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Etude des crédits du ministère de
l'Énergie et des Ressources
(Seize heures vingt et une minutes)
Le Président (M. Bordeleau): A l'ordre, messieurs! M.
l'adjoint parlementaire! A l'ordre, s'il vous plaît!
La commission parlementaire de l'énergie et des ressources
entreprend donc ses travaux aux fins d'étudier les crédits du
ministère de l'Énergie et des Ressources.
Les membres de la commission pour la séance d'aujourd'hui sont:
M. Bérubé (Matane); M. Brochu (Richmond), M. Ciaccia
(Mont-Royal), M. Desbiens (Dubuc), M. Grégoire (Frontenac), M. Marquis
(Matapédia), M. Perron (Duplessis), M. Raynauld (Outremont).
Les intervenants: M. Dussault (Châteauguay), M. Fontaine
(Nicolet-Yamaska), M. Giasson (Montmagny-L'Islet), M. Lévesque
(Kamouraska-Témiscouata), M. Mercier (Berthier), M. Michaud (Laprairie),
M. O'Gallagher (Robert Baldwin), M. Ran-court (Saint-François) et M.
Samson (Rouyn-Noranda).
Il y aurait lieu de nommer un rapporteur de la commission. Si j'ai des
suggestions de la part des membres de la commission... Quelqu'un se propose? M.
le député de Matapédia?
M. Grégoire: Je propose M. le député de
Matapédia.
Le Président (M. Bordeleau): Le rapporteur de la
commission sera donc M. Marquis (Matapédia) et on peut maintenant
procéder.
M. le ministre, vous avez des commentaires préliminaires avant
d'entreprendre l'étude des programmes? M. le ministre.
Remarques préliminaires M. Yves
Bérubé
M. Bérubé: Oui, M. le Président, pour
sacrifier à la coutume datant de quelques années maintenant, j'ai
pensé présenter quelques notes concernant l'ensemble du budget,
ce qui permettra peut-être de replacer certaines priorités dans
leur perspective la plus juste possible et pourrait peut-être même
nous éviter d'avoir des débats trop prolongés sur des
points que je n'aurais pas eu l'occasion de traiter.
En fait, la démonstration de l'importance des richesses
naturelles dans le développement économique du Québec
n'est certainement plus à faire. Je pourrais mentionner qu'en 1977,
l'exploitation forestière, la production de pâtes et de papiers,
le bois d'oeuvre, de placage, le contre-plaqué donnaient de l'emploi
directement à plus de 70 000 personnes. Cette industrie versait
près de $700 000 000 en salaires et livrait des produits d'une valeur de
$3 100 000 000. Il s'agit là de l'industrie primaire et de celle de la
première transformation.
Le plus important de ces produits, c'est le papier à imprimerie
qui se classe, depuis de nombreuses années, au premier rang des
exportations québécoises, tandis que la pâte de bois et le
bois d'oeuvre venaient aux huitième et neuvième rangs
respectivement en 1977.
Ensemble, ces trois produits représentaient des exportations
globales de près de $1 500 000 000, soit 20% du total des exportations
québécoises. C'est dire l'impact déterminant du secteur
forestier sur la balance commerciale du Québec.
Le secteur minier est tout aussi important pour notre industrie. En
fait, l'exploitation et la mise en valeur de nos mines et de nos forêts
ont représenté 43% des exportations totales du Québec en
1979. Les principaux produits exportés sont les papiers à
imprimerie, comme je le soulignais tantôt, mais également les
minerais concentrés et les déchets de fer pour $1 300 000 000 et
l'amiante non manufacturée pour $527 000 000. En d'autres termes, sept
des dix exportations principales du Québec sont reliées aux
ressources naturelles.
Dans une large mesure aussi, les secteurs de l'énergie et des
terres permettent de supporter ce développement économique.
Ainsi, 49% de l'énergie électrique produite au Québec est
consommée par le secteur industriel, dont les principales industries
énergivores sont celles du papier journal, de la fonte et de l'affinage
des métaux non ferreux et des produits chimiques industriels.
D'autre part, c'est sur les territoires dont la propriété
est entièrement publique que nous retrouvons 90% des terres à
vocation forestière du Québec.
C'est donc dans cette perspective d'assurer le développement
économique du Québec que le ministère de l'Énergie
et des Ressources a été créé et nous tenons
essentiellement la première commission parlementaire pour évaluer
les crédits de ce ministère, dis-je, qui regroupe pour la
première fois quatre grandes missions gouvernementales, toutes
axées autour des richesses naturelles à développer
à des fins économiques, c'est-à-dire les terres, les
mines, les forêts et l'énergie.
Parlons d'abord des forêts. L'industrie forestière est
considérée à juste titre comme étant l'un des
principaux moteurs de l'économie québécoise, d'autant plus
que sa localisation sur l'ensemble du territoire en fait un outil
privilégié de développement régional. Encore
aujourd'hui, il n'est pas rare de rencontrer des gens pour qui la seule vision
d'un couvert boisé immense est la garantie d'un développement de
cette industrie. Il s'agit certainement là d'un élément
important, d'autant plus que cette ressource est renouvelable.
Cependant, plusieurs études, celles entreprises depuis 1976
notamment, ont permis de détruire cette illusion de bonheur tranquille
et de révéler
que l'industrie des pâtes et papiers était en perte de
vitesse. En effet, graduellement, notre principal client est devenu en
même temps notre principal concurrent, si bien que depuis 25 ans
l'industrie québécoise des pâtes et papiers a perdu
annuellement 1% de sa part des marchés américains.
Malgré l'avantage comparatif que constitue le coût de notre
électricité, les coûts de production de nos usines ont
passablement grevé la capacité concurrentielle de notre
industrie. Je pourrais citer quelques exemples qui sont maintenant bien connus.
Un coût de bois plus élevé, par exemple; il est de $60
à $75 le cunit au Québec, contre $45 à $55 pour nos
concurrents. Il s'agit de chiffres de 1977.
Également, on peut parler d'un équipement qui ne favorise
guère la productivité. Une bonne usine moderne a besoin d'environ
3,6 heures-homme par tonne de papier journal, alors que nos usines ont une
moyenne de 6,7 heures-homme par tonne.
Finalement, on doit également souligner une politique
fédérale de transport ferroviaire qui défavorise le
Québec au profit de l'Ouest. Par exemple, sur une même distance de
890 kilomètres, le transport d'une tonne de papier journal coûte
$35.85 de Trois-Rivières à Philadelphie, alors qu'il en
coûte $18.40 de Catawba, South Carolina, jusqu'à Philadelphie, qui
est exactement le même marché. On voit donc que la structure de
tarification, dans le secteur ferroviaire est de nature à diminuer notre
capacité concurrentielle sur les marchés américains. En
fait, lorsque les coûts d'exploitation s'accroissent, les profits
diminuent au point souvent de ne plus permettre la modernisation majeure des
usines et on entre dans ce cercle vicieux. C'est alors que le gouvernement a
voulu profiter essentiellement d'une conjoncture intéressante dans la
mesure où le marché du papier journal allait connaître une
croissance importante d'ici à 1982-1984 pour tenter d'amener notre
industrie à accroître sa part des marchés, en d'autres
termes modifier son attitude et prendre une approche beaucoup plus
agressive.
C'est ainsi que nous avons mis sur pied ce programme des pâtes et
papiers qui a été le résultat de longues discussions, tant
au niveau gouvernemental à Québec, puisqu'il fallait harmoniser
des politiques de trois ministères différents, mais
également avec le gouvernement fédéral, puisqu'il nous a
fallu de nombreux mois pour en arriver à une entente. Cependant, je suis
en mesure de dire aujourd'hui que la presque totalité des usines
concernées vont participer au programme de modernisation de l'industrie
des pâtes et papiers et que l'investissement du secteur privé dans
ce programme dépassera largement $1 000 000 000 initialement
prévus. C'est un succès important, je pense, qui détruit
de façon totalement non équivoque un certain mythe entretenu par
une certaine opposition à l'effet qu'il n'était pas possible pour
un gouvernement du Parti québécois de bien gérer le
développement économique du Québec. Je pense que les
résultats financiers des deux dernières années sont
là pour faire la démonstration, une fois de plus, des fausses
prophéties de malheur auxquelles on a eu droit en 1975, en 1972, en 1969
et auxquelles nous avons droit présentement, puisque nous sommes
également quasi en période électorale.
En fait, quant au sciage, je dois dire que la problématique est
assez différente. Nous avons au Québec des entreprises modernes
et concurrentielles. Soulignons en passant qu'il s'agit d'entreprises
majoritairement contrôlées par des Québécois,
souvent même de souche francophone et on devrait normalement s'attendre,
suivant le point de vue de l'Opposition traditionnelle, à voir cette
industrie s'effondrer, puisque par définition, les
Québécois ne sauraient avoir les compétences normales dans
le domaine des affaires. Mais en fait, il s'agit au contraire d'une industrie
de sciage extrêmement moderne et très dynamique qui
représente, dans beaucoup de municipalités des
éléments essentiels de l'économie locale. (16 h 30)
En fait, dans ce secteur, le principal levier de développement
réside dans une meilleure allocation des bois, c'est-à-dire qu'il
faut s'assurer que les tiges de bois de bonne dimension vont au sciage,
plutôt qu'à la pâte. A ce moment-là, il faut amener
l'industrie des pâtes et papiers à se contenter de résidus
de sciage, sous forme de copeaux, par exemple. C'est l'essentiel de la
politique qui a été mise de l'avant par mon ministère dans
la région du Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie et dont on
connaît déjà l'impact dans des régions comme le
Nord-Ouest québécois, que vous connaissez bien, M. le
Président, et le Saguenay-Lac-Saint-Jean.
Pour favoriser la mise en oeuvre de ces politiques, $26 000 000 seront
consacrés, en 1980-1981, au programme de développement de
l'industrie forestière et $34 000 000 à l'aménagement
intensif de nos forêts publiques et privées. Alors que le
programme de développement de l'industrie forestière fait plus
que doubler par rapport à celui d'exercices précédents,
celui de l'aménagement intensif augmente de 19%. Plus
particulièrement, le budget de l'élément reboisement est
augmenté de 29%, ce qui permettra d'engager définitivement le
ministère sur la voie des objectifs dégagés dans le
programme de modernisation de l'industrie des pâtes et papiers.
D'autre part, je m'en voudrais de passer sous silence le travail de
réorganisation administrative effectué par les responsables du
programme d'aide à la production forestière privée, dont
le budget est augmenté de 14% en 1980-1981. Depuis plusieurs
années, ce programme s'était enlisé dans un
marécage normatif qui laissait de moins en moins de place, je pense,
à la discussion d'objectifs forestiers et d'objectifs
économiques. Il s'agissait essentiellement de trouver une autre
utilisation pour notre cahier fort important de procédures normatives
d'aménagement forestier; il s'agissait également de
réduire un contrôle un peu trop tatillon, ce qui nous a permis
d'ailleurs de réduire le personnel, au niveau de l'aide à la
forêt privée, de 22 personnes à 11 personnes et
égale-
ment de réduire de façon très substantielle les
coûts de la technique. Ce qui fait qu'avec le même budget, nous
nous retrouvons avec des capacités en travaux sur le terrain qui sont
notablement plus élevées.
En fait, à l'avenir, les sommes octroyées dans le cadre de
ce programme seront basées sur un taux de rendement des investissements
de l'État qui seront définis en fonction de critères
financiers et forestiers. Dans ce cadre beaucoup plus large, il appartiendra
aux bénéficiaires de cet investissement gouvernemental de
gérer les sommes. Je pense qu'il s'agit d'un bel exemple de
réévaluation d'un programme et de la confiance que le
ministère manifeste à l'égard de la capacité des
Québécois de prendre leur développement en main. Je suis
convaincu d'ailleurs que le député de Mont-Royal sera tout
à fait d'accord avec cette approche qui veut que les
Québécois, de plus en plus, prennent en main leur
développement et leur avenir collectif.
Vous me permettrez de citer un autre exemple de la réorganisation
administrative qui permet, avec une réduction des budgets, de maintenir
l'ampleur du programme de voirie forestière. C'est en 1980-1981 que la
nouvelle politique à cet égard pourrait être plus
généralisée. Cette politique vise à redonner aux
industriels la responsabilité de construire et d'améliorer leurs
chemins forestiers moyennant une subvention de l'État correspondant
à 50% des coûts totaux. Autrefois, sur les forêts
domaniales, le gouvernement défrayait 100% des coûts de
construction de chemins forestiers. Cependant, il percevait une rente, une
redevance routière qui allait de $1 à $3 du cunit.
En 1980-1981, $8 700 000 des $16 800 000 prévus à cet
élément de programme seront dépensés en vertu de
cette nouvelle politique, le reste devant servir à répondre
à des engagements qui ont été pris en vertu de la
politique précédente.
Il me fait plaisir de souhaiter la bienvenue au député de
Montmagny-L'Islet.
Un calcul simple permet de voir que les sommes totales
dépensées cette année en matière de voirie
forestière atteindront $23 700 000, comparativement à $23 500 000
calculés sur cette même base pour 1979-1980.
Enfin, le budget de l'élément Contrôle de
l'utilisation est augmenté de 18,8% par rapport à l'année
précédente. Il s'agit simplement de s'assurer que nos travaux de
reboisement soient appropriés, donnent les résultats attendus et
également de s'assurer qu'on récupère le plus de
matière ligneuse possible sur les parterres de coupe.
Globalement, si on fait abstraction du programme Gestion interne et
soutien, que l'on doit associer à l'ensemble des activités du
ministère, le budget du secteur forêts passe de $101 500 000
à $118 900 000 en 1980-1981, soit une augmentation de 17,1% par rapport
à l'exercice précédent.
Les $13 000 000 qui seront dépensés en 1980-1981 pour la
connaissance géographique du territoire sont loin de représenter
les sommes totales que le gouvernement dépense pour cette
activité par l'entremise de l'ensemble des ministères et
sociétés d'État. En fait, un comité
interministériel révélait tout récemment que
près de $51 000 000 étaient dépensés dans ce
secteur en 1977-1978 par un grand nombre de ministères, principalement
Hydro-Québec, le ministère des Transports, celui des Terres et
Forêts et celui de l'Agriculture.
Afin de coordonner les efforts de ces divers intervenants dans ce
secteur de la cartographie et de permettre ainsi d'éviter les
dédoublements et de favoriser des économies, un bureau de la
cartographie et des arpentages est créé et des crédits de
$600 500 lui sont réservés.
L'évolution des activités du programme de Gestion des
terres publiques ne se manifeste pas tant par l'ampleur des crédits, qui
augmentent quand même de 9,4% par rapport à l'exercice
précédent, que par le changement d'attitude du ministère
à l'égard de la gestion de ce qu'on appelle
généralement les lots épars placés sous la
juridiction du ministère de l'Énergie et des Ressources. Pour
être plus précis, il s'agit de lots publics enclavés dans
des zones où la plupart des lots ont déjà
été "privatisés".
En 1980-1981, le ministère oeuvrera à redonner aux
individus et aux organismes qui les regroupent et représentent la
gestion de ces lots pour autant que leur activité contribue à
l'amélioration du bilan forestier du Québec. La mise en oeuvre de
cette politique est un autre bel exemple de la volonté gouvernementale
d'associer toute la population au développement économique du
Québec et surtout de lui en donner les moyens. Qui veut la fin veut les
moyens, comme dirait le député de Mont-Royal.
Tout comme le secteur forestier, le secteur minier présente des
caractéristiques d'une large contribution à la balance
extérieure du Québec et au développement de nos
régions périphériques. Il est toutefois plus complexe
à analyser en ce sens que la plupart des substances minérales
véhiculent une problématique qui leur est propre.
Dans cet exposé des crédits budgétaires, nous nous
en tiendrons aux substances minérales qui sont les plus significatives
pour le développement économique du Québec. Nous avons
certes le regard tourné vers l'or, dont la valeur actuelle devrait
favoriser certainement la réouverture d'un certain nombre de mines dans
le Nord-Ouest particulièrement, et certainement l'expansion des mines
actuelles.
La situation du cuivre, par contre, est plus préoccupante pour
l'économie québécoise dans ce secteur des métaux
non-ferreux. Alors que la capacité de transformation du cuivre au
Québec est de l'ordre de 320 000 tonnes par année, soit 70% de la
capacité canadienne, notre production annuelle de matière
première ne représente que la moitié des besoins de cette
industrie. Plus grave encore, nos réserves de cuivre s'épuisent
et le gouvernement fédéral, via la Corporation de
développement du Canada je n'ai pas dit: la Corporation de
développement du Québec a permis le développement,
à Timmins, en Ontario, d'une industrie de transformation qui puisera
à
même les ressources d'approvisionnement de l'industrie
québécoise.
D'autre part, si on analyse la situation des substances telles le
minerai de fer et l'amiante, on se rend compte de leur faible effet
d'entraînement sur l'économie québécoise, même
si leur extraction constitue le principal moteur des économies de la
Côte-Nord et de l'Estrie. Il en est de même pour l'ilménite
qui, quoique nécessitant un premier stade de traitement, ne permet pas
réellement le développement d'une industrie de transformation au
Québec. Quant à l'uranium, il est encore au stade de
l'exploration intensive.
Enfin, la filière des minéraux industriels et des
matériaux de construction, tels la tourbe, le calcaire, le silice, le
granite et le mica, offre des perspectives beaucoup plus intéressantes
de développement. Les réserves québécoises pour ces
substances sont fortes de même que la demande mondiale. Or, le
caractère artisanal de ce secteur, dominé par les
Québécois, n'a pas encore permis l'actualisation de tout son
potentiel.
D'une façon générale, le secteur minier est
caractérisé par la domination étrangère, un
accès difficile au capital de risque et par des fluctuations du
marché que même les plus grandes multinationales ont de la
difficulté à absorber.
Dans le secteur minier, les principaux objectifs du ministère
sont d'encourager une participation québécoise accrue et de
rechercher des effets d'entraînement plus grands pour l'économie
québécoise. Pour ce faire, le gouvernement a surtout
privilégié des outils législatifs et fiscaux ainsi que le
développement des sociétés d'État. Il n'en demeure
pas moins que les crédits du secteur des mines passent de $30 500 000
à $33 100 000 pour l'exercice 1980-1981, soit une augmentation de $8 500
000 par rapport à l'exercice précédent.
Je pense qu'il est important de souligner en passant l'impact que
pourront avoir sur le développement des sociétés en
commandite québécoise les récentes mesures
budgétaires annoncées par le ministre des Finances, mesures qui
vont permettre au citoyen qui investit dans l'exploration, dans le cadre de
sociétés en commandite entre autres, de déduire,
au-delà des dépenses d'exploration, 66% desdites dépenses
en supplément sur son revenu, ce qui veut dire que, pour un
professionnel ou un homme d'affaires dont le niveau moyen de taxation serait
dans les 60%, par exemple, ce qui n'est pas rare aujourd'hui, le gouvernement
pourrait rembourser jusqu'à 80% des dollars d'exploration consentis par
le particulier.
Signalons qu'il s'agit en fait, à mon point de vue, de la
dernière demande d'importance que m'adressait l'industrie minière
puisque nous avons pu, depuis quelques années, répondre à
peu près à toutes les demandes tant en ce qui a trait à la
taxation sur les carburants qu'en ce qui a trait aux déductions pour les
dépenses d'exploration en chantier, ce qui fait que, pour autant que les
stimulants fiscaux sont concernés, nous en avons une gamme assez
complète. Il faut maintenant expérer que l'on sache au
Québec faire la jonction entre l'expertise qui est abondante au
Québec, dans la mesure où nos écoles d'ingénieurs
ont formé un grand nombre de géologues québécois et
où le capital est également abondant, mais où on n'a pas
su provoquer l'étincelle, que l'on sache faire la jonction entre ces
deux pôles du développement minier.
Je continue dans le texte principal: "En fait, en 1980-1981, le
ministère progressera dans la solution du problème
d'approvisionnement en cuivre de notre industrie de transformation. D'une part,
le programme d'exploration du Nord-Ouest québécois en est
maintenant rendu au stade de la détermination des cibles et des sommes
additionnelles de $440 000 environ sont prévues pour cette
activité. D'autre part, une somme de $6 000 000 sera allouée pour
la construction d'une route entre le village minier de Joutel et la
propriété minière de Selco Mining Corporation afin de
permettre la mise en exploitation du gisement de cuivre et de zinc de Brouillan
par Selbaie dès 1981. "Une subvention de $1000 000 sera également
versée à l'Institut de recherche et de développement de
l'amiante, et cela conjointement avec l'industrie de l'amiante, afin d'appuyer
cette politique finalement énergique du gouvernement du Québec
à l'égard de la transformation de l'amiante chez nous. Quant au
Centre de recherches minérales, il s'inscrira davantage dans la
philosophie du développement industriel du secteur minier, en
privilégiant cette fois les projets propres à susciter des
retombées économiques à moyen terme au Québec.
C'est dans ce même esprit que s'inscrit l'augmentation des crédits
de l'activité "planification" qui sont portés de $943 000
à $1 375 000 en 1980-1981, soit une augmentation de 46% par rapport
à l'exercice précédent.
Enfin, on notera que le budget alloué au développement
dans l'industrie minière n'est pas réellement diminué. En
fait, des sommes de $756 000, qui étaient prévues en 1979-1980
pour le fonctionnement du Bureau de l'amiante, ne réapparaissent pas, vu
la création de la Société nationale de l'amiante et la fin
des activités du Bureau de l'amiante. Les crédits alloués
à cet élément de programme serviront principalement
à développer l'industrie des minéraux industriels «
matériaux de construction.
Abordons maintenant peut-être le secteur de l'énergie. Il
s'agit d'un autre secteur dont les crédits budgétaires, je pense,
reflètent mal l'importance de l'activité gouvernementale. En
fait, le poids des éléments extérieurs à la
structure administrative du ministère je pense à
HydroQuébec, je pense aux grands commerçants internationaux du
pétrole et aux autres gouvernements explique l'accroissement
significatif du budget de l'activité conseils, politiques et
coordination de l'élément études et gestion interne, qui
passe de $1 500 000 à $1 900 000, soit une augmentation de 27% par
rapport à l'exercice précédent.
La diminution qui est appliquée au programme d'économie de
l'énergie est attribuable, elle,
au rattrapage effectué en 1979-1980 dans les subventions
relatives au programme d'isolation des maisons, à la suite des
amendements apportés aux conditions d'admissibilité.
D'autre part, le ministère poursuivra ses démarches
auprès du gouvernement fédéral en vue d'assurer le
transfert de son programme vers les provinces. De toute façon, des
crédits supplémentaires seront votés en fonction de
révolution de la demande, puisqu'il est difficile, a priori, de
prédire. Soulignons en passant que l'ancien ministre de l'Energie, M.
Hnatyshyn, avait offert formellement au gouvernement du Québec de
transférer entièrement les sommes de son programme d'isolation
des maisons au Québec et à d'autres provinces également,
de manière que les citoyens puissent éviter cette double
administration extrêmement coûteuse et qui a tendance, d'ailleurs,
à confondre les citoyens qui n'arrivent pas à se retrouver dans
ces programmes. J'ignore cependant quelle est la position de l'actuel
gouvernement. Cependant, nous les avons relancés sur la question et nous
attendons des résultats.
Enfin, en plus de la création de Nouveler, le ministère
augmentera de 22% les crédits alloués à la recherche et
à la promotion des énergies nouvelles, ceux-ci passant de $1 000
000 à $1 300 000 essentiellement.
Donc, de façon générale, le ministère
continuera son travail de mise en oeuvre de la politique
énergétique du gouvernement du Québec qui, malgré
l'importance de ses besoins pétroliers cela permettra au
député de Mont-Royal de nous faire un petit exposé
peut s'enorgueillir d'un bilan d'autonomie énergétique qui
s'élève à 51%, 56%, selon l'OCDE. Je vois, d'ailleurs, que
le député de Mont-Royal prend des notes. (16 h 45)
Outre l'économie d'énergie et le développement des
énergies nouvelles, les efforts du ministère pour l'exercice
1980-1981 porteront principalement sur le développement du réseau
de distribution du gaz naturel au Québec, sur la promotion d'un projet
de construction d'un port méthanier sur les rives du Saint-Laurent et
l'analyse du développement hydro-électrique pour la
période post-Baie James. En effet, à l'avenir, le discours
relatif à l'aménagement hydraulique de nos rivières ne
doit plus uniquement porter sur son utilisation domestique, mais doit
être plus intimement lié au développement de
l'économie québécoise. Le coût fort concurrentiel de
cette énergie est un atout de premier ordre pour les industries
énergivores; nous verrons ainsi à développer notre
industrie de transformation. D'autre part, l'exportation de surplus
d'électricité pourrait fort bien servir à financer le
coût d'utilisation d'énergies moins nobles.
Ce sont des perspectives fort intéressantes si l'on
considère que, malgré l'ampleur du projet de la Baie James, nous
n'avons pas encore développé la moitié des
capacités de production de nos rivières, qui totalisent une
puissance de 62 500 megawatts.
Abordons maintenant l'aspect de gestion interne et de soutien. Ce
programme incorpore toutes les activités reliées à
l'administration de l'ensemble du ministère. C'est pourquoi il est
détaché dans cette présentation du secteur
"Forêts".
En réalité, le budget de l'exercice 1979-1980 n'a
été que de $16 800 000, puisqu'une subvention de $10 700 000 a
été accordée à Rexfor pour favoriser le transfert
de propriété de Samoco Inc. Ce qui permettrait d'ailleurs sans
doute au député de Montmagny-L'Islet d'aborder cette
question.
En 1980-1981, le coût de l'administration du ministère sera
justement de $16 800 000; donc aucune augmentation à ce chapitre, ce qui
illustre fort bien les premiers effets de la fusion de l'énergie, des
mines et des terres et forêts. C'est d'ailleurs au cours de cet exercice
que se poursuivra le processus d'intégration des divers secteurs
composant le ministère.
Les crédits budgétaires servent, entre autres, à
financer les activités de planification et de coordination de l'ensemble
des secteurs concernés et tout particulièrement, les autres
moyens utilisés par le gouvernement pour atteindre ses objectifs. Ces
outils particuliers sont les sociétés d'Etat ainsi que les
mesures législatives et fiscales.
Soulignons que plusieurs sociétés d'Etat sont
placées sous la responsabilité du ministre de l'Energie et des
Ressources et non des moindres. Il s'agit d'Hydro-Québec, de SOQUEM,
SOQUIP, REXFOR, la Société Nationale de l'amiante, la SDBJ et de
la Société de cartographie. J'ai dû en oublier
d'ailleurs.
De façon générale, la présentation de plans
de développement de ces sociétés va désormais
permettre au gouvernement de planifier leur évolution et leur
développement; plus particulièrement, l'analyse du
développement hydroélectrique pour la période post-Baie
James et la poursuite de l'action gouvernementale pour la promotion d'une plus
grande transformation de l'amiante, seront, sans doute, les faits marquants en
1980-1981.
On voudra aussi noter l'originalité de la formule de
coopération intersectorielle qui a permis la création de
Nouveler, puisqu'il s'agit non pas d'une société
créée en vertu d'une loi votée à l'Assemblée
nationale, mais d'une filiale regroupant Hydro-Québec, la
Société générale de financement, SOQUEM et SOQUIP.
L'intention du gouvernement dans la création de cette filiale, a
été, essentiellement, d'éviter les dédoublements,
les multiplications des efforts parallèles, dans la mesure où ces
sociétés mères avaient déjà une expertise
dans le domaine et pouvaient certainement se révéler un atout
précieux au niveau du conseil d'administration.
D'ailleurs, on pourra peut-être, si l'Opposition s'y
intéresse, aborder un peu les caractéristiques de ce conseil
d'administration de la société Nouveler.
Sur le plan législatif, la création d'un fonds forestier
va favoriser l'aménagement intensif de nos forêts. Quant aux
mesures fiscales, je pense que le récent discours sur le budget
et j'ai insisté là-dessus tantôt aura un impact
majeur dans les secteurs des mines et de l'énergie.
En conclusion, M. le Président, je pense que ce préambule
a permis de passer en revue les priorités du ministère de
l'Énergie et des Ressources pour l'année 1980-1981.
Comme on le voit, les intérêts sont variés, on
réalise en même temps l'extrême importance de ce
ministère pour le développement économique du
Québec, quand on sait l'importance de nos richesses naturelles pour
asseoir le développement d'un Québec souverain pour l'avenir.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Marquis): M. le député de
Mont-Royal.
M. John Ciaccia
M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Les propos du ministre
ont été intéressants. Je les ai trouvés très
intéressants, non dans ce qu'il a dit particulièrement, mais dans
ce qu'il a omis de dire, ce qu'il n'a pas dit.
Je voudrais faire une petite analyse de quelques-uns des secteurs de son
ministère et lui poser certaines questions sur divers programmes.
Dans le secteur des forêts, le ministre, et je m'y attendais, a
commencé par critiquer le gouvernement fédéral dans les
taux ferroviaires, soulever certaines questions vis-à-vis de
l'Opposition. Ce qu'il n'a pas mentionné, M. le Président, c'est
que dans le programme de modernisation qu'il a mentionné, pour
l'industrie des pâtes et papiers, 60% des fonds viennent du gouvernement
fédéral. En plus, c'est une industrie qui est cyclique. Il y a
des hauts et des bas et une des raisons pour lesquelles on semble en bonne
position dans cette industrie, c'est la faible tenue du dollar canadien qui a
contribué à la croissance des exportations. Même les
dirigeants de cette industrie l'admettent, c'est un facteur qui les aide
énormément avec leurs concurrents.
Pour parler d'un autre chiffre qui est intéressant, quand le
ministre parle de la capacité de son gouvernement de bien gérer
l'économie du Québec, je ne mentionnerai pas le déficit de
$2 300 000 000 de cette année et tous les autres déficits qui
sont trois et quatre fois les montants de l'administration
précédente. Je ne me référerai pas à cela,
mais seulement, à titre d'exemple, dans l'industrie forestière,
à la production forestière. En 1975, si on prend la production
totale en milliers de cunits, la production du Québec
représentait 24,6% de la production totale canadienne. Il y a eu
certaines difficultés dans ces années et les années
subséquentes, mais on voit que pour l'année 1978 la production du
Québec ne représente que 21,5% de la production totale
canadienne. Les références à la gérance du
gouvernement, on ne peut pas blâmer entièrement l'administration
du gouvernement, mais on ne doit pas non plus prendre tous les crédits
sans se référer à certaines faiblesses dans l'industrie
où le gouvernement a une responsabilité.
Dans le domaine des mines, le ministre s'est référé
à des mesures fiscales que le ministre des
Finances a apportées pour aider l'investissement dans ce domaine.
Il y a certaines déductions en matière d'impôt pour ceux
qui ont des taux d'impôt assez élevés. Si vous vous en
souvenez, durant les débats sur le projet de loi no 60, l'hiver dernier,
nous avons suggéré au ministre d'apporter certains changements
à des mesures fiscales pour encourager l'investissement dans ce domaine.
Je crois que les mesures du ministre des Finances ne vont même pas assez
loin parce qu'elles s'appliquent seulement à ceux qui ont un taux
d'impôt assez élevé. Je crois que, dans d'autres provinces,
ces mesures sont réparties afin que non seulement les gens qui ont un
taux d'impôt de 60% puissent s'en prévaloir, mais c'est un
encouragement général d'investissement dans ce domaine. Alors,
c'est une suggestion que nous avons faite durant les débats sur le
projet de loi no 60.
Dans le domaine des mines, s'il y a une augmentation dans la valeur
minière, ce n'est pas dans la quantité, ce n'est pas dans la
production, mais c'est dans l'augmentation des prix. Même, si on veut
regarder la production québécoise, elle a diminué dans la
période de 1975 à 1979; l'emploi dans l'industrie minière
au Québec est demeuré relativement stable, mais la part des
emplois québécois sur le total canadien est passée de 18%
à 16% au cours de la même période. L'année 1978,
plus particulièrement, a été marquée par plusieurs
conflits de travail dans le domaine de l'amiante, du fer et du cuivre.
Je porte à votre attention, M. le ministre, d'autres chiffres qui
démontrent qu'il y a une baisse constante de la part du Québec
dans la valeur de l'extraction minérale canadienne; en 1966, la part du
Québec dans l'ensemble de l'extraction minérale était de
22,6% et elle a été continuellement à la baisse
jusqu'à maintenant, comme le montrent les derniers chiffres de
Statistique Canada pour 1976, c'est-à-dire 9,9%. Ce sont quelques
lacunes dans ces deux domaines.
Je voudrais parler d'autres lacunes qui sont beaucoup plus
sérieuses. Vous dites que le ministère de l'Énergie et des
Ressources est un ministère important, que les richesses naturelles sont
importantes pour le développement économique du Québec et,
quand on regarde votre budget, on remarque qu'il y a eu une augmentation, de
1979-1980 à 1980-1981, de $191 000 000, grosso modo, à $201 000
000. Mais, de ce chiffre, $7 500 000 représentent les conventions
collectives, les augmentations de salaire, ce qui laisserait une augmentation
approximative de moins de $3 000 000 pour tout l'ensemble de votre
ministère. Cela représente une augmentation approximative de
1,5%.
Si vous prenez en considération le taux d'inflation, vous voyez
qu'il y a une baisse réelle dans votre budget. L'augmentation de $10 300
000 est répartie de la façon suivante: $7 500 000 pour les
conventions collectives, il ne reste donc que $2 800 000 pour l'ensemble de
votre ministère.
Alors, on peut se poser des questions sur les priorités de votre
gouvernement. Je suis bien certain que vous, comme ministre, aimeriez avoir
beaucoup plus dans votre budget, mais il me semble que votre
gouvernement n'a pas jugé à propos d'augmenter le budget
spécialement dans un domaine sur lequel je vais attirer votre attention,
celui de l'énergie. Il y a eu une baisse dans ce secteur de votre
ministère. Pour 1979-1980, vous aviez $14 156 000; pour 1980-1981, vous
baissiez à $13 241 000.
Alors, quand on vous entend parler, dans vos déclarations, de
l'importance de l'énergie, de l'importance des ressources naturelles et
spécialement du domaine énergétique, il me semble qu'il
devrait y avoir une priorité pour votre gouvernement dans ce domaine. On
voit qu'à votre ministère, non seulement vous n'augmentez pas vos
budgets, mais vous les baissez. Je crois que, tenant compte de l'inflation, la
baisse est assez considérable. Vous avez baissé votre budget dans
un secteur où votre prédécesseur, dans le domaine de la
conservation de l'énergie, avait consacré toute une section de
son livre blanc à l'importance de la conservation de l'énergie et
il devait arriver à un certain chiffre. On voit ici que non seulement
vous n'y portez pas attention, mais vous avez enlevé approximativement
$2 000 000 du programme d'isolation des maisons. J'y reviendrai tantôt
pour en discuter plus en détail. (17 heures)
On voit globalement une réduction dans les montants
alloués, une réduction en termes de taux réels, de dollars
réels alloués à votre ministère. Je pourrais parler
de quelques sujets que vous avez passés très brièvement ou
que vous avez omis de mentionner totalement.
Parlons un peu du dossier de l'amiante. L'impression que vous
créez, non seulement dans l'Opposition, mais dans un large secteur de la
population, c'est que, vraiment, vous n'êtes pas sérieux dans
l'expropriation de l'Asbestos Corporation. Et si on regarde l'historique de vos
gestes dans ce domaine, premièrement, vous avez créé la
Société nationale de l'amiante. On a passé je ne sais
combien de mois en commission parlementaire. C'était un exercice de
publicité du gouvernement. Pendant tout ce temps, les actions
augmentaient à la Bourse. Et, chose curieuse, vous ne vous êtes
pas donné le pouvoir, dans ce projet de loi créant la
Société nationale de l'amiante, d'exproprier. On pourrait vous
demander pourquoi vous ne l'avez pas fait, si vraiment c'était votre
intention. Vous auriez pu, dans le même projet de loi qui a
créé la Société nationale de l'amiante, inclure le
pouvoir d'expropriation. Non, cela serait pour plus tard.
Plus tard, vous avez présenté un projet de loi pour vous
donner le droit d'exproprier Asbestos Corporation, la compagnie General
Dynamics. Encore, les choses ont traîné. On vous a fait des
suggestions, lors des discussions de ce projet de loi. Nous avons porté
à votre attention des amendements parce que nous vous avons avertis
qu'il y avait des lacunes dans le projet de loi. C'était pour vous
faciliter les choses, pour vraiment vous donner le pouvoir d'expropriation.
Vous avez choisi de ne pas accepter ces amendements. Et je crois que le
député de Saint-Laurent a même porté cela à
votre attention dernièrement, dans le débat sur la question.
Encore une fois, on voit un manque d'action de votre gouvernement. Cela
semble avoir traîné d'un mois à l'autre, d'une année
à l'autre. Vous posez un geste, mais l'impression que vous donnez, c'est
que vous ne voulez pas exproprier, mais vous voulez donner l'impression que
vous agissez. Encore une fois, c'est de l'inertie, dans ce dossier, qui est
fort difficile à expliquer. Le gouvernement a les pouvoirs, ou il peut
se donner les pouvoirs, il peut se doter des pouvoirs s'il est vraiment
sérieux, s'il a la volonté politique de le faire. Quand, en 1962,
on a voulu exproprier les compagnies hydroélectriques, le gouvernement
libéral de l'époque a procédé à
l'expropriation et s'est doté des pouvoirs d'exproprier et a
créé Hydro-Québec. Il a exproprié les compagnies
privées de l'époque. Le pouvoir d'exproprier du gouvernement
était là. Cela a été fait de gré à
gré. Mais le gouvernement avait le droit d'exproprier.
De toute façon, il semble y avoir vraiment un manque de
volonté politique d'agir. Vous donnez l'impression que vous avez
rédigé vos projets de lois pour qu'il y ait des failles dedans,
pour que vous puissiez blâmer le gouvernement fédéral.
C'est la faute du gouvernement fédéral, c'est la faute de la Cour
suprême, c'est la faute de tout le monde, mais ce n'est jamais votre
faute.
Pourtant, si vous lisez le journal des Débats relisez-le
les amendements que nous vous avons suggérés pour ce
projet de loi nous auraient évité beaucoup de difficultés.
On vous a même demandé ce que vous alliez faire pour ce qui est de
la baie Déception, si vous alliez exproprier cet actif, parce que la
production de cette mine s'en va en Allemagne. Si vous ne pouvez pas exproprier
toutes les actions de la compagnie et que vous restez avec les actifs,
qu'allez-vous faire avec la production? Les réponses étaient
toujours insatisfaisantes. C'est un dossier que vous allez avoir la chance
d'élaborer. On aimerait avoir un peu plus de détails sur
l'état de ce dossier, maintenant.
Un autre dossier qui soulève beaucoup de questions quant à
l'intention du gouvernement, c'est le dossier d'Hydro-Québec et le plan
d'investissements d'Hydro-Québec. Je sais que l'endroit normal pour
discuter du programme d'investissements d'Hydro-Québec, c'est devant la
commission parlementaire annuelle où HydroQuébec vient
présenter son rapport annuel, mais, chose curieuse, cette commission
parlementaire n'a pas eu lieu. Elle devait avoir lieu au mois d'août. En
parlant ici et là, on pensait qu'elle aurait lieu au mois de janvier.
Maintenant, on lit, dans une conférence de presse que vous avez
donnée dernièrement, au mois de février, je crois, que le
programme d'investissements vous a été soumis et que vous l'avez
renvoyé à Hydro-Québec pour le revoir, parce que vous
pensez que ce programme n'a peut-être pas pris en considération
l'augmentation, l'accroissement dans la pénétration du gaz
naturel au Québec. Le programme de
$36 000 000 000 qui vous a été soumis pour les
années 1980 à 1989 pour certains projets à la Baie James
demeure en suspens.
On se demande, premièrement, pourquoi la commission parlementaire
n'a pas eu lieu. On se demande quelle est l'attitude du gouvernement. On se
demande pourquoi vous n'avez pas cette commission parlementaire avant le
référendum. Est-ce que ce serait trop embarrassant pour le
gouvernement de poser des questions aux dirigeants d'Hydro-Québec? Le
programme d'investissements a-t-il été accepté par le
gouvernement? Sinon, pourquoi? Quelle est la part du gaz naturel que le
gouvernement préconise pour l'avenir? Il semble y avoir encore ici un
grand changement dans les prévisions du livre blanc qui a
été soumis par votre prédécesseur qui disait que le
gaz naturel irait de 6% à 12%. Dans une conférence de presse,
vous avez déclaré qu'il pourrait peut-être atteindre 20%,
ce qui voudrait dire qu'il faudrait revoir les investissements
d'Hydro-Québec. Ce sont des questions que nous voulions poser. Ce sont
des questions importantes, parce que, pour les investissements, les
décisions doivent se prendre maintenant pour les actes
d'Hydro-Québec dans les sept, huit ou neuf prochaines années. La
seule conclusion à laquelle nous pouvons en venir, c'est que vous
êtes embarrassés; c'est trop embarrassant pour le gouvernement
d'avoir cette commission parlementaire d'Hydro-Québec avant le
référendum.
L'autre dossier, que vous n'avez mentionné que brièvement,
c'est la question du gazoduc. L'extension du pipe-line, qui a été
accordée par l'Office national de l'énergie, pour la
première phase, jusqu'à Boisbriand. J'avais demandé en
Chambre, à l'Assemblée nationale, si le gouvernement était
prêt à autoriser TransCanada Pipe-Lines à commencer la
construction. L'Office national de l'énergie a donné
l'autorisation nécessaire. Il s'agit maintenant d'obtenir l'autorisation
du gouvernement du Québec. Si cette autorisation n'est pas obtenue dans
un certain délai, cela veut dire que le projet sera remis à
l'année prochaine, parce que certains travaux pour la construction du
pipe-line au lac des Deux-Montagnes doivent se faire cet été. Si
la décision n'est pas prise par le gouvernement, la compagnie ne pourra
pas procéder à ces travaux et devra nécessairement
remettre le projet. C'est un projet, je crois, d'environ $30 000 000. Le
premier ministre n'avait pas une réponse spécifique à ma
question et il a dit que vous apporteriez un complément de
réponse, mais jusqu'à maintenant, on ne sait pas encore les
intentions du gouvernement sur ce dossier.
L'autre dossier qui nous préoccupe, c'est le projet Archipel. Il
y a eu une pétition signée par 10 000 personnes qui s'opposent au
projet pour des raisons d'environnement, d'écologie, pour les raisons
que le site qui a été choisi, les Rapides de Lachine, est un site
historique. Le projet avait déjà été mis de
côté par Hydro-Québec, je crois, au début des
années soixante et dix.
Ce que je ne comprends pas, c'est que, d'une part, on se pose des
questions sur les travaux de la Baie James, on remet en question
l'échéancier et on dit: Peut-être ces travaux devraient-ils
être retardés pour prendre en considération la construction
du gazoduc et la pénétration du gaz naturel? D'autre part, le
gouvernement semble se précipiter sur la construction du projet
Archipel. Il semble y avoir contradiction. Vous avez le projet de la Baie James
et le programme d'investissement d'Hvdro-Québec ne prévoit rien
pour la construction d'Archipel. Il y a même des déclarations
d'Hydro-Québec voulant que les besoins de la région de
Montréal soient satisfaits pour l'année 2000 et plus par
l'énergie qui va provenir de la Baie James.
Alors, je me demande où est la hâte de procéder au
projet Archipel. Est-ce que vous avez autorisé Hydro-Québec
à commencer les travaux, parce qu'il semblait y avoir un article dans le
journal du 8 avril voulant qu'Hydro-Québec commence ces travaux à
la fin du mois? Je crois qu'il y a une question au feuilleton pour demander de
rendre publics certains rapports, certaines études qui ont
été faits au sujet du projet Archipel. Jusqu'à maintenant,
nous n'avons pas eu de nouvelle du gouvernement; ce sont des rapports,
d'après ce qu'on a pu apprendre, qui ne sont pas en faveur pour des
raisons d'environnement, pour des raisons d'écologie et d'autres
raisons. Il me semble que le gouvernement devrait rendre ces études
publiques afin que la population sache exactement les conséquences de la
construction d'un tel projet.
Il semblerait que même le ministre ne serait pas trop en faveur du
projet Archipel, d'après les déclarations qu'il a faites; je
pourrais sortir des coupures de presse, le ministre semble s'interroger sur ce
que je viens de mentionner; dans la Presse du 29 septembre 1979:
Béru-bé je cite l'en-tête jette une douche
froide sur le projet Archipel. Le ministre Bérubé je cite
I article a d'ailleurs rappelé qu'Hydro a déjà
rejeté le projet Archipel en 1970, un projet évalué entre
$2 000 000 000 et $2 500 000 000, que l'on jugeait alors pratiquement
irréalisable." Il y avait des raisons techniques qu'Hydro-Québec
avait données pour ne pas procéder à ce projet.
L'autre dossier que je voudrais mentionner brièvement, c'est la
question de la conservation de l'énergie. Je voudrais que le ministre...
Je sais qu'il a expliqué pourquoi il a enlevé un montant de $2
000 000 dans son budget, mais je voudrais demander au ministre: Vraiment, si le
gouvernement est sérieux dans le programme de conservation de
l'énergie, dans le programme d'isolation des maisons, pourquoi y a-t-il
une baisse? Parce que la conservation n'est pas moins importante aujourd'hui
qu'elle ne l'était l,année dernière et l'année
d'avant. Est-ce que les critères... Ce n'est pas une réponse que
de dire: Le gouvernement fédéral nous a promis de nous remettre
ce programme; ce que le gouvernement fédéral fait n'est pas une
excuse pour le ministre de ne pas agir. Est-ce que les critères de ce
programme ne découragent pas les demandes des individus d'y participer?
Par exemple, est-ce que
c'est un programme d'isolation de maisons ou si c'est un programme
d'aide sociale? Parce que ceux qui se prévalent du programme, s'ils
reçoivent quelque chose du gouvernement, doivent l'inclure dans leur
rapport d'impôt.
M. Bérubé: Fédéral, pas provincial,
vous vous trompez de gouvernement.
M. Ciaccia: Alors, si ces critères ne répondent
pas... Si les critères répondaient aux besoins de la population,
il y aurait beaucoup plus de gens qui en feraient la demande au Québec;
je ne parle pas du fédéral, je parle du gouvernement du
Québec. Puisque vous réduisez vos crédits, soit que vous
ayez modifié vos critères, soit que les critères ne
répondent pas aux besoins de la population, pourquoi? Est-ce que le
ministre peut expliquer son inertie, son inactivité dans ce domaine qui
est un domaine assez important? Parce que je pourrais même donner des
chiffres que son prédécesseur avait présentée ou
les objectifs qu'il avait dans le programme de conservation de
l'énergie.
Il disait: Dans le secteur résidentiel, un potentiel
d'économie de 32%. Je cite le livre blanc à la page 29. "Le
secteur commercial a un potentiel d'économie de 36%. Le secteur
industriel a un potentiel d'économie de 19%", surtout le secteur
résidentiel, qui visait un objectif de 32%. Comment allez-vous arriver
à votre objectif en réduisant vos crédits, en
réduisant les montants disponibles pour ce programme?
Le ministre a mentionné, mais il l'a fait très
brièvement, le secteur énergétique. Le ministre a
mentionné qu'au Québec on a une autosuffisance de 51%. Je
voudrais donc savoir où le ministre prend ce chiffre, parce que je
voudrais citer les statistiques de l'énergie au Québec,
préparées par son ministère, d'accord? à la page
201. On lit: Energie totale nette disponible à la consommation
québécoise... Là, vous faites le total dans tous les
secteurs: charbon, pétrole, gaz, électricité, et vous le
convertissez même en millions de BTU, en tonnes équivalentes de
pétrole et les pourcentages, dans tous les cas, indiquent que la part de
l'électricité est de 25,94%.
M. Bérubé: Voulez-vous avoir la réponse tout
de suite?
M. Ciaccia: Non, je vais attendre pour le plaisir de votre
réponse.
De ces 26%, approximativement 6% ou 7% viennent du Labrador. Cela veut
dire que, sur le territoire du Québec, la partie de l'énergie
autochtone qui est produite est d'environ 19% à 20%. Cela, c'est
l'énergie totale disponible à la consommation
québécoise. Cela veut dire que 80% viennent d'en dehors du
territoire du Québec et qu'ap-proximativement 74% sont de provenances
autres qu'Hydro-Québec.
Maintenant, c'est vrai que le ministre a cité d'après une
méthode qui a été utilisée par les pays de l'OCDE,
mais ce que le ministre oublie de men- tionner, c'est qu'il y a une petite
exception à cette méthode. C'est bien beau de convertir pour
déterminer combien d'huile ça prendrait pour produire tant
d'électricité. Là, vous arrivez et dites: Cela en prend X
quantité. Vous reconvertissez encore. X quantité, cela
représente 50%. Mais ce que vous oubliez, c'est que dans "Energy
Balances of OECD Countries", les Bilans énergétiques des pays de
l'OCDE, ... cette méthode où il y a de l'énergie
hydroélectrique thermique. Alors, s'il y a du thermique dans un endroit,
dans un pays, là, ils utilisent cette conversion, mais au Québec
on n'a pas de thermique. C'est malhonnête d'utiliser la moitié de
la méthode de l'OCDE sans l'exception. Que vous la tourniez tant que
vous voulez, ce n'est pas 51%. Vous pouvez calculer tant que vous voulez. Quand
vous calculez les BTU, les tonnes équivalentes de pétrole
même d'après vos propres chiffres, c'est 26%. Ce sont vos
chiffres, dans votre document, qui a été produit par votre
ministère. Encore une fois, même avec le danger de me
répéter, la méthode de conversion je le lis dans
l'introduction, à la page 14, des Bilans énergétiques des
pays de l'OCDE; ils le disent spécifiquement. Ils utilisent certains
modèles. Ils disent: "Alors que l'électricité d'origine
hydraulique et l'électricité d'origine nucléaire sont
exprimées en quantité de pétrole supposée
nécessaire pour produire la même quantité
d'électricité dans les centrales thermiques classiques en
service..." Au Québec, on n'a pas de centrale thermique en service.
Alors, on ne peut pas utiliser cette méthode, à moins de vouloir
faire encore de la propagande, qu'on essaie de diminuer notre dépendance
sur les sources énergétiques qui viennent d'en dehors du
Québec et qu'on veuille induire la population en erreur en lui faisant
croire qu'on a 51%. Mais vous ne pouvez pas convertir votre
électricité en huile et la preuve, comme je l'ai dit au ministre
d'Etat au Développement économique, c'est qu'il est pas mal
difficile de "ploguer" votre Electra dans Hydro-Québec. Il vous faut de
l'huile, il faut du pétrole.
M. Bérubé: Dans très peu de temps, ce sera
tout à fait possible.
M. Ciaccia: Vous ne pourrez jamais convertir votre
électricité à ces fins-là. Donc, quand vous parlez
de la gestion de l'économie du Québec, quand vous parlez de
l'Opposition et quand vous parlez d'un Québec souverain, vous devriez au
moins dire la vérité. Si vous disiez la vérité en
disant: Écoutez, voici les faits, voici les chiffres, voici ce qu'on
peut faire et ce qu'on ne peut pas faire, je pense que vous auriez le respect
de tout le monde. On ne conteste pas votre droit et votre opinion politique. Ce
à quoi on s'oppose, c'est de donner de la fausse information, de passer
sous silence tout un dossier dans lequel vous êtes très
faible.
Le dossier de l'énergie, pourquoi ne pas avoir la commission
parlementaire d'Hydro-Québec? Pourquoi passez-vous sous silence certains
chiffres et en lancez-vous d'autres? C'est parce que
c'est un dossier qui est très faible. Vous ne voulez pas avoir
cette commission, vous ne voulez pas que les faits soient connus, vous ne
voulez pas que la population obtienne toutes les informations et c'est pour
ça que vous lancez des projets référendaires comme le
projet Archipel, parce qu'en trois ans, qu'avez-vous comme réalisation
concrète? A part d'avoir annoncé des projets? Vous annoncez
l'expropriation de l'amiante, vous annoncez le projet Archipel, vous annoncez,
vous annoncez.
Même ce projet Archipel et je voudrais que le ministre
réponde parce que je suis convaincu qu'il est lui-même contre,
qu'il n'approuve pas ce projet hydroélectrique. Si, pour d'autres
raisons, il essaie de camoufler ce projet en disant que c'est pour
l'aménagement du territoire, il y a eu des études pour
démontrer que s'ils veulent prévenir des inondations de la
rivière Outaouais et les inondations de la rivière des Prairies,
il y a d'autres moyens de le faire. Ce n'est pas en détruisant le site
historique des rapides de Lachine et en construisant un mur de rétention
tout le long du lac Saint-Louis qu'on peut arriver à cette fin. Il y a
d'autres moyens moins dispendieux et plus convenables pour toute la
population.
M. le Président, ce sont quelques brèves remarques
préliminaires que je formule sur les crédits du
ministère.
En conclusion, j'aimerais que le ministre nous donne quelques
réponses, spécifiquement sur l'état du dossier de
l'extension du gazoduc à Boisbriand et, aussi, sur l'état du
dossier du projet Archipel.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Richmond.
M. Yvon Brochu
M. Brochu: Si vous me permettez, j'aimerais faire quelques brefs
commentaires au début des travaux de cette commission, peut-être
davantage sous forme de certaines questions auxquelles le ministre pourra
répondre immédiatement ou lorsqu'on sera rendu à ces
éléments plus précis.
J'aimerais tout d'abord commencer mes remarques sur la question qui a
été soulevée par mon collègue concernant la
parution d'Hydro-Qué-bec devant la commission parlementaire. On se
rappellera que, lors de la dernière comparution d'Hydro-Québec
devant cette même commission, tous les opinants à cette table
et à ce moment-là, ce n'était pas le ministre qui
occupait le portefeuille responsable d'Hydro-Québec avaient
souligné le fait que la commission parlementaire, dans l'institution que
nous connaissons actuellement, ne faisait plus du tout le poids pour l'analyse
des bilans et des activités de la société d'État.
Je pense que mon collègue le député était
présent lors de ces travaux de la commission parlementaire.
Nous avions été d'un commun accord pour déclarer
qu'à toutes fins pratiques, dans le contexte qu'on connaît
actuellement, dans la formule de commission parlementaire qu'on connaît,
le passage d'Hydro-Québec à la commission parlementaire
était à toutes fins pratiques une parade pour la forme, que
l'Assemblée nationale, par ses députés et par les membres
de la commission parlementaire, n'avait aucun pouvoir sur Hydro-Québec,
qu'à toutes fins pratiques, la société d'État
venait devant la commission pour indiquer globalement ses intentions et
demander les hausses habituelles au ministre concerné qui,
lui-même l'avait indiqué à ce moment-là, ne
possède pas non plus tout le contrôle qu'il pourrait souhaiter sur
le développement de la société d'État, sur ses
plans de développement, sur l'utilisation des fonds et ainsi de
suite.
On comprend qu'un ministre chargé comme le ministre l'est
actuellement, avec le nombre de portefeuilles qu'il a, devant une
société d'État aussi puissante que celle-là, n'a
peut-être pas en main tous les outils pour être capable d'agir
comme ce serait peut-être souhaitable qu'un élu puisse le faire,
étant donné qu'il a quand même à surveiller
l'administration, la gestion et l'utilisation des fonds du public qui a
élu cette personne pour en assurer la bonne marche.
A la suite de cette comparution d'Hydro-Québec, en ce qui nous
concerne, l'Union Nationale, nous avions fait motion à
l'Assemblée nationale demandant que soit convoquée une
sous-commission pour étudier la possibilité de créer une
commission permanente de surveillance des sociétés d'État,
ce qui permettrait aussi à l'Assemblée nationale d'avoir, au
besoin, par cette extension d'elle-même, un contrôle sur les
activités, les plans de développement, d'investissement, sur le
fonctionnement de l'ensemble de ces sociétés d'État. Cette
sous-commission a été acceptée, elle a
siégé. Malheureusement, depuis plusieurs mois, on n'en a plus
entendu parler et c'est resté lettre morte.
On avait quand même fait un consensus autour du besoin de se
donner un outil nouveau qui, sans être exactement les commissions
sénatoriales que connaissent les États-Unis, sans être
exactement la formule de Colombie-Britannique avec le Crown Corporation
Committee, pourrait être une formule mitoyenne où ne
siégerait pas nécessairement le ministre, mais qui serait
au-dessus même des partis politiques et qui se verrait confier des outils
pour agir, ce que n'a pas la commission parlementaire traditionnelle, parce
qu'à toutes fins pratiques, lorsque les députés et
même le ministre se présentent ici pour une journée ou une
journée et demie d'audition devant une société d'Etat qui
a un actif de $15 000 000 000 ou $16 000 000 000, avec les activités
qu'on lui connaît, il n'y a vraiment aucune commune mesure. C'est ce qui
nous fait dire, tout simplement, qu'il s'agit d'une parade pour la forme.
Alors, je souligne à nouveau le besoin qu'il y aurait de donner
suite à la création, ou tout au moins à l'analyse de la
possibilité de la création d'une telle commission permanente qui
soit au-
dessus des formations politiques et qui ait le support technique
nécessaire pour faire les analyses, pour avoir les expertises
également pour suivre les sociétés d'État et
Hydro-Québec dans leurs activités.
Le ministre a fait récemment certaines déclarations
intéressantes en ce qui concerne notre bilan énergétique
au Québec. Il en a fait tout à l'heure qui m'ont aussi un peu
surpris. J'ai hâte d'entendre les explications qu'il aura à nous
donner là-dessus, lorsqu'il a dit que le Québec pouvait
s'autosuffire dans une proportion de 50% à 51%. Son
prédécesseur, à cette même table, par les
années passées, était beaucoup plus conservateur en
parlant d'un bilan de 20% à 23% ou 24% d'autosuffisance en
matière énergétique lorsqu'on parle du Québec,
puisque, à toutes fins pratiques, on ne peut pas compter sur le
pétrole autochtone en ce qui nous concerne et sur très peu
d'autres sources, sinon celle de l'hydroélectricité qui compte
à peu près pour 20% dans le bilan complet. J'ai hâte
d'entendre les explications du ministre. S'il y a des sources nouvelles, cela
me satisfait au plus haut point, parce qu'on sait que la question du bilan
énergétique devient un problème de plus en plus chaud. Je
pense que le ministre a des responsabilités tout à fait
importantes et va en avoir de plus en plus dans ce domaine-là.
Mais je reviens au point qui m'a fait me poser certaines questions.
C'est une entrevue que le ministre a accordée tout récemment, le
31 mars, au journal Finances, où M. le ministre déclare ceci: "Je
pense que, d'ici quelques années, environ six ou sept ans, nous aurons
effectué le changement de l'électricité au gaz. Le gaz
naturel est disponible. Nous sommes prêts à dire à
l'Alberta: Voilà, nous vous offrons le même prix que les
Américains pour acquérir votre gaz. Quant au pétrole,
vendez-le aux États-Unis, nous allons l'acheter sur le marché
mondial. Quand nous aurons réduit notre consommation
d'électricité et de pétrole, nous allons financer
nous-mêmes nos coûts énergétiques."
Quand on regarde la déclaration dans son ensemble, cela semble
intéressant. Il semble que ce soit basé sur des avenues
peut-être nouvelles que le ministre a explorées et sur lesquelles
il n'y a pas eu encore énormément de déclarations et de
précisions d'apportées. J'aimerais que le ministre, à la
suite de ces déclarations faites récemment, puisse nous donner
davantage la perspective dans laquelle il situait une déclaration qui a
autant d'importance, à mon humble avis que celle qu'il fait dans le
contexte de l'entrevue qu'il a accordée au journal Finances. (17 h
30)
En fait, s'il a mis l'objectif comme ça, est-ce qu'il y a
réellement, au moment où on se parle, un programme de
transformation qui est mis sur pied? Est-ce qu'il y a quelque chose de
commencé dans ce sens? Est-ce qu'il y a des délais d'application
à ce programme? De quelle façon ça va, dans ses grandes
lignes, fonctionner?
Deuxièmement, quels sont les moyens que le gouvernement entend
prendre pour réduire à la fois la consommation
d'électricité et de pétrole pour en arriver à
financer nos propres coûts énergétiques? Il semble y avoir
des choses difficiles à saisir de ce côté et j'aimerais que
le ministre soit plus précis dans cette déclaration qu'il a
apportée, parce qu'en fait, ce à quoi le ministre touche, c'est
la question du comportement des consommateurs. Lorsque vous parlez du
comportement des consommateurs, ce sont des choses qui, malheureusement, ne se
changent pas du jour au lendemain, des habitudes de consommation...
Lorsqu'on a lancé, dans les années
hydroélectriques, les grands slogans: chauffez-vous à
l'électricité, convertissez vos demeures à
l'électricité, c'est une source intarissable, très peu
dispendieuse, la grande foule a suivi, le mouvement a été
lancé. Mais maintenant, pour reconvertir à l'inverse, une fois
que les habitudes sont créées au niveau des comportements,
ça peut quand même être assez difficile, ça peut
poser des problèmes d'ordre financier et de comportement.
C'est pour ça que j'aimerais que le ministre soit plus explicite
dans ce sens et, devant les membres de la commission parlementaire, qu'il
puisse nous donner certaines indications sur la perspective dans laquelle il se
place pour déclarer ça; quelles sont ses données,
qu'est-ce qui est amorcé exactement, est-ce qu'il prévoit dans un
avenir visible à l'oeil nu pouvoir mettre en application un plan qui
semble, au point de départ, tout à fait intéressant?
Je limiterai, pour le moment, mes remarques à ces quelques
questions en demandant au ministre s'il veut commencer à
répondre, quitte à y revenir au cours de l'étude article
par article.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: M. le Président, il y a plusieurs
remarques que j'ai tenté de noter pour essayer d'y répondre de la
façon la plus complète possible.
Réponse du ministre
Je commencerai peut-être par la dernière du
député de Richmond qui rejoint celle du député de
Mont-Royal. J'ai d'ailleurs fait exprès pour lui tendre la perche, de
manière à me permettre de lui expliquer quelque chose.
Lorsque vous électrifiez un chemin de fer qui, auparavant,
fonctionnait au diesel, pour effectuer le même transport, il vous en
coûte désormais trois fois moins d'énergie. Pourquoi? Parce
qu'il y a une loi en thermodynamique, qui s'appelle la deuxième loi de
thermodynamique, avec son corollaire qui est le cycle de Carnot, qui dit que la
conversion du thermique en mécanique ne peut se faire qu'avec un
rendement optimal de 30% à 33%. Il faut donc consommer beaucoup
d'énergie thermique pour faire du mouvement. Le mouvement, par contre,
se convertit en électricité avec des rendements relativement
élevés, puisque ce sont les rendements des dynamos que l'on
connaît, qui sont de l'ordre de 95%.
En d'autres termes, l'énergie électrique est une
énergie particulière, en ce sens qu'il s'agit
d'une énergie de type secondaire, qu'on peut qualifier de noble
et qui est convertie directement en mécanique, ce qui n'est
évidemment pas possible pour les calories conventionnelles purement
thermiques. Aussi, lorsque...
M. Ciaccia: Savez-vous, d'après...
M. Bérubé: J'ai été éminemment
patient avec le député de Mont-Royal, mais je vais quand
même le laisser m'interrompre.
M. Ciaccia: Je ne veux pas vous interrompre, mais vous avez
mentionné la loi d'aérodynamique ou de thermodynamique?
M. Bérubé: J'ai l'impression que vos connaissances
en thermodynamique vous amènent à confondre deux mots
semblables.
M. Ciaccia: Si c'était le mot aérodynamique,
d'après la loi d'aérodynamique, le "bulble bee", je ne sais pas
comment on traduit ça en français, "bumble-bee"...
M. Bérubé: Un bourdon.
M. Ciaccia: Un bourdon. D'après la loi
d'aérodynamique, le bourdon ne veut pas voler. Alors, est-ce que c'est
le même raisonnement qui va s'appliquer à vos exemples?
M. Bérubé: Malheureusement, je vous retournerai
à un cours de base en thermodynamique.
C'est donc cette conversion d'énergie thermique en énergie
électrique que l'on est obligé de faire dès que l'on veut
comparer les pays entre eux. En effet, lorsqu'on compare la France avec
l'Allemagne, avec les États-Unis, avec le Québec, il nous faut
nous ramener sur une unité thermique énergétique
comparable. On part du principe, en général, qu'on va utiliser
l'équivalent pétrole ou la BTU. C'est pour cette raison qu'il
nous faut, chaque fois que l'on utilise l'énergie électrique,
majorer son contenu énergétique par un facteur multiplicateur qui
ramène cette énergie sur une base comparable. C'est-à-dire
qu'alors qu'il nous faudrait une calorie pour nous éclairer ici, le
citoyen de New York qui s'éclaire a besoin de trois calories pour faire
exactement le même éclairage, pour la simple raison qu'il a besoin
d'utiliser de l'énergie thermique et qu'il doit la convertir en
énergie électrique.
C'est essentiellement ce qui amène à calculer de
façon différente le degré d'autonomie
énergétique. C'est parfaitement exact, ce que dit le
député de Mont-Royal quand il affirme que le Québec
répond à 27% de ses besoins énergétiques à
partir de son électricité. C'est une affirmation parfaitement
exacte.
Ce que cela ne dit pas, c'est que du fait que le Québec dispose
d'énergie mécanique pure, tirée directement de ses
rivières, il économise une très grande quantité
d'énergie lorsqu'il produit directement cette électricité
à partir d'une rivière plutôt que de la produire à
partir d'une centrale thermique.
Donc, si le Québec devait produire son électricité
dans des centrales thermiques, la consommation énergétique du
Québécois serait beaucoup plus élevée per capita
qu'elle ne l'est présentement. Elle est moindre parce que le
Québec utilise directement de l'électricité qui, elle, est
produite à partir des rivières. Cela permet de comprendre, de
donner son sens à l'interprétation qu'un journaliste faisait de
certains de mes propos dans cette revue Finances.
Tout ce que je soulignais au journaliste, peut-être pas dans des
termes aussi précis qu'il a bien voulu mettre dans son article je
pense qu'il a bien traduit l'esprit en tout cas; je pense qu'il ne pensait pas
à me citer verbatim, mais plutôt à donner l'idée et
je pense qu'il a bien donné l'idée ce que cela veut dire,
c'est que chaque fois que vous avez une calorie électrique au
Québec, si vous l'exportez, elle vaut trois calories thermiques,
strictement parlant, pour un concurrent qui, lui, a beson de trois calories
thermiques pour la produire. De là la très grande valeur de
l'électricité et de là la façon pour l'OCDE de
calculer l'autarcie énergétique de différents pays. Dans
la mesure où certains pays sont obligés de produire leur
énergie électrique à partir d'énergie thermique,
ils ont donc des consommations per capita énergétiques plus
élevées que d'autres, uniquement à cause de l'obligation
où ils sont placés de devoir produire cette
électricité à partir de combustible.
Et si on veut ramener le tout sur une base comparable et pouvoir
comparer des pommes avec des oranges, nous sommes obligés de ramener
toutes les énergies utilisées à l'intérieur du pays
en une unité de base, de la même façon que lorsqu'on veut
comparer une automobile avec une maison, on la ramène en dollars. Donc,
on est obligé de la ramener dans la même unité de base
comparable et, à ce moment-là, on utilise des calories ou des
BTU.
Le Québec est donc dans une situation d'autarcie
énergétique comparable à celle des autres pays, à
la condition que l'on majore son électricité pour tenir compte de
la valeur ajoutée de cette électricité. Dans ces
conditions, on peut effectivement comparer des pays entre eux.
C'est ce qui nous amène à dire que si le Québec
devait produire ses 60 000 mégawatts d'énergie électrique,
il produirait l'équivalent de 1 500 000 barils de pétrole par
jour, c'est-à-dire plus que la production albertaine.
Ce calcul n'est vrai qu'à une condition, soit que l'on n'utilise
pas l'électricité à des fins de chauffage, à des
fins thermiques, car alors on perd tout l'avantage de
l'électricité. Cela vous permet en même temps de comprendre
le sens de mes propos au journaliste. Si nous utilisons
l'électricité à des fins de déplacement,
électrification des chemins de fer, utilisation d'énergie
électrique dans la voiture, peut-être l'automobile de l'avenir
car Hydro-Québec vient de terminer la mise au point d'une
batterie dont la capacité est de six fois supérieure à
celle de la batterie au plomb, à un
poids nettement inférieur on pourra voir d'ici un certain
nombre d'années le développement sans doute, des transports
électrifiés.
Dans ces conditions, chaque fois que le Québec utilisera une
calorie électrique pour favoriser ses déplacements, il utilisera
l'équivalent de trois calories, s'il était placé dans la
position de ses concurrents. On se rend donc compte que l'énergie
électrique a une valeur ajoutée considérable et que la
meilleure approche sur le plan de l'utilisation de nos ressources
énergétiques consisterait à utiliser l'énergie
électrique partout où cette énergie est
irremplaçable, c'est-à-dire l'éclairage, le
déplacement, le travail mécanique, mais à éviter
d'utiliser l'énergie électrique à des fins purement
thermiques et à utiliser à ce moment-là des sources
énergétiques moins nobles; on peut penser au gaz naturel, au
pétrole. A ce moment-là, on pourrait exporter les surplus
d'électricité ainsi générés qui ont une
telle valeur ajoutée que les profits ainsi générés
permettraient de réduire notablement la facture
énergétique du Québec.
En d'autres termes, si nous produisons l'équivalent de 1 500 000
barils de pétrole par jour avec nos 60 000 mégawatts, eh bien, on
imagine que le Québec puisse être autonome sur le plan
énergétique à 100%. Mais, de la même façon
qu'il n'a jamais semblé aux Québécois qu'ils devaient
devenir le 54e Etat américain pour pouvoir manger des oranges, de la
même façon il n'est nullement nécessaire pour le
Québec d'être une province canadienne pour pouvoir avoir d'autres
ressources énergétiques que son électricité.
En d'autres termes, dans une économie ouverte, il faut utiliser
ses ressources là où elles sont très avantageuses, vendre
ses surplus et acheter les produits qui nous manquent. C'est ce qui permet aux
Québécois de manger des oranges en hiver, alors que nous n'avons
jamais fait pousser d'oranges, à ma connaissance, au Québec,
uniquement parce que nous exportons du papier journal, ce qui nous permet
d'acheter des oranges. De la même façon, à
l'intérieur d'un bilan énergétique normal, ces calculs
d'autarcie énergétique auxquels faisait allusion le
député de Mont-Royal n'ont de sens, strictement parlant, que si
l'on utilise l'énergie électrique là où elle est
irremplaçable, là où elle se convertit directement non pas
en effets joule, ce qui est un gaspillage, mais en effets mécaniques et,
à ce moment-là, oui, vous avez une possibilité très
nette d'autarcie énergétique du Québec, dans le cadre
d'échanges énergétiques. Il faut, à ce
moment-là, véritablement comprendre ce qu'est la
souveraineté-association, c'est-à-dire la négociation
d'égal à égal entre partenaires économiques. Comme,
malheureusement, le député de Mont-Royal n'a jamais compris ce
concept, à ce moment-là, il est plutôt habitué au
concept de dépendance; cela explique...
M. Ciaccia: M. Blakeney, non plus, ne l'a pas compris; M. Davis
ne l'a pas compris; M. Lougheed ne l'a pas compris. Il semble que personne ne
le comprend, sauf vous.
M. Bérubé: Là, vous êtes à
votre deuxième interruption.
M. Ciaccia: Vous allez vous associer tout seul.
M. Bérubé: C'est ce qui m'amène à
dire qu'à ce moment-là d'ailleurs, là-dessus, tous
sont unanimes il ne faut pas que l'Alberta cède à vil prix
des ressources énergétiques épuisables. Il faut
graduellement tendre vers les prix internationaux. C'est, d'ailleurs, la seule
façon d'amener graduellement les citoyens à réduire leur
consommation énergétique.
Là-dessus, toutes les provinces sont d'accord, à
l'exception de l'Ontario qui est d'ailleurs habitué à siphonner
la richesse des autres provinces et finalement à développer son
empire industriel sur la base de la richesse des autres. Il l'a fait depuis
cent ans. Il va évidemment chercher à le faire, mais on sait
à quel point le premier ministre Lougheed, de l'Alberta, s'oppose
totalement à recevoir moins que le prix international pour ses
ressources énergétiques et c'est tout à fait
compréhensible.
M. Ciaccia: Vous savez que Lougheed a accepté 85% du prix
de Chicago, ce n'est pas le prix international.
M. Bérubé: Oui, mais attention, c'est dans une
période purement de transition...
M. Ciaccia: Non, c'est pour arriver à ça.
M. Bérubé: ... la position du premier ministre de
l'Alberta a toujours été... Attention, quand vous parlez du prix
de Chicago, vous savez que le prix de Chicago est de 10% supérieur au
prix international, ce qui fait que...
M. Ciaccia: Pas toujours, non.
M. Bérubé: Oui, mais depuis quelques années
il l'est.
M. Ciaccia: Non, il ne l'est pas et Lougheed a
déclaré qu'il...
M. Bérubé: A ce moment-là vous vous fixez au
prix de Chicago qui est supérieur au prix international et après
vous dites: Nous allons viser 85% de ce prix; alors évidemment bonnet
blanc blanc bonnet, n'est-ce pas? (17 h 45)
M. Ciaccia: C'est faux ça, M. le ministre.
M. Bérubé: Je sais que vous brûlez
d'impatience de m'interrompre, M. le député de Mont-Royal, mais,
si vous le permettez, je vais répondre à vos questions et vous
pourrez à ce moment...
M. Ciaccia: Absolument, prenez tout le temps qu'il faut.
M. Bérubé: Je pense que cette confusion autour de
l'autonomie énergétique calculée sur la base simplement
des calories utilisées au Québec nous amène à dire
que 26% de nos besoins sont satisfaits à partir de l'énergie
électrique. Cependant si nous voulons nous comparer à d'autres,
à ce moment, il nous faut ramener notre énergie électrique
sur une base comparable et la seule façon d'y arriver c'est en faisant
les conversions normales de rendement thermique des centrales thermiques.
M. Ciaccia: Je ne peux pas vous interrompre sur ce sujet?
M. Bérubé: Non, vous ne...
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît, M. le
député de Mont-Royal!
M. Ciaccia: J'y reviendrai après.
M. Bérubé: Le député de Mont-Royal,
au début de son introduction, a souligné que mon exposé
n'était pas complet. Forcément, si j'avais fait un exposé
de deux heures, il se serait plaint de la longueur; ayant fait un exposé
plus bref, il se plaint que ça n'ait pas été complet; par
exemple, il souligne que je ne n'ai pas indiqué que 60% du programme de
l'industrie des pâtes et papiers étaient financés par le
gouvernement fédéral. De toute façon, je pense que c'est
un fait connu et si vous voulez que je vous le dise, je vais dire au
député de Mont-Royal que 60% du programme des pâtes et
papiers mis sur pied par le Québec a été financé
par le gouvernement fédéral.
Je dirais également au député de Mont-Royal qu'en
janvier 1978, je crois, nous soulevions, auprès du gouvernement
fédéral, la possibilité que le gouvernement
fédéral, au lieu d'envisager uniquement d'intervenir dans des
secteurs qui étaient de juridiction provinciale, c'est-à-dire les
programmes d'aménagement forestier, pourrait intervenir au niveau de la
rentabilisation de notre industrie forestière, puisqu'il est
lui-même responsable du commerce extérieur, donc du
développement industriel.
A l'époque, nous avons reçu une fin de non recevoir du
gouvernement fédéral et la position des fonctionnaires et du
ministre du MEER, à l'époque, était que le gouvernement
fédéral ne devait pas se mêler de développement
industriel comme tel, de modernisation des usines et devait laisser cette
responsabilité aux industriels.
Il a fallu les premières conférences
fédérales-provinciales des premiers ministres où, cette
fois, forts d'un programme que nous avions mis au point, nous avons
réussi, d'ailleurs avec l'appui de l'ensemble des provinces, à
faire bouger le gouvernement fédéral qui, finalement, a
accepté d'envisager un programme avec l'industrie.
Il nous a fallu une année et demie pour, après ça,
essayer de convaincre le gouvernement fédéral qui,
lui-même, a accouché d'un programme totalement incompatible avec
le nôtre. Or, nous de- vions profiter d'une brèche dans le
marché américain pour tenter de pénétrer le
marché, au moment où la demande était plus forte que
l'offre, avant que les industriels américains se lancent dans
l'implantation de nouvelles machines. Il fallait donc bouger très
vite.
Ces délais de près de deux ans et demi ont permis à
nos concurrents, entre-temps, de se lancer dans la construction de nouvelles
machines à papier, ce qui fait que, lorsqu'il faut parler de la
participation fédérale, il faut également parler des
lenteurs de près de deux ans et demi de négociation, l'obligation
de procéder à une double analyse de chacun des projets les uns
après les autres, et, devrais-je vous souligner que, le projet ayant
reçu telle acceptation, nous avons dû gonfler l'enveloppe
budgétaire. Le Conseil des ministres, il y a plusieurs mois, à
Québec, a approuvé une telle augmentation de l'enveloppe
budgétaire. J'attends toujours une décision du gouvernement
fédéral, ce qui ne me permet pas d'approuver mes programmes
d'aide à l'industrie forestière, puisque, ayant une enveloppe
dont je ne sais pas si elle est complète ou tronquée, il m'est
impossible de savoir quels seront les projets que je vais mettre de
côté.
Vais-je mettre de côté les derniers arrivés ou, au
contraire, vais-je devoir prendre un pourcentage de chacun des projets? Je suis
incapable de prendre une décision. Voilà où nous
mène cette double administration perpétuelle qui coûte
épou-vantablement cher aux contribuables, et je n'ai pas parlé
des 60% du gouvernement fédéral. Vous m'avez amené sur le
sujet. Le programme des pâtes et papiers est l'un des plus beaux exemples
du foutoir monumental du système fédéral-provincial actuel
dans lequel nous sommes continuellement engagés, parce qu'il est
impossible à un gouvernement de prendre des décisions sans passer
son temps à aller quêter l'autre partie.
Il y a beaucoup de Québécois comme vous qui ont
l'impression que le fait d'avoir un budget à Ottawa et un budget
à Québec donne deux fois plus d'argent, alors que diviser $1 en
deux $0.50 n'a jamais fait plus d'un dollar. En d'autres termes, cette
obligation, ces lenteurs, cette double bureaucratie administrative est un
fardeau qui pèse lourdement sur les finances du Québec, qui
pèse lourdement sur le contribuable québécois. C'est
quelque chose auquel il faut mettre un terme le plus rapidement possible et
seul le référendum va finalement permettre aux
Québécois de savoir où ils vont.
M. Giasson: L'indépendance... M. Bérubé:
Bon!
M. Ciaccia: C'est vrai, ça.
M. Giasson: Finissez donc votre phrase,
l'indépendance.
M. Bérubé: Donc...
M. Giasson: Cela vous fait peur.
M. Ciaccia: Dites-le!
M. Bérubé: Le député de Mont-Royal a
parlé du pouvoir concurrentiel de l'industrie des pâtes et papiers
qui était favorisée par le taux de change favorable. Je pense que
c'est tout à fait exact. Je pense que c'est en bonne part la raison qui
a amené l'industrie à mettre plus d'argent dans le programme.
Cependant, j'ai eu à un moment donné les chiffres du CPPA, dans
lesquels on nous disait que le Québec devrait avoir 45% des
augmentations de capacité prévues au Canada de 1978 à
1982, d'après un relevé de la Canadian Pulp and Paper Association
il faut bien l'appeler par son nom, puisqu'il s'agit d'un organisme
canadien et si l'on compare cela avec les chiffres que nous soulignait
le député de Mont-Royal concernant l'importance de la production
forestière québécoise, qui était de 24,6%, comme il
l'a souligné, en 1975 je ne contesterai pas ses chiffres, ne les
ayant pas moi-même sous les yeux de 21,5% en 1978... En fait, il
reconnaîtra que, grâce à l'intervention gouvernementale, si
l'industrie envisage d'investir 45% de son argent au Québec, alors qu'il
n'y a que 21,5% de la récolte forestière qui se fait au
Québec le député de Mont-Royal souligne à ce
moment-là sans le vouloir, l'extraordinaire succès du programme
de l'industrie forestière québécoise. Je pense que
ça ne peut pas être plus éloquent.
Autre point. Le député de Mont-Royal s'est accroché
à des chiffres un peu bruts du budget pour dire qu'il y avait, sinon
régression, en tous les cas que l'augmentation du budget ne faisait que
couvrir les accroissements de la masse salariale. C'est malheureusement
inexact. D'ailleurs, dans mon exposé, et je pense qu'au lieu de
prêter attention aux choses qui n'étaient pas dans mon
exposé, le député de Mont-Royal aurait dû prendre
des notes et porter attention à ce qu'il y avait dans mon exposé,
puisque cela m'a permis de souligner un grand nombre d'éléments
où il y avait des croissances très rapides. Cependant, il faut
que le député de Mont-Royal se rende compte d'une chose: En
refaisant l'intégration des ministères, l'infrastructure
administrative est desservie, toute proportion gardée, par un budget
moindre, qui se traduit en fait par une absence totale d'augmentation des
coûts des frais de gestion, première observation.
Deuxième observation, dans le budget antérieur, il y avait
une subvention à Samoco, ce que j'ai indiqué dans mon
exposé. Elle n'existe pas cette année. Par conséquent, je
viens d'économiser près de $11 000 000. Egalement, dans le
programme d'isolation des maisons, il y a eu l'an dernier un effort particulier
du gouvernement pour vider énormément de demandes qui
étaient accumulées, ce qui fait que les demandes que nous avons
traitées sont passées de 4500 à 25 000 en une
année. C'est évidemment une croissance nettement trop forte, qui
traduit une sorte de nettoyage des dossiers accumulés, et c'est donc
basé sur ce que nous pensons être un rythme de croisière,
que vous avez un budget qui est ainsi présenté.
Cependant, comme il n'y a eu aucun changement dans les critères
d'admissibilité au programme, cela veut dire qu'il s'agit d'un programme
ouvert, et si les demandes devaient être supérieures aux
prévisions, à ce moment-là, il n'y a qu'une seule
façon d'y remédier, c'est-à-dire d'y voir soit en budgets
supplémentaires, soit par un recours au fonds de suppléance, si
effectivement les demandes sont supérieures à ce qui avait
été anticipé.
Cependant, on pense que le budget prévu devrait nous permettre de
couvrir les demandes en question. Je souligne également que dans le cas
du bureau de l'amiante, où il y avait près de $1 000 000, comme
nous avons maintenant la Société nationale de l'amiante,
j'économise ce $1 000 000.
Au niveau de l'aide à la forêt privée, dans la
mesure où je réduis le nombre de fonctionnaires à
l'administration, dans la mesure où nous avons fait des économies
importantes si je ne m'abuse, en une année, les taux à
l'acre sont passés de $300 à $260, grâce à une
rationalisation administrative c'est bien évident qu'à ce
moment-là, j'arrive à faire beaucoup plus de travaux pour une
somme qui, tout compte fait, augmente de façon modeste. Mais c'est
ça qui est quand même important.
Je pense que ce que le député de Mont-Royal n'a pas
compris, c'est qu'une saine gestion des dépenses des deniers publics
peut permettre de minimiser les coûts d'administration et, tout compte
fait, d'injecter davantage de sommes dans les programmes qui ont des
retombées économiques directes. A ce moment-là, s'il
regardait tous les programmes qui ont des retombées économiques
directes, que ce soit l'industrie des pâtes et papiers,
l'aménagement forestier, que ce soit la construction d'une route, par
exemple, pour une nouvelle implantation minière, que ce soit le
développement de la planification de l'aide à l'industrie, il
verrait partout des augmentations de 15%, 20%, 25%, 30%, 40% et même 100%
dans certains cas.
Donc, partout où il y a un impact économique, il y a des
augmentations substantielles; mais partout où il s'agit purement et
simplement de faire croître la fonction publique en la gonflant
inutilement, il y a effectivement des contraintes. Mais c'est une chose qu'ils
n'ont jamais comprise que le gouvernement réussissait, par des
contraintes administratives, au niveau des faux frais, des frais fixes,
à comprimer les programmes existants de manière à
enclencher de nouveaux programmes qui ont un impact économique plus
grand; mais c'est ce qui s'appelle bien gouverner. Ce que ces gens n'ont
évidemment jamais connu de leur temps et je les comprends.
M. Ciaccia: ... aussi.
M. Bérubé: Alors, parlons maintenant de l'autre
point, à savoir l'argumentation du député de Mont-Royal
voulant que le gouvernement du Québec ne serait pas sérieux dans
sa volonté d'exproprier Asbestos. D'une part, il nous reproche,
dans le premier projet de loi créant la Société
nationale de l'amiante, qu'on n'ait pas prévu l'expropriation. C'est
parce que nous voulions, de bonne foi, négocier l'achat de gré
à gré et cela étonne qu'un gouvernement de bonne foi
cherche à négocier quelque chose de gré à
gré. Mais si nous le disons, nous l'exprimons également dans les
projets de loi que nous soumettons à l'Assemblée nationale. C'est
cela un parti politique qui ne se comporte pas comme un visage à deux
faces. Mais, je regrette, le député de Mont-Royal ne comprend pas
cela.
Donc, la première observation, notre volonté était
carrément de négocier de gré à gré.
Lorsqu'il est apparu impossible de négocier un tel achat, nous avons
soumis un projet de loi permettant l'expropriation de la société
Asbestos. Je ne me suis pas tapé les "filibusters" que nous avons connus
pour le simple plaisir de passer des semaines en Chambre à
écouter des fadaises. Par conséquent, il devait y avoir une
certaine volonté gouvernementale, effectivement, de procéder
rapidement. Le député de Mont-Royal prétend que les
amendements que son parti aurait voulu apporter auraient réglé
les problèmes constitutionnels, mais, M. le Président, il devait
sans doute référer aux amendements à la loi 101. Alors,
là-dessus je serais d'accord avec lui, car l'argument principal des
trois juges repose essentiellement sur l'in-constitutionnalité d'un
article de la loi 101 qui enlevait force de loi à l'article 133 du BNA
Act. Il faut parler du BNA Act puisqu'il s'agit effectivement de notre
constitution. En d'autres termes, c'est la loi 101 qu'invoquent les juges pour
émettre une injonction contre le gouvernement.
Là, je me permettrai une intervention du politique dans le
judiciaire, car il m'apparaît... Fort heureusement, nous sommes à
l'Assemblée nationale et je jouis justement de l'immunité dont
jouissent les juges, ce qui leur permet de s'immiscer dans la politique, sans
avoir à craindre qui que ce soit. Je crois personnellement que
l'émission d'une injonction contre le Parlement, contre la couronne,
représente un défi aux lois du Québec. Qu'un juge
émette une injonction sur la base d'une réglementation, en vue de
protéger le Parlement qui a adopté des lois et que le juge est
chargé de protéger, cela me paraît tout à fait
défendable. Mais qu'un juge émette une injonction à
l'encontre d'une loi du Québec, alors qu'il n'a pas été
élu par les citoyens, personnellement, je trouve cela disgracieux.
Le juge s'est permis, à propos de la loi 121, de parler d'une loi
arbitraire et répugnante. Il ne faisait pas de politique, il faisait du
juridique. Je me permettrai de qualifier l'intervention du juge comme
étant disgracieuse, disgracieuse dans la mesure où, en
émettant une injonction contre le Parlement à l'encontre d'une de
ses lois, il s'arroge le pouvoir de faire des lois. Le Parlement a dit: Vous
expropriez, le juge a dit: Vous n'expropriez pas. Il s'est érigé
en parlementaire. Le juge peut critiquer une loi et, en vertu de la
séparation des pouvoirs, lorsque la Cour suprême a tranché
concernant la loi 101, ce Parlement s'est rallié. Il s'est
rallié, parce que l'équilibre dans une société
repose sur trois pouvoirs essentiellement parallèles, du judiciaire, de
l'exécutif et du législatif. Il n'y a rien de prévu
concernant les interactions entre ces pouvoirs. C'est donc basé sur un
"gentlemen's agreement", cette vie en société.
A ce moment-là, lorsque le Parlement doit constater et
nous sommes humains, nous pouvons nous tromper qu'il a fait une mauvaise
loi, il doit la changer. C'est le rôle du juge d'interpréter les
lois et d'en souligner les forces et les faiblesses, c'est indéniable.
Il n'appartient pas à un juge de faire des lois. Personnellement,
j'estime qu'émettre une injonction à l'encontre d'une loi
explicite, c'est faire une loi au-dessus du Parlement. Cela me paraît
disgracieux, et certainement une ingérence directe du judiciaire dans la
politique.
Ceci est possible... (18 heures)
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre, je m'excuse
de vous interrompre, il est maintenant 18 heures. A moins d'avoir le
consentement pour continuer quelques minutes, il faudrait ajourner les travaux.
Les travaux... on peut continuer.
Une Voix: On peut continuer.
Le Président (M. Bordeleau): On continue quelques
minutes.
M. Bérubé: J'ai terminé.
Ceci n'était possible, M. le Président, que parce que la
cour a estimé que le Parlement du Québec n'était pas un
Parlement souverain, qu'il était soumis au Parlement
fédéral et que, pour protéger le Parlement
fédéral, le juge avait le droit d'émettre une injonction
contre le Parlement du Québec.
C'est essentiellement ce sens qu'il faut donner à
l'émission d'une injonction.
M. Ciaccia: Je vais retirer mon consentement.
M. Bérubé: C'est essentiellement un problème
constitutionnel, un problème politique, et les arguments invoqués
sont des arguments de stérilisation d'une société à
charte fédérale, des arguments d'inconstitutionnalité d'un
article de la loi 101 et des arguments d'inconstitutionnalité d'une
intervention du gouvernement du Québec dans un secteur de commerce
extérieur qui relèverait du gouvernement fédéral en
vertu de la constitution. Il s'agit purement d'arguments constitutionnels et
qu'aucun amendement présenté par l'Opposition n'aurait
réglés.
M. Ciaccia: Je vais revenir demain matin. Je ne suis pas d'accord
avec vous. On va en discuter demain.
M. Bérubé: Je termine pour aborder la question
d'Hydro-Québec. Pourquoi n'y a-t-il pas eu de commission parlementaire
jusqu'à maintenant?
D'abord, parce qu'il nous est apparu et là-dessus, je suis
en accord assez complet avec le député de Richmond que si
cette Assemblée nationale devait pouvoir juger d'un plan
d'équipement d'Hydro-Québec, les députés devraient
avoir en main des choix. Nous ne prétendons pas que, comme gouvernement,
nous connaissons mieux la problématique énergétique
qu'Hydro-Québec, mais nous prétendons cependant qu'il est de
notre devoir, comme gouvernement, d'exiger qu'Hydro-Québec fournisse
à l'Assemblée des choix énergétiques, des options,
qui pourront servir à ce moment-là à une véritable
discussion objective.
La préparation de tels choix énergétiques va
demander, en pratique, six mois. C'est pour cette raison, avec l'accord des
syndicats de la FTQ, que nous reportons la commission parlementaire à la
fin de l'été, en début de session, essentiellement, de
manière, justement, que nous puissions aborder deux sujets, le sujet des
relations de travail à Hydro-Québec et le sujet du plan
d'équipement des années 1985-1990 de l'Hydro-Québec, et
cela sur la base de documents bien étoffés, bien
étayés, qui nous permettront à ce moment-là d'avoir
une discussion beaucoup plus ouverte, beaucoup plus complète.
Concernant le projet Archipel, je dois malheureusement m'inscrire en
faux contre les assertions du député de Mont-Royal. A nouveau, je
pense qu'il n'est pas habitué à notre façon de gouverner.
Ils étaient habitués eux, à faire des annonces politiques
nous lançant dans le projet de la Baie James, c'est-à-dire le
projet Nottaway-Broadback-Rupert, qui, deux ans plus tard, s'est
avéré tellement coûteux, tellement plus coûteux que
le nucléaire qu'Hydro-Québec a dû sauver la face de ce
gouvernement et lui trouver des rivières meilleur marché, de
manière à pouvoir justifier le projet de la Baie James. De fait,
c'est grâce à la capacité technique d'Hydro-Québec
que l'ancien gouvernement a sauvé la face et également, c'est
grâce à l'accroissement des prix du pétrole imposé
par les Arabes que le développement de la Baie James ne s'est pas
révélé un fiasco. Car imaginons que les Arabes aient
décidé, en 1973, d'attendre à 1980 avant d'augmenter les
prix du pétrole, ou 1990, puisque, présentement, nous avons
épuisé à peine 15% des réserves de pétrole
découvertes il n'y a pas de pénurie de pétrole dans
le monde par conséquent, on aurait très bien pu imaginer
prolonger cet état de béatitude jusqu'aux années 2000,
avant de commencer à se préoccuper de la situation
énergétique du monde, auquel cas le Québec se serait
retrouvé avec de l'énergie électrique extrêmement
coûteuse et presque invendable. Voilà le type d'erreur que l'on
aurait pu commettre et que l'on n'a pas commis, sauvé par la chance.
Dans le cas d'Archipel, ce que nous faisons, c'est l'inverse de ce que
les libéraux ont fait, lorsqu'ils étaient au pouvoir,
c'est-à-dire que nous avons demandé à Hydro-Québec
de faire tranquillement, au rythme nécessaire, mais suffisamment
rapidement, les études permettant un jour au gouvernement de prendre la
décision appropriée. C'est tout ce que nous avons demandé
à HydroQuébec. C'est évidemment très
différent de l'approche libérale qui consistait à
embarquer HydroQuébec à la Baie James et, après, à
faire des études pour découvrir qu'on s'était
trompé. On avait pris la mauvaise rivière, ce qui a amené
d'ailleurs le ministère des Terres et Forêts à
l'époque à tout faire déboiser le futur site de
Nottaway-Broadback-Rupert et à découvrir quelques années
après qu'on s'était trompé de bassin, et cela, grâce
à ce génie particulièrement dévastateur de
l'ex-premier ministre entouré d'ailleurs de conseillers dont
était le député de Mont-Royal.
Cela l'étonne que nous demandions à HydroQuébec de
faire les études avant de prendres des décisions, mais,
voyez-vous, cela caractérise justement un bon gouvernement.
M. Ciaccia: Vous dites qu'ils ne commenceront pas les travaux
à la fin du mois.
M. Bérubé: La baisse du coût de l'isolation,
je pense que j'ai répondu à cette question. Je pense que j'ai
répondu à l'ensemble des questions du député de
Mont-Royal. Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre. Je
m'excuse, M. le député de Mont-Royal, mais la commission ajourne
ses travaux.
M. Ciaccia: On va reprendre demain.
Le Président (M. Bordeleau): On pourra reprendre demain.
On fonctionne sur le consentement des membres. La commission de
l'énergie et des ressources ajourne ses travaux jusqu'à demain,
10 heures.
Fin de la séance à 18 h 7