera pas plus avancé en fin de semaine parce que j'aurai usé d'autres mesures qui vont nous conduire à la même place.

Ce n'est pas compliqué, c'est très clair et je ne sais pas si c'était naïf, la question, mais la réponse ne l'est sûrement pas, c'est très clair. Je n'ai pas de velléité cachée. Il y a une disposition du règlement qui dit que, quand un parlementaire prétend qu'il travaille dans des conditions inconvenantes, il se prévaut d'un article du règlement, et c'est ce que j'ai fait. Il y a l'article 175 qui dit qu'on a le droit de faire rapport d'une façon intérimaire pour dire: Écoutez, on ne peut pas aller plus loin parce qu'un certain nombre de parlementaires ont prétendu qu'ils n'avaient pas ce qu'il fallait pour travailler convenablement. Cela, c'est clair, franc, net; c'est ça, mon objectif.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Est-ce qu'il y a d'autres interventions du côté ministériel? M. le ministre?

M. Ryan: Si le gouvernement était arrivé et qu'il avait déposé ses amendements un par un, qu'est-ce que vous auriez fait?

M. Gendron: M. le ministre... M. le Président - je dois m'adresser au président - j'aurais dit que ça n'a pas de bon sens. On n'a jamais fait ça. Je ne vous ai pas reproché de l'avoir fait.

M. Ryan: Vous ne l'auriez jamais su si d'autres s'en venaient, vous ne l'auriez pas su.

M. Gendron: Non, je n'ai pas fait de reproches sur la façon dont vous avez déposé les amendements. Je pense que c'est correctement sauf que, là, écoutez, on va verser dans ce que... Je peux bien sortir quelle a été l'attitude des députés ministériels actuels qui étaient dans l'Opposition iors de l'adoption du projet de loi 3. Je vous dis que je ne serais pas gêné du tout. Je veux dire, c'est de la petite bière comme moyen parlementaire, à comparer à ce qui s'est passé ici. Et on serait plus avancé? Cela ne m'intéresse pas de dire: Vous aviez fait ça, je le refais. Je vous l'ai dit, ce n'est pas pour ça que je le fais. Je le fais parce que c'est prévu au règlement et je le fais parce que c'est légitime de le faire, puis c'est convenable de le faire si on veut travailler correctement, c'est pour ça que je le fais.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci.

Alors, la commission suspend ses travaux jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 17 h 56)

(Reprise à 20 h 45)

Le Président (M. Parent, Sauvé): La commission de l'éducation poursuit ses travaux. Lorsque nous avons suspendu nos travaux à l'heure du souper, je vous avais informé qu'à mon retour je rendrais ma décision sur la motion du député d'Abitibi-Ouest faite conformément à l'article 175 de nos règles de procédure, proposant que cette commission fasse un rapport intérimaire à l'Assemblée nationale afin de permettre aux groupes intéressés de prendre connaissance des projets d'amendements du ministre. Je suis maintenant prêt à rendre ma décision.

Je me suis donc interrogé sur ce que doit être l'objet d'une motion présentée en vertu de l'article 175. Aucun critère n'y étant édicté, j'ai procédé à l'examen des précédents. À ma connaissance, des décisions ont été rendues à deux reprises. En mai 1987, a été jugée recevable une motion visant à faire un rapport intérimaire à l'Assemblée afin de demander d'ajouter des séances pour l'exécution d'un mandat; il s'agissait alors d'une consultation particulière sur un mandat de l'Assemblée. En juin 1979, une motion visant à faire rapport intérimaire afin de demander à l'Assemblée de convoquer des groupes et des individus pour donner leur avis a été jugée recevable. Cette motion, en vertu de l'article...

Une voix: Jugée?

Le Président (M. Parent, Sauvé):... recevable. Cette motion, en vertu de l'article 161 de l'ancien règlement, a été présentée à l'étape de l'étude détaillée d'un projet de loi. Il est à noter qu'à ce moment les commissions n'avaient pas le pouvoir de procéder de leur propre chef à des consultations particulières. Ces précédents, quoique peu nombreux, nous indiquent certains critères dont il nous faut tenir compte ici.

Une motion présentée en vertu de l'article 175 doit avoir pour objet une demande à l'Assemblée afin d'obtenir des moyens supplémentaires pour accomplir le mandat qui lui a été confié. De plus, Geoffrion affirme, à l'article 438, qu'une motion peut être utilisée pour obtenir des précisions sur le mandat qui a été confié à une commission par l'Assemblée.

La motion qui est devant nous a pour objet de mettre fin dans l'immédiat aux travaux de cette commission. En outre, l'argumentation du député d'Abitibi-Ouest repose sur le fait que les travaux devraient être reportés à plus tard.

Force nous est donc de conclure que les buts recherchés par la présentation de cette motion ne correspondent pas aux critères établis

par la jurisprudence. En effet, ni le libellé de la motion - s'il vous plaît! - ni l'argumentation du député ne nous indiquent qu'on recherche des moyens ou des précisions supplémentaires qui pourraient nous être fournis par l'Assemblée.

Finalement, j'aimerais ajouter qu'il n'existe dans notre règlement aucune disposition qui permette à une commission de reporter ses travaux à une date ultérieure dans le cadre d'un mandat de l'Assemblée. Il ne pourrait donc être question ici d'avoir recours à l'article 175 pour arriver à cette fin. Donc, pour ces motifs je déclare la motion du député d'Abibiti-Ouest irrecevable.

Alors, nous allons poursuivre nos travaux, M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Oui, je me rends à votre décision. J'aimerais cependant que vous nous indiquiez, comme président de cette commission, compte tenu de l'importance d'une telle décision, à quel moment vous pensez que les membres d'une commission qui voudraient se prévaloir des dispositions de l'article 175, qui sont tout de même inscrites dans nos règlements, pourraient le faire. Et pour quel motif pourraient-ils le faire? En termes de directive, j'aimerais que vous m'éclairiez sur ce sujet.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Selon ma compréhension de l'article 175, c'est lorsqu'une commission demande des moyens supplémentaires pour accomplir son mandat. Alors, vous allez peut-être me dire que ce sont des moyens supplémentaires que vous demandez. Non, je ne le pense pas. Vous demandez de reporter les travaux à une date ultérieure dans le but d'étudier les amendements qui vous ont été soumis par le ministre. Les moyens, vous les avez déjà. C'est à votre jugement de dire qu'il vous faut du temps. Je pense que les moyens ont été présentés.

M. Gendron: M. le Président, j'aurais une question additionnelle.

M. Tremblay (Rimouski): M. le Président, est-ce que je peux faire une motion?

Le Président (M. Parent, Sauvé): Un instant! M. le député d'Abitibi-Ouest, vous avez la parole.

M. Gendron: Puisque vous avez mentionné à deux reprises dans votre décision que l'usage de l'article 175 pouvait être permis, dans l'hypothèse où on ne demanderait pas un report, mais un délai comme moyen additionnel de mieux faire notre travail, je croyais - et ce sera ma dernière intervention - que j'avais très bien laissé voir qu'en réclamant l'utilisation de l'article 175, c'était pour permettre que les groupes concernés aient le temps de réagir aux amendements proposés par le ministre qui, immanquablement, doivent être pris en compte dans l'étude article par article que nous allons commencer un de ces Jours. Par conséquent, j'ai l'impression que dans votre propre argumentaire, quand vous dites que c'est une motion qui serait d'usage dans la perspective de vous donner des outils additionnels, j'ai l'impression que l'usage d'un délai pour mieux faire notre travail est un outil additionnel, exactement dans le sens de votre argumentaire, pour me permettre de faire... Alors, j'aimerais concilier cela avec ce que vous avez écrit ou ce que vous avez lu.

Le Président (M. Parent, Sauvé): L'article 175, M. le député d'Abitibi-Ouest, a pour but premier d'aider la commission à se donner des moyens pour bien faire son travail, tandis que dans votre motion, on dit: "fasse un rapport intérimaire afin de permettre aux groupes interressés de prendre connaissance des projets d'amendement". C'est quoi, des groupes intéressés? Est-ce la commission? Ce n'est pas clair.

M. Ryan: M. le Président, question de règlement. Il y a une décision qui a été rendue, on ne doit pas essayer de la remettre en cause indirectement et i! me semble que la décision était parfaitement claire autant dans ses prolégomènes que dans ses aboutissements.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Non, remarquez bien que je suis conscient que le député d'Abitibi-Ouest ne remet pas en question la décision qui a été rendue. Il me demande une directive, à savoir quand il peut utiliser l'article 175, qui a justement pour but de vous fournir des outils supplémentaires pour faire votre travail. Or, dans le libellé de votre motion ici, vous nous dites que c'est afin de permettre aux groupes intéressés de prendre connaissance. Alors, la décision est rendue.

M. Tremblay (Rimouski): M. le Président, est-ce que je peux faire une motion pour qu'on commence l'étude article par article, en commençant par l'article 1 et les articles suivants du projet de loi qu'on a devant nous?

Le Président (M. Parent, Sauvé): Monsieur.

M. Paré: Ceux qui avaient des commentaires préalables à faire n'ont pas eu la chance de s'exprimer. Ce serait tout à fait normal que les députés qui ont le goût de s'exprimer sur un projet de loi aussi important puissent le faire, comme ça s'est toujours fait en commission parlementaire.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Un instant! Pardon?

M. Gendron: D'autant plus, M. le Président, que comme critique de l'Opposition officielle je vous avais Indiqué qu'au moment où je faisais usage de l'article 175 prescrit à nos règlements...

Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous avais posé la question, à savoir si ceci mettait fin aux remarques préliminaires; vous m'aviez dit non. À ce moment-là, vous m'en aviez informé.

M. le député de Sherbrooke, sur une question de règlement.

M. Hamel: M. le Président, question de règlement. En vertu de l'article 244, étude détaillée d'un projet de loi, il y a une décision qui a été rendue par M. Jean-Pierre Charbon-neau, à savoir que "le fait d'étudier une motion préliminaire signifie donc que l'étape des remarques préliminaires est terminée". Alors, c'est assez clair; c'est à la page 244 14. 1. du recueil de décisions concernant les commissions.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Oui.

M. Hamel: Décision: "Selon la coutume, le processus d'étude détaillée débute d'abord par des remarques préliminaires et se continue par la suite par des motions préliminaires et, finalement, par l'étude article par article.

Le fait d'étudier une motion préliminaire signifie donc que l'étape des remarques préliminaires est terminée. Pour revenir à cette étape, la commission devrait adopter une motion de retrait conformément à l'article 195. "

M. Gendron: Avez-vous accepté la...

Le Président (M. Parent, Sauvé): Non, je ne peux pas l'accepter, parce que j'irais à l'encontre du bon sens. Comme je n'ai pas reconnu, en vertu de l'article 175, la motion préliminaire, je l'ai reconnue irrecevable, je ne peux pas refuser à M. le député de Shefford son droit de parole.

Une voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le député de Shefford.

Remarques préliminaires (suite) M. Roger Paré

M. Paré: Merci, M. le Président. Je suis heureux de voir qu'on a la chance de s'exprimer en commentaires préliminaires avant d'étudier article par article le projet de loi 107. Très rapidement, en quelques minutes, pour dire que... Je tiens à parler, parce que j'ai participe à beaucoup de commissions parlementaires sur l'éducation depuis 1981. Ce n'est pas la première fois qu'on parle de structures scolaires. Cela fait déjà, au cours des dernières années, trois fois qu'on le fait d'une façon majeure. Je dois dire que c'est la première fois que je vois, dans le projet de loi 107 sur les structures scolaires, un devoir aussi mal fait. La preuve, on l'a ici, avec une couple de pouces de documents qu'on appelle des amendements et des papillons. Cela relève presque de l'incroyable. Ce n'est presque pas acceptable.

Comment peut-on expliquer cela, après avoir reçu des études, vers la fin des années soixante-dix, c'était le livre orange sur l'école québécoise et tout cela; ensuite, au début des années quatre-vingt on a étudié, après avoir fait le tour du Québec... À peu près tout le monde a fait ses commentaires et émis des opinions, des gens sur le terrain, qui connaissent cela, sont venus s'exprimer. On a étudié le projet de loi 40 en commission parlementaire, la plus longue de l'histoire du Québec. Tous les intervenants sont venus s'exprimer. Du côté de l'Opposition, le ministre actuel venait écouter tout cela, entendre cela et participer aux discussions.

Ensuite, il y a eu la loi 3 où, encore, on retrouvait un peu les mêmes intervenants de chaque côté de la table pour étudier exactement la même chose, la Loi sur l'instruction publique, avec des modifications pour moderniser et mettre à jour notre système d'éducation au Québec. Normalement, on aurait dû comprendre quels étaient les besoins, quel était l'avenir, ce que le milieu voulait et présenter un projet de loi qui aurait dû aller un peu dans le sens du consensus ou du bien commun. Cela aurait été un minimum, surtout qu'on entendait, au moment où il était critique de l'Opposition en matière d'éducation, la même personne qui est ministre de l'Éducation aujourd'hui dire que cela prenait un consensus, qu'il fallait être à l'écoute et qu'il fallait connaître vraiment les besoins des gens.

On a eu la preuve qu'il n'a jamais écouté, ou bien il a fait exprès. Mais c'est un devoir raté, mal fait. On en a la preuve aujourd'hui. Cela n'a pas de bon sens! Je n'ai jamais vu un devoir aussi mal fait par un ministre, un projet de loi déposé comme ça, alors qu'on connaissait les besoins, nous amener ça en commission parlementaire après avoir écouté des groupes venir unanimement dénoncer ce projet de loi en disant que cela n'aurait aucun bon sens.

Le ministre s'en vient nous confirmer qu'on avait raison et que les gens du milieu avaient raison. La preuve, • ii nous apporte 400 amendements. Est-ce que cela a du bon sens? Dans les sept premiers chapitres, 400 amendements! Il faut le faire! Franchement, la médaille qu'il faudrait donner au ministre, ce ne serait pas une médaille de l'Assemblée nationale. Ce serait une médaille qui s'appellerait un prix citron pour un projet de loi mal foutu, mal pensé, mal préparé et dans le but d'arriver à quoi? Je ne le sais pas.

J'ai beau me poser la question. Cela ne m'entre pas dans la tête. Comment quelqu'un qui dit connaître le domaine, le dossier, qui dit être au courant, avoir parlé aux gens, peut-il nous arriver avec un document - pour être poli - semblable? Je ne comprends pas qu'en décembre 1987 on ait déposé un document semblable - je n'ose pas utiliser d'autres mots, même si j'en ai d'autres qui me passent par la tête - qu'on nous arrive, en moins d'une année,

avec quelque chose qui aurait dû être réécrit, parce que, finalement, c'est modifié presque totalement.

Il n'y aura pas beaucoup d'articles qui ne seront pas touchés. C'est presque incroyable. Le ministre nous disait avoir écouté beaucoup et savoir exactement où cela en était. Il a peut-être beaucoup écouté en commission parlementaire, parce qu'il s'était aperçu qu'il y avait un consensus et il y avait unanimité dans le sens que ce n'était pas acceptable. Donc, probablement qu'il n'avait pas écouté avant ou iI avait oublié. (21 heures)

Je me rappelle les discours qu'il tenait; il y a des choses fondamentales qu'il sortait quand il était dans l'Opposition. Premièrement, il disait qu'il fallait un consensus pour faire des modifications à une loi aussi primordiale pour le Québec, c'est-à-dire la Loi sur l'instruction publique, qui concerne l'éducation et l'instruction de nos jeunes, donc des générations futures. Il fallait un consensus, il l'a eu, mais contre lui. Au moins, il a accepté de modifier, mais il n'avait pas le choix parce que, sans un consensus, on ne peut pas modifier une loi aussi fondamentale que la Loi sur l'instruction publique. Le ministre disait: II faut aussi plus de pouvoirs aux intervenants des commissions scolaires. Il était impensable que l'ancien ministre ne cède pas plus de pouvoirs aux commissions scolaires. Pour autant qu'on retouchait à cette Loi sur l'instruction publique, il fallait absolument profiter de ce moment-là pour déléguer davantage aux commissions scolaires et, pourtant, le projet de loi 107 est certainement l'un, sinon le projet de loi le plus centralisateur qu'on n'ait jamais vu.

J'ai entendu des commentaires disant: Oui, mais il faut penser qu'un jour il peut y avoir un autre ministre de l'Éducation. Je dois dire qu'un projet de loi centralisateur comme celui-là n'est pas acceptable et encore moins avec le ministre actuel, quand on connaît les dérogations qu'il accepte. Cela n'a pas de bon sens, c'est un danger public. Mais cela se passe comme cela pareil: Je suis roi et maître et je décide à bord, je suis ministre, écoutez-moi, j'ai raison. C'est impensable, surtout quand on vient de voir un devoir aussi mal fait, aussi manqué que le projet de loi 107. Il vient de nous donner la preuve, la constatation qu'il a mal fait sa "job". Là, on le constate, on en est obligé malgré nous, on a tout modifié. Habituellement, quand on connaît notre dossier et qu'on est compétent un peu, ce n'est pas vrai qu'on modifie tous les projets, cela n'a aucun bon sens, à moins de ne vouloir je ne sais quoi. Je vous le dis, je cherche encore, je ne comprends pas qu'on soit obligé de tout modifier cela.

Le projet de loi 107, malgré les modifications, c'est un recul par rapport à la loi 3 qui, elle, faisait consensus, il ne faut pas l'oublier. On en avait discuté longtemps; certaines discussions avaient été serrées, je me le rappelle, elles n'avaient pas été faciles. On a eu des discussions de fond majeures; des intervenants ont été assez durs pour le ministre au moment où on était au pouvoir, mais on a écouté, on a modifié et il y a eu consensus à la fin. On aurait dû, au moins, retrouver et ramener dans la loi 107 les consensus qui s'étaient dégagés. Mais non! On n'a rien corrige, mais là on corrige. C'est une drôle de correction, je dois vous le dire!

J'ai aussi participé à la commission parlementaire du mois d'août où on n'a pas vraiment donné la chance aux gens de se faire écouter, parce qu'on ne leur a même pas donné un temps équitable, un temps qu'ils auraient mérité, un temps au moins égal à celui accordé aux groupes qui ont eu la chance de passer au mois de mai. Ce n'est pas eux qui ont décidé de passer au mois d'août plutôt que de passer au mois de mai, alors qu'au mois d'août et de septembre nous aurions dû leur consacrer plus de temps, étant donné que nous n'étions pas en session. Mais non! On a voulu rapetisser cela, on a voulu leur donner moins de temps. Pourtant, cela valait la peine de les écouter. À preuve, on a apporté 400 amendements, sauf qu'on ne les a pas encore assez écoutés parce qu'il y a des choses, lors d'une lecture rapide... Même si on a fait des amendements, on n'a pas encore répondu à des groupes qui auraient mérité d'être entendus davantage. On va revenir là-dessus lors de l'étude article par article.

Comme je l'ai dit, pour parier très rapidement, globalement - je ne reviendrai pas directement là-dessus - it y a des choses qu'on aurait pu modifier encore davantage et j'espère que nous allons pouvoir les faire modifier quand on va arriver à l'étude article par article. Comme je vous le disais, c'est quand même spécial qu'en commission, au mois d'août, le ministre ait pris l'engagement... Si vous ressortez le Journal des débats, vous allez vous apercevoir qu'on était censé déposer au moins 250 amendements avant la fin de septembre; on le savait, cela a été annoncé et enregistré; 250 amendements au moins et ce, avant la fin du mois de septembre. Pourtant, c'est déposé au mois de novembre. C'est drôlement plus tard. Les délais, pour le ministre actuel, ne sont jamais trop longs. On le voit aussi avec les jeunes dans les cégeps. Ce n'est jamais trop, les délais, quand c'est lui qui décide: Étirez-moi cela en masse et, si vous en êtes capables, jusqu'après les prochaines élections.

C'est le "fun", c'est facile, c'est comme cela que ça marche, ses propres délais, mais quand ce sont les délais pour les autres, par exemple, on coupe cela. Si on l'avait écouté, on aurait écouté les groupes pendant quinze minutes au mois d'août, non pas trois quarts d'heure ou une demi-heure, mais quinze minutes. Les autres en avaient assez, mais, pour eux, il faut que ce soit court. J'étais pour dire "short and sweet", mais je vais respecter la loi 101, il faut que ce soit court et rapide. On n'a pas trop de temps à

consacrer à écouter les autres. On vient d'en avoir encore la preuve. On ne veut pas permettre aux gens de consulter les 400 articles pour être capables, avant que la loi soit adoptée, de nous émettre leurs commentaires. On nous avait promis avant la fin du mois de septembre 250 amendements et ils n'ont pas été déposés; au lieu du mois de septembre, ils le sont au mois de novembre. On nous dépose 400 amendements au mois de novembre seulement et, maintenant, on va vouloir faire cela vite parce que ce n'est plus un groupe, c'est nous qui décidons ici, soit le gouvernement en place. Donc, cela presse.

Est-ce que les groupes ont eu la chance de commenter les amendements, alors qu'on pourrait entreprendre cela dès ce soir, si on voulait donner l'occasion, si on avait la volonté de prendre le temps de parler sur l'ensemble de la situation concernant le projet de loi 107. Or, on les a déposés en novembre et les gens n'auront pas le temps de se retourner de bord que nous aurons déjà commencé à étudier la loi article par article. Pourtant, c'est presqu'un nouveau projet de loi tellement il y a des modifications, tellement cela touche des choses. C'est incroyable! Il faut le voir.

Comme Opposition, on a un rôle fondamental qui est de représenter tous les groupes. Ceux qui ne sont pas d'accord avec cela, nous devons les représenter. C'est nous qui devons présenter leurs argumentations. Il faut être capable de discuter avec eux. La preuve que ce n'est pas facile, le ministre a même cru bon de nous les envoyer quelques jours à l'avance, pour qu'on puisse commencer à regarder cela parce que c'est tellement volumineux. C'est incroyable! C'est une brique. Il faut le voir, il faut le regarder. Nous aurons bientôt besoin d'une petite valise pour nous promener dans le passage, juste pour être capables de traîner avec nous les amendements.

Puis, il va y en avoir d'autres. En tout cas, il faut le croire si on regarde la lettre qui accompagnait les amendements, c'est pour les sept premiers chapitres. Il reste quatre autres chapitres, si je me rappelle bien, parce qu'il y en avait onze. J'ai hâte de voir l'épaisseur. S'il y a une compagnie de récupération dans le coin, cela va être payant de faire du recyclage ici tantôt. Il y a des papillons, parce que la loi n'a pas été faite en fonction des consensus et du bien commun il y a une année. Je ne sais pas pourquoi on voulait être aussi loin de la réalité. Je ne comprends pas pourquoi on a voulu être tellement loin de la réalité qu'on soit s'obligé, un an après, de dire: J'ai tellement mal fait ma "job" que je suis obligé maintenant de vous amener quelque chose où il va être plus long de se retrouver dans les papillons que de passer à travers le projet de loi lui-même article par article.

Donc, je dois vous dire que cela me surprend beaucoup et je ne me l'explique pas encore. Avec le projet de loi comme tel, on ne s'en vient même pas régler le sujet sur lequel on voulait vraiment essayer de moderniser notre système d'éducation. Le Québec est une société en évolution, tant mieux. C'est une société de plus en plus moderne. C'est une société ouverte, surtout à Montréal qui s'en vient cosmopolite et qui l'est déjà passablement. S'il faut modifier, ce n'est pas pour des écoles dans des paroisses à 100 % catholiques dans des petites municipalités dans le fond de la Gaspésie ou d'autres régions du Québec. Il s'est produit... On connaît maintenant des problèmes majeurs à Montréal et à Québec. La modification qu'on voulait apporter à notre système d'éducation, c'était pour corriger ces nouveaux problèmes modernes qu'on connaît dans nos deux grandes métropoles au Québec. Pourtant, le projet de loi 107 exclut les municipalités qui sont touchées par le problème d'intégration des nouveaux arrivants québécois. Ils ne sont pas concernés parce qu'on va en traiter plus tard. Je dis que c'est encore une erreur du ministre. Ce n'est pas plus tard qu'il aurait fallu le traiter, c'est plus tôt. Il fallait le traiter quand c'était le temps.

L'article 93 de la constitution canadienne, si on avait eu vraiment la volonté, à mon avis, si on avait vraiment voulu, premièrement, régler le problème parce qu'ii y a problème... On en a eu connaissance quand on a vu comment cela se passait dans des régions, comme au nord de Montréal où, finalement, c'est la minorité anglophone qui intègre et qui gère les écoles pour la majorité francophone. On a vu cela. À la surprise de tous les membres de la commission, je me rappelle cette présentation qu'il y avait eue et, finalement, on était tous restés surpris et bouche bée là-dessus parce qu'on trouvait que cela n'avait pas de bon sens.

Il y a un problème et on aurait pu le régler en modifiant l'article 93. Il y a des occasions qui passent et qu'on n'a pas le droit de rater quand on est responsable d'un dossier aussi majeur. C'était la négociation du lac Meech. Si on avait été déterminé, si on avait eu la volonté et si on avait pris à coeur la responsabilité qui nous incombait comme ministre de l'Éducation de dire: Je vais régler cela parce que c'est fondamental pour (e Québec... La preuve que c'est fondamental, regardez les problèmes dans la société dans laquelle on vit. On parle de politique familiale, de dénatalité, de vieillissement de la population, de décroissance de la population à partir de l'an 2010 environ, en plus du nombre grandissant de nouveaux venus. On connaît tout cela. On connaît l'article 93 qui nous empêche et, pourtant, durant tout le temps des négociations sur la nouvelle entente constitutionnelle du lac Meech, on n'a pas entendu parler de l'article 93.

Donc, qu'est-ce qu'on voulait? On ne voulait pas vraiment régler ce dossier-là et c'était le temps de prouver, une fois pour toutes, la bonne volonté de nos intervenants d'en face, pour voir s'ils étaient prêts à reconnaître que, dans cette société distincte, d'une façon tangible,

d'une façon claire et nette, ce que la société distincte voulait dire, c'était la primauté du Québec dans le domaine culturel, dans le domaine linguistique et dans le domaine de l'éducation. On avait une occasion unique et on l'a ratée. Cela, je dois dire que c'est grave parce que, historiquement, il y a des chances qu'on n'a pas le droit de rater, il y a des moments... Quand on est en poste, on doit prendre ses responsabilités. On n'avait pas le choix, on n'avait pas le droit, on avait même l'obligation de prendre cette occasion unique qui se présentait et de faire modifier tout de suite, dans la nouvelle entente constitutionnelle, l'article 93 et reconnaître au Québec son pouvoir. C'est à ce moment-là qu'il fallait le faire. Cela aurait été vraiment la meilleure occasion de prouver que la société distincte, cela veut dire quelque chose.

Or, là, on ne le sait pas parce que cela ne repose sur rien de concret, on n'a pas pris nos responsabilités, on n'a pas profité de l'occasion qui passait et, aujourd'hui, on est encore "poignés" avec une société distincte qui ne veut absolument plus rien dire, une occasion ratée qui va se présenter à nouveau on ne sait quand. Quand on voit les agissements des gens à Ottawa, peu importent lesquels, quand on regarde la campagne électorale fédérale, les chefs de parti disent - je lisais cela dans les journaux encore aujourd'hui - On va régler le traité du lac Meech, on va les attacher comme des saucisses, bien comme il le faut; ensuite, on leur fera la passe de la clause "nonobstant", la seule chose qui pourrait encore nous permettre d'être une société distincte, et, quand ils seront bien attachés, on finira de les brûler. Quand ils seront bien cuits et assez rôtis, on ira jusqu'aux os. C'est cela, le discours qu'on est en train de tenir.

En matière d'éducation, on n'a pas profité de cette chance pour faire en sorte qu'au-delà de la clause "nonobstant" dans la constitution, l'entente du lac Meech, on profite de cette occasion pour faire en sorte qu'on reconnaisse que c'est notre domaine. On aurait pu régler ces problèmes qui existent dans les deux grandes métropoles du Québec, Québec et Montréal. On aurait pu régler cela parce que la loi 107 aurait pu s'appliquer dans sa totalité, au lieu d'en retrancher des articles qu'on va soumettre à la Cour suprême, dont on aura le jugement dans je ne sais combien d'années. Quand aurons-nous l'occasion d'y revenir pour négocier cela? Surtout, quand aurons-nous l'occasion de le négocier en ayant - qu'est-ce qu'on pourrait utiliser comme terme - le gros bout du bâton? À l'avenir, pour modifier, il faudra convaincre les autres provinces. On voit comment c'est, comment sont traités les francophones des autres provinces. On voit aussi la ligne conductrice ou, en tout cas, le cheminement que prend le gouvernement d'Ottawa avec sa loi C-72. Il s'agit plutôt d'aider l'anglais que le français, même au Québec. C'est inquiétant, je vous le dis.

Je vois cela d'une façon très inquiétante et on a manqué une chance historique de pouvoir mettre cela au clair une fois pour toutes. On a raté cette occasion et on ne sait pas quand elle va revenir. Peu importe quand elle va revenir, je pense qu'on ne sera plus jamais... En tout cas, cela va prendre du temps. J'espère que cela va changer, mais, en tout cas, selon ce qu'on voit présentement, on ne sera pas dans le même rapport de forces qu'au moment où on a négocié l'entente du lac Meech. C'est dommage, c'est une erreur historique, à mon avis, et le ministre en est responsable. Surtout que ce n'est pas nouveau. On aurait pu dire qu'on ne connaissait pas le problème, mais on le connaissait. Si on n'avait pas été en train de préparer un projet de loi sur la réforme de l'instruction publique, on aurait pu dire: Ce n'est pas le temps. Mais on n'a jamais arrêté, la loi 3 était contestée, donc, on savait qu'elle n'était plus constitutionnelle et qu'il fallait absolument légiférer à nouveau. Comment se fait-il qu'on n'en ait pas profité? Je ne comprends pas et je n'accepte pas non plus qu'on n'ait pas pris ses responsabilités au moment où on aurait dû le faire.

Donc, cela veut dire: Oui, on va légiférer, on va passer une loi. On va passer une loi... Disons qu'on va passer un paquet d'amendements, ce qui va finir par avoir l'air d'une loi à la fin. Mais on n'aura pas réglé ce qu'on voulait régler avec cela. Les mêmes problèmes vont persister. La seule chose, quand on regarde les critiques qui étaient faites par la fédération des commissions scolaires ou d'autres organismes, c'est qu'on va se ramasser à Montréal et à Québec non pas avec un problème réglé, mais avec un problème qui va s'être davantage complexifié puisqu'il va y avoir des commissions scolaires qui vont s'ajouter en plus.

Seulement une minute? Je vous remercie, M. le Président.

Alors, malheureusement, je dois m'arrêter, mon temps est fini. J'aurais aimé continuer parce que, malgré les modifications, quand on reconnaît qu'on veut une politique familiale au Québec, quand on reconnaît l'importance de l'éducation et quand on sait que l'école est un milieu de vie où il n'y a pas seulement l'instruction, mais où il y a aussi l'éducation, on a l'obligation d'inclure une définition plus claire des services complémentaires dans les écoles, ce qu'on n'a pas fait. (21 h 15)

Donc, encore une fois, on prouve qu'on n'a pas l'intention de faire un véritable milieu de formation globale dans cela. On n'a pas l'intention de l'imposer. Cela nous permettra peut-être de faire encore des coupures dans ces services, alors qu'ils sont essentiels pour faire de nos jeunes Québécoises et Québécois des citoyens complets, émancipés et bien préparés pour l'avenir. Je trouve cela dommage. C'est la même chose quand on parle d'une politique familiale. On a beau en parler dans un autre ministère,

cela ne nous empêche pas d'enlever l'obligation d'avoir des services de garde dans les milieux scolaires, alors que c'est fondamental aussi. Cela va à rencontre du discours que tient un autre ministre de l'autre côté, cela va à rencontre de cette philosophie qu'on veut implanter de politique familiale, et c'est dommage.

Comme mon temps est terminé, M. le Président, j'y reviendrai lorsque j'en aurai l'occasion, probablement à l'étude article par article du projet de loi 107.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, merci, M. le député de Shefford et vice-président de la commission permanente de l'éducation. Une intervention du côté ministériel? Alors, je reconnais maintenant le député de Mercier. M. le député.

M. Gérald Godin

M. Godin: Merci beaucoup. Je vais commencer par un peu de statistiques. On a 400 papillons, comme on le dit, pour 7 chapitres, soit une moyenne de 57 papillons par chapitre. Si on le multiplie par 11 chapitres, cela fait 627 papillons. Donc, plus de papillons que d'articles dans la loi actuellement.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Des papillons...

M. Godin: Donc, cela regarde très mal pour les travaux de la commission à venir. Je pense que, plus fondamentalement, il faut dire au ministre dans une langue qu'il comprend, le romain, qu'à Montréal, dans le domaine scolaire, "omnia nova sub soie". Mais est-ce que la loi reflète cette réalité nouvelle sociale dans le domaine scolaire à Montréal? Pas du tout. Je pense que gouverner, c'est prévoir et j'espérais que notre ministre soit un bon prévoyant dans le domaine de l'éducation. Je me rends compte que, face à la réalité nouvelle que nous vivons à Montréal, c'est-à-dire les écoles multiethniques, catholiques et françaises, il n'y a rien dans la loi qui nous permette de croire que le milieu va changer et s'adapter à cette réalité nouvelle.

Nous avons aussi à Montréal un phénomène nouveau dans le cas des commissions scolaires protestantes et des écoles françaises. C'est une réalité entièrement nouvelle. Encore là, "omnia nova sub soie". Cela veut dire: Tout est nouveau sous le soleil. Demandez à votre ancien élève de Rome qui va vous traduire cela. "Omnia nova sub soie", M. le Président, cela veut bien dire: Tout est nouveau sous le soleil.

M. Ryan: "Nihil sub sole novum".

M. Godin: M. le Président, je dis le contraire. Je dis que dans la réalité tout est nouveau. "Omnia nova"...

M. Ryan: Vous comprenez tout à l'envers, tout de travers.

M. Godin: "Omnia nova", mais "nihil novum" dans sa loi, justement.

M. Ryan: En tout cas, c'est une nouvelle formulation, on ne l'a jamais entendue.

M. Godin: Dans la loi du ministre, M. le Président, "nihil novum", comme s'il n'avait pas vu ce qui se passait, comme s'il n'avait rien vu de la réalité qui changeait. La réalité change, "alea jacta est", et le ministre: "nihil novum" dans sa loi. Donc, il est totalement étranger à ce qui se passe dans son propre territoire où il a travaillé pendant vingt ans et où il vit. Dans la loi actuelle nouvelle, modifiée, amendée et suramendée, on constate que le gouvernement est totalement indifférent à ce qui se passe à Montréal.

M. le Président, pouvez-vous rappeler notre ami romain à l'ordre, si vous voulez qu'on puisse à notre tour...

Le Président (M. Parent, Sauvé): Est-ce qu'il y a un Romain dans la salle? Vous voulez parler du ministre de l'Éducation, il a été un temps à Rome. Vous avez la parole, M. le député.

M. Godin: II y a été un temps. Merci, M. le Président, je vous en sais gré.

M. Ryan: II y a 35 ans de cela. M. Godin: Les belles années!

Le Président (M. Parent, Sauvé): S'il vous plaît, M. le ministre.

M. Godin: Les belles années tout de même! Je dois vous dire, M. le Président, que malheureusement la loi est ainsi faite qu'on peut croire que le Québec est le même que lors de la loi antérieure de l'éducation publique. En effet, on ne trouve rien en cette loi qui nous permette de croire que le ministère est au courant de ce qui se passe à Montréal, c'est-à-dire là où la réalité a le plus fondamentalement changé, à mon avis, avec la présence d'écoles multiethniques et la présence d'écoles françaises dans le secteur anglais protestant. Face à cela, le ministre nous annonce qu'il va soumettre éventuellement les articles de sa loi à des tribunaux dans sa sagesse profonde et intime pour éviter, dit-il, de se faire "planter" comme nous, on l'a été, comme gouvernement, à l'époque avec la loi 63 ou était-ce 103? Donnez-moi le chiffre exact, M. le Président.

Le Président (M. Parent, Sauvé): La loi 3.

M. Godin: La loi 3, pardonnez-moi. Je vous

remercie beaucoup. Donc, il va peut-être procéder comme cela, mais l'objectif étant que le plus tôt possible il faut que les écoles soient changées à Montréal pour que cela corresponde à la réalité que nous avons vécue et pour éviter les problèmes que nous avons subis dans le passé avec les lois 22 et 63 que l'on tente de régler. Il faudrait que la loi actuelle soit plus prévoyante, à mon avis, et soit plus en mesure de s'adapter à la réalité nouvelle que Montréal vit présentement, une réalité multiethnique.

Dans mon comté de Mercier, il y a plusieurs écoles dont la majorité, maintenant, n'est plus française catholique, mais multiethnique et multireligieuse. J'aurais aimé que dans la loi on tienne compte de cette réalité nouvelle et que l'on travaille sérieusement, par conséquent, de manière que dans 20 ans il n'y ait pas une autre situation comme celle qu'on a tenté de régler par les lois 22, 63 et 101.

Est-ce que cette loi règle ces problèmes en prévoyant ce qui s'en vient? Pas du tout, pas un mot, "nihil novum" dans la loi, M. le Président. C'est ce qui me désole et c'est ce que je voudrais souligner à mon collègue, ex-confrère journaliste et ami, que cette loi, on l'a vu, ne correspond pas du tout à la réalité nouvelle qui est vécue à Montréal, dans chacun des comtés de Montréal et dans chacune des écoles de Montréal.

L'autre jour, je constatais, en voyant le film "Les tisserands du pouvoir", qu'au tournant du siècle nos gouvernants n'ont pas prévu que 1 000 000 de Québécois quitteraient le Québec pour aller vivre dans les États américains à la recherche d'emplois, de sorte qu'aujourd'hui le Québec est en minorité ou presque au Canada, alors que si nos leaders avaient prévu cela à l'époque, en créant des emplois ici pour eux, nous aurions pu devenir au Québec 8 000 000 de francophones et, ainsi, nous assurer qu'en l'an 2000 nous soyons encore un nombre suffisant pour survivre et rester là et que nos enfants trouvent un milieu propice à leur développement en français et dans la culture qui est la leur et celle de leurs ancêtres.

Aujourd'hui, le problème que nous vivons, cela se compare un peu, c'est un problème encore là relié à la langue et à la religion. Je déplore que la loi actuelle présentée par le ministre, la loi 107, ne contienne aucun article qui se fasse l'écho de cette réalité nouvelle. J'avais juste espéré que le ministre soit sensible à cela parce que, dans le quartier où il vit, à la frontière de mon comté et d'Outremont, il y a des communautés que nous connaissons tous: grecque, asiatique et autres. Alors, j'aurais souhaité qu'il soit sensible à ce qui se passe dans les écoles de son environnement le plus immédiat.

Au contraire, nous ne trouvons rien dans la loi qui règle d'une façon ou d'une autre ce problème de l'appartenance des nouveaux étudiants du Québec dans leurs écoles. Il faut donc que, tôt ou tard, le gouvernement actuel, le ministère de l'Éducation, joue son rôle, mette ses culottes, se tienne debout, prenne les affaires en main et détermine qu'il y a des écoles au Québec, à Montréal, qui sont françaises et d'autres anglaises, bien sûr, et que le patrimoine de chacun soit préservé. Nous sommes sensibles à cela, nous aussi.

Dans la loi actuelle, rien ne prévoit qu'il y aura des Institutions françaises et anglaises permettant aux nouveaux étudiants de s'intégrer, de s'identifier à des institutions qu'ils reconnaissent et, surtout, des institutions qui puissent être souples et avoir les moyens de les intégrer, parce que nous savons, dans nos comtés de Montréal, que les problèmes principaux vécus par des enseignants, c'est qu'ils n'ont pas les moyens, souvent, d'intégrer les nouveaux venus. Ils n'ont pas non plus les moyens, ni le temps, de comprendre mieux s'il y a une nouvelle culture dans leurs propres classes et école, avec les problèmes que ça cause déjà et causera encore plus à l'avenir.

Je souhaite que cette loi soit remaniée et modifiée en profondeur pour que ces problèmes soient pris en considération ou pris en compte et que la nouvelle version, ou la troisième ou la huitième - je ne sais pas à quelle nous en serons à cette époque - la version finale de la loi 107 en tienne compte. M. le ministre, je m'adresse à vous, l'esprit ouvert au Québec, s'il en est, s'il en fut, je ne sais pas trop...

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Blackburn: Si cela a déjà été.

M. Godin:... pour que vous nous montriez à quel point vous êtes soucieux de l'avenir du Québec, de la ville de Montréal et de nos nouveaux citoyens à Montréal, les jeunes, les enfants. Entre enfants, les choses vont très bien. Quand on prend le métro et que l'on voit des enfants tous avec l'accent québécois, qu'ils soient Vietnamiens, Chinois de Hong Kong ou du "main land" comme on dit, Haïtiens, etc., tout le monde parle avec l'accent québécois et je trouve cela assez merveilleux que ça se produise maintenant à Montréal. Donc, il y a une intégration qui se fait. L'école doit être un lieu supplémentaire d'intégration et ce sont souvent les enfants d'ailleurs qui enlèvent aux parents leur racisme ou leur xénophobie en leur montrant qu'ils s'entendent bien avec leurs collègues d'autres nations, d'autres races, d'autres langues et d'autres religions dans nos écoles. Ces écoles-là, en fait, n'ont pas encore de personnalité à elles et cette loi devrait s'occuper de régler ce problème.

La loi 3, à l'époque, tentait au moins, dans la bonne direction, de régler ce problème. Malheureusement, cela n'a pas abouti comme on l'aurait souhaité, mais la leçon apportée aurait dû être que c'est urgent de le faire et non pas:

Soyons encore plus lents et plus prudents que possible. Parce que le problème est urgent et la solution presse, si nous voulons éviter, dans l'avenir, dans vingt ans, qu'il y ait des problèmes causés par, je dirais, l'inexpérience des hommes politiques de l'époque précédente de se reproduire et que nous aboutissions, vingt ans après, avec des problèmes sociaux importants qui viennent de la question scolaire et de la crainte des Québécois francophones de perdre leur place en Amérique du Nord, de perdre leur langue et de voir leurs enfants la perdre aussi.

Ce projet de loi me semble tout à fait impropre à répondre à ces questions, à ces problèmes et je souhaiterais que le ministre, dans sa sagesse, comme je l'ai déjà dit, se repenche sur cette question et qu'il nous arrive avec des amendements, dans l'avenir, qui tiennent compte de l'importance vitale pour le Québec d'avoir des écoles françaises avec des écoles anglaises à côté sûrement, mais que les deux sortes d'écoles gardent leur personnalité propre et que les enfants qui les fréquentent puissent s'y identifier et sachent que nous sommes maintenant au Québec. Nous apprenons le français pour ceux qui y ont droit, nous sommes à l'école anglaise pour ceux qui ont droit, que ce soit clair et qu'il n'y ait pas cette confusion qui existe depuis fort longtemps.

Je me souviens qu'à l'époque de Daniel Johnson il y avait eu une tentative de régler ces problèmes. Vous vous en souvenez sûrement comme journaliste, vous. Cela n'a pas été réglé non plus, parce qu'il y avait un consensus qui n'était pas mûr, mais je pense que, maintenant, il est peut-être plus près d'être mûr et, après l'échec de la loi 3, M. le Président, comme il y a eu échec de la loi 63 et de la loi 22 avant, la loi 101 a réglé le problème, en grande partie. J'osais souhaiter que le nouveau projet de loi sur l'instruction publique au Québec soit aussi réfléchi que la loi 101 l'a été et qu'il règle les problèmes qui se posent. Je constate que, malheureusement, c'est du papier qu'on pourrait passer à la déchiqueteuse, sans rien perdre, la preuve étant que nous avons 400 amendements sur 547 articles et que la projection, l'extrapolation serait qu'on nous arrivera avec 627 amendements d'ici à la fin, si la moyenne au bâton du ministre se maintient et, comme il aime le baseball, je pense qu'il va la maintenir sûrement!

Votre moyenne au bâton par chapitre, M. le ministre, est de 57 amendements. Pour 11 chapitres, cela fait 627 amendements: plus d'amendements que d'articles de projet de loi. Je pense donc que nous avons en face de nous un projet de loi qui n'a pas été suffisamment réfléchi; cela a l'air de quelqu'un qui n'a pas osé régler un problème qui se pose à Montréal, dont il est fort conscient et dont, malheureusement, on ne trouve pas de trace digne de ce nom dans le projet de loi qui sort de son cerveau, ou du cerveau de ses conseillers, ou des législateurs de son ministère. Je compte sur lui. Je me permets encore d'oser compter sur lui pour qu'il consulte le président de la commission qui est un expert, lui aussi, du domaine scolaire à Montréal...

Mme Blackburn: II n'était pas de son avis!

M. Godin:... ainsi que sa collègue, la députée de Jacques-Cartier, qui a vécu également tous les problèmes et toutes les tensions au sein du CEPGM et qui sait très bien qu'une solution doit être trouvée. Elle ne plaira sûrement pas à tout le monde, mais, à la longue, elle apparaîtra, si elle est sage et bien faite comme la loi 101 l'est maintenant - tout le monde veut la garder, même les libéraux qui se battaient contre pendant des nuits entières à l'époque de la commission parlementaire sur cette question...

Je pense donc qu'il faut avoir le courage de consulter, d'écouter et de faire modestement son boulot de législateur, ne perdant pas de vue que l'objectif qui est visé à Montréal, en particulier, c'est qu'il y ait un réseau d'écoles anglaises et un réseau d'écoles françaises pour que nous ne soyons pas, dans vingt ans, devant les mêmes problèmes qu'on a vécus et que les lois 22 et 63 ont tenté de régler tant bien que mal.

M. le Président, ce sont mes propos pour ce soir, mais je n'ai pas fini; je vais revenir sûrement là-dessus.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous remercie, M. le député de Mercier. Est-ce qu'il y a des interventions du côté ministériel? S'il n'y en a pas, je reconnais Mme la députée de Chicoutimi. (21 h 30)

Mme Jeanne L. Blackburn

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Pour avoir suivi les travaux de la commission parlementaire au moment des consultations, je dois dire que je n'ai pas la même confiance. Ayant entendu les réponses du ministre, j'ajouterais que je n'ai pas la même confiance que mon collègue de Mercier, quant à la volonté du ministre de modifier de quelque façon que ce soit le fond du problème et le rapport de forces en ce qui touche la situation actuelle.

Il est peut-être intéressant de se rappeler deux ou trois petites choses qui ont été dites ici, en commission parlementaire, à l'occasion de la consultation, qui illustrent à cause du rapport de forces auquel le ministre s'est soumis parce que, en partie, il les partage, qu'on va rester avec une structure complètement bâtarde qui n'a aucun rapport avec la réalité actuelle au Québec.

On s'est fait dire ici très clairement - là, je vois les gens qui étaient ici, les députés du parti ministériel étaient en commission parlementaire - au moment où les représentants des commissions scolaires protestantes ont reconnu que la commission scolaire protestante n'avait

de protestant que le nom, que c'était une fiction. En même temps, on a dû reconnaître que les commissions scolaires catholiques et ceux qui prétendaient parler au nom des commissions scolaires catholiques et de tous les catholiques du Québec, c'était généralement un groupe d'intégristes, des purs et des durs. Je me suis toujours demandé: Comment se fait-il que le ministre soit si sensible à quelque chose qui ne semble plus correspondre à la réalité? Les personnes qui sont venues présenter ces mémoires, souvent, pour en connaître un certain nombre - personnes que le président de cette commission connaît également - on sait qu'elles envoient d'abord leurs enfants dans les écoles privées et que les autres n'ont plus d'enfant à l'école. Or, ils décident de parler pour tous les catholiques du Québec.

J'ai compris que le ministre n'avait pas l'intention de modifier la structure, qu'il n'avait pas non plus l'intention et qu'il n'a jamais eu l'intention de négocier l'article 93. Le ministre s'est donné comme mission de sauver, à lui seul, l'Église catholique au Québec et il estime que la façon à peu près la plus sûre, en tout cas qui a fait ses preuves jusqu'à ce jour, c'est de maintenir une école catholique mur à mur. Il connaît, comme le rappelait tout à l'heure mon collègue de Mercier, les problèmes de la grande région de Montréal. Je suis certaine qu'il les connaît, j'en suis profondément convaincue, sauf qu'il n'a certainement pas la même perception des effets de cette structure sur l'intégration plus particulièrement des nouveaux arrivants au Québec à la majorité francophone. Il n'a pas la perception de la même urgence d'intervenir pour renverser le rapport de forces.

Mais il y a plus que cela dans le projet de loi 107, ce qui m'étonnait beaucoup au commencement, quand j'ai examiné comme il faut à la fois la loi 3 et le projet de loi 107, c'est qu'essentiellement le ministre nous disait, lorsqu'on examinait le projet de loi 3, que les raisons pour lesquelles il s'opposait au projet de loi 3 étaient les suivantes. C'est bon de se le rappeler, II disait: Je ne pourrais pas souscrire à une loi qui augmenterait les pouvoirs du ministre. La deuxième raison: la gratuité totale et entière pour les adultes, rien de moins, et une structure pédagogique qui les respecte. La troisième raison: Je ne peux pas accepter que ceux qui ne sont pas élus au suffrage universel viennent voter, quoique finalement...

Pour vous dire que, sur ces trois questions, sur ces trois objets d'opposition à la loi 3, il est revenu, puisque, d'abord, il n'y a pas de gratuité à l'éducation des adultes; deuxièmement, il a augmenté ses pouvoirs et, dans le projet initial, il avait autorisé le droit de vote des parents. Donc, les trois raisons majeures qu'il invoquait pour ne pas adhérer et pour ne pas souscrire à la loi 3, ces trois raisons majeures, on les voit, une fois qu'il a le pouvoir en main, disparaître dans la brume comme si elles n'avaient pas existé.

On me dit que M. le ministre a beaucoup de rigueur, beaucoup de rigueur intellectuelle. C'est l'image qu'on en a conservé. Sauf que sur ce projet de loi...

Une voix: C'est une rumeur.

Mme Blackburn:... comme sur d'autres qu'il a préparés, sa rigueur est variable selon qu'il a les pouvoirs en main ou qu'il ne les a pas. C'est cela, la rigueur du ministre.

Vous savez, quand vous examinez le projet de loi 3, le jugement Brassard, on comprend qu'il dise: Je n'étais pas d'accord avec le jugement Brassard à savoir que vous enleviez tous les droits des commissions scolaires existantes. On peut reconnaître ça. Le ministre sait très bien, cependant, que s'il était allé en appel du jugement Brassard, toutes les dispositions ne touchant pas les structures scolaires auraient pu être adoptées. Autrement dit, l'essentiel de ce qui constitue la loi actuelle qu'on a en-dessous de la main aurait pu s'appliquer. Donc, il n'est pas allé en appel du jugement. Je me disais: Pourquoi ne l'a-t-il pas fait. Et je me disais: II va apporter quelques petites modifications à la loi 3, on va retrouver l'essentiel dans la Loi 107. Je me disais: II va probablement réduire les pouvoirs du ministre, s'il est cohérent avec les propos qu'il a tenus, il va augmenter l'accessibilité aux adultes pour respecter les propos qu'il tenait à l'époque, puis on va s'attendre qu'il refuse le droit de vote aux parents. Cela aurait été cohérent et c'est vraiment dans cette perspective que je voyais le dépôt du projet de loi 107.

Or, surprise, surprise, étonnement et déception. Sa rigueur s'exerce quand il n'a pas le pouvoir en main. Quand il a le pouvoir en main, il se donne plus de pouvoirs et le fait qu'il soit très ouvert et réceptif aux besoins des adultes et des autres groupes à l'intérieur, c'est de la fiction. Il n'y avait rien de sérieux. Il n'y avait aucune volonté réelle de rendre son projet de loi correspondant aux discours qu'il tenait à l'époque avec, je dois vous le dire, beaucoup de crédibilité. Moi, je l'ai cru comme beaucoup de Québécois et je me suis dit: J'ai hâte de voir le projet de loi. Je vous le dis en toute simplicité. Je pensais sincèrement que le projet de loi qu'il nous soumettrait... Je comprenais que, sur les structures scolaires, il n'aille pas très loin parce que - je m'y attendais - il n'était pas prêt à négocier l'article 93, il ne l'avait pas mis dans le paquet de Gil, et je connaissais à peu près ses intentions là-dessus. Quant au reste, jamais je n'aurais attendu un projet de loi comme celui-là. J'aurais attendu un projet de loi beaucoup plus cohérent, avec le discours qu'il nous avait tenu à l'époque, avec une vigueur exceptionnelle, celle qu'on lui connaît.

Hier, dans son projet de loi, c'a été exactement, l'inverse de ce que son discours

nous annonçait alors qu'il était dans l'Opposition. Je trouve toujours amusant quand on relit les notes explicatives du projet de loi: Modernisation et actualisation, rationalisation de la loi de l'instruction publique. L'objet principal de modernisation aura été l'établissement de commissions scolaires linguistiques. Où ça fait le plus mal, il n'y en a pas. Rationalisation, ce qu'on appelle la rationalisation: la centralisation des pouvoirs. Alors que tout le mouvement des sociétés actuelles, des sociétés contemporaines, va dans la direction de la responsabilisation des partenaires, il dit: Ma rationalisation, c'est d'accroître les pouvoirs du ministre.

Le projet de loi 107 est un projet de loi extrêmement centralisateur. Cela a été dit ici des centaines de fois, je ne vous le rappellerai pas. C'est un projet de loi qui vient augmenter les pouvoirs du ministre, diminuer ses obligations dans le sens, si vous n'avez pas suivi les débats, qu'il ne définit plus les services complémentaires, qu'il ne fait plus obligation aux commissions scolaires d'organiser des services de garde et, là, je pourrais vous donner toute une série.. Cela diminue les obligations à l'endroit des élèves, des parents, des commissions scolaires et ça vient en même temps consacrer le rétrécissement des droits des élèves, des parents, des enseignants et des commissions scolaires.

Certaines personnes vont continuer de penser que le ministre est sincère. J'ai peine à le croire et j'ai encore beaucoup de difficultés à comprendre un tel renversement de situation, un tel renversement de principes et de valeurs quand on a la possibilité d'accorder ses principes et valeurs à une réalisation qui s'appelle l'avenir de nos commissions scolaires et de nos écoles au Québec. C'est donc dire que les propos que le ministre tenait à l'époque sur la nécessité de donner aux commissions scolaires de réels pouvoirs, c'était simplement pour faire bonne figure, c'était pour la galerie. Il n'y avait aucune sincérité là-dedans.

C'est ce qui est infiniment décevant dans le projet de loi 107 parce que je ne vous cache pas que, sur les structures, je m'y attendais. J'étais prête à mener une bonne bataille là-dessus, mais je m'attendais que le projet de loi soit beaucoup plus conforme à l'esprit et aux valeurs que le ministre véhiculait alors qu'il était dans l'Opposition. Il est tout à fait à l'opposé de ce qu'il a essayé de nous faire croire pendant les quelques années, deux ou trois ans, peut-être un peu plus, pendant lesquelles il a porté le dossier de l'Opposition en matière d'éducation.

Je trouve cela infiniment décevant parce que le ministre de l'Éducation a été considéré, au Québec, comme un homme centralisateur, je dirais, un peu dictateur, mais crédible. Lorsqu'il avançait certaines valeurs, lorsqu'il prenait position, on tenait pour acquis, on croyait en ce qu'il disait. Sauf qu'entre ce qu'il a dit à l'époque et ce qu'il est en train de nous pondre, il n'y a aucun rapport. C'est cela qui est inacceptable. Je me dis: Le Québec n'a pas tant d'hommes dans lesquels on a cru pour que celui-là nous déçoive autant. Il s'est payé la tête des Québécois. Il s'est moqué de nous avec beaucoup de cynisme. On en a vu d'autres. Je pensais que les grands cyniques qu'on a eus étaient davantage assis à Ottawa. Mais on doit reconnaître que les propos du ministre... Il a été extrêmement cynique dans son attitude. Il est capable de nous dire avec beaucoup d'assurance: Écoutez, je ne connaissais pas bien la situation. Donc, on doit reconnaître qu'il parlait à travers son chapeau. Ce n'était pas l'impression qu'il nous laissait dans le temps. Une fois que je vois comment cela procède, on ne peut pas tout laisser, il faut contrôler. Mais ce n'était pourtant pas cela qu'il disait. Cela veut donc dire qu'il parlait aussi à travers son chapeau. Il prétendait pourtant avoir réponse à toutes les questions et être le seul dépositaire de la vérité et des solutions les plus efficaces et les plus réalistes.

Le projet de loi vient augmenter ses pouvoirs, diminuer ses obligations, réduire les droits des élèves, les droits des parents, les droits des commissions scolaires, les droits des enseignants. On ne reconnaît même pas aux élèves le droit d'en appeler devant le Protecteur du citoyen. On n'inscrit même pas un droit qui est reconnu au Québec, le droit d'association. On n'a pas cru utile de le reconnaître dans ce projet de loi. On ne reconnaît pas... Pourtant, ce gouvernement qui se targue d'avoir de solides politiques en matière familiale... D'ailleurs, le premier élément de politique familiale, faut-il se le rappeler, c'est le ministre qui l'a déposé en Chambre en disant: Écoutez, il faut absolument qu'on ouvre une école privée avec pensionnat car, à cause des parents, des familles éclatées, il y en a qui ont besoin de placer leurs enfants. Cela a été le premier élément de notre politique familiale. Pourtant, quand on a quelque chose d'extrêmement important qui s'appelle les services de garde en milieu scolaire, quand on sait les difficultés que les parents ont à amener les écoles à offrir de tels services, quand on sait que les directeurs d'école ont applaudi quand ils ont vu que cela n'était plus une obligation de les organiser sur demande, quand on sait cela, on sait exactement ce qui va se passer tantôt. Cela va être du tordage de bras pour essayer de se faire ouvrir des services de garde en milieu scolaire. C'était pourtant une bonne occasion et c'est un gouvernement qui prétend avoir une préoccupation très profonde quant aux besoins de la famille et qui est en train de nous faire croire qu'il va ouvrir de nombreuses places en garderie, sauf que ce qu'il oublie de nous dire, c'est que ce qui va ouvrir essentiellement, c'est ce que permet le budget du fédéral en cette matière. On n'a même pas l'assurance que les garderies qui seront ouvertes par le fédéral le seront aux conditions du Québec.

Rétrécissement des pouvoirs des parents. Il y a tout un virage quant aux sujets qui pourront

faire l'objet de consultations ou d'avis par les parents. On est passé de questions qui touchaient essentiellement, fondamentalement les écoles, la pédagogie, l'utilisation des écoles, les rapports avec la communauté à une approche extrêmement administrative qui n'a aucun rapport direct avec la pédagogie, l'enseignement ou les élèves.

La diminution des pouvoirs des commissions scolaires, on n'aura pas longtemps à épiloguer là-dessus. On en a parlé plus qu'il ne le faut.

Avec le projet de loi qu'on a en main, il y a 400 modifications. Là, j'écoutais mon collègue de Shefford qui disait: Écoutez, c'est surprenant. C'est un travail mal fait. Ce n'est pas rigoureux. Comment se fait-il qu'il n'ait pas pris l'essentiel de ce qui avait fait un consensus, la loi 3 avec quelques modifications à sa sauce, à son goût, ce que j'aurais trouvé tout à fait normal, puis on ne serait pas obligés aujourd'hui de se promener quasiment avec une brouette pour traîner les amendements?

M. Claveau: Un "truck"!

Mme Blackburn: Oui. Je vous le disais en plaisantant et ce n'était même pas en guise de plaisanterie. Le ministre est entré en Chambre cet après-midi avec deux porte-documents. J'ai pensé que ça prendrait une troisième main pour traîner les amendements tantôt, puis un troisième sac, parce que ça fait volumineux.

Le Président (M. Parent, Sauvé): À l'ordre, s'il vous plaît! Mme la députée de Chicoutimi, vous avez toujours la parole. S'il vous plaît! M. le député d'Ungava, M. le député d'Arthabaska.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Donc, 400 amendements, au total, on peut penser qu'il y en aura plus de 600. Et, là, ça étonne mes collègues. Cependant, moi, ça ne m'étonne pas. Cela ne m'étonne pas du tout parce que le projet de loi sur les commissions scolaires du Nouveau-Québec, réécriture complète! Quand on est arrivé en commission, il ne voulait même pas consulter là-dessus. Là, on lui a dit: Écoutez, regardez ça comme il le faut, ça n'a pas de bon sens. Et ii a dû réécrire ce projet de loi.

Le projet de loi 24, qui était une loi, n'avait pas été sitôt adopté qu'il a dû préparer une autre loi pour amender le projet de loi 24. C'est une habitude avec le ministre, ses projets de loi sont mal préparés. Il prétend que la conception qu'il a de ce qui est le mieux pour tout le monde est tellement bonne qu'il ne consulte pas avant de les préparer, c'est comme rien, sinon, il ne se retrouverait pas avec une pareille pelletée d'amendements, 400 amendements.

Et 400 amendements, M. le Président, ça me fait penser... Vous savez à quoi ça me fait penser? Vous savez, quand vous avez une boîte de casse-tête mais que vous n'avez pas l'image qui le compose. On vous dit: C'est censé vous donner un paysage, cela. C'est tout ce que vous avez. Quand vous avez chacun des morceaux en main, vous ne savez pas ce que cela donne comme paysage, il faut tous les placer. C'est cela qu'on nous offre actuellement, une espèce de boîte. On a une idée approximative de ce que le total va donner, mais on ne le voit pas. 400 amendements, cela étonne des collègues, mais cela ne m'étonne pas pour avoir vu les précédents projets de loi du ministre. Il n'est pas rigoureux, contrairement... C'est un travail mal fait et c'est ce que je ne comprends pas: qu'il n'ait pas au moins accepté de le réécrire comme il l'avait fait la première fois. La première fois, c'était quatre ou cinq articles qu'il a dû réécrire. Là, c'est tout près de 560 articles; il y aura pour ainsi dire aucun article qui ne sera pas retouché. Si vous appelez cela du travail bien fait! Cela peut être du travail bien fait pour quelqu'un qui ne regarde pas la réalité correctement, qui n'a aucune idée de ce que sont les besoins et la réalité des commissions scolaires. S'il avait, M. le Président...

M. Gendron:... dans les patates.

Le Président (M. Parent, Sauvé): À l'ordre, s'il vous plaît! Messieurs, madame.

Mme Blackburn: II y a un coprésident. M. le Président, s'il avait été un tant soit peu attentif à ce que demandaient les commissions scolaires, s'il avait eu le moindrement de mémoire pour se rappeler ce qu'avaient été les propos et les discours des différents intervenants au moment où on a examiné et adopté la loi 3, il aurait compris qu'il ne pouvait pas s'en aller dans cette direction.

Est-ce que les amendements sont majeurs? Il reste, à mon humble avis, des grands trous et il est impensable qu'on puisse faire un travail sérieux sur les 400 amendements déposés sans entendre quelques grands organismes nous dire si les amendements proposés correspondent un petit peu à ce qu'ils ont demandé, à ce qu'ils sont venus faire valoir, ici, en commission parlementaire. Si on ne réentend pas ces organismes, cela veut dire qu'on se fout de la démocratie ici et que c'était une sinistre farce, les commissions parlementaires.

Motion proposant d'entendre la

Confédération des organismes provinciaux

de personnes handicapées du Québec

C'est pourquoi, M. le Président, je voudrais déposer la motion suivante: II est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure la commission permanente de l'éducation tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi 107, Loi sur l'instruction publique, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet de loi et qu'à cette fin elle entende la Confédération des organismes provin-

ciaux de personnes handicapées du Québec. Je pense que cela se passe d'explications, on les a entendus pendant 45 minutes.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, merci, Mme la députée de Chicoutimi. Juste un instant, que je prenne connaissance de votre motion. Alors, je déclare la motion de Mme la députée de Chicoutimi recevable et vous avez, Mme la députée... Un instant!

Oui, avec plaisir, Mme la députée de Jacques-Cartier. Mme la députée de Chicoutimi a déposé la motion suivante: II est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure la commission permanente de l'éducation tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi 107, Loi sur l'instruction publique, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet de loi et qu'à cette fin elle entende la Confédération des organismes provinciaux de personnes handicapées du Québec. C'est une motion tout à fait recevable et, Mme la députée, vous avez la parole pour défendre ou expliquer votre motion. Je dois vous dire que, selon nos règlements, vous avez 30 minutes pour faire cela.

Mme Blackburn: Trente minutes, M. le Président. Comme le temps a passé.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Mais préférez-vous que l'on ajourne et qu'en reprenant demain vous...

Mme Blackburn: Oui, on pourrait reprendre demain, s'il n'y a pas d'objection, oui.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, la commission ajourne ses travaux jusqu'à demain matin, 10 heures, alors qu'elle se rencontrera au salon rouge de l'Assemblée nationale.

(Fin de la séance à 21 h 52)

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