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Version finale

32e législature, 3e session
(9 novembre 1981 au 10 mars 1983)

Le jeudi 25 mars 1982 - Vol. 26 N° 65

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Auditions d'organismes sur le projet de loi no 35 - Loi sur la révocation des droits de mine et modifiant la Loi sur les mines


Journal des débats

 

(Dix heures quinze minutes)

Le Président (M. Laplante): Mesdames et messieurs, si vous voulez prendre vos sièges, s'il vous plaît. La commission élue permanente de l'énergie et des ressources se réunit pour entendre des organismes sur le projet de loi no 35, Loi sur la révocation des droits de mine et modifiant la Loi sur les mines.

Les membres de cette commission sont: M. Bélanger (Mégantic-Compton), M. Bordeleau (Abitibi-Est), M. Duhaime (Saint-Maurice), M. Dussault (Châteauguay), M. Fortier (Outremont), M. Grégoire (Frontenac), M. LeBlanc (Montmagny-L'Islet), M. Middlemiss (Pontiac), M. Perron (Duplessis), M. Rodrigue (Vimont), M. Vallières (Richmond).

Les intervenants sont: M. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. de Belleval (Charlesbourg), M. Desbiens (Dubuc), M. Hains (Saint-Henri), M. Levesque (Bonaventure), M. Marquis (Matapédia), M. O'Gallagher (Robert Baldwin), M. Tremblay (Chambly).

Est-ce qu'il y aurait une proposition pour un rapporteur, s'il vous plaît?

Le rapporteur sera M. LeBlanc (Montmagny-L'Islet).

Les groupes qui se feront entendre aujourd'hui seront dans l'ordre: le Comité des mines du Conseil régional de développement des Cantons de l'Est; l'association des mines d'amiante du Québec; l'association des prospecteurs du Québec; l'association des mines de métaux du Québec; M. Everette Taylor, à titre personnel.

Avant de commencer, j'aimerais donner les règles pour le déroulement des travaux de cette commission pour la journée. Après entente avec les parlementaires membres de cette commission, on demande, autant que possible, aux intervenants, aux témoins, de résumer leur mémoire pour qu'il puisse se donner dans environ quinze minutes, afin que les membres - parce qu'on m'a dit qu'ils avaient tous lu vos mémoires - puissent vous questionner davantage à l'intérieur d'une limite d'une heure pour chacun de vous, pour essayer de donner une chance équitable à tout le monde de se faire entendre au cours de la journée.

Maintenant, M. le ministre, avant que commencent les travaux, j'avais demandé au premier groupe de se présenter, soit le Comité des mines du Conseil régional de développement des Cantons de l'Est qui a pris place à la table. Avant de commencer, je demanderais à M. le ministre s'il a des remarques préliminaires.

Remarques préliminaires M. Yves Duhaime

M. Duhaime: Merci, M. le Président. La seule remarque que je ferai c'est de dire que nous tenons cette commission parlementaire qui était ouverte à tous ceux et celles qui voulaient faire valoir leur point de vue. Je dis que c'est dans un esprit d'ouverture que nous tenons les audiences de la présente commission parlementaire sur le projet de loi no 35. Nous sommes conscients que les propositions contenues dans ce projet de loi qui amende la Loi sur les mines sont des modifications majeures, d'abord sur le plan de la révocation comme telle, et je suis conscient que nous répondons à un besoin qui s'est exprimé dans plusieurs régions du Québec, en particulier dans la grande région de l'Estrie.

Ce projet de loi contient aussi des modifications ou des propositions qui viendraient remplacer un mode d'exploitation. Je le sais pour avoir lu les mémoires que nous entendrons ce matin, nous avons des divergences d'opinions sur certains aspects du projet de loi et je sais qu'il y a des inquiétudes qui se sont manifestées. Mais j'espérerais essentiellement que nous puissions dégager un consensus à la fin de nos travaux, tant avec les membres de l'Opposition officielle qu'avec les intervenants et ceux de ce côté-ci de la table; ce serait pour le mieux. Mais, ayant l'habitude de ce genre de travaux, je ne me fais pas tellement d'illusions. Cependant, si nous pouvons réussir à exprimer très clairement et à mettre sur la table nos points de vue respectifs, je voudrais vous donner l'assurance que le gouvernement n'est pas dans le ciment, si je puis dire, non pas sur les principes mais sur les modalités, et c'est avec plaisir et beaucoup d'attention que j'écouterai les propositions.

Nous aurons des échanges de points de vue à l'occasion des travaux de cette commission; si nous pouvons obtenir ce consensus dont j'ai parlé tantôt, tant mieux; sinon, tâchons au moins d'avoir le meilleur modus vivendi possible en ayant à l'esprit que nous travaillons tous pour tenter de jeter

les bases d'un plus grand développement dans le secteur minier au Québec. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): Merci M. le ministre. M. le député de Richmond.

M. Yvon Vallières

M. Vallières: M. le Président, mes remarques préliminaires seront, un peu comme celles du ministre, relativement courtes puisque la deuxième lecture du projet de loi nous aura permis de faire part de nos principales oppositions au projet de loi que nous avons devant nous, de même que notre assentiment en principe, tout au moins, à la révocation des droits de mine.

Permettez-moi de remercier les intervenants concernés par le projet de loi 35, non seulement de nous assurer de leur présence ici, mais surtout d'avoir accepté l'invitation de venir apporter leurs commentaires et suggestions, à partir même de leur riche expérience dans le secteur minier, riche à tous égards. Vous vous en souvenez sans doute, M. le Président, c'est d'ailleurs une des conditions que l'Opposition officielle avait émise dans son discours de deuxième lecture, soit celle d'entendre les principaux intervenants concernés.

Vous me permettrez ici de reprendre brièvement l'essence même de notre argumentation pour le bénéfice de nos invités, tout en donnant notre accord sur le but avoué du projet de loi qui peut se résumer ainsi: Libérer ou retourner au patrimoine national les droits de mine dont la propriété est rattachée aux droits de surface sur des territoires concédés avant 1880 et dans certaines seigneuries, il n'en demeure pas moins qu'il y va aussi d'une façon de contrôler et de diriger l'exploration minière du sous-sol québécois pour en arriver à établir un inventaire de ce même sous-sol aux frais des explorateurs, des prospecteurs ou des propriétaires de droits de mine à travers une réglementation émise et applicable par le gouvernement ou son appareil bureaucratique.

Nous rappelons ici à votre attention, M. le Président, l'interrogation que nous nous posions, à savoir, l'idéal d'un tel projet de loi ne serait-il pas plutôt de révoquer tout simplement les droits de mine mentionnés et de permettre aux intervenants concernés d'acquérir ces droits par jalonnement pour en arriver à un véritable développement des droits de mine, selon les critères de la Loi sur les mines en vigueur actuellement. Nous constatons ici, à la lumière des mémoires qui nous ont été présentés, que tous les intervenants qui ont décidé de se faire entendre aujourd'hui forment un front commun pour dire que toute l'accessibilité aux droits de mine doit se faire via le jalonnement, ce qui évidemment remet en cause toute la question des permis spéciaux. Le mode de jalonnement nous semble, tout comme aux intervenants, dont nous avons pris connaissance de leur position avant cette commission, être beaucoup plus pratique et à l'abri des dangers d'un système discrétionnaire que risquent d'engendrer les permis spéciaux que veut introduire le ministre. Nous avons cependant déjà fait part de notre accord sur le principe de la révocation des droits de mine dans des concessions de terres faites avant 1880 et nous tenons à le réitérer ici.

Toutefois, nous nous permettons de souligner également que ce projet de loi comporte deux volets: premièrement, la révocation des droits de mine et, deuxièmement, la modification de la Loi sur les mines. On se rend compte, en effet, M. le Président, que le présent projet de loi peut se traduire comme un changement complet de tout le mode d'obtention des droits de mine sur les terrains faisant objet de révocation.

De plus, selon des informations obtenues de sources fiables, l'intention du gouvernement serait d'introduire, sur une base expérimentale, à partir de ce projet de loi, un nouveau mode d'acquisition des droits de mine. Et, si la nouvelle procédure s'avérait fructueuse aux yeux de l'administration gouvernementale, elle pourrait alors s'appliquer à l'ensemble de la province. Somme toute, on peut reprocher au gouvernement de vouloir dicter, dans les détails, le comportement des sociétés d'exploration minière et des prospecteurs au Québec, tout en étant bien conscient, M. le Président, qu'il n'a jamais été établi que les fonctionnaires ont plus d'aptitude que quiconque pour découvrir et développer les mines.

Ici, M. le Président, je demande au ministre d'infirmer ou de confirmer, au cours de ces audiences, la teneur de ces informations. Si le gouvernement veut procéder à une réévaluation de cette procédure par le biais du projet de loi no 35, on doit s'attendre, en vertu du principe de la transparence, à ce qu'une telle volonté soit clairement manifestée. Par ailleurs, ceci commanderait une consultation beaucoup plus large que celle qui a été faite à cette commission parlementaire. Alors, M. le Président, l'avant-projet de règlement sur les permis spéciaux d'exploration, section II, article 2, ne vient que confirmer nos avancés. Il suffirait d'un simple changement de quelques lignes de cet article pour que tout le territoire du Québec soit visé et le tour serait joué.

Or, M. le Président, de ce côté-ci de la Chambre, comme d'ailleurs du côté des ministériels, je crois, nous devons admettre que déléguer un tel pouvoir à des

fonctionnaires qui pourraient, sans le consentement de cette Chambre - et je dis bien sans notre consentement - l'étendre à tout l'ensemble du territoire québécois à partir d'un cas expérimental, le moins que l'on puisse dire ici, c'est que l'approche démocratique en prend pour son rhume et que l'obtention des droits de mine par jalonnement aura complètement disparu avant l'apparition des permis spéciaux dépendant de cette réglementation dont nous venons de parler.

Voilà pourquoi, M. le Président, tout en étant d'accord sur la révocation des droits de mine dans le respect des ententes déjà existantes aux termes de la présente loi, avec le maintien du jalonnement actuel, et soucieux du maintien du respect des droits actuels des détenteurs des droits de mine, nous nous opposons fortement à la modification du plan d'acquisition des droits de mine sur les terrains faisant partie de la révocation. Soucieux également de continuer à protéger et défendre les intérêts du prospecteur individuel et de la PME d'exploration minière, dans le contexte même de conditions tellement exigeantes qui sont posées à tous les prospecteurs que cela va finalement favoriser les grandes entreprises minières au détriment du petit prospecteur, nous disons au ministre que nous ne voulons pas, d'une part, libérer les droits de mine pour ensuite les enfermer dans un carcan qui en limiterait dorénavant l'accès. J'espère qu'à la fin de nos délibérations, le ministre pourra nous indiquer quelles sont les modifications majeures qu'il entend apporter à son projet de loi, parce que, de ce côté-ci, nous aimerions pouvoir donner notre assentiment et voter en faveur lors de la troisième lecture de ce projet de loi, car nous sommes en faveur du principe. Nous espérons, en particulier en ce qui a trait aux permis spéciaux et aux ententes qui existent actuellement entre les propriétaires de terrains et certaines sociétés, que le ministre pourra nous indiquer quelles sont les modifications qu'il entend proposer afin que nous puissions faire preuve de notre plus grande collaboration.

Voilà à quelle enseigne nous logeons, espérant que le fait d'afficher nos couleurs dès à présent permettra aux intervenants des échanges fructueux de part et d'autre. C'est dans cet esprit, M. le Président, que nous commes prêts à entendre les intervenants ici présents.

Auditions

Comité des mines du Conseil

régional de développement

des Cantons de l'Est

Le Président (M. Laplante): Merci, monsieur. Maintenant, c'est le Comité des mines du Conseil régional de développement des Cantons de l'Est. Madame, messieurs, si vous voulez identifier votre organisme et les personnes qui vous accompagnent pour le journal des Débats.

Mme Gobeil (Estelle): M. le Président, il me fait plaisir de répondre à votre demande d'identifier les membres du comité. À ma droite, le directeur général du Conseil régional de développement des Cantons de l'Est, M. Roch Fortin. À ma gauche, le président du Comité des mines du CRD, M. Roger Laliberté, et un autre membre du comité des mines, M. Francesco Spertini.

Le Président (M. Laplante): Vous pouvez commencer.

Mme Gobeil: M. le Président, M. le ministre, messieurs les députés du parti ministériel et de l'Opposition, le Conseil régional de développement des Cantons de l'Est est heureux de participer aux travaux parlementaires portant sur le projet de loi no 35 concernant la révocation des droits miniers et nous vous remercions de nous y avoir chaleureusement convoqués. Ces audiences de la commission permanente de l'énergie et des ressources permettront sûrement d'améliorer le libellé de la législation proposée et d'en modifier, s'il y a lieu, certains aspects.

Le conseil régional et les membres du comité des mines du conseil ont déjà fait connaître publiquement l'appui qu'ils ont réservé au projet de loi. À notre avis, l'adoption de cette législation favorisera la relance de la recherche minière et le démarrage de nouvelles exploitations qui contribueront particulièrement à l'effort de relèvement économique que nous recherchons tous actuellement. (10 h 30)

À la lumière de l'approbation générale que nous portons au projet, nous aimerions toutefois vous indiquer certaines considérations et moyens pouvant en améliorer la portée. Les remarques que nous formulons ont été soigneusement élaborées par notre comité des mines et, étant donné le professionalisme de ses membres ainsi que leur expertise, nous pensons qu'elles seront fort utiles. En passant, M. le Président, M. le ministre, j'aimerais vous signaler que le syndicat national de l'amiante devait nous accompagner, il n'a pu le faire; cependant, il vous a fait parvenir un télégramme dans lequel il indiquait qu'il appuyait totalement nos revendications.

Nous vous indiquons notre accord quant au projet de loi. Cependant, il y a un point particulier qui soulève chez nous une opposition très forte, soit les modalités relatives à l'obtention de permis spéciaux tel que formulé dans l'article 240.6. M.

Laliberté, qui m'accompagne, le président du comité, commentera particulièrement cet aspect et il mentionnera également les autres changements que le comité propose.

Avant de formuler nos remarques, permettez-moi de vous présenter brièvement le Conseil régional de développement des Cantons de l'Est, CRDCE; le conseil régional est un organisme autonome incorporé en vertu de la loi québécoise et il a pour mandat de travailler en concertation au développement économique et social de la région. Il est animé par un conseil d'administration regroupant 32 personnes élues et politiquement elles représentent les différents acteurs de la vie socio-économique de notre région. Le conseil intervient régulièrement devant les commissions parlementaires de nos deux gouvernements et nous sommes satisfaits de pouvoir à nouveau contribuer à votre réflexion sur ce sujet d'importance que constitue la révocation des droits miniers.

Et sur cela, M. le Président, j'aimerais passer la parole à mon collègue et président du comité des mines.

M. Laliberté (Roger): M. le Président, tout d'abord je voudrais suggérer de faire deux petites corrections à notre mémoire. En page 3 du mémoire, au troisième paragraphe, à la deuxième ligne, il faudrait remplacer le mot "clauses" par le mot "claims", une petite erreur d'écriture. Au bas de la page également, ajouter à la fin complètement du paragraphe "et l'industrie minière en général et la prospection minière en particulier en seront mieux servies". La phrase se lit comme ceci: "Que l'État accorde des droits de mine à celui qui le premier les a acquis par jalonnement et l'industrie minière en général et la prospection minière en particulier en seront mieux servies."

M. le Président, les commentaires que je veux formuler sur le projet de loi no 35 sont peu nombreux. On doit vous dire au départ que nous sommes heureux de constater que le projet de loi s'inspire largement du mémoire que nous avions préparé en novembre 1977. C'est ce mémoire-ci, j'ai la première page.

Nous sommes donc satisfaits que le gouvernement ait décidé de régler un vieux problème qui a paralysé vraiment l'exploration dans l'Estrie en particulier. Autant nous sommes d'accord avec le principe du projet de loi, autant nous sommes en désaccord avec la façon dont les droits de mine devront être acquis. Nous suggérons fortement la façon traditionnelle et nous pensons que le claim, le jalonnement, devrait être maintenu.

Nous sommes donc contre les permis spéciaux pour l'acquisition des droits de mine. On s'oppose donc à l'article 240.6 qui oblige les personnes, les compagnies qui veulent acquérir les droits de mine, de faire appel au ministère. Selon nous, le jalonnement demeure la façon la plus juste d'acquérir les droits de mine, parce que le jalonnement place tous les intervenants, le petit prospecteur, la compagnie minière, la petite compagnie minière d'exploration, les grosses corporations, sur le même pied. Par le jalonnement, une propriété minière ou des propriétés minières deviennent disponibles en même temps pour tout le monde. Les droits de mine, par le jalonnement, vont à ceux qui les ont jalonnés les premiers. C'est pour cette raison que nous pensons que c'est la façon la plus juste d'acquérir les droits de mine. Non seulement c'est la façon la plus juste, mais c'est également la façon, selon nous, la moins discrétionnaire. On laisse peu de place à l'arbitraire, par le jalonnement. Personne n'a besoin de demander de permission à qui que ce soit. Il fait son claim; celui-ci est enregistré au ministère et, s'il est le premier à avoir fait ce travail, il a le droit de mine. Le ministère n'intervient pas du tout à ce niveau. Il n'y a donc pas de pouvoir discrétionnaire accordé au ministère dans le cas de jalonnement. C'est pour cette grande raison que nous pensons que l'acquisition des droits de mine devrait se faire par jalonnement.

Il y a peut-être seulement un cas bien précis auquel j'accorderais une attention pour les permis spéciaux. Je vais vous expliquer brièvement le cas pratique qui pourrait survenir. C'est le cas où le ministère aurait à choisir, aurait a décider, pour certains lots qui sont dans le voisinage des exploitations minières, de la non appartenance à deux compagnies minières. Je m'explique plus précisément. Le droit de surface pourrait appartenir à une société minière qui en aurait besoin pour disposer de ses "tailings", par exemple. Dans l'Estrie, il y a beaucoup d'amiante et des haldes à rebut. Très souvent, les compagnies minières peuvent avoir les droits de surface sans avoir les droits de mine. Ce serait peut-être embêtant que ces terrains miniers servent pour les "tailings" et que ceux pour lesquels la compagnie minière n'a pas les droits de mine, que les droits de mine effectivement soient jalonnés ou concédés à une autre personne pour en faire une exploitation minière, par exemple, ou pour tout simplement bloquer un développement minier. Il y a seulement dans cette condition précise où nous verrions que l'État devrait peut-être être présent.

Est-ce que c'est par le biais d'un permis spécial? Ce n'est peut-être pas encore par le permis spécial qu'il faudrait être présent, ce serait peut-être beaucoup plus que les compagnies minières pourraient faire connaître, en même temps que ce que sont leurs gisements, les terrains qui seraient soustraits complètement ou qui feraient

partie de leur mine éventuellement. Cela pourrait être revu à tous les cinq ans. Mais c'est seulement le seul cas où nous verrions que l'État devrait se préoccuper de la question. Dans les autres cas, nous pensons réellement que le jalonnement est la façon la plus juste, la moins discrétionnaire et même la moins discriminatoire, finalement, pour acquérir les droits miniers.

Un autre changement que nous proposions dans notre mémoire original, c'était, dans les deux exceptions que le projet de loi fait, à l'article 239, de faire une exception aussi concernant les terrains sur lesquels il y a eu des travaux d'exploration depuis cinq ans. Bien sûr, on s'aperçoit que l'article 240.7 tend à rejoindre cette recommandation-là, de protéger les personnes qui ont acquis des droits miniers par option. Cela tend à rejoindre la recommandation, mais nous pensons, quand même, que, si on révoque les droits de mine sur les terrains où il y a eu des travaux d'exploration depuis cinq ans, celui qui a acquis les droits de mine se trouve pénalisé dans la circonstance parce que les règles du jeu sont changées. Même celui qui a accordé l'option, disons le fermier qui a accordé l'option moyennant certaines considérations financières avec la possibilité de vendre son droit de mine, se trouve pénalisé à ce moment-là. Nous aimerions que les terrains miniers où il y a eu des travaux depuis cinq ans rentrent dans vos exceptions et fassent partie de l'article 239.

L'autre changement, M. le Président, est plutôt mineur. Nous vous suggérons de peut-être mieux définir le terme "gisement", parce que le gisement, selon la définition, c'est quelque chose qui peut être exploitable présentement d'une façon économique. Si c'est seulement ça qui est considéré comme gisement dans la vraie définition, si c'est cette définition-là que vous appliquez au projet de loi, les réserves qui ont été trouvées, qui sont gardées et qui, peut-être, ne sont pas directement économiques au moment présent, mais qui pourraient le devenir dans un court laps de temps seront exclues alors que nous pensons que cela devrait faire partie de la définition du mot "gisement".

En plus de ça, nous recommandons de clarifier l'article 240.7 parce qu'il est très difficilement comprenable, même si ceux qui sont pris avec ce problème-là peuvent comprendre l'idée du ministre. Si je comprends bien, par l'article 240.7, vous voulez protéger les compagnies ou les individus qui ont acquis des options pour faire de l'exploration au moment où la loi sera adoptée. Vous voulez leur donner une chance, à ces gens-là. Mais je pense qu'à la façon dont l'article est rédigé, il y aurait lieu de le modifier, pour permettre une meilleure compréhension.

Finalement, un point très mineur, nous pensons que les avis mentionnés dans le projet de loi devraient également être publiés dans au moins un hebdo de la région concernée. On ne voit pas pourquoi, surtout pour des motifs d'efficacité, ces avis-là ne seraient pas publiés aussi dans un journal de langue anglaise. Alors, en gros, M. le Président, ce sont les remarques que nous voulions faire.

Le Président (M. Laplante): Merci, madame, messieurs, de votre coopération. M. le ministre.

M. Duhaime: Sur votre dernier point, M. Laliberté, je serais prêt à me ranger tout de suite en ajoutant une publication dans un hebdo régional. Cela m'apparaît une excellente suggestion. Je voudrais peut-être revenir, cependant, sur votre premier argument qui consiste à dire: Nous sommes d'accord sur le fond du projet de loi, peut-être que cela aurait dû être réglé il y a plusieurs années. C'est certain. J'ai pris connaissance de ce dossier-là quand je suis arrivé au ministère. Mes gens étaient prêts à y travailler. C'est ce qui explique qu'on ait pu déboucher rapidement. Votre objection majeure consiste à dire: Nous sommes d'accord sur le principe de la révocation, mais nous voulons maintenir intégralement le principe du jalonnement par opposition à l'émission de permis spéciaux d'exploration, même si l'émission de permis spéciaux d'exploration était bien balisée, bien articulée dans une réglementation très précise. (10 h 45)

Je voudrais peut-être, dans un premier temps, répondre à ce que j'appellerais une mauvaise information qui paraît dans la Presse de ce matin, cahier B, un article de notre bonne amie Francine Osborne qui dit dans un paragraphe que je cite: "Le projet de loi 35 stipule en effet qu'il faudra obtenir la permission du ministre de l'Énergie et des Ressources pour jalonner sur environ 50% du territoire québécois, soit le Nouveau-Québec, les terrains déjà requis par ordonnance et règlements", etc.

Il faudrait peut-être préciser que le projet de loi ne porte pas comme tel sur le Nouveau-Québec. Il existe déjà une procédure de révocation dans la loi actuelle, comme vous le savez. Le Nouveau-Québec est visé par la procédure déjà existante, de même que la loi permet de révoquer des droits, indépendamment du projet de loi qui est devant nous, par une procédure beaucoup plus compliquée et, lorsque les droits miniers sont révoqués, il y a émission de permis spéciaux; c'est une tout autre question. On voudrait très simplement voir bien limitée l'ampleur du projet de loi qui est devant nous.

Cela étant dit, M. Laliberté, voudriez-

vous me dire de façon précise si vous avez des exemples en tête. À quel endroit, dans l'application de cette procédure d'émission de permis d'exploration, soit au Nouveau-Québec ou encore sur des terrains révoqués en vertu des dispositions de la loi actuelle, y aurait-il eu ce que j'appellerais l'arbitraire du prince? Qu'y a-t-il de déficient dans cette procédure-là, selon vous?

M. Laliberté: Les permis spéciaux, M. le ministre, c'était pour un cas bien précis; c'était pour un individu qui se sentait bloqué dans un projet d'exploration, notamment, et qui ne pouvait pas réussir à négocier une option avec le propriétaire d'un droit minier; c'était également pour permettre à quelqu'un qui avait déjà acquis un large secteur d'un territoire mais qui était bloqué peut-être par un ou deux lots patentés avant 1880 de faire appel au ministre pour révoquer ces droits-là. C'était essentiellement pour permettre à des "opérateurs" de fonctionner dans les conditions existantes à ce moment-là; c'était pour permettre à des prospecteurs, à des compagnies l'accessibilité à des terrains qui les intéressaient. Dans ce cas-là, c'était la personne concernée qui avait déjà investi des sommes sur le terrain qui s'adressait au ministre pour demander la révocation de ces droits miniers. Je n'ai peut-être pas de cas de discrimination à vous rapporter mais j'ai moi-même fait appel au ministère pour révoquer de ces droits miniers. C'était une demande bien précise pour un territoire donné et le seul désavantage qu'il y a eu c'est que ça prenait considérablement de temps. Si on avait pu "claimer" ce terrain, le lendemain cela aurait été fait. Vous savez également que, pour obtenir le permis spécial, il fallait avoir des affidavits des voisins, et ce ne sont pas tous les cultivateurs qui vont signer un papier pour dire qu'il n'y a plus de travaux d'exploration qui ont été faits depuis cinq ou dix ans, je ne le sais pas, parce que le cultivateur avait peur de pénaliser son voisin. C'était quand même une procédure compliquée mais c'était la seule qui existait et qui permettait à une compagnie d'avoir accès à la propriété finalement.

M. Duhaime: Je voudrais préciser une chose pour les fins de nos discussions. L'ensemble du territoire qui est visé par le projet de loi no 35, en incluant les seigneuries, ça donne quelque chose comme plus ou moins 70 000 kilomètres carrés. Ce que nous avons retenu comme superficie qui, après l'adoption de cette loi, donc après révocation, serait assujettie à cette procédure de permis spéciaux d'exploration est une zone dont vous retrouvez la description très détaillée dans l'avant-projet ou dans le projet de règlement que nous avons mis à la disposition de tout le monde et, sans aucun doute, dont vous avez pris connaissance. Si on pouvait le représenter géographiquement, il est bien certain que vous allez convenir avec moi qu'on va retrouver cette zone dans la région de l'Estrie d'abord, et dans cette partie du territoire où nous avons évalué qu'il y avait, bien sûr, une possibilité minière; deuxièmement, où il y avait aussi une très forte concentration de population; nous sommes en territoires urbanisés.

Je comprends les préoccupations qu'on peut avoir face à un pouvoir réglementaire mais, comme je le disais au début des travaux de cette commission, je suis ouvert à des suggestions. Je vais vous faire part de mes craintes. Si nous laissions tomber ce territoire de 20 000 kilomètres carrés qui, comme mon collègue, le député de Richmond, l'indiquait, pourrait servir d'expérience fort utile pour l'avenir, pour des décisions que le gouvernement aurait à prendre, je voudrais avoir votre réaction comme citoyens qui vivez dans cette région. Le fait d'ouvrir après la révocation un territoire urbanisé comme celui-là au jalonnement, ça va donner quoi comme résultat?

M. Laliberté: Si je comprends bien, M. le ministre, le territoire qui est montré ici, c'est ce seul territoire-ci.

M. Duhaime: C'est ça, on l'a en main.

M. Laliberté: C'est ce seul territoire-ci qui obligerait un prospecteur ou une compagnie à demander un permis spécial?

M. Duhaime: C'est ce qui est contenu et décrit dans le projet de règlement que je vais citer pour les fins du journal des Débats, pour que l'on se comprenne bien: Projet de règlement sur la délimitation d'un territoire pour la recherche et la mise en valeur de certaines substances minérales. Alors le texte se lit ainsi: D'un point nord-ouest situé dans la zone Universel Transverse de Mercator (UTM) 18, etc. Vous avez la représentation graphique en annexe I. Je veux simplement vous indiquer que quand je parlais d'urbanisation du territoire, vous avez en partant du haut de ce graphique, du nord, Plessisville, Thetford Mines, Asbestos un {peu autour du lac Mégantic, Sherbrooke, Coaticook, ensuite vous avez Victoriaville, Drummondville, Saint-Hyacinthe, Granby, Saint-Jean, Magog, Cowansville. Je pense que c'est important de bien l'indiquer. Le territoire qui fait l'objet de la révocation sous l'empire de ce projet de loi porte sur 70 000 kilomètres carrés. C'est seulement la représentation graphique qui est sous vos yeux, en annexe I qui compte pour 20 000 kilomètres carrés; on va être d'accord pour dire que c'est beaucoup plus dense là que

dans des régions inhabitées qui seraient assujeties à la procédure d'émission de permis spéciaux d'exploration. Je ne sais pas si tout le monde a bien compris que c'est de cette façon que nous avions travaillé.

M. Laliberté: Autrement dit, par exemple, M. le Président, dans l'Outaouais où il y a des prospects miniers, l'acquisition des droits de mine pourrait se faire par jalonnement dans ces endroits-la, tandis qu'à l'intérieur du territoire délimité par le graphique ici, il faudrait avoir un permis spécial pour acquérir des droits de mine?

M. Duhaime: C'est exact.

M. Laliberté: Alors, M. le Président, nous ne voyons pas la raison pour laquelle le plus grand territoire estrien est assujetti à cette modalité du règlement. Nous aimerions toujours que ce territoire-ci soit accessible par jalonnement. Si le ministre ou le ministère veut faire des expériences, une nouvelle forme de jalonnement comme cela existe dans certaines autres provinces, on est bien d'accord, mais on veut quand même que l'acquisition des droits de mine se fasse par jalonnement, nous ne voyons pas la raison. Il y a d'autres territoires au Québec qui sont aussi populeux finalement, si c'est la densité de la population qui vous incite à une telle décision. Mais, nous préférons le jalonnement comme méthode d'acquisition.

M. Duhaime: Si je comprends bien, vous plaidez la tradition.

M. Laliberté: La tradition, M. le Président.

M. Duhaime: Merci.

Le Président (M. Laplante): Alors, M. le député de Richmond.

M. Vallières: Je voudrais qu'on me corrige au CRD, au comité des mines, si ce n'était pas cela. Je me souviens qu'originalement vous aviez préparé un mémoire dont s'est largement inspiré le ministre. Vous visiez deux objectifs en particulier, par la révocation des droits de mine: d'abord, favoriser l'exploration et dans un second temps, permettre l'inventaire des travaux qui sont faits sur le territoire. J'aurai donc deux volets.

D'abord vous semblez nous dire que le mode de jalonnement actuel, s'il était appliqué sur le territoire qui est délimité par voie de règlement, répondrait aux besoins et permettrait l'atteinte de vos objectifs, sans l'introduction des permis spéciaux dont on parle dans le projet de loi. Les craintes que manifeste le ministre, pour moi, ne sont pas encore très précises. En ce qui me concerne, je verrais mal que les législateurs acceptent de procéder par délégation de pouvoirs, via la réglementation. On se plaint déjà suffisamment que les réglementations viennent miner littéralement notre pouvoir de législateurs. Je ne vois pas pourquoi, sous forme expérimentale, on accepterait de donner nos pouvoirs de législateurs à des fonctionnaires par la voie de la réglementation.

En ce qui concerne l'inventaire des travaux, vous avez sûrement pris connaissance, dans le projet de loi, de toute la mécanique qui est introduite, qui est une mécanique quand même assez complexe et très exigeante pour l'explorateur. Est-ce que, selon vous, on pourrait arriver à faire l'inventaire des travaux d'exploration qui seraient faits sur le territoire d'une façon beaucoup plus simple que celle qui est introduite dans le projet de loi qu'on a devant nous?

M. Laliberté: Ce qu'on voulait dire, M. le député, c'est que, sur les terrains patentés avant 1980, les compagnies pouvaient faire des travaux et ces travaux n'étaient pas requis au ministère. Ces travaux-là dormaient dans les classeurs des compagnies. J'ai été témoin, par exemple, d'un terrain minier sur lequel trois compagnies différentes ont quasiment fait les mêmes travaux de base, travaux géologiques, travaux de géophysique; elles ont eu des anomalies à peu près aux mêmes endroits et des trous de forage aux mêmes endroits. Si le processus avait été différent et si cela avait été des claims, par exemple, les compagnies auraient été obligées de consigner ces travaux-là au ministère pour maintenir les droits miniers, et si la compagnie avait consignée le territoire et s'il avait été jalonné par une autre, la suivante aurait eu accès à tous ces travaux de base. C'est dans ce sens-là qu'on dit que la Loi sur les mines n'a pas favorisé - ce qu'on disait dans notre mémoire original un inventaire géologique dans l'Estrie, comme certains travaux miniers ou certains territoires de l'Abitibi. Vous avez plusieurs dossiers au ministère sur un claim particulier. C'est dans ce sens-là que nous disions que la loi n'avait pas favorisé cet inventaire des travaux miniers.

M. Vallières: Est-ce que vous avez pris connaissance des règlements qui doivent accompagner la loi et qui déterminent comment on pourra obtenir le permis et les conditions auxquelles les explorateurs devraient se soumettre?

M. Laliberté: Je ne suis pas allé...

M. Vallières: Parce qu'il y en a toute une ribambelle, et je pense bien que cela viendrait ajouter à vos craintes. Je pense

bien que ce qu'on veut, avec révocation des droits de mine, ce qu'on veut, c'est que cela permette davantage l'exploration.

L'impression que j'ai, c'est que la mécanique qu'on introduit de rémission des permis et des conditions auxquelles devront se soumettre les explorateurs, c'est que cela va, d'autre part, non pas stimuler, mais restreindre l'exploration dans notre région. J'aurais trouvé important que les principaux intervenants puissent voir toute la réglementation qui l'accompagne. Ce sont des conditions très exigeantes qui, au lieu de favoriser l'exploration, vont peut-être atteindre le but contraire à celui que nous poursuivons. (11 heures)

Pour ce qui est de la question de l'inventaire des travaux, il y a quelque chose de prévu dans le projet de loi qui permettrait de faire l'inventaire, mais je me demande si ce n'est pas largement dépasser vos attentes. J'aimerais que vous nous aidiez à trouver une façon plus simple et moins exigeante pour les prospecteurs, pour en arriver à cette fin, sans mettre un frein à l'exploration dans ces régions. On veut tous que l'exploration se poursuive et se développe mais je pense que les moyens qu'on veut prendre ne sont pas nécessairement les bons. Si vous aviez des idées à soumettre au ministre, je pense bien qu'il est tout oreilles pour savoir comment on pourrait faire l'inventaire de ces travaux de façon simple.

M. Laliberté: M. le Président, si le territoire est accessible par jalonnement, la Loi sur les mines actuelle pourrait très bien s'appliquer. La Loi sur les mines prévoit le genre de travaux, la quantité de travaux qu'il faut faire pour maintenir les droits miniers chaque année. Alors, on aurait seulement à appliquer la Loi sur les mines actuelle. De toute façon, s'il fallait vivre avec ces permis spéciaux, j'espère qu'on aurait une réglementation qui s'inspirerait au moins de la procédure actuelle prévue à la Loi sur les mines sur le genre de travaux, la quantité qu'il faut faire par acre. Il me semble qu'il serait tout à fait souhaitable que ce soit le même processus, au moins.

M. Vallières: M. le ministre, ces gens-là semblent nous dire que le jalonnement convient, que la Loi sur les mines actuelle convient pour permettre de faire l'inventaire des travaux. Je me demande pourquoi l'introduction de toute cette ribambelle de conditions et, en particulier, du permis spécial. J'espère que vous pourrez, au cours des audiences, nous préciser votre point de vue là-dessus parce que, de prime abord, il semblerait qu'il y a seulement vous qui savez pourquoi c'est introduit.

M. Duhaime: Je peux vous signaler, M. le député de Richmond, que vous êtes en train d'accélérer notre processus de délibérations. Si vous voulez avoir mon point de vue, je vous le donnerai à l'occasion de l'étude article par article, lorsque nous aurons entendu tout le monde. Pour l'instant, je me contente d'écouter. Vous avez raison de dire que mes antennes sont bien sorties.

Le Président (M. Laplante): M. le député d'Outremont.

M. Fortier: J'aurais deux questions dont l'une pour M. Laliberté. Si j'ai bien compris en lisant votre mémoire en annexe, vous demandez que les difficultés inhérentes à la région de Cantons de l'Est soient aplanies. Vous venez de dire, en présentant votre mémoire, qu'il y avait des difficultés pour faire de la prospection. Lorsque les droits étaient inconnus, c'était difficile pour quelqu'un d'investir et c'était difficile, même après avoir trouvé une mine à un endroit, de négocier une entente. C'est la raison pour laquelle vous avez présenté votre mémoire. Est-ce que vous pourriez donner des explications là-dessus? Vous êtes au courant, j'imagine - vous ne faites pas état de cas spécifiques - de difficultés qui ont existé dans la région des Cantons de l'Est, de gens qui ont investi ou tenté de faire de la recherche ou de la prospection minière. J'imagine que votre conseil est tout à fait au courant de cas bien précis qui vous ont porté à faire ces recommandations.

M. Laliberté: Dans l'Estrie, M. le député, il y a des territoires qui n'ont jamais été touchés et qui sont favorables à l'exploration. Je vais vous donner un exemple: en 1910, le cultivateur sur une ferme a vendu son territoire à quelqu'un; le notaire lui a fait penser de réserver les droits de mine. Effectivement, le contrat marque une réserve des droits de mine en faveur du propriétaire original du terrain. Ceci a été oublié dans le testament du bonhomme. Les droits de mine ont été octroyés aux ayants droit. Finalement, nous arrivons à une propriété divisée en 16, quelquefois. Vous voyez la complexité du problème d'aller rencontrer 16 personnes dispersées un peu partout pour acquérir les droits de mines. Bien sûr, il y a une disposition dans la loi actuelle qui permet de procéder à la révocation mais, comme on l'a dit tout à l'heure, c'est quelque chose de compliqué, avoir la révocation. Dans l'Estrie, cela a été vraiment la raison pour laquelle l'exploration n'a pas été plus active.

M. Fortier: Vous êtes d'accord avec moi pour dire que cet état de choses qui date de plusieurs années a été un handicap dans le développement économique des

Cantons de l'Est.

M. Laliberté: Cela a été un fort handicap.

M. Fortier: J'aurais une question à poser à Mme Gobeil. Votre conseil régional est très actif, comme on le voit, car il fait toutes sortes de représentations au gouvernement. Votre mémoire a été présenté au gouvernement en novembre 1977. Compte tenu des difficultés dans le développement économique des Cantons de l'Est, comment expliquer qu'un gouvernement qui est censé être sensible au développement économique du Québec en général et au développement économique d'une région comme celle des Cantons de l'Est en particulier prend quatre ans et demi avant d'arriver à un projet de loi qui nous permet maintenant d'en discuter? Ne croyez-vous pas que ce retard de plusieurs années est imputable dans une très grande mesure à un gouvernement qui a ignoré le développement économique des Cantons de l'Est?

M. Duhaime: J'ai comme l'impression que la question s'adresse à moi.

M. Fortier: M. le Président, j'ai posé une question à Mme Gobeil, elle est tout à fait libre de répondre.

M. Grégoire: On ajoutera un commentaire, par exemple, parce que cela a pris 40 ans pour que ça bouge.

Le Président (M. Laplante): Vous parlerez à votre tour, M. le député de Frontenac.

M. Fortier: M. le Président, la question que j'ai posée était bien simple, c'est que le mémoire a été présenté en novembre 1977 et nous sommes maintenant en mars 1982; c'a pris quatre ans et demi au gouvernement qui nous dirige pour se réveiller.

M. Grégoire: ... présente des mémoires comme cela au gouvernement.

Le Président (M. Laplante): Si vous voulez la parole, je suis prêt à prendre votre nom. Je vous le dis, Mme Gobeil, c'est une question embêtante qui suscite un jugement sur des politiques; vous êtes libre d'y répondre ou non.

Mme Gobeil: M. le Président, je pense pouvoir y répondre avec sagesse. D'abord, la question du président à la présidente du Conseil régional de développement des Cantons de l'Est quant à un jugement sur des politiques d'un gouvernement touchant ce secteur sont très complexes. Je vous dis bien humblement, je n'en ai pas la compétence.

M. Fortier: À la suite des propositions que vous avez faites en novembre 1977, le ministre Bérubé a-t-il accepté les recommandations que vous aviez faites ou si vous avez relancé le ministère pour qu'il donne suite à vos recommandations?

Mme Gobeil: Nous l'avons fait à plus d'une reprise à la suite de ce mémoire que nous trouvions excellent parce que fondé dans les raisons pour lesquelles on l'avait présenté au gouvernement. Mais il reste que je maintiens que dans tout ce contexte-là il y avait beaucoup de difficultés. Je ne voudrais pas, par votre deuxième question que j'appellerais une sous-question, que vous me forciez à porter un jugement de valeur.

M. Fortier: J'ai devant moi la Tribune de Sherbrooke; "M. Bérubé a rejeté la proposition du comité des mines de l'Estrie." Et M. Laliberté vient de me dire que justement ce handicap qui a duré plusieurs années a empêché le développement économique des Cantons de l'Est. Doit-on conclure - et j'en porte la responsabilité complète - qu'il est certain que le fait qu'on a reporté de quatre ans et demi la discussion de ce mémoire qui est extrêmement intéressant à mon avis a retardé le développement économique des Cantons de l'Est?

Le Président (M. Laplante): Merci, monsieur.

M. le ministre, pour le mot de la fin.

M. Duhaime: Je ne sais pas si cela va être le mot de la fin, M. le Président, mais moi je n'impliquerais pas ces braves gens dans nos discussions qui auraient peut-être dû avoir lieu à l'Assemblée nationale plutôt qu'en commission parlementaire en impliquant des tiers. Je voudrais simplement rappeler au député d'Outremont, qui n'est certainement pas familier avec l'industrie minière parce qu'il ne doit pas en avoir beaucoup dans son propre comté, que nous sommes en face d'un problème qui remonte à une bonne soixantaine d'années. Je voudrais dire qu'en 1936 le gouvernement du Québec a légiféré là-dessus. Je ne sais si cela va faire plaisir au député d'Outremont, mais le 20 février 1951 - c'est M. Duplessis qui était là à l'époque - l'Assemblée législative du Québec a adopté un projet de loi décrétant que toute personne autre que le propriétaire du fonds qui prétendait à des droits de mine abandonnés à la couronne en vertu des dispositions à la Loi des mines, et tout propriétaire de concessions minières suivies de lettres patentes émises avant le 1er juillet 1911 devaient, avant le 1er octobre 1951, faire enregistrer leurs titres s'ils ne l'avaient déjà été, ou dans le cas contraire, en renouveler l'enregistrement. Cette loi

décrétait aussi qu'à défaut de cet enregistrement ou de ce renouvellement dans le délai prescrit, les mines redevenaient la propriété de la couronne au droit de la province. Cependant, un avis juridique du ministère de la Justice, concernant les titres de propriété requis par la loi, obligea le gouvernement à abroger cette loi la même année.

Nous sommes en 1951. Il ne faut quand même pas prendre des vessies pour des lanternes, si vous me passez l'expression. Nous sommes en face d'une situation très complexe. Je serais étonné que les gens de l'Estrie aient fait leurs premières démarches en 1977 auprès du gouvernement. La seule chose que je voudrais dire au député d'Outremont, c'est que nous avons été sensibilisés à cette question. Nous sommes conscients aujourd'hui encore que cette loi doit être présentée à l'Assemblée nationale pour être adoptée en troisième lecture. Je vais vous dire que ce n'est pas dans cette perspective que j'entreprenais ces travaux. Il ne s'agit pas tant de savoir qui a eu tort ou raison dans le passé. Je pense que nos prédécesseurs ou les électeurs et les électrices ont eu l'occasion dans chacun des comtés du Québec de porter leur jugement. Je travaillerais plutôt en fonction de l'avenir, si vous me le permettez, M. le député d'Outremont.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Richmond, une courte question.

M. Vallières: Une dernière remarque en ce qui concerne ce mémoire en particulier, peut-être pour indiquer, pour la bonne compréhension de cette commission, que hors de tout doute, c'est dommage que votre prédécesseur, M. Bérubé, n'ait pas eu les antennes aussi développées que les vôtres. Chose certaine, c'est qu'il n'avait pas été trop élogieux non plus à l'endroit du Conseil régional de développement des Cantons de l'Est. Je ne voudrais pas reprendre tout ce débat - j'en ai parlé lors de la deuxième lecture - mais c'est pour le moins dommage.

M. Duhaime: Other days, other ways.

M. Vallières: That is it. Je voudrais maintenant demander ceci à M. Laliberté, parce que le ministre semble croire qu'avec le mode de jalonnement actuel, il y aurait des problèmes en région urbanisée. Pourriez-vous nous expliquer, pour éclairer nos lanternes, ce qui se produit avec le mode de jalonnement actuel, le prospecteur qui s'en va sur un terrain, qui décide de faire de l'exploration, le mode d'accès à la propriété actuel? Est-ce qu'on assisterait à un véritable "free for all" à partir du moment où on révoque les droits miniers dans les Cantons de l'Est? Est-ce qu'on assisterait à une véritable ruée vers l'exploration? En quoi le mode de jalonnement actuel protège-t-il les propriétaires? En quoi sommes-nous assurés que le lendemain matin, il n'y aura pas des gens dans votre jardin chez vous en train de faire de l'exploration?

M. Laliberté: Le jalonnement, vous savez en quoi il consiste. Vous êtes obligé d'avoir un permis de prospecteur. Je pense que cela coûte toujours 10 $. Cela vous donne droit d'acquérir environ 200 acres, cela peut aller jusqu'à 225 acres. C'est fort peu compliqué à faire dans un terrain arpenté. Vous n'avez pas besoin de couper d'arbres. Vous allez seulement au coin des quatre lots pour poser une petite plaque métallique avec une inscription. Il n'y a rien là. Ce n'est pas l'agriculture qui va devenir en danger. Je ne pense pas que le ministre Garon va s'opposer à une telle procédure. Bien sûr, quand il y a un travail d'exploration qui se fait, le prospecteur ou la compagnie doit prendre des arrangements avec le propriétaire du sol, s'arranger avec lui et même le dédommager. C'est la procédure qui se fait le plus souvent. Il n'y a pas de problème de ce côté.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Frontenac.

M. Grégoire: M. le Président, ce que je voulais soulever a été réglé.

Le Président (M. Laplante): Merci.

M. Grégoire: Je voudrais tout simplement dire ceci. Je ne voyais pas la nécessité d'entrer le sujet que nous étudions aujourd'hui dans la politique, comme le député d'Outremont l'a fait. Je voulais lui rappeler que ce n'est pas d'aujourd'hui que ce problème se soulève. Je me rappelle de longue mémoire qu'en 1944, ceux de Sherbrooke s'en souviennent, Johnny Bourque, dans le temps, cela fait longtemps, cela fait près de quarante ans, avait fait son élection et avait été appuyé par Maurice Duplessis justement sur ces droits miniers dans les Cantons de l'Est.

M. Vallières: C'est dans le temps que vous étiez fédéraliste?

M. Grégoire: C'est dans le temps où je n'étais même pas en politique, mais j'ai lu cela dans l'histoire.

M. Tremblay: C'est dans le temps qu'il n'avait pas de cheminée. (11 h 15)

M. Grégoire: Dans le temps que je n'avais pas de cheminée. Je n'avais pas pris connaissance des vicissitudes...

M. Tremblay: II n'avait pas les yeux ouverts.

M. Grégoire: ... du régime. Depuis ce temps, il y en a eu pas mal qui se sont succédé, que ce soient les Lesage ou les Bourassa et, après quarante ans, je crois que quatre ans d'attente, cela a tout de même été très rapide.

Le Président (M. Laplante): Merci, monsieur.

M. Grégoire: Je regrettais que la politique soit entrée dans ce sujet-là, d'autant plus que tout le monde semble d'accord sur le principe.

Le Président (M. Laplante): II ne faut pas rouvrir le débat non plus, M. le député de Frontenac.

M. Grégoire: Je crois que le député de Richmond a maintenu la discussion à un niveau élevé et je demanderais au député d'Outremont de faire la même chose.

M. Fortier: M. le Président, cela me fait plaisir de maintenir le débat à un niveau élevé. Je comprends le député de Frontenac de ne pas vouloir souligner le fait que le mémoire a été présenté il y a quatre ans et demi, mais on va s'en tenir à cela.

Le Président (M. Laplante): Merci de la coopération de tous les membres. M. le ministre, dernière remarque.

M. Duhaime: Je voudrais revenir sur un des éléments de l'argumentation de M. Laliberté dans sa déclaration d'ouverture, en rapport avec l'article 239. Je vais aller aux dernières lignes du deuxième alinéa de l'article 239, en haut de la page 5. Vous ave? suggéré que le mot "économiquement" soit possiblement exclu, parce que vous nous dites: Des indices raisonnables d'un gisement de minéraux devaient être localisés, mais, à cause du marché, à cause d'une teneur quelconque, la démonstration que cela pourrait être économiquement rentable serait peut-être impossible à faire.

Je vous avoue que je me réserve cependant d'en faire un amendement formel au moment de l'étude article par article, mais, à moins que mes collègues ici autour de la table n'y voient une objection, je serais prêt à biffer tout de suite le mot "économiquement" et à garder l'expression "d'un gisement de minéraux rentable". On reformulerait la phrase par "un gisement rentable" ou peu importe, mais l'idée étant qu'on enlèverait du texte le mot "économiquement". De cette façon, on répondrait tout de suite à votre argument.

Je voudrais apporter une précision, M. le Président. L'article 27 de la loi actuelle, la Loi sur les mines, prévoit que... Je vais simplement lire le texte, ce sera plus simple. "Personne ne peut, sans la permission écrite du ministre, jalonner les terrains: a mis de côté par la couronne comme lots de villages ou de villes; b subdivisés en lots à bâtir et inscrits comme tels sur le plan et dans le livre de renvoi du cadastre officiel; c situés dans les limites d'une cité ou d'une ville; d réservés en vertu du paragraphe b de l'article 301 ou e situés dans le territoire du Nouveau-Québec."

Si je fais la transposition pratique de l'article 27 qui est la législation existante, je vais prendre simplement l'aspect, le sous-paragraphe c qui dit: "Personne ne peut, sans la permission écrite du ministre, jalonner les terrains: c situés dans les limites d'une cité ou d'une ville." Si vous allez maintenant à la représentation graphique, l'annexe 1 du projet de règlement dont on discutait tantôt sur les 20 000 kilomètres carrés, si vous voulez avoir mon avis, une fois qu'on aura enlevé la partie "d'une cité ou d'une ville" et les autres exceptions de l'article 27, en excluant, bien sûr, le paragraphe e qui n'a rien à voir, il ne restera pas grand-chose comme superfie assujettie à la procédure d'émission de permis spéciaux d'exploration. Je vais peut-être avoir votre commentaire là-dessus.

M. Laliberté: C'est-à-dire que l'article 27 que vous venez de lire permet au ministre de soustraire...

M. Duhaime: "Personne ne peut, sans la permission écrite du ministre, jalonner les terrains: a, b, c, d, e." C'est le mot à mot de la loi. On parle de jalonnement. Avez-vous le texte de la loi avec vous?

M. Laliberté: Je n'ai pas la loi. M. le Président.

Le Président (M. Laplante): Oui, monsieur.

M. Laliberté: Nous voyons la pertinence de l'article 27. Nous pensons que le jalonnement au milieu d'une ville ou d'un village, c'est un petit peu compliqué. Maintenant, je pense que l'esprit de cet article 27 ne devrait pas s'appliquer aux nouvelles municipalités régionales de comté. Là, le jalonnement va être complètement impossible. Je comprends qu'un village, le restant, même si c'est une corporation municipale, pour le canton environnant, le canton ne tombe pas sous l'article 27. Je pense spécialement à la limite très spécifique d'un village ou d'une municipalité. Là, il est tout à fait logique d'obtenir la permission du ministre. Je ne pense pas que cela s'étende au niveau des cantons, au

niveau, comme je disais, des nouvelles municipalités régionales de comté. Cela paralyse complètement toute possibilité d'exploration.

M. Duhaime: Je peux peut-être tenter, en tout cas, d'éclaircir du mieux que je pourrai ce qui m'apparaît être une ambiguïté qui risque de se prolonger avec l'article qui est dans la Presse ce matin, de madame ou mademoiselle Francine Osborne.

Je voudrais vous montrer ici une carte. Je comprends que pour le journal des Débats ça ne sera pas trop facile. Vous avez sur cette carte, en rouge et en jaune, le territoire qui est visé par le projet de loi. La révocation porte là-dessus. Faisons une hypothèse: nous retirons le projet de loi et nous maintenons la procédure de révocation qui existe. Selon la législation actuelle, qu'est-ce qui va se produire? On va être obligé de maintenir la longue procédure d'avis, qui est coûteuse, etc., et, au fur et à mesure que pour tout ce territoire, qui part de l'extrême est, autour de Gaspé, et s'en vient des deux côtés du Saint-Laurent à l'extrémité ouest du Québec, au fur et à mesure que la révocation se fait, ce n'est pas le jalonnement, c'est l'émission d'un permis spécial, c'est la loi actuelle. Ce que ce projet de loi fait, c'est accélérer la procédure de révocation en révoquant d'un seul coup. Nous laissons à la procédure traditionnelle du jalonnement tout le territoire, sauf 20 000 kilomètres carrés, tel que décrit dans le projet de règlement. À l'intérieur de ce projet de règlement, à l'intérieur de cette superficie, parce que la loi 27 continue d'exister, il faut déjà enlever d'autres parties de territoire. ... Je voudrais juste essayer d'évaluer avec vous quelle est l'ampleur du problème sur lequel nous travaillons. Si on travaille sur un problème qui a un millimètre de long, je ne voudrais pas qu'on fasse des manchettes de six pouces de haut. Ce que je veux dire par là, c'est que tout ce qui est en rouge et en jaune représente les endroits où existent encore des droits miniers qui sont révoqués par cette loi. Une fois la révocation faite, la délivrance de permis spéciaux cesse et le permis spécial va s'appliquer aux seuls endroits décrits par le règlement. Une fois que cela est dit, il faut exclure ensuite, à l'intérieur de ces 20 000 kilomètres carrés, les dispositions applicables sous l'empire de l'article 27. On s'entend là-dessus? Cela veut dire que le problème est loin d'être énorme, à mon point de vue.

Le Président (M. Laplante): Des commentaires?

M. Laliberté: Oui, M. le Président. Le mémoire que nous avons présenté concernait en particulier l'Estrie et l'exemption que vous faites, M. le ministre, concerne précisément l'Estrie. Dans notre mémoire, nous disions que la politique des droits de mine, cette vieille politique, avait pénalisé l'Estrie, en particulier, ainsi que l'Outaouais, je suis bien d'accord avec vous là-dessus. Maintenant, l'exemption que vous faites s'applique directement à notre territoire et je pense que ce n'est pas le meilleur moyen pour une région présentement défavorisée d'accélérer le processus d'exploration minière. Essayez votre exemption dans un autre territoire qui est peut-être actuellement moins frappé par la conjoncture, on sera peut-être bien d'accord. Mais donnez à l'Estrie le statut d'une zone régulière sur le plan exploration, M. le Président.

M. Duhaime: Si je vous comprends bien, M. Laliberté, vous avez deux hypothèses devant vous: celle du jalonnement, qui peut permettre à quelqu'un d'enregistrer un claim et de dépenser le minimum prévu dans la loi sans nécessairement faire du développement, ou encore la problématique d'un permis spécial d'exploration. Votre choix est que vous aimez mieux courir le risque -parce qu'il y en a un - qu'un territoire dans l'Estrie qui est visé par le projet de règlement soit "claimé" et non développé. Vous aimez mieux prendre ce risque-là. Vous faites signe de la tête, mais ça ne sera pas enregistré.

M. Laliberté: Nous sommes d'accord que le claim demeure le meilleur moyen d'acquérir les droits de mine en fonction d'un développement éventuel. Cela va permettre aux prospecteurs, aux petites compagnies d'être présents et ça ne sera pas seulement les grandes corporations qui auront le moyen d'avoir accès aux droits de mine par la forme que vous suggérez, M. le ministre.

M. Duhaime: Quant à moi, je vous remercie, madame et messieurs, j'ai très bien compris votre point de vue.

Le Président (M. Laplante): Messieurs, madame, questions? Merci, messieurs, merci de votre coopération à cette commission. Bonne chance, Mme Gobeil, j'espère qu'on se reverra dans un autre milieu. Vous êtes toujours présidente de la Fédération des commissions scolaires?

Mme Gobeil: Sûrement, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): Bonjour.

J'appelle maintenant l'Association des mines d'amiante du Québec.

Messieurs, si vous voulez identifier votre organisme ainsi que les personnes qui vous accompagnent. M. le Président.

Association des mines d'amiante du Québec

M. Filteau (Paul-A.): Mon nom est Paul Filteau, je suis accompagné de M. Marie-Louis Trépanier qui est l'ingénieur-chef d'une de nos compagnies minières.

M. le Président, M. le ministre, messieurs les membres de la commission, comme vous le savez, l'Association des mines d'amiante du Québec regroupe tous les producteurs miniers d'amiante au Québec qui, pour la plupart, en font l'exploitation depuis au-delà de 100 ans.

Comme vous nous l'avez demandé, je serai bref. Vous voulez nous poser des questions, eh bien, nous aussi nous sommes ici pour vous souligner certains points sur lesquels nous aimerions avoir des éclaircissements.

Nous croyons qu'il y aurait lieu de modifier les articles 239 et 240 du projet de loi pour y prévoir un appel au ministre en vertu des articles 309 et suivants de la loi actuelle. (11 h 30)

À l'article 239, il est prévu que la révocation ne s'applique pas aux droits de mine dans un terrain où est situé un gisement constituant une réserve nécessaire -nous aimerions avoir le sens du mot "nécessaire", savoir quelle est l'extension du mot "nécessaire" - pourvu que le propriétaire de l'exploitation démontre à la "satisfaction" du ministre qu'il existe des "indices raisonnables" de gisements de minéraux "économiquement exploitables". Voilà des termes qui peuvent permettre une interprétation plus ou moins large.

Il nous semble que, lorsqu'il s'agit de révoquer les droits de mine située dans un terrain où il y a déjà exploitation ou qui constitue une réserve devant assurer la continuité de cette exploitation, on touche à des droits qui se rapprochent énormément du droit de propriété pur et simple et que, conséquemment, le processus de révocation de pareils droits se rapproche beaucoup de l'expropriation, domaine dans lequel le législateur est généralement fort soucieux d'éviter toute possibilité d'arbitraire. Il est donc important que la partie dont on veut révoquer le droit se voie donner le plus de protection possible.

Il est vrai que, dans la Loi actuelle sur les mines on retrouve plusieurs articles où il est dit "à la satisfaction du ministre"; voilà le facteur déterminant. C'est notamment le cas de l'article 84 dont les articles 239 et 240 reprennent la phraséologie, dans le même sens que les articles 108, 196 et 197. Nous vous soulignons cependant que, dans les cas qui précèdent, il s'agit d'un droit qui serait conféré par le ministre ou encore de travaux qui doivent être effectués, et non pas, comme dans le cas des articles 239 et 240, de la révocation d'un droit déjà acquis. Le juge des mines, d'après l'article 308, possède juridiction sur tout litige ayant pour objet des droits, privilèges ou titres conférés par la loi ou par un règlement. Cependant, il s'agit là d'un appel en première instance et qui ne couvre pas une décision du ministre.

L'article 309 donne bien au juge des mines "juridiction sur toute question de la compétence du ministre en vertu de la présente loi: a) par voie d'appel dans les cas où elle le permet; b) sur renvoi par le ministre dans tous les cas où celui-ci le juge à propos". C'est là un droit d'appel énormément précaire et qui n'est certes pas celui que nous recherchons.

Il nous apparaît en conséquence qu'il y aurait lieu de faire, pour les articles 239 et 240, ce que la loi prévoit actuellement dans trois circonstances aux articles 49, 72 et 136, qui prévoient spécifiquement un appel en vertu des articles 309 et suivants. Pour les mêmes raisons, il nous apparaît également qu'il devrait y avoir appel au juge des mines en ce qui à trait à l'indemnité prévue pour la révocation des droits de mine par l'article 240.1. Vous comprenez que je parle au nom des compagnies qui détiennent des propriétés qu'elles ont payées souvent à un prix très élevé. Certaines compagnies ont acheté des terres qui avaient été originellement achetées au prix de 10 000 $ et elles ont payé 250 000 $ tout simplement pour pouvoir faire l'acquisition des droits miniers.

Nous notons que les amendements prévus à l'article 296 prévoient un pouvoir de réglementation très étendu. Nous vous opinons que, compte tenu de l'importance de la réglementation prévue à l'article 296u qui y est ajouté, il y aurait lieu de subordonner l'adoption de cette réglementation à une publication préalable dans la Gazette officielle.

Enfin, M. le ministre, M. le Président, à cause du contexte actuel dans l'industrie de l'amiante, en particulier à cause des arrêts de travail, nous demandons que la loi n'entre pas en vigueur trop rapidement; nous suggérons le 1er janvier 1983 pour donner aux compagnies un temps suffisant pour évaluer les terrains qu'elles détiennent. Voilà M. le Président, les interrogations qui se posent pour nous en ce moment. J'aimerais, si possible, répondre aux quelques questions que vous pourriez nous poser.

Le Président (M. Laplante): Merci, messieurs. M. le ministre.

M. Duhaime: Je voudrais savoir si vous avez des suggestions précises?

M. Trépanier (Louis-Marie): Alors, voici, je représente Asbestos Corporation, c'est une filiale de la SNA maintenant et du

gouvernement.

M. Grégoire: Cela s'appelle maintenant la Société Asbestos Limitée.

M. Trépanier: Voici ce qui arrive. C'est que la Société Asbestos Limitée possède des terrains de 30 000 acres de superficie environ. Une très grande partie de ces terrains ont été acquis sous l'ancienne loi et cela date du 24 juillet 1880. Alors, les sièges sociaux dans les régions ont été déménagés, fractionnés, divisés. On avait naturellement un siège social à Inverness à un moment donné. Une partie de la paperasse a été déménagée à Thetford Mines dans les années 1926, c'est-à-dire les dossiers. Pour plusieurs de ces lots, naturellement, l'ancien arpentage et le nouvel arpentage, c'est différent également et cela exige une recherche énorme.

Quant à faire le travail, on va y aller de fond en comble pour savoir qui a bénéficié de ces droits-là. On a des droits de surface et on a des droits miniers. On a des terrains où on a seulement des droits de surface et d'autres où on a seulement des droits miniers. On a fait également l'exploration d'une très grande étendue de terrain. Avec la restriction budgétaire qu'on a actuellement, vous savez qu'on a été obligé de réduire le personnel à sa plus simple expression, et on arrête pour une période de treize semaines à partir de vendredi ou samedi prochain, jusqu'à la fin de juillet; à l'exception du mois de juin, on va arrêter au moins treize semaines. Cela veut dire que, durant cette période de treize semaines, il n'y aura à peu près pas d'ouvrage qui se fera.

Alors, si vous comptez, par exemple, six mois à partir de la semaine prochaine ou dans deux semaines, cela veut dire que le travail doit être fini au plus tard dès le mois de septembre, et nous n'en voyons pas la possibilité. C'est pour cela que j'ai suggéré à mon collègue, selon la date où vous allez adopter la loi, qu'on aimerait avoir une extension jusqu'au 1er janvier 1983.

M. Grégoire: II va y avoir plus que cela.

M. Fortier: Durant cette période de temps où la mise en vigueur de la loi sera reportée, les gens pourraient continuer à acquérir... La loi, c'est révoqué.

M. Trépanier: Nous allons continuer nos travaux de recherche pour être capable de faire le rapport au gouvernement, parce que, si vous vous fiez à ce qui souvent est demandé, cela prend un rapport très détaillé. Il faut qu'il soit vérifié par des géologues certifiés, qualifiés et par des ingénieurs. On a non seulement la région de Thetford à avoir soin, mais on a également la section du nord, Asbestos-Hill. Ce n'est pas très compliqué, mais il faut aller faire des recherches quand même.

M. Duhaime: Du côté d'Asbestos-Hill, si vous voulez avoir mon avis, j'ai l'impression que c'est plutôt tranquille.

M. Trépanier: C'est encore plus tranquille...

M. Duhaime: Mais, les voisins sont loin, comme on dit.

M. Trépanier: Pardon?

M. Duhaime: Les voisins sont loin.

M. Trépanier: Ce n'est pas là qu'est le travail majeur, c'est dans la région de Thetford.

M. Duhaime: Ma seule inquiétude à aller dans cette direction-là... Je vous avoue honnêtement que je suis prêt à y réfléchir, mais on envisageait une entrée en vigueur dans les 180 jours après l'adoption. Ce qui veut dire, sur le terrain, six mois. C'est quand même un délai fort appréciable. Vous me proposez qu'on devrait aller au 1er janvier 1983, ce qui veut dire neuf mois; cela veut dire 270 jours pendant lesquels on va être dans une espèce de vide, où il ne se passera systématiquement rien. On va prendre avis de votre point de vue, je demanderais cependant à être davantage convaincu qu'il faille aller au-delà de la période de 180 jours.

Je voudrais peut-être revenir sur l'intervention de votre collègue, tout à l'heure, au sujet de la procédure d'appel. Si je comprends bien votre préoccupation, vous n'êtes pas tout à fait certain s'il y a une procédure d'appel dans la loi que nous proposons.

M. Filteau: C'est laissé à la discrétion du ministre dans certains cas. C'est bien dit dans la loi.

M. Duhaime: Je ne vois pas que ma discrétion jouerait dans un secteur comme celui-là, puisqu'il y a une requête possible devant le tribunal compétent. Alors, si ce n'est pas le juge des mines, selon le montant qui est en cause, ce sera la Cour provinciale ou la Cour supérieure et, avec les dispositions du Code de procédure civile, il y aura ensuite appel à la Cour d'appel et, selon le montant en cause, possiblement même jusqu'en Cour suprême. Je ne comprends pas votre inquiétude.

M. Filteau: Si vous voulez regarder à l'article 309 de la Loi sur les mines, le juge

des mines a juridiction sur toute question de la compétence du ministre en vertu de la présente loi, par voie d'appel, dans le cas où elle le permet, sur renvoi par le ministre dans tous les cas où celui-ci le juge à propos.

M. Duhaime: Me permettez-vous de vous signaler que la juridiction du juge des mines porte sur son champ de juridiction, sur le champ d'application où le ministre agit, mais ce n'est pas à l'exclusivité de tout autre tribunal, selon les matières en litige?

M. Filteau: On ne voudrait pas aller devant le tribunal pour toute demande de contestation de révocation de droit, ou quelque chose comme cela.

M. Duhaime: Quand on parle du tribunal compétent, je me répète essentiellement; selon le montant en cause, ce sera tantôt la Cour provinciale ou tantôt la Cour supérieure, selon les montants et suivant les dispositions du Code de procédure civile. Si l'instance devant le tribunal est appelable devant la Cour d'appel, elle le sera, on ne touche pas à cela. Si elle est appelable en Cour suprême, elle ira en Cour suprême.

M. Filteau: Si nous contestons un droit de mine ou un terrain, en faisant la description telle que vous la demandez, avec le rapport du géologue, avec la valeur possible et en donnant des indications un peu trop claires, si nous contestons ce que vous considérez comme réserve nécessaire...

M. Duhaime: À la fin de l'article 240.11, vous avez le texte, je le lis essentiellement "... par la production d'une requête auprès du tribunal compétent." Si le juge des mines décline compétence, c'est la Cour provinciale ou la Cour supérieure. Ce n'est pas une compétence exclusive.

M. Filteau: Vous voulez dire que nous devrons aller devant une Cour provinciale ou supérieure si...

M. Duhaime: Je vais vérifier cela à nouveau auprès du contentieux au ministère de l'Énergie et des Ressources. Je puis vous dire que nous avons même pris avis auprès du juge des mines à ce sujet. Je peux m'informer à nouveau, mais je suis en mesure ce matin de vous donner l'assurance qu'il y a une procédure d'appel qui est très claire dans le texte de l'article 240.11, à la toute fin du 1er paragraphe, où on lit: "... par la production d'une requête auprès du tribunal compétent".

M. Filteau: À l'article 239, 2e, de votre projet de loi, on lit: que la révocation ne s'applique pas "aux droits de mine dans un terrain où est situé un gisement de minerai constituant une réserve nécessaire pour assurer la continuité d'une entreprise minière, pétrolière ou gazière en exploitation au Québec (...) pourvu que ces droits soient détenus par l'exploitant de cette entreprise et que ce dernier le démontre à la satisfaction du ministre..."

M. Duhaime: On peut l'enlever, "la satisfaction du ministre" si c'est ça qui fait votre déplaisir. Je comprends que vous êtes plus confiants dans le présent que craintifs face à l'avenir. Pour cela, je vous comprends, mais je voudrais lire essentiellement l'article 240.11 du projet de loi: "Le régistraire en chef des claims doit, dans les 60 jours qui suivent la réception d'une déclaration visée dans l'article 240..." Il faut aller voir à l'article 240 et vous avez la déclaration qui est là. C'est donc appelable, très clairement.

Quant à "la satisfaction du ministre", mon cher monsieur, j'ai tellement de choses pour me satisfaire que je serais bien prêt à le rayer tout de suite. Cela ne me dérange pas du tout.

M. Filteau: Nous prévoyons que certaines compagnies qui détiennent des propriétés en réserve peuvent être décrites par d'autres comme n'étant pas des réserves, n'étant pas nécessaires, c'est cela que je veux dire.

M. Duhaime: D'accord. Quant à moi, je vous remercie. Je ne sais pas si des collègues ont des questions.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Richmond.

M. Vallières: Deux ou trois questions. Vous êtes probablement les seuls parmi ceux qui ont présenté des mémoires qui ne se sont pas prononcés officiellement sur le principe de la loi, soit la révocation, d'une part, et la question des permis spéciaux, d'autre part. Est-ce que vous pourriez nous indiquer si, compte tenu que vous n'en avez pas parlé, on doit conclure que vous êtes pour les principes généraux qu'on retrouve dans ce projet de loi, exception faite des modifications que vous nous proposez?

M. Filteau: Dans une première lettre, nous nous étions prononcés contre le permis spécial. Quant au principe de la révocation des droits de mine, dans certains cas, cela peut être pratiquement une expropriation. Quand vous payez des terrains à des prix très très élevés et qu'on vous les révoque, cela sera assez compliqué.

M. Vallières: D'accord. Vos craintes vis-à-vis de la satisfaction éventuelle du

ministre - une question de précision, je ne voudrais pas vous obliger à une réponse que vous n'aimeriez pas non plus - est-ce que cela ne veut pas dire qu'il pourrait y avoir deux poids, deux mesures? Est-ce que l'attitude et la satisfaction du ministre pourraient varier selon qu'il s'agit d'une entreprise d'État ou d'une entreprise privée?

M. Duhaime: Bonne question!

M. Filteau: Pourvu que les règles du jeu soient les mêmes, comme nous l'avons toujours prêché, que ce soit une entreprise d'État ou une entreprise privée. (11 h 45)

Le Président (M. Laplante): D'autres questions M. le député de Richmond? M. le ministre, le mot de la fin.

M. Duhaime: Je vous remercie, messieurs.

Le Président (M. Laplante): Messieurs, les membres de cette commission vous remercient de votre mémoire.

Association des prospecteurs du Québec

Maintenant j'appelle l'Association des prospecteurs du Québec. Messieurs, si vous voulez identifier votre organisme et identifier les personnes qui vous accompagnent. C'est la même règle, je crois que vous étiez la lorsque je vous ai demandé une coopération pour synthétiser votre mémoire. Messieurs.

M. Carrière (Gilles): Merci, M. le Président. À ma droite, M. Jean Descarreaux qui, comme ancien président de l'Association des prospecteurs du Québec, est conseiller auprès du conseil d'administration de l'association; M. Jacques Beauregard, directeur général de l'association; je suis président de l'association, mon nom est Gilles Carrière, M. Jacques Beausoleil, membre du conseil d'administration de l'Association des prospecteurs et conseiller en matière juridique auprès de l'association, et M. Denis Francoeur de Matagami, secrétaire-trésorier de l'Association des prospecteurs.

Nous tenons tout d'abord à remercier les membres de cette commission de l'occasion qu'ils donnent à l'Association des prospecteurs de se faire entendre sur le projet de loi no 35.

Très brièvement, le projet de loi comporte deux aspects: la révocation des droits de mine et la modification sur les droits de mine. Sur la révocation des droits de mine, nous sommes favorables à la révocation des droits de mine à peu près dans les termes indiqués dans la loi ou dans le projet de loi. Nous avons d'ailleurs indiqué notre approbation au ministre à peine sept ou huit jours après le dépôt du projet de loi no 35 à l'Assemblée nationale. Nous avons une petite réticence sur laquelle je ne m'étendrai pas, mais qui est indiquée dans notre mémoire, à savoir qu'on semble pénaliser les exploitants éventuels de gisements qui pourraient se trouver sur ces terrains pour des concessions qui ont été accordées il y a au-delà de 100 ans. Ce n'est pas eux qui sont responsables du fait qu'avec la concession des terres les droits de mine aient été accordés aux propriétaires des droits de surface.

Passons maintenant à la deuxième partie du projet de loi. Je dois dire que les points sur lesquels nous sommes d'accord, je viens de les mentionner; pour le reste, nous sommes en désaccord avec le projet de loi no 35. Nous avons exprimé, nous l'exprimons dans notre mémoire, nous sommes fortement en désaccord avec cette nouvelle façon de donner accès aux droits de mine à tous les gens qui veulent y avoir accès. Nous sommes entièrement pour le mode d'acquisition des droits de mine qui existe actuellement, qui est le jalonnement des claims et nous nous opposons vigoureusement à l'octroi de permis spéciaux pour avoir accès à la propriété des droits de mine.

Essentiellement, ce que nous n'aimons pas dans le projet de loi no 35, ce sont les articles 240.6 et 6, à la fin du projet, qui accordent au gouvernement le pouvoir de faire des règlements pour délimiter des territoires et ce, non seulement dans les régions où les droits de mine ont été révoqués mais, si nous comprenons bien le projet de loi, partout dans la province, qui seront soustraits au jalonnement et où un permis spécial d'exploration sera nécessaire pour faire des travaux d'exploration. J'espère que nous comprenons bien le projet de loi. L'article 240.6 dit bien que toute personne devra obtenir un permis spécial d'exploration - j'en passe un bout - ou dans un terrain où les droits de mine appartenaient à la couronne avant le - on indiquera la date - et qui est compris dans un territoire délimité à cette fin par règlement. Ce que nous comprenons, c'est qu'à l'article 6, qui modifie l'article 296, le gouvernement, par des règlements qu'il peut adopter, à mon sens, n'importe quand, peut soustraire tout territoire qu'il juge à propos, là où les droits de mine lui appartenaient avant l'entrée en vigueur de la loi, je suppose, et que ces droits de mine ne seront plus accessibles par jalonnement, mais seront accessibles seulement par l'obtention de permis spéciaux.

Les raisons de notre objection aux permis spéciaux, M. Laliberté, du CSDCE, les a expliquées assez bien. D'ailleurs, elles sont indiquées dans notre mémoire. Je les mentionnerai peut-être brièvement. Il semble que la méthode de jalonnement sans permis

préalable place sur le même pied le prospecteur, la PME d'exploration et les grandes entreprises. Nous croyons que c'est encore la meilleure façon de donner aux Québécois la possibilité d'accéder à la propriété des droits de mine au Québec.

Nous proposons que les droits de mine qui auront été révoqués en vertu des articles 230, 237 ou 240 ne puissent être acquis que par jalonnement et que les claims ainsi jalonnés soient soumis aux dispositions de l'actuelle Loi sur les mines. Il me semble que c'est relativement simple de remplacer l'article 240.6 par les deux lignes qui suivent: "Les droits de mine révoqués en vertu des articles 230, 237 ou 240 sont régis par la présente Loi sur les mines".

Nous ajoutons dans notre mémoire, à la suite de cela, qu'en principe, nous n'avons pas d'objection à ce que la procédure de jalonnement soit modifiée pourvu que le jalonnement puisse se faire sans en demander la permission et qu'il donne priorité quant au terrain.

Je dois ajouter là-dessus que si on n'a pas d'objection en principe à ce qu'on change la procédure de jalonnement, on insiste quand même pour que le jalonnement se fasse sur le terrain. Au lieu de poser quatre poteaux, un poteau à chaque coin du terrain, au lieu d'indiquer les lignes entre les poteaux -quoique, dans les terrains arpentés, nous sommes obligés d'indiquer seulement les lignes de rang et non pas les lignes latérales des lots - ce qu'on veut dire par "modifier le mode de jalonnement", c'est que nous n'aurions pas d'objection à ce qu'on pose seulement un poteau pour jalonner un lot. On va poser un poteau au coin nord-est du lot. On place la plaque métallique et on inscrit la date et l'heure, le mode de jalonnement ordinaire. Il me semble que cela pourrait se faire comme cela. Les lots sont arpentés, les lignes de rang sont marquées, et la plupart du temps, il y a une clôture le long de la ligne de lot, et s'il n'y en a pas, la ligne de rang est marquée la plupart du temps.

Nous résumons dans notre mémoire la position de l'Association des prospecteurs du Québec. Je vous ferai remarquer que ce mémoire a reçu l'approbation des 18 membres de notre conseil d'administration, qui représente en général tous les intervenants dans l'exploration minière au Québec, les grandes compagnies, les PME d'exploration, les prospecteurs individuels, même des prospecteurs d'occasion, les "explorationnistes".

Notre position peut se résumer comme suit: Nous sommes pour la révocation des droits de mine; nous demandons des modifications au projet de loi 35 et même à la Loi sur les mines telle qu'elle existe dans le moment, dans le sens suivant: Nous suggérons que tous les terrains où les droits de mine seront révoqués en vertu des articles 230, 237 et 240 soient ouverts au jalonnement; deuxièmement, que la Loi sur les mines ne comporte pas de nouveaux pouvoirs de soustraire des terrains au jalonnement. En somme, pour y revenir encore une fois, c'est l'article 240.6 qui permet au gouvernement d'adopter un règlement qui désignerait des terrains n'importe où dans la province, si nous comprenons bien l'article, où les droits de mine appartenaient à la couronne avant la date d'entrée en vigueur du présent article et qui sont compris dans un territoire délimité à cette fin par règlement. Troisièmement, nous y allons d'une autre suggestion qui n'a pas grand-chose à faire avec le projet de loi 35, que les soustractions au jalonnement visées par le paragraphe b) de l'article 301 de la Loi sur les mines actuelle - ce serait peut-être utile que je mentionne plus précisément ce à quoi je réfère; c'est que le ministre peut par ordonnance réserver a la couronne pour fins de travaux d'inventaire et de recherche minière tout terrain où les droits de mine lui appartiennent - soient limitées à un an, renouvelables par le ministère ou le ministre, chaque année, par un avis dans la Gazette officielle. C'est pour éviter des soustractions au jalonnement que le ministère ou les fonctionnaires oublient, où il ne se fait plus rien et cela dure indéfiniment tant qu'il n'y a pas un fonctionnaire qui se réveille, a un moment donné, et qui dit: On n'a plus besoin de ce terrain.

M. Duhaime: Avez-vous des exemples précis en tête, M. Carrière?

M. Carrière: Pardon?

M. Duhaime: Avez-vous des exemples précis en tête où des territoires ont été mis en réserve, parce que vous vous référez à l'amendement de 1977? Si mes fonctionnaires dorment, je veux le savoir.

M. Carrière: On me fait remarquer que ce ne sont peut-être pas des soustractions au jalonnement faites en vertu de l'article 301, mais peut-être d'autres soustractions au jalonnement. En 1976, il y avait, au ministère, une pile épaisse comme ça de soustractions au jalonnement.

M. Duhaime: Vous me corrigerez si je fais erreur, M. Carrière, mais depuis les dispositions auxquelles vous venez de référer qui ont été adoptées par l'Assemblée nationale en 1977, le pouvoir de mise en réserve - pour les fins de référence, 1977 chapitre 31, l'article 27 du projet de loi - il y a eu 720 kilomètres carrés qui ont été mis en réserve et, par la suite, 225 kilomètres carrés sont retournés au jalonnement. L'information qu'on me donne, c'est que, sur

les 225 kilomètres carrés qui ont été retournés et donc susceptibles d'être jalonnés, il n'y a pas un millimètre carré qui a été jalonné à ce jour. Je ne vois pas où est l'abus, à moins que vous ne m'en fassiez une démonstration beaucoup plus claire.

M. Carrière: On me dit que ce sont d'anciennes soustractions au jalonnement qui ont été oubliées. Je ne peux pas vous répondre plus précisément à ce sujet, M. le ministre. (midi)

Finalement, on suggère que l'article 29 de la Loi sur les mines... Cet article accorde au ministre la discrétion d'établir les conditions et obligations qui peuvent être imposées, par le gouvernement ou par le ministre, dans le cas des articles 27 et 28, pour les terrains soustraits au jalonnement, où ça prend soit la permission écrite du ministre pour jalonner ou l'autorisation du gouvernement. Ce sont les terrains que vous avez énumérés tout à l'heure, les terrains mis de côté par la couronne, réservés, en vertu de l'article 301b, ou qui seraient, si on ajoute ce que le projet de loi 35 propose, situés dans les limites d'un territoire visé dans l'article 240.6, ou désignés comme parcs provinciaux ou comme sanctuaires d'oiseaux, ce genre de terrains.

Pour acquérir les droits de mine dans ces terrains-là, nous comprenons qu'il faut obtenir une permission pour jalonner. Mais la permission pour jalonner est accordée en vertu de conditions et obligations qui peuvent être imposées par le ministre ou par le gouvernement, dans le cas de l'article 28, ou qui sont prévues dans une convention approuvée par le gouvernement et conclue par le ministre et celui qui demande la permission ou l'autorisation de jalonner.

Notre point - je vais être clair là-dessus - ce qu'on suggère nous, c'est qu'on établisse des règles qui seront connues de tout le monde dans le cas où quelqu'un obtient la permission de jalonner dans tous ces territoires, au lieu de faire des ententes entre le ministre et celui qui demande la permission ou l'autorisation de jalonner.

À la suite de ces suggestions, nous soulignons dans le mémoire, le rôle prépondérant qu'ont joué les prospecteurs et les PME d'exploration dans le développement des ressources minérales au Québec. Des études ont démontré - ça s'applique à l'ensemble du Canada; je ne connais pas d'études qui ont été faites particulièrement pour le Québec dans ce domaine - que pour les années 1950 et 1960, plus de 60% des découvertes commercialisables avaient été faites par les PME d'exploration qui y consacraient, durant cette même période, moins de 60% des dépenses totales. Il est certain que le rôle des PME d'exploration minière au Québec a beaucoup diminué au cours des dix dernières années. Si on refaisait les statistiques, on verrait que la part des dépenses faites par les prospecteurs et les PME a diminué à peut-être moins de 5% des dépenses totales. On trouve la cause directe de ce déclin dans les mesures restrictives et contraignantes de la Commission des valeurs mobilières du Québec, tel que formulées dans ses énoncés de politique. Or, ce même organisme, la Commission des valeurs mobilières du Québec, consciente des effets néfastes de ses politiques, a précisément commencé, depuis quelques mois, à les modifier par de nouvelles instructions générales. Vous savez, il y a deux conditions essentielles à l'activité du prospecteur et des PME d'exploration minière: il faut avoir l'accès aux capitaux de risque pour le financement des entreprises ou de l'exploration, et, deuxièmement, l'accès à la propriété des titres miniers. On trouve qu'il serait pour le moins paradoxal que, pendant que la commission des valeurs s'ouvre au financement public d'exploration pour les prospecteurs et les PME par de nouvelles instructions générales qui remplaceraient les énoncés de politique, le ministère de l'Énergie et des Ressources compromette la survie même de nos entreprises en limitant l'accès de la propriété des droits de mine par son projet de loi no 35.

Là, nous disons que ce n'est certainement pas le but visé par le ministère, parce qu'il a montré dans le passé, avec des mesures remarquables, telle la modification du Code civil pour favoriser la formation de sociétés en commandite, les avantages fiscaux qui y ont été rattachés, les plans d'épargne-actions, ce qui nous semble être une politique d'ouverture du ministère de l'Énergie et des Ressources du Québec, dont nous tenons compte. Nous ne comprenons pas, de toute façon, les raisons du ministère de changer le mode d'acquisition des droits de mine dans la province. À notre connaissance, personne de l'industrie de l'exploration minière n'a demandé que le mode d'acquisition soit fait par permis spéciaux plutôt que par jalonnement.

Le Président (M. Laplante): D'accord. Excusez.

M. Duhaime: Je ne suis pas d'accord, mais j'aurais quelque chose à dire.

M. Carrière: On avait un petit point qui prendra à peu près une minute. Me Beausoleil me souligne que nous, on ne se place pas dans l'éventualité que les droits de mine seront acquis par permis spécial à partir de maintenant dans tout territoire désigné par le gouvernement, on refuse de se placer dans cette optique-là jusqu'à ce qu'on

soit obligé de le faire. Si on devait accepter de vivre avec un régime de permis spéciaux, il semble que les permis spéciaux durent douze ans et, ensuite, on ne sait plus ce qui arrive. Deuxièmement, les permis spéciaux d'exploration permettent de faire de l'exploration mais, si on trouve une mine, Me Beausoleil me dit qu'il n'y a pas de façon d'exploiter la mine. Autrement dit, il n'y a rien de prévu pour avoir un bail minier sur une mine qui aurait été trouvée dans les terrains explorés en vertu d'un permis spécial d'exploration. C'est tout.

Le Président (M. Laplante): Merci, messieurs. M. le ministre.

M. Duhaime: On pourrait peut-être, avant que Me Beausoleil fasse ses interventions sur des points, j'imagine, qui n'ont pas été couverts par l'intervention de M. Carrière...

Une voix: C'est terminé.

M. Beausoleil (Jacques): Oui, il y a des points qui n'ont pas été couverts.

M. Duhaime: Je ne voudrais pas qu'on perde le fil. D'abord, je vous écoutais tantôt, M. Carrière, et ça m'a rappelé un vieux souvenir, il y a quelques années, au collège. J'ai comme l'impression que votre conclusion a plus d'extension que la majeure partie de votre argumentation. Je pense que vous prêtez une intention au gouvernement qui pourrait, si j'ai bien compris votre argumentation, en utilisant un pouvoir réglementaire, soustraire tout le territoire à l'application de la Loi sur les mines.

M. Carrière: Pas tout le territoire, seulement celui où les droits de mine appartiennent a la couronne au moment de l'entrée en vigueur de la loi ou celui où les droits de mine ont été révoqués.

M. Duhaime: Cela me paraît énorme comme affirmation, mais je pense que notre devoir est de tenter d'apaiser vos inquiétudes. Que diriez-vous de la proposition suivante? Je serais prêt à restreindre le pouvoir réglementaire en pensant au passé, au présent et a l'avenir - je suis un citoyen comme vous - afin que nous puissions imaginer que le territoire visé dans le projet de règlement qui est devant vous soit intégré à la loi; que le projet de règlement qui décrit le territoire devant faire l'objet de permis spéciaux d'exploration comprenne la même description, qu'on l'introduise dans la loi et que tout autre pouvoir réglementaire permettant à un ministre d'agrandir ce territoire soit inexistant. Cela de sorte que, dans X années d'ici, si le gouvernement décidait d'agrandir ou même de diminuer ou d'abolir complètement, on devrait revenir devant l'Assemblée nationale.

Quand notre commission se réunira à nouveau au moment de l'étude article par article, avant l'étape du débat de troisième lecture, si nous formulions une proposition de ce genre, est-ce que ceci viendrait apaiser vos craintes?

M. Carrière: M. le ministre, ça enlèverait énormément de nos appréhensions, ça apaiserait beaucoup de nos appréhensions.

M. Duhaime: Vous allez convenir avec moi - que ce soit moi ou un autre - j'ai comme l'impression que ça serait peut-être une balise importante parce que ça forcera le législateur à vous entendre à nouveau, vous ou vos successeurs, et à voir ensemble, dans le temps comme dans le temps, comme on dit, ce que ça pourrait donner comme résultat.

Il y aurait une autre point aussi de votre argumentation. Vous dites: On aimerait bien que les conditions soient claires et connues pour tout le monde. Au moment de votre intervention, vous vous référiez plus particulièrement aux articles 28 et 29 de la loi actuelle. J'avais cru comprendre, en travaillant à ce dossier, que le but même de l'émission des permis spéciaux d'exploration allait rencontrer ce que vous nous dites ce matin, et c'est pourquoi ce que mon collègue de Richmond appelle des ribambelles, moi, j'appelle ça de la clarté. Vous avez un projet de règlement que nous avons mis à la disposition de tous les gens qui sont intéressés à ce projet de loi, lequel comporte 32 articles, dont le 32e est l'entrée en vigueur, il y a en 31. Le texte m'apparaît très clair et limpide. Prenez ma parole qu'en cinq ans j'ai eu l'occasion de voir de la réglementation qui était passablement plus compliquée. Dans le coeur de cet avant-projet de règlement sur les permis spéciaux d'exploration, ça m'apparaît être des conditions qui sont mentionnées et ne m'apparaissent pas être un fardeau insurmontable en tout cas, et qui ont l'avantage de rejoindre l'argument que vous venez tout juste de faire valoir, que des conditions seront connues et seront les mêmes pour tout le monde. Seriez-vous d'accord avec moi là-dessus?

M. Carrière: Je ne suis pas d'accord avec les dispositions de l'avant-projet de règlement qui nous a été fourni, mais je me demande si je vous comprends bien. Est-ce que vous voulez dire que les conditions des permis spéciaux seraient aussi appliquées dans le cas des articles 27 et 28 où la permission de jalonner aurait été obtenue du ministre ou du gouvernement sur le territoire?

M. Duhaime: Sur le territoire qui est visé. oui.

M. Carrière: Sur les sanctuaires d'oiseaux ou sur les...

M. Duhaime: Voulez-vous parler plus fort un peu, on vous entend mal à ce bout-ci.

M. Carrière: Sur les terrains qui sont soustraits au jalonnement en vertu des articles 27 et 28. Dans mon esprit, M. le ministre, il y a deux choses: il y a des permis spéciaux et il y a une permission de jalonner auxquels sont associées certaines conditions qui sont à discuter avec le ministre. En définissant les conditions d'obtention et de renouvellement d'un permis spécial, est-ce que, par le fait même, on définit les conditions de jalonnements fait en vertu d'une autorisation du ministre ou du gouvernement?

M. Duhaime: Je vais prendre le problème dans l'autre sens et je pense que je vais répondre à votre question. Une fois le règlement en vigueur, un règlement sur les permis spéciaux d'exploration, les articles 27 et 28 disparaissent, autrement dit, c'est-à-dire ne disparaissent pas comme tels mais deviennent inapplicables au territoire qui est visé.

M. Carrière: Qui est visé, mais non pas nécessairement à tous les autres terrains qui sont visés par les articles 27 et 28.

M. Duhaime: Le règlement sur les permis spéciaux d'exploration, je vous dis qu'il s'applique au territoire qui est décrit dans le projet de règlement qui est devant vous, 20 000 kilomètres carrés, plus ou moins.

M. Carrière: D'accord.

M. Duhaime: À partir du moment où il n'y aurait pas de jalonnement sur ce territoire visé, les articles 27 et 28 deviennent des dispositions inopérantes pour ce territoire.

M. Carrière: Oui, je comprends, M. le ministre. Alors, vous me demandez si, pour ce territoire visé, l'Association des prospecteurs du Québec est d'accord avec les dispositions du projet de règlement. Non, nous ne sommes pas d'accord. D'abord, dans le projet de règlement...

M. Duhaime: M. Carrière, j'ai dit tantôt, au début, que j'essayais de voir si on aurait un consensus quelque part et c'est ce que je souhaite retrouver.

M. Carrière: Je pense que, M. le ministre... (12 h 15)

M. Duhaime: J'ai comme l'impression d'avoir jeté passablement de lest depuis que nous avons commencé nos travaux. Je n'ai pas entendu de votre côté encore le moindre mouvement vers le consensus. Si vous me permettez de vous le dire.

M. Carrière: Je dois vous féliciter, M. le ministre, du lest que vous avez laissé en restreignant à un territoire le projet de loi no 35, plutôt que de pouvoir l'appliquer à l'ensemble de la province.

M. Duhaime: II est méfiant lui!

M. Carrière: Et vous me demandez si on est d'accord avec les règlements que vous avez bien voulu nous envoyer vendredi dernier, si on pourrait vivre avec cela. Il s'applique à un territoire des Cantons de l'Est. Si vous voulez que je vous fasse quelques remarques assez rapidement sur les parties du règlement avec lesquelles nous ne sommes pas d'accord...

M. Duhaime: Oui. Allez-y, mon cher monsieur. C'est d'ailleurs pour cela qu'on le met sur la table, avant même que la loi soit discutée en troisième lecture, pour avoir un peu le point de vue des gens qui, demain, auront à vivre avec le règlement, si jamais nous décidions de le mettre en vigueur.

M. Carrière: Les normes ou les critères qui seront utilisés dans l'octroi et le renouvellement des permis ne nous semblent pas indiqués dans le projet de règlement, quoique nous y voyions déjà certaines exigences qui défavorisent le prospecteur et la PME.

M. Duhaime: Vous vous référez à quel article, M. Carrière?

M. Carrière: Pardon?

M. Duhaime: Vous vous référez à quel article? À l'article 19 du projet de règlement?

M. Carrière: À l'article 8, par exemple, on dit qu'une société ou compagnie doit fournir les noms et adresses de ses administrateurs, officiers et une copie de son dernier rapport annuel avec sa demande de permis. Le prospecteur ne fournit pas cela, mais, s'il y a plusieurs personnes qui demandent un permis spécial en même temps pour un même kilomètre carré, quelles sont les normes d'attribution de ce permis dont le ministère va se servir? De quels critères le ministère va-t-il se servir pour l'accorder à l'un plutôt qu'à l'autre?

M. Duhaime: J'ai comme l'impression qu'on a une longue expérience avec les allocations quant aux claims.

M. Carrière: Le ministère n'a pas de discrétion pour accorder des claims. Le premier qui jalonne, c'est lui qui les a les claims, normalement.

M. Duhaime: II arrive souvent, M. Carrière...

M. Carrière: À moins que le gars n'ait été en prison.

M. Duhaime: II arrive souvent, M. Carrière, et vous le savez comme moi, que des gens se présentent au ministère; ils vont être deux, trois ou quatre et ils ont tous la même prétention d'avoir planté le piquet le premier.

M. Carrière: C'est une question de savoir qui a planté le piquet le premier.

M. Duhaime: Alors, je pense que le ministère de l'Énergie...

M. Carrière: Mais la norme pourrait être, M. le ministre, que le permis spécial soit accordé au premier qui l'a demandé. C'est plus facile de savoir qui a planté le premier le piquet sur le terrain que de savoir qui a été le premier à demander le permis spécial.

M. Duhaime: Je serais prêt à mettre dans le règlement, de façon très claire, la règle du premier arrivé, premier servi. Avec la tuyauterie et mécanique pour y aboutir, je pense qu'on pourrait trouver une formulation, mais je retiendrais cela comme suggestion. Je ne vois pas d'ailleurs comment on pourrait fonctionner autrement.

M. Carrière: Au mérite des gens qui font la demande. Si vous demandez les noms et adresses des administrateurs et des officiers de la compagnie et une copie de son dernier rapport annuel, cela doit être à une certaine fin, plutôt que d'accorder le permis au premier qui l'a demandé.

M. Duhaime: C'était votre premier commentaire. Vous m'avez dit que vous en aviez trois.

M. Carrière: Le deuxième a trait au manque de critères pour le renouvellement des permis. On dit, à l'article 19: "Une personne qui sollicite le renouvellement d'un permis doit produire avec sa demande un état complet et détaillé des travaux d'exploration tenus durant la validité du permis." Un permis est valable pour deux ans. La personne qui obtient un permis pour deux ans paie, chaque année, au début de l'année, 300 $ le kilomètre carré, et elle n'est pas obligée de faire des travaux, mais on lui demande de faire un rapport des travaux qu'elle a exécutés durant ces deux ans.

Deuxièment, avec la demande de renouvellement qui doit se faire avant la fin de la deuxième année du permis - le premier renouvellement est pour cinq ans, le deuxième aussi - on demande un programme détaillé et l'échelonnement des travaux d'exploration projetés pendant la période de validité de chaque permis ou groupe de permis, c'est-à-dire pour une période de cinq ans.

Premièrement, c'est très difficile de faire un programme d'exploration sensé pour une période de cinq ans.

M. Duhaime: Voulez-vous répéter cela, s'il vous plaît?

M. Carrière: Je dis que c'est très difficile de faire un programme d'exploration détaillé et échelonné sur une période de cinq ans parce qu'un programme d'exploration se modifie à mesure qu'on le fait, suivant les résultats obtenus.

M. Duhaime: Si vous voulez me permettre d'ajouter pour mes collègues de l'Opposition que cela s'applique au secteur privé aussi bien qu'au secteur public.

M. Carrière: Oui, certainement. Ce que je veux savoir c'est, pour celui qui fait une demande de renouvellement du permis, à quelles conditions va-t-il obtenir? Il présente un programme d'exploration pour cinq ans, bien que son obligation, durant les cinq ans, c'est de faire des travaux pour un coût minimal de 1000 $ par kilomètre carré, la première année; de 1500 $, la deuxième année, de 2000 $, la troisième année, 2500 $, la quatrième année, et de 3000 $ la cinquième année. Nous n'en avons pas, en particulier, contre ces dépenses minimales, elles nous semblent acceptables. Nous nous demandons cependant dans quelle mesure le programme projeté, le programme détaillé qu'on demande de soumettre avec la demande de renouvellement, sera utilisé pour le renouvellement ou le non-renouvellement du permis. S'il n'est pas pour être utilisé, je ne vois pas pourquoi on le demande. On va faire les travaux minimaux requis par la...

M. Duhaime: Si vous voulez avoir mon sentiment, c'est qu'on met un plancher; le minimum. On ne développera ni l'Estrie ni aucune partie du territoire visé par ce projet-là. Surtout lorsqu'on pense au territoire qui est visé à l'heure actuelle, qui serait assujetti à l'émission des permis spéciaux d'exploration, c'est entendu que

cette réglementation va vers une dynamique de développement. Je ne vous cacherai pas que, si c'est le minimum, il pourrait peut-être y avoir un renouvellement une fois, deux fois, mais, s'il n'y a aucun développement qui survient, il y a de grosses chances que le ministère se pose de sérieuses questions sur le sérieux des détenteurs du permis spécial qui se contenteraient de faire des dépenses minimum, alors que, dans ce secteur du Québec, on sait très bien qu'il y a un potentiel minier et que c'est une loi archaïque qui a empêché le développement. C'est pour cela que c'est dans la réglementation.

M. Carrière: Alors, si je comprends bien, M. le ministre, le renouvellement du permis risque de ne pas être fait si on s'en tient aux travaux minimaux, au minimum de travaux exigés; il pourrait être accordé ou ne pas être accordé suivant ce que vous jugez être un programme d'exploration convenable pour la région. Cela sera laissé au jugement du ministère.

M. Duhaime: Pour ne pas vous faire de cachette, vous avez parfaitement raison.

M. Carrière: C'est dans ce sens-là que je dis que des , dispositions comme celles-là sont discriminatoires envers le prospecteur parce que le prospecteur qui aura obtenu un permis spécial pour deux ans sans être obligé de faire des travaux et qui demandera un renouvellement du permis - d'abord, il n'est pas en mesure de le faire - vous ne le prendrez pas au sérieux s'il vous propose un programme d'exploration de 1 000 000 $ pour les cinq années suivantes. Il peut toujours vous proposer un programme de 10 000 $ pour les cinq années suivantes, c'est à cela que se montent tes exigences minimum, mais ce sont seulement les grandes compagnies qui pourront vous proposer des programmes d'envergure comme ce que vous souhaitez.

M. Duhaime: Je renverserais l'argument parce que je pense que votre argument est réversible, si vous me le permettez. Supposons qu'on fait l'émission d'un permis spécial. Le permis est renouvelé une fois, deux fois et celui qui est détenteur du permis spécial se contente de faire des dépenses minimales, suivant la lettre de la réglementation; allez-vous être d'accord avec moi pour dire qu'il ne se fera pas beaucoup de développement sur le plan économique?

M. Carrière: Si son territoire a beaucoup de potentiel, M. le ministre... D'ailleurs, le mérite des prospecteurs qui ont jalonné jusqu'à maintenant au Québec, ça été d'attirer l'attention des compagnies puissantes ou moins puissantes sur le mérite de leur propriété et de les inciter à y dépenser les sommes que lui personnellement n'est peut-être pas capable de dépenser, mais les sommes que justifie le potentiel minéral de sa propriété.

M. Duhaime: Nous respectons votre point de vue.

Le Président (M. Laplante): D'autres questions?

M. Vallières: J'en ai ici.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Richmond.

M. Vallières: J'aimerais tout au moins que vous nous précisiez votre point de vue -dans votre mémoire, vous y faites allusion -vis-à-vis de votre réticence au niveau du mode de compensation qui est prévu a l'endroit des propriétaires. Vous y faites allusion dans votre mémoire. Vous pouvez peut-être nous indiquer ce que vous en pensez.

M. Carrière: C'est une question un peu théorique. Une compagnie qui va trouver un gisement minier sur un territoire où les droits de mine auront été révoqués sera obligée de donner 5% de ses profits, tel que défini dans la loi, au gouvernement ou au ministère pour qu'ils soient distribués aux anciens propriétaires. Cela peut être interprété comme une pénalité à une compagnie pour avoir trouvé un gisement sur des terrains où les droits de mine ont été révoqués, plutôt que de l'avoir trouvé ailleurs. Ce qu'on dit, nous autres, c'est que la compagnie qui a trouvé un gisement dans les Cantons de l'Est ne doit pas, il nous semble, être pénalisée pour avoir trouvé le gisement là plutôt qu'ailleurs. Qu'elle paie les mêmes droits de mine et que le gouvernement se charge de compenser à même ses fonds les personnes dont les droits de mine ont été révoqués.

M. Duhaime: On va être obligé d'augmenter les impôts encore ou d'augmenter le déficit.

M. Carrière: Vous pénaliserez toutes les compagnies également.

M. Vallières: Épargnez-nous cette fois!

M. Duhaime: II faudra couper dans d'autres dépenses. Vous voulez nous envoyer une facture, si je comprends bien.

M. Vallières: Si on révoque les droits de mine, le propriétaire du droit de mine, c'est le gouvernement. Par conséquent, il pourrait, comme vous le mentionnez, payer à

même le droit d'exploitation de la mine qu'on connaît présentement. Comme dit le ministre, peut-être que cela pourrait impliquer des modifications aux montants qui sont exigés au niveau des droits miniers. Si le gouvernement s'orientait vers cela, il serait peut-être dans l'obligation de trouver des sources de revenus supplémentaires pour payer les propriétaires qui sont concernés.

M. Carrière: C'est peut-être notre souci de pousser trop loin l'uniformité qui nous fait faire cette remarque, que les compagnies qui trouvent des gisements miniers dans les Cantons de l'Est soient traitées, quant aux taxes à payer et quant à la distribution de leurs profits de la même façon que les compagnies qui les trouvent n'importe où ailleurs au Québec.

C'est un point théorique. Je laisserai à l'Association des mines de métaux du Québec débattre ce point davantage. Je vois qu'elle en parle elle aussi dans son mémoire. Ce n'est pas un point auquel nous de l'Association des prospecteurs tenons tellement.

M. Duhaime: Dois-je conclure que vous seriez disposés à retirer de votre mémoire cette partie de votre argumentation?

M. Carrière: À retirer quoi?

M. Duhaime: Dois-je conclure que vous seriez disposés à retirer de votre mémoire cette partie de votre argumentation concernant les indemnités et à laisser vos collègues de l'Association des mines de métaux reprendre votre argumentation à votre place sans pour autant vous sentir solidaires de leur position?

M. Carrière: Notre argumentation, si on devait la présenter, resterait la même, mais on peut la retirer au complet.

M. Duhaime: Merci.

M. Vallières: Votre point de vue m'apparaît très important dans la discussion d'aujourd'hui, parce que vous représentez les prospecteurs. Il ne faut jamais l'oublier. Je remarque que, dans votre mémoire, vous insistez beaucoup sur le fait que tel que c'est présenté actuellement, non seulement cela ne permettrait pas de stimuler l'exploration, mais c'est qu'en particulier les individus et les petites et moyennes entreprises dans le secteur de l'exploration seraient pénalisés. À la page 6, entre autres, de votre mémoire, vous nous dites: "On ne peut que constater que la PME d'exploration minière québécoise et le prospecteur individuel vont être nettement défavorisés par rapport aux entreprises minières nationales, multinationales et paragou- vernementales, dans l'octroi des droits de mine révoqués. On n'a pour s'en convaincre qu'à considérer les nombreuses exigences que pourront comprendre les règlements adoptés en vertu du paragraphe u) de l'article 296 proposé par l'article 6 du projet." (12 h 30)

Ce paragraphe u), est-il nécessaire de rappeler qu'il fait suite à toute une série de règlements, ce que le gouvernement peut faire. Pour moi, c'est important de connaître votre point de vue précis. Ce paragraphe u), qui vient s'ajouter à tous les autres paragraphes qui, dans la loi actuelle des mines, se rendent jusqu'à t), en quoi permet-il que, finalement, on va peut-être nuire à l'exploration, en particulier aux individus et aux PME d'exploration minière?

M. Carrière: Tout d'abord, ça ne répond pas directement à votre question mais, le paragraphe u) vient à la suite de nombreux autres paragraphes qui s'appliquent surtout à la recherche du pétrole et du gaz naturel, des réservoirs souterrains et des... Le paragraphe u), je pense qu'il est déjà précisé par l'avant-projet de règlement qu'on a devant nous. C'est ce que je commençais à dire tout à l'heure, en réponse à la question du ministre. Dans l'octroi et dans le renouvellement des permis, dans les conditions qu'on exige ou les normes ou les critères dont le ministère se servira pour accorder le permis ou accorder le renouvellement du permis, j'ai déjà dit, tout à l'heure, les raisons pour lesquelles je pensais que ce n'était pas favorable aux prospecteurs ou aux PME d'exploration.

Le deuxième aspect de l'avant-projet de règlement, c'est le coût des permis qui seront accordés. Aujourd'hui, on peut jalonner 80 hectares de terrain pour 10 $. On achète un permis de prospecteur, on nous donne des plaques; évidemment, il faut que le prospecteur aille sur le terrain et qu'il prenne une journée ou deux pour jalonner ses cinq claims, ça lui coûte 10 $. Pour obtenir un permis spécial, le même territoire lui coûtera 240 $, qu'il sera obligé de payer en partant. La deuxième année, un autre 240 $ pour son permis d'exploration, quoique le prospecteur, la deuxième année, paiera 5 $ l'hectare pour le renouvellement de son permis, ce qui est 60 $ du kilomètre carré, mais il aura été obligé de faire des travaux pour 500 $ du kilomètre carré. Alors, le prospecteur, dans les deux premières années d'un claim, est obligé de faire des travaux. En vertu d'un permis spécial, il n'est pas obligé de faire des travaux, mais il est obligé de donner de l'argent, de faire ses paiements sur son permis spécial. Arrive la troisième année, le prospecteur qui a fait ses travaux peut garder ses claims pour la troisième année. S'il ne fait pas de travaux

la troisième année, à la fin de l'année il perd ses claims ou bien, il paie la différence. Ce qu'il aurait dû faire en travaux sur le terrain, 1000 $ du kilomètre carré, il faut qu'il le donne au gouvernement.

Le Président (M. Laplante): Je m'excuse, M. Carrière. Il passe la demie et il faudrait suspendre la séance, à moins que les questions ne durent pas encore trop longtemps. On serait censé suspendre actuellement, par ordre de l'Assemblée nationale.

M. Vallières: J'ai d'autres questions pour votre groupe. Est-ce que ça peut se terminer à 13 heures? Il reste quand même deux intervenants, on ne pourra pas terminer avant 13 heures.

Le Président (M. Laplante): Non, les autres intervenants vont revenir après la période des questions pour 3 h 15.

M. Vallières: Moi, il me reste deux ou trois questions.

Le Président (M. Laplante): On peut donner dix minutes.

M. Vallières: Oui, ce serait suffisant.

Le Président (M. Laplante): Est-ce qu'il y a consentement?

M. Grégoire: Oui, consentement.

Le Président (M. Laplante): Allez-y, monsieur.

M. Carrière: Alors, pour la troisième année, c'est l'année où l'on demande le renouvellement du permis. Le prospecteur est obligé de donner, pour chaque kilomètre carré de permis spécial qu'il détient, il est obligé de donner 10 000 $ au ministère sous forme d'argent comptant ou de chèque ou d'obligation garantie par le gouvernement du Québec ou le gouvernement du Canada ou de fournir au ministère une police d'assurance-garantie. À toutes fins utiles, pour répondre directement à votre question, on voit que tout le monde est traité sur le même pied, mais tout le monde n'est pas aussi riche. Comme on sait que le prospecteur est pauvre et que les grandes compagnies sont moins pauvres que le prospecteur, des paiements comme ça pour le permis, c'est plus à la portée des grandes compagnies qu'à la portée du prospecteur. C'est tout.

M. Vallières: Merci. Cela précise, en tout cas pour moi, cet élément-là qui m'apparaît très important compte tenu du rôle important qu'ont joué les PME et les prospecteurs en tant qu'individus dans le passé au Québec par le mode de jalonnement. Je me dis qu'il faudrait absolument que le ministre tienne compte de ce point de vue qui m'apparaît très important dans la discussion actuelle. Si on élimine tous les petits prospecteurs, je me demande où on va s'en aller.

Il y a également une question que je veux vous poser sur l'article 6 parce que le ministre vous a demandé de donner votre point de vue là-dessus tantôt. On dit: L'article 6 permettra au gouvernement de délimiter par règlement les territoires où des permis spéciaux seront requis n'importe où au Québec. Il semblerait que le ministre soit prêt à indiquer que, dans l'avenir, pour être en mesure, exception faite de l'Estrie, d'agrandir le territoire, il faudrait revenir devant la Chambre et vous consulter à nouveau, de même que pour tout ce qui a trait à la détermination par règlement de diverses conditions comme la durée des droits conférés, le renouvellement, la rente annuelle, les travaux requis, en somme tout ce qui est couvert actuellement par les sections III et IX de la Loi sur les mines. Je veux vous indiquer que j'espère que vous avez très bien compris ce que le ministre vous a signifié tantôt. Finalement, vous proposez qu'on applique dans les Cantons de l'Est ce que vous refusez qu'on applique ailleurs au Québec par le projet de loi 35, au moment où l'on se parle, tout au moins.

M. Carrière: On ne l'accepte pas. M. le ministre me souligne qu'on semble toujours être contre, mais au moins, si le territoire visé est inscrit dans la loi comme le ministre nous l'a souligné, on se dira que, si on exclut les prospecteurs, à toutes fins utiles, d'un territoire de 17 000 kilomètres carrés, on ne les exclut pas du reste de la province.

M. Vallières: C'est un mal quand même, mais c'est un moindre mal.

M. Descarreaux (Jean): Si je peux parler, ce serait comme si le ministre des Transports décrétait un règlement spécial pour les Cantons de l'Est. Ailleurs au Québec, les voitures, vous allez continuer de conduire à droite, mais dans les Cantons de l'Est, pour une certaine région, on va conduire à gauche. Je ne vois pas ce qu'il y a de spécial pour les Cantons de l'Est. Je ne vois pas pourquoi on donnerait un statut spécial à cette région-là; je ne comprends pas encore pourquoi.

M. Vallières: C'est ça que j'essaie de savoir du ministre et peut-être qu'à la fin de nos débats il pourra nous l'indiquer, mais il semblerait véritablement que c'est une expérience qu'on veut tenter pour

éventuellement l'élargir, si c'était positif, à la grandeur du Québec.

M. Duhaime: Pour reprendre votre exemple, M. Descarreaux, je pense qu'on l'a déjà fait; je ne me souviens pas si c'est en Irlande ou en Ecosse, mais c'était seulement pour les camions: les voitures continuaient de circuler à gauche et les camions circulaient à droite.

M. Descarreaux: Dans le Nouveau-Québec où il n'y a pas de routes, je comprends qu'on procède par permis; ça coûte tellement cher de se rendre là. Mais je ne comprends pas pourquoi on donnerait un statut différent pour les Cantons de l'Est comparé au Nord-Ouest du Québec. Le jalonnement à l'intérieur des limites des villes, c'est déjà prévu dans la loi, il faut demander une permission spéciale pour aller jalonner dans les limites des villes. Les villes des Cantons de l'Est, c'est beaucoup plus petit que 20 000 kilomètres carrés, je serais curieux de savoir, c'est peut-être 100 ou 200 kilomètres carrés. Je ne vois pas pourquoi on étend ça à 20 000 kilomètres carrés. Je ne vois pas pourquoi on a un statut spécial pour les Cantons de l'Est.

Le Président (M. Laplante): D'autres questions, M. le député de Richmond.

M. Vallières: Une dernière. Si le ministre, dans sa grande bonté, à la fin de nos travaux, nous indiquait qu'il se contentera de révoquer les droits de mines et qu'il retirera toute la question relative aux permis spéciaux, est-ce qu'on peut dire que ça satisferait la grande majorité des membres que vous représentez?

M. Carrière: Et qu'il accordera l'accès à la propriété de ces droits de mine par le jalonnement, tel qu'il est prévu dans la loi actuelle?

M. Vallières: En vertu de la Loi sur les mines actuelle.

M. Carrière: C'est ce que nous demandons, c'est ce que nous souhaitons; nous serions complètement satisfaits.

M. Descarreaux: En somme, ça se résume à changer légèrement l'article 240.6, remplacer "permis spécial d'exploration" par "jalonnement" et à laisser tout simplement tomber l'article 6. Je serais d'accord.

Le Président (M. Lapante): Avez-vous un commentaire avant de terminer, M. le ministre?

M. Duhaime: On peut entendre Me Beausoleil, s'il a quelque chose à ajouter.

M. Beausoleil: C'est seulement quelques points techniques. Je pourrais communiquer directement avec votre contentieux, si vous voulez.

M. Vallières: J'aimerais, s'il vous plaît, M. Beausoleil, que vous le fassiez également avec les gens de l'Opposition, qui auront peut-être besoin de vos précieux conseils à un moment donné; ce que vous faites d'un côté de la table, faites-le de l'autre côté également, s'il vous plaît.

M. Duhaime: Si vous le jugez utile, remarquez bien, ce n'est pas une contrainte.

M. Beausoleil: Si vous le voulez. Le premier point touche la question de bails miniers. Actuellement, tant dans le projet de loi 35 que dans le projet de règlement, il n'est prévu aucun titre pour l'exploitation, c'est-à-dire qu'au bout de douze ans le prospecteur ou la compagnie minière se retrouve face à rien.

Le deuxième point, c'est un point technique aussi. L'article 3 de la Loi sur les mines prévoit que tous les titres émis en vertu de la Loi sur les mines constituent des droits réels et immobiliers. C'est très important au niveau du financement. Je remarque qu'il n'y a pas d'amendement qui a été fait à l'article 3 pour y inclure le permis spécial d'exploration.

M. Duhaime: Vous souhaiteriez donc une disposition déclaratoire dans le projet de loi 35 qui dirait que le permis spécial d'exploration est un droit immobilier?

M. Beausoleil: Est un droit immobilier.

M. Duhaime: Adopté, quant à moi. Cela ne pose aucun problème.

M. Beausoleil: Troisièmement et dernièrement. Le juge des mines a juridiction sur tout conflit sur le terrain. À l'article 308, la liste de tous les titres prévus dans la Loi sur les mines est incluse. Il faudrait peut être ajouter encore le permis spécial d'exploration pour que le juge des mines ait juridiction sur les conflits prenant naissance sur ces terrains.

M. Duhaime: Toujours dans l'hypothèse où à la limite, avec les réserves que j'indiquais tantôt qui pourraient être discutées lors de l'étude article par article... Si nous retenions, en toute hypothèse, la problématique d'un permis spécial d'exploration, vous souhaiteriez voir... Je retiens en tout cas tout de suite, parce que ça m'apparaît être de la législation de concordance, vos deux dernières remarques.

Pour ce qui est du bail minier qui était votre premier point, je n'ai pas le signal de

mon contentieux, mais j'aimerais bien que vous puissiez le rencontrer, si le temps vous le permet, et dans les meilleurs délais, afin que vos suggestions soient faites à nos légistes.

M. Beausoleil: D'accord.

M. Duhaime: Je vous remercie, messieurs.

Le Président (M. Laplante): Cette commission vous remercie de la présentation de votre mémoire.

Les travaux de cette commission sont ajournés sine die, c'est-à-dire selon l'ordre de l'Assemblée nationale.

M. Duhaime: Si vous me le permettez, M. le Président, je proposerais ceci quant aux deux derniers intervenants que nous devons entendre cet après-midi: l'Association des mines de métaux du Québec, qui est représentée par M. Adrien Bois, et M. Everette Taylor. Je proposerais au leader du gouvernement de convoquer à nouveau la commission pour 17 heures cet après-midi. Je pense que si on allait jusqu'à 18 heures ou 18 h 30 on en aurait suffisamment pour disposer des dernières interventions, si ça vous convient. Est-ce que ça convient, M. Vallières?

M. Vallières: Parfaitement.

M. Duhaime: Cela donnerait deux heures de plus pour dîner.

Le Président (M. Laplante): Sur ça les travaux sont ajournés sine die. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 45)

(Reprise de la séance à 17 h 19)

Le Président (M. Laplante): Reprise des travaux de la commission de l'énergie et des ressources sur le projet de loi no 35, Loi sur la révocation des droits de mine et modifiant la Loi sur les mines, afin de recevoir des groupes en vertu de cette loi.

Les membres de cette commission sont: MM. Bélanger (Mégantic-Compton), Bordeleau (Abitibi-Est), Duhaime (Saint-Maurice), Dussault (Châteauguay), Fortier (Outremont), Grégoire (Frontenac), LeBlanc (Montmagny-L'Islet), Middlemiss (Pontiac), Perron (Duplessis), Rodrigue (Vimont), Vallières (Richmond).

Les intervenants sont: MM. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), Ciaccia (Mont-Royal), De Belleval (Charlesbourg), Desbiens (Dubuc), Hains (Saint-Henri), Levesque (Bonaventure), Marquis (Matapédia), O'Gallagher (Robert Baldwin) Tremblay (Chambly).

Association des mines de métaux du Québec

Lorsque nous avons suspendu nos travaux à 12 h 45 nous étions rendus à appeler le groupe no 4, l'Association des mines de métaux du Québec. J'invite monsieur à s'identifier et à identifier l'organisme qu'il représente. J'apprécierais beaucoup - ce dont je vous ai parlé ce matin - si vous étiez capable de résumer en quelques minutes votre mémoire, d'en présenter les principales recommandations, parce que les membres de la commission l'ont tous lu et ils sont prêts à aller aux questions aussitôt que vous aurez fini votre présentation.

M. Langlois (Gonzague): M. le Président, je vous remercie. Mon nom est Gonzague Langlois. Je suis le directeur général de l'Association des mines de métaux du Québec. Le président de mon association me prie de l'excuser, il a été pris par des problèmes d'exploitation de dernière minute et n'a pas pu se rendre ici.

Je suis accompagné, à ma gauche, par le Dr Robert Sabourin, qui est le directeur d'exploration à Noranda Limitée et à ma droite, par M. Guy Lacroix, qui est directeur aux relations publiques et membre de l'AMM.

D'abord, M. le ministre, M. le Président, j'aimerais vous remercier de nous recevoir ici en commission parlementaire pour donner notre point de vue au sujet de la loi no 35. Étant donné que nous passons en quatrième, et que les discussions ont apporté peut-être certaines mini-concessions de la part du ministre, ce sera probablement la première fois où, avant de présenter un mémoire, on a déjà eu des semblants de concessions. De toute façon on verra par la suite si on peut en obtenir plus.

M. Duhaime: ... en plus, M. Langlois.

M. Langlois: Je ne sais pas si je peux résumer, de toute façon je pense qu'on est le seul, il y a seulement un autre intervenant après nous. J'aimerais bien autant que possible - parce qu'on touche des points qui n'ont pas été touchés ce matin -lire notre mémoire. Je ne suis pas un expert pour faire des résumés de mémoire, surtout quand c'est inscrit au procès-verbal de la réunion.

Je ne veux pas répéter la première partie, parce que je pense que tout le monde est d'accord que la loi 35, en vertu de l'amendement à l'article 237, vienne révoquer les droits de mine qui ont été concédés avant 1880. Cette page, je pourrais la passer. Étant donné que tout le monde est là, on peut dire qu'il y a un consensus. Tout

le monde est d'accord pour que les droits de mine soient révoqués dans les conditions décrites à l'article 237. Cependant, le projet de loi 35 va plus loin. Le législateur profite de l'occasion pour assurer un contrôle plus poussé sur le jalonnement et une redistribution plus discrétionnaire des droits miniers sur les territoires révoqués par le moyen de permis spéciaux.

J'aimerais vous expliquer que j'ai fait une deuxième version du mémoire à la suite de la réception des règlements que nous avons reçus en fin de journée vendredi. J'ai essayé de refaire, pas complètement, mais une partie du texte de manière à intégrer ce que les règlements me suggéraient. Je dois dire aussi que les deux projets de règlements que nous avons reçus vendredi dernier nous éclairent un peu mieux sur les intentions du gouvernement.

Enfin, alors que le texte de la présente Loi sur les mines nous semble, en général, clair et précis, certains articles du projet de loi 35 nous paraissent confus et certains même superflus. Tout d'abord, l'article 1 du projet de loi 35 élargit considérablement les territoires sur lesquels l'article 27 de la Loi sur les mines s'appliquera, c'est-à-dire les territoires pour lesquels il faudra une permission spéciale du ministre avant de jalonner des terrains. Je me permets de lire le paragraphe qui a été amendé.

L'article 27 de la loi dit: "Personne ne peut sans la permission écrite du ministre jalonner les terrains..." Évidemment, il y a les sous-paragraphes a, b, et c qui traitent surtout des terrains qui sont mis de côté comme lots de village; des terrains subdivisés en lots, et tout cela; des terrains situés dans les limites d'une cité ou d'une ville; des terrains réservés en vertu paragraphe b de l'article 301; des terrains situés dans le territoire du Nouveau-Québec; enfin, le paragraphe qui a été amendé, des terrains situés dans les limites d'un territoire visé dans l'article 240.6, c'est-à-dire sur les territoires qui sont révoqués en vertu des articles 230, 237 et 240, ainsi que ceux révoqués par règlement.

On peut comprendre facilement la nécessité d'obtenir la permission du ministre pour jalonner dans le Nouveau-Québec, étant donné les conditions différentes qui existent pour explorer le territoire. On comprend plus difficilement que cette nécessité existe aussi pour les territoires réservés par ordonnance du ministre pour fins de travaux d'inventaires et de recherches minières, en vertu du paragraphe b) de l'article 301. Cette mesure, mise en vigueur par un amendement à la Loi sur les mines en 1977, avait d'ailleurs été fortement critiquée par le secteur privé qui y voyait une seconde intervention gouvernementale dans le secteur des ressources minérales, après les sociétés d'État.

Enfin, on comprend beaucoup moins pourquoi l'article 27 est de nouveau amendé pour aussi exiger la permission écrite du ministre lorsqu'on voudra faire du jalonnement sur tous les territoires nouvellement révoqués.

Dorénavant, si le projet de loi 35 est accepté, en vertu de l'article 27, une permission écrite du ministre sera nécessaire pour jalonner sur environ 50% du territoire québécois, soit le Nouveau-Québec - on ne dit pas que c'est la loi 35 qui met cela en vigueur, cela l'était déjà avant - les territoires requis par ordonnance en vertu de l'article 301, tout le territoire révoqué en vertu des articles 230, 237, et 240, en plus de certains autres terrains déterminés par règlement.

L'article 2 du projet de loi 35, en amendant l'article 28 de la Loi sur les mines, nous semble même aller beaucoup plus loin. Ce nouvel article 28 se lirait comme suit: "Personne ne peut, sans l'autorisation du gouvernement, jalonner les terrains: a) - c'est un paragraphe amendé -dans lesquels l'or et l'argent sont réservés à la couronne;"

À notre connaissance, l'or et l'argent sont réservés à la couronne non seulement sur les territoires où les droits de mine avaient été concédés, tel que décrit à l'article 237, mais aussi sur tout le territoire québécois dont les droits de mine n'ont pas encore été concédés. Est-ce à dire qu'après l'adoption du projet de loi 35 il ne sera plus possible de jalonner des terrains sans obtenir, d'une part, une permission écrite du ministre ou, d'autre part, d'effectuer des travaux d'exploration ou de mise en valeur sans obtenir un permis spécial du ministre, tel que requis par l'article 240.6 du projet de loi 35? Cet article, tel que présentement rédigé, pourrait très bien s'appliquer - je parle de l'article 240.6 - à tout le territoire québécois avec un règlement approprié.

On peut facilement imaginer que l'obtention d'une permission écrite du ministre sera soumise à certaines exigences, par exemple des informations sur les terrains que le prospecteur veut jalonner, tel que stipulé en vertu de l'article 29 de la loi actuelle. Une telle mesure pourrait, dans certains cas, être la cause de cloute, pour les intervenants insatisfaits, sur la justesse de la décision prise puisque le ministre peut, en vertu de l'article 301b, par ordonnance, réserver à la couronne, pour fin de travaux d'inventaires ou de recherches minérales, tout terrain où les droits de mine lui appartiennent.

D'autre part, l'obtention de permis spéciaux, en vertu de l'article 240.6, nécessaires pour effectuer des travaux d'exploration et de mise en valeur dans les terrains révoqués en vertu des articles 230,

237 et 240, ainsi que pour d'autres terrains révoqués dans un territoire défini par règlement, est soumise aux exigences du paragraphe u) de l'article 296. Je pense que je ne lirai pas le paragraphe. Je pense qu'il est dans la loi et tout le monde le connaît.

On s'aperçoit, à la lecture de ce paragraphe, combien il sera difficile pour le demandeur de répondre à toutes les exigences de la réglementation ci-haut mentionnée. On s'aperçoit de plus que le demandeur aura pratiquement à dévoiler ses secrets sans jamais être assuré que la décision sera prise en sa faveur.

Les éléments hautement discrétionnaires que comporte la nouvelle loi dans l'émission des permissions écrites et des permis spéciaux, surtout des permis spéciaux, ne peuvent qu'affaiblir, dans l'esprit des intéressés, le statut d'impartialité qui devrait toujours lui être reconnu par tous.

Il est vrai que la Loi actuelle sur les mines mentionnait, à l'article 238, l'émission de permis spéciaux, mais pour l'exploitation seulement après la révocation d'une concession minière ou des droits de mine. D'ailleurs, le dernier paragraphe de l'article permet une réouverture au jalonnement après la révocation.

De toute façon, cet article disparaît avec le projet de loi no 35. (17 h 30)

La Loi actuelle sur les mines, aux articles 298 et 299, stipule aussi que l'émission de permis spéciaux est nécessaire pour l'exploration dans le Nouveau-Québec; ce qui est fort compréhensible, étant donné les conditions spéciales qui existent sur ce territoire et le fait que, pour être rentables, les dépôts découverts doivent être très importants.

Par contre, dans le cas de l'article 240.6, le permis spécial pourrait s'appliquer sur tout le territoire québécois si le gouvernement adoptait une réglementation appropriée. Le changement de système pour l'obtention des droits de mine sur les territoires révoqués, c'est-à-dire la demande du permis spécial d'exploration et de mise en valeur, nous apparaît une façon hautement discrétionnaire qui, comparée à la présente méthode de jalonnement, comporte beaucoup plus de désavantages que d'avantages, surtout lorsqu'on tient compte de la nouvelle réglementation pour l'obtention du permis spécial inscrit à l'article 6 du projet de loi. Le moins que l'on puisse dire, c'est que l'approche démocratique que contenait l'obtention des droits de mine par jalonnement aura complètement disparu avec l'apparition de permis spéciaux. Car seulement ceux, et ils sont peu nombreux, qui répondront aux normes sévères inscrites au règlement pourront songer à demander un permis spécial sans, évidemment, être sûrs de l'obtenir.

Il y aura nécessairement un choix à faire lorsque plusieurs feront une demande pour le même permis. Malgré toute l'intégrité et l'impartialité que le ministre aura mises dans son choix, il sera impossible de convaincre les laissés-pour-compte qu'il n'y a pas eu de favoritisme. De plus, l'obligation d'obtenir la permission écrite du ministre pour jalonner détruit le caractère plus ou moins confidentiel à l'obtention des droits de mine, si nécessaire à la motivation du prospecteur.

On fait état beaucoup trop des effets de nuisance que pourrait avoir le jalonnement sur un territoire aménagé. Le fait que l'on délimite par règlement, pour les permis spéciaux, une partie seulement du territoire révoqué enlève beaucoup de poids à l'argument de nuisance. Depuis que la Loi sur les mines existe, il s'est fait beaucoup de jalonnement dans les Cantons de l'Est, par exemple, sans inconvénients majeurs pour les terrains aménagés. L'effet de nuisance le plus grave existe quand on fait des travaux d'exploration, et les permis spéciaux n'enlèveront absolument rien à ce sujet. D'ailleurs, les projets de règlement qu'on nous a fait parvenir il y a quelques jours confirment cette interprétation selon nous. À l'article 2 du règlement sur les permis spéciaux, on répète intégralement le contenu de l'article 240.6, c'est-à-dire, selon notre interprétation, que compte tenu d'un règlement approprié, cet article pourrait s'appliquer à tout le territoire québécois. Ce n'est que dans le deuxième projet de règlement que l'on vient limiter la juridiction de l'article 240.6 à 20 000 kilomètres carrés environ. Si on avait voulu strictement faire une expérience avec les permis spéciaux, le législateur aurait normalement inscrit le territoire dans la loi et, à tout le moins, dans le règlement sur les permis spéciaux. C'est une suggestion qui a été faite ce matin par le ministre.

Nous n'excluons pas l'interprétation de faire une expérience de l'allocation des droits de mine par permis spéciaux. Cependant, il y a une autre interprétation que l'on peut donner à ces anomalies, et c'est que le législateur veut faire avaler à la petite cuillère au secteur privé le changement énorme que sera l'émission de permis spéciaux, se réservant le droit d'agrandir le territoire par règlement, comme le lui permettrait l'article 240.6. Selon notre interprétation, le permis spécial est nécessaire pour faire de l'exploration sur tout le territoire évoqué; c'est du moins ce qu'on comprend de l'article, présentement. Le règlement ne fait que décrire un certain territoire qui, à la limite, pourrait être étendu à tout le territoire québécois.

D'autre part, il y a certaines autres choses dans le règlement qui nous apparaissent passablement sévères. Je pense

que cela a été souligné ce matin par l'Association des prospecteurs; ce sont eux qui sont les plus concernés. J'aimerais peut-être passer ce chapitre au sujet de la sévérité, je pense que cela a été assez bien expliqué ce matin par les prospecteurs.

Il y a une chose tout de même que je ne voudrais pas passer sous silence, c'est que nous ne retrouvons, dans les 32 articles du règlement sur l'émission des permis spéciaux, aucune indication sur le mécanisme suivant lequel les permis spéciaux seront émis lorsqu'il y a aura plus d'une application pour un même permis. Nous ne pouvons donc interpréter l'émission des permis spéciaux comme étant entièrement discrétionnaire. Je crois que ça devrait être absolument nécessaire, dans ce règlement au moins, d'inscrire quelle méthode le ministre ou le ministère devra suivre pour l'émission des permis spéciaux dans les cas où il y aurait plus d'un permis à émettre, c'est-à-dire qu'il y aurait plusieurs personnes qui demanderaient un permis spécial.

Pourquoi ne pas continuer un système qui a fait ses preuves depuis de nombreuses années. C'est encore, selon nous, le meilleur moyen d'assurer le développement de nos richesses minérales et de le faire par voie démocratique, surtout à un moment où la Commission des valeurs mobilières et la Bourse de Montréal sont à modifier de façon importante leurs normes, afin d'assurer plus facilement le financement public des compagnies juniors d'exploration minière.

Les articles 239 et 240 nous apparaissent ambigus. L'article 239 dit que la révocation ne s'applique pas aux gisements en exploitation ou sur un terrain où il existe des indices suffisants pour l'existence d'un gisement d'un minerai. Par contre, l'article 240 stipule que les droits miniers mentionnés à l'article 239 sont révoqués si, dans les 180 jours de l'adoption de la présente loi, le propriétaire fait défaut de produire une déclaration au registraire contenant, entre autres, un rapport d'ingénieur dans le cas d'un gisement de minerai exploité un non.

Tout d'abord, il y aurait lieu pour le législateur de bien clarifier si les articles 239 et 240 se rapportent strictement aux droits miniers révoqués en vertu de l'article 237 ou à tout le territoire québécois. J'admets mon ignorance de l'interprétation légale de cet article, mais je ne vois aucune référence à savoir que cela s'applique strictement aux territoires révoqués. De toute façon, je comprends, selon les affirmations que l'on a obtenues, que l'intention du législateur est d'appliquer les dispositions des articles 239 et 240 seulement aux droits miniers révoqués en vertu de l'article 237. Mais ce n'est pas indiqué clairement dans le texte puisque nulle part, dans ces articles, on n'y fait référence. Il y a donc lieu d'ajouter cette clarification.

D'ailleurs, nous nous opposerions de toutes nos forces si ces articles s'appliquaient à l'ensemble du territoire québécois.

D'autre part, la méthode de révocation utilisée aux articles 239 et 240 peut être interprétée comme un recensement général des ressources minérales dans le territoire visé - je crois que c'est ce que l'on cherche en établissant cela - aux frais du détenteur et des propriétaires, puisque le dernier paragraphe de l'article 240 exige un rapport d'ingénieur dans les 180 jours pour éviter la révocation.

On procède à l'inverse de la présente Loi sur les mines qui, en cas de révocation, avertit le propriétaire 90 jours à l'avance, alors que le nouvel article 240 obligera ce même propriétaire à satisfaire dans les 180 jours aux exigences de cet article pour éviter la révocation.

Il est sûr que ces nouvelles dispositions élimineront un certain nombre de détenteurs de droits de mine, qui ne pourront ou ne voudront pas rencontrer les exigences qui pourraient s'avérer très onéreuses dans certains cas.

L'article 240.1 mentionne le taux des redevances qui devront être défrayées dans l'avenir, lorsqu'une mine entrera en exploitation après la révocation en vertu de l'article 237. Tout d'abord, les propriétaires dont les droits ont été acquis avant 1880 ou provenant de terres concédées en tenure seigneuriale, à condition qu'ils n'aient pas obtenu de concession minière par la suite, ne sont pas propriétaires de l'or et de l'argent puisque les métaux précieux ont toujours appartenu à la couronne. Toute exploitation d'or et d'argent sur ces territoires ne devrait évidemment pas être assujettie à des redevances pour les anciens propriétaires de terrains.

En second lieu, nous croyons que l'indemnité que devrait recevoir la personne dont les droits de mine ont été révoqués devrait provenir d'un pourcentage des droits miniers qui ont été payés par l'exploitant au gouvernement québécois, au lieu d'être un pourcentage des profits de l'exploitant. Il est vrai que l'article 239 de la Loi sur les mines stipule une redevance annuelle de 5% des profits réalisés par l'exploitation des droits du propriétaire. Dans le cas de la révocation des droits de mine des propriétaires par le gouvernement, c'est, selon nous, ce dernier qui devient en dette avec l'ancien propriétaire. En acquérant les droits de mine du gouvernement, après la révocation, l'exploitant ne devrait être redevable qu'à celui-ci; ce dont il s'acquitte présentement amplement par les taxes minières et autres redevances. En somme, l'exploitant du gîte minéral sur les terrains révoqués ne devrait pas être soumis à des règles différentes de celles qu'il doit respecter pour les droits de mine acquis sur les territoires présentement

détenus par la couronne.

Enfin, certains articles du projet de loi 35 nous apparaissent ambigus et même superflus. Par exemple, les articles 239 et 240, que nous avons commentés auparavant, nous apparaissent plus ou moins confus, alors que le dernier paragraphe de l'article 240.7 nous apparaît pratiquement incompréhensible. Ce paragraphe se lit comme suit, c'est l'article 240.7, deuxième paragraphe: Le détenteur d'une option, d'un bail ou de tout autre titre accordé par l'ex-propriétaire de droits de mine révoqués et en vigueur à la date du dépôt du présent projet de loi peut en exercer les droits lorsque, à son préjudice, il refuse ou néglige de le faire. J'avoue sincèrement que, n'étant pas avocat, je n'ai pas du tout compris ce paragraphe. Enfin, l'article 241 nous apparaît superflu puisque le mot à mot semble être exactement le même que l'article 241 de la Loi sur les mines.

En conclusion, alors que, selon les informations reçues, nous nous attendions à un projet de loi traitant exclusivement de la révocation des droits de mine, s'ils étaient concédés avant 1880, en tenure seigneuriale ou les droits de mine compris dans les concessions minières accordées avant 1911, le projet de loi no 35 nous met en face d'une vaste réforme qui restreint et contingente considérablement le droit au jalonnement pour l'obtention des droits de mine, en exigeant préalablement un permis du ministre. Sur les territoires révoqués, un permis spécial soumis à des conditions d'obtention très sévères devient nécessaire pour effectuer des travaux d'exploration et de mise en valeur. Avec l'adoption d'un tel projet de loi, le secteur privé fera face à un contrôle du gouvernement beaucoup plus rigide, embarrassant et discrétionnaire lorsqu'il voudra obtenir des droits de mine pour effectuer des travaux d'exploration et de mise en valeur des richesses minérales sur le territoire québécois.

Il ne fait aucun doute dans notre esprit que la méthode de jalonnement actuelle, malgré certains inconvénients mineurs, est la plus démocratique et la plus juste pour acquérir des droits de mine de la couronne. Elle a fait ses preuves depuis les débuts de l'industrie minière et, à l'exception des territoires du Nouveau-Québec, il n'y a aucune raison soit de la remplacer par des permis spéciaux assortis de conditions que seulement un petit nombre peut remplir, soit de l'astreindre à une permission écrite du ministre.

Il se peut que ce ne soit pas dans l'esprit du législateur de vouloir restreindre exagérément la l'allocation des droits de mine pour le secteur privé, car cela entrerait directement en contradiction avec certaines initiatives gouvernementales entreprises au cours des dernières années pour permettre une plus grande implication de la population dans le développement de nos richesses minérales, par exemple, l'établissement des sociétés en commandite, les allégements fiscaux aux investisseurs dans les travaux d'exploration, la révision de la réglementation de la Commission des valeurs mobilières, etc. Il faut malheureusement avouer que le projet de loi no 35, tel que rédigé, projette assurément une image complètement différente et va à l'inverse des initiatives entreprises au cours des dernières années. En somme, le projet de loi no 35, dans sa forme actuelle, nous apparaît inacceptable et nous recommandons fortement au gouvernement de ne conserver dans ce projet de loi que les articles qui ont rapport à la révocation des droits de mine tels que décrits à l'article 237.

En terminant, peut-être me permettriez-vous, M. le Président, de dire qu'il y a matière, dans le projet de loi no 35, à au moins deux projets de loi. Je ne veux pas donner d'idée à l'Opposition mais il y aurait peut-être matière à faire sonner la cloche plus longtemps que d'habitude. Merci, M. le Président.

Le Président (M, Laplante): Merci, monsieur. M. le ministre.

M. Duhaime: Merci, M. Langlois. Je ne voudrais pas reprendre dans le détail l'exposé que vous venez de faire et qui est contenu essentiellement dans le mémoire dont vous venez de donner lecture, mais je voudrais commenter un certain nombre de choses. Je vous renvoie, si vous voulez bien me suivre, a la page 3, au bas de la page. Indépendamment de la discussion que nous avons eue ce matin avec les groupes qui vous ont précédé, votre mémoire dit: "Enfin, on comprend beaucoup moins pourquoi l'article 27 est de nouveau amendé pour, aussi, exiger la permission écrite du ministre lorsqu'on voudra faire du jalonnement sur tous les territoires nouvellement révoqués."

À la page 4, je pensais que j'étais en train de lire le journal tantôt et je me suis trompé, vous mentionnez "... nécessaire pour jalonner sur environ 50% du territoire québécois, soit le Nouveau-Québec, les terrains requis par ordonnance en vertu de l'article 301, tout le territoire révoqué en vertu des articles 230, 237, 240, en plus de certains autres terrains déterminés par règlement." Je ne veux pas reprendre toute la discussion que nous avons eue ce matin avec le premier groupe que nous avons entendu, le CRD de l'Estrie, mais je pense que tout le monde s'entend ici, autour de la table en tout cas, sur la compréhension du projet de loi à savoir que le permis spécial d'exploration ne serait émis et ne serait en vigueur qu'en rapport avec le territoire dont il est question dans l'annexe 1 du projet de

règlement, c'est-à-dire à peu près 20 000 kilomètres carrés dans l'Estrie. Ce n'est donc pas, et loin de là, 50% du territoire québécois; donc, c'est une superficie très précise. (17 h 45)

J'ajoute essentiellement ceci. Un peu plus loin, vous faites une remarque intéressante au sujet de l'article 2, au sujet de l'or et de l'argent. Il n'y a pas seulement l'Opposition qui a de l'imagination, M. Langlois, prenez ma parole. On va essayer de trouver une mécanique pour aller rejoindre votre préoccupation. Je voudrais essentiellement répéter ce que je disais ce matin, parce qu'on retrouve votre inquiétude - je l'appelle comme cela - au troisième paragraphe de la page 4, où il est dit à la dernière ligne: Et cet article - en se référant à l'article 240.6 - tel que présentement rédigé pourrait très bien s'appliquer à tout le territoire québécois avec un règlement approprié. Je comprends que vous ne pouviez en aucune manière anticiper sur l'état de nos réflexions avant que l'on se rencontre ici. L'ouverture que je faisais ce matin tient toujours. Nous pourrions très bien rédiger le projet de loi et inclure dans la loi le territoire qui est actuellement visé par règlement, de sorte que je rejoindrais dans ce sens et ce faisant votre propre préoccupation, de même que celle qui a été mentionnée par les autres que nous avons entendus depuis le matin.

Je voudrais aussi réagir sur un aspect qui se retrouve aux pages 5 et 6 de votre mémoire. Sur les renseignements que le ministère demanderait, il faut bien comprendre d'abord que les renseignements ne sont pas demandés au moment où le permis spécial d'exploration est émis, c'est bien évident. Je retiens également votre suggestion de clarifier le mécanisme. De la même façon, sur le plan du jalonnement au sol, c'est le premier qui est en mesure d'établir qu'il a planté son piquet le premier qui y a droit. De la même façon, en appliquant dans un texte législatif la règle du premier arrivé, premier servi, je pense qu'on peut répondre aussi à une de vos objections.

Mon point, c'est plus loin que cela. Au moment où le renouvellement a lieu, il y a un premier renouvellement et il y a un deuxième renouvellement. Je n'arrive pas à comprendre comment il pourrait y avoir deux groupes en concurrence au moment du deuxième renouvellement parce qu'il n'y en aura qu'un qui aura l'information. Il aura été seul sur le terrain. C'est là que j'avoue que je ne suis pas en mesure de vous suivre.

M. Langlois: Je comprends l'idée du ministre. Franchement, je n'ai pas fait allusion au renouvellement, j'ai fait allusion à l'obtention du permis spécial strictement pour la première fois. Le renouvellement, c'est une autre chose.

M. Duhaime: D'accord. C'est donc au moment de l'émission.

M. Langlois: Au moment de l'émission. C'est peut-être mal exprimé dans mon texte, mais, de toute façon, c'est cela.

M. Duhaime: Mais il n'est pas question de fournir de l'information au moment de la première demande d'émission on va en convenir. Votre préoccupation est donc de vous assurer que la règle qui consisterait essentiellement à dire que ce soit le premier groupe qui fait une demande qui aura la certitude de l'obtenir dans la mesure où il répond aux autres conditions. Là-dessus, je vous donne raison.

M. Langlois: On peut peut-être spécifier que cela s'applique strictement au renouvellement du permis et non pas à la première obtention du permis, parce que, quand on parle du paragraphe u) de l'article 296, on dit que le règlement ferait des règlements. Le règlement ici porte, je pense, sur l'émission d'un permis spécial d'abord. Il porte aussi sur le renouvellement, mais cela vient après. Là, on demande une série d'informations. Peut-être que je comprends mal...

M. Duhaime: On lit bien au projet de règlement, à l'article 8 du règlement, je devrais dire de l'avant-projet. "Une demande de permis est faite par écrit au ministre et comporte les renseignements et documents suivants: Premièrement, son nom, son adresse, ou l'adresse de son siège social; deuxièmement, une carte à l'échelle de un cinquante millième de la région visée par le permis sollicité." C'est tout. Je ne vois pas en quoi on est en train de bouleverser l'humanité entière en demandant le nom, l'adresse et une carte au cinquante millième. Si vous voulez appeler cela autrement, cela pourrait être du jalonnement sur carte. C'est une expression utilisée ailleurs. Mais ce sont les seules informations qu'on demande au moment de l'émission. Au moment du deuxième renouvellement, on demande des informations, ce qui m'apparaît être normal.

Le Président (M. Laplante): D'autres questions?

M. Duhaime: J'aurais peut-être un dernier commentaire. À la page 8, au dernier paragraphe, vous répondez en partie à une préoccupation de mon collègue de Richmond. Peut-être qu'il voudra revenir lui-même là-dessus.

Sur la question du délai, la loi actuelle prévoit 90 jours, c'est à l'article 236. Je n'ai

pas tout à fait saisi votre intervention, parce que j'avais cru comprendre qu'en donnant 90 jours additionnels, c'était mieux.

M. Langlois: C'est parce qu'on change complètement tout le mécanisme. Vous parlez de l'article 240, qui met le propriétaire de droits de mine en face d'une révocation si, dans les 180 jours, il ne fait pas rapport. On lui fait peser une épée de Damoclès sur la tête. Tandis que, dans la Loi actuelle sur les mines, on l'avertit 90 jours à l'avance. Si, au bout de 90 jours, il n'a pas réglé son cas, on fait la révocation. Ce n'est pas du tout la même chose.

M. Duhaime: Mais, écoutez, ma compréhension à la lecture de l'article 236, c'est... 90 jours après la signification et la dernière publication de l'avis, le gouvernement peut prononcer la révocation, à moins que le propriétaire ne prouve que ses droits aux minéraux lui sont nécessaires comme réserve pour assurer la continuité des entreprises minières qu'il exploite au Québec. On vous propose 180 jours, c'est-à-dire 90 jours de plus pour qu'il fasse la même démonstration. Je ne vois pas en quoi on le lèse si on ajoute 90 jours de délai.

M. Langlois: J'ai toujours compris - je pourrais peut-être passer la parole à M. Sabourin - que la révocation des droits de mine se faisait, dans la loi actuelle, lorsque les droits n'étaient pas payés ou qu'il y avait quelque chose qui ne marchait pas. La, tout simplement, on oblige tout le monde, sous peine de révocation, à produire un rapport. C'est ça l'article 240.

M. Duhaime: C'est exactement la même chose qu'actuellement, sauf qu'on dit 180 jours.

M. Langlois: Je ne dis pas que vous n'avez pas raison de le faire. Je veux dire que la méthode est un petit peu dure. Vous pourriez l'obtenir, vous pourriez obtenir le recensement, un rapport, la même chose en écrivant aux mines et en disant: Faites-nous un rapport dans 180 jours. Vous allez l'avoir. Vous n'avez pas besoin de les menacer de révoquer leurs droits s'ils ne le font pas.

M. Grégoire: C'est une loi sur la révocation des droits miniers.

M. Duhaime: Écoutez, M. Langlois, je voudrais qu'on se comprenne parce qu'on est en train de se "confusionner".

M. Langlois: La première chose qu'il faudrait, parce que je ne suis pas convaincu, c'est que j'aimerais qu'on me rassure en disant que les articles 239 et 240 s'appliquent bien strictement aux territoires révoqués ou même aux territoires révoqués et non pas à tout le territoire québécois.

M. Duhaime: Écoutez, je fais l'hypothèse suivante; je vais vous donner la parole. Je m'excuse, M. le Président, le collègue de droite de M. Langlois voulait dire un mot. Je voudrais juste enchaîner là-dessus; après ça, je vais me taire, quant à moi. La mécanique de révocation telle qu'elle existe, c'est qu'après 90 jours de la signification de l'avis, le gouvernement peut révoquer. Si nous sommes d'accord sur le fond de ce projet de loi qui, sur le plan du principe, prononce la révocation des droits miniers, nous nous sommes dit que 90 jours, c'était peut-être serré. Nous avons donc ajouté 90 jours en tenant pour acquis que les détenteurs ou les propriétaires de droits miniers doivent connaître l'ampleur de leur propriété. Si c'est un individu qui a des droits à 1, 2, 3, 4 jusqu'à 50, l'inventaire est vite fait; si c'est une compagnie qui en a par centaines, elle doit l'avoir en carton. Six mois m'apparaît être un délai... Moi, j'avais pensé qu'on bonifiait la mécanique actuelle et qu'en travaillant sur un délai de 180 jours, ça permettait à tout le monde de faire valoir ses droits, plutôt que 90.

M. Langlois: Je suis absolument d'accord avec vous si on veut nous accorder 90 jours de plus, mais il faut relier l'article 236 aux articles 235 et 234. On dit: Lorsque le ministre désire recommander la révocation. Là, ce n'est plus le désir du ministre, c'est tout le monde à l'intérieur du territoire révoqué qui va subir la révocation si on ne présente pas de rapport. C'est ça l'article 240, si je le comprends.

M. Duhaime: Je ne peux pas vous en dire davantage. Si le ministre désire recommander la révocation, il publie un avis de 90 jours. Si, dans le délai de 90 jours, les papiers ne sont pas rentrés, il y a un avis dans la Gazette officielle qui révoque. Je ne peux pas être plus clair que ça: articles 235, 236, 237.

M. Langlois: Je vais vous donner un exemple précis. Par exemple, pour ne pas la nommer, Johns Manville, d'après ce que je comprends de l'article 240 du projet de loi 35, il va falloir qu'elle fasse un rapport au ministre si elle ne veut pas subir la révocation dans les 180 jours. Ce n'est pas dans la loi actuelle, il n'y a assurément pas ça. À mon point de vue, elle doit être en ordre avec le ministère à ce point de vue-là, il n'y a pas lieu de recommander, pour le ministre, la révocation des droits de mine.

M. Duhaime: J'ai comme l'impression, M. Langlois, que si Johns Manville n'est pas capable de nous répondre dans six mois, elle

ne nous répondra jamais.

M. Langlois: C'est une autre histoire ça. Je veux bien croire qu'elle va répondre, c'est bien clair mais peut-être qu'un petit prospecteur qui pense avoir découvert quelque chose dans les Cantons de l'Est, lui, s'il faut avoir un rapport d'ingénieur, fournir un rapport d'ingénieur il pourra laisser tomber parce qu'il ne sera pas capable de remplir ces conditions et son territoire va être révoqué automatiquement.

M. Duhaime: La loi actuelle, M. Langlois, c'est 90 jours en prenant votre hypothèse.

M. Langlois: Selon la loi actuelle, c'est 90 jours pour la révocation lorsque le propriétaire d'un terrain n'est pas conforme aux normes, je veux dire qu'il n'a pas fait ses paiements, ou qu'il n'a pas rapporté ses travaux ou des histoires comme cela. Bon, remarquez que le ministre peut toujours le recommander.

M. Duhaime: M. Langlois, je voudrais que vous appuyiez cette information, ce que vous venez de donner, ce que les Anglais appelleraient un "statement of facts", par quelque chose qui est dans la loi, parce que 235 dit: Lorsque le ministre désire recommander la révocation d'une concession minière ou de droits de mine, il ne s'agit pas de savoir si les rapports sont faits ou non, si le dossier est en ordre ou pas, si le ministre désire recommander la révocation de droits de mine ou d'une concession minière il fait signifier un avis. Le délai de l'avis, c'est 90 jours. Il me semble que c'est clair.

M. Langlois: Je suis d'accord, mais si vous allez à 234, vous allez voir que le gouvernement peut révoquer dans a, dans b, par exemple, sur une concession minière où on n'a pas travaillé pendant dix ans, ou des choses comme ça, il y a des conditions de révocation. C'est à ce moment que le ministre, à mon point de vue, décide de révoquer.

Le Président (M. Laplante): D'accord. M. le député de Richmond.

M. Vallières: Je m'aperçois que le ministre tient beaucoup à ses permis spéciaux. J'aimerais quand même poser quelques questions à M. Langlois, tout d'abord, d'ordre plutôt général. Est-ce que, selon vous - j'aimerais bien vous l'entendre dire - la question des permis spéciaux est une condition indispensable pour favoriser l'exploration sur les territoires qui seraient révoqués? (18 heures)

M. Langlois: Bon, si vous voulez que je réponde à ça, sincèrement, je pense que les permis spéciaux seront un certain empêchement au développement de l'activité d'exploration sur les territoires révoqués. Cela ne peut pas faire autrement. On pense que la méthode la plus démocratique, et pour tout le monde, c'est le jalonnement. Les permis spéciaux, d'une manière ou d'une autre, ce sera une source de conflits. On vous le dit très clairement, on est contre les permis spéciaux. Sur cela, vous demandiez un consensus ce matin, je pense que vous aviez ce consensus, tout ceux qui se sont présentés ici sont contre les permis spéciaux.

M. Vallières Unanimité.

M. Langlois: Je pense qu'on fait l'unanimité, excepté pour celui qui va se présenter après nous.

M. Vallières: Deuxième question, on a parlé de l'inventaire des travaux d'exploration qui pouvaient être faits. Selon vous, ce qui est contenu dans la loi présentement et qui vise à faire l'inventaire, les diverses recherches qui sont effectuées, est-ce que ça pourrait être remplacé par une formule qui soit plus simple et plus accessible à tous que ce qu'on retrouve dans le projet de loi? Pour autant que je suis concerné, je suis pour qu'on puisse faire l'inventaire de ce genre de travaux qui sont effectués dans une région donnée, pour éviter de répéter les uns à la suite des autres des travaux qui ont déjà été effectués. Alors, est-ce que vous auriez une façon d'y arriver?

Le Président (M. Laplante): À ce moment-ci, j'aimerais avoir l'autorisation de la commission pour dépasser l'heure...

Une voix: Fatidique.

Le Président (M. Laplante): Fatidique, oui, 18 heures, qui était selon l'ordre de l'Assemblée nationale. Vous êtes d'accord pour qu'on continue?

Merci.

M. Langlois: II y a deux choses là-dedans. Premièrement, il y a déjà beaucoup de renseignements qui vont au ministère au sujet des activités d'exploration. Je pense que même la Loi sur les mines prévoit toute une série de renseignements, mon collègue pourra compléter mon idée, parce qu'il est plus habitué que moi à faire de l'exploration.

Il y a déjà beaucoup de renseignements, je pense qu'il y aurait moyen d'avoir un certain inventaire, si on veut en avoir un, sans menacer de révocation le propriétaire de droits de mine. Cela pourrait se faire en dehors de cela. On reçoit énormément de questionnaires des gouvernements, on les remplit en général et je pense qu'on pourra

continuer de les remplir sans être menacé directement de révocation de vos droits dans les 180 jours, si votre rapport n'est pas entré. Je trouve que c'est aller un peu loin à ce sujet-là. Surtout le fait d'exiger un rapport d'ingénieur, pour certaines compagnies, il n'y a pas de problème, pour certains prospecteurs, cela peut causer un certain nombre de problèmes.

C'est toute l'argumentation qu'on avait tout à l'heure, l'histoire de la révocation. La révocation devient automatique si on ne produit pas un rapport en vertu de l'article 240, ce qu'on n'avait pas dans la loi auparavant.

M. Sabourin (Robert): II y a une chose que je pourrais peut-être ajouter ici. Il est évident, il est vrai, et tout le monde le reconnaît, qu'il nous manque énormément de renseignements sur le sous-sol dans la région de l'Estrie. La raison de cette lacune, des collègues de l'amiante et d'autres l'ont soulignée ce matin, c'est qu'on n'avait pas le système de jalonnement. On a donné des exemples de trois compagnies différentes qui accomplissent des travaux identiques, c'est de l'argent gaspillé pour la deuxième compagnie et encore plus pour la troisième. Et même plus, ces renseignements ne sont pas dans les dossiers du ministère, qui sont normalement et aujourd'hui de plus en plus accessibles à tous les gens qui sont dans la prospection.

L'ancien système nuisait à la collecte de renseignements. Un système - laissant de côté la question des permis, je pourrai revenir sur cela tantôt - de jalonnement est déjà une assurance d'au moins un minimum d'information qui, de par la loi, doit être déposé auprès du ministère et disponible au public parce que, une fois que vous avez jalonné vos claims, vous êtes obligé, après un certain temps, de justifier la possession de ces terrains pour des périodes subséquentes et une partie de la justification, c'est en soumettant les travaux statutaires; en d'autres mots, en donnant des informations, les résultats de nos recherches.

Alors, si le système de jalonnement avait existé, comme cela existe dans d'autres parties du Québec où on a des foules d'informations que souvent certains qui sont plus près de cette information ignorent, on aurait cette information requise pour les Cantons de l'Est; on ne l'a pas. Donc, le jalonnement comme tel... On commence cent ans en retard peut-être, mais le jalonnement assurerait un apport d'information qu'on n'a pas présentement.

Pour la question des permis... Ma présence ici est celle d'une personne intéressée à la prospection et pas tellement celle d'un employé ou d'un représentant de ce qu'on appelle souvent les méchantes grosses compagnies. Ma présence ici est comme géologue ou comme prospecteur, parce que je pense que je suis encore cela, même si j'en parle plus que je n'en fais, mais on atteint un certain âge.

La question du permis. Même si, au cours des discussions aujourd'hui, il apparaît non pas des failles, mais des manques qui, on l'a promis, seront corrigés, la question du permis ne fait pas peur à des compagnies comme la mienne. Il y a des inconvénients -on n'entrera pas dans les autres discussions -mais ça ne nous fait pas peur parce que j'ai un certain budget que certains peut-être me reprochent et les besoins financiers pour satisfaire aux conditions, pour s'assurer les expertises et tout cela, ça va bien. Mais, comme prospecteur, comme individu, comme moi-même tout seul, j'aurais peut-être de la difficulté à trouver les fonds. C'est pourquoi la question du permis, pour moi, n'est pas bonne, comme tous les autres collègues l'ont souligné, parce que ça nuit aux petits. Éventuellement, même nous, les soi-disant plus grands, comme cela a été souligné - on peut discuter de l'affaire encore plus - nous dépendons énormément des petits parce qu'avec un nombre limité de personnel, on ne peut quand même pas courir la province au complet.

Les prospecteurs et les petites entreprises qui, par leurs propres moyens, peuvent faire les premiers travaux de défrichage peuvent ensuite nous voir, comme on le fait couramment, et participer avec nous à la mise en valeur de ces richesses.

Alors, le permis comme tel, pour des gens comme nous autres, ce n'est pas un gros problème dans les conditions stipulées ici, et surtout si on nous assure que cela va s'appliquer, et ceci par le texte de la loi, uniquement à vos 20 000 milles carrées de l'Estrie. Maintenant, il y a une chose qui est bonne quand même, le ministre l'a souligné, il ne nous a pas menacés avec cela, mais il a dit: D'accord, indiquons cela dans la loi, et plus tard, si jamais on décide de le faire ailleurs, on fera une autre loi. Pour moi, cette chose, dans l'Estrie, c'est un peu l'histoire du chameau et de l'Arabe pendant la tempête de sable, où le chameau est à l'extérieur et l'Arabe à l'intérieur. Le chameau se rentre le nez dans la tente et dit: Pendant le gros de la tempête, est-ce que je peux juste entrer le nez? Il le rentre, puis il rentre le cou, les pattes, et finalement, l'Arabe se trouve dehors et le chameau dans la tente. Par rapport au permis...

M. Duhaime: Vous auriez dû avoir un chameau briqueté, vous n'auriez pas eu ce problème.

M. Sabourin: Je la connais celle-là aussi, M. le ministre. Comme pour le chameau briqueté, il faudrait savoir nous

donner de quoi vivre une journée de plus grâce au briquetage. En tout cas, j'espère que j'ai répondu un peu à votre question.

M. Vallières: Ce que je retiens de votre intervention, c'est que, finalement, ce sont les individus en tant que prospecteurs et les PME qui pourraient faire face à de plus grands problèmes à la suite de l'émission de ces permis spéciaux.

M. Sabourin: II ne faut pas négliger le fait que les grandes compagnies ont énormément besoin des prospecteurs et des petites compagnies.

M. Vallières: Aussi. Peut-être une autre question.

M. Duhaime: Oui, allez-y.

M. Vallières: Est-ce sur le même sujet, M. le ministre?

M. Duhaime: Oui, je voudrais juste donner un chiffre pour éclairer notre conversation, nos échanges. Il y a 86% des claims qui ont été jalonnés, 86% qui sont cédés aux grandes entreprises minières en-deça de deux ans. C'est à peu près le portrait. Quand vous me dites que la méthode actuelle des claims et du jalonnement est celle qui rend le plus grand service aux prospecteurs et aux petites et moyennes entreprises dans le secteur minier, j'avoue que je ne suis pas capable de vous suivre jusqu'au bout de votre raisonnement. J'ai des réserves.

M. Sabourin: Vous permettez?

M. Duhaime: J'ai dit que j'ai des réserves.

M. Vallières: Oui, allez-y, vous pouvez commenter cela.

M. Sabourin: D'accord. Je ne connais pas les chiffres, je prends les vôtres. S'il y a 60%, 86% ou 90% de claims qui sont jalonnés par les prospecteurs et qu'ils sont par la suite cédés aux plus grosses compagnies, vous ne comprenez pas comment ceci aide le prospecteur. Cela l'aide de bien des façons. Premièrement, lorsque nous discutons avec les prospecteurs ou avec les petites compagnies, si les claims qu'ils nous apportent sont basés sur les connaissances que nous avons du terrain et aussi si les données qu'ils peuvent nous apporter nous intéressent, non seulement allons-nous leur payer les frais de jalonnement, mais nous allons accorder une valeur à ces claims. Nous allons en plus, dans notre entente avec ces ge'ns, inclure dans certains cas l'assurance d'une certaine quantité de travail que ces gens vont pouvoir faire pour nous, ce qui va leur permettre de gagner une partie de leur revenu. Nous allons même, en plus, leur accorder - ceci est automatique avec nous - un pourcentage des recettes ou des profits provenant de la mise en valeur des richesses que nous aurions pu mettre en valeur sur leurs claims. En d'autres mots, un bon nombre de prospecteurs vivent - ne me demandez pas des cas précis, parce que je ne suis pas arrivé ici avec des statistiques, ni des roches - d'une façon respectable à partir des redevances qu'ils reçoivent de grosses compagnies qui ont acheté des claims d'eux et qui ont fait des ententes avec eux.

Le Président (M. Laplante): Dernière question.

M. Vallières: Ce ne sera pas la dernière, M. le Président, je m'excuse. J'aurais une question qui porte sur les redevances dont vous parlez ici, puisque que, dans votre mémoire, vous y faites allusion. J'aimerais que vous nous indiquiez quels sont les avantages que vous voyez à ce que l'indemnité payée au propriétaire le soit à partir non pas des profits de l'exploitant, mais bien à partir des droits de mine. Y aurait-il un avantage précis à cela? Pourquoi apportez-vous cela dans votre mémoire?

M. Langlois: Je ne sais pas si cela peut être un avantage. De toute façon, cela simplifierait énormément les choses; au lieu d'avoir deux taxes à payer au gouvernement, on n'en aurait qu'une. Ce que je dis, c'est qu'après que le gouvernement aura révoqué les droits de mine sur tous ces territoires il ne devrait pas y avoir de différence entre les droits de mine qui ont été révoqués et les droits de mine qui appartiennent déjà la couronne. On ne voit pas de différence pour celui qui exploite; il ne devrait pas y en avoir. Étant donné que c'est le gouvernement qui a révoqué ces droits de mine, s'il y a des frais au propriétaire, c'est lui qui a fait la révocation, cela ne lui appartenait pas. Si vous révoquez, entre autres, les mines d'amiante dont les minéraux appartiennent aux compagnies, cela sera révoqué, mais je ne vois pas pourquoi il y aurait des frais spéciaux directement au propriétaire pour ceux qui font l'acquisition de ces droits de mine. Remarquez que cela revient à peu près au même, parce qu'on sait très bien que, si c'est une partie des taxes minières qui sont dévolues au propriétaire, on va se retourner de bord et on va aller chercher les profits de ceux qui extraient grâce à ces droits.

M. Duhaime: Si vous permettez, c'est un peu mon inquiétude en vous écoutant, M. Langlois, parce que ce que votre texte ne dit pas, mais ce qu'il laisse entendre, c'est que l'indemnité deviendrait payable à même

les droits miniers que le gouvernement perçoit. Si je pousse votre raisonnement, cela veut dire que vous seriez d'accord pour qu'on augmente les droits miniers à travers le tableau et qu'on paie l'indemnité à même cela?

M. Langlois: On verra cela en temps et lieu. On fera nos recommandations dans ce temps-là.

M. Duhaime: J'aimerais peut-être mieux retenir la problématique.

M. Langlois: Remarquez qu'on est habitué; on a subi cela au cours des vingt dernières années par trois fois. Quand je suis arrivé à l'association, en 1962 ou 1963, les droits miniers étaient un maximum de 7% des profits; en 1972 ou 1967 ou 1968, cela a monté à 15% des profits et là, c'est rendu à 30%. Cela varie entre 15% et 30%. On est habitué à cela.

M. Duhaime: Puis-je vous corriger en disant que la dernière tarification a été faite en 1965?

M. Langlois: En 1965, non ce n'était pas la dernière, l'avant-dernière. La dernière s'est faite en 1975.

M. Duhaime: 1974, quant aux droits. M. Langlois: 1974, 1974-1975, oui.

Le Président (M. Laplante): D'accord. Avez-vous une autre question?

M. Vallières: Oui, une dernière question. C'est peut-être une question d'appréciation ou de point de vue de l'Association des mines. Est-ce que, selon vous, le projet de loi devrait respecter toute entente déjà existante entre les propriétaires de terrain et certaines compagnies ou sociétés? À votre connaissance, est-ce qu'il y a beaucoup de ces ententes ou protocoles qui ont été signés? Est-ce que le projet de loi devrait en tenir compte?

M. Langlois: C'est strictement personnel, on ne s'est pas consulté, mais assurément que le projet de loi devrait respecter les ententes en vigueur présentement. (18 h 15)

Le Président (M. Laplante): Là-dessus, messieurs, les membres de cette commission vous remercient de votre rapport. Une question finale, M. le ministre?

M. Duhaime: Les ententes auxquelles vous venez de faire allusion, M. Langlois, sont protégées par l'article 240.10. Je voudrais ajouter un élément. Vous avez eu une remarque fort pertinente sur la rédaction de l'article 240.7. Je vais la lire: Le détenteur d'une option, d'un bail ou de tout autre titre accordé par l'ex-propriétaire de droits de mine révoqués et en vigueur à la date... peut en exercer les droits lorsque, à son préjudice, il refuse ou néglige de le faire." Le "il" ne suffit pas si on veut donner un sens à la compréhension des mots. Je pense bien que si Boileau-Despréaux était ici, il serait d'accord avec moi, et, au lieu de retenir le "il", il faudrait parler de "ce dernier". D'accord? À ce moment-là, on donne un sens à 240,7 c'est alors un des points qu'on pourrait reprendre lors de l'étude article par article en commission parlementaire.

M. Vallières: Peut-être un dernier point, M. le ministre, qu'on a souligné. C'est à 240.7, puisqu'on disait que c'était incompréhensible, est-ce que vous pouvez...

M. Duhaime: C'est que je viens de dire...

M. Vallières: C'est bon. D'accord.

M. Duhaime: Alors, ça se lirait: "à son préjudice, si ce dernier refuse ou néglige de le faire."

M. Everette Taylor

Le Président (M. Laplante): D'accord. J'appelle maintenant M. Everette Taylor. Voulez-vous vous identifier, s'il vous plaît, M. Taylor, et commencer votre mémoire.

M. Taylor (Everette): Mon nom est

Everette Taylor, je représente les fermiers et les propriétaires, aucune compagnie ou association. Mon inquiétude est que, si le bill 35 devient loi, tous les terrains et fermes des Cantons de Shipton et Cleveland, dans l'Estrie, qui sont présentement sous option avec différentes compagnies, principalement MPH Consulting Inc., lesdites options ne seront plus valides.

Ces options furent signées en 1972 jusqu'à 1982. Elles furent par la suite prolongées jusqu'à 1987. Cinq individus dont les propriétés sont situées le plus près du dépôt minier ont des options jusqu'à 1997. Ces options d'achat furent signées avec les droits de surface et les droits miniers intacts. Elles furent enregistrées à Richmond sous le numéro 125,937. Ces options furent signées en toute bonne foi par les parties concernées et ce en considération de montants d'argent importants.

Je crois que le gouvernement n'a pas le droit d'annuler ces documents légaux; je vais lire la nature et le détail de ces documents. "Ledit document consiste en un acte signé le huit février 1978 entre Quebestos

Syndicate, représenté par M. Ernest D. Black, et la Société québécoise d'exploration minière, ci-après nommée SOQUEM, et représentée par M. Fernand Dubuc et M. Henri Lanctôt, par lequel acte Quebestos Syndicate cède à SOQUEM tous ses droits, privilèges, titres, intérêts et obligations libres de toutes charges, vices et autres troubles dans les options et extensions d'option pour acheter les droits de mine en surface et souterrains sur les terrains situés dans les cantons de Shipton et Cleveland."

Ces options mentionnées concernent 47 propriétaires. La liste des numéros de lots est considérable et, si le ministre en désire une copie, il me fera plaisir de vous la procurer.

Tous ces propriétaires et contribuables perdront leurs chèques d'option annuels. Ces propriétaires ont hérité ou acheté leurs terrains avec les droits de surface et droits miniers. Avec ces chèques d'option, ces gens paient leurs taxes municipales, scolaires et leurs impôts. Pour certains, cet argent est même nécessaire pour leurs besoins quotidiens.

Quebestos a dépensé ou causé des dépenses de plus de 500 000 $ jusqu'en 1981 sur ces terrains. Ils ont arpenté et fait des recherches conjointement avec Nicolet Asbestos, Bow-Valley Industries, SOQUEM et d'autres compagnies.

Je demande au ministre que toutes ces options déjà signées et enregistrées soient honorées.

Je suggère au ministre de prendre en considération les sommes dépensées sur ces propriétés et de les exempter de toutes dépenses pour développement futur. Tout ce qui empêche ces propriétés de devenir rentables est la demande ou un marché pour l'amiante.

Si le ministre ne protège pas ces options par le bill 35, je suis certain que les propriétaires concernés demanderont que les montants de leurs options annuelles soient payés par le gouvernement.

Légalement, tous ces gens auront recours à la loi pour perte de revenus et je crois que le ministre devrait penser sérieusement à protéger les options sur ces propriétés. Merci.

Le Président (M. Laplante): M. le ministre.

M. Duhaime: Vous pouvez laisser aller M. Vallières, je vais réfléchir un peu.

M. Vallières: D'abord, je veux remercier M. Taylor de venir s'exprimer devant la commission et vous comprendrez sûrement, M. le Président, que le mémoire n'est peut-être pas aussi technique que les autres, mais M. Taylor ne dispose peut-être pas de tous les moyens dont les autres intervenants disposaient pour préparer le mémoire.

Néanmoins, je pense qu'il était important que, lors de cette commission, on puisse entendre quelqu'un qui est propriétaire de terrains qu'on se propose de révoquer et de voir quelles en sont les conséquences pour les individus qui pourraient être aux prises avec certains problèmes qui pourraient leur être occasionnés par le projet de loi no 35. C'est un peu dans ce sens-là que j'ai demandé au ministre d'inviter M. Taylor afin qu'on puisse connaître un peu les revendications des propriétaires qui, en particulier, ont des ententes avec certaines compagnies.

Je partage votre point de vue, mais il y a quand même un article dans le projet de loi qui prévoit que certaines ententes vont être respectées; est-ce que vous pourriez nous indiquer un ordre de grandeur, peut-être pour éclairer la commission? Les gens dont vous parlez, ça peut représenter combien comme montants qui sont impliqués, les sommes qui sont versées a la suite des options qui ont été prises de façon annuelle? Les montants en cause peuvent être de combien?

M. Taylor: C'est un peu basé sur le nombre d'arpents que chaque propriétaire détient. Moi, j'avais 4 fermes, 1 ferme me rapportait 1000 $ par année et j'en avais une autre de 110 arpents qui me rapportait 1100 $ par année. Alors, je pense que c'est autour de 10 $ par arpent annuellement.

M. Vallières: Est-ce que ce sont à peu près les mêmes données pour les autres propriétaires qui sont visés?

M. Taylor: II y en a où ça monte assez haut, 4000 $, 5000 $.

M. Vallières: 4000 $ à 5000 $ par année?

M. Taylor: Oui.

M. Vallières: Vous demandez au ministre que toutes ces options déjà signées et enregistrées soient honorées. Voulez-vous dire également par là qu'on puisse en permettre le renouvellement en n'étant pas dans l'obligation de répondre aux divers critères qui sont fixés dans la loi 35? Cela veut dire que, par exemple, quand votre option sera terminée... Est-ce que la compagnie qui fait affaires avec vous, compte tenu de la loi 35, va être intéressée à maintenir son option et donc à continuer à vous payer annuellement certaines sommes ou est-ce qu'elle va se désister, d'après l'expérience que vous avez?

M. Taylor: Je suis pas mal sûr que, quand le temps sera terminé, que l'option

sera écoulée, non seulement les compagnies, mais les cultivateurs ne voudront plus embarquer parce que ça va être une nouvelle loi; ça va tout tomber.

M. Vallières: M. le ministre, j'espère que vous comprenez bien. Dans ces cas-là, s'il n'y a pas renouvellement de l'option comme telle, il y a une perte sur un certain nombre d'années pour les individus qui sont heureux, finalement, de signer ces ententes avec les compagnies. Il faudrait peut-être que je cède maintenant la parole à M. le ministre.

Le Président (M. Laplante): M. le ministre.

M. Duhaime: Je vous remercie M. Taylor, d'avoir porté ces faits à l'attention de notre commission. Il est bien certain que pour les dispositions du texte qui est sous vos yeux dans le projet de loi à l'article 240.10 sur les options, baux ou autres titres accordés, etc, la difficulté vient du fait suivant: à l'expiration des ententes qui sont signées, votre question se pose vraiment à ce moment parce que si la révocation ne touchait pas les ententes, et c'est ce que le projet de loi dit, le problème se poserait au moment de l'expiration de ces ententes.

Vous conviendrez avec moi cependant que le mécanisme du projet de loi va quand même faire en sorte que, dans l'hypothèse d'un non-renouvellement, puisque celui en faveur de qui existe l'option n'est jamais tenu de faire le renouvellement, l'indemnité prévue à la loi continue de s'appliquer. Avant de vous donner une réponse définitive j'aimerais que vous me remettiez tout à l'heure, ou plutôt à M. Beaulieu, mon sous-ministre associé aux mines qui est à mes côtés, la liste à laquelle vous avez fait référence tout à l'heure. Tout ce que je peux vous dire aujourd'hui, c'est que je vais faire examiner cette question très soigneusement. Notre objectif n'est pas de léser qui que ce soit, au contraire, c'est pourquoi on a introduit dans la loi un mécanisme quant aux indemnités. Vous soulevez un point particulier qui est un point majeur, à mon avis, et je suis prêt à en faire un examen avec mes gens et voir comment, lorsqu'on reprendra nos travaux, lors de l'étude article par article, on pourra essayer de trouver une solution à ce problème.

Le Président (M. Laplante): Est-ce que ça vous satisfait?

M. Taylor: Oui.

M. Duhaime: Avez-vous des remarques supplémentaires?

M. Taylor: Je n'ai pas mentionné tout à l'heure que dans nos options, en même temps, c'est écrit: si l'option E fait des dommages c'est écrit combien ils payaient par pied, et combien ils payaient s'ils coupaient un arbre. Comme quelqu'un l'a mentionné tout à l'heure, il va y avoir un "free for all" si c'est libre pour tout le monde, tandis qu'avec nos options à jour, on sait combien on a de dommages.

M. Duhaime: Je vais vous arrêter et vous donner l'assurance qu'il n'y a pas de "free for all" dans cela. Les ententes qui sont signées sont respectées par le projet de loi. Le problème se pose beaucoup plus tard à l'expiration des ententes, au moment où SOQUEM, par exemple, déciderait de ne pas renouveler une option. C'est un problème. Je vous concède qu'on va devoir en faire l'examen et voir comment, lorsque la commission reprendra ses travaux, on pourra faire une suggestion là-dessus. Il y a deux choses à distinguer: le projet de loi ici vise les droits de mine; les droits de surface ne sont pas visés par le projet de loi.

M. Vallières: Cela veut dire que les choses qui sont incluses dans l'entente, même avec le projet de loi, devront persister par la suite, c'est-à-dire que la compagnie ne pourra pas aller chez vous et faire de l'exploration sans votre consentement. À ce moment il y a des conditions à négocier entre vous et les compagnies concernées. Je pense que cela demeure, c'est un droit inaliénable, le droit de surface...

M. Duhaime: J'ajouterais même qu'avec le mécanisme des claims il faut la permission du propriétaire lorsqu'il s'agit d'un terrain privé, à moins que l'on décide de procéder par voie d'expropriation. Alors, là-dessus, vous êtes "blindés" il n'y a pas de problème.

Le Président (M. Laplante): Merci. On vous remercie, monsieur, de votre apport à cette commission. Les travaux de la commission de l'énergie et des ressources afin de recevoir les mémoires sur le projet de loi 35 sont ajournés sine die. Merci.

(Fin de la séance à 18 h 30)

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