Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
(Dix heures douze minutes)
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission élue permanente de l'énergie et des
ressources reprend son travail. Le mandat de cette commission est d'entendre
les dirigeants d'Hydro-Québec relativement à l'étude du
projet de tarification d'Hydro-Québec pour l'exercice financier
1983.
Les membres de la commission sont: MM. Pagé (Portneuf), de
Belleval (Charlesbourg), Duhaime (Saint-Maurice), Fortier (Outremont),
Grégoire (Frontenac), Dussault (Châteauguay), LeBlanc
(Montmagny-L'Islet), Middlemiss (Pontiac), Tremblay (Chambly), Rodrigue
(Vimont), O'Gallagher (Robert Baldwin).
Les intervenants sont: MM. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue),
Ciaccia (Mont-Royal), Bordeleau (Abitibi-Est), Lavigne (Beauharnois), Scowen
(Notre-Dame-de-Grâce), Levesque (Bonaventure) et Proulx (Saint-Jean).
Au moment où les travaux ont été
arrêtés hier soir, c'était le député
d'Outremont, sur Churchill Falls.
Durée des travaux
M. Fortier: M. le Président, comme vous avez pu voir, nous
avons été très fidèles à suivre l'ordre du
jour que j'avais suggéré. On a commencé par parler de
politique générale, ensuite on a parlé de la situation
économique et nous en étions au facteur important affectant la
demande. Bien sûr, nous avons touché d'autres sujets puisque
certains voulaient absolument être indisciplinés, ce qui nous
permettra de sauter des étapes pour aborder le programme
d'équipements dans quelques instants, je l'espère, pour toucher
les lignes de transport, la distribution, pour aborder la revue des objectifs
et le bilan financier, pour ensuite terminer par la tarification.
Juste à titre d'indication, puisque l'on ne peut s'imposer aucun
engagement puisque le progrès des travaux dépend des membres de
la commission, mais certains me demandaient quand nous finirions. Je croirais,
sans vouloir engager qui que ce soit - je parle en mon nom personnel - que nous
ne pourrons pas finir ce midi à une heure. Puisque le ministre avait
convenu avec moi d'être libéré cet après-midi pour
aller au
Conseil des ministres, nous tenterons, du moins en ce qui concerne
l'Opposition, de terminer peut-être pour demain midi. Je donne cela tout
simplement à titre indicatif puisque je ne peux pas engager le
gouvernement... Une voix: Pas encore.
M. Fortier: Je le fais simplement après consultation avec
les membres de l'Opposition.
M. Tremblay: Une question de règlement.
M. Fortier: ... pas de règlement, M. le Président,
à la commission parlementaire.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Chambly.
M. Tremblay: Je veux tout simplement dire que nous sommes bien
d'accord pour continuer longtemps parce qu'on aime beaucoup cette
commission.
Le Président (M. Desbiens): M. le député
d'Outremont, vous pouvez continuer.
M. Grégoire: ... du règlement.
M. Duhaime: Me permettez-vous juste un petit mot
là-dessus, sur la présentation?
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Duhaime: M. le Président, je ne voudrais pas que
personne ici ait l'impression que ce sont les représentants de
l'Opposition qui établissent l'ordre du jour.
M. Fortier: Tout le monde a compris.
M. Duhaime: Je me crois obligé de le dire après la
présentation que vient de faire le député d'Outremont.
Hier matin, à la fin de mon exposé, j'ai proposé que l'on
convoque à nouveau la commission parlementaire pour mars prochain. J'ai
presque le goût, ce matin, en ouvrant nos débats, de proposer que
cette commission parlementaire se réunisse à nouveau,
peut-être la semaine prochaine, pour étudier la proposition
tarifaire d'Hydro-Québec parce que j'avais cru comprendre que nous
étions
ici pour ce premier motif et, jusqu'à présent, on a
siégé pendant huit heures et je n'ai pas beaucoup entendu parler
de la proposition tarifaire. Je sais que c'est un des points à votre
ordre du jour, M. le député d'Outremont. Je me demande si on ne
devrait pas commencer nos travaux ce matin, quitte à revenir plus tard
sur autre chose, mais j'avoue ne pas être enferré dans quelque
scénario que ce soit. Je ne voudrais pas que, lorsque nous aurons
terminé nos travaux, soit demain midi, demain après-midi ou
demain soir, je l'ignore, l'Opposition nous demande de convoquer à
nouveau cette commission pour étudier la proposition tarifaire.
Je rappelle au député d'Outremont que nous sommes ici,
d'abord et avant tout, pour cela. Le contrat de Churchill Falls, on peut en
parler, bien sûr, c'est un aspect central du débat, mais ce n'est
pas le but principal. Je sais qu'hier soir on a consacré deux heures
très utiles à la technologie, à la recherche. Je sais que
mon adjoint parlementaire, le député de Frontenac, est
très intéressé par l'hydrogène liquide et vous
auriez eu intérêt à être présent, M. le
député de Portneuf, hier soir. Cela aurait éclairé
vos affaires.
Mais le point que je veux souligner au député d'Outremont,
c'est que, connaissant l'Opposition comme je la connais maintenant -
après six années de compagnonnage, on en vient à se
connaître un peu - je ne voudrais pas que l'Opposition escamote le
débat. Le but premier de la convocation de cette commission est
d'étudier la proposition tarifaire d'Hydro-Québec qui, cette
année -je pense qu'on doit en remercier Hydro-Québec - a
intégré cette proposition tarifaire à l'intérieur
d'un plan de développement révisé qui porte sur une
période de 1983 à 1985, sur l'horizon de 1992. Je sais
très bien que l'Opposition "jasait" - et c'est le cas de le dire, entre
guillemets - passablement plus l'année dernière sur la
proposition tarifaire qui avait été faite. Je ne voudrais pas que
le député d'Outremont perde de vue l'essentiel et le but premier
de la convocation de cette commission qui est la proposition tarifaire
d'Hydro-Québec. Quant au reste, je suis ouvert pour en parler, dans
l'ordre ou dans le désordre, comme vous voudrez, mais je ne voudrais pas
que vous nous imposiez, ni par une introduction ni autrement, quelqu'ordre du
jour que ce soit. Mon collègue, le député de Chambly, a
donné hier le signal d'un désaccord profond et il y avait des
réserves du côté du député de Frontenac
également.
M. Fortier: Le député de Frontenac a donné
son appui impartial.
M. Duhaime: Ah non! Il n'est jamais impartial.
Le Président (M. Desbiens): Alors, M. le
député d'Outremont.
M. Fortier: C'est moi qui ai la parole, M. le Président.
Je remercie...
M. Grégoire: Alors, M. le Président, si je
comprends bien, sur la question de règlement, nous commençons ce
matin par l'étude de...
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Frontenac.
M. Grégoire: ... la tarification, quitte à prendre
les autres points par la suite.
M. Fortier: Non, non, non.
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, M. le
député de Frontenac.
M. Fortier: M. le Président, c'est moi qui ai la
parole.
Le Président (M. Desbiens): M. le député
d'Outremont, vous avez la parole sur le sujet qui vous intéresse.
M. Fortier: Alors, je remercie le ministre de ses propos
condescendants, mais c'est assez curieux de se faire accuser d'illogisme par
quelqu'un qui lui-même est l'illogisme complet.
M. Duhaime: Je n'ai pas dit cela.
Le dossier des chutes Churchill
M. Fortier: D'une part, il aurait bien dû informer
Hydro-Québec qu'il voulait parler uniquement de tarification. À
ma connaissance, ce n'est que jeudi de la semaine dernière que nous
avons reçu un libellé venant de la présidence des
commissions parlementaires à l'effet que cette semaine,
c'est-à-dire mardi, avec un délai de quelques jours seulement,
nous parlerions de tarification, alors que tout le monde avait l'impression
qu'on parlerait du plan de développement d'Hydro-Québec, y inclus
la tarification. À un tel point qu'Hydro-Québec a
préparé un document qui inclut à 85% des informations sur
le plan de développement, et peut-être 15% sur la tarification.
Par ailleurs, l'illogisme du ministre va encore plus loin puisqu'il nous engage
à revenir en commission parlementaire, alors qu'il aurait fallu traiter
dans un premier temps de la politique énergétique avant de
discuter d'un sujet aussi sérieux que le plan de développement
d'Hydro-Québec pour les trois prochaines années.
Mais ceci étant dit, cherchons la façon la plus utile
d'aborder tous ces problèmes.
Pour ma part, je vais continuer dans la ligne logique que je
m'étais tracée pour moi-même.
Alors, j'en étais au facteur important, celui de la demande. Si
les membres de la commission ne le comprennent pas, tout le monde sait que
Churchill Falls pourrait affecter considérablement la tarification, si
ce n'est pas cette année, ce sera dans les années qui viennent.
D'ailleurs, vous-même, M. le président du conseil, vous avez dit
en public que la perte de Churchill Falls pourrait apporter des augmentations
de tarifs de l'ordre de 30%. Je crois que c'est votre déclaration, mais,
sans être aussi pessimiste et même s'il y avait des
négociations, sachant que, lorsqu'il y a des négociations, on
cherche à couper la poire en deux, on pourrait facilement convenir, sans
pour cela arriver à des conclusions infaillibles, que, de toute
façon, il y aurait des augmentations de tarifs uniquement dues à
une renégociation puisque, par définition, même une
renégociation nous porterait à rouvrir d'une certaine
façon le contrat de Churchill Falls et que cette augmentation de tarifs
s'ajouterait aux autres augmentations de tarifs dont aura besoin
Hydro-Québec pour pourvoir à ses besoins financiers, d'autre
part.
C'est donc dire que je crois que le sujet que je désire aborder
est tout à fait pertinent pour les consommateurs. Si les membres du
parti au pouvoir ne s'inquiètent pas des utilisateurs
d'électricité et des contribuables, nous de l'Opposition nous
croyons que c'est la raison pour laquelle nous avons été
élus.
Il y a une chose que j'aimerais savoir. Vous nous avez dit hier que la
perte de Churchill Falls est aléatoire et que vous avez
préparé votre plan de développement en faisant abstraction
d'une certaine façon de ce problème, puisque c'est
extrêmement difficile de prévoir de quelle façon le
cheminement va se faire durant les prochains mois. La Cour suprême doit,
dit-on, rendre un jugement prochainement; les avocats nous disaient il y a
quelque temps que ce serait au printemps de 1983; je crois que le
président du conseil a indiqué que ce serait peut-être plus
tût que cette date. Alors, cela pourrait être entre maintenant et
le printemps de 1983. De toute façon, cela ne change pas grand-chose au
cheminement ou à l'impact important que cela pourra avoir pour le
Québec.
Là-dessus, je sais qu'Hydro-Québec, compte tenu de ses
responsabilités vis-à-vis du public, a dû faire des
études pour déterminer cet impact au cas où M. Peckford
dans un moment, disons, de folie, désirerait donner suite aux menaces
qu'il a faites publiquement. Je dis dans un moment de folie, puisque, tout le
monde sait, même s'il y avait un jugement favorable à Terre-
Neuve, à ce moment-là la loi qui a été
adoptée à Terre-Neuve s'appliquerait; le gouvernement de
Terre-Neuve pourrait dès lors saisir les actifs de Churchill Falls
Corporation, mais l'entente avec les fiduciaires nous dit qu'à ce
moment-là il devrait y avoir refinancement de la dette, qui est
présentement de l'ordre de 800 000 000 $ à un taux
d'intérêt d'environ 8% - corrigez-moi, si les chiffres ne sont pas
exacts - et quand le financement se ferait - peut-être les experts
d'Hydro-Québec pourraient-ils dire à quel taux - mais ce serait
certainement à peu près au double certainement. C'est donc dire
qu'à toutes fins utiles, si Terre-Neuve était assez folle pour
donner suite à un jugement favorable et s'emparer des actifs pour
pouvoir arrêter le courant allant au Québec, elle doublerait la
dette de Churchill Falls pour ensuite se mettre à table et
négocier. À ce moment, les deux parties y perdraient. Ce serait
réellement de la folie de la part de Terre-Neuve d'agir ainsi. Ce ne
serait pas responsable ni pour elle, ni pour nous, ni pour aucun des Canadiens,
puisque finalement les seuls qui s'enrichiraient, ce seraient les
Américains dans ce genre de scénario.
Même si c'est un peu aléatoire et que cette
possibilité n'est pas tellement sérieuse pour les raisons que
j'ai indiquées, nos amis de Terre-Neuve jusqu'à maintenant ne
nous ont pas donné le signe qu'ils étaient tout à fait
rationnels dans leurs discussions. Peut-être qu'on ne peut pas les
blâmer puisque, dans le passé, ils n'ont pas été
traités par tous les Canadiens, du moins ceux qui le disent, d'une
façon... Je ne parle pas du contrat de Churchill Falls, je parle d'un
traitement général de la part du Canada en général.
Ils croient qu'ils ont été brimés de bien des
façons. On peut comprendre qu'une personne qui se croit brimée
puisse réagir de certaines façons et qu'elle réagisse
différemment du commun des mortels.
Compte tenu de cette possibilité même lointaine -
confirmez-le-moi, je crois que nous sommes sur la même hypothèse -
qu'il y ait effectivement coupure de courant, ne pouvant rien laisser au
hasard, vous avez dû étudier ce scénario pour voir de
quelle façon il serait possible d'alimenter le Québec. Ce
scénario aurait des répercussions considérables.
J'aimerais que vous en parliez. Bien sûr, nous avons des surplus dans le
moment que nous pourrions utiliser qui seront de l'ordre d'ici quelques
années de 3000 à 4000 mégawatts. Vos contrats de
fourniture d'électricité aux États-Unis pourraient
être rappelés - j'imagine que cela se ferait dans un cas de force
majeure - ainsi que l'électricité qui est vendue en Ontario et au
Nouveau-Brunswick. Cela aurait un impact assez considérable sur le bilan
pro forma que vous nous avez présenté pour l'an prochain.
Sans vouloir présumer de l'avenir - je
l'ai dit dans mes notes préliminaires - et tout en disant qu'il
s'agit là d'un scénario quasiment improbable, pourriez-vous quand
même nous donner les éléments qui nous permettraient, de
mesurer d'une part, si Hydro-Québec peut assurer efficacement la
population du Québec et l'industrie du Québec qu'elles auront
toujours l'électricité dont elles auront besoin en 1983? D'autre
part, quel serait l'impact financier probable sur le bilan pro forma que vous
nous avez présenté dans le document du plan de
développement d'Hydro-Québec?
M. Bourbeau (Joseph): II y a deux questions réellement. La
première a trait à la façon dont on pourrait
répondre à une coupure de courant. Comme vous l'avez dit, il y a
des surplus actuellement dans le réseau et ces surplus de puissance, on
les voit se continuer jusqu'en 1986. Ce sont des surplus qui ont une valeur
lorsqu'on exclut la réserve nécessaire. Les réseaux qui
partent d'environ 1500 mégawatts et qui peuvent aller jusqu'à
3000, 3500 mégawatts. Ce qui veut dire que le contrat de Churchill,
alors qu'il doit nous fournir 4300 mégawatts, a déjà
rapatrié 120 mégawatts, c'est-à-dire qu'on a
déjà une déficience d'à peu près 4000
mégawatts. On croit que durant la période 1983-1986, au point de
vue de l'alimentation, on pourrait continuer d'alimenter les charges du
Québec et, pour ce faire, il se pourrait que l'on demande l'assistance,
soit de l'Ontario, soit du Nouveau-Brunswick ou des États-Unis. Alors,
au point de vue physique d'alimentation, on ne croit pas, mettons, qu'on aurait
des pannes comme celle qu'on a vécue hier matin.
Au point de vue du prix, par exemple, s'il fallait remplacer
l'énergie de Churchill, qu'on obtient à trois mills, par de
l'énergie qui serait produite ici à un coût
supérieur, il est évident qu'il faudrait que les tarifs
d'électricité soient plus élevés. C'est là
que j'avais répondu à cette question qui était très
hypothétique. Si jamais vous deviez remplacer tout Churchill par quelque
chose qui devrait se faire aujourd'hui, il y aurait des hausses de tarifs
d'environ 30%.
M. Fortier: Mais vous nous avez dit hier qu'il y avait des
surplus et que si ces surplus n'étaient pas vendus ou s'ils
étaient vendus, de toute façon, ce serait de l'argent additionnel
qui viendrait dans les coffres d'Hydro-Québec et que ce serait une
source inattendue de revenu. C'est donc dire que si vous employez ces surplus,
cela n'affectera pas les finances d'Hydro-Québec dans la mesure
où vous utilisez des surplus qui ne sont pas utilisés de toute
façon; c'est seulement dans la différence manquant entre les
surplus d'Hydro-Québec présentement, c'est-à-dire en 1983,
et par la suite, durant les années subséquentes, étant
donné que les surplus iraient croissant. Des surplus qui seraient
peut-être invendus de toute façon. Dans la même mesure
où ces surplus seraient invendus, les revenus d'Hydro-Québec ne
seraient pas affectés.
M. Bourbeau (Joseph): C'est-à-dire que les surplus que
nous vendons actuellement sont des surplus vendus aux États-Unis, soit
en Ontario, soit au Nouveau-Brunswick, mais au prix de l'excédentaire.
À ce moment-là, on prendrait ces surplus pour en faire de
l'énergie ferme ici au Québec, qui est vendue à un prix
supérieur.
M. Fortier: Écoutez... (10 h 30)
M. Bourbeau (Joseph): Maintenant, après la période
1986, si cette situation persistait, ce qu'on ferait, du moment qu'on saurait
qu'il y aurait une coupure de courant totale - ce qu'on ne croit pas toutefois
- serait d'engager des turbines à gaz, à courte
échéance; ensuite il faudrait engager d'autres projets de base le
plus vite possible.
M. Fortier: Maintenant, j'aimerais aborder le programme
d'équipements. Je crois qu'on a établi hier que les
investissements durant les trois prochaines années seront moindres...
Écoutez, M. le Président, on n'a pas eu la collaboration du
ministre tout à l'heure... J'ai la parole présentement et je
continue, je m'en excuse. S'il veut nous donner de la collaboration, on pourra
lui en donner, mais s'il ne nous en donne pas, on ne peut pas lui rendre la
pareille.
Le Président (M. Desbiens): Monsieur...
M. Fortier: J'ai la parole présentement et je
continue.
Le Président (M. Desbiens): Oui, M. le
député d'Outremont.
M. Dussault: C'est une question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Desbiens): Sur une question de
règlement?
M. Dussault: Oui, une question de règlement.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Châteauguay.
M. Dussault: Je vois, M. le Président, sur la feuille de
convocation, où on voit l'ordre du jour, que le mandat indiqué
est celui-ci: Le mandat de cette commission est d'entendre les dirigeants
d'Hydro-Québec relativement à l'étude du projet de
tarification d'Hydro-Québec pour l'exercice financier 1983.
Dites-moi, M. le Président, à partir du mandat identifié,
est-ce que nous ne pourrions pas, nous, les membres de la commission, exiger
que nous parlions strictement de tarification, ce matin? Si cela est le cas,
est-ce qu'il n'y aurait pas lieu que l'Opposition se montre un peu plus
compréhensive à l'égard de la logique que nous aimerions
aussi voir développer à cette commission?
M. Fortier: Qui a la parole, M. le Président?
Le Président (M. Desbiens): Sur la question de
règlement?
M. Fortier: Non.
Le Président (M. Desbiens): Sur la question de
règlement, M. le ministre? M. le ministre.
M. Duhaime: M. le député d'Outremont aborde un
sujet qui est celui de Churchill, Je pense que mes collègues de ce
côté-ci auraient des questions à poser, moi aussi j'en
aurais, j'aurais des choses à dire également sur Churchill. Si
vous voulez qu'on vous écoute sur chacun des sujets que vous voulez
aborder, on va vous écouter, on va vous donner le temps dont vous avez
besoin, à la condition qu'ensuite vous laissiez les autres parler. Si
vous voulez qu'on aborde la discussion sujet par sujet, suivant la façon
dont vous désirez l'aborder ou encore que d'autres collègues
autour de la table voudraient l'aborder, on pourrait le faire. Par ailleurs, si
vous avez un "shopping list" sur 13 sujets différents et si vous voulez
discuter avec les gens d'Hydro-Québec sans que personne ne puisse
intervenir, on va vous organiser une commission pour vous tout seul.
M. Fortier: M. le Président.
M. Duhaime: Je ne pense pas que c'est comme cela qu'on doive
procéder.
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre! M. le
député d'Outremont, sur la question de règlement? M. le
député de Portneuf, sur la question de règlement?
M. Pagé: Sur la question de règlement. Je ne
voudrais pas qu'on passe une demi-heure à se perdre en procédure
ce matin. Nous avons effectivement un avis qui convoque les membres de la
commission parlementaire de l'énergie et des ressources pour entendre
Hydro-Québec et ses représentants sur, d'une part, la proposition
tarifaire, mais aussi sur la programmation pour les prochaines années.
Cela a toujours été dans ce sens que l'audition du
président, du directeur général, des
vice-présidents et des hauts fonctionnaires d'Hydro-Québec, a
été faite ici à cette commission. D'ailleurs, je dois le
regretter, on doit convenir, ce matin, qu'une rencontre entre les porte-parole
de l'Opposition et ceux du gouvernement aurait certainement pu nous permettre,
comme cela se fait d'ailleurs dans d'autres commissions et cela s'est fait
à d'autres moments, un ordre du jour de nos travaux pour les deux ou
trois jours prévus. Sauf qu'hier, j'ai cru comprendre qu'on abordait le
dialogue avec Hydro-Québec selon les champs d'intérêt de
chacun des députés. Le député d'Outremont a
proposé comme palliatif, parce qu'il n'y avait rien sur la table, un
ordre du jour qui a reçu un accueil mitigé, il faut en convenir.
Mais j'ai cru comprendre, hier, que nous aurions l'occasion de discuter,
aujourd'hui, de toute cette question d'énergie, question d'impact sur
Hydro-Québec des décisions des tribunaux où des causes
sont actuellement pendantes, discuter de tarification et aussi discuter de
programmation. Je ne voudrais pas, M. le Président, après
l'annonce du débat, que par une motion quelconque aujourd'hui, on vienne
limiter le débat strictement et uniquement à la tarification.
D'ailleurs, on siège aujourd'hui, on siégera demain, et rien
n'exclut qu'on siège au début de la semaine prochaine si le
besoin se fait sentir.
M. Grégoire: Question de règlement.
M. Pagé: Le député d'Outremont a
abordé une question très importante sur l'ensemble des
activités, on va continuer. J'espère - M. le Président -
je termine là-dessus que vous avez toujours en mémoire le
préavis que je vous ai donné, hier, pour mon intervention sur la
programmation en général et plus spécifiquement sur un
projet dans la région de Québec.
M. Grégoire: Question de règlement.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Frontenac, sur la question de règlement.
M. Grégoire: M. le Président, si le
député de Portneuf avait assisté à nos travaux,
hier, je pense qu'on l'a vu cinq minutes sur les huit heures...
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Pagé: M. le Président, je soulève une
question de règlement immédiatement, si le député
de Frontenac soulève une question de règlement.
Le Président (M. Desbiens): M. le
député de Portneuf.
M. Pagé: M. le député de Frontenac, je
comprends qu'il se complaît dans des références ou dans des
interventions comme celles-là, c'est généralement la seule
contribution de cet homme à nos travaux. Mon absence d'hier était
motivé.
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Grégoire: M. le Président, toujours sur la
question de règlement, je voulais ajouter un mot.
Le Président (M. Desbiens): Je crois que...
M. Grégoire: Non, non, je voulais ajouter un mot sur la
question de règlement.
M. Pagé: Je vous ai regardé à la TV, je vous
ai trouvé bien drôle, comique.
Le Président (M. Desbiens): Je crois que c'est la
dernière intervention sur la question de règlement qui
était soulevée par le député de
Châteauguay.
M. le député de Frontenac, à l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Grégoire: Je m'aperçois que le
député de Portneuf aime mieux regarder la
télévision qu'assister à nos travaux.
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, M. le
député de Frontenac.
Voici, le mandat de la commission, tel qu'on en a reçu copie au
secrétariat des commissions, se lit ainsi: "Le leader du gouvernement
demande de vous faire part que la commission permanente de l'énergie et
des ressources se réunira les 26 et 27 octobre et si nécessaire
pourra poursuivre ses travaux le jeudi 28 octobre. Elle procédera, au
salon rouge à 10 heures le matin à l'étude du projet de
tarification d'Hydro-Québec pour l'exercice financier 1983. Les
dirigeants de l'entreprise seront alors présents et seront
disposés à répondre aux questions des membres de la
commission." Ce mandat ne m'apparaît pas restrictif à la
tarification et, en conséquence, je dois convenir, je pense que c'est
d'ailleurs finalement quand même l'intention de tous les participants, de
discuter de sujets qui, d'une façon ou de l'autre - c'est assez
élastique - se relient à la tarification.
Une voix: Les chutes Churchill.
Le Président (M. Desbiens): M. le député
d'Outremont, vous avez fixé aussi l'établissement d'un certain
ordre de la discussion. Est-ce que vous intervenez sur l'ensemble des neuf
points que vous avez soulignés hier, immédiatement, ou si,
à partir de chacun des points que vous soulevez, la discussion puisse se
faire également sur chacun des sujets?
M. le député d'Outremont.
M. Fortier: M. le Président, j'ai proposé cet ordre
du jour et j'ai tenté d'avoir un consensus hier pour qu'on puisse
procéder d'une façon logique. De toute évidence, le
ministre il y a quelques minutes a indiqué qu'il ne voulait pas s'en
tenir à ce consensus et que les membres de la commission étaient
tout à fait libres d'aborder la discussion dans n'importe quel ordre
désiré. Maintenant que cela fait l'affaire du ministre
d'intervenir dans un ordre logique, je me demande si je devrais accepter de lui
céder mon droit de parole, puisque j'avais l'intention de
procéder à l'article no 4, qui touche les programmes
d'équipements.
Il faudrait bien s'entendre à cette commission à savoir
si, d'une part, il y a collaboration entre les membres de la commission pour
que le public qui nous regarde considère que les membres de cette
commission font un travail sérieux ou si l'on fait de la petite
politique. Si les membres de la commission et le ministre s'entendent pour dire
que, dorénavant, dans la grande mesure du possible, nous allons tenter
de procéder d'une façon logique, j'ai indiqué dès
le départ mon esprit de collaboration, mais je dois admettre que
certaines des interventions d'hier étaient faites d'une façon
tout à fait explicite pour saborder l'ordre du jour que nous avions
préparé. Si les membres du côté ministériel
veulent collaborer avec nous, nous allons collaborer également et dans
cet esprit. Si le ministre est d'accord pour procéder de cette
façon-là, je lui céderai mon droit de parole pour traiter
de Churchill Falls, puisqu'il s'agit d'un sujet extrêmement
important.
Le Président (M. Desbiens): Alors, on semble
s'entendre.
M. le ministre, sur Churchill Falls.
M. Duhaime: Je me demande pourquoi on a brûlé dix
minutes pour se rallier à ce que je disais d'une façon
très claire sur Churchill Falls et sur les autres sujets que vous
souhaiteriez aborder. De la même façon, vous pourrez intervenir
sur aucun des sujets que mes collègues, ici, pourraient soulever.
Autrement, on va se retrouver... Vous appelez cela votre propre logique, mais
si l'Opposition veut avoir une manchette disant que la commission a
siégé trois jours on peut vous la donner tout de suite, cette
manchette, ce n'est pas un problème.
Sur la question de Churchill Falls, je voudrais peut-être profiter
de l'occasion pour rappeler la position du gouvernement dans ce
dossier. Depuis quelques années, en tout cas, notre gouvernement
est impliqué dans ce dossier; nous avons toujours tenu un discours qui
consiste à placer le dossier dans une approche de négociation
d'ensemble pour ce qui est de Churchill Falls. Je n'ai pas l'intention d'entrer
dans le mécanisme juridique de ce dossier, c'est très complexe,
d'autant plus que la Cour suprême du Canada vient d'entendre cette cause
et c'est en délibéré.
Il y a cependant un point qui mériterait notre attention. La Cour
suprême de Terre-Neuve a été saisie de neuf questions. Cinq
ont reçu une réponse négative et quatre ont reçu
l'expression "not answered"; autrement dit, la Cour suprême de
Terre-Neuve ne s'est pas prononcée sur quatre des points dont elle avait
été saisie. Un des points qui m'apparaît important dans le
dossier consiste à se demander si le fait de déclarer intra vires
des pouvoirs de la Législature de Terre-Neuve le Water Reversion Act a
un impact direct sur le bail, qui est à la base du contrat. La Cour
suprême de Terre-Neuve ne s'est pas prononcée sur cette
question.
Par voie de conséquence, le dossier étant maintenant
devant la Cour suprême du Canada, la question se pose à savoir si,
même dans l'hypothèse où la Cour suprême dirait que
le Water Reversion Act est intra vires des pouvoirs de la Législature de
Terre-Neuve, cette loi a un effet extraterritorial et si cela peut toucher le
bail. Je pense que la moindre des choses, c'est de préparer toutes les
possibilités suivant ce que pourrait décider le jugement de la
Cour suprême. Je pense que, là-dessus, le député
d'Outremont a raison. Il a posé une question fort pertinente: Est-ce
qu'Hydro-Québec est prête à toutes les possibilités?
Je suis satisfait des réponses qu'Hydro-Québec vient de nous
fournir sur ce sujet.
Ce que je veux dire, essentiellement, c'est que nous pourrions en
arriver rapidement à une entente avec Terre-Neuve à la condition,
bien sûr, que nous puissions négocier avec quelqu'un.
J'étais moi-même présent à la conférence des
gouverneurs de l'Est américain et des premiers ministres des provinces
atlantiques où j'ai accompagné le premier ministre, M.
Lévesque, et M. Peckford a tenu une conférence de presse la
veille même de l'ouverture de cette conférence. C'était en
juin dernier. La question lui a été posée: Est-ce que vous
voulez vous asseoir avec Québec et négocier? Sa réponse a
été "no, no, no".
Alors, je ne voudrais pas qu'au Québec nos concitoyens aient
l'impression que nous tenons une position de refus global, en quelque sorte. Au
contraire, nous voulons ouvrir une négociation mais non pas avec
l'approche qu'a le Parti libéral du Québec dans ce dossier. Si je
retiens la voix autorisée dans le temps - ça remonte à
quelques mois - alors que M. Ryan était chef du Parti libéral, il
a eu l'occasion de faire une longue intervention à l'Assemblée
nationale sur une motion que j'avais moi-même mise devant
l'Assemblée nationale; c'était sur le projet de loi C-108,
maintenant adopté au Parlement fédéral, concernant le
corridor électrique et on avait eu l'occasion de discuter de l'ensemble
du dossier.
Il est hors de question que nous rejetions ou que nous déchirions
ce contrat que le Québec et Hydro-Québec ont signé.
Cependant, dans une approche de négociation d'ensemble du dossier, nous
avons fait savoir à Terre-Neuve que nous étions
intéressés à mettre en valeur, conjointement avec eux
s'ils le désirent, la puissance additionnelle du Haut-Churchill, de
même qu'à voir si le Bas-Churchill pourrait être mis en
valeur à l'Ile au Goéland et la rivière aux Rats
Musqués. Troisième élément de la
négociation, ce serait d'en venir à une entente afin de
régulariser les eaux des rivières de la Côte-Nord qui
prennent leur source au nord du tracé de 1927.
Il est bien entendu que ce que nous pourrions gagner dans cette
négociation, nous sommes prêts à le remettre sur la table
et à bonifier ce que Terre-Neuve peut retirer de ce contrat. Ce sera une
négociation donnant-donnant. Je pense que ce serait faire mal au
Québec et à la facture que les Québécois
reçoivent pour leur énergie hydroélectrique que de
simplement dire: Le contrat comme tel, nous y renonçons et, en bons
voisins, nous allons repartir à zéro. Je pense que ce n'est pas
de cette façon que l'on doive aborder le dossier. (10 h 45)
J'irai plus loin en disant que, dans l'hypothèse - parce que le
Parti libéral parle toujours dans l'hypothèse de ce que vous
allez faire si vous perdez en Cour suprême -je dis que, même dans
l'hypothèse où nous gagnons en Cour suprême, notre position
est exactement la même dans le dossier. Nous sommes prêts à
discuter avec Terre-Neuve et à voir comment on peut, entre voisins, en
arriver à s'entendre sur le règlement de l'ensemble de ce
dossier. J'ai comme l'impression que - je ne sais pas si l'appui peut
être qualifié comme étant très fort, mais même
l'ancien premier ministre, M. Bourassa, est parfaitement d'accord avec le
discours que je tiens ce matin et avec la position que le gouvernement a prise
tout au long du dossier - si MM. Johnson et Lesage étaient vivants, ils
tiendraient probablement le même discours. Il est entendu que les
impacts, sur le plan de l'énergie et sur le plan financier, seraient
énormes, que personne ne va gagner quoi que ce soit dans une position de
repli ou de refus.
Je voudrais profiter de l'occasion pour dire bravo à M. Bourbeau
qui, comme
président du conseil d'administration d'Hydro-Québec, a eu
l'occasion de prendre la parole récemment devant la Chambre de commerce
de Montréal et de refaire le point. Je puis dire là-dessus que la
position d'Hydro-Québec, dans ce dossier, et la position du gouvernement
du Québec sont absolument identiques et qu'aussitôt que nous
aurons quelque signal que ce soit, peu importe le jugement qui pourrait
être rendu par la Cour suprême du Canada dans le dossier, qui nous
viendrait de Terre-Neuve pour ouvrir une négociation, je suis prêt
à me rendre à Saint-Jean, à Halifax ou n'importe
où, pour entamer cette négociation que nous souhaiterions
entreprendre le plus vite possible afin d'en arriver à un
règlement le plus rapidement possible. C'est ce que je voulais dire, M.
le Président, sur Churchill.
M. Fortier: J'aurais juste deux mots à dire sur
Churchill.
Le Président (M. Desbiens): M. le député
d'Outremont, sur Churchill Falls.
M. Fortier: M. le Président, je crois que le ministre,
dernièrement, a fait une déclaration qui était nouvelle,
dans le sens qu'il a dit qu'il était prêt à négocier
même si le Québec avait gain de cause en Cour suprême du
Canada, ce qui indique une volonté de négocier beaucoup plus
grande que celle qu'il avait l'an dernier. Je me souviens qu'à
l'Assemblée nationale, je lui avais posé la question, à
savoir s'il croyait que la cause était bonne - c'était à
la veille du jugement qui était pour être rendu par la Supreme
Court of Newfoundland - il a dit: Notre cause est bonne, nous avons un contrat
et nous allons le respecter. Il semble bien que le ministre a entendu la voix
de la raison puisque notre position a toujours été celle qu'il
était très important de négocier pour régler ce
problème, que c'était la seule solution valable. Si le ministre,
maintenant, a entendu cette voix et qu'il l'indique d'une façon formelle
en déclarant, en particulier, qu'il est prêt à
négocier, même si la Cour suprême donnait raison à
Québec, je crois que c'est un message envoyé à M. Peckford
pour dire: Nous sommes très désireux de négocier, de toute
façon. Je crois que c'est une chose qui peut être utile pour
passer un message à M. Peckford, c'est-à-dire que le
Québec est disposé à négocier.
Je dois admettre qu'à venir jusqu'à maintenant, le langage
qu'avait tenu le ministre, à mon avis, en était un qui
était trop brutal, en disant: Nous avons un contrat, nous allons le
respecter et nous devons le respecter. Je crois que ce qu'il a dit la semaine
dernière se rapprochait beaucoup de la position que nous avons prise
nous-même il y a six mois, c'est-à-dire qu'il était
important de dire certaines choses qui permettraient à M. Peckford de
croire que le Québec veut réellement négocier. Dans ce
sens, je crois que nos positions se rapprochent ou la position du ministre se
rapproche de celle que nous avons prise il y a six mois. Sans vouloir lui
mettre les mots dans la bouche - parce que je sais qu'il n'accepte
peut-être pas la déclaration que nous avons faite - dans ce sens,
je crois qu'il est important d'indiquer à M. Peckford que le
Québec est désireux de négocier. Ce qu'il a dit la semaine
dernière ou l'autre semaine auparavant, en disant que nous serions
prêts ou le Québec serait prêt à négocier,
même si Québec avait gain de cause, est un pas dans la bonne
direction. Là-dessus, je crois qu'il a l'appui de l'Opposition.
M. Duhaime: Juste un commentaire, M. le Président.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Duhaime: À moins que je ne parle pas la langue que vous
entendez, je ne crois pas avoir dit, ce matin, que j'étais prêt
à ouvrir ce contrat. Ce n'est pas ce que j'ai dit et je le
répète. Ce que je dis ce matin, c'est exactement dans le
même sens du discours que j'ai tenu à l'Assemblée
nationale, il y a plusieurs mois, et c'est ce que j'ai dit au ministre Leo
Barry lorsque je l'ai rencontré à Montréal; c'est ce que
j'ai répété au ministre de l'Énergie, M. Marshall,
lorsque je l'ai rencontré à Halifax. Nous avons un contrat qui
est attaqué devant les tribunaux. Nous ne renoncerons pas à ce
contrat, cela est certain. Ce que je dis, cependant, c'est qu'il y a d'autres
éléments dans le dossier de Churchill qui méritent une
négociation d'ensemble: le Haut-Churchill, le Bas-Churchill et le
règlement des bassins hydrographiques des têtes des
rivières de la Côte-Nord.
Que le député d'Outremont ait des remords ce matin, j'en
conviens. L'Opposition a commencé le débat, la dernière
fois, à l'Assemblée nationale, en disant: Premièrement,
vous devriez reconnaître formellement le tracé de 1927 comme
étant la frontière. Je me souviens très bien avoir mis en
garde le chef de l'Opposition à l'époque - parce que
présentement on ne sait pas trop qui est le chef de l'Opposition -qu'il
recevrait très bientôt, d'abord, un certificat de citoyen
d'honneur de la ville de Saint-Jean et les clés de la ville, parce que
vous étiez prêt, à l'Assemblée nationale, à
donner à peu près tout à Terre-Neuve. Que voulez-vous que
je fasse? Qu'est-ce que vous voulez que je négocie lorsque j'ai en face
de moi un ministre de l'Énergie, à Terre-Neuve, et le premier
ministre de Terre-Neuve qui disent: "No, no, no, we will go to Court and
we are going to get the judgment". Alors, on va attendre et cela ne
change pas notre position. Que l'on gagne, que l'on perde, notre position est
la même; c'est une position d'ouverture et de négociation.
Ce que vous découvrez ce matin, M. le député
d'Outremont, comme étant un message, il y a belle lurette que le message
a été lancé et je ne crois pas que Terre-Neuve soit aussi
loin du continent pour que ce message n'ait pas été entendu. Ce
que vous devriez reconnaître comme étant très clair et
très net: À Terre-Neuve, il y a une décision qui a
été prise, nous ne voulons plus rien négocier dans ce
contrat. Plutôt que de prendre la position que vous avez prise à
l'Assemblée nationale, qui a été d'appuyer ce que
j'appellerais une folie furieuse dans le projet de loi C-108 du Parlement
fédéral consistant à vouloir nous faire hériter
d'un corridor électrique, vous auriez dû appuyer la proposition du
gouvernement qui consistait à refuser un pareil empiétement, qui
est un abus de droits, qui va nous compliquer la vie, qui est une entreprise
financière qui n'a ni queue ni tête. Aujourd'hui, vous semblez
découvrir les boutons à quatre trous en trouvant dans mon
discours un message. Il n'y en a pas, de message nouveau, c'est exactement le
même message qu'on répète depuis que je suis au
ministère de l'Énergie, depuis bientôt deux ans; c'est le
message qu'Hydro-Québec répète systématiquement
depuis le début. Je vais le demander à M. Bourbeau, si vous
permettez. M. Bourbeau, il y a combien d'années que vous suivez ce
dossier? Il y a combien d'années que vous proposez à Terre-Neuve
d'ouvrir des négociations sur l'ensemble du dossier? Quelle a
été la réponse de Terre-Neuve jusqu'à
présent?
M. Bourbeau (Joseph): Nous sommes dans le dossier avec
Terre-Neuve depuis 1963-1964. Le contrat a été signé en
1969, et depuis 1976, nous sommes devant les tribunaux, soit de Terre-Neuve.
Notre position a été de regarder l'ensemble des problèmes
qui se posent entre le Québec et Terre-Neuve; de regarder le contrat
Churchill; de regarder les rivières du Bas-Churchill, Gull Island,
Muskrat Falls et de regarder les rivières de la Basse-Côte-Nord.
C'est un ensemble de problèmes qui pourrait se régler à
l'avantage de Terre-Neuve, du Québec et aussi en aval, soit de l'Ontario
ou des États-Unis.
M. Fortier: Est-ce que, à venir jusqu'à maintenant,
autant que je le sache, vous n'aviez pas un mandat global de la part du
gouvernement pour négocier l'ensemble des problèmes? Je crois que
vous avez vous-même indiqué que votre mandat était dans le
domaine hydroélectrique et que vous vous en teniez à ce
mandat.
M. Bourbeau (Joseph): II y aurait des questions de
frontières peut-être à discuter, puis ce n'est pas à
Hydro-Québec de discuter de frontières. Tout ce qu'on veut, nous,
Hydro-Québec, c'est de regarder le contrat Hydro-Québec-Churchill
Falls, et on peut appuyer le ministre, qui est la personne
désignée, je crois, pour entamer les négociations avec M.
Marshall, le ministre de l'Énergie de Terre-Neuve.
M. Fortier: Je ne voudrais pas...
M. Duhaime: Un dernier point pour l'information de tout le monde.
Récemment, la Cour suprême a rendu un jugement dans un des
dossiers incidents au dossier de Churchill. La Cour suprême y a reconnu
ce qui était marqué dans le contrat, que ce sont les lois du
Québec qui s'appliquent et que ce sont les tribunaux du Québec
qui devraient être saisis de tout litige qui découlerait des
contrats intervenus. On a plaidé pendant six ans avant que le
gouvernement de Terre-Neuve comprenne que quand c'est prévu dans un
contrat que ce sont les tribunaux du Québec qui, par convention ou par
contrat, seront saisis d'un litige, la Cour suprême a tout simplement
reconnu cela. À partir d'une attitude comme celle-là, peut-on
encore espérer, peu importe le jugement à venir, qu'on puisse
trouver du côté terreneuvien une attitude qui consisterait
à sortir le dossier ou encore à dessaisir les tribunaux, si je
puis dire, pour en venir à s'asseoir à une table et à
discuter? Je vous rappelle, M. le député d'Outremont, que nous ne
sommes d'accord avec votre position en aucune manière. Vous ne me ferez
pas oublier les discours que vous-même et votre parti avez tenus à
l'Assemblée nationale lors du débat sur la motion au printemps
dernier où, parce que le jugement de la Cour suprême de
Terre-Neuve venait d'être rendu, vous craigniez que tout soit mis en
péril. Vous avez fait référence tantôt à la
question que vous m'aviez posée à l'Assemblée nationale,
où je vous avais répondu: Oui, le jugement à Terre-Neuve
peut être rendu un jour ou l'autre, je n'ai pas de renseignements
particuliers. Le jugement effectivement a été rendu le lendemain
par la Cour suprême de Terre-Neuve. Je ne connais pas vos relations avec
le greffe de la Cour suprême de Terre-Neuve. Je peux dire que je n'en ai
aucune. Je n'ai jamais été très enthousiaste sur nos
chances de gagner en Cour suprême à Terre-Neuve sur ce
dossier...
M. Fortier: À ce moment, vous avez dit oui.
M. Duhaime: ... avec tout le respect et toute la
déférence que j'ai pour ces gens de la cour. Ne venez pas dire
devant cette
commission aujourd'hui que vous découvrez un nouveau message et
que notre position ressemble à la vôtre. C'est plutôt
l'inverse qui est en train de se produire et je voudrais que la population le
sache d'une façon bien claire.
Le Président (M. Desbiens): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: Juste pour terminer ce dossier, j'aimerais corriger
ce que le ministre a dit en ce qui concerne le débat sur le projet de
loi C-108. Notre position -j'espère que le ministre va le
reconnaître -en ce qui concerne les lignes de transport d'énergie,
c'est que nous avons dit d'une façon très claire que, quelles que
soient les lignes de transport d'énergie qui seraient
éventuellement et possiblement construites au Québec, elles
devraient être la responsabilité d'Hydro-Québec.
Là-dessus, notre position raffermissait la juridiction du Québec
ou du moins l'autorité d'Hydro-Québec sur les lignes de transport
qui seraient construites au Québec même. Sans vouloir aller plus
loin en ce qui concerne ce débat sur le projet de loi C-108, je
répète ce que j'ai dit: l'impression qui se dégage - c'est
mon impression personnelle - c'est que le gouvernement semblait être
beaucoup plus sûr qu'il ne l'est maintenant de la possibilité de
gagner ce différend en Cour suprême. Devant les
répercussions considérables qu'aurait un jugement négatif,
puisqu'on ne peut pas présumer de la logique de M. Peckford, il pourrait
y donner suite, même si j'ai dit tout à l'heure qu'il serait tout
à fait ridicule de la part de Terre-Neuve de saisir les actifs et
ensuite de refinancer la dette de Churchill Falls Corporation à des taux
d'intérêt beaucoup plus élevés. C'est une
possibilité que tout ministre et que tout président
d'Hydro-Québec devraient chercher à éviter, parce que,
bien sûr, s'il fallait que le gouvernement de Terre-Neuve saisisse les
actifs de Churchill Falls et qu'il soit dans l'obligation de refinancer la
dette à un taux d'intérêt beaucoup plus
élevé, et si le gouvernement croit maintenant que les chances de
gagner en Cour suprême sont moins bonnes qu'elles ne l'étaient il
y a un an, à ce moment, ce que je disais, c'est qu'il est du meilleur
intérêt des contribuables du Québec de négocier le
plus tôt possible. Dans ce sens, je disais que, pour ma part,
après les propositions que nous avions faites, la proposition qu'a faite
le ministre, même s'il croyait qu'il ne lançait pas de message, je
l'ai perçue comme tel. Je dis que, dans cet ordre d'idées, nous
croyons que même si, malheureusement, il semblerait difficile d'arriver
à une entente négociée avant le jugement de la Cour
suprême, le gouvernement aurait l'appui du Parti libéral du
Québec s'il tentait tout ce qu'il peut - même s'il dit avoir fait
beaucoup jusqu'à maintenant - pour éviter cette
éventualité. Je ne désire pas faire de la petite politique
avec l'argent des contribuables. Je crois que c'est trop important, M. le
Président. On parle d'augmentation des tarifs cette année qui
seront peut-être moins élevés que les années
précédentes, mais, lorsqu'on croit qu'il sera possible d'avoir
une augmentation des tarifs de 30%, s'il fallait que Terre-Neuve gagne en Cour
suprême... Je crois que d'un côté comme de l'autre de
l'Assemblée nationale nous devons chercher à trouver des
solutions qui aillent dans le meilleur intérêt des
Québécois.
M. Duhaime: Écoutez, M. le Président...
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Duhaime: ... je ne voudrais pas éterniser le
débat sur l'affaire Churchill, mais cela n'est pas aussi clair que le
député d'Outremont voudrait le laisser entendre. Il faudra
d'abord attendre le jugement et voir quelle est la portée de ce
jugement. Si vous voulez répéter tout haut ce que vous venez
juste de dire, je n'ai d'objection en aucune manière, mais je peux vous
dire une chose: La question qui m'apparaît fondamentale, si on veut y
répondre sérieusement, c'est de savoir si le Québec a tout
fait pour essayer d'en venir à une entente à l'amiable. La
réponse est oui. Mais pour satisfaire M. Peckford et M. Marshall, ou
encore M. Barry, il aurait fallu que le gouvernement du Québec et
Hydro-Québec renoncent au contrat signé. C'est cela leur position
et c'est inacceptable. Nous n'allons pas renoncer à ce contrat et je
suis prêt à dire ceci: Le jugement de la Cour suprême va
très certainement trancher sinon toute la question, du moins une partie.
Je fais l'hypothèse suivante: Même si la Cour suprême disait
que ce projet de loi, le Water Revision Act, est intra vires des pouvoirs de la
Législature de Terre-Neuve, la question que tous les juristes se posent
aujourd'hui, et des opinions, il y en a dans toutes les directions, est la
suivante: Est-ce que le fait de déclarer que Terre-Neuve aurait le droit
constitutionnel de voter cette loi... La question n'est pas tellement
là, à mon point de vue. C'est beaucoup plus de savoir quel est
l'impact de cette loi sur le bail et les contrats qui en découlent.
Je voudrais dire au député d'Outremont que son souvenir du
débat sur la motion sur le corridor n'est pas le même que le mien
parce que tous les discours que j'ai entendus des députés
libéraux à l'Assemblée nationale, et
particulièrement de M. Ryan qui, je pense, avait une intervention en 16
ou 17 points... J'étais à peu près certain qu'il allait
conclure en disant: Nous allons appuyer le
gouvernement, tous leurs discours allant exactement dans le même
sens que notre proposition, sauf que quand est arrivé le moment de
livrer la marchandise, c'est-à-dire de voter, vous avez
décidé d'appuyer la position du Parti libéral du Canada
qui votait le projet de loi C-108 en même temps devant le Parlement
fédéral. C'est exactement ce que vous avez fait. Que vous en ayez
du remords aujourd'hui ou du regret, je suis bien prêt à
sympathiser avec vous autres, mais c'est le lit dans lequel vous vous trouvez
actuellement.
Programme d'équipements
Le Président (M. Desbiens): On peut passer à un
autre point, cela serait le programme 4, le programme d'équipements.
M. Fortier: M. le Président, nous avons déjà
parlé du programme de l'équipement. Alors, peut-être que ce
serait possible de raccourcir nos périodes de questions puisque
déjà on a couvert certains des sujets que nous avions à
l'ordre du jour.
On a parlé de fragmentation de projets. Compte tenu du fait qu'il
est très difficile de planifier - je ne veux pas revenir sur les
problèmes de méthodologie - et compte tenu de la position
d'Hydro-Québec, vous dites qu'à l'avenir il faudra fragmenter les
projets. Je crois que M. Coulombe a indiqué que, bien sûr, les
économies d'échelle vont être beaucoup plus difficiles
à faire s'il s'agit de projets fragmentés. C'est comme si en
Ontario, alors qu'on construit des centrales nucléaires et que dans le
passé on les construisait quatre tranches à la fois ou même
huit tranches à la fois, ce qui permettait de placer des contrats en
série, on construisait ces centrales une à la fois. Quand il
s'agit de projets hydroélectriques, on sait la difficulté de les
fragmenter puisque, d'une part, les infrastructures et, d'autre part, les
problèmes hydroélectriques, le contrôle des eaux en
particulier, obligent l'ingénieur à adopter plutôt des
solutions d'ensemble. Je ne dis pas que c'est impossible, je dis simplement que
ces solutions sont sûrement techniquement possibles, mais qu'elles
amèneraient Hydro-Québec à faire en sorte que le
coût de revient de l'électricité produite par des projets
fragmentés soit beaucoup plus élevé que le coût
total quand les projets sont aménagés ensemble. Je ne sais pas si
les études d'Hydro-Québec sont suffisamment avancées pour
nous indiquer si, par rapport à d'autres formes d'énergie, cela
remet en question la rentabilité de certaines rivières. Dans le
passé, il y a eu des estimations comparatives avec le nucléaire
en particulier, mais je sais que plusieurs rivières étaient
encore moins coûteuses à développer que l'énergie
nucléaire en particulier; je prends cette dernière seulement
comme référence, je n'en fais pas une suggestion de construction
de centrales à ce moment-ci.
Dans quelle mesure un programme fragmenté augmenterait-il le
coût moyen de la construction de barrages hydroélectriques,
même si cette solution avait l'avantage de limiter les investissements,
du moins l'ampleur des investissements, et de permettre davantage à ceux
qui sont responsables du financement de contrôler leur financement d'une
façon plus précise?
M. Coulombe (Guy): En fait, vous avez parfaitement raison et les
études sont actuellement entreprises à Hydro-Québec. Elles
ne sont pas entreprises d'hier, elles sont entreprises depuis un an ou deux,
surtout pour les grands projets de la Baie-James, pour essayer de les diviser
en phases qui pourraient débuter - si les circonstances changent, on
pourrait les arrêter - à des coûts acceptables en termes de
rentabilité. Ce qu'on veut ajouter, c'est d'accélérer
l'étude de projets de moindre envergure en y introduisant des variables
de rentabilité qui soient quelque peu différentes. De plus, on
veut ajouter un programme accéléré de réfection de
centrales. Ces études ne sont pas terminées. Notre objectif, dans
la révision du plan de 1983, est d'en arriver à une
problématique très claire là-dessus, avec des
critères de rentabilité qui nous permettent de prendre des
décisions basées finalement sur une rentabilité certaine.
Au moment où on se parle, ces études avancent, mais elles ne sont
pas rendues à un point qui permette de dire si les économies
d'échelles peuvent être compensées par d'autres
critères qu'il faudrait introduire. C'est à l'étude
à l'heure actuelle. Notre objectif, c'est que dans le plan de 1983 on
puisse avoir des clarifications beaucoup plus définitives sur ce
thème.
M. Fortier: Ce plan de 1983 serait normalement prêt
à cette période de l'année, à ce moment-ci?
M. Coulombe: À cette période, l'an prochain, on
pense avoir fait le point sur cette problématique, mais on n'a pas
encore de certitude pour dire si cela est réaliste ou pas. C'est
vraiment une ouverture, mais on pense qu'il faut attacher une certaine valeur
à la flexibilité et à la souplesse d'adaptation
d'Hydro-Québec. C'est très difficile de mettre une valeur
économique ou comptable à cette dimension, et c'est
là-dessus qu'on creuse à l'heure actuelle.
M. Fortier: Mais votre étude va considérer quand
même l'ampleur des... va revoir l'ensemble de la rentabilité ou du
profit des centrales qui devaient être aménagées.
Vous avez dit, je crois, laquelle des centrales devait être mise
en service incessamment. On parle de LG 2 ou de LG 1?
M. Coulombe: LG 1, qui est la plus...
M. Fortier: LG 1. Quelle est sa capacité?
M. Bourbeau (Joseph): 1000 mégawatts.
M. Fortier: 1000 mégawatts. On entend des rumeurs disant
que les turbines sont installées dans certaines centrales et qu'elles ne
tournent pas. Dans quelle mesure des turbines dont l'installation est tout
à fait complétée ne tournent-elles pas
présentement? Est-ce parce qu'on ne peut pas vendre
l'électricité ou parce que les lignes de transport ne sont pas
prêtes?
M. Coulombe: Je demanderais à M. Amyot de répondre
là-dessus. D'une façon certaine, c'est lorsque dans beaucoup de
centrales la demande est moins forte. Cela n'a rien à voir avec la
demande globale, c'est simplement la façon dont les gens utilisent
l'électricité. Ils en utilisent moins au mois de juillet qu'au
mois de décembre ou janvier. De plus, il y a des programmes
réguliers de réfection des turbines: certaines sont
arrêtées pour des réfections tout à fait normales
dans un programme d'équipements. M. Amyot peut peut-être
compléter cette perspective.
M. Amyot (Paul): Au sujet de l'arrêt du fonctionnement
d'une centrale hydraulique, il n'y a aucun problème à
arrêter une turbine pour un certain temps. Ce n'est pas comme pour les
groupes turbo-alternateurs où vous pouvez avoir des problèmes de
corrosion peut-être plus...
M. Fortier: Ma question n'était pas sur le plan technique,
ma question était surtout sur le fait qu'elles étaient
arrêtées parce que la demande n'était pas là ou
parce qu'il y avait eu des délais inopportuns dans la construction des
lignes de transport.
M. Amyot: Non, les lignes de transport sont à temps et
sont même en avance. Nous avons même décidé de
retarder la construction de la cinquième ligne parce que la demande
n'est pas là, on n'a pas besoin de transporter cette énergie en
dehors du complexe.
M. Fortier: Ce que vous me dites, c'est qu'il n'y a pas de
délai indu, qui serait attribuable à la construction des lignes
de transport d'énergie.
M. Amyot: Aucun. Le seul délai, c'est qu'on a
essayé d'ajuster le programme à la demande. Vous avez vu la
quantité d'énergie supplémentaire qu'on a dans le
réseau, cela ne sert à rien de continuer à
accélérer la construction si cet équipement ne sert pas.
On a fait une étude en profondeur. On a regardé l'an passé
si cela avait été avantageux de retarder LG 3, on a fait
l'étude économique, on a dit: ce n'est pas avantageux. On a
repris la même chose cette année avec LG 4 et c'est la même
chose; les travaux sont tellement avancés sur LG 4 que cela
coûterait plus cher d'arrêter LG 4 même si on n'a pas besoin
d'énergie tout de suite... On a dit: on va continuer les travaux de LG 4
parce que 85% des travaux de La Grande phase 1 sont terminés, il reste
à faire le 15%; étant donné que toute l'infrastructure est
en place, que le personnel est là et bien rôdé, c'est mieux
de continuer ces travaux. Par contre, on a vu qu'à MANIC-5 puissance
additionnelle, les travaux sont loin d'être aussi avancés, on a
à peu près 30% des travaux; là, on se permet
d'arrêter, on va continuer un peu les travaux l'an prochain; on va finir
la phase civile, excavation et un peu de bétonnage et ensuite on est
prêt à mettre le reste de la construction de la centrale dans les
"boules à mite" et à recommencer lorsque la demande sera
là.
M. Fortier: Merci. Une question qui touche les projets, les
programmes d'équipements ou du moins les études. Je crois que
vous avez indiqué hier que les études qui ont été
faites jusqu'à maintenant totalisent une somme d'environ 600 000 000 $.
Je sais par ailleurs que toutes les études qui sont faites sont toujours
capitalisées, c'est-à-dire qu'elles n'entrent pas dans les
dépenses d'exploitation. Et on sait que dans votre rapport, vous
indiquez que depuis quelques années, les dépenses d'exploitation
ont augmenté en moyenne de 24% par année. C'est donc dire que
plusieurs des dépenses qui ont été faites...
peut-être le commun des mortels croyait que les études
étaient chargées au budget de l'exploitation, mais elles sont
capitalisées, ce qui a pour résultat bien sûr de cacher
d'une certaine façon leur ampleur... Ce qui veut dire qu'à toutes
fins utiles, en plus des dépenses d'exploitation courante, il y a
d'autres budgets d'étude, qui sont capitalisés et qui seront
inclus dans la capitalisation lorsque les centrales seront mises en marche.
Cela a un certain avantage et un certain désavantage
puisqu'à ce moment, on peut se poser des questions: est-ce que de fait
il y a un contrôle suivi des dépenses de capital sur les
études, puisque, comme cela n'apparaît nulle part dans les profits
et pertes, il pourrait y avoir exagération dans les études? Je ne
présume pas de cela. Mais
la question que je pose tient compte du fait que vous avez dit dans
votre rapport, qu'il y a des études qui ont été faites,
peut-être avec raison, mais dont la réalisation va être
reportée aux calendes grecques.
On prend tout le nucléaire, vous avez investi beaucoup d'argent
pour des études de quatre unités ou autre et tout cela va
être reporté aux calendes grecques. La question que je poserais,
c'est une question à deux volets. La première c'est, à
l'avenir, dans quelle mesure y aurait-il des contrôles plus
sévères de l'ampleur des études qui sont faites? Quoique
là, il va falloir prendre en considération le désir de
garder certaines équipes occupées, puisqu'il faudrait bien
qu'à Hydro-Québec et chez les ingénieurs-conseils on garde
un minimum de "know-how" et des équipes. Et la deuxième question,
c'est que pour le budget de 1983 en particulier, dans quelle mesure, avez-vous
tenu compte du fait que si les études sont reportées aux calendes
grecques ou si la réalisation des études est reportée aux
calendes grecques, normalement, en suivant les bonnes données
comptables, il faudrait faire passer ces dépenses au budget
d'exploitation, parce qu'on ne peut plus dire que ce sont des dépenses
de capitalisation?
M. Coulombe: Vous soulevez un problème qui est très
réel à Hydro-Québec à l'heure actuelle. Je pense
que votre analyse est bonne sauf peut-être pour le mot "cacher"; en
d'autres mots...
M. Fortier: Pour le commun des mortels... (11 h 15)
M. Coulombe: ... il ne s'agit pas de cacher des dépenses,
ce sont des pratiques tout à fait acceptables et comptables
demandées même par les vérificateurs externes, de
capitaliser les dépenses d'études qui conduisent à des
projets. Il n'y a eu aucun changement dans la méthode comptable à
l'Hydro, cela a toujours été traditionnellement le cas et cela
continue à en être ainsi. Voici un exemple précis des
problèmes que cela peut poser. Dans le cas des réserves
pompées dans le cadre du projet Delaney, Hydro-Québec a dû
étudier cinq, six, ou sept sites possibles pour ce genre de centrale.
C'était normal, puisqu'il fallait optimiser les dépenses d'un tel
projet; qu'en est-il arrivé? C'est qu'après un certain nombre
d'années, il y a des sites qui ont été
éliminés pour finalement en arriver à en déterminer
un.
Les études relatives aux autres sites s'étaient
accumulées en termes de dépenses capitalisées. À un
moment donné, il a fallu dire: Vu qu'il y a un site qui est
supérieur aux autres, selon les critères techniques,
économiques, etc., les dépenses relatives à ces autres
projets ont été enlevées des dépenses
capitalisées et ont été mises dans les dépenses
d'exploitation. C'est ce qui vous explique que, l'an passé, dans le
bilan d'Hydro-Québec, on a effacé des dépenses
d'études de 25 000 000 $, on les a sorties des dépenses
capitalisées, on les a mises dans les dépenses d'exploitation et
on a dit: Ces dépenses passent aux dépenses d'exploitation. C'est
une dépense au sens strict. Toutes les études autres que celle de
Delaney pour le type de centrale à réserve pompée ont
été éliminées, elles ont été
effacées des livres en les plaçant dans la colonne
"dépenses d'exploitation". Cela s'est ajouté au rythme des
dépenses. Annuellement, il faut qu'Hydro-Québec se garde une
réserve dans ses livres pour permettre l'élimination
d'études qui ne se sont pas révélées inutiles, il
était absolument nécessaire de les faire, mais lorsque les
études sont en fonction d'un choix, lorsque le choix est fait, il faut
que les autres dépenses soient rendues à l'exploitation. C'est ce
qui se produit couramment.
Maintenant, pour l'avenir, s'il y a des projets qui sont
retardés, le problème ne se pose pas en 1983 parce que la plupart
des grands projets, même s'ils sont retardés de quelques
années, il y a des travaux essentiels qui vont continuer à se
faire, il y a des équipes qui vont être sur le terrain pour
continuer les travaux hydrologiques, etc., M. Amyot pourra parler mieux que moi
du genre de travaux que cela exige. Tout cela va se poursuivre certainement en
1983 et peut-être en 1984. S'il y a un affaissement de la demande, ce que
personne ne souhaite, mais si jamais cela se produit, et qu'il y a des projets
qui sont encore retardés, là il va y avoir des décisions
assez importantes à prendre pour Hydro-Québec, d'effacer ce genre
d'études, en partie, mais ce sont des décisions qui devront se
prendre en 1984 ou 1985. Toutefois, cela peut poser un problème
d'équilibré non pas énorme, puisqu'on ne parle pas de
sommes très élevées par rapport aux sommes globales
d'Hydro, mais il va y avoir un problème d'interprétation
comptable parce que c'est un problème comptable.
M. Fortier: C'est un problème comptable, mais cela
pourrait affecter tout de même...
M. Coulombe: ... des dépenses d'exploitation.
M. Fortier: Oui, oui, puisque vous avez comme ambition de les
limiter. Cela va être des dépenses inattendues qui auront
été faites par le passé, mais qui seront
comptabilisées comme dépenses à ce moment. Je voudrais
tout de suite dire que quand j'ai dit "caché" tout à l'heure, je
ne voulais pas imputer de motif à Hydro-Québec; c'est
"caché" dans le sens comptable, ce sont des dépenses qui
n'apparaissent pas quand on lit le rapport d'Hydro-Québec.
M. Coulombe: Sur la ligne des dépenses d'exploitation.
M. Fortier: Je ne voulais pas imputer de motif à
Hydro-Québec. Tout simplement, ma question vient d'obtenir sa
réponse. Cela pourrait avoir un impact relativement important dans les
profits et pertes d'Hydro-Québec et peut-être indirectement sur la
tarification. Dans la mesure où cela peut avoir un impact, c'est
là que j'avais une certaine inquiétude. J'imagine qu'en
particulier, si l'on reporte le nucléaire après l'an 2000, il y
aura une décision à prendre à savoir si toutes les
études sur le nucléaire sont effacées? Alors, on peut
parler de plusieurs millions de dollars, à titre d'exemple.
Pour l'an prochain, pour 1983, vous avez inclus un montant de 25 000 000
$?
M. Coulombe: Non. M. Fortier: Non.
M. Coulombe: Cela, c'est pour 1981 où on a effacé
pour 25 000 000 $ d'études.
M. Fortier: Pour 1983, est-ce que vous avez inclus un
montant?
M. Coulombe: Pour 1983, on a une réserve, mais on n'a pas
encore pris de décision sur le montant exact. On a une réserve
globale pour ce genre d'éventualité comme en 1982,
d'ailleurs.
M. Fortier: Étant donné que vous voulez limiter vos
dépenses, j'imagine que vous allez serrer de très près les
différentes dépenses d'études qui sont faites
présentement et peut-être faire des recommandations au
gouvernement de cesser certaines études qui apparaissent, à
toutes fins utiles, inutiles. Je pensais au projet Archipel qui semble vous
être imposé et sur lequel le gouvernement insiste pour des raisons
autres. Compte tenu de la situation financière d'Hydro-Québec,
j'imagine qu'il faudrait mettre le holà à un certain moment
donné et dire que ce n'est pas rentable et qu'on ne continue pas
à faire des études d'une façon indéfinie. À
ce moment-là, il va falloir les passer dans les dépenses
d'exploitation.
M. Coulombe: Mais il ne faut pas déduire de ce que j'ai
dit que le projet Archipel est dans cette catégorie. Il y a d'autres
études qui ont été entreprises et dont il faudrait
peut-être diminuer l'intensité, compte tenu de la situation.
Compte tenu du fait que ce genre de travaux exige plusieurs années
d'études vraiment non spectaculaires d'équipes qui sont sur le
terrain et qui travaillent d'une année à l'autre sur le niveau
d'eau des rivières et ainsi de suite, beaucoup de ces travaux doivent se
poursuivre. La raison pour laquelle on peut dire aujourd'hui
qu'Hydro-Québec est dans une position exceptionnelle de pouvoir
intervenir, c'est justement parce qu'il y a une accumulation d'études
qui lui permettent, si jamais la conjoncture change, d'agir rapidement. Le cas
Archipel est différent en termes de cette problématique.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Portneuf.
Le projet Delaney
M. Pagé: Merci, M. le Président. Ma participation
à ces travaux, comme celle de février 1981, porte
évidemment sur la programmation d'Hydro-Québec. Elle porte
aujourd'hui sur la question de la tarification pour la prochaine année,
mais vous comprendrez que j'ai un intérêt beaucoup plus
particulier en ce qui concerne la programmation et la formulation qui nous sont
présentées par Hydro-Québec aujourd'hui.
M. le Président, vous aurez compris que je me
réfère au projet de construction d'une centrale, de l'usine de
pompage, le projet Delaney, qui est prévu comme devant s'implanter dans
la région de Québec. Nous espérons bien que ça
pourra se concrétiser et que les travaux pourront commencer en 1985, tel
que prévu.
M. le Président, sans prendre trop le temps de cette commission,
on se rappellera que le ministre de l'Énergie et des Ressources, M. le
député de Saint-Maurice, n'était pas le ministre de
l'Énergie et des Ressources lorsque cette commission a
siégé en 1981 et on ne me reprochera pas de faire un bref
historique de ce projet qui a été amorcé à la fin
de l'année 1973, plus particulièrement, plus concrètement
au début de l'année 1974. Essentiellement, Hydro-Québec se
disait à cette période: La consommation
d'électricité au Québec est si grande qu'on prévoit
que, dans les années 1983, 1984 et 1985, la demande
d'électricité en période de pointe sera telle qu'on se
doit de prévoir la construction d'une centrale pour alimenter le
réseau en période de pointe spécifiquement.
Comme le disait tout à l'heure M. Coulombe, plusieurs
études ont été amorcées dans différentes
régions du Québec et même quelques études dans la
grande région de Québec. Il y a eu des avant-projets
préliminaires, des projets préliminaires, des avant-projets
définitifs, etc. et, pendant tout ce temps, au crédit
d'Hydro-Québec, je dois dire qu'elle a toujours su jouer "fair play"
avec les citoyens de la région. Hydro-Québec a
dégagé de ce dossier une politique d'information à la
population et de relations publiques qui est tout à son honneur. Tant et
si bien que les gens de la région de Québec, plus
particulièrement les gens du comté de Portneuf, ont pu suivre la
préparation du dossier.
En 1981, à l'automne 1981, la programmation
présentée par M. Boyd, à l'époque, prévoyait
que les travaux de la centrale pourraient commencer incessamment après
les travaux de cette commission. On se rappellera d'ailleurs qu'un
échange fructueux entre plusieurs collègues nous avait permis de
constater que les études étaient complétées, d'une
part, et que, d'autre part, Hydro-Québec attendait pour ce projet le feu
vert du ministère de l'Environnement. Au journal des Débats de
cette commission, on constate que M. Boyd indiquait clairement que, compte tenu
de la demande en période de pointe, les permis du ministère de
l'Environnement et l'acceptation de la part du Conseil des ministres devaient
être formulés avant le 1er juillet 1981. D'ailleurs, je ne lui en
fais pas grief, mais on se rappellera que le député de Matane,
alors ministre de l'Énergie et des Ressources, annonçait - et
j'en étais très heureux - au beau milieu de la campagne
électorale de 1981, la réalisation du projet.
Toutes ces études, j'en conviens, ont été faites en
fonction d'une hausse de la consommation annuelle d'environ 6,6% et,
évidemment, des effets que cela pouvait comporter sur la demande
d'électricité en période de pointe. Les documents que vous
déposez à l'appui de votre programmation indiquent que la
consommation d'électricité au Québec a diminué et
ce, pour plusieurs motifs. Vous évoquez une volonté bien
arrêtée chez Hydro-Québec de stimuler, dans les prochaines
années, la consommation d'énergie hydroélectrique et vous
visez un taux de croissance, malgré qu'il soit difficile, nous en
convenons, d'établir ce que sera la croissance réelle dans les
cinq, six ou sept prochaines années; il y a le facteur
démographique auquel vous avez référé hier, mais il
y a aussi toute cette question de la production intérieure brute du
Québec, de savoir quelle sera la consommation, quelle sera la part
d'électricité dans la consommation d'énergie au
Québec et tout cela.
Dans les documents que vous proposez, vous dites que le prochain projet
qui sera amorcé, selon votre programmation, sera la centrale de pompage
Delaney, dont la date de début de construction est prévue en
1985. Cette centrale produira éventuellement 2110 mégawatts. On
se rappellera qu'à l'origine le projet avait été
conçu pour produire 1010 ou 990 mégawatts.
Au tableau 19 du document, je retiens que le taux prévu est de
3,7%. Essentiellement, si le taux d'augmentation est de 3,7%, la centrale de
pompage Delaney devrait être mise en service entre 1990 et 1992. Si ce
taux est trop optimiste et qu'il est effectif à 2,6%, cela irait en
1996-1998. Cependant, si nos prévisions sont en deçà de la
croissance réelle, c'est-à-dire que, si le taux d'augmentation de
la consommation est de 4,7%, cela pourrait être devancé à
1988-1990.
Lors de la commission parlementaire de février 1981, nous avions
passé un moment assez important en termes de temps sur cette question du
comportement de la demande d'électricité en période de
pointe. J'ai cru comprendre, de la commission parlementaire de février
1981, que le suréquipement à Manic 5 qui allait permettre la
production de 980 mégawatts pour la période de pointe visait
à combler une demande de pointe plus régulière et que la
centrale Delaney allait, elle, fournir de l'électricité pour
répondre à une demande de pointe plus aiguë.
Je comprends que, si, d'une part, Hydro-Québec a de la
difficulté à prévoir quelle sera la consommation
d'énergie de base dans les prochaines années, il devient d'autant
difficile, sinon plus difficile, de prévoir quelle sera la demande de
pointe. Cependant, je suis persuadé qu'Hydro-Québec s'est
tracé un profil de ce que pourrait être dans les prochaines
années la demande en période de pointe et j'aimerais bien vous
entendre à cet égard.
M. Coulombe: Le plan d'équipement actuel est très
clair; je dis bien le plan d'équipement actuel. La centrale Delaney est
prévue, avec les hypothèses qui sont dans le plan, pour 1985.
Maintenant, en ce qui concerne le comportement de la demande de pointe, c'est
évident que là aussi il y a des modifications qui sont à
l'horizon. Prenons, par exemple, un programme nouveau de vente qui est dans le
plan à l'heure actuelle, le programme biénergie. Dans quelle
mesure ce programme va-t-il influencer ce qu'on appelle la pointe? C'est
évident que, si ce programme a un très grand succès, cela
aura de l'influence sur la pointe en ce sens que, si les gens se chauffent au
mazout dans les périodes de pointe, il va y avoir une demande moindre
d'électricité pour la pointe; si le programme n'est pas un
succès, la pointe va se comporter de façon différente. (11
h 30)
Ce qu'on peut dire à l'heure actuelle, c'est qu'avec les
hypothèses qui sont actuellement sur la table, le projet Delaney en 1985
a un sens. Quelle va être l'évolution des prochaines
années? Il y a beaucoup de questions qui se posent et je crois
qu'Hydro-Québec se doit d'être le plus honnête possible en
disant que, s'il y a une
redéfinition importante de la demande de pointe, c'est
évident qu'un projet de cet ordre devra être
réétudié en fonction des nouveaux éléments
qui seraient sur la table. Tout ce qu'on peut dire, c'est qu'à l'heure
actuelle, ce projet est programmé pour 1985; l'évolution de la
demande, on va la suivre tous ensemble et on verra quel sera l'impact de ces
programmes sur la demande de pointe. C'est tout ce qu'on peut dire à
l'heure actuelle, mais, au moment où on se parle, le programme est
prévu pour débuter en 1985.
M. Pagé: J'ai cru comprendre qu'Hydro-Québec avait
affronté des problèmes dans les travaux de suréquipement
à Manic 5. Est-ce qu'il y a une relation? Est-ce qu'il y a un lien entre
la terminaison des travaux qui permettront de produire 980 mégawatts
à Manic 5 avec la centrale Delaney? Autrement dit, est-ce qu'elle
concurrence entre les deux projets? Est-ce que la terminaison des travaux
à Manic 5 peut reporter d'autant la construction de la centrale Delaney
ou, encore, si Hydro-Québec juge qu'elle ne peut mener à terme
les travaux prévus à Manic 5, est-ce que ça pourrait
accélérer d'autant la construction de la centrale Delaney?
M. Coulombe: II n'y a pas de compétition entre les
projets. En fait, on a discuté hier soir des problèmes qu'il y a
eu à Manic 5; cela a retardé de quelques mois le début des
travaux de Manic 5, puissance additionnelle. Le retard qui est apporté
à l'heure actuelle ou l'étalement qu'on fait dans le projet est
strictement à cause d'un affaissement de la demande. Il n'y a pas de
compétition entre ces deux projets, en ce sens qu'ils répondent
à des problèmes de pointe qui sont différents.
L'étalement de Manic 5 sur trois ans est causé carrément
par un affaissement de la demande. C'est la stratégie pour Manic 5, qui
va reprendre tôt ou tard.
En ce qui concerne Delaney, je viens de vous dire que la structure
actuelle du plan d'équipement prévoit le début des travaux
en 1985, mais je pense qu'il ne faut pas écarter l'hypothèse que
la demande se comporte différemment, que les projets de vente de
biénergie aident à l'impact et il ne faut pas exclure de
façon définitive l'hypothèse d'une
réévaluation de ce plan d'équipement. Je crois
qu'Hydro-Québec se doit d'être perpétuellement à
l'affût de toutes les variables qui peuvent influencer la demande, de
telle sorte que le plan d'équipement soit compatible et de telle sorte
qu'à la limite, les tarifs soient à un niveau qui soit compatible
avec les dépenses d'Hydro-Québec et le plan d'équipement
d'Hydro-Québec.
M. Pagé: Merci, M. Coulombe. Strictement...
Le Président (M. Desbiens): M.
Bourbeau.
M. Bourbeau (Joseph): La seule relation qui existe entre le
report de ces deux projets, Manic 5 et la centrale Delaney, est causée
par un surplus de puissance en 1985 dans le réseau, mais ce surplus, on
va l'écouler en 1986-1987; c'est ce qui nous a permis de reporter Manic
5 de trois ans et ensuite Delaney.
M. Pagé: Deux autres questions très
spécifiques, M. le Président.
Au tableau 19 - soyons plus optimistes que les prévisions et
supposons que le taux de croissance de la demande, dans des délais assez
brefs, grimpe à 4,7% - vous prévoyez la date de mise en service
possible de ce projet pour 1988, 1989 ou 1990. On se rappellera que, dans le
projet initial, lors de la commission parlementaire de 1981, vous aviez
évoqué la possibilité que Delaney puisse produire à
un rythme de croisière moins élevé, en termes de
production, puisse produire 470 mégawatts pour les besoins de 1987,
avant sa mise en fonctionnement, à la fin de la décennie, pour
produire effectivement les 2110 mégawatts. Est-il exclu toujours - en
étant très optimiste, avec une augmentation de 4,7% - que les
travaux s'amorcent avant 1985, si on veut fonctionner en 1988? Excluez-vous la
possibilité de produire moins de mégawatts au début de la
mise en exploitation?
M. Amyot: Si le scénario que vous venez de mentionner se
réalisait, il faudrait commencer la construction plus rapidement. Si on
veut avoir de l'énergie pour 1988, cela prend au moins cinq ans, parce
qu'il faut commander l'équipement avant la première mise en
service. Quant à la quantité exacte d'énergie qui sera
requise la première année, cela dépendra de la demande.
Cela peut être 400, cela peut être 600. Cela dépend de la
demande.
M. Pagé: Plus concrètement, est-ce que les travaux
préliminaires sont terminés? Avez-vous obtenu le fameux permis de
l'Environnement que vous deviez obtenir en juillet 1981? Quelles seront les
sommes qui seront affectées, dans les années ou les mois qui
viendront, à ce projet? Enfin, prévoyez-vous que la construction
de tout cela pourra être sous l'administration de la SEBJ?
M. Amyot: Vous avez trois questions. Pour ce qui est du permis,
nous n'avons pas encore le permis. Il reste encore une petite étude
complémentaire à fournir au ministère de l'Environnement.
Les sommes affectées,
au 31 décembre, au projet Delaney seront de quelque 39 000 000 $.
L'an prochain, il y a peu d'activités qui vont continuer. Sur le
terrain, il n'y aura pratiquement pas d'activités. Tant qu'on ne l'a pas
rayé de nos livres, il reste l'intérêt sur l'argent
déjà dépensé, et quelques études au bureau
et quelques études d'environnement qui vont se continuer.
M. Pagé: M. le Président, je voudrais, avant de
terminer, remercier M. Bourbeau, M. Coulombe et M. Amyot des renseignements
qu'ils nous donnent ce matin. Je voudrais, au nom des citoyens que je
représente, et plus particulièrement au nom des citoyens de la
région de Saint-Raymond, leur faire part de toute la
réceptivité des gens de Portneuf et de la grande région de
Québec à l'égard de ce projet, et dire au gouvernement
combien ce projet peut être primordial pour la grande région de
Québec. Ce sont 2 000 000 000 $ d'investissements, j'en conviens. Ce
sont des milliers d'emplois pour une période qui, j'en conviens, sera
déterminée dans le temps, peut-être sur une période
de six ou sept ans ou de cinq ans, mais quand même, pour nous, dans
Portneuf, ce projet nous apparaît comme une planche de salut bien
importante. Tout ce qui s'appelle investissements en matière
énergétique, c'est primordial. Je n'ai qu'à donner
l'exemple de la construction du gazoduc, actuellement, entre Québec et
Trois-Rivières, et on est en mesure de saisir tout l'impact, en termes
financiers, sur une région comme la nôtre. Hydro-Québec ne
fait que construire une ligne de transport d'électricité et cela
a déjà un impact positif sur des régions par les sommes
importantes qui y sont affectées. Encore une fois, soyez assurés
de la collaboration des gens de la région, de notre ouverture.
Permettez-moi de vous témoigner, au nom de mes concitoyens, de
l'appréciation, comme je vous disais au début, de la façon
professionnelle, habile avec laquelle vous avez mené ce dossier. Je vous
en félicite.
M. le ministre de l'Énergie et des Ressources, je comprends que
le gouvernement ne peut, à trois ans de la date prévue pour le
début d'un projet majeur comme celui-là, faire son lit. Je
comprends que la réalisation du projet dépend du taux de
croissance de la consommation. Nous sommes quand même satisfaits, quant
à nous, de constater que ce projet apparaît comme étant
prioritaire dans votre programmation. C'est déjà cela parce que
avec la baisse de la consommation, nous aurions pu assister à un projet
qui aurait été biffé purement et simplement. Beaucoup de
capital humain, beaucoup de capital financier ont été investis
dans ce projet. Quant à nous, nous espérons qu'il se
réalisera et ce, dès 1983. Si jamais la consommation de
l'électricité va au-delà de 3,6%, nous souhaitons que cela
puisse commencer dans les plus brefs délais. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Duhaime: M. le Président, sur le même sujet, pour
suivre la logique de notre collègue d'Outremont, on relie le projet
Delaney, qui est inscrit à la programmation qu'on retrouve au tableau
19, Mise en construction 1985, à la croissance de la demande, et d'une
façon plus particulière, à la demande de pointe et
à la gestion de la demande de pointe. Il y a peut-être un
élément qu'il faudrait ajouter au dossier. Je le dis pour la
bonne compréhension. Hier, notre collègue de Châteauguay
nous rappelait que le vocabulaire utilisé ici était
compliqué, c'est peut-être vrai aussi dans le cas de Delaney
puisque l'utilisation qu'on pourrait faire de l'énergie à
Delaney, c'est-à-dire une centrale pompée, est une variable de
100 à 500 heures d'utilisation par année. C'est ce qu'on a
à Hydro-Québec et partout ailleurs, j'imagine, la plage
d'utilisation. Pour l'équipement de pointe, les réserves
pompées ne sont pas ou la réserve pompée n'est pas la
seule possibilité; il y en a d'autres, les turbines à gaz par
exemple, et il y en a déjà quelques-unes qui sont en
opération, mais on utilise la turbine à gaz sur des plages
d'utilisation inférieure à 100 heures sur une base annuelle.
Il y a aussi la possibilité de faire du suréquipement. Je
dis cela, M. le Président, pour indiquer que nous ne devrons pas tenir
compte seulement de la pointe en l'an x, mais nous devrons tenir compte aussi
des coûts de construction, au kilowatt ou encore au kilowattheure, selon
qu'on parle d'une réserve pompée par opposition à un
projet de suréquipement sur des centrales déjà existantes.
Il faudra aussi tenir compte de cette plage d'utilisation. Par exemple, une
centrale pompée au-delà de 500 heures n'est pas indiquée
pour répondre à la demande de pointe, il faut aller au
suréquipement. Quand on fait une comparaison de coûts, je ne sais
pas si on a l'information en main ici ce matin à Hydro-Québec,
mais les chiffres que j'ai pour Delaney, par exemple, où on avait une
plage d'utilisation maximale de 500 heures, 500 heures étant le maximum
d'utilisation, mais généralement la planification est faite sur
un coefficient d'utilisation de 75%, et ceci nous ramènerait autour de
350 ou 360 heures. En termes de coûts, je ne sais pas si
Hydro-Québec peut fournir l'information à la commission ce matin,
j'aimerais savoir, par opposition, ce que coûte le kilowatt
d'énergie sur une plage d'utilisation de 500 heures pour
l'énergie produite par une réserve pompée par opposition
à ce que 500 heures pourraient
produire avec du suréquipement. Je ne sais pas si vous avez les
chiffres ici.
M. Fortier: Du suréquipement surtout sur le
Saint-Maurice.
M. Duhaime: Qu'entends-je? Des voix: Ah! ah!
M. Fortier: Surtout sur le Saint-Maurice.
M. Bourbeau (Joseph): On ne semble pas avoir cette réponse
ici, M. le ministre. On va regarder s'il y a des études à
HydroQuébec qui ont trait à ce problème et, s'il y en a,
on fera parvenir nos résultats au secrétaire de cette
commission.
M. Duhaime: Oui. Moi, j'en ai des chiffres en main, M. le
Président. Je voudrais peut-être les risquer...
M. Fortier: Son chef de cabinet...
M. Duhaime: ... puisque nous allons nous réunir demain, je
pense que ce serait important que le député de Portneuf ait cette
information et que toute la population de la région de Portneuf et du
grand Québec aussi sache très bien que, dans la décision
finale qui viendra - on a quand même au moins deux ans devant nous pour
le prendre, cette décision finale - il est bien certain qu'il faudra
tenir compte de la prévision de la demande de pointe et aussi des
coûts de construction. J'ai beaucoup de respect pour le
député de Portneuf, comme vous savez, mais je pense que les
décisions d'investissements ne se prennent pas en fonction du nom ou de
la personne qui représente un comté à l'Assemblée
nationale. Je serais bien prêt à faire un compromis et à
réserver le nom de la centrale Delaney pour un autre nom un jour,
puisque vous vous identifiez si solidairement à ce dossier.
M. Pagé: Depuis neuf ans. (11 h 45)
M. Duhaime: Les chiffres que j'ai, les coûts au kilowatt,
en dollars 1989, pour une centrale pompée du type Delaney, sur une plage
d'utilisation variant entre 100 et 500 heures, c'est 1094 $ le kilowatt ou
encore 0,51 $ le kilowattheure. Pour un équipement de
suréquipement dont la plage d'utilisation serait de 500 à 2000
heures par année, le coût de la construction serait de 1541 $ le
kilowatt ou encore 0,18 $ le kilowattheure.
Je risque ces chiffres, mais il y a peut-être une mise à
jour à faire et je demanderais si possible à Hydro-Québec
d'avoir l'information demain. Je comprends qu'on pourra toujours informer le
secrétaire de la commission dans les jours ou les semaines qui viennent,
mais si l'information était disponible demain, on pourrait fermer ce
dossier et rappeler essentiellement, parce que le député
d'Outremont fait des calembours, vous savez, en me prêtant des intentions
de vouloir suréquiper les barrages de la rivière Saint-Maurice...
On en a tellement parlé du Bas-Saint-Maurice et du Haut-Saint-Maurice
que l'ancien député de Saint-Maurice, qui était de l'Union
Nationale, au fil des années, ne parlait plus du "harnachement" du
Bas-Saint-Maurice, mais de "l'acharnement" du Bas-Saint-Maurice. Si nos
collègues du Lac-Saint-Jean étaient ici, ils nous parleraient
très certainement de l'aménagement de la Chamouchouane et je suis
convaincu que le député de Duplessis, notre collègue,
aurait très certainement des choses à dire au sujet de
l'aménagement de la rivière Romaine, s'il n'était pas
retenu dans son comté.
Bref, ce que je veux dire, M. le Président, c'est que le projet
Delaney demeure inscrit à la programmation et qu'une décision
finale sera prise en 1985, ou à l'horizon de 1985, sous réserve
de deux facteurs et non pas d'un seul: la croissance de la demande et la
prévision qu'on peut en faire aujourd'hui sur l'horizon de 1990,
puisque, si on parle d'une mise en construction en 1985, c'est pour une mise en
service cinq ans plus tard, les coûts de la construction. Le choix
qu'autant HydroQuébec et le gouvernement auront à faire sera de
se poser la question: Qu'est-ce qui est le plus économique? Qu'est-ce
qui est le plus rentable en termes du nombre de milliards que nous aurons
à investir, parce qu'on parle de 2 500 000 000 $? Avec l'inflation et
tout le reste, il y a de gros risques que cela augmente aussi. Cela sera, bien
sûr, un choix économique que nous aurons à faire et je
voudrais donner l'assurance au député de Portneuf et à
tous ceux et celles qui travaillent au soutien de ce dossier que je suis, quant
à moi, prêt à les rencontrer. Ils m'ont demandé de
les voir récemment, je le ferai aussitôt que nous serons
libérés des travaux de cette commission et nous rendrons alors
disponibles, bien sûr, tous les chiffres et les documents. La seule chose
que je ne veux pas remettre au député de Portneuf, et tout le
monde va le comprendre, c'est le cahier que j'ai ici devant moi qui contient
les notes me permettant de bien faire mon travail; le reste est disponible.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Portneuf.
M. Pagé: M. le Président, brièvement, je
remercie le ministre de son commentaire. Je l'inviterais, s'il lui était
possible, ou à quelqu'un de son bureau, de prendre connaissance des
documents d'Hydro-Québec,
du document spécifique d'Hydro-Québec à l'appui du
projet Delaney qui a été produit en 1981 et du tableau des
prévisions de 1981, du miroir de la consommation de 1981 qui permettait
à Hydro-Québec de conclure à ce moment-là. À
ce moment-là, je conviens que répondre aux problèmes de la
pointe par des turbines à gaz aurait coûté, en 1981, 43% de
plus que le projet Delaney et la facture du suréquipement impliquait 28%
de plus, selon le tableau 1981.
M. Duhaime: 62 kilowattheures.
M. Pagé: Alors, je comprends que l'impact
budgétaire et le coût d'un tel projet est un élément
important pour ne pas dire majeur de la décision. Cependant, j'ose
croire et espérer qu'à coûts comparables et qu'à
coûts égaux le gouvernement du Québec, quel qu'il soit,
parce que c'est le gouvernement du Québec qui, en 1985, peu importe de
quel parti il sera formé - cela reste à voir... J'ose
espérer qu'à coûts égaux le gouvernement qui sera
là pensera à la grande région de Québec qui est
particulièrement affectée par la crise qui nous touche
actuellement; d'ailleurs, toute la structure économique de la
région de Québec est affectée depuis quelques
années. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Pontiac.
Conversion des systèmes de chauffage
M. Middlemiss: Merci, M. le Président. Dans ce même
domaine de la baisse de la demande d'électricité, est-ce qu'il y
a des statistiques qui démontrent, dans vos prévisions de
conversion de l'huile à chauffage à l'électricité
pour le résidentiel, qu'il y a eu diminution comparativement à
vos prévisions de l'an dernier, depuis l'avènement du programme
Énergain?
M. Coulombe: M. Cristel va répondre à la
question.
M. Cristel (Jean-Paul): L'an dernier, les conversions de
système au mazout à l'électricité sont de l'ordre
de 45 000. Cette année, nous prévoyons environ 32 000
conversions. Maintenant, est-ce qu'on doit attribuer cette diminution
uniquement aux conditions qui étaient attachées à
Énergain ou est-ce qu'on doit aussi en attribuer une certaine part au
ralentissement économique? Nous n'avons pas été capables
de déceler l'influence respective de ces facteurs.
M. Middlemiss: II semblerait, d'après des citoyens
ordinaires qui avaient l'intention de faire cette conversion, que suite
à la visite des gens d'Hydro et d'Énergain, on leur arrivait avec
une facture et que c'était obligatoire de faire des travaux d'isolation
de l'ordre de 1500 $. La personne regardait cela et disait: Si je fais ces
travaux, en fin de compte, cela va me prendre 25 ans pour faire une certaine
économie. Pour ces raisons, il y a eu moins de conversions. Est-ce
qu'Hydro-Québec, vu les surplus, a l'intention de changer cette
politique, à savoir qu'il ne sera pas nécessaire de faire
d'autres travaux que la conversion?
Une voix: Ce ne serait pas obligatoire. M. Middlemiss: Pas
obligatoire.
M. Cristel: Cette condition dont vous parlez rattachait la
subvention fédérale du programme canadien de remplacement du
pétrole à la réalisation des travaux recommandés
par le représentant d'Énergain et aussi à la conservation
par le client de son système de distribution de chaleur. Avec l'annonce
du programme biénergie, le ministre de l'Énergie du Québec
a annoncé qu'en date du 8 octobre de cette année, ces conditions
ne s'appliquaient plus, sauf pour certaines catégories de logements
où le propriétaire voudrait convertir un système au mazout
en un système électrique et, par ce fait même, passer la
facture d'énergie à ses locataires. Dans ces cas, le
propriétaire doit effectuer les travaux recommandés, mais pour la
grande majorité des citoyens, les conditions sont maintenant
abolies.
M. Middlemiss: Qu'arrive-t-il pour un citoyen qui aurait fait la
conversion à l'électricité et à qui on a
refusé de donner les formulaires de demande? Est-ce qu'il peut revenir
et profiter des 800 $ de conversion que le gouvernement fédéral
donne?
M. Cristel: Franchement, je ne suis pas capable de
répondre à votre question. Je ne me souviens plus de cette
modalité. Je pourrais trouver la réponse et vous le dire plus
tard.
M. Middlemiss: Pour ceux qui ont déjà fait la
conversion, cela n'aidera pas à... L'utilisation de
l'électricité ne sera pas augmentée, mais au point de vue
de la justice sociale, si ces gens ont fait la conversion, est-ce qu'ils n'ont
pas droit à cette même subvention, parce que si la conversion
était faite au gaz naturel, ils n'auraient pas été
obligés de satisfaire aux exigences du programme Énergain et
auraient profité de ces 800 $.
M. Cristel: Ce que vous dites est exact. Maintenant, c'est comme
je vous dis, pour vous renseigner sur les modalités d'application
rétroactives du PCRP, je ne me
risque pas de vous donner une réponse, ne sachant pas exactement
ce qui va se produire dans les cas de rétroactivité.
M. Middlemiss: Serait-il possible d'avoir une copie du
communiqué de presse de la nouvelle politique? Est-ce que c'est le
ministre de l'Énergie et des Ressources?
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Duhaime: Hydro-Québec doit avoir un document. On va
vous en remettre une copie avec plaisir. J'ai demandé si elle
était disponible immédiatement, sinon on vous la remettra demain
matin.
M. Middlemiss: En attendant votre réponse sur le cas de
ceux qui ont déjà fait la conversion, si la réponse
était négative, est-ce qu'Hydro-Québec serait prête
à considérer de changer cette position pour laisser les gens
bénéficier de ce changement? Est-ce M. Bourbeau...
M. Cristel: Les subventions en vertu du programme canadien de
remplacement du pétrole sont payées par le gouvernement
fédéral et...
M. Middlemiss: C'est Hydro-Québec qui a institué le
programme Énergain, c'est Hydro-Québec qui a mis la condition de
faire d'autres travaux. Je connais des gens qui l'ont eu avant le programme
Énergain... Est-ce que vous avez les statistiques à savoir le
nombre de personnes qui ont fait la conversion avant Énergain et
après le programme?
M. Cristel: C'est-à-dire que nous avons d'année en
année le nombre de conversions qui ont été
effectuées. Il est clair que les conversions ont augmenté
à chaque année jusqu'en 1981. Nous avons constaté en 1982
une diminution. Maintenant, l'attrait du chauffage électrique s'est
manifesté à travers les années et a causé cette
augmentation du nombre de conversions. C'est évident, cette année
il y a une autre raison, je pense, qu'on peut invoquer en faveur du nombre de
conversions qui est limité: c'est peut-être aussi le
ralentissement temporaire dans les prix du mazout. Il y a eu, comme vous le
savez, les annonces de prix du mazout et les augmentations prévues ont
ralenti au cours de l'année et c'est peut-être cela qui a
freiné aussi le nombre de conversions.
Encore une fois, Hydro-Québec administre le programme canadien de
remplacement de pétrole mais c'est le gouvernement fédéral
qui paie. J'aimerais vérifier avant de vous donner une réponse,
quelles sont les conditions, s'il y en a, d'application rétroactive des
subventions qui ont été refusées alors que la condition
était en vigueur.
M. Middlemiss: Si je ne me trompe pas dans les renseignements
à l'usage du requérant au Québec pour la conversion il est
dit: "II n'est pas nécessaire que l'isolation thermique de votre maison
réponde à une norme précise pour que vous puissiez
bénéficier du programme de conservation." Il semble que c'est
seulement au Québec qu'il y avait une condition, d'être
obligé d'isoler, aux exigences d'Hydro-Québec. Dans les autres
provinces, les gens ont bénéficié des 800 $ si la
conversion se faisait de l'huile à chauffage à
l'électricité. La seule condition qui l'empêche, je ne
crois pas que ce soit au niveau fédéral, c'est certainement une
politique du programme Énergain.
M. Cristel: C'est une négociation qui a eu lieu entre le
gouvernement fédéral et le gouvernement provincial, de sorte que
le Québec a demandé d'instituer ces deux conditions au
Québec, et qu'Hydro-Québec a administré le programme en
regard des demandes qui ont été formulées par le
gouvernement provincial, le gouvernement du Québec.
M. Middlemiss: Donc, l'exigence de l'isolement et d'autres
travaux associés au programme Énergain n'est pas une demande du
gouvernement fédéral mais du gouvernement provincial et
Hydro-Québec... Je ne critique pas, c'est certainement pour
éviter le gaspillage; mais je pense qu'il y a deux poids, deux mesures;
il y a des gens qui peuvent convertir au gaz naturel sans problème mais
ils ne peuvent pas convertir à l'électricité.
Contrairement, à l'an passé, lorsqu'on était ici pour
discuter des tarifs, une des raisons pour lesquelles on justifiait les 16,3%,
c'était pour créer encore un écart assez grand entre le
gaz naturel et l'électricité, de peur que la demande
d'électricité soit trop grande. Cette année, un an plus
tard, le portrait est totalement changé. On voudrait encourager les gens
à utiliser plus d'électricité, mais on crée
d'autres problèmes. On exige d'autre chose pour que les gens puissent
bénéficier. Je crois que, dans le contexte présent, on
devrait considérer sérieusement d'enlever cette exigence.
Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.
M. Duhaime: En fait, vous auriez peut-être dû
m'adresser cette question, je ne vous en fais pas un reproche. Mais puisqu'on
est ici pour entendre Hydro-Québec sur la politique tarifaire, je n'ai
pas d'objection à parler du programme d'isolation des maisons.
Je voudrais dire...
M. Cristel: Excusez M. le Président, est-ce que le
programme Énergain n'est pas un programme d'Hydro-Québec?
M. Duhaime: On n'en est pas là. Je vais vous donner dans
les minutes qui viennent ou demain matin, parce que je n'avais pas prévu
que vous auriez besoin de ce communiqué de presse qui a
été émis au début d'octobre. C'est un fait
qu'après de longues négociations, j'en étais venu à
une entente avec M. Lalonde, parce qu'il est bon de se rappeler que lorsque le
PCRP ou Programme canadien de remplacement du pétrole a
été lancé, il n'y avait personne pour l'administrer. Le
gouvernement fédéral nous a proposé que ce soit
Hydro-Québec, moyennant rémunération, bien sûr. Je
ne suis pas certain qu'on fait un gros coup d'argent. Je pense qu'on a 18 $ du
dossier, ou 25 $. Même à ça, finalement, on a
décidé de joindre l'effort commun. Le PCRP se mariait avec le
programme d'isolation des maisons appelé Énergain. Nous avions
pensé, il y a au-delà d'un an, que le fait d'exiger que les
travaux soient faits donnerait l'impact maximum à ce programme
d'économie d'énergie. (12 heures)
Au fil des mois, et avec les chiffres qui nous sont arrivés, on
en est venu à la conclusion que beaucoup de citoyens au Québec
faisaient une demande au PCRP et ne se prévalaient pas d'Énergain
comme tel, mais faisaient des travaux eux-mêmes sans passer par la
machine, si vous voulez. Alors, des représentations nous ont
été faites par l'Ordre des ingénieurs électriciens,
si je me souviens bien, entre autres, les entrepreneurs, différentes
corporations et, vu que notre gouvernement écoute lorsque les gens nous
font des représentations de cette nature, nous avons
décidé, il y a à peine deux semaines, de scinder, de
rendre le programme Énergain optionnel en quelque sorte par rapport au
PCRP. Je pense que c'est une excellente décision et je ne regrette pas
que nous ayons fait ce test pendant un an.
Ce que je regrette, cependant, je dois le dire, même ceux qui vont
se prévaloir du PCRP et qui ne font pas les travaux d'isolation se
privent des subventions prévues à l'intérieur
d'Énergain et je ne suis pas convaincu qu'ils obtiendront cent sous par
dollar investi. L'idéal serait que les Québécois qui
décident de faire de l'économie d'énergie et de se
prévaloir de ces programmes puissent bénéficier du PCRP,
puissent aussi bénéficier du programme Énergain et faire
les travaux d'isolation.
Nos calculs vont dans le sens qu'une dépense moyenne par
unité de logement de l'ordre d'à peu près, si mon souvenir
est bon, 1300 $ - cela a pu varier avec l'inflation depuis l'année
dernière, disons 1500 $ - pour de l'isolation sur une période de
cinq ans, en termes d'économie réelle d'énergie cet
investissement voit son retour à 100%.
Je vous ferai remettre tout à l'heure le communiqué.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Pontiac.
M. Middlemiss: Merci. Il est beau de voir que le gouvernement a
réalisé qu'il avait fait une erreur et qu'il l'a corrigée.
Cela montre qu'il commence à être un peu sensible, dans ce
cas-là au moins. Mais, je demanderais au ministre: Est-ce qu'on pourrait
aller un peu plus loin et tenter peut-être de faire
bénéficier les Québécois du programme canadien de
conversion à ceux qui ont accompli cette partie et toutefois n'ont pas
opté de faire les travaux d'isolation suggérés par
Énergain parce que pour eux il n'y avait pas de rentabilité?
C'est que, dans un cas que je connais, cela aurait coûté 1400 $
pour isoler le sous-sol où était la fournaise et,
jusque-là, ça lui coûtait par année 450 $ de
chauffage. Donc...
M. Duhaime: II doit porter des bas de laine, c'est certain.
M. Middlemiss: Non. C'est basé sur le rapport des gens
d'Énergain. Comment peut-on justifier une dépense de l'ordre de
1400 $ lorsque ça coûte 465 $? Combien peut-on économiser
de plus en mettant 1400 $ dans un sous-sol? Ce n'est pas seulement l'isolant
qui compte, c'est qu'il faut aussi mettre un fini sur l'isolant, que ce soit
dans n'importe quelle pièce.
Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.
M. Duhaime: Écoutez, j'aimerais mieux prendre avis
là-dessus pour une raison très simple. Si j'engage des fonds
fédéraux, j'ai comme l'impression que M. Chrétien, le
ministre de l'Énergie, des Mines et des Ressources au niveau
fédéral, n'aimera pas trop ça. Est-ce que la
rétroactivité est possible? Je poserai la question, mais aux
nouvelles d'hier soir, le déficit fédéral était de
22 000 000 000 $. Alors que l'année dernière, il avait
été prévu de 9 600 000 000 $ au mois de mai, au mois de
novembre il était de 19 000 000 000 $ et là on parle de 22 000
000 000 $. S'il reste de l'argent, j'ai l'impression que M. Chrétien
pourrait nous répondre oui, mais j'ai mes doutes.
M. Pagé: Les impôts suivent l'inflation
là-bas.
M. Duhaime: Je vais voir si on peut... M. Pagé: Ils
ont augmenté de 350%.
M. Duhaime: ...faire bénéficier de façon
rétroactive ceux qui, dans un premier temps, ont fait la demande au PCRP
ou ont même fait quand même la conversion et je pense qu'on pourra
fournir la réponse.
M. Cristel: M. le Président.
Le Président (M. Gagnon): M. Cristel.
M. Cristel: Quand on parle de rentabilité, il ne faut pas
oublier que le représentant d'Énergain - j'aimerais
préciser aussi qu'Énergain est un programme conjoint du Bureau
des économies d'énergie du Québec et
d'Hydro-Québec, chacun paie la moitié de la facture totale -
quand il se présente chez un abonné, fait une analyse
énergétique complète, examine l'enveloppe thermique,
vérifie l'infiltration et également l'efficacité du
système de combustion, si c'est un combustible fossile. Quand il soumet
ses recommandations, il base la rentabilité des investissements sur une
simple remise de capital de cinq ans, si l'abonné réalise les
travaux lui-même, ou de huit ans s'il fait appel à un entrepreneur
accrédité par HydroQuébec. Donc, la rentabilité
était sur cette base. En somme, si, par exemple, une mesure
d'économie d'énergie produisait des économies annuelles de
100 $ et que l'abonné avait l'intention de réaliser les travaux
lui-même, on exigeait, si la dépense n'excédait pas 500 $,
qu'il réalise les travaux avant d'obtenir la contribution
fédérale appelée Programme canadien de remplacement du
pétrole. Alors, la rentabilité était partie
intégrante des recommandations du représentant
d'Énergain.
M. Middlemiss: Qu'est-ce qui arrive dans le cas spécifique
dont je vous parle?
M. Cristel: Dans le cas d'un investissement de 1400 $, si
l'abonné devait lui-même réaliser les travaux - dans ce
cas, je ne sais pas si c'est lui ou son entrepreneur, mais supposons que ce
soit lui-même qui réalise les travaux - si l'on divise 1400 $ par
cinq, il faudrait que l'économie annuelle se situe aux environs de 300 $
en énergie; autrement, le travail n'aurait pas à être
réalisé avant l'obtention de la subvention du PCRP.
M. Middlemiss: Une question de renseignement: Si la conversion se
fait au gaz naturel, est-ce que c'est encore Hydro-Québec qui s'occupe
de cela?
M. Cristel: Non.
M. Middlemiss: Non, les...
M. Duhaime: N'en demandez pas trop!
M. Middlemiss: Est-ce que le programme Énergain s'applique
aux gens qui font la conversion du mazout au gaz naturel?
M. Duhaime: Oui, la même chose. M. Middlemiss: La
même chose que...
M. Cristel: Si un abonné, quel qu'il soit, appelle
Hydro-Québec, on répond à sa demande. Gaz
Métropolitain, par exemple, a institué un programme visant
à doubler la subvention du programme canadien, sans exiger aucune
condition. Alors, la plupart des abonnés appelaient Gaz
Métropolitain, faisaient la transformation du mazout au gaz sans pour
autant impliquer Hydro-Québec.
Une voix: C'est cela.
M. Middlemiss: II n'y aura aucun problème pour obtenir les
800 $ qui proviennent du programme conjoint
provincial-fédéral.
M. Cristel: Pas à ma connaissance.
M. Middlemiss: Donc, pour M. le ministre, qui avait une certaine
inquiétude à savoir si ce serait possible d'avoir une
rétroactivité, puisque des citoyens du Québec ont fait la
conversion au gaz et ont bénéficié de la subvention sans
être soumis aux mêmes conditions, est-ce qu'on ne pourrait pas
justifier le fait que ces gens ont tout autant le droit de
bénéficier des 800 $?
Le Président (M. Gagnon): M. le ministre, est-ce que vous
avez bien compris?
M. Duhaime: Je m'excuse, non, je n'ai rien compris.
M. Middlemiss: II semblerait que...
M. Duhaime: Est-ce que c'est cela... Allez-y.
M. Middlemiss: ...ceux qui ont fait la conversion du mazout au
gaz naturel auraient bénéficié des 800 $, sans être
soumis aux conditions d'Énergain.
M. Duhaime: C'est exact.
M. Middlemiss: Comme argument pour tenter d'obtenir une
équité pour ceux qui ont fait la conversion à
l'électricité dans le passé et qui n'ont pas
bénéficié du programme parce qu'ils ne voulaient pas se
soumettre aux exigences du programme Énergain, on pourrait facilement
justifier le
fait qu'on a déjà payé. Je pense que ce serait
certainement le devoir du gouvernement de défendre ces gens
vis-à-vis du fédéral. Je ne suis pas convaincu que le
programme Énergain est une exigence du fédéral
plutôt qu'une exigence du provincial.
M. Duhaime: Je crois avoir répondu tout à l'heure
à votre question. Puisque parce que cela implique rétroactivement
des dépenses, il faudrait voir ce que cela pourrait impliquer comme
masse d'argent et voir s'il y a des possibilités, du côté
fédéral, de payer; je n'ai aucune espèce d'objection
à faire la démarche en ce sens. La contrainte ou le lien qui
existait entre le PCRP et Énergain s'appliquait dans le cas des
conversions du mazout à l'électricité, mais la même
contrainte n'existait pas pour ce qui du gaz naturel. Tu comprends?
M. Middlemiss: Deux poids, deux mesures.
M. Duhaime: Ce n'est pas deux poids, deux mesures. Ce sont deux
formes d'énergie différentes dont les techniques d'isolation
doivent être nécessairement différentes aussi.
M. Fortier: ... elles se présentent en alternant.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Mont-Royal. Est-ce que vous avez terminé, M. le député de
Pontiac?
M. Tremblay: Sur une question de règlement.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Chambly.
M. Tremblay: J'avais demandé la parole, il y a fort
longtemps, avant même que le député de Mont-Royal soit
là. Je vous ai laissé donner la parole au député de
Pontiac parce que j'ai pensé qu'il l'avait demandée avant moi;
sans vouloir brimer le député de Mont-Royal, je voudrais quand
même avoir la parole.
Le Président (M. Gagnon): Je m'excuse, je remplace un
président qui était ici au moment où vous avez
demandé la parole. Effectivement, je vous vois en haut de liste. Je vais
vous donner la parole immédiatement; après, j'irai au
député de Mont-Royal.
Le projet Delaney (suite)
M. Tremblay: Je vous remercie, M. le Président. Cela ne
sera pas long. D'ailleurs, je suis persuadé que le député
de Mont-Royal a des questions très intéressantes à poser.
Je ne serai pas long, je veux avoir aussi le plaisir de les écouter.
Ma question concernait dans le cas Delaney, pour revenir à cette
centrale, puisque c'est la prochaine centrale qui est dans la programmation
d'Hydro-Québec. Je pourrais ajouter qu'on est conscient de ce
côté et qu'on sait que cela est important pour les gens de la
région de Québec, du point de vue de l'emploi, et les gens du
comté de Portneuf. Dans ce sens-là, on partage la
préoccupation du député de Portneuf. Pour nous aussi cela
est important.
Ce que je voudrais savoir d'Hydro-Québec, c'est: Est-ce qu'il y a
des expropriations de faites dans le cas de Delaney? Est-ce que les terrains
sont achetés? Est-ce qu'il y a, par exemple, des boisés qui
seraient déjà abattus? Est-ce qu'il y a des travaux de
commencés? Est-ce qu'il y a des gens de déplacés?
M. Amyot: Non, pas que je sache. Tout ce qu'il peut y avoir ce
sont des sondages de faits sur le terrain. Il y a des relevés, mais je
crois qu'on n'a pas fait plus que cela.
M. Tremblay: Sur le terrain, il n'y a absolument rien de fait
excepté des sondages des lieux...
M. Amyot: Des relevés, de l'arpentage.
M. Tremblay: II n'y a pas d'expropriations de faites. Il n'y a
pas de citoyens qui ont été déplacés. Il n'y a rien
de déplacé.
M. Amyot: On n'a pas de permis, on ne peut rien faire tant qu'on
n'a pas de permis.
M. Tremblay: D'accord. Je voudrais revenir sur une autre
question. Dans votre plan de développement pour 1982-1985, vous
établissez vos prédictions d'augmentation de consommation
en fonction des perspectives économiques. Vous dites, à la page
15, à 1.2, Perspectives économiques: "À moyen terme au
Québec, les taux d'intérêt, d'inflation et de chômage
devraient rester élevés". Vous faites cette affirmation. "Moyen
terme", dans mon esprit, cela veut dire dans une période de cinq ans et
déjà on peut voir que les taux d'intérêt, depuis que
cela est arrivé... Est-ce que cela veut dire que vous prévoyez
à Hydro-Québec que les taux d'intérêt vont remonter
et que l'inflation va rester élevée pour une période de
cinq ans, malgré les efforts du gouvernement fédéral dans
ce domaine?
M. Bourbeau (Joseph): M. Georges Lafond.
Le Président (M. Gagnon): M. Lafond. M. Lafond
(Georges): II s'agit d'un plan
d'équipements avec un horizon étendu de 1983 à
1985, mais, pour la dimension et les paramètres financiers, c'est un
plan limité sur un horizon d'un an. Dans cette perspective, nous avons
mis comme intrant de taux d'intérêt une hypothèse de
14,8%.
Le Président (M. Gagnon): M. Lafond, est-il possible
d'approcher un peu votre micro? (12 h 15)
M. Lafond: Bien sûr, je m'excuse. Alors, nous avons mis un
intrant hypothétique de 14,8%. Si les taux d'intérêt, en
moyenne, au cours des douze mois de l'année 1983, devaient se
révéler inférieurs à cette hypothèse de 1%,
en vous référant à la page 88, c'est-à-dire la
grille de sensibilité, on voit que cela aurait un impact favorable sur
les résultats d'Hydro-Québec de 10 000 000 $, seulement pour la
première année. Évidemment, on exclut l'impact à
long terme sur les flux financiers qui impliqueraient le service des emprunts
de 1983. Pour l'année 1983, celle qui nous concerne, celle pour laquelle
on a une recommandation tarifaire de 7,3%, on parle d'un impact mineur de 10
000 000 $.
M. Tremblay: Au niveau de l'inflation, quel pourcentage avez-vous
utilisé?
M. Coulombe: 9%.
M. Tremblay: Vous dites à moyen terme; pour moi, c'est
cinq ans. Là, vous me parlez de 1983, cela m'apparaît à
court terme. À moyen terme, quel est le pourcentage que vous avez
utilisé?
M. Coulombe: Si vous remarquez, aux tableaux 2 et 3, en termes de
taux de chômage, il est prévu, pour les trois prochaines
années, une diminution du taux de chômage de 13,1%, 13% et 12,3%.
Évidemment, cela subit l'aléa de toutes les prévisions.
Quant à l'inflation, c'est 9% pour 1983 et, pour les deux autres
années, c'est 9% et 9,5%, dans le tableau 2. Quant au taux
d'intérêt qui est prévu, il est évident que tout le
débat est ouvert. Est-ce que la diminution actuelle est causée
par des politiques conjoncturelles aux États-Unis, oui ou non? Le
débat est ouvert. Vous avez autant de ressources pour faire vos
prévisions que tout le monde en a.
M. Tremblay: Est-ce que cela veut dire que, si ces pourcentages
étaient différents et à la baisse, autant les taux
d'intérêt que chômage, on pourrait espérer un taux
d'augmentation de la consommation plus élevé que 3,7%?
M. Coulombe: C'est tout le problème de
l'élasticité que vous posez là. Dans quelle mesure, si
l'inflation est moindre, la demande va-t-elle augmenter? À ces niveaux,
c'est tellement ténu comme conséquence qu'il est très
difficile de dire que, si l'inflation baisse de 3% ou si les taux
d'intérêt baissent de 3%, la consommation
d'électricité va augmenter de tant. C'est extrêmement
difficile. Vous avez, au tableau 28 du plan, les hypothèses, un peu,
comme M. Lafond le disait tantôt, la sensibilité de toutes ces
variables, particulièrement pour les taux d'intérêt. On est
capable de calculer, dans les prévisions financières, qu'une
diminution du taux d'intérêt augmente la marge de manoeuvre
d'Hydro de 10 000 000 $ par point. Par contre, si c'est plus
élevé, cela diminue la marge de manoeuvre d'Hydro de 10 000 000 $
par point, de la même façon pour les tarifs, la croissance des
ventes et ainsi de suite. Donc, vous avez la sensibilité. Faire une
relation directe entre chacun de ces facteurs économiques et la
consommation d'électricité à très court terme,
c'est extrêmement difficile.
M. Tremblay: C'est donc dans cette logique que vous avez
demandé cette année, pour une des premières fois, des
augmentations des tarifs d'électricité seulement pour un an.
M. Coulombe: Seulement pour un an, à cause de la
difficulté de prévoir la conjoncture. Nous pensons que baser des
tarifs sur plusieurs années serait extrêmement dangereux à
l'heure actuelle.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Mont-Royal.
Le projet Archipel
M. Ciaccia: Merci, M. le Président. D'après le plan
de développement d'Hydro-Québec, vous avez prévu une
diminution dans la demande, une diminution dans les investissements. Vous nous
montrez un effort de vouloir rationaliser les dépenses et même,
par exemple, si je peux me référer à votre objectif no 5a,
de comprimer les dépenses d'exploitation. Il semble y avoir un effort,
non seulement de réduire les dépenses, mais de répondre
aux nouvelles demandes qui sont réduites, avec toutes les
conséquences que cela entraîne quant aux investissements et aux
dépenses.
Je voudrais vous poser certaines questions sur le projet Archipel, dans
le contexte de votre plan de développement. Le projet Archipel - je
parle seulement de l'aspect hydroélectrique, je ne parle pas de l'aspect
de l'aménagement du territoire -c'est un projet que le gouvernement
semble vouloir pousser. Il y a une équipe qui fait le tour de certaines
municipalités pour vendre
les bénéfices du projet. Dans le contexte actuel, à
quel stade sont vos études sur ce projet? Combien avez-vous
dépensé jusqu'à maintenant quant aux études?
M. Coulombe: Sur les deux questions précises, les montants
dépensés jusqu'à maintenant sont de combien?
M. Amyot: À la fin de l'année, nous
prévoyons avoir 7 900 000 $.
M. Coulombe: Alors, à la fin de l'année, nous
prévoyons avoir environ 8 000 000 $ de dépenses sur le projet
Archipel.
Le Président (M. Gagnon): M. le député
de...
M. Coulombe: Pour la première question, nous en sommes
à l'étude de variantes de projets hydrauliques dans ce territoire
et c'est encore à l'Etat d'étudier différentes
hypothèses pour essayer de trouver le moyen le plus rentable de
fabriquer de l'électricité. On est à l'étude des
hypothèses.
M. Ciaccia: Je pourrais vous demander: pourquoi étudier ce
projet quand vous réduisez tous les chantiers de la Baie-James? Je pense
qu'il y avait eu des déclarations, si je ne m'abuse, de la part de M.
Bourbeau ou de certains représentants d'Hydro-Québec à
savoir que, du point de vue hydroélectrique, le projet n'était
pas rentable. Vous voulez réduire vos dépenses, alors pourquoi
continuer à étudier un projet qui, d'après ce qu'on peut
voir - je pense qu'on a dit que les études continueraient jusqu'au mois
de septembre - en définitive, n'était pas rentable?
M. Coulombe: Notre position est que c'est évident que dans
les critères réguliers d'Hydro-Québec, c'est un projet
qui, strictement en termes hydrauliques, est reporté. Si vous regardez
le plan, le report des grands projets, il serait encore reporté plus
loin dans le temps, strictement en ces termes. Il faut quand même
mentionner que ce projet est étudié par Hydro-Québec
depuis de très nombreuses années, avant même la
stratégie générale d'aménagement du territoire de
la région de Montréal. C'est un projet qui, comme une multitude
de projets d'Hydro-Québec, j'y ai fait allusion plusieurs fois,
était à l'étude. Ce qui nous confronte à l'heure
actuelle et la stratégie qui est devant nous, c'est que, d'ici au
printemps prochain, Hydro-Québec a fermement l'intention de
déposer sur la table de concertation du projet Archipel une position qui
serait un peu plus définitive que celle que nous avons à l'heure
actuelle. Il reste certaines variantes parce que nous croyons que l'ensemble de
la problématique de ce projet est une problématique valable. En
termes d'aménagement du territoire, c'est un projet extrêmement
complexe et nous voudrions épuiser toutes les possibilités de
définir un projet qui soit rentable. Il y a peut-être beaucoup de
doutes à l'heure actuelle là-dessus et ce sont des doutes qui
sont fondés sur une réalité très claire. Nous nous
donnons jusqu'au printemps prochain ou au début de l'été
prochain pour mettre sur la table les conclusions d'Hydro-Québec sur
cette dimension de ce projet d'aménagement du territoire, en ce qui
concerne la partie hydraulique. C'est l'entente qu'on a faite avec les
représentants gouvernementaux du projet Archipel. Nous avons quelques
études à terminer, quelques variantes à préciser et
nous allons mettre carrément les coûts réels perçus
par Hydro-Québec. Si le minimum de production hydraulique qui peut
être fait là s'avérait non rentable, nous allons le dire
clairement aux représentants du projet Archipel. Et s'il y a une marge
pour des raisons autres que strictement hydrauliques, si c'est un projet qui a
tellement d'avantages pour la région métropolitaine, pour le
Québec dans son ensemble et qu'il y a des coûts
supplémentaires pour la production d'électricité, le
débat va être clair, c'est-à-dire que s'il faut qu'il y ait
une production électrique là-dedans et qu'il y a une marge
supplémentaire à investir pour rentabiliser le projet, les
données du problème vont être sur la table le printemps
prochain. Alors, nous nous donnons encore jusqu'au mois de mai, juin ou juillet
prochain pour avoir une position "définitive", dans la mesure où,
dans ce genre d'étude, une position peut être définitive.
Nous espérons qu'au début du printemps prochain ou à la
fin du printemps, Hydro-Québec puisse dire clairement: Voici les
possibilités, voici comment elles coûtent et voici ce qui est
justifiable, compte tenu de la mission d'Hydro-Québec de
considérer ce qui est valable pour Hydro-Québec et, s'il y a des
coûts supplémentaires, de se demander qui va assumer ces
coûts supplémentaires. Le dossier va être terminé, en
ce qui concerne Hydro-Québec, soit pour une future étape, pour
continuer, si on peut s'entendre sur des chiffres, sinon, le dossier sera
clarifié de la part d'Hydro-Québec. Mais, pour employer des
critères classiques, c'est évident, c'est un projet qui devrait
être remis, comme M. Bourbeau l'a affirmé à la
dernière table de concertation devant tout le monde, c'est assez clair.
Nous tentons un dernier effort pour préciser des variantes et
préciser surtout les coûts fondamentaux de la production
hydraulique dans ce territoire. Nous mettrons les chiffres sur la table et,
s'il y a des marges de manoeuvre qui peuvent être trouvées
ailleurs, dans d'autres milieux ou dans d'autres types, on verra ce
qui se passera là, parce que c'est un élément d'un
projet beaucoup plus vaste.
Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.
M. Ciaccia: Est-ce que vous avez...
M. Duhaime: Allez-y, sur l'Archipel, on va vous laisser
finir.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia: Est-ce que vous avez déjà des
études qui démontrent que les coûts pour le projet
Archipel, strictement du point de vue hydroélectrique, seraient plus
élevés, construction par kilowattheure, que certaines phases de
la Baie-James?
M. Coulombe: Dans l'étape actuelle des travaux, oui.
M. Ciaccia: Actuellement, vos études démontrent que
cela coûterait plus cher de construire un projet hydroélectrique
comme le projet Archipel que de construire...
M. Coulombe: À l'étape où nous en sommes de
l'étude des variantes qui sont sur la table, la réponse est oui.
Ce que nous sommes en train d'étudier, c'est s'il n'y a pas d'autres
variantes qui pourraient faire baisser les coûts et c'est cette
dernière phase qu'on veut terminer avant de présenter le dossier
global à ceux qui sont concernés.
M. Ciaccia: Quand vous parlez d'autres variantes, est-ce que vous
pourriez expliciter un peu votre énoncé. Avant de répondre
à cela, l'année dernière, M. Bourbeau avait, je crois,
demandé ou avait dit quelque chose en ce sens qu'il faudrait juger la
rentabilité du projet sur la base des critères
d'Hydro-Québec. Est-ce que c'est sur cette base, strictement sur les
critères usuels d'Hydro-Québec, que vous allez...
M. Bourbeau (Joseph): C'est justement ce que M. Coulombe vient
d'expliquer. On essaie, par des études additionnelles, de baisser le
coût du projet à son minimum de façon à le
rentabiliser le plus possible. À ce moment-là, lorsqu'on aura
trouvé la variante, la meilleure variante, elle aura été
évaluée d'après les critères d'Hydro-Québec,
on la mettra sur la table et, à ce moment-là, il y aura d'autres
considérations qui pourront entrer dans l'évaluation globale du
projet.
M. Ciaccia: Ce que je trouve, M. le Président, c'est
qu'Hydro-Québec fait des efforts pour réduire ses
dépenses, et il y a de l'opposition à ce projet, le projet
Archipel, il y a des gens du milieu, il y a des problèmes
environnementaux, le gouvernement fait des coupures dans les hôpitaux,
dans tout, on se serre tous la ceinture, et je ne comprends pas pourquoi le
gouvernement persiste à demander à HydroQuébec de
continuer à dépenser des sommes d'argent pour continuer à
étudier un projet dont personne ne veut. Pendant qu'on étudie ce
projet, on réduit les chantiers à la Baie-James, et il y a des
études déjà qui démontrent que cela coûte
moins cher. C'est difficile, je pense, de justifier ces dépenses.
Le Président (M. Gagnon): M. le ministre. (12 h 30)
M. Duhaime: J'ai cru comprendre du dernier commentaire du
député de Mont-Royal qu'il y avait une question qui
m'était adressée, je voudrais y répondre. Avant que vous
ne veniez vous joindre aux travaux de notre commission, il y a quelques
minutes, il a été dit hier et ce matin à nouveau
qu'Hydro-Québec avait engagé environ 600 000 000 $ en
études sur différents travaux et, bien sûr, ces
études ont différentes étapes. Si vous avez eu le temps de
parcourir le document qui a été préparé par
Hydro-Québec, à la page 65, au tableau 22, vous allez voir une
liste de projets et vous allez retrouver Saint-Louis (Archipel), Eastmain 2,
Sakami, Toulnustouc, La Baleine, Aguanus, Témiscamingue, le
Haut-Saint-Maurice, Harricana, Nastapoca, Natashquan, Saint-Paul,
Saint-Augustin, Rivière aux Feuilles.
Je ne sais pas si le député de Mont-Royal a suivi les
travaux de la table de concertation d'Archipel l'année dernière.
J'ai eu l'occasion d'y passer deux jours. M. Bourbeau...
M. Ciaccia: Le Parti libéral n'a pas été
invité à cette table de concertation. Il a été
délibérément exclu. C'est difficile pour nous de suivre
quand on n'a pas été invité aux travaux. Si vous nous
invitez, on va envoyer des représentants.
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous
plaît! Je ne vous ai pas refusé la parole, je pourrai vous la
redonner après. Pour le moment, c'est M. le ministre qui a la
parole.
M. Duhaime: J'apprécierais pouvoir faire mon intervention
parce que tout à l'heure j'ai été à deux cheveux
d'intervenir lorsque le député de Mont-Royal est intervenu, mais,
le connaissant de longue date, j'ai préféré attendre pour
lui dire qu'il a raté l'occasion de se mettre en valeur parce que
plusieurs de vos collègues ont suivi les deux jours de travaux de la
table de concertation. Je les ai même rencontrés moi-même et
je les ai salués.
M. Ciaccia: Je ne vous interromprai pas, je vous répondrai
après.
M. Duhaime: C'est que l'aspect hydroélectrique du projet
Archipel est un des volets du projet. Les variables sont énormes et je
ne crois pas que ce soit de l'argent mal placé que de savoir exactement
quel pourrait être le coût de la construction le kilowatt dans le
rapide de Lachine. Les variantes qui ont été
évoquées tout à l'heure peuvent être très
larges. Vous avez raison de dire que plusieurs de nos concitoyens sont inquiets
du sort du rapide de Lachine et de l'impact écologique qu'un
aménagement hydroélectrique de ce site pourrait entraîner.
Il est évident aussi qu'une des variantes majeures à mon sens est
d'établir l'utilisation que nous ferons du débit d'eau. Est-ce
qu'on va travailler sur 90% du débit d'eau, sur 75%, sur 60% ou sur 40%?
Cela fait partie de la variante fondamentale du dossier. Ce qui veut dire que
l'aspect production d'électricité au barrage Saint-Louis est un
des volets du projet Archipel, mais il y a trois autres volets qui sont
à mon sens majeurs. C'est ce qui fait que le gouvernement va
continuer de travailler sur ce dossier et de voir comment il pourra le faire
aboutir.
Il y a d'abord la question de la régulation des eaux autour et
dans le grand archipel de Montréal. Il s'agit de rencontrer quelques
instants quelques-uns des maires des municipalités qui sont autour,
surtout durant les crues du printemps, pour voir qu'il y a un problème
réel de régulation des eaux. Il y a aussi toute la question de
l'aménagement des rives de l'archipel de Montréal. Ceci est
lié bien sûr au programme d'assainissement des eaux qui a
commencé à se dérouler à Montréal.
Dire tout simplement que nous pourrions prendre une décision
maintenant à partir des données du coût le kilowattheure ou
du coût de la construction le kilowatt, ce serait tout simplement non. De
la même façon, ce que j'indiquais tout à l'heure, si on
faisait une évaluation strictement hydroélectrique, il est
évident que l'aspect rentabilité en termes d'énergie qu'on
peut tirer de ces travaux en fonction des coûts de l'investissement...
c'est une relation dont il faut tenir compte. Je ne veux pas reprendre ce que
je disais tantôt au sujet de Delaney qui est une centrale pompée
mais qui doit être opposée au coût d'une construction ou un
projet de suréquipement qui pourrait donner la même
quantité d'énergie. C'est dans ce sens qu'on doit travailler pour
prendre la meilleure décision.
Je ne voudrais pas, M. le député de Mont-Royal, que vous
laissiez tous les Montréalais et toutes les Montréalaises qui ont
hâte d'avoir accès aux rives, qui veulent voir s'assainir le grand
archipel de Montréal, qui veulent voir se régulariser les eaux,
sous l'impression que la décision que le gouvernement prendrait en
ultime ressort serait essentiellement et seulement liée au coût de
l'investissement et au potentiel hydroélectrique du barrage
Saint-Louis.
L'aspect hydroélectrique est un des volets, c'est un volet
majeur, c'est certain, mais ce n'est pas le seul, j'en ai indiqué trois
autres importants qui devront être pris en compte. Les variables, en
termes d'investissement sur Archipel, peuvent jouer autour de... Je ne sais pas
si M. Bourbeau a un meilleur souvenir que moi de ces chiffres, mais je pense
qu'on parlait à la table de concertation de quelque chose comme 5 000
000 000 $ ou 6 000 000 000 $; on a même parlé d'une variable qui
pourrait être de 4 000 000 000 $ à 8 000 000 000 $, mais si l'on
parle de 5 000 000 000 $ ou 6 000 000 000 $, cela nous donne un ordre de
grandeur de l'envergure d'un pareil projet, et je pense qu'on ferait une
erreur. Si j'étais député de Mont-Royal ou si
j'étais Montréalais, je travaillerais plutôt dans une
approche positive pour faire aboutir le dossier au lieu d'essayer de trouver
des bâtons pour les mettre dans les raies de la roue, parce que c'est ce
que j'ai cru comprendre de votre intervention et je le déplore.
M. Ciaccia: M. le Président...
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia: ... c'est malheureux que le ministre détourne
à sa façon le sens de mon intervention. Vous avez un projet,
supposément pour aménager le territoire, mais je pense que la
population doit connaître toutes les données. Le but de cette
commission parlementaire, c'est de savoir quelles sont les dépenses
d'Hydro-Québec, quels sont les projets d'Hydro-Québec et leur
rentabilité. Je ne pense pas qu'il faille semer la confusion et essayer
de vendre une salade à la population sans lui donner toute
l'information. Le but de mon intervention ce matin, des questions que j'ai
posées et des réponses que j'ai très bien reçues
des représentants d'Hydro-Québec, c'était vraiment oui,
quant à la rentabilité d'Hydro-Québec, que cela ne marche
pas, d'accord. Si cela ne marche pas, vous pouvez encore aménager le
territoire. Je ne vous dis pas de ne pas aménager le territoire, je ne
vous dis pas de ne pas faire des améliorations, mais qu'on sache
où on s'en va, pourquoi on le fait, quels seront les coûts et qui
va payer? Cela ne sert à rien que, tous les ans, on vienne ici et qu'on
demande des augmentations à Hydro-Québec, il y a des raisons pour
cela. On ne fera pas payer encore les consommateurs simplement
pour dire: On va avoir un projet d'Hydro-Québec. On ferme des
chantiers à la Baie-James et, pour essayer de vendre un certain projet,
on dit: On va construire le projet Archipel. Divisons les problèmes dans
le projet Archipel. Vous voulez aménager le territoire, très
bien. On va coopérer et on va voir les meilleures façons de le
faire. Mais informons la population de ce que cela va coûter. Est-ce
Hydro-Québec qui va être obligée de payer la facture et
encore une fois d'augmenter les tarifs. Je ne crois pas que cela serait juste.
Jusqu'à ce qu'on pose les questions à l'Assemblée
nationale et à cette commission parlementaire, on ne recevait pas les
informations. La raison pour laquelle on reçoit des informations
maintenant, c'est parce qu'on pose des questions, alors, ne nous faites pas le
reproche de dire qu'on veut...
M. Duhaime: Le seul reproche que je vous fais, c'est de ne pas
avoir été présent à la table de concertation.
M. Ciaccia: ... poser des questions sur la rentabilité de
certains projets. Si vous voulez aménager le territoire, vous
n'êtes pas obligé de détruire le site des rapides de
Lachine; il y a beaucoup de choses que vous pouvez éviter. N'essayez pas
de nous faire dire ou de donner l'impression à la population qu'on est
contre le progrès et qu'on est contre l'aménagement du
territoire, on est pour l'aménagement du territoire autant que vous mais
soyons sûrs de ce que nous faisons, sachons les coûts, sachons qui
va payer et comment la population va pouvoir en bénéficier. C'est
cela le but d'une commission parlementaire, obtenir de l'information.
Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.
M. Duhaime: Juste un commentaire, M. le Président, toutes
les informations que recherche ce matin le député de Mont-Royal
ont été données à la table de concertation sur
Archipel, il y a plusieurs mois.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia: II y a deux de mes collègues qui ont
asssisté à une réunion de cette table de concertation.
Savez-vous comment ils y ont assisté?
M. Fortier: Ils connaissaient la secrétaire.
M. Ciaccia: Ils ont rencontré une des secrétaires
dans le couloir, et elle a dit tout à coup: "On a une réunion tel
jour, pourquoi ne viendriez-vous pas?" Ce n'était pas une invitation
officielle du gouvernement. Ils n'ont pas eu le droit de parler, ils n'ont pas
eu le droit d'intervenir, ils étaient les invités d'une des
secrétaires dans cette commission. Informez la population et sachons ce
qu'on fait. Si j'avais voulu entrer, ils ne m'auraient même pas fait
entrer à cette réunion.
M. Fortier: Elle était pas mal gentille.
M. Ciaccia: Oui, la secrétaire était apparemment
très gentille et mes collègues aussi apparemment.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Frontenac.
M. Dussault: M. le Président, je ne sais pas si M. le
député de Frontenac me permettrait une question sur le projet
Archipel, j'ai des choses à dire là-dessus...
Une voix: M. le député de Châteauguay, chaque
fois qu'il parle, il se croit "dû". On va le laisser parler.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Châteauguay, c'est que j'en avais d'autres avant vous, mais si c'est sur
le même sujet, allez-y.
M. Ciaccia: En anglais, s'il vous plaît!
M. Dussault: Je puis le faire en anglais, si vous le voulez!
M. Ciaccia: Mon collègue m'informe que ce n'est pas dans
le couloir, que c'est dans une discothèque qu'ils ont rencontré
la secrétaire.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Châteauguay, vous avez la parole.
M. Dussault: M. le Président, ce sera bref. M. le
député de Mont-Royal, dès les premières paroles
qu'il a utilisées dans son intervention, nous a démontré
effectivement où il . s'en allait. Il a dit aux gens
d'Hydro-Québec ici: Je veux vous parler uniquement de la question
hydroélectrique, de l'aspect hydroélectrique. On sait très
bien que c'est une erreur de fond, que c'est une erreur d'approche fondamentale
et je pense que ce n'est pas comme ça qu'on va se comprendre sur le
projet Archipel.
Le projet Archipel est d'abord et avant tout un projet
d'aménagement global. Il y a plusieurs fonctions auxquelles il faut
songer tant et aussi longtemps que M. le député de Mont-Royal
voudra en faire strictement une question d'hydroélectricité, il
passera à côté de la question. Il faut le lui dire, il faut
le lui répéter chaque fois. Il insiste toujours pour venir nous
dire: On va défaire le site des rapides de Lachine alors qu'il n'y a
strictement rien de prouvé encore dans ce sens. Que M. le
député de Mont-Royal attende les conclusions de l'étude de
faisabilité qui se fait présentement et dans laquelle
Hydro-Québec est un intervenant. Je ne veux pas minimiser le rôle
d'Hydro-Québec, mais c'est quand même un intervenant parmi
d'autres intervenants.
Ces études seront complétées et on s'attend
à un rapport au printemps prochain.
M. Pagé: ... Bah!
M. Dussault: Si vous voulez le prendre comme ça, M. le
député de Portneuf, je dis qu'Hydro-Québec a un rôle
important à jouer dans ce dossier, mais elle n'est pas le seul
intervenant pour la raison que c'est une question d'aménagement global,
d'aménagement dans la grande région de Montréal, qui va se
faire au bénéfice de la très grande majorité des
citoyens de la région de Montréal. Attendons les conclusions de
l'étude au printemps prochain. Elle n'est pas terminée. Il
fallait faire au moins un cycle complet. Nous devons faire les études
sur le plan biologique durant l'hiver, ce qui n'avait pas été
fait, et nous serons en mesure de juger de la question à ce
moment-là.
Je pense bien que, quand on aura regardé toutes ces questions
après le rapport, il y aura lieu de regarder s'il y a un moyen de
partager les coûts entre les intervenants concernés. Mais, pour le
moment, c'est prématuré. Je trouve excellente la réponse
qu'a donnée le P.-D.G. d'Hydro-Québec, M. Coulombe, parce que je
pense que c'est là que ça se situe et ce serait vraiment
prématuré de vouloir aller plus loin. Merci, M. le
Président.
M. Ciaccia: M. le Président.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia: Cela me fait penser, juste très
brièvement, pour faire suite...
M. Grégoire: M. le député de Mont-Royal
avait eu l'occasion de dire son point de vue, je pense bien qu'il arrive ce
matin pour...
M. Ciaccia: L'approche du député de
Châteauguay me fait penser au marchand qui vendait à perte chaque
article et qui se disait: Je vais faire des profits sur le volume.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Frontenac.
M. Dussault: M. le Président, M. le député
de Mont-Royal nous fait penser à celui qui veut aller voir la population
pour essayer de lui vendre un objet mais qui oublie de donner toutes les
facettes de cet objet. Ce n'est pas plus brillant, M. le député
de Mont-Royal. Vous avez essayé de vous en sortir, mais, chaque fois,
vous nous faites la preuve que vous ne comprenez rien au dossier ou que vous ne
voulez pas comprendre le fond de ce dossier, parce que vous ne voulez avoir que
ce qui vous concerne. Vous voulez faire de la petite politique avec ça,
c'est évident.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Frontenac.
M. Grégoire: M. le Président, je voudrais en venir
à la question pour laquelle nous sommes réunis depuis hier matin,
c'est-à-dire la tarification.
M. Fortier: Je pensais que c'était
Hydro-Québec...
M. Grégoire: M. le Président, vous remarquerez
qu'on nous avait annoncé au cours de l'été que le Parti
libéral arriverait avec une nouvelle attitude, plus agressive, dans nos
commissions parlementaires et à l'Assemblée nationale, mais je
m'aperçois que c'est plutôt une attitude ridicule. Les
députés libéraux font des farces inutiles et des farces
plates depuis le matin. Cela me surprend du député d'Outremont,
parce que j'ai toujours eu beaucoup de considération pour celui-ci que
je considérais comme l'un de ceux dans le Parti libéral qui
avaient les qualifications pour étudier et analyser un dossier...
M. Fortier: Merci, merci. Une voix:
Méfiez-vous!
M. Grégoire: ... mais je m'aperçois qu'il prend les
mauvaises habitudes de ses collègues. Il prend les mauvaises habitudes
des pires de ses collègues.
M. Fortier: Cela commençait bien, mais cela finit mal.
M. Grégoire: Cela me désappointe, M. le
député d'Outremont, parce que je vous ai toujours eu en
très haute considération. Je lui ai déjà fait cette
remarque...
M. Fortier: Je vais m'en souvenir... (12 h 45)
M. Grégoire: ... que ce serait désastreux pour le
député d'Outremont qu'il prenne les mauvaises habitudes de ses
collègues - en fait, c'est que ses collègues ne peuvent pas faire
mieux - parce que je pense qu'il peut faire un meilleur député
que la majorité de ses collègues. Il est en train
de s'assimiler à la moyenne la plus basse de ses
collègues. Cela me fait de la peine de le voir. Il nous en manquait,
dans l'Opposition, des députés comme celui d'Outremont et il est
en train de changer son style. Cela me fait de la peine.
Je voudrais en revenir...
Une voix: Est-ce que le ministre est à votre image?
Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Frontenac.
La tarification
M. Grégoire: Je voudrais en revenir à mes
questions...
Une voix: J'espère que non.
M. Grégoire: ... sur le sujet pour lequel on s'est
réuni ici, la tarification. Je pense que la population, ceux qui vont
regarder cette commission parlementaire à la télévision,
veulent savoir eux aussi à quoi s'attendre en ce qui concerne la facture
à payer tous les mois à Hydro-Québec. Je crois que votre
demande d'augmentation pour l'année 1983, M. le président
d'Hydro-Québec, est d'environ 7,8%...
Une voix: 7,3%...
M. Grégoire: ... 7,3%. J'aimerais savoir,
premièrement, si vous n'avez pas eu l'idée de vous aligner sur
les 6%. Vous êtes à 7,3%, vous n'êtes pas loin, est-ce que
cela ne vous aurait pas tenté de vous aligner sur les 6%? J'aimerais
savoir quels sont les facteurs dominants dans toutes vos dépenses de
fonctionnement pour l'année prochaine qui font que vous ne pourriez pas
vous limiter aux 6% et ne pas les dépasser. Qu'est-ce qui est le plus
gros facteur dans toutes les dépenses de fonctionnement, de quelque
nature qu'elles soient, qui fait que vous soyez obligés de
dépasser les 6% pour l'année 1983?
Le Président (M. Gagnon): M.
Coulombe.
M. Coulombe: L'ensemble des variables qui ont été
étudiées; évidemment, on a fait le tour des principales
depuis le commencement de la commission.
L'augmentation prévue, l'an prochain, de 2,5% de la demande, un
taux d'inflation prévu de l'ordre de 9%, des investissements de 2 600
000 000 $, des emprunts de l'ordre de 2 000 000 000 $ nous ont conduits
à présenter un équilibre financier global qui devait
être mis en regard de certains critères qui, traditionnellement,
ont permis à Hydro-Québec d'avoir une place
privilégiée sur les marchés, l'un de ces critères
étant la couverture des taux d'intérêt qui a
oscillé, dans les dernières années, entre 1,3, 1,10, 1,15
et, voilà quelques années même, 1,25.
Nous nous sommes arrêtés dans tous ces calculs au point
précis où on était rendu à la couverture de 1. Cela
nous semblait le critère - c'est l'esprit de la loi, on peut s'y
référer - minimal qu'il ne fallait pas dépasser, en bas
duquel il ne fallait pas tomber après avoir fait un virage
extrêmement important dans les dépenses de fonctionnement.
L'année prochaine, je pense qu'il y a un effort, une volonté
collective d'Hydro-Québec de baisser les dépenses de
fonctionnement de façon extrêmement considérable. Le
"target" est de 5,4% par rapport à un taux historique de 20%. Tous ces
facteurs considérés, nous en sommes arrivés à la
volonté de baisser au minimum les tarifs pour les ramener à une
valeur de 7,3%. Évidemment, la diminution des dépenses
d'exploitation est intimement liée à la qualité des
conventions collectives qu'on va signer ou qu'on devrait signer d'ici quelques
mois.
C'est évident - je crois que toutes les discussions qu'on a
depuis deux jours le prouvent - que beaucoup de ces valeurs monétaires
font l'objet d'hypothèses de travail, et vous avez dans le plan
l'étude de sensibilité qui permet de calculer le risque des
tarifs, le risque en termes d'Hydro-Québec. L'objectif global serait
d'avoir zéro ou de les diminuer. Ce serait l'avis idéal, mais le
risque pour l'entreprise qu'est HydroQuébec peut être
calculé très facilement. Si la demande, par exemple, au lieu
d'être de 2,5% était de 1,5%, il y aurait 30 000 000 $ en revenus
de moins; si elle était de 3,5%, l'Hydro-Québec aurait une marge
de plus.
Vous avez à la fin du plan le tableau précis et chaque
point de tarif représente pour Hydro-Québec, au moment où
on se parle, 30 000 000 $. Vous avez toutes les données pour permettre
d'évaluer le risque, parce qu'il s'agit d'une analyse de risques
fondamentalement et d'un arbitrage qu'il faut faire entre la santé
financière d'Hydro-Québec pour lui permettre de continuer
à immobiliser au rythme de 2 500 000 000 $ par année, à
faire des travaux concrets au rythme de 2 500 000 000 $ par année. Le
financement que cela prend, les coûts du financement et une compression
extrêmement rigoureuse des dépenses d'exploitation nous conduisent
à ce qu'on a présenté comme recommandation, des tarifs de
7,3%. Les 7,3% ne sont pas un chiffre magique; vous me diriez 7,2% ou 7,4%...
Vous avez au tableau 28 du plan les conséquences des décisions
que le gouvernement en dernière analyse devra prendre. Alors, le chiffre
de 7,3% nous semble concilier une volonté de diminuer le plus possible
les tarifs, compte
tenu de la conjoncture, compte tenu des formes d'énergie
concurrentielles, et un équilibre financier dans le cadre d'une rigueur
extrême, les dépenses d'exploitation. Cela nous semble un
équilibre dont vous avez en main les principaux paramètres.
M. Grégoire: M. le Président...
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Frontenac.
M. Grégoire: Vous nous donnez les raisons qui vous
motivent à 7,3%. Vous parlez de l'augmentation de la demande. Je crois
que, lorsque la demande augmente, ce n'est pas cela qui entraîne une
augmentation du coût l'unité. Vous parlez des emprunts et des
investissements de 2 6Q0 000 000 $ et des emprunts de 2 000 000 000 $. Je vois
ici dans le rapport annuel d'Hydro-Québec sur l'évolution des
taux d'intérêt au cours des quelques dernières
années qu'en 1977, le taux effectif moyen des emprunts à long
terme contracté a été de 8,32%. En 1979, c'était
rendu à 10,77%. En 1980, cela a grimpé à 12,54%. En 1981,
cela a grimpé à 15,10%. Est-ce que cette seule augmentation des
taux d'intérêt sur vos investissements, sur vos
développements, ne mange pas à elle seule - j'entends,
l'augmentation, la progression phénoménale des taux
d'intérêt -est-ce qu'elle ne mange pas à elle seule
pratiquement tout le pourcentage d'augmentation des tarifs
d'électricité que vous demandez à la population du
Québec, à peu près?
M. Coulombe: Non, je ne crois pas que cela soit la seule
explication. Il faut coupler à ce phénomène la demande qui
a baissé considérablement. Donc, la demande baissant, les revenus
baissant, ce sont les deux phénomènes conjugués qui
augmentent le fardeau financier considérable d'Hydro. Si vos revenus
baissent parce que la demande baisse tout simplement, c'est
mathématique, et si vos taux d'intérêt augmentent au rythme
que vous venez de décrire vous-même, c'est évident qu'au
point de vue financier, cela sert Hydro-Québec d'une façon
beaucoup plus considérable.
M. Grégoire: Maintenant si, comme la tendance semble
à peu près le démontrer depuis quelques mois, les taux
d'intérêt baissaient, est-ce que cela pourrait avoir des effets
tels sur votre budget que vous pourriez envisager de vous maintenir à
une augmentation de 6% pour 1983?
M. Coulombe: Je ne crois pas, parce que, encore selon le
même tableau, si, au lieu de 14,8%, c'était 13,8%, cela fait donc
une différence de 10 000 000 $. Ces 10 000 000 $ ne se trouvent pas sur
la ligne des profits ou ainsi de suite, c'est sur la ligne des
intérêts bruts. Cela prendrait une diminution très
radicale, beaucoup plus radicale que celle qui se produit actuellement et
presque impensable des taux d'intérêt. Pour cela, il y a une
signification réelle en termes de marge de manoeuvre d'Hydro. La
sensibilité est beaucoup plus grande sur la demande, parce que 1%
d'augmentation de demande, au lieu de 2,5%, on a 3,5%, c'est 30 000 000 $,
alors que, dans le cas des taux d'intérêt, c'est 10 000 000 $.
M. Grégoire: Sur des emprunts de 2 000 000 000 $, 1%,
c'est 20 000 000 $. Si vous dites que vous faites des emprunts de 2 000 000 000
$ pour l'an prochain, dans le cas de 2 000 000 000 $, c'est 20 000 000 $.
M. Coulombe: Oui, mais il ne faut pas calculer cela comme cela.
Les emprunts totaux de l'année, il faut toujours les diviser par deux,
parce qu'il y a des emprunts qui sont faits au début de l'année,
au milieu de l'année et à la fin de l'année. C'est la
moyenne de l'année qu'il faut considérer. En d'autres mots, tout
le programme de 2 000 000 000 $ ne sera pas fait le 2 janvier.
M. Grégoire: M. Coulombe, quelles sont les comparaisons
entre le pourcentage d'augmentation des tarifs que vous demandez ici à
Hydro-Québec et ce qui se demande comme pourcentage d'augmentation en
Ontario, par exemple?
M. Coulombe: En Ontario, la nouvelle était dans les
journaux ce matin, je crois que c'est 8,3% qui ont été
accordés pour une catégorie, et 8,8% pour une autre
catégorie. D'après les journaux, la décision a
été prise hier en Ontario. Donc, ce serait 1% ou 1,5% de plus
qu'ici. Dans d'autres provinces, c'est plus délicat. Je crois qu'il y a
eu un gel au Manitoba, un gel qui se termine en 1984. C'est un gel des tarifs
qui a d'ailleurs mis Hydro-Manitoba dans une position catastrophique au point
de vue financier et qui se termine l'an prochain. Donc, c'est un gel. Je ne
sais pas si mes collègues ont des renseignements précis sur les
autres provinces.
M. Cristel: En Colombie britannique, on demanderait une
augmentation de tarifs de 13% au mois d'avril. Quand le gel finira en
Nouvelle-Écosse, on parle d'augmentation entre 30% et 40% au
début de l'année prochaine. Évidemment, nous n'avons pas
de renseignements sur l'Alberta, mais c'est à peu près les
principaux autres distributeurs.
M. Grégoire: Aux États-Unis, par
exemple, avez-vous une idée de ce que seront les augmentations
pour l'année 1983?
M. Coulombe: II y a un exemple et c'est un peu par hasard qu'on
choisit le pire parce qu'on suit ce qui se passe dans ce coin pour d'autres
raisons. Bonneville, c'est combien?
M. Lafond: Bonneville Power, pour des raisons strictement
financières - c'est ce qu'on veut éviter à
Hydro-Québec - a été forcée de demander une mise en
vigueur, le 1er octobre 1982, d'une hausse de tarifs de 58%.
M. Grégoire: 58%?
M. Lafond: 58% qui vont leur donner des revenus
supplémentaires excédant 600 000 000 $.
M. Coulombe: Avant que le président Reagan institue un
groupe spécial d'enquête sur TVA pour examiner leur plan
d'équipements qui était trop accéléré et
qu'ils se retrouvent avec des investissements énormes sur le dos, qu'ils
ne seraient pas capables de financer, leur demande était de l'ordre de
20% à 25%.
M. Grégoire: Votre augmentation moyenne des tarifs
à 7,3%, pourrait-on savoir ce que cela veut dire, par exemple, pour le
tarif domestique?
M. Coulombe: Cette année - avant de donner la parole
à M. Cristel - la caractéristique qu'on a voulu instaurer dans
les tarifs, la recommandation qu'on fait au gouvernement, c'est d'avoir des
tarifs uniformes pour l'ensemble des usagers. Une espèce de gel de la
structure des tarifs. Il y a des ajustements qui sont dus à des
problèmes techniques, que M. Cristel pourra expliciter, mais la marge
tourne autour de 7,3% pour l'ensemble des usagers. Pour quelques-uns, cela va
être 7,1% pour des raisons techniques, mais notre recommandation pour
l'ensemble des usagers, c'est d'être autour de 7,3%.
M. Grégoire: Que ce soit le domestique, le commercial ou
l'industriel?
M. Coulombe: C'est cela.
M. Cristel: A cause de l'arrondissement des tranches de tarifs et
des multiplicateurs, l'augmentation minimale est de 6,5% et l'augmentation
maximale de 7,7% parce que, comme je vous le dis, on ne veut pas des tarifs
à trois décimales.
Le Président (M. Gagnon): M. le député
d'Outremont. Avez-vous terminé, M. le député?
Une voix: II est 13 heures, M. le Président.
M. Fortier: Malheureusement, on arrive à 13 heures dans
quelques minutes. On a quasiment terminé la revue du programme et tout
cela. Personnellement, demain, il me fera plaisir d'aborder le bilan financier
et la tarification proprement dite. J'avais seulement, dans les deux minutes
qui nous restent, deux ou trois questions rapides.
Sur la distribution, on en avait parlé en avril 1981, il y avait
des problèmes de panne, on avait identifié cela comme un
problème extrêmement important dans certaines régions,
quelle est la situation présentement? À ce moment-là, on
nous avait dit qu'il y avait un programme d'étude qui avait
été mis au point et cela avait été identifié
comme un "bottle neck", une épine dans le système, merveilleux
par ailleurs, d'Hydro-Québec.
M. Coulombe: De façon générale, les
études ont progressé à un rythme
accéléré, sauf qu'elles ne sont pas terminées
complètement. Il y a eu quand même des améliorations
considérables qui ont été apportées par
l'augmentation des dépenses au budget de distribution au cours des deux
dernières années. Même si on n'a pas encore
déterminé tout à fait les critères
nécessaires pour se donner des règles précises de
qualité de service au niveau de la distribution, on est relativement
satisfait quand même des résultats obtenus à ce jour et
l'an prochain, on espère être en mesure d'avoir des
critères définitifs sur l'allocation des ressources
nécessaires pour maintenir un niveau de qualité acceptable.
M. Fortier: En particulier dans Outremont, on a eu moins de
pannes que nous en avions. Je ne sais pas si vous avez déplacé
les pannes vers d'autres régions de la ville pour me faire plaisir, mais
en tout cas, je vous en sais gré de toute façon.
En terminant, je m'excuse de sauter à un autre sujet rapidement:
vous mettez un effort dans votre programme sur HydroQuébec
International. Ils ont été impliqués dans le passé
d'assez prêt à certains travaux d'Hydro-Québec. Je crois
que la nomination de M. Boulet à la direction de l'exportation est
bienvenue sûrement dans les milieux de l'exportation, connaissant sa
grande compétence et son désir de collaborer avec tous les
milieux du secteur privé. Mais, vous mettez une certaine insistance sur
le fait que vous allez avoir des surplus en ressources humaines. Probablement
que je n'ai pas raison, c'est ce que j'aimerais que vous confirmiez, il
semblerait que vous mettez l'accent sur l'utilisation des
ressources qui seront en trop à HydroQuébec. Est-ce que le
secteur privé pourrait avoir des craintes que la collaboration avec le
secteur privé se ferait moins bien à cause de ce surplus de
main-d'oeuvre à HydroQuébec, alors qu'Hydro-International
pourrait venir en concurrence avec le génie-conseil qui, par ailleurs,
va souffrir énormément des baisses d'investissements
d'Hydro-Québec. (13 heures)
M. Coulombe: La stratégie dans ce secteur reste la
même, c'est-à-dire une stratégie de collaboration. Quant au
surplus de personnel, je vous ai mentionné hier un problème assez
paradoxal à Hydro-Québec: les principaux contrats
qu'Hydro-Québec International envisage à l'heure actuelle, sauf
quelques grands contrats de clés en main qui sont un peu plus loin
à l'horizon, les principaux contrats actuels sont dans le domaine de la
distribution: or, c'est probablement le secteur à Hydro-Québec
où il manque le plus de personnel. Il va y avoir un transfert en termes
de formation à Hydro-Québec de beaucoup d'individus qui devront
se recycler en distribution pour obéir aux deux contraintes qui sont
contradictoires. Sur le plan international, le plus grand nombre de contrats
est dans le domaine de la distribution et les efforts d'Hydro en même
temps sont dans le domaine de la distribution. Donc, il va y avoir une
période d'un an ou deux durant laquelle il va y avoir des programmes
accélérés de formation de techniciens et
d'ingénieurs qui étaient dans d'autres domaines et qui vont
être recyclés dans la distribution.
M. Fortier: Je m'excuse. Je crois qu'on doit se quitter parce
qu'il est passé 13 heures. Merci de votre collaboration. Pour ma part,
demain, il me fera plaisir d'entamer la discussion sur le bilan financier et la
tarification proprement dite. Je demande la suspension des travaux.
M. Duhaime: Demain, on va parler des tarifs.
Le Président (M. Gagnon): La commission de
l'énergie et des ressources suspend ses travaux jusqu'à demain,
10 heures.
(Fin de la séance à 13 h 02)