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Commission permanente de l'éducation,
des affaires culturelles et des communications
Projet de règlement sur la
câblodistribution
Séance du mardi 11 septembre 1973
(Dix heures six minutes 1
M. PILOTE (président de la commission permanente de
l'éducation, des affaires culturelles et des communications): A l'ordre,
messieurs!
Avant que ne débute la séance, je voudrais signaler les
changements suivants parmi les membres de la commission: M. Latulippe
(Frontenac) remplace M. Brochu (Richmond); M. Paul (Maskinongé) remplace
M. Cardinal (Bagot); M. Faucher (Yamaska) remplace M. Pearson (Saint-Laurent);
M. Bacon (Trois-Rivières) remplace M. Phaneuf (Vaudreuil-Soulanges); M.
Cornellier (Saint-Hyacinthe) remplace M. Saint-Germain (Jacques-Cartier) et M.
Jean Perreault (L'Assomption) remplace M. Leduc (Taillon).
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Qui remplace le PQ?
LE PRESIDENT (M. Pilote): Je signale leur absence.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Merci.
M. PAUL: Ce n'est pas suffisant de le noter comme cela, M. le
Président. Pour l'information de nos visiteurs, ce matin, je constate
une fois de plus le désintéressement total du Parti
québécois.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ils sont contre l'entreprise
privée.
M. LACROIX: Ils sont à la recherche d'argent pour leur caisse
électorale.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ils sont quelque part en Biélorussie.
Ils ont le goût du Q.
Compagnie de téléphone
du Nord du Québec Inc.
et Télébec Inc.
LE PRESIDENT (M. Pilote): A l'ordre, messieurs! Le député
de Yamaska sera le rapporteur de cette commission. J'inviterais à
présent M. Michel Racicot de la compagnie Téléphone du
Nord du Québec Inc. et de Télébec Limitée à
venir présenter son mémoire. M. Racicot.
M. RACICOT: M. le Président, M. le Ministre, MM. de la
commission, mon nom est Michel Racicot, avocat; je représente
Téléphone du
Nord du Québec inc. et Télébec limitée. A
mes côtés se trouve M. Claude Duhamel président des deux
compagnies et également vice-président à l'administration
de Bell Canada.
Nous avons également demandé à M. Gilles Tanguay,
ingénieur à la planification de Bell Canada d'être
présent. M. Tanguay était auparavant président de la
Corporation des ingénieurs du Québec.
Nos propos ce matin seront très brefs et traiteront
particulièrement des articles 1 a), 32 et 25 du règlement
à l'étude. Nous avons entendu, lors de la dernière
séance de cette commission, la prise de position de l'Association des
compagnies de téléphone indépendantes du Québec et,
dans son ensemble, Téléphone du Nord du Québec et
Télébec sont d'accord avec leur ligne de pensée. Pour se
situer dans le contexte, il est bon de rappeler que Téléphone du
Nord de Québec et Télébec ont des territoires
représentatifs du Québec non métropolitain parce que
Téléphone du Nord dessert la majeure partie du Nord-Ouest
québécois tandis que Télébec limitée a un
territoire morcelé qui s'étend de Mont-Laurier jusqu'aux
Iles-de-la-Madeleine en passant par La Tuque et plusieurs autres villes et
villages du Québec.
Nous sommes convaincus que la population québécoise doit
avoir accès à la câblodistribution ainsi qu'aux nouveaux
services audio-visuels qui sont en voie de développement à
l'heure actuelle.
Cette disponibilité de tous les services de
télécommunication pour l'ensemble de la population
présuppose une séparation des tâches entre les diffuseurs
et les transporteurs de communication, de manière à avoir la
meilleure allocation possible des ressources québécoises
disponibles tant en main-d'oeuvre qu'en capital et matériel.
Ceci implique également que les câblodistri-buteurs et les
transporteurs de communication s'acquittent de leurs obligations de services
publics, c'est-à-dire desservir tous ceux qui le demandent et ce
même s'il s'agit de services facultatifs et même si certaines
localités ne peuvent être desservies de façon rentable.
Ainsi dans le cadre de l'ordonnance no 8743 de la Régie des
services publics, les compagnies de téléphone qui lui sont
soumises, dépenseront d'ici 1975 environ $22 millions pour abaisser le
nombre d'abonnés en secteur rural à un maximum de quatre par
ligne. Il peut être intéressant de noter ce que la régie
disait dans son ordonnance: "Pour être plus précis, l'entreprise
communément appelée la compagnie de téléphone a un
devoir et des responsabilités sociales qui excèdent de beaucoup
ceux d'autres entreprises de communication qui par ailleurs, historiquement lui
font une drôle de concurrence en lui raflant pour ainsi dire des revenus
provenant de la clientèle la plus payante sans, par ailleurs, partager
aucun devoir en matière de services déficitaires, ni assumer un
égal fardeau dans le devoir social. Certaines ont des fardeaux que
d'autres n'ont pas. Ainsi, seules les sociétés
générales de téléphone sont tenues de fournir
obligatoirement le service partout sur le territoire et, par exemple, dans le
secteur rural.
D'autres entreprises ne partageant pas ce type d'obligations souvent
lourdes économiquement à supporter, sont cependant
autorisées à écrémer le secteur plus rentable dont
la totalité des revenus, toujours selon des taux plafonnés
d'ailleurs par l'autorité publique, sont nécessaires à
l'équilibre économique et financier desdites
sociétés". Fin de la citation.
Cette obligation de desservir toute la population laisse d'abord
supposer qu'une conception tarifaire de type service public s'applique de
façon générale et non seulement aux quelques 45 p.c. des
foyers québécois qui n'ont pas encore accès à la
câblodistribution et qui représentent les zones où un tel
service serait moins rentable sinon déficitaire, si on le
considère isolément. Or, au sujet des compagnies de
téléphone, M. le ministre L'Allier énonçait ce qui
suit en annexe à son livre vert: "Mais elles peuvent absorber la
technologie du câble.
Elles possèdent déjà l'infrastructure
nécessaire, l'accès aux capitaux à bon compte, la
puissance de pénétration dans un maximum de foyers et une
conception tarifaire qui rencontre déjà les exigences du bien
commun".
Une des caractéristiques principales de cette conception
tarifaire, c'est la répartition des taux sous forme de moyenne, ce qui
permet de facturer les abonnés du secteur moins rentable à des
taux raisonnables. Cette conception sous-entend que les territoires
accordés aux entreprises publiques soient assez vastes et
diversifiés pour permettre un tel système de
péréquation. Or, les compagnies de
télécommunication appliquent déjà cette conception
tarifaire au service téléphonique et pourraient fort
aisément le faire pour les services qu'elles loueraient en
exclusivité aux câblodistributeurs. En retour, ceci
éviterait la possibilité d'une trop grande disparité dans
les taux d'abonnement à la câblodistribution et ce, pour
l'ensemble de la population québécoise. Quant au contenu, notre
position concorde avec le livre vert: "II n'est pas question que les
sociétés de téléphone deviennent des entreprises de
câble. Le contenu ne les concerne pas".
L'article 6 du règlement à l'étude consacre ce
principe en interdisant, entre autres, aux compagnies de
télécommunication, qu'on appelle ici de téléphone,
d'exploiter une entreprise de câblodistribution. Nous sommes d'accord sur
cette prise de position qui reconnaît la vocation propre de chaque
entreprise mentionnée à l'article 6. Comme disait le ministre
lors d'une précédente séance de cette commission,
l'objectif de l'article 6 est de procéder à l'identification
d'une entreprise de câblodistribution autonome, en même temps
d'éviter des regroupements sur le plan éventuel du contrôle
de la propriété et, du même coup, des contenus. Cependant,
cette logique doit également s'appliquer aux entreprises de câblo-
distribution elles-mêmes. Il est en effet impérieux que les
câblodistributeurs concentrent leurs efforts à développer
la vocation qui leur est propre, soit la programmation, tandis que l'industrie
des télécommunications devra leur assurer tous les moyens de
transmission dont ils auront besoin pour s'acquitter de leurs fonctions. Cette
séparation des tâches entre les spécialistes du contenu et
les spécialistes du contenant offre, à notre avis, la ligne de
démarcation idéale pour départager les
responsabilités des câblodistributeurs de celles des transporteurs
de communication. A la lumière de ce que nous venons d'énoncer,
la définition de câblodistribution, à l'article 1 a), peut
prêter à équivoque. Certains pourraient en effet comprendre
que les transporteurs publics qui fournissent aux câblodistributeurs, aux
radio diffuseurs, aux télédiffuseurs les moyens de transmission
dont ces entreprises ont besoin font de la transmission de sons ou d'images
contenant la programmation et, à ce titre, exploitent une entreprise de
câblodistribution.
Selon cette interprétation, l'industrie de
télécommunication devrait alors cesser de fournir de tels
services par l'application de l'article 6.
Nous soumettons que cette équivoque peut être
dissipée en ajoutant, à l'article 1 a) du règlement
à l'étude, les mots suivants: "être propriétaire ou
fournir les installations nécessaires à l'émission, la
transmission ou la réception de sons ou d'images ne constitue pas en soi
de la câblodistribution."
L'industrie téléphonique et c'est un fait à
noter utilise déjà des câbles coaxiaux à des
fins de communication. Elle fournit, depuis les débuts de la
câblodistribution, une partie importante des moyens de transmission
requis à cette fin. Son réseau de câble coaxial sert
déjà pour la télévision en circuit fermé, la
télésurveillance et plusieurs autres services qu'il serait trop
long d'énumérer ici. Radio-Québec, cependant, utilise
actuellement le réseau de câbles coaxiaux de l'industrie
téléphonique pour relier ses studios aux réseaux des
câblodistributeurs à Québec et Montréal et, d'ici
1976, Radio-Québec nous confirme qu'elle atteindra ainsi plus de 85 p.c.
de la population québécoise.
L'industrie a par ailleurs mené une expérience comportant
le transport simultané sur les mêmes câbles coaxiaux de
communications téléphoniques, de signaux de
télévision et de données. Cette expérience s'est
avérée un tel succès qu'un réseau de ce genre est
maintenant exploité sur une base commerciale. L'application de ces
connaissances scientifiques pour fournir tous les services de communication,
qu'on parle de téléphone, de câblodistribution, de
télé-emplettes, de télésurveillance, et que sais-je
d'autres, permet d'affirmer que tous les Québécois pourront jouir
de ces services à un coût moindre si un seul réseau coaxial
intégré et polyvalent est construit.
Les services audio-visuels de l'avenir requerront un réseau qui
devra posséder toutes les
caractéristiques du réseau téléphonique
actuel: entre autres, un réseau qui puisse fonctionner dans les deux
directions et qui puisse être commuté, ce qui est fort
différent des réseaux actuels de câblodistribution. A cet
égard, Téléphone du Nord et Télébec sont
déjà disposées à louer leur réseau à
tout usager aux taux, prix, loyer et conditions que la Régie des
services publics voudra bien approuver. Téléphone du Nord et
Télébec croient que les moyens de transmissions requis pour la
câblodistribution, entre autres les câbles, les amplificateurs et
les fils d'entrée devraient être la propriété de
l'industrie des télécommunications.
A ceux qui craindraient que les compagnies de
télécommunication augmentent le coût de leurs services aux
câblodistributeurs ou exercent un contrôle indu, il est utile de
rappeler qu'en vertu de l'article 27 e) du règlement "tout contrat entre
un câblodistributeur et une compagnie de téléphone,
même non soumise à la juridiction de la régie, devrait
être approuvé par la régie".
L'article 32 veut reconnaître le principe que les installations
devraient appartenir aux compagnies de télécommunications. Mais,
pour le rendre plus complet et pour éviter tout dédoublement de
réseaux, de même que pour respecter le principe de la
séparation des tâches entre diffuseurs et transporteurs de
communications et également pour reconnaître l'obligation des
entreprises de télécommunication de fournir le service sur
demande, Téléphone du Nord et Télébec
suggèrent que cet article 32 soit modifié, comme il a
déjà été mentionné par l'Association des
compagnies de téléphone indépendantes du
Québec.
A cet égard, il est bon de reprendre le texte qui a
été suggéré comme suit: "Lorsqu'une entreprise
téléphonique dispose de câbles ou autres installations
propres à la transmission de sons ou d'images, la régie doit
ordonner leur utilisation par l'entreprise publique de câblodistribution;
lorsque de telles installations ne sont pas disponibles, l'entreprise
téléphonique desservant ce territoire devra en assurer la
disponibilité et la régie devra en ordonner l'utilisation par
l'entreprise publique de câblodistribution".
Finalement, le Téléphone du Nord et Télébec
recommandent de modifier l'article 25 et ceci dans le but de préciser
que l'abonné détermine l'endroit où le câble sera
installé à l'intérieur des lieux qu'il occupe, tandis que
ce droit appartient conjointement au propriétaire des lieux et au
propriétaire du câble lorsqu'il s'agit d'installations à
l'extérieur.
Par ailleurs, le texte suggéré reconnaît que le
déplacement se fera par "l'entreprise publique" plutôt que par
"l'entreprise publique de câblodistribution", ce qui permettrait à
l'entreprise propriétaire du câble d'effectuer ce
déplacement. La modification que nous suggérons à
l'article 25 se lirait comme suit: "Le câble situé dans les locaux
occupés par l'abonné est installé à l'endroit qu'il
désigne, le câble à l'extérieur desdits locaux est
installé à l'endroit agréé mutuellement par le
propriétaire des lieux et l'entreprise publique. Subséquement, si
l'abonné ou le propriétaire des lieux veut faire déplacer
le câble, ce déplacement doit être fait par l'entreprise
publique aux frais de l'abonné ou du propriétaire des lieux,
selon le cas".
En terminant, M. le Président, M. le ministre, MM. les membres de
la commission, nous voulons remercier cette commission de nous avoir permis de
faire valoir notre point de vue et nous sommes maintenant disponibles pour
répondre à toute question qui pourra nous être
posée.
LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable député de
Chicoutimi.
M.TREMBLAY (Chicoutimi): Je remercie Me Racicot de l'exposé qu'il
a fait au nom des sociétés dont il est procureur. J'aimerais lui
poser quelques questions parce que son mémoire parait comporter, aux
pages 3, 8 et 9, une certaine contradiction.
Me Racicot, vous établissez une distinction très nette
entre le contenant et le contenu. Vos entreprises de téléphone,
nous dites-vous, sont des contenants ou, si vous voulez, des instruments qui
servent à transmettre des signaux. Vous prétendez d'autre part,
et cela s'infère de votre mémoire, que les
câblodistributeurs sont aussi des contenants.
M. RACICOT: Je pense que nous avons prétendu que la vocation
propre et ce n'est pas notre prétention c'est ce qui
était énoncé au livre vert de M. L'Allier...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui.
M. RACICOT: Nous avons dit que la vocation réelle, la vocation
propre des câblodistributeurs était dans le contenu. Cela ne veut
pas dire que ce soit la vocation exclusive cependant.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Alors, dans cette optique-là, vous
feriez des câblodistributeurs, à toutes fins utiles, des radio
diffuseurs ou télédiffuseurs?
M. RACICOT: Je pense qu'on nous a parfois accusés de tenter de
contrôler cette industrie, et ce n'est pas à nous de placer dans
une catégorie ou dans une définition la vocation des
câblodistributeurs. C'est en ce sens-là que nous nous sommes
contentés de nous référer aux propos de M. le
ministre.
M.TREMBLAY (Chicoutimi): Oui. C'est fort commode, mais cela ne
règle pas le problème qui a surgit dans mon esprit quand aux
pages 8 et 9 vous faites la suggestion suivante: "Lorsqu'une entreprise
téléphonique dispose de câbles ou autres installations
propres à la transmission de sons ou d'images, la régie
doit ordonner leur utilisation par l'entreprise publique de
câblodistribution; lorsque de telles installations ne sont pas
disponibles, l'entreprise téléphonique desservant ce territoire
devra en assurer la disponibilité et la régie devra en ordonner
l'utilisation par l'entreprise publique de câblodistribution".
Alors, il y a une équivoque ici certainement dans votre
proposition puisque si, d'une part, vous revendiquez le privilège
d'être les instruments ou le contenant, comme vous avez dit, quelle
tâche sera dévolue aux câblodistributeurs qui devront
forcément devenir simplement des agents de diffusion responsables de la
programmation de ce qui serait transmis sur nos lignes
téléphoniques.
M. RACICOT: Je pense qu'il a été démontré,
et il le sera sans doute de plus en plus dans l'avenir, qu'il serait
économiquement non rentable d'avoir deux réseaux
parallèles, un pour la câblodistribution et un pour les
télécommunications dans leur ensemble. C'est en ce sens que nous
disons, nous, que dans l'intérêt public, il ne devrait y avoir
qu'un seul réseau coaxial, puisque le coût social associé
à ces services sera amoindri. Cela, c'est dans l'intérêt
autant des abonnés à la câblodistribution que des
abonnés au téléphone et aux autres services qui viendront
dans l'avenir.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui. Cela ne règle toutefois pas le
problème, mais le gouvernement aura à trancher cette question, la
régie aura à le faire, mais pour nous, les législateurs,
qui aurons à approuver un texte de règlements, c'est assez
difficile de comprendre. Les prétentions que vous avez d'être les
uniques instruments de transmission nous laissent perplexes quant à
l'avenir de la câblodistribution qui réclame, elle aussi, le droit
de faire ses installations à des coûts, dit-elle, moindres que
ceux que des entreprises comme Bell, par exemple, sont capables
d'établir.
M. RACICOT: Je pense que M. Duhamel aura peut-être quelque chose
à commenter sur les coûts qui auront été
cités par les câblodistributeurs.
M. DUHAMEL: Si vous me permettez, M. Tremblay, quant à la
première question, tout ce que l'on veut dire, c'est qu'il serait
préférable et à l'avantage du public qu'il n'y ait qu'une
entreprise qui s'occupe du contenant. Je crois qu'il resterait suffisamment de
vocation pour les câblodistributeurs, de par les règlements qui
ont été énoncés, en fait. Si vous voulez
réellement remplir les buts que vous vous fixez quant à la
culture, quant à l'aspect social puis éducatif. Eux s'occupent du
contenant. Je ne voudrais pas chercher leur vocation à eux. Tout ce que
l'on voulait dire de par l'article 102 de notre mémoire, c'est que s'il
y avait seulement une entreprise de télécommunication qui four-
nissait tous les moyens de transmission, autant pour la câblodistribution
que pour le téléphone et pour les services à venir, il en
résulterait un coût social qui serait moindre.
Si, par contre, les câblodistributeurs veulent d'abord être
des entreprises qui véhiculent les communications, comme ils l'ont dit,
qui va s'occuper réellement de la programmation? S'ils sont
réellement des entreprises de télécommunications, est-ce
qu'il devrait être interdit, d'après l'article 6, même de
faire de la câblodistribution?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Duhamel, ce matin, cela se complique et
cela devient confus. Les câblodistributeurs sont venus devant nous et ont
déclaré qu'ils voulaient être des véhicules de
transmission de signaux de toute nature, qu'ils n'avaient pas l'intention de se
substituer aux entreprises téléphoniques. Ils prétendent,
d'autre part, que, pour être des véhicules adéquats, ils
doivent être en mesure de faire eux-mêmes leurs installations, les
coûts de ces installations, nous ont-ils dit, étant moindres que
ceux qu'exigent actuellement les sociétés de
téléphone.
Vos sociétés, ce matin, nous disent que, non seulement
elles veulent être les véhicules, mais qu'elles sont prêtes
à accepter l'obligation qui leur serait faite par les pouvoirs publics
d'installer les systèmes de transmission partout, là même
où ils n'existent pas à l'heure actuelle, et de les mettre
à la disposition des câblodistributeurs.
On se demande alors quelle serait la place des câblodistributeurs.
Si les entreprises de téléphone fournissent toutes les
installations et tous les véhicules, les câblodistributeurs
devront certainement modifier leur vocation et devenir des programmateurs ou
des responsables du contenu. Alors, vous comprendrez que cela nous incite
à nous interroger. Je ne juge pas vos propositions au mérite;
j'essaie de concilier des attitudes qui ont été prises ici,
devant cette commission.
Alors, si vous revendiquez l'exclusivité du véhicule, les
câblodistributeurs, pour leur part, demandent d'avoir leurs propres
véhicules, parce que, disent-ils, ils les auraient à un
coût moindre s'ils les installaient eux-mêmes.
Alors, à supposer que le gouvernement décide d'acquiescer
à votre demande, il faudrait que le gouvernement indique aux
câblodistributeurs quelle serait leur nouvelle vocation dans l'optique
qui a surgi tout à coup au moment où j'entendais Me Racicot nous
faire la proposition qu'on trouve aux page 8 et 9 de votre mémoire.
M. DUHAMEL: Encore là, quant à la vocation, je croyais que
le gouvernement s'était fixé des buts et que les
câblodistributeurs avaient, quant au contenu, une responsabilité
et une vocation qui leur étaient propres. Les compagnies de
téléphone et de télécommunication,
aussi bien l'Association des compagnies indépendantes que
Télébec et Téléphone du Nord, voudraient vous dire
qu'elles sont convaincues qu'il serait dans l'intérêt public de
n'avoir qu'un seul transporteur commun. Le coût social serait
certainement moindre. Essayer de le prouver par des coûts ou des chiffres
comme ceux qui ont été cités jusqu'à maintenant, ce
serait peine perdue, je crois. Déjà des chiffres ont
été cités qui vont de $6,000 à $7,000, vous en avez
de $3,500 le mille et vous allez en voir de toutes les couleurs de ces
chiffres-là. A certains endroits ça pourrait monter à
$100,000 le mille, dans le centre de New York, par exemple.
Alors, sans le bénéfice d'un contre-interrogatoire
serré sur des coûts, on peut facilement se leurrer. A quel moment
de l'année cette construction a-t-elle été faite? Est-ce
que ce fut en hiver ou en été? Est-ce que ç'a
été une construction souterraine dans des conduits ou simplement
des fils enfouis? Est-ce que ç'a été une construction
aérienne? Quelle a été la proportion des frais
généraux qui ont été inclus dans leurs coûts?
Il y a une foule de facteurs et de critères qu'il faudrait
connaître avant d'accepter ou de rejeter quelque coût qui vous soit
cité ici. C'est pour ça que je ne voudrais pas en citer,
Téléphone du Nord et Télébec ayant une
expérience assez limitée dans le domaine; ces chiffres ne
vaudraient pas plus que simplement le chiffre que je pourrais vous citer.
Ce que je puis vous dire, par exemple, comme, je crois, le
ministère des Communications dans la politique qu'il a fait
connaître, c'est que si on se replace au début de la
téléphonie, ou encore si on regarde le téléphone,
on est convaincu aujourd'hui sans avoir à citer de coût que, s'il
n'y a qu'une entreprise de téléphone dans un territoire
donné, le coût est moindre. Si on a raison de dire qu'un
câblodis-tributeur doit avoir une licence dans un territoire et qu'elle
doit-être unique c'est dire qu'il ne doit pas y avoir de
concurrence c'est parce qu'ils sont convaincus, comme nous aussi, qu'il
ne doit y en avoir qu'une. Ils n'ont pas à le démontrer par des
coûts, c'est évident. En ce qui concerne les moyens de
transmission, on sait qu'avec le câble coaxial on se dirige vers une
certaine polyvalence qui va nous permettre d'en faire un usage
téléphonique, en plus de louer certains canaux, en plus de
permettre à des compagnies ou des entreprises qui le voudront de relier
une maison avec un ordinateur quelconque, en plus des autres services de
l'avenir. Nous sommes convaincus que tous ces services résulteront en un
coût moindre pour tous les usagers.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, Me Duhamel, je ne veux pas, moi
non plus, entrer dans cette question éminemment difficile et technique
des coûts. Nous avons eu des chiffres qui nous ont forcés à
faire des études comparatives. Il est assez difficile, comme vous
l'indiquez, d'arrêter des montants et de dire: ça coûte tant
et tant, selon les conditions de terrain, de climat, de saison, etc. Mais, il
nous a été dit également et je voudrais attirer
votre attention là-dessus et obtenir de vous une réponse
par des entreprises de câblodistribu-tion que des sociétés
téléphoniques étaient incapables de fournir les services
à l'heure actuelle, refusaient de les fournir ou encore prenaient un tel
temps à les donner que le service de câblodistribution s'en
trouvait compromis.
Or, vous affirmez dans votre mémoire qu'il est important
d'étendre à tout le territoire du Québec les services de
la câblodistribution. Est-il exact que la société Bell, par
exemple, soit incapable, à Montréal et dans la région de
Montréal, de fournir les services aux câblodistri-buteurs qui les
requerraient, et est-ce que les autres entreprises qui sont
représentées, et dont M. Racicot a été le
porte-parole, Téléphone du Nord de Québec, par exemple,
sont capables, à l'heure actuelle, techniquement, financièrement,
de fournir les services aux câblodistribu-teurs qui les
demanderaient?
M. DUHAMEL: Je ne connais pas de cas, que ce soit Télébec
ou Téléphone du Nord ou Bell, où la compagnie de
téléphone ou la compagnie de télécommunication a
refusé de fournir un service en autant que ceux qui en faisaient la
demande étaient prêts à respecter les conditions d'un
contrat qui avait déjà été approuvé par leur
association.
M.TREMBLAY (Chicoutimi): Vous comprenez, M. Duhamel, que ça c'est
une réponse commode aussi. Il nous a été affirmé
catégoriquement que des entreprises téléphoniques quelles
qu'elles soient n'étaient pas capables de fournir les services ou se
comportaient de telle façon qu'on retardait indéfiniment le
moment d'apporter les services là où les entreprises de
câbles les exigeaient, ce qui a disposé, c'est ce qu'on nous a
affirmé ici, les câblodistributeurs à se munir
eux-mêmes d'installations appropriées.
Evidemment, moi, je ne puis pas entrer dans le détail. Je ne sais
pas ce qui se passe entre vous. Est-ce que vous avez eu des discussions avec
les câblodistributeurs? Est-ce que vous continuez d'en avoir? Est-ce
qu'il y a eu des ententes? Là, je n'en sais rien. Il s'agit de
régie interne, mais avant que de nous prononcer sur l'à-propos
d'une réglementation, nous entendrons justement toutes les parties en
toute objectivité. Moi, je ne fais ni votre procès ni celui des
câblodistributeurs, mais nous essayons de concilier des versions qui,
à bien des égards, sont contradictoires.
M. DUHAMEL: Je ne voudrais pas non plus prendre avantage du fait que les
câblodistributeurs n'auraient peut-être pas la chance de
répliquer. Voici la façon dont je vois les choses, c'est
peut-être un peu simpliste. C'est un peu la situation de quelqu'un qui a
un bail et refuse de le
renouveler et à qui le propriétaire dit: Ecoutez un peu,
on va vous garder en attendant d'en venir à une entente. Cependant, ne
me demandez pas de bâtir une chambre additionnelle. Vous savez, c'est un
peu la même situation. C'est une question que les
câblodistributeurs, qui se sont plaints de cette situation, ont
carrément refusée. Après avoir été
invités à renouveler leur contrat, ils ont décidé
de ne pas le faire pour des raisons qui sont leurs. Je ne veux pas leur dire
qu'ils ont tort ou raison, mais en réalité, il s'agit simplement
de leur refus de signer un nouveau contrat. Nous continuons quand même
à donner du service là où on en fournissait. Cependant, on
a dit: Ecoutez un peu, si vous voulez que l'on fasse des exten-tions,
renouvelons le contrat avant qu'on continue de bâtir ou de construire de
nouvelles facilités. Les raisons pour lesquelles ils ne veulent pas
signer le contrat sont leurs, mais s'ils acceptaient jamais de signer un
contrat avec Bell, le contrat qui a été négocié
avec l'association qui les représente, il n'y aurait aucune
difficulté. D'ailleurs, tous les câblodistributeurs de l'Ontario
ou ailleurs, dans le territoire que l'on dessert, se sont conformés
à la signature de ce contrat.
Ce qui rend la difficulté plus grande pour Bell, c'est justement
le fait que si on acceptait de continuer sans contrat avec un
câblodistribu-teur pendant que les autres en ont signé un,
finalement, les gens diraient: Cela ne sert à rien de signer des
contrats parce qu'on a les mêmes privilèges, on peut avoir les
mêmes services, tout ça, sans contrat aussi bien qu'avec un
contrat.
M.TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, M. Duhamel, grosso modo, si on
résume votre position, vous voulez devenir les véhicules
exclusifs de la transmission des signaux.
M. DUHAMEL: C'est bien cela.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est bien cela. Comme les
câblodistributeurs ont la prétention d'être eux aussi des
véhicules de signaux, sans vous prononcer sur leur vocation, mettez-vous
à notre place. Quelle vocation allons-nous assigner aux
câblodistributeurs? Celle d'être, si vous me permettez cette
expression anglaise, les dispatchers des émissions, les orienteurs des
émissions? Autrement, ils n'auraient plus de raison d'être, nous
ont-ils dit. Notre objectif est un service aux citoyens par tout le territoire
du Québec, un service de qualité et à un coût
minimum. C'est notre objectif. Que ce soit vous ou les câblodistributeurs
ou n'importe quelle entreprise qui le donne, l'objectif du gouvernement serait
atteint si on répondait aux conditions que je viens de vous
indiquer.
Mais il y a un conflit, c'est bien clair, entre les
câblodistributeurs et les entreprises téléphoniques. Si on
devait vous donner l'exclusivité de ce véhicule de transmission,
il faudrait que les câblodistributeurs changent leur optique et soient,
à toutes fins utiles, des gens responsables d'un contenu. Contenu qu'ils
n'auraient peut-être même pas la possibilité
d'établir puisqu'il leur suffirait simplement de bâtir des
calendriers d'émissions, c'est tout, prenant la programmation à
droite et à gauche. Alors, vous voyez la difficulté dans laquelle
nous sommes. C'est pour ça que je vous demande: Est-ce que votre
prétention d'être exclusivement propriétaire des
entreprises de transmission, c'est une volonté ferme et c'est ce que
vous demandez au gouvernement?
M. DUHAMEL: Oui. Cependant, j'irai même plus loin. Vous me
demandez si je suis convaincu justement d'après la question que
vous posez que ce serait à l'avantage des
Québécois. Je vous répondrai sans aucune difficulté
que je suis convaincu que le coût social serait moindre pour les services
que vous avez. Là où je suis surpris, c'est de vous entendre dire
qu'en ce qui concerne le contenu, il resterait si peu à faire.
D'après moi, c'était là l'importance de la
câblodistribution pour le Québec. Sur la question
éducative, sur la question sociale, sur la question culturelle, je
croyais que c'était là qu'il y avait beaucoup de boulot à
faire. Nous autres, on ne connaît rien là-dedans. Si les autres
voulaient s'occuper de leur boulot, je pense que les objectifs du Québec
seraient mieux atteints; cela coûterait meilleur marché s'il y
avait seulement un transporteur commun. Pour aujourd'hui et pour l'avenir, je
suis convaincu que c'est dans l'intérêt du public. Je me demande
même si c'est nécessairement dans l'intérêt des
compagnies de téléphone de se mettre à blanc, de s'exposer
à câbler peut-être 40 p.c. du territoire du Québec,
où on peut dire que c'est peut-être le petit lait, au point de vue
économique, c'est-à-dire de la construction rurale et tout
ça, sans savoir si au moins les 55 p.c. où il y a
déjà des câbles ne sont pas aussi changés et que
dans les secteurs qui sont déjà câblés, on n'en
viendra pas à une transition au cours des dix, douze ou quinze
prochaines années pour que l'on revienne réellement à la
question d'avoir seulement un transporteur commun et que ceux qui s'occupent du
contenu fassent leur travail dans ce sens.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Duhamel, ce que vous dites là,
évidemment, tout le monde le pense. Vous comprenez que le
problème du contenu nous préoccupe au plus haut point. Mais nous
avons entendu par ailleurs les radiodiffuseurs et télédiffuseurs
qui, eux aussi, revendiquent l'exclusivité en certains domaines,
notamment en celui du contenu. Alors, il va être assez difficile pour le
ministre et le gouvernement de partager les responsabilités, parce que
les câblodistributeurs ont à faire un choix pour le contenu des
émissions, ils ont à
faire un choix dans un ensemble de programmes. Est-ce que ce sera leur
seule tâche? Je ne sais pas. J'aimerais ici poser une question au
ministre, à la lumière de ce que nous venons d'entendre, à
savoir comment il conçoit la vocation des câblodistributeurs dans
l'hypothèse où il n'y aurait qu'un transporteur.
M. L'ALLIER: M. le Président, avant de répondre à
la question du député de Chicoutimi, j'aimerais, s'il me le
permet, poser, moi aussi, un certain nombre de questions à M. Duhamel et
à M. Racicot. Relativement à la question du député
de Chicoutimi, la position que nous avons prise jusqu'ici était
précisément de faire en sorte que le règlement ne
crée pas d'obligation réglementaire à la Régie des
services publics de trancher a priori en faveur de l'une ou l'autre, à
savoir les entreprises de télécommunication et les entreprises de
télédistribution, précisément parce que nous
appuyons notre position sur le fait que ces entreprises, dans le domaine du
câble coaxial, sont à leur début en définitive, et
que les entreprises de télédistribution comme les entreprises de
télécommunication ou de téléphone ont
commencé à développer des réseaux de câbles
coaxiaux. Il nous paraît que sur le plan territorial, comme sur le plan
des zones urbaines en particulier, les situations peuvent varier à
l'infini. Il nous paraît que les compagnies de câble à
certains endroits donnés peuvent souhaiter que le réseau coaxial
nécessaire â leur fonctionnement appartienne à une
société de télécommunication, alors qu'ailleurs,
d'autres sociétés de câblodistribution peuvent souhaiter,
sur le plan économique, être elles-mêmes
propriétaires. Cette pondération qui doit exister entre les deux,
il ne me parait pas possible de la faire dans un règlement d'application
générale, dans un règlement qui, en fait, obligerait la
régie à opter automatiquement avant même d'avoir entendu
les parties pour l'une ou l'autre catégorie d'entreprises.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Mais vous n'avez pas dit que la régie
n'avait pas le devoir de trancher?
M. L'ALLIER: Non, absolument pas.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Parce que l'article 32 l'oblige.
M. L'ALLIER: Je crois que la pondération la plus intelligente qui
puisse être faite peut l'être par la Régie des services
publics, compte tenu du fait qu'elle pourrait faire des audiences cas par cas
et, sur le territoire, dans une première phase au développement.
Il n'est pas impossible qu'après une, deux ou trois années
d'expérimentation, on se rende compte qu'il se développe
effectivement de par le consensus des entreprises ou de par les
décisions de la régie une orientation en faveur de l'une ou
l'autre catégo- rie d'entreprises, mais à la suite d'expertises
et de preuves faites devant la Régie des services publics.
La commission parlementaire n'est pas un lieu où on peut
effectivement établir des preuves techniques, et c'est pourquoi je
souhaite que le règlement soit suffisamment précis pour
éviter de créer, non seulement des présomptions, mais des
obligations réglementaires qui trancheraient au préalable une
question qui est beaucoup plus complexe qu'on peut l'imaginer à la
simple lecture des règlements.
Cela m'amène à poser une question à M. Duhamel, si
vous me permettez, M. le Président. Quelle est, actuellement, la
proportion de vos réseaux de fils ou de câbles qui pourrait
immédiatement ou dans les deux ans, par exemple, servir aux fins des
entreprises de câblodistribution et en même temps à vos
propres fins?
M. DUHAMEL: Je pense que M. Tanguay, ici, qui est ingénieur
à la planification à long terme, pourrait, peut-être,
répondre à cette question. Mais, si je la comprends bien, vous
demandez à quel moment est-ce que l'on pourrait faire un usage pratique
de la polyvalence du câble coaxial. Est-ce bien ça?
M. L'ALLIER: C'est exact. Voyez-vous, les entreprises de câble
nous ont dit: Dans l'état actuel du développement technologique,
les installations que peuvent nous fournir à court terme les entreprises
de télécommunication et de téléphone, ne sont pas
adéquates pour répondre à nos besoins comme
câblodistributeurs. Deuxièmement, on nous a dit aussi que les
installations techniques, qui sont possibles à court et à moyen
termes, compte tenu du développement technologique et, même au
sein des entreprises de télécommunication, ces installations que
l'on pourrait faire, ne correspondraient pas au potentiel de
développement de la télédistribution qui est
différent de celui de la téléphonie.
M. DUHAMEL: Oui.
M. L'ALLIER: Dans cette optique, vous prétendez que le
câble coaxial peut avoir un usage polyvalent et multiple...
M. DUHAMEL: C'est ça.
M. L'ALLIER: ... et qu'il peut en même temps satisfaire aux
besoins prévisibles des entreprises de télécommunication
et satisfaire en même temps aux besoins prévisibles et actuels des
entreprises de télédistribution. C'est donc le sens de ma
question. Quelle est actuellement la proportion, ou la partie, ou le
pourcentage de vos installations, de vos réseaux qui pourrait,
d'après vous, satisfaire en même temps vos besoins et ceux de la
télédistribution?
M. DUHAMEL: M. Tanguay.
M. TANGUAY: Depuis quelque temps, les compagnies de
télécommunication font des expériences assez exhaustives
sur l'emploi du câble coaxial comme outil polyvalent de transmission de
télécommunications.
Dans tout le territoire du Québec je parle pour la
compagnie que je représente comme employé ici nous avons
environ 4,300 milles de câble coaxial qui peut se prêter à
la transmission simultanée de câblodistribution ou de
câblodiffusion et de d'autres signaux de télécommunication.
J'aimerais ici vous mentionner deux choses qui fonctionnent dans le moment: Par
exemple, dans la région de Montréal, entre deux centrales
téléphoniques, sur le même câble coaxial, nous
transmettons à la fois les signaux de Radio-Québec, nous
transmettons 96 conversations téléphoniques ordinaires, nous
transmettons aussi des signaux de télésurveillance et nous
transmettons finalement des données. Cela fonctionne très bien.
Nous avons même réussi à réduire dans la
transmission des données, la marge d'erreur qui est inhérente
à tout système de transmission semblable.
M. LEGER: Toujours sur le même câble coaxial?
M. TANGUAY: Sur le même câble coaxial qui est gros comme
ça.
M. L'ALLIER: Juste une sous-question sur ce point. Si l'entreprise de
télédistribution vous demandait les 16 ou 18 canaux dont elle a
besoin pour fournir le service qu'elle offre à la population, est-ce que
le câble coaxial, dont vous parlez, qui me semble être le plus
développé, pourrait maintenant supporter ce service
supplémentaire?
M. TANGUAY: Oui, aisément, parce qu'aujourd'hui, avec les
équipements de lignes, les équipements terminaux, qui sont
utilisés, on peut aller facilement jusqu'à 30 canaux.
Alors, la capacité d'un câble qui est cela ici
c'est 30 canaux de télévision ou son équivalent.
Alors, par exemple, vous pourriez, pour trouver le nombre total de
conversations téléphoniques à transmettre sur cela,
multiplier 144 par 30, ce qui est quand même un chiffre effarant. Pour
vous donner une idée très réaliste de ce que cela veut
dire, entre des centraux téléphoniques à haute
densité comme dans la région de Montréal, ce sont les
câbles que nous posons. Il y a 3,000 paires dans cela. Il y a 6,000 fils
de cuivre; c'est très pesant et cela coûte très cher. Un
câble coaxial, comme celui qui circule, peut en remplacer deux. Alors,
quand on parle d'économies substantielles qui rapportent aux citoyens au
point de vue social, au point de vue des télécommunications,
c'est ce qu'on veut dire. Cela, c'est la première expérience.
La deuxième expérience qui débutera très
bientôt, ce sera la transmission directement chez des abonnés, des
résidences et des bureaux, au moyen du câble coaxial, de ce qu'on
appelle la conversation téléphonique ordinaire ou d'autres
services téléphoniques dans les bandes de fréquence
très basses, en même temps que les signaux vidéo. Cette
expérience qui débutera très bientôt et se
poursuivra pendant peut-être un an a pour but de regarder tout l'aspect
technique de la question, de voir quelles en sont les difficultés et
aussi de déterminer les coûts pratiques, les coûts
réalisables pour des installations dans l'avenir.
Evidemment, le problème qui se pose au tout début,
lorsqu'on emploie des équipements en quantité très
limitée pour la première fois, c'est le coût terrible, en
réalité, de la première installation, mais, lorsqu'on
multiplie ces installations et le nombre de clients qui sont desservis par des
milliers et des milliers, cela baisse, évidemment. Un exemple assez
typique, c'est qu'on parle chez nous de fournir un réseau de
câblodistribution pour tous les signaux qui doivent être transmis,
non pas simplement pour le vidéo. Ce sera un réseau
bidirectionnel, un réseau commuté où les clients
abonnés pourront se rejoindre d'un point à l'autre, un peu comme
on fait aujourd'hui avec les signaux de télécommunications.
Alors, cela prendra une caméra dans chacune des résidences, dans
chacun des bureaux, caméra qui sera peut-être très petite,
mais dont le coût ne saurait probablement, à la longue,
dépasser l'équivalent d'un appareil téléphonique
usuel, peut-être un peu plus, peut-être dans les $50 ou $60. Il
faudrait quand même se souvenir qu'il y a 10 ans un appareil enregistreur
comme une caméra de télévision, c'était quelque
chose dans les milliers et les milliers de dollars.
Alors, le but de ces expériences, c'est de faire ces
choses-là et de trouver l'équipement de meilleure qualité,
de pousser la recherche et d'essayer d'abaisser les coûts pour que cela
devienne rentable pour les citoyens en général, les
abonnés en général.
M. L'ALLIER: Maintenant, vous nous parlez là d'un
développement de pointe qui, je le présume, se situe au niveau de
Bell Canada.
M. TANGUAY: Au niveau des compagnies de
télécommunications.
M. L'ALLIER: Mais est-ce Bell Canada comme telle qui procède?
M. TANGUAY: Dans ce cas-ci, oui.
M. L'ALLIER: Quel serait le délai nécessaire à
l'implantation de services qui pourraient répondre aux besoins
immédiats des câblodistri-buteurs en termes de canaux, 16, 30
éventuellement?
M. TANGUAY: Pour 30 canaux, il n'y aurait aucun problème pour
poser les équipements et pour le faire fonctionner immédiatement.
C'est plutôt du côté polyvalence, combiner le réseau
de télécommunications à basses fréquences.
M. L'ALLIER: Oui. C'est cela.
M.TREMBLAY (Chicoutimi): Mais dans quel délai par tout le
territoire du Québec? Est-ce que ce serait immédiatement, comme
vous le dites?
M. TANGUAY: Dépendant de questions financières qui ne sont
pas réellement de mon ressort, à mesure qu'on peut obtenir le
câble et les équipements, on peut les poser.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Mais à supposer qu'une entreprise vous
fasse la demande pour la région de Chicoutimi, de Hull, etc., est-ce que
demain vous êtes en mesure de donner le service qu'on demande?
M. TANGUAY: Demain, non, si le câble n'est pas installé. Si
le câble doit être installé en dedans d'une période
de quelques mois, le temps de faire la conception du système de
transmission, d'obtenir les équipements, de les poser.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que semblable demande vous a
déjà été présentée?
M. TANGUAY: Je ne pourrais pas répondre. Je vais demander
à M. Duhamel de répondre à cette question, si vous le
permettez.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui.
M. L'ALLIER: M. le Président, vous me permettrez d'interrompre 30
secondes les travaux de la commission pour souligner la présence, dans
la salle, de représentants de la délégation de la
Commission spéciale des comptes publics de l'Assemblée nationale
française, M. Baral, M. Guillermin, M. Desprez, M. Tessier qui sont
parmi nous et qui assistent à nos travaux parlementaires.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Nous nous joignons, M. le Président, au
ministre pour saluer nos collègues français, en souhaitant qu'ils
tirent partie de nos séances pour faire rapport à leur
gouvernement et apporter à notre ministre l'argent qui lui manque.
LE PRESIDENT (M. Pilote): Alors M. Duhamel, si vous voulez fournir la
réponse.
M. DUHAMEL : Je ne vois pas d'empêchement, comme M. Tanguay le
disait. Si un câblodiffuseur nous demandait de faire la pose de
câbles en quelques semaines, le temps de l'acheter, de le poser, il n'y a
pas de problème du tout, d'ici quelques mois.
M. RACICOT: Avec votre permission, M. le Président, on faisait
allusion tantôt à Bell Canada où il y avait des
installations coaxiales, je ne pense pas que M. Tanguay soit au courant de ce
fait, mais je suis personnellement au courant que dans le territoire de
Téléphone du Nord, entre Val-d'Or, Chibougamau et
Lebel-sur-Quévillon, il y a un câble coaxial d'installé qui
sert à la transmission de conversations téléphoniques
entre ces centres. Je voulais porter ces faits à la connaissance de la
commission.
M. LEGER: II y a des possibilités techniques, d'après ce
que vous dites, pour installer le câble coaxial, sur le territoire
couvert par les deux compagnies que vous représentez, le
Téléphone du Nord et Télébec, et celui couvert par
Bell Téléphone. Cela recoupe quel pourcentage du territoire de la
province et quel pourcentage des abonnés totaux du Québec?
M. RACICOT: Je peux vous donner... M. LEGER: ... incluant Bell
Canada...
M. RACICOT: Bell Canada a environ 3 millions d'abonnés au
Québec. Quant à Téléphone du Nord, il avait, le 31
décembre 1972...
M. LEGER: 93,000.
M. RACICOT: Téléphone du Nord, 40,123 abonnés, et
Télébec 31,848 abonnés. Cela représente la grosse
majorité des abonnés. Au point de vue du territoire, si vous me
permettez de le décrire grosso modo, Télébec
Limitée dessert les Iles-de-la-Madeleine, Mont-Laurier, La Tuque et une
multitude de villes et villages à partir de Bécancour en montant
jusqu'à nos régions de Québec. Quant à
Téléphone du Nord, cette compagnie dessert tout le nord-ouest
québécois, et l'autre partie est couverte par Bell,
c'est-à-dire le sud de la province. Maintenant, il reste pour certaines
petites compagnies des pochettes de territoire et il reste, évidemment,
toute la partie du territoire de la Gaspésie, de la Basse
Côte-Nord qui est desservie par Québec
Téléphone.
M. LEGER: En pourcentage, les trois compagnies, c'est-à-dire Bell
et ses deux filiales, en pourcentage des abonnés, des territoires,
avez-vous un chiffre, est-ce les 4/5?
M. RACICOT: Si vous me permettez de continuer...
M. LEGER: 89?
M.DUHAMEL: 89 p.c, 90 p.c. des téléphones dans le
Québec sont Bell, Télébec et Téléphone du
Nord. Quant au territoire, au point de vue géographique, je pense que
c'est peut-être 60 p.c. ou 50 p.c.
M. LEGER: Voici dans les difficultés que nous avons pu remarquer
chez les câblodiffuseurs et les distributeurs. Il y avait le
problème du fameux contrat que vous avez à signer avec la
compagnie Bell, et je présume que c'est le même contrat ou
à peu près avec Télébec et Téléphone
du Nord. Ces contraintes-là, est-ce qu'elles sont des conditions sine
qua non à l'entente entre les câblodistributeurs et les compagnies
de téléphone?
M. DUHAMEL: Oui. Il n'y a qu'un genre de contrat, et il est le
même pour tous les câblodistributeurs du Québec et de
l'Ontario. C'est un contrat qui a été négocié,
d'ailleurs, qui date de 1952, 1953, qui a été modifié au
cours des années après des discussions, et puis finalement,
chaque fois, le comité de négociation qui représentait
l'Association le recommandait à ses membres. Ces membres
n'étaient pas tenus nécessairement de l'accepter ou de ne pas
l'accepter. Il n'y avait rien pour eux qui les liait parce que l'Association
négociait en leur nom.
M. LEGER: Est-ce que vous voyez quand même un problème
actuellement, du fait que la régie...
LE PRESIDENT (M. Pilote): Je crois que le ministre des Communications
avait la parole. Vous avez posé une question
supplémentaire...
M. L'ALLIER: Question sur le plan technologique, et j'aimerais, si le
député de Lafontaine est d'accord...
M. LEGER: II me restait juste deux questions, je vais terminer, M. le
ministre. Me permettez-vous de terminer mes deux questions? Etant donné
que l'article 32 recommande aux compagnies de câble d'utiliser ce qui
existe déjà, c'est-à-dire vos facilités, d'une
part, et que la régie du Québec aurait autorité sur le
domaine des communications dans le câble, et que d'un autre
côté, elle n'aurait, la régie, de contrôle que sur
Télébec et Téléphone du Nord, et non pas sur le
Bell Téléphone, est-ce que vous ne voyez pas un imbroglio assez
difficile à démêler devant ce conflit qui existe?
M. DUHAMEL: Je pense que cela pourrait quand même se faire parce
que la Régie pourrait indiquer que ces installations doivent être
utilisées selon des termes et conditions qu'elle devra approuver. Alors
si la compagnie Bell, par exemple, n'était pas en mesure de
répondre aux exigences énoncées par la Régie des
services publics, il ne pourrait pas y avoir de contrat et le
câblodistributeur pourrait faire ce qu'il veut; mais il ne serait pas
tenu par la régie de se servir des installations, à moins que ce
ne soit à des conditions convenables et acceptables à la
Régie des services publics.
M. RACICOT: Avec votre permission, M. le Président, juste pour
renchérir sur la réponse de M. Duhamel pour le
député de Lafontaine, vous avez fait état de certaines
restrictions dans l'utilisation du câble. Je dois vous dire que les
contrats dont on a fait état auparavant devant la commission et qui
disaient que l'on restreignait, que Bell, en tout cas, restreignait les
câblodistributeurs à leur fonction de transmettre uniquement des
émissions de télévision conventionnelles, ces contrats
sont les contrats qui sont expirés. On parlait de contrats de 1957
à 1962, ce sont des contrats de 10 ans; à ma connaissance ils
n'ont pas été renouvelés. Par ailleurs, les contrats qui
sont offerts aux câblodistributeurs depuis 1968, et en particulier le
contrat qui est actuellement offert, permettent aux câblodistributeurs
d'offrir tous les services qui ont été mentionnés lors de
leur présentation audio-visuelle. J'ai personnellement pris le texte des
contrats et l'ai comparé avec les dix services qui y étaient
mentionnés, et tous ces services peuvent actuellement être fournis
en vertu des contrats. Alors je vois mal la difficulté pour les
câblodistributeurs de fournir ces services et de dire qu'une compagnie de
téléphone quelle qu'elle soit contrôle leur
développement.
M. L'ALLIER: D'accord. M. le Président, ma question s'adresse
soit à M. Duhamel, soit à M. Racicot ou à M. Tremblay.
Est-ce que vous avez actuellement des contrats ou des ententes qui font que
vous installez des câbles pour les sociétés de
télédistribution?
M. DUHAMEL: Si nous avons des contrats actuellement?
M. L'ALLIER: Si vous installez actuellement des câbles pour les
sociétés de télédistribution?
M. DUHAMEL: Oui.
M. L'ALLIER: Est-ce que ces câbles sont les mêmes, non pas
technologiquement mais d'utilisation conjointe avec le câble
téléphonique ou si vous installez un deuxième fil?
M. DUHAMEL: Un deuxième câble.
M. L'ALLIER: Vous installez deux câbles?
M. DUHAMEL: Deux câbles. Si un câblodistributeur nous
demande de lui fournir le service de câblodistribution, on va installer
un câble coaxial pour son usage, d'après le contrat actuel.
M. L'ALLIER: Oui mais il n'y a pas actuellement polyvalence
d'utilisation d'un équipement?
M. DUHAMEL: Non, pas actuellement.
M. L'ALLIER: Alors la question du député de Chicoutimi est
la mienne et elle était la
suivante: Pour quand cette polyvalence d'une façon pratique et
concrète? A quel moment sera-t-il rentable pour vous,
indépendamment de la demande qui vous est faite d'installer, au
même coût ou à un coût inférieur, l'instrument
polyvalent qui est la base, en fait, de la réclamation
d'exclusivité que vous avez?
M. DUHAMEL: A l'heure actuelle on a des câbles polyvalents qui
réunissent deux centraux à Montréal mais pour dire que
nous avons, dans un même câble, un service de
câblodistribution et qu'il serve en même temps à la
téléphonie, non.
M. L'ALLIER: En d'autres mots, ce qui s'installe maintenant, ce
câble parallèle qui s'installe maintenant est, en gros, le
même que la société de câble installe pour
elle-même lorsqu'elle a les moyens financiers de le faire?
M. DUHAMEL: C'est exact.
M. L'ALLIER: Vous faites pour elle actuellement le travail qu'elle
ferait si elle avait le potentiel économique ou technologique pour le
faire? C'est la situation présente.
M. DUHAMEL: C'est cela, oui.
M. RACICOT: M. le ministre, cette situation se justifie par la nature
des contrats actuellement que les câblodistributeurs ont. Il s'agit de
contrats de type partiel dans lesquels le câble appartient aux compagnies
de télécommunication, mais les amplificateurs, eux, appartiennent
aux câblodistributeurs. C'est la raison pour laquelle les compagnies de
télécommunication ne peuvent pas se servir de ces câbles
pour l'application de la polyvalence.
Ce qui arrive c'est que les compagnies de
télécommunication ont des bouts de câble entre des
amplificateurs qui appartiennent aux câblodistributeurs, ça c'est
en vertu des contrats partiels. Peut-être que M. Tanguay aurait quelque
chose à dire sur l'aspect technique.
M. TANGUAY: M. le ministre, un câble est, de par sa nature,
polyvalent; il passera ce que l'on voudra bien lui transmettre; ce qui fait que
le câble peut servir à d'autres choses que la transmission, la
retransmission de signaux vidéo, ce que l'on voudra bien lui mettre: les
amplificateurs de ligne, les amplificateurs de terminaison, les
équipements de protection automatique qui en font réellement un
système non seulement polyvalent mais sûr.
Au point de vue des télécommunications, ce n'est pas tout
de donner un service d'un point à un autre ou d'un point à une
masse de points; il faut aussi, quand même, s'assurer de la permanence et
de la fiabilité des circuits. Cela n'existe pas dans le moment pour la
câblodistribution telle qu'on la connaît et cela devra exister dans
l'avenir comme ça existe aujourd'hui pour les systèmes de
télécommunications.
Alors, la polyvalence se décrit plus par cet ensemble de choses
que simplement en affirmant qu'on aura le service de téléphone ou
de transmission de données avec le ou les signaux vidéo.
M. L'ALLIER: Maintenant, le dédoublement coûteux que vous
craignez... Sur un autre plan des télécommunications, au niveau
du réseau de micro-ondes, est-ce qu'il existe actuellement un
dédoublement partiel entre les services fournis par les
sociétés de télécommunications, de
téléphone et CN-CP, par exemple?
M. TANGUAY: Le réseau CN-CP sur microondes ou le faisceau
hertzien existe, oui, aussi comme réseau parallèle à celui
des systèmes de télécommunications à travers le
pays.
M. L'ALLIER: Est-ce que, dans votre esprit, ça constitue un
dédoublement qui pourrait cesser ou si c'est un dédoublement
normal et économique?
M. TANGUAY: Pour nous, c'était un dédoublement qui
n'était pas nécessaire au moment où le réseau CN-CP
a décidé de construire ce réseau de faisceaux
hertziens.
M. L'ALLIER: Et maintenant?
M. TANGUAY: Encore la même chose. Moi, comme ingénieur, je
ne changerai pas d'idée; c'est encore la même chose.
M. L'ALLIER: Et dans l'avenir prévisible, la même
chose?
M. TANGUAY: Oui.
M. L'ALLIER: II y a donc dédoublement, quant à vous,
d'équipement pour ce qui est des réseaux de micro-ondes.
M. TANGUAY: II y a dédoublement en termes de réseau de
micro-ondes, en termes de coûts. Evidemment, celui qui est
propriétaire d'un deuxième réseau doit assumer tous les
coûts et frais d'installation, de construction, d'entretien, de
réparation de ce réseau de micro-ondes et faire payer les
abonnés qui, en fin de compte, sont les mêmes que les
abonnés des autres compagnies de télécommunications, pour
un même territoire.
M. L'ALLIER: Cela déborde un peu le cadre, mais ça permet
d'expliquer ça me permet de comprendre, quant à moi, en
tout cas les dangers éventuels d'un dédoublement. Est-ce
que le dédoublement des réseaux de microondes, dans votre esprit,
comporte des coûts supplémentaires considérables pour la
société et l'utilisateur ou si c'est, en fait,
négligeable?
M. TANGUAY: Cela comporte des coûts supplémentaires qui
peuvent être exorbitants.
Le problème avec un deuxième ou un troisième
réseau parallèle, c'est de le remplir. Tout réseau qui
n'est pas rempli est un investissement de capital qui coûte
énormément cher et qu'on doit, quand même, repayer à
des taux d'intérêts qui sont assez élevés.
Pour la deuxième compagnie qui vient s'installer et qui essaie de
gruger dans le même contenant d'abonnés, c'est quand même
assez difficile. Si elle réussit à le faire, elle le fait aux
dépens de la ou des deux premières qui existaient
déjà et aux dépens des abonnés de ces deux
premières compagnies.
M. L'ALLIER: Et les réseaux de microondes actuels, dans votre
esprit, toujours pour poursuivre mon exemple, ne sont pas sur le point
d'être remplis de façon à atteindre une rentabilité
sociale, disons, pour l'utilisateur?
M. TANGUAY: Vous parlez des nôtres? M. L'ALLIER: De CN-CP et
Bell.
M. TANGUAY: Je ne connais pas l'état de contenance ou le contenu
des réseaux de micro-ondres de CN-CP, mais nous opérons le
nôtre à la plus grande capacité possible, qui est
très près du maximum.
M. L'ALLIER: Mais, si vous opérez à pleine
capacité, il n'y a pas dédoublement et, à ce
moment-là, on a besoin d'un deuxième réseau.
M. TANGUAY: On peut toujours ajouter, à un système qui
existe, des amplificateurs de lignes qui font que sa capacité devient
plus grande.
Quand le réseau de micro-ondes a été
inauguré en 1958, c'était un réseau qui pouvait
transporter six canaux de micro-ondes ou, si vous voulez, pour que ça
fasse un peu image, six voies de télévision. Aujourd'hui, on est
rendu à dix-huit. Evidemment, ces voies ne servent pas toutes à
la télévision; elles servent au transport des conversations
téléphoniques d'un point à l'autre du territoire du pays
et cela peut s'amplifier.
Evidemment, à un moment donné, la boite ne peut plus
s'agrandir et ça prend peut-être, à ce moment-là, un
deuxième réseau. Il faut quand même reconnaître que,
pour les réseaux de micro-ondes, il y a ce que j'appelais tantôt
le problème de la fiabilité. A ce moment-là,
nous-mêmes, nous devrons qu'il existe un autre réseau ou
non dédoubler pour permettre la protection des
communications.
M. L'ALLIER: Le réseau initial. M. TANGUAY: C'est ça.
LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable député de
Frontenac.
M. LATULIPPE: Je voudrais revenir sur cet- te question des
facilités techniques. Justement, sur ce problème du
dédoublement, vous avez dit que les coaxiaux actuellement pouvaient
contenir jusqu'à un maximum technique de trente canaux.
Est-ce que c'est la maximum à l'heure actuelle, par coaxial?
M. TANGUAY: Par percoaxial, c'est-à-dire ce que vous avez vu
tantôt, actuellement ce sont trente canaux de télévision.
Toutefois, il existe sur le marché depuis très peu de temps des
amplificateurs de lignes qui peuvent permettre d'aller jusqu'à 35. Il y
en aura d'ici un an ou deux qui permettront d'aller jusqu'à quarante et,
si on développe de nouvelles techniques d'amplification, on ira encore
plus haut pour remplir la bande de fréquences complètes qui
s'étend jusqu'à 300 méga-hertz. Actuellement, on peut
aller jusqu'à 35, parce que ça commence à exister.
M. LATULIPPE: Donc, dans des conditions actuelles c'est une
conclusion que je tire sur le réseau de câblovision à
Montréal si vous décidiez de vous servir des coaxiaux pour
fins de téléphonie, ça supposerait, étant
donné qu'eux peuvent justement implanter un réseau de trente
canaux immédiatement, que dès le départ, il y aurait un
dédoublement de coaxiaux dû au fait que les facilités
techniques, au niveau des amplificateurs, ne permettraient pas actuellement de
remplir ça.
Dans ce sens, est-ce que vous envisagez qu'effectivement, là
aussi, même dans le domaine des coaxiaux il y aura un dédoublement
au niveau des câbles, soit pour des raisons de fiabilité ou des
raisons techniques, qui devra se faire?
M. TANGUAY: II y aura éventuellement un dédoublement du
réseau qui se fera à cause de la capacité de transmettre
du nombre de canaux à transmission. Lorsqu'on dépassera la limite
du câble coaxial, ça prendra un autre tube coaxial ou un autre
câble coaxial. Toutefois, en planifiant, en regardant vers l'avenir, en
regardant les prévisions, les besoins qui peuvent être
exprimés, qu'on peut transposer dans les prochaines années, rien
n'empêche d'installer un câble qui comprendra deux tubes coaxiaux
ou trois tubes coaxiaux.
Permettez-moi de vous donner ici l'analogie des communications longues
distances. Les compagnies de télécommunication installent
présentement, entre les points majeurs de leur réseau, du
câble coaxial pour acheminer les communications interurbaines, quelque
soit la nature du signal, par autre chose que le système de faisceaux
hertziens ou de micro-ondes.
On installe du câble coaxial et ce câble coaxial est un
câble qui peut être gros comme ça, dans lequel il y a
plusieurs percoaxiaux. Cela peut aller jusqu'à douze ou quatorze
percoaxiaux. Ce qui donne évidemment les quantités fantastiques
de signaux qui peuvent être
transmis. On parle de 40,000 à 50,000, à 60,000
conversations téléphoniques simultanées qui pourraient
être transmises. La même chose devra se faire par analogie dans le
domaine régional, local ou urbain et dans le résidentiel et pour
les bureaux d'affaires, parce qu'on prévoit qu'un jour, les
communications qui s'achemineront vers un lieu donné, où vous
demeurez, où vous travaillez, ce sera autre chose que ce que vous
connaissez aujourd'hui; ce ne sera plus le système de communication
téléphonique qui lui, servira à envoyer simplement de la
codification pour faire fonctionner le video et les transmissions de
données.
On aura besoin, à ce moment-là, énormément
de canaux, non pas pour retransmettre comme on le fait aujourd'hui, les dix
canaux de télévision dont cinq sont un double des cinq autres,
mais pour transmettre des choses tout à fait particulières. Il
faut aussi prévoir que les abonnés, soit les résidents,
soit les bureaux d'affaires et surtout les bureaux d'affaires, voudront louer,
à un moment donné, d'un coin à l'autre du territoire local
ou régional, des canaux pour leur propre utilisation. Quand vous parlez
de dédoublement, il faut prévoir un dédoublement, mais ce
sera à l'intérieur du même câble. Il faudra poser,
à cause de la capacité demandée, peut-être plus
qu'un tube coaxial.
M. LATULIPPE: Donc, dès le départ dans le secteur de
Montréal pour le besoin de la câblodiffusion, on envisage
déjà trente canaux vous poseriez deux coaxiaux
immédiatement pour répondre à vos besoins?
M. TANGUAY: Dépendant de la planification que nous faisons, des
prévisions que nous entrevoyons, lorsque nous installons des structures,
nous essayons d'installer nos structures pour que ça dure dix ans,
quinze ans pour en amortir les coûts sur une longue période pour
que ça coûte moins cher aux abonnés. Dépendant de
ça, on poserait un tube, ou deux tubes, ou trois tubes. Dans les
secteurs résidentiels ou les secteurs très populeux,
évidemment, il ne serait peut-être pas question de poser seulement
un tube. Je relatais, il y a quelques instants, l'expérience d'un
transport de communications entre deux centrales de Montréal, assez
éloignées l'une de l'autre. Nous, on ne peut pas risquer de voir
les communications tomber parce qu'il y a un bris quelque part ou que
l'amplificateur est en panne. Il y a deux tubes coaxiaux, deux câbles
coaxiaux, si vous le voulez, qui se complètent l'un l'autre. On dit que
l'un est en stand by automatiquement par rapport à l'autre.
Alors, il y aura toutes sortes de considérations comme ça
dont il faudra tenir compte. Un fait est certain, c'est qu'avec l'accroissement
continuel des communications, de la masse d'information qu'il faut transporter,
ça va disparaître, comme ont disparu les fils nus, les fils
à découvert qu'on voyait il y a 30 ou 35 ans sur les poteaux le
long des routes ou le long des rues. Ils ont disparu et celui-là aussi
disparaîtra.
M. LATULIPPE: Vous avez dit qu'éventuellement il y aurait un seul
réseau commercial de coaxiaux. Disons qu'on part du fait qu'actuellement
on est dans un système de paire de fils et qu'on s'oriente vers les
coaxiaux. Quand prévoyez-vous qu'au Québec il sera possible et
rentable, dans votre esprit ou selon les études que vous avez faites,
d'étendre à la grandeur du Québec un système de
coaxiaux, parce qu'actuellement j'imagine que tant qu'il restera un nombre
assez important des abonnés qui ne seront pas sur coaxiaux, le service
ne sera pas étendu? Quand prévoyez-vous que cela pourra
être fait globalement ou quand prévoyez-vous commencer à
entrer chez le client un coaxial au lieu d'une paire de fils? En tenant compte
des possibilités techniques et des conditions de rentabilité.
M. TANGUAY: Je vous parlais de l'expérience que nous
commençons et qui se poursuivra pendant quelques mois, où nous
allons entrer chez un groupe sélectionné d'abonnés un
câble coaxial, qui servira à leur fournir la conversation
téléphonique, la transmission téléphonique en
même temps que les 5, 10 ou 12 canaux de télévision
transmis par je le suppose un câblodistributeur. Selon les
résultats pratiques, techniques et économiques de cette
expérience, on pourra vous dire ce qu'on pourra exactement faire, pour
quand et pour combien. Mais, dans le moment, ce n'est pas facile à
dire.
M. LATULIPPE: Est-ce que vous êtes au courant de
l'expérience, dont un câblodiffuseur nous a parlé, qui
aurait eu lieu en Ontario il y a quelques années, où on a
essayé de câbler tout un secteur résidentiel? Pour une
raison ou pour une autre j'ignore les raisons, vous pourriez
peut-être nous les dire finalement, on a opté pour un
système où il y avait duplication du coaxial et de la paire de
fils, au plan technique. Donc, ce sont des études qui ont
déjà été faites et, pour une raison ou pour une
autre, soit pour une raison de rentabilité ou de technique, ça
n'a pas marché.
M. TANGUAY: Un instant, s'il vous plaît.
M. RACICOT: On a parlé de cette étude qu'on appelait Wired
City Concept et qui n'était pas une étude faite sous forme de
chantier. C'était une étude sur papier et qui était
beaucoup plus une étude futuriste qu'une étude technique. C'est
ce qu'on entrevoyait. C'est dans ce sens que M. Levasseur ou quelqu'un d'autre
a dit que dans cette étude on prévoyait que deux câbles
entraient dans les résidences: un câble coaxial et un câble
de paire téléphonique. Dans l'expérience, technique cette
fois, économique, qui va commencer très
bientôt, un seul câble va entrer dans la maison et ça
va être un câble coaxial, tant pour le téléphone que
pour les autres fins. Maintenant, je ne pourrais pas vous donner les
détails techniques.
M. L'ALLIER: Une question complémentaire à ça. Un
seul câble, mais un ou deux amplificateurs?
M.TANGUAY: II y aurait seulement un amplificateur, M. le ministre. Tout
le long du câble, ce serait le même amplificateur à des
points bien déterminés. A l'arrivée chez le client, il
faudra séparer les pommes et les poires et les bananes et là il y
aura ce qu'on appellerait un filtre et un démodulateur. Le
démodulateur permet de séparer les différents signaux et
de les acheminer à l'intérieur de l'édifice; à
certains appareils, les signaux vidéo et à d'autres, les
conversations téléphoniques.
M. LATULIPPE: Est-ce que vous avez une idée du coût que
ça peut représenter d'entrer un seul câble, un coaxial pour
fins téléphoniques, par abonné au Québec?
M.TANGUAY: Personnellement, je n'aurai pas de coût tant que ces
expériences n'auront pas été faites.
M. LATULIPPE: Est-ce que ce sont des études qui ont
déjà été faites, approximativement sur papier?
M. TANGUAY: Ce sont des études qui sont en train de se faire chez
nous. Mais il y a quand même des gens, dans le domaine des
communications, qui ont fait des études. Je pourrais peut-être
vous référer à un document du ministère des
Communications d'Ottawa, une étude faite par le Dr De Mercado qui parle
des investissements, des coûts, des possibilités techniques et
pratiques qu'il voit pour les prochaines années?
M. LATULIPPE: Quel est l'ordre de grandeur de ces études, de ces
coûts? Le coût est quand même très important,
j'estime. C'est bien beau de dire qu'on va éviter un doublement, mais si
ça coûte plus cher pour éviter le doublement que pour
continuer le réseau actuel... Parce que je pense que toute votre
argumentation est basée sur une question d'économie pour le
consommateur, une économie sociale.
M. TANGUAY: Le Dr De Mercado parle de coûts qui iront chez le
client aux investissements de $100 à $120 ou de $160 à $210
dépendant du système qui est utilisé. Dans ça on
parle du câble, des attaches, des fils de branchement mais on ne comprend
pas, par exemple, les appareils à l'intérieur qui serviront
à transmettre à l'abonné les différentes informa-
tions. Lorsqu'on considère cet aspect de la question, on parle de
convertisseurs, des câbles, des caméras et ainsi de suite. Cela
peut monter quand même assez cher dans le point de vue actuel quand on
considère le coût des appareils aujourd'hui. II faut quand
même se souvenir qu'à la longue, à force de les utiliser et
de les utiliser à des milliers d'exemplaires le coût baissera,
c'est ça qui est important. Quand on parle de câble
évidemment, on peut retourner l'argument et dire à deux
compagnies ou deux groupes qui utilisent un nombre effarant de câbles
pour dédoubler le réseau: Ça coûtera moins cher le
pied de câble. Mais il y a quand même une limite qu'on atteint un
moment donné puis tout se met à augmenter. C'est toujours, encore
une fois, le citoyen, toujours le même qui est l'abonné des deux
qui paie deux fois le coût alors qu'il pourrait payer seulement une
fois.
Un autre point aussi qu'il faudrait peut-être souligner ici, comme
je le disais, aujourd'hui un câble a une capacité technique de 30
canaux. La question qu'on pourrait peut-être poser et à laquelle
je n'ai pas de réponse : Lorsqu'on veut transmettre 12 canaux pourquoi
installer un câble et avoir 18 canaux qui ne font rien? Pourquoi,
à ce moment-là, par exemple, ne pas louer 12 canaux? Les 18
autres pourraient servir à un tas d'autres fins pratiquement et
immédiatement. C'est le genre de questions à laquelle, moi, comme
ingénieur, je n'ai pas de réponse mais que je me pose quand
même comme citoyen et je n'ai pas de réponse. C'est une
façon de diminuer les coûts ça.
M. LATULIPPE: J'aimerais revenir sur une question qui touche le contenu.
Est-ce que vous n'estimez pas que le message téléphonique comme
tel est aussi en soi une forme de contenu?
M. RACICOT: Dans ce sens, d'un point de vue juridique sinon technique,
il faut concevoir que le message est acheminé par l'abonné et non
pas pas la compagnie de téléphone. La compagnie de
téléphone met à la disposition de l'abonné un
appareil et c'est l'abonné qui transmet son propre message. En ce sens,
les compagnies de télécommunication n'ont pas de contrôle
sur le contenu. Je pense que l'analogie tient encore.
M. LATULIPPE: Oui, on nous a dit aussi un peu la même chose
vis-à-vis des câblodiffuseurs. Ils ne voulaient pas, eux, prendre
la responsabilité de la programmation, d'une certaine façon. Ils
voulaient reporter ça sur les épaules du public au niveau de la
communauté qui utilisait ces facilités.
M. RACICOT: Ce n'est pas à nous de dire qui sera responsable de
quoi, je pense.
M. LATULIPPE: Dans ce sens, est-ce que
vous seriez favorables à ce qu'il y ait au Québec une
seule compagnie qui serait propriétaire de tous les équipements
au niveau de l'infrastructure du domaine des câbles qui serviront
à la communication? Pour les services téléphoniques comme
tels, soit les interurbains et autres, le personnel nécessaire serait
d'une autre entreprise. Il y aurait, en fin de compte, une seule entreprise au
Québec qui serait propriétaire de l'infrastructure des
télécommunications sous toutes ses formes. C'est un peu dans ce
sens que j'interprète la façon de voir que vous élaborez
dans votre mémoire, où on veut que les diverses personnes qui ont
accès au service de télécommunication sous une forme ou
une autre ne soient pas propriétaires de l'infrastructure des media
tandis qu'on veut que les personnes qui s'en servent soient des espèces
de compagnies qui soient spécialisées dans certains domaines.
M. RACICOT: Evidemment, il faudrait demander l'opinion de toutes les
parties concernées, non seulement de toutes les compagnies de
télécommunication et autres utilisateurs de ces services. Une
chose est certaine, c'est de cette chose que je me fais l'avocat, il est
éminemment rentable économiquement d'avoir une seule entreprise
qui soit propriétaire des infrastructures.
Maintenant, est-ce que cela veut dire une seule entreprise à la
grandeur du territoire du Québec ou si cela peut être une seule
entreprise à l'intérieur d'un territoire donné et que dans
d'autres territoires il s'agisse d'une autre entreprise, si on parle de
structures corporatives? Ici, il faudrait demander l'opinion de toutes les
parties concernées.
Peut-être que M. Duhamel aurait autre chose.
M. DUHAMEL: Non, je pense que c'est un ensemble. Parce qu'on a
essayé de résumer dans notre mémoire... Les compagnies de
télécommunication qui exercent un monopole à
l'intérieur d'un territoire donné, qu'elles soient
propriétaires de l'infrastructure. Je ne vois pas quel avantage il y
aurait s'il y avait nécessairement une seule compagnie à la
grandeur de la province. Cela fonctionne bien pour le téléphone,
aujourd'hui. Alors,...
M. LATULIPPE: Bien, je ne pensais pas nécessairement aux
compagnies de téléphone, je pensais aussi en fonction de l'avenir
et de toutes les autres possibilités d'innovation dans le domaine des
communications, parce qu'il semble que ce soit un peu ça que vous
tentez...
M.DUHAMEL: Oui.
M. LATULIPPE: ... de dissocier...
M. DUHAMEL: En réalité, ce qu'on...
M. LATULIPPE: En réalité, on sera en face des
câblodistributeurs et d'autres possibilités, par exemple, d'avoir
accès à des ordinateurs, avoir accès à d'autres
genres de services. Il semble, à la lecture de votre mémoire, que
vous voulez que ce soient des sociétés séparées.
Peut-être que j'interprète mal votre mémoire.
M. DUHAMEL: Non. On pense que nous, les compagnies de
télécommunication, fournirions seulement les moyens de
transmission, que ce soit aux câblodistributeurs, dans le cas de la
câblodistribution, pour les compagnies ou les sociétés
d'ordinateurs qui donneront des services à même leurs ordinateurs
à l'avenir. Elles aussi s'adresseront aux compagnies de
télécommunication pour obtenir les moyens de transmission. S'il
s'agit de sociétés qui font de la télésurveillance,
ou tout autre service de cette nature, que ces gens s'adresseront à un
seul transporteur commun et c'est là que l'on pourra réaliser les
économies dont je vous parlais tout à l'heure.
M. LATULIPPE: J'aimerais vous interroger, dans un autre ordre
d'idées, qui se rattache tout de même à ça. Les
câblodistributeurs nous ont dit que vous tentiez, à
l'intérieur de vos contrats, d'une certaine façon, de limiter le
contenu ou, si vous voulez, l'avenir ou la vocation des câblodiffuseurs
à transporter simplement des signaux de radio et de
télévision. Est-ce effectivement le cas?
M. DUHAMEL: Bien, écoutez. Il y a une clause, à laquelle
Me Racicot a fait allusion tout à l'heure. Cependant, on a aussi
démontré qu'il y avait eu beaucoup de changements qui avaient
été apportés à cette clause. Contrairement à
ce qu'on a laissé entendre, il ne s'est pas agi de resserrer cette
clause. Elle a été constamment libéralisée au point
où je ne crois pas que les câblodistributeurs puissent citer,
comme Me Racicot disait tout à l'heure, un seul service que la clause
les empêche de fournir. Et si, éventuellement, il y avait quelques
services, dans l'avenir, et qu'en vertu de cette clause ils ne pourraient pas
la remplir, je suis sûr que ce ne serait pas long avant qu'ils reviennent
pour essayer de négocier de nouveau cette clause.
Alors, à l'heure actuelle, pour faire ce qu'ils sont
autorisés à faire, il n'y a aucun obstacle pour eux dans
ça.
M. LATULIPPE: J'aimerais, s'il vous plaît, tenter... Ce matin, on
nous a remis un document. Les câblodiffuseurs nous ont remis un document
qui traite justement de la définition des contrats, contrats complets,
contrats partiels. A cet effet, on parle des contrats de 1961, de 1959 et on
remonte jusqu'en 1970. Quant aux contrats de 1970, y en a-t-il encore en
vigueur ou si un nouveau contrat a été signé en 1972?
M. DUHAMEL: II y a sûrement des contrats
de 1970. La version 1970 des contrats est vieille seulement de trois
ans. Ce sont des contrats de dix ans. Alors, il doit y en avoir une assez bonne
quantité encore en vigueur.
M. LATULIPPE: Je sais qu'à citer seulement un paragraphe, on peut
difficilement avoir une vue d'ensemble sur l'aspect général. Mais
on cite, à la page 3 du mémoire qui nous est soumis, ce qui
concerne directement les contrats de Bell Canada; pour ma part je suis enclin
à l'interpréter comme une limite du contenu. On y lit, par
exemple: Pour la première fois, le domaine interdit est indiqué
clairement, toujours dans le même paragraphe. Ils réfèrent
à la page 2 de l'annexe 7, paragraphe 3, utilisation des installations,
sur le contrat de 1970, la dernière édition du contrat
proposé par Bell Canada, soit la version 1970. Il n'y a rien dans le
présent contrat qui puisse être interprété de
façon à permettre la transmission de données qui ne
feraient pas partie ou qui ne seraient pas complémentaires d'une
émission de télévision ou d'une émission de radio
transmise par câble ou par radio.
Donc, est-ce que ce n'est pas justement une espèce de
cloisonnement à la vocation de l'industrie de la câblodiffusion
qui est opérée...?
Donc c'est un contingentement sur le contenu qui est
inséré à même vos contrats que vous négociez
aux abonnés.
M. DUHAMEL: Est-ce que d'après vous, M. le député,
il y a quelque chose dans cette clause-là qui empêche un
câblodistributeur d'exercer pleinement son permis?
M. LATULIPPE: Non, actuellement. Par contre, j'interprète cela de
cette façon. A l'avenir d'autres sociétés
peut-être que je me trompe ou une société de
câble comme National câblovision, qui voudront se donner d'autres
services ne pourront le faire, automatiquement ce sera une autre
société qui sera appelée à cause des limites
contenues dans votre contrat. Donc, ce sera là aussi une forme de
dédoublement d'activités.
M. DUHAMEL: Pour le moment, cette clause-là ne cause aucune
restriction. Lorsqu'il y avait des restrictions qui empêchaient les
câblodistributeurs de donner des programmes de point à point et
qu'à un moment donné ils ont pensé qu'ils pouvaient en
faire une utilisation ou se servir du câble de cette
façon-là... Il y aurait aussi une limitation quant à
l'utilisation du spectre du câble. A un moment donné les
câblodistributeurs ont pensé qu'ils devaient peut-être
utiliser tout le spectre. Le contrat a été amendé en ce
sens-là et si au cours des années... Actuellement ils ne font
pas, avec le câble, toutes les utilisations dont ils ont parlé.
Avant que cette clause-là ne soit réellement un obstacle, je suis
sûr qu'ils auront l'occasion de renégocier de nouveaux
contrats.
M. LATULIPPE: En d'autres mots, est-ce l'intention de votre
société d'occuper ces divers champs, par exemple, comme la
télémesure, possibilité de communication avec un
ordinateur, banque de données et autres? Est-ce l'intention de votre
société d'offrir ces services-là...
M. DUHAMEL: Justement.
M. LATULIPPE: ... ou de passer par d'autres intermédiaires?
M. DUHAMEL: Non. On pourra être grossiste, comme c'est le cas
aujourd'hui dans le cas de la câblodistribution ou on pourra faire du
détail; mais comme cela se fait aujourd'hui pour la
câblodistribution, on fournit à un intermédiaire les moyens
de transmission. Dans le cas de la télésurveillance, où
cela se fait déjà, quelqu'un vient nous voir et nous demande les
possibilités de donner un certain service et, dans l'avenir, cela
pourrait être les compagnies d'ordinateurs qui pourraient demander la
même chose. En même temps, on ne voudrait pas dire qu'une compagnie
de télécommunication ne pourrait pas fournir directement quelques
services de cette nature-là.
M. LATULIPPE: N'êtes-vous pas d'accord que cela devient
très difficile de définir le contenu comme étant de
juridiction exclusive d'une partie ou de l'autre? Par exemple, une banque de
données, sans être en soi une programmation, est quand même
une forme de contenu au bout de la course parce que le client peut quand
même...
M. DUHAMEL: Mais des compagnies de communication encore ne seraient pas
celles qui détermineraient ce qui sera retenu dans la mémoire de
l'ordinateur. Cela serait fait par d'autres. Encore une fois, comme dans le cas
de la câblodistribution, nous limiterons notre rôle à
fournir les moyens de communication ou les moyens de transmission.
M. LATULIPPE: Je pense, M. le Président, que cela résume
à peu près les questions que je voulais poser.
M. RACICOT: Si vous le permettez, M. le Président. M. le
député de Lafontaine, vous vous êtes
référé au contrat de juillet 1970 et à un
mémoire qui vient de vous être soumis. Je n'en ai pas de copie, je
m'en procurerai une tantôt. Cependant, il est peut-être important
lorsqu'on cite cette clause du contrat de juillet 1970 de regarder quelle est
la définition qui est apportée au mot "émission". Je ne
sais pas si elle est incluse dans ce mémoire-là. On dit qu'il n'y
a rien dans le présent contrat qui puisse être
interprété de façon à permettre la transmission de
données qui ne feraient pas partie ou qui ne seraient pas
complémentaires de l'émission de
télévision ou d'une émission de radio transmise par
câble ou par radio.
Le mot émission n'est pas entendu ici dans le sens couramment
employé. Il ne s'agit pas d'une émission de type programmation.
Je vous donne la définition. L'émission désigne
c'est la définition qui est incluse au contrat au tout début
une présentation d'images ou de sons destinés à
renseigner ou d'ordre éducatif, sportif, culturel ou artistique. Il est
essentiel que toute l'émission, ou partie de celle-ci, revête un
caractère intelligible pour le public ou pour une partie
représentative du public et que le sujet traité intéresse
les spectateurs ou les auditeurs du point de vue éducation, information,
divertissement. Cela vise beaucoup plus que l'émission. Prenons
l'exemple des télé-emplettes qui est un service où les
câblodistributeurs ont fait état de leur intérêt. Si
un magasin présente sur l'écran une marchandise en vente et que
l'abonné presse un bouton, il s'agit de transmission de données,
bien sûr, mais la transmission de données est associée ici
à une émission et, en ce sens-là, il n'y a aucune
restriction pour tous les services qui ont déjà été
mentionnés par les câblodistributeurs.
M. LEGER: Autrement dit, dans le mot émission, vous avez inclus
la plus large définition possible.
M. RACICOT: C'est bien cela. Ce qui est visé, c'est toute
présentation visuelle d'ordre éducatif, culturel, sportif ou
artistique. Je pense que c'est très vaste. D'ailleurs, ce contrat a
été négocié avec l'Association canadienne de
télévision par câble.
M. LATULIPPE: Actuellement, est-ce que l'Association de
télévision par câble signe ce contrat, est-ce que tout le
monde a...?
M. RACICOT: L'Association ne signe pas le contrat. Pour autant que je le
sache, elle n'a pas de pouvoirs coercitifs sur ses membres. Chaque membre juge
selon ses préférences.
M. LATULIPPE: Est-ce qu'il y a beaucoup de contrats actuellement qui
sont en litige? On nous a dit que pour la National Cablevision il y avait sept,
huit ou neuf contrats que la compagnie refusait de signer pour diverses
raisons. Je ne sais pas si c'est celle-là.
M. RACICOT: Je ne pourrais pas vous donner la raison pour laquelle la
National refuse de signer les contrats. Je pense que je ne pourrais pas parler
pour elle. Ce que je veux dire, c'est que pour la National, même s'il
s'agit de sept, huit ou neuf contrats, ce sont des contrats qui sont
situés dans les limites de l'île de Montréal, ou à
peu près, avec une partie de la rive sud. Historiquement, cela provient
du fait qu'autrefois il s'agissait de contrats avec plusieurs compagnies
différentes, contrats qui sont venus à échéance
à différentes dates. Maintenant, il n'y a qu'une seule
entité qui s'appelle National Clablevision.
M. LATULIPPE: Est-ce que si vous faites signer ce contrat avec cette
clause, cela ne limite pas pour la compagnie de câblodiffusion les
possibilités de varier à l'infini le contenu? Cela limite le
contenu que peuvent offrir les câblodiffuseurs, actuellement, dans ce
qu'ils font, et cela les élimine...
M. RACICOT: Pas pour ce qu'ils font, mais pour ce qu'ils voudraient
faire, qu'ils ont mentionné...
M. LATULIPPE: Cela les élimine des champs possibles pour
l'avenir, telles les banques de données et autres. Donc, par le fait de
signer avec votre organisme un contrat de cet ordre, automatiquement
l'entreprise qui est censée, elle, s'occuper essentiellement de contenu,
se voit limiter dans son contenu face à son devenir possible ou à
l'expansion possible de son entreprise.
M. RACICOT: II faut dire que ces contrats, au début, se
réfèrent aux permis détenus par les
câblodistributeurs et que l'on suit les contours de ces permis pour
déterminer ce qui fera l'objet du contrat.
M. LATULIPPE: Est-ce que vous soulignez, de cette façon, que
ça ne limite pas le contenu? C'est un point que j'aimerais
connaître. Est-ce qu'on peut interpréter votre contrat comme une
certaine forme de limite du contenu; est-ce que, par le biais de votre contrat,
vous arrivez à contrôler le contenu des entreprises,
peut-être avec la ratification de la régie ou du service, ou
est-ce que c'est...?
M. RACICOT: Je ne pense pas qu'il s'agisse là de limite au
contenu puisque tous les services dont on a dit qu'ils étaient des
services qu'on voulait offrir pour l'avenir, peuvent être offerts en
vertu de ce contrat. Maintenant, je pense que tout contrat peut être
négocié.
M. LATULIPPE: Alors, pourquoi avez-vous parlé d'exclusion? Vous
avez même ajouté, ce que je n'ai pas sur cette feuille, que les
compagnies n'ont pas le droit de transmettre de
télé-données et vous avez parlé aussi d'achats par
circuits fermés.
M. RACICOT: Ce n'était pas dans le contrat. Je donnais ça
à titre d'exemple de choses qui ont été mentionnées
lors de la présentation audio-visuelle. Je prenais ça à
titre d'exemple et je disais que c'est permis.
M. LATULIPPE; De toute façon, je vous remercie beaucoup.
M. LEGER: Pour l'ensemble des compagnies de câble, il y avait le
problème de la contrainte qu'elles voyaient dans le contrat. Il y avait
un deuxième point aussi, c'était le fait que ça leur
coûterait plus cher de louer que de produire elles-mêmes. En
d'autres mots, on m'a sorti un chiffre qui était, je pense, pour un
certain nombre d'années. Je ne me souviens pas si c'était dix ans
ou vingt ans, je ne me souviens pas du nombre d'années, mais cela
coûterait environ $100,000 de plus pour elles de louer que de produire
elles-mêmes l'équipement. Autrement dit, le coût que vous
facturiez à ces compagnies de câble serait plus
élevé. Elles disent que c'est pour deux raisons;
premièrement parce que votre personnel technique doit être
payé plus cher que le leur et aussi, possiblement, parce qu'il y aurait
un profit que la compagnie prendrait sur l'équipement à mettre en
place pour ensuite le louer. Est-ce exact?
M. RACICOT: M Duhamel va répondre à cette question.
M. DUHAMEL: C'est une question extrêmement complexe et à
laquelle j'ai fait allusion tout à l'heure. Vous avez eu toute une gamme
de chiffres qui vous ont été cités et à moins de
savoir ce qu'ils contiennent...
Je n'y ajouterais aucune fois, pas plus que je ne vous demanderais
d'ajouter foi à un chiffre que je pourrais vous donner qui serait
peut-être inférieur à celui-là, à moins de
savoir réellement ce qu'il contient et dans quelles conditions on a fait
cette construction, de quelle nature elle est. Lorsque vous parlez, cela peut
être un câble tout à fait différent que vous avez
à l'idée, surtout si vous allez un peu plus loin et que vous
dites: Cela comprend les amplificateurs. Bien, les amplificateurs, leur prix
peut varier de $500 à $1,500. Alors, il y a une foule de facteurs
lorsqu'on discute d'un mille de construction pour le câble coaxial, vous
savez. Je vous demanderais de n'avoir aucune foi même dans les chiffres
que je vous donne, surtout si vous voulez faire une comparaison qui serait
valable avec un autre chiffre qui a été donné.
M. LEGER: Alors, restons dans le domaine des principes, dans ce
cas-là, puisque les chiffres présentés dans chacun des
mémoires ne sont pas comparables. Est-ce que vous vendez ou facturez
l'équipement au même prix que cela vous coûte ou si vous
prenez une marge de profit, alors que vous ne le vendez pas, mais que vous
allez, après cela, le louer?
M. DUHAMEL: On s'assure surtout que le fait de fournir ce service pour
la câblodistribu-tion ne sera pas un fardeau pour l'usager du
téléphone. On prend en considération les coûts
marginaux. Comme vous le savez, les taux de rendement pour les compagnies de
téléphone sont traditionnellement très raisonnables.
M. LEGER: Je prends votre affirmation. Vous semblez être un bon
politicien. C'est une réponse politique. Maintenant, est-ce que cela
comprend le prix de l'installation de l'équipement et le remplacement
à cause de l'usure? On nous disait qu'un câble ou un
équipement technique, amplificateur, etc., pouvait être usé
au point de devoir être remplacé en dedans de quinze ans, de dix
ans et de vingt ans. Une fois que vous avez chargé le prix et, par la
suite, une location annuelle, cela comprend-il le changement régulier de
tout cet équipement qui va s'user à la longue ou si vous
rechargez le prix de la réparation ou du changement de
l'équipement?
M. DUHAMEL: Les taux d'amortissement sont établis d'avance,
qu'est-ce que vous voulez. Si on s'engage à louer le câble
à $0.26 le cent pieds par mois, au moment où l'on fait cela, on
se base sur la vie, d'après l'expérience, de ces câbles ou
des autres outillages dont on se sert.
Il se peut qu'au cours des années on se rende compte, avec
l'expérience, qu'un câble doit être remplacé tous les
sept ans au lieu de tous les dix ans ou tous les douze ans au lieu de tous les
quinze ans; la même chose peut arriver aux amplificateurs ou aux autres
fournitures. Alors, là, ces taux d'amortissement sont ajustés et
puis, si on se rend compte que $0.26 par cent pieds par mois est un tarif qui
ne nous permet pas de fournir au moins un service à un taux qui serait
compensatoire, à ce moment-là, on s'adressera aux
autorités pour faire augmenter de $0.26 peut-être à $0.30,
je ne sais pas. C'est basé sur...
M. LEGER: Sur le coût de location? M. DUHAMEL: C'est cela.
M. LEGER: Maintenant, tout le monde sait le problème de
juridiction dans lequel nous vivons. Je vais vous poser une question
indiscrète. On sait fort bien que les intervenants, les groupes
impliqués là-dedans, c'est-à-dire ceux du domaine de la
téléphonie, ceux du domaine des communications, sont soumis
à la juridiction fédérale ou provinciale pour certains
d'entre eux. Parfois, il y a double juridiction sur le même groupe. Je
parle de Québec Téléphone, de Télébec ainsi
que de Téléphone du Nord, d'une part, qui relèvent du
gouvernement québécois et de Bell Téléphone qui
relève du gouvernement fédéral. Est-ce que, actuellement,
il y a des pourparlers? Est-ce qu'il y a des études qui se font sur la
possibilité que Bell Téléphone, comme telle, transmette
son territoire québécois à une de ses compagnies filiales
pour tomber complètement sous la juridiction provinciale? Est-ce qu'il y
a des études qui se font actuellement à Télébec,
à Bell Téléphone ou à Téléphone du
Nord en ce sens?
M. DUHAMEL: D'abord, Télébec, autant
que Bell ou Téléphone du Nord ou les autres compagnies que
vous avez mentionnées ne sont pas soumises présentement à
une double juridiction, pas plus que Bell, d'ailleurs.
M. LEGER: Chacune a sa juridiction.
M. DUHAMEL: Quant à la possibilité qu'il y ait juridiction
provinciale pour Bell, je me réfère à ce que le ministre a
dit, je pense, au cours des derniers jours des commissions parlementaires,
à savoir que c'est une décision qui devra être prise, qui
est à l'étude. Le gouvernement étudie cela, il y a eu des
discussions avec Bell et il y en aura certainement avec Ottawa lors des
conférences.
C'est une décision que l'on croit nous, d'abord, du ressort
politique. Le ministre a fait allusion à ce que l'on faisait appel quant
aux changements de structure. Il est vrai que l'on en a fait des changements de
structure pour donner à l'organisation régionale du Québec
ou de l'Ontario une plus grande économie, c'était pour donner un
meilleur service aux clients et mieux administrer. Mais, en même temps,
si au point de vue politique il y a des changements qui feront que Bell sera
assujettie à une juridiction provinciale, nous ne ferons aucune
réticence, aucune objection. Nous serons peut-être plus
près de par ces changements que nous l'aurions été sans
ces changements.
M. LEGER: Alors, est-ce que vous pourriez conclure, c'est une opinion
personnelle que j'émets, du fait de l'expérience que vous avez
dans le domaine de la téléphonie, que pour le bien
général du domaine des communications, soit la
télécommunication ou la radiocommunication, ou du domaine du
téléphone, qu'il n'y ait qu'une seule juridiction, ce serait
beaucoup plus facile pour tout l'ensemble alors qu'il n'y aurait qu'un seul
interlocuteur, qu'une seule régie? Est-ce que vous trouvez
qu'idéalement, dans le fonctionnement quotidien, il serait
préférable que tout ce monde-là soit sous une même
et seule juridiction?
M. DUHAMEL: Si vous posez la question comme vous la posez, que vous
mettez de côté l'aspect politique et que vous pensez surtout
â l'abonné, au coût de son service, je ne pourrais pas
pencher de ce côté parce que, vous savez, c'est difficile de dire
que c'est la question de juridiction qui a fait défaut dans le
Québec, par exemple, au point de vue de la téléphonie. On
peut assurément l'affirmer, au point de vue téléphonique
on a, au Québec, le meilleur service téléphonique au monde
et au coût le plus bas au monde.
M. LEGER: Ma question était la suivante. Vous avez
différents groupes impliqués et chacun relève d'une
juridiction différente. Pour avoir une politique globale, d'ensemble,
dans le domaine des communications, que ce soit fédé- ral
vous connaissez mon objectif, ma priorité...
M. DUHAMEL: Oui.
M. LEGER: ... mais que ce soit fédéral ou provincial, le
domaine des communications est-ce que, d'après vous, il ne serait pas
idéal que ça ne relève que d'une seule juridiction, quelle
qu'elle soit?
M. DUHAMEL: Encore une fois, pour ce qui est de Bell, si vous pensez que
95 p.c. au-delà de 90 p.c, c'est probablement 95 p.c. de
tous les revenus des télécommunications vont à Bell, il
n'y a pas de doute qu'une juridiction est mieux que deux.
M. LEGER: Vous avez répondu à ma question.
M. DUHAMEL: Mais, Bell est sous une juridiction à l'heure
actuelle.
M. LEGER: Merci.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de
l'Assomption.
M. PERREAULT: En tant qu'ingénieur je m'intéresse à
la question technique et je voudrais poser des questions à
l'ingénieur, M. Gilles Tanguay.
Alors, M. Tanguay, vous avez dit tout à l'heure que vous
procédez à une expérience pilote, dans le moment, sur la
rive sud où vous amenez le câble coaxial chez l'abonné
téléphonique lui-même. Dans cette expérience est-ce
que le service téléphonique est compris avec les signaux de
télévision?
M. TANGUAY: Oui, le service téléphonique sera compris avec
la télédistribution normale que voudra bien donner le
câblodistributeur. Cela pourra être cinq, dix ou douze canaux. On
pourra même expérimenter d'autres systèmes, à ce
moment-là, si on le veut.
M. PERREAULT: Cette expérience va durer combien de temps?
M. TANGUAY: L'expérience durera au moins six mois pour mener
à bon terme toutes les études et vérifier la
théorie que nous avons élaborée et tous les calculs que
nous avons faits.
M. PERREAULT: En plus d'être une expérience technique,
est-ce qu'elle servira à établir des coûts, des
prolongements?
M. TANGUAY: Oui, exactement. Le territoire que nous prévoyons
avoir comme sujet d'étude, englobe à la fois ce qu'on pourrait
appeler l'abonné urbain, semi-urbain et aussi rural. Je sais qu'il n'y a
pas très longtemps on
discutait assez fortement d'abonnés ruraux et qu'on veut
abaisser, par exemple, le nombre d'abonnés par ligne. Alors, c'est une
méthode qui sera peut-être assez élégante et assez
peu coûteuse à comparer aux services conventionnels. Avec ce que
l'avenir offre cela nous permettra peut-être de la continuer à
très bon compte pour tous les abonnés.
M. PERREAULT: J'aimerais vous poser une autre question. Compte tenu de
la gamme de fréquence des signaux de télévision et de la
gamme de fréquence des appels téléphoniques vous
avez dit qu'un câble coaxial peut aller jusqu'à 30 canaux dans le
moment, peut-être 35 plus tard combien de circuits
téléphoniques un canal peut-il contenir?
M. TANGUAY: Un canal video sur le câble coaxial a une bande de
fréquence de six mega-hertz ou 6 millions de cycles. Dans ces six
millions de cycles, on pourra inclure 144 conversations
téléphoniques avec les technologies présentes de
modulation de multiplexage, ce qui n'enlève pas le fait qu'on pourra en
mettre peut-être beaucoup plus plus tard.
M. PERREAULT: Ce qui veut dire qu'en théorie vous pourriez
multiplier cela par 30 fois et ça vous donne tout près de 4,000
liaisons.
M. TANGUAY: C'est ça, entre 4,000 et 5,000 liaisons.
M. PERREAULT: Maintenant, on semble figés depuis le début
de la discussion. Un ingénieur doit se tenir au courant des
progrès. On semble figés, dans l'avenir, par le câble
coaxial. D'après vous, est-ce que le câble coaxial sera toujours
la technique de la communication dans l'avenir?
M. TANGUAY: C'est une technique qui est tout au plus temporaire,
même si une période de dix ans ou quinze ans ne semble pas
temporaire. Ce sera remplacé par des moyens comme la fibre optique ou le
laser et cela même sera remplacé par d'autres choses. Avec le
processus d'accélération des recherches et les conclusions
auxquelles ces recherches amènent les scientifiques et les
ingénieurs, dix ans ou quinze ans au plus et la technique du câble
coaxial deviendra une technique périmée comme le fil à
découvert est devenu une technique périmée pour la
télégraphie et la téléphonie.
M. PERREAULT: Maintenant, j'ai une autre question à vous poser
ici. On en a parlé l'autre jour, les câblodiffuseurs ont
parlé du rapport Rostoff qui recommandait deux systèmes. Est-ce
un fait reconnu à travers le monde que les deux systèmes soient
appliqués séparément?
M. TANGUAY: J'ignore réellement quel en est le statut au point de
vue global, universel.
Ce que je sais, c'est que dernièrement je crois, samedi
dernier on lisait dans les journaux des articles qui faisaient
état de la création en France, sous l'égide des PTT, la
compagnie de télécommunication, d'une compagnie de
télédistribution nationale qui s'abreuverait ou
s'approvisionnerait à même le budget des
télécommunications. Ce qui semble indiquer à mon point de
vue qu'en France, à tout le moins, la société des
télécommunications sera aussi le véhicule pour le
transport de signaux. Je ne saurais affirmer avec exactitude si c'est le cas un
peu partout dans le monde mais, si ma mémoire m'est fidèle, il y
a peut-être aussi une autre province ici où la compagnie de
téléphone est en même temps le propriétaire des
installations de câblodistribution.
J'aimerais faire un point ici sur le propriéta-riat des
installations de câblodistribution. On a dit à des séances
précédentes qu'être propriétaire de ces biens,
c'était un gage pour aller ramasser les sommes d'argent qui
étaient nécessaires pour financer, par exemple, les entreprises.
Chez nous, la compagnie vaut des millions ou un milliard ou quelque chose comme
ça. Ce ne sont pas les installations qui sont garantes des emprunts
qu'on puisse faire en réalité parce que ces installations sont
sujettes à devenir vétustes et à perdre leur
utilité.
Nous avons des installations, par exemple, de commutation qui ont
été mises en place il y a 30 ou 35 ans et qui fonctionnent
encore; mais lorsqu'on s'en débarrasse, on n'est pas capable d'avoir un
sous pour elles, ça ne vaut absolument rien. Il faut même payer
pour s'en débarrasser. Un câble coaxial, après dix ans,
aura perdu la presque totalité de sa valeur. On ne peut pas emprunter,
par exemple, beaucoup d'argent sur une automobile qui est vieille de cinq ou
six ans parce qu'elle ne vaut rien, même si eue est encore utile. Ce qui
fait plutôt, à mon point de vue, la force d'une compagnie de
télécommunication, de télédiffusion et ainsi de
suite, ce sont plutôt les abonnés, ou les clients, qui rapportent
des revenus à tant par mois ou à tant par année.
Dans d'autres pays, on tient compte de ces choses et c'est pour
ça qu'à certains endroits la câblodistribution devient
plutôt de la câblodif-fusion et qu'il y a un propriétaire
des véhicules de communication assigné aux communications.
M. PERREAULT: Vous faites de la planification, je pense. Quand vous
planifiez un réseau de télécommunications, comme celui
dont vous êtes responsables, quels sont les facteurs dont vous devez
tenir compte?
M. TANGUAY: II y a des facteurs démographiques, la population
elle-même, c'est-à-dire qu'on doit consulter Statistiques Canada
et les statistiques du gouvernement du Québec. Il faut faire appel aux
statistiques des municipalités qui sont souvent plus ou moins
adéquates.
II faut savoir aussi le genre de besoins en
télécommunication qu'aura besoin cette population,
c'est-à-dire prédire des choses qui n'existent pas encore
aujourd'hui. Il faut tenir compte du revenu des gens, de ce qu'ils pourront
payer. Il faut aussi tenir compte de nos possibilités financières
sur le marché de l'argent. Il faut tenir compte d'un tas de facteurs qui
sont en fait des facteurs sociaux, démographiques, culturels et aussi
politiques. Peut-être qu'on pourrait prendre comme exemple la
planification de l'extension des services régionaux autour des groupes
métropolitains dans la province, comme Québec,
Trois-Rivières, ainsi de suite. Nous avons des plans, nous faisons de la
planification pour étendre ces services. Bien souvent, il n'y a aucune
considération économique qui, en théorie, devrait nous
faire faire ces choses parce que ça ne rapportera pas ou ça ne
rapportera jamais. Mais il y a quand même des considérations
sociales et culturelles qui entrent en ligne de compte. Ces facteurs sont tous
des facteurs dont on doit tenir compte dans la planification. Evidemment, le
facteur dont je pourrais parler plus en détail, si c'était
nécessaire, c'est le facteur technologique: qu'aura-t-on comme
équipement pour desservir les besoins en télécommunication
de la population de la région?
M. PERREAULT: II y a une autre question que je voudrais vous poser. Il a
été mentionné tout à l'heure, à la suite
d'une question d'un député, qu'actuellement la
câblodiffusion se faisait de point à point et vous avez
parlé de cette absence de bidirectionnel en ce sens que la communication
se ferait dans les deux sens. On a parlé de l'usage de 30 canaux, ce qui
pourrait venir pour l'éducation où on aurait besoin d'être
bidirectionnel pour pouvoir poser des questions, pouvoir, par un code sur le
téléphone, faire venir un programme donné. Pourriez-vous
développer ça un peu?
M. TANGUAY: La câblodistribution, aujourd'hui, ce n'est pas de
point à point. C'est d'un point à une masse de points.
Personnellement, je ne vois pas cet état de choses continuer à
exister très longtemps. Il faudra pouvoir permettre aux abonnés
de communiquer de l'un à l'autre visuellement. Il faudra permettre aux
abonnés d'avoir accès, au moment où ils le
désireront, à des services audio-visuels. Prenons l'exemple de ce
qu'on appelle aujourd'hui la télé-éducation. La
télé-éducation se fait dans un sens, aujourd'hui. On
transmet une émission qui a été préparée ou
enregistrée à l'avance, où un professeur donne à
ses élèves qu'il ne connaît pas et ne voit pas des notions
qu'il essaie de rendre le plus claires possible et qu'il croit être
parfaitement acceptables par ceux qui seront à l'autre bout. Cependant,
au point de vue de l'éducation, si je ne m'abuse bien que ce ne
soit pas mon domaine, mais j'ai déjà été
étudiant le meilleur moyen d'enseigner est quand même le
face à face, le contact. Ce qui veut dire que si on voulait appliquer le
même principe à la télé-éducation, il
faudrait permettre à un élève ou à un
étudiant de pouvoir communiquer dans l'autre direction avec celui qui
enseigne ou qui a préparé le programme. Il n'est pas
nécessaire de le faire à ce moment précis mais
peut-être que cela devra se faire au moment qui conviendra en même
temps à l'étudiant et au professeur.
De plus, aujourd'hui, la télé-éducation se fait
à des heures qui sont très strictes. A 10 heures, on a un
programme de télé-éducation; malheureusement, ceux qui
peut-être en profiteraient le plus ne sont pas là; ils sont
malades, ils sont au travail. Peut-être que pour eux c'est à 10
heures, 10 h 30 ou 11 heures du soir qu'on pourrait le faire. A ce
moment-là, il faudra donner le moyen à ces abonnés d'avoir
accès à la bande magnétoscopique qui permet de recevoir le
cours ou visualiser le professeur et son enseignement; permettre par exemple,
au professeur, sans que l'élève sorte de chez lui, de constater
quels sont les travaux que l'étudiant a fait, ce qui, en poussant plus
loin dans l'avenir, peut amener la disparition même des
universités et des grandes écoles où on ne garderait
peut-être directement que la formation des professeurs et les
laboratoires de recherche. Il en est ainsi dans à peu près chaque
champ d'activité humaine qu'on veut considérer aujourd'hui. Il
faut pouvoir laisser le loisir aux abonnés, quels qu'ils soient, de
communiquer instantanément et de la façon qu'ils le
désirent d'un point à un autre, d'un abonné à un
groupe d'abonnés ou d'un groupe d'abonnés à un seul
abonné. Autrement, on restera avec un système comme celui qu'on
connaît aujourd'hui, qui est dans l'enfance de l'art, en
réalité.
M. PERREAULT: D'après vous, figer le système dans le
Québec, dans le moment, à l'aube de cette révolution
technique, ce serait dangereux et ce serait, pour le progrès social et
culturel du Québec, dangereux de geler le système et
l'empêcher d'évoluer?
M. TANGUAY: Très dangereux. Il faut prévoir qu'un jour
lorsque les abonnés voudront communiquer entre eux, ils pourront le
faire au moyen d'appareils de signalisation qui devront passer
nécessairement par des commutateurs ou switcher. Si on ne le fait pas,
quelqu'un le fera. Il faudra que quelqu'un le fasse. Aujourd'hui, le
problème est quand même très grave et très
important. Permettez-moi de prendre l'exemple de Radio-Québec qui veut
transmettre à toute la population quelle qu'elle soit et où
qu'elle soit les mêmes émissions pour que toute la population
puisse en bénéficier. Nous avons, par notre système de
câbles coaxiaux, à partir des studios de Radio-Québec, sur
la rue Fullum à Montréal, édifié un réseau
qui nous permet d'apporter ces émissions à National, à
Câble T.V. ; nous avons, par notre réseau local coaxial ainsi que
notre réseau interurbain,
acheminé ces émissions à Québec; et
bientôt la région de la Gatineau sera aussi servie par
Radio-Québec grâce à ce réseau qui existe et sur
lequel nous pouvons faire aujourd'hui de la commutation qui n'est pas
automatique mais qui est manuelle.
M. PERREAULT: Alors, on peut conclure qu'un système
téléphonique à pleine capacité avec commutation
permettrait de donner des services que les câblodiffuseurs ne pourront
jamais donner?
M. TANGUAY: Les câblodistributeurs pourraient donner ces services
seulement en faisant une duplication totale et complète du réseau
téléphonique qui existe et en construisant et en édifiant
un réseau avec centres de commutation un peu partout, centres locaux,
centres régionaux, centres interurbains.
Ma prétention est que ces centres existent depuis
déjà vingt ou vingt-cinq ans, nous faisons de la commutation sur
le câble coaxial pour les signaux vidéo qui sont utilisés
sur l'interurbain. Les technologies ne sont pas différentes, les
technologies sont un peu plus poussées. Ce qui a retardé
jusqu'ici l'implantation de ces réseaux ce sont les coûts qui
étaient quand même assez fantastiques. Une fois que ces
coûts auront été abaissés, il y aura une utilisation
de plus en plus grande de tous les amplificateurs et des câbles coaxiaux
pour le simple service de téléphonie ordinaire et pour la
transmission des programmes de radio que nous faisons depuis des temps
immémoriaux et toutes sortes d'autres services à mesure que les
clients pourront penser à les créer et à les demander.
Nous avons des services, par exemple, à Montréal sur le
coaxial qui sont des services de point à point sur le coaxial, alors que
la câblo distribution, comme on la connaît, est d'un point de
transmission à des centaines, voire même à des milliers
d'abonnés. Le service dont je parle est un service de
télésurveillance et puis c'est un point dans la région de
Montréal à un autre point. C'est le jeu de la caméra et de
l'écran. Cela peut être utilisé par n'importe qui
désireux de louer un canal et qui peut se permettre de disposer de
caméras et disposer d'écrans ou de moniteurs.
M. PERREAULT: C'est à peu près tout pour le moment.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de
Saint-Laurent.
M. PEARSON: On a posé à peu près toutes les
questions que je voulais poser. Mais à la suite de toutes les
réponses qui ont été apportées ça nous place
dans un certain dilemme comme législateurs, c'est qu'on peut
prévoir la polyvalence éventuelle du fameux câble coaxial.
On se demande qu'est-ce qu'on doit faire, est-ce qu'on doit agir ou tout
simplement attendre que les compagnies de téléphone soient
financièrement capables d'installer de tels câbles ou que leurs
recherches soient à point, ou bien combien de temps ça pourrait
prendre? Si le législateur leur donnait l'exclusivité, ça
voudrait dire quoi? Est-ce que ça les aiderait à donner plus vite
les autres services en plus de la télévision par câble, les
autres services qui ont été mentionnés tantôt?
Est-ce que c'est un peu dans ce sens? Quelles seraient les conséquences
d'une législation qui vous donnerait l'exclusivité?
M. DUHAMEL: Ce que l'on prétend dans notre mémoire, c'est
que si on s'en remet à une seule compagnie qui fournirait les moyens de
transmission, ayant comme base dix ou douze canaux qui pourraient être
loués à des câblodistributeurs, il est bien entendu que la
compagnie de télécommunication est en meilleure posture pour
réellement fournir d'autres services, se servir des canaux qui seraient
disponibles.
En somme, le résumé justement pour vous dire, en tant que
compagnies de téléphone, ce que l'on pensait et la façon
dont on a cru que l'article 32 devrait être amendé. Nous voulions
vous donner au moins la façon dont on concevait les choses.
M PEARSON: Maintenant, si, actuellement, le câble était
installé dans toute la province par les compagnies de
téléphone, les autres services ou les progrès futurs que
vous avez mentionnés tantôt, est-ce que vous pourriez les donner
actuellement ou plus vite?
M. DUHAMEL: Bien, on pourrait les donner plus vite, bien entendu. Si on
pose un câble coaxial et que l'on peut s'assurer de $2 ou $2.50 de revenu
par maison, comme base, il sera beaucoup plus facile et cela ira beaucoup plus
vite d'introduire les autres services que l'on considère aujourd'hui
comme des services de l'avenir, mais qui seront assez répandus.
Il ne faut pas faire un point au sujet de la recherche, vous savez. Il
ne faut pas s'attendre que la recherche va être, à un certain
moment, complétée, rien de ça.
M. PEARSON: Non.
M. DUHAMEL: On peut, demain, avoir un amplificateur bien
supérieur à celui d'hier et qui sera désuet dans
très peu de temps. Cela a été l'histoire du
téléphone. On a commencé avec la commutation manuelle;
ensuite, on a pensé qu'avec l'équipement de pas-à-pas on
avait trouvé une solution; à peine avait-on franchi cette
étape il y a une couple d'années, cette génération,
qu'on a eu la barre transversale; maintenant, on en est rendu à
l'électronique et on ne sait pas ce qui va arriver demain. La recherche
ne sera jamais à point, comme vous dites. On en fait continuellement.
Mais, aussitôt qu'on aura découvert quelque chose, c'est comme
dans tous les autres domaines, fort
probablement que ce ne sera pas long avant qu'on soit à la
recherche d'autres procédés.
M. PEARSON: D'accord. Mais ce que j'aimerais savoir, c'est ceci. Une
fois ce câble installé par vous, vous avez mentionné que sa
moyenne de vie peut être d'à peu près sept à douze
ans mettons une moyenne de dix ans ce même câble,
s'il est installé exclusivement, disons, pour les fins de la
télévision, ne pourra pas servir à autre chose, mais,
à l'intérieur de cette vie de dix ans, avec les résultats
de vos recherches actuellement, et c'est connu un peu partout ailleurs, est-ce
que vous considérez qu'il pourrait s'ajouter d'autres services pour le
même coût d'installation?
M. DUHAMEL: Oui. Si le service que l'on offrira... Vous savez...
M. PEARSON: Le même câble pourra vous servir à
l'intérieur de ces dix ans.
M. DUHAMEL: Oui.
M. PEARSON: Vous êtes capable de prévoir qu'il y aura des
découvertes...
M. DUHAMEL: Absolument.
M PEARSON: ... et que ce ne sera pas dans 25 ans, mais
peut-être...
M DUHAMEL: Oui.
M. PEARSON: ... dans quelques années au point de vue des
applications et le même câble pourra servir dans un avenir assez
rapproché.
M. DUHAMEL: Oui. Si l'on faisait, dans Rouyn-Noranda, une installation
et que le câblodistributeur en question, qui détient le permis,
venait nous trouver et disait : Là, on va s'entendre sur un prix pour un
minimum de canaux, et qu'on déterminait quel est le prix pour quinze
canaux, disons, et qu'il nous reste quinze canaux à louer, bien entendu,
on pourra activer la mise en marché et essayer d'utiliser les quinze
canaux qui seront encore disponibles dans ce câble. Cela pour autant que
l'article 32 sera modifié et que l'on se dirigera vers un système
complet, c'est-à-dire que tous les moyens de
télécommunication, les moyens de transmission seront fournis par
la compagnie de télécommunications. Cette même chose ne
pourrait pas être possible avec le système qui est en vigueur
actuellement, c'est-à-dire selon le contrat partiel où on a
divisé le bébé en deux et où les
câblodistributeurs sont propriétaires des amplificateurs et les
compagnies de téléphone sont propriétaires des
câbles.
M. PEARSON: Merci.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): M. le député de
Saint-Laurent, avez vous terminé?
M. PEARSON: Oui.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): M. le député de
Chicoutimi.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, l'audition du
mémoire et les explications qui nous ont été fournies nous
convainquent de l'importance de l'article 32, de son importance, sinon de sa
nécessité absolue, soit le privilège ou le droit qui
serait donné à la régie de décider de l'utilisation
des véhicules ou des systèmes techniques de transmission des
signaux.
Nous avons entendu divers organismes et entreprises qui ont tous
insisté sur l'importance de la câblodistribution. Nous avons
essayé d'avoir des chiffres pour établir les rapports de
coûts, les aspects techniques. Nous avons entendu, ce matin, des
spécialistes nous parler de l'aspect technique du problème.
Evidemment, cela ne rend pas facile la tâche du législateur
qui a à s'occuper de la qualité et du coût des services. Il
nous serait donc très difficile ce matin, en ce qui nous concerne, en
tout cas, de dire aux personnes qui se sont fait entendre que nous sommes
disposés à accepter leur suggestion, la suggestion qui se trouve
aux pages 8 et 9 de leur mémoire et qui réclame en fait
l'exclusivité des moyens techniques de transmission. Je pense que c'est
encore la régie qui sera la mieux placée pour décider,
lorsque les requérants se présenteront devant elle, compte tenu
des situations existantes, qui pourra, devra utiliser tel ou tel
véhicule. Parce que toute l'argumentation que l'on a faite ce matin
visait à démontrer la valeur des services fournis par les
entreprises de téléphonie, à démontrer que les
coûts en seraient moindres, encore que cela ne soit pas très
convaincant. Nous sommes donc dans l'obligation de demander au ministre de
revoir cet article 32 à la lumière des renseignements qui nous
ont été donnés mais nous ne pourrions pas souscrire, sans
un examen très approfondi, à la requête qui a
été soumise ce matin parce que nous aurions alors à nous
poser le problème de l'avenir de la câblodistribution, plus
précisément de la vocation de la câblodistribution.
Dans les échanges qui ont eu lieu nous avons entendu un de nos
collègues en particulier défendre la câblodistribution.
Nous savons qu'il est intéressé, soit lui-même ou par sa
famille, il connaît le problème. Alors, c'est face à ces
intérêts que je qualifierai de divergents que nous sommes
obligés de retenir, pour le moment, le jugement que nous aurons à
porter. Mais nous croyons, pour l'instant, que la régie, avec tous les
pouvoirs qui lui seront impartis, sera encore l'organisme le mieux placé
pour déterminer qui devra faire quoi parce qu'à mesure que nous
entendons des mémoires les choses se compliquent et le tableau devient
de moins en moins clair. Alors, j'imagine que le ministre va projeter son laser
sur cette complexité technologique, socio-économique, etc.
et nous rendre réponse dans les délais les plus brefs.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): M. le député de
L'Assomption.
M. PERREAULT: J'ai une question à poser en tant que
résident de L'Assomption. Je ne vois pas le câble venir chez moi
très vite actuellement. On attend depuis des années et je ne le
vois pas poindre avant 10 ou 15 ans. Alors, si je comprends bien votre
énoncé, autrement dit les transporteurs communs sont prêts
à installer le câble coaxial immédiatement et ceci pourra
accélérer la polyvalence, à l'avenir, de façon
à diminuer les coûts du coaxial dans les régions de plus
faible densité.
Je pense bien que le grand problème dans le moment, pour
l'expansion du câble, ce sont les régions où la
densité de la population est la moins grande parce que les coûts
sont beaucoup plus grands, il y a moins de population au mille carré.
Alors, j'aimerais savoir de vous si, en alliant les usages et en confiant aux
transporteurs communs l'installation des coaxiaux, des régions comme la
mienne pourraient avoir la câblodiffusion plus vite?
M. DUHAMEL: En autant que la compagnie qui dessert ce territoire est
concernée. Du moment que l'on recevra une demande d'un entrepreneur qui
détiendra un permis des autorités compétentes, comme on le
disait tout à l'heure, ce sera une question de semaines avant que l'on
ne pose le câble coaxial qui vous apportera le service que vous
désirez.
M. PERREAULT: Seriez-vous prêts à ne louer que quelques
canaux, six, huit ou douze canaux sur vos trente canaux?
M. DUHAMEL: Oui. Vous savez, c'est le genre de système où
l'on croit devoir se diriger. Non pas le système de contrat partiel tel
qu'il existe actuellement, parce qu'il est reconnu des deux parties qu'il n'est
pas bon, mais ce serait exactement ce que l'on a. J'ai eu des discussions avec
d'autres qui ont obtenu d'autres permis mais les câblodistributeurs, pour
des raisons qu'il faut reconnaître si l'on était dans leur
industrie aussi, ne veulent réellement pas entendre parler du
système que j'essaie de décrire qui est celui en vertu duquel les
compagnies de télécommunication fourniraient les moyens de
transmission.
M. PERREAULT: Une autre question pour finir, en ce qui me concerne. Un
député a parlé tout à l'heure de la clause de
restriction. Est-ce que, si une compagnie de câblodiffusion venait avec
un programme de transmission de télééducation vous seriez
prêts à accorder la possibilité d'employer des canaux pour
cet usage?
M. DUHAMEL: C'est déjà prévu. Il n'y a aucune
restriction en autant que tous les services, comme Me Racicot disait tout,
à l'heure, qui ont été mentionnés dans la
présentation des câblodistributeurs, peuvent être
donnés à l'heure actuelle. D'ailleurs cette question de
restriction, vous savez, elle fait partie d'un contrat qui, à mon sens,
est désuet. Si un câblodistributeur ou tout autre entrepreneur
s'adressait à une compagnie de télécommunication,
demandait un minimum de 12 canaux pour tel ou tel usage, et demandait 5 canaux
additionnels pour tel autre usage, comme on le fait actuellement pour ce qui
est du service téléphonique ou tout autre service de
communication que l'on fournit, il en fait l'usage qu'il veut.
M. PERREAULT: C'est un peu comme lorsque vous louez des canaux à
l'Hydro-Québec, il en fait l'usage qu'il veut pour la transmission de
données ou pour des téléindications?
M. DUHAMEL: Absolument.
M. PERREAULT: Alors, vous permettez cela. Merci.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Frontenac.
M. LATULIPPE: Pour un renseignement personnel, vous êtes revenu,
c'était la question du député de L'Assomption, sur les
limites du contenu. Pourtant, quand je relis encore cette section du
mémoire qui nous a été soumis ce matin, on nous dit: "II
n'y a rien dans le présent contrat qui puisse être
interprété de façon à permettre la transmission de
données qui ne ferait pas partie ou qui ne serait pas
complémentaire d'une émission de télévision ou
d'une émission de radio transmise par câble".
Dans ce sens, ne croyez-vous pas que c'est un peu exercer sous une
certaine forme un droit de veto sur le contenu, qui ne répond pas
nécessairement aux besoins actuels, mais qui contingente les
possibilités futures.
M.DUHAMEL: M. le député, s'il s'agissait d'une entreprise
comme celle de votre famille ou peu importe et que cette clause était,
en ce qui vous concerne, un obstacle, c'est la régie qui
déciderait si la clause est raisonnable ou non. Maintenant, cette
clause, en réalité, fait partie d'un contrat ou de l'approche
à un service et j'ai dit tout à l'heure, que je la croyais
désuète ou pas idéale.
Où la compagnie de télécommunication, en
fournissant un câble, dira-t-elle: faites-en l'usage que vous voulez?
S'ils étaient des télédistributeurs, mais si, comme ils le
prétendent et c'est bien leur affaire ce sont des
compagnies qui véhiculent les signaux, avez-vous vu des compagnies
semblables offrir des services à des concurrents, en disant: Avec nos
câbles, venez-nous faire concurrence dans l'avenir?
Elles ont aussi indiqué qu'il y avait des contrats d'attache aux
poteaux dans d'autres provinces où c'était tellement
supérieur. Mais, en réalité, même des compagnies de
télécommunication, dans d'autres provinces où l'on permet
des attaches aux poteaux, y vont de leurs restrictions aussi, et c'est normal.
Elles vont dire: Vous pouvez vous servir de nos poteaux, mais pas pour nous
faire concurrence.
En réalité, je reconnais que l'avantage particulier de
l'industrie du câble est qu'elle voudrait augmenter son rendement au
détriment des compagnies de télécommunication et le faire
sur nos poteaux, avec nos facilités.
Alors, la position des compagnies de téléphone est celle
que vous connaissez mais, encore une fois, je vous dis que cet article, je ne
le vois pas comme empêchant les câblodistributeurs de remplir
toutes les fonctions qui leur sont dévolues par leur permis
actuellement.
M. LATULIPPE: Dans ces conditions, M. Duhamel, pourriez-vous
développer un peu? Par exemple, prenons le cas de National Cable-vision
qui nous a dit qu'elle avait huit ou neuf contrats qui n'étaient pas
renouvelés soit avec votre société ou avec des
confrères au niveau des corporations. Savez-vous pourquoi National
Cablevision refuse de renouveler le contrat tel qu'il est bâti
actuellement?
M. DUHAMEL: C'est parce qu'elle ne trouve pas les termes du contrat
acceptables, je présume. C est bien ce qu'ils ont dit. Encore une fois,
les contrats qui ont été négociés par leur
association ne leur sont pas acceptables. Ils ne désirent pas s'engager
pour une période de dix ans, ce que d'autres ont fait. La version de
1970 du contrat dont on parle a été signée par 50 ou 55
entrepreneurs actuellement dans l'Ontario et dans le Québec.
M. LATULIPPE: Au Québec, combien, environ? On a dit qu'il y avait
145 câblodiffuseurs au Québec actuellement.
M. DUHAMEL: Je n'ai pas les chiffres pour le Québec.
M. LATULIPPE: Je vous remercie.
LE PRESIDENT (M. CorneUier): M. le ministre.
M. L'ALLIER: M. le Président, moi, je n'ai pas d'autres questions
à poser. Je remercie les intervenants des réponses qu'ils ont
données à nos questions et de la présentation qu'ils ont
faite de leur mémoire. Si les membres de la commission sont d'accord,
nous pourrions suspendre nos travaux pour les reprendre à quatorze
heures trente jusqu'à dix-sept heures et demie et entendre, dès
la reprise de la séance, M. Robert Routhier, du Conseil de
développement des media communautaires.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Alors, la commission suspend ses travaux
et les reprendra à quatorze heures trente jusqu'à dix-sept heures
trente.
(Suspension de la séance à 12 h 22)
Reprise de la séance à 14 h 38
M. PILOTE (président de la commission permanente de
l'éducation, des affaires culturelles et des communications): Nous
allons entendre à présent les groupes communautaires, à
savoir : Le Conseil de développement des média communautaires du
Québec; deuxièmement, le Conseil des média communautaires
de la Mauri-cie et du centre du Québec, la Communication Inter-Media
Sherbrooke, le SCRAM et la Télévision communautaire de
Saint-Félicien Inc. Le porte-parole principal est M. Robert Routhier. Je
demanderais aux autres personnes qui représentent ces organismes de bien
vouloir s'identifier. M. Routhier.
Conseil de développement des media
communautaires du Québec
M. ROUTHIER: M. le Président, messieurs les membres de la
commission, si vous permettez, je vais vous présenter les autres
personnes qui constituent le groupe. D'abord, il y a M. Pierre Allard de la
région no 4 qui était également membre de
l'exécutif du Conseil de développement des média
communautaires du Québec; M. Maurice Vallée, de la région
no 4, également de la Télévision de Drummond; MM.
André Castonguay et Jean Fortier, d'Inter-Media Sherbrooke.
Quand vous nommez le groupe de Saint-Félicien, ces gens sont
peut-être dans la salle, mais pas à notre connaissance.
LE PRESIDENT (M. Pilote): S'ils sont présents, je les inviterais
à venir s'asseoir.
UNE VOIX: Ils sont absents.
M. ROUTHIER: Avec votre permission, nous avons pensé vous
présenter un rapport succinct de l'essentiel des idées
véhiculées dans les divers rapports, supposant que vous avez eu
l'occasion d'en prendre attentivement connaissance, quitte à ce que dans
un deuxième temps, nous ayons l'occasion de répondre à des
questions, soit de clarification ou soit encore d'une autre nature. Ici, tel
que vous me l'avez suggéré tout à l'heure, on n'entend pas
faire état du second rapport présenté par le Conseil de
développement des media communautaires en réaction aux propos
tenus par les câblodistributeurs, de même que par les
radiodiffuseurs. On tient pour acquis encore là, que vous avez eu
l'occasion d'en prendre connaissance.
Très rapidement, si vous permettez, je vais vous présenter
un document que je vais appeler maintenant le CDMCQ, j'entend le Conseil de
développement des media communautaires du Québec. L'essentiel du
document tient au fait suivant: Nous sommes d'avis qu'il faut considérer
le câble comme un médium qui veut être un instrument de
développement pour la collectivi- té et ça c'est conforme
à ce qui est présenté comme projet de
réglementation et enfin c'est un service public.
Alors, pour la majorité de ces points, nous nous appuyons sur
l'essentiel des idées présentées dans la
réglementation. Ce triptyque nous amène à appuyer la
deuxième partie de notre mémoire, en disant qu'un
câblodistributeur, à notre avis, est un diffuseur. A ce
moment-là, la population, de même que d'autres groupes deviennent
des producteurs, ce qui nous amène à introduire une distinction
importante dans le projet de réglementation et tout le reste de notre
argumentation en dépend. Cela signifie tant pour les mesures
prévues que pour la publicité et pour tous les mécanismes
prévus concernant la programmation que les câblodis-tributeurs,
dans le cadre de la réglementation, ne sont pas concernés comme
tels, si on retient cette distinction fondamentale, à notre point de
vue. Eux ne sont, alors, que les gens qui permettent que dans ce medium soit
véhiculée une programmation qui tantôt vient de grandes
chaînes, comme Radio-Canada ou TVA, ou bien d'une population sur une base
locale. On est tout à fait disposé à s'accommoder d'une
distinction telle que l'ACTC vous la propose en ce qui regarde les
émissions locales, les émissions communautaires, les
émissions d'intérêt général. Pour nous, si on
retient ce mode de présentation sur une base locale, ces distinctions
n'ont plus tellement leur raison d'être, parce que c'est la population
locale qui devient le producteur d'émissions et on ne parle plus
d'émissions d'intérêt général ou
communautaires ou d'émissions locales.
D'ailleurs, dans cette perspective, il nous paraissait tout à
fait contreindiqué de vouloir confier aux câblodistributeurs la
production d'émissions locales, du moins de façon aussi
spécifique, quand on sait que, quand même, il y a des stations de
télévision dans pratiquement toutes les régions quand il
n'y en a pas deux. Il leur incombe d'assurer la production d'émissions
locales et non seulement d'être alimentées par les grands
réseaux. Quand je dis émissions locales, j'entends information,
pas strictement des petites variétés ou des talents locaux. A la
population reviendrait le fait de produire, j'entends d'assumer la
responsabilité d'une production communautaire.
A cette fin, à part le fait d'énoncer ce principe, on
prévoit trois moyens, dans le sens que cela suppose, sur une base
locale, l'organisation de la population, et que ce ne soit pas des
intérêts particuliers qui disent représenter la population.
Il devrait être prévu des mécanismes pour que toute la
population soit représentée de la façon la plus acceptable
possible pour constituer un comité de la production communautaire.
Ce comité, il s'agit de le doter des moyens nécessaires
pour lui permettre d'oeuvrer. On pense oeuvrer dans le sens de rejoindre la
population, savoir ce qu'elle désire, comment
elle entend s'y impliquer, et pour qu'elle participe à cette
programmation qu'on appelle communautaire.
Dans un troisième temps, ça suppose qu'ils disposent des
ressources pour ce faire. Je disais tout à l'heure que la
publicité, d'après nous, n'a pas à être un revenu
supplémentaire aux câblodistributeurs qui, à notre point de
vue, sont déjà très bien pourvus. Entre autres, la
publicité pourrait contribuer à financer cette production
communautaire, du moins à assurer au comité de programmation
l'argent nécessaire pour permettre cette production communautaire,
argent nécessaire qui permettrait de se procurer et du personnel et des
ressources dans le sens d'équipement et tout et tout. Et on rejoint les
préoccupations des câblodistributeurs à l'effet qu'il ne
leur revient peut-être pas strictement à eux de rendre disponibles
toutes ces facilités ou toutes ces ressources pour permettre une
production jugée souhaitable par le CRTC et par la présente
réglementation jugée comme nécessaire.
Le rôle de la Régie des services publics dans la
câblodistribution nous parait être, selon les propos tenus
jusqu'à maintenant, en définitive, qu'il lui reviendrait de tenir
compte des contingences territoriales et des diverses populations. A notre
point de vue, il faudrait que la réglementation, même
générale, dite de principe, soit quand même suffisamment
articulée pour qu'il ne soit pas laissé à la régie
de s'accommoder ou d'interpréter de façon aussi large qu'on l'a
vu ici depuis le début des travaux de la commission, les divers articles
prévus.
Si vous me permettez, de façon très rapide, je vais faire
la lecture des quelques recommandations, comme M. Tremblay me le
suggérait tout à l'heure, qui devraient être possiblement
la pièce de résistance pour fins de discussion.
Alors, les recommandations du CDMCQ se lisent comme ceci, à la
toute fin de votre document: La Régie des services publics doit d'abord
laisser à la population la responsabilité de toute la production
locale; ainsi, doit-on comprendre que tous les éléments de
programmation, tels que définis dans l'article 1, à l'exception
de la programmation éducative, doivent être sous la
responsabilité du comité de programmation communautaire. 2)Le
câblodistributeur demeure, par le fait même, le diffuseur sans plus
et, par conséquent, n'a ni le droit exclusif de décider de
l'orientation de la programmation, ni la responsabilité des contenus de
la production communautaire. 3) Le câblodistributeur demeure
obligé de fournir gratuitement à la population le ou les canaux,
le matériel et les studios, nécessaires à la diffusion,
ainsi que les ressources nécessaires à la production. 4)
L'entreprise de câblodistribution, en tant que service public, verse une
partie, à déterminer, de son revenu brut d'exploitation au profit
de la production communautaire au comité de programmation. 5) Avant
d'accorder un permis d'exploitation à une entreprise de
câblodistribution, la Régie des services publics doit s'assurer de
la formation d'un comité de programmation responsable et
représentatif de la collectivité concernée, de son pouvoir
effectif de décision et de ses moyens matériels et techniques
pour atteindre ces objectifs. 6) La Régie des services publics doit
définir ses critères d'évaluation de qualité de
technique, en termes de loi. Spécialement, il en est question aux
articles 10, 17 a) et 31. 7) En tant que diffuseur, l'entreprise de
câblodistribution ne doit pas être tenue de produire des
émissions et, par conséquent, le recours à la
publicité doit lui être défendu, le taux de
rentabilité de ces entreprises étant nettement
élevé.
A ce sujet-là, on a été beaucoup plus explicite
dans le second rapport qui vous a été remis. 8) La
publicité étant en fait un soutien à la production, le
CDMCQ considère qu'il revient au comité de programmation
communautaire plutôt qu'au câblodistributeur de pouvoir
bénéficier de cette ressource financière. 9) Toute
entreprise de câblodistribution doit faire approuver par la régie,
en plus des transactions contenues dans l'article 27, tout changement de tarif
d'abonnement et de frais d'établissement de câble. 10) Ne
serait-il pas plus juste que les droits perçus par la régie,
selon la section 1 de l'article 30, soient versés au comité de
programmation de la communauté ou, tout au moins, que la régie
justifie la perception de tels droits? 11) Enfin, certains termes du
règlement pourraient être définis ainsi... je vais
m'abstenir d'en faire la lecture.
Alors, en guise de conclusion, on insistait, à notre point de
vue, sur l'importance vitale de la présente commission et du projet de
réglementation qui est soumis même s'il va revenir à la
régie de voir à l'application plus immédiate de cette
réglementation.
On y est d'autant plus sensible qu'à un autre niveau qui vous a
précédé dans ce domaine, j'entends au CRTC, on a convenu
de généralités. En tout cas on s'est accommodé de
très grands principes, ce qui fait que les câblodistributeurs
peuvent faire à peu près ce qu'ils veulent à
l'intérieur. On souhaiterait bien, dans la présente
réglementation, que ce soit davantage articulé et qu'il ne soit
pas laissé à tout chacun la possibilité de faire une
interprétation dans le sens qu'il veut bien favoriser.
Alors, en vous remerciant de votre attention, si vous permettez nous
allons entendre M. Vallée, de la région no 04.
Télévisions communautaires de la région 04
M. VALLEE: Nous, de la région 04, on regroupe les
télévisions communautaires du
coin, Shawinigan, Sainte-Thècle, Grand'Mère, des
expériences qui se font là-bas. Il y a aussi Victoriaville,
où cela commence et Drummondville, où cela marche depuis un an.
Il y a, à Manseau, une autre expérience vidéo et on
fonctionne avec tout ce monde-là. Il y a aussi des projets de journaux
communautaires, des journaux de quartier qui se sont regroupés à
l'intérieur du Conseil de développement des media communautaires.
On essaie de planifier quelque peu tout ce qui se passe au niveau de la
région, les subventions qui arrivent d'un bord et de l'autre, les
projets PIL, les projets PJ pour essayer de voir ce qu'on fait avec cela et
où on s'en va.
Face au projet de réglementation de la Régie des services
publics, on s'est posé des questions. Au CDMCQ, on trouve qu'il y a une
distinction fondamentale qui n'a pas été faite entre la
câblodistribution et la production d'émissions locales, les
producteurs et les câblodiffuseurs. On trouve curieux qu'on donne aux
câblodiffuseurs le rôle de producteur, de créateur au niveau
du canal communautaire, en tout cas pour ce qui concerne les émissions
locales. On considère les câblodiffuseurs comme des distributeurs
de signaux et non pas des producteurs. Les producteurs, pour nous, ce sont les
gens qui font les émissions, ce sont les gens qui y travaillent, qui les
conçoivent, qui les réalisent et qui même parfois
suppléent au travail des câblodiffuseurs pour les diffuser sur le
câble. C'est arrivé assez souvent entre autres à
Drummondville. C'est nous-mêmes qui faisions partir les machines et on
diffusait. Alors, on trouve curieux que la responsabilité de ces
choses-là soit remise entre les mains des câblodiffuseurs alors
que c'est nous qui faisons la production.
On considère qu'on est capable d'en être responsable. A ce
même titre, on propose qu'il y ait, au niveau des localités
où il y a des télévisions, où il y a des
câbles, que ce soit un comité local de programmation qui s'occupe
du canal communautaire et qui soit responsable du contenu de ce qui est dit sur
ce canal et de la programmation qui est faite, et que le câblodiffuseur
n'ait rien à dire là-dessus, parce que, en fin du compte, il
n'est pas impliqué dans la production de ces choses; bien souvent
même, il derreure en dehors de la ville, il connaît très peu
les gens qui sont impliqués là-dedans, et il connaît
très peu aussi les besoins du milieu au niveau des communications. Il y
a des groupes communautaires qui travaillent; il y a des groupes qui ont besoin
d'information; il y a des groupes qui ont besoin de communiquer avec les autres
groupes; et ce sont des problèmes que les câblodiffuseurs ou
câblodistributeurs ne voient pas et ne perçoivent pas parce qu'ils
ne vivent pas dans le milieu, avec les gens quotidiennement.
Dans ce sens, on appuie intégralement le mémoire du CDMCQ.
Il y a certaines différences qu'on fait, entre autres, surtout au niveau
de la publicité et du financement. Le CDMCQ considère que la
publicité devrait financer le comité de programmation locale. On
a essayé de faire une petite analyse, on a essayé d'imaginer un
peu ce qui se passerait lors de la diffusion des émissions
communautaires.
La plupart de ces émissions discutent des problèmes, par
exemple du chômage ou des assistés sociaux ou encore des
problèmes au niveau des municipalités. Certains groupes essaient
de faire percevoir à la population qu'il existe des problèmes, et
qu'il faut que ces problèmes se règlent. Si on passe de la
publicité entre ces messages, on trouve que c'est contradictoire, parce
que la publicité, pour nous, après étude, nous dit qu'on
vit dans un monde merveilleux, c'est un paradis, il n'y a pas de
problème, cela n'existe pas. Vous achetez des Mustang, quelque chose du
genre, et vos problèmes sont réglés. L'essentiel de tous
nos messages c'est qu'il existe des problèmes, il faut qu'ils se
règlent, il faut qu'on trouve des solutions. Alors que l'autre message
dit: II n'y a pas de problème, puis il n'y a pas de solution à
trouver, et vous êtes bien.
Alors, cela vient en contradiction avec tout ce que l'on fait. Dans ce
sens, s'il y a de la publicité sur le câble, nous, cela ne nous
intéresse plus de passer par un medium comme celui-là, parce que
la publicité, en fin de compte, est beaucoup plus forte que les
citoyens. La publicité fonctionne avec l'argent, alors que les citoyens
fonctionnent avec de l'énergie bénévole; c'est du temps
que des gens consacrent à informer d'autres gens, à faire
naître, en tout cas, une participation des citoyens, une prise en main
des responsabilités. Or, la publicité dit justement: Ne prenez
pas vos responsabilités; vous êtes heureux comme cela. Cela est
une petite analyse de l'affaire.
Là, je saute à un autre sujet. Il y a le comité de
programmation, il y a le câblodiffuseur et la régie. La
programmation s'occupe de tout ce qui est programmation sur le canal
communautaire. J'ai l'impression que les citoyens aimeraient bien, à un
moment donné, avoir un mot à dire dans tout ce qui va être
diffusé sur le câble. Par exemple, je sais qu'à
Drummondville ou dans d'autres TVC on pense diffuser un, deux, trois ou cinq
canaux américains. Cela fait plus ou moins l'affaire des citoyens. Ils
aimeraient bien avoir un mot à dire aussi sur la diffusion qui va se
faire, par exemple, des émissions de Radio-Québec. En gros, ils
sont d'accord, mais que le câblodiffuseur dise: Bon, cela passe à
telle heure et vous autres, vous allez passer à telle autre heure, c'est
moins bon. Il y a des contacts à faire et il y a des ententes à
réaliser, en tout cas.
Dans le rôle de la programmation aussi, les gens ressentent un
besoin de savoir ce qui se passe, ce qui arrive avec le câble, ce qui va
passer dessus. Il y a un manque d'information et de communication entre les
câblodiffuseurs et les citoyens chez qui ces câbles se sont
implantés. Les câblodiffuseurs ont des projets à
long terme; ils voient cela de très loin. Tantôt, on
parlait de 35 canaux, de transmission de données, etc., et les citoyens
sont complètement en dehors de tout cela. Ils ne savent pas ce qui s'en
vient et cela leur fait peur dans un sens.
Cela, c'est pour le comité de programmation. Vu les profits
souvent énormes qu'ils peuvent réaliser par l'exploitation de
leur entreprise, on pense qu'il y aurait possibilité que les
câblodif-fuseurs réinvestissent quelque peu de cet argent pour
développer cette communauté, développer des liens entre
des groupes de citoyens et les individus eux-mêmes.
On pense que les câblodiffuseurs devraient financer, comme le
CDMCQ l'a dit tantôt, à la fois un canal, c'est-à-dire un
modulateur, etc., ce qui est très peu, le matériel de production
et même un, deux ou trois techniciens, selon la grosseur de la
localité.
Le câblodiffuseur, pour nous, fournit tout ce qui est technique,
tout ce qui est entretien et tout ça. Le rôle de la régie
là-dedans serait un rôle d'observateur, de surveillant, en quelque
sorte, de la représentativité des comités de programmation
au niveau local.
En gros, c'est ce que nous disons. Cela s'appuie sur des
expériences très, très concrètes au niveau de la
région, des expériences pratiques, vécues au jour le jour
avec les gens, et ce ne sont pas des représentants des classes
favorisées, en tout cas, pour ce qui concerne les expériences de
télévision communautaire qui se font dans notre
région.
Souvent vous avez, à la tête de ces organismes, des gens
qui ont très peu d'instruction, qui ont une communication verbale et non
pas écrite, littéraire et tout ça. La communication
audiovisuelle pour eux, est une chose pas mal importante pour se faire
comprendre des autres et exprimer leurs besoins. C'est pour ça qu'ils
s'impliquent là-dedans et je pense que la commission devrait se
préoccuper beaucoup plus de la représentativité de ceux
qui ont la responsabilité des câbles, du canal communautaire.
Merci beaucoup.
Communication Inter-Media Sherbrooke
M CASTONGUAY (André): Le mémoire que je veux
présenter est au nom de Communication Inter-Media Sherbrooke, au sujet
de la réglementation relative aux entreprises publiques de
câblodistribution. Il se situe en trois points, comme vous avez pu le
remarquer: à savoir un premier point qui veut marquer vraiment
l'intérêt de Communication InterMedia pour présenter un
mémoire à la commission parlementaire; un autre point qui veut
soulever certains points à l'intérieur du projet, qui veut
exprimer notre compréhension de ces points-là, dire comment nous
les voyons, et un dernier élément à la suite de cette
constatation qui serait de proposer des solutions ou des ajouts que nous
croyons heureux.
D'abord, pour nous situer, il faut dire que
Communication Inter-Media Sherbrooke est un organisme à but non
lucratif.
Nos objectifs généraux sont de favoriser l'expression et
la communication entre les citoyens de Sherbrooke et des environs, de sorte que
nous nous faisons un devoir de contribuer au développement du milieu
selon les intérêts de la population, à savoir les citoyens
exclus des mécanismes de décision. Ce sont nos principales
préoccupations.
Pour arriver à cette fin, nous voulons orienter nos actions dans
le sens suivant, à savoir créer un centre de production sans but
lucratif qui soit accessible à tous les citoyens de la zone
concernée pour tout document audio et vidéo, que ce soit le
magnétoscope, la photographie ou l'imprimé, et aussi, sans but
lucratif, diffuser des productions audio et vidéo du centre par tous les
canaux appropriés, à savoir, par exemple, salle publique ou
semi-privée, câbles communautaires, postes locaux de radio et les
journaux du milieu. Nous voulons intensifier notre action cette année en
vue surtout de travailler à la promotion d'une véritable
information et auto-information, de même que de travailler à la
création d'une place publique en regard des questions vitales du
milieu.
Dans cette ligne, nous avons travaillé déjà depuis
plus d'un an. Notre expérience repose sur des relations établies
déjà avec Câblevision Sherbrooke depuis tout ce
temps-là, de même que sur la production d'émissions
communautaires.
Je pense qu'il serait bon de souligner que, cette année, dans
toutes les productions communautaires qui ont eu lieu sur le canal 11, à
Sherbrooke, sept heures et demie d'émissions ont été
assurées par des groupes se rattachant à Inter-Media, alors qu'il
y a seulement deux heures d'émissions locales qui ont été
assurés par Câblevision.
Il est bon de souligner aussi que 30 groupes ou organismes
différents travaillent activement avec Communication Inter-Media
Sherbrooke et que, finalement, notre action, cette année, a
regroupé 22 équipes de production rejoignant ainsi près de
200 personnes. Tout cela pour dire que nous nous situons vraiment dans cette
participation des gens, que notre attitude se veut une représentation du
milieu et de ses besoins et qu'elle se veut aussi vraiment constructive.
Pour passer au deuxième point, à savoir notre
compréhension face à certains points qui sont soulevés
dans le projet de la réglementation, nous nous situons, d'ailleurs,
comme le projet lui-même, dans la ligne du livre vert sur les
communications, qui a été publié en mai 1971. Ses lignes
principales étaient les suivantes, simplement pour les rappeler: "Quant
aux citoyens, le ministère des Communications doit assurer le droit
inaliénable pour les citoyens du Québec à la communication
selon leurs besoins culturels, sociaux, économiques et politiques.
"Quant à l'Etat, le ministère des Communications doit
pourvoir directement ou indirectement le gouvernement et ses organismes d'un
système moderne de communications leur permettant d'assumer pleinement
toutes leurs responsabilités envers la population du Québec. "Et,
quant à la collectivité, le ministère des Communications
doit promouvoir et maintenir un système québécois de
communications, intégré aux systèmes extra-territoriaux ou
internationaux, qui facilite et contribue à l'épanouissement de
tous et à la réalisation des objectifs du Québec."
Face à ces orientations qui sont, d'ailleurs, soulignées
dans le projet, nous dégageons ce qui suit. Nous voulons
particulièrement souligner l'article 5 qui dit: "Toute entreprise
publique de câblodistribution doit être un instrument permanent de
développement social, culturel et économique de la
collectivité". Or, il nous semble que ceci est insuffisant, à
savoir que la formulation des diverses formes de participation prévues
n'offre aucune garantie que la population d'un milieu donné sera
associée à la prise de décisions relatives à
l'entreprise de câblodistribution, à moins que ne soit
assuré que ce soit appuyé par des obligations
spécifiées, par des critères et des mécanismes
précis, qu'on y ajoute ça.
Autrement, on ne voit pas comment les gens pourraient avoir droit de
regard là-dessus et y participer. Un mécanisme qui pourrait
être soulevé entre autres, c'est un comité de programmation
qui vienne vraiment du milieu. D'ailleurs, on y reviendra un peu plus tard dans
les solutions que nous proposerons. Je pense qu'il faut se rappeler une autre
difficulté: on ne peut pas tellement y faire de reproches
celle que les câblodistributeurs aient envie de faire un peu la
monopolisation, à savoir s'étendre à des réseaux,
avoir une action plus étendue. Par contre, cette monopolisation
amène, en même temps, un élargissement territorial et un
anonymat, ce qui nous semble, rendrait beaucoup plus difficile la participation
d'un milieu donné à l'orientation, au développement du
milieu à travers ces media.
Autre point à souligner, on rappelle dans l'article 21, que c'est
la priorité aux émissions éducatives et communautaires qui
doit être dans les conditions. Or, d'autre part, dans l'article 13, on
défend la publicité pour ce qui est de ce genre
d'émissions sans pour autant assurer une autre source permettant de
financer ou de produire des émissions communautaires. Si on prend le
milieu de l'éducation, ça ne pose pas tellement de
problèmes pour eux-même s'il n'y a pas de ressources qui soient
prévues parce qu'on sait qu'ils sont quand même assez pourvus de
ce côté. La chose n'est pas identique pour ce qui est des
groupements communautaires, des groupements de base qui n'ont pas
derrière eux tous ces moyens financiers. Nous croyons qu'il y a vraiment
des services qui devraient être établis. J'en cite quelques-uns,
à savoir qu'il importe de faire la promotion dans un milieu
donné, de posséder la mobilisation de groupes, d'assurer une
formation de base aux fonctions de réalisation et autres, outre la
manipulation des appareils pour un certain nombre de personnes, de veiller
aussi à un follow up permettant un perfectionnement nécessaire et
d'autres besoins, ce qui n'est pas sans mobiliser un tas de ressources humaines
et matérielles.
D'ailleurs, à Sherbrooke, l'expérience dans cette ligne
s'est avérée un peu difficile parce qu'un groupe comme le
nôtre, qui était assez jeune à ce moment-là, a
dû pour la majorité assurer tous ces services qui n'étaient
pas faits par câblovision, à savoir la formation des gens, la
mobilisation, tous les services qui sont donnés ici ont
été faits en grande majorité par Communication
Inter-Media.
Il faut se dire en même temps que face à la
rentabilité possible, les câblodistributeurs seront davantage
portés à s'orienter vers des émissions de type local ou
d'intérêt général. Mais sur ce point, il ne faut pas
oublier que ça pourrait facilement faire emploi avec les autres postes
locaux qui existent déjà ou qui sont à venir, soit un
deuxième poste de télévision à Sherbrooke, qui ont
justement pour vocation, entre autres, de produire des émissions
locales.
J'en viens maintenant aux propositions que nous faisons face à
ces remarques. Le sens de nos propositions, c'est qu'on croit vraiment que
c'est une responsabilité du gouvernement du Québec
d'énoncer des principes généraux et aussi d'aller plus
loin dans la précision de ces principes pour en assurer
l'application.
Nous souhaitons qu'il y ait vraiment des garanties que les citoyens
pourront décider en matière de câblodistribution suivant
leurs besoins et que les ressources nécessaires à leur
réalisation seront rendues disponibles en vue du développement
auquel ils aspirent.
Donc, nous proposons, premièrement, que la Régie des
services publics fasse une obligation aux câblodistributeurs d'affecter
un canal d'abord et avant tout aux émissions communautaires, quitte
à ce que d'autres types d'émissions complètent la
programmation de ce canal.
Deuxièmement, nous proposons que la Régie des services
publics fassent aussi une obligation aux câblodistributeurs de former un
comité composé de représentants voués aux
intérêts des propriétaires et surtout de
représentants voués aux intérêts de la
communauté locale chargée de la complète
responsabilité de la programmation du canal affecté d'abord aux
émissions communautaires. Les représentants du milieu au
comité doivent provenir, à notre avis, des secteurs suivants:
social, religieux, économie, travail, éducation, groupes
populaires, loisirs et culture, information. Ce comité doit être,
à notre avis, décisionnel et non pas consultatif pour la
compagnie propriétaire.
A cette responsabilité au niveau de la programmation sur ce canal
doit être ajoutée celle
de décider de l'affectation des sommes d'argent procurées
au comité par les câblodistributeurs, à qui la régie
doit faire une obligation de verser un montant suffisant à la
réalisation d'émissions communautaires dans une proportion
correspondant à un certain pourcentage du revenu annuel brut de ces
mêmes câblodistributeurs. Ainsi, les câblodistributeurs sont
appelés à garantir directement, et selon un montant significatif
par rapport à l'envergure de leur entreprise, les sommes d'argent
nécessaires à l'affectation de ressources humaines et
matérielles en vue d'assurer les services jugés essentiels par le
comité pour la réalisation d'émissions communautaires.
Par la suite, le milieu, avec l'assistance financière
gouvernementale et autres compléteraient cet apport de la compagnie
propriétaire ainsi préoccupée de développement
autant que de profit.
Troisième proposition. Là où existe
déjà une station ou plus de télévision locale, la
régie doit signifier sa volonté aux câblodistributeurs
concernés de s'abstenir de procéder à la
réalisation d'émissions locales. Normalement, ces stations de
télévision locales doivent produire de telles émissions.
De plus, il nous parait que la production d'émissions locales au sujet
desquelles la publicité n'est pas exclue constituera le plus beau
prétexte pour les câblodistributeurs de n'investir que très
faiblement dans les émissions communautaires.
Quatrième proposition. La Régie des services publics doit
faire une obligation aux câblodistributeurs de se doter d'un
comité de programmation de niveau décisionnel en regard de la
programmation de tous les canaux offerts par l'entreprise de
câblodistribution. Une communauté donnée ne peut confier le
soin de toute la programmation offerte par les câblodistributeurs
à une minorité. Le milieu doit être associé quant au
choix de la programmation globale de l'entreprise, et cela au niveau
décisionnel. Peut-être que ce dernier comité prévu
pour les émissions communautaires, dont on a parlé tout à
l'heure, devrait assumer cette tâche qui est dans le même
ordre.
Cinquième proposition. Pour le bénéfice de tous, la
population comme les câblodistributeurs et la régie, un certain
nombre de termes et/ou d'articles doivent être précisés
dans le projet de règlement. D'abord, à l'article 1 c) et
à l'article 21 d), la définition retenue pour "émissions
d'intérêt général" nous inquiète parce que
trop résiduelle, pas suffisamment précise. Cela constitue une
échappatoire trop facile pour les câblodistributeurs.
Aux articles 9 et 10, nous aimerions être informés
clairement des critères selon lesquels sera appréciée la
qualité du service.
A l'article 11.2, il importe que la régie s'assure de certaines
garanties que la programmation autorisée par la régie sera
réellement offerte, tellement d'événements permettent aux
câblodistributeurs de s'excuser de changements d'importance dans leur
programmation. Le co- mité proposé à l'article 3.4
constitue un élément de garantie appréciable, à
notre point de vue.
A l'article 31, nous sommes d'avis que les normes techniques auxquelles
sont tenues de se conformer les entreprises de câblodistribution doivent
être diffusées le plus possible et connues du grand public. Ces
précisions et ces garanties, loin de nous paraître comme de
simples modalités, constituent des aspects importants du projet de
réglementation. Autrement, les câblodistributeurs s'accommodent de
ces principes généraux que l'absence d'une réglementation
précise évite de cerner, le plus souvent au détriment des
communautés locales.
La reconnaissance aux câblodistributeurs d'une marge de profit
raisonnable ne nous empêche pas de prévoir des mécanismes
garantissant des services adéquats à la population. Alors, ce
sont les points que nous aimerions souligner. Nous croyons que ce serait
vraiment important pour le règlement de préciser ces points pour
vraiment assurer l'orientation de base de tout le projet. Merci.
LE PRESIDENT (M. Pilote): La parole est à l'honorable ministre
des Communications.
M. L'ALLIER: M. le Président, j'ai entendu, avec
intérêt, les exposés qui viennent d'être faits. Je
voudrais d'abord préciser, pour les membres de la commission,
résumer, en fait, ce que nous savons déjà, à savoir
quelle est l'étendue de l'intervention du législateur par voie de
réglementation au niveau de la télévision
communautaire.
D'abord, vous avez à l'article 15 du règlement un article
général qui prévoit que pour les fins d'émission
communautaire et de programmation éducative l'entreprise publique de
câblodistribution doit mettre gratuitement un ou plusieurs canaux
à la disposition de la communauté ou d'un organisme chargé
de faire de la programmation éducative. Ce qui veut dire que, dans la
mesure où l'on parle de un ou plusieurs canaux qui doivent être
mis gratuitement à la disposition de la télévision
communautaire ou de la télévision éducative, il ne s'agit
pas nécessairement de l'ensemble des frais j'explique le
règlement tel qu'il est rédigé maintenant qui
peuvent être inhérents à telle production communautaire ou
éducative. C'est la disponibilité d'un ou de plusieurs
canaux.
Pourquoi dit-on un ou plusieurs canaux? Précisément pour
laisser à la Régie des services publics cette marge de manoeuvre
qui permet d'évaluer l'ensemble de la programmation proposée sur
plusieurs canaux et de voir s'il est possible ou souhaitable d'avoir un canal
éducatif, un canal communautaire ou même deux canaux
communautaires et un canal éducatif ou, à l'inverse, deux canaux
éducatifs et un communautaire.
C'est le sens de l'article 15, qui doit être publié en
même temps que les articles 18 et 21.
A l'article 18, on parle de la programmation,
de la production minimale. On dit: La production de toute entreprise
publique de câblodistribution doit, outre la programmation
éducative, être d'une durée minimum de dix heures par
semaine et comprendre obligatoirement des émissions communautaires,
deuxièmement, des émissions locales. Le règlement ne fait
pas aux câblodistributeurs une obligation de faire de la production. En
d'autres mots, un câblodistribu-teur peut, dans la programmation qu'il
soumet à la Régie des services publics, proposer uniquement de
faire de la retransmission d'émissions déjà produites ou
de canaux déjà existants. Cela se justifie par la très
grande divergence de dimension qui existe entre les entreprises de
câblodistribution existantes sur le territoire québécois.
Cependant, si un câblodistributeur décide qu'il peut faire de la
production, nous avons indiqué, ici, que cette production devait
être d'une durée minimale de dix heures. C'est en gros sur les
indications qui nous ont été données par les
câblodistributeurs que c'était, en fait, un minimum, un seuil, si
vous voulez, à partir duquel on pouvait commencer à parler de
production, en deça duquel on ne peut pas parler véritablement de
production que nous avons indiqué ceci.
Des émissions communautaires, donc, sont obligatoires de
même que des émissions locales. Il n'y a pas de répartition
de temps par rapport à l'une ou l'autre catégorie. J'ai
indiqué, au début de la commission parlementaire, des amendements
de concordance que nous apportons maintenant à cet article et qui font
ajouter, après les mots "des émissions communautaires", les mots
suivants "et prévoir des émissions consacrées", etc. et
d). En d'autres mots, c) et d) sont facultatifs, a) et b) sont obligatoires
à l'intérieur de la production qui serait proposée par un
câblodistributeur, laquelle production se situe, elle, à
l'intérieur d'une programmation qui est majoritairement de la
retransmission.
Le troisième article qui est pertinent au sujet qui nous
intéresse maintenant est l'article 21, où on dit c'est
l'ordre de priorités, en fait Toute entreprise publique de
câblodistribution doit offrir sa programmation, tant audio que visuelle,
selon l'ordre de priorités suivant: a), b), c), d), e), f ), g)
étant, par référence, précisé dans le
deuxième paragraphe. La programmation éducative, c'est donc a);
b), les émissions communautaires; c) les émissions locales; d)
les émissions d'intérêt général. C'est
essentiellement à la régie qu'il appartient, au moment
d'étudier une programmation proposée par un
câblodistributeur, de voir à ce que l'économie
générale de cet ordre de priorités soit respecté,
compte tenu du potentiel de production, de la dimension de l'entreprise et de
tous les facteurs qui jouent et qui font, en fait, qu'il n'y a pas deux
entreprises de câble qui sont semblables au Québec à ce
point de vue.
Donc, sur ce point, l'économie générale du
règlement est la suivante. Nous avons voulu, d'une part, assurer la
collectivité québécoise que l'entreprise de
câblodistribution soit obligée de mettre gratuitement un ou
plusieurs canaux à la disposition de la communication communautaire et
éducative. Deuxièmement, nous avons voulu faire en sorte que ce
soit la Régie des services publics, à ce stade-ci, qui soit
l'autorité finale pour faire l'arbitrage dans la pondération de
la programmation et de voir quel pourcentage devait être consacré
à tel ou tel aspect.
Quant à la publicité à laquelle vous avez fait
allusion, nous avons voulu, dans le règlement, la rendre accessible aux
câblodistributeurs mais dans des conditions extrêmement
précises qui sont contenues à l'article 13. Lorsque vous avez
mentionné tout à l'heure que la publicité était
interdite pendant ou à l'occasion des émissions communautaires,
il y a une légère inexactitude. Ce qui est prévu dans le
règlement, c'est que la publicité est interdite lors
d'émissions communautaires ou dans le contenu d'une émission
communautaires; elle n'est pas interdite pour une émission
communautaire, avant ou après une émission communautaire. On ne
pourrait pas couper une émission communautaire pour passer un message
commercial. En d'autres mots, prendre l'auditoire qui s'intéresse
à telle émission communautaire et profiter de sa captivité
temporaire pour lui passer un message publicitaire. Le but était de
restreindre la publicité au moment de la production communautaire.
Ce que je retiens des exposés qui ont été faits,
j'en oublie certainement mais ce que je retiens essentiellement, c'est ceci. Un
point que je partage évidemment, parce qu'on l'a énoncé au
moins dans son principe dans le livre vert, c'est que la
télévision par câble de tous les moyens audiovisuels de
communication de masse est peut-être celui, à ce moment-ci, qui a,
toutes proportions gardées, le plus de possibilités de
participation des citoyens en regard de la télévision
traditionnelle ou de la radio traditionnelle, même en regard des
journaux.
A partir de là et dans la mesure où c'est une chose dont
nous sommes conscients, comme vous, vous l'indiquez, si, effectivement, on doit
avoir de la programmation communautaire, il faut prévoir dès ce
règlement et à ce moment-ci un mécanisme qui garantisse la
participation de la communauté à l'élaboration plus ou
moins grande, suivant les exposés qui viennent d'être faits, de la
programmation. Certains souhaitent que cette participation de la
collectivité desservie soit décisionnelle sur l'ensemble de la
programmation de tous les canaux, d'autres indiquent que cela pourrait se
limiter à la production locale. Quoi qu'il en soit, il y a un
désir d'insérer dans un projet de règlement, à ce
moment-ci, un mécanisme qui obligerait soit la régie, soit les
câblodistributeurs à traiter avec un comité de production
communautaire dont le rôle pourrait varier suivant les exposés qui
sont faits. Ce comité de production communau-
taire, en tenant pour acquis qu'essentiellement le dénominateur
commun veut qu'il s'occupe de la production communautaire du canal, donc
réservé à la production communautaire c'est la
conséquence logique de la première partie de votre exposé
devrait pouvoir disposer d'un certain nombre de moyens financiers pour
agir. Vous faites référence à la porte ouverte à la
publicité en disant: Si vous ouvrez une porte à la
publicité, pourquoi ne pas faire en sorte que cette porte s'ouvre
surtout, ou essentiellement ou uniquement sur le communautaire.
Le troisième point que je retiens, c'est que vous
considérez qu'il est important, à ce moment-ci, de limiter le
pouvoir discrétionnaire de la Régie des services publics afin que
vous ayez dès maintenant, dans une loi ou dans un règlement, des
garanties sur les deux points énoncés précédemment
et que la discrétion de la régie pourrait bien ne pas s'exercer
dans le sens que vous souhaitez, après tout, et qu'en conséquence
il vaudrait mieux prévoir maintenant une réglementation en ce
sens-là.
Je voudrais faire un très bref commentaire sur l'ensemble, M. le
Président, et réserver par la suite mon intervention à la
fin, s'il y a lieu, sur un certain nombre de points. On pourrait porter un
jugement global sur les exposés que vous avez faits en disant que c'est
peut-être une vue idyllique de la société idéale que
vous proposez dans cette utilisation à peu près parfaite des
moyens de communication aux fins de communication par les citoyens entre eux et
de gestion. Ceci dit, il faut bien se rendre compte que, poussant cela au bout,
il faudrait l'étendre à la radio, à la
télévision, à tous les journaux et à tout ce qui
parle dans la société, c'est-à-dire à tout le
monde.
Sans porter de jugement là-dessus, je souligne, tout simplement,
que c'est un certain nombre de questions que je me pose, quant à moi.
Essentiellement, comme j'ai eu l'occasion de le dire à quelques reprises
à certains membres des média communautaires, tout tourne, en
fait, autour de la définition de la communauté. C'est quoi, la
communauté, à un moment donné, face à l'utilisation
de tels ou tels media de communications? Ce qu'on veut, en définitive
c'est l'objectif que nous poursuivons c'est faire en sorte que
les moyens de communications ne servent pas à abrutir la
collectivité, mais, au contraire, qu'on puisse, dans toute la mesure du
possible, faire en sorte que la démocratie, en fait, s'en trouve
améliorée et que le citoyen assume les moyens de communications
pour son épanouissement individuel et collectif. Disons que c'est un
objectif un peu angélique; tout le monde est d'accord sur cela.
Le développement très inégal des media
communautaires ou des groupes de communication communautaire me fait, quant
à moi, hésiter très sérieusement quant à la
portée positive que pourrait avoir une réglementation aussi
précise que celle que vous souhaitez à ce moment-ci.
Deuxièmement, le développement aussi inégal des
entreprises de câblodistribution sur le territoire m'amène
à avoir les mêmes restrictions. Ma conclusion, quant à moi,
c'est que, dans un premier temps en tout cas, il me paraît plus utile et
peut-être plus sage que ce soit effectivement la Régie des
services publics qui, dans chaque cas particulier, sur chaque parcelle de
territoire desservi par une entreprise de câble à
l'intérieur de laquelle existent ou n'existent pas des groupes
communautaires, détermine parce que c'est quand même son
mandat dans l'intérêt de la collectivité, les
modalités d'utilisation par la communauté de telles ou telles
facilités techniques aux fins de communications communautaires.
Cela n'exclut pas que, dans un deuxième temps, nous puissions
conjointement, en consultation et après l'expertise de la régie,
élaborer une réglementation plus précise et plus
serrée, si vous voulez, sur le développement et sur la
communication communautaire. Cela n'exclut pas cela du tout. A ce moment-ci,
l'option que nous avons choisie et qui se traduit dans le règlement,
c'est précisément de donner à la régie qui
est d'abord un organisme d'adjudication, qui a tout un mécanisme pour
faire des auditions publiques, pour entendre des parties, pour entendre des
témoins, pour entendre des exposés contradictoires ou
complémentaires tous les pouvoirs pour décider, pour des
périodes de temps limitées, de quelle façon doivent se
développer les communications dans leur utilisation et dans leur
infrastructure. Il nous apparaît que ce mécanisme est beaucoup
plus souple que le simple jeu d'une réglementation qui, par la force des
choses, doit être générale et doit s'appliquer à
l'ensemble du territoire québécois. C'est un peu
l'économie que je voulais souligner, M. le Président, de ce
règlement.
Ma conclusion est que les points soulevés par les groupes
communautaires, encore une fois, sont complexes et mettent de
côté, a priori, un certain nombre de choses avec lesquelles nous,
on est obligé de vivre, comme la responsabilité publique du
diffiseur, par exemple, en termes de libelle, en termes légaux. Ce sont
des choses avec lesquelles on doit vivre, parce que cela existe maintenant. Les
préoccupations, donc, des groupes de communication communautaires, pour
légitimes qu'elles soient, auront vraiment réponse ou une
réception constructive en termes concrets sur le terrain devant la
Régie des services publics, dans cette première phase de la
réglementation.
Si imparfait cela puisse-t-il être, cela nous paraît, quand
même, être la voie la plus prudente dans le développement
des media communautaires. Il faudrait éviter, dans ce domaine, de poser
des gestes qui ont l'effet contraire de ceux qui sont recherchés et qui
bousillent, à toutes fins pratiques, d'une façon sinon
définitive, du moins pour des périodes de temps insupportables,
une insertion de plus en plus précise et souhaitable de la
communauté
dans les media de communications. Reste à savoir, encore une fois
c'est toujours la question "ballon" qu'on peut lancer et qui n'a pas de
réponse, moi, je n'en ai pas, en tout cas de quelle façon,
dans un contexte socio-économique donné, définit-on une
société. Est-ce que la chambre de commerce fait partie de la
communauté, comme j'ai eu l'occasion de le dire?
Est-ce que le Kiwanis, qui a des objectifs et une charte à but
non lucratif pour le développement social, etc., d'une région ou
d'un groupe donné de citoyens et même pas d'un groupe
professionnel donné, fait partie de la communauté? C'est qui, la
communauté? Ce n'est pas le but de la commission de définir ce
qu'est la communauté. A mon avis, il n'en existe pas, comme tel, de
définition de la communauté, que l'on peut mettre dans un
règlement. Encore une fois, c'est la régie qui peut
apprécier localement ce qui constitue, en fait, un groupe ou des groupes
communautaires de communication et quelle est la dimension ou la proportion des
moyens que l'on peut et que l'on doit mettre à leur disposition aux fins
du développement donné d'une région. On sait que les
rythmes de développement et que les priorités peuvent varier
sensiblement d'une région à l'autre, que ce soit de Sherbrooke au
Lac-Saint-Jean ou du Lac-Saint-Jean en Abitibi ou à Montréal ou
à Québec. Les problèmes sont différents, les
priorités sont différentes, les sensibilisations des citoyens
sont différentes.
C'est ce que je voulais dire sur l'économie du règlement,
M. le Président.
LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable député de
Chicoutimi.
M TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'ai porté
grande attention aux exposés qui ont été faits par les
associations qui représentent les groupes communautaires. Disons, au
départ, que nous accordons beaucoup d'importance au développement
de ces moyens de communication dits communautaires, parce qu'ils permettent aux
citoyens une meilleure information, de meilleures relations les uns avec les
autres et, par voie de conséquence, un élargissement de leurs
horizons jusqu'aux frontières internationales. Dans cette optique, il
est bien évident que les citoyens seront appelés de plus en plus
à participer à ce que l'on peut appeler l'information, aux
émissions d'ordres éducatif, culturel, socio-écononique,
etc. Ils disposeront, pour ce faire, des moyens que la science et la
technologie moderne mettent maintenant à notre disposition et qui sont
appelés à s'accroître et à s'améliorer.
Dans l'optique de la responsabilité des pouvoirs publics, on
comprendra que les législateurs ont le devoir de s'interroger sur la
notion de communauté qui est sous-jacente aux propositions qui nous ont
été soumises. La communauté, c'est vous, c'est moi, c'est
tout le monde.
Mais qui peut revendiquer le droit, le privilège, la
qualité de représentant le plus authentique et le plus
autorisé de la communauté? C'est là un sujet
qu'évoquait tout à l'heure le ministre et qu'il ne serait pas
facile de trancher en inscrivant une définition de la communauté
dans un texte législatif. Il y a, par exemple, des paliers de
gouvernement: fédéral, provincial, municipal, scolaire. On peut
donc dire que les gens qui sont, à ces divers paliers, des
législateurs et des responsables de l'administration sont des membres de
la communauté et en sont également des représentants
authentiques.
Il se peut faire que la représentativité des hommes qui
siègent aux divers paliers de gouvernement soit mise en cause et il y a
des moyens démocratiques pour corriger les abus ou l'absence de
représentativité des gens qui représentent la
communauté à ces divers paliers.
Nous sommes donc en principe d'accord pour que le gouvernement prenne
tous les moyens qui sont à sa disposition aux fins de promouvoir le
développement de la télévision communautaire. C'est
quelque chose d'assez neuf. Les expériences que l'on a poursuivies
jusqu'à présent s'avèrent, en bien des cas, concluantes et
nous incitent à les poursuivre. Il faut toutefois les replacer dans un
contexte administratif, dans un contexte public assez vaste, assez large et
tenir compte de ce qui existe à l'heure actuelle en d'autres
secteurs.
Il y a quand même la radio, la télévision, les
journaux qui ont certainement eux aussi la prétention de croire qu'ils
représentent la communauté ou, à tout le moins, qu'ils
expriment avec le plus d'objectivité, de fidélité
possible, la pensée de la communauté ou d'une partie de la
communauté.
Les entreprises de télévision communautaire s'inscrivent
donc dans ce contexte. Un contexte nouveau, très vaste, dont on n'a pas
exploré encore toutes les avenues et dont on ne connaît pas tous
les moyens. C'est pourquoi le projet de réglementation qu'a soumis le
ministre des Communications est un projet expérimental, puisque nous
avons légiféré il y a quelques mois dans un domaine que le
Québec considère comme de sa compétence, considère
comme le sien et nous en sommes maintenant à la phase d'application du
projet de loi, ce qui explique la naissance du règlement que vous avez
examiné et dont vous avez fait la critique tout à l'heure.
Critique en partie fondée et à laquelle nous pourrions souscrire,
n'étant les exigences qui sont les nôtres de devoir nous
interroger sur les conséquences des propositions pratiques que vous nous
faites.
Je pense qu'un bon nombre de vos propositions, de vos critiques ou de
vos observations positives proviennent d'une interprétation trop
restrictive des articles de la réglementation. Articles de cette
réglementation dont nous avons dit au ministre qu'ils devaient
être revus, refondus et repris le cas échéant, à la
lumière des propositions qui allaient nous être soumises
par l'ensemble des organismes qui ont comparu jusqu'à
présent.
Vous êtes de ceux-là et votre contribution nous sera
extrêmement utile pour définir, notamment, à l'article 1,
les mots câblodistribu-tion, émission communautaire, production,
programmation. Ce sont là des ternies que l'on retrouve dans vos
mémoires et qui ont besoin d'être repensés à la
lumière de ce que nous avons entendu.
De même, à l'article 5, il est question de la
propriété des entreprises. Nous avons déjà fait des
suggestions au ministre à la suite des mémoires qui nous avaient
été présentés.
Le ministre, pour sa part, tout à l'heure, a souligné
l'importance de l'article 15, qui donne quand même, au moyen de
télévision communautaire, des moyens qui nous apparaissent assez
clairs mais qui ont besoin d'être précisés, comme vous le
demandez.
A l'article 18, de la même façon, lorsqu'il est question de
production minimale, vous verrez que l'on s'est préoccupé des
émissions communautaires et que la régie aura à se
prononcer sur ces sujets.
Il est dit aussi, à l'article 20 et le ministre ne l'a pas
rappelé que toute entreprise publique de câblodistribution
peut être autorisée par la régie à se servir des
canaux non utilisés pour transmettre la météo, l'heure,
des avis d'intérêt communautaire et tout autre renseignement
similaire. Cet article aurait besoin probablement d'être
précisé; le champ aurait besoin d'en être élargi, le
cas échéant, afin de satisfaire aux exigences que vous avez
exprimées.
L'ordre de priorité vous a peut-être fait achopper comme il
nous a fait achopper, nous aussi, nous et la plupart des organismes qui ont
comparu devant nous. H est bien précisé que toute entreprise
publique de câblodistribution doit offrir sa programmation, tant audio
que visuelle, selon l'ordre de priorité suivant: programmation
éducative, émission communautaire, émission locale,
émission d'intérêt général, etc. C est
là un article clé de la réglementation, et la
révision de cet article nous permettra d'intégrer probablement un
ensemble de propositions que vous nous soumettez aujourd'hui.
Vous avez insisté tout à l'heure sur le problème de
la diffusion et de la programmation. L'entreprise de câblodistribution
est une entreprise de diffusion, c'est bien clair, une entreprise de diffusion
qui doit cependant respecter, dans la programmation qu'elle véhicule,
par le truchement de ses moyens techniques et technologiques, un ordre de
priorité qui constitue la programmation. Mais une entreprise de
câblodistribution n'a pas, contrairement à ce qu'on pourrait
prétendre, un rôle de production. A moins que je ne m'abuse, elle
n'a pas un rôle véritable de production. Et je ne sache point
qu'il lui soit dévolu un rôle de production en ce qui concerne les
émissions communautaires.
Ce qui vous inquiète, et vous avez, à bien des
égards, raison, c'est l'importance que l'on accordera, dans cet ordre de
priorité, aux émissions dites communautaires. Vous avez raison de
vous en inquiéter parce que vous avez vécu des expériences
dans vos milieux et vous voulez que la télévision communautaire
soit le véhicule et le porte-parole d'une collectivité que vous
connaissez, que vous identifiez et que ces émissions communautaires
rendent compte des problèmes bien identifiés d'une
société donnée par tout le territoire du Québec,
les problèmes étant différents, similaires, analogues ou
identiques selon les régions du Québec.
Il y aura donc lieu de voir de quelle façon l'on pourra articuler
cette programmation sur les besoins des communautés locales. Il ne faut
cependant pas oublier l'ensemble des problèmes de la communauté
dont vous parliez tout à l'heure. L'un d'entre vous, un monsieur qui
représentait la région de Drummond, enfin ce secteur-là
disait qu'il y a beaucoup de publicité; on nous dit que tout va bien,
tout va bien, alors qu'il y a beaucoup de problèmes qui
inquiètent les gens. Nous sommes d'accord là-dessus, que les
citoyens soient renseignés sur ce qui ne va pas, mais il serait
important aussi qu'ils le soient sur ce qui va bien, parce que si on se
réfère à la radio, à la télévision,
aux journaux, à l'ensemble des moyens conventionnels de diffusion et
d'information, on assiste beaucoup plus souvent à la litanie des
catastrophes qu'à l'évocation des situations qui pourraient
être réconfortantes pour les gens.
Il y a donc là une pondération qu'il importe d'apporter
à la programmation qui sera offerte par les entreprises de
câblodistribution et par les entreprises de télévision
communautaire. Vous avez parlé assez longuement d'un comité de
programmation, comité de programmation à pouvoirs
décisionnels. C'est une proposition qui n'est pas à rejeter, loin
de là, mais c'est une proposition qui n'est pas inconciliable avec les
pouvoirs de la régie. Il est possible que les comités de
programmation que vous avez constitués dans vos régions puissent
se faire entendre devant la régie. Rien n'interdit que ces
comités de programmation aillent devant la régie et discutent
avec les commissaires de la régie, de la programmation que
suggéreront ou que demanderont d'approuver certaines entreprises de
presse. C'est à ce palier de la régie et au moment des audiences
que votre comité de programmation, que les comités de
programmation des diverses sociétés que vous représentez
pourront avoir du poids et pourront vraiment faire comprendre à ceux qui
sont responsables de l'émission des permis, quelle est l'importance des
media communautaires. Vous pensez, semble-t-il, que la régie a trop de
pouvoirs. Il faudrait s'entendre ici sur la question de pouvoirs. Est-ce le
gouvernement qui doit déterminer quelle est la programmation que, dans
le détail, doit offrir une entreprise de câblodistribution? Est-ce
que c'est le gouvernement qui doit dire: Vous allez faire ceci, ceci ou
cela, auxquels cas les audiences devraient se tenir devant
l'Assemblée nationale et l'on aurait tôt fait de considérer
les décisions de l'Assemblée nationale comme des décisions
rigoureusement politiques? C'est pourquoi on a préféré
accorder ce pouvoir à une régie qui, en toute connaissance de
cause, à la suite d'audiences publiques vous serez
habilités comme n'importe qui à comparaître devant la
régie établira la programmation, programmation qui sera au
départ forcément expérimentale et qui ne vous satisfera
pas, j'en suis sûr, ou qui ne satisfera pas un grand nombre de citoyens.
Mais comme je le disais au départ, nous en sommes au tout début
de cette expérience de télévision communautaire. Ce que
vos comités de programmation imagineront, concevront, sera-t-il
accepté par la communauté et si c'est accepté par la
communauté, par quelle communauté, par quel secteur de la
communauté, par quelle fraction de la communauté? D'où
l'importance que le ministre et moi-même attachons à cette notion
de communauté. Quand on examine ce qu'on appelle les cotes
d'écoute des media traditionnels d'information, on se rend compte que
tous les goûts sont dans la nature. C'est pourquoi les radiodiffuseurs et
les télédiffuseurs sont obligés de patiner sur des glaces
assez minces et se tenir sur des cordes raides. Il est difficile de contenter
tout le monde et son père. Il y a aussi et il est bon d'insister
là-dessus vous le faites d'ailleurs dans vos mémoires
la question de la qualité. Il y a une question de qualité
technique, évidemment, puisqu'on va transmettre des signaux qui devront
être de qualité, c'est-à-dire perceptibles, visibles et
audibles.
Il y a la qualité du contenu également, parce que
j'imagine que, comme nous, vous êtes soucieux d'animer, produire des
émissions qui satisfassent les besoins socio-culturels des citoyens, que
ce soit au niveau de la langue, que ce soit au niveau de ce qu'on appelle la
culture au sens esthétique du terme, que ce soit au niveau de la culture
au sens anthropologique du terme. Vous êtes soucieux de la
qualité. Qui va déterminer la qualité? Les comités
de programmation seuls ou les comités de programmation avec les membres
de la régie? Ou ces comités de programmation avec les membres de
la régie, avec en plus, peut-être, un conseil
québécois de la câblodistribution et de la
télévision communautaire afin que l'on atteigne cet objectif qu'a
formulé le ministre et qui fait partie de sa politique des
communications?
Ce sont autant de questions que nous nous posons, que nous vous posons
et que vous vous êtes posées afin de vous faire comprendre que le
problème n'est pas facile à résoudre et qu'il faudra un
temps d'expérience pour intégrer l'ensemble des media
communautaires dans cette immense machine qui est en train de devenir la
câblodistribution et tout ce qui s'y rattache.
Je ne veux pas pousser plus avant ces observations, mais je ne voudrais
pas conclure sans vous dire, sans vous exprimer toute la sympathie que nous
avons à l'endroit des organismes comme les vôtres et la
volonté qui est la nôtre de vous aider à obtenir
satisfaction. Vous avez parlé du financement, vous avez parlé des
profits des câblodistributeurs, vous avez esquissé, enfin vous
avez fait une petite virée dans le domaine de ce que vous appelez les
gens favorisés versus les moins favorisés; évidemment,
c'est là matière d'appréciation assez difficile. Il
appartient aux pouvoirs publics de pondérer dans ce domaine les moyens
économiques et de s'assurer que chaque organisme qui veut vraiment
oeuvrer pour la collectivité ait les moyens appropriés.
Je ne veux pas interpréter votre mémoire,
c'est-à-dire aller au-delà du texte, je ne veux pas faire
d'exégèse en lisant entre les lignes, mais peut-être y
a-t-il sous-jacente à l'ensemble des mémoires que j'ai
examinés l'idée d'une subvention de l'Etat aux entreprises
communautaires. C'est une idée qui a été lancée
à maintes reprises, dont certaines personnes se sont faites les
propagandistes et les défenseurs, mais vous comprendrez que les moyens
de l'Etat, qui sont les vôtres et les miens, sont limités. Avant
de prendre une position ferme et catégorique sur l'obligation qu'aurait
le gouvernement du Québec de subventionner les entreprises de
télévision communautaire, il nous faudrait faire des
études assez détaillées et en même temps pousser
beaucoup plus loin nos recherches sur ce que la télévision
communautaire a donné jusqu'à présent, sur ce qu'elle se
propose de faire et ce qu'elle pourra devenir dans un temps que je ne suis pas
capable de déterminer.
Pour résumer, M. le Président, je tiens à dire
à l'ensemble des représentants des entreprises de
télévision communautaire que leurs mémoires sont positifs,
qu'ils élargissent considérablement nos horizons et qu'ils vont
nous obliger à demander au ministre de revoir sa réglementation
aux fins de la préciser, de l'améliorer dans le sens des
représentations qui nous ont été faites, à
condition toutefois que l'interprétation qui en est donnée dans
les différents mémoires n'aille pas au-delà du texte
lui-même, ce que je soulignais au départ. Ce que j'ai fait au
début, en invoquant certains articles, avait pour but d'inciter les
représentants des organismes de télévision communautaire
à bien peser le sens des termes qui se trouvent dans une
réglementation incomplète, imparfaite le ministre en
convenait lui-même mais qu'avec vous il nous sera possible
d'améliorer. Je vous remercie, M. le Président.
LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable député de
Frontenac.
M. LATUL1PPE: Très brièvement, M. le Président,
sans reprendre tout ce qui a été dit, nous aussi, nous croyons
bien que les divers commentaires que l'on vient d'entendre de la part des
organismes communautaires constituent un apport très
sérieux aux travaux de la commission. On sent bien que ces gens
entendent participer à la vie communautaire d'une façon tout
à fait spéciale et veulent jouer un rôle de levier face au
développement possible de leur milieu. Ils veulent contribuer, si vous
voulez, un peu à la conscience collective du milieu, à la
connaissance des gens du milieu, en somme faire participer la communauté
à un nouvel essor. C'est un outil de développement qui,
jusqu'à présent, n'a pas été exploité, qui
est encore méconnu, qui n'est pas non plus en usage dans beaucoup de
milieux.
Dans ce sens, je crois bien que c'est une des pierres d'assise de la
politique des communications du Québec. Elle doit certainement retenir
l'attention du ministre. D'ailleurs il nous l'avoue lui-même
nous comprenons qu'à cette fin également il y ait des
problèmes financiers qui vont venir en ligne de compte. D'après
les mémoires qui nous ont été présentés,
sous d'autres aspects, en plus de vouloir inculquer au milieu une certaine
responsabilité face au développement, on veut se réserver
certain accès à des moyens financiers pour être capable
d'exercer les prérogatives qu'on veut se donner.
Dans ce sens, nous sommes donc heureux de la participation des
communautés. Nous osons croire que les principes qu'elles nous ont
surtout proposés et les réserves qu'elles nous ont
adressées auront retenu l'attention du ministre.
A cet effet, j'aimerais poser une question au ministre. Dans son
exposé, il a pratiquement balayé tous les secteurs qui ont
été développés par nos interlocuteurs. Par contre,
il n'a pas, d'une façon directe, abordé le problème du
comité qui aurait des pouvoirs décisionnels et qui ne serait pas
consultatif vis-à-vis des propriétaires des diverses
organisations de câblodiffusion.
Il a parlé surtout du rôle de la régie qui devait
être non seulement d'arbitrer, mais de voir à l'équilibre.
Je crois bien, en contrepartie, que les organismes qui sont devant nous vont
nous demander, bien entendu, si la régie est appelée à
jouer un rôle, si ce sera un rôle qui sera exercé de loin et
qui, dans les détails, ne sera pas aussi présent que pourrait
l'être celui d'un comité organisé dans le milieu même
où doivent agir les divers organismes communautaires.
Dans ce sens est-ce que votre ministère a déjà
étudié, sous une forme ou sous une autre, la possibilité
d'introduire cette nouvelle modalité et de lui donner certains
privilèges à l'intérieur de la réglementation?
M. L'ALLIER: M. le Président, à la question qui est
posée, le comité de production communautaire, comme je l'ai dit,
tel que je l'ai compris, pouvait, suivant tel ou tel mémoire, prendre
une dimension plus ou moins grande.
On peut diviser la question en trois points. J'essaie de couvrir
l'ensemble du champ là- dessus. On peut songer, d'abord, à des
comités consultatifs ou à des comités décisionnels.
Indépendamment de l'un ou de l'autre, on peut avoir un comité qui
a une responsabilité consultative ou décisionnelle sur l'ensemble
de la programmation offerte par une entreprise de câble,
c'est-à-dire les 8, 9, 10 ou 12 canaux. Il est aussi possible de
restreindre cela à la partie production. Conformément à la
définition à l'article 1, la production est cette partie de la
programmation qui est offerte à l'abonné à partir des
locaux ou studios de l'entreprise publique de câblodistribution ou dans
laquelle cette dernière joue un rôle de création". Donc,
réduire le rôle d'un comité de programmation, consultatif
ou décisionnel, à tout ce qui n'est pas retransmission de canaux
d'autres chafnes de télévision, d'autres stations de
télévision. On peut restreindre encore davantage et avoir un
comité consultatif ou décisionnel qui porte uniquement, à
l'intérieur de la production, sur la partie de la production que
constituent les émissions communautaires. C'est le schéma
général. Sur l'ensemble de la production, tous les canaux, je
crois que c'est essentiellement à l'entreprise de câble qu'il
appartient de proposer sa programmation et à la Régie des
services publics de déterminer si cette programmation est ou non
conforme aux priorités établies dans le règlement.
On pourrait concevoir un comité qui soit consultatif pour
l'ensemble de la production locale, de la production au sens de la
définition et même c'est souvent ce qui existe, je pense
décisionnel sur cette partie de la production que constituent les
émissions communautaires. A ce moment-là, je reviens à
l'un ou l'autre des exposés je ne me souviens pas duquel
où on dit : Dans cette optique-là, l'émission
communautaire, cela ne devrait pas être uniquement ce que nous autres on
produit; cela devrait être tout ce qui se produit. Cela revient, en fait,
à la production. La position du gouvernement et ma position
là-dessus est la suivante: dans la mesure où il y a, d'une
région à l'autre, une variété de situations
il y a 135 ou 140 compagnies de câble, il n'y a pas 135 groupes de
communication communautaires rien n'empêche la régie, dans
la réglementation actuelle, de considérer que, dans telle
situation donnée, là où il existe d'une façon
structurée et satisfaisante pour l'intérêt public un groupe
ou des groupes de communication communautaires, que tel groupe de production
communautaire soit inséré dans le permis accordé à
tel câblodistributeur et non pas à tel autre de telle autre
région où il n'existe absolument aucune structure, aucun groupe
de communication communautaire. C'est dans cette phase initiale du
développement du câble et des media communautaires que nous devons
nous situer.
C'est pour cela que je n'ai pas d'opinion générale qui
pourrait s'appliquer à tout le monde et imposer des obligations qui, en
fait, ne pourraient pas être respectées par une
entreprise de câble ou même par des groupes communautaires.
Cela dit, si j'ai pu laisser des ambiguïtés sur le contenu de la
programmation communautaire au sens du règlement ici,
c'est-à-dire, tel qu'indiqué, ce qui est moins que la production
locale, mais qui est, en fait, le bloc fait par et pour la communauté,
c'est qu'il me paraît que c'est à la communauté qu'il
appartient de décider ce qu'elle doit faire ou non. Le mécanisme
qui permet d'identifier, aux fins d'une région donnée, telle
communauté ou qu'est-ce que c'est la communauté et permettre
à ce groupe d'utiliser tel potentiel de diffusion, c'est, encore une
fois, à la régie de le déterminer. On ne peut pas, dans un
règlement, prévoir le détail de ces situations.
C'est peut-être un peu complexe, si vous voulez, mais, encore une
fois, je crois que nous avons ici, dans ce règlement qui peut être
précisé sur certains points évidemment, dans la mesure
où l'on considère que la régie est un instrument du bien
public et qu'elle travaille dans l'intérêt public, suffisamment de
moyens mis à la disposition des communautés pour utiliser dans
une phase initiale les moyens de communications. Je ne sais pas si cela
répond à votre question.
M. LATULIPPE : Oui, cela répond très bien à ma
question. Je vous remercie beaucoup.
J'aurais une dernière question à poser à ces
messieurs qui représentent les divers corps cummunautaires dans cette
nouvelle aventure de la câblodiffusion. J'ai bien compris que vous
voulez, autant que possible, essayer de développer une conscience
collective, essayer de transporter l'initiative chez les gens du milieu. Vous
revendiquez à cette fin certains privilèges, notamment d'abord
des possibilités financières. J'imagine certainement que les
possibilités financières qu'on vous offrira seront
peut-être, d'un certain côté, proportionnelles à
votre apport face à l'ensemble du domaine communautaire. Dans ce sens,
est-ce que vous avez déjà étudié la portion de la
cote d'écoute que vous avez face aux autres media de
télécommunication ou de télévision dans votre
milieu? On va s'interroger. Est-ce que d'abord vous êtes
réellement des interlocuteurs valables face à ces
modalités-là? Est-ce que c'est une étude qui a
déjà été faite par vos services ou par des
programmations que vous avez faites en vue d'amener une participation
populaire?
M. ROUTHIER: Si vous permettez, nous n'avons pas d'études
spécifiques pour nous permettre de répondre à une question
aussi précise. On en a en cours et très prochainement nous allons
être en mesure dans certains milieux d'indiquer ce que cela
représente. On voudrait éviter de tomber dans le piège de
la cote d'écoute et se voir dans l'obligation de se comparer aux
puissants mass media auxquels vous pourriez vous référer. Par
contre, pensons à des organismes plus humbles comme Radio-
Canada, en particulier ses émissions d'affaires publiques. Quant
aux cotes d'écoute de certaines émissions produites dans le cadre
de Radio-Canada à fort coûts, il est vraisemblable qu'on peut
rejoindre des cotes d'écoute de cet ordre-là sur le plan
régional. La cote d'écoute de Radio-Canada c'est 12 p.c. Quant on
pense à des régions comme celles d'où je viens, en
particulier, dans la région de Sherbrooke, on imagine que pour le rayon,
le territoire qu'on atteint, vraisemblablement, cela peut se comparer. Mais, de
façon beaucoup plus précise, on pourra vous acheminer des
résultats, des statistiques précises là-dessus pour
pouvoir vous donner satisfaction. Je soupçonne, à
l'arrière de votre question...
M. LATULIPPE: Je parle surtout du milieu où vous avez une action
bien précise. Naturellement, je comprends qu'une institution
communautaire n'a pas un débordement très vaste. Par exemple,
prenons le milieu de Sherbrooke, que je connais mieux. On fait sept heures de
programmation par semaine, maintenant? Est-ce que vous avez eu, vous autres,
certaines études qui ont été faites dans ce
domaine-là pour essayer de mesurer l'importance ou l'effet
d'entraînement que pourrait avoir votre programmation actuellement?
M. FORTIER (Jean): A Sherbrooke, on a dit qu'il s'est produit neuf
heures et demie d'émission, l'an dernier, pour la première
année d'expérience de télévision communautaire, et
sept heures et demie qui étaient produites par des groupes du
milieu.
Dans le cadre d'un projet Perspectives Jeunesse, il s'est fait un
sondage et une évaluation de ces émissions. Je peux vous donner
quelques chiffres rapidement. L'étude a été faite sur 500
personnes, sur un échantillon représentatif de population; 40
p.c. des interrogés ont regardé des émissions une fois,
plusieurs fois, ou occasionnellement. Ceux qui ont regardé des
émissions occasionnellement, cela nous donnerait, si on extrapole la
partie de l'échantillon, 30 p.c. de la population. Ceux qui ont
regardé des émissions régulièrement, cela nous
donnerait 3 p.c. de la population. Ainsi le tiers de la population a
regardé la télévision communautaire. Il faut
considérer les abonnés au câble, évidemment. C'est
plus logique de considérer ceux qui ont regardé les
émissions sur le total des abonnés au câble, puisqu'il faut
être abonné au câble pour regarder la
télévision communautaire. Un abonné au câble sur
deux en aurait regardé à l'occasion, une fois ou
régulièrement des émissions. Si on ne retient que ceux qui
ont regardé régulièrement, cela représenterait 3
p.c. de la population.
En extrapolant à Sherbrooke la population adulte de plus de 18
ans, cela ferait 1,300 spectateurs réguliers.
M. LATULIPPE: Selon le même barème,
cela représenterait combien pour les abonnés, ces 3
p.c?
M. FORTIER (Jean): Ces 3 p.c. sont 3 p.c. des abonnés; c'est que
84 p.c. de la population à Sherbrooke est abonnée au
câble.
M. LATULIPPE: J'aurais une dernière question à poser assez
rapidement. Je sais que le député de Saint-Jacques est
pressé. Dans votre mémoire, en page 13, vous dites: Là
où il existe une station ou plus de télévision locale, la
régie doit signifier sa volonté aux câblodistributeurs
concernés de s'abstenir de procéder à la
réalisation d'émissions locales.
Or les câblodiffuseurs nous ont dit, à un moment
donné, surtout dans la région de Montréal, qu'ils
pouvaient même faire, comment dirais-je, des programmations de quartier
et qu'ils ne concevaient pas qu'une telle mesure, justement, éliminerait
cette possibilité pour les câblodiffuseurs de faire des
programmations de quartier, surtout dans les grandes agglomérations?
M. FORTIER (Jean): Si on répond pour Sherbrooke, la situation est
telle que la télévision communautaire, l'année
passée, sauf pour deux heures, était faite par le milieu. Cette
année, la situation change. La compagnie a décidé
d'engager toute une équipe de production de sorte qu'elle a
déjà commencé à réaliser et à stocker
des émissions pour la télévision communautaire. Etant
donné la façon dont ça va, l'entreprise de câble
devient une entreprise de production, de sorte que dans quelques jours,
à la mi-septembre, quand le poste ouvrira, la télévision
communautaire sera toute faite en "kit", elle sera prête... La compagnie
de câble est devenue producteur, elle a engagé une équipe
de sept à huit techniciens qui ont réalisé des
émissions, ce qui était impossible l'an dernier parce qu'on
n'avait pas engagé d'équipe.
Mais nous, on s'interroge justement: Comment se fait-il qu'à un
moment donné un câblodistributeur devient un producteur? Est-ce
que ce sera des mini Radio-Canada un peu partout dans la région? On
croyait comprendre que la télévision communautaire était
pour les citoyens, pour que les citoyens puissent s'exprimer. L'an dernier,
à Sherbrooke, on ne peut pas dire que les citoyens ne se sont pas
exprimés. Si les citoyens ont produit sept heures et demie
d'émissions par semaine, cela veut dire beaucoup d'équipes,
beaucoup de jeunes mobilisés qui avaient des choses à dire et qui
ont utilisé le câble. Evidemment, sept heures et demie de
production par semaine, quand on sait ce que veut dire faire une
émission de trente minutes, cela fait beaucoup de travail. Je crois
qu'il n'y a pas de raison pour qu'un câblodistributeur, à un
moment donné, décide de devenir producteur, engage des
équipes de production et produise des documents. Est-ce qu'il s'agirait
pour lui de faire de façon plus simple la télévision
commu- nautaire pour la communauté? On s'interroge beaucoup sur cela. A
la lueur de l'expérience de l'année dernière, sur les neuf
heures et demie, dont les deux heures d'émissions locales, la seule
différence que l'on a vue entre les émissions locales et les
émissions communautaires est que, dans le cas de quatre
émissions, ce sont des individus plutôt que des groupes qui sont
allés voir la compagnie qui a essayé de trouver des gens
intéressés à la technique pour réaliser des
émissions. Ce sont des individus, je pourrais les nommer: c'est une dame
qui est intéressée à faire une émission de
varitétés, c'est l'agent de relations publiques de la ville de
Sherbrooke, etc. La seule distinction qui a existé à Sherbrooke
au niveau des émissions communautaires et locales est que les
émissions communautaires ont été produites par des
groupes, les émissions locales étaient produites par un individu
qui allait demander à la compagnie de câble de réaliser des
émissions. Or, ce qui se dessine cette année et ce qui est
dangereux, c'est que déjà la compagnie a engagé une
équipe et commence à répondre à une série de
demandes comme cela, de sorte qu'on a des émissions
préparées qui nous attendent, sur la météo, sur les
fleurs, etc.
Mais nous, on croit que les canaux 7 et 9, qui vont être
bientôt à Sherbrooke, leur vocation est de faire ces types
d'émissions. Il n'y a aucun besoin pour les câblodistributeurs de
se munir d'équipes de production. On ne voit qu'une raison à
cela: c'est que, peut-être, dans le fond, Câblevision Sherbrooke
est intéressée à produire des émissions locales
pour les revendre au canal 9 qui va ouvrir bientôt. Mais là, c'est
de la télévision commerciale.
Selon nous, il devrait y avoir au niveau de la production locale quelque
chose de différent de la production commerciale. Pourquoi utiliserait-on
le câble pour faire les mêmes choses que les deux autres canaux
commerciaux?
M. LATULIPPE: Est-ce que votre production, en tant qu'agent
communautaire, a été restreinte au niveau de l'utilisation des
équipements et des heures de diffusion?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): II va sortir son aiguille.
M. FORTIER (Jean): Non. L'an dernier, les groupes qui ont voulu
s'exprimer à la télévision communautaire ont pu le faire.
Ce n'est pas le problème. Le problème est de savoir qui aura le
droit de s'exprimer, qui n'en aura pas le droit. Celui qui répond
à cette question est la compagnie de câble. Il nous paraît
très dangereux qu'une telle minorité, soit la compagnie de
câble, décide que tel groupe va parler, que tel autre ne parlera
pas.
L'an dernier, à Sherbrooke, on a réussi quelque chose et
je crois que c'est important de l'apporter, on parlait de ce qu'est la
communauté et la vue idyllique. Même si on pourrait avoir
une vue idyllique de ce qu'est la communauté, pratiquement,
à Sherbrooke, il nous a fallu vivre avec ça et depuis deux ans
nous avons trouvé une solution. Elle n'est pas parfaite, mais de concert
avec la compagnie on a contacté les 56 organismes dont j'ai la liste,
qui étaient susceptibles de produire des émissions, et 42
directeurs généraux ou présidents ont mandaté des
personnes qui ont élu un comité consultatif de programmation.
Même si de façon théorique on pense que la
communauté, c'est très flou, c'est le public finalement, la
responsabilité devrait aller à une personne qui est la compagnie,
qui est bien concrète. Des mécanismes ont été
expérimentés à Sherbrooke qui nous font dire qu'il est
possible de cerner la communauté et de se donner une organisation
pratique pour traduire cette communauté-là.
Cependant, après avoir dit ça, je dois ajouter que le
fameux comité consultatif que les groupes du milieu ont arraché
à la compagnie l'année passée, cette année la
compagnie a décidé de l'abolir. Alors, nous, les groupes dans la
communauté, face à ça, que faisons-nous? Nous sommes
devant une situation, c'est qu'en câblodistribution, celui qui
décide, c'est le propriétaire et nous n'avons qu'à suivre
ce que veut le propriétaire. Nous avons hâte que les
règlements que vous êtes en train d'étudier
précisent qu'il n'y a pas que les compagnies de câble qui
existent, il y a moyen de penser à des organisations qui
représentent la communauté et qui pourraient elles-mêmes
choisir et gérer la programmation communautaire et locale. Ce qui s'est
fait l'année passée, à Sherbrooke, a déplu à
la compagnie à un tel point qu'elle a décidé que
c'était assez.
M. LATULIPPE: Je ne veux pas prendre tout le temps de la commission,
mais connaissez-vous les raisons pour lesquelles la compagnie a
décidé de ne plus entrevoir le comité comme un
interlocuteur valable?
LE PRESIDENT (M. Pilote): J'inviterais le député de
Frontenac à poser ses questions un peu plus fort, nous avons de la
difficulté à comprendre.
M. LATULIPPE: Cela me fera plaisir. Je demandais si vous connaissez les
raisons pour lesquelles la compagnie a décidé d'abolir le
comité consultatif que vous aviez formé, qui fonctionnait depuis
deux ans?
M. FORTIER (Jean): Depuis un an. M. LATULIPPE: Depuis un an.
M. ROUTHIER: Si vous me le permettez, je vais tenter de répondre.
En définitive, partager le pouvoir de décision, c'est toujours
fatigant, non seulement pour les gouvernants mais pour les directeurs de
compagnies; c'est aussi simple que ça. Au niveau de la programmation, la
compagnie se voit face à un milieu organisé et tient bien
à ne pas trop le laisser aller. En particulier, la compagnie est une
succursale de National Cablevision, propriété de M. Levas-seur,
qui est particulièrement puissant dans le groupe de l'ACTC qui est venue
vous présenter un mémoire l'autre jour.
Surtout avec une réglementation aussi floue que celle
présentée ici, il est très accommodant pour la compagnie
de s'en aller avec cette réglementation, l'évoquer pour justifier
le fait qu'on n'a pas besoin d'un tel comité.
Effectivement, il serait malhabile de la part des directeurs s'ils n'en
désirent pas, de créer un précédent dans un lieu
que l'on pourrait ensuite évoquer un peu partout dans la province pour
commander de tels comités.
Il revient justement à une commission ici, au niveau d'une
réglementation et non pas une régie qui va s'occuper de
modalités, de prévoir de tels mécanismes qui feront que la
population effectivement pourra détenir un minimum de contrôle sur
un tel instrument de développement.
C'est avec cette insistance qu'on veut vraiment que la
réglementation soit précisée.
M. ALLARD: J'aimerais ajouter quelque chose à une question,
à la première question du député de Frontenac. Vous
avez associé la représentativité du comité de
programmation à la cote d'écoute du canal de production
communautaire. Une chose dont le CDMCQ s'étonne c'est tout
simplement une interrogation c'est avec quel pointillement chacun des
députés et l'honorable ministre, qui ont fait des interventions
aujourd'hui, se sont questionnés sur les communautés comme telles
et la représentativité des citoyens dans ces comités. Par
contre, l'immense pouvoir que vous donnez par cette réglementation aux
compagnies de câble qui vont décider du contenu
général des programmes qui vont passer sur le câble;
c'est-à-dire qu'ils vont pouvoir imposer avec la collaboration de la
régie même si les citoyens peuvent se faire entendre et
tant que ce mécanisme ne sera pas institué, ça va
être eux qui vont l'imposer diverses formes de programmations, que
ce soit les canaux québécois, ontariens ou américains et
qui vont pouvoir aussi former des comités consultatifs de programmation
et les abolir ensuite comme on l'a fait à Sherbrooke. Vous ne vous
souciez pas tellement de la représentativité de ces individus,
qui sont là pour en tirer un profit, alors que du moment que des
citoyens cherchent à s'organiser pour se donner des moyens, vous vous
interrogez immédiatement sur leur représentativité, sur la
forme, sur l'étendue de la communauté. C'est une interrogation
qui nous fait un peu peur, je dois l'avouer.
M. LATULIPPE: M. le Président, je ne voudrais pas revenir sur la
question. Ce n'était pas
mon but d'essayer de relier les deux, l'aspect du "rating" et l'aspect
de la représentativité de la communauté; loin de
là, c'était seulement en vue de mesurer justement l'impact et le
travail qu'ils faisaient au niveau de la responsabilité qu'ils voulaient
se donner comme agents de développement régional, comme agents de
développement local, face aux problèmes et aux diverses
modalités qu'ils voulaient. En somme, j'entrevois les groupes
communautaires comme un levier important au niveau de notre
société, justement en vue de développer une conscience
collective face à certains problèmes et justement de travailler
à certaines solutions.
Dans ce sens, M. le Président, j'entrevois les communautés
locales qui pourront participer au travail dans le domaine de la
câblodiffusion, comme étant essentielles. Je suis persuadé
qu'elles méritent une place importante et qu'elles seront certainement
participantes comme pierre angulaire ou pierre d'assise, d'une certaine
manière, à la politique de la communication. Je ne veux pas
prendre tout le temps de la commission. Je sais que le député de
Saint-Jacques est pressé, il a...
LE PRESIDENT (M. Pilote): Le député de Saint-Jacques.
M. CHARRON: Merci. M. le Président, en écoutant le
mémoire présenté par les différents organismes qui
se sont groupés derrière cette association, je ressentais un peu
ce qu'ils pouvaient ressentir eux-mêmes. Je me rappelais, lorsque nous
avons étudié à l'Assemblée nationale, il y a
déjà maintenant presque deux ans, le bill 45 qui s'appelle La
protection du consommateur. A ce moment-là, j'avais fait remarquer que
notre parti était favorable. On a même essayé à
plusieurs reprises d'améliorer les côtés touchant la
protection du consommateur. On avait fait remarquer au ministre des
Institutions financières qui défendait le projet de loi à
ce moment-là, qu'on en était toujours à la phase
défensive la loi elle-même s'appelait "Protection du
consommateur" mais que les mesures pour organiser les consommateurs pour
les porter à l'attaque, pour les mettre gérants de
l'économie, pour leur faire jouer le rôle véritable qu'ils
ont par leur pouvoir d'achat, ce gouvernement, comme tout le gouvernement
précédent, d'ailleurs, n'en a que très peu fait.
Ici, dans la réglementation, on veut protéger et on
le fait tant bien que mal; vous avez bien raison de souligner des
défauts cet élément nouveau dans notre vie
collective québécoise qui s'appelle la télévision
communautaire. On sent que c'est la force des choses qui a obligé la
réglementation à lui céder une place à certains
endroits. Le ministre a mentionné les articles à partir desquels
on peut extrapoler pour voir là une protection de la
télévision communautaire.
Vous avez raison de dire qu'elle protège mal, même si elle
ne devait être que là. Elle protège mal, et je pense en
particulier à l'exemple de
Sherbrooke et du comité de programmation qui est disparu, qui
peut disparaître ailleurs aussi du jour au lendemain, vu les
intérêts financiers qui sont toujours à l'arrière et
qui ont été vous avez raison de le dire aussi
admirablement bien défendus par ceux qui possèdent ces
entreprises.
Je ne parle pas du mémoire suave de l'Association canadienne des
radiotélédiffuseurs, mais je veux dire même des autres, des
entreprises de câbles, ce sont des entreprises financières qui se
défendent, comme toutes les autres d'ailleurs, et dont les
intérêts recoupent très rarement ceux que vous
défendez cet après-midi ici. Là où vous essayez
d'améliorer la protection que voulait vous donner le projet de loi, je
crois que, dans l'ensemble, vous avez raison. D'ailleurs, quand le Parti
québécois dit, dans son programme, qu'il s'engage à
favoriser, dans le secteur privé de la radio et de la
télévision, la propriété coopérative et
l'expérience des zones communautaires afin de répondre davantage
aux besoins du milieu, et quand il s'engage à assurer, dans le domaine
de la câblodiffusion, aux citoyens éventuellement réunis en
coopérative de programmation, l'utilisation prioritaire et exclusive
d'au moins un canal consacré à poursuivre l'expérience des
zones communautaires, c'est qu'il a décidé aussi, comme vous, non
seulement de protéger cette entreprise mais aussi de la faire passer un
peu à l'attaque.
J'étais à peu près certain également,
lorsque je vous ai vu vous présenter et amener votre mémoire, que
l'un ou l'autre membre de cette digne commission allait achopper sur la
définition de communauté. C'est un piège à ours
évidemment, pour à peu près chaque groupe de citoyens
organisés, que de tester ici le degré de
représentativité de ces gens. On l'a fait beaucoup moins, je dois
vous dire et vous étiez témoins lorsque l'Association
canadienne de radiotélédiffuseurs est venue nous dire en pleine
face que ce n'était même pas de notre juridiction on a
été beaucoup moins pointilleux, vous aviez raison de le souligner
tout à l'heure, quant à vérifier le fondement de ces
allégations.
Je prendrais, moi, à partir de la philosophie de votre
mémoire et de l'expérience que j'ai eu l'occasion de suivre dans
d'autres domaines peut-être pour faciliter la chose sans vouloir
en faire une définition qui soit ex cathedra et finale je
prendrais comme définition de cette communauté,
idéalement, ceux qui sont dans l'autre télévision: les
consommateurs. Ceux que nous ne voyons jamais à l'autre
télévision, ce sont ceux-là qui devraient être les
directeurs, les artistes, si vous voulez, de celle-ci. Prenons comme
communauté, le sens large de consommateurs de la
télévision commerciale que produisent les réseaux
privés, même le réseau d'Etat. Je dis: ceux que nous ne
voyons pas; nous les voyons à l'occasion, bien sûr. Les
émissions d'affaires publiques vont, à quelques occasions, leur
laisser une place mais avec un
filtrage bien certain et avec un encadrement et un animateur qui
interprétera à l'avance l'opinion que les gens émettront
sur bobines plus tard. Ou alors, on les voit, ces mêmes consommateurs,
applaudir bêtement les conneries de Claude Blanchard ou d'un autre. Mais
ils sont ainsi traités et aliénés publiquement face
à d'autres consommateurs de la télévision,
ridiculisés dans des jeux stupides de M. Banco pour gagner un frigidaire
électrique ou d'autres choses comme ça. Ce sont ces gens, que
l'autre télévision utilise comme consommateurs, comme clients et
dont elle abuse, qui devraient être, dans une télévision
communautaire, ceux qui la dirigent et ceux qui la font vivre.
Cette expérience que vous menez vous incite
nécessairement, au niveau de chacune des régions, j'imagine, dans
votre volonté de rejoindre cette communauté, à entrer en
conflit l'expérience de Sherbrooke en est peut-être un
exemple avec ceux qui sont, d'une certaine façon, les petits
potentats locaux et qui, eux, à cause d'un titre qu'ils ont souvent, de
façon plus ou moins honnêtement, usurpé, se
prétendent les porte-parole de la communauté et ne pourraient
accepter qu'il existe une télévision communautaire sans qu'on ne
les appelle, eux, M. le député provincial, eux, M. le
député fédéral, eux, M. le maire, eux, M.
l'échevin, eux, M. le commissaire. Parce qu'ils ont été
élus administrateurs à un niveau ou à l'autre, ils se
croient porte-parole de la communauté et refusent très
difficilement à la communauté elle-même de parler,
même pendant le temps de leur mandat.
Je suis convaincu qu'au niveau de chacune des expériences de
télévision communautaire au Québec, on a eu affaire
à ces jeux de coulisse. Et c'est exactement pour ça, aujourd'hui,
que vous demandez non seulement qu'on protège cette entreprise mais
qu'on lui donne des moyens financiers de vivre qui ont probablement
été tout le temps ceux auxquels vous avez eu à faire face.
Je crois que s'il y a une télévision, c'est la
télévision non pas où le législateur devrait aller
comme porte-parole de la communauté, c'est la télévision
que le législateur devrait écouter. C'est à peu
près l'endroit où le législateur devrait le moins
aller.
J'admets qu'à certaines occasions, il serait intéressant,
justement, au cours d'une expérience de télévision
communautaire, de mesurer l'opinion de la communauté elle-même que
vous captez vivante dans une région qui s'exprime et de ceux qui se
prétendent quotidiennement et à chaque jour autour de cette table
les porte-parole de cette communauté. Souvent, la population aurait
l'occasion admirable d'apprécier comment ceux qui se disent ses
porte-parole sont parfois effrontément éloignés de ce
qu'elle pense réellement. Ce sont les objectifs d'une
télévision communautaire, je pense, mais, à cause de leur
nombre, vous ne les réaliserez pas facilement. Quand on argumentera
auprès de la Régie des services publics, lorsque viendra le temps
de défendre votre programmation, de la qualité des
émissions, je suis convaincu que vous aurez à faire preuve de
beaucoup plus de finesse que Télé-Métropole n'en a eu pour
défendre Claude Blanchard quant à la qualité de son
émission. Très rarement, on va prendre la
télévision commerciale et l'obliger à fournir un exemple
de qualité de programmation. La vôtre, je crois, doit reposer
je crois aussi l'avoir compris dans votre mémoire, comme vous
l'avez défendu sur le fait que ce soit le plus souvent possible,
le plus honnêtement possible également tout le monde qui puisse
parler à cette télévision communautaire.
Je ne veux pas être moraliste à la fin, mais je suis
convaincu que vous ne pouvez pas nous donner cette leçon que vous nous
apportez aujourd'hui sans qu'en retour on ne vous invite à faire un
examen, vous aussi, ou à vous en donner une. C'est que pour certains
groupes qui travaillent je pense à un en particulier avec lequel
j'ai travaillé d'assez près lorsque j'étais
étudiant dans cette expérience communautaire, il faudra
même si la communauté que l'on veut faire parler n'est pas
exactement ce que l'on souhaiterait qu'elle soit, ne pense pas exactement comme
on voudrait qu'elle pense, même si on la trouve encore plus
aliénée qu'on n'aurait voulu qu'elle soit ou qu'on la trouve
encore plus éprise de principes qui, pour nous, artisans de cette
production sont déjà dépassés constamment
respecter ça. A cet effet, la cote d'écoute a très peu
d'importance. Que la télévision communautaire reflète
totalement, et parfois même à l'encontre de ceux qui la font
vivre, les opinions de la véritable communauté, je pense que
c'est l'objectif premier que vous devez avoir.
Moi, j'ai compris quand, par exemple, mon parti a adopté les
points que je vous lisais tantôt dans mon programme que c'était ce
que nous nous engagions de faire et que ça devait évidemment
figurer dans les budgets que nous aurions à présenter. Mais, pour
le reste, l'aspect protection du consommateur, protection de votre entreprise
de télévision communautaire, je crois que le ministre a tout
intérêt à prendre, en particulier sur le chapitre du
comité de la programmation, certainement les recommandations que vous
lui faites. Tant que nous n'aurons pas cet encouragement massif à la
télévision communautaire, il faudra, comme le règlement
tente de le faire, s'appliquer à la protéger. Si on veut
véritablement le moindrement la protéger, dans cette
première étape parce qu'à plusieurs reprises le
ministre nous a rappelé que ce n'était qu'une première
étape de la réglementation de la câblodistribution je
crois que cette première étape doit elle-même comporter un
chapitre ou un article ou une précision les articles flous sont
nombreux dans la réglementation; il y a donc intérêt
à le faire et place pour le faire où on protégera
cette liberté, cette autonomie des comités de
programmation communautaire. Sinon, ça risque d'être une
protection tout à fait fausse et des choses comme celles qui sont
arrivées à Sherbrooke risqueraient de se produire même si
unanimement nous devions adopter le projet de réglementation.
M. le Président, je crois que mon collègue de Lafontaine a
des questions à poser. Mon intervention à moi est
terminée. Il devra compléter celle de mon parti. Merci.
M. LEGER: M. le Président, je pense bien que vous avez
donné dans votre présentation l'essence même d'une
politique des communications et, plus spécialement pour le câble,
c'est celle de permettre aux Québécois de communiquer entre eux.
Vous faites face au problème majeur que l'adversaire dans le fond, c'est
un monopole possible axé justement sur un profit qui est la
première incitation à réaliser quelque chose dans le
domaine des communications. On oublie souvent ou on est en contrepartie en
défensive devant ce rôle de service public qu'on a à
donner.
Malheureusement, je pense que trop souvent, dans le but de rendre
rentable une émission ou un programme, ceux qui n'ont qu'un profit ou
une cote d'écoute comme base, c'est peut-être souvent parce qu'ils
ont essayé de niveler par le bas l'échelle des valeurs de la
population qu'ils ont à desservir. C'est le grand danger. Et l'avantage
que je vois dans une programmation où la communauté a quelque
chose à dire, il y a une possibilité peut-être
d'élever un peu ce niveau des goûts d'une population. Il faut lui
permettre de connaître mieux pour s'assurer qu'elle va aimer et augmenter
une cote d'écoute et non pas l'ayant nivelée par le bas.
Alors, de quelle façon voyez-vous votre conseil du
développement des media communautaires au Québec, que ce devrait
être une garantie de développement socioculturel de la population
québécoise, du milieu desservi? Comment pourriez-vous exprimer
cette possibilité où vous pourriez faire mieux que si la
programmation était uniquement entre les mains de ceux qui sont des
câblodistributeurs ou câblodiffuseurs?
M. ROUTHIER: Si vous me permettez, je crois que justement le principe de
la composition du comité est une garantie en ce sens-là. Je vous
réfère, en particulier, à l'expérience qu'on
signalait tout à l'heure. J'imagine qu'une cinquantaine d'organismes du
milieu, catégorisés selon des secteurs d'activités, que ce
soit la scène syndicale, du côté du bien-être ou du
côté des affaires économiques, il arrive que ces organismes
du milieu sont particulièrement en connaissance de ce qui devrait
être abordé dans le milieu au profit de la population et ce, de
façon beaucoup plus adéquate que souvent un propriétaire,
ou par son intermédiaire, le directeur de la programmation pourrait le
faire, lui qui souvent vient de l'extérieur de la région en
question.
Alors, le directeur de la programmation en question, on ne lui demande
pas d'évacuer les lieux. On lui demande de faire partie
intégrante d'un comité qui serait vraiment représentatif
de la population et non pas laisser le soin peut-être comme
certains membres ici, autour de la table, pourraient être portés
à le croire à quelques jeunes, ici et là, qui, dans
un an, ne seront plus dans le décor, mais vraiment articuler sur le
milieu que sans doute l'OPDQ voulait voir surgir par le biais des CRD, et tout
et tout, et cela, appliqué dans le domaine des communications. Enfin,
quant à la programmation, il nous parait qu'elle a beaucoup plus de
chances de coller au milieu si elle émane d'un organisme qui regroupe
des catégories d'organismes et cela sans aucune réserve.
M. LEGER: Mais comment voyez-vous cela dans la réglementation
proposée? Avez-vous un amendement précis ou une façon de
déterminer cette réglementation, permettant justement aux
endroits qui peuvent le faire de participer à la décision
relativement au contenu de la programmation?
M. ROUTHIER: Effectivement, on n'a pas eu une approche légale.
Nous avions observé dans nos mémoires qu'on ne disposait pas
d'équipe, dans notre organisation, comme l'ATC a pu le faire, pour vous
décoder les articles les uns après les autres. Alors, nous
laissons le soin à l'excellente équipe du ministère des
Communications de traduire, dans des cas bien précis, ce que l'on veut
signifier, quitte à ce que l'on puisse réagir par la suite s'il
nous paraît que la formulation, telle qu'adoptée à ce
moment-là, correspond à ce que nous souhaitons.
M. LEGER: Maintenant, pour faire face à des difficultés
que n'importe quel groupe communautaire peut rencontrer dans un système
capitaliste, est-ce que vous pensez que des subventions gouvernementales sont
absolument essentielles ou si les gens du milieu peuvent d'eux-mêmes
suffire ou s'autosuffire au point de vue du financement?
M. ROUTHIER: Voilà. Là-dessus, j'aimerais vous faire
observer certains faits. Sans trop d'hésitations, même si depuis
une couple d'années, en particulier au Québec, on commence
à se poser des questions, on se tourne de bord et on investit
$1,500,000,000 dans l'éducation, on regarde aller cela et on commence
à se questionner un peu.
Du côté des communications, surtout pour un champ dit aussi
vital que tous les partis tombent d'accord, c'est d'un ridicule extraordinaire;
j'entends aucune profession de foi n'est faite ici depuis deux ans qui va
permettre d'être réalisée si l'Etat du Québec
n'investit pas de façon intéressante dans le domaine, et pas
seulement par un biais comme Radio-Québec, mais vraiment articuler sur
la population.
D'autre part, il nous paraîtrait très difficile de
défendre le fait que les câblodistributeurs doivent, à eux
seuls, par une partie de leur profit brut, financer les opérations, pas
plus que l'un et l'autre; j'entends que cela provienne des instances
gouvernementales ou que cela provienne de la compagnie, pas plus cela devrait
se réaliser sans un effort au moins minime de la part des organismes du
milieu, un milieu relativement articulé.
Dans un milieu où cela débute, c'est beaucoup plus
difficile de le faire. En plus, il y a la publicité qui pourrait en
sortir, pas une publicité telle qu'on la connaît actuellement,
mais repensée et peut-être à caractère plus
institutionnel que celle qu'on connaît actuellement et qui sollicite
continuellement les individus. Alors, cela paraîtrait quatre sources de
revenu qu'il faudrait aménager de façon correspondante. De par
son obligation d'assurer, en particulier dans la situation du Québec, un
moyen propice au développement culturel, il n'y a pas d'erreur que
l'Etat devrait investir plus que cela.
M. LEGER: Avez-vous l'impression aussi...
M. ROUTHIER: Si vous le permettez, il va compléter.
M. VALLEE: En parlant de ressources du milieu, je prends
l'expérience de Drummondville, par exemple. La Société
nationale des Québécois, l'ancienne Société
Saint-Jean-Baptiste, a investi dans la télévision communautaire
par le prêt de locaux, chauffage, téléphone etc., et par le
salaire d'un de ses permanents qui est prêté à la
télévision communautaire. Dans très peu de temps, les
caisses populaires du coin vont investir dans la télévision
communautaire. Peu à peu des ressources communautaires d'une
région donnée s'aperçoivent que la
télévision communautaire, c'est quelque chose et que c'est
important au niveau des communications. Alors, ils commencent à
s'intéresser à l'affaire et à y participer
financièrement. Dans ce sens-là, c'est pas mal important.
Je vais revenir aussi sur ce que vous disiez tantôt: La
différence entre les câblodiffuseurs et les producteurs
communautaires. S'il y a production communautaire sur le câble, c'est que
c'est venu en réaction contre les media traditionnels. Si le
câblodiffuseur devient leur producteur, le canal communautaire devient un
medium traditionnel. Les télévisions communautaires sont
nées parce que les media traditionnels ne répondaient pas aux
besoins de communication des citoyens. Je peux vous citer des centaines
d'exemples dans ma région. Les télévisions communautaires
sont nées à cause de cela. Si on remet entre les mains du
câblodiffuseur la responsabilité de la production, on retombe dans
le même bateau. Par exemple, on est venu, à un moment
donné, pour expliquer la télévision communautaire au poste
de radio local et il nous demandait $250. Il y a un paquet d'exemples comme
cela. Les groupes communautaires n'ont pas d'argent pour se faire entendre dans
les media traditionnels. Il y a même des cas où des journalistes,
à des conférences de presse, se sont presque ri des groupes
communautaires. Alors, tout cela a fait qu'à un moment donné les
groupes communautaires en ont eu assez des media traditionnels et ils ne
veulent plus rien savoir de la clique présente dans ces media-là.
C'est pour cela que les télévisions communautaires sont
nées. C'est pour libérer l'expression des citoyens. Ils veulent
dire ce qu'ils ressentent et ils vont prendre leur medium à eux.
M. LEGER: Autrement dit...
M. FORTIER (Jean): Sur l'implication financière, juste pour
compléter, l'apport du milieu à Sherbrooke, c'est simple; depuis
deux ans, quatre personnes payées à plein temps ont
été mobilisés pour préparer l'expérience et
donner tous les services nécessaires. Au niveau de la production l'an
dernier, il y a eu 5 1/2 personnes. Des organismes ont payé 5 1/2
personnes pour réaliser pour eux des émissions,
c'est-à-dire la commission scolaire locale, l'agence de service social,
etc. C'est sans compter toutes les autres émissions. C'est donc dire que
le milieu s'est impliqué financièrement et considère
très sérieusement la télévision communautaire comme
une alternative pour s'informer et pour communiquer. Si la régionale, si
l'agence de service social, si toutes ces insitutions-là mettent autant
d'argent là-dedans, c'est donc dire que c'est sérieux. Mais on
n'a aucune garantie; c'est toujours le même problème. On investit
de l'argent là-dedans, mais on n'a aucune garantie, face à la
compagnie de câble, qu'on va pouvoir utiliser cela en fonction de nos
besoins. Je trouve que c'est bien important de souligner qu'à Sherbrooke
il y a une grosse mobilisation financière du milieu. Il se fait
là une grande préparation, mais cela souligne d'un autre
côté face à cela, quelles garanties on a. C'est,
d'ailleurs, le point crucial qu'on voit à Sherbrooke et la raison pour
laquelle on est ici.
M. LEGER: En d'autres mots, la solution pour vous, ce serait une
protection par une réglementation précise. Deuxièmement,
qu'il y ait une possibilité de subvention statutaire pour ne pas
dépendre de choix partisans ou autres; que ce soit quelque chose de
statutaire, basé sur des critères bien définis pour que
cet argent-là ne soit pas jeté à l'eau, mais soit
versé à des organismes sérieux qui ont prouvé
qu'ils sont issus du milieu et qui sont représentatifs du milieu.
Finalement, cela peut amener, selon vous, une mobilisation des gens du
milieu donc, un dynamisme nouveau, et responsabiliser les gens du milieu
à cette programmation qui amènera une possibilité pour que
les Québécois d'un milieu communiquent entre eux, que ça
devien-
ne eux. Ils peuvent s'identifier d'ailleurs dans ces émissions,
et peut-être niveler par le haut cette fameuse cote d'écoute qui
amène justement comme premier objectif un profit plutôt que
réellement une responsabilité sociale dans le milieu. C'est un
équilibre de tout cela que vous voulez obtenir par la
réglementation et une subvention possible.
M. FORTIER: Quant à la responsabilité du milieu, la
programmation l'an dernier, à Sherbrooke, était faite par les
groupes, donc, les 56 organismes, directeurs généraux ou
présidents qui ont mandaté officiellement des personnes à
l'élection du comité consultatif de programmation du canal 11. Il
y a eu un mécanisme, ces sept représentants étant en
communication constante avec les groupes, la programmation a été
la responsabilité totale du milieu. Dans chaque secteur, ce sont les
groupes, ce sont les organismes ensemble qui se sont dit: Si tu fais telle
émission, bien, je ne la ferai pas, je vais faire plutôt
celle-là. On a vu plusieurs émissions conjointes, donc il est
possible de penser que le milieu peut prendre en charge toute
l'opération de la programmation. Cette année, ce qui nous fait
peur un peu, c'est qu'on a constaté qu'on nous avait laissé
mettre le pied dans la porte, et on nous écrase le pied.
M. LATULIPPE : Si vous me permettez une couple de corrections à
la perception que vous véhiculez. Quand vous parlez de subvention du
ministère, il semble qu'il s'en dessine. Mais c'est relativement mince
par rapport aux besoins à satisfaire, et il n'y a pas que la
télévision communautaire qui existe comme media communautaire. Il
y a des imprimés, j'entends des journaux, il pourrait être
question de radio, enfin, les media communautaires, pour une bonne part, sont
à inventer. Alors, quand on pense en termes de subvention, je n'ai pas
de difficultés à vous mobiliser l'imagination, à savoir
qu'est-ce que cela pourra représenter dans un avenir pas trop
éloigné, mais justement c'est cela qui est en train de prendre
forme actuellement.
M. LEGER: On parle de câble aujourd'hui, mais au niveau
communautaire, il y a toutes sortes de communications entre les gens d'un
milieu et c'est pour éviter ce dont on parlait justement dans les
journaux dernièrement, un monopole journalistique; vous voulez
prévenir un monopole dans le domaine du câble. Le problème
qu'on vit actuellement, c'est comme l'expérience qu'il y a en
Suède actuellement au niveau des media de journaux, le gouvernement, de
façon statutaire, donne des subventions à des journaux de
deuxième force ou puissance, quel que soit le parti politique. Il y a
des critères bien définis. Si c'est le parti au pouvoir qui a le
journal en deuxième puissance, bien, il a l'octroi statutaire. Si c'est
le parti d'opposition qui est là, ou si c'est un journal qui est
absolument apolitique, le deuxième a une subvention. Ce sont des
critères bien définis que vous voulez avoir, permettant à
un milieu de pouvoir s'exprimer. Aujourd'hui on parle du câble, mais cela
veut dire aussi la télévision, la radio, les journaux, etc.
M. LATULIPPE: Si vous me permettez, vous avez intercalé dans
votre réponse le mot "monopole" ou "concentration". Nous nous permettons
de faire une mise en garde du fait par exemple qu'on a entendu le
représentant d'une compagnie du côté de
Trois-Rivières venir défendre l'idée, et sans doute au nom
de tous les câblodistributeurs, que ce n'est pas trop dangereux de
posséder une station de télévision, peut-être deux,
et d'autres media et, en plus, avoir la câblodistribution. On a les
comptes rendus ici des rencontres qui montrent que même des membres de la
commission, à toutes fins pratiques, souscrivaient à cette
approche. Pour nous, il n'est pas du tout certain, en tout cas, il ne nous
apparaît pas clair du tout qu'il faut aller dans ce sens-là,
même s'ils peuvent évoquer le fait qu'ils disposent d'un software
particulièrement intéressant dans un milieu donné,
etc.
Au niveau des intentions, on ne leur en prête pas. Il nous
paraît assez clair que c'est ouvrir la porte, de toute façon, si
ce n'en est pas, à ce qui pourrait en devenir très très
rapidement.
M. LEGER: En ce qui me concerne, je suis pleinement d'accord avec les
points que vous avez défendus, et j'espère que le ministre
je pense qu'il a été touché par ces arguments-là
tiendra compte de cela dans sa réglementation.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): M. le député de
Saint-Laurent.
M. PEARSON: J'aimerais savoir, dans une population par exemple, comme
Montréal, Québec ou Laval, comment cela pourrait fonctionner pour
permettre à une population locale, puisqu'il y a plusieurs
localités à l'intérieur d'une île comme
Montréal, de pouvoir s'exprimer?
Comment cela pourrait-il fonctionner? Cela m'intéresse.
M. ALLARD: Je pense que j'ai entendu une proposition qui venait des
câblodistributeurs mêmes. C'est que dans une région comme
Montréal, il existe quand même des réalités que l'on
peut appeler de quartiers, et de plus en plus les gens de la région de
Montréal commencent à s'organiser autour de ces entités
que l'on appelle "quartiers". Le câble pourrait très bien
desservir des productions communautaires sous forme de quartiers,
c'est-à-dire sectoriels.
M. LEGER: ... et dans le comté de Lafontaine, la ville de
Pointe-aux-Trembles avait deux heures par semaine par câble, des
émissions
pour les gens de Pointe-aux-Trembles. Alors, cela peut se faire
facilement. Il y a tellement de canaux possibles avec les nouvelles
méthodes.
M. ALLARD: II y a même une expérience à
Montréal où on pense... On est en train de réaliser, je
crois, une expérience de télévision communautaire à
l'intérieur d'un HLM et on étend cela aux quadrilatères
environnants. Alors, il serait possible de penser une télévision
communautaire même en deçà d'un quartier, parce que,
à Montréal, un quartier peut comprendre une fois ou deux la ville
de Sherbrooke.
M. PEARSON: Est-ce qu'une expérience comme telle a vraiment
été tentée dans Pointe-aux-Trembles?
M. LEGER: Régulièrement les gens de Pointe-aux-Trembles
savaient qu'à telle heure, deux heures par semaine, c'était des
nouvelles de Pointe-aux-Trembles et comme les gens vivent réellement un
esprit de communauté depuis très longtemps, les nouvelles de
Pointe-aux-Trembles les touchent et le canal avait une très haute cote
d'écoute. Je pense que National Câblevision pourrait affirmer la
même chose. Même des séances du Conseil de ville
étaient très suivies. Ce serait peut-être bon pour
l'Assemblée nationale aussi.
M. LAHAIE: Pour la région de Montréal, nous avons toujours
essayé de lui donner une représentativité des diverses
parties. Nous avons eu Ville Laval, c'était mené par le CEGEP et
en particulier un professeur qui s'est groupé avec une vingtaine de
jeunes hommes, qui nous donnait une programmation pour les gens de Laval.
Après cela, nous avons organisé un groupe sur la rive sud pour
tâcher de nous donner au moins une heure par semaine pour Longueuil,
Saint-Lambert, Préville, Greenfield Park, Brassard, Châteauguay;
la même chose dans l'île de Montréal, Pointe-aux-Trembles,
Montréal-Est. Alors, finalement on a réussi à avoir toutes
les parties. Seulement de là, il n'y aurait pas moyen de donner un canal
par municipalité. Il y en a 21.
M. PEARSON: Je suis d'accord. Ce qui fait la différence entre ce
que vous dites et ce qui a été exprimé par les organismes
devant nous, c'est ceci: Ces gens ont dit qu'ils ont regroupé 56
organismes différents qui sont, d'après eux,
véritablement, représentatifs du milieu, tandis que, dans votre
cas, c'est vous qui avez décidé, qui êtes allé voir
à Longueuil et qui leur avez demandé: Produisez-nous quelque
chose, une heure ou deux. A Pointe-aux-Trembles, est-ce que c'est un peu comme
cela? Alors comment cela pourrait-il fonctionner à l'intérieur
d'une ville comme Montréal? Serait-il possible de regrouper justement
tous ces organismes parce que la participation est sûrement beaucoup
moins forte, en tout cas, dans une ville comme
Montréal qu'à un endroit désigné comme
Sherbrooke ou comme au Lac Saint-Jean où il y a une espèce
d'affinité, une communion beaucoup plus forte, en tout cas, que dans une
île comme Montréal...
M. LEGER: ... de Saint-Henri, il y a une communauté; des gens ont
quelque chose en commun. Alors, dans le contenu, si la possibilité est
là, il s'agit de savoir ce que l'on va donner, par exemple, aux citoyens
de Pointe-aux-Trembles? Est-ce que, si il y a un organisme comme on nous
présente aujourd'hui, il a le droit de déterminer le contenu de
cette programmation? Il va le faire selon un niveau qui va et intéresser
les gens de Pointe-aux-Trembles, et qui tiendrait compte aussi de la
qualité du milieu, et qui serait par la suite approuvé selon un
mode quelconque avec les gens du câble. Mais ce qui compte c'est de ne
pas dire simplement: On vous donne cela à vous, les gens de
Pointe-aux-Trembles, donnez-nous n'importe quoi là-dedans ou donnez-nous
quelque chose qui est intéressant.
C'est le contenu qu'il faut vérifier et c'est là, je pense
bien que le groupe veut surtout avoir accès dans la programmation de ce
qui va être transmis par le câble.
M. LAHAIE: Monsieur, je pourrais vous dire que dans le contenu, jamais
nous n'avons déterminé le contenu en attirant les groupes de
Montréal. Le contenu est toujours laissé à la
discrétion du directeur de ce programme et il y avait une moyenne de 500
personnes par semaine au temps où je dirigeais cette compagnie à
Montréal. 500 personnes par semaine apparaissaient au canal
communautaire et le contenu était toujours le leur.
M. FORTIER (Jean): Pour compléter la question, pour mettre sur
pied la télévision communautaire à Montréal, je
crois qu'il y a un principe. A Sherbrooke, je parlais de 56 organisations. Ce
qui s'est passé c'est que, devant la facilité qui était
annoncée que le câble mettrait un canal local à la
disposition de la communauté, l'initiative est venue du milieu
lui-même. Les organismes se sont concertés entre eux et c'est ce
regroupement qui est allé rencontrer la compagnie, qui s'est
informé et qui a dit: Nous voulons faire tant d'émissions. Je
crois que c'est bien important. Si, à Montréal, ça devait
se faire d'une façon quelconque, ça ne devrait pas être le
propriétaire du câble qui se mette à aller faire de
l'animation dans le milieu, aller chercher les gens qu'il connaît dans le
milieu, parce que ça donne de la production locale.
C'est un peu ce que nous avons vécu à Sherbrooke.
Parallèlement à ce regroupement qui est venu faire des
émissions, le directeur de la programmation qui a été
engagé par la compagnie est allé voir le milieu qu'il connaissait
et ça a donné deux heures d'émissions mais ça a
donné deux heures d'émissions qui n'étaient pas
du tout comme les autres. C'étaient des émissions sur les
fleurs, sur la météo, une émission de
variété mais c'étaient vraiment des émissions qui
tenaient à un individu que le directeur de la programmation connaissait.
Je crois que ce qui est important pour lancer la télévision
communautaire quelque part c'est que ça parte d'un besoin, du milieu
lui-même, des organismes qui ressentent des lacunes dans l'information ou
des besoins de s'exprimer.
M. PEARSON: Ce que je voudrais savoir, on n'est pas capable de le
définir ici, mais vous avez fait une expérience. D'après
cette expérience, vous ne croyez pas que la quantité de personnes
ou la grandeur d'une ville comme Montréal soit une objection
fondamentale au fait que ça pourrait se réaliser, peut-être
de façon différente, peut-être avec certaines
difficultés. Mais d'après votre expérience ça peut
se faire dans des grandes agglomérations comme Montréal, Laval ou
Québec?
M. FORTIER (Jean): II ne s'agit pas pour moi de défendre
fondamentalement la télévision communautaire, dire si c'est
possible à Montréal. Mais fondamentalement ce qui est important
c'est que, là où il peut se faire de la télévision
communautaire, la responsabilité ne soit pas donnée à une
minorité qui est le propriétaire du câble avec son
directeur de la programmation engagé mais que la responsabilité
soit vraiment donnée au milieu par des mécanismes. Et des
mécanismes, il est possible d'en mettre au point et c'est encore bien
mieux qu'une ou deux ou trois personnes qui décident ce que sera la
programmation du canal.
Concernant la possibilité de la télévision
communautaire à Montréal, là-dessus, nous pourrions parler
beaucoup mais je pense que nous ne pouvons pas aller beaucoup plus loin que ce
que monsieur a dit tout à l'heure à savoir qu'à ce jour,
à Montréal, il n'y en a pas de télévision
communautaire. Ce qui est en train de se penser chez les groupes là-bas,
les besoins qui sont en train de se préciser, ça va surtout au
niveau des communautés locales comme Saint-Henri ou les autres quartiers
à Montréal.
M. ALLARD: Pour ajouter, c'est certainement aux gens de Montréal
de définir eux-mêmes quels media ils auront à employer,
qu'ils trouveront le plus facile d'employer. Je pense qu'on ne peut pas se
borner seulement au câble, il y a aussi de l'animation aux media comme
tels. Le UHF à faible puissance s'en vient, il y a toutes sortes de
secteurs que des gens expérimentent un peu partout. Ce qui est important
dans tout ça, c'est de prévoir des mécanismes
"facilitateurs". Ce n'est pas de faire de l'impérialisme et dire: Vous
allez vous organiser de telle façon. Mais il faut prévoir des
moyens pour que les gens qui veulent s'organiser puissent le faire. Cela, c'est
le but d'une réglementation.
C'est pour ça que nous la souhaitons plus rigide jusqu'à
un certain point, pour permettre justement aux communautés qui
débutent de ne pas tomber sur les mêmes obstacles qu'on
rencontrés Sherbrooke, Drummond. Partout dans le Québec où
on a tenté de mettre sur pied une télévision
communautaire, on a eu des difficultés avec les propriétaires de
câble. Nous croyons sincèrement qu'il faut que cette
réglementation soit beaucoup plus qu'un acte de bonne volonté,
laisse beaucoup moins de la latitude aux propriétaires de câble
qu'à l'heure actuelle.
M. CASTONGUAY (André): Dans la même ligne, je rappellerais
ce que le ministre L'Allier soulignait tout à l'heure alors qu'il disait
que ça devrait plutôt dépendre de la régie de
décider dans chaque cas particulier s'il y aurait ou non un organisme
représentatif du milieu, un comité consultatif et qu'à ce
moment-là ce soit inséré dans le permis
accordé.
Je pense que c'est vraiment utopique de penser que la compagnie de
câbles va partir comme ça à faire de la publicité
sur une grande échelle. Il faut dire aux gens de venir. On est
intéressé à ce que vous participiez et que vous
décidiez, en ce qui concerne la télévision communautaire.
On sait bien que l'expérience qu'on a eue à Sherbrooke avec
National Cable-vision a été tout à fait contraire. Il a
fallu que ça vienne du milieu et qu'on se batte pour que la compagnie
finisse par accepter que le milieu se rassemble et élise un
comité consultatif. Je pense que ça doit être vraiment
inséré dans les principes généraux, de sorte qu'une
compagnie devrait, à ce moment-là, voir à ce qu'il y ait
la publicité autour de ça et que ce soit vraiment inclus dans ces
politiques.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Chicoutimi.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. lé Président, dès le
début des audiences de cette commission, le parti que je
représente a fait valoir sa position concernant la
télévision communautaire. Notre attitude, contrairement à
ce que laissait entendre un membre d'un parti présent ici, n'a jamais
été et dans aucun cas pour les autres partis une
attitude protectionniste. Nous n'avons jamais adopté des positions qui
indiquent que nous voulons simplement protéger la
télévision communautaire. Nous avons demandé au ministre
d'assurer à la télévision communautaire les moyens de se
développer, de prendre sa place dans l'ensemble des moyens de
communication dont doit disposer la communauté..
On a tout à l'heure fait allusion et je crois
nécessaire d'y revenir à une idée que le ministre
avait suggérée et que j'ai reprise, la question de la
représentativité en ce qui concerne la communauté. Il est
important, en hommes lucides et responsables, les représentants de
collectivités qui sont la communauté, de s'interroger sur
ce terme. Chacun peut prétendre représenter la communauté,
mais les pouvoirs publics ont le devoir d'établir des frontières,
de déterminer des seuils pour que la communauté à tous ses
paliers soit représentée, y ait des moyens d'expression.
Le député de Saint-Jacques, en nous récitant, tout
à l'heure, le petit catéchisme du parfait anarchiste,
déclarait que nous n'avions pas été tâtillons et
très méchants à l'endroit des radiodiffuseurs et des
télédiffuseurs. Je crois que ceux qui ont lu attentivement, sans
préjugé et sans préoccupation partisane
électoraliste, les comptes rendus des séances de cette
commission, se sont rendu compte que non seulement nous avons été
plus que tâtillons, mais que nous avons été brutaux
à l'endroit des radiodiffuseurs, des télédiffuseurs, des
câblodistributeurs à qui nous avons demandé, de
façon très nette, et je l'ai fait à maintes reprises:
Est-ce que vous vous sentez responsables de la communauté
québécoise et est-ce que vous êtes disposés à
collaborer avec elle et avec le gouvernement qui la dirige? Je tiens à
faire cette mise au point pour qu'il n'y ait pas d'équivoque. Tous, tant
que nous sommes, nous représentons des citoyens. Je représente,
pour ma part, 37,000 électeurs, ce qui veut dire au-delà de
50,000 personnes, et je suis bien conscient des problèmes qui se posent
dans le milieu qui est le mien. C'est le cas de tous les députés
qui sont à cette table. Mais les choses étant ce qu'elles sont,
nous avons entendu des organismes de téléphonie, de
câblodistribution, de radiodiffusion, de télédiffusion et
nous leur avons à tous posé la même question, à
savoir quel était le cas qu'ils faisaient de leurs
responsabilités.
Particulièrement en ce qui me concerne, je les ai tous
interrogés sur l'attention qu'ils allaient apporter aux moyens de
communication communautaires. Il faut bien s'entendre. Lorsque j'entends dire:
Bon, les directeurs de la programmation de telle ou telle entreprise veulent
défendre leurs intérêts, je suis d'accord pour que d'autres
intérêts s'expriment. Si chaque citoyen de la communauté a
des besoins à exprimer et des intérêts à
défendre, il faut reconnaître que les entreprises de
câblodistribution, de diffusion, de radiodiffusion ou de
télédiffusion ont également des intérêts qui
peuvent être aussi valables que ceux des autres. Nous sommes ici pour
essayer d'établir un équilibre et une pondération. C'est
dans cette perspective que nous avons à maintes reprises demandé
au ministre de revoir la réglementation afférente à la loi
35 pour que non seulement la télévision communautaire soit
protégée, mais que la télévision communautaire se
développe selon un rythme de croissance qu'elle établira, que les
moyens communautaires établiront dans les divers secteurs où ils
oeuvrent en collaboration avec le gouvernement et avec l'aide du
gouvernement.
Le ministre a été d'ailleurs très explicite
à ce sujet, mais il a insisté sur le fait que nous sommes encore
en terrain vierge, que nous avons à inventer de nouveaux moyens et que
nov.s avons à tenir compte de situations difficiles qu'il n'est pas
aisé de mettre de côté. C'est un écheveau
très compliqué et nous nous sommes rendus compte à la
suite des auditions que nous avons tenues qu'il y avait une imbrication de
problèmes, d'intérêts. Notre responsabilité à
nous sera de les régler, ces problèmes, à l'avantage de la
communauté, la communauté étant entendue au sens de
l'ensemble de la population du Québec à l'intérieur de
laquelle se trouvent des groupes qui, comme on l'a souligné, n'ont pas
eu, jusqu'à présent, voix au chapitre. Notre position comme parti
politique est donc très claire. Elle est non seulement positive, mais
elle est même agressive et elle va dans le sens de l'ensemble des
propositions qui nous ont été soumises et qui exigent de notre
part un examen plus approfondi pour que l'on puisse inventer des
mécanismes qui permettent aux entreprises de se développer et en
même temps aux citoyens d'avoir ces moyens démocratiques de
s'exprimer par le truchement des ondes. Ceci étant dit, M. le
Président, je tiens à répéter que j'ai
été très heureux d'entendre les représentants des
organismes communautaires. Il me plaît de les assurer de notre
collaboration positive et de notre collaboration dynamique, sous la
réserve suivante qu'ils veulent bien faire auprès de nous le
lobbying qu'ils ont fait auprès d'autres partis politique.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): M. Rou-thier, vous avez demandé la
parole.
M. ROUTHIER: Je désirerais, dans une dernière remarque,
attirer votre attention sur deux points. D'abord, à plusieurs reprises,
les membres de la commission sont intervenus pour faire état du
caractère expérimental de la réglementation en question.
Ce qu'il ne faut pas négliger, c'est qu'en particulier du
côté du CRTC, il y a déjà, depuis deux ou trois ans,
des expériences de faites. Le terrain n'est pas aussi vierge qu'il en a
l'air. Déjà, il y a des expériences qui sont nettement
indicatives quant à des embûches à éviter et des
avenues à explorer. Et de un. Quant au deuxième point, ceux qui
nous ont précédés, vous les avez interrogés
à savoir quelle serait leur attitude en cas de conflit entre la
réglementation adoptée ici et celle adoptée à
Ottawa. Dans le second rapport que nous vous avons acheminé, nous avons
fait état d'une position que j'aimerais expliciter rapidement sur le
contentieux fédéral-provincial en matière de
communications.
A notre point de vue, il n'y a justement pas lieu de chercher à
éviter de toutes sortes de façons des problèmes possibles
du fait que, selon que l'une ou l'autre des réglementations sera plus
sérieuse ou exigeante que l'autre, elle embrassera forcément les
exigences de l'autre, ce qui ne devrait pas la fatiguer pour autant. En
cas de conflit, en particulier pour ce qui est de la publicité,
il nous paraît justement qu'avec les mécanismes qu'on favorise au
niveau de la programmation et ce, dans les diverses régions du
Québec, avec les comités nettement représentatifs de la
population, sur une courte période, vraisemblablement pas plus de trois
ans, il se pourrait fort bien que les deux gouvernements en cause trouvent des
arbitres beaucoup plus neutres qui pourraient indiquer nettement ce qu'ils
souhaitent, plutôt que d'engendrer des débats stériles qui
accouchent d'une souris.
En ce sens, il nous paraît justement que des organismes qui vont
devenir de plus en plus représentatifs comme le nôtre pourraient
être des acteurs importants à mettre à la table au moment
d'aborder ces choses-là, plutôt que de continuer à
alimenter un débat dont les citoyens font les frais en
définitive. Merci.
M. VALLEE: Moi, j'ai une suggestion à faire à la
commission. On parle souvent de pouvoirs publics. Je suggère à la
commission de remettre ce pouvoir justement au public selon les
mécanismes qu'il voudra et non pas de remettre ce pouvoir à une
structure technocratique faite par le gouvernement ou encore entre les mains de
financiers.
M. FORTIER (Jean): Je voudrais compléter ce que M. le
président disait. Tout à l'heure, vous disiez que la vision
idyllique des media communautaires devait se mettre en relation avec les
contraintes de la réalité, notamment en ce qui concerne la
responsabilité publique du diffuseur. Je voudrais juste porter une
petite remarque à votre attention, en disant comment, à
Sherbrooke, le président, M. Levasseur, nous a donné sa
réaction. Lors de la première réunion du comité
consultatif dont j'étais un des membres élus, M. Levasseur
déplorait justement la contradiction dans les énoncés du
CRTC selon lesquels les émissions communautaires sont faites par le
milieu, alors la responsabilité légale, elle, revient à la
compagnie. Selon M. Levasseur, la responsabilité devrait être
reconnue aux groupes communautaires et, quant à lui, la question de la
poursuite en libelle ne lui faisait aucunement peur. On parle
théoriquement de la responsabilité juridique, mais à
Sherbrooke on a vécu de cette façon. Le président de la
compagnie nous a dit de façon très claire que, quant à
eux, cette question ne les préoccupait pas. D'après les
études qu'ils ont faites, c'étaient des risques
négligeables, d'après l'expérimentation pratique. A
Sherbrooke, on a vécu avec ça. Le comité consultatif a
fait la programmation et on n'a pas eu de difficulté avec cette question
de responsabilité juridique ou de responsabilité publique du
diffuseur. Même si, en théorie, ça pouvait être
possible, la compagnie n'accordait pas plus d'importance que ça à
cet aspect, pour dire: Ecoutez, on ne peut pas vous donner la
responsabilité sur la programmation. C'est un élément
vécu, et c'était pour compléter.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable ministre des
Communications.
M. L'ALLIER: M. le Président, j'ai entendu avec
intérêt ce qui a été dit. Je n'ai pas l'intention,
à ce moment-ci, de donner d'opinion ou de décision en ce qui
concerne quelque article du règlement que ce soit, notamment compte tenu
de ce qui a été dit dans les dernières interventions, dans
les résumés, si vous voulez, de ce que les intervenants ont
dit.
On a parlé de débats dont les citoyens font les frais
entre les niveaux de gouvernement. En ce qui me concerne, les groupes de
citoyens, qu'ils soient organisés ou non organisés, sont
relativement semblables sur certains points. C'est qu'ils essaient je ne
les blâme pas pour ça de trouver avantage de toutes les
situations, de la même façon qu'au haut-commissariat, avec des
organismes de loisirs, on avait des gens qui venaient nous demander une
subvention et qui, par la suite, allaient la compléter au gouvernement
fédéral en disant: Le problème est politique, c'est votre
affaire. C'est une conception de l'Etat qu'on doit avoir ou qu'on n'a pas. En
ce sens, je ne m'arrête pas à l'étiquette de tel et tel
groupes pour savoir s'ils ont ou s'ils n'ont pas cette conception de
l'Etat.
Deuxièmement, pour ce qui est de remettre entre les mains des
citoyens, et non pas entre les mains des technocrates ou des financiers, les
pouvoirs décisionnels quant au câble, c'est une question aussi qui
peut être débattue. En définitive, toute la question est de
savoir où sont les citoyens dans cette histoire, qui, en fait, les
représentent et de quelle façon ils se manifestent.
Quant à moi, je dois dire qu'aussi longtemps que j'aurai la
responsabilité de ce secteur, je n'ai pas l'intention de travailler
d'une façon intuitive au risque d'être impopulaire
d'une façon émotive ou sentimentale en matière de
communications. Nous devons, quand nous posons des gestes réglementaires
et des gestes législatifs, nous asseoir sur les expériences qui
existent et sur les données les plus complètes possible dont nous
pouvons disposer. La réglementation que vous avez devant vous, aussi
modeste soit-elle, aussi insatisfaisante et aussi timide puisse-t-elle
paraître, est quand même la plus avancée qui existe à
l'intérieur de ce pays et même à l'étranger,
notamment quant à la garantie qui est donnée, au principe qui est
énoncé à l'article 5 sur les objectifs sociaux et
culturels qui doivent être poursuivis, article auquel la régie est
soumise et à partir duquel elle doit motiver ses décisions.
Ce geste, donc, timide par rapport à ce que vous souhaitez ou ce
que d'autres peuvent souhaiter, est quand même beaucoup moins timide si
on le compare à ce qui se fait ailleurs. Pour cette raison, entre
autres, je crois que nous devons procéder avec prudence, même si
le mot n'est pas populaire, prudence qui nous amène non pas à
prendre, comme on l'a dit tout à
l'heure, uniquement des mesures protectionnistes, mais bien prudence
dans la mesure où on risquerait, par des interventions émotives
au niveau de la réglementation ou de la législation, de poser des
gestes dont tout le monde, par la suite, aurait à regretter les
conséquences. Je ne pense pas là à l'utilisation qui est
faite ou qui peut être faite des media par tel ou tel groupe. Au
contraire, je pense à la population québécoise qui,
elle-même, a toutes les difficultés du monde, comme toutes les
populations, souvent, à s'adapter aux changements extrêmement
rapides de la technologie et des moyens utilisés.
En ce qui me concerne, aussi populaire et aussi représentatifs
que peuvent être les groupes de télévision communautaire,
il n'en demeure pas moins que, sous eux comme sous n'importe quelle personne
qui est ou qui se dit représentante de la collectivité, il y a
une masse de citoyens qui, elle, est presque apolitique, non politisée,
qui est mal informée, qui est mal structurée, qui n'est pas
structurée.
Ce qu'il nous faut considérer comme gouvernement et comme
responsables de la législation et de la réglementation, c'est
d'éviter de poser des gestes qui, pour ces citoyens qu'on veut de bonne
foi informer, qu'on veut amener à un plus haut niveau d'éducation
sociale et politique, n'auront pour effet que de faire passer, en
définitive, tel ou tel contrôle existant ou présumé
dans des mains plutôt que dans d'autres.
Cette prudence qu'on retrouve, bien sûr, dans la
législation est à la limite des moyens dont nous disposons pour
faire cette législation et cette réglementation. Quant à
moi je l'ai bien indiqué et je termine là-dessus, M. le
Président il s'agit là d'une première
réglementation. Nous allons tenter par tous les moyens d'atteindre les
objectifs qui sont poursuivis par les groupes communautaires, comme par tous
ceux qui s'intéressent au développement des communications. Nous
allons faire en sorte que cette législation et cette
réglementation évoluent au rythme que nous pouvons donner et qui
est acceptable par l'ensemble de la population québécoise.
LE PRESIDENT (M. Pilote): La parole est au député de
Lafontaine.
M. LEGER: L'article 5 dit: "Toute entreprise publique de
câblodistribution doit être un instrument permanent de
développement social, culturel et économique de la
collectivité" et on ne parle que des membres du conseil d'administration
d'une corporation, des propriétaires. Est-ce que le ministre veut dire
par là que la régie sera le seul juge pour déterminer si
cette corporation ou cette entreprise aura réellement atteint son
objectif d'être un instrument de développement du milieu? Est-ce
qu'il y a une façon dont on peut s'assurer que le milieu comme tel aura
pu réellement proposer des choses qui sont acceptées par cette
entreprise qui voit au développement du milieu? Qui, en dernier ressort,
pourra déterminer que le développement du milieu, elle le fait
bien ou pas?
M. L'ALLIER: M. le Président, si le député de
Lafontaine était juriste, je ferais appel à ses connaissances
juridiques pour souligner qu'à l'article 5, dans le premier paragraphe,
on dit: "Toute entreprise publique de câblodistribution doit être
un instrument permanent de développement social, culturel et
économique; à cet effet..." Ce n'est pas limitatif. Entre autres
choses, il doit sur ces points particuliers intervenir. L'article 5 donne
à la régie un cadre de développement des communications
que la régie devra respecter et qui se retrouve, par ailleurs, non
seulement dans les textes législatifs, mais dans les décisions
qui seront, au fur et à mesure de son travail, rendues par la
régie, que ce soit en téléphonie ou ailleurs. On a pu le
constater; cela a pu blesser, dans certains cas, même les administrateurs
publics. On n'a qu'à regarder, par exemple, les décisions qui ont
été rendues en expropriation par la régie dans le cas de
Forillon, et d'autres décisions qui ont été rendues
à l'encontre de sociétés de téléphone, les
obligeant à des développements qui, dans des régions, ne
sont pas rentables, comme la réduction du nombre d'abonnés
à quatre. C'est la seule régie provinciale qui a agi en ce
sens-là. La Commission canadienne des transports ne l'a pas fait encore
pour Bell Canada et ainsi de suite. La régie est soumise à une
économie générale de services publics et de biens publics.
Elle est là pour surveiller l'application, bien sûr, de lois et de
règlements, mais pour faire en sorte que les instruments collectifs, qui
sont des services publics, soient utilisés par des groupes ou par des
individus, par des sociétés économiques, par des
compagnies ou par des collectivités, dans l'intérêt
général. La régie est composée d'hommes. Bien
sûr, la régie peut ne pas avoir toute la dynamique qu'on pourrait
lui souhaiter; bien sûr, la régie est limitée comme
n'importe quelle organisation, n'importe quel mécanisme
décisionnel.
Il n'en reste pas moins que nous devons travailler avec les instruments
dont nous disposons. En ce qui me concerne, le passé de la régie
m'amène à conclure que nous devons lui donner une
présomption de bonne conduite pour l'avenir.
M. LEGER: Je pense que le ministre a raison de dire que le passé
de la régie est quand même positif dans ce sens. Mais il n'y a
aucun endroit dans cette réglementation on parle de l'article 5,
on peut parler de l'article 11 aussi où on parle de programmation,
d'horaires, etc. Tout cela, c'est encore la régie qui définira si
la programmation est réellement conforme au bien du milieu.
LE PRESIDENT (M. Pilote): Je vous remercie, messieurs, de vos
mémoires et j'inviterais à
présent les autres. Il est cinq heures et vingt-cinq, est-ce que
Publicité-Club de Montréal est ici? Brunelle, Lambert et
Associés Inc. L'Association des propriétaires de cinémas
du Québec et Les Quotidiens du Québec Inc. Je les invite demain
et j'invite le secrétaire, M. Pouliot, à communiquer avec ces
organismes pour voir s'ils désirent venir présenter leurs
mémoires. La commission ajourne ses travaux à dix heures demain
matin.
(Fin de la séance à 17 h 23)