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(Dix heures trois minutes)
La Présidente (Mme Juneau): Nous sommes réunis pour
procéder à l'étude détaillée du projet de
loi 42, Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.
Le Secrétaire: Mme la Présidente, les remplacements
pour cette séance sont les suivants: M. Tremblay (Chambly) remplace M.
Blais (Terrebonne), M. Sirros (Laurier) remplace M. Cusano (Viau), M. Parent
(Sauvé) remplace Mme Dougherty (Jacques-Cartier) et M. Fréchette
(Sherbrooke) est membre de la commission en vertu de l'article 122 des
règles de pratique.
M. Dussault: Mme la Présidente, compte tenu des
circonstances et de la difficulté à se réunir ce matin, je
voudrais faire motion pour que la commission parlementaire de l'économie
et du travail ajourne ses travaux jusqu'à cet après-midi,
après les affaires courantes.
Une voix: Adopté.
La Présidente (Mme Juneau): En vertu de l'article 160.1,
"un membre peut proposer que la commission ajourne ses travaux" pour quelques
minutes. "Cette motion est mise aux voix... Elle ne peut être
débattue sauf qu'un représentant de chaque groupe parlementaire
peut prononcer un discours de dix minutes." Est-ce que la motion est
adoptée?
Une voix: Adopté.
La Présidente (Mme Juneau): Adopté. La commission
ajourne ses travaux sine die.
(Suspension de la séance à 10 h 5)
(Reprise à 15 h 46)
La Présidente (Mme Juneau): M. le secrétaire, si
vous voulez vérifier le quorum, s'il vous plattl Je déclare la
séance ouverte. Le mandat de cette commission est d'étudier,
article par article, le projet de loi 42, Loi sur les accidents du travail et
les maladies professionnelles. Est-ce que nous avons des remplacements, M. le
secrétaire?
M. Lavigne: J'aurais quelque chose à dire, Mme la
Présidente, là-dessus. Tenant compte des circonstances, à
cause de la nomination de certains de nos collègues comme ministres, ils
perdent leur poste de membres de la commission de l'économie et du
travail. D'ici quelques minutes, on va sûrement trouver des
remplaçants dans l'équipe. Est-ce qu'on ne serait pas mieux de
commencer les travaux et de les nommer en cours de travaux? Apparemment,
d'après la réglementation, cela demande le consentement des deux
côtés. On pourrait commencer avec les membres que nous avons et
d'ici quelques minutes, on pourra vous soumettre une couple de noms qu'on
pourra reconnaître comme membres.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que la proposition du
député est acceptée?
M. Cusano: Mme la Présidente, certainement que le premier
ministre a un peu d'ordre à mettre dans sa cuisine et, une fois qu'il
aura réussi à établir cet ordre, s'il y a des changements
parmi les membres de la commission qui auront certainement à apporter
des idées et même des amendements très concrets au projet
de loi, ce sera un grand plaisir pour moi et certainement pour mes
collègues d'accepter ces changements.
M. Lavigne: J'apprécie, Mme la Présidente, la
collaboration de l'Opposition à la demande que vous avez soumise.
Une voix: Toujours.
La Présidente (Mme Juneau): C'est bien, messieurs.
Allez-vous, M. le secrétaire, annoncer les remplacements dans le
moment?
Le Secrétaire: Je vais annoncer les remplacements qu'on
m'a déjà signifiés et au fur et à mesure on
complétera la liste des remplaçants. M. Bourbeau (Laporte) est
remplacé par M. Maltais (Saguenay), Mme Dougherty (Jacques-Cartier) est
remplacée par M. Polak (Sainte-Anne). Je tiens aussi à signaler
que M. Grégoire (Frontenac) et M. Bisaillon (Sainte-Marie),
conformément à l'article 130 du règlement, ont
demandé de pouvoir intervenir.
M. Bisaillon: Non, Mme la Présidente. Ce n'est pas tout
à fait comme le secrétaire
l'a dit. Je ne demande pas la permission d'intervenir. Je suis membre
d'office de la commission avec tous les droits, sauf celui de vote. L'article
130 du règlement dit qu'un député indépendant, sur
des mandats gouvernementaux, peut siéger à toutes les commissions
parlementaires, avoir droit de motion, mais n'a pas, cependant, le droit de
vote. C'est juste pour dire que je ne demande pas de permission; je suis ici de
plein droit.
La Présidente (Mme Juneau):
Effectivement, M. le député, je crois que vous avez raison
et nous allons procéder tel que vous l'avez dit.
M. Grégoire: La même chose pour moi, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Juneau): M.
Grégoire aussi?
Le Secrétaire: Oui, exactement.
La Présidente (Mme Juneau): M.
Grégoire aussi.
Maintenant nous sommes rendus aux remarques préliminaires.
M. Dussault: Mme la Présidente, avant qu'on embarque sur
le fond des questions qui sont débattues ici, ce matin quand nous avons
voulu commencer les travaux, vous vous rappellerez sans doute que j'ai
été celui qui a fait une motion pour que nos travaux soient
reportés à cet après-midi, une motion d'ajournement. Je
voudrais être bien clair parce qu'il s'est dit toutes sortes de choses
à l'Assemblée nationale sur cela tout à l'heure. Je
voudrais qu'il soit bien clair que, si j'ai fait la motion en question,
c'était tout simplement parce que j'avais comme perception et comme
information que le responsable du dossier, M. le député de Viau,
n'était pas présent et ne pouvait pas l'être cet avant-midi
pour des raisons de température. À ce moment, je me suis, moi,
prêté à cette motion. C'est la seule et unique raison pour
laquelle j'ai fait cette motion, Mme le Présidente, et je voulais que
cela soit clair.
Merci.
M. Cusano: Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Juneau): Oui, M. le
député.
M. Cusano: ...j'apprécie certains des commentaires du
député de Châteauguay et j'aimerais préciser, comme
je l'ai fait en Chambre, que j'étais en train de me rendre.
Une voix: En train.
M. Cusano: Oui, en train, sur le train oui. À
l'arrivée à la Gare de Sainte-Foy, j'ai communiqué avec
mon bureau et on m'a dit qu'il y avait eu communication avec le ministre et que
la commission avait été reportée à cet
après-midi. C'est ce que j'ai compris. J'étais ici au parlement
à 10 h 55 et il me semble qu'on a déjà attendu, il n'y a
pas trop longtemps lorsque cette commmission a siégé, un peu plus
de temps que cela avant qu'on commence les travaux d'une commission. Le
ministre n'y était pas, mais je me rappelle très bien qu'on aattendu beaucoup plus que ce matin.
M. Dussault: Mme la Présidente, M. le député
implicitement confirme que les événements nous ont amenés
à constater qu'il ne serait pas présent pour les travaux puisque
c'est entre 10 h et 10 h 05 que cela s'est passé. À ce moment,
nous avions la perception...
M. Cusano: M. le député, la dernière fois
qu'on a siégé...
M. Dussault: ...que M. le député de Viau ne
pourrait pas être présent, Mme la Présidente. C'est la
seule raison pour laquelle j'ai fait ma motion et je voudrais qu'on termine
là.
La Présidente (Mme Juneau): Étant donné que
les éclaircissements...
M. Cusano: Mme la Présidente, vous me le permettez, s'il
vous plaît?
La Présidente (Mme Juneau): Oui, je vous en prie.
M. Cusano: La dernière fois - vous n'étiez pas
présente, Mme la Présidente -que cette commission a
été convoquée, on a attendu longuement et on a
été un peu moins pressé que le député de
Châteauguay de faire une motion. Simplement lorsqu'on parle de
collaboration, j'aimerais bien souligner au député qu'il a
été très vite dans son affaire. C'était son droit,
je ne mets pas cela en doute, mais il aurait dû s'informer.
La Présidente (Mme Juneau): Merci beaucoup, M. le
député.
M. Dussault: Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Juneau): Un instant, s'il vous
plaît!
M. Dussault: Question de règlement, Mme la Présidente. Je
pense qu'il ne faut pas laisser passer cela. J'étais en train de dire
que, par collaboration, on avait fait le nécessaire et que je
m'étais prêté à cette motion pour rendre service
à M. le député
de Viau. Il est quasiment en train de dire que je n'ai pas
été correct. J'ai voulu être le plus correct possible. Je
voulais que ce soit clair, Mme la Présidente. Je vous remercie.
La Présidente (Mme Juneau): M. le
député...
M. Cusano: Mme la Présidente, accepteriez-vous une motion
de félicitations envers le député?
La Présidente (Mme Juneau): Un instant, s'il vous
plaît! Un instant! Selon l'article 204, tout discours doit porter sur le
sujet en question et le sujet en question, c'est l'étude article par
article de la loi 42. Étant donné que, de part et d'autre, vous
avez donné des éclaircissements sur ce qui s'est passé
plus tôt dans la journée, je vous demanderais, dans toute la
mesure du possible d'entreprendre un travail qui va faire avancer le projet
qu'on a à étudier article par article. Nous sommes maintenant aux
remarques préliminaires. M. le ministre, avez-vous quelque chose?
M. Lavigne: Je m'excuse d'intervenir encore avant le début
de nos travaux, mais je voudrais vous annoncer que Mme Louise Harel, qui
était membre de la commission, sera remplacée par M. Jacques
Brassard, député de Lac-Saint-Jean.
La Présidente (Mme Juneau): Merci, M. le
député.
M. Lavigne: II y aura probablement d'autres annonces en cours de
route. Mme Harel et M. Rodrigue.
La Présidente (Mme Juneau): Pourrais-je prendre en
délibéré votre suggestion, M. le député,
étant donné qu'il faudrait que je discute avec le
secrétaire?
On m'informe qu'étant donné que les deux ministres que
vous avez mentionnés étaient d'office membres de la commission,
ils n'ont pas à être remplacés. La proposition que vous
nous faites pourrait être un remplacement du député de
Terrebonne ou de quelqu'un d'autre, parce que les deux ministres en question ne
doivent pas l'être.
M. Lavigne: Mme la Présidente, le député de
Terrebonne n'est peut-être pas présent ici, mais il est membre et
il demeure membre. Devant la situation, je vais demander à la Chambre de
proposer Jacques Brassard comme membre.
La Présidente (Mme Juneau): C'est cela.
M. Lavigne: Si c'est possible d'introduire cette demande à
l'intérieur des travaux qui sont déjà en cours et de voir
à ce que ce soit fait, dès que nous aurons une réponse de
la Chambre, on pourra le faire confirmer par la commission.
La Présidente (Mme Juneau): C'est très bien, M. le
député. Je vous remercie beaucoup. Est-ce qu'on peut maintenant
entreprendre les remarques préliminaires? M. le ministre.
Remarques préliminaires M. Raynald
Fréchette
M. Fréchette: Oui, Mme la Présidente, je vous
remercie. Comme vous l'indiquez, il s'agira de remarques vraiment
préliminaires, compte tenu que, depuis que le projet a été
déposé, il a fait l'objet de nombreuses discussions, autant ici
en commission parlementaire qu'à l'Assemblée nationale.
Je voudrais, dans un premier temps, attirer notre attention à
tous sur l'importance de l'opération que nous amorçons. Il
s'agit, effectivement, de ce qui serait l'avant-dernière étape de
l'adoption de ce projet de loi si le processus législatif suit son cours
jusqu'à sa limite. Je voudrais vous réitérer, Mme la
Présidente, la volonté ferme du gouvernement et la volonté
ferme également de celui qui vous parle d'arriver, effectivement,
à l'adoption de ce projet de loi avant l'ajournement de la
période du congé des fêtes. Tout cela, cependant, en
respectant scrupuleusement tous les délais prévus, en même
temps que les désirs de tous les membres de la commission de s'impliquer
dans les discussions qui vont nous occuper.
Je vous dirai, Mme la Présidente, ne serait-ce que pour nous
rappeler un certain nombre de choses, quelques-uns des motifs pour lesquels le
gouvernement prétend qu'il nous faut procéder à l'adoption
de ce projet de loi dans les meilleurs délais. D'abord, il est
évident que le régime actuel de la réparation des
accidents du travail est devenu, à tous égards, vétuste.
On le sait tous, il est là depuis plus de 50 ans maintenant sans avoir
subi de transformation fondamentale ou, en tout cas, de nombreuses
transformations fondamentales. Ne serait-ce qu'à cause de cela, nous
sommes d'opinion qu'il nous faut effectivement procéder à adopter
le projet de loi 42.
Deuxièmement, sous la réserve de toutes les observations
qui pourront être faites, sous la réserve, bien sûr, aussi
des opinions contraires, nous prétendons que les dispositions du projet
de loi qui est devant nous constituent une amélioration importante de la
situation des travailleurs - quand je parle des travailleurs, Mme la
Présidente, je vous signale qu'il faut inclure les
travailleuses, bien sûr - par rapport au système qui existe
actuellement. Nous aurons, évidemment, pendant tout le temps des
travaux, l'occasion d'attirer notre attention respective sur ce qui constitue
des améliorations par rapport au régime actuel.
Permettez que je ne fasse l'énumération que de deux ou
trois aspects de ce qui est carrément une amélioration: d'abord,
Mme la Présidente, une modification profonde de la loi actuelle quant
à cette opération importante pour un accidenté du travail
qui est celle du choix de son médecin; le droit de retour au travail est
introduit dans la loi, ce qui constitue, nous semble-t-il en tout cas, non
seulement une amélioration par rapport à la situation
antérieure, mais une innovation fondamentale. (16 heures)
Je voudrais aussi porter à l'attention des membres de la
commission qu'un des principes fondamentaux qui sous-tendent cette loi est
celui d'atteindre l'objectif d'harmoniser, mutatis mutandis bien sûr,
dans la mesure du possible les différents régimes
d'indemnités qui existent au Québec. Ne serait-ce que pour
mémoire, je voudrais rappeler, par exemple, le Régime de
l'assurance automobile et plusieurs autres régimes d'indemnités
qui existent. Encore une fois, un des objectifs fondamentaux de cette loi est
de procéder dans les meilleures délais à les harmoniser
tous, tout en tenant compte, cependant, et cela est particulièrement
important, de ce que je pourrais appeler, Mme la Présidente, les
vocations particulières de chacun des régimes auxquels je
réfère.
Je vous signale également, Mme la Présidente, pour avoir
eu l'occasion depuis un peu plus d'une année et demie maintenant de
procéder à l'évaluation de lois semblables autant à
travers le Canada qu'à travers quelques pays d'Europe, que,
malgré les imperfections que peut contenir le projet de loi 42,
malgré les récriminations qu'on fait vis-à-vis de ce
projet de loi, je n'ai pas eu l'occasion, dans la poursuite de ces recherches,
d'arriver à comparer quelque autre système ou régime que
ce soit qui puisse - je vous le dis comme je le pense -même se rapprocher
du régime qui est proposé à l'intérieur de la loi
42 qui est devant nous.
Je vous réitère, Mme la Présidente, que le
débat gouvernemental, en tout cas, n'est pas doctrinaire en ce sens que,
comme nous l'avons fait depuis que le premier projet a été
déposé, nous serons, de ce côté-ci, ouverts à
toute suggestion utile dont l'objectif et l'effet seraient d'améliorer
l'ensemble du régime qui est proposé.
D'ailleurs, depuis le dépôt du premier projet, on va se
rappeler qu'à travers plusieurs exercices législatifs qui ont
été tenus le projet réimprimé a, effectivement,
tenu compte de plusieurs des représentations qui avaient
été soumises ou bien en commission parlementaire ou bien à
l'occasion de consultations informelles de plusieurs groupes
intéressés ou, alors, à partir des débats qui se
sont tenus à l'Assemblée nationale à l'occasion de
l'adoption du principe du projet de loi. À partir de ces espèces
de précédents dont je viens de vous parler, je vous
réitère que nous sommes, quant à nous, tout à fait
ouverts à ce genre de suggestions dont je viens de parler dont l'effet,
encore une fois, et la conséquence seraient d'améliorer les
dispositions que l'on retrouve à l'intérieur du projet de loi
42.
Je vous signale également, Mme la Présidente, que,
probablement à la réunion de ce soir, je remettrai à tous
les membres de la commission un exemplaire, qui devrait être final, de
l'intention gouvernementale quant aux amendements à être
apportés. Je vous dis bien de l'intention gouvernementale, pour insister
encore - je ne sais pas si c'est nécessaire de le faire à temps
et à contretemps - sur l'ouverture que nous manifesterons quant à
des changements, encore une fois, qui pourraient être
proposés.
Voilà, Mme la Présidente, les remarques
préliminaires que je voulais soumettre à ce stade-ci,
étant quant à moi disposé et prêt à continuer
nos travaux.
La Présidente (Mme Juneau): En vous remerciant, M. le
ministre. M. le député de Viau, qui êtes critique de
l'Opposition, avez-vous quelques remarques?
M. William Cusano
M. Cusano: Oui, Mme la Présidente. J'aimerais,
premièrement, dire au ministre que j'apprécie ses paroles
lorsqu'il parle d'ouverture, lorsqu'il nous dit qu'il sera de son
câté ouvert à ce que l'on apporte des amendements qui
auront pour but d'améliorer ce projet de loi. Je dois lui dire
dès maintenant que c'est bien l'intention de l'Opposition d'apporter des
amendements et j'espère qu'à ce moment-là il sera aussi
ouvert qu'il l'est présentement. En même temps aussi, j'aimerais
adresser une question au ministre qui pourrait y répondre tout de suite
ou après. Il vient de nous dire qu'il déposera des amendements au
cours de la soirée. Encore une fois, je l'en remercie. La question que
je lui poserai est à savoir s'il a l'intention de faire parvenir ces
amendements aux milieux intéressés, c'est-à-dire au milieu
syndical, au milieu patronal et aux différentes associations
d'accidentés du travail au Québec. Il pourra certainement me
répondre tout à l'heure.
Mme la Présidente, cela m'a étonné durant le
débat en deuxième lecture que du côté
ministériel on n'ait quasiment pas parlé sur un projet de loi qui
est censé être le
projet de loi le plus avant-gardiste en Amérique du Nord. Le
ministre semble avoir eu de la difficulté... Je dois dire qu'il a fait
une très bonne présentation de son projet de loi, même s'il
y a des choses que je conteste. On se demandait pourquoi les
ministériels ne semblaient pas trop intéressés à
participer au débat en deuxième lecture. Je me suis posé
la question à savoir si c'est parce que le projet de loi est trop
complexe - 556 articles, en plus des annexes - ou bien c'est que les
ministériels étaient plus préoccupés par les
démissions éventuelles de ministres. Peut-être, ceux qui
espéraient remplacer les démissionnaires étaient beaucoup
plus préoccupés à faire un "lobbying" auprès des
personnes qui peuvent influencer le premier ministre. Ceci étant dit, M.
le Président, l'Opposition a été très claire,
très ferme sur le projet de loi. On est d'accord que la loi a besoin de
certains changements mais nous nous posons la question à savoir si l'on
doit transformer toute la province en un immense laboratoire, comme le disait
un des éditorialistes, sans avoir au préalable testé, sur
le terrain, des mesures qui auront des effets réels.
Sur ce, je dois dire que le projet de loi a été
testé d'une façon. Il a été testé par
l'honorable juge Sauvé, et Dieu sait combien ces mesures qui
apparaissent dans la réimpression du projet de loi peuvent être
très coûteuses.
Le projet de loi soulève plusieurs questions fondamentales. Le
projet de loi est en passant, M. le Président, j'aimerais porter
à l'attention des ministériels le rapport actuariel qui a
été déposé par le ministre en Chambre. Je ne sais
pas si les ministériels en ont pris connaissance mais il est très
clairement indiqué dans ce rapport que les accidents, au Québec,
n'ont fait qu'augmenter depuis l'adoption de la loi 17 et que, si on se
pète un peu les bretelles de l'autre côté en disant: II y a
une diminution des accidents à partir de 1981, les actuaires de la CSST
disent très clairement que cette baisse est fonction, entre autres, des
conditions économiques. On nous a dit cela bien souvent en Chambre et
vous avez continué à nous donner des chiffres montrant qu'il y
avait une baisse. On a essayé de vous faire comprendre que ce n'est pas
le nombre de personnes qui sont couvertes qui est le facteur le plus important.
C'est-à-dire que, lorsqu'on regarde le nombre d'accidents, il faut le
regarder en relation avec le nombre d'heures travaillées au
Québec. Il est sûr et certain que, s'il y a un congé demain
matin dans la province et que personne ne travaille, il n'y aura pas d'accident
demain. Ces personnes sont couvertes quand même.
Il faut regarder les chiffres - pour ceux qui cherchent, c'est à
la page 5 du rapport actuariel - où l'on dit justement qu'il y a une
baisse. Dans l'étude qui a été faite, les actuaires disent
que la projection des coûts est basée sur le fait qu'on prend les
mêmes chiffres qu'en 1981. La loi 17 n'a pas réussi à
diminuer les accidents au Québec, ils ont augmenté. Ce projet de
loi-ci, je défie qui que ce soit autour de cette table de me dire
comment il va diminuer les accidents parce que tout le monde veut - que ce soit
les patrons ou d'autres, et Dieu sait que cela coûte assez cher aux
patrons - qu'il y ait moins d'accidents. Les parlementaires, je pense qu'on est
tous des êtres humains, on est très conscients, on n'est pas
heureux de voir que le nombre d'accidents ne fait qu'augmenter d'année
en année.
Le projet de loi, M. le Président... excusez-moi, Mme la
Présidente. C'est une question d'habitude, j'espère vous voir
plus souvent ici et que vous aurez toute la patience d'être...
M. Fréchette: La couleur de sa blouse devrait vous la
rendre sympathique.
M. Cusano: Bien oui. Je pense que le rouge lui va très
bien. Mais je sais qu'elle n'a pas été de très bonne
humeur dernièrement et c'est peut-être pour cela qu'elle porte du
rouge pour lui remonter le moral.
Vous essayez de me distraire, M. le ministre.
Par ce projet de loi, je vous défie, tout au long des 556
articles, de nous démontrer comment les accidents vont diminuer au
Québec. Même, je crains que certaines mesures ouvrent la porte
à des "abuseurs" du système. Lorsqu'on parle des "abuseurs" du
système, je voudrais qu'on comprenne bien que des "abuseurs", il y en a
de tous les côtés. Il y en a du côté patronal, du
côté syndical et il y a aussi des pseudo-malades qui existent. Je
pense que c'est un fait. En ce qui me concerne, le projet de loi ne fait rien
pour éliminer ce grand pourcentage parce que c'est cela qui coûte
cher, et vous regarderez très bien le rapport de l'actuaire. Ce ne sont
pas des taux d'incapacité de 40% ou 50% qui coûtent cher, ce sont
les absences de moins de quatorze jours.
L'Opposition s'est plainte à maintes reprises de
l'inefficacité de la CSST pour compenser de façon assez prompte
les accidentés et, là, on admet, en transférant les
quatorze premiers jours aux employeurs, que la CSST a été
déficiente dans cela. Pourquoi les avoir transférés aux
patrons? Qu'est que cela veut dire "les quatorze premiers jours" payables par
l'employeur, Mme la Présidente? Cela ne veut pas dire grand-chose pour
une compagnie comme General Motors ou toutes les grandes multinationales. Mais,
pour la petite entreprise au Québec, pour celui qui a cinq ou sixemployés, cela veut dire que, pendant quatorze jours, il doit
débourser 90% du
revenu net à l'accidenté. En même temps, s'il veut
que son entreprise fonctionne, il faut qu'il aille chercher un
remplaçant. Alors, cela veut dire que pour trois semaines, à
toutes fins utiles, cette petite entreprise est obligée de verser
quasiment 200% d'un salaire pour l'accidenté. Qu'est-ce que cela va
faire? Faites des petits calculs. Ceux ici, autour de la table, allez faire le
tour des petites entreprises. Moi, je l'ai fait dans mon comté, et,
lorsqu'elles doivent débourser ces montants, qu'est-ce que cela veut
dire? Elles n'ont pas les fonds de roulement de la GM ou de n'importe quelle
autre compagnie que vous pouvez nommer. C'est un problème. Mais,
pourquoi le fait-on? Parce que la CSST est incapable d'émettre le
chèque avec tous ses ordinateurs, etc. Alors, dans le projet de loi, on
dit: Vous n'êtes pas capables de le faire, messieurs de la CSST, on va
donner cela à l'employeur. Mais cela donne quoi à
l'accidenté? À l'accidenté cela ne donne rien, absolument
rien que cela soit l'employeur ou la CSST qui le paye. Vous transférez
cette tâche à l'employeur et, par ce projet de loi, vous ajoutez
un fardeau financier à ces petites entreprises qui sont le coeur de
l'économie au Québec. (16 h 15)
On parle dans le projet de loi de l'assignation d'un travail temporaire.
J'ai encore une question qui m'étonne et à laquelle j'aimerais
bien que le ministre puisse me donner une réponse avant même qu'on
commence l'étude article par article. Le projet de loi confère
à des comités de santé et de sécurité au
travail certaines responsabilités telles que la détermination de
ce qui serait un travail convenable. Cela me fait un peu penser au projet de
loi 40 qui est maintenant le projet de loi 3. J'aimerais bien que le ministre
me dise combien de comités de santé et de sécurité
existent dans les entreprises. Va-t-on conférer à un
comité un certain pouvoir? Il ne faut pas se fermer les yeux et dire:
Bon, en tout cas cela va se régler d'une façon ou d'une autre.
Mais ces comités, est-ce qu'ils existent? Est-ce fonctionnel dans la
province? J'aimerais bien que le ministre du Travail nous le dise avant qu'on
aborde l'étude article par article.
Lorsqu'on parle des indemnités pour dommages corporels - encore
vous avez à vous référer à l'étude
actuarielle - vous allez remarquer qu'il y aurait des économies
énormes. C'est un changement fondamental -c'est cela qui est votre
laboratoire - de remplacer des rentes viagères par des montants
forfaitaires. J'entendais le député de Mille-Îles, je
crois, qui disait que 9255 $ investis pendant 20 ans rapportaient, à la
fin de ces 20 ans, 210 000 $. Mais il a oublié de dire une chose dans
son discours c'est que pendant ces 20 ans il ne faut pas retirer des
intérêts pour que cela rapporte cela. Si l'on retire les
intérêts sur 9255 $, à la fin de 20 ans il va encore y
avoir 9255 $ en banque. C'est cela. Alors vous allez remplacer les rentes
viagères. C'est une coutume chez nous, c'est accepté et tout d'un
coup vous arrivez et vous allez sabrer. Si au moins vous aviez dit: On va
remplacer ces montants par un montant équivalent. Le fait de remplacer
les rentes viagères va amener des économies à la CSST.
Cela veut dire qu'il n'y aura pas de chèque d'émis à tous
les 15 jours ou à chaque mois. Vous savez aussi bien que moi combien
c'est l'émission d'un chèque. Peut-être que le
vice-président de la CSST pourrait nous dire combien la commission va
épargner.
Une voix: II va rester plus d'argent pour les travailleurs.
M. Cusano: Ah oui! Il va rester plus d'argent mais c'est pour
cela qu'on leur donne moins. Faites les calculs et vous allez voir que le
travailleur qui est âgé de 25 ans qui gagne entre 20 000 $ et 21
000 $ par année, c'est beaucoup moins que ce que vous et moi gagnons ici
et que celui avec un taux d'incapacité de 25% présentement,
faites les calculs, il va recevoir environ 225 $ ou 230 $ par mois pour le
restant de ses jours. Vous savez, selon le projet de loi, ce que vous lui
donnez, M. le député? Vous lui donnez 9255 $, point final.
M. Lavigne: ...90% de remplacement...
M. Cusano: Oui, il l'a quand même, M. le
Président.
Est-ce que je vais me faire interrompre, Mme la Présidente, par
la...
La Présidente (Mme Juneau): Non, vous avez le droit de
parole. Je m'excuse, M. le député, la parole est au
député de Viau.
M. Lavigne: Vous avez raison, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Juneau): S'il vous plaît, M. le
député de Viau.
M. Cusano: Merci. Alors lorsqu'on arrivera à ce chapitre
on fera peut-être les démonstrations nécessaires. Vous
dites que vous en donnez plus. Ce n'est pas aux travailleurs que vous en donnez
plus, c'est à la CSST que vous en donnez plus pour qu'on s'amuse avec
les petites expériences.
Il était très curieux de vous entendre en Chambre
lorsqu'on parlait des indemnités de décès, et j'ai relu le
discours du ministre. Je l'ai relu parce que j'avais eu l'impression qu'il
disait que le nouveau système était plus avantageux. Ce n'est pas
tout à fait cela qu'il a dit. Il a donné certains chiffres mais
il n'a pas dit cela; il l'a laissé entendre; en
tout cas, c'est cela que j'avais compris.
Quand on regarde encore l'étude actuarielle, on voit le sommaire
des coûts des indemnités payables en cas de décès.
La CSST va économiser 10 500 000 $, mais pourtant on nous a
montré toutes sortes de tableaux disant qu'avec ce projet de loi cela
sera beaucoup plus avantageux pour les enfants et les veuves. Moi, j'ai
beaucoup de misère à comprendre comment cela sera plus avantageux
et que cela coûtera moins. Pour ceux qui sont en affaires, vous allez me
dire quelque chose, je vais en recevoir plus, c'est-à-dire que c'est
plutôt le contraire, c'est que quelque chose va coûter plus et je
vais en recevoir moins. Ce n'est pas concevable, Mme la Présidente.
Je parlais justement des comités de la santé et de la
sécurité qui vont avoir certains pouvoirs et ces comités,
présentement, ne sont pas fonctionnels. C'est la même chose, comme
je le disais, avec la loi 40 parce qu'on disait que les comités
d'orientation auraient certaines choses à faire; ce n'est pas tout
à fait pratique, ces comités n'existent pas dans toute la
province.
Lorsqu'on parle, dans le projet de loi, de réadaptation physique,
je n'ai aucun argument sur cela. La réadaptation sociale, cela me semble
être très flou; on ne sait pas exactement. Si on peut encore se
fier à certaines expériences de la CSST, on peut craindre, M. le
ministre, que cela va coûter très cher et les chiffres qui nous
sont cités, nous ne pouvons pas les accepter tels quels.
Lorsqu'on parle de la fonction réglementaire de la commission, le
ministre nous dit: La commission va être limitée dans ses pouvoirs
réglementaires. Il ne parle pas de directives de la CSST et, à
toutes fins utiles, c'est le règlement. Je vais donner un exemple
concret parce que cette commission - vous savez, M. le ministre, je l'ai dit
bien souvent en Chambre mais peut-être qu'un jour vous allez le
réaliser vous-même - elle se fout des parlementaires et elle se
fout de vous en tant que ministre responsable de cette commission.
Vous êtes sans doute au courant d'un document du 31 août
1984, le projet d'implantation, où on dit, justement, qu'ils se donnent
toutes sortes de pouvoirs dans les définitions, ils font tout un travail
même avant que nous, ici, ayons apporté des amendements. Eux
autres, déjà, se le permettent. Je peux vous dire même plus
que cela, en fin de semaine, je parlais avec des hommes d'affaires qui me
disaient qu'il y a des nouvelles formules déjà prêtes. On
les a même avisés et, en parlant des formules, cela m'amène
à la question des cotisations. On exige déjà un montant
qui est au-delà de ce que la loi actuelle permet. C'est
inquiétant cela, Mme la Présidente, en tant que parlementaire;
que nous ayons un organisme qui se permet toutes sortes de choses.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député, je
m'excuse de vous interrompre. C'est seulement pour vous signaler qu'il vous
reste une minute. Si vous voulez conclure, s'il vous plaît.
M. Cusano: Je vais essayer, dans une minute...
La Présidente (Mme Juneau): Merci.
M. Cusano: ...dans un esprit de collaboration parce que je
pourrai certainement y revenir au long de ces articles.
La Présidente (Mme Juneau): Sûrement.
M. Cusano: Ce sont des questions qu'on se pose, Mme la
Présidente. Je crois qu'il est important d'aborder tout cela. On change
le processus d'appel par l'abolition, c'est-à-dire pas par l'abolition
mais en créant une nouvelle commission en matière d'accidents du
travail. On dit qu'à la Commission des affaires sociales il y a un
engorgement. Que va-t-on faire? On va en créer une autre. Si je ne me
trompe pas, au Québec, il y a à peu près 80 ou 90
commissions judiciaires comme cela, Mme la Présidente. C'est un ajout,
et je crois qu'il n'est pas nécessaire.
Lorsqu'on parle d'évaluation médicale, j'aimerais savoir
comment va fonctionner l'évaluation de deux morceaux de papier. La
question fondamentale, comme on le dit en anglais, est celle-ci: "He who pays
the fiddler calls the tune." Cela veut dire que c'est celui qui paie qui prend
les grandes décisions. Lorsqu'on parle de la décision en ce qui
concerne l'évaluation médicale, etc., Mme la Présidente...
La tradition est toujours, Mme la Présidente, que le porte-parole peut
déborder un peu. Si vous le permettez, je vais terminer.
En ce qui concerne le droit de retour au travail, il y a encore des
choses extrêmement imprécises, par exemple la discrimination entre
l'employeur qui a 20 employés et plus et celui qui en a moins. Cela me
faire rire un peu, pour ne pas dire pleurer lorsque vous parlez de financement.
Vous dites: Le taux de cotisation baisse. Je ne conteste pas que le taux de
cotisation baisse, mais la masse salariale assurable augmente. Il y a des
municipalités qui ont joué ce tour aux propriétaires et
qui ont annoncé dans les journaux que le taux de taxation avait
baissé. Lorsqu'ils ont reçu leur compte chez eux, ils ont dit:
Comment se fait-il qu'il ait baissé alors que je paie plus?
L'évaluation est plus élevée. C'est ce qu'on fait ici. On
baisse le taux - je ne conteste pas cela - mais on augmente la masse
salariale. Mes collègues vont certainement continuer, parce que
j'allais parler des pouvoirs d'humanisation de la CSST.
La Présidente (Mme Juneau): Vous en aurez l'occasion au
fur et à mesure qu'on va avancer, M. le député.
M. Cusano: Certainement, Mme la Présidente. Vous
comprendrez...
La Présidente (Mme Juneau): Je comprends très
bien.
M. Cusano: ...qu'il y a 556 articles. Le ministre nous a souvent
dit qu'il y a plusieurs principes dans le projet de loi. Peut-être qu'il
aurait été sage à un certain moment de scinder le bill, et
on aurait eu moins de difficulté. Merci.
La Présidente (Mme Juneau): Merci, M. le
député. M. le député de Sainte-Marie, s'il vous
plaît.
M. Guy Bisaillon
M. Bisaillon: Merci, Mme la Présidente. Mme la
Présidente, le ministre nous a indiqué qu'il avait l'intention -
c'est son désir - de faire adopter le projet de loi 42 en
troisième lecture avant Noël. Il nous a aussi indiqué son
intention de ne pas brusquer les choses, de permettre au travail parlementaire
de s'effectuer correctement. Je suis porté à faire confiance au
ministre. Cela a peut-être l'air drôle de dire cela, mais...
Une voix: Ce n'est pas drôle, c'est bien.
M. Bisaillon: ...je pense que c'est un ministre qui est de bonne
foi. Cependant, M. le ministre, on fait moins confiance à votre
entourage. Lorsque je parle de votre entourage, je ne parle pas de votre
entourage immédiat, de celui de votre cabinet politique - on sait que
ces gens font du bon travail - mais de celui de ce projet de loi. J'ai beaucoup
moins confiance en ce qui se passe à la CSST, ainsi qu'au
président de la CSST, parce qu'au même moment où vous nous
dites que vous êtes prêt à faire le travail parlementaire
comme il doit être fait, par ailleurs, au niveau de la CSST, on dit: Cela
va être adopté avant le 25 décembre. Si ce n'est pas
adopté avant le 25 décembre, si c'est bloqué en commission
parlementaire, il va y avoir la guillotine.
M. le ministre, j'ai eu l'occasion de poser des questions au premier
ministre à ce sujet. Je lui ai demandé si la position du
gouvernement était à ce point fermée qu'elle ne
souffrirait pas d'amendements en commission parlementaire. Il m'a
répondu non. Il m'a répondu qu'il était réceptif
à des amendements. Vous nous avez dit la même chose.
J'apprécierais que ce discours qui se tient actuellement à la
CSST puisse au moins cesser pendant les travaux de la commission. C'est, quant
à moi, un mépris du travail qui s'amorce, en rappelant - je sais
que vous le savez, M. le ministre, et que vous en êtes conscient - aux
responsables de la CSST que la commission parlementaire siège parce
qu'il y a une bonne volonté des parlementaires de l'Opposition et des
députés indépendants. Ces travaux, à cause d'un
imbroglio juridique que tout le monde connaît, n'auraient pas pu
normalement avoir lieu s'il n'y avait eu le consentement de l'Opposition et des
députés indépendants. Notre intérêt n'est pas
de bloquer les travaux et de les retarder, c'est celui de discuter au fond
chacun des points qui, pour nous, posent des problèmes. C'est dans cet
esprit-là que moi j'amorce les travaux de cette commission. Je pense
qu'on serait grandement aidés si les déclarations -que, quant
à moi, je juge intempestives - du président de la CSST pouvaient
prendre fin. (16 h 30)
Vous avez annoncé, M. le ministre, les amendements qui seraient
déposés à la séance de ce soir. Vous avez
déjà déposé ou remis, en tout cas, une série
de 75 amendements. Je voudrais savoir si on doit comprendre qu'il va y avoir
d'autres amendements qui vont s'ajouter à ceux dont on a
déjà pris connaissance et vous souligner que la notion
d'amendement - en tout cas, si je me fie aux 75 premiers que j'ai lus - cela
n'annonce pas nécessairement une plus grande ouverture du gouvernement.
Vous l'avez présenté un peu sous cet angle-là en disant:
Comme on dépose des amendements, forcément vous pouvez juger de
notre souplesse. Un amendement, je vous rappellerai que cela peut être
plus dur que l'article original et, dans certains cas, je me ferais fort de
vous démontrer que, dans les amendements qui ont été
présentés jusqu'à maintenant, il y a des amendements qui
vont moins loin que le projet réimprimé. C'est, je pense, une
indication que vous devriez nous fournir au moment où vous allez
déposer les amendements ce soir.
Troisièmement, j'aurais deux demandes à vous adresser et
à adresser aux membres de la commission parlementaire. Mes demandes sont
simples. Depuis les auditions qui ont eu lieu avant la deuxième lecture,
les auditions de groupes qui sont venus présenter leur position sur le
projet de loi 42, et d'autres rencontres qui ont amené possiblement les
amendements que le ministre a déposés par la suite, il y a eu un
mémoire qui a été déposé par la Commission
des services juridiques qui traite d'aspects particuliers du projet de loi. Au
moment où on sera rendu aux articles concernés - je ne veux pas
qu'on s'embarque dans d'autres
auditions jusqu'à l'infini - il me semble qu'il pourrait
être intéressant pour la bonne compréhension des
parlementaires qu'on s'entende tous pour prendre une période de temps,
qui pourrait être courte, pour vérifier la portée de ce qui
est allégué dans le mémoire de la Commission des services
juridiques. Cela pourrait prendre une heure, une heure et quart. Rien pour
allonger les débats mais peut-être une présence qui
pourrait nous permettre de scruter plus à fond l'argumentation qui est
développée.
Je signale que la Commission des services juridiques - ce sont des
avocats de l'aide juridique qui traitent souvent les problèmes des
accidentés du travail - s'est déjà présentée
de,vant la commission parlementaire avant la réimpression. Ilsont fait maintenant une étude qui tient compte du projet de loi
réimprimé. Ils n'ont pas les amendements. Leur analyse ne tient
pas compte des amendements. C'est peut-être un peu tout cela qu'il
faudrait consolider au moment où on sera rendu à cet aspect, aux
articles qui concernent le contenu du mémoire de la Commission des
services juridiques. De la même façon... Ouil
M. Fréchette: Est-ce que le député de
Sainte-Marie me permettrait simplement une précision? Quand il parle du
moment où on arrivera à l'étude des articles auxquels
réfère le mémoire de la Commission des services juridiques
et qu'il souhaite que nous puissions suspendre nos travaux pour une heure, une
heure et demie ou, enfin, peu importe la période de temps dont il faudra
disposer, est-ce que je dois comprendre que c'est pour faire en sorte que les
membres de la Commission des services juridiques viennent expliciter
eux-mêmes leur mémoire? C'est cela?
M. Bisaillon: Pour qu'on puisse leur poser des questions, compte
tenu du fait que, quand ils ont réécrit leur mémoire
à partir du projet de loi réimprimé, ils n'avaient pas la
connaissance des amendements que le ministre a apportés par la suite. Je
trouverais intéressant que des gens qui sont des spécialistes de
la question, qui traitent ces cas quotidiennement, puissent venir nous faire
leur analyse, nous donner leur version du vécu des accidentés du
travail. Deuxièmement, au moment où l'on étudiera toute la
question des moyens qu'on fournit aux accidentés du travail pour faire
appel des décisions de la commission, lorsqu'on étudiera tout
cela, j'apprécierais quant à moi que la commission parlementaire
convoque le président de la Commission des affaires sociales. On sait
que la Commission des affaires sociales est l'organisme qui, actuellement, au
moment où l'on se parle, traite et entend les appels concernant
l'ensemble des lois sociales au Québec.
Dans le projet de loi, on fait une exception et on retire à la
Commission des affaires sociales l'audition des appels par rapport aux
accidentés du travail. La commission n'est pas un organisme qui,
instinctivement et de par son mandat et sa fonction, va se rendre à une
commission parlementaire pour présenter d'elle-même un
mémoire. Je pense que, comme parlementaires, il serait
intéressant d'avoir l'expertise de la Commission de affaires sociales
sur le cas des accidentés du travail; son évaluation des
possibilités qu'elle entrevoit de poursuivre ce travail; l'impact que
cela pourrait avoir, non seulement sur les cas d'accidentés du travail,
mais sur les autres cas qui sont entendus normalement par la Commission des
affaires sociales; l'impact que cela pourrait représenter dans son
travail. Là encore, M. le ministre, je parle de quelque chose qui
durerait une heure, une heure et quart, une heure et demie, rien pour allonger
les travaux mais pour nous permettre d'avoir la perception de quelqu'un qui
n'est pas au débat. Il me semble que cela pourrait nous aider à
comprendre et à accélérer les travaux par la suite sur un
certain nombre d'articles du projet de loi.
Je termine, Mme la Présidente, en signalant au ministre qu'il
nous a indiqué qu'un des objectifs du projet de loi 42 était
d'harmoniser les régimes. L'harmonisation c'est un peu comme la
centralisation, cela comprend aussi ses désavantages. Il m'a
semblé, jusqu'à maintenant, que les orientations
gouvernementales, à tous les niveaux, en tout cas jusqu'à
récemment, allaient contre la centralisation à outrance. Il me
semble que là on embarque dans un système qui, en voulant trop
harmoniser, va faire perdre des droits à un certain nombre de
travailleurs et de travailleuses qui auront à subir - je trouve qu'il
est important de rappeler cette expression - "à subir" un accident du
travail. Je trouve qu'on leur fait perdre, par rapport à la loi
actuelle, un certain nombre de droits. Évidemment, on va avoir
l'occasion de discuter de ces choses article par article, mais je voudrais
souligner qu'un objectif qu'on devrait aussi avoir en tête c'est la
diminution des accidents du travail.
Si on se fie à ce qui s'est passé ailleurs au Canada - en
Saskatchewan, par exemple, et au Nouveau-Brunswick, où une loi à
peu près identique a été adoptée il y a environ
cinq ans - ce qu'on constate aujourd'hui, c'est que les coûts pour les
employeurs ont diminué, les prestations pour les travailleurs ont
diminué, mais les accidents du travail, eux, n'ont pas diminué.
Il y aurait une autre façon de faire diminuer les coûts pour les
employeurs: c'est de faire diminuer les accidents du travail. Moins il y aura
d'accident du travail, moins,
évidemment, cela coûtera cher aux employeurs. Il faudrait
se méfier d'une harmonisation qui dévie de l'objectif premier que
le Parlement a eu lorsqu'il a voté la Loi sur la santé et la
sécurité du travail. L'objectif premier était de faire
payer les premiers responsables que sont les employeurs. Par l'harmonisation,
si, finalement, on fait payer l'ensemble de la société pour un
certain nombre de services qui seront fournis aux accidentés du travail,
il me semble qu'on dévie du débat.
Je sais qu'il y a un certain nombre de députés
ministériels qui sont conscients de cet aspect de la question. Je sais
aussi qu'il y a un certain nombre de députés ministériels
qui sont conscients qu'en changeant le type de remboursement, qu'en payant
maintenant, non plus l'incapacité au travail, mais davantage le manque
à gagner temporaire, on fait perdre des choses aux travailleurs.
À ce que je sache, il y a même un député
ministériel qui a présenté une motion à son caucus
pour demander qu'on réétudie toute cette question de la rente. Il
me semble que c'est le député de Beauharnois, si je ne me trompe
pas, si mes sources de renseignements sont exactes. Je trouve que c'est une
question extrêmement sérieuse qui doit être traitée
en dehors - à moins qu'il y ait un texte récent du premier
ministre sur la question. Il me semble que c'est une chose dont on devrait
traiter ici, à la lumière de ce pourquoi on veut une nouvelle
loi, c'est-à-dire la protection des travailleuses et des travailleurs
qui sont impliqués. C'est dans ce sens, Mme la Présidente, que
j'effectuerai mon travail à la commission parlementaire en
espérant que l'ouverture annoncée par le ministre se
vérifiera concrètement dans les amendements que non seulement il
va déposer mais dans ceux qu'on pourra peut-être amener en cours
de discussion et qu'il sera ouvert, aussi, aux demandes que je lui ai
formulées.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Sainte-Marie, pour éclairer les membres de cette commission,
pourriez-vous nous dire si c'est une proposition ou une motion formelle que
vous faites de rencontrer...
M. Bisaillon: Non, pas pour l'instant, Mme la Présidente.
C'est une demande que j'adresse au ministre et aux députés
ministériels; on peut la discuter. Si je le jugeais utile, je me
réserve toujours le droit, évidemment, lorsqu'on sera rendu
à l'étude de ces articles, d'en faire une motion et de la faire
discuter. Je pense que pour l'instant il faut donner la chance au coureur et
permettre au ministre de démontrer l'ouverture dont il nous a
parlé.
La Présidente (Mme Juneau): Je vous remercie beaucoup, M.
le député. La parole est maintenant au député de
Saguenay.
M. Ghislain Maltais
M. Maltais: Merci, M. le Président. Mme la
Présidente, je m'excuse, c'est une déformation
professionnelle.
Le projet de loi 42, à l'étape où nous sommes
rendus à son étude, évidemment c'est un pas en avant
comparé à la loi qui existait au Québec depuis 50 ans. Le
ministre avait comme responsabilité de consulter les principaux
intervenants et c'est pour cette raison que, l'hiver dernier, nous avons eu une
commission parlementaire où les principaux intervenants du monde dutravail québécois sont venus se faire entendre ici à
la commission. Nous, comme parlementaires, avions une responsabilité
bien définie dans chacune de nos régions, comme
représentants à l'Assemblée nationale de nos
comtés, d'aller voir ce qui se passe exactement chez les
différentes parties.
Je l'ai fait, cet exercice, M. le ministre, et je suis peut-être
un des rares députés qui ait pris le temps de le faire au niveau
de la grosse entreprise. Je parle de grosses entreprises de 1500 à 2500
travailleurs, autant du côté patronal que du côté
syndical, et aussi de petites entreprises de 25 travailleurs et plus, aussi
d'une classe de travailleurs qui ne sont pas syndiqués et de petites
entreprises qui regroupent deux, trois, quatre ou cinq travailleurs;
particulièrement cette classe de travailleurs non syndiqués,
c'est la partie qui m'a frappé le plus parce qu'on les ignore totalement
dans le projet de loi.
On les ignore de différentes façons, et je m'explique
là-dessus: ces gens qui travaillent dans une entreprise qui emploie
environ quinze personnes et moins, qui sont non syndiqués, ce sont des
gens qui n'ont à peu près aucune information. C'est malheureux de
le dire, les syndicats ont comme responsabilité d'informer leurs membres
et ils le font; les employeurs aussi, dans tous les cas, ont cette
responsabilité d'informer leurs travailleurs de leurs droits. Plusieurs
le font; plusieurs ne le font pas. Dans les petites entreprises non
syndiquées, cela ne se fait pas à 90%.
Or, M. le ministre, il est inconcevable, je pense, de modifier
fondamentalement l'habitude, presque vieille de 50 ans, d'une partie des
travailleurs québécois, la majorité des travailleurs
québécois et des travailleuses québécoises, sans
que ceux-ci soient partie prenante à la loi. Je suis allé
rencontrer tous les paliers syndicaux de ma région, je suis même
allé en rencontrer ici à Québec. Vous aviez
délégué quelqu'un pour vous représenter, mais je ne
suis pas sûr que vous ayez été bien
représenté, M. le ministre. Lorsqu'on arrive devant 500 ou
600
travailleurs et qu'on dise: Je ne suis pas au courant du projet de loi,
ce n'est pas mon dossier, je ne suis pas sûr que ce soit l'homme
idéal pour aller donner des explications aux travailleurs. Je pense
qu'on aurait dû, à ce moment, envoyer quelqu'un -je comprends que
vous, vous ne pouviez pas le faire, je comprends cela - du côté
ministériel qui était au courant de ce projet de loi et qui
aurait pu donner des explications de la part du gouvernement. Ce n'est pas un
blâme à vous, M. le ministre, c'est un blâme au
gouvernement. Lorsque les travailleurs sont représentés par des
associations syndicales, sont regroupés et demandent de l'information,
il est juste et équitable que tous les partis soient entendus, autant
l'Opposition que le pouvoir. Je déplore que la partie
ministérielle ait été très mal
représentée et n'ait pas su donner les informations pertinentes
à ces travailleurs. Souvent, cela permet, M. le ministre, de laisser
planer des doutes qui ne sont pas acceptables au niveau de tout le respect que
nous avons vis-à-vis de la machine gouvernementale. (16 h 45)
Ceci étant dit, le deuxième point que j'ai
rencontré lors de ces discussions avec autant les employeurs que les
travailleurs, c'est l'humanisation des services. M. le ministre, une
fâcheuse habitude s'est établie au cours des années -
encore là, je fais un constat, je ne vous mets pas en accusation, soyez
bien à l'aise - au niveau du travailleur accidenté. Je ne vous
dis pas qu'il n'y a pas des exceptions, qu'il n'y a pas des profiteurs de la
loi, il y en a; s'il n'y en avait pas, il n'y aurait pas d'avocat et il
manquerait une bonne classe de la société, M. le
Président. Cependant, nous sommes obligés de concevoir que tout
le monde n'est pas profiteur, et je ne suis pas avocat. Il y a des travailleurs
honnêtes au Québec. La très grosse partie, la très
grosse majorité sont des travailleurs honnêtes.
M. le Président, lorsqu'on subit des sévices physiques et
qu'on se retrouve presque au banc des accusés... Ce que je dis, il y a
des députés ministériels qui sont venus à
l'Assemblée nationale, lors du débat en deuxième lecture,
le dénoncer. En faisant une refonte fondamentale de cette loi, on aurait
dû inclure des certitudes vis-à-vis de ces gens afin qu'ils soient
traités d'une façon humanitaire. Non seulement un travailleur
blessé - qui subit des sévices physiques - se voit amputé
de capacités physiques mais fait face à la société
comme un accusé; c'est loin d'être drôle. À partir du
moment où on a des lois, on a des droits et des responsabilités.
La majorité des syndicats et des associations qui regroupent des
travailleurs sont venus nous dire ici en commission parlementaire - et ils nous
le disent dans nos comtés lorsqu'on les rencontre parce qu'il faut
d'abord les rencontrer pour le savoir - c'est devenu un fléau. Cela est
devenu une maladie industrielle de se faire traiter à la CSST parce
qu'on est considéré comme quelqu'un de deuxième ou de
troisième classe parce qu'on a eu un accident du travail. Il y a
différentes façons de persécuter quelqu'un. Il y a la
façon de le recevoir, en première instance. Il y a la
façon de s'acquitter de son dossier, lui fournir toute la paperasse
nécessaire et aussi traiter son dossier dans un suivi normal. Celui qui
subit un accident du travail n'a pas toujours nécessairement de l'argent
d'avance et, en plus d'être blessé, il se voit privé
pendant un certain temps de montants d'argent, son train de vie doit diminuer
et les problèmes financiers viennent. J'ai l'impression que cette
personne a tendance à sortir de son expérience avec une
très mauvaise opinion des lois qui ont des devoirs vis-à-vis des
travailleurs.
Mme la Présidente, il y a une chose qui me chicote, c'est que,
pendant que ce projet de loi est ici, à l'Assemblée nationale,
débattu par les parlementaires, les élus du peuple, la CSST a
pris pour acquis qu'il était déjà loi. Malheureusement, je
pense que c'est inacceptable pour des parlementaires de se faire doubler dans
un virage, puisque c'est la mode de parler des virages présentement.
J'ai l'impression qu'aujourd'hui, ici, on a l'air d'une bande de cons parce que
la CSST a pris les devants et cette commission parlementaire ne la retarde
même pas. C'est juste de la foutaise pour elle. Je pense que, comme
parlementaires élus démocratiquement par une population, on n'a
pas le droit d'accepter cela.
M. le ministre, vous avez le devoir, et très rapidement, de
remettre à l'ordre les sphinx de la CSST qui ont l'intention de se
prendre pour des parlementaires. S'ils veulent jouer ce petit jeu, M. le
ministre, nous allons le jouer, et nous allons entrer aussi dans la botte parce
que nous avons le droit comme parlementaires d'y aller dans la boîte.
Nous allons y aller faire le ménage, M. le ministre, si vous ne le
faites pas, et je vous dis que cela presse.
Mme la Présidente, au cours de cette commission nous allons
présenter des amendements. Il y a de bonnes choses dans la loi. Je ne
dis pas que tout est imparfait. Cependant, nous devons, comme c'est notre
devoir d'Opposition, apporter des correctifs. On a connu le vécu dans
nos comtés et on représente une population. C'est notre devoir de
vous présenter ici en cette commission parlementaire les amendements que
ces personnes nous ont demandés et que nous croyons, de ce
côté, très justes.
Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Juneau): Merci beaucoup, M. le
député.
La parole est maintenant au député de Frontenac.
M. Gilles Grégoire
M. Grégoire: Mme la Présidente, la première
chose qui me frappe dans cette loi, au départ, c'est qu'elle a 556
articles. Cela en fait des articles. Cela veut dire de la complication, cela
veut dire beaucoup d'avocats dans le travail et dans le jeu, cela veut dire
beaucoup de frais judiciaires, cela veut dire beaucoup de bureaucratie, cela
veut dire des interprétations différentes par chacun des
bureaucrates. On nous a toujours enseigné que "ce qui se conçoit
bien s'énonce clairement et les mots pour le dire viennent
aisément." Mais quand, pour une loi sur les accidents de travail et les
maladies professionnelles, on est obligé d'avoir 556 articles et qu'il
en manque, là je me dis, cela va entraîner plusieurs années
de difficulté pour s'adapter à cette nouvelle loi. Cela va
entraîner surtout du travail juridique, cela va entraîner une
bureaucratie énorme, cela va entraîner des complications. Je me
demande si le ministre, qui est lui-même avocat et qui doit savoir que
plus il y a de lois, plus il y a d'articles, plus c'est compliqué, plus
cela prend du temps, s'il ne pourrait pas inaugurer un système où
on décompliquerait cela. Je donne un exemple au ministre du Travail.
Hier, je prenais la nouvelle que ceux qui ont fait isoler leur maison par la
M1UF (mousse formaldéhyde) ont commencé leur procédure
pour se faire indemniser il y a deux ans et qu'on ne prévoyait pas en
terminer avant l'an 1990, dans six ans, avant que cela ait passé tous
les délais dus à la procédure et aux complications de la
loi. Pourquoi est-ce que cela prend du temps? Pendant ce temps les avocats qui
défendent ceux qui sont victimes de la mousse d'urée
formaldéhyde sont payés par le gouvernement provincial parce
qu'ils ont un recours collectif; et ceux qui sont de l'autre côté,
les avocats de la Société canadienne d'hypothèques et de
logement, sont payés par le gouvernement fédéral. Je vous
dis une chose: quand les avocats sont payés par les gouvernements d'un
côté ou de l'autre, cela prend pas mal plus de temps. Les
honoraires professionnels, quand je relis les comptes publics que ce soit du
gouvernement fédéral ou du gouvernement provincial, il y a
plusieurs avocats dans tout cela qui reçoivent le salaire combiné
du premier ministre du Canada et du premier ministre du Québec dans la
même année, qui reçoivent autant que les deux premiers
ministres réunis. Avec cette loi on s'en va vers une complication qui ne
nuira qu'à qui? Qu'aux travailleurs qui seront accidentés du
travail. Je me demande si le ministre ne pourrait pas faire un effort pour
essayer de la simplifier cette loi sur les accidents du travail. Cela est
toujours préparé par des avocats, qui voient qu'en
définitive ceux qui en profiteront seront encore les avocats. Vous allez
voir quand le procès pour la mousse d'urée formaldéhyde va
être terminé, tout le monde va se demander: Qui est-ce qui a
été victime? Est-ce que c'est nous autres? Ce sont les avocats
qui ont empêché tout le montant.
Je veux entrer sur un deuxième point. Je vois également
que la loi actuelle vient modifier deux lois: la Loi sur les accidents du
travail et la Loi sur l'indemnisation des victimes d'amiantose ou de silicose
dans les mines et les carrières. Cela vient en modifier deux, la Loi sur
les accidents du travail et la Loi sur l'indemnisation des victimes d'amiantose
ou de silicose dans les mines et les carrières, les victimes
d'amiantose. Les travailleurs de l'amiante, pendant longtemps, ont
été les victimes d'une maladie industrielle et n'avaient rien
pour se protéger. Ils ont dû gagner de peine et de misère,
après plusieurs grèves longues, après des matraquages -
que ce soit la grève de 1949, que ce soit la grève de 1975 - ils
ont réussi avec l'aide des principaux membres du gouvernement actuel, en
1975. Tout le monde se rappellera les visites répétées en
1975 à Thetford, que ce soit du premier ministre actuel, que ce soit du
ministre des finances qui était là il y a encore une semaine, que
ce soit de tous les dirigeants du Parti québécois en 1975; ilsse sont mérité l'appui de tout ce monde-là et
finalement ont réussi à gagner ce qu'on appelle la loi 52 pour
les victimes d'amiantose.
Vous arrivez avec la loi 42. Peut-être que pour les autres
victimes d'accidents du travail ou de maladies industrielles qui étaient
sous l'ancienne loi sur les accidents du travail, peut-être que la
nouvelle loi est un gain. Pour ceux qui sont victimes d'amiantose, la nouvelle
loi n'est pas un progrès. C'est un recul. Ce n'est pas qu'il y en a
beaucoup comparativement au nombre d'accidents du travail ou de maladies
professionnelles qu'il y a dans l'ensemble du Québec, mais pour
ceux-là c'est un recul. Je me demande si ces droits des travailleurs de
l'amiante qui ont été acquis après de longues luttes,
après de dures luttes, ne devraient pas au moins être
respectés dans cette nouvelle loi 42. Ainsi par exemple, les victimes
d'amiantose se sont toujours fait dire par toute la profession médicale,
où qu'elle se trouve dans le monde, que leur maladie était
incurable. C'est une maladie industrielle pour laquelle il n'y a jamais eu de
recherches en profondeur et qu'on a toujours traitée de maladie
incurable. C'est pourquoi dans la loi 52 pour les victimes d'amiantose, on a
toujours dit: Le travailleur qui en est atteint aura droit à 90% de son
revenu net, sa vie durant. Tantôt on a dit
qu'harmoniser les lois, les centraliser, parfois cela pouvait faire
perdre des droits à certains. Avec la nouvelle loi, la Commission de la
santé et de la sécurité au travail pourra décider
au bout de deux, trois ans: vous pouvez remplir un travail convenable. Alors,
on vous enlève votre rente à 90% de votre revenu.
De l'autre côté, les médecins viennent affirmer que
l'amiantose est une maladie qui n'est pas guérissable. On prévoit
quand même dans la nouvelle loi qu'on peut les retourner au travail, ou
à un travail convenable, ou un travail où ils ne seraient plus
exposés à la poussière. Mais la profession médicale
vient dire: Celui qui est atteint de cette maladie-là est atteint d'une
maladie incurable et ne peut plus fournir un rendement convenable.
Mme la Présidente, je vois que le ministre du Travail semble
n'être pas d'accord avec ce que je viens d'énoncer. Si c'est le
cas, il me semble à ce moment-là que la loi, même si elle
contient 556 articles, devra au moins en contenir un pour venir rassurer les
travailleurs de l'amiante à l'effet que s'ils sont
déclarés amiantosés, on reconnaît leur rente tel que
prévu à l'heure actuelle. Je crois que cela devrait être
reconnu par la nouvelle loi.
Il y a un deuxième point qui est important pour les travailleurs
de l'amiante. C'est que dans leur cas, on demande un verdict médical, et
les seuls qui sont aptes à donner un verdict médical pour les
victimes d'amiantose ce sont les pneumologues. On n'acceptera pas le verdict
d'un médecin traitant ordinaire ou d'un omnipraticien. On va demander un
pneumologue. À l'heure actuelle, tous les pneumologues du Québec,
tous les pneumologues enregistrés au Québec sont engagés
par la Commission de la santé et de la sécurité du
travail, de telle sorte que la victime de l'amiantose se fait dire par son
médecin que les victimes de l'amiantose ont toutes les
difficultés du monde à se trouver un pneumologue parce qu'ils
sont tous engagés par la Commission de la santé et de la
sécurité du travail. (17 heures)
J'ai à l'heure actuelle le cas d'un travailleur de l'amiante, et
cela va illustrer ce que je veux exposer ici. Depuis cinq ans il a
été déclaré amiantosé par un pneumologue de
Montréal. Or, en appel devant la Commission de la santé et de la
sécurité du travail, à deux pneumologues contre un, on a
décidé qu'il ne l'était pas. Ce même travailleur de
l'amiante attend depuis deux ans pour aller devant la Commission des affaires
sociales parce que le pneumologue qui l'a examiné, il y a
déjà plusieurs années, est actuellement en dehors du
Canada, en voyage pour encore deux ans, et cette victime d'amiantose ne peut
plus se trouver un pneumologue pour aller le représenter devant la
Commission des affaires sociales.
Il y a là un problème grave parce que c'est une maladie
des poumons, que les spécialistes sont rares et que les victimes de
l'amiantose, même s'ils ont le choix de leur médecin, se
retrouvent devant le fait que, devant la rareté des pneumologues et
devant le fait qu'ils sont engagés par la Commission de la santé
et de la sécurité du travail, les malades ont de la
difficulté à faire reconnaître leur maladie industrielle
devant la CSST. Alors, je crois que la loi 52, qui était la loi en vertu
de laquelle les travailleurs de l'amiante pouvaient réclamer devant la
CSST, présentait de nombreux avantages que la loi actuelle ne
présente pas. Je crois que le ministre aurait intérêt
à faire regarder les articles, à faire comparer les deux lois et
à faire inclure dans la nouvelle loi 42 ceux qui protégeaient,
que ce soit au point de vue maladie industrielle, que ce soit au point de vue
rente, les victimes d'amiantose, loi 52 qu'ils ont conquis après de
multiples efforts.
Je demanderais donc au ministre d'essayer d'adapter les deux lois. Il y
a du bon dans la nouvelle loi, mais vis-à-vis de cette catégorie
spéciale de travailleurs, les victimes d'amiantose, je crois qu'il y a
un net recul sur plusieurs points et j'aurai des amendements à apporter
en temps et lieu.
La Présidente (Mme Juneau): Merci, M. le
député. Est-ce qu'il y a d'autres députés qui
souhaiteraient intervenir? M. le député de Châteauguay? M.
le député de Nelligan.
M. Roland Dussault
M. Dussault: Merci, Mme la Présidente.
Je suis satisfait de l'ouverture que le ministre a
démontrée relativement à des amendements ou des
améliorations qui pourraient être apportés de la part des
députés qui participent aux travaux de cette commission. Et dans
ce sens-là, je vais appuyer la demande qu'a faite tout à l'heure
le député de Sainte-Marie.
Auparavant, je voudrais reprendre quelques éléments qui
ont été avancés par le député de Viau, tout
à l'heure. Il a évoqué que les députés
ministériels avaient été peu nombreux à prendre la
parole en deuxième lecture, quoique ce ne sont plus les termes que l'on
emploie selon la réforme, qu'on avait été peu nombreux
à prendre la parole sur le projet de loi 42. Je voudrais quand
même rappeler qu'il y a eu au-delà de quinze
députés, c'est peut-être même dix-sept
députés ministériels qui ont pris la parole sur ce projet
de loi. Alors, je pense que c'est un petit peu déplacé de la part
du député de Viau que de laisser entendre que nous avons
été peu nombreux à prendre la parole là-dessus.
Une autre chose que je voudrais faire
remarquer est que le député de Viau ne m'a pas
donné l'impression, tout à l'heure, qu'il faisait la distinction
entre la loi préventive sur les accidents du travail qu'est la loi 17 et
la loi réparatrice qu'est la loi 42, celle sur laquelle nous nous
penchons. Je pense qu'il est important de faire cette distinction, ne serait-ce
que pour ceux qui liront le Journal des débats à la suite de nos
travaux. Semble-t-il qu'il faudra qu'ils le voient sur vidéo parce que
cela ne sera pas produit comme cela l'était auparavant,
c'est-à-dire les débats des commissions.
Il a aussi parlé, tout à l'heure, du financement - quoique
je pense que ce soit le député de Saguenay qui a parlé de
la question du financement - cela me paraît important de faire une
correction des propos qu'il a tenus parce qu'il disait que le projet de loi
baisserait le taux de cotisation et que la masse salariale augmenterait. Je
voudrais rappeler au député de Viau que ce ne sont sûrement
pas les députés de la commission ni le gouvernement qui vont
faire augmenter la masse salariale. Je pense bien que...
M. Bisaillon: Pas par les temps qui courent!
M. Dussault: On sait qu'on a connu la crise, M. le
député de Sainte-Marie, avec toutes les conséquences que
cela représente; je pense qu'on s'entendra là-dessus.
Mais il reste quand même que la masse salariale, ce sont
plutôt les forces du marché qui font que cela fluctue. Je pense
bien que ce n'est pas par volonté gouvernementale ou par la
volonté des députés qu'on en arrive à ce
résultat.
Et pour en venir à ce point que je voulais appuyer, qui nous est
venu de la part du député de Sainte-Marie, Mme la
Présidente, je voudrais dire au ministre que je ne vois peut-être
pas, actuellement, toute la portée ou les conséquences, sur le
plan bien pratique peut-être, de la demande du député de
Sainte-Marie. Mais celle qui consistait à entendre le
représentant, le président enfin de la commission, le commissaire
principal, je ne me rappelle pas le terme exact, de la Commission des affaires
sociales, cette demande m'apparaît intéressante. Peut-être
craindra-t-on que cela fasse précédent, que l'on soit
obligé par la même occasion de convoquer d'autres organismes qui
n'auraient pas eu la chance de se faire entendre. Mais il m'apparaît - je
pense que le député de Sainte-Marie l'a invoqué dans ces
termes - que la Commission des affaires sociales n'est pas, effectivement, un
organisme qui a le réflexe, peut-être même que ce n'est pas
du tout dans le cadre de son mandat de prendre l'initiative d'offrir son
éclairage à l'occasion de travaux parlementaires. Peut-être
que, dans ce sens-là, il y aurait une ouverture qui nous permettrait de
prendre un risque calculé, qui n'aurait pas les conséquences que
l'on pourrait craindre.
Mais je le répète au ministre, Mme la Présidente,
que je ne vois pas toutes les conséquences de cela. Je voulais tout
simplement dire au ministre que, personnellement, j'aurais le goût,
à moins qu'on me convainque - que ce soient des raisons très
importantes - que ce n'est pas une bonne chose, jusqu'à preuve du
contraire, je pense qu'il y aurait un intérêt à ce qu'on
entende la Commission des affaires sociales à cette commission.
Dans ce sens-là, l'idée de suspendre, durant un certain
temps, nos travaux pour pouvoir entendre quelqu'un de la commission
m'apparaît intéressante.
La Présidente (Mme Juneau): Merci, M. le
député. J'avais reconnu le député de Nelligan.
M. Clifford Lincoln
M. Lincoln: Mme la Présidente, j'aurais voulu continuer
dans le sens de deux ou trois points que j'avais soulevés lors du
débat de deuxième lecture, en Chambre, surtout concernant la
période où l'employeur devient maintenant responsable par le
projet de loi 42 par rapport à l'ancienne loi.
En fait, si le minsitre voulait regarder avec moi le rapport annuel de
la CSST de 1983, à la page 52, où il y a un graphique et des
statistiques de la durée de l'interruption du travail à la suite
de lésions professionnelles déclarées en 1983. On
remarquera là-dedans que le pourcentage de cas où il n'y a aucune
indemnisation, c'est presque la moitié. Il y a quelque chose comme 146
000 cas où il n'y a aucun nombre de jours d'indemnisation, c'est 48%. De
un à cinq jours, il y a 66 000 cas, 22%; de six à dix jours, 27
000 cas, 9,1%; et de onze à quinze jours, 12 765 cas, donc 4,2%.
Or, selon les dispositions de la nouvelle loi, le projet de loi 42, la
loi projetée, ce qui arriverait, c'est que l'employeur ferait les frais
initiaux de l'indemnisation pour les premiers quatorze jours. Donc, si on
retire le pourcentage de cas qui ne sont soumis ni à l'employeur, ni
à la CSST - donc il n'y a pas d'indemnisation - c'est 48,4%. Si on
ajoute à cela le pourcentage de un à quatorze jours, on verra que
pratiquement 80% - en fait, si on prend les statistiques, il y a plus de 80%
maintenant seraient l'affaire de l'employeur, initialement. L'employeur devra
faire les frais initiaux, devra remplir toute la paperasserie, avoir la
responsabilité des montants d'indemnisation. Si on laisse la
différence de cinq jours, 16 à 20, 21 et plus et le reste, on
verra, d'après les statistiques du rapport annuel de la CSST, que c'est
une faible minorité, au plus 16% à 20%, qui va
être vraiment l'affaire de la CSST.
On se demande s'il y aura une compensation quelconque? Est-ce qu'il y
aura une réduction des effectifs de la CSST? Est-ce qu'il y aura un
ajustement quelconque à la bureaucratie presque monstre qui est
créée par cet organisme maintenant que vous allez ajouter au
fardeau de l'employeur, surtout du petit employeur, un pourcentage accru de
responsabilité sous son chef, d'après les articles 58 et suivants
qui vont porter la période où l'employeur sera responsable
à 14 jours.
Nous avons aussi soulevé le cas parallèle durant le
débat en Chambre: les statistiques aussi semblent démontrer que,
chaque fois que vous augmentez le nombre de jours où des indemnisations
sont données, le taux d'accidents semble monter parallèlement.
C'est dire que beaucoup de petites entreprises, la grosse majorité des
entreprises, vont avoir affaire, comme l'a souligné mon collègue
de Viau, à une bureaucratie additionnelle, des dépenses de frais
opérationnels qu'elles ne peuvent pas se payer. C'est très bon de
dire: On va rembourser cela à l'employé, à l'employeur
mais il faudra que l'employeur ajoute un coût additionnel en plus
d'avoir, en fait, le travail qui était fait au préalable par la
CSST et transféré à l'employeur.
La deuxième question qui me préoccupait et que mon
collègue de Mont-Royal, je pense, a souligné de façon
très éloquente, c'est toute la question du processus d'appel. Je
pense aussi que mon collègue de Viau a souligné cela et le
député de Sainte-Marie, je m'en souviens. Toute la question de
l'équité par rapport au droit d'appel, la comparaison entre le
droit d'appel actuel et le droit d'appel prévu par la loi. Alors,
après la décision, aujourd'hui, comme nous le savons, c'est le
bureau de révision qui se prononce et ensuite il y a l'appel à la
Commission des affaires sociales.
Maintenant, ce sera une révision administrative; on peut comparer
cela avec le bureau de révision actuel. Mais après ce sera un
appel à une Commission d'appel qui est formée selon la loi.
Alors, il faut se poser quelques questions.
D'abord la question d'équité. Il faudra se demander si la
Commission d'appel qui sera instituée par la loi va être aussi
impartiale qu'une Commission des affaires sociales qui est certainement en
dehors du giron du même ministère, en dehors du giron de la CSST.
Il me semble que, quand le droit d'appel a été institué
à la Commission des affaires sociales, certainement cette constatation,
cette préoccupation a dû être très, très
importante de situer ce droit d'appel à une commission qui ne relevait
pas de la CSST elle-même ou du ministre responsable. (17 h 15)
On ne fait aucun procès d'intention ni à la CSST, ni au
ministre responsable, mais il est certain que tout le processus d'appel dans
tout le système juridique est justement d'essayer d'avoir le plus grand
partage possible des responsabilités afin qu'il n'y ait pas une
situation où on pourrait se mettre en conflit d'intérêts.
Là, c'est le gouvernement - si je lis bien - qui nomme les douze
commissaires à part le président et le vice-président. Le
gouvernement se donne le droit de procéder à la sélection
des commissaires à la Commission d'appel. Il faut se demander pour la
nomination de ces commissaires d'appel de qui le gouvernement recevra des
recommandations. Il est évident que le gouvernement acceptera la
recommandation de la CSST elle-même et du ministre en charge. Il me
semble que nous arrivons à une situation où certainement le droit
d'appel actuel à la Commission des affaires sociales est beaucoup plus
impartial en principe que celui qui est prévu dans la loi 42. Il faut
aussi se demander: Qui va faire les frais de toute cette bureaucratie
additionnelle? La loi est tout à fait silencieuse là-dessus. Nous
aurons 12 commissaires. Parmi ces 12 commissaires, il y en aura un qui sera
président, il y en aura un qui sera vice-président. Il y aura
toute la question d'honoraires. Il y aura des assesseurs qui vont être
employés. Il y aura une banque centrale de jurisprudence qui sera
créée. Il y aura tout un système d'informatique qui sera
créé. Qu'est-ce que c'est que cette bureaucratie monstre qu'on va
créer, quand aujourd'hui nous avons déjà un
mécanisme qui a travaillé sur cette question et qui a
sûrement lui-même établi des expériences, un
historique, créé sans doute une banque d'information et de
jurisprudence? Le ministre pourrait nous rétorquer: Mais oui, mais cela
fonctionne mal, il y a beaucoup trop de délais: en fait, notre
collègue de Frontenac en a souligné. D'accord.
Est-ce que la chose la plus simple ne serait pas d'entendre les gens de
la Commission des affaires sociales pour savoir vraiment ce qu'il faudrait
faire pour améliorer ce processus au sein de la Commission des affaires
sociales, qui après tout a acquis toute une expérience, un
cheminement sur cette question, plutôt que d'aller créer, encore
une fois, une nouvelle bureaucratie qui, en plus, est obligée de faire
face à une possibilité tout à fait distincte puisque la
nomination des commissaires, c'est sûr, d'après la loi, pourrait
se faire par une procédure établie par un règlement du
gouvernement, la procédure de sélection. À ce
moment-là, ne peut-on pas dire que la commission, quoique en
théorie elle sera tout à fait démarquée de la CSST,
ne sera pas presque une extension de la CSST et du ministère en
place?
Nous croyons fondamentalement que cette question de la commission
d'appel est si importante qu'elle devait être vue. Nous demandons au
ministère de revoir toute cette question et d'essayer, si le
mécanisme de la Commission des affaires sociales est défectueux
dans un certain sens et s'il y a des délais, d'améliorer les
choses. Est-ce que le ministre a évalué les coûts de la
nouvelle commission d'appel? Qu'est-ce qui nous dit dans la loi qui va payer
pour cela? Qui est responsable de payer pour la commission d'appel? Est-ce que
le coût de la commission d'appel sera à la charge du fonds
consolidé du Trésor? Est-ce qu'il va sortir du budget de la CSST?
Est-ce qu'il va sortir du budget du ministre? À ce moment-là, si,
par exemple, la commission d'appel est financée par la CSST ou par les
fonds du ministère, est-ce que cela ne crée pas une espèce
de lien entre l'un et l'autre? Si, par exemple, la commission d'appel
dépend, pour ses budgets, de la CSST, est-ce que cela ne cause pas des
dangers qu'il y ait un manque d'indépendance de la commission par
rapport à la CSST, ce qui ne serait pas le cas pour la Commission des
affaires sociales?
Nous posons ces questions au ministre et nous espérons que, par
rapport à des choses que nous pensons fondamentales, il sera assez
ouvert pour peut-être ne pas faire acte sur ce projet de loi qui, comme
l'a souligné un de mes collègues, est une affaire immense. Nous
avons l'étude des premiers 100 articles avec les commentaires de notre
recherche. 100 articles regardez c'est presque... Comment peut-on travailler
sur tout cela et arriver à des conclusions rationnelles? C'est à
se demander, quand on a des livres devant soi, si on pense à la
bureaucratie que tout cela va créer. Alors j'espère que le
ministre va avoir un esprit d'ouverture et voudra écouter nos
suggestions au long de l'étude. Merci.
La Présidente (Mme Juneau): Merci beaucoup, M. le
député.
La parole est maintenant au député de Beauharnois.
M. Laurent Lavigne
M. Lavigne: Merci, Mme la Présidente.
Justement, je vais très brièvement ouvrir avec en gros les
dernières paroles du député de...
La Présidente (Mme Juneau): De Nelligan.
M. Lavigne: De Nelligan, qui fait appel à la
réceptivité du ministre. Je pense que le ministre dans son
ouverture verbale, tout à l'heure, nous a justement montré sa
réceptivité intellectuelle à examiner la loi article par
article. Je suis convaincu que le ministre ne l'a pas seulement dit, mais qu'il
est prêt à cet exercice et je suis content aussi de l'attitude qui
semble vouloir se dégager des gens de l'Opposition et des
députés indépendants face à l'étude qu'on
entreprend maintenant sur une loi que je considère d'une aussi grande
importance. Elle est importante sur le plan économique parce qu'on sait
que finalement ce sont les patrons qui ont à en assumer les coûts
et que c'est important. Si l'économie va bien au Québec, il y a
des chances d'avoir plus de travail et, s'il y a plus de travail, il va y avoir
moins de chômage.
Il y a aussi toute l'autre dimension qui nous démontre à
quel point cette loi est importante. C'est qu'on parle d'accidents du travail,
de maladies professionnelles pour nos travailleurs et nos travailleuses au
Québec. Donc, cette loi doit être passée non pas à
la vapeur, dans la partisanerie, mais avec le plus d'ouverture d'esprit et le
plus d'objectivité possible, car on ne parle pas de n'importe quoi quand
on parle de l'économie de notre pays et de la réparation ou de
l'indemnisation des travailleurs qui ont eu la malchance de subir un accident
du travail ou une maladie professionnelle. Donc, je sais qu'il y a des
principes nouveaux dans cette loi qui, au premier abord, m'apparaissent
intéressants. Qu'on parle du principe de réadaptation, justement.
Cela n'existait pas dans l'ancienne loi. Cela comprend plusieurs articles. On
aura l'occasion de les examiner un à un et si, effectivement, dans tout
le chapitre qui touche la réparation, on s'aperçoit que, encore
là, il y a des améliorations à apporter, je suis
prêt à les examiner de près, je suis prêt à
prendre en considération les propositions ou les recommandations que
pourront nous faire les députés de l'Opposition et les
députés indépendants. Si les recommandations qu'ils nous
font vont dans le sens de bonifier la loi, je pense que c'est ce que le
ministre nous a laissé entendre tout à l'heure dans son premier
exposé, je suis prêt à contribuer.
On parle aussi d'un autre principe qui, je pense, a été
largement discuté en commission parlementaire quand les
différents groupes sont venus nous présenter leur mémoire.
C'était la question du choix du médecin. À mon avis, on
l'a introduit comme on voulait le voir introduit dans la loi. Je pense que cela
ne fait ombrage ni au côté patronal, ni au côté
syndical. À la lecture de la loi telle qu'on la retrouve, si on tient
compte de ces amendements, je pense que toute la question du choix du
médecin règle les lacunes que la vieille loi comprenait.
L'obligation pour le patron de reprendre son employé après un
accident de travail, je pense que cela est un élément nouveau
aussi que je considère comme très positif. Il y a bien sûr
des termes comme "emploi convenable". On pourra en discuter dans
l'étude article par article et voir si vraiment le terme
"convenable" correspond effectivement à ce à quoi on veut que
cela corresponde. Je sais que tout au long des dernières discussions,
des rencontres que l'on a pu avoir avec les gens sur le terrain, même
dans nos bureaux de comté, le terme "emploi convenable" semblait
inquiéter certaines personnes. Je suis prêt à ce qu'on en
discute à nouveau lors de l'étude article par article et si on
avait un terme qui correspondait davantage à ce qu'on veut voir vraiment
introduire dans la loi, mon Dieu, on en discutera et on conviendra ensemble
d'un terme qui pourrait être plus précis. L'obligation pour
l'employeur de faire la preuve que l'accidenté ou que l'employé
souffre d'une maladie professionnelle incombe à l'employeur maintenant;
on a renversé la vapeur à ce niveau-là comparativement
à l'ancienne loi. Je pense que cela est un élément majeur,
un élément important. Combien d'employés n'avaient pas le
courage, les connaissances ou l'argent pour partir un débat ou un
procès afin de démontrer et faire la preuve que l'accident avait
bel et bien eu lieu en milieu de travail, que la maladie dont il souffre
dépend de son travail. Le fardeau de la preuve est complètement
renversé maintenant. Je pense que c'est un principe nouveau dans la loi
qui, à mon avis, est à l'avantage du travailleur.
Le droit d'indemnité en remplacement du revenu aussi, je suis
sûr que c'est un chapitre qui va être largement discuté en
commission parce qu'on vient changer un principe; on parle plutôt du
remplacement d'un revenu que d'une rente viagère. Donc, je suis
sûr qu'à ce chapitre il y aura des suggestions qui nous seront
faites de la part de l'Opposition et des députés
indépendants. Moi aussi, je suis prêt à regarder et
à examiner en profondeur toute cette question de l'indemnité.
Le député de Nelligan semblait très inquiet, dans
son intervention, en ce qui a trait aux quatorze jours qui devront être
assumés d'une certaine façon par l'employeur. Il disait
lui-même que le fait de passer de six à quatorze jours diminuait
d'environ 80% les cas à la CSST. Donc, s'il y avait 80% moins de cas
à la CSST, cela veut dire 80% moins de dossiers, de paperasse, avec
comme conséquence une rapidité d'action et une diminution des
coûts administratifs, car avec les 14 jours, cela ferait autant de
paperasse de moins qui entrerait à la CSST, et non pas un mince
pourcentage, 80% des cas.
Donc, à première vue en tout cas, il m'apparaît que
cela devrait amener une diminution des coûts de la CSST et par le fait
même laisser dans la banque ou dans le fonds consolidé plus
d'argent pour intervenir auprès des travailleurs, des travailleuses qui
auraient la malencontreuse chance d'avoir un accident du travail ou une maladie
professionnelle.
En tout cas, quand on sera rendu à ces articles, vous ferez
valoir votre point de vue et on verra si on doit modifier ou changer, soit des
termes ou des principes. Mais moi je pense, en tout cas, à
première vue que le principe me paraît correct.
Mme la Présidente, je pense que ce qui est important, pour moi,
dans cette loi, c'est de faire en sorte... Quand on a écouté les
députés de l'Opposition et les députés
indépendants lors de l'étude du principe de la loi en
deuxième lecture en Chambre, je ne sais pas si c'était l'effet de
la télévision qui ne leur faisait pas admettre trop que la loi
avait quand même des bons côtés. Tour à tour, ils ont
maintenant admis que, finalement, la loi n'était pas seulement mauvaise,
mais qu'elle avait quand même des bonnes choses dedans. Cela on ne l'a
pas entendu beaucoup lors de l'étude du principe en deuxième
lecture.
Par contre, ici, tous et chacun, je l'ai remarqué quand ils sont
intervenus il y a quelques minutes, ont souligné - et cela n'avait pas
l'air de les embarrasser de le dire - que la loi apportait des
éléments nouveaux ou une nette amélioration sur
l'ancienne.
Je considère, moi aussi, que la loi, évidemment, a
au-delà de 500 et quelques articles; c'est beaucoup. J'aurais
aimé mieux la réduire. Il y a des amendements en plus de cela.
C'est vrai que c'est volumineux, et le député de Frontenac disait
que cela pouvait amener des procès et de la paperasse additionnelle;
s'il y avait possibilité de la réduire, j'aimerais bien cela,
mais j'en doute.
De toute façon, mon objectif est de faire en sorte qu'en
conclusion, quand viendra le temps de voter et de mettre en force cette
nouvelle loi, la loi 42, que ce soit meilleur que l'ancienne loi. C'est le but
que je vise et je vais m'évertuer tout au long de nos travaux, Mme la
Présidente, à améliorer, par cette loi, le sort des
travailleurs et des travailleuses qui auront eu la malchance d'être des
accidentés du travail ou qui auront la malchance de subir ou de
connaître des maladies professionnelles. Merci, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Juneau): Merci, M. le
député. Est-ce qu'il y a d'autres députés qui
souhaiteraient intervenir à ce moment-ci des remarques
préliminaires?
M. Dussault: Mme la Présidente, s'il n'y a pas d'autres
intervenants... Quelques secondes, à la suite des propos tenus par notre
collègue de Beauharnois. Il est l'adjoint parlementaire et il disait
être sûr de l'ouverture du ministre à l'égard des
propositions qui seraient faites par les députés de l'Opposition
et les députés
indépendants. Je voudrais dire que je suis certain aussi que le
ministre se montrera disposé à écouter aussi les
propositions des députés ministériels. J'en ai fait une
tout à l'heure à la suite de celle de M. le député
de Sainte-Marie et, entre autres, je voudrais dire que des questions de
délai on va en retrouver à travers la loi assez
régulièrement. Cela me préoccupe beaucoup parce que ces
questions de délais d'application de la loi au service des travailleurs
font que, quand ils sont trop longs, il y aura une victime en fin de compte.
Cela me préoccupe beaucoup. Je vais surtout surveiller cela et si,
effectivement, il me paraît que quelque chose peut être
amélioré je vais être un de ceux qui vont vouloir que le
ministre se montre ouvert à des propositions, même des
députés ministériels. Je n'en doute pas. Cela sera
sûrement le cas. (17 h 30)
La Présidente (Mme Juneau): Oui, M. ledéputé. Étant donné que vous avez
épuisé votre temps de parole, M. le député de
Viau...
M. Cusano: En tant que commentaires préliminaires...
La Présidente (Mme Juneau): Oui, on est encore aux
remarques préliminaires et M. le ministre n'avait pas utilisé
tout son droit de parole, alors je donne la parole à M. le ministre,
s'il vous plaît.
M. Raynald Fréchette (réplique)
M. Fréchette: Merci, Mme la Présidente, comprenez
que je ne reviendrai pas sur toutes les questions que tout un chacun a
soulevées. Je n'aurais pas suffisamment de temps et,
deuxièmement, plusieurs d'entre elles vont faire l'objet de nos
discussions lorsque nous arriverons à l'article particulier qui est en
relation avec le problème soulevé. Je veux cependant revenir sur
certains des aspects qui ont été soulevés et, en
même temps, répondre à une question spécifique du
député de Viau et à une autre, spécifique
également, du député de Sainte-Marie.
Le député de Viau m'a d'abord demandé si, lorsque
les amendements allaient être déposés a la commission, les
parties intéressées pourraient en prendre copie. Il me
paraît évident, Mme la Présidente, que, dès lors
qu'un document est déposé ici, il devient public et tous ceux et
toutes celles qui veulent en obtenir une copie peuvent le faire sans aucune
espèce de difficulté. Deuxièmement, je signalerai au
député de Viau que nous allons, quant à nous, prendre
toutes les dispositions nécessaires pour faire parvenir à ceux et
à celles qui le souhaiteraient une copie de ces amendements. Quand je
dis à ceux et à celles qui le souhaiteraient, comprenez qu'il y a
une espèce de priorité à établir vis-à-vis
des groupes que nous avons entendus en commission parlementaire, à la
fin du mois de février et au début du mois de mars dernier.
Un autre aspect de l'intervention du député de Viau que
vous me permettrez de relever rapidement, Mme la Présidente, et je pense
d'ailleurs que le député de Châteauguay y a
référé, il ne faudrait quand même pas qu'il y ait
une confusion entre le projet de loi que nous sommes en train d'étudier
et ce qu'a été la loi 17 lorsqu'elle a été
adoptée en 1980. Nous ne sommes pas à entreprendre l'étude
d'une loi de prévention des accidents du travail, ni des maladies
professionnelles. Tant mieux si, en le faisant, on retrouve des dispositions
dont les effets sont, secondairement, d'arriver à atteindre cet
objectif. Je voudrais bien que l'on se souvienne que c'est la loi 17 qui visait
ces objectifs et qui est en train de les atteindre. Cette loi n'a pas encore
cinq ans et déjà il y a des améliorations substantielles
à bien des égards en termes de prévention d'accidents et
de maladie? par rapport à la situation qui existait auparavant.
Le député de Viau s'est également interrogé
sur, d'une part, le mécanisme des comités de santé et de
sécurité et, d'autre part, sur leur nombre, s'il en existe encore
au moment où l'on se parle. Mme la Présidente, est-il
nécessaire de rappeler qu'autant la loi 17 que les organismes
institutionnels ou d'autres natures qu'elle prévoyait retenaient comme
principe de fonctionnement l'idée qu'il fallait que tous ces
mécanismes soient alimentés par les parties qui étaient
intéressées et impliquées par la santé et la
sécurité? Cela procédait d'ailleurs aussi d'un principe
fondamental qui a présidé à la création de la
commission elle-même. Or, à l'intérieur des comités
de santé et de sécurité, c'est donc paritairement qu'on
retrouve des représentants des parties, pour s'assurer qu'à
l'intérieur de l'entreprise l'on convienne ensemble des moyens à
prendre pour s'assurer précisément de la prévention. Le
député de Viau me demandait également: Combien y en a-t-il
de formés au moment où l'on se parle? Je ne lui donnerai pas de
détail, sauf peut-être de lui dire qu'il y en a, en moins d'une
année, 788 qui ont été mis sur pied et principalement dans
des entreprises dont les activités se retrouvent à
l'intérieur de groupes qu'on a convenu de classifier comme étant
des groupes prioritaires.
Retenons qu'il n'y a pas plus d'une année, je crois, que le
règlement autorisant ou décrétant la création des
comités de santé et sécurité a été
adopté et, déjà, à l'intérieur d'une
année, il y a ce nombre de
788 comités de santé et sécurité qui ont
été formés.
Mme la Présidente, permettez-moi également que je
relève une affirmation du député de Viau qui m'apparaft,
quant à moi, procéder probablement d'une mauvaise
compréhension d'une des dispositions que l'on retrouve dans la loi. Le
député de Viau a déclaré, me semble t-il, que le
forfaitaire que l'on retrouve dans la loi remplace la rente viagère. Il
m'apparaît tout à fait élémentaire que c'est
là une mauvaise interprétation; je ne dis pas qu'il y a de la
mauvaise foi, mais c'est une mauvaise interprétation du texte de la loi
et des principes qu'on y retrouve eu égard et strictement eu
égard à la réparation économique d'un accident du
travail.
Je ne vous parle pas de la réparation en termes de
réadaptation avec ces trois chapitres bien précis: physique,
professionnel et social, mais sur le plan strictement économique. Je
pense qu'on va ensemble convenir qu'un régime de réparation
d'accident ou de maladie professionnelle doit avoir comme objectif principal de
replacer l'accidenté dans le même état qu'il était
au moment où son accident est arrivé. Je pense que
là-dessus on devrait être en mesure de s'entendre tous assez
facilement. C'est très précisément ce que fait la loi
actuelle.
La loi actuelle prévoit qu'un accidenté, après la
consolidation de sa lésion, sera replacé dans la même
situation économique que celle dans laquelle il était au moment
où son accident est arrivé. Donc, en termes de revenu qui
était autrefois son salaire, il se retrouvera, comme je viens de le
dire, dans la même situation, c'est-à-dire suivant les
circonstances particulières dans lesquelles on peut se retrouver.
S'agit-il d'une incapacité totale et permanente? S'agit-il d'une
incapacité partielle temporaire? Suivant les circonstances dans
lesquelles on peut se retrouver, le principe de l'indemnité de
remplacement du revenu est là pour faire en sorte que l'accidenté
se retrouve dans la même situation.
Quand on parle du forfaitaire, Mme la Présidente, c'est pour
rejoindre l'objectif qu'un accidenté qui subit un préjudice dans
son intégrité physique ou autre puisse être, d'une certaine
façon, compensé pour ce préjudice. C'est ce qu'on est
convenu d'appeler, dans des termes scientifiques, le déficit
anatomophysiologique.
L'accidenté, donc...
M. Bisaillon: Combien?
M. Fréchette: Le déficit anatomophysiologique.
L'accidenté, donc, est placé dans une position telle qu'il
recevra son indemnité de remplacement du revenu à laquelle devra
s'ajouter ce montant forfaitaire dont on parle qui correspondra au degré
d'incapacité dont il est affecté.
Quand on plaide, qu'on essaie de nous convaincre que le forfaitaire
remplace la rente viagère, je pense qu'il était important de
replacer la discussion dans son véritable contexte à cet
égard. D'ailleurs, je l'ai fait au moment de l'étude de
l'adoption du principe; j'ai rappelé à nos amis de l'Opposition
qu'ils sont les initiateurs de ces principes dans nos lois. Le
député de Frontenac y a référé tout à
l'heure; en 1975, la loi 52 a été adoptée à la
suite d'un long conflit dans l'amiante à Thetford-Mines et on a
retrouvé dans la loi 52 de 1975 exactement le principe que l'on retrouve
dans la loi 42 en termes de réparation économique. La loi 52
disait: Une indemnité de remplacement du revenu pour quelqu'un qui est
affecté d'amiantose accompagné du paiement d'un montant
forfaitaire. Nous avons pris plaisir ces derniers temps à fouiller les
débats, les journaux de l'Assemblée législative de
l'époque pour, à notre grande satisfaction d'ailleurs, retrouver
des argumentations du gouvernement de l'époque qui disait que le
régime proposé dans la loi 52 était, de toute
évidence, plus équitable et répondait plus
adéquatement au besoin des accidentés, dans ce cas précis,
des amiantosés et des silicoses.
Or, Mme la Présidente, je pense qu'il est important de se
rappeler cette situation puisque, encore une fois, à tous égards
quant aux principes, la loi 42 reconduit l'indemnisation prévue par la
loi 52 et adoptée par le gouvernement Bourassa en 1975.
On a fait beaucoup état, également, de cette institution
nouvelle qui serait une commission d'appel. Remarquez que les observations qui
ont été soumises de part et d'autre ont retenu mon attention
pendant tout le temps de l'étude de la loi, des travaux
préliminaires à sa préparation, et continuent de me
préoccuper. Je vous le signale sans aucune hésitation.
Je voudrais cependant, ne serait-ce que pour en mettre les
éléments sur la table, que l'on songe à la situation
suivante. Toutes les parties que nous avons entendues en commission
parlementaire, autant patronale que syndicale, ont convenu qu'il fallait
étendre les champs de juridiction d'appel. Les travailleurs nous ont
dit, par exemple: Vous devriez rendre "appelable" une décision de la
commission en matière de réadaptation. Les employeurs nous ont
dit: Vous devriez introduire des dispositions en vertu desquelles, si nous ne
sommes pas satisfaits d'un avis de cotisation que nous émet la
commission, nous puissions aussi nous retrouver devant un palier d'appel. Donc,
toutes les décisions actuellement rendues par la commission et qui ne
sont pas "appelables" vont devenir "appelables". Alors, la question
fondamentale qui se pose: Est-ce que la
Commission des affaires sociales est l'institution habilitée
à entendre toutes ces causes, même le voudra-t-elle? À
partir du raisonnement que l'on fait que la Commission des affaires sociales
est un organisme qui a une vocation sociale intéressante que tout le
monde reconnaît, qu'est-ce que la Commission des affaires sociales va
faire devant un appel d'un employeur qui ne sera pas satisfait de son avis de
cotisation, d'un employeur qui va vouloir contester dans les meilleurs
délais possible une fermeture de son usine à la suite d'une
inspection?
Et alors, c'est à partir de considérations de cette nature
qu'on en est venu à la conclusion que l'on sait. Ou bien alors, on
transfère à la Commission des affaires sociales in extenso toutes
les possibilités d'appel ou alors, on enlève de la loi ce que
toutes les parties nous ont demandé, c'est-à-dire la
possibilité d'aller en appel et on revient au statu quo avec les seules
possibilités d'appel du droit à une indemnité ou du
quantum de l'indemnité qui a déjà été
accordée. Alors, on enlève le droit d'appel pour la
réadaptation, on enlève le droit d'appel pour tous les autres
motifs possibles. Alors, c'est là-dessus que la réflexion a
porté et je vous réitère que, quant à moi, toute
suggestion utile propre à couvrir les objectifs pour lesquels il y a une
commission d'appel sera étudiée favorablement.
Je fais un dernier commentaire pour répondre à la demande
très précise du député de Sainte-Marie.
Je dirai simplement ceci, Mme la Présidente. Le
député de Châteauguay l'a soulevé, nous avons
entendu en commission parlementaire 43 organismes dont les uns ont
été là pendant une bonne partie d'une journée
complète d'audition. Ce que je crains au moment où l'on se parle,
c'est que le précédent étant créé pour ces
deux organismes très précis que vous avez identifiés, l'on
ait dans les heures qui vont suivre les mêmes demandes de 10, 15 ou 20
des autres groupes que nous avons entendus en commission. C'est le genre de
situation qui, actuellement en tout cas, me préoccupe. Je dirai
cependant au député de Sainte-Marie que ce que je viens de dire
n'est pas une réponse négative à la suggestion qu'il a
mise sur la table. Et ayant, en particulier, l'assurance que le
phénomème dont je viens de parler ne se produirait pas, je suis
tout à fait disposé à regarder sa suggestion de
très près. (17 h 45)
M. Bisaillon: Est-ce que le ministre me permet une petite
question, comme il l'a fait pendant que je parlais? Est-ce que le ministre ne
serait pas prêt à admettre qu'il y a une distinction, en termes de
précédent, à faire entre la Commission des services
juridiques et la Commission des affaires sociales? La Commission des affaires
sociales est un organisme paragouvernemental, administratif, elle a un tribunal
administratif que la commission convoquerait. Cela n'est pas un groupe
d'intérêt. Elles ne sont pas directement intéressées
dans le projet de loi. Dans ce sens, on pourrait peut-être en arriver
à faire des distinctions.
M. Fréchette: Je voudrais être aussi clair que
possible vis-à-vis du député de Sainte-Marie quand je
parle d'une crainte quant à la possibilité de faire un
précédent en entendant la Commission des services juridiques qui
est venue en commission parlementaire. Cela fera-t-il boule de neige? Est-ce
que, demain, le CPQ ne nous demandera pas une nouvelle audition? La FTQ? La
CSN? C'est ce genre de situation que je veux complètement éviter.
Je signale au député de Sainte-Marie que je suis tout à
fait ouvert à regarder de très près la suggestion qu'il a
faite.
La Présidente (Mme Juneau): Merci, M. le ministre. M. le
député de Saguenay.
Motion pour convoquer la Commission des affaires
sociales
M. Maltais: Mme la Présidente, je voudrais faire motion
qu'en vertu du deuxième alinéa de l'article 237 de nos
règles de procédure la commission de l'économie et du
travail invite des représentants de la Commission des affaires sociales
pour éclairer les membres de la commission de l'économie et du
travail relativement au projet de loi 42, Loi sur les accidents du travail et
les maladies professionnelles, et ceci dans les plus brefs délais.
La Présidente (Mme Juneau): Conformément à
l'article 237, la motion est effectivement recevable, M. le
député.
M. Maltais: Merci, Mme la Présidente. Je vous la donne
pour le texte.
M. Fréchette: Est-ce que la motion du député
de Saguenay vise les deux organismes dont a parlé le
député de Sainte-Marie?
M. Maltais: Non, c'est seulement la Commission des affaires
sociales.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que je pourrais lire la
motion pour éclairer les membres de la commission?
Qu'en vertu du deuxième alinéa de l'article 237 de nos
règles de procédure la commission de l'économie et du
travail invite les représentants de la Commission des affaires sociales
instituée en vertu de la Loi sur la Commission des affaires sociales
pour
éclairer les membres de la commission de l'économie et du
travail relativement au projet de loi 42, Loi sur les accidents du travail et
les maladies professionnelles, et ceci, dans les plus brefs délais.
Je vais faire faire des photocopies pour tout le monde. Est-ce que cette
motion est adoptée par l'ensemble des membres de la commission?
M. Raynald Fréchette
M. Fréchette: Mme la Présidente, je comprends que
le règlement nous permet une intervention de 20 minutes sur la motion.
Je voudrais, quant à moi, utiliser mon droit de parole à cet
égard. Je viens de vous signaler, Mme la Présidente, que je suis
tout à fait disposé à considérer de très
près la demande que soumettait le député de Sainte-Marie,
mais qui a été reprise plus formellement à partir des
dispositions de notre règlement par le député de
Saguenay.
La première observation que je voudrais soumettre, Mme la
Présidente, c'est qu'il ne faudrait pas imaginer, depuis le temps que le
projet de loi est en préparation, que des consultations n'ont pas
été faites avec la Commission des affaires sociales. Il y a eu
effectivement, et j'y ai participé, une rencontre avec son
président, M. le juge Poirier. Nous avons, à ce moment-là,
procédé à obtenir ses commentaires sur la
possibilité que la Commission des affaires sociales soit l'organisme
investi des juridictions d'appel prévues par la loi. Lorsque
effectivement il a été question du fait qu'il y aurait ouverture
sur les matières "appelables" et que toute décision de la
Commission de la santé et de la sécurité du travail
devenait "appelable", je vous signale, Mme la Présidente, qu'il y a eu,
à ce moment, passablement de réserves de la part du
président de la Commission des affaires sociales quant à se voir
investi, avec ses commissaires, de tout ce champ de juridiction. Il y a
même eu, à un certain moment, des discussions assez fermes sur le
fait que c'était presque impensable de se retrouver devant la Commission
des affaires sociales avec la contestation, comme je le disais tout à
l'heure, d'un avis de cotisation.
Deuxièmement, je sais aussi à ce stade-ci, je peux le dire
sans hésitation, que la Commission des affaires sociales ne serait pas
actuellement, en tout cas, "disposée" -entre guillemets - à
entendre des dossiers de réadaptation. La Commission des affaires
sociales ne voudrait pas se voir confier, avec le mécanisme prévu
dans la loi, d'abord le droit à la réadaptation qui est reconnu
dans la loi et, deuxièmement, le genre de réadaptation qu'on y
retrouve, la réadaption physique, sociale et professionnelle.
La Commission des affaires sociales a, là-dessus, des
réserves sérieuses et elle nous les a d'ailleurs
communiquées. Assez curieusement aussi, les groupes que nous avons
entendus en commission parlementaire, aux mois de février et mars,
m'apparaissaient, à cette époque, assez réceptifs à
la création de l'organisme qu'on retrouve dans la loi. C'est
après que la loi a été écrite que les
représentations ont repris à cet égard et qu'on nous a
dit: On voudrait garder notre Commission des affaires sociales telle qu'elle
est.
De deux choses l'une, Mme la Présidente, ou on enlève de
la loi - cela contribuerait à réduire le volume - toutes les
matières qui y sont actuellement "appelables" et on conserve comme
matière "appelable" le droit à l'indemnité et le quantum
qu'on conteste et puis on reste à la Commission des affaires sociales,
ou bien on retient les suggestions des parties de rendre toutes les
matières "appelables" et on fait autre chose.
C'est le dilemme dans lequel, actuellement, on se trouve. Encore une
fois, s'il y a des suggestions concrètes qui sont mises sur la table
pour arriver à essayer de voir quel mécanisme pourrait être
retenu, je suis tout à fait disposé à les
considérer de près.
Il y a également, Mme la Présidente, en termes de
consultation beaucoup de temps qui y a été consacré.
Remarquez qu'il fallait le faire et je ne suis pas en train de dire que cela
n'aurait pas dû être fait, ce n'est pas cela que je suis en train
de dire. Ce à quoi je veux en venir, la conclusion à laquelle je
veux en arriver, c'est que tous ceux qui l'ont voulu, autant à la
commission parlementaire qu'en rencontre informelle, ont eu l'occasion de venir
exprimer leur point de vue là-dessus. Nous avons donné aussi
à tout le monde l'occasion de récrire des mémoires. II n'y
a pas que la Commission des services juridiques qui a récrit des
mémoires, le Conseil du patronat a récrit un long mémoire
et suggère fortement que la Commission d'appel demeure telle qu'on la
retrouve dans le projet de loi. Le Conseil du patronat ne serait pas heureux si
on disait: On retourne tout cela à la Commission des affaires
sociales.
Je crois pouvoir vous dire que la Fédération des
travailleurs du Québec est relativement satisfaite du mécanisme
qu'on retrouve dans la loi telle qu'elle est écrite actuellement et
plusieurs autres organismes ont manifesté cette même
satisfaction.
Je vous signale, Mme la Présidente, que je ne sais pas - c'est la
question fondamentale que je me pose - si le fait de recevoir en consultation
le président de la Commission des affaires sociales contribuerait
à mettre sur la table des éléments nouveaux ou des
suggestions nouvelles qui permettraient de rejoindre les objectifs louables que
les uns et les autres ont en tête.
S'il fallait, effectivement, retenir la
suggestion de tout envoyer à la Commission des affaires sociales,
remarquez que la Commission d'appel qui est prévue dans la loideviendrait, à la Commission des affaires sociales, une
espèce de chambre particulière sur la réparation des
accidents du travail et tous les autres mécanismes et qu'elle serait
tout aussi bureaucratique - pour utiliser l'expression du député
de Nelligan - que la commission à laquelle on parle et on
réfère dans la loi.
M. Bisaillon: Si vous me le permettez, je ne veux pas en faire
des questions de procédure. Je comprends que le ministre essaie de se
donner deux heures additionnelles, mais j'ai l'impression qu'il nous parle
plus...
Une voix: Vous faites des procès d'intention, cher
monsieur.
M. Bisaillon: ...maintenant sur le contenu de ce que pourrait
dire ou pourrait faire la Commission des affaires sociales dans la loi que sur
la motion du député qui ne fait que demander la comparution de la
commission. Je pense que l'intervention du ministre devrait se limiter à
nous dire pourquoi, oui ou non, il serait intéressant à recevoir
la commission plutôt que d'entrer sur le contenu, à moins que le
ministre nous dise que, avant de réagir complètement à la
motion du député, il préférerait se donner un peu
de temps à l'heure du souper, auquel cas on n'écoutera pas cela
pour rien, on ne tuera pas le temps. Si c'est trois minutes qu'il nous reste,
on peut bien ajourner maintenant et demander au ministre de nous revenir
après le souper avec...
M. Fréchette: Je dirai simplement au député
de Sainte-Marie, Mme la Présidente, que je suis convaincu qu'il y a des
avantages à recevoir le président des affaires sociales comme il
y a des inconvénients aussi. À partir des dernières
observations du député de Sainte-Marie, je suis tout à
fait disposé à y réfléchir davantage.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce qu'il y a consentement
pour qu'on ajourne les travaux jusqu'à 20 heures?
Une voix: Oui, consentement.
La Présidente (Mme Juneau): Oui, merci. À 20
heures.
(Suspension de la séance à 17 h 57)
(Reprise à 20 h 7)
La Présidente (Mme Juneau): La commission de
l'économie et du travail reprend ses travaux. La parole était au
ministre.
M. Cusano: Mme la Présidente, j'aimerais à ce
moment-ci, compte tenu de l'entente que nous avons eue ce matin, faire un
remplacement, remplacer M. Polak, qui remplaçait Mme Dougherty, par M.
Paradis.
M. Fréchette: Pas d'objection, cela va. C'est, d'ailleurs,
conforme à l'entente, comme vient de le dire le député de
Viau.
La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.
M. Fréchette: Mme la Présidente, au moment de la
suspension de nos travaux à 18 heures, nous étions en train de
discuter de la motion du député du Saguenay dont l'objectif est
de demander que notre commission puisse procéder à l'audition du
président de la Commission des affaires sociales. J'ai eu l'occasion
d'indiquer, Mme la Présidente, autant dans mes remarques
préliminaires qu'au moment où nous avons discuté du fond
de la motion, que j'étais effectivement sympathique à la demande
que nous soumet maintenant par motion le député de Saguenay et,
à cet égard-là, je vous signale que je n'ai pas à
ce stade-ci changé d'opinion.
J'ai aussi admis à 18 heures, peut-être un peu candidement,
mais c'était tout à fait conforme à la
réalité, que je voulais prendre le temps de procéder
à une consultation, ne serait-elle que très préliminaire,
sur la question qui nous est soumise. J'ai effectivement, à l'heure du
dîner, Mme la Présidente, fait un peu de consultation en cette
matière, mais je vous signale qu'au moment où l'on se parle je
n'ai pas été en mesure de la compléter, cette
consultation.
Je vous dirai deux choses à cet égard: D'abord, il s'agit
d'une demande qui concerne l'éventuelle audition d'un président
d'un organisme qui relève de la juridiction d'une autre collègue
et il m'apparaît tout à fait élémentaire, convenable
que je puisse établir avec elle une communication à cet
égard-là.
Deuxièmement, il m'apparaît assez clair - en tout cas, ici
je procède par voie de présomption, on me corrigera si je fais
erreur - que l'objectif que l'on vise, ce serait effectivement d'ajouter de
l'argumentation qui amènerait les membres de notre commission à
la conclusion qu'il faille remplacer le mécanisme d'appel qu'on retrouve
actuellement dans la loi 42 par celui qui existe actuellement en matière
d'indemnités. Je vous dirai, Mme la Présidente, que le projet de
loi 42 réimprimé tel que nous l'avons devant nous actuellement
procède d'une décision du Conseil des ministres, donc d'une
décision du gouvernement. Avant d'enclencher tout processus ou toute
mécanique qui conduirait
au changement que l'on vise, vous allez certainement convenir avec moi,
Mme la Présidente, qu'il me faudra soulever la question au Conseil des
ministres, c'est-à-dire à l'endroit où la décision
a préalablement été prise.
Troisièmement, Mme la Présidente, ce dont on est en train
de discuter, encore une fois, c'est ce mécanisme d'appel actuellement
prévu par la loi et sous réserve d'erreur, ce n'est qu'au moment
où on arrivera aux articles 325 et suivants que tout ce mécanisme
sera soumis à notre appréciation et à notre
évaluation.
Dans les circonstances, Mme la Présidente, je soumets aux membres
de la commission la suggestion suivante: que nous suspendions la
décision sur la motion qui a été présentée
par le député de Saguenay, qu'elle soit en quelque sorte tenue en
suspens et, lorsque nous arriverons, dans l'étude du projet de loi, aux
articles spécifiquement concernés, nous disposerons alors de la
motion. C'est une suggestion, Mme la Présidente, que je soumets, encore
une fois, à l'appréciation des membres de la commission.
La Présidente (Mme Juneau): Merci, M. le ministre. M. le
député de Saguenay.
M. Ghislain Maltais
M. Maltais: Merci, Mme la Présidente. Je vous signale, au
départ, que je ne prendrai pas toutes les 20 minutes qui me sont
accordées, en cédant une partie à mon collègue de
Viau qui pourra conclure et apporter certaines précisions sur le sens de
la motion que j'ai présentée cet après-midi.
Mme la Présidente, il s'agit ici, somme toute, d'un
éclairage que les membres de la commission n'ont pas eu l'occasion
d'avoir. Il ne s'agit pas, je ne dirais pas contrairement à ce que le
ministre affirme, de chercher des entraves. Il s'agit d'avoir
l'opportunité d'entendre tous les intervenants. M. le ministre, qui est
un brillant avocat dans la pratique privée, sait très bien qu'on
ne peut pas condamner quelqu'un sans l'avoir entendu. Dans le projet de loi, on
dit que la Commission des affaires sociales doit être remplacée
et, de prime abord, cela m'apparaît une chose peut-être correcte.
Cependant, avant qu'on la condamne et qu'on la remplace, je pense que ces gens
ou le président de la commission, au moment opportun, je suis d'accord
avec vous -demain matin, cela ne m'intéresse pas d'entendre le
président de la commission; au niveau du temps, je pense que
l'Opposition est d'accord avec vous - devraient être entendus lorsqu'on
sera rendu aux articles précis traitant de la commission d'appel.
Cependant, il s'agit ici, je pense, d'une question
d'équité, parce que, tout au long de la commission parlementaire,
nous avons entendu à peu près tous les intervenants qui ont voulu
se faire entendre et qui ont manifesté le désir de se faire
entendre. D'autres aussi ont été convoqués sur
l'insistance, de part et d'autre, de différents groupes au
Québec. Cependant, la Commission des affaires sociales, la commission de
révision, elle qui a un rôle prépondérant à
jouer sur des incidences monétaires, à long et à court
terme, au niveau des accidentés, je pense qu'il est important pour nous
d'avoir son son de cloche, puisque, comme parlementaires, on n'a pas eu
l'occasion... Je l'ai eue une fois, cette occasion d'aller représenter
un de mes électeurs à la commission d'appel et je pense que j'en
ai appris beaucoup. Compte tenu de l'incidence monétaire que cette
commission a sur les accidentés, en toute justice, pour ma part, il
serait important de l'entendre et j'aurais des questions pertinentes à
poser au président de la commission, non pas des questions
négatives, mais des questions fort positives. À la suite des
renseignements que le président nous fournira, peut-être qu'il
nous convaincra aussi de la non-nécessité de cette commission et
que, plutôt, on devrait avoir une commission d'appel.
Le ministre a souligné, cet après-midi, des points fort
intéressants au niveau des cotisations des employeurs. Je suis certain
que la Commission des affaires sociales n'a pas à statuer
là-dessus, sauf qu'avant d'enlever un mécanisme qui,
malgré son imperfection, donnait quand même une certaine
satisfaction, d'après les échos et la perception, en tout cas,
que nous avons de ce côté-ci, je pense qu'il serait avantageux...
Il y a quand même un fait que le ministre a souligné cet
après-midi et qui est très important pour nous autres. C'est que
cette commission d'appel - lui-même nous l'a déclaré cet
après-midi: Écoutez, c'est un ensemble qu'on regarde, c'est un
ensemble qu'on voit - n'est pas encore précisée dans sa
pensée. Elle est inscrite dans le projet de loi, mais comment elle va
fonctionner, c'est une chose qu'on n'a pas encore.
À la mesure d'une étude approfondie du projet de loi
traitant de cette section et à la mesure aussi de l'éclairage que
pourrait apporter la Commission des affaires sociales, celle-ci pourra sans
doute nous permettre de voir le degré de satisfaction, son degré
de compétence. Aussi, il y a une chose très importante. Si la
Commission des affaires sociales elle-même nous dit qu'elle ne veut plus
s'en occuper, sans doute qu'elle aura de bonnes raisons et peut-être que
ces raisons seront concordantes avec celles que le ministre nous a
expliquées cet après-midi. M. le ministre, vous devez comprendre
que nous n'avons pas eu l'occasion d'interroger la Commission des affaires
sociales et c'est pour cette raison qu'on désirerait l'avoir.
Merci, Mme la Présidente, et je cède le reste de mon temps
à mon collègue de Viau.
La Présidente (Mme Juneau): Étant donné que
le député de Sainte-Marie avait demandé la parole, est-ce
que je peux lui donner la parole? Ensuite, ce sera vous, M. le
député de Viau.
M. Cusano: II n'y a pas de problème, Mme la
Présidente, vous pouvez continuer.
Une voix: Entendez-vous donc, tous les deux.
M. Cusano: Oui, on va s'entendre très bien.
M. Lavigne: Si vous me permettez, M. le député de
Bisaillon, Mme la Présidente... C'est le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: C'est M. Sainte-Marie dans le comté de
Bisaillon.
M. Lavigne: Je voudrais faire un changement. Je voudrais aviser
la commission que M. Le Blanc, de Montmagny-L'Islet, serait remplacé par
M. Gagnon, député de Champlain.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Guy Bisaillon
M. Bisaillon: Si on me le permet, Mme la Présidente, je
vais essayer de développer une argumentation peut-être un peu
différente, mais, au préalable, je voudrais indiquer au ministre
que je n'ai vu nulle part, dans la motion du député de Saguenay,
le moment où cela devait se tenir. Rien dans sa motion ne nous dit que
ce doit être demain matin. Je pense que ce sont des choses qui pourraient
facilement être discutables et s'appliquer, effectivement, comme vous
l'avez suggéré, au moment où on sera rendu là, dans
le projet de loi, ce qui était d'ailleurs dans le sens de la demande que
j'avais formulée au tout début.
Le ministre nous a d'abord indiqué, cet après-midi, les
problèmes qu'il affrontait au moment où il voulait laisser le
droit d'appel à la Commission des affaires sociales, étant
donné qu'on a augmenté les raisons ou les motifs d'appeler. Il
dit que la Commission des affaires sociales n'est peut-être plus
l'instrument et c'est pour cela qu'on en a mis un autre. Donc, il faudra faire
un choix. Il nous dit avoir rencontré le président de la
commission qui lui a expliqué ce qui faisait son affaire et ce qui ne
faisait pas son affaire. Je fais toujours confiance au ministre, mais c'est du
ouï-dire. Pour nous, parlementaires, et pour lui, avocat, c'est du
ouï-dire. Nous, on ne l'a pas entendu le président de la
commission.
Deuxièmement, l'objectif de l'entendre, le président de la
commission, c'est peut-être d'en arriver à répondre aux
souhaits du ministre qui nous implorait de trouver des suggestions, de lui
apporter des suggestions. Je peux bien avoir un certain nombre d'orientations,
mais comment puis-je les lui apporter maintenant sans, au préalable,
avoir vérifié - pour utiliser un mot à la mode de l'autre
côté - la faisabilité auprès du président de
la commission? Avant d'apporter des amendements, avant de faire des suggestions
au ministre, il me semble, en tout cas, qu'il serait normal qu'on
vérifie leur possibilité d'application auprès de celui
qui, éventuellement, à nos yeux, aurait à l'appliquer.
Troisièmement, je comprends que beaucoup de choses se passent au
Conseil des ministres, mais je comprends mal que, sur une motion aussi simple
qui ne crée pas de précédent, parce qu'il a
été clair, quant è nous, en tout cas, qu'il ne s'agissait
pas de faire reprendre les consultations des groupes qui étaient
déjà passés... Quant à moi, c'est justement parce
que la Commission des affaires sociales n'est pas un groupe
d'intérêt, ne fait pas partie des organismes qu'on entend
habituellement, mais est l'autorité, le tribunal administratif
chargé par nos lois, donc par nous parlementaires, d'appliquer les lois
sociales du Québec, parce qu'elle a développé l'expertise.
Cela n'en fait pas un cas d'exception. Ce n'est pas dans ce sens d'ailleurs
qu'on avait proposé cela.
Alors, il n'y a pas de précédent dans le fait qu'une
commission parlementaire entende le président de la Commission des
affaires sociales, pas plus qu'on n'a créé de
précédent en entendant aujourd'hui la Régie du logement
pour la première fois devant une commission parlementaire. Je ne vois
vraiment pas en quoi le ministre serait obligé de retourner au Conseil
des ministres pour voter sur une proposition aussi simple que celle qui lui a
été présentée par le député de
Saguenay. Je comprends qu'il ait besoin de réfléchir; il a eu
deux heures pour cela. Je comprends qu'il ait eu besoin de faire un certain
nombre de vérifications; il a eu deux heures pour cela. Je comprends
qu'il avait peut-être besoin d'une certaine consultation avec ses
collègues, étant donné qu'on semblait sympathique, de ce
côté-là, à cette demande du député de
Saguenay; il a eu deux heures pour cela. D'ailleurs, ils l'ont fait. Je les ai
vus qui discutaient ensemble à l'heure du souper. Je ne vois vraiment
pas ce qui nous empêcherait... En deux heures, le portrait a l'air de
changer beaucoup de votre côté, sans tourner le fer dans la
plaie!
Je pense qu'on pourrait facilement se prononcer favorablement à
la proposition du
député de Saguenay, quitte à endosser aussi le voeu
que le ministre a exprimé, c'est-à-dire de ne les recevoir - les
représentants de la Commission des affaires sociales - qu'au moment
où on en serait arrivé à l'étude de cette section,
à l'étape de nos travaux. Ce sont deux choses tout à fait
distinctes. On pourrait déjà accepter le principe ce soir,
permettre au député de Châteauguay d'aller dans le sens de
ce qu'il nous a annoncé cet après-midi et convenir avec le
ministre, par la suite, que, lorsqu'on en sera arrivé là, on
s'entendra sur les modalités de fonctionnement. Quant à moi, j'ai
déjà annoncé que j'étais prêt à
discuter d'un temps limite à cette audition de la Commission des
affaires sociales.
Que le ministre comprenne bien. S'il appelle des suggestions de notre
part, il faudrait qu'il nous donne aussi les outils nécessaires pour
qu'on puisse les formuler en étant sûrs de ne pas se faire dire
par le ministre, mais bien par la personne véritablement chargée
de son application, que ce que nous proposons comme suggestion n'est pas
applicable.
La Présidente (Mme Juneau): Merci, M. le
député. M. le député de Viau, s'il vous
plaît.
M. William Cusano
M. Cusano: Merci, Mme la Présidente. Au cours des travaux
de la commission parlementaire sur la loi 42, première version, je me
rappelle assez bien qu'un des organismes - je pense que c'était le
Conseil du patronat - à un certain moment, avait demandé au
ministre s'il y avait possibilité, au moment où l'on allait
débattre le projet de loi article par article, que la commission aille
chercher des experts dans le domaine. Il me semble que la Commission des
affaires sociales, depuis 1977 - je peux être corrigé -traite des
accidents de travail. Sur le nombre de cas reçus, Mme la
Présidente, selon les rapports annuels de la Commission des affaires
sociales, déjà, en 1979-1980, il y a eu au-delà de 1000
appels interjetés devant la Commission des affaires sociales; en
1980-1981, cela passait à 2357; en 1981-1982, à 1441; en
1982-1983, à 1805; en 1983-1984, à 2428.
Je voudrais bien, comme le dit le ministre, qu'on attende au moment
où l'on arrive précisément à la commission d'appel,
mais j'aimerais souligner au ministre et au député de
Sainte-Marie que, déjà, à la section II du projet de loi,
dans les définitions, on parle de la commission d'appel, au chapitre des
définitions. Je suis bien prêt, dans un sens, à attendre;
cela serait conditionnel à ce qu'on laisse tomber temporairement
certains articles ou paragraphes du projet de loi.
C'est que cette commission, qui a toute une expertise dans le domaine,
pourrait certainement donner beaucoup plus d'information aux membres de cette
commission et, même, se prononcer sur d'autres aspects du projet de loi,
parce qu'elle a eu à le vivre. Je suis sûr que le ministre a
souvent vu des comptes-rendus de décisions qui ont été
rendues par la Commission des affaires sociales. Alors, la question qui nous a
toujours préoccupés, en ce qui regarde les accidentés, est
celle de l'engorgement des appels logés devant la Commission des
affaires sociales. C'est inacceptable qu'on parle de délais allant
jusqu'à deux ans, Mme la Présidente.
On aimerait, de notre côté, questionner le président
sur ce projet de loi, qui a été conçu par la CSST, avoir
plus d'information, d'opinions sur tous les autres articles du projet de loi,
parce qu'ils ont eu à vivre avec cela. Je ne voudrais pas non plus
éterniser le temps qu'on aurait à notre disposition, mais je
crois que c'est primordial de les entendre, puisqu'ils vont être
appelés à disparaître. Vous nous dites que vous avez eu des
dialogues avec le président et, si je vous ai bien compris, M. le
ministre, eux disent: On ne peut pas tout faire. C'est peut-être vrai, je
n'ai aucune raison d'en douter, mais on aimerait bien qu'ils viennent nous le
dire, nous suggérer des possibilités. Je pense que c'est bien
important.
Je ne verrais pas pourquoi cette motion serait battue, compte tenu du
fait que, depuis le début de nos travaux jusqu'à présent,
il y a eu un grand esprit de collaboration. Tous les députés
membres de cette commission - vous les avez entendus comme moi - étaient
réceptifs à toutes sortes de suggestions. Il me semble que s'il y
a un organisme gouvernemental qui est vraiment habilité à se
prononcer en matière d'accidents du travail, c'est bien l'organisme qui
a à entendre les appels. Je suis prêt, comme je vous l'ai dit tout
à l'heure, à donner au président, une fois que la demande
lui sera formulée, un certain temps pour qu'il prépare sa
présentation. Mais d'attendre, selon le bon loisir du ministre, à
savoir quand elle sera convoquée, je ne suis pas tout à fait
d'accord avec cela.
Je ne prendrai pas tout mon temps, Mme la Présidente, parce que
je voudrais revenir plus tard. Alors, je ne vois pas pourquoi, si le ministre
et les députés autour de cette table étaient tous
réceptifs à des suggestions, on refuserait de recevoir ce que je
crois être l'organisme le plus habilité à parler
d'accidents du travail, spécialement en matière d'appel.
La Présidente (Mme Juneau): Merci, M. le
député. Est-ce qu'il y a d'autres députés qui
souhaiteraient intervenir sur cette motion? M. le député de
Brome-Missisquoi.
M. Pierre-J. Paradis
M. Paradis: Mme la Présidente, lorsque le ministre a
introduit... Est-ce que j'entends des voix, Mme la Présidente?
La Présidente (Mme Juneau): La parole est au
député de Brome-Missisquoi.
M. Paradis: Merci, Mme la Présidente. Lorsque le ministre
a introduit ce projet de loi, j'ai cru, malgré les discours qui ont
été prononcés en deuxième lecture du
côté ministériel, qu'il s'agissait d'émettre des
propositions dans le sens non pas de détériorer le
système, mais de tenter, à tort ou à raison - on en a
discuté au cours de la deuxième lecture - d'améliorer le
système. (20 h 30)
Le député de Saguenay, dans sa grande sagesse, voulait,
sans aucun doute, être renseigné par quelqu'un ou un organisme qui
a de l'expérience dans le domaine, qui a une expérience de
plusieurs années. On demande simplement au ministre d'avoir l'esprit
ouvert et d'inviter la Commission des affaires sociales à venir se faire
entendre, nous révéler son expérience, etc. Le ministre
semble difficile à convaincre. Je ne sais pas si, lui, il l'a
rencontré en privé. Il l'a peut-être rencontré en
privé et il est sans doute en mesure, s'il l'a fait, de nous livrer les
commentaires de cet organisme, mais je doute qu'il l'ait fait.
Ce qui m'inquiète, Mme la Présidente, si on n'invite pas
ces gens de la Commission des affaires sociales, c'est notre manque d'expertise
lorsqu'on aura à se prononcer comme législateurs. Ce qui
m'inquiète davantage - et je l'ai dit au moment de mon intervention en
deuxième lecture - c'est que je crois que ce projet de loi n'est pas
celui de l'honorable ministre du Travail, député de Sherbrooke,
mais bien celui issu des technocrates de la CSST.
Ce qui m'inquiète encore davantage dans ce contexte, Mme la
Présidente, c'est que lorsque vous recevez, à votre bureau de
comté, une personne qui a été victime d'un accident du
travail et qui a un dossier humainement difficile vous communiquez, comme
député de votre comté, avec les services de la CSST.
Là, tout ce qu'on fait, on vous dit simplement que la décision a
été rendue au premier palier et qu'elle est justifiée.
Vous, comme député, vous faites sans doute ce que les autres
députés font, vous tentez d'en savoir davantage et on vous
indique que la seule porte de sortie pour votre électeur, pour cette
victime d'un accident du travail, est de déposer une demande de
révision. Dans une demande de révision, on révise
administrativement.
Vous savez maintenant - parce que cela fait quand même quelques
années que vous êtes député - quelles sont vos
chances d'obtenir une révision différente ou une décision
différente de celle qui a été rendue au premier niveau.
C'est humain, cela. Les gens qui ont rendu une décision au premier
niveau ont un préjugé défavorable à rendre une
décision différente. Vous savez que votre électeur, que
cette personne qui est victime d'un accident du travail a une côte
à remonter tout simplement parce que la décision en
révision est rendue par le même organisme. Et cette côte,
elle est raide et pas facile à remonter.
Mais vdus gardez confiance, Mme la Présidente, parce que vous
dites à votre électeur: C'est vrai que la pente est raide,
qu'elle est difficile à remonter, mais si jamais vous ne
réussissez pas à remonter la pente en révision
administrative, vous pourrez toujours aller devant un organisme qui n'est pas
le même, en tout cas, qui n'est pas issu du même ministère,
un organisme dont le ministre responsable n'est pas le même, un organisme
que les technocrates de la CSST ne contrôlent pas. Vous irez en appel
devant la Commission des affaires sociales. C'est vrai que les délais
sont là. C'est vrai que c'est pénible pour nos gens. C'est vrai
que, lorsqu'on a à leur expliquer pourquoi, on est souvent à
court de réponse.
Concernant les ressources humaines qu'on est prêt à
consacrer à la création d'un nouvel organisme d'appel, est-ce
qu'on n'aurait pas avantage à consacrer ces ressources humaines, ces
énergies, ces ressources financières à améliorer
les services rendus par la Commission des affaires sociales ou par un autre
tribunal? Je vais vous dire pourquoi. Par souci d'apparence
d'indépendance. Je n'oserai pas dire par souci d'indépendance,
Mme la Présidente, mais par souci d'apparence d'indépendance.
Le justiciable qui va en appel devant la Commission des affaires
sociales a au moins l'impression qu'il n'est pas devant le même monde qui
lui a dit non une première fois, qui lui a dit non une deuxième
fois et qui est plus que susceptible, parce que l'humain n'aime pas admettre
qu'il a eu tort, de lui dire non une troisième fois.
Le ministre du Travail - c'est peut-être quelque chose sur lequel
il devrait réfléchir, c'est peut-être une chance
d'ouverture dans le présent débat - a été, je ne
sais plus s'il l'est, membre du barreau, avocat. Je suis sûr que les
principes de justice naturelle sont des principes qu'il a déjà
connus. Je fais appel à ces principes en espérant qu'il ne les a
pas oubliés. Je veux lui rappeler strictement ce que la corporation
professionnelle à laquelle il a appartenu dit sur ce sujet. Je veux tout
simplement lui rappeler qu'en s'opposant à la création d'une
commission d'appel à l'intérieur de la CSST même, donc qui
dépend de la CSST administrativement, le barreau a insisté
sur
les points suivants. J'aimerais que, dans sa réplique, le
ministre me dise quels sont les points avec lesquels il est en
désaccord. Sur quels points le barreau, qui n'a pas
d'intérêt immédiat dans le présent dossier, se
trompe-t-il lorsqu'il parle ou lorsqu'il dit que le ministre ne devrait pas
aller dans la direction où il va pour assurer une indépendance
judiciaire? Vous êtes contre l'indépendance judiciaire, M. le
ministre.
Lorsque le barreau dit qu'il se prononce par souci d'impartialité
et d'objectivité, qu'il ne serait pas affecté par des directives
venant des supérieurs hiérarchiques ou par un risque de
complaisance dans les décisions lorsque approche le temps du
renouvellement du mandat, vous comprenez ce qu'ils veulent dire, M. le
ministre? Parce qu'il y a des commissaires qui sont nommés à la
commission d'appel; ces gens-là sont nommés pour une
période de temps déterminée et ils ont besoin d'avoir des
mandats renouvelés s'ils veulent continuer à exercer leurs
fonctions. À la veille du renouvellement de ces mandats, c'est là
qu'on retrouve le plus souvent devant ces tribunaux administratifs des
décisions plus ou moins bizarres, mais qui ont
généralement tendance à aller de pair avec les
décisions ou le discours politique qu'on entend ailleurs.
On parle d'une commission où les commissaires
posséderaient une connaissance légale essentielle pour
décider des objections à la preuve, de la
prépondérance de la preuve, etc. Le barreau indique que ce ne
sont plus des questions purement administratives qui sont
décidées au niveau de l'appel, mais il y a des questions de
droit. Là, vous pouvez me dire que ce soit à la Commission des
affaires sociales ou que ce soit à la commission d'appel que vous voulez
instituer, qu'on peut remédier à ce point. Donc, on peut avoir
des gens qui ont ces connaissances, quel que soit le niveau.
Est-ce qu'on peut parler dans les deux cas, comme le barreau l'indique,
d'une indépendance face à l'organisme décisionnel de
première instance? Le barreau souligne que, le fait que les membres et
les fonctionnaires impliqués ne relèvent pas du même
ministère, c'est important. C'est important, je ne dirai pas pour que la
justice soit rendue, même si je pense que ce devraient être les
termes utilisés, mais pour qu'il y ait apparence de justice. Le barreau
continue en parlant de respect des principes de justice naturelle.
Naturellement, si le ministre n'est pas d'accord avec le respect des principes
de justice naturelle, il peut poursuivre dans la voie qu'il a entreprise. Le
barreau conclut qu'un organisme qui ne dépend pas du même
ministère peut assurer une meilleure protection des droits des parties.
Mais si le ministre ne veut pas assurer une meilleure protection des droits des
parties, il peut continuer dans la voie qu'il a entreprise.
M. le ministre, lorsque quelqu'un de votre comté va vous voir,
est-ce que vous lui recommandez d'aller plaider sa cause -parce que c'est la
cause du travailleur accidenté dont il s'agit - devant un organisme, une
institution ou une commission, appelons-les comme on veut, qui est à la
fois juge et partie? L'organisme, dans ce que vous proposez, qui aura à
rendre la décision finale, la décision d'appel relève du
même ministère, du même budget. Est-ce que vous
recommanderiez à votre électeur, par souci d'apparence de
justice, par souci d'équité, d'aller plaider devant un organisme
de la CSST? Est-ce que vous ne pensez pas plutôt que ce projet de loi,
qui a été préparé par les technocrates de la CSST,
vise à s'assurer ou à assurer aux technocrates de la CSST qu'ils
auront le plein contrôle sur toutes les décisions qui seront
rendues?
M. le ministre, à partir du moment où vous accordez, comme
gouvernement, le plein contrôle à la CSST sur la première
décision, sur la décision administrative en révision, sur
la décision en appel, à partir du moment où vous accordez
plein pouvoir à cette commission, quelles sont les garanties qui
demeurent dans les mains des travailleurs accidentés ou de leurs
représentants? Est-ce qu'il en reste? M. le ministre, lorsque vous optez
pour qu'un des organismes qui dépend de votre autorité, de votre
volonté, de votre contrôle, devienne à la fois juge et
partie, vous inquiétez tous les citoyens du Québec qui savent et
qui connaissent les risques que cela représente face aux règles
de la justice naturelle, les risques que cela représente face aux abus,
les risques que cela représente non pas pour vous et moi qui occupons
des fonctions de député à l'Assemblée nationale,
parce que nos risques d'être des victimes d'un accident du travail comme
député... Mme la Présidente, oui, on peut toujours tomber
de notre chaise, il y en a qui perdent leur siège de ce temps-ci, mais -
cela n'est pas arrivé de notre côté -cela s'est fait sans
réclamation à la CSST.
M. Maltais: Ils sont assis entre deux.
M. Paradis: Est-ce que vous êtes conscient des risques que
cela représente pour les accidentés du travail? Est-ce que, si
vous étiez vous-même personnellement victime d'un accident du
travail, si un membre de votre famille proche, si un de vos amis ou si un de
vos organisateurs politiques, s'il en reste dans le comté de Sherbrooke,
si un de vos électeurs subissait un accident du travail demain, vous
seriez satisfait de lui dire avec votre formation d'avocat, avec ce que vous
connaissez ou ce que vous avez déjà pratiqué des
règles de la justice naturelle, est-ce que vous seriez satisfait ou
content ou fier de lui dire que
les trois décisions qui auront à être rendues dans
son dossier seront rendues par le même organisme? Ne seriez-vous pas
plutôt fier de lui dire que vous avez participé à une
réforme qui lui garantit que toutes les décisions dans son
dossier ne seront pas rendues par le même organisme? Ne seriez-vous pas
plutôt fier de lui dire après avoir entendu la Commission des
affaires sociales comme le suggère le député de Saguenay,
qu'on en est venu à la décision qu'il fallait améliorer le
processus, conserver l'apparence d'indépendance du processus, mais
l'améliorer? (20 h 45)
En vertu de quel principe de justice naturelle, en vertu de quel
principe d'avantager le travailleur victime d'un accident du travail, en vertu
de quel principe pouvez-vous aujourd'hui vous présenter devant cette
commission et dire: Messieurs, je vous demande d'adopter un article en vertu
duquel on va enlever une apparence de justice à vos travailleurs?
Comment pouvez-vous faire cela, si ce n'est - et c'est la seule raison, parce
que je vous connais bien et je me permets de le dire - parce que vous avez pris
le projet de loi préparé par le juge Sauvé et son
équipe, qui veulent avoir le dernier mot parce que des fois ils n'aiment
pas être renversés par la Commission des affaires sociales, qui
vous disent: Mettez donc votre étampe en caoutchouc - en anglais, on
appelle cela du "rubber-stamping" - et faites adopter cela par les
députés.
M. le ministre, je crois que vous croyez aux règles de la justice
naturelle. Je pense sincèrement que l'apparence de justice, vous y
croyez. Je pense aussi qu'il y a une règle de justice naturelle qui vous
tient à coeur. On l'appelle, dans notre jargon légal, audi
alteram partem. Vous avez entendu jusqu'à maintenant le juge
Sauvé et son équipe de la CSST. Ils veulent avoir le dernier mot.
Ils veulent les trois décisions et ne veulent surtout pas qu'il y ait
quelqu'un d'en dehors qui vienne se mêler de ces dossiers-là. Mais
audi alteram partem, c'est ce que vous propose le député de
Saguenay. Il vous propose tout simplement d'entendre la Commission des affaires
sociales.
On a plusieurs questions de posées à la Commission des
affaires sociales. Il ne s'agit pas de leur dire que, parce qu'ils sont un
organisme indépendant de la CSST, ils représentent une apparence
de justice. Ce n'est pas tout ce que l'on a à leur dire, M. le ministre.
On a à leur demander pourquoi cela traîne, pourquoi cela prend un
an et demi, deux ans, deux ans et demi avant qu'un dossier soit entendu. On a
des questions à leur poser. Ce ne sont pas juste des
félicitations qu'on a à leur faire, M. le ministre. On voudrait
avoir, de ces gens-là, des suggestions constructives et positives; qu'on
nous explique pourquoi cela prend ces délais. Quelles sont les mesures
qu'il vous faudrait ou qu'il nous faudrait, tous ensemble, adopter comme
législateurs pour que ces délais soient raccourcis.
Si on ne les entend pas, n'avez-vous pas l'impression que vous risquez -
et le risque est gros - de recréer un autre organisme qui, au bout de
quelques mois, au bout de quelques années, aura ou connaîtra tout
simplement le même vice que l'actuelle Commission des affaires sociales,
faisant en sorte que cela prenne encore six mois, un an, un an et demi, deux
ans, deux ans et demi avant que les causes soient entendues? Vous aurez, d'un
autre côté, diminué en apparence l'application des
règles de justice naturelle.
Mme la Présidente, vous m'indiquez qu'il reste une minute. Je
terminerai en posant des questions brèves au ministre et j'aimerais
qu'il me réponde. Croyez-vous que, lorsque vous faites entendre votre
cas ou que vous faites entendre le cas de vos électeurs devant une
commission qui est à la fois juge et partie, votre électeur a
plus de possibilités de connaître la justice ou l'injustice?
M. le ministre, lorsque le cas d'un de vos électeurs, un de vos
travailleurs accidentés est entendu devant une commission qui
contrôle les trois niveaux décisionnels, pensez-vous que cette
personne a plus de chances d'obtenir justice ou risque plus de connaître
l'injustice? Comme ministre, M. le député de Sherbrooke,
lorsqu'un travailleur accidenté se présente à vos bureaux,
pensez-vous que, du fait qu'il soit entendu par un organisme d'appel qui
relève du même ministre, il a plus de chances d'avoir un jugement
qui lui rende justice ou si on ne répète pas, dans certains cas,
les injustices commises en première instance?
M. le ministre, est-ce que vous croyez, après avoir entendu les
représentations de la CSST, du juge Sauvé et de son
équipe, en vertu de la règle audi alteram partem, que vous ne
devriez pas suivre l'aimable invitation du député de Saguenay et
entendre les représentants de la Commission des affaires sociales?
La Présidente (Mme Juneau): Merci, M. le
député. La parole est maintenant au député de
Viau.
M. Cusano: Merci, Mme la Présidente. On m'a dit que j'ai
encore...
M. William Cusano
La Présidente (Mme Juneau): Une dizaine de minutes.
M. Cusano: Merci. Lors des auditions sur le projet de loi 42,
première version, s'il
y a eu un consensus par rapport à tous les intervenants, soit du
côté patronal, syndical, des accidentés - c'est justement
ce que disait mon collègue, le député de Brome-Missisquoi
- c'est que la CSST, dans son système actuel, jusqu'au niveau des
bureaux de révision, était juge et partie, parce que justement il
y avait une décision de rendue par la CSST. La révision de cette
décision se faisait par la CSST elle-même, par les bureaux de
révision.
On nous a démontré à de nombreuses occasions,
durant les presque deux mois qu'on a siégé, qu'il
répugnait à tout le monde le fait de faire face à un
organisme qui était juge et partie.
C'est vrai, comme certains députés durant les discours en
deuxième lecture nous l'ont dit, que pour un tel projet de loi c'est
peut-être difficile d'obtenir un consensus des intervenants. Mais, M. le
ministre, vous devez admettre que s'il y a eu un consensus lors des auditions,
c'était justement sur la question que la Commission de la santé
et de la sécurité du travail était juge et partie.
Alors, vous suggérez, par le projet de loi, que ce qui
était juge et partie devienne encore plus juge et partie, si c'est
possible de le faire. C'est parce que là, au moins, avec les bureaux de
révision qui sont imparfaits, qui ne sont pas satisfaisants, vous les
remplacez par une décision administrative. Qu'est-ce que c'est
ça, une décision administrative? C'est une décision qui
est prise par les mêmes gens qui ont rendu la décision, en
première instance...
Ce qui me fait sourire, M. le ministre, c'est l'article 342 du projet de
loi, lorsqu'on parle justement de cette révision administrative.
L'article 342, au cas où vous ne l'auriez pas remarqué, dit que:
"La personne qui a rendu la décision faisant l'objet d'une
révision administrative ne peut réviser elle-même cette
décision."
Bien, il me semble que si vous voyez la nécessité
d'insérer un tel article, c'est que vous admettez qu'un organisme ne
doit pas être juge et partie. Mais une personne veut dire aussi
l'ensemble des personnes qui travaillent ensemble.
Une voix: Oui, c'est clair.
M. Cusano: Les directives de la CSST, les fameuses directives de
la CSST, que ce soit M. X ou M. Y qui les regarde, ce sont les directives de la
CSST. Avec le processus qui nous est suggéré ici par le projet de
loi, ça va encore empirer la situation. Je m'explique. À la
Commission des affaires sociales, présentement, il y a 4768 dossiers en
attente. C'est déplorable, puis on veut en arriver è des
solutions pour éliminer ceci. Il y 4768 dossiers en attente. Cela va
prendre plus de deux ans pour les entendre.
On veut diminuer cette période d'attente. Là, vous allez
me dire: Mais ceux qui ont été logés avant une certaine
date vont rester avec la Commission des affaires sociales et les appels qui
seront logés après une telle date vont aller devant la nouvelle
commission. Qu'est-ce qui va se produire devant la nouvelle commission, puisque
justement la décision de la CSST qui révise administrativement,
c'est elle-même qui est juge et partie de tout le dossier? Vous allez
vous trouver automatiquement avec toutes ces décisions
révisées administrativement qui vont se ramasser devant cette
nouvelle commission que vous allez instaurer. C'est cela qui est le
problème. Alors, je n'ai pas besoin de vous dire, M. le ministre, que
j'appuie la motion de mon collègue, le député de Saguenay,
parce qu'on veut justement que la Commission des affaires sociales nous dise:
C'est peut-être faisable, on peut diminuer cette période d'attente
en ajoutant des commissaires, des assesseurs, on ne sait pas, nous, si c'est
impossible de le faire. Ces gens ont l'expertise, ils savent exactement la
nature des cas et ils savent les problèmes que cela a causés et
les contestations d'un bord et de l'autre. Pourquoi ne pas les convoquer?
Je répète ce que j'ai dit tout à l'autre, M. le
Président. Je pense que cette question du droit d'appel est fondamentale
dans le projet de loi. C'est la question la plus fondamentale, le droit
d'appel. Oui, comme dit mon collègue ici à ma gauche, c'est la
justice. Je pense qu'avant même qu'on aborde les articles, avant qu'on
arrive directement à cette commission d'appel, on se doit en tant que
parlementaire d'être illuminé par des gens. Je sais que le
ministre me dit souvent que je suis dur de "comprenure" mais je pense que s'il
y a quelqu'un qui a un meilleur record que moi c'est bien le ministre du
Travail lorsqu'il s'agit de comprendre quelque chose. Je reviens sur le point
que cette Commission des affaires sociales est indépendante de la CSST,
elle est très indépendante de la CSST. On sait fort bien, on se
l'est fait dire dans le passé, qu'un des problèmes c'était
une petite chicane interne. Les dossiers qui se promenaient d'un bord et de
l'autre lorsque la Commission des affaires sociales justement a dit à la
CSST: Bien écoutez les gars, on s'est déjà prononcé
sur des cas semblables, pourquoi persistez-vous? Sur la question des taux
d'incapacité, vous savez fort bien, la CSST a été
préoccupée par sa propre spécificité. Cela fait
longtemps qu'on entend parler de cela, sa propre spécificité.
À la CSST, on emploie une méthode pour arriver à ce taux
d'incapacité tandis qu'à la Commission des affaires sociales on
emploie une autre méthode. On voudrait bien qu'on nous explique cette
formule qui, selon mes informations, est employée à la Commission
des affaires sociales, qui est reconnue et
employée à travers le continent nord-américain. Que
se passera-t-il maintenant avec cette commission d'appel? Est-ce que ce sont
les bureaux de révision qui deviennent automatiquement la nouvelle
commission d'appel? Où vont tous ces gens au bureau de révision?
C'est une question auquelle je suis sûr que vous allez me répondre
en temps et lieu. Où vont-ils aller? Est-ce que cette commission d'appel
aura justement à développer ses propres formules pour
établir des taux? Alors, lorsque vous parlez de justice sociale, les
seules plaintes qu'on entend dans nos bureaux de comté en ce qui a trait
à la Commission des affaires sociales, c'est la période
d'attente. Est-ce qu'il y a un député ici qui a reçu...
certainement, il y a quelques cas d'une personne qui n'est pas satisfaite de la
décision rendue par la Commission des affaires sociales, c'est normal.
Mais 90% des cas qui arrivent dans le comté, c'est parce que ces gens
disent: M. le député, est-ce que je peux me permettre d'attendre
aussi longtemps que cela? Ce sont les seules plaintes que nous avons. Alors, il
me semble qu'un organisme qui n'est pas contesté d'aucune autre
façon, excepté pour l'engorgement qui est devant la Commission
des affaires sociales, ce n'est pas nécessairement la faute de la
Commission des affaires sociales et si on leur donnait un peu plus de
personnel, sans arriver dans une structure... Vous savez qu'aussitôt
qu'on en parle, on parle de bureaux, de secrétaires, de papeterie, de
communications et ainsi de suite et avant même qu'on ait commencé
à faire le total, on est rendu à 2 000 000 $ ou 3 000 000 $ par
année. Les députés de l'autre côté nous
disaient être concernés par le fait que si on peut
économiser de l'argent ce seront les travailleurs qui en recevront le
plus. Je suis complètement d'accord avec cela; je veux
économiser, M. le Président. Je me garde deux minutes... Je crois
qu'il me reste deux minutes, oui, juste au cas où il me resterait autre
chose à ajouter. J'ai dit et je maintiens: Je crois qu'il est primordial
d'entendre cette commission parce qu'il y en a parmi nous qui seront surpris de
voir quelle est la compétence de ces gens-là. (21 heures)
La Présidente (Mme Juneau): Merci, M. le
député. M. le ministre.
M. Fréchette: M. le député de
Châteauguay, Mme la Présidente.
M. Roland Dussault
M. Dussault: Merci, Mme la Présidente. En fait, cet
après-midi, c'est à cela qu'on a fait allusion tout à
l'heure quand M. le député Bisaillon de Sainte-Marie disait qu'il
sentait une certaine sympathie de ce côté-ci. J'étais un de
ceux qui avaient laissé entendre nettement et clairement un
intérêt pour entendre le président de la Commission des
affaires sociales, mais dans les dernières minutes j'ai entendu
l'intervention principalement de mon bon ami, le député de
Brome-Missisquoi, concernant à toutes fins utiles l'objectif...
Une voix: C'est épouvantable.
M. Dussault: Oui, oui, mon bon ami, le député de
Brome-Missisquoi. Y a-t-il quelque chose de honteux à ce que le
député de Brome-Missisquoi soit mon bon ami?
M. Cusano: ...si c'est réciproque.
M. Dussault: Je suis sûr que c'est réciproque.
La Présidente (Mme Juneau): La parole est au
député de Châteauguay.
M. Dussault: La meilleure preuve, voyez-vous, il se tait.
M. Cusano: Ah! C'est parce qu'ils sont allés en Californie
ensemble.
La Présidente (Mme Juneau): Pardon, je m'excuse.
M. Dussault: II arrive parfois que les situations créent
des amitiés. C'est connu, Mme la Présidente. Alors donc, en
entendant l'intervention du député de Brome-Missisquoi, il m'est
apparu que l'objectif visé par le député de
Brome-Missisquoi, tout au moins, et cela transparaissait un peu dans
l'intervention du député de Viau, ce n'est pas de vérifier
auprès de la Commission des affaires sociales sa capacité
d'assumer un nouveau mandat tel que cela apparaît dans le projet de loi
42 ou encore de mesurer en quoi il serait opportun que l'on transfère un
tel mandat à un autre organisme. Il m'est apparu dans cette intervention
que cela visait énormément à faire des
vérifications quant au fonctionnement comme tel de la Commission des
affaires sociales. Ce qui m'apparaît, à mon humble avis,
être un objet possible d'un mandat d'initiative qui pourrait être
donné à la commission parlementaire des affaires sociales, cela
ne m'apparaft pas vraiment relever de notre commission.
M. Cusano: Avant ou après l'adoption du projet de loi?
M. Dussault: À moins qu'on ne me garantisse du
côté de l'Opposition que l'esprit qui régnait cet
après-midi est l'objectif réel sur lequel on devrait s'entendre
et serait celui que l'on viserait en entendant la commission. Je suis bien
obligé
de prendre mes distances à l'égard de l'offre de mon bon
ami, le député de Brome-Missisquoi, et de tous les autres membres
de la commission.
Mme la Présidente, j'ai beau devenir l'ami de certains membres de
l'Opposition de ce temps-ci, je demeure quand même un peu critique
à l'égard de certains fonctionnements. J'ai vu des choses dans le
passé. Il m'est arrivé de temps en temps de devenir
méfiant - c'est le moins que l'on puisse dire - à l'égard
de certains fonctionnements. En tout cas, je pense qu'avec l'éclairage
que j'ai eu, je ne peux plus avoir cette ouverture que j'ai eue cet
après-midi. Il m'apparaft que là vraiment on s'en va vers quelque
chose qui ne relève plus de notre juridiction. À moins que d'ici
les quelques minutes qui restent à l'Opposition on me donne une tout
autre impression, une tout autre opinion. Je vais devoir davantage penser que,
tout au moins, on devrait attendre à demain quant à la prise
d'une telle décision selon ce que le ministre disait tout à
l'heure. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.
M. Raynald Fréchette
M. Fréchette: Merci, Mme la Présidente. Permettez
que je vous soumette quelques commentaires à la suite des interventions
que nous venons d'entendre de part et d'autre. Moi aussi, j'ai
été impressionné par l'argumentation du
député de Brome-Missisquoi que je vais prendre la chance de
qualifier d'ami de mon côté également. Je vous dirai
cependant qu'à bien des égards, j'ai une difficulté
absolument... Je suis absolument incapable de le suivre dans le
développement de son argumentation et voici pourquoi. D'abord, il pose
des questions. En vertu de quels principes faudrait-il que l'on retienne le
mécanisme qui est suggéré dans la loi 42? Je lui dirai
que, entre autres principes, il y en a quatre qu'on peut très facilement
identifier.
D'abord le député de Brome-Missisquoi n'a pas
assisté ici, en tout cas pas régulièrement, à la
commission parlementaire que nous avons tenue à la fin du mois de
février 1984 et au début du mois de mars 1984. S'il avait
été là ou s'il avait pris le temps de relire un tant soit
peu les différentes recommandations qui nous ont été
faites par les 43 organismes que nous avons entendus, il se souviendrait
certainement que c'est presque à l'unanimité de tous ces groupes
que dans le projet réimprimé l'on retrouve cette suggestion de
procéder à la formation d'une commission d'appel de la
façon dont elle est suggérée. Presque à
l'unanimité de tous les groupes, le patronat était unanime
à réclamer la formation de cette commission d'appel. Plusieurs
instances syndicales également suggéraient la formation de cette
commission d'appel. C'est à partir donc de l'expression d'opinion d'un
grand nombre de ces organismes que la suggestion qu'on retrouve dans la loi a
été retenue.
Deuxièmement, Mme la Présidente, j'ai un peu
d'hésitation à vous le dire mais il faut bien que je vous le dise
comme je le pense. C'est à partir également de l'affirmation
absolument sans équivoque, fort claire et qui ne permettait pas de
susciter de la discussion, du député de Portneuf, le
spécialiste en la matière, au moment de l'adoption du principe
qui a dit: Voici, vous avez une loi qui est excellente; cela fait longtemps
qu'on réclame, par exemple, que la loi prévoie que
l'accidenté ait la priorité quant au choix de son médecin;
nous trouvons excellente la suggestion d'assurer le droit de retour au travail
à l'accidenté; il est également excellent de retrouver
dans la loi un certain nombre d'autres choses dont la création d'une
commission d'appel indépendante; vous répondez en inscrivant
cette disposition dans la loi à une demande que l'on fait depuis
longtemps. Cela vaudrait sans doute la peine de retracer la déclaration
du député de Portneuf qui faisait cette affirmation avec une
éloquence absolument remarquable et une conviction qui ne semblait pas
être ébranlée en aucune espèce de façon. Dans
les 4 ou 5 paragraphes identifiés par le député de
Portneuf quant aux éléments intéressants de la loi, il y
avait donc la formation de cette commission d'appel.
Une voix: Et il est avocat aussi.
M. Fréchette: Il est avocat également. Donc, je
croyais qu'à partir de cette affirmation assez claire du
député de Portneuf, il y avait moyen d'essayer de s'entendre sur
le mécanisme. Quatrièmement, Mme la Présidente, pourquoi
cette suggestion est-elle là? Parce que l'objectif est d'arriver
à la création d'une porte unique pour toute matière
relevant des mécanismes de santé et de
sécurité.
Actuellement, vous savez et tout le monde le sait, les juridictions sont
éparpillées à travers à peu près une dizaine
d'instances: le commissaire du travail, le Tribunal du travail, la Commission
des affaires sociales, le bureau de révision, les mécanismes de
grief dans les conventions collectives, tout cela est éparpillé
partout et l'un des objectifs qui est visé dans les dispositions de la
loi, c'est d'arriver à cette espèce de guichet ou porte unique
qui permettra au travailleur accidenté de même qu'à
l'employeur de savoir que, dorénavant, il n'aura qu'à frapper
à une seule porte pour régler son problème.
Quatrièmement, Mme la présidente, l'on
sait que dans l'état actuel des choses - le député
de Brome-Missisquoi est très certainement au fait de cette situation -
les seules décisions de la Commission de santé et de
sécurité qui sont appelables devant la Commission des affaires
sociales sont celles qui concernent, ou bien le droit à
l'indemnité, ou alors le quantum de l'indemnité lorsque le droit
a été reconnu. Ce sont les deux seules matières
actuellement appelables.
Les parties - le député de Brome-Missisquoi n'était
pas en commission parlementaire - autant les représentants de
travailleurs que d'employeurs nous ont dit: Pourquoi est-ce qu'une
décision qui concerne le droit à ma réadaptation,
n'est-elle pas appelable? Pourquoi est-ce qu'une décision qui concerne
un programme de réadaptation, qu'on veut me suggérer, n'est-elle
pas appelable? Pourquoi ne puis-je pas contester ce programme devant aucune
instance?
Les employeurs, de leur côté, nous ont dit: Pourquoi,
lorsque la Commission de la santé et de la sécurité du
travail m'impose un taux de cotisation, lorsqu'à la suite de la visite
d'un inspecteur je dois fermer mon usine, lorsqu'on appose des scellés
sur des produits ou des procédés dangereux, lorsqu'on me
classifie dans une catégorie d'employeurs, la nouvelle loi ne me
permettrait pas de me prévaloir en appel d'une décision dont je
ne serais pas satisfait? C'est très précisément ce que le
projet de loi fait et l'énumération que je viens de faire - on le
sait - n'est pas exhaustive. Il y a plus de 25 matières qui, maintenant,
deviendraient appelables, alors qu'on n'en a que deux dans l'état actuel
des choses.
L'argumentation de l'Opposition, c'est de nous dire: Gardons tout cela
à la Commission des affaires sociales. Le député de Viau
plaide avec autant d'éloquence lui aussi que, actuellement, il y a 4700
cas en attente et ce ne sont que des cas de droit à l'indemnité
ou du quantum à l'indemnité. On nous dit: Conservons cette
instance comme étant la juridiction d'appel pour disposer de toutes les
matières, mais ajoutons-y 25 autres matières appelables. Et dans
l'état actuel des choses, il y a des délais variant de trois et
demi à quatre ans.
Maintenant, à partir . de - comment dirais-je, pas la juridiction
- la compétence qu'a développée la Commission des affaires
sociales, compétence que personne ne met en doute, en aucune
manière, comment pourrait-on espérer qu'elle devienne tout aussi
compétente dans des matières qui sont d'ordre strictement
administratif comme, par exemple, allons-nous aller demander à un
commissiaire des affaires sociales de se prononcer sur la justesse ou la
non-justesse d'un taux de cotisation qui lui est imposé? Est-ce que
c'est un commissaire des affaires sociales qui va faire cela?
Maintenant, Mme la Présidente, vous me permettrez que je vous
signale combien je ne suis pas capable de suivre le raisonnement du
député de Brome-Missisquoi. Il invoque le fait que la Commission
des affaires sociales a une réputation extraordinaire, ce avec quoi tout
le monde est d'accord. La Commission des affaires sociales jouit d'une
indépendance absolue, non seulement en termes pratiques, concrets, mais
en termes de réputation aussi et en termes d'apparence que justice soit
rendue. Il dit: II faudrait que cela continue comme cela et qu'on ne
procède pas à la création d'un organisme dont les
commissaires seraient nommés par le ministre du Travail et qui
dépendraient aussi du même ministre du Travail. (21 h 15)
Mais, Mme la Présidente, est-ce que le député de
Brome-Missisquoi avec ses connaissances approfondies du droit, comme il dit les
avoir lui-même... ce que je ne comprends pas, c'est que c'est exactement
le mécanisme qui existe à la commission des Affaires sociales. Le
président de la commission des Affaires sociales, les commissaires sont
nommés par le gouvernement sur recommandation du ministre ou de la
ministre responsable. Non seulement ce président et ces commissaires
sont-ils nommés par le ministre ou la ministre responsable, mais ils
prennent également des décisions dans des matières qui
relèvent de la juridiction du même ministre en matière, par
exemple, d'aide sociale, en matière de sécurité du
revenu.
Alors, à partir de cette argumentation-là, je ne peux pas
comprendre l'argumentation et les conclusions auxquelles en arrive le
député de Brome-Missisquoi. D'une décision qu'il
décrit comme étant idéale, à partir de son
fonctionnement et de ses mécanismes, il en arrive à la conclusion
qu'une autre qui pourrait lui ressembler ne pourrait pas avoir la même
compétence pour les motifs que l'on vient de dire, alors qu'on retrouve
exactement la même situation dans l'autre suggestion.
La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre, votre temps
est terminé.
M. Fréchette: Bien, madame.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Saguenay.
M. Maltais: Merci, Mme la Présidente. Je suis un peu
étonné de voir la réaction du ministre, une attitude aussi
conciliante avant le lunch. Je suis en train de me demander quelle sorte de
bifteck il a mangé ce soir.
Une voix: Where's the beef?
M. Maltais: II me semble, Mme la
Présidente... Je ne comprends pas l'insistance du ministre. Lui
qui nous rappelait l'extrême nécessité, toute à
l'heure, de réviser une loi vieille de 50 ans. C'est quelque chose, plus
de 50 ans et...
Une voix: II n'était pas au monde!
M. Maltais: ...une loi qui va marquer, peut-être, les cinq,
dix ou quinze prochaines années des travailleurs au Québec. Je ne
comprends pas que le ministre mette autant d'insistance à entendre une
commission qui relève du gouvernement. Est-ce que, Mme la
Présidente, on en serait rendu à l'époque où la
transparence ou le translucide gouvernemental serait un empêchement au
niveau des parlementaires de pouvoir entendre toute personne qui a des
décisions à prendre sur nos commettants dans chacun de nos
comtés?
À partir du moment où j'ai présenté cette
motion, j'avais, suite... Mme la Présidente, j'ai assisté
à tous les dépôts des 43 mémoires et à toute
l'audition lors de la commission, sans en manquer une.
Une voix: C'est vrai, ça.
M. Maltais: Je ne suis pas sûr que beaucoup de membres ici,
y incluant le ministre, aient pris le temps de le faire.
Une voix: Pas moi.
M. Ghislain Maltais
M. Maltais: Lorsque le ministre nous parle de sa
quasi-unanimité, je pense qu'il a manqué quelques petits
avant-midi, lorsqu'il nous dit, lui-même, que lors de la première
impression de son livre - d'ailleurs, ce livre-là est sous presse depuis
tellement longtemps qu'il est taché d'encre - il ne comprend pas que les
revendications de cette commission d'appel viennent un peu plus tard.
Lorsqu'on dépose un pareil projet de loi et qu'on le met à
la disposition de la population, il est normal que la réaction ne se
fasse pas dans les 24 heures, les réactions profondes, article par
article. Ce serait tout à fait aberrant de croire qu'au Québec un
ministre va déposer un projet de loi de 560 et quelques articles et, le
lendemain matin, toutes les personnes concernées vont pouvoir se
prononcer sur chacun des articles. Cela, ce n'est pas de la législation,
puis ce n'est pas demain qu'on va voir ça au Québec.
Une voix: ...une réputation péquiste.
M. Maltais: Mme la Présidente, le ministre nous a bien
expliqué, calmement, comme on le connaît, que cette
réticence-là est venue par après. Bien sûr, M. le
ministre, bien sûr, et si vous aviez été en région,
si vous étiez allé voir les travailleurs, les syndicats, comme
plusieurs de nos collègues l'ont fait, dont mon collègue de
Sainte-Marie, vous vous seriez aperçu, M. le ministre, que cette
commission ne fait pas, du moins d'un côté de la table,
c'est-à-dire du côté des travailleurs, l'unanimité.
Cela est bien dommage, et je ne l'avale pas parce que cela n'est pas vrai.
Pourquoi? Les travailleurs nous ont expliqué, les patrons aussi
nous ont expliqué qu'être juge et partie, cela ne peut demeurer
longtemps équitable. Mais ' je vous rappelle à ce stade-ci, M. le
ministre, que les travailleurs, dans le projet de loi actuel, ont
déjà renoncé à leur droit de poursuite civile, sauf
dans quelques exceptions, mais, règle majoritaire, ils ont perdu ce
droit de recours. Et, à partir du moment où ils ont perdu leur
droit de recours, comment voulez-vous que ces gens aient dans leur esprit une
intention d'équité lorsqu'ils s'en vont à une commission
dans laquelle le mandataire des montants d'argent est déjà juge
et partie? Comment voulez-vous, Mme la Présidente, que ces travailleurs
n'aient pas une certaine réticence alors que la Commission des affaires
sociales, même si elle est gouvernementale, n'est pas partie? C'est
là la grande différence et, M. le ministre, je ne comprends pas
que vos émissaires en région, les émissaires de la CSST,
ne vous aient pas averti de ce danger.
Le parti politique que vous représentez, M. le ministre,
prétendait avoir un préjugé favorable aux travailleurs,
mais, Bon Dieu, où l'avez-vous mis? Est-ce que vous l'avez envoyé
par la même occasion à Ottawa? M. le ministre, il faut être
un peu plus sérieux. Il faut toujours tenir le même langage et
à l'heure actuelle, dans ce projet de loi, M. le ministre, vous avez
changé de langage. Vous avez changé de langage depuis le
dépôt premier du projet de loi 42. Vous avez changé de
langage depuis votre discours en adoption de principe et vous avez
changé de langage de cet après-midi à ce soir.
M. le ministre, je vous demande encore une fois de nous dire exactement
vers où vous allez et quels sont les serviteurs qui vous servent aussi
servilement selon l'opinion qui change continuellement.
M. le ministre, les travailleurs du Québec ne sont pas
prêts à engager les quinze ou vingt prochaines années de
leur vie avec un projet de loi par lequel ils seront mal servis et, si j'ai
demandé cet après-midi que la Commission des affaires sociales
vienne nous rencontrer, c'était spécifiquement pour lui poser des
questions. On ne vous a jamais dit que c'était la perfection, la
Commission des affaires sociales, loin de là, sauf que nous avons, et
c'est notre devoir en tant que parlementaires, des questions fort
précises à lui poser. Au cours de cette rencontre, sans
doute M. le ministre, aurez-vous un éclairage nouveau. Je ne
comprends pas l'insistance que vous avez à devenir le ministre, le juge,
l'avocat et la partie. Il doit quand même rester, certainement, de la
démarcation pour celui qui va subir des sévices au niveau d'un
accident du travail.
Ne sommes-nous pas ici, ce soir - et depuis combien de temps, Dieu,
presque qu'un an - sur ce projet de loi? S'il faut passer trois ou quatre mois
de plus, M. le ministre, on le fera. Vous avez exprimé votre ferme
intention que ce projet de loi soit adopté avant les fêtes, mais
il ne faudrait quand même pas que ce projet de loi soit adopté
à la vapeur puisqu'il engage pour les quinze prochaines années
l'avenir des travailleurs du Québec. On n'a pas le droit, en tant que
législateurs, et on serait de mauvais représentants de nos
comtés si on acceptait de s'embarquer là-dedans. Merci, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Juneau): Merci, M. le
député.
Je vous rappelle, M. le ministre, que d'après l'article 239 vous
avez le droit d'intervenir cinq minutes après chacune des interventions
de chacun des membres de la commission. Est-ce que vous utilisez votre...
M. Raynald Fréchette
M. Fréchette: Je vous remercie de me le rappeler, Mme la
Présidente.
II y a peut-être des attitudes qui sont en train de changer. C'est
parce que les objectifs qui en début de travaux nous ont
été mis sur la table sont également en train de changer
complètement. Ce que j'avais compris, particulièrement de
l'intervention du député de Sainte-Marie, c'était que
l'objectif très précis qui était visé consistait
à prendre une certaine période de temps limitée. Le
député de Sainte-Marie avait même évoqué la
possibilité qu'il s'agisse d'une période d'une heure, une heure
et demie, deux heures, le temps qu'il aurait fallu prendre pour obtenir de la
Commission des affaires sociales les informations pertinentes à
l'exercice de sa juridiction en matière d'appels d'accidents du travail
et de maladies professionnelles.
Mme la Présidente, au fur et à mesure que le débat
avance, que de nouveaux arguments sont soulevés, je vous
réitère ma perception des choses, à savoir que l'objectif
mis sur la table d'abord, encore une fois, par le député de
Sainte-Marie, a pris une tangente tout à fait nouvelle qui ne ressemble
pas à ce à quoi on s'attendait. En écoutant la virulente
argumentation du député de Saguenay - avec force conviction comme
il est capable de le faire - je réalise maintenant que ce que l'on
voudrait savoir de la Commission des affaires sociales c'est beaucoup plus que
les renseignements pertinents aux mandats qui sont spécifiques aux
appels en matière de santé et de sécurité.
Là, évidemment, on essayera de savoir sans doute quelle
est son expertise ou son évaluation des autres juridictions d'appel qui
lui sont confiées par la loi. Enfin, on va ouvrir sur à peu
près toutes les matières qui relèvent de la Commission des
affaires sociales. Mme la Présidente, à cet égard, je ne
suis pas loin de partager l'opinion du député de
Châteauguay qui nous disait tout à l'heure qu'il y a
évidemment et très probablement d'autres moyens plus
appropriés pour atteindre le même objectif, c'est-à-dire
évaluer l'efficacité, l'expertise et la "capacité", entre
guillemets, de la Commission des affaires sociales et ce serait qu'un mandat
d'initiative parlementaire soit retenu pour atteindre ces objectifs.
Mme la Présidente, malgré la virulence du
député de Saguenay, je vous réitère qu'à
partir des positions qui avaient été mises sur la table cet
après-midi il n'y avait pas grand-chose qui nous séparait,
finalement. J'étais convaincu que nous aurions pu arriver à
établir un processus qui aurait fait en sorte que nous aurions pu
entendre la Commission des affaires sociales en spécifiant et en
limitant très clairement le mandat, autant au niveau des matières
qui seraient soumises à son évaluation que du temps que cela
prendrait, qu'au niveau, par exemple, du fait qu'il ne fallait pas par
là créer un précédent qui aurait fait en sorte
qu'après que cette motion aurait été adoptée on en
aurait présenté une autre pour entendre n'importe lequel des 43
autres organismes qui sont déjà venus en commission
parlementaire. Il apparaît très clairement que les objectifs ont
dévié complètement de ce qui paraissait être
l'esprit, cet après-midi.
Je vais quand même vous réitérer ma position, Mme la
Présidente, si vous me le permettez. Cet après-midi, il n'y avait
pas grand-chose qui nous séparait. J'avais suggéré,
à 18 heures, la suspension de la discussion pour me permettre de
procéder à un certain nombre de consultations et
d'évaluations de la situation. J'ai réitéré,
à 20 heures, lorsque nous sommes revenus, que mes dispositions
étaient les mêmes mais que j'avais besoin de faire certaines
autres vérifications plus poussées. Ces dispositions sont encore
les mêmes. Dans les balises dont je viens de parler, je serais encore
disposé à retenir la suggestion qu'a faite le
député de Sainte-Marie. Ce que je suggérais simplement
c'est que l'on suspende, pour le moment, la décision sur la motion,
quitte à y revenir, dès lors que, dans la loi, nous serions
arrivés à l'étude d'un article qui réfère
à la commission d'appel. Si cette suggestion n'est pas retenue, ce que
je respecterais comme
décision, nous allons, évidemment, devoir voter sur la
motion qui nous a été soumise. (21 h 30)
La Présidente (Mme Juneau): Merci, M. le ministre. Est-ce
qu'il y a d'autres intervenants sur la motion?
M. Lincoln: Oui, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Nelligan.
M. Clifford Lincoln
M. Lincoln: M. le ministre, je pense que, d'un côté
ou de l'autre, je ne veux pas passer de blâme, chacun se renverra la
balle comme il voudra, mais, de toute façon, je ne pense pas qu'il y ait
tellement de choses qui nous séparent quant à la motion faite par
mon collègue de Saguenay.
Si vraiment vous avez l'intention - et vous êtes sincère,
je crois - de faire la lumière sur la question de la commission
d'appel... En fait, lorsque j'ai fait mes remarques préliminaires, la
plupart d'entre elles se situaient au niveau de la commission d'appel. Je pense
que s'il y a une chose, du côté de l'Opposition et des
députés indépendants, qui a été
soulevée, même je pense que, dans vos remarques
préliminaires, vous avez dit que la question de la commission d'appel
vous avait réellement tracassé... C'est parce que nous pensons
qu'il y a un vice de forme et un vice de substance dans toute la notion d'une
commission d'appel qui serait contrôlée par le ministère
et/ou la CSST.
Là, vous avez soulevé deux arguments principaux. Le
premier, c'est que la Commission des affaires sociales se penche sur des
questions d'indemnités pour incapacité mais elle ne se penche pas
sur des questions techniques. Vous avez suggéré l'exemple, je
pense, de la cotisation, soit. Mais c'est justement là-dessus que nous
voulons essayer de faire la lumière. Je ne pense pas que ce soit une
raison assez valable pour dire: On va éliminer la commission d'appel et
tout ce qu'elle fait, maintenant, qui est fondamental. Si des questions
techniques ne peuvent pas être entendues par la commission d'appel,
pourquoi ne découvrirait-on pas un autre mécanisme pour
écouter les appels sur cette partie de la loi? Il y a peut-être
des compromis qui pourraient être faits. Mais ce que nous disons, c'est
que, sans écouter les gens de la Commission des affaires sociales,
comment voulez-vous que nous nous fassions une idée constructive et
objective de la question?
Je pense que c'est le point qu'a voulu apporter mon collègue de
Saguenay, dès le début. Vous dites qu'on devrait étudier
cela quand cela viendra. En fait, si je lis bien la loi, on dit, dès
l'article 2: "la commission d'appel en matière de santé et de
sécurité du travail instituée par la présente loi."
Nous sommes d'accord. Je vois que vous souriez. On peut dire que la
première référence à la commission d'appel est
faite sous l'article 2. Vous pouvez nous dire que c'est purement une
définition. On va parler de la commission d'appel aux articles 352 et
suivants. Alors, est-ce qu'on va dire qu'on va étudier 350 articles, des
jours et des jours, sans jamais entendre la Commission des affaires sociales?
En fait, c'est la clé, peut-être, du projet de loi, parce que
c'est la dernière instance pour les gens qui ont un appel. Il me semble
que si on ne met pas cela au clair - cela a été l'objection
fondamentale du député de Sainte-Marie et de notre formation
politique, de dire que cette question d'appel, on ne peut pas l'accepter comme
elle est maintenant. Ce que vous voulez dire, c'est: On ne va pas la regarder
à l'article 2 parce que c'est une pure définition, on va le faire
à l'article 352, ce qui va se passer à la fin de décembre,
je ne sais pas quand on en fera l'étude.
Nous, nous disons: Au contraire, on veut faire la lumière
là-dessus dès le début parce que cette question est assez
importante pour qu'on puisse l'examiner tout de suite. C'est cela qu'on dit.
Là, vous dites: II faudrait peut-être aussi rappeler tous les gens
qu'on a déjà entendus. Ce n'est pas du tout le cas. Je pense que
le fait est que la Commission des affaires sociales ne s'est pas fait entendre,
on ne sait pas ce qu'ils pensent du projet de loi. Je sais que vous nous avez
expliqué qu'ils ne sont pas intéressés à
élargir leur mandat, mais au moins peut-être qu'ils pourraient
nous donner un éclairage sur comment ils travaillent maintenant, ce
qu'ils suggèrent par rapport aux autres matières qu'ils
n'étudient pas maintenant en commission d'appel.
Vous avez dit que la Commission des affaires sociales est
constituée de la même façon que la commission d'appel que
vous voulez constituer sous l'article 352 et les suivants, soit par le
ministère des Affaires sociales, sous l'égide du ministère
des Affaires sociales. Seulement, du point de vue de la loi 42, c'est sûr
que la Commission des affaires sociales ne dépend pas, elle, de la CSST,
elle ne dépend pas du ministère. Justement, c'est là que
nous avons des objections assez importantes parce qu'il faut nous baser sur le
cheminement de la CSST jusqu'à présent.
Le pouvoir de la CSST est presque immense, la CSST est devenue un
appareil tellement fort qu'elle se moque presque du ministre. Elle fait des
communiqués à l'avance sur une loi qu'on n'a même pas
commencé à étudier. C'est cela qui nous fait peur. Ce qui
nous fait peur c'est que la CSST va avoir un droit de regard sur la commission
d'appel qui sera peut-être très
grand. Si, par exemple, l'expérience avec la CSST,
l'expérience avec le président de la CSST n'avait pas
été aussi concluante qu'elle ne l'a été,
peut-être qu'on aurait pris une position différente. Mais comme
elle se place maintenant, nous pensons que c'est une assurance que nous avons,
c'est un genre de garantie indirecte que nous avons que la Commission des
affaires sociales ne trouve pas à se placer dans le même cadre que
le ministère et la CSST. Cela, pour nous, c'est une notion
importante.
M. le ministre, s'il faut prendre quelques heures, s'il faut prendre un
jour pour écouter les gens de la Commission des affaires sociales, ce
n'est pas la fin du monde quand on parle d'une loi qui a 600 articles. Est-ce
que vous n'auriez pas pu recevoir des suggestions tout à fait
constructives et objectives qui viennent de l'ensemble de l'Opposition? Il me
semble que ce n'est pas une affaire qui va retarder les travaux de la
commission indûment. Que vous le fassiez maintenant, que vous admettiez
qu'on le fasse à l'article 2 ou à l'article 353, quelle est la
différence? Pourquoi ne pas le faire dès le début et
mettre à l'aise tous les gens pour qui cette question est une affaire
fondamentale et qui ne le font pas à titre obstructif. Je peux vous
assurer qu'ils le font parce que nous pensons que c'est une question qui doit
être réglée dès le départ parce que c'est
réellement tout le processus d'appel. C'est sûrement le processus
peut-être le plus important de la loi. Alors, nous continuons à
insister pour que vous révisiez votre position et que vous entendiez, le
plus tôt possible, les gens de la Commission des affaires sociales.
M. Bisaillon: Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Juneau): Oui, M. le
député.
M. Bisaillon: ...je dois vous avouer que je ne comprends plus
rien. Cet après-midi j'avais fait une suggestion, une demande au
ministre. Cette demande, il l'a accueillie, il m'a semblé, en tout cas,
de façon favorable.
La Présidente (Mme Juneau): Je m'excuse, est-ce que c'est
une question de règlement? Quelle...
M. Bisaillon: Non, c'est une question de clarification. J'essaie
de comprendre ce qui se passe, Mme la Présidente, et puis je ne
comprends pas. Le ministre nous dit qu'il est prêt et en même temps
il refuse de voter sur une motion qui lui demande la même chose que ce
que je demandais cet après-midi. Je ne comprends pas pourquoi on prend
tout ce temps alors que tout le monde est d'accord. Je ne vois pas de virulence
dans l'intervention du député de Nelligan. Je ne vois pas ce qui
fait craindre quoi que ce soit au ministre. Il nous répète qu'il
est d'accord encore...
La Présidente (Mme Juneau): M. le
député...
M. Bisaillon: ...et que le sens de ma demande serait
là.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Sainte-Marie, selon l'article 36...
M. Bisaillon: Moi, je ne connais pas cela , Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Juneau): ...aucun
député... Étant donné que...
M. Bisaillon: Expliquez-le-moi, cela va me faire plaisir parce
que je ne connais pas cela beaucoup.
La Présidente (Mme Juneau): Oui, c'est cela. L'article 36
dit qu'aucun député ne peut interrompre celui qui a la parole
sauf pour faire un rappel au règlement, signaler le défaut du
quorum ou attirer l'attention sur une violation de droit ou de
privilège.
M. Bisaillon: Je n'ai interrompu personne.
La Présidente (Mme Juneau): Étant donné que
M. le député...
M. Bisaillon: II avait terminé, excusez.
La Présidente (Mme Juneau): Vous aviez terminé?
M. Bisaillon: Oui, il avait terminé. M. Lincoln:
Oui, j'avais terminé.
La Présidente (Mme Juneau): Combien reste-t-il de minutes
à...?
M. Bisaillon: C'est parce qu'il avait terminé.
La Présidente (Mme Juneau): C'est très bien,
monsieur, vous avez le droit de parole.
M. Bisaillon: Bon! Alors là je comprends. Mme la
Présidente, ce que je voulais vous expliquer c'était que je ne
comprenais pas l'attitude du ministre. Cet après-midi, je n'ai pas fait
une proposition, j'ai adressé une demande au ministre. Une demande qu'il
a trouvée raisonnable. Une demande qu'il trouvait justifiée. Il
nous disait même qu'il était pour étudier cela pour voir
comment on pourrait encadrer pour que cela ne crée pas de
précédent. Cela c'était cet après-midi. On va
souper, puis, juste avant le
souper, le député de Saguenay, fort de l'appui du
ministre, a tout simplement voulu formaliser cela en le mettant dans une
proposition. Probablement que cela se trouve au procès-verbal. Il disait
exactement la même chose que ce que j'avais demandé. Là, le
ministre revient de souper. Il nous dit: C'est encore favorable mais je
voudrais prendre encore un petit peu plus de temps. Jusque-là on peut
s'entendre encore. Il y a des interventions qui expliquent la demande du
député de Saguenay, puis le ministre dit: Écoutez, je vais
être obligé de voter contre la motion mais je vais toujours
demeurer favorable à la demande du député de Sainte-Marie.
C'est où que l'on se sépare? Vous dites que le débat a
pris une tangente. Effectivement, peut-être que les débats
prennent des tangentes, parfois cela arrive. Il y a...
M. Bordeleain C'est la...
M. Bisaillon: II y a des fois, M. le ministre, qu'on commence
dans une voie, puis on se rend compte finalement qu'on est dans une
troisième voie. Cela ne prend pas de temps. Cela arrive. Mais,
après l'intervention du député de Nelligan, il me semble
que le député de Nelligan dit exactement la même chose que
je disais cet après-midi. Il disait exactement dans son intervention ce
que le ministre souhaitait entendre. Alors, qu'est-ce qui nous retient de
passer à autre chose rapidement en se mettant d'accord pour dire qu'on
va entendre la Commission des affaires sociales? Je ne vois pas où est
le débat là-dedans. On s'entend tous; alors, pour une fois qu'on
s'entend, profitons-en avant que quelqu'un d'autre vienne nous dire qu'on ne
s'entend pas.
La Présidente (Mme Juneau): Avez-vous terminé? Je
veux être bien sûr que tout le monde termine ce qu'il a à
dire avant de donner la parole à un autre. Avez-vous terminé?
M. Bisaillon: Oui, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Beauharnois, vous aviez demandé la parole avant.
M. Laurent Lavigne
M. Lavigne: Merci, Mme la Présidente. Je ne comprends pas
que le député de Sainte-Marie ne comprenne pas. Je ne comprends
pas cela parce qu'il m'a toujours donné l'impression que c'était
un gars qui comprenait. Effectivement, je pense que l'attitude et la demande
qui était formulée, avant le souper, avant 18 heures,
renfermaient, à mon avis, une demande qui a changé d'allure quant
à son contenu dans toute l'argumentation qui a été
développée au retour du souper. Moi, j'étais - et je le
suis encore - sympathique à l'idée de recevoir la commission ici
et je le dis. Seulement, écoutez. Le jour - si toutefois elle venait, la
Commission des affaires sociales - qu'elle viendra ici, ce qui est bien
important c'est qu'elle vienne ici pour la loi 42, qu'elle ne vienne pas ici
pour se faire passer au peigne fin dans toute son administration. Quand on
regarde le plaidoyer des gens d'en face, ils ont parlé de passer, ni
plus ni moins si j'ai bien compris, toute l'administration de la Commission des
affaires sociales au peigne fin. Si c'est le mandat...
M. Bisaillon: Ça, c'est un travers du député
de Brome-Missisquoi.
M. Lavigne: Si c'est ça le mandat, moi je m'y oppose
fermement. Cela s'en va dans un mandat d'initiative de la commission
parlementaire des affaires sociales. Pour moi c'est clair. Il n'y a pas
d'ambiguïté là-dessus. Si on est d'accord avec des balises
-parce que des fois, un moment donné, on semble être d'accord
verbalement sur-le-champ et, quand les décisions sont prises, on se fait
avoir parce qu'on a eu confiance. On finit par se méfier un moment
donné en cours de route. Après huit ans de vie parlementaire, M.
le député de Sainte-Marie, vous devez savoir qu'on a de grandes
raisons de se méfier parfois.
M. Bisaillon: Ah! oui. Ah! oui.
M. Lavigne: Et c'est la raison pour laquelle, moi, je dis que, si
on décidait ensemble de faire venir ici la Commission des affaires
sociales, il va falloir baliser davantage.
La Présidente (Mme Juneau): Un instant, s'il vous
plaît! II y a une question de règlement. Quel numéro
d'article, M. le député?
M. Lincoln: Mme la Présidente, excusez. On est entre nous
ici. On ne va pas jouer avec les articles.
La Présidente (Mme Juneau): Non, non, on est... Je veux
savoir quel article.
M. Lincoln: Tout ce que je veux vous dire, rien que pour
citer...
La Présidente (Mme Juneau): Quel article, M. le
député?
M. Lincoln: Le député de Beauharnois ne veut pas se
tracasser de cela si c'est l'article 42 ou 54.
La Présidente (Mme Juneau): Mais moi, je m'en tracasse. Je
veux savoir sur quel article vous voulez poser votre question.
M. Lincoln: Bien, sur l'article 36 ou 48, si vous voulez.
La Présidente (Mme Juneau): L'article 36? Aucun
député ne peut interrompre... M. le député de
Beauharnois, vous avez la parole. Vous avez la parole, M. le
député.
M. Lincoln: Ah! Corne on. (21 h 45)
Une voix: II a terminé son exposé.
La Présidente (Mme Juneau): Non, il n'avait pas
terminé.
M. Lavigne: Vous comprendrez, Mme la Présidente, que le
député d'en face m'a fait perdre un peu le fil...
M. Lincoln: J'avais peut-être une précision à
faire au député de Beauharnois. Je suis sûr que...
M. Lavigne: Je ne sais pas si c'était ça, le but de
son intervention.
M. Lincoln: Bien, si vous me donnez la chance de faire une
intervention...
M. Lavigne: Mais il a, jusqu'à un certain point,
réussi. Mme la Présidente, je reviens sur la demande qui a
été formulée, dans un premier temps, par le
député de Sainte-Marie et, dans un deuxième temps, par le
député de Saguenay. Je souscris à cette demande-là,
avec la réserve suivante: c'est que le ministre vous demande - il ne dit
pas non, il nous a consultés, on ne s'en cache pas, vous l'avez vu le
faire au souper. On s'est parlé là-dessus. Il a d'autres
personnes à consulter; il voudrait avoir un peu de temps
là-dessus.
Si vous êtes de bonne foi, prouvez-nous le. On va commencer
à étudier l'article 1 et, demain ou après-demain... On ne
dit pas: Dans trois mois, il va prendre une décision. Incessamment, il
va prendre une décision. Il a quelques personnes à voir encore,
entre autres la ministre responsable de cet organisme-là. C'est un peu
légitime qu'il lui parle. Il n'a pas eu le temps de lui parler lors du
souper. Il voudrait lui parler, lui demander son avis.
Il demande un peu de temps. Donnez-lui ce temps-là. Montrez-nous
que vous êtes de bonne foi et commençons l'article 1.
M. Bisaillon: C'est quel ministre, ça?
M. Lavigne: C'est Mme Marois qui est responsable de la
commission.
M. Bisaillon: Elle est encore là?
M. Lavigne: Oui, Main-d'Oeuvre et Sécurité du
revenu. Elle est encore là comme - j'aillais dire un seul homme - une
seule femme. Prouvez-nous votre bonne foi, faites-nous croire que vous
êtes de bonne foi; c'est le moins que vous puissiez faire.
M. Paradis: ...de bonne foi.
M. Lavigne: Écoutez, il vous demande un peu de temps. Ou
bien donc vous le croyez dans sa demande, ou bien donc vous ne le croyez pas.
Si vous n'êtes pas d'accord, si vous n'achetez pas ça, on va la
mettre au vote, puis on va la battre, puis on n'en parlera plus. Vous
embarquerez sur d'autre chose, si vous n'êtes pas de bonne foi.
M. Paradis: Passer sur le corps... M. Lavigne: Bien non,
ce n'est pas ça.
M. Lincoln: Mme la Présidente...
M. Lavigne: II y a un "deal" là.
M. Lincoln: ...selon l'article 33, je vais demander une minute
à mon collègue d'Outremont pour faire une remarque bien simple au
député de Beauharnois, parce que je pense que d'un
côté ou de l'autre on est de bonne foi ici. Tout ce que je voulais
souligner au député, c'est que, s'il lisait la motion de mon
collègue de Saguenay, la motion dit tout à fait clairement, si je
l'ai bien lue, qu'on veut écouter les gens de la Commission des affaires
sociales par rapport au projet de loi 42.
Donc, le mandat est tout à fait clair et spécifié,
quoi qu'en dise n'importe quel député ici. Alors, excusez-moi, M.
le député, ce que je voulais dire, c'est que je pense que nous
pouvons faire les balises de ce qu'on veut entendre. D'un côté et
de l'autre, ce qui nous intéresse, c'est de questionner la Commission
des affaires sociales, non pas sur tout le mandat global qu'ils ont avec les
Affaires sociales, sur l'administration des Affaires sociales, naturellement,
mais par rapport au projet de loi 42.
Je pense que notre porte-parole l'a confirmé avec plaisir et si
c'est ça qui accroche entre nous, ah bien, qu'on le règle
maintenant et qu'on décide que si c'est par rapport au projet de loi 42,
si vous n'avez aucune objection, si le député de Sainte-Marie n'a
aucune objection, nous n'avons aucune objection. Mais qu'on le fasse.
M. Lavigne: On vous a demandé, et je le
répète...
M. Lincoln: La motion l'indique
clairement, M. le député.
M. Lavigne: ...de nous donner un peu de temps.
Une voix: Pourquoi?
M. Lavigne: Je vous l'ai dit. Vous ne comprenez pas, vous
n'écoutez pas quand je parle.
Une voix: Répétez-le.
M. Lavigne: On peut répéter.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que vous aviez
terminé, M. le député de Beauharnois?
M. Lavigne: Oui.
Une voix: ...on a du temps...
La Présidente (Mme Juneau): Oui, vous avez encore du
temps. Vous avez 20 minutes.
M. Lavigne: Je peux toujours en prendre, Mme la
Présidente. Si je savais qu'en utilisant mon temps de parole
j'arriverais à faire comprendre les gens d'en face, je pourrais
peut-être faire un autre petit bout. Mais il me semble que j'ai
été assez clair dans mon explication et que, effectivement - je
le disais tout à l'heure et je tiens à le répéter -
l'attitude et la demande qui nous a été formulée avant le
souper étaient une chose et l'attitude et la demande, les plaidoyers du
député de Viau et du député de Brome-Missisquoi
nous ont laissé croire, en tout cas, qu'ils voulaient beaucoup plus...
Relisez votre propre plaidoirie dans le Journal des débats et vous allez
voir combien vous êtes allés loin.
C'était, à mon interprétation, pour le moins, un
examen exhaustif de toute l'administration de la Commission des affaires
sociales et je ne pense pas que la demande initiale parlait de ça et
voulait ça. Si ça doit être ça, pour ma part, ce
sera non.
M. Paradis: Question de règlement, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Juneau): Quel numéro, s'il vous
plaît, d'article?
M. Paradis: Même numéro que mon collègue de
Nelligan, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Juneau): 33?
M. Paradis: C'est ça, bingol Mme la Présidente, si
j'étais sorti du cadre. de la motion - je vous connais comme une
présidente autoritaire - vous auriez certainement soulevé le
point et vous m'auriez restreint au débat. Donc, les paroles du
député de Beauharnois sont complètement hors du contexte.
Il aura la chance cette nuit, pendant qu'il réfléchira, de relire
cela et de venir s'excuser demain, en gentilhomme.
M. Lavigne: La nuit je ne réfléchis pas, je
dors.
La Présidente (Mme Juneau): M. le député de
Brome-Missisquoi, j'ai protégé votre droit de parole lorsque vous
l'aviez, maintenant la parole est au député de Beauharnois. S'il
veut terminer son intervention, il a droit à 20 minutes tout comme vous
avez eu.
M. Paradis: Mon intervention était strictement dans le but
de dire: Lorsque vous présidez, vous faites respecter le
règlement.
La Présidente (Mme Juneau): C'est très bien, c'est
ce que je vais faire. M. le député de Beauharnois, avez-vous
terminé?
M. Bisaillon: Mme la Présidente, est-ce que le
député me permettrait une question? Notre règlement nous
permet cela.
L'argumentation du député me convient. Je trouve que cela
a du sens et que cela se tient. Mais, là aussi, cela demanderait des
balises. Quand vous demandez du temps, qu'est-ce que cela veut dire? Est-ce que
cela veut dire jusqu'à demain midi? Par exemple, supposons qu'on
trouverait normal que, effectivement, il y ait un peu plus de consultations qui
puissent se faire; est-ce que cela veut dire qu'on pourrait au moins trancher
cette question demain midi ou demain en après-midi?
M. Fréchette: Mme la Présidente, je peux, si vous
me le permettez...
La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.
M. Fréchette: ...répondre à la question du
député de Sainte-Marie et, pour le faire, je vais utiliser le
texte de la motion du député de Saguenay aussi, ses conclusions,
en tout cas, et ceci dans les plus brefs délais, cette audition. Je vous
signale que je serais disposé à ce qu'on procède à
l'évaluation et à disposer aussi de la motion dans la
journée de demain, effectivement, très probablement au
début de la séance qui suivra immédiatement la
période des affaires courantes à l'Assemblée nationale. Je
vous signale qu'à ce moment je serais disposé à prendre
une position définitive.
La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre, avez-vous
terminé?
M. Fréchette: Oui, j'ai terminé pour le moment.
La Présidente (Mme Juneau): La parole est au
député d'Outremont.
M. Frechétte: Est-ce que demain matin on siège?
La Présidente (Mme Juneau): Demain matin, on siège
à 10 heures.
M. Pierre-C. Fortier
M. Fortier: Mme la Présidente, je croyais que, entre
fédéralistes que nous sommes tous ici, on pouvait s'entendre sur
une motion aussi facile. Comme de raison, il y a le collègue de
Sainte-Marie qui est dans une classe à part mais, maintenant que nous
sommes tous dans le même Canada, je croyais qu'on aurait pu s'entendre
assez facilement. Moi aussi, je me suis posé des questions sur certaines
argumentations et je me suis posé la question à savoir pour
quelle raison - compte tenu du fait que tous semblent dire que ce serait une
très bonne affaire si on pouvait entendre le représentant de la
Commission des affaires sociales, relativement au projet de loi 42, comme l'a
dit la motion - on ne puisse pas se mettre d'accord.
Et, de fait, si je me suis tu jusqu'à maintenant, Mme la
Présidente, c'est que, n'ayant pas eu la chance de participer aux
nombreuses séances pour entendre tous ceux qui voulaient se faire
entendre sur le sujet, j'ai cru bon, en homme responsable, d'écouter
certains de mes collègues qui avaient plus d'expérience que moi
pour tenter de cerner la vérité d'un peu plus près. .
Cependant, même un ingénieur comme moi comprend les
argumentations des avocats et là je suis un peu en désaccord avec
mon collègue de Sainte-Marie. C'est que nous avons un règlement
qui dit: Lorsque nous avons une motion, il faut en disposer. Et bien sûr,
si j'ai bien compris, la demande explicite qui est faite par la motion, c'est
d'entendre les représentants de la Commission des affaires sociales dans
les meilleurs délais. Mais lorsque j'ai écouté leur
plaidoyer, dans le fond, ce que les gens de l'Opposition ou ceux qui se sont
manifestés demandent, c'est qu'il serait plus logique, plus responsable,
dans le sens d'une meilleure compréhension de la loi, d'entendre les
représentants de la Commission des affaires sociales avant même de
commencer l'étude article par article. Quoique, Mme la
Présidente, la motion ne soit pas aussi explicite que ce que je viens de
dire, je crois que c'était là le sens de l'argumentation qui
avait été faite.
Moi-même, j'ai très bien compris, d'ailleurs les
députés de Nelligan, de
Saguenay, de Brome-Missisquoi et tous les autres qui se sont
exprimés l'ont dit clairement, c'est que l'ensemble du projet de loi
commande que nous puissions, avant même de commencer, entendre les
représentants de la Commission des affaires sociales. C'est la raison
pour laquelle je me permets d'insister sur le fait - et personnellement je le
fais d'une façon très simple, sans aucune acrimonie - que c'est
là le sens très précis de la demande. Si l'on veut, Mme la
Présidente, expliciter davantage la motion qui est devant nous, j'en
ferais un amendement pour l'expliciter encore davantage et pour préciser
la motion qui est devant nous. J'aimerais proposer que l'on change les mots
"les représentants", dans la motion, par les mots "le président
de la Commission des affaires sociales". En changeant ces mots, bien sûr,
cela est tout à fait anodin, mais c'est pour préciser; on
demandait d'avoir des balises. Dans le fond, ce que nous demandons ou ce que
ceux qui se sont exprimés ont demandé, c'est d'entendre une
personne en autorité de la commission; donc, le président; qu'il
soit entendu, mais pas pour n'importe quel sujet. Il faut que cela soit
relativement au projet de loi 42. J'imagine que ceux des députés
qui insistent si fortement pour entendre les représentants - et je
propose, en amendement, le président - c'est que, justement, cette
personne autorisée pourra nous donner l'éclairage dont nous avons
besoin avant de continuer le débat.
Connaissant mes collègues, je ne crois pas que l'intention - si
elle a pu être perçue ainsi, je dis que c'est malheureux - est de
faire un "filibuster", loin de là. C'est un projet de loi
extrêmement sérieux. Je crois qu'il faut l'étudier en
profondeur et, si l'argumentation qui été faite a pu faire croire
à certains députés ministériels que les
députés de l'Opposition étaient mal intentionnés,
je voudrais les rassurer immédiatement. Connaissant les discussions que
nous avons eues ensemble, je ne crois pas que ce soit là le désir
des membres de l'Opposition.
En conséquence, Mme la Présidente, je propose donc cet
amendement, c'est-à-dire de changer les mots "les représentants"
par "le président", et j'insiste pour demander que cela soit fait
dès que possible, sans en faire un amendement; j'insiste auprès
du ministre: dès que possible, soit à la reprise de nos travaux,
demain matin.
Donc, Mme la Présidente, je crois que nous avons
écouté toute l'argumentation nécessaire pour nous faire
une idée de la justesse de la demande formulée. Je crois qu'elle
a été faite avec beaucoup de sérieux. Je crois que, si
l'on veut rendre justice à un projet de loi si important pour tous les
travailleurs du Québec et également pour les employeurs -
peut-être pour différentes
raisons, mais certainement aussi importantes l'une que l'autre - cette
demande explicite, très claire, devrait être entendue. Si le
ministre nous dit: Je suis d'accord, je crois, à ce moment-là,
compte tenu des règles de procédure que nous avons, qu'il devrait
voter pour la motion. J'ai de la difficulté à comprendre pour
quelle raison le ministre responsable de cette commission pourrait avoir une
attitude négative face à une demande aussi explicite. Je crois
que le ministre pourrait se faire notre allié pour dire à la
ministre responsable que cette demande est tout à fait raisonnable et
qu'elle devrait être acceptée.
Ce sont donc là les propos que j'avais à tenir sur le
sujet, en espérant qu'ils permettront de comprendre le sens du
débat que nous avons eu depuis deux heures et en espérant que
tout le monde se rangera à l'opinion que j'ai essayé de
résumer dans les mots que j'ai utilisés.
La Présidente (Mme Juneau): Un instant, s'il vous
plaît. L'amendement qui vient d'être proposé par le
vice-président de la commission et député d'Outremont,
selon l'article 189...
M. Fortier: 189, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Juneau): ...est recevable. Donc, je
donne la parole à M. le ministre. Il ne vous reste qu'une seule minute,
M. le ministre...
M. Fréchette: Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Juneau): ...selon le temps et selon
l'ajournement.
M. Fréchette: Je vous dirai, quant à nous, que nous
n'avons évidemment pas d'objection à l'amendement qu'a
suggéré le député d'Outremont et,
deuxièmement, je vous signale que je suis également d'accord avec
lui quand il se réfère au règlement pour nous rappeler que
nous devons disposer de la motion qui est en discussion. Cependant, le
règlement ne nous oblige pas à en disposer en l'adoptant ou en la
refusant. Le même règlement nous permettrait sans doute - je ne
sais pas si cela nécessiterait le consentement de tous les membres de la
commission - de retenir la suggestion que j'ai faite depuis 20 heures et de
reporter la décision sur la motion à notre séance de
demain après-midi, après la période de questions. C'est
une façon aussi, je pense, de disposer de la motion qui est devant
nous.
La Présidente (Mme Juneau): Étant donné
qu'il faut, comme vous l'avez dit, M. le ministre, le consentement des membres
de la commission, nous pourrions effectivement, si les membres y consentent,
reporter à demain, après les affaires courantes, la
décision sur l'amendement et la motion elle-même. Est-ce
que...
M. Lavigne: Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Juneau): Étant donné
qu'il est 22 heures...
M. Lavigne: Est-ce que, Mme la Présidente, on ne pourrait
pas accepter... Est-ce que l'amendement du député d'Outremont a
été accepté officiellement?
La Présidente (Mme Juneau): II est recevable, oui.
M. Lavigne: II est recevable, mais est-ce qu'on l'adopte?
La Présidente (Mme Juneau): C'est cela.
M. Gagnon: Vingt minutes pour expliquer l'amendement, c'est cela?
Et ce n'est pas un "filibuster".
M. Lavigne: Je proposerais, Mme la Présidente, s'il n'y a
pas d'objection...
M. Paradis: ...les propos du député de
Beauharnois.
M. Lavigne: Je ferais une proposition qui serait d'adopter
l'amendement proposé par le député d'Outremont dès
maintenant. On est d'accord ou non avec son amendement.
La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que tout le monde est
consentant à adopter la proposition d'amendement de M. le
député d'Outremont?
Des voix: Adopté.
M. Cusano: Mme la Présidente, il est passé 22
heures et je crois qu'il serait...
La Présidente (Mme Juneau): Oui, il est 22 heures
effectivement.
Une voix: Je ne sais pas si je suis contre l'amendement du
député d'Outremont, mais j'aimerais y penser.
La Présidente (Mme Juneau): Un instant, s'il vous
plaît.
M. Fréchette: Un instant, si vous me le permettez. Je ne
sais pas si les règles vont encore être écorchées,
mais souvenez-vous qu'au début de nos travaux j'avais indiqué que
je procéderais au dépôt des amendements, tels que
corrigés dans leur dernière édition. Je voudrais
solliciter le
consentement des membres de la commission pour procéder à
ce dépôt et je remettrais deux copies...
M. Cusano: On va lire cela ce soir, avant de se coucher, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Juneau): Selon l'article 158, il faut
que le dépôt soit accepté par le vice-président de
la commission.
M. Fortier: Cela me fait plaisir, Mme la Présidente,
d'accepter le dépôt des amendements pour me permettre de les
étudier.
La Présidente (Mme Juneau): Nous ajournons nos travaux
à demain, 10 heures.
(Fin de la séance à 22 h 2)