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Question avec débat: La politique relative au
pétrole
(Onze heures trente minutes)
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, s'il vous plaît!
Il s'agit de la commission permanente de l'énergie et des
ressources qui se réunit ce matin pour une question avec débat
posée par le député de Mont-Royal au ministre de l'Energie
et des Ressources sur le sujet suivant: La politique relative au
pétrole. Avant de céder la parole à celui qui a
posé la question avec débat, j'aimerais rappeler qu'en vertu de
l'article 162-A de notre règlement, je vais donc donner en premier lieu
la parole au député de Mont-Royal pour une vingtaine de minutes,
au ministre par la suite qui répondra pour une vingtaine de minutes tout
en répétant que ces deux députés, celui qui pose la
question et celui qui répond, ont un droit de parole
privilégié, mais non exclusif. Ceci étant dit, je
cède la parole au député de Mont-Royal.
Exposé du sujet M. John Ciaccia
M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Le pétrole,
comme on le sait, joue un rôle vital dans l'économie du
Québec et dans la vie des Québécois. Il est important non
seulement pour les automobilistes et pour leur budget, mais il est d'une
importance cruciale dans toute l'économie, par exemple, les industries
qui dépendent du pétrole, le secteur manufacturier, l'industrie
pétrochimique, les engrais chimiques, les matériaux de
construction. En somme, il y a très peu de produits que le
pétrole n'affecte pas directement ou indirectement. Dès lors,
toute politique qui ne tient pas compte de ces données et qui ne vise
pas à s'assurer d'une part des prix acceptables et, d'autre part, d'une
sécurité d'approvisionnement ne peut être qu'une politique
néfaste pour l'ensemble du Québec et pour son économie. On
ne peut aborder le problème de la politique du pétrole au
Québec hors du contexte général canadien et c'est parce
que le gouvernement actuel s'obstine à vouloir considérer
l'énergie au Québec comme un problème à part que
les citoyens du Québec pourraient avoir à affronter de
sérieuses difficultés. On ne peut subordonner nos politiques sur
le pétrole à des fins idéologiques. C'est pourquoi il me
semble important de faire un rappel de la situation réelle qui
prévaut en ce moment au Québec et au Canada, si nous voulons
établir un dialogue qui soit fructueux.
Commençons par la situation au Québec. Il est important de
comprendre que le pétrole compte pour 68% dans nos besoins
énergétiques alors que l'électricité ne compte que
pour 26% et le gaz naturel 6%. Même en tenant compte des
prévisions les plus optimistes du gouvernement,
l'électricité ne pourra pourvoir tout au plus que 40% de nos
besoins et cela, pas avant 1990. Ce sont les prévisions du gouvernement
dans son livre blanc sur l'énergie. Cela veut dire que le Québec,
même après 1990, aura encore besoin de combler la
différence de 60% dans ses besoins énergétiques qu'il
devra aller chercher à l'extérieur.
Actuellement, nous importons grosso modo, approximativement, 61% de
notre pétrole de l'Alberta et seulement 31,6% d'autres sources. Ceci est
en contraste avec la situation avant 1976 où, à la suite de la
crise énergétique en 1973, le gouvernement fédéral
a prolongé le pipe-line de Sarnia à Montréal, ce qui a
permis au Québec de recevoir son pétrole brut de l'Alberta pour
60% de ses besoins de pétrole. On peut se demander ce que, à
l'époque, en 1973, avec la crise énergétique de ce moment,
un gouvernement en place au Québec qui aurait eu les politiques du
gouvernement actuel aurait fait. Est-ce qu'il se serait fié sur les
ressources canadiennes ou bien est-ce qu'il aurait pris la position de se
tourner vers les marchés internationaux et aurait-il
empêché ou demandé que le pipe-line ne soit pas
construit?
Nous voyons les conséquences que ces politiques peuvent avoir
pour l'ensemble du Québec. Quand on parle de la crise
énergétique en 1973, il faut se rappeler aussi qu'en 1975 il y a
eu une pénurie aux Etats-Unis dans le gaz naturel; durant l'hiver de
1975, il y a eu des écoles et des industries qui ont dû fermer
leurs portes parce qu'elles n'avaient pas d'approvisionnement. Nous voyons
encore les avantages d'être approvisionné de sources canadiennes
et ne pas dire comme le gouvernement actuel semble dire: Nous allons aller aux
marchés mondiaux et l'on n'a pas besoin du Canada.
Quand le ministre au Développement économique va à
travers le continent en déclarant à qui veut l'entendre que nous
sommes les Arabes de l'électricité, sans dire que nos besoins
d'énergie ne sont couverts qu'à concurrence de 26% de sources du
Québec une grande partie vient de Churchill Falls qui est en
dehors du Québec et que ce pourcentage ne dépassera pas
40% dans l'hypothèse la plus favorable, il crée un climat de
fausse information qui empêche le Québec et son gouvernement de
jouer le rôle qui aurait dû être normalement le leur sur la
scène canadienne en ce moment.
On peut affirmer que le pétrole jouera toujours un rôle
essentiel dans l'économie du Québec, dans un avenir
prévisible. C'est pourquoi il me semble que le gouvernement devrait se
préoccuper, non seulement du futur prix du pétrole, mais surtout
de sa disponibilité et, par conséquent, de la
sécurité d'approvisionnement. Regardons pour un moment la
situation au Canada.
Vous me permettrez, M. le Président, de faire un bref rappel ici
des besoins canadiens en pétrole en tenant compte de la consommation
intérieure, de la production domestique et de
l'importation. D'après les chiffres de Statistique Canada pour
l'année 1977 qui ne varient pas tellement, l'utilisation totale est
approximativement de 773 000 000 de barils par année. De ce montant,
nous importons 244 280 000 barils et nous exportons approximativement 119 000
000 de barils. Donc, le Canada produit 650 000 000 de barils sur les 737 000
000 qu'il utilise. Si on tourne cela en pourcentage, on voit que le Canada
importe seulement 15% de ses besoins, alors que sa production couvre 85% de la
demande intérieure. Il y a là un contraste à faire avec
les États-Unis, qui doivent importer près de 50% de leurs besoins
en pétrole. Alors, nous sommes donc dans une situation beaucoup plus
enviable, mais cependant plus importantes encore me paraissent les perspectives
telles qu'elles existent et telles que le gouvernement actuel veut les
avoir.
Alors, si on regarde dans le livre blanc sur l'énergie, produit
par le prédécesseur du ministre actuel, on peut lire, à la
page 64, qu'au cours des années quatre-vingt le pétrole brut
canadien cessera d'être disponible. C'est dans le livre blanc sur
l'énergie. Mais ce qui est encore plus sérieux, permettez-moi de
citer à la page 96 ce que dit ce livre blanc sur la
souveraineté-association: "À partir de 1983, selon l'Office
national de l'énergie, l'épuisement des ressources albertaines se
traduira par la diminution graduelle, jusqu'à leur cessation
complète, des arrivages à Montréal du pétrole de
l'Ouest canadien. En outre, et à la suite des hausses
décidées par le gouvernement fédéral, le prix du
brut, au Canada, aura atteint, vers 1983 également, le prix
international. Ainsi prendra fin le système temporaire de subvention au
pétrole importé, qui permit au gouvernement fédéral
d'assigner au pétrole, dans l'ensemble du Canada, un prix
inférieur au prix mondial. "Pour le Québec, cela signifie que,
dans quelques années, il retournera à la situation d'avant 1976:
le pétrole brut traité dans ses raffineries proviendra
entièrement des marchés mondiaux et, d'où qu'il vienne,
son prix sera partout le même au Québec, au Canada et dans les
autres pays. En cela, la situation du Québec ne sera pas
différente de celle de l'Ontario ou de la plupart des pays
industrialisés, notamment les plus riches d'entre eux: la Suisse, la
Suède, le Danemark et l'Allemagne, qui ne produisent pas de
pétrole."
M. le Président, ces déclarations, je regrette de le dire,
sont fausses. Ce sont de fausses déclarations. Elles ont
été faites seulement pour appuyer les objectifs politiques,
séparatistes de ce gouvernement. Et cela est, à mon avis, un
autre exemple de ce que ce gouvernement est prêt à faire pour
fausser la réalité, afin d'atteindre ses buts, même si
c'est au détriment du bien-être de la population au Québec,
la vérité dut-elle en souffrir.
Toutes les politiques et les déclarations de ce gouvernement sont
basées sur cette déclaration, sur les données de cette
déclaration qui sont fausses. Si on démontre que ces
données sont fausses, tous les gestes posés par le gouverne- ment
et toutes les déclarations qui s'ensuivent aussi. En effet, l'Office
national de l'énergie a déclaré ce qui suit dans le
document: L'huile au Canada, besoins et approvisionnements, septembre 1978. Je
cite: "L'office s'attend à ce que le potentiel de production de
pétrole brut et d'équivalent canadien continuera à
s'amenuiser au taux annuel d'environ 5% jusqu'au milieu des années 1980.
La mesure dans laquelle ce taux fléchira vers la fin des années
1980 dépend surtout du rythme auquel les gisements de sables bitumineux
de l'Alberta seront mis en valeur. "Comme on l'a mentionné
précédemment dans le présent chapitre, l'office a
présumé un rythme dynamique de mise en valeur des sables
bitumineux, rythme qui maintiendrait la production à un niveau global
supérieur à 1 300 000 barils par jour au cours de la
période de prévision." Les présomptions de l'office se
traduisent par des faits concrets, parce qu'il y a en effet des nouveaux
projets qui sont en cours de construction pour le développement des
sables bitumineux. En effet, selon l'Office national de l'énergie, les
réserves canadiennes de pétrole brut récupérables
se chiffraient, en 1978, à 5 700 000 000 de barils. Cela veut dire que
nous pourrons nous approvisionner pour une période d'approximativement
onze ans au rythme d'utilisation actuel et en estimant que le niveau de
production ultérieur se maintienne. À ces données, il faut
ajouter la récupération potentielle et les nouvelles
découvertes que l'augmentation des prix rendra accessibles à la
production. Là encore, selon l'Office national de l'énergie, il
existe près de sept milliards de barils ce sont des estimations
des nouvelles découvertes ce qui fait encore une suffisance pour
une douzaine d'années de production pour le Canada."
Si on ajoute ces chiffres, on voit que nous avons, seulement avec les
sources traditionnelles, approximativement 23 années à un taux de
production constante et ceci ne tient pas compte des réserves "off
shore" qu'il est actuellement difficile de quantifier. Mais ce n'est pas tout,
il y a aussi les sables bitumineux. Selon Frazer H. Allen, le président
de Canada Petroleum Company Ltd et président de l'Association canadienne
du pétrole, les réserves canadiennes de pétrole des sables
bitumineux représentent environ un milliard de barils, dont 300
milliards sont récupérables. Actuellement, il semble que le prix
de revient du baril de pétrole à partir des sables bitumineux est
proche du prix mondial. Selon un rapport rendu public par la Rand Corporation,
ce prix se situerait entre $22 et $30 en devises américaines, ce qui
représenterait de $25 à $35 canadiens le baril. C'est dire que
les réserves canadiennes en pétrole sont considérables et
que l'affirmation du livre blanc à ce sujet est totalement fausse et
irresponsable. D'après les précisions, on pense même...
J'ai ici un graphique qui démontre, d'après les réserves
qui sont établies, qui vont en fléchissant, des sables
bitumineux, qu'on prévoit l'autosuffisance au Canada entre
l'année 1995 et l'an 2000. Le gouvernement actuel a une politique qui
viserait l'autosuffisance en 1990.
J'ai un autre graphique qui démontre même le potentiel, qui
démontre que si le développement des sables bitumineux est
accéléré, peut-être que le Canada aura même un
surplus vers les années 1995. Il ne s'agit pas de pénurie, il ne
s'agit pas de couper l'huile qui va venir de l'Alberta, tel que l'affirme le
gouvernement dans son libre blanc sur la souveraineté-association, dans
les déclarations des ministres. C'est totalement faux. Si on base notre
politique et les besoins sur ces critères au Québec, on fausse la
réalité et on va à l'encontre des intérêts
des Québécois.
Ma première question est celle-ci: Comment le ministre peut-il
expliquer, dans ce contexte, les déclarations du livre blanc? Comment
peut-il concilier ses déclarations avec les faits existants? (11 h
45)
Alors, parlons des prix. D'après le ministre, on va aller au prix
mondial. C'est sûr que si on a un scénario, que le
référendum est gagné par le gouvernement, ce qui est fort
peu probable, ce qui n'arrivera pas, mais mettons un scénario possible
dans le contexte des espoirs du ministre et du gouvernement, cela veut dire
qu'on paierait le prix mondial dès le mois de mai prochain et ça
doublerait le prix du baril.
Je voudrais demander au ministre si, par hasard, quand on parle d'aller
au prix mondial, il a fait des études sur l'impact qu'aurait
l'augmentation du prix du pétrole à ce niveau sur
l'économie québécoise? Si on va au prix mondial, quel est
l'effet sur l'économie du Québec?
L'Ontario a fait une telle étude. Je me demande, si le ministre
ici a fait une telle étude, s'il peut déposer une copie. S'il
n'en a pas fait, ne croit-il pas que c'est une approche totalement
irresponsable d'avoir une politique d'aller au prix mondial sans savoir les
conséquences pour le Québec? En Ontario, le secteur industriel
utilise 63,2% de gaz et de pétrole; au Québec, c'est 55,3%. C'est
un peu moins ici, mais il va certainement y avoir un impact et on voudrait
savoir quel sera cet impact.
À l'Assemblée nationale, le ministre a
suggéré que l'augmentation du prix du pétrole devrait
s'échelonner sur un nombre d'années. La question que je voudrais
poser au ministre est celle-ci: Quelle position a-t-il prise à Ottawa?
A-t-il déposé un mémoire à Ottawa, est-ce qu'il a
pris la position qu'il fallait que ce soit échelonné sur un
nombre d'années? S'il a déposé un mémoire à
Ottawa, est-ce qu'il pourrait nous en fournir une copie? Dans la position du
ministre, qu'est-ce qu'il distingue entre sa position, la position de l'Ontario
et la position de l'Alberta? Je voudrais que le ministre nous précise la
position exacte qu'il a soumise au gouvernement fédéral.
Récemment, on a prétendu que le gouvernement
fédéral envisagerait une augmentation du prix du baril de $4 par
année, jusqu'en 1983. Si tel était le cas, est-ce que le ministre
est au courant ou a-t-il envisagé les bénéfices que
pourrait en retirer le Québec dans le cadre d'une augmentation
progressive des prix? J'ai fait un calcul; j'ai pris les chiffres du
gouvernement dans le livre blanc sur l'énergie, qui prévoyait une
diminution de la demande qui se situe entre 1% et 1,8% par année. Pour
être conservateur, j'ai pris 1,8%, ce qui réduit les
bénéfices possibles.
Si nous prenons comme base de référence une augmentation
de 10% du prix mondial, de 8,9% en 1981, en descendant, jusqu'en 1983, je crois
que ce sont des projections qui sont assez conservatrices, on voit que les
bénéfices pour le Québec, dans ce scénario, se
chiffreraient à $6 800 000 000.
Si on prend un autre scénario où on va aller au prix
mondial en 1986, où on paierait $45 le baril c'est une estimation
du prix mondial à ce temps les bénéfices seraient
encore de $5 600 000 000. Alors, dans les deux scénarios, nous avons des
bénéfices énormes pour le Québec. On peut
déduire de cela approximativement un montant de 10% qui
représente les subventions non payées par le gouvernement
fédéral par la taxe à l'exportation mais payées par
le fonds consolidé.
On doit ajouter à tout cela la péréquation que mon
collègue, le député d'Outremont, va élaborer
tantôt, et les bénéfices que nous retirons, parce que nous
payons $2.15 les 1000 pieds cubes pour le gaz naturel, tandis que l'Alberta le
vend aux Etats-Unis, au prix canadien, $3.97 les mille pieds cubes. C'est
$3.45, mais je traduis je vois le ministre qui est en désaccord
le dollar américain en dollar canadien.
En somme, c'est un bénéfice énorme; c'est une
grande différence, et il ne faut pas dire qu'on va suivre le
marché mondial. Le marché, normalement, ne se fait pas de l'Est
à l'Ouest; le marché est Nord-Sud. Si on était à
notre guise et si l'Alberta n'avait pas les contraintes de l'Office national de
l'énergie, ce serait plus facile et plus avantageux pour elle de vendre
ses produits aux Etats-Unis plutôt que d'être obligée de les
vendre au Québec.
M. le Président, me permettez-vous quelques minutes
additionnelles? Je sais que mon temps s'écoule, mais, vu que nous avons
consenti, la semaine dernière...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Cela s'appliquerait aux deux et à tout le monde. C'est
d'accord.
M. Ciaccia: Oui. La semaine dernière, nous devions avoir
cette question avec débat. Nous aurions eu trois heures totales. Je vais
terminer dans quelques minutes, mais je dépasserai peut-être de
deux ou trois minutes.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
D'accord.
M. Ciaccia: Merci. Il y a un autre aspect, M. le
Président, que nous devons porter à l'attention du ministre et
à l'attention de la population. Dans des conditions normales, le prix du
pétrole, comme le prix d'autres ressources, serait le prix mondial. Ce
seraient les règles du marché qui s'appliqueraient, mais nous ne
sommes pas dans des conditions
normales parce que, depuis plusieurs années, nous avons une
situation dictée par des décisions politiques. Ce ne sont pas les
règles normales du marché qui s'appliquent. Souvent, ces
décisions politiques sont prises dans des conditions
d'instabilité politique dans les pays où elles sont prises.
Alors, je ne crois pas que, dans ces conditions, on doive fixer immuablement un
soi-disant prix mondial.
Premièrement, depuis 1973, nous n'avons pas payé le prix
mondial et, au fur et à mesure, que le prix canadien augmente, le prix
mondial augmente encore plus. Compte tenu de la situation très favorable
qui existe au Canada en matière de pétrole, situation rendue
encore plus avantageuse du fait des réserves considérables en gaz
naturel que l'on peut utiliser comme substitut au pétrole, diminuant en
cela la consommation, et compte tenu des raisons politiques et pas
nécessairement économiques qui semblent dicter le prix mondial
on voit la crise iranienne, on a vu les déclarations des autres
pays visant à augmenter leur prix pour des raisons politiques je
pense que ce n'est pas réaliste de parler aujourd'hui de payer le prix
mondial. Mais il faut certainement prendre en considération le
coût du développement des ressources énergétiques au
Canada.
Je voudrais demander au ministre s'il a l'intention d'intervenir
auprès du gouvernement fédéral pour demander que les
augmentations prévues du prix du pétrole soient graduelles et
échelonnées sur plusieurs années afin d'en atténuer
les effets sur l'économie du Québec et sur les revenus du
consommateur québécois, tout en reconnaissant que les provinces
productrices ont droit à leur juste part. Je demanderais au ministre
quelle position il prendra sur le prix ultime que les Québécois
devront payer. Est-ce le prix mondial, même s'il va à $50 le
baril, ou un prix canadien tenant compte des situations politiques mondiales et
tenant compte du coût du développement
énergétique?
En conclusion, M. le Président, la position actuelle du
gouvernement du Québec pourrait mettre en péril
l'approvisionnement en pétrole du Québec. Le gouvernement
placerait le Québec à la merci du marché international
quant au prix et, ce qui est encore plus important, quant à
l'approvisionnement. À ce sujet, permettez-moi de citer les propos de M.
Nordine Ait Laoussine, le vice-président de Sonatrach Alger,
prononcés au quatrième colloque international d'économie
pétrolière, tenu au Château Frontenac le 29 octobre. Je
cite M. Laoussine et c'est important qu'on en réalise les
conséquences pour le Québec. Je cite: "Pour l'ensemble des pays
de l'OPEP, la consommation pétrolière enregistre une augmentation
annuelle de l'ordre de 15%. À ce taux qui représente un
doublement tous les cinq ans, certains pays de l'OPEP entrevoient
déjà la perspective d'un arrêt de leurs exportations. Il y
a donc lieu de penser que ces pays de l'OPEP dont les réserves seront
sollicitées davantage qu'elles ne le sont aujourd'hui pour
répondre aux besoins importants qui se manifesteront au cours de la
prochaine décennie seront tout naturellement conduits à
réduire progressivement, voire à arrêter totalement leurs
exportations pour faire face aux besoins prévisibles de leur propre
consommation. ' Au Canada, M. le Président, nous avons accès
à des sources d'énergie qui sont à l'abri des
perturbations politiques et à des prix plus avantageux.
Dans de telles circonstances, essaierons-nous d'obtenir nos
approvisionnements sur les prétendus marchés internationaux ou
devons-nous nous fier plutôt sur les approvisionnements qui sont plus
certains au Canada? L'été dernier, par exemple, M. le
Président, les Etats-Unis voulaient faire une association en
matière énergétique avec le Canada. Or, le Canada a
proprement refusé. Alors, voici un des pays les plus riches au monde qui
veut s'associer avec nous en matière énergétique et
l'attitude du gouvernement actuel, c'est de ne pas prendre cette offre en
considération, c'est de traiter le Canada comme un autre pays
étranger. Je trouve cela absolument incroyable. Avec cette attitude,
comment le gouvernement peut-il protéger les intérêts des
Québécois? En adoptant de telles positions les positions
que le ministre a prises il a vraiment démissionné comme
représentant des Québécois au sein de la
fédération canadienne.
M. le Président, je veux simplement rappeler au ministre les
questions que je lui ai posées. J'apprécierais des
réponses à ces questions précises. Premièrement,
comment peut-il expliquer, dans ce contexte, les déclarations du livre
blanc quant à 1983 et les années subséquentes, à
savoir qu'on n'aura plus de l'huile de l'Ouest? Deuxièmement, est-ce
qu'il a fait des études d'impact? Si oui, peut-il nous en fournir?
Troisièmement, quelle position a-t-il adoptée à Ottawa?
A-t-il déposé un mémoire? Peut-il nous en donner une copie
et nous expliquer sa position? A-t-il l'intention d'intervenir auprès du
gouvernement fédéral pour demander que les augmentations soient
échelonnées sur un nombre d'années pour protéger
l'économie du Québec afin de réduire les effets
d'inflation et pour protéger les consommateurs? Finalement, quelle
position le ministre adoptera-t-il concernant le prix ultime que les
Québécois devront payer, le prix mondial, même s'il va
aller à $50 le baril, ou un prix canadien tenant compte du coût de
développement, mais qui n'arrivera pas nécessairement au prix
mondial? Merci.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Merci, M. le député de Mont-Royal. M. le ministre de
l'Énergie et des Ressources.
Réponse du ministre M. Yves
Bérubé
M. Bérubé: Merci, M. le Président. En fait,
en essayant de prévoir et d'anticiper un peu les interventions de
l'Opposition, je me suis non pas amusé, parce que j'ai trouvé
cela plutôt sinistre, mais je me suis complu à lire les
déclarations des différents porte-parole de l'Opposition dans
le
domaine énergétique, parce qu'on ne sait plus trop qui est
le porte-parole. Tantôt, c'est M. Ciaccia, tantôt, M. Raynauld,
tantôt, M. Bourassa, à un moment donné, M. Ryan prend la
parole parce qu'il s'aperçoit que ses porte-paroles ne sont pas à
la hauteur de la tâche. À ce moment-là, il se fait
démolir. Puis, il repasse la parole à quelqu'un d'autre. On a un
peu de difficulté à pouvoir découvrir qui est le
porte-parole du Parti libéral. Comme ils disent des choses totalement
contradictoires, c'est difficile pour moi d'essayer de démolir leur
argument, parce que si je démolis l'argument de l'un, l'autre devient le
porte-parole officiel et dit: Je n'ai jamais dit cela. Cela commence à
poser une petite difficulté pour moi d'essayer de répondre. Je
vais quand même essayer de vous mettre en rapport les uns avec les autres
pour essayer de vous comprendre.
M. Ciaccia: M. le Président, question de
règlement.
M. Bérubé: Je pense, M. le Président... M.
Ciaccia: Question de règlement.
M. Bérubé: ... que j'ai laissé parler le
député de Mont-Royal...
M. Ciaccia: J'ai demandé...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Bérubé: ... tout le temps même s'il disait
des sottises.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Ciaccia: Question de règlement, M. le Président.
Je voudrais demander une directive.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je vous
écoute.
M. Ciaccia: D'après les règlements sur la question
avec débat, nous posons des questions et je crois que le
règlement prévoit que le ministre doit répondre aux
questions que nous avons posées. Alors, est-ce que je pourrais demander
au ministre, plutôt que d'essayer de faire de la petite politique ou
d'essayer de faire des questions de personnalité entre les
différents membres du Parti libéral qui ont le droit et qui
disent avoir le même message à donner au gouvernement quant
à la politique pétrolière...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît!
M. Ciaccia: ... de répondre aux questions que je lui ai
posées?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): II n'y a
pas de question de privilège en commission parlementaire. D'autre part,
ce n'était manifestement pas une question de directive, ni une question
de règlement. Je vous cède de nouveau la parole, M. le ministre,
tout en disant qu'il y a un article qui s'applique aux commissions et à
l'Assemblée nationale: à moins que des gens soient
personnellement lésés dans leur privilège de membres de
l'Assemblée, c'est de respecter le droit de parole des autres. M. le
ministre.
M. Bérubé: Ainsi que je le disais, M. le
Président, je trouve quand même dommage qu'on ne permette pas
à chaque parti le temps nécessaire de s'exprimer, nous avons
chacun 20 ou 25 minutes. J'ai même laissé le député
de Mont-Royal patiemment dépasser son temps, comme il me l'a
demandé, à tout le moins, qu'il me laisse parler et on pourra
éventuellement échanger. C'est un débat, c'est une
question avec débat. J'ai, moi aussi, le droit d'énoncer mes
positions, d'essayer de voir où vous vous en allez et d'essayer de vous
dire où on s'en va. En même temps, je répondrai à
vos questions. (12 heures)
En fait, tout récemment, le député d'Outremont, M.
Raynauld, y allait d'un article dans le Devoir, un article fort
intéressant d'ailleurs, dans lequel il affirmait un certain nombre de
choses qui m'ont d'ailleurs choqué. "M. Bérubé affirme que
l'Alberta devrait vendre son pétrole au prix mondial, même lorsque
ce pétrole est acheminé vers l'Ontario et le Québec. Dans
ces conditions, il est évident que le Québec n'aurait pas
d'intérêt spécial à s'approvisionner au Canada; ceci
permet au ministre de faire l'indépendant, de prétendre acheter
n'importe où dans le monde et de considérer le pétrole
comme objet de transaction commerciale ordinaire". Voici une première
affirmation du député d'Outremont. Je pense qu'il
reconnaîtra ses écrits; je n'ai pas essayé de les tronquer,
de leur enlever leur sens. Je pense que j'en ai respecté le sens.
Il ajoute par la suite: "Une telle politique trahit et dessert les
intérêts du Québec." Sur cette même lancée, le
député d'Outremont laisse croire tout au long de son article que
le Québec préconise une hausse immédiate au prix mondial
et précise que dans le passé, suite au prix canadien
administré, les Québécois ont économisé $5
200 000 000 en factures de pétrole. Il conclut: "Tout le monde s'accorde
sur l'inévitable: il faudra augmenter le prix du brut canadien
dès 1979." Il vient de l'écrire. Cela ne fait même pas
quelques semaines, une semaine. "Le Conseil économique du Canada dont
j'étais alors président de temps en temps, il faut
s'encenser a proposé une politique de rapprochement progressif
des prix canadiens et mondiaux. Je souscris à une telle orientation,
mais la marge énorme entre un alignement progressif sur une
période de cinq à six ans et une hausse immédiate du plein
montant de l'écart qu'il reste présentement".
Je pense qu'on admettra, en lisant ces textes, que le
député d'Outremont feint, dans une argumentation qui
malheureusement je suis obligé de le dire frise la
malhonnêteté, d'ignorer, en
fait, la position que le Québec a prise, la position que j'ai
prise. Je n'ai jamais prôné le réajustement brutal
immédiat aux prix mondiaux. Lors de la conférence des premiers
ministres sur l'énergie qui était tenue à Ottawa le 12
novembre, j'ai remplacé M. Lévesque et j'ai défendu la
position du Québec avec un mandat gouvernemental très clair. Je
l'ai dit devant tous les Canadiens qui regardaient la télévision
à ce moment-là. J'ai dit: Au niveau des modalités de mise
en oeuvre de cette stratégie, le gouvernement fédéral
souligne que l'une des mesures préconisées est de faire en sorte
que le prix du pétrole au Canada rejoigne à terme le prix
international ou, au moins, le prix du pétrole à Chicago qui,
suivant les prévisions, sera supérieur au prix international
d'ici 1981. Là aussi, le Québec a maintes fois souligné le
côté inévitable de l'accroissement des prix du
pétrole. C'est bien clair. Je dis la même chose que le
député d'Outremont dans cette première étape.
Deuxièmement, je dis: II est évident que les hausses de
prix du pétrole doivent être modérées, graduelles et
planifiées. Il faut éviter que ces hausses ne signifient un choc
trop brusque pour l'économie des provinces consommatrices, pour certains
groupes de consommateurs à faibles revenus et pour certains secteurs
industriels tels l'industrie chimique. Cette position correspond exactement
dans les grandes lignes à celle exprimée par le
député d'Outremont dans son article du Devoir qu'il vient tout
juste de présenter. Cette position du Québec, je l'ai
défendue publiquement le 12 novembre, et le texte de l'article de M.
Raynauld est paru dans le Devoir le 29 novembre. En fait, il est pour, lui
aussi, mais il est contre le fait que nous soyons pour. Là, je ne
comprends plus rien. Première contradiction interne. Je suis
obligé d'aller plus loin et dire que M. Raynauld disait à
l'Assemblée nationale: Etant donné que le rattrapage ne se fera
pas de façon instantanée suivant la politique qu'il
préconise M. Raynauld à l'Assemblée nationale
disait cela à propos de mes interventions le ministre pourrait-il
nous dire combien d'argent les Québécois vont économiser?
Donc, le député d'Outremont sait très bien qu'on n'a pas
parlé de rattrapage instantané. Pourquoi dit-il dans son article
du Devoir je le recite...
Je n'arrive pas à retrouver son texte que j'ai cité
tantôt, mais, de toute façon, il était très clair
qu'à ce moment il soutient que le gouvernement du Québec veut un
réalignement instantané des prix du pétrole canadien aux
prix internationaux. C'est intellectuellement malhonnête puisque
lui-même a souligné à cette Assemblée que ce
n'était pas notre position. C'est ma première observation.
Egalement, j'essaie parfois de réconcilier les positions de
l'adversaire. Qu'est-ce que M. Ciaccia disait, et c'était
rapporté dans la Presse du 6 août 1979: M. Ciaccia,
ex-porte-parole des libéraux en matière énergétique
là, évidemment, je ne sais plus trop qui est le
porte-parole se prononçait au nom de son parti contre
l'augmentation des tarifs du pétrole brut canadien au niveau mon- dial
pour deux ordres de raisons, économique, d'abord, politique, ensuite.
D'ailleurs, les interventions du député de Mont-Royal ont fait
l'objet de plusieurs articles dans les journaux à ce moment, et je dois
dire qu'il a été ramassé de maîtresse façon
par tout ce qu'il y avait d'éditorialiste dans la presse
québécoise.
En fait, de la part de M. Raynauld, je dois dire qu'il fallait beaucoup
de courage pour changer son fusil d'épaule aussi vite. D'ailleurs, en
parlant de courage, je pense que M. Raynauld a dû être
obligé lui aussi de prendre son courage à deux mains quand il est
obligé de corriger les exagérations que je qualifierais pour le
moins d'irresponsables, du député de Mont-Royal qui affirmait,
lors d'une question qui m'était adressée dans cette Chambre le 11
octobre 1979, je vous réfère au journal des Débats
à la page 2839, qu'une hausse aux prix mondiaux entraînerait une
augmentation de $2 à $3 le gallon, faisant passer les prix de l'essence
au Québec à $3 ou $4 le gallon. C'est un très bel exemple
d'inflation verbale qui fausse totalement la réalité et dont
l'objectif n'a pas d'autre fin que de créer un climat
d'insécurité, d'inquiétude, amener les
Québécois à se dire: Si c'est comme cela, c'est
avantageux, le fédéralisme, par conséquent, faisons
attention. Il n'a pas d'autres objectifs que cela. C'est un bel exemple du type
de campagne électorale qu'ont menée les libéraux, plus
particulièrement dans Beauce-Sud, reconnaissons-le.
Faire croire aux Québécois qu'ils vont payer le gallon
d'essence trois à quatre fois plus cher, s'ils ne peuvent plus avoir le
pétrole canadien, c'est inadmissible. M. Raynauld, dans son article du
29 novembre, dans le Devoir, a eu au moins, il faut bien le dire, la
décence de ramener les peurs du député de Mont-Royal
à un niveau qui est plus réel. En fait, c'est une augmentation
appréhendée de $0.23 à $0.32 le gallon. Je m'excuse si, en
Chambre, j'ai dû répondre rapidement, étant donné
que la question m'était posée dans le feu de l'action et
qu'à cause de ma formation américaine, pour moi, un "drum" c'est
un "forty five gallon drum". Je fonctionne encore en données
américaines et c'est pour cela que j'ai pris le facteur de conversion de
45 gallons US et non pas de 35 gallons impériaux que je ne connaissais
pas.
Vous m'en excuserez, M. le député d'Outremont, mon
intention n'était pas d'induire cette Assemblée en erreur, mon
intention était de répondre rapidement et de corriger la
très mauvaise impression que l'intervention du député de
Mont-Royal avait laissée à cette Assemblée. J'avais
trouvé $0.27 et le député d'Outremont trouve $0.23
à $0.32, parce qu'il faut reconnaître que, pour faire de tels
calculs, il faut savoir quel est le pourcentage du baril de pétrole qui
va en essence. Il faut avoir également le facteur de conversion de
l'usine qui est de l'ordre de 94%. Enfin, il faut introduire un paquet de
calculs. Ce qui fait que, si on veut avoir le chiffre exact, évidemment,
ce n'est pas aussi simple que simplement sortir un calculateur à
l'Assemblée nationale et de donner un
chiffre grossier, mais qui est quand même plus près de la
vérité à $0.27 que ne l'étaient les $3 à
$4.
On peut parler soit d'une campagne de peur, soit carrément d'une
intention d'induire en erreur. Mais le moins qu'on puisse dire, c'est qu'avec
une vision aussi catastrophique de la situation, M. Ciaccia était dans
l'erreur. Vous savez, on peut être dans l'erreur à 5%, on peut
être dans l'erreur à 25% et on peut être dans l'erreur
à 100%. Mais être dans l'erreur à 900%, il faut que ce soit
intentionnel. C'est ma première observation. Si on abandonne maintenant
cette argumentation un peu trop fragile, on se lance sur un autre thème
du côté libéral. On affirme que la politique
énergétique canadienne a fait et fera encore pendant longtemps
économiser des milliards de dollars aux Québécois.
Là, immédiatement, si vous dites: Des milliards de dollars
aux Québécois, la frousse les poigne, des milliards de dollars
dans leurs poches. Evidemment, si on leur dit que le prix de l'essence va
monter de $0.20, si jamais on atteint notre souveraineté-association et,
s'ils restent dans le fédéralisme, si M. Clark annonce qu'il va
augmenter le prix du gallon de $0.20, là, ils ne voient plus trop trop
la différence entre les deux. Si M. Clark annonce que le prix de
l'essence va augmenter de $0.20 et si M. Raynauld annonce que, si jamais le
Québec prend sa souveraineté, le prix de l'essence va augmenter
de $0.20, ils sont tout mêlés. Ils ne savent plus lequel des deux,
ils disent: Dans le fond, le pétrole va augmenter de $0.20 si nous
restons dans le fédéralisme, il va augmenter de $0.20 si nous
sortons du fédéralisme et que nous modifions le système
politique actuel au Canada. Vous comprenez qu'ils commencent à se poser
des questions. C'est pour cela qu'on se faisait augmenter de $3 ou $4,
c'était plus avantageux. Là, c'est $3 ou $4 si jamais on
transforme le fédéralisme canadien en une communauté
économique canadienne tandis que c'est $0.20 si on reste dans le
fédéralisme, c'est plus facile.
On fait donc une analyse des sommes économisées par les
Québécois sur les factures d'huile à chauffage et de
carburant et on arrive à une économie de $5 200 000 000, de 1974
à 1979. Premièrement, je dois dire qu'il y a un certain nombre
d'erreurs dans ces chiffres. Est-ce que les Québécois, de la
politique énergétique canadienne, vont retirer $5 200 000 000, $6
000 000 000, $7 000 000 000, $2 000 000 000? Qu'est-ce que c'est le chiffre? Si
on essayait ensemble de le trouver, peut-être que cela éclairerait
les Québécois qui nous regardent en ce moment? Plutôt que
de charrier et d'envoyer n'importe quel chiffre, si on essayait
honnêtement, je suis prêt à le regarder honnêtement.
D'abord, ce n'est pas $5 200 000 000 qu'on a reçus jusqu'à
maintenant, c'est $5 700 000 000 d'après nos estimations. Là, je
n'en tiens pas rigueur au député d'Outremont. L'impression que
nous avons, c'est qu'il a oublié de tenir compte du gaz naturel. C'est
que le gaz naturel est indexé au prix du pétrole et, si on en
tient compte, évidemment, cela augmente les subventions au Québec
et ce n'est donc pas $5 200 000 000, c'est $5 700 000 000. C'est une
première erreur. Mais je pense qu'il doit en signe
d'honnêteté démontrer, on doit certainement essayer
rapidement de donner les chiffres les plus exacts possible.
La deuxième omission, c'est que l'Opposition semble laisser
croire qu'on est les seuls à avoir profité des subventions au
pétrole, que, dans le fond, nous avons été traités
comme des Canadiens privilégiés. Alors, il faudrait donc se poser
cette question: Est-ce que nous avons profité autant de cette politique
fédérale que les autres? C'est peut-être une question qu'on
devrait se poser. Si on se la posait ensemble, juste pour le plaisir, juste
pour essayer de connaître la réalité?
Evidemment, peut-être que cela vous choque d'avoir, à un
moment donné, à donner les chiffres exacts et à essayer de
peser le pour et le contre. Cela ne nous choque pas, nous. Tous les Canadiens
ont récupéré à peu près $25 800 000 000,
c'est indéniable. C'est l'ensemble des subventions et rabais de prix. Il
faut faire attention, il y a deux choses et là, le
député d'Outremont a été très clair
il y a, d'une part, l'obligation de diminuer le prix qu'on a imposé
à l'Alberta et il y a, d'autre part, des subventions que le gouvernement
fédéral a accordées, à certaines provinces plus
particulièrement, pour importer du pétrole de l'extérieur
du Canada. Quand on additionne tout cela ensemble, cela nous donne $25 800 000
000.
Combien avons-nous eu au Québec? On l'a dit tantôt, c'est
$5 700 000 000. C'est-à-dire qu'on a reçu 22% de la somme totale,
mais on a 28% de la population. On dit: Regarde donc cela, on en a eu moins que
l'importance de notre population. Là, on s'amuse et on dit: On va
regarder pour les autres provinces, parce qu'évidemment on n'est
peut-être pas tout seul dans le même bateau. L'Ontario, avec 36% de
la population, a eu 35% des subventions. Ce n'est pas trop pire. Les Maritimes,
avec 9,5% de la population, ont reçu 11,3% des subventions, plus que
leur population. L'Alberta, avec 7,5% de la population, a reçu 16,5% des
subventions, parce que les gens de l'Alberta ont aussi profité des
subventions, eux aussi ont payé leur gazoline moins cher que s'ils
avaient payé le prix international. Il ne faut pas oublier cela. La
Colombie-Britannique, avec 9,1% de la population, 10,7% pour le pétrole.
C'est drôle, mais, encore une fois, c'est le Québec qui est en
dessous. J'aurais pu m'amuser avec les provinces moins importantes, mais ce
n'était pas la peine, j'ai pris les plus grosses.
En d'autres termes, encore une fois, par habitant, c'est encore nous qui
retirons le moins. Vous allez me dire: N'essayez pas de dire que c'est le
fédéral qui nous en veut. Je n'ai jamais dit que c'est le
fédéral qui nous en voulait. C'est parce que, voyez-vous, nous,
on investit massivement dans l'électricité, plus qu'ailleurs, et
que notre dépendance énergétique, à cause de cela,
est plus faible. Je reviendrai d'ailleurs tantôt aux chiffres du
député de Mont-Royal, parce que je pense qu'il y a un certain
nombre de chiffres qu'il a donnés
qui sont exacts et il y a un certain nombre de chiffres qu'il faut
corriger aussi, parce qu'il a laissé certaines impressions qui, à
mon avis, sont incorrectes. En d'autres termes, si on compare avec l'importance
de notre population, on a eu moins, mais c'est exactement comme le programme
des hypothèques de M. Clark. (12 h 15)
M. Clark nous annonce un programme d'hypothèques, sauf qu'on
oublie une chose: Comme il y a juste la moitié des
Québécois qui sont propriétaires, alors qu'il y en a les
deux tiers qui sont propriétaires dans les autres provinces du Canada
anglais, qui va profiter le plus de la réduction d'impôt
reliée aux hypothèques, les propriétaires ou les
locataires? C'est bien évident que ce sont les propriétaires.
Donc, tout de suite en partant, les provinces anglophones vont en profiter
davantage. Mais ce n'est pas tout. Il y a deux mentalités
différentes. Vous savez, quand vous rencontrez un anglophone et qu'il
vous montre sa maison, il vous dit: Moi, j'ai une grosse hypothèque,
parce que je vais la rembourser dans 15 ou 20 ans et l'argent ne vaudra plus
rien, ça ne me fait rien. Quand vous rencontrez un
Québécois, lui, il vous dit: Elle est payée, ma maison.
C'est sa fierté. Il ne met pas son argent sur les hypothèques de
sa maison, il est fier de dire que c'est sa maison. Ce sont des
différences de mentalité. Ce qui fait que la moyenne des
hypothèques au Québec est de 13 000 alors que la moyenne des
hypothèques au Canada anglais est de 18 000. À cause de cela, on
n'aura que 15% des rabais d'impôt, alors qu'on a 27% de la population.
À nouveau, vous voyez, on en a moins.
Tous les Canadiens sont égaux, mais c'est drôle, nous
sommes toujours un peu moins égaux que les autres, sauf pour
l'assurance-chômage. En assurance-chômage, on a 35% des prestations
et, comme on n'a que 27% de la population, on gagne. Quand on me demande de
choisir entre un des emplois qui va permettre à un
Québécois d'acheter dans la dignité son gallon d'essence
et le fait de l'amener à mendier une subvention en lui faisant croire
que le fédéralisme est rentable, quant à moi, je
préfère les jobs. On va voir ça tantôt.
Donc, deuxième observation, je ne suis pas certain qu'on a eu
notre part, habitant par habitant. Si on avait voulu être juste, on
aurait peut-être vendu le prix de l'essence au prix international, on
aurait peut-être consenti des abattements fiscaux aux
Québécois de manière qu'ils puissent acheter leur essence
dans la dignité; cela aurait pu être une façon d'y arriver
et on aurait eu le même avantage que les autres, mais ce n'est pas ce
qu'on a choisi.
Ici, on va être obligé de faire un peu d'économique.
Malheureusement, je reconnaîtrai que les compétences du
député d'Outremont dans ce domaine de l'économie sont
beaucoup plus poussées que les miennes, ce qui ne me permettra
certainement pas de rivaliser avec lui. Je vais parler de
l'élasticité de la demande. Là, évidemment, je vais
être complètement mêlé. Alors, pour ne pas être
obligé d'aborder l'élasticité de la demande, je vais
plutôt prendre une expression plus simple. Quand quelque chose
coûte plus cher, on en achète moins. Quand le député
d'Outremont fait un calcul en disant: Voici le pétrole qu'on a
acheté, voici la subvention qu'on a eue, il fait le calcul en
considérant le nombre de gallons et la subvention au gallon. Il nous
dit: Voici le cadeau qu'ils nous ont donné. Il oublie que si on avait
payé le prix international, ça aurait coûté plus
cher et on en aurait moins acheté. Par conséquent, si on calcule
ce que le fédéralisme nous a donné, il faut comparer la
demande en pétrole qu'on aurait eue avec ce qu'on a eu en pratique comme
subvention. Cela réduit notre consommation d'à peu près
18%. Cela réduit la subvention réelle à $3 600 000 000. De
$5 700 000 000 qu'elle était, elle est rendue à $3 600 000 000;
on vient d'économiser $2 100 000 000. Pourquoi? Parce que les
Québécois qui paient leur essence bon marché vont
continuer à s'acheter de grosses cylindrées, vont continuer
à ne pas isoler leur maison. On constate, par exemple, que le recours au
programme d'isolation des maisons est beaucoup moins marqué au
Québec qu'en Ontario. Les gens vont continuer à gaspiller
l'énergie, c'est bon marché.
M. Grenier: On s'isole au Québec, ça n'a pas
été bon!
M. Bérubé: Donc, si on veut vraiment comparer, il
faut se dire: Haussons le prix au taux international, regardons comment le
consommation du Québec évolue, comparons ça avec ce qu'on
a observé et regardons l'économie. Cela baisse les subventions
d'Ottawa de $2 100 000 000, il reste $3 600 000 000. En fait, ce qu'on peut
dire, c'est que la politique fédérale a été un
encouragement au gaspillage. Si on a aujourd'hui des risques de pénurie,
c'est simplement parce qu'on consomme trop. Si on consommait 18% de moins de
pétrole au Québec qu'il y a cinq ou six ans, on n'aurait pas de
problème de pénurie cet hiver. Voilà! Première
observation. Si on en consommait moins, on en aurait plus en
réserve.
M. Grenier: C'est comme le sucre à la crème; si on
n'en mange pas, il nous en reste.
M. Bérubé: Je m'en viens au sirop d'érable,
ce ne sera pas long. Maintenant, il va falloir examiner plus soigneusement les
sortes de subventions. En fait, nous avons reçu en subventions, pour
l'ensemble du Canada, pour importer du pétrole, $6 700 000 000. Au
Québec, $3 400 000 000. Là, je reprends les chiffres qu'on nous a
proposés précédemment, sans vouloir les modifier, sans
tenir compte des économies d'énergie parce qu'on va au moins
parler avec les mêmes chiffres, ce sera un peu plus facile.
On a évidemment bénéficié d'une
réduction du prix. Qu'est-ce qu'on a fait? On a volé les
provinces productrices. Oui, volé! Volé, parce qu'il
n'y a aucun produit que je connaisse, moi, en tout cas,
peut-être que le député d'Outremont pourra m'en citer
où on oblige le producteur à accepter un prix moins cher
en le vendant à un plutôt qu'à un autre. On peut
peut-être l'obliger à approvisionner quelqu'un de façon
privilégiée mais on ne l'oblige pas de le vendre à rabais.
Cela ne se produit jamais!
Par exemple, pourquoi paie-t-on le sirop d'érable à $18.50
le gallon? On le paie à $18.50 le gallon parce que les Américains
sont prêts à le payer à ce prix. À ce
moment-là, le cultivateur québécois n'est pas
intéressé à vendre son gallon à des
Québécois à $16 alors qu'il pourrait le vendre à
$18.50 à un Américain. C'est pour cela. On paie le gallon de
sirop d'érable au prix mondial. Bien, on dit la même chose avec le
pétrole, c'est le même raisonnement. C'est difficile à
comprendre.
Maintenant, quand on essaie de regarder comment ce vol s'est
pratiqué et de voir qui en a profité, on s'aperçoit que
l'Alberta s'est volée elle-même de $4 300 000 000, contre son
consentement. On s'aperçoit que l'Ontario s'est volé de $8 600
000 000, les autres provinces de $3 900 000 000 et le Québec de $2 300
000 000. Ah! le plus grand voleur, c'est l'Ontario; le plus petit voleur, c'est
le Québec. Là, on regarde quel genre de politiciens appuient
cela. Moi, je comprends que Davis soit intéressé à
exploiter les richesses des autres à moitié prix; je le
comprends, je me mets à sa place. Ce que je ne comprends pas, c'est que
quelqu'un qui aspire à être premier ministre du Québec,
soit l'actuel chef du Parti libéral, soit d'accord avec M. Davis, parce
que cela a l'air d'une alliance entre un voleur et quelqu'un qui se fait voler.
Lequel qui est le plus intelligent? Le voleur ou celui qui se laisse
dévaliser? Je me pose des questions, sérieusement.
M. Raynauld: Le Québec se fait voler?
M. Bérubé: Donc, on voit tout de suite comment cela
s'est partagé. Mais là, il faut se poser une autre question; ce
n'est pas juste de dire qui a payé pour. On voit bien que les provinces
productrices se sont fait voler $19 milliards; le fédéral nous a
donné $6 700 000 000. Il faut maintenant se poser la question: Qui a
payé pour les $6 700 000 000 qu'Ottawa nous a versés? C'est la
troisième question. Qui a payé ces $6 700 000 000 de subventions
que les Canadiens ont reçues pour importer du pétrole?
D'abord, Ottawa a imposé une taxe d'accise de $0.10 puis de $0.07
sur chaque gallon d'essence que l'on consomme. Cela a rapporté $600
millions juste à partir du Québec; au total, $2 600 000 000. Ah!
Ottawa a payé les subventions avec des taxes à la consommation.
Cela, vous savez, c'est prendre de l'argent d'une poche et de le donner dans
une autre poche. On peut se demander si c'est tellement logique.
Deuxièmement, on a taxé l'exportation de pétrole
canadien. Là-dessus, je suis absolument d'accord. Le gouvernement
canadien a bien fait, parce que les profits des compagnies
pétrolières sont tellement élevés
présentement qu'il ne faut pas se gêner pour aller taxer les
profits exagérés, les "excess profits" comme on dit. Il ne faut
pas se gêner pour y aller, je suis absolument d'accord. Cela a
rapporté $4 700 000 000, cette taxation, à Ottawa.
Donc, au total, Ottawa a ramassé $7 300 000 000 et les
subventions $6 700 000 000. Ils ont ramassé $7 300 000 000 dans les
poches des contribuables et ont déboursé $6 700 000 000. Ils ont
gagné, dans l'opération, $600 000 000; c'est une
réalité dont il faut tenir compte.
On se rend bien compte que ceux qui ont payé, ce sont les
provinces exportatrices. C'est un vol pur et simple de ceux qui
possédaient la ressource.
Maintenant, on va essayer de voir parce que la politique
pétrolière, il faut la mettre dans son ensemble; j'ai dit
tantôt que des subventions, c'est bien beau, mais je
préfère travailler et l'acheter mon pétrole ce que
Ottawa a fait pour me faire travailler, moi, dans le domaine
énergétique. Je ne parlerai pas du reste, des créations
d'emplois.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît! Actuellement, M. le député de Mont-Royal me
faisait signe; vous avez pris 26 minutes et le ministre a pris actuellement 27
minutes.
M. Bérubé: J'aurais accepté, d'ailleurs, que
le député de Mont-Royal prenne trois minutes de plus, je n'aurais
posé aucune objection.
M. Ciaccia: M. le Président, si le ministre me le permet,
je ne veux pas invoquer l'article 96, mais je voudrais seulement corriger
certaines affirmations que le ministre a faites.
M. Bérubé: Ah oui! Vous pourrez certainement le
faire. C'est un débat. Je pense qu'on en aura l'occasion.
M. Ciaccia: Très brièvement, avant de céder
la parole à mon collègue...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je ne
voudrais pas être trop formaliste ce matin, mais je ne voudrais
pas...
M. Bérubé: II a peur qu'ils se contredisent, M. le
Président...
M. Ciaccia: Non, non.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ...
qu'on dépasse les deux minutes.
M. Bérubé: ... parce qu'ils se contredisent depuis
le début.
M. Ciaccia: Non. On ne se contredit pas. Si vous examinez nos
déclarations, on ne se contredit pas. S'approcher du prix mondial et
arriver au
prix mondial, ce sont deux choses différentes. D'accord?
M. Bérubé: Oh Seigneur! que la nuance est
subtile!
M. Ciaccia: Non, non, mais il y a une grosse
différence.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît! C'est une question avec débat, mais ne partez pas un
débat.
M. Ciaccia: M. le Président...
M. Bérubé: Ne partons pas le débat tout de
suite. Je vais essayer très rapidement, M. le Président
ces chiffres sont publics...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Un
instant, s'il vous plaît! L'article 96 est pour rectifier des propos que
vous, vous auriez tenus et qui seraient mal interprétés par le
ministre?
M. Ciaccia: Je les ai tenus.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Est-ce ce que vous voulez faire?
M. Ciaccia: Exactement. C'est cela, mais je vais laisser terminer
le ministre, s'il me dit qu'il en a seulement pour une couple de minutes.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
D'accord.
M. Bérubé: Essentiellement, maintenant, on va
regarder ce qu'Ottawa a investi au Québec pour créer des emplois
dans le domaine énergétique. C'est intéressant. J'aurais
pu prendre tous les autres secteurs. Cela aurait été encore pire.
Je vais prendre seulement le secteur énergétique, puisqu'on parle
d'énergie ce matin.
Jusqu'en 1977, les investissements du gouvernement fédéral
c'est notre gouvernement, en somme, n'est-ce pas, même si vous ne
vous adressez jamais à Ottawa quand il y a des problèmes, c'est
quand même notre gouvernement ont été de $2 700 000
000 jusqu'en 1977 dans le secteur énergétique. On a estimé
1978/79 j'admets que ce sont des estimations parce que, malheureusement,
on n'avait pas les chiffres sous la main et, en partant, on a simplement
extrapolé à partir des programmes qui sont en place. On a pris
les deux dernières années et on a les a extrapolées en
disant: Ils n'ont pas ralenti. Ils ont continué au même rythme.
Cela nous donne donc $1 300 000 000 de plus.
Donc, au total, le gouvernement canadien investirait dans le secteur
énergétique, jusqu'en 1979, $3 800 000 000, $400 millions au
Québec. Ce n'est pas mal. Mais savez-vous ce que c'est, $400 millions?
C'est Gentilly I. C'est une centrale nucléaire qui n'a jamais
fonctionné. Elle ne fonctionne toujours pas. Il faudrait qu'Ottawa mette
beau- coup d'argent dedans, mais il ne veut pas le mettre.
Quant à LaPrade vous savez que c'est une usine qui peut
fabriquer de l'eau lourde elle est dans les boules à mites, elle
aussi, parce qu'il n'est pas question de la continuer. Elle est
arrêtée. Cela valait $335 millions.
Vous voyez qu'il ne reste plus grand-chose sur les $400 millions. Je
pourrais même vous donner un autre exemple. Il y avait une entente avec
Ottawa pour défrayer le coût de Gentilly II et l'entente avec
Ottawa prévoyait que le fédéral payait sur la centrale 50%
des coûts. Comme on avait prévu qu'elle coûterait à
peu près $200 millions ou $250 millions, le fédéral a
accepté de verser $100 millions ou $125 millions, sauf qu'avec
l'inflation, c'est $1 milliard que va coûter la centrale, mais Ottawa
n'accepte de payer que les $100 millions ou les $125 millions.
Le fédéral a accepté de payer la moitié pour
toutes les autres provinces, le Nouveau-Brunswick, l'Ontario, mais pas le
Québec. Québec, il le garde aux premières estimations d'il
y a bien longtemps, faites par l'Energie atomique du Canada. En d'autres
termes, on se rend compte qu'on est loin d'avoir eu notre part
d'investissements.
En principe, ce que cela veut dire, c'est que l'assurance-chômage,
c'est pour nous, les chômeurs, c'est pour nous. Les "jobs", c'est Ottawa.
Je préfère non pas avoir $1 d'assurance-chômage à
chaque année, mais un emploi avec un travailleur qui entre chez lui tous
les quinze jours avec une paye dans sa poche et qui est capable de vivre dans
la dignité.
C'est ce qu'on défend. On ne demande pas la charité. On ne
demande pas l'aumône. On veut payer le prix, mais on veut avoir les
moyens de payer le prix. En fait, et je termine là-dessus, M. le
Président, ce qu'on nous propose dans la politique
énergétique canadienne, c'est un troc, un troc qu'on ne peut pas
accepter, parce qu'on nous propose d'échanger notre énergie
électrique contre une énergie pétrolière qui n'est
pas là pour durer indéfiniment. Notre électricité,
on l'a pour 100, 200 ou 500 ans, tandis que le pétrole, on sait qu'il
n'y en aura pas pour 100, 200 ou 500 ans.
Il y a là quelque chose qui n'est pas acceptable et il y a
seulement le chef du Parti libéral qui a été assez
honnête pour le dire à la population. Il a dit: Si on pense comme
cela pour le pétrole, il va falloir penser comme cela pour
l'électricité. Mais oui! Quand le prix de
l'électricité est trop bas par rapport au pétrole, les
gens cessent de se chauffer au pétrole et ils passent à
l'électricité. On se promène: gaz, pétrole,
électricité. Si on a une politique pour le pétrole et si
on a une politique pour le gaz, c'est malhonnête de ne pas en avoir une
pour l'électricité.
Savez-vous ce que nous aurait coûté la politique pour
l'électricité, si on avait vraiment eu la logique d'avoir une
politique canadienne de l'énergie? On paie $0.13 le kilowatt pour
l'électricité, mais les Canadiens paient $0.185. Cela veut dire,
en gros j'arrondis que si on payait le prix moyen j'ai les
chiffres exacts, si vous voulez
qu'on les cite cela voudrait dire qu'on aurait payé $400
millions de plus pour notre électricité pour nous ramener au prix
moyen et subventionner les autres pour donner une chance aux pauvres Maritimes
qui produisent leur électricité avec du pétrole ou avec
autre chose. (12 h 30)
En d'autres termes, si nous étions logiques avec
nous-mêmes, il faudrait payer cela sur l'électricité aussi.
Mais attention! Ces $440 millions, ce n'est pas jusqu'en 1985 et en 1990; c'est
tout le temps. On se rend compte qu'on est prêt à troquer un
avantage considérable que le Québec a dans le domaine
énergétique contre un avantage tout à fait partiel. C'est
ce que j'ai pu démontrer. C'est non seulement partiel l'avantage sur le
pétrole, mais, M. le Président, le gouvernement
fédéral va nous annoncer une taxe de $0.30 le gallon pour
équilibrer son budget. Cela va lui apporter au Québec $500
millions par année. Savez-vous ce que cela vaut en dollars
d'aujourd'hui, $500 millions que vous percevez tout le temps, parce que vous
n'avez jamais vu un gouvernement imposer une taxe et l'enlever après?
C'est très rare que cela se produit; cela ne se produit qu'avec le Parti
québécois. On a enlevé la taxe sur le linge des enfants,
les vêtements et les chaussures. Quand voyez-vous une taxe
disparaître? Cela rapporte au gouvernement fédéral $500
millions. J'ai terminé, M. le Président, c'est marqué
conclusion devant moi. Cela rapporte au gouvernement fédéral $500
millions par année. Si on actualise ce montant, si on ajoute tous les
$500 millions qu'on va être obligés de payer pendant au moins les
dix prochaines années parce que cela ne baissera pas, cela va aller en
augmentant, cela va rapporter environ $5 milliards à Ottawa.
Par contre, si on regarde les subventions qu'on peut calculer, parce
qu'on se ramène au prix international, on a eu $1 500 000 000 en 1979.
Si d'ici six ans on rejoint le prix international, cela s'en va vers
zéro. Si on calcule ce que cela nous aurait rapporté en dollars
d'aujourd'hui, c'est environ $3 milliards. Au net, on va payer $2 milliards de
plus à Ottawa que ce qu'on va retirer avec la politique
fédérale. On vient d'éponger tout ce qu'on vient d'avoir
d'Ottawa. Parce qu'on a eu $5 700 000 000, on en enlève $2 100 000 000
simplement pour tenir compte des économies d'énergie qu'on aurait
eues. On enlève $2 milliards, ce qu'on va être obligé de
payer.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
ministre.
M. Bérubé: On enlève également la
taxe d'accise. Au total, on n'aura rien gagné de la politique
fédérale pétrolière.
M. Ciaccia: M. le Président.
M. Grenier: Question de règlement de deux secondes.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Oui, M. le député de Mégantic-Compton.
M. Grenier: Pour expliquer que le député de
Richmond devait faire son intervention. Je pense qu'on a changé l'ordre
qu'on avait l'habitude d'avoir à cette commission, à savoir que
c'était généralement ceci. Quand c'est une question
présentée par l'Opposition officielle, on fait intervenir
immédiatement l'Union Nationale et, ensuite, le ministre répond.
C'est ce qu'on faisait depuis une couple de débats. Je me rends compte
que si le député de Richmond passe à la fin c'est qu'il a
dû assister à une réunion des leaders qui est
commencée depuis 12 h 20. Si elle finit assez tôt, il essaiera de
revenir à la commission pour donner l'intervention de l'Union
Nationale.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Merci. M. le député de Mont-Royal.
Discussion générale
M. Ciaccia: M. le Président, je voudrais corriger
certaines affirmations que le ministre a faites quant aux propos que j'ai
tenus. Premièrement, je voudrais porter à l'attention du ministre
que j'ai posé certaines questions auxquelles je n'ai pas eu de
réponse. Il a fait son exposé, son intervention sur une
série d'autres questions, mais pas sur les questions que j'ai
posées. Premièrement...
M. Bérubé: Au débat, on a y
répondre.
M. Ciaccia: ... vous n'avez pas expliqué les affirmations
dans le livre blanc.
M. Bérubé: ... expliqué, M. le
Président. M. Ciaccia: Non, un instant.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît!
M. Bérubé: M. le Président. M. Ciaccia:
Laissez-moi finir.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît!
M. Ciaccia: Je vais finir dans deux minutes.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît, parce que la présidence va devenir formaliste. Je sais
qu'habituellement les questions avec débat se déroulent de
façon très calme. La présidence, avec le consentement des
membres, n'applique pas le règlement à la lettre, mais je demande
votre collaboration des deux côtés, sinon j'appliquerai le
règlement à la lettre.
M. Ciaccia: D'accord. Deuxièmement, la question concernant
les études d'impact sur l'économie du Québec, je voudrais
savoir s'il y a une augmentation quant au prix mondial. Je ne pense pas que le
ministre ait répondu à cette question.
M. le Président, le ministre m'a fait dire des choses que je n'ai
pas dites. Quand on a parlé de
la question que je lui avais posée, à savoir que j'avais
fait référence à $3 ou $4 le baril, le ministre a
oublié de mentionner que j'avais fait référence au prix
je le cite c'est le cas dans d'autres pays où on paie les
prix mondiaux. Vous avez oublié de mentionner cela. Je pense que c'est
une nuance assez importante. Pour votre information, je vais vous citer
certains prix qui sont payés dans d'autres juridictions, dans d'autres
pays, qui varient entre $3 et $4. Je vous donne les chiffres du mois de juin
1979. À Montréal, c'était $1.03 le gallon canadien.
À New York, c'était $1.29. À Frankfurt, c'était
$2.77. À Paris, c'était $3.37. À Tokyo, c'était
$3.14. N'essayez pas de dire que j'ai totalement faussé la
vérité. J'essayais de faire certaines comparaisons entre les prix
dans des pays où les gens payaient le prix mondial et où ils
n'avaient pas d'approvisionnement de pétrole. Je pense que la
comparaison peut se faire très valablement parce que le Québec
n'a pas d'approvisionnement de pétrole. Si on se fie à votre
thèse d'indépendance, je crois que les conséquences, pour
les Québécois, seront les mêmes. Alors, ce n'est pas une
question de se tromper de 900% ou d'essayer de faire peur à la
population. Quand on dit la vérité, c'est une conséquence.
Vous pouvez interpréter cela de la façon que vous voulez. L'autre
affirmation que vous avez faite...
M. Bérubé: M. le Président...
Le Président (M. Bordeleau): Un instant, s'il vous
plaît!
M. Ciaccia: Je vais finir tout de suite.
M. Bérubé: Je vous réponds tout de
suite.
M. Ciaccia: Je vais seulement finir.
Le Président (M. Bordeleau): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Ciaccia: L'autre affirmation...
Le Président (M. Bordeleau): II faudrait peut-être
s'entendre, M. le député de Mont-Royal. C'est comme vous voulez
mais le ministre s'offre à répondre immédiatement à
votre question.
M. Ciaccia: Je serai très bref.
Le Président (M. Bordeleau): Vous préférez
poser les deux?
M. Ciaccia: Je vous donnerai l'occasion de répondre aux
deux questions.
Le Président (M. Bordeleau): Allez-y.
M. Ciaccia: Quand vous avez référé à
mes interventions...
M. Bérubé:... on n'est pas capable d'y
répondre. C'est bien plus simple, je vais lui répondre tout de
suite. Il va avoir sa réponse.
M. Ciaccia: ... dans la Presse. Face au silence du gouvernement
pendant l'été, je voulais porter à l'attention de la
population les discussions qui auraient lieu à Pointe-au-Pic. Vous avez
mentionné qu'il y avait eu des critiques dans les journaux mais vous
avez oublié de mentionner que ceux qui m'avaient critiqué, dans
le temps où j'ai fait mon intervention, ont changé d'idée
eux-mêmes. Je vous cite, par exemple, dans la Presse du 19 octobre le
même éditorialiste qui m'avait si sévèrement
critiqué. Il en est venu à mon point de vue. Il dit: Ces
ressources canadiennes de pétrole sont évidemment moins
coûteuses que le pétrole étranger. Il se
réfère à un coût de développement que j'avais
moi-même mentionné. Un autre éditorialiste de la Presse
aussi, le 16 août, disait: II ne faut pas oublier non plus que le
pétrole est devenu une arme politique sur l'échiquier
international; son prix peut encore doubler, tripler pour des raisons qui n'ont
rien à voir avec les coûts d'exploitation. Il serait donc
hasardeux de s'engager à l'avance et aveuglément à faire
l'équation entre nos prix domestiques et ceux de l'OPEP; autrement, quel
avantage aurions-nous à disposer des abondantes ressources
pétrolières? Ces deux points, je voulais les préciser
parce que je pense que le ministre n'a pas vraiment dit tout ce qu'il devait
dire là-dessus et je voudrais lui demander s'il peut répondre aux
questions que je lui ai posées à savoir s'il a fait des
études sur les impacts de l'économie québécoise si
on augmente aux prix mondiaux.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre de
l'Energie.
M. Bérubé: Certainement. La première
question: Est-ce que je vous ai mal cité? Je ne sais pas si je vous ai
mal cité. Je vais laisser les Québécois qui nous regardent
juger.
M. Ciaccia: Vous ne m'avez pas cité au complet.
M. Bérubé: D'acord, je vais vous citer. "Est-ce que
je peux demander au ministre si c'est la position c'est vous qui parlez
officielle du Québec que le prix de l'huile soit le prix mondial
et que les Québécois paient $3 ou $4 pour leur gallon d'essence
et $1.50 pour leur gallon d'huile à chauffage comme c'est le cas dans
les autres pays où on paie les prix mondiaux?" Je regrette mais s'il y a
un citoyen du Québec qui ne comprend pas cela comme voulant dire que si
on rejoint les prix mondiaux, on va payer $3 à $4 par gallon, il n'y a
pas un Québécois qui a un quotient intellectuel qui
dépasse dix.
Deuxièmement, dans les prix internationaux, il y a 85% de taxes.
C'est bien sûr qu'avec la taxe d'accise que le gouvernement
fédéral a l'intention de nous imposer dans son budget qu'il va
annoncer, s'il met $0.30 de taxe d'accise et qu'en même temps on rejoint
le prix international, on va trouver à la fin que le gallon d'essence
nous coûte plus cher que si on payait le prix international parce qu'il
faut tenir compte des taxes. Les pays européens, en particulier, n'ont
pas un impôt sur le
revenu aussi élevé que le nôtre. Ils taxent
directement la consommation. Notre tradition, c'est de ne pas taxer la
consommation pour des raisons très simples. Vous allez me comprendre,
c'est même un objet de critique. Le gouvernement actuel a baissé
les taxes pour les petits salariés et a augmenté les impôts
sur les salaires plus élevés.
Je le sais, l'Opposition nous le répète continuellement
parce que, justement, dans une société, on essaie de faire
partager les richesses des riches par l'ensemble de la société.
C'est cela notre philosophie politique. Alors, dans ces conditions, toutes les
taxes sur les biens de consommation courants sont des taxes régressives
parce que le pourcentage du salaire qu'un citoyen est obligé de mettre
dans sa nourriture, dans son linge, dans son essence, est beaucoup plus
élevé que le pourcentage du salaire que met un millionnaire ou
quelqu'un qui gagne $40 000 ou $50 000 par année. Alors, quand on taxe
les biens de consommation, on taxe, toutes proportions gardées, plus
lourdement les petits salariés et les pauvres. C'est pour cette raison
que nous disons: II ne faut pas mettre la taxe sur la consommation, il faut y
aller carrément par l'impôt sur le revenu. C'est cela notre
philosophie politique. Vous m'excuserez, la vôtre est l'inverse. Vous
voulez taxer les petits salariés. Cela n'est pas la même
philosophie.
On n'est pas intéressé nous autres à faire monter
le prix de l'essence à $3 ou $4 le gallon en le taxant de manière
à aller chercher cela dans les poches des gens de condition modeste. Ce
n'est pas cela notre philosophie. Je comprends qu'on ne soit pas d'accord sur
le plan politique, mais il est temps que les Québécois se rendent
compte qu'il y a une différence fondamentale entre la philosophie
politique des deux partis qui se font face. Première réponse.
Deuxième réponse. Vous me demandez comment expliquer le
livre blanc. Écoutez, M. le député de Mont-Royal, j'ai
devant moi un volume qui s'appelle "L'huile au Canada, besoins et
approvisionnements. C'est publié par l'Office national de
l'énergie, septembre 1978. Au moment où nous avons
rédigé le livre blanc, on pouvait lire à la page 2: Les
livraisons de pétrole canadien à Montréal pourraient
être maintenues au niveau de 315 000 barils par jour jusqu'à la
fin de 1983 et à partir de ce moment, elles devraient être
réduites progressivement pour atteindre un niveau d'environ 100 000
barils par jour qui est le niveau minimum de rentabilité, semble-t-il,
du pipe-line pour 1985. En d'autres termes, ce que vous avez dans le livre
blanc de la politique énergétique du Québec c'est cela.
C'est qu'on l'a pris là où l'information était disponible,
l'Office national de l'énergie.
Vous me dites: II y a des contradictions avec la position actuelle. Si
l'Office national de l'énergie modifie ses prévisions, nous
modifions les nôtres parce que nous prenons les leurs. C'est la raison
pour laquelle il peut y avoir une évolution dans nos prévisions.
Deuxièmement, des études d'impact. D'abord, je dois souligner que
là-dessus le député de Mont-Royal a été
correct. Il a souligné que des études ont été
faites sur l'accroissement du coût de la vie, sur l'impact
économique que pourrait avoir une hausse du prix de l'essence en
Ontario. Il avait raison d'indiquer en Ontario parce que la structure
industrielle de l'Ontario est différente de celle du Québec. Cela
n'a pas le même impact en Ontario que cela en a au Québec.
Effectivement, nous avons à l'aide d'un modèle
fédéral que nous avons tenté d'ajuster aux besoins du
Québec et on essaie présentement de le raffiner
tenté de mesurer quel serait l'impact. Effectivement, si on calcule une
augmentation de $5 par année jusqu'en 1983, c'est plus que ce que
propose le gouvernement Clark présentement. En fait, on perdrait sur
trois ans 10 000 à 12 000 emplois, c'est-à-dire, une moyenne
d'à peu près 3000 à 4000 emplois de moins. Cela est sur
l'ensemble de l'économie.
Comme l'année dernière, la performance gouvernementale de
création d'emplois, déjà pour les sept premiers mois,
était autour de 74 000 emplois, c'est une des années les plus
extraordinaires que le Québec ait connues. Si on regarde cela,
évidemment, c'est relativement peu important, mais c'est certain qu'une
politique comme celle-là devrait être associée à une
politique sur le plan, par exemple, de stimulation des investissements dans le
secteur des pâtes et papiers. L'impact que cela pourrait avoir, c'est
essentiellement ceci. Donc, 10 000 à 12 000 emplois sur trois ans, quant
à l'inflation, c'est peut-être un peu plus dramatique, cela
pourrait représenter à peu près 2% d'augmentation de
l'inflation à cause de l'augmentation des prix et cela sur les trois
premières années. C'est l'impact québécois d'une
hausse des prix de l'essence. Evidemment, sur le plan politique, M. le
Président, il serait bien plus facile de dire qu'il ne faut pas que les
Québécois paient plus cher pour leur pétrole. Cela serait
évidemment intéressant parce que le pauvre diable qui est dans sa
maison et qui a de la misère à arriver et qui voit un ministre de
l'Energie dire: II faut que les prix du pétrole reviennent au prix
international. Il dit: On se dépêche de se débarrasser de
ce ministre parce qu'il veut qu'on paie plus cher pour notre
pétrole.
C'est politiquement bien plus difficile d'être obligé de
dire à ce bonhomme: Quand tu travailles, tu veux avoir un salaire juste.
De la même façon, celui qui possède la richesse
pétrolière veut avoir un prix honnête. Je vais vous dire,
et je termine là-dessus, combien vaut l'énergie au Québec
au cours des années. Pour le faire, on est obligé de ramener cela
en dollars constants. Évidemment, c'est un petit peu compliqué
d'expliquer les dollars constants, mais le député d'Outremont
comprend ce que cela veut dire. C'est que c'est bien sûr que si je gagne
$2 aujourd'hui et je gagne $2 dans 100 ans, ce n'est pas la même chose.
Les $2 dans 100 ans ne vaudront plus grand-chose. Il faut tout ramener cela en
dollars qui ont la même valeur. Si on dit, l'indice du prix en 1958,
c'était 144 pour l'énergie. En 1971, on trouve 100. En d'autres
termes, l'énergie de 1958 à 1971 a baissé de prix. Si on
va en 1978, c'est remonté à 109. En d'autres termes, par rapport
à
1958, 1960, le prix de l'énergie au Québec a
baissé. Cela coûte moins cher aujourd'hui pour se chauffer que
cela coûtait il y a 20 ans, toutes proportions gardées, parce que
les salaires ont monté, les prestations de bien-être social ont
monté, ont suivi l'inflation, le salaire minimum, on l'a indexé
à l'inflation. Donc, le prix de l'énergie a baissé. Ce
n'est pas normal quand on parle de rareté, qu'une substance voit son
prix baisser. Le prix devrait normalement monter. (12 h 45)
En d'autres termes, il faut être réaliste et comprendre
qu'il faut que le prix du pétrole suive l'inflation
générale, le prix normal, le prix mondial. Sinon, on s'isole, on
a l'impression d'avoir fait un bon coup et je pourrai, dans mes réponses
tantôt, vous montrer les mauvais coups que cela a donnés pour le
Québec.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député d'Outremont.
M. Raynauld: Merci, M. le Président. Je pense que le
ministre ne se gêne pas...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député d'Outremont, excusez-moi. Je vous cède la parole,
vous avez droit à 20 minutes. Je vous avertis d'avance que si le
député de Richmond qui est actuellement en conférence
arrive, que je le reconnaîtrai également pour faire valoir ses
positions. Je voudrais que vous teniez compte de tout cela et également
du fait que nous terminons, en vertu de notre mandat à 13 h 30, pour
qu'à la fin et le député de Mont-Royal et le ministre
aient un dernier droit de parole.
M. le député d'Outremont.
M. Raynauld: Je vous remercie, M. le Président, je pense
que le ministre, dans ses réponses j'hésite à dire
le mot "réponses " puisqu'il a plutôt fait état de
remarques qu'il avait préparées visiblement à l'avance,
probablement préparées d'ailleurs par d'autres j'y
arriverai dans quelques instants mais je ne peux pas m'empêcher de
relever un certain nombre de points qui me paraissent très importants en
ce qui concerne, en premier lieu, la position que nous avons et la position que
le ministre a défendue un peu partout, soit à la
conférence fédérale-provinciale du 12 novembre, soit
à l'Assemblée nationale, soit dans des déclarations que
nous avons recueillies dans les journaux.
Dans tous les cas, le ministre se protège en invoquant le fait
qu'il pourrait peut-être se placer lui aussi devant l'inévitable
et accepter à son corps défendant que le prix puisse augmenter de
façon graduelle et progressive. Mais tout son discours prouve une chose,
c'est que sa position à lui est d'atteindre le prix mondial. C'est sa
position. Aujourd'hui, il nous a démontré la même chose, il
a passé une demi-heure environ à essayer de nous démontrer
que les bénéfices que nous recevions de cette différence
entre le prix canadien et le prix mondial, que cette différence
provisoire, était une différence qui, somme toute, était
à peu près nulle, que les calculs qui tendaient à
démontrer que le fait que le Québec reste dans le Canada soit
profitable, étaient à peu près sans fondement, ce qui
prouve que sa position de fond, indépendamment des réserves qu'il
peut apporter qu'il est bien obligé d'apporter, parce
qu'autrement il ne serait vraiment pas honnête, face à cette
réserve sa position de fond, c'est d'essayer de nous faire
comprendre qu'il faut augmenter au prix mondial, parce qu'à ce moment,
le Québec aura avantage d'acheter son pétrole à
l'extérieur du Canada, s'il y a lieu, indépendamment des
conditions internationales qui pourront prévaloir. Il pourra
démontrer également qu'il n'y a pas de coût, pour son
gouvernement, à avancer la position politique constitutionnelle qu'il a
relativement au pétrole. Je pense que c'est cela le fond de la question.
Il y a une question politique et idéologique où le ministre veut
bien passer quelques petites réserves ici ou là, mais le ministre
fondamentalement essaie de faire comprendre aux Québécois que
nous n'avons pas d'avantages à compter sur le pétrole canadien
parce que, pour des raisons politiques, il est avantageux pour lui de pouvoir
dire que l'indépendance du Québec et la souveraineté ne
coûteraient rien.
Ceci dit, je pense que je n'ai pas donné de mauvaise
interprétation de la position du gouvernement du Parti
québécois, à l'heure actuelle, en ce qui concerne le
pétrole. Je pense aussi que le Québec a retiré de cette
politique canadienne de péréquation du prix une politique
avantageuse. Le ministre l'a reconnu en disant même que j'avais pu faire
une erreur ou des oublis puisque les avantages n'étaient pas de $5 200
000 000 mais de $5 700 000 000. Je voudrais simplement lui demander, de
grâce qu'il lise les tableaux, avant de dire qu'il y a des erreurs dans
les chiffres que j'ai présentés. Il sait très bien, cela a
été marqué dans les journaux d'ailleurs, le tableau sur
lequel ces chiffres sont basés, s'appelle "Bénéfices pour
le Québec de la politique canadienne sur le pétrole ". Cela ne
veut pas dire qu'il y a une erreur, parce que je n'ai pas tenu compte du gaz
naturel, je parlais du pétrole. Je parlais du pétrole pour une
bonne raison, c'est que nous, de l'Opposition, on n'a pas toutes les
informations que vous avez du côté du gouvernement, on n'a pas pu
établir même pour ce matin encore, on n'a pas pu établir
exactement quelle est la différence entre le prix du gaz naturel
exporté à Chicago et le prix du gaz naturel que nous avons ici,
compte tenu de la consommation. C'est ça la vérité.
Ce n'est pas un oubli ni une erreur, c'est simplement que pour le gaz
naturel, je n'avais pas les informations nécessaires pour le calculer.
Il y a quelque chose de bien plus important que cela, le ministre nous dit
qu'il est bien prêt à reconnaître que les
Québécois bénéficient de quelque chose, il le fait
bien entendu parce que nous avons révélé ces chiffres et
le ministre n'était pas disposé à les
révéler du tout. La preuve est qu'il y a encore une autre chose
dont il aurait pu parler ce matin et il n'en a pas parlé. Là
aussi, je vais révéler une autre information.
Imaginez-vous qu'il y a aussi, rattachés au pétrole et au
gaz naturel, des paiements de péréquation dont le Québec
bénéficie aussi. Des paiements de péréquation,
c'est curieux, le ministre n'en a pas encore parlé. Il a fait une longue
analyse des chiffres que j'ai donnés, mais il n'a pas parlé des
versements de péréquation. Savez-vous, M. le Président,
combien de versements de péréquation nous avons reçus au
titre du pétrole et du gaz en 1979 au Québec? $589 millions qui
s'additionnent à tous les chiffres que nous avons donnés
précédemment, de sorte qu'on doit ajouter à ces $5 200 000
000, qui représentent les bénéfices de 1974 à 1979,
une somme de $2 600 000 000 au titre des paiements de
péréquation. $2 600 000 000 de plus. S'il voulait vraiment
corriger mes chiffres, il aurait peut-être pu ajouter cette pièce
d'information, qu'au moment où j'ai écrit l'article je n'avais
pas non plus. Lui, le ministre, qui a accès à toutes ces
informations, aurait pu révéler à la province de
Québec que ce n'était pas non plus $5 700 000 000 de
bénéfices, ce serait $5 700 000 000 y compris le gas naturel plus
$2 600 000 000 au titre des paiements de péréquation. Là,
on est rendu autour de $8 milliards pour la période de 1974 à
1979. $8 milliards que le Québec a reçus au titre de transactions
sur le pétrole et sur le gaz. Quand le ministre nous fait une grande
analyse pour essayer de minimiser l'importance de ces bénéfices,
je voudrais lui rappeler un certain nombre de choses.
Il a souligné ce matin, avec une certaine fierté,
l'élasticité de la demande de pétrole et de gaz. Pour
essayer de faire quoi? Pour essayer de dire que les bénéfices qui
sont indiqués là sont exagérés et qu'ils devraient
être réduits parce que nous achèterions moins de
pétrole si les prix montaient. Oui, c'est vrai, mais j'aimerais
suggérer au ministre qu'il consulte ses experts pour leur demander s'ils
connaissent le surplus du consommateur. Est-ce qu'ils connaissent cela, le
surplus du consommateur? À ce moment-là, le ministre ne
comprendra pas cette question et personne d'autre ne va comprendre d'ailleurs.
Sa réduction n'est pas bonne, elle n'est pas acceptable parce qu'il y a
telle chose en économique qui dit que lorsque vous payez plus cher par
unité et que vous en consommez moins, vous perdez l'avantage de cette
consommation que vous aviez auparavant. Le surplus du consommateur est une
notion fondamentale en économique et lorsqu'on ose parler de
l'élasticité, il faut également parler du surplus du
consommateur qui est réduit dans le cas présent. À ce
moment-là, cette réduction des bénéfices dont il
parle n'est pas acceptable. Si on veut parler d'économique, on va en
parler, mais il faudrait en parler d'une façon un peu plus
complète et d'une façon un peu plus exacte. Voilà pour ces
bénéfices.
Je ne sais pas, M. le Président, si je peux faire distribuer ce
tableau sur les bénéfices reliés au pétrole et qui
comprennent les versements de péréquation puisque le ministre ne
les a pas donnés. J'aimerais bien pouvoir déposer cela pour
l'information de tous.
Le Vice-Président: II n'y a pas de dépôt en
commission...
M. Raynauld: Non, je les distribue, M. le Président.
Le Vice-Président: ... mais vous pouvez distribuer cette
information.
M. Raynauld: Je les distribue, c'est pour l'information des
membres de la commission.
Maintenant, je voudrais en arriver à un deuxième point qui
me paraît important. C'est sur l'envolée du ministre sur les
questions de différences de philosophies et sur le fait que nous ferions
un troc de mauvais goût en enlevant à l'Alberta la
possibilité de bénéficier au complet des augmentations de
prix internationaux, ce qui pourrait éventuellement s'appliquer à
l'électricité qu'on produit au Québec.
Ces deux questions sont reliées, M. le Président, parce
que ce que le ministre essaie de faire croire à la population, c'est que
le gouvernement fédéral doit payer des paiements de
péréquation, le gouvernement fédéral doit payer des
subventions à l'importation, le gouvernement fédéral doit
trouver des moyens pour, justement, ne pas monter au prix mondial
immédiatement. C'est un volet de la position du gouvernement actuel.
Evidemment, il ne doit jamais taxer les Canadiens pour être capable de
faire ces versements, c'est absolument interdit. Le gouvernement
fédéral n'a pas le droit d'aller chercher des ressources. Oui, M.
le Président, je vais y arriver tout à l'heure, je vais donner
aussi un autre tableau pour l'information des membres, pour montrer que le
gouvernement fédéral, il faut bien qu'il donne des subventions ou
reconnaisse des bénéfices...
M. Bérubé: C'est nous qui donnons sans rien retirer
d'Ottawa.
M. Raynauld: ... sauf que le gouvernement fédéral
n'aurait pas le droit, suivant le Parti québécois, de
prélever les impôts nécessaires pour faire ces versements.
Or, le ministre a pris bien soin de ne pas nous parler de ce que le
gouvernement fédéral reçoit à propos du
pétrole et du gaz naturel au Canada. Cela, il ne nous en parle pas. Il
n'a pas révélé à la population que la part du
gouvernement fédéral à l'heure actuelle est de 10% et que
cela va monter à 12% de l'ensemble des recettes nettes provenant du
pétrole et du gaz. C'est à peu près de 10% à
12%.
J'ai un petit tableau ici qui montre que pour 1980 les recettes
fédérales sur le pétrole, provenant de l'impôt sur
les sociétés, vont rapporter au gouvernement
fédéral $1 900 000 000; la taxe à l'exportation va
apporter $633 millions; la taxe d'accise, au taux actuel, va rapporter $437
millions. Le ministre parlait tout à l'heure de $600 millions; c'est une
exagération verbale. Au total, le gouvernement fédéral
reçoit $2 900 000 000. Vous savez combien il doit verser s'il maintient
les programmes existants? Pour la péréquation, $1 mil-
liard en 1980; les subventions à l'importation, $2 500 000 000.
La position fiscale nette du gouvernement fédéral est
négative en ce qui concerne le pétrole. Il y a peut-être
des voleurs quelque part mais quand le voleur se retrouve plus pauvre que s'il
n'avait pas appliqué les programmes, on peut se demander de quel vol il
s'agit. Pour le gouvernement fédéral, les recettes nettes sont
négatives en 1980, tel que prévu, avec la politique existante
à l'heure actuelle, $647 millions de déficit de la part du
gouvernement fédéral.
Par conséquent, lorsque le gouvernement fédéral
nous dit, aujourd'hui: Si vous voulez que je continue à verser des
paiements de péréquation de l'ordre de $600 millions dont
j'ai parlé tout à l'heure si vous voulez qu'on continue
à donner des subventions à l'importation dont le Québec
bénéficie plus que tout autre en ce qui concerne les subventions
à l'importation, à ce moment-là, encore faut-il qu'il ait
des recettes fiscales pour faire ces paiements.
Je voudrais demander au ministre Bérubé, lui qui
connaît tellement l'économique, si l'argent tombe du ciel, est-ce
que c'est la manne qui tombe comme dans le désert? Où le
gouvernement va-t-il prendre cela? Si le gouvernement fédéral
n'est pas capable de percevoir des impôts, comme une taxe d'accise, par
exemple, à laquelle le gouvernement du Québec s'oppose bien
entendu, avec quel argent va-t-il verser les subventions à l'importation
dont nous bénéficions et les paiements de
péréquation. Je voudrais lui demander d'être un peu
responsable et de nous dire que s'il s'oppose à la taxe d'accise, il
faudrait aussi qu'il s'oppose à ce que le Québec reçoive,
dorénavant des subventions à l'importation et que le
Québec aussi demande au gouvernement fédéral de
réduire les versements de péréquation qu'il reçoit
au titre du pétrole et du gaz naturel. Je pense bien qu'il faut quand
même, étant donné qu'il y a peut-être des
différences de philosophie entre les deux parties ici, aujourd'hui, mais
il y a peut-être aussi une différence de bon sens...
Quand le gouvernement fédéral établit et
là, je suis généreux, j'ai parlé seulement de 1980
que les prévisions actuelles du déficit
fédéral seraient de $1 600 000 000 en 1985, si on continue la
même politique mais je n'en ai pas parlé a ce
moment-là, il va bien falloir que le gouvernement fédéral
prenne son argent à quelque part s'il veut continuer à verser des
bénéfices et répartir les bénéfices à
travers le pays comme il le fait.
Je vais m'arrêter là, M. le Président, pour
permettre justement qu'on ait un débat puisque le ministre nous a dit
qu'il était bien prêt à parler de chiffres. Moi aussi, je
suis tout à fait disposé à en parler. J'en ai encore
d'autres, d'ailleurs, dont je pourrai faire état, au besoin, sur
d'autres points. (13 heures)
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): II vous
reste une demi-heure. Je vous invite à essayer de vous distribuer
équitablement cette demi-heure pour que nous puissions terminer nos
travaux à 1 h 30. M. le ministre.
M. Bérubé: M. le Président, d'une part, le
député d'Outremont a commencé son intervention en
soulignant que les chiffres que je présentais n'étaient
certainement pas de moi, qu'ils avaient été
préparés par d'autres. Là-dessus, je lui donne raison et
je tiens à rendre hommage à tous ces fonctionnaires qui
m'entourent qui ne sont pas là pour faire de la politique, mais qui sont
là pour nous donner toute l'information nécessaire de
manière à pouvoir éclairer les citoyens. L'usage que nous
faisons de cette information est un usage politique, mais il faut quand
même qu'à la base, nous partions avec des chiffres
fondamentalement exacts.
Ce qui me frappe, c'est que le député d'Outremont, dans
son introduction et dans son développement, nous dise: La seule raison
et c'est ce que j'avais cité au début de mon intervention
pour laquelle le gouvernement du Parti québécois est
favorable aux hausses du prix du pétrole au niveau international, c'est
parce que cela sert son idéologie indépendantiste puisque, si on
rejoint le prix international, à ce moment-là, on devient libre
d'acheter notre pétrole où nous voulons et dans ces conditions,
on est plus souverain, plus indépendant, plus libre de prendre les
décisions que nous voulons prendre que si on est "poigné" avec un
programme de subventions qui nous tient à la merci des décisions
d'un autre.
Evidemment, ce qui me frappe, c'est que cela va aller très
facilement pour négocier la souveraineté-association, sauf avec
l'Ontario, parce que les neuf provinces du Canada neuf provinces sur dix
sont d'accord et le gouvernement fédéral actuel aussi. En
d'autres termes, il y a unanimité totale, y compris de la part de
provinces qui, devant produire leur électricité avec le
pétrole, sont encore plus dépendantes du pétrole que nous
et même ces provinces-là sont d'accord, demandent des mesures de
transition pour pouvoir passer au charbon. Parfait. Cela fait partie d'une
association économique normale, mais aucune ne demande ce que le
député de Mont-Royal demande et, d'ailleurs, même le
député d'Outremont reconnaît qu'il faut aller vers les prix
internationaux. Il faut peut-être en l'espace de cinq ans
rattraper essentiellement l'écart qui sépare les prix canadiens
des prix internationaux. Il l'a déjà dit en tant que
président comme il l'a si bien dit du Conseil
économique du Canada et il l'a réitéré
tantôt. Par conséquent, on est d'accord là-dessus. En
d'autres termes, tout le monde est d'accord. Si nous prenons cette position,
est-ce parce que nous sommes souverainistes ou bien tout simplement parce que
c'est le bon sens? C'est ma première réflexion.
Quand il prétend que nous refusons de publier les chiffres
concernant les subventions ou les rabais de prix que nous consentent les
provinces productrices, eh bien, je lui réponds immédiatement: Ce
n'est pas à nous à publier ces chiffres. Ce sont des chiffres du
gouvernement fédéral. Ce sont des chiffres publics. C'est
évidemment au gouvernement fédéral qui fait sa
comptabilité à les déposer. Ce n'est pas au gouvernement
du Qué-
bec d'arriver ici à l'Assemblée nationale et de
déposer des rapports du gouvernement fédéral. Si vous avez
besoin des rapports du gouvernement fédéral, vous n'avez
qu'à vous adresser au gouvernement fédéral. Ils auront la
même obligeance qu'ils ont vis-à-vis de nous et ils vous donneront
les chiffres parce que nous prenons leurs chiffres, c'est évident. Par
conséquent, ce n'est pas à moi à prétendre
commencer à révéler des sources fédérales.
Je pense que c'est à moi de les utiliser dans la discussion, mais je
laisse certainement à l'Opposition, qui a d'ailleurs eu accès aux
mêmes chiffres, le soin de les utiliser à ses fins. Donc, ce sont
des chiffres publics.
Il y a un point sur lequel le député d'Outremont a raison.
C'est la péréquation et là, je reconnais carrément
mon ignorance. En effet, le député d'Outremont a l'avantage sur
moi d'être beaucoup plus compétent dans les domaines de
fiscalité et il sait, comme peu de Québécois le savent,
à quel point le calcul de la péréquation est difficile,
compliqué et que peu de gens savent s'y retrouver. C'est d'ailleurs pour
cette raison que j'avais demandé, à la dernière minute, je
dois le dire j'en avais d'ailleurs déjà parlé au
ministre des Finances que quelqu'un puisse m'aider. Je peux donc
confirmer effectivement que ces chiffres de l'ordre de $600 millions concernant
la péréquation semblent exacts d'après les chiffres que
j'ai sous les yeux. En d'autres termes, ce sont des chiffres dont je n'avais
pas tenu compte pour la simple raison que je ne les avais pas et que je ne
savais pas comment les utiliser.
Cependant, évidemment, il faut reconnaître qu'il y a eu des
modifications au mécanisme de péréquation dès 1977.
On a mis des plafonds. En fait, à partir de 1982, au rythme de
croissance postulé du pétrole, il n'y aurait plus d'accroissement
de la péréquation, mais il reste néanmoins que la
péréquation est une réalité. Là-dessus, le
député d'Outremont a parfaitement raison de souligner ceci.
Il reste néanmoins qu'il faut tout de même revenir au
portrait global. Il faut, suivant la logique même du député
d'Outremont, se poser la question. S'il n'y avait pas eu de subventions au
pétrole et si nous avions été forcés de payer les
prix internationaux, combien le pétrole nous aurait-il
coûté? À ce moment-là, il faut regarder quelle
aurait été notre consommation de pétrole. Il faut regarder
quelle aurait été notre tendance à la substitution
d'électricité. Il faut donc regarder un certain nombre de
paramètres. C'est la première observation.
C'est ce qui nous amène à dire: Ce n'est pas $5 700 000
000 que nous avons obtenus, mais, en fait, essentiellement, $2 100 000 000 de
moins. Deuxièmement, nous introduisons comme deuxième
élément de calcul: Écoutez! Ce n'est pas normal de
calculer les subventions que vous recevez, mais de ne pas soustraire de ces
subventions les taxes que vous payez afin de payer les subventions. C'est bien
évident, sans quoi vous donneriez l'impression aux citoyens qu'ils
reçoivent de l'argent, mais qu'ils ne paient pas. À ce
moment-là, j'ai fait le calcul. J'ai soustrait $617 millions de taxes
d'accises que nous avons payées sur le pétrole. Ce qui m'a
amené à dire: Ce n'est pas $5 700 000 000 que nous avons
reçus, mais $3 milliards. N'essayons pas d'induire les
Québécois en erreur.
Maintenant, si le député d'Outremont pense que nous
devrions introduire les paiements de péréquation, je suis
d'accord avec lui. Je n'ai pas d'objection à recommencer mes calculs
pour les corriger. Mais on va quand même essayer de tracer un tableau
complet. Donc, on est déjà rendu à $3 018 000 000.
Récemment, à l'Assemblée nationale, le
député d'Outremont, par exemple, a dit: La ligne Borden
quand on parle de politique pétrolière, c'est une politique
pétrolière qui date de 1961 n'a jamais eu d'effet
néfaste sur l'économie québécoise pour autant que
le...
M. Raynauld: Je n'ai pas dit cela, M. le Président.
M. Bérubé: Ah! Vous n'avez pas dit cela.
M. Raynauld: Je m'excuse, mais je n'ai pas dit cela.
M. Bérubé: J'avais cru comprendre que vous aviez
dit que cela ne nous aurait rien coûté.
M. Raynauld: J'ai dit que le prix était inférieur
au Québec sur le pétrole de $0.50 le gallon...
M. Bérubé: Juste.
M. Raynauld: ... par rapport à l'Ontario...
M. Bérubé: Vous avez raison.
M. Raynauld: ... qui payait plus cher pendant toute la
durée de la ligne Borden. C'est tout ce que j'ai dit.
M. Bérubé: Oui, vous avez raison. C'est $0.50 le
baril, en fait.
M. Raynauld: C'est cela.
M. Bérubé: On a des difficultés avec nos
gallons et nos barils, M. le Président.
M. Raynauld: $0.50 le baril.
M. Bérubé: Enfin, reconnaissons que c'était
parfaitement exact. En fait, essayons de faire l'historique. Je pense que ce
n'est pas l'intention du député d'Outremont que je fasse
l'historique; c'est bien évident. Mais essayons de voir pourquoi cette
ligne Borden existe? Pour exploiter le pétrole de l'Alberta il en
coûtait plus cher que pour acheter du pétrole international. Ce
qui fait que l'industrie pétrolière albertaine ne pouvait se
développer. C'est cela qui a amené le gouvernement
fédéral à proposer la ligne Borden en disant: De l'autre
côté de l'Outaouais, du côté du Québec,
les Québécois ne pourront plus prendre leurs produits
raffinés qui sortent de leurs raffineries et les vendre en Ontario.
C'est bien évident que si l'Ontario ne peut plus recevoir de produits
raffinés du Québec, mais qu'elle reçoit du pétrole
brut de l'Alberta, que va-t-elle faire? Elle va construire des raffineries. On
a donc déplacé l'industrie pétrochimique
québécoise du Québec vers l'Ontario. Premier effet
négatif. Par exemple, il y a eu le cas célèbre de Calex,
qui voulait construire une raffinerie au Québec et qui n'a pu la
construire justement à cause de l'existence de la ligne Borden. Il y a
eu des poursuites judiciaires et c'est un cas très bien
documenté. Mais ce n'est pas tout.
On oublie trop facilement c'est dommage que la députation
de l'Union Nationale ait été retenue en commission parlementaire,
en réunion avec les leaders que l'Union Nationale a
procédé à la création d'une SOQUIP en 1969. Il y
avait une raison pour laquelle on a procédé à la
création de SOQUIP. Voyez-vous! Comme le pétrole albertain
coûtait plus cher, le prix du pétrole ou du gallon d'essence
coûtait plus cher en Ontario qu'au Québec ce qui,
évidemment, ne faisait pas l'affaire de l'Ontario et on n'était
pas plus intéressé à ce que cela soit trop
évident... Pendant des années, les compagnies
pétrolières ont chargé aux Québécois plus
cher pour leur pétrole que sur le marché international de
Rotterdam, par exemple. Une étude extrêmement intéressante
de M. Cloutier, à l'époque, avait montré au gouvernement
du Québec que les Québécois payaient environ $0.50 de plus
le baril que ce qu'ils devraient payer sur les prix internationaux.
Effectivement, il y avait une certaine complicité du côté
du gouvernement fédéral avec les compagnies pour maintenir ce
prix un peu plus haut. Cela compensait pour le fait qu'elles ne pouvaient plus
prendre d'expansion en Ontario, d'une part. En même temps, cela
empêchait les Ontariens d'être frustrés de voir les
Québécois payer leur gallon d'essence trop bon marché.
Lorsqu'on calcule cette différence je me suis amusé,
simplement pour le plaisir je me suis amusé à dire: Ne
prenons pas $0.50, comme le disaient plusieurs études à
l'époque; acceptons $0.25, et regardons la consommation de
pétrole.
Cette opération nous a coûté presque $1 milliard
parce qu'on avait un mécanisme artificiel de prix au Canada. Je
comprends qu'il fallait favoriser le développement du pétrole de
l'Ouest, mais on a payé pour cela. Là, évidemment, on n'en
a pas tenu compte. L'impact négatif de la ligne Borden sur le
développement de l'industrie pétrochimique au Québec, on
n'en a pas tenu compte. Cette possibilité pour les compagnies de majorer
leurs prix, de prendre un profit "off shore ' supérieur à ce
qu'elles prenaient dans les autres pays du monde, on n'en a pas tenu compte.
Cela, on l'a payé. Si on pouvait en tenir compte, évidemment, on
ferait peut-être une petite soustraction de $800 millions, $1 milliard,
$1 500 000 000; je n'en ai pas tenu compte.
Egalement pour les déficits d'investissement, j'ai
souligné, avec des chiffres extrêmement pro- bants, que, dans le
secteur énergétique, nous avons perdu $1 milliard en
investissements que nous aurions dû avoir. L'impact que cela a est
important. Nous devons développer notre électricité. Nous
devons développer, par exemple, des sources énergétiques
à partir de la forêt. A-t-on réalisé que si c'est le
gouvernement fédéral qui perçoit la taxe d'accise de $0.30
le gallon, cela veut dire que notre gallon d'essence va être à peu
près de $1.40 au Québec?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): On va
avoir une pénurie de temps. À ma connaissance, les travaux de
l'Assemblée ont été suspendus jusqu'à 13 h 30. On
m'informe que si l'Assemblée veut légalement siéger
à 13 h 30, il faut nécessairement permettre aux autorités
de sonner les cloches dans un délai qui fait partie de la tradition. Il
faut que la masse revienne sur la table pour que l'Assemblée puisse
siéger, de telle sorte qu'il faudrait que nos travaux puissent se
terminer au plus tard vers 13 h 20 afin qu'à 13 h 30, l'Assemblée
nationale puisse siéger.
Je vous incite donc, M. le ministre, à conclure très
rapidement et je recède la parole au député de Mont-Royal,
puisqu'on m'informe que nous devons agir de cette façon pour que
l'Assemblée puisse siéger et permettre aux députés
de revenir à l'Assemblée nationale.
M. Bérubé: D'accord. M. le Président, je
terminerai donc ce bilan en soulignant que, d'une part, on a déjà
baissé le gain à à peu près $3 milliards; si on
calculait ce que la ligne Borden, les politiques nationales
pétrolières nous ont coûté avant 1973, il y aurait
également un coût important et dont on n'a pas tenu compte, mais
ce ne serait certainement pas en bas de $1 milliard. Si on regarde le
déficit des investissements, ce qu'Ottawa a investi dans l'ensemble du
Canada dans le secteur énergétique, par comparaison avec ce qu'il
a fait chez nous, on s'aperçoit qu'on a un déficit de $1
milliard. Là, d'ailleurs, j'ai voulu souligner c'est ce sur quoi
je terminais tantôt le problème plus particulier d'une taxe
d'accise. Je vois le député de Beauce-Sud qui s'intéresse
énormément au méthanol. Le député de
Beauce-Sud, qui s'intéresse au méthanol, sait ou devrait savoir
peut-être ne le sait-il pas, parce que c'est de l'information un
peu privilégiée dont nous venons de terminer les études
que nous pouvons faire du méthanol et être concurrentiels
avec l'essence pour à peu près $1.40. Evidemment, si nous payons
les taxes d'accise sur le méthanol, jamais le méthanol ne sera
rentable. On peut donc imaginer une stratégie où nous enlevons la
taxe d'accise sur le méthanol et, à ce moment-là, le
méthanol devient concurrentiel et voilà le développement
extraordinaire à l'échelle du Québec, tant dans Beauce-Sud
que dans les Appalaches, Kamouraska-Témiscouata, le Nord-Ouest, la
Mauricie, un potentiel extraordinaire de développement industriel au
Québec qui est possible, si nous contrôlons la taxe d'accise.
Voilà le danger de laisser une taxe d'accise entre les mains d'Ottawa.
Première observation.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
ministre, il nous reste six minutes de débat. Je dois
nécessairement céder la parole au député de
Mont-Royal pour partager équitablement le temps. Je me dois de lui
céder la parole. Je vous incite à conclure en une minute.
M. Bérubé: Vous ne me laisseriez pas une minute, M.
le Président?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Une minute au maximum.
M. Bérubé: Jusqu'à 13 h 15, M. le
Président?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Une minute.
M. Bérubé: D'accord.
Je termine. Lorsque parfois on se demande quels seront les
bénéfices que nous retirerons de la politique
énergétique pour les cinq prochaines années, eh bien, dans
la mesure où nous rejoindrons le prix international, ces subventions
vont tendre vers zéro. Nous avons donc calculé combien il nous
resterait de subventions à aller chercher. Evidemment, c'est
hypothétique et nous avons trouvé $3 milliards de subventions,
mais nous avons calculé aussi combien nous coûterait la taxe
d'accise, qui est de $5 milliards, et on s'aperçoit qu'on est
déficitaire. (13 h 15)
Quand on additionne tout, absolument tout, y compris les $2 500 000 000,
on se rend compte que les politiques canadiennes pétrolières
n'ont à peu près rien donné au Québec d'avantages
comparatifs; c'est peut-être en moins, c'est peut-être en plus. On
se chicanera sur le zéro mais, personnellement, je
préférerais ne pas dépendre des politiques
pétrolières canadiennes qui, d'après les chiffres
mêmes que nous présentons à l'Assemblée nationale,
ne nous donnent rien pour pouvoir bénéficier d'une autonomie,
d'une capacité de prendre des décisions, d'une capacité de
mettre mon argent là où je dois le mettre, c'est-à-dire
dans le développement de la forêt, dans le développement du
méthanol, dans le développement de
l'hydroélectricité et peut-être dans un certain nombre
d'autres opérations énergétiques capitales pour le
développement du Québec. C'est essentiellement ça que nous
proposons.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
ministre...
M. Bérubé: Nos priorités sont
différentes de celles de l'ensemble du Canada et nous voulons avoir les
moyens de réaliser nous-mêmes nos priorités.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: M. le Président, vraiment c'est incroyable
cette position du gouvernement sur les approvisionnements, sur les politiques
du pétrole.
La logique du ministre semble dire: II faut payer plus cher pour le
pétrole, afin qu'on puisse développer l'hydro, pour que tout le
monde puisse payer plus cher pour les sources énergétiques; pour
que le consommateur paie plus cher à la fin. C'est là sa
logique.
Je ne comprends pas sa position sur les approvisionnements. Il
réitère qu'il ne veut pas dépendre des approvisionnements
canadiens, il veut se fier aux marchés mondiaux.
M. le Président, il l'a dit lui-même, il
préfère avoir sa propre politique, sans dépendre des
approvisionnements. Il n'a pas du tout répondu à cette question.
Les avertissements des pays qui nous disent que, non seulement ça va
augmenter en coût, mais que les approvisionnements vont être
réduits, les Etats-Unis qui veulent s'associer avec nous dans le domaine
énergétique, parce qu'il y a une sécurité
d'approvisionnement sur laquelle on peut se fier et qui ne dépend pas
des perturbations politiques mondiales, il met complètement ça de
côté.
Je ne comprends pas non plus sa position sur la taxe d'accise. Comment
peut-on dépendre du pétrole? On n'en a pas au Québec.
Comment le fédéral va-t-il pouvoir, premièrement, avoir
une banque d'énergie pour que, quand il y aura des pénuries,
comme il pourrait y en avoir cet hiver, où allons-nous nous tourner pour
combler cette pénurie? Même le ministre a admis: SOQUIP, à
long terme, peut-être. Il n'a même pas confié le mandat,
mais, à court terme, il dépend du gouvernement
fédéral.
Comment peut-il dire: On ne veut pas donner une taxe d'accise, on ne
veut pas donner de revenu au gouvernement fédéral, parce que...
Comment peut-il avoir le moyen, premièrement, de développer de
nouvelles sources de pétrole dont nous allons bénéficier,
et comment le gouvernement fédéral pourra-t-il avoir sa banque
d'énergie s'il n'a pas les revenus nécessaires? Sur ce point, je
ne comprends pas le ministre.
Je pense que ce sur quoi nous différons essentiellement je
vois que le temps s'écoule c'est sur l'approche que nous avons,
et ce n'est pas seulement sur la question de prix. Je pense que le ministre a
pris trop de temps pour essayer de parler des questions de prix pour en arriver
au prix mondial; même la politique fédérale est à
l'effet de ne pas aller au prix mondial, on parle même d'un "Chicago
Price" qui est en-dessous du prix mondial. Mais le ministre ne s'est pas
arrêté du tout sur la question de l'approvisionnement canadien, il
est passé à côté de cela.
Ses chiffres sur les bénéfices, j'ai des chiffres ici.
Quand le prix du baril de pétrole brut canadien est de $13.75, la partie
qui va aux producteurs, la partie qui va à la taxe
fédérale, la partie qui va aux taxes provinciales, cela ne sort
pas de la poche du consommateur québécois. Si on paie moins du
gallon, ce ne sont pas toutes des subventions directes du
fédéral; 85% de nos ressources sont
canadiennes, ce sont des profits qui ne vont pas aux compagnies, ce sont
des profits qui ne vont pas en Alberta, ce sont des profits qui restent dans
les poches du consommateur québécois. Ce n'est pas une question
d'aller de la poche gauche à la poche droite. C'est cela que vous
essayez de faire accroire.
Les bénéfices, d'ici à 1983, de $6 milliards, ce ne
sont pas des chiffres que nous avons inventés, ce sont des chiffres
basés sur les prévisions d'augmentation sur le prix mondial et
nous n'allons pas le payer au moins jusqu'en 1983. Même à ce
moment le prix mondial aura tellement augmenté qu'il va y avoir un autre
rattrapage.
M. le Président, je sais qu'il faut conclure. La position du
ministre ne protège pas les Québécois au sein de la
fédération canadienne. Je suggérerais au ministre qu'avant
d'implanter sa politique indépendantiste il n'a pas le mandat
pour le faire qu'il travaille au sein de la fédération
canadienne, qu'il se fie sur les ressources canadiennes et qu'il
représente vraiment les Québécois vis-à-vis du
gouvernement fédéral pour tous nos intérêts. Merci,
M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Merci beaucoup.
M. Bérubé: C'est parce que j'ai devant moi...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Non, M. le ministre, excusez-moi, avant d'ajourner les travaux, M. le
député de Richmond, je sais que le député de
Mégantic-Compton a excusé votre absence sur une question de
règlement. Il l'a très bien motivée et si c'est cela que
vous voulez faire, je vous le permets et après cela, j'ajournerai les
travaux de la commission.
M. Brochu: Très bien, je vous remercie, M. le
Président, et je remercie mon collègue le député de
Mégantic-Compton, justement j'étais retenu à la
réunion des leaders parlementaires pour mettre en marche le processus
pour le restant de la session. Je m'excuse, j'aurais aimé participer au
débat, on aura d'autres occasions de revenir sur le sujet, je vous
remercie, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Les travaux de la commission sont ajournés sine die.
Fin de la séance à 12 h 21