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Version finale

29e législature, 4e session
(15 mars 1973 au 25 septembre 1973)

Le jeudi 9 août 1973 - Vol. 13 N° 118

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Projet de règlement sur la câblodistribution


Journal des débats

 

Commission permanente

de l'éducation, des affaires

culturelles et des communications

Projet de règlement sur la câblodistribution

Séance du jeudi 9 août 1973

(Dix heures quinze minutes)

M. GIASSON (président de la commission permanente de l'éducation, des affaires culturelles et des communications): A l'ordre, messieurs!

Avant de donner la parole immédiatement au ministre des Communications, j'aimerais signaler les remplacements qui m'ont été soumis sur la liste des membres de la commission permanente. M. Cloutier (Montmagny) remplace M. Cardinal; M. Léger remplace M. Charron; M. Lacroix remplace M. Cloutier (Ahuntsic); M. Caron remplace M. Leduc; M. Ostiguy remplace M. Phaneuf; M. Perreault remplace M. Saint-Germain.

M. le Ministre.

M. L'ALLIER: M. le Président, messieurs, la commission parlementaire de l'éducation, des affaires culturelles et des communications se réunit, ce matin, pour entendre tous ceux qui ont manifesté le désir d'être entendus sur le projet de règlements, publié dans la Gazette officielle et qui constitue, en fait, le premier bloc de règlements du gouvernement à l'intérieur duquel la Régie des services publics exercera sa fonction au sujet de la câblodistribution.

Nous avons, en 1971, énoncé les principes d'une politique de communication. Je n'ai pas l'intention de m'étendre très longuement là-dessus. Ce document est connu. Il a été largement diffusé. Rappelons simplement qu'il était dit, dans cette politique, que les communications sont un instrument fondamental du développement québécois sur le plan économique, mais aussi sur les plans social, culturel et éducatif.

A l'intérieur du bloc technologique des communications, à l'intérieur de l'ensemble des moyens de communications, la câblodistribution prend une place de plus en plus importante. Elle connaît un développement accéléré et est le commencement d'une évolution dont il est impossible, aujourd'hui, de connaître tous les effets et toutes les ramifications.

Nous connaissons l'importance actuelle du câble. Nous pouvons deviner l'importance future de cet instrument de communication. Il est impossible d'en prévoir toutes les conséquences. Les communications techniques — c'est un autre des principes énoncés dans ce document de travail, dans cette politique québécoise des communications — si elles doivent se développer suivant les schémas industriels acceptés par notre société, doivent, avant tout, être au service des communications humaines.

La câblodistribution, la câblodiffusion, dans cette optique, est considérée et est un service public, service public au sens du téléphone, au sens de l'électricité. Bien sûr, l'analyse du développement actuel de l'entreprise de télédistribution peut amener certains à conclure qu'il ne s'agit pas, à ce moment-ci, d'un service public, mais d'un service facultatif. Techniquement, l'électricité comme le téléphone sont un service facultatif, mais sont en même temps un service public.

Service public et propriété privée. C'est aussi une chose qui a été reconnue dans l'énoncé de politique sur la câblodistribution. Cette propriété privée, elle doit se développer comme telle dans ce domaine, mais à l'intérieur des contingences et des contraintes qu'impose la fourniture d'un service public. Propriété privée exclut nationalisation, étatisation d'une entreprise. Cela n'exclut pas cependant la participation collective par des fonds québécois, par des institutions financières québécoises à la propriété des entreprises.

Ainsi, et nous en avons déjà des exemples, certaines grandes sociétés de câblodistribution ont comme partenaires principaux des institutions financières québécoises comme des sociétés d'assurance, comme la caisse de dépôt, comme d'autres organismes de même nature. Par ce biais, il est possible de faire participer un plus grand nombre de Québécois à la propriété de ces entreprises.

On disait, dans le document de travail sur le câble, ceci: "II pourrait donc s'agir d'un régime d'entreprises, financièrement vigoureuses, peut-être moins nombreuses, mais plus vastes en termes de territoire, et qui seraient, en définitive, la propriété de la collectivité québécoise, par ses institutions, au réservoir économique populaire, telles, par exemple, la caisse de dépôt, nos sociétés d'assurances, nos caisses populaires, nos propres institutions financières. Il s'agit là d'un objectif et cet objectif est en voie de réalisation."

La question des relations et des interrelations entre les sociétés de téléphone et les compagnies de câble se pose et se posera avec plus de précision et peut-être plus d'acuité à l'avenir. Le document de travail sur le câble, publié en 1971, présume que les sociétés de téléphone sont mieux placées pour procéder au développement technologique du câble que ne peuvent l'être les sociétés de câble. C'est un document de 1971. Il s'agit là d'une présomption et non pas d'un énoncé de politique.

Il est important que la preuve puisse être entendue et que les sociétés de téléphone, comme les sociétés de câble, puissent également et sur un même pied faire connaître leurs prétentions, leurs moyens, leurs objectifs face au développement de l'infrastructure des communications au Québec.

Nous n'avons d'aucune façon décidé politiquement, dans l'énoncé de 1971, pas plus que dans les présents règlements, de confiner les entreprises de câble à la seule utilisation des

équipements des compagnies de téléphone, d'autres services publics ou de leur propre équipement aux fins de télédistribution. Nous ne disposons pas actuellement de preuves suffisantes pour prendre une telle décision qui engage l'avenir d'une façon déterminante.

La politique actuelle du gouvernement sur ce point doit être clairement entendue: laisser aux entreprises de communication, qu'elles soient de câble ou de téléphone, le temps et les moyens de démontrer, tant à la satisfaction du gouvernement que de la régie, que leur intervention proposée dans le domaine des infrastructures de communication est dans l'intérêt public, dans l'intérêt économique, social et culturel de notre collectivité. C'est un point qu'il est important de clarifier et de bien faire connaître ici.

Nous avons, en mai 1971, déposé une loi; au même moment, nous avons fait connaître la politique à laquelle je me référais. En décembre 1972, les projets de loi 35, 36 et 37 étaient adoptés. Le projet de loi 35, adopté à l'unanimité par l'Assemblée nationale, élargissait et précisait les responsabilités de la Régie des services publics quant à la câblodistribution. Il est prévu, dans ce projet de loi, la publication préalable dans la Gazette officielle, pour un délai minimum de 30 jours, de tout le projet de règlement. C'est ce processus de consultation qui est actuellement en cours et c'est le but de cette commission parlementaire, M. le Président, que d'entendre les parties sur ce projet de règlement.

Les buts de la loi ont été longuement exposés au moment de l'étude des projets de loi. Quant à la réglementation pouvant émaner du lieutenant-gouverneur en conseil, en application des lois 35 et 37, j'ai déjà clairement indiqué qu'il s'agirait d'une réglementation générale à l'intérieur de laquelle le gouvernement fixerait les cadres et les priorités dans le développement de sa politique des communications par câble.

C'est à l'intérieur de cette loi, de même que dans l'esprit de la loi, des politiques énoncées et de la réglementation, que la Régie des services publics intervient conformément à sa loi pour préciser et compléter les modalités d'implantation et de réalisation de cette politique. Il ne s'agit donc pas maintenant d'entrer dans le détail des modalités de fonctionnement des entreprises publiques de câblodistribution à l'intérieur d'un territoire donné, pas plus qu'il ne s'agit d'entrer dans les modalités de fixation des priorités qui peuvent de fait être suivies par ces entreprises dans leur programmation.

Il s'agit encore moins de déterminer les modalités d'utilisation du potentiel de diffusion ou de distribution des entreprises de câbles à des fins communautaires, à l'intérieur d'un territoire donné. C'est à la régie qu'il appartiendra, au moment d'approuver la programmation et le plan de fonctionnement et de développement d'une entreprise de câblodistribution, de voir à ce que ces modalités se réalisent concrètement, dans un contexte géographique donné, en tenant compte des besoins sociaux et culturels donnés et en tenant compte en même temps du potentiel de développement et des moyens économiques et financiers dont dispose ou peut disposer l'entreprise publique. Le présent projet de règlement ne fait ici que fixer et préciser le principe de l'utilisation dans l'intérêt de la communauté d'une partie du potentiel de diffusion et de distribution de l'entreprise. C'est devant la régie qu'il faudrait débattre, tant au niveau de l'entreprise qu'au niveau des intérêts communautaires, des modalités d'utilisation du câble aux fins communautaires et c'est à la régie qu'il appartiendra de procéder aux audiences publiques qu'elle jugera nécessaires afin que soit respecté l'intérêt public.

Il est essentiel que chacun comprenne bien son rôle et accepte de présumer de la bonne foi des autres dans cette opération. Sans cette concertation dans la recherche des meilleurs moyens à prendre pour favoriser le développement accéléré de notre infrastructure de communication d'une façon rationnelle et conforme à nos moyens et à nos besoins, dans le respect des contraintes inhérentes à l'exercice de nos responsabilités gouvernementales et collectives et aussi de celles qui sont inhérentes à notre système économique et au sain développement d'une entreprise privée à l'intérieur de laquelle nos institutions économiques collectives jouent déjà un rôle important et qui pourrait être accru et étendu; il n'est pas question de faire porter sur quiconque le fardeau du conflit fédéral-provincial. Nous sommes plus que quiconque conscients des insatisfactions et des inquiétudes que peut susciter le fait que cette question ne soit pas réglée. Il s'agit là d'un problème politique et il appartient aux hommes politiques de le régler et le plus rapidement possible.

Les objectifs de cette réglementation visent à assurer un contrôle québécois, non pas gouvernemental, mais collectif québécois sur l'infrastructure de communication de la câblodistribution. Ces objectifs sont aussi le maintien des caractéristiques existantes des entreprises et visent à favoriser leur développement.

L'objectif est également de favoriser l'équilibre culturel ou de tenter de rétablir partiellement — parce que complètement n'est pas possible — l'équilibre culturel et linguistique entre les contenus diffusés par câble actuellement.

Nous ne voulons pas limiter, c'est un autre objectif, les chances de développement des entreprises de câblodistribution en faveur d'autres entreprises de communication. Ces grands objectifs, en fait, correspondent à la réglementation qui est proposée. Dans la mesure où ces objectifs peuvent être atteints, dans la même mesure nous allons analyser, comme nous l'avons déjà fait d'ailleurs, les mémoires et les exposés qui sont faits.

Nous sommes disposés, parce qu'il s'agit d'une opération de consultation, nous sommes tout à fait disposés à modifier les règlements, s'il y a lieu, pour faire en sorte qu'ils puissent être viables pour tous les intéressés. Ces modifications ne peuvent pas porter sur les objectifs fondamentaux; ils peuvent cependant porter sur les modalités de réalisation de ces objectifs.

J'ai déjà fait une analyse des mémoires qui ont été présentés et je peux dire ici que cette première analyse m'amène à la conclusion qu'il n'y a pas d'opposition fondamentale par rapport à ces objectifs avec les principes énoncés ou les mémoires présentés par les intervenants. Je m'en réjouis, ce qui permet effectivement de considérer que nous pourrons en arriver à des solutions satisfaisantes, tout en tenant compte, avant toute chose, de l'intérêt public.

Dix-sept mémoires ont, en fait, été soumis à la commission parlementaire. Afin de faciliter les travaux de la commission et pour une meilleure cohérence dans l'audition des mémoires, je suggérerais, M. le Président, que nous regroupions ces mémoires en six catégories, que nous entendions d'abord les câblodistributeurs, ensuite les sociétés de téléphone, ensuite les radiodiffuseurs, ensuite les groupes communautaires, ensuite les publicitaires et finalement les autres intervenants.

Il faut souligner la collaboration généralement positive, très positive des intervenants au moment de la préparation et au moment de la présentation de ces règlements. Le sens cons-tructif des mémoires permet, comme je l'ai dit, d'espérer que nous en arriverons à des solutions satisfaisantes pour tous.

Dans la mesure où le projet de règlement est déposé pour consultation, le but de cette commission parlementaire, M. le Président, m'apparaît évident. C'est celui — comme je l'ai dit — d'entendre les intervenants.

Il n'est pas question de modifier, ici, sur place, et d'une façon improvisée, le projet de règlements. Le fait que nous ne procédions pas maintenant à ces modifications ne veut pas dire, au contraire, qu'elles n'auront pas lieu. Cela signifie qu'il nous faudra, pour procéder à des modifications, analyser soigneusement le sens des interventions qui seront faites en relation avec les mémoires qui sont déjà déposés devant la commission.

Voilà ce que j'avais à dire, M. le Président, en présentation, si vous voulez, de l'opération dans laquelle nous nous engageons maintenant. A partir des mémoires qui nous ont été distribués, j'ai suggéré à la commission un ordre d'audition; si cet ordre agrée à la commission, nous poumons, à l'intérieur de cet ordre, entendre les câblodistributeurs et, par la suite, les autres. A l'intérieur du bloc des câblodistributeurs, tel qu'on l'a déjà distribuée, une liste suggérant cet ordre d'auditions consisterait à entendre l'Association canadienne de télévision par câble et, ensuite, M. Denis Filion, Rivière-du-Loup Câble Limitée, la Télévision Saint-Maurice et la Belle-Vision, Câble TV et National Cablevision.

M. le Président, j'ai ici à faire connaître aux membres de la commission un certain nombre d'amendements de concordance qui ne portent d'aucune façon sur le fond des règlements, mais qui sont des amendements corrigeant la qualité du texte français ou apportant certaines précisions linguistiques à un texte qui, sur certains points, était souffrant. Je demanderais que ce soit distribué aux membres de la commission et aussi à ceux qui souhaiteraient en avoir une copie. Pour donner un exemple de ces modifications, l'article 1 est modifié au paragraphe f) en enlevant à la deuxième ligne, après le mot production, les mots audio ou visuel. On les remplace par les mots sonore, visuel ou audiovisuel. C'est ce genre de modifications, en fait, que nous déposons maintenant. Ce sont des amendements de concordance, à toutes fins pratiques.

LE PRESIDENT (M. Giasson): Messieurs, avant de céder la parole au député de Chicoutimi, j'aimerais soumettre aux membres de la commission la suggestion qu'on a faite de nommer Jacques Veilleux comme rapporteur de notre commission; est-ce que ce nom est accepté par les membres?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Agrée'.

LE PRESIDENT (M. Giasson): Agréé. Nous écoutons le député de Chicoutimi.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je sais gré au ministre d'avoir respecté la promesse qu'il avait faite de soumettre le projet de réglementation à la commission parlementaire de l'éducation, des affaires culturelles et des communications.

En faisant son exposé, le ministre a précisé des objectifs qui doivent retenir notre attention au moment où nous abordons l'examen de ce projet de réglementation. Il est toutefois important de rappeler au ministre que le problème constitutionnel continue de nous préoccuper, comme il le préoccupe lui-même, puisque ce problème n'est pas encore réglé et risque de paralyser l'action du gouvernement.

Le ministre disait tout à l'heure qu'il s'agit d'une décision politique et que le fardeau de ces échanges, de ces disputes et de ces négociations ne doit pas peser sur le dos de ceux qui sont propriétaires d'entreprises de câblodistri-bution ou d'autres entreprises analogues.

Je suis bien d'accord avec le ministre, à condition cependant que les chefs d'entreprises dans ce domaine veuillent bien collaborer, comme ils l'ont fait jusqu'à présent, aux initiatives gouvernementales qui visent à assurer l'autonomie du gouvernement du Québec en cette matière éminemment stratégique de l'éducation et de la culture.

Il est donc important de se pencher sur le problème du contentieux constitutionnel, ce qui ne peut pas faire évidemment aujourd'hui l'objet de l'examen de la commission, mais il est

important de s'interroger sur la propriété des entreprises, sur le financement de ces entreprises de câblodistribution, sur leur programmation, en termes de contenu et en termes de qualité.

A cet effet, M. le Président, nous désirons rappeler aux membres de la commission ainsi qu'à tous les citoyens du Québec que notre parti ne reconnaît pas la compétence fédérale sur la câblodistribution et n'approuve pas, non plus, la loi fédérale donnant la responsabilité au Conseil de la radio et télévision canadienne sur la télédiffusion par câble.

Nous croyons que le Québec doit contrôler et rapatrier tous les instruments de communication nécessaires à sa mission d'éducation et de culture. La câblodistribution fait partie de ces instruments que nous jugeons nécessaires et essentiels.

Le câble est en effet un médium qui fragmente les auditoires en mettant un nombre de canaux plus élevé à la disposition des spectateurs. On prévoit — ces chiffres peuvent être corrigés— qu'en 1975, 50 p.c. des foyers québécois seront abonnés à des câbles coaxiaux de 27 canaux et qu'en 1980, l'ensemble des foyers québécois pourra être abonné à un réseau câblé de 80 canaux, potentiellement.

Le problème principal, celui qui devrait nous préoccuper davantage, nous semble être, outre celui de la propriété et du financement, celui de la programmation puisque plus de 27 canaux exigeront 300 heures d'émission par jour. On peut évaluer à 80 heures environ la programmation des réseaux télé actuels. La câblodistribution est donc un médium qui risque de mettre en danger notre identité nationale si la programmation des émissions diffusées sur ces canaux est trop exclusivement anglo-américaine.

Notre parti estime donc qu'il est du rôle du ministère des Communications, non seulement d'encourager, mais de faire en sorte que la programmation soit une programmation à caractère spécifiquement québécois.

Nous proposons, d'autre part, que d'ici 1975, un canal soit réservé et régi par le ministère des Communications afin de fournir au public des renseignements administratifs utiles. Nous voudrions également que d'ici 1975, un canal communautaire soit accordé à toute collectivité locale de plus de 5,000 personnes comme cela se fait aux Etats-Unis. Ce canal devra être accordé gratuitement à la localité par l'entreprise privée de câble.

Ce sont là quelques-unes des idées ou des propositions que nous formulons au nom de notre parti au moment d'entendre les représentants des entreprises de câblodistribution. L'objet de notre rencontre est d'examiner la réglementation qu'a soumise le ministre et, pour ce faire, d'entendre les parties intéressées qui ont soumis des mémoires que nous serons heureux d'étudier, d'analyser et de discuter avec elles.

C'est en cours d'exercice que nous pourrons préciser certains points qui font l'objet de nos préoccupations particulières, d'interroger, d'autre part, le ministre sur les gestes que son gouvernement a posés jusqu'à présent et sur ceux qu'il entend poser dans l'avenir afin d'assurer la suprématie politique du Québec en cette matière éminemment essentielle de la câblodistribution.

M. le Président, je serai donc tout ouie afin de connaître les vues des organismes représentatifs dont nous avons déjà reçu les mémoires. Je vous remercie.

LE PRESIDENT (M. Giasson): Le député de Richmond.

M. BROCHU: M. le Président, le projet de réglementation, soumis par le ministre, comporte des implications assez importantes à court terme et également à long terme.

Je pense que nous devrons clairement établir les nuances qui s'imposent en cours de route lors de l'audition des différents mémoires, d'où l'importance, je pense, de cette commission parlementaire que nous tenons aujourd'hui, et dont nous avons été les tenants à l'Assemblée nationale pour voir tous les aspects et toutes les implications du projet de réglementation qui nous a été soumis.

Je pense que l'importance de cette commission n'est pas à discuter et, en ce qui nous concerne, nous sommes prêts à entendre les différents sons de cloche des intéressés à ce sujet et, en cours de route, de poser les questions pertinentes au ministre et à ceux qui viendront déposer devant nous pour en arriver à trouver la meilleure solution possible au problème de la câblodiffusion.

LE PRESIDENT (M. Giasson): M. le député de Lafontaine.

M. LEGER: M. le Président, j'aimerais, au nom du Parti québécois, avant d'écouter les différents représentants des différents groupes intéressés à cette politique nouvelle québécoise de la câblodistribution, donner notre perception de cette nouvelle industrie dans le sens de ses possibilités.

Tout d'abord, le Parti québécois se réjouit fortement de la présentation à cette commission de la réglementation de la Régie des services publics, en rapport avec la câblodistribution, tel que le stipule la loi 35. Cette affirmation claire et nette de la juridiction du gouvernement national des Québécois sur un organe essentiel à son essor culturel, vient peut-être tard, mais elle arrive bien. Ce serait mesquin pour nous de le nier. De fait, on y retrouve presque textuellement plusieurs des principes et même des modalités que le futur gouvernement du Parti québécois s'est engagé à généraliser et à mettre en place en les étendant à toute la radio-télévision du Québec.

Sans entrer dans le détail de la réglementa-

tion projetée, l'affirmation du caractère public et communautaire de la câblodistribution, de sa qualité de service public aux collectivités locales, est un pas certain vers une sorte de décentralisation culturelle, aussi bien au point de vue géographique qu'à celui de l'élargissement et de la définition des groupes de notre société qui devraient pouvoir s'exprimer sur les écrans de télévision.

Ce souci communautaire qui s'oppose aux simples préoccupations mercantiles et commerciales qui, malgré quelques déclarations de principes, ont caractérisé, jusqu'à maintenant, l'action du CRTC fédéral dans la câblodiffu-sion, ce souci communautaire, donc, dans la présente réglementation, est bien visible, surtout par cette obligation d'accorder un canal gratuit pour fins éducatives, et aussi dans la priorité accordée pour les futurs permis à des groupes locaux et communautaires. Mais ces intentions frafches et pieuses du législateur, il ne faudrait pas qu'elles soient gâchées par de mauvais utilisateurs de la production communautaire. Il revient, je pense, à la Régie des services publics à voir à ce que le contenu communautaire n'ait pas de communautaire que l'étiquette. Il est difficile de dire si on peut se fier sur les entreprises de câblodistribution elles-mêmes pour discriminer l'élément communautaire du non-communautaire. Une part importante de cette politique reviendra à la régie. Alors on se demande sur quels principes, sur quelles lignes de force. J'aimerais que le ministre et les régisseurs se penchent sur ce problème, peut-être par des auditions publiques subséquentes à celles que nous avons aujourd'hui, où les câblodiffuseurs, les groupes communautaires eux-mêmes, et encore davantage les responsables actuels de la programmation communautaire pourraient nous aider à tracer un corridor flexible, mais réel, sur la notion même d'émissions communautaires.

Pour le moment, je voudrais souligner au ministre à ce sujet cinq principes de base que le groupe de télévision communautaire de Normandin, que l'on peut considérer comme pionnier dans ce domaine, soumettait dans un mémoire adressé au CRTC.

Le premier principe était le suivant: la communauté a la responsabilité entière de la production de ses émissions.

Le deuxième principe: cette communauté doit fournir complètement les ressources humaines et voir à s'organiser financièrement pour assurer sa production.

Un troisième principe pourrait être que la production doit être orientée vers des objectifs communautaires précis.

Un quatrième principe c'est que le fonctionnement doit faire appel au plus grand nombre possible de ses membres, idéalement n'importe qui dans la communauté peut participer à tous les niveaux de responsabilité d'organisation.

Le cinquième principe c'est que les personnes chargées du fonctionnement immédiat de la télévision communautaire le soient à des fins exclusives pour éviter des conflits d'intérêts.

D'autre part, en ce qui concerne les futurs permis accordés de préférence à des groupes communautaires locaux, selon l'avant-projet, je tiens à mettre le ministre en garde. Il ne suffit pas d'en établir le principe, même si c'est déjà appréciable, il faudrait qu'en collaboration étroite avec le ministère des Institutions financières, Compagnies et Coopératives la régie suscite et stimule, chez une collectivité donnée, la structuration efficace et cohérente des groupes communautaires intéressés à utiliser la câblodistribution et la câblodiffusion.

L'expérience de La Belle Vision, à Trois-Rivières, devrait servir de mise en garde sur la difficulté pour les groupes communautaires, sans aide technique du gouvernement, à battre de vitesse des intérêts financiers en place quand il s'agit d'accorder la propriété d'un réseau câblé existant ou projeté. Ils le peuvent exceptionnellement, comme cela a été le cas, on l'a vu d'ailleurs dans l'Outaouais, mais généralement la régie devrait inclure dans son mandat un rôle d'architecte et de coordonnateur des intérêts communautaires du moins pour les faire démarrer en projets précis.

D'autre part, le Parti québécois estime fort satisfaisantes les exigences de la réglementation sur la propriété québécoise des systèmes câblés de même que sur le contenu résolument québécois de l'ordre de priorité de la production diffusée. Ses intentions, encore là, rejoignent précisément les orientations du programme de notre parti.

Un autre point important, c'est la permission accordée aux câblodiffuseurs de diffuser de la publicité sur leur système allant ainsi à l'encontre de la politique du CRTC d'Ottawa. Nous sommes d'accord avec cette position pour deux raisons. D'abord, il s'agit d'une publicité restrictive, c'est-à-dire empêchant la publicité pour les enfants ou pour des fins de médicaments, etc., et qui, de ce point de vue, est beaucoup plus civilisée et avancée que les exigences actuelles du CRTC pour le réseau VHF.

Deuxièmement, l'apport financier de cette publicité permettra aux câblodiffuseurs de mettre réellement en application l'obligation faite d'un minimum de dix heures de production éducative et communautaire sans être obligés d'en reporter le coût sur les usagers.

Au sujet des câblodiffuseurs, j'ai noté que la régie tiendra le 6 novembre des auditions publiques sur deux causes impliquant les relations futures entre les entreprises téléphoniques et les câblodistributeurs. D'autre part, la réglementation à l'article 6, bannit les entreprises parallèles dans l'exploitation, ce qui constitue une des dimensions, je pense, des auditions de la régie.

Je crois qu'il serait peu sage de trancher ce point dès maintenant et qu'il voudrait peut-être mieux laisser la régie entendre les parties intéressées parce que le problème que je vois

d'abord, c'est un problème constitutionnel. Si les compagnies de câble avaient des difficultés à s'entendre avec des compagnies de téléphone et qu'elles décident elles-mêmes de voir à l'implantation de leur propre réseau de câble, cela amènerait un coût supérieur d'investissement et déjà cela mettrait des difficultés pour les groupes communautaires qui auraient des sommes à engager, de capitalisation qu'ils n'auraien,t pas s'ils avaient à louer des espaces sur les réseaux déjà installés de téléphone.

D'un autre côté, M. le Président, il faut tenir compte aussi que, s'il y a une utilisation des câbles de téléphone, il ne faudrait pas laisser les compagnies de téléphone, décider en dernier du coût qui peut être prohibitif et à ce moment-là, la régie, malheureusement n'a juridiction pour surveiller ce domaine-là que sur une partie des compagnies de téléphone. Cela crée encore un problème fédéral-provincial. Bell Canada n'étant pas sous la juridiction provinciale, la surveillance de la régie sur ce domaine-là serait beaucoup plus inférieure comparativement à sa juridiction sur les autres compagnies de téléphone.

A ce propos, M. le Président, il y aurait lieu d'étudier non seulement la définition des groupes communautaires qui devraient réaliser directement ou non la production locale, régionale et communautaire, mais aussi le contenu d'une émission dite communautaire, en particulier la réglementation inclut, à juste titre, un temps consacré à la politique québécoise. Nous reviendrons à l'étude plus détaillée des articles mais d'ici là, M. le Président, je demanderais au ministre de se pencher plus avant sur cet aspect en le précisait pour nos futurs travaux car ce n'est pas un simple détail. Je pense à la répartition de temps entre les partis reconnus et je pense aussi à un minimum de temps consacré sur ces dix heures.

En somme, M. le Président, le ministre constate avec plaisir, j'en suis sûr, que le Parti Québécois applaudit à sa réglementation et n'apporte des réserves que sur des modalités. Toutefois, nous ne nous faisons pas d'illusion sur la possibilité réelle de mettre en pratique cette magnifique réglementation à l'intérieur du fédéralisme à la canadienne.

Tout au plus, le ministre réussira à soumettre la câblodiffusion à une double juridiction coûteuse et chicanière, où le CRTC et la régie surenchériront dans les concessions et la stérilité pour tirer vers eux la sympathie des entreprises de câblodiffusion, d'où une juridiction coûteuse qui rejoindra celle des maisons du Québec et des ambassades canadiennes, des deux ministères de l'Agriculture, des doubles politiques économiques, des doubles politiques énergétiques, etc. Je ne le lui souhaite pas cependant puisque la mise en place de la régie et de ses instruments serait une chose à faire en moins après l'indépendance. Mais tout en souhaitant bonne chance au ministre, je tiens à lui dire que nous retiendrons soigneusement le texte de sa réglementation pour la préindépendance, une fois débarrassés du carcan fédéral.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est de la télévision en couleur!

LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable ministre des Communications.

M. L'ALLIER: M. le Président, je ne veux pas faire ici de commentaires sur les commentaires et les exposés qui ont été faits par les représentants de chaque parti. En badinant, je soulignerais au député de Lafontaine qu'il a bien passé son message publicitaire à la fin. En définitive, on peut dire que c'est une innovation parce que c'est peut-être le premier message publicitaire sur la câblodistribution.

M. HARDY: Ce sont des propos légers!

M. L'ALLIER: Je crois, M. le Président, que nous pouvons procéder maintenant à l'audition des témoins et des intervenants. Si les membres de la commission étaient d 'accord, nous pourrions entendre dans un premier temps le groupe des câblodistributeurs en commençant par l'Association canadienne de télévision par câble, et ensuite M. Denis Filion, Rivière-du-Loup Câble Ltée, Télévision Saint-Maurice, Cable TV Limited et National Cablevision Limitée. Certains des exposants ont manifesté le désir d'utiliser des moyens audio-visuels et il est évident que cette chose est possible.

Par ailleurs, certains groupes ou certaines personnes ont indiqué leur désir de faire connaf-tre à la commission des points de vue ou des mémoires qu'ils n'ont pas eu l'occasion de présenter jusqu'ici.

Je crois, M. le Président, que les membres de la commission seront disposés à recevoir ces mémoires par écrit, à recevoir ces documents, et je peux assurer ces personnes que nous en tiendrons compte au même titre que les autres mémoires qui ont été déposés et au sujet desquels il y aura présentation ce matin. Alors je ne sais pas s'il y en a dans la salle qui...

Association des journaux quotidiens

M. TOBAN: M. le Président, mon nom est Edmond Toban, je suis secrétaire et conseiller juridique de l'Association des journaux quotidiens. Nous demandons un délai d'une semaine pour déposer notre mémoire à la commission, s'il vous plaît?

M. L'ALLIER: Je serais d'accord, M. le Président, avec ce dépôt dans la mesure où les membres de la commission en seront saisis. Quant à nous, nous en tiendrons compte au moment de la rédaction finale du projet de règlement.

M. TOBAN: Merci!

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Est-ce que cette proposition est agréée par les membres de la commission?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): D'accord!

Association canadienne de télévision par câble

M. L'ALLIER: Le représentant de l'Association canadienne de télévision par câble.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Alors nous allons entendre le représentant de l'Association canadienne de câblodiffusion. Les porte-parole voudront bien s'identifier au début de leurs remarques.

M. GONTHIER: M. le Président, Charles Gonthier, avocat de Montréal.

Je représente, ici, ce matin, avec mon associé, Me Michael Cuddihy, l'Association canadienne de télévision par câble. J'ai à ma gauche M. Orner Girard, de Transvision Magog, qui est le président de la section du Québec de l'association. M. Girard vous présentera à l'instant les autres membres de la délégation qui vous expliqueront eux-mêmes d'abord la position générale de l'association vis-à-vis du projet de règlement dans son ensemble, puis vis-à-vis de certaines dispositions qui paraissent particulièrement importantes dans leurs conséquences comme nous les envisageons.

L'association a déjà produit un mémoire et un sommaire de ce mémoire, préparé et produit d'urgence. Elle a depuis voulu y apporter quelques corrections de détail et précisions qui paraissent dans le sommaire révisé et les errata aux mémoires qui ont également été produits ce matin. Nous n'entendons pas traiter, dans la présentation, devant vous aujourd'hui de tous les aspects du mémoire, mais nous serons évidemment prêts à répondre aux questions qui pourront être posées.

Pour répondre à vos propos en particulier, M. le ministre, je crois que l'association pourra le faire généralement de façon très positive. De fait, nous avons conçu notre présentation, je crois, dans l'optique que vous avez indiquée, c'est-à-dire non pas une optique d'examen en détail des diverses dispositions, mais plutôt une optique des modalités, des possibilités de réalisation des objectifs que vous avez exposés.

Nous sommes donc devant vous, faisant abstraction du débat constitutionnel que nous connaissons tous, dans un esprit d'entière collaboration avec la commission pour vous faire part de notre expérience dans cette industrie en vue d'établir une réglementation qui soit aussi bien adaptée que possible aux besoins, compte tenu des nombreux facteurs et objectifs dont il a été fait état.

Je demanderais maintenant à M. Girard de nous présenter les autres membres de la délégation et l'association fera elle-même sa présentation.

Merci, M. le Président.

M. GIRARD: M. le Président, messieurs de la commission, les représentants de notre délégation sont les suivants: M. Pierre Levasseur, président de National Cablevision; M. Marc Lahaie, vice-président aux affaires corporatives de National Cablevision; M. Conrad Tourigny, président de Cablevision, Asbestos; M. André Chagnon, président de Videotron; et moi-même, président de Transvision Magog, tous faisant partie du comité exécutif du Québec de l'Association canadienne de télévision par câble.

Nous sommes parfaitement conscients de l'importance que vous attachez à ce projet de règlement et c'est pourquoi nous vous avons soumis un mémoire qui a été minutieusement préparé. Cependant, nous croyons utile et important d'élaborer avec plus d'insistance sur certains aspects du projet de règlement. Nous voulons être très positifs dans nos recommandations afin d'assurer le développement harmonieux de la câblodistribution et protéger ainsi l'intérêt de tous les Québécois.

Après avoir traité certains articles particuliers du projet de règlement, il nous fera plaisir de répondre à vos questions. J'inviterais donc maintenant M. Pierre Levasseur, président de National Cablevision, à vous adresser la parole.

M. LEVASSEUR: M. le Président, Messieurs les membres de la commission, l'Association canadienne de télévision par câble représente ici aujourd'hui 55 opérateurs de câblodistribution desservant 90 p.c. de ceux qui ont adhéré à ce type de services au Québec. Le rôle de l'association est de faire connaître des préoccupations communes à tous ses membres, quelle que soit la taille de leurs entreprises; c'est dans ce but que son exécutif est présent devant vous ce matin.

Nous tenons à remercier les membres de cette commission de nous avoir invités à déposer un mémoire et de nous donner l'occasion d'exposer, de vive voix, quelques commentaires. Je crois qu'il est important de bien situer notre intervention d'aujourd'hui. Disons tout d'abord, pour dissiper les doutes que certains pourraient entretenir, que nous tenons à faire écho à l'esprit et au désir de collaboration et de recherche si bien exprimés par le ministre des Communications dans ses propos.

Il va sans dire que, comme entrepreneur oeuvrant dans le secteur privé, au sein d'une industrie jeune et en pleine évolution, dans un des secteurs de pointe que l'on cherche à développer au Québec, nous avons des préoccupations parfois fondamentalement distinctes de celles des législateurs. Alors que nous, nous nous réclamons de l'autoréglementation, par exemple, l'Etat, lui, a décidé de procéder autrement. Nous comprenons cependant les

préoccupations de l'Etat au chapitre des communications et nous reconnaissons que, dans notre secteur, en particulier, une réglementation est inévitable et peut-être même nécessaire pour l'Etat dans le contexte plus vaste de ses préoccupations socio-économiques et culturelles.

Qu'il soit donc clair que les membres de l'association ne s'opposent pas, en principe, à ce qu'une telle réglementation existe; ce à quoi nous devons nous opposer, cependant, c'est qu'il y ait, à l'intérieur de la réglementation proposée, des dispositions qui imposent à notre industrie un carcan qui pourrait retarder ou ralentir le rythme de développement qui lui est nécessaire pour atteindre les objectifs que l'Etat entend poursuivre par le biais de la câ-blodistribution.

L'exécutif de l'association s'est donc penché sur le projet de réglementation avec une attitude qui se voulait constructive. En somme, notre but est de sensibiliser le législateur et de l'aider à éviter de s'engager dans certaines voies qui pourraient s'avérer désastreuses par la suite. Nous ne réclamons par le monopole des connaissances dans le domaine, mais nous osons croire que le fruit de nos expériences collectives devraient être utile aux législateurs.

Ce mémoire se veut, en fait, une indication des effets et conséquences possibles de l'application immédiate de la réglementation telle qu'elle nous est présentement proposée. Les recommandations très détaillées, contenues dans notre mémoire, touchent les articles suivants: La clarification des définitions, l'article 1; la composition des conseils d'administration, l'article 5; le lieu de résidence des actionnaires, l'article 5; les droits acquis de l'entreprise, les articles 4 et 6 ; les entreprises connexes, article 6; l'exclusivité des territoires, article 8; la programmation, l'horaire et l'accessibilité, articles 1, 11, 12, 15, 16 et 18; l'utilisation des canaux, article 20; l'ordre des priorités, article 21; la promotion, articles 24 et 34; le type des réseaux, la grandeur des réseaux, article 26 ; l'approbation des transactions à la production de rapports, articles 27 et 29; la fixation des droits et redevances, article 30; l'établissement des normes techniques, article 31; la propriété et la gestion des équipements, l'installation et les supports de distribution, article 32.

Ce n'est pas notre intention de revoir en détail tous ces articles aujourd'hui, mais nous croyons qu'il est opportun et nécessaire de traiter, de façon particulière, quatre de ces articles en raison de leurs multiples incidences et de leur portée sur l'avenir de notre industrie. Il s'agit des articles portant sur la propriété de l'entreprise, article 5, les entreprises parallèles, article 6, l'ordre des priorités de la programmation, article 21, et finalement, peut-être le plus important pour notre industrie, la propriété des installations et l'accès aux supports de distribution. Ces articles seront commentés brièvement par mes collègues à la fin de mon exposé.

D'ailleurs, d'autres mémoires d'autres compagnies viendront étayer davantage des aspects inquiétants de ces articles tels qu'ils sont présentement formulés.

En résumé, donc, l'association a cru bon de faire connaître, d'une façon très détaillée, les préoccupations qui reflètent d'ailleurs l'état d'inquiétude de l'industrie face à la réglementation proposée. Cette inquiétude est née du fait que l'application immédiate de toutes les dispositions prévues pourrait s'avérer désastreuse autant pour l'industrie que pour l'Etat et les objectifs qu'il poursuit. En ce qui nous touche, une mise en application inopportune indiquerait, de la part des autorités gouvernementales, une méconnaissance de l'évolution technologique et de la nature réelle de notre industrie. Un exemple concret, pour illustrer un tel danger, est celui posé par l'application de l'article 21 portant sur l'ordre des priorités de la programmation.

Nous sommes d'accord sur l'objectif socioculturel sous-jacent à cet article. Toutefois, si l'autorité est chargée d'appliquer cette disposition — demander aux entreprises de se conformer dès maintenant à l'ordre de priorité indiqué — l'objectif visé par cet ordre risquerait d'être compromis, l'entreprise perdant une partie de sa clientèle qui lui est nécessaire aujourd'hui pour assurer la possibilité de faire demain tout ce que la réglementation vise.

Il est clair que, pour atteindre l'objectif visé par l'ordre de priorité, certaines entreprises qui sont déjà en voie d'augmenter la capacité de leur réseau primaire devront accélérer ces travaux. Une fois cette nouvelle capacité atteinte, l'entreprise devrait, par ailleurs, se conformer à l'ordre de priorité indiqué.

Cet exemple illustre bien que le règlement devrait donc comprendre des dispositions transitoires dans le cas des articles qui impliquent des mises de fonds additionnelles, des changements dans les modes d'opération ou des changements de structures de l'entreprise. L'absence, entre autres, de tels articles ou dispositions transitoires, nous a amenés à recommander que la promulgation du règlement soit reportée afin que les autorités compétentes étudient, en coopération avec nos membres, l'impact sur les structures et le financement des entreprises, compte tenu de tous les investissements qui seront requis au cours des prochaines années et qui seront nécessaires afin d'assurer aux Québécois les mêmes niveaux de qualité et la même gamme de services additionnels dont jouissent et jouiront les citoyens des autres provinces, et ceci au même rythme de développement que dans les autres provinces.

Que la commission accepte ou rejette cette recommandation, il nous paraît essentiel que certaines modifications majeures soient apportées aux différents articles du règlement. Même des dispositions transitoires ne sauraient atténuer dans certains cas l'impact à long terme de certaines dispositions dudit règlement.

Nous tenons à assurer cette commission, le ministre des Communications et ses hauts fonctionnaires de notre entière coopération pour poursuivre 1'élucidation des points litigieux. Merci.

Je voudrais maintenant vous présenter M. Conrad Tourigny.

M. TOURIGNY: M. le Président et MM. les membres de la commission, bien que notre analyse détaillée du projet de règlement traite particulièrement des articles 5a) et 5c), nous voudrions ajouter ici quelques commentaires additionnels concernant ces deux articles.

D'abord, l'article 5c) du projet de règlement, qui se lit comme suit: "Les propriétaires de toute entreprise publique de câblodistribution doivent être, dans une proportion de 80 p.c, des résidents du Québec".

Nous croyons qu'il s'agit là d'une réglementation unique dans un secteur de l'industrie québécoise. En effet, aucune règle semblable n'existe dans aucune autre entreprise, même dans les entreprises dites parallèles à la câblodistribution et je citerai, par exemple, la compagnie Québec-Téléphone.

Bien sûr, les distributeurs sont intéressés à motiver le plus grand nombre possible de Québécois à participer a développement de leur industrie, par contre, les réalités économiques peuvent nécessiter une participation supérieure à 20 p.c. de l'extérieur du Québec, tout en demeurant canadienne.

Les préoccupations dont nous faisons état dans notre analyse détaillée du présent projet de règlement se situent principalement au niveau des sources de capitaux. Le présent article, tel que rédigé, limitera la circulation éventuelle d'actions et d'obligations sur le marché public. D'autre part, les institutions financières sont généralement réticentes devant une entreprise sévèrement réglementée dans ses possibilités d'expansion. De plus, une telle limitation en-trafnerait possiblement une attitude négative, voire même des représailles, de la part de nos voisins canadiens.

Enfin, il nous semble que cette restriction va à lencontre de la politique incitatrice prônée par le gouvernement québécois à l'endroit des investissements étrangers dans les industries de pointe du Québec. Conséquemment, l'association recommande qu'à 5c) du présent projet de règlement, l'on substitue aux termes résidents du Québec, les mots suivants: résidents du Canada.

Revenons maintenant à l'article 5a).

Il va de soi, croyons-nous, que les mêmes motifs, invoqués à 5c), s'appliquent également à 5a). On ne peut certes refuser la possibilité aux intérêts minoritaires d'une entreprise de participer au conseil d'administration de cette même entreprise. Ce serait, à coup sûr, chasser toute possibilité de participation à des non-résidents du Québec.

D'autre part, nous reconnaissons que la majorité des administrateurs devraient être Québécois. C'est précisément là la suggestion que nous proposons en conclusion de nos observations sur la proposition faite dans le projet de règlements que nous vous avons soumis concernant l'article 5a). Voilà les quelques commentaires additionnels que nous voulions apporter à notre analyse détaillée concernant ces deux articles.

Je cède maintenant la parole à M. Marc Lahaie.

M. LAHAIE: M. le Président, MM. les membres de la commission, j'aimerais faire quelques commentaires sur l'article 6 concernant l'interdiction d'investissement par certaines entreprises dites parallèles, lequel article apporte encore plus de restrictions sur les investissements dans la câblodistribution.

L'industrie, étant axée sur la distribution de sons et d'images et étant techniquement outillée pour la distribution de formules, de données et d'informations diverses, n'est pas, par contre, la conductrice du contenu à une seule exception: Le canal communautaire, lequel n'existe pas dans tous les systèmes.

Les industries de télévision, de radio, de cinéma et de presse produisent le contenu qui est utilisé sur les voies électroniques et câblodistributeurs et une participation deviendrait nécessaire dans l'avenir. Ces entreprises sont complémentaires à la câblodistribution. Donc, au lieu d'exclure ces média, il serait préférable de juger chaque cas en particulier lors d'une audience de la régie et de ne pas refuser une affiliation qui serait bénéfique à la société québécoise.

De toute façon, les droits acquis devraient être reconnus et certaines compagnies intéressées feront des représentations en ce sens.

Enfin, la fin de l'article, interdisant l'investissement par des sociétés reliées aux entreprises mentionnées plus haut, empêcherait les prêts par des sociétés financières spécialisées, telles les banques, les compagnies d'assurances, les compagnies de fiducie qui ont des portefeuilles diversifiés, d'investir dans cette industrie.

Merci. Je passe maintenant la parole à M. André Chagnon.

M. CHAGNON: M. le Président, nous aimerions faire connaître nos préoccupations sur l'ordre de priorités de l'article 21 du projet de règlements.

L'association a recommandé, dans son énoncé de principe du 6 avril 1973, qui est contenu au présent mémoire, ce qui suit: "L'entreprise de télédistribution, tant et aussi longtemps que subsistera un doute quant à la compétence juridictionnelle en matière de réception et de retransmission des émissions radiodiffusées, s'attend, en fonction de ce qui, jusqu'ici, existait et de ce qui s'implantera par la suite, à ce qu'on n'exige pas d'elle deux ordres de priorités de retransmission d'axiaux parallèles et/ou contradictoires.

Le législateur omet vraisemblablement de contenir cette prescription dans le cadre de deux paramètres suivants, à savoir un nombre raisonnable et techniquement disponible de canaux de transmission et un certain revenu disponible.

Enfin, le législateur aurait vraisemblablement intérêt à préciser ce que sont un poste local, un poste régional et un poste éloigné. Un poste éloigné pourrait être aussi éloigné que Vancouver ou Paris. Il y aurait peut-être lieu de ne pas obliger, en ce sens, le télédistributeur à offrir deux postes d'une même chaîne et à programmation identique.

Il n'y a qu'un nombre limité de canaux disponibles sur un câble. Par ailleurs, on peut s'interroger sur le fondement des données socio-statistiques sur lesquelles repose l'établissement de l'ordre de priorité proposé. Conséquemment, l'association réitère son voeu quant à une collaboration étroite des gouvernements exerçant une juridiction dans le champ en vue de déterminer conjointement un seul et même ordre de priorité. Ce n'est pas à l'industrie de débattre ce problème qui place l'exploitant dans une situation impossible. C'est un problème politique et il appartient aux politiciens de trouver des solutions. Nous retenons que M. le ministre a mentionné dans son introduction qu'il ne laissera pas l'industrie supporter le fardeau de cette double réglementation. L'association recommande que, avant de déterminer tel ou tel ordre de priorité, l'on procède à une étude sérieuse des besoins et des désirs de la population consommatrice de services de télédistribution, en vue de réfléter les tendances du milieu lors de l'établissement de l'ordre de priorité.

Merci, M. le Président. Je donne la parole à notre président, M. Orner Girard.

M. GIRARD: M. le Président, MM. de la commission, nous vous avons soumis plusieurs recommandations concernant votre projet de réglementation. Nous aimerions souligner que l'article 32 est d'une importance capitale pour le public québécois et notre industrie. Si vous le permettez, nous aimerions commenter cet article qui ne semble pas prendre en considération la différence technologique qui existe entre la câblodistribution et la téléphonie.

Le problème soulevé ici entre les compagnies de câblodistribution et les compagnies de téléphone a été également soulevé aux Etats-Unis et a été résolu.

Le jugement suivant rendu par la 5e cour fédérale d'Appel dans la cause General Telephone versus NCTA, américain, en fait foi: "La concurrence sert l'intérêt public. Dès lors, les compagnies de téléphone ne devraient pas être autorisées à s'approprier le marché du câble coaxial à larges bandes de fréquence, à raison du contrôle qu'elles ont des moyens de distribution."

Il ne s'avère pas pratique, du point de vue technique, économique et administratif d'intégrer en un réseau unique les réseaux offrant le service téléphonique et de câblodistribution. Le réseau téléphonique fait usage de paires de fils reliant les abonnés entre eux, en passant par un centre de commutation, tandis que le réseau de télédistribution relie un centre à des abonnés sans qu'il y ait de commutation et ne permet pas à un abonné de communiquer avec un autre abonné.

Les compagnies de téléphone ont, en général, restreint l'usage des câbles coaxiaux à la liaison des centres de commutation. Elles ont laissé savoir leur intention de continuer à offrir la majorité de leurs services, y compris le picture phone, en utilisant des paires de fils.

Une solution logique, qui a, à son actif, un aspect économique et qui élimine toute possibilité de dédoublement, verrait l'évolution parallèle du réseau téléphonique employé pour la distribution des sons, des données et des images, dans le cas du picture phone, et d'un réseau de distribution de communications télévisées à bande large employant du câble coaxial, dans la mesure où l'on utiliserait les mêmes structures, c'est-à-dire celles employées pour la pose du câble aérien dans les conduits souterrains ou enfouis, pour desservir un même groupe communautaire. Ce genre de partage existe déjà en certains endroits.

En présence des faits tels que nous les connaissons maintenant, il y aurait malhonnêteté intellectuelle à prévoir une complète amalgamation, en un système de câbles coaxiaux à larges bandes de fréquence, de toutes les compagnies de téléphone et de tous les réseaux de télédistribution.

Depuis plusieurs décennies, il existe au Canada deux systèmes parallèles: l'un distribue l'énergie électrique; l'autre l'acheminement des communications téléphoniques.

Dans la mesure où les deux systèmes collaborent et utilisent les mêmes poteaux et les mêmes conduits souterrains, personne ne songerait à y redire. Maintenant qu'évolue un troisième système, un câble coaxial possédant des caractéristiques spécifiques, il ne saurait exister de raisons techniques ou économiques qui puissent justifier la prétention de combiner ce nouveau service à l'un ou l'autre des systèmes antérieurs, sauf peut-être sous l'aspect de l'usage harmonieux et commun des poteaux et des conduits.

J'aimerais illustrer ici les différences physiques existantes entre les trois systèmes. Voici un câble électrique, employé par l'Hydro-Québec; un câble téléphonique, composé de paires de fils et un câble coaxial, employé pour la télédistribution; ce dernier n'a qu'un seul fil, au centre.

L'industrie du câble a ouvert la voie aux communications à larges bandes de fréquences et les télédistributeurs n'ont pas l'intention de faire concurrence aux compagnies de téléphone, mais d'autre part, ils ne croient pas devoir

abandonner leurs perspectives de marché domestique au profit de ces dernières.

Lors de l'audience générale du CRTC en avril 1971, l'Association canadienne de téléphone a tenté d'établir la ligne de démarcation entre le véhicule du message et le message de la télédistribution et suggéré que les télédistributeurs limitent leurs efforts à la programmation. Les télédistributeurs font de la distribution électronique, ce fut leur intention première de le faire, mais ils opèrent avant toute chose un service de télécommunication. Que les compagnies de téléphone obtiennent demain le contrôle total de la télédistribution, sans doute elles offriront encore deux réseaux distincts, le câble coaxial relié au téléviseur et paire de fils reliée au téléphone.

Le Canada bat la marche dans l'industrie de la télédistribution. Il est un pionnier dans cette industrie. Le Canada devrait se voir reconnaître le droit de continuer son oeuvre. Que de fois le Canada a-t-il dû compter sur les percées d'autres pays! Néanmoins, cette fois, même après 21 ans, le Canada bat toujours la marche au niveau de la conception, de la gestion des systèmes coaxiaux de communication à larges bandes de fréquences que nécessite la télédistribution.

Au seul chapitre de la compétence, rien ne justifie d'enlever les responsabilités techniques du télédistributeur pour les donner aux compagnies de téléphone moins expérimentées. Des compagnies canadiennes de télédistribution conçoivent, construisent, gèrent et possèdent des réseaux en Europe et aux Etats-Unis sans compter que, à tout moment, les autres pays font appel aux connaissances des Canadiens en la matière. Déjà, les systèmes canadiens de câbles coaxiaux s'étendent devant 80 p.c. des résidences potentielles des territoires délimités par les permis fédéraux d'exploitation. L'imagination, l'énergie et les dollars canadiens ont contribué à leur établissement et ils assurent maintenant un entretien constant qui les maintiennent en parfait état. Les compagnies de téléphone n'ont qu'une faible part à jouer, celle de louer les poteaux ou, dans certains cas, celle de s'octroyer, sans justification aucune, le titre de propriété d'une partie de l'équipement pour l'installation duquel elles ont déjà reçu une compensation, installation qu'elles ont dû faire en prenant en considération des spécifications particulières de la télédistribution.

De plus en plus, les télédistributeurs possèdent leur réseau et font pression afin que les compagnies de téléphone leur accordent la permission d'utiliser les poteaux et les conduits souterrains qu'elles détiennent en servitude et dont elles ont la garde publique. Un exemple dans d'autres provinces: les contrats de l'Alber-ta Telephone et de BC Telephone. Elles donnent l'exemple, en ce sens, qu'elles permettent l'accès aux poteaux.

Déjà, le télédistributeur canadien a construit — du moins prévoit-il le faire — un réseau qui puisse desservir les quatre cinquièmes des familles canadiennes.

Dès lors, au niveau du contrôle de la situation et des installations, il a déjà dépassé l'étape de la planification classique du débutant. L'évolution technologique lui ayant donné un plein essor, il songe déjà aux moyens d'améliorer l'état actuel des choses. Ces réseaux canadiens de télécommunications des 21 dernières années portent maintenant le nom de réseaux de télédistribution. Les trois quarts de l'équipement de distribution appartiennent, de plein titre, aux télédistributeurs canadiens. Les compagnies de téléphone, du moins certaines d'entre elles, s'obstinent à conserver le droit de propriété de l'autre quart, c'est-à-dire du quart principal de distribution, dans le but de conserver un moyen de contrôler le réseau.

Obstination qualifie bien leur conduite car, si un manufacturier devait afficher la même attitude, il serait accusé de faire une concurrence déloyale et illégale et de restreindre la libre entreprise.

Lorsque les télédistributeurs doivent avoir recours aux compagnies de téléphone pour établir leur système de câblodistribution, des restrictions leur sont imposées quant aux comment et aux pourquoi de l'utilisation de ces installations. Ils sont, de plus, soumis à des charges et contraintes financières sur lesquelles ils n'exercent aucun contrôle.

Cet exposé se doit de réfuter certains des arguments formulés par les compagnies de téléphone au cours des deux dernières années. Des compagnies de téléphone affirment qu'elles devraient posséder et exploiter les réseaux de télédistribution et louer aux détenteurs de permis d'exploitation le droit d'utiliser les canaux disponibles, devenir les télédistributeurs de fait, posséder le contrôle et la gestion des exploitations, prendre en main les moyens physiques qui fondent cette industrie pour ne laisser aux détenteurs de permis que le nom de télédistributeur, les réduisant alors à vendre des abonnements et à percevoir des comptes.

Les arguments dont elles se servent pourraient aussi bien s'appliquer à la prise en tutelle de la mécanographie, des bornes de communication, des communications par satellites, du CN et du CP, secteur des communications, et de tout ce qu'elles désirent inclure à leur monopole actuel. Elles prétendent vouloir s'occuper de l'aspect technique des communications afin de laisser aux télédistributeurs le loisir de faire de la programmation. Elles vont même jusqu'à suggérer que, si des réseaux leur appartenaient, ils pourraient servir à transporter en un même véhicule des communications sonores et visuelles du téléphone et de la télédistribution. Mais pourtant elles n'ignorent pas que deux systèmes complémentaires vont continuer d'exister, l'un permettant la commutation et acheminant les communications téléphoniques, même les communications visuelles que nécessite le picture phone, et une multitude de services, de données et d'informations. Un système qui évoluera à partir du système actuel et dont des compagnies de téléphone ont déjà commencé la planifica-

tion et la construction. L'autre aura pour caractéristique spéciale une bande passante large pouvant accommoder une quantité impressionnante d'informations dont plusieurs signaux à sens unique, télévisés ou autres, les quelques incidences de communication à double voix nécessitant un minimum de commutations; une évolution qui peut se faire à partir du système que nous connaissons maintenant.

On pense souvent à l'intégration en affirmant que les compagnies de téléphone rendraient la vie de tout le monde plus simple si elles faisaient tout pour lui. Qu'elles le veuillent ou non, les compagnies de téléphone ne deviendront jamais les interlocuteurs valables des systèmes mécanographiques, des reproducteurs, des télédistributeurs et de l'homme. Les télédistributeurs canadiens ne demandent qu'à pouvoir posséder et exploiter une industrie à laquelle ils ont donné naissance sans les obstacles ou le contrôle des compagnies de téléphone. Ces dernières ont déjà fait l'essai de leur théorie au Québec, mais sans trop de succès.

Ainsi, à Sherbrooke, LaSalle, Roxboro, Bou-cherville, Shawinigan, Trois-Rivières, les câblodiffuseurs, pour améliorer la qualité de leur service ou même le maintenir, ont dû mettre fin à leur contrôle avec Bell Canada pour prendre à leur propre charge l'équipement de distribution, son entretien et le branchement aux résidences.

Au lieu d'un contrat dit complet, que les entreprises que je viens de mentionner avaient, elles ont choisi un contrat qu'on appelle partiel. Alors la compagnie de téléphone, dans un contrat complet, possède toutes les installations et l'équipement, à part le site d'antenne, tandis qu'en vertu d'un contrat dit partiel le télédistributeur possède un titre de propriété tout l'équipement électronique du réseau de télédistribution mais pas le câble.

L'association a dû faire appel à la Commission canadienne des transports pour obtenir une autre forme d'accord basé sur un tarif de location de l'accès aux poteaux. La raison de cette demande est clairement définie par le comité spécial du Sénat sur les moyens de communication de masse aux pages 248 et 249 du premier volume de son rapport et je cite, en traduction: "Un aspect de cette industrie qui nous a fortement vexés est son degré d'enchevêtrement avec les sociétés de téléphone. La plupart des réseaux de câbles louent une partie de leurs câbles des entreprises de téléphone. Quelques exploitants ont pu faire des arrangements avec les compagnies d'électricité ou avec les services publics locaux, mais la plupart ont dû traiter avec des entreprises de téléphone qui exigent d'eux qu'ils leur laissent la propriété du câble principal et se bornent à en louer une partie. "Les effets possibles de cette attitude nous rendent mal à l'aise. Tout d'abord, cette situation revient à dire: Une seule entreprise géante, la société Bell Canada, possède une portion excessive de la structure de base de la diffusion par câble au Canada. Prenons un exemple imaginaire fondé sur des chiffres réels, celui d'un réseau de câbles qui requiert 100 milles de câble coaxial. Le premier paiement à la société de services publics sera d'environ $450,000 et le loyer annuel sera approximativement de $20,000. Le contrat a une durée de dix ans, ce qui veut dire que l'entreprise de télévision par câble aura déboursé en tout $650,000 mais l'accroissement réel de la valeur de son installation est égal à zéro. "Le service public a la propriété du réseau même si c'est l'exploitant qui l'a payé. Si pareil arrangement contient une sorte de logique, ce ne peut être que celle de Pickwick. Ce qui le rend encore plus exemplicable c'est que l'entreprise de diffusion par câble pourrait acheter et installer elle-même le câble coaxial pour environ $350,000. Elle devrait encore payer le loyer des poteaux et conduits mais elle possèderait le cable et aurait un bien réel qu'elle pourrait donner en gage lorsqu'elle voudrait emprunter de l'argent."

L'association est convaincue que l'on ne devrait pas permettre aux compagnies de téléphone de s'approprier le marché du câble de retransmission, du simple fait qu'elles détiennent le contrôle des poteaux en franchise fédérale ou provinciale, comme un bien public à utiliser dans l'intérêt public.

L'usage multiple des structures de distribution par tous les services nécessaires à une communauté est essentiel à l'intérêt public. Le partage des frais de structure de distribution, poteaux ou conduits souterrains pourrait réduire les prix que les consommateurs doivent payer pour le câble, le téléphone et l'électricité.

La Commission canadienne des transports peut déterminer si certaines des exigences prescrites par la compagnie sont raisonnables ou non et rejeter toute exigence de ce genre. Notre industrie est d'avis que Bell Canada doit consentir que les câbles de retransmission soient placés sur ces poteaux, sujets bien sûr à toute exigence raisonnable.

Bell Canada restreint l'usage des conduits loués et refuse d'accepter des conditions raisonnables d'utilisation des poteaux, en violation, selon nous, de sa propre charte. Bell Canada refuse même de discuter de conditions raisonnables pour que les compagnies de câbles puissent utiliser ses installations et a même eu recours au sectionnement du câble d'un cablodistributeur qui refusait de se plier à ses exigences. Cette action a donné lieu à une injonction de la Commission canadienne des transports, qui étudie présentement ces questions.

Cette attitude de Bell Canada est unique en son genre sur ce continent. En général, les services publics et les transporteurs d'informations s'accordent sur des conditions de locations justes pour le client, la compagnie de téléphone et le service public ou la compagnie de téléphone propriétaire des poteaux.

L'ATNT et ses succursales Bell aux Etats-Unis ont, avec les compagnies de câble, des

contrats d'accès raisonnable et il en est de même des compagnies canadiennes de téléphone en Alberta et en Colombie-Britannique. Les compagnies d'électricité au Canada démontrent beaucoup plus de maturité. Les compagnies de câble ont des contrats avantageux avec l'Hydro-Québec, la commission hydro-électrique de l'Ontario, la Commission des services publics de l'Ontario permettant un usage multiple des structures de distribution dans l'intérêt public.

Bell Canada a même exercé des pressions sur l'exploitant du câble indépendant l'obligeant à accepter des conditions de location très onéreuses. En réalité, il paie pour l'équipement et son installation initiale et renonce à son droit de propriétaire. Par la suite, il doit payer une location pour un système qu'il a déjà payé mais qui ne lui appartient pas. Bell Canada a imposé des restrictions arbitraires à l'utilisation et à l'entretien du système de distribution restreignant le commerce opérationnel. Bell Canada, ayant des intérêts investis dans la technologie et les services, tente de prévenir et de limiter l'évolution de nouveaux services de câble sans doute pour ainsi se ménager une position de sécurité dans l'industrie.

Northern Electric, à cause du contrat de propriété partielle avec Bell Canada, fournit le câble de façon non compétitive et il en est de même des coûts de construction puisqu'on utilise la main-d'oeuvre de Bell.

Nous devons donc conclure, premièrement, qu'on ne peut accepter la prétention, qu'ont les compagnies de téléphone, de s'occuper de communication tandis que les télédistributeurs font de la programmation. On a tenté de séparer contenu et contenant, message et véhicule, programmation et distribution, radiodiffusion et transport public pour affirmer que la télédistribution relève de la catégorie contenu, message, programmation, ra-diodiffuseur et que l'aspect communication pur fait partie de la compétence des compagnies de téléphone; il n'y a pas d'erreur plus grossière. Les télédistributeurs, aujourd'hui comme hier, fournissent surtout le contenant, le véhicule et le moyen de distribuer la programmation. Ils assurent, avant tout, un service de télécommunications qui effectue la réception et la transmission de signaux radiodiffusés. Toute autre définition de leur raison d'être n'a pas le moindre sens.

Deuxièmement, les prétentions qui veulent séparer programmation et véhicule, afin de les remettre entre les mains de deux différentes industries, ne font que limiter les efforts en programmation alors qu'ils ne commencent qu'à se faire sentir. On prétend que la télédistribution fait du télédistributeur un directeur de programmation et qu'il devient, à ce moment, incapable de s'occuper d'un réseau de communications. Un tel argument met en danger très sérieux l'avenir de ce nouvel aspect de la télédistribution. On ne peut trancher la question — où finissent les contenus, messa- ge et programmation, et où commencent les contenants, véhicule et réseau de communication — bien qu'il ne fasse aucun doute que le télédistributeur appartienne tout d'abord à l'industrie de communications.

Dans le cadre de la télédistribution, on ne peut effectuer une séparation artificielle et irréalisable. Il faut adopter le concept du système hybride et se rendre à l'évidence: Le télédistributeur exploite un réseau très spécialisé de télécommunications et s'il fait de la programmation, il le fait par surcroit et dans l'intérêt de son public.

Troisièmement, la prétention à un système simple et unifié des communications n'a pas encore à son appui les arguments qui le justifierait aux yeux de tous. Des faits irréfutables — provenant de la conférence de M. E.-B. Rostow, professeur de droit à l'université Yale aux États-Unis et président de la commission des communications, nommé par le président Johnson en 1967-1968 — donnent les raisons d'être de notre pensée. M. Rostow assistait à notre congrès, à Toronto, le 23 mai 1973;c'est alors qu'il a donné cette conférence.

Ces faits indiquent l'émergence de deux types de réseaux de communication en Amérique du Nord, un réseau à double voie, à commutation, à potentiel image et son, auquel donnera naissance le réseau téléphonique actuel, et un réseau coaxial à sens unique pouvant accommoder une très grande quantité de fréquences évoluant du réseau de télédistribution tel que nous le connaissons aujourd'hui. Voilà qui réfute l'argument qui voudrait faire des compagnies de téléphone les seules responsables des services canadiens de communication.

Quatrièmement, le contrôle de la télédistribution par les compagnies de téléphone irait à l'encontre de l'intérêt public. Si les compagnies de téléphone devaient posséder et exploiter les réseaux de télédistribution, elles auraient en même temps le contrôle presque total des raisons physiques de leur existence sur le marché économique, ne laissant aux détenteurs que le rôle de commis, vendeurs et percepteurs.

Dans de telles circonstances, le télédistributeur n'arait plus le contrôle des moyens d'assumer ses responsabilités auprès de ses abonnés, des gouvernements et de l'industrie en général. Il lui faudrait se soumettre aux dictées unilatérales des compagnies de téléphone, y compris à leur théorie de la propriété des terminaux, d'où il en résulterait une industrie stagnante.

L'on ne peut trouver meilleure illustration d'une industrie canadienne qui offre à tous les mêmes degrés de chances économiques que la télédistribution. Il faudrait lui donner tous les droits qu'elle mérite. Des individus ont fait connaître leurs désirs relativement au service de télédistribution. Une saturation de 22 p.c. du marché québécois en comparaison de 10 p.c. du marché américain illustre bien ce fait.

En dernière analyse, ce qui importe dans

l'intérêt public, c'est de fournir un service qui répond aux besoins et aux désirs du public.

Merci, M. le Président et les membres de la commission.

LE PRESIDENT (M. Giasson): L'honorable député de Chicoutimi.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je remercie M. Girard de l'exposé qu'il a fait. Le mémoire qui nous est soumis est certainement l'un des plus importants et il est nécessaire que nous le commentions et surtout que nous interrogions les représentants de l'association qui vient de s'exprimer.

Tout en affirmant sa volonté de collaboration avec le ministère des Communications, votre association, M. Girard, remet en cause certains principes de base de la loi qui a provoqué le projet de réglementation que nous avons à étudier. Peut-être qu'à l'analyse et en discutant avec vous, il nous sera possible de constater dans quelle mesure vous avez l'intention de collaborer à l'instauration d'une politique québécoise des communications.

Ce que je vous dis là n'est pas un reproche, mais simplement l'expression des idées qui me sont venues à la lecture du mémoire et à l'écoute des diverses interventions.

Je voudrais au départ vous poser une question concernant la notion de services publics puisqu'il m'est apparu — et vous me corrigerez si mon impression n'est pas exacte — que la notion de services publics, selon votre association, ne semblerait pas s'appliquer aux entreprises de câblodistribution. C'est la première question que je vous pose.

M. GIRARD: Nous indiquons dans notre mémoire que, si la notion d'entreprise publique veut dire l'obligation de desservir totalement, dans leur ensemble, les territoires, il arrive que, vu que le service actuellement demeure facultatif dans beaucoup d'endroits qui peuvent capter autant de postes sur une antenne que sur le câble de télévision, il en résulterait une perte d'argent pour celui qui ferait l'installation et ne récolterait pas nécessairement suffisamment d'abonnés pour payer son investissement. C'est dans ce sens.

On estime qu'éventuellement, et si on se reporte aux années quatre-vingt, tel qu'il a été mentionné, d'autres services additionnels rendront l'utilité du câble beaucoup plus nécessaire dans chaque foyer; dans un tel cas, la notion de services publics sera peut-être plus réelle qu'elle ne l'est actuellement.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je vous remercie de cette précision M. Girard. Mais il reste que le gouvernement a indiqué son intention de doter les diverses collectivités québécoises des services de câblodistribution. Dans cette perspective, même en tenant compte des situations existantes, de la situation financière, technique, etc., des entreprises actuelles de câblodistribution, est-ce qu'il ne vous apparaît pas nécessaire d'articuler vos politiques et vos programmes de développement sur cette politique énoncée, mise de l'avant par le ministre des Communications qui a manifesté l'intention de doter toutes les collectivités québécoises, dans un délai qu'il assez difficile de prévoir, de ce service de câblodistribution? Est-ce que votre orientation actuelle va dans le sens de cette rencontre ou de cette jonction de vos intérêts avec l'intérêt public, tel que l'a exprimé le ministre des Communications lorsqu'il a parlé de câblodistribution comme d'un service public essentiel?

M. GIRARD: Voici. Nous avons manifesté l'intention de travailler avec M. le ministre. Mais je pense que le procédé démocratique veut que, justement, lors de la présentation d'un document particulier, tel que le projet de réglementation, l'industrie puisse y contribuer et même modifier, même montrer aux législateurs une autre manière de le faire, peut-être sur une période transitoire, qui permettrait justement à cette industrie d'évoluer, parce que notre industrie est jeune.

Lorsque vous manifestez l'intention de câbler tous les endroits de la province de Québec, c'est évident que nous ne sommes pas contre ce principe. Il reste une chose, c'est que le progrès technologique, actuellement, doit permettre l'autofinancement des compagnies privées et doit se faire également dans le but d'être en mesure de répondre à ces exigences. Alors, on ne s'oppose pas du tout au projet de réglementation. Ce que l'on fait, tout simplement, c'est ajouter des suggestions, des modalités en vue de rendre ce règlement plus flexible, dans le but d'atteindre, justement, les objectifs proposés par le ministère des Communications.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Alors, si je comprends bien, M. Girard, vous admettez le principe énoncé par le ministre et qui sous-tend, d'ailleurs, le projet de loi qui a fait l'objet de cette réglementation. Mais vous voudriez que, par le truchement de dispositions transitoires, vos entreprises puissent, petit à petit, s'adapter aux réalités existantes, mais en même temps poursuivre l'objectif qui est de doter toutes les collectivités québécoises de services de câblodistribution.

M. GIRARD: Certainement.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, vous avez évoqué, cela au tout début de votre exposé, le problème de la propriété québécoise et des difficultés financières que cela impliquerait. J'aimerais obtenir de vous des renseignements additionnels ou des précisions en ce qui concerne ce que vous avez appelé les embûches inhérentes à la promulgation du projet de règlements.

Particulièrement à l'article 4, vous dites que

ce projet, s'il était appliqué, restreint l'investissement des Canadiens dans l'entreprise québécoise de télédistribution. Est-ce qu'il vous est possible, ce matin, de nous donner une idée de ces investissements, c'est-à-dire d'établir quelle peut être, en pourcentage, la contribution des entreprises québécoises à tous les systèmes de câblodistribution versus la contribution des entreprises canadiennes ou étrangères? Est-ce qu'en termes statistiques vous êtes capable de nous donner des renseignements à ce sujet?

M. GIRARD: J'aimerais demander à M. Pierre Levasseur, de National, qui est touché par cette question, de répondre à votre question, si vous n'avez pas d'objection.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Certainement.

M. LEVASSEUR: Je ne peux pas répondre pour l'ensemble des entreprises de télédistribution au Québec. Je pense que je pourrais utiliser l'exemple de National Cablevision pour illustrer un peu le problème qui peut se poser ici. Dans le cas de National Cablevision, 60 p.c. de l'entreprise est déjà détenu par des Québécois. Les Québécois qui se sont portés acquéreurs de cette entreprise l'ont fait de la société américaine Columbia Broadcasting System, d'une société anglaise de radiodiffusion. Ils ont gardé avec eux comme partenaire un actionnaire de l'Ouest, de Vancouver plus précisément, qui lui-même est considéré comme le pionnier de la télédistribution au Canada.

Il nous apparaît important dans un domaine comme le nôtre, où la technologie évolue continuellement, de pouvoir avoir accès, par le biais du conseil d'administration par exemple, à des expertises qui viennent de l'extérieur du Québec. C'est dans cet esprit que nous avons fait des recommandations sur la majorité des membres du conseil d'administration.

Je pense qu'il est important aussi de réaliser — là je parle encore pour National Cablevision Ltée — que notre entreprise exerce un leadership qui, de plus en plus, dépasse les limites du Québec. Cette possibilité d'étendre nos activités au-delà du Québec se fait dans le contexte canadien ou étranger, d'habitude en considérant une participation financière ou une participation à des conseils d'administration qui, je pense, est bénéfique, à long terme, pour le Québec.

Ce que nous voulons ici préserver, en faisant les recommandations que nous avons faites, c'est justement cet influx de connaissances, d'une part, et la possibilité de manoeuvrer dans des ententes possibles à l'extérieur du Québec qui font que le contrôle de l'entreprise demeure québécois, que l'entreprise québécoise exerce un rôle à l'extérieur du Québec et qu'en même temps, on bénéficie de la technologie ou des conseils de personnes qui exercent le même genre d'activités ou des enterprises connexes dans d'autres parties du monde entier.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Levasseur, lorsque l'on parle dans votre mémoire, à la page 11: "Que le projet de règlement, s'il était appliqué, restreint l'investissement d'autres secteurs économiques d'importance dans l'entreprise québécoise de télédistribution", est-ce que vous pourriez expliciter cette proposition que vous soumettez à la commission?

M. LEVASSEUR: A ce moment-là, on commente l'article 6 qui, en somme, a deux parties. La première partie, c'est celle qui propose que certaines entreprises ne puissent être détentrices d'un permis de câblodistribution et nous retrouvons dans cette préoccupation celle de l'Etat d'éviter la concentration des média. Jusque-là, je pense qu'on peut partager cette préoccupation.

La deuxième partie de l'article — et c'est peut-être la rédaction qui porte à confusion et c'est cela que nous voulions soumettre au législateur — cette deuxième partie peut dans l'avenir nous empêcher de conclure certaines ententes avec des entreprises qui sont dans le même domaine. Si l'on prend, par exemple, une des préoccupations du règlement, qui est celle de créer de toutes pièces, si on veut — parce qu'il n'existe pas comme on l'envisage — du software québécois, du contenu québécois, je pense qu à certains moments, il va falloir permettre à l'entreprise de câblodistribution une certaine flexibilité pour qu'elle puisse entrer par entente, même par participation financière, dans des ententes avec des compagnies qui sont dans le domaine du software; et nous voulons mettre le législateur en garde contre cela.

C'est dans la rédaction, telle qu'elle est actuellement, il nous semble, que ce danger existe, c'est-à-dire qu'on en élimine la possibilité dans l'avenir, d'une part; mais aussi l'article peut s'interpréter même, peut-être d'une façon plus grave encore, dans notre cas en particulier; mais la rédaction, si on la comprend comme il faut... Si, par exemple, on dit, par le biais de l'article, qu'un instrument comme une société d'assurance, qui aurait aussi des actions dans une société de presse, ne pourrait pas être actionnaire d'une société de câblodistribution, cela commence à restreindre pas mal les sources d'investissement qu'il serait possible d'intégrer dans le capital-actions d'une entreprise comme la nôtre. Nous croyons que ce n'est pas le but du législateur, nous croyons que la rédaction porte à confusion et nous aimerions la voir clarifiée.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Quand vous parlez de software, vous parlez de contenu en termes de programmation, en terme d'émissions et vous avez laissé entendre que vos entreprises pourraient, par voie d'ententes, louer des émissions que vous appelez du software.

M. LEVASSEUR: J'irais plus loin que cela. Un autre article de la réglementation telle qu'elle nous est proposée nous incite à essayer

de développer le cinéma québécois. Je pense que la télévision par souscription, par exemple, qui est celle de permettre à l'abonné de voir le film qu'il veut voir au moment où il veut le voir, c'est possible. Est-ce que ce sera du film québécois ou si cela sera autre chose? Nous, nous pensons que le film québécois devrait être privilégié. Pour le favoriser et pour vraiment lancer l'industrie, je pense qu'il va falloir, dans des cas comme cela, songer à des participations de sociétés de câble avec des sociétés de cinéma ou avec des sociétés de télévision ou avec des postes de télévision, et c'est cela que je vise quand je parle de software.

Je ne parle pas seulement de la programmation communautaire comme telle qui existe déjà ou qui est en voie d'évolution ou de nouveaux softwares qui pourraient être développés. Je donne l'exemple du cinéma. Je ne me rappelle pas le numéro de l'article, 19 je pense, nous incite justement à encourager...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le cinéma. M. LEVASSEUR: ...le cinéma.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, M. Levasseur, ou M. Girard, toujours au sujet de la propriété québécoise et de ses conséquences, des résidents du Québec et tout ce qui se greffe à cet article, vous avez déclaré, soit M. Girard ou un autre, je ne me souviens pas, que, si la réglementation était appliquée telle quelle, vous craindriez des représailles de ce que vous avez qualifié de voisins canadiens. Qu'est-ce que vous entendez par représailles et est-ce que vous avez des exemples qui pourraient illustrer votre avancé?

M. LEVASSEUR: Lorsqu'on parle de représailles d'autres citoyens du Canada, je pense que tout à l'heure j'ai dit que, dans notre cas en particulier, nous aimerions étendre nos activités au-delà de la province. Je pense qu'il est bien sûr que, si on avait un règlement qui proposait que l'entière, la totale, la grande partie ou 80 p.c. doit être détenu par des Québécois, je pense qu'il est normal qu'on s'attende à la même réaction dans une autre province. Nous avons déjà eu une indication à cet effet-là que l'entreprise là-bas verrait d'un mauvais oeil qu'on essaie d'aller s'implanter dans un secteur où, selon elle, le gouvernement, son gouvernement devrait faire ou adopter la même politique que nous.

S'il s'agit d'une participation minoritaire, je pense bien que le problème est moins grave mais, s'il s'agit d'un désir d'une participation majoritaire ou d'une participation importante, c'est certainement, je pense, indicateur de l'attitude que prendront certaines autres provinces.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, M. Levasseur, est-ce que l'expérience que vous avez acquise dans ce domaine et l'expérience de l'association à laquelle vous appartenez vous indiquent que les investisseurs québécois ou les capitaux québécois sont, à l'heure actuelle, insuffisants et que les entreprises de câblodistri-bution ne pourraient pas, à l'heure présente, compter pour leur financement uniquement sur des sources québécoises d'investissement?

M. LEVASSEUR: Non, je pense que, jusqu'à maintenant, l'industrie québécoise a réussi parfois de peine et de misère à s'autofinancer. Ce qui vraiment va conditionner la continuité du flot d'argent dans l'entreprise, je pense, c'est le type de réglementation ou le cadre dans lequel on devra fonctionner. Nos fonds vont devoir provenir de plus en plus d'émissions publiques et l'investisseur québécois, en particulier, n'est pas reconnu comme étant un investisseur qui plonge dans les actions. Nous devrons compter sur un cadre réglementaire qui permet à l'entreprise d'évoluer, qui permet à l'entreprise d'indiquer à ces investisseurs potentiels que ce sont des entreprises viables, que l'investissement qu'ils considèrent en est un qui peut être rentable pour eux. Ce sont, je pense, toutes les conditions que nous visons à assurer pour que cet autofinancement existe.

Revenons à votre première question en termes de notion de services publics. Cette notion, par exemple, si elle donnait lieu à une indication précise aux sociétés de développer des secteurs non rentables prioritairement, une politique de ce genre pourrait avoir un effet négatif, je pense, sur les possibilités de financement par le biais du marché de la Bourse.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Outre, M. le Président, les...

M. LEGER: Est-ce que le député me permettrait seulement une sous-question pour comprendre l'exemple qu'il vient de donner?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Un instant, s'il vous plaît ! Je vais poser une autre question et peut-être que cela va vous aider. C'est parce que je ne veux pas prendre tout le temps, je vais vous laisser la parole bientôt.

Est-ce que, M. Levasseur, quand vous parlez d'investissements, vous parlez simplement en termes de capitalisation? La crainte que vous avez de voir réduite la masse des investissements, est-ce que, dans votre esprit, cela s'exprime simplement en termes de capitalisation ou si cela s'exprime également en termes de commandites, par exemple, de revenus qui proviendraient de l'annonce ou de la réclame publicitaire, etc.? Est-ce que vos craintes vont des deux côtés?

M. LEVASSEUR: Disons que pour les revenus qui pourraient provenir de la réclame, ce domaine est tout à fait nouveau pour nous parce que nous n'en avons pas dans le moment.

Alors, il est difficile pour moi de commenter les montants que cela va nous rapporter.

Disons que la préoccupation dans le financement est celle de trouver les capitaux nécessaires à, continuellement, faire la mise à jour de nos réseaux, la reconstruction. Je pense, par exemple, pour donner une indication, qu'un mille de câble coûte $6,000 et cela s'en va rapidement vers $7,000 à cause des charges, etc., qui augmentent.

Nous avons parlé tout à l'heure de services additionnels. Nous avons parlé, dans notre exposé d'ouverture, d'être capables d'accéder à l'ordre de priorité. Vous allez voir, dans la présentation d'autres groupes, en particulier, l'impact financier qu'exige la reconstruction d'un réseau dans la ville de Montréal pour le faire passer de douze à trente canaux. Ce sont des investissements de grande envergure et l'autofinancement par le biais de l'abonnement, surtout que le taux d'abonnement n'a pas changé depuis 1968 dans la plupart des entreprises, est quand même limité comme source. Il faut aller en chercher à l'extérieur et je pense en passant qu'on vient de souligner que plusieurs personnes ont cette impression que les compagnies de câbles sont très rentables. Moi, j'administre une compagnie et je peux vous dire le contraire.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous pourriez nous donner des chiffres? Vous dites ceci: Présuppose un niveau de profit non fondé pour l'entreprise québécoise de télédistribution. Là, vous touchez le problème de vos revenus. Vous venez d'ailleur de l'évoquer ce problème. Est-ce que vous avez des tableaux qui nous permettraient de voir s'il y a profit ou non et quelle est l'importance de ces profits?

M. LEVASSEUR: Si vous le voulez bien, j'aimerais que vous posiez la question aux actionnaires des entreprises plutôt que...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Bien, remarquez monsieur, vous représentez quand même une association importante. Je ne puis pas requérir l'avis de tous les actionnaires, ne les connaissant pas et sachant qu'ils ne sont pas ici présents. Or, vous êtes les porte-parole des diverses associations et, partant, des actionnaires eux-mêmes, il est donc important que nous connaissions, du moins dans ses grandes lignes, l'état financier de ces entreprises de télédistribution dont vous nous dites qu'elles ne font pas les profits que l'on présuppose.

M. LEVASSEUR: La raison pour laquelle j'hésite à répondre, naturellement, c'est qu'entre nous, on s'échange des informations, mais on n'a jamais, entre nous, établi nos états financiers, de l'un à l'autre.

Je pense qu'il est important de faire une distinction entre la grandeur de l'entreprise, son territoire d'exploitation, la qualité du réseau.

Vous donnez un chiffre qui représente le rendement général des entreprises, je pense que ce serait peut-être remplacer une mauvaise impression par une autre qui est peut-être mal fondée. D'ailleurs, l'objet de notre deuxième recommandation, dans notre mémoire, si vous vous en souvenez, était de procéder à une étude justement qui permettrait de revoir toutes ces choses. Mais la raison pour laquelle je vous ai mentionné tantôt que vous devriez peut-être poser des questions à des actionnaires, c'est que lors de la présentation du mémoire de Cable TV Ltd et de National Cablevision les actionnaires seront présents.

Alors, si, à ce moment-là, vous jugez bon de poser la question à une compagnie en particulier, je. pense que ce serait le temps idéal.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je ne veux pas priver mes collègues de leur droit de parole; nous aurons énormément de questions à poser parce que, au fait, vous n'avez pas l'air très sympathique au développement des réseaux communautaires. Vous mettez en cause le bien-fondé de la législation en ce qui concerne les priorités établies par la réglementation, par le projet de réglementation, la programmation, etc., et il y a cet énorme problème, puisque c'en est un, de vos relations avec les sociétés de téléphone.

Vous vous imaginez bien que ce n'est pas en quelques heures que nous pourrons épuiser ensemble les questions que nous avons à vous poser vu l'importance des groupes que vous représentez.

M. le Président, je n'insiste pas pour le moment. J'y reviendrai ou mes collègues y reviendront mais je laisse la parole à d'autres représentants des partis.

LE PRESIDENT (M. Giasson): L'honorable député de Lafontaine.

M. LEGER: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Giasson): Le droit de parole est retenu.

M. LEGER: ... M. Levasseur disait tantôt, en ce qui concerne la compagnie qu'il représente — je crois que c'est National Cablevision — que vous aviez déjà 60 p.c. d'actions détenues par des Québécois et qu'il n'y avait qu'un propriétaire qui possédait à peu près 40 p.c. et qui est en dehors du Canada. Est-ce que j'ai bien compris?

M. LEVASSEUR: Non, je m'excuse, je n'ai pas donné la réponse au complet. 60 p.c. des actions sont détenues par des Québécois, 20 p.c. par la Columbia Broadcasting System, de laquelle on a acheté la compagnie, en partie, et 20 p.c. sont détenues par le groupe Welch de Vancouver, qui sont justement les pionniers que je mentionnais tout à l'heure.

M. LEGER: C'est cela. Je vois qu'il y a peut-être 120 entreprises de câble dont deux ou trois regroupent 70 p. c. de la clientèle, entre autres, Cable TV. Est-ce que le représentant de Cable TV est ici?

M. FERGUSON: Oui.

M. LEGER: Est-ce que vous pourriez nous dire quel est, actuellement, le pourcentage d'intérêts québécois qui contrôlent Cable Television? Je pense bien qu'à vous deux vous avez au-delà de 200,000 abonnés.

LE PRESIDENT (M. Giasson): Si le député de Lafontaine nous le permettait, je crois que ces gens ont déposé un mémoire et, tout à l'heure, ils vont le commenter.

M. LEGER: Juste cette question-là.

M. FERGUSON: Tous les actionnaires de Cable TV sont des résidents du Québec.

M. LEGER: Parfait, merci. Une autre question, peut-être, à l'association comme telle, soit M. Girard ou M. Levasseur. Vous êtes dans ce domaine depuis quand même assez longtemps pour connaître certaines données dans le domaine des investissements. Etes-vous au courant de la quantité d'intérêts québécois qui sont investis dans des compagnies de cable en dehors du Québec, un pourcentage approximatif? D'abord, est-ce qu'il y en a et est-ce que cela représente un certain pourcentage?

M. GIRARD: Personnellement, je ne suis pas au courant du pourcentage qu'il pourrait y avoir dans d'autres provinces. Je ne sais pas si d'autres des directeurs pourraient apporter une réponse à cette question.

M. LAHAIE: M. le Président, vous demandez quels sont les investissements de câblodistribu-teurs du Québec en dehors du Québec.

M. LEGER: C'est-à-dire des intérêts québécois qui seraient dans des entreprises de câblodistribution en dehors du Québec.

M. LAHAIE: En dehors du Québec, il y a déjà un exemple ici.

M. LEVASSEUR: Je pense que M. Ferguson peut vous répondre.

M. FERGUSON: Je parle pour une seule compagnie, Cable TV Limited. Nous avons une moitié du système à Brockville en Ontario et presque 24 p.c. d'un des deux systèmes à Ottawa.

M. LEGER: C'est donc dire qu'il y a déjà des Québécois qui s'intéressent à investir en dehors du Québec. Je vois que les deux plus grosses, du moins, compagnies de câble actuellement ont, l'une 60 p.c. de ses intérêts québécois et l'autre 100 p.c. de ses intérêts québécois. Alors, où est la peur de ne pas être capable d'obtenir 80 p.c. d'intérêts québécois, alors que déjà une compagnie est très près et l'autre l'a entièrement?

M. LEVASSEUR: Disons qu'on ne veut pas fermer la porte, tout simplement. On dit: Pour que le contrôle soit détenu par les Québécois, nous ne croyons pas qu'il soit nécessaire d'avoir 80 p.c. comme tel. La notion de contrôle se définit de façon différente pour certaines personnes, mais dans le domaine du contrôle d'une compagnie, il se présente deux cas: le cas d'une compagnie dont les actionnaires sont privés et le cas d'une compagnie dont les actionnaires sont publics. Vous pouvez exercer le contrôle dans le cas d'une entreprise dont les actionnaires sont diffusés largement avec un bloc de 15 p.c. ou de 20 p.c; dans le cas d'une société qui a des actions détenues en privé, 51 p.c. donnent effectivement le contrôle.

Tout ce que nous disons, c'est que si on a déjà le contrôle et si on n'a pas l'intention de le laisser partir, si on veut ouvrir des portes pour aller à l'extérieur... Je pourrais donner un exemple, suite à votre première question. Nous sommes impliqués dans la propriété d'un manufacturier d'équipement de câblodistribution. Cela nous parait important qu'on soit impliqué dans un manufacturier qui n'est pas au Québec, qui est en dehors du Québec. Cela nous paraît important, parce qu'un jour peut-être, par cette participation-là, on pourra ramener une partie ou la totalité de cela au Québec; on ne veut pas fermer cette porte-là.

M. LEGER: Vous croyez que cela la fermerait? Vous faisiez allusion, tantôt, aux représailles et au fait qu'il pourrait y avoir une réglementation semblable en Ontario

M. LEVASSEUR: Disons que cela peut la fermer sur ce plan-là, mais cela peut aussi, je pense, inquiéter les investisseurs probables, lors d'une émission publique, si les 80 p.c. doivent être détenus par des Québécois, parce que le marché de la Bourse c'est international.

M. LEGER: Maintenant, le domaine des communications avec le problème de la barrière de la langue ou de la culture qui est différente, ce n'est pas la même chose que d'avoir des intérêts dans des compagnies complémentaires à votre industrie.

M. LEVASSEUR: Je pense que j'ai noté ça dans notre déclaration d'ouverture quand j'ai dit qu'au chapitre des communications il nous paraît essentiel que l'Etat cherche, je pense, à avoir des mesures qui assurent un contrôle québécois dans ce domaine. Nous ne sommes pas contre ça.

M. CHARRON: Je veux vous faire remarquer que M. Ferguson, de Cable TV, vient de donner un exemple contraire à ce que vous venez d'affirmer en disant que cette compagnie ayant 100 p.c. de ses actionnaires résidant au Québec a quand même réussi à investir à l'extérieur du Québec, à Brockville.

M. LEVASSEUR: II a dit 24 p.c.

M. CHARRON: Oui, il a dit 24 p.c. presque maintenant, j'imagine qu'ils sont encore sur le jeu du marché ontarien et qu'ils peuvent devenir actionnaires bientôt dans des entreprises de ce genre.

M. LEVASSEUR: II n'est pas dit que le gouvernement de l'Ontario n'introduira pas une réglementation lui disant de vendre ses actifs en Ontario, par exemple.

M. CHARRON: II est possible toujours pour un gouvernement de faire cette protection à cause du domaine bien particulier et c'est justement pourquoi on est à étudier un projet de réglementation. C'est une nécessité pour toutes les collectivités de se donner une réglementation. Je pense que là-dessus vous n'avez pas lésiné, vous avez endossé le principe d'un projet de réglementation à cause du sujet bien particulier de la télévision et du projet communautaire. Le gouvernement de l'Ontario, il nous a peut-être dans certains domaines devancés dans la protection de sa collectivité. Le gouvernement canadien a une protection de la collectivité par rapport à l'envahisseur américain. Toutes les collectivités le font. La nôtre, à son tour, vient se donner une protection. Vous avez parfaitement raison de dire qu'il est possible que les gouvernements autres, à l'intérieur de la confédération canadienne, se donnent une réglementation de ce type. Moi, je dis: C'est parfaitement normal aussi qu'ils le fassent. Partout il y a ce réflexe de la collectivité de se protéger et tout le monde sent que l'instrument essentiel pour sa protection comme en même temps son épanouissement, c'est la télévision et la télévision par câble.

M. LEVASSEUR: Je pense qu'en principe...

M. LEGER: Le danger est quand même inverse pour la collectivité anglophone. Je ne pense pas qu'il y aurait un danger à cause des intérêts québécois dans le domaine des communications en Ontario, qu'il y aurait un danger comme ça peut être le cas pour la langue anglaise auprès de la collectivité québécoise. Il n'y aurait pas le même danger du ; côté de l'Ontario.

M. LEVASSEUR: Je pense qu'en principe nous ne sommes pas en désaccord. Notre rôle comme membres de l'association, comme câblodiffuseurs dans un secteur de pointe qui est en train de se développer, qui veut se développer rapidement et qui veut s'étendre à l'ensemble du Québec, le plus rapidement possible, je pense que c'est notre devoir de vous dire: Comme entrepreneurs on voit tel risque, tel risque, tel risque. Ce sera au législateur de nous dire ce qu'il veut, mais nous venons ici pour vous mettre en garde contre ce risque. Si vous, dans votre analyse, vous en déduisez qu'il n'en a pas de risque ou que le risque que vous venez de décrire est plus important, ce n'est pas à nous de décider c'est au législateur.

M. LEGER: D'accord. Vous avez donné plus loin — je pense que c'est M. Girard qui le disait tantôt — un cas typique avec des chiffres réels, avec une projection ou une situation imaginée. 100 milles de câble loués, mettons, coûteraient $450,000 de base plus $20,000 de loyer; donc, en 10 ans, $650,000. Cela revenait à vos $6,000 du mille. Cela est pour la location. Avez-vous évalué sur 100 milles de câble combien ça coûterait d'investissement total, non pas pour une location, mais pour une implantation d'infrastructure sur un territoire de 100 milles?

M. GIRARD: Voici, ce qu'on vous a soumis ça provenait d'une citation du comité du Sénat. Le coût d'installation du câble, de capitalisation est d'environ $6,000 de mille.

M. LEGER: L'installation? M. GIRARD: L'installation.

M. LEGER: Tantôt c'était plutôt le coût du loyer.

M. GIRARD: Non, on vous a dit que pour 100 milles de câble ça coûtait $450,000 d'investissement plus $20,000 de loyer par année. Un contrat de dix ans avec une compagnie de téléphone voulait dire $200,000 de plus, ce qui faisait un tout de $650,000, capitalisation et loyer, sur une période de dix ans. Mais l'opérateur de câble n'avait comme valeur réelle que zéro, parce qu'il avait payé la compagnie de téléphone pour l'installation du câble et la propriété demeurait au téléphone.

M. LEGER: Ah, vous voulez dire par là que les $450,000 pour l'installation, qui serait faite par une compagnie de téléphone, ce coût, qui est un coût que la compagnie de téléphone a à subir, elle le réclame, elle le facture à la compagnie de câble en plus du loyer.

M. LEVASSEUR: Oui.

M. LEGER: Alors, ce n'est pas uniquement $200,000 que cela coûterait de location; cela coûterait $650,000 et vous n'êtes pas propriétaire.

M. LEVASSEUR: C'est ça. Il ne nous reste plus d'actif.

M. LEGER: Ce problème, comme de raison, est infiniment complexe. J'ai souligné tantôt, dans ma déclaration d'ouverture, qu'un investissement de départ d'une infrastructure pour un groupe communautaire, c'est une limitation ou une contrainte difficile. Ils n'ont peut-être pas les mêmes capitaux. Pour une compagnie privée, qui travaille dans un domaine public, c'est peut-être aussi un investissement. C'est peut-être moins onéreux.

Mais pour vous, jusqu'à présent, il y a un problème quant à cette location, parce que sur le plan d'un bilan, pour pouvoir faire des emprunts, vous n'auriez pas une image de capitalisation, de valeurs, de garanties. Je pense, comme je le disais tantôt, que c'est quelque chose de très complexe. Il y a des solutions intermédiaires qui pourraient, je ne sais pas... entre autres, que le câble central ou coaxial pourrait appartenir à une compagnie de téléphone et rejoindre les foyers par des câbles qui seraient la propriété de la compagnie de distribution. Il y a plusieurs solutions intermédiaires à trouver. Je trouve que c'est une chose qui devrait être laissée à la régie et que cet article ne devrait pas être adopté avant que l'on ait entendu toutes les personnes, tous les groupes intéressés là-dedans.

C'est assez complexe. Vous m'avez quand même touché sur ce point-là mais cela ne règle pas le problème de la télévision communautaire.

Un dernier point que je voudrais poser avant de laisser la parole...

M. GIRARD: Seulement un instant. Si on installait les mêmes 100 milles de câble nous-mêmes, cela nous coûterait $350,000. Il y a tout de même une différence de $100,000.

M. LEGER: Ah, c'est le chiffre que je voulais avoir tantôt. C'est ça.

M. GIRARD: Ce que vous avez mentionné tantôt, au début, vous parliez d'un montant total de $650,000. Alors, c'est pourquoi je l'ai réexpliqué. Si on fait l'installation de notre propre câble, notre propre usage, notre propre maintenance, évidemment, cela nous coûte meilleur marché et on...

M. LEGER: Cela coûte meilleur marché que si Bell Canada, ou une autre compagnie de téléphone l'avait fait.

M. GIRARD: Oui.

M. LEGER: Quant à elle, cela lui coûterait $100,000 de plus...

M. GIRARD: C'est ça.

M. LEGER: ... parce qu'elle exige probablement plus que le prix que cela lui coûte.

M. GIRARD: Oui.

M. LEGER: Maintenant, l'autre question porte sur l'article 32. Vous parliez, à cet article 32, de l'obligation de la régie: "Que la régie doit ordonner l'utilisation par l'entreprise publique de câblodistribution...". A ce moment-là, vous vous sentiriez obligés d'utiliser les services ou la structure ou l'infrastructure d'une compagnie de téléphone. Est-ce que si c'était, peut-être, je ne sais pas, une obligation pour la compagnie de téléphone de le louer sans que vous soyez obligés de la louer mais que vous ayez le choix de le faire vous-mêmes, est-ce que cela vous conviendrait mieux?

M.GIRARD: Notre suggestion est celle-ci: D'ailleurs, l'étude américaine, qui a été faite à ce sujet par le FCC... on a obligé les compagnies de téléphone à permettre l'accès aux poteaux parce que c'est un privilège de droit public qu'il y ait un poteau là. Nous avons fait la même demande, évidemment, à la Commission canadienne des transports. Alors, sur le poteau, autrefois, vous aviez l'Hydro-Québec et les compagnies de communications. De là, vous avez un troisième service que vous appelez "services publics" actuellement. Alors ce privilège d'avoir un poteau sur les voies publiques, évidemment, il devait être accessible au troisième service qui est nous-mêmes. C'est la raison pour laquelle on le suggère dans notre mémoire.

LE PRESIDENT (M. Giasson): Le député de Frontenac.

M. LAHAIE: M. le Président, simplement une précision. Vous parlez simplement de coût comparatif pour le câble, la compagnie de câble ou le téléphone. Ce n'est pas tout. Le plus important, c'est la contrainte dans l'emploi de ce câble. C'est que si quelqu'un d'autre est propriétaire, à ce moment, la compagnie de câblodistribution n'aura pas la latitude de développer tous les services additionnels qu'elle voudrait développer sur ce câble, parce qu'elle pourra toujours être empêchée par la compagnie de téléphone de dire: Non, nous allons le faire nous-mêmes. C'est surtout le point important cela, et nous croyons que, dans la libre entreprise, il y aura plus de chances pour les deux compagnies de se faire concurrence si elles le veulent, mais la concurrence ne dure pas longtemps. En effet, si le téléphone peut rendre un service mieux que nous, qu'il le fasse. Par contre, si nous pouvons le faire plus économiquement que le téléphone, ce serait peut-être à nous de le faire.

M. LEGER: Le grand problème, c'est qu'on ne sait pas jusqu'où l'industrie du câble peut aller. L'avenir est grand et il y a des contraintes qu'on pourrait se donner avant d'avoir vérifié toutes les possibilités.

M. LAHAIE: Oui, je crois d'ailleurs que nous avons des exemples concrets dans le moment. Si nous prenons ce qui se fait aux Etats-Unis, dans certains domaines techniques, ils nous ont devancés maintenant, seulement depuis quel-

ques années. On peut prendre l'exemple du système Mitre de Washington. Prenons certaines des villes, là-bas. On voit tous les services qu'ils ajoutent. Aujourd'hui, la technique permet, par la câblodistribution, d'amener énormément plus de services qu'on peut faire maintenant. Les équipements existent. Il s'agit simplement de pouvoir en avoir la demande. Nous visons à cela. Ce n'est pas simplement un rêve. C'est une chose d'aujourd'hui.

LE PRESIDENT (M. Giasson): Le député de Frontenac.

M. LATULIPPE: Pour rester sur le même sujet, j'aimerais demander à M. Girard s'ils ont fait une évaluation. Advenant le cas où les compagnies de câblodiffusion auraient la propriété intégrée de tous les équipements et la mise en service, est-ce que cela leur permettrait de réduire leur coût au consommateur d'une façon appréciable ou si elles envisagent tout simplement d'augmenter leurs profits?

M. GIRARD: Par le fait de posséder notre propre câble, évidemment, nous pourrions couvrir des territoires beaucoup plus que nous ne le faisons actuellement, parce que cela nous donnerait de l'argent supplémentaire pour couvrir ces territoires. Le fait que le coût actuel d'installation nous revient plus cher nous oblige à planifier sur de plus longues années l'installation des câbles. Tout à l'heure, M. Tremblay a mentionné que nous ne semblions pas être sympathiques à leur installation dans tout le Québec. Nous y sommes sympathiques. Il reste que l'on couvre, actuellement, dans les plus grandes villes, 90 p.c. des abonnés du Québec.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Girard, si vous me le permettez, quand j'ai fait, tout à l'heure, l'observation que vous venez de relever, c'est que vous semblez être opposé à l'idée d'obligation qui est inscrite et dans le projet de loi et dans le projet de règlement. Il y a le mot obligation. Vous avez bien parlé de services facultatifs versus services obligatoires, ce qui me permettait de conclure que vous aviez quelques réticences en ce qui concerne l'obligation qui vous serait faite d'implanter des services de câblodistribution là où il y a les communautés, les collectivités importantes. Cela s'infère de vos propos. Je vous ai dit qu'il vous appartiendrait de dissiper les équivoques.

M. GIRARD: Peut-être que je me suis mal exprimé. Disons que tous les principaux centres du Québec sont couverts actuellement. Les demandes ont été faites et elles ont été accordées. Il y a 145 entreprises, au Québec, de câblodistribution. D'autres demandes vont venir pour d'autres endroits, mais c'est évident que les centres urbains, les plus grands centres en premier, étaient ceux auxquels on pouvait s'attaquer.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous n'avez rien contre l'obligation qui pourrait vous être faite par voie de loi ou de réglementation d'installer des câbles par tout le territoire du Québec, là où, évidemment, il y a une population importante à desservir?

M. GIRARD: Evidemment, nous n'aurions pas d'objection.

M. LEVASSEUR: Je pense que le législateur devrait quand même être conscient de l'impact d'une telle obligation. C'est cela qu'on a voulu faire ressortir, je pense, M. Tremblay. Je trouve un peu déplorable que vous interprétiez nos interventions comme étant négatives.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): Messieurs, je voudrais bien préciser. Il ne s'agit pas d'interprétation négative. Il s'agit de tirer les conclusions de ce que vous avez dit et il vous appartient, à vous, de nous désabuser si nous le sommes. Vous parlez de l'impact. Vous pouvez, en accordant un minimum d'intelligence aux législateurs, croire que les législateurs sont conscients de l'impact particulièrement en ce qui concerne l'entreprise privée et vous avez devant vous un défenseur de l'entreprise privée.

LE PRESIDENT (M. Giasson): Messieurs, la commission suspend ses travaux jusqu'à 14 h 30.

(Suspension de la séance à 12 h 31)

Reprise de la séance à 14 h 40

M. GIASSON (président de la commission permanente de l'éducation, des affaires culturelles et des communications): A l'ordre, messieurs!

La commission poursuit ses travaux et, au moment de suspendre la séance, la parole était au député de Frontenac. Je l'invite à continuer son interrogatoire.

M. LATULIPPE: J'étais sur la question relative à l'article 32, où on parle de la propriété des équipements de base ou de l'infrastructure des câbles. J'aimerais demander à M. Girard si, effectivement, puisqu'il nous a dit que, d'une part, la situation actuelle équivalait à une hausse accrue des coûts, il nous a dit également que, si l'entreprise privée récupérait, je veux dire l'entreprise autre que celle de l'entreprise de télécommunication ou de téléphone, autre que celle des propriétaires de câbles, récupérait cette infrastructure, cela ne signifiait pas nécessairement une baisse pour les usagers mais que, d'autre part, cela signifiait peut-être une augmentation de la qualité des services, est-ce que vous seriez en mesure de nous donner des exemples? Parce que cette expérience a déjà été vécue par le passé où les entreprises de câblodiffusion... Vous avez mentionné tout à l'heure Sherbrooke qui avait délaissé les entreprises de télécommunication au niveau de la propriété du secteur principal ou de l'infrastructure de l'entreprise, au niveau du "main" que j'oserais appeler. Est-ce que vous savez exactement pour quelles raisons les Sherbrookois ou ceux qui sont propriétaires de l'entreprise à Sherbrooke ont été appelés à délaisser les services du Bell pour s'orienter eux-mêmes vers leur propre structure au niveau de l'infrastructure de leurs services?

M. GIRARD: Je crois que vous référez à la différence qui existe entre un système complet et un système partiel avec la compagnie Bell Canada.

M. LATULIPPE: Je sais que vous avez abordé cette question, mais je parle surtout des avantages pour les clients. Je veux référer surtout aussi à la qualité des services, quoiqu'il serait peut-être bon également que vous nous parliez de cette distinction qu'il y a entre le contrat complet et le contrat partiel que certains de vos membres effectuent avec Bell Canada.

M. GIRARD: Voici. Si on se réfère au cas de Sherbrooke que vous avez mentionné et aux autres cas que j'ai mentionnés dans la présentation, ces systèmes avaient un contrat que l'on appelait complet, autrefois, dans lequel la compagnie Bell Canada détenait les équipements de distribution, les câbles et les embranchements aux résidences. Le service ou la maintenance, l'entretien du câble était fait par les équipes de Bell Canada.

Alors ce qui arrivait, c'est que la qualité du service en était réduite en ce sens que probablement l'efficacité, si vous le voulez, à ce niveau de la part de certains employés de la compagnie téléphonique n'était pas aussi bonne que l'entreprise privée lorsqu'elle a un système qu'elle entretient elle-même. Et c'est la raison pour laquelle la plupart de ces systèmes ont changé. On est passé du système complet au système partiel, parce que, dans un tel cas, l'opérateur de câbles entretient l'équipement de distribution. Il ne possède pas encore le câble, parce que le câble appartient encore à la compagnie de téléphone.

Mais les embranchements, il les fait lui-même et il entretient l'équipement. Il peut donc le faire plus rapidement et peut donner une meilleure qualité de services. Ce sont les raisons primordiales qui ont amené ces systèmes de câbles à passer d'un système complet à un système partiel.

M. LATULIPPE: A Sherbrooke, on s'imagine que, si le service a été meilleur, il y a eu aussi un accroissement du potentiel ou du nombre de clients qui se sont raccordés. Est-ce que vous pourriez nous donner un aperçu si effectivement il y a eu un accroissement à Sherbrooke depuis que...

M. GIRARD: Bien voici...

M. LATULIPPE: ... il y a eu un changement?

M. GIRARD: ... de là à délimiter exactement le pourcentage d'augmentation dû à ceci, il y a beaucoup de choses qui sont arrivées entretemps, si vous le voulez. Le système, dans ce temps-là, avait été vendu à Rediffusion. Le groupe de Rediffusion a abandonné le système complet pour un système partiel et il y a eu une augmentation d'abonnés, nécessairement, qui est due à différents facteurs. La qualité du service est certainement un facteur. Après, le CRTC a obligé les compagnies à se départir des capitaux étrangers. Eh bien, ce système-là aujourd'hui, appartient à la National Cablevision.

Alors, il y a eu une augmentation de clients si vous le voulez depuis ces dates. Je crois que je ne peux pas dire que l'augmentation de clients est due simplement aux changements. Cela a été un facteur si vous le voulez.

M. LATULIPPE: Le contrat partiel a été une amélioration.

M. GIRARD: Le contrat partiel est une amélioration.

M. LATULIPPE: Est-ce qu'il répond à vos exigences ou si vous préféreriez l'abolir complètement? Est-ce qu'en définitive cela vous per-

met de donner à vos clients un service d'aussi bonne qualité que si vous aviez vous-mêmes l'entretien, la charge, la pleine propriété des embranchements principaux?

M. GIRARD: Le système partiel, tel qu'il nous est offert actuellement, ne nous satisfait pas complètement. Ce qu'on veut c'est l'accès aux poteaux ou aux structures. C'est ce qu'on demande parce que là on contrôle le tout. Au point de vue des investissements, au point de vue des emprunts, évidemment c'est notre propriété. Au point de vue de l'entretien, évidemment on a l'entretien total de notre propriété et de notre système. C'est la raison pour laquelle plusieurs opérateurs refusent actuellement de signer un nouveau contrat avec Bell Canada.

M. LATULIPPE: Vous dites "l'entretien total"; cela veut donc dire que vous avez également l'entretien du secteur principal, même s'il ne vous appartient pas.

M. GIRARD: Oui, sur un système partiel, vous avez l'entretien du site de l'antenne qui vous appartient, vous avez l'entretien de l'équipement électronique qui amplifie les signaux, vous avez également l'entretien des embranchements qui vont aux résidences, mais le câble principal appartient à Bell Canada et on doit, s'il y a certains troubles sur ce câble-là, se référer à Bel! Canada pour faire les modifications ou changer ce câble.

M. LATULIPPE: Disons qu'il arrive une panne sur le câble principal, qu'est-ce qui. se produit? S'il ne vous appartient pas, à ce moment-là, vous êtes obligés de vous référer à la compagnie Bell Canada qui envoie quelqu'un pour réparer cela?

M. GIRARD: Oui, on doit se référer à Bell Canada pour qu'elle vienne réparer un câble principal, par exemple, qui serait sectionné.

M. LATULIPPE: Cela amène des délais supplémentaires?

M. GIRARD: Cela amène des délais supplémentaires.

LE PRESIDENT (M. Giasson): Le député de Chicoutimi.

M. LATULIPPE: Je n'ai pas terminé.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président...

UNE VOIX: II n'a pas terminé.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): Ah, excusez-moi, M. Latulippe, je vous en prie.

LE PRESIDENT (M. Giasson): Le député de Frontenac.

M. LATULIPPE: J'aurais aimé savoir également comment M. Girard arrivait à concilier l'attitude qu'il avait à l'article 6 et à l'article 32. D'une part, vous semblez rejeter la réglementation qui est proposée relativement aux entreprises parallèles; à l'article 32, on nous propose quelque chose qui, à mon sens, est contradictoire et vous le rejetez aussi. Je ne sais pas si vous saisissez exactement ce vers quoi je veux m'orienter. Comment arrivez-vous à une attitude semblable?

Il me semble que l'article 6, que vous rejetez, vous donnerait une certaine satisfaction. D'autre part, à l'article 32, où on consacre la propriété des câbles principaux aux entreprises de télécommunications, de téléphone, autrement dit, vous êtes également réticent. Disons que je trouve cela un peu contradictoire.

M. GIRARD: Est-ce que vous permettez que je demande à M. Levasseur de répondre à cette question?

M. LEVASSEUR: A l'article 6, en somme, on dit qu'un permis pour exploiter une compagnie de télédistribution ne devrait pas être donné à une société de téléphone; à ma connaissance, on ne s'oppose pas à cela. On a commenté surtout la deuxième partie de l'article 6 en disant: Gardez la porte ouverte pour des unions possibles avec des entreprises de presse ou de cinéma et permettez que les investisseurs aient dans leur portefeuille des actions de sociétés qui pourraient être en contradiction dans l'article 6.

Quant à l'article 32, par contre, parce que là il faut bien s'entendre sur une chose, il est possible qu'un permis soit donné à une entreprise et cela nous paraît être notre rôle, mais l'article 32 rend possible pour le téléphone de contrôler le développement éventuel des sociétés de câble par le propriétariat du câble lui-même.

Nous venons de compléter une étude, par exemple, des contrats, depuis 1957 ou 1962, des compagnies de téléphone et ces contrats contiennent des stipulations à l'effet que nous devons utiliser le câble qui leur appartient, selon le système partiel, seulement pour faire de la télévision, de la transmission d 'images télévisées. Bien entendu, l'article 32 parle de l'utilisation des moyens, des soutiens, etc. Je pense que dans les termes on comprend la propriété du câble. Par exemple, on dit: Lorsque des installations d'une autre entreprise publique... Par installations, nous comprenons que ça contient les soutiens mais ça comprend aussi le câble lui-même, ça fait partie des installations. Si le téléphone est propriétaire du câble et s'il continue à vouloir nous imposer des restrictions dans le développement de nouveaux services additionnels par le biais d'une clause dans son contrat avec nous, c'est bien entendu qu'il faut s'y opposer, parce qu'il nous parait que c'est rendre une société responsable de l'orientation

et du développement d'une autre société, toutes les deux dans le secteur privé.

M. LATULIPPE: Est-ce que, à votre connaissance, il existe au Canada ou ailleurs des mesures semblables, dans des législations un peu semblables, ou encore dans d'autres secteurs, peut-être par le biais du ministère des Transports ou autres, où on arrive justement à consacrer ce fait, où l'entreprise peut être, comme le consacre l'article 32, propriétaire du secteur principal, de l'équipement principal alors que l'entreprise qui en fait la promotion et la vente devient en sorte une entreprise de facturation?

M. LEVASSEUR: A notre connaissance, c'est la tendance inverse qui est en train de se faire.

On a cité ce matin dans notre déclaration les jugements qui ont été portés sur ces questions aux Etats-Unis et même certaines autres provinces où, justement, on demande à la société d'utilité publique de permettre le droit d'attache des installations des opérateurs de câble sur les poteaux de façon qu'il n'y ait pas prolifération de poteaux. Mais, à ma connaissance...

M. LATULIPPE: Qu'est-ce qui se fait là-dessus?

M. LEVASSEUR: En Ontario, là aussi, les opérateurs travaillent avec Bell Canada et ils font comme nous, ils essaient justement d'utiliser davantage les facilités de l'Hydro-Ontario, comme nous le faisons avec l'Hydro-Québec.

M. LATULIPPE: Est-ce que, en Ontario, une partie de l'équipement, les poteaux et autres appartiennent également à Bell Canada et l'autre partie à l'Hydro-Ontario?

M. LEVASSEUR: Comme c'est le cas au Québec.

M. LATULIPPE: C'est exactement la même chose.

M. LEVASSEUR: Oui.

M. LATULIPPE: Est-ce que les propriétaires de câble, là-bas, ont le droit de s'accrocher, comme vous vouliez l'avoir ici au Québec, sur les équipements des installations, tant sur ceux de Bell Canada que sur ceux de l'Hydro-Ontario?

M. LEVASSEUR: Dans le cas de l'Hydro-Ontario, il n'y a pas de problème comme c'est le cas avec l'Hydro-Québec. Les ententes fonctionnent très bien. Les opérateurs de câble, en Ontario, ont le même problème que nous parce qu'ils font aussi affaires avec Bell Canada qui essaie de leur imposer le même genre de contrat qu'elle essaie de nous imposer, à nous.

M. LATULIPPE: Encore dans le même sujet, mais cela relève plus spécifiquement de l'article 5c) où vous aviez abordé cette question. Est-ce que cela existe dans d'autres provinces où on exige, comme ça, 80 p.c, à votre connaissance, de la propriété des gens du milieu, ou des provinciaux, pour avoir le droit de participer à une entreprise comme celle-là? Parce qu'ici on exige 80 p.c. des résidents du Québec.

M. LEVASSEUR: Disons que...

M. LATULIPPE: 80 p.c. des propriétaires doivent être des résidents du Québec.

M. LEVASSEUR: ... à ma connaissance, le Québec est la première province à avoir une réglementation, dans le secteur des communications, aussi précise que celle-là. Maintenant, est-ce que cette règle s'applique à d'autres entreprises ou d'autres secteurs d'activités économiques? Je ne pourrais pas vous dire.

M. LATULIPPE: J'aurais également une autre question. Cela concerne un peu le recoupage avec la réglementation fédérale. Je vais prendre seulement l'exemple de la publicité. D'un côté, avec la présente réglementation, vous allez avoir le droit de faire des frais et, de l'autre côté, vous n'aurez pas le droit de réclamer quoi que ce soit. De quelle façon allez-vous interpréter cela à l'association? Qu'est-ce que vous allez faire là-dedans?

M. LEVASSEUR: C'est le genre de problèmes auxquels on fait face depuis que la réglementation a été promulguée. Vous avez sans doute noté que tout au long du débat, nous n'avons pas pris position, ni pour le gouvernement fédéral, ni pour le gouvernement provincial, de façon concrète. M. le ministre des Communications, au départ, dit qu'il y avait, des conflits juridictionnels et que c'était un problème politique que les politiciens se devaient de régler, et si possible pas sur le dos de l'entreprise.

C'est une secteur où justement on attend beaucoup de votre aide pour nous éclairer dans ce domaine.

M. LATULIPPE: Donc, on ne saura pas exactement où iront vos préférences, de prime abord, sur le même sujet.

M. CHARRON: J'ai une toute petite question qui fait suite à celle-là. Dans l'hypothèse où — je pense que c'est ce que le député de Frontenac voulait vous demander — les politiciens ne régleraient pas ce conflit politique, — ce ne serait pas nouveau — quel sera le comportement des entreprises de câblodiffu-sion, si les réglementations fédérales et provinciales sont contradictoires sur certains aspects? Est-ce à croire que, en attendant qu'il y ait un conflit tranché par les tribunaux, ou je ne sais

quoi, on se comportera avec la réglementation qui vous semble la plus favorable?

M. LEVASSEUR: C'est difficile de répondre de façon globale. Je pense qu'on va devoir y faire face quasiment cas par cas. Disons que, quand la réglementation sera promulguée de façon définitive, les situations vont commencer à se présenter où il va falloir, justement, si le débat n'est par réglé — on espère bien qu'il sera réglé — faire une espèce de gymnastique intellectuelle pour en arriver à des conclusions concrètes.

M. CHARRON: Je sais que, pour votre propre interprétation, ce serait une gymnastique intellectuelle, mais dans le comportement quotidien, les décisions du conseil d'administration de chacune de ces entreprises, j'ai l'impression qu'on ira vers la version la plus favorable, comme je viens de vous le dire, en attendant que ce soit tranché par les tribunaux, ou que les politiciens aient fait une entente.

Supposons que vous, demain matin, membre d'un conseil d'administration comme vous l'êtes, vous devez vous plier au projet de réglementation tel qu'il est là actuellement, et que, dans la version fédérale du CATC ou d'autres organismes qui vous touchent, vous sentez une porte de sortie qui vous permettrait d'échapper à une réglementation trop sévère venant du gouvernement provincial, j'imagine bien que, comme homme d'affaires, comme membre d'un conseil d'administration, vous allez ne pas vous plier à la réglementation provinciale. Lorsqu'on vous rappellera à l'ordre, vous direz tout simplement que la réglementation fédérale vous permettait de le faire, et vous direz: Moi, puisque j'ai deux gouvernements, j'ai"pris celui qui m'était le plus favorable, à vous de vous arranger maintenant. Vous allez amener cela devant les tribunaux, n'est-ce pas?

M. LEVASSEUR: Ce serait plaisant si c'était aussi simple que cela, mais ce ne l'est pas.

M. CHARRON: Vous allez le faire comme...

M. LEVASSEUR: Je pense que je ne suis pas en mesure, M. Charron, de vous répondre de façon concrète.

Je pense que mes collègues et moi, comme vous le dites, nous sommes des hommes d'affaires. On n'associe pas nécessairement quelque chose de favorable de la même façon que vous l'avez définie, c'est-à-dire favorable au sens où cela nous rapporte plus dans un secteur ou dans l'autre, d'un côté ou de l'autre. Je pense qu'on est conscient d'une chose, c'est qu'on est dans un domaine très important au Québec, celui des communications. On est conscient aussi — la réglementation le prouve et les commentaires des membres de la commission le prouvent aussi — que c'est un secteur qui doit préoccuper l'Etat dans une politique d'ensemble qui a des aspects culturels, qui a des aspects socio-économiques. Je pense que l'entreprise se doit d'essayer de bien se situer à l'intérieur de ces préoccupations-là et d'agir en bon citoyen.

Je ne voudrais pas m'engager devant la commission ici au nom de notre compagnie à poursuivre une course donnée quand on n'a pas vraiment le problème devant nous.

M. CHARRON: Ce que je remettais en question, M. Levasseur, ce n'était pas le comportement de "bon citoyen" que peuvent avoir des entreprises, mais la difficulté que peuvent avoir ces bons citoyens à l'établir. Lorsqu'ils sont soumis à des réglementations contradictoires, même s'ils veulent être de bons citoyens, si vous êtes bon citoyen à l'égard du gouvernement québécois, vous ne le serez probablement pas à l'égard du gouvernement fédéral ou vice versa dans certains points de réglementation. Voici ce que je vous demande: Comme bon citoyen, comment allez-vous réagir quand les objets de contradiction sont déjà annoncés, sont déjà apparents dans certaines dispositions du règlement?

On parle de quelque chose de très concret; peut-être que tantôt j'ai simplifié, mais je sais que dans l'administration courante vous aurez à vous soumettre aux deux. Ce n'est pas la première fois d'ailleurs. Dans d'autres domaines de l'activité, on a essayé de concilier...

Je me rappelle quand on a modifié, par exemple, toute l'échelle fiscale à Ottawa, on a eu des modifications pour que, justement, les entreprises ne soient pas face à une chose permise par un gouvernement et défendue par l'autre. Ici, dans ce secteur bien précis des communications où, comme vous le dites, il y a beaucoup de culturel, de socio-économique — c'est pour cela que c'est un secteur tellement palpitant et intéressant — il va y en avoir des contradictions et les conseils d'administration de vos entreprises et d'autres entreprises et d'autres types de gens qui militent dans ce milieu et qu'on rencontrera plus tard, devront travailler avec. Je me demande comment un bon citoyen peut répondre face à des dispositions contradictoires.

M. GHAGNON: M. Charron, vous avez mentionné le mot publicité. La réglementation proposée dit: La câblodistribution peut inclure...

M. CHARRON: Bon! En voilà un exemple.

M. GHAGNON: Alors, dans mon cas, je crois que je n'en ferais pas de publicité.

M. CHARRON: Vous n'en ferez pas? M. CHAGNON: Je règle le problème.

M. CHARRON: Parce que là, on vous l'interdit.

M. CHAGNON: Cela règle mon problème temporairement jusqu'à ce que le problème soit réglé à l'échelle de deux gouvernements. Je crois que plusieurs cas peuvent être réglés temporairement jusqu'à ce que le problème soit réglé sur une base juridictionnelle. Je crois qu'il y a beaucoup d'autres... même s'il y a un conflit...

M. CHARRON: Autrement dit, le droit que semble vous accorder cette disposition de la publicité, dans le règlement québécois, à toutes fins pratiques, pour un membre de conseil d'administration, pour un industriel qui ne veut pas avoir de conflit, est tout à fait théorique parce qu'il n'a à peu près pas la possibilité pratique de l'utiliser, comme vous le faites, pour éviter les conflits...

M. CHAGNON: Présentement.

M. CHARRON: ... puisque vous savez que le CRTC va vous taper sur les doigts parce que, lui, interdit la publicité, vous n'utiliserez pas cette loi. Autrement dit, le gouvernement québécois peut se permettre de faire des réglementations de droit théorique, sachant très bien que, pratiquement, les entrepreneurs ne les utiliseront pas, parce que l'autre droit qui les concerne l'interdit. Vous prenez donc une solution, vous me donnez un exemple à ma question de comportement face à une disposition contradictoire. Vous cherchez à éviter les conflits.

M. CHAGNON: C'est difficile!

M. CHARRON: Alors, qu'est-ce que cela nous donne à nous — ce n'est pas à vous que je devrais le demander, c'est plutôt au ministre...

M. L'ALLIER: Préparez la question!

LE PRESIDENT (M. Giasson): M. le ministre...

M. CHARRON: On peut donc se demander dans ces cas, sans élever le débat trop loin, que nous vaut de nous mettre des dispositions comme celles-là dans le projet de réglementation si on est à peu près assuré que les gens concernés, comme ceux qui témoignent actuellement, hésiteront à profiter de cette réglementation, parce qu'ils savent, eux, dans le milieu par-dessus la tête, qu'il y a une réglementation contradictoire à un autre échelon? Quelle est l'utilité du gouvernement du Québec de mettre ces pouvoirs théoriques quand il sait qu'il y a à peu près impossibilité pratique pour ceux qui sont dans le milieu de les utiliser?

M. L'ALLIER: D'abord, M. le Président, la question peut se poser sur le plan des textes qui sont ici. On peut voir un certain nombre, quelques contradictions peut-être, notamment sur le plan de la publicité. Il restera à voir la façon dont chacun interprétera sa responsabilité face à la réglementation. Je n'accepte pas que l'on prête des intentions au gouvernement en disant: Vous pouvez faire des règlements parce que vous savez qu'ils ne seront pas respectés ou, au contraire, parce que vous savez qu'ils ne seront pas applicables. Les gens ne pourront pas les appliquer tant que le problème ne sera pas réglé.

Le but que nous poursuivons par cette réglementation n'est pas de placer les entreprises dans des situations qui les obligeront, de fait, à prendre position dans un sens ou dans l'autre. Nous nous comportons dans ce secteur, sur décision du gouvernement et compte tenu des analyses et des expertises que nous avons faites, nous nous comportons comme nous le faisons parce que nous sommes convaincus que nous avons cette responsabilité et cette juridiction. Il a d'ailleurs été reconnu unanimement par l'Assemblée nationale... Que le règlement du CRTC défende une chose qui soit partiellement permise par ledit règlement, ici, les entreprises pourront, à mon avis, le faire ou ne pas le faire.

Si une entreprise fait de la publicité alors que le règlement du CRTC l'en empêche, le CRTC pourra éventuellement intervenir pour l'empêcher de le faire. Cela placera éventuellement cette entreprise dans une situation délicate. Ce que j'espère, pour ma part, c'est que rapidement nous puissions convaincre le gouvernement fédéral du bien-fondé de notre position pour l'amener progressivement à se retirer d'un champ de juridiction qui ne lui appartient pas. Est-ce que cela se passera ou ne se passera pas? Le député de Saint-Jacques ne peut pas le dire plus que moi.

M. CHARRON: Mais cela fait trois ans...

M. L'ALLIER: Moi, j'y travaille et lui n'y travaille pas; c'est la différence entre les deux.

M. CHARRON: Cela fait trois ans, M. le ministre, que vous occupez ce fauteuil-là et que vous le faites et cela n'a pas avancé au point qu'aujourd'hui on fait une réglementation contradictoire.

M. L'ALLIER: II y a des choses, à un moment donné, qu'il faut planifier sur des périodes un peu plus longues que six mois ou un an et ce sont des choses qu'on apprend avec le temps. Mon expertise dans le domaine des communications est que cela n'a peut-être pas avancé, mais, si on fait une espèce de rétrospection sur trois ans, on a quand même fait passablement de chemin dans le domaine des communications au Québec et on commence dans ce domaine.

Le but de cette réglementation est précisément d'asseoir les bases d'une concertation entre les pouvoirs publics, l'entreprise privée et

les utilisateurs pour la développer, cette politique de communication. Au fur et à mesure qu'elle se structurera d'une façon réaliste, au fur et à mesure nous aurons des moyens et des arguments pour expliquer à nos collègues des autres provinces et du gouvernement fédéral le bien-fondé d'une attitude québécoise en matière de communications.

M. CHARRON: Si vous me le permettez, je trouve que ce que vous avez fait depuis trois ans dans le domaine des communications et ce qu'a fait le Québec depuis qu'il est doté d'un ministère des Communications a été — et c'est pourquoi on a endossé le projet ce matin — de justement prouver qu'on a la capacité d'avoir une politique des communications. Tout ce qui nous manque au Québec, c'est le pouvoir de le faire, mais on s'est prouvé à soi-même comme Québécois qu'on avait la capacité dans ce domaine comme dans d'autres d'avoir une réglementation qui nous met dans certains domaines à l'avant-garde de la protection d'une culture. A ce moment-là, je suis complètement prêt à endosser vos efforts depuis trois ans, efforts internes ici. La direction que vous avez offerte à ce ministère et le travail qui s'est fait dans ce ministère nous ont prouvé notre capacité de décider dans ces matières. Il nous manque le pouvoir. C'est une fois de plus la situation qui est sur la table.

M. L'ALLIER: Je voudrais apporter une précision, M. le Président, si vous me le permettez, sur un point technique, c'est très technique. Pour éviter les ambiguïtés, le CRTC actuellement n'a pas, à ma connaissance, de règlement interdisant la publicité. C'est un énoncé de politique, mais il n'y a pas comme tel un règlement précis auquel on contreviendrait si on faisait de la publicité conformément à ce règlement-ci. Le point technique, c'est cela.

LE PRESIDENT (M. Giasson): Le député de Frontenac.

M. LATULIPPE: Sur le même sujet, j'aimerais demander ceci au ministre, parce que, par le projet qu'il nous a soumis, il me semble qu'il y a quelque chose qui est important. Une intention semble percer, c'est que le Québec vise essentiellement par le projet qui nous est soumis surtout à réglementer le contenu des possibilités que le câble peut offrir, alors qu'essentiellement le CRTC jusqu'à maintenant, à mon point de vue, s'est limité à réglementer surtout l'aspect technique et commercial de l'entreprise. Dans ce sens, j'aimerais demander au ministre si c'est l'intention justement de son ministère de continuer à essayer de faire un mariage possible des deux réglementations, quitte à ce que, même éventuellement, il y ait peut-être un dédoublement ou une uniformisation en ce qui concerne les aspects techniques, pour justement arriver à créer une certaine forme d'harmonie. Personnellement, tout de même, je ne trouve pas que le projet de loi qui nous est soumis, dans son ensemble, sauf sur certains points bien particuliers, va essentiellement à l'encontre des objectifs fédéraux.

On voit, à mon point de vue, que c'est une tentative de marier une situation pour donner au Québec une possibilité d'élaborer une politique québécoise des communications, surtout pour arriver à des résultats dans le domaine de l'éducation, de la culture et autres.

M. L'ALLIER: M. le Président, quand l'Etat intervient dans le domaine des communications, si on continue à se placer dans un contexte économique d'entreprise privée, l'intervention de l'Etat ne peut se situer que dans le contexte aussi d'un service public. Si on peut dissocier sur le plan réglementaire contenant et contenu, cela ne veut pas dire qu'on ne doit s'occuper que de l'un ou de l'autre secteur. En d'autres mots, l'infrastructure des communications, la complexité du développement des communications sur le plan technologique nécessitent une intervention de l'Etat pour que s'exerce une certaine planification parce qu'en définitive, c'est chaque citoyen, par ses abonnements ou autrement, qui paie l'infrastructure des communications.

Quant au contenu, le but de la réglementation — cela a été énoncé au moment de l'étude des projets de loi — n'est pas d'entrer dans le détail de telle ou telle programmation ou de contrôler tel ou tel contenu, c'est dans les blocs de contenus. En ce sens-là, le CRTC, de son côté, intervient exactement de la même façon mais à partir d'autres prémisses, à partir de la notion de l'unité canadienne et de l'ensemble de la nation canadienne. Nous nous plaçons, parce que c'est notre responsabilité, dans le contexte québécois. Le CRTC vient de rendre une décision qui exclut, à toutes fins pratiques, la publicité américaine des stations de télévision par câble dans la région de Montréal comme il l'avait fait pour Vancouver. Cela touche le contenu. Quand le CRTC indique que le contenu doit être X p.c. canadien et qu'il doit y avoir tel ordre de priorités à respecter, cela touche le contenu.

Nous devons, à partir de grands principes qui sont admis partout, dans tous les pays, en définitive, appliquer ces grands principes-là à nos priorités et à nos objectifs de collectivité québécoise. Il est possible qu'il y ait des chevauchements, il est possible aussi qu'à certains moments où c'est marqué canadien ce soit marqué québécois pour les mêmes motifs de fonds; l'intervention sur les contenus ne dépasse pas cela.

M. LATULIPPE: M. le Président, j'aurais une dernière question qui concerne un problème soulevé par le député de Chicoutimi et qui me préoccupe passablement. M. Girard disait tout à l'heure qu'il voyait le système de câblodiffusion comme un service; il semblait dire que c'était

un service obligatoire. Dans son esprit, est-ce qu'on ira, par le texte qu'il nous a proposé, jusqu'à obliger les entreprises de câble à faire de la programmation? Est-ce dans ce sens-là que vous voyez l'obligation? Actuellement, l'obligation se limite à donner accès aux services du câble mais est-ce que vous croyez également que l'obligation ira jusqu'à forcer les entreprises à donner une certaine programmation locale?

M. GIRARD: Beaucoup d'opérateurs font déjà de la programmation locale et donnent accès à la TV communautaire également dans les endroits où il y a un circuit fermé de télévision. Evidemment, on a mentionné dans notre mémoire qu'on aimerait que les opérateurs avec 3,000 abonnés et plus en fassent simplement quoiqu'il y a des systèmes avec un nombre beaucoup moindre d'abonnés qui en font à titre facultatif; c'est dans ce sens-là que vous avez posé votre question.

M. LATULIPPE: Vous n'interprétez pas la réglementation actuelle comme étant obligatoire sous cet aspect-là pour une entreprise de câblodiffusion de donner ces services-là, soit une programmation locale et autres?

M. GIRARD: Dans les priorités, on indique qu'il doit y avoir de la programmation communautaire, de la programmation locale, de la programmation éducative, de la programmation d'intérêt général. Nous avons mentionné que nous étions prêts à répondre à ces priorités-là sur une période peut-être transitoire dans laquelle on pourrait changer jusqu'à 30 canaux, que nous ayons l'équipement de 30 canaux de télévision parce que plusieurs systèmes n'ont que de l'équipement à douze canaux. Un changement immédiat serait très onéreux et ne permettrait pas à plusieurs systèmes de le faire. C'est pourquoi on a mentionné que cette priorité-là, on est prêt à y satisfaire mais sur une période de temps, si vous voulez.

M. LATULIPPE: J'ai lu cela et je me suis posé la question. Je ne la vois pas d'une façon draconienne, dans la réglementation qui est proposée, cette obligation que vous mentionnez justement. A mon point de vue, je m'explique mal comment vous arrivez à concevoir que c'est effectivement obligatoire. Si on lit l'article 18, c'est marqué "la programmation de toute entreprise publique de câblodiffusion doit", disons que c'est sans concerner les priorités; les priorités arrivent seulement à l'article 21. A ce moment-là, je vois difficilement où se trouvent cette obligation-là.

Disons que vous avez certainement plus d'expérience que je puis en avoir là-dedans mais, si, effectivement, cela équivaut à une obligation pour toutes les entreprises de le faire, cela peut devenir très onéreux. A mon point de vue, nombre de petites entreprises ne seront certainement pas capables de donner un service qui va automatiquement amener l'élimination d'entreprises ou certains regroupements. Disons que je n'arrive pas à concilier cela pour que ce soit l'intention du législateur.

M. GIRARD: Je lis l'article 18: "La production de toute entreprise publique de câblodistri-bution doit, outre la programmation éducative, être d'une durée minimale de dix heures par semaine et comprendre des émissions communautaires, des émissions locales, des émissions consacrées équitablement à la politique partisane du Québec, des discussions au cours desquelles les opinions sur des sujets d'intérêt public sont traitées équitablement.

De là on va à l'ordre de priorité, de l'article 21 qui mentionne, à a) la programmation éducative; b) les émissions communautaires; c) les émissions locales; d) les émissions d'intérêt général; e) les programmes de postes locaux, etc. Dans l'obligation de donner une durée minimale de dix heures de programmation par semaine, il n'est pas mentionné la grosseur de câble.

M. LATULIPPE: Est-ce que je pourrais demander au ministre si effectivement il interprète la réglementation comme étant justement obligatoire à cet effet-là?

M. L'ALLIER: Voici, M. le Président. Sur ce point, c'est une question technique et je vois que le député de Frontenac connaît particulièrement les modalités de fonctionnement d'une entreprise de câble.

C'est l'article 21 qui indique un ordre de priorité. C'est la Régie des services publics, sur présentation d'une demande à partir d'un projet de programmation proposé par une entreprise, qui détermine dans cet ordre de priorité quelles sont les choses qui peuvent être faites, compte tenu des moyens de l'entreprise, compte tenu de ses disponibilités. Donc, c'est fixé au moment de l'audience par la Régie des services publics.

Si la Régie des services publics, après audience, en arrive à la conclusion qu'il peut ou qu'il doit y avoir production, c'est-à-dire des choses faites par l'entreprise de câble en dehors de la simple retransmission, à ce moment-là, c'est la production minimale prévue à l'article 18 qui s'applique.

En d'autres mots, il n'y a pas, dans le règlement ici, une obligation de faire de la production locale. C'est à la régie d'interpréter, compte tenu de la dimension des systèmes, des potentiels, compte tenu des populations à desservir, au moment où une entreprise vient faire une demande de permis, de voir si elle peut ou non faire de la programmation locale.

Nous avons indiqué une durée minimale de dix heures par semaine; c'est une question sur laquelle nous aimons avoir l'opinion des télédistributeurs. Effectivement ça peut être trop. Nous avions indiqué, dix heures par semaine,

pour éviter précisément qu'une entreprise, au moment de faire sa publicité et sa vente, indique qu'elle offre une programmation autre que la simple retransmission d'antenne et que ça se résume à une demi-heure en définitive par semaine. Dix heures nous paraissaient un bloc minimum nécessaire pour que, lorsqu'on parlera de production locale, ça vaille la peine de dire: on en fait, et on en fait dix heures. Si c'est trop, si c'est incompatible, on pourra, suite aux audiences, modifier ça. C'est quand même la régie, au moment de l'attribution de chaque permis, qui détermine, à partir d'un ordre de priorité, les choses qui sont faisables.

M. LATULIPPE: Pour quelle raison n'avez-vous pas jugé, vous ou vos fonctionnaires, jugé bon d'arrêter une norme bien spécifique? On vient de mentionner 3,000 abonnés, par exemple.

M. L'ALLIER: M. le Président, c'est parce que nous avons tenté de vivre avec la réalité actuelle des entreprises de câbles au Québec. Si vous regardez les statistiques et les données, vous avez les entreprises qui ont de 150 ou 200 abonnés et celles qui ont 70,000 ou 75,000 abonnés. Or toute norme ou toute règle générale qu'on voudrait appliquer à ce genre d'entreprise risque d'être inadéquate. C'est pourquoi existe la Régie des services publics en particulier pour adapter, si vous voulez, des normes, des règles générales à des situations particulières.

Le but de cette réglementation n'est pas de chambarder la situation présente sur le plan économique. Il y a de tout petits systèmes de télédistribution comme il y en a de très importants. L'éventail des 125 ou 130 entreprises de télédistribution au Québec est tel qu'il est difficile, dans une réglementaiton, d'être détaillé de telle sorte qu'on puisse atteindre les normes, comme vous le souhaitez, je pense.

Maintenant, il est possible qu'à la suite de ces auditions on se rende compte que... Oui, c'est possible de mettre un règlement qui satisfasse l'association, les membres, les petits et les grands dans ça. A ce moment, on sera tout à fait disposé à le faire.

M. LATULIPPE: Je ne fais pas un réquisitoire, je m'informe seulement. Là on dit: II y a sûrement des situations, la régie va s'adapter aux diverses circonstances. Mais, par exemple, à l'article 6, je sais que c'est dans un tout autre ordre d'idée, on veut avoir des dispositions semblables puis on voudrait que la régie... Je dis on, tout à l'heure ceux qui ont déposé un mémoire disaient qu'ils voulaient que la régie se prononce sur des faits spécifiques selon les circonstances, autoriser ou ne pas autoriser certaines transactions en ce qui concerne les entreprises parallèles.

Ce point de vue a dû être abordé par les fonctionnaires, pourquoi n'a-t-il pas été retenu?

M. L'ALLIER: Les modifications au sujet de l'article 6?

M. LATULIPPE: Si vous voulez. Qu'est-ce qui motive, par exemple, qu'à l'article 6 on propose que tel genre d'entreprises parallèles n'ait pas accès, sous aucune forme, y compris le financement, parce que c'est ce que j'ai cru comprendre lors des discussions, ce matin, au capital d'une entreprise? Qu'est-ce que l'Association des câbles demandait justement?

M. L'ALLIER: L'objectif, M. le Président, de l'article 6, était justement de procéder à l'identification d'une industrie de câblodistri-bution autonome; en même temps d'éviter des regroupements qui, sur le plan éventuel du contrôle de la propriété et du même coup des contenus — parce que c'est quand même le télédistributeur, ou le radiodiffuseur, ou le propriétaire de journal qui est responsable de son contenu — feraient qu'on en arrive à des concentrations qui ne seraient pas souhaitables. Voilà l'objectif.

Est-ce que les dispositions de l'article 6, tel que rédigé maintenant, sont, en ce sens, trop sévères? Est-ce qu'elles ont des effets secondaires qui deviennent des effets principaux en termes d'un équilibre de portefeuille, en termes de propriétés par exemple? Est-ce qu'on pourrait, plutôt que d'exclure toute participation, prévoir un mécanisme ou des pourcentages de participation dans la mesure où il n'y a pas contrôle d'une entreprise sur l'autre? Il faudra, à ce moment-là, tenir compte des entreprises qui sont à capital-actions et des entreprises qui sont non sur le marché. Tous ces facteurs, c'est ce que nous voulons entendre maintenant.

C'est pourquoi lorsque les représentants des sociétés de téléphone ou d'autres intervenants s'exprimeront, ils auront peut-être des opinions à exprimer sur le point no 6. En d'autres mots, l'article 6, comme les autres, sont susceptibles de modifications aussi longtemps qu'on ne s'éloigne pas de l'objectif: Eviter les concentrations indues, et quant au contenu malsain, si vous voulez; et, deuxièmement, identifier une entreprise qui demande à se développer et qui demande d'avoir, au départ, pas plus d'entraves que les sociétés de téléphone ou d'autres.

LE PRESIDENT (M. Giasson): M. le député de Chicoutimi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je reviens sur une question qu'a posée tout à l'heure le député de Saint-Jacques, qui a repris, d'ailleurs, les propos que nous avons maintes fois tenus en commission parlementaire, ou en Chambre, concernant les conflits de compétence qui peuvent naître de l'application d'une réglementation fédérale et d'une réglementation provinciale.

Je sais que l'association que vous représentez regroupe des hommes d'affaires qui tiennent compte des faits, qui ont une expérience et qui,

jusqu'à présent du moins, on peut le croire, acceptent de vivre en régime fédéraliste et en acceptent aussi les conséquences. Ils ne souhaitent pas non plus vivre à Cuba ou ailleurs.

Mais étant donné l'effort que le Québec a fait jusqu'à présent pour se donner une politique des communications, même si vous avez été très prudents en ce qui concerne les conflits de compétences, est-ce que votre association est disposée, ou serait disposée, à accepter de mettre en application toute réglementation provinciale promulguée après examen, comme nous le faisons actuellement, nonobstant des dispositions contraires du CRTC?

M. GIRARD: Si vous vous référez en particulier à la question de publicité d'origine locale, les opinions sur l'usage de la publicité sont variées. Certains exploitants préfèrent avoir la publicité. Certains autres se demandent si réellement cela en vaut la peine.

Alors, tout en...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Girard, si vous me permettez.

M. GIRARD: Oui.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Avant que nous n'alliez plus avant, j'aimerais que vous répondiez directement à la question que je vous ai posée sans la reprendre de façon parcellaire.

Il s'agit d'un problème de principe que j'ai posé, et qui est le suivant. Est-ce que, étant donné les initiatives que le Québec a prises et entend poursuivre dans le domaine des communications, est-ce que, nonobstant toute réglementation au contraire du CRTC ou de l'ACTC, votre association est disposée à se ranger du côté du ministre québécois des Communications, ce qui sera une façon d'occuper le champ et en même temps de faire comprendre à nos interlocuteurs fédéraux que le Québec a pris des responsabilités en une matière dont il semble bien que, juridiquement, elle soit de la compétence du gouvernement du Québec? Je parle de la câblodistribution.

M. GIRARD: Je crois que je peux répondre à ceci que chaque compagnie, chaque groupe d'administrateurs voudront peut-être décider eux-mêmes de mettre en application, totalement ou non, la réglementation du Québec et celle du fédéral.

A titre d'association, je pense que je peux difficilement, comme président, dire que chacune des compagnies concernées, opérant au Québec, sera en mesure de satisfaire totalement à la réglementation proposée. C'est pourquoi j'ai référé à la question sur la publicité tout à l'heure, qui est un exemple que M. Charron avait amené, parce que certains jugent utile de voir leur publicité d'origine locale et certains autres n'y voient pas de différence, qu'ils l'aient ou non. Ils s'abstiendraient de le faire, non pas nécessairement parce que cela entrerait en conflit avec le CRTC, mais tout simplement parce qu'ils ne jugent pas, dans le moment, qu'elle leur serait utile.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Girard, si vous me le permettez, vous avez répondu partiellement à ma question. Il y a un faux-fuyant dans votre réponse. Vous nous avez dit à plusieurs reprises ce matin, et les membres de votre association ou d'entreprises de la nature de celles que vous regroupez nous ont déjà dit qu'ils n'entendaient pas se mêler à des querelles politiques. Vous nous avez répété ce matin que vous laissiez aux hommes politiques le soin de trancher le débat ou de régler le problème entre eux.

Remarquez que c'est une attitude prudente, mais ne pensez-vous pas que les hommes politiques ont besoin de votre opinion et de votre appui pour régler ce problème à votre satisfaction et à la satisfaction des citoyens que le ministère des Communications est appelé à servir? C'est pourquoi je vous demande ceci: Dans l'hypothèse où il y aurait conflit entre l'organisme fédéral et le ministère des Communications du Québec, est-ce que vous êtes prêt à faire bloc avec le gouvernement du Québec pour que celui-ci profite du moment qui est actuellement favorable et occupe un champ qu'il a commencé d'occuper grâce à vous?

M. GIRARD: Pourriez-vous me donner un exemple concret de conflit dans lequel on aurait à prendre une position?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Bien, vous avez parlé tout à l'heure de la réclame commerciale.

M. GIRARD: Oui.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Dans un cas comme celui-là, qui est aussi simple que celui de la réclame, est-ce que vous seriez prêt, si le gouvernement du Québec décidait que c'est lui qui doit réglementer ce secteur, est-ce que vous seriez prêt à appuyer le gouvernement du Québec? Remarquez, M. Girard, que je ne veux pas vous engager dans un débat constitutionnel. Il est important pour nous de savoir quelle serait éventuellement votre attitude, puisque nous avons une rude bataille à mener et nous avons un enjeu très important.

M.GIRARD: Voici.

M. LEGER: Pourrez-vous aller jusqu'à donner une consigne à vos membres?

M. GIRARD: Non. On peut difficilement donner une consigne sur la question de la réclame actuellement pour la simple raison que...

M. LEGER: Votre association serait-elle pré-

te à donner une consigne à ses membres pour faire bloc avec le gouvernement québécois?

M. GIRARD: Je parle d'un exemple concret à obtenir pour vous donner une réponse concrète. On a parlé de publicité, de réclame sur le canal communautaire; certains opérateurs le désirent, la veulent cette publicité-là. Leur décision personnelle de l'employer reste une décision personnelle d'administrateur de compagnie. Si une autre compagnie ne voit pas l'utilité de l'avoir ou estime que cela ne lui donnera pas grand-chose, elle n'est pas obligée de s'en servir. Elle est peut-être contente qu'elle soit là, mais elle n'est pas obligée de s'en servir.

M. LEGER: Etre content qu'elle soit là, c'est aller jusqu'à faire une consigne de faire bloc devant cette réglementation même s'ils ne l'utilisent pas, même si les entreprises membres de votre association peuvent être divisées sur l'utilisation possible? Comme association, est-ce que vous seriez prête à donner la consigne de faire bloc avec le gouvernement québécois sur cette réglementation?

M. GIRARD: Je crois qu'on n'est pas en mesure de le faire, pour la simple raison que c'est une décision personnelle de chaque opérateur de décider s'il veut se servir de la réclame ou de ne pas s'en servir.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. Girard, vous demandiez qu'on vous donnât des exemples précis. A l'article 5 a) et c), il est dit ceci à c) notamment: Les propriétaires de toute entreprise publique de câblodistribution doivent être, dans une proportion de 80 p.c, des résidents du Québec.

Alors, supposons que cela ne soit pas l'avis du CRTC, est-ce que vous accepteriez que le gouvernement du Québec vous impose cette obligation? Vous en avez discuté d'ailleurs ce matin et cela se trouve dans votre mémoire. Vous avez exprimé des réserves au sujet de cette qualité de résident.

M. GIRARD: Disons qu'on va tous se conformer aux lois autant du Québec que du fédéral dans le moment parce qu'on a à subir les deux. Tel que mentionné ce matin, on aimerait que la décision soit prise par le législateur au point de vue constitutionnel. Maintenant, à titre d'association, de la à ordonner à nos compagnies... Les compangies qui sont affectées par l'article 5 sont minimes parmi les entreprises dans l'association. La majorité des entreprises de télédistribution au Québec satisfont déjà à ce qui existe ici.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Girard, je ne veux pas vous torturer avec cette question-là, mais nous sommes réunis ici, législateurs et hommes d'affaires, chefs d'entreprises, pour discuter d'un problème qui intéresse toute la collectivité.

Vous êtes Canadien, vous êtes Québécois comme nous tous et voici que notre gouvernement prend des dispositions afin de s'assurer un contrôle sur une entreprise relativement jeune. Vous avez le devoir de servir le public et vous avez beaucoup de poids sur l'opinion publique. Je ne sais pas si vous pouvez me répondre, mais il me parait que votre association, compte tenu de son importance, devrait être en mesure d'affirmer catégoriquement que, si son coeur balance quelquefois entre une allégeance fédérale et une allégeance provinciale, en l'espèce, il ne devrait pas y avoir d'hésitation.

Vous devriez nous dire carrément si vous êtes consentant à faire prévaloir la législation du Québec sur toute autre législation, cela dût-il vous causer, pendant un certain temps, des inconvénients?

M. GIRARD: Voici, je crois que l'on doit se conformer aux lois canadiennes et aux lois québécoises. Nous n'avons pas d'autre choix, je crois, à titre de Canadiens et de Québécois.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Mais si l'une dit noir et l'autre blanc?

LE PRESIDENT (M. Giasson): Le ministre des Communications.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'ai d'autres questions, M. le Président.

M. L'ALLIER: On me pose des questions à la romaine.

M. LEGER: II faut dire que le ministre est blanc !

M. L'ALLIER: La question, M. le Président, qui est posée par le député de Chicoutimi, en fait, devait s'adresser au ministre des Communications. Le projet de règlement qui...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): S'il est déterminé à parler, j'en suis fort aise.

M. L'ALLIER: Vous ne devriez pas faire cela. On ne sait pas quand cela arrête. Le règlement, qui est présenté ici pour commentaires et qui est le projet de règlement du gouvernement, ne comporte aucune disposition qui soit contradictoire avec la législation ou la réglementation, si elle existe, ou les politiques du gouvernement fédéral en cette matière. Ce qui ne veut pas dire que les dispositions seront identiques.

Le résultat net amène certainement dans certains cas, en tout cas sur certains points, des obligations supplémentaires pour les entreprises de câble ou plus spécifiquement québécoises. C'est à dessein que nous n'avons pas voulu, dans un projet de règlement ou dans les règlements qui suivront, poser des gestes qui soient contradictoires avec la réglementation fédérale à ce moment-ci, tant et aussi longtemps que le problème politique ne sera pas réglé.

Si nous déterminions volontairement des règlements contradictoires qui étaient ensuite adoptés par le gouvernement, nous aurions décidé politiquement de faire porter le fardeau du règlement du conflit sur les entreprises ou sur les utilisateurs, sur toute autre personne intéressée que l'Etat.

En d'autres mots, en faisant un règlement qui est nettement contradictoire et qui oblige l'entreprise à choisir entre l'une ou l'autre allégeance, nous nous départissons de la responsabilité politique que nous avons.

Je crois qu'à ce stade-ci il y a encore suffisamment de chances de régler ce problème politique au niveau politique et dans des délais raisonnables pour ne pas avoir à recourir à des moyens qui sont, en définitive, une fuite en avant et qui feraient porter sur l'entreprise le fardeau de plaider pour nous les positions que nous voulons voir accepter pour le Québec.

Ceci dit, s'il y avait dans les règlements qui sont ici non pas des contradictions, parce que je sais qu'il n'y en a pas, mais des points comme celui de la publicité, par exemple et qu'une entreprise québécoise, se conformant à la réglementation québécoise en publicité, encourt des poursuites ou des actions de contrainte de la part du gouvernement fédéral, je crois que, dans la mesure où précisément nous avons fait ce règlement, dans la mesure où les entreprises québécoises s'y sont conformées, dans la même mesure, nous aurions l'obligation de faire front avec elles et de les aider par tous les moyens à régler le problème s'il devenait judiciaire, devant les tribunaux.

En d'autres mots, ces entreprises pourraient compter sur notre appui technique.

M. LEGER: J'ai une courte question là-dessus.

LE PRESIDENT (M. Giasson): Le député de Chicoutimi avait demandé de garder son droit de parole lorsqu'il a cédé son droit de parole.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'ai posé une question au ministre, il l'a prise comme telle. C'était une observation, mais il a décidé de parler; je veux donc compléter ce que je voulais demander au ministre. J'admire sa prudence et le souci qu'il a de ne pas causer d'ennuis aux entreprises de câblodistribution, mais le ministre a fait des énoncés politiques.

Il entend, semble-t-il, mettre en application ce qui se trouve dans le livre vert, et il sera fatalement amené à promulguer une réglementation qui, un jour ou l'autre, provoquera des conflits.

Le ministre dit qu'il est disposé à fournir de l'aide technique, peut-être financière — il pourra s'en expliquer — aux entreprises qui auraient à faire face à des poursuites devant les tribunaux. Est-ce que le ministre pourrait nous fournir des renseignements plus précis sur les intentions de son gouvernement? Est-ce que le ministre est bien décidé à prendre l'initiative des opérations, dût-il faire face à des poursuites, des actions, etc.? Parce que cela s'est vu en 1954 où l'on a, pendant un certain temps, fait porter le fardeau d'une double imposition aux citoyens, ce qui a obligé le gouvernement central à reculer. Alors, en prenant l'initiative le ministre pourrait peut-être faire reculer le gouvernement plutôt que d'attendre que l'on institue des poursuites.

M. L'ALLIER: Encore une fois, M. le Président, je me vois dans l'obligation de répéter que nous ne placerons pas, à ce moment-ci, des entreprises dans la position où elles seront coincées, au moment d'une réglementation, entre la désobéissance à l'une ou à l'autre loi.

Si, par ailleurs, des actions judiciaires étaient prises contre une entreprise québécoise de câblodistribution qui a respecté la réglementation ou les ordonnances de la régie ou la loi québécoise, nous serions intervenants dans cette cause.

Par ailleurs, nous n'avons pas l'intention de prendre nous-mêmes l'initiative de porter devant les tribunaux la question de juridiction en matière de câblodistribution parce que nous sommes convaincus qu'il ne s'agit pas d'une question judiciaire mais d'une question politique.

En d'autres mots, la dernière référence valable en termes de jurisprudence ou en termes de textes qui ont force de loi ou, à toutes fins pratiques, l'équivalent, la dernière décision de quelque importance est la décision du conseil privé de 1932 et cette décision portait exclusivement sur la TSF à l'époque, la radiodiffusion.

Les juges du conseil privé, les savants juges du conseil privé, ont repris les paroles des juges de la cour Suprême qui avaient décidé à trois contre deux en 1931 de reconnaître la responsabilité fédérale en cette matière. Ils les ont reprises sur un point particulier en disant que le jugement de 1932 ne pouvait s'appliquer qu'à la radiodiffusion, telle que connue à l'époque, et qu'on ne pouvait pas en tirer des conclusions pour l'avenir. C'est la dernière référence de quelque importance en termes décisionnels.

C'est pourquoi je n'accepte pas qu'on puisse valablement chercher une solution à un problème qui est beaucoup plus fondamental, qui est celui du partage des pouvoirs décisionnels en matière de communication entre deux niveaux de gouvernement et non pas celui de la répartition des mécanismes consultatifs, qu'on cherche donc une solution par la voie judiciaire. La solution se trouve dans la négociation politique. Il se peut, théoriquement, que, le temps passant, on en vienne à une situation où, le problème n'étant pas réglé, il faille effectivement poser des gestes de réglementation, qui, à ce moment-là, seront contradictoires.

J'ai bon espoir que nous n'aurons pas à aller jusque là. Si cela se produisait, tel règlement subirait le même mécanisme que nous connais-

sons maintenant, reviendrait ici, serait discuté et, dans un tel cas, au moment où le conflit se poserait et du fait de l'application de tel règlement, c'est l'autorité fédérale qui aurait à décider: ou de laisser s'appliquer le règlement québécois et de ne pas poursuivre l'application de son règlement, ou, au contraire, de poursuivre devant le tribunal telle entreprise qui a respecté le règlement québécois et non pas le règlement fédéral et, à ce moment-là, le gouvernement fédéral prenant l'initiative d'une poursuite, nous serions intervenants dans une telle cause. C'est le plus clairement possible que je...

M. CHARRON: Ne croyez-vous pas que d'ici ce temps-là la population aura tranché le débat que les politiciens tardent à trancher?

M. L'ALLIER: Chacun peut avoir là-dessus son opinion. Pour ce qui est de la mienne, si vous le voulez, je vais continuer à travailler pour faire en sorte qu'on règle ce problème et le plus rapidement possible dans le sens que j'ai déjà indiqué. La population juge toujours, en définitive.

M. CHARRON: Je crois qu'elle arrivera avant vous.

M. L'ALLIER: Mais elle peut juger dans tous les sens.

M. LEGER: Est-ce que la règle de non contrariété avec le gouvernement fédéral ne risque pas justement d'amputer le pouvoir de réglementation québécois actuellement?

M. L'ALLIER: Disons que compte tenu des moyens dont nous disposons, nous sommes tout à fait conscients qu'il est impossible — vous avez pu constater, ce matin, la complexité du domaine des communications et nous serons en mesure de le constater à nouveau dans les interventions qui viendront — nous ne sommes pas en mesure, d'un bloc, de faire une réglementation qui couvre absolument tous les champs d'activité. Il est donc possible, à la fois, compte tenu de nos moyens, des connaissances que nous avons du milieu des communications et des connaissances que tout le monde a, de procéder par étapes. Nous avons un laps de temps que j'évalue suffisamment long pour nous permettre d'en arriver, pendant ce temps-là, à un règlement politique du problème.

M. LEGER : Est-ce que vous voulez dire par là que, jusqu'à présent, la réglementation qui nous est présentée... Est-ce que vous avez écarté des mesures qui auraient été avantageuses pour le Québec actuellement, sous prétexte de le faire par étapes?

M. L'ALLIER: Non, M. le Président, on n'a rien écarté du tout.

M. LEGER : Actuellement, dans la réglementation, il n'y a pas eu d'autres réglementations qui auraient pu être inscrites, mais que vous n'avez pas osé faire parce que cela aurait pu être en contradiction avec la politique fédérale?

M. L'ALLIER: Dans l'état actuel de nos connaissances, de nos moyens, des consultations que nous avons eues avec ceux qui sont intéressés par ce champ de communications, le présent projet de règlement — vous pouvez le constater et le vérifier — est, en fait, le plus complet qui existe au pays, ici, et c'est l'étape la plus importante que nous pensons pouvoir franchir à ce moment-ci. Il y aura d'autres règlements qui viendront, il y en aura d'autres et, au fur et à mesure que nous serons prêts à les proposer, nous le ferons.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je voulais poser d'autres questions à M. Girard dans un autre ordre d'idées. En ce qui concerne l'article 21, l'ordre de priorités, soit vous-même ou vos collaborateurs avez exprimé des réserves ce matin au sujet de cet ordre de priorités. Est-ce que vous pourriez parler davantage sur ce sujet?

M. GIRARD: Si vous permettez que M. Chagnon réponde...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je vous en prie.

M. CHAGNON: M. Tremblay, notre mémoire confirme que l'association trouve très louable l'ordre de priorités qui nous est présenté. On constate, à l'article 21, que c'est la programmation qu'on indique dans l'ordre des priorités et non des canaux.

Notre seule préoccupation, au stade de la technologie, est que la majorité des systèmes présentement ont douze canaux. Présentement, la majorité des systèmes, en ordre de priorités, soit la programmation éducative, les émissions communautaires, les émissions locales et d'intérêt général sont données par ces entreprises sur un canal.

La seule préoccupation qu'on exposait ce matin, c'est que la régie nous demanderait de fournir des canaux différents pour chacun de ces articles. Notre technologie, présentement, nous permet de transporter douze canaux, mais plusieurs entreprises modifient présentement leurs installations pour fournir jusqu'à trente canaux. En plus, je crois que c'est un processus qui va évoluer progressivement. Présentement, ces quatre sujets-là ne remplissent pas un canal au complet durant la journée ou durant la semaine.

Avec les années, la programmation communautaire va augmenter, les émissions de télévision locales vont augmenter. Radio-Québec, la télévision éducative ou les écoles vont s'en servir de plus en plus, mais c'est un processus qui va avancer avec les années.

Je pense que l'association a tout simplement exprimé, ce matin, sa préoccupation, à ce stade-ci, de ne pas avoir à fournir quatre canaux pour les quatre points prioritaires mentionnés, mais par contre, on trouvait très louable cette priorité dans la réglementation.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Si je comprends bien, M. Chagnon, vos préoccupations sont simplement d'ordre technique et vous êtes d'accord...

M. CHAGNON: Exactement.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... sur l'ordre de priorités établi dans le projet de règlement, à l'article 21.

Maintenant, M. Girard, ce matin, nous avions abordé assez rapidement — nous n'avons pas fait le tour de la question — le problème de la programmation communautaire. Vous avez repris, dans votre mémoire, le texte que vous aviez présenté à la commission parlementaire fédérale sur la radiodiffusion. Vous dites ceci, à la page deux de cette section: "La valeur intrinsèque des émissions réalisées dans le cadre de la programmation communautaire ne correspond, à l'encontre des émissions radiodiffusées, construites en fonction d'une cote d'écoute maximalisée, qu'à l'intérêt seul et exprimé du public communautaire auquel elles s'adressent. "Nous estimons, conséquemment, que la programmation communautaire devrait être encouragée, mais non pas imposée." Vous ajoutez: "Les télédistributeurs engagés dans la programmation communautaire et/ou locale devraient se voir accorder la faculté de commercialiser leur temps d'antenne."

J'aimerais connaître de façon plus précise la position de votre association en ce qui concerne ce service communautaire dont vous dites qu'il ne doit pas être imposé. Nous comprenons que le client est libre de s'abonner ou pas. Si le gouvernement du Québec veut en faire un service public et vous demande de le donner ce service, quelle sera, compte tenu naturellement du développement normal de vos entreprises, votre attitude?

M. CHAGNON: Dans notre esprit, la télévision communautaire c'est permettre à la minorité d'avoir accès à un medium de communication. Essentiellement, c'est un désir de la population de communiquer et je crois que l'entreprise de câble peut à ce moment-là fournir des facilités qui permettraient à la population de communiquer si elle le désire.

Je crois que l'entreprise peut favoriser par des installations techniques, peut-être à l'occasion par de l'aide de réalisateurs, un groupe communautaire qui voudraient être entendu, être vu sur un sujet donné.

Mais l'entreprise a un rôle je crois qui est assez passif lorsqu'on parle de télévision communautaire parce que c'est un besoin de la communauté qui veut s'exprimer. A ce jour peut-être elle s'est exprimée par écrit dans le journal local; maintenant, avec le truchement du câble de télévision, elle pourrait se servir de la facilité qu'est la télévision pour communiquer avec la communauté.

Le rôle du câblodiffuseur est de fournir peut-être une aide technique mais son rôle est assez limité quand même si la population ne désire pas se servir de ses facilités. Je crois que les câblodiffuseurs au Québec ont prouvé, ont fait des efforts louables pour favoriser la télévision communautaire en fournissant de l'équipement, de la main-d'oeuvre pour inciter les groupes à produire des émissions, le contenu étant toujours leur responsabilité.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant si le gouvernement vous demandait par exemple de fournir des services afin de donner aux citoyens des renseignements d'ordre administratif quelle serait l'attitude de vos associations ou de votre association?

M. CHAGNON: Peut-être, pour certaines entreprises, il a été mentionné que la réclame publicitaire pourrait les aider, sans surcharger, augmenter le tarif, à obtenir des revenus additionnels qui pourraient être consacrés à du personnel administratif pour seconder des groupes communautaires qui voudraient réaliser à ce moment-là de la programmation.

Dans mon cas, mon entreprise exploite de petits systèmes de câble de télévision qui sont à Mont-Laurier, à Gatineau, Buckingham, Beloeil. L'intérêt communautaire varie d'un endroit à l'autre et l'intérêt communautaire varie peut-être d'une période de l'année à l'autre. A certaines occasions, je vous donne raison, s'il y avait du personnel administratif pour les seconder en plus grande quantité il y aurait peut-être certaines personnes qui pourraient se servir un peu plus de ces facilités.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, Oui, M. Levasseur?

M. LEVASSEUR: Je pourrais peut-être ajouter un exemple. Dans le moment, plusieurs dans nos sociétés coopèrent déjà avec Radio-Québec à la diffusion des émissions à caractère éducatif et je pense que cela reflète l'état d'esprit des entreprises au Québec. Radio-Québec nous a pressentis en nous demandant de mettre du temps d'antenne à sa disposition et cela gratuitement. Nous avons collaboré l'an dernier et nous reprenons l'expérience cette année. Je pense que peut-être cela peut répondre à votre question. Si le gouvernement nous demandait un moment donné de rendre un service au public du même type que celui qui est rendu par Radio-Québec, je pense que vous trouveriez une certaine collaboration.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): La réglemen-

tation souligne à l'article 17, que la production offerte par toute entreprise publique de câblodistribution doit répondre aux exigences suivantes: Etre de haute qualité, utiliser des ressources locales, être de langue française y compris la musique vocale, à moins que dans le cas de programmation éducative et d'émissions communautaires la régie n'ait autorisé l'usage d'une autre langue, promouvoir la création et la diffusion de disques de toute autre production audio-visuelle du Québec. Est-ce que vous avez des commentaires concernant cet article particulièrement en ce qui concerne la qualité des émissions? Est-ce que vous y voyez des difficultés? Et en ce qui concerne l'usage d'une langue, la langue française, par exemple?

M. CHAGNON: Au Québec, il y a plus de 140 entreprises de télédiffusion par câble, mais il y a peut-être trois grandes entreprises. C'est-à-dire que la très grande majorité des entreprises desservent peut-être moins de 3,000 abonnés. Avec les ressources financières dont elles disposent, même si on ajoutait la réclame publicitaire, ce qui va être très limité quand même, ce ne serait pas suffisant. Je prends une municipalité comme Buckingham. Si on décidait de vendre la réclame publicitaire à Buckingham, ce serait très limité et peut-être ça ne couvrirait pas les frais du personnel pour vendre la réclame et produire un message publicitaire. Cela veut dire que les revenus qui peuvent être consacrés à la programmation locale et communautaire sont très limités.

Lorsqu'on parle de qualité, il y a de l'équipement non professionnel dans le demi-pouce entre autres qui est employé par les petits systèmes et qui, je crois, à ce stade-ci répond aux besoins des personnes qui veulent communiquer.

Un journal local dans une petite municipalité n'a peut-être pas le calibre du quotidien dans la grande ville mais il remplit quand même le besoin de fournir l'information qu'on attend de lui. La question de qualité pourra varier, naturellement.

National Cablevision Montreal peut se permettre d'installer un système — je ne l'engage pas, mais je le crois — qui peut-être coûtera au-dessus de $200,000 et un autre système qui va desservir 1,000 abonnés ou moins, parce qu'il y a des systèmes où il n'y a qu'une centaine d 'abonnés. Il ne pourra pas se permettre finalement d'obtenir peut-être d'autre chose qu'un portefaix qui va lui coûter $2,000 avec naturellement une qualité qui va être différente. Mais, au moins, il aura un outil qui, au Québec, a servi aux gens pour communiquer entre eux et qui va s'améliorer avec les années.

Donc, la qualité va être variable, il n'y a pas de doute à ce moment-là, selon la grosseur des systèmes.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Quand je parle de qualité, évidemment, je ne parle pas seulement de la qualité de l'équipement et de l'image, etc. Je parle du contenu. Est-ce que vous vous êtes penchés sur ce problème des normes de qualité en ce qui concerne le contenu de ce que vous diffusez?

M. CHAGNON: M. Tremblay, si on parle de programmation communautaire, l'entreprise de câble ne devrait pas s'ingérer dans le contenu parce qu'à ce moment-là c'est une censure qu'on va appliquer. Si les gens de la communauté veulent s'exprimer, ils s'expriment de la façon dont ils considèrent qu'ils devraient s'exprimer.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Alors, vous considérez votre rôle, dans ce domaine, comme un rôle de distributeur. Vous êtes un véhicule, à ce moment-là, qui achemine des émissions.

M. CHAGNON: M. Tremblay, je parle toujours de programmation communautaire.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Communautaire, c'est ce que j'entends.

M. CHAGNON: Parce que le câblodiffuseur interprète que la télévision locale, dans l'ensemble, est sa responsabilité et il y a des standards qui vont régir, à ce moment-là, son opération.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Qui ne relèvent pas de vous. D'accord.

LE PRESIDENT (M. Giasson): Le député de Saint-Jacques.

M. CHARRON: J'aurai d'abord une question qui s'adressera au ministre et qui fait suite à son énoncé de tout à l'heure; par la suite, une à M. Levasseur sur une affirmation de cet après-midi.

Le ministre — il faut le rappeler aux membres parce que nous avons un peu quitté le sujet momentanément — tout à l'heure, à la suite des questions adressées à M. Girard sur le comportement de l'association dans le cas d'une contradiction ou d'un conflit entre les deux juridictions, a affirmé que le gouvernement du Québec s'engageait à apporter un appui technique aux entreprises si jamais cela devait aller jusque devant les tribunaux.

Cela apparaît donc comme une déclaration de principe, mais cette déclaration est en même temps un peu coulée, elle perd un peu de sa valeur par le fait qu'un autre énoncé du ministre nous disait qu'un des principes qui a conduit à la rédaction et à l'élaboration de cette politique — et le ministère des Communications n'est pas le seul; c'est la marque de commerce de ce gouvernement — a été d'éviter les affrontements avec le gouvernement fédéral en cette matière.

L'appui qu'il promet aux entreprises n'a donc que peu de chances de se matérialiser, puisqu'il est prêt à affirmer qu'il n'y a pas ou à

peu près pas de points de litige dans le projet de réglementation qu'il nous a présenté cet après-midi.

Je veux demander au ministre si cette habitude ou ce principe d'éviter les conflits qui devraient entraîner les citoyens dans des affrontements entre les deux niveaux de gouvernement et qui, d'une certaine façon, fait oublier aux citoyens les contradictions inhérentes au système politique dans lequel nous vivons — comme le demandait le député de Lafontaine, tout à l'heure — vous a amené à abandonner des choses qui devraient figurer dans cette réglementation et que vous n'avez pas inscrites pour éviter les conflits.

Vous avez déjà partiellement répondu tout à l'heure à mon collègue: Non, il n'y a rien que nous avons abandonné. Je voudrais vous demander, à la suite de cette réponse, si vous considérez le rôle du Québec, dans la réglementation de la câblodiffusion, comme simplement complémentaire à une réglementation issue du gouvernement fédéral.

Dans la réglementation du gouvernement fédéral, du CRTC, qui touche l'ensemble de la câblodiffusion et de la télévision, y a-t-il des dispositions de cette réglementation qui entrent en contradiction, selon vous, avec les intérêts et la volonté québécoise? Si oui, quand attaque-rez-vous ces dispositions contradictoires aux intérêts québécois du gouvernement fédéral?

Attendrez-vous que le conflit politique, que la négociation politique soit intervenue à terme ou si, dans une prochaine réglementation, nous trouverons véritablement une décision québécoise qui est prête à affronter le gouvernement fédéral sur un terrain que lui-même occupe déjà et que ne lui reconnaît pas le gouvernement québécois, et à amener le conflit dans ses véritables proportions ou si la prochaine étape des réglementations de la câblodiffusion sera encore un effort pour éviter les conflits avec l'administration fédérale?

M. L'ALLIER: M. le Président, je voudrais relever un certain nombre de choses dans les observations du député de Saint-Jacques. D'abord, je lui rappelle, c'est probablement un lapsus, qu'il n'existe pas de réglementation fédérale du CRTC. Il y a des politiques, des énoncés, des décisions qui fonctionnent par jurisprudence et... Deuxièmement, je n'ai pas dit que nous avions adopté comme politique en matière de communication d'éviter les conflits avec le gouvernement fédéral.

J'ai dit qu'au moment de la préparation de ce premier bloc de règlements, nous avions volontairement évité de faire des règlements qui soient contradictoires et qui, en fait, libèrent le gouvernement de sa responsabilité politique de vider la question avec le gouvernement fédéral en la faisant porter sur les entreprises, en leur disant: Maintenant, vous êtes coincées, allez-y devant le tribunal, on vous aidera. J'ai voulu éviter cela dans un premier temps.

Troisièmement, nous n'avons pas, dans cette opération, mis de côté des règlements qui, à ce moment-ci, nous apparaîtraient essentiels et qui, à ce moment-ci, nous apparaîtraient pouvoir, d'une façon réaliste, s'appliquer. Je ne dis pas que, si le conflit ne se règle pas et si cela dure, nous n'aurons pas à en arriver là. Je souhaite éviter cela, parce que, à ce moment-là, c'est directement impliquer les citoyens, leur faire supporter un fardeau qu'ils n'ont pas à supporter. C'est déjà assez lourd comme cela, le système.

M. LEGER: A ce moment-ci, mais vous en voyez venir.

M. L'ALLIER: Cela peut arriver. Nous allons essayer de l'éviter.

M. CHARRON: A votre connaissance...

M. L'ALLIER: On avait le choix de faire deux choses. On avait le choix dans un premier règlement qui aurait pu être encore plus bref que cela de poser des gestes réglementaires contradictoires, de regarder les entreprises de câble se démerder — excusez l'expression — se débrouiller dans le conflit et de voir comment c'est tranché par le tribunal.

Nous avons, avant toutes choses, opté pour une solution politique de ce problème, et non pas pour une solution judiciaire. Tout en disant que, si l'autorité fédérale, de quelque façon, amenait la question devant le tribunal, nous ne serions pas indifférents. Même si nous devons aller devant le tribunal, nous continuons de penser que c'est une mauvaise voie pour trouver une solution qui n'en sera pas une, parce que basée sur des principes qui n'ont rien à voir avec la réalité des communications.

M. L'ALLIER: Je vais terminer là-dessus. Pour ce qui est des principes qui sont sous-jacents à la politique québécoise de communication, le député de Saint-Jacques sait comme moi qu'il y a plusieurs de nos principes qui sont contradictoires avec ceux du gouvernement fédéral actuellement. Nous n'avons pas voulu parce que ce n'était pas utile et aussi pour ne pas faire porter le fardeau politique, le faire supporter par les entreprises de câble à ce moment-ci.

M. CHARRON: C'est cette dernière partie qui m'incite à vous poser une autre question. Ces principes que, dans votre esprit — dans l'esprit que je pourrais même étendre à celui du gouvernement s'il en a un — ces principes, qui sont d'intérêt québécois, quand pourrons-nous les appliquer chez nous?

M. L'ALLIER: Je peux vous donner un exemple. Une chose qui, techniquement, aurait

peut-être pu être faite ici, mais nous ne sommes pas équipés pour la voir se réaliser maintenant et qui aurait posé des problèmes considérables.

Le gouvernement fédéral, dans ses politiques, considère que la télédistribution, la distribution de télévision par câble doit être subordonnée, à toutes fins pratiques, à la radiodiffusion et à la télédiffusion, parce qu'en définitive, c'est la radiodiffusion et la télédiffusion qu'il faut encourager en termes de production.

Nous avons déjà dit... Nous croyons — il n'y a pas de raison à ce moment-ci de changer d'idée — que cette situation nous serait défavorable au Québec et qu'au contraire, il faut donner à la télédistribution des moyens d'améliorer et d'augmenter, par la publicité en particulier, son potentiel de production, parce que la production de la télévision sera dans la très grande majorité des cas, en français et de culture française et québécoise, alors que d'encourager la production des systèmes de radio et de télédiffusion peut, dans le résultat final, encourager, en fait, l'augmentation du volume de production anglophone par rapport au volume de production francophone.

C'est un concept que nous avons. C'est une idée que nous avons. Nous n'avons pas voulu la traduire ici parce que nous ne sommes pas prêts. Cela comporte trop de technicités. Cela comporte trop de changements radicaux et le faire ici aurait davantage créé des problèmes et cela aurait surtout comporté de passer la balle, si vous voulez, aux entreprises de câble.

C'est une question, cependant, que nous continuons de penser importante. Il n'est pas impossible, dans un prochain temps, que nous le fassions. J'espère qu'entre les deux on pourra régler le cas.

M. CHARRON: Je vais conserver cet exemple précis que vous apportez. Quant à ce concept qui est québécois, qui représente nos intérêts québécois. Est-ce que, lorsque les détails techniques qui nous permettront de le réaliser, seront prêts, admettons que cette étape-là est passée, la volonté politique, elle, existera-t-elle avant la fin des négociations ou si elle attend les négociations pour pouvoir se réaliser?

Autrement dit, mettrez-vous un jour, lorsque le technique sera prêt, le fédéralisme dans sa situation de contradiction, par une réglementation de ce genre-là? Aurez-vous le cran de faire une réglementation qui amènera nécessairement une contradiction avec les politiques fédérales, ou si, même quand les détails techniques de l'application de ce concept seront terminés, ils devront rester sur les tablettes parce que la négociation politique, elle, n'aura pas encore abouti?

M. L'ALLIER: Vous soulevez là, en fait, ce qui sera à ce moment-là une décision politique. Comme vous le dites, c'est là-dessus que la population aura à décider si elle continue avec ce gouvernement ou avec un autre. Comme vous l'avez dit, peut-être qu'on ne sera pas là, à ce moment-là.

M. CHARRON: Je vous remercie. Je vais maintenant poser la question à M. Levasseur, cela va peut-être nous ramener un peu en arrière, mais c'est sur les 80 p.c. de propriétaires, actionnaires, résidents québécois que vous avez contestés ce matin. Dans votre cas, notez bien que j'ai parfaitement compris, parce que, quand vous avez décrit l'échantillonnage d'actionnaires de la compagnie que vous représentez, il est bien évident que si l'on devait accepter la modification que vous proposez, 80 p.c. de résidents du Canada, votre 20 p.c. de Vancouver se trouverait ajouté à votre 60 p.c, CBS pourrait continuer à garder son 20 p.c. extérieur et votre entreprise ne serait pas dérangée par l'application de ce règlement. Je ne vous fais aucunement grief d'essayer d'éviter des problèmes dans votre propre entreprise.

Vous avez entendu mon collègue de Lafontaine exprimer l'opinion de notre parti, ce matin, aussi là-dessus. C'est un point sur lequel nous sommes tout à fait solidaires du gouvernement et je n'ai pas besoin, vous êtes assez impliqué dans le milieu, d'expliquer comment nous considérons l'importance dans ce type d'entreprise en particulier, que le taux de propriété de résidents québécois soit aussi élevé que 80 p.c. Evitons donc les affirmations théoriques et passons aux questions.

Dans vos justifications, ce matin, à l'encon-tre du projet de réglementation, vous avez évoqué, en deuxième lieu, la possibilité de représailles. On en a partiellement discuté. Mais le premier argument que vous aviez apporté était l'utilité quant à la mise à jour nécessaire, essentielle à une entreprise de ce genre-là, d'être à la fine pointe du développement technologique. Vous avez fait état que le développement technologique dans cette matière est essentiellement, comme on le devine, américain et qu'il est essentiel, en plusieurs occasions, d'avoir des intérêts étrangers siégeant ou comme actionnaires, ou siégeant même au conseil d'administration.

Cet argument, M. Levasseur, m'apparaît un peu comme de la poudre aux yeux. Je pense que c'est très facilement dit, mais dans la réalité concrète des entreprises — là, je n'ai pas l'expérience que vous avez — je ne crois pas que ce soit aussi fondé que cela. Je m'explique. J'ai l'impression qu'une entreprise peut facilement rester en contact avec les dernières découvertes de la technologie, sans nécessairement avoir parmi ses actionnaires plus de 20 p.c. d'étrangers, dussent-ils venir tous de la mère patrie du développement technologique.

D'autre part, comme M. Girard l'a affirmé tout à l'heure, plusieurs entreprises, membres de cette association, ont déjà, je pense à Cable TV, jusqu'à 100 p.c. d'actionnaires québécois. Ces entreprises, on ne les a pas encore enten-

dues, mais je ne pense pas qu'elles s'avouent en retard du développement technologique parce qu'elles ont accepté 100 p.c. de Québécois chez elles. Je trouve que l'argument est de poids aux yeux des profanes parce que, évidemment, au premier abord, on fait le rapport... Oui, ce sont des Américains, donc on est mieux d'avoir des Américains avec nous. Toujours l'avantage d'avoir le plus fort de son côté. Mais je crois que l'essentiel des échanges et du développement se fait et les autres entreprises qui sont dans l'association se sont tout aussi bien développées sans avoir cela.

Permettez-moi d'ajouter, avant de vous céder la parole, le fait que les 80 p.c, j'en suis convaincu, ne nous écartent pas du développement technologique, mais en plus de cela, nous assurent de garder dans ce domaine très précis une possibilité québécoise de développement à notre manière et à notre façon.

La technologie, vous le savez, ce n'est pas international; la technologie, dans chacun des pays, prend sa propre version. Je dis que l'avantage d'une réglementation qui obligerait les entreprises de câblodiffusion à avoir 80 p.c. de résidents québécois ne les écarterait pas du développement technologique, mais permettrait même aux Québécois de se développer dans ce développement technologique, de se perfectionner dans ce développement technologique et parfois même de contribuer au développement technologique, plutôt que d'ouvrir toutes grandes nos portes à l'étranger qui a ce développement technologique, qui se contente de venir l'appliquer chez nous, sans jamais nous l'apprendre et sans jamais nous donner l'occasion d'y participer.

Je crois que 80 p.c. de Québécois, de résidents québécois actionnaires d'une entreprise, et j'espère l'équivalent à un conseil d'administration, feront que cette technologie où l'on restera toujours lié aura des chances de se québécoiser en s'en allant. Je vous donne l'occasion de reprendre votre argument de ce matin.

M. LEVASSEUR: M. Charron, je pense qu'il y a des choses que je laisserai le soin de débattre aux actionnaires chez nous, en particulier, peut-être, ententes qui existent déjà avec d'autres actionnaires, comme CBS, et l'impact de la réglementation sur ces ententes.

Je pense que vous avez mentionné que l'on peut avoir accès à la technologie sans avoir une participation ou sans accepter de donner une participation à des entreprises étrangères et là-dessus, je vous concède que, dans la réalité, dans le domaine du câble, on fait beaucoup de shoppings. On se promène, on cherche et finalement on trouve un équipement ou un produit qui nous satisfait et on n'a pas besoin d'offrir un siège au conseil pour acheter l'équipement. Ils sont très heureux de nous vendre l'équipement et cela continue.

Je pense que ce à quoi on faisait allusion dans nos commentaires et ce que j'ai moi-même dit ce matin, c'est que l'on cherche à ne pas fermer la porte à une participation des étrangers chez nous ou à notre participation à l'étranger.

En somme, l'ensemble de votre argument réside autour du pourcentage, parce que je pense que, nous comme vous, cherchons à développer au Québec des techniques dans le domaine du câble qui nous placent à l'avant-garde. Nous cherchons à développer des entreprises connexes qui viendront, soit fournir l'équipement ou soit faire des développements. Chez nous, par exemple, cette année, pour la première fois, on consacre un budget assez intéressant à la recherche. Je pense que le principe que l'on a invoqué est de ne pas fermer les portes dans ce champ-ci, ce qui pourrait avoir comme effet, peut-être, de fermer les portes dans d'autres champs d'activité économique aussi.

Je pense que les actionnaires de National tantôt pourront expliciter davantage la position des 80 p.c, mais l'association a fait la recommandation.

D m'apparaft que c'est peut-être l'orientation qu'on a donnée à la plupart de nos commentaires, en particulier sur le 32, de ne pas fermer la porte parce qu'il y a des développements technologiques nouveaux qui continuellement se font. Par exemple, dans les nouveaux services, on a parlé tout à l'heure de ce qu'on mettrait sur les 30 canaux, sur l'ordre de priorité. Il y a aussi des nouveaux services, qui vont être illustrés d'ailleurs dans la présentation du visuel de tout à l'heure.

Ces nouveaux services demandent très souvent des applications technologiques ou techniques qu'on n'a pas encore développées au Québec, qui sont en voie de développement aux Etats-Unis. Cela est l'exemple d'une technique ou d'une technologie qu'il faut aller chercher. Si on s'y met à partir d'aujourd'hui et si on décide en se servant d'instruments comme le Centre de recherches industrielles du Québec, par exemple, de consacrer des efforts spécifiques sur ce secteur de pointe, de façon à ce qu'ils servent les Québécois disons au même rythme de développement que dans les autres provinces, je pense qu'on va peut-être arrêter d'importer de la technologie.

Tout ce qu'on dit c'est que la réglementation, dans le moment, peut être un cadre qui peut déjouer vos objectifs si vous le faites trop serré. Cela devrait être un cadre que vous prévoyez utiliser en conjonction avec d'autres instruments comme le CRIQ. On vous demande tout simplement de laisser la porte ouverte.

M. CHARRON: En un mot, l'association considère que pour 80 p.c. la porte est fermée.

M. LEVASSEUR: Disons que l'association dit que le contrôle québécois de l'entreprise se gagne par 51 p.c. dans le cas d'une entreprise qui a des actions en privé et par un mécanisme

sur le contrôle du transfert des blocs de propriétés si c'est en public.

Puis nous autres on dit: Si c'est de cela qu'on a besoin pour faire effectuer un contrôle, pourquoi aller mettre 80 p.c. et se mettre un paquet d'investisseurs possibles à dos? Je pense que l'association dans son affirmation poursuit le même objectif que vous dans le sens que vous avez dit : D'accord, il faut que cela soit contrôlé par les Québécois. Nous on dit: Oui, la mesure effective est de 51 p.c.

M. CHARRON: D'accord, j'ai compris votre argument.

LE PRESIDENT (M. Giasson): Le député de Chicoutimi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je reviens sur une question qui a été évoquée assez longuement et que le ministre a développée, le problème des conflits possibles entre le gouvernement du Québec et le gouvernement d'Ottawa.

Ce matin, le député de Lafontaine parlait du paradis de l'indépendance. C'est bien son droit de le faire. On a chacun ses croyances et ses dogmes quelqu'en soit la morale, mais je me disais après coup: II va falloir négocier. Le gouvernement actuel négocie avec le gouvernement central dans ce domaine des communications. Il négocie avec un succès relatif, tout le monde le constate, mais avec l'espoir d'en arriver à des résultats plus percutants et plus convaincants.

Mais un gouvernement qui serait indépendant, si ce malheur arrivait, aurait également à négocier. Il aurait à négocier en des domaines où nos contribuables auraient à porter le fardeau de la plus grave querelle constitutionnelle qui soit, soit la sécession. Il aurait à négocier dans le domaine des transports aériens, ferroviaires, ports nationaux, etc.

Alors je pense que l'attitude du ministre s'inspire d'un réalisme qu'on voudrait peut-être un peu plus dynamique mais tient compte d'une situation de fait. Même si nous le pressons de régler cette question, il n'échappe pas à notre attention que tous les contribuables du Québec seraient appelés à faire les frais de ces attitudes rigides, inspirées d'un idéalisme peut-être louable mais qui aboutit souvent à un sectarisme désastreux pour l'ensemble des contribuables.

Tout ce que je voulais savoir, lorsque je vous ai interrogé — M. Girard et les membres de votre délégation — c'était ceci: Est-ce que, dans le cas de conflit, vous seriez disposés à appuyer à 100 p.c. le gouvernement du Québec dans son entreprise difficile de négociation? Vous m'avez répondu, je vous en sais gré et je ne voudrais pas vous laisser partir — vous allez assister à ce qui va suivre, j'imagine — sans vous remercier de votre mémoire et sans vous féliciter de l'approche qui est la vôtre.

On peut être d'accord ou pas d'accord sur certains points mais je crois que dans l'ensemble vous avez compris dans quel sens s'infléchit la politique du gouvernement que nous, les hommes politiques, avons la responsabilité de critiquer et de combattre, le cas échéant.

M. LATULIPPE: M. le Président, je voudrais également joindre mes remerciements à l'Association des câblodiffuseurs pour son apport positif aux travaux de cette commission. On ose espérer que cela va leur donner satisfaction également.

LE PRESIDENT (M. Giasson): M. le ministre.

M. L'ALLIER: M. le Président, nous allons continuer, si tout le monde est d'accord, l'audition des intervenants, mais je tiens à souligner ici, à mon tour, la très bonne collaboration que nous avons eue et que nous avons constamment de l'Association de télévision par câble du Canada. Nous avons eu des discussions, nous sommes partis de loin, mais finalement, je crois que sur les objectifs que nous poursuivons il n'y a pas, comme je l'ai dit, d'opposition.

L'association, ses membres et en particulier la section québécoise comprennent la situation et nos problèmes et jusqu'ici — je peux le dire publiquement et j'en suis heureux — ils ont tout fait pour nous faciliter le travail et pour expliquer à leurs membres le sens de nos interventions.

LE PRESIDENT (M. Giasson): Messieurs, merci. Nous invitons maintenant à la table M. Denis Filion. M. Filion, nous vous écoutons.

Télévision Laurentienne

M. FILION: M. le Président, M. le ministre, messieurs les membres de la commission, mon nom est Denis Filion, propriétaire d'un système de câblodistribution à Mont-Tremblant. Vous venez d'entendre la grosse machine, la grosse cloche; voici maintenant que la très petite cloche de la province de Québec va donner son opinion puisque j'ai seulement 200 abonnés à mon câble, sur une distance de 14 milles.

J'aimerais, pour débuter vous féliciter et vous remercier sincèrement de l'occasion que vous nous offrez de nous exprimer. Je tiens à vous mentionner que je l'apprécie beaucoup et cela en mon nom personnel et aussi au nom de mes collègues, les petits qui à mon humble avis, auraient dû en faire autant, cela aurait facilité la tâche, je crois.

Etant donné que vous avez tous mon exposé, vous vous êtes sans doute rendu compte qu'il est d'une ampleur égale à mon entreprise. Vous avez sûrement remarqué qu'il est axé — non pas taxé — vers la télévision communautaire, la réglementation de la programmation et la commandite puisque c'est plutôt dans ce domaine que je suis réellement touché.

Messieurs, je vous avoue franchement ici que vous avez actuellement la clef de l'avenir de la télévision communautaire chez les petits dans mon cas comme dans celui de mes collègues.

Comme je suis le plus petit, encore une fois, câblodistributeur au Québec à avoir un investissement si fort dans ce domaine, c'est-à-dire studio et équipement ou tout autre, j'ai cru bon de prendre position personnellement, puisque je crois que personne ne connaît mieux ses problèmes que lui-même. Non pas, Messieurs, que je n'ai pas confiance en mes collègues, c'est-à-dire les grosses machines, l'association, au contraire, je les appuie sans réserve, mais je crois tout simplement que le câblodistributeur moyen, ou encore le gros, ne rencontre certainement pas les mêmes difficultés financières.

Il est bien évident qu'il négocie davantage selon son niveau, selon ses revenus à lui. Je crois que c'est tout à fait normal.

Messieurs, je vous remercie de votre bonne tolérance envers moi et si vous jugez bon que je vous relise mon exposé, ou encore si vous avez des questions, il me fera plaisir d'essayer de vous éclairer sur mon cas.

Avant de terminer, je vous fait remarquer que je suis très optimiste quant à votre décision puisque je suis certain et persuadé même de votre bonne compréhension et collaboration. Je suis à votre entière disposition si vous avez des questions à mon sujet.

Merci.

M. LATULIPPE: Est-ce que je pourrais demander à M. Filion de résumer l'essentiel de son mémoire, sans prendre le temps de le lire, parce que je crois que vous...

M. FILION: Je le dis, il est axé sur la commandite et la programmation communautaire. C'est ce que je viens de vous dire, il est axé là-dessus.

M. LATULIPPE: M. Filion, est-ce que vous jugez que les propositions qui sont faites dans le règlement à l'étude actuellement vous satisfont?

M. FILION: Je m'excuse, Monsieur, mais je vous comprends mal.

M. LATULIPPE: Est-ce que vous jugez que la réglementation qui vous est proposée vous donne satisfaction?

M. FILION: Dans l'ensemble?

M. LATULIPPE: Dans l'ensemble, parce qu'on va vous permettre effectivement de pouvoir retirer certains frais publicitaires. Est-ce que cela va vous permettre de couvrir ou de faire vos frais?

M. FILION: Si j'ai gain de cause, oui.

LE PRESIDENT (M. Giasson): M. le ministre des Communications.

M. L'ALLIER: J'ai pris connaissance du mémoire de M. Filion. Je voudrais d'abord féliciter M. Filion de l'effort considérable qui est fait par la télévision de la communauté Télé Laurentides en termes de participation communautaire. Vous avez, comme vous l'avez dit, un petit système, mais vous êtes quand même équipé pour fournir un service communautaire proportionnellement mieux que n'importe qui. Je pense qu'il faut le reconnaître. C'est un effort qui devrait être fait par l'ensemble des câblodistributeurs, proportionnellement à leurs moyens.

La question principale que j'ai cru déceler dans votre mémoire — vous me direz si c'est exact — c'est l'obligation qui pourrait être faite de faire un minimum de dix heures par semaine de programmation locale. Sur ce point, tout à l'heure, j'ai donné les explications et je peux, encore une fois, vous rassurer. Il n'y a pas, ni dans l'esprit, ni dans le texte de la réglementation — même si cela peut être complexe à faire des recoupements, il faut quand même rester à l'intérieur du vocabulaire juridique — d'obligation de faire dix heures de programmation par semaine.

Au moment d'obtenir un permis de la régie, la régie doit suivre un ordre de priorité en tenant compte du potentiel de clientèle et de distribution que vous avez. A ce moment-là, vous pouvez soumettre, en demandant votre permis, une programmation qui ne comporte pas, d'aucune façon, de programmation communautaire et la régie pourra l'accepter comme tel. C'est à vous de déterminer en définitive la programmation qui vous paraît acceptable au moment de demander votre permis. C'est comme ça que cela se passe de toute façon dans le CRTC.

La régie pourra vous poser des questions et vérifier si effectivement vous ne voulez pas faire de télévision communautaire si vous n'avez pas les moyens de le faire, mais si vous n'avez pas les moyens de le faire, c'est à vous d'en déterminer la preuve. Vous ne serez pas obligé de le faire.

Nous avons indiqué dix heures pour éviter précisément qu'il y ait des entreprises de bonne foi qui fassent de la publicité en disant: Nous avons une programmation communautaire; alors qu'elle est d'une heure, deux heures ou d'une demi-heure par semaine. En d'autres mots, on s'est dit: On ne peut pas parler de programmation communautaire à moins que ce soit dix heures par semaine.

C'est un point que nous allons continuer de regarder compte tenu de vos observations et il est possible, sur le volume de dix heures, qu 'il y ait des modifications compte tenu de l'ensemble des mémoires.

Encore une fois, il n'y a rien, dans cette

réglementation ni dans son esprit, qui constitue une contrainte telle que vous soyez obligé de fermer boutique parce qu'il y a des choses que vous ne pouvez pas faire et qu'on vous obligerait à faire.

La relation que vous faisiez ensuite avec la publicité va un peu dans le même sens. Ce sont les moyens qui sont disponibles pour réaliser cette programmation. La publicité, si vous décidez d'en faire, est permise par cette réglementation.

Alors, c'est en gros ce que je retenais de votre mémoire. S'il y a d'autres points, vous pouvez nous les souligner ou, si cela n'est pas exact, vous pouvez nous le dire aussi.

M. FILION: M. le Ministre, c'est très exact, ce que vous venez d'affirmer. Mais au point de vue commandite, je ne sais pas si vous avez capté mon message. J'ai surtout axé mon intervention sur la commandite pas seulement locale, mais régionale.

J'avoue avec vous que cela ne peut peut-être pas s'adapter partout. Mais, dans mon cas, avec le bassin de marchands qu'il v ? dans Saint-Jovite, c'est tout à fait évident qu'on ne peut pas survivre avec ça. Il faut considérer aussi que l'on se dérange beaucoup. Remarquez bien que ce n'est pas un reproche pour personne et cela me fait plaisir de prendre, de Saint-Jérôme à l'Annonciation, toutes les activités des clubs sociaux quelconques. Même, vous en avez une preuve; votre collègue, Me Denis Hardy, mon député, que je salue en passant, souvent je me rends à Saint-Jérôme pour prendre ses conférences de presse.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Cela pose un problème...

M. FILION: Oui, cela arrive.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... de qualité, M. Filion!

M. FILION: Pardon, M. le Président, j'aimerais répondre à M. Tremblay. La qualité des conférences...

M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. Filion... M. FILION: Pardon?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... c'est une blague que j'ai faite à l'intention de mon collègue.

M. FILION: Je peux vous en faire une autre, si cela ne vous fait rien.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): On continuera.

M. FILION: Si vous parlez de la qualité des conférences de presse de Me Hardy, vous savez que Me Hardy porte le nom de Denis, il a une grande facilité de parole. Lorsque je me rends à Saint-Jérôme pour enregistrer quelquefois deux heures de programmation, c'est mon programme le plus facile à monter, puisque, lorsque Me Hardy commence à parler, il ne finit plus et il n'y a pas de coupures. Alors, je n'ai qu'à passer le programme.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je vous félicite de votre patience, M. Filion! Deux heures de conférence de presse!

M. HARDY: Ce sont des réalisations.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): On n'en a jamais entendu parler!

M. FILION: C'est la raison pour laquelle, M. le Président, j'insiste tellement pour avoir une commandite régionale pour pouvoir suffire aux dépenses de tout ça.

M. L'ALLIER: J'en prends note. M. FILION: Merci beaucoup.

LE PRESIDENT (M. Giasson): Le député de Frontenac.

M. LATULIPPE: Est-ce que vous pensez réellement que vous allez avoir un apport financier de la part de la commandite qui va combler vos frais?

M. FILION: Je n'ai pas compris votre question. Excusez-moi.

UNE VOIX: Vous n'êtes pas le seul.

M. LATULIPPE: Est-ce que vous pensez que la vente de publicité va vous fournir suffisamment d'argent pour faire vos frais dans le domaine de la production?

M. FILION: Cela fait déjà deux ans que j'opère et, en deux ans, sans publicité, j'ai construit un studio, je l'ai opéré et j'ai monté toute l'affaire. Alors, cela en prendrait juste un peu plus avec l'arrondissement et je me charge du reste.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. Filion, est-ce que...

M. FILION: II y a seulement des solutions, mon cher ami.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'était la question de mon collègue. Qu'est-ce que vous escomptez tirer de la publicité que vous réclamez ici de la commandite? Quel est, enfin, approximativement le montant qui pourrait vous venir de cela?

M. FILION: Premièrement, il faudrait en

avoir assez pour pouvoir me payer un employé à plein temps, ce qu'actuellement je ne peux pas faire.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ce n'est pas cela que je veux dire. Je ne parle pas de l'usage que vous pourriez en faire, mais est-ce que vous avez, enfin, une étude aux fins de savoir ce que cette publicité vous apporterait en revenus additionnels pour exploiter votre entreprise?

M. FILION: Je crois que, malheureusement, je n'ai pas le dossier ici. Je dois vous avouer que je travaille souvent la nuit, depuis un bon quinze jours, sur ce projet de règlements et j'ai complètement oublié ça. J'ai fait une étude là-dessus et je crois qu'il doit y avoir moyen, mais pas seulement avec le local, car, avec le local, c'est définitif, je ne peux pas arriver. Cela n'est pas seulement en mon nom.

Le petit qui a 200, 300, ou 1,000 abonnés, c'est impossible qu'il arrive dans une localité avec quelque 80 marchands, c'est impossible. Parce que, vous savez, le marchand du coin, vous allez lui demander $50 pour une semaine, il va vous les accorder, mais n'allez pas lui demander une série de trois mois, à $50 par semaine, il n'est pas capable.

M. HARDY : Qu'est-ce que la publicité locale veut dire dans votre esprit?

M. FILION: Dans mon esprit, la publicité locale, d'après ce que j'ai pu voir dans le projet de règlement, c'est la localité que nous desservons — c'est Saint-Jovite, dans mon cas, et comme Me Hardy connaît très bien Saint-Jovite, le potentiel, le bassin des marchands ne suffit pas à cela, c'est absolument impossible.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): On va demander à M. Hardy de vous payer des émissions!

M. HARDY: M. le Président, la proposition de mon collègue de Chicoutimi cadrerait avec mes principes sur la limitation des dépenses des partis politiques.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est nouveau cela chez vous.

M. LATULIPPE: La présente réglementation ne limite pas la perception de commandites aux territoires spécifiques où l'entreprise fait des affaires actuellement?

M. L'ALLIER: C'est exact, la prochaine réglementation permet la publicité d'une entreprise sur le territoire qu'elle dessert. Il est évident à ce moment-là que, pour une grande entreprise, par exemple, qui dessert l'est ou l'ouest de Montréal, cela peut devenir un territoire intéressant. Pour une toute petite entreprise, c'est proportionnel au territoire desservi. C'est le projet qui est actuellement devant nous maintenant.

Comme je vous l'ai dit, j'ai pris connaissance de ce mémoire qui, en gros, représente l'opinion de tous ceux qui sont dans la situation d'exploiter des réseaux de moins de 1,500 ou 2,000 personnes, 2,000 abonnés. C'est une question que nous allons analyser. Il n'y a rien qui empêche cependant des ententes d'intervenir entre les petits câblodistributeurs, les petites entreprises entre elles pour des échanges.

M. LATULIPPE: Le petit distributeur en vertu de la réglementation telle qu'elle est faite, est-ce qu'il peut solliciter par exemple, une commandite de Coca-Cola à Montréal?

M. L'ALLIER: II ne pourrait pas solliciter une commandite de Coca-Cola à Montréal, il pourrait solliciter une commandite de celui qui le vend chez lui.

M. LATULIPPE: Essentiellement.

M. L'ALLIER: Vous comprenez que ce sont les distributeurs locaux qui pourraient...

LE PRESIDENT (M. Giasson): Le député de Terrebonne.

M. HARDY : Dans l'étude de ce problème, quand on parle du territoire desservi, actuellement, ce que la réglementation prévoit, c'est le territoire où résident les abonnés. Mais comme M. Filion l'a expliqué tantôt, au point de vue de l'information, c'est-à-dire comme source d'information, il va chercher de l'information en-dehors de ce territoire, c'est-à-dire qu'il va chercher de l'information à Sainte-Adèle, à..., de différents organismes.

Alors, je me demande s'il n'y aurait pas lieu — je ne sais pas dans quelle mesure cela peut être défini — de définir la région où l'on peut aller chercher de la publicité comme étant la région où le câble prend son information. C'est-à-dire que si M. Filion ou d'autres donnent de l'information sur le territoire allant de Saint-Jovite à Saint-Jérôme, c'est-à-dire si c'est là sa source d'information, s'il donne de l'information sur les activités syndicales de Saint-Jérôme, sur les activités de la Chambre de commerce de Sainte-Adèle, etc., il serait peut-être normal que ce territoire lui serve de source d'approvisionnement en publicité.

M. L'ALLIER: C'est une chose, M. le Président, que nous n'excluons pas et que nous allons étudier précisément à partir de maintenant.

M. FILION: M. le Président, me permettez-vous de donner seulement un exemple auquel Me Hardy me fait penser? En parlant de Sainte-Adèle, justement, à compter de la fin de semaine, nous allons être là six jours dans l'autre semaine pour le festival d'été. Deux hommes s'en vont là, ils passeront les grandes journées complètes, pour couvrir le festival

d'été de Sainte-Adèle. Ils ne nous paient pas pour ça, mais c'est dans la région, c'est la région des Laurentides, quoi. On se fait un devoir de le faire pour informer la population.

LE PRESIDENT (M. Giasson): Messieurs, d'autres questions à l'endroit de M. Filion? M. Filion nous vous remercions.

M. FILION: C'est moi qui vous remercie, messieurs.

LE PRESIDENT (M. Giasson): J'invite maintenant le ou la représentante de Rivière-du-Loup Câble Ltée. Il semblerait que les représentants de Rivière-du-Loup Câble Ltée ne sont pas dans la salle. Donc, Télévision Saint-Maurice Inc., La Belle Vision. Monsieur, si vous voulez vous identifier.

Télévision Saint-Maurice

M. BEAUMIER: M. le Président, M. le ministre, messieurs les membres de la commission, messieurs, mon nom est Marcel Beaumier, je suis l'avocat de Télévision Saint-Maurice Inc. J'ai avec moi le président de la compagnie qui est à ma droite, M. Henri Audet, son assistant et collaborateur immédiat, M. Robert Bonneau, dont je vous parlerai tantôt, et également deux administrateurs des câbles, M. Jean Brousseau et M. Jacques Gauthier, de Shawinigan et de Trois-Rivières.

L'objet principal de notre intervention se rapporte uniquement à l'article 6 de la réglementation. Je connais personnellement M. Audet, qui est une autorité en matière de radio, télévision et câblodistribution, parce qu'il oeuvre dans ce champ-là depuis près de 30 ans maintenant. Il a à son crédit de nombreuses années de service à la société Radio-Canada pour avoir organisé et dirigé les services techniques de Radio-Canada à Montréal et dès les débuts de sa pratique, il s'est occupé activement de l'organisation de la télévision au Canada. Dès le début également il a fait partie d'un groupe de cinq représentants chargés par Radio-Canada de faire enquête sur la télévision au Canada, aux Etats-Unis et en Europe. Il possède donc le sujet de façon très profonde. Depuis 1953, jusqu'en 1957, il a dirigé les services techniques de Radio-Canada à la télévision de toute la province de Québec. Il a fait partie également du comité conjoint de Radio-Canada et de la compagnie de téléphone Bell qui a organisé et dirigé l'opération des réseaux de télévision de Radio-Canada d'un océan à l'autre. Il a fait également partie d'un comité spécial de télévision de Radio-Canada qui dirigeait les activités de télévision de tout le Canada. En octobre 1957, il a laissé Radio-Canada pour organiser et diriger Télévision Saint-Maurice au coeur du Québec. Il en est le président et le directeur général.

Cependant, il ne s'est pas arrêté là dans son expérience des communications au Canada et au Québec puisqu'il a été président de l'Association canadienne des radiodiffuseurs et télédiffuseurs de langue française. Il a participé à des voyages d'études organisés par différentes organisations aux Etats-Unis, en Angleterre, en Suède, en Italie et en France afin de recueillir des renseignements sur l'utilisation de la télévision éducative dans ces pays. Vous voyez donc que M. Audet, qui dirige une compagnie progressive, est extrêmement qualifié pour vous parler du sujet dont nous allons vous parler.

Son assistant, M. Bonneau, est dans le métier depuis 20 ans, il a fait lui aussi ses débuts à Radio-Canada et il a à son crédit d'avoir construit et dirigé les débuts des stations de Vancouver et d'Ottawa. A ce titre-là également, il est qualifié pour discuter de toute la réglementation avec vous si vous avez des questions à leur poser dans d'autres domaines, mais notre présentation, comme vous l'avez constaté dans notre mémoire, se limite strictement à l'article 6, qui concerne notre compagnie et qui concerne également énormément le milieu dans lequel nous évoluons.

Je laisse donc la parole à M. Henri Audet et à M. Bonneau, qui feront eux-mêmes la présentation de notre mémoire.

LE PRESIDENT (M. Giasson): M. Audet.

M. AUDET: M. le Président, messieurs les membres de la commission, j'aimerais vous remercier de cette occasion que vous nous donnez de vous présenter nos vues en marge du règlement proposé pour les télécommunications et spécifiquement la câblodistribution au Québec.

Comme vous le savez, nous ne nous proposons pas de discuter de toute la réglementation proposée, d'autres l'ont fait avant nous; en particulier, notre Association des câbles vous a présenté un mémoire qui contient les buts de tous les membres câblodiffuseurs du Québec. Nous appuyons dans l'ensemble ce mémoire présenté par notre association.

Nous désirons surtout souligner par notre présence l'effet qu'aurait cette réglementation sur notre compagnie et vous souligner que ce règlement, s'il était adopté sans modification, en particulier le règlement ou l'article 6, risquerait de compromettre le service de télévision que notre entreprise fournit présentement à la région de Trois-Rivières.

Pour vous expliquer comment cette réglementation affecterait notre service de télévision dans la région de Trois-Rivières, j'aimerais vous présenter M. Robert Bonneau, administrateur de Télévision Saint-Maurice. M. Bonneau.

M. BONNEAU: M. le Président, messieurs de la commission, je vous ferai grâce de la lecture de l'article 6 et j'enchaine. D'après nous, le texte de cet article ne répond pas à l'intérêt de

la collectivité de notre région, ne tient pas compte des facteurs importants que sont la conceptualisation des émissions, de la technologie et des réalités économiques auxquelles ont à faire face des entreprises de télévision et de câblodiffusion dans une région comme la nôtre.

De plus, si l'on considère toute la réglementation dans son ensemble, la partie de l'article 6 qui concerne les entreprises de presse, de radio, de télévision et de cinéma nous parait superflue. Regardons tout d'abord l'intérêt de la collectivité.

A la lecture du règlement dans son ensemble, on constate facilement que le législateur s'est soucié de l'intérêt de la collectivité, comme c'était d'ailleurs son devoir de le faire. Nous croyons cependant que cette partie de l'article 6 qui concerne les entreprises de presse, radio, télévision et cinéma constitue une entrave à cet intérêt. L'intérêt public semble bien servi si les abonnés d'un câble ont accès au plus grand nombre possible de programmes de qualité.

Le projet de règlement définit la nature et l'ordre de priorité de ces programmes et indique comment ils doivent être mis à la disposition du public. Le projet de règlement prescrit même un minimum d'heures de programmation que devrait produire le câblodiffuseur. Toutefois, ce service de programmes, que laisse entrevoir à l'abonné l'ensemble de la réglementation proposée, semble subitement et inutilement amputé de ses racines et de ses sources les plus dynamiques par l'interdiction qui est faite à la régie d'attribuer des autorisations à des entreprises de presse, radio, télévision et cinéma et à toute entreprise ou personne reliée à l'une d'elles par participation financière ou autrement.

En effet, les entreprises de presse, radio, télévision et cinéma constituent certaines des sources d'approvisionnement de programmes les plus importantes et les plus dynamiques puisqu'elles possèdent déjà les ressources humaines, technologiques et financières appropriées à la production de programmes. Ces entreprises possèdent également l'expérience et la formation professionnelle essentielles à la production de programmes qui satisfassent aux besoins du public et qui assurent à ce public une information intègre et de qualité.

Le cloisonnement artificiel proposé par l'article 6 entre la câblodistribution et les entreprises de radio, de télévision et de cinéma semble, d'une part, interdire au public l'accès à des programmes de valeur, et, d'autre part, interdire à des professionnels de la programmation la présentation de leurs oeuvres à un public plus large.

Ceci nous semble constituer une injustice pour le public, les artistes et les professionnels de la télévision et du cinéma. Ce cloisonnement artificiel proposé par l'article 6 nous parait conduire à un éparpillement des efforts et à un gaspillage des ressources régionales au détriment de toute la communauté.

Le gaspillage de talents et de ressources culturelles n'est admissible nulle part. Dans une région comme la nôtre qui ne possède pas les ressources de grands centres comme Montréal, le gaspillage de ressources humaines et financières nous semble particulièrement à éviter. Pour soutenir nos institutions régionales, nous devons faire appel à des solutions pratiques qui permettent le groupement et l'utilisation de toutes les bonnes volontés et de tous les moyens disponibles.

La modification de l'article 6 par l'élimination des mots "de presse, de radio, de télévision, de cinéma et à toute entreprise ou personne reliée à l'une d'elles par participation financière ou autrement" permettra ce genre d'approche aux problèmes de la télévision dans notre milieu.

Regardons maintenant l'aspect technologique. Pour être en mesure d'exploiter une entreprise de presse, de radio, de télévision et de cinéma, il faut posséder les moyens technologiques et économiques considérables. Ainsi, l'entreprise doit utiliser les services continus d'hommes, de programmes, de réalisateurs, d'ingénieurs, de techniciens, d'annonceurs, d'artistes en art graphique et de spécialistes dans le film, de photographe, de caméramen, d'aiguilleurs, de spécialistes du son et d'administrateurs, etc., tous hautement qualifiés.

Tous ont dû faire de longues études et, quotidiennement, ils s'adonnent à la recherche afin d'améliorer constamment la qualité de leurs programmes et ainsi faire bénéficier le public d'une qualité toujours grandissante de production. Inutile de signaler également qu'au simple niveau de l'administration quotidienne ces entreprises de presse, radio, télévision et cinéma reçoivent l'aide efficace d'un personnel administratif déjà rompu à la bonne marche de ce genre d'entreprise.

Pour répondre aux exigences du règlement proposé, une entreprise de câblodistribution a besoin de la contribution d'individus possédant ce genre de connaissances et de compétences; il nous parait malheureux et contraire à l'intérêt public d'interdire la meilleure utilisation des ressources disponibles, limitées dans une région comme la nôtre.

Les réalités économiques. Passons maintenant à l'aspect économique. Il est reconnu que l'industrie de la câblodistribution requiert des capitaux considérables pour son établissement, son expansion et sa modernisation. L'évolution de la technologie en télévision est tellement rapide qu'elle exige le remplacement à courte échéance d'équipement qui se voit frappé prématurément de désuétude. On peut prévoir que ce rythme d'investissement en capital se maintiendra pour de nombreuses années à venir.

Si l'on songe à exclure les investissements possibles par toutes les entreprises ou personnes ayant des intérêts dans des entreprises de presse, de radio télévision, cinéma au Québec, on prive, par le fait même, la câblodistribution

de sa source la plus naturelle de capitalisation tant pour le présent que pour l'avenir.

La conceptualisation des émissions. Il en est de même quand on envisage tous les problèmes de la conceptualisation des émissions. En effet, toute entreprise de radio, de télévision et de cinéma exige de ses directeurs de programmes qu'ils conçoivent à un rythme sans cesse accéléré des productions d'une qualité toujours plus poussée pour répondre à la demande d'un public toujours plus exigeant.

Si, également dans ce domaine, on divise les efforts en ne permettant pas à une entreprise qui possède déjà tous les moyens d'action d'exploiter également une entreprise de câblodistribution qui devra, elle aussi, un jour ou l'autre avoir toute cette aide technique pour préparer ses programmes afin de se conformer à la loi et aux règlements, nous aurons, encore là, un éparpillement d'efforts et, par le fait même, un appauvrissement global de la qualité des émissions présentées au public.

Nous disons qu'il n'y a pas d'inconvénient qu'une entreprise de presse, de radio, de télévision et de cinéma exploite également une entreprise de câblodistribution. Nous venons de voir qu'il existe de sérieux avantages à exploiter conjointement la télévision et la câblodistribution dans une région comme la nôtre.

Bien plus, à notre avis, rien ne s'oppose à ce qu'une entreprise de presse, de radio, de télévision ou de cinéma opère en même temps une entreprise publique de câblodistribution, et ce pour le plus grand avantage et au profit de la communauté.

A titre d'exemple, permettez-nous de vous proposer le cas de notre compagnie. Télévision Saint-Maurice Inc., rencontre toutes les exigences de propriété édictées par l'article 5 du règlement proposé.

En effet, depuis sa fondation, notre compagnie s'est toujours voulue un instrument permanent de développement social, culturel et économique de la collectivité. Elle s'est toujours fait un souci de donner au public des programmes de qualité à tous les points de vue. Elle a invité et encouragé les citoyens de la région à venir partager avec leurs concitoyens le fruit de leurs expériences et de leurs connaissances, et le public a répondu à cette invitation en participant activement à ces activités.

Notre câble a son service son directeur des programmes qui dirige la programmation sur les câbles de Trois-Rivières et de Shawinigan. Actuellement, à Trois-Rivières, notre câble présente sur un de ses canaux des émissions éducatives du niveau CEGEP, au rythme d'environ 70 heures par semaine. Il produit déjà à Trois-Rivières et à Shawinigan pendant trois heures par semaine des émissions de type communautaire. Des négociations sont présentement en cours à Shawinigan pour y présenter des émissions éducatives semblables à celles qui sont présentées à Trois-Rivières.

Juste quelques exemples pour illustrer le genre d'activités de notre programmation communautaire. Je ne ferai qu'esquisser quelques genres d'émissions qui ont été produites au cours des derniers mois. Par exemple, le témoignage des hommes tombés prématurément à la retraite par la fermeture d'une industrie locale, la Gulf, qui malheureusement a dû fermer ses portes; le déroulement des séances du concile diocésain; les objections et les inquiétudes d'un groupe de citoyens au sujet du tracé d'une autoroute qui coupait leur quartier; une analyse par des étudiants du CEGEP, faite sous forme mi-dramatique, mi-panel, des problèmes de leurs dettes accumulées à cause de leur prêt pendant leurs études; les principales parties du congrès de la CSN tenu à Shawinigan; un colloque de l'ACEF, l'Association coopérative d'économie familiale, sur les compagnies multinationales; des sujets aussi variés qu'une élection à une caisse populaire et tout son processus, une séance d'information sur le bill 65, le sport amateur, le théâtre amateur, et je vous fais grâce d'autres exemples.

Nous prévoyons également que les émissions éducatives dans ces deux villes incluront bientôt le niveau universitaire et le niveau primaire. Tous les membres du conseil d'administration et ceux de la direction sont des résidents du Québec. Le siège social de notre compagnie est situé au Québec et sa raison sociale est exclusivement et typiquement française. Enfin, la propriété de notre entreprise appartient à des résidents du Québec dans une proportion de 100 p.c, dont 88 p.c. sont détenus dans les territoires précis qu'elle dessert.

L'équipe qui dirige les opérations de notre compagnie possède déjà une longue expérience en télévision et des états de service assez remarquables. Certains de ses membres ont même contribué à mettre sur pied le service de télévision au Québec et au Canada et ont assumé des fonctions de chef de file dans les différents secteurs de la télévision, tant au Québec que dans le reste du Canada. L'équipe de télévision Saint-Maurice fait plus que répondre aux désirs exprimés dans le projet de règlements relatif aux entreprises de câblodistribution puisque ses administrateurs et son personnel vivent au sein même de la communauté qu'ils servent et contribuent, de façon active, au développement social, culturel et économique de cette collectivité. Notre compagnie a déjà énoncé et mis en application sa politique en matière de câblodistribution. De ce fait, elle a démontré, de façon positive, sa détermination à favoriser le développement social, culturel et économique de la collectivité qu'elle dessert.

Nous avons déjà dit et annoncé publiquement que dans le domaine important de la programmation, notre compagnie a créé, dans chacun des deux centres, un service de programmation communautaire. Dans notre esprit, l'expression programmation communautaire signifie une programmation conçue et réalisée par

les citoyens du milieu, secondée par la compétence technique et l'équipement mis gratuitement à leur disposition par nous. Ces programmes communautaires, de même que l'équipement technique nécessaire à leur production sont propres à chacun des deux centres. Nous assurons ainsi le caractère particulièrement local du service supplémentaire offert à chacune de ces agglomérations urbaines. Nous donnons aussi dans chacun des deux centres un service de programmation locale, tels que des programmes d'affaires publiques et d'information, exemple que je n'ai pas cité tantôt, l'enregistrement des séances municipales de la ville de Shawinigan-Sud.

Nous ajoutons à ce service celui de la distribution de six canaux FM, service offert gratuitement, sans charge mensuelle additionnelle. Ainsi, elle remplit à tout point, nous croyons, les objectifs énoncés par le règlement proposé.

La partie de l'article 6 qui concerne les entreprises de presse, de radio, de télévision et de cinéma, d'après notre présentation, est superflue.

A ceux qui nous objecteraient que cette partie de l'article 6 a été insérée dans la réglementation par souci de l'intégrité de l'information, nous soumettons bien humblement qu'elle est totalement inutile pour les raisons suivantes:

D'abord, nous ne sommes pas convaincus qu'une entreprise de câblodistribution dans laquelle ne serait pas une entreprise de presse, de radio, de télévision et de cinéma, offre de meilleures garanties de l'intégrité de l'information.

De plus, dans notre région, comme dans la plupart des autres régions du Québec, il y a d'autres media d'information indépendants qui garantissent au public une information complète. Chez nous tout particulièrement, il existe trois postes privés de radio, un quotidien et plusieurs hebdomadaires, sans compter l'importation électronique par simple récepteur domestique de près de 25 postes de radio et de multiples postes de télévision.

A la lecture du deuxième alinéa de l'article 21, on constate que toute entreprise publique de câblodistribution doit donner priorité à différents postes et encore là, l'intérêt de la communauté est sauvegardé.

Il ne faut pas oublier qu'une entreprise comme la nôtre se veut professionnelle et qu'elle considère comme partie de son mandat de voir à ce que les citoyens de la communauté soient bien informés et à prévenir toute tentative de distorsion des nouvelles, d'où qu'elle vienne.

Ne croyez-vous pas qu'il est inutile de restreindre ce champ d'entreprise en excluant les entreprises de presse, radio, télévision et cinéma, puisque, de toute façon, partout ailleurs dans le projet de la Régie des services publics, à qui a été confiée l'administration de la loi et de ses règlements, a en main tous les moyens nécessaires pour prévenir quelque abus que ce soit de la part de quiconque?

On pourrait également vous objecter que la qualité des services de câblodistribution serait sacrifiée pour tout autre canal au bénéfice de celui par lequel la compagnie de production entend émettre ses ondes. A cela, nous répondrions que la réglementation proposée y a également pourvu et à ce sujet, nous vous référons à l'article 10, qui parle de la qualité des services et à l'article 31, qui parle des normes techniques.

En conclusion, M. Paul Audet.

M. AUDET: Comme nous vous l'avons dit un peu plus haut, nous vous avons démontré, au meilleur de notre connaissance, que l'adoption de l'article 6 sans modification risquerait de compromettre le service de télévision que nous donnons présentement dans notre région et que cela compromettrait également l'avenir de notre entreprise qui est déjà si bien amorcée.

Nous désirons donc appuyer fortement cette partie en particulier, du mémoire de l'Association canadienne de télévision par câble qui suggère de retrancher, dans le projet de l'article 6, les termes suivants: De presse, de radio, de télévision, de cinéma et à toute entreprise ou personne reliée à l'une d'elles par participation financière ou autrement.

Nous croyons que la modification à cet article, recommandée par l'Association canadienne des câbles, permettra à notre compagnie de poursuivre l'oeuvre qu'elle a entreprise tout en préservant les objectifs énoncés dans la Loi de la régie des services publics et dans le projet de règlement sur la câblodistribution. Je n'ai pas besoin de vous dire que toute notre équipe est désireuse de continuer l'oeuvre déjà entreprise et nous vous soumettons ces commentaires bien humblement en espérant que, grâce à votre considération favorable, nous pourrons continuer et voir progresser le service de télévision que nous donnons déjà dans la région de Trois-Rivières. Je vous remercie, M. le Président.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Giasson): M. le ministre.

M. L'ALLIER: Très brièvement, M. le Président, je voudrais remercier les représentants de la Télévision Saint-Maurice Inc. de leur présentation. Je voudrais leur dire également que je suis conscient du problème particulier que pose chez eux l'application du règlement que nous avons ici. Nous étudierons très attentivement les commentaires qui sont faits dans ce document qui complète, en fait, les présentations antérieures et, quant à moi, ce document est clair. Je n'aurai pas de questions à vous poser. Je suis parfaitement conscient du problème.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président...

M. LEGER: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Giasson): La coutume veut qu'en commission parlementaire, on respecte l'ordre des partis. Le député de Chicoutimi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je vais être très bref, M. le Président. J'ai écouté avec beaucoup d'attention, j'avais lu d'ailleurs ce matin votre mémoire M. Audet. Je vous félicite de sa clarté. Il pose, évidemment, un problème assez sérieux. Quand nous avons examiné toute la question, nous avons insisté sur cet aspect du danger de la création des monopoles dans les entreprises de communication, télévision, etc. Par ailleurs, les arguments que vous apportez à l'appui de votre thèse sont, je dois le dire, plus qu'impressionnants. A certains égards, ils me convaincraient de prendre votre part.

J'estime que la présentation que vous avez faite, particulièrement en ce qui concerne les données technologiques, l'aspect économique du problème, le service à la collectivité également, m'incite à m'interroger sur la validité de cet article 6 qui est quand même assez restrictif. Je reste quand même inquiet si l'on devait accepter vos propositions, de ce qui pourrait survenir, soit la création ou la poursuite de monopoles en matière de communication.

Est-ce qu'il est possible de trouver un accommodement, c'est-à-dire un texte de réglementation qui pourrait préserver certaines situations de fait, bénéfiques d'ailleurs à la collectivité que vous déservez, tout en éliminant le danger de la création, du maintien de la création de monopoles en matière de communication?

Je crois que votre mémoire, fort sérieux, va exiger de notre part une analyse attentive et une discussion aussi assez suivie avec le ministre responsable. Parce que les arguments que vous apportez sont très sérieux et vous situez votre plaidoyer dans le cadre d'une collectivité bien déterminée, dont je connais d'ailleurs les services, ceux que vous donnez notamment.

Alors, sans me déclarer absolument d'accord sur votre mémoire, je me dois de vous dire qu'il nous incite à la réflexion et qu'il va probablement nous obliger à rediscuter le problème avec le ministre et à remettre en cause peut-être certains principes auxquels nous tenions, notamment celui que j'ai évoqué tout à l'heure, soit la préservation des... enfin l'élimination du danger des monopoles.

Ceci étant dit, M. le Président, je voudrais remercier et féliciter encore une fois M. Audet et ses collaborateurs de nous avoir présenté un mémoire aussi clair, aussi simple et en même temps aussi explicite sur une question d'ordre technique qui échappe à la compétence de la plupart d'entre nous.

LE PRESIDENT (M. Giasson): Le député de Frontenac.

M. LATULIPPE: M. le Président, j'avais cru comprendre que le député de Chicoutimi, peut-être que je me suis trompé, demandait à M. Audet si, effectivement, il avait une proposition qui arriverait à concilier les deux objectifs. Ce qui est proposé par l'association des antennes communautaires — je ne sais pas si c'est le nom exact — enfin de compte il vise essentiellement à éloigner les compagnies de téléphone et de télégraphe.

A ce moment-là, lors de l'exposé, on nous avait dit: Que chaque cas — ou cela revenait à dire ça — soit étudié au mérite. A ce moment-là, est-ce que vous avez pensé à une formulation qui pourrait concilier ces objectifs pour répondre également aux objectifs que vous avez fournis parce que votre mémoire est très explicite, très clair et il me semble fondé?

M. AUDET (Henri): M. le Président, comme nous l'avons indiqué dans notre mémoire, à notre avis le problème serait réglé et la situation, dans notre cas, serait améliorée d'une façon générale si on éliminait certains mots que nous avons dis tout à l'heure, presse, radio, télévision, etc.

Nous croyons que la Régie des services publics aura de toute façon tous les pouvoirs qui lui sont donnés dans d'autres parties du règlement pour s'assurer qu'il n'y ait pas de monopole. Nous réalisons tous ensemble, je crois, le danger qu'il y aurait pour une population de voir son information contrôlée par un seul groupe. Je crois qu'au Québec dans le moment, tout de même, si on parle de câblodis-tribution, ce danger ne semble pas, est-ce que je peux dire un danger prioritaire? C'est une possibilité que l'on peut considérer pour un avenir très éloigné. De toute façon, dans l'octroi des permis et dans la modification des permis existants, il nous semble que la régie pourrait tenir compte du fait qu'il ne faut pas qu'il y ait de monopole.

Excusez si un profane parle de loi; je présume qu'ailleurs dans la loi on doit pouvoir trouver des articles pour éviter que l'on prive la population de certains renseignements à cause de l'établissement d'un monopole possible.

Cela me paraît dans le moment, pour autant que nous sommes concernés, une question un peu hypothétique. Je préférerais — pour répondre à votre question de façon plus directe — ne pas suggérer un texte, mais plutôt, comme nous l'avons indiqué précédemment, présenter nos réflexions pour considération et étude par votre commission.

M. LATULIPPE: A ce moment-là, pourquoi souscrivez-vous à la proposition qui veut justement indentifier les compagnies de téléphone et de télégraphe comme devant être exclues?

Pourquoi elles, à ce moment-là? Pourquoi ne pas simplement proposer de biffer l'article 6? Vous venez de dire que dans d'autres textes la régie aura suffisamment de pouvoirs pour, d'une façon peut-être un peu discrétionnaire à l'occasion, mais équitable, rendre justice aux Québécois.

M. AUDET: D me parait essentiel, à ce moment-ci, de faire une distinction très claire entre d 'une part, la position de la radiodiffusion ou de la presse ou du cinéma versus la câblodistribution, et, d'autre part, la question de téléphone et télégraphe versus la câblodistribution. Dans le premier cas, il y a de grands éléments complémentaires et, pour être réaliste — je pense qu'on pourrait appliquer cela pas mal en général au Québec — il faut se servir de tous les moyens, de toutes les ressources humaines ou économiques dont nous disposons pour réellement bâtir une industrie des communications viable et valable.

Du côté du téléphone, la situation se pose d'une façon différente. Les compagnies de téléphone, contrôlant les câbles sur lesquels nous devons transmettre nos renseignements, enfin, tiennent dans leurs mains notre lifeline, si vous me permettez de dire un mot anglais dans cette enceinte.

Je crois que, là, il faut réfléchir sérieusement et s'assurer qu'à aucun moment les compagnies de téléphone ne puissent compromettre la viabilité de l'entreprise de câblodistribution à leur profit. Remarquez bien que je ne leur prête pas d'intentions qu'ils n'ont pas. Je veux simplement indiquer — puisque vous me posez la question; j'aurais préféré ne pas être celui qui y réponde — qu'on peut peut-être entrevoir un danger. On pourrait penser, comme quelqu'un l'a dit avant moi, qu'on puisse monter les taux jusqu'à ce que cela devienne prohibitif pour les câblodistributeurs et peut-être, à ce moment-là, les évincer.

Du côté des radiodiffuseurs et du cinéma, imaginons, pour le moment, qu'un producteur de film demande trop cher pour ses films; tout simplement, les câblodistributeurs ne les achèteront pas et ça ne compromettra pas leur avenir. Le marché rétablira l'équilibre de lui-même.

Alors j'espère avoir répondu à votre question, à votre satisfaction.

M. LATULIPPE: Je vous remercie beaucoup.

LE PRESIDENT (M. Giasson): Le député de Maskinongé.

M. PAUL: M. le Président, je rejoins l'inquié- tude de mon collègue, le député (le Chicoutimi, dans cette crainte que nous devons avoir en lace de l'établissement de certains monopoles ou de contrôle de la câblodiffusion. D'un autre côté nous avons entendu un mémoire qui est plus que réel. Il s'agit de vivre à Trois-Rivières ou à Shawinigan pour apprécier la qualité des programmes présentés par l'organisme qui nous soumet aujourd'hui le mémoire, soit la Télévision Saint-Maurice Inc.

En principe, nous devrions retenir l'article fi, mais peut-être que les conseillers du ministre pourraient envisager un amendement à l'article 6 qui pourrait se lire comme suit: "Cependant, tel permis peut être accordé à une entreprise qui rencontre toutes les exigences de l'article 7."

A ce moment-là, nous n'aurions aucune crainte quant à la survie de Télévision Saint Maurice Inc., à la lumière des exigences de l'article 7 et surtout quant à la compétence des administrateurs de cet organisme, quant à la production des émissions et quant à la participation communautaire.

M. Bonneau nous a donné des renseignements qui peuvent être parfaitement contrôlés et qui sont très appréciés par la population de Trois-Rivières et de Shawinigan. Je suis sûr que les conseillers du ministre trouveront moyen, pour ne pas frapper par une mesure aussi sévère que les dispositions de l'article 6 qui, dans leur ensemble, doivent être maintenues, mais qui, d'un autre côté doivent être également assez souples pour reconnaître la compétence et l'efficacité de ceux qui oeuvrent dans la câblodiffusion depuis plusieurs années et dont les succès ont été assez retentissants et qui, par le service qu'ils donnent à leurs abonnés et à la population, constitue un actif pour le milieu qu'ils desservent tant au point de vue économique et socio-culturel.

C'est pourquoi, tout en retenant la logique des propos de mon collègue, le député de Chicoutimi, j'inviterais le ministre à retenir, dans son entier, le mémoire qui nous a été présenté cet après-midi et qui a été, en quelque sorte, une ouverture d'une opération qui, chez nous, fait l'orgueil des citoyens de la Mauricie, en même temps qu'il est à la louange de ceux qui en sont les administrateurs.

LE PRESIDENT (M. Giasson): Messieurs, autres questions?

Nous remercions les représentants de Télévision Saint-Maurice Inc. La commission ajourne ses travaux à demain, dix heures.

(Fin de la séance à 17 h 20)

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