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Commission permanente de l'éducation
des affaires culturelles et des communications
Projet de règlement sur la
câblodistribution
Séance du vendredi 10 août 1973
(Dix heures douze minutes)
M. CORNELLIER: (président de la commission permanente de
l'éducation, des affaires culturelles et des communications): A l'ordre,
messieurs!
La commission reprend ses travaux ce matin, et je cède
immédiatement la parole au ministre des Communications.
M. L'ALLIER: M. le Président, si les membres de la commission
sont d'accord, nous allons continuer l'audition des mémoires. Nous en
sommes à l'audition du mémoire de Cable TV Limited.
Nous pourrions ensuite entendre, tel que proposé, le
mémoire de National Cablevision Limited et, par la suite, contrairement
à l'ordre qui vous a été suggéré, nous
pourrions entendre immédiatement le mémoire de l'Association
canadienne des radiodiffuseurs qui est un bref mémoire, étant
donné que le représentant de l'association ne pourrait pas
être présent la semaine prochaine, alors que la commission
continuera ses travaux, son association étant en réunion à
Vancouver, je crois, la semaine prochaine.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Alors, Cable TV, vous avez la parole.
Cable TV Limited
M. FERGUSON: Merci. Je suis David Ferguson, président du Cable
TV. J'ai avec moi, ce matin, Donald Eaton, le vice-président aux
finances de notre compagnie, et Me Charles Gonthier qui va m'aider si c'est
nécessaire.
Tout d'abord, permettez-moi de vous remercier de m'avoir donné
l'occasion de me présenter devant vous aujourd'hui. J'aimerais partager
avec vous certaines impressions au sujet du projet de règlement
concernant l'industrie de la télédistribution. Vous serez
certainement contents de savoir que mon exposé verbal sera bref.
Vous avez déjà reçu et discuté le
mémoire détaillé soumis par l'Association canadienne de
télévision par câble et nous soutenons la position
exposée dans ce document. Il n'est donc pas nécessaire de
répéter encore ces arguments.
Nous avons aussi soumis à la commission un exposé
écrit qui fournit quelques précisions sur les principaux sujets
qui nous affectent de la façon la plus directe. Je regrette que
l'urgence qui a marqué la rédaction de ce mémoire ne nous
ait pas permis de vous présenter un texte plus soigné, comme nous
l'aurions désiré. Mon présent exposé constitue un
sommaire de ce mémoire et je me suis permis de le distribuer.
Dans la première partie de ce mémoire, nous
décrivons l'historique de notre compagnie mettant l'accent sur son
évolution depuis son acquisition par les propriétaires actuels en
décembre 1970. Ceci a pour but d'attirer votre attention sur certains de
ses projets actuels pour mieux faire comprendre les conditions et les exigences
de la planification et du développement de l'industrie du
câble.
C'est peut-être pécher contre la modestie, mais nous
croyons avoir raison d'être fiers de ce que nous avons accompli durant
ces trois dernières années.
La réglementation proposée, pour autant qu'elle est
appliquée à notre compagnie, pourrait avoir pour effet d'exclure
la participation de nos propriétaires et seuls actionnaires, Star-law
Investments Ltd., en raison de ses investissements dans le Montreal Star. Elle
le forcerait à se désister de sa propriété ou de sa
participation dans Cable TV Limited. Nous avons déjà eu
l'occasion de soulever le principe que ceux qui ont fait leur preuve et ont
mérité la confiance dans la direction d'un medium d'information
ne devraient pas automatiquement se voir empêcher de participer à
un autre.
Nous faisons nôtres les représentations exposées
hier par M. Audet et ses collègues de Trois-Rivières. Nous devons
souligner que l'obligation imposée à Starlaw de se retirer de
Cable TV en ce moment pourrait entraîner des pertes considérables
et être dommageable aux deux compagnies. Une telle conséquence
sera, croyons-nous, malheureuse et injuste, compte tenu spécialement de
la contribution apportée par notre compagnie à l'industrie
québécoise du câble au cours des trois dernières
années.
En plus de ces conditions spécifiques, nous croyons qu'il existe
des raisons sérieuses de ne pas décréter l'exclusion a
priori de certaines catégories de personnes. De fait, les organismes de
régie, tant au Canada qu'aux Etats-Unis, se sont
généralement abstenus de faire de telles exclusions en bloc, leur
préférant une politique plus flexible, permettant des
décisions qui tiennent compte des situations spéciales, et ainsi
mieux promouvoir l'intérêt public. Une telle politique est
particulièrement indiquée dans le domaine de la
télévision par câble parce que cette industrie est encore
jeune et qu'il est difficile d'engager ou prévoir les besoins et les
structures qui seront les plus avantageuses à l'avenir.
Dans cet article, nous faisons état de certains faits relatifs
à la situation financière présente et aux besoins futurs
de capitaux de cette industrie. L'industrie du câble, en effet, est dans
sa première phase de développement et ce fait fondamental doit
être reconnu dans toute réglementation. Nous sommes d'avis que
certains des règlements proposés semblent tenir
pour acquis que l'industrie du câble a atteint la maturité
et est la source de bénéfices importants. Cette
présomption n'est pas fondée dans les faits.
On pourra voir, dans les dernières données de Statistique
Canada pour 1971, que le total des revenus de l'industrie du câble au
Québec n'était que de $15 millions et les profits nets
après l'impôt seulement d'environ $6 millions; son rendement sur
l'investissement est de 8.9 p.c. Ces chiffres sont donnés plus en
détail dans l'annexe A de notre mémoire.
Depuis 1971, l'industrie du câble eut un bon développement,
à l'instar de l'économie dans son ensemble. Mais ceci
n'établit pas sa maturité, ni sa capacité de faire face
aux obligations que propose la réglementation. Quant à l'avenir,
nous indiquons les mises de fonds que requiert notre compagnie. Cable TV a
besoin de nouvelles mises de fonds d'un montant de $27 millions durant les cinq
prochaines années pour pouvoir pleinement développer son
réseau pendant cette période. Vous trouverez, dans l'annexe B de
notre mémoire, quatre tableaux qui donnent des détails.
Ces calculs ne comprennent que notre compagnie, mais illustrent
l'ampleur des investissements que requiert cette industrie et l'importance de
les encourager. Nous prévoyons que nos besoins annuels en capitaux et
mises de fonds s'élèveront à cinq fois ce qu'ils sont
à l'heure actuelle. D'où viendront ces fonds? Nous avons fait
part de notre inquiétude touchant l'exclusion de certains des
investisseurs actuels ou éventuels. Ceci limitera, sans
nécessité, les sources de fonds disponibles pour l'industrie du
câble. D'autre part, la restriction proposée, limitant à 20
p.c. la participation des non-résidents dans ces entreprises, nous cause
les plus graves inquiétudes.
L'industrie du câble au Québec a été
développée presque sans exception par les compagnies
privées comportant peu d'actionnaires et grâce à une
participation majeure de non-résidents qui ont rendu possibles ces
services.
Cette tendance vers la propriété privée changera
inévitablement au fur et à mesure que la participation du public
sera nécessaire pour financer l'expansion et le développement des
compagnies de câble ici au Québec comme c'est déjà
le cas ailleurs.
Notre compagnie est un très bon exemple de cette tendance. Cable
TV et ses propriétaires sont des compagnies privées avec peu
d'actionnaires, en effet, une fiducie familiale. C'est là la raison
pourquoi je pourrais dire, comme je l'ai dit hier, que tous nos actionnaires
sont des résidents du Québec. Mais cette situation va changer,
doit changer. Nos actionnaires peuvent se permettre de faire des mises de fonds
jusqu'à concurrence du niveau actuel d'investissement, mais cela ne
serait pas le cas à l'avenir, compte tenu de ces besoins futurs aussi
importants. Il sera nécessaire de chercher la ressource
financière sur le marché public et, à ce temps-là,
ces restrictions proposées dans le projet de règlement seront un
problème, un obstacle.
Il y avait hier des questions quant à la suffisance des fonds ici
au Québec pour fournir ces besoins de l'industrie du câble. A mon
avis ce n'est pas une question quant à la suffisance mais quant au
désir ou à la volonté des investisseurs de faire leurs
placements dans une industrie limitée par ces restrictions.
Il y a, il y aura comme tout le monde sait une forte concurrence pour
les investissements dans le marché public. Nous devrons nous battre en
effet contre les autres possibilités de placement, pas seulement dans
les compagnies du câble ailleurs mais contre toute autre industrie. Notre
point est qu'avec ces restrictions les investisseurs vont se détourner
de notre industrie et choisir des investissements d'un autre genre. Une telle
restriction constitue aussi un dangereux précédent,
spécialement à ce moment où il y a un grand besoin
d'investissements. On ne trouve, croyons-nous, pareille restriction dans aucune
autre industrie, pas même dans celles procurant les services dits
publics. Cela placera l'industrie du câble dans une position très
désavantageuse à l'avenir.
Dans la dernière partie de notre mémoire, qui commence
à la page 13, nous traitons de l'ordre des priorités
établi pour l'affectation des canaux, le manque actuel de canaux et les
projets en cours pour augmenter la capacité des systèmes de
télévision par câble.
Je n'entends pas rentrer dans les détails de ces problèmes
mentionnés dans notre mémoire, mais ils nous inquiètent et
la raison de notre inquiétude peut s'exprimer simplement. Nous devons
accepter le fait fondamental à savoir que la télévision
par câble est utilisée aujourd'hui par les abonnés pour
avoir accès aux postes éloignés de
télévision ayant des programmes qui ne sont pas disponibles par
les canaux locaux. Ceci signifie, en somme, que pour plus de 80 p.c. de nos
abonnés, le système de câble n'a d'attrait que comme moyen
d'accès aux quatre réseaux américains. D s'agit de
circonstances techniques sans lesquelles il n'y aurait pas de
télévision par câble à Montréal.
La disponibilité de ces réseaux est essentielle à
la rentabilité du service. A plus longue échéance, bien
entendu, nous prévoyons que tous les foyers seront équipés
de téléviseurs munis de convertisseur rendant possible la
réception de nombreux canaux et il y aurait largement place pour
répondre à toutes les demandes. Mais durant cette période
de transition, on devra prendre bien soin d'éviter de réduire le
service offert par le câble au point d'inciter les usagers à un
retour aux antennes privées et ainsi saper la viabilité de cette
industrie importante.
Je finirai par un cri du coeur. Nous pouvons établir ici, au
Québec, des systèmes et des services qui pourraient devenir des
modèles pour l'industrie du câble au Canada et ailleurs. Il y a
assez de facteurs évidents, à notre esprit,
qui nous permettent de penser que les compagnies de câble du
Québec, si on leur donne un milieu ou la réglementation favorise
l'expansion, l'expérimentation et l'innovation, peuvent devenir des
chefs de file dans cette nouvelle industrie.
Nous craignons, en ce moment, que les règlements proposés
tendent à restreindre le droit de propriété et les mises
de fonds et à décourager le développement. Nous courons le
risque de créer des conditions qui viendront miner la viabilité
de l'industrie et la conséquence en sera que les compagnies de
câble, par la force des choses, se préoccuperont de survie
économique et de préservation.
Nous perdrons là l'occasion de devenir de vrais pionniers dans le
domaine de cette nouvelle et importante technologie. Merci, M. le
Président.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Merci. Le député de
Chicoutimi.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, le mémoire que
nous venons d'entendre, dont on vient de nous donner la substance, dis-je,
reprend substantiellement certaines des observations qui ont été
faites hier et que nous avons discutées longuement.
J'aimerais aborder les deux questions principales qu'a posées M.
Ferguson. D'abord celle de la propriété, notamment en ce qui
concerne l'article 6 du projet de règlement, soit l'exclusion de ce
qu'on appelle les entreprises parallèles.
Hier, les représentants d'une association de la
télévision du Saint-Maurice nous ont fait une demande analogue,
soit d'empêcher que les entreprises parallèles soient exclues de
la participation aux entreprises de câblodistribution.
Nous avons fait remarquer à M. Audet qui plaidait la cause de son
organisme, de son entreprise, que l'une des préoccupations que nous
avons eues en discutant le projet de loi, qui a donné suite à ce
règlement, c'est le danger de la création des monopoles en
matière d'agences, de systèmes ou d'entreprises de
communications.
Hier, cependant, M. Audet a apporté à l'appui de sa
demande des arguments d'ordre technologique, économique, etc., qui, sans
nécessairement nous avoir ébranlés, nous ont forcés
à nous interroger, nous ont obligés à reposer toute cette
question en en discutant avec le ministre.
M. Ferguson, j'aimerais vous poser la question suivante: Dans le cas de
Cable TV Ltd., l'entreprise de Câble Ltée, comme cela devrait
s'appeler en français, est-ce que l'exclusion d'une entreprise
parallèle, comme le Montreal Star, signifierait, sinon la disparition,
du moins des difficultés considérables pour le maintien de votre
exploitation? Quelle peut-être la part de cette entreprise
parallèle dans celle de Cable TV Ltd.?
M. FERGUSON: Oui, nous sommes les seuls propriétaires de Cable TV
Ltd. Cela ne nous est pas possible de continuer. C'est nécessaire, pour
notre actionnaire, Starlaw Investments Ltée, de vendre toutes les
actions, 100 p.c. des actions de Cable TV sur le marché, pas sur le
marché comme... Donc, ce n'est possible de nous séparer et de
continuer de jouer un rôle dans cette industrie.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que cela signifierait vraiment la ruine
de votre entreprise si on- devait exclure cette entreprise
parallèle?
M. FERGUSON: Bien, ce n'est pas une question de ruine. Ce serait trop
grave, trop sérieux. Mais ce sera nécessaire pour Starlaw, comme
actionnaire, de vendre ses actions. Ils ont payé une somme assez grosse,
il y a trois ans, pour ces actions avec une confiance dans l'industrie et une
confiance dans l'industrie ici au Québec. C'était un
investissement à longue échéance. Je pense, je suis
presque certain c'est difficile d'anticiper ces choses exactement
que si c'était nécessaire cette année ou l'année
prochaine, dans l'avenir, de vendre ces actions, les actionnaires subiraient
une perte, une perte peut-être considérable. C'est tout.
C'est plus compliqué que cela. Cela, c'est la situation,
l'essentiel en perte financière. De plus, je pense que ce serait
considérer les situations de Cable TV avec les autres
propriétaires maintenant. Ils ont eu une assez longue période
pendant cette retraite, il y a des choses très importantes que l'on doit
faire. Il y a un plan, comme j'ai dit, pour augmenter le système, et
tous ces projets doivent être retardés. Je pense que, comme j'ai
dit dans le discours, c'est un ordre qui serait dommageable pour deux
compagnies le propriétaire, Starlaw, et la compagnie du câble.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous croyez que, si l'on devait exclure cette
entreprise parallèle, cela aurait, évidemment, des effets assez
désastreux pour les actionnaires, et pour l'avenir de votre
exploitation, de votre entreprise. Est-ce que vous prévoyez que votre
entreprise, si on devait exclure l'entreprise parallèle qui s'y trouve,
ce que demande l'article 6 du projet de règlement, pourrait continuer de
fonctionner normalement, de se développer? Vous semblez dire que
non?
M. FERGUSON: Elle va fonctionner.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Elle va continuer de fonctionner. A un rythme
normal ou si vous devrez...
M. FERGUSON: A un rythme un peu ralenti.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ralenti.
M. FERGUSON: Avec une autre gestion, les gérants seront
différents, ce sera...
M.TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que cela peut paralyser, enfin, les
projets d'expansion que vous avez?
M. FERGUSON: Pas paralyser, c'est un mot, je pense, trop fort. Non,
c'est une question de... cela va prendre quelques années de plus pour
retourner à un rythme normal, mais le problème sera le
même. De nouveaux actionnaires devraient trouver ces grosses sommes pour
financer ces nouveaux systèmes, ces nouveaux services.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Alors, il s'agit d'un ralentissement tout
simplement que vous craignez. Maintenant, est-ce que ces craintes, que vous
avez exprimées au sujet des entreprises parallèles, ne rejoignent
pas celles que vous exprimez concernant la propriété
québécoise? Aux pages 12 et 13 de votre mémoire
nous avons eu hier l'occasion de poser des questions vous reprenez cette
idée que la limitation du champ des ressources financières
pourrait vous causer des problèmes ou des ennuis en ce qui concerne les
investisseurs. Est-ce que l'expérience que vous avez, qui est une
expérience déjà assez longue maintenant, vous indique
qu'au Québec il serait difficile de trouver des investisseurs, comme
l'exige le projet de règlement, qui soient majoritairement du
Québec, ou à 80 p.c. du Québec?
M. FERGUSON: On peut trouver des investisseurs, il y a assez de fonds
privés, ici, au Québec. Ce n'est pas une question de
quantité de ces fonds. C'est une question de mentalité de la part
des investisseurs.
A mon expérience, assez limitée bien sûr, les
investisseurs privés sont très timides. Ce n'est pas tout le
monde. Il n'y a pas beaucoup de différence, à mon avis, entre les
investisseurs des différents pays ou des différentes provinces du
Canada. Tous deux sont timides et quand ils placent leur argent dans des
actions, ils désirent une flexibilité. Ils font des analyses des
risques, bien sûr, et ils anticipent un profit, mais c'est la
liquidité de leurs investissements qui est très importante. S'il
arrive des troubles, une récession, un problème ou autre, ils
désirent avoir l'occasion de vendre sur le marché subitement.
Peut-être. Cette liquidité est la principale chose.
Le problème, à mon avis, de ce règlement est que
les investisseurs veulent le regarder comme une restriction dans leur
habilité à trouver les meilleurs prix pour leurs actions, si dans
l'avenir, il ont un besoin d'argent ou s'ils désirent changer leurs
placements dans une autre industrie, le marché public est très
nécessaire pour les compagnies du câble maintenant, pas
maintenant, mais dans un avenir prochain.
Jusqu'à ce point, les fonds des compagnies privées
étaient suffisants pour financer ces systèmes mais maintenant il
est nécessaire d'avoir accès aux grandes réserves au
Québec, en Ontario et les autres provinces, pour financer ces projets.
Et on doit rappeler qu'il y a beaucoup d'autres compagnies de l'industrie du
câble qui cherchent aussi ces fonds parce que c'est le même
problème au Manitoba, en Colombie-Britannique; ces nouveaux
systèmes coûtent la même chose à n'importe quelle
place. Et c'est une concurrence, notre système par exemple, notre
recherche pour des fonds avec la compagnie ABC de Edmonton. Et ce sera beaucoup
plus difficile s'il n'est pas possible de convaincre les investisseurs qu'ils
ont la même possibilité de vendre leurs actions sur un
marché ouvert dans le futur. Et c'est la chose que je dois dire
aujourd'hui avec force.
M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'aimerais poser ici
une question au ministre. Avant que de nous soumettre ce projet de
réglementation, à l'article 6 notamment et en ce qui concerne la
propriété québécoise des entreprises, est-ce que le
ministère des Communications ou celui de l'Industrie et du Commerce, ou
tout autre ministère à vocation économique, a fait des
études prospectives des marchés qui ont permis au ministre
d'établir que la propriété des entreprises de câble
doit être celle que stipule la réglementation, les articles de la
réglementation qui en traitent? Est-ce que le ministère a fait
des études, est-ce qu'il a des chiffres, des données? Parce que,
hier, nous avons entendu si le ministre me le permet une
association très importante nous faire part de ses inquiétudes
concernant les investissements. Ce matin, une autre entreprise reprend les
mêmes propos en utilisant les mêmes arguments. Est-ce que de l'avis
du ministre et à partir des études qu'il aurait fait mener ces
inquiétudes sont fondées?
M. L'ALLIER: M. le Président, je vais répondre au
député de Chicoutimi que le ministère des Communications
n'a pas fait d'études prospectives du marché et je ne crois pas
non plus que le ministère de l'Industrie et du Commerce en ait fait. Du
moins, s'il en a fait, elles ne sont pas à ma connaissance.
Le pourquoi de cette situation, c'est que précisément nous
connaissions, au moment de rédiger le règlement, la situation de
propriété des entreprises de câble qui existaient au
Québec. Nous devons faire un règlement qui, dans la mesure du
possible, satisfait la majorité des entreprises. C'est un
règlement général qui s'applique à la
majorité. Nous étions dans le même temps conscients qu'il
existait sous ce chapeau réglementaire tel que conçu des
exceptions majeures dont celle de Cable TV et celle de
Trois-Rivières.
Dans la mesure où le règlement précisément
n'entre pas en vigueur automatiquement dès sa publication ou dans un
délai prévu dans la publication originale, nous avons
préféré main-
tenir un règlement général et acceptable pour une
très grande majorité des entreprises telles qu'elles existent
maintenant quitte à les entendre sur les aspects prospectifs du
marché et quitte à entendre plus particulièrement celles
de ces entreprises qui actuellement ne peuvent dans l'immédiat se
conformer à un tel règlement.
C'est à partir de l'expertise que ces entreprises
elles-mêmes font et ont faite que nous allons pouvoir analyser de quelle
façon il serait possible, tout en maintenant un objectif de non-monopole
dans le domaine des entreprises de communication, de premettre une marge de
manoeuvre suffisante sur le plan économique et financier, de telle sorte
que l'on puisse assurer dans la réglementation qu'il n'y a pas
d'obstacle au développement normal de ces entreprises. Plutôt que
de faire nous-mêmes des recherches et des analyses qui sont, de toute
façon, faites constamment par ces entreprises en termes de recherche de
marché, nous avons préféré, comme c'est le cas ce
matin, les entendre et bénéficier de leurs propres expertises,
quitte, au moment de la rédaction finale, à faire des
vérifications et des analyses nouvelles là-dessus et à
procéder à une nouvelle consultation avec les
intéressés.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Mais des propos du ministre, puis-je en
conclure qu'il est déjà virtuellement prêt à faire
des exceptions?
M. L'ALLIER: C'est-à-dire que nous allons voir dans quelle mesure
il est possible, tout en respectant l'objectif poursuivi, de faire en sorte
qu'un tel règlement n'ait pas d'effets désastreux pour telle ou
telle entreprise qui actuellement fournit un bon ou un excellent service.
L'objectif doit être maintenu. Est-ce que l'on doit prendre
immédiatement les mesures pour l'appliquer d'une façon
draconienne et est-ce que cela comporte plus d'avantages que les
inconvénients que cela comporterait? C'est à l'audition des
exposés et à l'analyse des mémoires, compte tenu' des
données qui y sont contenues, que nous pourrons éventuellement
faire des exceptions.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je suis d'accord avec le ministre sur
l'objectif. Nous l'avons dit hier formellement. D'autre part, je
m'inquiète comme les entreprises de câblodistribution des
répercussions que cela pourrait avoir en termes d'investissements. Il
reste cependant que les chiffres que l'on nous donne, plutôt que les
craintes que l'on exprime ne sont pas encore en notre esprit confirmées
par des démonstrations de faits. C'est pourquoi j'aimerais savoir de M.
Ferguson, dans la mesure où il lui est possible de le dire, si son
entreprise ou des entreprises de même nature ont fait des études
sur les possibilités d'investissements, sur les ressources possibles qui
pourraient être investies dans des entreprises de
câblodistribution. Quelle est votre appréciation des
possibilités du marché à l'heure actuelle?
M. FERGUSON: Pour nous-mêmes, nous n'avons pas fait une
étude comme vous avez détaillée. En effet,
peut-être, nous avons fait pour notre propre compagnie la première
partie de cette étude. Ce sont les besoins de la compagnie et nous
n'avons pas commencé l'autre partie de l'étude. Nous avons une
appréciation concernant les besoins de Cable TV. Mais je pense qu'une
étude économique, prospective de cette industrie, de ce secteur
est très nécessaire.
On a mentionné à plusieurs reprises hier, et je l'ai
mentionné aussi dans mon discours, que l'industrie est dans une
étape de développement très jeune. On doit avoir une
certaine crainte quand nous considérons une industrie à ce stade
de développement, parce qu'on peut la mettre en danger très
facilement. L'Association canadienne de télévision par
câble recommande une telle étude; l'association et notre compagnie
seraient heureuses de participer activement à une étude commune,
avec d'autres. A mon avis, cette sorte d'étude est une
nécessité fondamentale avant qu'on puisse considérer les
réglementations viables.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Ferguson, dans le cas de votre entreprise,
en particulier, pour les prochaines années d'ici trois ans ou
cinq ans, si vous pouvez le dire quel est le montant d'argent dont vous
aurez besoin? Quels sont les investissements dont vous aurez besoin? Quel est,
enfin, l'ordre de grandeur?
M. FERGUSON: Les quatre pages, dans l'annexe b) de notre mémoire,
montrent un total des besoins, pour les prochains cinq ans, de $27 millions. Il
y a, bien sûr, beaucoup de présomptions sur lesquelles ce total
est fondé; ce sont des présomptions vis-à-vis des
événements éventuels qui sont, à mon avis,
raisonnables. Je peux dire que nous avons besoin de $27 millions et ce,
seulement pour une seule compagnie du câble.
C'est une question de rythme. Si c'est désirable, on peut
ralentir le rythme de développement et dépenser ces sommes sur
une période de dix ans. Si nous faisons cela, nous n'aurons pas les
bénéfices de ces services. Le but, l'intérêt, je
pense, dans le câble, peut-être le point de vue principal de l'Etat
est-il d'avoir accès à ces nouveaux systèmes, à ces
nouveaux moyens de communication pour obtenir ces nouveaux
bénéfices; c'est dans l'intérêt public, je pense, d
'accélérer le développement de ces industries, de
créer une ambiance souhaitable au développement dans la
période la plus courte possible.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que votre entreprise a
déjà reçu des subventions du gouvernement
fédéral ou est-ce que votre entre-
prise a déjà demandé des subventions du
gouvernement fédéral?
M. FERGUSON: Aucune subvention. M. TREMBLAY (Chicoutimi): Aucune. M.
FERGUSON: Nous payons des taxes.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Nous en sommes convaincus et nous nous en
réjouissons!
M. FERGUSON: Nous courons dans l'autre direction.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Nous nous réjouissons que vous payiez
des taxes. Tout le monde en paie. Pour le moment, M. le Président, je
laisse la parole à un autre collègue.
M. LEGER: M. le Président.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Un instant, si vous me permettez, avant de
céder la parole à un autre député, j'aimerais
mentionner pour les fins du journal des Débats certains changements
à la liste des membres de la commission. M. Perreault remplace M.
Cloutier, Ahuntsic, M. Caron remplace M. Leduc, M. Dionne remplace M. Phaneuf
et M. Faucher remplace M. Saint-Germain.
Le député de Frontenac avait demandé la parole.
M. LATULIPPE : M. le Président, pour faire suite à la
dernière question du député de Chicoutimi, est-ce que vous
connaissez d'autres entreprises dans votre secteur d'activités qui ont
eu ou ont bénéficié de subventions gouvernementales de
quelque nature que ce soit?
M. FERGUSON: A ma connaissance, aucune compagnie de câble.
M. LATULIPPE: J'aimerais revenir sur un sujet qui a déjà
été discuté et auquel on nous référait
justement à votre exposé. En ce qui concerne les recettes des
exploitations de câble au Québec, vous nous avez mentionné
que les bénéfices étaient d'environ 8 p.c, mais moi, ce
que j'aimerais savoir surtout, c'est sur quoi sont fondés vos tableaux
à l'annexe A dans votre mémoire général. Est-ce que
ça comprend trois ou quatre compagnies ou si c'est l'ensemble des
compagnies de câble au Québec?
M. FERGUSON: Ce sont les recettes, excusez-moi de ne pas l'avoir
noté sur la page, c'est le rapport de Statistique-Canada pour
l'industrie de la câblodiffusion de 1971. C'est une copie et j'ai pris
les chiffres qui concernent les compagnies de câble situées au
Québec. C'est le document que j'ai consulté.
M. LATULIPPE: Pour ma part, je vais vous dire bien franchement, j'ai
été surpris de voir ça. Je croyais que l'ensemble
était beaucoup plus élevé que ça au niveau des
recettes et également au niveau des investissements et autres. J'ai
été relativement surpris de voir le peu d'ampleur de
l'entreprise. Excusez-moi de dire ça, mais je pensais que c'était
beaucoup plus grand que ça.
M. FERGUSON: C'est une réaction très commune, parce que
tout le monde pense que nous parlons ici de quelque chose de vaste et
prospère. Mais, en effet, c'est...
M. LATULIPPE: Dans le passé, est-ce que vous êtes en mesure
de dire si les entreprises de câble avaient une rentabilité
supérieure à celle qu'elles ont maintenant? Dans l'avenir, est-ce
que vous croyez également qu'il y aura une tendance à la
stabilisation, qu'elle sera relativement moins élevée que
maintenant ou si vous prévoyez un ordre de grandeur, surtout au niveau
des bénéfices nets qui tendra à l'augmentation?
M. FERGUSON: Je pense que nous entrons maintenant dans une
période de très grande expansion, si on nous le permet. C'est
possible maintenant d'avoir un niveau d'augmentation bien plus
élevé qu'autrefois. Ce sera une croissance rapide.
Peut-être que je dois ajouter: J'espère.
M. LATULIPPE: Vous situez cette croissance dans les années 1975,
1974, 1976 et 1977, ou si vous la voyez dans une période plus lointaine,
de telle sorte que...
M. FERGUSON: C'est mon plus grand espoir.
M. LATULIPPE : Alors, selon vous, les besoins de capitaux se font sentir
immédiatement?
M. FERGUSON: Oui, certainement.
M. LATULIPPE: C'est dans ce sens-là que votre mémoire est
présenté. Disons que cela résume à peu près
ce que je voulais savoir et je vous remercie beaucoup.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Lafontaine.
M. LEGER: Je voudrais demander, M. le Président, quels sont,
actuellement, les territoires que votre compagnie couvre, spécialement
à Montréal? Est-ce que ce sont les territoires de l'Ouest
surtout, je pense?
M. FERGUSON: Oui. C'est assez complexe. Simplement, c'est le
côté ouest de l'île de Montréal, commençant
à la rue Peel et Park Avenue. Mais cela n'inclut pas
Notre-Dame-de-Grâce, Montréal-Ouest et Lachine. Ces
régions
appartiennent à National Cable. Aussi, il y a la ville de Chomedy
et la ville de Laval.
M. LEGER: Vous avez quelle proportion de l'est? Est-ce que vous avez
quelque chose dans l'est ou si vous n'en avez pas du tout?
M. FERGUSON: Non. La frontière de l'est c'est Peel-Park
Avenue.
M. LEGER: Je voudrais revenir justement à la question des 80 p.c.
qui, pour vous, semblent être un problème pour des
possibilités, selon vos dires, d'investissements futurs. Je partirais de
votre déclaration, à la fin de votre document, qui dit: "Je
finirai par un cri du coeur." Dans ce cri du coeur, il me semble qu'il en
manque un petit bout. On dit: II y a des facteurs évidents à
notre esprit qui nous permettent de penser que les compagnies de câble,
si on leur donne un milieu où la réglementation favorise
quoi? l'expansion, l'expérimentation, l'innovation peuvent
devenir des chefs de file dans cette nouvelle industrie.
Ce sont des sentiments légitimes mais qui ont, comme
préoccupation presque unique, un profit, une rentabilité de
l'entreprise. Je pense que c'est une dimension importante. Mais dans ce cri du
coeur, il n'est aucunement question de la dimension, du rôle d'une
entreprise dans le domaine des communications qui est, spécialement au
Québec, la possibilité non plus de survie d'une
collectivité ou d'une culture mais de l'épanouissement, de
l'essor, du dynamisme de la culture québécoise.
Je pense que dans cela vous avez une responsabilité importante et
qu'il faut réaliser que, dans un système de l'entreprise
privée, il faut qu'il y ait aussi une préoccupation de
l'environnement humain, des personnes qui doivent soit vivre par leur emploi de
cette entreprise ou des conditions de vie de gens qui auront à utiliser
les services de cette entreprise. Spécialement dans le domaine des
communications, je pense que les objectifs devraient être
équilibrés, tempérés concernant aussi l'aspect
social. Souvent on nous a dit: Bien, l'entreprise privée, vous ne
semblez pas en avoir tellement une grande préoccupation. Je dois
rétablir les faits ici. C'est que, pour nous, l'entreprise privée
est essentielle et nécessaire dans un Québec actuel dans la
confédération et dans le futur dans un Québec
indépendant. L'entreprise privée, c'est important. C'est
important. Je vois sourire le député de Chicoutimi qui
parlait...
M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je ris de sa
blague.
M. LEGER: J'entendais le député parler hier de paradis
d'indépendance...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je ris de cette vaste blague.
M. LEGER: ... et je comprends que pour lui...
M.TREMBLAY (Chicoutimi): Vaste blague...
M. LEGER: ... le paradis d'indépendance, cela peut lui être
difficilement acceptable parce que, pour aller au paradis, il faut parfois
aller à confesse, il faut avoir une âme pure, monter au ciel
après avoir eu le pardon de ses péchés. Je comprends que
c'est plus difficile ce paradis là mais il a encore des chances d'y
aller. Je comprends que c'est peut-être plus difficile pour certains que
pour d'autres.
Mais, M. le Président...
M.TREMBLAY (Chicoutimi): Vous irez à confesse pour...
exécutions en deux ans...
M. LEGER: ... quand je pense à l'entreprise...
M.TREMBLAY (Chicoutimi): ... pour l'entreprise privée, M. le
Président.
M. LEGER: J'ai écouté le député de
Chicoutimi...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): 13,000 exécutions en deux ans.
M. LEGER: ... hier, qui a parlé longuement. On l'a
écouté, alors je lui demanderais d'écouter religieusement
ce que l'on a à dire.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... écoute jamais...
M. LEGER: Je veux dire ceci. C'est que dans cet...
M.TREMBLAY (Chicoutimi): ... pas pour l'entreprise privée,
dites-le donc. Soyez honnête.
M. LEGER: M. le Président, je pense que j'ai la parole. Vous
voyez très bien le député de Chicoutimi, à
côté de vous, quand c'est le temps de lui donner la parole.
J'espère que vous le voyez très bien quand c'est le temps de lui
dire de se taire.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le président considère que
vous...
M. LEGER: ... j'espère que vous le voyez très bien quand
c'est le temps de lui dire de se taire.
M.TREMBLAY (Chicoutimi): Le président considère que vous
êtes un imposteur.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): A l'ordre, messieurs !
La parole est au député de Lafontaine.
M. LEGER: M. le Président, ce que je veux dire, c'est que, dans
les objectifs d'une entreprise privée, il est essentiel que l'Etat soit
quand même un régulateur de l'économie. L'entreprise
privée a un rôle bien précis à jouer et
l'équilibre qui peut exister entre les différentes entreprises
privées doit être souvent tempérée par l'Etat
devant, justement, peut-être, des appétits un peu voraces que
certaines peuvent avoir et à cause des conséquences sociales qui
peuvent en résulter.
En ce qui nous concerne, nous sommes très ouverts à
l'entreprise privée pourvu qu'elle jouisse, qu'elle joue à
l'intérieur de certaines règles qui soient à l'avantage de
tous les citoyens. Spécialement cet équilibre d'un désir
de profit et de conscience sociale en même temps doit être
présent encore plus dans le domaine des communications sociales. C'est
la raison pour laquelle quand on parle du cri du coeur je pense
qu'il est important qu'il n'y ait pas de monopole dans le domaine de
l'information. Quand on parlait tantôt, à l'article 6, qu'il ne
devrait pas y avoir de personnes reliées directement dans la radio, la
télévision, le cinéma, la presse, je vois que cela vous
touche directement. Je comprends le problème et, si je fais un peu
d'emphase, je me mets à votre place, je me dis: C'est sûr que cela
va créer des problèmes.
Je veux juste faire un parallèle: Vous avez dit tantôt que
les propriétaires, l'actionnaire pratiquement unitaire du câble,
avait des intérêts directement dans le Montreal Star. Je remarque
que, dans le Montreal Star et c'est cela les dangers dans les
communications les préoccupations peuvent être toujours
revues, décelées dans les communications par la suite.
Je vois, dans le Montreal Star, qu'on a beaucoup plus de nouvelles
internationales, nationales, canadiennes qu'il y a de nouvelles
québécoises. Cela m'inquiète de voir que, très
souvent dans les autres journaux francophones, on a une bonne place pour les
nouvelles québécoises et que, dans le Montreal Star, on en voit
un peu moins. Cela m'inquiète. C'est une des raisons pour lesquelles je
pense que cet article veut nécessairement avoir un éventail de
possibilités de nouvelles et s'il y avait un monopole de l'information,
ce serait dangereux. Je pense qu'actuellement, le câble permet beaucoup
l'entrée de programmes venant de canaux américains. C'est
très bon, mais il faut y avoir un équilibre de ce
côté-là. C'est la raison pour laquelle on veut, je pense,
par cet article, éviter un monopole dans tout ce qui touche les
communications pour permettre cet équilibre.
Est-ce que vous pensez qu'il y a des difficultés à ce que
vous ayez des investissements? Moi, je pense que, si je me mets à votre
place, vous désirez avoir le moins d'entraves possibles dans les
investissements futurs. Mais si on tient pour acquis que le domaine du
câble est un domaine de l'avenir et que, très bientôt, cela
va être très intéressant pour beaucoup de gens, il est
possible d'utiliser des investissements d'abord locaux. Je pense qu'on a sorti
un mythe en disant que les capitaux, il n'y en a pas beaucoup au Québec
et qu'il y en a beaucoup ailleurs. Il y en a beaucoup ailleurs, c'est vrai,
mais il y en a encore beaucoup au Québec. C'est possible de prendre des
investisseurs qui sont des résidents du Québec. Actuellement, il
y en a, et je pourrais facilement nommer des maisons qui ont leurs
sièges sociaux ici, des compagnies de fiducie, d'assurance, de trust, de
banque, ainsi que différentes autres sources qui sont
québécoises. Et s'il en fallait de l'extérieur, je pense
que c'est un avantage d'avoir des capitaux qui pourraient venir de
l'extérieur. Ces gens viendraient s'installer au Québec parce
qu'il y aurait de l'argent à faire dans le câble et ils
amèneraient leurs sièges sociaux au Québec et
deviendraient québécois. A ce moment-là, il est possible
d'avoir des intérêts québécois dans le domaine du
câble et qui ne dérangeraient pas, qui ne limiteraient pas
à ce point les investissements, l'expansion, l'expérimentation
que vous recherchez. Est-ce que vous ne pensez pas que c'est possible au
Québec, dans les circonstances que je viens de mentionner, devant
l'appât du gain possible dans le domaine du câble où on sait
que c'est le domaine de l'avenir, que cela ne limiterait pas votre entreprise
comme telle?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Tout cela pour dire que le ministre
prêche et que René Lévesque ne prêche pas.
M. FERGUSON: Comme je l'ai dit, je suis certain qu'il y a insuffisance
des fonds, ici, au Québec et je pense que c'est nécessaire
d'encourager les résidents à y participer. Quand il y a des
ventes sur le marché public, il est peut-être possible de faire
une distribution qui favorise ceux qui résident dans la province, mais
je dois retourner au fait que les investisseurs, par tout le monde, sont des
gens très timides concernant leur argent. Si on restreint ou s'ils
pensent que vous avez restreint, limité la liquidité de leurs
investissements, ils vont placer leurs investissements dans des industries que
l'on peut appeler libres, d'autres industries, d'autres genres
d'investissements.
Bien sûr, comme ces compagnies de câble vont devoir vendre
leurs actions sur le marché, on doit prendre bien soin de placer ces
actions, le plus possible, dans les mains de nos concitoyens, mais on doit
avoir pour eux une attraction et non pas une restriction.
M. CHARRON: M. Ferguson, j'ai écouté votre argumentation
tout à l'heure et la réponse que vous venez de faire. En
admettant avec vous une bonne partie de l'analyse que vous faites du
comportement de l'investisseur, en amplifiant aussi son caractère de
prudence et d'hésitation et le fait que, pour lui, "the best government
is the less government", cela a
toujours été l'esprit du système dans lequel nous
vivons, en admettant tout cela, en 1973, il y a très peu de secteurs
d'activité économique même dans un pays comme le
nôtre qui échappent à la réglementation.
Le comportement de l'investisseur auparavant était,
peut-être, d'éviter systématiquement les endroits où
la réglementation existe. Puisque, maintenant, la plus grande partie de
l'activité économique est couverte par des réglementations
gouvernementales, je pense et on a eu d'autres témoins, à
d'autres occasions, sur d'autres projets de loi, qui sont venus nous le dire
que l'investisseur québécois ou autre finalement
accepté, puisqu'il ne pouvait faire autrement, de vivre avec des
réglementations gouvernementales dans tous les secteurs où il
va.
Or, là où on pourrait parler de ce 80 p.c, c'est dans sa
sévérité et non pas dans son existence. Je pense que
l'existence, comme je viens de vous le dire, de la réglementation se
fait sentir dans tous les domaines de l'activité économique.
Admettons, avec vous, pour le moment, que les 80 p.c. seraient trop
sévères, donc qu'ils feraient fuir des investisseurs. Je me dis:
Pour un investisseur québécois qui a de l'argent à
investir dans ce genre d'entreprises, en quoi le fait de savoir que 80 p.c. des
actionnaires de l'entreprise dans laquelle il se trouve seront
québécois peut-il l'écarter ou ne pas l'écarter
d'investir là-dedans?
Qu'est-ce que cela peut changer pour le gars qui est prêt à
prendre, supposons 10 p.c. des actions d'une entreprise, que de savoir qu'un
autre 70 p.c. sera nécessairement québécois ou que, demain
matin, 50 p.c. serait québécois et 40 p.c. serait
américain, comme dans d'autres entreprises, ou peut-être
même 60 p.c. serait américain comme, malheureusement, c'est le cas
de plusieurs entreprises au Québec.
Je veux dire, que ces partenaires dans cette entreprise, comme
investisseurs on parle toujours d'un investisseur qui a des partenaires,
qui ne devient pas le propriétaire unique d'une entreprise soient
des Québécois comme lui ou des Canadiens, ou des Anglais, ou des
Américains, qu'est-ce que ça vient faire dans la
rentabilité de son entreprise et de son investissement?
Si les règles que propose le ministre des Communications avaient
porté sur l'incapacité pour lui, par exemple, de rendre son
investissement mobile l'incapacité de le retirer à un moment
donné lorsqu'il jugera qu'il perd ou qu'il serait plus rentable
ailleurs, l'interdiction de vendre ses actions à d 'autres actionnaires
québécois, etc., là j'admettrais que le gars pourrait
sentir qu'il n'est plus tout à fait le maître de l'investissement
financier qu'il met là-dedans. Mais si la "restriction" entre
guillemets, je ne le crois pas, mais comme vous l'appelez des 80 p.c.
n'est qu'une règle qui dit que ce sont des résidents
québécois qui devront être vos partenaires dans cette
entreprise, je ne vois pas comment vous pouvez affirmer que cette
décision du gouvernement québécois empêchera un
investisseur québécois, qui a les moyens financiers d'investir
dans cette entreprise, de le faire.
D y a peut-être d'autres aspects de la réglementation, par
exemple celui de l'entreprise parallèle, que vous considérez qui
écarteront des gens, mais je ne crois pas que l'obligation des 80 p.c.
ait cet effet. Et je ne l'ai pas compris encore dans l'argumentation que vous
avez donnée ce matin. Pas plus d'ailleurs que je ne l'ai compris dans le
témoignage de l'association hier.
M. FERGUSON: C'est assez difficile pour moi de vous convaincre. Je peux
répéter les arguments. Vous êtes intéressé,
je pense, dans le contrôle de cette industrie, de déterminer
maintenant et pour l'avenir que l'intérêt du public serait servi.
C'est le but de la réglementation et c'est le but peut-être de cet
article qui demande une participation forte des résidents. J'ai
émis l'opinion qu'on court un certain risque, à mon avis, un
risque très grand. Nous avons un argument à ce sujet. Mais
puis-je dire qu'on peut effectuer le contrôle, un vrai contrôle sur
cette industrie, un contrôle détaillé, sans égard
pour la résidence des actionnaires, des propriétaires? C'est
nécessaire, vous avez les permis et des rapports, des comptes rendus
vous avez ou vous aurez un ministère, une régie qui peut
contrôler et qui peut déterminer les qualités, les
quantités des services rendus par l'industrie. Mon but, peut-être,
est de dire que vous n'avez pas besoin de cet article pour obtenir le
contrôle.
M. CHARRON: Je crois que vous minimisez l'importance de la
propriété d'une entreprise.
Quelles que soient les règles avec lesquelles l'entreprise doit
se familiariser et quelles que soient les réglementations de cette
entreprise, je ne crois pas qu'il y ait beaucoup d'industriels qui seraient
prêts à dire que tout cela est supérieur dans la
possibilité de manoeuvre d'une entreprise, du fait d'en être les
actionnaires. Je crois que malgré toutes les "contraintes", encore une
fois, auxquelles doivent se soumettre les entreprises modernes aujourd'hui, le
fait d'en être les propriétaires et les actionnaires constitue la
mainmise sous la direction de cette entreprise encore aujourd'hui.
L'intervention de l'Etat n'est venue qu'à la longue pour
civiliser parfois certaines entreprises, comme on a aimé employer
l'expression, mais la direction des entreprises est toujours restée en
ce bas monde, en 1973, au Québec, aux mains des directeurs de
l'entreprise et aux mains de ses propriétaires.
La question que je vous posais tout à l'heure ne porte pas
je vous le répète encore une fois sur le contrôle de
l'entreprise. M. Levas-seur, de l'association, me disait hier que le
contrôle d'une entreprise peut être assuré par
51 p.c. Il n'est pas nécessaire d'avoir 80 p.c. Moi, je vous
posais la question plus directe et à partir de votre argumentation,
à vous et non pas de celle de l'association exprimée, hier,
à savoir: Comment une règle qui fixerait demain, par exemple,
à 70 p.c. l'obligation d'y avoir des résidents
québécois écarte un investisseur? Qu'est-ce que cela peut
faire à un investisseur de savoir que ses partenaires seront des
Québécois, obligatoirement' à 80 p.c, ou des
Américains à 20 p.c, des Chinois à 10 p.c, peut importe,
si l'entreprise dans laquelle il investit est assurée d'une
rentabilité.
M. FERGUSON: A mon avis, le choix des investisseurs est dans la valeur
des actions. Chaque fois, quand ils achètent une action, ils pensent la
vendre. Voilà la chose importante. Ils pensent toujours la vendre
à un taux plus élevé. Mais il y a là des craintes.
Eh bien, le problème qui s'impose selon leur mentalité sera que
sa vente sera limitée par la restriction concernant les
non-résidents. Peut-être peuvent-ils vendre les actions mais quand
le marché est plus petit, le prix est plus bas.
M. CHARRON: Mais je veux vous demander ceci: Pensez-vous que vos
collègues de l'association seraient d'accord sur une
réglementation plus sévère de l'opération, de la
vente plutôt que sur le contrôle de la propriété de
l'entreprise, si la réglementation portait plus sévèrement
sur l'opération du câble pour atteindre à peu près
le même objectif que l'on veut atteindre par les 80 p.c?
M. FERGUSON: Je ne le sais pas. Je me trouve dans une position assez
difficile comme expert dans les investissements; bien sûr, ce n'est pas
mon rôle. Je ne connais pas les nuances de cette question. Mais je peux
suggérer que c'est peut-être une bonne idée de demander
à d'autres, peut-être aux maisons de placement qui peuvent
être objectives, non pas aux actionnaires des compagnies du
câble.
Demandez leur leur opinion quant à l'effet de ces articles. Cela
prendrait peut-être une place dans l'étude économique
prospective, avoir une contribution par les experts dans les matières
d'investissement.
M. CHARRON: Je vais vous poser une dernière question, si vous
permettez, et celle-là, elle est peut-être un peu plus subjective.
C'est purement l'information que je vais aller chercher puisque vous travaillez
dans ce milieu-là et pas moi. Je me réfère à ce
secteur précis dont on a parlé hier du grand développement
technologique et de l'intérêt de la câblodiffusion. Quand un
investisseur éventuel, quelqu'un qui a de l'argent mais qui ne sait pas
encore où le placer, apprend qu'une entreprise je pense à
celle dont M. Levasseur parlait hier détient déjà,
par 20 p.c. de ses actionnaires, un réseau aussi important que CBS aux
Etats-Unis, le gars peut se dire, dans sa tête: Si les Américains
sont là-dedans, si CBS est là-dedans, il y a de l'argent à
faire au bout de la ligne; sans cela, CBS ne se mettrait pas
là-dedans.
Il y a donc intérêt d'avoir un partenaire aussi fort, aussi
poussé que CBS peut l'être dans ce domaine-là. S'il
apprend, par contre, que CBS ne pourra jamais jouer un plus grand rôle
que 20 p.c dans cette entreprise-là, que ceux qu'on considère les
gens d'avant-garde dans cette entreprise-là, forcément
étrangers, ne pourront donc pas avoir plus de 20 p.c, l'attrait et
l'espoir de profit, l'espoir d'augmenter la valeur de ses actions pour
éventuellement les vendre, comme vous avez très bien
expliqué, devient moins intéressant.
Autrement dit là, je vais mettre une connotation politique
à la question d'information que je vous posais il y a le
réflexe de colonisé qu'on a souvent; on pense qu'à un
endroit où sont les Américains, c'est bon, que là
où les Américains n'y sont pas, ce n'est pas bon. On dit aussi,
comme souvent nos indigènes, petits hommes d'affaires grignoteux l'ont
fait: Plus les Américains sont là, plus on va les suivre. C'est
souvent eux qui se sont opposés à toute réglementation,
aussi bien fédérale que provinciale, visant à restreindre
la participation des étrangers dans les entreprises comme une attaque
à leurs profits. Souvent, on a eu cette ambition-là, souvent on a
vu ce réflexe-là.
On se dit: Si c'est des Québécois qui contrôlent
à 80 p.c. une entreprise, cela n'ira pas loin. C'est le réflexe
de dire: Nous autres, on n'est pas capables de nous mener nous autres
mêmes. Pourtant les témoignages d'hier, pourtant les
témoignages que constitue la réglementation que l'on
étudie, pourtant bien d'autres choses peuvent nous donner confiance en
nous-mêmes. Mais il y a cette vieille croûte qui a envahi le
secteur des affaires depuis longtemps au Québec, à mon avis, qui
est de dire: On n'est pas capables, par nous autres mêmes. Et on va
chercher la connaissance, le courage ailleurs.
Ce n'est pas surprenant, c'est la marque d'un gouvernement. Notre propre
gouvernement s'en remet aux investissements étrangers pour assurer son
développement. C'est bien normal que les hommes d'affaires c'est
leur gouvernement d'ailleurs aient ce même
réflexe-là de se fier sur l'étranger pour nous
développer à notre place. Moi, je me demande si, au fond, ce que
défendait l'association hier je le dis avec beaucoup de politesse
à votre égard, ce n'est pas une attaque ce que vous
défendez aujourd'hui et ce que, probablement, d'autres
propriétaires que nous entendrons tout à l'heure
défendront ce n'est pas, au fond, ce réflexe-là un peu de
se dire: Dans un secteur de pointe comme celui-là, le fait
d'écarter les étrangers, qui sont à la pointe du
développement de cette entreprise-là, ralentit l'essor de
l'entreprise et, donc, donne moins de valeur à mon investissement.
C'est dans ce sens-là que vous craignez que
l'obligation de remettre l'entreprise aux mains de 80 p.c. de
résidents québécois écartera des gens parce qu'ils
ne croiront pas au succès éventuel de cette entreprise. Ils
préféreront aller dans un autre type d'activité avec leur
argent où la porte est ouverte aux investisseurs étrangers, donc
à leur contrôle éventuel dans ce secteur de notre
économie. Je sais que c'est un peu gros comme question que je vous pose,
mais depuis hier pas depuis hier, ça fait longtemps que je pense
cela hier, dans les questions que mes collègues et moi avons
posées à l'association, dans les réponses surtout que nous
recevions, j'avais souvent cette impression-là, cette manie
fondée j'admets bien, pour certains secteurs.
Je ne conteste pas l'avance qu'ont dans le secteur de l'économie
des étrangers; je ne dis pas que les Québécois sont les
meilleurs au monde, mais...
LE PRESIDENT (M. Cornellier): M. le député de
Saint-Jacques, est-ce que vous pourriez terminer le plus tôt
possible?
M. CHARRON: Je vais terminer. J'ai l'impression d'atteindre une question
importante et j'ai hâte d'entendre M. Ferguson.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que vous pourriez lui demander de
déposer un mémoire? Ce serait bien plus simple.
M. CHARRON: C'est peut-être embarrassant d'atteindre un
débat de ce niveau plutôt que discuter des questions de virgules,
mais je pense que c'est important de connaître cela. Je veux demander
à M. Ferguson si le fait d'écarter ou de réduire à
20 p.c. la participation des étrangers pourra avoir cet effet sur
l'investisseur qu'il préférera aller à un autre
secteur.
M. FERGUSON: J'ai dit que la mentalité des investisseurs est la
même pour tout le monde. Nous avons toujours cette mentalité
d'infériorité qui nous fait considérer les choses de notre
voisinage comme pires que celles d'autres places. Je pense que c'est la
même chose, à Los Angeles, par exemple; ils voient les chances au
Canada comme quelque chose de merveilleux. Je ne peux pas souligner outre
mesure une différence dans les mentalités ou un complexe que nous
démontrons de temps en temps, non.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de
L'Assomption.
M. PERREAULT: J'aurais des questions à poser suite à la
page 14 de votre mémoire. Vous dites que la prémisse fondamentale
pour les abonnés de câble est l'utilisation de signaux
éloignés, pour 80 p.c. de vos abonnés. Est-ce qu'il y a eu
des "ratings" sur les postes, les canaux d'écoute de votre
système de câble? Est-ce que les gens se sont abonnés pour
les réseaux américains?
M. FERGUSON: Oui, nous avons fait un sondage, il y a deux ans,
peut-être deux ans et demi. Nous avons demandé les raisons pour
lesquelles les abonnés ont pris le câble. La réponse
était identique pour tous. Il y a les mêmes résultats dans
les sondages préparés par d'autres compagnies de câble dans
d'autres endroits au Canada et aux Etats-Unis. C'est une question d'avoir
accès à des programmes de postes éloignés qui ne
sont pas disponibles sur les canaux locaux. On peut voir une carte de la
câblodistribution dans toute l'Amérique du Nord et on peut voir le
succès des compagnies et le nombre des abonnés. C'est une
fonction directement de la géographie et de l'accessibilité des
signaux lointains.
M. PERREAULT: A la page 18 de votre mémoire, vous dites
qu'à cause de l'ordre de priorité, pour accommoder d'autres
usagers, vous devriez supprimer ces canaux américains. Etant
donné que vous n'avez que huit canaux actuellement utilisables, vous
vous inquiétez que le nombre d'abonnés diminuerait.
M. FERGUSON: Oui, je suis inquiet sur ce point.
M. PERREAULT: Possibilité de diminution d'un fort pourcentage ou
quoi?
M. FERGUSON: Franchement je ne peux pas faire un total. Je ne peux
même pas deviner les vrais auteurs. Mais je dois peut-être dire,
comme explication, comme preuve peut-être, qu'il y a plusieurs endroits,
dans la partie ouest de Montréal, et ailleurs peut-être aussi mais
dans notre territoire, où c'est possible, avec une antenne privée
très simple, de capter plus de signaux que le nombre que nous livrons
par le câble. Cela est une forte concurrence. Regardez une carte de notre
système et la densité des abonnés. C'est très
intéressant. C'est en fonction directement de l'accessibilité de
ces canaux. Dans le Vieux Montréal, par exemple, derrière la
montagne, le pourcentage est presque de 60 p.c. de foyers qui sont des
abonnés. A Dorval, près du lac, le pourcentage est moins de 25
p.c, un peu plus. Si vous annulez ces canaux très populaires, ou si vous
faites un arrangement selon lequel il est nécessaire d'augmenter le
prix, de niveau trop vaste, nous courons, bien sûr, le risque qu'il y ait
une autre antenne.
M. PERREAULT: J'aimerais préciser qu'il aurait déjà
été fait un sondage sur les abonnements au câble. Est-ce
que vous avez fait des "rating d'écoute"...? Vous distribuez huit
canaux, je pense, dans le moment, vous avez huit canaux de distribution sur
votre câble?
M. FERGUSON: Neuf, en effet, maintenant. M. PERREAULT: Neuf. Avez-vous
fait un
sondage de "rating d'écoute" de chacun de ces canaux
là?
M. FERGUSON: Non, pas nous, mais il y a des sondages
préparés par l'industrie des radio-diffuseurs. C'est B.B.M., je
pense, deux ou quatre fois par année, qui le fait. Cela peut vous donner
la popularité, les "ratings" de tous ces postes.
M. PERREAULT: Qu'est-ce que cela donne pour votre système? Quels
sont les canaux qui sont les plus écoutés sur votre
système de câble?
M. FERGUSON: Je ne sais pas, je n'ai pas vu un sondage strictement
limité à nos abonnés. C'est pour toute l'île de
Montréal.
M. PERREAULT: Pour toute l'île, qu'est-ce que cela donne?
M. FERGUSON: Pardon?
M. PERREAULT: Pour toute l'île, quels sont les
résultats?
M. FERGUSON: Je pense qu'il y en a d'autres, dans cette salle, qui ont
des chiffres beaucoup mieux que moi. Mais je pense que le poste le plus
populaire à Montréal est le canal 10.
M. PERREAULT: Deuxièmement, une autre question que je voudrais
vous poser, vous avez 71,000 abonnés. Vous avez parlé d'une
pénétration de 25 p.c. à Dorval, 60 p.c. derrière
la montagne. Vous avez 71,000 abonnés. Votre degré de
pénétration, c'est sur combien de foyers possibles avec 71,000
abonnés.
M. FERGUSON: Possibles? C'est maintenant 200,000.
M. PERREAULT: Cela donne à peu près 35 p.c?
M. FERGUSON: 35 p.c.
M. PERREAULT: 35 p.c. Merci.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable député de
Maskinongé.
M. PAUL: M. Ferguson, votre passage à la commission parlementaire
des communications fera époque parce que vous avez assisté, ce
matin, comme nous d'ailleurs, à la naissance d'un groupuscule au sein de
la députation séparatiste et l'on pourrait les appeler les
apôtres de l'amour infini de l'entreprise privée. Ce groupe est
présidé par le député de Lafontaine, et le
député de Saint-Jacques en est le "cérémoniaire".
Je vous prierais de noter, M. le Président, que c'est sans la
"bénévolence" du chef du Parti québécois que nous
avons eu, ce matin, cette profession de foi dans l'entreprise
privée.
C'est peut-être pour cette raison que nous avons vu arriver le
député de Gouin qui n'a certainement pas été
consulté quant au rôle que doit jouer l'entreprise privée
dans notre économie québécoise.
M. JORON: On va tout régler cela, ne vous inquiétez pas.
Laissez cela aux professionnels et on va tout arranger cela.
M.TREMBLAY (Chicoutimi): Vous allez vendre une de vos entreprises aux
Américains.
M. JORON: Ne vous mêlez pas de ça, cela va bien aller.
M.TREMBLAY (Chicoutimi): Vous allez vendre une autre de vos entreprises
aux Américains.
M. JORON: Ne vous mêlez pas de ça et cela va bien
aller.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Très bien. On se souvient de l'affaire
de Droy, les huiles.
M. PAUL: M. le Président,...
M. JORON: Qu'est-ce que le député de Chicoutimi raconte
là, M. le Président?
M.TREMBLAY (Chicoutimi): On vous l'a déjà dit en Chambre;
vous n'avez jamais été capable de le réfuter.
M. JORON: Voulez-vous arrêter de raconter des menteries. C'est du
niaisage que vous faites là. Je n'ai jamais eu d'intérêt
dans Droy et on n'a jamais vendu de Droy aux Américains.
M.TREMBLAY (Chicoutimi): Vous deviez avoir douze ans.
M. JORON: Arrêtez-moi donc cela, ce placotage-là.
M.TREMBLAY (Chicoutimi): Vous deviez avoir douze ans.
M. PAUL: Cela vous a pris du temps...
M. JORON: Etes-vous jaloux?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non!
LE PRESIDENT (M. Cornellier): A l'ordre, messieurs!
M.TREMBLAY (Chicoutimi): Des Américains.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): A l'ordre, messieurs!
M. PAUL: M. le Président, vous savez que je n'aime pas ça
quand c'est violent.
M. JORON: Petite peste!
M.PAUL: M. Ferguson, mes questions étaient de la même
portée, de la même nature que celles posées par mon
collègue, le député de l'Assomption.
Pourriez-vous nous donner un peu plus de précisions quant au
nombre de vos abonnés qui prennent le câble et qui ont comme
motivation première cette possibilité de capter les
réseaux, postes ou canaux américains? Est-ce que l'on pourrait
parler de l'ordre de 90 p.c, par exemple?
M. FERGUSON: Franchement, je n'ai pas ces chiffres avec moi,
aujourd'hui.
M. PAUL: Oui, mais sans nous donner, d'une façon précise,
le pourcentage, est-ce que vous pourriez mettre, par exemple, un minimum
d'abonnés qui vont au câble à cause de cette
facilité de capter les réseaux américains?
M. FERGUSON: C'est plus de 80 p.c.
M. PAUL: 80 p.c. Alors, c'est la raison pour laquelle, aux pages 17 et
18 de votre mémoire, vous craignez un peu l'effet de l'application de
l'article 21 du règlement qui traite des priorités. Dans cet
article 21, nous voyons, au sous-paragraphe i), "toute autre programmation" ce
qui, à ce moment-là, voudrait définir ou inclure les
programmes américains. Entre-temps, si cet article était
intégralement appliqué, quel pourrait-être l'effet chez
votre compagnie et chez d'autres sûrement, quant aux abonnements ou aux
abonnés que vous avez déjà au câble? Est-ce qu'on
pourrait dire que ce serait une catastrophe?
M. FERGUSON: Oui. J'en suis certain. Mais c'est une question d'horaire,
parce que nous sommes en train d'augmenter la capacité du
système. Notre compagnie est assez fière de notre recherche,
notre présentation est très fructueuse dans ce domaine. Il y
aurait le système des trente canaux, avec cet appareil que nous appelons
"convertisseur".
L'ordre de priorité jusqu'ici n'aurait aucune importance pour
nous parce qu'il y a suffisamment d'espace pour tous les usagers. Mais le but
de mon discours, aujourd'hui, est de dire: Faites attention, s'il vous plait,
pendant cette période de transition. Il est nécessaire qu'il y
ait des compagnies de câble vivantes. C'est l'intérêt de
l'industrie, de la régie et du gouvernement. On doit examiner la
situation à chaque endroit, et le problème concernant
l'affectation des canaux, parce que la solution pourrait venir de
Montréal n'est pas le même peut-être pour Sherbrooke,
Thetford Mines ou d'autres. Mais c'est la base fondamentale de l'affectation de
canaux, le service que nos abonnés désirent.
Examinez les prix exactement, le service qui est demandé par les
abonnés et notez aussi la concurrence créée par les
antennes privées. C'est dans l'intérêt de tous d'avoir une
augmentation, non une diminution, de nos abonnés. Nous sommes dans la
même équipe et on doit porter une grande attention à ce
service.
M. PAUL: Si je comprends bien vos arguments, M. Ferguson, vos
abonnés adhèrent à votre compagnie en raison de la
qualité du service que vous donnez et entre autres, cette
facilité que vous leur procurez de capter les réseaux
américains. L'application intégrale de l'article 21 pourrait
être considérée comme une diminution de services par votre
clientèle, de la part de votre compagnie ou des autres compagnies de
câblodiffusion. Est-ce pour cette raison que vous invitez prudemment le
ministre, spécialement à la page 17 de votre mémoire,
d'appliquer cet article de priorités qu'au fur et à mesure de la
disponibilité des nouveaux réseaux?
M. FERGUSON: C'est cela!
M. PAUL: Parce que, autrement, vous craignez une répercussion
économique désastreuse pour votre compagnie et les autres qui
seront dans le même champ d'opérations?
M. FERGUSON: C'est une grande inquiétude.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Un instant, sur le même sujet, le
député de Saint-Jean.
M. PAUL: Un instant, je... M. VEILLEUX: Oui.
M. PAUL: ... voudrais peut-être demander au ministre quel est son
opinion sur ce sujet, après avoir entendu M. Ferguson.
M. L'ALLIER: Mon opinion, M. le Président, je l'ai
déjà indiquée hier. L'ordre de priorités qui est
indiqué dans l'article 21, est l'ordre de priorités à
l'intérieur duquel la Régie des services publics, au moment
d'attribuer un permis d'exploitation et sur présentation de la preuve
faite par l'entreprise, détermine si elle doit ou non accepter la
programmation telle que proposée ou suggérer des
modifications.
C'est en d'autres mots à l'entreprise qu'il appartient de
démontrer sa viabilité à partir d'une programmation
qu'elle propose et la Régie des services publics dans sa
décision, va tenir compte en même temps de l'ordre de
priorités. Mais aussi et c'est un facteur essentiel de la
viabilité de l'entreprise, fonction de la programmation proposée
par l'entreprise, de sorte que le fardeau, en fait, repose sur chaque
entreprise de démontrer et de prouver à la régie ce qui
pour elle, est viable sur le plan économique et sur le plan de son
développement.
M. PAUL: Est-ce que le ministre a l'impression que les membres de la
régie auront une certaine facilité d'actions ou
d'interprétations de l'article 21?
M. L'ALLIER: Sûrement, M. le Président,...
M.PAUL: Dans ce que l'on dit, ici: Toute entreprise publique de
câblodiffusion doit offrir sa programmation, etc..
M. L'ALLIER: Si on fait référence, M. le Président,
à l'ordre de priorités, par exemple, qui est suivi, jusqu'ici,
par le CRTC. Le CRTC a aussi un ordre de priorités à respecter,
mais cela se passera exactement de la même façon. C'est à
l'intérieur d'un ordre de priorités. On doit... La
régie... Et c'est pour cela que l'on ne peut pas dans un
règlement comme celui-ci, rendre une chose absolument obligatoire. C'est
la régie qui devra faire la pondération entre l'ordre de
priorités et le potentiel de distribution et de développement de
l'entreprise.
En d'autres mots, la régie ne peut pas imposer à une
entreprise ce serait contraire à l'économie de la loi et
des règlements et contraire à l'intérêt public
un fardeau tel qu'elle ne puisse pas se développer et continuer
de fournir le service qu'elle fournit déjà.
M. PAUL: Le ministre pourrait accepter de ma part une remarque, celle de
reconsidérer le texte tel que rédigé pour que, justement,
la régie ait cette flexibilité pour rencontrer les objectifs que
vise le ministre, parce que, à mon humble point de vue, la régie
n'aura pas cette flexibilité en appliquant les dispositions de l'article
21. Il faudra peut-être reconsider le texte tel que rédigé
actuellement.
M. L'ALLIER: Nous allons de toute façon revoir tout le texte,
tout le règlement, dans l'optique des mémoires qui sont
présentés.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): En donnant la parole au
député de Saint-Jean et sans vouloir priver les membres d'une
participation au débat, j'aimerais tout de même rappeler que nous
avons deux autres groupes à entendre. J'inviterais donc les
députés à résumer autant que possible leurs
questions.
M. VEILLEUX: Je veux tout simplement souligner, M. le Président,
l'impact de la programmation télé sur le câble, si nous
regardons les tableaux que nous avons devant nous sur le réseau desservi
par National Cablevision et le deuxième réseau, Cable TV. On
remarque dans la programmation française que National Cable-vision donne
une possibilité de quatre postes français à ses
abonnés, tandis que Cable TV en donne deux, le canal 2 et le canal
10.
Si on regarde attentivement les tableaux, on se rend facilement compte
que, sur les quatre réseaux que fournit National Cablevision à
plusieurs heures de la journée, les abonnés n'ont le choix que de
deux postes, le 2 ou les postes affiliés au 2, et le canal 10 ou les
postes affiliés au 10. Si je prends entre 19 h 30 et 21 heures, les
abonnés de Cablevision vont avoir le choix entre deux réseaux, le
2 ou les postes 13, 7 et 10 qui donnent exactement le même programme;
tandis que si on regarde Cable TV, de 9 heures le matin à 1 heure du
matin, lorsque les abonnés ont à choisir la programmation
française, ils ont toujours le choix entre deux programmes
différents, soit le canal 10 ou le réseau 2.
M. FERGUSON: La réponse est un peu technique, je pense. Notre
système et celui de National Cablevision suivent des plans
différents pour l'affectation des canaux. Nous avons voulu comme base
fondamentale que des postes locaux puissent avoir une place sur le câble,
sur un canal clair.
Rappelez-vous qu'il y a à Montréal quatre canaux et leurs
signaux créaient des parasites sur les canaux 2, 6, 10 et 12; c'est un
canal secondaire, si vous voulez. Il y a maintenant des méthodes pour
améliorer ces canaux. National Cablevision, par un côté de
son système, a transféré deux de ses postes locaux
à un canal clair, et il a converti le signal. Pour cette raison, ilpeut
ajouter deux autres postes éloignés parce qu'il n'a pas
utilisé un canal clair pour le poste local. Ces deux postes qu'il ajoute
sont affiliés aux mêmes réseaux qui sont
représentés à Montréal; il y a une duplication de
cette programmation.
Nous avons pensé qu'il y a des endroits, surtout dans les
édifices "high rise" où il y a de l'interférence, des
problèmes avec le poste local. C'est la raison pour laquelle nous avons
donné une place prioritaire à ces postes. C'est pourquoi nous
avons seulement les canaux 2 et 10, mais pas Télé-7 et le canal
13 de Trois-Rivières.
Mais nous avons l'intention, et nos planifications sont presque finies,
d'ajouter les autres canaux et, bien sûr, tous ces canaux seront dans le
paquet.
M. VEILLEUX: Moi, ce que je voulais dire, M. Ferguson vous avez
peut-être mal compris c'est que ce n'est pas nécessairement
le nombre de canaux qui donne une meilleure qualité de la programmation,
c'est plutôt le choix des canaux. Bien, si on regarde... Là, on a
jeté un coup d'oeil du côté français sur les deux
réseaux de câblevision à Montréal. Maintenant, si
nous regardons du côté perception de programmes anglais, on
remarque des programmes identiques en plus grand nombre sur le réseau
National Cablevision à certaines heures de la journée, par
exemple le 10 juillet, que ceux que l'on peut retrouver sur le réseau
Cable TV parce qu'à certains moments de la journée, par exemple
entre la seizième heure et 22 heures, sur le réseau Cablevision,
en additionnant l'anglais et le français, les abonnés ont un
choix de neuf émissions complètement différentes, tan-
dis que, si on regarde sur l'autre réseau, ce n'est qu'à
des heures données de la journée, même, à certain
moment, une demi-heure ou une heure, où le même choix de neuf ou
de dix réseaux se retrouve sur la deuxième chaîne de
câble à Montréal.
M. FERGUSON: En effet, mon argument est que certains de ces canaux ne
sont pas des canaux clairs du câble. Si vous parlez de la qualité
du service... Mais vous avez raison, c'est la vérité. C'est le
choix qui est nécessaire et quand ces affiliations, pendant la
période de programmation locale de non "network", oui, il y a plus de
choix et c'est certainement dans notre intérêt d'augmenter le
choix, mais c'est difficile. Pour nous peut-être, ce serait dans notre
intérêt d'annuler le poste local du câble. On peut en faire
un argument, juste les postes éloignés, et peut-être que
nous aurons une augmentation des abonnés.
M. VEILLEUX: Et si vous...
M. FERGUSON: Cela ne nous mène nulle part.
M. VEILLEUX: Si une compagnie de câble, à Montréal,
enlevait les postes locaux de la ville de Montréal, est-ce que les
abonnés pourraient facilement capter les postes de Montréal sans
rien changer sur leur appareil ou s'il faudrait, s'ils veulent capter le 10, le
2 ou le 12...
M. FERGUSON: Ce sont des problèmes, maintenant...
M. VEILLEUX: C'est cela le problème.
M. FERGUSON: Non, nous sommes dans cette route; on doit rester
là; non, on ne peut pas retourner à cette situation.
M. VEILLEUX: D'accord.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de
Saint-Laurent.
M. PEARSON: Juste deux brefs commentaires, dont un qui m'est
suggéré par les commentaires du député de
Saint-Jean. Je pense qu'il est difficile de porter un jugement sur la
programmation de National Cablevision et de Cable TV, parce que la
première, National Cablevision, s'adresse particulièrement aux
gens de l'est de Montréal, qui est en grande majorité
francophone, ce qui laisserait supposer que la demande de l'apport à ces
gens-là serait surtout peut-être pour des postes francophones,
tandis que dans l'ouest, il y a beaucoup plus d'anglophones. Ce qui veut dire
que, si on imposait deux autres canaux francophones, par exemple le poste de
Trois-Rivières ou d'ailleurs pour les gens de l'ouest, j'ai l'impression
que les appareils resteraient peut-être plus souvent fermés
qu'autrement. C'est pour cela que c'est difficile de porter un jugement
là-dessus.
Maintenant les autres commentaires sont suggérés par ceux
du député de Maskinongé.
En règle générale, les gens qui demandent le
câble, c'est simplement pour pouvoir capter les postes
éloignés. Toute réglementation doit être flexible ou
bien applicable, sinon, ça ne servira à rien. C'est-à-dire
que si une réglementation est trop stricte, les gens vont se
désabonner du câble et on va avoir la multiplication, sur les
toits de Montréal, d'antennes extérieures tout simplement pour
être capables de recapter, par leurs propres moyens, des postes qu'ils
pourraient capter, comme dans certaines petites villes qui n'ont pas de
câble; quand on se promène en auto, on voit une multiplication,
comme des arbres, sur les toits, de ces antennes extérieures.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Même à Québec. Vous ne
pouvez pas prendre Radio-Canada sans le câble dans certaines zones.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable ministre.
M. L'ALLIER: M. le Président, je voudrais remercier M. Ferguson
de sa présentation et lui dire, comme aux autres, que nous allons tenir
compte, dans toute la mesure du possible, des impératifs, dont il nous a
fait part, au moment de compléter la réglementation.
Maintenant, nous avions prévu entendre National Cablevision
à ce moment-ci tout en indiquant qu'il était souhaitable
d'entendre, immédiatement après, l'Association canadienne des
radio diffuseurs afin de permettre à cette association de se
libérer pour la semaine prochaine.
Compte tenu du fait que National a une présentation assez
élaborée, je voudrais demander à ses représentants
s'ils souhaitent présenter leur rapport au risque de le voir interrompre
et continuer la semaine prochaine, ou s'ils préféreraient le
présenter la semaine prochaine et laisser à l'Association des
radiodiffuseurs le privilège de présenter maintenant son
exposé.
M. LEVASSEUR: M. le Président, s'il était possible, nous
aimerions faire notre présentation la semaine prochaine et laisser
l'occasion, à l'association qui nous suit, de présenter son
mémoire dès maintenant.
M. L'ALLIER: Je remercie M. Levasseur, je pense que cela va nous
permettre, effectivement, d'avoir une perception beaucoup plus complète
de la présentation que vous voulez faire. Nous pourrions, alors passer
immédiatement à l'audition de l'Association canadienne des
radiodiffuseurs, compte tenu du fait que la commission a exprimé le
désir de terminer ses travaux à midi et demi.
LE PRESIDENT (M. Cornellier) : L'Association canadienne des
radiodiffuseurs.
Association canadienne des radiodiffuseurs
M. DE GASPE BEAUBIEN: M. le Président, M. le ministre, je suis
Philippe de Gaspé Beaubien et j'assume la présidence du conseil
d'administration de l'Association canadienne des radiodiffuseurs, l'ACR, et
j'en suis le porte-parole aujourd'hui, ainsi que celui de l'ACRTF, son
association régionale.
Je suis accompagné de M. Paul Audet, le président de
l'ACRTF, ainsi que de Me Bureau et de Me Richard.
M. le Président, l'ACR et l'ACRTF sont très conscientes du
problème de juridiction législative que ce projet peut poser;
elles ne croient pas devoir discuter devant cette commission de cet aspect du
problème qui pourra éventuellement être
étudié et tranché dans un autre forum ou dans d'autres
instances. Nos commentaires seront donc faits sous réserve de la
décision qui pourra être rendue ou de l'entente qui pourrait
intervenir sur cette question et notre participation aux travaux de la
commission aujourd'hui ne doit pas être interprétée comme
une acceptation de la juridiction de l'autorité provinciale en ce
domaine.
Compte tenu de cette réserve, l'ACR et l'ACRTF se proposent de
formuler des commentaires dont devrait tenir compte toute autorité
exerçant une juridiction dans ce domaine.
Premièrement, le règlement proposé ne devrait
contenir aucune prohibition (article 6) ayant pour effet d'interdire à
la Régie des services publics le droit d'attribuer une autorisation
d'exploitation d'une entreprise publique de câblodistribution à
une entreprise de radio, de télévision et à toute autre
entreprise ou personne reliée à l'une d'elles par participation
financière ou autrement. La régie devrait être
laissée libre, selon les circonstances de chaque cas, d'attribuer ou non
la licence demandée, et d'encourager ou de limiter, compte tenu des
circonstances de chaque cas, la participation de telles entreprises ou personne
à une entreprise publique de câblodistribution.
Cela permettrait, à notre opinion, en particulier de
protéger les droits acquis lors de l'entrée en vigueur de tels
règlements et de tenir compte du fait que la câblodistribution est
une des voies d'expansion naturelle des entreprises de radio et de
télévision.
Deuxièmement, pour être conforme à la politique
québécoise générale et à la politique
canadienne en matière de propriété des investissements
étrangers dans la radiodiffusion, le projet de règlement ne
devrait pas contenir de limitations telles celle établie à
l'article 5 concernant la résidence des propriétaires
d'entreprises de câblodistribution. Cette préoccupation nous
paraît, d'ailleurs, secondaire par rapport aux objectifs
recherchés et atteignables par des règlements. Une telle
disposition risque d'entraîner dans d'autres juridictions pareilles
limitations à l'égard des Québécois qui voudraient
étendre le champ d'action de leurs entreprises et le rayonnement de leur
production en dehors des limites de la province de Québec.
Troisièmement, l'autorisation accordée par l'article 13 du
projet de règlement d'inclure de la publicité dans la
programmation des entreprises de câblodistribution entraînerait un
partage de volume de publicité qui serait néfaste pour les
entreprises de radiodiffusion et de télédiffusion et qui mettrait
en péril les efforts de production faits présentement au
Québec. De plus, cette disposition placerait les radiodiffuseurs et les
télédiffuseurs québécois dans une situation
défavorable par rapport à leurs collègues des autres
provinces qui pourraient, eux, bénéficier des avantages de la
politique de substitution établie par le CRTC è cet égard.
Nous y reviendrons.
Le projet de règlement devrait prévoir des
mécanismes pour assurer au groupe linguistique minoritaire sur le plan
provincial le respect de certains droits. Ainsi, a) dans les régions de
majorité linguistique anglaise, l'ordre de priorité de l'article
21, paragraphe 2, devrait être modifié; b) dans tous les cas, les
émissions produites en une langue autre que le français ne
devraient pas être limitées comme elles le sont par l'article 17.
Aucun règlement applicable à une entreprise de communication du
type de la câblodistrubution, à notre opinion, ne devrait contenir
de dispositions qui permettent à une régie de contrôler
totalement, comme semble l'impliquer la rédaction actuelle de l'article
11, la programmation. Il s'agit là d'une atteinte à la
liberté d'information et des communications. D'ailleurs, rien dans le
présent règlement ne reconnaît ce droit.
Notre système de communications est actuellement conçu
comme un tout et la réglementation actuelle tient compte de
l'interdépendance des composantes, à savoir la radio, la
télévision et le câble, de ce système. Il faut
s'assurer que toute réglementation applicable à l'une ou l'autre
des composantes protège l'équilibre établi entre elles et
prévoit les mécanismes qui éviteront les conflits ou la
duplication de réglementation.
M. le Président, comme nous le disions dans notre lettre du 28
juillet, l'autorisation accordée par l'article 13 du projet de
règlement d'inclure de la publicité dans la programmation des
entreprises de câblodistribution entraînerait un partage de volume
de publicité qui serait, à notre opinion, néfaste pour les
entreprises de radiodiffusion et de télévision et qui mettrait en
péril les efforts de production faits présentement au
Québec. En effet, à cause de la pénurie de sources
d'approvisionnement pour les radiodiffuseurs et les
télédiffuseurs de langue française, une grande part de
leurs revenus sont
consacrés à la production locale en français. Cette
production très dispendieuse a permis jusqu'à ce jour aux
radiodiffuseurs et aux télédiffuseurs de créer au
Québec des centres de production qui font preuve d'une vitalité
et d'une qualité exceptionnelles.
Toute réduction sensible, vous le comprendrez alors, dans des
revenus de ces entreprises risque de compromettre cette situation. Or, les
informations, les statistiques, les données que le court délai
dont nous disposions nous a permis de recueillir et d'analyser nous permettent
déjà de tirer des conclusions préliminaires qui
corroborent notre appréhension.
D'abord, quelques indices. Premièrement, en ce qui concerne les
revenus publicitaires, le Québec se classe: a) en chiffres absolus, au
troisième rang dans le domaine de la télévision; b) per
capita, au septième rang dans le domaine de la radio à comparer
avec d'autres provinces.
Deuxièmement, les radiodiffuseurs québécois ont vu
leur part des revenus publicitaires canadiens diminuer sans cesse depuis neuf
ans.
Troisièmement, les chiffres démontrent que les
radiodiffuseurs québécois, malgré ces pertes, font preuve
de beaucoup d'efficacité dans le "marketing" ou la mise en marché
de leur produit à comparer avec leurs autres confrères des autres
provinces.
Quatrièmement, comparativement à celles du reste du pays,
les stations de radio québécoise, en dehors de Montréal et
Québec, doivent compter sur des revenus de publicité locale
à comparer au national local pour environ 81 p.c. de leur volume
total.
Cette situation particulière au Québec se reflète
aussi dans les stations de télévision. On chercherait en vain au
Canada un endroit où les revenus publicitaires puissent s'avérer
inépuisables. Cela est particulièrement vrai dans le cas du
Québec puisque sa part desdits revenus a baissé depuis les
dernières neuf années. Toute action dirigeant une partie de ces
revenus vers des media additionnels amènerait une véritable
saignée qui ne manquerait pas d'affaiblir les stations et probablement
surtout les petites stations au Québec.
Ces indications, M. le Président, entrafnent les conclusions
préliminaires suivantes: Premièrement, les radiodiffuseurs
québécois doivent faire preuve d'une remarquable
efficacité en dépit des circonstances économiques moins
avantageuses que dans d'autres régions du pays.
Deuxièmement, les stations québécoises, en dehors
de Montréal et de Québec, dépendent presque
entièrement de la publicité locale. Leur situation deviendrait
des plus précaires si elles avaient à faire face, dans leur
propre localité, à une nouvelle concurrence provenant de
l'expansion d'un autre medium de publicité, tel que le câble.
Troisièmement, plusieurs petites stations se font
déjà enlever une partie importante de leur auditoire à
cause de la pénétration des émissions de
télévision venant de l'extérieur et
véhiculées par câble.
A partir du moment où l'on permet de la publicité sur les
câbles, ces stations verront une diminution de leurs revenus de
publicité, tant sur le plan local que sur le plan national.
Le propriétaire d'une compagnie de câble se trouverait donc
doublement avantagé. D'abord, il peut offrir aux annonceurs, surtout
à ceux des plus petits marchés, de la publicité à
des tarifs très inférieurs à ceux des postes
réguliers qui opèrent dans la région. Ceci, parce qu'il ne
dépend pas uniquement de la publicité comme source de revenu,
mais plutôt des abonnements au câble.
Deuxièmement, sa mise de fonds en équipement et en
personnel lui permet la production de programmes à des frais beaucoup
moins élevés.
Plus que toute autre chose, messieurs, ces conclusions
préliminaires soulignent le besoin d'une étude approfondie de
l'impact économique qu'une réglementation comme celle de
l'article 13 risque d'entrafner. Nous sommes disposés à
participer à une telle étude dès maintenant et à
mettre à votre disposition et à celle de ceux à qui vous
voudriez demander d'y participer aussi tous les renseignements
nécessaires et disponibles pour mesurer l'impact probable d'une telle
réglementation. Nous croyons que cette étude doit
nécessairement précéder la mise en application de cette
réglementation, et vous demandons expressément de surseoir
à la mise en application jusqu'à ce que cette étude soit
complétée. Il s'agit là d'un des aspects de l'impact
économique de cette réglementation.
Nous avons aussi souligné que les radiodiffuseurs du
Québec se trouveraient également désavantagés par
rapport aux radiodiffuseurs du reste du pays, si cette réglementation
était adoptée, et ce, à cause de l'absence de
l'application au Québec des politiques dont continueront alors de
bénéficier ces autres radiodiffuseurs. Je veux parler notamment
des politiques concernant le dédoublement d'émission, la
suppression et le remplacement des messages publicitaires et la prohibition de
la publicité dans les entreprises de télévision par
câble.
Nous croyons qu'une étude de l'impact économique, M. le
Président, de la réglementation proposée concernant la
publicité doit tenir compte de ces facteurs. Il nous apparaît que
cette étude est d'autant plus nécessaire que si le volume de
publicité disponible au Québec était partagé avec
un medium additionnel, qui incidemment réalise déjà des
profits sans le bénéfice de la publicité, la permission de
faire de la publicité mettrait en péril, premièrement,
l'industrie québécoise de production et de programmation qui,
actuellement, bénéficie dans les entreprises privées de
radiodiffusion et de télévision de budgets d'au-delà de
$30 millions par année.
Deuxièmement, et plus généralement, elle risque de
mettre en péril un système de communication unique au monde, par
la diversité du choix à faire, et qui semble fonctionner
actuellement à la satisfaction de la communauté.
Nous vous réitérons donc, M. le ministre, M. le
Président et messieurs, notre offre aujourd'hui, de participer à
une telle étude économique et d'y apporter toutes les
informations dont nous disposons. Nous sommes heureux de constater ce matin
votre ouverture d'esprit nécessaire à l'élaboration d'un
projet de réglementation qui tienne compte des facteurs
économiques en jeu. Je vous remercie.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable ministre des
Communications.
M. L'ALLIER: Vous nous avez donné un certain nombre de
renseignements, M. de Gaspé Beaubien, qui ne figurent pas au texte du
mémoire que nous avons et qui sont quand même extrêmement
intéressants. Je n'ai pas devant moi les données essentielles du
rapport Davey sur la rentabilité de la radiotélédiffusion
au Québec et j'aimerais pouvoir, à un moment donné,
analyser ce que vous avez dit, plus les données que vous avez fournies
en regard de ce rapport.
Je voudrais tout simplement vous poser une très brève
question qui porte sur la publicité. Vous avez souligné à
quelques reprises la diminution proportionnelle des revenus en publicité
des radiodiffuseurs québécois par rapport au bloc des revenus de
l'ensemble des radiodiffuseurs canadiens.
Est-ce que, dans l'analyse que vous faites, vous êtes en mesure
d'établir une distinction ou si la situation est absolument identique au
Québec pour les radiodiffuseurs de langue anglaise ou pour les
radiodiffuseurs de langue française?
Ce que je veux dire, c'est ceci: Est-ce que la diminution du revenu de
la publicité pour le bloc des radiodiffuseurs québécois a
porté davantage sur les radiodiffuseurs francophones ou de langue
anglaise? Vous comprenez ce que je veux dire? Est-ce que, en d'autres mots,
c'est le bloc publicitaire canadien anglais qui a grevé davantage la
radiodiffusion anglaise ou inversement?
M. DE GASPE BEAUBIEN: M. le ministre, d'abord, je dois vous dire que ces
statistiques ont été obtenues à la toute dernière
minute. Nous les mettons à votre disposition, ce matin, et nous
désirons mettre toute information que nous avons à votre
disposition. C'est ce qui explique qu'elles n'étaient pas incluses au
moment où nous avons écrit cette lettre, il y a
déjà une semaine.
Deuxièmement, les chiffres que nous avons ne font pas de
distinction entre les media de communication de langue française ou de
langue anglaise au Québec, mais il y aurait certainement moyen de
collaborer avec vous et avec cette commission pour obtenir cette
information.
M. L'ALLIER: Je vais préciser ma question. Je comprends que vous
n'ayez peut-être pas la distinction à ce moment-ci, mais comme
vous êtes quand même un spécialiste de cette question,
est-ce que vous pouvez nous donner une appréciation? En d'autres mots,
à partir d'un exemple concret, si ce n'est pas dévoiler des
choses qui ne sont pas publiques, est-ce que, par exemple, dans une station
radiophonique francophone importante, on peut considérer qu'il y a eu
une diminution de volume de la publicité?
M. DE GASPE BEAUBIEN: M. le ministre, la baisse de revenu que nous avons
est comparée aux autres provinces du Canada. C'est la participation, la
part qu'ont les postes du Québec et non pas les postes
nécessairement français ou anglais. Cette participation s'est vue
réduite de 25 p.c. de tous les revenus de publicité nationaux et
locaux, qu'elle était en 1963, à 21 p.c. qu'elle est
présentement. Donc, je n'ai pas de donnée
particulière.
Je m'adresse à vous aujourd'hui comme président du conseil
d'administration de l'association et je ne suis pas mandaté pour parler
pour eux à cet effet.
Je peux vous parler, par exemple, si vous me permettez de changer de
chapeau, comme président de Télé-média et vous dire
que dans le cas d'un poste de radio à Montréal nous sommes
heureux de voir que les postes francophones ont réussi à
convaincre, au point de vue national, non pas local, les agences de
publicité d'où sort la plus grosse partie des revenus à
Toronto de l'importance du marché français. Et nous avons pu voir
un changement graduel depuis les deux ou trois dernières années;
les postes francophones obtiennent une plus grande part, une part plus
équitable des revenus qui leur reviennent dans ce marché. Donc,
il y a des progrès qui se font de ce côté.
Les statistiques que j'ai pour vous aujourd'hui démontrent qu'en
général, au Québec, les entreprises de radiodiffusion au
Québec vont chercher une moins grosse part des revenus disponibles en
publicité pour le Canada, d'année en année, et ce depuis
les neuf dernières années. Il semblerait que c'est un "trend" qui
va continuer malheureusement.
M. L'ALLIER: Vous comprenez, M. le Président, si vous permettez
que je poursuive sur ce point quelques minutes, l'importance de cette
distinction à établir. En d'autres mots, la publicité
c'est quand même le moyen qui est un des appuis principaux au potentiel
de production.
M. DE GASPE BEAUBIEN: C'est exact.
M. L'ALLIER: Si le bassin publicitaire français n'a pas
diminué ou s'est maintenu ou, au contraire, s'améliore, ça
veut dire que le potentiel de production francophone est bien appuyé
même s'il pourrait l'être davantage. Si, par
ailleurs, cette diminution sur les neuf ans a surtout affecté le
potentiel de procuction anglophone au Québec via la publicité,
à ce moment-là c'est probablement, étant donné que
la publicité est fonction des "ratings" et de l'interprétation,
parce que le potentiel de production québécois anglophone a perdu
en regard, par exemple, du degré de pénétration des autres
stations anglophones.
M. DE GASPE BEAUBIEN: M. le ministre, c'est certainement là une
des questions que nous aimerions examiner avec vous, l'approfondir et on vous
offre aujourd'hui notre collaboration. On est très heureux de voir que
votre commission est disposée à examiner la possibilité de
plus de recherches et d'études. Nous aussi cherchons la
vérité. Voyez-vous, on essaie de communiquer à des gens
qui sont peut-être moins familiers l'importance pour la plus petite
station de son revenu local. Dans la publicité, il y a deux sortes de
revenus; le revenu qui est placé par les agences de publicité
dans les grands centres et qui représente la publicité faite
à l'échelle du pays, c'est dit une publicité nationale.
Elle est dirigée par les agences de publicité. Au Canada
français, une bonne partie des revenus des plus petits postes,
jusqu'à 81 p.c. de tous leurs revenus, leur vient de ce qui existe dans
leur localité, non pas ce qui vient des grosses agences de
publicité mais ce qui vient de la pharmacie ou du centre commercial de
leur région.
C'est essentiel à leur survie ce qui se passe dans leur milieu.
Et nous, on dit: Si on introduit un autre medium de publicité, si on
introduit un autre élément de concurrence dans ces plus petits
marchés-là, on risque d'affecter d'une façon sensible
plusieurs des postes de télévision et ils ne pourront pas
continuer à investir autant dans le domaine de la programmation. Et
deuxièmement, ça risque d'affecter également les petits
postes de radio qui sont en concurrence dans ces marchés-là pour
obtenir une part de leurs revenus. Vous savez, on croit... Vous avez
parlé plus tôt des taux de revenus. La majeure partie des postes
qui opèrent au Québec ont des taux de rentabilité ou de
profit sur leurs ventes avant la taxe, en radio, pas de 50 p.c. ou de 60 p.c,
mais de 8 p.c; 8 p.c. avant la taxe. Cela veut dire peut-être 4 p.c.
après la taxe. On peut avoir un rendement de 8 p.c, 9 p.c. et 10 p.c. et
investir son argent ailleurs.
Là, l'idée préconisée que la radiodiffusion
et la télévision sont une licence pour imprimer de l'argent, cela
n'est plus vrai. Je ne sais pas si cela l'a déjà
été, je n'y suis que depuis quatre ou cinq ans, mais j'essaie de
vous faire comprendre qu'il y a un système qui nous aide tous dans le
moment, le système de radiodiffusion et de télédiffusion
qui rend de bons services dans notre milieu. Je suis certain que vous
êtes préoccupés comme nous de ne rien faire qui pourrait
réduire un équilibre qui est très impor- tant pour nous
dans le marché; un système qui semble bien remplir ses
obligations envers la communauté qu'il dessert. C'est pour cela que j'ai
insisté un peu sur l'aspect économique et que je vous invite
à venir l'examiner encore plus profondément avec nous.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable député de
Chicoutimi.
M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je regrette d'abord que
nous ne puissions pas poser des questions aussi longuement que nous devions le
faire, puisque nous ajournons les travaux à midi trente, au sujet du
mémoire qui nous a été soumis par l'Association des
radiodiffuseurs.
Ce mémoire exigerait que nous interrogions longuement ces
personnes et j'aimerais savoir de M. de Gaspé Beaubien s'il serait
possible à son association, la semaine prochaine, de
déléguer quelqu'un qu'on pourrait interroger parce
qu'écoutez, vous allez nettement à l'encontre des grandes lignes
de la politique énoncée par le ministre québécois
des Communications.
Et au seul chapitre des compétences constitutionnelles vous
comprendrez, M. Beaubien, qu'il va nous être nécessaire de savoir
ce que vous voulez et dans quelle mesure vous entendez collaborer avec le
gouvernement du Québec.
D'autre part, certains sujets, que vous avez évoqués,
notamment le problème de l'exploitation des entreprises
parallèles nous en avons discuté déjà
exigerait que nous vous interrogions assez longuement. Vous parlez, d'autre
part, de la propriété québécoise et il faudrait
aussi vous interroger là-dessus et savoir quelle est la situation de vos
diverses entreprises.
En ce qui concerne la publicité, pour être éloquent,
votre plaidoyer ne nous a pas complètement convaincus. Vous imaginez que
nous avons entendu d'autres sons de cloche et que nous allons en entendre
d'autres; il nous faudrait comparer avec vous les versions qui nous ont
été données et qui nous seront données
ultérieurement.
Je m'inquiète aussi, à la page 3 de votre mémoire,
de ce que vous dites concernant la protection des droits linguistiques des
groupes linguistiques minoritaires et de votre attitude relative au projet de
règlement que soumet le ministre en cette matière. De la
même façon, au paragraphe e), je vois mal que vous n'acceptiez
point que la régie, en fonction du bien public et des services à
rendre à la collectivité québécoise, n'ait pas
quelque droit de regard sur une programmation sans pour autant exercer un
dirigisme qui serait néfaste à la qualité de l'information
et à la qualité des émissions que vous produisez.
Ainsi donc, M. le Président, je me vois obligé de demander
au ministre des Communications de convoquer à nouveau les
radiodiffuseurs pour que nous puissions les interroger longue-
ment sur une série de sujets qui remettent en cause, à
notre sens, l'ensemble des politiques énoncées par le ministre
des Communications. Même si certains aspects de votre mémoire
peuvent nous être sympathiques, nous ne pouvons, d'emblée,
accepter vos propositions et changer, modifier radicalement le projet de
réglementation que nous avons devant nous sans avoir, auparavant, obtenu
de vous tous les renseignements utiles.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable ministre.
M. L'ALLIER: Je voudrais concourir aux paroles du député
de Chicoutimi, s'il était possible, malgré les obligations que
vous avez au niveau de votre association, de déléguer la semaine
prochaine quelqu'un qui pourrait continuer de répondre à des
questions, pour que nous puissions faire un bon bout de chemin
là-dedans, je crois que ce serait extrêmement utile à la
commission. Je comprends que ça pose une contrainte, mais, dans le
contexte où nous sommes, il faudra prendre tout le temps
nécessaire pour analyser les données et les propositions que vous
faites, étant donné que précisément les entreprises
de câble, d'une part, et les membres de la commission, d'autre part, et
peut-être d'autres intervenants devront se pencher très
attentivement sur ces données en regard des objectifs de la
réglementation.
M. DE GASPE BEAUBIEN: M. le ministre, M. le Président, M.
Tremblay, ce sujet est assez important pour nous et je suis prêt quant
à moi, à revenir par avion de Vancouver pour vous rencontrer
jeudi, si c'est jeudi que vous siégez. J'assisterai à une
réunion de nos comités exécutifs, mais nous croyons que
c'est tellement important pour nos membres du Québec que je serai
à votre disposition pour essayer de répondre à vos
questions en ce domaine. Je crois que c'est important; nous avons beaucoup en
jeu, nos membres ont beaucoup en jeu dans ces régions et je viendrai de
Vancouver pour vous voir.
M. L'ALLIER: Je vous remercie, M. de Gaspé Beaubien, de votre
disponibilité. Je suis convaincu que ce sera extrêmement utile aux
membres de la commission. Si les membres sont d'accord, nous pourrions à
ce moment-ci ajourner nos travaux à jeudi prochain à dix heures
et nous reprendrions alors nos travaux, si cela vous convient, lors d'une
présentation complémentaire.
M. DE GASPE BEAUBIEN: Très bien, M. le ministre, M. le
Président.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Merci.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): La commission ajourne ses travaux et les
reprendra jeudi prochain à dix heures. Le premier groupe à se
faire entendre sera justement l'Association canadienne des radiodiffuseurs de
langue française.
(Fin de la séance à 12 h 33)