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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le mercredi 21 mai 1997 - Vol. 35 N° 66

Étude détaillée du projet de loi n° 97 - Loi sur le Centre de recherche industrielle du Québec


Étude détaillée du projet de loi n° 79 - Loi instituant la Commission des lésions professionnelles et modifiant diverses dispositions législatives


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Table des matières

Projet de loi n° 97 – Loi sur le Centre de recherche industrielle du Québec

Projet de loi n° 79 – Loi instituant la Commission des lésions professionnelles et modifiant diverses dispositions législatives


Intervenants
M. François Beaulne, président
Mme Rita Dionne-Marsolais
M. Matthias Rioux
M. Réal Gauvin
M. Robert Benoit
M. Régent L. Beaudet
M. Normand Jutras
M. Robert Kieffer
*M. Jean-Jacques Towner, ministère de l'Industrie, du Commerce,
de la Science et de la Technologie
*M. Serge Guérin, Centre de recherche industrielle du Québec
*M. Jacques Brosseau, idem
*M. Yves Tremblay, Commission de la santé et de la sécurité du travail
*M. Pierre Gabrièle, idem
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Neuf heures sept minutes)


Projet de loi n° 97

Le Président (M. Beaulne): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 97, Loi sur le Centre de recherche industrielle du Québec.

Est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Gauvin (Montmagny-L'Islet) remplace M. Cherry (Saint-Laurent) et M. Williams (Nelligan) remplace M. Sirros (Laurier-Dorion).


Étude détaillée


Constitution et organisation (suite)

Le Président (M. Beaulne): Merci. Alors, simplement pour récapituler, étant donné que le porte-parole officiel n'était pas là quand on a commencé l'étude du projet de loi, la semaine dernière, nous en étions à l'article 3. L'article 1 avait été adopté, l'article 3 avait été adopté et l'article 2 avait été suspendu. Alors, c'est là où nous en sommes. Donc, vous avez le choix: ou bien nous revenons à l'article 2 ou bien nous procédons à l'article 4. Alors, M. le porte-parole de l'opposition, c'est à vous de choisir.

M. Gauvin: Ah oui? T'en contrôles grand, ici!

M. Benoit: Oui, c'est ça. Il semble qu'il y ait eu un concours en mon absence, jeudi après-midi. J'étais à ville de Laval, je tiens à le situer, avec 1 000 récipiendaires de tout acabit au grand gala de la Chambre de commerce de ville de Laval, auquel d'ailleurs deux membres du cabinet étaient présents. Le député de Laval et le ministre responsable de la grande région de Montréal étaient présents. Nous y avions été invités – c'est ce qui explique que je n'étais point ici jeudi dernier – pour faire la promotion des gens d'affaires du Québec.

Il semble qu'il y a eu un grand débat sur le Centre, désigné sous le sigle CRIQ, et qu'il y a eu toutes sortes de suggestions de faites, toutes aussi bonnes les unes que les autres, si j'ai bien compris. Mais il semblait que la ministre voulait garder le nom tel qu'il était. C'est ce que j'ai cru comprendre. Alors je n'ai pas trop de problèmes avec ça, à ce moment-ci.

Le Président (M. Beaulne): Donc, l'article 2 est adopté, et nous passons à l'article 4. Mme la ministre.

Mme Dionne-Marsolais: Bon. D'abord, je remercie le député de sa participation et de son accord pour l'article 2. Je souhaite la bienvenue au député de Montmagny-L'Islet. L'article 4, c'est un article qui prévoit que le Centre est mandataire du gouvernement, mais qu'il demeure responsable de ses propres actes, ce qui est un peu normal. Donc, l'article 4 se lirait comme suit:

«Le Centre est un mandataire du gouvernement.

«Les biens du Centre font partie du domaine de l'État mais l'exécution de ses obligations peut être poursuivie sur ses biens.

«Le Centre n'engage que lui-même lorsqu'il agit en son nom.»

Dans l'ancienne loi, il n'y avait pas de disposition. Toutefois, les tribunaux, par des décisions, avaient reconnu le statut de mandataire du CRIQ. Donc, il n'y a pas vraiment de changement sur cet article-là. C'est plus une précision qu'autre chose, M. le Président.

Le Président (M. Beaulne): M. le député d'Orford.

M. Benoit: Oui. Je vais, au fur et à mesure qu'on va avancer, poser des questions d'éclaircissement à la ministre, histoire de peut-être mieux comprendre l'essence même du projet de loi. Quand on dit: Le Centre fait «partie du domaine de l'État mais l'exécution de ses obligations peut être poursuivie sur ses biens, le Centre n'engage que lui-même lorsqu'il agit en son nom», est-ce que je dois comprendre que la province n'est pas responsable des gestes posés par... Il ne pourrait pas y avoir de recours contre la province pour, je ne sais pas, moi, des gestes qui n'auraient pas été adéquats ou de malversation ou... Est-ce que c'est ce qu'il faut comprendre, que les gens n'auraient de recours que contre le CRIQ?

(9 h 10)

Le Président (M. Beaulne): Mme la ministre.

Mme Dionne-Marsolais: M. le Président, je vais demander à l'avocat, Me Towner...

M. Benoit: Pardon? Maître...

Mme Dionne-Marsolais: ...Me Towner, de répondre à cette petite précision légale.

Le Président (M. Beaulne): Je vous demanderais, comme on commence une nouvelle journée, là, à mesure que vous parlez...

Mme Dionne-Marsolais: De les présenter?

Le Président (M. Beaulne): ...de vous identifier pour les fins de la transcription.

M. Towner (Jean-Jacques): Oui. Jean-Jacques Towner, avocat au ministère de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie. L'article 4, c'est simplement pour préciser que le Centre demeure responsable de ses actes. Donc, s'il signe un contrat avec une firme ou une association, un organisme, il est le seul responsable. Il n'engage pas la responsabilité du gouvernement.

M. Benoit: Allons un peu plus loin, Mme la ministre. Nous savons, dans le projet de loi, que vous allez nommer le conseil d'administration dans son ensemble, si j'ai bien compris. Les administrateurs seront nommés par... Et on sait maintenant que les administrateurs peuvent être responsables de certains aspects, dont celui de l'environnement; les lois sont très, très claires là-dessus. On sait aussi que le CRIQ est après développer tout un secteur environnemental. Ils sont venus sur la production porcine, etc. Bon. Il pourrait y avoir ultimement des recours contre les administrateurs, si je comprends bien. Dans une situation qui pourrait devenir ambiguë, il pourrait y avoir des recours contre les administrateurs. Qui, à ce moment-là, couvrirait les administrateurs?

On me dit d'ailleurs, dans le monde des affaires, de plus en plus que les gens ne veulent plus être administrateurs. C'est bien, bien compliqué d'aller chercher des administrateurs. Même pour les PME, les gens ont une peur maintenant féroce de ça. On est responsable des salaires, on est responsable de l'environnement, on est responsable d'à peu près tout, là, et, pas plus tard qu'hier, j'avais des gens qui ont investi dans des fonds de recherche et développement, des pauvres gens, des gens qui ont travaillé au salaire minimum dans des shops de textile et qui, après avoir payé leur frais de recherche et développement, dont le gouvernement ne veut pas faire grâce, là ils s'aperçoivent qu'ils étaient aussi sur les conseils d'administration de ces petites compagnies là, desquelles ils n'ont jamais su vraiment qu'ils étaient administrateurs, et là ils sont actionnés pour la TVQ puis la TPS alors que la compagnie a fait faillite. Bon. C'est pour montrer comment loin le gouvernement peut avoir la main.

Mais là, si on le prend à l'envers, où d'autres gens pourraient avoir des recours contre les administrateurs, qu'est-ce qui se passerait dans le cas présent? Est-ce que les administrateurs seraient couverts par la province ou par le CRIQ? Et quelles sont les garanties qu'on peut donner à ces gens-là finalement qu'ils vont nous représenter, mais qu'ils ne seront pas non plus dans le trouble éventuellement?

Mme Dionne-Marsolais: La protection des membres du conseil est couverte par les articles 12 et suivants, jusqu'à 14, qui indiquent justement que le Centre assumerait la défense de son administrateur poursuivi, sauf en cas de faute lourde ou de faute personnelle. En fait, ce sont des dispositions de la Loi sur les compagnies, et les sociétés d'État qui sont régies par la Loi sur les compagnies sont assujetties à ces dispositions-là aussi. Ce n'est pas nouveau pour le Centre de recherche industrielle.

M. Benoit: Bon, très bien dans le cas des administrateurs. Revenons maintenant à une action majeure faite contre le Centre. Est-ce qu'ultimement la province – puis c'est ça qui est le sens de ma question – est garante de ce qui se passe au CRIQ? Parce qu'il n'y a pas d'équité dans cette compagnie-là, ou très peu, en ce moment.

Le Président (M. Beaulne): Mme la ministre.

Mme Dionne-Marsolais: Oui. Je vais demander à Me Towner, parce qu'il y a une interprétation un petit peu légale. «Ultimement» semble poser problème. Je pense que, comme à l'intérieur des responsabilités des administrateurs et donc des actionnaires aussi, il y a des responsabilités prévues par la loi. Maintenant, «utimement», il y a une petite nuance, et j'aimerais peut-être que Me Towner réponde à cette question qui est assez technique.

Le Président (M. Beaulne): Allez-y, Me Towner.

M. Towner (Jean-Jacques): Oui. Dans le fond, c'est juste une précision que j'aimerais peut-être que vous m'apportiez, parce que le terme «ultimement», là, ça va jusqu'où? C'est difficile d'apporter une réponse précise, puisqu'on a affaire à un organisme qui a sa propre autonomie, sa propre responsabilité, et là, «ultimement»...

M. Benoit: O.K. Prenons un cas précis, qui est un peu tiré par les cheveux, là, mais vous me demandez... On sait que vous êtes en recherche dans la production des fumiers porcins. On trouve la patente, on se met à développer ce produit-là à la grandeur du Québec – d'ailleurs, c'est le but ultime – et on réétend sur les terres agricoles les produits qui sortiront de ces appareils ou de ces machines. On s'aperçoit, dans deux ans d'ici, qu'on a pollué des milliers d'acres à la grandeur du Québec. Tous ces agriculteurs reviennent contre le CRIQ, qui, lui, n'a pas les moyens. Je veux dire, l'équité dans le CRIQ, là, c'est quelques millions de dollars. Est-ce que c'est la province qui ultimement paierait?

M. Towner (Jean-Jacques): Ultimement, légalement, la responsabilité, c'est le Centre; ce n'est pas la responsabilité gouvernementale.

M. Benoit: Il y a un mur. Ça ne peut pas aller plus loin que ça, parce que la province n'est qu'actionnaire. C'est ça?

M. Towner (Jean-Jacques): C'est ça.

M. Benoit: M. le président, vous vouliez peut-être apporter une précision?

Le Président (M. Beaulne): Allez-y, M. Guérin.

M. Guérin (Serge): Serge Guérin, président-directeur général du Centre de recherche industrielle du Québec. Simplement pour dire que, effectivement, c'est une responsabilité limitée qui est celle du Centre dans ce cas-là. C'est le Centre qui assume ces obligations. Si, je pense – et les avocats pourraient me corriger – il y avait une poursuite énorme soulevée par un tiers, à ce moment-là, s'il voulait vraiment poursuivre conjointement le Centre et le gouvernement, il pourrait toujours le faire; mais c'est le Centre qui a à répondre en première ligne. Maintenant, là, je ne sais pas ce que le gouvernement, légalement, ferait d'une poursuite de la sorte. Je pense qu'il s'en remettrait à la responsabilité du Centre puis il dirait: Bien, c'est au Centre d'assumer cette poursuite-là, dans la limite de ses moyens.

Le Président (M. Beaulne): Mme la ministre.

Mme Dionne-Marsolais: M. le Président, je pense que c'est un cas qui se compare aux responsabilités des compagnies en vertu de la Loi sur les compagnies et je pense qu'on peut appliquer le même... L'objet de ce projet de loi là, c'est justement de faire du Centre de recherche industrielle du Québec une société à fonds social dans le même esprit de la Loi sur les compagnies que n'importe quelle compagnie.

M. Benoit: Oui, si ce n'est que, quand je suis actionnaire de Bell Canada, moi, Bell Canada n'est pas, comme vous dites à l'article 4, un mandataire pour moi, elle est une compagnie dans laquelle j'ai... Ici, vous dites à l'article 4: «Le Centre est un mandataire du gouvernement», et j'essaie de mettre ça dans une perspective. Si je suis un mandataire, quelle est la responsabilité du mandat? Ce n'est pas évident, hein? Quand vous me dites: C'est comme toute autre compagnie, quand vous avez acheté des actions chez Bell Canada, Mme la ministre, votre responsabilité, elle arrête à l'achat des actions. Ici, si vous êtes un mandataire du gouvernement, vous êtes mandatée pour faire des choses par le gouvernement. C'est plus fort, là.

Le Président (M. Beaulne): M. Towner.

M. Towner (Jean-Jacques): Cette clause-là, c'est une clause usuelle qu'on retrouve dans toutes les sociétés d'État. C'est tout simplement pour préciser que, lorsqu'on dit: «Le Centre est un mandataire du gouvernement», c'est qu'il jouit des mêmes privilèges et prérogatives que le gouvernement.

M. Benoit: Comme TVQ, TPS?

M. Towner (Jean-Jacques): Comme ne pas payer de l'impôt, des choses comme ça.

M. Benoit: Vous soulevez une très bonne question, puis c'est juste pour éclaircir dès le début du projet de loi. Est-ce qu'effectivement vous payez la TVQ et la TPS?

Des voix: Oui, oui.

M. Benoit: Comme toute autre compagnie.

Des voix: Oui.

M. Benoit: Vous n'êtes pas exemptés comme le gouvernement. Bon, très bien.

Le Président (M. Beaulne): Alors, est-ce que l'article 4 est adopté?

(9 h 20)

Mme Dionne-Marsolais: Adopté.

Le Président (M. Beaulne): L'article 5.

Mme Dionne-Marsolais: Bon. Alors, l'article 5. Actuellement, la loi prévoit 15 membres, dont un directeur général qui est nommé par le gouvernement après consultation des organismes les plus représentatifs du monde de la science et du monde de l'industrie. Alors, l'article 5 que nous proposons réduit le nombre d'administrateurs. On dit que le conseil d'administration du Centre sera composé de neuf membres et on détaille sa composition, le mode de nomination et la durée de leur mandat. Je le lis:

«Le conseil d'administration du Centre est composé:

«1° du président-directeur général qui en est membre d'office;

«2° de huit autres membres nommés par le gouvernement, pour une période d'au plus trois ans.»

L'objectif, ici, avec le trois ans, c'est d'assurer une certaine continuité, une certaine pérennité dans la représentation puis la philosophie du conseil d'administration. Le président-directeur général, comme on le verra plus loin, je pense – oui, c'est ça – sa durée est différente. C'est présenté à l'article 8.

Le Président (M. Beaulne): M. le député d'Orford.

M. Benoit: Oui. On ne retrouve nulle part dans l'article 5 – et normalement je pense bien que c'est comme ça que ça se passe dans à peu près toute corporation – l'intention, pour ce qui est de l'actionnaire, de nommer ses administrateurs. Est-ce qu'on peut savoir de la part de la ministre... Effectivement, dans l'ex-article, on parlait des représentants du monde des sciences, de l'industrie. Dans d'autres – je pense à Société d'Investissement Jeunesse ou je pense à d'autres organismes où là on est beaucoup plus spécifique, on parle des régions, on parle des femmes, on parle des jeunes, etc. Là, je comprends qu'il n'y a rien de ça qui est écrit, ici. On en est, mais est-ce qu'on peut connaître un peu les intentions de la ministre en ce qui a trait à ces différentes nominations?

Mme Dionne-Marsolais: Oui. Je me contenterai de dire, à cette étape-ci, deux choses. D'abord, vous connaissez la politique du gouvernement au niveau de la représentation sur les conseils: on essaiera d'avoir une représentation équilibrée entre les hommes et les femmes. Deuxièmement, étant donné le mandat ou la mission du Centre, on voudrait y voir siéger là des gens qui non seulement représentent, qui ont une capacité d'émettre des avis sur les matières de science et de technologie, mais aussi une certaine représentation régionale. Ça nous apparaît très important, parce qu'on souhaite que le Centre soit au service de l'ensemble des entreprises, des PME du Québec, et les PME sont distribuées à travers tout le Québec. Alors, disons, en dehors de la capacité de rendre la technologie applicable et donc de saisir la dimension technologique des travaux du CRIQ, mais aussi de saisir leur capacité, leur potentiel de marché, la représentation régionale apparaît aussi un élément dont on voudra tenir compte.

Le Président (M. Beaulne): M. le député.

M. Benoit: Oui. Mme la ministre, dans vos engagements électoraux que vous avez pris il y a trois ans maintenant, vous aviez un engagement très, très ferme, très solide, hein, celui de nommer sur tous les conseils d'administration de société d'État des jeunes, et je voudrais savoir où vous en êtes dans le cas du CRIQ et de cet engagement que vous avez pris au moment de l'élection.

Mme Dionne-Marsolais: Pour ce qui est des jeunes sur les conseils d'administration, vous savez que, sur les SAJE, dans les organismes où il y a un volet de la mission qui concerne les jeunes, on a été très actifs à ce niveau-là. Dans certaines sociétés d'État, on a nommé des jeunes dans la mesure où ces jeunes-là apportaient une expérience dans le champ d'action de la société d'État. Je pense ici au Palais des congrès, par exemple, et au secteur tourisme où on sait qu'il y a 28 % de la main-d'oeuvre qui est jeune, qui a moins de 25 ans.

Dans le cas du Centre de recherche industrielle du Québec, on a des postes à combler en ce moment et on n'a pas pris de décision quant à la représentation, mais je crois qu'il serait intéressant d'avoir une représentation de jeunes entrepreneurs qui sont dans des secteurs d'intérêts du champ d'action du CRIQ. Je pense que ce serait quelque chose qui serait certainement intéressant, dans le contexte d'avoir un équilibre au niveau de la représentation.

M. Benoit: Alors, vous en prenez un engagement, pour les jeunes du Québec, d'avoir un siège jeunes?

Mme Dionne-Marsolais: Non, je ne veux pas prendre d'engagement là-dessus, parce que je ne suis pas convaincue que c'est quelque chose qui est... ni pour les autres, d'ailleurs. Je pense qu'il faut faire des efforts pour trouver des bons candidats pour la participation à des conseils d'administration. De là à prendre un engagement, je ne vois pas la valeur ajoutée que ça apporterait sur la discussion du projet de loi. Mais je peux assurer le député et l'opposition que c'est une condition que je mettrai dans la recherche des candidats et des candidates.

M. Benoit: Parce que c'est un engagement électoral, je vous le rappellerai, qui a été pris par votre formation politique de nommer les jeunes sur les conseils d'administration des sociétés d'État.

Vous parlez de représentation régionale. Bon. Les politiciens, tous égaux que nous sommes, nous aimons bien faire plaisir à nos gens de région et leur dire qu'ils sont représentés dans ces institutions. C'est très valable, mais est-ce qu'on n'est pas rendu à l'âge de l'international et est-ce qu'on ne doit pas plutôt penser – quoiqu'on pourrait aussi avoir des gens des régions – à un ou des membres du conseil d'administration qui ne seraient ni des Québécois ni des Canadiens mais bien des gens du monde international?

Quand on regarde la percée qu'essaie de faire le CRIQ avec la Hollande, par exemple, avec les États-Unis, la Californie, si je ne me trompe – vous avez des démarches là-bas – est-ce que ce n'est pas plus avec l'international qu'on doit chercher vers demain que de demander à quelqu'un d'Austin, dans mon petit village, d'aller s'asseoir chez vous? Je veux dire, je n'ai pas de problème à ce que les gens d'Austin soient là, mais j'aimerais peut-être que ce soient des gens de la Hollande aussi. Si on est pour faire du CRIQ ce que vous avez l'intention d'en faire, est-ce que la prochaine page, ce n'est pas l'international?

Le Président (M. Beaulne): Mme la ministre.

Mme Dionne-Marsolais: Le volet international est important. Mais, par contre, si on compare avec d'autres centres de recherche d'État ailleurs dans le monde, généralement on y fait participer des gens de l'État, c'est-à-dire territorialement, là, de l'État. Je crois qu'il est plus intéressant pour nous d'avoir des gens d'entreprises québécoises qui ont un rayonnement international et qui peuvent avoir accès à certains réseaux. Ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas des gens au niveau international qui ne présenteraient pas un intérêt pour nous. Il y a, par exemple, toute une diaspora de Québécois et de Québécoises qui sont dans des firmes internationales à travers le monde et qui pourraient représenter pour nous, dans certains secteurs, des valeurs ajoutées élevées sur un conseil d'administration comme celui du Centre de recherche industrielle du Québec.

Ceci étant, je crois qu'il y a, à travers toutes les régions... Ce n'est pas pour faire plaisir aux régions, là, ou aux gens des régions qu'on souhaite avoir une représentation régionale, mais c'est parce que, en ayant des gens de différents milieux et de différentes régions, on apporte une dimension plus grande à la nature des discussions qui se tiennent à un conseil d'administration et donc au rayonnement du Centre, autant pour aller appuyer les entreprises qui sont dans des régions plus ou moins éloignées des installations du Centre que pour se servir de références de ces gens-là qui sont souvent dans des marchés très spécialisés. Alors, je crois que ce n'est pas exclusif.

Je vous donne un exemple. Si on avait – je dis «si», là – par exemple, comme on a déjà eu à un moment donné, des représentants de sociétés – que ce soit comme l'Alcan ou Bombardier – qui ont des activités à travers le monde... Il y a des Québécois qui se trouvent dans ces sociétés internationales, maintenant, qui pourraient être des candidats ou des candidates très intéressants pour le Centre de recherche industrielle du Québec, dans la mesure où ça les intéresse d'y participer et d'apporter une contribution.

Le Président (M. Beaulne): M. le député.

(9 h 30)

M. Benoit: Encore une fois, je veux bien que la ministre me comprenne. Je n'ai aucun problème que des gens des régions soient là. Loin de moi de... D'autre part, quand on regarde la tendance chez les grands conseils d'administration en ce moment – pour n'en prendre que quelques-uns, là, les Alcan de ce monde, les Power Corp. de ce monde et combien d'autres – on s'aperçoit qu'ils sont rendus à essayer d'avoir des aspects internationaux à leur conseil d'administration qui amènent quelque chose de plus. Vous avez raison, le journal Les Affaires a fait tout un journal là-dessus il y a une semaine ou deux. Tous les Québécois qui sont maintenant à travers le monde, il y en avait des pages et des pages. C'est absolument effarant et emballant de voir tous ces jeunes Québécois soit pour des maisons mères du Québec ou soit avec des filiales qui sont à travers le monde. Mais le village est devenu global, hein, et je pense que ces grands conseils d'administration là, maintenant... La réalité veut qu'on aille chercher des gens internationaux, des gens qui arrivent avec d'autres cultures, d'autres façons de faire les choses. C'est toujours le même problème qu'on a: si on a des Québécois, bien, on va voir les choses de l'oeil du Québécois, société distincte oblige, bien sûr. Mais, si on arrive avec un Hollandais, si on arrive avec un Américain, ils vont regarder les choses d'un autre oeil.

J'avais l'occasion de rencontrer, la semaine dernière, des Américains qui viennent d'acheter un hôtel dans mon comté, qui ont rencontré le bureau de la ministre, par exemple, des gens qui sont propriétaires de 13 terrains de golf. J'écoutais parler cet Américain qui a ouvert je ne sais plus combien de Hilton à travers le monde. C'était extraordinaire de l'entendre parler, lui, de la réalité internationale de l'hôtellerie versus notre réalité québécoise, et je me disais: Il peut apporter quelque chose d'extraordinaire dans ma région, au-delà de ce que, nous, on sait bien faire puis de ce qu'on essaie de bien faire. Mais, lui, il arrivait avec tout un bagage. D'ailleurs, il a rencontré votre ministère. Vous allez en rencontrer un autre qu'on rencontrera ensemble, je pense, le 13, des industriels de Boston, des Américains. On écoute ces gens-là parler et on se dit: Bien, il y a une nouvelle réalité, il y a une autre réalité. Ils apportent beaucoup, ces gens-là, et ils ne sont pas nécessairement de formation latine, formés par nos collèges classiques ou cégeps, ils ont été formés à l'école de l'univers. Et puis ils apportent beaucoup.

Alors, dans une institution comme le CRIQ que vous voulez ouvrir à l'international, qui est déjà ouverte en alliance un peu partout, est-ce que l'heure n'est pas arrivée d'aller chercher un ou des grands noms de grands recherchistes mondiaux qui ne sont pas de notre culture, mais qui vont nous amener et qui vont nous aider... On est toujours plus fort en s'associant avec des gens plus forts. J'ai l'impression qu'ils nous apportent quelque part quelque chose. Bon, mon point est fait, là.

Mme Dionne-Marsolais: Oui, je pense que c'est un excellent point, M. le Président, et je pense que le député a entièrement raison. Il y a juste des petites nuances, et je crois qu'elles sont importantes. Sur le plan de la contribution internationale, il faut bien comprendre aussi que ces organismes d'État ne paient pas pour la présence au conseil d'administration, et je crois que c'est une politique qui a été adoptée par l'opposition quand elle était au pouvoir. Si le député m'assure que sa formation ou les membres de sa formation ne feront pas tout un plat ou ne perdront pas de temps, au moment de l'étude des crédits, sur les coûts que pourraient représenter, un, des déplacements internationaux et, deux, des compensations, parce que les gens des firmes multidomestiques ou multinationales – appelez-les comme vous voulez – ce sont des gens, comme vous le savez, qui facturent, tu sais, qui ont des coûts très élevés parce que justement leur contribution dans leur entreprise se mesure par leur rentabilité et ce que ça rapporte à leur entreprise... Alors, dans les cas où ils participent à des conseils d'administration non rémunérés, c'est qu'ils y trouvent ou ils doivent y trouver pour leurs entreprises un intérêt qui doit être financier, parce qu'il doit se traduire par la valeur des actions ultimement. Donc, dans ces conditions-là, je crois que, comme société d'État, on a une responsabilité à gérer là-dessus.

Ceci dit, je souscris entièrement à l'internationalisation de nos entreprises, de nos conseils d'administration et je crois que toute contribution internationale à ce niveau-là est bien reçue et peut apporter une valeur ajoutée à nos entreprises et qu'il y a différentes façon d'assurer cette internationalisation. La présence sur les conseils d'administration en est une, mais il y en a d'autres, M. le Président.

Le Président (M. Beaulne): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Gauvin: Mme la ministre, au niveau de la structure administrative du CRIQ, est-ce qu'il y a un volet spécifique pour le Québec sur le plan administratif et qu'il y a un volet administratif spécial sur le plan international canadien ou nord-américain? Est-ce que ça se démarque?

Mme Dionne-Marsolais: D'abord, quand on parle du volet, là, je rappelle au député que le marché de toutes nos entreprises, c'est le monde, et ça, là-dessus, je rejoins entièrement le député d'Orford. Le marché de nos entreprises, c'est le monde, et nos décisions de même que l'accès aux technologies se prennent dans la dynamique mondiale.

Par contre, il faut un tremplin de départ, et le tremplin de départ, c'est le marché local, le marché québécois. Dans cette perspective-là, je crois qu'il n'y a pas une entreprise et certainement pas un centre de recherche industrielle qui peut isoler, séparer de cette façon-là, parce que la technologie, elle est universelle, et le développement industriel, lui, il est local. Alors, dans cette dynamique-là, je crois que c'est deux composantes de la mission du Centre de recherche. Mais, sur le plan de l'administration comme telle, en dehors du suivi technologique et de l'ouverture sur des réseaux internationaux, je ne crois pas qu'on puisse parler d'un volet particulier, mais je peux demander peut-être au président du CRIQ de compléter ma réponse sur le plan administratif, comme vous dites. M. Guérin.

Le Président (M. Beaulne): M. Guérin.

M. Guérin (Serge): Alors, sur le plan administratif, non, il n'y a pas deux administrations ou il n'y a pas d'administrations séparées; c'est fondu dans la même administration et c'est très léger. Pour l'instant, ce que nous avons à l'international comme efforts qui sont déployés – parce qu'on ne veut pas effectivement monter une large organisation puis encourir des coûts qui seraient trop lourds à porter et trop longs à rentabiliser – c'est qu'on a essentiellement, à l'intérieur du groupe de développement des affaires du CRIQ, deux personnes actuellement qui ont des activités à l'international ou qui tentent de faire de la représentation, de signer des ententes, de nous représenter auprès d'autres centres à l'extérieur; on mentionnait le Centre des Pays-Bas tout à l'heure, le TNO. Alors, ce genre d'activités est maintenu à travers le groupe de développement des affaires au CRIQ. Il n'y a pas deux administrations différentes.

Le Président (M. Beaulne): M. le député d'Orford.

M. Benoit: Oui. Mme la ministre me demandait si je reviendrais aux crédits avec toutes sortes de questions. Bien sûr que nous reviendrons aux crédits avec toutes sortes de questions, Mme la ministre. C'est mal nous connaître.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Benoit: D'autre part, il faut aussi admettre que c'est Robert Bourassa qui a ouvert le Québec à l'international avec le traité de libre-échange. Il y avait encore une émission hier soir – je ne sais pas si c'était à RDI – où on voyait que jamais le traité de libre-échange n'aurait passé – l'Ontario était contre – si Robert Bourassa n'avait pas mis tout son poids. J'étais adjoint à M. Bourassa à ce moment-là et je me souviens de discussions où on a décidé, où M. Bourassa, avec le Parti libéral, à l'Exécutif... Ça avait été de grandes discussions. Le temps a donné raison à M. Bourassa. Je dois avouer aussi que le chef de l'opposition de l'époque, M. Parizeau, était aussi pour, alors ça aide toujours la job d'un premier ministre. Mais, ceci dit, c'est M. Bourassa qui a voulu ouvrir le Québec économique à la réalité mondiale. Il l'avait fait avant avec l'hydroélectricité sur les États-Unis. Or, on ne pourrait pas tenir un double discours, dire qu'on est pour l'international et puis qu'on ne veut avoir que des gens d'Austin qui siègent sur le conseil d'administration. Je veux dire, en quelque part il va falloir être cohérent dans notre discours.

Moi, j'y crois, à l'internationalisation d'un organisme comme le CRIQ, et, pour avoir investi personnellement dans des entreprises où, sur les conseils d'administration, il y avait des Européens qui siégeaient, je pense que ces gens-là nous ont apporté des choses, et ça a ultimement fini en retombées économiques positives.

Il y a des dépenses à ça, mais il faut faire attention, Mme la ministre. Quand on a regardé les crédits, il y en avait 35 pages de voyages dans votre ministère, à peu près au rythme de 15 par page, là, des voyages, alors, je veux dire, même si on en avait quatre de plus, on parle de quatre assemblées des administrateurs parrainés ou cinq, je ne sais trop, il n'y en a pas une douzaine, alors, au total... Moi, en tout cas, on pourra les questionner, ces crédits-là, ça ne sera pas le gros point.

Le Président (M. Beaulne): Alors, est-ce que l'article 5 est adopté?

M. Benoit: Oui.

Le Président (M. Beaulne): Adopté. L'article 6.

Mme Dionne-Marsolais: Alors, l'article 6, c'est la durée, les mandats. «Le gouvernement nomme, parmi les membres du conseil d'administration, le président du conseil. Celui-ci préside les réunions du conseil d'administration et voit à son bon fonctionnement.»

Ah non. Non, c'est la nomination du président.

Une voix: C'est la nomination du président.

Mme Dionne-Marsolais: Oui. «Les fonctions de président-directeur général et de président du conseil d'administration peuvent être cumulées.» Alors, ce crois que c'est assez clair, là. Je n'ai pas grand-chose à ajouter, à moins que les députés aient des questions sur...

M. Benoit: Oui. Mme la ministre, je suis un peu surpris, parce qu'à la RIO, où on n'avait qu'un président qui pouvait cumuler les deux postes, si je me souviens bien, vous avez insisté avec force, vigueur, intérêt et passion même pour qu'il y ait un président du conseil et un président à la RIO. Pourquoi on ne le fait pas ici avec cette même passion?

Mme Dionne-Marsolais: M. le Président, on peut le faire...

(9 h 40)

M. Benoit: On peut le faire?

Mme Dionne-Marsolais: ...parce que le deuxième alinéa de l'article 6 dit: «Les fonctions de président-directeur général et de président du conseil d'administration peuvent être cumulées.» Donc, on peut le faire si on souhaite le faire.

M. Benoit: À l'intérieur des neuf membres du conseil. On n'augmenterait pas pour autant le conseil d'administration.

Mme Dionne-Marsolais: On n'est pas obligé, non. On peut nommer un membre du conseil qui soit président du conseil.

M. Benoit: Très bien.

Le Président (M. Beaulne): Alors, l'article 6 est-il adopté? Oups! Allez-y, oui.

M. Benoit: Juste une minute, oui. Est-ce que l'intention de la ministre, c'est effectivement, M. le Président, d'avoir un président du conseil d'administration ou on veut que ça soit un président-directeur général et président du conseil d'administration?

Mme Dionne-Marsolais: La décision du gouvernement n'est pas prise là-dessus. Il y a deux tendances, comme le député le sait bien. Il y a une tendance actuellement dans le monde à séparer les deux fonctions, l'une par rapport à l'actionnaire, à la planification, l'autre par rapport aux opérations. Pour ce qui est de ce cas-ci, la décision n'est pas prise. On se garde la liberté et le pouvoir de le faire. Je pense que ça dépend de l'état des entreprises, dans ce cas-là. Si le député veut connaître mon opinion personnelle, moi, je suis d'avis que les deux fonctions ont avantage à être partagées. Mais ça dépend des cas, je le répète. Il y a des cas où il peut être important de les fusionner.

M. Benoit: Votre chef, dans le cas d'Hydro-Québec, a décidé d'avoir un président du conseil et un président administratif. Pour la RIO, qui relevait de vous, vous avez décidé d'avoir deux postes distincts. Bon, je suis capable de vivre avec les deux, M. Gérin, sûrement, est capable de vivre avec les deux aussi. Ça sera au Conseil des ministres de prendre la décision, bien sûr.

Mme Dionne-Marsolais: Tout à fait.

Le Président (M. Beaulne): Alors, ça va, M. le député? L'article 6 est adopté. L'article 7.

Mme Dionne-Marsolais: Alors, l'article 7. «À l'expiration de leur mandat, les membres du conseil d'administration demeurent en fonction jusqu'à ce qu'ils soient remplacés ou nommés de nouveau.»

Je crois que cet article-là est un article assez standard, M. le Président. C'est pour éviter des périodes où on manquerait de membres de conseil par défaut, qui peuvent être des périodes où on ne peut pas nommer des gens, ou pour toutes sortes de raisons. Je crois que ça nous donne une flexibilité d'opération.

Le Président (M. Beaulne): M. le député.

M. Benoit: Là, si je comprends bien, il y en a qui vont être remerciés. On en a 14 en ce moment, on va tomber à neuf...

Mme Dionne-Marsolais: À huit.

M. Benoit: ...à huit, neuf avec le président de l'entreprise. Il y en a qui seront remerciés. Finalement, est-ce que tout le monde va être reconduit à la même date de façon à ce que... L'opération trois ans, elle ne sera pas si bonne que ça si tout le monde arrive à la même date. Ou est-ce qu'on va faire ça en cascade? Comment on a l'intention d'arriver à nos fins là-dedans?

Mme Dionne-Marsolais: On a justement l'intention d'arriver à nos fins, c'est-à-dire d'assurer une continuité. Donc, il y a des échéances, et, au fur et à mesure des échéances, on va remplacer les membres sortants. Et, pour ce qui est de... Ah oui. À l'article 39, il y a un complément d'information là-dessus, mais au niveau des mesures transitoires. Mais notre intention, M. le Président, c'est vraiment d'assurer l'équilibre de la continuité, et on n'a pas l'intention que tout le monde arrive à échéance en même temps. Donc, je pense que c'est souhaitable et je partage la préoccupation du député là-dessus.

Le Président (M. Beaulne): M. le député.

M. Benoit: Donc, juste être sûr que je comprends bien, là. Prenons, je ne sais pas, moi, Serge Gagné, qui est administrateur chez vous; prenons-le à titre d'exemple. Je ne le connais pas, c'est sûrement un chic bonhomme. M. Gagné, en ce moment, ce que vous me dites, Mme la ministre, c'est qu'il y a une date à laquelle son mandat se terminait. Est-ce que c'est comme ça qu'il faut que je comprenne ça?

Mme Dionne-Marsolais: Il y a des administrateurs dont les mandats se terminent ou vont se terminer et qu'on va remplacer; il y en a d'autres dont les mandats ne sont pas terminés et qu'on pourrait décider de remplacer aussi. Mais l'important – et je pense que c'est là-dessus qu'il faut rassurer le député – c'est qu'on veut garder cette continuité. Je n'ai pas les dates des échéances des administrateurs avec moi, M. le Président, donc je ne peux pas commenter puis je ne souhaiterais pas commenter sur chacun des membres du conseil; je crois que ce ne serait pas approprié.

M. Benoit: Alors, quand nous allons nommer un administrateur, il va être là pour trois ans. En d'autres mots, on ne remercie pas tout ce beau monde là à la même date et ils ne seront pas tous renommés en même temps. C'est ce que vous nous assurez.

Mme Dionne-Marsolais: Oui. Je dois préciser, M. le Président, qu'à l'article 5 on dit que huit autres membres sont nommés par le gouvernement pour une période d'au plus trois ans. On peut en nommer pour un an, pour deux ans et pour trois ans. Alors, ça, je pense que c'est important de garder cette dynamique-là. On peut avoir des raisons, pour toutes sortes de raisons, de vouloir garder un administrateur ou de vouloir en nommer un pour un an ou pour deux ans ou pour trois ans. L'important, c'est de garder la dynamique de la continuité.

M. Benoit: Le président, lui, il est nommé pour cinq ans. C'est exact? Et sa nomination comme président est de cinq ans, mais celle...

Mme Dionne-Marsolais: C'est à l'article 8. On va y voir tout à l'heure, là. Au plus, encore là, cinq ans, hein? Au plus, cinq ans.

M. Benoit: Au plus, cinq ans et, comme administrateur, trois ans. Il n'y a pas d'exception. Donc, il faut le renommer. C'est ça?

Mme Dionne-Marsolais: Bien, ça dépend comment on le nomme.

M. Benoit: Il est nommé d'office?

Mme Dionne-Marsolais: Oui, il est nommé d'office, comme dans le cas où on nommerait... À quel article?

Une voix: À l'article 39.

Mme Dionne-Marsolais: Ah oui. D'accord. Donc, c'est ce que je disais tantôt, là. Dans les dispositions diverses, à l'article 39, on peut lire: «À l'exception du directeur général dont le mandat est, pour sa durée non écoulée, poursuivi aux mêmes conditions à titre de président-directeur général du Centre, les mandats des membres du Centre en fonction le [...] – c'est-à-dire à la date d'entrée en vigueur de la présente loi – prennent fin à cette même date.» Et là on va les renommer.

M. Benoit: Sur le conseil d'administration, en ce moment, il y a des gens qui sont directement liés au gouvernement: bien sûr, M. Gérin, qui en est le président, M. Archambault, qui est du ministère de l'Industrie et du Commerce. Bon. Quelle est l'intention de la ministre? Est-ce que c'est de garder ce genre de proportion de gens directement liés au gouvernement sur le conseil d'administration ou si c'est de donner au conseil d'administration comme un vrai conseil d'administration, finalement, de gens complètement libres et réfléchis?

Le Président (M. Beaulne): Mme la ministre.

Mme Dionne-Marsolais: Les intentions de la ministre sont d'avoir un conseil d'administration, je l'ai dit tout à l'heure, représentatif de la réalité et de la dynamique québécoises, et je crois qu'on n'a pas à décider – je ne crois pas que ce soit essentiel de le faire – à l'étude du projet de loi, quant à la composante ou à la représentation au niveau d'un ministère ou d'autres. Le gouvernement précédent avait jugé bon d'avoir un fonctionnaire sur ce conseil; on évaluera en temps opportun s'il y a lieu d'en conserver un.

Le Président (M. Beaulne): Ça va, M. le député?

M. Benoit: Si on comprend la dernière phrase de l'article 7, on dit «jusqu'à ce qu'ils soient remplacés ou nommés de nouveau». Or, dans la vraie vie, on pourrait ne pas nommer ou remplacer, et un administrateur finalement pourrait être là très longtemps. C'est ce qu'il faut comprendre.

Mme Dionne-Marsolais: Oui. Effectivement, M. le Président...

M. Benoit: Est-ce que ça ne va un peu à l'encontre de l'esprit de la loi, où le trois ans semblait... Dans les compagnies dans lesquelles vous avez investi, Mme la ministre, c'est à toutes les assemblées annuelles où les administrateurs sont réélus par les ou l'actionnaire. Ici, non seulement on lui donne déjà un mandat de trois ans...

Mme Dionne-Marsolais: Au plus trois ans.

M. Benoit: ...au plus trois ans, ce qui, déjà là, bon... Je trouve ça un peu spécial. Bien, là, en plus, on dit: S'il n'est pas remplacé puis s'il n'est pas nommé... Bien, là, il peut être là bien longtemps. Les racines peuvent lui prendre, à un moment donné. Est-ce qu'on n'est pas mieux de garder la dynamique ou... Et est-ce que ça veut aussi dire qu'au bout de trois ans on ne peut pas le renommer? Est-ce que c'est ce que je dois comprendre? Et là est-ce qu'on ne tombe pas dans un autre... Ça, c'est spécial aussi, hein? Vous allez chercher un gros... J'étais pour dire «aller chercher un gros gars», mais on va m'accuser d'être sexiste. Vous allez chercher un gros nom...

Mme Dionne-Marsolais: Un «gars» au sens large? Ha, ha, ha!

(9 h 50)

M. Benoit: ...puis on lui dit: Bien, là, c'est trois ans. Que tu fasses un bien bonne job, c'est trois ans. «That's it, that's all.» Sauf à l'article 7; bien, là, par la bande, on pourrait peut-être étirer un peu. Mais là, je ne le sais pas, j'ai l'impression que c'est le meilleur des deux mondes. Je ne comprends pas ce que le projet de loi essaie de faire, ici. «C'est-u» trois ans ou «c'est-u» éternellement? Moi, je suis prêt à vivre avec l'un ou l'autre, mais je ne suis pas sûr que je suis prêt à ce qu'ils vivent avec les deux.

Le Président (M. Beaulne): Mme la ministre.

Mme Dionne-Marsolais: Alors, dans l'ancienne loi, M. le Président, on avait, pour les membres du conseil, une durée de trois ans et c'était renouvelable une seule fois. Dans la présente loi, on s'est laissé la flexibilité de renouveler sans fixer de limite. Alors, l'objectif, c'est strictement la flexibilité. Et, comme c'est une nomination qui est gouvernementale, le pouvoir gouvernemental a la liberté de renouveler, de ne pas renouveler, un an, trois ans. Il peut arriver des moments où, pour toute sortes de raisons, on veut renouveler pour une année seulement; dans d'autres cas, on ne veut pas renouveler. Je crois que c'est la liberté du gouvernement de décider de renouveler ou de ne pas renouveler.

Le Président (M. Beaulne): M. le député.

M. Benoit: J'ai un peu de misère avec ça. L'article 5, «nommés par le gouvernement, pour une période d'au plus trois ans». Donc, d'au plus trois ans, ça veut dire que ça ne dépasse pas trois ans. C'était clair, l'article 5, j'avais compris ça. La ministre puis moi, on se trouvait bien bons. Mais, à l'article 7, on dit «jusqu'à ce qu'ils soient remplacés ou nommés de nouveau». Bien, là, ça vient de défaire complètement l'article 5. Je veux dire, je ne le sais pas, là, j'ai bien de la misère avec ça.

Mme Dionne-Marsolais: Non, je ne crois pas, M. le Président, que ça remplace l'article 5. Tout ce que ça dit, c'est que, quand on les nomme, à l'expiration de leur mandat, on peut les remplacer; et, si on ne les remplace pas, on peut les nommer de nouveau. C'est tout ce que ça dit.

M. Benoit: Bien, là, ça ne sera pas pour une période d'au plus trois ans.

Mme Dionne-Marsolais: Ça peut être d'au plus trois ans; ça peut être un an, deux ans ou trois ans. L'article 5 limite chacune des nominations à un maximum de trois ans. Ça veut dire qu'au maximum on peut les nommer pour trois ans.

Le Président (M. Beaulne): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Gauvin: Il n'y aurait pas eu lieu d'ajouter «une nomination d'au plus trois ans, renouvelable», une expression comme celle-là? Ça serait clair. Je comprends que ça peut...

M. Benoit: Comme avant.

Mme Dionne-Marsolais: Comme avant, c'était renouvelable consécutivement une seule fois.

M. Gauvin: Oui, mais sans mentionner une seule fois. Renouvelable, là. Pour une meilleure compréhension.

Mme Dionne-Marsolais: M. le Président, je vais demander à Me Towner de répondre. Il semble qu'il y ait de nouvelles habitudes qui aient été prises, et il va donner une réponse plus technique à cet article.

Le Président (M. Beaulne): Allez-y, Me Towner.

M. Towner (Jean-Jacques): Merci. Oui, depuis quelques années, dans toutes les lois sur les sociétés d'État, on retrouve cette disposition de la continuation des fonctions des administrateurs. On sait qu'en droit des compagnies c'est du droit anglais, et puis il y a eu des décisions des tribunaux à l'effet que... On appelait ça le «holding over», c'est-à-dire que, même si les administrateurs avaient été nommés pour un an puis qu'ils n'avaient pas été renommés, les actes qu'ils posaient, on appelait ça du «holding over». C'est qu'ils pouvaient poser des actes, et ces actes-là étaient légaux.

Donc, dans le fond, cet article 7 là ne fait que remettre en droit québécois cette règle-là qui a été développée en droit anglais. Donc, c'est pour assurer la continuité des fonctions des administrateurs au cas où ces administrateurs-là, à la fin de leurs fonctions, ne seraient pas nommés ou remplacés. C'est pour éviter qu'il y ait des gens qui intentent des poursuites pour déclarer des actes illégaux d'un conseil d'administration parce qu'un membre n'aurait pas été renommé. Donc, on voit tous les problèmes que cela poserait si on n'avait pas l'article 7.

Le Président (M. Beaulne): M. le député d'Orford.

M. Benoit: Bon, enfin, moi, j'ai fait mon point. Il me semble que ce n'est pas clair entre l'article 5 et l'article 7, même après les explications de Me Towner que je respecte. La loi antérieure me semblait être plus claire, plus évidente. Mon confrère, ici, qui est un praticien des affaires – longue expérience parlementaire – me disait à l'oreille que pour lui non plus ce n'était pas évidemment très clair, et «thanks God», comme disent les Anglais, que Me Towner comprenne ça, parce que le vrai monde comme nous autres ne semble pas le comprendre. Alors, une fois ça dit, mon point est fait.

Le Président (M. Beaulne): Alors, est-ce que l'article 7 est adopté? Adopté.

Mme Dionne-Marsolais: Oui.

Le Président (M. Beaulne): L'article 8.

Des voix: Sur division.

Le Président (M. Beaulne): O.K. Adopté à la majorité. Article 8.

Mme Dionne-Marsolais: Alors, c'est concernant la nomination du président-directeur général du Centre.

«Le gouvernement nomme, pour une période d'au plus cinq ans, le président-directeur général du Centre. Celui-ci est responsable de l'administration et de la direction du Centre dans le cadre de ses règlements et de ses politiques.

«Il exerce ses fonctions à plein temps.»

En fait, je pense que l'article est assez clair, là, et il décrit les fonctions du président-directeur général et la durée de son mandat. Il n'y a pas de changement quant à la durée du mandat par rapport à la loi actuelle.

M. Benoit: M. le Président, dans certains cas de projet de loi, on voit que c'est le ministre ou la ministre qui nomme les gens en fonction. Ici, on dit «le gouvernement». Est-ce qu'il y a une raison? On sait que le CRIQ relève directement du ministère de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie. Est-ce qu'il y a une raison pour laquelle ce n'est pas «le ministère», mais que c'est «le gouvernement»?

Le Président (M. Beaulne): Mme la ministre.

Mme Dionne-Marsolais: M. le Président, on me dit que c'est très rare que dans des projets de loi on voie que le ou la ministre nomme, que généralement, dans les projets de loi, c'est le gouvernement qui nomme.

M. Benoit: J'en ai fait un la semaine dernière sur le parc marin du Saguenay où, là, c'était clair, c'était le ministre qui nommait les officiers, etc. Mais je n'ai pas de problème, là, je fais juste...

Mme Dionne-Marsolais: Je pense, M. le Président, que, dans ce cas-ci, avant c'était le gouvernement, ça demeure le gouvernement. Il n'y a pas de changement, puis je ne vois pas de raison qu'il y ait du changement à cet égard-là.

Le Président (M. Beaulne): M. le député d'Orford.

M. Benoit: Non, je posais, aux fins d'éclaircissement, là...

Le Président (M. Beaulne): Alors, est-ce que l'article 8 est adopté?

M. Benoit: Non. Juste un commentaire.

Le Président (M. Beaulne): Oui. Allez-y, M. le député.

M. Benoit: On dit que le président exerce ses fonctions à plein temps avec tout le mandat qu'il aura dans les prochaines années. Je ne suis pas sûr même qu'on aurait à écrire ça. Je pense qu'il va être plus qu'à plein temps, il va être à temps double et à temps triple, j'en suis convaincu, avec tout ce qui...

Une voix: C'est déjà commencé.

M. Benoit: Oui, j'imagine. Alors, je suis heureux qu'on le mette là, mais ça me semble quasiment superflu. Mais c'est très bien.

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. le député. Alors, l'article 8 est-il adopté? Adopté.

Mme Dionne-Marsolais: Oui.

Le Président (M. Beaulne): L'article 9.

Mme Dionne-Marsolais: Bon. Alors, l'article 9, c'est un article qui concerne la rémunération. Je le lis donc:

«Le gouvernement détermine la rémunération, les avantages sociaux et les autres conditions de travail du président-directeur général.

«Les autres membres du conseil d'administration ne sont pas rémunérés, sauf dans les cas, aux conditions et dans la mesure que peut déterminer le gouvernement. Ils ont cependant droit au remboursement des dépenses faites dans l'exercice de leurs fonctions, aux conditions et dans la mesure que détermine le gouvernement.»

Quant au premier alinéa de l'article 9, il n'y a pas de changement; c'était la même chose dans l'ancienne loi. La différence entre cette loi et l'ancienne loi, c'est qu'on disait dans l'ancienne loi que les membres ne recevaient aucun traitement mais étaient indemnisés conformément aux normes qui étaient déterminées par le gouvernement. Là, on dit à peu près la même chose, mais en d'autres mots. Dans l'ancienne loi, on indiquait que, à l'exception du président-directeur général, les membres et les fonctionnaires qui siégeaient recevaient une allocation de présence fixée par le gouvernement, ce qui n'existe plus.

Le Président (M. Beaulne): M. le député d'Orford.

(10 heures)

M. Benoit: Oui. Au moment des crédits, dans les deux boîtes que j'ai eu l'occasion de recevoir trois heures avant les crédits – que j'ai eu le grand plaisir de lire après les crédits – il y avait un petit document qui s'appelait Programme de reconnaissance du rendement, rencontre de discussion . Ça nous vient du CRIQ, 13 septembre 1996. C'est en abrégé. C'est évidemment quelqu'un qui faisait une présentation à du personnel en quelque part au CRIQ, et il faut être un peu devin pour comprendre ce qu'on essaie d'expliquer là-dedans.

On parle de reconnaissance de rendement. Donc, je me suis demandé si ce n'était pas une patente à bonus, ça, là. J'aimerais savoir si, effectivement, notre président-directeur général, M. Gérin, a une forme de reconnaissance autre que celle d'un salaire et, j'imagine, des dépenses. On doit bien payer son gaz quand il se promène en auto à quelque part. Est-ce qu'il a un programme de reconnaissance autre? J'essaie de voir avec ça, cette histoire-là, ce qu'on a reçu dans les deux grosses boîtes que vous nous faites parvenir.

Mme Dionne-Marsolais: J'aimerais tout simplement rappeler au député que le nom du président, c'est M. Guérin.

M. Benoit: Guérin, oui. Excusez. C'est parce que j'ai un voisin qui s'appelle Gérin.

Mme Dionne-Marsolais: Ça va. C'est simplement pour les fins de l'enregistrement. À ma connaissance, il n'y a pas d'autre rémunération, mais je vais demander au président-directeur général de répondre peut-être à cette question.

Le Président (M. Beaulne): Allez-y, M. Guérin.

M. Guérin (Serge): La réponse est très simple. En ce qui me concerne, il n'y a pas d'autre type de rémunération que la rémunération de base fixée par le gouvernement. Il n'y a pas de bonus ni d'autres rémunérations.

M. Benoit: Est-ce qu'il y a chez vous, suite à ce document, d'autres gens qui sont rémunérés sous d'autres formes que celle de salaire?

M. Guérin (Serge): Non.

M. Benoit: Non. Donc, il n'y a aucune forme d'intéressement, dans l'entreprise, autre que celle du salaire, certainement pas sous forme d'actions à ce moment-ci, quoique je pense que ce serait une des avenues qu'il faudrait regarder, mais ça, c'est un autre sujet.

Dans ce genre d'industrie, M. Guérin, ailleurs au monde, comment on rémunère les directeurs généraux? On les intéresse dans l'entreprise, sûrement pas seulement sous forme de salaire? Comment on les retient dans l'entreprise? Comment on les rémunère sur leur performance, non pas juste administrative, mais de ventes et de découvertes? J'essaie de voir, là. J'ai l'impression qu'on ne vous rémunérera pas assez. C'est ça qui est le fond de ma pensée. Vous ne direz pas que l'opposition n'est pas gentille avec vous, là. Non, mais on est rendu à l'âge au Québec, il faut se le dire, que, si on veut avoir les meilleurs administrateurs dans nos meilleures sociétés d'État, il va falloir payer le prix que ça coûte, que ce soit à Hydro-Québec ou ailleurs.

Hydro Ontario a dû passer une loi exceptionnelle pour aller chercher le meilleur président qu'ils ont pu aller chercher. Il leur a coûté bien cher, mais, au total, Hydro Ontario ne s'est jamais si bien portée. Or, c'est un peu ça qui est mon point. Si on veut avoir les meilleurs, il va falloir les payer comme l'entreprise privée. Je ne crois pas trop, trop au missionnariat, sauf pour les hommes et les femmes politiques comme nous. Je ne crois pas trop, trop au missionnariat en affaires et je ne crois pas que M. Guérin, quand il est venu au monde, avait une mission divine, assignée par sa mère, pour sauver les entreprises de l'État et ne pas être rémunéré pour.

Or, ce que j'essaie de voir, c'est comment, dans ce genre d'entreprise, on rémunère des gens comme vous. C'est ça qui est la question.

Le Président (M. Beaulne): Mme la ministre.

Mme Dionne-Marsolais: Alors, M. le Président, je vais faire deux remarques. D'abord, je suis très intéressée par la position du député d'Orford. Si elle traduit la position du Parti libéral, elle est un peu en contradiction avec leur comportement passé, puisque, au niveau de la compensation des administrateurs, ils avaient éliminé les jetons de présence.

M. Benoit: Je ne parle pas des directeurs, ici, je parle du président. Il y a une grosse différence, là.

Mme Dionne-Marsolais: Mais il a fait son commentaire quant à aller chercher les meilleures personnes. Donc, ça inclut aussi les administrateurs. J'apprécie la précision si ce n'est pas le cas.

Pour ce qui est du missionnariat, je dirais que le président-directeur général du Centre de recherche industrielle du Québec reçoit une rémunération fort convenable. Quant à la pratique dans le monde, je crois qu'il faut faire une différence entre la pratique dans les centres de recherche industrielle privés, où, là, il y a une rémunération qui est liée à un certain nombre de critères – il peut y avoir des capacités d'achat d'actions, de compensation, etc., bonus et autres – et les centres de recherche qui sont financés par l'État. Le Centre de recherche industrielle du Québec, pour l'instant, il est une société d'État. Donc, les conditions reflètent les règles de nos sociétés d'État.

Pour compléter l'information du député, je vais demander au président, peut-être, s'il a d'autres informations, de répondre à cette question très précise.

Le Président (M. Beaulne): M. Guérin.

M. Guérin (Serge): Alors, je n'ai pas de comparatif avec les autres présidents de centres de recherche un peu partout dans le monde. Les bases sont tellement différentes. Dans certains cas, on les appelle «privés» puis ils ne sont pas tout à fait privés. Dans certains cas, ils sont vraiment privés, à propriété privée. Alors, c'est extrêmement difficile... Et le nombre de personnes sous leur supervision varie énormément. Alors, c'est très difficile de comparer. Mais je n'ai pas de comparatif par rapport aux autres postes de président-directeur général d'autres centres.

Cependant, dans le cas des employés comme tels, sur le plan de la rémunération des employés, bien là il y a toutes les formules dans les rapports qu'on a pu examiner sur des comparatifs de centres à travers le monde. Il y a toutes sortes de formules. Il y en a qui ont des formules d'intéressement, il y en a qui n'en ont pas. Il y en a que c'est plus compliqué que d'autres, ce sont des participations. Il y en a d'autres que ce sont vraiment des bonus comme tels, un montant forfaitaire à la fin de l'année. Alors, il y a toutes sortes de bases. On rencontre à peu près toutes les formules de rémunération qu'on rencontre ailleurs dans le monde des affaires. Alors, c'est très varié.

M. Benoit: Sauf que chez vous – je veux être sûr qu'on s'est bien compris – vous, vous n'êtes pas rémunéré sous une forme de bonus ou autre, ni vos employés. Vous m'avez bien dit que vos employés n'avaient aucune forme d'indexation sur la performance, ou sur la découverte, ou sur la vente.

M. Guérin (Serge): Exact.

M. Benoit: Mme la ministre, peut-être que je vais un peu plus loin que le salaire du président-directeur général, mais je pense que c'est un pivot important de cette entreprise-là pour son devenir, surtout dans la direction dans laquelle vous voulez l'envoyer. Est-ce que ce n'est pas là l'avenue, finalement, du succès futur de cette entreprise-là?

Un savant qui s'en va travailler chez vous et qui peut aller je ne sais pas trop où il va avoir une royauté sur la découverte, ou sur la performance de l'appareil, ou sur la grosseur des ventes éventuellement versus un salaire connu et reconnu avant d'arriver, est-ce qu'on ne pénalise pas nos gens, finalement? Et est-ce qu'on ne devrait pas regarder rapidement chez vous la possibilité d'indexer tout ce beau monde là sur une performance? Mais pas une performance comme j'ai vue, par exemple, dans des centres hospitaliers, où on prend un bonus 1 000 000 $. On dit: Il y a 15 cadres. On divise ça par 15 cadres, puis tout le monde est égal. Ça, ce n'est pas de la rémunération à la performance; c'est une façon indirecte de dire à des gens: Bon, on vous donne un bonus à la fin de l'année. Mais le meilleur puis le moins bon ont le même bonus. Ça puis rien, c'est à peu près pareil.

Je parle vraiment d'un intéressement sur la performance à partir des objectifs de ventes ou de découvertes qu'on se donne. Je n'ai jamais été directeur général du CRIQ. Je ne sais pas trop, trop les angles les plus forts avec lesquels vous devez travailler. Mais est-ce que ce n'est pas là quelque chose qu'il faut regarder dans une entreprise comme celle-là dont vous voulez à plus ou moins long terme, Mme la ministre, vous délester? Est-ce qu'il ne faut pas essayer de pousser nos gens dans cette direction-là?

Mme Dionne-Marsolais: Je pense, M. le Président, que c'est une excellente question puis que c'est un bon objet de réflexion. Je crois en effet que... Je n'ai pas la réponse à cette question-là, M. le Président. On a, à l'article suivant, une proposition qui nous permettrait de garder une flexibilité là-dedans.

Mais j'aimerais tout simplement ajouter aux réflexions du député – et, je le souligne, elles sont extrêmement pertinentes – que dans le monde, en ce moment, il y a deux tendances au niveau des chercheurs, qu'ils soient privés ou publics. Il y en a une qui consiste à dire: Par contrat d'engagement, le chercheur cède sa découverte, le cas échéant, pour un dollar à son propriétaire ou à son employeur, et ça s'arrête là. Il y a d'autres sociétés, actuellement, qui préfèrent donner – en fait, il y a trois façons – des primes de performance qui peuvent être basées sur soit le nombre de brevets, soit les retombées industrielles, les applications de ces découvertes-là et qui peuvent se faire de deux façons, soit par chercheur ou par équipe de recherche.

Alors, il y a beaucoup d'éléments qui entrent en jeu dans la motivation et la performance d'un centre de recherche et des chercheurs. Quand on parlait tout à l'heure d'une performance globale, bien il y a des cas où effectivement on ne peut pas séparer un chercheur de son équipe de recherche. Il y a des projets qui impliquent plusieurs disciplines, plusieurs personnes.

(10 h 10)

Alors, je pense que la réflexion est importante. Le projet de loi que l'on propose, à l'article 10, prévoit une certaine flexibilité là-dedans, mais il n'y a pas de décision de prise en ce moment à cet égard-là. On doit compléter des travaux qui sont très importants et effectivement suivre ce qui se fait dans le monde à ce niveau-là, exactement comme l'a bien souligné le député.

M. Benoit: Oui, peut-être une dernière question. On croyait qu'on allait le trouver dans les livres, mais on s'aperçoit que ça n'a pas été donné au moment des crédits, les salaires de tous les cadres et du président du CRIQ. Est-ce qu'on peut savoir le salaire du président? C'est public, alors il n'y a pas de problème, j'imagine.

M. Guérin (Serge): Oui, oui, c'est dans les comptes publics. Le niveau de ma rémunération actuellement est de 99 000 $, annuellement.

M. Benoit: Parfait. Bien, c'est ce que je disais. Moi, je pense, Mme la ministre, qu'il faut regarder des formules d'intéressement. Le CRIQ s'en va dans cette direction-là. Il faut ouvrir le CRIQ, il faut le faire exploser. Je pense qu'un homme de la trempe de M. Guérin, avec toutes les responsabilités qu'on lui confie et qu'on va lui confier, dans l'entreprise privée vaut plus que ça, j'en suis convaincu. Si on veut garder ces gens-là, il faut trouver d'autres formules.

Maintenant, il sera facile de rouvrir cet article-là à un moment donné. L'Ontario a démontré... En tout cas, Hydro Ontario, ils ont fait un succès avec cette formule-là. Je pense que c'est la formule à retenir pour les années à venir, pour nos gens d'affaires, qu'on veut investir dans nos entreprises d'État.

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. le député. Alors, l'article 9 est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Beaulne): Adopté. L'article 10.

Mme Dionne-Marsolais: Alors, l'article 10, c'est exactement l'article dont je parlais tout à l'heure, qui nous permet justement cette flexibilité-là et cette capacité de marier la rémunération aux conditions du marché.

Je le lis: «Les membres du personnel du Centre sont nommés selon le plan d'effectifs et les normes établis par règlement du Centre. Ce règlement détermine de plus les normes et barèmes de rémunération, les avantages sociaux et les autres conditions de travail des membres du personnel.»

Alors, je crois que l'article reflète exactement les préoccupations du député d'Orford. On l'a discuté tout à l'heure. Il n'y a vraiment rien à ajouter là-dessus.

M. Benoit: Est-ce que, M. Guérin – je m'excuse de revenir... Ma mère disait toujours: Il a la qualité de ses défauts.

Mme Dionne-Marsolais: Ha, ha, ha! Heureusement.

M. Benoit: Ha, ha, ha! Est-ce que c'est quelque chose que vous regardez en ce moment, au CRIQ, la possibilité d'avoir un intéressement chez vos gens? Tantôt, vous m'avez dit: Non, on n'en a pas. À bien y repenser, on n'en a pas. Mais est-ce que c'est quelque chose qu'on regarde en ce moment au CRIQ? Est-ce qu'on pourrait convaincre ce bon gouvernement qu'il faut regarder ça éventuellement, que nos gens, on les dynamise par des formes d'intéressement à l'intérieur de la boîte?

Le Président (M. Beaulne): M. Guérin.

M. Guérin (Serge): Je pense, M. le Président, que l'article 10 est là spécifiquement pour ça, pour permettre une flexibilité qui va de pair avec le mandat de développement que le CRIQ reçoit également. C'est l'outil par lequel on peut mettre en place ce genre de rémunération. Je souscris tout à fait aux commentaires qui ont été faits à ce sujet-là.

Nous sommes à réfléchir et, même plus que réfléchir, à travailler très concrètement sur des modes qui pourraient s'appliquer. Évidemment, les équipes de travail ne sont pas les mêmes au Centre. Il y a du personnel plus administratif, donc de soutien. Il y a du personnel technique, mais qui n'est pas stratégique pour le développement technologique comme tel, ou les secteurs de pointe, ou les résultats importants. Il y a aussi toute la question des sociétés de commercialisation qu'on souhaite mettre en place pour commercialiser les technologies. Là encore, il y a une autre base, il y aurait une autre façon de rémunérer des gens qui pourraient y être ou des gens qui pourraient participer, par leurs travaux, à la création d'une société, qui nous mèneraient, par leurs travaux, à monter une société pour commercialiser une technologie. Est-ce que ça, ça ne doit pas être rémunéré de façon particulière?

Il y a beaucoup de bases qui sont différentes. De façon générale, je vous dirai que ce qu'on examine actuellement, c'est d'abord deux corridors importants, une rémunération qui pourrait être basée sur des objectifs opérationnels et une rémunération qui pourrait être basée sur des objectifs stratégiques: réalisation du plan stratégique, progression du plan stratégique, développement des technologies de pointe, etc. C'est les deux grands corridors dans lesquels nous travaillons. Nous faisons notre réflexion actuellement en termes de rémunération. Maintenant, quelle pourrait être la base? Ça dépend des groupes d'employés, évidemment. Il y a des rémunérations d'équipe, il y a des rémunérations plus personnelles à des chercheurs. L'article prévoit justement nous donner cette flexibilité qui va de pair avec le mandat que nous avons à réaliser, à l'heure actuelle.

Le Président (M. Beaulne): M. le député.

M. Benoit: Bien, je suis heureux d'entendre ça. Dans la mesure où tous ces régimes d'intéressement peuvent être très compliqués comme ils peuvent être relativement simples, je mets en garde M. Guérin de s'embarquer dans des... Ça peut être très compliqué, ces régimes d'intéressement là. Ça peut obliger une comptabilité à n'en plus finir.

J'ai vu, dans ma courte vie d'homme d'affaires, plein de compagnies où le fait qu'on intéressait le personnel... Je pense à une dans l'Ouest canadien, Nowsco Well, une compagnie qui nettoyait des tuyaux de puits de pétrole, où on disait que les vendeurs gagnaient 10, 12, 15, 20 fois le prix du salaire du président. C'est une des compagnies qui avaient eu la meilleure performance pendant des années dans ce secteur-là. Eux, ils avaient fait un choix, reconnaissant que c'était plus compliqué de vendre des services que de gérer la compagnie en soi. On avait reconnu ça et la compagnie avait eu une performance extraordinaire. On a plein, plein, plein d'exemples dans les marchés boursiers où on reconnaît la performance des gens. Il y a aussi des choses excessives, on le sait tous. Je ne suis pas sûr que le gouvernement peut se permettre de tomber dans des régimes excessifs comme on voit.

Enfin, moi, je suis heureux de voir que cet article-là permettrait une certaine forme d'intéressement. Dans la mesure où c'est la volonté, je pense qu'on y souscrirait de ce côté-ci de la table.

Le Président (M. Beaulne): Alors, l'article 10 est adopté. L'article 11.

Mme Dionne-Marsolais: Alors, l'article 11, c'est un article qui concerne les conflits d'intérêts. Il y a un papillon que l'on veut ajouter à cet article-là, et je le déposerai...

Le Président (M. Beaulne): Déposez-nous l'amendement, parce que nous allons commencer par la discussion sur l'amendement. Alors, présentez-nous l'amendement, Mme la ministre.

Mme Dionne-Marsolais: Alors, on suggère d'ajouter, à la fin du troisième alinéa de l'article 11, ce qui suit: «...son intérêt au président du conseil d'administration "du Centre ou, selon le cas, de la filiale."» Donc, on précise qu'il s'agit du membre du conseil au président du conseil d'administration soit du Centre de recherche industrielle ou de l'une de ses filiales. Et c'est important de préciser à qui un membre du personnel soit du Centre ou de la filiale qui est en situation de conflit d'intérêts doit dénoncer cette situation. C'est pour ça qu'on suggère d'ajouter «du Centre ou, selon le cas, de la filiale.».

Le Président (M. Beaulne): M. le député.

M. Benoit: Le principe de l'article est valable, certainement, dans une organisation comme la vôtre. D'autre part, c'est une chose de se faire intéresser par le bonhomme ou la bonne femme pour qui on essaie de développer une machine qui va nettoyer le purin de porc. Ça, c'est une chose, de se faire attacher. On dit ici: D'intérêt qui lui échoit par succession. C'est une autre chose de travailler au CRIQ et de se ramasser avec des actions soudainement, de cette même compagnie-là, parce que nos parents les avaient, et être obligé de s'en départir.

Je n'ai pas la solution. Je n'ai pas la solution, mais est-ce qu'on ne peut pas regarder, un peu comme les gens qui sont sur le Conseil des ministres au Québec, où ces choses-là peuvent aller dans un compte en fidéicommis et être gérées par une tierce personne. Parce que, là, on peut perdre de très bons éléments, je veux dire, on peut perdre de très, très bons éléments chez vous de gens qui auront un choix à faire entre dire: Bien, j'ai quelques actions de telle patente. Je pense qu'il y a succès extraordinaire là-dedans. Je suis obligé d'en disposer. Et ici, j'imagine, «disposition» ne veut pas dire juste les léguer à ses enfants ou à son épouse, là. Ça doit être un peu plus compliqué que ça.

(10 h 20)

Est-ce qu'il n'y a pas moyen d'arriver à quelque chose comme on fait pour le Conseil des ministres, si c'est bon pour le ministre des Finances à Ottawa puis si ça a été bon pour je ne sais pas combien de ministres sous Robert Bourassa, qui avaient, pour toutes sortes de raisons, des entreprises? Si on veut avoir des gens d'affaires qui font des affaires, bien on essaie de les intéresser, mais on ne veut pas non plus qu'ils gèrent leurs affaires pendant qu'ils sont là. Ce n'est pas évident, vendre nos affaires quand on va en politique, non plus, hein. Je veux dire, c'est évident de ne pas en acheter une fois qu'on est là, mais, quand on arrive en politique et qu'on a des affaires, ce n'est pas évident.

Le Président (M. Beaulne): Mme la ministre.

Mme Dionne-Marsolais: L'amendement que nous proposons concerne les membres du personnel.

M. Benoit: Oui, je comprends bien ça.

Mme Dionne-Marsolais: Alors, quand ils deviennent employés du Centre. Je parle de l'amendement, là, je ne parle pas de tout l'article. Alors, le membre du personnel, il devient employé du Centre et tout ce qu'il a à faire, c'est de dénoncer par écrit son intérêt. On ne dit pas qu'il doit le vendre, là; on dit qu'il doit dénoncer son intérêt au président du conseil d'administration du Centre ou de la filiale. On parle de l'amendement, dans ce cas-ci, là. On ne parle pas de l'article 11. On peut revenir à la question du député sur l'article 11 après, là.

M. Benoit: Écoutez, excusez, je parlais du premier paragraphe. Vous me parlez, à ce point-ci, de l'amendement?

Mme Dionne-Marsolais: Oui, c'est ça.

M. Benoit: Ah! Excusez-moi, moi, je parlais du premier paragraphe.

Mme Dionne-Marsolais: Oui, c'est ça, je comprends.

M. Benoit: Excusez-moi. Est-ce que vous pouvez recommencer, Mme la ministre?

Mme Dionne-Marsolais: Oui. L'amendement que l'on propose, c'est d'ajouter à la dernière phrase, après le point, là, on enlèverait le point et on dirait... Voulez-vous, je vais lire tout le paragraphe, ce sera plus clair: «Un membre du personnel du Centre ou de l'une de ses filiales qui a un intérêt direct ou indirect dans une entreprise mettant en conflit son intérêt personnel et celui du Centre ou de l'une de ses filiales doit, sous peine de déchéance de sa charge, dénoncer par écrit son intérêt au président du conseil d'administration.» Et là nous suggérons d'ajouter «du Centre ou de la filiale» pour justement préciser à qui il doit dénoncer son intérêt.

M. Benoit: Parfait. Revenons maintenant à...

Mme Dionne-Marsolais: Alors, maintenant l'article 11. L'article 11 se lit comme suit: «Un membre du conseil d'administration qui exerce ses fonctions à plein temps au sein du Centre ou de l'une de ses filiales – donc, on parle bien, là, qui exerce ses fonctions à plein temps au sein du Centre ou de l'une de ses filiales – ne peut, sous peine de déchéance de sa charge, avoir un intérêt direct ou indirect dans une entreprise qui met en conflit son intérêt personnel et celui du Centre ou de l'une de ses filiales. Toutefois, cette déchéance n'a pas lieu si cet intérêt lui échoit par succession ou par donation pourvu qu'il y renonce ou en dispose avec diligence.»

Le paragraphe suivant: «Un membre du conseil d'administration autre qu'un membre qui exerce ses fonctions à plein temps au sein du Centre ou de l'une de ses filiales, qui a un intérêt direct ou indirect dans une entreprise mettant en conflit son intérêt personnel et celui du Centre ou de l'une de ses filiales doit, sous peine de déchéance de sa charge, dénoncer son intérêt et se retirer de la réunion pour la durée des délibérations et pour la prise de décision portant sur toute question relative à l'entreprise dans laquelle il a un intérêt.» Voilà.

M. Benoit: Bon. Pas de problème avec le conseil d'administration, ça va bien. C'est un membre. Est-ce qu'avoir une participation dans une entreprise publique... Ici, comme député, vous savez qu'on n'a pas les mêmes règles si les actions sont publiques ou privées. Est-ce que ça s'applique ici? Si on dit «un intérêt personnel», on ne dit pas dans une...

En d'autres mots, est-ce que quelqu'un qui travaille chez vous... Un de vos petits brillants qui travaille là ne peut pas acheter des actions demain dans une des compagnies listées sur la Bourse de Montréal pour son REA – c'est ça que ça dit – si cette compagnie-là, malheureusement, a demandé un avis à votre Centre. C'est ça que ça dit?

Mme Dionne-Marsolais: Si vous me permettez, je vais demander à l'avocat de nous donner l'interprétation spécifique pour répondre à la question.

Le Président (M. Beaulne): Alors, Me Towner.

M. Towner (Jean-Jacques): Dans un cas comme celui-là, d'un membre de personnel qui aurait acheté des actions, là, qui sont cotées à la Bourse, évidemment qui ne détiendrait que quelques actions sur des millions qui sont émises et en circulation pour cette compagnie-là, on ne pourrait pas dire, là, qu'il y a un conflit entre son intérêt personnel et celui du Centre. Ce n'est pas cet intérêt-là qui est visé par cet article-là. Mais je pense qu'on doit comprendre qu'on doit quand même avoir un article qui est suffisamment large pour permettre d'englober les véritables situations de conflit d'intérêts. Ces situations-là sont innombrables, on ne peut pas en faire une énumération. Mais acheter des actions cotées à la Bourse...

M. Benoit: Ce n'est pas...

M. Towner (Jean-Jacques): ...en règle générale, je devrais dire, je ne vois pas un conflit d'intérêts. C'est évident que ça dépend toujours du cas, ça dépend de l'entreprise, ça dépend du nombre d'actions, ça dépend d'une foule de choses.

Le Président (M. Beaulne): M. le député.

M. Benoit: Enfin, permettez-moi de vous dire que ce n'est pas tout à fait très clair, que ce n'est pas très limpide, «direct ou indirect dans une entreprise». Je veux dire, je ne voudrais pas être juge, moi, pour décider ça, être pris entre M. Guérin et un de ses employés qui a pris une bonne participation dans une PME du Québec qui a un gros contrat chez vous. Il sait que les affaires s'en viennent, en plus, ils sont juste sur le bord de trouver la patente qui fait que ça ne fera plus de bruit, cette histoire-là, et il achète les actions. Et là le juge va être capable de lui dire: Non, non, ce n'était pas direct ou indirect. Moi, ce n'est pas clair.

En tout cas, dans le cas des députés, notre code d'éthique est pas mal plus clair que ça, je vais vous dire ça. Si c'est public, c'est permis; si c'est privé, ce n'est pas permis. Bingo. Et on parle, je pense, de participation minoritaire dans le cas du public. Bon, enfin, c'est bien plus clair que ça.

Le Président (M. Beaulne): Mme la ministre.

Mme Dionne-Marsolais: As-tu fini?

M. Benoit: Oui, oui, absolument.

Mme Dionne-Marsolais: M. le Président, ce sont des dispositions qui s'appliquent à toutes les sociétés d'État maintenant. Je vais demander à Me Brosseau, qui est l'avocat du CRIQ, peut-être d'apporter quelques précisions pour notre éclairage à tous.

Le Président (M. Beaulne): M. Brosseau.

M. Brosseau (Jacques): Merci, M. le Président. L'esprit de l'article est d'informer la direction du Centre d'une situation de conflit d'intérêts ou de potentialité de conflit d'intérêts. Ce qu'on demande au personnel du Centre, c'est de dénoncer le conflit d'intérêts pour s'assurer que la gestion soit limpide.

Par contre, quand vient le temps d'étudier un conflit d'intérêts, il s'agit de déterminer l'impact que des affaires entre le Centre et une entreprise peuvent avoir. Donc, quand on détient 500 actions de Bell Canada, l'impact d'un contrat entre le CRIQ et Bell Canada, dans ce contexte-là, il n'y en a à peu près pas. Donc, c'est dans ce contexte-là qu'on le regarde.

Il faut aussi voir que la fonction d'un employé du Centre et la fonction d'un homme public est différente, parce que je pense qu'on a des contraintes un peu plus importantes du côté des hommes publics. Je pense que ça se comprend. Les employés du Centre ont quand même le droit d'investir aussi, tout en s'assurant que, dans la gestion, on puisse être en mesure de déceler à l'avance les situations potentielles de conflit d'intérêts ou les situations réelles de conflit d'intérêts, mais des conflits d'intérêts où les relations d'affaires entre le Centre et une entreprise pourraient avoir un impact. Comme je le disais tout à l'heure, si on détient même 1 000 actions de Bell Canada, il y a peu d'impact dans ce cas-là entre un contrat, et on ne peut pas penser... En tout cas, je ne peux pas imaginer immédiatement qu'un contrat entre le Centre et Bell Canada, dans la mesure où les contrats habituels sont faits, puisse avoir un impact sur la valeur des actions.

M. Benoit: Tout est relatif.

M. Brosseau (Jacques): Oui.

M. Benoit: Notre ami Yves Michaud semble avoir beaucoup d'impact sur le prix des actions avec très peu d'actions à la Banque Royale. Alors, tout est relatif. Mais enfin, peut-être que c'est à cause de l'aide gouvernementale qu'il a reçue, ça a pu l'aider.

Le Président (M. Beaulne): Alors, est-ce que ça va, M. le député?

M. Benoit: Je vais juste relire celui du membre du conseil d'administration, excusez.

(Consultation)

M. Benoit: Oui.

Le Président (M. Beaulne): Alors, est-ce que l'amendement est adopté?

Une voix: Adopté.

Mme Dionne-Marsolais: Oui.

Le Président (M. Beaulne): Adopté. Est-ce que l'article 11, tel qu'amendé, est adopté? Alors, je vais suspendre nos travaux pour une dizaine de minutes pour permettre aux membres de se détendre un peu.

(Suspension de la séance à 10 h 30)

(Reprise à 10 h 42)

Le Président (M. Beaulne): Sur ces paroles, on continue. L'article 12. Mme la ministre.

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. L'article 12 prévoit les règles de protection des administrateurs du Centre – le sujet dont on a parlé tout à l'heure – en cas de poursuite. Alors, je lis l'article. L'article 12 se lit comme suit:

«12. Le Centre assume la défense de son administrateur qui est poursuivi par un tiers pour un acte accompli dans l'exercice de ses fonctions et paie, le cas échéant, les dommages-intérêts résultant de cet acte, sauf s'il a commis une faute lourde ou une faute personnelle séparable de l'exercice de ses fonctions.

«Toutefois, lors d'une poursuite pénale ou criminelle, le Centre n'assume le paiement des dépenses de son administrateur que lorsque celui-ci avait des motifs raisonnables de croire que sa conduite était conforme à la loi ou qu'il a été libéré ou acquitté.»

M. Benoit: Oui, peut-être à M. Guérin. Est-ce qu'on achète une assurance pour les administrateurs ou si c'est tout simplement le Centre, point, qui assume la responsabilité?

Le Président (M. Beaulne): M. Guérin.

M. Guérin (Serge): Non, non. On a une assurance qui était avant – M. Brosseau me corrigera – sous le parapluie du gouvernement et qu'on va prendre maintenant à notre charge comme centre, directement, c'est-à-dire qu'on va s'assurer. Nous sommes en processus pour examiner les propositions d'assurance à cet égard.

M. Benoit: Est-ce qu'on vous a indiqué un ordre de grandeur dans ce genre de business là? De la minute où on touche à l'alimentation, à l'environnement, à des secteurs... Je comprends que vous n'êtes pas non plus les derniers de ce monde puis des clinclins, mais est-ce qu'on vous a donné une idée de grandeur d'une prime pour un conseil d'administration de votre ordre pour une assurance comme celle-là?

Le Président (M. Beaulne): M. Brosseau.

M. Brosseau (Jacques): Merci. Auparavant, il y a deux ans, le CRIQ détenait une assurance-responsabilité civile pour les administrateurs qui se chiffrait autour de 15 000 $ par année, la prime était autour de 10 000 $ à 15 000 $. Pardon?

Une voix: ...

M. Brosseau (Jacques): Ah, c'était plus de 1 000 000 $. La prime totale, assurance-responsabilité civile, même pour le Centre, était autour de 45 000 $, 50 000 $. Donc, ce qui coûte très cher, c'est l'assurance-responsabilité professionnelle; ça, c'est très, très cher. Mais l'assurance-responsabilité civile pour les membres du conseil d'administration, ce n'est pas très cher. Bien, pas très cher, dans le contexte corporatif.

M. Benoit: Parfait.

Le Président (M. Beaulne): L'article 12 est adopté. L'article 13.

Mme Dionne-Marsolais: L'article 13 se lit comme suit:

«13. Le Centre assume les dépenses de son administrateur qu'il poursuit pour un acte accompli dans l'exercice de ses fonctions s'il n'obtient pas gain de cause et si le tribunal en décide ainsi.

«Si le Centre n'obtient gain de cause qu'en partie, le tribunal peut déterminer le montant des dépenses qu'il assume.»

Ces deux articles-là, 12 et 13, sont des articles qui sont transcrits, importés directement de la loi des compagnies.

M. Benoit: «Le Centre assume les dépenses de son administrateur qu'il poursuit pour un acte accompli dans...» Alors, là, c'est le Centre qui poursuit l'administrateur? Est-ce que c'est ce que je comprends, ici? «Le Centre assume les dépenses de son administrateur qu'il poursuit pour un acte accompli dans l'exercice de ses fonctions...

Mme Dionne-Marsolais: S'il n'a pas gain de cause.

M. Benoit: ...s'il n'obtient pas gain de cause et si le tribunal en décide ainsi.» Est-ce qu'on peut me donner un cas précis? J'essaie de comprendre. Marc Lévy siège à votre conseil d'administration et puis vous l'actionnez...

M. Brosseau (Jacques): Il peut avoir commis un geste... À titre de membre du conseil d'administration, il a commis un geste qui a causé préjudice au Centre; à titre de membre du conseil d'administration a donné une fausse information finalement, a prétendu une chose, que c'était blanc alors que c'est noir, a induit le conseil d'administration en erreur et le Centre a subi des dommages. Donc, sur les principes de droit civil, le Centre peut poursuivre son administrateur à ce moment-là.

M. Benoit: Mais vous en assumez les coûts légaux, c'est ça?

M. Brosseau (Jacques): Si le Centre perd. Si l'administrateur a raison.

M. Benoit: Si le Centre perd.

M. Brosseau (Jacques): Et si le tribunal en décide ainsi. Les deux conditions sont nécessaires.

Le Président (M. Beaulne): Ça va?

M. Benoit: Oui.

Le Président (M. Beaulne): Alors, l'article 13 est adopté. L'article 14.

Mme Dionne-Marsolais: L'article 14 se lit comme suit:

«14. Le Centre assume les obligations visées aux articles 12 et 13 à l'égard de toute personne qui, à sa demande, a agi à titre d'administrateur pour une personne morale dont il est actionnaire ou créancier.»

Encore là, ce sont les règles de protection identiques à celles qui sont prévues aux articles 12 et 13, mais qui concernent cette fois-là l'administrateur pour une personne morale dont le Centre serait actionnaire ou dont le Centre serait créancier.

M. Benoit: Parfait.

Le Président (M. Beaulne): L'article 14 est adopté.


Objets et pouvoirs

L'article 15.

Mme Dionne-Marsolais: L'article 15, c'est l'article qui concerne les objets et les pouvoirs du Centre. Alors, je vais le lire parce que je crois que c'est...

Le Président (M. Beaulne): Le coeur.

Mme Dionne-Marsolais: ...l'essence du projet de loi.

«15. Le Centre a pour objets:

«1° de concevoir, développer et mettre à l'essai des équipements, des produits ou des procédés;

«2° d'exploiter, seul ou avec des partenaires, les équipements, produits et procédés qu'il a développés ou dont il détient les droits – c'est le nouvel article;

«3° de colliger et diffuser de l'information et des renseignements d'ordre technologique et industriel;

«4° de réaliser toute activité reliée aux domaines de la normalisation et de la certification.

«À ces fins, le Centre peut agir comme conseiller et fournir des services dans les domaines de sa compétence.»

Alors, c'est l'article qui est modifié par rapport à l'ancienne loi. Et peut-être que pour les fins de mon collègue le député d'Orford je pourrais lire l'ancienne loi qui disait:

«Le Centre a pour objets:

«a) la recherche en sciences appliquées effectuée soit dans ses propres laboratoires, soit dans ceux d'autres centres de recherche;

«b) la mise au point de produits, procédés et appareils industriels ou scientifiques;

«c) la collecte et la diffusion de l'information et de renseignements d'ordre technologique et industriel.»

C'était l'article 17 dans l'ancienne loi.

Ce qu'on ajoute dans cette nouvelle loi, c'est l'objet d'exploiter, seul ou avec des partenaires, les résultats finalement de ces recherches.

M. Benoit: Mme la ministre qui m'a écouté bien patiemment lors de mon exposé au salon bleu, pendant plus d'une heure, réalisera que c'est un des points pivots avec lequel, autant moi que les deux autres confrères qui ont pris la parole, avions des problèmes. Alors, nous en aurons bien sûr encore aujourd'hui. L'article 17, tel qu'il était avant, me semblait entrer dans ce que, nous, on pensait que ça devait être, le CRIQ.

Bon, là, on veut aller un peu plus loin. On veut parler d'exploitation avec des partenaires. On pense que vous tombez directement en compétition avec l'entreprise privée. Et, s'il y a partenaire, c'est bien évident que ces partenaires-là sont de l'entreprise privée. Les représentations qui sont faites auprès de nous, qui viennent de toutes parts, nous disent: Écoutez, ces gens-là ont des moyens bien plus grands que nous autres et vont jouer dans nos talles constamment. On a lu pendant nos discours, encore une fois, des extraits de gens qui exposaient ce point de vue-là. Alors, je l'ai clairement indiqué dans mon discours, de deux choses l'une: ou bien on refocusse la mission originale du CRIQ dans ce qu'elle était, tel que l'article 17 le dit, ou bien on la privatise. Et là tout le monde va être égal devant le Seigneur: on va être une entreprise privée qui pourrait être subventionnée ultimement ou les services qu'on donne pourraient être subventionnés ultimement. Mais on est après se mettre dans une situation hybride entre deux missions, qui va directement entrer contre celle de l'entreprise privée.

(10 h 50)

Oui, il y a des gens en entreprise privée qui y trouvent leur compte là-dedans. Ce n'est pas tout le monde qui est contre. Les gens qui sont partenaires en ce moment, bien sûr sont prêts à aller à la barricade et défendre le point de vue de la ministre. Il y en a qui sont gagnants là-dedans, mais je pense qu'à plus ou moins long terme, pour la période de transition tout au moins, il y a un coût. Vous entrez dans les talles de l'entreprise privée, et le contraire ne m'a pas été démontré, pas plus qu'à mon confrère, jeudi dernier, ou à ma consoeur qui a pris la parole quand nous avons étudié le principe du projet de loi – première lecture, l'adoption du principe.

Or, on n'est pas d'accord. On pense que ce n'est pas la façon de le faire. Que demain, vous nous disiez: Le CRIQ est une entreprise privée, nous l'avons dit à nos employés, ils vont être dans la même aréna, avec les mêmes moyens ou même avec des moyens meilleurs, on en fait, on dirait: On en a privatisé d'autres entreprises au Québec et celle-là, c'est peut-être là qu'on est rendu. Mais cette période de transition à laquelle vous voulez l'amener, il y a un coût pour l'entreprise privée au Québec et là-dessus, à moins que M. Guérin ait une baguette de magicien pour me convaincre, ça va être bien compliqué.

Le Président (M. Beaulne): Mme la ministre.

Mme Dionne-Marsolais: M. le Président, j'aimerais... Est-ce qu'on peut prendre l'article 15, article par article? Parce qu'on parle seulement de l'alinéa deuxièmement là, qui gêne. J'aimerais comprendre la préoccupation du député pour peut-être y répondre le plus efficacement possible.

Nous entamons un processus de privatisation et nous partons d'une société qui est entièrement une société d'État. Pour réaliser cette transition-là, il faut du temps et il faut prévoir des modalités. Ce que le député nous dit, c'est qu'il craint que le Centre de recherche concurrence l'entreprise privée. Ce n'est pas le cas. Ce n'est pas l'objectif et, tel que libellé, nous pensons que l'article 15 prévoit qu'il... Parce qu'on dit bien: «...exploiter, seul ou avec des partenaires, les équipements, produits et procédés qu'il a développés ou dont il détient les droits.»

Or, la préoccupation de l'opposition est à l'effet que l'on devienne un fabriquant. Enfin, c'est ce qu'on a compris des propos qui ont été tenus ici. Ce n'est pas du tout ce que dit cet article-là. Ce que cet article-là dit, c'est qu'il exploitera, donc il commercialisera les équipements, les produits qu'il a développés et dont il détient les droits, seul ou avec des partenaires. C'est pour justement mettre en valeur, valoriser les résultats de la recherche du Centre de recherche. Je crois que c'est une façon modérée de procéder vers une privatisation et je crois qu'il faut tenir compte, dans un processus de privatisation, l'expérience nous l'a démontré, d'une phase de transition. On ne parle pas de fabrication ici, parce que c'est une préoccupation qui est revenue la semaine dernière, très clairement. Alors, j'aimerais comprendre... Je ne sais pas comment on peut procéder pour cet article-là, mais ce que dit l'article, quand on le lit comme tel, c'est très clair et ça permet la commercialisation et ça ne donne pas place à la fabrication.

Le Président (M. Beaulne): M. le député.

M. Benoit: Oui. Plus haut, dans d'autres articles on réalise bien qu'on peut être associé, on peut le faire dans des filiales maintenant, etc. Et il est plus qu'évident que c'est la direction dans laquelle on s'en va. Ce n'est pas vrai qu'on va juste trouver une formule magique, quelques produits ou quelques machines et qu'on n'ira pas plus loin par la suite.

Et il faut voir comment tout ça se développe. J'ai dû mettre le pied à terre au CRIQ où il y a une filiale qui fait de la recherche en santé au CRIQ. Un bon jour, je ne «lis-tu» pas dans le journal que cette société – pas au CRIQ, à la CSST – la première nouvelle qu'on avait, c'est que la CSST faisait une étude sur les lève-personnes. Jusque là, je me disais, bon, c'est peut-être leur mission. J'avais un peu de misère à comprendre pourquoi on faisait des études sur les lève-personnes parce qu'il me semblait qu'il y en avait plein au monde qui faisaient des études sur les lève-personnes, et des pays et des peuples pas mal plus importants que nous autres, et je trouvais qu'on dépensait bien de l'argent sur les lève-personnes comme si notre monde dans les hôpitaux était pas comme ailleurs au monde. Mais enfin.

Jusque là, j'ai laissé tomber. Jusqu'à ce qu'un entrepreneur de mon comté qui en fabrique, des lève-personnes, m'arrive, et là cette même société, filiale de la CSST, s'en allait en fabrication de ces patentes-là. Alors, c'est toujours le même pattern: tu développes et puis là tu te dis: Bien, asteur qu'on l'a développé et qu'on est – comme dit ma fille – les plus meilleurs, on va aller un peu plus loin là-dedans. Et puis là, tu essaie de capitaliser, c'est bien sûr, sur ton développement.

Je peux vous dire qu'ils ont frappé comme un mur cette journée-là. Ils n'ont jamais été en production, parce que là ils rentraient carrément contre une entreprise qui faisait ça dans mon comté. Puis je me souviens d'une engueulade pas à peu près avec le président de la CSST. C'est là que ça a arrêté.

Ceci dit, je l'illustre pour expliquer clairement à la ministre: c'est ça qui va se passer. Que ce soit les lève-personnes, que ce soit... Et il faut bien voir que des laboratoires quand on a créé ça en 1969, le Québec puis la révolution tranquille étaient au début, je pense, de ce genre de recherche technique avec l'entreprise, etc. On est 20 ans plus tard, hein? On est 20 ans plus tard. Là, il y en a des laboratoires, il y en a des Lavalin de ce monde, des SM, des Technica, des... bon, vous les connaissez mieux que moi, qui en font de la recherche ou qui en font faire.

Et je donnais comme exemple à partir des toiles de stade olympique jusqu'aux toiles de sites d'épuration. Bien, je pourrais vous nommer des compagnies qui font ça juste dans le secteur de la toile, qui ont assez d'expertise, qui savent où aller la chercher, soit chez nous ou ailleurs. Or, est-ce qu'on n'entre pas – puis on est convaincu de ça – directement contre l'entreprise privée? Et la réponse, c'est oui. Et il n'y a personne... D'ailleurs, je peux vous relire les gens qui nous ont envoyé des lettres, puis qui nous disent: ils soumissionnaient devant nous autres au cocktail; il m'a arraché le client devant moi – l'histoire dans les viandes, là.

C'est ça qui est notre préoccupation, et je vous le dis tout de suite, vous allez avoir bien de la misère à changer notre point de vue là-dessus.

Le Président (M. Beaulne): Oui, Mme la ministre.

Mme Dionne-Marsolais: M. le Président, est-ce que la préoccupation du député, c'est le fait de faire de la recherche ou de faire de la production?

M. Benoit: C'est les deux, dans la mesure où on entre en compétition avec des moyens gouvernementaux contre l'entreprise privée. En 1969, il y avait un problème de recherche et développement, il y avait un problème de PME qui ne regardait pas ces choses-là. On a comme peuple, pour toutes sortes de raisons, décidé dans cette direction-là. Maintenant, l'entreprise privée est dans ces sphères d'activité-là. Je vous donne le cas des toiles. Je pourrais vous en donner dans à peu près tous les secteurs où l'entreprise privée est là. La preuve, c'est que dans la production porcine la commission parlementaire qu'on a eue là-dessus, bien il y a eu le CRIQ qui est venu nous montrer sa patente, avec tout le respect que je leur dois.

On en a eu pendant un mois, du monde – comment je les appelais? – des vendeurs du temple qui sont venus nous parler de leur patente aussi. Ils sont venus nous parler qu'eux autres aussi ils en développaient. Puis, je vais vous dire franchement, celle du CRIQ me semblait bien bonne, mais celle qui était faite par des agriculteurs, je ne me souviens plus de quelle ferme expérimentale, leur principe de compost me semblait tellement plus simple, tellement plus pratique, tellement plus près de la clientèle.

(11 heures)

Or, le CRIQ essayait de nous démontrer qu'il couvrait les trois éléments. En tous cas, je ne veux pas rentrer là-dedans, ce débat-là, on l'a fait assez et puis il va continuer d'ailleurs, mais ce que j'essaie de démontrer, c'est que, oui, le CRIQ fait de la recherche dans la production porcine, mais on en a eu 10, 12, je ne sais plus combien de groupes qui sont venus nous montrer toutes sortes de patentes. Or, ils ne sont pas tout seuls là-dedans, ils ne sont pas tout seuls.

Le Président (M. Beaulne): Mme la ministre.

Mme Dionne-Marsolais: Est-ce que je comprends du député qu'il souhaite... En fait, si on ne peut pas faire de recherche pour la PME, on ferme le CRIQ, là. Est-ce que c'est comme ça que je l'interprète? C'est parce que j'essaie de trouver... Est-ce que le député est d'accord pour qu'il existe un Centre de recherche industrielle du Québec?

M. Benoit: Le point, et je l'ai dit dans mon discours, je vous le redis, Mme la ministre, c'est que je suis pour que nous recentrions la mission de recherche du CRIQ, oui, dans la mesure où elle n'est pas en compétition – et ce n'est peut-être pas évident, évident – ou bien qu'on privatise le CRIQ. Et là ça va devenir un joueur comme tous les autres. Je veux dire, ils seront dans la même soumission que Lavalin, avec les mêmes moyens, puis les mêmes problèmes, etc. Mais ils n'auront pas un gros édifice sur le bord du boulevard Métropolitain qui a été, dans le temps, financé par la province, etc. Je veux dire, ils devront performer avec des profits en bout de ligne et puis...

Et ce n'est pas ça qu'on retrouve là-dedans, là. C'est une patente hybride à tous égards au mode... À tous égards, là-dedans, dans ce projet de loi, je réalise bien que vous êtes dans une phase de transition. Ce que je vous dis, c'est que je ne suis pas d'accord avec cette phase de transition là. Je suis convaincu, si j'avais le temps de faire une étude coûts-bénéfices de l'argent qu'on va mettre là-dedans versus le fait que vous serez capables de le privatiser dans quelques années... On verra. Quand on regarde l'argent que vous mettrez, à partir de documents que vous allez déposer au Conseil des ministres, sous forme de subventions ou sous forme de capital-actions, et prenez les multiples 10 fois ou 15 fois ou 20 fois, je vous garantis que dans cinq ans vous n'aurez pas fait d'argent avec ça, hein? Vous allez encore en perdre, puis pas à peu près, à part ça.

J'essaie de comprendre la logique. Vous me dites: Bien, là, donnez-nous le temps de faire la transition. Même sur une base de transition, vous ne mettrez pas votre argent, et Dieu sait qu'on a assez d'expérience au Québec dans les privatisations – on en a fait 40 – pour savoir comment ça marche puis comment ça ne marche pas, ces histoires-là. Il y en a que tu es aussi bien de les privatiser vite, à part ça, que de les traîner. Il y en a d'autres, bon, elles sont rentables: Société des alcools, Hydro. Il y a des choix de société qui semblent vouloir être faits là-dedans. Je ne suis pas sûr que je les partage tous, mais je ne suis pas sûr que vous faites le bon choix de la bonne façon pour arriver à vos fins.

Oui à la privatisation, je l'ai dit dans mon discours. Oui à la privatisation. Privatisons-la, vendons-la, cette entreprise-là. Vendons-la au personnel. Vous nous dites: Il n'y a peut-être pas d'acheteur. Le président nous dit: Oui, mais, quand ils descendent dans l'ascenseur – je reprends ses paroles – ça vaut moins cher parce qu'ils s'en vont coucher chez eux le soir. Bien, vendons-la à eux, ces gens qui descendent dans l'ascenseur. Je veux dire, ce n'est pas la première compagnie au monde qui est vendue à son personnel. Et là étalons ça dans le temps. Mais, quand ils vont aller en soumissions dans trois semaines, dans un mois, quand ils vont être propriétaires de l'entreprise – ils vont en être propriétaires – je vous garantis que ça va être différent, la dynamique dans l'entreprise.

Mme Dionne-Marsolais: Écoutez, c'est deux philosophies différentes. Nous pensons que, pour privatiser un centre de recherche... Et le député d'Orford l'a bien dit dans sa présentation, il y a un besoin pour le Centre de recherche industrielle du Québec. Il y a 100 000 interventions qui ont été faites par le CRIQ au fil des années. Il y a un besoin. Nos PME ont des besoins dans le secteur manufacturier, des besoins auxquels le Centre de recherche industrielle correspond spécifiquement.

C'est clair que la tendance, c'est d'augmenter l'autofinancement de ces centres de recherche en gardant leur mission un peu à dimension de développement industriel; c'est la proposition de ce projet de loi. Maintenant, nous y ajoutons la commercialisation pour augmenter l'autofinancement. C'est une proposition qui nous apparaît respectueuse de la mission et de l'essence mêmes du Centre de recherche industrielle du Québec. C'est une proposition qui nous apparaît compatible avec les grandes tendances européennes qui sont à l'augmentation de l'autofinancement, pour ne pas dire la privatisation, à moyen terme.

Et on le dit, qu'on va le privatiser; mais, pour privatiser un centre de recherche, il faut qu'il y ait une base de revenus assez forte pour intéresser des investisseurs. Alors, si, à la suite de l'adoption de ce projet de loi, il y avait de l'intérêt, de la part de l'industrie, à travailler avec le CRIQ pour accélérer cette privatisation-là, je crois qu'on serait tous réceptifs à ça. Mais il faut regarder la capacité, qui est un élément très important, de mettre en valeur le fruit de ses découvertes. Alors, nous, on pense que le 2° de l'article 15 permet de couvrir ça.

Et, pour tout le reste, il n'y a pas de changement par rapport à son mandat précédent. Tout ce qu'il prévoit, cet article-là, à 2°, c'est qu'on pourra retirer des revenus de la commercialisation des découvertes du CRIQ, des produits, des procédés qu'il aura développés ou dont il détient les droits, donc dont il sera propriétaire en tout ou en partie, et c'est pour justement aider ces partenaires, qui sont souvent les clients du CRIQ, à mettre en valeur, eux aussi, le fruit de leurs recherches. Je crois que c'est une façon équilibrée de planifier une transition vers un centre de recherche avec un pourcentage plus élevé de contributions privées.

Tu sais, on a 170 000 PME à peu près, au Québec. Elles ont des besoins au niveau de l'appui à la recherche et au développement, et on reconnaît qu'il y a des ingénieurs-conseils, des entreprises de recherche et de développement qui se sont développées au fil du temps. Mais, dans le secteur manufacturier, il y a encore un gros vide que le Centre de recherche industrielle du Québec comble, et, par cet article-là, on lui donne la possibilité de retirer des revenus sur des développements qu'il fait pour des PME, pour des entreprises et en partenariat avec elles. Alors, moi, je crois que c'est une façon prudente de procéder à une transition vers la mise en valeur et vers la privatisation du Centre de recherche industrielle du Québec sans faire de vente de feu, sans faire de déséquilibre au niveau de l'activité de recherche essentielle aux PME dans le secteur manufacturier.

Alors, moi, pour l'instant, je n'ai pas d'autres... C'est le coeur même de ce projet de loi, et, à moins que le député ait des propositions spécifiques qui pourraient répondre à ses préoccupations... Il n'est pas question de le privatiser dès demain, ce serait mettre une valeur quasiment nulle sur une activité qui s'est bâtie au fil des années depuis 1969. Alors, il y a des actifs de matière grise dans ça. Même le député l'a reconnu lui-même dans sa...

M. Benoit: Vendons-leur, vendons-leur.

Mme Dionne-Marsolais: Je pense que, avant de prendre une décision de faire une vente de feu, il serait plus sage d'assurer une transition vers une participation d'investisseurs par le biais de développements conjoints. Je sais que, sur le plan de la philosophie, on ne se rencontrera probablement pas, parce qu'il y a deux philosophies différentes, ici. Mais la philosophie du Parti libéral... À l'époque, ils ne l'ont pas vendu, hein, eux autres, le Centre de recherche industrielle. Pourquoi? Je n'en ai aucune idée. Mais, nous, on pense que, compte tenu de l'évolution et de la dynamique à la fois industrielle et gouvernementale, notamment au niveau du financement, on ne veut pas procéder à une vente d'un centre de recherche qui a un mandat au niveau social aussi, au niveau du développement de nos entreprises, surtout les PME, qui sont ses utilisateurs, et on pense que, en proposant l'ouverture par l'exploitation en partenariat avec des produits qu'il développe et dont il détient les droits, c'est une façon intelligente de faire une transition vers une privatisation éventuellement, si le marché est prêt à investir dans ce type de centre. C'est une façon aussi de rencontrer nos obligations financières dans l'intérêt des PME québécoises.

M. Benoit: M. le Président, la ministre pourra peut-être me répondre. S'ils ont l'idée de privatiser... Et je lui rappellerai que, dans son discours au salon bleu, à aucun moment, alors qu'elle parlera pendant 20, 25 minutes, elle ne parle du mot «privatisation», hein? C'est le distingué député d'Orford qui va lui demander si effectivement elle a oublié ce mot-là dans son discours. Jamais, dans un discours de 25 minutes, le mot «privatisation» ne sera mentionné. Alors, ça, c'est la première affaire.

Deuxième affaire, la ministre nous dit: Écoutez, oui, on veut privatiser. Là, elle l'admet carré. Bien, de toute façon, c'était dans les documents du Conseil des ministres. Y «a-tu» un scénario? Je veux dire, y «a-tu» des délais, y «a-tu» des... Y «a-tu» un scénario? Et j'aimerais ça qu'elle me réponde éventuellement sur les scénarios qu'elle regarde.

(11 h 10)

Troisièmement, quand elle dit: Eux, ils ne l'ont pas vendu, les libéraux, vous avez absolument raison. Quand nous sommes attablés, le caucus des députés, pour regarder ce projet de loi là, mon chef était là et on a fait ressortir le rapport Fortin. Vous savez, Fortin, ça a été ce député d'Outremont qui était un homme d'affaires, qui avait été, avant que nous prenions le pouvoir en 1985, avec Stéphane... Enfin, peu importe. Ils avaient fait le tour du monde pour regarder comment ça se privatisait, des choses, et comment on pouvait faire ça, ce qu'il fallait éviter aussi de faire. Il y a des privatisations qui n'ont pas fonctionné, à travers le monde. Et ça va très loin, hein? Encore ce matin, on apprend qu'Hydro en regarde une dans je ne sais pas quel pays d'Amérique du Sud, etc. Alors, les prisons sont après se privatiser, les aéroports, les bureaux de poste. À travers le monde, là, on s'aperçoit que les gouvernements sont embourbés dans à peu près n'importe quoi, et on n'est pas l'exception, on va être la règle.

Un, j'aimerais savoir c'est quoi, les scénarios de privatisation. Deux, le rapport Fortin, à aucun moment, n'a parlé de privatiser le CRIQ. Alors, quand je vous dis: Il y avait deux avenues dans mon discours, et je ne changerai pas, c'est qu'on revient à la mission originale, l'article 17, le bon vieil article 17 du bon vieux projet de loi – pas de problème là – ou bien on privatise, et il y a des choses pas mal plus compliquées que ça au monde qui ont été privatisées sans faire des ventes de feu, et, je vous le rappelle, Mme la ministre, ça peut être payé dans le temps, ça peut être payé sur les profits futurs, ça peut être payé sur toutes sortes de formules où on pourrait intéresser le personnel, et j'en suis convaincu.

Le troisième argument est celui-là: les gouvernements sociaux-démocrates tels que le vôtre, qui ont été battus à plate couture pour leurs conséquences économiques, en Ontario, en Angleterre et ailleurs, on s'aperçoit que c'est leur implication dans le monde économique. Or, au Québec, en ce moment, 52 % du PIB, Mme la ministre, est directement lié à l'action gouvernementale; 52 %. Toutes les études de M. Landry en tête, à l'époque où il était à l'université, jusqu'au plus humble étudiant à l'économie 101 du cégep de Sherbrooke savent que, à partir du moment où le PIB dépasse en quelque part le 30 % de l'implication gouvernementale, ça a des conséquences négatives sur l'économie. On a un beau cas ici où on pourrait se désengager d'un autre bout du PIB, le laisser à l'entreprise privée et faire que notre économie ne soit pas en recul avec celle de l'Ontario, comme on voit. Vous nous annoncez à tous les trois jours qu'il s'est créé je ne sais plus combien de jobs depuis deux mois, mais il faut vérifier puis le comparer avec l'Ontario, hein? L'Ontario nous en annonce 300 000 pour l'année à venir. On en a perdu 8 000, l'année passée. Chez les jeunes, en date de ce matin, c'est 23 000, sur l'année passée, jeunes de moins qui travaillent.

Les beaux discours, là, quand on se compare un peu, quand je vous dis: Allez chercher des Européens sur votre conseil d'administration, on va se comparer. Ici, quand on se compare, on s'aperçoit qu'on est bien trop impliqués dans l'économie du Québec, à comparer à nos voisins de gauche, de droite et du Sud, et on a un beau cas ici de ce désengagement. Ou bien on revient à notre mission originale de recherche pure. Et, oui aux 170 000 PME, je n'ai pas de problème avec ça, si ce n'est que, encore là, privatisez ça demain matin, le CRIQ, vous allez voir qu'il va y avoir du monde en «running shoes» qui va travailler là-dedans, hein? D'ailleurs, les chiffres sont là. On n'a pas besoin d'être génial, on a juste à lire le rapport annuel. Ce qu'on a reproché au CRIQ, de tout temps, ça a été sa lourdeur, sa lenteur. On ne lui a jamais reproché sa compétence, mais on lui a reproché... alors que des laboratoires privés ou des centres de recherche privés vont être beaucoup plus agressifs, beaucoup plus dans le marché. Or, c'est évident que c'est un des pivots du projet de loi.

La ministre, je doute fort qu'elle soit capable de me démontrer qu'ils n'iront pas taponner dans les talles de l'entreprise privée. Ils avaient deux choses à faire; ils ont décidé de ne faire ni l'une ni l'autre. J'aimerais connaître maintenant quelle est la direction de la privatisation qu'elle veut prendre là-dedans, à quel moment ils ont l'idée de privatiser ça, à quels coûts, sur quelle base. Est-ce qu'ils ont des acheteurs intéressés dans cinq ans ou dans 10 ans ou jamais? Quand on dit: On veut privatiser, normalement c'est parce qu'il y a un scénario en quelque part qu'on a.

Le Président (M. Beaulne): Mme la ministre.

Mme Dionne-Marsolais: Oui. Alors, je vais reprendre quelques points des commentaires du député d'Orford. D'abord, concernant la privatisation, dans ses commentaires à l'Assemblée quand on a étudié ce projet de loi, il a fait ressortir que, dans le mémoire au Conseil des ministres – c'est lui-même qui l'a dit, il l'a répété tout à l'heure – nous avions indiqué que c'était une première étape vers une privatisation. Donc, on l'a dit très clairement, on ne l'a jamais caché. Et ce qu'on a ajouté, c'est qu'on ne change pas la mission du Centre de recherche industrielle du Québec; ce que l'on change, c'est sa façon de faire, en lui permettant la commercialisation de ses produits, seul ou avec ses partenaires pour lesquels il développe ses produits ou ses procédés. Donc, ce que l'on fait, c'est justement augmenter l'autofinancement possible au Centre de recherche industrielle du Québec. Or, c'est exactement ce qui est la tendance internationale dont parle le député d'Orford, qui consiste à augmenter l'autofinancement des centres de recherche industrielle d'État.

Il a aussi parlé du rapport qu'il a appelé Fortin, mais, en fait, c'est le rapport de Pierre Fortier, qu'on connaît bien, et c'est une décision du gouvernement, à l'époque, qui consistait à procéder différemment. Dans ses notes d'introduction, le député a fait état d'un certain nombre d'alternatives. Il disait qu'il y avait des choses avec lesquelles il était d'accord. Il a mentionné une phrase, et je vais la citer. Il a dit: «Je le dis et je le répéterai en commission, dans le cas du CRIQ, il ne fallait pas faire une vente de feu.» C'est exactement ce que nous ne faisons pas. Pour ne pas faire une vente de feu, il faut augmenter l'autofinancement pour créer une valeur ajoutée au CRIQ qui pourra éventuellement intéresser des partenaires et des investisseurs éventuels. C'est exactement l'essence du 2° de l'article 15.

Je crois que, dans toute l'argumentation du député d'Orford, que je partage en partie, il y a un élément qu'il oublie: c'est le besoin. À quoi répond le besoin du Centre de recherche industrielle du Québec? Il répond au besoin des PME du secteur manufacturier qui ont besoin d'un partenaire pour faire de la recherche industrielle dans des secteurs très particuliers, pour des volets très particuliers. Tout ce que nous donnons au CRIQ par cet article 15, c'est la possibilité de s'associer à elles pour en faire le développement commercial, donc en retirer des revenus qu'elles pourront éventuellement consacrer à leur financement, à leur autofinancement. Donc, le projet de loi, et l'article 15 en particulier, répond à toutes les préoccupations qui ont été soulevées, les quatre points de vue dont parlait le député dans ses notes d'introduction. Et il y a une certaine cohérence à approuver cet article-là dans l'esprit et dans l'ouverture que l'on a bien indiqués au niveau de la mission, de l'accroissement à l'autofinancement et de la possibilité de privatisation à moyen ou long terme, tel qu'on l'a écrit dans le document du Conseil des ministres.

Le Centre de recherche industrielle, à chaque année, va déposer son plan d'affaires qui permettra, au moment de l'étude des crédits, à l'opposition de nous questionner sur les éléments de suivi. Alors, je pense que cet article-là traduit exactement le fond de la pensée du député d'Orford. Il veut aller un peu plus vite que nous. Moi, je pense que c'est peut-être là des valeurs que l'on dirait partisanes, mais notre approche, à ce gouvernement, est de faire une transition graduelle pour qu'on puisse continuer d'assumer la responsabilité et répondre aux besoins de nos entreprises tout en permettant l'augmentation de leur contribution à notre processus de financement. C'est de cette façon-là qu'on va impliquer les PME, les entreprises ou d'autres partenaires à s'intéresser et à investir éventuellement dans le Centre de recherche industrielle du Québec.

Le Président (M. Beaulne): Merci, Mme la ministre. M. le député.

M. Benoit: Oui. Mme la ministre, d'abord je n'en sais pas plus sur la privatisation, sauf que vous reprenez mes paroles puis vous dites qu'il ne faut pas faire une vente de feu. On s'entend là-dessus. Deux, si je regarde le document que vous avez déposé au Conseil des ministres, vous investirez dans le MICST, soit sous forme de capital-actions ou soit budgétaire, 66 000 000 $ sur cinq ans. D'accord? On se comprend? C'est les chiffres du Conseil des ministres. Vous retirerez sur cinq ans des bénéfices de 2 400 000 $. C'est à la page 6. Bon. On investit 67 000 000 $ dans une affaire puis on va avoir un bénéfice de 2 400 000 $.

Multiplions-le – je ne sais pas sur quelle base ça se transige, ça, dans les marchés boursiers, là – à 20 fois les profits, ce qui me semble généreux: on est à 40 000 000 $. On a investi 67 000 000 $; après cinq ans, sur une base de profits... Bon, là, il y a des patentes. Peut-être bien que le «goodwill» puis les patentes, ça vaut... J'imagine, j'espère que ça vaut quelque chose. Comme disait le Français qui avait investi dans une de mes entreprises – c'est juste un mot d'esprit – ce bon Français qui avait investi dans une de mes entreprises, il parlait toujours du «Q noir». Alors, si ça vaut quelque chose, ça, là, la connaissance...

(11 h 20)

Ceci dit, comment la ministre peut essayer de me convaincre que – d'ailleurs, je reprends ses mots exacts – à moyen ou à long terme... Moyen pour les marchés boursiers, c'est deux ans; long terme, c'est cinq ans. Est-ce qu'elle est après me dire qu'elle pourrait privatiser ça à deux ans? Bien, à deux ans, là, ce n'est pas compliqué, elle aura investi 45 000 000 $ et elle sera encore en état de déficit; elle aura seulement 300 000 $ de profits après trois ans. Alors, ça, c'est le moyen terme. Long terme, cinq ans, je lui ai donné des chiffres. Alors, peu importe dans quel scénario on le fait, je ne le sais pas, comment vous allez privatiser ça à profit.

Alors, si ce n'est pas pour être plus à profit dans cinq ans que ça l'est aujourd'hui – puis encore une fois c'est les chiffres que vous avez déposés au Conseil des ministres – bien, mon Dieu, essayons tout de suite de dire: Écoutez, il y a quelque chose là-dedans. C'est vrai qu'il y a de la matière grise là-dedans, ils sont 300 et quelques employés. C'est vrai que vous avez des clients. Alors, tout le monde, ici, vous allez aller à la banque...

On l'a fait dans bien d'autres entreprises, hein? Les employés ont acheté leurs entreprises, surtout dans ce genre d'entreprises là, et ce serait surprenant de voir comment les employés pourraient être intéressés, parce que, eux, ils la connaissent, la vraie valeur de l'entreprise, et ils sont convaincus que, si on les lâchait lousses là-dedans, probablement qu'ils en feraient, de l'argent, eux autres, tous ensemble, à part ça.

J'aimerais entendre la ministre. Comment elle peut essayer de me convaincre que ça va être plus payant dans cinq ans – c'est ça qui est son argument – que ça l'est maintenant ou que ça va l'être dans deux ans? Les chiffres qu'elle dépose au Conseil des ministres, je veux dire... Et, s'il y a une plus-value en ce moment sur les brevets et puis tout ça, bien, elle est là, la plus-value. Je veux dire, peut-être elle n'apparaît pas dans les chiffres, mais elle est là, la plus-value. Moi, j'aimerais ça entendre la ministre là-dessus, parce que je suis convaincu qu'on va porter ça chez un courtier, Merrill, Lynch, Pierce, Fenner & Smith, puis on dit: Aïe, dans cinq ans, à quoi vous allez nous vendre ça, tout étant égal, par ailleurs, avec le document du Conseil des ministres? et qu'ils vont dire: Ça ne vaudra pas plus cher dans cinq ans que ça vaut aujourd'hui. En ce moment, il y a un déficit puis, dans cinq ans, il va y avoir un profit de 1 900 000 $, mais vous aurez ajouté sous toutes sortes de formes à peu près 66 000 000 $ de capital dans l'entreprise.

Mme Dionne-Marsolais: M. le Président, d'abord je voudrais juste avoir une petite réaction, puis après ça je voudrais vous demander si c'est possible que l'on ajourne parce que je dois aller défendre un document au Conseil des ministres. Mais je voudrais juste expliquer...

M. Benoit: Il n'y a pas de problème à ajourner dans une quinzaine de minutes, M. le Président. C'est la demande de Mme la ministre?

Mme Dionne-Marsolais: Oui. Ça vous irait?

M. Benoit: Oui. Dans une quinzaine de minutes, il n'y a pas de problème.

Mme Dionne-Marsolais: Bon, je vous remercie beaucoup. Alors, pour ce qui est des prévisions financières dont parle le député d'Orford, la première ligne au niveau des mandats du ministère de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie, ce sont des mandats que nous donnons au Centre de recherche industrielle actuellement et éventuellement qui seront donnés à des tiers de toute façon. Ce sont des mandats de développement, ça peut être des mandats de vérification, ça peut être des mandats de normalisation; ce sont des mandats courants dans le cadre des affaires. Donc, le 42 000 000 $, là, il ne peut pas être considéré au sens de... Il faudra le dépenser de toute façon au niveau du gouvernement. Donc, le capital-actions dont on parle, on parle de 24 000 000 $.

Quand on parle d'ouvrir la porte à la privatisation – et c'est ce que dit le mémoire au Conseil des ministres – on parle d'augmenter l'autofinancement. Alors, notre approche vise essentiellement cette capacité d'augmenter l'autofinancement du Centre de recherche industrielle par la commercialisation de ses résultats, seul ou avec des partenaires, par la création de filiales qui, elles, vont aussi avoir des impacts au niveau de l'ensemble du développement économique du Québec par le biais des partenariats. Donc, il y a un volet complémentaire à nos efforts. On ne peut pas évaluer le Centre de recherche industrielle du Québec comme on évaluerait n'importe quelle compagnie, avec des ratios prix-profits courants sectoriels, ce n'est pas le cas. Alors, dans ces conditions-là, je pense que les comparaisons et la demande de référence à des courtiers comme Nesbitt Burns ou d'autres, ça ne s'applique pas dans ce cas-ci. On ne peut pas utiliser les mêmes formes de comparaison, de prix et de valeur par rapport aux profits ou aux revenus nets d'une entreprise, ça ne s'applique pas dans un contexte de centre de recherche, pas plus chez nous que dans d'autres secteurs. Dans ce contexte-là, nous visons une augmentation de l'autofinancement. On sait que, si on réussit l'augmentation de l'autofinancement, ça pourrait aboutir à une privatisation.

Mais il faut bien comprendre que l'objectif qu'on poursuit, nous, c'est de répondre aux demandes des petites et moyennes entreprises et de permettre, ce faisant, au Centre de recherche industrielle du Québec d'augmenter ses entrées de fonds par une commercialisation du résultat de sa recherche avec ses partenaires, ou seul dans les cas où il détient des droits seul, et ça, c'est important parce que c'est l'essence même de la contribution d'un centre de recherche national, d'État.

Le Président (M. Beaulne): M. le député.

M. Benoit: Oui. Mme la ministre, à combien vous pensez, si Burns Fry n'est pas prête à faire une transaction à 15 ou 20 fois les profits, ce que vous me dites? Pas de problème avec ça, mais à quel prix ça se vendra dans quatre ans, dans cinq ans, dans six ans? Et je voudrais vous rappeler le mandat du ministère. Quand on le prend dans les crédits, ça me semble effectivement l'argent que vous prenez, que vous donnez au CRIQ année après année, qui est décroissant. Je veux dire, vous essayez de me donner une explication; je ne suis pas trop sûr de l'explication que vous me donnez, parce que, aussi loin qu'on peut aller, la province a subventionné d'une manière ou d'une autre le CRIQ, et puis les chiffres que je vous donne, 66 000 000 $, 42 000 000 $, au niveau du mandat, ça vient du CRIQ. Je veux dire, c'est bien sûr qu'ils font quelque chose avec. Si c'est ça que vous m'avez dit, je suis bien d'accord avec vous, mais le mandat... C'est ça. C'est de l'argent qui vient de chez vous, qui s'en va au CRIQ, et puis lui fait des choses avec. Mais, au total, vous aurez mis, dans cinq ans, 66 000 000 $ pour, au niveau de la profitabilité, 2 400 000 $.

Mais ce que j'essaie de vous poser comme question... Vous semblez avoir un plan de privatisation. Que Dieu vous vienne en aide, pas de problème avec ça. Mais à combien vous allez vendre ça et quand? Dans une phrase, vous avez dit «à moyen ou à long terme». Plus souvent qu'autrement, vous parlez de cinq ans, vous ne mettez pas de prix. C'est très vague, hein, c'est très, très vague.

Mme Dionne-Marsolais: M. le Président, le CRIQ n'est pas à vendre. Il faudrait clarifier ça tout de suite, il n'est pas à vendre. Ce que nous faisons, c'est de prévoir une capacité de mise en valeur de ses découvertes avec les gens avec lesquels il fait des découvertes.

Quand le député dit: D'aussi loin qu'on regarde, 42 000 000 $, ça vient du MICST, etc., nous, on regarde l'avenir, et à l'avenir, justement, on sait qu'il y aura encore des mandats qu'on va donner au Centre de recherche industrielle pour répondre à des besoins particuliers du gouvernement, en particulier du ministère de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie. C'est ce qui se fait. Ce type de mandats là, ce sont des mandats que tous les gouvernements donnent à leur centre de recherche régulièrement pour des besoins, pour répondre à des questions ponctuelles précises.

Quant à toute la question de la privatisation, c'est le député qui parle d'une stratégie. Nous n'avons jamais dit ça, mais nous avons reconnu – et on l'a écrit dans le mémoire au Conseil des ministres – et le gouvernement reconnaît que le fait d'augmenter l'autofinancement du Centre de recherche industrielle du Québec, de lui ouvrir la porte à la capacité d'exploiter le fruit de ses découvertes, c'est une porte à la privatisation. On est très clairs là-dessus. Mais c'est tout. Il n'y a pas de grande stratégie ni de vente de feu ni de mandat à Nesbitt Burns ou à n'importe qui d'autre. Ça n'a rien à voir.

M. Benoit: Oui, mais, au Conseil des ministres, signé par M. Bernard Landry et Mme Rita Dionne-Marsolais – si je ne me trompe, c'est vous, ça – vous dites, dernière phrase «une réduction graduelle de la contribution du gouvernement et une modification de la culture organisationnelle ouvrant la voie à une privatisation éventuelle d'ici cinq ans». Bon. Vous, dans votre discours, tantôt, vous avez dit «à moyen ou long terme». Moyen terme, dans ces secteurs-là, c'est deux ans; long terme, c'est cinq ans. J'essaie de vous faire préciser ce que vous entendez par «privatisation». Vous dites: On ne ferait pas une privatisation de feu. D'autre part, ça se peut que ce soit à moyen terme. On sait que, entre l'argent que vous allez y mettre et l'argent dont vous allez profiter, ce n'est pas là la solution, hein, je veux dire...

Je m'excuse, mais vous ne me démontrez pas que cette affaire-là va être vraiment plus rentable. Elle va perdre un peu moins, mais on aura trouvé en cinq ans le moyen de faire 2 400 000 $ de bénéfice net avec une injection de fonds de 66 000 000 $. Trouvez-moi un seul investisseur, Mme la ministre, qui va être prêt à mettre 66 000 000 $ pendant cinq ans pour en recevoir un bénéfice net de 2 000 000 $. Je veux dire, il y a rien que le gouvernement pour s'embarquer dans des patentes comme ça. Alors, ce que je vous dis, c'est: Offrons-les au personnel, et la culture de l'entreprise va changer sûrement plus vite, ou bien revenons à notre mission originale, qui est de la recherche pure, pour nos 170 000 entreprises, et là on ne sera pas en compétition contre l'entreprise privée.

(11 h 30)

Mme Dionne-Marsolais: Alors, pour revoir le commentaire du député, il est très bien écrit que cette solution que nous avons traduite par le projet de...

M. Benoit: À quelle page, Mme la ministre?

Mme Dionne-Marsolais: Vous l'avez, le mémoire, c'est vous qui l'avez cité. Alors, je reprends votre phrase: «Cette solution paverait la voie à une éventuelle privatisation, totale ou partielle, du Centre sur un horizon de cinq ans.» C'est ce que je dis depuis le début. Et, quand on parle de donner la capacité d'exploiter des découvertes et donc d'autofinancer le Centre, c'est la voie que nous ouvrons et c'est exactement cohérent avec le projet de loi.

Le Président (M. Beaulne): M. le député.

M. Benoit: Bien, écoutez, je ne pense pas qu'on va s'entendre, je l'ai dit dès le début à la ministre, ils vont directement être dans les talles de l'entreprise privée. Le CRIQ a été fondé à une autre époque où il y avait un besoin. Ce besoin-là maintenant est répondu par plein de gens dans ce secteur-là et ça ne va qu'ajouter un joueur, mais avec les avantages du gouvernement, et c'est là que ce n'est pas équitable pour l'entreprise privée. On leur donne des moyens, des laboratoires. Aïe, vous devriez voir juste au niveau des voyages, au niveau des cotisations à des organismes. Je veux dire, il faut avoir été dans l'entreprise privée pour savoir comment tout ça a été géré très généreusement. D'ailleurs, M. Gérin, dans un article...

Une voix: Guérin.

M. Benoit: ...Guérin, excusez – j'ai un peu de misère – est très clair. M. Guérin parle quand même de privatisation, mais d'un ordre différent.

Le Président (M. Beaulne): Bon, alors, M. le député, je pense que Mme la ministre a expliqué son point de vue. J'en déduis qu'elle n'a pas l'intention de changer d'idée ou d'apporter un amendement quel qu'il soit. De votre part, je pense que vous avez très bien exposé vos préoccupations, et d'ailleurs la commission en a pris bonne note. Alors, est-ce que vous êtes prêt à passer au vote sur l'article 15?

M. Benoit: Bien, je veux juste résumer ma pensée, M. le Président. Je sais que la ministre doit quitter pour le Conseil des ministres. On est d'accord avec ça, on va sûrement voter cet article-là avant qu'elle quitte. Mais, encore une fois, le gouvernement libéral a fait 40 privatisations et je pense qu'elles ont toutes été des succès. Le PQ en a fait une, celle de la Société des alcools, qui, 20 ans après, est encore en cour. C'est tout croche. Alors, je pense qu'on a un certain «knowledge», on a une certaine connaissance de la privatisation, et la ministre aurait avantage à écouter notre message là-dedans. Les chiffres, ses propres chiffres, démontrent qu'elle ne s'en va pas dans la bonne direction. Ça ne sera pas rentable, cette histoire-là. Elle ne le fait pas de la bonne façon. Et ce n'est pas une vue dogmatitienne non plus quand je dis: Il faut absolument qu'on ne soit pas en compétition directe avec l'entreprise privée. Ce n'est pas ça. Je veux dire, si on veut aider l'entreprise privée, il ne faut pas, comme gouvernement, être là, il faut la laisser faire et l'aider comme centre de recherche, oui, ou bien qu'on devienne, nous aussi, un laboratoire indépendant, privé, mais pas les deux à la fois, et c'est ce qu'on essaie de faire, ici.

Bon, alors, je suis prêt à passer au vote, et puis c'est bien sûr que j'espère que vous avez la majorité, de l'autre bord.

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. le député. Je pense que votre explication résume très bien votre position. Alors, est-ce que l'article 15 est adopté?

Des voix: Adopté.

M. Benoit: Sur division.

Le Président (M. Beaulne): Sur division, c'est-à-dire à la majorité, d'après le nouveau vocabulaire; alors, à la majorité.

Donc, conformément à la demande qui m'a été faite, j'ajourne les travaux de la commission à cet après-midi, après la période de questions, pour, cette fois-ci, l'étude du projet de loi n° 79.

(Suspension de la séance à 11 h 34)

(Reprise à 15 h 40)


Projet de loi n° 79


Étude détaillée


Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles


La Commission des lésions professionnelles


Personnel et ressources matérielles et financières (suite)

Le Président (M. Beaulne): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux sur le projet de loi n° 79. Lorsque nous sommes quittés, hier, nous en étions à l'article 429.6, où les députés avaient posé certaines questions quant à la nécessité ou à l'objectif ou au but de faire disparaître du dossier certaines pièces au bout d'un an. Alors, M. le ministre, voulez-vous commencer l'échange?

M. Rioux: Oui. Quand on a quitté, hier soir, j'avais dit au député d'Argenteuil que je trouverais une formule; je pense qu'on l'a trouvée. D'abord, le premier paragraphe reste tel quel. Le deuxième, «À défaut, ces pièces...», ça reste tel quel, et on introduirait un troisième paragraphe à l'article 429.6, ou plutôt on compléterait le deuxième, oui. Le 429.6 est modifié par l'addition, à la fin du deuxième alinéa... Après le mot «autrement», on ajoute les mots suivants: «notamment en les transmettant à la Commission en vue de compléter son dossier».

Alors, comme on s'est beaucoup interrogés là-dessus hier, on apporte cet amendement et, de cette façon-là, on règle le problème, parce qu'on a dit hier qu'à la Commission on conservait les documents à vie.

Le Président (M. Beaulne): Bon. Alors, l'amendement est déposé. En avez-vous pris connaissance?

M. Beaudet: M. le Président, je dois vous dire que le ministre a eu la gentillesse de venir nous partager l'amendement qu'il propose et qui... D'après moi, comme j'ai répondu tantôt, ça ne me protège pas. Moi, je n'ai rien à protéger, je n'ai rien à satisfaire non plus. J'essaie de voir le meilleur fonctionnement de la Commission à long terme, et puis l'amendement qui est proposé me semble répondre à ce qu'on recherchait hier, c'est-à-dire de conserver en filière les dossiers et tous les éléments de la preuve tout en n'ayant pas de duplication. Je pense que, par cet amendement-là, on a trouvé à régler le problème.

Le Président (M. Beaulne): Alors, l'amendement est adopté et l'article 429.6, tel qu'amendé, est adopté.

M. Rioux: Adopté.

Le Président (M. Beaulne): L'article 429.7.

M. Rioux: «L'exercice financier de la Commission des lésions professionnelles se termine le 31 mars», de chaque année, évidemment. C'est la date de la fin de l'année financière du tribunal.

M. Beaudet: On part un gros argument là-dessus. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Beaulne): Comme le CRIQ?

M. Beaudet: Non. Le CRIQ, j'avais raison; là, je n'aurais pas raison. Adopté.

M. Rioux: Adopté.

Le Président (M. Beaulne): Bon. Alors, adopté. L'article 429.7, adopté. L'article 429.8.

M. Rioux: «Le président soumet chaque année au ministre les prévisions budgétaires de la Commission des lésions professionnelles pour l'exercice financier suivant, selon la forme, la teneur et à l'époque déterminées par ce dernier.

«Ces prévisions sont soumises à l'approbation du gouvernement.»

C'est les attributions, M. le Président, normales d'un président de tribunal de préparer un budget annuel puis de le soumettre au gouvernement pour le faire approuver.

M. Beaudet: «C'est-u» soumis à l'Assemblée nationale, ça itou, ou, comme hier, ça reste dans vos mains?

M. Rioux: C'est soumis au gouvernement. C'est soumis au Conseil des ministres.

M. Beaudet: Quand on fait des prévisions budgétaires, M. le Président, c'est parce qu'on a un financement. On «peut-u» savoir que c'est la nouvelle Commission? Parce que c'est de ça qu'on parle, la CLP. Est-ce qu'elle va être financée de la même façon qu'elle l'était avant? Comment elle va être financée?

M. Rioux: On prévoit la création d'un fonds. Il y a un fonds spécial pour le financement de la Commission des lésions professionnelles, qui est un fonds prélevé à même les cotisations des employeurs.

M. Beaudet: Alors, c'est la CSST qui va supporter la CLP.

M. Rioux: Oui, oui, à même les cotisations des employeurs.

Le Président (M. Beaulne): Ça va? Adopté. L'article 429.9.

M. Rioux: «Les livres et comptes de la Commission des lésions professionnelles sont vérifiés chaque année par le Vérificateur général et chaque fois que le décrète le gouvernement.» Bon, bien, c'est que les livres puis le compte du tribunal, ça fait l'objet d'une vérification annuelle.

M. Beaudet: Quand vous dites «le gouvernement», M. le Président, est-ce que le ministre veut dire que ça inclut la commission de l'économie et du travail qui pourrait demander de voir les livres? Pas nécessairement à tous les ans, parce qu'on ne finira pas, mais, une fois sur trois, quatre ans, on peut demander à voir les livres de la Commission des lésions professionnelles ou de quelque organisme que ce soit qui relève de la commission de l'économie et du travail.

Le Président (M. Beaulne): On peut avec un mandat de surveillance ou d'initiative, oui.

M. Beaudet: C'est ça. Mais, quand on dit «le gouvernement», est-ce que ça inclut la commission de l'économie et du travail ou si on doit l'inclure?

M. Rioux: M. le Président, je pense que c'est la prérogative des députés membres de cette commission de demander des comptes et de demander que l'on dépose des documents, qu'ils les examinent, qu'ils posent des questions. C'est la prérogative des députés de la commission parlementaire.

M. Beaudet: Oui, je comprends, mais, dans le 429.9, ce n'est pas inclus que la commission de l'économie et du travail puisse faire appel à ces pouvoirs pour obtenir... Mais c'est tacite, j'entends.

M. Rioux: Bien sûr!

Le Président (M. Beaulne): Oui, c'est implicite, c'est dans la Loi sur l'Assemblée nationale.

M. Beaudet: Bon, bien, je n'ai pas de problème.

Le Président (M. Beaulne): J'irais même plus loin, M. le député. Si par hasard il advenait qu'un dirigeant d'organisme ou d'agence se refuse à répondre aux invitations de la commission, on peut le faire venir avec l'équivalent d'une subpoena. Alors, on peut aller très loin.

Donc, 429.9 est adopté. L'article 429.10.

M. Rioux: En vertu de la loi 198. C'est ça.

Le Président (M. Beaulne): Non, il y a la Loi sur l'Assemblée nationale aussi.

M. Rioux: C'est de cette loi-là que vous voulez parler, M. le Président.

Le Président (M. Beaulne): Non, de la Loi sur l'Assemblée nationale.

M. Rioux: De la loi de l'Assemblée.

Une voix: Ah oui, il y a un article de la loi qui le dit.

M. Rioux: O.K. Très bien.

Le Président (M. Beaulne): Ah oui. C'est l'article 34.

M. Rioux: «429.10 Les sommes requises pour l'application du présent chapitre sont prises sur le fonds de la Commission des lésions professionnelles – dont j'ai parlé tout à l'heure.

«Ce fonds est constitué des sommes que la Commission y verse annuellement pour l'application du présent chapitre, au montant et selon les modalités que détermine le gouvernement.»

Ça, c'est vraiment le financement de la CLP.

M. Beaudet: Juste un éclaircissement. Quand vous dites, à l'alinéa deux: «Ce fonds est constitué des sommes que la Commission», la Commission, c'est la CSST.

M. Rioux: C'est la CSST.

M. Beaudet: Oui. C'est parce qu'on parle de deux commissions, là. Je pense que ça...

M. Rioux: Oui, oui, mais il y a le tribunal...

M. Beaudet: Oui, nous, on comprend ça, M. le ministre, c'est clair pour nous, ça fait des semaines qu'on fouille à l'intérieur de la Commission des lésions professionnelles puis de la Commission de la santé et de la sécurité du travail, mais ce n'est pas spécifié comme tel. J'aimerais mieux qu'on puisse ajouter, au deuxième alinéa, «est constitué des sommes que la Commission de la sécurité et de la santé du travail». Il semble qu'on me dit non avec un bon sourire, en arrière. Je suis quasiment prêt à céder, mais...

M. Rioux: Quand on parle de la Commission, c'est de la CSST, O.K.? La Commission de santé et sécurité au travail. Et, quand on parle du tribunal, on parle de la CLP.

M. Beaudet: C'est toujours mentionné «Commission des lésions professionnelles»?

M. Rioux: «Commission des lésions professionnelles».

Le Président (M. Beaulne): Alors, c'est adopté. L'article 429.10, adopté.


Règles de preuve et de procédure

L'article 429.11.

M. Beaudet: Oups! on change de chapitre.

M. Rioux: Dans la définition des termes de la loi, M. le Président, lorsqu'on parle de la Commission, on parle de la Commission de la santé et sécurité au travail instituée selon la loi sur la santé et sécurité.

Le Président (M. Beaulne): Je pense que c'est clair. C'est pas mal clair.

M. Rioux: On se comprend?

Le Président (M. Beaulne): Oui, oui.

M. Rioux: Très bien.

Le Président (M. Beaulne): On est à 429.11.

M. Rioux: «429.11. Avant de rendre une décision, la Commission des lésions professionnelles permet aux parties de se faire entendre.» Ça, c'est la section XV, «Règles de preuve et de procédure». Ça consacre, au fond, le droit des parties d'être entendues. Je pense que c'est ça qu'il est important de retenir. Ça consacre le droit des parties d'être entendues par le tribunal. C'est une règle de justice naturelle à laquelle tout le tribunal administratif doit se conformer.

M. Beaudet: Dans la Loi sur les accidents de travail, à l'article 423, on dit: «Avant de rendre une décision sur un appel, la Commission d'appel permet aux parties de se faire entendre et, à cette fin, leur donne un avis d'enquête et d'audition. Lorsque la chose est possible, l'audition est fixée à une heure et à une date où les parties et leurs témoins peuvent être présents sans trop d'inconvénients pour leurs occupations ordinaires», et ça, je ne retrouve pas ça au 429.11. Est-ce que ça se retrouve ailleurs dans le texte à quelque part? Parce que je pense qu'on procède à d'autres éléments rapidement.

(15 h 50)

L'article 423 faisait référence à la notification des gens, à leur donner l'heure, la journée, la disponibilité, ils échangeaient... Mais je ne le trouve pas dans 429.11, à moins que vous l'ayez plus loin. L'article 429.35?

M. Rioux: Oui, on l'a. À 423...

M. Beaudet: O.K., 429.35.

M. Rioux: Oui.

(Consultation)

M. Rioux: Oui. À 429.35, on a une disposition qui parle des avis à transmettre aux parties, de même que des délais raisonnables avant l'audience. Ils mettent l'objet, la date, l'heure, le lieu, etc.

M. Beaudet: On critiquera celui-là quand on sera rendus là, mais...

M. Rioux: Oui, oui, oui.

M. Beaudet: O.K.

Le Président (M. Beaulne): Bon, ça va?

M. Beaudet: Oui. Ça va pour 429.11.

Le Président (M. Beaulne): Adopté. L'article 429.12.

M. Rioux: «La Commission des lésions professionnelles peut procéder sur dossier si elle le juge approprié et si les parties y consentent.» Je vais peut-être donner une petite explication et demander à M. Tremblay d'aller plus loin. C'est que ça prévoit que la CLP peut procéder sur dossier sans qu'il y ait de débat contradictoire. C'est de ça qu'on parle, je pense.

Une voix: Sans audition.

M. Rioux: Sans audition. Alors, voulez-vous donner, M. Tremblay, plus d'info là-dessus?

M. Tremblay (Yves): Oui, d'accord.

Le Président (M. Beaulne): M. Tremblay, allez-y.

M. Tremblay (Yves): Comme vous pouvez le voir à l'article en question, les deux conditions sont conjonctives. Alors, il faut qu'on le juge approprié, c'est-à-dire que, si le commissaire en question le juge approprié et si les parties y consentent... Donc, c'est des cas où, règle générale, les éléments de preuve au départ sont plutôt admis – il y a beaucoup d'admissions – et les gens préfèrent souvent plaider par écrit plutôt que de plaider en présence les uns des autres. Et aussi on prend pour acquis qu'il n'y a pas vraiment d'interrogatoire de témoins et de contre-interrogatoire. Alors, quand à peu près toutes ces conditions sont satisfaites, c'est-à-dire que les deux parties y consentent et que la Commission des lésions professionnelles le juge approprié, à ce moment-là on passera outre à la règle de départ voulant que les parties se fassent entendre comme telles, et on peut procéder sur dossier.

M. Beaudet: C'est bien clair que c'est avec le consentement des deux parties.

M. Tremblay (Yves): Bien sûr!

M. Rioux: Oui, oui. Ça atténue un peu la portée de l'article 429.11.

M. Beaudet: Ou l'obligation de se faire entendre.

M. Rioux: C'est ça.

Une voix: C'est exact.

M. Beaudet: Mais, par ailleurs, est-ce que cet acquiescement-là des deux parties... C'est-à-dire, en fait, c'est la partie qui appelle, dans le fond, qui est plus importante; l'autre juge. La partie qui appelle, est-ce que c'est un consentement écrit que vous exigez ou c'est un consentement verbal?

M. Tremblay (Yves): Habituellement, moi, je vous dirais que les gens sont plus prudents, ils exigent des consentements écrits.

M. Beaudet: Bien, il ne faudrait pas que ce soit «être plus prudent», il faudrait être très prudent, parce que quelqu'un va pouvoir un jour vous dire qu'il n'a jamais dit ça.

M. Tremblay (Yves): Ah non, non.

M. Beaudet: Alors, pour ne pas s'ouvrir le flanc à la critique, il faudrait que l'avis du consentement de la partie appelante soit rédigé par écrit.

M. Tremblay (Yves): Bien sûr.

M. Rioux: Parce que, à 429.11, on énonce un principe. À 429.12, on l'atténue, mais cependant...

M. Beaudet: C'est ça. En autant que les parties sont d'accord.

M. Rioux: ...il faut quand même se mettre dans la tête que c'est une exception. C'est une procédure d'exception un peu. C'est conforme aussi à la justice administrative.

M. Beaudet: Bien, ça ne deviendra peut-être pas nécessairement une exception, ça peut devenir relativement fréquent. Si la plainte a déjà été entendue en d'autres lieux puis que le dossier est complet, si c'est juste d'apporter un jugement...

M. Rioux: Mais ce que je veux dire, c'est que ce n'est pas la normalité des choses. C'est un peu exceptionnel, je dirais un peu exceptionnel. Ce n'est pas exceptionnel, mais...

M. Beaudet: En tout cas. Je ne le sais pas. Je ne sais pas jusqu'à quel point ce sera ça, mais je n'ai pas de problème, en autant que les deux parties s'entendent.

M. Rioux: C'est beau.

Le Président (M. Beaulne): Alors, adopté. L'article 429.13.

M. Rioux: «Si une partie dûment avisée ne se présente pas au temps fixé pour l'audition et qu'elle n'a pas fait connaître un motif valable justifiant son absence ou refuse de se faire entendre, la Commission des lésions professionnelles peut néanmoins procéder à l'instruction de l'affaire et rendre une décision.»

Alors, ça, c'est une disposition, on s'en rend compte, M. le Président, qui permet au tribunal de rendre sa décision même si une partie fait défaut de comparaître. C'est important. Dans de tels cas, le tribunal prend une décision pour mettre fin au litige, et ce que ça implique aussi, c'est qu'il y en a d'autres qui peuvent être affectés s'il n'y a pas de décision. M. Tremblay, ma compréhension est correcte?

M. Tremblay (Yves): Bien sûr!

M. Rioux: C'est qu'il faut qu'il y ait une décision, parce que, si on n'en rend pas, de décision, ça peut être préjudiciable à d'autres groupes.

M. Tremblay (Yves): Bien sûr, et ça paralyse aussi le tribunal.

M. Rioux: Puis ça paralyse le tribunal. Merci.

Le Président (M. Beaulne): L'article 429.13 est-il adopté?

M. Rioux: Adopté.

M. Beaudet: Non. Non, non. Vous êtes trop vite, M. le Président. Vous ne devriez pas prendre de café.

Le Président (M. Beaulne): Non, non. Allez-y, M. le député.

M. Beaudet: Ah bon! O.K.

Le Président (M. Beaulne): Habituellement, quand vous ne réagissez pas, c'est parce que vous êtes d'accord, sinon vous êtes vite sur la gâchette.

M. Beaudet: Non!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Rioux: Moi, si j'ai été vite en apparence, c'est parce que c'est le statu quo sur les anciennes dispositions.

M. Beaudet: Bien, c'est ça que je voulais savoir. Est-ce que dans l'ancienne loi c'est exactement la même chose qu'on a là?

M. Rioux: Même chose, oui.

M. Beaudet: Moi, je vais vous dire, M. le Président.

M. Rioux: C'est 427, M. le Président, de l'ancienne...

M. Beaudet: Pour avoir déjà vécu des événements similaires, pour avoir eu un défaut de me présenter...

M. Rioux: Semblables. Semblables.

M. Beaudet: Semblables. C'est mieux. Oui, vous avez raison.

M. Rioux: C'est plus français.

M. Beaudet: Pour avoir vécu des événements semblables, ayant fait défaut de me présenter devant la Commission, le tribunal s'est prononcé en déclarant en accident de travail un individu qui avait une maladie coronarienne. Étant donné ma vie passée, j'avais un certain degré de connaissance dans le milieu. Pas besoin de vous dire que la déclaration de l'accident de travail permanent à cause de cette situation, je ne l'ai pas trouvée drôle. Évidemment, à cause du système mutuel, bien, c'est partagé puis ce n'est pas si pire, sauf qu'il y en a sûrement d'autres comme ça qui passent, et, une fois qu'il y a un précédent d'établi, bien, il faut vivre avec.

Je me demande jusqu'à quel point l'absence d'une des parties à la Commission n'entache pas le jugement. Parce que le jugement m'apparaissait tellement simple et clair que je me suis dit: Même si on n'y va pas, ça ne change rien, et pourtant ça a changé quelque chose. Tout en respectant l'inquiétude soutenue et persistante du ministre à vouloir diminuer les délais, est-ce qu'on ne pourrait pas, suite à une situation où la personne ne se présenterait pas, sans motif – elle l'oublie ou je ne sais pas quoi – lui donner un avis de 15 jours puis c'est fini, au cas où ça aurait été un oubli? Elle est malade, elle ne peut pas vous répondre, elle a oublié, elle est partie en Europe puis c'est la dernière de ses considérations. Est-ce que c'est quelque chose qui serait envisageable?

M. Rioux: Oui, mais la personne est dûment avisée, là. Vous le voyez bien, à l'article, hein? Elle est dûment avisée. C'est son problème qui est en cause.

M. Beaudet: J'ai tout compris ça. C'est que, si la personne ne se présente pas, sans vous donner d'avis, vous pouvez présumer... Ou la personne peut être morte. Elle a pu tomber malade puis elle n'a pas transmis le dossier à l'autre parce qu'elle est sur le carreau, elle est à l'hôpital. Il n'y a aucune... Elle, elle est tombée malade la veille puis elle n'a eu le temps de transmettre à personne: Écoutez, là, occupez-vous donc de ma... Je dois aller à la CLP demain témoigner puis, moi, je suis sur le dos à l'hôpital, intubé, puis je suis branché. Puis, le lendemain, la CLP, elle va décider puis elle va dire: Il ne s'est pas présenté, on décide. Pouf! Je ne suis pas sûr, moi, là, que...

(16 heures)

Je ne parle pas de celui... Si, moi, je vous envoie un avis que je ne me présente pas, il n'y a pas de problème; c'est quand on ne se présente pas sans raison. Je n'ai rien envoyé. Il peut y avoir toutes sortes d'événements qui justifient l'absence d'une des parties. À ce moment-là, vous ne lui donnez aucune chance. Il peut être mort comme il peut être malade, et il ne peut pas vous revenir, lui. C'est réglé, là, et c'est sans appel, M. le ministre. Vous devez vous rappeler, c'est sans appel. Alors, quand le commissaire se sera prononcé sur la situation en l'absence d'une des parties qui n'a pas pu motiver son absence, le jugement est rendu, «that's it».

M. Rioux: Mais, lorsqu'on sait, par exemple, tous les moyens qu'utilise le tribunal pour faire connaître aux personnes qu'elles sont convoquées, l'heure, la date, l'endroit, que la personne elle-même qui est impliquée connaît évidemment le sérieux de cette histoire-là... C'est que je pense qu'il faut laisser le bon jugement, aussi, aux personnes qui gèrent le tribunal. Si la personne est morte, c'est clair qu'elle ne peut pas être là.

M. Beaudet: Il ne le sait pas, lui. C'est ça, le problème, M. le Président. C'est ce que je veux transmettre au ministre. Peut-être que la personne est en trajet pour aller justement témoigner le lendemain ou le matin, elle a un accident et elle s'en va à l'hôpital. Comment voulez-vous que la Commission soit mise au courant? Tous les accidentés ne passent pas aux nouvelles, M. le Président, c'est l'infime minorité. D'ailleurs, je trouve ça triste qu'on ne passe pas tous les accidents aux nouvelles, mais on doit avoir autre chose de plus intéressant à passer. Mais on n'a pas de moyen d'avoir un délai pour une juste cause, là?

M. Rioux: Oui. M. Tremblay, est-ce que, dans des cas, il peut y avoir demande de réouverture d'enquête?

M. Tremblay (Yves): Bien sûr.

M. Rioux: Bon.

Le Président (M. Beaulne): Bon, monsieur... Minute.

M. Rioux: Et c'est accepté, ça?

M. Tremblay (Yves): Sûrement, puisque, je veux dire, c'est...

Le Président (M. Beaulne): M. Tremblay, oui, allez-y, parce que...

M. Tremblay (Yves): En fait, c'est une règle essentielle, c'est le droit de se faire entendre. Alors, le principe est toujours là. Il s'agit là d'une exception, si vous voulez. Et, comme on l'a dit tout à l'heure, comme vous l'avez dit vous-même, il s'agit de ne pas préjudicier aux autres parties aussi au débat, de ne pas paralyser. Mais on ne laisse pas pour autant l'appelant, entre guillemets, pâtir d'une situation qui serait incontrôlable.

Alors, dans le cas, par exemple, de quelqu'un qui aurait vraiment un accident en se rendant, il est toujours possible pour lui de demander une réouverture d'enquête, et c'est son droit le plus strict. Ça va être accordé, puisque l'article le dit tout à fait expressément: «Si une partie dûment avisée ne se présente pas au temps fixé pour l'audition et qu'elle n'a pas fait connaître un motif valable justifiant son absence ou refuse de se faire entendre – là, à ce moment-là, uniquement dans ces cas-là – la Commission des lésions professionnelles peut néanmoins procéder à l'instruction de l'affaire et rendre une décision.»

M. Rioux: In extremis.

M. Beaudet: Oui, mais vous dites exactement...

M. Tremblay (Yves): Et les motifs valables, on peut les faire valoir aussi bien avant, dans la mesure où on les connaît avant, qu'a posteriori, auquel cas on demanderait une réouverture d'enquête.

M. Beaudet: Moi, je ne suis pas légaliste, mais ce n'est pas comme ça que je l'interprète, là. «Si une partie dûment avisée ne se présente pas au temps fixé – on parle bien du temps fixé – pour l'audition et qu'elle n'a pas fait connaître un motif valable – pas fait connaître, donc c'est antécédent, pas postérieur à la date fixée – justifiant son absence ou refuse de se faire entendre, la Commission des lésions professionnelles...» Bon. Alors, moi, je me dis: Ça doit antécéder la date fixée ou le temps fixé, et, si ça vient après, ça ne peut pas faire partie de cette situation-là, à moins que vous n'y mettiez un nouvel article.

Le Président (M. Beaulne): M. Tremblay.

M. Beaudet: Bien, j'ai besoin d'une interprétation légale là-dessus, là.

M. Rioux: M. le Président, c'est que...

M. Beaudet: Je ne pense pas que ça puisse...

M. Rioux: ...le député d'Argenteuil vient de substantiver un verbe.

Le Président (M. Beaulne): Ah bon!

M. Rioux: Formidable! Ça n'arrive pas fréquemment dans l'histoire de notre vie parlementaire.

Le Président (M. Beaulne): Ça m'a échappé.

M. Rioux: Le député d'Argenteuil vient de substantiver un verbe, ce qui est assez extraordinaire. J'en prends note. On y reviendra.

Alors, moi, je suis attentivement ce que dit mon collègue d'Argenteuil, parce que je veux savoir si véritablement une personne peut subir un préjudice, honnêtement, là, à cause de 429.13. M. Tremblay nous a dit tout à l'heure... Moi, je lui ai demandé: Est-ce qu'il peut y avoir demande de réouverture d'enquête? Il me dit: Oui, si le travailleur ne peut pas se présenter ou encore... Est-ce qu'il peut demander de plaider par écrit?

M. Tremblay (Yves): Moi, je pense que tous les moyens lui sont offerts, c'est-à-dire qu'il peut...

M. Beaudet: Ça m'arrive ce matin. Je suis en auto. Je m'en vais témoigner, puis je me fais frapper au coin de la rue où est situé le tribunal. Ils viennent me chercher puis ils m'emmènent à l'hôpital. Moi, je ne peux pas vous envoyer une lettre ni un télégramme, je suis dans les pommes. Oubliez-moi, là! Alors, le commissaire a le pouvoir, comme je n'ai pas motivé mon absence, je n'ai pas donné de raison valable, il peut dire: Bon, moi, je suis à même de juger des preuves qui sont ici. Il n'a pas voulu venir, «tough luck». Ça finit là. Moi, je suis à l'hôpital pour deux mois, trois mois, je ne sais pas pourquoi, là, puis, à un moment donné, je ressors. Aie! Qu'est-ce que c'est ça, cette affaire-là? Ah, ça a passé. Oui, oui, écoute, je n'ai pas pensé à ça pantoute, là.

M. Rioux: Je voudrais, M. le Président...

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre, avant de vous permettre de répondre, le député de Drummond, je pense qu'il a quelque chose d'intéressant à dire sur cette question. Allez-y.

M. Jutras: Bien, vous jugerez, M. le Président. Bien, moi, c'est un article, si vous me permettez l'expression, qui est en quelque sorte commun, cela pour permettre que les causes procèdent. Parce que, à un moment donné, on a vécu des abus dans notre système de justice où des gens ne se présentaient pas et les causes étaient remises. Après ça, les gens disent: Ah! Mais regardez donc les délais en matière de justice, ça n'en finit plus.

Alors, c'est de mettre de la pression, somme toute, parce que vous avez une obligation de vous présenter au tribunal, et, comme le disait le ministre tantôt aussi, les gens sont dûment avisés, et plus que moins, en plus de ça. Aussi, en fait, il faut voir en pratique comment ça se passe, là. Quand tu as un appel du rôle à 9 h 30 le matin, le commissaire, quand il constate le défaut de quelqu'un, il ne dit pas: Bien là, youpi! On procède, puis on règle ça en 15 minutes. Ce n'est pas de même que ça se passe. Il va suspendre cette cause-là. Il y a toujours d'autres causes. Il permet aux autres causes de procéder. Puis là il demande justement: Bien, appelez donc telle partie pour voir si elle va se présenter. Puis, bien des fois, même, c'est reporté en après-midi pour donner la chance de vérifier ce qui se passe. De sorte que, moi, cet article-là, je suis plutôt favorable à ça, parce que, en pratique, c'est plutôt comme ça que ça se passe.

Par ailleurs, aussi, M. le Président, là je n'ai pas la loi comme telle avec moi, mais il doit y avoir maintenant – je sais que, dans le cas de la justice administrative, on l'a – la procédure de révision qui est possible, puis il y a même la procédure de rétractation de jugement quand, justement, quelqu'un n'a pas pu se présenter devant le tribunal puis qu'il avait une bonne raison. Comme l'a invoqué le député d'Argenteuil, vous avez un accident sur le coin de la rue, à 100 pieds de là, mais personne ne réalise que c'est vous qui êtes dans l'accident. Vous êtes inconscient et on vous emmène à l'hôpital. Vous êtes dans le coma pendant 48 heures de temps. Alors, quand il y a des bonnes raisons comme ça – je pense que c'est un cas plausible, ça, M. le député d'Argenteuil, n'est-ce pas? – là il faudrait vérifier dans la loi, mais il y a soit matière à révision ou matière à rétractation. Je pense que c'est matière à révision.

Le Président (M. Beaulne): Est-ce que, M. Tremblay, vous lui permettez de répondre?

M. Rioux: Oui, oui, oui. Allez-y.

M. Tremblay (Yves): C'est ça. En fait, il y aurait des recours de deux ordres, là. Admettons que, après avoir fait toutes les vérifications, le commissaire s'aperçoit que la personne n'est pas là; il demande au greffe de téléphoner, de s'assurer... au bout de la ligne, ça ne répond pas; il y a quelques jours qui se passent; en tout cas, bref on décide de continuer et il y a une décision qui est rendue. Là, finalement, la personne, il s'avère qu'elle était malade, ou qu'elle était à l'hôpital, ou, en tout cas, une espèce de circonstance incontrôlable. Et voilà un motif valable qui est invoqué dans l'article.

Et, de deux, les recours qui seraient laissés à la disposition de l'individu pour faire valoir ses droits sont, d'une part – et puis ça, je pense qu'il n'y a pas un commissaire qui souhaite avoir ça sur le dos – une requête en révision judiciaire. Alors, là, règle générale, quand vous êtes décideur, vous ne voulez pas avoir la Cour supérieure à vos trousses. Alors, il y a cette espèce de spectre qui est là et que vous évitez. Deuxièmement, il y a aussi une demande de révision pour cause qui est aussi possible, c'est-à-dire de demander à ce que la première décision rendue soit corrigée, compte tenu du fait que la personne n'a pas pu se faire entendre, et c'est un droit fondamental.

M. Beaudet: Oui, ça, c'est peut-être un droit fondamental, mais ce que j'essaie de vous transmettre, d'abord, c'est que nous créons une nouvelle structure de justice administrative. Ce n'est pas dans son fonctionnement, ce n'est pas marqué, nulle part. Est-ce que c'est ça qu'elle va appliquer? Je ne le sais pas. Je voudrais juste faire remarquer au député de Drummond que, souvent, les causes sont remises parce que l'individu ne s'est pas présenté, mais je voudrais bien lui faire savoir que les gens les plus habiles à remettre les causes, ce sont justement les avocats qui sont souvent là pour les remettre. Alors, ce n'est pas toujours l'individu qui ne se présente pas, mais l'avocat qui ne veut pas se présenter avec l'individu.

(16 h 10)

Nonobstant cette mise au point, je veux juste m'assurer que, advenant un événement majeur, une raison majeure, l'individu qui ne s'est pas présenté à la CLP peut avoir une rétractation de jugement, comme on peut le faire en cour, là. Vous allez aux petites créances. Vous ne vous êtes pas présenté. Vous êtes tombé malade. Il y a eu un jugement de porté contre vous parce que vous étiez absent. D'ailleurs, pour vous donner une idée, c'est souvent contre celui qui est absent, parce que vous n'êtes pas capable de faire valoir votre point. À ce moment-là, il y a des problèmes qui peuvent être vus s'il y a une rétractation de jugement possible. Il faut que ça soit possible dans le contexte. Puis ça, je ne le sais pas, là, parce que je ne suis pas avocat, moi, je ne peux pas vous le dire, mais je voudrais bien que ça soit possible, parce qu'on me dit que c'est sans appel, la CLP, là. Mais est-ce qu'il y a toujours une rétractation de jugement possible?

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre.

M. Rioux: M. le Président, ce qu'on reproduit à 429.13, au fond, c'est ce qu'on a dans la loi actuelle à 427. Moi, ce que m'ont dit les gens de la Commission, c'est que ça n'a jamais causé de problème dans le passé, ça. Ça n'a jamais causé de problème. De plus, à l'article 429.53 – on va y arriver tout à l'heure, là – il y a bien une disposition qui dit que, lorsqu'une partie n'a pas pu, pour des raisons jugées suffisantes, se faire entendre, la Commission des lésions professionnelles peut, sur demande, réviser ou révoquer une décision. Est-ce que ça répond?

M. Beaudet: On parle pour rien. C'était le fun de parler.

M. Rioux: On parle pour ne rien dire.

M. Beaudet: On fait de la parlotte.

Le Président (M. Beaulne): Bon. Alors, est-ce que ça règle le problème pas mal?

M. Beaudet: C'est vrai, là.

M. Rioux: Ça règle le problème.

Le Président (M. Beaulne): Bon. Alors, 429.13 est-il adopté?

M. Rioux: Adopté.

M. Beaudet: Adopté.

Le Président (M. Beaulne): Article 429.14.

M. Beaudet: J'avais juste une petite question, par exemple, par rapport à 429. Ce n'est pas une affaire d'adopter ou pas, là. Quand on va juger sur document, sans l'intervention des individus pour débattre leur cause, est-ce que les paritaires vont être présents? Les paritaires vont être présents et vont avoir accès aux documents?

M. Rioux: Oui.

M. Beaudet: Les deux membres, oui...

M. Rioux: Bien oui.

M. Beaudet: ...vont être présents.

Le Président (M. Beaulne): Article 429.14.

M. Jutras: M. le Président...

Le Président (M. Beaulne): Oui, M. le député de Drummond.

M. Jutras: ...j'ai retrouvé l'article, justement, de la révision pour cause. C'est à l'article 406 dans l'ancienne loi.

M. Beaudet: L'article 406.

Une voix: De la loi actuelle.

M. Jutras: L'article 406, à savoir que la Commission...

M. Beaudet: De la loi actuelle.

M. Jutras: Oui, c'est ça. J'ai dit l'ancienne loi, là, je vais trop vite.

M. Beaudet: On ne le sait plus.

M. Jutras: On dit que la Commission peut, pour cause...

M. Beaudet: Oui, c'est ça. C'est le même qu'à 429.53.

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. le député. Alors, nous sommes bien entourés, dans cette commission. On a un médecin puis on a un avocat, alors on a tout ce qu'il nous faut. Article 429.14.

M. Rioux: «La Commission peut intervenir devant la Commission des lésions professionnelles à tout moment jusqu'à la fin de l'enquête et de l'audition.

«Lorsqu'elle désire intervenir, elle transmet un avis à cet effet à chacune des parties et à la Commission des lésions professionnelles; elle est alors considérée partie à la contestation.

«Il en est de même du travailleur concerné par un recours relatif à l'application de l'article 329.»

M. le Président, il s'agit d'une disposition importante qui existe dans la loi actuelle. Ça va rappeler des souvenirs à bien du monde, ça, une discussion sur cet article-là. Vous souvenez de l'époque où la CSST était à peu près un bar ouvert, où c'était la belle époque glorieuse où elle accumulait des déficits faramineux d'une année à l'autre et où c'était devenu une organisation difficile à montrer en public. Il y a eu des dispositions dans la loi qui ont fait en sorte que la Commission de la santé et de la sécurité du travail, la CSST, qui est fiduciaire des fonds, puisse, à un moment donné, intervenir et être partie prenante à la cause. La CSST s'assure, par cette disposition, que les fonds sont versés selon les règlements et la Loi sur la santé et la sécurité du travail. Le travailleur peut contester comme les employeurs peuvent le faire aussi. Un employeur peut toujours contester sa cotisation si ça ne fait pas son affaire. Le travailleur peut plaider un litige sur ses indemnités de remplacement; il lui est toujours loisible de faire ça.

Ce qu'il faut bien comprendre, c'est que cette disposition introduit un mécanisme qui permet à la CSST d'être partie à la cause parce qu'elle est responsable de l'administration des fonds. C'est un fiduciaire, la CSST. La CSST ne se met pas le nez dans la décision, comprenons-nous bien; elle est responsable des fonds et elle doit en rendre compte. D'ailleurs, dans la loi actuelle, l'article 416 dit bien que la Commission peut intervenir devant la Commission d'appel à tout moment jusqu'à la fin de l'enquête et de l'audition. Lorsqu'elle désire intervenir, elle transmet un avis, comme on le fait avec les dispositions de 429.14.

M. Beaudet: M. le Président, cet article-là me sied très mal parce que je pense qu'on entache l'apparence de neutralité de la justice, et je m'exprime. On a deux personnes qui sont membres et qui ont été nommées par le conseil d'administration. On sait que, à la Commission, il y a déjà des membres du conseil d'administration qui y siègent, il va sans dire. La Commission va pouvoir intervenir directement à la Commission des lésions professionnelles. Je ne suis pas sûr que, par cette position-là, on n'entache pas l'apparence de neutralité de la justice, que l'on ne prête pas le flanc à une critique quant aux motifs qui pourraient être invoqués devant la décision du commissaire et/ou des recommandations des membres qui auraient pu être influencés par la présence de la CSST.

C'est un petit peu, M. le Président, comme si le gouvernement allait s'asseoir à côté du juge puis faisait des interventions alors que le juge est après se prononcer sur quelque chose à côté. La CSST, la Commission est l'élément payant, mais c'est toujours l'élément payant, le gouvernement, aussi, en justice. S'il faut qu'on mette des membres du gouvernement pour surveiller le jugement du juge, pour s'assurer qu'il procède selon les directives, on ne finira plus et je ne suis pas sûr qu'on va respecter l'apparence de neutralité au niveau du tribunal.

Moi, cet article-là, pour un, je trouve ça un peu poussé. Là, on a tout pris les moyens: on a nommé des commissaires; on s'est assuré qu'ils ont été nommés avec tous les critères appropriés; tous les qualificatifs leur ont été prêtés, on a même exigé qu'ils soient avocats et notaires – je le répète à nouveau, M. le Président, on a exigé qu'ils soient avocats et notaires – à l'exclusion des autres; on a fait une sélection judicieuse des membres pour s'assurer de leur compétence; on a même parlé de formation des commissaires et formation des membres à leur venue au niveau de la CLP. Les membres vont être paritaires. Ils vont pouvoir être influencés par la CSST qui va venir interférer au niveau d'un tribunal. Ça, pour moi, M. le Président, c'est une ingérence directe dans un processus judiciaire qui teinte la neutralité des intervenants.

Je comprends l'intervention du ministre qui me dit: C'est la CSST qui paie au bout de la ligne. C'est vrai. Vous avez bien raison. C'est le gouvernement qui paie aussi en justice, vous avez bien raison, mais est-ce que, pour ça, on met le premier ministre au tribunal à côté du juge pour le surveiller, pour savoir si... On ne finirait plus. Il a nommé des gens en qui il a confiance ou, en tout cas, à qui il doit faire confiance. Il a nommé des commissaires avec tous les critères appropriés, des membres avec tous les critères appropriés, choisis sur le volet, bien formés, avec une formation continue pour les commissaires, formation appropriée pour les membres. Qu'est-ce qu'il veut de plus? Ce qu'il veut de plus: il veut les surveiller.

Le Président (M. Beaulne): Oui, M. le ministre, expliquez-nous donc un peu l'objectif de cet article.

(16 h 20)

M. Rioux: Bien, je l'ai expliqué tout à l'heure, M. le Président.

Le Président (M. Beaulne): Oui, mais à la lumière des interventions du député.

M. Beaudet: Moi, j'ai juste relevé ce que le ministre nous a dit. Je comprends que c'est la CSST qui paie. Ça, ce n'est pas parce qu'une compagnie d'assurances paie, M. le Président, qu'elle va siéger aux délibérations du juge.

M. Rioux: Non, non. Ce n'est pas ça.

M. Beaudet: Non, mais elle va être présente.

M. Rioux: Pourrais-tu, Pierre...

Le Président (M. Beaulne): M. Gabrièle, oui, allez-y donc.

M. Gabrièle (Pierre): M. le Président, regardez, d'abord, on ne fait pas d'interférence auprès du tribunal de la CLP. Peut-être qu'il vaudrait mieux qu'on revienne à l'origine. Normalement, quand il y a une contestation – actuellement, je vais partir du BRP ou de la CALP et, après, à la CLP – c'est une contestation d'une décision de la CSST. Alors, ce qu'on vient contester, c'est une décision de la CSST. Par exemple, pour une décision d'admissibilité au régime, il faut que, nous, la CSST, on parle par voie de décision. On admet quelqu'un au régime ou on ne l'admet pas. Si, à un moment donné, par exemple l'employeur, lui, conteste, mettons, le certificat médical du médecin traitant, pour qu'il puisse le contester, il faut qu'à l'origine, nous, on l'ait admis au régime, qu'on ait pris une décision et qu'on ait pris la décision de continuer à payer, par exemple, la personne, le travailleur ou la travailleuse accidentée. Donc, quand on se présente à la CLP, on se présente comme partie prenante à une décision. Donc, on n'interfère pas, c'est nos avocats qui se présentent: il y a le représentant, l'avocat de l'employeur, l'avocat du travailleur ou de la travailleuse accidentée et celui de la CSST.

De plus, il faut que je rappelle à la commission, M. le Président, que notre intervention a permis aussi de réduire les délais à la CALP. Quand on a créé l'opération des blitz régionaux à la CALP, ce dont on parlait hier, c'est parce que les parties, autant les représentants de l'employeur que le représentant du travailleur et de la CSST, nos avocats, se rencontraient préalablement quand on formait les rôles régionaux, et là on analysait. Soit qu'il y avait de la conciliation, soit qu'on faisait même une transaction...

M. Rioux: Ou des règlements hors cour.

M. Gabrièle (Pierre): ...règlement hors cour, ou encore, quand il n'y avait pas possibilité de conciliation ou de transaction, règlement hors cour, on plaidait.

Aussi, il y a un autre point qui est important et qu'il faut vous faire connaître, c'est que normalement, quand des parties se rencontrent suite à une décision, parce qu'il y a eu contestation et que nous n'intervenons pas, si le cas est un cas de plus de trois ans, les parties peuvent s'entendre sur n'importe quoi, mais, après, si nous ne sommes pas là, les coûts, on ne peut plus les imputer à l'employeur avec lequel le travailleur s'est entendu, on les impute à l'ensemble des employeurs du Québec. Quand on fait ça, à ce moment-là, on touche principalement la petite entreprise qui paie généralement pour la grande entreprise. C'est pour ça que nous sommes là et que nous intervenons. Mais on n'interfère pas, on n'accompagne pas le commissaire ni les membres; on intervient à l'audition pour faire les représentations nécessaires comme partie prenante au dossier. Donc, il n'y a pas d'interférence. C'est comme si je venais à la cour et que je faisais, à ce moment-là, des représentations par mon procureur.

Maintenant, il faut se souvenir, comme le ministre l'a précisé, qu'en 1991, quand on a arrêté d'intervenir autant devant le BRP que devant la CALP, c'est là où les coûts ont dérapé, même si la loi actuelle, la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, nous permet d'intervenir. Ce n'est pas nouveau, ce que nous faisons. Ensuite, je tiens, M. le Président, à vous signaler qu'on n'intervient pas dans tous les dossiers que nous avons, les 9 000 qui se présentent à la CALP. De toute façon, je n'ai pas assez d'avocats.

M. Beaudet: J'espère.

M. Gabrièle (Pierre): Bon. Autrement, je judiciariserais. J'ai actuellement 43 avocats pour l'ensemble des 21 régions. Donc, on intervient à peu près, dans le volume, dans un pourcentage de 15 %. Voilà ce que je tenais à vous signaler, M. le Président.

Le Président (M. Beaulne): Merci, c'est une bonne explication. M. le député d'Argenteuil.

M. Beaudet: Deux secondes, M. le Président, je veux juste...

Le Président (M. Beaulne): Oui, oui, allez-y. Prenez le temps qu'il vous faut.

M. Beaudet: Vous dites 15 % des cas?

M. Rioux: Oui, 15 %.

M. Beaudet: M. le Président, moi, je pense bien que, quand l'employeur accepte la décision du BEM, disons, et que l'employé ne l'accepte pas, parce que le BEM a opté en faveur de l'employeur, alors l'employé va aller en appel ou à la CLP. Assumons qu'il y a eu toutes les étapes de concertation. À ce moment-là, la CSST, qui est un agent payeur – dans le fond, c'est un agent payeur, la CSST, là, c'est comme une compagnie d'assurances, c'en est une, dans le fond, une mutuelle – elle joue le rôle de la compagnie d'assurances qui irait plaider à la place de l'assuré qui poursuit quelqu'un parce qu'il a eu un accident. À ce moment-là, il faudrait faire disparaître une étape qui est celle de l'employeur. C'est la CSST tout le temps, il n'y a pas d'employeur puis il y a un employé. Alors, il y a l'assureur puis la victime. Le restant, ça disparaît.

Or, on a voulu introduire à la CSST justement le rôle de l'employeur, qui est la partie payante, avec l'employé, qui est la partie victime – je n'aime pas le mot «victime», là, mais, en tout cas, blessée, une victime, dans le fond; je ne sais pas pourquoi je n'aime pas ça. Les deux doivent être capables de débattre. Moi, je me dis: Si on ajoute un troisième élément, le troisième, là, qui va être la CSST qui vient dans le dossier, il y a un débalancement de forces, là. C'est un débalancement de forces. La CSST va venir essayer de défendre la partie qui est présente, alors que la Commission des lésions professionnelles, c'est pour permettre à l'employé de faire valoir ses droits devant un tribunal pour lequel la position du commissaire doit être neutre.

Moi, j'ai peur, puis je dis bien, là, j'ai une crainte devant ça, que le tribunal qui est, dans le fond, tout nommé par la Commission, là – on ne fera pas de midi à 14 heures, là – soit influencé par les arguments, par la défense, par les démarches entreprises par la CSST. Le président par intérim semble me dire que ça n'a pas l'air à le... Si, moi, j'étais le travailleur accidenté puis que je voyais venir les avocats de la CSST en avant, là, oh! que je ne me sentirais pas gros, là, parce que, moi, je n'ai pas d'avocat à côté de moi, moi, je suis tout seul. Je suis un petit travailleur pas syndiqué, là, puis le gars qui devait m'accompagner à matin, il m'a dit: Moi, je ne peux pas y aller. Je ne peux pas perdre une journée de travail pour t'accompagner. La CSST, elle ne me rembourse pas mes frais de déplacement puis ma journée. Je ne suis pas capable d'y aller, là. Le petit gars, lui, il se trouve tout seul devant vous autres, là. Non, non, le président, il rit, mais, dans le fond, c'est comme ça, la vraie vie, là. C'est ça. Je comprends que je caricaturise, là, mais c'est vrai. Il va admettre que c'est vrai, ce que je dis là.

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre.

M. Beaudet: Je ne sais pas. J'ai des inquiétudes, bon, puis je ne veux pas transmettre l'impression de mauvaise foi, là. Je fais juste vous transmettre des inquiétudes quant à la neutralité du tribunal qui va avoir à se prononcer alors que la CSST est intervenue directement.

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre.

M. Rioux: Oui, je comprends les inquiétudes du député. Il n'y a pas de problème de ce côté-là. Cependant, la CSST, vous dites que c'est une compagnie d'assurances, c'est un agent payeur. Bon. C'est vrai. C'est une mutuelle de risques, au fond.

M. Beaudet: C'est ça.

(16 h 30)

M. Rioux: Cependant, ce qu'il faut bien comprendre, c'est que la CSST, c'est un contrat social aussi, en même temps, entre les employeurs et les travailleurs. C'est une organisation dont l'État québécois s'est doté pour faire les arbitrages nécessaires lorsque les travailleurs se blessent gravement ou moyennement. Ce contrat social là, il faut autant que possible qu'il soit équilibré. On parle de 15 % de cas où la CSST intervient. Mais la CSST n'intervient pas pour dire aux commissaires sur le banc: Voici le genre de décision que tu devrais prendre. La CSST intervient, bien sûr, comme agent payeur, comme fiduciaire. Elle intervient parce qu'elle a des questions à poser; avant de payer, l'organisme veut comprendre. Moi, ce que j'ai demandé, avant qu'on se présente en commission parlementaire avec cet article-là, c'est: Coudon, est-ce que la CSST fait de l'ostracisme sur la Commission? Pas du tout, j'ai été rassuré là-dessus. Le député prétend, lui, que c'est une ingérence de l'administratif dans le judiciaire.

M. Beaudet: Ce n'est pas ça.

M. Rioux: C'est ça que vous venez de dire.

M. Beaudet: Non, non, ce n'est pas ça que je voulais dire.

M. Rioux: Bien, c'est ça que vous venez de dire. Si ce n'est pas ça que vous voulez dire, c'est ça que j'ai compris.

Le Président (M. Beaulne): Bien, allez-y, M. le député, précisez votre pensée.

M. Beaudet: Le ministre, M. le Président, il sait très bien que ce n'est pas ça que j'ai voulu dire – d'ailleurs, son petit sourire en dit long. Ce que j'ai voulu dire, c'est qu'il y a une possibilité d'influencer le commissaire et ses membres, d'une part, puis aussi d'influencer le travailleur accidenté. C'est tout ce que j'ai voulu transmettre. Puis je suis bien conscient de l'importance pour la CSST, qui a à protéger les biens qui lui sont confiés – bon, c'est elle qui administre l'argent qui lui est donné pour s'assurer qu'elle a suffisamment d'argent pour indemniser le travailleur accidenté, puis sans étouffer le patron à faire des contributions à tour de bras... Je suis conscient de son rôle. Je veux juste laisser savoir au ministre que j'ai une certaine inquiétude devant cette situation-là, parce que j'ai l'impression que le rôle...

Vous le savez, en Chambre, M. le Président, quand on veut poser une question puis on sait que la réponse va vraiment porter, on la pose au premier ministre. Pourquoi? Parce que son poids a plus d'importance, c'est le ministre des ministres. Alors, en cour, devant la CLP, quand quelqu'un va se présenter pour la CSST, c'est évident qu'il a plus de poids que le travailleur qui arrive en bas. Je comprends que le commissaire est supposé être neutre; je comprends ça. Je fais juste soulever une possibilité. Si le ministre m'assure que, non, ce n'est pas ça, je ne suis pas pour me battre jusqu'ad vitam aeternam; de toute façon, je sais que je vais perdre. J'ai juste essayé de lui faire partager mon inquiétude. S'il ne la partage pas, bien, j'ai fini le débat.

M. Rioux: M. le Président, les échanges qu'on a, le député et moi, c'est vrai que ça s'est toujours déroulé sous le sceau de la bonne courtoisie, puis c'est correct comme ça. Mais ce que j'essaie de comprendre – parce qu'il faut quand même être respectueux aussi des propos que tiennent les gens en face de moi, puis je pense qu'il a la même attitude – j'essaie de voir si la crainte de l'opposition est fondée. Parce que, généralement, le tribunal, il apprécie ce que la CSST décide, il veut comprendre ce que la CSST a à dire. Il faut que la CSST s'explique aussi sur sa décision et donne son interprétation, elle aussi, de la loi. Elle a le droit de faire ça, la Commission. Mais j'imagine que tout est dans la manière. Puis, étant donné que le commissaire, c'est un juriste – en plus, il siège avec deux autres personnes – avez-vous l'impression que ces gens-là vont se laisser influencer, impressionner par la CSST? Non.

M. Beaudet: C'est là mon point, M. le Président. C'est exactement ça. C'est que le travailleur accidenté qui va aller plaider sa cause devant la CLP, ce n'est pas un avocat. On a bien vu tantôt l'effet que le député de Drummond nous a transmis comme avocat: il a su nous faire porter l'odieux des cancellations et des remises des jugements sur la personne qui ne se présente pas. Il n'a jamais parlé des avocats qui demandent des remises à tour de bras. Parce que c'est un avocat, il sait comment présenter son affaire. Il fait ça à la journée, il sait comment faire ça. Alors, de la même façon, l'avocat de la CSST, quand il va aller plaider devant le commissaire, il va plaider en avocat. Il connaît ça, c'est ça, sa job. C'est un plaideur.

Le travailleur accidenté, là, sa job, c'est de défendre sa peau parce qu'il en a perdu un morceau. Alors, ce n'est pas du tout les mêmes fonctions, puis on demande de maintenir un équilibre. C'est tout ce que j'ai soulevé, et, moi, si j'étais commissaire, dans mon humanité bien simple, je suis sûr que je serais plus influencé par la capacité, les bons termes et le beau jeu d'un plaideur expérimenté que du travailleur accidenté. Puis force nous est d'admettre que récemment on a des événements qui nous le démontrent, hein? Les gens qui écoutent M. Charest comprennent très bien ce que c'est qu'un bon «debater»: ça donne des résultats, hein? C'est tout. Je n'ai pas d'autre argument.

M. Rioux: Alors, M. le Président, deux mots pour terminer, peut-être pour rappeler aussi aux membres de la commission, qui sont des législateurs, que, lorsque la Commission intervient, elle peut intervenir dans le sens de protéger le travailleur. Il lui arrive d'intervenir...

M. Beaudet: Dans ce temps-là, je ne m'en plains pas.

M. Rioux: ...aussi pour protéger l'employeur. C'est vrai, c'est très vrai, tout ça. Mais la Commission n'intervient pas abusivement. La preuve, c'est que le pourcentage est mince.

M. Beaudet: 15 %.

M. Rioux: Ça va?

Le Président (M. Beaulne): Oui, M. le ministre, la réponse est bonne. Avant de passer à l'adoption de l'article, je dois dire que, comme député, j'avais un peu les mêmes interrogations que le député d'Argenteuil et, en écoutant les échanges, je pense que ça vient du fait que ni lui ni moi ne sommes des avocats impliqués dans des causes comme celles-là. Alors, c'est vrai, et puis je dois dire que, de prime abord, en lisant cet article-là, l'impression que ça dégage chez des non-avocats, c'est qu'il y a une ingérence ici qui est débalancée, mais je pense que M. Gabrièle a très bien répondu à la question en nous expliquant la procédure.

Dans les circonstances, est-ce qu'on peut considérer que l'article 429.14 est adopté?

M. Rioux: Adopté.

M. Beaudet: Juste un petit commentaire que j'aimerais faire au ministre, s'il peut répondre. La Commission, elle est devenue paritaire puis elle ne l'est plus, là, mais, en tout cas, elle n'est pas paritaire dans son jugement mais paritaire dans son fonctionnement. Tout ça, est-ce que c'est vraiment nécessaire? Oui? Vous pensez que c'est encore nécessaire. Parfait.

Le Président (M. Beaulne): Alors, l'article 429.14 est adopté...

M. Rioux: Adopté.

M. Beaudet: Sur division.

Le Président (M. Beaulne): ...à la majorité. L'article 429.15.

M. Rioux: Alors, à l'article 429.15: «Les parties peuvent se faire représenter par une personne de leur choix.»

Le Président (M. Beaulne): C'est pas mal évident, hein? Ça vous va, ça?

M. Rioux: Alors, les parties qui veulent se faire représenter par la personne de leur choix, peu importe que cette personne soit membre ou pas du Barreau, ce n'est pas ça qui est important.

M. Beaudet: N'importe qui.

M. Rioux: N'importe qui.

Le Président (M. Beaulne): Adopté. L'article 429.16.

M. Rioux: «La Commission des lésions professionnelles peut accepter une procédure même si elle est entachée d'un vice de forme ou d'une irrégularité.» M. Tremblay.

Le Président (M. Beaulne): M. Tremblay, expliquez-nous ça.

M. Tremblay (Yves): Bien, c'est une mesure de souplesse. Je pense que c'est une des caractéristiques des tribunaux administratifs, on ne veut pas s'enfarger dans les fleurs du tapis. Alors, on est moins formalistes que devant les tribunaux judiciaires.

M. Beaudet: J'aime bien ça, cette affaire-là.

Le Président (M. Beaulne): Bon, alors, c'est adopté. L'article 429.17.

M. Rioux: Si je comprends bien, M. le député, ce n'est pas un vice de forme qui vous empêche de dormir.

M. Beaudet: Non, pas là-dessus. D'ailleurs, ça prend tout un vice pour m'empêcher de dormir.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Rioux: J'ai bien dit «de forme».

M. Beaudet: Oui, oui, oui, oui, oui. J'avais compris.

Le Président (M. Beaulne): Alors, M. le ministre, 429.17.

M. Rioux: La Commission des lésions professionnelles peut prolonger un délai ou relever une personne des conséquences de son défaut de le respecter, si cette personne démontre qu'elle n'a pu respecter les délais prescrits pour un motif raisonnable et si, à son avis, aucune autre partie n'en subit de préjudice grave. C'est de la souplesse.

(16 h 40)

M. Beaudet: Je n'ai pas tout à fait le même texte qu'il vient de lire. Ça veut dire la même chose, mais je n'ai pas tout à fait le même texte. À la troisième ligne, «s'il est démontré que celle-ci n'a pu respecter», «c'est-u» ça que vous avez, vous autres aussi? Ce n'est pas ça que je viens de vous entendre lire.

Le Président (M. Beaulne): Bon, on va relire l'article.

M. Beaudet: Que cette personne a démontré...

Le Président (M. Beaulne): L'article 429.17, hein? Vous êtes bien à celui-là?

M. Beaudet: Oui, oui, oui, oui, oui. Je suivais, puis, à la troisième ligne...

Le Président (M. Beaulne): Bon, on va le relire. «La Commission des lésions professionnelles peut prolonger un délai ou relever une personne des conséquences de son défaut de le respecter, s'il est démontré que celle-ci n'a pu respecter le délai prescrit pour un motif raisonnable et si, à son avis, aucune autre partie n'en subit de préjudice grave.»

M. Rioux: Le texte est bon.

M. Beaudet: Bien, moi, c'est le même texte que ça que j'ai, mais ce n'est pas ça que j'ai entendu tantôt.

M. Rioux: Y «a-tu» une erreur?

M. Beaudet: Bien, je ne le sais pas, là.

Le Président (M. Beaulne): Bien, le texte que j'ai lu, c'est celui que vous avez.

M. Beaudet: C'est ça.

Le Président (M. Beaulne): Bon, bien, on marche avec celui-là, nous autres.

M. Beaudet: Mais ce n'est pas ça que j'ai entendu. Mes oreilles me trompent rarement.

M. Rioux: Il y a une petite erreur dans le texte.

M. Beaudet: Je veux juste montrer au ministre que je l'écoute quand il parle.

M. Rioux: C'est vraiment remarquable.

Le Président (M. Beaulne): Relisez donc ce que vous avez, vous, M. le ministre.

M. Beaudet: Il a lu dans son cahier.

M. Rioux: «Si cette personne démontre». «Si cette personne démontre», on va le changer.

M. Beaudet: C'est ça. Oui, mais ça voulait dire la même chose.

M. Rioux: Ça veut dire la même chose.

M. Beaudet: Mais ce n'est pas ça qui est écrit dans le texte.

Le Président (M. Beaulne): Ce n'est pas la même formulation. Non, non, ce n'est pas ça qu'on a, nous autres.

M. Beaudet: C'est le même sens.

Le Président (M. Beaulne): Nous autres, on marche d'après la loi, là, pas d'après votre cahier.

M. Rioux: On va marcher sur le texte ici. O.K.?

M. Beaudet: Ça ne me dérange pas, là, moi, mais ce n'est pas ça que vous avez lu. Merci. Pas de problème.

Le Président (M. Beaulne): Bon. Ça va?

M. Rioux: Très attentif. C'est remarquable.

Le Président (M. Beaulne): Bon, alors, adopté. L'article 429.18.

M. Beaudet: Vous suscitez mon éveil, M. le ministre. Ha, ha, ha!

M. Rioux: «En l'absence de dispositions applicables à un cas particulier, la Commission des lésions professionnelles peut y suppléer par toute procédure compatible avec la présente loi et ses règles de procédure.» C'est un pouvoir du tribunal qui lui permet d'agir même en l'absence de dispositions expresses.

M. Tremblay (Yves): Exact. On ne peut pas tout prévoir dans un texte de loi, alors... Encore là, c'est une mesure de souplesse qui permet au tribunal de réagir à des cas particuliers.

M. Rioux: À réagir à peu près à toutes les situations.

M. Tremblay (Yves): Exact.

M. Rioux: O.K.

M. Beaudet: M. le Président, moi, je vais vous dire, là, j'ai un peu un problème là-dedans, c'est quasiment un trou noir pour moi. On apprend beaucoup d'expressions, récemment.

Le Président (M. Beaulne): Oui, on a tout un cours avec cette loi-là.

M. Beaudet: Il faut suivre les activités politiques pour s'instruire, n'est-ce pas? Mais, dans le cas présent...

M. Rioux: Qu'est-ce qui vous instruit tant que ça? C'est la campagne fédérale, j'imagine.

Le Président (M. Beaulne): Non, on ne parle pas de campagne fédérale avec ça.

M. Beaudet: J'estime que c'est de ça qu'on parle. Ha, ha, ha! Mais j'aimerais que vous m'expliquiez. Quand vous parlez de «dispositions applicables à un cas particulier», donnez-moi un exemple qui va me faire saisir, là, qui va me faire comprendre, parce que...

M. Rioux: M. Tremblay va vous expliquer ça.

Le Président (M. Beaulne): Oui, expliquez-nous donc ça, M. Tremblay.

M. Tremblay (Yves): Ce sont des cas d'abord qui arrivent plutôt rarement, alors je vais me référer ici à...

M. Beaudet: Parce qu'il y a deux éléments que je ne comprends pas: «dispositions applicables» puis «cas particulier».

M. Tremblay (Yves): Alors, le cas particulier, c'est vraiment marqué qu'on fait du cas par cas...

M. Beaudet: Pas de fleurs dans le tapis.

M. Tremblay (Yves): ...oui, et puis que chaque cas est un cas particulier, que chaque cas peut exiger des mesures...

M. Beaudet: Particulières.

M. Tremblay (Yves): ...particulières, effectivement.

M. Beaudet: C'est bon.

Le Président (M. Beaulne): Ça va?

M. Beaudet: Oui, mais je veux savoir, «dispositions applicables», ça veut dire quoi?

M. Tremblay (Yves): Attendez un instant. Bon, je vais vous donner un exemple. La Commission d'appel, par exemple... C'est parce qu'il y a une disposition similaire. Je me fie un peu à ce que la CALP a décidé en se servant de ces dispositions-là au cours des dernières années, puisque l'article 424 est au même effet, 424 de la loi actuelle, la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles. Alors, la Commission d'appel a le pouvoir d'enjoindre à un travailleur de produire une copie de son dossier médical. Celui qui sollicite une indemnisation pour cause de santé renonce implicitement à la confidentialité de son dossier médical. Alors, par exemple, on s'est servi de cet article-là pour demander à un travailleur de produire une copie de son dossier médical parce que, bien entendu, on est devant une instance qui est la CALP. Il y a un débat, il y a un employeur qui a aussi des droits et qui a droit de connaître certaines choses. Alors, si la...

M. Beaudet: Ça va de soi, si vous allez devant un tribunal avec une question médicale, que votre dossier médical va être débattu. Ça va de soi.

M. Tremblay (Yves): Exact. Oui, mais on s'est servis de ça parce que vous n'avez pas de recours particulier prévu dans le texte de loi pour obliger ça. Alors, on s'est servis d'un article comme celui-là pour venir combler ce trou-là.

M. Rioux: C'est les cas d'absence de dispositions.

M. Tremblay (Yves): C'est ça.

M. Rioux: M. le Président, ce qu'il faut prévoir, c'est les absences de dispositions, et c'est ce que ça permet de régler.

M. Tremblay (Yves): Un autre cas, ici, très intéressant.

M. Rioux: Oui, allez.

Le Président (M. Beaulne): M. Tremblay.

M. Tremblay (Yves): Dans un cas, on s'est servi de ça pour présenter une requête pour demander un retrait de désistement d'un appel. Quelqu'un avait décidé de se désister de son appel. Alors, on a des délais pour aller en appel, ça doit se faire à l'intérieur d'un délai de 30 jours. Quelqu'un, à un moment donné, a décidé de se désister, donc son droit disparaissait. Il s'est servi de cette procédure-là pour reprendre l'instance et se défaire de ce désistement-là. Alors, c'est vraiment utilisé, là... Des retraits de désistement d'appel, il y en a vraiment d'un peu toutes les sortes. Mais ce sont toujours des cas très particuliers et des cas relativement rares, puisque, règle générale, la très grande majorité des recours les plus fréquemment utilisés est bien encadrée.

M. Beaudet: M. le Président, quand on parle, exemple, d'un dossier médical... Je vais vous donner un exemple farfelu. Moi, je viens de gagner 9 000 000 $ à Loto-Québec et je me suis fait écraser le gros orteil. Il est évident que, si je m'en vais à la CLP et que mon dossier...

M. Rioux: C'est quoi, le lien de cause à effet?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Beaudet: Non, il n'y a pas de lien de cause à effet. Mais je m'en vais à la CLP, puis mon dossier n'a plus la confidentialité. Vous allez savoir que j'ai une leucémie, puis ça va être sorti que j'ai une leucémie. Mes héritiers, ils «vont-u» se taper dans les mains? Ils savent que je m'en vais mourir bientôt. Je ne suis pas sûr que c'est relatif à mon écrasement d'orteil.

M. Tremblay (Yves): Règle générale, le dossier qui est divulgable, entre guillemets, c'est le dossier qui est en relation avec...

M. Beaudet: C'est ça que je veux dire. Oui, mais c'est exactement ce que je voudrais, qu'on s'assure que c'est ce qui est pertinent à l'événement. Si c'est non pertinent dans le dossier médical de l'individu, il devra être laissé à la discrétion du médecin traitant. Si un élément du dossier médical n'a aucune pertinence avec l'événement en cause, ça ne doit pas faire partie de la divulgation au tribunal.

M. Rioux: M. le Président.

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre.

M. Rioux: Je pense que – le député connaît ça mieux que moi – la CSST a le dossier pertinent à ce qui est devant le tribunal. On ne va pas chercher à l'hôpital le dossier médical avant. Alors, la question de la leucémie...

M. Beaudet: Ne devrait pas prêter à jugement devant cette situation-là...

M. Rioux: Absolument pas.

M. Beaudet: ...ni à divulgation.

M. Rioux: Ni à divulgation non plus. Est-ce que vous voyez, vous autres...

M. Beaudet: Je vois ça, sauf que, là, «en l'absence de dispositions applicables»...

M. Rioux: Le texte n'est pas assez étanche?

M. Beaudet: C'est parce que, là, il se donne le droit d'aller le chercher, avec la disposition applicable. Vous ouvrez tout.

M. Tremblay (Yves): Bien, c'est-à-dire qu'il peut toujours aller chercher ce qu'il est possible d'aller chercher avec le recours qu'on lui permet en vertu de l'article. Ça ne lui confère pas plus de droits qu'il va en avoir. En fait, ça, ça donne un moyen à quelqu'un pour faire valoir ses droits en vertu des textes de loi.

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre.

M. Rioux: M. le Président, moi, mon gros bon sens me dit que, le commissaire étant un juriste, il va savoir ce qui est pertinent puis ce qui ne l'est pas, il a la formation pour ça. Et, à 429.30, là, on va pouvoir régler ça: «La Commission des lésions professionnelles a droit d'accès au dossier que la Commission possède relativement à la décision contestée.»

M. Tremblay (Yves): Elle ne peut pas aller plus loin.

M. Rioux: Elle ne peut pas aller plus loin.

M. Beaudet: ...ce qui est pertinent.

M. Rioux: Oui. Puis, en plus, on a un minimum de garantie avec la compétence du commissaire. Alors, voilà.

Le Président (M. Beaulne): M. le député.

M. Beaudet: Une minute, s'il vous plaît.

M. le Président, est-ce qu'il est arrivé dans le passé – et je demande à M. Tremblay s'il peut me répondre, avec l'autorisation du ministre, il va sans dire, parce que je pense que c'est M. Tremblay qui peut me répondre – que la Commission d'appel actuelle, qui est l'élément juridique actuel... Est-ce que la Commission d'appel n'est pas allée chercher le dossier médical d'un individu en utilisant un article du genre? Non pertinent, là.

M. Tremblay (Yves): À ma connaissance, non. L'article 429.11 – c'est ça? – en tout cas, l'article qui est à l'étude présentement...

M. Beaudet: L'article 427.17.

(16 h 50)

Des voix: L'article 427.18.

M. Beaudet: L'article 427.18. Là, on est à 427.18.

M. Tremblay (Yves): ...n'offre qu'un outil. C'est-à-dire, on dit: Il existe des moyens pour faire valoir vos droits même s'ils n'ont pas été encadrés de façon particulière. Moi, je qualifierais ça de disposition résiduelle. Vous avez, par exemple, un recours en révision pour cause qui, celui-là, est bien balisé dans deux ou trois articles, qui encadre une situation juridique donnée. Par contre, il y a une foule de situations qu'on ne peut pas prévoir, sinon on aurait des lois qui seraient de l'épaisseur d'un bottin téléphonique. Alors, pour justement se donner des outils à caractère résiduel pour régler ce type de situations là, on a des articles comme l'article 429.18.

M. Beaudet: Alors, si je comprends bien l'article, c'est que l'article est beaucoup plus visé à protéger le travailleur qu'à donner des possibilités à la CLP.

M. Tremblay (Yves): Bien sûr. Comme l'exemple qu'on donnait tout à l'heure, le retrait d'un désistement d'appel, bien, c'est quelqu'un qui a peut-être réagi trop vite à un moment donné, qui a dit: Bon, moi, je n'ai pas de chance, qui a peut-être subi une mauvaise influence. Ça peut arriver, hein, une influence, un représentant qui lui dit, par exemple: Désiste-toi donc, tu n'as pas de chance. Il rencontre quelqu'un sur le trottoir qui vient lui expliquer qu'une cause comme la sienne, il en a gagné une il y a un mois.

M. Beaudet: Maudit fou, si t'étais allé...

M. Tremblay (Yves): Oui. Alors, là, il vient expliquer ça au commissaire, mais, au préalable, il doit pouvoir avoir un outil pour se rendre jusqu'au commissaire, et 429.17 lui permet de le faire.

M. Beaudet: O.K.

Le Président (M. Beaulne): Ça va? Adopté.

M. Rioux: L'article 429.18, adopté.

Le Président (M. Beaulne): L'article 429.19.

M. Rioux: «429.19 La Commission des lésions professionnelles peut, par règlement adopté à la majorité de ses commissaires, édicter des règles de preuve, de procédure et de pratique précisant les modalités d'application des règles établies par la présente section. Ces règles prévoient notamment la préparation d'un rôle de pratique.

«Ce règlement est soumis pour approbation au gouvernement.»

Donc, M. le Président, il appartient au tribunal d'adopter par règlement ses propres règles de preuve, de procédure et de pratique.

M. Beaudet: Intéressant.

M. Rioux: On a déposé un modèle, hein, à l'opposition, un modèle de règlement qui est celui de la CALP. La règle de preuve, de procédure et de pratique de la Commission d'appel, c'est un règlement qui va ressembler à celui qu'on a remis à l'opposition. Le temps qu'ils regardent ça, moi, M. le Président...

Le Président (M. Beaulne): Oui, je suspends quelques minutes.

(Suspension de la séance à 16 h 53)

(Reprise à 17 h 6)

Le Président (M. Beaulne): Bon, on en était à 429.19.

M. Rioux: Oui, à 429.19. Bien, c'est ça. Ça avait été lu, ce texte-là.

M. Beaudet: M. le Président, moi, j'ai une faveur à demander au ministre. Je vais m'abaisser à lui demander une faveur. Vraiment, là, je suis prêt à quasiment me mettre à genoux.

Le Président (M. Beaulne): Bon, bien, allez-y donc. Pas vous mettre à genoux, mais le ministre est généralement très généreux.

M. Beaudet: D'ailleurs, le ministre sait combien de difficultés j'ai actuellement à me mettre à genoux, puis je suis prêt à faire l'effort. Ici, hier, on a discuté longuement – en tout cas, longuement, longuement – des règlements qui n'avaient pas été mis en place avec «le président peut, après consultation des commissaires, établir des normes et des montants concernant les frais des allocations des témoins».

Moi, je demande au ministre, je le supplie de me rentrer ça dans l'article 429.19 parce qu'il me semble que ça cadrerait bien dans les règlements qui nous ont été présentés. On aurait juste à ajouter ça dans les règlements puis on assurerait un équilibre dans la justice, ou les gens qui se présenteraient devant la CLP auraient au moins la possibilité d'avoir un montant forfaitaire pour les rembourser des dépenses encourues. Il me semble que ce serait un bel endroit pour faire rentrer ça. Il me semble donc que ça rentrerait... Vous n'êtes pas d'accord? Hop! elle a failli dire oui, M. le Président. Elle est venue à deux...

Le Président (M. Beaulne): Mais c'est le ministre qui a le droit de parole. Alors, qu'est-ce qu'il en pense?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Beaudet: Elle est venue à deux cheveux de dire oui. Mais vous savez combien, moi, je me soumets à...

Le Président (M. Beaulne): Ah, il y a bien des choses qu'on serait tenté de dire aussi, mais, malheureusement ou heureusement, c'est notre ministre qui parle. Allez-y.

M. Rioux: M. le Président, je soumets respectueusement au député d'Argenteuil que cette question-là a été tranchée hier. On en a débattu, il est vrai.

M. Beaudet: Oui, mais il n'est pas exclu de revenir à la charge. Ça, c'est comme dans une bataille, M. le Président: on fait trois ou quatre attaques, puis il ne faut pas arrêter à la première.

M. Rioux: M. le Président, c'est son droit le plus strict de le faire...

Le Président (M. Beaulne): Oui. Il le fait gentiment, d'ailleurs.

M. Rioux: ...et il le fait gentiment, mais à regret je dois lui dire que cette question-là...

M. Beaudet: Ça n'a pas l'air d'être un regret très profond, M. le Président. Je vais vous dire: Il n'y a pas de larmes là.

M. Rioux: Non, mais, si vous continuez, ça peut être possible. L'émotion peut s'emparer de moi.

Le Président (M. Beaulne): On va éviter ça.

M. Rioux: Mais on l'a tranchée. On a tranché cette délicate question hier, que nous avons débattue, je crois, à fond. Il n'a pas réussi à me convaincre hier, alors ça ne serait pas plus possible aujourd'hui, je ne crois pas.

M. Beaudet: Aujourd'hui, c'est une autre journée, M. le Président. Je voudrais qu'il sache que le calendrier a avancé d'une heure, les minutes ont changé, alors peut-être que le ministre est mieux disposé aujourd'hui, qu'il est plus porté à l'écoute et à l'empathie à l'égard du travailleur accidenté qui a des besoins particuliers puis qui aimerait voir, soit pour lui, soit pour ses témoins, qui sont obligés de perdre des journées de travail, des dépenses occasionnées par leur présence à ce tribunal au moins se faire rembourser. Alors, je me suis dit que peut-être en revenant à la charge aujourd'hui, à l'occasion de l'article 429.19, le ministre serait mieux disposé qu'hier. Moi, ce n'est pas une question que je n'ai rien à perdre, je n'ai rien à gagner. Moi, j'ai déjà eu mon accident, puis je n'ai pas de problème puis je n'ai pas d'indemnité de la part de la CSST. Alors, ce n'est pas pour moi.

M. Rioux: En voulez-vous un autre?

M. Beaudet: Mais je le fais pour le travailleur accidenté, pour que le ministre puisse prendre ça en considération. C'est un élément important. Puis j'étais quasiment convaincu qu'il allait accéder à cette demande-là, étant donné les règlements qui ont été proposés par le 429.19 dans l'article puis qu'on aurait juste à ajouter dans le règlement un petit élément qui dirait que le président peut, devant des pièces justificatives, rémunérer ou rembourser les frais engendrés par la présence d'un témoin à la cour ou au tribunal.

(17 h 10)

M. Rioux: J'ai eu l'occasion, hier, M. le Président, d'expliquer en long et en large mon point de vue, alors ça termine le débat, quant à moi.

M. Beaudet: Bon, M. le Président, moi, d'abord, je veux juste assurer deux choses au ministre, qu'on ne créerait pas un précédent à la CLP en agissant de la sorte, en étant humain, compatissant et compréhensif. Ça ne serait pas un précédent, d'une part. Et je suis sûr que le ministre... Il a peut-être clos le débat, mais, moi, je lui assure qu'il n'a pas fini d'en entendre parler, parce qu'il y a plusieurs autres articles où on va pouvoir revenir dans l'espoir d'amollir sa frigidité à l'égard de cette situation, qui pourraient lui permettre d'ouvrir son coeur, son empathie à l'égard du travailleur accidenté qui a besoin de quelqu'un pour l'accompagner.

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. le député. En attendant qu'il se ramollisse sur d'autres articles, est-ce qu'on considère le 429.19 comme adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Beaulne): L'article 429.20.

M. Rioux: Un recours est formé par requête déposée au bureau de la Commission des lésions professionnelles de la région où est situé le domicile du travailleur ou, si le travailleur est domicilié hors du Québec – hors du Québec ou hors Québec? hors du Québec? – d'une région où l'employeur a un établissement.

Lorsqu'un travailleur n'est pas partie à la contestation, le recours est formé au bureau de la Commission des lésions professionnelles d'une région où l'employeur a un établissement.

L'oblitération postale fait preuve, à toutes fins que de droit, de la date du dépôt d'un recours au bureau de la Commission des lésions professionnelles.

C'est une requête écrite, n'est-ce pas, et c'est l'oblitération postale qui fait foi de tout. Mais il se cache un objectif derrière ça: c'est qu'on veut éviter les nombreuses contestations.

M. Beaudet: Contestations.

M. Rioux: Oui, sur la date du dépôt d'une déclaration d'appel. On veut éviter le trouble autant que possible, que s'accumulent les dossiers et qu'on ralentisse le processus. Il y a toujours un objectif dans ce projet de loi là: diminuer les délais, faire en sorte que la justice soit la plus expéditive possible. En cela, on se conforme aux dispositions des procédures qui ont été introduites dans la Loi sur la justice administrative, M. le Président.

Le fait nouveau, c'est le troisième paragraphe. Le fait nouveau, là, sur les dispositions de la loi actuelle, c'est le troisième paragraphe, quand on parle de l'oblitération postale.

Le Président (M. Beaulne): Oui, M. le député.

M. Beaudet: M. le Président, d'abord, juste un éclaircissement. Probablement encore qu'on n'a pas le même texte que le ministre. À l'alinéa deux, «Lorsqu'un travailleur n'est», vous avez dit «n'est pas partie», et, dans notre texte, on a «n'est partie de la contestation».

M. Rioux: Oui, oui. Je disais «n'est partie», M. le député.

M. Beaudet: O.K. Deuxièmement, hier on a parlé avec beaucoup d'emphase et d'intérêt de l'informatisation des dossiers, de la disparition du papier, de la disparition des radiographies, etc., parce qu'on s'en va sur le dossier pas de papier. C'est vers ça qu'on chemine. Aujourd'hui, on vient me dire, dans le texte de loi, que la preuve, c'est l'oblitération postale. Bien, là, on progresse ou on régresse.

M. Rioux: Mais attention. On ne va pas chercher du courrier électronique au bureau de poste, là.

M. Beaudet: Non, mais ça peut être la date d'entrée du fax, ça peut être je ne sais pas quoi, moi. Vous parlez de l'oblitération postale. Un fax, ce n'est pas une lettre. Est-ce que c'est l'oblitération postale, un fax qui est envoyé avec la date dessus?

M. Rioux: Là, on parle d'une requête. C'est ça?

M. Beaudet: Oui, mais pourquoi il faut que ce soit envoyé par courrier absolument? Pourquoi ça ne pourrait pas être envoyé par fax?

M. Rioux: Ça, ça fait partie des pratiques.

M. Beaudet: Je ne le sais pas, là, moi.

M. Rioux: Ça fait partie des pratiques, M. Tremblay, n'est-ce pas?

M. Tremblay (Yves): Oui, puis éventuellement disons que le tribunal pourrait aussi, dans ses règles de preuve, de procédure et de pratique, élargir les façons de recevoir quelque chose ou...

M. Beaudet: M. le Président, moi, je vous suggère qu'éventuellement, c'est le temps. Le temps, là, si on se garde en avant, pas en arrière, bien, là, qu'on lâche l'oblitération postale. On est sortis de ça, là. Moi, en tout cas... Lâchez-moi ça. Y «a-tu» un autre moyen de... Puis je comprends l'affaire, là, qu'on a une preuve qui est claire, l'oblitération postale, mais j'ai aussi une preuve quand j'ai un fax, la date est marquée. Moi, j'en ai un, fax, ici, là. C'est marqué «1997-05-21» puis ce n'est pas une oblitération postale. Il n'y a pas de timbre.

M. Rioux: M. le Président, tous les travailleurs n'ont pas de fax.

M. Beaudet: Non, mais je peux aller le faire envoyer par fax.

Le Président (M. Beaulne): Oui, mais un fax, ce n'est pas un original.

M. Rioux: Ça coûte moins cher par courrier.

M. Beaudet: On est rendus à ça, maintenant.

Le Président (M. Beaulne): Est-ce que c'est reconnu légalement, ça, un fax?

M. Beaudet: Les fax sont considérés comme légaux, maintenant, à moins que...

Une voix: Oui, oui.

M. Rioux: M. le Président, une lettre envoyée par la poste...

M. Beaudet: Les fax sont considérés légaux, maintenant.

M. Rioux: Oui, mais la lettre envoyée par la poste coûte moins cher que le fax.

M. Beaudet: Bien, là...

M. Rioux: Non, mais vous plaidez en faveur de l'intérêt des travailleurs.

M. Beaudet: Quand j'aurai considéré la lettre, l'enveloppe, le temps d'aller la maller, tout ça, je ne suis pas sûr que ça revient moins cher. Mais, en dehors de ça, M. le Président, on s'en va vers l'an 2000. On parlait de tout informatiser, de tout mettre ça... d'avoir un dossier pas de papier. On va avoir un dossier pas de papier, puis on va garder l'enveloppe. J'ai un problème. Bien, un problème, ce n'est pas un problème majeur. J'essaie de dire: Pour ne pas qu'on revienne dans un an à dire: Il faut changer cet article-là parce que ça ne marche plus, il n'y en a plus, de courrier, on «devrait-u» le faire tout de suite? Ou tout autre moyen qui nous donne une preuve irréfutable de, je ne sais pas, l'envoi. Je veux juste qu'on se mette à l'ère technologique moderne, là, pas dans le temps des Pony... Comment on appelle ça? Le Pony...

M. Rioux: Quand on a dit, tout à l'heure, à 429.19...

M. Beaudet: La marque américaine, le Pony, là...

(Consultation)

M. Beaudet: Le Pony express.

M. Rioux: M. le Président, quand on a dit, à cet article-là, au 429.19, qu'on prévoit par règlement que le tribunal va se doter de règles de preuve, de procédure puis de pratique, je veux dire, c'est large, ça.

M. Beaudet: Oui, mais elle est exclusive.

M. Rioux: C'est une souplesse qui nous permet...

M. Beaudet: Non, mais c'est plus souple. C'est clair. Si le gars n'a pas l'oblitération postale, il n'est pas légal. On prend la peine de le spécifier. On marque «oblitération postale ou toute autre mesure»... ou oblitération de la date puis... Je ne le sais pas, moi. Je veux qu'on sorte du cadre du papier. Parce que, là, on va avoir un dossier pas de papier puis on va être obligé de traîner l'enveloppe.

M. Rioux: Il est vrai, M. le Président, que j'ai dit hier qu'on s'en allait vers une CSST sans papier. C'est très vrai.

M. Beaudet: Bien oui! Bien, c'est à ça que je fais référence.

M. Rioux: C'est très vrai, puis le député fait bien de me le rappeler, parce que je souhaite de tous mes voeux que la CSST se libère de la paperasse et devienne un modèle dans l'organisation gouvernementale.

M. Beaudet: Commençons par là.

M. Rioux: Alors, donnez-moi donc deux minutes avant que ça s'agite trop autour de moi. Ça me fatigue.

Le Président (M. Beaulne): Alors, je suspends.

(Suspension de la séance à 17 h 19)

(Reprise à 17 h 21)

Le Président (M. Beaulne): Bon, on recommence.

M. Rioux: M. le Président, M. le député d'Argenteuil a l'art de nous rappeler les choses, il a une bonne mémoire. Je trouve qu'il vieillit bien.

M. Beaudet: Ça va lui valoir des fleurs. Ha, ha, ha! Il faut se rappeler qu'il y a toujours un pot qui accompagne. Ha, ha, ha!

M. Rioux: Qu'est-ce que je pourrais bien dire pour être clair et limpide? C'est que c'est un reliquat de la CALP, cette histoire. Alors, j'ai l'impression qu'on ne changera pas grand-chose, au Québec, en enlevant ça.

M. Beaudet: En enlevant ça?

M. Rioux: Le troisième paragraphe. Si ça règle votre problème, moi, ça ne me complique pas la vie, mais pas du tout.

M. Beaudet: Mais vous n'aurez plus de preuve, là.

M. Rioux: Parce que c'est vrai qu'on peut avoir d'autres moyens modernes, plus modernes, en tout cas, que ça et qui nous permettraient également d'avoir une preuve tout aussi valable. Et, dans notre règlement, on pourra préciser d'autres formes...

M. Beaudet: Ah bon. O.K. Transmission électronique...

M. Rioux: Transmission électronique, etc.

M. Beaudet: ...télécopieur, fax, courrier électronique. Bon, O.K.

Le Président (M. Beaulne): Comme c'est dit à l'article précédent.

M. Beaudet: Ah bon, parfait. Pas de problème, moi.

Le Président (M. Beaulne): M. le député de Drummond.

M. Rioux: Alors, je termine juste ma petite intervention.

Le Président (M. Beaulne): Oui, terminez vite.

M. Rioux: C'est que l'article 429.20 est modifié par la suppression du troisième alinéa.

Le Président (M. Beaulne): M. le député de Drummond.

M. Jutras: Bien, moi, ce n'est pas là-dessus. Ça, je suis d'accord avec cet amendement-là.

Le Président (M. Beaulne): Bon, c'est sur autre chose?

M. Jutras: Oui.

Le Président (M. Beaulne): Alors, on va disposer de l'amendement. L'amendement consiste à retirer le troisième alinéa, et ça se lit: L'article 429.20 est modifié par la suppression du troisième alinéa. L'amendement est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Beaulne): Est-ce que l'article 429.20, tel qu'amendé, est adopté?

M. Jutras: M. le Président.

M. Beaudet: C'est là que le député de Drummond veut intervenir.

Le Président (M. Beaulne): Ah! allez-y.

M. Jutras: Oui. C'est quand même sur l'article 429.20. On dit: «Un recours est formé par requête déposée au bureau de la Commission des lésions professionnelles de la région où est situé le domicile du travailleur.» Qu'arrive-t-il si, dans cette région-là où est situé le domicile du travail, il n'y a pas de bureau de la CLP? Comment loge-t-il son appel? Et ça, c'est bien possible, parce que nous avons adopté, à l'article 368, qu'il y a un bureau à Montréal et un à Québec, puis il peut y en avoir un dans d'autres régions administratives si le nombre de recours dans une région le justifie.

Le Président (M. Beaulne): Bonne question. Allez-y donc.

M. Rioux: Bien, hier, M. le Président, en commission, la question a été soulevée par le député d'Argenteuil et je lui ai répondu qu'on regarderait attentivement la possibilité d'implanter des bureaux en région lorsque la masse critique ou encore le volume le justifie.

M. Beaudet: M. le Président, je pense que la question du...

Le Président (M. Beaulne): Oui, mais ce n'est pas exactement sa question...

M. Jutras: C'est ça.

M. Beaudet: ...député de Drummond veut dire: Si le gars, il reste dans le Témiscamingue, qu'il n'y a pas de bureau dans la région du Témiscamingue, où est-ce qu'il va aller? Ou le bureau le plus près...

M. Rioux: Bien oui, mais on a dit hier qu'il y avait de l'itinérance aussi.

M. Beaudet: Ah, mais ça, c'est pour aller siéger.

M. Rioux: C'est que la CLP se déplace.

M. Beaudet: Mais, lui, il veut vous envoyer... C'est pour vous faire parvenir une requête.

Une voix: Il l'envoie à Montréal ou à Québec.

M. Beaudet: Il l'envoie où? Au bureau le plus près.

M. Rioux: Il l'envoie au bureau de Montréal ou de Québec.

M. Beaudet: Oui, mais ce n'est pas marqué.

M. Jutras: Ce n'est pas écrit.

M. Beaudet: C'est marqué «au bureau de la Commission des lésions professionnelles de la région».

M. Rioux: Non, mais, si le bureau n'est pas existant...

M. Beaudet: Ou le bureau le plus près. Moi, en tout cas, ça ne me dérange pas.

M. Rioux: ...il l'envoie au bureau qu'il pense le plus près de son domicile. Ça peut être Québec, ça peut être Montréal.

M. Beaudet: Bien, moi, il me semble... Je suis d'accord avec ça.

M. Rioux: Mais je voudrais rappeler au député de Drummond l'engagement qu'on a pris hier d'examiner la possibilité d'implanter des bureaux.

M. Beaudet: Je comprends son point.

Le Président (M. Beaulne): Oui, mais, M. le ministre...

M. Jutras: Oui, mais ça ne répond pas à la question, ça, parce...

Le Président (M. Beaulne): ...non seulement ça ne répond pas à la question, mais, si on prend la peine, ici, d'ajouter «ou si le travailleur est domicilié hors du Québec»... On précise que, s'il est domicilié hors du Québec et qu'il n'a pas accès à un bureau qui est près de chez lui, il y a des procédures, ici, qui sont prévues. Alors, je pense que la question du député de Drummond est aussi bonne que celle du travailleur qui est hors Québec.

M. Beaudet: Il faudrait que ce soit spécifié, «ou le bureau le plus près».

M. Rioux: Est déposée au bureau de la Commission des lésions professionnelles de la région, s'il y en a un.

M. Beaudet: Bien oui, mais ce n'est pas marqué, ça.

Le Président (M. Beaulne): Oui, mais s'il n'y en a pas?

M. Rioux: Ça peut être la région de Montréal, ça peut être la région de Québec ou une autre région.

M. Beaudet: Oui, mais, lui, il n'en a pas. S'il n'y en a pas dans sa région, il l'envoie où? Alors, il dit: Ce n'est pas spécifié dans la loi. Je comprends, là. Moi aussi, je pense ça, mais ce n'est pas spécifié.

M. Rioux: Oui, oui, oui. C'est Québec ou Montréal.

M. Beaudet: Sauf que ce n'est pas clair pour le député de Drummond.

M. Jutras: Évidemment, je pense que ce serait préférable de le dire, parce que, là, la personne va vouloir loger son appel puis elle va dire: Je fais quoi, moi, avec ça? Moi, je suis à Drummondville, le plus proche, il est à Trois-Rivières.

M. Beaudet: Québec ou Montréal? Il est entre les deux.

M. Jutras: Par contre, je sais qu'il y en a un à Québec, je sais qu'il y en a un à Montréal et il y en a un à Saint-Hyacinthe. Je l'envoie où? Puis là, moi, si je décide de l'envoyer à Saint-Hyacinthe, par exemple, mon adversaire va dire: Votre appel est mal logé parce que ce n'est pas prévu que vous pouvez loger votre appel à Saint-Hyacinthe, et là ça va se plaider.

Le Président (M. Beaulne): Ah oui, les avocats sont forts sur les technicalités, effectivement.

M. Beaudet: Ils vont remettre la cause. Ha, ha, ha!

M. Rioux: M. le Président, tant et aussi longtemps qu'on n'a pas de bureaux régionaux en plus grand nombre que ceux que nous avons aujourd'hui, on appartient à une région. Au sens de la CSST, on appartient à une région. O.K.? Alors, on envoie ça dans la région qui est la plus proche. Moi, ce que je souhaite, c'est qu'on en ait le plus possible, un jour. On envoie ça dans la région.

M. Jutras: Mais où vous prenez ça? Ce n'est pas écrit.

M. Rioux: «429.16 La Commission des lésions professionnelles peut accepter une procédure même si elle est entachée d'un vice de forme ou d'une irrégularité.» On l'a réglé, ça.

M. Jutras: Oui, mais est-ce qu'un appel qui est mal logé, ce n'est qu'un vice de forme? Ça, on peut se rendre loin avec ça. Pourquoi...

Le Président (M. Beaulne): Je comprends, il y a des causes qui sont retardées parce qu'elles ne sont pas déposées à la bonne cour.

M. Beaudet: Ah! même s'il s'est fait des preuves inutiles dans le record Matticks, c'est ça. Ils n'avaient pas besoin de preuves additionnelles, ils en ont mis d'autres.

M. Rioux: M. le Président, la question du député...

Le Président (M. Beaulne): Oui, M. le ministre.

M. Rioux: Oui. La question du député est importante, et on va essayer d'y répondre. M. Tremblay.

M. Jutras: Je pense qu'il suffirait de l'ajout d'un article: s'il n'y a pas de bureau, c'est déposé au bureau le plus proche de la région administrative la plus proche ou c'est déposé à Québec ou Montréal. Tu sais...

Le Président (M. Beaulne): Mais que ce soit précisé pour éviter des litiges de la nature de ceux dont vous parlez.

M. Jutras: Oui. C'est ça.

Le Président (M. Beaulne): M. Tremblay, avez-vous des éclaircissements?

M. Tremblay (Yves): Oui, si vous voulez. En fait, moi, je suis absolument convaincu qu'un appel ne serait pas rejeté parce que justement le citoyen restant, par exemple, à la frontière des deux régions l'enverrait dans le mauvais bureau de la CLP. Et là, présentement, la disposition de la LATMP concernant les appels qu'on envoie à la CALP sont exactement au même effet. Il existe deux régions, c'est-à-dire un bureau à Montréal et un bureau à Québec. Donc, finalement, tout le monde appartient à une région. Soit qu'on appartienne à la grande région de Montréal ou à toutes les régions qui sont rattachées administrativement au bureau régional de Montréal, ou au bureau régional de Québec. Alors, c'est sûr que ce n'est pas donné à tout le monde de peut-être raisonner et de dire: Moi, je demeure à Drummondville et spontanément de l'envoyer à Québec. Ils vont peut-être l'envoyer à Montréal, mais à ce moment-là c'est administrativement que l'appel va être rapatrié dans la bonne région et qu'un citoyen ne perdra absolument aucun droit en raison d'une erreur de cette nature-là.

M. Jutras: En tout cas, je demeure convaincu, M. le Président, que ce serait plus simple d'écrire la phrase plutôt que d'éviter un débat sur une question comme celle-là. En plus de ça, pratiquement parlant, je vois l'affaire, là, vous représentez un accidenté du travail, et là ce qui va se dire, c'est: Regardez donc, ils n'ont pas prévu le recours dans un cas comme le nôtre; le législateur fait mal son travail. C'est ça qui va se dire, alors qu'il suffit de rajouter une petite phrase, hein? Quelqu'un qui représente un accidenté du travail, c'est ça qu'il se dit. Il dirait: Le législateur, regardez, il n'a pas pensé à ça. On y pense, là; écrivons-le.

Le Président (M. Beaulne): Oui. Vous avez... Oui, allez-y donc.

M. Rioux: Bien, avant ça, moi, j'aimerais savoir si depuis 12 ans il s'est produit des cas comme soulève le député de Drummond, ça va nous éclairer un peu.

M. Jutras: Bien, là, ce n'était pas un problème.

M. Tremblay (Yves): Moi, je n'en connais pas, de cas de cette nature-là.

M. Rioux: Il n'y a pas eu de cas?

M. Kieffer: M. le Président.

Le Président (M. Beaulne): Oui, M. le député de Groulx.

M. Kieffer: Je ne sais pas s'il y a eu des cas de contestation, mais il y a sûrement eu des retards administratifs, ne serait-ce que, par exemple, de recevoir à Montréal une demande, hein, et puis de réaliser qu'elle ne s'adresse pas à Montréal, mais qu'elle s'adresse à Québec. Nous connaissons tous les délais qu'implique le fait de dire: Ah, ça ne s'adresse pas ici. Il faudrait le mettre dans une belle petite enveloppe, le transférer au fonctionnaire Y qui, à son tour, va l'envoyer à Québec, et là on...

(17 h 30)

Parce que le projet de loi vise à réduire les délais, hein? Ça, c'est un bon exemple où il va y avoir des retards. Il va y avoir des délais additionnels, ça, c'est très clair.

M. Beaudet: Ou on le retourne au travailleur, puis on dit: Ta formule est mal remplie, tu ne l'as pas envoyée à la bonne adresse.

M. Kieffer: Ah! Tu sais, ça va être soit ce que le député dit ou bien soit des délais additionnels. Ça, c'est clair.

Le Président (M. Beaulne): Oui. M. le ministre, laissez-moi vous poser une question. De la même façon qu'à ce même article on a éliminé le troisième alinéa sous prétexte que ça ne changeait pas grand-chose au projet de loi et que, de toute façon, jusqu'ici, on a ajouté des bouts de phrases, des qualificatifs, ou on en a retranchés, qu'est-ce que ça enlèverait au projet de loi d'ajouter la petite précision que souhaiterait le député de Drummond qui la fait sur la base de son expérience de plaideur dans des causes?

M. Rioux: M. le Président...

M. Beaudet: M. le Président, moi, je vais suggérer quelque chose au ministre, là. Je suis sûr que ce n'est pas facile de phraser cet élément-là. Alors, on peut laisser à son contentieux la peine de le faire. On peut retarder cet article-là, on peut le suspendre puis continuer. Les gens pourront décider entre eux comment ils veulent le formaliser, puis on reviendra là-dessus demain ou je ne sais pas quand, là. Quand est-ce qu'on siège?

Le Président (M. Beaulne): Bien, écoutez, on va voir. Si le ministre peut régler ça tout de suite, on va y aller tout de suite.

M. Rioux: M. le Président...

Le Président (M. Beaulne): Allez-y, M. le ministre.

M. Rioux: ...je vais regarder comment on pourrait reformuler ça.

Le Président (M. Beaulne): D'accord. Alors, on suspend temporairement l'adoption de 419.20 et on passe à 429.21.

M. Rioux: Non, non. On va le régler tout de suite.

Le Président (M. Beaulne): Ah bon! Tout de suite. Alors, vous voulez qu'on suspende immédiatement, immédiatement.

M. Rioux: Oui, on va le régler tout de suite.

Le Président (M. Beaulne): Bon, on suspend immédiatement, immédiatement.

(Suspension de la séance à 17 h 32)

(Reprise à 17 h 37)

Le Président (M. Beaulne): Nous revenons à nos travaux. Temporairement, nous suspendons 429.20 et on passe à 429.21.

M. Rioux: «La requête:

«1° identifie la décision, l'ordre ou l'ordonnance qui fait l'objet du recours;

«2° expose sommairement les motifs invoqués au soutien du recours;

«3° mentionne les conclusions recherchées;

«4° contient tout autre renseignement exigé par les règles de preuve, de procédure et de pratique de la Commission des lésions professionnelles.»

Ça détermine le contenu des requêtes qui sont introduites, tout simplement, mais ça permet d'être moins formaliste aussi. Ça permet d'être moins formaliste. On avait ça dans l'ancienne loi. Ça reprend 414 de la loi actuelle.

Le Président (M. Beaulne): M. le député d'Argenteuil.

M. Beaudet: M. le Président, si on pense à déjudiciariser, il ne faudrait pas que la requête devienne d'une formalité ou d'un formalisme tel que mon numéro d'aide sociale, la couleur de mes cheveux, j'«ai-tu» une lésion qui m'identifie plus qu'un autre, puis le numéro de passeport. Bon. Il faut que ce soit très simple.

Exemple, je soumets au ministre cette situation. D'abord, j'espère que, en lui transmettant la décision, lui, va aller à la CLP, qu'on va lui fournir un formulaire. Parce que les formulaires, j'assume qu'ils ne sont pas accessibles au bureau de poste. S'il ne l'a pas, le formulaire, comment est-ce qu'il va l'obtenir? «First thing.» Est-ce que ça pourrait être une simple lettre, comme on en reçoit des centaines, là, adressée à la Commission des lésions professionnelles, puis mon adresse, mon numéro de téléphone, d'où je viens, la décision qui a été rendue, l'ordre, l'ordonnance, tout est dessus, puis les motifs qui font que je vais aller à la Commission des lésions professionnelles, ou s'il faut absolument le formulaire qui est émis par la Commission des lésions professionnelles?

Une voix: ...

M. Beaudet: Oui, mais comment? Je ne sais pas, moi, là. Je n'ai pas lu ça, moi, là. Je suis un travailleur accidenté, là, M. le Président, puis, moi, je n'ai pas lu ça, puis je n'ai pas ça dans mes poches, là. Je viens de me faire écraser un orteil ou je me suis cassé un clou dans le pied, puis je veux aller en appel.

M. Rioux: Oui, mais il est bien dit, par exemple, que la Commission d'appel met à la disposition des intéressés les formulaires de déclaration d'appel.

M. Beaudet: Alors, ça veut dire que, quand elle va lui faire part de sa première décision, avec la possibilité pour lui d'aller en appel, elle va lui introduire un formulaire. Est-ce que c'est ça qui se passe dans la vraie vie, là, ou si, moi, comme travailleur accidenté, j'ai l'obligation de demander un formulaire? Parce que, là, je rejoins toujours le ministre dans sa sempiternelle notion de raccourcir les délais, avec laquelle je suis totalement d'accord. Si, moi, j'ai l'obligation de vous demander un formulaire, je vais encore maller, je vais encore attendre que ça revienne, puis je vais retourner. Là, je rajoute des délais, je rajoute deux semaines, là, juste là-dedans.

M. Rioux: Moi, je ne sais pas si mon observation est bonne, là, mais j'ai un de mes beaux-frères qui a été pris là-dedans. La lettre que lui envoyait la Commission des lésions professionnelles, dans la lettre qu'on lui écrivait, on introduisait un formulaire.

M. Beaudet: C'est ça que j'ai demandé.

(17 h 40)

M. Rioux: Alors, il l'a, son formulaire.

M. Beaudet: S'il l'a, il n'y a pas de problème. C'est ça que j'ai demandé: Est-ce qu'on l'introduit? Avec la réponse que la CSST transmet au travailleur accidenté, elle lui envoie un formulaire lui donnant la possibilité d'en appeler à la Commission des lésions professionnelles.

M. Rioux: C'est ça.

M. Beaudet: Le formulaire est dedans; il n'a pas besoin de courir, il est dedans. Là, on raccourcit les délais, il va sans dire.

Là encore, tantôt, M. Tremblay du contentieux nous disait qu'il ne faut pas s'accrocher dans les fleurs du tapis. Alors, si le travailleur accidenté, par oubli, je ne sais pas, n'a pas marqué sa date de naissance, ça ne change rien qu'il s'est planté un clou rouillé dans le pied, là. Alors, on ne retournera pas le formulaire, j'espère, disant: Formulaire incomplet, vous n'avez pas marqué votre date de naissance.

M. Rioux: Non.

M. Beaudet: On ne s'accroche pas là-dedans.

M. Rioux: Non. Mais, M. le Président...

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre, oui.

M. Rioux: ...c'est clair que l'omission de suivre une règle n'entraîne pas le retard.

M. Beaudet: Le retard du processus, en soi.

M. Rioux: Non, non.

M. Beaudet: Ça veut dire que ça peut marcher pareil, mais dire: Donne-nous ta date de naissance, on va la marquer. Pas de retourner la feuille et dire: Mets ta date de naissance.

M. Rioux: Mais, d'ailleurs, on peut clarifier une chose tout de suite. S'il n'y avait pas de formulaire à la portée de la main, est-ce qu'une lettre fait foi également?

M. Tremblay (Yves): Ce n'est pas formaliste.

M. Rioux: Ce n'est pas formaliste. C'est ça.

M. Tremblay (Yves): Le formulaire est là pour aider les gens.

M. Beaudet: O.K. Mais, si, moi, je vous envoie une lettre adressée à la bonne personne, avec mon nom, mon adresse, mon dossier, mes récriminations, mes besoins puis ma demande, ça marche. Parfait.

M. Tremblay (Yves): C'est une caractéristique des tribunaux administratifs, la souplesse.

M. Beaudet: J'apprécie ça, ça m'éclaire. Ça répond à ma question.

M. Rioux: Parfait.

Le Président (M. Beaulne): Bon. Ça va?

M. Rioux: Très bien.

Le Président (M. Beaulne): Alors, 429.21 est-il adopté?

M. Beaudet: Adopté.

M. Rioux: Adopté.

Le Président (M. Beaulne): L'article 429.22. Il y a un amendement de retirer l'article 429.22.

M. Rioux: L'article 429.20 est modifié...

M. Beaudet: Bien là il faut revenir en arrière.

M. Rioux: On y revient, oui.

M. Beaudet: O.K.

Le Président (M. Beaulne): Alors, vous êtes prêt?

M. Rioux: Pour le régler, oui.

Le Président (M. Beaulne): Bon. Alors, comment se lirait l'amendement?

M. Rioux: Alors, M. le Président, l'article 429.20 serait modifié par l'addition, après le deuxième alinéa, du suivant: «Advenant le cas où un recours est formé dans une région où la Commission des lésions professionnelles n'a pas de bureau, la requête est déposée au siège social de cette Commission.»

Le Président (M. Beaulne): Bon, c'est clair, ça.

M. Rioux: Le député de Drummond voulait qu'au moins ça soit clair pour ne pas qu'il y ait de distorsion. Alors, ça, ça répond.

Le Président (M. Beaulne): Alors, M. le député de Drummond, ça répond à vos voeux, ça?

M. Beaudet: M. le Président...

Le Président (M. Beaulne): Oui.

M. Beaudet: ...il est où, le siège social?

M. Tremblay (Yves): Il y a un article qui dit qu'il est à Montréal ou à Québec.

M. Beaudet: Pas là, là.

M. Tremblay (Yves): À 368.

M. Jutras: «À l'endroit déterminé par le gouvernement.»

M. Beaudet: Oui, je sais, mais c'est où? L'endroit déterminé par le gouvernement, c'est où?

M. Jutras: «Un avis de l'adresse du siège ou de tout changement...

M. Beaudet: Je ne sais pas où, moi, là.

M. Jutras: ...de cette adresse est publié à la Gazette officielle du Québec .» Il faudrait que vous alliez voir à la Gazette officielle du Québec . Vous n'êtes pas abonné, vous allez me dire.

Le Président (M. Beaulne): Bon. Non, je pense que c'est assez clair, là. Alors, est-ce que l'amendement est adopté?

M. Rioux: Adopté.

Le Président (M. Beaulne): Est-ce que l'article 429.20, tel qu'amendé, est adopté?

M. Beaudet: Adopté.

Le Président (M. Beaulne): Adopté. Alors, 429.22.

M. Rioux: À l'article 429.22, M. le Président, il n'y a pas d'amendement

Le Président (M. Beaulne): Bien, moi, j'en ai un.

M. Beaudet: Bien oui, il est retiré.

Le Président (M. Beaulne): Oui, c'est de le retirer. C'est ce qu'on a, nous, dans nos papiers.

M. Beaudet: Il est retiré dans notre chose.

M. Rioux: L'article 429.2.

Le Président (M. Beaulne): Non, 429.22.

M. Rioux: L'article 429.22.

M. Beaudet: Moi, j'avais marqué «retiré», ici.

Le Président (M. Beaulne): Moi aussi. On a tous ça, nous autres.

M. Beaudet: On nous a envoyé un premier amendement comme quoi on retirait l'article 429.22. Oui, oui.

Le Président (M. Beaulne): Ah oui! Moi, j'ai ça aussi.

M. Rioux: Il y a une confusion.

M. Beaudet: Mais vous ne le retirez pas.

Le Président (M. Beaulne): Bon. Là, vous ne le retirez pas? Bon. Alors, on ne le retire pas.

M. Beaudet: Là, moi, je n'ai pas porté attention pantoute.

Le Président (M. Beaulne): De toute façon, c'est vous, M. le ministre, qui décidez.

M. Rioux: Oui.

Le Président (M. Beaulne): Alors, ça se peut très bien qu'on ait changé depuis ce temps-là. Allez-y, présentez-nous l'article.

M. Beaudet: Le ministre a tous les pouvoirs.

M. Rioux: «Les règles relatives à l'avis prévu à l'article 95 du Code de procédure civile (chapitre C-25) s'appliquent, compte tenu des adaptations nécessaires, dans tous les cas où une partie allègue qu'une disposition visée à cet article est soit inapplicable constitutionnellement, soit invalide ou inopérante, y compris en regard de la Charte canadienne des droits et libertés (Partie I de l'annexe B de la Loi sur le Canada, chapitre 11 du recueil des lois du Parlement du Royaume-Uni pour l'année 1982) ou de la Charte des droits et libertés de la personne.»

M. Beaudet: C'est compliqué, cette affaire-là.

M. Rioux: On va rappeler des choses heureuses au député d'Argenteuil.

M. Beaudet: Maudite Constitution, que c'est compliqué!

Le Président (M. Beaulne): On ne l'a pas signée, nous autres.

M. Beaudet: C'est parce que tu ne l'as pas compris. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Beaulne): Oui, on l'a trop bien compris, au contraire.

M. Rioux: On l'a trop bien compris, oui.

Le Président (M. Beaulne): Oui, allez-y, M. le ministre. On est tous les deux hors d'ordre, ici.

M. Rioux: Cet article prévoit qu'une partie doit transmettre un avis au Procureur général lorsqu'elle entend contester la validité d'une disposition de la loi ou des règlements en regard des chartes. Tremblay, est-ce que... Comme ça, tu pourras continuer?

M. Tremblay (Yves): C'est pour permettre au Procureur général, compte tenu de l'importance du dossier, d'intervenir auprès du tribunal et de faire les représentations qui s'imposent. Alors, le Procureur général représente le ministre de la Justice et le ministre de la Justice vient expliquer son point de vue sur les lois supérieures comme sur les chartes.

Disons que c'est une disposition qui est similaire à celle qui existe en vertu de l'article 112 de la Loi sur la justice administrative.

M. Rioux: C'est ça. Ça existe...

M. Beaudet: Quand vous dites que le Procureur peut intervenir, mais le ministre de la Justice a dû la lire la loi, lui?

M. Rioux: Bien oui.

M. Beaudet: S'il l'a lue, pourquoi est-ce qu'il va revenir après?

M. Rioux: D'ailleurs, il l'a tellement bien lue qu'il l'a prévu à la loi n° 130, à l'article 112 de la loi n° 130 sur la justice administrative. Le ministre était très, très conscient de ça.

M. Beaudet: L'article 95, là, ça veut dire quoi?

Le Président (M. Beaulne): M. le député, M. le député de Drummond voulait intervenir. Allez-y, M. le député.

M. Jutras: Bien, je pense que votre adjoint est en train de chercher l'article 95. Mais, en fait, pour répondre à la question du député d'Argenteuil, ce qui survient, là, c'est que vous pouvez avoir une loi qui est adoptée depuis un certain temps, même depuis longtemps, puis là, tout à coup, il y a quelqu'un qui décide que tel article, par exemple, c'est contraire à la Charte parce que ça enfreint la vie privée. Alors, là, il faut que quelqu'un intervienne dans le dossier pour défendre la loi, la soutenir comme quoi elle est bonne. Alors, il faut donc donner un avis au Procureur général comme quoi on entend invoquer que tel article de la loi est contraire à la Charte, et là le Procureur général intervient au dossier pour défendre sa loi.

Le Président (M. Beaulne): Très bien expliqué.

M. Rioux: Ça va?

Le Président (M. Beaulne): Oui, pour moi, ça va. C'est très bien dit.

M. Beaudet: Une seconde, on va lire l'article 95, là.

(Consultation)

Le Président (M. Beaulne): Ça vous va, M. le député?

M. Beaudet: Ça va. Merci.

Le Président (M. Beaulne): Alors, adopté.

M. Rioux: Adopté.

Le Président (M. Beaulne): Article 429.23.

M. Beaudet: Ça aurait été plus simple si ça avait continué comme c'était, retirer... Ha, ha, ha!

Le Président (M. Beaulne): Je le sais, mais, en tout cas, ils ont décidé de le garder.

M. Rioux: À 429.23, M. le Président, il y a un amendement: Remplacer, dans la première ligne de l'article 429.23, les mots «d'une» par les mots «de toute».

En somme, c'est une procédure de transmission des requêtes. C'est ça. «Sur réception de toute requête, la Commission des lésions professionnelles en délivre une copie...»

M. Beaudet: C'est quoi, la différence entre l'article 429.23 initial puis de lui ajouter «de toute» au lieu «d'une»?

M. Rioux: Oui. M. Tremblay.

(17 h 50)

M. Tremblay (Yves): En fait, l'objectif, c'était de vraiment s'assurer que, pour tous les types de requête, copie allait être envoyée aux parties. C'est parce qu'il peut... Là, présentement, on ne traite pas de l'appel, mais de la contestation générale, ce qui est l'équivalent de l'appel. Mais vous pouvez, par exemple, avoir des requêtes en révision pour cause. On ne voulait pas qu'à un moment donné les gens se mettent à faire de l'interprétation et à dire, par exemple, qu'une requête en révision pour cause n'était pas le type de requête visé à l'article 429.23 et n'avait pas à être transmise aux autres parties et à la CSST. Alors, c'est pour éviter ce type d'interprétation et de confusion là qu'on a vraiment, si vous voulez, mis la ceinture, les bretelles et puis...

M. Beaudet: Pas de fleurs dans le tapis.

M. Tremblay (Yves): Pas de fleurs dans le tapis.

Le Président (M. Beaulne): Alors, est-ce que l'amendement est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Beaulne): L'article 429.23, tel qu'amendé, est adopté. Article 429.24.

M. Rioux: M. le Président, l'article 429.24, c'est une disposition qui prévoit l'abolition du bureau de révision. L'article 55 du projet de loi. C'est maintenant la CSST qui va transmettre copie du dossier. «Dans les 30 jours de la réception d'une copie de la requête, la Commission transmet à la Commission des lésions professionnelles et à chacune des parties une copie du dossier qu'elle possède relativement à la décision contestée.»

Ça fait référence à l'abolition du bureau de révision, n'est-ce pas? Ça s'adressait avant ça au bureau de révision, mais, maintenant qu'il n'existe plus, ça s'en va à la Commission.

M. Beaudet: M. le Président, pourquoi ça prend 30 jours?

M. Rioux: C'est une concordance avec la Loi sur la justice administrative.

M. Beaudet: Mais là vous avez reçu une requête. Vous prenez 30 jours pour envoyer aux parties la requête puis la copie du dossier. Ça ne prend pas 30 jours pour faire ça. Vous voulez réduire les délais, on va mettre 15 jours. Si c'est pour réduire les délais, ça va forcer tout le monde à aller plus vite.

M. Rioux: Oui, mais c'est dans les 30 jours. Ça peut vouloir dire 15, ça, ça peut vouloir dire 10, ça peut vouloir dire cinq.

M. Beaudet: Oui, mais alors pourquoi on ne met pas 15? Ça va peut-être vouloir dire 10?

M. Rioux: Non, mais on se met une limite: dans les 30 jours.

M. Beaudet: Moi, j'essaie d'aller dans le même sens que vous avez initié avec beaucoup d'emphase.

M. Rioux: D'ailleurs, je vous en remercie. Ça veut dire qu'on s'entend sur l'essentiel, presque.

M. Beaudet: Sur plusieurs points. Mais, moi, il me semble que, quand j'ai reçu la requête, je me retourne de bord, puis je dis aux gens appropriés: Écoutez, faites une copie du dossier et puis envoyez ça. Ça ne prend pas un mois. Ça ne prend pas deux semaines non plus.

M. Rioux: Non, mais on s'est référé à la Loi sur la justice administrative. Eux autres, à l'article 114, disent: Dans les 30 jours.

M. Beaudet: M. le ministre, vous voulez faire mieux que la justice administrative. Vous voulez être plus efficace. Donc, on pourrait mettre 15 jours. Ça pousserait tout le monde un petit peu dans le dos pour aller plus vite. Qu'est-ce qui arrive si ce n'est pas transmis dans les 30 jours? Y a-t-il une pénalité?

M. Tremblay (Yves): Il n'y a pas de pénalité.

M. Beaudet: Alors, pourquoi vous mettez 30 jours? Mettez-en pas pantoute.

M. Tremblay (Yves): Je pense que l'idée, c'est de mettre une période de temps qui soit un peu réaliste, compte tenu du nombre de dossiers. C'est un tribunal à grand volume.

M. Beaudet: M. Tremblay, vous savez très bien que, s'il n'y a pas de pénalité au bout, mettez le temps que vous voudrez, ça ne change rien. Ça fait que mettez cinq jours ou cinq mois...

M. Tremblay (Yves): Mais là je pense qu'on peut quand même vous dire que, dans l'état actuel des choses, c'est le bureau de révision paritaire de la Commission qui se charge de transmettre ces dossiers-là à la CALP, et ça se fait dans une période de 20 jours.

M. Beaudet: Je suis d'accord, là, moi. Je ne discute pas le temps que vous prenez pour le faire. Tout ce que je vous dis: S'il n'y a pas de sanction au bout, ne mettez pas de temps, ne changez rien. Vous allez le faire à 20 jours pareil. L'article, il n'a pas de valeur, il a une valeur symbolique.

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre.

M. Rioux: M. le Président, je sais qu'on est en train d'établir des règles. Le député soulève le 30 jours, ça le fatigue. Remarquez que ça me fatigue autant que vous.

M. Beaudet: Bien, ça me fatigue... Ça ne me fatigue pas, moi...

M. Rioux: Non, non. Moi, ça me fatigue.

M. Beaudet: ...j'essaie de raccourcir vos délais.

M. Rioux: Mais je me suis dit: Est-ce qu'on peut procéder de façon différente? C'est la question que vous me posez. Je dis: Oui, on peut procéder d'une façon différente. On peut mettre un délai plus court.

M. Beaudet: Non, mais ce que j'en viens... Parce que, là, en réalité, si on met un délai puis qu'il n'y a pas de sanction, pourquoi mettre un délai? Mais, si on met un délai, j'assume qu'il y a une sanction. Là, on me dit qu'il n'y en a pas. C'est pour ça que je me dis: Quand même qu'on le mettrait plus court, il n'y aura pas plus de sanction. Mettez cinq jours, bien là... Quand je dis sanction, je ne cherche pas une sanction.

M. Rioux: Il n'y a pas de sanction.

Le Président (M. Beaulne): M. le député, sauf probablement au niveau de l'évaluation du fonctionnaire concerné. Il va y avoir une évaluation de la performance du fonctionnaire responsable de ces choses-là.

M. Rioux: Les organismes et les personnes qui ont à appliquer la loi doivent respecter les délais.

M. Beaudet: En fait, c'est l'évaluation du fonctionnement de la Commission. Moi, je me dis, quand j'ai reçu une requête pour aller à la CLP, pourquoi vous mettez 30 jours? Pourquoi vous ne mettez pas 15 jours? Là, je vais dire: La Commission est très efficace.

M. Rioux: M. le Président, si ça peut nous rallier autour d'un texte, on peut mettre «dans les 20 jours de la réception».

M. Beaudet: Pas de problème.

M. Rioux: Alors, moi, ça me satisfait, je n'ai pas de problème avec ça, et le député, j'imagine, va adhérer facilement à ce compromis.

M. Beaudet: Alors, moi, je vais régler à 15, si le ministre est d'accord...

M. Rioux: Non, non, non.

M. Beaudet: ...mais je voudrais qu'on mette une sanction, par exemple. C'est quoi, la sanction? Ça, je ne sais pas. Parce que mettre un chiffre qui n'a rien au bout, ça va être juste dans l'évaluation de la performance de la CSST. Je ne sais pas quelle sanction on peut mettre. Je n'en vois pas non plus, moi, à prime abord.

M. Rioux: M. le Président, je vais quand même dire ce que je pense là-dessus.

M. Beaudet: M. le ministre, vous êtes connu pour avoir l'habitude de dire ce que...

M. Rioux: Il y a tellement de monde qui est venu nous dire qu'on harcelait les travailleurs, que la CSST et ses mécanismes, ses organismes en place pour traiter leur cas manquaient d'humanité, que, moi, je me dis, je ne me vois pas mettre une sanction qui aurait pour effet de pénaliser les travailleurs. Ça ne m'intéresse pas de mettre une sanction. On va faire en sorte que ces délais-là soient respectés puis qu'on vive à l'intérieur des balises qui sont là. Pourquoi une sanction?

M. Beaudet: Je n'en veux pas, de sanction, M. le Président. C'est ça que j'essayais de transmettre tantôt au ministre. C'est que, si on met un délai, on spécifie, on est très spécifique, bien, à ce moment-là, il faut qu'il y ait quelque chose au bout. S'il n'y a pas quelque chose au bout, soyons plus vague, «dans les plus brefs délais», «dans un délai...», je ne sais pas quoi. Pourquoi mettre un chiffre spécifique? Moi, je vous dis 20 jours. Vous pourriez me dire cinq jours. S'il n'y a rien au bout, ça va prendre 20 jours puis ça ne changera rien, ni à votre vie ni à la mienne.

M. Rioux: Mais, même si on mettait «dans les meilleurs délais»...

M. Beaudet: Ça va être 20 jours, ce qu'ils font actuellement.

M. Rioux: Moi, j'aime bien mieux mettre un chiffre.

M. Beaudet: C'est contraignant, un chiffre.

Le Président (M. Beaulne): M. le député, je pense qu'il y a une sanction, elle est éventuelle, mais rappelez-vous les vérifications du Vérificateur général de différentes agences d'État, et ainsi de suite. Si on inscrit 20 jours dans la loi, je comprends qu'il n'y a pas de sanction immédiate si le délai n'est pas respecté...

M. Beaudet: Mais ils vont se faire écoeurer.

Le Président (M. Beaulne): ...mais, lorsque le Vérificateur général va se mettre le nez dans la CSST, qu'il va comparer le fonctionnement de la CSST avec ce qui est dans la loi et qu'il arrivera en disant que la CSST régulièrement ou systématiquement ne respecte pas les propres délais qui sont imposés dans la loi, bien il y aura quelqu'un à quelque part qui va se faire taper sur les doigts.

M. Rioux: M. le Président, merci beaucoup. Vous êtes un président efficace. Vous donnez même des avis. Je trouve ça intéressant. Ça nourrit notre réflexion; c'est bien. Mais je voudrais attirer l'attention de la commission et de ses membres qu'on est dans la section de la preuve et des procédures, puis on ne peut pas rester vague là-dessus. Moi, je préfère dire à mon collègue d'Argenteuil: Si, vous, 30 jours, vous trouvez ça long, on peut en mettre 20, que dire «dans les meilleurs délais» ou «dans des délais raisonnables». Ça, c'est trop vague, dans mon esprit, et je ne pense pas qu'on serve notre cause en voulant travailler de la sorte.

Le Président (M. Beaulne): Je pense qu'on s'entend, 20 jours, puis...

M. Beaudet: Moi, je vais être plus précis, dans ce cas-là, M. le Président.

Le Président (M. Beaulne): Bon. Allez-y donc.

M. Beaudet: S'il trouve qu'il faut mettre quelque chose parce que c'est plus précis – comme on dit en bon jargon, c'est un «target» – bien, dans l'article 429.23, on dit: «Sur réception de toute requête, la Commission des lésions professionnelles en délivre une copie aux autres parties et à la Commission.» Pourquoi ne pas mettre «Sur réception de la copie de la requête, la Commission transmet à la Commission des lésions professionnelles et à chacune des parties une copie du dossier»? On va régler le problème. «Sur réception», ça veut dire le temps qu'elle procède à ses affaires, trois, quatre, cinq, 10 jours.

M. Rioux: M. le Président...

Le Président (M. Beaulne): Oui, M. le ministre.

M. Rioux: ...étant donné qu'il est 18 heures, je voudrais formuler rapidement un amendement à l'article 429.24.

Le Président (M. Beaulne): Bon. Allons-y.

M. Rioux: Le député d'Argenteuil, il lui sera loisible de voter pour ou contre. L'article 429.24 est modifié par le remplacement du chiffre «30» par le chiffre «20».

(18 heures)

M. Beaudet: Oui. Moi, j'aurais souhaité, M. le Président, qu'on exige la même célérité de la Commission qu'on demande à la Commission des lésions professionnelles, en disant: Sur réception. Comme je suis bon joueur...

Le Président (M. Beaulne): On règle pour 20?

M. Beaudet: ...je vais accepter 20, mais j'aurais aimé que ce soit sur réception, comme pour la Commission des lésions professionnelles.

Le Président (M. Beaulne): D'accord. Alors, l'amendement est adopté?

M. Rioux: Adopté.

M. Beaudet: Adopté.

Le Président (M. Beaulne): Alors, l'article 429.24, tel qu'amendé, est adopté. Sur cela, j'ajourne nos travaux jusqu'à demain matin, 9 heures.

(Fin de la séance à 18 h 1)


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