Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
Étude du rapport de
l'Hydro-Québec
et de la société
d'énergie
de la baie James
(Onze heures huit minutes)
Le Président (M. Dussault): Mesdames, messieurs, à
l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre les travaux de la
commission parlementaire de l'énergie ayant le mandat de faire
l'étude du rapport de l'Hydro-Québec et de la
Société d'énergie de la baie James.
Sont membres de cette commission: M. Bor-deleau (Abitibi-Est), M. Brochu
(Richmond), M. Desbiens (Dubuc); M. Gendron (Abitibi-Ouest) en remplacement de
M. Godin (Mercier); M. Ciaccia (Mont-Royal) en remplacement de M. Gratton
(Gatineau); M. le ministre Joron, M. Mercier (Berthier), M. Rancourt
(Saint-François), M. Raynauld (Outremont).
Pourraient aussi intervenir à cette commission: M. Baril
(Arthabaska), M. Charbonneau (Verchères), M. Fontaine (Nicolet-Yamaska),
M. Forget (Saint-Laurent), M. Johnson (Anjou), M. Lavigne (Beauharnois), M.
Michaud (Laprairie), M. O'Gallagher (Robert-Baldwin), M. Roy (Beauce-Sud) et M.
Samson (Rouyn-Noranda).
Hier soir, au moment où nous avons ajourné nos travaux,
nous en étions toujours sur la question financière et M. le
député d'Abitibi-Est avait la parole.
M. Gendron: Abitibi-Ouest.
Le Président (M. Dussault): Est-ce que vous avez
terminé votre intervention? Il y a aussi le député de
Mont-Royal qui avait demandé la parole. C'est toujours sur la même
question.
Financement
M. Ciaccia: Oui, M. le Président. Dans votre rapport
financier, M. Boyd, il y a une liste des emprunts que vous avez faits pour la
fin de l'année 1976 et l'année 1977. À la fin de 1976,
vous démontrez un emprunt de 300 millions de francs suisses. Le montant
de 300 millions de francs suisses, à ce temps-là, était
l'équivalent de $124 200 000...
M. Joron: De dollars.
M. Ciaccia: De dollars. Avec le changement des taux de change
je remarque que c'était un emprunt à très court
terme, c'est dû en 1981 quel serait le montant requis aujourd'hui,
en dollars canadiens, pour rembourser ce prêt? Le taux à ce
moment-là était à 5 3/8%.
M. Boyd: 5 3/8%.
M. Ciaccia: Oui, 5 3/8%.
M. Boyd: On va faire le calcul. M. Lemieux, voulez-vous
répondre?
M. Lemieux (Edmond): Vous parlez d'un emprunt de 300 millions de
francs suisses?
M. Ciaccia: Oui.
M. Lemieux: Aujourd'hui, le franc suisse vaut environ 0.77, ce
qui donnerait une valeur de $231 millions en devises canadiennes.
M. Ciaccia: Cela veut dire que les $124 millions, si vous
étiez appelés à les rembourser, soit aujourd'hui...
M. Lemieux: Oui.
M. Ciaccia: ...ou soit à très court terme
parce qu'il est dû en 1981 si les taux de change n'étaient
pas modifiés, vous seriez appelés à débourser non
pas $124 millions, mais vous seriez appelés à débourser
$231 millions plus les intérêts?
M. Lemieux: Oui, c'est cela.
M. Ciaccia: Cela fait un écart passablement marqué,
c'est $87 millions de plus en capital sur une somme que vous avez
empruntée de $124 millions. Quel serait le pourcentage? Vous êtes
plus à jour dans les chiffres que moi.
M. Lemieux: Quelle est la question?
M. Ciaccia: Quel est le pourcentage, si vous êtes
appelés aujourd'hui à rembourser $87 millions de plus sur le
capital quand vous en avez emprunté $124 millions?
M. Lemieux: Je calcule $107 millions.
M. Ciaccia: $107 millions, oui, c'est vrai, excusez-moi. C'est
encore plus. C'est quasiment 80% de plus?
M. Lemieux: Oui.
M. Ciaccia: À ce moment-là, le taux
d'intérêt étant de 5 3/8%, il n'y a vraiment pas trop
d'avantages quand le capital que vous êtes appelés à
rembourser est quasiment le double.
M. Dozois: M. le député de Mont-Royal, je pense
qu'il faut cependant tenir compte du taux d'intérêt.
M. Ciaccia: Oui.
M. Dozois: II y a par exemple un montant considérable
chaque année d'intérêt qu'on n'a pas eu à payer, vu
le taux bas. Si vous regardez, à peu près dans la même
année, on a emprunté au Canada au taux de 10%.
M. Ciaccia: Mais les 10%...
M. Dozois: Alors il y a 4% et 4 5/8% d'économie.
M. Ciaccia: Ah oui! mais un instant! Oui, mais ce n'est pas une
économie. Cela aurait été une économie si...
M. Dozois: Cela l'a été.
M. Ciaccia: ... le franc suisse n'avait pas changé de
valeur.
M. Dozois: Oui, mais cela l'a été pendant un
certain nombre d'années.
M. Ciaccia: Non, parce que je parle...
M. Dozois: En 1976/77, le franc suisse a monté
récemment.
M. Ciaccia: Je parle d'un emprunt qui a été fait,
je pense, en décembre 1976, il y a une année.
M. Dozois: Le franc suisse est monté récemment. En
1976, il était encore assez bas.
M. Ciaccia: Je pense qu'il y a eu des augmentations durant
l'année 1977. Même s'il n'était pas monté du tout
durant l'année, le risque, les 4% de différence
approximativement, cela représente quelque chose comme $4 500 000 que
vous avez épargnés, théoriquement. Contre cela, il faut
balancer le risque que vous avez pris de payer un montant de $107 millions de
plus. Cela aurait été, je crois, une bonne assurance de $4
millions pour ne pas courir le risque d'en payer un autre $100 millions.
Remarquez bien la position que je prends, le ministre va certainement
contester. Vous n'avez pas eu le choix de faire cela. Dans les circonstances,
vous étiez obligés d'aller emprunter chez les marchés
étrangers. Ce n'est pas tellement un reproche que je fais à
l'Hydro-Québec qu'au gouvernement, parce que les décisions
finales, je pense que ce sont les décisions du gouvernement. (11 h
15)
Supposons qu'on prend un autre exemple, le yen: En 1977, vous avez fait
un emprunt de $80 500 000 pour 20 milliards de yens japonais. Aujourd'hui, si
vous étiez appelés à rembourser ce montant, combien
seriez-vous appelés à débourser? Je voudrais faire
remarquer que le taux d'intérêt, à ce moment, était
de 8,5%. Il n'était pas aussi bas que 5 3/8%. Alors, la marge
n'était pas tellement différente, spécialement quand on
constate qu'au même temps, c'était au début de 1977,
janvier 1977, l'Hydro-Ontario a emprunté $300 millions américains
à 8,4%. Il n'y avait pas beaucoup en banque. C'est un désavantage
de recourir au yen japonais, 8,5%, pour le risque qu'on prend avec le yen,
sachant ce qui arrive au changement des taux. Les échéances,
c'est encore pire. Le ministre vient de mentionner
l'échéance...
M. Boyd: Pour...
M. Ciaccia: Je suis content qu'il m'ait rappelé ça.
L'échéance de l'emprunt japonais, c'était un
emprunt...
M. Boyd: 1992.
M. Ciaccia: ... pour quinze ans.
M. Boyd: C'est ça.
M. Ciaccia: Alors, normalement, l'échéance est
à plus long terme; oui, on paie un peu plus cher. Le plus long terme, en
Ontario, c'était de 27 ans. L'Ontario a payé moins cher, 8,4%.
Pour le plus court terme japonais, quinze ans, vous avez payé plus
cher.
Quel serait le montant qu'on serait appelé à
débourser aujourd'hui pour ce prêt, le savez-vous?
M. Lemieux: Environ $120 millions.
M. Ciaccia: Alors, ça représente encore une hausse
de 50% sur le capital original.
Il y a un autre emprunt, 199 milliards de marks allemands,
représentant, au moment où vous avez fait l'emprunt, $92 568 000.
Quelle est la différence aujourd'hui? Combien êtes-vous
appelés à rembourser?
M. Lemieux: Ce sera environ $120 millions.
M. Ciaccia: On commence à être plus raisonnable.
C'est seulement 30%. Il faudrait avoir la loi de la protection du petit
consommateur pour venir à la rescousse de ces prêts.
Vous en avez un autre, 300 millions de francs suisses, qui
représentait un emprunt de $131 800 000. Combien serez-vous
appelés à rembourser?
M. Lemieux: $231 millions.
M. Ciaccia: $231 millions, ce qui représente une hausse de
$100 millions sur un prêt original de $131 millions. C'est
approximativement encore 70% de hausse. Oui, celui-là aussi, c'est un
prêt à très court terme. Vous pourrez être
appelés à le rembourser en 1990. Je pourrais dire que le taux
d'intérêt est de 5 1/4%, mais on peut oublier les 5 1/4% quand on
parle de hausse de remboursement de 70% à 80%. Il y a un autre
prêt de francs suisses, de 100 millions de francs suisses, à $45
millions, combien devrez-vous rembourser?
M. Lemieux: $77 millions.
M. Ciaccia: $77 millions. Et le dernier emprunt, 149 500 000 en
marks allemands représentant $75 692 000 en dollars canadiens, quel est
le montant que vous devrez rembourser?
M. Lemieux: Pardon? C'est quel montant? M. Ciaccia: $75692 000.
M. Lemieux: $90 millions.
M. Ciaccia: Une hausse de $15 millions.
M. Dozois: Me permettriez-vous une remarque?
M. Ciaccia: Certainement.
M. Dozois: Quand on regarde la liste des obligations
émises par l'Hydro-Québec qui constituent la dette, je constate
que la première fois qu'on a emprunté sur un marché autre
que le marché américain, le marché allemand, en 1969, en
tant qu'exerçant, à l'époque, une autre fonction que celle
que j'exerce maintenant, j'ai eu à l'approuver. Cela a été
la première initiative dans ce domaine. C'était un emprunt de 105
millions de marks allemands qui avaient rapporté, dans le temps, $28
millions. L'échéance de 1984, si on avait à la rembourser
aujourd'hui, coûterait $63 millions. J'ai approuvé l'emprunt, dans
le temps, non pas en tant que commissaire, mais en tant que membre de la
fonction que j'occupais. On avait les recommandations qu'il fallait.
C'était un risque qu'on prenait, un risque calculé et, tout au
long de l'histoire, depuis 1969, depuis que cette expérience s'est
produite, plusieurs marchés... Ce sont les risques. Le marché
canadien ne suffit pas à nous fournir les sommes qu'il faut. Dans le
risque qu'on prend, cela aurait pu tourner de l'autre côté
également. Peut-être que le mark allemand aurait pu baisser. Le
franc suisse aurait pu baisser. Maintenant, il monte. Peut-être qu'il
baissera encore à l'avenir.
M. Ciaccia: Vous me l'avez fait remarquer, M. Dozois. Il est vrai
qu'en 1969 vous avez fait un emprunt de 70 millions de marks allemands, mais
pour...
M. Dozois: On en a d'abord fait un de 105 millions...
M. Ciaccia: 105 millions et un de 70 millions. M. Dozois:
... qui a rapporté $28 millions.
M. Ciaccia: Mais est-ce que vous pourriez m'expliquer quelque
chose? Si je regarde la liste à laquelle vous vous êtes
référé, je remarque que le pourcentage des emprunts que
vous faisiez, même à ce moment-là, sur les marchés
d'outre-mer représentait un très minime pourcentage de votre
demande d'emprunts, de vos emprunts globaux. Si on regarde la liste, on voit
que, systématiquement, il y avait des emprunts pour outre-mer. Je vais
finir. Hier, j'ai donné certaines statistiques. Cela pouvait varier de
6% les trois dernières années avant 1976 à 18% une
année où vous aviez emprunté beaucoup. Ceci me porte
à dire que c'était une administration, une façon de
procéder assez prudente et assez conservatrice. Vous vouliez
équilibrer vos emprunts.
Pouvez-vous m'expliquer pourquoi, en novembre 1976, quasi totalement,
pas totalement, parce que le pourcentage était de 50% vous avez
concentré vos emprunts sur le marché d'outremer? C'est une
pratique que vous n'aviez jamais suivie. Maintenant, je ne sais pas ce que vous
allez me dire, mais le ministre a dit hier qu'il faut aller où l'argent
se trouve. C'est difficile pour moi d'ac- cepter cette explication, M. Dozois,
et je vais vous dire pourquoi c'est plus difficile, c'est parce que vous avez
emprunté $800 millions en 1977 et que l'Hydro-Ontario en a
emprunté $1 600 000 000. Or, l'Hydro-Ontario a trouvé la
moitié, soit $800 millions, de ses emprunts sur le marché
canadien, même pas sur le marché américain. Elle a
trouvé l'autre moitié sur le marché américain.
C'est difficile pour moi de dire que l'argent ne se trouvait pas sur le
marché ici, il se trouvait outre-mer, je suis donc allé outre-mer
alors que l'autre juridiction au Canada non seulement n'a pas été
obligée d'aller sur les marchés américains, mais a
trouvé plus de la moitié de ses emprunts sur le marché
canadien. Or, c'était deux fois plus en montants globaux que ce que
l'Hydro-Québec avait demandé.
M. Dozois: Mon expérience, c'est que l'argent, on va le
chercher là où il est disponible, mais également là
où on croit faire le meilleur marché. Si vous revenez à
1969, je me rappelle fort bien que l'Hydro-Québec avait emprunté
à peu près $250 millions. Si on regarde cela en proportion des
possibilités du marché américain à l'époque,
on aurait pu emprunter entièrement aux États-Unis et ils auraient
bouffé cela comme rien, mais on a quand même choisi d'aller sur le
marché allemand alors que le marché américain, de
mémoire, pouvait nous fournir tout l'argent dont on avait besoin.
M. Raynauld: Après coup, M. Dozois, est-ce que vous
admettez qu'il pourrait quand même y avoir une erreur commise?
Après coup, quand vous regardez ça, vous dites: Oui, ça
coûterait $63 millions...
M. Dozois: Les erreurs, sur le marché financier, on les
connaît après.
M. Raynauld: Oui, on les connaît après...
M. Dozois: Quand on vend nos obligations, on est convaincu qu'on
ne fait pas une erreur.
M. Raynauld: Je comprends ça, mais, après coup,
vous n'êtes pas obligé de défendre la décision de
1969; on regarde et on dit que ça n'a pas été un bon
marché, cette affaire-là. Ce n'est pas dire que les gens sont
incompétents que de dire ça.
M. Dozois: Non, il y a souvent des conditions qui changent...
M. Raynauld: II y a des jugements qui sont...
M. Dozois: ... et il y a souvent des conditions, sur les
marchés monétaires, absolument imprévisibles.
M. Raynauld: C'est ça, je ne veux pas dire que les gens
sont incompétents en disant ça, mais il me semble qu'il est aussi
possible...
M. Dozois: On dit souvent que, si le président tousse, il
y a une baisse à la Bourse.
M. Ciaccia: Quand vous avez fait votre emprunt, en 1969, si on
regarde la courbe des différences dans le taux de la monnaie, il y avait
très peu d'écart entre le marché allemand, le franc
suisse, le yen japonais, le dollar canadien, la courbe avait subi, de 1966
à 1969, un très léger écart. Même avec cet
écart, autrement dit, même quand c'était pas mal
égal, les taux de change, vous avez pris un emprunt parmi plusieurs.
Entre 1969 et 1970, le mark allemand a commencé à monter assez
substantiellement. Le dollar canadien avait pris un certain écart
à la hausse avec le dollar américain.
Si vous examinez ça, vous voyez que l'augmentation du mark
allemand, de 1969 à 1976, allait toujours en s'accentuant. En 1976,
c'était évident que l'argent, sur les marchés
européens, allait en augmentant. J'essaie d'expliquer votre
décision, en 1969, de montrer qu'en 1976 les conditions étaient
tellement complètement différentes que, même si vous
étiez justifiés en 1969 d'aller sur le marché d'outre-mer,
parce que les courbes étaient pas mal égales, au moins, en 1976,
il aurait dû y avoir des avertissements, en examinant ces taux de change
et l'historique des taux de change. L'écart allait en
s'élargissant. C'est le premier point de votre référence
à 1969.
Le deuxième point, c'est que je vois un changement marquant dans
l'approche de l'Hydro-Québec. Je ne peux pas attribuer cela aux
méthodes normales de l'Hydro-Québec, parce que pour des
changements si marquants, il faut une évolution dans les méthodes
d'approche de l'Hydro-Québec.
Je ne peux attribuer cela seulement au fait que, d'une façon ou
d'une autre, vous avez été obligés d'y aller. Ce
n'était pas parce qu'il n'y avait pas d'argent ici, ce n'était
pas parce que vous pensiez que le mark et le franc suisse étaient pour
aller en baissant. Il y avait d'autres considérations. On voit
aujourd'hui le résultat de cela.
Je pourrais poser une autre question. En 1978, vous avez
mentionné que vous avez fait des emprunts de $1 800 000 000. Sur quel
marché avez-vous fait ces emprunts? (11 h 30)
M. Lemieux: Dans ce montant, il n'y a eu que $75 millions qui
étaient en devises autres qu'américaines ou canadiennes. Il n'y a
eu qu'une émission, au tout début de l'année, qui
était effectuée outre-mer. C'est notre politique de ne pas en
faire actuellement, jusqu'à ce qu'on voit une stabilité.
Il y a deux phénomènes que j'aimerais faire remarquer. En
1977, et de temps à autre, il y a eu des suggestions que le
marché des capitaux aux États-Unis soit fermé ou, au
moins, réduit pour des emprunteurs étrangers, dans le but
d'essayer de baisser le déficit sur leur "balance of payments".
On trouvait qu'il était opportun, en 1977, de profiter des
marchés d'outre-mer et sûrement, on ne s'attendait pas à
une chute aussi considérable du dollar canadien. Il y avait cette
possibilité d'une baisse de disponibilités aux États-Unis,
mais il y a eu aussi le problème, qui continue, de la saturation des
portefeuilles aux États-Unis, pour des obligations de
l'Hydro-Québec.
Il y a des compagnies d'assurance importantes qui ont plus d'obligations
de l'Hydro-Québec que de n'importe quel autre émetteur. Ces
gens-là, naturellement, ont une limite sur ce qu'ils peuvent acheter
avec un seul crédit.
M. Boyd: Pour ajouter à ce qu'a dit M. Lemieux, au cours
de 1976, il y avait eu une grosse poussée sur le dollar américain
pour des obligations. Si vous faites la somme des emprunts américains,
en 1976, nous avions emprunté $1 425 000 000. Le point de saturation
dont parle M. Lemieux à l'instant nous a créé des
embêtements en 1977. Les grosses compagnies d'assurance, par exemple, ou
les gros fonds mutuels nous ont dit: On a un gros inventaire et il faut
ralentir. C'est un des points.
Évidemment, les emprunts sur les marchés étrangers,
suisse, allemand ou le yen, étaient à un taux bas
d'intérêt. Je pense qu'au moment où on les a faits, on ne
pouvait pas prévoir que ces monnaies continueraient de
s'apprécier autant qu'elles l'ont fait.
Le troisième point, c'est que, depuis quelques semaines ou
quelques mois, nous avons réussi à renégocier deux
emprunts en francs suisses. Celui qui est au haut de la page, qui était
de $13 millions, a été renégocié à 2%,
lorsqu'il était à 9%. Un peu plus bas, vous en avez un autre pour
100 millions de francs suisses ou de $38 400 000, qui a été
réduit, renégocié de 8% à 3,25%. Nous sommes en
train d'essayer de renégocier le deuxième montant de 100 millions
de francs suisses de 7,75% à quelque chose qui serait du même
ordre de grandeur que les deux autres que nous avons à
renégocier.
Évidemment, ces choses se font. Cela a diminué l'impact,
mais le gros problème, c'est qu'à un moment donné nous
avons frappé une saturation en 1977. En 1978, comme le disait M. Lemieux
tout à l'heure, nous avons quand même amélioré la
position canadienne avec $384 millions à long terme et $500 millions
avec les banques canadiennes, en monnaie canadienne, avec un taux variable.
Tout cela, pour revenir à ce qu'on disait hier, quand on a
demandé des augmentations de tarifs, le point fort qu'on a voulu faire,
c'est que, vis-à-vis de nos besoins en investissements, pour pouvoir
répondre à la demande d'ici 1985, il faut construire, et on prend
l'argent quelque part.
On vous a dit que les $2 milliards qui étaient notre limite pour
ces trois années, c'est un point capital et que, si on l'augmentait
davantage, ce serait mettre notre situation d'investissements en péril.
Vous nous avez questionnés là-dessus. Pourquoi en est-on
arrivé à $2 milliards? Cela vient de ce que les marchés
où on aimerait emprunter ces $2 milliards, M. Lemieux vous l'a dit hier
et vous l'a répété ce matin, sont le marché
canadien et surtout le marché américain ou des dollars US,
que ce soit aux États-Unis ou sur le marché de
l'euro-dollar. On veut s'éloigner des marchés à monnaie
forte que vous nous soulignez. C'est évident qu'on veut le faire pour
les années 1979, 1980, 1981. Mais, de plus en plus, on retrouve des
marchés qui sont saturés. C'est pour cela qu'il faut augmenter
notre autofinancement le plus possible.
Si vous ne nous permettez pas d'augmenter notre autofinancement le plus
possible, on vous disait hier qu'il y a une grande différence entre $6
milliards pour trois ans et $6,5 milliards pour trois ans.
M. Raynauld: M. le Président, je voulais seulement poser
une petite question sur ce que M. Boyd vient de dire. M. Boyd, quand vous
renégociez un emprunt avant terme, est-ce que vous payez une
pénalité ou non?
M. Boyd: Cela dépend du contrat. D'habitude, il y a une
clause, mais la pénalité peut être de l'ordre de 1% ou
quelque chose comme cela. Ce n'est pas un montant important.
M. Raynauld: Si j'ai bien compris, vous avez
renégocié un emprunt en francs suisses au début de
l'année.
M. Lemieux: Oui, au mois d'octobre.
M. Raynauld: Au mois d'octobre. Celui-là, vous dites: On
l'a renégocié. Je n'ai pas les détails ici, je n'ai pas
été capable de suivre dans le rapport annuel. Si vous
présentez cela en disant: On a renégocié un nouvel emprunt
et on l'a renégocié à 7,5% quand l'autre était
à 9%...
M. Boyd: De 9% à 2%.
M. Raynauld: Pardon?
M. Boyd: De 9% à 2%. Le nouveau taux, c'est 2%.
M. Raynauld: Le nouveau taux auquel vous avez emprunté,
c'est 2%?
M. Boyd: Le nouveau taux d'intérêt, c'est 2%. M.
Raynauld: Vous en avez un à 9%. M. Boyd: Oui, qui a
été remplacé...
M. Raynauld: Là, vous l'avez renégocié avant
terme.
M. Boyd: Oui.
M. Raynauld: Avant échéance, et vous n'avez rien
payé.
M. Boyd: II y a une légère pénalité,
comme l'a dit M. Lemieux.
M. Raynauld: Une pénalité.
M. Lemieux: II y a peut-être eu une pénalité
de 1%, je ne me souviens pas, mais ce n'était pas plus que 1%.
M. Raynauld: En quel honneur les Suisses accepteraient-ils
d'échanger un emprunt de 9%, qui leur rapporte 9%...
M. Lemieux: Parce que c'était permis par le contrat.
M. Raynauld: ... et qu'ils vous en permettraient un à
2%?
M. Lemieux: Parce que c'est maintenant une période de deux
ans qui reste. Alors, cela devient maintenant un emprunt à court
terme.
M. Ciaccia: Cela ne change pas le capital. M. Lemieux: Le
capital.
M. Ciaccia: Le capital, s'il augmente, s'il a doublé, vos
2% deviennent 40%.
M. Lemieux: Oui, cela reste.
M. Ciaccia: Quand vous avez mentionné la chute du dollar
canadien, ce n'est pas seulement la chute du dollar canadien, parce que si vous
aviez été seulement emprunter sur le marché
américain, vous auriez limité vos pertes, you would have limited
your losses, c'est 15%.
M. Lemieux: Quand j'ai parlé...
M. Ciaccia: La chute, c'est l'accélération du franc
suisse, du mark allemand...
M. Lemieux: La chute du dollar canadien vis-à-vis de
toutes les autres monnaies, pas seulement vis-à-vis du dollar
américain.
M. Ciaccia: Oui, mais vous courez deux risques en agissant
autrement, la chute du dollar canadien vis-à-vis du dollar
américain et les autres changements qui peuvent avoir eu lieu pour les
autres monnaies.
M. Lemieux: À ce sujet, j'aimerais faire un commentaire,
suite à une conversation que j'ai eue ce matin même avec un
banquier suisse, me plaignant justement de la valeur du franc suisse.
D'après les économies suisses, on prétend que, l'an
prochain, les exportations des États-Unis augmenteront
considérablement vers l'Europe et qu'il y aura à ce moment une
reprise de la valeur du dollar américain. À ce moment, les pays
de l'Europe et le Japon auront, d'après eux, des problèmes, parce
qu'à ce moment ils verront tomber leur monnaie qui, actuellement,
augmente tellement.
M. Ciaccia: Une question, sur le même sujet.
Le président (M. Dussault): M. le député de
Mont-Royal, il ne faudrait pas que ce soit long, parce qu'il y en a d'autres
qui attendent. On vous a permis tout simplement...
M. Ciaccia: Oui, j'apprécie le fait que vous m'avez
accordé la permission. Une autre question. Sur les $900 millions
d'augmentation échelonnés sur les trois prochaines années,
quel serait le montant de taxes payables au Québec? Il y a une taxe?
Une voix: Une taxe de vente?
M. Ciaccia: Oui.
M. Joron: Ou résidentielle?
M. Ciaccia: Oui. Quel en serait le montant?
M. Joron: Cela porte sur à peu près la
moitié du total.
M. Raynauld: Le résidentiel, c'est 37%, 38% des ventes;
c'est 10%?
M. Ciaccia: Ce ne sont pas tous les $900 millions qui vont aller
à l'Hydro-Québec.
M. Joron: Oui, mais c'est "over and above".
M. Ciaccia: Ah! C'est en plus. Alors, en plus des $900 millions,
il va y avoir une taxe...
M. Joron: Oui.
M. Ciaccia: ... de vente payable au Québec. Quel serait ce
montant-là? Lavez-vous?
M. Boyd: C'est environ 5%, parce que la grande industrie ne la
paie pas. C'est 5% du montant. Mais je pense que je dois faire une correction.
Il y a eu mésentente hier sur le montant. Vous parlez de nouveau de $900
millions et, hier, lorsqu'on parlait de ça... Les $900 millions, c'est
pour l'année 1981 seulement; pour 1980, c'est $599 millions; pour
l'année 1979, c'est $256 millions. Je ne voudrais pas vous laisser une
fausse impression. Vous me donnez l'occasion, parce que j'ai
réalisé, après la séance, que ce sont des
montants... La première année, c'est $256 millions
d'augmentation; la deuxième année, les $256 millions s'appliquent
encore, plus les 15%, ce qui fait $600 millions. La troisième
année, les $600 millions se reportent, plus les 10%. Alors, c'est
cumulatif...
M. Ciaccia: Oui. C'est de cette façon, M. Boyd, que je
J'ai compris. Sur les trois années, $900 millions; pas $900 millions par
année, je comprends.
M. Boyd: Non, c'est $900 millions, plus $600 millions, plus $256
millions qui est le montant des trois années. Hier, on n'avait pas
mentionné ça ou je ne sais pas si j'ai mal
interprété...
M. Ciaccia: Sur quel chiffre devraient s'appliquer les 5% pour
déterminer, sur les trois prochaines années, le montant de taxe
que le consommateur va payer au Québec, en plus de ses augmentations de
tarifs?
M. Boyd: $1 700 000 000. C'est 5% sur $1 700 000 000.
M. Ciaccia: Mais $1 700 000 000, ce sont vos revenus bruts,
non?
M. Boyd: Pardon?
M. Ciaccia: $1 700 000 000, ce sont vos revenus bruts? J'essaie
de calculer la taxe additionnelle que le contribuable sera appelé
à payer.
M. Boyd: Oui, c'est ça, M. le député. C'est
5% de $1 700 000 000, soit $87 millions.
M. Joron: Oui, parce que, là-dedans, il y a des
augmentations de ventes. Tout cela n'est pas dû à l'augmentation
des tarifs. C'est ça, la question...
M. Ciaccia: II y a un certain pourcentage.
M. Boyd: C'est parce qu'on me réfère aux
augmentations dans le tableau ici. On dit: Revenu additionnel requis; ce sont
les montants qu'on va chercher par l'augmentation de la tarification, dont $256
millions en 1979, plus $600 millions en 1980 et $900 millions en 1981. Pour les
trois années, il faut faire la somme des trois. Cela fait $1 700 000
000, et 5%, ça fait $87 millions en taxes qui vont à
l'État du Québec. (11 h 45)
M. Ciaccia: Le gouvernement, en plus de l'augmentation qui ira
à l'Hydro-Québec, se trouve à bénéficier
d'un autre montant de $87 millions en taxes que le consommateur sera
appelé à payer dans les trois prochaines années. C'est
important.
M. Boyd: Évidemment, c'est une chose qu'on a souvent
demandée dans les commissions passées, ici même. On
trouvait étrange que notre concurrent, le pétrole, n'ait pas de
taxe sur le chauffage, tandis que l'électricité et le gaz en
avaient une. On a toujours demandé si cette chose va changer. Cela fait
plusieurs fois qu'on mentionne cela. Évidemment, il y a $87 millions de
plus. Sur les revenus assujettis aux règlements tarifaires existants,
qui sont dans la première ligne, là aussi, il y a les mêmes
5% qui s'appliquent.
M. Ciaccia: Alors, il semble y avoir un intérêt pour
le gouvernement d'approuver vos hausses de tarifs, parce que cela va aider le
ministre des Finances dans son budget. Cela n'aidera pas seulement
l'Hydro-Québec à respecter ses obligations. C'est pour cela qu'il
faudrait faire un peu l'équilibre. On y reviendra peut-être plus
tard. Mon
temps est écoulé. Il s'agit de distinguer entre les
besoins de l'Hydro-Québec pour honorer ses emprunts et les
retombées, le fardeau additionnel qui sera placé sur le dos du
consommateur en taxes additionnelles, qui découlent de vos besoins, mais
qui, peut-être, seraient un cadeau pour le Québec.
Le Président (M. Dussault): M. le ministre.
M. Joron: On a beaucoup parlé de taux de change. Je ne
veux pas prolonger indûment la discussion là-dessus. Je pense que
M. Lemieux et M. Boyd indiquaient très clairement que, depuis le
début de cette année, compte tenu des perturbations dans les taux
de change, surtout en ce qui concerne le franc suisse, le mark allemand et le
yen japonais, l'Hydro-Québec évite maintenant ces marchés
autant que possible, tant qu'on ne pourra pas voir plus clairement
l'évolution de la situation. Cela a été clairement
établi. Il y a une chose qu'il faut bien comprendre. Il n'y a pas de
moyens garantis d'avance de se mettre à l'abri, évidemment, des
variations dans les taux de change des monnaies étrangères quand
on doit aller emprunter sur ces marchés. L'idéal, bien sûr,
serait de tout emprunter dans une monnaie locale, en dollars canadiens.
Là, évidemment, on est complètement à l'abri de
toutes les variations de taux de change, sauf que la question qui se pose est
de savoir: Est-ce que le marché canadien ou le marché local peut
absorber de tels montants d'emprunt? Je pense qu'il serait utile, pour faire
comprendre on ne mesure pas toujours cela l'ampleur des besoins
d'investissement de l'Hydro-Québec... Les comparaisons avec
l'Hydro-Ontario ou d'autres utilités du même genre ne sont pas
toujours utiles; il faut garder ceci en mémoire, les investissements de
l'Hydro-Québec sont, à toutes fins utiles, exclusivement dans le
domaine hydraulique. Dans le domaine hydraulique, tout est dans
l'investissement, relativement peu, par la suite, dans les frais
d'exploitation, alors que dans des centrales thermiques, comme c'est le cas en
Ontario maintenant, qu'elles soient nucléaires, qu'elles soient au
pétrole, qu'elles soient au charbon, le coût d'investissement
initial pour la même puissance est moindre. Par contre, par la suite, les
coûts d'exploitation sont plus grands. Donc, tout cela pour dire que les
besoins d'emprunt de l'Hydro-Québec pour installer une même
puissance, parce qu'elle utilise l'hydraulique, sont plus grands dans
l'immédiat que pour tous ses concurrents qui sont davantage axés
sur le thermique, qu'il soit nucléaire, au pétrole ou au charbon.
Évidemment, il y a des avantages, par contre. On n'a pas besoin de se
redire cela. L'hydraulique, une fois installée, après cela, c'est
à l'abri de l'inflation. Cela ne subira pas de hausses de coûts
d'exploitation et c'est une ressource renouvelable et tout cela.
Mais cela a nettement le désavantage de coûter plus cher au
départ. Il faut emprunter plus. C'est vrai à un tel point que
l'Hydro-Québec, qui fournit un marché énergétique
plus petit que celui de l'Ontario la population du Québec est
plus petite que celle de l'Ontario les actifs de l'Hydro-Québec
sont pas mal plus considérables que ceux de l'Hydro-Ontario et
l'écart s'en va croissant dans le temps, à un point tel qu'au
début de l'année, l'actif de l'Hydro-Québec a
dépassé les $10 milliards pour la première fois. Il faut
bien comprendre qu'il n'y a pas une corporation au Canada, privée ou
publique, qui s'approche de ce chiffre. C'est plus que le CPR: C'est plus que
Bell Canada. À l'heure actuelle, l'Hydro-Québec est la plus
grosse corporation de tout genre au Canada. Même sur une base
nord-américaine, elle est parmi les dix premières.
Parler de programmes d'investissement dans les années qui
viennent comme on parle de $3 milliards, je ne sais pas si on mesure toujours
ce que cela veut dire. Savez-vous que IBM, dans le monde entier, n'investira
même pas cela l'année prochaine. C'est du même ordre de
grandeur que ce que General Motors, approximativement, va investir dans le
monde entier cette année. Alors, c'est quelque chose qui est gigantesque
à l'échelle internationale, un tel programme d'investissement.
C'est bien sûr qu'on ne peut pas s'attendre que les marchés locaux
financent tout cela, comme on ne pourrait pas s'attendre que toute la finance
de General Motors, à travers le monde, pourrait se faire à partir
du seul marché canadien. On s'aperçoit, évidemment, qu'il
faut aller sur les marchés étrangers. Alors, je pense qu'on va
être obligé de vivre avec des risques de change.
Cela dit, je pense que c'était utile de mettre cela en
perspective, parce que ce n'est pas une mince affaire dont on parle ici. Si on
parle tant d'emprunts et des contraintes que cela pose, c'est parce que
l'Hydro-Québec est probablement une des sociétés parmi les
plus importantes emprunteuses au monde. Ce n'est pas un mince défi qu'on
a à relever. On ne discute pas de "peanuts" ou de petites affaires
faciles. Il y a évidemment ces contraintes.
M. le Président, ma question toutefois ne portait pas
là-dessus. C'est un commentaire que je voulais faire. Ma question
portera sur la chose suivante. Hier, on est passé, je pense, un peu
rapidement. On nous annonce que le coût du complexe La Grande ayant subi
des modifications, je veux bien, baisse de $16 milliards à $15
milliards. On vient d'épargner $1 milliard comme cela, dans notre
programme d'investissement, d'ici 1985. Il me semble c'est là mon
avis qu'on soit passé un peu vite là-dessus, pour
expliquer comment il se fait qu'on épargne $1 milliard. Tout le monde
est passé un peu vite.
M. Brochu: Ce n'est pas fini, on y revient. C'est loin
d'être fini.
M. Joron: Oui, je le souhaite bien.... y compris les media
d'information. Je me permets de dire ce que j'ai trouvé un peu curieux.
On a parlé de $1 milliard que nous ont coûté les Olympiques
et on en a parlé pendant trois ans. On a écrit des livres
là-dessus, des carrières politiques se sont faites et
défaites sur le sujet. Hier, on annonce qu'on épargne, $1
milliard et c'est la cinquième nouvelle, rapide, trente secondes et
c'est fini. Je pense que
cela mériterait d'être fouillé un peu plus. Ce n'est
pas l'élément nouvelle que je retiens. C'était un petit
aparté. On a compris vos explications techniques sur le rapport de LG 1,
l'addition d'unités...
M. Ciaccia: Pardon, à cet égard, à titre
d'information, est-ce que vous épargnez $1 milliard, est-ce que cela
coûte $1 milliard de moins, ou si vous réduisez le coût
prévu en excluant, par exemple, la construction de LG 1?
M. Joron: C'est cela qu'il faudrait fouiller.
M. Ciaccia: II y a une différence. Quand vous faites une
comparaison avec les Olympiques, je ne pense pas que ce soit un vrai
parallèle. Si vous avez réduit le coût de $1 milliard ou si
vous l'avez fait en excluant LG 1, je ne sais pas le coût de LG 1, mais
vous l'avez remis à plus tard. Vous allez le dépenser plus
tard.
M. Joron: Non, d'accord. Nous aurons $1 milliard de moins
à investir d'ici 1985. On vient d'alléger notre programme
d'investissement de $1 milliard. Il y a une partie de cela qui est un
changement, LG 1 étant reporté, des unités additionnelles
étant faites à LG 3 et LG 4, qui explique une partie de cela et
le complexe donne quand même la même puissance, même un petit
peu plus, pas tout à fait la même quantité
d'énergie, puisqu'on a besoin de répondre plutôt à
la puissance qu'à l'énergie, c'est idéal. Très
bien. Il y a une épargne nette, par contre, de $359 millions, a-t-on
compris, sur les lignes de transport. C'est une économie réelle.
On vient d'épargner $359 millions. M. Monty répondait
brièvement au député d'Abitibi, hier, à ce
sujet-là. Quand même, j'aimerais en savoir plus long.
C'est-à-dire qu'on n'élimine pas $359 millions comme cela, comme
par magie. La question du député d'Abitibi, hier, a
été posée à la toute fin de nos travaux. Si on a pu
épargner $359 millions sur les $4 milliards que devraient coûter
les lignes de transport, comment se fait-il que le même raisonnement ne
pourrait pas s'appliquer sur d'autres types d'équipement? Vous avez
évoqué le fait, M. Monty, que la compétition entre les
entrepreneurs, à un moment donné, étant donné le
ralentissement qu'il y avait eu dans ce secteur, a permis d'avoir des
soumissions à meilleur prix, alors que les estimations du début
ont donc pu être réduites après avoir vu, dans les faits,
à quel prix on avait des soumissions. Est-ce que la même chose
n'est pas vraie, je ne sais pas, pour une excavation? Est-ce que des
économies ne sont pas possibles dans d'autres domaines également
du complexe?
M. Monty (Guy): J'ai l'impression tout de même que, quand
on examine les contrats donnés à la baie James, pour LG 2,
l'ordre de grandeur des contrats je pense aux barrages, je pense aux
travaux de digue de la centrale l'évaluation qui avait
été faite au début s'est avérée assez juste
au niveau de la réalisation. Vous ne pouvez pas construire un barrage de
l'ordre de LG 2, de 30 millions de verges cubes, dans un temps presque record,
à des prix réduits. Il faut quand même tenir compte de
certaines contraintes qu'on a eues durant la réalisation du barrage,
qu'il a fallu reprendre le temps perdu et même aussi devancer le
calendrier prévu. Cela ne se fait pas avec des économies,
ça se fait en payant un peu plus cher.
La grosse partie de LG 2 s'est faite dans une période presque
impossible à respecter. Vous devez payer pour ça. Tandis
qu'au niveau des lignes et des postes, on avait une série
d'entrepreneurs qui avait réalisé, à des prix assez
intéressants, les projets de ligne, 3000 milles de lignes entre
Churchill Falls, Manicouagan et Montréal à des coûts qu'on
connaissait. On a évalué les taux d'inflation qu'on a
ajoutés. Lorsqu'on a fait l'estimation du coût à la baie
James, évidemment, cette période de trois ans de pénurie
de travaux a vraiment affamé les entrepreneurs au point que, lorsqu'est
arrivé le temps des soumissions, ils ont presque donné des prix
au plus coûtant.
On a pensé que c'était seulement un début, mais on
a reconnu quand même que l'économie, non seulement dans les
travaux de déboisement, mais dans les travaux de construction, se
continuait. C'est un peu comme l'offre et la demande, les entrepreneurs sont
moins affamés, ils ont des contrats qui les satisfont, ils ont quand
même une limite de réalisation et on réalise que les prix
commencent à monter, alors que certains soumissionnaires, qui sont
beaucoup plus prudents, ont commencé tranquillement à venir sur
le marché, à offrir des contrats à leurs prix.
On est rendu sur le plateau qui correspond à celui de notre
estimation. Au niveau des grands travaux de LG 2 et de LG 3, c'est beaucoup
plus difficile de s'en tenir à une réduction, parce que la
période où on avait à construire était tellement
courte qu'il a fallu payer pour ça. Je ne pense pas qu'on puisse faire
une comparaison qui sera la même entre les travaux du barrage, de la
centrale et des digues...
M. Joron: À partir de quel moment, approximativement,
s'est dessinée, dans les faits, l'économie qui était en
train de se réaliser sur les lignes de transport? Vous vous êtes
rendu compte de ça...
M. Monty: On a commencé à réaliser ça
vers la fin de 1977.
M. Boyd: M. le Président, lorsqu'on a fait la nouvelle
estimation, en 1976, du complexe La Grande, on a tenu compte du fait que les
grands chantiers étaient terminés un peu partout dans la province
et qu'on avait également donné des contrats. Pendant la
période 1974-1975, il y avait eu des augmentations à cause de
l'inflation d'environ 35% sur une période de 18 mois et, à
compter de 1976, on voyait aussi les prix baisser dans les coûts de
construction de barrage et de centrale. Dans le chiffre de $16 100 000 000, on
avait tenu compte de ces coûts qui allaient être plus raisonnables
dans les prochaines années qu'ils l'avaient
été dans l'année 1974-1975. Quand on révise
le chiffre de $15 100 000 000, on en tient encore compte; donc, la correction a
été faite dans cette révision de 1976.
M. Gendron: M. le Président...
Le Président (M. Dussault): M. le député
d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Pour varier un peu l'échange, j'aurais
quelques questions sur votre document d'introduction, lorsqu'on vous a...
Le Président (M. Dussault): M. le député,
c'est toujours sur la question financière.
M. Gendron: Effectivement, je vais toucher la question
financière, mais pas dans les deux premières questions. De toute
façon, il me semble que vous aviez retenu mon droit de parole hier et je
l'ai donné à M. Raynauld, parce qu'on a voulu parler davantage de
la question financière. Comme, de toute façon, ça fait
plusieurs fois qu'on le remet, ce droit de parole, j'ai l'impression que, dans
l'ensemble de la discussion, on aura éventuellement d'autres occasions
d'y revenir. Je me dis que j'ai le droit de parole, je l'ai demandé
depuis un bon bout de temps. Cela ferait peut-être du bien de varier avec
quelques questions qui vont porter sur un sujet autre que le sujet
financier.
Le Président (M. Dussault): Je comprends votre
préoccupation, M. le député. J'essaie, comme
président de commission, d'y mettre un certain ordre pour qu'on puisse
prévoir quand on pourra terminer ses travaux. Il y a un certain espoir
de rattacher un certain ordre de travail. (12 heures)
M. Ciaccia: Ce ne sera pas long.
Le Président (M. Dussault): Cependant, je ne veux pas vous
frustrer non plus. Je vais vous laisser poser vos questions.
M. Gendron: M. le Président...
M. Brochu: Si le député le permet, je vous
rappellerai quand même qu'hier, après la discussion sur la motion
qui a été présentée, on avait commencé le
tour de table habituel, d'un parti à l'autre, sur le sujet sur lequel
vous avez donné une directive à l'effet de discuter de la
question financière.
Dans la discussion, il apparaît que maintenant ce serait au tour
de l'Union Nationale à faire valoir certains points de vue. Et si on
devait aborder immédiatement d'autres sujets, je pense qu'à ce
moment-là ce serait donner libre cours à un débridement
complet de la conversation.
Je voudrais, M. le Président, respecter l'ordre qui avait
été établi, et qu'on discute des questions
financières, quitte à revenir par la suite je ne voudrais
pas être désagréable à l'endroit de mon
collègue à d'autres questions.
Le Président (M. Dussault): Vous avez raison sur la
question de l'ordre des partis dans le droit de parole. Mais vous savez qu'il
est très facile de le faire quand on commence à discuter d'une
question. Mais, à mesure que le temps passe, cela devient difficile de
le faire, parce que chacun ne veut pas nécessairement prendre la parole.
À ce moment-là, je suis obligé de le prendre dans l'ordre
où cela vient.
M. Brochu: Mais c'est pour vous faciliter les travaux, justement
dans le sens que vous le dites. Lorsque vous donnez une directive pour un sujet
de discussion, qu'on fasse l'ordre habituel. Je ne pense pas qu'on ait besoin
de se mettre debout, dans le milieu de la place, pour vous demander la parole.
D'un parti à l'autre, habituellement, on fait le tour de table et
ensuite, on passe aux sous-questions.
Le Président (M. Dussault): Vous avez très bien
compris ma préoccupation. C'est de l'encadrer et de savoir exactement
sur quoi on discute, et là, suivre un certain ordre. Au début,
c'est l'ordre des partis et ensuite, c'est un peu comme cela vient, parce que
cela devient difficile de suivre un ordre.
M. Brochu: C'est pour cela que je vous demandais la parole
immédiatement, M. le Président, compte tenu du fait que mes
collègues de droite ont pu poser un certain nombre de questions dans le
domaine financier. Il apparaît maintenant qu'il revient au tour de
l'Union Nationale de faire valoir certaines questions.
M. Gendron: M. le Président, comme ma dernière
question portera sur un aspect financier, il me fera plaisir de laisser mon
droit de parole, suite à ma dernière question financière,
au député de l'Union Nationale, qui pourra continuer sur l'aspect
financier.
M. Brochu: Alors, vous pouvez commencer par votre dernière
question.
M. Gendron: Non, parce que cela va m'enlever trop rapidement mon
droit de parole.
M. Ciaccia: Entendez-vous.
M. Gendron: Rapidement, cela va être deux petites questions
rapides.
Le Président (M. Dussault): Le président
étant l'arbitre habituellement, M. le député de Richmond
m'avait signifié son intention de prendre la parole, mais sur la
question tarifaire. Je l'avais pris en note. C'est toujours sur ma feuille.
Entre-temps, vous m'avez signifié que sur cette question, vous vouliez
parler.
Comme je ne suis plus l'ordre des partis sur cette question comme telle,
je vais laisser la parole à M. le député d'Abitibi-Ouest
et je reviendrai à vous sur cette question et non pas sur la question
tarifaire.
M. Brochu: Si je comprends bien, je vous ai donné deux
fois l'indication que j'avais l'intention de parler.
Le Président (M. Dussault): C'est cela.
M. Brochu: Et à cause de cela, c'est le
député d'Abitibi-Ouest qui parle.
Le Président (M. Dussault): Pas du tout. M. le
député de Mont-Royal, je n'accepte pas votre remarque parce que
vous m'identifiez au gouvernement en tant que président et ce n'est pas
le cas.
M. Ciaccia: ...
Le Président (M. Dussault): Je ne suis pas le
gouvernement, je ne suis pas du tout rattaché au gouvernement non
plus.
M. Ciaccia: Ce n'était pas mon intention, M. le
Président, vous avez mal interprété mes paroles.
Le Président (M. Dussault): Je vous remercie de
l'interprétation que vous en faites parce que c'était autrement
compréhensible.
M. Ciaccia: C'est le côté du gouvernement qui,
constamment, demande la parole aux dépens du député de
l'Union Nationale. Il faut comprendre une chose, le gouvernement peut poser des
questions...
M. Gendron: M. le Président, à l'ordre.
Le Président (M. Dussault): À l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Mont-Royal, je n'accepte pas non
plus ce que vous venez de dire, parce qu'on vous a souvent permis de parler au
désavantage du parti ministériel. On a été fort
tolérant. J'essaie de l'être, j'essaie d'être souple dans ma
façon de travailler avec les députés. Et je reviens sur
l'intervention du député de Richmond. Ce n'est pas exact, ce que
vous avez dit. Vous m'avez demandé la parole au début, sur la
question tarifaire. On a dit que la question tarifaire, on la traiterait
ensuite.
Entre-temps, on m'a demandé la parole sur la question
financière et vous me l'avez demandée ensuite sur la question
tarifaire. Je continue à penser que le député
d'Abitibi-Ouest a le droit de préséance sur votre droit de
parole. C'est pour cela que je lui laisse la parole, en lui demandant de s'en
tenir à la question qu'on discute, c'est-à-dire la question
financière. On reviendra ensuite sur la question tarifaire. Je sais
qu'il est difficile aussi de faire le partage entre les deux. Mais il faut
quand même se donner un certain ordre de travail. M. le
député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: M. le Président, si c'est comme cela, les deux
autres questions qui n'étaient pas sur la question financière
reviendront un peu plus tard, si je suis encore dans le décor. Au niveau
de la question financière, dans votre mémoire, plus
particulièrement concernant la tarification à la page 2, vous
mentionnez que les hausses de tarifs notamment demandées pour les trois
prochaines années permettront à l'Hydro-Québec d'atteindre
un pourcentage d'autofinancement de 31% en 1979, 31,7% en 1980 et 34,1% en
1981.
Vous indiquez que le pourcentage, en 1977, fut de 21,3%. J'aimerais
savoir si c'est possible, comme indication, qu'on donne ces pourcentages pour
les années 1970 à 1977 pour voir la variation d'autofinancement
tout en reconnaissant qu'effectivement, pour ces années-là, vos
programmes d'emprunts à l'étranger étaient moindres, mais
pour éventuellement savoir le pourcentage d'autofinancement des six
dernières années, compte tenu que je veux relier cela au fait
que, dans votre mémoire d'allocution, vous mentionnez que, dès
1969, vous aviez nettement des intentions d'aller poursuivre vos emprunts sur
un marché plus vaste que le marché canadien et le marché
américain?
M. Boyd: Le député me demande, M. le
Président, à partir de 1970. Je ne peux pas aller si loin. Est-ce
qu'on pourrait se contenter de partir de 1973? En 1973, c'était de 10%;
en 1974, de 17,8%; en 1975, de 14%; en 1976, 24,2% et, en 1977, de 21,3%. Pour
1978, on entrevoit 22,3%, comme c'est dit dans le mémoire ici. Les trois
années à venir, pour les avoir toutes sur le même papier,
en 1979, ce sera de 30,9%; en 1980, de 31,7% et, en 1981, de 34,1%.
M. Gendron: D'accord. Je vous remercie. En complément,
à un moment donné, pourrait-on avoir davantage d'éclairage
sur la justification? En 1978,vous dites que vous prévoyez un
pourcentage d'autofinancement de 22% alors qu'en 1981 il passera à 34%,
ce qui veut dire une augmentation de 12%. Ne serait-il pas possible de faire
que ce pourcentage d'autofinancement prévu pour 1981 soit réduit
et qu'éventuellement, en réduisant le pourcentage
d'autofinancement d'un pourcentage quelconque, cela n'aurait pas pour effet de
permettre de demander moins au niveau de la tarification
suggérée? Est-ce que cela a été analysé?
Supposons qu'on s'en tienne à un pourcentage d'autofinancement d'environ
30%, quelle serait la répercussion financière concrète sur
la réduction des emprunts prévus?
M. Boyd: On répond un peu à cela à la page
17 quand on assume que ce sera 1,25 en 1981. Si on maintenait 1,25 pour les
trois années 1979, 1980 et 1981 je pense que cela va dans le sens
de votre question cela voudrait dire qu'il faudrait emprunter
près de $500 millions ou vendre des obligations pour $500 millions de
plus pour ces trois années pour accomplir le même programme
d'investissements.
Vous comprenez donc pourquoi nous prônons qu'il faille augmenter
notre pourcentage d'autofinancement. D'ailleurs, comme nous l'avons dit dans la
discussion qu'on a eue ce matin sur le taux de change et les marchés
qu'il faut
essayer d'éviter, cela restreint nos possibilités
d'emprunts. Si, au lieu d'avoir à emprunter $6 milliards au cours des
trois prochaines années, on a $6,5 milliards à emprunter, cela
rend encore notre problème plus difficile, quand on est limité
aux marchés du dollar canadien et du dollar américain. C'est pour
cela qu'on essaie de passer de 1,25 à 1,41 ou à 1,34.
M. Gendron: Quand vous parlez de maintenir, au niveau de la
couverture, les intérêts à 1,25, est-ce à la
condition de rester à une couverture d'intérêt de 1,25 que
votre niveau d'autofinancement doit être, en 1981, 34%?
M. Boyd: Si on maintenait la couverture à 1,25, notre
pourcentage d'autofinancement pour les trois années en question, 1979,
1980, 1981, serait de 28,7%, en 1979; de 24,5% en 1980, et de 24,3% en 1981,
alors que nous avons proposé les chiffres que je vous ai donnés
tout à l'heure.
M. Gendron: Cela va, là c'est clair. Merci.
Le Président (M. Dussault): M. le député de
Richmond.
M. Brochu: Merci, M. le Président! Je reviens un peu sur
les remarques qui avaient été faites tout à l'heure par le
ministre concernant l'économie du milliard de dollars et, avec la
procédure aussi qu'on doit suivre à cette commission
parlementaire, vous comprendrez, M. le Président, qu'à ce moment,
n'ayant pas pu poser des questions, on n'a pas pu toucher à cette
question qui n'est pas la moindre dans le contexte actuel, même si c'est
en termes d'économie qu'on parle. Le ministre a indiqué qu'il
avait été quelque peu surpris qu'on n'aborde pas, de façon
plus directe et plus complète, cette question de l'économie du
milliard de dollars. Par contre, immédiatement après, il s'est
fixé sur la question de l'économie des $359 millions en ce qui
concerne les lignes de transmission. J'aimerais qu'on y revienne
peut-être plus à fond.
M. Boyd, vous avez indiqué hier, dans vos nouvelles projections,
que vous aviez là une économie d'un milliard de dollars, surtout
parce que vous mettiez à part la question de LG 1. J'aimerais
peut-être d'abord vous réentendre sur cette question de la mise
à part de LG 1 pour le moment. J'aimerais vous entendre dire si,
vraiment, le projet est simplement retardé ou s'il y a une modification
majeure dans le plan global, qui était prévu au point de
départ.
M. Boyd: LG 1 était prévu pour mise en service...
Au départ, lorsqu'on a fait l'estimation de $16 100 000 000, en 1976, LG
1 devait être au mille 44 et devait être mis en service entre 1982
et 1984. Ensuite, à cause des changements dans nos besoins, parce que le
programme est fait en fonction des besoins, la mise en service de LG 1 a
été reportée de 1983 à 1985. Ce que j'ai dit hier,
c'est qu'en fonction aussi des besoins du Québec,
c'est-à-dire...
M. Brochu: Seulement une seconde. M. Boyd: Oui.
M. Brochu: Cette décision de reporter le besoin de 1983
à 1985, est-ce qu'elle a été prise l'an dernier ou
récemment?
M. Boyd: C'était l'année passée.
C'était déjà fait l'année passée.
M. Brochu: Au cours de l'été?
M. Boyd: La date, je ne m'en souviens pas, mais cela fait
déjà quelque temps. Tandis que le nouveau changement dont on vous
parle maintenant, c'est au cours de l'année courante. Nos besoins, ayant
changé encore davantage et à la demande de l'Hydro-Québec,
ayant besoin de moins d'énergie, mais d'autant de puissance, on a
décidé d'installer de l'équipement de pointe, si vous
voulez, ou deux unités de plus à LG 3, deux unités de plus
à LG 4, et de retarder de deux ans LG 1. C'est ce que vous avez au
tableau là-bas, que vous allez d'ailleurs sur les petits tableaux qui
correspondent...
M. Brochu: Oui, vous nous avez remis hier un tableau des
changements de prévision.
M. Boyd: Alors, il y a eu aussi, entre-temps, des
négociations avec les Cris de Fort George pour déplacer leur
village de l'île des Gouverneurs à la terre ferme. Là, les
différents gouvernements, mais surtout la Société
d'énergie participant au coût du déménagement du
village de Fort George sur la terre ferme, à leur demande, on a
demandé, en contrepartie, parce que c'était eux qui nous avaient
fait remonter au mille 44, de revenir au mille 23, ce qui nous donne environ
290 mégawatts de plus. Il faut refaire les plans pour un LG 1 plus
considérable. Donc, c'est avantageux de ce côté. En plus de
cela, l'énergie de pointe que vous voyez là et sur vos tableaux,
et ceux qui s'appellent ici suréquipement de LG 3 et LG 4, nous fait
ajouter $437 millions, tandis que la soustraction de LG 1 tel qu'il
était dans notre bilan, soit $16 100 000 000, était de $1 102 000
000. (12 h 15)
Nous soustrayons $1 102 000 000, nous ajoutons $437 millions et, avec
ça, nous obtenons 10 269 mégawatts, ce qui correspond à
nos besoins et nous donne un coût de $15 488 000 000. Donc, il y a
là une économie d'investissement pour la période, chose
qui est avantageuse. Cela nous a permis, dans cette proportion, de demander
moins en augmentation de tarifs. En plus de ça, la dernière
colonne vous donne les 10 269 mégawatts qui sont les mêmes, mais
ayant eu la réduction dans les coûts de transport de cette
énergie, au lieu d'être $4 136 000 000, c'est maintenant $3 777
000 000, ce qui nous donne les $15 100 000 000 dont on a parlé hier. Il
y a trois éléments dont il faut tenir compte là-dedans,
c'est que, pour nos besoins, on n'avait pas besoin de toute l'énergie
qu'on aurait pu tirer de LG 1 et,
cependant, on avait besoin de la puissance équivalente. On l'a
obtenue, à meilleur compte, en faisant des unités additionnelles
à LG 3 et LG 4. Il y a eu aussi les économies de lignes de
transport. Donc, pour répondre à nos besoins pendant cette
période jusqu'à 1985, on a réduit, en somme, nos
investissements de $1 milliard et ça nous permet de venir ici avec un
programme moins lourd et de vous demander des augmentations de tarifs moins
considérables.
M. Brochu: "L'épargne réelle", si on peut dire, en
termes d'épargne dans le contexte, par le retardement de LG 1 et le
suréquipement de LG 3 et LG 4, en réalité, est de quelque
$600 millions.
M. Boyd: On le saura quand on aura fait l'estimation de LG1, qui
va être différent. Tout d'abord, il ne sera pas au même
endroit, il va être pour 290 mégawatts de plus et il sera
repoussé dans le temps de deux ans. LG 1 va probablement entrer en
service en 1986-87. Donc, le coût de LG 1, je ne peux pas vous le donner
aujourd'hui, mais, ce qu'on fait, pour garder un programme correspondant
à nos besoins, on a repoussé LG 1 et, à la place, on a
bâti des unités de suréquipement à LG 3 et LG 4.
L'économie est de $359 millions sur les lignes.
M. Brochu: M. Boyd, est-ce que l'économie que vous
pressentez actuellement, en faisant ce transfert, ne sera pas grugée
largement et ne sera pas dépassée en termes de dépenses
lorsque vous aurez à reconstruire LG 1, lorsque vous parlez de refaire
les plans et d'établir un LG 1 beaucoup plus considérable que ce
qui était initialement prévu? Est-ce que si on établit la
projection, l'Hydro-Québec ne devra pas revenir encore devant la
commission pour dire: Maintenant, on doit vous demander pas mal plus que
prévu? Parce que, étant donné, cette fois-là, qu'on
a changé nos plans...
M. Boyd: Non.
M. Brochu: ... il faudra reconstruire un LG 1 beaucoup plus
considérable que ce qu'on devait initialement faire, on revient
maintenant vous demander des hausses supérieures de tarifs.
M. Boyd: II y a...
M. Brochu: On peut reprendre l'argument par l'inverse. On dit
maintenant: On pense économiser, mais est-ce que ça n'ouvre pas
la porte pour dire: On va faire un plus gros complexe un peu plus tard et
là, on va demander des coûts plus élevés?
M. Boyd: II y a deux parties à cette question.
Premièrement, c'est de l'optimisation qu'on fait sur le complexe La
Grande. En ajoutant 1000 mégawatts aux deux centrales LG 3 et 4, c'est
une optimisation, c'est de l'énergie trouvée qu'on n'avait pas
vue avant. On continue de faire de l'optimisation. Il va y avoir, sur le
complexe La Grande, des centrales additionnelles à proposer sur Laforge
1, peut-être Laforge 2, centrale Brisay et, probablement centrale
Eastmain 1, peut-être Eastmain 2. Ce sont des choses qui sont à
l'étude. Ce qu'on propose, c'est de faire un complexe La Grande, phase
II. C'est pour cela que celui dont on vous parle, de $15 100 000 000, est une
prévision qui va nous donner, d'ici 1985, 10 269 mégawatts qui
correspondent à nos besoins. On reviendra pour un complexe La Grande,
phase II, qui sera tout autre chose, qui sera LG 1 parce qu'il va venir
en 1986 plus, possiblement, LA 1, plus possiblement Brisay,
peut-être LA 2, peut-être EM 1 et EM2, ce qui fera un ensemble
je ne sais pas de 4000 ou 5000 mégawatts, disons 4000
mégawatts. Il sera estimé dans le temps et au moment où il
sera fait et sera présenté pour approbation. Donc, le complexe La
Grande, phase 1, qui est fixé à $15 100 000 000, nous donne 10
269 mégawatts et environ 62 milliards de kilowatts/heures.
Celui-là est figé maintenant. On parlera d'un autre complexe. La
Grande, phase II, qui comprendra les centrales, possiblement, que j'ai
mentionnées.
M. Brochu: Lorsqu'on parlait du complexe La Grande, phase I,
initialement, on incluait automatiquement LG 1, à ce moment-là,
dans les coûts.
M. Boyd: D'accord, mais...
M. Brochu: Est-ce que le fait d'enlever $1 milliard,
momentanément, et de revenir un peu plus tard, ce n'est pas simplement
jeter un peu d'ombre sur $1 milliard pour respirer plus à l'aise devant
la population et devant la commission parlementaire? En réalité,
à toutes fins utiles, dans les faits, lorsqu'on va regarder le complexe
La Grande, on aura LG 1, LG 2, LG 3, LG 4.
M. Boyd: II y aura beaucoup plus que cela, M. le
Président.
M. Brochu: C'est ce que je veux dire. Est-ce que le milliard qui
semble disparaître, dans le moment, est tout simplement mis en veilleuse
pour permettre une annonce confortable, en demandant même des taux
réduits, comparativement à ce qui était prévu l'an
passé, mais qu'à toutes fins utiles appelons-la comme cela
pour les fins de la discussion cette bête noire est
attachée pour le moment et on va la laisser sortir un peu plus tard?
M. Boyd: La raison pour laquelle on a reporté LG 1
à une date ultérieure est qu'avec le suréquipement qu'on a
fait à LG 3 et à LG 4, on n'en aura pas besoin en 1985. Donc, on
le reporte au moment où on en a besoin. Cela ne sert à rien de le
bâtir pour 1985. On n'a pas besoin de cette puissance. Donc, pour
répondre aux besoins, d'ici 1985, on construit ce qui coûte le
moins cher. Ce qui coûte le moins cher, c'est le suréquipement LG
3 et LG 4. Je ne pense pas qu'il y ait une bête
noire cachée là-dedans. On dit que LG 1 sera construit
à l'endroit le plus propice, c'est-à-dire a mille 23. Il sera
plus considérable et sera bâti suivant les coûts de ce
temps-là, et il fera partie d'un nouvel ensemble. Quand on a
parlé du complexe La Grande, on a parlé de LG 1, LG 2, LG 3, LG
4, c'est vrai, mais correspondant à des besoins connus à ce
moment. Les besoins ont changé. On a trouvé des méthodes
plus économiques de répondre aux besoins. C'est fort simple. En
plus de cela, en optimisant le projet, on découvre qu'on peut aller
chercher d'autres centrales, d'autres puissances et d'autres énergies.
Donc, je pense que, là aussi, c'est une bonne nouvelle que de trouver
sur le même complexe peut-être 4000 mégawatts de plus que
prévu au départ. En fait, si on l'exprime autrement, dans notre
estimation du complexe La Grande 1976, on avait 10 190 mégawatts et
maintenant, on arrive avec 10 269 mégawatts, à un coût de
$1 milliard de moins. Je pense que cela est important. Le fait d'avoir
réussi, entre-temps, à déplacer LG 1 au mille 23,
grâce à nos négociations avec les Cris de Fort George, nous
ajoute 290 mégawatts.
Si on calcule la valeur de 290 mégawatts et l'énergie qui
va en sortir pendant les cinquante années sur lesquelles on l'amortit,
on arrive à un chiffre considérable. Alors, qu'il soit fait plus
tard ou maintenant, on le fait plus tard parce qu'on n'en a pas besoin dans le
moment, vous avez quelque chose qui est considérable, qu'on a
récupéré en négociant avec les Cris. Je pense qu'on
a ces chiffres, la valeur additionnelle des 290 mégawatts qu'on obtient
en déménageant LG 1.
M. Brochu: C'est sûr qu'en cours de route, en tant
qu'administrateurs, si vous trouvez, comme vous avez fait, le moyen de fournir
une puissance équivalente aux besoins que vous pressentez pour tel ou
tel montant, vous pouvez effectuer des choix. Mais, fondamentalement, ce que je
tente de faire ressortir, c'est le fait qu'il ne faut pas donner l'impression
que LG 1 est complètement enlevé et que ces coûts ne
réapparaîtront pas, parce qu'à la fin, lorsqu'on va
regarder l'ensemble de la facture et lorsque les citoyens vont regarder
l'ensemble de la facture qui va leur être présentée, il va
y avoir les $15 milliards, mais ce qu'on n'a pas dit dans la nouvelle hier et
ce qui doit quand même être dit, c'est que, lorsqu'on regarde le
projet dans son ensemble, on doit dire $15 milliards plus maintenant ce que va
coûter LG 1 au moment où on devra le mettre en application avec ce
que vous avez dit d'ajout dans le sens que le projet va être
considérable et qu'on va devoir refaire les plans.
M. Boyd: M. le Président, notre fonction est de
répondre aux besoins. Les besoins ayant été
modifiés au point de vue de l'énergie, on a construit des
unités supplémentaires, LG 3, LG 4, qui correspondent mieux
à notre besoin et, en faisant cela, on réussit à
réduire la différence entre $1 102 000 000 et le coût
additionnel de $437 millions. C'est déjà fort intéressant
et, en plus de cela, on vous annonce que le complexe La Grande ne sera pas
limité à LG 1, LG 2, LG 3 et LG 4. On vous dit qu'il y a des
unités de plus à LG 3 et LG 4. On vous dit que LG 1 fera partie
d'une deuxième phase dans laquelle il y aura quatre ou cinq centrales.
Alors, il faut quand même comparer des choses avec des choses semblables.
Nos besoins, ce sont des mégawatts et des mégawatts/heures, de la
puissance et de l'énergie. D'ici 1985, on a besoin de tant de
mégawatts et de tant de mégawatts/heures et on répond
à ce besoin à un coût moindre. En plus de cela, on vous dit
que, pour la période qui va suivre, en optimisant le projet, on a
découvert 4000 mégawatts de plus. Évidemment, cela va
coûter de l'argent. Si on installe LG 1 au mille 23 avec 290
mégawatts de plus, c'est évident qu'il va coûter plus cher
que le LG 1 au mille 44, mais sa valeur relative et les infrastructures ayant
toutes été imputées à la phase I, le coût de
LG 1, même s'il est pour 290 mégawatts, va être un
coût favorable et les autres centrales, comme je vous dis, qu'on va
ajouter à l'ensemble du même bassin, vont être un ajout
important. C'est assez extraordinaire de pouvoir dire qu'on va avoir 4000
mégawatts de plus dans le complexe. C'est évident que, si on les
construit en 1987, 1988, 1990, cela va coûter plus cher que si on les
avait construits en 1982, 1983, mais ils vont être encore bien meilleur
marché que toute autre chose, sans cela, on les construirait plus
tard.
M. Brochu: Je comprends que vous voyez en termes de besoins, que
vous mettez le plein feu sur la question de répondre à des
besoins avec ce que vous avez. Par contre, on doit aussi regarder en termes de
coûts réels au bout de la ligne, en fin de course. Comme vous
l'avez laissé entendre aussi, je pense que la réalité
qu'on aura à envisager à ce moment-là est
hypothétique pour le moment. On verra, rendu là, ce que cela va
réellement coûter, et à ce moment-là on pourra faire
la facture finale. (12 h 30)
Le Président (M. Dussault): Est-ce que vous avez
terminé votre intervention, M. le député de Richmond?
M. Brochu: J'aimerais revenir à un fait que j'avais
souligné lors de ma première intervention devant la commission.
J'aimerais que vous éclairiez ma lanterne sur des chiffres qui ne me
semblent pas tout à fait concorder dans deux rapports qui nous ont
été fournis. Premièrement, dans la revue En Grande, du
début de juillet 1978, à la page 12, c'est M. Boyd qui
écrit: "C'est ainsi que je pouvais déclarer devant la commission
parlementaire des richesses naturelles que l'estimation de $16 153 000000
demeurait inchangée. Au 31 décembre 1977, il y avait 43,5% de ce
budget qui était dépensé ou engagé, soit un montant
de $7 010 000 000."
M. Boyd: ... le chiffre?
M. Brochu: Le chiffre, au 31 décembre 1977, il
y avait 43,5% de ce budget de $16 153 000 000 qui était
dépensé ou engagé, soit un montant de $7 010 000 000.
Lorsqu'on a reçu le rapport annuel de l'Hydro-Québec, en me
référant à la page F13, Engagements et dépenses en
immobilisation, baie James, "le projet de la baie James comporte
présentement la construction de quatre centrales sur la rivière
La Grande dont la puissance projetée est de 10 000 kilowatts,
l'achèvement de ces travaux est prévu pour 1985... Le coût
du projet est évalué à $16 milliards au 31 décembre
1977. On y avait investi, à cette date, $3 385 000 000. " II y a un
écart que je m'explique mal.
M. Boyd: Les deux chiffres sont vrais. J'avais retenu la page F13
du rapport annuel, j'ai vérifié ce matin.
M. Brochu: Oui.
M. Boyd: Ce qu'on y dit, c'est qu'il s'agit de $3 385 000 000
investis. Investis veut dire les coûts jusqu'à maintenant. C'est
vrai. C'était ça au 31 décembre, tandis qu'on dit, dans la
revue En Grande, je n'avais pas retenu votre chiffre, vous venez de me le
répéter, que c'est 43,5% dépensés ou
engagés.
M. Brochu: C'est ça.
M. Boyd: $7 010 000 000, ça aussi, c'est vrai. Parce que
là, ce sont les coûts jusqu'à maintenant, plus les sommes
engagées. Les contrats qui sont donnés...
M. Brochu: D'accord, de là l'écart de $3 milliards
à $7 milliards.
M. Boyd: ... les contrats de fournitures ou les contrats de
construction, etc., ne sont pas encore dépensés, mais ils sont
engagés. Donc, les deux chiffres sont vrais. Il faut tenir compte de
cette différence, l'un est plus global et comprend les coûts
jusqu'à maintenant, au 31 décembre, plus les engagements.
Le Président (M. Dussault): M. le ministre.
M. Joron: Oui, je voudrais revenir à l'essentiel de notre
propos, si c'est possible. Je pense que la façon de présenter le
problème central avec lequel nous sommes confrontés, dans notre
souci commun de diminuer le fardeau des abonnés, c'est le suivant.
J'essaie de le résumer de la façon suivante: dans les trois
années qui sont devant nous, ce que nous avons à investir, si on
veut répondre à nos besoins en énergie, c'est $8 700 000
000, ce sont vos investissements prévus pour 1979, 1980 et 1981, tels
que revus et corrigés avec les changements au complexe La Grande.
On a $8 700 000 000 à investir, c'est quasiment coulé dans
le ciment, dans un sens, à moins qu'une optimisation nouvelle
c'est pour ça que je posais la question précédente
comme celle dont il est question aujourd'hui, puisse intervenir, mais il semble
que non. On a tiré à peu près tout le jus du citron.
Donc, on est pris, si on veut répondre à nos besoins, pour
investir $8 700 000 000. Il va venir de deux sources, une partie va être
empruntée et l'autre partie va être payée par les
contribuables, par les abonnés. Il va y avoir une partie
d'autofinancement et une partie va être empruntée. Vous avez
posé comme hypothèse de départ que, sur ces trois
années, les emprunts ne devraient pas dépasser $6 milliards; $2
milliards par année apparaissent, aux experts et à vos
conseillers, comme étant la limite. Ce n'est pas un chiffre absolu,
ça ne découle pas d'un raisonnement technique, c'est une
appréciation.
Disons qu'il peut y avoir une marge d'interprétation, vous
êtes là pour donner votre avis, vous l'avez donné, c'est
notre avis. Donc, s'il faut soustraire $6 milliards d'emprunt à $8 700
000 000 d'investissement, il vous faut $2 700 000 000 d'autofinancement sur ces
trois années. On va emprunter $6 milliards et on va mettre 2,7 de notre
poche; 2,7 de 8,7 représentent à peu près 32% en
moyenne.
En gros, deux tiers, un tiers. On va emprunter deux dollars et on va en
investir un de notre poche. C'est votre suggestion. Si on pouvait emprunter
plus, $6 500 000 000, par exemple, en se collant au plancher du 1,25 et en n'en
bougeant pas, cela deviendrait $6 500 000 000. Les 8,7% sont toujours les
mêmes, 6,5% d'emprunt, il en resterait 2,2% à autofinancer, ce qui
représenterait 26% et non plus 32% à ce moment-là, donc
à peu près trois quarts, un quart. On demanderait moins d'efforts
financiers de la part du contribuable.
Donc, il y a un élément aléatoire là-dedans,
c'est: Quel est le volume maximal d'emprunt? C'est une question que je pense
être d'appréciation. Ce n'est pas une question qu'on peut figer,
comme découlant d'un raisonnement technique ou automatique.
Présumons pour l'instant que le plafond d'emprunt est bien
là, à $6 milliards. Comment peut-on faire pour réduire la
charge des abonnés, les $2 7000 000 000 qu'il faut aller chercher par
autofinancement? Il y aurait deux façons, dont l'une est de
réduire les investissements. Vous nous dites qu'on ne peut pas
espérer réduire, optimiser le complexe davantage et que cela
aurait un effet sur le niveau des investissements dans les trois années
à venir.
Bien que quand on voit changer les chiffres, d'une année à
l'autre, quelquefois vers la baisse, on est porté à être un
peu sceptique et quelquefois un peu optimiste en disant: Tout à coup ils
nous arrivent en 1980 avec une autre trouvaille et que, finalement, on a
augmenté trop les tarifs parce qu'il y a quelque chose qu'on n'avait pas
prévu.
Cela incite le gouvernement à être un peu prudent. Mais
s'il n'est pas possible de réduire les investissements, il resterait une
autre possibilité. Ce serait de réduire les dépenses
d'exploitation. Avant de demander aux contribuables de participer davantage au
financement de l'affaire, norma-
lement, je pense que les contribuables se tourneraient vers vous et
diraient: Et vous, faites-vous votre effort dans vos propres dépenses,
pour couper le gras ou pour aller chercher jusqu'à "la dernière
cenne"? Avant de venir la prendre dans nos poches, qu'est-ce que vous faites
chez-vous?
Je me suis amusé à faire le petit tableau suivant des
trois dernières années. Je comprends que la comparaison n'est pas
directement comparable, mais j'aimerais cela vous entendre la commenter. De
1976 à 1977, les dépenses du gouvernement du Québec ont
augmenté de 16%; vos dépenses d'exploitation interne
j'exclus là-dedans le coût du combustible et ces choses-là
vos frais d'exploitation directe ont augmenté de 15,4%, donc un
peu moins que le budget du Québec.
Mais de 1977 à 1978, alors que les dépenses du
gouvernement augmentaient de 12,5%, les vôtres augmentaient de 14,2%.
Si on prend les chiffres que vous nous suggérez pour 1979
j'ai arrêté la comparaison là pour 1978/79, les
dépenses du gouvernement vont augmenter de 10,5% mais vos frais
d'exploitation augmentent de 17,9%. Il semble que, depuis trois ans, le
gouvernement est pas mal plus économe que l'Hydro-Québec. Je ne
vous dis pas que c'est une conclusion qu'il faut en tirer.
M. Raynauld: Ce n'est pas un standard bien
sévère.
M. Joron: En plus, ajoute le député d'Outremont, ce
n'est pas un standard bien sévère que de comparer cela au
gouvernement.
Donc, vos dépenses d'exploitation semblent augmenter plus vite
que d'autres. Je ne sais pas si c'est juste de comparer cela directement
à cela. Pourriez-vous nous dire s'il y a espoir, avant de demander aux
contribuables un effort financier supplémentaire, de comprimer davantage
les dépenses d'exploitation de l'Hydro-Québec?
M. Boyd: C'est une chose qu'on essaie toujours de faire, mais
malheureusement, je dois vous rappeler qu'en 1976, on a eu une convention
collective qui nous a coûté très cher. Ces montants que
vous donnez, dans les frais d'exploitation, sont largement incompressibles,
parce qu'il y a 9000 employés qui sont régis par ces trois
conventions collectives...
M. Joron: Pour un grand total de 15 000?
M. Boyd: C'est cela, plus les conventions des ingénieurs
dont on a entendu parler hier. On prévoit aussi, suivant les demandes
qui nous ont été faites par les trois syndicats qui reviennent
pour une nouvelle convention au début de cette année. Si vous
avez pris connaissance des demandes, ce sont des demandes très
considérables. C'est à ces niveaux que les dépenses
d'exploitation augmentent beaucoup.
M. Joron: Quel est le pourcentage des salaires aux
dépenses totales d'exploitation?
M. Boyd: Pardon?
M. Joron: Le pourcentage des salaires dans vos dépenses
totales annuelles d'exploitation?
Si je comprends l'incidence des conventions collectives, peut-être
que vous voudrez détailler davantage cet aspect, mais le gouvernement a
aussi des fonctionnaires à indexer.
M. Boyd: Les salaires représentent environ 70% des frais
d'exploitation.
M. Joron: 70%.
M. Boyd: En 1977, les salaires représentaient 65% et les
avantages sociaux représentaient environ 28%.
M. Joron: Comme l'essentiel de tout cela est
déterminé par une convention, cela devient un incompressible.
M. Boyd: À toutes fins utiles, lorsque vous allez signer
une convention, c'est à peu près incompressible.
Évidemment, dans les révisions de tarifs dont on parle ici, on
vous dit dans le mémoire qu'on n'a pas tenu compte des dépenses
additionnelles qui pourraient venir à la suite de la réforme
fiscale municipale, qui pourrait entraîner un autre fardeau.
M. Joron: Avez-vous tenu compte de la renégociation de vos
conventions collectives?
M. Boyd: Pardon?
M. Joron: II doit y avoir une hypothèse cachée
là-dedans?
M. Raynauld: Ah oui!
M. Boyd: Ce qu'on a mis...
M. Joron: Puisqu'on a des chiffres d'exploitation pour 1979, 1980
et 1981...
M. Boyd: Oui, on a mis une hypothèse cachée. Je
pense que, dans le moment avec la loi 55, comme vous le savez, nous avons
procédé suivant la loi et soumis nos demandes, par l'entremise du
ministre délégué à l'énergie, au Conseil du
trésor pour l'ensemble des clauses financières. C'est suivant
cette norme que nous devrons négocier les conventions collectives avec
ces trois syndicats d'ici la fin de l'année.
Est-ce que le résultat sera moindre que celui prévu ici?
Je ne le sais pas, mais vous savez que, entre autres, les syndicats demandent
des réductions d'heures de travail, et une semaine sur deux de quatre
jours.
Ils demandent l'indexation des fonds de retraite, la possibilité
de prendre leur retraite optionnelle à compter de 60 ans, et certaines
choses comme cela qui sont des faits assez importants au niveau de
l'exploitation. Cette partie des frais
d'exploitation, une fois que les conventions sont signées, ce
sont des dépenses incompressibles. (12 h 45)
M. Joron: II semble que vous ayez traversé là un
corridor assez étroit qui ne laisse pas tellement de marche de
manoeuvre. J'ai une dernière question sur ce sujet crucial, qui nous
occupe. Si on tient pour acquis qu'il n'y a pas moyen d'emprunter
au-delà des $6 milliards durant ces trois ans, comme je le disais tout
à l'heure, il faut en prendre et en laisser, dans un sens, parce que
c'est une question d'appréciation, mais c'est votre avis. S'il n'y a pas
moyen de réduire les investissements, puisque le projet est
déjà optimisé au maximum et s'il n'y a, à toutes
fins pratiques, pas moyen de réduire substantiellement les
dépenses d'exploitation, il en découlerait que si on veut faire
ces investissements que vous estimez nécessaire pour répondre aux
besoins, selon les prochaines années, il n'y a plus d'autre solution que
d'aller chercher $2 700 000 sur $8 700 000 au cours de ces trois années
par voie d'autofinancement.
Dans un sens, on est un peu mal pris parce qu'on a, vous l'avez
signalé hier, une pointe à passer, et après cela, les
choses se calment un peu. On a un effort plus substantiel qu'à
l'accoutumée à demander aux abonnés pendant quelques
années, et après cela, les choses vont redevenir à la
normale. Il y a le problème d'équité qui se pose, de faire
payer des gens tout de suite pour des bénéfices à venir
plus tard. Ce n'est pas nécessairement tout à fait les
mêmes das le temps qui vont en bénéficier.
Idéalement, il aurait fallu étaler cela sur le plus loin
possible.
Est-ce qu'on peut avoir un aperçu de la situation après
1981? Je comprends que les programmes ne sont pas encore
déterminés. C'est la raison pour laquelle cela va être
difficile d'arriver avec un chiffre d'investissement précis pour 1982,
1983, 1984, parce que ce seront des investissements reliés à des
équipements qui seront mis en service entre 1985 et 1990, qui ne sont
pas encore déterminés, mais on doit quand même avoir une
idée quant à l'ordre de grandeur. Selon ce qu'on a devant nous,
l'horizon arrête en 1981, mais il serait utile, pour mesurer l'effort
qu'on a à passer d'ici à 1981, d'essayer de voir un peu ce qui
nous attend au cours des années suivantes. Quelles pourraient
être, par exemple, les augmentations de revenus requis par
l'Hydro-Québec pour faire face aux années suivantes, 1982, 1983,
1984, 1985 et ainsi de suite? Ce que j'essaie de mesurer, c'est à quel
point on a comprimé tout cela dans une courte période, et s'il
n'y avait pas moyen de l'étaler. C'est ce qu'on recherche.
M. Boyd: Évidemment, les investissements dont on aura
besoin en 1982 vont dépendre du programme actuel qui est connu, plus les
investissements qu'il faudra faire pour nos besoins après 1985. Le
programme de 1985 à 1990 n'est pas encore déterminé.
Le nouveau conseil d'administration aura à l'approuver d'ici le
printemps. C'est absolument, je dirais, dangereux que de vouloir vous donner
une approximation de quelque chose qui n'est pas définitif ou
approuvé, mais il est certain que, dans cette période, on aura
besoin de plus d'énergie de pointe qu'on en a eu besoin dans la
période actuelle. Donc, c'est le mieux que je peux répondre
à votre question, parce qu'on n'est pas en mesure de vous dire ce que
sera le programme 1985-1990 et donc, des investissements qui vont devoir
commencer en 1982, on n'est pas en mesure de vous les donner non plus.
M. Raynauld: M. le Président, je me demande si ça
n'aiderait pas à obtenir la réponse que le ministre cherche, si
on posait la question d'une façon un peu différente.
Est-ce que vous avez une estimation du nombre d'années que vous
prenez pour financer vos immobilisations? Autrement dit, je ne pourrais pas
avoir les statistiques d'amortissement comptables. Vous amortissez ces
investissements sur combien de temps? On crée des immobilisations qui
vont durer, je ne sais pas, moi, 50 ans. Vous les amortissez, compte tenu de
l'autofinancement, des emprunts et des échéances des emprunts.
Vous les financez sur combien de temps? Je pense que c'est ça qu'on
cherche à savoir. Qu'est-ce que c'est, l'effort qu'on demande aux
Québécois dans les trois prochaines années par rapport
à une situation où on aurait la liberté de vraiment
dépenser ça en fonction de la durée de vie des
équipements?
M. Boyd: Dans le rapport annuel, à la page F9... M.
Raynauld: F9?
M. Boyd: F9, oui, vous avez: Les vies utiles prévues et
les périodes correspondantes d'amortissement des principales
catégories de propriétés et outillage en exploitation soit
les suivantes: centrales hydrauliques, 50 ans; turbines et alternateurs des
centrales hydrauliques, 40 ans; barrages et réservoirs, 50 ans;
pylônes en acier et conducteurs des lignes de transport, 50 ans; poteaux
en bois des lignes de distribution, 25 ans; conducteurs des lignes de
distribution, 40 ans; actif incorporel, 25 ans. Ce sont les barèmes que
l'on emploie depuis toujours pour l'amortissement.
M. Raynauld: Oui, mais ça, c'est l'amortissement
comptable. C'est pour ça que j'ai dit tout à l'heure que ce
n'était pas nécessairement ça qu'il nous fallait. Ce n'est
pas l'amortissement comptable, l'amortissement réel, compte tenu des
échéances des dettes et de l'autofinancement. Si on fait un
autofinancement pour un tiers, pour les trois prochaines années, c'est
bien sûr que, dans trois ans, on a financé la totalité, si
c'est un tiers par année. Cela veut dire qu'en trois ans, vous pouvez
avoir, vous, des amortissements comptables pour les fins de calcul qui
correspondent à cette durée de vie, mais là, c'est le
contenu économique de ça que je cherche. Je ne pense pas que les
deux notions soient identiques.
M. Boyd: Si on autofinance au tiers le programme d'une
année, dans trois ans, vous l'avez...
M. Raynauld: ... financé. M. Boyd: Je ne pense
pas.
M. Lemieux: La deuxième année, ce n'est pas le
même actif que vous êtes en train de construire. La
troisième année, c'est encore un autre actif. Si vous contribuez
à 30% ou 33% au coût de l'actif, la première année,
ce que vous contribuez à la deuxième ne paie rien pour cet
actif.
M. Raynauld: M. Lemieux, je pense qu'on ne se comprend pas. Vous
faites un investissement de $100.
M. Lemieux: Oui.
M. Raynauld: Vous achetez une machine de $100. La première
année, vous financez le tiers. La deuxième année, un autre
tiers.
M. Lemieux: Non, ce n'est pas cette machine-là. La
deuxième année, c'est une autre machine que vous achetez.
M. Raynauld: Là, vous additionnez à ma machine une
deuxième machine.
M. Lemieux: Si on veut.
M. Raynauld: Un autre montant de $100, sur lequel c'est un tiers.
D'accord?
M. Lemieux: Oui, mais, pour la première machine, tout ce
que vous avez payé, c'est le tiers, la première année. Il
reste 70% ou 66%.
M. Joron: Je suis votre raisonnement, mais, en
réalité, ce qui arrive, c'est que, dans un sens, vous pouvez dire
c'est vrai trois années de suite, trois fois $100. On paie
chaque fois le tiers. Il y a deux façons de le voir. Vous voulez
dire...
M. Raynauld: On paie la première machine.
M. Joron: ... au bout de trois ans, la première machine
est payée, mais les deux autres, on n'a pas un cent versé dessus,
par exemple. On n'a pas un cent versé dessus...
M. Raynauld: Non.
M. Joron: ... ou c'est le tiers de chacune.
M. Raynauld: Je comprends cela, mais...
M. Boyd: II y a aussi le facteur, M. le Président, que,
chaque année, notre investissement devient de plus en plus
considérable. Au bout de trois ans, peut-être qu'on aura à
moitié autofinancé la première année, mais,
étant donné que, la deuxième année, on investit
davantage et qu'on n'a rien, et ainsi de suite...
M. Raynauld: On va le reprendre autrement dans ce cas. On a
financé un tiers, la première année. Les deux tiers ont
été financés par des emprunts. L'échéance
moyenne de vos emprunts, c'est quoi?
M. Lemieux: Actuellement, c'est environ 12,8% sur douze
ans...
M. Raynauld: Sur douze ans? M. Lemieux: Douze ans et
demi.
M. Raynauld: Alors, douze ans sur deux tiers, plus un an pour
l'autofinancement, cela donnerait qu'on aurait financé l'investissement
de cette année en huit ans ou quelque chose comme cela?
M. Lemieux: Non, parce que même si la vie moyenne est de
douze ans et demi, cela ne veut pas dire qu'on va liquider la dette. On aura
les fonds. Il y aura probablement des emprunts pour une partie, une partie de
ce montant sera refinancée.
M. Raynauld: La réponse à la question, vous ne
l'avez pas. Vous ne savez pas sur combien d'années vous financez les
immobilisations. C'est ce que cela veut dire?
M. Lemieux: Effectivement, c'est la période de
dépréciation comptable. On récupère, par
l'entremise des tarifs, sur une période de 50 ans, le coût d'une
centrale. Le seul montant imputé...
M. Ciaccia: Mais l'emprunt sur cette centrale que vous avez fait,
combien d'années vous faudra-t-il pour payer la dette, le capital de
l'emprunt? Est-ce que c'est 12 ans et demi? Cela ne se peut pas. Est-ce que
c'est 20 ans?
M. Lemieux: C'est la période durant laquelle vous
amortissez la dette. C'est seulement sur une période de 50 ans pour la
centrale que vous récupérez de l'abonné.
M. Ciaccia: Je pense que je sais la réponse que M.
Raynauld essaie d'obtenir. Supposons que vous empruntez $1 million pour
construire un édifice, une centrale. Si c'est un prêt
hypothécaire, il est amorti sur 20 ans et vous payez tous les mois
capital et intérêts. À la fin des 20 ans, vous avez
liquidé votre dette, mais l'édifice peut être bon pour 50
ans. Cela veut dire que pour un autre 30 ans, vous avez l'utilisation, vous
avez déjà payé cette centrale ou cet édifice que
vous avez financé dans l'espace de 20 ans. Dans l'espace de 20 ans, vous
avez peut-être emprunté 75% que vous avez financé sur 20
ans et les autres 25% ont été de l'autofinancement. Est-ce que
vous avez ces calculs pour vos centrales? Parce que le coût de
l'édifice ou de la centrale si on avait ces chiffres-là, n'est
pas réparti sur la base de 50 ans. Est-ce que vous comprenez un peu la
question?
M. Lemieux: Au point de vue de l'étude des revenus et des
dépenses le seul montant imputé pour payer la centrale, c'est
l'amortissement, la
dépréciation. Maintenant, à la fin de
l'année si vous restez avec...
M. Ciaccia: Oui, pour les revenus et dépenses.
M. Lemieux: ... un profit, ce profit aide à financer les
investissements ou aide à financer les échéances, les
achats de fonds d'amortissement.
M. Boyd: Quand on parle d'autofinancement à 30%, on veut
dire qu'à même les revenus, il va nous rester 30% qu'on va
réinvestir dans des projets futurs. C'est ce qu'on veut dire par
l'autofinancement. Les remboursements de la dette totale, c'est sur une
période de 13,6 années. Mais il y a des renouvellements qui se
font constamment...
M. Ciaccia: 13,6%... M. Boyd: 13,6 années.
M. Ciaccia: Non, l'autre, la date, sur combien d'années,
vous ne payez pas... Supposons que vous avez une émission d'obligations
sur 15 ans, vous faites un emprunt sur 15 ans, vous autofinancez un quart et
vous empruntez 75% de la valeur de cet investissement. Vous ne remettez pas le
capital et les intérêts complètement durant cette
période, c'est ce que vous dites.
M. Boyd: On ne les remet pas.
M. Ciaccia: Alors, vous amortissez ça...
M. Boyd: Sur une période...
M. Ciaccia: ... sur la période globale de la vie de la
centrale.
M. Boyd: C'est ça, oui.
Le Président (M. Dussault): Messieurs, il est 13 heures,
nous avons convenu hier que nous cesserions nos travaux à 13 heures et
que nous les reprendrions cet après-midi à 15 heures. Les travaux
de la commission sont suspendus jusqu'à 15 heures.
(Fin de la séance à 13 heures)
(Reprise de la séance à 15 h 19)
Le Président (M. Dussault): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Nous allons reprendre les travaux de la commission parlementaire de
l'énergie. À la suite d'une petite conférence qui a eu
lieu avant notre départ ce midi, il a été convenu entre
les partis que nous suivrions l'ordre suivant cet après-midi.
Premièrement, il sera question des tarifs; deuxièmement, des
prévisions des demandes d'électricité et autres questions
relatives et, troisièmement, du programme d'investissements futurs. Nous
avons aussi convenu de terminer nos travaux vers dix-huit heures, quitte
à prendre quelques minutes pour s'assurer que nous terminerions avant
d'aller souper, ce qui libérerait tout le monde ce soir. Sur la question
des tarifs...
M. Ciaccia: M. le Président...
Le Président (M. Dussault): Oui, M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Avant de commencer la question des tarifs, j'aurais
seulement une question à poser, Cela fait suite aux remarques du
ministre quand il disait qu'il y a un certain montant, soit S2 milliards et
plus d'emprunts à faire au cours des prochaines années, pour les
années 1979, 1980 et 1981.
Je remarque qu'en 1976 vous avez emprunté $1 800 000 000 ou $1
600 000 000. Vous aviez de l'avance sur l'année subséquente.
Est-ce que vous pouvez m'expliquer pourquoi, en 1977, vos emprunts ont
été passablement moindres? Est-ce que cela peut expliquer le
rattrapage qui va être nécessaire par des emprunts additionnels
pour les trois prochaines années? Autrement dit, si vous aviez
emprunté au même rythme que celui de l'année 1976,
où il vous restait une avance à la fin de l'année, cela
aurait réduit le montant d'emprunt nécessaire dans les
années subséquentes.
M. Lemieux: Les emprunts en 1977 ont été
réduits parce que nous avons eu des emprunts importants au cours de
1976. On a terminé l'année 1976 avec un montant de $1 086 000 000
en banque. Ce n'est pas logique de continuer à détenir une somme
aussi importante.
On prévoyait laisser baisser ce montant en empruntant moins au
cours de l'année 1977. ce qui nous permettait aussi de donner un peu de
temps aux investisseurs américains qui ont des portefeuilles
déjà passablement remplis de nos obligations. On a cependant
terminé 1977 avec $750 millions en banque et, au cours de cette
année, on va encore légèrement baisser pour probablement
finir l'année avec $400 millions ou $500 millions en banque, sans
compter deux montants de $500 millions chacun, $500 millions en devises
canadiennes, $500 millions en devises américaines provenant des
banques.
Cela nous permet d'avoir une certaine confiance de pouvoir
compléter les programmes de 1979 et de 1980.
Tarifs
M. Ciaccia: Je vous remercie. C'est une question de tarifs,
est-ce que...
Le Président (M. Dussault): Sur les tarifs, nous devrions
normalement suivre l'ordre des partis. Je commencerais normalement par M. le
ministre.
M. Joron: À ce stade-ci, je n'ai pas de question
spécifique, je peux bien laisser la parole à mes
collègues.
Le Président (M. Dussault): M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia: M. le Président, pouvez-vous nous expliquer la
répartition que vous avez faite entre les différents taux,
résidentiels, domestiques et industriels? Quelle était la hausse
l'année dernière? Je crois que c'était approximativement,
dans le secteur industriel, au-dessus de 23%. C'était la demande, je ne
sais pas si c'était la hausse effective. Pouvez-vous nous expliquer un
peu les raisons qui vous ont motivés pour arriver aux tarifs inclus dans
votre mémoire?
M. Boyd: J'invite M. Bisaillon, le directeur de notre
tarification, de répondre à cette question.
M. Bisaillon (Jacques): Jacques Bisaillon. Je vais avoir les
chiffres de l'an passé dans quelques secondes. On est en train de les
sortir. Évidemment, notre principal guide, ce sont les coûts tels
qu'établis par des méthodes universellement reconnues au Canada
et aux États-Unis. Il y a également beaucoup d'autres facteurs
qui entrent en cause, dont celui des objectifs du livre blanc
évidemment, celui qu'on a toujours suivi, de toute façon.
Il faut surveiller la concurrence, le prix de l'huile et du gaz. Cela
entre en ligne de compte, surtout si on veut garder notre part du marché
et même l'accroître, comme on nous le demande. Disons que ce sont
les deux principaux facteurs. Enfin, on essaie de rejoindre plusieurs objectifs
à la fois. Ce qui arrive finalement, c'est que quand on regarde les
augmentations prévues pour 1979, 1980 et 1981, il n'y a pas tellement de
variation d'une classe à l'autre. Il y a certaines classes, comme dans
la grande puissance, où il faut faire certains rattrapages. Il y a des
contrats qu'on n'a pas pu renégocier parce qu'ils étaient encore
valides, et là, il faut reprendre le terrain perdu. Si vous regardez
l'ensemble, regardez pour 1979 je ne sais pas à quelle page que
c'est indiqué dans votre sommaire, je les ai ici pour le
domestique, vous avez une hausse prévue de 16,9%; l'usage
général petite puissance, qui est en bas de 100 kilowatts, qui
est comparable au domestique, et peut-être un peu plus gros pour
certains, c'est de 14%. La raison étant là qu'il y a un
rattrapage à faire entre le domestique et l'usage général.
Ce sont tous des petits abonnements. Il y a des problèmes sur le plan
pratique d'avoir des tarifs qui sont trop différents. Dans nos tarifs,
entre l'usage domestique et l'usage général, il y a un
écart beaucoup plus grand qu'il n'en existe ailleurs, dans d'autres
provinces. L'usage général, moyenne puissance, c'est 15,9% et
l'usage général, grande puissance dans son ensemble, est 15,4%.
L'éclairage public est un petit peu plus bas avec 13,2%, parce que l'an
passé, on avait pris la bouchée un peu plus grande.
Si on se reporte à 1978, le domestique était de 17% alors
que le total était de 18,7%, donc c'était plus faible que la
moyenne. La petite puissance est à 16,8%, donc très près.
La moyenne puissan- ce, on avait donné un coup assez fort avec 22,6%; la
grande puissance, 18,4% et l'éclairage public était de 25%. Je ne
sais pas si cela répond à votre question. Je suis prêt
à préciser davantage, si vous voulez.
M. Ciaccia: Cela me donne les chiffres, mais j'aurais quelques
autres questions. Quand vous dites que ça répond aux objectifs du
livre blanc, dans quel sens?
M. Bisaillon (Jacques): Oui, disons dans un...
M. Ciaccia: Est-ce que ce sont les objectifs du livre blanc
d'augmenter le domestique ou de réduire l'industriel? Est-ce dans le but
d'attirer de l'industrie? Est-ce un des objectifs? Est-ce que l'effet de
l'augmentation, l'année dernière, qui était assez haute
sur l'industrie, a été négatif? Est-ce pour cette raison
que vous avez modifié un peu vos taux? Je me souviens que,
l'année dernière, on avait posé certaines questions quant
à la tarification qui ne devrait pas subventionner une catégorie
de consommateurs? Est-ce que vous vous tenez dans ces normes ou est-ce que la
raison pour laquelle vous augmentez le domestique et que vous
réduisez... La hausse est moins prononcée dans la
générale et la grande puissance pour le secteur industriel.
Est-ce pour attirer plus d'industries?
M. Joron: Si le président me permet, comme cette question
concerne le livre blanc, je pourrais peut-être répondre à
une partie.
Un des principes justement du livre blanc est, pour autant que faire se
peut, de faire assumer à chaque catégorie de consommateurs les
frais que sa consommation entraîne. C'est ce qe vous avez
évoqué quand vous disiez que, l'année dernière,
vous avez exprimé l'opinion qu'une catégorie de consommateurs ne
devrait pas en subventionner une autre. Or, il reste encore la seule
catégorie, et M. Bisaillon me corrigera si c'est inexact, qui ne fait
pas ses frais, c'est la catégorie domestique.
M. Ciaccia: C'est pour cette raison que vous augmentez, cette
année, la catégorie domestique plus que le secteur
industriel?
M. Joron: Ce n'est pas exact non plus, parce que...
M. Ciaccia: Je regarde les... (15 h 30)
M. Joron: Non, mais attention! Il y a quelque chose que vous
lisez de façon incomplète dans la catégorie industrielle.
C'est la hausse des revenus provenant du secteur industriel que vous lisez
là. Ce n'est pas la hausse du tarif industriel grande puissance
normalisée, parce qu'il y a un certain nombre de contrats signés,
d'ailleurs, antérieurement à notre arrivée au pouvoir, par
le précédent gouvernement, accordant des contrats de fourniture
d'électricité à prix fixe pour un certain nombre
d'années. Ils ne sont ps tous échus. Ceux-
là subissent 0% d'augmentation, tant que le contrat n'est pas
échu. Comprenez-vous?
Si bien que vous avez, dans le secteur industriel, une catégorie
d'abonnés qui, cette année parce que c'est en vertu d'un
contrat préalablement signé ne subissent aucune
augmentation, alors que les autres, ceux qui n'ont pas un tel contrat et qui
sont aux tarifs normaux, subiront une augmentation plus forte que ce que vous
lisez là, même de l'ordre de 18%, 19%, si ma mémoire est
fidèle et, quand on prend l'un avec l'autre, cela donne que l'ensemble
de la catégorie produit des revenus supérieurs tels que vous les
lisez là, mais le tarif industriel comme tel augmente beaucoup plus vite
que ce que vous voyez là.
M. Raynauld: Ce n'est pas...
M. Joron: Non. Ce que vous lisez là, on parle des
revenus...
M. Raynauld: C'est marqué frais...
M. Joron: M. Bisaillon va vous le confirmer.
M. Bisaillon (Jacques): J'ai les chiffres ici. Pour l'ensemble,
en 1979, de la catégorie générale grande puissance, la
hausse serait de 15,4%, le tarif lui-même pour la catégorie grande
puissance augmente de 19,9%.
M. Raynauld: Le chiffre de 15,4% est encore un tarif.
M. Bisaillon (Jacques): Non. C'est un revenu provenant de cette
catégorie d'usage.
M. Raynauld: Alors, le titre qu'on a ici, dans le
résumé: Répartition des hausses par catégories
tarifaires. Il n'y a aucun endroit où on dit que ce sont des revenus. Ce
ne sont pas des recettes.
M. Bisaillon (Jacques): C'est la hausse moyenne. C'est une
moyenne.
M. Raynauld: J'ai compris que c'était une hausse moyenne
du tarif, compte tenu du fait que certaines catégories à
l'intérieur de cela avaient des hausses de tarif de 19,9% comme il est
marqué un peu plus bas dans le résumé.
M. Joron: C'est vrai dans tous les cas à l'exception du
secteur industriel, compte tenu qu'il y a des usagers industriels à
tarif fixe par des contrats préalablement signés.
M. Raynauld: Les recettes, c'est le tarif multiplié par la
consommation. Y a-t-il de la consommation là-dedans ou non? Les
recettes, c'est ça. Les recettes, ce sont les tarifs multipliés
par une consommation d'énergie et, à mon avis, il n'y a pas de
consommation là-dedans.
M. Bisaillon (Jacques): Pour essayer d'expliquer... S'il y a des
abonnés... Disons que la moitié des abonnés aurait 20%
d'augmentation et que la moitié aurait 10%, cela veut dire, en moyenne,
15%.
M. Raynauld: Exactement. Donc, ce sont des tarifs.
M. Joron: Non. Ce ne sont pas des tarifs.
M. Bisaillon (Jacques): Parce que le tarif a augmenté de
20, mais il y en a qu'on ne peut augmenter de plus que 0. Les contrats sont
valides. Alors, cela fait une moyenne de 10. En fait, ce n'est pas le
chiffre...
M. Raynauld: Donc, c'est encore une augmentation de tarif de 10
en moyenne. Ce ne sont pas des recettes. Des recettes, c'est l'énergie
consommée multipliée par le tarif.
M. Joron: La différence c'est cela que vous ne
saisissez pas c'est que le tarif dont on parle, le tarif industriel,
grande puissance, ne s'applique pas à une partie de ceux que l'on inclut
dans la catégorie industriel.
M. Raynauld: J'ai très bien compris cela, mais cela
n'empêche pas que c'est encore un tarif. Vous dites: Je vous demande
$0.10 par unité consommée, n'importe quelle que vous consommez,
c'est $0.10, mais, comme l'autre n'en a pas du tout, on va dire à ce
moment qu'en moyenne cela a été 5%, mais c'est encore un tarif,
indépendamment de la consommation d'énergie que vous pouvez faire
ou que votre voisin peut faire.
M. Joron: Le tarif de l'un n'a pas changé du tout, il est
resté à zéro...
M. Raynauld: C'est cela.
M. Joron: ... le tarif de l'autre a augmenté de 20%,
admettons...
M. Raynauld: Beaucoup plus, c'est cela.
M. Joron: Les revenus de l'ensemble de cette catégorie
tarifaire sont de 15,4%.
M. Raynauld: Vous ne pouvez pas dire "revenus", c'est le tarif
moyen.
Le Président (M. Dussault): M. Bisaillon.
M. Raynauld: En tout cas, est-ce qu'on se comprend? Est-ce que
c'est cela?
M. Bisaillon (Jacques): Oui. Quand on prend la consommation, on
prend celle prévue pour 1979, c'est à consommation égale;
alors la consommation reste la même.
M. Ciaccia: M. le Président, est-ce que je peux continuer?
On a toujours - peut-être même encore maintenant, mais je vous pose
la question eu un
avantage au Québec pour attirer l'industrie et un des avantages a
été non seulement le coût de l'électricité,
mais le coût de l'énergie. Avec les hausses au secteur industriel
de l'année dernière, les hausses que vous demandez pour les trois
prochaines années, que va-t-il arriver à cet avantage qui
existait jusqu'à maintenant au Québec pour attirer la nouvelle
industrie?
M. Joron: Je pense que vous avez la réponse à la
page 22 du résumé du mémoire où vous avez les
tarifs de cette année, 1978, en vigueur dans certaines villes du Canada
et des États-Unis.
M. Ciaccia: Non, ce n'est pas ma question, M. le ministre.
M. Joron: Vous allez voir que l'avantage est resté
là.
M. Ciaccia: Non, une minute. Je ne demande pas, je sais que le
coût de l'électricité est moins élevé au
Québec que dans d'autres juridictions. Ce n'est pas ma question. Ma
question est: Quel est l'avantage du coût de l'énergie? Autrement
dit, les industries ne sont pas toutes obligées d'utiliser la même
forme d'énergie. Elles vont aller chercher celle qui est à
meilleur marché. Jusqu'à très récemment,
c'était l'électricité qui était à meilleur
marché, beaucoup moins coûteuse que l'huile, alors cela nous a
permis d'attirer certaines industries ici.
M. Joron: C'est-à-dire ce type d'industrie. Il y a des
types d'industrie qui ne peuvent pas se passer d'électricité.
M. Ciaccia: II y a certains types à qui il en faut, ils ne
peuvent pas s'en passer, mais je ne parle pas de ceux qui sont ici, qui ne
peuvent pas s'en passer; je parle de l'avantage pour l'industrie d'avoir un
coût d'énergie moindre, que ce soit l'électricité,
le gaz naturel ou l'huile, peu importe. Je sais que
l'électricité, d'après votre chiffre en page 22, c'est
encore meilleur marché que dans d'autres juridictions. Mais tenant
compte de tous les coûts, est-ce que cela peut avoir un effet? Est-ce que
vous avez fait des études à ce sujet?
M. Bisaillon (Jacques): Disons que la meilleure étude
c'est encore les contacts qu'on a quotidiennement, enfin toutes les semaines,
avec les grandes entreprises. Les gens qui font cette négociation font
partie de nos groupes de travail et on en tient lourdement compte quand on
pense augmenter le secteur industriel comme il est augmenté. Il reste
que ma conviction personnelle c'est qu'on continue à avoir l'avantage.
D'ailleurs, on a seulement à se référer à ce que
sont nos tarifs pour la grande puissance, la grande entreprise, comparativement
à ailleurs, et on a encore un avantage marqué. Tout ce qu'on
espère, c'est que ça puisse continuer.
D'un autre côté, il faut être réaliste avec ce
que ça nous coûte pour livrer cette puissance et ne pas encourager
le gaspillage pour rien non plus, y compris dans la grande entreprise.
M. Ciaccia: Est-ce que, d'après vous, cet avantage,
naturellement... les coûts des autres formes d'énergie, en
augmentant l'électricité des montants que vous les augmentez,
vous réduisez l'écart entre les deux.
M. Bisaillon (Jacques): Peut-être que la situation est
moins avantageuse qu'elle ne l'était il y a quelques années,
d'accord, comme il y a vingt ans, par exemple; mais elle existe encore. Il faut
aussi tenir compte des autres objectifs.
M. Joron: II est peut-être bon d'ajouter une chose.
Beaucoup d'entreprises quelquefois on participe à des discussions
semblables se soucient, ça vous surprendra peut-être, moins
du coût que de la disponibilité de l'énergie, d'être
assurées de pouvoir s'approvisionner en telle quantité pendant
une période suffisamment longue, ainsi de suite. Je pense qu'il est bon
de signaler que l'Hydro-Québec est une des rares utilités
publiques en Amérique du Nord qui peut garantir des approvisionnements.
Je ne parle pas de prix, seulement de la quantité, et c'est un facteur
très important chez les industriels.
M. Ciaccia: Vous n'avez pas le nombre des nouvelles industries
qui sont venues s'implanter, par exemple, au Québec, durant la
dernière année, à cause de cet aspect?
M. Joron: Cela, spécifiquement et uniquement à
cause de cela, c'est difficile à déterminer, même
l'entreprise elle-même ne le dirait probablement pas. Je peux vous donner
un exemple qui est arrivé au début de l'année
dernière, il y a un peu plus d'un an, avant même que les tarifs de
l'année passée soient décidés. C'est le cas de CIL
à Bécancour, qui, avant de procéder à la
deuxième phase de Bécancour II, un investissement d'une centaine
de millions de dollars, a voulu savoir, les tarifs n'étant pas
établis pour les années à venir, si les prévisions
que l'Hydro-Québec avait préalablement déposées en
commission parlementaire, l'année précédente, et qui
parlaient de hausse moyenne de 17% à 20% pendant trois ans, cela allait
être à peu près dans ce "range ", comme on dit. Ce qu'on a
pu lui confirmer, "give or take", comme on dit en anglais, une petite marge a
suffi à l'entreprise pour prendre sa décision et elle a
procédé à la construction de Bécancour II.
M. Raynauld: M. le Président, est-ce que je pourrais
continuer sur ce sujet, assez précisément?
Est-ce qu'il est exact que les ventes que vous faites à
l'extérieur peuvent être faites à des taux
inférieurs à ceux qui sont demandés ici? Quand on regarde
les recettes moyennes je sais que c'est une partie de la réponse
déjà pour les ventes excédentaires ou souscrites
hors Québec, c'est 7,8 mills le kilowatt-heure et, au Québec,
c'est $0.0188 pour le domestique et $0.0198 pour le commercial.
Je sais une partie de la réponse. Il s'agit de contrats qui ont
pu être pris auparavant, mais quant aux nouveaux, par exemple, est-ce que
c'est vendu effectivement moins cher ou plus cher?
M. Joron: Ce sont des livraisons à haute tension qu'on
doit comparer, non pas au tarif domestique qui est livré à basse
tension, mais au tarif industriel grande puissance. Ce n'est évidemment
pas livré au même voltage que...
M. Boyd: Ce sont surtout les ventes excédentaires,
lorsqu'on en a à notre disposition seulement. Les ventes à nos
abonnés, que ce soit aux grandes entreprises ou autrement, sont des
ventes fermes. Tandis que les ventes excédentaires, ce que l'on vend en
dehors de la province, c'est lorsque disponible.
M. Raynauld: Mais il existe des ventes excédentaires au
Québec, de l'énergie excédentaire au Québec
aussi.
M. Boyd: oui.
M. Raynauld: Comment cela se compare-t-il, pour les tarifs? Voici
la quesion que je pose, plus généralement: Est-ce que vous nous
dites que vous vendez aussi cher ou plus cher à l'extérieur du
Québec qu'au Québec, là où cela s'applique?
M. Bisaillon (Jacques): Je peux répondre à une
partie de la question. L'excédentaire lui-même, vraiment
l'excédentaire, l'eau qui pourrait passer de l'autre côté
du barrage, si on la laissait passer sans la vendre, on peut la vendre plus
cher à l'extérieur, de façon générale.
À l'intérieur, à l'interne, tout ce qu'on peut faire,
c'est de la brûler dans des chaudières, à la place de
l'huile. Il faut que notre prix soit un peu inférieur pour que cela leur
donne la chance de passer de l'huile lourde à
l'électricité. C'est un cas.
Pour ce qui est des autres cas, je n'ai pas les chiffres avec moi
actuellement.
M. Boyd: J'aimerais demander à M...
M. Joron: Pour ce qui concerne ces ventes excédentaires,
qui ne sont pas par contrats fermes, qui sont "take it or leave it" à
relativement court avis, nous avons demandé à
l'Hydro-Québec d'établir un programme de façon qu'un droit
de premier refus soit offert à des utilisateurs québécois
quand se produisent des excédents d'énergie à très
court terme. L'Hydro-Québec, si je comprends bien, est à
préparer un programme dans ce sens-là.
M. Boyd: Je voudrais demander à M. Cristel de vous donner
une autre partie de la réponse, concernant les ventes industrielles.
M. Cristel (Jean-Paul): Jean-Paul Cristel. Je pense que quand on
parle des ventes excédentaires au Québec, il s'agit de ventes
à des entreprises industrielles qui utilisent cette énergie dans
des bouilloires.
L'Hydro-Québec, selon ses disponibilités hydrauliques,
soit le niveau de l'eau dans ses barrages, peut offrir ou non, à ces
abonnés-là, cette énergie. Évidemment, eux vont
l'acheter s'ils y trouvent leur avantage. C'est-à-dire qu'on leur offre
cette énergie à 90% du prix qu'ils paient pour l'huile lourde.
Actuellement, cela se situe autour de six ou sept mills le kilowatt-heure, de
$0.006 ou $0.007 le kilowatt-heure pour l'énergie qu'on vend à
ces gens. Ils ont évidemment des bouilloires électriques et des
bouilloires au mazout et ils peuvent changer d'une bouilloire à l'autre,
selon la disponibilité d'énergie de l'Hydro-Québec.
Le prix de l'huile lourde a augmenté considérablement au
cours des dernières années, de sorte que ce qu'on réalise
aujourd'hui, c'est presque le double de ce qu'on réalisait il y a
quelques années. (15 h 45)
Si on parle des ventes excédentaires hors Québec, je ne
suis pas un expert là-dedans, mais je sais que les réseaux hors
Québec qui achètent l'énergie achètent cela en
partageant le bénéfice qui leur revient de ne pas utiliser des
ressources de production plus coûteuses. L'Hydro-Québec, quand
elle a des disponibilités et qu'elle exporte, va partager les profits
avec la compagnie qui achète du dehors du Québec.
Quand on vend de la puissance ferme, on a trois petits abonnés
aux États-Unis à qui l'on vend de la puissance ferme et cette
puissance est vendue au gros, à un prix qui est supérieur
à notre prix de détail au Québec. Je parle de Citizens
Utilities et de deux autres compagnies à qui on vend de petits montants
de puissance aux États-Unis. Leur prix est nettement supérieur
à celui du Québec.
Ce n'est pas la même sorte d'énergie qu'on vend, par
exemple, à l'abonné domestique ou à un abonné
industriel qui utilise l'énergie excédentaire. L'un s'en sert
quand on en a de disponible, l'autre a besoin de puissance ferme à
longueur d'année, selon ses besoins. Les prix apparaissent suivant les
caractéristiques de charge.
Comme l'expliquait M. Joron, on vend normalement de l'énergie aux
abonnés industriels. Quand on regarde le rapport annuel, à un
prix inférieur à celui de l'abonné domestique, parce
qu'ils la prennent à haute tension et, deuxièmement, leur facteur
d'utilisation annuel est généralement plus élevé,
c'est-à-dire que l'abonné domestique se situe rarement au-dessus
de 50%, tandis que l'abonné industriel aura souvent un facteur
d'utilisation de 80% et plus. Plus on utilise le service de production pendant
longtemps, plus le prix moyen décroît.
Je ne sais pas si cela répond à la question.
M. Raynauld: Je pense que oui. Je voudrais vous dire que ce qui a
peut-être donné lieu à cette question, c'est que j'ai vu,
dans les statistiques,
que 17% de l'énergie étaient vendus à
l'extérieur du Québec et que les recettes tirées de
l'extérieur étaient de 8%. Visiblement, en moyenne, vous la
vendez beaucoup moins cher à l'extérieur. D'après les
explications que vous avez données, c'est bien sûr que les prix
pour l'usage domestique et les prix pour l'usage industriel ne peuvent pas
être comparables. Si je comprends bien, c'est cela, la réponse
à cette question. Je pense que je suis prêt à
l'accepter.
Une deuxième question un peu générale
également. Quand on en arrive, avec d'autres parties du Canada, ou des
États-Unis, aux comparaisons des prix d'électricité,
à la page 19 du résumé du mémoire, je
n'étais pas sûr à qui s'appliquaient ces prix, l'usage
domestique était indiqué, d'une part. Ce sont les tarifs en
vigueur au 1er mars 1978. Bien sûr, cela n'incorpore pas les hausses
demandées. Vous allez me dire que vous ne savez pas non plus quelles
vont être les hausses ailleurs. Ma question était: Quelle est la
catégorie la plus réaliste?
M. Boyd: C'est 1000.
M. Raynauld: J'ai vu que la moyenne de consommation est de 12 000
par an. Donc, c'est 1000 par mois. Maintenant, c'est une moyenne. Je voulais
savoir s'il n'y avait pas d'autres mesures plus adéquates que
celle-là, que la moyenne. Il doit y avoir des écarts très
grands là-dedans. Je voulais savoir si c'était bien
celle-là que vous prendriez comme principal point de comparaison.
M. Joron:... vous avez les deux tiers estimés à
1000 ou moins.
M. Boyd: C'est 1000 qui a été employé comme
comparaison habituellement, parce que c'est la charge moyenne ou la
consommation moyenne de nos abonnés.
M. Raynauld: Est-ce que cela comprend également
l'augmentation de 1978, ces comparaisons? Elles sont au 1er mars 1978?
M. Bisaillon (Jacques): C'est cela, oui.
M. Raynauld: Cela incorpore l'augmentation de l'année
dernière.
M. Bisaillon (Jacques): C'est encore beau de les avoir aussi
près que cela, sans avoir à faire toute une tournée pour
avoir ces renseignements et les avoir doublement sûrs.
M. Raynauld: Je suppose.
M. Boyd: Les augmentations dataient du 1er janvier 1978. Donc,
elles sont dans ces tarifs.
M. Bisaillon (Jacques): II y a eu des hausses depuis ce temps
à Charlottetown, à Halifax et à Moncton.
M. Raynauld: L'année passée, évidemment, les
factures pour usage domestique ont monté assez peu, 7% avez-vous dit
tout à l'heure. Cette année, ce qui est prévu, c'est une
hausse beaucoup plus forte.
M. Joron: Non. En moyenne, dans la catégorie domestique,
l'an passé, c'était 17%. Comme on a introduit le tarif progressif
pour la première fois l'année dernière, avec un point de
différence qui était de 900 kilowatts par mois, pour celui qui
était à 1000 ou à 900, par exemple, la hausse moyenne que
l'abonné moyen a subie l'an passé, est d'environ 12%, mais pour
l'ensemble de la catégorie domestique, parce que, dans les
dernières tranches, ceux qui consomment beaucoup, cela devenait plus
cher, c'était de 17%. C'est cela?
M. Bisaillon (Jacques): C'est cela, oui.
M. Raynauld: J'ai compris 7%.
M. Joron: Non, il manquait un 1, 17%.
M. Raynauld: C'était 17%. Ah bon! Excusez. Si c'est 17%,
la comparaison avec l'année prochaine va être à peu
près du même ordre de grandeur, ce qui est prévu pour
l'usage domestique. Avec ces hausses de 1978, avec les hausses prévues,
évidemment, vous n'avez pas d'idée dans quelle mesure on rattrape
les autres ou est-ce que vous en avez une idée?
M. Bisaillon (Jacques): Disons qu'on a une petite idée de
ce qui s'en vient à l'horizon. Pour 1978, on a des hausses un peu
partout. Il y en a où ce n'est pas encore décidé,
évidemment. Il y en a d'autres où c'est le secret des dieux. Par
exemple, en Nouvelle-Écosse, en 1978, on s'attend à une hausse de
16% à 18%, après en avoir eu une de 43% en 1977.
À Terre-Neuve, on parle en termes de 17,8%, plus la clause qui
est indexée au coût du combustible. Au Nouveau-Brunswick, on parle
en termes de 9,9% et de 8,7%, mais après des hausses de 16,6% et 17,5%
l'an passé, selon les endroits. En Ontario, c'est plus faible en 1978,
pour toutes sortes de raisons, mais, par contre, l'an passé, cela
oscillait entre 25% et 30%. Au Manitoba, c'est 15%: 15%, l'an passé et
15% cette année. Winnipeg avait 17% l'an passé, au lieu de 15%.
En Saskatchewan, la Saskatchewan Power Corporation a 20% pour Saskatoon. Cette
année, elle ne pense cependant pas avoir de hausse. En Alberta, à
la Calgary Power, qui est la grosse compagnie, l'an passé, ce fut 14,8%;
cette année, c'est 15,6%. À la B.C. Hydro, c'est 12,1% l'an
passé, et 13% à 14% cette année. Comme vous voyez, c'est
un peu la même chose pour tout le monde.
M. Ciaccia: Je voudrais simplement ajouter une question, M. le
Président.
Le Président (M. Dussault): Une petite question, M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Auparavant, on parlait d'usage industriel et on avait
fait référence au coût de l'énergie. Votre
réponse était que c'était encore plus avantageux. Il y a
certaines industries et certains consommateurs qui doivent absolument utiliser
l'électricité. Si on reste dans le domaine domestique, par
exemple, il est évident que, pour l'éclairage et les usages de ce
genre, il faut absolument utiliser l'électricité. Quant à
la question d'utiliser l'électricité pour le chauffage, vous avez
donné un nombre d'abonnés qui font la substitution toutes les
années. Je pense que votre position, c'est que
l'électricité coûte encore moins cher que l'huile
aujourd'hui, même après... Est-ce ça?
M. Bisaillon (Jacques): Oui, encore.
M. Ciaccia: Elle coûte encore moins, à l'heure
actuelle.
M. Bisaillon (Jacques): Oui.
M. Ciaccia: II y a des calculs qui contestent ça et,
franchement, je pense que ce serait l'intérêt de tout le monde de
savoir exactement les vrais chiffres, parce que si, vraiment, ça
coûte moins cher de chauffer à l'huile pour fins domestiques,
ça pourrait réduire les substitutions et ça pourrait
peut-être entrer dans votre planification et plus dans vos objectifs.
Si vous prenez l'efficacité, à quel pourcentage le
faites-vous, quand vous traduisez, par exemple, le BTU produit par
l'électricité, un kilowatt-heure d'électricité et
le BTU produit par l'huile? Comment faites-vous vos calculs?
M. Bisaillon (Jacques): On va trouver le chiffre pour les
efficacités. C'est 60% pour l'huile, je ne me souviens plus si
c'était 60% ou 62,5%, c'est 60%.
M. Ciaccia: C'est ça.
M. Bisaillon (Jacques): C'est réaliste.
M. Ciaccia: II y a des calculs qui contestent ce chiffre.
M. Bisaillon (Jacques): Oui, d'accord, mais je pense que c'est
réaliste, parce que, vous savez, quand on prend seulement l'hiver, quand
la chaudière fonctionne à plein, peut-être que
l'efficacité est meilleure, mais, le printemps, vous savez, ça
part, ça monte, ça descend, ça arrête, et c'est un
petit peu moins efficace, dans l'ensemble, les chiffres qu'on a obtenus
60% on pense que c'est bon.
M. Ciaccia: J'ai un tableau ici qui donne la qualité de la
performance, qui commence à excellent. Naturellement, il y aurait une
efficacité de 83 à 90% et là, ils disent que c'est
très rare d'en arriver à cette efficacité, mais quand on
descend à une performance inacceptable, à 61%, ces calculs ici,
ces commentaires disent la même chose à l'effet que c'est
très rare aussi à 60% et ils établissent la moyenne
d'efficacité, pour les nouveaux systèmes, entre 76% et 82% et de
72% à 80% et cela peut être réduit à 74%. Alors, si
on prend un facteur d'efficacité de 70% ou de 75%, je pense que c'est
une question mathématique on ne le fera pas ici parce qu'on
n'aura pas le temps que l'huile va être moins chère. Vous
me donnez une opinion basée sur 60% j'ai des chiffres ici de
l'industrie qui m'indiquent que c'est 75%. Comment pourrait-on établir
les vrais chiffres? Parce que je crois que, spécialement avec le
coût élevé de la production d'électricité
quand on parle de milliards et de milliards et si on s'en tient
au facteur économique, c'est-à-dire que si
l'électricité coûte tellement cher que cela et qu'il nous
faut $2 milliards, essayons de décourager la substitution, si c'est
moins cher d'utiliser l'huile et, entre parenthèses,
peut-être vais-je contester les prémisses du livre blanc qui
disent qu'on n'aura plus d'huile en 1983. On n'entrera pas dans ce
débat.
M. Joron: On ne dit pas cela.
M. Ciaccia: Supposons qu'il y a de l'huile et du gaz naturel et
que le prix est tel quel et que même, il y a un surplus de gaz naturel et
un surplus d'huile aujourd'hui sur le marché. Comment pouvons-nous,
vraiment, pour informer le public, parce qu'on n'est pas plus
intéressés que les autres à falsifier les chiffres,
arriver à obtenir le vrai taux d'efficacité entre celui que vous
nous donnez, 61% et les autres chiffres qui sont réclamés par
d'autres facteurs à 75%?
M. Cristel: Notre position là-dessus est la suivante:
Quand vous parlez de 75%, vous avez raison et nous croyons que lorsque nous
parlons de 60% ou de 61%, nous avons raison aussi. Disons qu'au milieu de
l'hiver la fournaise à l'huile ou au gaz fonctionne à plein
rendement les jours sont très froids vous rejoignez une
efficacité qui voisine les 75%. Quand on parle de 60%, on parle de la
moyenne de l'efficacité annuelle. À ce temps-ci de l'année
et au printemps, la fournaise fonctionne très occasionnellement, de
sorte que vous partez d'une fournaise froide, vous injectez du mazout dedans et
l'efficacité à ce moment s'établit bien en bas de 60%.
Alors, si on prend l'efficacité annuelle parce que si vous
regardez la distribution des degrés-jour à partir du mois de
septembre jusqu'au mois d'avril, vous constatez qu'évidemment les
principaux mois de chauffage sont décembre, janvier, février,
mais qu'il y a quand même une consommation importante si on additionne
les mois de septembre, octobre, novembre et ensuite mars et avril on en
arrive aux chiffres qu'on vous a donnés et cela semble vérifier
les estimations qui sont faites chez les abonnés qui ont converti leur
système parce qu'ici vous parlez d'un système neuf, mais quand on
parle de la moyenne des installations aussi, le système ne reste pas
neuf longtemps. (16 heures)
Évidemment, il s'encrasse rapidement et l'efficacité
diminue rapidement. Alors, nous maintenons que l'efficacité moyenne
annuelle est de l'ordre de 60% et les chiffres semblent confirmer ces
énoncés, même s'il est possible, théoriquement,
comme vous dites, d'arriver à 75% pour une installation neuve dans la
période d'hiver.
M. Ciaccia: Justement, le chiffre de 75%, ce n'était pas
seulement pour le neuf. De 1965 à 1975, d'après ces chiffres...
C'était la moyenne aussi pour 1965 à 1970 pour les vieux
systèmes et c'était une moyenne non seulement durant l'hiver,
mais à longueur d'année, ce qui ferait une assez grande
différence dans les calculs.
M. Joron: Si M. le député de Mont-Royal me le
permet, parce qu'il a mis en doute l'opportunité de la substitution,
dans un sens, en' partant des prix comparatifs des formes d'énergie, on
vient d'en parler, je ne veux pas poursuivre inutilement ce débat, mais
vous savez que, dans le passé, les consommateurs... Pourquoi y a-t-il
une substitution en faveur de l'électricité, qui a d'ailleurs
commencé longtemps avant l'existence d'une politique
énergétique québécoise? Cela a-vait commencé
avant nous. Pourquoi les consommateurs, même à une certaine
époque, acceptaient-ils de payer une prime pour
l'électricité? C'est parce qu'ils y voyaient des avantages de
propreté, de sécurité, de versatilité aussi pour
contrôler...
M. Ciaccia: Ils pouvaient se permettre une prime à ce
moment-là.
M. Joron: L'électricité était quand
même nettement plus chère, à ce moment-là, que les
autres formes de chauffage, mais ils acceptaient quand même le chauffage
électrique, dans une proportion moins grande que celle d'aujourd'hui,
mais ils acceptaient quand même de payer une prime pour ces
qualités-là. Non seulement, aujourd'hui, les qualités
supérieures de l'électricité sont encore là, mais
le prix est à peu près égal. Pourquoi
privilégions-nous, dans le livre blanc, dans la politique
énergétique, ce mouvement? C'est qu'en plus, non seulement c'est
à l'avantage du consommateur, mais, à long terme, il y a une
sécurité des approvisionnements qui est bien meilleure que celle
obtenue dans le cas de formes d'énergies non renouvelables, d'où
qu'elles viennent, d'une part. Troisièmement, le développement
hydroélectrique provoque, vous le savez, des retombées
économiques au Québec, cela fait travailler du monde, cela
provoque un entraînement de l'économie que l'achat d'hydrocarbure,
que ce soit le gaz ou le pétrole, à l'extérieur, ne
provoque pas et cela améliore également le solde des comptes
extérieurs du Québec.
M. Ciaccia: On entre dans un autre débat.
M. Joron: Ce sont cinq bonne raisons pour le chauffage
électrique.
Le Président (M. Dussault): M. le député
de... Excusez-moi, M. Boyd.
M. Boyd: J'ai commencé tout à l'heure à
donner une réponse à une question qui a été
posée concernant l'énergie excédentaire vendue en bloc
hors Québec. On m'a demandé les prix, j'attendais la
réponse. Nous avons Con. Edison, le prix moyen en 1978 est de 14 mills
pour de l'énergie excédentaire hors Québec; PASNY, c'est
15; le Nouveau-Brunswick, c'est 12; l'Hydro-Ontario, c'est 7,8, mais cela va
augmenter; une autre partie de l'Hydro-Ontario, c'est 11,2. Les ventes
excédentaires industrielles sont à 5,9 au Québec et on a
des ventes excédentaires en bloc au Québec comparativement aux
ventes excédentaires en bloc hors Québec dont je vous parlais
tout à l'heure, 14, 15, 12 qui sont à 6 dans un cas et à
6,7 dans l'autre cas, pour des bouilloires. Donc, on vend moins cher ces
énergies excédentaires en bloc chez nous. En fait, c'est presque
le double lorsqu'on les vend à l'extérieur.
Le Président (M. Dussault): M. le député de
Richmond.
M. Brochu: Merci, M. le Président. J'aurais quelques
questions également, tout d'abord, en ce qui concerne l'étalement
de la tarification de l'année dernière et l'Hydro-Québec
avait fait sa demande de tarification sur trois ans. On sait que le ministre,
à ce moment-là, avait refusé en alléguant qu'il
attendait la parution de son livre blanc sur l'énergie afin de statuer
définitivement sur cette question. Maintenant, l'Hydro-Québec
revient cette année avec la même demande de tarification
répartie sur trois ans. Lorsque je regarde le résumé du
mémoire que nous a soumis M. Boyd, à la page 3, par exemple, on y
parle des conditions de plus en plus sévères du côté
du financement. On parle d'une hausse du taux d'intérêt qui
affectera directement l'Hydro-Québec évidemment. En
réponse à d'autres questions qui lui ont été
posées, M. Boyd a fait état de la faiblesse du dollar canadien
qui amène certains problèmes et qui est un facteur de fluctuation
important. On peut ajouter à ça les fluctuations du taux
d'inflation et quelques autres facteurs également.
Ce qui m'amène à la réflexion suivante et à
la question suivante: Est-ce qu'en demandant une tarification répartie
sur trois ans, comme vous le faites actuellement, l'Hydro-Québec, en
quelque sorte, ne figerait pas un peu trop le corridor de sa marge de maoeuvre,
de sorte que si l'un ou l'autre des facteurs en cause ou quelques-uns des
facteurs en cause devaient fluctuer de façon plus grande que
prévu, à ce moment-là, on soit à l'étroit
à l'intérieur du corridor qu'on s'est fixé, soit dans un
sens ou dans l'autre? Quelle a été votre approche en ce qui
concerne cette volonté d'obtenir quand même une tarification
répartie sur trois ans, alors que tous ces facteurs sont devant nous
comme possibilité?
M. Boyd: Ce sont, comme on a dit hier, des hypothèses.
Mais ce sont les plus plausibles qu'on puisse envisager et il y a des raisons
pour lesquelles on veut quand même avoir des augmentations
réparties sur trois ans, c'est pour que l'abonné qui a à
se décider pour une source d'énergie ou une autre sache où
il s'en va; au lieu de l'avoir annuellement, cette prévision, il l'a sur
une période plus étalée. C'est très important
vis-à-vis des gens qui vont acheter nos obligations pour qu'ils aient
une meilleure vue de nos possibilités de financement ou
d'autofinancement.
Ce sont les deux principales raisons: pour que nos abonnés
sachent où on s'en va et pour que nos acheteurs d'obligations soient
mieux renseignés sur nos capacités.
M. Brochu: Est-ce que vous avez gardé, à
l'intérieur de ce corridor, une marge en surplus de manoeuvre pour la
variation des facteurs possibles? Autrement dit, est-ce que vous en demandez
plus pour faire face à ces facteurs, qui sont quand même
présents et en même temps, pour assurer les deux objectifs que
vous nous décrivez?
M. Boyd: Ce qui peut arriver c'est déjà
arrivé c'est qu'on espérait s'autofinancer à 30%,
comme cette année, on espérait s'autofinancer davantage et je
pense que ça revient à 24%. Par contre, si on avait eu une
année plus fructueuse, à différents points de vue, si on
n'avait pas eu le problème du dollar américain et certaines
ventes qui ne sont pas apparues, on aurait eu 30%. Ce qui va changer, c'est
qu'on peut avoir un peu plus que ce qu'on espère comme autofinancement,
ou un peu moins. Mais le mieux qu'on puisse faire, c'est de prévoir,
avec les hypothèses les plus plausibles, espérant qu'elles se
réaliseront; si elles ne se réalisent pas, vous allez avoir ces
changements par rapport à nos prévisions, qui devront être
corrigés en cours de route.
Je pense qu'il y a avantage à ce qu'au point de vue
énergétique, les gens sachent ce qui les attend, au point de vue
résidentiel, mais aussi au point de vue petite, moyenne et grande
entreprise.
M. Brochu: Est-ce à dire qu'à ce moment-là
il ne serait pas possible, dans le courant des deux ou trois prochaines
années, face à des situations particulières, qu'on soit
obligé, d'une façon ou l'autre, d'augmenter plus que prévu
les tarifs?
M. Boyd: Je ne le crois pas. Évidemment, qui peut
prévoir si tôt que ça, mais on ne le croit pas. On a eu
dans le passé des cas où les prévisions ne se sont pas
réalisées. On a quand même pu passer à travers, soit
en empruntant un peu plus ou un peu moins.
M. Brochu: J'aimerais reprendre un problème qu'on a
abordé également l'année dernière, au sujet duquel
j'avais posé, à quelques reprises, des questions au ministre
à l'Assemblée nationale. C'est le problème du mode de
facturation, à l'Hydro-Québec.
On sait qu'il y a eu des plaintes assez nombreuses sur cette
façon de procéder, d'abord de faire parvenir l'estimation, etc.
On avait dit, l'année dernière, qu'on ferait l'impossible pour
essayer d'apporter les corrections à ces situations. Lors des questions
que j'avais posées à l'Assemblée nationale, le ministre
m'avait indiqué que les corrections étaient amorcées; mais
il s'avère maintenant, d'après les dernières informations
qu'on a, qu'il demeure certains problèmes assez importants à cet
égard.
J'aimerais avoir certaines précisions à savoir où
est rendue la normalisation du mode de facturation à
l'Hydro-Québec et quand peut-on espérer en arriver à
compléter cette uniformisation dans le mode de facturation.
M. Boyd: M. Cristel
M. Cristel: Pour ce qui concerne les pratiques commerciales, nous
avons tenté, en premier lieu, d'éviter, autant que possible, dans
les endroits urbains, des factures quadrimestrielles. Nous sommes donc revenus,
dans les endroits comme Montréal métropolitain ou Québec
métropolitain, à la facture bimestrielle. Ensuite, nous avons
fait un effort pour améliorer la qualité de la relève et
aussi encourager les abonnés à utiliser les cartes
d'au-torelève. Un effort a été fait de ce
côté-là.
Troisièmement, pour ce qui concerne l'amélioration, vous
savez qu'au 1er avril, on a instauré la majoration de 1,5% au lieu du
10% sur les factures non payées. Il se fait également un effort
actuellement, pour améliorer la compréhension de la facture. Avec
l'énoncé du tarif qui permet un calcul journalier, nous
espérons, au début de l'année, produire une facture qui
contiendra, pour les abonnés domestiques, au verso, une explication du
tarif et, aussitôt que l'informatique pourra le réaliser,
possiblement, un calcul détaillé de la facture sur la facture
elle-même.
Ce sont certaines mesures qui ont été prises pour
faciliter la compréhension de la facture chez l'abonné domestique
et aussi pour assurer une qualité de relevé supérieure
à ce qu'on avait.
M. Brochu: Dans ce travail que vous avez effectué, est-ce
que vous prévoyez que les problèmes qui nous sont soulevés
à l'occasion, pour ce qui concerne ce fameux mode de tarification, vont
connaître une fin dans un délai relativement rapproché?
Est-ce que vous vous êtes fixé certains échéanciers
quant à la normalisation de ce mode de facturation?
M. Cristel: Ce serait très prétentieux de vous le
dire je parle personnellement mais quand on émet, à
l'Hydro-Québec, environ 15 millions de factures par année, dire
qu'il n'y aura pas d'erreur dans ces factures-là, surtout quand on se
rappelle les événements de 1976... On ne sait pas ce qui va se
produire à la fin de 1978. On espère que les mêmes
événements ne se reproduiront pas.
Mais je pense que le niveau de qualité de la facture devrait
augmenter avec les mesures qui
ont été prises. Aussi, il ne faut pas oublier non plus que
l'Hydro-Québec est en train de concevoir un nouveau système de
gestion des abonnements. Elle est au travail depuis 1972, en fait, avec ce
projet, mais cela prend du temps. Ce projet de nouveau système de
gestion de l'abonnement sera implanté au cours de la première
moitié de 1979. Graduellement, le nouveau système remplacera les
deux systèmes actuels, un qui était l'ancien système de
l'Hydro-Québec, le système métropolitain, et celui qui
était l'ancien système des filiales, le système
centralisé.
L'implantation de ce système prendra quand même une couple
d'années. Pendant un bon bout de temps, l'Hydro-Québec aura
effectivement trois systèmes de facturation. Vous ne pouvez pas
éviter... ce serait malhonnête de ma part de vous dire qu'on
n'aura pas de problème avec trois systèmes de facturation, mais
on espère; quand le nouveau système sera implanté
et je répète que cela prendra probablement une couple
d'années on aura franchi toute une étape.
Il faut quand même envisager quelques années.
M. Boyd: Pouvez-vous expliquer un peu le nouveau système?
(16 h 15)
M. Cristel: Le nouveau système comportera certaines
facilités qu'on a commencé à implanter sur les
systèmes existants, pour que nos 300 représentants qui
reçoivent les demandes des abonnés... Vous savez qu'annuellement
on reçoit environ 2 millions de communications des abonnés dont,
je crois, 8% se font par appels téléphoniques, 6% par
correspondance et les autres 6% sont des abonnés qui viennent nous
visiter aux 49 bureaux d'affaires que nous avons. Ces 2 millions de contacts,
ce ne sont évidemment pas des plaintes comme telles, mais, à 40%,
des demandes concernant la facture, des informations au sujet de
déménagements, etc. Nous sommes actuellement en train d'implanter
dans les secteurs des régions un système d'interrogations par
affichage qui a été effectivement implanté dans la
région du Saint-Laurent, c'est-à-dire l'île de
Montréal, l'an dernier. Ainsi, nos représentants utilisent des
écrans cathodiques pour appeler le dossier de l'abonné, ce qui
augmente la qualité du service à ce moment-là et leur
donne, n'est-ce pas, un meilleur outil de travail.
Également, à la suite des événements de 1976
auxquels je me référais tantôt, je ne dirais pas tous nos
représentants, mais la grande majorité de nos
représentants au service à la clientèle dans les secteurs
ont reçu une formation qui s'appelle "Communications
clients-représentant" qui devrait évidemment les aider à
mieux accomplir leur travail.
Avec ces mesures, plus actuellement un profil de connaissances qui veut
inventorier leurs connaissances pour ériger des programmes futurs de
formation, nous croyons que les outils que nous leur avons mis en main, plus
ces cours de formation, devraient aider à améliorer le service
à la clientèle.
M. Brochu: D'accord, cela va sur ce point. J'aurais un autre
élément sur lequel j'aimerais parler quelque peu, c'est sur la
question du rôle que joue l'Hydro-Québec dans l'économie du
Québec. On sait que l'Hydro-Québec, par sa présence,
assure un roulement économique important. On sait que
l'Hydro-Québec est génératrice d'emplois. On sait que sa
présence dans l'économie québécoise est tout
à fait importante. On sait que, du côté de sa politique
d'achats également, l'Hydro-Québec a fait un effort remarquable.
C'est, je pense, la société d'État à l'avant-garde.
C'est elle qui a la plus grande participation par sa politique d'achats. C'est
sûr qu'il y a toujours de la place pour de l'amélioration.
L'Hydro-Québec est la première, je pense, dans ce domaine, quand
on parle de politique d'achats chez nous.
Il m'apparaît qu'il y aurait peut-être certains secteurs qui
pourraient être améliorés en particulier, à
l'Hydro-Québec, et qui pourraient peut-être davantage devenir un
facteur de développement indutriel. Je fais référence
à ce moment à toute la question industrielle
manufacturière.
Le Président (M. Dussault): M. le député de
Richmond, je suis un peu mal à l'aise de vous interrompre. J'essayais de
voir le lien avec les tarifs et je ne le vois pas encore.
M. Brochu: J'y arrive.
Le Président (M. Brochu): Ah bon! d'accord.
M. Brochu: Si votre patience peut s'exercer encore quelques
instants...
Le Président (M. Brochu): Je vais essayer, M. le
député, allez-y.
M. Brochu: C'est que, l'année dernière, certaines
revendications avaient été portées à notre
attention par l'Association des manufacturiers canadiens. En particulier, un
mémoire nous avait été adressé pour ce qui concerne
les coûts de l'électricité par cette association dans le
secteur de La Mauricie, entre autres.
On rappelait, dans ce document je pense que l'Hydro-Québec
en a eu copie également que les objectifs fondamentaux de
l'Hydro-Québec au point de départ allaient dans le sens de faire
de l'énergie hydroélectrique un pilier de base du
développement industriel au Québec. On disait qu'à
l'époque où toute cette machine s'est mise en marche on
favorisait l'implantation d'usines près des centrales pour deux raisons
principales, soit d'abord de diminuer les coûts de transport
d'électricité et, deuxièmement, favoriser le
développement des différentes régions.
Vous me permettrez de citer un paragraphe du document ici qui demande
dans quelle position on se retrouve maintenant: "L'Hydro-Québec, de par
ses règlements, a des tarifs uniformes à travers la province, ce
qui ne peut plus favoriser le développement industriel des
différentes régions du Québec. L'industrie aurait donc
tendance à
s'éloigner de certaines régions comme la nôtre et
à se rapprocher des marchés". À toutes fins utiles
à ce moment-là, si elle était plus proche des
marchés, ayant l'électricité aux mêmes coûts
que dans les régions éloignées de grands centres comme
Montréal ou les autres, évidemment, au choix, l'industrie
s'implanterait dans une région comme Montréal ou ces grands
centres.
On dit plus loin: Que fait-on, par exemple, du facteur régional
des taux préférentiels aux industries qui s'implantaient
près des barrages pour diminuer les coûts de transport de
l'électricité, et ainsi favoriser le développement des
régions comme celle de la Mauricie. Je vous rappelle, d'ailleurs, vous
le savez encore mieux que moi, que dans le contexte du développement
hydroélectrique, plusieurs entreprises, justement, ont pu
bénéficier de ces taux préférentiels ou de certains
avantages que la société énergétique leur
procurait, permettant ainsi en même temps un double objectif: d'une part,
de créer de l'emploi et de permettre à des entreprises de
s'installer; d'autre part, de décentraliser les opérations
industrielles au Québec. Je pense qu'il conviendrait de rappeler
l'importance de cette situation et de demander maintenant à
l'Hydro-Québec et au ministre également quelles sont leurs
intentions face à ces problèmes.
Je comprends que l'Hydro-Québec a d'abord comme priorité
de répondre aux besoins, mais si en même temps,
l'Hydro-Québec peut se donner cette vocation de devenir un facteur
industriel encore plus important, je pense qu'il vaut la peine qu'on lui
accorde attention et qu'on indique dans quelle mesure on peut répondre
à la préoccupation de ces manufacturiers, ces associations qui
auraient besoin de soutien. On parle, de façon générale,
de la part du gouvernement, d'acquérir des entreprises, même de
nationaliser, d'emprunter pour nationaliser. À plus forte raison,
comment devrions-nous trouver les moyens, à même peut-être
nos sociétés d'État existantes, de favoriser le maintien
de nos petites et moyennes entreprises dans le domaine manufacturier et
industriel?
M. Boyd: Nous devons aller dans un contexte bien
différent, car la Mauricie a été développée
grâce à ses centrales. C'était dans un contexte
d'entreprise privée où souvent, la compagnie productrice
d'électricité était intéressée
personnellement ou financièrement par l'entreprise qui se
développait. C'était ce contexte. Évidemment, pendant
cette même période, il y a des endroits au Québec où
on payait peut-être trois, quatre, cinq ou six fois plus cher
l'électricité que dans la région de la Mauricie. Le but de
la nationalisation, en 1963, a été de rendre autant que possible
le service à tout le monde au Québec et à des conditions
identiques. C'est évidemment ce qui a été fait. On a dit
hier, dans l'historique, qu'il y avait au-delà de 85 tarifs qui
étaient disparus, etc., mais on ne peut pas faire en même temps
deux choses contraires. On a permis aux gens de la Gaspésie d'avoir de
l'électricité à des taux acceptables, aux mêmes taux
que partout ailleurs. On a fait des conversions de fréquence en Abitibi,
etc., c'est-à-dire qu'on a traité tous les
Québécois d'une façon égale et équitable.
À ce moment, il faut que chaque groupe de clients contribue le plus
équitablement possible au prix de revient de l'électricité
qu'il achète. Je comprends qu'il est important que l'Hydro-Québec
joue son rôle dans le développement industriel, et comme vous le
dites, on l'a fait depuis 1962 d'une façon importante par notre
programme d'achats.
D'un autre côté, il est très difficile pour nous de
vouloir être le distributeur de largesses envers certaines industries
plutôt que d'autres, parce qu'on ne pense pas que ce soit notre
rôle. De plus en plus, avec l'accord des différents gouvernement
qui se sont succédé, on a plutôt fait des efforts pour
avoir des tarifs de plus en plus normalisés pour les différents
types d'industries. Nous pensons qu'il revient au gouvernement de
décider si telle industrie doit être favorisée dans tel ou
tel secteur. C'est au gouvernement de décider de quelle façon cet
encouragement doit être fait, et non pas à l'Hydro-Québec,
ce qui pourrait des fois être arbitraire, en donnant plutôt
à un endroit qu'à un autre.
M. Joron: Si M. le Président le permet, il y a une petite
partie de la question qui s'adressait à moi. Je voudrais seulement
compléter.
Comme l'a signalé M. Boyd, il faut bien comprendre que
l'uniformisation des tarifs, qui a été une des
conséquences de la nationalisation de 1963, a eu pour effet, globalement
ce n'est peut-être pas vrai dans un cas particulier dans telle ou
telle région de faire baisser les prix de
l'électricité dans l'ensemble des régions du Québec
par opposition à Montréal. Cela a été un premier
pas qui a été bénéfique aux régions.
D'autre part, il reste encore un avantage régional dans un sens,
même si le tarif est uniforme à travers le Québec, qui
favorise le développement industriel régional si on ne le relie
pas directement à l'électricité, c'est que toutes les
autres formes d'énergie, à l'exception de
l'électricité, sont plus chères en régions
qu'à Montréal. Il y a déjà un avantage à se
tourner vers l'électricité en régions.
M. Brochu: Seulement une parenthèse. Quand vous parlez
strictement, par exemple, du domaine de la métallurgie, on estime, je
pense, que le produit fini comporte dans son coût 20% en
énergie...
M. Joron: Oui, c'est peut-être le cas.
M. Brochu: ... et, à ce moment-là, ce serait donc
un facteur de première importance dans leur choix.
M. Joron: Oui, c'est évident. Si l'Alcan est au Saguenay,
on sait pourquoi. L'Hydro-Québec contribue aussi au développement
régional d'une façon très directe sinon comme promoteur
d'expansion industrielle au sens de développement
régional, tout au moins dans les différents travaux... Je
pense à tout ce qui s'est passé sur la Côte-Nord, par
exemple, ce qui se passe dans le Nord-Ouest à l'heure actuelle et ce qui
va se passer finalement, à tour de rôle, dans presque toutes les
régions du Québec. Il y a une contribution au
développement régional, mais comme M. Boyd, je pense aussi que ce
n'est pas la responsabilité première de l'Hydro-Québec
d'élaborer des politiques de développement régional au
sens large. Cela, c'est la responsabilité du gouvernement par toutes
sortes de moyens, différents programmes, mais je ne pense pas que ce
soit à travers les prix de l'électricité qu'on puisse
bâtir l'ossature d'une véritable politique de développement
régional en faveur des régions; c'est par bien d'autres mesures
qui dépassent les sujets de discussion de cette commission.
M. Boyd: M. le Président, j'aimerais ajouter quelque chose
ici.
J'ai ici le rôle que joue l'électricité dans la
production industrielle justement pour les grands consommateurs
d'électricité. Exprimé en pourcentages dans le prix de
vente des produits en 1977, les abrasifs, c'est 17,7%; les pâtes et
papiers papier journal c'est 5,8%; l'aluminium en lingots, c'est
11,3%; le cuivre en lingots, c'est 2,2%; le zinc en lingots, c'est 4,5% et le
ciment, c'est 4,2%.
C'est évidemment un facteur, mais qu'on donne un escompte de 10%
même sur 17%, ce n'est pas ça qui va nécessairement faire
que l'industrie va s'implanter ou ne s'implantera pas.
M. Brochu: Au point de départ, en ce qui concerne
l'uniformisation des tarifs dans le secteur domestique, comme dans le secteur
commercial, il semble, d'après les données qu'on a, que c'est
sûr, c'est certain que c'est souhaitable. Par contre, lorsqu'on tombe
strictement dans le domaine industriel, les données qui nous sont
fournies par les entreprises, elles, semblent indiquer que même si ce
n'est pas l'élément majeur de leur santé
économique, dans le contexte actuel, on nous souligne l'importance de
l'intervention du gouvernement à ce chapitre-là pour leur
permettre peut-être de respirer davantage, parce que je ne vous cacherai
pas et ce n'est pas un secret pour personne, que les entreprises actuellement
ont à naviguer dans des eaux qui sont parfois difficiles et ça y
va pour l'ensemble de notre économie. Je comprends que ce n'est pas la
décision de l'Hy-dro-Québec de dire: On va faire
bénéficier de nos largesses telle ou telle entreprise. Cela doit
être une décision gouvernementale dans un contexte beaucoup plus
large que celui-là. Mais je me dis: Si on est prêt à
déployer des grands efforts pour nationaliser les entreprises dans des
aventures je le souligne avec deux traits comme celle de
l'amiante, par exemple, à combien plus forte raison ne devrait-on pas
mettre en place tous les facteurs pour soutenir les domaines déjà
existants, même si ces facteurs ne sont pas des facteurs dominants pour
l'existence ou non de l'entreprise, mais leur permettent une meilleure
santé économique qui, par le fait même, assure les emplois
dont on a tellement besoin et soutient nos régions.
C'est dans ce sens-là que je délaisse peut-être M.
Boyd, à moins qu'il ait d'autres commentaires à faire à ce
sujet-là, et que je me retourne davantage vers le ministre, à ce
chapitre-là, en disant, M. le Président: Le ministre ne doit pas
attendre une solution globale à l'ensemble des problèmes
économiques du Québec, mais dans son secteur à lui, comme
d'autres ministres dans leur secteur respectif, il peut peut-être trouver
les ajustements qui, même s'ils ne sont pas la clé de tout le
système économique, peuvent dans une certaine mesure, influencer
pour permettre une économie plus saine au niveau des entreprises. (16 h
30)
Je me dis que, dans ce sens, d'après les informations qui nous
sont transmises et les demandes répétées qui nous sont
faites par les entreprises, par les manufacturiers, peut-être que, si on
envisageait de donner un peu plus de corde, de donner un peu plus de
possibilités de respirer du côté des entreprises en ce qui
concerne les taux préférentiels d'électricité, on
assurerait peut-être, dans une certaine mesure, une meilleure
santé économique. Je pense que c'est la responsabilité du
gouvernement.
M. Joron: Je dis que c'est normal que les entrepreneurs, les
entreprises et les industriels s'adressent à tous les fournisseurs d'une
matière première quelconque, quand c'est le gouvernement, par le
biais de l'Hydro-Québec pour l'électricité, ou fassent des
demandes à d'autres ministères pour essayer d'avoir des
avantages. C'est parfaitement normal. Mais, ce que je disais tout à
l'heure, c'est qu'il ne faut pas considérer cette chose de façon
isolée comme étant à proprement parler un problème
énergétique. Cela fait partie des discussions qu'on a au
comité ministériel permanent du développement
économique dans l'élaboration de toutes sortes de
stratégies de promotion de développement industriel, de promotion
de développement régional, etc.
Il y a beaucoup de choses qui se font ailleurs et qui, finalement, en
fin de compte, j'ai l'impression, pour l'entreprise, sont finalement plus
importantes encore que de possibles tarifs industriels régionaux, c'est
de cela que vous parlez.
Déjà, régionalement, le Canada comme tel, d'abord
au niveau fédéral, est divisé en régions selon
leurs possibilités d'obtenir des subventions, qui tiennent compte des
particularités régionales, taux de chômage dans certaines
régions. Il y a toutes sortes de façons par lesquelles on peut
promouvoir le développement industriel régional.
Je ne pense pas que le point de départ soit les tarifs
d'électricité, sauf que je ne l'exclus pas de la discussion. Cela
fait partie des discussions interministérielles qu'on a au comité
de développement économique. Jusqu'à maintenant, on n'en a
pas tiré, en ce qui concerne l'électricité, de conclusion
immédiate.
Le Président (M. Dussault): M. le député de
Beauharnois.
M. Lavigne: Je voudrais poser ma question à M. Boyd en ce
qui a trait aux tarifs. Nous savons qu'actuellement nous vendons de
l'électricité à l'étranger d'une façon
saisonnière, nos surplus; comme, par exemple, la fameuse ligne qui passe
dans le comté de Beauharnois vend de l'électricité aux
États-Unis pendant la période d'été, sachant
très bien que les besoins en énergie ou la commande
électrique au Québec est plus faible l'été que
l'hiver. Plutôt que d'arrêter les turbines pendant
l'été, on les laisse fonctionner et cela nous donne un surplus
ici. On vend ce surplus au États-Unis et, quand le chauffage reprend au
Québec à l'automne, on cesse cette vente et on garde
l'électricité pour nos propres besoins.
Je voudrais savoir si la vente à l'étranger, en
période d'été, influence la facture du citoyen
québécois et à quel pourcentage. Deuxième
question... On sait que nos besoins augmentent d'année en année
au Québec et, par contre, les pouvoirs de produire de
l'électricité de l'Hydro-Québec... Nous sommes dans une
phase d'expansion et on augmente aussi notre capacité de produire de
l'électricité.
S'en va-t-on, à court terme, vers une plus grande capacité
de produire de l'électricité que l'augmentation de nos besoins?
Quel rapport prévaut sur l'autre? Est-ce que notre capacité de
produire est plus grande dans les cinq ou dix prochaines années ou
est-ce notre augmentation en besoin qui est plus grande? Si c'est
l'augmentation de production, on risque de vendre plus
d'électricité, plus de surplus. Est-ce que cela ne pourrait pas
influencer de façon avantageuse les factures des
Québécois? Si c'est l'inverse, cela peut-il faire en sorte
qu'à assez court terme, la facture des Québécois sera
augmentée assez considérablement?
M. Boyd: Je vais prendre la première partie de votre
question. Je pense que, pour les trois années à venir, les
revenus que nous allons avoir de cette source, c'est $125 millions. Alors,
comme on dit à la page 16, ici, on prévoit une exportation
souscrite de $57 millions plus $126 millions d'excédentaire, en 1979,
et, en 1980, c'est $60 millions plus $139 millions; en 1981, c'est $49 millions
plus $121 millions. Donc, cette énergie que l'on vend, qui est
excédentaire en été, c'est autant de pris et que les
citoyens canadiens et québécois n'ont pas à
débourser. Par contre, notre programme de construction et
d'investissement est fait en fonction des besoins du Québec et non pas
en fonction des exportations. Il arrive, à cause du facteur de
diversité de charges, qu'on ait des excédents l'été
et, heureusement, on les a et on les vend, et pendant la période de mise
en service de la baie James, il y aura encore des excédents qu'on pourra
vendre à nos voisins avec avantage. Mais, pour le moment, je pense qu'on
ne peut pas construire pour vendre à l'extérieur du
Québec. Ce sont déjà des programmes d'investissement
extrê- mement lourds qu'on a à supporter. Je ne crois pas qu'on
puisse envisager dans le moment de bâtir pour vendre, on bâtit donc
pour répondre à la demande. Si la demande était moindre
que prévue pour différentes raisons, on aurait peut-être un
peu plus d'énergie à vendre et on la vendrait jusqu'à la
limite des lignes qui existent. Mais, actuellement, les capacités
d'exportation sont assez limitées. C'est une chose que nous discutons
avec nos voisins, qui semblent intéressés peut-être
à augmenter la capacité de ces lignes pour justement pouvoir en
prendre davantage si on en avait davantage à vendre, dans le sens de
votre question.
M. Lavigne: La deuxième partie de ma question, M. Boyd,
était la suivante: Le jour où les Québécois auront
besoin de toute leur électricité, même en
été, est-ce que cela peut arriver, et qu'on soit pris pour ne
plus en vendre à l'étranger, est-ce qu'à ce
moment-là on aura à assumer tous les coûts
nous-mêmes? Nous n'aurons plus cet apport des ventes qui nous viennent de
l'étranger; à ce moment-là, on a le droit de
s'inquiéter quant à l'augmentation des coûts de chacune de
nos factures.
M. Boyd: C'est quand même un faible pourcentage, si on
reste dans les $150 millions, $175 millions ou même $200 millions par
année, dans les périodes où on sera rendu à des
revenus de $3 milliards. C'est quand même peu, si cela disparaît.
C'est intéressant, évidemment, mais ce n'est pas un facteur
très lourd dans la facture des abonnés.
M. Lavigne: Merci, M. Boyd.
Le Président (M. Dussault): II semble bien que nous sommes
prêts à aborder la deuxième question. M. le
député de Mont-Royal.
Prévisions des demandes
d'énergie
M. Ciaccia: M. le Président, M. Boyd, dans le
mémoire que vous avez présenté à la commission
parlementaire en 1977, quand il y a eu les auditions pour entendre les
différents témoins sur la question énergétique, en
vue de la préparation de la politique énergétique au
Québec, vous aviez fait certaines prévisions de demandes de
croissance énergétique au Québec. Vous aviez des chiffres
pour l'année 1985 et vous êtes arrivé à ces chiffres
en utilisant un pourcentage de conservation de 12% de cette date jusqu'à
1985. Est-ce que vos prévisions tiennent encore? Est-ce que les
conditions ont changé pour vous faire réviser ces
prévisions ou si elles demeurent?
M. Boyd: D'ici 1985, ça peut changer, mais cela a
changé. J'aimerais demander à M. Bour-beau de répondre
à cette question.
M. Bourbeau (Joseph): Joseph Bourbeau. Nos prévisions pour
l'accroissement de la demande, d'ici 1985, sont à peu près
égales à celles
qu'on avait il y a un an. On voit un léger affaissement de la
demande, surtout de la demande énergétique et non pas de la
demande de puissance. C'est très léger.
M. Ciaccia: Grosso modo...
M. Bourbeau: Grosso modo, on est dans le même...
M. Ciaccia: Parce que dans votre... Voici ce à quoi je
veux en venir. Le livre blanc semble, pour l'année 1990, prévoir
une demande d'énergie globale qui est moindre que vos prévisions
pour l'année 1985. Une minute, le taux de croissance est moindre.
Autrement dit, vos chiffres étaient d'environ 7,5% par année et
d'après... le ministre semble contester ce que je dis, je vais sortir le
livre blanc pour qu'il...
Le taux de croissance que le ministre projette, dans son livre blanc,
est moindre que le vôtre. Cela veut dire qu'il va y avoir
différentes conséquences.
M. Joron: De quelle année parlez-vous, M. Ciaccia?
M. Ciaccia: Je parle de 1985 à 1990 et plus tard. Parce
que M. Boyd a dit tantôt que les programmes d'investissements pour les
années 1985 à 1995 n'étaient pas encore parachevés.
Le conseil d'administration doit se réunir prochainement, au cours de la
prochaine année, je crois, et déterminer quels projets et quels
investissements l'Hydro-Québec devrait projeter. Maintenant, il va y
avoir une différence, si on prend les chiffres que l'Hydro-Québec
a soumis à la commission parlementaire et si on prend les chiffres que
le gouvernement a inclus dans son livre blanc. Je pense qu'une des
différences, c'est que le gouvernement préconise un taux de
conservation plus élevé, 23%, vis-à-vis de 12%.
M. Joron: Non, cela ne s'applique pas à l'ensemble, 12%,
vous comparez deux choses différentes.
M. Bourbeau: Selon le chiffre qui est donné à la
page 48 du livre blanc, le gouvernement, en 1990, prévoit une puissance
requise de 38 560, et notre programme d'équipement est basé sur
une puissance requise d'environ 39 100 mégawatts. À toutes fins
utiles, c'est la même puissance en 1990. Là où il y a une
différence, c'est sur l'énergie. Le livre blanc, à la
même page, indique un appel net de l'énergie de 195 milliards de
kilowatts-heures. Nos prévisions actuelles sont de 206 720 000 000 de
kilowatts-heures. La différence est de 6%, il y a 11 milliards de
kilowatts-heures de différence.
Pour essayer d'expliquer cette différence, en l'année
1990, si le chiffre de l'Hydro-Québec était vrai, on atteindrait
le chiffre qui est dans le livre blanc vers le 15 décembre de cette
année. Autrement dit, la différence entre les deux chiffres
représente environ 15 jours durant l'année 1990. À toutes
fins utiles, c'est encore à peu près le même montant.
M. Ciaccia: II n'y a pas de différence entre vos
prévisions...
M. Bourbeau: Appréciable. Il n'y a pas de
différence...
M. Ciaccia: II n'y a pas de différence appréciable
entre vos prévisions et les prévisions du livre blanc.
M. Bourbeau: Exactement.
M. Ciaccia: Vos prévisions sont-elles basées
strictement, pour atteindre les chiffres que vous venez de citer, sur le
développement hydroélectrique ou sur le développement
additionnel de l'énergie nucléaire? (16 h 45)
M. Bourbeau: La question, c'est la demande de la
clientèle. Ce que vous voulez exprimer par votre question, c'est quel
genre de programme d'équipement on aurait. Le programme
d'équipement, pour répondre à cette demande de 38 000
mégawatts, serait sensiblement celui qui est décrit, à
toutes fins utiles, dans le livre blanc. Il y a une centrale nucléaire,
Gentilly 3, qui est prévue ici avant 1990 et on croit y mettre en
service une centrale nucléaire d'ici 1990. Le reste de nos
équipements ce seront des équipements hydrauliques.
M. Ciaccia: II me semblait que le pourcentage que vous
prévoyez, du total de la demande, et le pourcentage qui serait fourni
par l'électricité hydroélectrique, c'était un
pourcentage différent de ce que le livre blanc préconisait. Par
exemple, vous aviez fait trois différents scénarios et vous avez
pris le scénario moyen.
M. Joron: Je peux vous l'expliquer facilement.
M. Ciaccia: Je vais continuer ma question et peut-être que
vous pourriez m'expliquer. Dans le scénario moyen pour 1985, vous disiez
que l'électricité comprendrait l'hydroélectrique 30%, le
pétrole 57% et le gaz naturel 11%. Vous aviez également un
pourcentage de nucléaire. Il me semble que ces chiffres ne sont pas les
mêmes que ceux inclus dans le livre blanc. Est-ce que vous pourriez
clarifier cela, s'il vous plaît?
M. Bourbeau: Vous devez vous référer au
mémoire que nous avons soumis à la commission parlementaire au
mois de février 1977. Je crois que les chiffres qui ont
été retenus dans le livre blanc, en juin 1978, peuvent
différer un peu de ce qu'on avait prévu en février
1977.
M. Joron: Si M. Bourbeau me permet d'ajouter quelque chose, il
faut faire attention aux dates
auxquelles vous employez ces chiffres et de quels chiffres vous parlez.
Des scénarios, comme nous aussi avant d'arriver aux conclusions du livre
blanc, on en avait de tout ordre.
M. Ciaccia: Je prenais le même scénario, le
moyen.
M. Joron: On avait toutes sortes de fourchettes également.
Finalement, on a arrêté une décision; l'Hydro-Québec
fait exactement de même, de multiples scénarios et, après
ces exercices, elle arrive à déterminer un programme
d'équipement donné. Après avoir fait trois, quatre, dix ou
quinze scénarios, à un moment donné, on finit par faire un
choix.
À la question que vous soulevez, M. Bourbeau vous a bien
expliqué comment notre prévision de la demande électrique
coïncide, pour l'année 1990, à toutes fins utiles, à
une petite différence marginale près...
M. Ciaccia: Est-ce que je peux vous interrompre? Comment
peut-elle coïncider si le taux de croissance est différent, si vous
avez un taux de croissance annuel de 7,5%, d'après les prévisions
de l'Hydro-Québec et qu'ici vous en avez un de 6,4%? C'est une
différence assez marquée. C'est plus qu'une différence de
deux semaines.
M. Joron: Cela dépend de quelle année vous partez.
Le livre blanc part de 1976. Il faut faire attention à l'année
à laquelle vous partez. Il y a toute la différence du monde, si
vous partez de l'année 1975. Je vais vous dire pourquoi: En 1975, la
croissance des ventes d'électricité n'avait été que
de 1%. À partir de 1975, vous arrivez à un chiffre
complètement différent. Vous avez une différence d'une
année où il n'y a pratiquement pas de croissance; si vous
l'incluez ou l'excluez, vous allez changer plusieurs décimales dans
votre chiffre pour la période.
Je voulais répondre à une question que vous avez
soulevée, qui est restée sans réponse. J'étais
à dire que la prévision pour la demande électrique de 1990
est, à toutes fins utiles, la même. Il peut y avoir une
différence d'opinion, par contre, à savoir... La demande
électrique, on prétend tous les deux que cela va être
ça. Qu'est-ce que cela va représenter dans le total de la
consommation énergétique qui inclut d'autres secteurs dont
l'Hydro-Québec n'est pas responsable, entre autres le secteur du
transport, qui est passablement en dehors du champ d'électricité,
on peut avoir des divergences là-dessus. Le gouvernement est en mesure
de pouvoir élaborer des politiques qui ne sont pas du ressort de
l'Hydro-Québec, bien entendu, en ce qui a trait au pétrole, en ce
qui a trait au gaz ou en ce qui a trait indirectement, si je le prends sous un
autre angle, au secteur des transports, etc.
Nous pouvons avoir certains objectifs sur l'ensemble de la consommation
totale d'énergie pour établir le montant global
d'électricité qu'on aura au bout de la ligne, en 1990, si on
s'entend là-dessus.
Est-ce que cela va représenter 41%, 38% ou 42% de toute
l'énergie consommée au Québec? C'est complètement
une autre chose.
M. Ciaccia: Oui, mais cela fera une différence assez
marquée si les prévisions de I'Hydro-Québec... Disons que
les programmes d'équipement sont les mêmes ainsi que le programme
de construction. Si, d'après les chiffres de l'Hydro-Québec, cela
représente 35%, 38% ou 40% de la demande globale et que vous dites que
ce que l'Hydro-Québec va faire représente 50% de la demande
globale, d'où la différence va-t-elle venir?
M. Joron: M. Ciaccia, ce que je suis en train de vous dire, c'est
que 35% de tant ou 50% d'un montant plus petit, cela aboutit au même
nombre de mégawatts.
M. Ciaccia: Oui, mais c'est là que je veux en venir. Vous
minimisez la demande globale. Naturellement, ce que l'Hydro-Québec
produit, cela représente un plus haut pourcentage. L'Hydro-Québec
n'aurait pas, par exemple, besoin de développement nucléaire,
parce que...
M. Joron: Non, on parle toujours d'électricité, on
arrive au même montant de mégawatts électriques, de toute
façon.
M. Ciaccia: Non, mais vous parlez d'une demande globale
différente.
M. Joron: Oui.
M. Ciaccia: Si la demande globale est plus haute, d'après
les prévisions de l'Hydro-Québec, je pense qu'on peut se demander
le genre d'investissements que l'Hydro-Québec va faire, quel genre de
projets il y aura pour combler la différence entre les deux
opinions.
M. Joron: Ce qui arriverait dans un tel cas, c'est que le volume
des équipements installés et la puissance disponible, à ce
moment-là, seraient les mêmes dans un cas comme dans l'autre. Par
contre, si la demande globale de l'ensemble des sources d'énergie
était plus grande, on importerait plus de pétrole que
prévu. C'est cela qui arriverait, mais cela n'a aucune
conséquence sur la planification de l'Hydro-Québec.
M. Ciaccia: Mais cela pourrait avoir une conséquence. Si
vous dites que l'hydroélectricité doit satisfaire un certain
pourcentage de la demande globale...
M. Joron: Un objectif.
M. Ciaccia: ... cela aura une conséquence sur les projets
de l'Hydro-Québec.
M. Joron: C'est parce que vous prenez le problème à
l'envers. L'objectif n'est pas d'arriver à un pourcentage comme tel. Ce
dont on parle, c'est
de savoir combien de puissance on va installer. On s'entend
là-dessus. Au bout de la ligne, les résultats de cette production
d'électricité, nous avons comme objectif qu'ils devraient
représenter X pourcentage dans le total de l'énergie
consommée, parce qu'on s'occupe des autres secteurs
énergétiques qui ne sont pas de la responsabilité de
l'Hydro-Québec.
M. Ciaccia: Seulement une petite question. M. Joron: Oui,
s'il vous plaît!
M. Ciaccia: Dans ses projets, dans ses prévisions,
l'Hydro-Québec avait prévu, par exemple, un certain nombre de
stations nucléaires pour répondre à la demande.
M. Joron: Vous vous référez à des documents
d'il y a deux ou trois ans, c'est ce que je suis en train de vous dire.
M. Ciaccia: C'est cela que je demande. Non, c'est un document de
février 1977.
M. Joron: Tout cela se révise continuellement. Oui,
préparé en 1976, sans aucun doute, ce qui fait déjà
plus de deux ans.
M. Ciaccia: C'est pour cela que je demande si les
prévisions de l'Hydro-Québec n'ont pas changé.
M. Joron: Ah oui!
M. Ciaccia: Si elles n'ont pas changé... Où est M.
Bilodeau?
M. Bourbeau: Bourbeau.
M. Ciaccia: M. Bourbeau, excusez-moi. On dit que ces
prévisions n'ont pas changé sensiblement. Cela veut dire que ce
qu'elle avait prévu pour satisfaire à la demande n'a pas
changé non plus. Si, dans ses prévisions, elle avait inclus un
certain pourcentage pour le nucléaire...
M. Joron: Par contre, moins d'hydraulique.
M. Ciaccia: ... cela veut dire qu'il y a une différence
entre les prévisions de l'Hydro-Québec et ce que vous
préconisez dans votre livre blanc. J'essaie de trouver comment cette
différence sera comblée.
M. Joron: M. Bourbeau vient de vous expliquer que les
dernières prévisions de la planification de l'Hydro-Québec
coïncident à 6% près pour ce qui concerne l'énergie
et à peut-être 1% ou 2% près pour ce qui concerne la
puissance pour 1990.
Ce que je veux souligner, c'est que tous les planificateurs
énergétiques, que ce soient les producteurs d'énergie ou
les organismes responsables des planifications énergétiques au
niveau gouvernemental, constamment, et spécifiquement dans ces
années de changements assez rapides dans le monde de l'énergie,
révisent et révisent presque tous les trois mois ces
précisions. Le livre blanc vous donne un exemple intéressant
à la page 35 où vous voyez quels ont été les
principaux organismes de prévision de la demande totale d'énergie
pour l'ensemble du Canada.
Vous avez la prévision de 1973, celle de 1975, celle de 1976 et
celle de 1977. Ce n'est pas une très longue période. En quatre
ans, c'est passé de 20 000 BTU multiplié par dix au
douzième degré à 9760 BTU. En quatre ans, avant ou
après la crise d'énergie, cela a été coupé
en deux. Cela vous donne seulement un indice sur la rapidité avec
laquelle le monde de l'énergie évolue dans ces années et
il faut toujours réviser constamment. On a dit d'ailleurs en publiant le
livre blanc que ce n'est pas coulé dans le ciment cela non plus. C'est
sujet à révision périodique. Il va falloir voir les
tendances, qu'est-ce qui va arriver, mesurer, dans trois ou quatre ans d'ici,
si les tendances telles qu'on les a dessinées se poursuivent ou non et
rajuster en conséquence. Ce n'est pas une obligation d'arriver au cent
près en 1990. Ce sont des objectifs.
M. Ciaccia: II faut se prendre d'avance pour ces projets. Cela a
pris dix ou douze ans pour construire le projet de la baie James. Je pense
qu'il faut s'entendre sur les prévisions; autrement, ce n'est pas une
chose avec laquelle on peut arriver à la dernière année
et, si on s'est trompé, tout à coup, combler la demande. Dans le
rapport de I'Hydro-Québec, en février 1977, le chiffre qu'elle
avait prévu pour 1985... Elle avait dit qu'elle avait besoin de 1730 BTU
multiplié par dix au douzième degré. C'était le
chiffre global dont elle avait besoin.
M. Joron: Oui, dont elle avait besoin. Les prévisions sur
la demande globale d'énergie, cela n'a pas de rapport direct avec
l'électricité.
M. Ciaccia: Prévision globale d'énergie,
exactement. Votre prévision globale d'énergie, à moins
qu'on n'ait les mauvais chiffres ici, pour 1990, c'est moins que cela.
M. Joron: Oui, c'est exact.
M. Ciaccia: On va y revenir. Si ces gens prévoient 1730
BTU...
M. Joron: Non, ils prévoyaient.
M. Ciaccia: Ils prévoyaient.
M. Joron: Le temps du verbe est important.
M. Ciaccia: Je viens de poser la question et ils me disent que
cela n'a pas sensiblement changé leurs prévisions.
M. Joron: En ce qui concerne l'électricité. M.
Ciaccia: Je vais le leur demander. Est-ce
que votre demande globale, telle que vous l'avez prévue en
février 1977, a changé?
M. Joron: D'électricité globale dont vous
parlez?
M. Ciaccia: Non, leur demande énergétique globale.
Est-ce que cela a changé?
M. Bourbeau: On n'a pas refait, depuis notre présentation
du mémoire à la commission parlementaire du mois de
février, de prévision globale énergétique pour la
province de Québec. On avait préparé le mémoire en
vue de la séance de la commission parlementaire de 1977. Ce qu'on fait
à tous les ans, c'est une révision de la prévision de la
demande d'électricité pour les besoins de l'Hydro-Québec.
Ceci se fait à tous les ans à l'Hydro-Québec.
M. Ciaccia: Si votre prévision globale, c'est seulement
une estimation, une opinion que vous avez émise pour 1985, j'ai une
autre opinion. À ce stade, d'abord, il y a deux opinions. Comment les
décisions vont-elles être prises pour répondre à la
demande globale des consommateurs?
M. Joron: Le mandat de l'Hydro-Québec est de fournir de
l'électricité. Ce n'est pas de fournir du pétrole, du gaz
et Dieu sait quoi.
M. Ciaccia: Oui, mais si on demande à
l'Hydro-Québec de fournir de l'électricité pour un certain
pourcentage d'une certaine demande globale...
M. Joron: On demande à l'Hydro-Québec de fournir
une quantité donnée d'électricité. Après
cela, on a beau dire que cette quantité représente un pourcentage
donné dans un total de la demande énergétique, c'est autre
chose complètement. Cela ne change pas la planification de
l'Hydro-Québec de savoir, encore une fois, si le total, en fin de
compte, sera de 41 ou 38 ou 42. Ce que l'on sait, c'est que la demande en
électricité va être de tant; donc, cela prend tant
d'équipement. Je vais vous donner un exemple qui s'est
présenté hier à cette commission et qui montre justement
comment les choses évoluent et qu'on adapte un programme
d'équipement en cours de route. On a changé le complexe La Grande
pour cette raison. Il y a eu une modification substantielle dans
l'aménagement du complexe La Grande pour tenir compte d'une
évolution à la baisse de la demande d'énergie pendant
qu'il y a un maintien de la demande de pointe.
M. Ciaccia: Quand c'est à la baisse, ces gens peuvent
décélérer leur programme d'investissements. S'il fallait
accélérer, c'est la la difficulté. Si vous voyez moins de
demande qu'eux, je me demande comment on va pouvoir résoudre ce
problème.
M. Joron: À ce moment, M. le député, il n'y
aurait qu'une solution. Pour garder la marge de sécurité qui est
déjà incluse là-dedans, parce qu'on a des
excédents, M. Boyd le rappelait tout à l'heure, jusqu'en 1985. Il
y en aura peut-être d'autres qui vont se maintenir dans la période
de 1985 à 1990. (17 heures)
II y a de l'énergie excédentaire. Il y a
déjà là un coussin de sécurité. Ce que vous
suggérez, c'est que le coussin devrait être plus large encore.
Mais si on doit bâtir plus d'équipement pour avoir une marge de
sécurité plus grande au cas où on en manquerait, il va
falloir emprunter plus et augmenter les tarifs encore davantage. Il y a
toujours une limite à la sécurité. On ne peut pas taxer
les contribuables parce que le député de Mont-Royal a peur de
manquer d'électricité.
M. Ciaccia: ... de manquer d'électricité, c'est une
question de divergence d'opinion dans la prévision globale de ce qui est
nécessaire pour répondre aux demandes des consommateurs. Ce n'est
pas une marge de sécurité. Quand on voit des différences
entre le taux de conservation que l'Hydro-Québec nous donne, qui est de
12%, et celui du livre blanc, qui est de 23%, on va bien se demander...
M. Joron: Là, vous appliquez...
M. Ciaccia:... comment va-t-on réconcilier ces deux
chiffres?
M. Joron: Une minute! Encore une fois, vous appliquez deux
chiffres qui ne portent pas sur la même chose. Les 23% s'appliquent
à la consommation énergétique de tous les secteurs,
l'ensemble des secteurs. Les 12% ne s'appliquaient pas à ça. Il
n'y a pas d'électricité dans le transport, ou, à toutes
fins utiles, si peu...
M. Ciaccia: Quel est votre chiffre pour
l'électricité? Est-ce qu'il est le même que...
M. Joron: II y a le métro de Montréal... M.
Ciaccia:... celui de l'Hydro-Québec?
M. Joron: Non, si vous prenez les trois autres secteurs où
l'électricité joue un rôle significatif, le
résidentiel, le commercial ou l'industriel, là, les chiffres
je ne les ai plus de mémoire de conservation, si vous
voulez, ou d'économie d'énergie possible... Mais il reste une
chose aussi, c'est que, encore une fois, à partir de la date à
laquelle on fait ces estimations ou ces prévisions, à savoir
quelle est l'économie possible ou le degré de conservation
attribuable à une plus grande efficacité
énergétique, cela change très rapidement au fur et
à mesure qu'évoluent les prix de l'énergie justement, et
on l'a vu au cours de 1977. Cette année, entre autres, la consommation
totale d'énergie au Québec est stable, celle de
l'électricité va avoir augmenté. Par contre, on sait, par
les rapports préliminaires qu'on a des fournisseurs d'autres sources
d'énergie, que ce soit le gaz ou les compagnies
pétrolières, que la demande a
baissé dans l'ensemble des produits pétroliers. Alors,
jusqu'à maintenant, tout semble se dessiner tel que prévu et nous
porte à croire que les objectifs, encore une fois, de conservation
d'énergie fixés pour la fin de la décennie prochaine
pourront être atteints, mais ça, comme je l'ai
répété souvent, c'est en cours de route qu'on va pouvoir
le mesurer. Il est encore bien tôt pour le faire.
Le Président (M. Dussault): M. le député
d'Outremont.
M. Raynauld: M. le Président, sur le même sujet,
mais peut-être en partant de chiffres plus simples, je voudrais poser une
question, je pense, qui est claire.
Pour 1976-85, la consommation d'énergie électrique
prévue dans le livre blanc, c'est 6,9%. Est-ce que ces 6,9% sont
conformes à vos prévisions? Vous nous avez donné hier, en
réponse à une question que je vous ai posée, les
consommations d'énergie électrique prévues de 1978
à 1981. Si mes calculs sont corrects, ça donne une moyenne de 8%
par année, que vous avez prévue jusqu'en 1981. Donc, pour arriver
à 7%, de 1976-85, comme moyenne, il faudrait que ce soit 6%,
après 1981. Est-ce que ça, c'est conforme à vos
prévisions, au-delà de 1981?
M. Bourbeau: Voici. Vous partez d'une prévision, pour 1976
à 1985 de 6.9%. C'est ce qu'il y a dans le livre blanc. De 1978 à
1981, on prévoit une augmentation de la demande d'énergie de 8%.
De fait, depuis le 1er janvier de cette année jusqu'au 31 juillet,
l'augmentation de l'énergie a été effectivement de 8%
à l'Hydro-Québec. Je crois qu'on se trouve, à court terme,
vis-à-vis d'une augmentation énergétique
d'électricité forte, plus forte que ce qu'il y a dans le livre
blanc, sur une période plus longue.
Sur une période de quinze ans, un horizon de quinze ans, nous
prévoyions, l'an dernier, lors de notre révision de la
prévision de la demande au mois de décembre 1977, une
augmentation de 7,7% sur la puissance et de 7,4% sur l'énergie.
M. Raynauld: Quinze ans à partir de quelle
année?
M. Bourbeau: 1978.
M. Raynauld: 1978, ça se rend à 1993, Si
c'était 7,4%, je pense que vous trouveriez, M. le ministre, que c'est un
peu fort par rapport à vos prévisions et à vos
objectifs.
M. Joron: 7,4 quinze ans.
M. Raynauld: Quinze ans. Ici, c'est 6,4.
M. Joron: Quelques décimales trop fortes, oui.
M. Bourbeau: On est en train de réviser nos
prévisions pour cette année et, vers le mois de décembre,
on devrait avoir une nouvelle révision de la demande
d'électricité. Jusqu'à maintenant, nos travaux indiquent
un léger affaissement de cette prévision de l'an dernier,
quelques dixièmes de pourcentage, pas plus.
M. Raynauld: Je ne sais pas si j'ai été clair,
hier. Je voulais savoir et je voudrais savoir de nouveau aujourd'hui... Quand
vous avez fait une telle prévision de consommation d'énergie
électrique, en 1978 vous avez donné 7,3, en 1979, vous avez
donné 8,3. Qu'aurait été votre prévision si vous
l'aviez faite en l'absence des mesures tarifaires que vous proposez aujourd'hui
ou, a-t-elle été faite antérieurement à la demande
et, si oui, de combien va-t-elle changer si le gouvernement accepte votre
proposition sur le prix?
M. Joron: Ce que vous voulez dire, c'est qu'en somme, s'il n'y
avait pas d'augmentation du prix de l'électricité, quelle serait
la croissance de la demande d'électricité? Compte tenu que les
autres formes d'énergie augmentent au bout de la ligne, il n'y aurait
plus autre chose qui se vendrait que de l'électricité, pour
autant que c'est possible, j'ai bien l'impression. On aboutirait à une
croissance absolument fantastique et, pour faire face à cette demande,
il faudrait installer tellement plus d'équipement qu'il n'y en a
déjà de prévu que les programmes d'emprunt et les hausses
de tarif seraient plus forts que prévu.
M. Raynauld: J'ai posé une question. Je veux savoir si la
consommation d'énergie est antérieure ou si elle tient compte de
la demande d'augmentation de prix.
M. Boyd: Quand on a parlé pour 1979, on tient compte d'une
augmentation de tarifs qu'on demande, mais je voudrais aussi ajouter que, pour
les ventes assujetties au règlement tarifaire, cela exclut les
autoproducteurs qui n'augmentent pas du tout ou très peu, tandis que je
pense que le gouvernement, dans son livre blanc, considère l'ensemble de
la production de la province.
M. Raynauld: Compte tenu de toutes les réserves que vous
devez faire, de combien aurait été la prévision pour 1979
de 8,3 si vous n'aviez pas incorporé la hausse de prix?
M. Boyd: On prétend qu'il n'y aurait pas eu de
différence.
M. Raynauld: Aucune différence. M. Boyd: On ne le
croit pas.
M. Raynauld: Bon. C'est ce que je pensais. Aucune
différence.
M. Joron: À si court terme, mais évidemment,
c'est...
M. Raynauld: Mais on va jusqu'en 1981.
M. Joron: Non, mais M. Boyd a répondu sur un an.
M. Boyd: L'année 1979.
M. Raynauld: II nous a dit qu'il avait tenu compte de
l'augmentation des prix lorsque cette prévision de consommation
d'énergie électrique avait été établie. Je
demande si elle aurait été changée s'il n'y avait pas eu
d'augmentation de prix d'envisagée. La réponse pour 1979 a
été non. Cela n'aurait pas changé.
M. Boyd: Si vous permettez, j'aimerais citer les trois chiffres.
En 1979, on a 8,3...
M. Raynauld: Oui.
M. Boyd: ... en 1980, 8,2 et en 1981, 7,9.
M. Raynauld: C'est cela.
M. Boyd: Donc, il y a une diminution qui apparaît. C'est
une prévision.
M. Raynauld: Voulez-vous dire par là que, lorsque vous
avez établi vos prévisions de consommation d'énergie,
compte tenu des demandes de prix, d'augmentation des tarifs que vous faites
aujourd'hui vous avez, pour 1980 et 1981, réduit la consommation
prévisible à cause de la demande de prix?
M. Boyd: Non, pas nécessairement, je ne le crois pas. M.
Bourbeau, voulez-vous répondre?
M. Bourbeau: II n'y a pas encore d'élasticité dans
la demande à cause du prix très bas de
l'électricité au Québec. On ne croit pas que
l'augmentation du prix de l'électricité va forcer le
consommateur, encore à cause de son bas prix, à économiser
l'électricité ou à ne pas se servir de
l'électricité.
NI. Raynauld: Vous nous dites qu'en trois ans, avec les
augmentations, par exemple, pour usage domestique, de 52,7% la consommation
d'énergie électrique ne diminue pas en dépit de la hausse
de prix. C'est cela que vous dites.
M. Bourbeau: Légèrement, il n'y a pas de
grande...
M. Raynauld: Donc, hausser les prix pour économiser de
l'énergie, pour vous, ce n'est pas une bonne méthode.
M. Bourbeau: Ce n'est pas ce que je dis. Je dis qu'à cause
du prix très bas de l'électricité ici, il se pourrait
qu'à force d'augmenter les prix d'énergie, vous en arriviez
à un point où vous verriez votre consommation baisser.
M. Raynauld: Je comprends, mais, de toute fa-çon, d'ici
1981, pour vous, cela n'affecte pas la demande du tout.
M. Boyd: II y a un autre facteur dont il faut se rappeler, c'est
que le taux des conversions du pé- trole à
l'électricité augmente sans cesse. Il y a quelques années
c'était 3000, 4000, 5000 conversions par année et, cette
année, nous avons 17 000 conversions. Évidemment, cette tendance
semble vouloir se continuer.
M. Raynauld: Elle pourrait venir compenser, d'accord.
M. Boyd: Cela compense en partie.
M. Raynauld: Oui, je comprends. À cet égard,
j'avais laissé une note avant de partir... Je ne suis pas
intéressé aux questions techniques parce que je ne connais pas
cela. Alors, il paraît que la réponse était que cela
coûtait moins cher encore pour chauffer une maison à
l'électricité, donc vous n'êtes pas d'accord avec le
rapport qui a été fait pour 1977. On disait que cela devenait
kif-kif à la fin de 1977. Vous n'êtes pas d'accord sur cela.
M. Boyd: Non. M. Cristel a expliqué longuement ce point de
vue tout à l'heure. Je ne sais pas si on a convaincu M. Ciaccia, mais je
pense que l'explication a été donnée tout à
l'heure.
M. Raynauld: Je m'excuse, j'ai dû m'absenter quelques
minutes. Je ne sais pas si la question a été posée d'une
façon aussi précise. Ce serait vrai également jusqu'en
1981 où vous ne prévoyez pas de substitution inverse vers le
pétrole, compte tenu, encore une fois, de l'augmentation pour usage
domestique je prends toujours cet exemple-là, mais cela pourrait
être peut-être plus facile dans le domaine industriel, je ne sais
pas des augmentations de 52,7%, cela va être encore vrai en 1981,
de sorte que vous comptez encore qu'il va y avoir 17 000 logements de ce genre
qui vont plutôt se chauffer à l'électricité qu'au
pétrole, en dépit de l'augmentation du prix.
M. Boyd: Premièrement, j'aimerais ajouter que tout
à l'heure je vous ai parlé de conversion. Je voudrais ajouter
aussi qu'environ 75% des nouvelles résidences se construisent
actuellement avec le chauffage à l'électricité. Donc, par
rapport au passé, c'est une grosse substitution, mais aussi lorsqu on
parle de substitution et de remplacement du pétrole par
l'électricité, c'est plutôt dans le domaine
résidentiel que dans le domaine industriel. M. Cristel, peut-être,
saurait répondre davantage à cette question.
M. Cristel: En ce qui concerne votre question relative à
l'effet de l'augmentation des prix à la fois sur la consommation de
l'électricité et la situation concurrentielle, en ce qui concerne
le premier point, d'abord j'aimerais dire ceci. Historiquement, les
Québécois ont utilisé l'électricité assez
judicieusement. Si vous vous rappelez les années cinquante où
l'électricité se vendait 40% plus cher que le pétrole et
que les gens commençaient à se chauffer a
l'électricité, les maisons construites pour être
chauffées à l'électricité au Québec,
historiquement, ont été bien construites. Alors, nous avons,
actuellement, sur notre réseau, près du
quart des abonnés qui utilisent l'électricité comme
source principale de chauffage. Il y en a également au-dessus de 20%
le pourcentage exact, je ne l'ai pas parce qu'on a fait le dernier
sondage en 1976 qui utilisent l'électricité comme source
de chauffage d'appoint et, si vous regardez plusieurs logements à
Montréal qui ont une plinthe en avant, pas loin de la porte d'en avant
et l'autre pas loin de la porte arrière, vous constatez que la grande
partie de l'énergie utilisée par ce foyer est de source
électrique, même si on appelle cela le chauffage d'appoint. Ils
ont quand même un poêle, mais on peut presque dire aujourd'hui que
l'électricité fournit près de la moitié de
l'énergie pour le chauffage dans les domiciles au Québec. Je dis
près. (17 h 15)
En augmentant le prix, est-ce qu'en fait on va en réduire la
consommation? Je vous disais tantôt que les Québécois
utilisent déjà sagement l'électricité parce qu'ils
ont isolé leurs maisons, ceux qui chauffent à
l'électricité, et parmi ceux qui ont ajouté le chauffage
d'appoint, il y en a qui l'ont fait aussi et quand on considère que,
dans le bilan énergétique d'un logement, 80% de l'énergie
sert au chauffage de l'eau ou de l'espace, que ce soit n'importe quelle forme
d'énergie, quand vous voulez augmenter les prix de
l'électricité, dans nos études de prévisions,
évidemment, il faut savoir quel va être l'effet de substitution
inverse, comme vous venez de le mentionner.
Selon nos prévisions et ce sont des prévisions, quelqu'un
qui chaufferait à l'électricité, air chaud, en 1979, je
vous donne un coût global sur un logement hypothétique, ça
pourrait être au coût annuel moyen total de $800, et au mazout, air
chaud, $826, en 1979. Là, on parle des prix annoncés, de ce qu'on
connaît, $905 en 1980, $898 pour le mazout, selon des hypothèses.
Quand on arrive en 1981, on a $985 pour l'électricité et ce qu'on
connaît du prix possible du mazout, c'est $952. Ces différences,
en plus ou en moins; ne nous indiquent pas que les gens changeront leurs
habitudes actuelles, qui sont ce que M. Boyd a mentionné.
M. Raynauld: Somme toute, vous supposez que le prix du gaz et du
pétrole va monter autant que la proposition que vous faites
d'augmenter...
M. Cristel: Selon nos hypothèses et à la suite des
déclarations des différents gouvernements, l'hypothèse de
1981, par exemple, est basée sur un prix moyen de $0.713 le gallon pour
le mazout.
M. Joron: À Montréal.
M. Cristel: À Montréal. M. le ministre a
mentionné précédemment que les prix de Montréal
sont normalement toujours plus bas que dans le reste de la province, où
le taux d'électrification... D'ailleurs, le plus bas taux
d'électrification est à Montréal.
M. Joron: Oui, c'est ça.
M. Cristel: Mais, à cause aussi du fait qu'on a, dans la
province si je me souviens des chiffres on a environ 50%
locataires-propriétaires, mais à Montréal, c'est
légèrement plus bas. En fait, on a plus de locataires à
Montréal, je pense que c'est 80%-20%, comparativement à 20%-80%
pour le reste de la province. Mais, pour la province, c'est 50%-50%. À
Montréal, il y a cette idée qu'on a plus de locataires qui ont
moins de possibilités de changer de source d'énergie, moins de
demeures unifamiliales.
M. Raynauld: Bon. C'est un peu pour ça que je vous ai
posé la question hier, à savoir si vous changiez vos
prévisions, si le prix du pétrole n'augmentait pas au 1er janvier
1979. J'ai retenu que ce n'était pas un montant ou un facteur assez
important pour faire jouer ces comparaisons que vous faites, que je trouve
d'ailleurs fort intéressantes.
À ce sujet, ça va pour moi.
Le Président (M. Dussault): II semble qu'on ait
épuisé le deuxième point. M. le député de
Mont-Royal? Non. Nous allons passer au troisième point, le programme
d'investissements futurs. M. Raynauld.
Investissements futurs
M. Raynauld: Auparavant, il y a un domaine qui est relié
un peu à ce qu'on vient de discuter, et qu'on n'a pas eu vraiment le
temps d'examiner, ce matin. M. le ministre avait commencé à poser
quelques questions sur les dépenses d'exploitation, les coûts de
production, etc.
Je ne voudrais pas, moi non plus, aller au fond des choses
là-dedans, parce qu'on n'a pas le temps, mais je me demandais si vous
aviez quelques statistiques qui pourraient nous donner des ordres de grandeur
comparatifs. Je suis certain que vous avez ces choses. Ce serait
peut-être utile qu'on ait, nous aussi, des choses comme, par exemple, le
nombre d'employés qu'il faut à l'Hydro-Québec pour vendre
ou distribuer un kilowatt-neure d'électricité, en le comparant
avec d'autres entreprises similaires.
Je sais qu'on pourrait argumenter longtemps sur la
"comparabilité" des données, mais cela donnerait quand même
des ordres de grandeur. J'ai noté, à cet égard, que par
exemple, l'augmentation dans le nombre d'employés, en 1977, à
l'Hydro-Québec, a été de 5,3%, qui est une forte
augmentation dans le nombre d'employés et ceci, si j'ai bien compris,
exclut toutes les opérations de la baie James.
Donc, il y a des choses, sur la conduite ordinaire, la gestion ordinaire
d'une entreprise, qu'on obtient, de façon automatique, quand on parle
d'autres entreprises, les entreprises manufacturières, par exemple, ces
données sont toujours dans toutes les statistiques, partout.
Mais quand on arrive à des secteurs comme
l'électricité ou les secteurs de services publics pour une raison
ou pour une autre, on a beaucoup
plus de difficultés a trouver des données comme
celles-là, qui m'apparaissent très pertinentes pour juger de la
façon dont, encore une fois, une entreprise est gérée.
Je pourrais poser aussi une autre question du même genre,
même si celle-là est encore plus difficile à
interpréter. C'est le capital qu'il faut par kilowatt-heure
d'énergie distribuée. Là encore, je sais que les
comparaisons, d'une place à l'autre, vont toujours être fautives.
Mais le souvenir que j'ai d'un certain nombre d'études qui ont
été faites, il y a longtemps, à propos de
l'Hydro-Québec, à comparer en particulier avec l'Hydro-Ontario,
c'était que, sur ces deux points, cela coûtait beaucoup plus cher
au Québec. Évidemment, il y avait des raisons, la. population
était moins dense au Québec par rapport à l'Ontario, ou
des choses comme celles-là...
M. Joron: La structure de production n'est pas la même.
M. Raynauld: Maintenant, il y a la structure nucléaire,
l'hydroélectricité, tout cela. Mais il me semble qu'un organisme
comme le vôtre doit être préoccupé par ce genre de
choses et peut-être que vous avez des mesures plus adéquates que
simplement les réponses aux questions que je pose, qui sont très
générales.
S'il y avait des documents qui existaient, personnellement, je serais
très intéressé à ce qu'ils soient transmis à
la commission parlementaire ou qu'ils soient mis à la disposition, d'une
façon ou d'une autre, des gens qui ont à prendre des
décisions sur ce sujet.
M. Boyd: M. Gauvreau.
M. Gauvreau (Georges): Je vais répondre partiellement
à la question. On nous a demandé, l'an dernier, si nous faisions
des études de productivité. On a donné des
éléments de réponse. Des études de
productivité globale, qui tiennent compte des notions de surplus, de
transfert, on n'en fait pas officiellement, actuellement. On a fait des essais
de productivité, d'études de cette nature, inspirés de ce
qui se fait ailleurs, de ce qu'on essaie de faire à l'Hydro-Ontario,
à l'électricité de France. On ne peut pas dire
qu'actuellement, c'est un instrument que nous possédons, à
l'Hydro-Québec.
Par ailleurs, nous faisons annuellement, depuis dix ans, une
étude de productivité basée sur le ratio effectif et les
kilowatts-heures produits. Si cela peut répondre à votre
question, je peux vous dire quel est l'état de ces ratios. Ce n'est pas
complet, mais c'est quand même assez significatif. Cela nous permet de
voir si vraiment nos effectifs sont productifs.
Après la nationalisation, nous avons connu un taux
d'augmentation, de croissance de productivité annuelle de Tordre de, 6%
par année, 6%, 5,5%, autour de 5%, 5,1%. Je ne peux pas vous dire
exactement le nombre de kilowatts-heures produits par individu, mais cela
était autour de 4500 et 5500, quelque chose du genre.
Lorsque nous autorisons une liste de postes, nous surveillons de
près ce ratio. Il y a toujours croissance de productivité.
D'année en année, cela n'a jamais baissé. Mais le taux
baisse, il a tendance à baisser. C'est difficile à établir
selon le nombre de kilowatts-heures qu'on met dans le ratio et le nombre
d'individus qu'on met dans le ratio. Il y a des individus qui travaillent
à temps plein, d'autres à temps partiel, des temporaires, il y a
le nombre de kilowatts-heures vendus, il y a ceux qu'on vend en bloc et il y a
ceux qu'on vend à l'intérieur du Québec. Mais nous avons
quand même convenu de deux blocs, de deux chiffres, de deux courbes que
nous comparons ensemble, qui nous semblent les plus représentatives de
cette activité. L'an dernier, notre croissance de productivité
était autour de 3,5%. Je pense que lorsque nous aurons approuvé
ce qui nous est demandé cela va dépendre du nouveau
conseil il y aura encore un fléchissement. Cela va probablement
baisser autour de 3,2% ou 3,3%.
C'est aussi très sensible aux ventes. Il suffit d'un faible
changement pour le pourcentage des ventes de kilowatts-heures pour soit
l'améliorer, soit l'empirer. Quand même, c'est assez constant. Je
pense qu'il y a beaucoup de gens chez nous qui s'intéressent à
d'autres études, dans le sens de ce que vous appelez plus globales, qui
pourraient être faites, mais, chaque fois qu'on les demande, qu'on se
penche là-dessus, on s'aperçoit que c'est assez difficile de
faire ces études et de les publier, parce qu'on trouve qu'elles ne sont
pas vraiment représentatives de la réalité à cause
de la très grande variété des "inputs " qu'il faut mettre
dedans.
M. Raynauld: Par hasard, vous n'auriez pas quelque chose sur le
coût du travail par kilowattheure, sur la même base que ce que vous
avez donné? Comme c'est là, si vous avez une augmentation de
productivité de 3,5%, en chiffres physiques, pécuniairement, il
faut que ce soit négatif, absolument.
M. Boyd: J'ai ici un chiffre à donner sur la population,
incluant les employés permanents et temporaires. En 1977, c'était
3 600 000 kilowatts-heures par employé. Si on parle de kilowatts-heures
vendus, c'est-à-dire en incluant la production qu'on achète de
Churchill Falls, c'était 5 millions de kilowatts-heures par
employé. Ce sont des statistiques qui sont utilisées lorsqu'on
fait le travail du budget, des postes. Vous avez tout à l'heure fait
allusion à l'Hydro-Ontario. Il faut, premièrement, faire bien
attention lorsqu'on parle de IHydro-Ontario et comparer les mêmes choses.
Au Québec, l'Hydro-Québec. a la distribution de presque la
totalité de la province, tandis que, lorsqu'on parle des chiffres de
l'Hydro-Ontario, cela exclut environ 325 commissions municipales qui font leur
propre distribution avec leur propre personnel et qui ne sont pas incluses dans
les chiffres de l'Hydro-Ontario. Malgré tout cela, lorsqu on parle de 17
000 employés, si on inclut les temporaires, je crois qu'il y en a
environ 25 000 à l'Hydro-Ontario, pour une production à peu
près
équivalente, excluant les réseaux de distribution de 325
commissions municipales. On aurait tendance à croire qu'on est beaucop
plus productif que ne l'est l'Hydro-Ontario.
M. Raynauld: Cela va, merci!
M. Ciaccia: M. le Président, quels projets de
construction, d'investissements avez-vous prévus après 1985? Dans
le secteur de la Baie James, vous avez le projet possible de la NBR et de La
Grande Baleine. Premièrement, avez-vous décidé à
quel projet vous allez procéder? Quel serait votre
échéancier? Avez-vous une estimation des coûts de ces deux
projets?
M. Boyd: M. Monty va répondre à cette question.
M. Monty: Premièrement, on pourrait peut-être
rappeler le programme 1978-1985 qui est le même qu'on avait produit l'an
dernier et dans lequel on retrouve la mise en service complète
d'Outardes 2 qui sera fini ces jours-ci, la mise en service, en 1979, de la
centrale de turbines à gaz de La Citière à Laprairie ainsi
que la mise en service des quatre premiers groupes du complexe La Grande qui
vont s'échelonner par la suite en contenant LG 2, LG 3 et LG 4, d'ici
1985, jusqu'à la fin de 1985.
Pour ce qui est des projets qui devront être mis en chantier
à partir de 1982, pour une mise en service après 1985 ou 1986, la
décision sera prise uniquement au printemps de 1979. Les études
se font actuellement. Nous croyons qu'à la fin de l'année, nous
serons en mesure de faire un résumé et de valider les projets en
cause. (17 h 30)
En fait, il y a une série de projets à l'étude. On
a étudié les projets au nord de la rivière La Grande,
c'est-à-dire La Grande Baleine. Nous étudions aussi les projets
au sud de La Grande Rivière, le projet des trois rivières
Nottaway, Broadback et Rupert. D'ailleurs, à titre d'information, pour
le projet NBR, à la fin de 1978, nous aurons dépensé en
études préliminaires, en relevés de terrain, un montant de
$53 millions. Nous prévoyons en 1979 dépenser S23 millions si la
décision était daller de l'avant, par exemple, vis-à-vis
le NBR avant La Grande Baleine. Si, évidemment, la décision
était prise d'aller de l'avant sur La Grande Baleine avant, le montant
de $23 millions serait réduit, selon la date de décision qui
serait prise.
M. Joron: Plus ce dont M. Boyd parlait ce matin, les additions au
complexe La Grande, qui sont possibles à Laforge et Eastmain et LG
1.
M. Monty: Évidemment, ce que M. Boyd disait ce matin, LA
1, LA 2, c'est pour des projets de demande qui pourraient être mis en
service en 1988 et 1989, qui pourraient être regroupés avec ceux
qu'on étudie actuellement. Quant à La Grande Baleine,
actuellement, les dépenses qui ont été faites au niveau
des études préliminaires se chiffrent à $17 millions
à la fin de 1977, et $17 600 000 à la fin de 1978. C'est
uniquement au printemps 1979 qu'on aura pris une décision sur le
programme pour les travaux qui seront mis en chantier en 1982 et 1983 pour une
mise en service en 1986, 1987, 1988. 1989.
M. Ciaccia: Est-ce qu'il y a des problèmes particuliers
qui seraient rattachés, par exemple, à NBR et des
problèmes particuliers à La Grande Baleine?
M. Monty: Non, les problèmes, on les connaît. On a
actuellement prévu les solutions aux problèmes auxquels on a fait
face depuis les études qui se font sur le NBR et La Grande Baleine.
C'est une question de coûts, une question de projets les plus
économiques dans l'ensemble qui favoriseraient la décision.
M. Ciaccia: Est-ce qu'il y a des problèmes techniques
particuliers quant au projet de La Grande Baleine, comme la question de
distance? Est-ce que, par exemple, l'année dernière, on a subi
pas mal de pannes d'électricité... Il y en a qui disaient qu'une
des causes, c'était naturellement la question de Churchill Falls, la
distance des lignes de transport. Est-ce que ce problème va s'accentuer
quand vous allez à des distances aussi grandes que La Grande
Baleine?
M. Monty: Évidemment, plus on construit des milles de
lignes, plus on devient vulnérable. Lorsqu'on avait validé ou
étudié les trois possibilités de réseaux de
transport pour le complexe La Grande, qui incluait le NBR, on avait
examiné le 735, qui fonctionnait déjà, et le 1100 kV en
courant alternatif, ainsi que le 1200 en courant continu. Maintenant, il
semble, d'après les études que nous avons faites, que la
quantité d'énergie qu'on a à transporter et les distances,
même en incluant La Grande Baleine, justifient la décision qui a
été prise de construire tout le réseau à 735 kV. Il
semble qu'avec une capacité de l'ordre de 15 000 ou 20 000
mégawatts, à une distance allant jusqu'à 700 milles
à 800 milles, on justifie entièrement le choix de 735 000 volts
pour les moyens de transport.
M. Ciaccia: Est-ce que vous avez les coûts comparatifs par
kilowatt-heure, par exemple, d'un projet NBR par rapport au projet La Grande
Baleine?
M. Monty: C'est ce que nous faisons actuellement, avant qu'une
recommandation ne soit portée au conseil d'administration.
M. Ciaccia: Est-ce qu'on peut avoir l'assurance du ministre qu'on
va nous soumettre cela à une commission parlementaire où qu'on va
nous donner tous les renseignements quant aux estimations des coûts,
quant à tout ce dont on aurait besoin pour savoir exactement les raisons
pour lesquelles un de ces projets va se faire plutôt qu'un autre, avant
que ce ne soit...
M. Joron: Quelle que soit la forme que prenne cette transmission
d'information, c'est clair qu'elle sera prête.
M. Ciaccia: Je reviens à ma question de prévisions
de l'Hydro-Québec, des prévisions de la demande. Mon
expérience était que les prévisions que
l'Hydro-Québec avait faites, si on regarde les quelques dernières
années, étaient pas mal exactes. J'ai beaucoup de respect pour
votre service de planification et les projections que vous faites quant
à la demande globale. Je me souviens que dans la cause de la baie James,
on avait contesté, de la part des autochtones qui demandaient
l'injonction, les prévisions que vous aviez faites, disant que
c'était trop élevé, que vous n'aviez vraiment pas besoin
de ce projet pour...
M. Joron: En quelle année cela se passait-il?
M. Ciaccia: Cela a commencé, je pense en 1972, 1973.
M. Joron: Avant la crise de l'énergie, justement.
M. Ciaccia: Oui, les prévisions... Subséquemment,
je crois que les chiffres, même après la crise, n'ont pas
changé sensiblement. Pour satisfaire à toute la demande globale,
vous avez fait certains projets, certaines planifications et j'en viens
à la différence avec votre projection totale des demandes
globales et celle dans le livre blanc. Cela va affecter les décisions
qu'un gouvernement doit prendre, parce que s'ils n'acceptent pas vos
projections globales pour la demande globale, ça veut dire que les
décisions qu'il va prendre soit dans votre domaine de
l'hydroélectrique, soit dans d'autres domaines, que ce soit le gaz
naturel ou le pétrole, vont être sensiblement différentes.
C'est vrai qu'au niveau des équipements, en ce qui vous concerne
aujourd'hui, il n'y a pas tellement de différence. Vous répondez
aux prévisions, aux projections qui sont contenues dans le livre
blanc.
Est-ce que vous aviez d'autres projets, à part les projets
hydroélectriques à la baie James, proposés pour satisfaire
à la demande globale, la portion que l'Hydro-Québec pourrait
contribuer à cette demande globale? Par exemple, est-ce que vous aviez
d'autres projets dans le nucléaire et est-ce que vous avez
abandonné ou allez abandonner ces projets face au livre blanc, qui
semble prendre une approche, l'énergie en rose, un peu, parce qu'ils
disent: On n'aura pas besoin de tant d'énergie dans les années
1990? Il va falloir qu'ils démontrent à la population que la
croissance sera moindre. Est-ce que vous avez abandonné quelques-uns de
vos projets de même que votre planification dans certains secteurs?
M. Monty: On n'a rien abandonné. Tout de même, on
avait prévu, c'est exact, un programme de nucléaire, en fonction
d'une demande. Évidemment, la tendance actuelle, c'est qu'on veuille
réaliser des projets hydroélectriques en plus gran- de
quantité. Alors, c'est pour ça qu'actuellement la fourchette des
projets que nous étudions est plus grande et plus large, mais, tout de
même, nous allons réaliser Gentilly 3. On a eu le feu vert pour le
programme nucléaire de Gentilly 3, pour la mise en service en 1988. Il
est fort possible qu'éventuellement on puisse quand même
réaliser d'autres projets nucléaires. Maintenant, la
décision sera prise éventuellement. Entre-temps, nous
prévoyons d'autres projets dans l'hydroélectricité, de
façon à satisfaire à la demande qui se fera.
M. Ciaccia: À quel endroit ces autres projets dans
l'électricité, parce qu'il doit y en avoir... Plus loin vous
allez, moins ça devient rentable.
M. Joron: Vous avez 10 000 mégawatts encore à aller
chercher seulement dans la région de la baie James.
M. Monty: Sur la Côte-Nord.
M. Ciaccia: Au nord de la Baie James?
M. Joron: Pour et aux alentours. Au nord, au sud et aux
environs.
M. Ciaccia: ... oui.
M. Monty: Si on inclut ensemble la validation du complexe La
Grande, et si on inclut La Grande Baleine et le complexe NBR, on retrouve
très près de 10 000 à 12 000 mégawatts encore.
M. Ciaccia: Mais vous avez mentionné Gentilly 3. Vous
allez procéder avec votre planification au plan du nucléaire,
malgré la décision du gouvernement fédéral quant
à LaPrade?
M. Joron: Ce n'est pas une décision. C'est une intention
annoncée.
M. Ciaccia: Quelle est la position du ministre dans cette
intention annoncée?
M. Joron: La position du ministre est très claire à
cet égard. On a signé un contrat par lequel Ottawa s'engage
à construire l'usine d'eau lourde selon un échéancier
prévu se terminant en 1982.
D'autre part, on s'engage à fournir de la vapeur pour faire
fonctionner cette usine et on s'engage à acheter une quantité
d'eau lourde et à mettre en service un réacteur
supplémentaire au cours de la décennie 1980. C'est ce dont vient
de parler, M. Monty, Gentilly 3.
Pour autant que nous sommes concernés, un contrat est un contrat.
Il lie les parties et il n'y a pas de signe, jusqu'à maintenant, qui
nous montre que l'autre partie a effectivement, dans les faits, à ce
jour, rompu ce contrat.
Ce qu'Ottawa a annoncé, c'est l'intention de demander à
l'Energie atomique du Canada Ltée d'entrer en négociation avec
l'Hydro-Québec pour voir s'il ne serait pas possible de reprendre une
des clauses centrales de ce contrat et de refaire
l'échéancier sur une plus longue période. Ceci ne
nous intéresse absolument pas évidemment parce que cela aboutit
à ralentir les travaux, à les mettre en veilleuse pendant un
certain nombre d'années et cela met des gens en chômage.
Notre position est donc qu'on ne veut pas s'engager dans une telle
négociation, puisqu'une telle négociation ne conduit qu'à
perdre quelque chose et à ne rien gagner. On a fait savoir et on a dit
publiquement que ce n'était pas notre intention du tout de permettre
à l'Hydro-Québec d'entreprendre de telles négociations
avec l'Energie atomique du Canada Ltée.
Si, de son côté et tout devient hypothétique,
un gros "si" l'autre partie veut unilatéralement rompre le
contrat, on avisera en temps et lieu de ce qu'on fera.
M. Ciaccia: II me semble que c'est un autre changement de
position que vous énoncez maintenant.
M. Joron: Pas du tout. Cela fait quatorze fois que je
répète la même chose depis un mois. Cela m'étonne
que vous me le demandiez encore.
M. Ciaccia: À moins que tous les journaux vous aient mal
interprété, c'était votre première position que
vous ne vouliez pas négocier, mais, votre deuxième position,
c'était que vous étiez prêt à négocier...
M. Joron: Non. Je n'ai pas de deuxième position. Ce
à quoi vous faites allusion, c'est une question qui m'a
été posée: Qu arriverait-il, puisqu'il reste à
dépenser à cette usine d'eau lourde $650 millions? Sur un
coût de $850, il y en a à peu près $200 millions de
dépensés et il en reste $650 millions à venir. J'ai dit
ceci question hypothétique encore qui commence par un
énorme "si": Si le gouvernement fédéral disait: Fort bien,
les $650 millions que nous sommes engagés par contrat à
dépenser dans les années qui viennent à cet endroit, on
les prend et on vous les donne, faites-en ce que vous voulez.
M. Ciaccia: Vous accepteriez cette position.
M. Joron: ... j'écouterais ce qu'il a à dire, parce
qu'il y aurait probablement moyen de faire des investissements
énergétiques qui non seulement protégeraient les emplois
concernés, mais peut-être, sait-on jamais, pourraient en
créer davantage.
Tout ce que j'ai dit, c'est-à-dire que si on était
prêt à transférer entièrement ce qu'on s'est
engagé à dépenser dans un calendrier donné, si on
devait transférer cet argent dans le même calendrier,
j'écouterais ce qu'ils ont à dire. Je ne suis pas fou, ni sourd.
Je vais écouter.
M. Ciaccia: Ce n'est pas ce qui a semblé être sorti.
C'est pour cela que je veux...
M. Joron: C'est bien précisément ce que j'ai
dit.
M. Ciaccia: Je veux bien comprendre clairement que vous
êtes prêt à écouter en ce qui a trait à
l'utilisation de ces fonds, pourvu que le fédéral les remette au
Québec...
M. Joron: Oui.
M. Ciaccia: ... et ces fonds pourraient aller dans d'autres
projets énergétiques...
M. Joron: II faudrait voir.
M. Ciaccia: Vous allez voir. Peut-être que cela pourrait
financer l'Hydro-Québec, mais si cela arrive...
M. Joron: Vous admettrez avec moi que, d'abord, c'est une
question hypothétique, qui commence par un "si", et qu'il y a un gros
pourvu que ' là-dedans.
M. Ciaccia: Non, mais c'est une différence d'approche.
Cela va faire une différence, par exemple, à
l'Hydro-Québec, de savoir si votre position est: Non, on ne
négocie pas, parce qu'on a un contrat '
Selon certaines opinions, c'est une technologie que le Québec ne
devrait pas perdre et avec laquelle il devrait continuer avec le contrat pour
l'usine LaPrade. C'est une position. Maintenant vous dites: On est prêt
à écouter les autres propositions. Ou vous écoutez les
autres propositions, dans lequel cas cela ne répondra peut-être
pas, premièrement, à la question d'emploi, de la
technologie...
M. Joron: Écoutez. Le gros pourvu en question c'est pourvu
qu'il ait fait un transfert de $650 millions. À ce moment-là, une
des options qui pourraient être ouvertes encore une fois, ce serait
d'acheter l'usine et d'en poursuivre la construction nous-mêmes.
M. Ciaccia: Je ne veux pas vous mettre dans l'embarras face aux
demandes de votre conseil national. Ce n'est pas le but de ma question. Je
voudrais savoir quelle position...
M. Joron: Cela ne m'a pas mis du tout dans l'embarras. Le conseil
national a confirmé ce que j'avais dit. (17 h 45)
M. Ciaccia: Quelle position prenez-vous vis-à-vis le
gouvernement fédéral, parce que cela va affecter directement le
fonctionnement.
M. Joron: Nous ne voulons pas renégocier ce
contrat-là. It stands as is. Par contre, on ne veut pas que
l'Hydro-Québec se mette à table avec l'Energie atomique du Canada
et commence à discuter d'un autre calendrier. Ce serait en dehors du
contrat, négocier un bris de contrat, un changement au contrat qui n'est
aucunement à l'avantage du Québec. Si le gouvernement
fédéral, par contre, veut venir voir le gouvernement, non pas
l'Hydro-Québec, disposé au départ à mettre sur
la
table S650 millions, j'écouterai ce qu'il a à me dire.
Mais je lui dis ceci: Si, au départ, vous ne voulez pas partir d'Ottawa
avec $650 millions que vous êtes prêts à mettre sur la
table, ne vous dérangez même pas. Ne venez pas me voir.
M. Ciaccia: Parce que dans votre communiqué de presse
je ne cite pas un journal, je cite votre communiqué de presse que
vous avez émis vous-même une seule hypothèse serait
susceptible de rendre possible l'ouverture d'un tel dialogue, si le
gouvernement du Canada faisait au gouvernement du Québec une offre ferme
de lui transférer intégralement, selon le même calendrier,
les sommes qu'il doit par contrat investir dans les prochaines années
à l'usine LaPrade, afin de réaliser d'autres projets
énergétiques susceptibles de créer un nombre d'emplois au
moins équivalent. Alors, vous ouvrez la porte ici. Vous semblez indiquer
que vous ne tenez pas mordicus à ce que LaPrade soit continué. Ce
que vous voulez, c'est l'argent. Et vous allez en faire ce que vous voulez et
cela peut être dans un autre domaine. Je pense qu'il y a une
différence d'approche en ce qui concerne l'Hydro-Québec. Je pense
que c'est assez clair.
M. Joron: Je ne vois pas la différence.
L'Hydro-Québec est liée à l'Energie atomique du Canada par
un contrat. On dit qu'on veut que ce contrat soit respecté.
M. Ciaccia: Non. mais vous dites...
M. Joron: Si, d'autre part, le gouvernement fédéral
est prêt, au départ, à transférer dans le même
calendrier les $650 millions, là j'écouterai ce qu'il a à
dire. C'est bien entendu que je ne peux pas fermer la porte parce qu'une de mes
options c'est de faire LaPrade moi-même.
M. Ciaccia: Est-ce que c'est afin de réaliser d'autres
projets? Vous ne dites pas que c'est afin de réaliser LaPrade,
strictement pour cela. C'est pour réaliser d'autres projets. Cela
pourrait être dans d'autres domaines. Ce n'est pas nécessairement
à LaPrade.
M. Joron: Pas nécessairement, mais cela ne l'exclut pas
non plus.
M. Ciaccia: Alors, vous laissez la porte ouverte, c'est ce que
vous dites. Ce n'est pas nécessairement LaPrade. Vous ne tenez pas
mordicus à LaPrade. vous tenez mordicus à l'argent que le
gouvernement fédéral doit investir au Québec.
M. Joron: Compte tenu du fait que le gouvernement
fédéral n'a jamais investi un cent dans le développement
énergétique du Québec, mais en dépense partout
ailleurs, tant dans l'Ouest que dans l'Arctique et est prêt à en
dépenser dans les provinces maritimes, je pense que la bien petite
partie de notre dû qu'on n'a jamais eue, on n'est pas pour la laisser
passer ainsi.
M. Ciaccia: Ce n'est pas cela, ne détournez pas le
débat; ce n'est pas ce que je demande, insister pour avoir l'argent
d'Ottawa. J'essaie de trouver, dans votre réponse, quelle est votre
position quant à l'usine de LaPrade. Est-ce que vous voulez l'argent
d'Ottawa, parce que vous voulez l'utiliser pour d'autres fins? Je ne mets pas
en doute l'à-propos de votre demande auprès d'Ottawa pour
récupérer ces sommes? Ce n'est pas là du tout l'objet de
ma question. Je ne conteste pas cela.
Mais qu'allez vous faire avec cet argent? Vous laissez les portes
ouvertes à d'autres projets énergétiques, peut-être
investir cet argent à l'Hydro-Québec et réduire les
montants qu'ils vont emprunter. Je ne sais pas; c'est une possibilité
que vous avez vous-même évoquée. Où encore est-ce
que vous dites à Ottawa; Si vous ne continuez pas LaPrade, donnez-moi
l'argent, je vais la continuer. Dans ce cas-là, l'Hydro-Québec va
savoir à quoi s'en tenir.
M. Joron: C'est ce que je vous dis. Je n'ai pas
déterminé quelle utilisation on pourrait faire avec ce transfert
très théorique, très hypothétique, vous l'admettrez
avec moi.
M. Ciaccia: Vous gardez les portes ouvertes. M. Joron:
C'est ça.
M. Ciaccia: Vous pourriez prendre cet argent, oublier LaPrade, et
utiliser l'argent à une pipeline...
M. Joron: II faudrait, je pense, effectivement, revoir
l'opportunité des différents choix qui s'offriraient alors
à nous.
M. Ciaccia: Est-ce que je pourrais demander à
IHydro-Québec, sans impliquer ses porte-parole dans un débat
politique, sa position, est-ce que vous voulez...
M. Joron: Cela va être difficile.
M. Ciaccia: Non, la position que vous prenez, c'est que vous
voulez continuer le projet que vous avez commencé, dans le
nucléaire. Est-ce que vous exigerez que ce programme, je ne parle pas de
l'avenir, ne soit pas interrompu?
M. Monty: Actuellement, nous continuons le projet tel que
prévu.
M. Ciaccia: Vous le continuez.
Le Président (M. Dussault): J'ai, sur ma liste, M. le
député d'Abitibi-Est.
M. Bordeleau: M. le Président, concernant de nouveaux
développements ou de nouveaux investissements, particulièrement
celui de NBR. D'abord, un court préambule. Je pense que
IHydro-Québec sait très bien que certains reproches qui
viennent
de milieux de ma région en particulier, à cause des
développements qui sont dans ce coin-là s'adressent
à elle, parce qu'elle ne dévoile pas toujours à l'avance
ses intentions au niveau de la façon dont elle va faire ses
développements. Je dis l'Hydro-Québec, ça pourrait aussi
être la SEBJ.
Je sais, en particulier, qu'il y a une ville comme Matagami qui
s'inquiète souvent de la façon dont vont se développer les
nouveaux projets, en particulier celui de NBR qui serait au nord de la ville de
Matagami. D'ailleurs, le maire de Matagami a écrit une lettre
récemment au ministre. Les représentants de l'Hydro-Québec
en ont reçu copie.
J'aimerais savoir s'il y a une politique concernant la construction ou
la mise en place d'infrastructures ou de structures permanentes comme des
villages à certains endroits, dans le plan de développement du
projet NBR en particulier. La ville de Matagami s'inquiète, parce qu'il
y a des rumeurs qui circulent à savoir que l'Hydro-Québec, par la
SEBJ, aurait l'intention de construire un village à 60 milles ou
à peu près au nord de Matagami.
J'aimerais savoir s'il y a une politique bien déterminée
là-dessus et si ces rumeurs sont fondés, sinon, si elles ne sont
pas fondées, de quelle façon voyez-vous ça, afin de
rassurer les édiles municipaux?
M. Boyd: Justement, avant de partir de mon bureau hier matin,
j'ai signé une lettre à l'intention du ministre, pour lui
permettre de répondre au maire qui exprimait ses inquiétudes.
À Matagami, comme vous le savez, on a bâti un aéroport,
mais, dans le complexe NBR, il y aura des campements et des villages pour un
certain personnel sur les différents sites qui seront le long de la
rivière Rupert, le long de la rivière Broadback, ou le long de la
rivière Nottaway. Mais il n'est pas question du tout de bâtir un
village à côté de Matagami. Il n'y a aucun village
prévu, comme je le dis dans ma lettre, dans un rayon de 100 milles de
Matagami.
De toute façon, on a étudié cette question qui nous
a été transmise par le ministre et c'est dans ce sens qu'on a
donné la réponse. C'est une rumeur qui n'est pas
fondée.
M. Bordeleau: C'est souvent comme cela des rumeurs. Maintenant,
même s'il n'est pas question de construire de village, vous dites qu'il y
aura quand même des campements. Je comprends bien cela. Mais est-ce que
vous considérez tout l'équipement qui est actuellement existant
à Matagami même, pour l'utiliser au maximum? Pensez-vous faire
voyager un certain nombre de travailleurs qui pourraient résider
à Matagami, vers les chantiers, par autobus, sur une distance de 40
milles à 100 milles à peu près? Est-ce que tout a
été étudié pour utiliser au maximum les structures
existantes et faire bénéficier Matagami de ces
développements?
M. Boyd: II est trop tôt pour répondre
précisément à votre question. Premièrement, je ne
voudrais pas susciter d'intérêt inutile pour le moment dans ce
coin, parce qu'on n'a pas encore décidé à quel moment NBR
sera construit, peut-être que ce sera le troisième des groupes
dont on a parlé; donc, on est loin dans le temps, quant à dire
qu'on va faire ceci ou cela aujourd'hui, ce serait susciter de faux espoirs ou
des espoirs qui vont être assez lointains.
Mais c'est évident que, dans la planification du projet, on
utilisera les installations, les infrastructures qui sont à Matagami,
dans toute la mesure du possible. En fait, actuellement, je pense qu'il y a au
moins un entrepreneur qui fait du travail sur le chantier du complexe La
Grande, qui fait certains travaux de fabrication et d'assemblage à
Matagami et qui transporte ensuite cet équipement sur la route.
Il y en a d'ailleurs un autre qui fait la même chose à
Val-d'Or. Cela a donné de l'emploi sur les iieux. Ce sont deux cas qui
me viennent à la mémoire. C'est quand même loin de LG 2,
Matagami, mais on a favorisé ces deux cas. Si d'autres entrepreneurs
voulaient faire la même chose, je pense bien que ce serait de mise.
Pour NBR, lorsque cela viendra je ne peux pas vous dire à
quel moment la centrale NBR sera bâtie c'est évident que
les infrastructures qui existent seront utilisées dans toute la mesure
du possible.
M. Bordeleau: D'accord. D'ailleurs, je trouve que vous avez
choisi deux bons exemples qui sont intéressants pour la région,
chez nous. Le seul souhait que j'ai à formuler, c'est que cela
s'accentue le plus possible. Je comprends, d'autre part, que cela dépend
en partie des entrepreneurs qui ont des contrats.
Cela m'amène à une autre question ayant surtout rapport
aux chantiers actuels existants et qui concerne les conditions de vie. Ceux qui
faisaient partie de la commission parlementaire en avaient passablement
parlé l'an dernier. Cette année, il semble qu'on en parle moins;
en tout cas, jusqu'à maintenant. Il y a des problèmes, c'est
sûr il y en avait, il y en a sûrement encore par
exemple au niveau justement des conditions de vie. Je vais peut-être
soulever un problème qui va faire rire des gens, qui peut ne pas
paraître important pour des gens qui ne demeurent pas sur les chantiers,
mais je pense cela l'est pour les travailleurs de la baie James même. En
tout cas, pour y être allé à plusieurs reprises, je sais
combien cela peut être important. C'est au sujet de la consommation de
boissons alcooliques, particulièrement de la bière, sur les
chantiers et particulièrement sur le chantier de LG 2. Je me souviens
qu'il en avait été question l'an dernier en commission
parlementaire. Je suis allé moi-même avec le ministre du Travail,
M. Johnson, y passer quelques jours pour rencontrer les travailleurs
là-bas. Je pense que tout le monde connaît la situation, mais,
pour résumer rapidement, tout le monde sait que les travailleurs ont une
taverne et doivent boire de la bière en fût, alors que les cadres
ont des clubs et, en général, ont de la bière en canette
et aussi des boissons fortes.
M. Boyd: Là-dessus, j'ai de bonnes nouvelles.
M. Bordeleau: Pardon?
M. Boyd: J'ai de bonnes nouvelles.
M. Bordeleau: Ah bon! cela me fait plaisir.
M. Boyd: Tout récemment...
M. Bordeleau: La bière en fût ou la bière en
canette?
M. Boyd: Lorsque le président nous aura permis de lever la
séance, on pourra prendre un verre. Oui, on peut annoncer que,
maintenant, depuis tout récemment, la bière en canette se vend
dans toutes les tavernes au complexe La Grande. C'est une des choses qui
étaient désirées, c'est maintenant effectif.
Il faut aussi ajouter, pour tout dire, qu'au moins dans deux chantiers,
et cela reviendra dans les autres, les employés ont des restaurants.
Entre autres, à LG 2 - il y a le Remblai. Je ne sais pas comment il
s'appelle à LG 3, il y a un autre nom, le Repaire où les
employés peuvent aller, accompagnés ou non, prendre un repas avec
consommation de bière ou de vin pour faire un peu changement par rapport
à la cuisine, très bonne, d'ailleurs, des
cafétérias. Ce sont des choses qu'on ajoute au fur et à
mesure. Concernant la bière en canette, qui est un bien gros
problème, il est réglé, puisqu à notre avis, les
gens peuvent l'acheter maintenant, la prendre dans toutes les tavernes.
M. Bordeleau: Est-ce qu'éventuellement, étant
donné que...
M. Raynauld: Je pensais que le député
s'inquiétait de la trop grande consommation de bière sur les
chantiers. Je pensais que c'était cela que vous vouliez souligner.
M. Bordeleau: Pas du tout. Je pense que les travailleurs...
M. Raynauld: Ah bon!
M. Bordeleau: Je pense que les travailleurs de la baie James,
comme tous les autres, ont droit à leurs consommations. Justement,
étant donné que le problème des tavernes est
réglé, au sujet de la bière en canette, il y a aussi le
problème connexe, bien sûr, de la possibilité d'acheter de
la bière et de l'apporter avec soi. En ce qui concerne les cadres, je
sais qu'ils ont droit d'acheter deux caisses de bière par semaine, alors
que les employés ne le peuvent pas. Est-ce que cela va déboucher
là-dessus éventuellement?
M. Boyd: Je le pense bien. Il y a un autre pas à faire,
c'est la question d'emmagasinage et de transport, etc., mais je pense qu'on va
y arriver. Le premier pas étant fait, je pense que le deuxième va
être moins difficile.
M. Raynauld: Le problème va être réglé
à la baie James, si on est capable de donner de la bière.
M. Bordeleau: Non, je pense que cela ne réglera pas
nécessairement tous les problèmes, mais je pense que, pour un
travailleur, c'est important. D'accord! Je suis très satisfait, je vous
remercie. (18 heures)
Le Président (M. Dussault): M. le député de
Beauharnois.
M. Lavigne: J'allais poser ma question à M. Boyd. Vous
êtes sans doute au courant, M. Boyd, qu'on a vécu cette semaine
une commission parlementaire sur le projet de loi 69, sur l'environnement. Dans
la loi, on sait qu'il y a un article qui parle d'étude d'impact. On
obligera par cette loi toutes les sociétés, les entreprises
privées ou même gouvernementales, à des études
d'impact avant l'implantation d'un nouveau barrage, d'une ligne
hydroélectrique ou quelque projet que ce soit. On ajoute même,
remarquez que c'est toujours à l'état de projet de loi, ce n'est
pas encore une loi, qu'il peut y avoir des amendements d'ici à ce qu'il
soit adopté et devienne loi. Il est même question dans le projet
de loi que les citoyens de la localité qui pourront être
concernés par le projet aient le droit d'assister aux séances
d'études d'impact. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.
Le Président (M. Dussault): M. Boyd, si vous permettez,
avant de répondre à la question, il serait peut-être
intéressant, pour l'assistance en tout cas, de savoir que, par une
convention établie entre les parties avant qu'on aille dîner, il a
été convenu que nous pourrions nous rendre jusqu'à 18 h 30
plutôt que de revenir après le souper. C'est pour cette raison que
je laisse passer 18 heures.
M. Boyd?
M. Boyd: Excusez-moi. M. Boulanger va répondre à
cette question puisqu'il a assisté et était notre
représentant à la commission sur l'environnement.
M. Boulanger (Jean): Effectivement, je n'ai pas
présenté le mémoire moi-même, mais j'étais
présent lors de la présentation du mémoire.
Sur la question telle que posée par le député, je
dois dire que, dans le mémoire que nous avions soumis, nous nous sommes
déclarés favorables aux études d'impact et, effectivement,
nous avons souligné que nous faisions déjà des
études d'impact depuis fort longtemps à l'Hydro-Québec,
bien avant que la loi ne l'exige. Sur ce point-là, nous sommes
entièrement favorables à ce qui est dit dans le projet de
loi.
Le Président (M. Dussault): II n'y a pas d'autres
intervenants? Nous n'avons plus de questions à poser aux
représentants de l'Hydro-Qué-
bec. Nous en sommes arrivés aux remarques habituelles de la
fin.
M. le député de Mont-Royal?
Conclusion M. John Ciaccia
M. Ciaccia: J'aimerais remercier, M. le Président, nos
invités de leurs réponses, de leur patience, face aux questions
qu'on leur a posées, et de la coopération qu'ils ont
démontrée.
En concluant, M. le Président, je pense que ces séances de
la commission parlementaire nous ont démontré, quant à
nous, que ce n'est pas vraiment le forum pour discuter convenablement afin
d'arriver à certaines conclusions sur la tarification. Alors, il
faudrait absolument trouver un autre mécanisme pour discuter de ces
questions. Nous avons proposé une régie. Le ministre a
suggéré que ça pourrait peut-être être une
commission parlementaire dotée de pouvoirs additionnels. Quoi qu'il en
soit, les sommes qui sont impliquées, les problèmes qui sont
soulevés, les conséquences dans tous les différents
secteurs de notre société, je pense bien que cela
mériterait d'autres mécanismes qu'une commission
parlementaire.
Je n'ai pas fini. Puis-je continuer?
Le Président (M. Dussault): Soyez bien à l'aise, M.
le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: II y aura aussi la question fondamentale. Quelle
proportion de nos budgets pouvons-nous allouer au développement
énergétique par le gouvernement, au développement
hydroélectrique dans les années à venir, parce que cela
affectera, en définitive, les autres priorités que le
gouvernement et que la société pourraient avoir, d'autres
besoins? On aurait aimé explorer...
Vous vous êtes référé, M. Boyd, à
l'étude de M. Sultan, l'économiste en chef de la Royal Bank, qui
a fait une étude sur les difficultés de financement dans
l'avenir. Je pense qu'il a souligné qu'on ne peut se permettre de penser
que des sommes seront disponibles à tous les échelons. Il y a
certains obstacles. Il y a les montants qui seront demandés, les
priorités et l'assiette de la province. Si une plus grande proportion du
budget total, des sommes totales qu'une province requiert vont, que cela soit
même une société d'État, logiquement, les sommes ne
sont pas limitées, il faudra faire des coupures ailleurs. Je pense
qu'une des questions fondamentales est d'explorer plus à fond le vrai
coût d'autres formes d'énergie.
Si le gouvernement n'avait pas d'autres priorités politiques, je
pense qu'il ferait plus attention au coût d'autres formes
d'énergie. Je pense que cela sera une des questions auxquelles on
s'attaquera et on essaiera de soulever un débat au sein de la population
pour qu'elle soit informée, mais il faut absolument mettre le
gouvernement en garde dans ce sens.
On a vu aussi que, suite aux hausses tarifaires demandées par
Hydro-Québec, on arrive à faire un cadeau de $85 millions au
gouvernement en taxe de vente. Je pense que ce n'est pas le but d'une demande
de hausse de tarifs. D'après vous, le but est de pouvoir faire face aux
obligations de l'Hydro-Québec dans les années à venir. Si
on est déjà les plus taxés au Canada, ajouter une autre
taxe de $85 millions en trois ans me paraît injuste. C'est une
conséquence, un accident des hausses de tarifs, mais je crois que le
gouvernement devrait prendre les mesures nécessaires pour ne pas
pénaliser deux fois le consommateur.
M. Raynauld: Ce n'est pas un secteur mou.
M. Ciaccia: Parce qu'on a déjà assez de
problèmes économiques ici sans en ajouter. Dans les mois à
venir, nous allons, M. le ministre, examiner votre politique
énergétique. Je vois que vous avez déjà
vous-même, après seulement trois mois, fait un changement dans
votre politique parce qu'à la page 69, en parlant de la position face au
fédéral, vous aviez dit, et je cite votre livre blanc: "Un
objectif du gouvernement dans ce domaine est d'assurer un transfert de
technologie vers le Québec à l'occasion de la construction de
l'usine d'eau lourde et de G 3". C'est clair, mais votre position aujourd'hui
est moins claire et le communiqué de presse que je vous ai lu ouvre la
porte. Ce n'est pas votre position aujourd'hui. Aujourd'hui, vous semblez dire:
On peut négocier et utiliser ces sommes d'argent pour d'autres fins.
M. Joron: Incluant de faire la même chose.
M. Ciaccia: Ce n'est pas la même chose. Ouvrir la porte
comme cela et dire, en noir et blanc, que vous voulez transférer la
technologie, ce n'est pas tout à fait la même chose. Seulement
pour souligner que nous allons vous apporter d'autres... Soyez assuré
que nous apporterons d'autres commentaires et d'autres critiques à votre
livre blanc dans les mois à venir et beaucoup de problèmes qui
ont été soulevés ici, ce n'était pas vraiment le
forum, parce que cela touchait d'autres aspects du livre blanc, mais nous
allons nous reprendre dans d'autres endroits à l'Assemblée
nationale et à d'autres endroits en temps opportun. Encore une fois, je
veux remercier les invités et un des résultats, une des
conséquences de la demande d'une hausse de tarifs pour trois ans
je comprends que c'est la stabilité que vous voulez dans votre
société et dans vos activités, mais si le gouvernement
accorde cette demande aujourd'hui, cela va lui éviter d'aller faire face
au public dans les années à venir. Il l'a accordé
aujourd'hui et c'est pour cela que nous avons suggéré que ce
n'était pas ici le forum approprié pour en venir à des
conclusions sur ce sujet.
Le Président (M. Dussault): M. le député de
Richmond.
M. Yvon Brochu
M. Brochu: M. le Président, j'aimerais à mon tour
aussi faire quelques réflexions et vous livrer
certaines impressions à la suite des travaux de cette commission
parlementaire.
Nous avons eu une journée et demie, à toutes fins utiles
quelques heures pour faire l'analyse rapide, à vol d'oiseau, d'un bilan
de $15 milliards d'augmentation des tarfis, l'ampleur dont on nous a
parlé, sur lesquelles travaillent pendant douze mois toute une kyrielle
d'experts dans le domaine. Nous avons pu poser certaines questions, tout en
nous tenant dans les délais qui nous étaient fixés
à l'intérieur du corridor obligatoire que la présidence a
dû, par ses fonctions, nous tracer.
De cette commission, il ressort qu'on nous indique maintenant une
hausse, sur trois ans, des tarifs d'électricité avec les montants
qu'on connaît et qui sera, à toutes fins utiles, ratifiée,
acceptée et qui recevra la bénédiction du conseil des
ministres du présent gouvernement. Il ressort également que, dans
le contexte actuel aussi, lorsque l'Hydro-Québec, comme c'est le cas,
fait face à des besoins nouveaux, elle a la possibilité d'avoir
la main sur le robinet, tant en termes d'emprunt qu'en termes de hausse de
tarif et les commissions parlementaires successives que nous avons tenues
à ce chapitre en font éloquemment la démonstration.
Par contre, de son côté, il convient de souligner aussi que
le citoyen a peut-être moins accès à un robinet direct en
ce qui concerne l'augmentation de ses revenus. Si la situation, dans son
ensemble, est difficile à un point tel que l'Hydro-Québec doit
passer par les augmentations qu'elle demande, le citoyen consommateur,
également, vit dans le même contexte, dans le même cadre de
temps et de données de société.
On apprend aussi évidemment, par les travaux de cette commission
parlementaire au cours de cette année et demie, une prétendue
économie de $1 milliard qui nous a été
présentée comme telle par la presse de ce matin, parce qu'on
reporte simplement une partie des travaux, soit celle de LG 1 qui fait pourtant
quand même partie de l'ensemble du complexe auquel on devra ajouter, en
note finale, la facture complète de LG 1, complétée au
coût d'alors, étant donné qu'on devra, comme l'a
indiqué M. le Président, refaire les plans, ce qui apportera une
facture globale beaucoup plus considérable que $15 milliards, plus $1
milliard en question, compte tenu du fait qu'en cours de route on a
augmenté certaines possibilités de production à LG 3 et
à LG 4.
La réalité est celle-là. J'ai eu l'occasion de
souligner dans mes remarques préliminaires - je prends la peine d'y
revenir, puisque j'y attache une certaine importance également - la
grande discrétion que certains experts ont soulignée en ce qui
concerne l'administration de l'Hydro-Québec, en ce qui concerne
également l'accessibilité à certaines données.
Je vous réfère simplement à l'étude
Boyer-Martin, où on avait dit à ce moment-là qu'on avait
eu grand-peine à obtenir certaines données fondamentales pour ses
études et également au rapport de l'OPDQ qui avait
été demandé par le gouvernement, rapport qui a
été déposé en mars 1977.
De cette journée et demie de commission parlementaire, il se
dégage également un fait en ce qui concerne le contentieux
fédéral-provincial de l'usine LaPrade. Le problème demeure
entier, et il demeure tout à fait présent, même si aucune
réponse n'a été apportée, aucune réponse
satisfaisante, dans le cadre de cette commission parlementaire. C'est à
un point tel que même si l'annonce d'intention faite par le gouvernement
fédéral devrait s'avérer réalité et
qu'à ce moment-là le gouvernement provincial devait rajuster ses
positions, même si, dans ce cadre de rajustement, il devait recevoir les
montants totaux du projet que le gouvernement fédéral devrait
verser, on ne sait encore pas et c'est devenu encore plus clair au cours
de nos discussions si le gouvernement du Québec continuerait
spécifiquement l'usine LaPrade ou si, avec ces quelques centaines de
millions, il n'irait pas vers d'autres projets ou des choses tout autres,
remettant ainsi en question un domaine important du portrait
énergétique du Québec.
Donc, la commission, dans sa journée et demie de
délibérations, n'a pas non plus, à ce chapitre,
donné de résultats satisfaisants. Bien au contraire, on y a tout
simplement souligné l'ampleur des problèmes.
Je remets donc un peu en question le rôle de notre commission,
après une journée et demie de discussions autour d'un bilan comme
celui de l'Hydro-Québec. Il n'y a vraiment, mais vraiment, aucune
commune mesure qu'on puisse établir entre le rôle et le mandat de
cette commission parlementaire et la société d'État qu'est
l'Hydro-Québec, qui revient, comme annuellement, présenter son
bilan et demander sa hausse de tarifs. (18 h 15)
J'insiste sur ce facteur, ayant suivi depuis un bon bout de temps tous
les développements de la question énergétique, ayant suivi
toutes et chacu-nes des commissions parlementaires. J'ai vraiment cette
impression de plus en plus claire et l'expérience de cette
journée et demie passée ensemble démontre qu'il n'y a
vraiment aucune commune mesure entre les deux.
La comparution de l'Hydro-Québec cette semaine m'apparaît
plutôt comme une formalité érigée en coutume et dont
on veut bien s'acquitter, peut-être pour une des dernières fois,
plutôt qu'une analyse efficace de la part d'une commission
éclairée ayant un mandat et des pouvoirs effectifs.
Il m'apparaît que, dans ce sens, l'appareil démocratique
qu'est l'Assemblée nationale, à travers ses commissions comme
celle que nous avons aujourd'hui, ne joue pas pleinement un rôle
véritable et dynamique vis-à-vis de ces sociétés
d'État et, plus particulièrement dans le cas qui nous
préoccupe, vis-à-vis de l'Hydro-Québec.
À la lumière de cette dernière expérience,
on se doit de souligner l'urgent besoin que nous avons de repenser, en tant que
législateurs, et de modifier notre approche quant à l'analyse des
bilans et des performances et quant au mode de fonctionnement et au plan de
développement de toutes nos sociétés d'État. Nous
avons absolument besoin de trouver une autre formule pour assurer
un droit de regard réel et certains pouvoirs aux
députés, à l'intérieur d'un cadre précis qui
pourrait avoir un poids plus équivalent à celui des
sociétés d'État, en termes de documentation, en termes
d'information, en termes de possibilités d'analyse et surtout avoir un
poids plus équivalent en termes de continuité, pour s'assurer
justement qu'il n'y ait pas ce décalage entre le législateur qui
a des responsabilités précises, mais qui se retrouve en quelque
sorte en position de faiblesse, parce qu'il n'a pas justement cet
élément de continuité, d'où le besoin et la
nécessité de repenser, à très court terme, notre
mode d'approche en tant que législateurs face à l'ensemble des
sociétés d'État.
J'aurai donc à ce chapitre, M. le Président je
termine mes remarques la-dessus au nom de l'Union Nationale, très
bientôt, à faire des propositions très précises en
ce sens, lesquelles, j'espère, pourront également recevoir
l'assentiment des autres membres de cette commission comme des autres partis
politiques également pour améliorer l'approche du
législateur dans ce sens et corriger cette situation qui, disons-le
ouvertement, m'apparaît tout à fait anormale, celle que nous
venons de vivre à cette commission parlementaire qui ne produit, je
pense, ni pour la société d'État, ni non plus pour le
législateur, les rôles et les buts précis que l'on pourrait
atteindre avec toute l'efficacité qu'on veut bien rechercher.
M. le Président, c'étaient là les quelques
remarques que je voulais faire. J'aurai donc l'occasion de revenir plus
amplement à d'autres tribunes sur cette question particulière qui
me tient beaucoup à coeur et à laquelle l'Union Nationale portera
une attention particulière dès l'ouverture des travaux de la
Chambre.
Le Président (M. Dussault): M. le ministre. M. Guy
Joron
M. Joron: M. le Président, en terminant, je voudrais faire
le point à partir d'une remarque du député de Richmond
dans le sens que le gouvernement allait bientôt ratifier la demande de
tarifs que l'Hydro-Québec nous a présentée aujourd'hui. Il
ne faut rien tenir pour acquis.
L'exercice d'aujourd'hui et d'hier consistait à recevoir l'avis
de l'Hydro-Québec sur une question, à poser des questions
à l'Hydro-Québec, à la lumière des réponses
apportées, à la lumière des remarques des membres de
l'Opposition, représentants des élus du peuple comme les membres,
d'ailleurs, du côté ministériel de la commission
parlementaire. C'est à la lumière de ces remarques, et en pesant
d'autres choses également que le gouvernement aura une décision
à prendre, c'est évident, puisque le processus de notre loi
prévoit que c'est le cabinet qui approuve le règlement tarifaire,
le gouvernement va avoir à prendre des décisions dans les
semaines qui viennent, c'est évident. Je ne voudrais pas du tout que
l'on parle de ratification automatique, parce que les soucis du gouvernement,
je tiens à vous les dire, c'est de savoir quels sont les critères
qui vont nous guider dans l'évaluation de tout ce qui s'est dit ici
depuis deux jours. Il y a une chose qui me semble ressortir, c'est le
bien-fondé, si vous voulez, des investissements partons du haut
de la pyramide requis pour les trois prochaines années, de
façon à pouvoir faire face à la demande
d'électricité. Je pense que c'est une chose à laquelle on
n'échappe pas.
Il faut se soucier, comme l'a dit le député de Mont-Royal,
du pourcentage que ces investissements représentent, dans le total des
investissements qu'une société fait. Est-ce que c'est en train de
devenir trop gros? C'est exactement cela l'objet d'une politique
énergétique. Cela dépasse un peu le cadre de notre
discussion immédiate, mais c'est justement notre souci que de contenir
ces investissements et de là découlent, évidemment, les
programmes d'économie d'énergie et tout cela. Il faut bien se
rendre compte qu'il y a une demande d'électricité à
laquelle on a à faire face à court terme. Pour répondre
à cette demande, on a des investissements importants à faire,
quoi qu'il en soit. On tente de les optimiser, ces investissements, et on en a
eu une preuve aujourd'hui. On a trouvé un moyen pendant cette
période, la période de la phase 1 de la Baie James nous menant en
1985, de réduire le fardeau d'investissement de $1 milliard.
Déjà, cela dégage, si vous voulez, la somme de $1 milliard
qu'on n'aura pas à emprunter ou qui sera libérée pour fins
d'investissement dans d'autres secteurs de la société par
d'autres agents que ceux dont on parle aujourd'hui.
Cette optimisation, c'est un premier moyen de réduire le fardeau.
Il reste qu'en fin de compte il faut payer ces investissements, une partie en
emprunts, une partie en autofinancement, c'est-à-dire fournie par les
abonnées d'électricité, partie fournie par les
marchés étrangers. Comment fait-on la part des deux?
Évidemment, l'exercice consiste c'est le souci principal du
gouvernement, c'est ce qui va guider nos délibérations dans les
semaines qui viennent à prévoir et essayer de voir par
quel moyen on peut réduire le fardeau financier que l'on exige des
abonnés. C'est notre principal souci.
Il y a des moyens. Le gouvernement va vouloir étudier, par
exemple, ce qu'on a évoqué, la productivité de
l'Hydro-Québec, par exemple, les dépenses d'exploitation et tout
ça. On va vouloir peser ça. On va vouloir peser les avis qui nous
ont été donnés aujourd'hui quant à la
disponibilité des capitaux, des montants qu'on peut emprunter ou ne pas
emprunter sur les marchés, et plus on peut en emprunter,
évidemment, moins on en a à contribuer nous-mêmes.
L'Hydro-Québec a un avis là-dessus. Il n'est pas dit que le
gouvernement va avoir exactement le même avis. Il faudra voir. On va
peser tout ça.
Je comprends c'est normal que l'Hydro-Québec, en
nous donnant son avis, cherche, bien entendu, voulant protéger la
solidité financière traditionnelle et remarquable d'une
entreprise, à se protéger contre certains aléas. On a
parlé depuis deux jours de certains de ces aléas, quelles seront
les variations des taux de change, qui, évidem-
ment, peuvent affecter nos dépenses en intérêts, ce
qu'on a à verser annuellement en intérêts, toutes sortes
d'aléas semblables, les ventes d'énergie excédentaire, qui
seront peut-être plus grandes ou moins grandes, toute autre forme de
revenu, si vous voulez, qui pourrait diminuer le fardeau des contribuables.
L'Hydro-Québec, évidemment, cherche à être
prudente et à protéger la solidité financière de
l'entreprise et à répondre à son mandat de procurer
l'électricité au plus bas coût possible.
Ce que je dis, c'est que le gouvernement a également des
responsabilités peut-être plus larges, moins spécifiques
que celles de l'Hydro-Québec, et ce fait va amener le gouvernement
à considérer la demande qui nous est présentée,
depuis hier, à la lumière de tout cela.
Soyez assurés d'une chose, c'est qu'on va essayer, par tous les
moyens possibles... Peut-être qu'il y en a, parmi ceux-là qui,
dans la réflexion qui va suivre dans les semaines qui viennent, vont
nous permettre de trouver des choses que les dernières journées
ne nous ont pas permis de trouver. C'est notre souci d'essayer
d'alléger, bien entendu, le fardeau que l'on impose aux contribuables,
bien qu'il faille dire que tout cela reste quand même un investissement,
de la part des contribuables, éminemment rentable, parce que non
seulement tous ces investissements génèrent beaucoup
d'activités économiques au Québec même, procurent
des emplois, mais cela nous fournit également une énergie
à meilleur marché d'ailleurs que celle qu'on pourrait importer.
Ce n'est pas une mince affaire non plus, c'est un placement, dans le fond, que
font les abonnés, sauf que, me direz-vous, quand on impose un tarif,
c'est un placement forcé, un plan d'épargne forcée.
Cependant, cela ne veut pas dire qu'en soi cette partie d'épargne
forcée appelons les choses par leur nom n'est pas
bénéfique. Évidemment, personne n'aime être
forcé à épargner plus qu'il n'en a l'intention. On
comprend cela et c'est pourquoi on va chercher à minimiser la chose.
En terminant, je veux remercier à mon tour je suis le
premier à le faire les membres de l'Opposition, d'une part, qui
nous ont fourni plusieurs idées intéressantes, dont deux
importantes que je relève parmi d'autres, sur lesquelles je suis
d'accord. Ce souci d'améliorer le forum dans lequel se déroule ce
genre de discussion, je le partage. On l'a déjà exprimé
dans le livre blanc sur la politique énergétique.
J'espère qu'une prochaine occasion comme celle-ci se
déroulera d'une façon différente pour permettre de
meilleurs instruments d'analyse aux membres de la commission et une plus large
participation de l'"input" du public.
Je partage également le souci du député de Richmond
d'améliorer les mécanismes par lesquels les parlementaires ou les
élus du peuple peuvent connaître ou être au fait de ce qui
se passe dans nos sociétés d'État. Je suis d'accord avec
vous c'est inadéquat. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle le
gouvernement a l'intention d'amener de la législation dans ce sens, non
pas spécifiquement par rapport à l'Hydro-Québec, mais pour
l'ensemble des sociétés d'État, avant la fin de
l'année.
Je remercie les autres membres de la commission parlementaire de ce
côté-ci de la table pour leur participation à nos
débats et, finalement, les membres de la Commission
hydroélectrique, dont le mandat se terminera dimanche prochain.
Je les remercie en commençant par M. Boyd pour leur
participation très active à nos discussions depuis deux jours et,
sans évidemment les nommer tous un par un, tous ceux qui les
accompagnaient.
Alors, merci à tous et bonne chance aux nouveaux membres du
conseil d'administration qui commencent une tâche ardue dès lundi
prochain.
Le Président (M. Dussault): Merci, M. le ministre. Le mot
de la fin revient toujours au président.
Je tiens à remercier de leur participation et plus
spécifiquement de leur collaboration les représentants de
l'Hydro-Québec et de la Société d'énergie de la
baie James, les membres de cette commission, bien sûr, et le rapporteur
de cette commission fera rapport à l'Assemblée nationale.
J'ajourne les travaux de cette commission sine die.
Fin de la séance à 18 h 28