Journal des débats de la Commission de l'économie et du travail
Version préliminaire
43e législature, 2e session
(début : 30 septembre 2025)
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Le
jeudi 2 octobre 2025
-
Vol. 48 N° 1
Étude détaillée du projet de loi n° 101, Loi visant l’amélioration de certaines lois du travail
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11 h 30 (version non révisée)
(Onze heures quarante-huit minutes)
Le Président (M. Allaire) :
Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la
séance de la Commission de l'économie et du travail ouverte. La commission est réunie
afin d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 101, Loi visant
à l'amélioration de certaines lois du travail. Mme la secrétaire, est-ce qu'il
y a des remplacements?
La Secrétaire
: Oui, M.
le Président. MmeRotiroti
(Jeanne-Mance—Viger)est
remplacée par Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis), et M. Fontecilla
(Laurier-Dorion) par M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve).
Le Président (M. Allaire) :
Merci, Mme la secrétaire. Alors, avant de débuter les remarques préliminaires,
je dépose les mémoires reçus depuis la fin des auditions, soit ceux du Conseil
provincial du Québec des métiers de la construction, de la Fédération indépendante
des syndicats autonomes, du Syndicat québécois de la construction et des Associations
représentant des directions d'établissements scolaires du Québec. Alors, je
suis content de vous trouver, chers collègues. On va se débrouiller ensemble.
Alors, dans la procédure, si vous vous souvenez, on débute avec les remarques
préliminaires. Alors, M. le ministre, je vous serais... je serais prêt, pardon,
à vous céder la parole pour 20 minutes pour vos remarques préliminaires.
La parole est à vous.
M. Boulet : Oui. Laissez-moi
30 secondes. Est-ce que je...
Le Président (M. Allaire) :
C'est une période de réapprentissage pour tout le monde. Alors, vous pouvez
prendre votre temps, M. le ministre. Il n'y a pas de problème. Pour vous
remémorer la mémoire, si vous vous souvenez, après les remarques préliminaires
de chacun des groupes parlementaires, on va ensuite enchaîner avec les motions
préliminaires. Voulez-vous qu'on suspende les travaux quelques instants? On va
suspendre les travaux quelques instants. Merci. Pas de problème.
(Suspension de la séance à 11 h 49)
(Reprise à 11 h 50)
Le Président (M. Allaire) : Alors,
nous allons reprendre les travaux. M. le ministre, la parole est à vous.
M. Boulet : Merci, M. le
Président. Bien, bien heureux d'être de retour. Puis j'en profite pour saluer
les collègues des partis d'opposition, mes collègues gouvernementaux, qui sont
des personnes précieuses dans le contexte d'une commission parlementaire et,
bien sûr, les personnes de mon ministère, les personnes de mon cabinet.
On est au moment d'étudier concrètement
les mesures qui sont dans le projet de loi n° 101, qui est une loi visant à
améliorer certaines lois du travail. On a constaté dans les dernières années
qu'il y avait des obstacles d'application ou des problèmes d'efficacité. Donc,
c'est une loi de nature omnibus. Et ça va nous permettre de reprendre aussi des
discussions qu'on avait amorcées lors des consultations particulières. Et vous
allez réaliser qu'il y a beaucoup de protections en faveur des travailleurs et
travailleuses qui sont éclaircies, qui sont raffermies. Parfois, ça se fait par
des initiatives globales, je pense aux lois adoptées, M. le Président,
récemment visant l'encadrement du travail des enfants, vous vous en souvenez,
et la loi qui concerne la prévention du harcèlement psychologique et les
violences à caractère sexuel en milieu de travail, d'autres, c'est des
propositions de mesures à différentes portées qui améliorent beaucoup
l'encadrement législatif pour les personnes, pour les organisations et pour les
milieux de travail.
Il faut être constamment à l'écoute des
parties intéressées à l'évolution du monde du travail du Québec et être à
l'affût, bien sûr, des opportunités d'agir positivement. Il faut faire évoluer
nos lois. On a malheureusement constaté que des lois qui ne sont pas adaptées
aux mutations modernes font des lois qui sont encore plus difficiles
d'application et, parfois, plus difficiles d'interprétation. Donc, c'est
important pour moi de réitérer qu'un corpus législatif, ça ne doit pas être
rigide, intouchable ou figé dans le temps. Comme législateurs, on doit être
agiles, proactifs. Et, pour avoir à travailler avec vous, là, certains des
collègues... bien, en fait, tous les collègues, sur de nombreux projets de loi,
je sais que vous partagez cette vision-là.
Vous le savez, je vais être attentif, on
en parlait, tout à l'heure, aux questions. Je vais répondre du mieux que je
peux. On va se remettre graduellement. Mon objectif, au début d'une étude
détaillée, c'est de m'assurer qu'on ait tous les mêmes repères, qu'on ait tous
les mêmes références et qu'on ait tous la même compréhension de l'économie
globale du projet de loi. Puis, après ça, ça va nous permettre d'aller plus
diligemment. Et je n'ai pas l'intention de déroger de mes façons de faire.
Puis, s'il y a des propositions d'amendement, vous pouvez m'en discuter... en
discuter avec moi, même avant de les déposer. Parfois, ça accélère les
discussions et ça nous permet de rencontrer nos objectifs communs et de
s'assurer que le travail parlementaire soit le plus compatible avec les
intérêts des Québécois et des Québécoises.
Vous souvenez, on a entendu des groupes,
18 groupes, il y en a 33 qui ont déposé un mémoire, on a analysé les
recommandations dans tous ces mémoires, c'est pour ça qu'il y a un certain
nombre d'amendements, mais on va les analyser un après l'autre.
Donc, on touche, bien sûr, à la Loi sur
les accidents de travail, les maladies professionnelles, le Code du travail, la
loi sur les normes, la loi santé et sécurité et la loi modernisant le régime de
santé et sécurité du travail. Je ne veux pas en dresser une liste exhaustive,
là, mais j'aimerais rappeler les grandes lignes : possibilité pour une
personne de s'absenter si elle se conforme à une règle de santé publique, on
l'a vu pendant la pandémie, ou une règle de sécurité publique, par exemple un
sinistre, un feu, une inondation, sans risque de perdre son emploi, puis on
vient raffermir aussi la protection du lien d'emploi dans un contexte comme
celui-là, on renforce la protection du revenu en cas de lésions
professionnelles pour ce qu'on appelle les Chauffeurs inc., les personnes
faussement incorporées...
M. Boulet : ...incorporées.
Vous avez vu qu'on avait une nouvelle définition qu'on a bonifiée suite aux
représentations de l'Association du camionnage du Québec. Souvenez-vous des
propos de Marc Cadieux. On ajuste la méthode de calcul de l'indemnité de
remplacement de revenu parce que le calcul de l'indexation pouvait défavoriser
certaines personnes, notamment les personnes qui travaillent au salaire
minimum.
La déjudiciarisation des recours. Bien, en
matière d'arbitrage de griefs, on s'est beaucoup appuyé sur le consensus au
Comité consultatif du travail et de la main-d'oeuvre. Vous le savez, les
patrons, les syndicats ont travaillé ensemble. Donc, il y a des délais. Il y a
une révision des règles de preuve, de procédure. Il y a des critères améliorés
pour permettre au TAT, au Tribunal administratif du travail de déterminer quand
et en vertu de quels motifs la personne peut être relevée de son défaut de
respecter le délai.
Renforcement, recours à la médiation
préarbitrale, la conférence préparatoire. C'est pour s'assurer qu'on respecte
les enseignements de la Cour suprême. L'arbitrage de griefs, c'est vu et ce
doit être une procédure expéditive pour permettre aux parties de se rencontrer,
de faire de la médiation, de négocier et, ultimement, d'être entendues devant
un arbitre de griefs qui respecte les règles, et notamment en ce qui concerne
la divulgation de la preuve qui va être devenue obligatoire.
Le 1er octobre, vous le savez, est
entré en vigueur le règlement sur la prévention et la participation des
travailleurs et travailleuses. Ça, c'est un règlement adopté par le CA de la
CNESST. En santé puis en obligation, ça va se déployer plus progressivement
pour respecter la capacité organisationnelle, pour éviter des ruptures de
service, pour éviter un nombre d'heures de libération qui aurait provoqué
beaucoup d'ETC additionnels, ce qui n'aurait pas été possible dans ces deux
secteurs-là. Mais je le répète, c'est une avancée considérable par rapport à
l'état actuel des choses. Puis la prévention et la participation dans des
secteurs, comme ces deux secteurs là, pour moi, c'est aussi prioritaire, mais
il faut le faire de façon intelligente. Puis déployer des nouveaux mécanismes,
ça prend du temps, ça prend de l'accompagnement, puis beaucoup de pédagogie. Et
évidemment, avec ce qu'on appelle le régime intérimaire, qu'on a bonifié, ça va
être possible d'atteindre nos objectifs de diminution de la fréquence et de la
gravité des lésions professionnelles, donc...
Bon, je le répète, évidemment, ça nous est
apparu fondamental de respecter la capacité organisationnelle des établissements.
On a bonifié les fonctions associées aux mécanismes de prévention, notamment
pour les comités de santé et de sécurité du travail et les représentants en
santé, sécurité du travail. Donc, quand ce régime particulier-là va être
adopté, ça va venir remplacer les dispositions du règlement qui est entré en
vigueur le 1er octobre, règlement, essentiellement, qui est adopté par le
conseil d'administration de la CNESST qui, je vous le rappelle, là, pour les
personnes qui sont un peu moins familières, regroupe les associations
patronales et les syndicats. Donc, c'est un conseil d'administration paritaire
et aussi représentatif de nos milieux de travail.
Il va y avoir d'autres mesures, M. le
Président. Nous, on est prêts à débuter l'étude détaillée. Ça va être encore
une fois, je le répète, une occasion d'échanger. Il n'y a pas un projet de loi
qui est demeuré le même, ou, en tout cas, pas à ma connaissance, pas dans notre
cas, qui est demeuré intégralement le même du début à la fin. Peut-être, mon
collègue d'Hochelaga-Maisonneuve, mais, je vous dis, en ce qui concerne nos
projets de loi, notre projet de loi n° 101, il est perceptible. Moi, je
vais être attentif, je vais collaborer, puis c'est une étape qui est vraiment
importante. Puis je trouve que c'est l'étape la plus importante d'écoute et
d'ouverture. Voilà. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Allaire) : Merci
à vous, M. le ministre. On enchaîne avec l'opposition officielle. Mme la
députée de Westmount Saint-Louis, vous avez 20 minutes. La parole est à
vous.
Mme Maccarone : Merci
beaucoup, M. le Président. À mon tour de vous saluer et saluer tous les
collègues ici aujourd'hui. Je suis vraiment contente de participer à l'étude
détaillée de ce projet de loi. C'est... je suis ici en renfort de mon collègue
la députée de Bourassa-Sauvé. Puis c'était un plaisir de collaborer avec eux et
d'apprendre aussi avec vous. Comme j'avais dit au ministre hors micro, c'est un
sujet pour moi qui est un peu une nouveauté, c'est loin de sécurité publique et
la famille...
Mme Maccarone : ...mais je me
mets au travail parce que je vois comment que c'est d'une grande importance, ce
type de réforme.
• (12 heures) •
Alors, je salue les commentaires de M. le
ministre, parce que j'ai l'intention de collaborer et d'apprendre. Et je suis
contente de savoir qu'il y aura une ouverture en ce qui concerne des potentiels
amendements ou bonifications de ce projet de loi. Il y a... Je suis d'avis,
comme M. le ministre, à date, de mes sept ans comme députée, il n'y a aucun
projet de loi qui n'est pas perfectible, qui n'a pas eu des amendements à la
suite du dépôt de la première mouture. Pourquoi? Parce que les lois que nous
sommes en train de débattre ici... Puis, ça, c'est quelque chose que j'ai
appris de l'ancienne députée Lise Thériault, qui m'a toujours dit qu'au début,
quand on commence un projet de loi puis le débat sur un projet de loi, ça
appartient à la communauté et non aux députés.
Alors, c'est pour ça que je trouve que
c'est très important qu'on prend en considération toutes les suggestions, les
modifications qui nous ont été apportées par les membres de la communauté, les
parties présentes... prenantes qui sont venues témoigner, soit en commission
parlementaire, ou qui ont déposé des mémoires ou même des questions que nous
voyons actuellement dans notre... au Greffier, où on peut voir les commentaires
de nos citoyens dans chacun de nos comtés, que je trouve fort intéressants. Et
ça nous aide, je pense, à comprendre l'impact, suite à une adoption éventuelle
de ce projet de loi, sur le terrain. Puis, ça, c'est très important parce que
c'est un projet de loi qui... et, c'est vrai, c'est un omnibus, c'est assez
technique et très complexe. Le ministre a dit que, oui, c'est sûr, il y a
certains aspects qui vont prendre du temps, de l'accompagnement, de la
pédagogie, mais aussi du budget. Alors, je pense que nous devons être sensibles
à ceci parce qu'on comprend que ça amène un certain frein à des éléments de ce
projet loi qui sont peut-être un peu plus contentieux. Mais je reconnais encore
une fois la grande expertise des gens qui ont déjà témoigné puis qui nous
accompagnent dans ce processus. Entre autres aussi l'équipe qui accompagne le
ministre, les gens du ministère, parce que je reconnais qu'il y a quand même
une grande expertise. Et nous avons probablement l'intention de collaborer et
demander de l'aide et du renfort, ici, de l'opposition officielle.
Il y a des éléments, certes, qui sont très
importants puis très positifs en ce qui concerne le projet loi 101. Comme
par exemple que l'indemnisation ne soit pas inférieure au salaire minimum, ça,
c'est une avancée. Et aussi qu'on... le projet de loi améliore aussi
l'indemnisation pour ceux dont le salaire dépasse le minimum assurable. Il y a
des projections qui se sont ajoutées pour les salariés en cas d'absences liées
à des situations exceptionnelles que, nous reconnaissons, est très important.
Ça reste qu'il y a quand même des
préoccupations en ce qui concerne la mise en œuvre de ces avancées. Comme la
Fédération québécoise des municipalités nous a demandé une étude d'impact pour
voir vraiment comment ceci sera appliqué. C'est une avancée, le ministre l'a
déjà dit, exemple, si, en cas de sinistre ou quelque chose d'une grande
importance. Mais il va y avoir un impact sur nos plus petites municipalités. Et
je pense que ça va être important de prendre ça en considération. Comme vous,
M. le Président, votre comté est très important, il va y avoir un impact
majeur. Ça fait qu'il faut vraiment être à l'écoute de ces préoccupations.
De réduire les délais dans le processus
d'arbitrage et griefs, je pense que, ça aussi, c'est une avancée. Par contre,
nous avons aussi entendu la Fédération des professionnels et professions...
professionnels et professionnelles municipaux qui proposent aussi des
recommandations constructives et réalistes pour améliorer l'application dans
nos milieux de travail.
Alors, on fait face à énormément
d'amendements qui ont été déposés juste ce matin. Ça fait qu'on n'a pas eu la
chance d'en prendre ça en considération. Ça fait qu'on va regarder ça avec
beaucoup de soin. Parce que, ce que je constate, puis j'espère que c'est le
cas, c'est que tous les amendements vont quand même venir en réponse des
préoccupations qui ont été soulevées par les groupes et les parties prenantes,
entre autres, comme j'ai dit, pour la Fédération québécoise des municipalités.
Autre chose que je dirais, c'est... j'ai
quand même des réserves, que je souhaite être rassurée ou avoir des échanges
avec le ministre en ce qui concerne l'exercice d'harmonisation technique ou une
simple amélioration des lois existantes. Parce que, souvent, on voit, dans ce
projet de loi, dans la mouture actuelle, ça se peut qu'il y ait un
amendement...
12 h (version non révisée)
Mme Maccarone : ...s'en
vient à cet égard, mais la mise en place d'un régime de prévention qui
affaiblit et limite pour les secteurs de l'éducation, de la santé et des
services sociaux, ça amène une difficulté, ça amène à un régime à deux
vitesses. Alors, ce serait à discuter puis aller en fond de cette question,
vider la question, entre autres, pour s'assurer que nous ne sommes pas en train
de laisser de côté nos travailleurs du secteur public, ce qui va avoir un
impact néfaste, entre autres, sur les femmes, infirmières puis professeures
dans nos écoles. On veut s'assurer qu'on a une protection équivalente pour tous
les travailleurs dans tous les secteurs. Alors, on souhaite que ce soit quelque
chose qui sera adressé.
Autre chose que nous souhaitons s'assurer
que ceci sera adressé, c'est... Il y a des délais stricts qui sont déposés qui
pourraient remettre en question les pratiques courantes et flexibles. Ça, c'est
quelque chose qui a aussi été soulevé lors des auditions. Alors, en espérant
que ça, c'est quelque chose qui serait adressé avec les amendements qui ont été
déposés. Par exemple, la divulgation de la preuve 30 jours avant l'audience,
ça a été critiqué par beaucoup de groupes qui demandent plutôt 45 jours.
Ils ont besoin de cette mesure de flexibilité. Les dossiers médicaux des
travailleurs, il y a quand même des préoccupations aussi qui ont été soulevées.
Et aussi les 10 jours d'absence rémunérés pour les personnes victimes de
violence conjugale. On espère qu'il y aura quand même une grande écoute de la
part du gouvernement.
Ça fait que, comme je l'ai dit, M. le
Président, je vois qu'il y a quand même beaucoup d'avancées. Je vois que ça se
peut qu'on ait des reculs aussi, particulièrement touchant les réseaux de santé
et sécurité des travailleurs dans ces secteurs qui sont cruciaux pour notre
société. Alors, le ministre peut compter sur mon entière collaboration. Je vais
poser des questions pour la bonne compréhension des étapes de cette étude
détaillée, mais je souhaite travailler ensemble au nom de tous les citoyens et
les travailleurs qui seront impactés par ce projet de loi lors de son adoption
éventuelle. Merci beaucoup.
Le Président (M. Allaire) :
Merci à vous, Mme la députée de Westmount—Saint-Louis. On enchaîne avec le
deuxième groupe de l'opposition avec le porte-parole officiel. M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve,
vous avez 20 minutes.
M. Leduc : Merci, M. le
Président. Très heureux d'être avec vous ce matin. Dans le fond, je veux
commencer par lancer quelques fleurs. On verra si un pot ou deux suivront, mais
commençons par les fleurs ce matin. Je pense que ça va de soi. Le ministre du
Travail et moi avons derrière nos cravates respectives 13 ou 14 projets de
loi ensemble. Je ne me rappelle jamais du chiffre exact, mais ça commence à
faire beaucoup. Ça fait donc sept ans qu'on travaille ensemble et je dois
souligner que le ministre du Travail a la bonne pratique d'envoyer d'avance le
plan de travail, l'ordonnancement des articles, parce que c'est rare avec M. le
ministre qu'on fasse le numérologique, là, de 1 à 100. Peu importe le nombre
exact, il préfère jouer avec les chiffres, puis c'est bien correct. Et il a la
bonne pratique de nous l'envoyer d'avance pour qu'on puisse se préparer, les
oppositions, parce que ça prend du temps, réfléchir aux amendements, etc., consulter
des partenaires si on sait d'avance par quel bout du gros projet de loi... Parce
que c'est rarement des petits projets de loi avec M. le ministre. Il a quand
même des bonnes réformes. Si on sait par quel bout commencer, c'est plus facile
pour nous. Alors, là-dessus, on le salue.
Deuxième fleur que je lui lance. Il a aussi
la bonne pratique d'envoyer, à l'ouverture de la séance, ses amendements. Et je
n'avais pas constaté qu'il l'avait fait. C'est la prise de parole de ma
collègue à l'instant, donc ma collègue de l'opposition officielle, qui m'a fait
remarquer qu'ils sont tous en ligne dans le Greffier. Il y en a, mon Dieu!, 30,
40. Il y en a beaucoup. Je n'ai pas eu le temps de, tous, les regarder, bien
sûr. On verra si c'est, toutes, des bonnes nouvelles, mais espérons. Espérons
que c'est des bonnes nouvelles. Mais en tout cas, sur la forme, je salue encore
une fois la bonne pratique du ministre. Je ne sais pas s'il pourrait passer le
mot à ses collègues, au conseil des ministres, des autres ministères, pour
faire exactement la bonne pratique qu'il a, qu'il fait, parce que c'est bien la
pratique pour nous aussi. Ça nous permet d'une part d'éviter d'écrire des
amendements pour rien si jamais il a déjà prévu des choses. D'ailleurs, je
constate qu'il y en a certains qu'on avait commencé à écrire et qu'on n'aura
pas besoin de déposer, notamment sur le processus de négos qu'il retire au
complet. Mais bref, encore une fois, sur la forme, merci. Ça facilite beaucoup
notre travail.
Sur le projet de loi n° 101 en tant
que tel, il y a plein d'éléments sur lesquels je ne pourrai pas aller en
profondeur parce qu'on aura le temps de le faire. Je vais quand même mentionner
une histoire du processus de négo quand même, M. le Président, parce qu'il
était hautement contesté, c'est-à-dire que l'ensemble des organisations de
travailleurs et des organisations patronales étaient extrêmement critiques...
M. Leduc : ...cette méthode.
Ce qu'on avait compris, entre les branches, c'est que c'était plutôt une
demande de la CNESST en tant que telle, mais qui ne suscitait pas l'adhésion de
personne d'autre finalement. Donc, je comprends que le ministre l'a mise au
jeu, mais je comprends qu'il semble avoir compris que ce n'était pas... que la
greffe n'avait pas pris au sein du milieu du travail dans son sens large. Donc,
je constate, là, avec trois, quatre clics que j'ai eu le temps de faire avant
de prendre la parole, que ce processus-là est retiré. C'est une bonne chose.
• (12 h 10) •
Cependant, je ne peux pas m'empêcher par
contre de critiquer, de manière assez frontale... puis on verra, ça, je n'ai
pas... je ne suis pas sûr qu'il va l'avoir modifié par exemple, on verra bien,
mais toute la question de la prévention dans les domaines de la santé et de
l'éducation. Vous savez, M. le Président, je disais à l'instant qu'on a
derrière la cravate, M. le ministre et moi, de nombreux projets de loi, de
nombreuses heures d'études détaillées. Le plus gros projet de loi qui nous a
occupés, c'était à peu près au même moment du précédent mandat, donc alentour
de 2020-2021. Je pense que c'était justement... à la rentrée de la dernière
année, qu'on avait conclu le projet de loi n° 59, monstrueux projet de loi
de 450 articles, si ma mémoire est bonne, au-delà de 190 h d'études
détaillées. Quand j'en parlais aux gens, j'utilisais l'image d'une bataille de
tranchées, parce qu'à chaque fois qu'il y avait plein de trucs, on faisait une
petite passe d'escrime, le ministre et moi.
Et, un des points forts de cette
réforme-là, avant même son étude détaillée, c'était son dépôt. Parce que, quand
il avait déposé sa réforme, le ministre avait laissé entendre que ce serait une
importante réforme, qu'il y aurait des avancées significatives puis qu'on
réglerait des vieux problèmes qui traînaient depuis souvent 30, 40 ans
dans le domaine de la santé et sécurité au Québec, notamment les exclusions de
pans entiers de travailleurs et de travailleuses dans le volet de la prévention
de la santé et sécurité.
Et, quand on a constaté sa première
version de sa réforme, c'était clair pour tout le monde que ce n'était pas ça
qui se passait, pour le domaine de la santé et de l'éducation. On avait deux
immenses domaines. Parce que, dans le fond, la prévention de la santé et sécurité,
c'est un peu divisé par secteurs d'activité. Puis il y avait des secteurs qui
étaient jugés prioritaires. Je vous donne par exemple les mines, les emplois
plus physiques et souvent plus masculins, disons qu'il y avait... il y avait là
une espèce de lecture assez sexiste, d'un point de vue historique, sur qui qui
se fait des lésions professionnelles ou qui contracte des maladies
professionnelles dans la vie. On avait décidé que c'étaient juste des hommes
qui vivaient ça dans la vie puis c'étaient juste ceux qui avaient le droit
d'avoir de la prévention. Or, deux immenses secteurs, la santé et l'éducation,
où... qui sont composés majoritairement de femmes en matière de travailleuses
et, woups!, où l'État est employeur principal, étaient exclus.
Et, dans sa première mouture de son projet
de loi, le ministre avait déposé une mouture où est-ce qu'il y avait encore une
fois une discrimination. Donc, il donnait un petit peu plus que rien, parce
qu'il n'y avait rien avant, mais il ne donnait pas pleinement les outils de
prévention et les heures de libération, notamment pour faire de la prévention à
la santé et l'éducation, comme c'était revendiqué et consensuel dans la société
civile depuis des années. Il avait dû reculer. Il avait dû reculer.
Et, sur ces articles-là, il avait décidé
de jouer un autre jeu. Puis, là-dessus, on a... on a valsé un peu, le ministre
et moi, on a joué au tango. Parce que, voyant l'impasse et sentant que s'il
fallait mettre un chiffre exactement sur ces libérations-là et sur ces deux secteurs
là, on... probablement qu'on n'y arriverait pas, à découdre ce gros morceau
qu'était le projet de loi n° 59, il a décidé d'envoyer ça dans la cour du
CA de la CNESST, de dire : C'est un règlement. On pellette un peu en avant
en disant : Bien, les patrons, les syndicats se parleront, conviendront
des heures de libération et des outils de prévention appropriés par secteurs.
Et là on allait leur donner un certain délai.
Moi, j'étais à l'aise avec ce film-là.
Mais j'avais dit... M. le ministre et moi, dans un de nos nombreux échanges à
ce moment-là, autant publics que privés, que j'étais prêt à jouer dans son film
à la seule condition qu'il y avait une date limite, que ce n'est pas vrai que
ça allait être pitché dans le CA de la CNESST puis que ça pourrait prendre cinq
ans, 10 ans avant qu'un règlement consensuel atterrisse sur la table du
ministre. Il fallait donner un espace-temps limite pour que le CA de la CNESST
fasse son travail.
À ce moment-là, on avait négocié, on avait
discuté, le ministre et moi, puis on... il est arrivé avec un délai de quatre
ans, si je ne me trompe pas. C'était une disposition transitoire. J'ai ressorti
d'ailleurs tantôt l'article en me préparant. C'était l'article du projet de loi
n° 300, une disposition transitoire qui parlait, à ce moment-là, donc, du
6 octobre 2025. Le 6 octobre 2025, c'est quand, M. le Président,
c'est la fin prochaine. On y est, au 6 octobre 2025. Ça me semblait très
loin en 2021 quand on a voté ça à l'Assemblée, ici, mais on est au 6 octobre
2025.
Il faut savoir par contre que le
règlement, bien, il est prêt depuis longtemps. Il est prêt depuis longtemps. Le
règlement, là, il y a beaucoup de monde qui ont travaillé là-dessus. Le
ministère du Travail a embauché ou du moins délégué Mme Lise Lavallée,
médiatrice conciliatrice, qui était retraitée du ministère du Travail...
M. Leduc : ...qui avait reçu
le mandat, costaud quand même, de présider les travaux réglementaires à la
CNESST. Là, d'habitude, le CA de la CNESST, c'est les patrons et les syndicats.
Techniquement, l'État est un patron, hein? L'État employeur, en santé, en
éducation et dans d'autres domaines est un patron, mais, historiquement, c'est
des sièges qui sont réservés aux patrons plus du secteur privé. Cependant, on
allait déterminer des seuils de prévention ou des outils de prévention pour le
secteur public. Donc, l'État, un moment donné, s'est dit : Bien, peut-être
que je devrais avoir avantage à faire partie des discussions, et c'était tout à
fait légitime. Ils ont donc mandaté un représentant du Conseil du trésor qui,
entre février 2022 et septembre de 23, a travaillé, a suggéré des données, a
participé à tout l'ensemble des discussions pour qu'on atteigne un règlement
qui fasse l'unanimité. Et c'est ça qui est arrivé.
Le CA de la CNESST a finalement adopté à
l'unanimité, aucune voix dissidente, le règlement pour une première publication
à la Gazette officielle le 3 janvier 2024. Ça, ça fait plus d'un an
maintenant, ça va bientôt faire deux ans, janvier 2024. Qu'est-ce qui s'est
passé? Bien, ça a été publié. Ça a traîné longtemps sur le bureau du ministre.
Puis là, après la publication à la Gazette, il a commencé à avoir du
monde, dans le ministère de la Santé en particulier, qui a fait pression. Ils
ont même fait pression pour que le règlement soit complètement annulé en
disant : Bien là, c'est bien trop, ça ne marchera pas. Il avait participé,
via le Conseil du trésor, à ces discussions-là, là, il savait que c'était en
cours, il savait que c'était en discussion depuis des années. On en discutait
ouvertement depuis des années, M. le ministre et moi. Le PL n° 59
avait été l'objet de plusieurs heures d'études détaillées, on ne peut pas
plaider la surprise, mais ils ont quand même commencé à faire des pressions
puis les pressions se sont rendues au Conseil des ministres. Puis là, oups, il
y a le secteur de l'éducation aussi, toujours avec le ministre de l'Éducation
qui a commencé a avoir des pressions au Conseil des ministres.
Là, ils ont tenté de faire des tentatives
de médiation, des tentatives de compromis, les syndicats ont été ouverts à
trouver des compromis, mais il n'y avait rien à faire, les ministères de la
Santé puis de l'Éducation disaient : Non, on ne veut rien savoir, il n'y
en aura pas, de compromis sur ce règlement-là. Ça fait que, là, on est tombé
dans une situation où le ministre était coincé. Il y avait une date limite dans
la loi, qu'il avait lui-même déterminé avec nous, qui était le 6 octobre
2025, avec la balle qu'il avait donnée au CNESST d'adopter un règlement. Ça
fait qu'il était vraiment coincé entre ces deux affaires-là, et là on nous a
pondu le projet de loi n° 101 qui donne... qui baisse
les seuils, qui baisse les seuils de libération qui ont été convenus
unanimement au CA de la CNESST en santé et en éducation, alors que,
rappelons-le, le secteur de la santé...
J'ai mis la main sur une lettre qui avait
été envoyée aux deux ministres, de la Santé et l'Éducation, au premier ministre
Québec et au ministre Jean Boulet par les neuf syndicats du secteur... bien,
qui ont des représentants dans le secteur public. Ils disent la chose
suivante : «L'état des lieux dans nos secteurs d'activités, santé et
éducation, est alarmant. Le secteur de la santé et des services sociaux
remporte la Palme d'or pour le nombre de lésions professionnelles avec
25 % du nombre total de réclamations, ça avait haussé jusqu'à 46 %
lors de la pandémie, comparativement à 8,4 % de réclamations pour le
secteur de la construction. Le secteur de l'éducation, quant à lui, ne cesse de
faire les manchettes sur la violence qui est endémique et l'enquête de l'INSPQ
sur la santé psychologique des personnes de l'éducation dévoile un portrait
dévastateur de la situation». Je vous épargne le reste de la lettre, mais, en
gros, on souligne à gros traits qu'il y aurait matière de donner les pleines
libérations puis les pleins outils aux dossiers de la santé et de l'éducation
en matière de prévention de santé et sécurité. Puis le ministre, ce qu'il a
fait, dans le fond, c'est très simple, il a rompu sa parole. Il a rompu sa
parole.
Il s'était engagé à faire confiance aux
travailleurs puis aux patrons. Il a même délégué des gens du Conseil du trésor.
Il y a eu un consensus. On s'était entendu, dans le PL n° 59,
que c'était par le règlement que ça allait passer puis que ça allait être
appliqué avant le 6 octobre 2025. Mais devant l'impasse, qu'est-ce qu'il
fait? Il cède, il cède au chantage du ministère de la Santé, il cède au
chantage du ministère de l'Éducation. Plutôt que de défendre les travailleurs
et travailleuses, il va sur toutes les tribunes pour dire qu'il va faire son
projet de loi antisyndical sur les cotisations syndicales parce qu'il se souci
de... il fait ça pour les syndiqués. Bien, ça aurait été le fun qu'il le fasse
pour les syndiqués aussi quand il était matière de les défendre contre des
employeurs au ministère de la Santé puis de l'Éducation qu'il n'était pas game
de mettre au jeu des heures de libération dans le sens du monde pour éviter que
ce soit encore le secteur de la santé qui se ramasse avec des lésions puis des
accidents de travail à pelleté. Ça aurait été le fun qu'il défende les
syndiqués à ce moment-là. Ça fait que, visiblement, la défense des syndiqués,
ici, c'est à géométrie variable.
• (12 h 20) •
Il est encore temps, par exemple. Pourquoi
il est encore temps, M. le Président? Parce que, là, le règlement, il a été
adopté par le Conseil des ministres. Il n'avait pas le choix, c'était dans la
loi. S'il ne le faisait pas, il était illégal, il ne respectait pas la loi. Il
l'a adopté, il est donc en fonction depuis quelques jours, si je ne me trompe
pas, mais il l'a adopté en se disant : Ce n'est pas trop grave, on va
l'adopter, le PL n° 101, assez rapidement, ce qui
fait que le délai entre la mise en vigueur du règlement puis l'adoption du
PL...
M. Leduc : ...du pl n° 101 et
son entrée en vigueur, il va se passer quoi, deux ou trois, peut-être quatre
semaines où est-ce qu'en effet, là, le secteur des santé et éducation aura
droit aux pleines libérations puis aux pleins outils en matière de prévention.
Mais ça ne sera pas grave, ça va être juste une couple de mois. Ça fait que, tu
sais, serrez les dents, chers gestionnaires de Santé Québec. Vous n'en avez pas
trop longtemps à endurer. J'arrive et je vous libère de ce fardeau qui est la
prévention de santé et sécurité pour les milliers et les milliers de personnes,
principalement des femmes, qui travaillent en santé et en éducation. C'est
gênant, M. le Président, ce n'est pas compliqué. C'est trahir sa parole, c'est
de trahir les travailleuses syndiquées de ces secteurs-là. Et moi, je trouve ça
important dans un contexte qui est celui de la négociation, un contexte où le
ministre plaide tout le temps qu'il faut des ententes, qu'il faut que les gens
se parlent, qu'il faut qu'ils trouvent des consensus. Bien là, il vient briser
un consensus. C'est triste, c'est triste. Alors, vous pouvez compter sur nous,
M. le Président, pour maintenir la pression sur ce sujet-là.
C'est triste parce que ça noircit encore
plus un bilan somme toute assez catastrophique du ministre du Travail dans les
dernières semaines, dans les derniers mois. On sort d'une période des questions
où ma collègue de Bourassa-Sauvé a posé la question, que j'aurais pu reprendre
mot pour mot, sur la formation en construction. On lui avait dit : Ça ne
sert à rien, là, de sortir du gros cash pour payer du monde. Puis on avait déjà
des trucs qui sortaient, qui disaient : Attention! Les gens vont se faire
former, puis ils ne s'en servent même pas, ils reviennent... On lui a dit, on
l'a averti : C'est du gaspillage. Pas grave, il signe un chèque. Puis là
les chiffres sortent, puis on n'a même pas la moitié qui se ramasse dans la
construction. On lui avait dit; il ne nous a pas écoutés.
Même chose. On a appris en juillet, par un
article du Devoir, Les chiffres erronés derrière la réforme Boulet du droit du
travail, de M. Carbasse, 17 juillet 2025. Tout le long de ce projet de loi là,
le ministre disait : 91 % des arrêts de travail au pays recensés dans
la Belle Province, au Québec. Ce n'était pas vrai. Son propre ministère avait
les bons chiffres. Moi, j'aimerais ça l'entendre tantôt, qu'il nous explique.
Avait-il accès à ces bons chiffres de son propre ministère pendant des semaines
qu'il nous plaidait 91 % des grèves au Québec... étaient faites au Québec
par rapport au pays? Ce n'était pas vrai. Puis il le savait, ses propres
chiffres. Alors, est-ce qu'il va plaider que, non, non, je ne le savais pas,
mon propre ministère ne m'a pas informé? J'aimerais ça qu'il nous en parle un
peu plus parce que ça, ça a beaucoup entamé sa crédibilité.
Le Président (M. Allaire) : Oui,
allez-y.
Mme Jeannotte : ...je trouve
que le député prête des intentions à notre ministre, puis je trouve que ça va
un peu trop loin, là. J'aimerais ça que le ton change, ce serait apprécié. On
est ici pour collaborer, faire avancer un projet de loi pour les travailleurs.
On n'est pas ici pour s'insulter.
Le Président (M. Allaire) : Merci,
Mme la députée Labelle. Honnêtement, M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve, je
me suis retenu à quelques reprises. Je vous demande juste de faire très
attention pour ne pas prêter des intentions. C'est très important. On ne peut
pas imputer des motifs indignes à un collègue.
M. Leduc : À quel moment
exactement?
Le Président (M. Allaire) : Vous
avez employé le mot «trahir» tantôt, je vous ai laissé aller. Mais, encore une fois,
on est dans les remarques préliminaires, là, je laisse ça un peu plus lousse,
là, mais sachez que je vous demande de faire attention. Alors, vous pouvez
continuer. Merci.
M. Leduc : Parfait. Merci
beaucoup. Il me reste combien de temps, M. le Président?
Le Président (M. Allaire) : Il
vous reste cinq minutes.
M. Leduc : Merci bien. Je
vais faire attention aux mots que je vais utiliser, il n'y a pas de problème.
L'autre catastrophe du ministre qui
noircit son bilan également, malheureusement, c'est les conflits de travail
qu'on a connus cet été, en particulier... puis celui qu'on connaît en ce moment
à Montréal de la STM. On lui a dit de... C'est pour ça que j'insiste là-dessus,
parce qu'on va lui dire aussi des affaires dans le projet de loi n° 101,
on va l'avertir d'affaires qui vont mal aller. J'espère qu'il va nous entendre,
parce que là le dossier commence à être assez épais sur des choses qu'on lui a
dit, qu'il ne nous a pas écoutés, puis qui se produisent. On lui a dit, dans le
projet de loi n° 89 : Faites attention, parce que ce qui va se
passer, c'est que les patrons négociateurs vont s'asseoir sur leurs mains parce
qu'ils savent que le patron... pas le patron, mais le gouvernement va avoir de
la pression pour venir casser la grève. Qu'est-ce qui se passe en ce moment à
la STM? Tout ce qu'on entend là, c'est exactement ça. Il n'y a pas de volonté
de négocier du point de vue de l'employeur. Il refuse les différentes
propositions de conciliation... pas de conciliation, pardon, mais de compromis
qui sont mis sur la table par la partie syndicale, précisément, parce qu'ils
savent que l'entrée en vigueur de la loi, c'est d'une semaine à l'autre. C'est
bientôt, c'est début novembre, si mon...
Le Président (M. Allaire) : Mme
la députée de Huntingdon.
Mme Mallette : ...j'aimerais
ça qu'on revienne vraiment au projet de loi, s'il vous plaît.
Le Président (M. Allaire) : Je
comprends. On n'est pas à l'étude détaillée. Je remarque qu'on est aux
remarques préliminaires. C'est quand même assez vague. Donc, vous pouvez
poursuivre. Merci.
M. Leduc : Je constate que mes
propos font réagir, mais il faudrait aussi assumer du côté du gouvernement
qu'il y a des erreurs importantes qui ont été faites. Puis ce n'est pas des
erreurs qui sont des surprises. Moi, mes collègues des autres oppositions, des
gens de la société civile, on vous avait avertis que c'est ça qui arriverait,
puis c'est ça qui arrive, ça fait qu'il faudrait assumer. Moi, je n'ai pas
plaisir à souligner ça aujourd'hui, j'aurais aimé mieux me tromper, M. le
Président. Mais là j'espère qu'il y a des leçons qui vont être comprises de
l'autre bord, qui vont être entendues...
M. Leduc : ...Je vais
terminer là-dessus, M. le Président. Le ministre, il sait que je l'apprécie. On
a une belle relation. On se connaît depuis plusieurs années, on travaille bien
ensemble. Mais cet été, on a aussi appris qu'il y avait un projet de loi qui
avait été travaillé en secret, qui avait été travaillé sans la collaboration du
CCTM, où c'est des gens qui sont d'habitude, le patronat et les syndicats, qui
sont en train de travailler ensemble pour produire...
Le Président (M. Allaire) :
C'est le terme «travailler en secret». Je vous demande de faire attention
encore une fois. Vous prêtez des intentions. Vous pouvez continuer.
M. Leduc : La culture,
c'est que, d'habitude, quand on fait des réformes de cette importance-là, on
assoit les patrons et les syndicats ensemble, puis on trouve des compromis,
puis on trouve des pistes d'avenir. Ils n'ont même pas été au courant qu'on
allait commencer à aller jouer dans la formule Rand, comme le ministre
s'apprête à le faire. Donc, moi, je trouve ça dommage parce que le ministre est
en train de noircir son bilan. Il a fait des belles affaires en droit du
travail, mais ça s'enligne pour se terminer en queue de poisson. J'espère que
sur le PL n° 101 on sera capable de trouver des beaux compromis et
j'espère qu'on ne verra pas la couleur de son projet antisyndical sur les
cotisations. Merci.
Le Président (M. Allaire) :
Merci. Encore une fois, vous avez prêté des intentions, M. le député, là,
«antisyndical». C'est un terme que, là, je vais tolérer parce qu'on est dans
les remarques préliminaires, mais dans l'étude détaillée, je serai plus ferme. M.
le député de Jean-Talon, je vous cède la parole pour vos remarques
préliminaires à vous. Vous avez 20 minutes.
M. Paradis : Merci, M.
le Président. Je vous salue chaleureusement. De même que... de même que tous
mes collègues de l'opposition et mes collègues de la banquette gouvernementale.
M. le ministre, mes salutations. J'écoutais mon collègue
d'Hochelaga-Maisonneuve, là, puis ça fait quelques fois que je l'entends
répéter le nombre de projets de loi qu'il a faits avec vous. Alors que là, ça
vient de me donner l'idée de le faire à l'instant. Ouais, mais moi, ça fait
combien? Parce qu'il me semble que ça fait quelques-uns. Et je vous annonce, M.
le ministre, que malgré le fait que j'ai été assez récemment élu, c'est déjà la
sixième fois qu'on se retrouve en commission parlementaire. Donc, ça fait... Ça
veut dire qu'on commence aussi à avoir des habitudes de travail dans cette
commission. Et je pense que c'est important que les gens entendent ce genre de
commentaire là, qu'on entend souvent beaucoup de choses sur la joute politique,
mais la réalité, c'est que les parlementaires, lorsqu'on est en commission, on
veut travailler dans l'intérêt public, et il y a beaucoup d'échanges
constructifs entre nous. Et moi, je veux reconnaître que le ministre est un de
ceux avec qui c'est agréable de travailler, qu'il a des méthodes de travail qui
facilitent la prise en considération, comme on le disait tout à l'heure, des
amendements, le plus tôt possible. Il nous annonce ses intentions. On se parle.
Et ça, je pense que c'est... c'est bon pour notre démocratie. C'est bon pour
notre travail de législateurs parce que c'est un travail qui est complexe. Et
il y a eu d'autres cas que je ne nommerai pas ici, mais où on reçoit
l'information à la toute dernière seconde. On est difficilement capables de la
traiter vu sa complexité. Le gouvernement, lui, a eu accès à beaucoup de
travaux qui précèdent la présentation des projets de loi ou des amendements. Et
donc ça rend notre travail plus difficile. À l'inverse, quand on décide qu'on
veut faire un travail démocratique dans l'intérêt public, bien, c'est bon pour
tout le monde. Alors, je veux... Moi, je veux reconnaître cette façon de
travailler du ministre, très avenant dans nos relations. Puis c'est important
de le mentionner, il est entouré d'une équipe que je veux saluer parce qu'avant
qu'un projet de loi arrive à nous, il y a eu beaucoup de travail qui a été
effectué dans les officines du ministère, dans le bureau du ministre. On le
sait que c'est beaucoup de travail, en quelque sorte, bien là, aujourd'hui, on
arrive... Il y a eu les consultations particulières et maintenant l'étude
détaillée, c'est le moment où on le met à l'épreuve.
Donc, salutations à tout le monde et merci
à toutes les personnes qui ont participé aux consultations particulières. Je
n'ai pas pu, moi-même y assister parce que j'étais dans une autre commission
parlementaire, mais c'est important aussi de recevoir l'avis des gens, de la
société civile, des représentants des travailleurs, des employeurs, des parties
prenantes, c'est très, très, très important puis ça fait partie aussi de la
richesse de notre exercice démocratique. On veut toujours aussi que ça soit
considéré le plus sérieusement et avec le plus de détails possible. J'espère
que ça a été le cas. M. le ministre, on n'a pas eu le temps de regarder, nous
non plus, les amendements que vous déposez aujourd'hui en grand nombre, mais on
espère que c'est une façon d'orienter le travail du gouvernement.
• (12 h 30) •
Et je veux saluer aussi votre rigueur. On
sait que vous vous préparez bien, que vous travaillez beaucoup pour préparer
vos projets de loi. La rigueur sur les données, c'est important. Et je dois
joindre ma voix à celle du collègue d'Hochelaga-Maisonneuve. J'avoue que j'ai
été troublé d'apprendre dans les dernières semaines que les données qui nous
avaient été présentées et sur lesquelles on insistait lourdement dans une des
dernières fois où on était ensemble sur le projet de loi n° 89, n'étaient
pas les bonnes données. Et ça, j'avoue que ça m'a ébranlé. Vous vous
souviendrez peut-être que lors de notre première commission parlementaire
ensemble, je vous avais parlé de l'importance d'avoir des bonnes données pour
prendre les meilleures décisions...
M. Paradis : ...notamment,
dans le monde du travail, c'était à l'époque du projet de loi sur les mesures
visant à lutter contre le harcèlement en milieu de travail. Donc, j'espère que,
dans ce cas-ci, les consultations particulières et les données, dont on parlera
dans nos échanges, seront des bonnes données. C'est une mesure qui est bonne
pour tout le monde et pour notre démocratie. Ce projet de loi, donc, ratisse large.
Et je suis d'une formation politique dont le fondateur, René Lévesque, avait
insisté pour répéter, pour réitérer dans les premières années de notre
formation politique, mais c'est toujours un guide, c'est toujours dans l'ADN de
notre formation politique que nous voulons agir dans l'intérêt du Québec, dans
l'intérêt des travailleurs. Ce qui est bon pour les travailleurs, c'est bon
pour le Québec. Nous allons analyser ce projet de loi sous cet angle-là.
Et, bien sûr, nous avons... nous avons
écouté avec attention le discours d'ouverture du premier ministre. Nous avons
analysé avec soin les mots qu'il a utilisés lorsqu'il vous a confié la mission
de nous présenter un autre projet de loi qui s'en vient bientôt, donc, qui est
annoncé dans le programme gouvernemental. Et on espère, on appelle de tous nos
vœux à ce que cet autre projet de loi qui est lié à celui-ci, bien sûr, soit
dans l'intérêt du Québec, dans l'intérêt des travailleurs, et ne soit pas
présenté en vue des élections qui s'en viennent en 2026 et avec d'autres idées
derrière la tête, parce qu'il y a un vocabulaire parfois, il y a une façon de
présenter les choses qui tend à laisser croire parfois qu'on veut restreindre
les droits des travailleurs pour arriver à d'autres fins.
Et j'espère que ce projet de loi va être
analysé, va être travaillé avec un état d'esprit qui est ouvert à tous les
points de vue et qui tient compte des... de ce que nous avons bâti au Québec,
de relations de travail qui font en sorte qu'il y a un équilibre qui est délicat,
et qu'à chaque fois qu'on vient jouer dans cet équilibre-là, on peut y voir des
avancées, mais il y a aussi des risques qu'il faut considérer. C'est le cas,
par exemple, quand on arrive dans des dispositions — c'est une partie
du projet de loi — bon, il y avait des dispositions qui touchaient la
transparence des retraites dans le milieu du travail des représentants des
travailleurs. Il y avait des dispositions sur les états financiers. Je
comprends, je n'ai pas analysé tous les amendements, et on me corrigera si je
me trompe, mais je comprends donc que ces dispositions-là ont été retirées du
projet de loi que nous analysons, et elles iront dans l'autre projet de loi que
nous aurons, donc, probablement analysé bientôt, celui qui a été annoncé par le
premier ministre, qui vous en a confié la mission, M. le ministre. Donc, ça, la
discussion va aller à plus tard.
Par contre, il reste des
dispositions qui touchent, par exemple, des thèmes aussi importants que ceux de
la prévention en milieu de travail. Et je comprends qu'on veut améliorer la
prévention en milieu de travail, en imaginant des nouveaux mécanismes et en
ayant des nouvelles dispositions qui visent notamment le secteur privé. Mais
les mêmes ne s'appliquent pas au secteur de la santé, au secteur de l'éducation,
là où il y a notamment une prépondérance de travailleuses et qui pourraient
constituer un désavantage pour elles. Je n'utilise pas, d'ores et déjà, le mot
discrimination, mais, en tout cas, qui pourraient les désavantager de manière
particulière. Je note aussi que l'application... le moment de l'application de
ce nouveau régime en prévention est laissé à la discrétion du ministre. Je note
aussi que ce gouvernement a annoncé son intention... en fait, il l'a réitéré,
parce qu'il l'avait dit en 2018, hein, il est arrivé avec un programme :
Nous, on va travailler sur l'efficacité gouvernementale. On va réduire la
paperasse. On va réduire les contraintes administratives.
Et là il nous ressort exactement le même
discours sept ans plus tard, en disant : Je vous avais dit ça, je ne l'ai
pas fait, puis j'ai fait la même chose pendant sept ans. Mais là, croyez-moi,
faites-moi confiance, j'ai changé, dans la prochaine année, tout va être
différent. Mais quand j'analyse ce projet de loi là et quand j'analyse
plusieurs des mesures proposées par le gouvernement dans la dernière année de
ce mandat, j'y vois beaucoup de risques d'augmentation de la bureaucratie,
d'augmentation des barrières administratives et de la paperasse. Et il va
falloir se demander si ce projet de loi là n'est pas un risque aussi de ce
côté. Il y a plusieurs autres dispositions qui touchent des domaines qui
peuvent paraître...
12 h 30 (version non révisée)
M. Paradis : ...techniques,
mais qui sont extrêmement importants, par exemple sur l'arbitrage de griefs. Et
là ça va être important aussi de voir dans quelle philosophie le ministre a
rédigé ce projet de loi, parce qu'il est... il est porteur, en quelque sorte,
de beaucoup de travaux qui ont été effectués dans les dernières années,
notamment le livre blanc qui a été déposé sur l'arbitrage, qui contenait
beaucoup de conclusions et beaucoup de recommandations. Je suis curieux de voir
pourquoi certaines des recommandations semblent avoir été considérées, d'autres
non. C'est la même chose en fait pour beaucoup des solutions proposées. Tout à
l'heure, j'entendais dire... j'entendais parler le ministre qui disait :
Bien, vous savez, sur certains points, on va dans le même sens que les comités
paritaires. Alors, pourquoi, sur certains points, on va dans le même sens que
les comités paritaires, mais pourquoi, dans d'autres, non, pas du tout, et
pourquoi, dans d'autres, on n'a pas consulté ou on n'a pas considéré la
possibilité d'avoir des discussions à la fois avec donc les représentants des
travailleurs et les représentants du secteur des employeurs? Donc, ça va être
des questions qu'on va avoir à se poser tout au long de l'étude.
Le ministre l'a réitéré aujourd'hui, et je
l'apprécie, son ouverture à avoir des discussions. Je dois dire que parfois,
sur certaines questions, oui, il y a eu possibilité de faire des petites
modifications, mais que, sur beaucoup de questions essentielles, ça n'a pas été
facile d'essayer de faire passer des propositions, des alternatives, des
options qui étaient parfois très constructives et qui étaient proposées par les
membres des trois oppositions. On espère de l'ouverture, M. le ministre, pour
avoir un dialogue franc, parce que, oui, parfois, nous aussi, on va lire les
mémoires, on écoute les parties prenantes et on arrive avec des solutions qui
sont des voies de passage qui nous permettent de faire le mieux qu'on puisse
faire comme législateur dans des domaines aussi complexes que celui du droit du
travail. Je le redis, là, cette loi touche à plusieurs lois, à plusieurs
règlements. C'est un ensemble de dispositions qui touchent différents milieux
et différents secteurs du droit du travail.
Alors, espérons qu'on va avoir des débats
constructifs, je nous le souhaite. Je nous souhaite de bons travaux, M. le
Président. Et, là-dessus, je vous cède le micro.
Le Président (M. Allaire) : Merci.
Merci à vous, M. le député de Jean-Talon. Est-ce qu'à ce stade-ci il y a d'autres
collègues qui souhaitent faire des remarques préliminaires? M. le ministre,
vous voulez soulever un point de règlement?
M. Boulet : Non.
Le Président (M. Allaire) : Non?
M. Boulet : Mais, avec le
consentement de mes collègues des partis d'opposition, j'aimerais ça parler
deux minutes du nombre de conflits de travail, si les... C'est une note
préliminaire additionnelle.
Le Président (M. Allaire) : Je
comprends, M. le ministre, ce n'est pas dans la procédure, mais, avec le consentement,
on peut tout faire. Est-ce que j'ai votre consentement?
M. Boulet : Deux minutes.
Le Président (M. Allaire) : Consentement.
Parfait. M. le ministre, allez-y pour deux minutes.
M. Boulet : Merci. C'est
important pour moi, M. le Président, parce qu'on soulève des notions de
crédibilité et de rigueur. Je veux simplement vous rappeler que, quand on a
déposé le projet de loi n° 89, puis j'ai le verbatim, je n'ai jamais
mentionné le nombre de grèves. Ce qui me préoccupait dans ce projet de loi là,
c'était la nature et l'impact des grèves sur la population, pas le nombre de
conflits de travail. À la suite de la présentation du Pr Collombat,
présentation de Mélanie Laroche, M. Murray, M. Jalette, à chaque fois, même
Éric Gingras, je reprenais les chiffres de mon ministère.
Mais, les chiffres dans mon ministère que
vous verrez sur le site Web, on calcule. Il y a un calcul qui est fait en
fonction de regroupements. Par exemple, s'il y a 30 CPE, 30 accréditations
syndicales avec le même syndicat puis une structure de négociation unique, ils
considèrent un conflit de travail. Et il y a un autre chiffre qui y va selon l'approche
plus technique, plus légale, c'est par accréditation syndicale puis c'est par
accréditation syndicale qu'en vertu du code on envoie un avis de grève. Et c'est
pour ça qu'en 2024, puis vous pourrez le constater sur le site Web, il y a 199 grèves
selon une méthode de calcul qui regroupe et 968, plus que les chiffres de
Statistique Canada, selon la méthode de calcul par accréditation syndicale,
puis je pense que vous comprenez très bien ce à quoi je réfère. En 2021, c'étaient
211 selon la méthode de calcul de regroupement et 913 par accréditation
syndicale. Donc, c'est deux données différentes. Et Statistique Canada a
utilisé celle par accréditation syndicale et par accréditation...
M. Boulet : ...syndicale,
selon mon ministère, qui reçoit tous les avis de grève au Québec, c'est même un
chiffre plus élevé que ce qui avait été publié par Statistique Canada. Ça fait
que je le dis, parce que c'est important pour moi, je n'ai jamais assis ce
PL-là sur le nombre, mais sur la nature et l'impact des conflits. Et les
chiffres que j'ai utilisés étaient toujours compatibles avec les informations
que mon ministère me donnait. Alors, deux méthodes de calcul différentes. Je
voulais simplement faire cette mise au point là, et je vous remercie, collègue.
• (12 h 40) •
Le Président (M. Allaire) :
Merci, M. le ministre. Alors, nous allons débuter la prochaine rubrique, la
rubrique... Ça va pour tout le monde? Ça va, M. le député de Jean-Talon? Par
souci d'équité, je peux vous laisser la parole, maximum deux minutes, par
contre.
M. Paradis : Je remercie le
ministre de faire cette mise au point, parce que, de fait, c'est important. Je
comprends qu'il nous dit que, oui, il y avait tels chiffres, mais, néanmoins,
les articles qui sont sortis cet été pointaient quand même avec des citations
du ministre, de l'équipe gouvernementale, du premier ministre, qui ont été
dites et redites et qui s'appuyaient sur ces chiffres-là, sans nuances, en
fait, sans beaucoup de nuances. Et là je comprends qu'on dit : Oui, il y
avait ça, mais c'est ça, l'importance de la nuance. Il y avait des chiffres, il
y avait d'autres études qui démontraient un autre visage qui n'était pas aussi
noir et blanc que celui qui a été dépeint par votre gouvernement, pas seulement
par vous, M. le ministre, mais vous savez que votre chef, le premier ministre,
s'est prononcé souvent aussi, l'équipe gouvernementale s'est souvent prononcée,
c'était sans nuance. Et là on voit que c'était — je vais me
permettre de dire simplement ceci — c'était beaucoup plus nuancé, à
tout le moins, que ce que vous avez dit l'automne dernier... le printemps
dernier, au moment où le débat battait son plein sur ce projet de loi.
Le Président (M. Allaire) : Merci,
M. le député de Jean-Talon. M. le député de Jean-Talon, merci. On enchaîne avec
le député d'Hochelaga-Maisonneuve. Vous avez deux minutes aussi.
M. Leduc : Vous voyez...
Merci. Bien là, je n'ai pas le temps de faire le verbatim exact de tout ce qui
a été dit dans ce projet de loi là, on le fera une autre fois pour savoir le
fin mot de l'histoire. Une chose est certaine, à chaque fois qu'on avait un
débat, soit en salon rouge, soit en motion... du vendredi, soit ici, dans
l'étude détaillée, le ministre faisait toujours référence à une explosion,
explosion du nombre de conflits de travail. Puis là ce que je comprends, dans
l'article Le Devoir, c'est que ce n'était pas 759 grèves au
Québec en 2024, comme le soutenait l'Institut économique de Montréal, mais
plutôt 208, qui n'était pas une explosion par rapport à la moyenne des grèves
des années précédentes. C'était-tu plus? Oui. Pourquoi? Parce qu'il y a un
contexte particulier du coût de la vie. Les professeurs étaient venus nous le
démontrer. Quand il y a un coût de la vie puis une inflation forte, les
syndicats vont aller faire plus de grèves pour aller chercher leurs bouts pour
essayer de survivre. Puis quand, au contraire, c'est le chômage qui est dans le
tapis puis le contexte économique est difficile, de ce point de vue là, il y a
un ralentissement des grèves.
Alors, on verra, là, si le ministre nous
dit : Je n'ai jamais utilisé ces chiffres-là, on fera le verbatim une
autre fois, là. Mais c'est certain qu'il plaidait une explosion, il fallait
intervenir. Il y avait une explosion des conflits de travail au Québec. Ce
n'était pas le cas. Puis on a eu un échange, je me rappelle très bien, il me
semble que c'était à l'interpellation, on a eu un échange sur la méthodologie
qui était utilisée par le ministre. À ce moment-là, s'il le savait qu'il y
avait une différente méthodologie dans son ministère puis que celui utilisé par
l'IEDM puis ces... il aurait dû le dire, il aurait dû le dire : Vous avez
raison, collègue d'Hochelaga-Maisonneuve, il y a des méthodologies, il y a un
autre chiffre qui n'est pas tout à fait le même qu'on utilise. Il ne l'a pas
fait, c'est un choix. Je le constate, je trouve ça regrettable. Merci.
Le Président (M. Allaire) :
Parfait. Merci. Ça met fin à cette discussion un peu plus générale qu'on a eue
ensemble avec votre consentement. Donc, on enchaîne au prochain bloc, là, avec
les motions préliminaires. À ce stade-ci, je sais déjà que j'ai reçu une motion
préliminaire du député d'Hochelaga-Maisonneuve. Donc, M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve,
on va l'afficher à l'écran. Je peux laisser le temps peut-être de l'afficher
justement, et vous pourrez en faire la lecture. Donc, la parole est à vous.
M. Leduc : OK «Que
conformément à l'article 244 du règlement de l'Assemblée nationale, la
Commission de l'économie du travail, avant d'entreprendre l'étude détaillée du
projet de loi n° 101, Loi visant l'amélioration de certaines lois du
travail, tienne des consultations particulières et qu'à cette fin elle entende
la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec.»
Le Président (M. Allaire) :
Merci. Vous avez 30 minutes.
M. Leduc : Merci. Vous savez
comment ça marche, M. le Président, pour avoir des groupes en audition? C'est
une prérogative du gouvernement, c'est-à-dire que, lorsqu'il y a un dépôt de
projets de loi qui est fait au salon bleu, il faut qu'un parti d'opposition,
principalement le parti... principalement le parti d'opposition officielle,
demande des consultations particulières. Ça peut être un autre parti qui le
demande, ça peut être fait après le dépôt, dans les jours qui vont suivre. Ce
n'est pas obligé à être fait en direct...
M. Leduc : ...à la période des
questions. Mais, ça, c'est la poutine, le «inside» baseball», comme on dit en
bon québécois. Et là s'en suit une espèce de discussion où est-ce que chacune
des oppositions va préparer une liste de nombre de groupes qu'elle souhaite
pouvoir entendre en commission parlementaire. Parfois, les oppositions se
parlent, des fois, moins. Ce n'est pas... Il n'y a pas de règle à ce niveau-là.
Et toutes les oppositions acheminent donc la liste des groupes réclamés au
gouvernement, au bureau du leader en particulier, qui travaille bien sûr
étroitement avec le ministre qui porte le projet de loi à l'étude.
C'est quand même compliqué, avec ce
gouvernement, M. le Président, d'obtenir des listes complètes, j'oserais dire,
d'audience. Souvent, on se fait réduire au... puis je dis «strict minimum»,
c'est un euphémisme, là, bien en deçà du strict minimum. Il faut reconnaître,
moi, je n'ai pas eu l'occasion de siéger dans les législatures précédentes.
Mais mes collègues qui l'ont fait au caucus, notamment la députée de
Sainte-Marie-Saint-Jacques, le député de Gouin, en partie à la fin du
gouvernement Couillard, nous disaient qu'il y avait beaucoup plus de
collaboration de ce côté-là, à ce moment-là, pour avoir des groupes un peu plus
nombreux. Pourquoi? Parce que, quand on modifie des lois qui touchent
directement des personnes, envoyer un mémoire puis espérer que tout le monde
lise le mémoire, ce n'est pas suffisant. Il y a des gens qui représentent des
centaines, des milliers de personnes qui veulent venir ici puis qui veulent
nous présenter ce... quoi il en retourne pour leurs membres, pour les gens
qu'ils ont... qu'ils se font mandater pour les représenter.
C'est un exercice intéressant, hein, de
venir ici, M. le Président. Moi, avant d'être député, avant d'avoir l'honneur
d'être le député d'Hochelaga-Maisonneuve, j'avais accompagné... j'étais
conseiller syndical à l'époque, j'avais accompagné mon président à la FTQ
dans... bien, pas cette salle-ci, elle n'existait pas encore, mais dans une des
salles, en haut, pour venir présenter des mémoires de la FTQ, que j'avais
d'ailleurs participé à rédiger. Mais j'étais assis sur la chaise puis j'avais
préparé la personne, j'avais conseillé. On avait essayé d'identifier c'étaient
quoi les points majeurs, quels allaient être les échanges avec le ministre,
est-ce qu'il y avait moyen d'avoir des questions ou d'échanges particuliers
aussi avec des oppositions pour faire ressortir des points particuliers du
mémoire. Donc, c'est tout un exercice démocratique fondamental pour une
organisation de la société civile.
Quand on a préparé la liste des groupes,
pour le projet de loi n° 101, le projet de loi que nous étudions en ce
moment, on avait différents critères. D'habitude, un groupe... un groupe
d'opposition, un parti d'opposition veut une espèce de cocktail, hein,
d'invités, c'est-à-dire des organisations évidemment patronales et syndicales,
si on est dans le droit du travail. Peu importe le sujet, on essaie toujours
d'avoir des experts, soit universitaires, soit des experts de la société
civile, idéalement, les deux. On essaie aussi d'avoir des agences
gouvernementales qui sont impliquées dans ce domaine-là. On essaie d'avoir,
donc, un portrait diversifié pour entendre divers points de vue. C'est ça, le
propre d'une consultation particulière, d'une audience. C'est d'entendre
différents points de vue, venir s'exprimer ici, dans la maison du peuple. Parce
que justement, le peuple, il est divers, il est composé de plein de tendances,
et il y a beaucoup de choses à dire à travers les différentes organisations qui
sont formées à travers, donc, le peuple québécois. Et, quand on a décidé de
faire la liste puis qu'on l'a envoyée au gouvernement, ça nous semblait évident
que si on allait traiter de la question de la santé et sécurité au travail, si
un des points majeurs du projet de loi dont on avait eu l'objet à ce moment-là,
hein, on dépose le projet de loi au salon rouge, on a l'occasion de le lire
bien au complet, de se faire une tête rapidement, puis de voir qui sont les
groupes pertinents à inviter, bien, à partir du moment qu'on a compris qu'il
allait y avoir... j'éviterai le mot que vous m'avez proposé de ne pas retenir
tantôt, un recul en matière de santé et sécurité, un recul majeur en santé et
sécurité pour le secteur de la santé et l'éducation, ça nous semblait évident
qu'on allait inviter les différentes représentations de travailleurs et
travailleuses du secteur de la santé et de l'éducation.
• (12 h 50) •
Ça adonne qu'il y en a quelques-unes. Au
Québec, pour le meilleur ou pour le pire, on a un régime syndical avec
plusieurs organisations. Certains vont plaider qu'il y a des avantages,
d'autres vont plaider qu'ils ont des inconvénients. Ils ont tous un peu tort et
un peu raison. Mais c'est la réalité. Les travailleurs et travailleuses du
Québec se sont dotés de plusieurs organisations syndicales en matière de
représentativité dans tous les secteurs, autant privé, construction, santé,
éducation. On est reconnus au Québec pour être assez diversifiés en matière de
pluralisme syndical. Encore une fois, pour le meilleur et pour le pire, mais
c'est une réalité. On a beau avoir notre opinion là-dessus, peut-être, le
ministre et moi, c'est la réalité. Bien, ça me semblait une évidence que la
FIQ, la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec, qui représente
toutes sortes de travailleuses, principalement des infirmières, bien sûr, bien,
ça me semblait une évidence qu'il fallait les inviter. On parle d'elles. On
parle de leur capacité à opérer un virage majeur en matière de prévention en
santé et sécurité au travail, bien, ce serait le fun qu'elles viennent nous
dire ce qu'elles en pensent. Ce serait intéressant qu'elles viennent nous
présenter...
M. Leduc : ...leurs
frustrations potentielles au regard du recul majeur qu'on avait commencé à
constater dans le contenu du projet de loi. Ça serait intéressant qu'elles
puissent venir voir le ministre yeux dans les yeux, caméra ouverte, puis
avoir... on échange avec lui, puis le faire parler, puis lui demander pourquoi
il a reculé là-dessus, alors qu'il avait promis autre chose, alors qu'il y
avait un consensus au CA de la CNESST, pourquoi un recul sur ce sujet-là. Bien,
on a refusé du côté du gouvernement. Refus. Refus de les entendre. Tout ce
qu'ils nous ont dit, c'est : Bien, si jamais il y a un désistement, là,
peut-être qu'on serait capable de les placer. Ça, c'est l'espèce de tactique,
là, classique qu'on nous sert du côté gouvernemental pour essayer un peu
d'acheter la paix en disant : Je refuse mon groupe, mais ça arrive à
l'occasion, pour toutes sortes de raisons, qu'un groupe se désiste puis que,
woups, on peut glisser dans cette plage horaire là un groupe substitut, si vous
me permettez l'expression. L'affaire, c'est qu'il y en avait plusieurs, des
groupes substituts, là, qu'on avait poussé pour le projet de loi n° 101.
Il y avait notamment un autre groupe syndical en santé qui s'appelle l'APTS.
Puis là ils ont dit : Bien là, vous choisirez ou vous verrez, là, qui
vient, l'APTS, la FIQ, ou je ne sais trop quelle autre organisation aussi.
Finalement, c'est l'APTS qui a réussi à venir, qui est venue présenter ici,
devant tout le monde, leur mémoire et leur intervention. Mais ça fait en sorte
que le plus gros syndicat qui représente les infirmières du Québec n'était pas
là. Alors qu'on parle d'eux, alors qu'on traite d'eux, alors qu'on va changer
leur vie, on va changer leur réalité, on a refusé de les entendre.
Moi, je trouve, ça n'a pas de bon sens, M.
le Président. Moi, je trouve que, si on est sérieux dans notre prétention de
représenter l'ensemble du peuple québécois ici, dans cette Chambre, il faut
représenter l'ensemble du peuple québécois à travers sa représentativité dans
l'espace public. Hein, on est 125 députés ici, M. le Président, de quatre
partis différents, avec des indépendants, mais élus sous quatre manières
différentes à l'origine. Même à quatre partis, on ne représente pas tout le
monde. Puis on le sait très bien, le mode de scrutin étant ce qu'il est, ça a
fait en sorte que le Parti conservateur, qui avait quand même accumulé c'était
quoi, 13 % des votes...
Une voix : ...
M. Leduc : J'aimerais ça
arrêter de me faire interrompre, M. le Président, pour des pacotilles, là.
Le Président (M. Allaire) : Juste
un petit instant. Vous vous souvenez, quand vous voulez intervenir, vous pouvez
prendre le micro. Vous avez le droit de le faire seulement si vous soulevez un
point de règlement. Je n'ai pas entendu le point de règlement ici. Et, dans ce
cas-ci, on est dans les motions préliminaires. Je considère qu'on est sur le
sujet, il n'y a aucun doute. Donc, M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve, vous
pouvez poursuivre.
M. Leduc : Merci, c'est
apprécié, M. le Président. Je disais donc que nous, les quatre partis ici, les
125 députés issus de quatre partis, nous ne représentons même pas
l'entièreté de la population québécoise qui s'est exprimée à travers les urnes
à cause d'un mode de scrutin. Je pourrais partir sur 15 minutes sur le
mode de scrutin, mais je ferai plaisir à ma collègue, je vais l'épargner de ces
détails-là, on en reparlera une autre fois peut-être. Là où je veux... avec cet
exemple, M. le Président, c'est quoi, c'est que, même nous, ici, on n'est
pas... on ne peut pas prétendre être 100 % représentatifs de la société
québécoise, mais c'est... le système est tel qu'il est. Puis on fonctionne
avec, puis on bouge, puis on avance. Il faudrait le réformer, mais bon, un
autre débat.
Ça fait que, quand on arrive au moment des
audiences, c'est encore plus important d'être généreux en matière d'écoute.
Puis là je ne suis en train de dire que le gouvernement, il n'entend personne
puis il est tout seul. Il y en a, des audiences. Souvent, c'est deux jours, des
fois deux jours et demi. C'est mieux que rien, on s'entend, mais ça pourrait
être plus généreux que ça pour des réformes aussi fondamentales pour l'avenir
des Québécois et Québécoises, pour des réformes aussi fondamentales pour les
travailleuses de la santé. Il faudrait qu'on soit plus généreux en matière d'écoute.
Et, là-dessus, le gouvernement a failli, il a dit : Non, on ne veut pas
entendre les représentantes d'infirmières. Ça ne nous intéresse pas de les
entendre. Ce n'est pas prioritaire, ce n'est pas essentiel. Envoyez un mémoire,
on le lira.
Le Président (M. Allaire) : Faites
attention, vous prêtez des intentions. Vous pouvez continuer.
M. Leduc : Il dit : Vous
enverrez un mémoire, puis on lira. Bien oui, c'est ça, le seul syndicat
représentatif majoritairement des infirmières, vous enverrez un mémoire. Des
centaines, des milliers d'infirmières. Vous enverrez un mémoire, on regardera
ça. Ah! je suis sûr qu'ils l'ont regardé. On leur fait confiance là-dessus, on
regarde tous les mémoires, on les analyse. Mais ça ne peut pas être ça, notre réponse.
Ça ne peut pas être ça, la réponse des élus du peuple québécois. Il faut qu'on
soit meilleur que ça. On est capables d'être meilleurs que ça. Ce n'était pas
compliqué de trouver une petite plage horaire de 45 minutes
supplémentaires pour entendre le plus gros syndicat des infirmières du Québec.
Ce n'était pas si compliqué que ça. On ne me fera pas à croire que l'équilibre
de la grande marche démocratique de ce Parlement allait être encombré...
M. Leduc : ...à un tel point
que ce n'est plus possible d'avancer si on n'était pas capable de trouver un
petit 45 minutes, pour entendre les infirmières, supplémentaire. Moi, je
m'en désole, je m'en désole parce qu'il y a eu des projets où est-ce qu'on a
été un peu plus généreux. Il y a eu des projets de loi où est-ce qu'on était
capable de pousser et pousser puis de convaincre le gouvernement que, là, on
allait modifier des équilibres, il fallait entendre tout le monde. Puis, qu'on
prenne une demi-journée de plus ou une journée de plus, ça n'a jamais été un
problème. Entendre des gens nous parler de leur posture, de leur lecture, ce
n'est jamais un problème. Après ça, je ne suis pas en train de dire qu'il
faudrait en entendre pendant trois semaines, M. le Président, je n'irai pas là,
mais, entre deux jours et des poussières, puis trois semaines, il y a une
méchante marge. Il y a bien du gris à aller jouer là-dedans, là. Et je ne peux
pas croire et je ne peux pas comprendre qu'au niveau du gouvernement on ait
refusé cette motion-là... on ait refusé, pardon, à l'origine, d'inviter la FIQ,
d'accepter que la FIQ vienne nous parler.
On a donc aussi, par principe, comme je
vous le disais tantôt dans la mécanique, refusez que l'APTS vienne. Ils ont
juste réussi à venir parce qu'un autre groupe... c'était... puis là, je ne me
rappelle pas par cœur c'était quoi, le groupe qui s'est désisté. Ça arrive des
fois, M. le Président, conflit d'horaire parce que, souvent, en plus, on les
convoque à des... des fois, à une semaine d'avis, une semaine et demie, quand
on est généreux, deux semaines.
Comme je disais tantôt, moi, j'ai déjà été
donc à un conseil syndical de la FTQ, j'étais au service de la recherche puis
je rédigeais des mémoires. Mais quand je me faisais convoquer, à l'époque... Je
vous le dis, hein, sous l'ancien gouvernement Couillard, je me faisais
convoquer à trois semaines d'avis puis je trouvais ça intense. À de nombreuses
reprises depuis que je suis entré dans ce Parlement, en 2008, j'ai eu une
pensée pour toutes les personnes, peu importe les organisations, hein,
patronales, syndicales, professeurs d'université, tous les gens qui se
faisaient convoquer à deux semaines d'avis, une semaine et demie d'avis, puis
qu'il fallait qu'ils pondent un mémoire. Qu'est-ce que ça a fait? Ça a fait
qu'on a un nombre record de gens qui se présentent ici, qui sont convoqués puis
que leur mémoire n'est pas fini. Ils nous présentent leur allocution, là, de
10 minutes, il y a un échange intéressant, mais nous, les oppositions, on
n'a pas... tu sais, on écoute, on échange, mais on n'a pas la matière...
D'habitude, on reçoit nos mémoires d'avance, on peut le commenter, on peut leur
poser des questions en amont ou, en tout cas, certainement leur poser des
questions basées sur le document qu'ils nous ont envoyé. Mais là les courts
délais qui sont mis de l'avant par le gouvernement fait en sorte que, de plus
en plus, il y a des intervenants qui viennent ici puis leur mémoire n'est pas
terminé, ils nous la cheminent quelques jours après, une fois qu'ils ont eu le
temps de l'attacher puis de le terminer.
Donc, il y a vraiment un coup de barre à
donner. Donc, dans la dernière année de cette législature, il y a un coup de
barre à donner au niveau du gouvernement, principalement au bureau du leader,
bien sûr. Mais après ça, chaque ministre a son rôle à jouer à l'intérieur de sa
relation avec le bureau du leader pour, un, plaider qu'il y ait plus de
groupes. Le ministre, il n'est pas... il n'est pas un pion dans cette
histoire-là, au contraire, c'est le ministre porteur du dossier. Ce n'est pas
parce que le bureau du leader, il dit : Non, c'est tant de groupes puis
c'est tout, puis arrange-toi, le ministre peut mettre son pied à terre et
dire : Non, non, non, moi, je suis en train de modifier une loi
fondamentale, j'exige d'avoir plus de groupes. Il a le pouvoir de dire ça. Son
collègue, le leader gouvernemental, c'est son égal au Conseil des ministres. Ce
n'est pas son boss, c'est son partenaire. Il a le pouvoir de dire ça. Pourquoi
ne l'a il pas fait dans le cas de la FIQ et dans le cas de l'APTS? Pourquoi la
seule porte de sortie, c'était qu'il y ait d'autres groupes qui se désistent?
Espérons que le maximum de groupes, peut-être, se désiste pour x raisons puis
peut-être qu'il y a aura une petite case qui va se libérer. Ce n'est pas une
bonne procédure, ça, M. le Président. Ce n'est pas une bonne façon de
travailler. Moi je m'en désole.
C'est pour ça qu'on dépose la motion
aujourd'hui, parce qu'il est encore temps de corriger cette iniquité-là, de
dire : La FIQ peut venir, on peut prendre une pause. Le projet de loi n° 01, il n'est pas... il est perfectible, le ministre a
dit tantôt. Bien, on va le croire. S'il est perfectible, ça serait bien
d'entendre une des organisations principales qui va en subir les conséquences.
Oui, ils ont envoyé un mémoire, mais ils ont peut-être des choses à dire, des
nouvelles informations qui ont sorti depuis ce temps-là. On peut certainement
trouver un 45 minutes, cet après-midi même. Je suis convaincu, là, qu'on
peut les mettre en visio cet après-midi même.
Suspendons un peu les travaux cet
après-midi, je le mets au défi, 45 minutes cet après-midi. Là, on s'en va
faire un beau débat de fin de séance, le ministre et moi, on va avoir du fun,
sur le projet de loi des cotisations, mais au retour, là, à 14 heures,
45 minutes, ici, à l'écran, je suis convaincu qu'elle va se remettre
disponible. La présidente, là, elle va libérer son agenda ou des conseillères
vont se libérer puis on va avoir un bel échange. Je le mets au défi, il est
capable d'appeler son collègue le leader durant l'heure du dîner puis
dire : Mon collègue d'Hochelaga-Maisonneuve, là, il a eu raison une couple
de fois cet été, là, peut-être qu'il a encore raison cette fois-ci, on devrait
le faire. On invite la FIQ cet après-midi. C'est un peu particulier qu'il n'ait
pas été invité à l'audience générale, on rattrape cette erreur-là, puis, après
ça, on commence d'un meilleur pied cette étude détaillée là.
Alors, je tends la main au ministre puis
je le mets au défi. Qu'il appelle son leader sur l'heure du dîner, qu'il lui
dise : Mon cher Simon, je pense que, là, on a fait une erreur...
M. Leduc : ...J'insiste pour
qu'on invite la FIQ l'après-midi et on pourra procéder comme ça.
Le Président (M. Allaire) : Merci.
Est-ce que vous avez souhaité poursuivre votre intervention cet après-midi?
M. Leduc : Ça va être
correct.
Le Président (M. Allaire) : C'était
terminé. Parfait. Est-ce qu'il y a d'autres interventions concernant cette
remarque... cette motion préliminaire, pardon?
Une voix : ...
Le Président (M. Allaire) : Oui,
il y en aura d'autres cet après-midi. Parfait.
Donc, compte tenu de l'heure, nous allons
suspendre les travaux jusqu'à 14 heures. Donc, bon dîner, tout le monde.
(Suspension de la séance à 13 heures)
14 h (version non révisée)
(Reprise à 14 h 04)
Le Président (M. Allaire) : Alors,
à l'ordre, s'il vous plaît! La Commission de l'économie et du travail reprend
ses travaux. Nous poursuivons l'étude détaillée du projet de loi n° 101,
Loi visant à l'amélioration de certaines lois du travail. Si on se souvient, à
la fin, tantôt, de l'avant-midi, M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve avait
terminé son intervention sur la motion qu'il a lui-même déposée, la motion
préliminaire.
Alors, je vais céder la parole à la
députée de Westmount-Saint-Lui... Saint-Louis, pardon, pour son 30 minutes.
La parole est à vous.
Mme Maccarone : Merci
beaucoup, M. le Président. Bien, je trouve la motion préliminaire du collègue
très intéressante, et j'ai l'intention de l'appuyer. Il a mené un très bon
argumentaire. Alors, je risque de répéter un peu les paroles que le député d'Hochelaga-Maisonneuve
a déjà partagées. Bien, entre autres, c'est vrai que c'est...
Mme Maccarone : ...quand on
parle le débat de ce qui qui va venir témoigner en commission parlementaire,
c'est vrai que c'est un échange entre partis politiques puis c'est toujours une
déception quand il y a un groupe qui est très important, qui n'est pas sur la
liste des groupes que nous souhaitons entendre. Je trouve que la Fédération
d'infirmiers, infirmières du Québec tombe dans cette catégorie. Pourquoi? Parce
que c'est vrai, c'est un projet de loi qui va avoir un impact majeur sur leur
ordre, il va avoir un impact sur leur façon de travailler, sur leur sécurité au
travail. Alors, quand même important qu'on les entende. Et oui, c'est vrai, ils
ont déposé un mémoire puis le mémoire est fort intéressant. Puis, c'est sûr, on
va prendre en considération toutes les propositions et ceux qui ont partagé
avec nous parce que c'est essentiel. Mais si je parle comme parlementaire, je
trouve important d'entendre la FIQ. Puis il y a la raison de pourquoi cette
motion préliminaire est tellement importante, c'est parce que c'est quand même
la maison du peuple, et je l'avais dit à mes remarques préliminaires
qu'aussitôt qu'un projet de loi est déposé ça n'appartient pas seulement à
nous, les élus, mais ça appartient à la société. Puis ça, ça comprend la
société civile. Ça, ça comprend aussi toutes les parties prenantes. Et c'est
pour ça que je trouve que c'est une déception qu'on n'élargit pas en général,
parce que ce n'est pas la seule commission qu'on fait ce type d'exercice, mais,
en général, d'entendre le plus possible les groupes concernés puis les groupes
qui lèvent la main, qui souhaitent être entendus ici par les parlementaires à
la maison du peuple, sur la place publique, parce que c'est ça, la démocratie,
puis c'est ça notre rôle comme parlementaires, c'est de donner une chance à ces
groupes de s'exprimer publiquement. On peut bien avoir des rencontres. Je sais
que nous,, notre formation politique, on les a rencontrés. Je présume que tous
les élus ici ont eu des rencontres parce que c'est vraiment important. Eh oui,
c'est un début, mais ça ne remplace pas la présentation en commission
parlementaire. Je me souviens très clairement que moi même j'étais l'autre bord
et c'est moi qui s'assoyait pour témoigner. Mon Dieu, j'étais nerveuse, M. le
Président, vous ne pouvez pas savoir, je ne savais pas à quoi m'attendre. Puis,
pour moi, ça a été vraiment un honneur d'une grande importance de venir ici à
l'Assemblée nationale pour témoigner en ondes... les commissions scolaires dont
j'ai été la représentante pour toute la province du Québec et parler en leur
nom. Malgré que j'avais déposé un mémoire, malgré que j'avais eu des rencontres
par la suite, c'est un honneur de venir ici puis de se faire entendre sur la
place publique. Alors, pour cette raison, j'ai une déception pour eux parce que
je sais c'est quoi. Je sais ce qu'est, la préparation, je sais c'est quoi avoir
un débat puis les échanges avec nous. On n'est pas des super héros, mais...
nous sommes seulement 125, en cette commission, je crois qu'on est 13 à peu
près, alors ça aussi, je trouve que c'est quelque chose qui est manquante dans
l'expérience. Puis malgré qu'on a pu avoir des rencontres, souvent suite à leur
témoignage de la présentation de 10 minutes en audition, on discerne
quelques points, j'écoute vraiment avec une grande attention, toujours la
partie gouvernementale, les questions qu'ils posent puis les échanges, parce
que ça m'aide à m'orienter en ce qui concerne les éléments qui sont peut-être
favorables ou moins favorable pour eux dans le projet de loi, comment on peut
faire une tête. Ça, c'est quelque chose qu'on ne peut pas reproduire en lisant
une mémoire. Puis ce n'est pas quelque chose qu'on peut reproduire, même avec
des rencontres, parce qu'on fait ça ici avec une grande collaboration, on
entend chacun entre nous, non seulement le ou la ministre, mais les autres collègues
qui posent leurs propres questions, que ce soit à l'intérieur des dossiers qui
sont principals ou principaux pour eux, ou bien parce que c'est dans leur
propre comté, ou c'est parce que c'est en lien avec leur expérience
personnelle. C'est cet élément humain que, pour moi, je trouve est manquant
chaque fois qu'on exclut un groupe ou on dit non. Puis on a eu très peu de
groupes qui sont venus témoigner. On a eu, oui, 33 mémoires, à peu près
15 groupes qui sont venus témoigner, ce n'est pas long pour un projet de
loi omnibus, ce n'est pas non plus un projet de loi qui va avoir un impact si
majeur puis si important pour la population concernée. Puis, entre autres,
quand on parle de la FIQ en particulier, oui, ça aurait été, je pense,
essentiel de leur entendre, parce qu'eux sont majoritairement féminines, puis
on parle d'avoir un régime qui sera en place, qui va avoir un impact sur elles
et eux aussi, mais sur elles. Donc, il y a quand même des préoccupations, tu
sais, on va dire ça de cette manière, parce que je comprends l'intention du
gouvernement, je comprends qu'on fait face à... il y a des enjeux, puis on doit
prendre ça en note. Quand on gouverne, c'est de faire des choix. Je suis tout à
fait d'accord avec ça et je comprends. Souvent, les...
Mme Maccarone : ...ne sont pas
faciles, mais d'où l'importance d'entendre les parties prenantes comme la FIQ,
que ça aurait pu juste améliorer nos échanges ici puis nous aider à prendre des
bonnes décisions, surtout si on avait des amendements à aborder. Puis ça se
peut, dans les amendements que le gouvernement ont déposés, il y a des
modifications en lien avec les problématiques dont elles et eux ont soulevées.
Je ne sais pas encore parce qu'on n'a pas pris connaissance de tous ces
amendements. Mais ça reste que c'est le plus gros syndicat des infirmières et
infirmiers au Québec, alors l'impact sur ce syndicat est quand même assez
majeur, ça aurait été essentiel de leur entendre.
• (14 h 10) •
Je retourne encore une fois, M. le
Président. C'est une question démocratique. Je pense que ça fait partie de nos
obligations, comme parlementaires, d'avoir une bonne écoute. Puis juste...
message à tous les groupes, si possible, nous envoyer leurs mémoires plus tôt
que plus tard. Ça nous aide beaucoup à comprendre l'orientation avant qu'ils
viennent témoigner en commission parlementaire. Mais c'est la partie
essentielle, tu sais, ça fait partie des enjeux que les groupes font face, soit
qu'ils n'ont pas la chance de venir ici témoigner ou bien ils n'ont pas assez
de temps pour se préparer. Ça fait qu'on a des refus. Puis on peut bien dire
que... des remplacements, des remplacements. Je comprends. On a des gens qui
vont désister puis, peut-être, ils auront de la place à venir, mais ils sont
parties des groupes qu'on aurait dû avoir sur la liste principale.
L'APTS, oui, a aussi une grande
importance. Puis je reconnais qu'ils sont venus témoigner. Et on peut être
heureux et heureuse de ça parce qu'ils vont nous aider à alimenter nos débats
puis à avoir des échanges qui sont riches. Mais j'ose croire qu'on aurait eu
exactement la même expérience avec la FIQ.
Et c'est pour cette raison que j'appuie
cette motion préliminaire. Et j'espère que le gouvernement acceptera. C'est
sept ans depuis que je suis députée, M. le Président, je ne rêve plus en
couleur, je ne porte plus mes lunettes roses. Je pense que c'est peut-être la
meilleure expression, mais je ne porte plus mes lunettes roses. Je sais que
c'est quelque chose, dans le fond, en sept ans, que je n'ai jamais vu, mais je
croise tout le temps mes doigts parce que je sais que le ministre est sensible
à cet effet et je sais que c'est un projet de loi, que, pour lui, il tient à
cœur et qu'il était rigoureux dans les travaux qu'il a faits avec son équipe.
Alors, moi, je croise toujours mes doigts qu'on va pouvoir ajouter à cette
rigueur en entendant des groupes qui sont essentiels, encore une fois, à notre
réflexion comme parlementaires. Puis je dis ça d'une façon non partisane. Ce
n'est pas parce que le Parti libéral souhaite le faire. Pour moi, sincèrement,
je trouve que ça fait partie de notre devoir parlementaire et que, si c'est un
non pour... puis le gouvernement vote contre cette motion préliminaire, bien,
j'espère que peut-être ça va nous aider à avoir une réflexion plus profonde,
lors des futures commissions parlementaires, quand on est en train de planifier
les groupes que nous pourrons entendre en commission. Oui, je comprends,
souvent on a le sens de l'urgence d'agir, mais, en ajoutant une journée pour
entendre six ou sept groupes de plus, c'est rassurant pour la population, c'est
rassurant pour les gens qui vont venir témoigner. Parce que ce n'est pas juste
une question de perception. Là, c'est du concret. Parce que là, c'est la vraie
démonstration que nous sommes ici puis que nous sommes écoute... nous sommes à
l'écoute de la population. Et, on a droit de ne pas être d'accord, c'est ça, la
démocratie, mais d'être à l'écoute puis de faire la démonstration que ça nous
préoccupe, pas juste en perception, mais en vrai, avec des mesures concrètes
pour leur entendre. Je trouve que c'est quelque chose que nous devons essayer
d'en faire mieux parce que nous pouvons le faire. Et, en ajoutant... ici, on
parle de 45 minutes, en ajoutant plusieurs... quelques 45 minutes, je pense
que ça peut juste nous aider à améliorer les travaux puis notre façon de faire.
Alors, j'appuie, avec une grande sincérité puis avec beaucoup de respect, cette
motion préliminaire.
Le Président (M. Allaire) : Merci,
Mme la députée de Westmount-Saint-Louis. On enchaîne avec le député de
Jean-Talon. Vous avez 10 minutes. La parole est à vous.
M. Paradis : Merci. J'appuie,
moi aussi, cette proposition que nous entendions, la FIQ, avant de commencer
nos travaux. Et je comprends. Il y a... Il y a un agenda parlementaire
détaillé. Il y a beaucoup de projets de loi que le gouvernement représente
après la prorogation, il y aura des nouveaux projets de loi. Je comprends tout
ça. Je comprends aussi que, souvent, ça arrive qu'on fait des motions
préliminaires comme celle-ci. Et là on...
M. Paradis : ...on demande au
ministre d'entendre des personnes, mais là ça m'apparaît particulièrement
criant de pertinence qu'on entende la FIQ qui a déposé un mémoire. Et c'est
vrai qu'on a lu leur mémoire, qu'on peut en tirer l'essentiel, mais on a besoin
de les entendre pour plusieurs raisons.
D'abord, elles nous proposent... elles ont
des recommandations très constructives, détaillées, bien présentées, sur les
mécanismes de prévention et de participation, sur la représentation
additionnelle au conseil d'administration de la CNESST, sur le traitement et le
processus de griefs, sur le processus de négociation à la direction de la
révision administrative, sur l'accès au dossier médical et les amendes, sur les
amendes relatives, donc, à des accès non autorisés au dossier médical. Ce sont
des sujets vraiment importants sur lesquels elles ont une expertise
particulière, sur lesquels les entendre, au-delà de leur mémoire, serait très
important pour guider nos travaux, compte tenu notamment de ce qu'elle nous...
ce qu'elles nous rappellent au début, puis je vais me permettre de citer
quelques passages parce qu'ils sont très, très, très importants, parce que je
l'ai dit dans mes remarques préliminaires, et tout le monde le sait, une des
questions qu'on aura à se poser, c'est pourquoi un traitement différencié entre
les entreprises privées puis les employés du secteur de la santé et de
l'éducation? Peu importe, là, ce qu'on va dire de... est ce que ça devrait être
cette telle solution, telle solution? On sait que ça va être au cœur de nos
débats : santé et éducation et la posture, donc, des travailleurs dans ces
deux secteurs-là.
Mais là on n'a pas entendu la FIQ qui
représente parmi les plus importantes actrices de notre réseau de la santé.
Elles nous rappellent que les travailleuses de la santé, les travailleurs, les
travailleuses de la santé et de l'éducation ont représenté 35,7 % de
toutes les lésions professionnelles reconnues, alors qu'ils et elles représentent
seulement 19,2 % de l'emploi total au Québec. On parle de
344 057 salariés, dont 81 % c'est des femmes... sont des femmes.
Et elles nous disent que, depuis plusieurs années, il y a une hausse marquée
des risques dans leur travail.
Ensuite, elles nous disent : Voici
pourquoi on va être entendues. En fait, elles nous le disent dans leur mémoire.
Puis là aussi, je vais me permettre de les citer. Elles nous disent : «La
FIQ, dont le membrariat est composé de près de 90 % de femmes, considère
que les reculs envisagés par le projet de loi n° 101 portent
particulièrement atteinte aux droits des femmes qui travaillent en santé. En
réduisant les exigences de prévention, le projet de loi institutionnalise une
inégalité inacceptable. Il affaiblit la protection dans des secteurs presque
exclusivement féminins, alors même que ces travailleuses portent, jour après
jour, le fardeau du soin, de l'enseignement et de l'accomplissement social. Il
banalise les risques invisibles, pourtant réels et bien documentés, auxquels
elles sont exposées : la violence verbale, les agressions physiques et les
risques psychosociaux. Le gouvernement crée ainsi une discrimination
structurelle en santé et sécurité du travail». Dans mes remarques préliminaires
tout à l'heure, je disais qu'il y avait un traitement différencié et qu'il
faudrait se poser la question : Est-ce que c'est de la discrimination ou
pas?
Elle nous parle du phénomène de la sous
déclaration et elles nous disent : «En affaiblissant les comités de santé
et de sécurité et en réduisant les ressources dédiées à la prévention, le
gouvernement ne fera qu'accentuer la culture du silence au détriment de la
santé et de la sécurité des travailleuses».
Plus loin, elles nous disent qu'«en les
excluant ainsi de l'application des mécanismes de prévention que le projet de
loi impose à tous les employeurs de la province, le gouvernement semble
considérer la prévention comme étant optionnelle pour les travailleuses du
réseau de la santé». Et elles nous disent évidemment qu'elles ne peuvent pas
accepter ce traitement différencié.
Alors, compte tenu de ce qu'elles nous
disent, ça me semble vraiment très, très, très important qu'on les entende ici.
Au-delà de ce qu'elles ont écrit, qu'elles puissent échanger avec le ministre.
Et bien que, comme on le disait tout à l'heure, on puisse avoir chacun d'entre
nous des échanges en parallèle, ça, c'est important que les Québécoises et les
Québécois nous entendent sur ces questions-là.
• (14 h 20) •
Le deuxième facteur qui est lié au
premier, qui ne sont pas des facteurs qui s'excluent mutuellement, mais qui me
semblent particulièrement importants, c'est que la FIQ nous dit ceci : «Il
n'y a pas d'analyse différenciée selon les sexes qui a été réalisée pour ce
projet de loi». Et ce n'est pas la première fois, là, que j'ai des échanges
avec le ministre là-dessus. Mais ici, il y a beaucoup de gens qui sont venus
nous dire : Le projet de loi, bien qu'il soit bien intentionné, bien qu'on
puisse vouloir des avancées en matière de prévention et de sécurité au travail,
parfois, ça...
M. Paradis : ...produit des
effets différenciés pour les femmes qui sont insoupçonnées. Parfois, on ne
l'avait pas vu venir et il s'est développé, dans les dernières années, cet
outil de travail qui vise à regarder l'ensemble de ce qu'on fait dans une
perspective d'égalité entre les sexes et en disant : Encore une fois, on
veut bien faire, mais voici des effets différenciés selon les sexes, ce qu'on
n'avait pas vu venir. Et, à moins que le ministre aujourd'hui me dise :
Nous avons cette étude, puis qu'il soit prêt à nous la transmettre, ça me
semble très important d'entendre des expertes, des gens qui sont sur le
terrain, qui vont venir nous dire : Voici ce que nous, on a dit. Ça me
paraît encore plus important, compte tenu de la discussion qu'on a eue il y a
quelques minutes, avant la pause, où on a parlé du fait que, dans la dernière
fois où on a été ensemble dans un autre projet de loi, il se pourrait bien
qu'on n'ait pas eu les bonnes données, qu'on ne nous ait pas dit les bonnes
choses, ou qu'on a dit : C'est noir ou c'est blanc sur les statistiques
relativement aux grèves et aux conflits de travail au Québec. Et ça fait
quelques reprises que j'ai cette discussion-là, moi, avec le ministre. Comment
ça se fait que vous ne nous donniez pas plus de renseignements sur les données
de base qui vous permettent d'arriver avec ces solutions-là? Je comprends qu'il
y a une partie du travail qui doit se réaliser dans les officines internes,
mais parfois que les analyses, les chiffres, les données qui ont été utilisés
et qui permettent au ministre de dire : Voici pourquoi je vous propose
cette solution-là, qu'elle nous soit communiquée.
Donc, moi, j'aimerais bien savoir, donc,
en matière d'égalité entre les sexes, en matière d'analyse des impacts
différenciés selon les sexes de ce projet de loi là, j'aimerais savoir ce qui
est à la disposition du ministre et ce qui pourrait nous être communiqué. Mais,
en tout cas, la FIQ, ici, nous disent : Il n'y en a pas eu, de cette analyse-là
et voici ce qu'il va se passer. Il va y avoir des impacts qu'on n'avait pas vu
venir, qui vont être différents pour les femmes, notamment dans le milieu de la
santé, notamment pour nous, les infirmières, les préposés, les gens qui sont
des rouages essentiels, qui sont des actrices essentielles de notre système de
la santé.
Donc, j'implore le ministre à bien écouter
cette demande-là en particulier, elle me semble vraiment pertinente pour notre
travail. Ce n'est pas un si grand investissement en temps qui pourrait nous
permettre d'avoir... de sauver du temps plus tard puis d'avoir des décisions
beaucoup plus éclairées, des discussions encore plus éclairées sur des sujets
importants. Merci.
Le Président (M. Allaire) :
Merci, M. le député de Jean-Talon. D'autres interventions concernant cette
motion préliminaire? M. le ministre, allez-y, la parole est à vous. Vous avez
30 minutes.
M. Boulet : Évidemment, je
vais commencer en disant que je ne supporte nullement cette motion et vous
rappelez à tous que les bureaux des leaders respectifs de chaque parti se sont
entendus. Il y a 33 mémoires qui ont été déposés, il y en a,
18 groupes, qui ont été entendus. Dans les 15 qui n'ont pas participé aux
consultations particulières, nous avons fait l'analyse. Nous allons considérer
le mérite de chaque recommandation. C'est ce que nous avons fait.
Et ceci dit, avec respect, il y a eu
plusieurs porte-parole qui ont pris le flambeau de ce qui concerne le règlement
en prévention et participation des travailleurs et travailleuses. La CSQ est
venue, le CIAFT, intervention accès des femmes au travail, l'APTS, la CSN, la
FTQ, Geneviève Baril-Gingras et d'autres, plusieurs sont venues lors des
consultations particulières. Et, bon, Alex, mon collègue d'Hochelaga-Maisonneuve
me connaît bien, j'ai énormément d'estime pour la FIQ. Je connais Julie
Bouchard, pour avoir travaillé des dossiers avec elle. Mme Bouchard a
communiqué avec moi parce qu'elle aurait aimé être entendue par le ministre. Le
26 juin dernier... bon, leur mémoire est daté du 29 mai, le
26 juin dernier, je l'ai rencontrée pendant 45 minutes,
Mme Bouchard, avec sa conseillère Vanessa... Donc, elle a été entendue
au-delà du mémoire. Puis ce n'est pas nécessairement la première fois que je
fais ça. Il y a des groupes qui peuvent être plus insistants et je respecte le
membershipt d'à peu près 80 000 membres de la Fédération des
infirmières et infirmiers, et je les ai entendus. Et on est en mesure, et c'est
ce que nous avons fait, d'évaluer l'opportunité de leurs recommandations...
M. Boulet : ...ceci dit, je
suis... Puis là je me retire de la motion. Je veux traiter de deux points. Le
collègue d'Hochelaga-Maisonneuve était avec nous, il sait très bien qu'avant
l'entrée en vigueur de la Loi modernisant le régime de santé et sécurité du
travail... savez-vous ce qu'il y avait en santé, puis en éducation, puis en
services sociaux, en matière de prévention puis participation? Zéro. Zéro. Puis
je vois le zéro de mon collègue d'Hochelaga-Maisonneuve. Pas de programme de
prévention, pas de comité paritaire, pas... À l'époque, c'étaient des
représentants à la prévention, maintenant c'est des représentants en santé et
sécurité. Encore une fois, je réfère à mon collègue, ça ne s'appliquait
impérativement, en vertu de la loi et de son règlement, qu'à des secteurs à
forte prépondérance masculine, où il y avait du travail physique, en
métallurgie, en foresterie. Dans des secteurs à prépondérance féminine, aucune
obligation, collègue. Puis, les gouvernements précédents ont laissé dormir ça
pendant 40 ans, M. le Président.
Ça fait que je ne laisserai pas
dire : C'est un recul. Puis Mme Bouchard le sait, puis je l'ai partagé
avec tous les leaders syndicaux, le régime intérimaire bonifié, que nous avons
dans le projet de loi n° 101, c'est une avancée considérable par rapport à
ce qu'il y avait avant 2021. C'est deux secteurs, cependant, où les capacités
organisationnelles ne sont pas les mêmes pour permettre d'activer les
mécanismes. Vous le savez, les comités paritaires, c'est des heures de
libération syndicale, c'est... Des comités paritaires, c'est participer à des
comités. C'est ça qui est l'enjeu central. Si on applique le règlement qui a
été adopté par le CA de la CNESST, c'est 730 ETC de plus. On va couper les services
aux enfants, on va avoir des... Oui. Le plein règlement aurait un impact sur la
capacité de ces deux réseaux là de continuer à maintenir la même qualité et la
même quantité de services.
Ça fait que c'est faux de dire que c'est
un recul. On veut intégrer dans tous les milieux de travail. Puis ce n'est pas
le privé et santé, éducation. C'est tous les secteurs, sauf en santé ou en...
et en éducation, où l'impact serait disproportionné. Il faut intégrer une
culture de prévention puis de participation des travailleurs, travailleuses,
une culture durable. Pour bien le faire, il faut y aller progressivement. Il
faut déployer les mécanismes en faisant de la formation puis de
l'accompagnement notamment de la CNESST et d'associations qui s'intéressent à
la formation dans ces deux secteurs là.
Ça fait que je l'ai dit, je suis prêt à le
dire, puis les gens m'écoutent, puis les syndicats le savent et ils le
reconnaissent. Pour les personnes qui sont férues de santé et sécurité, ne
venez pas dire : C'est un recul. C'est une avancée considérable. Mais ce
n'est pas le plein règlement. Ça, je le reconnais. Le règlement, qui a fait
l'objet d'un consensus qui a été adapté au CA de la CNESST, il s'applique
actuellement partout. Maintenant, avec le projet de loi n° 101, on va
avoir un régime qui est respectueux des organisations complexes que sont les
secteurs de la santé et de l'éducation.
• (14 h 30) •
Je veux finir avec les conflits de
travail. Les méthodes de calcul, collègue, elles sont sur le site Web de mon
ministère. Puis c'est constamment évolutif, parce qu'il y a des grèves qui
n'ont pas été déclarées, il n'y a pas eu de grève. Il y a des ajustements à
faire. Je le répète, il y a un nombre de conflits qui tiennent compte de
regroupements d'accréditations syndicales. Je donnais l'exemple, ce matin, s'il
y a 30 CPE avec le même syndicat, la même structure de négociation, avec
la même association, l'employeur s'est regroupé. Ça ne veut pas dire que... il
n'y a pas 30 grèves, parce que les CPE, il y en a à Trois-Rivières, il y en a
dans Hochelaga-Maisonneuve, dans toutes les villes du Québec, mais chaque CPE
est en grève, et c'est des réalités spécifiques à chacun des milieux. Ça fait
que c'est pour ça que techniquement, légalement, si on tient compte des avis de
grève en fonction des accréditations syndicales, l'écart est gigantesque. Puis
c'est ça que Statistique Canada a utilisé par accréditation syndicale selon la
méthode de calcul technique et légale. Et, même les chiffres de Statistique
Canada n'étaient pas tout à fait à jour. Les chiffres de mon ministère...
14 h 30 (version non révisée)
M. Boulet : ...qui sont
les plus justes parce que nous recevons généralement les avis de grève. C'est
968 en 2024, puis 913 en 2023. Puis je vais reprendre ce que j'ai dit au
collègue d'Hochelaga-Maisonneuve, jamais, lors du dépôt du projet de loi, je n'ai
référé au nombre de grèves. Ce qui nous préoccupait, la nature et l'impact des
grèves sur la population. Puis, suite aux témoignages des professeurs, j'utilisais
les chiffres par regroupement de mon ministère. Et quand Statistique Canada, l'Institut
économique de Montréal ou l'Institut de Montréal... l'Institut économique de
Montréal est sorti au mois de mai, ça, c'est venu sur la place publique, puis
les gens répétaient ce que l'Institut économique de Montréal avait utilisé
comme données fondées sur une méthode de calcul différente. Mais on est tous
des personnes raisonnées autour de la table. On peut comprendre que les
méthodes de calcul sont différentes. Et moi, personnellement, je ne veux pas
juger du mérite de chaque méthode de calcul, mais vous connaissez ma formation
académique, moi, selon moi, par accréditation syndicale, par des grèves, une
grève dans un CPE à Trois-Rivières et une autre grève dans un CPE à Shawinigan
avec des réalités qui sont différentes, des familles puis des enfants qui ne sont
pas les mêmes. Mais on peut les regrouper puis vous pouvez les utiliser. Ça ne
me préoccupe pas. Ce jour-là, quand la CSN a sorti les chiffres, j'ai donné une
entrevue à Radio-Canada à Montréal, puis j'ai dit : Le nombre de grèves,
puis s'il y en a 10 ou 15, c'est plus la nature et l'impact des grèves qui nous
préoccupent et qui supportent le PL n° 89. Le reste, ce que d'autres ont
pu dire, c'est la réalité qui nous préoccupe le plus. Ça fait que tout ça pour
dire que la motion est aussi une opportunité pour vous de vous exprimer sur d'autres
thématiques. Or, vous m'excuserez d'avoir saisi cette opportunité-là pour
remettre un peu les pendules à l'heure. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Allaire) :
Merci, M. le ministre. D'autres interventions? S'il n'y a pas d'autre
intervention, nous allons procéder à la mise aux voix de la motion
préliminaire. Est-ce que la motion...
Une voix : ...
Le Président (M. Allaire) :
Parfait. Par appel nominal, Mme la secrétaire.
La Secrétaire
: Pour,
contre, abstention. M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve)?
M. Leduc : Pour.
La Secrétaire
: M. Boulet
(Trois-Rivières)?
M. Boulet : Contre.
La Secrétaire
: Mme Mallette
(Huntingdon)?
Mme Mallette : Contre.
La Secrétaire
: Mme Tremblay
(Hull)?
Mme Tremblay : Contre.
La Secrétaire
: Mme Jeannotte
(Labelle)?
Mme Jeannotte : Contre.
La Secrétaire
: Mme Dorismond
(Marie-Victorin)?
Mme Dorismond : Contre.
La Secrétaire
: M. Thouin
(Rousseau)?
M. Thouin : Contre.
La Secrétaire
: Mme Maccarone
(Westmount—Saint-Louis)?
Mme Maccarone : Pour.
La Secrétaire : M. Paradis
(Jean-Talon)?
M. Paradis : Pour.
La Secrétaire
: M. Allaire
(Maskinongé)?
Le Président (M. Allaire) :
Abstention. Donc, la motion est rejetée.
Est-ce qu'il y a d'autres motions
préliminaires? S'il n'y a pas d'autre motion préliminaire, nous allons
commencer l'étude détaillée. Oui, Mme la députée de Westmount—Saint-Louis, allez-y.
Mme Maccarone : ...je
voulais juste qu'on s'assure que tel que prévu dans l'article 245 qu'on va
étudier, malgré qu'on accepte de faire ça par bloc, mais qu'on réserve le droit
de toujours étudier paragraphe par paragraphe, alinéa par alinéa au besoin.
Le Président (M. Allaire) :
C'est bien noté. Ça va être fait. Donc, comme on l'a évoqué plusieurs fois ce
matin dans le Greffier, vous avez eu le plan de travail, donc, un peu dans le
désordre, dans un ordre logique, mais aussi vous avez l'ensemble des
amendements qui a été déposé, donc, à peu près une trentaine. Donc, je vous
invite à les consulter si vous le souhaitez. Donc, on va commencer, M. le
ministre, on est rendus naturellement à l'article 1. Donc, la parole est à
vous. Je crois aussi qu'il y aura un amendement.
M. Boulet : Oui. Merci, M.
le Président. Donc, je vais lire l'article. Après ça, on pourra déposer l'amendement.
Donc,
1. La Loi sur les accidents du travail et
les maladies professionnelles est modifiée par l'insertion, après l'article 2,
du suivant :
«2.1. Le paragraphe 4° de la définition de
"travailleur" de l'article 2 ne peut avoir pour effet d'empêcher
de qualifier le dirigeant de travailleur lorsqu'il exécute personnellement un
travail pour une autre personne que celle pour laquelle il a le statut de
dirigeant et de lui déterminer un revenu brut aux fins du calcul de l'indemnité
de remplacement du revenu et un salaire brut pour l'application du chapitre IX
selon les critères que la Commission détermine.»
Donc, mes commentaires. Ah! je peux... Est-ce
que je peux lire l'amendement?
Le Président (M. Allaire) :
...le commentaire puis, après ça, on tombera à l'amendement.
M. Boulet : Ah! OK. Donc,
mes commentaires. Bon, c'est un article interprétatif. Puis vous connaissez la
problématique des chauffeurs inc. des personnes qui s'incorporent et qui
évitent de payer des déductions à la source, qui évitent d'être soumises à l'application
des lois du travail, notamment la Loi sur les accidents de travailleurs... du
travail et...
M. Boulet : ...des maladies
professionnelles et qui, en réalité, sont des travailleurs au sens de la loi.
Il y en a qui sont de véritables travailleurs autonomes ou qui peuvent ne pas
être des travailleurs s'ils possèdent les outils, les équipements puis ils
risquent de faire des profits et des pertes, mais, ce que nous vivons au
Québec, c'est que l'incorporation sert de voile, leur permet de se camoufler et
permet d'être soustrait de leurs obligations légales en matière fiscale et de
leur obligation de respecter la Loi sur les accidents de travail, les normes du
travail. Et ici, on vient simplement dire que ces personnes-là, ils peuvent
être des travailleurs. Évidemment, ça peut être du cas par cas, là, mais s'il y
a une réclamation en vertu de la Loi sur les accidents de travail, maladies
professionnelles, on a les outils pour déterminer qu'ils peuvent être des
travailleurs avec cette disposition interprétative là, qui dit que le dirigeant
peut être un travailleur. Mais vous avez vu, l'Association du camionnage est
venue en consultation particulière puis ils étaient très à l'aise avec cette
définition interprétative, mais ils souhaitaient que ce soit un peu plus clair,
d'où l'amendement. Est-ce que je peux le lire tout de suite? M. le Président?
Le Président (M. Allaire) : Oui.
Allez-y. Il est sur Greffier, il est à l'écran.
M. Boulet : Donc, remplacer,
dans l'article 2.1 de la Loi sur les accidents de travail et les maladies
professionnelles, proposé par l'article 1 du projet de loi, «le dirigeant
de travailleur lorsqu'il» par «de travailleur un dirigeant qui». Là,
mais, bon, c'est beaucoup plus clair maintenant, c'est parce qu'on dit :
Le paragraphe 4° de la définition de travailleur ne peut avoir pour effet
d'empêcher de qualifier de travailleur un dirigeant. Donc, ça ne suscite plus
d'interprétations. Puis on l'avait un peu... l'Association du camionnage
souhaitait, là... les avocats de l'association souhaitaient que ça ait ce
niveau de clarté là. Alors, essentiellement, c'est ça. Merci.
Le Président (M. Allaire) : Merci
à vous, M. le ministre. Est-ce qu'il y a des interventions concernant
l'amendement déposé à l'article 1? M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc : Merci, M. le
Président. Je me rappelle très bien des discussions qu'on a eues avec les
associations qui étaient d'ailleurs un peu de haute voltige, là, c'était
particulier sur la lecture, de c'est-tu ça que ça veut dire, des questions de
français, là, c'était particulier. Bref. Mais ça me semble peut-être, en effet,
plus clair, plus limpide. Il faut toujours avoir le souci d'écrire des lois qui
sont idéalement compréhensibles pour le commun des mortels, ce qui est loin
d'être toujours le cas. Mais si une association professionnelle avec un avocat
est venue nous dire en audition qu'ils avaient mal compris la loi, mais c'est
très bien qu'on la change.
Bien, j'ai une question, mais je pense que
je vais attendre qu'on ait terminé l'amendement pour revenir sur la principale
pour la poser.
Le Président (M. Allaire) : D'autres
interventions concernant l'amendement? S'il n'y a pas d'autre intervention,
nous allons procéder à sa mise aux voix. Est-ce que l'amendement déposé à
l'article 1 est adopté?
Des voix : ...
Le Président (M. Allaire) :
Adopté. Excellent. Parfait. On revient donc... Oui, on en revient donc à
l'article 1, amendé, maintenant. Donc, il y a des interventions? M. le
député d'Hochelaga-Maisonneuve, allez-y.
M. Leduc : Oui. Je vais
essayer de ne pas m'ébouillanter avec l'eau. Voilà. Merci. Là, je comprends
qu'on vient modifier la notion et la définition de travailleur notamment, mais
est-ce que, puis c'est une question assez naïve à la limite, mais est ce qu'il
y aurait... est-ce qu'il faudrait modifier d'autres définitions de travailleurs
dans d'autres lois? Parce que là, on ne fait que toucher celle de la LATMP,
mais des définitions de travailleur d'ailleurs, elles ne sont pas toujours
cohérentes d'une loi à l'autre, là.
M. Boulet : Non. En fait, la
Loi sur les normes, non, la définition du travailleur n'est pas la même. La
notion de travailleur est élargie puis ça fait référence à la rémunération, à
la présence d'un employeur et du lien de subordination.
La problématique qu'on avait avec la
LATMP, collègue, c'est qu'on définit le travailleur : personne physique,
pour un employeur, rémunération, contrat de travail à l'exclusion de. Puis, au
paragraphe 4°, on excluait le dirigeant d'une personne morale, quel que soit le
travail qu'il exécute pour cette personne morale. C'est la raison qui nous
incitait à l'éclaircir, parce qu'il pouvait ab initio se présenter à la CNESST
puis être considéré comme étant le dirigeant d'une personne morale et donc pas
un travailleur. Donc, on enlève cette ambiguïté-là.
M. Leduc : Je comprends.
Est-ce que c'était la seule chose? Parce que je connais... j'ai vu passer le
dossier des chauffeurs Inc., là, ça se fait de plus en plus jaser. Puis là je
teste ma propre mémoire, mais il me semble qu'y avait d'autres aspects au-delà
de la loi, la LATMP, là.
M. Boulet : Dans notre
périmètre d'action, ce n'était que la revendication de l'Association du
camionnage, comme ils l'ont exprimé en consultations particulières, mais il y a
d'autres choses. Tu sais, il y a la présence des contrôleurs...
M. Boulet : ...sur les routes.
Suite à une décision du Tribunal administratif du travail, il y a la formation,
il y a l'émission des permis. Mais ce n'est pas dans notre périmètre d'action.
C'est la raison pour laquelle vous avez vu, au salon rouge, c'est mon collègue
des Transports qui a répondu à la question, parce que ça relève vraiment, en ce
qui concerne la formation, les permis puis la présence des contrôleurs
routiers, de Transports puis de Sécurité publique aussi.
• (14 h 40) •
Mais il y a aussi, collègue... il y a une
ligne de dénonciation, vous m'avez peut-être déjà entendu en parler, à la
CNESST pour dénoncer ces personnes-là. Puis c'est sûr qu'à Revenu Québec, s'il
y a des dénonciations, ils vont faire une enquête. Parce que, si tu es
incorporé, puis que c'est juste un voile corporatif pour camoufler un véritable
salarié, là ils vont faire des enquêtes. Mais je sais que la police peut être
impliquée là-dedans, Revenu Québec peut être impliquée là-dedans. Mais, nous,
dans notre sphère d'activité, c'est ce que nous pouvions faire.
Le Président (M. Allaire) : Allez-y.
M. Leduc : Bien, il n'y a pas
aussi une cotisation à payer pour les normes du travail qui...
M. Boulet : Oui. La
cotisation.
M. Leduc : Parce que là, vous
me dites qu'on règle... J'entends puis je le vois puis je ne le conteste pas.
Mais j'ai vraiment l'impression qu'on échappe... Tu sais, là vous dites :
Il y a des trucs, là, sur le transport, etc. D'accord. Mais est-ce que la
cotisation à... elle est déjà couverte?
M. Boulet : Il va falloir
qu'elle soit payée. Si la personne est démasquée, son employeur va devoir payer
la cotisation, absolument.
M. Leduc : Mais que la loi
est suffisamment bien écrite au moment où on se parle pour ça?
M. Boulet : Ah! bien oui.
Tout à fait. Tous les...
M. Leduc : Mais pas la...
M. Boulet : Non. Exact.
M. Leduc : Pourquoi il
fallait modifier juste la LATMP puis pas la LMT aussi pour couvrir l'enjeu des
«Chauffeurs inc.»?
M. Boulet : Bien, à cause,
comme je viens de vous mentionner... parce qu'il y avait une exclusion
spécifique pour les dirigeants de personnes morales. Il n'a pas dans la LMT.
M. Leduc : Ce qu'il n'y a pas
dans la LMT.
M. Boulet : Exact.
M. Leduc : D'accord. Je
comprends. Merci de la précision.
Sur le reste des aspects que vous avez
évoqués en matière d'intervention sur le dossier «Chauffeur inc.», je comprends
que c'est un dossier qui est important pour tout le monde. Ça semble l'être
aussi pour le gouvernement. Tant mieux. Vous dites : Il y a des choses à
faire en formation, des choses à faire sur les contrôleurs routiers. Est-ce qu'il
n'y aurait pas eu lieu, parce que ça s'est déjà vu, de rajouter ça dans la loi
qui est ouverte en ce moment pour régler le dossier «Chauffeur inc.» au
complet?
M. Boulet : C'est vraiment
une affaire de transport et de sécurité publique, là. On ne s'immiscera pas
là-dedans. C'est un dossier dans lequel je n'ai aucune expertise. Ce n'est
vraiment pas dans notre périmètre d'action.
M. Leduc : Mais ça veut dire
qu'il y aura des initiatives législatives en transport?
M. Boulet : Bien oui. Vous
avez entendu mon collègue des Transports qui en a parlé, d'ailleurs, qui
travaille en collaboration avec mon collègue de la Sécurité publique pour
redéployer des contrôleurs routiers. Puis je sais qu'aux Transports, ils
travaillaient à accentuer la formation puis s'assurer d'un meilleur contrôle,
lors de l'émission des permis.
M. Leduc : Donc, pas
nécessairement des interventions législatives de la part de vos collègues?
M. Boulet : Non. Pas
nécessairement. En tout cas pas à ma connaissance. À ce stade-ci, pas à ma
connaissance.
M. Leduc : Parfait.
Le Président (M. Allaire) : Ça
va?
M. Leduc : Oui.
Le Président (M. Allaire) : Mme
la députée de Westmount-Saint-Louis.
Mme Maccarone : Oui. Merci.
M. le ministre, je souhaite comprendre. Parce que là, vous avez parlé de la
ligne de dénonciation auprès de la CNESST. Mais je me souviens que, quand
l'Association des camionneurs du Québec sont venus passer ici, en commission,
ils ont quand même soulevé des préoccupations. Ils ont dit que c'est très
difficile puis souvent ça ne fonctionne pas. C'est une lourdeur de travail.
Alors, est-ce que nous sommes en train d'ajouter quelque chose ici que... Ça
fait que c'est quoi la mécanique d'abord, le processus à suivre pour s'assurer
qu'il puisse continuer à faire son enquête puis qu'on n'en échappe pas, suite à
la lumière qu'ils ont... ils sont venus partager avec nous, ici, en commission?
M. Boulet : Bien, il y a...
il y a trois façons, hein? Tu sais, si un «Chauffeur inc.» fait une réclamation
pour être indemnisé, recevoir une indemnité de remplacement de revenu suite à
un accident ou une maladie, là ça risque de démasquer la personne. Il peut y
avoir des vérifications faites par la CNESST suite à des dénonciations ou des
examens de conformité. Mais, sans dénonciation, collègue, on ne peut pas rien
faire. Ça fait que ce n'est pas une lourdeur. Tu sais, il y a des vols, il y a
de la maltraitance, il y a tout, dans notre société. Malheureusement, il faut
que ce soit suivi d'une plainte ou d'une dénonciation, pour qu'il y ait une
enquête, une vérification puis qu'on redresse la situation. Ici, on est
plusieurs ministères puis il y a des... comme Revenu Québec, la CNESST, il y a
la police aussi qui est impliquée. Je pense que ça prend une vigilance puis une
collaboration de tout le monde. Mais ce n'est pas d'ajouter une lourdeur. C'est
de s'assurer de savoir les faits. Et là, ce qu'on fait aujourd'hui, qui a été
salué, là, selon ma compréhension, là on...
M. Boulet : ...des
consultations particulières, c'est qu'on vient dire... on enlève... on vient
clarifier que l'exclusion n'empêche pas la personne de bénéficier de
l'indemnisation qui est prévue dans la loi.
Mme Maccarone : C'est le mot
«lourdeur», mais il n'est pas de moi. Comme j'ai dit, c'est ça qu'ils ont
partagé quand ils sont venus. Parce qu'ils ont quand même dit que, malgré qu'on
a l'élément de dénonciation auprès du CNESST... puis je n'ai pas la citation
exacte, mais ils disent : Le fardeau, pour que la CNESST puisse continuer
à faire son enquête, est très lourd, et donc il y a beaucoup de dossiers qui
s'échappent. Alors, ça, je voulais savoir si on avait un mécanisme en place, ou
on va penser qu'est-ce qu'on peut faire pour alléger la tâche, faire un
accompagnement. Étant donné que nous sommes en train de faire des
modifications, est-ce qu'il y a quelque chose qui est prévu par la suite, par
exemple, pour venir accompagner cette demande?
M. Boulet : Bien, on me
confirme qu'au-delà de la ligne de dénonciation, à la CNESST ils ont mis une
mesure administrative en place, puis ça rend disponible une adresse courriel
centralisée, une adresse courriel centralisée, où tu peux dénoncer les
employeurs suspectés de participer à ce stratagème-là. Donc, il faut en faire
la promotion, puis je suis content que vous posiez la question, ça me permet
d'en parler. Puis la CNESST informe, renseigne aussi les employeurs quant à
l'importance de respecter leurs droits et leurs obligations qui sont prévues
dans la LATMP.
Ça fait qu'on met tout en place pour faire
de la pédagogie, pour sensibiliser, pour informer et s'assurer qu'on lutte
contre ce phénomène-là. Puis je pense que nous, on l'a... moi, je l'ai
considéré comme un devoir de m'y intéresser, parce que ça nous fait mal, et ça
génère des accidents aussi, là. Puis il y a, malheureusement, des personnes,
collègue, qui ne savent pas qu'ils peuvent bénéficier de la CNESST puis c'est
suite à un accident, c'est suite à une maladie, ou, peu importe. Mais je pense
qu'on fait un pas en avant. C'est notre contribution au travail, à la grande
problématique des Chauffeurs inc.
Mme Maccarone : Avons-nous
des statistiques qui vont nous aider à voir l'impact de cette modification puis
changement, dont on peut faire une comparaison d'ici trois ans, cinq ans?
M. Boulet : Ah! on peut
certainement, collègue, avoir le nombre de dénonciations, le nombre d'enquêtes
de vérifications. Mais, oui, c'est certain. Je le présume qu'à la CNESST ils
font ces compilations-là.
Mme Maccarone : Bien, il me
semble que ce serait intéressant de le voir...
M. Boulet : Bien oui.
Mme Maccarone : ...parce que
c'est quand même un changement... Le but, évidemment, comme vous avez dit,
c'est la sensibilisation, mais ça va provoquer quand même un changement sur le
terrain.
M. Boulet : Oui, tout à fait.
Mme Maccarone : Ce serait
intéressant d'avoir une étude d'impact pour voir si ça fonctionne.
M. Boulet : Oui, la
compilation. Oui, tout à fait.
Mme Maccarone : J'aurais une
autre question pour vous, M. le ministre. Lors de passage, en commission
parlementaire, de la Fédération des chambres de commerce du Québec, ils ont
quand même partagé la préoccupation que... Ils parlaient de... Dans les
définitions, ils nous ont dit que cette définition peut avoir des effets
indésirables sur d'autres industries ou des nombreux entrepreneurs. Eux, ils
ont soulevé l'exemple des médecins, qui peuvent tomber dans cette définition,
alors il y aurait un impact sur eux. Alors, je voulais juste savoir quelle est
votre réponse à ça. Est-ce que ça, c'est prévu dans la planification? Est-ce
qu'on a autre chose qui s'en vient? Parce que le changement peut notamment
avoir des répercussions notables, selon eux, auprès des industries et des
services professionnels autres que les chauffeurs.
M. Boulet : Non, pas dans
l'industrie des services professionnels, mais, dans d'autres secteurs, ça
pourrait, parce qu'utiliser un voile corporatif pour te soustraire à des
obligations légales en matière de travail ça arrive. Dans le fond, collègue,
c'est que tu t'incorpores même si tu es un salarié, que tu as un employeur, que
tu es rémunéré par l'employeur, puis qu'il y a un lien de subordination entre
les deux. C'est ça, la relation employeur-salarié. Mais tu t'incorpores, même
si tu es un employé, pour éviter, mettons, de payer les déductions à la source
puis de te... de t'assujettir à des obligations légales qui sont prévues dans
des lois.
Mais il faut faire attention, il y a des
personnes qui sont incorporées, puis qui n'ont pas d'employeur, puis qui sont
des travailleurs autonomes ou des entrepreneurs autonomes, qui, eux, peuvent,
légalement, le faire. Mais ici, on s'intéresse aux personnes qui utilisent
l'incorporation à titre de stratagème pour, encore une fois, éviter des
obligations.
Mme Maccarone : Vous dites
que ça ne s'applique pas aux professions parce que... Tu sais, un médecin,
c'est quand même un entrepreneur. Tu sais, c'est une ambiguïté...
M. Boulet : Bien là, vous
pouvez y répondre autant que moi, là. Mais dans le secteur... dans d'autres
secteurs, il faudrait voir, là, c'est qui, le lien de subordination, c'est
qui...
M. Boulet : ...qui est l'employeur,
c'est quoi, le mode de rémunération. Moi, je n'ai pas aucune compréhension que
ça s'appliquerait dans ces... dans les services professionnels, par exemple.
• (14 h 50) •
Mme Maccarone : Ça
s'appliquera d'abord dans quelle industrie précisément? Parce que, là, on parle
des chauffeurs, mais la... bien, la crainte ou l'effet que ça va avoir sur
d'autres industries. Est-ce qu'on a des exemples où il va y avoir un impact
ailleurs qu'ici?
M. Boulet : Ah! bien, moi,
j'en ai vu beaucoup, là, des employeurs, puis le collègue d'Hochelaga-Maisonneuve
puis Jean-Talon, ont dû en voir, là, mais c'est souvent des employeurs. Je
n'aime pas parler comme ça, là, mais c'est la réalité, qu'ils disent : Je
t'embauche, mais tu vas t'incorporer, puis ça va m'éviter de déduire à la
source. Bon, je vois le collègue d'Hochelaga-Maisonneuve. C'est un stratagème,
c'est une ruse, mais ce n'est pas acceptable. Puis, tu sais, en droit, on
disait souvent : On peut soulever le voile corporatif quand il y a une
fraude. Ici, on soulève... en fait, on tasse le voile corporatif pour permettre
que le travailleur soit considéré puis que l'employeur aussi s'assujettisse à
ces obligations légales, notamment fiscales. Je pense que j'ai pas mal tout
dit, là.
Mme Maccarone : Mais nous
n'avons pas étudié l'impact ailleurs que sur les chauffeurs, techniquement.
M. Boulet : Non, ce qui nous
intéressait ici, c'étaient les «chauffeurs inc». Mais je ne dis pas, collègue,
que ça ne peut pas s'appliquer, absolument pas, dans un autre secteur ou dans
un stratagème comme ça.
Mme Maccarone : Je comprends.
Non, je comprends puis ce que vous dites est très logique. On souhaite que tous
les employés sont protégés. Ça fait que s'il y a un impact à l'extérieur des chauffeurs
qui peut être bénéfique pour les autres, j'en suis, c'est juste que je
comprends le point de vue qu'ils avaient quand même soulevé, c'est que, s'il y
a une interprétation... je ne suis pas avocate, vous, vous êtes avocat, s'il y
a une interprétation des groupes, comme la Fédération des chambres de commerce
du Québec, ils disent... bien, eux, ils pensent qu'il va y avoir un impact sur
les médecins, comment est-ce qu'on peut corriger d'abord leur perception que
c'est le cas?
M. Boulet : Bien, les
médecins, ce n'est pas le cas. OK.
Le Président (M. Allaire) : Ça
va?
Mme Maccarone : Merci.
Le Président (M. Allaire) :
Merci. M. le député de Jean-Talon.
M. Paradis : Merci. Donc, M.
le ministre, juste... vous nous l'avez dit, mais je voudrais être sûr que c'est
bien le cas. Cet article, cette modification, de même que... bon, l'amendement
et l'article principal visent le cas des «chauffeurs inc.» uniquement.
M. Boulet : Oui.
M. Paradis : Est-ce qu'il y a
d'autres cas, là? Juste pour qu'on...
M. Boulet : Bien, uniquement,
comme je viens d'expliquer à notre collègue de Westmount—Saint-Louis, ce n'est
pas impensable que ça puisse s'appliquer dans un autre cas où il y a une
tentative de masquer la réalité d'employés ou de travailleurs d'une personne.
Tu sais, ça peut être... puis je ne vais pas cibler aucune entreprise, là, mais
ce qu'on cible essentiellement, c'est les «chauffeurs inc.», mais il pourrait y
avoir un entrepreneur qui décide, par exemple : Vous travaillez pour
moi... Je travaille pour vous, collègue, puis vous me demandez de m'incorporer
pour vous permettre de ne pas payer les déductions à la source puis pour
m'empêcher de recevoir des indemnités en cas d'accident. Je résume. Mais s'il y
a une réclamation, s'il y a une vérification, s'il y a une enquête de
non-conformité, on pourrait démasquer cette réalité-là ultimement dans un autre
secteur. Mais là où il y a un foisonnement de stratagèmes de cette nature-là,
c'est dans le domaine des chauffeurs. Vous avez bien compris.
M. Paradis : Et si je résume,
donc vous dites : Ce n'est pas exclu que ça s'applique à d'autres choses,
mais aujourd'hui, quand vous avez rédigé votre projet de loi, et c'est ça dont
on parlait tout à l'heure, il n'y a pas d'autres secteurs où il n'y a pas
d'autres domaines, c'est celui de «chauffeurs inc.», que vous avez regardé.
Donc, nos discussions, on peut se concentrer sur «chauffeurs inc.».
M. Boulet : C'est la seule,
oui. Puis, en consultations particulières, c'est cette problématique-là qui
nous intéresse.
M. Paradis : Et vous l'avez
bien résumé, je vais me permettre de le faire à peu près dans les mêmes mots
que vous. Mais pour les gens qui nous écoutent, là, les «chauffeurs inc.»,
donc, c'est des gens qui agissent, en fait, comme des employés. Ils utilisent
les outils de travail de l'employeur, d'une compagnie de transport, ils sont...
leur horaire de travail est déterminé par l'employeur, etc. Donc, ils sont
vraiment comme des employés, mais, en réalité, ils se sont incorporés, et là
ils ne sont pas considérés comme des employés pour les fins du droit du
travail, des obligations fiscales, des cotisations obligatoires à payer. Donc,
ce que ça fait, c'est que l'employeur réduit de cette façon-là les cotisations
à payer, notamment en matière de santé et de sécurité au travail. Donc, tu ne
paies pas ta juste part des services qui vont être rendus en matière de
sécurité... de santé et de sécurité, puis ça te donne un avantage indu par
rapport à ceux qui respectent la loi. Bon...
M. Boulet : Très bon point...
M. Paradis : ...ça fait en
sorte que... ça fait en sorte qu'il y a actuellement un déséquilibre, parce
qu'il y a, sur la route, beaucoup de camionneurs qui sont venus nous voir. Vous
l'avez mentionné tout à l'heure, puis je suis sûr que c'est votre cas, M. le
ministre, c'est le cas des collègues. Moi, ils sont venus dans mon bureau, à Jean-Talon...Nous,
on suit la loi actuellement et on est désavantagés, parce que là on coûte plus
cher. Ceux qui nous emploient, bien, ça coûte plus cher pour eux que les
chauffeurs inc. qui font de la concurrence déloyale en quelque sorte. Donc,
c'est un véritable enjeu. Puis c'est pas normal que des chauffeurs inc.
puissent continuer à proposer leurs services à des entreprises, par exemple, de
livraison, sans cocher toutes les cases que les autres cochent, notamment en
matière fiscale, en matière de santé et sécurité.
Donc, c'est ça, on fait face à ça. On en a
discuté aujourd'hui à l'Assemblée nationale... non, hier, hier à l'Assemblée
nationale. Et ça a des conséquences réelles pour la santé et la sécurité des
chauffeurs concernés, dont on parle ici, dans cet article-là, mais aussi pour
la santé et la sécurité de tout le monde. Parce que, souvent, c'est des gens
qui n'ont pas la même formation, qui ont causé des accidents. On est d'accord,
c'est ça, les constats. Je vous pose la question, et je n'ai pas d'a priori,
parce que, dans leur mémoire que j'essaie de remettre à l'écran à l'instant,
les gens de l'Association du camionnage du Québec ont conclu un peu comme suit,
puis je voudrais m'assurer avec vous qu'on qu'on répond correctement à la
question, parce qu'à la fin, ils disent : On regarde le projet de loi,
puis ils disent : «Si l'objectif est d'indemniser une travailleuse ou un
travailleur sans tenir responsable l'employeur, alors, il nous apparaît que le
projet de loi n° 101 vient légitimer... légitimiser le concept des
chauffeurs inc., ce qui serait absolument catastrophique pour l'industrie du
camionnage et le tissu social québécois. Toutefois, si l'objectif est de créer
une présomption du statut d'employé et cotiser l'employeur à même sa masse
salariale, cet objectif rejoint les prétentions que nous évoquons auprès de vous — c'est
l'association qui parle. «Nous soumettons toutefois qu'il demeure
primordial que cette clarification soit apportée au projet de loi n° 101
afin d'éviter toute interprétation ambiguë relativement aux obligations et
responsabilités d'un employeur envers son employé. Conséquemment, il nous
apparaît essentiel que le projet de loi n° 101 soit plus clair sur
l'aspect de l'incorporation de la rémunération du chauffeur inc. dans la masse
salariale du donneur d'ouvrage.» Donc, c'est une invitation, ils vous
regardaient et ils disaient : Ça semble bien aligné, puis on comprend vos
intentions, mais on n'est pas sûr qu'on a les bonnes solutions ici.
Donc, je vous pose la question et la
question est vraiment ouverte, sans a priori, M. le ministre. Il faut faire
attention de ne pas légitimer, de ne pas avoir l'air de donner un bonbon
additionnel, mais d'être sûr qu'on est en train de serrer la vis, parce qu'en
réalité, ce qu'on veut, tout le monde ensemble, c'est faire disparaître le
phénomène...
M. Boulet : Totalement.
M. Paradis : ...des
chauffeurs inc. parce que c'est un danger public. C'est ça qu'on veut faire,
hein?
M. Boulet : Mais totalement,
on est vraiment, vraiment sur la même longueur d'onde. Ce qu'on a mis dans la
loi, c'est totalement compatible avec les recommandations de l'Association du
camionnage. On ne l'éliminera pas — soyons réalistes — totalement,
mais on va s'assurer de faire en sorte que ça ne foisonne plus et que ça soit
diminué sur le terrain. Donc, promotion, sensibilisation, modification de
l'article qui définit. Et, bien sûr, qu'avant d'indemniser, collègue, si c'est
un travailleur déguisé en entrepreneur... en compagnie, en personne morale,
oui, l'employeur va devoir assumer ses cotisations puis, oui, il va devoir
assumer ses obligations. Absolument. C'est un corollaire inéluctable selon moi.
Le Président (M. Allaire) :
...
M. Paradis : Donc, est-ce que
vous pourriez préciser un peu comment c'est un corollaire inéluctable.
M. Boulet : Bien, je ne peux
pas le faire, parce que c'est la loi sur... qui gère Revenu Québec, tu sais,
c'est les déductions à la source. Ici, pour les cotisations, c'est un
employeur. Si on conclut que c'est un salarié, on va avoir défini l'employeur.
Puis je référerais mon collègue aux articles de la LATMP, qui prévoit qu'un
employeur doit assumer sa cotisation, selon différents régimes de financement,
soit à l'unité, ou dans une mutuelle de prévention, ou selon un régime
rétrospectif. Mais, dans la loi, c'est prévu que l'employeur doit cotiser.
M. Paradis : Bon, ce qui est
intéressant, encore une fois, pour les gens qui nous regardent...
M. Boulet : Bien oui, bien
oui, bien oui, bien content.
• (15 heures) •
M. Paradis : ...on a les
mêmes objectifs, c'en est une vraie discussion constructive où on poursuit,
tous, le même objectif, puis il n'y a pas de... C'est comme transpartisan ce
qu'on essaie de faire. Je le précise, parce que ce n'est pas une question pour
vous mettre en porte-à-faux ou trouver... Il faut qu'on s'assure qu'on n'est
pas en train de faire quelque chose qui, peut-être...
15 h (version non révisée)
M. Paradis : ...n'a pas les
impacts recherchés. Vous nous dites : C'est clair que ça n'aura pas l'impact
de permettre de donner des compensations ou de faire des paiements à quelqu'un
qui, par ailleurs... dont l'employeur, par ailleurs, n'a pas cotisé. Vous nous
dites : C'est clair. Pour moi, aujourd'hui ce n'est pas si clair que ça
parce qu'on n'a pas les autres bouts. C'est quoi le lien avec les lois fiscales
pertinentes? C'est quoi le lien avec l'autre projet de loi que le ministre des
Transports a annoncé qu'on ne connaît pas encore? Parce que la question du
collègue d'Hochelaga-Maisonneuve de tout à l'heure demeure très pertinente. Est
ce qu'il y a d'autres... ou c'était... je ne sais pas si c'était la collègue de
Westmount—Saint-Louis, non, je pense, c'est mon collègue d'Hochelaga-Maisonneuve
qui disait : Est ce qu'il y a d'autres définitions comme celle-là dans d'autres
lois, là, de travailleurs où il faut avoir le même ajustement? Et est-ce que ça
ne nécessite pas, si on bouge, cette pièce du casse-tête, qu'on bouge tout de
suite d'autres pièces du casse-tête pour ne pas favoriser les chauffeurs inc. à
qui on tente de serrer la vis, en réalité?
M. Boulet : Je comprends. Notre
problématique... pour moi, c'est très clair, notre problématique avec la LATMP,
collègue de Jean-Talon, c'est qu'on avait une exclusion spécifique et c'est ce
qui nous a rendu impérative la solution d'amender et d'ajouter cette précision-là.
Maintenant, dans les lois fiscales, dans d'autres
types de lois, il y a des définitions qui ne sont pas les mêmes, mais qui ne relèvent
pas de moi. Mais tout est enquêtable, tu sais, comme Revenu Québec ou la Sûreté
du Québec, ils font des enquêtes de vérification puis des enquêtes de
conformité. Moi, j'ai déjà vu, en pratique, des personnes comme ça qui
recevaient des avis de cotisation du ministère du Revenu du Québec parce qu'il
y avait eu des enquêtes puis ils avaient été démasqués. Mais, tu sais, moi, ce
qui m'intéresse ici, c'est qu'on ait la possibilité de démasquer les personnes
pour ce qui concerne l'indemnisation des lésions professionnelles, les
accidents puis les maladies. Et c'est ce que la l'Association du camionnage
nous demandait. Et je le répète, c'est totalement compatible avec ce qu'ils
veulent.
Donc, l'employé en bénéficie. Puis l'employeur,
c'est prévu dans la loi qu'il doit cotiser. Ça fait que, forcément, si tu es un
salarié, lorsque tu réclames une indemnité de remplacement de revenu, forcément,
il y a un employeur puis, forcément, il va être cotisé.
M. Paradis : C'est une
discussion intéressante, je le redis, là, parce qu'on n'a pas... on a le même
objectif, on a vraiment le même objectif, c'est juste que moi, quand j'ai lu
ça, j'ai vraiment eu l'inquiétude que l'Association du camionnage du Québec
vous a exprimée : Attention, si vous essayez de faire ceci mais qu'en
réalité ça donne cela, ce n'est pas une bonne idée. C'est-à-dire qu'on essaie
de serrer les vis, mais qu'en réalité on donne en quelque sorte un cadeau.
Parce que, moi, vous dites «je vous assure que», j'aimerais ça vous croire
sur parole, mais est-ce que vous avez le pendant du mécanisme? Là, on est en
train de dire : on n'empêchera pas de qualifier le camionneur lui-même de
travailleur et donc de bénéficier de la possibilité d'être indemnisé en cas d'accident,
bon, puis un problème de santé-sécurité. Juste pour terminer. On a ce bout-là. Comment
ça marche avec le mécanisme de l'autre côté, là, pour s'assurer que, bien là,
employeur, c'est parce que toi, il était qualifié jusqu'à aujourd'hui. Avant
que s'applique cette présomption-là avec votre amendement, il était un
camionneur inc. L'employeur, il n'a pas payé de cotisations. Parce que la
présomption, là... On se retrouve dans un cas où il y a eu un accident, disons,
le camionneur a eu un accident, il s'est blessé, il était au travail. Il
réclame. Il dit : Je veux être compensé, je ne peux plus travailler, je veux
être compensé. La présomption fait en sorte qu'on va dire : Ah, tu es un...
tu es un chauffeur inc., ton employeur n'a pas payé de cotisations, mais ça ne
m'empêchera pas de te considérer comme un travailleur et de te compenser. Fort
bien. Ça, c'est au jour où on prend cette décision là, où on applique la
présomption. Où est ce que ça me dit, moi, avant que...
M. Boulet : ...l'article où
l'employeur...
M. Paradis : Mais c'est ça
que j'aimerais savoir, là, donc. C'est que c'est quoi le pendant juridique pour
s'assurer qu'on n'est pas en train de créer un avantage alors qu'on veut serrer
les boulons.
Des voix : ...
M. Boulet : ...326 et
suivants, collègue. Puis je vais vous donner d'autres informations après ça.
Donc, s'il un travailleur, il y a un employeur, parce que la définition de
travailleur, il faut, au-delà du lien de subordination puis de la rémunération,
qu'il y ait un employeur. Puis 326 et suivants : La commission impute à l'employeur
le coût des prestations dues. Elle peut... Bon. Puis 326 et suivants : La commission
impute aux employeurs. Vous allez voir, là, selon... il y a certaines
distinctions, mais il y a une obligation de la commission d'imputer aux employeurs.
Ça fait que si tu es démasqué...
M. Boulet : ...parce que
tu es un employeur, mais je vais le prendre, ça aussi, tu as forcément comme
employeur une obligation. Ça ne peut pas être plus limpide, collègue. Puis je
vais vous donner d'autres informations pour vous rassurer, là, qu'il n'y a que
dans notre... Est-ce que ça vous va?
M. Paradis : Mais
continuez. Je vais être curieux parce que je vois l'article 326 en même
temps.
M. Boulet : 326, 327.
M. Paradis : Là, vous me
le mentionnez, et le suivant.
M. Boulet : Et les articles
suivants, là, c'est une obligation de la commission d'imputer l'employeur selon
différentes conditions.
M. Paradis : Mais c'est
à une, ou plusieurs, ou toutes les unités?
M. Boulet : Non, non,
mais il y en a... Il y a trois régimes de financement. Il y en a un, c'est
selon ton unité d'employeur. Donc, tous les employeurs qui sont dans la même
unité, généralement, où les niveaux de risque se rassemblent, il y en c'est
selon les regroupements par des mutuelles de prévention, puis les employeurs
qui ont des masses salariales plus élevées, c'est ce qu'on appelle un régime
rétrospectif long terme. On tient compte d'un certain nombre d'années. Mais ce
n'est pas ça qui est important. Ce qui est important, c'est l'obligation de la
commission d'imputer l'employeur. Ça fait que si le travailleur est démarqué,
il y a forcément un employeur. S'il n'y a pas d'employeur, il ne sera pas
démarqué. C'est un autonome. Il est propriétaire de son camion. Il contrôle son
horaire. Il y a des profits, des pertes. Vous connaissez tous ces critères-là.
Et je voulais vous... Moi, pour moi, c'est clair, clair, claire. Mais je
voulais vous dire qu'au plan fiscal à Revenu Québec, puis je le dis, là, à
titre d'information, collègues, là, parce que vous poussez un peu... Dans
d'autres secteurs, Revenu Québec s'est doté de la notion d'entreprises de
services afin de s'assurer que les particuliers et les propriétaires
d'entreprises individuelles qui se constituent en personne morale ou en société
s'acquittent bien de l'impôt dont ils sont recevables...redevables. Puis il y a
la SAAQ aussi, la Société d'assurance automobile qui a mené une opération de
contrôle auprès des camionneurs afin de vérifier la validité de leur permis de
conduire et de leurs assurances. Et ça, c'est une opération qui a été fortement
médiatisée en novembre 2024, ce qui fait que tout ça pour vous dire :
Nous, on répond aux vœux de l'Association de camionnage du Québec. Puis j'en ai
parlé souvent avec Me Marc Cadieux, mais mes collègues font la même
affaire. Mais je ne m'exprimerai pas plus sur la responsabilité ministérielle
de mes collègues, mais c'est tout.
Le Président (M. Allaire) :
Député de Jean-Talon.
M. Paradis : Bon.
Première question. Là, vous dites que vous répondez à la demande. Dans leur
mémoire, là, ils n'étaient pas... Ils étaient encore dubitatifs. Ils n'étaient
pas... Ils disaient... Ils ne condamnaient pas. Ils ne dénonçaient pas. Ils ne
disaient pas que ça ne fonctionne pas. Ils étaient dubitatifs. Est-ce que vous
nous confirmez que vous avez eu, depuis, des conversations additionnelles où
ils vous disent : OK, je suis rassuré parce que j'ai vu et entendu, et
c'est la bonne solution.
M. Boulet : En
commission, ils étaient corrects, mais ils en avaient quant à la clarté totale
de la définition. Est-ce que vous avez eu des... Oui, mais...
M. Paradis : Mais c'est
à ça que je réfère, M. le ministre, là.
M. Boulet : Oui. Et, oui,
ça répond à...
M. Paradis : C'était...
Je pense... Je ne pense pas qu'au terme des consultations particulières avec ce
groupe-là et de leur mémoire, on peut déduire qu'ils sont arrivés puis qu'ils
ont dit; Attaboy! C'est exactement ça que je demandais.
M. Boulet : Non. Non, ils
avaient des réserves. Il y avait même un avocat qui était avec eux autres,
c'est un avocat de Cain Lamarre de Québec. Puis moi-même, j'étais étonné un peu
parce que je trouvais que la rédaction était correcte, mais je comprenais que
ça... Il n'y a rien qui n'est pas susceptible d'interprétation, vous le savez,
on est des... Tu sais, on le sait tous, ici, autour de la table. Mais eux
autres avaient un petit doute. Et donc c'est pour ça qu'on l'a clarifié.
Le Président (M. Allaire) :
M. le député de Jean-Talon.
M. Paradis : Mais la
clarification me semble être une clarification de terminologie, c'est-à-dire
que la phrase soit plus claire. Et ça, ça me semble être accompli comme
objectif. L'interrogation de base de l'association des camionneurs était plus
importante. Elle disait : On comprend que ça pourrait vouloir dire qu'on
serre les vis, qu'on serre la vis, qu'on... qu'on ne légitimise pas un truc qui
est, en réalité, illégal. Mais ça pourrait vouloir dire le contraire aussi
qu'on donne des avantages puis qu'on... qu'on risque de faire ça. Est-ce que
depuis les consultations particulières vous avez eu des conversations où ils
disent : Oui, oui, on a compris, puis on est d'accord, c'est la bonne
façon de l'écrire, de le faire.
M. Boulet : Il y avait
une appréhension, comme vous exprimez, mais découlant de l'absence de totale
clarté de définition. Mais avec la précision qu'on a faite, il n'y a plus
d'ambiguïté. Puis moi je ne vois pas comment ça pourrait légitimer le
stratagème qu'est Chauffeur inc., je veux dire. Je ne le vois pas, mais je peux
comprendre qu'il y en a qui peuvent le prétendre si l'amendement...
M. Boulet : ...n'avait pas été
suffisamment clair, mais, pour moi, il m'apparaît clair. Il n'y a rien qu'il
peut y avoir dans cet article-là pour effet d'empêcher de qualifier de
travailleur un dirigeant qui exécute, etc., il me semble, c'est clair, clair,
clair, alors qu'avant je pouvais comprendre qu'il pouvait y avoir une petite
zone de doute, là.
• (15 h 10) •
M. Paradis : Et je verrai...
je vais de nouveau qualifier mes questions puis les interventions, parce que
c'est important ce dont on est en train de discuter. C'est drôle qu'on commence
avec ça dans ce projet-ci, mais donc le phénomène des «chauffeurs inc.», en
tout cas, ma formation politique s'est exprimée très clairement dans les
derniers jours là-dessus, en disant que c'est un phénomène très grave. Votre
collègue, le ministre des Transports aussi, M. le ministre, on le sait, donc a
dit : Là, il faut agir. Je pense que l'ensemble des partis... et je vois
mes collègues qui hochent la tête, on est tous un peu catastrophés de voir ce
que ça a donné parce que ça a donné des accidents graves puis c'est la vie des
gens qui est en jeu.
Donc, on veut s'assurer qu'on fait la
bonne chose. C'est pour ça que le débat est important et que ce n'est pas des
technicités. Ce que vous proposez comme amendement, avec ce qu'on voit ici,
c'est assez clair. Je précise que, pour moi, c'est les autres bouts qui
devraient aller avec ça, qui ne me semblent pas aussi clairs. Comme, par
exemple, vous avez dit : Ah! bien là, c'est clair que... vous m'avez
référé, rapidement, je suis allé revoir les articles 326 et suivants,
c'est la règle d'imputation, vous avez dit : Ça va s'appliquer. Mais,
parlons très concrètement pour que les gens nous suivent, là, allons-y avec un
exemple très concret, qui est celui que je donnais tout à l'heure.
Alors, un camionneur a un accident, c'est
un «chauffeur inc.». Disons que c'est un «chauffeur inc.» qui est depuis trois
ou quatre ans avec son entreprise de camionnage, donc jamais des cotisations
pour l'application de... en application de nos lois en santé et sécurité n'ont
était payées. L'employeur était content, il n'a pas payé ça, ça a réduit ses coûts.
Il est allé chercher des contrats, notamment dans des offres... des appels
d'offres publics, parce que ceux qui respectaient la loi étaient trop chers,
ils ne les ont pas eus. Alors là, il est bien content, puis là son chauffeur a
un accident. Avec votre projet de loi, il est accidenté, puis là il y a des
conséquences très graves, c'est un accident grave qu'il a eu parce que,
justement, il n'était pas assez formé. Lui, ça faisait longtemps qu'il était
sur la route, mais il n'était pas assez formé. Ça fait que, là, il va coûter
cher à l'État, il va coûter très cher en indemnités, il va être arrêté
longtemps. Là, vous me dites : Ah! 326 et suivants, on va imputer les
coûts. Ça, c'est les coûts de l'indemnité. C'est bien, là, mais qu'en est-il
des cotisations qui auraient dû être payées les années d'avant? Tout ça, c'est
couvert?
M. Boulet : Bon, là, c'est
sûr qu'on fait un cours de financement de la CNESST, mais allez voir aussi 304
et suivants. Je vais aller plus loin que ce que vous me demandez en utilisant
l'article 308 qui dit : «L'employeur qui aurait dû être cotisé pour
une année et qui ne l'a pas été demeure tenu de payer à la commission le
montant pour lequel il aurait dû être cotisé pour cette année». Puis voyez,
collègue de Jean-Talon, à 304 : La Commission fixe annuellement le taux de
cotisation. La Commission fixe... la Commission cotise annuellement...
l'employeur, à 305, mais il y a un éventail d'articles qui s'appliquent, la
commission est obligée, puis même celui qui n'a pas cotisé, elle peut le
cotiser parce que celui qui a utilisé le stratagème, là... Bon, dans notre
exemple, c'était moi, le... c'était moi l'incorporé ou c'était vous
l'incorporé, mais, dans la mesure où l'incorporé va être indemnisé, l'autre
d'entre nous deux va devoir payer sa cotisation. Et s'il ne l'a pas payé puis
qu'il aurait dû le faire, la commission va s'en occuper. Je pense que je ne
peux pas aller plus loin.
M. Paradis : Disons, M. le
ministre, que le chauffeur s'appelait Alexandre Leduc et que la compagnie
c'était Maccarone, camionnage Maccarone...
Des voix : ...
M. Paradis : Non, non, c'est
complètement une blague pour inclure nos amis. Disons que le chauffeur
s'appelait... peu importe...
M. Boulet : Non, mais,
collègue, vous étiez...
M. Paradis : ...ce que vous
me dites, ce que vous me dites, M. le ministre...
M. Boulet : ...vous étiez extrêmement
bon ce matin pour les Capitales de Québec, vous nous avez tellement fait rire.
Puis il y a un côté humain de votre personnalité qui ressortait de façon
tellement manifeste. Moi, j'apprécie beaucoup parce qu'au-delà du travail de
parlementaire qu'on fait, on est capable de rire, de s'apprécier puis d'avoir
de l'humanité. Merci de l'avoir fait.
M. Paradis : Je vous remercie
puis, évidemment...
M. Boulet : Ce n'est pas
stratégique, ce que je viens de vous dire.
M. Paradis : Et évidemment,
je blaguais avec ces noms-là pour inclure nos collègues dans la conversation.
Mais donc ce que vous me dites, et c'est une bonne nouvelle, c'est que ce n'est
pas tant la présomption ou la modification que vous avez là, à
l'article 2.1, c'est qu'en application de tous les articles autour, c'est
ça qui va permettre de serrer les vis, parce que, là, on va les rechercher...
on va vous dire : Ah! vous n'aviez pas payé vos cotisations, c'était un
travailleur, vous n'avez pas payé vos cotisations dans le passé, on va imputer,
etc. Donc, le mécanisme habituel de la loi va faire en sorte qu'on va aller
chercher le «chauffeur inc.» et...
M. Paradis : ...la compagnie
de camionnage à travers les mécanismes habituels. Fort bien.
J'anticipe que votre réponse à ma question
suivante va être que... On ne peut pas présumer, mais là il y a toutes sortes
d'autres conséquences. Parce que là, ça veut dire qu'une fois qu'on applique
cette présomption-là on va avoir, comme vous l'avez dit, démasqué à la fois le
chauffeur inc. et à la fois la compagnie de camionnage. Il devrait y avoir
toute une série de conséquences. Parce que là, vous venez de déclencher un
effet domino, vous venez dire : Ah-ha! on a déterminé que ce n'était pas
une vraie compagnie, c'est un chauffeur inc. Donc là, il y a des aspects
fiscaux, avec l'Agence de revenu du Québec, il y a l'application, peut-être, de
lois criminelles, de lois pénales, de toutes sortes de normes. Évidemment, on
n'a pas ça aujourd'hui, mais ce que vous nous dites, c'est : à suivre avec
le projet de loi de mon collègue aux Transports. Mais là il faut... il faut
vous faire confiance pour la suite des choses. C'est ça?
M. Boulet : ...pour qu'il y
ait une cohésion. Oui, oui, tout à fait. Puis est-ce qu'au ministère des
Transports ils vont faire une loi en matière fiscale, ils ont fait ce qui
s'imposait? À la SAAQ, ils ont fait ce qui s'imposait? Mais, oui, tout à fait.
Mais tout ce qui concerne notre périmètre d'action, je pense qu'on est bien
protégés pour lutter efficacement contre ce phénomène-là.
Le Président (M. Allaire) : Ça
va?
M. Paradis : Merci.
M. Boulet : Merci. Bien
compris, hein?
Le Président (M. Allaire) : Avant
de vous céder la parole, M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve, juste pour dire
que les échanges sont très cordiaux, ça fait que je vous laisse échanger entre
vous. Ça fait des échanges plus fuides... plus fluides, pardon, et plus
efficaces. Mais, advenant le cas où ça irait moins bien, je vais vous ramener
vers moi. Mais continuez, ça va super bien. M. le député
d'Hochelaga-Maisonneuve, allez-y.
M. Leduc : Merci, M. le Président.
C'est en effet des échanges très intéressants.
Sur le dossier «Chauffeur inc.», là, je
comprends bien que M. le ministre dit : Il y a plein de choses qui vont
devoir être faites par d'autres collègues de d'autres ministères. C'est très
bien. Puis que, moi, j'ai un champ d'expertise ou un champ d'action, en tout
cas, c'est celui du travail. Une fois qu'on aura adopté, donc,
l'article 1, que la loi va être mise en vigueur, dans le fond, c'est comme
un nouvel outil qu'on offre aux contrôleurs routiers de la SAQ?
M. Boulet : Non. C'est
essentiellement la CNESST.
M. Leduc : C'est la CNESST.
M. Boulet : Les contrôleurs
routiers, ça relève totalement du ministère des Transports.
M. Leduc : Mais c'est les...
donc c'est les inspecteurs de la CNESST qui vont faire ces vérifications-là
eux-mêmes?
M. Boulet : Je ne comprends
pas.
Une voix : ...
M. Boulet : Ah! Bien oui. Les
inspecteurs ont le pouvoir. Ils ont les... Ils ont tous les pouvoirs des
commissaires d'enquête. Ils peuvent aller chez l'employeur, ils peuvent
demander des livres, ils peuvent examiner des masses salariales. Puis, tu sais,
ce que le collègue de Jean-Talon soulevait, l'employeur a aussi une obligation,
en vertu de d'autres lois, de faire une déclaration de sa masse salariale, là.
C'est... C'est vraiment... Il y a un... Il y a un écosystème légal dans la loi
sur les accidents de travail, et que vous connaissez bien. La déclaration de la
masse salariale, oui, l'enquêteur peut aller chez l'employeur.
M. Leduc : Mais là, dans ce
cas de «Chauffeur inc.», l'employeur, par définition, il est sur la route
essentiellement.
M. Boulet : Oui. Mais il y a,
à la CNESST, ce qu'ils appellent, je pense, des vérificateurs de financement — elle
hoche de la tête, oui — qui ont le pouvoir d'aller sur la route et de
rencontrer puis de demander. Puis, je veux dire, ils peuvent contraindre une
personne de divulguer et de donner des renseignements. Ils ont...
M. Leduc : Sur la route?
M. Boulet : Oui. Oui. Ils ont
des pouvoirs pour le faire. Oui.
M. Leduc : Mais, c'est-à-dire,
ils ne vont pas mettre des gyrophares puis tasser quelqu'un sur le bord de la
20, là. On s'entend, là.
M. Boulet : Non, non. Bien
non. Bien non. Mais c'est des vérificateurs de financement qui se déplacent
puis qui appellent, qui rencontrent puis qui s'assurent d'avoir l'information
qui est demandée.
M. Leduc : Ça fait que sur
«Chauffeur inc.» 1234567, on ne se rend pas... on se rend chez son domicile,
j'imagine. Parce que lui, «Chauffeur inc.», quand il s'est enregistré...
M. Boulet : Je pense que...
Je pense, c'est plus au siège social, là. Pas au domicile, hein? Oui.
M. Leduc : Puis les
«Chauffeurs inc.» s'enregistrent où en général?
M. Boulet : Bien, ils
s'incorporent.
M. Leduc : Bien, avec une
adresse qui est?
M. Boulet : Bien, ils
s'incorporent. C'est... Ils font des déclarations d'incorporation.
M. Leduc : C'est-tu chez eu ou
chez... c'est...
M. Boulet : Oh! probablement
que ça doit varier d'un à l'autre. Mais, peu importe, le siège social du
«Chauffeur inc.», dans la mesure où on fait enquête puis qu'on détermine que
c'est faux, ça peut même être à sa maison, ça peut même être à son chalet.
Mais, si ce n'est pas ça, la réalité, c'est ça, la possibilité de soulever le
voile corporatif, puis on identifie que c'est un salarié.
Le Président (M. Allaire) : Ça
va?
Une voix : ...
M. Boulet : Ou ça peut être,
collègue... ça peut...comme on me reconfirme, ça peut être aussi chez
l'employeur, là. Tu sais, généralement, si la personne fait une réclamation...
puis là, c'est bien, bien hypothétique, mais elle fait une réclamation, tu
sais... elle fait une réclamation, elle va identifier son employeur. Tu sais,
la réclamation initiale, là, le formulaire d'une page où tu décris ton
accident, tu fais une réclamation, il faut que...
M. Boulet : ...identifies ton
employeur, il faut que tu donnes des renseignements. Ça fait que forcément, le
«Chauffeur inc.», lui, est incorporé, souvent vulnérable, mais il sait pour qui
il travaille. Ça fait que...
• (15 h 20) •
M. Leduc : Bien, dans... Ça
fait que là, si un «Chauffeur inc.», il remplit une déclaration à la CNESST
puis qu'il met son véritable employeur, ça devient une forme de pièce à
conviction?
M. Boulet : Absolument.
Absolument.
M. Leduc : Puis c'est... ça,
c'est de la matière pour les inspecteurs?
M. Boulet : Tellement! Du
moins, le vérificateur de financement, il va se déplacer puis il va aller
constater elle est où, ta masse salariale, après avoir déterminé les trois
aspects, les trois éléments importants, là. Il y a un lien de subordination, il
y a un mode de rémunération... bien, il y a une rémunération et il y a un
employeur. Ça prend les trois.
M. Leduc : Parce que si un
«Chauffeur inc.» fait une... remplit un formulaire de réclamation de CNESST en
identifiant son véritable employeur, ce n'est certainement pas le véritable
employeur qui lui a dit de faire ça. Il n'est pas fou à temps plein, là.
M. Boulet : Non. Non.
M. Leduc : Ça fait que ce que
j'ai compris, c'est qu'un des phénomènes des «Chauffeurs inc.», c'est beaucoup
des gens qui ne parlent pas français ou qui parlent difficilement français. Ça
fait qu'il ne doit pas y en avoir tant que ça, des autodéclarations.
M. Boulet : Oui. Mais ils
sont accompagnés, hein, s'ils ont un accident puis ils doivent s'absenter.
C'est sûr qu'il faut continuer constamment à faire de la formation puis de
l'information. Mais, si c'est des travailleurs étrangers par exemple, vous le
savez, les escouades qu'on a, les ateliers de formation, la sensibilisation
qu'on fait sur le site Web puis dans les réseaux sociaux de la CNESST. Et il y
a de l'accompagnement en espagnol, puis en anglais, là aussi, à la CNESST.
M. Leduc : Ça, je comprends,
puis c'est très bien. Mais, ma question, c'est plus que là, on a un phénomène
quand même important, dangereux à plusieurs égards. Vous avez eu un échange
assez prolifique avec mon collègue de Jean-Talon depuis quelques instants
là-dessus. Mais c'est-à-dire comment on... comment on ouvre la chasse, là, aux
faux travailleurs? Dans le sens, si on est juste au bureau puis qu'on attend
qu'il y ait un formulaire qui rentre d'autodénonciation sans le savoir, on va
attendre longtemps, là. On ne réglera pas le problème.
M. Boulet : Bien, il y a...
il y a trois éléments. Puis je ne veux juste pas oublier, hein? Parce que je me
suis déjà fait dire que les vérificateurs de financement, ils pouvaient
s'assurer d'avoir le nom de tous les autres salariés de l'employeur qui est
démasqué suite à ce stratagème-là. Mais, les trois moyens classiques, collègue,
c'est la réception d'une réclamation, vous le savez, le formulaire unique, ça,
c'est classique, deux, il y a les opérations de non-conformité qui sont faites
sur dénonciation à la CNESST, puis il y a aussi le troisième volet, c'est les
vérifications qui peuvent être faites sans dénonciation. Vous le savez, pour
les travailleurs étrangers temporaires, on a fait des vérifications auprès de
secteurs spécifiques où il y avait beaucoup de travailleurs étrangers
temporaires, que ce soit dans le commerce de détail ou dans le domaine
agricole. Mais c'est les trois cas classiques : réclamation, vérification
des opérations de conformité puis les vérifications. C'est les trois
principaux. En fait, je n'en vois pas d'autres.
M. Leduc : Puis, à partir du
moment qu'on a décidé au gouvernement d'en faire un focus, ça fait que là, je
comprends que vous faites une loi... une intervention dans la loi. Je comprends
qu'il y aura des interventions au ministère des Transports, de la Sécurité
publique, peut-être, aussi. Mais, pour votre volet, là, pour la CNESST, est-ce
qu'il y a une forme d'équipe spéciale qui a été mise sur pied à la CNESST pour
dire : là, il faut faire un tour de force majeure sur ce dossier-là, on
libère, je ne sais pas, moi, je dis un chiffre de même, mais une douzaine
d'employés qui vont se concentrer que ça... sur ça?
M. Boulet : Bien, je l'ai
mentionné tout à l'heure, là, il y a une ligne de dénonciation puis une mesure
administrative qui a été mise en place depuis 2021. Comme je répondais à notre
collègue de Westmount-Saint-Louis, il y a une adresse courriel centralisée qui
permet de dénoncer les employeurs suspectés de participer aux stratagèmes. Et
là, à ce moment-là, on déploie et on s'assure d'informer, d'encadrer les
travailleurs puis de s'assurer que tout le monde comprend ses droits et
obligations.
M. Leduc : Vous parlez d'une
ligne de dénonciation depuis 2021. C'est ça que j'ai compris?
M. Boulet : Non. Ça,
l'adresse courriel centralisée, c'est depuis 2021. La ligne de dénonciation, il
me semble, ça fait deux ans, si je me souviens bien, à peu près deux ans.
M. Leduc : Est-ce qu'on a une
statistique sur le nombre d'appels?
M. Boulet : Si... Il y a
certainement une statistique, mais il n'y en a certainement pas beaucoup à ce
jour, parce que c'est un phénomène qui s'amplifie. Mais je pourrai certainement
vous la partager, si je l'ai, là.
M. Leduc : Bien, je serais
curieux. Je serais curieux de mettre la...
Une voix : ...
M. Boulet : Il y en a 27, à
date, des dénonciations, ce qui est quand même...
M. Leduc : Donc, sur la ligne
qui est en fonction, d'à peu près deux ans?
M. Boulet : De dénonciation.
Oui.
M. Leduc : 27. C'est le nombre.
Intéressant.
M. Boulet : C'est quand même
bien, là.
M. Leduc : Donc,
dénonciation, vérification, formulaire un peu par erreur. Et puis il n'y a pas
une équipe particulière attitrée qu'à ça. C'est des... C'est des fonctionnaires
de la CNESST qui ont plusieurs tâches, notamment celles-là.
M. Boulet : Totalement. Mais
c'est sûr que c'est devenu une priorité. Et c'est la raison pour laquelle on
a...
M. Boulet : ...a mis en
place l'adresse courriel centralisée qui est spécifiquement destinée à dénoncer
les employeurs qui utilisent ce stratagème-là. La ligne de dénonciation, c'est
spécifiquement pour eux autres. Ça fait que vous comprendrez que ça accélère la
vérification de conformité, puis l'inspection qui est faite, là. C'est des
opérations de conformité et de vérification. Ça fait que plus on les fait vite,
mieux c'est.
M. Leduc : Les
contrôleurs routiers, là, de la SAAQ, est-ce qu'ils peuvent, eux, utiliser la
ligne de dénonciation?
M. Boulet : Bien, c'est
ouvert...
M. Leduc : Comment ça
marche? Est-ce qu'il y a une collaboration entre... Mettons qu'ils sont sur la
route et qu'ils en pognent un sur la route... Ou à une force policière, la SQ
ou des policiers?
M. Boulet : Je ne suis
pas capable de répondre à ça, collègue, là.
M. Leduc : OK.
M. Boulet : Est-ce que
tous les contrôleurs savent qu'il y a une ligne de dénonciation juste? Je ne
suis pas capable de répondre à ça.
M. Leduc : Mais au-delà
de savoir s'ils savent ou pas, est-ce qu'il y a une collaboration concrète
entre les différentes branches de l'État pour qu'on ait une espèce d'effet de
cisaille, là, tu sais, sur ces phénomènes-là, là?
M. Boulet : La meilleure
collaboration est issue de ce que nous faisons pour promotionner, sensibiliser
puis informer. Puis c'est ce qu'on fait constamment. L'adresse courriel
centralisée, la ligne de dénonciation, on en parle et on fait beaucoup de
campagnes de sensibilisation à la CNESST pour les violences, pour le traitement
des travailleurs étrangers temporaires, pour l'équité salariale. On peut ne pas
être d'accord, là, mais il y a beaucoup, beaucoup de sensibilisation qui est
faite. Et pour les Chauffeurs inc., ça peut se faire. Je l'avais même dit à l'association
de camionnage, il faut faire des campagnes. Bien, ils le font beaucoup,
beaucoup eux autres, là, avec... avec des firmes de relations publiques.
M. Leduc : Votre
contribution à ce dossier-là, c'est de changer la loi, ici, c'est bien, et de
mettre des fonctionnaires de la CNESST sur le dossier. Il y a quelques
semaines, on a appris qu'il allait y avoir une abolition de 250 postes
d'équivalence à temps complet à la CNESST, là. Je réfère à un article de
mi-juillet de Radio-Canada. Il y a aussi une... une sortie, je pense, d'une
représentante de la CNESST qui disait que ça allait avoir un impact sur les
services. Ici, je suis à l'article, on parle de 5 % de la force de travail
de la CNESST qui va être logiquement mise à pied. Ça va avoir un impact, ça,
sur la tentative de vouloir régler frontalement le dossier des Chauffeurs inc.
M. Boulet : La réponse,
c'est non. On a des impératifs budgétaires, on a des objectifs d'accroître
l'efficacité, de réduire la bureaucratie, mais certainement pas de sabrer ou de
couper des services aux travailleurs, aux travailleuses et aussi aux
employeurs. Puis ça passe par les campagnes, la formation et la
sensibilisation. Mais non, il n'est pas question de... Ni l'accompagnement non
plus. Donc, il n'est pas question de couper les services à la population qui
bénéficie de la CNESST.
M. Leduc : Donc, il y
avait 5 % de gens à la CNESST qui ne faisaient absolument rien.
M. Boulet : Non. Ce n'est
pas ce que je dis, mais il y a des postes qui peuvent s'éliminer par attrition,
par regroupement, par réorganisation. C'est comme ça que ça va se faire, ou par
non-renouvellement de contrats à durée temporaire ou des salariés occasionnels.
C'est comme ça que ça va se faire. Ça, c'est des impératifs, je le répète, de
ressources humaines qui sont imposées en raison des budgets puis de
l'efficacité. L'optimisation des ressources, c'est comme ça que ça va se faire,
mais pas avoir d'impact négatif sur la qualité ou la quantité des services.
M. Leduc : Ça me semble
toujours assez étonnant de soutenir que baisser de 5 % le nombre
d'employés d'une entreprise, d'un service, de n'importe quel endroit n'aura
absolument aucun impact.
M. Boulet : Bon. Ça, on
peut varier d'opinion là-dessus. Quand on parle d'optimiser des ressources
humaines ou de s'assurer que les organisations de travail soient les plus
compatibles avec les besoins des travailleurs, travailleuses et employeurs, ce
n'est pas, certainement pas, ce qui est souhaité ni souhaitable. Donc, ça prend
un plan de réorganisation pour rencontrer les objectifs, respecter les budgets.
Je pense que c'est requis aussi par la population. La situation économique,
budgétaire nous impose ce type d'objectif là. Mais, collègue, vous pouvez
douter, vous pouvez appréhender, puis je le comprends, puis je respecte ça,
mais ce n'est certainement pas notre intention, que j'ai d'ailleurs partagée
clairement avec la haute direction de la CNESST.
M. Leduc : Pourtant, la
CNESST, ce n'est pas... Ce n'est pas les... Ce n'est pas vous et moi qui payons
ça avec les taxes, là, c'est les cotisations.
• (15 h 30) •
M. Boulet : J'aimerais ça
que vous le répétiez, les cotisations de 100 % des employeurs ou à peu
près...
15 h 30 (version non révisée)
M. Leduc : ...bien, j'espère.
M. Boulet : Bien, il y a
Accès construction, là, quand on lutte contre le travail au noir, puis il y a
l'IVAC, là, où il y a des sommes qui proviennent du gouvernement, mais les
cotisations, c'est 100 % les employeurs.
M. Leduc : Pourquoi c'est le Conseil
du trésor qui coupe, d'abord, si ce n'est pas lui qui paie?
M. Boulet : Bien, c'est dans
le périmètre budgétaire de l'État québécois, là. Il y a d'autres...
M. Leduc : Ça ne devrait pas
être l'objet d'une résolution du CA de la CNESST?
M. Boulet : Ah! ça, là, on
embarque dans une... Non, c'est ultimement le gouvernement, ça dépend de la loi.
L'existence de la CNSSEST... En fait, c'est une commission dont le CA est paritaire,
mais dont le mandat est d'appliquer des lois adoptées par le gouvernement. Donc,
c'est aussi dans le périmètre budgétaire de l'État. Ça fait que ce n'est pas un...
ce n'est pas un cerf-volant libre dans les airs pas de ficelles, l'État est
présent.
M. Leduc : Là, vous, vous
dites qu'en coupant 5 % de personnel, il n'y aura absolument aucun impact
sur les services.
M. Boulet : Est-ce qu'on est
encore dans le sujet, collègue? Je ne sais pas, là, mais on... j'aimerais... j'aime
ça faire ce débat-là, là, mais on peut le faire dans un autre contexte aussi. Mais
si vous souhaitez continuer...
M. Leduc : Bien, j'achève sur
ce sujet-là puis je n'ai pas tellement d'autres choses après, là, sur ce thème-là,
mais c'est juste que...
Le Président (M. Allaire) : En
fait, si je peux me permettre, là...
M. Boulet : On peut
l'adopter.
Le Président (M. Allaire) :
...j'ai quand même compris le souci de ce qui a été évoqué dans l'article 1
qui demande des ressources, assure une certaine pérennité, là, compte tenu des...
c'est ce qui a été mentionné. Ça fait que je pense qu'on est dessus, mais je vous
demande quand même peut-être, là...
M. Leduc : Je n'étirerai pas
l'élastique à l'infini, M. le Président.
Le Président (M. Allaire) :
Parfait, merci.
M. Leduc : Ce que je veux
juste comprendre, c'est que si vous, vous soutenez qu'à 5 % de coupes de
personnel, il n'y n'aura aucun impact sur les services, incluant ceux pour essayer
de régler le dossier de «chauffeurs inc.», quelle est la suite? Parce que le
discours du premier ministre a été limpide de mardi, qu'il y en aurait d'autres
coupures. Est-ce qu'il va y avoir un autre 5 %, un autre 10 % de
coupures dans les prochains mois puis que ça n'aura aucun impact sur les
services?
M. Boulet : Évidemment, la Commission
des normes, équité, santé et sécurité est soumise aux décisions du Secrétariat
du Conseil du trésor, mais, peu importe l'objectif, je ne peux pas anticiper ce
que le Conseil du trésor va décider. Moi, je peux réaffirmer, je l'ai fait
devant les médias, qu'à la CNESST, il n'est certainement pas dans notre
intention, et ce n'est nullement un objectif, que d'affecter les services à des
travailleurs accidentés, à des travailleuses malades ou à des employeurs qui
ont des besoins.
M. Leduc : Mais vous, vous
vous le dites, le dossier «chauffeurs inc.», c'est important, il faut qu'on le
traite puis il faut qu'on ait du monde qui s'en occupe. Ça fait que j'assume
que vous allez plaider, avec votre collègue, la nouvelle présidente du Conseil
du trésor, qu'il n'y ait pas de nouvelles coupures à la CNESST dans le prochain
budget, là.
M. Boulet : Oui, vous m'avez
bien compris.
M. Leduc : C'est ça que vous
allez plaider?
M. Boulet : Oui, bien sûr.
M. Leduc : Parfait. On va
vous appuyer, là-dessus, sur le reste, on verra.
M. Boulet : On s'est appuyé
mutuellement sur beaucoup plus de dossiers que ceux à l'égard desquels on a été
en désaccord. Mais, oui, je comprends très bien votre appui puis je l'apprécie.
M. Leduc : Parfait.
Le Président (M. Allaire) : Ça
va? Merci. Mme la députée de Westmount—Saint-Louis, la parole est à vous.
Mme Maccarone : Oui, mais
juste pour prendre la balle au bond, je comprends, pour clore le débat
là-dessus, je vous entends puis l'échange a été très intéressant, mais on l'a
vu juste la semaine passée, le 26 septembre, que la PDG du CNESST, elle,
elle a dit, et je la cite : Ruptures de services, délais, impacts sur la
clientèle à court et moyen terme, les compressions qu'exige le gouvernement ne
font pas sans heurte à la CNESST, selon le courriel que la PDG a envoyé à tous
ses vice-présidents. Elles ont des conséquences directes sur les services à la
population, révèlent des communications à ses hauts dirigeants obtenus à la
suite de demandes d'accès à l'information. Ça, c'est juste la semaine passée. Ça
fait que c'est une question de : c'est qui qui dit vrai? Je comprends ce
que vous dites, M. le ministre, je vous entends, c'est très clair et je partage
le sentiment d'appréciation en ce qui concerne les revendications que vous
allez faire auprès de la ministre ou la présidente du Conseil trésor, mais c'est
juste la semaine passée qu'elle a dit ceci. Alors, qu'est-ce qu'on répond à la PDG,
qu'elle a fait un cri cœur sur la place publique pour dire qu'il y va avoir des
choses qui vont nous échapper? Parce qu'il y a aussi un gel d'embauche, si je
comprends bien.
M. Boulet : Oui. Encore une
fois, je vais répéter, mais nous, on est... on respecte notre cible d'ETC et il
n'y a pas de rupture de services. Maintenant, quant à ce qui peut être
annoncé par le Trésor, moi, tout ce que je peux vous dire en date d'aujourd'hui,
nous, on va plaider pour le maintien de la qualité et de la quantité des
services.
Mme Maccarone : Bon, bien, j'espère
que la PDG nous entend étant donné que nous sommes en ondes et qu'elle se sent rassurée
parce que c'est quand même inquiétant. Comme je vous dis, c'est juste le 26 septembre
que cet article est sorti, ça fait que...
Mme Maccarone : ...quand même
un plaidoyer qui est inquiétant.
J'ai peut-être une dernière question pour
vous, M. le ministre, puis c'est... dans le fond, c'est la question du CSQ.
Dans leur mémoire, et lors de leur passage, ici, en auditions, ils disent
qu'ils s'interrogent sur les conséquences possibles lors d'un conflit de
travail puis ils donnent l'exemple lorsqu'un employeur décide d'avoir recours à
des briseuses ou briseurs de grève. Est-ce que ce serait possible, dans
certaines situations, qu'une entreprise utilise des gestionnaires venant d'une
autre entreprise appartenant au même propriétaire pour accomplir les tâches
normalement confiées aux travailleuses et travailleurs en grève? Parce que, si
c'est le cas, les brisages... briseuses ou briseurs de grève pourraient
bénéficier, dans le fond, des droits normalement inaccessibles à un ou une
gestionnaire.
M. Boulet : ...il n'y a
vraiment pas de lien avec notre discussion, mais simplement pour vous dire
qu'il y a des articles là, 109.1 et suivants, du Code du travail...
Mme Maccarone : Ça, c'est
juste pour clarifier si c'est en lien avec la définition.
M. Boulet : S'il y a des
briseurs de grève, c'est la même dynamique, là. Si c'est des... Tu sais, c'est
vraiment le Code du travail, pas la Loi sur les accidents de travail et
maladies professionnelles, là.
Mme Maccarone : Mais moi, je
parle de la définition de «travailleur», hein? C'est ça, c'est... OK... Mais je
veux juste m'assurer... Ça fait que ce ne serait pas le cas, ce ne serait pas
possible.
M. Boulet : Et il n'y a pas
d'enjeu, effectivement.
Mme Maccarone : OK, parfait.
Merci.
Le Président (M. Allaire) : Merci.
M. le député de Jean-Talon.
M. Paradis : Très bien. Je
réitère que je suis toujours dans l'optique de s'assurer qu'on serre les vis et
non l'inverse. Et je vais reposer une question que mon collègue de Hochelaga-Maisonneuve
a posée, parce que vous avez eu ensuite une discussion très intéressante, tous
les deux, mais je ne suis pas sûr que j'ai bien compris quelle était la
réponse. La question était... une présomption puis une formulation qui dit que
ça ne peut avoir pour effet... donc, que les autres articles de la loi ne
peuvent avoir comme effet de qualifier de travailleur un dirigeant qui exécute
personnellement un travail. Donc, c'est-à-dire, tu es un chauffeur inc., ça
fait que ce n'est pas vrai que les autres articles de la loi qui expliquent ce
qu'est un travailleur ça ne peut pas avoir pour effet de dire : Non, en
réalité, tu es un employé, et voici ce qui se passe. Ça, c'est une présomption,
ou, en fait, c'est un... c'est une protection.
Mais la question, c'était : Qu'est-ce
qui va faire... c'est passif, en fait, comme mécanisme... qu'est-ce qui va être
l'élément déclencheur qui va faire en sorte qu'on va de plus en plus, être
capables de démasquer, comme vous l'avez indiqué tout à l'heure, M. le
ministre, les Chauffeurs inc.? Au-delà de cet article-là, j'ai cru comprendre
que vous évoquiez les directives. Il y a un changement de paradigme, peut-être,
mais est-ce qu'il y a quelque chose qui vient avec ça qui fait en sorte qu'on
ne fait... on ne fait pas juste attendre qu'ils tombent dans le filet mais
qu'on est en train d'installer un filet pour s'assurer, avec cette
disposition-là et les autres dont on a parlé tout à l'heure, qu'on les... que,
proactivement, on est en train de réfléchir...
M. Boulet : Bien oui.
M. Paradis : ...à chaque fois
qu'on a quelqu'un qui, peut-être... je ne sais pas il y a combien de cas par
année, je ne sais pas si on a des statistiques...
M. Boulet : Non.
M. Paradis : ...mais
dire : On est très alertes pour les identifier?
M. Boulet : Oui, oui, tout à
fait. Je pense que j'ai répondu à quelques reprises, là, mais, dès réception
d'une réclamation, il y a identification de l'employeur avec son adresse, il y
a des vérificateurs de financement qui vont se déplacer chez l'employeur. On va
s'assurer qu'il fournisse sa déclaration de masse salariale, même pour ce qu'il
aurait dû faire dans le passé. On va s'assurer qu'il respecte son obligation de
payer la cotisation. Il y a des lignes de dénonciation, il y a une adresse
courriel centralisée, il y a des activités de promotion, il y a des
vérifications qui sont faites sans plainte ni dénonciation. C'est vraiment
une... En ce qui nous concerne, là, il y a beaucoup d'accent qui est mis
là-dessus.
M. Paradis : Est-ce que
c'est... ce que vous venez de nous décrire, ça existait déjà avant, mais là on
avait une difficulté avec la définition de «travailleur»...
M. Boulet : Bien oui, bien
oui.
M. Paradis : ...puis c'était
juste ça qui bloquait, ou, en plus de cette modification là, il y a des choses
à changer aussi, ou à améliorer, ou à préciser pour qu'on puisse proactivement,
les identifier?
M. Boulet : En fait,
collègue, c'était clairement exclu. Ça fait que c'est sûr que la définition devait
être repensée et réécrite, et donc ça règle le problème. Et ce qui se fait va
continuer à se faire, mais de façon encore plus intensive. Tu sais, les lignes
de dénonciation, c'est quand même assez récent. L'adresse courriel centralisée,
ça date de 2021, les opérations de conformité, la même affaire. Les
vérifications puis les réclamations, surtout, qui seront soumises vont
permettre à la personne d'être indemnisée, puis vont permettre à la CNESST
d'aller frapper à la porte de l'employeur qui a utilisé ce stratagème-là. Je
pense... je pense que c'est assez... moi, ça m'apparaît bétonné, collègue.
Ceci dit...
M. Boulet : ...si vous voulez
me l'entendre dire, ça m'apparaît très clair.
• (15 h 40) •
Le Président (M. Allaire) : M.
le député de Jean-Talon.
M. Paradis : Bien. Donc, ça,
c'est sur cet aspect.
Maintenant, on parle beaucoup des
accidents du travail. Qu'en est-il de l'application de la Loi sur les normes du
travail? Est-ce qu'il y a quelque chose qui est relié à ça? Par exemple, si
c'est un «Chauffeur inc.» qui a été obligé de devenir un «Chauffeur inc.»,
comme on voit que c'est souvent un mécanisme aussi, parce qu'on dit : Là,
tu vas être un «Chauffeur inc.», parce que je ne veux pas payer ci, ça, ça, et
surtout je ne veux pas payer d'heures supplémentaires. Donc là, une fois qu'on
l'a identifié, que c'est un «Chauffeur inc.», ça peut être un «Chauffeur inc.»,
donc, qui a été forcé d'aller là, il y en a des cas comme ceux-là, donc est-ce
qu'il y a d'autres choses? Est-ce que, ça, vous aussi, vous nous dites :
Ça va aller avec le reste? Parce que là, on est dans un projet de loi qui
ratisse large, qui va chercher beaucoup de choses. Est-ce que, sur les lois des
normes du travail, vous voyez autre chose?
M. Boulet : J'ai répondu à ça
au collègue d'Hochelaga-Maisonneuve. Dans la loi sur les normes du travail, la
définition de «salarié» est plus large et il n'y a pas d'exclusion. C'est
surtout à cause de ça. Il n'y a pas d'exclusion dans la LNT. S'il y avait eu le
même type d'exclusion dans la LNT, dans la LATMP, ça nous aurait imposé de la
modifier. Ce n'est pas le cas. C'est tout.
M. Paradis : Je comprends.
Mais là, ma question est... est parallèle à ce que vous venez de dire.
M. Boulet : Et donc, la
réponse, c'est oui.
M. Paradis : C'est que là, on
vient de... on vient de trouver un mécanisme pour débusquer. Puis ça revient à
ce que je vous disais : Est-ce qu'on serre assez la vis? Est-ce qu'on a
tout prévu? Là, ici, ça, le projet de loi n° 101, là, vous avez... on a
parlé des aspects fiscaux, ça va ailleurs, des aspects criminels ou pénaux, ça
va ailleurs. D'accord, Mais là, on est dans un projet de loi sur l'application
du droit du travail. On vient de débusquer un «Chauffeur inc.». Parfois, les
«Chauffeurs inc.», c'est un peu eux, les victimes. On leur a dit : Tu vas
être un «Chauffeur inc.» qui ignore les protections sociales au Québec. On l'a
dit, tout... On l'a dit, nous, au Parti québécois. C'est souvent relié aussi à
des stratagèmes liés à l'immigration. Donc, ce sont des gens qui connaissent
peu ou pas les autres protections. Là, on vient de découvrir qu'ils sont un
«Chauffeur inc.». Qu'est0ce qui se passe avec la Loi sur les normes du travail?
Ils ont travaillé 15 h par jour pendant six mois illégalement. Qu'est-ce
qui se passe avec ça? Est-ce que vous l'avez prévu? Parce que ce qu'on ne veut
pas, M. le ministre...
M. Boulet : Là...
M. Paradis : Je comprends
votre réaction, mais on est en... Vous ouvrez quelque chose. Mais on a
dit : On est devant un phénomène très grave. On n'aura pas 12 autres
opportunités.
Le Président (M. Allaire) : ...
M. Boulet : Bon. Regardez,
là, c'est superclair, là. Mais, bon, je vais faire le pédagogue patient, là.
Allez voir la définition de «personne salariée» à l'article 1,
paragraphe 10, de la Loi sur les normes du travail. Essentiellement,
c'est : employeur, lien de subordination puis rémunération. Puis c'est une
définition élargie de la «personne salariée». Il n'y a aucune exclusion.
Si votre question, c'est de savoir est-ce
qu'il va bénéficier des droits de la LNT, oui. Il n'y a pas d'enjeu à cet
égard-là parce qu'il peut se qualifier comme une personne salariée. Évidemment,
vous le savez, avec votre formation, il y a un fardeau de preuve à assumer. Il
faut que tu le démontres. Mais, tu sais, on ne le dira pas. C'est... Allez voir
la définition, c'est extrêmement clair : «Une personne qui travaille pour
un employeur, qui a droit à un salaire, puis ça comprend quelqu'un qui, en
vertu d'un contrat, s'oblige à exécuter un travail dans le cadre et selon les
méthodes et les moyens que cette personne détermine, il s'oblige pour
l'exécution du contrat, à fournir le matériel, l'équipement, les matières
premières.» C'est même une définition élargie de «personne salariée». Puis il
conserve, à titre de rémunération, la somme qu'il reçoit conformément à ce
contrat-là. Ça fait qu'y a... il y a... En fait, il n'y a pas d'enjeu en vertu
de la Loi sur les normes du travail, à moins que vous m'en trouviez un que je
ne comprends pas.
Le Président (M. Allaire) : M.
le député.
M. Paradis : Je... Vous
voyez, M. le ministre, c'est ce qu'on disait tout à l'heure. Là, on travaille
ensemble pour voir est-ce qu'on a fait tout ce qu'on pouvait faire. Puis je
vois... on est... on marche ensemble sur cette voie-là actuellement. Mais là
vous dites : C'est assez.
M. Boulet : ...finition
depuis...
M. Paradis : Bien, la Loi sur
les normes du travail, M. le ministre, le fardeau de preuve, il est différent.
Est-ce que vous êtes d'accord avec moi? C'est aux travailleurs de dire :
Je suis un travailleur, donc je peux bénéficier des protections de la Loi sur
les normes du travail. C'est quoi le lien avec ce que vous venez de faire? Vous
venez de créer une présomption qui dit : On peut être qualifié de
travailleur. Est-ce qu'il y a un bout qui manque pour l'autre côté ou vous avez
tout ce qu'il faut encore? Je ne suis pas sûr, moi.
M. Boulet : ...ça va être mon
dernier commentaire.
Le Président (M. Allaire) : M.
le ministre, allez-y.
M. Boulet : L'Associaton du
camionnage du Québec n'en voyait pas d'enjeux. Les avocats de l'ACQ n'en
voyaient pas. Moi, je n'en vois pas. Je ne le sais pas. Si vous voulez trouver
des enjeux... Moi, je pense que la définition est claire, elle répond aux
besoins...
M. Boulet : ...de l'impératif
de débusquer ceux qui utilisent un stratagème. Le reste, je ne peux plus... je
suis à court de dire ce que j'ai à dire.
Le Président (M. Allaire) : Merci,
M. le ministre. M. le député, vous souhaitez poursuivre? C'est terminé?
M. Paradis : Je comprends mal
l'impatience du ministre, parce que l'idée de faire ce qu'on a à faire... Parce
que vous nous dites : Il y a beaucoup qui va venir ailleurs. Là, on est
dans un projet de loi qui touche le domaine du droit du travail. Est-ce qu'on a
d'autres opportunités? C'est ça, la question. Moi, vous me dites : C'est
sûr, tout est certain, tout va être beau, tout va bien aller. Je veux bien vous
croire sur parole, M. le ministre, mais ce sont... ce sont de réelles
questions. Tout ce qu'on a ici, c'est un peu une présomption. Puis d'ailleurs
je l'appelle une présomption. Ce n'est pas nécessairement une présomption,
c'est juste qu'on s'assure qu'il n'y a pas de blocage dans la qualification de
«travailleur», qui permet de débusquer.
Moi, je ne suis pas sûr, M. le ministre,
que tout ce que vous venez de me dire, très rapidement, que c'est sûr que la Loi
sur les normes du travail, ça va suivre. Je ne suis pas sûr, parce que ce n'est
pas le même fardeau, c'est très différent. Ça, la loi sur la santé puis la Loi
sur les normes du travail, ce n'est pas le même fardeau, puis moi, je ne suis
pas sûr, là, qu'après ça, tout de suite, automatiquement tout va débouler, les
dominos vont tous tomber, puis là on va dire : Ah! dans ce cas-ci,
travailleur, tu avais peut-être d'autres protections en vertu des lois sur les
normes du travail. Vous me dites que c'est ça, mais je ne le vois pas tant...
aussi clairement que ça.
M. Boulet : Je vous confirme
mon incapacité d'assurer votre certitude juridique. Est-ce que ça vous va? Mais
je vous redis que l'Association du camionnage, avec ses procureurs, ne voyait
pas d'enjeu. Moi, je n'en vois pas. Mais je ne serai jamais capable de
convaincre un collègue qui doit être certain, ou qu'il faut qu'il soit certain.
Mais je pense qu'on a fait ce qui s'impose. On a écouté l'association puis on
fait tout ce qui relève de notre périmètre d'action.
M. Paradis : C'est très bien,
M. le ministre, là, puis je vous indique la... Cette disposition-là, je n'ai
pas besoin, là, d'en faire un grand mystère, je vais voter pour. Par contre, je
comprends l'association des camionneurs. Eux, ils s'intéressaient surtout à un
point de vue, mais ici, il y a celui des Chauffeurs inc., qui n'étaient pas,
là, en position de... qui, peut-être, étaient en situation de vulnérabilité
puis qui auraient intérêt, donc, à avoir accès à d'autres avantages de notre
droit du travail, ceux, notamment, de la Loi sur les normes du travail, et là
ce n'était peut-être pas le point principal de l'association des camionneurs.
Ça fait que je ne veux pas qu'on soit juste dire : Ah! ce que
l'association des camionneurs a demandé, c'est tout.
Nous sommes face à un phénomène dont on
sait les impacts dévastateurs qu'il a non seulement sur notre route... sur nos
routes, mais sur le système qu'on a prévu, qui est contourné de tous les bords
tous les côtés. L'association des camionneurs l'a dit dans son mémoire, mais
plusieurs aussi le dénoncent c'est la fiscalité, c'est le droit du travail,
c'est le droit pénal, c'est le droit criminel, c'est le code de sécurité
routière. C'est ce que je dis, M. le ministre, là, je vous sens impatient, mais
l'idée c'est de voir : Est-ce que là, on a une opportunité? Puis peut-être
que votre équipe peut regarder ça, puis dire : OK. On va aller le
regarder. Peut-être, vous allez me dire : M. le député, tout est beau
finalement sur la loi sur les normes. Mais c'est ça que je dis : Ça ne
m'apparaît pas si clair que ça aujourd'hui.
M. Boulet : Mon équipe l'a
regardé. L'équipe de l'association du camionnage, à mon cabinet, on l'a
regardé. Il n'y a pas d'enjeu. Puis, vous le savez, en vertu de la Loi sur les
normes du travail, le concept clé, c'est le lien de subordination puis c'est du
cas par cas, ça fait que tu sais... Et dans cette définition-là, de personnes
salariées dans la LNT, il n'y a pas d'exclusion comme on avait ici qui
requérait une intervention pour enlever cet obstacle là, pour s'assurer que les
personnes qui sont dans une relation employeur-employé puissent bénéficier des
indemnités de remplacement de revenu. Et pour la LNT, c'est la même affaire,
mais il n'y avait pas d'obstacles littéraux ou d'obstacles de définition, en
tout cas pas décelés par personne autour de moi et pas par moi non plus.
Le Président (M. Allaire) : Pas
d'autres interventions? S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons
procéder à la mise aux voix de l'article 1 tel qu'amendé. Est-ce que
l'article 1, tel qu'amendé, est adopté?
Des voix : ...
Le Président (M. Allaire) :
Adopté. Parfait. On va prendre une pause. Cinq minutes. Nous allons suspendre
les travaux. Merci.
(Suspension de la séance à 15 h 49)
(Reprise à 16 heures)
Le Président (M. Allaire) :
Alors, nous allons reprendre les travaux. M. le ministre, nous sommes, selon
l'ordre de préétabli, rendus à l'article 4, s'il vous plaît. Donc, je vous
cède la parole pour lecture de l'article 4 avec vos commentaires.
M. Boulet : Oui, merci.
Il n'y a pas d'amendement?
Une voix : ...
M. Boulet : Merci, M. le
Président.
4. L'article 117 de cette loi est
remplacé par le suivant :
«117. Le revenu brut annuel d'emploi du
travailleur déterminé au moment de sa lésion est revalorisé chaque année à la
date anniversaire du début de l'incapacité du travailleur à exercer son emploi.
«Le résultat de cette revalorisation
constitue le nouveau montant du revenu brut annuel d'emploi qui sert de base au
calcul de l'indemnité de remplacement du revenu, y compris aux fins de
l'article 101. Ce montant ne peut être inférieur au revenu brut annuel
déterminé sur la base du salaire minimum en vigueur au moment de la
revalorisation ni supérieur au maximum annuel assurable en vigueur à ce moment.
«Le montant du revenu brut annuel que la
Commission évalue en vertu du premier alinéa de l'article 50 est également
revalorisé chaque année à la date anniversaire du début de l'incapacité du travailleur
à exercer son emploi.»
Ça a l'air technique, mais ça ne l'est pas
trop. Commentaire. Cette modification vise à assurer une meilleure protection
du revenu des travailleurs ayant subi une lésion professionnelle en prévoyant
que le revenu brut que le travailleur tire annuellement de son emploi au moment
de sa lésion professionnelle est celui qui est considéré pour le calcul de la
revalorisation. Le montant résultant de cette revalorisation servira de base au
calcul de l'indemnité de remplacement du revenu et ne pourra être inférieur au
revenu brut annuel déterminé sur la base du salaire minimum au moment de la
revalorisation ni supérieur au maximum annuel assurable en vigueur à ce moment.
Donc, peut-être que je vais... Ainsi, avec la modification au moment de la
revalorisation, il n'y aura plus de situations où leur revenu annuel brut
d'emploi, qui sert de base au calcul de l'IRR, pourra être inférieur à celui
qui aura été déterminé sur la base du salaire minimum. Donc, on a un plancher
en dessous duquel on ne peut pas aller. Ça, c'est une protection nouvelle.
Également, dans le cas où le revenu brut au moment de la lésion est supérieur
au maximum annuel assurable au moment de la revalorisation, les indemnités ne
seront plus calculées sur la base du maximum annuel assurable applicable au
moment de la lésion. Donc, l'IRR, le salaire minimum et le maximum annuel
assurable n'évoluent pas selon les mêmes paramètres d'indexation ni au même
rythme. Donc, la revalorisation de l'IRR suit l'IPC. Le salaire minimum est
modifié par règlement, vous le savez, le 1ᵉʳ mai chaque année, en tenant
compte d'une douzaine d'indicateurs socioéconomiques, mais dans les dernières
années, c'est en fonction de l'évolution du salaire moyen horaire québécois.
Puis le maximum annuel assurable, lui, il suit la rémunération hebdomadaire
moyenne des travailleurs. Donc, la modification projetée n'intègre pas,
contrairement à d'autres, une nouvelle revalorisation pour les travailleurs
indemnisés en fonction du salaire minimum. Mais en fait, je vais la résumer
simplement à ma façon. Quand une personne fait une réclamation pour recevoir
des indemnités, elle doit s'absenter parce qu'elle a eu une entorse dans le
dos, elle reçoit, bon, pour les 14 premiers jours, une indemnité de remplacement
de revenu, ce qui est payé par l'employeur les 14 premiers jours, qui lui
est remboursée plus tard. La façon dont l'indemnité est versée, c'est 90 %
du revenu net retenu. Puis bon, il y a une formule, là, dans...
16 h (version non révisée)
M. Boulet : ...un article
spécifique de la LATMP qui prévoit le montant du calcul. Bon, la personne
continue de s'absenter. Après 14 jours, bon, la CNESST rembourse à
l'employeur, puis à partir du 15 ᵉ jour, continue à payer l'IRR, l'indemnité de
remplacement de revenu, mais il y a des revalorisations annuelles, et on veut
s'assurer qu'avec la revalorisation, il n'y a pas personne qui reçoit une
indemnité calculée sur un revenu brut qui est inférieur au salaire minimum, qui
augmente à chaque année et qui peut dépasser cependant le maximum annuel
assurable qui, lui aussi, est augmenté année après année. Donc, on appelle ça
une protection des travailleurs, des travailleuses, une protection de revenu.
Puis je pense que, globalement, ça a été... OK. Puis j'ai des... Écoutez, je
vais préparer des tableaux avant la modification puis après la modification.
Jean-Philippe pourrait vous les... Je vais vous les... On peut peut-être
suspendre deux minutes, mais ça va faciliter beaucoup, beaucoup la discussion.
Le Président (M. Allaire) :
Parfait. Juste... Juste on peut même l'envoyer, s'il vous plaît, à l'adresse
courriel de la commission, puis on va le déposer sur Greffier avec grand
plaisir. Ça va?
Une voix : ...
Le Président (M. Allaire) :
Parfait. Oui, on a senti son dévouement. C'est bien. Est-ce qu'il y a des
interventions concernant l'amendement déposé? Pas l'amendement, concernant
l'article 4, pardon.
Une voix : ...
Le Président (M. Allaire) :
Vous voulez qu'on suspende? Pas de problème, on va suspendre les travaux
quelques instants. Merci.
(Suspension de la séance à 16 h 07)
(Reprise à 16 h 19)
Le Président (M. Allaire) : Alors,
nous allons reprendre les travaux. Nous sommes toujours à l'article 4. Mme
la députée de Westmount Saint-Louis, vous avez une question? Allez-y.
Mme Maccarone : Oui. Bien, je
veux remercier premièrement le ministre pour les explications hors micro, ça
aide beaucoup à la compréhension. J'avais posé la question si... entre les montants,
ça fait que, si... l'indemnité de remplacement du revenu et le maximum annuel
assurable, si le travailleur recevra le plus élevé de l'un ou l'autre. Parce
que, pour moi, je comprends que peut-être c'est implicite, mais moi, ma
lecture, ce n'est pas... ce n'est pas nécessairement clair. Je veux juste
entendre le ministre le dire au micro, parce que la CSN nous pose cette
question, ils souhaitent que ça soit celui qui est plus élevé.
M. Boulet : Bon, c'est...
S'il avait un revenu de 95 000 $, le plafond de 2018, le maximum annuel
assurable était 74 000 $, il était à 74 000 $, son revenu qui sert à calculer
l'indemnité. Le plafond de 2024, il est à 94 000 $, mais comme lui, il a eu une
revalorisation annuelle seulement en vertu d'IPC, il s'est ramassé avec une...
M. Boulet : ...calculé sur un
revenu de 89 000 $. Et c'est là qu'il va augmenter. C'est là qu'on
vient le revaloriser plus que l'IPC. Puis il se ramasse au maximum annuel
assurable. Il passe de 89 000 $ à 94 000 $. Donc, il est à
peu près au même niveau que son revenu de 95 000 $ qu'il avait en
2018.
• (16 h 20) •
Mme Maccarone : C'est une
amélioration. Je comprends.
M. Boulet : Substantielle.
Mme Maccarone : Puis, ça,
c'est un montant qui sera alloué à la personne jusqu'à leur mort ou ça arrête?
M. Boulet : Jusqu'à la fin de
sa... tu sais, quand il redevient capable de faire son travail, il n'y a plus
d'IRR, quand il revient... redevient capable d'un emploi équivalent non plus. Quand
il redevient capable de faire un emploi convenable, c'est-à-dire un emploi qui
respecte ses capacités fonctionnelles, ça peut être un emploi où il fait un
salaire moins élevé, puis là, il reçoit ce qu'on appelle une indemnité de
remplacement de revenu réduite, là, qui vient compenser.
Mme Maccarone : Et, dans le
cas de quelqu'un qui ne peut pas retourner au marché de travail à cause d'un
accident qui est vraiment grave, est-ce que ça, l'indemnité, c'est quelque
chose qu'il va... l'IRR ou le...
M. Boulet : Il reçoit ça
jusqu'à 65 ans.
Mme Maccarone : 65 ans.
M. Boulet : Après ça, il y a
une réduction de 25 % par année jusqu'à 68 ans, parce que c'est un
régime qui a été adopté par les partis pour compenser une perte de capacité de
gain. Donc, la philosophie derrière ça, c'est qu'à 65 ans, ta capacité de
gain est réduite d'à peu près 25 % par année jusqu'à 68 ans. Mais, en
même temps, il y en a qui faisaient des comparatifs avec les indemnités versées
par la... mais à la CNESST, quand c'est une pleine indemnité, la personne ne
subit pas de diminution de sa Régie des rentes du Québec, là. Le calcul, c'est
bien technique, là, collègue, là, mais la règle, c'est 65 à 68 ans.
Mme Maccarone : OK. Merci.
M. Boulet : Merci.
Le Président (M. Allaire) : M.
le député d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc : Merci, M. le
Président. Dans le fond, j'ai deux types de questions. La première, c'est sur
l'entrée en vigueur.
M. Boulet : ...est-ce que vous
me permettez? C'est une... C'est une nuance. Puis peut-être que je l'ai faite,
là, mais dans le deuxième cas, si l'IPC avait monté plus rapidement que le
maximum annuel assurable, la personne bénéficierait de l'IPC. Parce que là, on
a un exemple où il y a un écart important, là, 95 000 $,
74 000 $, mais l'écart pourrait être moins important. Puis la
personne, elle se dit : La revalorisation annuelle, IPC, ça me donnerait
plus que le maximum annuel assurable, elle en bénéficie, donc elle n'est pas...
C'est le meilleur des deux mondes, en fait.
Mme Maccarone : ...plus
clair. Ça fait que vous l'avez dit au micro. C'est parfait. Merci.
M. Boulet : Merci.
Le Président (M. Allaire) : ...d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc : Merci. Les
explications, en effet, sont très claires.
Date d'application. Dans le projet de loi,
à l'origine, si on va à l'article 75, on nous dit que ça ne sera
applicable, cette bonne nouvelle, que le 1er janvier 2026. Bon. C'est
quand même proche, le 1er janvier 2026, là. C'est dans deux mois et des
poussières. Mais là, les amendements qui ont été déposés aujourd'hui par le
ministre nous parlent de 1er janvier 2027. Ah! bien là, c'est un peu plus
plate. Peux-tu nous expliquer qu'est-ce qui s'est passé entre le dépôt du
projet de loi...
M. Boulet : On aura à en
parler lors de cet amendement-là. Mais il y avait des impératifs opérationnels,
là, qu'on pourra vous expliquer au moment opportun. C'est plus en rapport avec
le système informatique. Mais on en parlera à ce moment-là.
M. Leduc : Le système
informatique de la CNESST?
M. Boulet : Oui. Exact. De la
mise en application.
M. Leduc : Bon. Ça se passe
bien, l'informatique, à part de ça?
M. Boulet : Ah! bien, c'est...
Si vous avez une expertise, collègue, partagez-la.
M. Leduc : Vous êtes preneur.
Vous prenez toutes les expertises qui passent. Parfait.
M. Boulet : Moi, je suis...
je ne me qualifierais pas là-dedans.
M. Leduc : Je charge moins
cher peut-être que d'autres, mais ça, c'est un autre... c'est un autre sujet.
Blague à part, je trouve ça intéressant,
parce que ce dossier-là, de la bonification de l'IRR, ce n'est pas la première
fois qu'on s'en parle, le ministre et moi. On en avait eu des échanges, là, si
ma mémoire est bonne, pendant le projet de loi n° 59. Mais surtout, à peu
près un an, presque un an, jour pour jour, en novembre, l'année passée,
novembre 2024, il y avait une belle grosse campagne de l'UTTAM, hein, l'UTTAM,
c'est l'Union des travailleurs, travailleuses accidentés de Montréal,
notamment, mais il y a des... il y a des UTT...
M. Boulet : Salutations à
Félix s'il nous écoute.
M. Leduc : Salutations à
Félix, qui nous écoute sûrement, j'imagine.
M. Boulet : Je présume.
M. Leduc : On le présume.
C'est un... C'est un fan des commissions parlementaires, Félix, alors on le
salue également. Tout ça pour vous dire qu'en novembre 2024, on avait eu une
belle période de questions et une belle campagne, donc, de l'UTTAM, qui était
venue ici, au parlement, avec des gens dans les gradins qui vivaient ces cas-là
de disparité de... bien, pas de...
M. Leduc : ...mais en cas
de disparité de revenu d'IRR en raison de cette situation-là, on avait
sensibilisé le ministre à ce niveau-là. Je vois que ça a cheminé chez lui. On
aura nos débats sur les dates d'application plus tard, mais je veux souligner
deux choses. D'abord, bravo et merci au ministre d'avoir mis ça dans le projet
de loi. L'autre chose que je veux souligner, c'est bravo et merci à l'UTAM,
parce que c'est eux et elles, ce n'est pas juste des hommes, bien sûr, eux et
elles qui poussent ce genre de dossiers là. Puis c'est des dossiers assez
pointus, hein, on s'entend, là. Il faut un tableau. L'IRR, c'est pointu, c'est
technique. Même nous, nos services de recherche, on n'a pas le temps, bien,
bien, de se spécialiser dans ce niveau de détail là. Puis c'est une association
portée à bout de bras par quelques personnes, par quelques bénévoles, quelques
salariés très rares. Mais je veux juste souligner qu'une organisation comme
l'UTAM, ils sont financés beaucoup par des dons syndicaux, par des
organisations syndicales qui font des dons à l'UTAM parce que les organisations
syndicales disent : Nous, on a notre obligation, bien sûr, de représenter
les salariés qui cotisent, mais il y a plein de salariés qui sont non syndiqués
dans la vie. Puis, en matière de santé-sécurité, ils ne sont pas représentés.
Ça fait que s'ils sont... S'ils subissent
une injustice en normes du travail, ils vont être représentés par la
commission, bien sûr, mais en santé-sécurité, ils ne seront pas représentés.
C'est seulement des associations comme l'UTAM qui peuvent faire ce travail-là,
mais aussi ils ont aussi un devoir de représentativité, d'influence et ils ont
une voix dans la cité. Mais si éventuellement, dans un autre projet de loi
qu'on aura à débattre une autre fois, vous venez rendre plus compliqué le fait
des organisations syndicales de donner du financement des organismes de
commentaire, du type de l'UTAM, ça va fragiliser les non-syndiqués dans leur
potentiel de mobilisation, comme celui dont nous avons le fruit aujourd'hui
dans votre intégration de ces articles-là dans la loi.
Donc, je voulais seulement vous
sensibiliser qu'il y a tout un débat qu'on va avoir, là, mais des fois il y a
des aspects qu'on peut oublier dans un angle mort. Ça, je pense que c'est
quelque chose que j'avais besoin de vous soumettre. Que cette campagne-là, elle
existe parce qu'il y a une organisation qui a quelques moyens, notamment d'un
point de vue de financement d'organisations syndicales. Ça leur a permis de
monter une campagne, ça leur a permis de venir ici, de me sensibiliser, de vous
sensibiliser, de nous sensibiliser. Plus ça, ça devient un article de loi.
C'est merveilleux, mais pour ça, il faut qu'il y ait des moyens puis qu'on
permette aux organisations syndicales de pouvoir le faire. Voilà. Merci.
Le Président (M. Allaire) :
Donc, d'autres interventions concernant l'article 4? S'il n'y a pas
d'autre intervention, nous allons procéder à sa mise aux voix. Est-ce que
l'article 4 est adopté?
Des voix
: Adopté.
Le Président (M. Allaire) :
Adopté. M. le ministre, l'article 2. Vous avez le temps de le lire. Et vos
commentaires, s'il vous plaît.
Des voix : ...
M. Boulet : Merci, M. le
Président. L'article 2 : L'article 64 de cette loi est modifié
par le remplacement de « qui sert de base au calcul de cette indemnité » par «
annuel d'emploi d'un travailleur déterminé au moment de sa lésion ».
Commentaire. En concordance avec la
modification proposée par l'article 4 qu'on vient d'étudier, ça vise à
assurer une meilleure protection du revenu des travailleurs puis ça prévoit que
le revenu annuel brut d'un travailleur déterminé au moment de sa légion, que la
commission revalorise plutôt que le revenu qui sert de base au calcul de l'IRR.
Donc, c'est un corollaire de ce qu'on vient d'adopter.
Le Président (M. Allaire) :
Merci, M. le ministre. Est-ce qu'il y a des interventions concernant
l'article 2? Non? Oui, M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc : Quand vous
dites que c'est un corollaire, c'est qu'il faut...
Une voix : ...
M. Leduc : C'est parce
que si on l'avait laissé tel quel il y aurait eu une contradiction entre cet article-là...
M. Boulet : Exact.
M. Leduc : ...et celui
qu'on vient de modifier.
M. Boulet : Oui.
M. Leduc : Puis c'est la
raison pour laquelle vous l'avez ordonnancé, 4, 2.
M. Boulet : Peut-être parce
qu'il est à la suite de l'autre. C'est parce que si on avait suivi le numérique
puis qu'on aurait été avant, alors qu'il fallait discuter l'autre au préalable.
M. Leduc : Parce que le
4, on vient de modifier l'article 117...
M. Boulet : Oui.
M. Leduc : ...qui venait
plus tôt. Mais même si... OK.
M. Boulet : En fait,
c'est... On vient d'adopter le principe. Ça, c'est l'application.
M. Leduc : OK. Puis dans
la loi originale?
M. Boulet : C'était dans
cet ordre-là.
M. Leduc : C'était dans
cet ordre-là pour x, y raisons.
M. Boulet : Oui, oui.
M. Leduc : Je comprends.
Le Président (M. Allaire) :
Ça va? M. le député de Jean-Talon.
M. Paradis : Et donc, en
fait, ici, la logique, c'est qu'au lieu de parler du revenu qui sert de base de
calcul, c'est le revenu annuel d'emploi parce qu'on a changé, en fait, le
concept...
M. Boulet : Totalement.
M. Paradis : ...de
revenu de base par le revenu annuel tel que revalorisé à chaque année.
M. Boulet : Exact.
Le Président (M. Allaire) :
Ça va? D'autres interventions? S'il n'y a d'autre intervention, nous allons
procéder à la mise aux voix de l'article 2. Est-ce que l'article 2 est
adopté?
Des voix
: Adopté.
Le Président (M. Allaire) :
Adopté. Bravo! Quand même. Donc, je regarde l'heure. Compte tenu de l'heure,
merci pour votre belle collaboration cet après-midi. Donc, je...
Le Président (M. Allaire) : ...les
travaux au mardi 7 octobre, à 9 h 45, où elle poursuivra
son mandat. Bon week-end, tout le monde. Bon retour en circonscription.
(Fin de la séance à 16 h 30)