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Version finale

32e législature, 4e session
(23 mars 1983 au 20 juin 1984)

Le mercredi 4 mai 1983 - Vol. 27 N° 36

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Examen de la décision de la SEBJ et du rôle du premier ministre et de son bureau lors du règlement hors cour de la poursuite intentée à la suite du saccage de LG 2


Journal des débats

 

(Dix heures quinze minutes)

Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission élue permanente de l'énergie et des ressources reprend ses travaux pour siéger ce matin, de 10 h 15 à 13 heures. Nous reviendrons, normalement, après une motion en Chambre, après la période de questions, c'est-à-dire vers 16 heures, 16 h 30, jusqu'à 18 heures. Ce sont les travaux de la journée aux fins d'examiner les circonstances entourant la décision du conseil d'administration de la Société d'énergie de la Baie James de régler hors cour la poursuite civile intentée à la suite du saccage du chantier de LG 2 survenu en 1974 et, plus spécifiquement, le rôle du premier ministre et de son bureau à cet égard.

Les membres de cette commission sont M. Dussault (Châteauguay), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Duhaime (Saint-Maurice), M. Bourbeau (Laporte), M. Laplante (Bourassa), M. Gratton (Gatineau), M. Lavigne (Beauharnois), M. LeBlanc (Montmagny-L'Islet), M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys), M. Perron (Duplessis), M. Rodrigue (Vimont).

Les intervenants sont M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Vaillancourt (Jonquière), M. Desbiens (Dubuc), Mme Harel (Maisonneuve), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Pagé (Portneuf), M. Doyon (Louis-Hébert), M. Tremblay (Chambly), M. Saintonge (Laprairie). Le rapporteur est toujours M. LeBlanc, de Montmagny-L'Islet.

Au moment où nous avons terminé... Oui, M. le député de Vimont.

M. Rodrigue: Si vous voulez bien prendre note que le député de Chambly va être membre de la commission, en remplacement du député de Duplessis.

Le Président (M. Jolivet): Dans ce cas, je ferai la correction nécessaire.

M. Rodrigue: Merci.

Le Président (M. Jolivet): Au moment où nous nous sommes quittés, hier soir, c'était Me Beaulé qui était avec nous. L'autre personne invitée pour la journée est Me André Gadbois. Donc, la parole était au député de Gatineau, à qui je la redonne. Mais, avant, le député de Marguerite-Bourgeoys a une question?

Un mémoire de M. Yvan Latouche?

M. Lalonde: Une question préliminaire, comme d'habitude, au début de la journée, M. le Président. Je voudrais simplement vérifier une chose. Je me suis laissé dire qu'un témoin qui était sur la première liste des témoins, M. Yvan Latouche, aurait fait parvenir à la commission une demande de témoigner, accompagnée d'un mémoire, et il aurait demandé que ce mémoire soit distribué aux membres de cette commission. Je me suis adressé de façon officieuse au secrétariat des commissions et on me dit que l'autorisation de distribuer le mémoire n'est pas encore arrivée d'en haut. Si M. Latouche est invité comme témoin, naturellement, il serait de mise, comme d'habitude, d'attendre qu'il présente son mémoire pour le distribuer aux membres ou à la presse. Mais, s'il n'est pas invité, est-ce qu'on pourrait quand même avoir accès à son mémoire?

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre a l'intention de parler de cette question.

M. Duhaime: M. le Président, je crois que l'Opposition libérale a déjà en main le document auquel se réfère le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: J'ai parlé, de mon siège, à savoir que je voulais avoir accès à ce mémoire-là, c'est que je ne l'ai pas, physiquement, en main. Est-ce que l'Opposition l'a? L'Opposition, c'est 43 députés et c'est beaucoup de monde. Je vous dis simplement que les membres de la commission... Enfin, moi je ne l'ai pas reçu comme membre de la commission. Je ne l'ai pas reçu officiellement du secrétariat des commissions. C'est ce dont il est question ici.

Des voix: Moi non plus.

Le Président (M. Jolivet): M. le

ministre.

M. Bourbeau: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Un instant! Si vous avez tous l'intention de dire que vous ne l'avez pas, je tiens pour acquis que personne ne l'a, du moins officiellement. Donc, il n'y aura pas de question de règlement.

M. Bourbeau: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): Je vais entendre votre question de règlement, M. le député de Laporte.

M. Bourbeau: M. le Président, cela va beaucoup plus loin que ce que vous venez de dire. Vous avez dit que l'Opposition ne l'a pas officiellement. J'affirme de mon siège que je ne l'ai pas, que je ne l'ai pas vu, ni lu, et que je n'en ai même jamais entendu parler. Je pense qu'il serait intéressant de pouvoir l'avoir.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Duhaime: M. le Président, je constate une faiblesse d'imagination dans les moyens de l'Opposition libérale, parce qu'il était dans le journal La Presse, ce matin. Tous les journalistes, que j'ai rencontrés hier après-midi, l'avaient dans les mains.

Une voix: Je l'ai vu.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

Une voix: Vous en avez une copie officielle, vous autres.

M. Duhaime: M. le Président, je ne donnerai pas mon consentement pour un dépôt officiel de ce document, qui pourrait faire partie des travaux de cette commission. Il serait tout à fait irrégulier de recevoir quelque document ou déclaration que ce soit, de quiconque ne témoignerait pas devant la commission, à moins qu'il y ait consentement des deux côtés. Or, il n'y a pas de consentement, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Je pense que je vais régler assez rapidement le problème.

M. Lalonde: Oui, mais...

Le Président (M. Jolivet): Premièrement, je sais très bien que la question n'est pas posée à M. le ministre. Elle est posée à la présidence de la commission parlementaire. Je dois vous dire que le président doit aussi agir à l'intérieur des mandats qu'il reçoit. Le mandat était d'entendre des personnes. Au moment où la personne se fait entendre, normalement, je lui demande si elle a des propos préliminaires à faire. Si la personne n'est pas entendue devant cette commission, il me faut absolument, comme je l'ai déjà fait d'ailleurs à la commission de l'éducation en particulier, permettre la distribution de documents, puisqu'il n'y a pas de dépôt de documents à cette commission. Il n'y a que des distributions de documents à la commission parlementaire. À ce moment-là, normalement, c'est avec le consentement des membres de cette commission que l'on peut faire ce genre de dépôt. Compte tenu que je n'ai pas le consentement, je n'ai pas l'intention de faire le dépôt de ce document. Cependant, je vais aller plus loin dans la recherche des décisions que j'aurai à rendre à l'avenir. Je prends donc en délibéré la demande qui est faite et j'aurai une décision à rendre dans ce sens.

M. Lalonde: Merci. M. le Président. Premièrement, je voudrais simplement souligner le fait qu'il s'agit d'une personne que le leader du gouvernement avait inscrite sur sa liste maîtresse des témoins. Deuxièmement, si elle ne vient pas témoigner...

M. Laplante: Question de règlement, M. le Président.

M. Lalonde: ...il s'agit d'une situation spéciale.

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le député de Marguerite-Bourgeoys. Le député de Bourassa, sur une question de règlement.

M. Laplante: Je pense qu'on a tous eu une leçon de la journée qui s'est passée ici hier. Vous êtes en train de la laisser commencer de la même façon qu'elle a commencé hier, par des questions de règlement. Notre invité n'a pu témoigner avant 20 heures hier. Je vous demande d'arrêter ces questions de règlement pour que notre invité puisse être questionné. Je vous en supplie.

Une voix: En commençant par la vôtre.

Le Président (M. Jolivet): D'une façon ou de l'autre, M. le député, je vous remercie de cette information que vous nous donnez. Il arrive souvent que... S'il vous plaît! Il arrive souvent que des demandes comme celle-là se fassent. Elles sont un peu longues, mais je pense qu'on peut désormais commencer avec M. le député de Gatineau

et ses questions adressées à Me Beaulé. S'il vous plaît, ne revenez pas sur l'ensemble du sujet! Restons avec Me Beaulé.

M. Duhaime: M. le Président, me permettriez-vous une question?

Le Président (M. Jolivet): Oui, juste un instant.

M. Beaulé: Le micro ne fonctionne pas.

Le Président (M. Jolivet): Me Beaulé, vous avez...

M. Beaulé: M. le Président, je veux apporter...

Le Président (M. Jolivet): Juste un instant, je vais vous le permettre après puisque le ministre m'a dit qu'il avait une question à poser.

M. Duhaime: Je voudrais poser une question au député de Marguerite-Bourgeoys.

Le Président (M. Jolivet): Est-ce que le député de Marguerite-Bourgeoys accepte?

M. Lalonde: Me poser une question à moi? Je vais prendre avis. Allez.

M. Duhaime: Je voudrais savoir si votre M. Latouche est le même M. Latouche que celui qui fait la manchette en première page du Soleil ce matin? "Yvan Latouche promet d'autres ennuis au Parti québécois." Est-ce qu'il s'agit de la même personne?

M. Lalonde: Je ne le sais pas. On fera les vérifications nécessaires.

Le Président (M. Jolivet): Me Beaulé, vous avez la parole.

Témoignages M. Rosaire Beaulé (suite)

M. Beaulé: M. le Président, je voudrais apporter trois corrections à mon témoignage donné en toute fin de séance, hier soir, le 3 mai. Je ne vous cache pas que j'étais littéralement épuisé et je crois qu'il est dans l'intérêt de la commission que je fasse ces rectifications. Je pense que la journée d'hier a été dure - je ne m'étendrai pas là-dessus -et je crois qu'on acceptera avec équité que je puisse le dire. J'ai assisté durant toute la matinée à un débat entre parlementaires pendant lequel j'ai été le ballon de certaines interventions, de déclarations qui étaient très dures à mon égard, et pendant lequel je n'avais pas droit de parole, ni droit de réplique. Ce n'est qu'à 16 heures hier que j'ai pu invoquer la charte des droits et faire présenter par mon avocate, Me Roy, la requête que vous connaissez et dont vous avez disposé.

J'ai également pris connaissance, à l'heure du midi, d'une déclaration faite à la radio hier matin qui me touchait également, et qui me touchait profondément - je ne vais pas revenir là-dessus - mais je veux souligner qu'à la fatigue physique s'était ajoutée, tout au long de la journée d'hier, une fatigue nerveuse à tel point qu'à un moment donné, hier soir, M. le député de Gatineau m'a demandé de lire un extrait du rapport Cliche. Il se rappellera que j'ai buté à trois reprises sur le même mot. Tout cela étant dit, j'affirme donc qu'étant extrêmement fatigué hier soir, j'ai - non pas induit la commission en erreur - mais donné des réponses qui, en certains cas, nécessitent des corrections. Je commence par les donner, si vous le permettez.

Le Président (M. Jolivet): Vous avez la permission.

M. Beaulé: M. le député de Mont-Royal, c'est à 21 h 35, ruban 1034-ER, page 3, me pose la question et je cite à brûle-pourpoint: "M. Ciaccia: Est-ce que vous avez communiqué avec le bureau du premier ministre vendredi dernier? "M. Beaulé: Vendredi dernier, j'étais ici et je n'ai pas communiqué avec le bureau du premier ministre.

Je continue. "M. Ciaccia: Est-ce que le bureau du premier ministre a communiqué avec vous? "M. Beaulé: Non, je n'ai pas eu de contact avec le bureau du premier ministre vendredi dernier. "M. Ciaccia: Et le premier ministre lui-même? "M. Beaulé: Excusez-moi. "M. Ciaccia: Ah!. "M. Beaulé: M. le Président, j'ai entendu le mot "ah"!" "M. Lalonde, etc. "M. Beaulé: M. le Président, j'ai été avisé par Me André-J. Bélanger, mon associé, que M. Boivin avait téléphoné à notre bureau vendredi après-midi qui est, je crois, le 29 avril dernier. Je n'ai pas parlé à M. Lévesque depuis, je pense, quelques jours après le référendum. "M. Ciaccia: M. le Président, non".

Un peu plus loin au ruban 1035-ER, page 1. "M. Beaulé: Je ne vous cache pas que j'étais un peu épuisé à la fin de la session de vendredi, ayant appris de mon bureau que M. Boivin avait tenté de me rejoindre, j'ai tenté de le rappeler ici à son bureau de Québec et il n'était pas là".

Pour que les choses soient bien claires - et ce fait m'a été rappelé par Me Roy à la fin de la séance d'hier soir - au milieu de

l'après-midi du vendredi 29 avril, c'est Me Roy qui a communiqué avec notre bureau, puisque nous faisons partie de la même étude. Elle a su que Me Boivin avait communiqué avec le bureau et tenté de me rejoindre. J'ai tenté de le rejoindre à son bureau de Québec, je ne l'ai pas rejoint. Mais elle m'a rappelé qu'en fin de journée j'ai effectivement parlé à M. Boivin à Montréal pendant à peu près une minute. Donc, il s'agit d'une correction majeure. J'ai, vendredi, parlé pendant à peu près une minute à M. Boivin en fin de journée et je vous avoue qu'hier soir, quand M. Ciaccia m'a posé la question, j'ai eu un black-out complet parce que nous venions de discuter des rencontres de 1979. On me transporte, dans le temps, à quelques jours tout récents et de toute façon j'affirme que j'ai de fait parlé à M. Boivin pendant une minute en fin de journée. Je l'avais oublié complètement. C'est sur le premier point, en fin de journée vendredi.

Maintenant, M. le député de Châteauguay m'a posé une question au ruban 1035-ER, page 2, vers 21 h 40. M. le Président, je ne veux pas prendre le temps de la commission. On trouve cela à 21 h 40 et 21 h 44, rubans 1035 et 1036. M. le député de Châteauguay voulait savoir si, et je cite au haut de la page 1036: "Je voudrais savoir de Me Beaulé si, à sa connaissance, les avocats de la SEBJ, qui n'ont pas évoqué cette information ici à la commission, ont eu l'occasion d'apprendre cette situation, à savoir que ce syndicat aux vocables multiples, pour employer votre expression, ne demanda jamais son accréditation à l'International Union of Operating Engineers et ne lui versa jamais, d'ailleurs, de cotisations ou de redevances."

Je vais tenter de clarifier ce point, M. le Président. J'ai dit hier soir que, dans la contestation du 28 novembre 1978, que j'avais transmise aux avocats de la SEBJ, j'avais allégué que l'Union des opérateurs de machinerie lourde du Québec, faisant affaires sous plusieurs vocables dont j'ai donné la liste hier soir, n'était pas affiliée à l'International Union of Operating Engineers et qu'elle n'avait jamais d'ailleurs payé de cotisations ou de redevances à ce syndicat, à ma cliente. D'ailleurs, vous pouvez voir, si vous le jugez à propos, en consultant la correspondance que j'ai déposée déjà, correspondance entre M. Rowland G. Hill et M. Wharton, président de l'International Union of Operating Engineers, lettre du 16 janvier 1974, lettre du 13 mars 1974 également de M. Hill à M. Wharton, que c'est hors la connaissance de l'International Union of Operating Engineers que ce syndicat québécois avait été formé. En mars 1974, ma cliente était même sur le point de prendre des procédures de suspension contre le local 791, lui, affilié à l'International Union of

Operating Engineers. (10 h 30)

Alors, pour essayer de résumer ce que j'avais compris de la question de M. Dussault hier soir, c'est: Ce renseignement ou ce fait que l'Union des opérateurs de machinerie lourde du Québec n'était pas affiliée à l'International Union of Operating Engineers avait-il été communiqué à la SEBJ? J'ai dit que cela avait été communiqué aux procureurs de la SEBJ le 28 novembre 1978. Cependant, en examinant les documents, le dossier présenté par la SEBJ le 30 mars dernier, je constate ceci à la page 70. Je lis à la page 70 du dossier de la SEBJ - il s'agit d'un extrait du procès-verbal de la réunion du conseil d'administration de la SEBJ tenue le mardi 6 février 1979, au paragraphe 2 - et je cite: "Les membres du conseil prennent connaissance d'un rapport adressé aux procureurs de la compagnie par Me Michel Jasmin, procureur du Conseil provincial du Québec des métiers de la construction et du local 791, ainsi que d'un rapport adressé à Mes Geoffrion et Prud'homme par Me Rosaire Beaulé, procureur du syndicat international."

Ce rapport est annexé à ce procès-verbal. On le trouve à la page 93. C'est la fameuse lettre que j'ai adressée à M. François Aquin, dont la première partie traite de l'absence de lien de droit entre la SEBJ et l'International Union of Operating Engineers, de sorte que je veux modifier ma réponse dans les termes suivants: À ma connaissance, c'est le 6 février 1979, pour la première fois, que le conseil d'administration de la SEBJ a pris connaissance des faits soumis par l'International Union of Operating Engineers et qui étaient allégués dans la contestation du 28 novembre 1978. Pour être plus précis, c'est la première fois, selon les documents que j'ai pu consulter, que le conseil d'administration a pu prendre connaissance de nos prétentions quant à l'Union des opérateurs de machinerie lourde du Québec.

Le troisième point touche une question qui m'a été posée par le député de Gatineau, M. Gratton. Il citait la page 5 du mémoire que j'ai eu l'honneur de vous soumettre le 28 avril dernier. Au premier paragraphe, il est écrit: "II est donc évident que les gestionnaires de la SEBJ et son conseil d'administration adoptaient en janvier 1979 une attitude incompatible avec l'une des recommandations principales de la commission Cliche". Je crois que les mots "l'une des recommandations" ne sont pas justes. J'aurais dû écrire à la place "l'une des constatations principales de la commission Cliche".

En fait, si je me souviens bien de la question de M. le député de Gatineau, c'est: "Est-ce que nous étions en face d'une recommandation spécifique?" Il m'a référé au

rapport de la commission d'enquête. Je crois qu'il a raison. Il ne s'agit pas d'une recommandation spécifique, il s'agit d'une constatation et, à mon sens, de l'une des constatations principales de la commission Cliche.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président, je remercie Me Beaulé d'avoir apporté ces corrections, parce que, effectivement, en relisant ce matin la transcription des propos qu'on avait échangés hier soir, j'avais l'intention de revenir pour essayer de préciser un peu plus ce que constituait une recommandation dans l'esprit de Me Beaulé. Il nous indique qu'il se rend à l'interprétation que j'en faisais moi-même, à savoir que les passages des pages 68 et 69 du rapport Cliche ne constituaient pas une recommandation au sens strict du mot - une recommandation, selon Larousse, est l'action de recommander, c'est-à-dire de charger de faire une chose, de demander avec insistance - mais bien une constatation. Et j'irai même un peu plus loin: c'était peut-être une certaine forme de conclusion que faisait la commission Cliche par rapport aux événements de mars 1974.

Cela dit, M. le Président, j'aimerais revenir à la première correction que Me Beaulé a faite, à savoir qu'il aurait parlé à Me Jean-Roch Boivin, chef de cabinet du premier ministre, le vendredi 29 avril, en fin de journée, pendant environ une minute. Est-ce que Me Beaulé pourrait nous dire de quoi ils ont parlé, lui et Me Boivin?

M. Beaulé: De quoi il a été question? M. Gratton: Oui.

M. Beaulé: M. le Président, je vais répondre à la question si vous la jugez recevable. Je me réfère au télégramme de convocation que j'ai reçu de la commission où il est dit: "Le mandat de cette commission est d'examiner les circonstances entourant la décision du conseil d'administration de la SEBJ de régler hors cour la poursuite civile intentée à la suite du saccage du chantier de LG 2 survenu en 1974 et, plus spécifiquement, le rôle du premier ministre et de son bureau à cet égard."

M. le Président, la conversation que j'ai eue avec M. Boivin, à mon humble avis, ne relève pas du domaine ou du rôle de cette commission. Ce que je veux dire, c'est qu'il me semble qu'elle ne s'insère pas dans le cadre du mandat. Il ne s'agit pas d'une conversation qui s'est tenue en 1978 ou en 1979. Il s'agit d'une conversation qui a eu lieu vendredi dernier. Et, je ne crois pas, respectueusement, qu'elle soit pertinente au mandat. Maintenant, si vous m'ordonnez d'y répondre, vous savez que je m'y conformerai, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): Je pense que la réponse que nous venons d'entendre du témoin, à savoir que cette conversation n'avait absolument aucun rapport, de près ou de loin, avec le mandat de la commission, tel que nous l'avons reçu de l'Assemblée nationale, à ce moment-là, M. le Président, doit être acceptée. Et, en conséquence, le député de Gatineau, M. Gratton, devrait passer à une autre question.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, j'ai cru comprendre que vous vouliez intervenir?

M. Lalonde: M. le Président, en fait, le témoin soulève une question de règlement, à savoir que la question ne serait pas recevable parce qu'elle n'entrerait pas dans le cadre du mandat de la commission. Mais je pense, M. le Président, qu'elle est tout à fait pertinente. Si la conversation avait trait au témoignage rendu ou à rendre par Me Beaulé, à sa comparution, enfin à ce qu'on discute, à ce qui se passe ici, je pense que c'est tout à fait pertinent. Nous avons posé cette question à plusieurs reprises à d'autres témoins. Nous l'avons posée, par exemple -on me le rappelle - à M. Giroux, à savoir si quelqu'un lui avait parlé avant qu'il n'envoie son télégramme, autrement dit, s'il avait eu une invitation à le faire. Nous l'avons posée à plusieurs témoins, à savoir s'ils avaient eu des communications avec MM. Boivin ou Gauthier depuis un mois ou deux, en fait, depuis que l'affaire est rendue publique. Je pense que si la conversation a touché à la présence ici de M. Beaulé, à son témoignage, à ce moment-là, c'est pertinent, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Je vais rendre une décision préliminaire. Premièrement, effectivement, plusieurs questions ont été posées dans lesquelles on a demandé si, depuis, il y avait eu des rencontres, des appels téléphoniques ou des discussions avec des membres, dont ceux qu'on a mentionnés. Je pense que cette partie de la question est totalement recevable. Quant à savoir si la personne doit répondre à la question spécifique qui est posée, vous me permettrez de prendre cette question en délibéré. Je suis assuré que nous aurons l'occasion, lorsque les gens poseront leurs questions à Me Beaulé ce matin, possiblement cet après-midi, que je pourrai avoir la chance de vous donner ma décision

finale.

M. Gratton: M. le Président, pendant que vous délibérez, la question que je voudrais poser à Me Beaulé est de savoir si la conversation qu'il a eue vendredi dernier avec Me Jean-Roch Boivin a porté sur le témoignage qu'il avait lui-même fait ici à la commission la journée même ou la veille, c'est-à-dire le jeudi 28 avril. En l'occurrence, si on a discuté de cela, j'aimerais savoir quel a été le contenu de cette conversation.

Cela dit, M. le Président, en attendant votre décision là-dessus, je reprendrai tant bien que mal là où on s'était quitté hier, tout en prenant bien note de la correction qu'a apportée Me Beaulé ce matin, en ce sens que, effectivement, dans le mémoire qu'il a présenté à la commission, il disait ce matin qu'il aurait dû écrire "une des principales constatations de la commission Cliche" plutôt que "une des principales recommandations."

Le Président (M. Jolivet): M. Beaulé.

M. Beaulé: M. le Président, ce que j'ai dit textuellement, c'est que j'aurais dû écrire qu'il est donc évident que les gestionnaires de la SEBJ et son conseil d'administration ont adopté, en janvier 1979, une attitude incompatible avec l'une des constatations principales de la commission Cliche.

M. Lalonde: C'est correct.

M. Gratton: D'accord. C'est ce que j'avais compris et c'est ce que je tentais de répéter à ma façon.

M. Beaulé: Merci beaucoup.

M. Gratton: Dans vos rencontres avec Me Boivin, où vous le sensibilisiez à la non-responsabilité de votre cliente, avez-vous fait allusion à cette constatation de la commission Cliche?

M. Beaulé: Je ne crois pas, M. le Président.

M. Gratton: Vous n'y avez jamais, au cours de ces discussions, fait référence. Je pense que vous avez dit, à plus d'une occasion, que vous le sensibilisiez aux conséquences sociales de la poursuite intentée en cour. À votre souvenir, cela ne vous a jamais amené à discuter de ce qui est dans l'avant-propos même de votre déclaration de la semaine dernière, dans votre mémoire, c'est-à-dire cette recommandation ou constatation de la commission Cliche.

M. Beaulé: M. le Président, pour donner une réponse claire et faire avancer les travaux, je me souviens cependant que Me Jasmin, en ma présence, lors de l'une ou l'autre des rencontres que j'ai eues avec M. Boivin, a traité, lui, de cette conclusion de M. le juge Cliche, en ce sens que les travailleurs québécois ne devraient pas payer les dommages causés par M. Duhamel.

M. Gratton: On y reviendra, parce que si...

M. Beaulé: Mais, quant à moi, pour être bien clair avec vous...

M. Gratton: Oui, oui.

M. Beaulé: ...je n'ai pas abordé cette question.

M. Gratton: D'accord. J'y reviendrai tantôt. D'abord, je voudrais qu'on épuise toute la question du rapport de la commission Cliche. Donc, vous n'en avez pas parlé avec Me Boivin. Hier, quand on a relu ensemble le passage du rapport de la commission Cliche qui suit immédiatement celui que vous avez cité dans votre mémoire, et que le ministre a d'ailleurs cité ici à la commission parlementaire plus de six ou sept fois - a-t-il admis lui-même hier - on a relu, dis-je, cette partie qui traite de la responsabilité morale du crime de Duhamel, c'est-à-dire du saccage. Je vous ai posé la question, hier soir, Me Beaulé à savoir si, selon vous, ce deuxième passage ne venait pas atténuer ce que nous appelions hier une "recommandation", mais qui est aujourd'hui une "constatation" incluse dans la première partie. (10 h 45)

M. Beaulé: Pourriez-vous répéter votre question? Elle était très claire. La question du député était très claire, mais je voudrais qu'il la répète.

M. Gratton: Je vais...

M. Beaulé: Je pense qu'elle est très importante.

M. Gratton: Je vous demande à nouveau si la partie, les trois derniers paragraphes -probablement qu'on peut s'abstenir de les relire...

M. Beaulé: Vous voulez m'empêcher de buter sur un mot.

M. Gratton: ...les trois paragraphes qui traitent de la responsabilité morale du saccage qui enchaîne avec la partie que vous avez citée. Est-ce que, selon vous, ces trois paragraphes atténuent la portée des deux premiers que vous avez cités?

Le Président (M. Jolivet): Me Beaulé, je dois vous rappeler qu'étant donné qu'il est question d'opinion, j'ai dit que je considérais ces questions comme étant irrecevables et qu'on a demandé d'appliquer l'article 168 le plus rapidement et le plus directement, vous n'avez donc pas à répondre.

M. Beaulé: Pardon?

Le Président (M. Jolivet): Vous n'avez pas à répondre.

M. Beaulé: Est-ce que je pourrais répondre?

Le Président (M. Jolivet): Mon problème est justement ce que j'ai demandé hier. Je m'abstenais de le faire, le ministre m'ayant demandé - et c'est son droit le plus strict -d'appliquer directement l'article 168 du règlement. Si on me délie de ce droit, je vais vous le permettre, mais, le ministre ayant l'intention d'intervenir, je vais lui laisser la chance d'intervenir.

M. le ministre.

M. Duhaime: M. le Président, je voudrais faire une suggestion pour faire avancer nos travaux. Si le député de Gatineau veut avoir un éclairage additionnel sur la portée du...

M. Gratton: M. le Président, on n'est pas pour recommencer ce jeu-là.

M. Lalonde: Si vous voulez témoigner...

M. Duhaime: ...rapport Cliche, je voudrais lui suggérer qu'il...

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse. M. le ministre.

M. Gratton: Une question de règlement, M. le Président.

M. Duhaime: ...invite à dîner M. Brian Mulroney et M. Guy Chevrette...

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre...

M. Duhaime: ...qui sont deux des commissaires encore vivants...

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre...

M. Duhaime: ...ils pourraient lui expliquer exactement ce qu'il a voulu dire.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre. Me Beaulé, je suis encore lié par les décisions que j'ai rendues - ce qui est normal...

M. Gratton: Question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): ...et, compte tenu qu'il s'agit d'une opinion, je juge la question irrecevable et, en conséquence, vous n'avez pas à y répondre. Comme on m'a demandé d'appliquer le règlement à la lettre, je vous interdis de répondre.

M. Gratton: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Puis-je vous citer le R-1039, page 1, des Débats d'hier soir, sur lequel j'ai posé la question suivante à Me Beaulé: "Est-ce que cette deuxième partie qui porte sur la responsabilité morale de ce crime commis par Duhamel, est-ce que cela ne fait pas en quelque sorte partie de la recommandation dont vous parlez?" La réponse de Me Beaulé: "Pour être juste, et là-dessus je suis bien d'accord avec vous, on ne peut dissocier les trois paragraphes cités au bas de la page 68 et au bas de la page 69 des paragraphes qui suivent. Cela m'apparaît évident mais je n'y vois aucune contradiction, M. le Président".

M. Duhaime: II a répondu.

M. Gratton: II a répondu, la question était donc recevable hier soir. L'invité y a répondu et tout ce que je veux, c'est situer le reste de mes questions dans le prolongement normal des questions que je posais hier. Si le ministre voulait s'abstenir de faire de fausses questions de règlement -il veut faire avancer les débats - ils avanceraient beaucoup plus rapidement. Je lui demande très humblement de me laisser continuer mes questions. Vous allez voir. Je ne suis pas avocat, cela devrait peut-être prendre moins de temps, à la condition qu'on ne m'interrompe pas. Je le dis en toute déférence et sans aucune arrière-pensée pour notre invité et pour cet aréopage d'avocats qui m'entourent.

M. Beaulé: M. le Président, me permettez-vous d'appuyer, non pas sur la question sous étude, mais sur un obiter de M. le député de Gatineau. Il y a souvent des avocats qui ne pratiquent pas depuis plusieurs années.

Le Président (M. Jolivet): Me Beaulé, j'aurais eu la tentation de vous permettre -parce que je l'avais permis hier - de le faire. Si on me délie, si on me dit oui, compte tenu des questions qui viennent, je pense que je n'aurais pas d'objection quant à moi. Mais je vous dis que, si on me demande de l'appliquer, je vais être rigide, je vais

l'appliquer.

M. Lalonde: M. le Président, sur une question de règlement...

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Je me souviens qu'à un moment donné le ministre vous a demandé de l'appliquer de façon très rigide, à savoir, si cela n'est pas recevable, de l'interdire, même pas d'avertir le témoin, mais de lui interdire les réponses. C'est une demande du ministre, cela ne lie pas le président. Je ne vois pas que cela soit un consentement unanime à cette table, à savoir que c'est de cette façon qu'on devrait procéder. Il me semble que la présidence a une flexibilité d'appliquer les règles, dans le bon sens. Cette question, si elle a un petit contenu d'opinion, en suit une autre qui a été permise hier soir. Il me semble que ce serait manquer un peu de logique que d'interdire la deuxième partie de la question après avoir permis la première.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Duhaime: M. le Président, vous avez jugé la question irrecevable parce qu'elle contient une demande d'opinion. Elle l'est d'autant plus, si j'ai bien compris la lecture de la transcription que faisait le procureur de Gatineau, que Me Beaulé aurait déjà répondu à la question hier, en disant qu'il n'y avait pas de contradiction entre les passages cités aux pages 68 et 69.

Le Président (M. Jolivet): À la suite de tout ceci, je ne permets pas la réponse.

M. Lalonde: J'ai une question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Dans la foulée, comme dirait l'ancien ministre de l'Éducation, de votre décision, est-ce que vous allez demander qu'on raie du journal des Débats toutes les expressions d'opinions des témoins, y compris celles qui sont contenues dans le mémoire de Me Beaulé mais qui sont encore là et sur lesquelles on ne peut pas lui poser de questions?

Le Président (M. Jolivet): Premièrement, je dois dire que les notes ou les propos préliminaires ne m'appartiennent pas, pas plus que la question et la réponse à être donnée. Les propos préliminaires appartenant à la personne qui les fait, nous les permettons sans aucune possibilité de l'en empêcher.

Quant à la question... Sur cette question, vous allez convenir avec moi que la journée d'hier n'a pas été une journée facile, ni pour le président de cette commission, ni pour celui qui est en face de nous, j'en conviens, il en a fait lui-même mention. Que, parmi les décisions que j'ai eu à rendre, j'aie eu peut-être un petit oubli hier, c'est possible; qu'on n'ait pas eu non plus d'interruptions en disant: Question de règlement... Je dois convenir cependant que si j'applique le règlement à la lettre, comme on m'a demandé de le faire, de façon à accélérer les travaux, ce que j'exprimais depuis le début était dans le sens de dire à l'invité qu'en vertu du règlement, la question était irrecevable, en vertu de l'article 168, mais que s'il le voulait quand même, il pouvait y répondre.

Si quelqu'un me demande, par une question de règlement, d'appliquer le règlement, même si c'est une seule personne de cette assemblée, je suis obligé comme président de l'appliquer et c'est ce que je fais.

M. le député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président, je voudrais qu'on se comprenne, parce qu'on risque de voir des questions de règlement surgir à chaque phrase que je vais prononcer et autrement. Hier, j'ai posé des questions à Me Beaulé sur l'opinion qu'il exprimait dans son mémoire, en ce sens que les deux premiers paragraphes du rapport de la commission Cliche constituaient une des recommandations principales qui venaient à l'encontre de la décision de la SEBJ. Si on se fie à la suite logique de votre décision de ce matin, je n'aurais pas eu l'occasion de poser cette question et donc, d'obtenir ce matin la correction que Me Beaulé...

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau, j'ai une autre question de règlement. M. le député de Bourassa.

M. Laplante: C'est un peu indécent ce qui se passe actuellement, c'est que vous avez rendu une décision...

M. Lalonde: On demande une directive.

M. Laplante: Non, on n'a pas demandé de directive, ne jouons pas sur les mots, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: On demande une directive.

M. Laplante: II faut que nos travaux avancent. Actuellement, on est à discuter sur une décision que vous avez rendue. Si c'était une demande de directive...

M. Lalonde: On compte sur vous.

M. Laplante: ...je serais d'accord, mais non pas sur une question de règlement...

M. Lalonde: Non, c'est une question de directive.

M. Laplante: ...de discuter à nouveau sur la décision que vous avez rendue.

Le Président (M. Jolivet): Vous avez raison, M. le député de Bourassa, on ne doit pas discuter des décisions que je rends mais si le député de Gatineau veut me poser une question de directive, je ne pourrai cependant pas la lui refuser.

M. Lalonde: Un beau petit tour de caméra.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président, il semble que c'est évident, ce que je suis en train de faire: je suis en train de vous demander comment on pourrait arriver à obtenir des informations de nos invités. M. le Président, pourriez-vous demander au député de Chambly d'arrêter de faire le bouffon?

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! Je n'étais aucunement dérangé, je vous écoutais attentivement.

M. Gratton: Non, vous n'êtes pas dérangé mais moi, cela me dérange. Mon droit de parole doit être respecté, non?

M. Tremblay: On s'en rend compte que vous êtes dérangé.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau, comme vous devez vous adresser à moi, restons ensemble et posez-moi les questions en me regardant, plutôt que les autres.

M. le député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président, je vais vous regarder dans les yeux.

Une voix: De mauvaise humeur ce matin, qu'est-ce qui arrive?

M. Duhaime: II n'est pas de bonne humeur.

M. Gratton: Au contraire.

Une voix: Là, il a retrouvé le sourire. Souriez, souriez.

M. Gratton: J'ai bien dormi la nuit passée.

Le Président (M. Jolivet): À l'ordre! À l'ordre! M. le député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président, ce que je tente de savoir de vous, c'est comment on peut interroger un de nos invités qui fait une déclaration préliminaire dans laquelle il exprime des opinions sur lesquelles s'appuyait la défense de sa cliente. Comment peut-on m'empêcher d'aller fouiller le bien-fondé non pas de son argumentation, mais, on l'a vu, on a un cas patent ce matin. Me Beaulé, à la suite des questions que je posais, questions qui appelaient une expression d'opinion de sa part hier... Je lui demandais hier: Comment en êtes-vous venu à dire: C'est une recommandation plutôt qu'une constatation? Ce matin, Me Beaulé est venu dire: Effectivement, j'aurais dû écrire "constatation".

Si ce n'est pas éclairer la commission, je me demande ce que c'est, M. le Président. C'est dans ce contexte que je voudrais savoir de vous comment je pourrai questionner Me Beaulé, non pas pour contester ce qu'il affirme mais pour l'amener à préciser, pour bien informer les membres de la commission - en tout cas, ceux qui s'y intéressent, M. le député de Chambly - sur ce qui s'est vraiment passé lors du saccage et de toutes les circonstances qui l'ont entouré, comme le mandat de la commission le veut. C'est dans ce sens que je reformulais la question, que j'avais même posée hier soir à Me Beaulé, et il me semble que c'est tout à fait recevable. Si cela ne l'est pas, je voudrais que vous m'indiquiez, si vous le voulez bien, comment je pourrais la formuler pour qu'elle soit recevable, non pas dans le but de me permettre de poser des questions, mais dans le but surtout d'éclairer la commission.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau, je vais vous rappeler qu'il est possible que la présidence ait aussi, en écoutant et en faisant une journée aussi bien remplie que celle d'hier, quelques errements qui sont normalement bien appuyés par des questions de règlement de chaque côté me demandant de faire attention à ce que je peux rendre comme décision. Je pense qu'il y a une décision importante qui a été rendue hier, c'est que j'essaierai d'appliquer de façon plus précise l'article 168. C'est ce que j'essaie de faire et, compte tenu qu'on me demande de l'appliquer de façon plus précise que je ne le faisais, parce que je croyais justement que cela pouvait aider aux travaux de la commission, je suis aussi aux prises avec le fait que, si une personne me demande par le règlement d'appliquer l'article 168, je dois l'appliquer. Je ne vois pas quelle solution apporter à vos demandes sinon que des questions - telles qu'on en a vécu hier - qui semblaient irrecevables au départ ont été transformées en questions

recevables, ce qui, finalement, a permis de continuer nos travaux, et je vous demande d'agir dans ce sens.

M. Tremblay: M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Chambly, vous m'avez fait signe que vous aviez une question de règlement?

M. Tremblay: Oui, je voudrais que vous rappeliez à l'ordre le député de Gatineau qui continue sa campagne de salissage en disant que je ne m'intéressais pas à la commission. Je voudrais vous faire remarquer que j'ai écouté patiemment, depuis le début de la commission, les gens du Parti libéral poser et reposer les mêmes questions...

M. Lalonde: Très bien, continuez. Continuez comme cela, cela va très bien.

M. Tremblay: ...dix fois, quinze fois à nos témoins et, malgré cela, j'ai continué à assister à la commission, à m'intéresser aux travaux et je suis là en permanence. Je voudrais donc vous demander, M. le Président, de demander au député de Gatineau de cesser sa campagne de salissage.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Jonquière, j'ai cru comprendre que vous aviez une question de règlement.

M. Vaillancourt (Jonquière): Pour le simple bénéfice de ceux qui nous écoutent. Ces gens ne sont peut-être pas au courant de l'existence de l'article 43 de notre règlement, et tout particulièrement de l'article 43.2 qui dit ceci: "Lorsque le président rend sa décision, il indique ce qui la justifie et il n'est pas permis de la critiquer ni de revenir sur la question décidée; il en est de même lorsque le président décide de laisser l'Assemblée se prononcer sur une question." Je pense, M. le Président, que nous assistons actuellement à des sortes d'appels déguisés de votre décision et je pense qu'on devrait continuer à poser des questions à notre témoin.

Une voix: C'est très inconvenant.

M. Lalonde: Sur la question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): Je ne voudrais pas qu'on - je vais employer mon vieux terme que le monde connaît "enganse" un débat sur la question. Je vais le régler rapidement en disant qu'effectivement je n'ai pas compris, même si on fait en sorte de me rappeler, à bon droit d'ailleurs, les numéros de règlement qui nous permettent d'agir le mieux possible dans nos travaux, mais, justement, à la suite de la demande du député de Bourassa, le député de Gatineau a demandé une question de directive et il était en plein droit de le faire. Cela ne veut cependant pas dire que tous les propos qu'il a tenus avaient pour but de me faire revenir sur ma décision. Il voulait savoir, une fois que ma décision était rendue, de quelle façon il pouvait procéder. Je lui ai dit que malheureusement il fallait qu'il reformule sa question. M. le député de Gatineau. (11 heures)

M. Gratton: M. le Président, c'est de bonne guerre. Le député de Jonquière voulait me remettre la monnaie de ma pièce d'hier, parce qu'il avait fait...

Le Président (M. Jolivet): Allez, M. le député, sur les questions.

M. Gratton: Ah, mais, M. le Président, quand même! Le député de Chambly, je le reconnais, je lui donne raison. Il a écouté depuis le début et je souhaite qu'il continue parce que, finalement, il pourra peut-être comprendre.

Cela étant dit, je pose une question directe à Me Beaulé. Pourquoi dans votre mémoire, dans les réponses que vous avez fournies à nos questions à la commission, avez-vous choisi de ne citer que les deux premiers paragraphes du rapport de la commission Cliche et de ne pas y inclure les trois paragraphes qui suivent, à la page 69?

M. Beaulé: M. le Président, je pense que le député qui m'interroge a absolument raison. Pour me rendre à son désir, je vais citer les paragraphes pertinents que j'aurais dû citer dans mon rapport, n'exprimant pas d'opinion et m'en tenant à d'autres extraits du rapport Cliche que j'aurais dû citer.

Pour qu'on se comprenne bien, à la page 68 du rapport Cliche, il est dit et je cite: "Les commissaires ont acquis la conviction que les travailleurs ordinaires n'encourent pas la responsabilité de ce qui est arrivé." Cela veut dire, à mon point de vue honnête et clair, que les commissaires sont d'avis que les travailleurs ordinaires ne doivent pas payer pour les dommages causés par Duhamel. Cependant, à la page 69, comme le soulignait M. le député de Gatineau, la commission ou les commissaires vont plus loin et ils disent au deuxième alinéa: "II suffit, à partir de Yvon Duhamel, de remonter le lien de filiation pour voir à qui incombe ultimement la responsabilité morale de son crime." Et on continue toujours la lecture du rapport Cliche: "Car, enfin, l'agent d'affaires travaillait à la réalisation d'un objectif maintes fois déclaré par les dirigeants de sa centrale: l'acquisition du monopole syndical sur les chantiers. Et il le faisait avec des méthodes qui ne détonnent pas du tout avec celles

généralement admises dans la FTQ-Construction." Nous nous reportons évidemment en 1973-1974.

J'aurais probablement dû citer également la page 69, comme l'a souligné M. le député de Gatineau, mais en même temps, si j'avais voulu donner, si vous voulez, un portrait complet, j'aurais dû y incorporer également les citations suivantes. Je vais être assez bref, M. le Président, je n'ai pas tellement de citations à faire.

À la page 69, les commissaires affirment après avoir dit que les travailleurs ordinaires ne doivent pas encourir de responsabilités financières ou ne doivent pas payer la note pour les dommages causés par Duhamel... Je vais attendre, j'essaie de me concentrer et je n'y arrive pas.

Le Président (M. Jolivet): Allez, allez. De la même façon que le député de Gatineau l'a demandé, j'aimerais qu'on vous permette de répondre, parce que, moi aussi, j'étais déconcentré.

S'il vous plaît'. Me Beaulé.

M. Beaulé: Je vais faire un effort pour être en même temps bref, clair et équitable. Donc, je disais qu'à la page 68 - et cela, c'est déjà cité dans le mémoire - les commissaires affirment que les responsabilités financières des dommages causés par Duhamel ne doivent pas être imputées ou payées par l'ensemble des travailleurs québécois ou des travailleurs du chantier de la Baie-James. À la page 69, on va plus loin et on remonte le lien de filiation pour voir à qui incombe ultimement la responsabilité morale de son crime. Les commissaires continuent en disant que "L'agent d'affaires travaillait à la réalisation d'un objectif maintes fois déclaré par les dirigeants de sa centrale: l'acquisition du monopole syndical sur les chantiers."

Ce monopole syndical, M. le Président, que la FTQ-Construction, à l'époque, tentait d'acquérir sur les chantiers de la Baie-James, qui avait offert ce monopole syndical à la FTQ-Construction? Pour répondre à cela, il faut d'abord se référer à la page 28 du rapport, au haut de la page, et je cite: "Ce que la violence ne pouvait lui donner, la FTQ-Construction a tenté de l'obtenir au moyen de négociations secrètes nouées avec MM. Paul Desrochers et avec la haute direction de l'Hydro-Québec, la SEBJ et la SDBJ. "Devant la preuve, la Commission ne peut que conclure que le gouvernement, l'Hydro-Québec et la FTQ-Construction ont véritablement négocié en vue d'instituer le monopole syndical à la Baie-James. "On regrette que MM. Desrochers et Giroux aient abordé avec la FTQ la possibilité d'accorder à celle-ci un monopole syndical, sans en informer la CSN ou la CSD et sans tenter de conclure avec les trois centrales des modalités d'entente susceptibles d'assurer aux travaux de la Baie-James un climat de travail serein et harmonieux. Il ne faut pas oublier que la loi 290 avait déjà sanctionné le principe du pluralisme syndical dans la construction."

Je continue très brièvement sur cette question soulevée à la page 69, c'est-à-dire en remontant le lien de filiation pour voir à qui incombe ultimement la responsabilité morale de son crime. Je me permettrai aussi de citer le rapport des commissaires, à la page 292, au bas de la page, où il est écrit: "II convient maintenant d'étudier le comportement de M. Paul Desrochers, ex-conseiller spécial au bureau du premier ministre. "On se souviendra - page 293 - que c'est à son initiative que certaines rencontres eurent lieu avec les dirigeants de la FTQ et ceux de la Baie-James. Ces rencontres avaient pour but de reproduire au Québec ce qui s'était passé à Churchill Falls: monopole syndical en échange de dix années sans grève. Les démarches de M. Desrochers étaient importantes puisqu'elles impliquaient de graves conséquences. Alors que le pluralisme syndical est la règle, la proposition de M. Desrochers allait à l'encontre de ce principe. "Des séances dites "exploratoires" furent tenues pendant plusieurs mois entre la FTQ et les autorités de la Baie-James. Ni la CSN, ni la CSD ne furent invitées à "explorer". La loi est pourtant bien claire: toutes les parties intéressées doivent s'asseoir à une même table pour amender le décret. Il est évident que la manière d'agir de M. Desrochers, celle de MM. Robert Boyd et Roland Giroux, respectivement de la SEBJ et de l'Hydro-Québec, étaient susceptibles d'attiser le feu entre les centrales syndicales. "Même si MM. Desrochers, Boyd et Giroux sont - à bon droit - des dirigeants voués à l'efficacité, ils se devaient quand même de respecter la loi et son esprit. "En outre, il était imprudent pour M. Desrochers d'explorer la possibilité d'accorder un monopole syndical à M. André Desjardins, le midi, au Club de la Garnison, à Québec, puis de retrouver ce même M. Desjardins, le même soir, à Sept-Îles, pour lui demander de l'aide afin que l'élection partielle de Duplessis "se passe dans un climat serein."

M. le Président, j'aurais pu citer tous ces paragraphes. Je voulais ne donner aucune connotation politique à mon mémoire, mais je pense que...

M. Gratton: On rit de ce côté-ci, M. le Président.

M. Beaulé: Je ne voulais pas donner de connotation politique à mon mémoire, et je

pense que le mémoire, M. le Président, en témoigne. Je pense que le désaccord que nous pouvons avoir sur les événements de 1974 peut être un désaccord idéologique et non partisan. Est-ce que la SEBJ, M. le Président, devait suivre l'une des constatations principales du rapport Cliche ou non et, par voie de conséquence, mettre fin à sa poursuite? Cela, c'est une question d'abord idéologique et qui, à mon point de vue, participe d'une certaine philosophie sociale qu'on a ou qu'on n'a pas. Cela ne touche pas la politique partisane. Et, j'ai voulu que mon mémoire reste à ce niveau. Maintenant, M. le Président, pour conclure, il est évident que les commissaires, en remontant, si vous voulez, le lien de filiation, pour voir dans quel contexte la FTQ-Construction s'est vu promettre ou offrir le monopole syndical sont remontés aux agissements, aux actes, aux faits et aux gestes de MM. Desrochers, Giroux et Boyd.

M. Gratton: M. le Président, je comprends de la réponse de Me Beaulé, à la question lui demandant pourquoi il n'avait pas cité les trois paragraphes de la page 69 dans son mémoire, qu'il aurait dû le faire, mais qu'il aurait dû également citer tous les extraits qu'il vient de nous citer ce matin. Il n'a pas voulu le faire dans son mémoire, parce que cela aurait donné une connotation politique à son mémoire.

M. Beaulé: Cela aurait pu être l'occasion pour certains d'y voir une connotation politique. Je ne veux pas m'avancer plus loin.

M. Gratton: D'accord.

M. Beaulé: J'ai essayé vraiment d'être objectif et je vous prie d'accepter ma parole et mon serment dans ce mémoire.

M. Gratton: Oui, oui.

M. Beaulé: Et j'ai accepté de modifier, de substituer au mot "recommandation", le mot "constatation", parce que je crois que M. le député de Gatineau avait raison. Bon. Cependant, j'ai ajouté ces citations que je connaissais; je ne les ai ajoutées que ce matin, à la demande, dans un sens, du député de Gatineau...

M. Gratton: Oui, oui.

M. Beaulé: ...mais je suis bien conscient que, évidemment, on y réfère non seulement à des cadres supérieurs de la SEBJ et d'Hydro-Québec de l'époque, mais également au conseiller spécial du premier ministre Bourassa de l'époque. Je ne veux pas en dire davantage. Je ne suis pas ici pour débattre, en aucune façon, sur un plan partisan, le problème dont était saisi le tribunal en 1979.

M. Gratton: Est-ce qu'il n'aurait pas été plus exact, plus rigoureusement exact, de citer tous ces passages dans votre mémoire plutôt que de n'en citer que deux paragraphes et de qualifier cela d'une des principales recommandations de la commission Cliche? Je comprends que vous avez corrigé ce matin. Mais, on parle de ce que vous avez présenté ici à la commission.

M. Beaulé: M. le Président, je ne veux pas faire un débat de sémantique. J'ai accepté de substituer au mot "recommandation", le mot "constatation"...

M. Gratton: Me Beaulé, si...

M. Beaulé: Je voudrais donner une réponse complète. Je m'excuse. Vous avez droit de parole.

M. Gratton: Bon, si vous me dites dans votre mémoire, quelque part, que quelque chose est blanc, le 28 avril et que vous venez me dire aujourd'hui, le 4 mai, qu'on va changer cela pour noir, est-ce que cela ne change pas la substance même de votre présentation?

M. Beaulé: Je vais répondre à la question...

M. Duhaime: M. le Président.

M. Beaulé: ...en attirant votre attention...

Le Président (M. Jolivet): Juste un instant, Me Beaulé. J'ai à ma droite le ministre qui me pose une question. M. le ministre.

M. Duhaime: M. le Président, on peut réunir les encyclopédistes ou les spécialistes du dictionnaire, mais à la page 294 du rapport de la commission Cliche, il y a deux paragraphes qui sont mentionnés là. Et, ensuite, les commisssaires écrivent: Notre conclusion sera brève. Qu'il s'agisse d'une constation, qu'il s'agisse d'une conclusion, qu'il s'agisse d'une recommandation...

M. Gratton: Question de règlement.

M. Duhaime: ...quand on lit les conclusions, les recommandations...

M. Gratton: Question de règlement, M. le Président.

M. Duhaime: ...il m'apparaît important que le coeur même...

M. Lalonde: M. le Président, le ministre

veut témoigner.

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le ministre.

M. Gratton: Question de règlement, M. le Président.

M. Lalonde: Faites assermenter le ministre. Il veut témoigner, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît, je m'excuse.

M. Gratton: Question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): Question de règlement de la part du député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président, hier soir, le ministre a fait le même genre d'intervention en invoquant une question de règlement et a tenté, à la toute fin de nos travaux, de citer les passages du rapport Cliche que Me Beaulé a justement cités tantôt. Pourrais-je...

M. Lalonde: Coïncidence.

M. Gratton: Oui, coïncidence. C'est le moins qu'on puisse dire. Pourrais-je suggérer au ministre que, plutôt que d'invoquer des questions de règlement qui n'en sont pas pour citer les passages de la commission Cliche qui font son affaire, il fasse l'une des deux choses suivantes: qu'il attende d'avoir le droit de parole et qu'il l'exerce en citant ce qu'il voudra bien ou, qu'il refile les citations qu'il veut mettre en preuve au témoin, Me Beaulé, qui pourrait le faire pour lui, comme il l'a fait tantôt? Mais qu'il cesse de m'interrompre, au moment où j'ai le droit de parole, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, j'ai bien compris la question de règlement que vous allez me poser.

M. Duhaime: Oui. Ce que le député de Gatineau est en train de dire à la commission, M. le Président, c'est que je passe des réponses à Me Beaulé, que je lui suggère de citer des passages. Je vous dis que vous avez libéralement menti.

M. Gratton: Question de règlement, M. le Président.

M. Duhaime: Je n'ai jamais...

M. Gratton: Question de règlement, M. le Président.

M. Lalonde: Retirez-moi ça.

M. Gratton: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Question de règlement. Je m'excuse. À l'ordre! À l'ordre! À l'ordre. M. le ministre. (11 h 15)

M. Duhaime: ...de ma vie rencontré Me Rosaire Beaulé avant de faire sa connaissance ici, la semaine dernière.

Le Président (M. Jolivet): À l'ordre! M. le ministre.

M. Duhaime: II y a quand même des maudites limites.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, s'il vous plaît!

M. Gratton: Ce ne sont pas les gros mots qui vont nous faire peur, M. le ministre.

M. Duhaime: Ce ne sont pas des gros mots.

Le Président (M. Jolivet): Je ne voudrais pas qu'on...

M. Lalonde: Voulez-vous retirer le mot "menti", s'il vous plaît?

M. Duhaime: Non, je ne le retirerai pas!

M. Lalonde: Ah bien! Un instant, M. le Président!

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président, j'exige du ministre qu'il retire le mot "menti", en disant que j'aurais menti...

Des voix: ...libéralement...

M. Gratton: ...en m'imputant des paroles que je n'ai pas tenues de toute façon.

M. Duhaime: Ah oui!

M. Gratton: De toute façon, en fonction de notre règlement, il est défendu au ministre d'accuser un membre de l'Assemblée nationale ou de cette commission d'avoir menti. J'exige qu'il retire ses paroles.

Le Président (M. Jolivet): Avant de permettre au ministre quelque intervention que ce soit, je dois aussi dire que j'ai accepté la question de règlement du ministre parce qu'il est aussi prévu dans le règlement qu'on ne doit pas imputer des motifs à un député, qu'il soit assis à ma droite ou à ma

gauche, que ce soit de la part de l'un ou de l'autre. Or, j'avais expressément compris qu'il y avait des motifs...

M. Gratton: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Je vais d'abord finir mon point.

M. Gratton: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Je vous donnerai...

M. Gratton: Surtout, ne me prêtez pas de motif, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Non, mais j'essaie de voir ce que la phrase contenait et, toujours selon mon bon sens, il y avait, dans la question que vous avez posée, des choses imputées au ministre, choses que le ministre aurait peut-être faites - supposition - et sur cette partie-là le ministre avait amplement raison.

M. Gratton: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau, sur une question de règlement.

M. Gratton: Je n'ai imputé aucun motif au ministre. Je lui ai suggéré de faire une de deux choses: Soit d'attendre d'avoir le droit de parole pour citer les paragraphes du rapport de la commission Cliche qu'il veut citer ou encore de les transmettre à Me Beaulé pour qu'il les cite lui-même. C'est ce que j'ai dit. C'est ce que je répète. J'exige que le ministre retire ses paroles.

M. Vaillancourt (Jonquière): Question de règlement, M. le Président.

M. Lalonde: Question de règlement, M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): Un instant! M. le ministre.

M. Duhaime: Oui, M. le Président. Je fais l'offre suivante au député de Gatineau. Il va retirer, mot à mot, ce qu'il a dit la première fois. Pas tout à l'heure, parce que je n'aurais jamais prononcé les mots que j'ai prononcés. Vous allez retirer intégralement ce que vous avez dit et je vais retirer le qualificatif que je vous ai imputé avec grand plaisir.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Sur la question de règlement, M. le Président. On sait que le règlement, à l'article 99.9, interdit à un député qui a la parole d'imputer des motifs indignes à un député. C'est une chose, cela. Deuxièmement, il est absolument interdit à un député, qu'il soit ministre ou non, d'accuser un collègue d'avoir menti. Même le mot est antiparlementaire. Je pense que vous devriez demander au ministre de le retirer dès maintenant. Lorsque ce mot aura été retiré, on pourra s'entendre sur le reste.

Le Président (M. Jolivet): Je pourrais ajouter que, de la façon dont le député de Gatineau - je suis attentif, très attentif à ce qui s'est dit et on verra, avec les galées, si j'ai raison ou non... Je maintiens qu'il y avait une forme d'imputation, que ce soient des motifs indignes ou non, que ce soit d'attaquer la conduite d'un membre de l'Assemblée d'une façon indirecte, je maintiens que le ministre avait raison.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): Je le maintiens.

M. Lalonde: M. le Président, c'est très important.

Le Président (M. Jolivet): Oui, c'est très important, mais je ne voudrais pas qu'on reprenne la décision que je viens de rendre. J'ai bien écouté. J'ai bien entendu. En conséquence, je le maintiens et je ne veux pas qu'on prenne des moyens détournés pour me faire changer d'idée. Je ne changerai pas d'idée.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, tout d'abord, je dois me montrer tout à fait d'accord avec votre décision parce que, moi-même, j'ai entendu les paroles du député de Gatineau. Les galées nous démontreront bientôt qui a raison. Mais je voudrais faire valoir, M. le Président, que non seulement les paroles du député de Gatineau étaient blessantes pour le ministre de l'Énergie et des Ressources, mais je pense qu'implicitement elles étaient également blessantes pour le témoin qui est notre invité.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Gratton: Vous, étiez-vous blessé, M. le député?

M. Vaillancourt (Jonquière): Cela ne s'adressait pas à moi.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, d'abord, lorsque vous dites que vous ne changerez pas d'idée, j'aimerais savoir quelle est votre décision.

Le Président (M. Jolivet): Oui. En fait, ce que je dis, c'est que, de part et d'autre, des propos ont été tenus. Le premier, c'était sur la question du député de Gatineau eu égard aux propos qu'il a tenus et qui m'ont semblé, à première vue, avec l'attention que j'y ai portée, qu'il imputait quelque chose ou qu'il attaquait d'une façon indirecte la conduite de quelqu'un de cette commission.

Le ministre, en deuxième lieu, a ajouté, quant à lui, à la suite de ce que le député de Gatineau avait dit, qu'il avait - je ne citerai pas les termes - posé un geste que, lui, demandait et qualifiait d'indigne. En conséquence, le ministre a fait une proposition au député de Gatineau pour qu'il retire ses mots; le ministre alors retirait les siens. Je n'ai pas à juger pour le moment, dans l'un ou l'autre des cas. Ce que je demande c'est que cet incident soit clos d'une façon ou de l'autre. Dans le cas du député de Gatineau et dans le cas du ministre, ce sera de façon différente, mais je pense qu'on pourrait clore le débat sur cette question en corrigeant l'incident qui est intervenu.

M. Lalonde: Est-ce que vous voulez dire que vous ne demanderez pas au ministre de retirer l'accusation grave qu'il a portée contre le député de Gatineau d'avoir menti? Est-ce que je comprends de votre décision que vous ne lui demanderez pas de retirer ses paroles?

Le Président (M. Jolivet): Ce que je demande, c'est aux deux parties de corriger la situation.

M. Lalonde: Est-ce que le ministre sera appelé à retirer ses paroles?

Le Président (M. Jolivet): D'une façon ou d'une autre, compte tenu de ce qui s'est passé compte tenu aussi que notre règlement interdit d'accuser quelqu'un de mentir ou d'un propos aussi indigne que les précédents, je demande aux deux de corriger la situation.

M. Lalonde: Quels mots voulez-vous que le député de Gatineau retire?

Le Président (M. Jolivet): Pour plus de sécurité - je pense qu'on va me le permettre pour bien comprendre la situation - nous allons continuer d'interroger notre invité. Nous allons cependant faire sortir le plus rapidement possible la galée de façon que, de part et d'autre, on puisse corriger la situation avec les vrais termes, s'il le faut. Ce que je dis, c'est que le ministre a eu des propos qui ne sont pas plus dignes que ceux que le député de Gatineau a eus envers lui.

M. Lalonde: Dans ces conditions-là, je suggérerais qu'on suspende, parce qu'on ne peut pas demander de continuer avec deux participants dont l'un est accusé d'avoir menti et l'autre accusé de je ne sais quoi mais qui l'a chatouillé alors que le député de Gatineau invitait le ministre à refiler des questions. On ne peut quand même pas lui dire que cela est indigne puisqu'on l'invite à le faire.

Le Président (M. Jolivet): Je vais donc, pour les besoins de la cause, suspendre...

M. Gratton: ...faire avancer les choses.

Le Président (M. Jolivet): D'accord, si vous m'aidez, je serais très content.

M. Gratton: Je considère que je n'ai imputé aucun motif indigne au ministre. Si on devait constater, au moment de la lecture de la transcription du journal, qu'effectivement mes paroles auraient pu dépasser ma pensée - ce dont je doute - si on devait interpréter cela ou permettre que quelqu'un puisse interpréter cela comme cela, je dis d'avance que je retirerai de telles paroles. Je n'accepte pas et je ne peux pas accepter de continuer à poser des questions à Me Beaulé avec...

Le Président (M. Jolivet): D'accord, d'accord, j'ai bien compris.

M. Gratton: ...l'accusation d'être un menteur.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau, s'il vous plaît, je pense que le ministre a bien dit que si vous retiriez vos paroles - si vraiment vous avez prononcé ces paroles-là - il était prêt à le faire aussi. C'est ce que j'avais compris. Compte tenu de cela, pour que je puisse vraiment voir ce qui s'est passé, je vais suspendre et aller chercher les galées. Après cela on corrigera. Me Beaulé.

M. Beaulé: Puis-je vous faire une demande qui ne se rapporte pas au débat qui est devant vous? Je dois absolument vaquer à mes obligations professionnelles demain, à Montréal. J'espère qu'il sera possible que je

puisse être libéré ce soir. Je pense que c'est maintenant la quatrième journée où je témoigne devant la commission, sans compter les journées où je suis venu et où j'ai attendu mon tour. Il y a un fait, c'est - tout le monde devrait le savoir, on l'a dit devant les caméras - que cette commission-là coûte 15 000 $ par jour aux contribuables québécois. Il serait peut-être bon de savoir que les témoins ne sont pas payés et qu'ils doivent défrayer eux-mêmes leurs voyages à Québec. En plus de cela, il y a une perte de revenus dans nos bureaux et - peut-être encore plus important - les clients qui ont besoin de nos services ne peuvent pas les obtenir. J'espère qu'il me sera possible de retourner à mon bureau ce soir, au moins pour la journée de demain. J'ajouterai que j'espère que devant vous et devant la commission j'ai d'autres droits que ceux d'un payeur de taxes.

M. Bourbeau: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Non, je n'accepterai rien. Je n'accepterai rien.

M. Bourbeau: Question de règlement.

M. Lalonde: II y a quand même des limites.

M. Bourbeau: J'ai droit de parole.

Le Président (M. Jolivet): Vous avez droit de parole. M. le député de Marguerite-Bourgeoys, ce que je vais faire - j'ai tout entendu, vous avez tous entendu - je suspends. On reviendra sur la question plus tard.

(Suspension de la séance à 11 h 25)

(Reprise de la séance à 12 h 11)

Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, messieurs!

La commission reprend ses travaux. Avant de parler de la discussion qui nous a amenés à suspendre les travaux pour quelques instants, je voudrais faire deux choses: la première c'est à la suite des propos tenus par Me Beaulé je voudrais lui rappeler...

Mme Roy (Denise): Oui, il sera présent.

Le Président (M. Jolivet): ...d'accord, je le ferai, je voulais le faire afin que personne d'autre n'ait à le faire au nom des membres de la commission. La deuxième c'est concernant le fait que cela a pris du temps. Il faut l'expliquer aux gens. Les rubans d'enregistrement doivent être dactylographiés par des personnes qui suivent un processus, ce qui fait que cela peut paraître long. Je me suis rendu écouter l'enregistrement tout à l'heure, et j'ai ensuite demandé que chacune des deux personnes qui sont considérées comme devant poser un geste l'aient entre les mains, qu'on ait les galées, c'est-à-dire le préliminaire non corrigé des propos qui ont été tenus sans les petites corrections que chaque député a le droit d'apporter dans le temps pour corriger, s'il y a des erreurs dans le texte, non pas de fond, mais de forme.

Je lis le texte du député de Gatineau. Je lirai ce qui est pertinent à la discussion. On dit que le ministre a deux choix: "Premièrement qu'il attende d'avoir le droit de parole et qu'il l'exerce en citant ce qu'il voudrait bien", c'est la première partie qui ne fait aucunement objet de la contestation actuelle. La deuxième partie: "Ou qu'il refile les citations qu'il veut mettre en preuve, au témoin, Me Beaulé, qui pourrait le faire pour lui comme il l'a fait tantôt, mais qu'il cesse de m'interrompre au moment où j'ai le droit de parole, M. le Président." Le ministre a ajouté: "Puisque j'avais compris qu'il y avait une question de règlement à ceci: Oui, est-ce que le député de Gatineau est en train de dire à la commission, M. le Président, que je passe des réponses à Me Beaulé et que je lui suggère de citer des passages? Je vous dis que vous avez libéralement menti." Ce sont ces propos qu'on me demande de retirer d'un côté comme de l'autre. Une chose est certaine c'est qu'on devra faire des corrections qui s'imposent. Je dois rappeler que ce sont les deux qui ont, si besoin est, à retirer des mots, je dois dire au ministre que le mot "menti" n'est pas parlementaire. Il pourra, s'il le désire, faire des corrections ou l'enlever complètement du texte, les faire au même titre que le député de Gatineau qui, s'il a quelque chose à dire sur le texte qu'il a dit pourrait porter à confusion.

Je vais demander au député de Gatineau de son côté, s'il a à retirer quoi que ce soit.

M. le député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président, vous m'honorez et normalement vous reconnaissez le ministre en premier, vous me faites l'honneur de me reconnaître avant lui, j'accepte volontiers, mais je demande une précision au ministre qui dit et je cite: "Je vous dis que vous avez libéralement menti", c'est ce qu'on reproduit au journal des Débats. Est-ce que M. le ministre a voulu dire libéralement ou littéralement?

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Duhaime: J'ai dit que vous avez menti au sens large d'une façon libérale.

Le Président (M. Jolivet): Ceci étant dit, il reste une chose. Je demande au député de Gatineau si ce qu'il a dit et que je ne qualifie pas, il le retire ou s'il le change pour qu'on corrige quoi que ce soit?

M. le député de Gatineau. (12 h 15)

M. Gratton: M. le Président, je suis prêt à retirer toute parole que j'aurais prononcée et que vous jugez avoir constitué une imputation de motif, une insinuation de ma part à l'endroit du ministre.

Le Président (M. Jolivet): Je vais relire le texte en français - comme je le disais comme prof de français - et essayer de voir, sans faire de sémantique, ce qu'on a bien voulu dire, mais aussi en termes de bon sens. À quelqu'un qui a écouté ces mots, qui n'a pas les galées comme nous, pour savoir la façon dont cela s'est produit, on dit qu'il refile les citations qu'il veut mettre en preuve au témoin, Me Beaulé, qui pourrait le faire pour lui comme il l'a fait tantôt. Cela peut laisser supposer à quelqu'un qui n'entend que cela qu'il y a eu, lorsqu'on faisait référence à d'autres textes qui ont été lus hier, puisqu'on fait mention de ce qui s'est passé hier soir, cela peut laisser sous-entendre que, depuis hier soir, le ministre aurait pu passer quelque texte que ce soit à Me Beaulé et que cela fait qu'on peut y trouver une forme différente que l'imputation directe des mots. Si ce n'est pas ce que le député a voulu dire, j'aimerais qu'il corrige en conséquence parce que effectivement ce n'est pas ce que j'avais compris.

M. Gratton: M. le Président, non seulement ce n'est pas ce que j'ai voulu dire, ce n'est pas ce que j'ai dit non plus. J'en veux pour preuve le texte même du journal des Débats. Je reprends ce que vous avez lu. Je dis, au ruban 1055, page 3: "Pourrais-je suggérer au ministre que, plutôt que d'invoquer des questions de règlement qui n'en sont pas pour citer les passages de la commission Cliche qui font son affaire, il fasse l'une des deux choses suivantes: premièrement, qu'il attende d'avoir le droit de parole et qu'il l'exerce en citant ce qu'il voudra bien ou, deuxièmement, qu'il refile les citations qu'il veut mettre en preuve au témoin, Me Beaulé, qui pourrait le faire pour lui et - ce qui semble faire un problème -comme il l'a fait tantôt." Or il est manifeste, M. le Président, c'est ce que j'ai voulu dire et c'est ce que j'ai dit, que quand j'emploie les mots "comme il l'a fait tantôt", c'est comme venait de faire Me Beaulé quelques instants auparavant, c'est-à-dire de citer les extraits du rapport Cliche que le ministre avait tenté de citer en soulevant une question de règlement hier à la toute fin de nos travaux. C'est d'ailleurs là-dessus qu'on a ajourné les travaux de la commission hier soir.

M. Vaillancourt (Jonquière): Je n'ai pas très bien... Le premier "il".

Le Président (M. Jolivet): Non, juste un instant. Juste un instant.

M. Vaillancourt (Jonquière): Monsieur...

M. Gratton: Aussitôt que j'aurai terminé.

Le Président (M. Jolivet): Juste un instant. M. le député de Gatineau d'abord.

M. Gratton: Donc, M. le Président, je n'ai fait aucune allusion à quelque échange de communication privilégiée qu'il aurait pu y avoir entre le ministre et Me Beaulé. Quelqu'un me faisait remarquer tantôt qu'effectivement cela a été fait publiquement hier soir à la commission vers 22 h 50.

Une voix: A 22 h 55.

M. Gratton: À 22 h 55 environ. Le ministre a tenté - on pourrait se référer d'ailleurs au journal des Débats, mais je ne pense pas que ce soit utile - en soulevant une question de règlement, de citer les passages de la commission Cliche qu'on a retrouvés à la page 28, que Me Beaulé a cités ce matin, et d'autres passages.

Le Président (M. Jolivet): Pour aller rapidement, M. le député.

M. Gratton: Oui, je termine là-dessus, M. le Président. Il n'a pas eu besoin et je n'ai pas insinué qu'il y avait eu un échange d'informations privilégiées entre le ministre et Me Beaulé. J'ai simplement voulu dire et j'ai dit ce matin que Me Beaulé avait cité les passages du rapport Cliche que le ministre avait tenté de faire. Je suggérais au ministre que s'il voulait le faire encore ce matin, il le pouvait, mais il n'y a rien de péjoratif ou de malicieux ou... Il n'y a pas d'insinuation là-dedans. Il n'y a rien d'incorrect à ce que le ministre, qui n'a pas le droit de parole, qui voudrait voir des propos cités, le fasse. Il pourrait même le faire au vu et au su de la commission. Donc, M. le Président, je maintiens que je n'ai pas insinué, je n'ai pas prêté quelque intention que ce soit au ministre et je vous demande de prendre en considération les explications que je viens de vous donner pour constater que je n'ai donc pas accusé, ou prêté des propos, ou quoi que ce soit, des intentions au ministre et qu'il n'avait donc aucunement raison de dire que j'avais menti. J'exige qu'il retire ses paroles.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Duhaime: La langue française, M. le Président, a cette grande qualité, autant dans ses conjugaisons que dans ses déclinaisons, d'être une langue claire. De deux choses l'une, ou vous retirez les trois lignes à partir de "qu'il refile les citations qu'il veut mettre en preuve au témoin", etc., ou vous ne les retirez pas. C'est ce que j'attends de votre côté. Ensuite, je vous dirai, M. le Président, ce que je ferai.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président, je veux bien être agréable à la commission et à ses membres, mais je n'entends pas me laisser dicter ma conduite par le ministre. Je vous demande à vous, en tant que président de la commission, de m'indiquer si vous considérez que mes propos ont été au-delà du règlement de l'Assemblée nationale; si oui, de m'indiquer quels propos j'ai tenus qui auraient pu amener le ministre à me traiter de menteur, parce que c'est ce qu'il a fait, et je respecterai, comme je le fais toujours, votre décision. Mais je ne suis quand même pas pour me prêter au jeu du ministre.

Le Président (M. Jolivet): Dans le texte, on dit: "qu'il refile les citations qu'il veut mettre en preuve au témoin, Me Beaulé, qui pourrait le faire pour lui, comme il l'a fait tantôt". Les mots "comme il l'a fait tantôt" peuvent être interprétés de différentes façons par quelqu'un qui les a entendus. Est-ce que cela sous-entend que c'est le ministre qui a refilé les citations? Est-ce que c'est Me Beaulé qui a utilisé les passages? Là, il faut le reporter à l'incident d'hier soir, comme si on supposait que le ministre avait refilé, entre hier soir et ce matin, la façon dont Me Beaulé a à répondre ce matin. Or, comme les mots "comme il l'a fait tantôt" peuvent porter à ambiguïté, c'est cette partie que j'aimerais qu'on corrige. Si on me dit: "qu'il refile les citations qu'il veut mettre en preuve au témoin, Me Beaulé, qui pourrait le faire pour lui...

M. Gratton: Comme le témoin l'a fait tantôt, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, s'il y a une correction à être apportée... Non, non, la parole est au député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président, je suggère qu'on remplace le mot "il" par le mot "témoin" ou par les mots "Me Beaulé" et cela se lirait ainsi: "comme le témoin l'a fait tantôt", et là il n'y aurait aucune espèce de connotation, de prestation d'intention.

Le Président (M. Jolivet): II y aurait mieux que cela, ce serait, quant à moi, c'est une suggestion qui est faite au ministre: "qu'il refile les citations qu'il veut mettre en preuve au témoin, Me Beaulé, qui pourrait le faire pour lui." Point. Cela corrigerait.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Jonquière, sur une question de règlement.

M. Vaillancourt (Jonquière): Ce qui se passe là est absolument illégal. Les paroles que nous avons l'occasion de lire sur cette page 1055 - ER sont exactement les paroles telles qu'elles ont été prononcées par le député de Gatineau. Aussi bien à l'Assemblée nationale qu'en commission parlementaire, nous n'avons pas le droit de modifier ou d'altérer de quelque façon que ce soit les paroles qui ont été prononcées, que ce soit par le député de Gatineau ou par n'importe quel autre député de cette commission. Nous devons vivre avec les paroles que nous avons prononcées. Je conçois que le mot "il" dans ce cas peut porter à confusion, même si en ce qui me concerne, si je lis la phrase comme je l'ai devant moi, il me semble très évident que le mot "il" a la même signification que le mot "il" qui est le pronom qui précède le verbe "refiler". En supposant même que ce ne soit pas le cas, je ne pense pas qu'on puisse, à moins d'un consentement unanime... Et, encore là, je me demande si un consentement unanime pourrait nous permettre de modifier, aussi bien à l'Assemblée qu'en commission parlementaire, les paroles qui ont été prononcées par un député. En fait, c'est un problème de fond. Ce n'est pas parce que c'est le député de Gatineau qui les a prononcées; ce serait un autre député qui les aurait prononcées, je suis sûr que le problème serait le même. Ce serait un dangereux précédent que de commencer aujourd'hui. J'espère que le problème va se régler autrement, de toute façon, entre les deux personnes concernées. Mais ce serait un dangereux précédent que de permettre à une commission parlementaire de modifier les mots qui ont été prononcés par un député parce que cela pourrait nous amener à faire la même chose à l'avenir, à d'autres commissions parlementaires ou même à l'Assemblée nationale. Regrettant un mot que nous avons prononcé, ayant été imprécis dans ce qu'on voulait dire dans un discours à l'Assemblée nationale, nous demanderions, par la suite, à l'Assemblée, de le modifier parce que ce n'est pas nécessairement cela qu'on

voulait dire ou qu'on a été imprécis dans ce qu'on voulait dire.

Le Président (M. Jolivet): J'ai été mal compris; ce n'est pas ce que j'ai voulu dire.

M. Lalonde: M. le Président, c'est une question règlement.

Le Président (M. Jolivet): Je vais simplement essayer de faire en sorte que le cas qui est posé soit de retirer des paroles.

Des voix: C'est cela.

Le Président (M. Jolivet): Je n'ai pas à déterminer si on doit corriger les galées, si on doit corriger le texte; ce n'est pas ce que j'ai demandé. Ce que je dis, c'est que le député semble faire deux suggestions, il a le droit de faire deux suggestions. La première, c'est qu'il attende sont droit de parole qu'il exerce en citant ce qu'il voudra bien. C'est la première suggestion, je pense bien que cela ne fait aucune espèce de discussion. La deuxième partie, c'est qu'il refile les citations qu'il veut mettre en preuve au témoin, Me Beaulé, qui pourrait le faire pour lui. À mon avis, il n'y a pas, jusque-là, autre chose qu'une suggestion qui est faite au ministre. Là où il y a ambiguïté, je ne demande pas qu'on corrige le procès-verbal -si on peut l'appeler comme tel - ni les galées, ce que je demande, c'est qu'il retire la dernière partie qui fait ambiguïté. C'est cela que j'ai demandé. On peut employer le mot "biffer" ou "retirer". Ce que je demande au député de Gatineau, pour éviter l'ambiguïté que j'observe et que j'ai observée et pour laquelle j'ai demandé l'interruption, c'est que ce qu'il a fait tantôt peut porter à suggestion dans le sens que le ministre l'a déjà fait ou qu'il l'a fait tout dernièrement. Corriger le mot "il" par le mot "témoin" ne change rien au fait que cela laisse supposer, en cours de route, que le ministre l'aurait fait à quelque moment que ce soit. Donc, je demande qu'on retire cette partie.

M. Lalonde: M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: De toute évidence, c'est le mot "il" qui a provoqué l'ire du ministre, parce qu'il semblerait qu'il l'a pris pour lui-même. Le député de Gatineau précise que le mot "il" est le témoin. Il donne cette explication. Il ne s'agit pas, comme le député de Jonquière le suggère, de changer ce qui a été dit, il s'agit de savoir s'il y a lieu de retirer ou de ne pas retirer des mots.

M. Vaillancourt (Jonquière): ...on peut biffer.

M. Lalonde: C'est cela. Si le mot "il" peut porter à confusion - on pourrait passer l'après-midi à s'expliquer là-dessus - on doit prendre la parole du député qui dit que, lui, dans ce qu'il a dit, dans son propos, le mot "il" est le témoin. Après cela, il faut regarder pour savoir si, une fois cette explication donnée - pas le texte changé -cela autorise le ministre à l'accuser de mensonge. C'est cela, M. le Président, je pense, qui est la première étape à franchir. Elle a été franchie par le député de Gatineau qui a dit: Quand j'ai dit "il", de toute évidence, dans mon esprit, c'était le témoin. Si cela peut porter à confusion, je suis même prêt à le changer dans le texte, mais comme cela ne se fait pas, je donne l'explication, c'est le témoin. Est-ce que, cette explication étant donnée, le ministre est encore justifié - enfin, il n'est jamais justifié d'employer le mot "menti", de toute façon, il devrait le retirer - d'employer le mot "menti"?

M. Vaillancourt (Jonquière): ...

Le Président (M. Jolivet): Je répète, même si on faisait quelque correction que ce soit au dernier bout de phrase, et je continue à prétendre, pour quelqu'un qui l'a écouté et qui l'entendrait à nouveau, que cela porterait à ambiguïté et que cela imputerait au ministre, par le ruban, de façon indirecte, qu'il aurait fait un geste entre hier et aujourd'hui. En conséquence, je pense que, pour corriger la situation, qu'on lui fasse une suggestion - il n'y a rien qui peut l'empêcher de faire une suggestion -mais que le dernier bout de phrase, comme il l'a dit, même corrigé si le député disait qu'il le corrige, a aussi pour effet de garder une ambiguïté. Cette partie doit être complètement ignorée, enlevée, de façon qu'il soit bien clair que ces paroles ont été retirées et que la phrase se terminerait ainsi: "qui pourrait le faire pour lui".

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président.

M. Gratton: M. le Président, est-ce que vous me permettez une demande de directive?

Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Parlons de l'Assemblée nationale. Un député qui prend la parole à l'Assemblée nationale, quelques minutes ou quelques heures plus tard, reçoit la transcription, corrigée une première fois par les services de l'Assemblée nationale, sur

laquelle il peut apporter des corrections, non pas pour changer le sens de ses propos, mais pour corriger des erreurs de transcription qui pourraient s'être glissées ou pour préciser le sens des propos qu'il a jugé avoir tenus et qui seraient mal rendus dans la transcription. (12 h 30)

Je n'accuse pas la transcription, le journal des Débats, de ne pas avoir reproduit fidèlement ce que j'ai dit. J'ai effectivement dit: "comme il l'a fait tantôt". Mais j'ai voulu préciser ici - et j'insiste là-dessus, M. le Président, pour qu'on prenne ma parole -que ce que j'ai voulu dire, ce que j'ai dit, en employant le mot "il", c'était pour référer à Me Beaulé, le témoin, et non pas au ministre. Et, M. le Président, je n'en ferai même pas une question de directive. J'insiste pour que le ministre, au moment où il retirera les mots qu'il a eus à mon endroit, m'indique s'il accepte la parole que je lui donne, à savoir que le mot "il" que j'ai employé l'a été dans le sens qu'il s'appliquait au témoin et non au ministre.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président.

M. Gratton: Et, à ces conditions-là, M. le Président, et seulement parce que vous, à titre de président, me le demandez, pour éviter une ambiguïté et non pas pour corriger des propos que j'ai tenus, pour éviter une ambiguïté, je me soumets à votre décision et à ces conditions, je retirerai les mots "comme il l'a fait tantôt".

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Duhaime: M. le Président, je ne peux pas accepter cela pour la raison suivante: ce serait encore plus grave. Si on relit ce texte: ...ou qu'il refile - là, c'est clair que vous parlez du député de Saint-Maurice - les citations qu'il veut mettre en preuve au témoin, Me Beaulé, qui pourrait le faire pour lui, comme Me Beaulé l'a fait tantôt... C'est ce que vous voudriez qu'on corrige. Cela veut dire encore plus fort, M. le Président, que j'aurais déjà, auparavant, fait cette opération avec Me Beaulé. Jamais dans cent ans! La langue française est claire. Je suis prêt à prendre la parole d'un député, mais les mots qui sont écrits ici ont été prononcés et je ne suis pas le personnage du livre de Ewen Montagu, "L'homme qui n'existait pas". J'étais ici présent et je l'ai entendu clairement. Ou bien vous le retirez, ou je maintiens ce que je dis.

Le Président (M. Jolivet): Je voudrais savoir ce qui doit être retiré. Moi, ce que j'ai compris...

M. Duhaime: Le "comme il l'a fait tantôt", comme vous l'avez suggéré, M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): D'accord. M. Duhaime: ...et on va régler.

Le Président (M. Jolivet): D'accord. M. le ministre.

M. Duhaime: On va faire un règlement hors commission.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, j'ai cru comprendre, dans les propos du député de Gatineau, qu'à ma demande, il retirerait les mots "comme il l'a fait tantôt". Cela étant dit, c'est ce que le député de Gatineau m'a bien dit: Je me soumets à votre demande, M. le Président. C'est bien ce qu'il a dit. Donc, "comme il l'a fait tantôt", le député de Gatineau retire ces mots-là.

M. Duhaime: Alors, M. le Président, ceci étant fait, je vais retirer la phrase que j'ai prononcée, qui est la suivante: "Est-ce que le député de Gatineau est en train de dire à la commission, M. le Président, que je passe des réponses à Me Beaulé, que je lui suggère de citer des passages? Je vous dis que vous avez libéralement menti". Je retire ces paroles.

Le Président (M. Jolivet): Merci, M. le ministre. Ceci étant maintenant un incident clos, nous continuons avec le député de Gatineau sur les questions qu'il a à poser. Mais, avant, comme Me Beaulé est revenu...

Me Beaulé? Me Beaulé? J'ai attendu votre retour pour, au nom des membres de cette commission, éviter quelque question de règlement que ce soit, ce qui explique que j'ai suspendu la séance dans le brouhaha, tout à l'heure. Je voulais éviter que chacun ait à donner son opinion sur ce que vous avez dit.

Je vous ai dit hier qu'en vertu de la décision que j'ai rendue, vous êtes à la disposition de la commission, vous n'avez pas à juger - vous ne l'avez pas fait, à mon avis - des désirs de chacun des députés. Je sais qu'il y a encore beaucoup de députés, de chaque côté, qui ont l'intention de vous poser des questions et je leur rappelle toujours qu'ils doivent poser des questions qui n'ont pas été posées, de façon à répondre à la directive que j'ai donnée hier. Mais, je ne peux en aucune façon, au nom des membres de la commission, vous dire à quel moment nous pourrions vous libérer. Je pense que cette partie se règle à une autre instance. Si, entre le ministre et le responsable de l'Opposition, il y a quelque accord que ce soit en dehors de cette commission et qu'on m'en fait rapport, qu'on vient me le

rapporter ici, je tiendrai compte de cela. J'ai accepté que vous fassiez votre demande. Mais je dois vous dire que nous aussi, comme députés, de quelque côté que ce soit, nous avons des occupations et je suis l'un de ceux qui savent ce que veut dire avoir un grand comté et s'occuper de son comté en même temps que de présider cette commission. Me Beaulé.

M. Beaulé: Sur ce point, puis-je demander respectueusement aux membres de la commision d'être libéré au moins pour la journée de demain, quitte à revenir vendredi matin, pour plaider deux causes que j'ai vraiment à plaider?

Le Président (M. Jolivet): Je demande donc aux deux responsables de discuter de cela et on reviendra après le dîner sur cette question. Oui, M. le ministre?

M. Duhaime: Je ne veux pas revenir sur l'incident de tout à l'heure, mais je voudrais faire une question de règlement puisque le texte qui est devant nous maintenant, après correction, contient une suggestion de la part du député de Gatineau qui m'invitait à deux choses: "qu'il attende d'avoir le droit de parole et qu'il l'exerce en citant ce qu'il voudra bien" - ce avec quoi je suis parfaitement d'accord - ou encore, la deuxième suggestion: "qu'il refile les citations qu'il veut mettre en preuve au témoin, Me Beaulé, qui pourra le faire pour lui." Je ne suis pas d'accord avec cette suggestion. Je ne la retiendrai ni dans le cas de Me Beaulé, ni dans le cas de tout autre témoin. Je n'ai pas l'intention de refiler quelque citation que ce soit à quiconque.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau, vous avez la parole.

M. Duhaime: II faut que ce soit clair.

M. Gratton: Sur une question de règlement très brève, M. le Président. C'est simplement pour dire qu'il y a une heure et demie, j'avais posé et je posais des questions à notre invité, Me Beaulé, que j'ai été interrompu par une question de règlement du ministre qui, manifestement, n'en était pas une. Nous avons perdu très exactement une heure trente-cinq minutes ici, à la commission...

M. Duhaime: Par votre fautel

M. Gratton: ...parce que le ministre a voulu faire indirectement ce que le règlement de l'Assemblée nationale ne lui permet peut-être pas de faire directement. J'invite à nouveau le ministre à bien vouloir me laisser poser les questions que j'ai l'intention de poser à Me Beaulé. S'il souhaite réellement que les travaux avancent à la meilleure vitesse de croisière possible, cela va grandement améliorer les choses. Qu'il ne fasse pas de questions de règlement qui n'en sont pas. Cela étant dit, M. le Président...

M. Duhaime: Sur la question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, sur la question de règlement.

M. Duhaime: Ah! Celle-là, franchement, c'est un éléphant dans ma grange!

Une voix: Quoi?

Une voix: Un éléphant dans sa grange!

M. Paradis: Un éléphant dans sa grange. Y a-t-il un crédit agricole là-dessus?

M. Duhaime: Le député de Gatineau est en train de nous dire, M. le Président, que je suis responsable de l'heure et demie que nous venons de perdre.

M. Lalonde: Oui, on est d'accord.

M. Duhaime: Je prends à témoin tous ceux qui sont ici présents et tous ceux et celles qui nous écoutent. Ce n'est pas moi qui ai imputé des motifs à quiconque en cette commission parlementaire.

M. Gratton: II va recommencer, M. le Président.

M. Duhaime: J'ajoute essentiellement que, si vous voulez que l'incident soit clos...

M. Gratton: M. le Président, j'ai retiré les paroles. Il ne peut pas y revenir. Est-ce qu'il veut que je les répète?

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

M. Duhaime: Oui.

Le Président (M. Jolivet): J'ai demandé que l'incident soit clos.

M. Lalonde: Voulez-vous envoyer le ministre dans le coin, s'il vous plaît, M. le Président?

Le Président (M. Jolivet): Je voudrais, s'il vous plaît, que le député de Gatineau pose ses questions à Me Beaulé. Mais je dois lui rappeler que je n'ai aucun moyen...

M. Duhaime: Si vous continuez, je vais vous envoyer mes témoins pour un duel.

Le Président (M. Jolivet): ...J'ai bien compris que vous faisiez une nouvelle suggestion au ministre, mais le ministre est libre de ses décisions. Je n'ai aucun moyen de l'empêcher de poser les questions de règlement qu'il voudra...

M. Lalonde: Bonnes ou mauvaises.

Le Président (M. Jolivet): ...et, quelle que soit la personne, soit à ma gauche ou à ma droite, qui soulève des questions de règlement, je me ferai un devoir de l'écouter. Après, je verrai si c'en est une ou non. M. le député de Gatineau.

M. Vaillancourt (Jonquière): Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): Simplement pour corriger peut-être une fausse impression que le député de Gatineau vient de laisser à nos nombreux téléspectateurs. Il vient de laisser entendre que cette période de temps, une heure et demie, où on n'a pas travaillé, a été occasionnée par une question de règlement du ministre, ce qui est vrai.

Des voix: Oui, oui.

M. Vaillancourt (Jonquière): Mais j'aimerais vous souligner, M. le Président, que vous avez retenu la question de règlement du ministre, que celle-ci a été acceptée et que la conséquence de tout cela a été le retrait de ses paroles par le député de Gatineau.

Des voix: Ah! Ah!

M. Vaillancourt (Jonquière): Donc, sa question de règlement était bien fondée, M. le Président.

M. Paradis: C'est vous qui avez laissé l'impression à la population...

M. Lalonde: C'est de la nostalgie. Des voix: Oui.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau, en vous demandant, de votre côté ainsi qu'à tous les autres, s'il vous plaît, la possibilité de recommencer les questions à poser à Me Beaulé, s'il vous plaît. Allez!

M. Lalonde: Vous aviez posé deux questions, un petit peu avant...

Une voix: Je ne sais pas si ses avocats vont avoir le droit de parole.

M. Gratton: M. le Président, je n'ai pas laissé l'impression que le ministre en avait été responsable. Je l'ai affirmé. Je le réaffirme.

Le Président (M. Jolivet): M. le député! M. le député!

M. Tremblay: M. le Président, si je comprends bien, ce que voudrait le député de Gatineau, c'est que nous, les membres de la commission, ne soyons plus là et qu'on ne conteste pas quand il abuse de l'article 168.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Chambly! Je m'excuse. M. le député de Gatineau, posez vos questions, mais, s'il vous plaît, ne faites aucune autre allusion à quoi que ce soit. Posez vos questions.

M. Lalonde: Éteins cela!

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau, en me regardant et en posant les questions à Me Beaulé, parce que, avec la petite farce que j'ai faite, comme ancien professeur, je vais vous demander de rester après la classe. M. le député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président, j'adresse une question à Me Beaulé. Hier, le député de Mont-Royal vous a demandé si vous aviez transmis à Me Jean-Roch Boivin d'autres documents que la contestation du 28 novembre 1978 et l'aide-mémoire du 29 janvier 1979. Vous avez répondu: Non.

M. Vaillancourt (Jonquière): Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Jonquière, sur une question de règlement.

M. Vaillancourt (Jonquière): Je pense que, si on relit les galées, on verra très facilement que cette question a été posée, hier, à Me Beaulé, qui a répondu: Le 2 février.

M. Paradis: Bien, laissez-lui finir sa question. Voyons donc! Qu'est-ce que cela?

Une voix: Ah! Ah! Come on!

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

M. Ciaccia: Y aurait-il collusion de ce côté-là?

M. Lalonde: Bien oui.

M. Vaillancourt (Jonquière): Non, mais c'est cela.

M. Lalonde: Oui, laissez-le donc finir la

question.

M. Paradis: II y a déjà un président.

Le Président (M. Jolivet): Messieurs, les députés. Je ne voudrais en aucune façon, cependant, que des questions soient reposées. Je l'ai mentionné. M. le député de Gatineau, allez, s'il vous plaît!

M. Ciaccia: II sait qu'il a menti, c'est pour cela qu'il veut se défendre.

M. Gratton: M. le Président, je ne reprendrai pas mais il faudrait presque je reprenne pour que Me Beaulé puisse répondre à une question précise. Je reprends. Hier, le député de Mont-Royal vous a demandé si vous aviez transmis à Me Boivin d'autres documents que la contestation du 28 novembre 1978 et l'aide-mémoire du 29 janvier 1979. Vous avez répondu: Non. Ensuite, vous avez corrigé en disant que vous croyiez que la question s'appliquait à la rencontre du 2 février 1979. Vous nous avez alors dit que vous aviez donné à Me Boivin des copies de factures de la SEBJ qui impliquaient les frais de séjour de M. Duhamel.

Je voudrais être clair, Me Beaulé. Entre le 20 avril 1978 et 13 mars 1979, avez-vous remis ou transmis à Me Boivin des documents autres que votre contestation du 28 novembre 1978, que votre aide-mémoire du 29 janvier 1979 et que les factures de la SEBJ déposées ici hier soir?

M. Beaulé: M. le Président, je vais répondre à la question. Je crois cependant qu'au moment où vous avez déclaré la suspension il y avait une question qui m'était adressée.

M. Gratton: On va y revenir.

M. Beaulé: Quant à la question qui m'est posée, avant le 2 février et jusqu'au 2 février inclusivement, je n'ai remis à M. Boivin, en rapport avec la poursuite de la SEBJ contre l'International Union of Operating Engineers, que la contestation et l'aide-mémoire. Subséquemment, j'ai fait parvenir à M. Boivin - est-ce que c'est par messager ou autrement? je n'ai pas de copie de lettre dans mes dossiers, mais je me rappelle les lui avoir fait parvenir, probablement par messager - copie des documents que je vous ai transmis hier qui établissent que la SEBJ, qui avait reconnu Duhamel comme le porte-parole de la FTQ-Construction et du Conseil provincial du Québec des métiers de la construction à LG 2, facturait la FTQ pour le gîte et le couvert de Duhamel. J'ai transmis à M. Boivin copie de ces factures-là. Je lui ai également transmis - à quelle date, je ne le sais pas, sûrement au début du mois de février 1979 - photocopie des chèques qui établissaient que Duhamel était toujours, avait toujours été en tout cas, à partir du moment où il était à Matagami - donc à partir de l'automne 1973 - jusqu'en 1974, payé par l'Union des opérateurs de machinerie lourde du Québec. J'ai même dit qu'il s'agissait de chèques tirés sur la Banque Provinciale du Canada et qu'il n'était même pas un salarié du local 791 affilié à ma cliente. Oui, j'ai fourni ces documents-là à M. Boivin. Je ne lui en ai pas fourni d'autres.

M. Gratton: II n'y en a pas eu d'autres. M. Beaulé: Non.

M. Gratton: Merci. Revenons maintenant à nos moutons de ce matin...

M. Beaulé: Moutons du printemps.

M. Gratton: ...à nos agneaux, à nos agneaux du printemps. Me Beaulé, avez-vous pris connaissance de l'éditorial de Marcel Adam dans la Presse du 28 avril 1983 qui s'intitulait: "Des motifs et avantages du règlement hors cour"?

M. Beaulé: À ma connaissance, il y a eu deux éditoriaux publiés par M. Adam au cours du mois d'avril. J'ai référé à l'un de ces éditoriaux lorsque j'ai dit que M. Adam avait conclu que les dommages excédaient 32 000 000 $. Quand j'ai parlé du danger de conclure que les dommages avaient été prouvés, j'ai référé en particulier à une affirmation de M. Adam dans un de ses éditoriaux. Quant à l'autre, vaguement, je sais qu'il y a eu un éditorial samedi, je ne crois pas l'avoir lu attentivement. J'y ai jeté un coup d'oeil, mais je ne l'ai pas lu attentivement.

M. Gratton: M. le Président, si vous me le permettez - je suis sûr que vous le ferez - j'aimerais citer un passage de l'éditorial en question, celui du 28 avril 1983, donc samedi dernier, et j'aurai une question précise à poser à M. Beaulé à la suite de cette citation.

M. Rodrigue: Si le député me le permettait?

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Vimont.

M. Rodrigue: Serait-il possible que le député fasse faire des photocopies de cet éditorial afin qu'effectivement le témoin puisse avoir l'éditorial devant lui...

M. Gratton: D'accord.

M. Rodrigue: ...avant de répondre à la question? En même temps, on pourrait en faire faire pour les membres de la commission.

Le Président (M. Jolivet): Auparavant, est-ce que quelqu'un en aurait une copie, ce qui permettrait d'éviter une photocopie parce que cela retardera les travaux encore une fois? Si quelqu'un avait une copie, on pourrait lui en donner une pour le moment.

M. Gratton: Le 28 avril, le titre est: "Des motifs et avantages du règlement hors cour".

M. Lalonde: Moi, j'ai: Le gouvernement doit aller jusqu'au bout, le gouvernement doit respecter son engagement.

Le Président (M. Jolivet): M. le député. S'il vous plaît! S'il y a des questions de posées à partir de ce texte - je pense que c'est normal qu'on lui en donne une copie -est-ce que le député accepterait de poser d'autres questions en attendant, d'ici treize heures, et nous reviendrions après la période des questions avec ce texte?

M. Gratton: M. le Président, je voudrais bien vous être agréable, mais...

Le Président (M. Jolivet): Ce n'est pas possible.

M. Gratton: Non, ce n'est pas possible parce que cela s'enchaîne.

M. Duhaime: M. le Président, si vous me le permettez...

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre. Entre-temps, donnez donc au Secrétariat des commissions le document et on fera faire les photocopies immédiatement. M. le ministre.

M. Duhaime: S'il nous reste quelques minutes avant treize heures et qu'il nous faut attendre les photocopies, je vais profiter de l'intermède pour vous dire que notre formation politique serait d'accord pour agréer la demande qui a été faite par Me Beaulé de le libérer ce soir, quitte à ce qu'on s'entende avec le leader parlementaire de l'Opposition pour trouver une journée qui puisse être à la convenance de Me Beaulé au cours de la semaine prochaine. Je pense qu'il a été d'une grande collaboration à l'endroit de la commission et je comprends parfaitement qu'un avocat qui a une clientèle et une pratique chargée... Cela m'apparaîtrait vraiment abusif d'insister pour qu'il soit présent demain. Nous pourrions procéder à l'audition de Me Gadbois, qui attend déjà depuis trois jours, si ma mémoire est bonne.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Marguerite-Bourgeoys. Oui, Me Beaulé.

M. Beaulé: Je dois venir à Québec vendredi après-midi pour affaires. Je pense que vous ne siégez pas le vendredi après-midi. Si vous désirez ma présence vendredi matin, je serai à votre disposition.

Le Président (M. Jolivet): Me Beaulé, c'est moi qui ai un problème.

M. Beaulé: Ah bon!

Le Président (M. Jolivet): J'avais demandé à mes deux collègues de me libérer pour vendredi de façon à reprendre au début de la semaine prochaine et on me l'avait accordé jusqu'à maintenant. Je ne voudrais pas faire de publicité pour mon comté.

M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, si Me Beaulé vous convainc d'être ici vendredi matin, on est d'accord. En ce qui concerne demain, nous allons nous consulter et vous donner une réponse. Si c'est le moindrement possible, vous pouvez être sûr que nous allons le faire, en enlevant une certaine partie du ton que contenait votre demande tout à l'heure.

Le Président (M. Jolivet): M. le député, c'est justement ce pourquoi je n'ai pas voulu qu'il y ait en aucune façon...

M. Duhaime: À moins qu'on finisse ce soir.

Le Président (M. Jolivet): ...qu'il y ait d'intervention sur ce sujet et c'est pour cela que j'ai pris la précaution tout à l'heure de le faire au nom des membres de la commission.

M. Lalonde: Avouez que je l'ai fait avec assez de délicatesse, M. le Président.

M. Duhaime: Comme d'habitude.

Le Président (M. Jolivet): Le texte n'est pas encore arrivé?

M. Beaulé: Est-ce que je peux remercier le député de Marguerite-Bourgeoys de la façon avec laquelle il m'a, dans un sens, rappelé à l'ordre, et je l'accepte?

M. Lalonde: Merci.

Le Président (M. Jolivet): Ceci dit, l'incident est clos. Est-ce que vous avez une autre question entre-temps, M. le député de

Gatineau, ou si c'est la...

M. Beaulé: Est-ce qu'on pourrait revenir aux questions de ce matin qui avaient été abordées sur...

Le Président (M. Jolivet): Oui, il y a la question qui était... Allez-y donc, Me Beaulé. Vous aviez une réponse à donner.

M. Beaulé: Peut-être que monsieur.... Enfin, je ne voudrais pas être injuste vis-à-vis du député de Gatineau. Est-ce qu'il veut reformuler sa question, ou la répéter plutôt? J'ai une bonne compréhension de sa question, mais je pense qu'elle devrait venir de lui parce que ce n'est pas moi qui pose les questions.

M. Gratton: M. le Président, justement, la citation que je veux faire de l'extrait de l'éditorial de M. Adam m'amènera à préciser encore plus la question que j'avais commencé à poser ce matin et qui a été perdue dans les dédales de la procédure qu'on a connue depuis.

M. Beaulé: Voici. Je suis prêt à répondre à la question que vous m'aviez posée et, si vous pensez que je vous cite mal, je suis sûr que vous allez l'indiquer.

Le Président (M. Jolivet): Je pense que pour vous aider nous avons dans les galées...

Une voix: Voilà. Voilà.

Le Président (M. Jolivet): ...la question. Je pourrais vous la répéter.

Une voix: On l'a.

Le Président (M. Jolivet): Oui, je sais, mais je pense qu'en toute justice pour notre invité qui avait à répondre à une question, on devrait lui permettre de répondre à cette question. Je vais vous la lire. Je vais simplement lire les galées.

M. le député de Gatineau: "Bon, si vous me dites que dans votre mémoire quelque part quelque chose est blanc le 28 avril et que vous venez me dire aujourd'hui, le 4 mai, qu'on va changer cela pour noir, est-ce que cela ne change pas la substance même de votre présentation?" C'était la question.

M. Beaulé: Voici, M. le Président. D'abord, en déclarant ce matin qu'il y avait lieu de substituer au mot "recommandation" le mot "constatation", parce que je me référais à la commission Cliche, je n'ai pas l'impression d'avoir noirci ou blanchi quoi que ce soit. Cependant, si j'ai bien compris tout le sens de la question, les passages que j'ai cités ce matin du rapport Cliche et les autres passages que nous retrouvons à la page 28 de même qu'aux pages 292 et 293 sont des citations qui viennent, à mon point de vue, établir hors de tout doute la première partie de mon mémoire qui commence à la page 6 et qui s'intitule: "Les actes de violence du 21 mars 1974 survenus à LG 2 s'insèrent dans une toile de fond que la SEBJ a contribué à créer et dont elle doit assumer sa part de responsabilité."

Je ne veux pas lire le texte, mais, si vous jugez utile de le lire, vous verrez que ce qui est allégué aux pages 6, 7 et 8 du mémoire est établi et prouvé par la commission lorsqu'elle affirme, à la page 28, que, oui, la SEBJ a offert un monopole syndical à la FTQ-Construction, qu'elle l'a fait à l'instigation de M. Paul Desrochers, à la demande de M. Giroux, et que c'était en contravention avec nos lois existantes à l'époque. Je n'ai pas cité les passages dans mon mémoire. Je vais vous donner la raison très brièvement. M. Giroux est à sa retraite et je pense même qu'il est malade. M. Boyd est à sa retraite et je pense que M. Desrochers est à sa retraite politique. Je ne voulais pas les mêler à mon mémoire, mais cela ne change absolument rien. J'ai dit en toutes lettres à la page 6 que la SEBJ avait offert en 1971 le monopole syndical à la FTQ-Construction et j'ai développé cet argument aux pages 7 et 8. Vous en trouvez la preuve dans le rapport Cliche, aux pages 28, 292 et 293. On nous indique dans quelles circonstances ce monopole a été offert et par qui. Alors, je n'ai pas modifié mon mémoire en citant ce matin mes sources, je n'ai que prouvé mon mémoire.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau, avec la question qui a été laissée en plan tout à l'heure.

M. Gratton: Oui, M. le Président. Donc, je cite cet extrait de l'article ou de l'éditorial de Marcel Adam, dans le journal La Presse du 28 avril 1983, qui s'intitule "Des motifs et avantages du règlement hors cour". Au bas, d'ailleurs, je pense que c'est raturé sur la copie que vous avez. Après avoir cité les deux mêmes paragraphes de la page 68 du rapport Cliche que Me Beaulé a cités lui-même dans son mémoire, et en parlant des trois P.-D.G. de la SEBJ, c'est-à-dire M. Roland Giroux, M. Robert Boyd et M. Lucien Saulnier, à la dernière ligne de la troisième colonne, on lit ce qui suit: "Seul M. Saulnier s'est dit d'accord avec ce passage du rapport qui donne l'impression que la responsabilité n'incombe qu'à ceux qui ont été impliqués directement dans le saccage, non aux syndicats qu'ils représentaient. Le ministre Guy Chevrette, qui fut membre de la commission Cliche, pense aujourd'hui qu'il ne fallait pas faire payer à tous les travailleurs les fautes "d'une petite clique de bandits qui avaient pris le contrôle, grâce à

la collaboration du gouvernement Bourassa". "Le ministre Chevrette oublie-t-il ce passage du rapport qu'il a signé et qui fait suite à celui qu'a invoqué M. Duhaime? Et que Me Beaulé a également invoqué? Et M. Marcel Adam de citer les trois paragraphes de la page 68; je vous fais grâce de tout relire. À l'avant dernier paragraphe, Marcel Adam écrit: "II est donc clair que la commission Cliche imputait à la FTQ-Construction "la responsabilité morale" du crime de Duhamel et compagnie. "Que le ministre Duhaime choisisse de ne lire du rapport que ce qui arrange le premier ministre, soit. Mais le politicien Guy Chevrette devrait avoir la décence de ne pas contredire ce qu'écrivait avec plus d'objectivité, en 1975, le commissaire du même nom." La question que je pose - elle reprend celle que je vous posais ce matin, Me Beaulé - est la suivante: Pourquoi, en ne citant pas les trois paragraphes qu'on n'a pas relus ici, mais qui sont reproduits textuellement dans l'éditorial de Marcel Adam, n'avez-vous pas conclu, comme Marcel Adam le fait, que les syndicats, notamment la FTQ-Construction, portaient la responsabilité morale du saccage selon la commission Cliche?

M. Beaulé: M. le Président, je vais répondre très sommairement. D'abord, dans cet éditorial de M. Adam, lorsqu'il dit que le ministre Charest qui fut membre de la commission Cliche...

Le Président (M. Jolivet): Chevrette.

M. Beaulé: Pardon, lorsqu'il dit que le ministre Guy Chevrette qui fut membre de la commission Cliche pense aujourd'hui qu'il ne fallait pas faire payer à tous les travailleurs les fautes d'une petite clique de bandits, si on lit le rapport Cliche à la page 68 - M. Chevrette était l'un des commissaires - on voit qu'il pensait la même chose en 1975. Je vous réfère à la page 68 où il est dit: "Les commissaires ont acquis la conviction que les travailleurs ordinaires n'encourent pas la responsabilité de ce qui est arrivé". Sur ce point...

M. Gratton: Ma question précise, Me Beaulé, porte sur la responsabilité morale des syndicats.

M. Beaulé: Quant à la responsabilité morale - très bien - il n'y pas de doute que le rapport Cliche, à mon avis - on pourrait citer abondamment le rapport - impute la responsabilité morale à la FTQ-Contruction de l'époque dirigée par André Desjardins et, M. Desjardins étant à la tête d'une pyramide, à des personnes dont l'activité était bien connue au Québec dès 1971. Il n'y a pas de doute que le rapport Cliche impute à la FTQ-Construction d'alors, avec M. Desjardins et certains gangsters qui travaillaient sous ses ordres, la responsabilité des événements du 21 mars 1974. Mais, en même temps, la commission va aux causes lointaines et relie les dirigeants de la SEBJ et d'Hydro-Québec de l'époque et M. Desrochers à ce fameux monopole syndical accordé ou offert par MM. Desrochers, Giroux et Boyd à M. Desjardins et à ses acolytes.

M. Gratton: Me Beaulé...

M. Beaulé: C'est ma perception du rapport.

M. Gratton: Oui, vous vous enflammez et je ne vous en fais pas grief. Mais quand je vous pose une question sur la... Vous vous êtes plaint, à plusieurs occasions, qu'on vous répète les mêmes questions à plusieurs reprises. Je vous suggère respectueusement que ma question portait uniquement sur la partie de la responsabilité morale et que vous avez vous-même choisi de répéter pour la nième fois - je ne sais trop - tout le reste. Je veux bien, je n'ai pas d'objection, mais ne vous surprenez pas si, à l'occasion, des membres de la commission répètent la même question plus d'une fois.

M. Beaulé: Je vais préciser la réponse, M. le Président. La commission Cliche a tenu non seulement les dirigeants de l'époque de la FTQ responsables, mais également les hommes politiques et les cadres de la SEBJ qui ont pactisé avec les bandits qui dirigeaient la FTQ, à l'époque, la FTQ-Construction.

Une voix: C'est clair.

M. Gratton: Donc, est-ce que vous reconnaissez le droit à quiconque d'interpréter le rapport de la commission Cliche...

Le Président (M. Jolivet): M. le député...

M. Gratton: ...de la façon...

Le Président (M. Jolivet): ...je me dois, étant donné qu'il est très tard, de suspendre jusqu'après la période de questions.

(Suspension de la séance à 13 heures)

(Reprise de la séance à 16 h 22)

Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission élue permanente de l'énergie et des ressources est à nouveau réunie aux fins d'examiner les circonstances

entourant la décision du conseil d'administration de la Société d'énergie de la Baie James de régler hors cour la poursuite civile intentée à - la suite du saccage du chantier de LG 2 survenu en 1974 et, plus spécifiquement, le rôle du premier ministre et de son bureau à cet égard.

Les membres de cette commission sont: MM. Dussault (Châteauguay), Ciaccia (Mont-Royal), Duhaime (Saint-Maurice), Bourbeau (Laporte), Laplante (Bourassa), Gratton (Gatineau), Lavigne (Beauharnois), LeBlanc (Montmagny-L'Islet), Lalonde (Marguerite-Bourgeoys), Tremblay (Chambly), M. Rodrigue (Vimont).

Les intervenants sont: MM. Bisaillon (Sainte-Marie), Vaillancourt (Jonquière), Desbiens (Dubuc), Mme Harel (Maisonneuve), MM. Paradis (Brome-Missisquoi), Pagé (Portneuf), Doyon (Louis-Hébert), Perron (Duplessis), Saintonge (Laprairie). Le rapporteur est toujours M. LeBlanc (Montmagny-L'Islet).

Au moment où nous nous sommes quittés, ce midi, nous avions Me Rosaire Beaulé qui répondait aux questions. Avant de donner la parole au député de Gatineau, qui a toujours le droit de parole, au moment où on se parle, je vais rendre une première décision sur les deux que j'avais à rendre. La seconde viendra un peu plus tard. Elle concerne la question de recevabilité ou d'irrecevabilité concernant la conversation qu'il y a eu entre Me Beaulé et Me Boivin, vendredi de la semaine dernière.

Nous devons tenir compte du mandat de la commission. J'ai eu l'occasion, ainsi que d'autres présidents, à plusieurs commissions, de rendre cette décision, eu égard au mandat qui nous est confié comme président de commission parlementaire. Je ne rappellerai pas ce qui a trait à ce mandat. Il a été lu dès le départ. En conséquence, à cause du mandat qui nous est dévolu et à cause des précédents souventefois accomplis à l'intérieur des mandats que nous avons, la question à savoir ce qui a été dit vendredi dernier n'étant pas pertinente au mandat est irrecevable. Je ne la permettrai donc pas. M. le député de Gatineau, vous avez la parole pour adresser vos questions à Me Beaulé.

M. Lalonde: M. le Président, j'aurais une directive à vous demander.

Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, sur une demande de directive.

M. Lalonde: Oui. Votre décision, celle que vous venez de rendre, sur l'irrecevabilité d'une question portant sur une conversation téléphonique du mois d'avril 1983, s'appliquerait jusqu'à quand dans le temps? Autrement dit, le mandat d'examiner toutes les circonstances entourant la décision... Est- ce qu'on doit interpréter votre décision comme rendant irrecevable une question qui porterait sur un événement qui serait arrivé en 1980, en 1979, au mois de juillet? Enfin, où situez-vous...

Le Président (M. Jolivet): Effectivement, pour répondre à la demande de directive, le mandat est d'examiner les circonstances entourant la décision. Or, la décision a été prise en 1979, au cours d'une certaine journée, dans un certain mois. À partir de cela, la décision étant prise, c'est de cela qu'on doit discuter. À partir de cette date-là, tout ce qui a eu trait à la décision déjà prise ne peut pas être interprété comme faisant partie du mandat de cette commission. En conséquence, qu'on demande si, depuis ce temps, il y a eu des conversations, des discussions, je pense qu'on a permis cela depuis le début. Mais le contenu de la conversation, qui n'a trait en aucune façon à la décision rendue à ce moment-là n'étant pas l'objet de notre commission, ne peut pas être jugé recevable.

M. Lalonde: Je ne veux pas vous causer de problèmes inutiles...

Le Président (M. Jolivet): Je ne veux pas non plus que vous reveniez sur la décision que j'ai rendue, de façon indirecte.

M. Lalonde: Non, non. Je ne reviens pas de façon indirecte, non plus directe. J'aimerais quand même qu'on sache quels sont les paramètres dans lesquels nous pourrons librement poser des questions aux différents témoins, une question, par exemple, qui porterait sur une conséquence de la décision. Est-ce que...

Le Président (M. Jolivet): M. le député, je ne peux pas, au moment où aucune question ne m'est posée - parce que c'est dans une hypothèse que vous le faites -répondre à quoi que ce soit. Je dis que la décision a été rendue à un moment donné, cette décision est connue de tout le monde, à une date donnée, dans un mois donné, en 1979 et, en conséquence, toute décision qui a trait à ce qui a précédé cette prise de décision, toute discussion sera jugée recevable. Ce qui dépasse le moment où la décision a été prise n'est pas, à ce moment-là, du mandat de la commission. Je ne peux donc pas le recevoir. Si vous avez d'autres questions, c'est ailleurs que dans ce lieu que ces questions doivent être posées.

M. Lalonde: Ecoutez, M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): M. le député...

M. Lalonde: Je ne présume pas que

vous m'empêchez de poser des questions?

Le Président (M. Jolivet): Non, vous ne présumez en aucune façon. Je ne voudrais pas non plus que vous remettiez ma décision... Elle est rendue. Je ne vois pas comment je pourrais continuer, au moment où on se parle, à faire autre chose que demander au député de Gatineau de poser ses questions et on verra au fur et à mesure que nous avancerons si elle est jugée recevable ou irrecevable.

M. le député de Gatineau.

M. Laplante: M. Le Président, une question de règlement ou de directive. Vous deviez dire ce midi à Me Beaulé si demain il comparaîtrait.

Le Président (M. Jolivet): Oui.

M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. Le Président, en effet Me Beaulé m'a parlé après la suspension et il m'a indiqué que demain soir il pourrait être disponible. Si on présume que l'interrogatoire, l'entretien avec Me Gadbois, notre invité, pourrait se terminer vers la fin de l'après-midi demain, en tenant compte qu'on commence demain matin j'accepterais la suggestion de Me Beaulé. J'ai cru comprendre - d'ailleurs, vous l'avez dit publiquement - que vous devez être à Québec de toute façon vendredi.

M. Beaulé: C'est cela.

M. Lalonde: Ce n'est pas un dérangement spécial. Si Me Beaulé veut se tenir disponible - le Secrétariat des commissions pourrait communiquer avec lui vers le milieu de l'après-midi pour confirmer, mais on pourrait continuer demain soir l'interrogatoire de Me Beaulé.

Le Président (M. Jolivet): II n'y a d'objections en aucune façon. Donc... M. le ministre.

M. Duhaime: M. le Président, à moins que ce soit terminé ce soir.

M. Lalonde: À moins qu'on termine à 18 heures. Cela va dépendre de la...

M. Gratton: La question ne se pose pas, à ce moment-là.

Le Président (M. Jolivet): D'une façon ou d'une autre tout ce qui est intéressant...

M. Lalonde: Cela va dépendre de la longueur des réponses.

Le Président (M. Jolivet): ...c'est le plus vite possible.

Une voix: Les redondances.

Le Président (M. Jolivet): Le plus vite on aura terminé avec les questions à poser, le plus vite cela permettra à Me Beaulé d'être libéré, si c'est ce soir. Sinon il pourrait être à notre disposition à partir de 20 heures demain soir jusqu'à 22 heures.

M. le député de Gatineau. (16 h 30)

M. Gratton: Merci, M. le Président. Me Beaulé, ce matin, compte tenu de vos réponses, je pense que nous pouvons dire que nous avons établi que vous-même ne partagez pas le point de vue de Marcel Adam qui dans son éditorial du 28 avril dernier écrivait, et je cite: "II est donc clair que la commission Cliche imputait à la FTQ-Construction la responsabilité morale du crime de Duhamel et compagnie."

M. Beaulé: M. Le Président, je n'ai pas de commentaire à faire sauf de dire que j'ai étudié ce dossier pendant près d'un an, que j'ai lu à peu près 22 jours d'enquête au préalable et que j'ai assisté personnellement à 22 jours d'enquête devant l'honorable juge Bisson. Ma connaissance du dossier, ma connaissance du rapport Cliche me commandaient de dire ce que j'ai dit ce matin à la suspension.

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, Me Beaulé, est-ce que vous pourriez approcher votre micro?

M. Beaulé: Oui.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau.

M. Gratton: J'imagine, Me Beaulé, que vous reconnaissez quand même, soit à M. Adam ou à bien d'autres qui pensaient comme lui et qui pensent encore comme lui, par exemple, M. Roland Giroux, M. Robert Boyd, vous leur reconnaissez, dis-je, le droit, eux, d'avoir interprété les passages pertinents de la commission Cliche de cette façon?

M. Beaulé: M. le Président, je me suis battu assez longtemps - cela remonte même aux années soixante alors que j'étais à la commission politique du Parti libéral pour la liberté d'expression - que je peux répondre uniquement ceci à votre question: Pour moi, la liberté d'expression est fondamentale. Si elle l'est à l'intérieur d'un parti politique, a fortiori au niveau de la presse.

Cependant il y a une chose qui me frappe dans le rapport Cliche, à la page 68, et je cite à nouveau: "Les commissaires ont acquis la conviction que les travailleurs ordinaires n'encourent pas la responsabilité de ce qui est arrivé." Je continue: "L'impression nette que nous tirons de

l'interrogatoire des témoins du saccage..." Il s'agit là d'une expression de fait ou d'une conclusion de fait tirée après audition des auteurs mêmes du saccage.

Il vous appartient, messieurs, de savoir laquelle des conclusions doit être retenue: celle de ceux qui ont entendu les témoins du saccage comme la commission Cliche ou celle de ceux qui viennent après, tout en bénéficiant - c'est fondamental en démocratie - du droit d'opinion, et leur rôle est essentiel. Il n'en reste pas moins qu'ils n'ont pas entendu les témoins du saccage. Mais c'est une question que je préférerais ne pas aborder davantage.

Je pense que le principe de base est que nous vivons en démocratie et je crois que M. Adam... Cela me paraît tellement fondamental que je vous reconnais le droit de me poser la question, mais je pense que la question comporte sa réponse: M. Adam a droit à ses opinions. Quant à moi, j'aime mieux me rallier - c'est ma réponse, en fait - à la commission Cliche qui a entendu les témoins du saccage.

M. Gratton: J'ai compris cela depuis le début. Vous me permettrez sûrement de vous poser des questions telles que, par exemple, vous reconnaisez - je vous pose la question -que des gens comme M. Giroux, M. Boyd, M. Hébert, peut-être bien, qui a voté contre le règlement hors cour, Mme Forget... À ma souvenance, on ne leur a pas posé la question, mais reconnaissez qu'ils pouvaient, eux aussi, en 1979, être tout aussi honnêtes, tout aussi sincères, dans leur interprétation des propos, des conclusions ou des constatations de la commission Cliche et s'appuyer sur ces constatations pour décider, comme ils l'ont fait, de voter contre le règlement hors cour.

M. Beaulé: M. le Président, je préfère ne pas aller plus loin. Je crois que j'ai déjà répondu. Quant à moi, et je ne suis pas le seul, j'aime mieux m'appuyer sur les juges qui ont entendu les témoins du saccage que sur ceux qui tirent leur conclusion à partir d'une opinion personnelle.

M. Gratton: M. le Président, je ne veux pas reprendre toute la citation du passage de la page 69, mais ce sont les commissaires de la commission Cliche qui ont imputé, dans les trois paragraphes qu'on y voit, la responsabilité morale aux syndicats, en parlant de la filiation à partir de M. Duhamel. Ce que je veux faire ressortir... Je ne demande pas à Me Beaulé de juger des intentions des personnes qui ne partageaient pas son point de vue. Je lui demande tout simplement de me dire s'il reconnaît que ces gens pouvaient se sentir tout aussi bien fondés, eux, d'avoir un point de vue différent du sien.

M. Beaulé: Votre question comporte deux volets. J'ai dit et je répète que, lorsqu'on lit attentivement le rapport Cliche - et j'ai cité cela ce matin en complément à l'appui du moyen que nous avons développé aux pages 6 et suivantes du mémoire - la commission Cliche retenait la responsabilité des hommes politiques et des cadres de la SEBJ et d'Hydro-Québec qui ont pactisé avec ces personnes à qui on a offert le monopole et qui ont tenté de le maintenir par la violence. Quand, à l'automne 1973, il n'était plus possible de leur maintenir dans les faits ce monopole parce que la CSN exigeait que ses membres puissent aller sur les chantiers de la Baie-James, il y a eu une mesure de représailles qui s'est préparée de la part de la FTQ-Construction et qui a eu son point culminant le 21 mars. Alors, je ne veux pas revenir là-dessus. Je ne peux pas accepter comme conclusion que le rapport Cliche n'ait blâmé que la FTQ-Construction. Le rapport Cliche a, en fait, blâmé tous ceux qui ont pactisé avec les dirigeants de l'époque de la FTQ-Construction. Quant au reste, j'ai dit tout à l'heure qu'il y a 20 ans, je me suis battu à l'intérieur d'une formation politique pour le droit de parole et de pensée. Je ne veux pas répéter que je crois que, si ce droit doit exister à l'intérieur, il doit être sûrement reconnu aux membres de la presse et aux membres des conseils d'administration des sociétés d'État.

M. Gratton: Ce n'est pas sur la liberté d'expression ou la liberté d'opinion des personnes impliquées que je pose la question, c'est sur leur droit d'interpréter des passages du rapport de la commission Cliche. Vous admettrez, Me Beaulé, que, vous-même, dans votre texte, aviez interprété deux paragraphes de la page 68 comme étant une des principales recommandations et que, vous-même, ce matin, avez corrigé cela et dit: J'aurais dû écrire plutôt "constatations". Donc...

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Bourassa, je m'excuse...

M. Laplante: Le député, actuellement, de bonne foi, essaie encore de faire dire des choses au témoin ou de faire interpréter au témoin un écrit de Marcel Adam pour essayer de lui faire dire s'il approuve ou pas. C'est une question qui n'est pas recevable. On l'a laissé aller pendant un petit bout...

Une voix: Avez-vous compris, M. le Président?

M. Laplante: Mais, actuellement, il essaie d'impliquer d'autres paroles que M. Beaulé aurait ajoutées dans un autre témoignage pour le raccrocher encore là-dessus. Je voudrais que cela cesse, M. le

Président.

M. Gratton: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Je réfère Me Beaulé au deuxième paragraphe de la page 5 de son mémoire où il écrit: "En somme, au-delà des passions de l'époque et des débats pertinents d'aujourd'hui, il y avait et il existe toujours un désaccord idéologique quant à l'interprétation des événements de 1974 et aux conclusions à en tirer". Est-ce que la lecture du passage de la page 69 n'aurait pas dû vous inspirer à écrire plutôt que c'était un désaccord et que cela demeure toujours un désaccord sur la façon de lire et d'interpréter les constatations du rapport Cliche?

M. Beaulé: Voici, M. le Président. Je donnerai une dernière réponse qui est la suivante: Est-ce que nous ne devons pas tous admettre, M. le Président, que seule la commission Cliche, qui a siégé pendant près d'un an, a entendu les témoins du saccage de même que tous ceux qui, de près ou de loin, ont, de 1971 à 1974, transigé avec la FTQ-Construction de l'époque? En somme, mon point est le suivant: Seule la commission Cliche a entendu les acteurs - je ne le dis pas dans un sens péjoratif - de ces événements de 1971 à 1974. C'est pourquoi j'ai dit tout à l'heure que je me rallie à leur conclusion de fait. Maintenant, vous me parlez de membres du conseil d'administration de la SEBJ. Vous avez parlé de M. Hébert. Je pensais, selon le témoignage que j'ai entendu, qu'il avait voté pour le règlement.

M. Lalonde: II a voté contre.

M. Beaulé: Bon. Je pensais que Mme Nicolle Forget avait voté contre et que c'était une question de montant, quant à elle, et non pas une question de principe. Je n'aime pas m'aventurer sur ce plan parce que je ne suis pas ici pour juger...

M. Gratton: Je ne vous demande pas de juger, non plus.

M. Beaulé: ...de l'attitude des membres du conseil d'administration de la SEBJ. Je dis simplement, M. le Président, que ce n'est pas parce que - du moins c'est comme ça que j'ai compris son témoignage - Mme Forget était contre les constatations du rapport Cliche sous ce chef qu'elle a voté contre le règlement. Pour elle, je pense que c'était à cause d'une question financière. Et je ne veux pas m'aventurer là-dedans. Écoutez, je n'étais pas présent aux réunions du conseil d'administration de la SEBJ.

M. Gratton: Mais, Me Beaulé, la question que je vous ai posée, c'est: Est-ce que possiblement les gens qui n'interprétaient pas le rapport Cliche de la même façon que vous pouvaient être tout aussi sincères, tout aussi convaincus...

Le Président (M. Jolivet): M. le député. M. le député.

M. Gratton: ...que leur interprétation était bonne?

Le Président (M. Jolivet): M. le député. M. le député.

M. Gratton: C'est tout ce que j'ai demandé.

Le Président (M. Jolivet): M. le député, je pense... Pour revenir à l'idée principale de l'article 168, ce que vous semblez vouloir demander à Me Beaulé c'est une opinion quant à ce que les gens avaient ou n'avaient pas. En conséquence, je ne peux pas accepter que cette question soit posée.

M. Gratton: Bon. Me Beaulé, au troisième paragraphe de la même page 5 de votre mémoire, vous écrivez: "Nous ne croyons pas être injuste à l'égard de ceux qui contestent le bien-fondé du règlement intervenu le 12 mars 1979 en disant qu'ils ne sont pas prêts à suivre la commission Cliche sous ce chef et que leur philosophie sociale diffère de celle de la commission Cliche." Est-ce que vous maintenez cette déclaration?

M. Beaulé: Absolument. J'ai toujours pensé que, face à la cessation de la poursuite intentée par la SEBJ contre les syndicats, le débat aurait toujours dû demeurer, à mon point de vue, un débat d'idées et non pas un débat partisan. Et je maintiens ce que j'ai écrit.

M. Gratton: Peut-être un débat juridique aussi, comme procureur?

M. Duhaime: M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Gratton: Je pose la question.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Duhaime: Sur une question de règlement, M. le Président. Depuis dix minutes, je ne suis pas intervenu, si vous l'avez remarqué. Je pense que mon collègue va le reconnaître, toutes ses questions vont

dans le sens de demander à Me Beaulé son opinion sur l'opinion de d'autres. Dans la dernière question et dans l'avant dernière question que vous avez posées, il y avait également des hypothèses.

M. Gratton: En effet.

M. Duhaime: Alors, M. le Président, je vous demanderais de considérer ces questions comme étant irrecevables et d'inviter le député de Gatineau à poser des questions conformément à notre règlement.

M. Gratton: M. le Président, j'ai...

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau.

M. Gratton: J'ai posé des questions du même genre que celle qui a valu une admission ce matin par Me Beaulé, à l'effet qu'il avait écrit dans son mémoire que la décision des gestionnaires de la SEBJ et de son conseil d'administration adoptée en janvier 1979 était une attitude incompatible avec l'une des recommandations principales de la commission Cliche. Ce sont les questions que j'ai posées à Me Beaulé qui l'ont amené à reconnaître qu'il ne s'agissait pas d'une recommandation de la commission Cliche mais d'une simple constatation de la commission Cliche. Le but de mes questions, cet après-midi, quant aux autres éléments du mémoire de Me Beaulé, est de m'assurer qu'il n'a pas l'intention de corriger également les affirmations qu'il y fait. Il m'a répondu que non. C'est terminé. Il n'y a pas de problème.

M. Duhaime: Merci.

M. Gratton: Ma prochaine question, Me Beaulé...

M. Beaulé: M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Me Beaulé.

M. Beaulé: J'écoutais M. le député de Gatineau. Je n'ai pas dit qu'il s'agissait là d'une simple constatation. J'ai dit qu'il s'agissait de l'une des constatations principales du rapport. D'accord?

M. Gratton: Je m'excuse. (16 h 45)

M. Beaulé: Non, non, ce n'est pas une question de sémantique, c'est une question de substance.

M. Gratton: Donc, Me Beaulé, vous qui étiez le procureur d'une des défenderesses, vous pouvez, en quelque sorte, vous constituer en juge de la philosophie sociale de ceux parmi, notamment, les administrateurs de la SEBJ qui considéraient que l'intérêt des actionnaires de la société, c'est-à-dire les citoyens québécois, serait mieux servi si la société, qui était quand même victime du saccage, exigeait qu'on poursuive les responsables des dommages, c'est-à-dire les syndicats.

M. Duhaime: M. le Président, je voudrais connaître la question.

M. Gratton: La question est claire. M. Duhaime: C'est quoi?

M. Gratton: On va voir si Me Beaulé la comprend.

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse. M. Duhaime: C'est quoi, votre question?

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

M. Beaulé: Est-ce que vous auriez l'amabilité de la répéter? Je consultais mon...

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Ce que je demande, essentiellement, Me Beaulé, c'est ceci: Vos affirmations, quant à la philosophie sociale de ceux qui ne partagent pas votre point de vue, quant aux différences idéologiques sur l'interprétation qu'on doit donner des événements de 1974, ce sont des propos tirés de votre mémoire. En maintenant cela, je vous demande si vous ne vous portez pas juge, vous le procureur d'une des défenderesses dans cette cause, de la philosophie sociale et de l'idéologie de ceux qui ne partageaient pas votre point de vue et qui avaient pourtant le mandat de protéger les intérêts des citoyens québécois qui étaient actionnaires de la SEBJ.

M. Beaulé: Je ne pense pas m'être porté juge, pas plus que M. Adam croit s'être porté juge en signant un éditorial. Il s'agit d'une expression d'opinion, M. le Président. C'est, il me semble, un point bien acquis.

M. Gratton: D'accord.

M. Beaulé: Une deuxième chose, cependant, et je vais poser cela sous la forme d'une question: Est-ce que le conseil d'administration de la SEBJ aurait dû, quant à l'évaluation des faits ou de la responsabilité des syndicats, s'en remettre aux conclusions de fait de la commission Cliche? C'est une excellente question, cela.

En d'autres termes, est-ce qu'il appartenait au conseil d'administration de la SEBJ de siéger comme tribunal et de décider si les syndicats étaient responsables ou pas? La commission Cliche avait conclu négativement, à mon point de vue. C'est une question de fait.

Encore une fois, c'est un terrain glissant qui...

M. Gratton: Me Beaulé, ce ne sont pas les administrateurs qui devaient juger, c'est le juge Bisson. Les administrateurs, eux, avaient à décider s'ils continuaient la poursuite en cour ou s'ils réglaient hors cour.

Le Président (M. Jolivet): M. le député, allez aux questions, s'il vous plaît! Allez aux questions!

M. Gratton: Quand même! En tout cas, je constate...

M. Duhaime: Vous devriez inviter Me Beaulé pour un lunch.

M. Gratton: ...je ne vous en fais pas grief, Me Beaulé, mais que votre opinion, votre lecture du rapport de la commission Cliche diffère de celle d'autres... Je pense ne pas attaquer votre dignité, votre honneur et votre réputation en vous disant que je suis un de ceux qui diffèrent d'opinion avec vous.

M. Beaulé: Mais, M. le Président, ce n'est pas à la lecture du rapport Cliche que je tire une conclusion. C'est la commission Cliche qui a tiré une conclusion de fait et je pense que c'est important.

M. Gratton: M. le Président! M. le Président!

Le Président (M. Jolivet): Je pense que, manifestement, à ce niveau-là, il y a deux opinions différentes...

M. Gratton: Voilà!

Le Président (M. Jolivet): Quand bien même on grugerait pour aller plus loin, on resterait sur la même position. Je demanderais au député de passer à d'autres questions.

M. Gratton: Avec plaisir, M. le Président. Revenons aux rencontres avec Me Jean-Roch Boivin, chef de cabinet du premier ministre. Je pense qu'il y en a eu quatre à son bureau auxquelles vous avez assisté. Est-ce exact, Me Beaulé?

M. Beaulé: J'ai déjà répondu, M. le Président.

M. Gratton: Est-ce exact?

M. Beaulé: J'ai déjà répondu, M. le Président.

M. Gratton: Avez-vous répondu par l'affirmative ou par la négative?

M. Beaulé: M. le Président, j'ai déjà répondu au moins 25 fois.

Le Président (M. Jolivet): M. le député, je m'excuse...

M. Lalonde: Question de règlement, M. le Président.

M. Gratton: À quoi joue-t-on ici, Me Beaulé?

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse! Il n'y a personne qui joue à quoi que ce soit ici.

M. Gratton: Eh bien!

Le Président (M. Jolivet): Non, non, je m'excuse. La personne qui est devant nous a répondu à ces questions. Comme on l'a fait à d'autres occasions, les députés ont fait référence à ses réponses en utilisant les galées. Tout ce qu'affirme Me Beaulé, c'est qu'il a effectivement répondu à ces questions. Je ne vois pas pourquoi on lui demanderait, à plusieurs occasions, s'il a répondu et quelle sorte de réponse il a donnée. C'est déjà inscrit au journal des Débats.

M. Gratton: Parfait, M. le Président.

M. Lalonde: Question de règlement, M. le Président.

M. Gratton: Je m'excuse. Cela va pour moi. Je n'ai pas les galées et je n'ai pas l'intention de fouiller dedans. Je vais affirmer des choses et si Me Beaulé, qui prétend y avoir...

Des voix: Ah! Ah! Ah!

M. Gratton: Bien oui. Bien oui.

M. Beaulé: M. le Président, est-ce que je peux expliquer ma réponse?

Le Président (M. Jolivet): Oui, Me Beaulé.

M. Beaulé: J'ai été d'abord interrogé le 28 dans l'après-midi par M. le ministre Duhaime. J'ai ensuite été interrogé longuement par M. le député de Mont-Royal...

Une voix: Ce n'était pas trop long!

M. Beaulé: Je n'ai rien d'autre à ajouter sur ces rencontres. J'ai tout dit, M. le Président.

M. Gratton: On verra!

M. Lalonde: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Un instant! C'est Me Beaulé qui a la parole.

M. Lalonde: Oui, après.

M. Beaulé: M. le Président, je ne peux rien ajouter sur ces rencontres. Si on se réfère - peut-être que cela devrait être soulevé par un député, mais peut-être aussi que vous permettrez que je le soulève - à l'article 730, paragraphe 4, de l'ancien règlement de l'Assemblée nationale, je lis ceci: "Quand un député interroge directement un témoin, les autres députés peuvent s'opposer aux questions pour quelqu'une des raisons que les parties ou leurs avocats peuvent généralement invoquer au cours d'un interrogatoire judiciaire."

Je soumets, M. le Président, que, dans le cas d'un interrogatoire judiciaire, lorsque les mêmes questions ont été posées à plusieurs reprises et que le témoin a couvert tout le sujet, la règle veut qu'on ne continue pas à poser les mêmes questions. Voilà pourquoi j'ai dit que j'avais déjà répondu à toutes ces questions et que je ne pouvais rien ajouter d'utile pour les fins de la commission.

M. Lalonde: M. le Président, sur la question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Je pense qu'il est important qu'on s'entende là-dessus avant de continuer. On fait l'analogie avec un interrogatoire judiciaire, fort bien, c'est d'ailleurs ce que l'ancien règlement prévoyait. Je tiens à souligner, pour le profit du témoin et de nous tous qui voudrons le prendre, que le droit de parole de chacun des députés est prévu aussi par notre règlement. Ce n'est peut-être pas la meilleure façon, sûrement pas celle que je préfère, de faire la lumière sur un cas, un fait, un événement. J'aurais préféré, pour ma part, une enquête indépendante où l'interrogatoire est fait par une personne seulement. C'est beaucoup plus complet, mais c'est le mandat que nous avons. Je pense... Moi aussi j'ai des questions à poser - vous avez mon nom sur la liste, à la fin - sur des faits qui ont déjà été soulevés par d'autres questions mais pour lesquelles, soit la question, soit la réponse, ne satisfont pas toute ma curiosité. D'avance, j'aimerais qu'il soit bien établi que nous allons revenir en particulier sur les rencontres et que je n'accepte pas la dernière déclaration du témoin à savoir qu'il a tout dit là-dessus et qu'il n'a plus rien à dire. Cela n'enlève pas, j'espère, le droit de chacun des membres de cette commission de poser des questions, peut-être pas répéter exactement la même question, si on a eu la réponse à cette question-là mais, quand on parle d'une réunion ou de quatre réunions qui totalisent peut-être trois heures ou quatre heures -enfin plusieurs heures - qu'on ne vienne pas nous dire qu'il est impossible de poser d'autres questions là-dessus.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Duhaime: M. le Président, je me rends compte que la cadence que voudrait retenir l'Opposition libérale est beaucoup moins vigoureuse maintenant qu'elle ne l'était avant Pâques, puisque le chef de l'Opposition libérale insistait, toute affaire cessante à l'Assemblée nationale, pour que cette commission ait lieu avant Pâques. On se rend bien compte que nous sommes ici pour la quatrième ou la cinquième semaine, et je pense que la stratégie de l'Opposition libérale consiste à étirer les travaux de cette commission. Je vous dis tout de suite que je devrai m'opposer, dans le sens et dans l'esprit du jugement que vous avez rendu vous-même sur une question de règlement que j'ai portée.

Le député de Mont-Royal a posé des questions pendant de très longues heures. Si je faisais un scénario qui consisterait à laisser chaque député libéral libre de recommencer l'interrogatoire principal - à quelle date, à quel endroit, les noms des personnes présentes, le contenu - cela serait systématiquement une redite. En langage parlementaire, on appelle cela un "filibuster". Cela peut se faire devant certaines commissions parlementaires. J'ai eu l'honneur d'ailleurs d'avoir un "filibuster" qui a duré 70 heures, 22 minutes et 40 secondes, et je vais m'en souvenir très longtemps. Un de ces jours, je vous le remettrai, prenez-en ma parole.

M. Lalonde: Vous parlez au président. Est-ce que vous parlez au président?

Le Président (M. Jolivet): Je ne me suis pas senti visé.

M. Gratton: En supposant que vous êtes réélu quelque part à cette commission-là.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous

plaît:

M. Duhaime: Pour qu'il n'y ait pas d'équivoque, le député de Marguerite-Bourgeoys va se souvenir facilement que je lui ai déjà dit les mots que je viens de dire et que c'est à lui que je m'adresse.

M. Lalonde: M. Le Président, c'est quand même assujetti à la condition mentionnée par le député de Gatineau.

Le Président (M. Jolivet): À l'ordre!

M. Duhaime: Cette question de règlement qui est devant vous maintenant est très importante parce que, si vous retournez l'argumentation du député de Marguerite-Bourgeoys, l'Opposition libérale va faire passer ici la prochaine semaine à Me Beaulé. Il a passé une semaine ici avec un interrogatoire, la semaine suivante avec un autre député, et la semaine qui suivra il va la passer avec un autre.

M. Lalonde: Non, non, non, non!

M. Duhaime: Je pense que lorsqu'on recommence en disant: "Vous avez rencontré Me Boivin, combien de fois?" - je crois que Me Beaulé a répondu cinq ou six fois, on a les dates par coeur - "Qui était présent?", ce sont des questions à répétition et qui sont interdites par le règlement. Je vous demanderais de les juger systématiquement irrecevables.

Le Président (M. Jolivet): Maintenant je serais prêt...

M. Lalonde: M. Le Président, je regrette j'ai une question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): Oui, je sais.

M. Duhaime: Cela ferait longtemps qu'un juge vous aurait mis dehors.

Le Président (M. Jolivet): Je voudrais tout de même essayer de répondre à celle qui est devant moi, mais je n'ai pas l'intention de commencer quelque débat que ce soit sur la question qui a été soulevée en premier lieu.

M. Lalonde: M. Le Président, je veux rectifier les faits tout de même. Lorsque le ministre s'inspire d'une déclaration du chef de l'Opposition le 23 mars pour conclure à la demande qu'il vous fait, je vais lui rappeler que lui-même le 30 mars a dit ceci: "Nous allons entendre - c'est au ruban 221 - bien sûr tous les témoins que l'on souhaiterait entendre. Je dis même que s'il y a des témoins qui n'avaient pas été convoqués et qui, à tout hasard, avaient des choses à apprendre à cette commission - comme M. Pouliot, comme M. Latouche - ils n'ont qu'à communiquer avec le secrétariat de la commission de l'énergie et des ressources, faire connaître leur nom, leur identité. Je pense que je pourrai parler avec mon collègue de l'Opposition et d'où qu'elle vienne, cette personne, si son témoignage peut éclairer les membres de cette commission de même que tout le public, je pense que cela serait notre devoir de l'entendre". C'est M. Duhaime qui parle, son nom est écrit ici. C'est tout à fait différent de l'espèce de tentative qu'on croit reconnaître dans ses derniers propos, qui ne sont pas de nature à nous faire penser que vous êtes là pour faire toute la lumière.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Duhaime: M. le Président, deux choses. Premièrement, je vais demander au député de Marguerite-Bourgeoys d'indiquer à la commission si j'ai moi-même mentionné les deux noms cités.

M. Lalonde: Non, c'est moi qui les ai mentionnés. C'est un aparté que j'ai fait et qui en avait l'air, de toute évidence.

M. Duhaime: Cela, c'est dans votre bonne habitude, on vous reconnaît très vite.

M. Lalonde: Je ne vous prêterai pas ces mots.

M. Duhaime: Je voudrais vous indiquer que, si vous me prêtez des motifs en ce sens que ma conduite à cette table va dans le sens de ne pas éclairer toute la commission, je vais vous demander de retirer vos paroles, parce que vous m'imputez des motifs. M. le Président, je voudrais rappeler et nous lire les propos du chef de l'Opposition, M. Levesque (Bonaventure), le 23 mars 1983. "Très rapidement. Est-ce que le premier ministre peut assurer cette Chambre que cette commission parlementaire aura lieu avant le congé pascal...

M. Lalonde: Elle a eu lieu!

M. Duhaime: ..." aura lieu, autrement dit, dès la semaine prochaine et, si c'est possible, avant la semaine prochaine? Le premier ministre peut-il nous donner cette assurance?"

J'ai appris que, lorsqu'un événement avait lieu, il avait lieu. J'ai toujours compris que si le chef de l'Opposition...

M. Gratton: Est-ce que la conception a eu lieu dans une journée?

Le Président (M. Jolivet): À l'ordre!

M. Gratton: Est-ce possible?

M. Duhaime: ...que si le chef de l'Opposition indiquait dans sa question que la commission parlementaire avait lieu avant Pâques, c'est que nous commencions et que nous terminions.

M. Lalonde: La belle saison a lieu au cours de l'été, tout le monde le sait.

M. Duhaime: Cela fait cinq semaines que nous sommes en commission parlementaire...

M. Lalonde: C'est trois mois!

M. Duhaime: Je préviens l'Opposition que je vais m'opposer systématiquement, il n'y aura pas de question à répétition.

Le Président (M. Jolivet): Ceci étant dit, je tiens à vous rappeler, à ma gauche et à ma droite, que vous aussi, il y a plusieurs "redites" que vous avez utilisées...

M. Duhaime: Vous allez être obligés de changer de...

Le Président (M. Jolivet): ...et chacun avec les mêmes arguments. Comme il n'y aura jamais, sur l'un ou sur l'autre, sur les interprétations de l'un et de l'autre de ces opinions, je pense qu'à satiété tous les membres de cette commission, toutes les personnes qu'on invite et tous les gens qui nous écoutent les ont entendues... Je pense que c'est la dernière fois qu'on en parle de part et d'autre, de telle sorte qu'à chaque fois qu'on voudra ramener cela je vous rappellerai à l'ordre. (17 heures)

La deuxième a trait à la demande de Me Beaulé de ne pas à avoir à répondre cinq, six, dix fois, deux fois, trois fois à la même question. J'ai dit, en vertu de la décision que vous m'avez demandé de rendre pour faire en sorte que les travaux s'accélèrent, que les travaux ne soient pas un "filibuster" envers l'invité non plus. J'applique l'article 168 et tous les autres qui ont trait aux questions à être posées par analogie à celles que l'on connaît dans notre règlement. J'ai dit que j'avais l'intention de le faire; je vais continuer à le faire mais je vous dis aussi en même temps que le fait de dire que la personne qui est devant nous a répondu déjà à cette question et qu'elle n'a pas besoin d'y répondre, ce n'est pas fait dans le but d'enlever le droit de parole à qui que ce soit. Si la personne veut poser d'autres questions que celles déjà posées, soit. Mais, si le but est de répéter la même question deux fois, trois fois, quatre fois, cinq fois, je vous dis dès le départ, comme je l'ai dit hier à la suite de la directive que j'ai rendue, que je jugerai qu'elles n'ont pas lieu d'être posées. Me Beaulé, sur la question, a dit qu'il a déjà répondu et, comme il est sous serment et comme, effectivement, tout le monde ici a entendu les réponses qu'il a données, cette question est classée. M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Donc, M. le Président, pour situer ma question, Me Beaulé, vous avez eu quatre réunions avec Me Jean-Roch Boivin ou à son bureau. Selon la liste des départs et des arrivées que nous a communiquée le ministre, à trois occasions vous vous êtes enregistré à des heures qui coïncidaient avec des visites de Me Michel Jasmin, qui était procureur des syndicats québécois.

Hier vous nous avez dit que le 2 février une partie de la réunion avec Me Boivin s'est déroulée à trois, c'est-à-dire en présence de Me Jasmin. Si vous avez déjà répondu à cette question je vous dis en toute sincérité: Je ne connais pas la réponse. Je me risque de vous la poser. Est-ce qu'à la réunion du 15 janvier vous étiez, vous et Me Jasmin, dans le bureau de Me Boivin en même temps?

M. Beaulé: Oui, j'ai déjà répondu, M. le Président...

M. Gratton: Je m'excuse, je ne savais...

M. Beaulé: ...que le 15 janvier j'étais au bureau de M. Boivin avec M. Jasmin, qu'on lui avait fait rapport en quelques minutes des procédures qui s'étaient déroulées en cour ce jour-là. Donc...

M. Gratton: Je note également que le 15 janvier vous êtes sorti à exactement la même heure du bureau du premier ministre. Est-ce que vous avez répondu auparavant, quant à la réunion du 19 janvier, si vous y étiez en même temps que Me Jasmin?

M. Beaulé: Si je suis sorti?

M. Gratton: Non, non. Je pense que vous êtes sorti à une minute d'intervalle, donc on peut présumer que vous êtes sortis à peu près en même temps mais étiez-vous dans le bureau de Me Boivin en même temps que Me Jasmin?

M. Beaulé: Je ne veux pas être technique parce qu'il y a quand même pas mal de gens qui nous écoutent mais je pense que je me suis bien exprimé là-dessus en disant que le 19 janvier, en présence de MM. Woll et Fanning et de M. Jasmin, j'ai rencontré M. Boivin. M. Fanning a fait la conversation; M. Jasmin a écouté. Je suis parti après la réunion avec mes clients, MM. Woll et Fanning. Je suis allé les reconduire à l'aéroport. J'ai déjà répondu. J'ai déjà

indiqué, M. le Président, quelle a été la nature des propos de M. Woll. Je n'ai plus rien à ajouter.

M. Gratton: Bon. Alors...

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Duhaime: C'est une question de règlement, M. le Président. Le député de Gatineau, tantôt, a affirmé que Me Beaulé avait rencontré Me Jean-Roch Boivin à quatre reprises. C'est inexact comme tel, M. le Président. Me Beaulé a ajouté, à ma question, qu'il y avait eu cinq rencontres...

M. Gratton: Question de règlement, M. le Président.

M. Duhaime: ...la première dans la liste étant celle du 1er décembre 1978. Alors ce n'est pas quatre rencontres, c'est cinq.

M. Gratton: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau. M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Je demande au ministre de lire lui-même le document qu'il nous a remis. Il n'en montre que quatre et j'ai référé aux quatre rencontres dont j'ai les heures d'entrée et de sortie que nous a fournies le ministre. La cinquième, je la connais mais je ne connais pas les heures d'entrée et de sortie. Je ne l'ai donc pas mentionnée.

Vous voyez que votre question de règlement est encore dans les patates, les deux pieds dans la même assiette.

Le Président (M. Jolivet): Allez, M. le député de Gatineau, et posez maintenant votre question suivante.

M. Gratton: Alors, Me Beaulé, lors de ces quatre réunions, vous sensibilisiez Me Boivin à la non-responsabilité de votre cliente et vous avez dit ce matin que, parmi les arguments que vous invoquiez quant à la non-responsabilité de votre cliente, vous n'avez pas fait état du rapport de la commission Cliche. Je ne vous pose pas la question, vous allez me répondre que vous me l'avez dit. Donc, je le tiens pour acquis. Si je dis quelque chose qui n'est pas correct, arrêtez-moi.

M. Beaulé: C'est-à-dire que j'ai dit davantage que cela, mais je ne peux pas faire d'objection ici comme témoin. Je pense que j'ai dit que Me Jasmin, en ma présence, avait abordé...

M. Gratton: Oui, mais laissez-moi terminer ma phrase. J'arrive à la page 4 et ma question, c'est...

M. Beaulé: M. le Président, j'ai été respectueux.

Le Président (M. Jolivet): M. le député, je veux être honnête envers l'invité qui est devant nous. Vous lui avez dit: Si vous croyez que des corrections sont nécessaires, faites-les, et c'est ce qu'il faisait.

M. Gratton: Après que j'aurai terminé la question.

Le Président (M. Jolivet): Non, mais je crois comprendre que l'invité a exactement répondu à votre demande.

M. Gratton: ...

Le Président (M. Jolivet): Cela peut permettre à des gens de comprendre plus vite la question.

M. le député de Gatineau, complétez votre question, si vous voulez. On s'entend très bien.

M. Gratton: Vous et moi, M. le Président, qui sommes parmi les rares non-avocats ici, s'il faut qu'on ne se comprenne pas, on a des problèmes.

Le Président (M. Jolivet): Allez donc dans votre question.

M. Gratton: Vous avez indiqué ce matin que Me Jasmin a pu parler - c'est ce que j'ai compris - à Me Boivin de cette soi-disant recommandation de la commission Cliche. Quelle a été la réaction de Me Boivin à cet argument de Me Jasmin?

M. Beaulé: Je ne m'en souviens pas, parce que les conversations que j'ai eues avec M. Boivin portaient sur des faits qui apparaissent dans l'aide-mémoire que je lui ai remis et dont la substance et la teneur mêmes se trouvent dans ma lettre...

M. Gratton: Oui, mais, Me Beaulé...

M. Beaulé: ...à M. Aquin le 5 février 1979, de même que dans ma contestation du 28 novembre.

M. Gratton: Me Beaulé, je ne vous demande pas quels étaient vos propos. Vous étiez là en même temps que Me Jasmin et que Me Boivin. Vous écoutiez ce qui se disait. Vous écoutiez tellement que ce matin cela vous a permis d'affirmer que Me Jasmin avait pu invoquer le rapport de la commission Cliche à l'appui de la défense de ses clients. Donc, si vous écoutiez, vous avez

possiblement pu entendre ce que Me Boivin a répondu à Me Jasmin, lorsqu'il a fait état du rapport de la commission Cliche. Je vous demande si vous vous souvenez de ce que Me Boivin a dit en réponse à cet argument évoqué par Me Jasmin.

M. Beaulé: Mon avocate me suggère de vous demander à quelle page de mon témoignage vous vous référez.

M. Gratton: On peut suspendre en attendant qu'on m'apporte la transcription.

M. Beaulé: Je ne veux pas évoquer cela, mais il y a un problème, c'est qu'après le nombre d'heures pendant lesquelles j'ai témoigné je ne peux pas me rappeler de chaque mot, de chaque nuance, mais...

M. Gratton: Alors, reprenons. M. Beaulé: D'accord.

M. Gratton: Je vous repose la question de ce matin. On a établi que vous n'avez pas parlé du rapport de la commission Cliche devant Me Bovin.

M. Beaulé: J'ai déjà dit que je n'en ai pas parlé.

M. Gratton: Me Jasmin, lui, en a-t-il parlé?

M. Beaulé: Je crois que oui. C'est mon sentiment, mon impression et même une certitude qu'il en a parlé, mais il n'a pas parlé seulement de la page 68.

M. Gratton: Bon, une certitude.

M. Beaulé: Permettez-moi que je fasse une réponse complète.

Le Président (M. Jolivet): Oui, oui, Me Beaulé.

M. Beaulé: M. le Président, Me Jasmin avait assisté, à ma connaissance, à certaines des séances, sinon à toutes les séances de la commission Cliche.

M. Gratton: Donc, vous avez la certitude qu'il en a parlé devant Me Boivin en votre présence. Qu'est-ce que Me Boivin a eu comme réaction?

M. Beaulé: Je vais vous répondre ce que j'ai déjà répondu. Il a écouté.

M. Gratton: N'a-t-il rien dit?

M. Beaulé: Je n'ai pas d'autres commentaires à faire et je n'ai aucun souvenir précis de cela.

M. Gratton: Je ne vous demande pas un commentaire, je vous demande une réponse à ma question. Est-ce que Me Boivin a dit quelque chose?

M. Beaulé: M. le Président, je pense que...

Le Président (M. Jolivet): Attendez seulement un instant, Me Beaulé, que cela se calme un peu. M. le député de Bourassa, s'il vous plaît!

M. Beaulé: M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Ce que je crois comprendre jusqu'à maintenant, Me Beaulé, c'est qu'on vous a posé la question: Quelle réaction? Tout à l'heure, la question qui a été posée est: Qu'est-ce que Me Boivin a dit? C'est bien différent: quelle est la réaction et qu'est-ce qu'il a dit?

Une voix: C'est cela.

Le Président (M. Jolivet): Mais ce que je sais, c'est que Me Beaulé n'a pas à répliquer sur la réaction d'un individu. Sur la question: Qu'est-ce qu'il a dit? il a répondu: II a écouté. À partir de cela, vous pouvez tirer les conclusions que vous voulez, mais il ne faudrait pas en arriver avec toutes sortes de questions qui font en sorte que la personne dise ce qu'elle ne veut pas dire. Je pense que cela aussi, le bon sens l'implique.

M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: Lorsque Me Beaulé nous répond que Me Boivin a écouté...

M. Duhaime: Faites-vous une question de règlement?

Le Président (M. Jolivet): C'est justement...

M. Paradis: C'est une question de règlement.

M. Duhaime: Faites une question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): Seulement un instant, un instant...

M. Duhaime: Vous n'avez pas la parole.

Le Président (M. Jolivet): Seulement un instant.

M. Lalonde: C'est une question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): Un instant! Je veux savoir quelle est la question de règlement que vous posez, parce que je ne veux pas que, indirectement, vous preniez la parole, vous ne l'avez pas.

M. Paradis: M. le Président... Le Président (M. Jolivet): Oui.

M. Paradis: C'est très simple: lorsque le témoin répond que Me Boivin a écouté, ce n'était pas la question qu'adressait le député de Gatineau. C'est sûr qu'il a écouté, mais après avoir écouté, qu'a-t-il dit? Qu'a-t-il répondu? En répondant tout simplement: II a écouté... C'est avant de répondre qu'il a écouté. Tout le monde qui nous écoute constate cela. Mais, qu'a-t-il répondu ensuite? Me Beaulé ne semble pas vouloir répondre. Ce que je vous demande, c'est de demander au témoin de répondre à cette question. C'est aussi simple que cela.

Le Président (M. Jolivet): Me Beaulé, avant que... Oui, M. le député de Vimont.

M. Rodrigue: M. le Président, on a quand même des articles dans notre règlement qui traitent des réponses qui sont données. Je vous réfère entre autres aux articles 170, 171 et 173. À l'article 170, on dit ceci: "La réponse à une question doit se limiter au point qu'elle touche, être brève et claire et ne contenir ni argument ni expression d'opinion. Toutefois, une certaine latitude est accordée au ministre. Une réponse est tenue pour finale." Il me semble que c'est clair: "Une réponse est tenue pour finale." À ce moment-là, il n'y a pas lieu d'insister trois, quatre, cinq, dix fois avec la même question.

À l'article 171, à l'alinéa C, on dit: "Un ministre ou un député auquel une question est posée peut refuser d'y répondre - mais, on a admis que, par extension, cela s'appliquait également à notre invité - si la question a déjà été posée ou si elle porte sur un débat qui a eu lieu pendant la session en cours." Si la question a déjà été posée. Cela fait quatre ou cinq fois que cette question a été posée à notre invité, M. le Président.

À l'article 173, on dit: "II est permis de poser de nouvelles questions pour obtenir des renseignements supplémentaires, pourvu que ces questions ne prennent pas la forme d'un contre-interrogatoire".

Une voix: C'est cela.

M. Rodrigue: Je vous suggère respectueusement, M. le Président, que la façon dont le député de Gatineau pose ses questions constitue un contre-interrogatoire et que, à ce moment-là, vous devriez déclarer ses questions antiréglementaires.

M. Lalonde: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Marguerite-Bourgeoys. Mais, avant, j'aimerais seulement vérifier avec Me Beaulé s'il avait une réponse à donner, puisqu'il semblait vouloir, avant que je ne l'interrompe, dire quelque chose. Je veux seulement vérifier.

M. Beaulé: Je préférerais attendre votre décision, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): D'accord. M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, c'est une question de règlement. Je ne sais pas à combien de contre-interrogatoires le député de Vimont a assisté. Mais, puisqu'il le mentionne, il devrait savoir qu'un contre-interrogatoire donne lieu à des questions suggestives, répétitives, même vigoureuses et souvent plus que rigoureuses.

Une voix: C'est exactement cela...

M. Lalonde: II n'y a rien de plus doux, de plus modéré que la question. Elle n'est pas suggestive: Qu'est-ce que M. Boivin a dit? J'attire votre attention, justement, sur l'ancien règlement que le ministre a invoqué hier dans sa question de règlement et que vous-même avez mentionné. Vous avez mentionné, par exemple, Cushing, qu'on retrouve, justement, à l'article 730 de l'ancien règlement. Cushing dit ceci: "Quand un témoin refuse de répondre de façon directe et complète à une question qui n'a pas été jugée irrégulière, l'orateur l'admoneste". L'orateur, c'est le président, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Donc, la question qui est posée par le député de Gatineau est la suivante: Qu'est-ce que Me Boivin a dit lors de cette rencontre? C'est la question qui est posée. Je voudrais faire la distinction entre les deux questions qui ont été posées, dont l'une était irrecevable: Quelle était la réaction...? Sur la question, Me Beaulé.

M. Beaulé: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): Me Beaulé.

M. Beaulé: Puis-je vous demander de prier le député de Gatineau de préciser à quelle rencontre il fait référence?

Le Président (M. Jolivet): D'accord, M. le député de Gatineau.

M. Gratton: On peut les prendre une à une...

Le Président (M. Jolivet): Non, la dernière, c'est de celle-là dont il est question.

M. Gratton: Non, je parlais de l'ensemble des quatre rencontres, je n'ai spécifié aucune rencontre.

Le Président (M. Jolivet): Non. Je m'excuse, M. le député, j'ai mal saisi. J'ai cru comprendre que, au fur et à mesure, vous approchiez d'une rencontre. J'ai cru comprendre que vous faisiez mention de la dernière rencontre. Je pense qu'il faut quand même être clair pour la personne qui est devant nous.

M. Gratton: À la rencontre où Me Jasmin a invoqué le rapport de la commission Cliche à l'appui de sa défense, quelle a été la réaction de... Je m'excuse. Qu'est-ce que Me Boivin a dit en réponse à cet argument?

M. Duhaime: Quelle date était-ce? Il y en a cinq. (17 h 15)

M. Gratton: Alors, je pose la question: À quelle date Me Jasmin a-t-il parlé à Me Boivin du rapport de la commission Cliche?

M. Beaulé: Me Jasmin a abordé les faits relatés dans le rapport Cliche, certains d'entre eux...

M. Gratton: À quelle réunion?

M. Beaulé: ...avec M. Boivin, en ma présence. Je n'ai pas gardé le souvenir de cela, honnêtement, parce que, moi, je ne représentais pas les syndicats québécois. Je représentais l'International Union et nous n'invoquions pas le rapport Cliche. Nous disions: La poursuite est abusive et vous n'avez pas de recours contre l'International Union. Il est évident que, côtoyant M. Jasmin et m'étant plongé dans l'étude du rapport Cliche, les vingt-deux jours d'interrogatoire préalable, etc., la question m'intéressait personnellement, mais, comme procureur de l'union américaine, ce n'était pas mon problème.

M. Gratton: Me Beaulé, vous avez dit cela à plusieurs reprises. Vous vous plaignez qu'on vous pose les mêmes questions à répétition, mais je vous ferai remarquer que je ne vous ai pas posé cette question-là. Je vous ai demandé à quelle réunion Me Jasmin avait parlé à Me Boivin du rapport de la commission Cliche. Dois-je comprendre de votre réponse que vous ne vous rappelez pas précisément quelle réunion il s'agissait?

M. Beaulé: M. le Président, première chose, je ne me plains pas des questions que me pose le député de Gatineau. Je pense que cet après-midi, on peut le voir, le débat se fait dans le calme, et je l'apprécie énormément. Cela me permet d'ailleurs de me souvenir davantage et d'aider davantage la commission, mais je suis incapable, à votre question, de dire à quelle réunion il a abordé cela.

M. Gratton: Bon! Et, donc, moi, je suis incapable de vous préciser à quelle réunion je dois me reporter pour vous poser la question, à savoir qu'est-ce que Me Boivin a répondu, qu'est-ce que Me Boivin a dit à cette réunion-là.

Le Président (M. Jolivet): Me Beaulé.

M. Beaulé: J'ai été assez clair. Je ne peux rien ajouter à cela.

Le Président (M. Jolivet): D'accord. M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Me Beaulé, vous avez, selon l'enregistrement qu'on nous a fourni de vos visites chez M. Boivin, passé au maximum trois heures et quart, trois heures seize minutes très précisément, dans le bureau du premier ministre, quelquefois dans la salle d'attente, mais, j'imagine, une majeure partie du temps dans le bureau de M. Boivin. Et là-dessus il y a deux heures et demie, deux heures quarante-six minutes très exactement - 146 minutes, voilà! - donc, environ deux heures et demie où vous vous êtes retrouvé, soit dans l'antichambre, soit dans le bureau de M. Boivin, en compagnie de Me Jasmin. Enlevons la moitié du temps, si vous voulez, que vous avez passé dans la salle d'attente. Cela laisse quand même au-delà d'une heure et demie que vous avez passée avec Me Boivin, dont environ une heure et quart où Me Jasmin était également présent. Et vous me dites, à ce moment-ci, et c'est la question que je vous pose, que pendant tout ce temps-là Me Boivin n'a fait qu'écouter et vous n'avez aucun souvenir de ce qu'il a pu dire?

M. Beaulé: M. le Président, j'ai déjà répondu davantage. J'ai déjà dit que M. Boivin m'a souvent posé des questions. Encore ce matin, et hier soir plus précisément, je me reportais à l'aide-mémoire dont vous avez le texte dans la lettre adressée à François Aquin, ou la teneur. M. Boivin me posait des questions, à savoir: Avez-vous la preuve que la SEBJ reconnaissait dans la FTQ-Construction

l'employeur de Duhamel en envoyant les factures pour gîte et couvert? Avez-vous la preuve que Duhamel était l'employé de l'Union des opérateurs de machinerie lourde non affiliée aux Américains? Ce sont des questions qu'il m'a posées. Je l'ai dit ce matin et je l'ai dit à d'autres occasions.

Alors, j'ai dit une chose et je l'ai affirmé à plusieurs reprises: Je n'ai pas fait le décompte en minutes. Je sais que les rencontres ont été peu nombreuses et que je n'ai pas passé des heures au bureau de M. Boivin. Ce n'est pas mon genre et c'est un homme très occupé. Je suis à votre disposition, mais pas simplement par goût, parce que la loi m'y oblige. Je préférerais être de retour à mon bureau depuis un bon moment.

Pour revenir à M. Boivin, je n'ai pas prolongé les visites, même si je connaissais M. Boivin. Nous avons traité affaires. Je l'ai dit.

M. Gratton: Alors, qu'est-ce que Me Boivin a dit à Me Jasmin en votre présence?

M. Beaulé: À quel sujet, M. le Président?

M. Gratton: Au sujet du rapport Cliche.

M. Beaulé: M. le Président, je peux toujours essayer de me creuser la tête. J'ai déjà indiqué que ce qui m'intéressait, c'était la cause d'International Union of Operating Engineers. Je me permets de me référer à l'article 730, paragraphe 4, de l'ancien règlement. La règle de la meilleure preuve qui s'applique devant les tribunaux, je soumets avec respect qu'elle s'applique aussi devant la commission, si elle veut arriver à des conclusions qui puissent être soutenues et défendues. La règle de la meilleure preuve, ce n'est pas une avocasserie, c'est d'éviter toute erreur dans l'appréciation des faits. Je soumets donc avec respect que ces questions devraient être posées à M. Boivin et M, Jasmin.

M. Gratton: Mais vous étiez présent, Me Beaulé...

M. Lalonde: M. le Président, sur une question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): Un instant, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Je m'excuse auprès de mon collègue. En fait, c'est une question de règlement qui est soulevée par le témoin. La règle de la meilleure preuve ne comprend-elle pas aussi le témoin, c'est-à-dire celui qui entend parler une autre personne? Ce n'est pas du ouï-dire qu'on vous demande. Vous êtes témoin, n'est-ce pas cela une des meilleures preuves? Vous êtes témoin d'une conversation entre M. Boivin et M. Jasmin. On ne vous demande pas de nous dire ce que la cousine de M. Boivin vous a dit que M. Boivin lui aura rapporté, etc., etc. de sa conversation avec M. Jasmin. Vous étiez là, vous avez entendu des choses, vous souvenez-vous, pendant ces deux heures de présence ou de conversation, de ce que M. Boivin a dit? Il me semble que c'est là une des meilleures preuves.

M. Beaulé: M. le Président, je crois que la remarque de M. le député de Marguerite-Bourgeoys est sérieuse. Je vais essayer d'ajouter à ma réponse de tout à l'heure. Je ne suis pas, que je sache - même si on a fait allusion hier à un procès -poursuivi conjointement et solidairement avec M. Lévesque, M. Boivin et M. Gauthier. Je suis un témoin à la commission. Si nous étions devant une cour de justice et que j'étais poursuivi conjointement et solidairement avec le député de Marguerite-Bourgeoys et le député de Gatineau, de telles questions seraient admissibles. Mais, présentement, je soumets que je n'ai rien à faire avec les déclarations que M. Boivin a pu faire à M. Jasmin ou que M. Jasmin a pu faire à M. Boivin. Si vous voulez vraiment rechercher la vérité sans qu'il n'y ait d'erreurs, c'est à eux que les questions devraient être posées. J'ai ajouté ceci, tout à l'heure, que j'ai gardé, par exemple, le souvenir que M. Jasmin a abordé pas seulement le rapport Cliche, les séances de la commission Cliche. Mais, je n'ai pas pris note de cela. Cela ne m'intéressait pas pour les fins de ma cause. Je pense que le député de Marguerite-Bourgeoys va comprendre que, lorsque vous êtes dans un procès de longue durée, vous savez les heures de recherche que cela commande, plus la présence en cour... J'essayais de faire mon boulot, je n'essayais pas de faire le boulot de M. Jasmin. En d'autres termes, j'essayais de limiter mon travail à ce qui concernait mes clients. Maintenant... J'aimerais bien vous aider, M. le Président...

M. Gratton: Non...

M. Beaulé: ...mais je n'ai pas de souvenir précis de réponses que M. Boivin a pu donner à M. Jasmin quant à la commission Cliche ou quant aux séances de la commission Cliche ou quant aux faits mis en preuve devant la commission Cliche. Honnêtement, c'est cela ma réponse.

M. Lalonde: Je pense qu'on doit prendre au sérieux les derniers propos du témoin.

Une voix: C'est le temps!

M. Lalonde: Non, on doit prendre au

sérieux tous ses propos. Je pense qu'il vient de nous éclairer sur peut-être les raisons pour lesquelles il se souvient moins des conversations entre M. Jasmin et M. Boivin que des conversations que lui, par exemple, aurait pu avoir directement avec M. Jasmin. Cela c'est compréhensible. Maintenant, vous avez dit, tout à l'heure, que vous n'êtes pas accusé ou enfin ni... J'ai eu cette expérience de témoigner devant une commission d'enquête pendant une journée et demie et on ne m'a pas...

M. Duhaime: N'étiez-vous pas vérificateur?

M. Lalonde: Là où j'ai eu des félicitations pour mon excellent travail de la part d'une commission d'enquête...

Le Président (M. Jolivet): Allez! Allez!

M. Duhaime: C'est à l'époque où vous étiez vérificateur? C'est cela?

M. Lalonde: C'est là que j'ai eu des félicitations pour excellent travail, de la part d'une commission d'enquête.

Le Président (M. Jolivet): Allez! Allez! Allez!

M. Lalonde: Mais, on ne me demandait pas la permission de me poser des questions, vous savez.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau, en tenant pour acquise la réponse de Me Beaulé.

M. Gratton: Me Beaulé...

M. Beaulé: M. le Président, me permettez-vous une remarque?

Le Président (M. Jolivet): Oui, Me Beaulé.

M. Beaulé: Je pense que la remarque que vient de faire le député de Marguerite-Bourgeoys est à l'honneur de la commission parlementaire, dans le sens que la commission parlementaire veut suivre des règles de preuve qui respectent l'équité procédurale et la recherche de la vérité.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Me Beaulé, vous avez quand même eu l'impression ou le "feeling", comme vous l'avez appelé, le 19 janvier, que Me Boivin était sympathique à votre cause, à votre défense, à votre désir de régler hors cour.

M. Beaulé: J'ai déjà répondu là-dessus, M. le Président, à plusieurs reprises.

M. Gratton: Est-ce que Me Jasmin partageait cette impression, ce "feeling"?

Le Président (M. Jolivet): M. le député, je pense que cette question est irrecevable. Vous la poserez à qui de droit.

M. Gratton: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): Non.

M. Gratton: Question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): Oui, allez-y sur une question de règlement, mais je dois vous dire d'abord que vous demandez une impression à Me Beaulé et qu'il n'a pas à répondre de l'impression d'une autre personne. Posez votre question autrement et je verrai si...

M. Gratton: Ah bon! Si vous voulez que je la pose autrement.

Le Président (M. Jolivet): C'est cela.

M. Gratton: Est-ce que Me Jasmin ne vous a jamais dit s'il partageait votre impression, votre "feeling"?

M. Duhaime: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Gratton: Celle-là, est-elle recevable, M. le Président?

Une voix: Celle-là est claire.

Le Président (M. Jolivet): Je vais entendre d'abord M. le ministre. Il m'a posé...

M. Gratton: Non, mais selon vous?

Le Président (M. Jolivet): Non. Je vais attendre d'avoir entendu ce que M. le ministre a à dire. M. le ministre.

M. Duhaime: M. le Président, pendant des heures, jeudi dernier et vendredi dernier, je dirais que l'inimitable et incomparable député de Mont-Royal a posé ses questions. Ce qu'on demande maintenant à Me Beaulé... Il a dit, je me souviens très bien: "C'est une impression que j'ai eue, c'est un "feeling". J'ai le sentiment qu'une impression intérieure et un "feeling" sont quelque chose qu'une autre personne ne peut pas ressentir. Si on recommence, après avoir eu l'épisode du

"feeling" pendant plusieurs heures, avec "l'interfeeling", je pense qu'on va en avoir pour au moins une semaine, M. le Président. Je vous demanderais d'abord de demander au député de Gatineau de poser des questions pertinentes, recevables et sérieuses pour la bonne marche de nos travaux.

M. Lalonde: Elle est très recevable, cette question, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Est-ce que vous avez quelque chose à ajouter, M. le député de Marguerite-Bourgeoys?

M. Lalonde: Elle est très recevable, cette question, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): C'est votre opinion.

M. Lalonde: Je vous le suggère respectueusement, parce qu'elle demande un fait: Est-ce que Me Jasmin vous a fait une communication?

M. Beaulé: M. le Président, je pense...

Le Président (M. Jolivet): Oui, justement, pour clore le débat sur la question: cette question reformulée était recevable.

M. Beaulé: Vous dites qu'elle est recevable, M. le Président?

Le Président (M. Jolivet): Oui.

M. Rodrigue: Mais, M. le Président, sur une question de règlement...

Le Président (M. Jolivet): Non, non. Je m'excuse. J'ai rendu ma décision. Ne revenez pas là-dessus.

M. Rodrigue: Oui, mais ce n'est pas sur la même question.

Le Président (M. Jolivet): Oui, mais on va commencer par entendre celle-là et, ensuite, on entendra l'autre.

M. Rodrigue: Je pose une question de règlement qui est un peu différente de l'autre.

Le Président (M. Jolivet): Oui, je sais, mais il y a une question qui est posée actuellement à Me Beaulé. Je vais lui permettre de répondre. Ensuite, je reviendrai à vous.

M. Rodrigue: Par qui est posée la question, M. le Président?

Le Président (M. Jolivet): Par le député de Gatineau.

M. Rodrigue: Mais, c'est le député de Marguerite-Bourgeoys qui vient de la poser.

M. Gratton: Par l'entremise de mon procureur.

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse.

M. Rodrigue: C'est le député de Marguerite-Bourgeoys qui vient de la poser.

M. Gratton: M. le Président, question de directive.

Le Président (M. Jolivet): Non, je ne m'amuserai pas à cela.

M. Gratton: Non? Bon!

Le Président (M. Jolivet): Me Beaulé, s'il vous plaît.

M. Beaulé: Je crois, M. le Président, que ma réponse va être assez claire. On se réfère au 19 janvier, n'est-ce pas? J'ai quitté le bureau avec MM. Woll et Fanning, avant M. Jasmin. Je n'ai pas discuté avec M. Jasmin de mon "feeling" ou de ma déduction. J'en ai discuté avec mes confrères américains, MM. Woll et Fanning, en allant les conduire à Dorval. Un point, c'est tout.

M. Gratton: Donc, vous n'en avez pas discuté avec Me Jasmin, à la sortie de la réunion. Est-ce que vous en avez discuté ou est-ce qu'il a pu en discuter avec vous à une date ultérieure?

M. Lalonde: ...ou antérieure?

M. Beaulé: Je ne me souviens pas, M. le Président. Je ne me souviens pas. Je pense que c'est la première fois que j'emploie cette expression devant vous, mais, là, vraiment, je ne me souviens pas.

M. Gratton: Bon. Donc...

M. Beaulé: Je pourrais ajouter ceci, M. le Président. Cela pourrait peut-être éclairer la commission. Mes clients américains ne voulaient d'aucune façon lier leur sort à la cause du local 791. (17 h 30)

M. Gratton: Cela, j'en conviens. Mais les questions que je vous pose portent sur les nombreuses conversations, sans doute, que vous avez eues tant au téléphone qu'en cour - parce que le procès est en cours - tant dans les réunions que vous avez eues avec Me Jasmin. La question que je vous pose est: Est-ce qu'il vous a communiqué son impression de la réunion du 19 janvier, laquelle vous avait permis d'avoir

l'impression que Me Boivin était favorable à un règlement?

M. Beaulé: Me Jasmin m'a dit beaucoup de choses durant toute cette période de juin 1978 jusqu'à mars 1979. En ce qui concerne ce "feeling" auquel vous référez, je n'ai aucun souvenir d'en avoir discuté avec lui. Je répète que, pour moi, l'issue du procès en ce qui concernait l'International Union était une chose. Ceux qui ont eu à décider de la cessation des poursuites ont probablement vu le problème dans son ensemble mais ce n'était pas pour moi un problème global. Le problème qui me préoccupait était la poursuite engagée contre le syndicat américain.

M. Gratton: Je comprends à la lecture de votre mémoire et à l'audition de votre témoignage que votre défense quant à la non-responsabilité de votre cliente s'appuyait sur les explications que vous donnez d'ailleurs dans votre mémoire et selon lesquelles votre cliente, l'International Union of Operating Engineers, ne pouvait pas avoir de responsabilité parce que, premièrement, l'Union des opérateurs de machinerie lourde du Québec, local 791, n'avait jamais demandé son accréditation à l'International Union of Operating Engineers et ne lui versa jamais d'ailleurs de cotisations ou redevances.

Deuxièmement - on retrouve cela à la page 17 - "en tout temps pertinent au saccage de LG 2, Yvon Duhamel n'était d'aucune façon le préposé, représentant ou mandataire de l'International Union of Operating Engineers mais plutôt le représentant du Conseil provincial des métiers de la construction". Donc, c'était là, entre autres, les raisons qui vous motivaient à prétendre que votre cliente n'avait aucun lien de responsabilité avec le saccage de la Baie-James. Mais Me Jasmin, lui, ne pouvait pas invoquer cette défense-là parce qu'il était effectivement le procureur du Conseil provincial des métiers de la construction et du local 791, si je me m'abuse.

M. Beaulé: C'est exact.

M. Gratton: Donc, il ne pouvait pas invoquer les mêmes arguments que vous devant Me Boivin.

M. Beaulé: Oui, c'est pour cela d'ailleurs... Dans un sens, vous corroborez ce que je viens de dire.

M. Gratton: Quels étaient les arguments que Me Jasmin a invoqués en votre présence auprès de Me Boivin?

M. Beaulé: Le 1er décembre 1978 à Québec, M. Jasmin n'était pas là. Le 15 janvier 1979, j'ai déjà répondu qu'il n'a pas été question du mérite de la cause. J'ai dit qu'on avait fait un rapport des procédures qui s'étaient déroulées ce jour-là devant le tribunal. J'ai été bien explicite là-dessus. Le 19 janvier, je vous ai dit que c'est M. Woll qui a utilisé le temps qui nous était alloué. Le 2 février, j'ai déjà répondu en disant que la réunion a porté principalement, sinon exclusivement, en ce qui me concerne - je suis parti avant M. Jasmin - sur l'aide-mémoire que vous retrouverez dans la lettre du 5 février adressée à M. Aquin.

M. Gratton: En votre présence, Me Jasmin n'a donc pas invoqué d'arguments à la défense de ses clients?

M. Beaulé: Dans le cadre du règlement qui a été déposé devant vous - je pense qu'il est dans les documents - le local 791, affilié à l'International Union of Operating Engineers, a reconnu sa responsabilité, de même que le Conseil provincial du Québec des métiers de la construction. Je ne me souviens pas que M. Jasmin ait développé devant M. Boivin, en ma présence - mais il l'a vu en d'autres occasions - des arguments qui tendaient à établir que ces deux clients, ses clients à lui n'étaient pas civilement responsables.

M. Gratton: Si Me Jasmin ne plaidait pas devant Me Boivin de la non-responsabilité de ses clients, de quoi parlait-il?

M. Beaulé: Je crois que j'ai déjà répondu, M. le Président. J'ai référé à toutes les rencontres et l'interlocuteur...

M. Gratton: En votre présence, j'entends.

M. Beaulé: Oui. J'ai donné toutes les rencontres. Celle du 1er décembre, j'ai déjà dit ce que j'ai fait, j'étais seul. Le 11 décembre, j'étais seul - on parle toujours de 1978 - le 15 janvier, je viens de dire de quoi il a été question, le 19 janvier aussi et le 2 février aussi.

M. Gratton: Non, prenons le cas du 15 janvier. Est-ce que Me Jasmin a présenté des arguments à Me Boivin en votre présence?

M. Beaulé: Le 15 janvier, j'ai déjà répondu à plusieurs reprises. J'ai fait rapport à M. Boivin en présence de M. Jasmin.

M. Gratton: Cela c'est vous, mais Me Jasmin? Est-il resté silencieux tout au cours de la réunion?

M. Beaulé: Je pense que j'ai gardé le crachoir pendant les 24 minutes.

M. Gratton: Donc, Me Jasmin n'a rien

dit à Me Boivin dont vous vous souvenez avoir été témoin? C'est le 15. Vous faites un signe de tête. Est-ce que c'est oui ou non?

M. Beaulé: J'ai déjà répondu. Je ne me souviens pas des propos que M. Jasmin a pu tenir à M. Boivin le 15 janvier. On a été dans le bureau, au total, 26 minutes.

M. Gratton: C'est le 15 janvier.

M. Beaulé: II me semble que j'ai été la personne qui a fait rapport des procédures. D'ailleurs, j'ai suivi les 22 jours d'enquête et M. Jasmin n'a pas été présent chaque journée de l'enquête.

M. Gratton: Que faisait-il là Me Jasmin, s'il ne participait pas à la discussion?

M. Beaulé: M. le Président, il était en cour le 15 janvier et, en sortant du palais du justice, nous sommes allés au bureau de M. Boivin. Je ne sais pas si c'est M. Jasmin qui avait demandé l'entrevue ou moi, mais de toute façon une entrevue avait été demandée.

M. Gratton: Je présume que ce devait être plutôt vous puisque vous avez été le seul à parler, que Me Jasmin n'a rien dit. Ce n'est sûrement pas lui qui a demandé de rencontrer Me Boivin pour vous écouter.

M. Beaulé: J'imagine que oui. Essayez de vous situer: le 15 janvier 1979, c'est l'ouverture du procès. C'est un peu la même chose que lorsque M. le député de Mont-Royal m'a demandé si vendredi dernier j'avais parlé à M. Boivin, ou, plutôt, il m'a demandé si j'avais communiqué avec le bureau du premier ministre. Sur le coup, il n'y a absolument rien qui m'est revenu parce que le souvenir que j'ai de vendredi dernier, c'est celui d'une journée extrêmement dure au point de vue, si vous voulez, de l'interrogatoire, au point de vue de la résistance physique et nerveuse. Cela prend toujours un certain temps avant de se rappeler précisément les détails, parce que ma conversation avec M. Boivin, c'était, dans le cadre de cette journée, en fait, peut-être un détail.

Pour revenir au 15 janvier, ce qui m'a frappé cette journée, c'est l'ouverture du procès. C'était la déclaration de guerre officielle, c'était l'attitude des procureurs de la SEBJ qui nous disaient en fin de journée: Tout ce qu'on peut faire, nous, c'est écouter. Je ne me rappelle pas les propos que M. Jasmin a pu tenir à M. Boivin ce jour-là. J'y ai répondu. C'est moi qui ai fait rapport des procédures.

M. Gratton: Est-ce que vous aviez pris rendez-vous au préalable avec Me Boivin ou si vous vous êtes présenté comme cela?

M. Beaulé: Je ne m'en souviens absolument pas, c'était un lundi. Je ne m'en souviens absolument pas. Je sais que M. Boivin a été en Louisiane pendant tout le début de janvier 1979. Je pense que le rendez-vous a été pris le jour même.

M. Gratton: Donc, cela règle le 15 janvier, pour autant que je suis concerné.

Le 19 janvier, vous nous avez expliqué que c'est surtout Me Woll qui a fait des représentations. Dois-je en déduire que Me Jasmin n'a rien dit à Me Boivin à cette réunion, en votre présence?

M. Beaulé: À ma connaissance, il n'a rien dit à M. Boivin ce jour-là en ma présence.

M. Gratton: II était là encore à titre de témoin intéressé par la chose.

M. Beaulé: Oui, oui.

M. Gratton: Le 2 février?

M. Beaulé: Le 2 février, j'ai déjà indiqué et répondu à plusieurs reprises que cela a porté sur l'aide-mémoire dont le texte est reproduit dans ma lettre du 5 février adressée à Me Aquin.

M. Gratton: Cela est votre participation à vous, mais je vous demande quelle a été la participation de Me Jasmin pendant que vous étiez dans le bureau de Me Boivin.

M. Beaulé: Écoutez, je n'en ai pas de souvenir. Je m'en suis expliqué tout à l'heure et à plusieurs reprises d'ailleurs. J'ai dit que M. Boivin - et je prends la présidence à témoin de cela - m'a posé des questions précises. Je ne veux pas reprendre à nouveau ces questions. Elles touchaient la facturation faite par la SEBJ à la FTQ. Elles touchaient la question de savoir qui était l'employeur de M. Duhamel avant le saccage. J'ai pris des notes. J'ai fait les recherches appropriées et j'ai obtenu les documents. Je ne me souviens pas de ce que M. Jasmin a dit, honnêtement.

M. Gratton: Honnêtement, donc, au cours des quatre rencontres où vous vous êtes retrouvés, Me Boivin, Me Jasmin et vous-même, en même temps, dans le bureau de Me Boivin, vous n'avez aucun souvenir de quelque parole qu'ait pu prononcer Me Jasmin autre que "bonjour", "salut".

M. Beaulé: Ce n'est pas ce que j'ai dit, M. le Président. J'ai dit tout à l'heure que j'avais un souvenir qu'il avait abordé avec M. Boivin certaines des séances de la

commission Cliche ou certaines constatations du rapport Cliche. Je n'en ai pas pris note et j'ai expliqué pourquoi.

M. Gratton: Et vous n'avez aucun autre souvenir que celui-là?

M. Beaulé: Non, M. le Président.

M. Gratton: Par exemple, vous n'avez aucun souvenir que Me Jasmin ait pu parler de la non-solvabilité ou de l'incapacité de payer de ses clientes advenant une condamnation.

M. Duhaime: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): Vous avez raison. J'avais l'intention de...

M. Duhaime: Une expression d'opinion, une hypothèse, une suggestion...

M. Gratton: Vous souvenez-vous...

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre. Elle n'est pas recevable.

M. Gratton: Je retire ma question, M. le Président, et je la formule à nouveau. Je remercie mes procureurs qui m'aident à me débrouiller tant bien que mal. Avez-vous eu connaissance, dans l'une ou l'autre de ces quatre rencontres où vous avez été présent en même temps que Me Jasmin dans le bureau de Me Boivin, qu'il ait invoqué la non-solvabilité ou l'incapacité de payer de ses clientes advenant une condamnation?

M. Beaulé: La réponse est non et j'ajoute ceci: même au moment où vous m'interrogez, où on m'interroge, je n'ai pas pris connaissance des états financiers des syndicats québécois qui sont dans les dossiers. On a parlé de solvabilité tout à l'heure. Je ne me suis pas intéressé, à l'époque, pas plus qu'aujourd'hui, à cette question.

M. Gratton: M. le Président, mettons de côté pour l'instant la question de la non-responsabilité et parlons de responsabilité. Dans votre mémoire, Me Beaulé, vous alléguez que la SEBJ devait assumer sa part de responsabilité pour avoir contribué à créer une toile de fond propice aux actes de violence du 21 mars 1974 - on retrouve cela à la page 6 de votre mémoire. Vous alléguez également que la SEBJ n'avait pas pris les moyens adéquats pour empêcher le saccage qui était pourtant prévisible - on retrouve cela à la page 9 de votre mémoire. Est-ce que, au cours de vos rencontres avec Me Boivin, vous avez fait valoir ces arguments?

M. Beaulé: M. le Président, si je me réfère à la contestation du 28 novembre 1978, pages 3 et suivantes, j'ai développé les moyens ou les faits qui, à mon point de vue, établissaient la non-responsabilité de l'International Union of Operating Engineers pour en faire la preuve devant le tribunal. Une partie de cette preuve a été faite d'ailleurs en contre-interrogatoire parce que nous étions au moment de la cessation du procès, encore au niveau de la preuve principale: la SEBJ. J'ai déjà abordé ces sujets avec M. Boivin, je l'ai indiqué à plusieurs reprises, parce qu'en réalité, ce qui est allégué aux pages 3, 4 5 et 6 de la contestation du 28 novembre, c'est en substance également ce que vous retrouvez dans ma lettre à M. Aquin du 5 février, lorsque je parle de l'absence de lien de droit. J'ai discuté de ces faits avec M. Boivin dans le sens que j'ai porté à sa connaissance ces faits. J'ai répondu à ses questions et je lui ai fait livrer les documents, comme je l'ai indiqué déjà. Peut-être que je ne réponds pas complètement à votre question; est-ce qu'il y avait un autre élément dans votre question?

M. Gratton: Vous lui avez répondu.

Vous dites que vous avez discuté de ces points-là avec Me Boivin, que vous avez répondu à ses questions...

M. Beaulé: Tout le chapitre de la non-responsabilité.

M. Gratton: Quelles questions?

(17 h 45)

M. Beaulé: M. le Président, j'ai déjà indiqué à la commission ce qui en était. À titre d'exemple, le 2 février, M. Boivin m'a demandé... Je crois que je répète cela pour la quatrième fois, mais je vais essayer de garder mon calme, parce qu'en réalité, je dois garder mon calme, parce que vous avez le droit de me poser toutes les questions juridiques...

M. Gratton: Faites les mêmes efforts que moi, Me Beaulé.

M. Beaulé: M. le Président, j'admets que M. le député de Gatineau en fait...

M. Duhaime: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Duhaime: C'est dommage que l'immunité parlementaire ne puisse pas s'appliquer au témoin, parce que j'ai l'impression que ce serait plus facile pour Me Beaulé. J'ai l'impression, après avoir écouté quelques questions, que j'aurais pu

systématiquement m'opposer aux trois ou quatre dernières questions qui ont été posées. Ce que le député de Gatineau est en train de faire avec les notes qu'il a devant lui, c'est l'interrogatoire que conduisait hier, avant-hier et la semaine dernière, le député de Mont-Royal. On reprend essentiellement les mêmes questions...

M. Gratton: Question de règlement, M. le Président.

M. Duhaime: ...les redites à répétition. Je pense que le premier ministre...

M. Gratton: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau.

M. Duhaime: Si vous me permettez, M. le Président, je vais terminer.

Le Président (M. Jolivet): Seulement un instant; mon problème est toujours le même. Lorsque j'ai une autre question de règlement, je dois l'entendre d'abord.

M. le député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président, M. le ministre est en train de faire allusion à des notes que je possède effectivement et qui reprennent des témoignages ou des questions qui auraient été posées par d'autres. Je veux lui signaler que j'ai préparé mes propres questions moi-même. C'est peut-être ce qui explique que je ne les formule pas comme un procureur devrait normalement les formuler. Je m'en excuse devant la commission, mais je fais mon travail à ma façon, avec les compétences et les capacités que j'ai. Je regrette si cela a l'heur de déplaire au ministre, mais je suis ici pour cela, je suis ici pour faire mon job et j'entends le faire à ma façon et non pas à la façon que voudrait m'imposer le ministre.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, sur votre question de règlement.

M. Duhaime: M. le Président, est-ce que je peux terminer?

Le Président (M. Jolivet): Oui.

M. Duhaime: Je n'ai pas l'intention de dicter de ligne de conduite à qui que ce soit à cette commission. Ma seule préoccupation... On peut s'y prendre de la façon qu'on voudra, mais suivant les règlements de l'Assemblée nationale et de cette commisssion. Si cet interrogatoire qui est conduit présentement ne ressemble pas à peu près en tous points à celui qu'a conduit hier, avant-hier et la semaine dernière, le député de Mont-Royal, pour moi, c'est exactement du pareil au même. Ce sont des questions à répétition et qui sont interdites par le règlement...

M. Gratton: De quoi voulez-vous qu'on parle? Du beau temps?

M. Duhaime: Je ne veux pas systématiquement m'opposer à chacune des questions. Mais, s'il faut que je le fasse, M. le Président, je vais le faire.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau, est-ce que vous avez d'autres questions à poser à Me Beaulé?

M. Gratton: Oui. Me Beaulé, est-ce que Me Boivin, quand vous lui faisiez état des considérations de responsabilité, vous a déjà mentionné que la SEBJ ne pouvait pas accepter de se reconnaître responsable de...

Le Président (M. Jolivet): M. le député...

M. Duhaime: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Je vais le faire moi-même, M. le ministre. J'ai cru comprendre, dans les réponses de Me Beaulé, que, en ce qui concerne les conversations -vous me rectifierez si j'ai mal compris - il ne s'en souvenait pas. Vous ne pouvez pas lui suggérer des réponses s'il ne se souvient pas. Cette question, je pense, en vertu du règlement, est claire. Si vous voulez reformuler votre question, on verra.

M. Gratton: Non, M. le Président, laissez faire.

M. Lalonde: M. le Président, une question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): Non, M. le député de Gatineau.

M. Beaulé: M. le Président, me permettez-vous de dire quelque chose qui peut peut-être faire avancer les travaux?

M. Gratton: M. le Président, c'est moi qui ai la parole.

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, j'ai mal compris. Vous m'avez demandé si...

M. Beaulé: Me permettez-vous de dire quelque chose qui pourrait peut-être aider à faire avancer les travaux?

Le Président (M. Jolivet): Allez.

M. Beaulé: Je pense l'avoir déjà dit.

Lorsque j'ai rencontré M. Boivin aux quatre dates qui sont indiquées au tableau et à celle que j'ai indiquée moi-même, M. Boivin m'écoutait lorsque je parlais de la non-responsabilité des Américains dans cette cause. Je me souviens, parce qu'il en est question dans la contestation du 28 novembre que je lui ai remise le 1er décembre à Québec et dont j'ai parlé brièvement avec lui le 11 décembre à son bureau. Dès que j'ai abordé les deux chapitres suivants, M. le Président - et, pour être plus simple, vous les retrouverez dans ma déclaration que j'ai eu l'honneur de vous lire: "Les actes de violence du 21 mars 1974, survenus à LG 2, s'insèrent dans une toile de fond que la SEBJ a contribué à créer et dont elle doit assumer la responsabilité". De même, lorsque j'ai voulu aborder le deuxième chapitre: "Les événements du 21 mars 1974 survenus à LG 2 étaient prévisibles et la SEBJ n'a pas pris les moyens adéquats pour les empêcher"...

M. Gratton: J'ai moi-même lu ces passages tantôt, Me Beaulé.

M. Beaulé: Je voulais dire quelque chose qui, peut-être, serait utile, mais, si vous ne voulez pas me permettre, c'est...

M. Gratton: Moi aussi, j'aurais quelque chose à dire qui serait utile, M. le Président, si vous me le permettez. J'aimerais référer Me Beaulé à la conclusion de son mémoire. On y lit ce qui suit: "À la lumière des faits qui précèdent, on comprendra que j'ai fait appel à la droiture, à la sagesse et au "fair-play" des personnes en autorité et des membres du conseil d'administration de la SEBJ afin que cesse au plus tôt ce procès long et coûteux non seulement pour la SEBJ mais également pour l'International Union of Operating Engineers. "On comprendra aussi le refus de ma cliente de reconnaître quelque responsabilité que ce soit dans le saccage de LG 2 survenu le 21 mars 1974". En supposant, pour les fins de la discussion, qu'on donne raison à Me Beaulé, en ce sens que sa cliente n'avait aucune responsabilité, je pense qu'il est clair qu'on ne peut pas en dire autant des syndicats québécois représentés par Me Jasmin, sûrement pas, en tout cas, pour les mêmes raisons que pour le syndicat américain. D'ailleurs, ils l'ont reconnu en signant le règlement. Pourtant, tout au long des démarches qui ont précédé le règlement hors cour, les deux procureurs syndicaux, soit Mes Beaulé et Jasmin, ont plaidé à au moins trois occasions en présence l'un de l'autre auprès de Me Boivin pour que la poursuite, en définitive, soit abandonnée. Est-ce qu'on doit reprocher, M. le Président, aux procureurs...

M. Duhaime: M. le Président, question de règlement.

M. Gratton: C'est un préambule à une question que j'ai l'intention de poser à Me Beaulé.

M. Duhaime: Est-ce qu'on pourrait entendre une question?

Le Président (M. Jolivet): Oui, mais, justement...

M. Duhaime: Suivant l'article 168, une question est irrecevable, M. le Président, si elle est précédée d'un préambule inutile.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre. M. le ministre. Vous m'avez demandé d'être vigilant. J'écoutais et j'essayais de voir si la question venait. Je dois vous dire, M. le député, que, pour la bonne compréhension, comme on m'a demandé une directive et que je l'ai donnée de façon à faire progresser les travaux, je vais l'appliquer. J'aimerais que vous posiez votre question à Me Beaulé et que vous ne fassiez pas de long préambule.

M. Lalonde: M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Non, M. le député...

M. Lalonde: M. le Président, là, par exemple...

Le Président (M. Jolivet): ...de Marguerite-Bourgeoys, je n'accepterai rien.

M. Lalonde: II a un droit de parole...

Le Président (M. Jolivet): II a un droit de parole. Le député a le droit de parole...

M. Lalonde: ...il peut l'exercer...

Le Président (M. Jolivet): ...sauf que le député, s'il a une question à poser, il va la poser en vertu de ce que j'ai déterminé hier, c'est-à-dire pas de préambule, la question.

M. Lalonde: Ce n'est pas un préambule, M. le Président, ce sont des observations.

Le Président (M. Jolivet): C'est autre chose.

M. Lalonde: C'est ça.

Le Président (M. Jolivet): Ce n'est pas ce que le député m'a dit. Il m'a dit: J'ai fait précéder, pour poser ma question... Je veux qu'il pose la question. S'il a des observations à faire, il les fera en temps et lieu.

M. Lalonde: C'est ça. Il peut les faire maintenant.

Le Président (M. Jolivet): Non. M. le député, la question.

M. Gratton: M. le Président, en terminant...

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau, la question.

M. Laplante: Qui est président? C'est impoli cela.

M. Gratton: ...vous me permettrez de dire à Me Beaulé, par votre entremise, que je l'aurais trouvé beaucoup plus convaincant quant au bien-fondé de ses démarches auprès de Me Jean-Roch Boivin si, dans son mémoire et dans ses réponses à nos questions, il s'en était tenu aux considérations purement juridiques de sa défense, qui n'étaient pas sans mérite, je suppose...

M. Beaulé: M. le Président.

M. Gratton: ...mais quand il se permet de citer un extrait incomplet du rapport de la commission Cliche...

Le Président (M. Jolivet): Juste un instant!

M. Beaulé: M. le Président, je veux invoquer l'article 4 de la Charte des droits...

M. Gratton: Quand il nous parle de désaccord idéologique...

Le Président (M. Jolivet): À l'ordre! À l'ordre!

M. Beaulé: Encore une façon de me discriminer et d'attaquer ma crédibilité, ma bonne foi, mon honnêteté, ma réputation. Si, M. le Président, le député de Gatineau a des questions de fait à me poser ou des questions de droit, je vais répondre sur la question de non-responsabilité.

Le Président (M. Jolivet): Vous avez raison.

M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Quand il nous parle de désaccord idéologique, M. le Président, quant à l'interprétation des événements...

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau! M. le député de Gatineau, je veux que vous posiez une question. Si vous n'avez pas de question, je vais passer à l'autre personne qui a l'intention de poser des questions.

M. Lalonde: M. le Président, sur une question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): Sur une question de règlement, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Oui. Là, je ne sais pas ce qui est arrivé...

M. Duhaime: II serait grand temps que vous vous en rendiez compte.

M. Lalonde: ...entre le moment où vous avez, avec la grande sagesse qu'on vous connaît, présidé cette commission depuis un mois... Les droits de parole des députés sont aussi importants que les droits de parole des témoins, et je me demande si maintenant on va transformer cette commission en réduisant le droit de parole des députés. Le député a autant droit à l'article 4 de la charte qui est évoqué par le témoin. Il y a aussi un droit de parole qui est prévu par le règlement. Je ne crois pas que le règlement empêche un député de faire des observations lorsqu'il exerce son droit de parole, quitte à poser...

M. Duhaime: Sur la question de règlement, M. le Président.

M. Lalonde: ...des questions en conclusion, comme cela a été fait à plusieurs reprises ici. J'entends bien exercer ce droit de parole lorsque mon tour viendra.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, sur la question de règlement.

M. Duhaime: M. le Président, il y a une grande distinction à faire dans ce que vient de dire le député de Marguerite-Bourgeoys. Il est incontestable et personne ne va contredire qu'un député membre de cette commission parlementaire a un droit de parole et a le droit de l'exercer. Mais, à ce moment-ci de nos travaux, le député de Gatineau a la parole pour poser des questions...

M. Lalonde: Non, il a le droit de parole.

M. Duhaime: ...à l'invité. Si le député de Gatineau a choisi de déclarer à la commission qu'il a terminé de poser des questions

M. Lalonde: Depuis quand cela? M. Duhaime: ...à Me Beaulé...

M. Gratton: je n'ai pas l'intention de faire cela, M. le Président.

M. Duhaime: ...ensuite de formuler un commentaire en indiquant à la commission: Je fais maintenant un commentaire, je vais être obligé, à ce moment-là de dire qu'il se conformerait au règlement.

M. Gratton: Ce n'est pas ce que je fais, M. le Président.

M. Duhaime: Mais, interrompre les questions - dans le fond, ce n'est pas une méchante idée, la plupart sont irrecevables -mais, interrompre l'interrogatoire pour nous faire un résumé d'une situation qu'il, croit être, à quelques minutes de la fin de nos travaux, en présence de Me Beaulé qui nous dit, depuis deux jours, qu'il a des choses urgentes, qu'il doit rencontrer sa clientèle, qu'il doit rentrer à Montréal, qu'il manifeste envers la commission une franche collaboration en offrant même de revenir jeudi soir, si ce n'est pas abusif, actuellement, non seulement abusif mais irrégulier, ce que fait le député de Gatineau!

M. Gratton: Pas du tout.

M. Duhaime: Je vous demande de ne pas vous laisser ébranler par votre gauche et de rappeler à l'ordre le député de Gatineau en l'invitant à poser des questions.

Le Président (M. Jolivet): Je vous...

M. Duhaime: S'il n'a pas d'autres questions à poser, je vous inviterais à passer la parole à un autre député.

Le Président (M. Jolivet): Avant, je vais quand même régler une chose. Je n'ai aucunement l'intention d'enlever le droit de parole à qui que ce soit. Je pense que cela est bien clair. La seule chose, on va poser la question: Qu'est-ce qui est arrivé? C'est que, par les abus qu'il a pu y avoir à cette commission, au niveau de l'utilisation du droit de parole, on m'a demandé une directive. J'avais, à ce moment-là...

M. Lalonde: Quels abus?

Le Président (M. Jolivet): M. le député, vous ne me dérangerez pas, pas plus que moi je vous dérange quand vous parlez.

M. Lalonde: Vous nous accusez d'avoir usé de notre droit de parole?

Le Président (M. Jolivet): Je n'ai pas parlé de qui que ce soit. J'ai dit que la commission m'a demandé une directive que j'ai effectivement donnée de façon à faire accélérer les travaux. J'ai dit qu'il y a, à la suite des abus qui ont pu exister à cette commission, des pouvoirs que possède un député d'interroger une personne. J'ai donc demandé, à ce moment-là, en vertu de la directive, de se limiter à des questions, en revenant à l'analogie de l'article 168.

Ceci étant dit, qu'une personne ait des commentaires à faire, c'est son droit, mais elle n'a pas le droit, dans ses commentaires, de mettre en péril l'invité qui est devant nous, quant à sa crédibilité. Je pense que cela est clair aussi. Compte tenu de ces faits, je vais vous dire deux choses: Premièrement, nous continuons nos travaux demain matin, à dix heures jusqu'à 12 h 30. Après la période des questions, jusqu'à 18 heures. Me Beaulé nous a promis d'être ici présent, demain, à 20 heures, si besoin est et si nous avons terminé avec Me Gadbois.

En terminant, je rappelle aussi qu'il y a eu une décision de prise, à savoir que nous ne siégerons pas vendredi. Nous siégerons mardi prochain, normalement sur avis, sur motion. S'il y a des corrections à apporter, on verra à les apporter dès demain.

Une autre chose. Je dois rendre une autre décision à une demande qui est faite par le député de Marguerite-Bourgeoys, eu égard à un document qui a été envoyé au Secrétariat des commissions parlementaires par M. Latouche.

La présidence a toujours considéré que toute personne, qui vient ici devant cette commission, peut déposer des documents, mais elle n'a aucun pouvoir de déposer d'autres documents que ceux qui sont les propos préliminaires de la personne qui vient à la demande de la commission. Comme la présidence n'a pas à décider si une personne se présente ou ne se présente pas, je n'ai donc pas à déposer et même à distribuer un document que je n'ai pas à donner comme président. En conséquence, le document, quant à moi, ne sera pas distribué.

Je vais donc ajourner les travaux à demain matin, dix heures.

(Fin de la séance à 18 heures)

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