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(Dix heures onze minutes)
Le Président (M. Beaumier): La commission de
l'économie et du travail ouvre ses travaux, avec le mandat de
procéder à l'étude des crédits budgétaires
1985-1986 du ministère du Commerce extérieur.
Je crois que nous nous sommes entendus pour procéder - puisqu'il
n'y a qu'un seul programme, d'autant plus de la façon la plus
générale possible, quitte à adopter l'ensemble des
crédits à la toute fin. M. le ministre du Commerce
extérieur.
M. Landry: Je vous remercie, M. le Président. Comme le
Commerce extérieur, par définition et par vocation, se livre
à des activités assez pragmatiques, j'ai l'intention de limiter
mon exposé liminaire à deux choses: vous présenter d'abord
les collaborateurs qui m'accompagnent et vous donner les faits saillants de
notre action, au cours de l'exercice 1984-1985; ensuite, répondre aux
questions de la façon la plus précise et la plus technique
possible.
M. le Président et chers membres de la commission, j'ai l'honneur
d'avoir avec moi M. Roger Pruneau, sous-ministre du Commerce extérieur,
assis à ma droite; M. Marcel Bergeron, à ma gauche, sous-ministre
adjoint; M. Jacques Brind'Amour, directeur général de la
coopération économique; M. Michel Dagenais, directeur
général du développement de l'offre; M. Gerald Audet,
directeur général de l'analyse et de la stratégie; Mme
Janine Beaulieu, directrice de nos communications; M. François Paradis,
secrétaire du ministère; M. Carl Grenier, directeur de la
politique commerciale; M. Raynald Brulotte, directeur de l'administration; M.
Paul-Émile Blouin, direction Europe; M. François Cournoyer,
direction Amérique; M. Robert Cossette, du secrétariat; M. Yvan
Bouchard, direction de l'administration.
Je ne sais pas si vous avez remarqué le phénomène
visuel suivant: il n'y a pas d'uniforme pour travailler au ministère du
Commerce extérieur, mais vous voyez, par hasard, que tout le monde,.
sans aucune consigne, se met toujours dans la tenue austère des vendeurs
internationaux, discrète et de bon goût.
Remarques préliminaires M. Bernard
Landry
Les faits saillants en 1984-1985 sont les suivants. Vous allez voir
qu'il y a - je parle pour le député de Nelligan, surtout, M. le
Président - certains recoupements avec l'action internationale plus
générale du Québec que nous avons étudiée
lors des crédits du ministère des Relations internationales.
C'est pour cela que la première chose que je signale, c'est l'ouverture
de trois nouveaux bureaux à l'étranger: Bogota en Colombie,
Stockholm en Suède et Singapour. De plus, un conseiller
économique a été affecté à la nouvelle
délégation du Québec à Hong Kong.
Ces conseillers relèvent, dans le cas de Bogota, de notre
délégation du Venezuela; dans le cas de Stockholm, de notre
délégation de Londres; et dans le cas de Singapour, de la
délégation de Tokyo.
J'ai eu également l'honneur de participer, au cours de
l'exercice, à six missions commerciales importantes en vue d'appuyer les
efforts de nos gens d'affaires et de promouvoir la vente de biens et de
services produits au Québec. Je ne mentionne que les déplacements
majeurs où on avait un grand nombre d'hommes d'affaires avec nous - tout
cela a été largement publicisé dans la presse - mais
à titre d'illustration, la grande mission sud-est asiatique - la
République populaire de Chine, la Corée, Hong Kong, Japon - qui a
profité de la présence du premier ministre en particulier,
à la tête d'une délégation considérable
où toute la fine fleur de l'économie québécoise
était représentée.
Le ministère était également très
impliqué dans la préparation et la tenue du sommet Le
Québec dans le monde. Il est normal que dans un tel sommet
l'activité économique et commerciale occupe une grande proportion
du temps, ce qui fut le cas. Il y a eu, nous l'avons vu aux crédits du
ministère des Relations internationales, la signature de ce protocole
d'entente que vous avez entre les mains - je vous l'ai remis à ce
moment-là - entre les services du Commerce extérieur et les
services des Relations internationales en général, de
façon à organiser un fonctionnement harmonieux des deux
équipes, ce qui est maintenant devenu une réalité.
Nous avons également mis sur place un
réseau international d'échange d'information technologique
qui compte maintenant 117 correspondants répartis aux États-Unis
d'Amérique, au Canada, en France, en Espagne, en Italie, en Belgique,
aux Pays-Bas, en Grande-Bretagne, en Allemagne et dans les pays Scandinaves.
Nous avons mis en place une banque d'offres à l'exportation avec un
logiciel d'exploitation permettant d'obtenir des données d'ordre
technologique, financier, commercial et juridique auprès de 2500
entreprises de fabrication destinée à l'exportation. Ces
données faciliteront le repérage des atouts à
l'exportation de nos PME québécoises.
Nous avons également assuré la présence de trois
conseillers en commerce extérieur à temps plein auprès de
trois organismes spécialisés du monde des affaires. Il s'agit du
Centre de finance et de commerce international, de Montréal, du Centre
de commerce international de l'Est du Québec et du Groupement
québécois d'entreprises.
Cette année, au cours de l'exercice qui s'écoule, pour des
raisons de conjoncture, mais des raisons de changement de mentalité,
deux fois plus d'entreprises ont profité du programme APEX d'aide
à la mise en place d'une stratégie de marketing; comparativement
à l'an dernier, 109 entreprises se sont vu accorder une aide dans le
cadre de ce programme. Je vous signale qu'il s'agit de l'APEX "strategic
marketing" et non pas de l'APEX régulier. Nous avons également
lancé une série d'activités de groupe: des expositions
commerciales, des missions commerciales, des missions d'accords industriels,
des missions mixtes, promotions en magasin et missions d'acheteurs
étrangers, qui ont engendré, selon les informations
préliminaires recueillies des entreprises participantes, des ventes sur
place - cela n'inclut pas le suivi - de l'ordre de 61 000 000 $ et des ventes
projetées sur douze mois de 426 000 000 $. C'est là que vous
voyez l'énorme rendement des activités de promotion du Commerce
extérieur.
En vérité, il n'est pas exagéré de dire que
plus d'une fois par semaine des missions officielles organisées, par le
ministère du Commerce extérieur quittent le territoire
québécois. Je parle des missions de groupe, je ne parle pas des
activités individuelles: là, évidemment, c'est chaque jour
que des entreprises du Québec quittent notre territoire pour aller faire
la promotion de leurs biens et de leurs services à l'extérieur de
nos frontières.
Nous avons également lancé un bulletin mensuel de liaison
en cours d'année qui s'appelle Le Commerce extérieur. Si vous ne
l'avez pas déjà par-devers vous, vous l'aurez dans les minutes
qui viennent. Mme la directrice de l'information.
Une voix: Le messager apporte les documents.
M. Landry: Très bien. Nous avons également
réalisé trois documents audiovisuels pour soutenir l'information
et la formation des entreprises en vue d'exporter. Ce sont: "Exporter, c'est
rentable", "Les accords industriels, une solution d'avenir" et "Exposer, c'est
profitable".
Nous avons poursuivi les efforts entrepris en matière de
politique commerciale en vue de réduire ou de supprimer les
difficultés d'ordre tarifaire ou de réglementation auxquelles
font face les entreprises québécoises. Parmi les principaux
dossiers, voici les plus spectaculaires que vous connaissez et dont on a
abondamment parlé: libéralisation sectorielle des échanges
entre le Canada et les États-Unis d'Amérique, les
ministères sectoriels ont été mis à contribution
afin d'identifier les intérêts spécifiques du
Québec; élargissement de l'accord du GATT sur les marchés
publics, l'effort d'identification des opportunités et des coûts
pour le Québec de participer à cet accord s'est poursuivi;
intensification, enfin, des échanges entre le Québec, les
Maritimes et la Nouvelle-Angleterre dans le cadre de la conférence des
premiers ministres de l'Est du Canada et des gouverneurs de la
Nouvelle-Angleterre.
Il y a aussi de grands dossiers particuliers qui ne sont pas toujours
heureux. Des fois, ce sont des tuiles qui nous arrivent, mais vous savez que
les producteurs américains, dans certains cas, se sont
transformés en pétitionnaires devant la commission
américaine du commerce et nous ont causé certains ennuis, soit
passagers, en voie de règlement ou hélas! définitifs, tant
que les rapports ne seront pas mieux aménagés entre le Canada et
les États-Unis. Il s'agit de l'acier, des tubes en acier, du cuivre, du
porc et d'un certain nombre d'autres cas moins déterminants, mais
également présents dans notre paysage contentieux avec les
États-Unis d'Amérique.
Également, nous nous sommes penchés sur la tentative de la
Communauté économique européenne de réduire
unilatéralement le contingentement en franchise sur le papier journal,
avec un résultat qui a été acceptable pour les
producteurs. Cela n'a pas été une catastrophe. On a 600 000
tonnes plus 50 000 tonnes.
Voilà les faits saillants de notre année. Je n'insiste pas
sur l'activité régulière du ministère, qui n'est
pas un vieux ministère, mais qui s'est suffisamment illustré
auprès de la communauté des affaires et de l'administration pour
être le ministère du gouvernement dont les crédits vont le
plus augmenter au cours du prochain exercice.
Donc, cette priorité du Commerce
extérieur annoncée par le gouvernement, maintenue par le
gouvernement depuis quelques années, se traduit dans - les choix
budgétaires du gouvernement puisque c'est cette équipe que vous
avez devant vous qui va disposer de la plus forte augmentation de
crédits pour l'exercice qui vient.
Le Président (M. Beaumier): Merci, M. le ministre.
Maintenant, je passe la parole au député de Nelligan et
porte-parole de l'Opposition. M. le député de Nelligan.
M. Clifford Lincoln
M. Lincoln: M. le Président, j'ai participé
à l'étude des crédits et à des débats avec
le ministre du Commerce extérieur depuis la création du
ministère en novembre 1982. Loin de moi l'idée de vouloir faire
de l'opposition systématique à tout ce qui a trait au commerce
extérieur. De notre côté, nous réalisons
l'importance presque capitale du commerce extérieur dans l'appareil
économique du Québec qui, en fait, vit en grande partie de ses
exportations et de son commerce extérieur.
Là où peut-être nous nous départageons de
l'approche du ministre, ce n'est pas dans les politiques et les actions
pragmatiques, systématiques et spécifiques que le ministre a
mises en place ou continue d'exploiter comme une extension du système du
commerce extérieur qui était en place alors à travers le
ministère de l'Industrie et du Commerce, les programmes APEX, les
programmes de mission à l'étranger, les programmes
spécifiques de promotion de nos produits, les programmes de soutien
à l'entreprise. Sur cela, je pense que nous pourrions nous mettre
d'accord pour dire que beaucoup de ces programmes - la majorité, sans
doute - sont très valables, aident l'entreprise et devraient être
soutenus, devraient être encouragés.
Là où nous nous départageons, c'est sur une
approche quant au commerce extérieur. Chaque fois que j'ai eu un
débat avec le ministre, chaque fois que j'ai écouté les
propositions qu'il nous a faites par rapport au ministère du Commerce
extérieur, par rapport à ses actions, je revois l'analogie de
deux familles. Il y a une famille avec beaucoup d'enfants où il y a un
menu commun, il y a des heures de repas communes. Tout le monde mange en
même temps et tout le monde mange le même menu. Après, il y
a l'autre famille avec beaucoup d'enfants où chacun a son menu
spécifique et séparé, chacun mange à son heure. On
peut tirer soi-même sa conclusion. Dans un cas, une cohésion
globale, une attitude d'ordre et d'efficacité. Dans l'autre cas, des
politiques spécifiques, des politiques pragmatiques, soit, mais on peut
constater que c'est le manque de cohésion, le manque
d'efficacité, des coûts additionnels, etc. C'est peut-être
cela qui démontre notre approche différente par rapport au
commerce extérieur.
Nous avons toujours dit de ce côté de la Chambre que,
d'après le gouvernement et les politiques que le ministre a mises en
place, les attitudes que le ministre véhicule et a mises en place, on
semble traiter le commerce extérieur en vase clos, qu'on semble ignorer
que le commerce extérieur fait partie d'un tout, que le commerce
extérieur, c'est avant tout une projection, une résultante de
toutes les actions du gouvernement dans toutes les autres sphères. Le
commerce extérieur, en fait, ce n'est pas magique. C'est toute la
résultante des actions du côté économique, du
côté de l'éducation, de la haute éducation, de nos
écoles, de nos universités. C'est le produit de notre
fiscalité, de tout ce qui fait l'appareil gouvernemental en entier.
Je pense que cela démarque une question très importante.
Nous, nous disons qu'il faudrait d'abord avoir une politique de départ,
une politique globale qui nous donne les objectifs du Commerce extérieur
par rapport à l'action économique globale du gouvernement.
Lorsque nous avons créé le ministère, en novembre 1982,
nous disions au ministre: Tout le monde doit se mettre d'accord qu'il faut
faire plus de commerce extérieur, mais en même temps il faudrait
mettre les boeufs avant la charrue. Il faudrait situer nos objectifs globaux,
il faudrait situer nos priorités. Il faudrait situer toutes les
questions qui ont trait au commerce extérieur avant que nous ne nous
embarquions dans un ministère spécifique. Là,
ironiquement, après deux ans et demi de ministère du Commerce
extérieur, le ministre va présenter bientôt une politique
de relations internationales et de commerce extérieur dans les semaines
et mois qui vont venir et ce, à la veille même de la fin du mandat
du gouvernement.
Il nous aurait semblé, nous, qu'on aurait dû attendre six
mois et plus, un an et plus, avant de créer un ministère, afin de
savoir où on s'en allait sur toutes ces questions. Nous avions fait le
point au départ avec le ministre en disant: Prenez la question de la
coordination des ministères qui s'entrecroisent par rapport au commerce
extérieur. Le ministère à vocation responsable
légalement se lie aux Affaires intergouvernementales d'alors. On n'avait
fait aucune coordination de base. Le ministre nous avait dit alors: II faudra
faire un rodage et, ensuite, on va voir ce qui va se présenter.
On a décidé de séparer le ministère des
Affaires intergouvernementales entre affaires canadiennes et affaires
internationales. Il a fallu, en décembre 1984, reconnaître qu'il
fallait une coordination de base. Et, là, nous
ne sommes pas tout à fait convaincus que la coordination se fait
de la façon la plus efficace possible. Nous avons des questions
là-dessus que nous allons présenter au ministre encore
aujourd'hui. Mais, en décembre 1984, deux ans après la
création du ministère, on reconnaissait alors qu'il fallait un
protocole d'entente entre le ministère des Relations internationales et
le ministère du Commerce extérieur. Nous aurions pensé
que, si on avait une vue globale de la chose, ce protocole d'entente se serait
fait, non pas en décembre 1984, mais certainement qu'il y aurait eu une
politique de coordination, une politique d'entente au départ même,
avant la création du ministère.
C'est peut-être systématique ce qui se passe du point de
vue de l'action économique en général. Par exemple, hier
soir, j'écoutais le budget du ministre des Finances. On pourrait dire
que le budget du ministre des Finances n'a rien à voir avec nos
débats sur les crédits aujourd'hui. Pourtant, cela
démontre ce que nous essayons de souligner. Je pense que c'est un
exemple tout à fait typique de ce que je veux souligner. D'un
côté, le ministre des Finances parlait beaucoup de commerce
extérieur, d'exportation. À la fin de son budget, il nous annonce
qu'il va décréter une taxe dès minuit hier soir sur toutes
les primes d'assurance, que ce soient les assurances personnelles ou les
assurances commerciales. C'est un domaine que je connais intimement. Toute ma
vie, je l'ai passée dans le domaine de l'assurance internationale. Or,
il est évident pour qui s'intéresse aux choses économiques
que les trois grands piliers de l'économie sont le système
bancaire, le système des transports et les assurances. Il n'y a pas une
industrie, une entreprise, qu'elle soit toute petite, grande ou de taille
moyenne, qui n'a pas besoin d'assurances pour pouvoir faire du commerce, pour
pouvoir vivre, pour pouvoir prendre un départ. La première chose
qu'il faut qu'elle ait, c'est un crédit en banque, des fonds financiers.
Il faut qu'elle puisse s'assurer du transport de ses marchandises, de sa
sécurité, de ses garanties d'affaires, etc. (10 h 30)
Cela pourrait paraître quelque chose qui n'a rien à voir
avec le commerce extérieur, mais prenons l'impact que cela a sur une
firme, surtout les petites firmes d'aujourd'hui. Les petites firmes ont
à s'approvisionner en matériaux de base, en ressources, en
services, en transport. Tous ces services qui lui sont donnés, que ce
soient les services de transports, les services de consultations, les services
d'imprimerie, les services de publicité, les matériaux de base
dont elles ont besoin pour construire un produit, toutes ces composantes vont
avoir des primes d'assurance plus élevées au départ. Ce
qui veut dire que les produits de base qui vont faire le produit final vont
coûter plus cher, c'est évident. C'est évident que, si on
taxe les primes d'assurance, on va chercher 400 000 000 $ par année, et
c'est un chiffre très conservateur. Aujourd'hui, il y a des gens de ce
milieu qui me disent que c'est une estimation très conservatrice, que
cela pourrait aller jusqu'à 500 000 000 $, 600 000 000 $.
Il faut bien que l'économie accuse le coût des 400 000 000
$. Si l'économie accuse le coût des 400 000 000 $, peut-on dire...
C'est cela l'ironie de la chose: comme le disait le ministre des Finances, on
cherche une économie concurrentielle. Comment est-ce qu'on peut faire de
la concurrence en grevant les entreprises au même moment? Cela me
dépasse, c'est un manque total de logique. Il me semble que c'est
là le point central que nous faisons. Le point central que nous faisons,
c'est que le commerce extérieur, cela ne se fait pas en vase clos. Cela
se fait comme la composante d'un tout. C'est la résultante du tout.
Il me semble que, si le ministre du Commerce extérieur, qui est
peut-être le principal ministre économique du gouvernement
à l'heure actuelle, après le départ de l'ancien ministre
des Finances... C'est peut-être le ministre en titre qui a le plus de
poids dans le gouvernement aujourd'hui. Est-ce qu'il n'aurait pas pu discuter
avec son collègue et lui dire: C'est aberrant d'aller grever une taxe
directe sur une composante essentielle de l'économie? Quelles sont les
conséquences de cela sur le commerce extérieur? Encore une fois,
on va nous dire: II faut qu'on soit concurrentiel avec l'Ontario et l'Alberta.
Est-ce que ces provinces font cette chose? La seule province que je sache au
Canada qui le fasse, c'est Terre-Neuve. Là encore, on n'est pas en
concurrence avec Terre-Neuve. On est en concurrence avec l'Ontario, l'Alberta,
avec les États américains. C'est un exemple typique de ce qui se
fait. Il me semble que, si on avait une approche systémique du commerce
extérieur au lieu d'une approche pragmatique, au lieu d'une approche au
pied levé, ce budget ne devrait pas contenir cette mesure tout à
fait régressive.
Je parle d'un autre exemple pour souligner un peu la différence
d'approche que nous avons sur cette question. Nous avons fait pas mal de
débats en Chambre ici. On a posé des questions sur tout le propos
du libre-échange. Le ministre et moi, en principe, pouvons nous mettre
d'accord sur le libre-échange, tout le monde dit la même chose. On
dit oui, on est pour le libre-échange. J'ai même lu une
déclaration très récente du ministre où il propose
encore une fois un marché commun États-Unis-Québec, qui
était sa proposition d'il y a environ deux ans. On peut se dire: Comme
principe, nous sommes
tout à fait d'accord que si c'était possible on ferait un
marché commun États-Unis-Québec. Un marché commun,
cela veut dire la fluidité la plus totale d'économies
juxtaposées. Cela veut dire une complète fluidité de tout
ce qui a trait au commerce, que ce soient les services, les biens, les
capitaux, le personnel. Je ne pouvais pas m'empêcher de penser en
même temps qu'on fait des discours sur le marché commun qu'il y a
peut-être un an de cela on se battait avec les gens du Nouveau-Brunswick
qui ne pouvaient pas venir travailler au Québec quand les gens du
Québec allaient travailler au Nouveau-Brunswick et que cela avait fait
une guerre de frontières. On parle de tous les problèmes que nous
avons dans la construction entre nous-mêmes et les autres provinces. On
parle de toutes les restrictions de personnel d'une province à l'autre.
On parle de notre fameuse politique d'achat. Là, encore, je fais un
parallèle. L'autre jour, lors d'une question en Chambre, je voyais le
ministre applaudir son collègue de l'Industrie et du Commerce qui
défendait la politique d'achat du Québec. Selon moi,
c'était une question superficielle qui avait trait à un document
que j'ai publié et qui n'avait certainement pas été lu par
le ministre de l'Industrie et du Commerce parce que, s'il l'avait lu, il aurait
très bien compris qu'on ne cherchait pas une abolition
unilatérale de la chose, mais qu'on disait: Prenons les devants au
Québec. Comment pouvons-nous parler de libre-échange avec les
États-Unis? Comment pouvons-nous parler de marché commun en plus,
qui va beaucoup plus loin que le libre-échange, quand nous-mêmes,
entre provinces d'un pays qui est encore un pays où s'enchaînent
dix provinces, on ne peut pa3 s'entendre avec les provinces voisines pour
arriver à une politique d'achat commune?
Sur ce sujet, le ministre disait: Avant qu'on fasse le
désarmement, il faudrait que le désarmement se fasse aussi en
Ontario. Il faisait même le parallèle entre les Russes et les
Américains. Qui commence? Mais même les Russes et les
Américains l'autre jour s'entendaient pour avoir des discussions
à Genève. Il faut bien que quelqu'un commence à en parler.
Si on cherche le libre-échange avec les États-Unis, il va y avoir
un cadre beaucoup plus élargi qui va se faire bientôt, qu'on le
veuille ou non. Il faudra bien qu'on s'ajuste ici localement. Ce sera tout
à fait paraxodal et ironique que chez nous on ne puisse pas s'entendre
tandis qu'on fait des approches avec les États-Unis pour un commerce
plus ouvert.
Nous avons dit au ministre: Ce que nous suggérons, c'est que nous
prenions les devants et qu'on n'attende pas que l'Ontario le fasse ou que
l'Alberta le fasse avant nous. Qu'on prenne les devants pour leur dire:
Écoutez, si on ne le fait pas ensemble, cela va se faire de gré
ou de force parce qu'il le faudra bien lorsqu'il y aura un contexte beaucoup
plus libre entre nous et les États-Unis. Pour nous, c'est une question
qui a trait à cette approche systémique du commerce
extérieur au sein de l'économie. Nous ne pouvons pas concevoir
une politique d'achat préférentielle en 1985, à l'abord
même des réductions des barrières tarifaires du GATT dans
quelque chose comme moins de deux ans, à la veille même de
nouvelles négociations du GATT qui vont avoir trait en grande partie aux
politiques d'achat et aux marchés publics. Pour nous, ce sont des
exemples de notre approche que le commerce extérieur doit être la
résultante de l'économie. Si le reste de l'économie ne
marche pas, si on taxe les primes d'assurance, si notre fiscalité n'est
pas concurrentielle, si nous grevons nos universités de budgets trop
restreints qu'on ne fait que réduire tout le temps et qui ont un impact
négatif sur notre évolution technologique, tout cela veut dire
que tout ce que nous faisons de systématique, de pragmatique dans le
commerce extérieur n'a pas d'impact ou bien moins d'impact, beaucoup
moins d'impact que si nous avions une politique systémique où le
commerce extérieur était partie d'un tout. Ce que nous disons au
ministre, c'est que d'abord nous suggérons comme nous l'avons
suggéré au départ qu'il faudrait au plus tôt avoir
une politique d'ensemble, une politique d'objectifs et une coordination
interministérielle qui se reflète dans des actions qui
empêchent les actions négatives comme celles du ministre des
Finances hier soir et que j'ai citées plus tôt.
Au début de novembre 1982, au départ du Commerce
extérieur, on a dit que le ministre créerait un ministère
mobile, un ministère léger, un ministère adaptable aux
circonstances, pragmatique, et sur cela on l'a appuyé. Mais là,
on commence à constater que la maladie bureaucratique affecte tous les
gouvernements et surtout les gouvernements qui ont été
rodés depuis plusieurs années, et je ne critique pas
particulièrement ce gouvernement sur ce sujet. Tous l'ont
été, tous le font, que ce soit le gouvernement de Reagan, que ce
soit le gouvernement libéral antérieur fédéral, que
ce soit le gouvernement libéral antérieur provincial ou un autre.
La bureaucratie s'alourdit aux cours des années. On peut voir que la
petite équipe mobile qui avait, au départ, un budget de 9 000 000
$ pour les mois qui restaient dans le premier exercice financier, qui avait
dépensé 13 000 000 $ au cours du second exercice financier,
aujourd'hui, est arrivée avec un budget de 24 000 000 $. Comparativement
à celui de l'année dernière où l'on a
dépensé 18 000 000 $, c'est 50 % de plus. On peut dire que 24 000
000 $ au sein d'un budget
de 27 000 000 000 $ du gouvernement du Québec, ce n'est pas
grand-chose. En effet, ce n'est pas grand-chose, mais il faut se demander si
nous arrivons à une bureaucratie qui commence à devenir, non plus
légère, non plus mobile, mais un peu trop alourdie. En deux ans,
les effectifs en personnel ont monté de 38 %. On va poser des questions
au ministre. Ce qui nous frappe surtout, après avoir analysé les
chiffres de très près, c'est que la composante économique
dans certains secteurs névralgiques du commerce extérieur, au
lieu de s'améliorer avec la progression significative du budget, avec la
progression significative du personnel, s'est au contraire relativement
amoindrie.
On a encore parlé, par exemple, des effectifs de notre
délégation étrangère où nous concluons, avec
les chiffres que nous avons cités, que les composantes
économiques de notre délégation étrangère
sont moins appuyées par les budgets, par le personnel, que les
composantes politiques ou non économiques, dans un âge où
nous disons que la concurrence économique est la raison même de
notre existence future, où on a à concurrencer le Japon,
Taïwan, et le reste. Cela me semble impensable qu'en 1985, si nous avions
une politique économique solide, si nous avions une politique du
commerce extérieur solide, quand le ministre est un des personnages les
plus importants au sein de l'appareil, parce que, comme nous le disons, c'est
le ministère économique qui a le plus de poids aujourd'hui dans
l'appareil gouvernemental... Au lieu de voir à ces choses, de voir
d'urgence à des politiques aujourd'hui, qu'est-ce qu'on a fait depuis
qu'on est là, en séance, depuis le mois de février? C'est
ce même gouvernement qui faisait, il y a quelques semaines, l'ordre du
mérite des pisciculteurs et l'ordre du mérite de l'alimentation.
Pour moi, c'est complètement impensable. On pourrait dire que là
on se détache du sujet, mais c'est un exemple de plus du manque de
pensée économique et c'est ce qui se reflète dans les
politiques; par exemple, dans nos délégations il n'y a pas de
politique centrale.
Là, je reviens encore à quelque chose dont on a
discuté avec le ministre l'autre jour: nous n'avons pas de politique
centrale pour nos délégations à l'étranger, nous
n'avons pas d'objectifs précis, nous n'avons en fait pas d'objectifs
clairs et précis par rapport à nos délégations
étrangères. Autrement, nous n'aurions pas vu des budgets monter
à 50 % dans le commerce extérieur. Pourtant, le nombre de
conseillers économiques diminuent, comme nous allons le montrer plus
tard. C'est pourquoi il faut voir à toutes ces choses. Au lieu de perdre
notre temps, à l'Assemblée nationale, à faire des ordres
du mérite des cultivateurs et autres, il faudrait... Chaque chose en son
temps, mais pour le moment on n'y est pas. Moi, je dirais la même chose
aux pisciculteurs. Ce n'est pas le moment d'aller faire des petites politiques
systématiques ridicules qui n'ont aucun impact sur l'économie
quand, aujourd'hui, on est dans un monde concurrentiel où on fait
concurrence au Japon, à Taïwan, à la Corée qui nous
abondent de leurs produits. Au lieu de mettre autant d'efforts sur des lois
tout à fait inutiles, on devrait mettre plus d'efforts pour avoir une
politique systémique du commerce extérieur et de notre
économie en général.
Je dis au ministre encore une fois: Nous ne voyons rien dans son budget
qui indique qu'il y a une politique pour nos délégations
étrangères, qu'il y a une politique de gestion du personnel,
qu'il y a de grands objectifs qui se situent par rapport à son
ministère. Nous voyons, nous, des politiques tout à fait
spécifiques, des politiques, comme il dit, pragmatiques. Il les a
citées: une ici, une là-bas, le programme APEX. On va faire ceci
pour le GATT, on va faire cela pour autre chose. Moi, j'aurais espérer,
trois ans après, que le ministre nous dise, au contraire, dans son
exposé que, bientôt, il va nous présenter quelque chose, un
éventail, un tissu, un dessin de là où le Québec
s'en va par rapport à la concurrence mondiale. (10 h 45)
J'aurais espéré qu'il nous dise: On va essayer de
renverser la balance entre nos importations et nos exportations. J'aurais
espéré qu'il nous parle du libre-échange; j'aurais
espéré qu'il nous parle de sa politique par rapport à la
politique d'achat du Québec et ce qu'il compte faire pour la
contrecarrer, pour l'harmoniser avec celle des provinces d'à
côté, pour arriver à quelque chose de logique par rapport
au grand débat qui se fait aujourd'hui entre le Canada et les
États-Unis pour un accord commercial plus large.
J'aurais espéré qu'il nous parle de fiscalité,
qu'il nous dise: On va se diriger vers des incitatifs fiscaux pour les
exportateurs. Il y en a des quantités qui peuvent être
suggérés. Nous allons les suggérer bientôt
nous-mêmes dans notre programme électoral pour aider les
exportateurs au sein d'une politique économique large où, lui,
comme ministre peut-être dominant de l'économie, prendrait une
part active, dominante et globale.
Malheureusement, on est là, au point de départ de 1982. On
a fait une politique d'entente à retardement avec le ministre des
Relations internationales. On fait des politiques pragmatiques ici et
là. On dit que le ministère est pragmatique, on dit que le
ministère est mobile et il devient de plus en plus lourd. On dit qu'on
appuie l'économie concurrentielle. On va démontrer que ce n'est
pas toujours le cas et, en fait, que c'est de moins en moins le cas. On dit,
nous,
qu'il est temps que le ministre nous apporte des politiques larges, des
politiques qui ont un objectif précis et nous allons poser beaucoup de
questions au ministre en ce sens.
Le Président (M. Beaumier: Merci, M. le
député. Toujours dans le cadre des remarques
préliminaires, le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
M. Landry: M. le Président, n'est-ce pas l'usage de
répondre alternativement aux interventions?
Le Président (M. Beaumier): Selon le règlement,
à l'article 287, lors de l'étude des crédits, le ministre
peut intervenir autant de fois qu'il le désire après une
intervention.
M. Landry: Si mon collègue et adjoint parlementaire le
permettait, j'aimerais mieux relever tout de suite pour vider la table de la
commission...
M. Fortier:... profondeur.
M. Landry:... d'un certain nombres de choses qui sont d'une
utilité relative, pour ne pas dire nulle.
Le Président (M. Beaumier): M. le ministre, vous avez la
parole à présent.
M. Bernard Landry (réplique)
M. Landry: Avant d'entendre l'intervention sérieuse de
l'honorable adjoint parlementaire, je veux dire au député de
Nelligan qu'il a ma gratitude pour un certain nombre de choses dans ce qu'il
vient de dire. C'est la première fois, je pense, en huit ans de vie
parlementaire que les phrases du critique de l'Opposition pourront être
citées dans ma littérature électorale à
Laval-des-Rapides. Je m'engage à le faire, à dire à mes
électeurs que le député m'a reproché d'être
pragmatique. Je pense que dans une population comme la mienne: classe moyenne,
gens industrieux, etc., cette épithète de pragmatique pourrait
m'être de quelque utilité.
Le député m'étonne et me surprend aussi, et c'est
bon qu'une commission parlementaire soit intéressante à ce point,
parce qu'il me rappelle ma jeunesse. Dans les universités, les
facultés de sciences économiques, milieu théorique par
excellence, il y avait toujours une proportion noble des étudiants qui
étaient là, qui étaient ce qu'on appelle des gauchistes,
et c'est en cela que le député m'étonne: il emploie
exactement le langage des gauchistes de ma jeunesse avec lesquels j'ai eu des
discussions dialectiques à n'en plus finir.
Autant j'ai de respect pour les gens de gauche véritable, les
gauchistes m'ont toujours, jusqu'à un certain point, horripilé,
mais, en rétrospective, quinze ou vingt ans après, cela m'amuse.
En effet, la clé du vocabulaire gauchiste, c'est "global". Le
député a employé le mot 25 fois. C'est systémique,
c'est systématique, c'est le Gosplan, quoi. En Union soviétique,
on pratique le Gosplan. Depuis la révolution, ils sont rendus au
nième Gosplan, avec les résultats brillants, d'ailleurs, que l'on
connaît, et il n'y a pas de pays plus systémique, plus
systématique que cette grande nation qui a choisi d'organiser son
économie d'une façon qui ne nous conviendrait pas.
Les approches globales et creuses à la sauce systémique,
à mon humble avis, ne mènent nulle part. Ce n'est pas ce genre de
réflexion qui a conduit à la création pragmatique du
ministère du Commerce extérieur. Cela ne veut pas dire qu'il ne
faut pas faire une réflexion profonde sur l'économie et sur les
stratégies économiques. Or, de ce point de vue et pour
mémoire, je rappelle au député de Nelligan que le
gouvernement du Québec actuel est le seul gouvernement en
Amérique du Nord qui se soit doté de stratégies
économiques profondes, claires, bien étayées,
saluées avec un concert d'éloges par toute la communauté
économique du Québec, mais surtout par des instances majeures de
la communauté canadienne.
Le Conseil des sciences du Canada a affirmé clairement et
à plusieurs reprises que le Québec était la seule province
du Canada qui avait une stratégie de développement industriel. Ce
n'est pas le Gosplan, ce n'est pas la globalisation; ce n'est pas le
système, c'est la vision de l'avenir, c'est l'agencement des politiques
que l'on appelle stratégie. C'est cela que l'on pratique. Et ce serait
un grand malheur que le gouvernement du Québec ou que le Québec
se laisse entraîner par une opposition qui, visiblement, manque de
réflexions et de compétence sur la chose économique dans
quelque vision globalisante qui ne nous mènerait nulle part. Si Maurice
Duplessis, qui a siégé dans cette salle si longtemps, avait eu
une politique systémique, une politique globalisante et qu'il avait
inscrit l'activité économique du Québec dans un plan,
jamais Armand Bombardier n'aurait été nulle part avec une chose
qui était absolument imprévisible dans tout système et
dans tout plan qu'avec un moteur de tondeuse à gazon et deux
chenillettes il pouvait monter un empire économique privé et
dynamique, comme l'est devenu aujourd'hui Bombardier.
Donc, le député a bien exprimé sa pensée.
Elle est le contraire de celle du gouvernement. Remarquez que ce n'est pas
surprenant pour une opposition. Il est bien que ce soit comme cela. Il est bien
que cela
reste comme cela. Le député a aussi évoqué
la question du libre-échange. Je dois vous dire qu'il m'a beaucoup
amusé aussi et je m'amuse considérablement devant la tournure des
événements dans cette affaire, parce que, lorsqu'il y a trois ans
j'ai commencé à parler clairement et ouvertement de la
nécessité d'une plus grande fluidité continentale entre
les espaces économiques des États-Unis d'Amérique, du
Canada et du Québec, indépendamment de toute considération
constitutionnelle, j'ai eu droit de la part de l'Opposition et de son chef, qui
ne participe pas à nos travaux, à des gorges chaudes, à
des quolibets, en disant que ce sont tous des projets irréalistes. M.
Bourassa disait: Jamais le Sénat américain ne voudra entendre
parler de cela. Or, le président des États-Unis d'Amérique
est venu en parler ouvertement ici au Château Frontenac avec le premier
ministre du Canada et on a mis des équipes importantes sur ces
idées que moi-même, comme membre du présent gouvernement...
Et, si le député est sérieux quand il dit - et j'accepte
modestement son constat - que je suis un des ministres économiques qui
comptent, il doit reconnaître qu'en raison de la solidarité
ministérielle, c'est le gouvernement du Québec qui aura
peut-être fait le plus pour faire évoluer la fluidité
économique de l'ensemble du continent nord-américain.
Ce n'est pas le ministre du Commerce extérieur de l'Alberta qui a
fait cela, ce n'est pas le gouverneur du Wisconsin, c'est le ministre du
Commerce extérieur du Québec qui a donné un coup
d'accélérateur fantastique à ce qui est la voie d'avenir,
il me semble, de la constitution de grands marchés, de grands espaces,
avec des centaines de millions de consommateurs solvables.
Déjà les Américains travaillent sur 225 000 000, ce
qui est un chiffre extrêmement impressionnant.
Les Européens depuis la semaine dernière, avec
l'entrée des deux Ibériques dans la communauté, sont
à 335 000 000 de consommateurs dans leur marché intérieur
européen. Alors, les petites batailles d'arrière-garde et les
gorges chaudes de M. Bourassa qui dit que jamais le Sénat ne voudra
entendre parler de cela... D'ailleurs, le Sénat quand il est
allé, il n'a pas entendu parler beaucoup de ce que M. Bourassa a dit. Il
a réuni combien de représentants? Il y a 500 représentants
au US Congress; il y en a eu onze qui sont allés voir M. Bourassa? "Big
event". Si on remet la proportion ici, disons qu'un grand Américain, un
moyen ou un petit vient présenter un projet à notre
Assemblée nationale, toute proportion gardée, il y aurait un
député qui irait. Cela ferait un gros événement
historique au Québec, celai Figurez-vous qu'un Américain vient
nous présenter un projet et que notre ami Guy
Bisaillon se présente là, seul, ou que, malgré son
mérite extrême, notre ami le député et adjoint
parlementaire de Rouyn-Noranda-Té-miscamingue irait rencontrer
l'Américain, cela serait gentil, mais cela ne serait pas un
événement d'envergure occidentale, en tout respect pour notre
Assemblée. C'est cela qui est arrivé aux États-Unis.
Alors, quand M. Bourassa brandit le Sénat américain, il
n'a pas réussi dans toute l'assemblée, Sénat et
Congrès ensemble, à en avoir plus de onze pour entendre parler,
soi-disant, du projet du demi-siècle.
Je veux que cela soit reconnu par les membres de l'Opposition parce que
c'est un fait inéluctable qu'ils ont tiré au flanc dès
qu'on a parlé de fluidité par la bouche de leur chef, par leurs
questions à l'Assemblée nationale et qu'aujourd'hui, prudemment
et d'une façon assez peureuse, ils se remettent dans le "main-stream".
Là, ils sont pour cela maintenant.
Le député a parlé aussi de politique d'achat. Il
l'a eue, sa réplique. Ce n'est pas le gouvernement qui la lui a
donnée. Il a proposé naïvement le désarmement
unilatéral il y a deux semaines. Aucun membre du gouvernement n'y a
répondu, mais les agents économiques lui ont répondu, en
particulier les fournisseurs du matériel qui va représenter des
milliards de dollars dans l'épuration des eaux pour les années
qui vont venir.
Je rappelle au député la fable de La Fontaine, qu'il
connaît peut-être, d'un renard qui, par un accident tragique,
s'était fait couper la queue et voulait persuader les autres de se la
couper. Il disait que ce n'était plus la mode, que cela ne se portait
plus, que cela traînait dans les sentiers fangeux. Un instant! On ne va
pas désarmer. On ne va pas se couper la queue en prétendant que
ce n'est plus la mode de la porter quand l'Ontario va garder une politique
discriminatoire à rencontre de toutes nos productions.
Une entreprise de mon propre comté a été
obligée de déménager, sous peine de perdre les contrats,
une partie de sa production en Ontario parce qu'il y a une clause dans les
conventions collectives des travailleurs de la construction en Ontario qui dit
qu'ils ne posent pas, en Ontario, de matériel fabriqué au
Québec. Est-ce que vous saviez cela, M. le Président? Sans doute
pas. C'est une chose tellement énorme que, quand on m'en a averti, j'ai
dit: Cela n'a pas de sens, ce n'est pas croyable.
Les travailleurs de la construction, en Ontario, par leur convention
collective ne posent pas, dans les constructions, de produits fabriqués
au Québec. Et, dans le cas qui nous occupe, il s'agissait d'un contrat
pour un édifice d'une quinzaine d'étages de tubes de ventilation
fabriqués à Laval, Québec, contrat obtenu parce que
c'était le
plus bas soumissionnaire, le meilleur produit, une meilleure
technologie; contrat cassé à cause de la convention collective
des travailleurs de la construction en Ontario. Ce serait cela, se couper la
queue, que de ne pas se protéger.
Nous avons fait une politique d'achat. Elle a été
conçue au ministère du Développement économique
dont j'avais la charge en 1977, pas cinq ans après notre
élection, mais cinq semaines après notre élection ou
à peu près, parce que nous étions les dindons de la farce
et c'était cela, l'héritage économique libérai: nos
produits discriminés, nos entrepreneurs bafoués. Nous, dans la
naïveté totale et complète: Venez les bénis, venez
dans nos marchés.
Par conséquent, libre-échange ne veut pas dire
naïveté. Le libre-échange ne veut pas dire tourner le dos
à ses intérêts bien compris. Le libre-échange veut
dire: négociation. Le libre-échange veut dire: discussions. Je
pense que je n'ai pas besoin de m'appesantir davantage sur cette question qui
est tellement limpide. Je ne vois pas pourquoi le député a pris
le risque politique énorme d'aller s'embarquer dans ce bourbier qui a
été dénoncé par les entrepreneurs eux-mêmes.
(11 heures)
Le député a parlé des effectifs du ministère
du Commerce extérieur. Je vais lui en parler. D'abord, je lui avais dit:
Un ministère léger, un ministère mobile. Il est
resté léger, il est resté mobile. S'il est vrai... Et vous
ne pouvez pas me reprocher de ne pas augmenter les budgets et de les augmenter
en même temps. S'il est vrai que le ministère du Commerce
extérieur connaît la plus forte augmentation de crédits
pour l'exercice qui vient, c'est parce que le ministère du Commerce
extérieur est aussi celui qui fait le plus de transferts directement
dans la poche des entreprises. On a probablement 50 % de notre budget qui va
directement à la PME.
Nous avons maintenant des milliers de clients. Notre stratégie,
non pas notre plan et notre approche systémique, notre stratégie
était de prendre les PME par la main pour les amener sur les
marchés extérieurs. C'est ce qu'on a fait. Comme le disait Alain
Dubuc, dans la Presse: Petit coup de pouce, mais petit coup de pouce
déterminant et des milliers d'interventions du ministère du
Commerce extérieur sous forme d'APEX régulier ou sous forme
d'APEX plus lourd, APEX marketing.
Alors, le ministère, contrairement à ce que le ministre a
dû faire à certaines périodes de sa vie, n'a pas à
se mettre au "Weight Watchers", d'aucune espèce de manière. Cela
reste un ministère léger, un ministère mobile dont les
augmentations d'effectifs sont toujours liées à la masse des
dépenses qui sont transférées directement aux poches des
entrepreneurs et qui, de toute façon, restent extrêmement
modestes.
On peut y aller d'une façon un peu chiffrée. Au 1er avril
1984, il y avait 199 personnes au ministère du Commerce
extérieur. Au 1er avril 1985, il y a 220 personnes au ministère
du Commerce extérieur, donc, un différentiel, un delta de 10, 5 %
alors que notre budget est en progression absolument spectaculaire. Cela prouve
que l'argent ne va pas dans les poches des fonctionnaires ou dans le
grossissement de la machine. L'argent va dans les poches des entreprises. Il
n'y a pas de démonstration mathématique plus évidente et
plus claire que cela.
Il y a aussi de la confusion technique dans l'approche du
député. Je ne sais pas s'il n'a pas eu suffisamment de temps pour
éplucher nos chiffres. Je pense qu'il reconnaîtra qu'on lui a
remis tout ce qu'il nous a demandé, tous les documents qu'il nous a
demandés. Il y a une confusion parce que, quand il dit, par exemple, que
l'activité économique à l'étranger en ressources ne
progresse pas aussi vite que le reste de l'activité du MRI, disons, mais
on a discuté cela abondamment aux crédits du MRI! C'est vrai
qu'il avait manqué la première séance, pour des raisons
sans doute très valables. Mais le député ne sait-il pas
que c'est le ministère des Relations internationales qui fournit le
soutien au ministère du Commerce extérieur à
l'étranger? Alors, c'est le ministère des Relations
internationales qui loge les gens du MCE, qui fournit les secrétaires,
qui fournit toutes les dépenses de soutien. Alors, quand
l'activité du MCE augmente, il y a un effet symétrique
immédiat dans le budget du MRI parce que c'est le MRI qui fournit les
secrétaires du délégué commercial, etc. Il me
semble que c'est tellement élémentaire en termes de gestion des
finances publiques que le député aurait dû voir cela.
Je termine sur une chose, pas importante, mais qu'il ne faut pas laisser
passer non plus, ce sont les gorges chaudes qu'il a faites des mérites
et des ordres. Premièrement, moi qui suis d'un milieu rural, si vous
étiez venu rigoler du Commandeur du mérite agricole dans ma
paroisse à Saint-Jacques de Montcalm, vous auriez été,
vous, l'objet de la risée générale et de la
réprobation générale. C'est un phénomène
humain, parfaitement compréhensible, que des agriculteurs
méritants, des pêcheurs méritants, des pisciculteurs, des
restaurateurs soient honorés par la collectivité. Je vous dirais
plus que cela. Certains pays ont fait de ces mérites, de ces
distinctions et de ces récompenses une stratégie majeure de
commerce extérieur. La République française en a
donné l'exemple à plusieurs reprises. L'Australie a
utilisé énormément...
Une voix: L'île Maurice.
M. Landry: Je ne connais pas la situation mauricienne, c'est un
des trous qui manquent à ma culture. Peut-être que le
député en dehors des sessions de la commission parlementaire
pourrait m'aider à combler cette lacune, une lacune qui me manque, comme
disait notre collègue d'autrefois, Camille Laurin. Mais, on a, nous, au
ministère du Commerce extérieur un prix qui s'appelle
Stimulexport, 100 000 $ sous forme d'un APEX marketing. Le député
aurait dû assister à la remise du prix. Il aurait dû voir
l'intérêt suscité par le prix. Il aurait dû voir ce
que l'entreprise qui l'a reçu, qui s'appelle Electromed, qui fabrique,
en particulier le détecteur Avion X que nous avons ici à
l'entrée... On consomme nos produits. Je ne sais pas si c'est un effet
de la politique d'achat, de l'excellence de la firme ou des deux, mais c'est un
Avion X fabriqué par Electromed, justement, grand prix Stimulexport de
cette année.
Je trouve cela méprisant. Je trouve que cela manque de
stratégie. Ce sont des choses qui ne coûtent pas cher et dont le
ratio coûts-bénéfices est extraordinairement
élevé.
Je termine ces remarques. Je suis content de les avoir faites.
J'espère que je n'ai pas trop déplu au député de
Nelligan, mais ce qui me chagrine le plus, c'est d'avoir retardé notre
commission d'entendre le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue et adjoint parlementaire.
Le Président (M. Beaumier): Merci. M. le
député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
M. Gilles Baril
M. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue): M. le
Président, d'abord, comme je suis le fils d'un ancien méritas
agricole du Québec, je devrai reprendre le député de
Nelligan pour lui dire que, pour nous, c'est une fierté. Mon père
avait gagné, en 1963, la médaille de bronze pour le mérite
agricole. C'est vrai que, dans la grande aristocratie libérale, les
cultivateurs et les régions, cela ne semble pas être trop
important.
Alors, il est évident que, pour nous, l'agro-alimentaire et ces
mérites-là, c'est en quelque sorte un "challenge", un défi
de l'excellence que les gens veulent atteindre, chez nous, dans la
région de l'Abitibi-Témiscamingue et dans l'ensemble des
régions du Québec.
M. le Président, j'ai assisté, la semaine dernière,
à l'étude des crédits du ministère des Relations
internationales et aujourd'hui à ceux du ministère du Commerce
extérieur. J'ai l'impression que l'Opposition - c'est important de le
signaler - flotte, actuellement, sur des sondages et s'assoit sur une certaine
paresse intellectuelle dans les commissions parlementaires. On n'a pas
d'exposé de fond. On a, effectivement, une analyse globale de la
situation, mais on n'a pas un effort avec un objectif et un souci de recherche
et d'analyse.
Dans certains secteurs comme le domaine du commerce extérieur,
concernant les pâtes et papiers, au sujet du bois, par exemple,
actuellement, le litige qui confronte les exportateurs de la région de
l'Abitibi-Témiscamingue par rapport aux États-Unis, en ce qui
concerne, entre autres, la question du moratoire des États-Unis
concernant l'exportation du bois de sciage au Québec vis-à-vis
des États-Unis... Il est malheureux de voir l'Opposition qui s'assied
confortablement sur certains sondages et ne fait pas son travail d'opposition
actuellement et je le déplore parce que, effectivement, il y aurait des
choses à soulever, il y aurait des choses à souligner. On n'a pas
cet effort de rechercher en profondeur des choses qui permettraient, dans une
discussion positive, d'en connaître davantage sur les points majeurs au
niveau de l'exportation au Québec.
M. le Président, je suis fier d'exposer aujourd'hui un point de
vue parce qu'il ne faut pas oublier que l'Abitibi-Témiscamingue
dépend de l'exportation; 50 % de notre économie régionale
est exportée. Donc, 50 % des emplois chez nous, en
Abitibi-Témiscamingue, dépendent de l'exportation. Alors, pour
nous, c'est important et on doit dire que depuis quelques années,
surtout avec la mise en place du ministère du Commerce extérieur,
on assiste, dans la région de l'Abitibi-Témiscamingue à
une sorte de poussée très intéressante dans tous les
secteurs. Cela part, naturellement, de nos secteurs traditionnels comme les
pâtes et papiers et le bois de sciage, notre 2x4, vers les
États-Unis, mais cela va dans des domaines aussi innovateurs et
inédits que le caviar. On devrait être en mesure, d'ici quelques
semaines, de signer un contrat extrêmement important avec les Allemands
et probablement avec les Chinois dans le domaine de l'exportation de la
chaux.
Pour nous, le commerce extérieur, c'est extrêmement
important. Je dois vous dire que les gens, dans les régions, que ce soit
dans le domaine de la forêt, dans le domaine des mines ou dans le domaine
agro-alimentaire parce que, effectivement, il y a quelques semaines, l'ensemble
des intervenants agro-alimentaires, chez nous, ont mis sur pied un dossier qui
va être envoyé dans toutes les délégations du
Québec à travers le monde pour faire connaître les produits
du domaine agro-alimentaire en ce qui concerne
l'Abitibi-Témiscamingue... Cela part du caviar jusqu'au lapin. Je pense
qu'effectivement cela va permettre à certaines entreprises de chez nous
de
connaître des expansions extrêmement intéressantes
pour les années à venir.
D'autre part, je ne voudrais pas passer sous silence le souci du
défi de l'excellence qui est actuellement l'objectif premier de
l'ensemble de la jeunesse de l'Abitibi-Témiscamingue parce qu'on sait
qu'il y a quelques semaines M. Landry est venu souligner les grands gagnants et
finissants des sciences comptables de la région de
l'Abitibi-Témiscamingue qui se sont classés parmi les dix
premiers au Canada.
C'est très important de le souligner parce que, étant dans
une région très importatrice, notre économie doit
être confrontée à un environnement beaucoup plus
international. Alors, le souci de l'excellence, le défi de l'excellence
est très important. Comme l'a dit le ministre du Commerce
extérieur chez nous, nous devons former des gens extrêmement
compétents pour calculer, en fin de compte, notre 2 X 4 de façon
qu'il soit moins cher sur les marchés des États-Unis et de
l'Europe pour concurrencer les Finlandais et les autres.
Alors, peut-être pour finir, M. le Président, parce que je
serai très bref. La question du libre-échange est très
importante. On se rappellera que le président de l'Association des
manufacturiers de bois de sciage, M. Bienvenu, l'a souligné à
maintes reprises. Le Parti québécois prêche toujours et de
plus en plus une ouverture sur le monde et est capable, effectivement, pour
reprendre une vieille expression de Jack Lang, d'affronter Donald Duck,
c'est-à-dire les Américains à tous les points de vue. Je
pense que les gens du Québec, les gens de l'Abitibi-Témiscamingue
sont prêts à relever ce défi.
Alors, j'espère, M. le Président, sur ce point, que le
Parti libéral apportera une plus grande attention, surtout en ce qui
concerne des dossiers à caractère économique, une
recherche plus approfondie, et permettra à l'ensemble de la commission
parlementaire et à tous les intervenants, effectivement, d'apporter une
discussion positive et d'amener certains éclairages sur certains
dossiers. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Beaumier): Alors, toujours dans le cadre
des remarques préliminaires, M. le député d'Outremont.
M. Pierre-C. Fortier
M. Fortier: Très brièvement, M. le
Président. Je souriais à entendre le ministre du Commerce
extérieur faire certaines remarques qui étaient assez
désobligeantes et qui tranchaient du ton serein qui avait
été utilisé par mon collègue de Nelligan. Je me
demandais pourquoi le ministre qui a, des fois, de bons arguments, cherche
toujours à faire des attaques ad hominem alors que les
députés ne cherchent qu'à faire leur travail dans cette
Chambre.
Mais, sans vouloir aller plus loin dans cette direction, il y a deux
points que j'aimerais souligner. En toute honnêteté, le ministre
doit reconnaître que la politique d'achat chez nous au Québec
existe depuis fort longtemps. Je me souviens lorsque j'étais jeune, il y
avait des sociétés nationalistes qui demandaient à tous
les magasins d'avoir dans leur vitrine une pancarte qui disait: L'achat chez
nous, c'est important. Cela fait depuis plusieurs années que le
Québec a cru nécessaire, et peut-être que cela a
très bien servi la communauté, d'avoir une politique d'achat chez
nous qui a été instaurée bien avant le gouvernement du
Québec par Hydro-Québec elle-même, qui a fait que tous ceux
qui voulaient vendre à Hydro-Québec devaient montrer patte
blanche, devaient démontrer qu'ils existaient bien au Québec, que
leurs bureaux étaient du Québec même. De plus, ils
étaient réconfortés par une marge de 10 % qui les
avantageait.
Le ministre reconnaîtra qu'en particulier - et, moi-même,
venant d'un grand bureau de génie-conseil, j'en ai fait la preuve
à plusieurs reprises - pour leur part, les grands bureaux de
génie-conseil, qui ont pu se développer grâce à
cette politique d'achat, n'ont pas rencontré la même
résistance dans les autres provinces canadiennes. Dans une certaine
mesure, je dirais que cela a bien joué pour les Québécois,
mais il faut bien comprendre que les autres bureaux de génie-conseil en
Ontario et ailleurs se sentent un peu frustrés de voir les SNC et
Lavalin obtenir des contrats d'Hydro-Ontario, des contrats de l'Alberta, des
contrats en Colombie britannique, que ces deux grands bureaux ont des
succursales dans tout le Québec. Je crois que je pourrais nommer un
bureau dans le domaine des mines en particulier qui est encouragé par
SOQUEM, qui obtient certains contrats, mais nommez-moi un bureau ontarien de
génie-conseil d'ailleurs qui pourra obtenir des contrats
d'Hydro-Québec? Je n'en connais pas. (11 h 15)
II faut bien se rendre compte, M. le ministre, que ce que vous avez dit
était légèrement faux, que depuis plusieurs années
je dirais même que cela a peut-être été
encouragé par la communauté québécoise dans son
ensemble, indépendamment de tous les partis politiques. Mais ce que mon
collègue de Nelligan a voulu souligner, c'est que cette politique a
amené les autres provinces à se défendre contre cette
politique d'achat chez nous qui a très bien avantagé de grandes
industries québécoises et en particulier, j'ai nommé: le
génie-conseil.
Ce que mon collègue a évoqué au nom du Parti
libéral du Québec, c'est que de
toute évidence, je me souviens, il y a trois ou quatre ans, le
sous-ministre à l'industrie et au commerce de l'Ontario avait
distribué une brochure sur ce sujet-là. Il évoquait que
cette division du marché à l'intérieur du Canada
n'était pas dans le meilleur intérêt de tous les Canadiens
et qu'on se devait d'attaquer ce problème, de se poser la question
suivante: devons-nous continuer à ériger des barrières
entre chacune des provinces du Canada? Devrions-nous plutôt se poser la
question, à savoir si un marché commun réellement ouvert
ne serait pas plus bénéfique à l'ensemble des Canadiens?
C'est la question que mon collègue de Nelligan a soulevée, c'est
la politique du Parti libéral dont je fais partie. Tout ce que nous
avons dit, c'est que le Québec devrait prendre le leadership comme
l'Ontario avait cherché à le prendre il y a quelques
années. J'admets que c'est plus gênant pour l'Ontario parce
qu'elle bénéficie déjà grandement sur le plan
économique, mais il faut quand même se poser la question.
J'oserais espérer qu'on puisse en discuter aujourd'hui d'une
façon non partisane, à savoir si le ministre du Commerce
extérieur croit, si ses fonctionnaires croient qu'il serait dans le
meilleur intérêt du Québec de s'assurer de plus grands
débouchés dans les autres provinces canadiennes et qu'en
conséquence devons-nous poser des gestes, non pas
unilatéralement, mais devons-nous poser des gestes? Cela n'a jamais
été la politique que mon collègue de Nelligan a
évoquée. Devons-nous poser des gestes? Devons-nous prendre le
leadership de proposer aux autres provinces canadiennes d'entamer des
discussions pour qu'ensemble nous mettions de côté ces
barrières qui ont été érigées au fil des
ans, je dirais, au Québec, depuis que je suis jeune, depuis trente ou
quarante ans?
Donc, c'est la question importante qui a été
soulevée par mon collègue de Nelligan. La rejeter de
côté aussi facilement, M. le ministre, je crois que c'est trop
facile et ce n'est pas dans le meilleur intérêt du Québec.
Parce que je tiens pour acquis que vous et moi et que mon collègue de
Nelligan, autour de cette table, cherchons à évoquer des
politiques qui pourraient améliorer le sort des Québécois.
C'est ce qui compte fondamentalement et cela va au-delà des partis
politiques en présence.
En ce qui concerne les remarques de mon collègue de l'Abitibi qui
disait que l'Opposition manque de profondeur, venant immédiatement
après la lecture du budget du ministre des Finances, cela fait sourire
parce qu'il y a au moins trois ou quatre articles qui ont été
inclus dans ce budget et qui proviennent directement des documents que nous
avons développés depuis six ou sept mois. Quand je pense au fonds
de développement régional qui a été
évoqué à Sept-îles alors que je présidais un
atelier; qu'on pense au document que j'ai moi-même déposé
en décembre dernier sur la nécessité de réviser
toute la question des sociétés d'État; qu'on pense
à l'abolition des droits de succession.
Si on nous accusait dans le passé de manquer de politique, je
crois que le côté ministériel est en mauvaise posture
aujourd'hui pour nous faire cette critique -et je crois que c'est de bonne
guerre lorsqu'on est au gouvernement - puisque le gouvernement s'est
inspiré de mesures qui, de toute évidence, étaient bonnes
puisqu'il s'en est inspirées pour orchestrer, du moins dans le proche
avenir, sa politique économique. Somme toute, je crois que nous avons
joué notre rôle, que nous avons mis de l'avant des embryons, des
propositions de politique économique qui ont été
acceptés par le gouvernement au pouvoir.
J'oserais espérer, M. le Président, que nous puissions
avoir un débat non partisan, surtout ce débat de la politique
extérieure du Québec, ou du moins en ce qui concerne le commerce
extérieur. Même si nous pouvons avoir des divergences d'opinions
ici au Québec, je crois que - et cela vaut dans tous les pays du monde -
lorsqu'on se retrouve à New York, à Washington, à Tokyo ou
à Hong Kong, les Québécois doivent mettre leurs
divergences d'opinions de côté pour assurer le
développement économique du Québec. J'ose espérer,
pour ma part, que ce serait dans cet esprit que les discussions pourraient
être continuées, quitte à démarquer nos
différences d'opinions à l'occasion. Je vous remercie, M. le
Président.
Le Président (M. Beaumier): Merci, M. le
député d'Outremont. M. le ministre.
Réponse du ministre
M. Landry: Je voudrais réagir aux remarques du
député d'Outremont de façon positive à peu
près pour toutes, sauf pour une. Quand je ne suis pas d'accord avec les
idées du député de Nelligan, je le lui dis. Cela n'a rien
d'une attaque à l'homme. C'est une attaque aux idées. Chaque fois
qu'il en émettra une qui me semble contraire aux intérêts
du Québec, je vais lui répondre de façon
systématique, ce qui, évidemment, ne diminue en rien mon respect
pour l'homme. Je ne crois pas qu'il y ait eu dans mes remarques quelque attaque
qu'on puisse qualifier d'attaque ad hominem.
M. Fortier: Quand on parle du trou de l'île Maurice...
M. Landry: Pardon?
M. Fortier: Quand vous avez parlé du trou de l'île
Maurice, c'était aller loin.
M. Landry: Moi, je n'ai jamais parlé du trou de
l'île Maurice. J'ai dit que, dans mes connaissances, il y avait un
trou.
M. Fortier: Oui, oui, c'est un jeu de mots facile.
M. Landry: Non, non, ce n'est pas...
Le Président (M. Beaumier): La parole est au ministre.
M. Landry: Je ne veux pas que le député d'Outremont
m'entraîne dans une chose comme celle-là. Ce n'est pas vrai. Je
reconnais modestement que je ne connais pas l'île Maurice. Est-ce que
c'est injurieux si je demande en dehors des séances de cette commission
à notre ami, le député de Nelligan, qui, me dit-on, en est
originaire, de nous en parler? Je parle de mon bled natal à qui veut en
entendre parler. Je n'ai pas souvent de demandes, remarquez. Mais il n'y a rien
d'injurieux là-dedans.
Revenons maintenant aux remarques sérieuses du
député d'Outremont. C'est peut-être une façon de
s'exprimer, mais quand il évoque les campagnes d'achat chez nous,
j'espère qu'il ne compare pas cela à la politique d'achat du
gouvernement. Ce sont deux animaux d'une espèce totalement
différente. Plusieurs pays, y compris le Canada, en ont eu assez du "Buy
Canadian" et du "Magasinons à la canadienne" avec tous les "jingles"
imaginables autour de cela. C'est pratiqué même aux
États-Unis. Les Britanniques ont utilisé l'Union Jack
déguisé de toutes les couleurs pour promouvoir les produits
britanniques. Cela, c'est de la propagande et de la publicité. C'est un
animal totalement différent d'une politique d'achat.
M. Fortier: C'est dans le même esprit.
M. Landry: C'est dans le même esprit, peut-être, mais
ce n'est pas la même chose que d'inviter les gens à faire une
chose et, dans le cadre d'une politique gouvernementale fondée sur des
arrêtés en conseil, les obliger à le faire. Il y a eu,
évidemment, des mouvements d'achat chez nous au Québec qui,
malheureusement, je dois le reconnaître - et cela me déplaît
quand je regarde en perspective historique le nationalisme
québécois - ne disaient pas "Achetez au Québec", mais
"Achetez d'une origine ethnique particulière". Vous rappelez-vous cela?
Sur cela, une croix, une immense croix. Ce sont des politiques qui, dans le
passé, pouvaient peut-être se justifier pour diverses raisons.
Mais jamais le Québec moderne ne pourrait aller encourager qu'on fasse
une sélection entre un marchand hongrois québécois, comme
le député d'Outremont et moi, ou un marchand qui est né
à Saint-Lin des Laurentides. Je pense que ce sont des histoires
passéistes. Mais tout cela était fondé sur la propagande
et non pas sur les textes.
En 1977, suivant - et là, le député a raison -
l'exemple d'Hydro-Québec qui le faisait depuis 1962 - je crois que c'est
M. Jean-Paul Gignac qui avait été l'artisan de la naissance de la
politique d'achat d'Hydro-Québec - on en a fait une politique
systématique du gouvernement. Je réitère que cela aurait
été de la naïveté de ne pas le faire, parce que tous
nos voisins et concurrents pratiquaient un tel système et, pour nous, ne
pas avoir de système aurait été l'équivalent
d'avoir une attitude naïve.
Il a parlé des bureaux d'ingénieurs-conseils qui n'ont pas
eu de résistance ailleurs au Canada pour leurs services. Pourquoi? Parce
qu'ils sont allés s'installer ailleurs au Canada. Vous connaissez les
équipes importantes que la firme Lavalin a eues et a encore à
Edmonton et à Calgary. Le volume a réduit parce que le boum
pétrolier est chose du passé. De la même manière,
dans la politique d'achat d'Hydro-Québec, une firme ontarienne
fabriquant à Drummondville était admissible, tout comme la firme
Lavalin située à Montréal mais puissamment
installée à Calgary était admissible au contrat.
Voyez-vous, il ne faut pas faire d'erreurs techniques et penser que tous les
Ontariens étaient exclus des contrats québécois
d'Hydro-Québec. Il s'agissait qu'il y ait une base de fabrication ou de
conception ici. Je dirais plus, Hydro-Québec, malgré sa politique
d'achat, a toujours eu une ouverture à l'étranger
considérable. Un des plus grands entrepreneurs sur les chantiers de la
Baie James, sinon le plus grand, qui? Imprégilo Spino. Imprégilo,
filiale de Fiat, grand entrepreneur international est venu avec ses
véhicules, avec son personnel de maîtrise, c'est eux qui ont fait
la grande digue à LG 2 d'ailleurs. Avec un associé
québécois qui était Spino, mais c'était une
multinationale italienne. Le contenu ontarien de la Baie James est
étonnamment élevé. Pourquoi? Parce que lorsqu'on fait des
digues, des barrages ou des chaussées, il faut transporter de la terre
et de la pierre. Or, tout le matériel roulant et le matériel de
traction, sauf pour les choses les plus spécialisées,
étaient fabriqués directement à Oshawa, Windsor et al.
L'Ontario a énormément profité de cela. Le Québec
n'a pas eu du tout une attitude mesquine. Loram-Komo est basée en BC -
vous qui êtes ingénieur-conseil - Loram est une firme de BC, je
crois, ou d'Alberta. Mais vous avez vu l'implication énorme de
Loram-Komo sur les chantiers. Ne donnons pas l'image que le Québec est
mesquin, que le Québec est fermé. Le Québec s'est
donné un niveau de protection comparable à celui que les autres
se donnaient. Cela a dû pas trop mal marcher
puisque le député reconnaît que dans tout cela on a
fait naître trois des plus grandes bottes de firmes de
génie-conseil du monde en utilisant habilement les contrats
d'Hydro-Québec. Pourquoi est-ce que d'autres firmes du Canada n'ont pas
pu atteindre le niveau des Lavalin, des SNC, des Monenco? Je pense qu'il ne
faut pas chercher cela dans les politiques d'achat. Un des principaux facteurs,
à mon avis, cela a été la mobilité culturelle et de
mentalité qu'il y avait à l'intérieur des trois grands. Il
m'est arrivé souvent d'aller travailler à l'étranger avec
des gens de Lavalin ou de SNC en Amérique latine dans la langue du lieu,
en Algérie dans la langue du lieu, en Afrique anglophone dans la langue
du lieu. Les ingénieurs diplômés de l'École
polytechnique et de l'École de génie de Laval ont, comme
caractérisques reconnues mondialement, d'etre ouverts aux diverses
cultures, de parler plusieurs langues et d'avoir acquis cette mobilité
qui est un atout précieux pour le commerce international. Je pense que
c'est là qu'il faut voir le succès des trois grands plus que dans
quelque protection indue qu'ils auraient eue d'Hydro-Québec.
Maintenant, la division du marché canadien. Le
député m'a posé clairement la question et je lui
réponds. Quand je parle de fluidité continentale
nord-américaine - et personne ne nie que j'en ai parlé sur tous
les tons et partout - m'avez-vous entendu exclure le reste du Canada du
continent? Si on s'en va vers une fluidité continentale, elle est
continentale. Elle est Montréal-Boston, elle est Montréal-New
York, elle est Montréal-Saskatoon aussi. J'ai plus insisté sur
Boston et sur New York que sur Saskatoon pour des raisons évidentes. Il
y a pas mal plus d'intérêts et pas mal plus de monde. Mais il
serait incohérent de notre part de préconiser des échanges
économiques plus souples, plus fluides et de dire: Si c'est Sakastoon,
cela ne marche plus. Le député a raison, on doit tout faire pour
que l'économie fonctionne à l'avantage des consommateurs et
à l'avantage des producteurs. Et ceux qui ont les produits de la
meilleure qualité, du meilleur prix sont ceux qui méritent de
vendre ces produits. C'est cela le défi de l'économie
québécoise. Les Québécois ne sont pas frileux sur
cela. J'ai vu des augmentations de nos exportations dans des domaines qui sont
un sujet de fierté énorme. Au cours du dernier exercice pour
lequel nous avons des chiffres: tubes électroniques et semi-conducteur -
ce n'est pas la lampe â pétrole et la broche à foin - 139 %
d'augmentation; matériel commercial de télécommunication:
70 % d'augmentation sur douze mois, à l'exportation; pièces et
accessoires d'autres véhicules automobiles: 53 %; pâtes de bois
-nos traditions - 36 %; autres minéraux non métalliques bruts, 36
%. Le Québec n'est pas frileux sur le plan de la concurrence. Tout ce
que j'ai à dire, c'est que le Québec n'est pas naïf. (11 h
30)
Je pense que quand on nous demande de prendre l'initiative pour
prêcher le libre-échange, prêcher la fluidité de
l'économie, nous l'avons fait. Encore une fois, ce n'est pas mon
collègue, Horst Schmid, de l'Alberta, qui s'est fait le défenseur
de la mobilité continentale, c'est le ministre du Commerce
extérieur du Québec.
Si l'Opposition voulait qu'on prenne l'initiative, qu'elle reconnaisse
que nous l'avons prise, mais si le député veut en faire une chose
non partisane, qu'il nous supporte. Quand j'ai commencé à parler
de cela et que son chef a fait les gorges chaudes, je ne suis pas partisan en
disant cela, il s'est foutu de nous; il disait que ce n'était pas bon et
que les sénateurs américains étaient pour bloquer, etc.
Là, il a été obligé de prendre le train en marche;
ce n'est pas moi qui en fais une affaire partisane. C'est lui qui m'a
attaqué de façon partisane, sans penser que c'était cela
l'idée d'avenir.
Maintenant que c'est l'idée d'avenir, là, on est
obligé de rectifier le tir et cela fait des petites flammèches
partisanes dont je m'excuse auprès du député et du
président.
Le Président (M. Beaumier): Nous aurions terminé
les remarques préliminaires et nous passerions un peu plus à la
ventilation des crédits.
M. Lincoln: On peut passer à la ventilation des
crédits, mais vous ajouterez trois minutes, parce que le ministre a pris
beaucoup de temps pour faire des débats. Moi, j'ai apporté des
questions qu'il me semble...
Le Président (M. Beaumier): Mais, un instant!
M. Lincoln: Excusez-moi, M. le Président, je pense que
c'est important. Je vais poser des questions, mais j'ai envie de diminuer pour
dire une ou deux choses par rapport à ce que le ministre a
apporté, parce qu'il me semble, moi, que ce n'est pas équitable
et si le ministre peut faire des péroraisons de vingt minutes, j'ai
envie de lui dire quelque chose.
Le Président (M. Beaumier): Je suis d'accord, M. le
député de Nelligan, sauf que chacun des membres, ici, a pris le
temps auquel il avait droit. Alors, le député de Nelligan,
allez-y.
Discussion générale
M. Lincoln: D'accord. Tout ce que je voudrais dire au ministre,
très brièvement,
c'est que je sais que les crédits, ici, ne se prêtent pas
à un débat sur des questions fondamentales. Tout ce que j'ai
apporté, moi, dans mon exposé, c'étaient des questions de
fond. Je n'ai pas essayé...
Une voix: Questions de fond?
Le Président (M. Beaumier>. C'est au député de
Nelligan. M. le député, c'est à vous.
M. Lincoln: Si cela amuse la galerie, moi, je veux bien amuser la
galerie, mais j'ai envie de revenir sur ce que j'allais dire. Je n'ai pas
parlé du tout de personnalité; je n'ai pas parlé du tout
de questions... Je n'ai pas fait de sarcasmes personnels. On peut apporter la
question de l'île Maurice, cela ne me fait pas mal du tout. J'ai
vécu au Canada bien plus longtemps qu'à l'île Maurice. Je
m'en balance de ce qui se passe à l'île Maurice, si les gens ont
du mérite ou pas, cela ne m'intéresse pas du tout.
J'ai voulu apporter un exemple dans une situation économique
critique au Québec que leurs priorités sont tout à fait
faussées. Lorsque le ministre dit que j'ai proposé l'abolition
unilatérale de la politique d'achat, c'est clair qu'il n'a même
pas lu le document que j'ai présenté, autrement, il n'aurait pas
dit cela.
Il a cité, par exemple, un article du Devoir. Le Devoir a
isolé une industrie qui s'accommode de la politique d'achat. Mais il n'a
pas cité - peut-être qu'il devrait les contacter; je suis
sûr qu'il a dû les entendre - l'Association des manufacturiers
canadiens, le Groupement québécois des entreprises, la Chambre de
commerce du Québec, la Chambre de commerce de l'île de
Montréal, le Conseil du patronat du Québec et des entreprises -
je pourrais en citer des quantités - des PME, de petites entreprises,
des grandes entreprises.
Ce que nous disons, nous, c'est très bon de faire de grands
discours sur la fluidité continentale. Le ministre rigole des soi-disant
grands termes que j'ai employés: la fluidité continentale.
Qu'est-ce qu'il a fait pour apporter la fluidité continentale? C'est
très beau de dire: C'est nous qui avons pris les devants. Moi aussi, je
peux faire des discours tous les jours sur les marchés communs. Comment
est-ce qu'il pourra ouvrir un marché commun avec les États-Unis,
une puissance de 250 000 000 d'habitants, avant même qu'il puisse faire
un marché commun efficace avec les partenaires à
côté de chez lui, dans un pays où on n'a aucune
barrière juridique entre nous?
Il a cité beaucoup d'exemples de ce que l'Ontario a fait contre
nous et je le conçois, je le conçois tout à fait. Moi,
tout ce que je lui dis, c'est que l'Ontario aussi pourrait citer toutes sortes
d'exemples, et c'est une bataille de coqs. Tout ce qu'on lui dit: Prenez les
devants; prenez des initiatives. Si vous êtes vraiment pour la
fluidité continentale, allez vous asseoir avec M. Miller. Faites venir
M. Miller ici. Lui, il a proposé M. Miller tout récemment, deux
ou trois fois, qu'il est prêt à discuter de la chose.
Il l'a suggéré à la réunion de Regina,
prenons les devants, faisons une réunion pour essayer d'examiner des
politiques communes au sujet des politiques d'achat. C'est cela, notre
proposition; parler, par exemple, du passage de M. Bourassa à Washington
et de dire: II a rencontré onze sénateurs, proportionnellement,
cela fait un député du Québec, quelle stupidité!
Quelle niaiserie de prendre un exemple pareil! M. Reagan est venu ici et il a
rencontré peut-être M. Mulroney; c'est une personne sur 269 dans
la Chambre des communes d'Ottawa. Est-ce qu'on fait des proportions? Dit-on que
c'est une proportion de un contre 269?
Si une personnalité américaine vient rencontrer le
ministre ici, le ministre est seul. Est-ce qu'on dit qu'il a rencontré
un député sur 122, donc que ce n'est pas beaucoup? Cela
dépend qui vous rencontrez. Je ne conçois pas, dans un
débat sérieux, qu'on prenne des exemples aussi ridicules. S'il a
rencontré onze sénateurs américains, c'est plus de
sénateurs américains que beaucoup de gens du Québec ont
rencontrés sur des questions sérieuses comme cela. D'après
tous les articles de journaux que j'ai lus, les gens étaient très
étonnés, au contraire, que les Américains aient pris la
chose tellement au sérieux.
J'ai assisté à une réunion avec mon collègue
d'Outremont à la John Hopkins University, l'école d'études
internationales avancées: les gens qui étaient là,
c'étaient des sommités de leur métier, de leur profession
et de leur vocation internationale. Et dire, aujourd'hui, qu'on écarte
cela du revers de la main, qu'on établit des proportions: cela veut dire
un député du Québec... Cela dépend quel
député du Québec. S'il rencontre un député
du Québec qui n'a aucune assise "executive", je comprends que cela n'a
pas de poids; mais s'il rencontre le ministre, cela aura du poids, même
si c'est un seul ministre.
Je ne veux pas faire une discussion plus longue. Tout ce que je veux
dire au ministre en terminant: On va croiser le fer dans une élection
bientôt. On aura une chance, j'espère, pendant un mois de discuter
de ces choses en profondeur. Je veux bien le jour que le ministre sera
prêt - pendant les élections, on aura un temps égal -
discuter de la politique d'achat avec lui et du libre-échange n'importe
quand. S'il veut aller affronter M. Bourassa c'est encore mieux, parce que lui
est un bien plus grand expert et, sur le marché commun, il est reconnu
au
Canada comme un des plus grands experts sur la question.
Dans ma fonction - je sais que cela fait rigoler les gens,
peut-être qu'eux voudraient aller discuter avec M. Bourassa des choses du
marché commun - en tout cas, si le ministre le veut, n'importe quand,
une discussion à temps égal sur la politique d'achat du
Québec, pour voir si vraiment il a pris des actions concrètes sur
la fluidité continentale et tous les grands mots qu'il utilise...
Le Président (M. Beaumier>. Merci, M. le
député de Nelligan. J'en conclus donc que nous reviendrons
à notre propre mandat qui est l'étude des crédits.
M. Lincoln: D'accord.
M. Landry: Je me servirais, quand même, sans en abuser, de
mon droit d'intervenir à tout moment...
Le Président (M. Beaumier): D'intervenir après
chaque intervention.
M. Landry:... pour une des choses sérieuses sur laquelle
le député fait vraiment fausse route. Quand il parle de
l'Ontario, l'Ontario, précisément, est l'entité politique
au Canada la plus réticente à la fluidité. Si le
député de Nelligan a écouté attentivement ce qu'a
dit le député d'Outremont, il l'a sa réponse. Le
député d'Outremont a bien dit que l'Ontario, coeur industriel du
Canada, a beaucoup plus d'intérêt parce qu'il fabrique beaucoup
plus de choses que n'importe qui d'autre, d'avoir une attitude protectionniste.
C'est cela qui est la réalité. Ce n'est ni M. Miller, ni M.
Grossman qui a parlé de fluidité et je comprends pourquoi. Je ne
dis pas que je les approuve, mais il faut regarder la
réalité.
Je ne suis pas élu député en Ontario, le
député de Nelligan non plus, même si son comté est
légèrement plus à l'ouest que le mien et il devrait garder
cela en tête.
On a fait dans notre juridiction, le Québec, la promotion de la
libéralisation des échanges et de la fluidité, mais on ne
fera le travail ni de M. Miller, ni de M. Grossman qui, eux, pour des raisons
évidentes, sont un peu plus réticents à cela. Ils sont
moins enthousiastes. Je les comprends. Si j'étais dans une position
dominante, comme ils le sont... Je donne un exemple. Le ministre du Commerce
extérieur de l'Ontario, c'est un des hommes les plus comblés de
la terre; 55 % de sa production industrielle est vendue aux États-Unis
le 1er janvier, sans qu'il ait eu même le temps d'offrir ses voeux
à sa famille immédiate. Pourquoi? Parce que l'Ontario a toute
l'industrie automobile du Canada. Et le commerce extérieur de l'Ontario,
pour 55 %, c'est du compte à compte entre Ford Canada et Ford USA, GM
Canada et GM USA. Alors, dans ces conditions, ils l'ont réglé
leur problème. Ils ont un marché commun pour 55 % de leur
production industrielle: le pacte de l'automobile signé il y a plus de
20 ans.
Le député de Nelligan devrait, lui qui veut qu'on fasse
des débats durant la prochaine campagne électorale, prendre ce
thème en note pour qu'on le débatte un bon jour à la
télévision ou devant une assemblée. Si le Québec
avait simplement la production automobile comme l'a l'Ontario, le taux de
chômage ontarien aurait été deux fois plus
élevé que celui du Québec tout au cours des 75
dernières années. Alors, quand on s'apitoie sur les jeunes
chômeurs et le taux de chômage, la larme à l'oeil, on
devrait avoir ce sens des réalités: la structure
économique canadienne a écrit dans les faits que l'Ontario
était dans une possibilité d'avoir, toujours et quelles que
soient les circonstances, le taux de chômage le plus bas ou à peu
près au Canada, parce que les Ontariens se sont pris la grosse part du
gâteau dans une économie industrielle occidentale,
c'est-à-dire l'automobile. Nous, on les achète les camions, les
tracteurs, les voitures particulières. Eux, ils les produisent, ils les
vendent au Québec et aux États-Unis. Je dis cela sur un mode
technique. Je n'ai aucune agressivité contre l'Ontario. Mais encore une
fois, regardons les choses en face.
Le Président (M. Beaumier): Merci, M. le ministre. Alors,
nous passerions à la ventilation des crédits. La parole est au
député de Nelligan et porte-parole de l'Opposition.
Direction générale de la
planification
M. Lincoln: Est-ce qu'on pourrait parler d'abord des
crédits de l'aménagement interne et des structures
administratives? Je parle d'abord de la direction générale de la
planification. Sur le plan de l'organisation administrative, l'organigramme qui
a été approuvé par le document du Conseil du trésor
151675, le 10 juillet 1984, comprend une nouvelle direction qui s'appelle la
direction générale de la planification et de la
coopération économique. Cette direction est dans une ligne
hiérarchique directe avec le bureau du sous-ministre. Elle fait,
dorénavant, le lien avec le bureau du sous-ministre et les trois
directions suivantes: le secrétariat, la direction de l'administration
et du personnel et le secteur de la coopération économique.
Avant la création de la nouvelle direction
générale, ces trois directions, soit le secrétariat, la
direction de l'administration et du personnel et la direction de la
coopération économique entretenaient des liens directs
avec le bureau du sous-rninistre. Est-ce que le ministre ou le sous-ministre
pourrait nous dire s'il s'agit là d'un simple regroupement de ce que
existe déjà dans les trois directions ou s'il s'agit là de
la création d'une nouvelle unité administrative?
M. Landry: Il s'agit surtout pour l'essentiel d'un transfert de
juridiction découlant du protocole que vous avez entre les mains entre
le ministère des Relations internationales et le ministère du
Commerce extérieur. L'élément coopération
économique est maintenant logé au ministère du Commerce
extérieur avec ses moyens et avec une partie de ses effectifs. Cela
explique, en partie, l'apparition spécifique de ce secteur
coopération économique. Vous avez lu que cela relève
directement du bureau du sous-ministre. Oui, toutes les directions
relèvent directement du bureau du sous-ministre. C'est un organigramme
classique. H y a un seul sous-ministre adjoint au ministère et il est
"staff" lui-même. Vous voyez qu'il est dans la ligne hiérarchique
également. Je trouve que la suggestion du député
d'entendre aussi le sous-ministre est excellente. Je vais donner la parole au
sous-ministre du Commerce extérieur, si le président le permet
puisque c'est lui qui donne la parole.
Le Président (M. Bordeleau): Oui.
M. Lincoln: Voici ce que j'aurais voulu demander au
sous-ministre. Auparavant, ces trois directions séparées
relevaient directement de vous. Là, on a interposé cette
direction générale de la planification. Si vous vouliez nous dire
quelles sont les implications de cette nouvelle structure en termes de budget.
Est-ce que c'est une addition budgétaire? En termes de personnel? Quels
sont les objectifs visés à travers la structure? Est-ce que c'est
un regroupement? Est-ce que c'est une coordination, un élément de
coordination? Dans le ministère des Relations internationales, quelle
est la corrélation de cette direction générale de
planification et de coopération économique?
Le Président (M. Bordeleau): Alors, avant de donner la
parole à M. Pruneau, je voudrais simplement vous rappeler qu'en vertu de
nos nouveaux règlements, le sous-ministre qui parle, surtout à
l'étude des crédits, parle en son nom et non plus au nom du
ministre. Alors, M. Pruneau.
M. Pruneau (Roger): Merci, M. le Président.
M. Landry: C'est purement théorique en ce qui nous
concerne.
Le Président (M. Bordeleau): Oui. (11 h 45)
M. Pruneau: Effectivement, M. le député, le
regroupement des trois directions qui étaient, au départ, des
directions autonomes procède, comme le ministre l'a dit, d'un ajout de
personnel au niveau de la coopération économique qui, à
l'époque, était une direction légère au
ministère puisqu'elle était doublée au ministère
des Relations internationales. Maintenant elle va devenir une direction
beaucoup plus importante. Donc, cela nécessite un degré
d'encadrement que je ne peux plus assumer au jour le jour.
La même chose, le groupe à la direction de
l'administration, au ministère du Commerce extérieur, est
très léger. En conséquence, les ressources d'encadrement
sont de plus en plus nécessaires. C'est la raison pour laquelle on a
regroupé ces trois directions pour en faire une direction
générale, portant maintenant le nombre de directions
générales à quatre, comme il était au
départ, et n'ajoutant aucun poste d'encadrement à ce niveau. Ce
sont les mêmes ressources qui ont été redistribuées
de façon différente, sauf pour la coopération
économique, où il y a déjà eu un transfert de trois
postes du ministère des Relations internationales vers le
ministère du Commerce extérieur et où durant le courant de
l'année il y aurait quelques transferts de postes au niveau
professionnel et possiblement au niveau d'un cadre. C'est essentiellement pour
l'organisation du quotidien du ministère, pour libérer mon bureau
du quotidien et essayer de chercher à planifier dans le long terme
l'avenir du ministère.
M. Lincoln: Donc, il n'y a aucune implication budgétaire
ou une implication de personnel. C'est purement le personnel existant dans ces
directions spécifiques qui a été regroupé au sein
de ce...
M. Pruneau: Pour être tout à fait précis, au
niveau de la structure elle-même, ce sont les mêmes directions qui
ont été reportées sous le vocable de la direction
générale. À l'intérieur de chacune de ces
directions, d'une part, à la direction de la coopération
économique il y a eu l'ajout de trois postes et, à la direction
de l'administration il y a eu l'ajout de sept postes, à la suite d'une
demande au Conseil du trésor. Entre autres, le ministère du
Commerce extérieur n'avait pas d'agent payeur, c'était un contrat
de services avec le ministère du Conseil extécutif. Le
ministère du Conseil exécutif n'étant plus capable
d'assumer cette charge, nous avons obtenu le poste pour répondre
à ces besoins. Il n'y a pas de changement de vocation, ce sont les
mêmes vocations avec, dans un cas, trois postes de plus et, dans l'autre
cas, sept
postes de plus.
Les effectifs
M. Lincoln: Ce qui nous amène à discuter des
effectifs en général. D'après ce que j'ai pu calculer dans
le récent livre de crédits - je pense que la date que vous
donnez, c'est le 19 mars 1985 - comme le ministre a mentionné, le MCE a
220 employés permanents, auxquels s'ajoutent 6 occasionnels et 28
contractuels à l'étranger, ce qui fait un total de 254. Vous
dites dans les crédits: Cela représente un accroissement del'ordre de 10 % comparativement aux effectifs permanents du 1er avril 1984,
alors qu'on avait 199 postes permanents contre 220 maintenant. Vous dites que
cette augmentation s'est réalisée à la suite de
l'obtention de nouveaux postes auprès du Conseil du trésor, ce
sont 14 nouveaux postes. Il y a eu 9 transferts de postes provenant de
différents ministères, cela fait 23, auxquels il faut retrancher
2 postes à la suite de la compression d'effectifs exigée par le
Conseil du trésor.
Si, par exemple, on peut voir l'évolution des effectifs à
l'extérieur du Québec, si mes chiffres sont corrects, nous avons
23 fonctionnaires du MCE à l'extérieur du Québec et 28
contractuels pour un total de 51. Nous avons 197 permanents, 6 occasionnels au
Québec, pour un total de 203, donc le total complet est 254.
Ce qu'on peut voir, il y a 17 postes qui s'ajoutent aux effectifs au
Québec et quatre nouveaux postes qui s'ajoutent aux effectifs
extérieurs, soit pour les nouveaux bureaux à Hong Kong,
Singapour, Bogota et Stockholm. Pouvez-vous nous dire le pourquoi de la
création de 14 nouveaux postes?
M. Landry: D'abord, il y a l'expansion du réseau. Alors
là, je pense que cela ne demande pas une réponse très
élaborée. On n'était pas à Hong Kong, on y est,
etc. Il y a aussi l'expansion du volume des activités du
ministère en termes de transfert, par exemple. Si on augmente
considérablement le budget APEX, il est entendu que cela va avoir des
répercussions dans l'administration. On fait des gains de
productivité énormes, la hausse des effectifs n'est pas
proportionnelle à la hausse du budget du ministère, mais, en
dépit des gains de productivité, de l'usage de méthodes
plus compliquées et de l'informatique, il y a un effet sur le personnel
minime et non proportionnel à l'augmentation de l'activité du
ministère.
M. Lincoln: En ce qui concerne les quatre postes dans les
nouvelles délégations étrangères, pourriez-vous
nous dire quelles sont vos prévisions pour l'année en cours?
Est-ce que cela demeure quatre postes? Aurez-vous besoin de personnel
additionnel dans ces délégations? Est-ce que vous prévoyez
une stabilisation?
M. Landry: En termes de postes réguliers, il ne faut pas
s'attendre à des changements au cours des douze prochains mois. Sauf que
vous connaissez notre technique classique qui consiste à engager sur
place des attachés commerciaux. Il se peut qu'on engage des contractuels
sur place, mais tout cela est très lié à la conjoncture.
C'est la vertu des contractuels d'ailleurs. Si un marché est en
expansion, on peut engager des contractuels et si - pour une raison ou pour une
autre: récession dans le pays d'accueil, voile monétaire comme
c'est le cas actuellement en Europe de l'Ouest - on comprime, ce sont les
contractuels évidemment qui sautent les premiers.
M. Lincoln: Tout à l'heure je vous parlais des
dépenses relatives qu'on fait - si notre analyse est exacte, c'est le
but même de notre question - par rapport aux conseillers
économiques et les dépenses qui se font dans le secteur des
relations internationales. Je le conçois et vous l'avez expliqué.
Cela explique en partie qu'il y a du personnel de soutien qui est fourni par le
ministère des Relations internationales et cela, c'est expliqué
dans le protocole d'entente que j'ai lu. Il y a toujours une relativité
parce qu'on parle d'un point de départ qui est le même depuis
disons 1983- 1984. Si on prend 1983-1984, on a dépensé pour la
représentation à l'étranger, soit les conseillers
économiques, tout près de 2 000 000 $, soit 1 951 000 $. En 1984-
1985, c'est monté de 13, 6 %: 2 218 000 $ et dans les crédits
pour 1985-1986 cela se chiffre à 2 360 000 $, une augmentation par
rapport à l'année précédente de 6, 4 %.
Lorsqu'on regarde l'évolution des dépenses de
représentation à l'étranger par rapport au budget des
Relations internationales, les chiffres démontrent que les augmentations
relatives sont beaucoup plus fortes. Par exemple, de 1983 à 1984, on a
augmenté la représentation à l'étranger au sein du
MRI de 27 %, de 13 000 000 $ à 16 500 000 $, de 18, 5 % entre 1984-1985
et 1985-1986, soit de 16 500 000 $ à 19 600 000 $. Ce qui nous frappe,
c'est vraiment qu'en relativité l'effort au point de vue des conseillers
économiques ne semble pas se faire dans la même proportion que
l'effort touchant le personnel de soutien et le personnel des relations
internationales au sein du ministère des Relations internationales.
L'inverse ne devrait-il pas être le cas?
M. Landry: Je pense que c'est parce que vous ne tenez pas compte
d'un élément considérable qui n'a rien à voir avec
le personnel, qui est mécanique et auquel on ne
peut pas échapper. Quand le ministère des Relations
internationales soutient nos agents à l'étranger, il les loge
aussi, les loyers sont compris. S'il y a une flambée inflationniste dans
un secteur où on a des postes et des employés, on n'augmente pas
le nombre des employés mais le budget augmente parce que cela
coûte plus cher pour les maintenir là.
M. Lincoln: Est-ce que je n'ai pas bien compris, par exemple,
qu'avant, les loyers et les immeubles, c'était fait par la fonction
publique, ce ministère?
M. Landry: Non, ce n'est pas tout à fait cela. La gestion
des immeubles était faite par l'ancien ministère des Travaux
publics; aujourd'hui, cela nous a été transféré,
mais le ministère des Travaux publics n'a jamais payé le loyer de
nos fonctionnaires.
M. Lincoln: Mais même en considérant que vous ouvrez
quatre nouvelles délégations et que l'on parle d'un effort de 1
900 000 $ sur un budget qui était alors de quelque chose comme on a
dépensé en 1983-1984, 13 000 000 $, en 1984-1985 18 000 000 $.
Là on va dépenser 24 000 000 $, cette année-ci. Ne
pensez-vous pas que l'effort que l'on fait, la relativité du budget, les
représentations à l'étranger par rapport aux conseillers
économiques, semblent aller en baisse relative? En fait, cela descend de
13, 6 % l'année dernière à 6, 4 % alors que le budget
monte de presque 50 %.
M. Landry: Je vous ai donné un élément dont
vous ne tenez pas compte, le soutien autre que le personnel, mais il y a une
chose à laquelle il faut que vous pensiez aussi. La
représentation économique n'est pas l'apanage exclusif du MCE qui
la coordonne, mais il y a des gens du ministère de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation là-dedans et des gens d'autres
ministères qui sont comptabilisés, mais vous allez retrouver les
salaires de ces gens dans les crédits des ministères
concernés et le soutien au MRI.
Alors on peut affirmer, sans crainte de se tromper, que l'effort de
personnel à l'étranger est dirigé vers les
activités économiques. Je vous comprends des fois de ne pas
toujours le voir parce que ce n'est pas toujours strictement repérable
dans les crédits budgétaires. Je vais vous donner deux exemples:
la déléguée générale du Québec
à New York, Mme Rita Dionne-Marsolais, chef de poste, nommée par
le Conseil des ministres, rattachée au ministère des Relations
internationales, est une personne de profil hautement économique, tout
le monde le sait. Sa carrière est économique, elle est
économiste, elle vient d'Hydro-Québec et de Bio-Méga.
Alors vous ne pouvez pas faire l'équation que, parce que son
rattachement est au MRI, son activité n'est pas en grande partie
économique comme chef de poste. Le second exemple, c'est le nouveau
délégué du Québec à Hong Kong, Jean-Yves
Papineau. Il n'y a pas de profil plus économique que le profil de
carrière de Jean-Yves Papineau qui est le chef de poste; Patrick Hyndman
à Londres, William Siebes à Dusseldorf, Jacques Girard, ancien
fonctionnaire du ministère du Commerce extérieur, qui dirige
notre délégation à Tokyo, son salaire est au MRI
maintenant, ce n'est pas un transfert de l'activité économique de
M. Girard à l'activité culturelle ou politique; M. Bérard
à Chicago. Alors tout cela pour vous dire que notre personnel à
l'étranger est de plus en plus fortement teinté par des profils
économiques.
M. Lincoln: Ne pensez-vous pas alors, d'après ce que vous
dites, que cela renforce notre argumentation voulant que vraiment le mandat du
MRI devient de plus en "plus -vous avez cité l'exemple de la
déléguée générale à New York - quasi
économique dans plusieurs de ses ressorts? Est-ce que cela ne renforce
pas l'argumentation de dire qu'il faudrait presque un ministère unique
ou une formule quelconque où il faudrait situer très clairement
les priorités centrales? Est-ce que la priorité passe globalement
du MRI et du ministère du Commerce extérieur? Quels sont les
priorités et les objectifs par rapport au personnel en
général? Est-ce prioritairement économique? A ce
moment-là, ne faudrait-il pas situer un peu cette priorité en
fonction de la relativité des budgets de chaque ministère? Est-ce
que cela n'évoque pas une coordination beaucoup plus grande, presque une
fusion de ces deux organismes? Ce dont on a discuté l'autre jour. (12
heures)
M. Landry: Je sais que cela traîne dans votre esprit depuis
longtemps. Je vous ai répondu dix fois, je vais vous répondre
encore que je pense qu'il est nécessaire d'avoir deux ministères.
Le chef de poste est dans une situation unique. J'ai donné l'exemple de
nombreux chefs de poste; j'ai dit que leur profil de carrière
était plutôt économique, mais Mme Rita Dionne-Marsolais,
à New York, elle est la patronne des services culturels
également. Elle est chef de poste. Les horizons du conseiller culturel
à New York, l'attaché culturel à New York, je vous jure
que cela n'a rien à voir avec les préoccupations quotidiennes du
ministère du Commerce extérieur. Vous avez ici une équipe
de gens qui, par leur formation, par leur choix professionnel, sont
obsédés par les questions économiques: investissement,
transfert technologique, vente de biens et services. Ils ont besoin du
ministère du Commerce extérieur comme milieu de rattachement,
comme milieu de
références, comme milieu de fertilisation intellectuelle.
Ils n'ont pas le même style d'actions que les conseillers culturels, que
les conseillers de l'immigration - encore qu'il y ait un substrat
économique maintenant dans l'immigration - ou que les conseillers
politiques polyvalents. Je ne dis pas que je ne changerai jamais de doctrine
mais, jusqu'à maintenant, aucun de vos arguments ne m'ont
ébranlé, moi, qui ai à vivre l'existence quotidienne des
deux ministères. Le premier ministre m'a mis dans une position
privilégiée de ce point de vue. Je connais bien le fonctionnement
des deux. Je connais bien les équipes des deux et je crois que deux
ministères doivent être maintenus avec une coordination
très forte, ce que nous faisons par la personne du ministre, par son
cabinet, mais aussi par le protocole que nous avons entre les deux
ministères. Je ne veux pas dire que c'est la perfection, c'est une
question mal réglée. Il y a peu de pays qui s'en sont sortis
vraiment sans tiraillement. Nous avons eu des tiraillements qui ont duré
à peu près douze mois mais il y a des pays qui traînent
cela depuis quinze ans. Même au gouvernement fédéral du
Canada - vous devez parler aux ministres fédéraux et aux
fonctionnaires fédéraux; vous parlez moins aux ministres
fédéraux aujourd'hui qu'avant mais les fonctionnaires vous devez
- ce n'est pas clair. Ils sont trois ministres sur ces questions à
Ottawa, au moins trois. M. Joe Clark, secrétaire d'État aux
Affaires extérieures du Canada, Mme Vézina et M. Keller, ministre
du Commerce extérieur. Chacun a un sous-ministre. Pour les mêmes
raisons probablement que celles que nous invoquons ici à Québec.
Il y a d'autres raisons aussi que j'ai de la difficulté à
préciser. Je vous les ai déjà dites, au moins à
mots couverts. Il n'y a pas de honte à cela mais la mentalité du
commerçant souvent a besoin d'une dose d'agressivité qui n'est
pas toujours conciliable avec la mentalité beaucoup plus harmonieuse et
souple du diplomate. Je veux bien qu'on joue sur toutes les palettes de la
couleur internationale. Je pense que vous me comprenez.
M. Lincoln: Bon, d'accord. C'était une question que nous
voulions soulever par rapport à ces constatations que nous avons faites.
On aurait voulu passer à toute la question des crédits et aux
chiffres globaux de ces crédits pour l'année 1985-1986. Je dois
faire une correction, j'ai fait un lapsus avant en parlant d'une augmentation
de 50 %. Je constate que l'augmentation est de 30 %. Je m'excuse, ce
n'était pas voulu. Je réalise que c'est un peu moins de 6 000 000
$, soit 5 500 000 $. Cela a été une erreur de ma part que je
corrige volontiers. On a augmenté le budget en total de 29 %, environ 5
500 000 $. J'aurais voulu passer un peu en revue l'éventail des
augmentations suivant les directions des programmes par rapport aux
dépenses prévues en 1984-1985. On a considéré
celles qui ont eu des augmentations de plus de 10 %. Par exemple, pour ce qui
est du cabinet du ministre, il y a une augmentation de 20 %.
M. Landry: Pardonï
M. Lincoln: Ce sont les chiffres que nous avons. En 1984-1985,
comparés aux dépenses de 1984-1985, ce ne sont pas les
crédits.
M. Landry: Mais oui! À la page 38, le tableau 13,
comparaison des crédits votés en 1985-1986 et 1984-1985: Cabinet
du ministre, 1, 4 %.
M. Lincoln: Attendez une minute!
M. Landry: À la page 38. Si vous avez une autre page
à me suggérer, je veux bien y aller.
M. Lincoln: Non, on a travaillé sur les pages 31, le
tableau 9.
M. Landry: Page 31, le tableau 9.
M. Lincoln: Oui. Vous aviez un crédit de 514 000 $, on
parle du cabinet du ministre. Pardon, ce sont les dépenses...
M. Landry: Mais là, écoutez. À mon avis,
c'est parce que vous êtes une année en retard. On est sur les
crédits de cette année, pas ceux de l'an dernier.
M. Lincoln: Non, je comprends très bien.
M. Landry: 1985-1986 et 1984-1985, ce n'est pas pareil.
M. Lincoln: Je comprends très bien. Écoutez, il
faut voir la page 31 et la page 38 ensemble, M. le ministre. Si vous voyez
à la page 38 on parle de crédits, les crédits 1984-1985 et
les crédits 1985-1986. Vous avez 560 000 $ de crédits en
1985-1986...
M. Landry: Combien?
M. Lincoln: En 1984-1985, vous avez eu 560 000 $ de
crédits.
M. Landry: Je ne les retrouve pas. M. Lincoln: C'est
à la page 38.
M. Landry: Oui, 568 000 $ de crédits en 1985-1986, oui, je
vois. C'est pour l'année qui vient.
M. Lincoln: Alors cela démontre un écart de 7800 $
et nous sommes d'accord.
M. Landry: C'est l'année qui vient.
M. Lincoln: C'est l'année qui vient: 7800 $, donc un
écart de 1, 4 %. Mais lorsqu'on regarde la page 31, on voit que les
crédits eux-mêmes... On ne s'est pas servi des crédits. Il
faut voir les dépenses actuelles. Les dépenses réelles ont
été de 473 700 $.
M. Landry: Les dépenses ont été moindres que
les crédits.
M. Lincoln: Les dépenses ont été bien
moindres que les crédits.
M. Landry: Oui. Et c'est tout à fait possible, mais c'est
moins probable que ce soit comme cela pour l'année qui vient
également. Mon but n'est pas de dépenser le plus possible dans
mon cabinet, mais de dépenser ie moins possible. Deuxièmement,
dans les années de référence que vous avez, n'oubliez pas
qu'on était en mutation. Normalement, j'aurais eu droit à deux
cabinets mais j'ai choisi de ne pas en avoir deux. J'ai pris 1, 2 cabinet,
disons. La tradition est qu'un ministre qui a deux ministères peut avoir
deux cabinets, deux chefs de cabinet, deux attachés de presse et toute
la kyrielle. Dans certains cas, c'est peut-être nécessaire. Moi,
comme mes deux ministères sont liés à l'activité
internationale, j'ai décidé de ne pas faire cela et de maintenir
autour de moi une toute petite équipe personnelle. Donc, je ne
dépense pas tout l'argent auquel j'aurais pu avoir droit par une
évaluation mécanique. Comprenez-vous?
M. Lincoln: Oui, oui, je comprends. Je vais citer un ou deux
noms. Ce n'est pas une question personnelle du tout, et c'est purement à
titre d'exemple que je les cite. Je fais abstraction des personnes. Ce n'est
pas du tout mon intention... Ce n'est pas donné par poste, c'est
donné par nom. J'ai relevé quelques exemples.
M. Landry: Voulez-vous me donner les pages? Je vais vous suivre
mieux si vous me donnez les pages à chaque fois.
M. Lincoln: D'accord. Je vais vous donner la
référence.
M. Landry: L'annexe 8, Liste du personnel du cabinet du
ministre?
Personnel du cabinet
M. Lincoln: Oui, le personnel du cabinet du ministre. Prenons le
cas de M. Gilles
Gauthier, par exemple. Il y a une augmentation et je voudrais une
confirmation de votre part. Je présume que l'augmentation de salaire de
36 000 $ à 49 000 $, c'est parce qu'il est passé du statut
d'attaché politique à celui de chef adjoint de votre cabinet.
C'est bien cela?
M. Landry: Oui, c'est possible, puisque vous avez le statut
d'attaché politique au 15 août 1983 quand il est entré en
fonction. Maintenant, il est chef de cabinet adjoint, oui. Il y a aussi une
autre raison. Entre-temps, il a obtenu de façon formelle un Ph. D., ce
qui, quand même, est un événement. Non, c'est par
année, c'est le traitement annuel. Alors, il y a deux raisons: il a
changé de fonction, son poste a été
réévalué et, entre-temps, il est devenu détenteur
d'un doctorat.
M. Lincoln: La deuxième chose: il y a deux postes que nous
avons identifiés, celui de Mme Lise Venne et celui de M. Philippe
Châtillon qui, je pense, est votre attaché de presse. H y a
augmentation d'environ 15 %, c'est-à-dire 14, 6 % et 14, 7 %. Est-ce que
le barème général... Quels sont les critères pour
établir les augmentations? Est-ce qu'il y a des critères
gouvernementaux par rapport aux autres ministères, aux autres postes de
chef de cabinet de ministre ou si le pourcentage d'augmentation est
laissé purement à votre discrétion?
M. Landry: À titre de membres d'un cabinet, ils ont une
bonification à cause de la précarité, à cause d'un
tas de choses. En général, les augmentations ne sont pas
régulières et annuelles comme ailleurs et leur rythme annuel de
croissance est plus bas que pour l'ensemble des salaires de la fonction
publique. Ce sont les critères usuels utilisés. Mais ce n'est pas
aussi systématique dans un cabinet que dans une administration de
ministère.
M. Lincoln: Pour ce qui concerne votre directeur de cabinet, son
salaire a augmenté de 57 750 $ à 70 200 $, une augmentation de
21, 5 %.
M. Landry: À quelle page?
M. Lincoln: II n'y a pas de page, c'est l'annexe C, Relations
internationales, 1er novembre 1981, directeur du cabinet. Traitement
annuel.
M. Landry: II n'est pas dans le cahier du Commerce
extérieur, celui-là. Je m'excuse, il est MRI.
M. Lincoln: Oui, mais c'est la question que je me posais. Comment
est-ce qu'on départage, par exemple, dans votre cabinet,
comment décide-t-on que c'est un poste qui va au ministère
du Commerce extérieur? C'est un poste, par exemple, votre chef de
cabinet, est-ce qu'après que ces budgets sont faits, c'est
partagé ou si tout cela est imputé...
M. Landry: Comme cela n'a aucune espèce d'importance sur
le plan administratif, c'est un peu arbitraire. Les uns sont chargés sur
une masse, les autres sur l'autre. C'est l'argent du gouvernement, de toute
façon.
M. Lincoln: Comme on parlait de votre cabinet, je réalise
que c'est imputé au... Mais dans le budget 1985-1986, je voyais que le
salaire qui était indiqué pour M. Roy était de 57 700 $ et
qu'il était inscrit ici dans traitement annuel. C'était la
liste...
M. Landry: Intérieur, à l'époque. M.
Lincoln:... à l'époque, oui.
M. Landry: Je n'avais pas encore transféré parce
que j'ai eu le ministère des
Relations internationales, il y a un an et quelques mois.
M. Lincoln: Oui, d'accord. Mais, dans l'intervalle, ce que je
réalise que peut-être vous pourriez me dire: Ce n'est pas le sujet
parce que son salaire est maintenant payé par le ministère des
Relations internationales, ce qui explique, par exemple, que son salaire
monterait de 57 000 $ à 70 000 $.
M. Landry: Non, ce n'est pas cela. C'est que je l'ai
carrément sous-payé par rapport à la norme pendant au
moins deux ans. Je l'ai carrément sous-payé et on l'a
réajusté à la norme du chef de cabinet dans l'ensemble du
gouvernement avec quelques années de retard. Je ne me vante pas de
l'avoir sous-payé, mais j'ai toujours essayé de comprimer les
frais de cabinet au plus bas, comme je l'ai dit. Je n'ai même pas pris
deux cabinets, j'en ai pris seulement un. Mais là, il est le chef de
deux cabinets.
M. Lincoln: Oui, mais sans...
M. Landry: En pratique.
M. Lincoln:... sans vraiment...
M. Landry: II fait affaires avec deux sous-ministres, il a une
double charge de chef de cabinet et il était beaucoup moins payé
qu'un chef de cabinet à tâche unique. Je pense qu'il est juste,
surtout que ce n'est pas un gars sorti de l'université l'an dernier,
c'est une personne qui, comme moi-même, est presque
quinquagénaire.
M. Lincoln: Encore une fois, j'ai bien envie de souligner la
chose parce que ce n'est nullement mon intention de discuter des mérites
de la personne en question. Au contraire, je suis prêt à accepter.
Je n'en connais pas beaucoup qui ne font pas un travail très valable et
significatif dans votre ministère. Ce n'est pas du tout la question.
Mais, justement, pour fins de comparaisons, cela nous aurait
intéressés de comparer avec le ministère de
l'Éducation où le chef de cabinet de M. Gendron, dans le budget
1985-1986, touche 57 000 $ sur un budget de presque 5 000 000 000 $ et
le...
M. Landry: Sans mentionner de noms, je pense que je connais bien
l'individu et à mon avis, il doit avoir 15 ans plus jeune.
M. Lincoln: II doit... Pardon?
M. Landry: II doit avoir 15 ans d'âge de moins.
M. Lincoln: Ah! Bon! Il y aussi le ministère de
l'Enseignement supérieur où le chef de cabinet, encore une fois,
c'est à peu près la norme. Je me demandais si on avait pris
quatre exemples, c'était toujours dans ce barème?
M. Landry: Pourriez-vous me donner l'exemple du chef de cabinet
du chef de l'Opposition?
M. Lincoln: Écoutez, je ne peux pas vous dire cela. Je
n'en sais rien moi-même.
M. Landry: Alors, je ne suis guère plus renseigné
sur les chefs de cabinet de mes collègues que vous ne l'êtes sur
celui du chef de l'Opposition.
M. Lincoln: Tout ce que je voulais savoir, ce n'est pas cela.
C'est vraiment à savoir s'il y avait sûrement des critères.
Même vous m'avez dit! Écoutez, il était mal payé
comparativement aux autres ministères...
M. Landry: Non, je pense que je vous l'ai dit.
Premièrement, il était sous-payé en égard à
sa formation et à son âge. C'est un gars qui avait une grande
expérience professionnelle, qui est diplômé de
l'École internationale de Genève et qui dirige des cabinets de
deux ministères et de deux ministères assez remuants, avec des
déplacements à l'étranger, etc. Alors, j'ai pensé
que je devais corriger cette injustice tout en restant dans les normes parce
qu'il y a des normes qui plafonnent ces choses et qui... Je ne veux pas le
payer 125 000 $. Ce n'est pas possible. Il y a des normes. Probablement que le
plus payé, c'est le chef de cabinet du premier ministre avec un
traitement comparable à celui d'un sous-
ministre et après cela, en decrescendo dans la pyramide. (12 h
15)
M. Lincoln: Est-ce qu'on aurait pu le voir, par exemple, en ce
qui concerne les directions? Il me semble, d'après les chiffres que nous
avons analysés, que l'importance relative de la direction de la
planification et de la coopération économique et de la direction
générale de l'analyse et de la stratégie, s'est
légèrement accrue par rapport à ce qu'elle était en
1983-1984. Mais ce qui nous frappe, c'est que l'importance relative de la
direction générale de l'expansion des marchés au sein du
budget a diminué progressivement depuis trois ans. En 1983-1984...
Est-ce que vous pouvez me donner la page référence des
crédits? Je vais vous donner la page référence dans...
M. Landry: C'est la page 38, tableau 13, n'est-ce pas?
M. Lincoln: Oui, la page 38, tableau 13. L'importance relative,
depuis trois ans, est passée de 32, 3 % du budget total, en 1983-1984,
à environ 21 %, en 1985-1986. Est-ce que vous pourriez nous dire, par
exemple, quelles sont les priorités d'une direction par rapport aux
autres? Comment établissez-vous les priorités? Pourquoi y a-t-il
un décroissement relatif de la Direction de l'expansion des
marchés par rapport aux autres?
M. Landry: II y a eu des transferts en particulier de ce poste
que vous indiquez, expansion des marchés, à la
représentation à l'étranger que vous retrouvez trois
lignes plus loin. Il y a aussi eu un léger tassement en raison des
coupures et, comme c'est la direction la plus importante en budget, c'est elle
qui essuie le plus en termes de coupures.
M. Lincoln: Est-ce que vous me dites par là qu'au sein des
objectifs eux-mêmes, c'est peut-être la répartition du
travail qui a été donnée à d'autres directions, ce
qui a résulté en un transfert de personnel?
M. Landry: II y a cela en partie, oui, pour la grande partie. Le
phénomène est expliqué en très grande partie par
cela.
M. Lincoln: Pourriez-vous, par exemple, me donner une idée
des priorités par rapport à cette direction actuelle? Lorsque
vous situez le budget, il y a sûrement des priorités. Je
réalise que vous avez réorganisé les directions et les
objectifs. Auriez-vous pu nous situer un peu? La répartition du budget
actuelle traduit-elle les priorités que vous vous êtes
imposées?
M. Landry: Les priorités du ministère ne changent
pas, mais nous cherchons, à l'expérience et aussi en raison de la
conjoncture. Lorsqu'on est en période de récession ou en
période d'expansion, ce n'est pas tout à fait pareil; lorsque
l'Europe marche ou qu'elle ne marche pas, lorsque les États-Unis
marchent ou qu'ils ne marchent pas. Les priorités du ministère
n'ont pas varié, mais la façon de les atteindre en utilisation
des ressources peut varier légèrement pour une infinité de
facteurs qu'on pourrait vous énumérer un à un, si vous le
voulez. Par exemple, peut-être le sous-ministre pourrait-il expliquer ce
qui s'est passé entre la direction générale de l'expansion
des marchés à la représentation à
l'étranger. C'est un phénomène mécanique, mais
c'est un facteur.
M. Pruneau: Puis-je prendre, la parole, M. le
Président?
Le Président (M. Beaumier): Oui, allez- y.
M. Pruneau: Effectivement, la façon de comptabiliser une
partie des augmentations qui étaient données et les budgets
afférents à nos attachés commerciaux à
l'étranger était, à une certaine époque, à
la direction générale de l'expansion des marchés. On l'a
maintenant "repositionnée" à une direction qu'on appelle la
représentation à l'étranger, ce qui explique en grande
partie la décroissance.
L'autre partie est à la suite du suivi de la conjoncture. Ce qui
est devenu de plus en plus important, compte tenu des parités
monétaires sur l'Europe, était de développer des accords
technologiques, des échanges technologiques et la Direction
générale de l'offre, le développement de l'offre à
l'exportation, a vu ses montants augmenter pour prendre en compte cette
nouvelle dimension. Essentiellement, les objectifs globaux du ministère
n'ont pas changé, mais l'actualisation, compte tenu de ce qui s'est fait
sur les marches étrangers, implique des réaménagements
constants.
M. Lincoln: Cela veut dire que, d'année en année ou
de mois en mois, il pourrait y avoir des ajustements qui vont se pratiquer,
mais, au sein d'objectifs globaux, il va y avoir des transferts de directions,
d'après les fluctuations du marché.
M. Pruneau: Vous avez raison, M. le député, et la
vertu d'un petit ministère, c'est d'être capable de suivre,
d'être en mouvance face aux conditions changeantes. Le nombre de missions
que nous avons effectuées dans les années passées est
constamment en révision - et, souvent, nous allons changer de pays
cibles - de même que l'utilisation d'attachés commerciaux dans
les
pays étrangers. Présentement, l'évolution des
parités monétaires dans certaines régions rend très
attrayante l'addition d'un attaché commercial. Nous regardons
constamment ces choses et, en cours d'année, au fur et à mesure
que nos informations augmentent, nous nous permettons de faire certaines
modifications, tout en restant à l'intérieur du même mandat
global et à l'intérieur des mêmes crédits à
être votés par le Parlement.
M. Lincoln: Au niveau des programmes APEX, ce qu'on appelait
autrefois APEX F, aide à la mise en place d'une stratégie de
marketing à l'exportation, le nouveau nom du programme, quand on parle
de l'importance relative des programmes APEX - c'est le programme d'aide
à la mise en place d'une stratégie de marketing à
l'exportation -l'importance relative de ces deux programmes au sein du budget,
nous constatons, pour ce qui est du programme APEX, que le budget consacrait
quelque chose comme 16 % en 1983-1984 contre un peu moins de 11 % en 1985-1986,
tandis que l'autre programme, l'ancien APEX F, aide à la mise en place
d'une stratégie de marketing, est monté de façon
très significative: de 4 % en 1983-1984 du budget total jusqu'à
26 % en 1985-1986. Est-ce que le ministre pourrait nous dire si cela
représente un rattrapage au niveau du programme APEX F ou si c'est le
résultat d'un choix à long terme quant au type de programmes
privilégiés ou prioritaires du ministère?
M. Landry: M. le Président, il y a deux explications: la
première, c'est que l'un est un peu une suite logique de l'autre. Le
programme APEX ordinaire, c'est un programme très léger: billets
d'avion, unités d'hôtel, etc. Avec cela, on fait prendre contact
entre l'entreprise et le marché étranger. Quand cela se
développe d'une façon un tant soit peu favorable et qu'il y a
quelques ventes, à ce moment, suit, logiquement, l'attaque
systématique.
L'attaque systématique, ce n'est pas une nuit d'hôtel et un
billet d'avion, c'est le plan de marketing à l'étranger, c'est la
location de l'entrepôt. Il y a une séquence logique, dans le
temps, de l'évolution - c'est ce qu'on souhaitait, c'est ce qu'on a
réussi - de la mentalité de l'entreprise québécoise
vers l'exportation. Présentement, elle est plus portée sur la
stratégie de marketing que sur le petit APEX plus léger.
Il y a une deuxième raison, c'est la conjoncture. La
stratégie de marketing, 50 % de contribution du client, comme vous le
savez, suivant notre doctrine bien connue, cela coûte cher. Quand les
eaux sont basses, il y a moins de clients. Présentement, les eaux sont
hautes dans l'économie du Québec: 1983-1984, deux années
de croissance économique supérieure à celle du Canada.
Cela paraît dans la liquidité des entreprises, dans les fonds de
roulement et elles sont capables de se payer des stratégies de marketing
dont le ministère paie la moitié. Deux éléments de
la réponse.
Programmes APEX
M. Lincoln: Pour ce qui est des programmes APEX, l'année
dernière, nous avons eu des discussions parce qu'il y a des programmes
où les crédits d'une année sont votés, mais ne sont
pas tout à fait accaparés dans cette année. Alors, il y a
toujours une marge en avant, un roulement qui se fait. Est-ce que vous pourriez
nous situer un peu sur ce qui se passe par rapport aux crédits de
1985-1986, les programmes entamés et qui restent en suspens? Si vous
pouviez nous faire un tour d'horizon de cela.
M. Landry: À cause de nos efforts, bien sûr, mais
peut-être à cause de votre aide aussi, de vos questions de l'an
dernier et de la conjoncture. Quand cela n'allait pas, que les gens ne
voulaient pas sortir parce qu'il y avait des exiguïtés
intérieures, on dépensait moins. Là, on s'en va vers
aucune péremption de crédit dans l'APEX. C'est un problème
qui est vraiment dans notre dos, des choses du passé.
M. Lincoln: Vous vous dites alors que les budgets votés
dans une année seront pratiquement consommés dans cette
même année?
M. Landry: Je ne dis pas presque... Globalement, on n'aura pas de
péremption importante de crédit.
M. Lincoln: L'année dernière, je vous avais
interrogé à ce sujet-là, je pense qu'on avait eu une
discussion.
M. Landry: Notre tableau était moins bon l'an dernier, je
le reconnais, je vous l'avais dit d'ailleurs.
M. Lincoln: Oui, je me souviens très bien. Sur toute la question
du suivi des programmes APEX pour savoir justement si quelqu'un avait
l'obtention d'un crédit, comment l'utiliserait-il? Comment ferait-on le
suivi et le "monitoring" de ces crédits APEX? Là, on avait eu
toute une discussion là-dessus et j'aurais voulu savoir ce qu'il s'est
fait par rapport à l'année dernière pour le suivi. Est-ce
que le suivi a eu un effet sur le fait qu'il y aura moins de péremption?
Est-ce que cela vous a aidé à faire un tri?
M. Landry: Oui, on a considérablement
resserré notre gestion. D'abord on a une série de
critères, beaucoup plus clairs, beaucoup plus rigoureux.
Deuxièmement, on a un comité, un genre de jury
d'évaluation des dossiers, présidé par le sous-ministre
adjoint lui-même, qui fait que là on a une bonne vision des choses
et on paie sur facture.
M. Lincoln: Est-ce que par rapport à l'année
dernière ce suivi est plus systématique, le fait de confier cela
à un sous-ministre adjoint qui suit le programme de beaucoup plus
près? Est-ce que cela vous a porté à
réévaluer, changer, modifier ou améliorer les
critères de sélection du programme APEX?
M. Landry: On a même des critères approuvés
par le Conseil du trésor maintenant et qui seront publicisés dans
les jours qui viennent. Cela a été approuvé, hier, mais on
les pratiquait avant.
M. Lincoln: Est-ce que le ministre pourra nous remettre une copie
de ces documents lorsqu'ils seront approuvés?
M. Landry: Volontiers, puisque ce sont des documents que la
clientèle doit connaître. D'ailleurs cela fait partie denotre catalogue d'une certaine manière alors dès que cela
sera disponible sous forme convenable, vous les aurez.
M. Lincoln: À titre d'information, est-ce que vous
pourriez nous dire, pour quelqu'un qui fait une demande d'APEX, pour une firme
moyenne, combien de temps cela vous prendrait pour évaluer selon vos
critères, pour accorder un crédit, pour notifier la firme, dans
quel délai, etc. ? Est-ce que cela se fait très vite?
M. Landry: J'imagine que vous parlez toujours de l'APEX
marketing?
M. Lincoln: Oui, l'APEX marketing. Excusez!
Le Président (M. Beaumier>. Oui.
M. Pruneau: Si M. le Président me permet.
Le Président (M. Beaumier): M.
Pruneau.
M. Pruneau: M. le député, nous avons eu, l'an
dernier, compte tenu de la demande qui était très croissante,
quelques difficultés à satisfaire des délais qui auraient
été de la nature que nous aurions aimés. Nous avons
maintenant restructuré notre programme, nous avons maintenant des
critères que la clientèle va bien comprendre, des critères
qui sont également des critères classants qui vont nous permettre
immédiatement d'établir le degré de support que nous
devrions apporter à l'effort de marketing de l'entreprise.
Nous sommes toujours à la merci de la demande. Si la demande
devait devenir exubérante - et je l'espère - il est possible
qu'avec les ressources que nous avons pour traiter ces documents, cela prenne
un peu plus de temps que prévu. Cela dit, si nous avions le volume que
nous avons eu l'an dernier, qui était un volume suffisamment important,
nous avons approuvé 109 demandes de prêts après analyse,
parce que ce sont des stratégies de mise en marché... si nous
devions avoir le même volume, dis-je, je crois qu'à
l'intérieur d'un mois, nous serions en mesure de répondre
affirmativement ou négativement à l'entreprise, selon le cas, ce
qui n'exclut pas, durant cette période de temps, des contacts directs
avec l'entreprise pour lui demander des ajouts d'information et participer avec
elle à l'élaboration, à la modification de la
stratégie si nous le jugeons opportun. (12 h 30)
M. Lincoln: Vous parlez de 109, c'est 109 acceptées sans
doute?
M. Pruneau: Oui, acceptées.
M. Lincoln: En général, combien de demandes
recevriez-vous pour 109 acceptées? Est-ce beaucoup plus...
M. Pruneau: L'an passé, 209.
M. Lincoln: C'est à peu près 50 %
d'acceptées.
M. Pruneau: Oui. Le comité qui revoit la stratégie
de la mise en marché est non seulement utile pour assurer une bonne
utilisation des deniers publics, mais il est également très utile
à l'entreprise. Des gens d'expérience siègent à ce
comité qui souvent, dans leurs recommandations, donnent de nouvelles
indications à l'entreprise, ce qui lui permet de mettre sur pied une
meilleure stratégie de mise en marché.
M. Lincoln: Y a-t-il une attitude différente par rapport
aux entreprises qui répètent l'expérience APEX et les
entreprises initiales? Je suppose qu'une entreprise qui a déjà
fait une demande a bâti une crédibilité ou une
non-crédibilité. Est-ce qu'il y a une approche tout à fait
différente par rapport aux demandes initiales?
M. Landry: Cela va plus vite, évidemment, si la
crédibilité de l'entreprise est établie. Il y a aussi des
critères de non-répétition dans un certain
délai.
M. Pruneau: C'est surtout pour les
programmes APEX réguliers. Nous avons une limite qui est toujours
de trois sur un même marché à l'intérieur de deux
années financières pour éviter de développer une
clientèle captive.
M. Landry: Cela pourrait être trois aux États-Unis,
trois en Europe de l'Ouest.
M. Pruneau: Cela pourrait être trois aux États-Unis
et trois en Europe de l'Ouest pour développer des marchés
différents. L'aide du ministère doit être perçue
comme une aide pour connaître un marché, dans un premier temps, et
pour tenter une implantation, dans un deuxième temps, avec l'APEX
marketing. Évidemment, si la conclusion de l'APEX marketing est telle
que l'entreprise veut continuer ses activités sur ce marché,
alors les programmes de la SDI-exportation, qui sont menés
conjointement avec les ministères des Relations internationales et du
Commerce extérieur, sont les programmes pour une implantation plus
longue.
M. Lincoln: Oui, je comprends.
Pour ce qui est du programme APEX et du programme APEX marketing, est-ce
que je comprends bien, selon vos réponses, que l'objectif est d'essayer
d'attirer de plus en plus de demandes initiales et d'augmenter
l'éventail des firmes qui vont postuler?
M. Pruneau: Tout à fait, c'est le défi que s'est
donné le ministère, depuis sa création, d'augmenter le
nombre d'exportateurs. C'est évidemment de plus en plus difficile au fur
et à mesure que les années passent, mais il reste encore une
bonne clientèle à développer. La direction
générale du développement de l'offre à
l'exportation a un rôle clé à ce niveau. C'est elle qui
doit dénicher ces nouveaux exportateurs, les former, dans un premier
temps, et les programmes APEX, régulier et mise en marché,
viennent en aide à leurs efforts lorsque les gens sont prêts
à aller à l'étranger.
M. Landry: II y a une dimension des choses qui n'est pas
abordée aux crédits et que vous ne devez pas oublier. Nous avons
également juridiction sur la SDI-exportation, laquelle prend le relai
après un premier APEX marketing avec d'autres instruments d'intervention
qui sont le Crédit implantation.
M. Lincoln: J'aurais des questions au sujet des contacts avec la
SDI-exportation plus tard. Je n'ai pas oublié cet
élément.
M. Landry: C'est pour vous expliquer qu'il y a rarement deux APEX
marketing.
M. Lincoln: Oui.
M. Landry: Quand il y a eu un APEX marketing, on est mûr
pour les programmes de la SDI.
M. Lincoln: Au sujet du suivi de l'année dernière,
que vous avez commencé sur les projets APEX, est-ce que vous êtes
en mesure maintenant de déceler des statistiques valables du nombre de
faillites dans ceux qui ont fait une demande, dans leur projet, et du nombre
de...
M. Landry: Du nombre de?
M. Lincoln:... succès?
M. Landry: Ah oui!
M. Lincoln: Est-ce que vous avez des...
M. Landry: II y a une bonne enquête sur cela. D'abord, des
malheurs, on n'en a pratiquement pas eu, on en a eu un. Une faillite dans toute
la clientèle, est-ce cela? On a cette information; on a travaillé
là-dessus ce matin et, là, on la cherche.
M. Lincoln: Peut-être qu'on peut y revenir, M. le
ministre.
M. Landry: Oui. Là, il y a un petit problème. Je ne
peux pas vous donner le nom des firmes, vous comprenez pourquoi.
M. Lincoln: Oui, on comprend très bien.
M. Landry: J'en ai vingt qui ont reçu en APEX,
globalement, 609 000 $ et elles ont vendu immédiatement 17 000 000 $.
Elles ont maintenu ou créé - dans le cas où on a les
données et, dans plusieurs cas, on n'a pas les données - 166
emplois. Sur cet échantillonnage de vingt, vous voyez que pour 600 000
$, 17 000 000 $ de ventes, c'est un ratio bénéfices-coût
absolument extraordinaire.
M. Lincoln: Est-ce que les vingt dont vous parlez - vous avez
parlé d'une centaine - est-ce que ces vingt, c'est une sélection
que vous faites pour le suivi ou bien c'est vingt parmi d'autres? Est-ce que
vous les suivez toutes? Est-ce que vous en suivez une partie? Est-ce que vous
suivez une sélection de firmes dans un secteur cible ou des secteurs
géographiques?
M. Landry: On les suit toutes. Celles que je vous ai
données, c'est sûr que c'était complètement
terminé, de l'initiation du processus jusqu'à la conclusion de la
vente.
M. Lincoln: Est-ce que c'est le genre d'information - sans qu'on
s'intéresse au nom
de la firme, parce que je comprends la confidentialité - qu'on
pourrait avoir pour nos dossiers?
M. Landry: Sans avoir le nom? M. Lincoln: Sans avoir le
nom.
M. Landry: Ah oui, je pourrais vous faire la firme no 1, no 2, no
3.
M. Lincoln: Oui, merci.
M. Landry: Cela se fait. Mon tableau, c'est très simple.
C'est, disons, la firme A, contribution du MCE, 30 000 $; ventes induites, 3
300 000 $; emplois maintenus et créés, de 30 à 60. J'ai
cela en colonnes.
Budget et dépenses
M. Lincoln: Est-ce qu'on pourrait passer, M. le ministre,
à la page 30, budget et dépenses? Pour ce qui est de la
modification des crédits pour l'exercice 1984-1985, nous avons
l'augmentation des effectifs, 152 875 $. Ensuite, il y a trois projets
spéciaux, 1 250 000 $, et trois virements techniques en
supercatégorie de l'ordre de 598 000 $.
Pour ce qui est des trois projets spéciaux, il y en avait un
à CEGIR pour 115 000 $. 11 y en avait un aux Camions Pierre Thibault
pour la construction de la papamobile, 85 000 $, et, ensuite, une subvention
à BG Checo International pour la réalisation de six projets
d'électrification en Amérique latine, en Afrique et en Asie pour
1 050 000 $.
Pour ce qui est de la subvention à CEGIR, est-ce que
c'était bien l'étude que vous aviez - pour me rafraîchir la
mémoire demandée à CEGIR par rapport à
l'établissement de contacts avec des milieux financiers du Sud-Est
asiatique? Est-ce que c'était bien cela?
M. Landry: C'est bien cela.
M. Lincoln: Est-ce que vous pourriez nous dire quelle est la
conclusion de tout cela? Est-ce que cela a apporté des conclusions
concrètes?
M. Landry: II s'agissait de la première phase d'une
étude en deux phases; la première phase est
complétée. Cette première phase tournait, comme vous le
savez, autour des institutions internationales et multilatérales de
financement et cela nous a permis d'aller trouver à l'intérieur
des dossiers de ces agences de financement multilatérales les projets
qui pourraient être intéressants pour nos entreprises. On peut
dire que le but de l'opération a été atteint.
M. Lincoln: Est-ce que CEGIR fait maintenant une seconde phase ou
est-ce que la seconde phase est pour plus tard?
M. Landry: En négociation, le projet de seconde phase.
M. Lincoln: À un moment donné, il y a eu confusion
dans notre esprit. On a posé la question l'année dernière
et il y a eu une confusion. On ne sait pas comment cela est arrivé;
peut-être que CEGIR ou une firme québécoise allait presque
représenter le Québec dans le milieu. Ce n'était pas du
tout cela, c'était purement une étude de consultation, une
étude sur le terrain.
M. Landry: Bien que souvent la marge est mince. Quand CEGIR se
présente à la Banque mondiale et dit: Je suis consultante du
gouvernement du Québec, je veux avoir accès aux dossiers, ce
n'est pas le gouvernement, mais c'est son mandataire.
M. Lincoln: Oui, d'accord. Pour le moment la première
phase est terminée.
M. Landry: Oui.
M. Lincoln: Est-ce que cette étude est disponible? Est-ce
le genre d'étude qu'on peut lire et connaître?
M. Landry: Je vois d'ici quelle serait la difficulté. Si
je rends l'étude publique, je peux permettre aux contribuables de
l'Alberta d'en profiter sans qu'ils n'aient contribué. Alors, ce sont
des documents hautement stratégiques pour nous. On le fait pour se
donner un avantage de la situation à nous et à nos firmes, mais
on ne veut pas que cela se répande plus que cela.
M. Lincoln: Est-ce que cette étude est disponible à
titre confidentiel à l'Opposition?
M. Landry: Pour examen.
M. Lincoln: Merci. Pour la dernière subvention à BG
Checo International, est-ce que vous pourriez nous dire où en sont ces
projets et quel en a été le résultat? Excusez, M. le
ministre, de vous interrompre, mais je vois dans les crédits
périmés... Est-ce qu'il y a une connexion entre les deux?
M. Landry: Oui, il y a une connexion.
Crédits périmés
M. Lincoln: II y a 850 000 $ qui ont été
périmés. Si vous voulez bien nous parler de la
différence.
M. Landry: II y a une connexion. Ces six projets sont dans six
pays différents,
n'est-ce pas? Cela demande des négociations longues et ardues
avec des pays de différentes mentalités. Pour la Malaisie et la
Thaïlande, les négociations sont pratiquement terminées.
Pour l'Amérique latine, c'est en phase finale de négociation, il
y a deux ou trois pays en Amérique latine. L'Asie, c'étaient
quels pays?
Une voix: Malaisie et Thaïlande.
M. Landry: C'est terminé pour les négociations. On
va au rythme des négociations avec les pays d'accueil.
Évidemment, un contrat est un contrat et quand les deux parties sont
prêtes, on signe. Des fois, elles ne sont pas prêtes
indépendamment de l'exercice financier du gouvernement, ce qui fait
qu'on a eu 150 000 $ de périmés.
Une voix: Plus que cela.
M. Landry: On a eu 850 000 $ de périmés.
M. Lincoln: Ce que je comprends, du montant de 1 050 000 $ qui
avait été crédité ou obtenu, on a
dépensé 200 000 $ jusqu'à maintenant?
M. Landry: Oui. Le reste, on va tout le débourser et le
reporter à l'exercice suivant.
M. Lincoln: Est-ce que les 850 000 $ vont être
reportés aux crédits de cette année? Vous dites que cela
va en être une partie? Ou est-ce que ce sont des crédits
spéciaux qui sortent du Conseil du trésor.
M. Landry: Non. On s'est engagé auprès de BG Checo
à cette contribution, évidemment, à la condition que les
négociations aboutissent; on ne va pas donner de l'argent pour pas de
contrats. Si les contrats se font, les montants sont
dépensés.
M. Lincoln: D'accord. Ensuite, il y a le point 3. Il y a trois
virements techniques en supercatégorie de l'ordre de 598 000 $.
Pourriez-vous nous donner un rapport de la situation par rapport à cela?
(12 h 45)
M. Landry: L'essentiel est un virement technique régulier
à APEX qui est tombé en eaux basses à un certain moment de
l'année. Comme la demande était forte, on a fait ce virement
technique avec les autorisations habituelles. Les autres, ce sont des
détails: il y a 20 000 $ de meubles, je pense, 20 000 $ de prêts
et avances, et il y a 78 000 $ d'éléments mobiliers, des
ordinateurs, des éditeurs de textes, des machines à traitement,
etc., pour faire des gains de productivité.
M. Lincoln: Dans les crédits périmés, il y a
justement un poste de 413 000 $ par rapport au report de projets et à la
non-réalisation d'activités prévues par les entreprises
dans le programme APEX marketing. Est-ce que je peux présumer que dans
le programme APEX vous aurez toujours quelque chose qui se détache, des
projets qui n'aboutiront pas pour une raison ou pour une autre?
M. Landry: II y aura toujours des projets qui n'aboutiront pas.
Cela peut dépendre de la conjoncture intérieure de la firme. Je
vous ai dit que, sur l'ensemble de la clientèle de cette année,
on a eu une faillite. En faillite, tout arrête. Il y en a d'autres qui,
sans être en faillite, sont en butte à une conjoncture du pays
d'accueil défavorable; alors, elles vont arrêter les
opérations. Elles peuvent se tromper, mais persévérer,
c'est plus grave. Alors, elles vont arrêter. C'est la fatalité des
programmes APEX: programmes souples, ministère mobile.
Réseau international d'échanges
d'information technologique
M. Lincoln: Est-ce qu'on pourrait revenir en arrière,
à la page 6 du cahier des crédits, aux faits saillants de
1984-1985? À la fin de la page, vous parlez de la mise en place d'un
réseau international d'échanges d'information technologique, qui
compte maintenant 117 correspondants répartis aux États-Unis, au
Canada, dans les pays Scandinaves, etc. Est-ce que vous pourriez nous dire
exactement ce qu'est ce réseau? Depuis quand est-il opérationnel?
Est-ce que les correspondants sont des correspondants physiques, des
correspondants par informatique? De quoi s'agit-il?
M. Landry: En général, ce sont des associations
professionnelles dans les divers pays ou des agences gouvernementales qui
s'occupent de ces transferts de technologie. Dans certains cas, ce sont des
accords poussés; dans d'autres, ce sont juste des correspondants. J'ai
la liste ici... Oui, voilà la liste des correspondants. On en a 5 en
République fédérale d'Allemagne, 34 en Angleterre, 19 aux
États-Unis, 11 en France, 8 en Finlande, 4 au Canada, 7 au Danemark. Il
y en a 117 et ce sont des gens avec qui on est en contact.
M. Lincoln: Est-ce qu'ils ont un statut de contractuel par
rapport au gouvernement du Québec ou au ministère?
M. Landry: Non.
M. Lincoln: Les liens qui s'établissent, est-ce que ce
sont des liens informels, des liens de contrat?
M. Landry: Tous ces regroupements sont à but non lucratif.
Ce sont des entités qui, dans leur propre pays, sont en contact avec
plusieurs entreprises mais à but non lucratif, un peu à la
manière d'une chambre de commerce, et c'est avec elles qu'on est en
contact. Donc, il n'est pas question d'argent. Elles nous rendent service, on
leur rend service, on est sur une base de troc. Je pourrais déposer
cette liste, mais il se pourrait très bien qu'un fonctionnaire malin
d'une autre juridiction, par exemple, l'Ontario, vienne profiter des fruits de
notre travail, qu'il prenne la liste et qu'il aille les voir tous, les uns
après les autres. Je ne dis pas cela par méchanceté pour
quiconque, mais c'est la concurrence. Nous, on est dans le commerce
extérieur, on n'est pas là pour donner nos informations aux
autres, sauf à nos propres firmes. Vous comprenez?
M. Lincoln: M. le ministre, si vous pouviez...
M. Landry: Si j'ai dépensé, je ne sais pas combien
d'argent des taxes des Québécois pour faire une aussi belle liste
et que cela va profiter aux riches contribuables de l'Alberta, je ne serai pas
content.
M. Lincoln: Si vous pouvez prendre ma parole...
M. Landry: Totalement, M. le député.
M. Lincoln:... je peux vous assurer que, moi aussi, j'ai les
intérêts du Québec bien à coeur. Ce n'est nullement
mon intention de passer cela surtout aux gens de l'Ontario ou de l'Alberta qui
nous font concurrence.
Je réalise qu'il y a toujours des fuites dans le système,
qu'il peut y avoir maldonne, mais je peux vous assurer que ce sera gardé
en toute confidence.
M. Landry: Je vous crois et je ne dépose pas la liste,
mais je fais en sorte que le député l'ait.
M. Lincoln: Merci. Par rapport à ces informations
technologiques que vous allez puiser à l'étranger - je
présume du nombre de correspondants que vous avez, 117, que cela peut
être assez extensif, assez large -comment effectuez-vous le lien ou la
distribution de cette information au milieu des affaires, au milieu des
exportations, aux intervenants du milieu?
M. Landry: II y a deux méthodes: d'abord, il y a un cahier
- je pense qu'il est déjà déposé à cette
table - des offres de technologie du Québec et des demandes de
technologie du Québec. Ce cahier, par ailleurs, est anonyme pour des
raisons de stratégie. Cela marche par numéro.
Lorsqu'une firme se dit intéressée, soit du pays
étranger vers le Québec ou vice versa, à un transfert de
technologie, on fait le contact de firme à firme, l'anonymat se termine
et on entre dans des opérations concrètes de firme à
firme. Je vous l'ai déposé, ce cahier?
M. Lincoln: Oui, j'ai le cahier ici.
M. Landry: Vous l'avez. Vous voyez là-dedans qu'il n'y a
pas de noms d'entreprise pour des raisons évidentes.
M. Lincoln: Oui. Le réseau d'information, si je le
comprends bien, se fait à travers toutes les organisations dans le pays
2 et, là où nous avons une délégation, cela se fait
à travers notre délégation et nos conseillers
économiques qui filtrent l'information vers les directions
appropriées, ici, au Québec.
M. Landry: Parfaitement.
M. Lincoln: Vous dites plus bas: mise en place d'une banque
d'offres à l'exportation avec un logiciel d'exploitation permettant
d'obtenir des données d'ordre technologique, financier, commercial et
juridique auprès de 2500 entreprises. On avait parlé, je pense,
d'une banque d'information. Est-ce que c'est la banque d'information que vous
deviez commencer? Avant, on l'obtenait à travers la SDI ou la
SDI-exportation et vous deviez en commencer une à vous. Est-ce que c'est
bien de cela dont on parle ici?
M. Landry: Cela n'a absolument aucun rapport. J'ai un
échantillon. C'est cela que ça donne comme information sur chaque
entreprise. Vous pouvez voir, d'après le format, que tout cela est
mécanisé et informatisé. Ce sont ce qu'on appelle des
"printouts". On a le nom de l'entreprise. On a ses adresses de correspondance,
ses officiers supérieurs, et même leurs numéros de
téléphone. On a le nom des produits. On a les marques de
commerce. On a leurs points de vente à l'étranger. Dans le cas de
l'entreprise en question, il y a une série de points de vente à
l'étranger. On a les ventes annuelles réparties au Québec,
dans les Maritimes, en Ontario, dans l'Ouest, au Canada, le total, à
l'étranger.
On a un relevé de leurs accords industriels, avec qui elles ont
signé des accords industriels concernant quels produits. On sait si
elles ont participé à nos missions ou si elles n'ont pas
participé à nos missions, si elles ont reçu des acheteurs
étrangers ou si elles n'en ont pas reçu, si elles sont
allées à des foires et à des expositions. Bref, une banque
intéressante de données à l'exportation. On a combien
d'entreprises?
Une voix: 2005.
M- Lincoln; On dit 2005.
M. Landry: 2005 documents comme celui que j'ai à la
main.
M. Lincoln: Comment coordonne-t-on ces données? Est-ce que
certains ministères ou départements fédéraux, par
exemple, le MEER, ont une banque de données comme cela où sont
gardées des données sur les entreprises? Est-ce qu'il y a une
coordination quelconque qui se fait pour éviter des dédoublements
de coûts et d'informatisation?
M. Landry: Toute information en provenance du
fédéral, on l'inscrit dans notre banque. Alors, on ne
redépense pas d'argent pour collecter de l'information qu'un autre
percepteur de taxes au Québec a déjà collecté. Mais
une chose que je dois vous dire, M. le Président: le gouvernement du
Canada voudrait nous imiter. Grand bien lui fasse, il devrait faire cela dans
beaucoup de choses! Dans le domaine de la stratégie industrielle, en bon
gouvernement bien géré, la nouvelle équipe au pouvoir
à Ottawa pourrait prendre des leçons énormes.
M. Lincoln: J'espère et j'en suis sûr, M. le
ministre, que c'est de part et d'autre dans toutes les choses du monde. On a
beaucoup à apprendre les uns des autres.
M. Landry: II devrait prendre des leçons en matière
de déficit, en particulier, quand j'entendais notre collègue des
Finances, hier soir, qui annonçait une réduction du
déficit québécois, alors que cette malheureuse machine
administrative d'Ottawa se débat avec une perte de contrôle sur le
sien.
Échanges entre le Canada et les
États-Unis
M. Lincoln: M. le ministre, est-ce qu'on pourrait passer un
instant à la question qu'on discutait très
généralement avant, toute la question de la libéralisation
des échanges entre le Canada et les États-Unis? Ce n'est pas une
question de débat du tout. J'ai envie de savoir... Par exemple,
l'année dernière, aux crédits, vous aviez
déclaré - je cite les crédits au Journal des
débats, le 5 avril 1984: C'est notre direction qui analyse les
stratégies, qui fait ces travaux et, aujourd'hui, le Canada est
prêt à commencer des négociations avec les
États-Unis d'Amérique.
Les négociations ne sont pas commencées. On parlait,
à ce moment, du libre-échange sectoriel qu'avait proposé
le gouvernement fédéral libéral. Les fonctionnaires se
préparent de part et d'autre. Il y a six secteurs qui sont
particulièrement étudiés: l'acier, les textiles, le
matériel de transport urbain, la pétrochimie et ses
dérivés, et quelques autres.
D'abord, j'aurais voulu savoir, par rapport à l'approche qui
avait été suggérée par le gouvernement
fédéral antérieur sur des secteurs spécifiques que
vous avez cités, s'il y a eu des études qui ont été
faites par votre ministère par rapport à ces secteurs.
M. Landry: D'abord, "other days, other ways", un autre
gouvernement à Ottawa, surtout à l'issue de la rencontre du
premier ministre du Canada et du président des États-Unis, a
adopté une méthode différente. Quelle que soit la
méthode suivie, l'étude par secteur reste toujours très
précieuse...
M. Lincoln: Oui, d'accord.
M. Landry:... parce que si on nous propose une globalisation qui
irait nuire dramatiquement à un secteur ou l'autre au Québec, on
veut le savoir, et nos études sectorielles - on peut le dire maintenant
-sont complétées. Il nous manque deux secteurs. Alors, on est
à l'oeuvre.
M. Lincoln: Lesquels des secteurs? Je suis entièrement
d'accord avec vous. Je réalise qu'il y a un changement de politique
fédérale très marqué du sectoriel vers une approche
beaucoup plus globale. Sur cela, nous sommes d'accord, mais c'était
justement le sens de ma question, l'importance de ces secteurs au sein de toute
approche plus globale. Est-ce que vous pourriez nous dire quels sont les
secteurs qui ont été étudiés parmi
ceux-là?
M. Landry: Je vais vous énumérer cela. Je ne peux
pas le dire par coeur, il faut que je me reporte à mes documents. A
cette fin, plusieurs études sur des secteurs spécifiques comme -
ce sont les secteurs qu'on a faits -le textile, le vêtement, le transport
en commun, les équipements aratoires, les pesticides, l'informatique,
les produits agricoles, etc., ont été effectuées en
collaboration avec les ministères sectoriels concernés et nous
aurons d'autres études à venir sur les minéraux non
métalliques et les métaux primaires. Il y a une autre chose que
je veux vous dire, que vous allez considérer comme une bonne nouvelle:
nous sommes virtuellement assurés de participer aux
négociations.
M. Lincoln: Du GATT? Aux négociations
fédérales, oui.
M. Landry: Les deux. C'est vous qui m'avez interrogé aux
crédits du MRI là-dessus et je vous ai dit que cela allait
très bien, qu'on avait de très bonnes informations, que notre
collègue fédéral montrait une
ouverture d'esprit et il semble bien que ce que nous demandons depuis si
longtemps, nous l'obtiendrons.
M. Lincoln: Pour revenir aux secteurs spécifiques que vous
avez étudiés, vous avez étudié, en fait, plus de
secteurs que les secteurs qui ont été cités l'année
dernière. Parlons spécifiquement de la pétrochimie. Est-ce
que c'est à l'étude ou est-ce qu'on se retrouve dedans?
L'année dernière, je sais que la pétrochimie et ses
dérivés étaient un des secteurs qui avaient
été cités, l'acier aussi.
M. Landry: En pétrochimie, il y a un problème
très particulier. Il faut que la question
canado-québécoise et canado-américaine se règle
avant qu'on puisse prendre position.
M. Lincoln: Oui, d'accord.
M. Landry: Tout le reste, c'est théorique. Si les "feed
stocks" ne sont pas concurrentiels à Montréal, les études
qu'on ferait ne vaudraient pas le papier sur lequel on les écrirait.
Le Président (M. Beaumier): M. le député de
Nelligan, je m'excuse, je me vois obligé, malheureusement, de suspendre
nos travaux jusqu'à cet après-midi après la période
des questions.
M. Landry: Très bien.
Le Président (M. Beaumier): Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à 13 h 1)
(Reprise à 16 h 35)
Le Président (M. Beaumier): La commission permanente de
l'économie et du travail poursuit ses travaux. La parole était au
député de Nelligan, porte-parole de l'Opposition. M. le
député.
M. Lincoln: M. le Président, je réalise, avec les
motions annoncées, qu'il ne nous reste pas beaucoup de temps. Alors, je
vais essayer de faire le plus vite possible pour qu'on puisse passer à
travers des sujets.
Le Président (M. Beaumier): Je peux peut-être vous
accorder 20 minutes. Ensuite, le député de Frontenac a aussi
demandé la parole, quitte à revenir à la fin.
M. Lincoln: Oui, d'accord.
M. Grégoire: M. le Président, c'est une
séance de deux heures, n'est-ce pas?
Le Président (M. Beaumier): Cela avait commencé ce
matin mais, là, c'est jusqu'à 18 heures, en ce qui concerne les
crédits du ministère du Commerce extérieur.
M. Grégoire: Sur le nombre d'heures fixé pour
l'étude des crédits de chaque ministère, il restait encore
deux heures. Cela ne me fait rien qu'on continue jusqu'à 18 h 30.
M. Lincoln: Est-ce qu'on peut aller jusqu'à 18 heures?
Ensuite, on verra si le ministre est disponible, ainsi que les gens. Cela m'est
égal.
Le Président (M. Beaumier): On va essayer de s'en tenir
aux ententes...
M. Landry:... le président de la commission. Je n'ai pas
l'odieux de vouloir vous couper du temps aux questions.
M. Grégoire: Je m'excuse, mais je n'ai pas su que la
commission siégeait ce matin sur le Commerce extérieur. Je ne
reçois pas toujours les feuillets avant, mais...
Le Président (M. Beaumier): Je crois bien qu'en
commençant tout de suite le député de Nelligan va avoir 20
minutes et, ensuite, M. le député de Frontenac, vous pourrez
avoir 20 minutes également.
Échanges Québec-Canada-USA M. Lincoln:
D'accord.
Le Président (M. Beaumier): M. le député de
Nelligan.
M. Lincoln: On parlait des études d'impact que vous avez
faites dans différents secteurs. Je voulais vous demander ceci. Par
exemple, il y a certains secteurs clés, comme celui du bois de sciage,
où on a eu pas mal d'ennuis l'année dernière et où
il y a encore des problèmes avec les États-Unis; il y a celui du
porc, en particulier, où il y a maintenant une étude
américaine qui est en train de se faire. Une décision sera prise
en juin. Si ces deux questions sont à l'étude, peut-être
que vous auriez pu nous situer par rapport à ces deux secteurs, par
rapport aux actions américaines et à ce que nous, nous faisons.
Est-ce qu'on fait une étude d'impact advenant que les Américains
prennent les mesures protectionnistes annoncées pour le porc ou qu'ils
nous imposent des droits dans le cas du bois de sciage?
M. Landry: D'abord, le bois de sciage: vous l'avez
rappelé, c'est réglé à notre avantage. La
dernière attaque des producteurs et l'intervention des provinces du
Canada et de l'État canadien a été
considérée comme de minimis. De toute façon, on a
eu des désistements de dernière heure dans cette cause de bois de
sciage de la part des pétitionnaires. Elle a été
jugée de minimis et la procédure a été
arrêtée là. Mais c'est vrai que la menace est toujours
là. C'est le "due process of law" aux États-Unis. On s'est
déjà entendu là-dessus. Je me suis déjà
expliqué publiquement à ce sujet. Le député
connaît la question. N'importe quel producteur américain, pourvu
qu'il puisse assumer les coûts d'une telle procédure, peut
s'adresser à l'American Trade Commission et on est toujours
menacés. Alors, nous sommes sur nos gardes. On ne fait pas une
étude permanente sur le bois de sciage, mais on tient toujours à
jour nos dossiers sur la question du bois dans l'ensemble, parce qu'il aurait
pu arriver que du bois de sciage, cela dérive vers les pâtes et
papiers, étant donné que la pomme de discorde, c'étaient
les droits de coupe. Leg droits de coupe s'appliquent autant au bois de sciage
qu'aux pâtes et papiers.
En tout cas, je pense que ce n'est pas surtout de ce secteur dont vous
voulez entendre parler, puisqu'on s'est pas mal tirés d'affaire, mais
c'est du secteur du porc. Là, on ne s'est pas tirés d'affaire. Il
y a eu une requête le 2 novembre dernier par le National Pork Producers
Council, et la US International Trade Commission a reconnu le 11
décembre, par une décision préliminaire unanime, qu'il y a
des indications raisonnables de croire que les importations de ces produits
causent ou risquent de causer un préjudice à l'industrie
américaine du porc. En conséquence, ils ont mené une
enquête par questionnaire, inscrit dans un premier temps, et ensuite par
visite des inspecteurs. On a eu des Américains qui sont venus ici, qui
sont allés à la Régie des marchés agricoles et qui
ont été entendus la semaine dernière. Le 27 mars dernier,
il y a eu une décision préliminaire et, là, il y a
peut-être un vice de forme puisque la commission fait porter
l'enquête à la fois sur le porc vivant et sur la viande de porc.
Nous sommes des exportateurs de viande et les pétitionnaires
américains sont des producteurs de porc vivant.
Alors, on pourrait dire que la commission s'est prononcée
au-delà de la demande, puisque le fond de la discorde ne touchait pas
notre produit, mais s'est élargi parce que des gens d'abattoirs se sont
joints aux pétitionnaires. Résultat net: un droit compensateur de
0, 053 $ la livre doit être imposé. Ramené ad valorem, cela
fait 7, 5 %. Nos exportateurs de ces produits doivent, depuis le 3 avril,
verser un cautionnement équivalant à 1 %, à titre de droit
compensateur provisoire, qui serait remis si les droits n'étaient pas
imposés.
L'impact québécois est le suivant: on a exporté -
comme je l'ai dit - surtout de la viande; 169 000 000 $, 52 % du total
canadien, en 1984. Les porcs vivants, c'est peu de chose pour nous; c'est
seulement 6 400 000 $, 3, 2 %.
L'étape suivante qui est prévue consiste en une phase de
vérification, j'ai dit que les vérificateurs sont venus. Les
données, sur le terrain, ont été recueillies. Cela devait
se terminer le 16 et cela s'est terminé le 16 avril. Il y aura une
décision finale vers le 10 juin sur l'existence de subventions et, si
oui, quelle est leur importance; et une décision finale sera rendue
quant à l'existence du préjudice. C'est toujours en deux
étapes: le quantum et le préjudice que l'industrie
américaine subirait à cause de nos exportations. Le 25 juillet,
oui.
Notre position est la suivante: si le préjudice était
reconnu, il est peu probable que le même pourcentage serait maintenu.
Evidemment, on n'admet d'aucune façon le préjudice. On n'est pas
là pour en juger, mais on est là pour se défendre. Nous
allons nous défendre et on verra; en espérant qu'on aura autant
de succès que dans la question des droits de coupe.
On doit dire aussi que, là, ce n'est pas que la loi
américaine, c'est le GATT qui est en cause; et les Américains
agissent conformément au GATT.
M. Lincoln: Est-ce que le ministre pourrait nous dire... J'aurais
voulu revenir sur la question du porc mais, malheureusement, je ne sais pas si
on aura le temps de passer cela plus en détail.
Par rapport à nos échanges avec les Américains,
vous avez confirmé que certains secteurs ont été
étudiés et que d'autres sont à l'étude. Par rapport
à la décision fédérale d'élargir le cadre de
la libéralisation des échanges avec les États-Unis, est-ce
qu'il y a une étude d'impact plus globale qui se fait sur les
conséquences d'échanges plus élargis par rapport au
Québec?
M. Landry: On avait élargi nos études à
l'ensemble des productions agricoles. Dans ce que j'ai dit - vous vous
souvenez, dans la matinée - il y avait un "et caetera" qui comprend nos
études sur les productions agricoles et d'autres productions
industrielles.
M. Lincoln: Est-ce que vous pourriez nous dire brièvement
quelle est la participation et l'implication du Québec au sein des
discussions fédérales-américaines qui vont venir ou qui
sont en cours à ce sujet?
M. Landry: D'abord, la partie canado-québécoise,
pas de problème; on a été consulté vraiment
régulièrement, soit au niveau des fonctionnaires, soit au niveau
ministériel. M. Kelleher est venu lui-même à
Montréal il y a trois semaines et nous avons pu discuter de ces
choses.
Pour la partie canado-américaine, la réponse est la
même que pour notre participation au GATT. Comme je l'ai dit ce matin,
nous sommes pratiquement persuadés d'Être membre de
l'équipe de négociation du Canada; c'est-à-dire que le
Québec sera directement représenté dans l'équipe de
négociation canadienne. Cela n'est pas confirmé, mais nous avons
un très bon espoir, comme pour la participation au GATT. C'est la
dernière impression que nous ont laissée nos homologues
fédéraux. (16 h 45)
M. Lincoln: Est-ce que je peux présumer qu'à la
date où les négociations vont commencer de façon
spécifique avec les Américains vous aurez en main toutes les
études d'impact, "incluant celles de l'Agriculture, des Pêcheries
et de l'Alimentation, et leurs conséquences pour le Québec?
M. Landry: C'est un processus continu tout au cours de
l'évolution de la négociation non pas uniquement au
ministère du Commerce extérieur, mais encore dans les
ministères sectoriels dont nous coordonnons l'action. Vous pensez bien
qu'à l'Agriculture, Pêcheries, Alimentation, ils ont fait les
études dans le domaine du porc en notre compagnie et avec nous, mais
tous les ministères sectoriels font également leur travail dans
ce domaine.
M. Lincoln: Sur la même longueur d'onde, la
Communauté économique européenne a décidé
d'imposer des représailles envers le Canada pour contrecarrer les tarifs
sur les importations de ses chaussures et de sa viande vers le Canada, et
d'imposer des douanes sur les produits chimiques, la sidérurgie et le
papier, par exemple. C'est surtout la question du papier qui tratne dans le
décor depuis assez longtemps. Je pense qu'elle a aussi parlé de
sirop d'érable, récemment. Cela devait avoir lieu en avril 1985;
je pense que la date a été reportée maintenant. Une
négociation quelconque se fait avec le Canada. Nous considérant
comme de grands exportateurs de papier, pourriez-vous nous dire quelle est la
situation du Québec dans ce dossier spécifique et qu'est-ce qui
se passe entre vous et Ottawa par rapport à cette question?
M. Landry: Pour les premiers produits que vous avez
nommés, on a un répit, parce que la communauté n'a pas
imposé de droits compensatoires ou de rétorsion, de
représailles. Ce sont plutôt des représailles dont il
s'agit dans ce cas. Nous discutons, chaque semaine, avec les fonctionnaires
fédéraux des conséquences de cela sur le Québec et
des sacrifices que le Québec pourrait être amené à
faire, si sacrifices il y a, des sacrifices qui ne sont pas
disproportionnés par rapport aux avantages qu'on peut en retirer. Pour
l'instant, les négociations continuent. Cela se fait sur une base
bilatérale et on n'a pas de craintes particulières.
Pour le papier, cela s'est réglé d'une façon qui
nous convenait. On a 600 000 tonnes plus 50 000 tonnes. On a eu l'aide,
d'ailleurs, de pays amis, membres de la Communauté économique
européenne, qui nous ont aidés considérablement: la
France, la Grande-Bretagne, en particulier. Pour l'instant, cela nous fait une
situation convenable. Mais tout est vulnérable, puisque les pays
d'Europe de l'Ouest se sont fait un marché commun, et ils ont une voix
unifiée. Ils préservent leurs intérêts. Dans un
marché commun, il n'y a pas de tarif à l'intérieur, mais
il y a un tarif extérieur commun et une défense extérieure
commune. C'est exactement ce qu'ils font.
Je vous ferais remarquer que tout ce dont on discute confirme la
nécessité pour le continent nord-américain d'avoir un
niveau d'organisation économique sophistiqué, ne serait-ce que
pour faire contrepoids à l'Europe de l'Ouest.
M. Lincoln: Pourriez-vous nous dire si la politique que vous
allez déposer ou introduire d'ici à la fin de mai, je pense, dans
le domaine des relations internationales et du commerce extérieur va
inclure toute la question de l'impact sur l'économie du Québec
d'un libre échange avec les Américains?
M. Landry: Ce ne serait pas réaliste. On ne peut pas
mettre cela dans un énoncé de politique qui va avoir, à
tout casser, moins de 200 pages. C'est une stratégie globale. Ce dont
vous parlez, toutes les études d'impact, ce sont des milliers de pages;
ce ne serait pas convenable de mettre sur la table d'une commission
parlementaire des études de ce niveau de technicité, qui
d'ailleurs vont varier dans le temps, la situation va être très
fluide.
M. Lincoln: Oui, peut-être que je me suis mal
exprimé. Je vais reformuler ma question. Ce que j'avais en vue,
c'étaient des choses comme identifier certains secteurs dans le cas
où il y aurait un élargissement du cadre d'échanges
Canada-Amérique, naturellement incluant le Québec, où, par
exemple, il y aurait des ajustements à faire dans certains secteurs
précis, des ajustements de garantie d'investissement, comme cela s'est
fait dans le cas du récent accord bilatéral
Israël-États-Unis. Là, il faudra qu'on définisse des
politiques d'ajustement dans certains secteurs, et imposer une condition
peut-être de garantir l'investissement américain au Québec
en cas de libéralisation des échanges pour empêcher la
fermeture de
certaines usines; plus une question de politique générale
qu'une question spécifique d'impact.
M. Landry: Dans cet énoncé de politique, je vous le
rappelle, on va donner les lignes directrices de la politique pour les cinq
prochaines années, les bases, la philosophie, les axes fondamentaux vers
lesquels nous voulons nous diriger au cours des cinq prochaines
années.
Or, à peu près tout ce que vous avez mentionné fait
partie d'une négociation entre le Canada et les États-Unis. Il ne
serait pas sage d'aller dans des détails qui relèvent plus d'une
table de négociation que d'une table éminemment politique comme
la commission des institutions, qui va apprécier la direction d'une
politique. On peut dire que ce qu'on recherche, c'est la fluidité
continentale; on ne la recherche pas à n'importe quel prix, il faudra
des clauses de sauvegarde pour ne pas que des pans entiers de notre
économie soient brutalement frappés par l'ouverture des
frontières. Mais on ne va pas aller mettre sur la table nos arguments de
négociation.
M. Lincoln: Mais est-ce qu'on pourrait tout de môme penser
que ce serait tout à fait logique pour nous, même si on ne le met
pas au sein d'une politique large que vous allez déposer, des politiques
de direction, d'objectifs principaux... Peut-être pouvons-nous être
d'accord là-dessus aussi. Mais d'une façon ou d'une autre, qu'on
fasse des choix, qu'on situe des priorités, des objectifs par rapport
aux grandes lignes d'une politique de libéralisation des
échanges, comme cela a été le cas, par exemple, dans le
récent accord Israël-États-Unis, où ils ont
identifié certaines conditions: garantie d'investissement, ajustements,
financement mutuel, etc. Peut-être que cela déborde des questions
de détail. Ce sont des vues d'ensemble qui démontrent des
directions où le Québec voudrait peut-être prendre une
position un peu différente de celle de l'Ontario ou de celles des autres
provinces par rapport à ses objectifs économiques.
M. Landry: Oui, mais ce que vous nous décrivez, c'est
l'accord qu'il y a eu entre les États-Unis d'Amérique et
l'État d'Israël. Ce n'est pas un énoncé de politique
des États-Unis ou d'Israël. Ce dont on va parler à la
commission des institutions, c'est de notre énoncé de politique.
L'accord viendra beaucoup plus tard. Juridiquement, il ne peut intervenir
qu'entre le Canada et les États-Unis d'Amérique. Nous ferons
valoir, au sein de la position canadienne, la position québécoise
secteur par secteur. Mais je vous dis qu'on pense à un ouvrage d'entre
150 et 200 pages, alors que simplement pour le textile, le vêtement, la
chaussure, on ne peut pas aborder la question dans le sens que vous dites sans
publier des centaines de pages.
M. Lincoln: Non, non. Ce que je voulais vous dire, j'ai convenu
que ce n'était pas la place de mettre cela dans un énoncé
de politique mais est-ce que nous avons établi des critères, des
barèmes, des positions que nous allons défendre au sein des
prénégociations canadiennes par rapport à ces sujets? Par
exemple, la garantie d'investissement, les secteurs que nous devrons
peut-être ajuster en regard du libre échange à un taux
peut-être différent de celui de l'Ontario, pour nos raisons, comme
le secteur du vêtement, du textile, où nos considérations
sont un petit peu différentes des leurs ou de celles de la Colombie
Britannique et autres...
M. Landry: Oui.
M. Lincoln:... qui dépassent une étude d'impact
spécifique dans un secteur ou dans un autre.
M. Landry: C'est l'objet de notre stratégie à
l'intérieur de la préparation du dossier canadien de
négociation. On va faire cela. On a déjà en main la plus
grande partie de ces informations. On va exiger, au besoin, des clauses de
sauvegarde ou des périodes d'ajustement qui peuvent aller jusqu'à
une dizaine d'années. On va tout faire cela. Mais on va faire cette
bataille à l'intérieur de la préparation du dossier
canadien en vue de la négociation Canada-USA. C'est vrai qu'il y aura
sûrement des intérêts québécois qui peuvent
être légèrement divergents des intérêts
ontariens, bien que ce soit moins vrai, contrairement à la
légende, pour le textile et le vêtement, puisque l'Ontario est
devenu producteur autant que nous.
M. Lincoln: Oui. Je citais cela en exemple, réalisant que
ce n'est peut-être pas un exemple... Mais le porc aurait peut-être
été un bon exemple. J'ai envie de sauter à un autre ordre
d'idées. Alors, si le député de Frontenac veut intervenir
sur ce point et si... Je vais me retenir parce que je vais sauter à un
sujet tout à fait différent après.
Le Président (M. Beaumier): Oui.
M. Lincoln: Alors, je préférerais que...
Le Président (M. Beaumier): D'accord. M. le
député de Frontenac.
Exportation de l'amiante
M. Grégoire: M. le ministre, je crois que vous vous doutez
du sujet que nous
allons discuter ensemble pendant les prochaines quinze à vingt
minutes. Je pense bien que vous devez savoir de quoi nous allons parler.
H y a à peine cinq ans, l'amiante constituait à peu
près le deuxième produit d'exportation du Québec.
Après les pâtes et papiers, c'était l'amiante;
c'était une valeur de 550 000 000 $ par année. Cela allait un peu
dans tous les coins du monde. C'est le seul domaine du secteur minier qui
rapportait des profits au ministère des Richesses naturelles.
C'était surtout un produit d'exportation, parce que 70 % de l'amiante
servait à fabriquer des tuyaux d'amiante-ciment, des tuyaux
d'égout et d'aqueduc. Les autres 30% servaient pour 1500 ou 1600 autres
produits, mais c'était surtout l'amiante-ciment.
J'aimerais savoir ceci, dans un premier temps, étant donné
que c'est un gros produit d'exportation: 90 %-95 % de notre amiante
était exporté il y a cinq ans. Depuis que vous avez votre
ministère du Commerce extérieur... Je vois que vous
dépassez 24 000 000 $, que vous avez pour le personnel 8 842 000 $, des
autres rémunérations pour 113 000 $; je crois que vous avez des
communications pour 2 644 000 $, des services pour 2 874 000 $; il y a 220
employés permanents, 6 employés occasionnels; vous faites des
transferts à des entreprises pour la mise en place d'une
stratégie de marketing et d'aide à la promotion des
exportations.
Est-ce qu'il est ici, celui qui s'occupe de l'exportation de l'amiante?
En avez-vous un à votre ministère qui se spécialise
là-dedans? Lequel est-ce?
M. Landry: On en a plusieurs. Sauf qu'à notre
ministère ils travaillent plus sur une base géographique que sur
une base par produit. Alors, il m'est arrivé moi-même de vendre de
l'amiante: j'y ai pris un grand plaisir, en Yougoslavie en particulier. Mais,
là, ce sont nos directions géographiques qui avaient fait le
travail. On a aidé la Société nationale de l'amiante
à vendre de l'amiante en Yougoslavie. Mais on ne travaille pas cela sur
une base tellement sectorielle. On a aidé aussi à la promotion de
structures d'habitations, incluant des panneaux d'amiante. On s'est
impliqué auprès des gouvernements du Canada, des
États-Unis, de la France, de l'Angleterre et de la République
fédérale d'Allemagne pour faire la bataille de l'amiante.
Alors, le ministère du Commerce extérieur n'a pas
été en reste sur cette question.
M. Grégoire: II n'y a aucun secteur de l'exploitation,
même si cela se négocie d'une façon géographique,
qui a un personnage en charge et qui voit à... Comme, par exemple, dans
les pâtes et papiers, ce qui est le plus gros...
M. Landry: On n'en a pas pour les pâtes et papiers, on n'en
a pas pour l'aluminium. Chaque directeur géographique est responsable de
vendre la production québécoise dans son secteur, y compris
l'amiante. On a trouvé que c'était beaucoup plus efficace d'avoir
des gens qui connaissent le marché et qui ont une optique marketing que
d'avoir des gens surspécialisés dans un produit pour couvrir
toute la planète. Pour vendre de l'amiante en Yougoslavie...
M. Grégoire: Sans couvrir la planète, en se servant
des bureaux que vous avez établis un peu partout, en se servant de ces
bureaux et de leur expérience des marchés locaux...
M. Landry: C'est exactement ce que l'on fait. On prend l'approche
"connaissance des marchés". On pense, par exemple, que pour vendre de
l'amiante en Yougoslavie, c'est plus important de connaître la
Yougoslavie que de connaître l'amiante. Car la Société
nationale de l'amiante connaît l'amiante et ce sont ses
représentants qui viennent avec nous et qui font la promotion du
produit.
M. Grégoire: Maintenant, l'amiante se vendait mieux parce
qu'il y avait beaucoup d'usines de transformation dans des pays
étrangers il y a cinq, dix ou quinze ans, surtout en Europe et aux
États-Unis. Ces marchés ont diminué
considérablement.
Maintenant, il y a des pays assez bien développés, en voie
de développement si vous voulez, qui ont regardé du
cûté de l'amiante et qui, il y a deux, trois ou quatre ans,
lorsque la crise internationale s'est annoncée, lorsqu'on est
rentré dans le pire de cette crise internationale, ont annulé
leurs commandes d'amiante, comme l'Algérie, le Mexique. Pourtant, pour
ces pays, qui ont énormément besoin de systèmes
d'égout et d'aqueduc, surtout des villes comme Mexico City, où on
dit que près de 50 % de la population n'est pas desservie par un
réseau d'aqueduc et d'égout, ce qui leur revient à
meilleur marché, c'est encore les tuyaux d'amiante-ciment. (17
heures)
Est-ce que vous avez pensé à l'établissement ou
à faire partie d'un consortium qui établirait des usines de
tuyaux d'égout d'amiante-ciment dans des pays comme l'Égypte,
l'Algérie, le Mexique, le Nigéria où il y a de grosses
populations qui s'urbanisent de plus en plus? Est-ce que vous avez pensé
à instaurer un consortium qui irait installer des usines de tuyaux
d'amiante-ciment dans ces pays-là? La prise d'action par le gouvernement
du Québec pourrait être tout simplement l'amiante qu'il
fournirait qui constituerait...
Dans un moment où nos hommes sont improductifs, on pourrait
acheter des actions d'usines comme celles-là en payant avec de l'amiante
qui est absolument nécessaire en se disant également que, dans
ces pays-là, ce qui revient le moins dispendieux et qui,
économiquement est le plus rentable, c'est justement de fabriquer, de
construire le réseau d'égout et d'aqueduc en amiante-ciment parce
que, si les gens le font en fonte, c'est moins durable, cela rouille plus vite.
Il faut aussi qu'ils achètent tout le tuyau à l'extérieur.
Souvent, ils ne sont pas organisés avec les sidérurgies voulues
pour construire leurs propres tuyaux tandis qu'en amiante-ciment ils n'ont
qu'à acheter l'amiante et ils sont capables de se construire des
cimenteries chez eux et d'avoir des usines de fabrication pour tuyaux
d'amiante-ciment, la technologie étant là.
C'est ce genre de consortium et l'argent qui sort de chez eux, à
ce moment-là, ne constitue qu'une faible partie du coût des tuyaux
d'amiante-ciment, ce n'est que de l'amiante. L'argent ne sortirait pas
puisqu'on paierait nos actions, dans ces usines, en amiante. On profiterait du
moment où les mineurs sont là; les mineurs reçoivent leur
assurance-chômage ou leur bien-être social, ils sont payés
quand même. Ils pourraient travailler et l'amiante produit servirait
à acheter des actions dans des usines de tuyaux d'amiante-ciment.
Rejoindre un consortium avec une cimenterie multinationale, avec des
ingénieurs, avec des actionnaires des pays concernés, pour ces
pays-là, c'est un avantage énorme, cela leur revient moins cher
et, surtout, l'argent ne sort pas du pays. C'est leur gros avantage. S'ils le
font en tuyaux de fonte ou en polyvilène, l'argent sort de leur pays;
s'ils le font en tuyaux d'amiante-ciment qui sont plus résistants, qui
ont une durée plus longue, l'argent ne sort pas de leur pays parce
qu'ils ont toute la matière première chez eux et ils peuvent le
fabriquer eux-mêmes.
Avez-vous pensé à un tel consortium qui serait
installé là où les besoins se font sentir, là
où ces pays ne peuvent pas se permettre de sortir leur argent en
quantité, là où l'inflation les empêche d'aller sur
le marché international pour s'acheter des tuyaux de fonte ou de
polyvilène, ne penseriez-vous pas à revenir à l'ancien
système et installer cela sur place dans des pays
sous-développés ou des pays en voie de développement? Ceux
que je vous nomme là sont capables de le faire. L'argent ne sortirait
pas de leur pays.
Vous pourriez intéresser à cela une cimenterie
multinationale, une firme d'ingénieurs internationale, des courtiers en
valeurs mobilières. Vous pourriez intéresser à cela des
investisseurs des pays locaux, d'autant plus qu'avec ce qui s'en vient
l'amiante phosphaté, qui est déjà produit ici au
Québec mais à quelques tonnes, pourra être à la
disposition au point de vue industriel d'ici à deux ans. L'amiante
phosphaté ne constituera plus aucun danger pour la santé et pour
les poumons. L'amiante phosphaté perd 99 % de ses
propriétés biologiques pour garder toutes ses
propriétés physiques. L'amiante phosphaté demeure quand
même... Et la SNA, grâce à son centre de recherche à
Sherbrooke, a les brevets d'invention pour tous les pays du monde. Vous arrivez
avec un produit dont on a appris que c'était un produit nuisible, si on
s'en servait mal, mais cela peut devenir un produit qui n'est plus nuisible.
Tout comme les premiers qui se sont servis de l'électricité, ils
n'ont pas dû penser tout de suite à l'entourer d'une pièce
de caoutchouc et il y en a qui se sont électrocutés au
début. L'amiante, on l'a connu tard, c'est-à-dire que
c'était nocif, mais on a trouvé le remède à
cela.
Est-ce que ce ne serait pas le temps de constituer des consortiums pour
les pays en voie de développement, de s'allier avec des cimenteries
multinationales, avec des firmes d'ingénieurs et d'acheter des actions
dans ces usines de fabrication de tuyaux d'amiante-ciment en les payant avec de
l'amiante, au moment où on peut produire de l'amiante, mais où on
ne le vend pas? Est-ce que vous ne trouvez pas que ce serait remettre l'amiante
sur le marché que d'aller dans une quantité de grands pays qui
ont des besoins et qui n'ont pas les devises fortes voulues pour acheter
d'autres sortes de tuyaux? Tous les avantages sont là: la qualité
du produit, sa durabilité, son faible coût, le fait qu'on ait
réussi à passer à travers les effets nocifs de l'amiante
pour, après maintes recherches, en trouver la solution au point de vue
de l'hygiène et de la santé, le fait que nous en ayons ici, de
l'amiante, et que ce soit un de nos principaux produits d'exportation. Comment
entrevoyez-vous... Pourquoi, dans votre budget, n'ajouteriez-vous pas quelque
chose? Une équipe irait voir si c'est possible d'installer, avec un
consortium international, des usines comme celles-là. C'est 70 % de
notre amiante, ce sont des centaines de millions de dollars, ce sont des
milliers d'emplois. Je voudrais avoir votre réaction là-dessus,
M. le ministre.
M. Landry: D'abord, si jamais on fait cela ou quelque chose
d'analogue - je ne dis pas qu'on ne le fera pas - vous ne verrez pas
apparaître cela dans les budgets du ministère du Commerce
extérieur. Le ministère du Commerce extérieur appuie les
entreprises privées ou publiques à faire des transactions
à l'étranger et à constituer des consortiums. La SDI
participe à ces
consortiums. Nous, on fournit l'aide technique et l'organisation du
consortium, mais ce ne sera jamais pour nous une opération
budgétaire. Ce n'est pas le râle du ministère du Commerce
extérieur de s'impliquer dans une cimenterie ou dans une fabrique de
tuyaux d'amiante.
Cependant, ce que vous dites est à ce point pertinent qu'à
plusieurs reprises nous avons rencontré la Société
natinale de l'amiante et la Caisse de dépôt et placement pour
discuter de projets de cet ordre. Moi-même, j'ai offert à
plusieurs pays du tiers monde des formules de ce genre. La
Société nationale' de l'amiante a dû le faire plus que moi,
puisqu'elle est spécialisée et a même utilisé les
services d'un de nos fonctionnaires qu'on lui a prêté pendant
plusieurs mois, sinon plus d'un an. M. Normand Bernier, ancien
délégué du Québec à Tokyo, a
été prêté - non, il n'est pas ici - à la
Société nationale de l'amiante, justement pour mettre sur pied -
on l'a prêté à la Caisse de dépôt et placement
ensuite - des projets du même genre, dont des projets d'amiante. La
dernière fois qu'on s'est rencontré dans une réunion, M.
Normand Bernier était là.
M. Grégoire: Oui, je l'ai rencontré. Alors, c'est
lui qui serait...
M. Landry: II connatt bien le secteur de l'amiante. Mais, encore
une fois, quand vient le temps de passer à l'action, le ministère
du Commerce extérieur peut être la bougie d'allumage, peut fournir
des services: les services des délégations, comme vous l'avez
dit, notre service des consortiums, la SOI peut participer à la
formation du consortium mais ce n'est pas nous, jamais, qui sommes au front, en
première ligne.
Ceci dit, si ces projets qu'on a évoqués, si le travail de
M. Normand Bernier, si le travail d'un certain nombre d'autres n'a pas abouti
au cours des dernières années, c'est que la conjoncture a
été très mauvaise, la conjoncture tenant à
l'amiante d'abord, vous le savez. Je suis de ceux qui croient, comme vous,
qu'on va remonter la cote de l'amiante, d'abord parce que ce produit a
été décrié d'une façon très injuste
et d'une façon plus religieuse que scientifique, dans plusieurs pays. Il
s'est fait un combat antiamiante qui a ressemblé beaucoup au combat de
Mme Brigitte Bardot pour la fourrure de phoque et cela a jouxté
l'absurde. Il y a eu 20 000 000 de signatures, je pense, dans la
Communauté économique européenne, à un moment
donné, des choses qui, selon moi, en tout respect pour ceux qui sont les
promoteurs de ces causes, ne sont pas des causes prioritaires pour
l'humanité. L'amiante a été l'objet d'une psychose de ce
genre.
On voit que les Américains se sont par ailleurs ressaisis. Les
Américains sont venus bien près de faire une interdiction globale
de l'amiante et, il y a deux ans, la situation n'était pas rose. Mais,
là, on voit qu'autant l'EPA que l'OSHA, même si elles restent
préoccupées par la question de l'amiante, considèrent que
c'est un produit utile, un produit intéressant qui doit être
manipulé avec précaution, qu'on doit avoir des normes. La
conjoncture antiamiante est en train d'être chose du passé et je
pense que de mois en mois le produit remonte la côte, d'autant plus que
la phosphorylation de la fibre que nous pratiquons déjà à
quelques tonnes par jour, je crois, dans une usine de petite taille pourrait
devenir un procédé à l'échelle industrielle
rentable et nous permettre pratiquement de mettre sur le marché une
nouvelle fibre. Même le nom ne s'appliquerait plus parce que la
phosphorylation produit un changement physico-chimique tel qu'il ne serait pas
illusoire de parler d'une nouvelle fibre qui aurait un nouveau nom, qui serait
présentée d'une nouvelle manière et, là, repartir
l'offensive de l'amiante. C'était le premier aspect conjoncturel tenant
au produit.
Le deuxième aspect, il n'est pas réglé et
même s'il y a des signes de rémission, on n'a pas encore
passé à travers le pire, c'est l'incapacité de payer des
pays du tiers monde, pas simplement de payer la fibre, mais est-ce que la ville
de Mexico est en position financière de doter ses 12 000 000 ou 15 000
000 d'habitants d'un réseau d'aqueduc? Dans la plupart des cas, la
réponse est non et, là, il faudrait se lancer dans le financement
des travaux locaux. C'est cela que les gens nous demandent: Financez l'usine,
fournissez la fibre, financez les travaux locaux. Là, cela devient un
autre genre d'opération.
Donc, dans plusieurs pays - je ne veux pas faire un cas particulier du
Mexique parce que le Mexique remonte la pente assez vite à cause
d'institutions qui ne conviendraient peut-être pas au peuple
québécois, mais qui sont assez rigides pour remettre le pays sur
la bonne voie dans un an ou deux - sans parler plus particulièrement du
Mexique, la plupart des pays du tiers monde, actuellement, ont beaucoup de
difficultés à satisfaire des nécessités pour eux
plus élémentaires et primaires que même l'adduction d'eau
et les travaux de génie sanitaire dans leur ville. Plusieurs en sont
à combattre des problèmes de balance alimentaire et à
nourrir leurs gens. Plusieurs en sont à faire des dépenses
élémentaires de santé, des dépenses
élémentaires de mise en valeur des surfaces agricoles pour
régler le problème de la balance agro-alimentaire.
Alors, on peut dire que tous ces facteurs combinés ont fait qu'en
dépit d'efforts véritables faits par la SNA, par la Caisse de
dépôt et placement du Québec, par
le ministère du Commerce extérieur et un certain nombre
d'autres, aucun des projets auxquels le député pense n'a pu
être réalisé jusqu'à ce jour, mais je crois que
l'idée doit être maintenue. Pourvu que le beau temps revienne un
tant soit peu, on sera en mesure, un jour ou l'autre, de participer au
financement d'usines de produits en amiante à la condition qu'on ait une
exclusivité de vente du produit.
M. Grégoire: Maintenant, simplement dans le domaine des
pays développés qui sont capables de payer, je vais vous donner
un exemple pour vous montrer ce que peut être l'amiante et, là, il
n'y a peut-être pas un effort... Je ne sais pas s'il y a un effort qui a
été fait depuis la guerre des îies Falkland, mais il me
semble qu'il y a là un exemple où on aurait pu permettre un
effort et je me demande si le ministère du Commerce extérieur ne
pourrait pas le faire. On a blâmé l'amiante pour ceux qui
travaillaient à revêtir, redoubler les bateaux de la marine
marchande qui traversaient l'Atlantique nord au temps de la dernière
grande guerre et ceux qui font des réclamations, aujourd'hui, pour
amiantose vis-à-vis des compagnies comme Johns-Manville, ce sont ceux
qui ont travaillé, justement, là-dessus. Mais, en les lambrissant
d'amiante, en les recouvrant d'amiante à l'intérieur, on leur
donnait six à sept heures de temps d'évacuation alors que, lors
de la guerre des îles Falkland, nos Anglais qui avaient peur de l'amiante
et qui ne voulaient pas le voir construisaient leurs croiseurs en aluminium et
cela a pris une petite bombe bien dirigée pour que le croiseur, en moins
de 20 minutes, ait passé au feu au complet et on n'a pas eu le temps
d'évacuer. (17 h 15)
Je ne sais pas combien de centaines de marins anglais sont morts et
combien il y en a eu de sauvés parce qu'ils ont eu le temps
d'évacuer à cause de l'amiante. Le bateau ne brûlait pas si
vite à cause de l'amiante pendant la dernière grande guerre
comparativement à ceux qui ont attrapé l'amiantose en
travaillant. Mais il faut dire qu'aujourd'hui, quand on lambrisse les bateaux
d'amiante, quand on emploie un matériel d'amiante pour donner une
protection de sécurité contre le feu, on ne le fait plus comme
autrefois, par jets, alors que la fibre n'était pas du tout
attachée à sa matière première, qu'elle pouvait
s'envoler dans l'air. Elle pouvait se répandre dans l'air et
pénétrer dans les poumons.
Aujourd'hui, grâce au centre de recherche, quand on se sert de
l'amiante, c'est relié à une matière première qui
ne le laisse plus se dégager, il n'y a plus d'émission de fibres
dans l'air. Ce sont les nouvelles recherches qui ont donné cela. Alors,
est-ce qu'il n'y aurait pas de ce côté- là un effort
à faire pour diversifier ou ramener ces ventes d'amiante qu'on faisait
en... Parce qu'il s'en est vendu, des tonnes d'amiante, autrefois. Puis, tout
à coup, cela cesse. Est-ce qu'il n'y aurait pas un autre effort à
faire de ce côté?
M. Landry: Je veux bien vous croire. Je ne suis pas un expert du
matériel militaire et des spécifications techniques de la flotte
de Sa Majesté. Je sais qu'aux îles Falkland, il y a un autre
produit québécois - vous l'avez mentionné - qui a connu
des difficultés de marketing, c'est l'aluminium. Il est à peu
près certain que...
M. Grégoire: II a brûlé vite.
M. Landry:... l'aluminium de ces navires avait été
fabriqué également au Québec à cause de la
présence de la Canadian British Aluminium dans le temps, qui
était une compagnie britannique à l'époque où les
navires ont été construits. Mais je ne veux pas entrer dans un
niveau de détails. Je n'ai pas votre érudition en matière
d'amiante. Je dois vous répéter que tous les bons produits
québécois qui sont dans les prix et les qualités voulus
reçoivent au ministère du Commerce extérieur l'accueil
mérité.
Encore une fois, la Société nationale de l'amiante est un
de nos clients réguliers. Nous sommes en contact avec elle. J'ai
amené moi-même ces gens en mission. J'ai vendu des tonnages
d'amiante par intervention, pas juste en paroles diplomatiques. Nous avons
soutenu financièrement les ventes. On a garanti les prêts à
des pays dont on pensait que les finances publiques pourraient être
défaillantes. On a garanti des délais plus grands. Mais on ne
veut pas se faire nous-mêmes les promoteurs immédiats des
produits. On va aider les promoteurs à faire la promotion de leurs
produits. Vous avez probablement raison dans ce que vous dites.
M. Grégoire: Avez-vous l'impression que la
Société nationale de l'amiante, à l'heure actuelle, est
tellement préoccupée par les problèmes de l'Asbestos
Corporation, cette seule succursale de la SNA - c'est la plus grosse succursale
de la SNA - qu'elle n'a pas le temps de voir à la promotion de ses
produits, à ses développements ou à ses diversifications,
qu'elle est uniquement préoccupée et qu'elle laisse tomber le
reste?
M. Landry: Franchement, je crois...
M. Grégoire: Est-ce que ce n'est pas là mettre un
terme à ce qu'on appelait l'objectif de la politique d'amiante qui
était la création d'usines et l'exportation d'un produit fini
ou... Si vous faites affaire avec la SNA, n'avez-vous pas l'impression que,
justement, son rôle n'est plus que d'essayer de rapiécer?
Vous savez, M. le ministre, qu'à payer les actions de la
Société Asbestos à 42 $ l'action à 16, 5 %
d'intérêt par année, cela fait trois ans qu'on paie
l'intérêt qui est cumulatif. C'est rendu au-delà de 70 $
l'action et les intérêts de 1982 ne sont pas encore payés.
C'est rendu au-delà de 70 $ l'action. Quand c'est inscrit sur le
marché de la Bourse à Toronto ou à Montréal
à 4, 75 $ ou à 5 $ l'action, soit la moitié du coût
de l'intérêt, cela devient un gros problème pour la
Société nationale de l'amiante qui s'est engagée à
acheter toutes ces actions, soit 54 % des actions. À ce
moment-là, ces personnes n'ont plus les loisirs ou la
capacité de voir à développer l'exportation des produits
d'amiante ou à s'occuper de cela. Est-ce que vous n'avez pas
remarqué un tel gel à la politique de l'amiante telle qu'elle
avait été énoncée le 22 octobre 1977?
M. Landry: M. le Président, j'ai l'impression que le
député s'adresse à moi comme si j'étais toujours le
ministre d'État au Développement économique, ce que je ne
suis plus depuis un certain nombre d'années. Je n'ai plus, d'une
part...
M. Grégoire: Sachant que c'est un des plus
compétents dans le secteur économique, que ce soit dans le
commerce extérieur ou dans le développement économique, je
m'adresse au ministre en étant sûr que c'est un des plus
compétents dans le domaine économique.
M. Landry: Le député est très gentil de me
dire cela. Il confirme aussi, d'ailleurs, ce que disait mon ami de Nelligan ce
matin. Vous me comblez d'éloges et tout cela et je vous réponds
bêtement que je n'ai plus l'expertise directe de ces dossiers comme je
l'avais autrefois. Cela me passionnait de faire cela, mais je ne peux pas vous
dire si ce qui se passe à l'intérieur de la Société
nationale de l'amiante actuellement fait que ces gens ont un potentiel à
l'exportation plus ou moins grand. Ce que je peux vous dire, c'est que, lorsque
nous avons travaillé avec eux, ils se sont vraiment comportés
comme des vendeurs, et des vendeurs résolus et
décidés.
M. Grégoire: Dernièrement encore?
M. Landry: La dernière fois que j'ai participé
à une mission avec la SNA, cela doit faire huit ou dix mois, je pense,
M. Dorais lui-même y était et nous avons vendu sur place 700 000
ou 800 000 tonnes, pour autant que je me souvienne. Sur place! Dans les pays de
l'Est!
M. Grégoire: C'est la production de...
Le Président (M. Beaumier): M. le député de
Frontenac, est-ce qu'on peut conclure, parce que, si je veux...
M. Landry: C'était très important et on a soutenu
l'opération, comme je l'ai dit, en crédits
supplémentaires. On a délogé des concurrents que je ne
nommerai pas et qui étaient en furie des résultats de notre
mission. M. Dorais m'avait dit à l'époque combien d'heures-hommes
étaient impliquées par cette vente et cela dépassait les
chiffres d'emploi global d'une année pour une des mines, je crois.
Le Président (M. Beaumier): Alors, merci. Si je veux
respecter...
M. Grégoire: Est-ce que je pourrais conclure?
Le Président (M. Beaumier): Oui, mais brièvement,
parce que je veux respecter les paroles que j'ai dites tantôt. Je
voudrais passer au député de Nelligan. Concluez.
M. Grégoire: Je pourrais revenir après le
député de Nelligan.
Le Président (M. Beaumier): Terminez plutôt tout de
suite.
M. Grégoire: Le député de Nelligan en a-t-il
pour plus de 40 minutes?
M. Lincoln: M. le Président, vous savez que nous faisons
l'étude des crédits de tout le ministère. Il y a 24 000
000 $. Il y a toutes sortes de programmes et de sous-programmes qu'il faut...
C'est notre seule chance de poser des questions. J'ai beaucoup de sympathie
pour le député, mais, si on veut parler purement de l'amiante, il
me semble tout à fait démesuré de passer... Je veux aller
jusqu'à 18 heures, à moins que vous ne me disiez...
Le Président (M. Beaumier): C'est pour cela que je
terminerai avec le député de Frontenac, tout en disant...
M. Grégoire: Je vais terminer en deux minutes, M. le
Président!
Le Président (M. Beaumier): Excusez-moi, M. le
député! Tout en disant, quand même, qu'il y a un programme
que nous avons adopté et que le député de Frontenac avait
droit à son temps lui aussi. On a été assez large aussi.
Alors, vous avez eu votre bonne part et vous aurez la dernière aussi.
Merci.
M. le député de Frontenac.
M. Grégoire: Je vais terminer comme ceci. À la
suite de tous ces projets qu'on
peut mettre de l'avant dans différents domaines, est-ce que le
ministre ne considérerait pas qu'un secteur d'exportation aussi
volumineux et aussi important que l'a déjà été
l'amiante mériterait qu'on y attache un homme, quitte à ce qu'il
se serve des lieux géographiques, qui a la connaissance du marché
pour aller faire des ventes, un homme qui s'occuperait de projets et viendrait
aider à la Société nationale de l'amiante dans les pays
étrangers, surtout dans les pays en voie de développement? Est-ce
que le ministre serait d'accord avec une telle proposition?
M. Landry: Je vous dis qu'on fait déjà cela depuis
quelques années puisqu'un de nos bons opérateurs à
l'étranger, l'ancien délégué à Tokyo, a
été prêté à la SNA et s'active
présentement dans le dossier de l'amiante. Je ne minimise pas la
question. Toutes nos directions peuvent travailler pour l'amiante -Analyse et
stratégie peut travailler pour la question de l'amiante - mais ce n'est
pas notre méthode et je crois que nos méthodes sont
éprouvées, pas depuis vingt ans, mais depuis que le
ministère existe et avec, ceci dit modestement, les succès
d'opération que nous avons eus, nous n'avons pas l'intention d'ouvrir
des divisions sectorielles, sauf que pour un dossier particulier, des fois, on
va faire un détachement de fonctionnaire. Là, j'en ai
déjà fait un. Je ne prévois pas en faire d'autres.
Je peux bien m'engager, par ailleurs, à faire regarder de plus
près par nos directions concernées le marketing mondial de
l'amiante et les opérations spécifiques qu'on pourrait
prévoir, mais je ne veux rendre aucun de mes fonctionnaires prisonnier
d'un secteur. Ils vont s'occuper de cela; ensuite, ils vont s'occuper des
pâtes et papiers et, ensuite, ils vont s'occuper d'aluminium. Mais ce
sont les vendeurs qui vont vendre ultimement, donc, la SNA et les autres
compagnies.
Le Président (M. Beaumier): Merci. La parole est à
M. le député de Nelligan.
Projets de consortiums
M. Lincoln: M. le ministre, est-ce qu'on pourrait vous poser
quelques questions sur les consortiums? Je pense que c'est à la page 12
du cahier. D'après ce que j'ai vu, en mars 1983, il y avait neuf projets
de consortiums, six projets avaient été abandonnés et un
autre était considéré comme en formation. En avril 1984,
il y avait quatorze projets de consortiums, en plus des neuf premiers. De ces
quatorze projets, il y en avait huit qui avaient été
abandonnés et deux en formation. En 1985, il y avait eu neuf nouveaux
projets, dont trois abandonnés et cinq en formation,
c'est-à-dire, au total, trente-deux projets mis en marche, dix-sept
abandonnés et huit en formation. Pouvez-vous me dire si les consortiums
qui ont été abandonnés avaient été
formés pour une seule transaction ou si c'étaient des consortiums
qui devaient être formés d'une façon permanente?
M. Landry: Je pense que vous avez tout cela à l'annexe 3.
D'ailleurs, à l'annexe 3, vous avez cela en chiffres, en lignes et en
colonnes et on vous donne dans les colonnes de droite ce qui se passe
exactement. Je prends le numéro 1 - Scordos & Als, manufacturier
d'équipement électrique. Le secteur visé, c'étaient
les lignes de transmission de distribution électrique. Le marché:
l'Afrique, le Moyen-Orient. Le projet a été abandonné de
façon pure et simple, il n'a pas vu le jour.
M. Lincoln: Est-ce que le ministre ou le sous-ministre pourrait
nous expliquer le pourcentage très significatif, très
élevé, d'un petit peu plus de la moitié des consortiums
qui ont été abandonnés? Pourquoi ce pourcentage
élevé d'abandons?
M. Landry: D'abord, on a déjà un résultat,
dans le domaine des consortiums, qui n'est pas négligeable. Après
peut-être quinze ans, le souhait de formation de consortiums, c'est une
opération très, très compliquée. D'abord, les
entrepreneurs, par définition, ont une mentalité un peu
individualiste, ils sont souvent en concurrence les uns les autres. S'ils
veulent faire un consortium sur un marché, ils restent en concurrence
sur les autres marchés, ce qui ne crée pas entre eux un climat
d'harmonie, un climat de communication des renseignements qui seraient
nécessaires. C'est une opération très
compliquée.
Le premier consortium qui a vu le jour, il y a quelques années,
je crois que c'est le Consortium de créativité de
Montréal. Après des mois et des mois de travail, la
Société nationale des véhicules industriels, qui regroupe
SDI-exportation, Exportation
Québec, Camions Pierre-Thibault, Équipements Poudrier,
Ramtec, Paul Demers, etc., a également eu une très longue
gestation. On a déjà des consortiums qui marchent et on
espère se servir de l'expertise développée dans ceux qui
fonctionnent pour aider à en faire naître d'autres. L'exemple
entraîne. Dès qu'il y en a une masse critique suffisante qui va
fonctionner, cela va apprendre aux autres comment fonctionner, cela va leur
donner l'exemple. Dès qu'il y a de l'argent qui se fait, les autres
veulent utiliser les mêmes méthodes pour en faire et on a l'espoir
d'accélérer le mouvement.
M. Lincoln: Depuis l'expérience de 1983, est-ce qu'il y a
- je ne sais pas le mot français - des "patterns", est-ce qu'il y
a de grandes lignes qui se détachent de l'expérience qui
s'est faite depuis 1983?
M. Landry: J'ai perdu le début de la phrase.
M. Lincoln: Est-ce qu'il y a de grandes lignes qui se
détachent de l'expérience qui s'est faite depuis 1983 par rapport
à 1985 pour vous permettre de savoir comment ajuster le tir et mieux le
coordonner? Est-ce qu'on a pu avoir des statistiques, des
éléments de réponse de ce qui a été fait en
1983 par rapport à ce qu'on va faire en 1985-1986?
M. Landry: Ce qui ressort de notre expérience - si on peut
vous résumer cela brièvement - la difficulté des
consortiums qui peut se transformer en facteur de succès, si elle est
résolue, c'est le problème humain, le choix du directeur
général, l'entente entre les associés et le niveau de
confiance et de coopération qu'ils peuvent développer entre eux.
(17 h 30)
On a même organisé - c'est relaté dans le document -
un séminaire, un symposium pour inviter tous les gens qui ont
tâté de cette expérience de consortium à donner
leurs impressions. Le résumé de la journée de consortium
est le suivant: niveau de motivation et de compétence du directeur
général et capacité des partenaires à travailler
entre eux, dans des relations humaines et de confiance harmonieuses; ce serait
cela, le message. Cela se fait. Vous voyez, on en a déjà un
certain nombre qui fonctionnent et qui sont solides.
M. Lincoln: Est-ce que vous voyez une accentuation future de ce
programme de consortiums? Est-ce que vous pensez que l'expérience nous
démontre qu'il faudrait accentuer le programme des consortiums?
M. Landry: On en a plusieurs en formation, comme vous voyez. Mon
pari, puisque c'est une formule relativement nouvelle au Québec, c'est
que, dès que quelques consortiums auront connu des résultats
spectaculaires, vous allez voir la boule de neige commencer à rouler et
à prendre du volume. Mais, il faudrait qu'il y ait quelques bons
"success stories"; on commence à en avoir. SNVI, cela commence à
être tout à fait montrable, et quelques autres. C'est quand ces
modes de fonctionnement seront bien éprouvés et auront connu du
succès que les autres suivront. C'est souvent comme cela que cela se
passe en affaires.
M. Lincoln: À la page 13 du cahier, identification des
marchés extérieurs, vous dites: "La direction de l'analyse des
marchés a poursuivi son mandat d'identification des marchés
extérieurs le plus susceptibles d'acheter les biens et services produits
au Québec. Ainsi, afin de parfaire la connaissance des principaux pays
partenaires commerciaux du Québec, 63 analyses ont été
effectuées. " Pourriez-vous me dire quels moyens principaux on utilise
pour faire connaître les occasions de marché aux entreprises
québécoises? Est-ce que les délégations du
Québec à l'étranger jouent un râle actif et dominant
dans le processus de recensement des informations contenues dans les
dossiers?
M. Landry: L'équipe qui ne quitte pas le territoire -
l'équipe de Montréal et la petite équipe de Québec
- joue un rôle clé dans la collecte des données, dans
l'analyse et dans le traitement de ces données. À
l'étranger, des équipes sont en contact direct avec les
clientèles et les marchés. C'est un système
d'interrelation et de transmission d'informations qui fait qu'on peut arriver
à certains résultats et qu'on a pu, en particulier, monter 33
analyses solides.
M. Lincoln: Est-ce que ces 33 analyses ont été
entreprises par le ministère lui-même ou si c'est à la
suite de demandes d'intervenants que les analyses ont...
M. Landry: Non. C'est nous-mêmes. Il est arrivé
quelques fois qu'on ait agi sur demande, mais on a agi suivant l'importance de
nos partenaires commerciaux. On a fait l'analyse de nos marchés les plus
importants d'abord.
M. Lincoln: Cela fonctionne par secteurs ou par pays?
M. Landry: Par pays. C'est ce qu'on appelle la fiche "pays".
M. Lincoln: Est-ce que vous pouvez nous dire quelle est
l'évaluation officielle par rapport à l'expérience qui
s'est faite jusqu'à maintenant? Est-ce qu'il y aura plus d'analyses qui
vont se faire? Est-ce qu'on continue au même rythme? Est-ce que
l'expérience a été concluante?
M. Landry: On va continuer nos analyses et cela va être de
plus en plus simple parce qu'on va finir par avoir couvert la planète et
là, cela deviendra une question de renouvellement et de mise à
jour. On utilise l'informatique en plus.
Représentation à
l'étranger
M. Lincoln: Est-ce qu'on aurait pu parler brièvement de la
représentation à l'étranger? Je ne veux pas revenir sur
les débats que nous avons eus l'autre jour sur la
même question. Beaucoup de questions que nous avons posées
aux Relations internationales s'appliquent ici. J'aurais voulu vous poser des
questions plus spécifiques, par exemple, sur la formule des conseillers
itinérants, qui est peut-être une formule, en un sens,
expérimentale.
M. Landry: Voulez-vous faire une référence de page,
s'il vous plaît? Il n'y a pas de page là-dessus?
M. Lincoln: Excusez. Page 23, je pense.
M. Landry: II n'est pas question des itinérants?
M. Lincoln: Non. Je pose une question par rapport à la
représentation à l'étranger.
M. Landry: Oui.
M. Lincoln: L'année dernière, à la suite des
crédits, on avait discuté de la formule des conseillers
itinérants. Est-ce que vous pouvez nous dire combien de conseillers
itinérants vous avez à l'heure actuelle dans votre
délégation étrangère?
M. Landry: On a eu, M. le député, depuis notre
dernière rencontre, deux conseillers itinérants, qui ont couvert
essentiellement les pays du Moyen-Orient et du Maghreb. Il s'agit de MM. Louis
Granger et Jean Labonté. Les deux, d'ailleurs, sont actuellement dans
d'autres affectations. M. Labonté travaille toujours sur le dossier du
golfe Persique et M. Granger est actuellement dans une autre affectation. On va
probablement avoir un autre itinérant pour le remplacer, suivant les
besoins.
M. Lincoln: Est-ce que la formule en est une flexible, où
vous employez ces conseillers itinérants pour une période de X et
peut-être que, après cela, le travail se résorbe, pour
recommencer plus tard? Quelle est la formule? Quel est le genre de contrat
qu'ils ont avec le ministère?
M. Landry: Ce ne sont pas des contractuels. Ce sont des
fonctionnaires du ministère.
M. Lincoln: Ce sont des fonctionnaires du ministère.
M. Landry: Oui, oui. Ce qui est souple, c'est l'endroit où
ils travaillent, car ils vont suivant les besoins. Ils vont couvrir des
marchés où on n'est pas présent avec une
délégation permanente, mais où il y a des
possibilités de faire des affaires. Pour le Moyen-Orient, cela se passe
de commentaires; les Emirats, la République Arabe, l'Arabie Saoudite;
pour le Maghreb, cela se passe de commentaires aussi. Ces conseillers nous ont
rendu de grands services. Quand on en a moins besoin, on les retire, on les
envoie ailleurs ou on réutilise la main-d'oeuvre d'une autre
manière.
M. Lincoln: L'évaluation du système qui a pu
être faite jusqu'à présent, est-ce que...
M. Landry: On est généralement satisfait de
l'effort de ces conseillers.
M. Lincoln: Je ne parle pas des conseillers comme personnes,
comme compétences individuelles, mais du principe même des
conseillers itinérants. Est-ce que vous comptez le garder? Est-ce que
vous voulez préserver la formule ou peut-être l'étendre
à d'autres secteurs? Est-ce que c'est une expérience que vous
allez réévaluer dans un avenir prochain, pour décider si
elle continue ou ne continue pas?
M. Landry: On est déjà prêt à dire
qu'on doit continuer. Ces gens nous ont rendu - encore une fois, au-delà
des personnes, cela a bien tombé parce que c'étaient des gens qui
travaillaient bien - de grands services; les succès qu'on a eus sur les
marchés du Moyen-Orient et des pays d'Afrique du Nord, du Maghreb sont
là pour en témoigner.
M. Lincoln: Alors, vous en avez deux ou trois. Est-ce que vous
avez des prévisions pour que ce chiffre soit augmenté dans
l'avenir? Est-ce que vous pouvez nous dire si cela va rester au statu quo?
M. Landry: On n'a pas les ressources, actuellement, pour en
mettre plus. Alors, il faudra les rendre plus mobiles et leur demander
davantage. On ne pense pas que le Conseil du trésor nous accordera les
ressources pour en avoir davantage.
M. Lincoln: Dans les engagements financiers de novembre 1984, on
parlait du renouvellement du contrat de services de l'attaché commercial
du Québec à La Haye pour une période de cinq mois et deux
semaines. Est-ce que vous pouvez nous dire si ce poste se continue? Quel est le
rôle de l'attaché commercial? Est-ce que cela va se continuer?
M. Landry: On a fait un deuxième bloc de six mois. On est
en phase d'évaluation. Si l'évaluation est positive, on va
continuer la formule.
M. Lincoln: Pourriez-vous me dire le rôle spécifique
de l'attaché commercial à La Haye? Est-ce qu'il est
rattaché purement aux Pays-Bas ou est-ce que c'est un secteur quelconque
du marché européen?
M. Landry: II est rattaché aux Pays-Bas et il
relève hiérarchiquement de notre délégation de
Bruxelles.
M. Lincoln: Sur les 95 personnes aux États-Unis, nous
avons 18 attachés commerciaux. Je réalise que c'est une question
à laquelle, réellement, la réponse peut prendre bien des
sens, se fait d'elle-même, parce qu'il y a naturellement une relation
avec nos exportations dans le pays. Mais, malgré tout, puisqu'on a
parlé, lors du 20e anniversaire de la coopération avec la France,
d'augmenter nos échanges économiques avec la France, sur 91
personnes en France, on a seulement 6 attachés commerciaux. Est-ce que
c'est l'objectif du ministère d'augmenter l'apport des conseillers
économiques en France...
M. Landry: Mais, est-ce qu'il compte le CQCI
là-dedans?
M. Lincoln:... d'accentuer la dimension économique de la
délégation en France?
M. Landry: Commençons par le premier aspect de votre
question. Quand vous voyez le grand nombre d'attachés commerciaux que
nous avons aux États-Unis et que vous n'avez pas nommé les
conseillers, vous voyez bien que c'est là que l'effort se passe parce
que c'est là que les marchés se trouvent. C'est 66 % de
l'exportation internationale.
Quant à la France, je pense qu'on n'a pas de... On en a six
à Paris. Trois conseillers, plus trois recrutés locaux à
Paris. Aux États-Unis, c'est sept fonctionnaires et onze recrutés
locaux, pour un total de dix-huit.
M. Lincoln: On a parlé tantôt de 19, mais, enfin,
c'est...
M. Landry: De 19, il y en a peut-être un qui traîne
quelque part...
M. Lincoln: Oui, d'accord.
M. Landry: Je ne dis pas qu'on ne pourrait pas faire davantage
avec la France. Cependant, vous n'êtes pas sans savoir que nos prix
vendeurs ont plus que doublé au cours des deux dernières
années pour des raisons de conjoncture monétaire. Alors, est-ce
que ce serait sage de ma part, quand j'ai à ce point la
réalité monétaire contre moi, d'aller lancer des troupes
excédentaires dans un pays où on est mieux d'attendre que le beau
temps revienne pour être plus concurrentiel, là où les
meilleurs vendeurs ont beaucoup de difficultés?
M. Lincoln: Pour situer la question dans un autre contexte ou
différemment, dans l'ordre des priorités du ministère, je
réalise que les États-Unis sont de beaucoup notre gros
marché international. Dans la question de situer les priorités de
marchés cibles et de zones cibles, où se situent, par exemple, la
France et la francophonie par rapport aux priorités géographiques
comparativement au Sud-Est asiatique, etc? Est-ce que la France et la
francophonie y occupent une place prioritaire, importante pour l'avenir? Il y
aura les conjonctures temporaires.
M. Landry: Sur le plan des relations internationales, vous ne me
demanderez pas de faire une priorité entre la France...
M. Lincoln: Non. Je veux parler du commerce extérieur.
M. Landry:... et les États-Unis. Sur le plan du commerce
extérieur, vous voyez par la répartition de nos objectifs quel
est le degré de priorité: l'Amérique du Nord, les
États-Unis, le Canada ont 43 % de nos effectifs. L'Europe en a 38 %. Le
reste du monde en a 20 %. Alors, cela vous donne une idée que nous
établissons le volume de notre effort, pour l'instant, en fonction de
l'importance des marchés, en nombre d'habitants et en facilité de
pénétration. C'est vrai qu'en Europe de l'Ouest et dans l'Europe
de la communauté, il y aura, avec les deux pays ibériques, 335
000 000 de personnes. C'est vrai aussi que la conjoncture monétaire nous
défavorise énormément et que nous n'avons pas avec eux les
circuits traditionnels qu'on a avec les États-Unis. Malgré cela,
on fait un effort pour l'Europe de l'Ouest de 38 %.
Et là, entre la France et les Pays-Bas ou la Grande-Bretagne, on
n'est pas dans l'univers culturel ou politique, ce sont des marchés et,
pour nous, ils ont une importance égale, ou même dans le cas de la
Grande-Bretagne, plus importante à cause de l'histoire, à cause
des circuits économiques. La Grande-Bretagne est un client plus
important pour nous que la République française.
M. Lincoln: Je réalise tout à fait, oui. (17 h
45)
M. Landry: Alors, c'est pour cela que je mets 43 % en
Amérique du Nord et 38 % en Europe de l'Ouest. Si le franc
français, le deutsche mark et la livre sterling reprenaient un peu du
poil de la bête et rendaient nos produits plus concurrentiels, je ne dis
pas que je ne serais pas amené un jour ou l'autre à inverser les
choses et à mettre un effort supplémentaire en Europe de
l'Ouest.
M. Lincoln: À la suite du sommet, vous avez pris
l'engagement de prolonger le mandat des conseillers économiques à
cinq ans. Est-ce que vous pouvez nous dire où on se situe par rapport
à cela?
Débats de l'Assemblée nationale 24 avril 1985
M. Landry: On se situe là-dedans à cette
réserve près que ce que j'ai dit, c'est que nous pourrions aller
jusqu'à cinq ans et on l'a déjà fait en prolongeant un
certain nombre d'entre eux. S'ils sont bons, s'ils sont bien adaptés au
pays où ils se trouvent, si leur rendement est acceptable, on peut aller
jusqu'à cinq ans. On le faisait déjà aussi dans certains
cas avant. Je pense à M. Migneault, qui était à Los
Angeles et qu'on vient de ramener à New York; il a bien
été là cinq ans. Pardon, c'est quatre ans.
M. Lincoln: Aujourd'hui, est-ce qu'on peut dire, par exemple,
qu'il y aura peut-être un certain nombre de ces conseillers
économiques qui vont choisir eux-mêmes, si les conditions s'y
prêtent? Je pense que c'était cela que vous citiez, lorsque les
conditions se prêtent à cela. Je pense que c'était cela,
lorsque les conditions le permettent. Si le délégué
économique lui-même fait du bon travail et qu'il est
désireux de rester en poste, est-ce que c'est la politique du
ministère de le garder là jusqu'à cinq ans?
M. Landry: De plus en plus, ils vont être cinq ans en poste
alors que, pour les diplomates, en général, la règle c'est
trois ans; pour les délégués économiques, cela va
être plutôt cinq ans.
Le financement des exportations
M. Lincoln: Est-ce qu'on pourrait vous poser quelques questions
sur le financement des exportations, parce c'est par rapport aux
priorités à la page 25? Vous avez dit qu'un certain nombre de
moyens, d'outils financiers et techniques permettant de mieux appuyer les
efforts de pénétration du marché de nos entreprises font
l'objet d'une évaluation et que certains d'entre eux seront mis en
oeuvre au cours de l'année prochaine. Quant à la
société de financement des exportations, j'aurais voulu vous
demander, d'abord, où se trouve le projet, parce qu'il y a eu
différentes déclarations qui ont été faites par
votre ministère et vous-même, où vous avez dit: On est
presque prêt à embarquer dedans. Je ne sais pas si vous parliez de
jours ou de mois à venir. H y a certaines déclarations qui
semblaient dire que c'était presque imminent. Est-ce que vous pourriez
nous dire où on se trouve avec cela? Où est-ce que vous en
êtes avec vos consultations, vos études et quel est
l'échéancier? Est-ce que vous allez de l'avant avec une
société de financement à l'exportation?
M. Landry: D'abord, vous connaissez la doctrine du
ministère en cette matière et la doctrine du ministre. On pense
que nos moyens d'intervention, qui ne sont pas négligeables et qui n'ont
pas mal marché, sont devenus, eu égard à l'augmentation de
notre commerce extérieur et à l'augmentation du nombre de firmes
impliquées, insuffisants, surtout si on tient compte d'une nouvelle
dimension du commerce mondial qui n'est pas la dimension la plus sympathique -
mais ce n'est pas le Québec qui donne le "trend", comme on dit -qui est
cette dimension des accords de compensation du troc.
Si on pense au fait que nous sommes totalement dépourvus, autant
dans le secteur public que dans le secteur privé, d'un bon instrument
pour répondre à notre clientèle qui veut faire du troc,
nous allons être obligés de modifier nos structures d'intervention
d'appuis financiers aux exportations et ce que nous mettons de l'avant au
ministère du Commerce extérieur, c'est un
réaménagement des forces en utilisant une partie des ressources
de la SDI-Exportation, une partie des ressources du commerce extérieur
pour donner naissance à la Société
québécoise d'exportation.
Comme c'est une chose qui n'allait pas de soi, comme souvent les
idées nouvelles, on a entrepris une série de consultations. Au
début, les gens du secteur privé avaient compris qu'il s'agissait
de mettre sur pied une nouvelle société d'État. Alors,
sans autre forme de procès, ils ont fait quelques déclarations
adverses. Quand ils ont compris qu'il ne s'agissait pas de cela, mais qu'il
s'agissait d'un réaménagement des personnels, des moyens et des
effectifs, et surtout quand ils ont eu des problèmes de troc et qu'ils
se sont rendu compte qu'aucune entreprise privée ne pouvait les leur
régler, le vent a tourné. Le Conseil du patronat, je crois, avait
alors fait une déclaration plutôt négative -
j'espère que je ne me trompe pas avec la chambre de commerce; c'est bien
la chambre de commerce plutôt - au début. Après
explications plutôt positives et un certain nombre de déclarations
de milieux d'affaires, on voudrait même qu'on en fasse une
société mixte dans laquelle ils pourraient prendre des
intérêts.
C'est donc là qu'en est le dossier. Nos consultations continuent.
On a un projet de mémoire qui serait presque en forme pour aller au
Conseil des ministres. On va faire les travaux ultimes dans les mois qui
viennent et si on doit passer à l'action, si on a un consensus
suffisant, on le ferait à l'automne. Parce que cela va aussi demander
des aménagements législatifs et je ne pense pas que, d'ici au 21
juin, on soit en mesure de déposer quoi que ce soit de bien
préparé.
M. Lincoln: Est-ce que vous songez à une commission
parlementaire pour écouter les intervenants avant de...
M. Landry: Ce n'est pas du tout exclu comme hypothèse. En
tout cas, il y aura
sûrement une commission parlementaire passionnante sur le projet
de loi lui-même, article par article. Ce serait hautement souhaitable et
ce serait probablement souhaitable aussi d'entendre des intervenants.
M. Lincoln: C'est dans ce sens que je vous demandais cela.
M. Landry: On verra, à l'époque, en accord avec les
leaders parlementaires, mais je peux dire dès maintenant qu'en principe
c'est la façon dont on devrait procéder.
M. Lincoln: Je pense que je vous avais posé une question
en Chambre et ce n'est certainement pas la façon, on n'a pas le temps
d'avoir des réponses prédéfinies, mais peut-être
pourriez-vous me dire si cela implique qu'une partie de la SDI-Exportation va
être prise par la nouvelle société et sera sous
l'égide du ministère du Commerce extérieur?
M. Landry: Oui, c'est exactement ce que cela implique quand je
parie de réaménagement. J'ai été réticent
depuis le début - les chiffres le montrent d'ailleurs -à me
lancer dans des embauches de fonctionnaires à n'en plus finir. On a
aimé mieux avoir des équipes plus légères, plus
productives et on n'entend pas, au ministère du Commerce
extérieur, préconiser des formules qui dérogent de cette
philosophie. Par conséquent, nous allons employer des ressources
disponibles à l'intérieur du secteur public présentement,
donc ce qui se trouve à la SDI-Exportation. Sous réserve,
évidemment, qu'on ait un bon consensus et qu'on soit bien appuyés
par le milieu d'affaires qui a parlé de participation au
capital-actions. Alors, à ce moment-là, cela ne pourra plus
être la SDI qui, elle, est possédée à 100 % par
l'État.
M. Lincoln: L'élément du consensus par rapport au
ministère de l'Industrie et du Commerce, est-ce que cette étape
est déjà franchie?
M. Landry: Le ministère de l'Industrie et du Commerce,
comme tous les ministères du gouvernement, s'ajuste aux meilleures
formules requises par la clientèle. Le jour où s'est
ajustée la clientèle et, comme je vous l'ai dit, quand le vent a
tourné - c'est un peu comme l'attitude de votre chef sur l'ouverture
avec les Etats-Unis - il y a des gens qui ont pris le train en marche, et je
prévois que c'est ce qui va encore arriver. On juge les dossiers au
mérite. Si M. Biron me fait une démonstration convaincante comme
il l'a fait à 100 reprises depuis qu'il est membre du Conseil des
ministres, je suis le premier à l'appuyer et l'inverse est
également vrai.
Le Président (M. Beaumier): Ce serait seulement pour
informer les membres de la commission que, si on veut terminer vers 18 heures,
on pourrait peut-être conclure, parce qu'il faudrait aussi
procéder à l'adoption des crédits.
M. Lincoln: Oui. Je vais conclure le plus tôt possible.
Mais cela ne prend que quelques secondes pour adopter les crédits, ce
n'est pas tellement compliqué!
Le Président (M. Beaumier): C'est cela, si nous le
voulons, mais il ne faudrait pas trop dépasser 18 heures, parce que cela
entraîne des coûts aussi.
M. Lincoln: Je vois que notre chef vous préoccupe, M. le
ministre, c'est bon signe, c'est de bon augure pour nous. En tout cas, revenons
à la société des exportations, qui est le sujet du moment.
Est-ce que vous pourriez nous parler de la coordination que vous entendez faire
avec la SEE? Par exemple, le dernier rapport qui a été
émis sur le financement des exportations par le fédéral
citait ce dédoublement qu'il regrette des financements provinciaux et,
en fait, on y parle du Québec plus spécifiquement.
M. Landry: Je dois d'abord dire que nous parlons
déjà régulièrement à la
Société d'expansion des exportations. Je pourrais dire que,
quotidiennement, au niveau des fonctionnaires, ils sont en contact.
Alors, on a un bon modus vivendi, une complémentarité. Ce
qui m'amène à vous redire en une phrase une doctrine qui, pour
nous, est fondamentale: Les mécanismes québécois sont
complémentaires aux mécanismes fédéraux. Nous
avons, à moult reprises, procédé par addition des
avantages au profit des PME québécoises. Toute proposition
fédérale - notre collègue, M. Kelleher, le sait, les
fonctionnaires fédéraux le savent -qui viserait à
homogénéiser l'intervention de l'État, de Halifax à
Vancouver, en matière de soutien aux exportations, recevra, de la part
du Québec, une fin de non-recevoir. Il se peut qu'il y ait des
aménagements. Par exemple, le ministre de l'Industrie et du Commerce du
Québec discute avec son homologue fédéral pour le
transfert de la gestion de certains programmes à Québec;
très bien, on pourrait faire cela. Sans addition d'effectifs et de
moyens spectaculaires, on pourrait administrer probablement nous-mêmes
une partie des programmes fédéraux qui s'adressent à la
PME, mais jamais nous n'entrerons dans la philosophie de
l'homogénéisation des programmes, c'est le contraire de ce qu'on
fait avec succès depuis trois ans. C'est bien cela, notre doctrine.
M. Lincoln: M. le ministre, malheureu-
sèment, il faudra terminer à 18 heures. C'est très
regrettable parce que j'avais d'autres questions à vous poser. J'aurais
voulu, peut-être très brièvement, vous demander où
on se situe par rapport à SEREQ, j'avais plusieurs questions sur ce
sujet. Quelle va être l'implication du ministre du Commerce
extérieur par rapport à SEREQ? Je voulais aussi vous poser des
questions sur deux ou trois études, où on en est. Mais
peut-être que je pourrai les poser au sous-ministre après, par
téléphone.
M. Landry: Oui.
La SEREQ
M. Lincoln: Mais peut-être que vous pourriez nous parler,
brièvement, de SEREQ.
M. Landry: D'accord. Je pense que le député
reconnaîtra que, lorsqu'il s'adresse au ministère du Commerce
extérieur à quelque moment de l'année, commission ou pas,
il reçoit les informations...
M. Lincoln: Oui, oui.
M. Landry:... qu'il demande...
M. Lincoln: Je n'ai pas à me plaindre du tout de ce
côté.
M. Landry:... et on va continuer à faire cela.
Pour SEREQ, c'est vrai qu'on n'a pas beaucoup de temps, mais même
si on en avait plus, je ne vous en parlerais pas beaucoup; je vais vous dire
pourquoi. C'est que la SEREQ est tombée sous notre juridiction, sous
bénéfice d'inventaire, le 1er avril. Alors, on est encore en
train d'en examiner tous les mécanismes. On a mis une espèce de
moratoire sur son action, comme dans la période d'inventaire dans le
commerce, on ferme la boutique. On est en train de faire l'inventaire, de
recentrer son action. On a maintenant un an et demi d'expérience
à SEREQ. On a rencontré le conseil d'administration. Maintenant,
la SEREQ est dans le giron du ministère du Commerce extérieur et
je pourrai vous dire, dans quelques mois, qu'on va véritablement en
faire.
M. Lincoln: Est-ce que SEREQ va devenir une société
d'État?
M. Landry: C'est déjà une société
d'État, qui était sous la tutelle du ministère de
l'Éducation.
M. Lincoln: Mais qui n'avait pas de loi constitutive, n'est-ce
pas?
M- Landry: Non. C'était une société...
Oui, c'est vrai, techniquement, vous avez raison. Vous m'avez pris en
défaut, moi qui suis pourtant un juriste aussi. C'était une
compagnie québécoise, suivant la loi québécoise,
mais possédée par le gouvernement.
M. Lincoln: Oui.
M- Landry: Ce n'était donc pas techniquement une
société d'État. Je ne pense pas que ce soit sous l'angle
juridique qu'on aborde les choses. Cela va rester comme cela.
M. Lincoln: D'accord.
Adoption des crédits
Le Président (M. Beaumier): Merci, M. le
député. Alors, est-ce que les membres de la commission adoptent
le programme 1' et, comme il n'y a qu'un programme, l'ensemble des
crédits du ministère du Commerce extérieur?
M. Lincoln: Adopté.
Le Président (M. Beaumier): Merci beaucoup, M. le ministre
et MM. les membres de la commission...
M. Landry: Merci, M. le Président, ainsi que tous les
membres de la commission.
Le Président (M. Beaumier): Alors, nous allons ajourner
nos travaux sine die.
(Fin de la séance à 18 heures)