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Version finale

32e législature, 4e session
(23 mars 1983 au 20 juin 1984)

Le jeudi 5 mai 1983 - Vol. 27 N° 39

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Examen de la décision de la SEBJ et du rôle du premier ministre et de son bureau lors du règlement hors cour de la poursuite intentée à la suite du saccage de LG 2


Journal des débats

 

(Dix heures dix minutes)

Le Président (M. Jolivet): La commission élue permanente de l'énergie et des ressources est à nouveau réunie aux fins d'examiner les circonstances entourant la décision du conseil d'administration de la Société d'énergie de la Baie James de régler hors cour la poursuite civile intentée à la suite du saccage du chantier de LG 2 survenu en 1974 et, plus spécifiquement, le rôle du premier ministre et de son bureau à cet égard.

Les membres de cette commission sont: MM. Dussault (Châteauguay); Ciaccia (Mont-Royal); Duhaime (Saint-Maurice); Bourbeau (Laporte); Laplante (Bourassa); Gratton (Gatineau); Lavigne (Beauharnois); LeBlanc (Montmagny-L'Islet); Lalonde (Marguerite-Bourgeoys); Vaillancourt (Jonquière); Rodrigue (Vimont).

Les intervenants sont: MM. Bisaillon (Sainte-Marie); Perron (Duplessis); Desbiens (Dubuc); Mme Harel (Maisonneuve); MM. Paradis (Brome-Missisquoi); Pagé (Portneuf); Doyon (Louis-Hébert); Tremblay (Chambly); Saintonge (Laprairie).

Le rapporteur est toujours M. LeBlanc (Montmagny-L'Islet).

L'horaire des travaux d'aujourd'hui est de maintenant jusqu'à 12 h 30. Nous reprendrons normalement après la période des questions, c'est-à-dire vers 15 heures ou 15 h 30, jusqu'à 18 heures, et de 20 heures à 22 heures, après un arrêt de 18 heures à 20 heures.

Les personnes invitées devant la commission aujourd'hui sont d'abord, à la suite de l'entente, Me André Gadbois. Si nous avons terminé avec Me Gadbois avant 18 heures ou à 18 heures, Me Rosaire Beaulé reviendra pour la soirée de 20 heures à 22 heures.

Je demande donc à Me André Gadbois de s'approcher et à M. Jean Bédard, greffier, de lui faire prêter le serment demandé.

Le greffier (M. Jean Bédard): M.

Gadbois, pourriez-vous mettre la main sur l'Évangile et répéter après moi: Je, vos nom et prénom, jure ou déclare solennellement que je dirai toute la vérité, rien que la vérité?

M. Gadbois (André): Je, André Gadbois, jure et déclare solennellement que je dirai toute la vérité, rien que la vérité.

Le greffier (M. Jean Bédard): Merci, monsieur.

Le Président (M. Jolivet): Pendant que Me Gadbois s'installe, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

Discussion sur la procédure

M. Lalonde: M. le Président, l'ajournement d'hier soir, à 18 heures, m'a empêché de poursuivre les questions que je soulevais quant au règlement qui régit nos travaux et à la façon, naturellement, de l'appliquer pour nous permettre de faire avancer les choses en rappelant, comme vous l'avez dit tout à l'heure, que notre mandat est un mandat d'examiner les circonstances avec les moyens qu'on peut avoir à notre disposition.

Pour faire un bref historique, avant-hier, le ministre a soulevé une question de règlement justement sur cette question, à la suite de laquelle vous avez ajourné les travaux et vous avez rendu une décision que j'ai examinée attentivement. Je vais relire l'essentiel de la conclusion: II est une règle d'interprétation dont le président entend s'inspirer dans la poursuite des travaux, comme il l'a fait depuis le début du mandat de cette commission; il s'agit de l'article 168 de notre règlement, je ne le répéterai pas, vous le connaissez mieux que moi. Pour le bénéfice de ceux qui nous écoutent, ce serait peut-être bon de le lire: "Une question ne doit contenir que les mots nécessaires pour obtenir les renseignements demandés. Est irrecevable - c'est-à-dire refusée, irrégulière - une question qui est précédée d'un préambule inutile; qui contient une hypothèse, une expression d'opinion, une déduction, une suggestion ou une imputation de motifs; dont la réponse serait une opinion professionnelle ou une appréciation personnelle."

En toute justice, il faut le rappeler, vous vous inspiriez aussi des concepts que la Cour suprême a établis pour que les travaux de la commission se déroulent dans l'équité et l'impartialité. Enfin, vous avez souligné, à fort bon droit si vous me le permettez, que la règle de la gentilhommerie, etc., serait aussi votre bible.

En m'inspirant de la journée d'hier, à

la suite de votre décision, il y a des points où ça peut créer un problème. Je vais vous en soulever quelques-uns. Quand le témoin soulève une question d'opinion - l'exemple le plus récent, le plus frais à la mémoire, c'est le mémoire présenté par Me Beaulé il y a quelques jours, lequel est une opinion qui ne se réfère à presque aucun fait - à ce moment, comment pouvons-nous poser des questions sur cette opinion si l'article 168 est appliqué, à savoir que: Est irrecevable une question dont la réponse serait une opinion professionnelle ou une appréciation personnelle?

Les autres dispositions de notre règlement, pour illustrer que cela peut difficilement s'appliquer ici... On sait qu'un ministre peut refuser de répondre, on sait qu'il peut prendre avis de la question. Je veux simplement démontrer jusqu'à quel point l'ambiguïté entre l'application de l'article 168 et aussi le rappel qu'il y a des règles devant nos tribunaux dont vous pouvez vous inspirer - vous ne l'avez pas exclus d'ailleurs dans votre décision - que cette ambiguïté permet de faire des objections à un grand nombre de questions. Il y a une autre règle qui est admise et qui est pratiquée quotidiennement devant les tribunaux, c'est de tester la crédibilité. On ne peut tester la crédibilité d'un ministre. On peut simplement lui poser des questions auxquelles il peut refuser de répondre ou auxquelles il peut répondre. Mais un témoin dont la mémoire n'est pas parfaite, dont la version des faits ne nous semble pas, à l'un ou à l'autre, exacte, peut voir tester sa crédibilité.

Par exemple, le ministre l'a fait à l'égard de M. Giroux, mais en rappelant un événement de 1976 qui était bien loin avant le règlement de 1979. Autrement dit, ce que je vous demande en fait, c'est: Peut-on étendre l'application de l'article 168.1, par exemple, par lequel on interdirait à un député de faire des observations sans poser de questions et de faire des motions conformément à notre règlement?

Ce qui m'inspire cette demande, M. le Président, c'est la décision que vous avez rendue hier, à la toute fin de nos travaux, voulant que le député de Gatineau ne pouvait même pas faire d'observation sans poser de questions. Cela soulève un droit extrêmement fondamental du parlementarisme, à savoir que notre règlement doit protéger notre droit de parole alors que le témoin, à plusieurs reprises, interrompait même le député de Gatineau et pouvait faire toutes sortes d'observations. Vous me le permettrez, M. le Président, ce droit est fondamental; il est permis et créé par le règlement. Un député qui ne veut pas poser de questions, mais qui veut faire des observations, ou proposer une motion devrait avoir ce droit. Je vous dis respectueusement que ce droit permettrait justement à un député de faire des observations sans poser de questions, parce que notre râle n'est pas seulement de poser des questions, mais d'examiner les circonstances. On peut le faire en posant les questions directement à un témoin ou en éclairant ou en tentant d'éclairer la commission de sa propre analyse des choses.

Il y a aussi un cas qui m'a inquiété. C'est lorsque vous avez - je ne fais pas appel de votre décision, mais c'est seulement pour montrer dans quelle perspective le problème se pose - interdit la question à Me Beaulé du contenu de la conversation qu'il avait eue avec M. Boivin vendredi dernier. Cela peut même être injuste pour le témoin si on permet la question, à savoir s'il y a eu conversation, et si on ne lui permet pas de dire ce qu'elle contenait. À ce moment, l'ignorance du contenu peut être aussi nuisible au témoin qu'à la cause qu'on essaie de chercher, c'est-à-dire la vérité.

M. le Président, tout ceci sans faire appel de votre décision pour rappeler que, lorsque le ministre avait suggéré que l'article 730 de l'ancien règlement s'applique, je l'avais appuyé d'emblée. Tout en conservant peut-être l'esprit de l'article 168, je veux vous demander une directive, à savoir si ces points que j'ai soulevés ne devraient pas faire l'objet d'une plus large interprétation et application de l'ancien règlement, par exemple, qui permet à peu près toute question pertinente et de tester la mémoire et la crédibilité.

M. le Président, un exemple, et je termine là-dessus. Si, par hypothèse, une promesse de pot-de-vin avait été livrée six mois après le règlement hors cour, est-ce que votre décision, à savoir qu'on ne peut poser de questions sur des faits qui ont suivi le règlement, nous empêcherait d'aller faire cet examen? C'est une hypothèse parce que je n'ai aucune information dans ce sens. Que ce soit bien clair, je ne veux pas laisser planer quoi que ce soit, mais c'est un...

M. Duhaime: ...comme exemple.

M. Lalonde: D'accord, disons que je retire cet exemple, mais j'essaie de trouver un exemple ou un événement postérieur s'y rattachant et qui devrait être examiné par notre commission. Je vous présente ceci pour permettre aussi au député de Gatineau - je ne sais pas si c'est lui qui a droit de parole ce matin - et à tous les autres députés de parler et de faire leurs observations sans que ce soit interprété comme étant un préambule à une question.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Jonquière, sur cette question.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, même si le député de Marguerite-Bourgeoys a indiqué qu'il ne s'agissait pas

d'un appel de vos décisions, il n'en demeure pas moins que, de façon très habile, par les questions qu'il vous a posées, il vous amène de façon évidente à vous interroger sur les décisions que vous avez rendues. De ce côté-ci de la table, nous croyons, et le suggérons humblement, que vous devez respecter et continuer à respecter, comme vous l'avez fait depuis le début, cette décision importante à laquelle nous nous rallions de façon générale, à savoir que l'article 168, que je ne relirai pas parce qu'il a été lu à plusieurs reprises, devrait guider les parlementaires sur la façon de poser leurs questions.

Comme le député de Marguerite-Bourgeoys l'a dit, vous avez également mentionné que l'article 730, paragraphe 4, de l'ancien règlement n'était pas exclu, en ce sens que, même si ce n'était pas la première règle qui devait nous guider, on pouvait quand même se servir de cet article pour faire certaines objections. Vous avez également fait appel à l'équité, à l'impartialité et à la gentilhommerie. De ce côté-ci de la table, M. le Président, nous avons l'intention de continuer, sans exagérer, bien sûr, à nous opposer à toute question qui contiendrait un préambule inutile, qui serait une expression d'opinion, qui comprendrait une déduction ou une suggestion, qui imputerait des motifs ou qui demanderait au témoin une opinion ou une appréciation personnelle, comme, d'ailleurs, on le mentionne à l'article 168, paragraphe 4.

Nous avons en plus, M. le Président, l'intention de nous servir de l'article 173 du règlement, qui dit qu'il est permis de poser de nouvelles questions pour obtenir des renseignements supplémentaires pourvu que ces questions ne prennent pas la forme d'un contre-interrogatoire. C'est à l'article 173 de notre règlement.

Il ne faut jamais oublier, M. le Président, que les témoins qui viennent devant la commission sont nos invités. Ils sont les invités de la commission parlementaire et, en ce sens, l'interrogatoire doit être direct, comme pour le témoin d'une partie qui le produit devant les tribunaux de droit commun. Dans ce sens, nous allons continuer, parce que c'est une règle d'équité et d'impartialité qu'une partie interroge son témoin par un interrogatoire direct. Nous allons continuer, quant à nous, de la façon la moins exagérée possible; tant mieux, si nous n'avons pas d'objection. Nous allons essayer de continuer à faire respecter ces principes que vous avez toujours fait respecter depuis le début de la commission. Mais vous me permettrez de dire que vous les faites respecter avec beaucoup plus de rigueur depuis deux jours.

M. le Président, j'ajouterais un petit point en terminant...

M. Lalonde: La semaine dernière, ce n'était pas bon?

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, le député de Marguerite-Bourgeoys a fait allusion au fait que, sur des événements qui seraient postérieurs, le fait de ne pas répondre peut nuire passablement au témoin. Je vous rappellerai que, dans le cas qu'il a soulevé, le témoin a eu l'occasion de répondre et de dire que cette conversation n'avait aucun rapport avec le mandat de la commission. Je pense que le témoin, il faut le dire, a eu l'occasion de dire que cette conversation n'avait pas de rapport avec le mandat de la commission tel que nous l'avons eu de l'Assemblée nationale. Le président a pris cette chose en délibéré et a rendu une décision, je pense, dans les heures suivantes. C'est ce que j'avais à dire, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Comme le règlement me permet de prendre une décision sans entendre d'autres personnes et que je suis prêt à la prendre dans le sens de continuer à faire en sorte qu'on avance le plus rapidement possible dans les débats et que votre but de ce matin est d'entendre Me Gadbois, je dois d'abord dire que je n'ai jamais dit que personne n'avait le droit de faire des observations sans poser de question. Ce que j'ai dit, c'est que nous étions ici pour poser d'abord des questions et je n'enlèverai jamais le droit de parole à personne. J'en ai d'ailleurs fait mention depuis le début de cette commission. Qu'une personne fasse des observations, mais qu'elle dise qu'elle n'a aucune question à poser et qu'elle a des observations à faire.

Cependant, ce que j'ai demandé, c'est que les observations tiennent compte aussi qu'on ne doit pas mettre dans la bouche de qui que ce soit ni des intentions, ni des suppositions, ni des choses semblables; je pense qu'à partir de cela, on va s'entendre facilement.

À savoir maintenant pourquoi il y a eu un changement dans mon attitude comme président de la commission, c'est que je ne suis ni sourd, ni aveugle et, en conséquence, j'ai tenu compte aussi de ce qui se dit aussi bien à l'intérieur de l'enceinte de cette Assemblée, aussi bien à la commission parlementaire qu'ailleurs.

J'en avais fait mention après les vacances de Pâques. Cependant, j'ai eu une demande et j'ai reçu une directive différente. Je ne veux en aucune façon faire en sorte d'expliquer mon comportement, mais j'ai essayé, à partir du mandat qui avait été donné à cette commission, d'amener le plus d'éclairage possible par les questions qui étaient posées, jusqu'à ce qu'il y ait des objections auxquelles j'ai eu à répondre ou que moi-même j'ai eu à interrompre des

questions, puisque j'avais une attitude qui était basée sur une sorte de bon sens.

Il est arrivé, en cours de route, qu'on m'a demandé d'être plus rigide par une demande de directive. J'ai donc pris cette demande en délibéré. J'ai entendu chacune des parties et, après avoir, avec les gens qui sont au bureau de la présidence, regardé l'ensemble de la question, les arguments que vous aviez apportés, j'ai décidé d'appliquer de façon plus rigoureuse l'article 168 que j'avais à plusieurs occasions invoqué comme moyen de faire avancer nos travaux.

Simplement, ce changement d'attitude est dû au fait qu'il fallait éviter tout abus et j'ai peut-être dû le faire, à la fin de la journée, comme j'ai eu souvent l'occasion de m'en excuser, si j'avais moi aussi, à cause de la fatigue que j'ai à présider cette commission, comme tous les membres de cette commission... Ce que je voulais dire, c'est qu'il risquait d'y avoir des abus et qu'en conséquence, aussi bien pour l'invité qui, depuis de longues heures, était devant nous, qui est une personne qui doit nous aider à faire la lumière sur le mandat qui nous est donné, il fallait donc éviter, par des questions répétées, d'en arriver à faire en sorte qu'il puisse se tromper, parce que, la fatigue aidant, quelquefois, il n'est pas sûr que cela aide l'individu à avoir plus de mémoire. Or, je pense que la personne qui était devant nous - on aura l'occasion de la revoir ce soir, normalement - a fait, à mon avis, tout son possible pour nous aider jusqu'à maintenant et qu'il faudra continuer dans ce sens.

Pour ce qui est de l'autre demande qu'on m'a faite, sans vouloir remettre en question ma directive concernant mon refus d'aller au delà du mois de mars 1979, c'est bien simple: s'il y a d'autres choses qui sont portées à la connaissance de l'Assemblée nationale, d'autres décisions seront prises. Et ce n'est pas à moi, comme président d'assemblée, d'aller plus loin que le mandat qui m'est accordé. Or, je pense que cela a été clair dans bien d'autres commissions parlementaires. S'il y avait un autre fait qui était porté à la connaissance de l'Assemblée nationale et s'il avait trait à une période ultérieure à cette prise de décision de mars 1979, vous avez, comme parlementaires, tout le loisir de poser des questions à l'Assemblée nationale, mais ce n'est pas ici qu'on va le régler. Et je ne changerai pas d'opinion sur cette question. Donc, au moment où on se parle, c'est Me André Gadbois qui est notre invité. J'ai demandé s'il...

M. Paradis: M. le Président, sur la question...

Le Président (M. Jolivet): Non, je n'accepte plus rien.

M. Bourbeau: Une question de directive, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Une question de directive? M. le député de Laporte.

M. Bourbeau: J'ai l'intention de poser des questions un peu plus tard, M. le Président, et je voudrais savoir ce que vous allez faire si un témoin refuse de répondre sans donner de raisons.

Le Président (M. Jolivet): Je n'ai actuellement devant moi personne qui a refusé de répondre. La seule chose qu'on a eue, ce sont des gens qui ont dit: J'ai déjà donné cette réponse. Or...

M. Bourbeau: M. le Président, est-ce qu'un témoin a le droit de refuser de répondre sans donner de raisons? (10 h 30)

Le Président (M. Jolivet): La personne qui est devant nous n'a pas le droit de refuser. Mais elle n'a pas non plus le devoir de répondre cinq ou dix fois à la même question. Si tel était le cas, je vais commencer par rendre la question irrecevable et, à ce moment-là, elle n'aura pas besoin de refuser.

M. Bourbeau: M. le Président, je voudrais simplement préciser ma question. Je veux que vous m'expliquiez comment on peut appliquer l'article 171, paragraphe 2, à la lumière de ce que vous venez de dire tout à l'heure. Il faut prendre, je pense, les articles 168, 169, 170, 171, dans un tout. Les articles 168 et 169 établissent les règles qui s'appliquent à celui qui questionne. Les articles 170 et 171 établissent les règles pour les réponses. Et je pense qu'il faut les traiter ensemble. Or, comme le règlement qui s'applique à l'Assemblée nationale s'applique également ici, à l'égard des réponses, je pense qu'il faut tenir compte -et c'est votre décision d'hier - du fait que l'article 171.2 dit: "Un ministre ou un député - et par analogie, évidemment, un témoin -peut toujours refuser de répondre à une question sans donner de raisons et son refus ne peut être discuté d'aucune façon."

M. le Président, en vertu de ce que vous venez de dire, je veux savoir ce qui se passera si un témoin refuse de répondre sans donner de raison.

M. Duhaime: On verra dans ce temps-là.

M. Bourbeau: Oui, mais il faut le savoir tout de suite.

Le Président (M. Jolivet): J'ai dit au départ, et je le répète, que, par analogie, j'appliquais à la commission parlementaire les

règles prévues à l'Assemblée nationale. J'ai dit que je tenais compte aussi d'autres facteurs. Ma décision a été rendue en ce sens. Je pense que c'est important puisqu'on m'a demandé d'être plus strict dans les manières d'agir et j'ai accepté, à la suite d'une directive qui m'a été demandée, d'agir en ce sens, après consultation.

Normalement, quant à la personne qui est devant nous, quand on regarde l'ensemble des commissions parlementaires et qu'on en préside, je pense que c'est important pour les gens qui nous écoutent aussi, quand un mémoire est présenté, quand des questions sont posées sur un mémoire présenté, il y a une grande différence par rapport à la commission où nous siégeons actuellement.

J'ai donc essayé, par le mandat qui m'a été accordé, d'être souple. Les gens me connaissent comme cela. Cependant, je pense qu'il y a crainte d'abus et, en conséquence, on m'a demandé d'appliquer plus strictement, par analogie, l'article 168; ce que j'ai fait. Donc, une personne, qui est devant nous, n'a pas le droit de refuser, non pas en vertu de l'article 171, mais en vertu d'autres articles qui disent que la personne, qui est devant nous, en vertu de la Loi sur l'Assemblée nationale, doit répondre aux questions.

L'autre chose qu'il faut aussi considérer, et ce sur quoi j'ai dit que la personne, qui était devant nous, n'aura pas l'obligation de répondre, est si la question a déjà été posée. Quel est le moyen de ne pas la reposer? C'est de la prendre en note et de ne pas la reposer. Mais si, à partir de la question qui a déjà été posée, un élément additionnel doit' être cherché, c'est autre chose.

M. Lalonde: D'accord.

Le Président (M. Jolivet): Mais allons-y sur la question additionnelle et non pas sur la même question. Je pense que le député de Gatineau, pour lui rendre hommage sur ce point, a accepté, à plusieurs occasions hier, de reformuler sa question qui est devenue recevable. C'est, je pense, la seule façon d'agir.

M. Paradis: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): Je ne voudrais pas qu'on passe la matinée sur cela, s'il vous plaît!

M. Lalonde: Non, non. Il n'est pas question de cela. Absolument pas.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: M. le Président, une précision quant aux événements postérieurs au règlement. J'ai ici la transcription de la commission parlementaire, le ruban 915 du 28 avril 1983. À l'occasion d'une réponse qu'il a donnée à cette commission, le témoin ou l'invité, Me Beaulé, a fait référence à une conversation téléphonique qu'il a eue le 29 mars dernier avec Me Fanning, son client. On sait qu'il est délié du secret professionnel.

C'était une question que lui adressait M. Ciaccia. Ce qu'il nous a dit dans sa réponse, en faisant référence à un événement postérieur, c'est qu'il s'interrogeait sur sa nomination, à savoir si elle était due à Me Gauthier, qui est au bureau du premier ministre, comme procureur du syndicat international. Il a vérifié sa nomination par téléphone après cette date. La réponse qu'il a donnée ici en commission parlementaire est que cela venait du milieu de Montréal et du milieu syndical. Si le député de Brome-Missisquoi ou tout autre membre de cette commission veut avoir des détails, parce que Montréal est une grande ville et le milieu syndical, Me Gauthier y était, si on veut avoir des précisions, est-ce que ce genre de questions, qui découlent des réponses fournies par un témoin sur des événements après le règlement, va être autorisé ou est recevable selon la présidence?

Le Président (M. Jolivet): Ce que je veux vous dire, M. le député, c'est que la question avait trait au mandat qu'il avait reçu à l'époque des décisions à être rendues en 1978 et en 1979. Elle était donc pertinente. Mais ce que je veux dire, c'est que tout ce qui dépasse et qui n'est pas pertinent au mandat n'a pas lieu d'être et, après vérification, je ne changerai pas ma décision là-dessus.

M. Paradis: Est-ce que, selon sa réponse, il nous a dit qu'il avait téléphoné, lui, aux États-Unis...

Le Président (M. Jolivet): M. le député, ce que je vous dis, c'est que, effectivement, dans la réponse qu'il a donnée, compte tenu des besoins de la commission, pour le mandat dans lequel il avait eu une décision en 1978...

M. Lalonde: Cela va.

Le Président (M. Jolivet): ...c'était normal.

M. Lalonde: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): D'une façon ou de l'autre, cela n'avait pas trait à un événement postérieur aux décisions qui étaient rendues.

M. Gratton: Très brièvement, j'aimerais que cela soit clair. Je suis sûr que cela

évitera des retards par la suite. Hier, j'ai été empêché de formuler des commentaires, à la toute fin des travaux, parce que cela ne constituait pas une question, si j'ai bien compris. Par contre, vous venez de dire ce matin que les règlements de l'Assemblée nationale permettent à un député qui a le droit de parole, ici à la commission parlementaire, de faire des commentaires à la condition qu'il n'attaque pas l'intégrité, l'honnêteté ou la réputation du témoin qui est devant la commission. Dois-je comprendre de cela que, si je désire à l'avenir faire un commentaire qui ne comporte pas une question à l'endroit de l'invité qui est devant nous, je pourrai le faire simplement en annonçant que c'est ce que je désire faire?

Je vous pose la question parce que j'ai tenté - je pense que c'était le 21 avril - de le faire de cette façon-là, en annonçant d'avance que je faisais un commentaire et cela a soulevé une question de procédure de la part du ministre indiquant que nous n'étions pas ici pour entendre les commentaires. Je veux qu'on se situe pour qu'à l'avenir, je ne déroge pas aux règlements et à nos directives.

Le Président (M. Jolivet): Vous avez raison et c'est d'ailleurs ce que j'ai répété ce matin, en référence justement à cette fameuse journée de vendredi. Ce que j'ai voulu dire, c'est que vous pouvez tirer les conclusions que vous voulez, sans mettre en péril, comme vous le dites, l'honnêteté et l'intégrité de la personne qui est devant nous. Je n'ai jamais empêché cela. Ce que je veux dire, c'est que la personne qui est devant nous - vous étiez en train de lui poser des questions - voulait que vous lui posiez d'abord votre question, et quand vous aviez eu réponse à la question, vous disiez: Maintenant, j'ai des commentaires à faire, ce sont mes commentaires personnels. Je vous aurais permis de le faire.

M. Gratton: Je vous remercie, M. le Président. Vous ne savez pas combien cela me soulage.

Le Président (M. Jolivet): Me Gadbois a-t-il des renseignements à donner?

M. Duhaime: Oui, je m'excuse. M. le Président, est-ce sur autre chose?

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Duhaime: Oui. Si mon collègue de Marguerite-Bourgeoys était d'accord, on pourrait peut-être régler tout de suite l'horaire de la semaine qui nous reste et celui de la semaine prochaine. À votre demande, M. le Président, nous sommes d'accord des deux côtés pour faire droit à votre requête de ne pas siéger demain, ce qui vous permettra de vaquer à vos occupations dans votre comté de Laviolette.

Les gens de la presse ont également fait état que, puisque mardi est le jour du discours sur le budget, ils seront retenus incomunicado à partir de 11 heures, mardi matin. Je serais parfaitement d'accord pour que nous ne siégions pas mardi. Cela veut dire qu'à l'ajournement de ce soir, les travaux reprendraient mercredi, sous réserve des motions ou avis que pourrait donner le leader du gouvernement à l'Assemblée. Nous allons - je ne dirais pas perdre - devoir sacrifier de précieuses journées. J'ai vérifié de mon côté - je ne sais pas si tous mes collègues seraient disponibles, mais on pourrait très certainement voir à ce qu'il y ait des députés ministériels en nombre suffisant - et on pourrait reprendre les quelques heures perdues le vendredi 13 mai. N'étant pas superstitieux, je n'ai aucun problème à travailler un vendredi 13. On pourrait siéger en matinée et dans l'après-midi. On pourrait arrêter à 18 heures. N'ayant pas la période des questions, cela nous donnerait tout près de sept heures d'affilée. Si vous voulez y penser pour vendredi après-midi prochain, je serais prêt à le faire. On pourrait régler cela tout de suite. Demain, vendredi, nous ne siégerions pas de même que mardi prochain.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Pour ce qui est de vendredi après-midi de la semaine prochaine, j'en avais déjà discuté avec le ministre. Nous sommes d'accord pour vous libérer demain en vertu du règlement que nous appliquons avec libéralité. En ce qui concerne l'idée d'enfermer les journalistes pendant une demi-journée, cela ne nous déplaît pas non plus. Il faut dire qu'on les laisse sortir vers 16 heures ou 18 heures. Jusqu'à maintenant, nous n'avons pas pu accepter lorsque le ministre nous invitait à siéger le vendredi après-midi à cause des occupations de mes collègues et souvent des miennes dans les comtés. Comme nous serons tous retenus à Québec pour la fin de la semaine, à cause d'un conseil général que nous tenons, ce serait possible, sous réserve de le confirmer toutefois, disons, mercredi; cela devrait pouvoir se faire.

Le Président (M. Jolivet): D'accord. Ce qu'on peut toujours dire, c'est que tous les éléments pour les superstitieux sont réunis, c'est un vendredi 13 et au mois de mai en plus.

Me Gadbois a-t-il des commentaires préliminaires à faire?

Témoignages M. André Gadbois

M. Gadbois: M. le Président, je n'ai ni mémoire ni commentaire préliminaire, sauf pour vous dire que j'ai demandé à Me John Lussier, l'avocat en chef de la Société d'énergie de la Baie James, de s'asseoir à côté de moi pour m'assister. Deuxièmement, j'ai été relevé de mon secret professionnel par la Société d'énergie de la Baie James concernant les événements et les matières qui font l'objet du mandat de la présente commission.

Je suis à la disposition des membres de la commission pour répondre à leurs questions.

Le Président (M. Jolivet): Nous vous remercions. Il n'y a pas de problème quant à votre compagnon.

M. le ministre.

M. Duhaime: Merci, M. le Président. Me Gadbois, pour les fins de l'information des membres de la commission, je voudrais que vous nous précisiez exactement quelles sont vos fonctions actuelles?

M. Gadbois: M. le Président, mes fonctions actuelles sont d'être l'avocat en chef d'Hydro-Québec, et ce depuis le 31 janvier 1979, le jour où j'ai été nommé à cette fonction. Cependant, étant donné que j'avais la charge de la coordination du dossier de la poursuite des événements du saccage de la Baie-James, j'ai continué à occuper ce dossier jusque vers la fin du mois de février 1979.

M. Duhaime: Au moment où l'action a été intentée, quelle était votre occupation?

M. Gadbois: À ce moment, j'étais chef du contentieux de la Société d'énergie de la Baie James et, en même temps, j'étais secrétaire intérimaire de la société.

M. Duhaime: L'on parle de février 1976, si ma mémoire est bonne.

M. Gadbois: C'est cela.

M. Duhaime: En plus clair, est-ce que vous avez été au dossier en quelque sorte de cette action en cour du début jusqu'à la fin?

M. Gadbois: C'est exact.

M. Duhaime: Je vais vous poser une question qui vous paraîtra une question de détail, mais qui est importante. Sur du papier à lettres qui fait partie du dossier de la SEBJ on retrouve votre nom avec des noms d'associés professionnels dans la pratique du droit. Est-ce que je peux conclure de cela que vous avez d'autres activités professionnelles ou si vous êtes au service exclusif tantôt de la SEBJ ou tantôt d'Hydro-Québec?

M. Gadbois: La société dont je fais partie, en fait, forme le contentieux d'Hydro-Québec et de la Société d'énergie de la Baie James, c'est-à-dire que nous nous occupons des affaires et des problèmes juridiques de l'entreprise dans son sens large. Nous n'avons pas d'autres clients.

M. Duhaime: Vous n'avez pas d'autres clients, donc vous vous occupez des affaires juridiques en général. Est-ce que vous n'avez pas été aussi, à un certain moment, secrétaire de la SEBJ?

M. Gadbois: Oui, j'ai été secrétaire intérimaire...

M. Duhaime: Oui.

M. Gadbois: ...de la Société d'énergie de la Baie James depuis le début de 1973 jusqu'à 1979 inclusivement. Je devrais dire que c'est un intérim qui a duré longtemps, mais c'est une question historique. Le secrétariat de la Société d'énergie de la Baie James, au début, était conduit par le secrétaire de la Société de développement de la Baie James et, vers l'année 1973, il y a eu un changement et le conseil d'administration de la société m'a demandé d'agir temporairement comme secrétaire jusqu'à ce qu'un secrétaire permanent soit nommé. Le choix de ce secrétaire a pris quelque temps à être déterminé. (10 h 45)

M. Duhaime: Maintenant, Me Gadbois, pendant tout ce litige qui est intervenu devant les tribunaux à partir de février 1976, l'action intentée à partir du saccage de 1974 jusqu'au règlement hors cour de mars 1979, est-ce que, durant toute cette période, un jour ou l'autre, M. René Lévesque, premier ministre du Québec, aurait communiqué avec vous au sujet de ce dossier?

M. Gadbois: Aucunement, M. le Président.

M. Duhaime: Est-ce que Me Jean-Roch Boivin l'aurait fait?

M. Gadbois: Non plus, M. le Président.

M. Duhaime: Est-ce que Me Yves Gauthier a communiqué avec vous pour parler de cette affaire?

M. Gadbois: Je crois, une fois. C'était à l'automne. Je ne peux pas vous donner la

date, mais c'était à l'automne 1978. J'ai eu la visite à mon bureau d'un monsieur Yves Gauthier qui s'est présenté comme ex-tuteur du syndicat 791 et qui est venu me voir pour exposer les difficultés dans lesquelles se trouvait le syndicat face à l'action qu'on avait instituée contre lui.

Il m'a fait valoir certains motifs pour lesquels il disait qu'il ne convenait pas qu'Hydro-Québec continue sa poursuite contre le syndicat et je lui ai dit que le conseil d'administration de la Société d'énergie de la Baie James avait mandaté le bureau Geoffrion et Prud'homme pour agir, prendre la poursuite, instituer l'action. Je lui ai suggéré qu'il communique avec les avocats de Geoffrion et Prud'homme. La visite a duré à peu près dix minutes et elle n'avait pas été annoncée. Je me souviens vaguement de ce monsieur Gauthier qui était accompagné d'une autre personne que je ne connaissais pas et que je ne pourrais nommer.

M. Duhaime: Alors, vous situez cela à l'automne de 1978?

M. Gadbois: Oui. C'est peut-être au mois d'octobre, novembre ou décembre, je ne sais pas. La raison pour laquelle je dis ceci, c'est que c'était sur la fin de l'après-midi, il faisait noir dehors et la lumière de mon bureau était allumée. Alors, je ne peux vous dire autrement.

M. Duhaime: Est-ce que vous auriez eu des conversations téléphoniques à un moment ou à l'autre, soit avant ou après cette rencontre, avec Me Yves Gauthier?

M. Gadbois: Pas que je me souvienne.

M. Duhaime: Maintenant, pour les fins de la responsabilité de ce dossier - je comprends qu'au contentieux d'Hydro-Québec comme à celui de la SEBJ il doit y avoir plusieurs dizaines de dossiers - lorsque la corporation décide d'aller à l'extérieur pour confier un mandat à des procureurs, soit pour prendre action ou faire valoir des moyens de défense, je voudrais que vous nous disiez, pour qu'on le connaisse exactement, ce que devient à ce moment le rôle du contentieux d'Hydro-Québec lorsqu'un mandat est confié à l'extérieur, à une firme d'avocats dans la pratique privée, comme un mandat a été confié à la firme Geoffrion et Prud'homme pour s'occuper des intérêts de la SEBJ dans la poursuite qui a été intentée. Que devient votre rôle à ce moment?

M. Gadbois: Lorsqu'un dossier est confié à une étude de l'extérieur dans les cas exceptionnels - parce que normalement le contentieux donne ou essaie de donner un service complet à la société ou à Hydro-

Québec - l'avocat qui a la charge du dossier - comme j'en avais la charge - agit comme coordonnateur entre la société et le bureau d'avocats qui s'occupe du dossier. Je faisais donc la coordination entre le président-directeur général de la Société d'énergie de la Baie James ou le conseil de la Société d'énergie de la Baie James et les avocats qui s'occupaient du dossier dans l'étude extérieure.

M. Duhaime: Cela veut dire que la responsabilité première du dossier, quant à faire valoir des opinions, par exemple, la démarche à suivre, la stratégie, les discussions, les négociations, etc., ne relèvent pas à ce moment de votre bureau du contentieux comme tel mais du bureau des procureurs à qui le mandat a été confié?

M. Gadbois: C'est cela, M. le Président. Cela ne relève nullement du contentieux à ce moment-là.

M. Duhaime: Je n'ai pas d'autres questions pour l'instant, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. Gadbois, je ne vous demanderai pas si vous avez été surpris d'être convoqué; on s'est aperçu, à mesure qu'avançait le scénario de ce règlement, que vous étiez, en quelque sorte, une plaque tournante. Les avocats de Geoffrion et Prud'homme nous ont dit qu'ils communiquaient avec vous; en fait, vous faisiez la liaison, comme on dit dans le métier. Alors, c'est pour cela qu'on a cru bon de vous poser quelques questions.

Donc, votre fonction dans le règlement hors cour était d'être le lien, si je comprends bien, avec les avocats que la société avait engagés.

M. Gadbois: C'est exact, M. le Président.

M. Lalonde: Je ne sais pas si vous avez entendu Me Aquin ou d'autres avocats du bureau Geoffrion et Prud'homme, mais je me souviens sûrement de Me Aquin qui disait que ce n'est qu'exceptionnellement qu'il communiquait avec d'autres que vous à la SEBJ.

M. Gadbois: C'est vrai.

M. Lalonde: Vous-même, de qui receviez-vous vos instructions? On peut partir de 1976, mais ce qui nous intéresse surtout, c'est l'automne 1978 et le printemps 1979, au moment du règlement.

M. Gadbois: Mes instructions

provenaient, comme je l'ai dit tantôt, du président ou du président-directeur général lorsque le nouveau conseil d'administration est entré en fonction ou du conseil d'administration lui-même ou, sur la fin de l'époque en question, du président du conseil lui-même.

M. Lalonde: Alors, pour ma bonne compréhension, à compter du 1er octobre 1978, au moins, il s'agissait de M. Claude Laliberté, président-directeur général de la SEBJ - je vous ferai grâce des noms de tous les membres du conseil d'administration - et de M. Saulnier, président du conseil?

M. Gadbois: C'est exact.

M. Lalonde: M. Lucien Saulnier. J'aimerais qu'on parle de l'opinion des avocats américains du 9 novembre 1978, qui vous a été remise, je pense, par les avocats de Geoffrion et Prud'homme. Est-ce qu'on s'entend sur le document dont on parle?

M. Gadbois: Je l'ai devant moi, M. le Président.

M. Lalonde: Vous l'avez devant vous. Je vois une copie d'un document qui a sans doute été déposé par Geoffrion et Prud'homme ou peut-être par la SEBJ; il s'agit d'une lettre qui vous a été adressée le 9 novembre 1978, par Me Michel Jetté, et qui se lit comme suit: "Cher confrère, veuillez trouver sous pli le mémoire que nous avons reçu de Me Wade V. Mallard, à la suite de la demande que nous avions formulée à son étude légale". Est-ce que vous avez remis ou communiqué cette opinion au président-directeur général, M. Laliberté?

M. Gadbois: Non, M. le Président, la raison étant que cette opinion était une opinion de fond sur laquelle Geoffrion et Prud'homme avaient basé l'opinion qu'ils avaient rendue au conseil d'administration le 5 janvier, et les opinions suivantes. En d'autres mots, j'avais jugé que les matériaux - si je peux les appeler comme cela -légaux, soit la jurisprudence ou les opinions d'arrière-fond, ne devraient faire partie du dossier présenté aux administrateurs de la SEBJ pour ne pas appesantir le dossier ou ne pas confondre.

M. Lalonde: Alors, vous considériez cette opinion comme un document sur lequel s'était appuyée l'opinion de Geoffrion et Prud'homme. D'après vous, si je vous comprends bien, ce qui était important de communiquer, c'était le résultat, en fait, le produit fini qui était l'opinion de Geoffrion et Prud'homme?

M. Gadbois: C'est exact.

M. Lalonde: Je vous traduis bien. Donc, je vous pose la question: Est-ce que vous l'avez communiquée à d'autres qu'à M. Laliberté, c'est-à-dire à M. Saulnier, par exemple?

M. Gadbois: Cette opinion n'est ressortie qu'au début de février, lorsque la demande du conseil allait plus loin que simplement les liens de responsabilité des syndicats du Québec. En d'autres mots, lorsque le conseil s'est posé la question: Si on obtient le jugement, que fera-t-on avec ce jugement, à ce moment, ces opinions sont devenues importantes. À la demande de M. Saulnier, le président du conseil, vers le milieu de février, j'ai repassé les opinions qui nous avaient été données par Geoffrion et Prud'homme, ainsi que les opinions américaines pour faire valoir ou ressortir les points difficiles de faire exemplifier ou de faire valoir un jugement rendu au Québec aux États-Unis.

M. Lalonde: Est-ce qu'on - je le fais exprès pour employer le mot "on", je vous demanderai de qui il s'agit si la réponse est affirmative - vous avait demandé spécifiquement de faire ressortir les points difficiles?

M. Gadbois: Le président du conseil, M. Saulnier, me l'avait demandé.

M. Lalonde: Vers quelle époque? M. Gadbois: Vers le 15 février.

M. Lalonde: Donc, cette opinion ne faisait pas partie des documents qui ont été remis aux membres du conseil d'administration. Je pense que la première fois que les nouveaux membres du conseil d'administration avaient un dossier, c'est à la réunion du 11 décembre 1978. Cette opinion n'était pas dans ces...

M. Gadbois: Non, elle n'y était pas, M. le Président.

M. Lalonde: ...dossiers. Je vais continuer un peu au sujet de cette opinion et on reviendra dans le temps. Votre propre opinion du 19 février. C'est bien cette date?

M. Gadbois: C'est bien celle-là.

M. Lalonde: Elle ne faisait pas état, non plus, de cette opinion juridique américaine?

M. Gadbois: Elle faisait surtout état de la seconde opinion américaine.

M. Lalonde: Mais pas de celle-là?

M. Gadbois: Mais pas de celle-là, non.

M. Lalonde: Bon! Si je pose la question, c'est qu'on a cru, à un moment donné, que Geoffrion et Prud'homme - cela a été nié ici par Me Jetté et je pense qu'on a démontré que c'était faux, j'en suis satisfait - dans leur opinion du 19 février, la même date que la vôtre, dans une lettre, en mentionnant tout à coup, d'après nous, dans le déroulement des choses, le Norris-La Guardia Act, avaient changé leur opinion. D'après vous, il n'y a pas eu de changement d'opinion à ce moment?

M. Gadbois: Aucunement. Lorsque M. Saulnier m'a demandé de regarder les opinions et de faire ressortir les points difficiles de faire exemplifier un jugement aux États-Unis, j'avais préparé l'opinion du 19 février. J'ai jugé bon - en fait, je l'aurais fait de toute façon - de la faire examiner par Geoffrion et Prud'homme. En fait, c'est Me Jetté qui l'a examinée et il lui est venu à l'idée que je n'avais pas été assez loin. En d'autres mots, j'avais dit que faire exemplifier un jugement aux États-Unis causerait des difficultés. Mais, il y avait plus que simplement les difficultés d'exem-plification; il y avait également des difficultés de droit de base. Il a relevé ce qui était contenu dans la première opinion américaine. Il a bien fait, évidemment. Les deux opinions se complètent.

M. Lalonde: Maintenant, je vais passer quelques réunions avec vous à compter du 27 novembre 1978. Vous étiez secrétaire, je pense, jusqu'à la réunion du 6 février 1979 inclusivement?

M. Gadbois: C'est exact.

M. Lalonde: À ce moment-là, vous avez changé de fonction.

M. Gadbois: C'est cela.

M. Lalonde: Vous avez été remplacé par Me...

M. Gadbois: Me Bernier. (11 heures)

M. Lalonde: ...Bernier. À la réunion du 27 novembre 1978, il apparaît que M. Laferrière, un des membres du conseil d'administration, a soulevé un certain nombre de questions sur la poursuite - qui était alors la poursuite, parce qu'il n'était pas question de régler hors cour - d'un peu plus de 31 000 000 $ de la SEBJ contre des syndicats et des individus à la suite du saccage de la Baie-James, comme on l'appelle.

Naturellement, c'est vous qui avez composé, je suppose, le procès-verbal. Alors, je ne vous demande pas s'il est complet. On sait qu'un procès-verbal n'est qu'un procès-verbal. Est-ce qu'en vous inspirant du procès-verbal et de votre mémoire vous pourriez nous dire si d'autres questions ont été soulevées par M. Laferrière à ce moment? Je pense que le procès-verbal fait état de la capacité de payer et du lien de droit. Est-ce que, par exemple, la paix industrielle sur le chantier a été soulevée?

M. Gadbois: Je ne me le rappelle pas, M. le Président. En fait, la demande de M. Laferrière est venue parce que M. Laferrière était absent de la réunion qui précédait cette réunion où le conseil d'administration avait voté un crédit de 500 000 $ pour pourvoir aux frais judiriques qui seraient entraînés par la poursuite l'année suivante, c'est-à-dire en 1979. M. Laferrière étant absent, il est venu à la réunion suivante et, dans ce qu'on appelle les affaires découlant de la dernière assemblée, il a constaté l'approbation de ce crédit. Alors, il a soulevé cette question pour approfondir un peu plus les motifs sur lesquels était fondée l'action qui avait été instituée par la Société d'énergie de la Baie James.

M. Lalonde: Je vais vous demander si vous avez participé à la préparation de ce cahier que la SEBJ nous a remis.

M. Gadbois: Je n'y ai pas participé directement, n'étant plus détenteur des registres de la société d'énergie; d'autres l'ont fait.

M. Lalonde: Nous avons présumé ici que les seuls extraits de procès-verbaux qui sont contenus dans les livres de la SEBJ pour cette période et qui concernent le règlement hors cour nous ont été remis.

M. Gadbois: Votre présomption est bonne. J'ai eu l'occasion, évidemment, de repasser à fond ce cahier et je peux vous confirmer que c'est exact.

M. Lalonde: C'était le but de ma première question, à savoir si vous aviez participé à la préparation de ce cahier. Je comprends que vous l'avez vérifié même si vous ne l'avez pas préparé.

Je m'excuse de revenir sur un sujet que je pensais avoir complété, c'est-à-dire l'opinion du 9 novembre, mais vous avez participé au rapport interne - ce qu'on appelle le rapport interne confidentiel - qui a été soumis à la réunion du 9 janvier. Vous avez participé à sa préparation, votre nom apparaît. Est-ce exact?

M. Gadbois: En fait, je crois que j'ai

fait la majeur partie de la rédaction de ce rapport, avec l'aide, évidemment, des autres personnes qui sont mentionnées à la fin du rapport.

M. Lalonde: Ce rapport interne, je ne le lirai pas ici, car il y a certains passages qui ont été lus par plusieurs de mes collègues, qui confirment, par exemple, qu'il serait bon que la poursuite soit continuée, justement, pour démontrer le sérieux de la SEBJ dans cette poursuite en cour et, par voie de conséquence, assurer la paix sur le chantier. Il y a aussi toutes sortes d'autres considérations. Est-ce que ce rapport interne tient compte de l'opinion du 9 novembre, dont on ne connaissait pas l'existence et qui revient le 19 février 1979?

M. Gadbois: Ce rapport était basé essentiellement sur les opinions qui avaient été remises par Geoffrion et Prud'homme. Je ne crois pas que nous soyons allés autant dans le détail que de tenir compte de l'opinion américaine. Le rapport avait été préparé à la demande du président-directeur général, M. Laliberté, à la suite de la réunion du conseil d'administration du mois de novembre, pour expliquer la situation aux membres du conseil, leur donner l'aspect général du fondement de l'action, les circonstances qui ont motivé l'action et des détails. Normalement, un conseil ne connaît pas réellement tous les détails de l'action, mais il est au courant par la voie des journaux ou autrement. C'était pour leur information de façon que, à cette réunion du mois de janvier, durant laquelle on a considéré une seconde opinion de Geoffrion et Prud'homme, tous les administrateurs puissent être au même diapason.

M. Lalonde: Oui. Quand je disais "tient compte", je voulais dire que... Je vais vous poser la question autrement: Ce rapport interne est-il conforme à l'opinion du 9 novembre? Est-ce conforme? Est-ce que ça reflète...

M. Gadbois: Cela ne fait pas mention... M. Lalonde: Non.

M. Gadbois: ...de cette opinion-là. Mais, en fait, cela en tient compte, parce que l'opinion de Geoffrion et Prud'homme en tenait compte.

M. Lalonde: Je vous remercie. Est-ce que, à votre connaissance - si vous n'en avez pas eu connaissance, vous me le direz - la paix industrielle du chantier était acquise à la fin de 1978, comme M. Boyd, je pense, nous l'avait dit ici?

M. Gadbois: Je crois bien que oui. Le chantier était redevenu paisible et les travaux s'accéléraient.

M. Lalonde: Et encore là - c'est selon votre connaissance seulement que je vous pose la question - est-ce que la paix industrielle du chantier, d'après vous, était compromise par la poursuite de l'action en cour?

M. Gadbois: Si je me fie aux conclusions du rapport que nous avons fait, nous croyions qu'il était essentiel de faire déterminer par un tribunal extérieur les responsabilités des parties pour le saccage. Les gestionnaires de l'entreprise qui ont signé le rapport avec moi étaient de cette opinion et ils y ont participé.

M. Lalonde: Je m'excuse, je me suis probablement mal exprimé, quoique votre dernière réponse soit utile aussi, mais je vais poser la question autrement. En fait, votre opinion était que c'était mieux de poursuivre et de laisser un tribunal décider. Mais est-ce que, d'après vous, cette poursuite de la cause en cour compromettait cette paix industrielle dont vous venez de dire qu'elle était déjà acquise à la fin de 1978?

M. Gadbois: Nous n'avions pas d'indication que cela compromettait cette paix.

M. Lalonde: Je vous remercie. J'aimerais vous poser une autre question, un peu dans la foulée - comme dirait l'ancien ministre de l'Éducation - des questions du ministre, en ce qui concerne les communications que vous auriez pu avoir. Vous avez fait état d'une rencontre avec deux personnes et vous en avez identifié une, Me Gauthier. Je ne vous demanderai pas si celui qui l'accompagnait était petit, chauve et fumait beaucoup.

Des voix: Ah! Ah! Ah!

M. Gadbois: Tout ce que je peux vous dire, c'est qu'il avait un habit foncé, c'est tout.

M. Lalonde: J'aimerais savoir si vous avez eu des conversations avec l'ancien ministre, M. Joron, ou son chef de cabinet d'alors, M. Dumas?

M. Gadbois: Jamais, M. le Président. M. Claude Dumas?

M. Lalonde: Oui, c'est Claude Dumas, je pense, le nom de son chef de cabinet d'alors?

M. Gadbois: Voici. Claude Dumas, pas au sujet du saccage de la Baie-James, non.

M. Lalonde: Non. Est-ce que vous avez été témoin - j'insiste, je veux répéter parce que je ne vous demande pas, maintenant, si ce sont des communications que vous avez eues - de communications entre, d'une part, M. Laliberté et - là, j'ai toute une série de noms - Me Beaulé?

M. Gadbois: Non.

M. Lalonde: Me Jasmin?

M. Gadbois: Oui.

M. Lalonde: Je reviendrai à Me Jasmin, pour le contenu, si vous voulez. M. Boivin?

M. Gadbois: Non.

M. Lalonde: M. Gauthier?

M. Gadbois: Non plus.

M. Lalonde: Je parle de M. Boivin, du cabinet du premier ministre, ainsi que de Me Gauthier.

M. Gadbois: Je comprends. Non plus.

M. Lalonde: Ou d'autres personnages politiques du gouvernement, en particulier M. Joron qui était, à cette époque, ministre de l'Énergie?

M. Gadbois: Non plus, M. le Président.

M. Lalonde: Revenons à Me Jasmin. Vous avez été témoin d'une communication ou de plusieurs? Combien?

M. Gadbois: J'ai été témoin, selon mon souvenir, d'une réunion qui a eu lieu...

M. Lalonde: Ah oui!

M. Gadbois: ...au bureau du président-directeur général au début du mois de janvier, c'est-à-dire le 18.

M. Lalonde: C'est le 17 janvier, je pense.

M. Gadbois: Le 17 janvier.

M. Lalonde: À votre connaissance, M. Laliberté n'a pas, devant vous, eu d'autres communications? Je ne parle pas seulement de réunions, mais d'appels téléphoniques avec l'un ou l'autre de ces messieurs.

M. Gadbois: Pas à ma connaissance, M. le Président.

M. Lalonde: Je reviendrai à la rencontre du 17 janvier plus tard. Il y avait d'autres personnes. Je pense qu'il y avait aussi des représentants de l'étude Geoffrion et Prud'homme. On a fait état de cette rencontre ici, auparavant.

M. Gadbois: C'est cela. Il y avait Me Cardinal et Me Aquin...

M. Lalonde: C'est cela.

M. Gadbois: ...qui participaient à cette rencontre.

M. Lalonde: On reviendra, si vous voulez, à la réunion du 17 janvier. Je voudrais connaître les circonstances qui ont entouré la demande d'ajournement du procès. Si vous permettez, M. le Président, un petit préambule non inutile, le procès commençait le 15 janvier 1979. On nous a dit ici, je pense, que Me Cardinal - le 15 janvier, si je comprends bien, était un lundi - en fin de semaine, donc, le samedi ou le dimanche précédent, aurait reçu un appel téléphonique - je vous demande si c'est vous - qui disait essentiellement que les avocats de la défense allaient demander un ajournement du procès, c'est-à-dire que le procès ne commence pas. Deuxièmement, on demandait à l'étude Geoffrion et Prud'homme d'acquiescer à cette demande d'ajournement. Je pense - on pourra me corriger si je fais erreur - qu'on a demandé à la firme Geoffrion et Prud'homme si cette demande d'ajournement lui avait été communiquée directement par les avocats des défendeurs. Je crois que la réponse était négative. Avec qui, à votre connaissance, les avocats des défendeurs - je présume que c'est Me Jasmin et/ou Me Beaulé - ont-ils communiqué à la SEBJ pour faire cette demande d'ajournement?

M. Gadbois: Si vous me le permettez, M. le Président, je devrai revenir une couple de jours avant, au 10 janvier, en fait, où il y a eu une rencontre entre Me Rosaire Beaulé et Me Jetté. Me Beaulé aurait fait part à Me Jetté d'une proposition de règlement. Ce n'était pas réellement une proposition, c'était une ouverture plutôt, où on avait mentionné une somme de 250 000 $.

M. Lalonde: Si vous me permettez de vous interrompre, est-ce la rencontre fortuite dans un restaurant, dont on a parlé?

M. Gadbois: C'est celle-là. Le lendemain matin, le 11 janvier, je suis avisé par Me Cardinal de cette rencontre. Je passe à son bureau pour rencontrer Me Jetté et obtenir des détails sur la rencontre. Me Jetté appelle Me Beaulé devant moi et lui demande de confirmer la conversation qu'il a eue avec lui, la veille. Me Beaulé a apparemment confirmé cette conversation; cependant, ce n'étaient pas des offres

réelles, si vous voulez. C'était simplement une ouverture. J'en ai fait part au président-directeur général, M. Laliberté. M. Laliberté nous a demandé, voyant qu'il y avait une certaine activité qui commençait du côté d'un des défendeurs, puisque la fin de semaine arrivait, de rester disponibles au cas où il y aurait une proposition réelle. J'ai alors demandé les numéros de téléphone des deux procureurs, c'est-à-dire Me Cardinal et Me Aquin, afin de pouvoir les rejoindre. (11 h 15)

Sur la fin de l'après-midi du vendredi 12 janvier, j'ai reçu un appel téléphonique de Me Jasmin qui - les événements sont très loin - me dit qu'il aurait communiqué avec Me Cardinal, qui quittait le bureau à peu près au moment où il a communiqué avec lui, pour lui faire part du fait que le conseil de son syndicat devait se réunir cette fin de semaine-là et qu'il y aurait peut-être une proposition de règlement. Il a demandé à Me Cardinal s'il y avait possibilité qu'il obtienne une remise de la cause qui devait commencer le 15, c'est-à-dire le lundi suivant. Me Cardinal lui aurait dit: Je n'ai pas l'autorité de vous donner cela. Appelez donc Me Gadbois. Je vous relate ce que Me Jasmin m'aurait dit au début de son appel téléphonique. Me Jasmin m'a ensuite demandé s'il aurait possibilité qu'on ne s'oppose pas à une remise. Je lui ai dit que je verrais ce que je pourrais faire. J'en ai discuté avec le président-directeur général de la société et, comme Me Cardinal n'était pas disponible cet après-midi-là, je l'ai rappelé le lendemain matin pour lui dire que la société d'énergie ne s'opposerait pas - pas qu'elle appuierait - à une demande de remise, si elle avait lieu, pour autant que cette demande était raisonnable, c'est-à-dire à la condition que ce ne soit pas une remise sine die.

M. Lalonde: Je vous remercie de ces précisions. Cela ouvre une parenthèse que j'aimerais qu'on explore ensemble. Est-ce que Me Jasmin, procureur des défendeurs, et Me Beaulé communiquaient avec vous à propos de la cause?

M. Gadbois: Je n'ai jamais parlé à Me Beaulé, sauf lorsque je le voyais à la cour, parce que j'ai assisté à plusieurs des sessions. Je ne lui ai jamais parlé privément et il ne m'a jamais parlé de cette cause. Me Jasmin a communiqué cette fois-là et non subséquemment, sauf durant la rencontre au bureau du président. Il avait communiqué avec moi précédemment, en 1975, lorsqu'est venue la question du paiement qu'on devait recevoir des assureurs. Autrement, je n'ai pas eu de communications directes. D'ailleurs, j'aurais trouvé drôle que Me Jasmin communique directement avec moi sans passer par les procureurs qui étaient en titre à la cause.

M. Lalonde: Je vous remercie. Le 15 janvier 1979, le procès commence. Les avocats de Geoffrion et Prud'homme nous ont dit qu'ils avaient reçu un mandat d'écouter, à ce moment-là, les propositions de règlement qui pourraient venir des défendeurs. Est-ce que vous pouvez nous dire comment ce mandat vous avait été demandé?

M. Gadbois: Le midi de la première journée de la cause, c'est-à-dire le 15 janvier, les avocats sont allés dîner. J'étais présent à ce lunch-là parce que j'étais à la cour à ce moment-là avec nos procureurs. Me Beaulé a commencé à faire des ouvertures et a posé la question: Est-ce que Geoffrion et Prud'homme pouvait négocier un règlement de la cause? Après avoir fait certaines vérifications nous en sommes venus à la conclusion que le seul mandat que nous avions était d'écouter pour savoir s'il y avait des propositions, et j'en ai fait part à Me Cardinal et à Me Aquin.

M. Lalonde: Excusez-moi. Quand vous dites: La seule conclusion à laquelle nous sommes venus...

M. Gadbois: N'ayant pas de mandat de négocier.

M. Lalonde: ..."nous", c'est M. Laliberté. L'avez-vous consulté à ce moment?

M. Gadbois: Je ne me le rappelle pas, mais j'ai dû le consulter.

M. Lalonde: Si je comprends bien votre réponse, cela n'a pas fait l'objet d'un mandat formel écrit.

M. Gadbois: Aucunement. D'ailleurs, ce mandat a été confirmé le 17, lors de notre réunion et des conversations que nous avons eues à la fin de la réunion. Il se peut que, lorsque cette conversation a commencé, j'aie communiqué par téléphone avec le P.-D.G., mais je ne me le rappelle pas.

M. Lalonde: Venons-en à la réunion du 17, vous étiez déjà rendu là. Vous êtes présent avec Me Jasmin, M. Laliberté, Me Cardinal et Me Aquin.

M. Gadbois: C'est cela.

M. Lalonde: Et vous-même?

M. Gadbois: Et moi-même.

M. Lalonde: II n'y avait pas d'autres personnes à cette réunion?

M. Gadbois: Pas d'autres.

M. Lalonde: On nous a dit que Me Jasmin avait demandé d'avoir l'occasion de faire valoir - et je cite - "certains arguments qui ne sont pas nécessairement de nature juridique". Est-ce que vous vous souvenez quels étaient ces arguments qui ne sont pas de nature juridique?

M. Gadbois: Heureusement, j'ai conservé certaines notes et c'est là-dessus que ma mémoire repose. Comme je vous le disais tantôt, se rappeler d'événements qui peuvent parfois sembler des événements ordinaires, c'est très difficile, surtout quand on ne peut pas se souvenir de ce qu'on a mangé la veille. Cependant mes notes indiquent qu'il avait parlé de paix syndicale sur le chantier, évidemment. Il disait qu'il avait des difficultés, qu'il n'était engagé par le syndicat que de semaine en semaine et qu'il y avait possibilité que le syndicat, finalement, ne soit pas représenté à l'action, qu'il pouvait retirer ses représentants du chantier si, évidemment, on continuait à poursuivre l'action et qu'on le mettait dans l'impossibilité de continuer en affectant les cotisations syndicales. Il a parlé de faillite, etc. Il a fait valoir probablement tous les arguments qui permettaient de dire: Pourquoi poursuivez-vous le syndicat, et un syndicat si pauvre?

M. Lalonde: Quand vous avez parlé de paix syndicale, au meilleur de votre souvenir, est-ce que Me Jasmin a indiqué de quelle façon cette paix syndicale pouvait être compromise, brisée?

M. Gadbois: II n'en a pas parlé. Il a dit que la paix syndicale existait alors. Mais, sur le simple fait d'en avoir parlé, je ne veux pas donner d'opinion.

M. Lalonde: Sur les 23 et 30 janvier, nous avons des petits problèmes ici à cette commission. On sait qu'on a parlé du règlement, mais le procès-verbal de ces deux réunions ne reflète aucune décision, enfin, aucune discussion de ce règlement. Prenons le 23 janvier. Est-ce que vous avez souvenir de ce qui a été discuté, d'après vos notes, par exemple, du contenu des discussions à propos du règlement?

M. Gadbois: Le 23 janvier, en fait, c'est la première fois que le conseil d'administration voyait les offres de règlement qui avaient été reçues, et de la part de Me Jasmin et de Me Beaulé. Il y a eu, évidemment, des discussions au conseil parce que, le 24, j'écrivais à Geoffrion et Prud'homme pour leur faire part de certaines demandes du conseil.

Je dirais que les motifs pour lesquels le procès-verbal ne fait pas mention de ces discussions au moins - sans les préciser, il aurait pu les mentionner - c'est que le 24 janvier, dès le lendemain, CKAC annonçait publiquement que l'action était réglée pour 125 000 $. Vu que le conseil d'administration n'avait donné aucun mandat de règlement a ce moment ou de négociation pour régler, le juge ayant fait des commentaires le matin du 24, le conseil d'administration a jugé bon de ne rien inclure dans le procès-verbal. C'est pour cela, je crois; c'est le motif pour lequel les réunions des 23 et 30 janvier ne contiennent pas de mention du fait qu'il y ait eu des délibérations vis-à-vis de l'action.

M. Lalonde: Oui, je comprends. Cela nous a été expliqué. Mais, pour le contenu des discussions, est-ce que le conseil d'administration, d'après votre souvenir - je comprends que vous pouvez ne pas vous en souvenir du tout - était plutôt favorable au règlement hors cour à ce prix?

M. Gadbois: Je ne pourrais pas dire que le conseil d'administration était favorable ou non. Ce que le conseil d'administration a demandé, c'est plus de précisions sur le plan légal, sur les moyens de payer du syndicat; il a également demandé ou suggéré que des modifications soient apportées dans les déclarations de transactions que Me Beaulé avait déposées. C'est constaté par la lettre du 24 janvier que j'ai adressée à Geoffrion et Prud'homme et qui fait partie du dossier.

M. Lalonde: Est-ce qu'on peut dire que la lettre du 26 janvier de Geoffrion et Prud'homme donnait suite à cette demande de précisions du conseil d'administration?

M. Gadbois: C'est exact.

M. Lalonde: Si on vient au 30 janvier maintenant, le 30 janvier, le procès-verbal ne fait pas état, non plus, de discussions sur le règlement. Mais ici - plusieurs l'ont mentionné, y compris le président du conseil d'administration, M. Saulnier, le président d'alors - est-ce que vous pouvez nous donner un compte rendu rapide, succinct, de ce qui a été discuté à la lumière des nouvelles informations obtenues entre-temps, entre le 23 et le 30 janvier?

M. Gadbois: Autant que je me souvienne, la discussion sur la question du saccage, à la réunion du 30 janvier, a été assez brève. M. Giroux a aidé à mon souvenir lorsqu'il a déclaré qu'il avait proposé ou suggéré au conseil d'administration que le président du conseil et les deux présidents-directeurs généraux d'Hydro-Québec et de la Société d'énergie de la Baie James consultent le premier ministre pour avoir son opinion sur la possibilité d'un

règlement.

M. Lalonde: Je vais vous poser la même question - je l'ai seulement en mémoire, c'est possible que je n'emploie pas les mêmes termes - à propos de la réunion du 30 janvier que celle que je vous ai posée pour le 23. Est-ce que le conseil d'administration, à ce moment, le 30, favorisait, était prêt à accepter un règlement? (11 h 30)

M. Gadbois: Je ne peux me souvenir, n'ayant pas de document sur lequel me reposer, mais je crois qu'à ce moment c'était encore de l'exploration, c'est-à-dire que c'était pour avoir de l'information pour en arriver à une décision, finalement.

M. Lalonde: Je vous remercie. Avant d'arriver à la prochaine réunion, qui est le 6 février, si je comprends bien...

M. Gadbois: C'est exact.

M. Lalonde: ...le 2 février, on a appris ici que M. Boivin, chef de cabinet du premier ministre, a convoqué Me Aquin et Me Cardinal à "luncher" et il les a mis au courant d'une réunion qui a précédé, la veille, entre le premier ministre, M. Boyd, M. Laliberté et M. Saulnier, à laquelle M. Boivin participait. À cette réunion, nous a-ton dit, M. Boivin a annoncé que deux rapports allaient leur être remis: un de Me Beaulé, avocat du syndicat américain, et un de Me Jasmin, avocat des défendeurs canadiens. Si je fais erreur dans ma description, parce qu'il est possible que ce soit vous qui avez mis au courant Mes Geoffrion et Prud'homme de ces rapports, vous pouvez donner la précision. Qui vous a vous-même mis au courant de l'existence de ces rapports et du fait que ces rapports-là seraient remis à Mes Geoffrion et Prud'homme?

M. Gadbois: Je ne connaissais pas l'existence de ces rapports. Toutefois, je dois dire qu'à cette date ou environ, le président du conseil avait formulé le voeu, pour étoffer le dossier, d'avoir peut-être plus de détails sur les difficultés financières des syndicats québécois et des syndicats en général. Je crois que j'ai probablement parlé au téléphone à Me Cardinal le matin du même jour. Mais c'est tout ce que je sais, à ma connaissance. La suite est que j'ai vu quelques jours après les rapports qui nous ont été soumis.

M. Lalonde: Quelques jours après. Pouvez-vous préciser? Était-ce à la réunion du 6 février ou auparavant?

M. Gadbois: C'était le 5 février.

M. Lalonde: Le 5 février. Le 8 février, Me Aquin vous a appelé, nous a-t-il dit. Il nous a décrit que cet appel téléphonique - je ne suggère pas que c'est à votre connaissance - faisait suite à un appel téléphonique de M. Boivin, chef de cabinet du premier ministre, qui s'informait s'il était exact que le syndicat américain refusait de reconnaître sa responsabilité. Me Aquin, d'après ce qu'on nous a dit, vous aurait appelé à ce moment-là et aurait parlé avec vous de cette question de la difficulté d'obtenir du syndicat américain la reconnaissance de la responsabilité. Est-ce exact?

M. Gadbois: C'est exact. En revenant à la réunion du conseil d'administration tenue le 6 février, le mandat qui avait été donné aux procureurs comportait, notamment, que chaque défendeur, que ce soit un organisme ou une personne, reconnaisse sa responsabilité pour les dommages. Le 7 février, j'ai transmis ce mandat à Geoffrion et Prud'homme. J'ai reçu, un peu plus tard dans la même journée, un appel de Me Aquin concernant l'aveu de responsabilité du local 134. Il m'avise qu'il aurait des difficultés à l'avoir. Je lui ai confirmé que c'était nécessaire de l'avoir. Le lendemain, le 8 février, il me rappelle, toujours concernant la même question des aveux de responsabilité, et il me dit que le syndicat américain, c'est-à-dire Me Beaulé, refuse absolument de reconnaître une responsabilité.

Je lui ai répondu à ce moment-là que, évidemment, devant un refus total, il y aurait peut-être lieu de sonder le conseil d'administration de la société et je lui ai dit: Pour l'instant, acceptons ou essayons de voir de cette façon quelles seront les choses et on le soumettra au conseil. À la réunion du 20 février, le conseil a pris connaissance de ces diverses matières et a encore confirmé qu'il voulait avoir l'aveu de responsabilité de tous les syndicats. Ce n'était pas une question de... Mon appel téléphonique avec Me Aquin était simplement pour dire: On verra ce qui arrivera.

M. Lalonde: Je vous remercie de ces précisions. J'avais compris que, selon les témoignages que j'ai entendus jusqu'à maintenant, au cours de cet appel téléphonique du 8 février, vous n'aviez pas tellement insisté sur la reconnaissance ou l'aveu de responsabilité, mais ce n'est pas ce que vous venez de nous dire.

M. Gadbois: Si je peux préciser un peu, je n'ai pas tellement insisté devant le refus absolu de Me Beaulé.

M. Lalonde: Est-ce que vous en avez parlé à M. Laliberté, à ce moment-là?

M. Gadbois: J'ai pu le faire, mais je ne m'en souviens pas.

M. Lalonde: Donc, si vous ne vous souvenez pas de lui en avoir parlé, vous ne vous souvenez sûrement pas de ce qu'il avait dit, fatalement. Étiez-vous au courant des visites que les procureurs, Mes Jasmin et Beaulé, les avocats des défendeurs, faisaient au bureau du premier ministre et de ce qu'on a appris ici par une liste déposée par le premier ministre lui-même à la commission parlementaire?

M. Gadbois: Je l'ai également appris ici.

M. Lalonde: Étiez-vous au courant que vos propres avocats, Geoffrion et Prud'homme, avaient aussi eu des communications comme - précisons - le lunch du 2 février, l'appel téléphonique de Me Boivin, chef de cabinet du premier ministre, à Me François Aquin, du bureau de Geoffrion et Prud'homme? Étiez-vous au courant de cela?

M. Gadbois: Je n'étais pas au courant de ces communications et de ces rencontres. Toutefois, je dois préciser que je savais que Me Cardinal était un ami de Me Boivin et qu'il aurait pu me mentionner, à un moment donné, qu'il arrivait de ou qu'il allait chez Me Boivin, mais cela ne m'aurait pas indiqué qu'il y avait quelque chose d'insolite qui se passait ou autre chose. En d'autres mots, cela fait assez longtemps que je connais Me Cardinal, on a travaillé ensemble dans le dossier de Terre-Neuve, le contrat de Churchill, et je savais qu'il voyait Me Boivin occasionnellement, mais pas plus.

M. Lalonde: J'aimerais que vous apportiez une précision lorsque vous dites que cela ne vous aurait pas paru insolite; je pense que c'est le mot que vous avez employé. Est-ce que, autrement dit, Me Cardinal vous a dit qu'il avait discuté d'un règlement possible avec M. Boivin?

M. Gadbois: Jamais.

M. Lalonde: J'ai mentionné deux communications. Je n'oublie pas les autres, naturellement. Vous avez vous-même parlé de M. Cardinal qui a eu, je crois, deux visites au bureau de M. Boivin. Est-ce que Me Aquin vous a aussi parlé de la visite qu'il a faite et de la communication qu'il a eue avec Me Gauthier, du bureau du premier ministre?

M. Gadbois: II ne m'en a pas parlé.

M. Lalonde: Est-ce que je vous traduis bien en concluant, si vous me le permettez,

M. le Président, que les avocats de Geoffrion et Prud'homme ne vous ont jamais fait rapport des communications qu'ils avaient avec le bureau du premier ministre quant à cette cause?

M. Gadbois: C'est exact, M. le Président.

M. Lalonde: Je vais vous poser une question, Me Gadbois - vous allez peut-être avoir de la difficulté à y répondre, vous le me direz - sur l'évolution, le cheminenent que M. Claude Laliberté, le président-directeur général de la SEBJ, nous a décrit ici à cette commission, qui l'a amené à éventuellement favoriser un règlement hors cour. Je vous demande seulement si à votre connaissance, vous avez été témoin de faits, de conversations qui vous ont fait suivre ce cheminement de M. Laliberté.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Duhaime: Dans un premier temps, je voudrais féliciter le député de Marguerite-Bourgeoys pour la façon dont il pose ses questions ce matin.

M. Gratton: II n'y a rien de changé.

M. Lalonde: M. le Président, question de règlement.

M. Gratton: M. le ministre...

M. Duhaime: Mais je dois, à ce moment-ci, m'opposer...

Le Président (M. Jolivet): M. le député...

M. Lalonde: Je suis l'exemple de mes collègues, tout simplement

Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous plaît: S'il vous plaît!

M. Gratton: La différence se retrouve peut-être chez le témoin, M. le Président.

M. Duhaime: Je ne voudrais pas...

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il vous plaît! Je pense, M. le député de Gatineau, que ce n'était pas nécessaire d'affirmer cela.

M. Gratton: Je le pense, néanmoins, M. le Président.

M. Duhaime: Je vais me convaincre moi-même, M. le Président, de ne pas aller plus loin dans cette voie. C'est bien ressenti, ce que je viens de dire à l'endroit du député

de Marguerite-Bourgeoys.

Maintenant, sur la question qui vient d'être posée, je vais m'opposer, parce que c'est une question qui, à mon sens, est tout à fait irrecevable pour les raisons suivantes. M. Claude Laliberté a témoigné ici. Il a été devant la commission pendant de longues heures, à mon sens, de trop longues heures. Il a donné sa version des faits et son témoignage a été fait ici sous serment en entier.

Ce que vous demandez à Me Gadbois, c'est une opinion personnelle quant à l'évolution ou quant au témoignage rendu par M. Laliberté devant cette commission. Vous demandez à un employé permanent, qui est chef du contentieux à Hydro-Québec et qui, à l'époque, était également un officier de la SEBJ, qui en était secrétaire, de porter un jugement de valeur, parce que c'est vraiment une appréciation que vous avez demandée.

Je n'aurai pas d'objection si vous voulez vous y prendre autrement.

M. Lalonde: Je vais reprendre cela.

M. Duhaime: Mais, si vous tenez à la formuler de cette façon, je vais m'opposer à nouveau.

M. Lalonde: Je prévoyais que j'aurais de la difficulté, M. le Président. J'en avais même avisé Me Gadbois.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: C'était plutôt une question pour situer une autre question plus précise au cas où vous auriez eu un souvenir de faits, de conversations qui vous auraient indiqué cette évolution. Je vous ai posé une question générale, mais je vais y aller plus précisément. Est-ce que M. Laliberté vous a mis au courant personnellement de la rencontre qu'il a eue avec M. Boivin, chef de cabinet du premier ministre, le 3 janvier 1979, réunion à laquelle M. Boivin aurait -et là j'espère que je traduis bien tout ce qu'on a entendu là-dessus - exprimé à M. Laliberté le souhait que le premier ministre voulait un règlement hors cour ou, enfin, que la poursuite soit abandonnée et qu'un règlement ait lieu?

M. Gadbois: Non, M. le Président.

M. Lalonde: Est-ce qu'il en a fait part au conseil d'administration postérieurement, c'est-à-dire après le 3 janvier?

M. Gadbois: Pas en ma présence, M. le Président. (11 h 45)

M. Lalonde: Est-ce que M. Laliberté, au cours de conversations, vous a indiqué qu'il était, à un moment donné - on verra quand, si jamais votre réponse est affirmative - en faveur du fait que la SEBJ cesse de poursuivre les syndicats, enfin, les défendeurs, dans cette cause?

M. Gadbois: Je ne crois pas que M. Laliberté m'ait fait mention, en aucun temps, qu'il était en faveur que la compagnie règle la cause. Il était, évidemment, réceptif à une offre de règlement, puisqu'il nous avait demandé d'être à l'écoute quant à la possibilité de recevoir des offres, mais il n'est pas allé plus loin.

M. Lalonde: Est-ce que vous parlez du 15 janvier?

M. Gadbois: Oui.

M. Lalonde: J'aurais une dernière question - à moins que votre réponse ne m'en inspire d'autres - assez précise. Au ruban 660, M. Saulnier, l'ancien président du conseil d'administration de la Société d'énergie de la Baie James, a dit ceci: "C'est le chef du contentieux de la SEBJ qui faisait les demandes pour obtenir plus d'argent." Je pense que cette question lui avait été posée dans le contexte suivant: Qui négociait les montants? Qui? Qui avait le mandat? Quel était ce mandat, à vous donné, pour aller chercher plus d'argent? Est-ce que c'est exact?

M. Gadbois: En fait, la façon dont je percevais mon rôle comme chef du contentieux, c'était de transmettre les voeux du conseil d'administration aux avocats qui oeuvraient dans le dossier. Ces voeux ont été transmis à au moins deux reprises, suivant la réunion du 6 février et celle du 20 février. La demande du conseil était, le 6 février, d'essayer d'obtenir un montant acceptable pour la société et, le 20 février, d'essayer d'obtenir un montant qui soit substantiellement égal au montant des frais judiciaires que la compagnie avait engagés dans la cause.

M. Lalonde: Avant le 6 février 1979, est-ce que, vous, comme chef du contentieux, aviez un mandat pour parler d'argent, de négociation d'argent, dans un règlement hors cour de cette cause?

M. Gadbois: Aucunement.

M. Lalonde: Je vous remercie, Me Gadbois, de votre collaboration.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Vimont.

M. Rodrigue: M. Gadbois, lors de

l'audition de la cause devant la Cour supérieure, il y a un M. Marcel Audet qui a été appelé à témoigner. Je veux vous demander, si possible, de préciser pour qui travaillait M. Marcel Audet à cette époque et quelle était sa fonction, à l'époque du saccage du chantier de LG 2, bien sûr. Êtes-vous en mesure de le faire?

M. Gadbois: Je ne m'en souviens pas. Il faudrait qu'on vérifie dans le dossier pour voir exactement qui il représentait.

M. Rodrigue: Écoutez, je vais garder la question en suspens et, si c'est possible de le faire au cours de votre témoignage, vous pourrez répondre à la question plus tard.

Lors de la visite de Me Yves Gauthier à vos bureaux, que vous avez mentionnée plus tôt dans votre témoignage, est-ce que M. Gauthier vous a dit ou vous a indiqué qu'il était adjoint au bureau du premier ministre?

M. Gadbois: Je ne le savais pas à ce moment-là, je l'ai appris depuis.

M. Rodrigue: Alors, lorsque M. Gauthier vous a rencontré... Vous rappelez-vous à quelle date?

M. Gadbois: Je ne me souviens pas de la date. C'était à l'automne 1978, autant que je me souvienne.

M. Rodrigue: À l'automne 1978.

M. Gadbois: II ne s'est présenté que comme ex-tuteur du syndicat 791.

M. Rodrigue: Donc, vous l'avez reçu comme ex-tuteur et M. Gauthier - il ne l'était peut-être pas à ce moment-là non plus - n'a pas invoqué de qualité d'adjoint au premier ministre lors de cette rencontre, et vous, vous ne le saviez pas non plus?

M. Gadbois: Aucunement, M. le Président. Même que je me demande... Je n'ai ni vu, ni connu M. Gauthier qui est au cabinet du premier ministre. Réellement, il faudrait que je le voie pour dire si c'est la même personne.

M. Rodrigue: Très bien. Me Gadbois, l'action devant la Cour supérieure a été intentée en février 1976, si je me souviens bien. À votre connaissance, est-ce que le premier ministre du temps, M. Robert Bourassa, avait été consulté par les autorités de la Société d'énergie de la Baie James, avant le dépôt de cette action en Cour supérieure?

M. Gadbois: Je crois que oui. Je me fie sur une déclaration que M. Giroux aurait faite - M. Giroux était alors le président du conseil d'administration de la Société d'énergie de la Baie James - précédemment ou après l'institution de l'action qui a été prise.

M. Rodrigue: Avez-vous appris cela de la bouche même de M. Giroux?

M. Gadbois: Oui.

M. Rodrigue: Vous l'avez appris de la bouche de M. Giroux. Vous rappelez-vous à quel moment?

M. Gadbois: Je ne pourrais pas vous le dire. Je vous ai dit: Probablement juste avant ou après. Je ne le sais pas.

M. Rodrigue: Avant ou après sa rencontre avec M. Robert Bourassa?

M. Gadbois: Non, non. M. Rodrigue: Non?

M. Gadbois: Non, non. Avant ou après l'institution de l'action, en 1976.

M. Rodrigue: L'institution de l'action, donc, autour de février 1976. Est-ce que vous avez discuté avec M. Giroux du contenu de ses conversations avec M. Bourassa, à ce moment-là?

M. Gadbois: Aucunement. C'est une... M. Bourbeau: Question de règlement.

M. Rodrigue: C'est une question de fait, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Oui. Je m'excuse.

M. Rodrigue: Ce n'est pas une question d'opinion.

Le Président (M. Jolivet): Non, non, je sais. C'est simplement pour bien clarifier la situation.

M. Bourbeau: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Laporte, je veux seulement vérifier ce qui ne va pas, pour m'assurer que je suis correct.

M. Bourbeau: Je n'ai pas d'objection à la question, M. le Président, mais je veux souligner qu'on parle de faits qui se sont passés en 1976, donc, qui sont un petit peu en dehors du mandat qui est d'examiner les circonstances entourant la décision du conseil d'administration de régler. Ce sont des

événements de 1979. Je n'ai pas d'objection à ce qu'on parle de 1976, mais on parlera de 1981 aussi, après.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Bourassa.

M. Laplante: S'il y a eu un règlement, M. le Président, c'est parce qu'il y a eu des procédures qui ont été prises. Dans quelles circonstances ces procédures ont-elles été prises pour qu'il y ait eu règlement? Cela fait partie, je crois, des questions du député de Vimont.

M. Lalonde: S'il y a eu procédure, c'est parce qu'il y a eu un saccage. S'il y a eu un saccage, c'est parce qu'il y avait une baie James. S'il y avait une baie James, c'est parce que...

M. Laplante: S'il y a eu un règlement, c'est parce qu'il y a eu...

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M. le député de Vimont. Est-ce que vous aviez bien compris la question?

M. Gadbois: J'ai compris la question. La seule réponse que je puisse vous donner, c'est qu'à un conseil d'administration le président du conseil...

M. Rodrigue: Qui était monsieur? M. Gadbois: ...qui était M. Giroux... M. Rodrigue: Très bien.

M. Gadbois: ...a déclaré qu'il avait consulté le premier ministre relativement à la prise d'action contre les auteurs du saccage.

M. Rodrigue: Si je comprends bien, vous étiez présent à ce conseil d'administration?

M. Gadbois: J'étais secrétaire pendant toute cette période.

M. Rodrigue: Très bien. Est-ce que M. Giroux avait fait part du contenu de sa conversation au conseil d'administration?

M. Gadbois: Non. Il a simplement mentionné qu'il l'avait consulté. C'est tout.

M. Rodrigue: Tout simplement, il a relaté qu'il l'avait consulté.

M. Gadbois: Et le fait que le conseil d'administration ait autorisé l'institution de l'action m'indiquait que c'était favorable.

M. Rodrigue: Que la consultation avec M. Robert Bourassa avait été favorable?

M. Gadbois: C'est exact.

M. Rodrigue: Bon. Mais le contenu comme tel, vous n'êtes pas en mesure d'en parler parce que M. Giroux n'en a pas parlé au conseil d'administration.

M. Gadbois: Aucunement.

M. Rodrigue: Très bien, merci. Lors de l'institution de l'action en février 1976, la réclamation qui est contenue, je pense, dans les documents qui ont été déposés en Cour supérieure est de l'ordre de 31 000 000 $. C'est la réclamation globale qui a été faite par la SEBJ pour des dommages causés sur le chantier. L'action déposée, en février 1976, si je me souviens bien, était d'environ 31 000 000 $. Est-ce exact?

M. Gadbois: C'est exact. Un peu plus que 31 000 000 $.

M. Rodrigue: Avez-vous participé à la préparation de cette action et, en particulier, à la compilation des montants des divers chapitres de la réclamation pour en arriver au total de 31 000 000 $?

M. Gadbois: Je n'ai pas participé directement à l'établissement des montants des dommages...

M. Rodrigue: Des quanta?

M. Gadbois: ...des quanta, si vous voulez. Cela a été fait par nos procureurs, consultant les diverses directions qui étaient responsables soit de la construction ou des assurances, des réclamations et le reste. Je n'ai pas participé à ce côté-là de l'affaire.

M. Rodrigue: Quand vous parlez des procureurs consultant, vous vous référez à?

M. Gadbois: Me Jetté, particulièrement, qui était assisté d'autres avocats de son étude.

M. Rodrigue: Alors, c'est l'étude Geoffrion et Prud'homme qui est au dossier depuis le début?

M. Gadbois: C'est cela.

M. Rodrigue: Pas depuis le début, mais, enfin, qui était là à ce moment-là. Dans l'avis qu'ils vous ont transmis le 26 février 1979 - c'est quand même trois ans plus tard...

M. Gadbois: Je pourrais préciser. C'est peut-être le 26 janvier.

M. Rodrigue: Vous avez raison, c'est le 26 janvier 1979. Je vous remercie de la

correction. Les procureurs Geoffrion et Prud'homme sont donc les mêmes procureurs qui initialement avaient compilé une réclamation de 31 000 000 $. Là, je vous réfère à la page 7 de cet avis, qui est la page 61 du document déposé par les procureurs Geoffrion et Prud'homme, intitulé Correspondance et lettres du cabinet Geoffrion, Prud'homme, contenant leurs opinions. On trouve l'opinion à la page 55 et, à la page 61 du document, les procureurs vous disent ceci - et cela, c'est en 1979, donc trois ans après l'institution de la poursuite - "En résumé, la réclamation totale peut se détailler comme suit: "A. Les postes suivants sont juridiquement fondés et, selon notre opinion, devraient être maintenus." Là, il y en a pour 17 196 419,12 $. "B. Les postes de réclamation suivants, bien que prouvables, risquent d'être rejetés pour raison de force majeure et de non-subrogation; "C. Les postes de réclamation qui suivent sont juridiquement discutables puisqu'ils peuvent être considérés comme des dommages indirects; "D. Le poste suivant est inadmissible; "E. Le poste de réclamation suivant devrait être abandonné; "F. Quant au chapitre des assurances, étant donné les récentes révisions de vos assureurs, il nous est impossible à l'heure actuelle de déterminer le montant prouvable."

Est-ce que je dois comprendre que les mêmes procureurs qui, au départ, avaient déposé une poursuite de 31 000 000 $, dans cet avis du 26 janvier, étaient en train de vous dire à la SEBJ que, finalement, ils n'étaient en mesure de prouver que 17 196 419,12 $?

M. Gadbois: C'est exact, mais je crois que je devrais apporter une précision à ce moment-ci. C'est que les procureurs Geoffrion et Prud'homme n'ont été introduits dans le dossier qu'à la fin de septembre 1975. Le conseil d'administration de la société d'énergie avait, le 1er octobre 1974, mandaté l'étude Pouliot, Dion et Guilbault pour donner une opinion à la société d'énergie et prendre action, s'il y avait lieu. Toutefois, cette étude n'avait pas pu mettre sur pied... Je crois que cette situation-là est relatée dans le rapport qui a été présenté à la réunion du 7 janvier 1979 au conseil d'administration. Ce n'est qu'au cours du mois de septembre 1975 que nous sommes venus à la conclusion que le temps passait et qu'il fallait absolument faire quelque chose pour rectifier la situation. Nous avons donc suggéré à Me Pouliot que le bureau de Geoffrion et Prud'homme, qui semblait avoir les ressources nécessaires et que nous connaissions, pouvait apporter de l'aide et agir conjointement. Le bureau n'avait que du mois de septembre jusqu'à la prescription, c'est-à-dire au mois de mars de l'année suivante, pour préparer l'action, aller dans tous les fondements et faire ressortir les dommages. Devant ce court laps de temps, ils ont tout mis dans l'action, c'est-à-dire qu'ils ont mis ce qu'on appelle communément le paquet, quitte à prouver la validité ou la non-validité, plus tard, de certains chefs de réclamation. (12 heures)

M. Rodrigue: Si je vous comprends bien, ils n'ont pas couru de risque, ils ont tout mis, quitte à préciser plus tard et à réduire, si nécessaire. Une fois l'action déposée devant la Cour supérieure, il est évident qu'ils n'auraient pas pu ajouter, je pense. C'est cela?

M. Gadbois: Cela devenait prescrit.

M. Rodrigue: Cela devenait prescrit à ce moment. Il n'y avait pas possibilité d'ajouter; donc, ils ont mis tout le paquet.

M. Gadbois: C'est cela.

M. Rodrigue: Et, par la suite, ils ont précisé et ils arrivent, finalement, au chiffre de 17 196 419,12 $, qui était le montant qu'eux estiment être capables de prouver.

M. Gadbois: On me fait remarquer qu'ils auraient pu l'amender pour l'augmenter également, mais c'est toujours plus facile de réduire que d'augmenter.

M. Rodrigue: Dans votre témoignage, précédemment, vous avez fait état d'une rencontre - si je me souviens bien, c'est avec M. Laferrière, mais je n'en suis pas absolument sûr, vous pourrez me le préciser - où on vous aurait dit: Si on obtient jugement, qu'est-ce qu'on fera ensuite? Qui a posé cette question? Vous le rappelez-vous? Vous en avez parlé plus tôt dans votre témoignage; malheureusement, j'ai saisi ce bout, mais je n'ai pas saisi le nom de la personne à laquelle vous référiez.

M. Gadbois: Ce n'est pas une question précise d'un membre du conseil.

M. Rodrigue: C'est lors d'une réunion du conseil?

M. Gadbois: C'est plutôt la façon dont le conseil a évolué. En d'autres mots, au début de janvier, le conseil était plutôt concerné par les liens de droit qui pouvaient être établis, les liens de responsabilité; c'est cette question qui a été examinée au cours du mois de janvier. Vers le début du mois de février, c'est là qu'on a commencé - quand je dis "on", ce n'est pas un souvenir précis

que j'ai; c'est la totalité des délibérations du conseil - à s'interroger sur ce qui arriverait une fois le jugement obtenu ici au Québec. En d'autres mots, lorsque les rapports ont été faits sur les capacités financières de payer, le conseil d'administration, ayant reçu des rapports de Geoffrion et Prud'homme sur cette capacité de payer, en est venu à la conclusion que le seul organisme qui pouvait réellement défrayer le coût complet des dommages, c'était le syndicat américain.

M. Rodrigue: Est-ce pour cela et est-ce à la suite de cela qu'on a commencé à explorer les chances d'étendre un jugement canadien aux États-Unis, ce que vous avez appelé l'exemplification? Est-ce à partir du moment où on a constaté que les syndicats canadiens n'étaient pas solvables et que seul le syndicat américain était solvable qu'on a examiné les possibilités d'obtenir un jugement aux États-Unis?

M. Gadbois: C'est à peu près à ce moment, malgré le fait que nous avions demandé à nos procureurs d'obtenir des rapports des avocats américains sur le droit américain, premièrement sur la responsabilité en droit américain d'organismes ou de personnes pour des dommages et, deuxièmement, sur ce que ça prenait pour faire exemplifier un jugement. Toute cette situation est venue progressivement; cela n'est pas venu tout d'un coup ou cela n'est pas venu à la demande d'une personne en particulier.

M. Rodrigue: Dans une conversation dont vous avez eu connaissance, Me Jasmin vous aurait demandé que certains éléments qui n'étaient pas de nature juridique soient considérés pour examiner la possibilité de règlement hors cour et, en particulier, il vous aurait parlé de paix syndicale, qu'il n'était engagé par le syndicat qu'il représentait que de semaine en semaine et que le syndicat pouvait retirer ses représentants du chantier. Il vous a également parlé de faillite du syndicat. Dans quel sens vous a-t-il parlé de faillite du syndicat? Quelles auraient été les conséquences d'une telle faillite sur la cause s'il y avait eu un jugement accordant des dommages à la SEBJ?

M. Gadbois: Évidemment, lorsqu'il nous a parlé de paix syndicale, c'est ce qui existait au moment où il nous a parlé. Il a fait mention de faillite du syndicat dans le sens que, si nous poursuivions le syndicat pour les sommes impliquées dans l'action, le syndicat deviendrait incapable de payer un tel montant et que le seul recours qu'il y aurait serait de déclarer faillite. Il n'est pas allé plus loin. Cependant, nous avons pris la déclaration qu'il avait faite comme telle.

M. Rodrigue: Maintenant, si un syndicat déclare faillite dans ces circonstances...

Le Président (M. Jolivet): M. le député, je dois vous arrêter; si Me Gadbois avait commencé à parler, je l'aurais arrêté. Cette partie est une question d'opinion et je la juge irrecevable.

M. Rodrigue: Laquelle?

Le Président (M. Jolivet): La dernière partie de votre question: Quelles seraient les conséquences d'une faillite du syndicat sur la cause?

M. Lalonde: C'est hypothétique. C'est très hypothétique.

Le Président (M. Jolivet): Je ne peux pas l'accepter.

M. Gratton: Vous avez le même problème que moi, M. le député?

M. Lalonde: Entre ingénieurs, vous vous comprenez.

Le Président (M. Jolivet): M. le député.

M. Rodrigue: Me Gadbois, d'après vos connaissances comme avocat, est-ce que vous pensez qu'un syndicat qui fait faillite peut être en mesure de payer un jugement?

M. Gadbois: Évidemment, toute personne, que ce soit un syndicat ou un autre, qui fait faillite a de la difficulté à payer un jugement. C'est de cette seule façon que je peux répondre.

M. Rodrigue: J'ai interrogé des membres du conseil d'administration à cet effet et un certain nombre d'entre eux m'ont mentionné que cela avait été un élément important dans la décision qu'ils avaient eu à prendre de régler hors cour, le fait qu'une fois un jugement prononcé par le tribunal il aurait été extrêmement difficile de l'exécuter. M. Saulnier, dans ses notes écrites déposées ici, a même souligné cela d'une façon très explicite. En somme, on a beau condamner un syndicat à 17 000 000 $...

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le député.

M. Rodrigue: Oui.

Le Président (M. Jolivet): Je voudrais vous arrêter parce que j'ai demandé ce matin au député de Gatineau, s'il n'avait plus de questions, de passer aux commentaires. Je pourrais vous le permettre, mais je voudrais d'abord savoir si vous avez

des questions.

M. Rodrigue: M. le Président, je faisais précéder ma question d'un préambule...

Le Président (M. Jolivet): J'ai refusé...

M. Rodrigue: ...qui était nécessaire pour faire comprendre ma question.

Le Président (M. Jolivet): Non.

Justement, je voudrais que vous posiez votre question et que vous fassiez vos commentaires ensuite.

M. Rodrigue: Oui. Sur un autre sujet, M. Gadbois, le rapport de la commission Cliche a établi très clairement que des tractations avaient eu lieu entre des dirigeants de la SEBJ, M. Paul Desrochers, adjoint spécial au premier ministre, M. Robert Bourassa, de même que les représentants de la FTQ-Construction, pour accorder un monopole syndical au syndicat de la FTQ-Construction. Effectivement, je vous réfère à la page 28 du rapport de la commission Cliche où on dit: "On regrette que MM. Desrochers et Giroux aient abordé avec la FTQ la possibilité d'accorder à celle-ci un monopole syndical sans en informer la CSN ou la CSD..." Également, à la page 292 du rapport, on dit: "II convient maintenant d'étudier le comportement de M. Paul Desrochers, ex-conseiller spécial au bureau du premier ministre."

Je poursuis la citation: "On se souviendra que c'est à son initiative que certaines rencontres eurent lieu avec les dirigeants de la FTQ et ceux de la Baie-James. Ces rencontres avaient pour but de reproduire au Québec ce qui s'était passé à Churchill Falls: monopole syndical en échange de dix années sans grève. Les démarches de M. Desrochers étaient importantes puisqu'elles impliquaient de graves conséquences. Alors que le pluralisme syndical est la règle, la proposition de M. Desrochers allait à l'encontre de ce principe."

Je poursuis toujours la citation: "Des séances dites "exploratoires" furent tenues pendant plusieurs mois entre la FTQ et les autorités de la Baie-James. Ni la CSN, ni la CSD ne furent invitées à "explorer". La loi est pourtant bien claire: toutes les parties intéressées doivent s'asseoir à une même table pour amender le décret. Il est évident que la manière d'agir de M. Desrochers, celle de MM. Robert Boyd et Roland Giroux, respectivement de la SEBJ et de l'Hydro-Québec, était susceptible d'attiser le feu entre les centrales syndicales. "En outre, il était imprudent pour M. Desrochers d'explorer la possibilité d'accorder un monopole syndical à M. André Desjardins, le midi, au Club la Garnison, à Québec, puis de retrouver ce même M. Desjardins, le même soir, à Sept-Îles, pour lui demander de l'aide afin que l'élection partielle de Duplessis "se passe dans un climat serein".

Une voix: Eh bien!

M. Rodrigue: La question que j'ai à vous poser, M. Gadbois, est la suivante: Est-ce que vous avez participé aux discussions en vue d'accorder un monopole syndical à la FTQ-Construction?

M. Gadbois: Je n'ai pas participé aux discussions, M. le Président, qui sont mentionnées par le député.

M. Rodrigue: M. Gadbois, est-ce que vous avez été informé, soit par M. Giroux, soit par M. Boyd ou par d'autres personnes, des discussions qui étaient en cours entre l'adjoint spécial du premier ministre, M. Bourassa, d'une part, M. Robert Boyd, et M. Giroux, d'autre part, avec la FTQ-Construction pour lui accorder un monopole de représentation syndicale sur les chantiers de la Baie-James?

M. Gadbois: J'étais au courant qu'il y avait des discussions qui se poursuivaient au niveau ministériel. Je ne savais pas qu'il y avait des discussions avec M. Desrochers. Cependant, en reportant mon souvenir à cette période du début des travaux de la Baie-James et surtout au fait que la société d'énergie s'était associée à Bechtel pour qu'elle lui fournisse des services - la compagnie Bechtel et la compagnie Akers étaient en cours de construction de la centrale de Churchill Falls - à ce moment-là, il était ordinaire, je crois, d'obtenir des conventions collectives de projets. Je crois que c'est dans ce but que des discussions se poursuivaient. Je suis au courant qu'elles ont abouti, mais je ne crois pas que c'étaient des discussions dans le but d'accorder un monopole syndical à un syndicat en particulier. J'ai lu le rapport Cliche. J'ai même entendu les dépositions des cadres de la société devant cette commission. Par ailleurs, j'ai lu, dans la Presse de ce matin, l'article de M. Marcel Adam, qui écrit, au deuxième paragraphe: "II faut dire que les conclusions du rapport Cliche sur les responsabilités du saccage de la Baie-James sont ambiguës et portent à interprétation, comme on l'a vu hier dans l'échange auquel se sont livrés à la commission parlementaire le député libéral Michel Gratton et Me Rosaire Beaulé, ex-procureur du syndicat américain dans la poursuite intentée par la SEBJ."

Je voudrais vous reporter au rapport conjoint de Jean Bernier, Laurent Harnel, Marc Darby et moi-même, plus particulièrement au dernier paragraphe de ce

rapport où, parlant dans le paragraphe précédent de paix de chantier, nous disons: "II est important, pour le maintien de ce climat de confiance qui est devenu apparent depuis la reprise des travaux à la Baie-James et l'institution de l'action, que les responsabilités des parties soient déterminées par le tribunal et que la société d'énergie soit reconnue comme un organisme qui ne fléchit pas dans la poursuite d'un but qu'elle reconnaît amplement justifié."

M. Rodrigue: Si je comprends bien, avec ce que vous venez de nous lire, la SEBJ recherchait beaucoup plus à ce moment-là à établir la responsabilité du syndicat.

M. Gadbois: C'était un point principal.

M. Rodrigue: C'était le point principal. En réponse à ma question, à savoir si vous aviez été informé des tractations que j'ai relatées en lisant le rapport de la commission Cliche, vous nous avez dit: Oui, j'ai été informé qu'il y avait des discussions au niveau ministériel.

M. Gadbois: Ce que je veux dire, c'est que la société d'énergie était en relation, évidemment, avec le gouvernement.

M. Rodrigue: Qui en particulier au gouvernement? Le savez-vous?

M. Gadbois: Je ne pourrais pas vous le dire. Le président d'alors avait des communications, je présume.

M. Rodrigue: C'était le gouvernement Bourassa?

M. Gadbois: Oui.

M. Rodrigue: À ce moment-là, vous nous avez dit qu'il y avait des discussions au niveau ministériel du gouvernement Bourassa pour accorder un monopole de représentation syndicale à la FTQ-Construction?

M. Gadbois: Je n'ai pas dit cela.

M. Rodrigue: Non. Bon! Je veux être bien prudent pour ne pas mettre de paroles dans votre bouche, contrairement à ce qu'a tenté de faire le député de Mont-Royal pendant tout son interrogatoire avec d'autres témoins et, en particulier...

M. Ciaccia: Question de règlement, M. le Président.

M. Rodrigue: Je me réfère toujours à votre témoignage. Vous nous avez dit...

Le Président (M. Jolivet): M. le député, seulement avant, de la même façon que j'ai demandé à un autre député d'être courtois et de la même façon que j'ai demandé à une personne invitée d'être courtoise envers un autre député, j'aimerais que vous n'exprimiez pas l'opinion que vous avez. Compte tenu que vous l'avez fait, je demanderais, pour la bonne poursuite des travaux, que vous retiriez... (12 h 15)

M. Rodrigue: Je ne comprends pas.

Le Président (M. Jolivet): ...ce que vous avez dit à propos du député de Mont-Royal.

M. Rodrigue: Pourriez-vous préciser les paroles, M. le Président? Je m'excuse, j'étais en train d'examiner un document.

Le Président (M. Jolivet): M. le député, vous avez dit: Contrairement à la façon dont le député de Mont-Royal a mis dans la bouche des personnes invitées des paroles. Je vous demande simplement de retirer cette remarque.

M. Rodrigue: M. le Président, je pense que toutes les personnes qui ont suivi les travaux de notre commission ont constaté que, plusieurs fois, dans ses questions, le député de Mont-Royal a tenté de suggérer des réponses aux personnes qui étaient devant nous. Il me semble que c'est une question de fait, ce n'est pas une opinion que j'émets, à ce moment-là.

Le Président (M. Jolivet): M. le député, simplement pour les besoins de la poursuite des travaux, je vous le demande une deuxième fois.

M. Rodrigue: M. le Président, je n'ai pas envie de retarder les travaux de la commission sur une question comme celle-là. C'est une question absolument accessoire. Alors, je vais me rendre à votre demande, tout en conservant mon opinion sur la façon qu'a eue le député de Mont-Royal d'interroger les témoins, mais je vais la garder pour moi.

M. Gratton: C'est un gentilhomme!

Une voix: M. le Président, est-ce que le...

M. Rodrigue: M. le Président, toujours concernant Me Gadbois...

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse. J'ai cru comprendre qu'il retirait ses paroles, mais qu'il gardait quand même son opinion. C'est son droit le plus strict, cependant.

M. Rodrigue: J'ai le droit d'avoir mes opinions.

Le Président (M. Jolivet): Vous avez exactement ce droit, M. le député.

M. Rodrigue: Mais ce que vous me demandez, c'est de ne pas les rendre publiques à cette commission.

M. Ciaccia: Je garde mon opinion sur le député.

M. Rodrigue: M. le Président, l'opinion du député de Mont-Royal n'a aucune espèce d'importance pour moi, pour autant que je suis concerné.

Le Président (M. Jolivet): Allez, M. le député, continuez avec les questions. M. le député de Gatineau, s'il vous plaît!

M. Gratton: Quelle arrogance!

M. Rodrigue: Vous savez que l'opinion que les autres peuvent avoir de nous...

Le Président (M. Jolivet): M. le député, simplement sur les questions, s'il vous plaît!

M. Gratton: Quelle arrogance!

M. Paradis: II y en beaucoup qui se sont fait une opinion sur vous.

M. Rodrigue: J'aimerais bien comprendre ce que vous vouliez nous dire, Me Gadbois, quand vous avez dit que les discussions se poursuivaient au niveau ministériel. Vous aviez été informé qu'il y avait des discussions qui se poursuivaient. C'était avant la commission Cliche. Ce sont des faits dont vous avez eu connaissance. Vous aviez été informé qu'il y avait des discussions pour voir s'il était possible de donner un monopole syndical à la FTQ-Construction; là, vous nous avez dit que vous étiez informé que c'était au niveau ministériel. Est-ce que je vous ai bien compris là-dessus?

M. Gadbois: Je n'ai pas parlé, en donnant ma réponse, de donner un monopole syndical à qui que ce soit. Ce qui était recherché, à ce moment-là, M. le Président, c'était la possibilité d'obtenir une convention de chantier qui était semblable ou qui pourrait être semblable à celle qui avait été approuvée sur d'autres chantiers avant les travaux de la Baie-James. Il y a eu une convention de chantier pour les travaux de Churchill Falls. Il y a eu une convention qui a été obtenue pour Expo 67, je crois. Dans d'autres chantiers dans le monde, il y en a plusieurs qui l'ont obtenue. C'était une recherche, à ce moment, pour essayer de retrouver une formule semblable.

M. Rodrigue: Une convention de chantier avec un seul syndicat ou avec une seule centrale.

M. Gadbois: C'était une exploration.

M. Rodrigue: Je vous relis un paragraphe à la page 28 du rapport de la commission Cliche qui dit ceci: "Devant la preuve, la commission ne peut que conclure -et là, c'est la commission Cliche - que le gouvernement, Hydro-Québec et la FTQ-Construction ont véritablement négocié en vue d'instituer le monopole syndical à la Baie-James". C'est dans le rapport de la commission Cliche.

La question que je vous avais posée, c'est si vous étiez au courant de ces discussions. Vous nous avez dit avoir lu le rapport de la commission Cliche. Est-ce en lisant le rapport de la commission Cliche que vous avez constaté qu'effectivement c'était en vue d'accorder le monopole syndical à la FTQ-Construction que ces discussions avaient eu lieu?

M. Gadbois: J'ai vu dans le rapport Cliche que c'était mentionné de cette façon, mais ce n'était pas mon impression générale.

M. Rodrigue: À quel moment? M. Gadbois: Au moment...

M. Lalonde: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Je suis les questions du député de Vimont à Me Gadbois, et je pense que Me Gadbois a bien établi, à sa première question sur cette série, qu'il n'avait participé à aucune des réunions qui sont mentionnées dans le rapport Cliche, mais qu'il avait entendu dire que cela se passait. On lisait cela même dans les journaux. Il me semble que les questions sont un petit peu injustes à l'égard du témoin, lorsqu'il est obligé de répondre que c'était son impression. C'est passablement loin du bon témoin, c'est-à-dire que ce n'est peut-être pas à ce témoin que ces questions devraient être posées.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Duhaime: M. le Président, sur la question de règlement, je voudrais simplement - je ne veux pas en faire un débat - rappeler au député de Marguerite-Bourgeoys qu'une impression en anglais, cela devient un "feeling". Je pense que je vais demander à quelqu'un de me faire le relevé du nombre de minutes que le député de

Mont-Royal a passé sur le "feeling" de Me Beaulé.

M. Lalonde: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: La comparaison est tellement boiteuse, parce qu'il s'agissait, dans le cas de Me Beaulé, d'une rencontre à laquelle il participait avec Me Boivin dans le bureau du premier ministre et qu'on lui demandait si Me Boivin lui avait dit quelque chose qui avait l'air d'une décision du premier ministre de mettre fin. Me Gadbois dit qu'il n'a pas participé à ces réunions.

M. Rodrigue: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Vimont.

M. Rodrigue: ...j'ai posé une question à savoir si M. Gadbois avait participé à des discussions et il m'a dit non. Je lui ai demandé s'il avait été informé et il m'a dit oui. À partir de là, j'essayais de savoir de quoi il avait été informé. Il est fort possible que, lors de ces discussions, M. Gadbois ait été informé d'une partie des éléments que plus tard la commission Cliche a considérés...

M. Lalonde: En quoi est-ce dans notre mandat?

M. Rodrigue: ...mais que d'autres éléments aient été considérés par la commission Cliche plus complets peut-être pour en arriver à une conclusion. Il est possible que Me Gadbois, au moment où ces discussions ont eu lieu, ait eu un autre aperçu de ces discussions. Je veux tout simplement savoir de quoi il avait été informé. Même si cela ne concorde pas parfaitement avec les conclusions de la commission Cliche, cela ne met pas en cause du tout la crédibilité du témoin. En somme, il a pu avoir connaissance de certains éléments et d'une certaine ligne d'action pour discuter de la façon d'organiser la représentation syndicale sur les chantiers, et la commission Cliche a pu avoir des témoignages possiblement beaucoup plus complets de diverses sources qui l'ont amenée à conclure autre chose. Mais je ne veux absolument pas que mes questions soient interprétées comme mettant en cause la crédibilité du témoin, d'autant plus que je suis à Hydro-Québec depuis 1960 et que Me Gadbois est là depuis très longtemps aussi. Je vous dis tout de suite que je n'ai aucun doute sur la bonne foi et la crédibilité de Me Gadbois. Au contraire, sa réputation à Hydro-Québec n'est plus à faire. Je regrette que le député de Marguerite-Bourgeoys ait laissé planer des doutes sur cet aspect.

M. Lalonde: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): M. le député. M. Lalonde: Question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): Juste avant, M. le député. Le problème que je vais avoir, c'est que c'est un débat qui est soulevé par une question de règlement. Je pense - je dois être juste envers tous les gens de cette commission, en particulier envers ceux qui ont posé des questions ce matin - qu'il n'est pas vrai qu'on ait, de quelque façon que ce soit, mis en doute la crédibilité de Me Gadbois. Au contraire même, le député de Marguerite-Bourgeoys a, à la fin de ses questions, félicité Me Gadbois pour ses réponses. Je pense qu'on devrait clore ce débat, s'il vous plaît, sans en faire un autre.

M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Je ne veux pas faire un débat, mais vous remarquerez... Enfin, j'espère que vous allez me laisser quand même rétablir les faits. Ma question, mon objection ou, en fait, mon observation aux questions du député ne touchait pas du tout la crédibilité de Me Gadbois. C'est un des meilleurs témoins que j'aie vus ici par sa franchise, enfin, son état d'esprit, la rigueur de ses réponses. Ce que je veux dire, c'est qu'on me fait remarquer - d'ailleurs, on vous écoute, M. le Président, avec beaucoup d'empressement - qu'on est rendu en 1971 ou en 1972 et que nous avons le mandat d'examiner les circonstances entourant la décision de régler hors cour. Cela reste là.

Le Président (M. Jolivet): Si j'ai bien compris, cependant, le sens de votre question, quand j'ai fait mention de la décision que j'ai rendue, eu égard à la période après le mois de mars 1979, c'est parce que tout ce qui peut précéder et qui a un effet sur les décisions prises par le conseil d'administration de la Société d'énergie de la Baie James, depuis le début, on en a fait mention: les questions doivent porter là-dessus. Ce que je demanderai, cependant, au député de Vimont, c'est d'arriver le plus rapidement possible aux questions qu'il veut poser et d'éviter les préambules qui amènent les questions de règlement qu'on a eues jusqu'à maintenant. S'il vous plaît, M. le député de Vimont, allez.

M. Lalonde: J'aurais une chose à ajouter, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Dans votre désir - vous l'avez annoncé dans votre décision avant-hier d'appliquer aussi le principe de la gentilhommerie, j'aimerais que le député de Vimont retire les motifs qu'il m'a prêtés, à savoir que ma question était inspirée par le sentiment que j'avais que la crédibilité de Me Gadbois était à mettre en doute.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Vimont.

M. Rodrigue: M. le Président, je sens qu'on devient nerveux de l'autre côté quand on commence à parler des tractations qui ont entouré la question du monopole syndical sur le chantier de la Baie-James.

M. Gratton: On va y revenir cet après-midi.

M. Rodrigue: Alors, je vais donner la chance au député de Gatineau, qui a permis par...

M. Lalonde: Posez une question!

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Vimont, je m'excuse, mais, si vous avez l'intention de continuer dans cette veine, je ne l'accepterai pas.

M. Rodrigue: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): Non, je ne pense pas qu'on doive mettre en doute, de part et d'autre, la façon dont on a à poser des questions. Je vous demande expressément, M. le député de Vimont, de ne pas entrer dans cette forme de discussion.

M. Rodrigue: C'est un compliment que je vais...

Le Président (M. Jolivet): Non. M. le député de Marguerite-Bourgeoys vous a posé une question. J'aimerais, d'abord, savoir quelle réponse vous y donnez. Vous auriez dit que le député de Marguerite-Bourgeoys, par la question qu'il a posée, avait laissé planer un doute sur la crédibilité de Me Gadbois. J'aimerais, d'abord, savoir si vous retirez cette partie de vos paroles, à la demande du député.

M. Rodrigue: Je ne pense pas avoir dit cela, M. le Président, je n'ai pas voulu prêter de motifs au député de Marguerite-Bourgeoys, en aucune façon. Maintenant...

Le Président (M. Jolivet): Cela va. M. Bourbeau: Question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): Non, cela va. Il a parfaitement répondu en disant qu'il n'avait pas voulu imputer de motifs au député de Marguerite-Bourgeoys, et c'est ce que le député de Marguerite-Bourgeoys demandait. Cette question étant réglée...

M. Bourbeau: M. le Président... Le Président (M. Jolivet): Oui.

M. Bourbeau: ...je voudrais quand même souligner que vous-même, tout à l'heure, dans vos remarques, vous avez dit que le député de Vimont n'avait pas dit la vérité. Ce sont les mots que vous avez employés à l'égard de ce qu'il avait dit du député de Marguerite-Bourgeoys. À mon avis, s'il n'a pas dit la vérité, il doit donc retirer ses paroles.

M. Duhaime: II n'a jamais dit cela. M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: ...je prends la dernière remarque du député de Vimont comme étant une rectification du fait qu'il ne voulait pas me prêter ce motif. Je ne peux lui en demander davantage, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Vimont, maintenant, sur les questions, s'il vous plaît!

M. Rodrigue: Oui, je m'abstiendrai toujours, M. le Président, de prêter des motifs au député de Marguerite-Bourgeoys. Maintenant, j'avais terminé mes questions avec M. Gadbois. Je remercie M. Gadbois d'avoir bien voulu y répondre.

Le Président (M. Jolivet): Compte tenu du peu de temps qu'il nous reste, je voudrais simplement vérifier une dernière chose. Il reste l'intervention du député de Brome-Missisquoi, celle du député de Châteauguay, celle du ministre et celle du député de Gatineau. Ils ont l'intention de poser des questions. Cela veut donc dire que nous reviendrons après la période des questions. Je voudrais vous poser une autre question. Est-ce que, dès maintenant, puisque, cet après-midi, Me Beaulé doit communiquer avec le greffier du Secrétariat des commissions parlementaires, on peut lui dire qu'il doit être ici, ce soir, à 20 heures?

M. Lalonde: Oui.

Une voix: Je n'en ai pas pour longtemps.

Le Président (M. Jolivet): Donc, nous pouvons dire que Me Beaulé sera ici - à 20

heures?

Des voix: Oui.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Châteauguay.

M. Dussault: M. le Président, compte tenu que cet après-midi je ne pourrai pas venir à la commission, ni ce soir, à ce moment-là, je ne pourrai pas poser de questions à Me Gadbois. Je pense que, lorsqu'on reprendra, s'il advenait que Me Gadbois soit obligé de revenir, je ne pourrai pas être là, non plus, à cause de ma fonction d'adjoint parlementaire et de la commission sur les crédits. Est-ce qu'on me permettrait de poser brièvement deux petites questions à Me Gadbois?

Le Président (M. Jolivet): Non. Il y a une façon plus simple de régler cela, c'est de demander à un de vos collègues de le faire à votre place cet après-midi. Je suspends jusqu'après la période des questions.

M. Lalonde: Est-ce que je peux poser une question concernant nos travaux?

Le Président (M. Jolivet): Non, cet après-midi.

(Suspension de la séance à 12 h 29)

(Reprise de la séance à 15 h 43)

Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission élue permanente de l'énergie et des ressources est à nouveau réunie aux fins d'examiner les circonstances entourant la décision du conseil d'administration de la Société d'énergie de la Baie James de régler hors cour la poursuite civile intentée à la suite du saccage du chantier de LG 2 survenu en 1974 et, plus spécifiquement, le rôle du premier ministre et de son bureau à cet égard.

Les membres de cette commission sont: MM. Dussault (Châteauguay), Ciaccia (Mont-Royal), Duhaime (Saint-Maurice), Bourbeau (Laporte), Laplante (Bourassa), Gratton (Gatineau), Lavigne (Beauharnois), LeBlanc (Montmagny-L'Islet), Lalonde (Marguerite-Bourgeoys), Vaillancourt (Jonquière), Rodrigue (Vimont).

Je m'excuse. J'ai nommé M. Dussault (Châteauguay), j'aurais plutôt dû dire M. Tremblay (Chambly).

Les intervenants sont: MM. Bisaillon (Sainte-Marie), Perron (Duplessis), Desbiens (Dubuc), Dussault (Châteauguay), Mme Harel (Maisonneuve), MM. Paradis (Brome-Missisquoi), Pagé (Portneuf), Doyon (Louis-Hébert), Saintonge (Laprairie).

Le rapporteur est toujours M. LeBlanc (Montmagny-L'Islet).

Nous avions devant nous Me Gadbois qui avait à répondre à des questions. Avant de donner la parole au député de Brome-Missisquoi, qui est le prochain sur la liste, j'aimerais vous lire un télégramme que j'ai reçu et qui a une importance, compte tenu de la décision que j'ai rendue dans les jours passés. "M. le Président, nous représentons l'Union des opérateurs de machinerie lourde, local 791, et confirmons que notre cliente a, par résolution dûment adoptée, décidé de ne pas relever expressément ou implicitement Me Michel Jasmin de son secret professionnel. "Nous avons pris connaissance de votre décision datée le ou vers le 3 mai 1983 suivant laquelle Me Michel Jasmin, avocat et procureur de notre cliente à l'époque pertinente, n'a pas été libéré de l'invitation qui lui a été adressée à l'effet de témoigner devant la commission. "Le témoignage précité met en cause l'interprétation d'une disposition législative, précisément l'article 9 de la Charte des droits et libertés de la personne, et justifie dès lors notre cliente à demander une interprétation judiciaire. "Nous sommes à rédiger une requête pour jugement déclaratoire et visant à faire déterminer la portée de l'article 9 de la charte précitée et plus précisément eu égard à l'obligation pour Me Jasmin de témoigner. "Subsidiairement, demande sera faite afin de déterminer, le cas échant, la portée du secret professionnel auquel le procureur est tenu. Nous demandons avec déférence et respect que l'invitation à témoigner soit ajournée jusqu'à ce que décision judiciaire soit rendue. "Veuillez agréer, M. le Président, l'expression de nos sentiments distingués. "Laurin, Laplante et Laplante, avocats, par Robert Laurin."

Je fais simplement faire les photocopies qui s'imposent pour chacun des membres de cette commission, en vous disant, comme M. le ministre et M. le député de Marguerite-Bourgeoys en ont fait mention au moment de la suspension, que des discussions sont amorcées actuellement sur cette question. Mais, comme je n'ai pas, comme président, à prendre de décision autre que celle d'abord de prendre connaissance du document qui nous est transmis et au niveau des deux personnes représentant l'Opposition et le gouvernement, il y a peut-être des discussions qui peuvent s'amorcer et j'aurai peut-être d'autres décisions à rendre, selon ce qui se fera dans les jours qui suivent. Je demanderai au secrétariat des commissions de faire les photocopies qui s'imposent.

M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: À ce stade-ci, j'aurais seulement une demande préliminaire à vous faire. Si j'ai bien compris la lecture que vous avez faite du télégramme, le client ou l'ancien client de M. le juge Jasmin maintenant a demandé que le témoignage de M. Jasmin soit suspendu. Je voudrais seulement savoir s'il s'agit d'une décision de la présidence ou d'une décision du gouvernement.

Le Président (M. Jolivet): J'ai reçu ce télégramme à mon bureau. Comme je l'ai reçu, je me permets de le lire, mais j'aurai certainement d'autres décisions à prendre. Je voulais vous mettre au courant de la demande. Il y aura d'autres décisions qui seront prises dans les jours qui viennent, de façon à pouvoir nous déterminer quelle position la présidence prendra vis-à-vis de cette demande.

M. Lalonde: Si vous permettez une dernière observation. Je ne sais pas dans quelles circonstances la décision sera prise et je ne peux pas la prévoir complètement; je voulais seulement m'assurer par qui la décision devra être prise et tout simplement faire valoir qu'il est important que la présidence, ou même le gouvernement, s'il s'agissait d'une décision du leader du gouvernement, soit bien conscient de la portée de cette décision sur l'autonomie de l'Assemblée nationale, sur la souveraineté de l'Assemblée nationale et sur sa souveraineté aussi sur les travaux qu'elle entreprend. C'est seulement cela que je veux dire maintenant.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Duhairne: Oui, en fait, M. le Président, vous venez de donner lecture de ce télégramme. Si j'ai bien compris à la lecture, une demande était adressée à la présidence. Je le dis sous toutes réserves et en tout respect pour la présidence. J'ai toujours compris que tant la convocation que l'ordre de convocation des personnes appelées devant cette commission relevaient du leader du gouvernement, qui transmet tant les convocations que les ordres de convocation au secrétariat de la commission. Est-ce que la présidence, qui est saisie de ce télégramme qui contient une requête, peut ordonner de surseoir à la comparution de quelqu'un parce qu'une action serait pendante devant une instance judiciaire pour définir ce qu'est le secret professionnel, son extension? Enfin, on verra bien ce qui va se produire. Je ne suis pas certain, M. le Président, que ce soit du ressort de la présidence. Si vous avez besoin davantage d'arguments là-dessus, sans préjuger pour autant de ce que pourrait être la décision du gouvernement là-dessus, je pourrais en ajouter en temps utile, mais je pense qu'il y a un préalable que vous aurez à décider: Est-ce que c'est de votre ressort ou non?

Le Président (M. Jolivet): C'est dans ce sens que je vous mettais d'abord au courant du télégramme. Nous allons le faire parvenir à chacun d'entre vous pour que vous l'analysiez de votre côté. Si jamais la présidence a besoin de conseils pour la décision qu'elle aura à prendre auprès des gens qui l'appuient dans les décisions qu'elle a à rendre, elle vous demandera, comme on le fait d'habitude, de part et d'autre, une intervention, mais, pour le moment, il n'y a pas de décision de prise autre que celle de vous faire lecture du télégramme.

Une voix: Merci.

Le Président (M. Jolivet): D'accord? M. le député de Brome-Missisquoi, vous avez la parole.

M. Paradis: Merci, M. le Président. Me Gadbois ayant été libéré par sa cliente du secret professionnel et ayant répondu aux questions du député de Marguerite-Bourgeoys qui, cet avant-midi, a fait le tour du jardin, je serai très bref. Vous avez parlé, en réponse à une question du député de Marguerite-Bourgeoys, d'une visite qu'a effectuée à vos bureaux, à l'automne 1978, Me Yves "Ti-Lou" Gauthier, ex-tuteur du local 791, un des syndicats québécois qui étaient poursuivis pour 32 000 000 $...

M. Duhaime: M. le Président, je m'excuse auprès du député de Brome-Missisquoi. Je me demande si, pour la bonne marche de nos travaux et pour continuer dans l'esprit que tous semblent avoir retenu depuis le début, le député de Brome-Missisquoi pourrait s'abstenir d'ajouter aux nom et prénom des personnes ce que j'appellerais un... Comment appelez-vous cela?

M. Lalonde: Comment appelle-t-on cela?

M. Duhaime: Non, je n'allais pas dire un quolibet, mais un surnom.

Le Président (M. Jolivet): Un surnom.

M. Duhaime: Je pense que cela nous aiderait. Chaque fois que je l'entends, je vous avoue... Je l'ai tellement entendu qu'il y a un bout de temps, j'avais même changé le prénom de Me Gauthier. Je vous prierais, en tout respect pour Me Yves Gauthier, qui est notaire de sa profession et attaché politique au cabinet du premier ministre, de vous abstenir d'utiliser du patois pour le

qualifier.

M. Paradis: Sur la question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: J'ignorais que Me Yves Gauthier portait cette appellation de "Ti-Lou". Je l'ai lu dans la Presse comme la population en général. J'ai également entendu au moins un administrateur de la Société d'énergie de la Baie James qui, sans manquer de respect pour Me Gauthier, l'avait appelé "Ti-Lou". Je pensais que, pour faciliter la compréhension, c'était plus simple d'inscrire ses titres au complet. Mais, si cela choque l'oreille du ministre, je me contenterai de l'appeler du prénom du ministre, Yves.

M. Duhaime: Et son nom de famille. M. Paradis: Oui, oui.

Le Président (M. Jolivet): Ceci étant dit, vous avez la parole, M. le député.

M. Paradis: M. le Président, constatant que le ministre ne veut pas être assimilé à Me Gauthier du bureau du premier ministre, je dirai donc Me Yves Gauthier.

Me Gadbois, je reprends ma question. En réponse à une question du député de Marguerite-Bourgeoys ou au ministre, Me Yves Duhaime, ce matin, vous avez affirmé que Me Yves Gauthier, tuteur du local 791, d'après les témoignages qu'on a recueillis ici, jusqu'au mois de septembre ou octobre 1978 et, à ce moment-là, conseiller politique dans le bureau du premier ministre, vous avait rendu visite à vos bureaux à l'automne 1978, en compagnie d'une personne que vous n'avez pas pu identifier, pour vous parler du dossier du saccage de la Baie-James et des motifs pour lesquels cette poursuite de 32 000 000 $ qui a finalement été réglée pour 200 000 $ devait être abandonnée.

Ma question est bien simple! Est-ce que vous avez fait rapport à quelqu'un de cette rencontre que vous avez eue avec le notaire Yves Gauthier?

M. Gadbois: Je ne me rappelle pas, M. le Président, avoir fait rapport à quelqu'un, parce que je n'avais pas associé le notaire Gauthier à quelqu'un qui appartenait au gouvernement. J'ai sûrement parlé de ceci à Me Cardinal. La visite directe de l'ex-tuteur, si vous le voulez, m'avait surpris parce que, étant donné qu'il y avait des avocats interposés dans le dossier, je trouvais singulière une visite de cette nature, directement du syndicat ou de l'ex-tuteur du syndicat.

M. Paradis: Simplement pour mon information et peut-être celle de la commission également: Quand avez-vous appris pour la première fois que ce fameux Me Gauthier, qui était l'ex-tuteur, faisait partie des conseillers politiques du premier ministre, M. René Lévesque?

M. Gadbois: Je l'ai appris subséquemment, des mois après.

M. Paradis: Des mois après. M. Gadbois: Probablement.

M. Paradis: Ça clôt ce sujet-là.

Dans un autre ordre d'idées, dans le cahier que nous a remis le président-directeur général de la Société d'énergie de la Baie James, M. Laliberté, aux pages 117 et suivantes, on retrouve un extrait du procès-verbal de la 369e réunion du conseil d'administration de la SEBJ, tenue le 20 février 1979, à 9 h 30. On a le nom des personnes présentes, etc. Est-ce qu'il s'agit, selon votre connaissance personnelle, de 9 h 30 de la matinée?

M. Gadbois: Autrement, on aurait dit 21 h 30, je crois.

M. Paradis: D'accord. À votre connaissance, il s'agit de 9 h 30 de la matinée?

M. Gadbois: De la matinée.

M. Paradis: Est-ce que vous avez une connaissance personnelle de l'heure à laquelle, approximativement, s'est terminée cette réunion?

M. Gadbois: La réunion elle-même s'est probablement terminée dans l'après-midi, parce que la réunion ne comprenait pas seulement la question du saccage de la Baie-James, ou de l'action. Il y avait également un grand nombre de points à l'ordre du jour. Alors, je ne pourrais vous dire, à partir des documents qu'il y a ici, à quelle heure la réunion s'est terminée. D'autant plus que je n'étais pas secrétaire de cette réunion.

M. Paradis: Non, non. D'ailleurs, je l'ai constaté. Il est indiqué au procès-verbal que c'est Me Jean Bernier. C'est pour cela que j'ai insisté sur les mots "à votre connaissance personnelle". Maintenant, et cela clôt ce sujet également, ce sont simplement des questions de précision que je demande. Si on prend le cahier qui nous été remis par les avocats Geoffrion et Prud'homme qui s'intitule: Correspondance, cabinet Geoffrion et Prud'homme, et projets de déclaration de transaction dans l'instance, à la page 133, on y retrouve une lettre que

vous avez adressée en date du 7 mars 1979 à Me François Aquin, de chez Geoffrion et Prud'homme, et qui se lit, très brièvement, comme suit: "Pour donner suite à la conversation téléphonique que nous avons eue ce matin, vous trouverez ci-joint le texte d'un projet de communiqué de presse que la Société d'énergie de la Baie James entend faire au moment opportun, lequel lui sera indiqué par ses procureurs. Auriez-vous l'obligeance de me transmettre vos commentaires au sujet de ce projet de communiqué. Veuillez me croire, votre tout dévoué."

Votre signature apparaît au bas de la lettre. En annexe, on retrouve le communiqué qui dit, finalement, que la société a décidé de régler hors cour pour 200 000 $ la poursuite de 32 000 000 $. Plus spécifiquement, à la page 135, au bas, au dernier paragraphe, c'est le deuxième alinéa du paragraphe 3, on y lit ce qui suit: "La cause de la Gaspé Copper Mines qui pourrait être invoquée pour appuyer une poursuite devant les tribunaux d'un syndicat américain comporte, de l'avis de ses conseillers juridiques, des éléments qui n'apparaissent pas dans le dossier de la SEBJ."

Le dernier paragraphe, à la page 136: "C'est pour toutes ces raisons - celle-là et d'autres qui sont invoquées - que le conseil d'administration de la SEBJ a accepté l'offre de règlement hors cour de cette cause pour une considération presque nominale."

Plus loin, à la page 139, on retrouve, datée le 8 mars 1979, une lettre qui vous est adressée par Me François Aquin. On va en faire la lecture complète pour une meilleure compréhension de la question que je vais vous poser. Cette lettre se lit comme suit: "Cher confrère, "Je reçois le projet de communiqué que la Société d'énergie de la Baie James entend publier. "Ce communiqué ne pourrait être expédié aux médias d'information qu'après la production de la transaction devant le tribunal. - on était le 8 mars, cela se comprend - Si les documents de règlement sont signés lundi, comme on peut présentement le prévoir, la transaction pourrait être produite devant le tribunal à la séance de mardi matin. "Nos commentaires sur le projet de communiqué se limitent, comme il se doit, aux aspects juridiques du communiqué. "Nous nous permettons de souligner le caractère inopportun de l'alinéa suivant." On retrouve l'alinéa que je viens de lire dans le communiqué. Je passe cet alinéa, parce que j'en ai déjà fait la lecture. "Il est exact, comme nous l'avons écrit le 19 février dernier, que l'instance de la Gaspé Copper Mines se situait dans une perspective juridique différente. Par contre, et pour cette raison, nous n'avons jamais invoqué à l'appui de notre cause le précédent de la Gaspé Copper Mines. Le rapprochement fait par le communiqué entre la présente instance et celle de la Gaspé Copper Mines peut laisser croire que nos chances de réussite contre le syndicat américain étaient bien minces. Ce qui n'est pas exact. Le même rapprochement amène à douter sérieusement de la compétence de conseillers juridiques qui auraient mis plus de trois ans à réaliser que l'arrêt de la Gaspé Copper Mines ne pouvait pas être invoqué comme tel au soutien de leur cause. Ce qui n'est pas non plus exact, comme nous l'avons mentionné plus haut. La comparaison entre des instances non comparables nous paraît donc totalement inopportune et entraînerait vraisemblablement d'autres comparaisons avec l'affaire Reynolds qui vient d'être décidée par la Cour supérieure, il y a à peine quelques semaines. "Veuillez agréer..." C'est signé: "François Aquin". (16 heures)

Qui avait rédigé le communiqué que vous aviez fait parvenir et dans lequel on retrouvait cette référence à la cause de Gaspé Copper Mines?

M. Gadbois: Autant que je me rappelle, ce communiqué avait été rédigé par le service des relations publiques d'Hydro-Québec. Il faut se replacer un peu dans le contexte. C'est le président du conseil d'Hydro-Québec, dont les bureaux étaient à Hydro-Québec, qui avait été mandaté pour effectuer la transaction. Il avait à coeur de faire une déclaration adéquate. Le service des relations publiques d'Hydro-Québec avait préparé, conjointement avec lui - il a eu quelque chose à faire avec cela - et moi-même, le texte de ce projet de communiqué.

M. Paradis: Est-ce qu'à la suite de la réception de la lettre du 8 mars 1979, à votre connaissance, la Société d'énergie de la Baie James a modifié, à la demande des procureurs de Geoffrion et Prud'homme, le texte du communiqué?

M. Gadbois: À ma connaissance, cela n'a pas été modifié.

M. Paradis: Cela n'a pas été modifié. C'est une opinion - je préviens immédiatement la présidence - professionnelle que je vous demande à titre d'avocat - gratuite, d'ailleurs, j'en profite. Est-ce que vous étiez d'accord, vous, en tant qu'avocat, avec le texte de la lettre de Geoffrion et Prud'homme du 8 mars 1979? Vous êtes libre de me répondre, étant donné que c'est un conseil juridique gratuit que je vous demande.

Le Président (M. Jolivet): Je voudrais déclarer dès le départ qu'il n'a pas à répondre.

M. Paradis: Non, non, je le sais, M. le Président, mais j'invite le témoin à le faire, s'il veut bien le faire.

Le Président (M. Jolivet): Je suis dans l'obligation d'appliquer ce que j'ai demandé hier, c'est-à-dire de ne même pas y répondre.

M. Paradis: M. Gadbois, je vous remets...

M. Duhaime: Elle est irrecevable.

Le Président (M. Jolivet): II n'en est pas question, il ne répondra pas.

M. Duhaime: Non, non, je ne suis pas nerveux, je faisais autre chose.

M. Paradis: M. Gadbois, je vous remercie de votre témoignage. Je sais que vous auriez aimé répondre à ma question.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Bourassa.

M. Laplante: Une courte question. Les demandeurs dans la cause de la Baie-James étaient les assurances et la Société d'énergie de la Baie James. C'est cela?

M. Gadbois: Non, il y avait des causes séparées. Trois compagnies d'assurances avaient institué action contre les mêmes personnes qui étaient les défendeurs dans l'action de la Société d'énergie de la Baie James. Pour les fins de la preuve dans la cause, les deux causes ont été jointes. D'ailleurs, on me dit que ces causes sont indiquées dans la lettre de l'International Union of Operating Engineers datée du 25 avril 1978, que Me Beaulé a déposée devant cette commission.

M. Laplante: Mais, lorsque le règlement est venu, est-ce que ce fut un règlement conjoint?

M. Gadbois: Le règlement n'a pas été un règlement conjoint, il a été un règlement séparé, mais fait en même temps, pour autant que je me rappelle.

M. Laplante: II y a 200 000 $ qui étaient pour la Société d'énergie de la Baie James; il y avait 100 000 $, après entente avec les gens de la Société d'énergie de la Baie James, qui leur reviendraient à elles aussi parce qu'elles vous ont versé, je crois, 1 300 000 $. Il y avait une condition: qu'elles laissent tomber leur cause, elles aussi, pour autant que soit inclus dans le règlement qu'il y ait 100 000 $ qui seraient pour les assurances. Est-ce que je me trompe?

M. Gadbois: C'est exact.

M. Laplante: Est-ce que je me tromperais en disant comme cela que ce n'est plus un règlement de 200 000 $, mais bien un règlement de 300 000 $ qui s'est fait?

M. Gadbois: Si vous examinez la globalité de l'affaire, oui, c'est un règlement de 300 000 $.

M. Laplante: D'accord. On peut maintenant parler de 300 000 $ comme règlement, au lieu de 200 000 $. Il ne faut pas minimiser les choses et montrer cela plus dur que ce ne l'est.

M. Gadbois: Pour autant que vous considérez que les compagnies d'assurances étaient dans le règlement.

M. Laplante: Cela en faisait partie. Je vous remercie, M. Gadbois.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président, très brièvement; le député de Vimont ce matin a interrogé Me Gadbois sur l'interprétation qu'on doit donner de certains passages et même des conclusions du rapport Cliche. J'aimerais ici non pas poser une question à Me Gadbois - je vous en avertis d'avance, M. le Président - même pas formuler des commentaires ou porter des conclusions moi-même, mais tout simplement citer un passage d'un éditorial du journal La Presse de ce matin, signé par Marcel Adam, auquel Me Gadbois s'est d'ailleurs référé ce matin, pour tenter de situer ce que fait le rapport Cliche par rapport aux travaux de la commission. Ce sera très bref.

L'éditorial s'intitule: "Les commodes ambiguïtés du rapport Cliche". Me Gadbois a fait lecture d'une partie du deuxième paragraphe qui disait: "II faut dire que les conclusions du rapport Cliche sur les responsabilités du saccage de la Baie-James sont ambiguës et portent à interprétation", etc. Le passage qui retient mon attention et que j'aimerais communiquer à la commission se retrouve à la fin de l'éditorial. On y lit ce qui suit: "Comme ce passage du rapport prête à des exégèses différentes, pour les fins du débat, je veux bien étudier la portée de l'interprétation que lui donne le gouvernement: la non-responsabilité des simples travailleurs des actes commis par quelques bandits, pour la mettre en rapport

avec d'autres conclusions de la Commission Cliche. "Ailleurs dans son rapport, la commission Cliche établit une relation indirecte de cause à effet entre le saccage de la Baie-James et les agissements répréhensibles de divers agents publics, notamment les dirigeants d'alors d'Hydro-Québec et de la SEBJ, l'ex-conseiller spécial du premier ministre Bourassa, agissements qui ont conduit à accorder illégalement un monopole de fait, au chantier de LG 2, à la FTQ-Construction, et de mettre éventuellement le feu aux poudres. "On sait que le premier ministre Lévesque et les syndicats ont tiré argument de cette conclusion du rapport pour inciter la SEBJ à régler hors cour. "Si cette thèse profite aux simples travailleurs de la construction en les déchargeant de toute responsabilité, elle n'arrange pas l'ensemble des Québécois. Innocents des crimes commis à LG 2, ces derniers n'échappent pas aux conséquences des actes condamnables commis en leur nom par des agents publics qui portent une bonne part de responsabilité, cependant que les syndiqués innocents du crime commis par quelques-uns des leurs et agissant au nom du syndicat qui les regroupe tous ne sont pas tenus responsables. "Si la responsabilité est indivisible dans la société politique, comment peut-elle l'être dans les organisations syndicales? "En quoi, se demanderont certains, ce débat est-il pertinent au mandat de la commission qui siège à Québec? À mon avis, ce débat n'a qu'une commodité politique pour ceux qui ont intérêt à distraire l'opinion de l'objectif fondamental de cette enquête: le premier ministre a-t-il dit la vérité en Chambre? "Ce n'est pas le rapport Cliche qui peut apporter la réponse à cette question."

M. le Président, je terminerai là parce que la fin de l'éditorial porte sur des propos tenus par Me Rosaire Beaulé devant cette commission hier. Je ne voudrais pas y revenir ici en l'absence de Me Beaulé. On pourra peut-être le faire lorsqu'il sera parmi nous, mais je retiens de cet extrait de l'éditorial que je viens de lire de M. Marcel Adam dans le journal La Presse de ce matin, et je dis très clairement que je partage son point de vue, que ce n'est pas le rapport... Bien oui, je sais que cela n'impressionne personne, mais j'ai quand même le droit de dire, M. le Président, que ce n'est pas le rapport Cliche qui peut apporter...

M. Duhaime: Quelle est votre question? Une voix: II n'y a pas de question.

M. Duhaime: Comment, il n'y a pas de question?

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse...

M. Gratton: Si le ministre écoutait, M. le Président...

M. Duhaime: J'écoute, mais j'attends votre question.

M. Gratton: ...il saurait que j'ai indiqué que je n'aurais pas de question.

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, non, non.

M. Duhaime: Ah! Vous faites un commentaire.

Le Président (M. Jolivet): II a dit dès le départ qu'il faisait un commentaire.

M. Duhaime: Ah bon! Je m'excuse.

M. Gratton: Je n'ai même pas fait de commentaire. J'ai dit que je n'en ferais pas.

Le Président (M. Jolivet): D'accord, d'accord.

M. Duhaime: Pour tout de suite, vous lisez la Presse.

M. Gratton: Par contre... Oui.

M. Lalonde: J'ai apporté aussi la Presse pour la lire.

M. Gratton: On va aussi vous lire un bout tantôt de l'article de Mme Lysiane Gagnon.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

M. Gratton: J'invite Me Gadbois, s'il le veut, s'il le désire, s'il le sent approprié, à commenter. Je n'ai pas de question et je termine là-dessus, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): J'ai seulement une question à poser au député de Gatineau. Est-il exact que...

Le Président (M. Jolivet): Juste un instant, M. le député.

M. Vaillancourt (Jonquière): Non, mais avec son consentement.

M. Gratton: Encore là, le règlement...

M. Lalonde: II n'y a pas de consentement.

Le Président (M. Jolivet): Je pose la question. Est-ce qu'il y consentement?

M. Vaillancourt (Jonquière): J'ai une question à poser au député...

M. Paradis: Non, il faut qu'il soit assermenté.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

Une voix: Non, il n'y a pas de consentement.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Gratton: Je ne me rendrai pas à ma question.

Une voix: Ils ne sont pas préparés.

M. Duhaime: M. le Président, je voudrais dire tout de suite que je n'aurai pas de question à poser à Me Gadbois. Je considère que les réponses qu'il m'a fournies ce matin étaient très claires. Je vais faire un commentaire. Dans les différents éditoriaux que signe régulièrement M. Marcel Adam depuis le début de nos travaux il y en a un qui m'impliquait directement, la Presse, le 28 avril 1983: "Des motifs et avantages du règlement hors cour." "Que le ministre Duhaime choisisse de ne lire du rapport que ce qui arrange le premier ministre, soit. Mais le politicien Guy Chevrette devrait avoir la décence de ne pas contredire ce qu'écrivait avec plus d'objectivité, en 1975, le commissaire du même nom."

Une voix: Soit.

M. Duhaime: Non, il n'a pas écrit "soit", c'est le point, c'est terminé.

M. le Président, M. Marcel Adam, comme vous le savez, est un éditorialiste qui travaille pour le quotidien La Presse. Il fait donc partie, comme le disait récemment le président du journal La Presse, de l'équipe éditoriale et donc de l'orientation politique du journal, peu importe le sujet traité. Puisque M. Adam me fait une suggestion, je pourrais peut-être lui en faire une aussi. Je pense qu'il est partie dans ce dossier, parce que, si nous sommes réunis autour de cette table, c'est non pas à partir des déclarations du premier ministre du Québec faites en Chambre en mars 1979, mais bien parce que la Presse a publié en première page, le 17 mars 1983, un article que je qualifierais de fracassant et que la Presse a récidivé le 19 mars 1983. À la demande expresse de l'Opposition, qui paralysait les travaux de la Chambre, au moment même où il n'y avait même pas un président au fauteuil, le chef de l'Opposition a réclamé que toute la lumière soit faite et que la commission parlementaire ait lieu avant Pâques. Or, puisque M. Adam nous fait des invitations, je voudrais peut-être lui faire une suggestion -je suis convaincu qu'il nous écoute actuellement - celle d'avoir, quant à moi, la décence de s'abstenir de faire des commentaires sur un dossier dans lequel il est partie prenante comme membre de l'équipe éditoriale d'un journal qui a porté une des plus graves accusations qu'un journal n'ait jamais portées à l'endroit du premier ministre du Québec.

Quant à ses interprétations sur le contenu du rapport de la commission Cliche et les conclusions, quant à moi, autant sur le contenu que sur les conclusions, j'aime mieux me référer à ce que disent les commissaires de la commission Cliche. C'est rapporté à la page 28. Tout le monde sait que ceux qui ont été impliqués dans ce que j'appellerais l'entente pour, d'une part, obtenir une convention collective de travail pour la durée du chantier, mais aussi un monopole syndical... Spécialement pour M. Adam, je voudrais peut-être lui relire la page 28 du rapport de la commission Cliche: "Ce que la violence ne pouvait lui donner, la FTQ-Construction..."

M. Gratton: M. le Président, de façon qu'il n'y ait pas de malentendu, je ne voudrais pas que le ministre fasse une déclaration en ayant été induit en erreur par le fait que je n'ai cité qu'une partie de l'éditorial de M. Adam ce matin, parce qu'effectivement, il se réfère à ce passage de la page 28 dans son éditorial de ce matin. (16 h 15)

M. Duhaime: Vous pouvez dire ce que voulez ici, à partir de votre siège; M. Adam peut écrire ce qu'il veut, et moi aussi, j'ai l'intention de dire ce que je veux.

M. Gratton: Ah! Si vous voulez dire n'importe quoi, allez-y!

M. Duhaime: Non, je ne dirai pas n'importe quoi.

M. le Président, à la page 28, il est très bien dit: "Ce que la violence ne pouvait lui donner, la FTQ-Construction a tenté de l'obtenir au moyen de négociations secrètes, nouées avec M. Paul Desrochers et avec la haute direction d'Hydro-Québec, la SEBJ et la SDBJ. Devant la preuve, la commission ne peut que conclure que le gouvernement, Hydro-Québec et la FTQ-Construction ont véritablement négocié en vue d'instituer le monopole syndical à la Baie-James. On regrette que MM. Desrochers et Giroux aient abordé avec la FTQ la possibilité d'accorder à celle-ci un monopole syndical sans en informer la CSN ou la CSD et sans tenter

de conclure avec les trois centrales des modalités d'entente susceptibles d'assurer aux travaux de la Baie-James un climat de travail serein et harmonieux. Il ne faut pas oublier que la loi 290 avait déjà sanctionné le principe du plurialisme syndical dans la construction."

Il va de soi, M. le Président, qu'à cette époque, quand on se réfère au gouvernement du Québec, puisque le rapport des commissaires Cliche, Chevrette et Mulroney a été remis à l'honorable Robert Bourassa, premier ministre du Québec, le 2 mai 1975, il s'agit du gouvernement libéral.

M. le Président, aux pages 68 et 69 du rapport - je vais le relire pour qu'on ne l'oublie jamais au Québec, non seulement pour les prochaines années, mais pour le prochain siècle - on dit: "Les commissaires ont acquis la conviction que les travailleurs ordinaires n'encourent pas la responsabilité de ce qui est arrivé. Il ne s'agit aucunement d'une réaction de masse, mais bien d'une opération montée par un noyau de mécréants, dirigés par Duhamel, pour montrer, une fois pour toutes, qui était le maître à la Baie-James. "L'impression nette que nous tirons de l'interrogatoire des témoins du saccage est que les travailleurs ont été de simples spectateurs et même des victimes des actes insensés posés par un Duhamel en délire. "C'est à ce genre de castastrophe que devait fatalement aboutir l'irresponsabilité des aventuriers sans scrupule qui avaient fait main basse sur le contrôle des principaux locaux de la FTQ-Contruction."

M. Adam, l'autre jour, me reprochait de ne lire que les paragraphes qui faisaient mon affaire. Je vais continuer la lecture.

M. Gratton: C'est une première provinciale.

M. Duhaime: Je continue, à la page 69 du rapport de la commission Cliche: "II suffit, à partir de Yvon Duhamel, de remonter le lien de filiation pour voir à qui incombe ultimement la responsabilité morale de son crime. "Car, enfin, l'agent d'affaires travaillait à la réalisation d'un objectif maintes fois déclaré par les dirigeants de sa centrale: l'acquisition du monopole syndical sur les chantiers. Et il le faisait avec des méthodes qui ne détonnent pas du tout avec celles généralement admises dans la FTQ-Construction. Il n'est que de lire le procès-verbal de l'assemblée mensuelle des membres du local 791, tenue le 25 mars 1974. Une résolution, adoptée unanimement, accepte le rapport par lequel M. René Mantha, après avoir souligné le "beau travail" accompli par Yvon Duhamel "pour le local et pour tous les membres", ajoute qu'il "a été grandement apprécié à son dernier meeting à la Baie-

James". À noter que les membres sont alors bien au courant du saccage du 21 mars puisqu'il en a été question à la même assemblée."

Je pourrais continuer, M. le Président, et parler de René Mantha ou de l'esprit de famille, du roi de la construction, faire état également que plusieurs des dirigeants de la FTQ-Construction étaient ce qu'il est convenu d'appeler des travailleurs d'élections à la solde du Parti libéral du Québec, ce qu'il est convenu d'appeler des bras, mais je vais m'arrêter là pour l'instant, pour faire une distinction qui m'apparaît fondamentale: La responsabilité morale, sauf erreur, n'a pas d'effet juridique. Il y a, à mon sens, une distinction très nette qu'ont faite les commissaires, à la page 68, en disant qu'ils ont acquis la conviction que les travailleurs ordinaires n'encourent pas la responsabilité de ce qui est arrivé. C'est simple, c'est un travailleur à la base, celui qui n'a rien à voir avec les mécréants et les criminels, qui avait pris le contrôle de la FTQ-Construction et qui avait obtenu le monopole syndical après l'avoir négocié avec le gouvernement Bourassa, la direction d'Hydro-Québec, la SEBJ et la SDBJ. C'est ce que dit en toutes lettres le rapport de la commission Cliche. On aura beau écrire les éditoriaux qu'on voudra, M. le Président, au soutien d'une mauvaise thèse ou d'un mauvais dossier, quant à moi, je ne changerai pas d'idée. Je vous remercie, M. le Président, de votre patience.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: M. le Président. Je voudrais poser une question à Me Gadbois. Est-ce qu'une requête en irrecevabilité a été prise par l'International Union of Operating Engineers, soit à cause d'une absence de lien de droit ou pour tout autre motif?

M. Gadbois: À ma connaissance, non. La requête en irrecevabilité avait été prise par le local 134.

M. Ciaccia: Vous aviez, je crois, mentionné que cette requête avait été entreprise par le local 134.

M. Gadbois: C'est exact.

M. Ciaccia: Est-ce que d'autres défendeurs s'étaient joints à cette requête?

M. Gadbois: Je ne crois pas.

M. Ciaccia: Alors, si je comprends bien, la requête en irrecevabilité a été présentée devant les tribunaux à cause d'une absence de lien de droit et l'International Union of Operating Engineers n'a jamais pris une telle

requête.

M. Gadbois: La requête en irrecevabilité avait été présentée par Me Cutler. Elle a été entendue le 15 janvier, pour autant que je me rappelle, c'est-à-dire dès le début de la cause, et elle a été rejetée.

M. Ciaccia: Elle a été rejetée.

M. Gadbois: Elle avait également été entendue avant, je crois, mais la décision a été rendue le 15 janvier.

M. Ciaccia: Et elle a été rejetée. M. Gadbois: Rejetée, oui. M. Ciaccia: Merci.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Chambly.

M. Tremblay: M. le Président, j'aimerais demander à Me Gadbois de l'information relativement au communiqué de presse qui, je crois - et je le demande à Me Gadbois - a finalement été envoyé après le règlement. Je parle d'un communiqué de presse qui avait été préparé le 13 mars 1979, en présence du président du conseil d'administration.

M. Gadbois: À quelle page, M. le Président?

M. Tremblay: J'ai cela à la page 183. À la page 134, il y a le projet de communiqué de presse. Je ne retrouve pas dans les documents le communiqué de presse final. La page 134 du document des avocats Geoffrion et Prud'homme et les documents de la SEBJ qu'on nous a remis au début, à la page 183. À la page 134, vous trouvez le projet de communiqué et les avocats de la SEBJ demandaient qu'un des paragraphes ne soit pas inclus dans le communiqué.

M. Gadbois: Je regrette, M. le Président, mais je comprends mal. À la page 183 du livre de la société d'énergie, c'est un mémoire de Me Jean Bernier des circonstances entourant la signature de la déclaration de règlement, alors qu'à la page 134 du livre de Geoffrion et Prud'homme, c'est un projet de communiqué qui avait été envoyé à MM. Geoffrion et Prud'homme pour avoir leurs commentaires.

M. Tremblay: D'accord. Dans le troisième paragraphe du mémo à Me Gadbois de Me Jean Bernier, à la fin du troisième paragraphe, c'est écrit: "Ensuite, j'ai réglé avec le PCA les termes finals du communiqué de presse." Ma question est:

Est-ce que le communiqué de presse a été expédié aux médias d'information?

M. Gadbois: En fait, il l'a été. C'est Me Bernier, qui était à ce moment secrétaire de la société d'énergie, qui s'est occupé de l'expédier.

M. Tremblay: Est-ce que vous pouvez me dire s'il a été expédié dans les termes du projet de communiqué?

M. Gadbois: On m'avise que le communiqué qui a été remis aux médias de la presse contenait de légères modifications à ce que vous avez comme projet à la page 134. J'en ai une copie ici.

M. Tremblay: Bon. Vous en avez une copie. Je voudrais simplement vous demander si, dans le communiqué final, la SEBJ conservait l'essentiel de l'article 2 qui disait que les syndicats québécois n'étaient pas en mesure de payer des sommes de l'ordre du montant réclamé dans la poursuite. D'autre part, conservait-il aussi l'allégation que le syndicat américain impliqué dans la poursuite, l'International Union of Operating Engineers, auquel était affilié un des syndicats québécois, ne reconnaissait pas sa responsabilité, mais participait au règlement et y contribuait? On ajoutait: De l'opinion des conseillers juridiques de la SEBJ, des procédures requises aux États-Unis pour faire reconnaître un jugement québécois pourraient se révéler longues et coûteuses, en plus de représenter des risques sérieux. Est-ce que cela a été conservé dans le...

M. Gadbois: Oui. Je lis dans ce communiqué, aux paragraphes 2 et 3, celui qui a été émis aux médias, les mots que vous venez de prononcer.

M. Tremblay: Cela avait été préparé par Me Bernier, avec la collaboration du président du conseil d'administration, M. Saulnier.

M. Gadbois: C'est exact. Je pense que j'ai dit tantôt que le projet de communiqué avait été préparé par le personnel des relations de presse d'Hydro-Québec, à la demande de M. Saulnier. Il a, par la suite, été référé à nos avocats et, par la suite, transmis à la société d'énergie, qui a émis son propre communiqué.

M. Tremblay: D'accord. Maintenant, dans ce même mémo, sont relatées les démarches de la journée - j'ai l'impression -de Me Jean Bernier relativement à ce dossier. Et il y a une citation, à la page 2 du document, à la page 84 du cahier, du juge Bisson, du 13 mars 1979 à midi.

M. Gadbois: C'est exact.

M. Tremblay: Est-ce que vous pouvez nous dire quelle a été la réaction du juge Bisson au moment où lui a été présentée la requête pour la déclaration d'entente ou de règlement hors cour?

Le Président (M. Jolivet): Juste un instant. La façon dont la question est posée concerne une réaction. Je ne peux pas accepter la question.

M. Tremblay: Quelle a été sa déclaration, alors?

M. Gadbois: Voici, M. le Président. Tout ce que je puis faire, c'est de lire ce que M. Bernier rapporte. Je n'étais pas présent au moment où le juge a constaté le règlement, étant absent, soit en voyage ou par maladie. Le rapport que m'en fit M. Bernier est entre guillemets. Donc, j'assume que ce sont les paroles du juge. On dit: "Je constate que des hommes sages se sont penchés sur ce dossier pour mettre fin au litige de la façon présentée." Fin de la citation.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Je vais faire ce qu'on fait peu souvent, M. le Président, je vais m'abstenir.

Le Président (M. Jolivet): Dans ce cas, le député de Laporte. Le député de Bourassa? Oui.

M. Laplante: J'ai une question additionnelle qui m'a échappé tout à l'heure. On a parlé de la compagnie d'assurances et du montant de 1 300 000 $; la compagnie d'assurances, étant donné que ce n'était pas 32 000 000 $, comment se fait-il qu'elle ait abandonné aussi facilement une poursuite de 1 300 000 $?

M. Gadbois: II faut...

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse. Vous n'avez pas besoin de répondre parce que cela ne vous regarde pas. J'ai eu une réaction spontanée du député de Jonquièrel

M. Laplante: Je vais changer ma question. Je vais changer ma question.

Des voix: Ah! Ah! Ah!

Le Président (M. Jolivet): D'accord, parce que j'ai eu une réaction véhémente... Non, je ne devrais pas dire cela.

Une voix: Spontanée.

Le Président (M. Jolivet): Spontanée.

M. Laplante: Oui, mais je n'aime pas d'où elle vient, par exemple.

M. Tremblay: La justice, pour nous, c'est plus important.

M. Laplante: Avez-vous eu une concertation avec les compagnies d'assurances pour abandonner les poursuites?

M. Gadbois: Pas moi-même. Nos procureurs étaient en relation avec les procureurs des compagnies d'assurances. (16 h 30)

M. Laplante: Dans votre mandat, était-ce une condition liée au règlement que la compagnie d'assurances cesse ses poursuites en même temps que la Société d'énergie de la Baie James?

M. Gadbois: En fait, c'était une exigence de la Société d'énergie de la Baie James que, s'il y avait un règlement, il fallait nécessairement que les réclamations des assureurs soient également réglées, à cause de l'obligation qu'avait la Société d'énergie de la Baie James, en vertu des contrats qui la liaient aux compagnies d'assurances, qui prévoyaient que la Société d'énergie de la Baie James, comme assurée, devait fournir, à la compagnie d'assurances qui réclamerait, tous les services nécessaires, soit comme témoin, soit comme preuve, pour aider à la cause.

Si le règlement était effectué seulement par la Société d'énergie de la Baie James, celle-ci se voyait entraîner dans une action qui se poursuivait contre les défendeurs et elle considérait qu'elle n'était pas plus avancée à ce moment-là. Alors, il fallait qu'elle règle.

M. Laplante: Vous m'avez dit tout à l'heure que ce n'était pas une action conjointe, mais, en somme, la compagnie d'assurances était quand même liée aussi intimement que cela avec vous. Ce que je voudrais déterminer - parce que je n'aime pas jouer au sous-marin avec cela - c'est la responsabilité de la compagnie d'assurances d'avoir jeté du lest, elle aussi, sur un règlement en même temps que la Société d'énergie de la Baie James, quand elle n'avait qu'un petit montant de 1 300 000 $ à récupérer et qu'à cause de l'insolvabilité des syndicats, qui a été mentionnée aussi à ce moment-là, je le vois comme une action prise conjointement avec Hydro-Québec.

M. Gadbois: C'étaient les mêmes causes; c'étaient les mêmes défendeurs. Dans les quatre actions dont il s'agit, l'action de la Société d'énergie de la Baie James, l'action de la Sécurité, compagnie

d'assurances générales du Canada... Il y avait deux actions, excusez-moi. En fait, il y en a trois de la compagnie d'assurances et ces actions devaient être réglées en même temps que la nôtre. Autrement, l'action se poursuivait en cour comme si nous n'avions pas réglé.

M. Laplante: C'est compliqué!

M. Gadbois: C'est une question de preuve.

M. Laplante: Oui, c'est cela. Pour nous, c'est compliqué. Pour les gens qui nous écoutent aussi, s'ils ne sont pas familiers avec de telles requêtes en justice, au tribunal.

M. Gadbois: M. le Président, j'ai mentionné tantôt que les trois - j'ai dit trois, mais, en fait, il y en a quatre -actions étaient liées ensemble pour la preuve. Si une des causes est réglée et que les trois autres se continuent, c'est la même preuve qui se continue. L'obligation de la Société d'énergie de la Baie James était, vis-à-vis de ses assureurs, de leur fournir la preuve nécessaire pour la poursuite de leurs actions. Alors, il fallait nécessairement que tout ce "paquet" soit réglé ensemble.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Laporte.

M. Bourbeau: Merci, M. le Président. M. Gadbois, pouvez-nous dire à quel moment M. Laliberté s'est installé dans ses locaux à Hydro-Québec, en 1978? Vers quelle époque?

M. Gadbois: En fait, M. Laliberté est devenu président-directeur général de la Société d'énergie de la Baie James et, à ce titre, administrateur membre du conseil d'administration d'Hydro-Québec, le 1er octobre 1978. À quel moment s'est-il installé? Je dirais dès cette date ou dès après.

M. Bourbeau: Ah bon! Vous n'avez pas le souvenir qu'il ait pris place dans les locaux à une période antérieure au 1er octobre 1978?

M. Gadbois: De souvenir, non.

M. Bourbeau: À l'égard de M. Saulnier qui était président du conseil, est-ce qu'il a pris possession de ses locaux avant le 1er octobre 1978 ou après?

M. Gadbois: Non plus, je dirais.

M. Bourbeau: À titre de chef du contentieux, ou avocat en chef de la compagnie, vous aviez l'occasion de rencontrer M. Laliberté, je présume, sur une base journalière?

M. Gadbois: Pas nécessairement journalière. J'avais l'occasion de le rencontrer lorsque j'avais affaire à lui ou qu'il avait affaire à moi et également, comme j'étais secrétaire intérimaire du conseil d'administration de la Société d'énergie de la Baie James, au moins une fois par semaine.

M. Bourbeau: Est-ce que vous rencontriez M. Saulnier souvent?

M. Gadbois: II faudrait peut-être vous préciser que le bureau de M. Laliberté était situé à Place Dupuis, au bureau de la Société d'énergie de la Baie James, alors que M. Saulnier avait son bureau à Hydro-Québec, au vingt-deuxième étage. Il y avait une séparation physique entre les deux.

M. Bourbeau: D'accord. À compter de sa nomination - je parle de M. Laliberté -est-ce qu'en aucun moment, lors de vos rencontres journalières - ou enfin hebdomadaires et non pas nécessairement lors des rencontres du conseil d'administration -il vous a fait part de son souhait ou de son désir de voir la cause réglée hors cour?

M. Gadbois: Pas comme tel, M. le Président.

M. Bourbeau: Et à l'égard de M. Saulnier, si je vous posais la même question?

M. Gadbois: Je donnerais la même réponse.

M. Bourbeau: La même réponse. Au sujet du règlement avec les compagnies d'assurances dont on faisait état tout à l'heure, le montant de 100 000 $ qui a été payé aux compagnies d'assurances a été payé, je crois, à une seule compagnie.

M. Gadbois: Je n'ai pas participé au règlement des compagnies d'assurances.

M. Bourbeau: J'avais cru comprendre que, parmi les compagnies d'assurances, il y en avait quelques-unes qui s'étaient désistées à un certain moment et qu'à la fin, il n'y en avait plus qu'une seule encore au dossier. Est-ce que vous pourriez vérifier?

M. Gadbois: Si je comprends bien, M. le Président, il n'y avait qu'un certain nombre de compagnies d'assurances qui avaient décidé de poursuivre, représentant à peu près un tiers du montant total qui avait été versé par les compagnies d'assurances. Je parle de la somme de 1 132 000 $. La Sécurité, compagnie d'assurances générales du Canada,

représentait les trois compagnies d'assurances qui ont décidé de poursuivre. Si le règlement s'est effectué en un seul paiement à cette compagnie, c'est peut-être un fait, mais je ne connais pas les droits ou les obligations de cette compagnie vis-à-vis des compagnies qu'elle représentait.

M. Bourbeau: D'accord. Si vous dites que les compagnies qui avaient poursuivi ne représentaient qu'un tiers du montant de l'indemnité payée à Hydro-Québec, on parle alors d'une réclamation de compagnies qui auraient déboursé environ 375 000 $. J'essaie d'obtenir le tiers de 1 132 000 $. Cela représente 377 000 $. Est-ce que c'est exact? Est-ce approximatif?

M. Gadbois: Excusez, M. le Président. Je lis ceci, à la page 22 du rapport de la Société d'énergie de la Baie James, c'est-à-dire du livre: "La Sécurité, compagnie d'assurances générales du Canada, St. Paul Fire and Marine Insurance Company et la Société d'assurance des caisses populaires, représentées par Mes Desjardins, Ducharme et Cie, poursuivent également les mêmes défendeurs pour leurs parties, 340 000 $, des indemnités payées pour les dommages directs à la SEBJ et la SDBJ et SOTOUR.

M. Bourbeau: D'accord. Ces compagnies poursuivaient pour 340 000 $ et elles ont encaissé?

M. Gadbois: 100 000 $.

M. Bourbeau: 100 000 $ sur 340 000 $, ce qui fait tout près de 30% de leur réclamation.

M. Gadbois: II faudrait mettre cela en face des autres compagnies qui ont renoncé à leur poursuite.

M. Bourbeau: Maintenant, à la suite du paiement des indemnités par les compagnies d'assurances, il y a eu une augmentation des primes à la SEBJ. Êtes-vous au courant de l'importance de cette augmentation?

M. Gadbois: Je crois qu'un des paragraphes de la déclaration, dans l'action, fait mention de cette augmentation.

M. Bourbeau: Est-ce que vous pourriez me donner le renseignement? On peut vous laisser quelques minutes pour vérifier.

Une voix: Le député de Bourassa a dit que c'était 20%.

M. Bourbeau: Je me fierais plutôt aux chiffres du témoin qu'à ceux du député de Bourassa.

M. Gadbois: Si l'on regarde à la page 54 du livre de la Société d'énergie de la Baie James, qui contient la déclaration de la société, au paragraphe 85 on lit ce qui suit: "À cause des événements de mars 1974 les représentants du groupe d'assureurs qui avaient déjà produit auprès de la demanderesse leur cotation pour assurer les biens de cette dernière ont exigé une majoration de 20% du taux des primes d'assurance, majoration qui, sur une période de 10 ans, représentera pour la demanderesse un coût additionnel de 5 869 132 $, somme que la demanderesse est bien fondée à réclamer des défendeurs."

M. Bourbeau: Êtes-vous au courant si, effectivement, les primes d'assurance ont été augmentées subséquemment de ce montant?

M. Gadbois: Je ne suis pas au courant, il faudrait le vérifier.

M. Bourbeau: Je vous remercie.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Laprairie.

M. Saintonge: M. le Président...

M. Tremblay: En verty du principe de l'alternance...

Le Président (M. Jolivet): Vous aviez demandé la parole, je m'excuse, M. le député de Chambly. Allez, laissez tomber le reste.

M. Tremblay: Me Gadbois, j'aimerais vous demander quel était le montant d'assurance que vous déteniez, c'est-à-dire quelle était la somme maximale que les compagnies d'assurances auraient pu vous payer dans une réclamation.

M. Gadbois: Là, je n'ai aucun document qui pourrait me permettre de vous donner une réponse exacte. Cependant, la société d'énergie détenait des polices d'assurance-construction qui étaient peut-être de l'ordre de 30 000 000 $ ou 50 000 000 $, quelque chose comme cela. Cependant, ces polices prévoyaient le paiement simplement de dommages directs, c'est-à-dire de dommages aux installations. C'est la raison pour laquelle le montant du paiement qui a été fait par les assureurs à la société d'énergie s'est limité à 1 132 000 $; il s'agissait là de dommages aux installations, aux campements, aux maisons, etc.

M. Tremblay: Les 1 132 000 $, est-ce que c'était la somme totale de votre réclamation aux assureurs?

M. Gadbois: Cela a été la somme totale qui a été acceptée par les compagnies

d'assurances.

M. Tremblay: Votre réclamation à la SEBJ?

M. Gadbois: Je ne pourrais vous répondre.

M. Tremblay: Dans un autre ordre d'idées, mais toujours en rapport avec la somme de 1 132 000 $ payée par les assurances, si j'ai bien compris - je ne suis pas avocat; je ne m'en excuse pas, mais je le dis - les compagnies d'assurances auraient-elles récupéré les 1 132 000 $, si la SEBJ avait eu gain de cause en cour et qu'elle avait récupéré - c'est fort hypothétique, je l'admets très bien cet argent?

Le Président (M. Jolivet): Me Gadbois, simplement en vous disant que je vous refuse la réponse. C'est une hypothèse. Je ne peux en aucune façon vous permettre de répondre; on ne sait pas ce qui serait arrivé. (16 h 45)

M. Lalonde: Si le député avait des roues...

M. Tremblay: Je voudrais, au moins, que vous m'informiez de l'erreur que je fais.

Le Président (M. Jolivet): Oui, simplement, vous allez la reformuler, mais, si vous partez sur une hypothèse, dès le départ la question est irrecevable.

M. Gratton: Faites attention parce qu'il y en avait trois avant votre question.

M. Lalonde: On pourrait demander au député de Bourassa de vous conseiller.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le député.

M. Gratton: En tout cas, je ne vous offre pas mes services.

M. Tremblay: De notre côté, c'est un travail d'équipe.

M. Gratton: On voit cela.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît; M. le député de Chambly, vous pouvez reprendre votre question si vous pensez pouvoir la reprendre.

M. Tremblay: Écoutez, je vais y aller très directement et, M. le Président, vous m'arrêterez si c'est hypothétique. Ce que je cherche à savoir, c'est: Aurait-il pu être possible pour les assurances de recouvrer le montant qu'elles avaient payé à la SEBJ si le jugement...

Le Président (M. Jolivet): M. le député, je suis obligé de vous dire que, malheureusement, je ne peux la recevoir.

M. Tremblay: Si j'arrête au si, M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): Indépendamment de cela. C'est impossible de le savoir. Il y a eu un règlement hors cour et, en conséquence, on ne peut poser aucune autre hypothèse en disant: S'il y avait eu un procès.

M. Tremblay: M. le Président, je m'excuse, mais il reste qu'en droit il doit y avoir une entente normale entre les compagnies d'assurances dans un cas comme celui-ci et leurs clients pour savoir comment seraient réparties les sommes qui seraient versées. Et, dans la pratique courante, j'imagine que je pourrais avoir la réponse, non?

M. Lalonde: Demandez à la pratique courante. Appelez la pratique courante.

M. Tremblay: Alors, dans la pratique courante. Merci. Le député de Marguerite-Bourgeoys...

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il vous plaît!

M. Tremblay: ...en tant qu'avocat, me conseille maintenant. J'ai non seulement la collaboration de mes collègues de ce côté-ci de la Chambre, mais aussi de ceux de l'autre côté. Je les remercie infiniment.

M. Lalonde: M. le Président, je veux déclarer que je n'ai pas accepté de mandat.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Chambly.

M. Tremblay: Ce serait un procureur que je n'aurais pas choisi.

M. Lalonde: Tant pis pour vous.

M. Tremblay: Dans la pratique courante, comme me le suggérait je ne sais qui de l'autre côté, dans le cas où un jugement aurait été porté...

M. Lalonde: On vous observe.

M. Tremblay: Je sais... est-ce que les compagnies d'assurances auraient pu espérer...

Une voix: Tous les espoirs sont permis.

Le Président (M. Jolivet): M. le député, vous allez me rendre la vie difficile. Le problème est que votre question, quel que soit l'angle sous lequel vous la posez, ne semble pas être autre chose qu'une hypothèse sur quelque chose qui n'a jamais existé. Alors, je ne peux permettre à Me Gadbois de répondre.

M. Tremblay: M. le Président, c'est fort simple.

Le Président (M. Jolivet): Allez-y donc et on verra.

M. Tremblay: Ce que je cherche à savoir, c'est: Les compagnies d'assurances avaient-elles intérêt à poursuivre au maximum pour obtenir plus que 100 000 $?

Le Président (M. Jolivet): Et mon problème, c'est qu'encore une fois Me Gadbois ne peut répondre à cela; il n'est pas la compagnie d'assurances. Il ne peut répondre à cela. C'est impossible.

M. Tremblay: Ah non! Mais, il sait très bien...

Le Président (M. Jolivet): Ah non! C'est une opinion, et une opinion n'est pas recevable en vertu du règlement que vous m'avez demandé d'appliquer et que j'applique.

M. Lalonde: Vous pouvez demander à Me Gadbois l'adresse des compagnies d'assurances pour leur écrire.

M. Tremblay: Bien, je vous remercie, M. le Président. Je vais clore là-dessus et vous remercier de vos directives, ainsi que de celles du député de Marguerite-Bourgeoys.

Le Président (M. Jolivet): Dans ce cas, je donne la parole au député de Laprairie.

Une voix: Vous savez maintenant comment je me sentais hier.

M. Bourbeau: On appelle cela un "strike-out".

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Laporte, je ne voudrais aucun commentaire. Je l'ai fait ce matin et je demanderais la même collaboration de votre bord. M. le député de Laprairie.

M. Saintonge: Me Gadbois, le 15 janvier, les procureurs de la SEBJ, Geoffrion et Prud'homme, recevaient uniquement comme mandat d'écouter les propositions de règlement, sans aucun mandat de négocier. C'est bien exact?

M. Gadbois: C'est exact.

M. Saintonge: À la réunion du 17, Me Jasmin avait présenté la veille une proposition de règlement de l'ordre de 50 000 $.

M. Gadbois: Oui.

M. Saintonge: Cela a été présenté à M. Laliberté le 17. C'est bien cela?

M. Gadbois: C'est cela.

M. Saintonge: Cela a été reçu de quelle façon par M. Laliberté?

M. Gadbois: Me Jasmin avait demandé, en présentant sa proposition de règlement, de rencontrer le P.-D.G. de la société d'énergie. Cette rencontre a effectivement eu lieu le mercredi 17 dans le bureau du président-directeur général de la société d'énergie où étaient présents M. Laliberté, Me Cardinal, Me Aquin, Me Jasmin et moi-même. C'est là que Me Jasmin a proposé les commentaires dont j'ai fait part ce matin. Après qu'il eut quitté, le président-directeur général de la société nous a avisés que l'offre syndicale, c'est-à-dire l'offre faite par Me Jasmin pour son syndicat, était inacceptable.

M. Saintonge: A-t-il donné des motifs du fait que l'offre était inacceptable?

M. Gadbois: II avait un motif, le montant de l'offre: 50 000 $ et il y avait dans l'offre certains textes qu'il trouvait non acceptables.

M. Saintonge: Je pense que c'est à cette même réunion que le mandat a été confié à Geoffrion et Prud'homme de préparer une formule de transaction ou une formule de déclaration de règlement hors cour.

M. Gadbois: C'est exact, M. le Président.

M. Saintonge: Dans quelles circonstances, le mandat précis de préparer cette formule a été donné à Geoffrion et Prud'homme?

M. Gadbois: Dans les circonstances que je viens de vous relater. En d'autres mots, d'une part, le président-directeur général fait le commentaire que l'offre de Me Jasmin est inacceptable, qu'elle contient certains allégués qui n'étaient pas, non plus acceptables et qu'il désirait avoir de Geoffrion et Prud'homme un projet de transaction qui, s'il décidait de transmettre ce document ou un projet de transaction au conseil d'administration, soit acceptable à la

société d'énergie.

M. Saintonge: À ce moment-là, M. Laliberté a-t-il mentionné si des négociations étaient en cours entre les syndicats et une personne quelconque, ou une partie quelconque, pour la SEBJ?

M. Gadbois: II a répété que le mandat de Geoffrion et Prud'homme était toujours d'écouter.

M. Saintonge: Mais a-t-il fait allusion au fait de préparer une formule de transaction, une formule de règlement de cour, alors qu'on refuse une offre potentielle du syndicat et que M. Laliberté demande, d'autre part, précisément à ses procureurs, tout en leur laissant simplement le mandat d'écouter, de préparer une formule de transaction? Est-ce qu'une quelconque offre de règlement autre que cela ou une quelconque négociation était dans l'air?

M. Gadbois: Pas au moment où on a rencontré Me Jasmin. Il y avait l'ouverture qui avait été faite par Me Beaulé la semaine précédente, lorsque Me Beaulé avait exposé à Me Jetté qu'il y avait peut-être une possibilité d'un montant de 250 000 $, mais c'était tout.

M. Saintonge: Étiez-vous présent le 15 janvier à la cour lorsque Me Beaulé aurait mentionné quelque chose relativement aux négociations par rapport au mandat confié à Geoffrion et Prud'homme à ce moment-là, dans le sens que, si Geoffrion et Prud'homme n'avaient pas le mandat de négocier, seulement d'écouter, lui, il se retirait de toute négociation?

M. Gadbois: C'était sur l'heure du dîner et j'étais avec Me Cardinal et, je crois, Me Aquin. Nous avons rencontré Me Beaulé et Me Jasmin. Je crois que l'un ou l'autre a commencé à parler, probablement Me Beaulé. Il a demandé à Me Cardinal s'il avait un mandat de négocier. Me Cardinal lui a répondu: Non, nous n'avons pas le mandat de négocier. Me Beaulé leur a soi-disant répondu - je l'ai entendu, cela fait revenir ma mémoire - qu'il ne pouvait pas parler à des gens qui n'étaient pas mandatés pour négocier.

M. Saintonge: Donc, en d'autres mots, Me Beaulé n'était pas dans les négociations avec la SEBJ à ce moment-là. Le 17, il n'y avait aucune négociation, à votre connaissance. Vous n'aviez pas le mandat de négocier, Geoffrion et Prud'homme non plus?

M. Gadbois: Aucunement.

M. Saintonge: Me Jasmin avait présenté son offre et cela avait été refusé. M. Gadbois: C'est exact.

M. Saintonge: Donc, à ce moment-là, M. Laliberté n'avait donné aucun motif du nouveau mandat confié à Geoffrion et Prud'homme de préparer une formule de transaction?

M. Gadbois: Non. C'est à sa demande que cela a été fait.

M. Saintonge: Sans aucune explication? M. Gadbois: Au cas où.

M. Saintonge: Au cas où, bon! Et sans aucune information que des négociations quelconques pouvaient se dérouler entre les parties?

M. Gadbois: Non, juste au cas où des offres seraient faites...

M. Saintonge: D'accord.

M. Gadbois: ...par les défendeurs.

M. Saintonge: Je pense que Me Aquin mentionnait qu'on avait demandé que la formule de négociation soit préparée dans un délai assez court, pour le 23 janvier, si je me souviens bien. Êtes-vous au courant de cela?

M. Gadbois: On avait demandé - quand je dis "on", je veux dire M. Laliberté - s'il était possible d'avoir un document aussitôt que possible. D'ailleurs, M. Aquin m'a transmis un document le lendemain, le 18 janvier.

M. Saintonge: D'accord. On voulait arriver avec un document assez complet pour le 22 ou le 23 janvier, je pense. Est-ce qu'il y avait une raison à l'urgence de préparer un tel document? Ma question est bien précise: À votre connaissance, est-ce qu'il y avait une raison d'urgence pour la préparation d'un tel document de transaction ou de règlement dans un délai très rapide?

M. Gadbois: D'après moi - je ne fais qu'une hypothèse - il y avait l'offre de M. Jasmin...

M. Duhaime: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le ministre.

M. Duhaime: Je dois m'opposer, non pas que je n'aimerais pas entendre la réponse, mais parce que cette question est

irrecevable, M. le Président.

M. Saintonge: Non. Ce n'est pas une opinion que je demande, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Répétez votre question. Me Gadbois a commencé en disant: Je fais une hypothèse.

M. Saintonge: Je demandais simplement à Me Gadbois s'il y avait un motif d'urgence, à sa connaissance, qui existait pour la préparation d'une telle formule de règlement dans un bref délai.

Le Président (M. Jolivet): Me Gadbois.

M. Gadbois: À ma connaissance, le président-directeur général de la Société d'énergie de la Baie James ne m'a pas fait part des motifs ou des raisons pour lesquels il demandait ce document. Vu l'offre qui avait été faite par Me Jasmin - encore une fois, il faut que je suppose - je suppose qu'il voulait être préparé.

M. Saintonge: Au cas où. M. Gadbois: Au cas où.

M. Saintonge: J'ai une autre question à poser à Me Gadbois. Cela concerne les rapports spéciaux de Me Jasmin, en fait, comme procureur des syndicats canadiens et également le rapport spécial qui a été remis au conseil d'administration le 6 février. Est-ce que vous avez été informé d'une façon quelconque avant le 6 février de la préparation de ces rapports par les syndicats et que ce rapport s'en venait éventuellement au niveau de la Société d'énergie de la Baie James?

M. Gadbois: Je ne savais pas que ces rapports s'en venaient. Ce que mes notes m'indiquent, c'est que le président du conseil, M. Saulnier, m'a exprimé, à peu près à ce moment-là, le voeu de pouvoir étoffer le dossier. Ils avaient reçu, à ce moment-là, certaines offres qui avaient été déposées à l'assemblée du 23 janvier. C'était celle de Me Jasmin, qui était semblable à celle qui avait été refusée originalement, et celle de Me Beaulé. M. Saulnier m'a exprimé le voeu d'une possibilité d'avoir plus de renseignements du côté des difficultés financières des syndicats. De mémoire, je crois que j'en ai probablement fait part à Me Cardinal.

M. Saintonge: Vous ne savez pas qui a fait part de la demande aux syndicats de préparer de tels rapports?

M. Gadbois: Je ne le sais pas.

M. Saintonge: Vous avez pris connaissance de ce rapport ou vous en avez été informé simplement à la réunion du 6 février. C'est bien cela?

M. Gadbois: C'est cela.

M. Saintonge: Vous n'aviez pas discuté de cela auparavant, dans les jours précédents, avec les procureurs de la SEBJ ou les procureurs des syndicats? (17 heures)

M. Gadbois: J'avais simplement transmis le voeu ou le message. Je n'ai eu que le retour des documents. Quant à ce qui . s'est passé dans l'intervalle, je n'en sais rien.

M. Saintonge: Vous n'avez pas discuté avec Me Jasmin ou Me Beaulé?

M. Gadbois: Aucunement. Je n'étais pas en communication avec Me Jasmin.

M. Saintonge: Je vous remercie.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Duhaime: Cela va être bref. Je voudrais revenir sur un des points soulevés par M. le député de Laporte sur la question des assurances. Je voudrais vous renvoyer au document déposé par la SEBJ, à la page 54 qui réfère au paragraphe 85 de la déclaration de la société, au dossier de la cour qui porte la date du 29 juillet 1977, où il est question d'une réclamation quant aux assurances pour un montant de 5 869 132 $. C'est le paragraphe que vous avez lu tantôt.

Pour vous poser ma question, je voudrais que vous vous référiez au dossier déposé par les procureurs Geoffrion et Prud'homme, la rubrique Correspondance et lettres à la page 55 qui réfère à une lettre de Geoffrion et Prud'homme qui vous a été transmise. Je vais vous lire le premier paragraphe. "Le 24 janvier 1978 - il y a un renvoi au bas de page: lire 29 janvier 1979 -vous nous demandiez notre opinion sur le montant des dommages que nous croyions être en mesure de vous prouver compte tenu de nos plus récentes informations et du déroulement de la preuve dans ce dossier." La lettre se poursuit et je voudrais vous renvoyer à la page 4 de la lettre, donc à la page 57 du document, au dernier paragraphe. Est-ce que vous l'avez?

M. Gadbois: M. le ministre c'est, en fait, la page 3, numérotée en haut.

M. Duhaime: Pardon, page 3. Oui, c'est cela, vous avez raison. Est-ce que vous pourriez nous lire le dernier paragraphe de la page 3 qui commence par: "Sous la rubrique majoration des primes d'assurance?

M. Gadbois: Certainement.

M. Duhaime: C'est une lettre qui vous est adressée.

M. Gadbois: "Sous la rubrique majoration des primes d'assurance imposées par les assureurs de la société à cause des événements de mars 1974, nous avons réclamé une somme de 5 869 132 $ (c'est la somme qui avait été mentionnée précédemment). D'une part, la somme réclamée couvre la majoration des primes d'assurance non seulement pour le chantier de LG 2 lui-même, mais pour tous les chantiers du complexe La Grande. Il se pourrait fort bien que, même si de fait, les événements de mars 1974 ont provoqué une augmentation des primes d'assurance de 20% pour tous les chantiers du complexe La Grande, le tribunal pourrait décider de ne faire supporter par les défendeurs que les coûts additionnels applicables au chantier de LG 2. M. Marc Darby nous a précisé récemment - M. Darby était le contrôleur des assurances de la société d'énergie - que les coûts additionnels encourus à ce jour se chiffrent pour le chantier de LG 2, à 400 000 $ approximativement. En outre, les assureurs de la société viennent de décider tout récemment de réduire de 20% les primes d'assurance actuellement payées par la société d'énergie. Un représentant des assureurs nous a informés que 10% approximativement de cette diminution récente est attribuable à la paix syndicale qui règne depuis quelques années sur les divers chantiers du complexe La Grande. Une nouvelle analyse de notre réclamation sous ce chef s'impose donc."

M. Duhaime: On peut s'arrêter là, M. le Président. Je voudrais vous renvoyer à la page 8 de la lettre qui vous a été adressée et qui correspond à la page 62 du document Correspondance et lettres, sous la rubrique F. Pour gagner du temps, je peux bien le lire. "Quant au chapitre des assurances, étant donné les récentes révisions de vos assureurs, il nous est impossible, à l'heure actuelle, de déterminer le montant prouvable."

Si je me réfère à la page 3 de la lettre, dans la majoration des assurances pour ce qui est du chantier de LG 2, il était question d'un montant de 400 000 $ approximativement.

M. Gadbois: C'est exact.

M. Duhaime: Est-ce qu'on peut dire que c'était un maximum réclamable?

M. Gadbois: J'aurais de la difficulté à répondre à cette question.

M. Duhaime: Très bien. Maintenant, lors des réunions du conseil d'administration de la SEBJ des 23 et 30 janvier, je crois que la Société d'énergie de la Baie James a déposé après ce document-ci, à la demande, je crois, du député de Marguerite-Bourgeoys, la liste des présences. Voulez-vous me confirmer si M. Roland Giroux était présent à ces deux réunions du conseil?

M. Gadbois: À la réunion du 23 janvier 1979, il est indiqué que M. Giroux est présent.

M. Duhaime: À la réunion du 30? M. Gadbois: Également.

M. Duhaime: Maintenant, lors de l'une ou l'autre de ces deux réunions du conseil d'administration, au meilleur de votre souvenir, est-ce que M. Giroux a mentionné que, quant à lui, la réclamation valait 20 000 000 $?

M. Gadbois: Les délibérations du conseil portaient sur bien des aspects de la réclamation. Qui a dit quoi? Sauf, peut-être, la demande de M. Giroux de suggérer que le président du conseil et les deux P.-D.G. aillent consulter le premier ministre, je ne pourrais me rappeler si M. Giroux a fait cette remarque ou non.

M. Duhaime: Je vous remercie, Me Gadbois.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Me Gadbois, comme je n'ai plus d'intervenant, je tiens, au nom des membres de la commission, à vous remercier.

M. le député de Marguerite-Bourgeoys a un petit commentaire à faire?

M. Lalonde: Je voudrais, moi aussi, remercier Me Gadbois de l'éclairage qu'il a fourni à la commission, de sa collaboration, de sa façon directe et claire de répondre à nos questions, de nous donner des réponses qui touchaient directement les questions posées, sans détour, ce qui témoigne, sans l'ombre d'un doute, que vous n'avez voulu rien retenir, ce qui, au fond, est la meilleure façon de ne pas se sentir harcelé.

Le Président (M. Jolivet): J'aimerais simplement faire une vérification. Avant la fin de la séance de ce matin, le député de Vimont a fait une demande de documents concernant Marcel Audet, si je ne me trompe pas. M. le député de Vimont.

M. Rodrigue: Je voulais savoir quelle était la fonction de M. Audet au moment du saccage de LG 2 et pour qui il travaillait. C'est la question que j'avais posée.

M. Gadbois: II nous fera plaisir, M. le Président, de faire la vérification et d'en aviser le secrétaire de la commission.

Le Président (M. Jolivet): Je vous remercie et, compte tenu de la fin de cette interrogation de Me Gadbois, je vais suspendre les travaux jusqu'à 20 heures alors que l'on reprendra avec Me Beaulé.

(Suspension de la séance à 17 h 08)

(Reprise de la séance à 20 h 06)

Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission élue permanente de l'énergie et des ressources reprend donc ses travaux jusqu'à 22 heures ce soir. Je vous rappelle que la commission ajournera à 22 heures jusqu'à mercredi prochain, dans l'avant-midi, à la suite d'une motion qui sera déposée à l'Assemblée nationale au cours de la journée de mardi de la semaine prochaine.

Décision sur la requête des procureurs du local 791

Avant de commencer nos travaux, j'aimerais répondre par une décision concernant le télégramme que nous avons reçu. Je ne pense pas que j'aurai besoin d'éclairage de personne puisque la décision va être facile à rendre. De la même façon que j'ai jugé irrecevable une requête présentée par l'avocate de Me Beaulé de la même façon la présidence de cette commission rejette comme irrecevable la requête présentée par Laurin Laplante et Laplante, avocats par M. Robert Laurin pour le local 791. Donc, M. le juge Jasmin devra se tenir disponible pour la commission parlementaire au moment où il sera invité à cette commission parlementaire.

M. Lalonde: M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Si vous me le permettez peut-être que c'est à ce moment-ci que je devrais poser la question au ministre. Dans l'hypothèse où le témoignage de Me Beaulé se terminerait ce soir, est-ce que le ministre est en mesure de nous dire quel serait le prochain invité, mercredi prochain?

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Duhaime: Alors, M. le Président, je suis content que le député de Marguerite-Bourgeoys aborde cette question. Si j'avais la garantie que ce soir nous en aurons terminé avec le témoignage de Me Beaulé...

M. Lalonde: J'ai fait un hypothèse je pense assez réaliste dépendant de la longueur des réponses et de la longueur des interventions et des interférences.

M. Duhaime: Et de la pertinence des questions vous voulez dire. Je préférerais prendre un peu de temps pour consulter. Je comprends que la présidence, par le jugement qui vient d'être rendu tout à l'heure, a disposé de la requête ou du télégramme du local 791. Mais normalement nous ne reprenons nos travaux que mercredi prochain à 10 heures. Je dis normalement. J'appellerais Me Yves Gauthier et ensuite, dépendant des consultations qui pourraient être faites et selon aussi ce dont nous pourrions être informés des procédures judiciaires qui sont annoncées dans ce télégramme, le temps d'en prendre connaissance, le temps également de demander avis, je pourrais suggérer au leader du gouvernement ou bien d'appeler Me Jean-Roch Boivin, ou encore l'honorable juge Jasmin. Mais, en tout état de cause, n'ayant en main aucune des procédures annoncées dans le télégramme transmis à la présidence cet après-midi, je ne pourrais vraiment pas aller plus loin pour l'instant.

M. Lalonde: Est-ce qu'on peut s'attendre à être avisés...

M. Duhaime: Lundi. M. Lalonde: Lundi?

M. Duhaime: Lundi, dans la journée, oui.

M. Lalonde: Merci. Maintenant, en ce qui concerne M. Maurice Pouliot - je m'excuse de revenir à la charge...

Le Président (M. Jolivet): M. le député...

M. Lalonde: J'ai posé une question au premier ministre, il y a quelques jours, lui demandant s'il était prêt à reconsidérer la décision de ne pas l'appeler. Et il avait semblé accueillir cette invitation avec une certaine faveur. Est-ce que cette décision de ne pas l'appeler a été reconsidérée par le gouvernement?

M. Duhaime: Je répondrais, M. le Président, que le premier ministre a pris avis de la question qui a été posée à l'Assemblée nationale. Je n'ai pas eu le temps de participer à quelque discussion que ce soit avec le premier ministre à propos de cette question. Je ne veux pas m'engager au nom du premier ministre. Probablement que,

mardi ou mercredi de la semaine prochaine, il pourrait donner une réponse à l'Assemblée nationale à la suite de l'avis qu'il a pris de la question qui lui était posée. Mais cela pourrait aider beaucoup la prise en considération ou le délibéré si le député de Marguerite-Bourgeoys nous indiquait davantage le lien ou le rapport, autre que le fait d'avoir signé le règlement hors cour au nom du Conseil provincial des métiers de la construction...

Le Président (M. Jolivet): Je n'accepterai, cependant, aucun débat ce soir, comme je l'ai dit hier...

M. Duhaime: Puisqu'il n'y a pas de motion sur la table, M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): C'est ce que j'allais dire...

M. Duhaime: ...attendons la semaine prochaine.

M. Lalonde: Alors, je comprends donc que mercredi, ce sera Me Louis alias Yves

Gauthier qui sera invité par le ministre, de toute évidence.

M. Duhaime: M. le Président, normalement, oui. Mais je ne peux pas être formel...

M. Lalonde: À confirmer lundi.

M. Duhaime: Ce sera confirmé par le leader du gouvernement par l'entremise du secrétariat de la commission.

M. Laionde: Très bien.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Nous en étions toujours au même serment de Me Rosaire Beaulé.

Comme les débats se sont déroulés aujourd'hui, avec rapidité, je demanderai donc aux membres de cette commission d'agir de la même façon. La parole est au député de Gatineau. Et je devrais aussi dire, par la même occasion, que je demanderais la même collaboration de la part de notre invité. La parole est au député de Gatineau.

Commentaire sur le témoignage de Me Rosaire Beaulé

M. Gratton: M. le Président, vous aurez probablement deviné, hier, à l'ajournement de nos travaux, que j'avais fini de poser les questions à notre invité, Me Rosaire Beaulé. Avant de céder mon droit de parole, j'aimerais maintenant faire un bref commentaire.

En me référant à la conclusion du mémoire de Me Beaulé, on y lit ce qui suit: "À la lumière des faits qui précèdent, on comprendra que j'ai fait appel à la droiture, à la sagesse et au fair-play des personnes en autorité et des membres du conseil d'administration de la SEBJ, afin que cesse au plus tôt ce procès long et coûteux, non seulement pour la SEBJ, mais également pour l'International Union of Operating Engineers. "On comprendra aussi le refus de ma cliente de reconnaître quelque responsabilité que ce soit dans le saccage de LG 2, survenu le 21 mars 1974."

M. le Président, supposons, pour les fins de la discussion, qu'on donne raison à Me Beaulé étant donné que sa cliente, l'International Union of Operating Engineers, n'avait aucune responsabilité dans cette cause, la question qui se pose est de savoir si on doit reprocher à Me Beaulé d'avoir jugé utile de s'adresser aux personnes en autorité pour les sensibiliser au point de vue de sa cliente? Après tout, comme il l'a lui-même répété à plusieurs reprises, c'était peut-être son droit de prendre tous les moyens juridiques susceptibles de protéger les intérêts de ceux qui payaient ses honoraires.

Je tiens à préciser que le fait d'avoir été ou d'être un ami de longue date et un ancien associé du chef de cabinet du premier ministre et d'avoir milité activement dans le même parti politique n'a rien de répréhensible en soi.

Je répète que je ne suis pas avocat, mais prenons par analogie le cas heureusement de plus en plus rare, mais qui s'est quand même produit assez fréquemment dans le passé - d'un individu qui écope d'une contravention de circulation ou de stationnement, dans une de nos villes du Québec. Supposons que cet individu est un ami de longue date du maire de la ville, peut-être même un de ses organisateurs politiques. L'individu en question est convaincu que le policier qui lui a collé la contravention l'a fait injustement ou abusivement. Plutôt que de se présenter en cour pour plaider non coupable et se défendre, il décide de tenter de sensibiliser le maire, par l'entremise de son principal conseiller, à l'injustice dont il se croit victime. Je ne porterai pas de jugement sur le bien-fondé d'une telle démarche. Je sais cependant que le maire qui y donnerait suite en faisant annuler la contravention serait jugé très sévèrement par la population. (20 h 15)

Dans le cas qui nous occupe, je dois avouer que j'aurais pu être convaincu du bien-fondé des démarches de Me Beaulé auprès de Me Jean-Roch Boivin si, dans son mémoire et dans ses réponses à nos questions, il s'était limité à nous exposer les

considérations purement juridiques de sa défense qui pouvait, je suppose, ne pas être sans mérite. Mais, M. le Président, quand dans son mémoire, il se permet de citer un extrait incomplet du rapport de la commission Cliche et qu'il en fait une de ses principales recommandations et qu'il nous parle de la philosophie sociale de la commission qui aurait inspiré le règlement hors cour, quand il nous parle de désaccord idéologique quant à l'interprétation des événements entourant le saccage, quand il s'est permis de tenir publiquement un discours à saveur nettement politique, pour ne pas dire partisane, avant même de témoigner et durant son témoignage devant la commission, quand finalement je constate l'attitude que Me Beaulé a eue jusqu'à maintenant à l'égard des membres de la commission qui ont osé poser les questions qu'ils jugeaient susceptibles d'aider à faire la lumière sur toute cette affaire, je regrette de vous dire que Me Beaulé ne m'a pas convaincu.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Duhaime: Nous venons d'entendre, à mi-course, la conclusion du Parti libéral du Québec sur l'état de nos travaux. Je dois dire que je le regrette, non seulement sur le fond mais sur le moment. J'aurais pensé que nous aurions pu mener les travaux de cette commission à terme et qu'ensuite cette commission aurait, bien sûr, débattu et produit un rapport. C'est avec beaucoup d'insistance que l'Opposition libérale a demandé cette semaine à Me Beaulé qui, je tiens à le répéter, est ici comme invité de cette commission... Ce n'est un témoin ni d'un côté ni de l'autre mais un témoin de la commission permanente élue de l'énergie et des ressources. En excluant la journée d'aujourd'hui, cette commission à ce jour a siégé pendant treize jours en incluant aujourd'hui, jeudi 5 mai, quatorze jours. De tout ce temps, je le rappelle, Me Beaulé est ici et nous sommes jeudi 5 mai. Me Beaulé a répondu à l'invitation de la commission parce qu'il n'a pas été assigné par huissier ou par voie de subpoena, il est ici depuis jeudi matin dernier. J'avais pensé que l'insistance de l'Opposition libérale en ce sens que Me Beaulé revienne devant nous ce soir était dans le but de lui poser des questions sur des points qui n'avaient pas été éclaircis par notre commission depuis une semaine, c'est-à-dire depuis le temps où Me Beaulé est avec nous. Plutôt que d'adresser des questions à Me Beaulé, le député de Gatineau qui n'est pas le garçon d'ascenseur au Parti libéral du Québec mais qui est leader parlementaire adjoint de l'Opposition s'est contenté de faire ce que j'appellerais un plaidoyer pro domo.

Motion pour libérer M. Beaulé

En conséquence, je voudrais formuler la motion suivante puisque j'en ai le droit. Je vais formuler la motion et je ferai l'argumentation ensuite. Je fais motion pour que cette commission mette fin immédiatement et de façon définitive au témoignage de Me Rosaire Beaulé devant la commission élue permanente de l'énergie et des ressources.

M. le Président, je voudrais statuer d'abord sur la recevabilité de cette motion et ensuite j'argumenterai sur le fond.

Le Président (M. Jolivet): Sur cette motion, M. le ministre, toute motion de fond - et c'en est une - est débattable. Donc, je la déclare recevable.

M. Lalonde: Sur la recevabilité, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): ...non j'ai le droit de la déclarer puisqu'elle est recevable, c'est une motion.

Une voix: ...

Le Président (M. Jolivet): Un instant seulement, vous aurez à la discuter. On m'a demandé de parler sur la recevabilité et j'ai le droit comme président de déclarer si elle est recevable ou pas. Cette motion est recevable.

La deuxième chose que je tiendrais à faire remarquer, puisqu'un débat suivra, bien entendu, est en ce sens que cette motion étant recevable le droit de parole de chaque personne sur une motion est de vingt minutes. Je vais donc déclarer recevable la motion. Toute personne qui voudra intervenir aura vingt minutes pour le faire.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le...

Une voix: Le ministre a demandé la parole.

Le Président (M. Jolivet): Oui, je sais. Sur une question de règlement ou sur la motion?

M. Lalonde: Sur la motion.

Le Président (M. Jolivet): Sur la motion. On va d'abord entendre le ministre.

M. Lalonde: Oui. Je voulais simplement donner un renseignement qu'on vient d'ailleurs de me demander. Mon adjoint, mon chef de cabinet me posait la question à savoir que le chef de cabinet du leader du gouvernement lui avait demandé combien de

temps encore l'interrogatoire de Me Beaulé durerait. Je lui ai indiqué que nous tenterions de terminer ce soir. On ne sait pas exactement combien de temps cela peut prendre; cela dépend de la longueur des questions, des interventions, etc. Le député de Brome-Missisquoi, le député de Laporte et votre humble serviteur devaient... Nous avions même, en séance de préparation, tenté de nous discipliner d'une façon absolument rigoureuse pour pouvoir libérer Me Beaulé à 22 heures ou avant mais, enfin, c'est malheureux... Je donne cette information au ministre; il peut retirer sa motion, et à 22 heures, je pense qu'on va pouvoir terminer, suivant la longueur des questions.

M. Duhaime: Alors, M. le Président, là-dessus....

M. Lalonde: S'il veut qu'on débatte la question.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Duhaime: J'ai l'habitude de jouer franc-jeu en pareille matière. Je voudrais le consentement de l'Opposition officielle à l'effet que le témoignage de Me Beaulé se terminera à 22 heures précises, c'est-à-dire à l'ajournement normal. Si j'ai cet accord, je vais retirer la motion que je viens de formuler. Si je n'ai pas ce consentement nous allons la débattre.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, au nom de l'Opposition.

M. Lalonde: Oui. Il faudrait faire vite pour cela, M. le Président. Il nous reste à peine une heure et demie. J'ai à peu près cinq ou six questions à poser et peut-être un petit commentaire de deux minutes, après ou avant ou au milieu. Le député de Brome-Missisquoi me dit à peu près la même chose. Cela va dépendre de la longueur des réponses et des interventions concernant les questions. Si la deuxième question du député de Brome-Missisquoi dégénère en débat qui nous mène à 21 h 45, je ne peux m'engager dans ce sens. Je ne vois pas pourquoi on forcerait Me Beaulé à revenir mercredi prochain. Je ne vois pas pourquoi. Je pense que Me Beaulé non plus ne voit pas pourquoi il reviendrait.

Je pense qu'on a quelques questions. Chacun de nous a été témoin participant, mais surtout témoin du déroulement de cet interrogatoire. Si le témoin prend dix minutes pour répondre à chacune de nos questions, on ne finira pas à 22 heures.

M. Duhaime: M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le ministre.

M. Duhaime: Je comprends la situation dans laquelle se retrouve le leader parlementaire de l'Opposition. Je lui prête toute la bonne foi possible, mais je lui dis très clairement ceci: Je pense qu'on pourrait demander à notre invité d'être très bref dans ses réponses, mais je ne prendrai pas le risque de perdre mon droit de parole...

M. Lalonde: J'allais vous l'offrir. M. Duhaime: Un instant.

M. Lalonde: À 9 h 50, vous reviendrez...

M. Duhaime: Non, non.

M. Lalonde: ...avec votre motion si ce n'est pas terminé.

M. Duhaime: Non, non, non, j'en ai déjà vu passer depuis quelques années.

M. Lalonde: Suspendez-la.

M. Duhaime: Ce que je dis au leader parlementaire de l'Opposition - je ne sais pas quel genre de conciliabule il peut avoir avec ses propres troupes, c'est son problème -c'est ceci: À moins d'avoir, non seulement l'assurance ou l'intention, mais le consentement que cette commission va libérer Me Beaulé, à 22 heures, nous allons argumenter sur la motion.

M. le Président, je ne courrai pas le risque de revivre ce que cette commission a vécu vendredi dernier où, lorsqu'un droit de parole est consenti... Je rappelle essentiellement qu'au début des travaux de cette commission, nous avons consenti que le droit de parole des députés membres de cette commission puisse dépasser la période normale de 20 minutes suivant nos règlements. Quand on dit dépasser 20 minutes, cela peut aller à 25, 30 et même 45 minutes, mais quand cela fait quatre heures, vous me permettrez de qualifier cela comme un abus de la période de 20 minutes. Je ne courrai pas le risque que, lorsqu'un autre député de l'Opposition aura la parole, on assiège Me Beaulé pendant quatre ou cinq heures. Mon offre est très simple. Nous avons devant nous une heure trente-quatre minutes. À peu près tout a été dit depuis -j'avais le minutage exact; je crois que cela fait maintenant neuf heures trente-cinq minutes que Me Beaulé est ici - depuis jeudi dernier. Si j'ai l'assurance, par consentement de l'Opposition, que nous pourrons libérer Me Beaulé, à 22 heures, je vais retirer la motion que j'ai formulée tout à l'heure. Autrement, je suis prêt à l'argumenter.

M. Lalonde: M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Le ministre, comme à peu près tout ce qu'il a fait jusqu'à maintenant et son parti, depuis le début de cette commission parlementaire, s'est enferré dans ses propres problèmes. Jamais je ne consentirai à renier ou à enlever un droit de parole à mes collègues pour poser des questions. J'ai, dans le meilleur esprit possible de coopération, donné tout ce qu'on a l'intention de faire. Je vous ai donné tout.

Le député de Jonquière a-t-il l'intention de parler? Qu'il parle au lieu de murmurer et de m'interrompre.

M. Vaillancourt (Jonquière): Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): À l'ordre! À l'ordre!

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): À l'ordre! À l'ordre!

M. Lalonde: II y a quand même des limites...

Le Président (M. Jolivet): À l'ordre!

M. Lalonde: II m'accusait de mauvaise foi. Retirez vos paroles.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): À l'ordre!

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je pense que j'ai...

Le Président (M. Jolivet): Non, à l'ordre! Je pense que cela allait très bien. Je ne voudrais pas que... S'il vous plaît, M. le député! Si vous voulez m'aider, aidez-moi en ne parlant pas.

M. Lalonde: M. le Président, j'étais donc en train de dire que, compte tenu de la longueur des réponses et des interventions, nous avions nous-mêmes l'intention de mettre fin à cet interrogatoire après l'intervention... D'ailleurs, vous avez vu que l'intervention du député de Gatineau était très courte. J'ai dit que j'aurais quelques questions, ainsi que le député de Brome-Missisquoi et celui de Laporte. Cela dépend aussi, nécessairement, s'il y a un député de l'autre côté qui prend la parole pendant une heure et demie, on n'y peut rien. Mais il y a une chose qui est sûre, c'est que je ne peux pas consentir à enlever un droit de parole à un collègue. Il y a une autre chose qui est très sûre, c'est que si on discute de votre motion, Me Beaulé va revenir mercredi prochain.

M. Duhaime: M. le Président...

M. Lalonde: C'est totalement stupide.

M. Duhaime: M. le Président.

M. Lalonde: Vous voulez le libérer...

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

M. Lalonde: On est prêt à le libérer ce soir à 22 heures, compte tenu, naturellement, de la longueur des réponses, et vous me dites: On va le faire venir mercredi pour discuter d'une motion pour le libérer.

M. Duhaime: M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

Retrait de la motion

M. Duhaime: J'ai l'habitude d'être vite sur mes patins, je vais saisir la balle au bond, je retire la motion. Allez-y.

Le Président (M. Jolivet): Donc, je m'excuse... La motion étant... S'il vous plaît! Seulement un instant, je veux bien m'entendre au départ. Nous avons devant nous un ministre qui a retiré sa motion. Nous avons donc, maintenant, à entendre Me Beaulé, en essayant de faire en sorte, aussi bien pour lui que pour tous les membres de cette commission, de le libérer pour 22 heures. En conséquence, la parole sera donnée au député de Brome-Missisquoi. Mais, avant, le député de Jonquière a invoqué une question de règlement.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président. Tout à l'heure, le député de Marguerite-Bourgeoys a dit que je l'avais traité de député qui agissait de mauvaise foi. Je voudrais dire au député de Marguerite-Bourgeoys que ces paroles n'ont pas été enregistrées et qu'elles n'ont jamais été dites. Je parlais au ministre et je disais tout simplement que le Parti libéral agissait de mauvaise foi, puisque, après la conclusion tirée par le député de Gatineau, les questions, nécessairement, provenaient d'un parti qui était de mauvaise foi, puisque la conclusion était déjà tirée. C'est ce que j'ai dit au ministre. J'ai le droit de parler à mon ministre et personne ne va m'empêcher de le faire.

Une voix: Question de règlement, M. le Président.

M. Lalonde: Ce n'est pas une question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): Justement, c'est...

M. Lalonde: Je prends la parole du député, M. le Président, en ce sens qu'il ne m'accusait pas de mauvaise foi. Mais si le ministre avait pu comprendre qu'un député, après son interrogatoire, peut apporter une conclusion, sa perception de l'interrogatoire...

Le Président (M. Jolivet): M. le député...

M. Lalonde: C'est ce que le député de Gatineau a fait.

Le Président (M. Jolivet): D'une façon ou d'une autre, je l'avais permis.

M. Lalonde: Oui.

Témoignages M. Rosaire Beaulé (suite)

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Brome-Missisquoi, en essayant de faire en sorte que chacun puisse, d'ici à 22 heures, agir comme on l'a fait durant toute la journée. J'ai demandé la même collaboration de la part de notre invité. M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: Le plus rapidement possible, je ferais une brève remarque préliminaire, M. le Président... (20 h 30)

Le Président (M. Jolivet): Seulement un instant, j'ai entendu Me Beaulé?

M. Beaulé: M. le Président? Le Président (M. Jolivet): Oui. M. Paradis: II m'interrompt?

M. Beaulé: Je voudrais souligner que mes réponses, depuis le début de la séance, ont été très brèves.

Le Président (M. Jolivet): De cette séance-ci, oui. M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: Je souhaite qu'elles soient un peu plus longues à cette séance-ci. M. le Président, lorsque le député de Gatineau a dit que, à la suite de ses questions au témoin, le témoin ne l'avait pas convaincu, je suggère bien respectueusement - pour mes remarques préliminaires, cela s'arrêtera là -qu'un juge qui entend - on aura un jugement à rendre comme parlementaires - qu'un juge qui entend un témoin témoigner ou un invité témoigner lui accorde un degré de crédibilité. Ce sont tous les juges qui sont actuellement en fonction au Québec qui font cela. J'espère que les juges qui seront en fonction dans quelques années au Québec continueront de faire la même chose.

M. Lalonde: Les futurs juges.

M. Paradis: Revenant plus spécifiquement aux questions, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Allez, M. le député. S'il vous plaît:

M. Paradis: Je vais donner à Me Beaulé tout le temps de retrouver la page, s'il a les notes sténographiques avec lui, de façon qu'on puisse suivre et bien se comprendre et éviter des questions et des réponses trop longues. Je vous référerais, Me Beaulé, à la page R/915 du 28 avril 1983. Il est 20 h 25 et le sujet porte, pour vous permettre d'avoir le temps de vous situer dans le débat, sur des questions que vous adressait le député de Mont-Royal quant à une recommandation qui aurait pu vous être favorable pour obtenir un mandat de l'union internationale américaine de la représenter dans cette contestation de la Société d'énergie de la Baie James qui poursuivait vos clients pour 32 000 000 $.

Est-ce que votre avocate vous a remis le texte?

M. Beaulé: M. le Président, j'ai le texte du ruban 915 à 20 h 25.

M. Paradis: Très bien. Ruban 915, 916 et vous complétez un petit peu plus loin aux pages 916 et substantiellement - je l'ai résumé à partir de cette transcription - vous dites ce qui suit: À la fin mars 1978 vous étiez en vacances. Quelqu'un des États-Unis, de l'union internationale a placé un appel à votre étude d'avocat. Le 12 avril 1978 vous êtes revenu de vacances et vous avez retourné à Me Woll à Washington, qui est le general council of AFL-CIO, l'appel qu'il vous avait fait, durant vos vacances.

Il vous propose à ce moment une rencontre à Washington. Vous vous y rendez le 20 avril, soit huit jours après. Vous avez à ce moment rencontré Me Woll, Me Fanning, M. Turner qui est le general president et vous avez accepté, suivant votre témoignage, le mandat que ce client a jugé à propos de vous confier.

Un peu plus loin, vous avez déclaré que pour vous cela a été une surprise totale de recevoir un tel mandat.

M. Beaulé: À quel endroit, M. le Président?

M. Paradis: Si je comptais le nombre de lignes cela va peut-être être un petit peu trop long mais pour qu'on se replace plus facilement entre moi et vous...

M. Beaulé: ...je l'ai trouvé.

M. Paradis: Vous l'avez trouvé, c'est bien dans cette page-là?

M. Beaulé: Oui, cela va.

M. Paradis: Vous avez dit ce qui suit à la suite de la surprise totale. Je reprends à partir de l'alinéa qui suit. M. Ciaccia vous demande y a-t-il eu quelques recommandations qui auraient pu être faites à votre égard? Vous répondez au texte: "M. Beaulé: Comme je pense saisir le sens de votre question, cela répondra à votre question. J'ai reçu un appel téléphonique le 29 mars dernier - j'attire l'attention du président sur le fait qu'il s'agit du 29 mars 1983 - d'un journaliste, M. Girard - le journaliste de la Presse qui a publié des articles qui ont donné lieu à cette commission - me demandant s'il était exact que j'avais été nommé avocat de l'union internationale, à la suggestion de Me Yves Gauthier, l'ancien tuteur du local 791 qui était poursuivi et qui est devenu, au mois d'octobre, conseiller spécial au bureau du premier ministre du Québec." Je continue au texte: "Je lui ai dit que je n'avais jamais entendu parler d'une telle recommandation. Ce soir-là, j'ai appelé Me Fanning à sa résidence - j'ai son numéro ici - pour m'enquérir de cette question, et il m'a répondu ce qui suit: qu'après le décès de Me Golt qui les représentait avant, parce qu'on se rappelle que l'action datait de 1976, ils ont pris des renseignements à Montréal. Ils ont obtenu une liste d'avocats et ils ont fait un choix. Je sais maintenant que sur cette liste il y avait le nom de M. Aquin, etc." Plus loin, vous répondez que les renseignements sont venus du milieu syndical montréalais. En résumé, vous répondiez à la question du député de Mont-Royal à l'effet de savoir s'il y avait eu une recommandation: "Oui, il y en avait eu une; ça venait de Montréal et ça venait du milieu syndical." C'est grand, Montréal. C'est populeux, le milieu syndical. Mais pour autant que l'on sache, Me Yves Gauthier était, à ce moment-là, à Montréal et était dans le milieu syndical. Est-ce que c'est de Me Gauthier, à la suite de la conversation que vous avez eue, ou à votre connaissance qui a pu vous venir autrement, qu'est venue la recommandation?

M. Beaulé: La réponse est la suivante:

Je n'ai jamais cherché à savoir, avant le 29 mars dernier, qui avait pu placer mon nom sur une liste à partir de laquelle l'International Union of Operating Engineers a choisi un avocat. Je vais simplement répéter, en essayant d'être bref, comme on me l'a dit, que j'ai communiqué avec Me Fanning, le 29 mars. Il m'a donc dit qu'ils avaient eu une liste à l'époque, qu'ils avaient confectionné une liste à partir de recommandations en provenance du milieu syndical montréalais. Bon. Je n'en sais pas davantage; pas plus aujourd'hui que le 29 mars.

M. Paradis: D'accord. On va essayer de se comprendre, Me Beaulé. Le 29 mars, vous recevez un appel d'un journaliste de la Presse, qui s'appelle Michel Girard, suivant votre témoignage. Il vous demande si vous avez obtenu votre mandat à la suite de la recommandation de Me Yves Gauthier. Vous trouvez la question suffisamment intéressante pour faire un interurbain à Washington, pour parler à vos clients et pour leur demander si c'est exact. Vous nous répondez ce soir que vous n'avez pas eu la réponse lors de cette conversation téléphonique, que tout ce qu'on vous dit, cela vient de Montréal, du milieu syndical.

M. Beaulé: La réponse de M. Fanning a été que mon nom apparaissait sur une liste qu'ils avaient confectionnée à partir de recommandations du milieu syndical montréalais. Et j'ai indiqué que, sur cette liste, il y avait également le nom de M. Aquin.

M. Paradis: Est-ce que vous avez déjà vu cette liste?

M. Beaulé: Absolument pas.

M. Paradis: Comment pouvez-vous dire que le nom de M. Aquin s'y trouvait?

M. Beaulé: Écoutez, ma réponse est simple, M. le Président. M. Fanning m'a dit qu'il y avait plusieurs avocats sur la liste, incluant le nom de M. Aquin.

M. Paradis: Vous effectuiez votre appel téléphonique dans un but très précis, suivant vos propos qui sont enregistrés au journal des Débats. C'était dans le but de savoir si cette recommandation - à la suite de l'appel qu'avait effectué l'après-midi un journaliste du journal La Presse - provenait de Me Yves Gauthier, du bureau du premier ministre. C'était le but de votre appel. Est-ce exact?

M. Beaulé: M. le Président, je ne veux pas entrer dans aucun carcan parce que, souvent, cela ne permet pas de dire exactement les faits. Je ne me suis pas

préoccupé avant le 29 mars 1983 de savoir qui avait pu me recommander auprès de l'International Union en 1978. Mais, comme je lis les journaux comme tout le monde et comme il y avait des allégations de relations, je dirais, politiques qui pouvaient être à la source de mon mandat. C'était le sens de l'appel téléphonique de M. Girard, près de cinq ans après avoir eu ce mandat, j'ai voulu vérifier de qui provenait ce mandat. M. Fanning m'a dit qu'on avait retenu mes services à partir d'une liste où il y avait les noms de plusieurs avocats montréalais dont le nom de M. Aquin. Je n'en sais pas davantage.

M. Paradis: Je ne vous parle pas, Me Beaulé, de lecture de journaux, parce que les membres de la commission, le public et moi-même lisons les journaux. Ni les membres de la commission ni ces gens ni moi n'avons reçu, sauf erreur, d'appel téléphonique de Michel Girard, journaliste à la Presse, en date du 29 mars 1983, pour demander s'ils avaient été nommés procureur de l'union internationale à la suite de la recommandation de Me Yves Gauthier, du bureau du premier ministre. Vous, vous avez reçu cet appel téléphonique et, selon le témoignage que vous avez rendu ici, vous avez affirmé sous serment, devant cette commission, qu'à la suite de cet appel téléphonique, vous avez fait un appel interurbain à Washington pour savoir ce qu'il en était. C'était le but de votre appel téléphonique. Est-ce exact?

M. Beaulé: C'est exact. C'est sûr que c'était le but de mon appel téléphonique.

M. Paradis: Bon! Merci beaucoup.

M. Vaillancourt (Jonquière): Cela fait quatre fois qu'il vous le dit.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M. le député de Brome...

M. Paradis: M. le député de Jonquière...

M. Vaillancourt (Jonquière): Cela fait quatre fois qu'il vous le dit.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: M. le Président, le député de Jonquière vient d'affirmer...

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

M. Paradis: ...que cela fait quatre fois que je reçois cette réponse.

Des voix: C'est vrai.

M. Duhaime: Oui.

M. Paradis: Je vous prends à témoin que c'est la première fois que j'obtiens la réponse "oui", à cette question.

M. Vaillancourt (Jonquière): Cela fait quatre fois qu'il vous le dit.

M. Paradis: Je vous demanderais, si vous n'êtes pas convaincu ou si vous n'êtes pas en mesure de rendre une décision, de vérifier à la transcription du journal des Débats.

M. Vaillancourt (Jonquière): Oui, on va vérifier.

Le Président (M. Jolivet): M. le député, adressez vos questions à Me Beaulé, s'il vous plaît.

M. Paradis: Très bien, M. le Président.

M. Duhaime: On était bien, restez de bonne humeur.

M. Paradis: Je demanderais au député de Jonquière...

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M. le député.

Une voix: Demandez-lui!

Le Président (M. Jolivet): ...à Me Beaulé, s'il vous plaît!

M. Paradis: Très bien.

Le Président (M. Jolivet): Laissez-moi la chance de mener à bien cette réunion.

M. Paradis: Vous avez fait votre appel, donc, comme vous venez de le dire, afin de savoir si c'était Me Yves Gauthier, du bureau du premier ministre, qui avait recommandé à vos clients américains de vous engager, de vous confier un mandat. D'ailleurs, soit dit en passant - c'est une remarque que je fais, M. le Président - c'est un mandat que vous avez exécuté, à mon avis d'ex-avocat - je suis encore membre du barreau - d'une façon impeccable. Vous avez obtenu la meilleure solution ou le meilleur règlement possible pour vos clients et, là-dessus, malgré mes propos...

M. Duhaime: Est-ce qu'il y a un secondeur?

M. Paradis: ...je tiens à vous en féliciter comme procureur.

M. Duhaime: Est-ce qu'il y a un secondeur?

Le Président (M. Jolivet): Merci. Cependant, M. le député, ce n'est pas l'objet de nos...

M. Paradis: J'ouvrais une parenthèse.

Le Président (M. Jolivet): N'en ouvrez pas trop puisqu'on aurait des difficultés.

M. Lalonde: Notre président est nerveux, s'il vous plaît, un petit peu de calme!

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M. le député de Brome-Missisquoi, continuez.

M. Ciaccia: La question est de savoir comment il l'a eu?

M. Paradis: J'ouvrais une petite parenthèse, mais ce n'était pas de la façon dont vous l'avez conduite sur laquelle je m'enquérais, c'est plutôt comment et de quelle façon vous avez eu ce mandat? Vous avez fait cet appel téléphonique afin, donc, de savoir si c'était Me Gauthier. La réponse que vous nous avez donnée est la suivante: Vous avez été recommandé par quelqu'un Os Montréal qui était dans le milieu syndical. C'est assez large...

M. Beaulé: La réponse...

M. Paradis: Laissez-moi continuer!

M. Beaulé: Ah bon! Je pensais qu'il y avait une question.

M. Paradis: Sauf erreur, à ce moment-là, Me Yves Gauthier, du bureau du premier ministre - il n'y était pas à ce moment-là, il était tuteur du local 791 à Montréal - était de Montréal et du milieu syndical. Est-ce que vous concluez, de la réponse que vous avez eue, que la recommandation effectuée au syndicat américain, pour vous confier un mandat, est venue de Me Yves Gauthier.

M. Duhaime: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse. M. le ministre.

M. Paradis: Voyons donc! Il a appelé pour cela.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Duhaime: Cette question, selon les dispositions de l'article 168, paragraphe 2 de notre règlement, contient une hypothèse.

M. Lalonde: Non, non.

M. Duhaime: J'ajouterais que Me Beaulé, non seulement ce soir, mais la semaine dernière, a été interrogé sur l'origine de son mandat. À moins d'avoir complètement perdu l'esprit, je dirais qu'à chaque fois que la question lui a été posée, il a répondu que, à sa connaissance, une liste de procureurs avait été fournie par le milieu syndical...

M. Paradis: II faudrait que je retire ma question.

M. Duhaime: ...et que son nom apparaissait sur la liste, de même que le nom de Me Aquin. Alors...

Le Président (M. Jolivet): Merci, M. le ministre. La question est retirée. Je viens de l'entendre.

M. Duhaime: La question est retirée. M. Paradis: Pour accélérer le débat...

Le Président (M. Jolivet): Donc, allez, M. le député.

M. Duhaime: Bon. Alors... (20 h 45)

M. Paradis: ...est-ce que vous avez demandé au cours de votre conversation téléphonique à votre interlocuteur, Me Fanning, si c'était Me Yves Gauthier qui vous avait recommandé?

M. Beaulé: J'ai relaté à M. Fanning la teneur de la conversation que j'avais eue avec M. Girard, évidemment, faisant état de cette rumeur que m'avait colportée M. Girard concernant le rôle qu'aurait pu jouer M. Gauthier dans mon choix comme avocat de l'union internationale. Sa réponse a été la suivante, c'est très clair: Nous avons procédé à partir d'une liste. J'ai compris de sa réponse qu'aucune influence politique n'avait joué dans son choix comme avocat de l'union internationale. C'est cela ma réponse, je n'en n'ai pas d'autre à offrir.

M. Paradis: Je m'excuse. Je vais être obligé de revenir parce que vous venez de me répondre qu'aucune influence politique n'avait joué dans le choix qu'avaient effectué vos clients. Me Yves Gauthier, à l'époque, n'était pas dans la politique. Il était dans le monde syndical. Il était tuteur du 791. Est-ce qu'il vous a répondu si c'était Me Yves Gauthier, oui ou non?

M. Beaulé: Ce sera ma dernière réponse...

Le Président (M. Jolivet): Je pense justement que je ne vous laisserai même pas répondre pour une raison bien simple: c'est

qu'en réponse aux questions qui ont été posées, la réponse a toujours été la même et je ne pense pas qu'elle changera quoi que ce soit. Je pense que c'est vouloir trop insister sur la même question qui revient systématiquement depuis le début.

M. Paradis: Cela va, M. le Président. Je me plie à votre décision comme je me plie habituellement à vos décisions. Je rappellerai simplement au témoin le ruban 916 où le témoin a dit: "J'espérais que les Américains n'étaient pas déçus de m'avoir choisi peut-être aussi à cause de mes connaissances juridiques." On passe au fait suivant.

M. Duhaime: Qu'est-ce que cela veut dire?

Le Président (M. Jolivet): Me Beaulé.

M. Beaulé: C'est une remarque qui est peut-être humoristique mais qui est blessante.

M. Paradis: C'est ce que vous avez dit.

M. Beaulé: Je...

M. Paradis: Si vous vous êtes fait...

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

M. Paradis: ...une remarque blessante, excusez-vous en.

Le Président (M. Jolivet): M. le député, s'il vous plaît!

M. Duhaime: Franchement!

Le Président (M. Jolivet): Laissez quand même la chance... Est-ce que ça va, Me Beaulé?

M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: Vous nous avez remis, Me Beaulé, le texte, le libellé du mandat qui vous a été confié. Ce texte-là porte la date du 25 avril 1978. Il provient de l'International Union of Operating Engineers et il est signé par Michael R. Fanning, house counsel. Le deuxième paragraphe de ce mandat se lit textuellement en anglais comme suit: "We are pleased that you will be representing the International Union of Operating Engineers in these cases. It is requested that you keep this office posted of all progress and that you send copies to me of any documents filed on behalf of the International Union of Operating Engineers. Sincerely, Michael R. Fanning."

On vous demandait donc de faire parvenir tous les documents que vous produisiez pour le compte de votre cliente. Est-ce que vous avez envoyé une copie du document que vous avez produit à Jean-Roch Boivin, chef de cabinet du premier ministre, et que vous avez mis à la poubelle la veille de votre comparution devant cette commission?

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Duhaime: M. le Président, dans le Code de procédure civile, il est très bien mentionné que "filed" veut dire produit à la cour. Quand on dit: "You send copies to me of any documents filed on behalf of the International Union" cela signifie les procédures produites et enregistrées au plumitif de la Cour supérieure.

Une voix: Qu'est-ce que cela veut dire? Qu'est-ce que c'est que cela?

M. Lalonde: Ce n'est pas une question de règlement. Ce n'est pas une question de règlement. Il a donné la réponse pour le témoin.

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, un instant.

M. Duhaime: Si la question va sur ce point-là, sinon je demanderai au député de Brome-Missisquoi de préciser sa question.

M. Paradis: Je vais la préciser. Est-ce que vous avez envoyé une copie à vos clients américains du document que vous avez remis à Me Jean-Roch Boivin et que vous avez jeté à la poubelle la veille de votre comparution devant cette commission?

Le Président (M. Jolivet): Juste avant que vous ne répondiez Me Beaulé, je pense que, pour les besoins des gens qui nous écoutent et qui ont suivi ces débats, il serait mauvais de continuer même si la réalité est là. Me Beaulé a répété à plusieurs occasions que l'essentiel du document se retrouvait dans une lettre envoyée...

Des voix: Non, non.

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse je prends la réponse parce que vous prenez des réponses, je fais simplement une mise au point que Me Beaulé peut faire s'il le désire. La question est posée vous devez y répondre. Me Beaulé, vous devez répondre à la question qui est posée. Est-ce que vous avez envoyé...

M. Beaulé: Je n'en ai aucun souvenir. Cependant, en révisant mon dossier, j'ai envoyé à Me Fanning une transcription de toutes les procédures judiciaires faites dans

ce dossier, tant par mon bureau que par mes adversaires; et la réponse ne m'est suggérée que par qui que ce soit. Je lui ai envoyé également une copie de tous les exhibits importants. Quand je parle de copie, je parle de transcription. Je lui ai envoyé la transcription également de parties de témoignages importants. J'ai également vu dans mon dossier que je lui ai adressé une transcription de la lettre que j'avais adressée à François Aquin, le 5 février 1979.

Le Président (M. Jolivet): Me Beaulé, je voudrais vous arrêter parce que la question était - sans vouloir vous demander de préciser, on dit souvent que vous en donnez plus que le client en demande - Est-ce que le document a été envoyé? C'est simplement cela.

M. Beaulé: Je ne peux pas répondre. Le Président (M. Jolivet): Merci. M. Paradis: Pardon?

M. Beaulé: Je ne peux pas répondre. Je ne sais pas.

M. Paradis: Ah! vous ne le savez pas, vous l'ignorez.

Les avocats Geoffrion et Prud'homme lorsqu'ils sont venus informer cette commission des circonstances qui entouraient le règlement hors cour, ont préparé pour les besoins des membres de la commission de façon à faire avancer les travaux, à faire avancer les débats, deux cahiers: un cahier dans lequel se trouvaient les opinions qu'ils avaient émises tout au long des procédures ainsi qu'un cahier de projets de déclaration etc. Est-ce que vous pourriez remettre ou communiquer à la commission toutes les lettres et les opinions que vous avez émises de même que l'échange de correspondance que vous avez émis dans ledit dossier, vu que vous avez été libéré par vos clients de façon complète et entière de votre secret professionnel?

M. Beaulé: M. le Président, si c'était là une résolution de la commission je le ferais.

Le Président (M. Jolivet): II n'y a aucune obligation.

M. Paradis: Vous ne voulez pas...

Le Président (M. Jolivet): S'il y avait un consentement. La question qui est posée c'est..

M. Paradis: Je vais la poser autrement. Est-ce que vous voulez les remettre à ma demande?

M. Beaulé: M. le Président, s'il y avait une résolution de la commission me demandant de produire mes dossiers je les produirais.

Le Président (M. Jolivet): Pour savoir s'il y a une...

M. Paradis: M. le Président, je comprends que le Parti libéral est en minorité sur cette commission.

Le Président (M. Jolivet): Allez continuez vos questions M. le député.

M. Paradis: M. le Président, lorsque vous avez été interrogé par le député de Mont-Royal sur le mandat qui vous a été confié et sur les honoraires que vous avez touchés, vous avez été très clair. Vous avez dit que votre compte d'honoraires et frais, pour être le plus exact possible, se calculait à 280 000 $ approximativement, que vous aviez eu des déboursés à effectuer, que vous aviez eu d'autres avocats à payer pour vous assister etc. Lorsque le député de Mont-Royal vous a demandé de déposer les détails de votre compte d'honoraires vous avez invoqué votre vie privée ou la charte des droits etc. La Société d'énergie de la Baie James nous a déposé dans ce cahier-ci le détail des comptes d'honoraires de ses avocats, nous a déposé dans une annexe le reste qui n'avait pas été déposé dans le premier cahier etc. Je vous demande bien simplement, pour contribuer à l'avancement des travaux de cette commission, de bien vouloir communiquer à cette commission le détail de votre compte d'honoraires. Je m'explique sur ceci, ce n'est pas le montant on l'a c'est 280 000 $ - qui nous intéresse, c'est le déroulement quotidien dans des comptes d'avocats qui est récité. On a vu à quel point cela pouvait se révéler utile dans le cas des comptes de Geoffrion et Prud'homme qui nous ont été dévoilés. Est-ce que vous auriez l'obligeance de nous déposer le détail de vos comptes de façon qu'on puisse avancer dans nos travaux et qu'on puisse prendre connaissance des démarches quotidiennes que vous avez effectuées pour le compte de vos clients, considérant que vous avez été libéré de façon totale et complète de votre secret professionnel?

Le Président (M. Jolivet): Un instant, Me Beaulé. M. le ministre veut intervenir. M. le ministre.

M. Duhaime: M. le Président, je pense qu'il y a une distinction très nette à faire. C'est pourquoi d'ailleurs la Société d'énergie de la Baie James a déposé devant cette commission tous les documents, procès-verbaux, etc. C'est même la première fois

que je vois devant une commission parlementaire jusqu'aux honoraires en détail des procureurs d'une société. La grande distinction est qu'il s'agit d'une société d'État. La société d'énergie appartient à 100% aux citoyens du Québec.

Pour ce qui est de la question posée...

M. Lalonde: Ce n'est pas une question de règlement, M. le Président. Il répond pour le témoin. Qu'est-ce que c'est que cela? Il répond pour le témoin.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il vous plaît!

M. Duhaime: Non. J'en fais une question de règlement, M. le Président.

M. Lalonde: Ce n'est pas une question de règlement.

M. Duhaime: Me Beaulé, à mon sens, n'était même pas tenu de mentionner le montant des honoraires qu'il a reçus et des frais.

Une voix: C'est vrai. Il aurait pu refuser.

M. Lalonde: II l'a fait. M. Duhaime: II l'a fait. M. Paradis: Oui.

M. Duhaime: J'ajouterai que si j'avais été un avocat en pratique et un de ses associés dans son bureau ou lui-même, j'aurais fait le calcul très rapide que si le procès avait duré six mois ou, encore, trois ans ou jusqu'en 1990, il aurait gagné des millions de dollars.

M. Lalonde: Ce n'est pas une question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre. M. le ministre.

M. Paradis: Bien voyons donc! Arrêtez-moi donc cela, vous.

M. Lalonde: Si vous voulez revenir mercredi, on va revenir.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaîtl M. le ministre. M. le ministre.

M. Paradis: ...question ou la perte de temps? On ne finira pas à 22 heures si...

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, je pense qu'on va régler notre problème rapidement. Vous avez fait ce que vous aviez à faire au niveau de...

Une voix: C'est M. Ciaccia qui va faire la conclusion.

Le Président (M. Jolivet): C'est justement ce que je pensais que vous étiez pour me demander au départ, pour me permettre de bien situer le débat, mais je pense que Me Beaulé a déjà répondu. S'il veut donner la même réponse, je pense que ce serait bon qu'on sache si, oui ou non...

M. Beaulé: M. le Président, je ne représentais pas une société d'État. Les honoraires ne m'ont pas été payés par les payeurs de taxes québécois mais par les

Américains. Je n'ai pas l'intention de produire le détail de mes comptes. J'ai donné le montant.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: Je veux simplement faire remarquer, comme l'a dit le témoin devant cette commission, et j'emprunte ses paroles, que ce sont les payeurs de taxes du Québec qui ont payé pour ce règlement hors cour. De toute façon, je continue. Prochaine question, M. le Président.

De façon à faciliter votre compréhension de la question et de façon à ce que vous puissiez vérifier si ce que je cite au texte est exact, je demanderais à quelqu'un du Secrétariat de la commission de vous acheminer...

Une voix: Le texte et non pas la réponse.

M. Laplante: ...

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Bourassa, laissez, s'il vous plaît. Il ira à la Chambre le voir lui-même. S'il vous plaît, M. le député.

M. Gratton: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): Non, je ne lui ai pas donné la parole. La parole est au député de Brome Missisquoi.

M. Gratton: Non, mais il l'a prise quand même, et il a mentionné que le journaliste Normand Girard...

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît!

M. Gratton: ...était le recherchiste du Parti libéral du Québec.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il vous plaît! Vous aussi, prenez la parole que je... S'il vous plaît! M. le député de Brome-Missisquoi. M. le député de

Bourassa, s'il vous plaît! M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: M. le Président, suivant votre décision, je vais ignorer les attaques...

Le Président (M. Jolivet): Je vous remercie beaucoup.

M. Paradis: ...du député ministériel contre la presse et à l'égard d'un tiers qui n'est pas présent ici ce soir.

Le Président (M. Jolivet): M. le député, M. le député, s'il vous plaît!

M. Paradis: Et je vais référer notre invité, Me Beaulé, au dernier paragraphe d'un article intitulé: "L'interruption des poursuites LG 2: une décision politique." Journal de Québec, le samedi 30 avril 1983. Je vais le référer au dernier paragraphe...

M. Duhaime: Qui est-ce qui a écrit cela?

M. Paradis: Le ministre demande qui a écrit l'article? C'est un journaliste. Le dernier paragraphe entre guillemets...

M. Duhaime: Qui a écrit cela? Une voix: ...

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

M. Paradis: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! Vous ne m'aidez aucunement, de la façon dont vous fonctionnez.

Une voix: On sera ici mercredi.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Brome Missisquoi, s'il vous plaît.

M. Paradis: M. le Président, un journaliste - ce n'est pas le député de Brome-Missisquoi, qui est journaliste - a cité, au dernier paragraphe de cet article intitulé: "L'interruption des poursuites LG 2: une décision politique", Me Beaulé entre guillemets. Il dit ce qui suit et, suivant ces guillemets, c'est Me Beaulé qui parle: "Quant au principe à savoir si, oui ou non, cela devait être réglé, cesser les procédures, c'était une question politique. Le premier ministre avait non seulement le droit mais le devoir de prendre position. Il l'a fait." Est-ce que vous avez prononcé ces paroles, Me Beaulé? (21 heures)

M. Beaulé: M. le Président, j'ai conversé longuement avec M. Girard, le vendredi 29 avril, M. Normand Girard du Journal de Québec et du Journal de Montréal. L'article que vous me citez demanderait de ma part plusieurs commentaires, plusieurs nuances et plusieurs mises au point. J'ai parlé à M. Girard...

Le Président (M. Jolivet): Seulement un instant, je ne voudrais pas qu'on s'enferre dans un débat. Il y a une question qui est posée, j'aimerais que vous y répondiez.

M. Beaulé: M. le Président, en vertu de l'article 3 de la Charte des droits et libertés de la personne, qui se lit comme suit: "Toute personne est titulaire des libertés fondamentales telles la liberté de conscience, la liberté de religion, la liberté d'opinion, la liberté d'expression, etc.", j'ai exercé certains de ces droits, le 29 avril, et je ne pense pas en être redevable devant cette commission. Je ne pense pas que cela entre dans le mandat. J'ai exercé, M. le Président, certains des droits que me reconnaît, comme être humain et comme citoyen, l'article 3 de la Charte des droits et libertés de la personne.

M. Paradis: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): Un instant, s'il vous plaît! Vous n'aurez pas besoin de question de règlement, je vais le régler. S'il vous plaît! Me Beaulé... S'il vous plaît! Me Beaulé, une question vous est posée et je pense que vous devez y répondre.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): Juste un instant.

M. Vaillancourt (Jonquière): Question d'équité, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Seulement un instant. Vous connaissez le règlement aussi bien que moi, il y a une question de posée, Me Beaulé doit y répondre.

M. Vaillancourt (Jonquière): Oui, mais, M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): Sur quoi?

M. Vaillancourt (Jonquière): D'abord, je suis d'accord avec votre décision.

Le Président (M. Jolivet): Merci.

M. Vaillancourt (Jonquière): II doit répondre à la question; mais lorsqu'un député de cette commission met un article dans les mains de l'un de nos invités, même si sa

question ne porte que sur une des parties de l'article, le témoin, en présence de l'article, a le droit, comme il l'a dit tout à l'heure, de faire toutes les nuances qui s'imposent, non seulement sur la partie de l'article qui a été citée par le député, mais sur l'ensemble de l'article.

Le Président (M. Jolivet): D'accord. M. le député, la seule chose que je voudrais savoir, c'est d'abord une réponse, et il fera les commentaires qu'il voudra de la même façon que d'autres en font.

Me Beaulé.

M. Beaulé: C'est ma position, ce soir, et c'était ma position le vendredi, 29 avril, savoir que la cessation de ces procédures pouvait commander une décision politique et également une décision administrative. Si on veut bien m'écouter, M. le Président. Lorsque je parle...

Le Président (M. Jolivet): Allez, allez.

M. Beaulé: ...d'une décision administrative, c'est du ressort de la SEBJ. Quant à la décision politique, à savoir s'il y avait lieu d'appliquer une des constatations principales du rapport Cliche, c'était, à mon sens, une décision politique.

M. Lalonde: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): Question de règlement, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, je pense que vous avez demandé à l'invité, Me Beaulé, de répondre à la question du député de Brome-Missisquoi. A-t-il, oui ou non, prononcé les mots qui sont reproduits, entre guillemets, dans l'article et que le député de Brome-Missisquoi a cités? Ces mots sont les suivants: "Quant au principe à savoir si, oui ou non, ça devait être réglé, cesser les procédures, c'était une question politique. Le premier ministre avait non seulement le droit mais le devoir de prendre position. Il l'a fait."

La question du député de Brome-Missisquoi à Me Beaulé: Avez-vous prononcé ces paroles?

M. Duhaime: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Duhaime: Cela fait partie des questions inutiles.

M. Lalonde: Laissez faire pour l'utilité des questions, on verra. Elle est recevable et le président a demandé au témoin de répondre. C'est oui ou non.

M. Duhaime: Vous avez eu le droit de parler sur la question de règlement, alors...

Le Président (M. Jolivet): Oui, et le ministre a le droit de parler sur la question de règlement.

M. Duhaime: Je ne vous ai pas interrompu non plus, alors...

M. Lalonde: On va être ici mercredi.

Une voix: II faut que cela finisse à 22 heures.

M. Duhaime: Détachez vos montures un peu, il n'y a pas de problème.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

M. Duhaime: M. le Président, je pense que le député de Brome-Missisquoi devrait comparer sa question à la transcription du journal des Débats, aux fins de vérifier si ce qui est rapporté dans cet article du Journal de Québec traduit exactement ce que Me Beaulé aurait dit devant cette commission avant de poursuivre les débats.

M. Lalonde: Ce n'est pas devant cette commission...

Le Président (M. Jolivet): À l'ordre! Àl'ordre!

M. Lalonde: ...que ces paroles ont été prononcées, c'est pour cela qu'on demande au témoin de savoir s'il les a prononcées.

Le Président (M. Jolivet): À l'ordre!

M. Lalonde: Autrement, on pourrait vérifier à la transcription.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

M. Lalonde: C'est en conférence de presse.

M. Duhaime: Cela fait partie du placotage, si je comprends bien.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

M. Lalonde: Je ne sais pas si le témoin placote, mais le ministre vient de l'accuser de placoter.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous

plaît: s'il vous plaît!

M. Duhaime: II y a beaucoup de journalistes qui placotent aussi.

Le Président (M. Jolivet): Me Beaulé.

M. Duhaime: J'en connais plusieurs dans l'Opposition qui le font également.

Le Président (M. Jolivet): Me Beaulé.

M. Beaulé: M. le Président, lorsque je dis que cela demande des nuances, je vais m'expliquer à partir de l'article en question. Il s'agit toujours de l'article de Normand Girard du samedi, 30 avril 1983. Le titre: "L'interruption des poursuites: une décision politique"; en sous-titre: "Me Rosaire Beaulé a déclaré hier que la décision d'interrompre les poursuites découlant du saccage de LG 2 était une décision politique et que le premier ministre René Lévesque l'avait prise". Voilà le sous-titre. Si on va à la quatrième colonne, au bas de la troisième et au haut de la quatrième: "À une remarque d'un journaliste, Me Beaulé a soutenu: Cela n'a pas été réglé dans le bureau de M. Lévesque et s'il y a eu une décision ministérielle ou d'un comité ministériel, je l'ignore même aujourd'hui. Il faudrait poser la question à M. Lévesque."

Ce qui m'amenait à dire tout à l'heure que la réponse qui est citée à la fin de cet article, à la cinquième colonne, demanderait des nuances, parce que je ne l'ai sûrement pas prononcée isolée comme elle est là, M. le Président. Je n'ai pas autre chose à dire.

Le Président (M. Jolivet): D'accord. M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: Je vais vous demander de demander au témoin s'il veut confirmer qu'il a également prononcé ces paroles. C'est son droit le plus strict. S'il pense que ses propos expliquent, nuancent, etc., je crois que c'est son droit le plus strict. Je n'ai aucune objection. C'est son droit de parole et je vais le respecter, M. le Président. Mais quand je lui demande de façon très précise et que je lui cite, entre guillemets, des paroles qu'un journaliste lui attribue, que je lui demande s'il reconnaît avoir prononcé ces paroles, la réponse, même s'il peut l'expliquer, même s'il peut mettre tout le chocolat et l'arrondir, est-ce qu'il les a prononcées, oui ou non? C'est aussi simple que cela. Je les répète: "Quant au...

Le Président (M. Jolivet): Non, M. le député, je l'ai entendu assez souvent et assez longtemps.

M. Paradis: Je n'ai pas eu de réponse.

Le Président (M. Jolivet): Non, mais je pense que le bon sens... Ce que j'ai amené au point de vue juridique, comme le député de Gatineau, je ne suis pas un avocat, donc, je vais prendre le bon sens pour m'aider. J'ai cru comprendre, de la part de Me Beaulé... S'il vous plaît, M. le député!

M. Lalonde: C'est parce que vous dites que vous n'êtes pas avocat, donc, vous allez prendre le bon sens.

Une voix: Je n'ai rien contre cela.

Le Président (M. Jolivet): Je pense que ce que je voulais dire, c'est que le bon sens général... L'invité - je ferai en sorte de ne plus permettre d'autres questions - a dit: J'ai prononcé les paroles, mais dans un contexte. Il a vraiment répondu à la question, c'est ce que je lui ai demandé. Mais il ne peut... Je pense qu'il est impossible de dire que ces paroles n'ont pas été prononcées dans un contexte. C'est bien ce que j'ai compris.

M. Paradis: M. le Président, c'est simplement pour que cela soit clair pour les fins du journal des Débats lorsqu'on aura une argumentation à effectuer. Ce que vous me dites, c'est que vous avez compris. Je suis prêt à prendre votre décision là-dessus, comme je prends toutes vos décisions, non pas avec un grain de sel, mais avec tout leur sens. Est-ce que vous avez dit que le témoin a répondu qu'il avait prononcé ces paroles, mais dans un contexte et a ajouté d'autres paroles?

Le Président (M. Jolivet): Monsieur, ce que l'invité a dit, ce n'est pas qu'il refuse de dire qu'il a prononcé certainement des paroles, mais que ce n'est pas le contexte dans lequel elles sont citées. Est-ce que j'ai bien compris, Me Beaulé?

M. Beaulé: M. le Président... M. Paradis: M. le Président...

M. Beaulé: ...parce que je vois que le journaliste, M. Girard, a cité ce qui faisait son affaire de ma déclaration, pour être net et clair.

M. Ciaccia: M. le Président... Le Président (M. Jolivet): Non.

M. Ciaccia: C'est une question de directive, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Non. M. Paradis: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît'. Pour être bien clair, on ne fera pas le procès d'un texte qui est produit par un autre à partir des déclarations d'une personne. C'est sûr et certain que je ne le permettrai pas. Me Beaulé, je pense, a répondu adéquatement à la question et je ne permettrai pas d'autres questions.

M. Paradis: Très bien, M. le Président. M. Ciaccia: Question de directive.

Le Président (M. Jolivet): Question de directive, M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: M. le Président, est-ce que vous constatez, comme je le constate moi-même, que les questions qui sont posées par le député de Brome-Missisquoi, sur certains points très spécifiques, sont interrompues par le ministre ou par le côté ministériel, pour suggérer le genre de réponse que M. Beaulé doit donner.

M. Duhaime: Question de règlement, M. le Président.

M. Ciaccia: Est-ce que vous constatez cela, M. le Président?

Le Président (M. Jolivet): M. le député, je ne peux pas accepter, vous m'avez demandé...

M. Duhaime: Vous allez retirer vos paroles.

Le Président (M. Jolivet): ...une directive. Je dois vous dire, M. le député, vous êtes en politique comme moi, et, comme une personne en politique... S'il vous plaît! M. le ministre, laissez-moi... S'il vous plaît! Je pense que chacun m'a promis, ce soir, de permettre qu'on finisse, mais je connais tous les aléas de cette chose. Ce que je voulais dire - je pense qu'il faut être honnête envers Me Beaulé, comme chacun d'entre nous le voudrait - c'est que, souvent, il arrive que nous fassions des déclarations et que des gens les utilisent. Ce que Me Beaulé a dit, c'est cela. Je ne permettrai pas d'autres questions. On le vit assez comme député. On sait qu'on est très bien cité, mais quelquefois on juge qu'on est mal cité et je pense que cela pourrait arriver. En conséquence, je ne permettrai plus d'autres questions. M. le député, sur un autre sujet.

M. Duhaime: M. le Président, sur la question de règlement du député de Mont-Royal...

Le Président (M. Jolivet): ...je ne l'ai pas reçue.

M. Duhaime: Ah! bon. Très bien.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: M. le Président, ma question s'adresse, encore une fois, à notre aimable invité. Est-ce que vous avez déclaré, le 22 avril 1983, dans la langue de Shakespeare, et là j'espère qu'il n'y a pas de barrière linguistique...

Le Président (M. Jolivet): M. le député, je m'excuse mais je vous ai demandé, de la même façon qu'à tous les autres... J'espère que vous allez me permettre de retirer cette partie-là.

M. Paradis: Je vous permets de la retirer, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Vous, vous la retirez.

M. Paradis: Si je vous permets de retirer ce que j'ai dit, donc...

Le Président (M. Jolivet): ...il n'existera pas.

M. Paradis: ...cela n'existe pas. Le Président (M. Jolivet): D'accord.

M. Paradis: C'est ce que j'avais compris, M. le Président.

M. Tremblay: M. le Président, sur une question de directive.

Le Président (M. Jolivet): M. le député, laissez la chance au député de Brome-Missisquoi.

M. Tremblay: Non, c'est parce que cela implique sa question.

Le Président (M. Jolivet): Allez donc, je vais voir.

M. Tremblay: Je voulais vous demander si je devrais faire une question de règlement puisque hier, sur un appel téléphonique qui avait été fait ou des contacts téléphoniques qui avaient été faits avec Me Boivin...

Le Président (M. Jolivet): Juste un instant, je veux d'abord entendre la question. Je verrai. J'ai compris votre question. Vous allez voir que j'ai compris. Allez, posez votre question.

Une voix: II est brillant, notre président.

M. Paradis: II comprend vite, le

président.

Le Président (M. Jolivet): Allez, allez.

M. Gratton: Est-ce que c'est assez fort?

Le Président (M. Jolivet): Ce n'est pas la première journée que je suis ici moi non plus.

M. Paradis: M. Beaulé, le vendredi 22 avril 1983, lorsque vous avez parlé du mandat de cette commission, des circonstances qui entouraient le règlement hors cour du saccage de LG 2, est-ce que vous avez déclaré, en langue de Shakespeare, en langue anglaise, à des journalistes, qui l'ont reproduit sur des réseaux de télévision ainsi qu'à la radio, la phrase suivante: The principle of the settlement was discussed with Mr. Boivin but the amount of the settlement at no time has been discussed with Mr. Boivin.

M. Beaulé: Je ne me rappelle pas, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, je m'excuse mais je n'ai pas compris Me Beaulé.

M. Beaulé: Je ne me rappelle pas, M. le Président.

M. Paradis: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): Je vous ai compris, mais la question était recevable.

M. Paradis: Bien oui, ce n'était pas une question hypothétique.

Le Président (M. Jolivet): C'est vrai, elle se rapportait au détail de la décision.

M. Paradis: Merci, M. le Président. C'était ma dernière question. Vous me permettrez un bref commentaire. À la suite des réponses que vous nous avez données, Me Beaulé, c'est avec regret que je le dis à un collègue du barreau, tout comme le député de Gatineau, vous ne m'avez pas convaincu de votre version des faits.

M. Beaulé: Me permettez-vous de me retirer temporairement?

Le Président (M. Jolivet): Oui, Me Beaulé.

M. Beaulé: Je considère que la commission ou ses membres ne sont pas là comme mes juges. Ils sont là pour me poser des questions et mon devoir est d'y répondre, mais non pas de recevoir le sermon de la fin après chaque intervention. Puis-je me retirer pour quelques minutes, M. le Président?

Le Président (M. Jolivet): Oui, je vous le permets, Me Beaulé. Je voudrais savoir pour combien de temps vous voulez que je suspende?

M. Beaulé: Non, je ne veux pas une suspension, je trouve, M. le Président, que c'est absolument indigne de me servir une leçon après chaque intervention.

M. Lalonde: Un instant, M. le Président.

M. Beaulé: Si la commission juge à propos de...

M. Lalonde: ...question de règlement, question de règlement...

Le Président (M. Jolivet): ...écoutez...

M. Lalonde: ...j'ai une question de règlement à soulever, M. le Président, ici maintenant.

Le Président (M. Jolivet): Juste avant, Me Beaulé, le problème - je dois le dire pour les gens qui nous écoutent - c'est que nous sommes en commission parlementaire. Comme nous sommes en commission parlementaire, je ne peux cependant malheureusement empêcher qui que ce soit d'user de son droit de parole et de faire les commentaires qu'il veut ni d'avoir l'opinion qu'il a. Je ne peux donc faire autre chose qu'écouter. Comme c'était la dernière intervention que faisait le député et que nous passions au député de Bourassa, vous permettez que le député de Bourassa continue?

M. Beaulé: Je suis à votre disposition, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Bourassa. M. le ministre.

M. Duhaime: M. le Président, sans vouloir ajouter à ce que vient de dire Me Beaulé, je dirais que je fais miens ses propos. Je trouve disgracieux, pour ne pas dire davantage...

M. Lalonde: ...ce n'est pas une question de règlement...

Le Président (M. Jolivet): ...non, non...

M. Vaillancourt (Jonquière): Ce n'est pas sur une question de règlement, il a le droit de parole.

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse,

je ne pense pas que ce soit une question de règlement. Je veux juste savoir si...

M. Laplante: ...j'ai échangé mon droit de parole avec le ministre, je le reprendrai à l'autre tour, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Merci, M. le ministre, à vous la parole. (21 h 15)

M. Duhaime: M. le Président, malgré l'excuse qui a précédé ce qu'a dit le député de Brome-Missisquoi, je dis que je trouve parfaitement disgracieux ce que je viens d'entendre quant à l'évaluation que l'on peut faire, à ma gauche, en plus de celle du procureur de la Gatineau et de celle qui viendra sans aucun doute, à un moment ou l'autre, d'un des autres à ma gauche, et à la conviction qu'on pourrait avoir quant à la version des faits qu'a donnée devant cette commission Me Rosaire Beaulé.

Je dis, M. le Président, aux membres du Parti libéral du Québec qui, par des députés munis de l'immunité parlementaire, défendent le dossier du quotidien La Presse: s'ils défendent un mauvais dossier et s'ils s'en rendent compte maintenant, je les prierais de bien vouloir constater qu'ils plaident un mauvais dossier. Mais, de grâce, au nom de ce qui pourrait vous rester d'éthique parlementaire, pour ne pas dire d'éthique professionnelle, je vous demande de ne pas calomnier, calomnier, la carrière, l'honneur et la réputation fort honorable des membres du Barreau. Qui a eu, au cours de sa vie, l'occasion de plaider un dossier contre l'une de nos sociétés d'État? J'aurais cru, M. le Président, qu'en 1983, autant dans la lettre que dans l'esprit, nous aurions pu quitter, lors de ces travaux, ce que j'appellerais l'ambiance pernicieuse et vicieuse de la banlieue de Téhéran. Depuis les cinq dernières semaines que nous sommes ici devant cette commission, nous avons pu entendre des soi-disant procureurs, en mal de pratique ou de nostalgie de leur ordre, venir littéralement écoeurer des honnêtes gens devant cette commission. Et je parlerai de M. Claude Laliberté, président-directeur général de la Société d'énergie de la Baie James, de M. Lucien Saulnier et, également, M. le Président...

M. Paradis: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le ministre, il y a une question de règlement. J'aimerais...

M. Paradis: Je n'ai pas les citations exactes, mais si le ministre me demande de les retracer, autant M. Laliberté que M. Saulnier qu'il vient de mentionner, ne se sont pas plaints du traitement. Au contraire, ils ont dit qu'ils appréciaient...

Le Président (M. Jolivet): M. le député...

M. Paradis: ...le fait d'apporter un éclairage à cette commission.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Brome-Missisquoi, ce n'est pas une question de règlement et j'aimerais...

M. Paradis: C'est une rectification de faits inexacts...

Le Président (M. Jolivet): Non, non. M. le député. M. le ministre. M. le ministre.

M. Duhaime: Le seul regret que j'ai, M. le Président, à ce stade-ci de nos travaux, c'est d'avoir cru, il y a à peine une heure, que l'Opposition libérale avait des questions sérieuses, pertinentes et intelligentes à poser...

M. Lalonde: M. le Président...

M. Duhaime: ...sans quoi, j'aurais, sans aucun doute, engagé le débat sur la motion que j'avais présentée et que j'ai retirée sur l'affirmation du leader parlementaire de l'Opposition officielle à savoir que ce soir, dès 22 heures, nous en aurions terminé avec Me Beaulé.

M. Lalonde: On pourra terminer si vous cessez de parler.

M. Duhaime: M. le Président, je dirai que, comme député de mon comté de Saint-Maurice, comme membre de cette commission parlementaire et comme parlementaire, je me sens en quelque sorte humilié de voir mon nom, de même que celui des collègues qui sont à ma droite, associé aux propos qui viennent d'être tenus par le député de Brome-Missisquoi à l'endroit de Me Beaulé. La perche que je vais lui tendre, c'est la suivante: Je vous demanderais de retirer votre évaluation pour le moins désobligeante de la version des faits que Me Beaulé a rendue devant cette commission, puisqu'il est ici depuis maintenant une semaine.

M. Paradis: Je vais profiter de la perche...

M. Duhaime: C'est la demande que je vous formule comme parlementaire...

M. Paradis: Je vous remercie beaucoup, M. le ministre.

M. Duhaime: ...pour la bonne santé de nos institutions.

Le Président (M. Jolivet): En évitant, cependant, d'ouvrir un autre débat.

M. Paradis: II n'y aura pas de débat, M. le Président. Je vais saisir la perche du ministre, à une condition: que le ministre me permette de reprendre les questions que j'ai posées pour permettre au témoin de se reprendre.

M. Duhaime: Oui, allez-y.

M. Paradis: Très bien. M. Beaulé...

M. Duhaime: Vous allez retirer vos paroles, donc?

M. Paradis: Non, non, non. M. Duhaime: Ah!

M. Paradis: On va se reprendre... Si on a des réponses aux questions, on va retirer...

M. Duhaime: Non, non, il n'y a pas de fligne-flagne, là.

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse. C'est moi qui vais refuser.

M. Duhaime: Ce n'est pas ce que j'ai compris.

M. Paradis: Bien, voyons donc! C'est clair et net!

Le Président (M. Jolivet): Eh bien! moi, dans ce cas-là, compte tenu des circonstances, si le ministre a terminé l'utilisation de son droit de parole, je vais demander au député de Laporte... C'est le ministre qui va me dire s'il a terminé. M. le ministre, avez-vous terminé?

M. Duhaime: Oui, M. le Président. Je voudrais que l'Opposition profite des minutes...

Une voix: Quarante minutes.

M. Duhaime: ...selon l'indication que j'ai eue tout à l'heure, pour poser des questions pertinentes, sérieuses à l'intérieur du mandat de cette commission.

Le Président (M. Jolivet): Avant de permettre au député de Laporte d'utiliser son droit de parole, j'aimerais vous faire remarquer qu'à la demande du député de Vimont, nous avons reçu de M. John Lussier, un dossier qui répond aux questions de M. Marcel Audet, et je vous l'ai fait distribuer.

M. Lalonde: Merci.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Laporte, s'il vous plaît, vos questions.

M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Je vais tenter d'être aussi bref que possible étant donné que mon collègue, le leader parlementaire, doit prendre la parole après moi et qu'il reste à peu près 40 minutes avant la fin de la séance.

Me Beaulé, est-ce que vous considérez Me Boivin comme un ami?

M. Beaulé: M. le Président, est-ce que ce n'est pas une question d'opinion qu'on me pose?

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse. On m'a dérangé. Voulez-vous reprendre votre question, M. le député?

M. Bourbeau: J'ai demandé à Me Beaulé si M. Jean-Roch Boivin est un ami à lui. Question de fait.

M. Beaulé: Non, la question était, M. le Président: Est-ce que vous considérez M. Boivin comme un ami?

Le Président (M. Jolivet): Donc, la question est: Est-ce que c'est un ami?

M. Bourbeau: Est-ce que M. Jean-Roch Boivin est votre ami?

M. Beaulé: M. le Président, je me suis déjà exprimé devant la commission, sur ce sujet, à plusieurs reprises.

M. Lalonde: Non.

M. Bourbeau: Je ne pense pas, M. le Président, que la question ait jamais été posée. Je la repose, M. le Président. Est-ce que M. Boivin est votre ami?

M. Duhaime: On est loin du mandat...

M. Beaulé: J'ai l'honneur d'avoir comme ami, M. Boivin. La réponse est oui. J'ajoute que j'ai déclaré à la commission que, en ce qui concerne ce dossier qui fait l'objet du mandat de cette commission, mes relations avec M. Boivin étaient traitées sur une base professionnelle et d'affaires. Je pense qu'on se souviendra de mes réponses.

M. Bourbeau: M. le Président, question de règlement. J'ai posé une très courte question et je ne vois pas pourquoi le témoin commence à faire un discours.

Le Président (M. Jolivet): M. le député! Il avait raison. Votre question maintenant, M. le député.

M. Beaulé: Opération "salissage!"

M. Bourbeau: Pardon?

M. Beaulé: J'ai dit que c'est une opération "salissage" et j'en ai assez! Je pense que l'opinion publique aussi en a assez.

M. Lalonde: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! Je ne voudrais pas avoir de question de règlement.

M. Lalonde: Non, mais j'en ai une. À moins que vous régliez le problème vous-même.

Le Président (M. Jolivet): Oui, je sais. C'est ce que je voudrais faire.

Une voix: Ils n'ont jamais fait autre chose!..

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! Me Beaulé, je comprends votre fatigue, comme la mienne aussi, je pense. S'il vous plaît, simplement pour les besoins des travaux, j'aimerais que vous retiriez vos paroles de façon qu'on puisse continuer. De la même façon que je l'ai demandé à d'autres, c'est votre opinion, j'en conviens. Vous avez le droit d'avoir votre opinion. Mais je ne voudrais pas que vous l'exprimiez, de façon que les travaux puissent se poursuivre. S'il vous plaît!

M. Beaulé: Bien, M. le Président.

M. Tremblay: Question de règlement, M. le Président.

M. Lalonde: Pardon?

Le Président (M. Jolivet): Non. J'ai compris, de la part de Me Beaulé, qu'il retirait ce qu'il venait de dire, tout en conservant, si j'ai bien compris, son opinion. Je l'ai compris. C'est ce que vous avez dit?

Des voix: On n'a pas compris.

M. Beaulé: M. le Président, à votre demande, je vais retirer tout ce qu'un homme sans moyen et sans immunité parlementaire peut dire et faire.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Laporte, vos questions s'il vous plaît!

M. Bourbeau: M. le Président, je dois avouer que je suis très mal à l'aise. J'ai posé une question très simple...

Le Président (M. Jolivet): Imaginez-vous que, moi aussi, je suis très mal à l'aise dans la fonction que j'occupe.

M. Bourbeau: Je me fais engueuler par le témoin parce que je lui demande si M. Boivin est son ami.

Le Président (M. Jolivet): Non, non. M. le député! Il a retiré ses paroles, prenez-le pour fait. Vos questions maintenant.

M. Bourbeau: Bon. M. Boivin, est-ce que vous parlez la langue anglaise?

Le Président (M. Jolivet): C'est M. Beaulé.

M. Bourbeau: M. Beaulé, plutôt.

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le député. Je regrette...

M. Beaulé: Ce n'est pas dans le mandat de la commission, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Je voudrais éviter de revenir sur ce qu'on a dit. Je m'excuse, mais je pense que vous entrez dans une discussion qui n'a trait en aucune façon au mandat que nous avons.

M. Bourbeau: M. le Président, je pense que j'ai le choix de mes questions. Je veux poser mes questions...

Le Président (M. Jolivet): Je sais que vous avez le choix de vos questions, mais j'ai aussi le choix de savoir si elles sont recevables ou pas.

M. Bourbeau: Bon. Alors, M. le Président, je vais demander au témoin s'il s'exprime très bien en anglais.

Le Président (M. Jolivet): Je n'accepte pas la question.

M. Bourbeau: Non.

M. Lalonde: C'est contre la loi 101.

M. Bourbeau: Elle est irrecevable, M. le Président?

Le Président (M. Jolivet): Oui, monsieur.

M. Bourbeau: Merci, M. le Président. M. Beaulé, le 28 août dernier, vous étiez présent à une rencontre au bureau du ministre Pierre-Marc Johnson, le ministre du Travail de l'époque.

Une voix: Le 28 août 1978. M. Bourbeau: Le 28 août 1978.

M. Duhaime: Parlez un peu plus fort, s'il vous plaît! Si vous manquez de voix, on

peut libérer...

M. Bourbeau: Alors, je reprends. Le 28 août 1978, vous étiez présent, M. Beaulé, à une rencontre avec Me Yves Gauthier, Me Jasmin et vos clients, Mes Woll et Fanning, au bureau du ministre Pierre-Marc Johnson. En quelle langue l'entrevue s'est-elle déroulée?

M. Beaulé: Forcément en anglais, M. le Président.

M. Bourbeau: Est-ce que vos clients, Mes Woll et Fanning, parlaient le français? Comprenaient-ils le français?

M. Beaulé: Non, M. le Président. Une voix: Italien ou grec?

M. Bourbeau: Depuis combien d'années connaissez-vous Me Jasmin?

M. Beaulé: Je ne sais pas si cela fait partie du mandat de la commission, mais je vais y répondre quand même. Depuis quinze ans au moins, quinze ans environ.

M. Bourbeau: À votre connaissance, est-ce que Me Boivin connaît Me Jasmin depuis plusieurs années?

M. Beaulé: Je pense que la question s'adresse à M. Boivin.

M. Bourbeau: À votre connaissance à vous?

Le Président (M. Jolivet): II a répondu. J'ai compris qu'à sa connaissance, vous devriez poser la question à Me Boivin.

M. Bourbeau: À sa connaissance, c'est oui ou c'est non.

Le Président (M. Jolivet): Je le sais, mais ce que je veux dire, c'est qu'il a répondu sous une forme différente.

M. Bourbeau: Est-ce que vous connaissez Me Jasmin sur une base assez familière ou si c'est plutôt d'une façon distante?

M. Beaulé: Je n'ai pas de rapports sociaux avec M. Jasmin, je n'en n'ai jamais eu. J'ai eu des rapports professionnels avec lui, uniquement.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le député de Bourassa.

M. Bourbeau: Est-ce que vous avez rencontré Me Jasmin lors d'activités politiques?

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, Me Beaulé...

M. Beaulé: Je n'ai pas compris la question.

Le Président (M. Jolivet): Moi non plus, je suis dérangé. Si vous voulez qu'on termine comme il faut, je vais demander à M. le député de Laporte de reprendre sa question, parce que je ne l'ai vraiment pas comprise. Je demanderais de ne pas être dérangé, s'il vous plaît! M. le député de Laporte.

M. Bourbeau: J'ai demandé si vous aviez déjà rencontré Me Jasmin lors d'activités politiques?

M. Duhaime: Question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Duhaime: Etes-vous capable de me dire ce que cela peut nous "foutre". Le mandat de la commission est de voir dans quel sens...

M. Bourbeau: M. le Président, je retire ma question.

M. Duhaime: ...et vous l'avez lu à plusieurs reprises...

Le Président (M. Jolivet): La question est retirée, M. le ministre.

M. Duhaime: ...oui j'espère. On va surveiller les prochaines.

M. Bourbeau: M. le Président, je la retire pour permettre d'épargner du temps.

Le Président (M. Jolivet): Je vous remercie.

M. Bourbeau: Lors de vos visites, Me Beaulé, au bureau du premier ministre, les visites qui ont été notées sur le registre, le but recherché était de sensibiliser - comme vous l'avez dit - les responsables au bureau du premier ministre à la cause de votre cliente. Pourquoi n'êtes-vous pas plutôt allé voir le ministre responsable de l'énergie, responsable de la SEBJ, M. Joron?

Une voix: C'est une hypothèse.

M. Bourbeau: Puisque vous vouliez sensibiliser les autorités, pourquoi n'êtes-vous pas allé voir M. Joron, responsable de la SEBJ?

M. Beaulé: J'ai déjà répondu à toutes

ces questions. Mes clients ont d'abord voulu rencontrer le ministre du Travail selon la tradition américaine. Ils croyaient vraiment que c'était à cette personne qu'ils devaient s'adresser pour exposer le problème. Je répète qu'ils considéraient cette poursuite comme abusive et que cela avait des répercussions dans les milieux syndicaux américains. Par la suite, j'ai remis certains documents à M. Boivin pour le sensibiliser au problème, à tout ce problème qui avait aussi des incidences internationales et qui dépassait les simples débats partisans, encore hier comme aujourd'hui, d'ailleurs.

M. Bourbeau: Vous avez dit dans une de vos déclarations antérieures que vous ne tutoyiez pas Me Boivin en réunion. Je pourrais le citer, mais je voudrais gagner du temps. Vous avez dit: En réunion...

M. Beaulé: Je n'ai pas dit cela.

M. Bourbeau: Alors, je vous cite. Nous parlions de Me Boivin en réunion: "II n'y a jamais eu de tutoiement, ni de familiarité dans nos rencontres." C'est ce que vous avez dit...

M. Beaulé: Ce que j'ai voulu dire, c'est qu'il n'y avait pas de familiarité comme cela m'était suggéré par M. le député de Mont-Royal, un peu comme si j'avais discuté avec M. Boivin en disant: Jean Roch, qu'est-ce que t'en penses? J'ai dit que ce n'était pas le ton, ni le mode, ni la façon avec laquelle j'avais traité avec lui de cette affaire qui était extrêmement importante. (21 h 30)

M. Bourbeau: Je vous pose la question carrément. Est-ce que vous tutoyez M. Boivin?

M. Duhaime: M. le Président, question de règlement. Je connais des Français...

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Duhaime: Je connais des couples de Français qui sont mariés depuis 45 ans et qui se vouvoient.

M. Bourbeau: Est-ce qu'ils sont... M. Lalonde: Question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

M. Duhaime: Qu'il le tutoie ou le vouvoie, franchement! On se croirait non seulement dans un cour de récréation, mais dans une brasserie.

Le Président (M. Jolivet): Je suis en train de me demander si je n'utiliserai pas la martingale du ministre pour mettre les gens...

M. le ministre.

M. Duhaime: C'est épouvantable!

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M. le député de Laporte.

M. Bourbeau: M. le Président, sur la question de règlement que M. le ministre a soulignée, je vais expliquer pourquoi je la pose. C'est que M. Beaulé a dit lui-même: II n'y a jamais eu de tutoiement et de familiarité dans nos rencontres. Je veux lui donner l'occasion d'expliciter ce qu'il voulait dire et je pense qu'il est heureux d'ailleurs de ma question. Si le ministre veut le laisser répondre, je crois qu'il veut exactement ce qui se passe. Ma question, je la repose. Est-ce que vous tutoyez ou non M. Boivin?

M. Beaulé: Je ne sais pas.

M. Duhaime: Voulez-vous lire le mandat de la commission?

Le Président (M. Jolivet): Juste un instant!

M. Beaulé: M. le Président, je ne sais pas si je laisserais le député de Laporte lire dans ma conscience, cela, c'est une autre question. Il est évident que, lorsque je rencontre M. Boivin ailleurs, si vous voulez, que dans l'exercice de ses fonctions, je le tutoie mais, dans le cas de ces quelques rencontres que j'ai eues avec lui, je ne l'ai pas tutoyé.

J'ajoute ceci. Me le permettez-vous, je vais invoquer l'article 4, pour ceux qui peuvent comprendre ce que cela veut dire: "Toute personne a droit à la sauvegarde de sa dignité, de son honneur et de sa réputation". Les questions qu'on me pose, et j'en forme un protêt auprès de vous, qui êtes mon seul protecteur ici, ont pour but de me rendre coupable par association comme McCarthy le faisait aux États-Unis, en 1953, de présumés actes illicites.

M. Lalonde: Une question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

M. Lalonde: Une question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! Juste un instant! Je ne voudrais pas qu'on empêche la personne qui est devant nous d'avoir tout de même des opinions, de la même façon que chacun des membres de cette commission en a aussi.

M. Lalonde: M. le Président, une question de règlement.

Une voix: Richard Nixon, lui?

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, sur une question de règlement.

M. Lalonde: M. le Président, tout le monde sait que se faire traiter de Mccarthysme est une accusation péjorative et c'est, je pense, les propos que le témoin vient d'avoir à l'égard de cette commission ou de quelques membres, j'imagine que ce sont surtout les membres libéraux, puisque le témoin s'était déjà permis des accusations politiques, à savoir que ce qu'on faisait, c'était un ballon politique. Je crois qu'on ne peut pas accepter que des accusations de cette nature soient faites. Ce n'est pas parlementaire, ce n'est pas du tout conforme aux règles de gentilhommerie que vous avez vous-même promis d'appliquer. Je vous demanderais de prier le témoin de retirer ses paroles.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Duhaime: M. le Président, sur la question de règlement, si Me Beaulé est obligé de retirer des propos qu'il vient de tenir, parce qu'il n'a pas l'immunité parlementaire, je voudrais les répéter. Je l'ai, l'immunité parlementaire...

M. Lalonde: M. le Président, vous n'avez pas le droit de parole.

M. Duhaime: ...je voudrais l'utiliser.

M. Paradis: ...ce n'est pas une de question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): Sauf que, M. le ministre, ce n'est vraiment pas une question de règlement, et vous n'avez pas le droit de parole.

M. Tremblay: M. le Président, une question de règlement ou de directive.

Le Président (M. Jolivet): Allez, M. le député de Chambly.

M. Tremblay: Je voudrais simplement savoir ce qui arrive, si l'invité refuse de retirer ses paroles.

M. Duhaime: C'est intéressant.

Une voix: Complètement hypothétique.

Le Président (M. Jolivet): Vous m'aidez difficilement dans cette décision. J'ai eu l'occasion, avant les débuts des travaux, de demander à Me Beaulé de m'aider dans mon travail. J'ai demandé a chacun des membres de cette commission en dehors des travaux de m'aider à faire en sorte qu'on puisse en terminer ce soir avec Me Beaulé. Je ne sais pas de quelle façon exprimer cette demande qui pourrait être faite - sans vouloir blesser personne - en disant que je peux penser comme toute personne ici présente qu'on peut avoir des opinions mais que, quelquefois, il est peut-être mieux de ne pas les donner et de les conserver pour soi-même. Puisqu'il n'est pas député, je l'ai fait par gentilhommerie tout à l'heure, je ne peux pas demander à Me Beaulé de retirer certaines paroles, mais ce n'est pas la même chose qu'un député qui est autour de la table et à qui je demande de retirer ses paroles. Je fais simplement le souhait que, si Me Beaulé veut dire autre chose, il le fasse, sinon je laisserai la parole au député de Laporte.

M. Duhaime: M. le Président, une question de règlement.

M. Bourbeau: Une question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): Non. Sur la question de règlement, je l'ai réglé.

M. Duhaime: Alors, vous ne demandez pas à Me Beaulé de retirer ses paroles?

Le Président (M. Jolivet): Non, non.

M. Duhaime: Ah bon! J'aurais trouvé cela regrettable.

Le Président (M. Jolivet): Tout ce que je dis, c'est qu'il est libre de le faire.

M. Bourbeau: M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Laporte.

M. Bourbeau: M. le Président, une dernière question, et je ne poursuivrai pas sur la question du tutoiement, mais je l'avais posée uniquement parce que c'était le témoin qui avait souligné ces mots.

Ma dernière question est celle-ci: L'objet du présent exercice est d'examiner les circonstances entourant la décision du conseil d'administration de la SEBJ et le rôle du premier ministre. Or, le premier ministre, à l'Assemblée nationale, le 20 février 1979, a dit, et je le cite: "Ce n'est pas du tout, ni de près ni de loin, dans le bureau du premier ministre que le règlement ou partie du règlement a eu lieu." Évidemment, il s'agissait du règlement hors cour de l'action en justice de 32 000 000 $ intentée et dont

le règlement a été fait pour 200 000 $ en ce qui concerne la SEBJ.

Le 29 avril dernier, mon collègue, le député de Mont-Royal, vous posait une question. C'est au ruban 953, page 1, si vous voulez regarder. Il vous disait ceci.

M. Beaulé: Juste un instant, s'il vous plaît!

M. Bourbeau: Oui. C'était au sujet de la réunion...

Une voix: ...

M. Bourbeau: Oui, oui. Mais, M. le Président, je ne lis pas, je parle.

Le Président (M. Jolivet): Je sais, mais c'est simplement pour qu'il puisse l'avoir entre les mains avant de commencer.

M. Beaulé: Quelle page dites-vous? Le Président (M. Jolivet): Ruban 953.

M. Bourbeau: 953, page 1. Au bas de la page.

Le Président (M. Jolivet): Page 1.

M. Bourbeau: Alors il s'agissait de la réunion du 15 janvier 1979 que vous aviez tenue au bureau de Me Boivin. M. le député de Mont-Royal vous a demandé: "II ne vous a fait aucun commentaire sur les propos que vous lui avez faits?" Évidemment, vous parlez à Me Boivin. Et vous avez répondu: "J'ai informé M. Boivin du déroulement des procédures de la journée." On parlait du procès qui venait de débuter. M. le député de Mont-Royal vous a demandé: "Est-ce que vous avez parlé du règlement?" Il s'agissait du règlement hors cour prévu, enfin, en négociation. Et vous avez répondu: "Pas ce jour-là. Pas ce jour-là." La question était: "Est-ce que vous avez parlé du règlement à M. Boivin?" Et vous avez répondu: "Pas ce jour-là." Est-ce qu'on doit comprendre que vous avez parlé du règlement à M. Boivin une autre journée?

M. Beaulé: Non. Je vous ai déjà répondu là-dessus, M. le Président.

M. Bourbeau: Pas sur cette question.

M. Beaulé: Maintenant, quant à la citation qui a été faite de la déclaration du premier ministre et qui a été le préambule à la question, je jure qu'elle est vraie. La déclaration du premier ministre est vraie.

M. Bourbeau: Alors, pourquoi avez-vous utilisé le mot "pas ce jour-là"? Est-ce que cela n'implique pas que vous en avez parlé une autre journée?

M. Beaulé: Je n'ai pas parlé de règlement. J'ai été clair, M. le Président. Il ne faut pas sortir des réponses hors contexte.

Le Président (M. Jolivet): D'accord, Me Beaulé.

M. Bourbeau: M. le Président, je voudrais poser une autre question sur le même sujet. Je cite vos propres paroles, M. Beaulé, pas celles d'autres personnes, vos propres paroles à vous. Vous avez dit: "Pas ce jour-là."

M. Beaulé: Je réponds, M. le Président, que c'est hors contexte. J'ai déclaré et bien expliqué à la commission qu'il n'a jamais été question de règlement ou de modalités de règlement. Il y a plusieurs questions qui m'ont été posées dans ce sens, en particulier par le député de Mont-Royal.

M. Bourbeau: M. le Président, je vais terminer en disant ceci: M. le Président, j'ai posé deux sortes de questions à Me Beaulé. Je lui ai...

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Laporte, avant d'aller trop loin...

M. Dussault: Donnez-vous votre sermon aussi?

M. Bourbeau: Pardon?

M. Dussault: Donnez-vous votre sermon aussi?

M. Bourbeau: Non, non.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le député.

M. Tremblay: Votre petit commentaire désobligeant.

Le Président (M. Jolivet): M. le député. M. Bourbeau: Je veux simplement dire...

Le Président (M. Jolivet): Oui, d'accord, d'accord.

M. Tremblay: Vous ne pourrez pas dormir, sans cela.

Le Président (M. Jolivet): Je vais vous laisser parler, M. le député, mais je ne voudrais pas que vos propos engendrent un autre débat. M. le député de Laporte.

M. Bourbeau: M. le Président, je vais simplement dire que les mots "pas ce jour-

là", en ce qui me concerne, impliquent qu'il en a été question un autre jour, sans cela, on n'aurait pas dit: "Pas ce jour-là."

Le Président (M. Jolivet): M. le député, je dois malheureusement vous rappeler une chose.

M. Bourbeau: Oui.

Le Président (M. Jolivet): C'est que l'invité est sous serment.

M. Bourbeau: M. le Président, je donne mon opinion.

Le Président (M. Jolivet): Non, non. Vous n'avez pas le droit, je pense. Non, je l'ai déjà dit. La personne est sous serment et nous devons prendre sa parole. Nous devons peut-être avoir des opinions, c'est autre chose.

M. Bourbeau: Alors, M. le Président, disons que le témoin ne m'a pas convaincu.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, vous avez la parole.

M. Laplante: Vous avez passé mon tour.

Le Président (M. Jolivet): Oh! Excusez-moi. M. le député de Bourassa. Je m'excuse.

M. Laplante: Oui, mais en bon prince, M. le Président, voulant que les travaux puissent se terminer à 22 heures...

Le Président (M. Jolivet): ...sur votre temps.

M. Laplante: Marquez zéro minute sur mon temps. Au cas où des questions auraient été oubliées, j'avais des remarques à faire sans poser de questions mais je vais m'abstenir...

Le Président (M. Jolivet): Merci, M. le député.

M. Laplante: ...de les poser pour que M. le député de Marguerite-Bourgeoys puisse poser toutes ses questions d'ici à 22 heures.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le député de Marguerite-Bourgeoys, vous avez la parole, mais vous n'êtes pas obligé de la prendre jusqu'à 22 heures.

M. Lalonde: M. le Président, lorsque j'ai dit au ministre que nous espérions de ce côté-ci terminer l'interrogatoire de ce témoin à 22 heures, je n'avais pas prévu toutes les interruptions que nous avons eues...

M. Duhaime: Ils ne l'ont pas provoqué, cela je peux le dire...

M. Lalonde: Non, en fait, je vais essayer d'être rapide. Mais j'aimerais commencer et terminer par quelques observations. J'aurai quelques questions entre-temps.

M. Duhaime: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): Oui.

M. Duhaime: Je voudrais seulement savoir de la part du député de Marguerite-Bourgeoys s'il a des questions à poser à Me Beaulé.

Le Président (M. Jolivet): Oui. M. Lalonde: J'en ai. M. Duhaime: Vous en avez? M. Lalonde: Oui, j'en ai. M. Duhaime: Ah, d'accord.

M. Lalonde: Parce qu'on a fait grief, et même vous, j'en suis convaincu, Me Beaulé, à certains députés qui ont exprimé leur évaluation de l'éclairage que vous avez pu apporter à cette commission. Il ne faut pas se cacher que la question qui se pose dans tout le débat, une fois qu'on a passé la commission Cliche, le saccage, le procès, le règlement, c'est la suivante: Est-ce que le premier ministre a trompé l'Assemblée nationale le 20 février 1979? C'est pour cela que votre témoignage est extrêmement important, parce que la déclaration du premier ministre touchait à la participation de son bureau dans le règlement.

Enfin, je vais parler pour moi, je ne veux pas parler pour les autres, j'espérais avoir beaucoup plus de détails, beaucoup plus d'information quant à la participation de Me Boivin aux rencontres que vous avez eues avec lui. Lorsque vous avez répondu à une question du ministre, à savoir si vous aviez négocié le règlement avec Me Boivin, vous avez répondu non. Je ne pense pas vous mettre des mots dans la bouche qui n'étaient pas les vôtres. Je respecte votre conclusion de ce qui s'est passé; mais nous ici devons faire notre propre perception et apporter nos propres conclusions, à même quoi? À même des faits. Pour apporter ces conclusions, il faudrait avoir un peu plus d'information en ce qui concerne la participation de Me Boivin à ces réunions. Cela ne sert à rien de tourner autour du pot pendant deux ou cinq semaines si on n'a pas ce qui s'est passé.

Je vais vous poser quelques questions. C'est possible que quelques-unes de mes

questions vous apparaissent comme une répétition, vous me pardonnerez, je l'espère, je ne les lis pas dans la transcription. En fait, vous répondrez comme vous voudrez, mais si vous me dites que c'est la quatorzième fois que je réponds à cette question... en tout cas, vous ferez ce que vous voudrez, mais je ne le fais pas pour vous harceler.

Votre objectif était-il la cessation de la poursuite de la SEBJ contre votre cliente?

M. Beaulé: C'est évident, M. le Président, que l'objectif ultime c'était que la SEBJ mette fin à une poursuite abusive contre l'union internationale, abusive quant à eux et très dommageable à nos rapports avec les États-Unis. Je parle des rapports du Québec avec les États-Unis. Mais, avec M. Boivin, je n'ai discuté...

M. Lalonde: Non, je...

M. Beaulé: ...que de la non-responsabilité des Américains.

M. Lalonde: Si je comprends bien, votre objectif ultime - j'emprunte votre qualificatif - était donc la cessation de la poursuite de la SEBJ contre votre cliente. Vos rencontres avec Me Boivin étaient-elles des démarches en vue d'atteindre cet objectif?

M. Beaulé: M. le Président, je pense que, ayant répondu oui à la première question, la réponse à la deuxième est également oui.

M. Lalonde: Merci, M. Beaulé. Dans vos rencontres avec Me Boivin, avez-vous eu des entretiens avec Me Boivin?

M. Beaulé: M. le Président, j'aurais peut-être dû apporter mon Littré.

M. Lalonde: Cela semble tomber sous le sens. Mais, si vous permettez, je vais m'expliquer. Je ne veux pas vous citer de travers, mais, au moins une fois et quelquefois trois ou quatre fois parce que vous répétiez vos réponses, j'avais l'impression que - sûrement une fausse impression - c'était plutôt un monologue ou un discours et que Me Boivin écoutait. Enfin! Je vous pose la question: Est-ce que vous avez eu des entretiens avec Me Boivin lors de vos rencontres?

M. Beaulé: II y a sûrement eu des discussions. J'ai déjà répondu - je crois que c'est hier - à la commission en disant que M. Boivin m'a posé beaucoup de questions. Je lui ai même fourni les documents toujours relatifs à la non-responsabilité des Américains.

M. Lalonde: Ces entretiens portaient-ils sur la cessation de la poursuite de la SEBJ contre votre cliente?

M. Beaulé: J'ai déjà répondu oui à la première question en expliquant ma réponse.

M. Lalonde: Est-ce que Me Boivin a pris la défense de la SEBJ lors de l'un ou l'autre de ces entretiens?

M. Beaulé: Oui, M. le Président. Je fais référence à ma contestation du 28 novembre 1978. J'essayais de dire cela, hier, au moment où, vers 18 heures, M. le député de Gatineau allait lire une déclaration. M. Boivin, alors que je lui ai remis le texte de la contestation... Vous vous rappelez qu'il y avait deux chapitres importants à part le chapitre sur la non-responsabilité des Américains. L'un, c'est que la SEBJ avait tissé la toile de fond qui était à la source des causes lointaines de ce saccage en accordant un monopole syndical à la FTQ-Construction; l'autre, c'est que la SEBJ n'avait pas pris les moyens sachant les dangers imminents pour le chantier de LG 2 pour empêcher que le saccage ne se produise. Là-dessus, M. Boivin m'a toujours dit: Je ne veux pas en discuter, cela ne relève pas de moi.

M. Lalonde: Je vous remercie, Me Beaulé. Me Boivin ayant pris la défense de la SEBJ, si j'ai bien compris votre réponse à ma question précédente, a-t-il mentionné un montant minimum que la SEBJ devrait recevoir pour cesser la poursuite?

M. Beaulé: D'aucune façon et jamais. Une voix: Cela va bien.

M. Lalonde: Est-ce que vous avez réussi à convaincre Me Boivin du bien-fondé de votre cause?

M. Beaulé: M. le Président, je pense que la question devrait être posée à M. Boivin.

Le Président (M. Jolivet): Vous avez raison.

M. Lalonde: J'aurais pensé que vous auriez eu une opinion, là-dessus. C'est une question d'opinion peut-être.

M. Beaulé: Ce serait la meilleure preuve, M. le Président.

M. Lalonde: Oui, sûrement. Enfin, vous avez déjà eu un "feeling" que vous aviez réussi, mais je ne reviendrai pas là-dessus.

M. Duhaime: ..."feeling" un bout de

temps.

M. Lalonde: Est-ce que vous avez appris, d'un avocat de la pratique privée, à la suite d'une indiscrétion, ce qu'un membre du conseil d'administration de la SEBJ aurait dit à la réunion du 9 janvier 1979, à peu près en ces termes: "II faut poursuivre l'action car la poursuite pourrait avoir pour effet de tenir les syndicats tranquilles. De plus, un règlement pourrait être interprété comme un blâme à l'égard des personnes en autorité à l'époque, comme MM. Boyd, Hamel et Gauvin."

M. Duhaime: M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Duhaime: Pour ma part, je n'aurais pas d'objection à ce que la question soit formulée, à la condition que l'avocat de la pratique privée soit identifié. Je ne voudrais pas reprendre le même débat à une des questions posées par le député de Mont-Royal qui faisait référence à une déclaration qu'aurait pu faire M. Lucien Saulnier à un journaliste. Je vois que le Parti libéral est bien documenté, peut-être que vous devriez réviser les bandes enregistrées que vous avez à la suite de conversations téléphoniques. Je ne m'opposerai pas à la question pour autant que l'on identifiera l'avocat de la pratique privée dont il s'agit, de façon que Me Beaulé puisse répondre en toute connaissance de cause.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Justement, l'identité de l'avocat était ma deuxième question. Est-ce que vous n'avez pas une note à votre dossier à l'effet qu'un membre important du conseil d'administration aurait dit, lors de la réunion du 9 janvier 1979, ce que je viens de dire?

M. Duhaime: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): Vous n'avez même pas besoin de question de règlement, M. le ministre.

M. Duhaime: Je voudrais que l'on identifie le membre...

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, M. le ministre...

M. Duhaime: ...du conseil d'administration de la SEBJ de façon qu'on puisse...

Le Président (M. Jolivet): ...vous n'avez pas besoin de faire une question de règlement car je n'accepte pas la question.

M. Duhaime: Ah bon! Je vous remercie, M. le Président, je vais ménager ma salive.

M. Lalonde: Est-ce que vous avez appris de quiconque ce qui s'est passé en partie lors de cette réunion du 9 janvier 1979 du conseil d'administration?

M. Beaulé: Non, M. le Président.

M. Lalonde: Ni d'un avocat de la pratique privée, ni de personne d'autre.

M. Beaulé: J'ai su, par la suite, M. le Président, par M. Aquin en particulier, lors de rencontres tout à fait officielles, que la SEBJ avait, le 9 janvier 1979, décidé de continuer la poursuite engagée. Quant à moi, j'en ai tiré certaines conclusions à savoir que, dans toute cette affaire, M. Boyd était plus intéressé à ménager ses arrières et ses décisions administratives et à refiler aux syndicats l'entière responsabilité qu'à toute autre chose.

M. Lalonde: Me Beaulé, je voudrais revenir - vous m'excuserez de ne pas l'avoir fait tout à l'heure - à ce que vous avez répondu à ma question, à savoir si M. Boivin avait pris la défense de la SEBJ. Je pense que vous avez dit oui?

M. Beaulé: D'une façon claire.

M. Lalonde: Est-ce que vous pouvez expliciter votre pensée en nous disant en quels termes et lors de quelle réunion? Vous en avez eu cinq, en incluant celle du 1er décembre?

M. Beaulé: C'est à la première, celle... Je n'ai pas mon calendrier, mais, de mémoire, c'est à celle du 11 décembre où je lui ai remis la contestation. Il m'a dit: Tout ce qui touche... Pour ce qui est des allégations faites contre la SEBJ, je ne veux pas qu'on en discute. C'était assez clair et j'ai toujours respecté cette consigne-là.

M. Lalonde: Et, à aucune autre réunion, Me Boivin n'a pris la défense... Ce que je comprends, c'est la seule réunion...

M. Beaulé: Je n'en ai jamais reparlé avec lui, M. le Président.

M. Lalonde: Pardon?

M. Beaulé: J'ai dit tout à l'heure, et je pensais que j'avais été clair que, dans la contestation, il y a un chapitre qui traite de la non-responsabilité des Américains, un autre chapitre où il est dit - vous pouvez

prendre connaissance de cette contestation -que la SEBJ a contribué à créer, si vous voulez, ce contexte ou cette toile de fond qui a abouti au saccage. Et, dans un troisième chapitre, que M. Boyd, savait dès le 19 mars 1974 que tout allait sauter, que M. Boyd savait, par l'entremise de Me Durocher, d'Hydro-Québec, que tout allait sauter et j'ai toujours prétendu qu'il n'avait pas pris les mesures pour protéger son chantier. Là-dessus, M. Boivin m'a dit: Je ne veux absolument pas discuter de ces questions-là avec toi.

M. Lalonde: Avec toi? M. le Président...

M. Beaulé: C'était une rencontre privée.

M. Lalonde: Ah! Ah!

M. Beaulé: II n'y avait pas d'interlocuteur, M. le Président, le 11 décembre.

M. Lalonde: Le 11 décembre, c'était privé, c'est-à-dire que vous considérez que c'est privé, quand vous êtes tous les deux seuls, si je comprends bien?

M. Beaulé: Ce serait hypocrite de dire que, quand je rencontre M. Boivin seul à seul, je vais le vouvoyer, M. le Président.

M. Lalonde: Ah bon! Non, non, je voulais savoir...

M. Beaulé: Pour ce qui est des rencontres que j'ai avec des tierces personnes, je l'ai toujours vouvoyé. D'ailleurs, en anglais, on peut s'en rendre compte très difficilement.

M. Lalonde: Oui, oui, je comprends.

Des voix: Ah! Ah! Ah!

M. Lalonde: Même avec Me Jasmin?

Une voix: Do you understand that, young man?

Des voix: Ah! Ah! Ah!

M. Lalonde: Je présume que, lorsque vous rencontriez Me Boivin avec Me Jasmin, vous ne parliez pas anglais et que vous vouvoyiez Me Boivin? Enfin, je peux tirer mes conclusions, parce que vous avez dit que c'est seulement seul à seul que vous le tutoyez.

M. Duhaime: Le pape, lui, dit "Nous". Le pape, à Rome, dit "Nous". Cela m'impressionne chaque fois de l'entendre.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M. le député de Marguerite-Bourgeoys, c'est vous qui avez la parole.

M. Lalonde: Merci, M. le Président. Me Beaulé, je n'ai plus de question mais j'aurais quelques observations à faire sur...

M. Beaulé: Me permettez-vous, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Oui.

M. Beaulé: Si le député de Marguerite-Bourgeoys me le permet.

M. Lalonde: Un instant! J'aurais des...

M. Beaulé: C'est pour compléter une réponse que je lui ai donnée.

M. Lalonde: Oui, s'il vous plaît!

M. Beaulé: Je regrette de ne pas avoir le temps de le faire, ce soir.

M. Lalonde: Vous pouvez revenir mercredi, si vous voulez. Je voulais vous libérer. On voulait vous libérer.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

M. Beaulé: Je soumets - je pense que cela intéresse le public - que M. Boyd avait refilé au syndicat les factures pour bien des réclamations ou bien des postes qui n'étaient ni de près ni de loin le résultat du saccage. J'en donne comme exemple le poste de 21 000 000 $ qui a été payé à Impreglio et Spino.

M. Lalonde: Si vous permettez, M. le Président. Le témoin s'est exprimé, je pense, pleinement là-dessus. Vous avez fait un plaidoyer...

Le Président (M. Jolivet): Vous avez la parole.

M. Lalonde: ...assez long d'ailleurs, lors de votre première journée de comparution. Non. Voici ce que je voulais simplement, et j'aimerais que Me Beaulé comprenne le problème des députés ici autour de la table. On nous a confié un mandat, un mandat extrêmement difficile, parce que cela s'accorde mal avec nos habitudes de fonctionnement à l'Assemblée nationale ou à une commission parlementaire, c'est-à-dire de poser des questions - non pas des opinions -comme on pose par exemple à la chambre de commerce ou à la société nationale des Québécois de l'Estrie, sur des projets de loi qui sont soumis à l'Assemblée nationale. À ce moment-là, ce sont des questions

d'opinion. Ce qu'on a ici sont des faits. Vous êtes un témoin clé, c'est évident. Parce que l'accusation est à savoir si c'est dans le bureau du premier ministre qu'une partie du règlement a eu lieu, "Ni de près ni de loin", comme disait le premier ministre.

J'ai écouté attentivement votre témoignage et je fais appel à votre expérience d'avocat, depuis 25 ans, pour comprendre quelle peut être la réaction de quelqu'un qui participe à un interrogatoire vis-à-vis de quelqu'un qui répond à des questions. Vous niez avoir négocié...

M. Beaulé: Le règlement...

M. Lalonde: ...et les renseignements que, à mon humble avis, vous nous avez donnés de vos réunions avec Me Boivin sont très minces quant à la participation de Me Boivin. Dans cette mesure, je suis déçu. Donc, je ne suis pas convaincu. Je sais une chose. D'après la démonstration qui a été faite, encore avec Me Gadbois aujourd'hui -vous ne l'avez pas entendu, mais c'est à vous que je parle, M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): Oui, j'ai entendu.

M. Beaulé: J'étais en cour toute la journée.

M. Lalonde: ...il est évident que la SEBJ ne peut pas avoir négocié avant le 7 février. Donc, s'il y a eu des négociations avant le 7 février, ce n'est pas ailleurs que cela s'est fait. Le problème c'est que les informations que nous avons...

M. Duhaime: Question de règlement.

M. Lalonde: ...sont très minces à savoir...

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Lalonde: ...si cela s'est fait là.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Lalonde: Mais ce n'est pas ailleurs...

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, question de règlement.

M. Lalonde: On est pas mal sûr que jusqu'au 7 février ce n'est pas ailleurs.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le ministre.

M. Duhaime: M. le Président, sur une question de règlement. Je veux demander au député de Marguerite-Bourgeoys, avec la conclusion qu'il vient de formuler, s'il serait d'accord pour que cette commission ajourne ses travaux.

M. Lalonde: Non, pas du tout, M. le Président. On a encore des témoins qui auraient sûrement, j'espère, davantage à nous dire sur la participation du bureau du premier ministre. Nous allons avoir Me Gauthier, Me Boivin, M. Lévesque...

Le Président (M. Jolivet): Dans ce cas-là, vous allez me permettre - je crois comprendre que tout le monde a terminé son intervention - de remercier, au nom de tous les membres de la commission, Me Beaulé de sa patience, de la mienne et de la vôtre. Je n'ai pas à faire ces choses cependant. Je dois vous libérer et je suis heureux pour vous et pour l'ensemble de toutes les personnes qui sont ici autour de cette table.

M. Beaulé: Merci M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): J'ajourne les travaux jusqu'à la prochaine motion qui sera présentée en Chambre, possiblement pour mercredi prochain à 10 heures.

(Fin de la séance à 21 h 58)

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