L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Commission de l'économie et du travail

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission de l'économie et du travail

Version finale

32e législature, 5e session
(16 octobre 1984 au 10 octobre 1985)

Le mercredi 28 novembre 1984 - Vol. 28 N° 4

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude détaillée du projet de loi 42 - Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles


Journal des débats

 

(Dix heures vingt et une minutes)

La Présidente (Mme Juneau); La commission de l'économie et du travail reprend ses travaux. Voici le mandat de notre commission: procéder à l'étude détaillée du projet de loi 42, Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles. M. le Secrétaire, voulez-vous annoncer les remplacements.

Le Secrétaire: Oui, Mme la Présidente. Les remplacements, pour cette séance, sont les suivants: M. Bourbeau (Laporte) est remplacé par M. Maltais (Saguenay), Mme Dougherty (Jacques-Cartier) est remplacée par M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Kehoe (Chapleau) est remplacé par M. Polak (Sainte-Anne), M. Le Blanc (Montmagny-L'Islet) est remplacé par M. Gagnon (Champlain), M. Perron (Duplessis) est remplacé par M. Dupré (Saint-Hyacinthe) et MM. Bisaillon (Sainte-Marie) et Grégoire (Frontenac) nous ont informés qu'ils désiraient se prévaloir de l'article 130 lorsqu'ils seront présents.

Une voix: En quoi consiste l'article 130, Mme la Présidente?

Motion pour convoquer la Commission des affaires sociales (suite)

La Présidente (Mme Juneau): L'article 130 dit ceci: "Tout député indépendant peut participer sans droit de vote aux travaux d'une commission qui étudie un projet de loi." Voilà.

Nous en étions à discuter l'amendement proposé par le député de Viau sur la motion principale, qui était de changer les mots "les représentants" par les mots "le président de la Commission des affaires sociales".

M. Dussault: Mme la Présidente, étant donné que nous sommes tous d'accord avec l'amendement à la motion qui a été proposé hier par le vice-président de la commission, M. le député d'Outremont, je suggère à nouveau que nous passions au vote immédiatement sur cet amendement.

M. Marcel Gagnon M. Gagnon: Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Juneau): Oui, M. le député de Champlain...

M. Gagnon: Si je me souviens bien...

La Présidente (Mme Juneau): ...vous aviez la parole hier.

M. Gagnon: ...à la fermeture des travaux hier soir...

La Présidente (Mme Juneau): C'est exact.

M. Gagnon: ...c'était à moi à parler, j'avais le droit de parole. Je ne veux pas me prévaloir de ce droit trop longtemps. C'est seulement à la suite de l'intervention du député de Sainte-Marie où l'on s'est aperçu qu'à 21 h 45 hier soir - ou à 21 h 55 - on avait discuté sur des choses avec lesquelles tout le monde était d'accord. Ce matin, je me souviens que la suggestion qui avait été faite par le député de Sainte-Marie qui a été reprise sous forme de motion par le député de Saguenay à l'effet d'entendre la commission et ainsi de suite... Lorsque le ministre est arrivé, hier soir, il a dit qu'il semblait d'accord à quatre conditions, c'est-à-dire: premièrement, consulter le ministre responsable de cette commission; deuxièmement, baliser notre rencontre; troisièmement, inviter la commission lorsque nous en serons rendus à étudier les articles qui font l'objet de cette commission; quatrièmement, limiter le temps. Il est arrivé un amendement, par la suite, du député d'Outremont qui a dit: Au lieu d'entendre la commission, c'est le président de la commission. Là-dessus aussi nous sommes d'accord.

À ce moment-là, j'espérais, ce matin, et c'était à peu près l'intervention que je voulais faire hier soir, non seulement qu'on prenne une décision sur l'amendement seul, mais sur tout le sujet discuté hier soir qui, à mon point de vue, a duré trop longtemps pour rien parce que nous étions tous d'accord.

Si on veut commencer le mandat de notre commission qui est d'étudier article par article, y a-t-il possibilité de disposer de l'ensemble, du tout?

M. Fréchette: Je n'ai rien à ajouter, Mme la Présidente, à l'argumentation du député de Champlain. Cela me semble d'une logique absolument imperturbable. C'est sans

réserve évidemment que je souscris à la suggestion du député de Champlain.

La Présidente (Mme Juneau): Merci. M. Cusano: Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau.

M. Cusano: J'aimerais poser quelques questions au ministre sur l'amendement qui est devant nous. Est-ce que vous avez eu le temps de faire les consultations que vous songiez à faire?

M. Fréchette: Est-ce la première question?

M. Cusano: Oui. Je vais y aller au fur et à mesure, si cela ne vous dérange pas.

M. Raynald Fréchette

M. Fréchette: Je vous dirai, Mme la Présidente, qu'effectivement c'est un peu le motif pour lequel je n'étais pas ici à 10 heures précises. J'ai poursuivi la consultation dont je parlais hier soir. J'indiquais également hier soir que ce serait cet après-midi, à la reprise de nos travaux, que je serais en mesure de vous indiquer, de façon précise, l'état de la situation, mais, si le député de Viau me demande si cette consultation a été poursuivie, je dois lui dire que oui.

M. Cusano: Avez-vous consulté l'honorable juge Sauvé depuis hier soir?

M. Fréchette: Mme la Présidente, je veux bien qu'on continue, comme on l'a fait depuis un an et demi, deux ans, à faire le procès de tout un chacun, pas d'objection à cela, pas du tout, mais la réponse à la question du député de Viau, c'est un non catégorique.

M. Cusano: C'est clair quand c'est un non catégorique. Est-ce que vous avez songé, puisque vous semblez y être favorable, à ce que l'on convoque le président? Dans quel délai seriez-vous d'accord qu'il soit convoqué?

M. Fréchette: Mme la Présidente, le député de Champlain vient très précisément de le dire. C'est à l'article 352 - je pense, sous réserve d'une erreur de mémoire - qu'on amorcerait, normalement, l'étude article par article de la formation de cette commission d'appel en matière de santé et sécurité. La logique des choses m'amenait à la conclusion - c'est toujours l'opinion que j'en ai à ce stade-ci - que ce serait effectivement à ce moment qu'il serait indiqué, pour notre commission, d'entendre le président de la Commission des affaires sociales, si la décision est prise de l'entendre.

À cet égard, je voudrais simplement ajouter que les balises, dont vient de parler le député de Champlain, sont également importantes dans l'ensemble du scénario. Par exemple, le député de Sainte-Marie qui a été l'initiateur de cette discussion, par la suggestion qu'il a faite au début de nos travaux hier... Il faudra, de toute évidence, baliser dans le temps le témoignage du président de la Commission des affaires sociales, si on l'entend. Parce que convenons entre nous, Mme la Présidente, que les discussions que nous avons eues hier, après le dîner, ont fait dévier considérablement, à mon sens, l'objectif qui était ou qui semblait, préalablement, visé par les gens qui ont manifesté le désir que l'on puisse entendre le juge Poirier. Or, s'il est entendu, il faudra que ce soit à l'intérieur d'un temps déterminé et il faudra également que l'on s'entende sur le fait que nous n'allons pas, à tout bout de champ, procéder à entendre d'autres personnes ou d'autres organismes, particulièrement ceux qui ont déjà eu l'occasion de venir en commission parlementaire à travers les différentes étapes de l'adoption de cette loi.

M. Cusano: M. le ministre, vous accrochez toujours au chapitre XII en commençant par l'article 352, mais vous semblez oublier qu'à l'article 2 du projet de loi la commission d'appel y est difinie. Alors, il me semble qu'il faudrait - si vous êtes vraiment intéressé à entendre cet organisme ou son président - au moins que vous nous donniez une garantie qu'on l'entendrait, avant même d'aborder l'article 2, Mme la Présidente.

M. Fréchette: Mme la Présidente, mon expérience des débats parlementaires n'est pas ce qu'est celle de plusieurs autres, mais il me semble que cela ne répugne ni à la logique, ni à notre règlement qu'arrivant à l'article 2 nous suspendions l'adoption de cet article 2 pour le reporter pour adoption au moment où nous en arriverons à l'article 352. Je ne pense pas qu'en adoptant cette position nous ferions quelque entrave que ce soit à la réglementation.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Saguenay.

M. Maltais: Mme la Présidente, si on acquiesçait directement à la demande du ministre, cela serait d'accepter, au départ, que la commission d'appel est créée. La raison pour laquelle nous voulons entendre la Commission des affaires sociales, c'est que, si on étudie 352 articles avant, dans lesquels le principe de la commission d'appel est

inclus, cela veut dire qu'on donne notre accord de principe pour le reste du projet de loi. À partir du moment où on a des interrogations sérieuses sur la commission d'appel et que tout le monde est d'accord pour entendre la Commission des affaires sociales, je ne vois pas pourquoi on ne le ferait pas à cette étape-ci, avant le début de l'étude du projet de loi. Si on le fait à la fin, qu'est-ce que vous voulez, on sera obligé de revenir sur certains articles, car c'est dans une prémisse du projet de loi. Je pense que ce serait normal qu'on l'appelle dès l'article 2.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Champlain.

M. Gagnon: Je constate tout simplement que le débat recommence et que, à midi ou à 13 heures, je ne sais pas à quelle heure on va suspendre les travaux, on en sera encore sur le même sujet. On a perdu une heure trois quarts là-dessus, hier soir. Hier soir, j'ai écouté les interventions des libéraux; là-dessus, il n'y avait pas de problème, on était prêt à entendre la commission au moment de l'étude des articles, autour de l'article 352. On recommence le débat ce matin. Ce qui m'a fait mal un peu, c'est quand j'ai entendu le plaidoyer du député d'Outremont, à la toute fin de la commission, qui disait: Ce n'est surtout pas un "filibuster" qu'on fait. Mais il faudrait peut-être s'entendre, si l'on veut avancer; on est tous d'accord et on recommence le débat qu'on a fait hier soir. Si on veut avancer, pourquoi ne nous entendrions-nous pas sur les balises? Les balises sont claires, c'est lorsqu'on arrivera aux articles qui touchent la commission, l'article 352 et suivants; deuxièmement, s'entendre sur une période de temps. Alors, est-ce qu'il y a possibilité de régler cela au plus vite pour qu'on commence à étudier le projet de loi?

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Dubuc, ensuite M. le député de Châteauguay.

M. Desbiens: Mme la Présidente, le député de Saguenay parle d'appel, il dit qu'on va décider du principe - le principe a été décidé en deuxième lecture - d'une cour d'appel. Quand on parle de cour d'appel, cela ne présume pas comment sera constituée cette cour d'appel. On peut très bien discuter des 350 articles qui précèdent et l'appel se fera selon la cour qui sera déterminée à partir des articles 350 et suivants.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Châteauguay, je lui avais donné la parole.

M. Dussault: Mme la Présidente, merci. Pour compléter l'intervention du député de Dubuc, il est évident que le principe de la création d'une cour d'appel intervient à l'article 352. Alors, cela veut dire qu'on n'aura jamais tranché ce principe jusqu'à ce qu'on en arrive à cet article 352. Donc, il n'y a aucun problème à se rendre jusqu'à l'article 352. Il y a une définition, on ne la tranchera pas, on va la suspendre tout simplement, Mme la Présidente. C'est cela qu'on offre.

Je sais que M. le député de Saguenay n'est pas avec nous depuis longtemps, c'est sans doute quelque chose qu'il a encore à apprendre, c'est normal; mais c'est peut-être l'occasion de comprendre que le principe arrive seulement à l'article 352.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau.

M. William Cusano

M. Cusano: Mme la Présidente, de quoi l'Opposition a-t-elle voulu tenter de convaincre les ministériels? C'est qu'on a dit, tout simplement, que la Commission des affaires sociales a une certaine expertise que peu d'autres organismes ont présentement.

Je voudrais me référer à une brochure de la CSST, 1984, à la page 13, où, justement, on parle de la Commission des affaires sociales. Je pourrais vous lire tout le texte, mais, enfin, c'est un cas d'appel devant la Commission des affaires sociales, où la commission a eu à juger, à savoir si c'était un accident du travail ou non. Je vais simplement vous lire la conclusion, Mme la Présidente, où on dit: "Pour ces motifs, la commission a conclu que l'accident en question s'était produit alors que la victime exerçait une activité qui lui était personnelle et qui ne pouvait donc être considéré comme un accident du travail, la victime n'étant pas un employé de la municipalité." L'appel a été rejeté. C'est que tout cela, c'est inclus, ce sur quoi la Commission des affaires sociales a eu à se prononcer. On le retrouve dès le début. Si vous avez bien écouté mon intervention, j'ai dit que, s'il y avait un organisme qui avait une expertise en matière d'accidents du travail, c'est bien la Commission des affaires sociales et que l'on voulait entendre cet organisme pour qu'il puisse nous éclairer lorsqu'on arrive... Ce n'est pas simplement la question de la cour d'appel, ce n'est pas seulement ça. Ce sont tous les autres articles. On voudrait le savoir, lorsqu'on parle, par exemple, de l'établissement, un accident du travail comme celui-là qui a été jugé tel quel. C'est ça qu'on veut savoir de la Commission des affaires sociales. C'est de voir, justement, quel problème elle a le droit de régler dans le projet de loi.

Alors, si vous n'êtes pas intéressé à ça, si vous n'êtes pas intéressé, c'est une autre question. Mais, si on suit votre esprit d'ouverture, il me semble qu'il serait très normal, avant même qu'on aborde l'article 1, de convoquer les personnes qui sont des experts dans la matière. Le ministre, lors des auditions sur la loi 42, première version, avait accepté la suggestion, je crois, du Conseil du patronat, qu'on puisse adjoindre des experts.

Ce n'est pas là la proposition. On veut entendre la Commission des affaires sociales pour voir ce qu'elle a vécu, elle, en tant que commission d'appel et, en même temps aussi, nous dire si la structure qui est proposée comme commission, comme nouvel organisme, est vraiment une structure qui va améliorer le sort des accidentés.

C'est ça qui est l'esprit de la motion qui est devant nous, Mme la Présidente. Alors, ceux qui essaient de leur côté une petite stratégie en disant: Bon, on va y arriver en temps et lieu, à l'article 352, nous, nous n'avons aucune garantie que ça va être accepté.

Comme disait mon collègue, le député de Saguenay, c'est qu'il y a beaucoup d'autres choses dans le projet de loi, justement, où on pourrait profiter de l'expertise de la Commission des affaires sociales. C'est pour ça qu'on avait fait la motion. Alors, s'il pense qu'on est dans un "filibuster", il a droit à son opinion, mais je peux vous dire une chose, M. le député. C'est que, si on regarde la brique, environ 200 amendements, alors qu'au début de la deuxième lecture on me disait qu'il n'y en avait qu'une centaine, une chance que nous avons pris le temps nécessaire pour permettre au ministre de réviser son projet de loi avec quelque 200 amendements. C'est quelque chose de considérable et on voudrait voir quelle est l'opinion de cet organisme qui a une expertise, une expertise énorme.

C'est pour ces raisons, Mme la Présidente, que je crois qu'il faut prendre une décision immédiatement. Je suis d'accord que le ministre soit préoccupé, dans un sens, de ne pas éterniser le débat. Je n'ai pas l'intention d'éterniser le débat. Mais je veux être bien informé et je veux que les membres ici de cette commission soient bien informés, en demandant à la Commission des affaires sociales, à son président de venir ici.

Qu'on le limite dans le temps, il n'y a aucune objection. Il n'y a aucune objection et qu'on le dise tout de suite. Si le ministre est si ouvert que ça, qu'il propose des amendements, que le côté ministériel propose des amendements, pour que, justement, le président soit convoqué pour telle ou telle journée, pour telle ou telle période de temps. Là, on verra si, d'après nous, c'est convenable.

La Présidente (Mme Juneau): Vous avez terminé, M. le député de Viau?

M. Cusano: Oui, pour le moment.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Beauharnois.

M. Lavigne: Mme la Présidente, je voudrais remplacer le député de Saint-Hyacinthe par le député de Duplessis.

La Présidente (Mme Juneau): Remplacement...

M. Cusano: On s'était mis d'accord, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Juneau): Oui, ça va.

M. Cusano: II y a un esprit de collaboration de ce côté-ci.

La Présidente (Mme Juneau): C'est à espérer! M. le député de Champlain, vous avez demandé la parole.

M. Gagnon: Je crois que le ministre avait demandé la parole avant.

M. Fréchette: Oui, j'ai juste...

La Présidente (Mme Juneau): Je m'excuse, M. le ministre.

M. Fréchette: ...une argumentation à ajouter, Mme la Présidente, à tout ce qui s'est dit jusqu'à maintenant et je vous signale, quant à moi, que je n'ajouterai aucun commentaire à toutes ces argumentations-là.

De la façon dont le député de Viau nous fait ses représentations ce matin, il a l'air de penser, ou enfin, de souhaiter que, s'il faut entendre le juge Poirier, nous devrions le faire cet après-midi ou demain.

J'imagine bien que, si nous prenions cette décision-là, si le juge, le président de la Commission des affaires sociales en était informé, il est suffisamment responsable pour prendre le temps dont il a besoin pour se préparer à venir répondre à nos questions. En tout cas, si j'étais dans sa position, dans ses fonctions et qu'on me demandait à une heure d'avis de venir me présenter devant une commission parlementaire pour répondre aux questions de tous ses membres, je me considérerais passablement bousculé. C'est une autre des raisons pour lesquelles la demande, ou enfin, les balises dont on parle, de procéder à l'adoption de la motion avec cependant la réserve que le président de la Commission des affaires sociales serait entendu au moment où nous entreprendrions l'étude des articles 352 et suivants, c'est un

autre motif pour lequel cela m'apparaît être tout à fait logique, raisonnable et convenable que l'on procède à son audition uniquement au moment d'entreprendre l'étude des articles 352 et suivants.

La Présidente (Mme Juneau): Merci, M. le ministre. M. le député de Champlain.

M. Gagnon: Pour revenir à la charge, Mme la Présidente, j'ai l'impression qu'à peu près tout le monde a écoulé le temps de droit de parole qu'on avait sur cette motion. Je n'ajouterai rien d'autre que de vous demander d'appeler le vote sur la motion, de façon qu'on puisse commencer à étudier article par article le projet de loi.

La Présidente (Mme Juneau): Selon l'article 194, M. le député de Champlain: "Si aucun amendement n'est proposé à une motion, tout député qui a la parole peut proposer qu'elle soit immédiatement mise aux voix. Cette motion ne peut être amendée." Étant donné que nous avons eu un amendement hier par le député d'Outremont.

M. Gagnon: J'avais justement lu cet article, mais, si j'ai bien compris - je pense que oui, j'ai bien compris - l'amendement qu'on avait en discussion a été automatiquement accepté par tout le monde. Même s'il n'y a pas eu de vote - je présume qu'il n'y en a pas eu - si on relit le Journal des débats d'hier soir, je pense que l'amendement n'a fait l'objet d'aucune discussion. Après l'explication du député d'Outremont, tout le monde était d'accord. Donc, je considère que l'amendement est adopté et je considère qu'on en est rendu à adopter la motion principale.

M. Bisaillon: Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Saguenay avait demandé la parole.

Je dois lui donner la parole, je l'avais reconnu d'ailleurs.

M. Maltais: Mme la Présidente, je pense que le ministre a peut-être mal interprété mes paroles tout à l'heure. Ce que je dis, c'est que, dans les articles 1 à 352, il y a tout le principe d'acceptation d'une commission d'appel et qu'on regarde seulement, par exemple, le chapitre III, de 41 à 55, à l'heure actuelle, c'est là que les problèmes se posent à la Commission des affaires sociales par rapport à cette commission d'appel. C'est un droit fondamental au niveau des travailleurs. Il est vrai que je n'ai pas huit ans d'expérience de parlementaire, peut-être que dans l'avenir on l'apprendra. Cependant, il y a une chose qui est bien claire: C'est qu'on est ici pour légiférer pour des citoyens qui sont lésés et c'est à ce titre-là qu'on entend le faire. Peu importe ce que les membres d'en face puissent en penser, cela ne nous empêchera pas de faire notre travail adéquatement. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Sainte-Marie.

M. Guy Bisaillon

M. Bisaillon: Mme la Présidente, je voudrais juste - en espérant que cela va accélérer les choses - indiquer que l'argumentation du député de Viau m'amène à conclure finalement dans le même sens que le ministre. Le député de Viau nous soulignait qu'hier le ministre a déposé 200 amendements. Il me semble évident que, si on veut entendre le président de la commission, si on veut que cette comparution du président de la commission soit valable, même si on décidait entre nous que c'est absolument avant l'article 2 que cela doit se faire, il me semble que ça ne serait pas réaliste de penser que le président de la commission peut, en si peu de temps, passer à travers les 200 amendements et voir à quel point cela change, cela modifie le projet de loi qu'il a sûrement déjà lu. Je trouve qu'on pourrait rapidement adopter le principe et demander au ministre responsable du projet de loi ainsi qu'au responsable de l'Opposition de s'entendre sur le moment où cela devrait être fait. Je pense qu'on peut adopter le principe maintenant et, après cela, demander au ministre et au responsable de l'Opposition de s'entendre sur le moment. Si, en cours d'étude article par article, on se rendait compte qu'il est préférable de suspendre un article en attendant le président, cela se fait toujours. Je suis pas mal certain qu'à ce moment on pourrait avoir la collaboration du ministre et des députés ministériels à cet effet. (10 h 45)

Je pense qu'on devrait, maintenant qu'on a fait le tour de toute la question, adopter le principe de la motion du député de Saguenay et demander au ministre qu'il s'entende avec l'Opposition sur le moment où cela devrait être fait, en convenant, cependant, que, si on rencontre des articles, au moment de l'étude article par article, qui posent un problème et qu'on aimerait soumettre au président de la Commission des affaires sociales, on les suspendra.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau. Pardon, M. le ministre, est-ce que vous aviez demandé la parole?

M. Raynald Fréchette

M. Fréchette: Mme la Présidente, je dois vous signaler que je suis tout à fait

d'accord avec la suggestion que le député de Sainte-Marie vient de nous soumettre. La seule réserve que j'ai, et elle ne s'adresse pas à lui, mais à la conséquence des suggestions qu'il fait, c'est que je voudrais bien que l'on convienne, ici à cette table, dès maintenant, de ce genre de balise dont on parle.

Cela ne serait pas, quant à moi, tellement compliqué d'arriver à les identifier et si on peut s'entendre sur ces balises, je vous réitère qu'on va adopter la motion rapidement et qu'on pourra passer à autre chose.

Quelles pourraient être les balises? En termes de temps, par exemple, pour ce qui nous concerne très spécifiquement et ce qui concerne le président de la Commission des affaires sociales, il me semble qu'à l'intérieur d'une période de deux heures on pourrait être suffisamment informé sur les choses qu'on a besoin de savoir.

Deuxièmement, il nous faut, de toute évidence, avoir cette assurance qu'en acceptant la motion cela n'ouvrira pas la porte à toute espèce de motion de même nature pour faire venir ici les autres groupes qui ont pu être entendus en commission parlementaire.

C'est à l'intérieur, donc, de ces deux balises et, évidemment aussi, il faut laisser au juge Poirier le temps nécessaire pour se préparer. Et, comme le suggère le député de Sainte-Marie, si, de l'article 1 à l'article 352, il y a des articles qui se réfèrent à la commission d'appel, nous les suspendrons purement et simplement jusqu'à ce que le juge Poirier ait été entendu.

Mme la Présidente, je pense qu'on est allé aussi loin qu'on pouvait aller et je souhaite entendre maintenant la réaction de nos collègues de l'Opposition sur ces suggestions. Un seul autre commentaire, Mme la Présidente. Il faudrait aussi que ce soit très clair entre nous que les motifs pour lesquels le président de la Commission des affaires sociales viendrait devant nous sont des motifs strictement reliés à la matière qui nous occupe. Il ne faudrait pas, évidemment, qu'on entreprenne ici de faire l'évaluation de toutes les activités de la Commission des affaires sociales.

M. Bisaillon: C'est dans la motion, cela. Pour être honnête avec le proposeur, c'est dans sa motion.

M. Fréchette: Enfin, trop fort ne casse pas.

M. Bisaillon: Oui, je comprends, mais des fois trop fort allonge.

M. Fréchette: Je suis tout à fait d'accord.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau, vous aviez demandé la parole.

M. Cusano: Mme la Présidente, je suis d'accord avec les propos du ministre, mais j'aimerais avoir une certaine garantie; il parle de deux heures. Cela veut dire qu'en l'espace de deux heures le président aurait à faire une présentation. D'après l'expérience qu'on a vécue ici aux commissions parlementaires, lorsqu'on parle, justement, d'un sujet aussi important, il me semble que deux heures, considérant l'exposé du président plus les interventions d'un côté et de l'autre de la table, cela ne nous donne pas beaucoup de temps. Qu'il consente, par exemple, qu'on établisse que la présentation du juge Poirier soit d'une heure, que deux autres heures supplémentaires soient allouées et que ces deux heures soient partagées: une heure du côté ministériel et une heure du côté de l'Opposition, cela m'irait.

M. Bisaillon: II y en a deux.

M. Cusano: II y a deux Oppositions. Dans ce cas, M. le député de Sainte-Marie, je suis prêt à partager et même à demander un peu plus de temps. Je ne voudrais pas qu'on passe à travers une action et, à la fin, qu'on s'impose soi-même une guillotine. Je pense que ce serait important et j'aimerais savoir du ministre si, dans son esprit d'ouverture, justement, il pouvait nous indiquer... Si le juge Poirier, même dans le temps qu'on lui accorde, prend plus de temps pour faire son exposé, je pense qu'il serait gentil de le laisser faire son exposé. Encore une autre suggestion, M. le ministre. Que le juge fasse son exposé et, par après, que l'on prenne deux heures pour lui poser des questions. Cela va. Parce que de lui dire qu'il va avoir 30 minutes pour faire une présentation, je pense qu'on commence à imposer pas mal de choses. Si le ministre est d'accord, je vais lui donner l'accord en principe justement. Qu'il convoque ou qu'il demande au juge Poirier, justement, de se préparer. Je suis d'accord avec quelque 200 articles ici qui sont amendés.

Il serait peut-être préférable que le ministre renvoie une réimpression de la réimpression du projet de loi au juge Poirier pour qu'il puisse vraiment se préparer adéquatement. Laissant la liberté au juge de se préparer et de nous dire à un certain moment: Je suis prêt à venir vous rencontrer, parfait. Nous, ici, qu'on s'entende sur le partage du temps du côté ministériel et du côté de l'Opposition et des indépendants. Sur ça, Mme la Présidente, je suis complètement ouvert.

La Présidente (Mme Juneau): Vous avez terminé, monsieur. M. le ministre.

M. Fréchette: Je vais faire un autre bout. Là je vous signale que c'est vraiment le dernier. Cela veut dire quoi?

M. Bisaillon: En négociations, il ne faut jamais dire cela.

M. Fréchette: Moi je serais disposé à retenir la suggestion du député de Viau, que l'enveloppe de temps soit de trois heures au lieu de deux. Maintenant, il n'y a rien qui implique que de toute évidence le président de la Commission des affaires sociales doive faire une présentation d'une heure. Il peut bien faire une présentation d'une demi-heure, une présentation de quinze minutes, une présentation de 20 minutes, il peut ne pas en faire du tout et se déclarer à la disposition des membres de la commission pour que l'on procède à l'interroger sur les renseignements qu'on veut avoir. Si on peut s'entendre, au sujet du délai maximum de la présentation, si le président de la Commission des affaires sociales veut effectivement en faire une, ce serait d'une heure. S'il en fait une et qu'elle est de quinze minutes, les représentants des deux partis - et là je ne sais pas comment on va répartir cela pour l'Opposition circonstancielle - pourraient avoir une enveloppe d'une heure chacun pour procéder à obtenir des renseignements du juge Poirier. Cela veut dire que cela peut durer au maximum trois heures et au minimum deux heures. C'est le compromis que je suggère aux membres de la commission.

La Présidente (Mme Juneau): II me semble que tout le monde est d'accord. Personne...

M. Cusano: Dernière question. C'est que si je comprends bien, vous allez communiquer avec le juge Poirier, c'est ça? Bon, ça va être le secrétariat justement qui dira que l'on désire le rencontrer. Dans la communication, vous allez justement lui expliquer...

M. Fréchette: Lui expliquer? Je n'ai absolument rien, quant à moi, à lui expliquer.

M. Cusano: C'est-à-dire de l'informer au moins combien de temps il aurait à sa disposition.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau, je m'excuse de vous interrompre, mais je pense que c'est le travail de la commission de faire cela et on pourrait après cela vous informer.

M. Cusano: C'est bien.

La Présidente (Mme Juneau): Si vous êtes d'accord sur le principe.

M. Cusano: Je suis d'accord sur le principe.

La Présidente (Mme Juneau): À ce moment, est-ce que la motion principale est adoptée, d'une part? Est-ce que l'amendement du député d'Outremont est adopté?

Des voix: Adopté.

La Présidente (Mme Juneau): Adopté. Maintenant, nous devons . baliser tel que le ministre l'a dit. Nous convenons que c'est trois heures maximum que le juge Poirier sera ici pour être entendu. Est-ce que tout le monde est d'accord avec cela?

Une voix: D'accord.

La Présidente (Mme Juneau): D'accord. Aussi, le moment où on va inviter le juge est à l'article 352 du projet de loi 42. Est-ce que tout le monde est d'accord pour cela?

M. Cusano: Cela va. C'est-à-dire, que si je comprends bien le ministre, il va vouloir...

M. Bisaillon: Étant donné, Mme la Présidente, que vous avez souligné que la commission va informer le juge Poirier du désir qu'elle exprime de le rencontrer, les discussions peuvent se poursuivre entre le ministre et l'Opposition officielle. Ne serait-il pas préférable de suspendre les articles ayant une référence, selon l'entente qu'on a eue, tout simplement de laisser cet aspect de côté, de ne pas préciser à quel article on veut l'avoir?

M. Fréchette: Au moment jugé opportun.

M. Bisaillon: Au moment jugé opportun par les parties.

La Présidente (Mme Juneau): Nous devons convenir aussi, tel que le ministre l'a proposé tout à l'heure, qu'il y ait une heure maximum pour le juge Poirier et deux heures réparties pour l'ensemble des membres de la commission. Est-ce que c'est exact? Est-ce que tout le monde est d'accord avec cela?

Une voix: Oui, cela va.

M. Cusano: Mme la Présidente. Excusez-moi.

La Présidente (Mme Juneau): On m'informe qu'après convocation du juge, on pourra à ce moment-là, fixer la date et les convenances, tel qu'entendu.

M. Cusano: Sur la question de

commencer cela à l'article 352, c'est que...

M. Fréchette: C'est cela, on vient de dire que ce serait en temps opportun.

M. Cusano: En temps opportun, exactement. Et, on va se rencontrer en arrière du trône, j'espère, M. le ministre, pour savoir quel est le temps opportun, après avoir eu la réponse du...

M. Fréchette: De toute évidence, Mme la Présidente, il va falloir qu'on se parle à un moment donné.

M. Cusano: C'est bien.

M. Desbiens: C'est évident. On peut se parler devant le monde.

M. Cusano: Cela va.

La Présidente (Mme Juneau): Au moment présent, c'est que la commission convoquera le juge Poirier et en temps opportun, le juge sera là pour répondre aux questions des membres de la commission.

M. Cusano: Cela va.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que c'est cela?

M. Gagnon: On passe à l'article 1.

La Présidente (Mme Juneau): Bon, c'est très bien.

Est-ce que l'on peut convenir que les remarques préliminaires sont maintenant terminées et que nous débutons sur l'article 1 de la loi 42. Exact? Merci, messieurs.

Étude détaillée Objet

Est-ce qu'il y a des députés qui souhaiteraient intervenir sur l'article 1 ou si nous convenons qu'il est adopté? Ah! oui.

M. Fréchette: Cela s'engageait.

La Présidente (Mme Juneau): Vu que cela allait bien.

M. Cusano: Bien sûr, ce serait juste pour les arrêter.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau, vous avez la parole.

M. Cusano: J'aimerais, lorsqu'on parle de l'article 1, Mme la Présidente, poser des questions au ministre, s'il me le permet. C'est sur le mot "consolidation". Est-ce que le ministre peut nous expliquer ce que veut dire le mot "consolidation" dans le sens du projet de loi?

La Présidente (Mme Juneau): Vous avez terminé, M. le député?

M. Cusano: Est-ce que vous voulez que je pose toutes les questions sur l'article...

M. Fréchette: Non. Là, si je comprends bien, on entreprend l'étude de l'article 1 du projet de loi?

M. Cusano: C'est cela. M. Bisaillon: C'est bien.

M. Fréchette: Déjà une première question qui m'est soumise par le député de Viau. Ce qu'il me demande, c'est de lui indiquer quelle serait la définition du terme "consolidation".

Evidemment, la première source de référence pour répondre à cette question, on va tous convenir que c'est dans le dictionnaire qu'on peut la retrouver. La définition du Petit Robert de l'édition 1979, à la page 373, est la suivante: "rapprochement et soudure de parties accidentellement séparées. Consolidation d'une fracture. Stabilisation d'une maladie ou d'une lésion."

Alors, on ne peut pas ajouter ni retrancher à ce genre de définition. (11 heures)

Maintenant, je vous signale que nous avons eu de longues discussions avec le monde médical pour obtenir son appréciation quant à la définition qu'il fallait donner au terme "consolidation" et je ne vais pas vous répéter , les expressions qu'eux-mêmes utilisent, mais plutôt la signification qu'on retient de leur définition. La consolidation d'une lésion professionnelle, qu'il s'agisse d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, ce serait l'étape où en arrive une personne et après laquelle, aucune amélioration n'est possible. En d'autres mots, la réadaptation physique est complétée. C'est, encore une fois, à partir des observations du monde médical que cette définition est retenue. Je ne sais pas si c'est suffisant ou si le député de Viau souhaite...

M. Cusano: Concernant la consolidation, est-ce qu'on pourrait nous dire, sur le plan médical, si c'est une définition qui est très précise? Quand y a-t-il consolidation? Je sais que le ministre n'est pas médecin, mais j'aimerais savoir. Est-ce que c'est un moment où il n'y a plus rien à faire sur une lésion ou un moment où c'est complètement guéri? C'est cela que je veux savoir.

M. Fréchette: Mme la Présidente, le député de Viau a été prudent de signaler que

je n'étais pas médecin. Je vais, encore une fois, à partir de mon appréciation à moi, de mon évaluation et de la connaissance très limitée que j'ai d'un phénomène comme celui-là, lui dire que la consolidation c'est, effectivement, l'étape après laquelle il n'y a pas de possibilité d'amélioration de la condition d'une personne. En d'autres mots, donnez les soins que vous voudrez, soumettez cette personne à quelque traitement que ce soit, cela ne pourra pas améliorer sa situation et cela répond à la deuxième question du député de Viau.

Cela veut dire aussi que quelqu'un, par exemple, qui est affecté d'une incapacité partielle permanente de 10%, si l'incapacité est permanente, la consolidation va arriver au moment où les médecins vont évaluer que cette incapacité est là, qu'elle est là pour durer et que la guérison complète ou totale n'est pas possible. C'est dans ce sens que l'on parle de consolidation. Cela nous ramène, encore une fois, à la définition du dictionnaire le Petit Robert, qui donne de la consolidation une définition qui réfère à la médecine légale et qui dit ce que je vous signalais tout à l'heure: C'est la stabilisation d'une lésion à la suite d'un traitement, état séquellaire, non susceptible d'amélioration.

M. Cusano: Mme la Présidente, cela va pour le moment.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Mme la Présidente, mes interrogations sur l'article 1 sont beaucoup plus sur la capacité qu'on peut avoir au moment où on se parle, d'adopter l'article 1. Si je le lis correctement, cet article présente les objets du projet de loi, mais son adoption supposerait que je suis d'accord avec chacune des modalités qui y sont contenues, en particulier le paiement d'indemnités de remplacement du revenu, d'indemnités pour dommages corporels et, le cas échéant, d'indemnités de décès. Cela présume de toute une discussion qui va avoir lieu plus loin. Il me semble qu'on devrait plutôt faire cette discussion et par la suite, revenir à l'article 1. Je dis cela, M. le ministre, en pensant aussi à toutes les définitions qui vont suivre. Il y a deux orientations possibles. Je sais que vous avez déjà fait des négociations et il arrive très souvent que les définitions soient la dernière chose qu'on règle dans une convention collective. On s'entend. On fait d'abord les débats de fond, on s'entend sur une formulation de clauses. Par la suite, on donne les définitions selon l'utilisation qu'on en a faite. Donner des définitions d'abord et, après cela, discuter d'un texte, si on apporte des amendements, cela peut ne pas être concordant, è un moment donné. Or, de la même façon, je trouve que l'article 1 nous fait entrer dans un débat de fond qui n'est pas fait. Et adopter l'article 1, même si c'est l'objet de la loi... Cela me rend mal à l'aise, en tout cas, de procéder à l'adoption d'un article, qui contient des modalités dont on va avoir à discuter plus tard, sans savoir comment cette discussion va ressortir, sans savoir s'il n'y aura pas des modifications apportées, sans savoir si les calculs et l'analyse qu'on pourrait faire ne nous amèneront pas à modifier cet aspect du projet de loi.

M. Fréchette: Mme la Présidente, je trouve l'argumentation du député de Sainte-Marie fort intéressante, mais je vous signale que j'ai beaucoup de difficultés à y souscrire.

Je ne comprendrais pas pourquoi et comment il faudrait que l'adoption de l'article 1, qui est un article d'orientation générale, de description des objets de la loi, je ne comprendrais pas comment, si on l'adoptait, cela nous lierait à l'égard de certains autres mécanismes qui sont prévus dans la loi comme, par exemple, là je prends l'exemple très précis qu'utilise le député de Sainte-Marie, la reconnaissance du fait que nous allons retenir, lorsque nous y arriverons, le mécanisme d'indemnité par voie de remplacement du revenu. Si nous arrivons à l'étape qui prévoit que la réparation, en termes strictement économiques, doit se faire par l'indemnité de remplacement du revenu et que les membres de la commission décident de rejeter ce mécanisme-là, comment voulez-vous qu'on soit lié par l'application d'un mécanisme qui ne serait pas adopté parce qu'on aurait, dans un article très général, indiqué un objet d'application de la loi, lequel objet ne serait pas retenu. En d'autres mots, je ne vois pas comment on est lié de la façon dont l'explique le député de Sainte-Marie. J'aimerais avoir un peu plus de détails là-dessus.

M. Bisaillon: Le ministre me donne un peu raison dans son argumentation, Mme la Présidente. L'article 1, c'est l'objet de la loi. L'objet de la loi, c'est la réparation des lésions professionnelles et des conséquences qu'elle entraîne pour les bénéficiaires. C'est l'objet de la loi. Tout le reste, ce sont des mécanismes, des moyens qu'on utilise pour arriver à répondre à l'objet de la loi, qui est de réparer les lésions professionnelles. Je dis que le deuxième paragraphe, ce n'est pas de l'ordre de l'objet de la finalité, c'est de l'ordre du moyen. Et le fait de l'inclure dans l'article 1 avec la mention objet, cela me lie au niveau de la discussion que je vais faire sur les moyens. Parce que si je ne retiens pas les moyens... Le ministre me dit: Si vous ne retenez pas le moyen, on n'aura qu'à

faire l'ajustement du deuxième paragraphe de l'article 1. Ce que je dis, c'est que l'article 1 a comme titre "objet". Ce qu'il faut que j'adopte, à ce niveau, c'est la finalité du projet de loi, ce qu'il vise ultimement, et c'est la réparation des lésions professionnelles. Là-dessus, tout le monde va s'entendre.

Comment? Cela est une autre chose. La preuve que c'est une autre chose, c'est qu'on va retrouver dans le projet de loi plusieurs articles qui vont nous dire comment cela va se faire, justement. Le fait de l'adopter maintenant, c'est me lier sur les moyens. Ce que je pourrais par la suite, vous dire: Le paiement d'indemnités de remplacement du revenu n'est pas suffisant; mettez-en un peu plus, mettez-en moins. Je pourrais discuter sur les modalités du paiement de revenu. Mais si je l'adopte dans l'objet, le paiement de revenu devient un objet de la loi et m'empêche, par la suite, de discuter du moyen.

En tout cas, je pense que l'argumentation même du ministre nous indiquait que lorsqu'on réfère aux indemnités de remplacement du revenu, on réfère à un moyen qu'on prend pour répondre à l'objet de la loi, qui est, véritablement, seulement le premier paragraphe de l'article 1.

M. Fréchette: Mme la Présidente, dans la même foulée de l'argumentation du député de Sainte-Marie, à supposer que, lorsqu'on arrivera au chapitre des moyens dont il parle et, plus précisément, au chapitre qui parle d'une indemnité de remplacement du revenu, l'on ne retienne pas l'objet dont on parlait à l'article 1, qu'on modifie par exemple ce moyen, qu'on décide, au lieu d'introduire la notion et le principe du paiement d'indemnités de remplacement du revenu, de conserver - là, je parle strictement pour les fins de la discussion - le mécanisme actuel de réparation sur le plan strictement économique, qu'est-ce qui nous empêcherait, à ce moment, Mme la Présidente, de faire le réajustement qui s'impose à l'article 1?

C'est dans ce sens-là que je réitère mon opinion, que d'adopter l'article 1, comme il se retrouve au projet actuel, ne nous lie pas juridiquement, ni autrement quant à l'opportunité de procéder à des changements sur l'un ou l'autre des moyens qui ne sont qu'identifiés à l'article 1. On ne parle pas, à l'article 1, des modalités d'application de chacun des moyens qui sont identifiés. Alors, je ne vois pas, Mme la Présidente, comment l'argumentation du député de Sainte-Marie pourrait être retenue à ce stade-ci. Si c'était ça, ça voudrait dire que, si on prend le deuxième paragraphe de l'article 1, à toutes fins utiles, il n'y a rien à faire. Je veux dire, on ne peut pas l'adopter, l'article 1, tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas disposé de tous les moyens auxquels il réfère.

Enfin, si on pousse l'argumentation jusqu'au pied de la lettre, ce n'est pas illogique d'arriver à cette conclusion-là.

M. Bisaillon: Je termine mon intervention, Mme la Présidente - ce sera la seule que je vais faire sur l'article 1, de toute façon - en disant que des articles de loi, ça doit répondre aux titres qu'on leur donne. Là, on parle des objets de la loi. L'objet de loi, c'est la réparation des lésions professionnelles. C'est le droit et la reconnaisance du droit au retour au travail. Cela, c'est vraiment les objets. Le reste, c'est comment on va y arriver. Je vais dire au ministre: Le premier et le troisième paragraphes de l'article 1, pour moi, sont de l'ordre des objets. Comment se fait-il qu'il n'a pas ajouté un quatrième paragraphe, pour nous expliquer le processus disant comment on va assurer le droit au travail? Il aurait pu faire ça et ça aurait répondu exactement au deuxième paragraphe, quand il nous explique le processus qu'on va utiliser pour réparer les lésions professionnelles.

Je ne sais pas si je me fais bien comprendre. Premier paragraphe, on dit: L'objet de la loi, c'est la réparation des lésions professionnelles. Deuxième paragraphe, on dit - les grands titres disent comment on va faire pour réparer les lésions professionnelles.

Deuxième objet qu'on retrouve dans l'article 1, c'est le droit de retour du travailleur, le droit de retour au travail du travailleur. Mais là, on ne nous dit pas comment, on ne nous explique pas de processus, on ne nous dit pas ce que va être les moyens utilisés. On va le retrouver au chapitre 7 de la loi.

Pourquoi n'a-t-on pas procédé comme ça pour la réparation des lésions professionnelles? C'est juste ça que je dis. Dans ce sens-là, je dis: On peut adopter les deux principes, suspendre le processus et, puis, quand on aura discuté les moyens, on reviendra là-dessus. Mais, techniquement, je vous dis en plus de ça que, normalement, on ne devrait pas le retrouver là, le deuxième paragraphe.

Maintenant, ce n'est pas une question de... Je comprends que le ministre a dit: Si la discussion de fond sur les moyens amenait des changements, on l'enlèvera. On fera les concordances. Je suis d'accord avec ça. C'est habituellement aussi comme ça qu'on procède. Je n'ai pas d'objection, sauf que j'indique qu'à l'article 1, on en fait un objet. Le moyen, est-ce que c'est un principe? Est-ce qu'on est lié... Après la deuxième lecture, on est lié par les principes qui ont été votés par l'Assemblée nationale, en commission parlementaire.

Est-ce que le moyen qui a été retenu, c'est ça, le principe? Si on le retrouve à

l'article 1, je crains qu'à un moment donné, quand on va discuter du moyen, je me fasse servir ça comme argument. J'aime autant le dire maintenant. J'aime autant dire, ça, c'est de l'ordre des moyens, puis ce n'est pas un objet de la loi. Donc, c'est discutable, ici, article par article, et c'est modifiable. On n'est pas lié par la question de principe votée par l'Assemblée nationale, parce que c'est de l'ordre du moyen. Si je ne le dis pas maintenant, Mme la Présidente, rendu aux articles qui vont parler des processus, je pourrais me faire dire: C'est une question de principe votée par l'Assemblée nationale, puis on ne peut pas revenir là-dessus. Je pense que ce ne serait pas correct d'entrer dans l'étude du projet de loi avec cette attitude d'esprit.

C'est juste pour ça que je vous dis que, d'après moi, il vaudrait mieux suspendre le deuxième paragraphe, adopter le premier et le troisième, et quand on aura discuté des moyens, là, on l'endossera.

M. Fréchette: Mme la Présidente, je ferai, quant à moi aussi, une dernière observation. Le député de Sainte-Marie l'a souligné dans la dernière intervention qu'il vient de faire, je pense qu'on est beaucoup plus devant une question d'ordre technique qu'une question de fond. Son objection, encore une fois, concerne beaucoup plus la forme que le fond. Je continue de prétendre, à tort ou à raison, que le fait d'adopter le paragraphe 2 de l'article 1 ne nous placerait pas devant l'éventualité de difficultés comme celles dont parle le député de Sainte-Marie. Je vous signale que c'est mon appréciation ou mon interprétation. (11 h 15)

La Présidente (Mme Juneau): Merci, M. le ministre. M. le député de Saguenay.

M. Maltais: Mme la Présidente, malgré le savant plaidoyer de mon collègue de Sainte-Marie, j'ai l'impression qu'on devra vivre avec les moyens à l'intérieur des objets.

Tout à l'heure, à une question du député de Viau, le ministre a donné quand même une définition très importante du mot "consolidation" et les arguments qu'il a ajoutés autour du mot "consolidation" prouvent de toute façon et sans équivoque l'importance dans les moyens.

À ce stade, je ne sais pas si le ministre accepterait qu'on retrouve la définition du mot "consolidation" à l'article 2. Puisqu'on trouve déjà le mot "lésion" qui explique très bien ce que sont des lésions, en contrepartie, si on trouve le mot "lésion" et sa définition on devrait, pour simplifier la compréhension de la loi, inclure aussi la définition de "consolidation".

La Présidente (Mme Juneau): Pour le moment.

M. Fréchette: L'information qu'on me transmet, Mme la Présidente, c'est que lorsqu'on retrouve dans les dictionnaires ou les ouvrages appropriés une définition qui rencontre les objectifs que l'on vise, comme dans ce cas-ci la consolidation au sens strictement médical du terme, il n'est pas nécessaire, sur le plan de la technique législative, de l'inscrire dans la loi, les gens devant interpréter et appliquer la loi se référant à cette définition que l'on retrouve dans les ouvrages qui donnent des définitions du terme dont on parle. C'est la raison pour laquelle il ne serait pas techniquement indiqué sur le plan législatif d'inscrire, dans la loi, une définition du terme "consolidation".

M. Maltais: Sauf que, M. le ministre, à ce moment, on laisse la porte ouverte à différentes interprétations, puisque dans le Petit Robert, on donne une interprétation et plus on consultera d'avocats sur le mot plus on aura d'interprétations qui tourneront véritablement autour du pot, définitivement.

Je ne vois pas pourquoi, par exemple, si on accepte d'établir le mot "lésion", qu'est-ce qu'une lésion, dans la loi, on inclut ce qu'est une lésion professionnelle, une maladie professionnelle. A partir du moment où on accepte d'inclure dans la loi la définition de "lésion" on devrait, en contrepartie, accepter finalement de donner une définition à "consolidation" qui, en vertu de l'article 1, se rattache directement à la réparation.

M. Fréchette: Je vais répondre à la question du député de Saguenay de la façon suivante, Mme la Présidente, en reprenant un tout petit peu l'argumentation préliminaire que j'ai faite. On retrouve la définition du terme "lésion" dans la loi très précisément parce qu'aucun dictionnaire, aucun ouvrage spécialisé ne donne une définition du terme lésion dans le sens de son application qu'on doit retrouver dans une loi sur la réparation des accidents du travail. Vous n'allez trouver nulle part, dans aucun ouvrage, une définition du terme "lésion" en fonction de l'application d'une loi comme celle-là. Au niveau de la consolidation, on ne peut pas y faire des particularités. La consolidation, en terme médical, est la même pour toutes les circonstances tandis que pour le terme "lésion" - c'est la raison pour laquelle on le définit - il y a des particularités qu'il faut attacher à la définition pour les fins de l'application d'une loi spécifique et, dans le cas qui nous occupe, la loi sur la réparation des accidents du travail.

M. Maltais: Maintenant, est-ce que, dans votre définition du mot "consolidation",

vous y voyez la même implication au niveau d'une lésion d'un travailleur et d'une lésion d'un professionnel qui est soumis à la loi?

M. Fréchette: Je ne vois pas comment et pourquoi on commencerait à faire des distinctions en fonction des termes, selon que la victime de l'accident - ou, parlons plus généralement, de la lésion professionnelle -est un travailleur de tel secteur d'activité plutôt que de tel autre secteur d'activité. Je m'excuse, je n'ai peut-être pas suffisamment bien saisi la question du député de Saguenay, mais on ne va certainement pas commencer à faire des définitions différentes qui vont s'appliquer à différents secteurs de travailleurs.

M. Maltais: Ce que je voulais dire, M. le ministre, c'est qu'il y a différentes sortes d'accidentés, de travailleurs, qui sont régis par la présente loi. Il y a, par exemple, les personnes cléricales et celles de manoeuvre. Au niveau de la réparation, au niveau du mot "consolidation", est-ce que la même définition va être appliquée?

M. Fréchette: Ecoutez, je vais sans doute me répéter. La consolidation chez une secrétaire de bureau qui se serait, par exemple, versé une cheville au travail, se serait cassé une jambe, peu importe, pourquoi faudrait-il que ce soit, en termes de définition, différent lorsqu'on l'appliquerait à un travailleur d'usine ou à n'importe quel autre genre de travailleur qui aurait eu la même blessure?

M. Maltais: Je suis bien d'accord mais vous allez vous en tenir à cette définition. Merci. C'est très important parce qu'il y a d'autres articles qui se rapportent à ce mot et, au cours de l'étude du projet de loi, il sera très important de ne pas changer d'idée en cours de route. Très important.

M. Fréchette: Je pense qu'on s'entend bien là-dessus.

M. Maltais: Oui, bien. Je m'entends sur la version que vous me donnez présentement.

La Présidente (Mme Juneau): L'article 1 est-il adopté? Non? M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: Oui, Mme la Présidente. J'aimerais strictement poser au ministre un problème qui peut devenir majeur. Pour éviter justement un des fléaux que vivent les accidentés du travail présentement, on en arrive à une situation où cela prend deux ans, deux ans et demi, trois ans, trois ans et demi, quatre ans avant d'être entendu au dernier palier. Je pense que plus le projet de loi sera clair, plus les termes en seront définis, moins on risque d'encombrer le système aux trois paliers. Si on ne retrouve, et à moins qu'on ait des indications contraires... Est-ce que vous allez être ministre? Non?

M. Fréchette: Puis-je prendre deux secondes?

M. Paradis: Oui, pas de problème.

M. Fréchette: Je m'excuse. Cela va. Pardon?

M. Bisaillon: Les cas de comté, cela se règle ailleurs.

M. Fréchette: C'est un cas national.

M. Paradis: M. le ministre, vous savez que moins les termes sont définis, plus il y a de place à l'argumentation, plus il y a de place aux délais, plus on risque de retrouver un encombrement du rôle, qu'il s'agisse de la nouvelle commission ou des premiers paliers. L'expérience qu'on a vécue dans les lois du travail où on tente de plus en plus, à partir d'une jurisprudence maintenant connue, de rendre les choses claires pour éviter les procès et pour éviter que les avocats plaident sur la signification des mots...

On me dit que le terme "consolidation" utilisé au paragraphe 2 de l'article 1 n'a aucun sens médical établi par une jurisprudence. Si je fais erreur, le ministre peut me corriger.

On me dit que le terme "consolidation" n'a aucun sens juridique établi par la jurisprudence. On ne retrouve pas la définition de ce mot à l'article suivant de la loi.

On me dit qu'aucune autre province canadienne n'utilise cette notion, que le mot n'est pas défini en termes de principe. Si ces informations sont exactes, M. le ministre, vous savez ce qui va se produire sur le plan pratique. Tant au premier niveau qu'au niveau de la révision administrative, qu'au niveau de l'appel, que ce soit la commission ou le tribunal d'appel, il va falloir établir, par la jurisprudence, une définition de ce que consolidation veut dire. Les avocats vont prendre le dictionnaire Larousse, d'autres le dictionnaire encyclopédique médical Untel, d'autres le Petit Robert, etc., et vont argumenter, vont plaider jusqu'à ce que la commission d'appel rende finalement des décisions sur cette notion. Est-ce que vous ne trouvez pas qu'il serait plus sage pour atteindre les buts que vous recherchez et que sans doute on recherche tous comme parlementaires, pour éviter des délais de plaidoiries où on cherchera à dire: Le législateur, lorsqu'il a utilisé le mot "consolidation" voulait dire... C'est l'objet de la loi. C'est ce que cela signifie, est-ce que

pour éviter tout cela, ça ne vaudrait pas la peine de vérifier - parce que vous avez des outils pour le faire au sein de votre ministère - ce qui se passe ailleurs? Quel mot, quelle expression utilise-t-on? Je pense que si on prenait la peine de le définir ici, on pourrait le faire quitte à suspendre l'application de l'article, l'adoption de l'article pour vous permettre de faire ces vérifications. À moins que vous ayez toutes les réponses.

Si vous ne les avez pas, je pense qu'on va rendre justice, on va rendre un fier service aux accidentés du travail en le définissant tout de suite. On va même rendre un fier service à tout le système, à tout l'appareil. Je pense que vous êtes prêt à rendre ce service et que vous n'avez pas intérêt, comme ministre, à conserver une définition qui ne repose pas sur des décisions déjà rendues, qui ne repose sur aucun précédent et qui donne une porte ouverte aux plaideurs qui voudront plaider ad vitam aeternam. C'est le sens de mon intervention.

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fréchette: Je suis heureux de l'intervention du député de Brome-Missisquoi parce que le point qu'il soulève peut évidemment s'appliquer de façon spécifique à l'article 2, mais il peut également nous préoccuper dans le reste du projet de loi. C'est particulièrement vrai lorsque - si on s'y rend - on arrivera au chapitre de la réadaptation. La loi consacre le droit à la réadaptation et décrit les mécanismes de réadaptation physique, sociale ou professionnelle. Au moment de la commission parlementaire, les groupes qui sont venus devant nous et, particulièrement, ceux qui sont intéressés au phénomène de la réadaptation ont insisté pour que ce droit à la réadaptation et les programmes qui les accompagnent soient inscrits dans la loi. Actuellement, c'est dans une réglementation. C'est pour cela qu'il y a des interprétations qui sont différentes et que dans certaines régions les programmes de réadaptation pour le même phénomène n'est peut-être pas tout à fait semblable. Ce que j'ai indiqué, à ce moment, aux gens qui sont venus nous voir pour plaider dans le sens d'introduire dans la loi toute la politique de la réadaptation, je le dis: Sur le plan du principe, je n'ai pas d'objection à le faire. Cependant, je suis obligé de vous signaler, pour toutes sortes de motifs et dans le cas qui nous occupe particulièrement à cause de la "culture", entre guillemets, du milieu, vous allez tous vous retrouver à un moment ou l'autre devant les tribunaux pour faire interpréter un article de la loi. Vous allez devoir attendre possiblement, dans bien des cas, les jugements de la Cour suprême pour savoir très précisément ce que tel article de la loi veut essentiellement dire.

J'ai, à plusieurs reprises, attiré l'attention de nos intervenants là-dessus. Je pense que le député de Saguenay va se souvenir de cela. À plusieurs reprises, j'ai attiré l'attention de nos invités là-dessus. On m'a représenté avec passablement d'insistance qu'on aimait mieux courir ce risque que de ne pas voir - et je parle toujours de la réadaptation - les programmes et le droit inscrits dans la loi. Je rétière ce que je disais tout à l'heure au plan du terme strict de la consolidation. (11 h 30)

C'est probablement vrai, au moment où on se parle - je n'ai pas fait cette vérification d'une façon plus poussée - que les tribunaux, quels qu'ils soient, ne se sont pas prononcés encore sur ce qui peut être clairement de la "consolidation" au sens médical du terme. Ce n'est pas parce qu'on le retrouverait dans la loi qu'on éliminerait le danger dont on parle. Je veux dire que si on inscrit à l'article 2, la définition du terme "consolidation" à partir par exemple de la définition qu'on retrouve au dictionnaire, cela n'éliminerait pas les difficultés dont parle le député de Brome-Missisquoi en termes de contestation éventuelle devant les tribunaux, en termes d'interprétation différente selon que c'est une personne plutôt que l'autre qui apprécie la définition de ce terme-là. Ce qu'on dit essentiellement dans le cas de la définition de la "consolidation", c'est qu'on réfère à deux sources bien précises pour retenir la définition du terme consolidation. Donc, cela nous amène à ne pas l'inscrire dans la loi. D'abord les informations qui nous viennent du monde médical nous indiquent que dans le monde médical, le monde de la science médicale, tout le monde s'entend sur l'interprétation qu'il faut donner au terme "consolidation". Deuxièmement, on en retrouve dans des dictionnaires et même des dictionnaires spécialisés, des définitions qui sont très précises. Alors, je ne vois pas comment on éviterait la difficulté à laquelle réfère le député de Brome-Missisquoi, si on inscrivait dans la loi la définition du terme "consolidation" à partir par exemple de définitions qu'on retrouve dans le dictionnaire. Les dangers de contestation vont toujours exister. Les dangers d'interprétation différente vont toujours exister et par voie de conséquence, bien sûr, les dangers de contestation devant les tribunaux vont toujours exister et vont être là, tant et aussi longtemps qu'une instance décisionnelle finale ne se sera pas prononcée. Je pense qu'on n'améliorerait définitivement pas la situation.

M. Paradis: Je suis le ministre en disant qu'on ne peut peut-être pas atteindre

la perfection. On peut pas éliminer tout danger de contestation et tant qu'une décision finale n'aura pas été rendue par le système judiciaire, qui la définit dans son application pratique, il y a des dangers. Tout ce que je suggère au ministre, pendant qu'on en est là, c'est de vérifier si le cadre ne pourrait pas être rétréci. C'est tout ce que je suggère. Le ministre me dit lui-même: Dans le monde médical on s'entend sur ce que cela veut dire. On peut aller dans les dictionnaires spécialisés où même dans les dictionnaires usuels et on va y retrouver des définitions. On a la possibilité, comme législateurs d'en mettre une définition. Elle pourrait même être contraire à celle qu'on retrouve dans le dictionnaire et le tribunal serait lié, les parties seraient liées par celles qu'on insérera dans la loi. Je veux peut-être demander au ministre qu'est-ce que lui vise? Qu'est-ce qu'il entend, qu'il nous le dise dans ses mots et ce n'est pas dangereux pour les interprétations judiciaires. On sait que devant les tribunaux, on n'a pas le droit de plaider ce qui s'est dit en commission parlementaire, etc. Qu'est-ce que vous visez exactement? À partir du moment où on sait... Vous, vous les avez lus les dictionnaires spécialisés. Vous le savez ce que cela veut dire dans le monde médical "consolidation" et tout cela. Une fois que vous avez tout regroupé cela, quelle est votre version à vous du mot "consolidation"? De quelle façon vous me le définiriez? Peut-être qu'à partir de cette information, on pourrait ensemble trouver le vocabulaire pour strictement rétrécir le cadre parce qu'on ne pourra pas l'éliminer. Je vous suis là-dessus.

M. Fréchette: Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Juneau): M. le , ministre.

M. Fréchette: Je suis tout à fait disposé à accepter la recommandation du député de Brome-Missisquoi dans le sens suivant. Si je l'ai bien compris, sa suggestion, c'est que l'on procède à l'adoption de l'article 1 et lorsqu'on arrivera à l'article 2, qui est l'article qui donne les définitions des termes, évaluer après une nouvelle appréciation, l'opportunité d'inclure à l'article 2, la définition du terme "consolidation".

M. Paradis: Voici ce que je proposerais, M. le ministre. Avant de l'adopter, on aurait besoin de savoir quelle interprétation ou ce que vous visez avec le mot "consolidation" comme gouvernement? On pourrait peut-être, pour vous donner le temps de retourner dans les dossiers où cela a certainement déjà été défini par les gens qui travaillent au ministère, en suspendre l'adoption, passer à l'article 2 et lorsque vous serez en mesure de nous fournir cette réponse-là, on pourra reprendre le travail ensemble sur le terme "consolidation" et s'il y a une possibilité -parce qu'à l'impossible, nul n'est tenu - s'il y une possibilité de rétrécir ce cadre, parce qu'il m'apparaît extrêmement large au moment où l'on se parle... En tout cas, il est le plus large possible. Si on visait ensemble à le rétrécir, on n'éliminerait pas toutes les contestations, mais on en éliminerait sans doute plusieurs. Si on réussissait cela, on pourrait dégager le rôle de la commission d'appel et on pourrait peut-être empêcher, s'il y en a une nouvelle, que cela s'engorge comme cela l'est présentement. C'est par ces exercices qu'on aide les gens qui sont aux prises avec les décisions quasi judiciaires par la suite, ou même administratives.

M. Fréchette: Mais, Mme la Présidente, je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas atteindre l'objectif que soulève le député de Brome-Missisquoi même en adoptant l'article un. Qu'est-ce que cela va changer qu'on adopte l'article un et qu'on arrive à l'article deux et qu'on décide, oui, on en donne une définition du terme "consolidation" ou on n'en donne pas.

M. Paradis: Je pourrais vous expliquer cela rapidement, M. le ministre, ce que cela pourrait changer. Si vous nous arrivez avec une définition du terme "consolidation" qui va soit d'un extrême à l'autre, soit qui favorise de façon incroyable le travailleur accidenté ou qui le défavorise de façon incroyable, le vote peut changer de ce côté-ci de la table. Le vote peut changer subtantiellement parce qu'on veut savoir ce que vous visez comme gouvernement, parce... Quelle est votre définition à vous? Parce que vous nous dites: il en existe; mes recherchistes m'apportent des dictionnaires de gauche, de droite. Je suis bien content de les lire ces définitions de dictionnaires, mais c'est la vôtre qui m'intéresse au plus haut point.

M. Fréchette: Je ne sais pas, Mme la Présidente, si le député de Brome-Missisquoi était là lorsqu'on a amorcé la discussion sur la définition du terme "consolidation".

M. Paradis: Non, j'étais avec le député de Trois-Rivières en train de...

M. Fréchette: Ah! Bon.

M. Paradis: Discuter de son avenir politique.

M. Fréchette: Bon! Vous connaissez cela, vous, des discussions d'avenir politique.

Avant donc que le député de Brome-Missisquoi ne nous rejoigne, le député de Saguenay avait soulevé la question et...

M. Paradis: ...se rejoigne.

M. Fréchette: ...me demandait très précisément mon évaluation, en tout cas, mon appréciation de la définition qu'il fallait donner au terme "consolidation". Je lui ai donné une réponse à double volet dont l'une était strictement une définition d'un dictionnaire que je peux bien répéter au député de Brome-Missisquoi pour les fins de notre discussion et cette définition - ce serait dans mon esprit celle qu'il faudrait donner au terme que l'on retrouve à l'article deux - c'est la stabilisation d'une lésion à la suite d'un traitement et l'état séquellaire non susceptible d'amélioration.

Qu'est-ce que, en termes moins scientifiques et plus accessibles, cela peut-il vouloir dire? Cela peut vouloir dire que la consolidation serait l'étape, dans un processus de réadaptation physique, après laquelle il n'y a pas lieu d'espérer d'amélioration d'une situation.

Le député de Saguenay me demandait, par exemple: est-ce que dans votre esprit, le terme "consolidation" réfère à une guérison complète d'une lésion professionnelle? Je lui dis non. Je lui dis essentiellement non. C'est le moment même où toute la science médicale ne peut plus améliorer la situation d'une personne.

La Présidente (Mme Juneau): Le député de Viau. Il avait demandé la parole, je l'avais reconnu. Après, M. le député de Frontenac.

M. Paradis: Excusez, Mme la Présidente, je n'avais pas terminé. Est-ce que j'ai épuisé mon temps?

La Présidente (Mme Juneau): Non.

M. Paradis: Je veux demander au ministre, peut-être des quatre définitions suivantes, laquelle il préfère? Stabilisation -et je réfère toujours au mot "consolidation". Est-ce qu'il préfère la stabilisation comme définition d'une lésion locale ou l'état général d'un malade à la suite d'un traitement? Deuxième. Est-ce qu'il fait référence à la consolidation anatomique? Je pense que c'est peut-être un peu dans le sens qu'il vient de me dire, c'est-à-dire "le stade auquel une lésion s'est cicatrisée anatomiquement tout en laissant subsister certains troubles fonctionnels susceptibles d'amendement par un traitement approprié" ou est-ce qu'il s'agit d'une consolidation légale, c'est-à-dire "le stade auquel, après consolidation anatomique, il subsiste une invalidité "éventuelle à laquelle on ne peut plus remédier par un traitement" ou est-ce qu'il préfère la consolidation médicale? J'aimerais, à ce stade-ci, que le ministre me dise que c'est une de celles-là, aucune de celles-là, celle qu'il a mentionnée et qu'on s'entende, entre législateurs, pour dire: On n'est pas tellement loin, retenons-en une de celles qui ont été exprimées ou un mélange de quelques-unes, mais qu'on s'entende sur celle qu'il faut retenir, autrement les avocats vont plaider cela ad nauseam.

M. Gagnon: Mme la Présidente, juste une question au député. Il a donné trois définitions et il a dit ou est-ce qu'il préfère la définition médicale. J'aimerais qu'il la donne, celle-là aussi, parce qu'il ne l'a pas donnée.

M. Paradis: "L'ensemble des interventions et des services qui visent à la prévention, au diagnostic ou au traitement des affectations pathologiques considéré sous l'angle de son coût." Je ne sais pas si cela vous éclaire'.

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fréchette: Mme la Présidente, je pourrais peut-être en ajouter deux ou trois à celles que le député de Brome-Missisquoi vient de citer. Je lui signalerai que, essentiellement, dans toutes les définitions auxquelles il réfère, on retrouve toujours la même notion de l'atteinte d'un plateau. On ne peut pas parler de guérison parce que ce n'est pas dans... C'est une notion de stabilisation d'une lésion professionnelle, d'une lésion généralement parlant. Est-ce qu'il est indiqué d'essayer de retirer ou d'extraire de chacune des définitions dont on parle, les principaux éléments et de s'en bâtir une à partir de tout cela? Peut-être bien, mais je signale au député de Brome-Missisquoi que la difficulté qu'on cherche à éviter en inscrivant une définition dans la loi, on ne l'évitera pas. Les mêmes contestations vont se produire.

M. Paradis: Il y en a une qu'on peut certainement éviter. Je vais vous poser la question très précise suivante: C'est entre la consolidation anatomique et la consolidation légale. La différence entre les deux, suivant le texte, le préambule est à peu près le même. Lorsqu'on parle de la consolidation anatomique, on dit: "susceptible d'amendement par un traitement approprié". Tandis que lorsque l'on parle de la consolidation légale, on dit: "à laquelle on ne peut plus remédier par un traitement". Laquelle des deux retenez-vous? Cela me semble être capital. Si c'est la deuxième, qu'on le dise. Les deux sont complètement différentes.

M. Fréchette: Mme la Présidente, je suis obligé de vous dire qu'on est quasiment, tout le monde ensemble, en train de faire la

preuve qu'il va falloir en avoir une dans la loi. Est-ce que cela répondrait au voeu du député de Brome-Missisquoi et de ses collègues si on essayait de travailler une définition du terme "consolidation" autour de l'axe suivant: Ce pourrait être l'état de la victime d'une lésion professionnelle, qui a atteint un plateau de récupération, dans le cas d'une blessure ou une stabilisation de sa maladie, dans le cas d'une maladie professionnelle. Je ne vous dis pas que ce serait, au texte, la définition qu'il faudrait retenir, mais ce serait autour d'une définition comme celle-là qu'on pourrait, législativement, bâtir une définition.

M. Paradis: Cela me semble être une approche positive, mais qu'est-ce que vous entendez par plateau?

M. Fréchette: C'est le sommet. M. Paradis: C'est le sommet...

M. Fréchette: Le plateau, je vais m'exprimer...

M. Paradis: Je reviens à la question que je vous ai posée. Si c'est le sommet, on ne peut plus y remédier par un traitement approprié.

M. Fréchette: C'est cela.

M. Paradis: Donc, cela serait la première définition qu'on retiendrait. Celle où on pourrait y remédier par un traitement ne serait pas un sommet ou un plateau.

M. Fréchette: Non. En d'autres mots, le plateau, Mme la Présidente, c'est l'étape -comme je le disais tout à l'heure - après laquelle aucune amélioration d'une situation n'est possible. (11 h 45)

M. Grégoire: D'accord. Moi, j'aurais juste une question là-dessus au ministre, puis il pourrait peut-être définir clairement sur un des secteurs. C'est que quand vous parlez du plateau rendu auquel aucune amélioration n'est possible, dans le cas des victimes d'amiantose, tout le corps médical a toujours décrété que ça ne se guérissait pas, que ça ne pouvait aller qu'en empirant. Alors, est-ce qu'il n'y aurait pas moyen, dans cette définition-là, d'inscrire, pour simplifier et clarifier nettement la situation, que dans les cas des victimes d'amiantose, le plateau est automatiquement reconnu et l'indemnité est automatique? Parce que le corps médical reconnaît que ça ne se guérit pas, que ça ne peut pas aller en s'améliorant, que ça ne peut aller qu'en augmentant.

Alors, si on le mettait clairement dans l'article 2, dans votre définition, dans vos définitions? C'est reconnu dans l'article 52, pourquoi pas le reconnaître dans l'article 42? Une voix: C'est dans la loi, ça.

M. Grégoire: Dans la loi 52, c'est-à-dire.

M. Fréchette: Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Juneau): Oui, M. le ministre.

M. Fréchette: Je suis tout à fait d'accord avec le député de Frontenac, quant à l'évaluation de la maladie spécifique de l'amiantose. Tout le monde reconnaît, dans le monde médical, que lorsqu'on est atteint d'amiantose, il ne peut pas y avoir de régression et de guérison. On va oublier les miracles qui se sont produits. Il ne peut pas y avoir de régression, ni de guérison.

Cela ne s'aggraverait pas non plus, à la condition, évidemment, que celui qui en est victime soit retiré du milieu ambiant. Cela ne progresserait pas, ce qui veut dire que quelqu'un qui en est atteint, s'il est retiré du milieu ambiant, va rejoindre, à un moment donné, ce qu'on est convenu d'appeler une stabilisation de sa situation ou un plateau.

Alors, je réfère à nouveau à la définition dont je vous parlais tout à l'heure. Je pense qu'on rejoint la préoccupation du député de Frontenac quand on dit: C'est l'état de la victime d'une lésion professionnelle qui a atteint un plateau de récupération, dans le cas d'une blessure -blessure étant synonyme d'accident - ou dans le cas d'une stabilisation de sa maladie, dans le cas d'une maladie professionnelle.

Alors, cela, ça rejoint très précisément la préoccupation du député de Frontenac. La consolidation chez le malade professionnel atteint d'amiantose va être l'étape de la stabilisation de sa maladie. S'il y a par la suite progression, il y a d'autres dispositions de la loi qui permettent à cet accidenté ou cette personne atteinte de maladie professionnelle d'utiliser les recours qui sont prévus par la loi.

Mais, à partir des indications que je viens de donner, quant à la définition, je pense, moi, sous réserve de mal interpréter la discussion qu'on est en train de faire, que ça rejoint la préoccupation du député de Frontenac.

M. Grégoire: Je voudrais rappeler au ministre que si seulement sur ce point-là, on s'entendait, je pense bien que, moi, sur la loi 42 après ça, je n'aurais pas grand-chose à ajouter. Si on pouvait ajouter dans l'article 2, par exemple, définition de consolidation d'une lésion pour les victimes d'amiantose, que c'est reconnu qu'un employé a atteint le plateau, dès qu'il est reconnu malade et qu'il

a le droit à son indemnisation sa vie durant, à 90% de son revenu brut, comme ça existait auparavant, ça, si ce point-là est admis, moi, je vais vous dire bien franchement que vous allez éliminer bien des difficultés pour tout le restant de l'étude de loi, quant à moi.

M. Fréchette: Bien, Mme la Présidente...

M. Grégoire: Si, parce que c'est un cas spécial. C'est la seule maladie industrielle qui est reconnue comme n'étant pas guérissable, étant incurable, qui ne peut aller qu'en s'aggravant et non pas en diminuant.

Une voix: Autrement dit, réglez-moi ça, puis tu ne me verras plus.

M. Grégoire: Réglez-moi ça, M. le ministre, puis je vous dis qu'on va bien s'entendre par la suite.

M. Fréchette: Mme la Présidente, je suis très heureux que le député de Frontenac soulève cette question. D'ailleurs, dans tout le reste du projet, il y a un chapitre qui est consacré très spécifiquement à ça. Je voudrais simplement rappeler au député de Frontenac que dans le cas des maladies pulmonaires professionnelles - parce qu'on élimine de la loi, vous avez dû le remarquer, les termes silicose et amiantose; on ne parle plus du travailleur atteint d'une maladie pulmonaire professionnelle - vous allez retrouver un premier élément, en vertu duquel le travailleur qui a atteint l'âge de 55 ans et qui, à cet âge-là, est déclaré amiantosé, silicosé ou atteint d'une maladie causée par le plomb, par exemple, il y a, quant à lui en tout cas, une garantie qui lui est donnée que jusqu'à l'âge de 68 ans, il aura droit à son indemnité de remplacement de revenu même s'il pouvait exister pour lui un emploi qu'on est convenu de définir comme étant convenable. En d'autres mots, après l'âge de 55 ans, pour quelqu'un qui est atteint d'une maladie professionnelle, son indemnité de remplacement de revenu va durer jusqu'à l'âge de 68 ans.

Je vous signale que c'est une amélioration par rapport à la loi 52. À la loi 52, à 65 ans, l'indemnité de remplacement du revenu cessait. Dans le cas des dispositions de la loi 42, l'indemnité de remplacement du revenu continue jusqu'à 68 ans en dégradant de 25% par année, chaque année, après 65 ans.

Quant à l'aspect plus spécifiquement médical, la commission parlementaire des mois de février et mars derniers nous a amené à la conclusion suivante, après avoir entendu tous les intéressés et les intéressés plus spécifiquement reliés au monde de l'amiante. Quand je dis tous les intéressés je parle autant syndicats que travailleurs et en particulier la CSD. Ils nous ont dit: Ce devrait être une décision médicale que celle de déterminer si une personne atteinte, personne pour laquelle on diagnostique de l'amiantose, ce devrait être une décision médicale que d'arriver à déterminer si on la retire ou non du milieu ambiant, ce qui était, jusqu'à maintenant, la prérogative exclusive de la Commission de la santé et de la sécurité du travail. Dorénavant, ce sera encore une fois les gens du milieu médical qui auront à se prononcer là-dessus.

Lorsqu'un comité de pneumologues - et je vous signale que les pneumologues ne seront pas choisis par la Commission de la santé et de la sécurité du travail - ce sont les associations professionnelles qui vont suggérer des noms pour la formation des comités de pneumoconiose. Les comités de pneumologues vont avoir l'obligation d'émettre un certificat médical à l'intérieur duquel on devra retrouver au moins quatre éléments qui sont les suivants: d'abord, ce travailleur est-il atteint d'amiantose? Si oui, à quel degré l'est-il? Troisièmement, quelles sont ses capacités résiduelles? Quatrièmement, est-ce qu'il peut retourner au travail sans risque pour sa santé? Ce sont les nouveaux mécanismes que l'on retrouve dans la loi. Encore une fois, ce n'est pas la commission de la santé elle-même qui va avoir à prendre cette décision.

Il me semble, Mme la Présidente, qu'à partir de ces observations, la préoccupation du député de Frontenac on y répond de façon expresse dans la loi quand on parle de la stabilisation de la maladie professionnelle.

M. Grégoire: Mme la Présidente, il y a deux points que je voudrais soulever. D'abord, en laissant entre les mains des comités de pneumologues... À l'heure actuelle, tous les pneumologues au Québec sont engagés par la Commission de la santé et de la sécurité du travail et cela constitue un problème énorme que d'avoir un spécialiste indépendant pour aller faire valoir les droits des victimes d'amiantose. La profession est assez rare; on en avait un à Sherbrooke, avant, auquel on faisait appel, au centre hospitalier de Sherbrooke.

M. Fréchette: Le Dr Bégin. M. Grégoire: Non. M. Fréchette: Non.

M. Grégoire: Un jeune, et cela n'a pas été long qu'il a été ramassé par la Commission de la santé et de la sécurité du travail lui aussi. Il travaille du côté de la Commission de la santé et de la sécurité du travail.

Deuxièmement, il y a un autre point

dans l'évaluation de cela. La loi 52 - on l'a fait amender - disait, dans sa formule originale, "un test médical positif", ce qui voulait dire que le doute jouait en faveur de la compagnie et non pas en faveur du travailleur. Des pneumologues venaient dire: II a l'amiantose. D'autres pneumologues disaient non. Alors, il ne restait qu'une seule solution pour en arriver à le démontrer positivement, c'était la biopsie. La biopsie c'est opérer le gars, lui enlever un morceau de poumon pour voir s'il y a des fibres. Là, on en est arrivé, hors de tout doute, la première version de la loi disait: II est amiantosé hors de tout doute et hors de tout doute, cela prenait la biopsie. C'est un traitement sauvage pour les gars atteints d'amiantose à qui il fallait, pour être sûr hors de tout doute... On ne donnait même pas le doute au travailleur. Pour être sûr hors de tout doute qu'il l'avait, il fallait lui enlever un morceau de poumon pour vérifier. J'ai vu, des fois, M. le ministre, où on a été obligé de recommencer la biopsie et le travailleur de dire: J'aime mieux ne rien avoir, mais je ne repasse pas par cette opération parce que c'est très grave.

Vous avez là deux éléments. On a fait changer cela dans la loi 52. Et avec le projet de loi 42, cette chose semble revenir, où il va falloir que le travailleur se resoumette à la biopsie pour avoir atteint le plateau. Ce n'est pas acceptable d'être obligé, pour dire qu'il a l'amiantose ou non, de lui ouvrir l'estomac et d'aller lui arracher un morceau poumon, pour voir s'il y a de la fibre dessus. C'est de retourner au monde non civilisé. C'est pourquoi je voudrais que dans l'article 2 - si on s'entend là-dessus, cela va être un fichu de bon départ - qu'on reconnaisse que l'amiantose, reconnu comme tel, a atteint son plateau, qu'il n'y a plus rien à faire pour lui, que cela ne peut pas se guérir. Donc il reçoit son indemnité équivalant à 90% de son revenu net, puisque c'est une maladie incurable.

M. Fréchette: Oui, je suis d'accord.

M. Grégoire: Alors qu'on l'expose, ce sera au moins un secteur des victimes d'accidents du travail qui sera, en trois lignes, clairement défini. Ce sera clair. Là, tout le monde se dit... Il va y avoir trois autres articles pour dire: Les bureaucrates pourront toujours nous changer cela, ils pourront toujours exiger la biopsie, ils pourront toujours dire qu'il est capable de retourner au travail, il peut retourner dans la mine, il peut retourner travailler sur un camion.

M. Gagnon: Mme la Présidente, sur le même sujet, juste un mot, si vous me permettez. C'est parce que le député de Frontenac... Je suis d'accord, en principe, avec ce que le député de Frontenac défend, excepté que j'aime mieux la façon dont le ministre... À mon point de vue, je ne voudrais pas qu'on revienne à l'amiantose parce que, comme on l'a mentionné tantôt, c'est pour toutes les maladies pulmonaires, les maladies industrielles privées, ce qui veut dire que l'amiantose est là-dedans.

Parce que si on faisait une ouverture pour les amiantosés, cela veut dire que les gens qui travaillent à, je ne sais pas, à la CANRON, à Trois-Rivières, qui ont aussi des problèmes de poumon, les gens qui travaillent dans les fonderies ou dans le plomb, et ainsi de suite, comme vous l'avez mentionné... Alors, je...

M. Grégoire: C'est différent, c'est que ce sont des maladies pulmonaires guérissables.

M. Gagnon: Non, non.

M. Fréchette: Non, non, non.

M. Gagnon: C'est au même titre que l'amiantose. Alors quand le ministre parle des maladies pulmonaires industrielles, cela englobe l'amiantose.

M. Grégoire: II y en a des guérissables et il y en a des non guérissables.

M. Gagnon: Non, mais cela englobe l'amiantose. Chez nous, c'est, c'est la silicose, par exemple.

M. Grégoire: Mais qu'il le spécifie, pour les maladies non guérissables et que la profession médicale reconnaît comme non guérissables. À ce moment-là, vous réglez un gros point. Il n'y a plus un fonctionnaire qui pourra arriver et jouer avec cela...

M. Gagnon: Mais pour l'ensemble...

M. Grégoire: ...et aller jusqu'à demander des biopsies.

M. Gagnon: ...des maladies pulmonaires, cela comprend l'amiantose.

M. Grégoire: L'ensemble des maladies sont guérissables ou peuvent permettre un retour au travail, mais l'amiantose, non.

M. Fréchette: Je voudrais simplement indiquer ici pourquoi on a convenu de retirer du projet de loi les termes "amiantosé" et"silicose". Le député de Frontenac va sans doute comprendre pourquoi. C'est que cela fait, va faire dix ans bientôt que le gouvernement, par tous les moyens mis à sa disposition, tente de convaincre les marchés nationaux et internationaux de l'opportunité d'acheter des produits d'amiante. Si, par

ailleurs, on a dans nos lois des termes qui réfèrent très spécifiquement à une éventuelle maladie qu'on peut contracter au contact de l'amiante, vous allez convenir qu'on n'aide pas notre propre cause. C'est la raison pour laquelle, ne serait-ce que purement pédagogique... En tout cas, c'est l'une des raisons pour lesquelles les termes "amiantose" autant que "silicose" ont été retirés du projet de loi.

Maintenant...

M. Grégoire: Ce sont deux choses différentes...

M. Fréchette: Oui, je suis tout à fait d'accord.

M. Grégoire: ...M. le ministre, parce que...

M. Fréchette: Je reviens sur votre autre sujet.

M. Grégoire: ...aujourd'hui, avec le gouvernement actuel et grâce à celui-ci qui a fait des recherches, il est prévu que, en 1987, avec l'amiante phosphaté, dont une usine pilote est installée pas loin de chez vous, l'amiante va perdre 100% de ses propriétés de nocivité à la santé. Dans deux ans, avec l'amiante phosphaté, on aura réglé le problème.

Mais là où cela se pose, c'est que, aujourd'hui, on traverse la génération de ceux qui ont commencé à travailler à 18, 19 ou 20 ans, pendant la guerre, alors que ceux de 22 ans étaient dans les armées; ceux-ci arrivent à 55, 53 ou 52 ans, ils sont poignés, ils ont travaillé dans ce temps-là, non pas dans des situations où il y avait une fibre d'amiante par centimètre cube, mais où il y en avait 250 et 300 par centimètre cube, où, pour se voir, il fallait tasser... C'est à ceux-là, aujourd'hui, auxquels on fait face. Mais, de plus en plus, on va dire que l'amiante est devenu un produit non dangereux parce que le gouvernement fait des recherches pour le rendre non dangereux. Mais, on vit encore avec le passé, on est obligé de réparer les bêtises qui n'ont pas été réparées dans le passé. C'est cela que... (12 heures)

M. Fréchette: C'est peut-être une raison additionnelle pour retirer de nos lois des termes qui réfèrent très spécifiquement à la possibilité de contracter une maladie professionnelle si on travaille dans tel milieu ambiant pour continuer dans le sens dont le dit le député de Frontenac. Mais revenons sur le fond de la question, si vous me le permettez. Le député de Frontenac dit: Des pneumologues au Québec il n'y en a pas beaucoup et le peu de ceux qui sont là ont tous été déjà à l'emploi de la commission de la santé et de la sécurité. Je vous dirai qu'il y en a 150 pneumologues au Québec et que sur les 150, une trentaine ont déjà travaillé contractuellement pour la Commission de la santé et de la sécurité du travail. Il en reste un bassin de 120 et avec les nouvelles dispositions de la loi il n'y en aura plus aucun dont les services seront retenus par la Commission de la santé et de la sécurité du travail. Il y a quatre comités des pneumologues de prévus dans la loi les quatre étant formés de trois membres chacun et dont les candidatures auront été retenues à partir des suggestions des associations professionnelles auxquelles ils appartiennent et formés dans la discipline spécifique de la pneumoconiose.

Deuxièmement, quand le député de Frontenac me parle de la loi 52 et qu'il manifeste des inquiétudes par rapport au fait qu'elle serait abrogée en vertu de la loi 42, c'est vrai. Mais dans la loi 52, il n'y avait pas de présomption à savoir que quelqu'un, sur dépôt d'un certificat médical, était atteint de l'amiantose. Quand il déposait un certificat médical de son médecin traitant attestant qu'il était atteint à un degré X d'amiantose, il devait par la suite lui-même franchir toutes les étapes et convaincre en dernière instance la Commission de la santé et de la sécurité du travail que son médecin traitant avait raison. La loi 42, qu'est-ce qu'elle fait? Elle inscrit en annexe - il y a au-delà de 200 maladies professionnelles qui sont énumérées en annexe de la loi 42 -l'amiantose et la silicose comme étant des maladies dont la présomption existe dès lors qu'un certificat médical est déposé attestant qu'il y a atteinte à un degré, peu importe le degré, d'amiantose. À ce moment-là, ce sera ou bien à l'employeur ou bien à la Commission de la santé et de la sécurité du travail à faire la preuve qu'il n'y a effectivement pas amiantose. La présomption, en d'autres mots, est renversée. Ce qui n'était pas le cas dans la loi 52.

Troisièmement, à supposer qu'un travailleur ne soit pas satisfait de la décision finale du comité des pneumologues - et remarquez qu'il y a un premier comité des pneumologues qui se prononce et il peut être soumis à un deuxième. En tout cas, n'entrons pas dans les modalités pour le moment - il ne faut jamais perdre de vue qu'il a un droit d'appel devant l'instance dont on parle dans la loi actuellement - je ne dis pas si c'était une autre quand on aura fini - au-delà du diagnostic du comité des pneumologues. Je pense que c'est important de retenir cette situation-là.

Quatrièmement, quand le député de Frontenac dit que le phénomène des biopsies c'est traumatisant à ne pas s'en imaginer les conséquences pour un travailleur, je voudrais simplement attirer son attention sur les dispositions de l'article 135 de la loi qui prévoit plus précisément que la commission

peut réduire ou suspendre le paiement d'une indemnité si le bénéficiaire entrave un examen médical prévu par la présente loi, ou omet ou refuse de se soumettre à un tel examen, sauf s'il s'agit habituellement d'un examen qui présente habituellement un danger grave. Alors, la biopsie étant ce que l'on sait et ce qu'a décrit le député de Frontenac, mon opinion - et elle vaut ce qu'elle vaut; encore une fois, c'est de l'interprétation - c'est que quelqu'un pourrait se prévaloir des dispositions de l'article dont je viens de parler, considérant que c'est pour lui un danger grave que de se soumettre à un tel examen, pour le refuser, sans par ailleurs faire l'objet d'une pénalité de quelque nature que ce soit.

M. Grégoire: Je dois vous dire que je n'aime pas ce paragraphe-là non plus. S'il s'agit d'un examen qui présente habituellement un danger grave. Il n'y en a jamais qui sont morts d'une biopsie. Ils en restent traumatisés. Ils ont été opérés. On leur a enlevé une partie de poumon, mais il n'y en a pas qui sont morts d'une biopsie. Alors, jusqu'où cela va le danger grave. Le député de Brome-Missisquoi parlait des définitions. Est-ce que ça va jusqu'à la mort? Il faudrait définir "danger grave" par la suite. Je vous dis que cet article-là justement: "sauf s'il s'agit d'un examen qui présente habituellement un danger grave." Or, la biopsie n'a jamais présenté habituellement un danger grave. C'était une écoeuranterie que d'être obligé d'aller ouvrir l'estomac du gars pour lui arracher un morceau de poumon avant de le dédommager. Cela ne présentait pas un danger grave. Qu'est-ce que c'est qu'un danger grave? La mort? Il n'y a pas eu de mort encore à la suite d'une biopsie.

M. Fréchette: Surtout cela dépend encore une fois...

M. Grégoire: Vous allez voir que même là, la définition devrait être changée.

M. Fréchette: C'est curieux, Mme la Présidente, parce qu'on nous demande continuellement de simplifier les lois, de les diminuer, de faire en sorte qu'elles soient le moins compliquées possible et par ailleurs, chaque fois ce n'est pas suffisant, ce n'est pas complet, ça ne rejoint pas l'objectif que l'on visait. C'est sûr que lorsqu'on va arriver...

M. Grégoire: La première rédaction a été faite par des avocats qui l'ont compliquée inutilement.

M. Fréchette: Pardon?

M. Grégoire: C'est parce que la première rédaction de la loi est faite par des avocats qui l'ont compliquée inutilement. Alors, on arrive ici, on se dit "Wo là" on ne comprend pas tout cela.

M. Fréchette: En tout cas, c'est évident que lorsqu'on va arriver à cet article 135, on va sans doute avoir encore une discussion intéressante sur ce que peut être un danger grave. Je suis content qu'on le soulève tout de suite parce qu'on va prendre le temps d'y regarder de plus près. Encore une fois, je réitère que les objectifs que poursuit le député de Frontenac me semblent être atteints dans la loi telle qu'elle est actuellement.

Une dernière observation que je veux lui faire. Il a dit, je pense dans l'une ou l'autre de ses observations que, dans l'état actuel des choses, n'importe qui ou à peu près pouvait ordonner à un travailleur déclaré atteint d'amiantose de retourner au travail. Je vous signale que lorsqu'il a atteint l'âge de 55 ans, il n'y aura personne qui pourra lui faire quelque obligation que ce soit de retourner au travail, ni dans le milieu ambiant, ni dans un emploi convenable. En d'autres mots, à 55 ans, s'il est atteint, ce que le député de Frontenac souhaite, c'est-à-dire l'indemnité de remplacement de revenu jusqu'à 65 ans, dans ce cas-ci 68 ans, avec la dégradation que l'on sait, ça c'est dans la loi. Si cela ne rejoint pas l'objectif qu'il poursuit, je ne sais pas autrement comment on pourrait l'atteindre cet objectif.

M. Grégoire: Je suis très satisfait de cet article. Il faut dire aussi que dorénavant, à l'avenir avec les précautions qui sont prises depuis qu'il y a un gouvernement qui s'en occupe, qu'il y a du monde qui s'est occupé de nettoyer les moulins et les mines. Quand on a baissé cela à une fibre-cube par cc alors que les rapports mentionnaient jusqu'à 740 fibres... Le danger est à 3 fibres. Quand même, il reste une chose. La seule chose que je vous demande comme définition dans l'article 2, c'est qu'on parle de consolidation d'une lésion. On arrive avec différentes définitions, puis tout à coup vous arrivez et en donnez une qui semble correcte lorsqu'on a atteint le plateau de soins possibles. Je voudrais qu'on spécifie le plateau de...

M. Fréchette: D'amélioration.

M. Grégoire: ...d'amélioration possible. Je voudrais que dans la définition de "consolidation", on ajoute deux lignes disant: Pour ce qui est des victimes d'amiantose, le corps médical ayant déclaré qu'il n'y avait pas de guérison possible, le plateau est atteint automatiquement dès qu'il est déclaré amiantosé. C'est tout ce que je vous

demande. Là, je vous dis qu'on va bien s'entendre sur bien des choses après. On aura fait un bon pas.

M. Fréchette: D'accord. Comme on s'entend au moins sur un aspect de la question, c'est-à-dire que l'amiantose est une maladie qui ne régresse pas. Dès lors que le taux d'atteinte est fixé, ce plateau dont on parle, il est également atteint. Dès que les médecins vont se prononcer sur le degré d'atteinte, ce plateau, encore une fois, il est atteint à la condition bien sûr qu'il ne soit pas retourné dans le milieu ambiant. Ce sera une décision qui appartiendra aux professionnels de la santé et non plus à la Commission de la santé et de la sécurité du travail. J'essaie de voir de façon plus précise comment on pourrait autrement améliorer la situation que par les dispositions qu'on retrouve actuellement dans la loi. On n'utilise peut-être pas les mêmes mots mais je pense que les objectifs sont atteints.

M. Grégoire: Ce que je crains - et tout le monde autour, parce que nous avons tous affaire à la CSST - c'est que les fonctionnaires fassent du zèle et qu'ils interprètent cela: amiantosé ou non, tout est guéri. On en a eu des miraculés. Alors que tous les médecins disaient à l'hôpital du Mont-Sinaï, le spécialiste de l'amiantose: Cela ne se guérit pas, cela ne régresse pas, il s'est trouvé un ou deux pneumologues au Québec pour dire: Tiens, il y en a 40 qui ont été guéris. Ce sont ceux qu'on a appelés les miraculés. Ils se sont fait examiner et tous ont dit: Cela n'a pas regressé, cela a empiré. C'est cela que nous craignons. On a une loi épaisse. Imaginez-vous l'épaisseur de la CSST pour administrer cette loi? C'est cela que je crains.

M. Fréchette: Mme la Présidente, le député de Frontenac...

M. Grégoire: C'est cela qui est le bobo et c'est pour cela que vous êtes obligés de réformer votre loi, parce qu'en cours de route, les bureaucrates, les fonctionnaires ont donné des interprétations; autant de fonctionnaires, autant d'interprétations et il faut être dans nos bureaux pour le réaliser et le savoir.

M. Fréchette: Mme la Présidente, je...

M. Grégoire: Moi, je les ai les cas d'amiantose...

M. Fréchette: J'en ai quelques-uns moi aussi.

M. Grégoire: ...et cela n'est pas un cadeau de faire affaire avec la CSST, vis-à-vis eux.

M. Fréchette: Mme la Présidente.

M. Grégoire: Je vous ai proposé deux lignes qui ne vont pas à l'encontre d'aucune des autres dispositions...

M. Fréchette: J'ai bien compris votre proposition.

M. Grégoire: ...de votre loi qui ne vont pas à l'encontre de votre...

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Frontenac, laissez-le répondre s'il vous plaît!

M. Grégoire: ...principe mais qui réglerait le problème.

M. Fréchette: Je voudrais bien que le député de Frontenac sache que le phénomène des miraculés dont il parle a été fort préoccupant quand est arrivé le temps de rédiger cette loi. Il a été à ce point préoccupant qu'il y a une disposition dans la loi qui fait en sorte que tous ceux qui, à un moment donné, ont été déclarés amiantosés et qui, par la suite, se sont prévalus des dispositions de la loi 52 et qui, après deux ou trois ans ont été déclarés miraculés, tous, par une disposition transitoire de la loi, ont dit: Les droits que vous avez acquis, vous les conservez. J'espère que c'est clair dans le milieu plus particulièrement concerné.

Quant au reste, la préoccupation du député de Frontenac est bien fondée et c'est pour cela qu'on a dit que, dorénavant, la décision n'appartiendrait plus à la Commission de la santé et de la sécurité du travail. On dit: Cette décision va appartenir au milieu professionnel de la santé: les comités de pneumologues composés de trois personnes. Ils ne seront pas un pneumologue patronal avec un poumon patronal et un poumon syndical et un poumon indépendant dans le milieu. Trois pneumologues...

M. Cusano: ...un comité paritaire...

M. Fréchette: Si le député de Viau trouve le moyen de faire des farces avec le genre de discussion que nous sommes en train d'avoir, il a le droit.

Ce sont trois pneumologues qui vont prendre les décisions et qui vont indiquer dans leur diagnostic les quatre éléments dont je viens de parler. Y a-t-il atteinte? Si oui, à quel degré? Quelles sont les capacités résiduelles de ce travailleur? En fonction de son état, y a-t-il danger d'aggravation s'il retourne dans le milieu ambiant? Ce n'est plus la commission de la santé qui va décider cela, ce sont les professionnels de la santé. Si le travailleur n'est pas satisfait de la décision du comité des pneumologues, il a droit à un appel externe, en vertu des

mécanismes qui sont prévus dans la loi. En tout état de cause, après 55 ans, dès qu'il y a déclaration ou qu'il y a diagnostic d'arniantose, il n'y a plus personne qui peut intervenir pour forcer un travailleur à réintégrer son emploi et risquer d'aggraver sa situation parce que l'amiantose est une maladie qui progresse. Il n'y a plus personne, non plus, qui peut le forcer à se trouver un emploi qu'on qualifie dans la loi comme étant un emploi convenable.

M. Grégoire: Une dernière question au ministre. Est-ce que je peux lui demander de prendre jusqu'à cet après-midi pour penser aux deux lignes que je lui suggère d'ajouter au point "définition de consolidation"...

M. Fréchette: Je suis tout à fait disposé à prendre ce temps-là.

M. Grégoire: ...et d'y réfléchir comme il le faut, de consulter les milieux spécialisés et qu'il essaie de nous arriver avec une solution pour clarifier cela. Cela sera clair. Cela ne sera plus l'objet de poursuites judiciaires, de délais de deux ans ou de trois ans. Cela sera clair. (12 h 15)

M. Fréchette: Je suis tout à fait disposé à y réfléchir davantage.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Brome-Missiquoi, est-ce que vous aviez terminé.

M. Paradis: Pour le moment, sauf dépendant de la décision finale du ministre. Quant à la définition, je pourrai y revenir si je n'ai pas encore réussi à le convaincre.

La Présidente (Mme Juneau): Donc, je donne la parole à quelqu'un d'autre.

M. Fréchette: Mme la Présidente, j'ai compris que pour autant que le terme "consolidation" était concerné, on essayait de bâtir, autour de la petite définition non techniquement législative, que j'ai donnée tout à l'heure, un texte technique législatif qui rejoindrait ces objectifs.

M. Paradis: Autour du plateau.

M. Fréchette: Autour du plateau, voilà.

La Présidente (Mme Juneau): La parole est maintenant au député de Viau.

M. Cusano: Mme la Présidente, j'abonde dans le sens du député de Sainte-Marie, au premier article, lorsqu'on parle de l'objet comme étant la réparation des lésions professionnelles et des conséquences qu'elle entraîne pour les bénéficiaires. Je suis complètement d'accord. Mais lorsqu'on arrive - et je pense que les discussions l'ont vraiment démontré - au deuxième et au troisième paragraphes, on a un peu tendance à s'accrocher dans la plomberie. Sur cette question de plomberie et spécialement sur la question de consolidation, j'apprécie le fait que le ministre soit prêt à vouloir essayer d'en arriver à une définition qui rejoindrait cette question de plateau.

Il y a un autre aspect, une autre partie de la phrase, avant le mot "consolidation", dans le deuxième paragraphe et c'est la question de la fourniture des soins nécessaires. Le projet de loi, lorsqu'on parle de soins nécessaires, implique la question du choix du médecin traitant et le choix de l'établissement de la part de l'accidenté. Est-ce que le ministre pourrait spécifier, à ce moment - lorsqu'on parle du médecin traitant ou du médecin chargé du dossier ou du médecin qui prendra la charge de l'accidenté - si c'est lui qui va décider quels sont les soins nécessaires pour en arriver à un plateau de consolidation? Qu'est-ce qui arrive, en ce qui a trait aux soins nécessaires, si l'accidenté veut avoir des soins d'un chiro ou même en arriver à des traitements d'acuponcture? Qui est le premier, dans ce cas, à prendre la décision?

C'est vrai qu'il y a une question d'appel, mais du côté d'une lésion, je pense que c'est dans l'immédiat qu'il faut remédier à une situation. C'est pour cela que je voudrais que ce soit clarifié. Les discussions qu'on a eues sur ce deuxième paragraphe, la nécessité de définir le mot consultation, cela prouve qu'on devra reporter l'adoption de ce paragraphe.

Sur la question des soins nécessaires, j'aimerais que le ministre nous précise, à ce moment-ci, le rôle et l'autonomie du médecin traitant ou du médecin chargé du patient. Cela semble ne pas être très clair.

M. Fréchette: Mme la Présidente, j'essaie de donner aux termes, la signification que le sens commun nous amène à leur donner. Quand on dit dans la loi: "Que le processus de réparation des lésions professionnelles comprend la fourniture des soins nécessaires à la consolidation d'une lésion", il m'apparatt évident que la conclusion qu'il tire de cela, c'est que cela réfère aux soins que le médecin traitant qu'il a choisi évalue qu'il doit recevoir. Si le médecin traitant, dans l'évolution du traitement qu'il donne à son patient ou à sa patiente, en venait à la conclusion, à un moment ou l'autre du traitement, qu'il serait utile et approprié que son patient aille en traitement de chiropractie, par exemple, rien n'empêche que cela puisse être fait. À ce moment, c'est inclus de façon très évidente dans la fourniture des soins nécessaires et ce sont aussi, bien sûr, des soins dont le coût est assumé par la Commission de la santé et

de la sécurité du travail. En d'autres mots, le député de Viau a fort bien résumé, je présume, l'ensemble de la situation quand il a dit: Est-ce que le médecin traitant jouit de toute l'autonomie nécessaire pour prescrire, indiquer à son patient la nature des soins dont il a besoin? La réponse est carrément oui.

M. Cusano: Cette autonomie, on sait qu'elle peut aller loin, aussi, dans certains cas. On a vu des cas où on peut suggérer, justement, un séjour en Floride comme étant partie des soins nécessaires. Comment allez-vous vous assurer que les soins nécessaires n'apportent pas des abus de la part de l'accidenté ou même de la part du médecin?

M. Fréchette: Mme la Présidente, ce ne serait pas la première fois, quant à moi, que j'entendrais parler qu'un médecin conseille à son patient ou à sa patiente, effectivement, de faire un séjour plus ou moins prolongé sous un autre climat que le sien pour arriver à une "consolidation" - entre guillemets, parce qu'on ne sait pas encore quelle en sera la définition - plus rapide de son état de santé.

Par ailleurs, s'il arrivait - et là je parle avec toutes les réserves qui s'imposent et au conditionnel - qu'un médecin prescrive des soins qu'il juge nécessaires mais que le médecin de l'employeur ne jugerait pas nécessaires ou que le médecin de la Commission de la santé et de la sécurité du travail ne jugerait pas nécessaires, il y aurait, à ce moment, le mécanisme de l'arbitrage médical qui, en dernière instance, déciderait si les soins prescrits sont appropriés ou non. En d'autres mots, la décision du médecin traitant, eu égard à la fourniture des soins nécessaires, est contestable.

M. Cusano: Oui, mais sur cette question de l'autonomie du médecin traitant, aussi la question du choix de l'établissement, c'est que lorsqu'on regarde dans le projet de loi -vous me corrigerez si je me trompe - il y a certains délais avant que tout cela ne soit fait. Si le médecin traitant décide qu'il faut un certain traitement et que ce traitement est disponible dans un établissement en dehors du Québec, est-ce que l'accidenté va pouvoir se prévaloir de se rendre dans un établissement en dehors du Québec?

M. Fréchette: Je ne sais pas si ce genre de situation peut, en pratique, exister. Le député de Viau a peut-être des cas précis en mémoire mais j'essaie d'imaginer dans quelle situation précise, compte tenu de notre réseau d'établissements de santé et de la qualité de nos professionnels, j'essaie d'imaginer dans quelle situation précise il faudrait, par exemple, à l'intérieur du traitement, prescrire qu'un traitement médical ou une intervention chirurgicale doit intervenir à l'extérieur des limites de notre territoire.

Si c'était le cas et qu'il était jugé, effectivement, que c'est la procédure appropriée et puis c'est la décision appropriée, cela peut aussi se faire à la condition qu'au préalable les dépenses inhérentes à ce genre d'opération aient été évaluées en même temps qu'autorisées par la commission de la santé et de la sécurité.

M. Cusano: Alors, c'est la CSST qui aura vraiment le choix.

M. Fréchette: Oui, mais encore là une décision appelable.

M. Cusano: Oui, certainement.

M. Fréchette: Toutes les décisions sont appelables.

M. Cusano: Tout est appelable mais lorsqu'on arrive dans un processus d'appel cela prend du temps. Ce n'est pas une question qui va se régler, on sait fort bien les délais qui existent. Vous me demandez si j'ai des cas précis; certainement que j'en ai. Même du côté, par exemple, de certaines ordonnances du côté des médicaments, il y en a qui sont dans la région de Montréal. Je ne sais pas si ça se produit ici à Québec. 11 y a certains médicaments par exemple, qui sont disponibles dans certains hôpitaux seulement, parce qu'ils sont au niveau expérimental.

C'est à ça que je veux en arriver, lorsqu'on parle de l'établissement, de l'autonomie du médecin traitant et ainsi de suite. Je veux que le ministre, lorsqu'on parle de soins nécessaires, essaie de vraiment me définir si l'autonomie du médecin traitant, c'est un voeu pieux ou bien si ça va être la réalité.

M. Fréchette: Mme la Présidente, je ne peux pas ajouter beaucoup aux commentaires que j'ai déjà soumis à la commission quant à la perception que l'on doit avoir du phénomène de la fourniture des soins nécessaires, sauf, peut-être, de répéter qu'il faut comprendre, de toute évidence, que lorsqu'on parle de la fourniture des soins nécessaires, on réfère aux soins que le médecin traitant de l'accidenté juge nécessaires pour atteindre cette consolidation dont on parle.

Quant au choix de l'établissement, ça aussi c'est important. La loi - je n'ai pas en mémoire l'article précis - prévoit que le choix de l'établissement est évidemment la décision exclusive de l'accidenté. Tout ce qui est ajouté dans la loi à cet égard-là - cela rejoint la préoccupation du député de Viau -

c'est que dans certains cas, la commission peut suggérer à un travailleur, qui n'est pas du tout obligé d'accepter la suggestion, de songer à la possibilité de se faire traiter dans un autre établissement et voici pourquoi: Vous avez des accidentés des régions périphériques qui nécessitent des soins spécialisés qui ne se donnent que dans de grands centres, par exemple, Montréal et Québec, ou alors des gens qui peuvent recevoir des soins dans leur région, mais qui, à cause de la congestion, sont obligés d'attendre deux, trois, six mois et dans certains cas, plus, avant d'avoir leur tour dans un établissement de leur région.

Pourquoi la disposition est-elle là? C'est pour pouvoir indiquer, à un moment donné, à un travailleur que dans une autre institution, les mêmes disponibilités de traitement existent. Non seulement les mêmes disponibilités de traitement existent-elles, mais il peut les recevoir plus rapidement.

C'est donc la seule - ce n'est même pas une réserve - indication ou formalité qui existe dans la loi, quant au choix de l'établissement.

Mais, encore une fois, Mme la Présidente, je ne pense pouvoir être plus explicite que je ne le suis actuellement en indiquant que la fourniture des soins nécessaires, c'est tout ce que le médecin traitant décide de prescrire pour la consolidation de la lésion de son patient.

M. Cusano: Excusez-moi, M. le ministre, peut-être que je ne vous comprends pas. C'est que vous avez la décision du médecin traitant et cette décision est contestable, elle peut être contestée par l'employeur ou bien la CSST. Est-ce que je me trompe?

M. Fréchette: Je ne pense pas que vous vous trompiez, non.

M. Cusano: Alors, le médecin traitant -je parle dans des cas de quasi-urgence, suite à un accident très grave - peut décider d'envoyer l'individu soit à Montréal ou ailleurs. Je me demande jusqu'à quel point ça va être respecté. Ou bien la CSST dit: Non, c'est à l'hôpital un tel; on peut donner les soins nécessaires sans avoir même évalué l'état de l'accidenté. C'est ça. Je voudrais bien que ce soit précisé pour soins nécessaires. Je ne voudrais pas non plus qu'on arrive à donner une définition de soins nécessaires, parce que là, on pourrait prendre chaque mot et commencer à donner une définition.

M. Fréchette: Non, mais l'article, ce ne sera pas long. (12 h 30)

M. Cusano: Non, je parle de ça, M. le ministre, parce que ce deuxième paragraphe traite de plomberie et vous nous demandez d'adopter l'article 1. Il me semble qu'il est nécessaire de remettre cela à plus tard, une fois qu'on aura regardé les articles, justement ceux où l'on parle de soins nécessaires parce que cela n'est pas clair.

En ce qui nous concerne, la question d'autonomie du médecin traitant n'est pas vraiment claire, parce qu'elle est appelable; elle est appelable par la CSST et par l'employeur.

M. Fréchette: J'ai un dernier commentaire là-dessus, Mme la Présidente. Une des préoccupations du député de Viau, c'est de se demander si, par exemple, à l'intérieur des limites du territoire du Québec, le médecin traitant peut décider de prescrire que son patient, qui a été accidenté à Chibougamau, doit être traité à l'hôpital Notre-Dame à Montréal. Je signale au député de Viau que la compréhension qu'on doit avoir de la fourniture des soins nécessaires dans un cas comme celui-là, c'est que le médecin traitant de l'accidenté à Chibougamau pourra prescrire de l'envoyer tout de suite ailleurs. La seule réserve, c'est que si le médecin traitant prescrivait qu'il faut aller le faire opérer en Californie, là il faudrait que, au préalable, les dépenses soient autorisées. À l'intérieur du territoire du Québec, il n'y a aucune restriction.

M. Cusano: Cela va pour le moment, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Nelligan.

M. Lincoln: Mme la Présidente, j'ai un commentaire dans un ordre d'idées tout à fait différent. C'est parce que cela s'enchaîne à ce qu'a dit le député de Viau par rapport aux objectifs du projet de loi.

Si on regarde le premier paragraphe des objectifs du projet de loi, c'est tout à fait clair, comme objectif global - là, nous nous associons tout à fait - quand on arrive au second paragraphe, c'est plutôt le processus d'application de l'objectif; quant au troisième paragraphe, duquel je veux parler, je voulais souligner au ministre les possibilités de problèmes de cedit paragraphe et sur lesquels il ne s'est peut-être pas arrêté.

En fait, je voulais lui demander si on s'était arrêté aux problèmes qui pouvaient être causés par rapport aux sociétés fédérales, alors qu'on accorde un droit de retour au travail à tous les travailleurs. Pourtant, on a vu, par exemple, par rapport à la loi 17, le cas paradoxal de Quebecair, une société du Québec, qui appartient au gouvernement du Québec, où on se sert de la loifédérale pour contourner l'application de la loi 17. Le fait est que les travailleurs de

Quebecair, aujourd'hui, ne peuvent pas se prévaloir des droits de la loi 17 parce que, techniquement et légalement, elle ne s'applique pas à leur protection comme travailleurs, d'après les lois fédérales qui régissent les compagnies d'aviation.

En fait, je voudrais souligner au ministre que nous avons décelé un cas qui opposait la CSST à Bell Canada sur la question de la Loi sur la santé et la sécurité du travail, où la cause a été en appel. En appel, le jugement majoritaire a été que chacune des lois prévoit un mécanisme, un tribunal d'arbitrage différent. Quant au cas présent, les articles 33, 36, 37, 40 à 45 de la loi provinciale n'ont donc pas d'application à l'endroit de l'intimé, qui était Bell Canada.

Je sais que cette question est abordée, dans de plus amples détails, au chapitre VII. Mais, en fait, dans les objectifs du projet de loi, l'article 1, qui est le principal article où on situe les objectifs, on donne un droit de retour au travail aux travailleurs. Alors, il faudrait se demander si, par exemple, les travailleurs des sociétés fédérales, qui dépendent des lois fédérales... On peut parler des sociétés fédérales elles-mêmes telles que Air Canada et CN; on peut parler de celles qui sont régies par les lois fédérales, comme Bell et des quantités d'autres comme Quebecair. Si dans ce cas, ce droit de retour au travail est un droit qualifié réellement et qui n'appartiendrait qu'aux travailleurs des sociétés régies directement par les lois du Québec, par les lois de la santé et de la sécurité du travail du Québec et que là aussi, il y aurait ces mêmes problèmes que des sociétés régies par les lois fédérales pourraient se soustraire à cette obligation de droit au travail, alors, quelle est la situation par rapport à la discrimination, en fait? On aurait deux groupes de travailleurs, un qui aurait le droit au retour au travail par rapport à la loi 42, un autre groupe qui pourrait dire: Bon, la loi 42 ne s'applique pas à nous parce que nous sommes une compagnie fédérale. Je voulais savoir du ministre s'il avait pris connaissance de ce jugement qui a été en appel: La CSST contre Bell Canada, et s'il ne pense pas que cela constitue un problème d'importance qui devrait être réglé?

M. Fréchette: Effectivement, Mme la Présidente, le problème que soulève le député de Nelligan est de taille et de surcroît préoccupant. Dans la cause à laquelle il se réfère, CSST versus Bell Canada, effectivement la Cour d'appel en est venue à la conclusion que les sociétés fédérales qui étaient régies par les dispositions ou bien du Code canadien du travail ou alors par les dispositions de la santé et de la sécurité relevant du gouvernement fédéral, ces institutions étaient exclues de l'application de la Loi sur la santé et la sécurité du travail. Je signalerai cependant un détail que le député a sans doute oublié, c'est qu'il y a actuellement pendante devant la Cour suprême une requête pour permission d'appeler et le jugement n'a pas encore été rendu sur la requête pour permission d'appeler.

Quant à l'autre aspect de la question, est-ce que les dispositions du troisième paragraphe de l'article 1 ont comme objectif de couvrir tous les travailleurs du Québec, même ceux qui sont au service de sociétés ou d'institutions fédérales? C'est évident que c'est l'objectif. On n'est cependant pas exempt de ce danger dont vient de parler le député de Nelligan. Si un organisme, une société ou une corporation s'avisait de contester cette disposition-là en alléguant que le même droit est couvert par des dispositions de lois fédérales, il est évident que nous pourrions nous retrouver en contestation devant les tribunaux. La première évaluation qu'on en a faite au moment d'écrire la loi, c'est que contrairement au problème très spécifique qui a été soulevé dans la cause de Bell Canada, il n'y aurait pas - et je vous signale que c'est notre évaluation - actuellement dans aucune loi fédérale canadienne concernant les relations du travail ou la santé et la sécurité, un mécanisme semblable. Si notre évaluation est exacte, nous devrions, ou bien être à l'abri de poursuites judiciaires ou alors, si on était l'objet de poursuites judiciaires, être en mesure de convaincre les tribunaux de la position qu'on soutient. Alors, c'est essentiellement la position.

M. Lincoln: Si la requête en appel à la Cour suprême est acceptée, que la cause va à la Cour suprême et que l'appel est consolidé... En d'autres mots, si les mêmes décisions sont rendues par la Cour suprême, à ce moment-là, parce que cela irait plus loin en fait que le retour au travail, cela voudrait dire que dans les cas comme celui de la Cour d'appel où il y avait un retrait préventif en cas de grossesse, cela irait beaucoup plus loin que cela. À ce moment-là, allez-vous prendre des dispositions, ou par les lois du Québec ou bien par des ententes spécifiques avec le fédéral, pour régler ce problème? C'en est un, quand vous considérez la quantité de travailleurs qui sont régis par des lois fédérales à travers des sociétés fédérales, si on ajoute même Air Canada, Canadien National, Bell et toutes les autres. Ce sont des centaines de milliers. Est-ce que cela ne serait pas un problème qu'il faudrait adresser à... Est-ce que vous avez un échéancier quelconque qui dit, bon la première chose, on va faire appel à la Cour suprême si le droit d'appel est accepté. Il y a deux scénarios, le droit d'appel à la Cour suprême peut être refusé

ou la cause va en Cour suprême et cela prend quelques mois ou un an ou deux ans, je ne sais pas.

À un moment donné, il faut arriver à l'évidence que d'une façon ou d'une autre, si la Cour suprême annule la décision, alors tout rentre dans l'ordre, mais s'il n'y a pas de droit d'appel en Cour suprême qui est accepté ou si la Cour suprême accepte la décision de la Cour d'appel, est-ce que, à ce moment-là, il ne faut pas aller plus loin que cela? Est-ce qu'on ne se retrouve pas dans une situation où on a deux groupes de travailleurs, les travailleurs régis... Comme le cas est paradoxal, au lieu d'une société appartenant au gouvernement du Québec, le gouvernement du Québec se sert réellement de la loi fédérale pour dire: la loi 17 que nous avons créée nous-même ne s'applique pas aux travailleurs? Est-ce que cela n'est pas deux poids, deux mesures?

M. Fréchette: Mme la Présidente, le débat que soulève le député de Nelligan a deux aspects dans le sens suivant. Ce qui est actuellement en discussion devant les tribunaux, c'est un mécanisme d'application de la loi 17, pas la loi 17 relative au Code du travail, mais la loi 17 ayant créé la Commission de la santé et de la sécurité du travail et de façon plus spécifique, le droit au retrait préventif.

Si la Cour suprême, ou bien refusait d'entendre l'appel où alors l'entendait et confirmait le jugement de la Cour d'appel, c'est évident qu'à ce moment-là, le droit au retrait préventif que l'on retrouve dans la loi 17 est très sérieusement compromis. Je ne vais pas contester cela d'aucune espèce de façon. Si l'on devait malheureusement se rendre jusqu'à cette étape, il me semble qu'à ce moment, le débat devient strictement politique. Je veux dire qu'il n'y aurait pas de possibilité pour le gouvernement du Québec de procéder à quelque amendement que ce soit à quelque loi que ce soit, pour contrer cette difficulté. C'est dans ce sens que je dis que le débat se transporterait alors carrément au palier politique des deux gouvernements.

C'est un peu différent du phénomène dont on est en train de discuter. Je ne pense pas que si la Cour suprême devait maintenir le jugement de la Cour d'appel, cela doive nécessairement invalider la disposition du troisième paragraphe de l'article 1 qui concerne le droit de retour au travail. Parce que selon notre évaluation, c'est que dans l'état actuel des choses, il n'y aurait dans aucune disposition d'une loi fédérale, un espèce de droit qui aurait une allure concurrente ou enfin qui serait à peu près de même nature dans deux législations distinctes et, s'il n'existe pas de dispositions de cette nature dans une loi fédérale, le problème causé par la cause de Bell Canada n'existerait pas. Enfin, c'est l'évaluation qu'on fait à ce stade-ci. J'espère qu'elle va continuer d'être la bonne, c'est notre façon de voir la situation.

M. Lincoln: Est-ce que je comprends bien, Mme la Présidente, est-ce que je comprends bien, M. le ministre, qu'il y a eu une évaluation, une opinion légale, que le cas a été étudié, que selon vous, la décision quant à la CSST et Bell Canada n'influencerait pas la question de retour au travail sous la loi 42?

M. Fréchette: Si le député de Nelligan me parle d'une opinion légale à proprement parler, tout à fait circonscrite, balisée à l'intérieur d'un long texte, je lui dirai que non. Il n'y a pas d'évaluation de ce genre. Mais la situation a été discutée à travers toutes les séances qu'il a fallu tenir pour préparer la loi, et la conclusion à laquelle tous en arrivent, c'est qu'effectivement, dans l'état actuel des choses, à partir d'une analyse des dispositions du Québec et des dispositions fédérales, il n'y aurait pas cette concurrence dont je parlais tout à l'heure.

M. Lincoln: Est-ce que je pourrais faire une suggestion, M. le ministre, puisque nous admettons que c'est un problème potentiel sérieux? C'est sûr que, si on parle, si, par exemple, la décision d'aller ou non en Cour suprême était confirmée, si elle avait une influence sur le cas du retour au travail -admettons, c'est possible - est-ce que cela n'aurait-il pas valu la peine d'en faire une évaluation juridique approfondie? Pour en fait être en avance, prévenir la possibilité que des centaines de milliers de travailleurs -peut-être qu'il y aurait une société de la couronne fédérale comme Air Canada ou Bell, je ne sais laquelle, ou CN, qui justement contesterait ce droit donné par la loi 42 - est-ce que cela ne vaudrait pas la peine de nous mettre en avant du problème, d'essayer de voir où exactement nous nous tenons là-dessus? Je sais que nous allons y revenir au chapitre VII. Je pense que cela aurait été bon, avant le chapitre VII, d'aborder le problème, de faire un peu les balises, de voir si cela n'est pas possible, au sein de votre ministère ou du ministère de la Justice, de voir ce problème plus en profondeur.

M. Fréchette: Mme la Présidente, je voudrais bien qu'on prenne la précaution de procéder à une analyse minutieuse et détaillée de chacune des dispositions de nos lois. S'il arrivait qu'à la suite d'une évaluation de cette nature, on en vienne à la conclusion qu'il y a possiblement un danger qu'éventuellement un droit qu'on voudrait reconnaître à des travailleurs puisse être contesté et même nié en dernière instance

par la Cour suprême et qu'on ne l'inscrive pas dans la loi, il y a un nombre considérable de choses qu'on ne retrouverait pas dans nos lois et qui sont à l'avantage des gens pour qui ces lois sont faites. En d'autres mots, je ne peux pas, par présomption, renoncer au désir que j'ai d'inscrire, dans une loi de la réparation des accidents du travail, un droit essentiel, parce qu'il y a une crainte éventuelle qu'une cour en vienne à la conclusion qu'il n'est pas constitutionnel. Je ne vais certainement pas renoncer d'avance.

Deuxièmement, Mme la Présidente, s'il fallait accepter l'argumentation du député de Nelligan jusqu'à la limite, cela voudrait dire que, chaque fois que, dans n'importe laquelle de nos législations - pas nécessairement celle-ci - il y a une ambiguïté ou un doute ou alors des questions qui se posent, on ne doive pas légiférer, cela va créer de sérieux embarras pour plusieurs législations. Deuxièmement, cela n'est pas le cas ici, mais, sur le plan des principes, il faut, dans certains cas, à cause de l'ambiguïté qui existe autour de certaines dispositions législatives, faire le test de l'autorité judiciaire pour savoir très précisément où on doit loger en termes juridictionnels. Pour ces motifs, je serais fort mal à l'aise de retirer de la loi la consécration du droit de retour au travail parce que éventuellement telle ou telle chose peut se produire. Par ailleurs, je suis conscient de l'acuité du problème que soulève le député de Nelligan.

M. Lincoln: Mme la Présidente, je pense qu'il y a un malentendu. Je n'ai jamais suggéré, M. le ministre, qu'on retire le droit de retour au travail. Tout ce que j'ai souligné, c'est qu'on est devant le fait d'une décision qui s'est passée par rapport à la CSST elle-même et Bell Canada et qui a des conséquences certainement sérieuses. Cela est un fait. On ne peut pas l'ignorer. Cela ira en Cour suprême qui va le confirmer ou non. Si cela n'est pas confirmé, si cela est infirmé, alors, nous retournons au point de départ où tout est pour le mieux. Si cela était confirmé, on constate qu'il y a déjà un problème. Tout ce que j'ai suggéré, c'est qu'on puisse le mettre dans la loi et dire: Bon, on va attendre qu'il y ait un conflit devant les tribunaux, on va aller faire la même chose que dans leur cas. Là, on a déjà un avertissement. Tout ce que je suggère, c'est qu'au moins on soit préparé avec une étude conséquente qui montrerait les bons et les mauvais côtés de la chose, certainement les avantages que nous avons de mettre cela dans la loi, quelles sont nos protections, etc. D'après ce que vous m'avez dit, cela a été une étude sommaire. Cela n'a pas été quelque chose d'approfondi, mais peut-être qu'on devrait faire cela maintenant plutôt que d'attendre qu'une société fédérale nous fasse tester la loi une seconde fois. Je ne dis nullement qu'on ne devrait pas le mettre dans la loi.

M. Fréchette: Je voudrais être sûr de bien comprendre la suggestion du député de Nelligan. Ce qu'il dit essentiellement, c'est: Gardez cette disposition dans la loi, mais soyez prêts au cas où. Soyez prêts au cas où, par exemple, en première étape, la Cour suprême confirmait le jugement de la Cour d'appel dans le cas de Bell Canada et que ce jugement avait une incidence sur le phénomène du droit de retour au travail. En d'autres mots, le député de Nelligan nous donne le conseil judicieux de se bien préparer à faire éventuellement face à des contestations judiciaires. Je suis bien disposé...

M. Lincoln: J'allais un petit peu plus loin que cela. Je dis: Si, par exemple, vous faisiez une telle étude approfondie, quand nous arriverions à l'étude du chapitre VII, cela nous donnerait du temps de recul. Au moins nous serons préparés, quand on arrivera au chapitre VII, à peut-être faire des suggestions. La sélection d'articles possibles pourrait renforcer l'objectif que vous vous fixez. Il me semble qu'en arrivant au chapitre VII il faudra discuter de cette question.

M. Fréchette: Je n'ai pas d'objection à ce qu'on en discute, Mme la Présidente, mais je ne vois pas pourquoi on devrait à cet égard-là ne pas adopter l'article 1. Cela n'empêche pas l'adoption de l'article 1. Cela n'empêche pas non plus que, lorsqu'on arrivera au chapitre VII, on fasse la discussion fondamentale sur le sujet dont parle le député de Nelligan et que, dans l'intervalle, on regarde de plus près quelle est très précisément notre évaluation de la situation juridique de la question.

M. Lincoln: Mais, par rapport au troisième chapitre, je n'ai pas dit de ne pas adopter l'article 1. Il y a les réserves qu'avaient mes collègues par rapport au chapitre II qu'il faudra régler. C'est une autre affaire, mais, par rapport au chapitre III,tout ce que j'ai dit, puisqu'on aborde cette question qui est sérieuse: Soyons prêts avec des études, etc. Quand on arrivera au chapitre VII, on va discuter, on va avoir quelque chose d'étoffé devant nous pour pouvoir faire le compte et faire des suggestions. C'est cela que je veux demander au ministre.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Frontenac.

M. Grégoire: Je voudrais faire une suggestion au ministre du Travail. Cela se

produit souvent dans des commissions parlementaires qu'on suspend un article et on revient à la fin de l'étude de tout le projet de loi. Il y a 10 ou 12 articles qui ont été suspendus et qui passent vite parce que d'autres parties de la loi ont été étudiées. On gagne du temps. Cela va plus vite et la discussion ne se fait pas deux fois, elle ne se fait qu'une fois. Si on fait la discussion sur le deuxième paragraphe de l'article 1 immédiatement, elle va être recommencée plus tard. On va revenir à l'article 1 et tout le monde va dire: adopté. Cela se fait régulièrement et on gagne du temps. Il n'y aura pas une série d'articles. Il peut y en avoir 10 ou 12 dans le courant de l'étude de toute la loi qui soient suspendus en attendant qu'on ait des explications qui seront données un peu plus tard. Je pense que le ministre aurait intérêt à faire cela. Ça va lui permettre de gagner du temps et cela va aller plus vite. Cela se fait dans toutes les commissions parlementaires.

M. Fréchette: Je suis tout à fait au fait de cela et j'étais également tout à fait conscient qu'en abordant l'étude de la loi 42 nous allions devoir, à un moment donné, à un stade ou l'autre, tenir un certain nombre d'articles en suspens. Sauf que je n'ai pas compris dans l'argumentation du député de Nelligan qu'il demandait la suspension de l'adoption de l'article 1, à moins, encore une fois que je ne l'aie mal saisi. Il nous donne un préavis, le député de Nelligan, un préavis judicieux d'être prêt à répondre aux questions, lorsqu'on arrivera aux questions sur le chapitre du droit de retour au travail, pour nous assurer de la constitutionnalité de la disposition. C'est comme cela que je comprends le préavis du député de Nelligan.

M. Lincoln: Moi, je n'ai parlé que par rapport au troisième paragraphe. Je vais laisser le soin à mon collègue de Viau qui est notre porte-parole de décider s'il demande une suspension ou non. Ce n'était pas du tout le sens de mon intervention. Je sais qu'il a beaucoup de réserves par rapport au paragraphe 2. Moi, j'ai voulu purement apporter certains commentaires au ministre. Ce sera à notre porte-parole de décider s'il demande la suspension.

M. Cusano: Mme la Présidente, je disais tout à l'heure justement que, sur la question de cet article, on est d'accord avec le premier paragraphe. Mais, lorsqu'on arrive, justement, aux deuxième et troisième paragraphes, il faut qu'on ait des explications.

Le ministre s'est engagé sur la question de la consultation à définir d'une façon assez claire ce qu'il entend par le mot "consolidation". Maintenant, je ne peux pas accepter qu'on adopte ou qu'on vote sur cet article-là, parce que, selon la définition que vous allez donner à "consolidation", ça va tout changer. Une fois qu'on aura... S'il est adopté présentement, on ne peut plus y revenir, M. le ministre.

Alors, je crois qu'on peut faire deux choses. Une qui serait peut-être plus complexe, c'est qu'on pourrait adopter les articles par paragraphe. Mais là, je pense que le secrétariat va avoir de la difficulté, non pas à se comprendre, parce que ces gens sont très compétents, mais enfin, ça va être très long.

Moi, je suggère et, si nécessaire, j'en fais une motion formelle, de suspendre l'article 1 jusqu'au moment où on sera prêt, où on connaîtra vraiment la portée de tout l'article. Il me semble que c'est une demande qui est très raisonnable, Mme la Présidente et M. le ministre, parce qu'on sait que ce n'est pas la présidente qui va prendre la décision sur cela; c'est certainement le ministre.

Alors, je demeure encore dans un esprit de coopération, pour qu'on comprenne très bien si c'est nécessaire de suspendre l'adoption de cet article à ce moment-ci.

M. Fréchette: Est-ce que je dois comprendre, Mme la Présidente, qu'il y a une motion formelle sur la table?

M. Cusano: C'est-à-dire que, si vous voulez que j'en fasse une, je vais en faire une.

M. Fréchette: Non, je ne vous ai pas demandé si... Je me suis adressé à la présidence pour savoir s'il y avait une motion formelle sur la table.

La Présidente (Mme Juneau): II n'y en a pas pour le moment, M. le ministre.

M. Fréchette: Mme la Présidente, l'argument qu'utilise ou qu'invoque le député de Viau pour demander à ce stade-ci la suspension de l'adoption de l'article 1, se réfère à la définition qu'on est en train d'élaborer autour du terme "consolidation" et qu'on devra retrouver à l'article 2.

Mais, Mme la Présidente, quelle que soit la définition que l'on retienne pour le terme "consolidation", dans l'article 1, au paragraphe 2, on va toujours retrouver le mot "consolidation". Cela ne change strictement rien au deuxième paragraphe de l'article 1. Cela va toujours être de la consolidation. On va simplement retrouver, à l'article 2, une définition de la consolidation, à moins que le député de Viau ne dise: II ne devrait pas y avoir, dans l'article 2, de référence à la fourniture des soins nécessaires. Il ne devrait pas y avoir de référence à la consolidation. Il ne devrait pas y avoir de référence à la réadaptation

physique, sociale et professionnelle. Il ne devrait pas y avoir de référence au droit de retour au travail, parce qu'il y a un danger éventuel de contestation judiciaire. Si c'est à ça que se réfère le député de Viau, c'est une tout autre situation.

Mais ce n'est pas comme ça que je comprends son argumentation. Il dit: N'adoptons pas l'article 1, parce qu'on va définir, dans l'article 2, la consolidation. Ce n'est pas parce qu'on va déterminer une définition du terme "consolidation" que le terme même de "consolidation" va changer dans le paragraphe 2 de l'article 1. Alors, j'ai de la difficulté, Mme la Présidente, à accepter cette argumentation.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau.

M. Cusano: M. le ministre, si la définition qu'on apportera au mot "consolidation" est acceptable de notre part, ça change notre position sur cette question de voter pour ou voter contre l'article 1. C'est aussi simple que ça.

Je sais que vous allez peut-être, avec votre expérience d'avocat, commencer à couper les cheveux en quatre. Ce n'est pas à ça que je veux en arriver. C'est tout simplement pour qu'on puisse bien procéder. On demande de suspendre - j'en fais, à ce point-ci, une motion formelle à Mme la Présidente - l'article 1 pour qu'on puisse prendre connaissance de ce que l'article 1 implique.

La Présidente (Mme Juneau): Je m'excuse. M. le député de Viau, étant donné que je constate qu'il est rendu 13 heures, nous devons suspendre nos travaux et reprendre après les affaires courantes.

(Suspension de la séance à 13 heures)

(Reprise à 16 h 19)

La Présidente (Mme Juneau): La commission de l'économie et du travail reprend ses travaux pour l'étude du projet de loi 42, Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.

Nous nous sommes quittés sur la motion du député de Viau demandant que l'article 1 soit reporté. La parole est au député de Châteauguay.

M. Dussault: Oui, Mme la Présidente, avant que vous ne rendiez votre décision...

La Présidente (Mme Juneau): Excusez-moi, c'est sur la recevabilité de la motion du député de Viau.

M. Dussault: C'est ce que j'allais vous dire. Avant que vous ne rendiez une décision sur la recevabilité de cette motion, je me permets, Mme la Présidente, de vous donner un éclairage qui est le suivant. Il me semble, depuis les huit ans que j'ai été député à l'Assemblée nationale, qu'au moment où nous avions une suggestion visant à suspendre un article d'un projet de loi, à suspendre l'étude de cet article, l'on devait donner notre consentement à l'unanimité pour ce faire.

Il me semble qu'à partir du moment où on met cette question aux voix, ici, nous renions cette règle de l'unanimité pour en faire l'enjeu d'un débat qui pourrait durer un temps assez long. De plus, Mme la Présidente - je suis toujours en train d'essayer de vous éclairer sur la recevabilité - il m'apparaît que l'article 1, parce qu'il s'agit de celui-là en plus, présentement, est un article de fond, un article essentiel puisque c'est à partir de cet article que beaucoup d'autres articles qui suivront prendront leur sens.

II m'apparaît que, si on devait mettre aux voix une telle motion et si elle devait être adoptée, cela aurait pour conséquence d'étudier les articles, par la suite, qui seraient plutôt pendants par rapport au principe, par rapport à l'objet du projet de loi.

Mme la Présidente, puisque, de toute façon, si vous décidiez de la recevoir, cette motion pourrait être de conséquence pour le reste de nos travaux et pour bien d'autres travaux qui suivraient, il m'apparaît qu'il serait important que, si vous aviez le moindre doute sur cette motion, vous preniez la chose en délibéré et que vous nous apportiez le meilleur éclairage possible quand vous rendrez la décision.

La Présidente (Mme Juneau): Merci, M. le député. M. le ministre.

M. Fréchette: Mme la Présidente, je veux ajouter un seul élément à l'argumentation du député de Châteauguay. C'est pour nous rappeler le danger que pourrait représenter une décision en vertu de laquelle, par exemple, une motion de cette nature serait recevable. Cela voudrait dire -et on a un projet de loi de 566 articles, cela fait longtemps qu'on se le fait dire - que, pour tous les articles du projet de loi, le même processus pourrait se représenter, non seulement pour les articles numérotés du projet de loi, mais aussi pour des amendements, des sous-paragraphes, des paragraphes. Alors, cela deviendrait tout à fait illusoire d'essayer de procéder à l'adoption d'un projet de loi dans une situation comme celle-là.

Alors, j'appuie sans réserve l'argumentation du député de Châteauguay. Si vous jugez utile de prendre le temps qu'il

faut pour regarder la situation de près, je vous suggère, quant à moi, sans aucune réserve et, évidemment, je n'y ferai aucune espèce d'objection... Encore une fois, la question est à ce point importante qu'il faut, me semble-t-il, prendre tout le temps nécessaire pour la bien cerner et, ensuite, rendre la décision qui fera en sorte que nous pourrons, normalement, évoluer dans nos travaux.

La Présidente (Mme Juneau): Merci, M. le ministre. M. le député de Viau.

M. Cusano: Merci, Mme la Présidente. Vous comprendrez la raison pour laquelle j'ai présenté cette motion; plusieurs facteurs m'ont influencé. Un des facteurs les plus importants, c'est le fait que le ministre nous a déposé nier cette liasse d'amendements au projet de loi; je n'ai même pas encore fini de les compter, mais il y en a au-delà de 200, si je ne me trompe pas. Si le ministre les a déposés, je présume que ceci va avoir un impact, même sur l'article 1, selon le contenu du projet de loi et des amendements. Et je ne vois pas pourquoi, à ce moment-ci, on ne pourrait pas, compte tenu du fait... Je ne serai pas méchant en demandant au député de Châteauguay s'il a pris connaissance, c'est-à-dire s'il a lu tous les amendements qui sont proposés, qui vont certainement amener des changements au projet de loi et qui pourraient, dans un sens, nous placer dans une situation où l'on va adopter un article où il y a certains principes et après on ne pourra pas y revenir, parce que cela a été changé. Il me semble que cela a déjà été fait, cela a été soulevé ce matin par d'autres collègues, qui ont dit que cela a déjà été fait, il y a des précédents à cela, à savoir qu'on peut suspendre un article et y revenir après.

Alors, je peux assurer le ministre que ce n'est pas l'intention de l'Opposition d'arriver, de façon systématique, à chacun des articles et d'en demander le report. Ce n'est pas cela. Le premier article est un article fondamental, qui indique l'objet du projet de loi. Et je pense que, en toute décence, il faudrait donner l'occasion à tous les membres de cette commission de bien étudier l'impact, même si le député de Châteauguay les a lus depuis qu'il les a reçus, de ces amendements au projet de loi.

C'est pour cela, Mme la Présidente, que j'insiste. Je crois que la motion est recevable et je ne vois pas pourquoi on commence à faire toutes sortes de chiards de l'autre côté sur cette motion.

Alors, pour le moment, Mme la Présidente, c'est tout ce que j'ai à dire. Et si vous jugez nécessaire de prendre cette question en délibéré, à ce moment-là, il va falloir, je crois, suspendre nos travaux.

La Présidente (Mme Juneau): Effectivement, M. le député de Viau, étant donné qu'il y a des divergences d'opinions, je pense que la commission se doit de prendre la chose en délibéré, d'arrêter momentanément les travaux et...

M. Dussault: M. le député de Viau se réfère à moi constamment quant au nombre d'amendements apportés au projet de loi. Je voudrais faire remarquer quand même que... Regardez le contenu. J'ai surtout constaté qu'il y a quelques amendements de fond importants, mais qu'il y a des dizaines et des dizaines d'amendements de concordance qui découlent de cela et qui font qu'on a un paquet de feuilles. Je pense que c'est important de le dire; sinon, cela laisse planer l'impression qu'on est en train de refaire toute la loi. Cela n'est pas du tout le cas.

Deuxièmement, Mme la Présidente, ce à quoi je m'en prenais tout à l'heure quand je vous ai fait des représentations, c'est au formalisme de l'approche qu'a utilisée le député de Viau pour nous amener à suspendre l'étude. Qu'il nous demande de consentir à suspendre cet article, cela sera une tout autre affaire; mais qu'il nous demande de voter cela par une motion, je pense que c'est dangereux. Cela nous amène forcément à faire des vérifications très serrées pour que cela ne fasse pas jurisprudence. Je ne me rappelle pas qu'on ait procédé comme cela. Si cela avait été le cas, il me semble qu'on aurait à la mémoire des blocages de commissions absolument extraordinaires. On en aurait facilement à la mémoire. Je ne me rappelle pas qu'on ait utilisé une telle technique pour en arriver à bloquer une commission. C'est ce qui me fait penser que cette possibilité de voter une telle motion n'existe pas. J'ai plutôt l'impression très nette que nous avons toujours fonctionné par consentement mutuel, consentement unanime de la commission. C'est cela que je veux qu'on vérifie d'une façon très serrée. C'était l'objet de mon intervention.

M. Cusano: Sur cette question, Mme la Présidente, je répète ce que j'ai dit. Je suis d'accord pour que vous preniez la question en délibéré, mais je vois, en attendant, la nécessité de suspendre les travaux.

M. Fréchette: Mme la Présidente, permettez qu'avant que vous preniez le tout en délibéré, j'ajoute un seul commentaire. L'argumentation du député de Châteauguay est très importante. Là, on a décidé de procéder par la voie juridique, par la voie légale, c'est-à-dire le dépôt ferme d'une motion demandant la suspension de l'article 1. Bien sûr, vous allez devoir vous pencher sur ce problème et nous indiquer quelle est la teneur du règlement à cet égard. Si vous en arrivez à la conclusion, Mme la

Présidente, que la motion est recevable, nous entreprendrons le débat de fond. Si, par ailleurs, vous en arrivez à la conclusion que la motion n'est pas recevable, je voudrais bien que l'on sache, à ce stade-ci, que, comme on a décidé d'emprunter plutôt la voie juridique que la voie du consentement dont on parlait tout à l'heure, cela va être le même processus pour tous les autres articles. Je ne sais pas si je suis suffisamment clair. Je veux dire que nous allons disposer de la situation une fois pour toutes, par la voie juridique. Je vous réitère que j'aurais été, quant à moi, disposé à considérer sérieusement la possibilité de procéder, par voie de consentement de tous les membres de la commission, à suspendre l'article 1 pour le moment et à entreprendre l'étude de l'article 2, mais, si la voie du consentement n'est pas celle que retient le député de Viau, nous allons attendre, Mme la Présidente, la décision que vous rendrez. (16 h 30)

La Présidente (Mme Juneau): Étant donné que le ministre vient de nous faire une certaine ouverture... Oui, M. le député.

M. Grégoire: Avant que vous ne rendiez une décision, peut-être que le député de Viau serait consentant à tout simplement demander au ministre que, de consentement, sans qu'il y ait motion, on suspende l'article 1...

La Présidente (Mme Juneau): J'allais le dire, cher monsieur.

M. Fréchette: Je pensais que j'avais été suffisamment clair.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce qu'on pourrait, à ce moment, convenir qu'on pourrait suspendre l'article 1 jusqu'après l'article 2, en délibérer, et, quand l'article 2 sera adopté, nous reviendrons avec l'article 1? Est-ce que c'est à peu près cela?

M. Fréchette: Oui, c'est le processus auquel je pense, mais il faut une condition préalable à cela, Mme la Présidente, et le député de Frontenac vient de le signaler. Il faut que la motion qui est actuellement en discussion soit retirée par le député de Viau.

La Présidente (Mme Juneau): C'est exact.

Une voix: C'est cela.

M. Fréchette: Si la motion est retirée, je lui dis tout de suite que, quant à moi, je n'aurai pas d'objection, par la voie du consentement unanime, à suspendre l'étude de l'article 1 pour entreprendre immédiatement l'étude de l'article 2.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau.

M. Cusano: Mme la Présidente, nous avons, tout au long de la discussion de l'article 1, exprimé, de notre côté, qu'il y avait une volonté de remettre cet article à plus tard. C'était dans une esprit non juridique, c'est plutôt une question d'entente. Les commentaires qu'on a entendus de l'autre côté de la Chambre étaient que ces gens n'étaient pas favorables. Avec la garantie que le ministre vient de me donner, je suis prêt à retirer ma motion et à accepter la vôtre, Mme la Présidente, à savoir qu'on revient à l'article 1 après l'étude de l'article 2.

Une voix: C'est cela. Cela va.

La Présidente (Mme Juneau): Cela va? Est-ce que tous les députés sont d'accord? La motion est retirée.

Une voix: La motion est retirée.

M. Cusano: Je retire ma motion moyennant la condition qui a été soulevée par le ministre du Travail.

M. Fréchette: Nous consentons, Mme la Présidente, à la suite du retrait de cette motion, à suspendre l'étude de l'article 1 et à entreprendre tout de suite l'étude de l'article 2.

Interprétation

La Présidente (Mme Juneau): Nous passons, maintenant, à l'article 2.

M. Cusano: Une question de directive, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Juneau): Oui, M. le député de Viau.

M. Cusano: L'article 2 contient une série de définitions, commençant par "l'accident du travail" et se terminant par le "travailleur autonome". La directive que je vous demande vise à savoir si le droit de parole est limité à 20 minutes pour la totalité de l'article ou à 20 minutes par définition.

La Présidente (Mme Juneau): D'accord. L'article 238 se lit comme suit: "Le temps de parole de vingt minutes dont disposent les membres de la commission vaut pour chaque article, alinéa ou paragraphe d'un projet de loi, chaque amendement ou sous-amendement ou chaque article qu'on propose de modifier ou d'ajouter dans une loi existante. Ce temps de parole peut être utilisé en une ou plusieurs interventions." Ceci veut dire que,

dans l'article 2 du projet de loi, il est question de 18 alinéas qui correspondent à 18 définitions, c'est-à-dire 18 fois 20...

M. Cusano: C'est-à-dire 18 fois 20 par député.

La Présidente (Mme Juneau): C'est exact.

M. Cusano: Merci.

M. Fréchette: 20 fois 18, c'est cela?

La Présidente (Mme Juneau): Oui, c'est cela.

M. Cusano: C'est théorique cela, M. le ministre.

M. Fréchette: Cela prendrait un miniordinateur. Alors, c'est l'article 2, paragraphe 1.

La Présidente (Mme Juneau): Nous appelons l'article 2.

M. Cusano: Mme la Présidente, je vois le ministre sourire, mais ce sont nos règlements. Je crois qu'il ne serait pas sérieux de notre part d'aborder justement 18 définitions en 20 minutes. Cela veut dire, en sortant l'ordinateur, une minute et quelques secondes par définition. Je crois que ce serait irresponsable. Je n'ai pas l'intention, M. le ministre, je vous le dis tout de suite, de prendre 20 minutes par définition.

Une voix: Vous êtes donc gentil.

M. Cusano: C'est gentil de notre part;

M. Fortier: Moi aussi, je suis soulagé.

M. Cusano: Mon collègue d'Outremont est très soulagé.

M. Fréchette: Vous êtes bien bon pour nous.

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que vous souhaiteriez prendre alinéa par alinéa, discuter de chacun d'eux, avec les réponses du ministre et les autres membres de la commission ou si...

M. Cusano: C'est bien cela, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Juneau): ...vous souhaiteriez discuter de tout cela ensemble?

M. Cusano: J'aimerais, de notre côté, qu'on prenne justement chaque alinéa et on pourrait en discuter, poser des questions au ministre, comme il est d'habitude de le faire et selon...

M. Fréchette: Oui, oui.

La Présidente (Mme Juneau): Cela va?

M. Cusano: Cela va.

La Présidente (Mme Juneau): Cela va. La parole est à vous, M. le député.

M. Cusano: On est au premier alinéa. Est-ce bien cela?

La Présidente (Mme Juneau): Nous sommes au premier alinéa.

M. Cusano: Je pense qu'on ne s'attardera pas sur le préambule, qui dit qu'il y a justement des définitions. Dans le premier alinéa, sur la question de l'accident du travail, qui est défini comme "un événement imprévu et soudain attribuable à toute cause, survenant à une personne par le fait ou à l'occasion de son travail et qui entraîne pour elle une lésion professionnelle;", cet article... Il y a un peu de changement. J'ai remarqué que, parmi les amendements qui sont proposés, le ministre y amène indirectement un certain changement. Je crois que c'est à l'article 27.1, M. le ministre.

Une voix: L'article 27.1.

M. Cusano: L'article 27, si je ne me trompe pas.

M. Fréchette: Oui.

M. Cusano: Dans la liasse des amendements qu'il a déposée.

J'aimerais demander au ministre pour quelle raison on a soustrait de cette définition l'imprudence grossière du travailleur. Cette question est fondamentale, pour ma part, et je ne parle pas... Je ne voudrais pas qu'on m'impute certaines choses lorsqu'on parle d'imprudence grossière. C'est que je ne parle pas de l'individu, parce que je crois qu'aucune personne ne veut s'infliger des blessures au travail. Mais nous avons vécu plusieurs fois l'expérience où l'imprudence grossière de la part du travailleur a joué un rôle, justement, très important - ce n'est pas un rôle important mais c'est une question qui a été trèscontestée... Pourquoi le ministre a-t-il enlevé cette notion d'imprudence grossière? Parce que, sur le chantier de construction ou sur n'importe quel autre lieu de travail, il y a des gestes d'imprudence grossière. Ceci, des fois, est dû aux directives du côté patronal, mais aussi à certaines directives ou certaines actions de la part de l'individu qui travaille.

M. Fréchette: Mme la Présidente, je ne voudrais pas interrompre indûment le député de Viau, mais je voudrais lui signaler que, dans la liasse d'amendements qui lui a été remise, il va retrouver, à l'article 27.1...

M. Cusano: Oui.

M. Fréchette: ...un amendement qui réintroduit la notion de négligence grossière. Et alors, cela veut dire qu'en réintroduisant à l'article 27.1 la notion de négligence grossière on revient très précisément dans le statu quo de la loi actuelle.

M. Cusano: Mais est-ce qu'on peut m'expliquer pourquoi cela a été fait à l'article 27.1 et non pas à la définition de l'accident du travail même? Je compte sur l'expertise juridique du ministre.

M. Fréchette: Dans la Loi actuelle sur les accidents du travail, qui a plus de 50 ans d'existence, comme on le sait, le motif d'exclusion par négligence grossière n'apparaît pas dans la définition de l'accident et n'apparaît pas non plus dans la liste des autres définitions. C'est une disposition d'ordre général qu'on retrouve à l'article 3.1 de la loi actuelle et cette même disposition d'ordre général est reconduite in extenso, sauf erreur, à l'article 27.1. Alors, c'est simplement un réajustement de numéros d'articles dans la loi, strictement.

M. Cusano: Je vous remercie. Est-ce qu'il y a d'autres commentaires?

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Frontenac.

M. Grégoire: On a ajouté à "accident du travail" "un événement imprévu et soudain attribuable à toute cause..." Le mot "imprévu" peut donner lieu à diverses interprétations. On peut dire, par exemple, que cela aurait pu être prévu sur un chantier de construction où certains contremaîtres ne suivraient pas les plans et devis des ingénieurs, que ce soit en structure ou en mécanique; alors, on peut prévoir qu'il se produira des accidents et l'accident se produit. À ce moment-là, est-ce que cela cesse d'être un accident du travail, alors que le travailleur lui-même n'y est pour rien et que, à cause des changements effectués par l'entrepreneur aux plans et devis des ingénieurs, ce qui aurait dû être prévu, c'est-à-dire un accident, est arrivé? Mais, pour le travailleur, c'est toujours imprévu. Ce n'est pas lui qui est maître.

Si on prend un cas combien typique, il va y avoir un procès au sujet de la chute du pont de la rivière Sainte-Marguerite, à Sept-Îles. On va pouvoir dire, il y en a qui vont prouver ou qui vont essayer, du moins, de prouver que l'entrepreneur ou toute autre personne n'a pas rempli les normes de l'art, soit en ingénierie, soit en construction, et qu'il était à prévoir que ce pont tomberait.

Alors, à ce moment-là, aux travailleurs qui sont victimes d'accident, on pourrait leur dire: Vous n'êtes pas dans un événement imprévu et soudain attribuable à toute cause. Cela aurait dû être prévu puisque les entrepreneurs n'ont pas suivi les devis des ingénieurs.

M. Fréchette: M. le Président, la question du député de Frontenac est intéressante. D'ailleurs...

M. Grégoire: D'autant plus qu'on va avoir affaire à beaucoup d'avocats avec cette loi.

M. Fréchette: Oui, mais alors...

M. Grégoire: II va y en avoir beaucoup qui vont embarquer et qui vont chercher tous ces points.

M. Fréchette: II faut peut-être procéder à abolir le barreau... En tout cas, ce serait plus facile.

Voici les observations que je veux soumettre au député de Frontenac à la suite de ces représentations. D'abord, il faut bien retenir à la lecture du texte qu'on ne lit pas qu'il s'agit d'un événement imprévu ou soudain. Les deux éléments doivent coexister pour que la notion d'accident du travail puisse exister.

Deuxièmement, j'étais à dire au député de Frontenac, tout à l'heure, qu'au moment de la commission parlementaire, dans le premier projet de loi 42, nous avions purement et simplement fait disparaître les deux notions d'imprévu et soudain. On ne retrouvait pas cela dans la loi. Cela élargissait considérablement la notion. Alors, à la suite de représentations qui nous ont été faites par des représentants des parties patronales, on a convenu de réintroduire la définition qu'on avait dans la loi actuelle. Ensuite, je dirai aussi au député de Frontenac que la discussion que nous sommes en train d'avoir a été testée à je ne sais pas combien d'occasions par les tribunaux et la Cour suprême s'est prononcée là-dessus pour baliser, circonscrire quels sont les éléments qui doivent exister pour que la nature d'imprévu et soudain existe.

C'est-à-dire que les discussions là-dessus, même les avocats n'en font plus parce que la Cour suprême, à plusieurs occasions, s'est prononcée et on en connaît maintenant les balises. Cela serait facile de trouver un de ces jugements qui nous permettraient de voir quelles sont ces balises. Mais, si nous étions avec des dispositions tout à fait nouvelles, les craintes

que soulève le député de Frontenac, il faudrait en tenir compte sérieusement et possiblement les retenir. Mais, comme déjà les tribunaux ont tranché la question depuis plusieurs années, je ne vois pas comment une bataille juridique pourrait reprendre autour et alentour de cette définition. C'est là depuis 1931, comme cela.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député d'Outremont. Vous avez la parole. (16 h 45)

M. Fortier: Je crois que l'échange que vous avons est important. Bien sûr, on n'en est qu'aux définitions, mais, comme tout le monde le sait, les définitions sont extrêmement importantes et le ministre disait qu'il y a un certain consensus à revenir aux définitions qui existaient déjà. Moi qui n'ai pas suivi les débats aux commissions parlementaires, j'ai lu les recommandations qui nous venaient de différentes associations. Je vois ici, en particulier, que le Conseil du patronat voudrait que la définition soit plus restrictive. J'aimerais demander au ministre s'il a pris connaissance de cette recommandation puisque le Conseil du patronat nous dit: La commission interprète l'expression "à l'occasion de son travail" -cela se retrouve dans la définition actuelle -et cela est interprété d'une façon tellement large que les employeurs écopent de coûts d'accidents qui n'ont rien à voir avec leurs responsabilités. La recommandation du Conseil du patronat était à l'effet de restreindre cette définition. Contrairement à ce que vous avez dit, cela n'est pas un élargissement, vous revenez au statut actuel, alors que le Conseil du patronat demandait un resserrement pour dire que la définition soit telle qu'on ne puisse couvrir que les accidents survenus par le fait, au cours et à l'occasion du travail et pour exclure des accidents qui pourraient arriver sur le terrain de balle molle ou alors que l'accidenté n'est pas au travail. Je n'ai pas moi-même l'expertise qu'il faut pour sustenter cette argumentation, mais je voudrais quand même que le ministre nous dise pour quelle raison il ne retient pas l'argumentation du Conseil du patronat à cet égard.

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fréchette: Essentiellement, Mme la Présidente, pour les mêmes raisons que celles que je viens de donner au député de Frontenac. Il s'agit là aussi d'un texte qui existe depuis 1931. Ce que le député d'Outremont invoque, ce sont les possibilités qu'il y ait de l'abus à cet égard. Je dois convenir qu'il y en a effectivement eu. Je donne un exemple de ce que je veux dire.

Jusqu'à ce que les tribunaux tranchent la question, il s'était développé, à la Commission des accidents du travail, à l'époque, devenue par la suite la Commission de la santé et de la sécurité du travail, une interprétation parlant de quelqu'un qui, par exemple, voyageait de chez lui à son travail, mais qui se trouvait sur la route avant l'heure prévue pour le commencement de son horaire de travail et avait un accident pendant le trajet; il fut un temps où la Commission des accidents du travail et, par la suite, la Commission de la santé et de la sécurité du travail interprétait cette situation comme devant signifier que l'accident arrivait à l'occasion du travail. Les cours de justice ont également, à cet égard, été appelées à se prononcer et elles ont, par exemple, exclu la situation dont je viens de vous parler. Les circonstances de cet exemple ont une relation encore plus intense avec le travail lui-même que l'accident qui pourrait arriver sur le terrain de balle molle, par exemple. Il me semble que, déjà, à cause des jugements des cours qui ont tranché la question, ce danger n'existe pas effectivement et c'est la raison principale pour laquelle la suggestion du Conseil du patronat à cet égard n'a pas été retenue.

M. Fortier: Juste un éclaircissement, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député d'Outremont.

M. Fortier: Je remercie le ministre de son explication. Est-ce qu'il vient de nous dire que la nouvelle interprétation exclurait, disons, le cas d'un menuisier de Montréal qui irait travailler sur un des chantiers d'édifices dans Montréal même; s'il avait un accident en partant - je ne sais pas - du nord de la ville de Montréal ou de Montréal-Est pour se rendre à un chantier au centre-ville de Montréal, ce cas serait-il exclu?

Prenons le cas du même menuisier qui, à la demande de son employeur, devrait se rendre, pendant un certain nombre de semaines, sur un chantier précis qui serait à l'extérieur de la ville où il demeure. Un employé de Montréal qui, à la demande de son employeur, voyagerait le lundi et le vendredi, disons, à Sainte-Agathe. Est-ce que, dans ce cas où l'employeur demande à un employé de voyager et d'aller sur un chantier quelque peu éloigné, l'interprétation de la loi fait en sorte qu'il est couvert ou qu'il est exclu, au même titre que l'employé ou le menuisier auquel je me référais tout à l'heure qui irait travailler sur un chantier à Montréal même?

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fréchette: Mme la Présidente, la question du député d'Outremont m'embarrasse un peu et je vous dis dans quel sens. Il me demande de lui donner une interprétation juridique d'une...

M. Fortier: Je parlais d'un cas qui est arrivé dans le passé.

M. Fréchette: Bon. J'espère qu'on ne se sentira pas lié par l'opinion que je peux avoir sur le sujet que vous soulevez. Si l'accident se produit en dehors des heures de travail, donc avant 8 heures, par exemple, ou après 16 heures, alors que le travailleur ou bien s'en va au travail ou retourne chez lui, le soir, mon interprétation, c'est que, si l'accident arrive à l'extérieur de ces heures, il n'y aurait pas de couverture par la Loi sur les accidents du travail.

Si, par ailleurs, l'employé étant chez lui le soir, après son quart de travail, reçoit un appel de son employeur qui lui demande d'aller rapidement et spontanément à tel endroit parce qu'il y a un bris qui vient de se produire et qu'il y a lieu de s'y transporter rapidement, si, pendant que cela se produit, l'accident arrive, là il y aurait sans doute une couverture qui serait accordée à l'accidenté.

Je ne veux pas prendre le risque d'aller plus avant dans cette interprétation, mais cela me semble couvrir les situations auxquelles vous vous référez.

M. Fortier: Brièvement, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Juneau): M. le député d'Outremont.

M. Fortier: ...c'est autant pour mon information et mon instruction, peut-être aussi pour celle du public, pour ceux qui liront nos débats. Je suis d'accord avec le ministre à savoir qu'il ne s'agit pas d'une interprétation juridique, donc avec toutes les limites nécessaires aux réponses qu'il nous donne.

Mais je faisais allusion au fait que, dans plusieurs conventions collectives, il y a des frais de remboursement qui sont payés à un employé lorsqu'il doit se déplacer pour aller sur un chantier quelque peu éloigné et j'oserais croire que, dans une telle situation, il y a une relation contractuelle entre l'employé et l'employeur. Si l'employé est rémunéré pour se rendre à Sainte-Agathe, j'imagine que celui-ci pourrait argumenter que, de fait, ce n'était pas le même genre de déplacement que celui qu'il pourrait faire à l'intérieur de Montréal ou à l'intérieur de la ville où il demeure et que, ce faisant, il était contractuellement obligé de se déplacer, puisqu'il était rémunéré. J'imagine...

M. Fréchette: C'est exactement...

M. Fortier: ...que c'est un peu les limites qui s'imposent, je crois.

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fréchette: ...l'interprétation que j'en ai, Mme la Présidente, et c'est aussi dans ce sens-là que je vois que les dispositions qui sont là s'appliquent. Juste un détail additionnel. Même dans le cas où un travailleur se trouve sur appel, la Cour d'appel, on vient de me le signaler, a déjà décidé que la Loi sur les accidents du travail ne s'appliquait pas. Il devait y avoir des circonstances bien particulières à ce cas-là. Mais même sur appel, dans un cas, la cour a décidé qu'il n'y avait pas d'application de la loi. Je ne connais pas les circonstances précises et particulières, mais cela a été décidé. Mais je suis tout à fait d'accord avec l'interprétation que donne le député d'Outremont aux différents processus d'application de la loi.

M. Fortier: D'ailleurs, mon recherchiste vient de me dire que la jurisprudence dont on fait état va dans le sens...

M. Fréchette: Dans ce sens-là.

M. Fortier: ...des questions et des réponses qu'on vient d'avoir. Je vous remercie.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau.

M. Cusano: Merci, Mme la Présidente. Une question au ministre, justement sur des accidents qui ne sont pas tout à fait reliés au travail. En tant qu'exemple il en a soulevé un, c'est la question de l'accidenté -cela a été tellement soulevé devant la commission parlementaire - à savoir celui qui s'est fait mal sur un terrain de balle molle, durant une période récréative. Ma question est relative à cela. Mais je vais vous donner un autre exemple. Si on prend un employé qui, au cours de son travail, décide d'aller se faire un café dans la cuisine qui est mise à sa disposition - c'est un cas très précis, c'est arrivé à la CECM - où, justement, l'employé, le professeur est allé faire chauffer son eau pour préparer son café. La bouilloire a éclaté; c'était sa bouilloire, à elle ou à lui - je ne voudrais pas être sexiste, Mme la Présidente - il y a eu des blessures. Est-ce que le ministre considère un cas semblable comme un accident du travail?

La Présidente (Mme Juneau): Merci, M. le député. M. le ministre.

M. Fréchette: Alors, Mme la Présidente... Oui, je m'excuse...

M. Cusano: Je vais prendre ce que vous avez dit tout à l'heure en réponse au député d'Outremont. C'est que, pour cette personne, ses heures de travail étant de 8 h 30 à 15 h 30, cet accident est arrivé durant cette période. Est-ce qu'il prévoit des difficultés sur ces choses-lè? Et s'il prévoit des difficultés, comment envisage-t-il de corriger cette situation?

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fréchette: Mme la Présidente, je ne vais évidemment pas écourter notre discussion, elle est fort intéressante. C'est sûr, et on va tous en convenir, que, si on entreprend de faire des études de cas par cas, d'abord cela va durer longtemps et, deuxièmement, notre commission va se constituer en cour de justice qui va rendre des jugements.

Prenons quand même l'exemple que donne le député de Viau. Là, encore une fois, je dois être prudent et vous répéter que c'est une interprétation que je fais, une interprétation qui ne va lier personne d'autre que moi quant à l'opinion que j'émets.

Dans le cas très précis que vous nous donnez, c'est-à-dire l'éclatement d'une bouilloire qui appartient au professeur, dans ce cas-ci, en propriété propre, je pense que le mécanisme qui surviendrait serait le suivant. En vertu des dispositions actuelles de la loi, dispositions qui sont reconduites dans la loi 42, il y aurait une présomption que l'accident est arrivé à l'occasion du travail, sauf et excepté si l'employeur entreprenait de renverser cette présomption et de prouver, effectivement, que l'appareil ne lui appartenait pas; si l'appareil était défectueux, il n'a aucune espèce d'implication dans cette défectuosité. Il me semble - encore une fois avec toutes les réserves qui s'imposent - que la présomption serait renversable dans ce cas-ci.

On me dit que, effectivement, même la Commission des affaires sociales a rendu des décisions dans des cas identiques ou à peu près identiques, décisions en vertu desquelles elle a dit: Non, vous n'êtes pas couverts parce qu'on ne peut pas, selon un principe, un axiome légal qui est vieux comme la terre, invoquer sa propre turpitude. Alors, il y a exclusion complètement de l'application des dispositions de la loi.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau.

M. Cusano: Ma question peut être plus précise au ministre, puisqu'il donne cette interprétation. Ne serait-il pas plus sage, dans un sens, de prévoir, dans cet article justement, qu'on puisse exclure tout ce qu'il y a eu de ce côté spécifiquement sur des accidents qui ne seraient pas imputables à l'employeur?

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fréchette: Mme la Présidente, je suis d'opinion que, si on entreprenait de retenir les suggestions que nous fait le député de Viau, tout ce qui est déjà clarifié par les tribunaux, tous les tribunaux qui se sont prononcés là-dessus, les dernières instances qui ont rendu des jugements et clarifié des situations, s'il nous fallait modifier le texte, ce serait à recommencer complètement. Il faudrait revenir devant les tribunaux, dire: Là, il y a un nouveau texte. Quand est-ce qu'on est couvert et quand est-ce qu'on ne l'est pas? Alors que déjà c'est tout réglé maintenant par ces décisions qui ont été rendues par tous les tribunaux et les tribunaux rendent une décision qui a quasiment l'effet de la loi quand on parle de la Cour suprême. Ce serait, quant à moi, un désavantage certain par rapport à la situation actuelle.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Mme la Présidente, ma question s'adresse au ministre sur la notion d'événement imprévu. Je sais qu'il y a déjà répondu; cela ne me satisfait pas complètement.

Dans le texte premier du projet de loi, le mot "imprévu" avait été enlevé et on le réintroduit au moment de la réimpression. Je voudrais savoir, de la part du ministre, pourquoi il l'avait enlevé la première fois. Il devait avoir une intention, la première fois, quand il l'avait enlevé. Qu'est-ce qui a fait que, tout à coup, cela réapparaît au niveau de l'impression? Est-ce que, par exemple, c'est là pour couvrir la mutilation volontaire?

M. Fréchette: Je m'excuse, je n'ai pas saisi.

M. Bisaillon: Est-ce que cela serait pour ne pas couvrir les mutilations volontaires?

M. Fréchette: Ce pourrait être cela, comme exemple. Deuxièmement, il est exact de dire, comme nous le rappelle le député de Sainte-Marie, que, dans la première version du projet de loi 42, le terme "imprévu" avait été enlevé. Nous avons eu, par la suite, une commission parlementaire et c'est au cours de la commission parlementaire que des argumentations nous ont été soumises, dans

le sens que nous devrions garder le texte actuel pour le principal motif que déjà les tribunaux ont tranché toutes les questions qui se rattachent aux notions d'imprévu et de soudain.

Nous avons retenu de faire droit aux représentations qui nous étaient soumises et de conserver le texte actuel de la loi. (17 heures)

M. Bisaillon: Les groupes qui ont défendu le fait qu'on devrait réintroduire cette notion-là, en prétextant que les tribunaux s'étaient déjà prononcés ou avaient déjà encadré l'interprétation de ces termes-là... D'abord, on sait qu'un autre jugement pourrait élargir ou rétrécir cette notion-là qui a déjà été donnée. Des jugements de tribunaux, ça se modifie.

M. Fréchette: Je m'excuse, est-ce que je peux intervenir?

M. Bisaillon: Je ne veux pas un cours de droit, mais...

M. Fréchette: Quand vous avez trois, quatre ou cinq jugements de la Cour suprême qui vont tous dans le même sens, je ne sais pas comment, dans les mêmes circonstances, on pourrait espérer que la Cour suprême modifie une position qu'elle a déjà clairement arrêtée par trois ou quatre jugements.

M. Bisaillon: Le ministre nous a dit que des groupes étaient venus devant la commission parlementaire et avaient demandé de réintroduire l'expression. Quelle était leur argumentation? Autrement dit, est-ce que le seul élément qu'on craignait qui ne soit plus couvert était les mutilations volontaires? D'abord, au pourcentage qu'il doit y avoir de mutilations volontaires, il me semble que ce n'est pas dans une définition qu'on couvre ça, mais en en parlant clairement dans le texte de la loi, ce que vous faites d'ailleurs plus loin.

M. Fréchette: Ce n'est pas effectivement le seul élément, Mme la Présidente. Un des éléments - on retrouverait ça dans les débats sans aucune difficulté - c'est qu'on nous a dit: Vous avez une notion qui va devenir tellement large que vous allez devoir couvrir, du moins pour enclencher le processus de couverture des dispositions de la loi, à peu près tout ce qui se passe à l'intérieur d'un lieu de travail. En d'autres mots, on nous a dit: C'est une ouverture que nous ne pouvons pas accepter. À partir de cette argumentation-là, de l'évaluation que nous avons faite par la suite des représentations qui nous étaient soumises, nous avons retenu ce qui nous avait été demandé et réintroduit la notion d'imprévu pour couvrir effectivement la situation dont parle le député de Sainte-Marie. Par exemple, la mutilation volontaire: je veux bien convenir avec lui qu'on ne trouve pas ça à treize à la douzaine, dans toutes les entreprises, à tous les jours. Je suis tout à fait d'accord avec lui là-dessus, mais c'était essentiellement pour ça.

Comme on est habitué de vivre, de part et d'autre, avec un texte qui a 50 ans et que les cours, encore une fois, en ont déterminé les balises d'application, il nous apparaissait logique dans les circonstances de revenir à...

M. Bisaillon: Si je comprends bien, Mme la Présidente, les 50 ans, ça sert à toutes les sauces, ça sert aussi bien quand on veut faire des changements que quand on ne veut pas en faire.

M. Fréchette: Pour entrer dans l'âge d'or aussi.

M. Bisaillon: Là, l'expression est bonne parce que ça fait 50 ans qu'on l'utilise alors que, il y a à peine deux semaines, le ministre nous disait qu'il fallait tout chambarder justement parce que cela avait 50 ans. Il faudrait peser la valeur des arguments.

Je voudrais poser une dernière question là-dessus au ministre. Est-ce que le ministre est conscient que, par exemple, si la CSST intervenait sur un chantier en disant: Attention, tel aspect de l'organisation du chantier est dangereux et susceptible de créer des accidents...

M. Fréchette: Oui.

M. Bisaillon: ...et que le propriétaire du chantier laissait courir les choses, ne se préoccupait pas des conseils de la CSST et qu'il y avait un accident, ce n'est pas imprévu, cela avait été prévu par quelqu'un, par exemple par la CSST.

M. Fréchette: Si la situation devait se présenter exactement de la façon que l'explique le député de Sainte-Marie, il y a très certainement un ou des inspecteurs de la CSST qui n'auraient pas fait leur job comme il le faut. Parce que, si un inspecteur de la CSST arrive sur un chantier, que ce soit un chantier de construction ou un autre - on entend parler de ça tellement souvent qu'on sait que ça existe - et qu'après évaluation de l'ensemble de la situation il en vient à la conclusion qu'il y a effectivement des situations qui présentent des dangers pour la santé ou la sécurité des travailleurs qui y sont, il ne fera pas qu'avertir les gens qui s'y trouvent, il va immédiatement arrêter les travaux qui resteront arrêtés tant et aussi longtemps que l'employeur ou le maître d'oeuvre n'aura pas

pris les dispositions pour faire disparaître le danger dont on parle.

M. Grégoire: Dans l'affaire du pont de Sainte-Marguerite, l'inspecteur n'a pas fait son travail puisque...

M. Fréchette: Je veux bien qu'on fasse du cas par cas, mais je veux simplement signaler au député de Frontenac qu'il y a actuellement une enquête publique dans le cas du pont de Sainte-Marguerite qui a été décrétée par le gouvernement, dont les travaux sont commencés et qui va être en auditions publiques à Sept-Îles très bientôt. Que le député de Frontenac ne me demande pas de me prononcer sur les conclusions auxquelles la commission en arrivera. Même s'il insistait beaucoup, je n'entrerais pas dans...

M. Grégoire: ...sur les conclusions, ça peut être un exemple de ce qui peut se produire.

M. Fréchette: Hypothétiquement, ça peut être un exemple, bien sûr, mais j'aurais aimé mieux que vous preniez un autre exemple que celui-là.

M. Bisaillon: Je vais terminer...

M. Fréchette: Cela en prendrait un autre.

M. Bisaillon: Je vais terminer mon intervention, Mme la Présidente, en changeant mon exemple. Le ministre m'a répondu, dans l'exemple que je lui avais donné qui était celui de la CSST, qu'il y a des pouvoirs effectivement non seulement pour constater, mais en plus pour arrêter. Je vais donner un autre exemple. Un enquêteur du ministère de l'Habitation va vérifier l'état des édifices publics, disons, gouvernementaux. Cela arrive quand ça change de main. Quand cela passe du ministère à un organisme, à une société d'État, le ministère de l'Habitation doit faire une enquête et vérifier l'état de l'édifice. L'enquêteur conclut que l'édifice n'est pas sécuritaire, qu'il devrait y avoir, disons, quatre ou cinq portes de sortie de plus, qu'on devrait ajouter un escalier en cas d'incendie. Il n'a pas le pouvoir de fermer l'édifice. Il a simplement le pouvoir de constater que c'est dangereux et d'imposer des travaux éventuellement, mais il n'a pas plus de pouvoir que celui-là. S'il arrivait un accident? L'accident aurait été prévu, il y aurait eu un enquêteur qui serait passé pour dire: Attention, cet édifice public est dangereux; il ne correspond pas aux normes de sécurité. Mais il n'avait pas le pouvoir de fermer l'édifice. Les employés qui sont à l'intérieur, s'il arrivait un accident, je dois comprendre que ce ne serait pas un accident du travail parce que ce ne serait pas un accident imprévu.

M. Fréchette: Mme la Présidente, ce sont des discussions qui seraient intéressantes devant des cours de justice, demander à des juges de trancher dans le vif comme cela. Encore une fois, de l'argumentation du député de Sainte-Marie, je crois devoir faire la distinction suivante: Ce que cet inspecteur du ministère de l'Habitation dont vous me parlez est en mesure de prévoir, c'est le danger d'un accident. II va dire à l'entrepreneur et aux gens qui y travaillent: De la façon dont les choses fonctionnent, il y a un danger d'accident. Mais il n'est très certainement pas en mesure de prévoir que, demain, il arrivera un accident. Il aura prévu le danger, mais pas l'accident lui-même, l'éventualité de l'accident, bien sûr. Mais, pour prévoir l'accident lui-même, il me semble que cet inspecteur devrait être encore plus précis et dire: Si vous ne faites pas attention et si vous ne corrigez pas telle situation, ce soir, à 16 heures, vous allez avoir un accident. Il peut prévoir qu'il y a un danger éventuel, hypothétique d'accident, mais prévoir effectivement qu'il y aura un accident, je ne pense pas qu'il soit en mesure de le faire.

M. Bisaillon: En tout cas, Mme la Présidente, je vais continuer à prétendre que j'avais vu, dans la première version, une amélioration, un élargissement, et que je trouve cet article restrictif. Je considère que le principal argument du ministre a été de me dire que c'est là depuis 50 ans, que cela a été testé auprès des tribunaux et que les tribunaux ont rendu des jugements qui ' rendent cette définition sécuritaire et imperméable. Alors, je vais retenir son argument des 50 ans et lui dire que je l'utiliserai à d'autres articles du projet de loi.

Des voix: Ah! Ah! Ah!

M. Fréchette: J'en prends acte, M. le député.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau.

M. Cusano: Mme la Présidente, pour accélérer les travaux de la Chambre, parce que...

Une voix: ...

M. Cusano: Vous me prêtez des intentions, M. le ministre.

M. Fréchette: Non. Il faut s'amuser un peu de temps en temps.

M. Cusano: Oui. Précisément, cet article 2 avec les définitions et tout ce que cela comporte, toutes les questions, est-ce qu'il y aurait consentement - je suis prêt à donner mon consentement - si on voulait procéder à l'article 3 et revenir à ceci plus tard?

M. Fréchette: Et voilà. C'est exactement, Mme la Présidente, la situation à laquelle je faisais référence avant de donner le consentement à l'article 1. Le député de Viau m'a dit: Écoutez! Croyez en ma bonne foi; je suis rempli de bonnes intentions, comme l'enfer l'est, et nous voilà très précisément tombés dans le piège et dans le panneau du député de Viau. Là, Mme la Présidente, on va très certainement s'en remettre aux dispositions de notre règlement à cet égard.

M. Cusano: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau.

M. Cusano: ...j'aimerais peut-être corriger le ministre un peu. Lorsqu'on parlait de l'article 1, c'est parce que j'avais procédé de façon légale. Je voudrais, à ce moment-ci, lui demander si, par consentement... Ce n'est pas tout à fait la même chose.

M. Fréchette: Mme la Présidente, nous n'allons pas jouer ce jeu aux 566 articles du projet de loi. En toute bonne foi tout à l'heure, et croyant profondément aux bonnes intentions que me manifestait le député de Viau, j'ai accepté qu'on procède par consentement alors qu'il a accepté de retirer sa motion pour suspendre l'étude de l'article 1. Nous avions, encore une fois, de bonne grâce, tous les deux, avec tous les membres de la commission, convenu que nous n'allions pas nous servir du consentement qu'on venait de donner à l'article 1 pour l'appliquer à tous les autres articles. Et là, ça ne fait pas une demi-heure de ça, nous tombons très précisément, je dois le dire, quant à moi, naïvement, dans le piège que le député de Viau nous a tendu. Je m'excuse, mais ça prend un consentement pour chacun des articles et, dans ce cas-ci, je ne vais pas le donner.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Nelligan.

M. Lincoln: M. le ministre, à la défense du député de Viau, cette suggestion qu'il a faite est venue de moi. D'accord.

Ce que je voulais vous expliquer, c'est ceci: Quand j'ai vu qu'on discutait... Il est 17 h 10 et on discute toujours de la première définition, on va passer des jours à décider parce que... Je vais vous donner des exemples et vous dire pourquoi j'ai fait cette suggestion. Si vous nous prêtez des intentions, à savoir qu'on essaie de bloquer le projet de loi, au contraire, je trouve qu'on est en train de mettre la charrue devant les boeufs.

Vous voyez, par exemple, la définition d"'emploi convenable", la définition de "personne à charge": "Une personne qui a droit à une indemnité en vertu de la sous-section 2 de la section III du chapitre III." Et là, vous voulez nous faire dire: Bon, on va accepter ça sans passer à l'étude de la sous-section 2 de la section III du chapitre III. C'est moi qui viens de faire, il y a quelques minutes, la suggestion à mon collègue de Viau qu'on pourrait passer des heures à voir chacun de ces chapitres-là qui se réfèrent à d'autres lois, qui se réfèrent à d'autres chapitres. Je lui ai dit: Pourquoi ne fait-on pas la suggestion de sauter l'article 2, d'arriver à 3 et à 4 sur lesquels on pourra s'entendre bien facilement et qu'on pourra accepter?

Si vous voulez, on ira avec l'article 2. Chaque fois qu'il y aura une sous-section on va l'examiner; autrement, ça n'a aucun sens. Si c'est ça que vous voulez, c'est d'accord.

M. Fréchette: Je veux bien croire à la bonne foi du député de Nelligan. Je n'ai jamais mis en doute cette bonne foi et je n'ai pas l'intention de commencer à la mettre en doute non plus. Cependant, je ne sais pas s'il était ici au moment où ensemble nous avons convenu d'un processus pour en arriver à la même conclusion pour l'article 1.

Le député de Viau a manifesté l'intention que l'on procède à la suspension de l'étude de l'article 1 pour amorcer l'étude de l'article 2. Nous avons eu une discussion d'ordre juridique, d'ordre technique à cause d'une motion qu'il a finalement présentée pour arriver à cette fin. Mme la Présidente avait presque pris la décision de suspendre nos travaux pour quelques minutes, pour délibérer sur la question parce qu'elle est importante. J'ai suggéré, à ce moment-là, au député de Viau de retirer sa motion de suspension et que, de mon côté, j'allais demander à mes collègues de consentir à la suspension sans qu'il y ait cette motion, mais que j'attirais l'attention de la commission, en faisant cette argumentation, sur le fait que nous n'allions pas recommencer le même processus à chacun des articles du projet de loi.

Je suis obligé de dire que, de toute évidence, c'est dans ce processus qu'on est engagé. Le député de Viau a demandé la suspension de l'article 1; vous demandez maintenant, M. le député de Nelligan, la suspension de l'article 2. Si on arrive à l'article 3, qui va en demander la suspension? C'est ça l'imbroglio dans lequel

on se trouve maintenant.

M. Lincoln: M. le ministre, je comprends très bien, vous avez bien situé le cas. Tout ce que je voulais vous dire, c'est que j'ai fait ça de bonne foi parce que je pense que l'article 2, comme l'article 1, du reste, contient des définitions cruciales, que tout le reste du projet de loi s'accroche à des définitions et que ces mêmes mots, ces mêmes termes qui sont réellement la base même du projet de loi vont revenir tout le temps. (17 h 15)

Alors, on va passer des heures et des heures là-dessus puisqu'on passe une heure sur une définition. Voici ce que je voulais vous suggérer: aux articles 3 et 4, on parle de choses qui n'accrochent pas, qu'on pourrait accepter, amender ou rejeter, et en terminer. C'est ma suggestion. Je ne suis pas le porte-parole. Ce sera au député de Viau de décider. C'est ma suggestion pour qu'on accélère les travaux. Qu'on laisse cela là; autrement, on va discuter de cette définition pendant longtemps, c'est sûr. Tout accroche sur cela.

M. Fréchette: Je veux être bien clair sur une chose. Que le député de Nelligan ne croie pas que je mette en doute sa bonne foi. C'est simplement, à partir de la discussion préliminaire que nous avions eue, le député de Viau et moi-même...

M. Lincoln: D'accord.

M. Fréchette: ...que je suis presque malgré moi obligé d'en arriver à la conclusion que le phénomène qu'on est en train de créer va se perpétuer à tous les articles qu'on va entreprendre. Je voudrais bien avoir l'assurance que non, mais, à partir de ce qui vient de se passer, je peux difficilement avoir cette assurance. C'est pour cela que je me vois dans l'obligation de demander que l'on procède par voie de motion, que la présidence décide et, après, on se conformera à la décision que la présidence rendra.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau.

M. Cusano: J'aimerais bien expliquer de nouveau au ministre que, lorsque j'ai présenté la motion formelle, je lui ai donné la garantie que je retirais la proposition formelle et que ce n'était pas mon intention de procéder à un report, par le biais d'une motion formelle. À ce moment-ci, je vous demande un consentement, comme on a fait avec l'article 1. C'est tout. Si vous voulez le refuser, on va le refuser. On va continuer à étudier chacun de ces alinéas, comme l'a dit le député de Nelligan, si vous voulez insister sur ce point. On va se référer à tous les articles du projet de loi qui sont reliés aux définitions.

La Présidente (Mme Juneau): Merci, M. le député. M. le ministre.

M. Fréchette: II y a une difficulté qui va se présenter. Regardez à l'article 7, par exemple. Il y a là aussi des dispositions qui font référence aux définitions de l'article 2. Si les définitions de l'article 2 ne sont pas adoptées, cela voudra dire qu'il nous faudra également suspendre l'étude de l'article 7, et on va s'enliser comme cela dans toute l'étude du projet de loi. Vous comprenez que ce n'est pas de la mauvaise volonté que je suis en train de...

M. Fortier: Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député d'Outremont.

M. Fortier: Je crois qu'on est à la veille d'en arriver à un consensus. J'aimerais proposer...

M. Fréchette: Encore? J'espère.

M. Fortier: Ce qu'on pourrait proposer, c'est que, lorsqu'on arrivera à l'article 7, s'il y a des définitions qui s'y rapportent, on pourra avoir un "gentleman's agreement", à savoir que la définition qui est pertinente à l'article 7 serait également adoptée, à toutes fins utiles, remettant le vote éventuellement à la fin. Si on peut procéder par "gentleman's agreement", ce sera beaucoup plus facile.

Des voix: ...

M. Fréchette: Je vais à nouveau, Mme la Présidente, procéder par voie de consentement. Je suis disposé à convenir qu'on suspende l'article 2, mais j'espère que, cette fois-ci, l'on comprend encore une fois le genre de difficulté que je soulève. Si, vraiment, cela doit être ainsi tout le temps, on n'en finira pas de finir. Je comprends que c'est un projet de loi important, qu'on doit y consacrer tout le temps et ne rien escamoter. On prendra le temps que cela voudra et cela ira où cela voudra. Si c'est un cadeau de Noël, c'en sera un. Si c'est un cadeau de Pâques, ce sera un cadeau de Pâques. Il n'y a pas plus de bousculade dans le portillon que cela. On va convenir de cela. Suspendons pour le moment l'étude de l'article 2 et allons immédiatement à l'article 3.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député d'Outremont.

M. Fortier: On peut convenir de ce que j'ai suggéré. Le député de Viau est d'accord que, s'il y a une définition qui s'y rattache lors de l'étude d'un article en particulier, on en fera l'étude tout en convenant que cette discussion est faite à toutes fins utiles.

M. Bisaillon: Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: C'est juste la dernière partie de l'intervention du député d'Outremont qui me fait un peu peur. Dès le départ, à l'article 1, j'avais indiqué au ministre que ce que je disais pour l'article 1, j'aurais pu aussi le dire pour l'article 2. On s'en souviendra, je lui avais donné l'exemple de la négociation d'une convention collective où, selon l'orientation qu'on prend, on règle des définitions et, après, à chacun des articles, on s'y réfère, ou encore on règle le contenu de nos clauses et, après, on fait nos définitions en fonction du contenu qu'on y a mis. N'importe quelle façon m'agrée. À partir du moment où le ministre consent à suspendre l'article 2, ce que je craindrais, cependant, c'est que... Adoptons les articles de la loi et, après cela, revenons aux définitions pour voir si les définitions qui sont là sont conformes à ce qu'on a adopté. Si on le fait à la pièce, on va en perdre des morceaux. Pour moi, c'est tout l'un ou tout l'autre. Ou bien on les fait au début, ou bien on les fait totalement à la fin, mais là on aura un tout qui pourra être cohérent.

M. Fréchette: Je veux dire que je suis tout à fait d'accord avec l'interprétation. Cela irait comme cela? Très bien.

La Présidente (Mme Juneau): Consentement?

Une voix: Nous allons consentir.

La Présidente (Mme Juneau): II est convenu de suspendre l'article 2. Vous êtes d'accord? Cela va. L'article 3, adopté?

Des voix: Adopté.

Une voix: Sortez le champagne.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député d'Outremont.

M. Fortier: L'article 3 dit: La présente loi lie le gouvernement, ses ministères et les organismes qui en sont mandataires. Qu'est-ce qu'on veut dire? La présente loi lie le gouvernement, cela lie tous ceux qui sont... Cela s'applique à tous les gens, à tous les accidents du travail dans l'industrie en général. Quand on dit que cela lie le gouver- nement et ses mandataires, qu'est-ce qu'on veut dire exactement?

M. Fréchette: Le gouvernement et ses mandataires, cela veut dire que la loi s'applique au gouvernement et à ses mandataires de la même façon qu'elle s'applique pour n'importe quel autre employeur, et que le gouvernement est obligé, comme tous les employeurs, de cotiser à la CSST. Prenons simplement l'accident du mois de mai ici. Cet accident du mois de mai est compensé par... Enfin, l'accident. Je m'excuse. Le drame du mois de mai, c'est couvert par la Commission de la santé et de la sécurité.

M. Fortier: Quand on dit mandataires, cela inclut les sociétés d'État à l'intérieur desquelles on retrouve la définition comme étant mandataires. D'ailleurs, il y en a une nouvelle qui va être créée, c'est celle de la Société d'État des établissements de plein airdont on dit, à l'article 3 ou 4, qu'elle va être un mandataire.

M. Fréchette: C'est cela.

M. Fortier: Cela inclut ces sociétés d'État également.

M. Fréchette: D'ailleurs, je signale au député d'Outremont qu'il n'y a aucun changement par rapport à la loi actuelle.

M. Fortier: Merci.

La Présidente (Mme Juneau): L'article 3 est-il adopté?

Des voix: Adopté.

La Présidente (Mme Juneau): J'appelle l'article 4?

M. Bisaillon: II serait peut-être bon que le ministre, à chaque fois qu'on arrive à un article, nous souligne le fait qu'il n'y a aucun changement par rapport à la loi actuelle. J'aimerais cela qu'il nous le dise avant.

La Présidente (Mme Juneau): Merci, M. le député. L'article 4.

M. Fréchette: L'article 4, spontanément comme cela, je dirais qu'il était déjà là. Est-ce qu'il y était?

Une voix: Non.

M. Fréchette: Bon. Ce que cela indique, essentiellement, c'est que, lorsque, par exemple - et je vais procéder par la voie d'un exemple pour exprimer l'objectif que vise cet article - il peut intervenir une

convention collective entre un employeur et ses employés qui contiendrait des dispositions plus avantageuses en termes de réparation et d'indemnité que celles que l'on retrouve dans la loi. C'est une convention qui peut être faite et qui est tout à fait légale. Cependant, une convention collective qui dirait, par exemple, qu'en cas d'accident, l'indemnité de remplacement de revenu sera de 80% au lieu de 90% comme la loi le prévoit, cette disposition dans la convention collective serait illégale.

La Présidente (Mme Juneau): D'autres personnes souhaitent-elles intervenir?

M. Cusano: Oui.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau.

M. Cusano: Je suis d'accord avec le ministre lorsqu'il parle de convention. Est-ce qu'il pourrait m'expliquer ce qu'on entend par règlement? Est-ce que c'est un règlement de cour ou un règlement de la CSST?

M. Fréchette: Je m'excuse, je n'ai pas saisi la question du député de Viau. Je m'en excuse.

M. Cusano: Peut-être que le ministre réfléchissait à ses mandataires à cause de la question qui avait été posée en Chambre par mon collègue, le député de Mont-Royal, sur l'article 3.

M. Fréchette: Cela couvre toute espèce de règlement. Quand on parle de décret, c'est la même chose. Toute décision gouvernementale, par exemple, qui serait rendue par la voie d'un règlement ou d'un décret ne pourrait pas contenir de dispositions qui seraient inférieures à celles que l'on retrouve dans la loi générale. Il pourrait y avoir des dispositions plus avantageuses. Encore une fois, si un employeur décidait de donner 100% du salaire net en cas d'accident du travail, cela serait tout à fait légal, acceptable.

M. Cusano: Oui, je comprends cela, M. le ministre. Lorsque vous dites par décret, est-ce que cela veut dire qu'on peut avoir un décret gouvernemental justement et que les 90% du salaire net passent à 100%?

M. Fréchette: Cela se pourrait pour ses employés, pour les employés du gouvernement, pas pour... De toute façon, il ne peut pas se produire de situation pour les employés autres que ceux du gouvernement qui ressemblerait à celle que...

M. Cusano: Cela se pourrait.

M. Fréchette: Oui, théoriquement, c'est peut-être possible, mais il est évident que, lorsqu'on parle d'entente ou de décret, on se réfère au gouvernement comme employeur. Il est également évident, par interprétation, qu'il faut en arriver à la seule conclusion que c'est une entente ou un décret qui touche ses propres employés et c'est également vrai dans l'entreprise privée. C'est exactement le même phénomène.

M. Cusano: Je voudrais seulement m'assurer, M. le Président, que, demain matin ou à un autre moment, le gouvernement n'arrive pas par décret - c'est le mot "décret" qui m'inquiète, pas le mot "convention" - changer certaines choses qui sont ici dans la loi, parce que...

M. Fréchette: C'est précisément ce que cela interdit. C'est le décret qui donne effet à la convention ou au règlement.

M. Cusano: Cela veut dire, si je comprends bien, qu'il y a eu une entente entre employés et employeur et le décret, c'est pour confirmer cette entente qui a eu lieu.

M. Fréchette: Voilà!

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: L'article 4, Mme la Présidente, couvre les conventions ou ce qui en tient lieu, ou ce qui a valeur de convention, de plus en plus des décrets. Est-ce...

Une voix: De temps en temps, même dans le transport.

M. Bisaillon: ...qu'il est possible de prévoir que les lois subséquentes... Je vous donne l'exemple de la rente. Actuellement, la rente, ce n'est pas imposable. Il n'y a rien qui nous dit qu'un jour ou l'autre elle ne le deviendra pas. On peut faire semblant de donner des choses dans ce projet de loi et, par la suite, en rendant cela imposable par un autre décret... Ce que vous appliquez aux conventions collectives, est-ce qu'il ne serait pas pensable que cela s'applique aussi aux autres lois du même gouvernement?

M. Fréchette: M. le Président, je ne sais pas trop comment prendre la question du député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Comme elle est posée, Mme la Présidente.

M. Fréchette: Bon! Alors, comme elle est posée, cela veut essentiellement dire que, dans cette loi-là, le gouvernement devrait

s'interdire de légiférer en semblable matière ad infinitum, c'est-à-dire...

M. Bisaillon: Sauf pour donner...

M. Fréchette: ...réglez cela et n'y revenez plus jamais, M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Bon! Mme la Présidente, je vais essayer d'expliquer ce que je veux dire. Dans cet article, l'article 3 qu'on vient d'adopter, on dit: "La présente loi lie le gouvernement, ses ministères et les organismes qui en sont mandataires." On trouve cela normal. À l'article 4, on dit: les conventions collectives ou ce qui en tient lieu, cela peut prévoir des dispositions qui sont meilleures, mais cela ne peut jamais aller en bas de ce qu'il y a dans la loi. C'est ce qu'on dit et, comme le disait le député de Châteauguay, on ne peut pas être contre cela. Sauf que là, on ne prend pas le même engagement que celui qu'on prenait tantôt. Tantôt, on disait: La loi qu'il y a là, elle s'applique à toutes les entreprises du Québec, mais, en plus, le gouvernement va se lier par cette loi. Il va l'appliquer de la même façon que l'ensemble des employeurs du Québec.

Pourquoi ne ferait-on pas la même chose par rapport à cette loi seulement? Si cette loi ne prévoit pas actuellement, au moment où on l'adopte, l'imposition des rentes, je dois comprendre que le gouvernement ne pourrait pas dans un autre temps enlever à cette loi ce qu'elle peut donner et cela me semblerait logique. Si on dit: Les conventions collectives ne doivent pas contenir moins que ce qu'il y a dans la loi, comment pourrait-on accepter que des lois ultérieures donnent moins - à moins d'amender celle-là - ou enlèvent, par le biais d'autres lois, les choses qu'on donnait dans celle-ci? Il me semble que ce n'est pas illogique de penser cela, surtout qu'au même moment où on travaille le président de la CSST se promène, en disant: Les rentes vont être imposables, mes petits garçons. N'oubliez pas cela! Un jour, les rentes vont être imposables. Alors, on ne parle plus des mêmes montants. On ne parle plus des mêmes sommes d'argent. Là, je voudrais savoir si c'est le gouvernement qui parle ou si c'est le président de la CSST. Qui mène, au juste, et qui a raison là-dedans?

M. Fréchette: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fréchette: ...une première observation quant à la demande spécifique du député de Sainte-Marie et, ensuite, un commentaire sur son dernier commentaire.

D'abord, une réponse d'ordre strictement technique. Si l'objectif est de faire en sorte que jamais les rentes ou les indemnités ne soient imposables, je ne pense pas que ce soit dans la loi 42 que l'on doive retrouver une disposition comme celle-là. (17 h 30)

C'est tellement vrai qu'on avait une disposition dans la loi 42, dans le premier projet, qui précisait clairement que les indemnités ne sont pas imposables. Nous avons découvert, au fur et à mesure que les travaux préparatoires à la loi ont progressé, que la Loi sur les impôts contenait également une disposition dans ce sens. Alors, nous avons retranché de la loi 42 la disposition en vertu de laquelle les indemnités n'allaient pas être imposables, puisque c'est déjà dans la Loi sur les impôts. Quand je dis que c'est une question d'ordre technique que je soulève, c'est pour en arriver à la conclusion que, si jamais cela devait être ça, ce serait par un amendement à la Loi sur les impôts.

Deuxièmement, il nous faut ici faire la distinction entre le gouvernement et le législateur. On ne pourrait pas, dans une disposition législative, lier le gouvernement dans une juridiction qui appartient au législateur. Quand bien même on dirait dans la loi que le gouvernement est lié de cette façon, s'il y a une loi qui est adoptée de l'autre côté pour déroger à cette disposition, cela ne voudra absolument rien dire. Moi, je veux bien qu'on essaie de contourner la difficulté dont parle le député de Sainte-Marie, mais cela n'en est pas une, et il le sait tout aussi bien que moi.

M. Bisaillon: Je n'avais pas terminé. Il y a un autre aspect que je voudrais souligner, c'est la difficulté, dans la rédaction actuelle - et je n'ai pas de suggestion pour une rédaction qui pourrait être différente - que représentent les termes "plus avantageuses". En principe, c'est évident et c'est habituellement les notions qu'on retrouve à peu près partout. On voit cette disposition dans plusieurs autres lois. Mais la notion de "plus avantageuses", cela amène, dans l'application, des problèmes. Sur des choses qui sont concrètes, quantifiables, cela va bien, cela ne cause pas de problème. Si la loi dit 90% et qu'une convention dit 100%, on comprend tout de suite que c'est plus avantageux. Mais, dans la procédure, dans tout ce qui est plutôt de la forme que du fond, souvent, les organisations, les associations qui défendent les accidentés du travail ou les centrales syndicales sont obligées d'aller en Cour supérieure pour faire la démonstration que c'est plus avantageux.

Je ne sais pas comment on peut éviter cette situation, mais cela ne couvre pas, selon moi - quand on parle de dispositions de conventions collectives - la procédure. On

pourrait même aller jusqu'à se demander si une convention collective pourrait prévoir des procédures différentes de celles de la loi, même si elles étaient plus avantageuses ou plus efficaces. À ce moment, l'individu, ou l'association qui le représente, se trouve obligé de faire la preuve de cela. Y a-t-il un moyen de faire en sorte que cet article...

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fréchette: J'ai deux commentaires, à la suite de la question du député de Sainte-Marie. D'abord, il l'a dit lui-même, c'est l'expression que l'on retrouve dans toutes les lois qui contiennent des dispositions de cette nature. Deuxièmement, s'il a une formule à suggérer... Effectivement, la question s'est posée chaque fois qu'un texte de loi comme cela a été écrit et les spécialistes de la rédaction des lois en arrivent toujours à la même conclusion: c'est, dans l'état des choses que l'on connaît, la meilleure façon d'arriver à atteindre l'objectif que l'on vise. Cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas d'autres solutions qui rejoindraient la situation dont parle le député de Sainte-Marie. Par exemple, sur la stricte question de la procédure pour exercer un droit, si on parle de plus avantageux, qu'est-ce que ça veut dire? Comment cela s'évalue-t-il?

M. Bisaillon: ...pour le retrait préventif, par exemple, par rapport à la Loi sur la santé et la sécurité du travail. Il y a eu des difficultés quant à la procédure concernant le retrait préventif. Les organisations syndicales ont eu des difficultés à faire comprendre que les clauses qu'il y avait dans leurs conventions collectives étaient plus avantageuses que celles de la loi. La notion d'avantage est reliée à quelque chose de pécuniaire ou de financier.

M. Fréchette: À des choses qui peuvent se quantifier.

M. Bisaillon: Oui. Je me demande s'il n'y aurait pas moyen, tout en trouvant cet article correct, d'essayer de préciser ou d'ajouter un adjectif, une précision qui éviterait aux organisations d'être constamment devant la Cour supérieure.

M. Fréchette: Je suis bien disposé à regarder davantage la situation dont parle le député de Sainte-Marie, sauf que, dans l'état actuel des choses, je ne connais vraiment pas de solution qui rejoindrait son objectif et cela ne veut pas dire que l'on ne doive pas regarder davantage la situation, mais je suggère qu'on puisse procéder à l'adoption de cet article de la même façon, quitte à regarder de plus près la situation qu'il soulève.

M. Bisaillon: Le ministre serait-il d'accord avec un ajout qui dirait "Tant des droits que de la procédure".

M. Fréchette: Pardon?

M. Bisaillon: "Des dispositions plus avantageuses, tant des droits que de la procédure."

M. Fréchette: Je ne suis pas capable de donner une réponse immédiatement à cette suggestion.

M. Bisaillon: Cela couvrirait les deux aspects.

M. Fréchette: Je suis bien disposé à le regarder. Je ne voudrais pas, par ailleurs, retarder l'adoption de l'article 4.

M. Bisaillon: Non, non. On peut l'adopter sous réserve que vous reveniez avec quelque chose plus tard.

M. Fréchette: Cela va.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député d'Outremont. Vous passez? M. le député de Nelligan.

M. Lincoln: Je voudrais poser une ou deux questions au ministre. À l'article A, vous dites: "La présente loi est d'ordre public." J'aurais voulu savoir, par exemple, par rapport à l'ancienne, pourquoi c'est d'ordre public dans ce cas-là, parce qu'il me semble que c'est la seule province où cette , loi serait d'ordre public. Quelle a été la motivation pour la faire d'ordre public?

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fréchette: Dans la loi actuelle, Mme la Présidente, il y a une disposition qui est au même effet, mais qui est rédigée en termes différents. Lorsqu'on utilise cette expression: "la présente loi est d'ordre public", c'est pour indiquer que personne ne peut y déroger par des conventions particulières et, encore une fois, c'est expressément la reprise de l'intention ou du principe de l'actuelle loi, mais formulée avec d'autres mots. Mais c'est précisément pour atteindre l'objectif dont je vous parle, c'est-à-dire qu'il soit clairement compris qu'aucune disposition particulière ne peut déroger à ce qu'on retrouve dans la loi.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Nelligan.

M. Lincoln: Auriez-vous pu aussi

m'expliquer, par rapport, si c'était possible... Je pense nue j'ai compris votre explication. Cet article: "Cependant, une convention ou un règlement ou un décret qui y donne effet..." se rapporte exclusivement, en fait, aux employés du gouvernement. Non?

M. Fréchette: Non, non. Quand on parle d'un règlement, cela peut, effectivement, se référer à une décision gouvernementale qui a effet par l'adoption d'un décret. Quand on parle d'une convention, cela n'exclut pas, évidemment, les conventions collectives qui peuvent intervenir dans la fonction publique, mais cela inclut aussi les conventions qui interviennent dans l'enteprise privée, dans le secteur privé.

M. Lincoln: Je vous avais mal compris. Ce sont toutes les questions que j'avais. Merci.

Le Président (M. Dussault): C'est terminé? M. le député de Frontenac.

M. Grégoire: Je n'ai qu'une courte question. Le ministre nous a dit tout à l'heure qu'il existait dans la loi le fait que la rente n'était pas imposable, mais, comme il était inscrit dans la Loi sur les impôts que les rentes n'étaient pas imposables, on l'a enlevé de la loi 42, ce qui veut dire que si, toutefois, des gens veulent les rendre imposables, ils ne sont même pas obligés de venir toucher à cette loi. Ils n'ont qu'à toucher à la loi sur le revenu. Pourquoi ne l'auriez-vous pas gardé là-dedans pour les obliger au moins à ce que le travail soit deux fois plus dur, que les efforts soient deux fois plus grands pour venir imposer les rentes...

M. Fréchette: M. le député de Frontenac...

M. Grégoire: ...parce que n'oubliez pas une chose, M. le ministre. Quand on dit que le travailleur qui est dans une incapacité permanente et totale reçoit une rente égale à 90% de son revenu net, c'est égal à peu près, du moins pour un salarié moyen, à 66% ou 70% de son revenu brut. Si on va lui imposer cela en plus... C'est pour cela que je me demande: Pourquoi ne le garderiez-vous pas là-dedans?

M. Fréchette: Bon!

M. Grégoire: Cela voudrait dire pour le prochain ministre, pour le ministre...

M. Fréchette: Je suis content de la question du député de Frontenac, parce qu'elle me fait penser que je n'ai pas donné au député de Sainte-Marie la réponse que j'aurais voulu lui donner quant à des intentions qui auraient apparemment été manifestées sur l'éventualité de l'imposition des indemnités par les deux paliers de gouvernement. Je ne parlerai certainement pas pour l'autre palier de gouvernement, bien sûr. Je sais à quoi fait allusion le député de Sainte-Marie, je le sais très bien.

M. Bisaillon: Mais, M. le Président, peut-être que je pourrais me permettre de donner la citation exacte.

M. Fréchette: Je l'ai lue, je l'ai presque en mémoire par coeur.

M. Bisaillon: Mais pour les fins de nos travaux et de ceux qui ne l'auraient pas vue. C'est le mercredi 28 novembre, le président de la CSST faisait une déclaration où il disait "les gouvernements". "Actuellement, ces indemnités qui équivalent à 90% du revenu net, maximum de 31 500 $ par année, ne sont pas imposables. Cependant, selon le président de la CSST - ici on parle de M. Sauvé - les gouvernements préparent subtilement le terrain - les soulignés sont de moi - pour que ces prestations soient considérées éventuellement comme des gains imposables. Pour le moment, les gouvernements se contentent d'obliger le bénéficiaire à déclarer ce revenu dans son rapport d'impôt tout en lui permettant de déduire un montant équivalent."

M. Fréchette: Je remercie le député de Sainte-Marie de me rafraîchir la mémoire parce que j'avais effectivement été sensibilisé à la déclaration qu'il me cite au texte. Je ne parlerai pas pour l'autre palier de gouvernement, mais, si jamais c'était cela, c'est à ce point subtil que personne dans le gouvernement n'en a entendu parler. Quand on utilise le terme "subtilement", cela voudrait dire que ceux qui auraient éventuellement à prendre une semblable décision n'ont jamais imaginé une semblable situation. C'est aussi invraisemblable de penser à une situation comme celle-là que de penser, par exemple, à demander aux travailleurs de cotiser au régime comme certaines gens le demandent.

Alors, je vous signale que, pour autant que le gouvernement du Québec est concerné, il n'y a à cet égard-là aucune espèce d'intention, ni non plus aucune espèce de travail subtil ou pas qui est amorcé dans ce sens.

M. Bisaillon: Je trouve quand même, Mme la Présidente, assez incroyable - je me dois de prendre la parole du ministre quand il nous dit que jamais le gouvernement n'a envisagé cela - je trouve quand même incroyable qu'au moment où une commission parlementaire est en train d'étudier un projet de loi important le président de la CSST se

promène dans le décor en faisant des déclarations comme celles-là. Ou bien il est mieux informé que le ministre, ce que je suis prêt à nier, ou encore il se permet des déclarations qui ne vont pas dans le sens des intérêts, en tout cas, de nos travaux et je ne pense pas non plus dans le sens des intérêts du gouvernement.

Une voix: Sûrement pas.

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fréchette: Quand j'ai été sensibilisé à cette déclaration, Mme la Présidente, j'ai évidemment demandé d'obtenir des renseignements plus précis quant au contexte dans lequel cette déclaration a été faite, à l'intérieur de quelle situation et de quelle circonstance. J'aurai sans doute plus de détails à cet égard-là demain ou après-demain.

Mais je réitère au député de Sainte-Marie et aux membres de la commission qu'en aucune circonstance et jamais cette hypothèse n'a été soulevée au gouvernement de Québec.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Frontenac.

M. Grégoire: Mme la Présidente, avec les années et l'expérience politique qu'il a, le ministre devrait savoir que souvent les ministres sont les derniers à savoir quels sont les documents que leurs fonctionnaires préparent et lâchent en fuite. On en a eu des exemples dernièrement.

M. Fréchette: La plupart de ceux-là n'ont jamais eu de suite.

M. Grégoire: Qui sortent en fuite et... Ce qui se produit, c'est qu'en même temps on s'aperçoit qu'on enlève de la loi l'article qui dit que les rentes ne sont pas imposables. On l'enlève sous prétexte que c'est dans la loi de l'impôt sur le revenu. On l'enlève de la loi 42. C'est cela que je me demande. On dirait que la subtilité peut être forte aussi.

Une voix: Elle a bien meilleur goût.

M. Grégoire: S'il y a quelqu'un d'autre qui a pensé, est-ce que c'est vous ou si c'est quelqu'un d'autre ou si c'est un fonctionnaire qui a pensé à enlever cet article? Est-ce que c'est quelqu'un de l'impôt sur le revenu qui vous a fait penser subtilement que vous devriez peut-être l'enlever de la loi 42 parce qu'elle est déjà dans la loi de l'impôt? Alors, il ne vous est pas venu à l'esprit d'imposer les rentes, mais il y a quelqu'un qui, subtilement, vous a mis dans la tête d'enlever l'article de la loi 42. C'est votre responsabilité. Cela vient probablement de l'impôt sur le revenu puisqu'elle y est déjà. Et alors, si le ministre de l'impôt veut changer sa loi, cela n'est plus incrit dans votre loi. Vous avez perdu votre pouvoir de dire non parce que cela n'est plus inscrit dans votre loi, vous l'avez enlevé. Vous ne trouvez pas que la subtilité est réelle? (17 h 45)

M. Fréchette: Est-ce que le député de Frontenac...

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fréchette: ...est en train de me dire que la loi de l'impôt à cet égard ne s'appliquerait pas? C'est cela que le député de Frontenac est en train de me dire. Non seulement me dit-il que la loi de l'impôt pourrait théoriquement, éventuellement, ne pas s'appliquer, mais il faudrait aussi faire en sorte que, dans toutes les lois, on se double, on se... Trop fort ne casse pas. Plus il y en a, mieux c'est, en fait.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Frontenac.

M. Grégoire: La loi de l'impôt, pour s'appliquer, par exemple, devrait contenir un article de concordance qui viendrait amender la loi 42. À ce moment-là, cela serait deux fois plus long parce que le ministre du Travail serait directement impliqué à cause de sa loi. Tous ceux qui font partie du...

M. Bisaillon: Les parlementaires seraient alertés.

M. Grégoire: Les parlementaires seraient alertés, oui. Cela ferait deux lois à amender au lieu d'une. Cela serait deux fois plus dur. Je crois, M. le ministre, que...

M. Fréchette: Tout ce que je peux vous dire, c'est qu'on ne passera pas quatre heures là-dessus. Je ne ferai pas une guerre de principe sur une situation comme celle-là. C'est une question de technique législative. Il m'apparaissait que, quand c'est prévu dans une loi, cela couvre la situation qu'on est en train d'évaluer et de discuter, mais cela va donner davantage d'ouvrage aux avocats parce que cela fera deux lois à interpréter. Le député de Frontenac a fait de longues argumentations ce matin pour dire que les lois étaient assez longues et assez compliquées, qu'il y avait trop d'avocats là-dedans et que cela prenait trop de temps, mais, si on fait des lois qui se retrouvent avec les mêmes dispositions de part et d'autre, cela va ouvrir la porte aux avocats.

La Présidente (Mme Juneau): M. le

député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Mais on doit comprendre que vous seriez prêt à remettre l'article dans la loi.

M. Fréchette: Oui, tout à fait. M. Bisaillon: Bravo.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député d'Outremont, vous avez la parole.

M. Fortier: Merci. Le député de Frontenac disait qu'il y avait des fuites de documents, les documents fuyaient, mais maintenant ce ne sont plus les documents qui fuient, ce sont les ministres. Ce que je trouve curieux en ce qui concerne cette taxation... Je suis d'accord avec le ministre que, dans le fond, il s'agit d'une disposition législative qui, normalement, provient du ministre des Finances et est tenue secrète. C'est le ministre du Revenu ou des Finances, cela peut être également dans le discours du ministre des Finances.

Dans le Soleil du 28 novembre, M. Sauvé est allé encore plus loin. Il a soutenu que, dans cette éventualité, les gouvernements fédéral et québécois auraient remboursé à la CSST les 80 000 000 $ qu'elle débourse annuellement en frais médicaux et d'hospitalisation. Je ne comprends pas bien la relation avec la fiscalité, mais il a calculé qu'il y avait 80 000 000 $. Il semblerait qu'il s'est penché sur le problème, il a fait le calcul, il a passé l'information à quelqu'un et il en a fait état. J'espère que le ministre comprend le sérieux de la situation. Cela mérite certainement une déclaration minitérielle, en quelque sorte. Alors qu'on est en train de discuter d'une disposition et alors que tout le monde a tenu pour acquis qu'il s'agissait d'un bénéfice non imposable, non seulement cela serait, pour l'employé, une baisse éventuelle de revenu, mais on pourrait aussi prétendre qu'à la suite de cette baisse de revenu les employés ou les syndicats demanderaient une augmentation et que, finalement, ce seraient les employeurs qui devraient payer davantage pour compenser le fait qu'il y a taxation.

C'est bien certain que, pour un employé recevant un bénéfice de 90% du revenu net -et tout le monde tient pour acquis qu'il s'agit d'un revenu non taxable - s'il s'agissait d'un revenu taxable, les employés eux-mêmes demanderaient que les montants soient reconsidérés et les employeurs se verraient obligés de payer des taux plus élevés à la CSST. Je crois que M. Sauvé a ouvert un dossier et un débat très important. S'il le fait de lui-même, d'une part, je laisse le soin au ministre responsable de le rappeler à l'ordre, mais, d'autre part, je crois qu'une déclaration s'impose dans les meilleurs délais, compte tenu de l'implication non seulement pour les individus, mais, éventuellement, de l'implication financière pour les employeurs.

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fréchette: Mme la Présidente, je remercie les membres de la commission d'attirer mon attention sur ce dossier. Vous ne serez pas surpris que je vous dise qu'au moment où j'ai pris connaissance de cette déclaration j'ai immédiatement demandé plus de précision, comme je le signalais tout à l'heure. Dans quel contexte cela a-t-il été dit? Dans quelle circonstance, à partir de quelles informations ces affirmations ont-elles été faites? Je sais qu'actuellement nous sommes en train de préciser ces questions. Je devrai très certainement, quant à moi, à partir des renseignements que j'obtiendrai, faire les précisions qui s'imposent. Est-ce que ce sera par la voie d'une déclaration ministérielle ou autrement, c'est autre chose, mais qu'il y ait un réajustement ou une précision qui se fasse, cela m'apparaît aller de soi.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Frontenac.

M. Grégoire: Dois-je comprendre que le ministre est prêt à le faire de lui-même, de réinclure la clause de la non-taxation de la rente dans la loi 42?

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fréchette: Mme la Présidente, je suis prêt à le faire, mais j'attire l'attention du député de Frontenac, comme je l'avais fait pour nombre de groupes qui étaient venus ici et qui insistaient pour que des choses soient dans la loi, je leur disais qu'on ouvre sur des contestations judiciaires qui peuvent nous amener jusqu'en Cour suprême.

Si le député de Frontenac qui a une peur bleue des avocats et des contestations judiciaires me dit qu'il insiste là-dessus, je vais le remettre dans la loi et on vivra avec cela.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Frontenac.

M. Grégoire: Maintenant, dans un tel cas, le ministre du Travail nous dit que le gouvernement du Québec n'en a nullement l'intention, mais si c'est inscrit dans la loi 42 et si le gouvernement fédéral voulait taxer la rente...

M. Fréchette: La loi 42?

M. Grégoire: ...voulait changer son

régime de taxation et imposer la rente, qui aurait priorité? La loi fédérale de l'impôt ou la loi provinciale 42?

Une voix: Le président de la CSST. Quelle question!

M. Grégoire: Qui aurait priorité? Est-ce que le Québec serait assez autonome, est-ce que le Québec serait assez maître de ses destinées pour dire: Nous avons adopté une loi...

Une voix: Il faut faire la souveraineté avant!

La Présidente (Mme Juneau): Messieurs!

M. Grégoire: Est-ce que le gouvernement fédéral pourrait aller à l'encontre de la loi 42 qui décréterait que les rentes ne sont pas taxées?

Une voix: Vous ne parlez pas de souveraineté.

La Présidente (Mme Juneau): S'il vous plaît! M. le ministre.

M. Fréchette: Mme la Présidente, le député de Frontenac me demande une opinion que je suis tout à fait disposé à lui donner, qui vaut ce qu'elle vaut, remarquez bien, mais je suis d'opinion que, si le gouvernement fédéral adoptait une législation fiscale en vertu de laquelle il décréterait, par législation, que les rentes, les indemnités de remplacement de revenu seront dorénavant imposables, nous n'aurions pas d'autre choix que d'accepter cette décision du fédéral.

M. Grégoire: Se soumettre.

M. Fréchette: Enfin!

Une voix: Ou se démettre.

M. Fréchette: Se soumettre ou se démettre, mais...

M. Grégoire: Mais là, il n'est même pas question de se démettre, il faut se soumettre.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau.

M. Lincoln: Mon collègue me permettrait-il de poser une question très courte au ministre?

M. Cusano: Certainement.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Nelligan.

M. Lincoln: M. le ministre, est-ce que ce ne serait pas la même chose si le ministre des Finances décidait, demain matin, que ces rentes sont imposables? Ce serait la même chose, en fait. Le ministre des Finances pourrait, malgré ce qui est dans la loi 42, décider de changer la loi de l'impôt et que les rentes soient imposables. Cela deviendrait imposable malgré la loi 42, il me semble.

M. Fréchette: Oui, c'est clair cela aussi.

M. Grégoire: Mais il faudrait qu'il soit en charge de la loi 42.

M. Lincoln: Oui, d'accord.

La Présidente (Mme Juneau): La parole est au député de Viau.

M. Cusano: Seulement un petit commentaire, Mme la Présidente. À l'article 4, lorsqu'on regarde...

M. Fréchette: Je voulais simplement attirer l'attention des membres de la commission, particulièrement du député de Frontenac qui s'intéresse à la question, sur l'amendement que l'on retrouve à l'article 137. Cet amendement va nous permettre de faire toute la discussion qu'on vient d'amorcer il y a deux minutes.

Une voix: Article 137.

M. Fréchette: Article 137, dans les amendements.

La Présidente (Mme Juneau): Dans les amendements.

M. Bisaillon: On comprend qu'on ne fera plus de discussion là-dessus étant donné que c'est déjà acquis que cela va être là.

M. Fréchette: Ce dont on parle, oui, cela va.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau.

M. Cusano: Seulement un commentaire, Mme la Présidente, avant de terminer. En regardant la version anglaise du projet de loi, l'article 4, peut-être à cause de ma langue maternelle, je le trouve un peu plus clair. On dit, à l'article 4, en anglais: "Not withstanding the first paragraph, any agreement or any regulation or Order giving effect to an agreement may provide more favourably for a worker than does this Act." Il me semble que c'est un peu plus clair, dans mon esprit, que le texte français.

La question qui me chicote dans cela,

c'est la question du décret; c'est un décret qui donne suite à une entente et non un décret gouvernemental.

Une voix: Comment cela?

M. Cusano: C'est une question simple, Mme la Présidente. Est-ce que, demain matin, si on parle justement de dispositions qui sont plus avantageuses - je vais prendre l'exemple des 90% du salaire net - est-ce que, par décret gouvernemental, demain matin ou à un temps donné, le gouvernement pourrait arriver et dire: C'est plus avantageux de donner 95% du salaire net?

M. Fréchette: Il pourrait le faire.

M. Cusano: II pourrait le faire.

M. Fréchette: Pour ses employés.

M. Cusano: Pour ses employés!

M. Fréchette: Oui.

M. Cusano: Mais non pour l'ensemble des travailleurs de la province.

M. Fréchette: Absolument pas.

M. Cusano: Absolument pas.

M. Fréchette: On ne pourrait pas faire cela sans changer la loi. On ne pourrait pas procéder à une décision comme celle-là par simple décret. Il faudrait procéder à un amendement législatif de la loi.

M. Cusano: Non, mais c'est ma préoccupation.

M. Fréchette: Ma compréhension, c'est ce que je viens de vous dire.

M. Bisaillon: Mais, par contre, une convention collective signée pourrait aller...

M. Cusano: Non, non. Sur la question des conventions collectives, je suis complètement d'accord avec cela. C'est le mot "décret", à ce moment-ci. Qu'est-ce qui arrive, justement, lorsqu'un gouvernement a décrété une convention collective?

M. Fréchette: Dans le décret, on ne pourrait pas retrouver des dispositions qui feraient en sorte que les avantages prévus par la loi 42 seraient inférieurs à ceux que l'on retrouve effectivement dans la loi.

M. Cusano: Vous êtes complètement convaincu de cela, M. le ministre?

M. Fréchette: Bien, écoutez...

M. Cusano: C'est-à-dire que, s'il y a un autre projet de loi... Quel était le projet de loi dont on avait discuté?

M. Fréchette: Pardon? M. Bisaillon: Le décret...

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: ...quand il est voté...

M. Fréchette: Oui...

M. Bisaillon: ...c'est comme une loi.

M. Fréchette: ...mais vous ne pouvez jamais amender ou abroger une loi par un décret. Convenons de cela, quand même.

M. Bisaillon: Non, non, mais ce que je veux dire...

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Prenons le dernier exemple...

M. Fréchette: Oui.

M. Bisaillon: ...celui dont beaucoup de gens se souviennent encore; 105 et 111, c'étaient des décrets, ce n'était pas juste une loi disant: On arrête...

M. Fréchette: II y a eu une loi d'adoptée pour déterminer...

La Présidente (Mme Juneau): M. le ministre.

M. Fréchette: ...que les décrets tiendraient lieu de conventions collectives. Et c'est par loi que cela a été fait.

M. Bisaillon: Bon.

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Alors, ce que je veux dire, c'est que c'est par loi que cela s'est fait.

M. Fréchette: C'est cela.

M. Bisaillon: Dans ce cas-là, c'est par loi que c'est fait.

M. Fréchette: C'est cela, oui.

M. Bisaillon: Et vous nous dites que, dans cette loi, il ne pourrait pas y avoir de dispositions inférieures à ce qui est contenu dans le projet de loi 42.

M. Fréchette: Non, ce n'est pas cela que je vous dis. Dans une loi, tout un chacun peut faire à sa volonté, faire ce qu'il veut. C'est évident que, si le gouvernement décidait d'adopter une loi spéciale ou une autre, à l'intérieur de laquelle on retrouverait une disposition qui dirait: L'article 4 de la loi 42 est abrogé et les avantages que prévoit cette loi seront inférieurs à ceux qu'on y retrouve actuellement, c'est cette loi qui aurait force de loi.

Ce que l'on dit, c'est que, dans une convention - je pense qu'on s'entend tous là-dessus - ou un règlement qui pourrait intervenir par le gouvernement, qui s'applique à ses employés et lequel règlement est sanctionné ou avalisé par décret, sans que l'appareil législatif ne soit mis en marche, dans ces conditions, il ne peut pas y avoir de conditions inférieures. Mais par une loi, évidemment, c'est une tout autre chose.

M. Cusano: ...M. le ministre...

La Présidente (Mme Juneau): M. le député de Viau.

M. Cusano: ...c'est que... Il est 18 heures. Je crois qu'on revient demain matin, à 10 heures. J'aurai d'autres...

La Présidente (Mme Juneau): C'est exact, mais est-ce que vous voulez poser votre question?

M. Cusano: Non, non, j'aime autant attendre à demain matin, parce que, si je pose ma question, je vais avoir ma réponse demain. J'aime autant, si le ministre y consent...

Une voix: Est-ce que l'article 4 est adopté?

M. Cusano: Non, non...

La Présidente (Mme Juneau): Est-ce que l'article 4 est adopté?

M. Cusano: ...j'ai d'autres questions à poser sur l'article 4.

La Présidente (Mme Juneau): Nous ajournons nos travaux jusqu'à demain, 10 heures.

(Fin de la séance à 18 heures)

Document(s) associé(s) à la séance