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Etude des projets de loi nos 61 et 62
(Dix heures dix-sept minutes)
Le Président (M. Gendron): A l'ordre, messieurs! C'est la
commission permanente des finances et des comptes publics.
Je vais faire l'appel des membres de la commission. Les membres sont: M.
Bordeleau (Abitibi-Est) est remplacé par M. Lévesque
(Kamouraska-Témiscouata); M. Charbonneau (Verchères), M. Gagnon
(Champlain), M. Garneau (Jean-Talon), il doit y avoir quelqu'un qui le
remplace...
M. Raynauld: Non.
Le Président (M. Gendron): M. Goulet (Bellechasse), M.
Grégoire (Frontenac), M. Michaud (Laprairie), M. Parizeau
(L'Assomption), M. Raynauld (Outremont), M. Roy (Beauce-Sud).
Les intervenants à cette commission sont: M. Boucher
(Rivière-du-Loup), M. Caron (Verdun), M. Gosselin (Sherbrooke), M. Guay
(Taschereau), M. Jolivet (Laviolette), M. Martel (Richelieu), M. O'Gallagher
(Robert Baldwin), M. Russell (Brome-Missisquoi), M. Samson (Rouyn-Noranda).
La commission des finances a été convoquée pour
faire l'étude des projets de loi 62 et 61. On abordera l'étude du
projet de loi 62, selon l'ordre de la Chambre. M. le ministre des Finances,
vous avez la parole.
Projet de loi 62
M. Parizeau: II s'agit du projet de loi prévoyant une
augmentation des droits sur le tabac, qui comporte, en outre, une clause en
vertu de laquelle l'augmentation des droits sur le tabac de 1976 qui avait
été établie pour garantir en quelque sorte le financement
olympique est maintenue au même niveau. Donc, l'augmentation des droits
sur le tabac qui est décrétée par le projet de loi no 62
ne tombe pas dans la garantie olympique. C'est le sens des articles 1 et 2.
M. Raynauld: M. le Président, j'aurais peut-être une
question à poser.
Le Président (M. Gendron): Oui, M. le député
d'Outremont.
M. Raynauld: J'aimerais savoir pour quelle raison la taxe est
ainsi formulée que le fonds olympique reste au même niveau. Est-ce
parce que les rentrées pour le fonds olympique sont satisfaisantes ou
même plus élevées que prévu? Est-ce qu'il y a eu
d'autres raisons qui peuvent faire qu'on a tenu à ne pas affecter le
fonds olympique? Est-ce qu'il y a une raison spéciale?
M. Parizeau: Non, c'est un geste qui, en 1976, avait
été posé et qui comprenait deux éléments:
d'une part, les rentrées de Loto-Canada, et d'autre part, une taxe bien
définie, en termes de cents par paquet. Ces deux éléments
étaient donnés comme gages, en somme, de l'emprunt qui avait
été fait pour financer les Jeux olympiques. Puisque ces deux
gages suffisaient au prêteur, il n'y a pas de raison d'améliorer
le gage. En somme, on n'en demande pas plus que le client n'en demande. S'il
s'est satisfait de cela en 1976, il n'y a pas de raison qu'on lui en donne
davantage.
M. Raynauld: Est-ce que les rentrées de Loto-Canada et les
versements qui ont été faits par le Québec, par ailleurs,
au fonds olympique, est-ce que cela suit les prévisions, est-ce que cela
suit ce qui était attendu?
M. Parizeau: C'était, il y a quelques mois,
inférieur à ce qui était prévu. Puis les tirages,
singulièrement au cours de l'été, de Loto-Canada se sont
considérablement améliorés en termes de rendement.
Là, cela recommence à baisser depuis l'introduction de
l'association de la Super Loto et de la Provinciale. Alors, là, il est
très difficile de faire des projections maintenant pour l'année
à venir, étant donné que ce nouveau véhicule de
Super Loto et de Provinciale entre manifestement dans le corps de Loto-Canada,
mais on ne sait vraiment pas. Il va falloir attendre quelques tirages, le
premier a eu lieu en octobre, cela ne vient que de commencer. On sait que les
ventes de Super Loto sont en hausse assez nette, mais j'attendrais, moi, encore
deux, trois mois pour faire de nouvelles projections.
Le Président (M. Gendron): Je m'excuse auprès des
membres de la commission. Je voulais simplement avoir le consentement pour que,
éventuellement, le même rapporteur de la commission des finances
puisse agir également aujourd'hui, pour les fins du journal des
Débats, que ce soit le même rapporteur de la commission. Est-ce
que la commission a des objections à ce que la même personne
agisse comme rapporteur?
M. Raynauld: Non.
Le Président (M. Gendron): Alors, ça va. Le
même rapporteur qu'à la commission des finances d'hier.
Maintenant, la convocation, c'est pour faire l'étude du projet de
loi no 62 article par article. Le ministre des Finances a eu quelques mots de
départ. Est-ce que vous êtes prêts à procéder
à la discussion article par article? Sur l'article 1, est-ce qu'il y a
d'autres intervenants qui auraient des commentaires, à part de M. le
député d'Outremont?
M. Raynauld: M. le Président, comme ce sont des projets de
loi qui ont habituellement deux articles depuis quelques jours que nous sommes
à étudier des projets de loi semblables je pense que si
l'on pose quelques questions qui permettent d'expliquer le contenu de ces
articles, il
n'y a pas d'objection, pour ma part, à ce qu'on le fasse à
l'occasion d'un article. La question que je posais, c'était à
propos de la Loto-Canada. Je vois un peu mal comment elle pourrait se placer,
sauf à l'article 2. Si vous tenez absolument à ce que j'en parle
à l'article 2, je pourrais bien le faire...
Le Président (M. Gendron): Je n'ai pas d'objection.
M. Parizeau: Quant à moi, je vous avouerai que quand les
textes des articles sont aussi courts, cela ne me dérange pas.
Le Président (M. Gendron): C'est cela. C'était tout
simplement pour vérifier auprès de la commission s'il y a
d'autres intervenants sur l'ensemble des articles du projet de loi avant de
faire l'examen article par article.
M. le député d'Outremont, est-ce que vous avez d'autres
questions ou commentaires?
M. Raynauld: Oui, M. le Président. Je voulais donc
demander quant aux fonds qui proviennent de Loto-Canada et qui avaient
été prévus à $100 millions, pour l'année
1978-1979, si c'est encore la même prévision qui prévaut
aujourd'hui. Sinon, j'aimerais que le ministre explique peut-être un peu
mieux ce qu'il nous a dit tout à l'heure. Si je comprends bien, il y a
eu un emprunt pour le financement des Jeux olympiques; ce financement
était fondé sur certaines prévisions de rentrées.
Si ces entrées sont inférieures à celles qui sont
prévues, qu'est-ce que cela affecte? Est-ce que cela veut dire que la
garantie diminue auprès des emprunteurs ou si cela veut dire
simplement...
M. Parizeau: En pratique, cela n'a rien changé. On vient
de refinancer, de toute façon, les $360 millions dont il s'agit aux
Etats-Unis à des conditions beaucoup plus avantageuses, simplement parce
qu'il y avait beaucoup plus d'argent en circulation à New York, à
ce moment-là. On vient de reconvertir la dette olympique pour une
échéance plus longue à des taux d'intérêt
plus faibles et ce n'est même pas intervenu dans les discussions. Ce qui
est intervenu, c'est la quantité d'argent disponible à New
York.
M. Raynauld: Je me doute de cela mais quand même, si les
entrées sont inférieures, est-ce qu'elles sont de beaucoup
inférieures aux $100 millions?
M. Parizeau: J'ai beaucoup de difficulté à
répondre à cela justement à cause de trois mouvements qui
se sont produits en succession très rapide. L'hiver dernier, les tirages
de Loto-Canada rapportaient beaucoup moins que prévu.
L'été dernier, cela se replaçait. Il semblait bien qu'ils
atteindraient l'objectif de paiement au Québec. Depuis l'intervention de
Super Loto Provinciale, les ventes de Super Loto Provinciale sont dans une
hausse telle depuis un mois, un mois et demi, que forcément, cela va se
répercuter sur les ventes de
Loto-Canada. Mais là, il faut vraiment encore deux ou trois mois
pour qu'on soit vraiment en mesure de faire des projections correctes. Au point
où on en est aujourd'hui, on est dans une mouvance telle que je ne me
risquerais pas.
Le Président (M. Gendron): M. le député de
Bellechasse.
M. Goulet: Je serai très court. Comme l'a rappelé
le ministre, lors de son allocution en deuxième lecture, c'est une taxe
volontaire. Il a choisi cette forme de taxation. On lui avait
suggéré autre chose. J'aurais une question au niveau de la
discussion générale. Le député de D'Arcy McGee
avait fait une suggestion au ministre et le ministre l'avait trouvée
très valable. Probablement que je l'ai oubliée sur mon bureau, je
m'en excuse. Quelle était la suggestion que vous aviez trouvée
très valable? C'étaient des catégories...
M. Parizeau: Ce que le député de D'Arcy McGee
suggérait, c'était de taxer moins fortement le tabac à
pipe...
M. Goulet: D'accord.
M. Parizeau: ... et les cigares que la cigarette, parce que, sur
le plan de la santé...
M. Goulet: C'est moins dommageable.
M. Parizeau: ... c'est moins dommageable. C'est une idée
que je trouve intéressante, qui vaut la peine d'être
creusée. La seule chose, c'est que ce n'est pas quelque chose que je
pourrais traduire dans un projet de loi immédiat, étant
donné que notre structure de taxation des différents types de
tabac est basée, pour le tabac à pipe et le cigare, en
pourcentage et pour cigarettes à l'unité. Si je veux
défaire cette structure et en monter une autre, j'aurai besoin, de toute
façon, de prendre un peu plus de temps. Ce n'est pas
immédiatement que je ferai l'amendement. Je ne nie pas que l'idée
soit intéressante et je voudrais, en particulier, consulter un certain
nombre de gens qui connaissent mieux ces questions de santé que moi, je
peux les connaître. Je n'exclus pas, si vous voulez, pour l'avenir, une
démarche comme celle-là. Cela vaut la peine d'être
creusé.
M. Goulet: Si le ministre entreprend une démarche comme
celle-là pour l'avenir, il faudrait peut-être penser
également à taxer au pro rata du goudron, de la nicotine dans les
cigarettes. Cela pourrait aller jusque-là. On peut le savoir assez
facilement des fabricants. Par exemple, probablement que les cigarettes du
ministre seraient plus taxées que les miennes, mais cela irait dans le
même sens que la proposition que vous avez jugée très
valable qui venait du député de D'Arcy McGee. Quant à
entreprendre une étude...
M. Parizeau: La seule chose, quand on entre là-dedans,
c'est qu'il faut penser à l'aspect administratif.
M. Goulet: Oui.
M. Parizeau: II s'agirait de savoir ce que cela demanderait
à nos mandataires comme comptabilité et ce qu'il faudrait qu'on
leur paie comme frais pour tenir une comptabilité pareille. Il y a
tellement de marques de cigarettes. Cela s'examine. Ce sont des choses
chiffrées, après tout. A un moment donné, quand on a les
chiffres, on se rend bien compte du nombre de fonctionnaires de plus, des
dépenses de plus et de la paperasse de plus que cela demande aux
mandataires et si cela en vaut la peine on n'en vaut pas la peine. Mais ce sont
des choses qui s'examinent.
M. Goulet: M. le Président, quant à moi, je suis
prêt à l'adopter. Je ne dis pas que je suis d'accord en principe,
c'est une taxe; même si elle est volontaire, c'est une taxe et on ne
devrait jamais être pour les taxes. En tout cas, le ministre a choisi
cette forme de taxation et je suis prêt, M. le Président, à
adopter le premier article, en ce qui me concerne.
Le Président (M. Jolivet): M. le député
d'Outremont.
M. Raynauld: Une dernière question, peut-être.
Est-ce que le ministre confirme les prévisions qui avaient
été faites au moment du discours sur le budget à propos du
rendement de cette augmentation de taxes de $48 millions.
M. Parizeau: A peu près, oui. C'est bien l'impression
qu'on a.
M. Raynauld: Cela va.
Le Président (M. Jolivet): Article 1. Adopté.
Article 2. M. le ministre.
M. Parizeau: Je l'avais commenté tout à l'heure, M.
le Président. Je pense que...
M. Raynauld: Adopté.
Le Président (M. Jolivet): Article 2. Adopté.
Article 3. Adopté.
M. Raynauld: Adopté.
M. Goulet: A compter du 19 avril, cela veut dire qu'au moment
où le ministre l'a annoncé, même si la loi n'était
pas votée, c'est... (10 h 30)
M. Parizeau: A minuit.
M. Goulet: Actuellement, les cigarettes que nous
achèterons sont déjà taxées.
M. Parizeau: Oui.
M. Goulet: Cela se fait, c'est courant.
M. Parizeau: Non seulement cela se fait, mais ça doit se
faire.
M. Goulet: Comme ça, d'accord. Pour qu'il n'y ait pas
de...
M. Parizeau: De spéculation.
M. Goulet: ... de spéculation, d'accord.
M. Parizeau: Les taxes sur des produits, normalement, la coutume
veut que ce soit ce soir à minuit. Une des raisons, d'ailleurs, pour
laquelle le discours du budget se fait le soir, c'est ça, quand les
transactions sont terminées, de façon que, dans le courant de la
journée, il n'y ait pas de... C'est une vieille habitude
parlementaire.
M. Goulet: Pourquoi, à ce moment-là, si c'est
automatique, sent-on le besoin de légaliser? On peut légaliser un
an ou deux ans après, c'est normal.
M. Parizeau: C'est parce que si un mandataire ou un contribuable
refusait de payer, même à la suite de l'indication que j'ai
donnée le soir du discours du budget, il aurait légalement le
droit de refuser de payer tant que la taxe n'a pas été
adoptée par l'Assemblée nationale. En pratique, cela ne se fait
pas, il la paie, mais, légalement, on ne pourrait pas le poursuivre,
s'il refusait de payer, tant que la loi n'a pas été
adoptée par l'Assemblée nationale.
Simplement, une fois que la loi serait adoptée par
l'Assemblée nationale, on récupérerait la taxe
jusqu'à ce jour-là. Mais, légalement, on ne peut pas
courir après le contribuable, tant que la taxe n'a pas été
légalement adoptée par l'Assemblée nationale.
M. Michaud: II reste que c'est assez simple, parce qu'il y a
à peine quelques dizaines de grossistes.
M. Parizeau: Non, ce n'est pas...
M. Michaud:... et très peu de manufacturiers, donc, c'est
assez limité.
M. Parizeau: A cet égard, nous avons eu un cas,
l'année dernière, avec la publicité électronique,
un des postes visés a dit: Je tiens ma comptabilité, mais je ne
vous paie pas, c'est seulement quand la loi sera adoptée à
l'Assemblée nationale que je vous paierai, rétroactivement.
M. Goulet: C'est entendu, sur un paquet de cigarettes, non, mais
sur un montant de X millions, j'imagine que, pour certains postes de
télévision qui font des affaires pour plusieurs millions, cela
peut représenter l'intérêt et c'est compréhensible.
D'accord.
M. Parizeau: Vous vouliez l'explication, c'est ça. C'est
pour ça qu'il faut adopter une loi, en dépit du fait que cela
entrait en vigueur le 19 avril.
M. Raynauld: M. le ministre, je pense que cela illustre qu'on a
un système. Le système fiscal,
essentiellement, c'est un système volontaire, un paiement
d'impôt volontaire. Je pense que c'est bon de faire ressortir cela de
temps à autre.
M. Parizeau: De l'autocotisation.
M. Raynauld: C'est de l'autocotisation, le système fiscal.
Si les gens se mettaient à ne pas vouloir payer leurs impôts, il
serait à peu près impossible au gouvernement d'aller chercher ces
impôts. Il faudrait qu'il poursuive tout le monde.
M. Parizeau: Ce ne serait pas impossible, mais disons que ce
serait beaucoup plus difficile.
M. Raynauld: Ce serait beaucoup plus difficile. Essentiellement,
quand il y a des millions et des millions de personnes, si cela fonctionne,
c'est parce que le régime est démocratique, d'abord, et que les
gens savent très bien que les lois ont été votées
par eux, qu'ils y ont participé et tout cela. Mais je trouve que c'est
quand même une caractéristique d'une chose qu'on oublie souvent,
qu'un système de paiement d'impôts, essentiellement, c'est un
système de paiement volontaire. Bien sûr, il y aurait des recours
et tout cela. Mais il reste que c'est la collaboration du monde qui fait que le
système fonctionne. Si les gens ne voulaient pas collaborer, il ne
fonctionnerait pas.
M. Parizeau: Et les cours seraient occupées.
Le Président (M. Jolivet): L'article 3 est-il
adopté?
M. Raynauld: Adopté.
Le Président (M. Jolivet): L'article 4 est-il
adopté?
M. Raynauld: Adopté.
Le Président (M. Jolivet): Adopté. L'article 5
est-il adopté?
M. Raynauld: Adopté.
Le Président (M. Jolivet): Donc, le projet de loi 62 est
adopté. Passons au projet de loi 61. L'article 1. M. le ministre.
Projet de loi no 61
M. Parizeau: II s'agit essentiellement de la protection des
municipalités, des ressources que les municipalités tirent de la
taxe de vente. En vertu des lois antérieures, les municipalités
retiraient le quart des rentrées de taxe de vente au détail et,
dans la mesure où le gouvernement a aboli pour un an la taxe de vente au
détail sur les chaussures, le textile, les vêtements et les
meubles, les recettes des municipalités seraient donc automatiquement
tombées si on n'avait pas modifié le pourcentage.
Donc, un peu dans le sens de la loi d'hier, qui portait sur les repas et
l'hôtellerie, nous augmentons le pourcentage à 31,25%, de
façon à compenser les municipalités pour le manque
à gagner.
Le Président (M. Jolivet): M. le député
d'Outremont.
M. Raynauld: M. le Président, je pense que nous nous
sommes prononcés, en ce qui nous concerne, en faveur du projet de loi en
deuxième lecture. Je crois que ce remboursement des municipalités
est un remboursement nécessaire. Par conséquent, nous n'avons pas
d'objection sur le fond.
J'ai aussi soulevé en deuxième lecture, si mon souvenir
est bon, le problème du calcul. En me fondant sur l'objectif que le
ministre a exprimé comme étant le sien, qu'il voulait compenser
les municipalités pour la totalité des pertes potentielles
à encourir par elles, j'ai dû me tromper quelque part aussi, mais
j'aimerais que le ministre nous donne les chiffres sur lesquels il s'est
basé pour fixer le pourcentage d'augmentation à 31,25%. Suivant
mes chiffres et suivant les prévisions qui ont été
données par le ministre, il semble que les rentrées se
chiffreraient, pour 1978/79, à $1 300 000 000. après la
décision du ministre et qu'elles auraient été de $1 645
000 000 avant. 25% de cela, cela donnerait $325 millions et 31.25%, cela
donnerait $406 millions, une augmentation de $81 millions.
Or, il semble que l'augmentation qui aurait été
nécessaire pour rembourser intégralement les municipalités
devrait être de $86 200 000, suivant mes calculs, au lieu de $81 200 000.
L'impression que j'ai, c'est qu'on calcule le pourcentage évidemment
après qu'on ait réduit la taxe de vente, quand, en
réalité, le pourcentage de 25%, s'il n'y avait pas eu de
changement, se serait appliqué sur les taxes de vente perçues
avant la réduction.
M. Parizeau: C'est cela.
M. Raynauld: Encore une fois, si ces calculs sont bons, à
ce moment-là, le remboursement devrait être de $86 200 000. Si
c'est $86 200 000, le pourcentage de 31,25% n'est pas suffisant.
M. Parizeau: C'est qu'on ne s'entend pas sur les chiffres, M. le
Président.
M. Raynauld: Peut-être pas, non.
M. Parizeau: Le montant prévu avant les réductions
était de $1 590 000 000. La réduction prévue est de $317
000 000.
M. Raynauld: $317 000 000.
M. Parizeau: $317 000 000, enlevez les chambres d'hôtels.
Les chambres d'hôtels, c'était sur repas et hôtellerie. $317
000 000, c'est ex-hôtels, ex-chambres d'hôtels. Cela fait $1 273
000 000.
M. Raynauld: $1 273 000 000.
M. Parizeau: $1 273 000 000.
M. Raynauld: Oui.
M. Parizeau: Enlevez maintenant les compensations aux
mandataires, c'est-à-dire les droits de perception qu'on leur donne.
C'est la même chose.
Une Voix: II y avait cela hier aussi.
M. Raynauld: C'est combien?
M. Parizeau: $12 millions.
M. Raynauld: $12 millions.
M. Parizeau: Oui. Le 15,90% devient 15.78%, et le 12,73% devient
12,61%. On l'enlève aux deux places. La part des municipalités,
avant la réduction, devient de $394 500 000, c'est-à-dire 25% du
montant, $394 500 000 qu'on leur maintient par rapport à $1 261 000 000,
qui devient 31,25%.
M. Raynauld: Par rapport à $1 milliard?
M. Parizeau: $1 261 000 000.
M. Raynauld: $1 261 000 000.
M. Parizeau: C'est cela. Entendons-nous bien! Les montants
peuvent varier à partir de là. C'est fait à partir des
estimations. Si les rentrées de taxe de vente étaient plus
élevées cette année que prévu, les
municipalités auront toujours leur 31,25%, quel que soit le montant
ramassé. Or, en fait, elles vont faire un peu d'argent cette
année, parce que, jusqu'à maintenant, il semble que les recettes
de la taxe de vente soient en avance sur ce qui avait été
prévu à l'occasion du discours du budget, pas de beaucoup, mais
enfin! Les ventes au détail ont monté, celles qui sont
taxées, un peu plus vite qu'on ne l'avait estimé. Le 31,25%
s'appliquera quand même, de la même façon qu'autrefois, le
25% s'appliquera, quel que soit le résultat ultime à la fin de
l'année. Si on en ramassait plus, elles en avaient plus, si on en
ramassait moins, elles en avaient moins.
M. Raynauld: J'avais calculé $406 milliards, et vous
arrivez à $394 500 000. Cela doit être encore $1 500 000 000.
M. Parizeau: C'est cela. Ce sont les $12 millions des
mandataires.
M. Raynauld: Les $12 millions des mandataires. Cela va.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Bellechasse.
M. Goulet: Cela va. Il n'y avait qu'un petit point que j'avais
souligné au ministre, et cela touche plus particulièrement des
régions comme mon comté, par exemple, où il n'y a pas de
ville. A peu près toutes les paroisses varient entre 600 à 700
habitants jusqu'à 2000 habitants. Deux cas avaient été
portés à mon attention par des maires des municipalités
où on a un manque à gagner qui peut être une goutte d'eau
dans l'océan au niveau de la province ou au niveau d'une ville comme
Montréal ou Québec. Dans une municipalité, je vais donner
un exemple comme Saint-Gervais-de-Bellechasse, qui est une très petite
municipalité. Il n'y a qu'un marchand général, un marchand
de meubles qui est assez important, mais qui dessert peut-être toute la
région. Pour elle, cela peut représenter un manque à
gagner peut-être de $8000 à $15 000. Pour une petite
municipalité qui a un très petit budget, ce sera $8000 à
$15 000, mais cela vaut peut-être X millions pour la ville de
Montréal. C'est seulement cette petite chose... Le ministre m'a dit: Ce
n'est pas général. Je vois le député de Kamouraska
qui fait signe que oui. Pour des comtés ruraux où, souvent...
J'ai un autre exemple où la municipalité n'aurait peut-être
pas besoin de taxer ses contribuables, parce qu'il y a un gros marchand
d'automobiles dans la municipalité. Ils ne sont pas touchés,
d'accord. Il y a deux autres municipalités, entre autres, je vous ai
nommé Saint-Gervais, où il y a à peu près un
marchand important dans la paroisse, qui dessert peut-être il vend
même beaucoup à Québec toute la région. Cela
peut représenter un manque à gagner de $10 000, $15 000 ou $20
000, dans certains cas, ce qui, pour une très petite
municipalité, est beaucoup. Elles disent: On avait quelqu'un qui
apportait de l'eau au moulin et là... $20 000 pour une
municipalité comme Saint-Gervais, je peux vous dire qu'à la fin
de l'année, c'est beaucoup. Cela peut valoir peut-être X millions
à Québec. C'est seulement cette parenthèse que je voulais
ouvrir.
M. Parizeau: Mais il reste que ce n'est pas adaptable. S'il
fallait chercher à adapter ça sur un territoire, village par
village, l'opération serait impensable. Je vous répondrai,
cependant, un certain nombre de choses à ça.
Premièrement, les recettes de la taxe de vente d'une petite
municipalité ne dépendent qu'à 50% des ventes locales;
tout le reste est "péréquaté".
M. Goulet: Et?
M. Parizeau: II y a une péréquation... M.
Goulet: C'est-à-dire que non...
M. Parizeau: ... au niveau de la région et du
Québec.
M. Goulet: Après ça, c'est régional. M.
Parizeau: C'est ça.
M. Goulet: Après ça, c'est au niveau de la
province, mais c'est plus que 50%, parce que vous avez la formule; quelle
est-elle? 50-40...
M. Parizeau: 50-40-10.
M. Goulet: 50-40-10. Alors, 50, local; 40, régional, et
10...
M. Parizeau: Donc, ce que je veux dire, c'est que ce n'est pas
une perte de $1 pour $1.
M. Goulet: D'accord.
M. Parizeau: Deuxièmement, j'imagine qu'elles seraient les
premières ravies lors de l'augmentation de la taxe au 31 mars. Je ne
suis pas certain que les contribuables le seraient. Cela ferait leur
affaire!
D'autre part, si vous vouliez vraiment étendre ce principe, la
meilleure des choses pour augmenter les recettes de la taxe de vente des
villages, ce serait de taxer la nourriture, parce qu'il y a des
épiceries partout.
M. Goulet: Ce n'est pas ça que je voulais dire.
M. Parizeau: Je pense bien que ce n'est pas ça que vous
vouliez dire. Mais vous comprenez ce que je veux dire. C'est que, dans ce type
de raisonnement, à la limite, où est-ce qu'il y a des magasins
partout? Dans l'alimentation. Il n'est pas question, uniquement pour distribuer
la taxe de vente dans les villages, de commencer à taxer la nourriture.
Il y a un équilibre à faire ici. Je comprends très bien le
type de problème que vous soulevez, mais vous comprendrez, d'autre part,
que l'adaptation d'un changement de pourcentage comme celui-là à
chaque village, en fonction du type de magasins qui s'y trouvent, est une
tâche impossible. Ce n'est pas faisable.
M. Goulet: Non, ce que je voulais dire, M. le Président,
c'est que ce serait peut-être plus facile de faire l'inventaire et de
dire: Les municipalités, d'accord... J'imagine qu'une ville comme
Québec, à un moment donné, ce que vous allez lui donner va
probablement être à peu près égal à ce que
cette ville aurait eu si la taxe avait été maintenue. Mais il me
semble que ce serait facile de faire un inventaire rapide des petites
municipalités en bas, par exemple, de 1000 ou de 2000 habitants. Il y en
a peut-être 25 dans la province. Je voyais le député de
Kamouraska-Témiscouata qui faisait signe tantôt: Oui, c'est vrai.
Il y en a peut-être 50, mais de dire: Ecoutez! Si les
municipalités ont perdu $800 000, on n'en parle pas, mais
peut-être un chiffre... Peut-être qu'aux municipalités qui
auraient perdu en haut de $5000, le ministère des Affaires municipales
ou le ministère des Finances, n'importe quel ministère, pourrait
dire: Voici vos $5000, parce que... Ecoutez! Ces petites municipalités
reçoivent une subvention on l'a vu avec les chemins à
vocation agricole et les autres chemins à l'intérieur de la
municipalité de $2000 à $5000 et elles font des miracles
avec ça. C'est beaucoup pour elles. (10 h 45)
C'est tout simplement cette argumentation que je voulais amener. Je ne
veux pas retarder l'adoption du projet de loi, loin de là, mais souvent,
dans les ministères, nous sommes habi- tués à parler en
chiffres de milliards et de millions; pour de petites municipalités,
$2000, $3000 à la fin de l'année, c'est beaucoup Je le sais. On
discute régulièrement avec les maires; on rencontre ces
gens-là régulièrement et, lorsque le ministère des
Transports arrive avec une petite subvention de $3000, c'est comme si la ville
de Montréal venait de recevoir $3 milliards ou $300 millions; ses
représentants sont aussi contents.
Oui, c'est vrai. Je vois un monsieur qui fait des signes, qui hausse les
épaules. C'est vrai, parce que ces municipalités ont de
très petits budgets et, $5 000 pour elles, c'est beaucoup. C'est tout
simplement ce que je voulais dire au ministre. Il y aurait peut-être
moyen de dire: On fera un inventaire rapide et celles qui ont perdu plus de $3
000, on va leur donner sous une autre forme, tout simplement. C'est là
la demande que je faisais au ministre. Peut-être que ce ne sera pas un
article dans ce projet de loi, mais on pourrait étudier la situation. La
demande m'a été faite par au moins deux maires et,
également, par le préfet du comté qui disent: Cela touche
quelques municipalités chez nous.
M. Parizeau: Cela peut toujours s'examiner, mais cela ne pourra
s'examiner cependant qu'à la fin de l'année. Il faut bien
comprendre les choses. Il faut aller jusqu'à la fin de l'année
pour voir, parce qu'à l'avance, il n'y a pas moyen, parce que beaucoup
de magasins de village ont des ventes beaucoup trop diversifiées. Vous
avez trop de petits magasins de village qui vendent de la quincaillerie, de
l'habillement, des graines de semence et tout un ensemble de choses. Or,
commencer à faire une estimation à l'avance de la
répartition de leurs ventes détaxées par opposition
à leurs ventes taxées et prévoir ce que cela va donner
à la fin de l'année magasin par magasin, ce n'est pas faisable.
Mais, à la fin de l'année, c'est sûrement envisageable de
regarder exactement ce que cela a donné, oui.
M. Goulet: C'est tellement important. Je termine
là-dessus. Je donne un exemple. Une municipalité de mon
comté a trois gros dépositaires d'automobiles. Si elle voulait,
elle n'aurait à peu près pas à taxer ses contribuables
avec les services qu'elle donne actuellement. Saint-Anselme paroisse a trois
gros concessionnaires. Ces concessionnaires sont tellement important pour elle
que si elle voulait, elle n'aurait à peu près pas à taxer
ses contribuables; seulement la redevance de la taxe de vente des trois
concessionnaires d'automobiles pourrait faire compenser les services.
M. Parizeau: Mais vous comprendrez que dans un tel cas, je ne
vais pas verser des larmes de sang parce que la taxe foncière est
à zéro.
M. Goulet: Non, mais pour vous montrer l'importance qu'une petite
somme d'argent je parle d'une somme de $5 000 à $25 000
peut avoir pour ces municipalités. J'ai terminé, M. le
Président.
Le Président (M. Gendron): M. le député de
Kamouraska-Témiscouata.
M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata): J'abonde dans
le même sens que le député de Bellechasse. On a des
comtés qui se ressemblent assez et avec 40 municipalités, dans
mon comté, imaginez-vous que j'en ai de 400 de population et 500 ou 600,
j'en ai au moins 20. On a un peu le même problème. Qu'est-ce qu'on
va faire? On va perdre. Entre autres, j'en connais un qui a une fabrique de
meubles, qui fait un gros chiffre d'affaires et il n'y a plus de taxe sur les
meubles, alors, il se demande le retour de la axe... Je lui ai dit: Attendez et
on va voir. Comme vous le dites tout à l'heure vous avez un peu
répondu à la question à la fin de l'année,
la municipalité qui a été lésée, qui a perdu
un certain montant d'argent pourrait revenir après l'année
écoulée.
M. Parizeau: Une fois que l'année sera terminée,
qu'on saura combien a été versé. Parce qu'au
départ, il s'agirait de faire des projections des ventes de magasins
généraux dans les villages, ce qui n'est pas faisable.
M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata): Oui.
M. Parizeau: Vous voyez le nombre d'inspecteurs qu'il faudrait
envoyer dans les livres, non seulement pour apprécier la
répartition de leur chiffre de vente entre les produits taxés et
les produits non taxés, mais les projections de ventes que le magasin
pense faire dans le courant de l'année. Amenez-moi jamais des solutions
qui impliquent le recrutement de 1000 personnes de plus au ministère du
Revenu. A la fin de l'année, cela est autre chose.
M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata):
D'accord, merci.
Le Président (M. Gendron): M. le député
d'Outremont.
M. Raynauld: M. le Président, cela pourrait s'appeler
simplement une espèce de correctif qui pourrait être
apporté une fois. A la fin d'une année, on dit: On fait une
transition. Je pense qu'il ne serait pas nécessaire de changer ni la
base des calculs ni la répartition, mais on dit: A cause de ce
changement, on apporte une mesure une fois qui pourrait être faite
après coup. Peut-être qu'à ce moment-là ce ne serait
pas si difficile que cela de le faire, mais appeler cela une mesure transitoire
ou une mesure de correction ad hoc, et si, effectivement, c'est avantageux,
à moi. il ne me parait pas évident que ce sera avantageux tant
que cela, cette histoire, cela va dépendre des situations et de toute
sortes de choses.
M. Parizeau: Et, d'autre part, de l'effort fiscal des
municipalités. C'est pour cela qu'il faut garder cela à la fin et
voir les résultats que cela a donné. Il ne faut pas oublier qu'il
y a quatre municipalités au Québec qui, à cause de la taxe
de vente, n'ont pas de taxe foncière du tout, zéro. Dans ces
quatres cas, je ne pense pas qu'on veuille nécessairement bouger.
M. Raynauld: Oui, qu'on veuille nécessairement
compenser.
M. Parizeau: Dans d'autres cas, cela peut être tout
à fait différent. Il peut y avoir un effort fiscal tout à
fait raisonnable sur le plan de la taxe foncière et, effectivement, pour
une raison qu'on mentionnait tout à l'heure, y avoir un trou dans leur
budget. Vers la fin de l'année, on examinera cela, je n'ai pas
d'objection à faire cela, d'autant plus qu'à la fin de
l'année, c'est facile à faire. Au début de l'année,
cela n'a quasiment pas de bon sens. Il faudrait envoyer, je ne sais pas combien
de gens dans le champ pour faire le tour des magasins.
M. Raynauld: C'est cela.
Le Président (M. Jolivet): L'article 1 est-il
adopté?
M. Raynauld: Adopté.
Le Président (M. Jolivet): L'article 2 est-il
adopté?
M. Raynauld: Adopté.
Le Président (M. Jolivet): L'article 3 est-il
adopté?
M. Raynauld: Adopté.
Le Président (M. Jolivet): Le projet de loi no 61
étant adopté au complet, sans amendement, nous ajournons sine
die.
Fin de la séance à 10 h 52