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Version finale

30e législature, 4e session
(16 mars 1976 au 18 octobre 1976)

Le jeudi 1 avril 1976 - Vol. 17 N° 13

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude des crédits du ministère du Revenu


Journal des débats

 

Commission permanente des finances,

des comptes publics et du revenu

Etude des crédits du ministère du Revenu

Séance du 1er avril 1976

(Dix heures quarante minutes)

M. Bédard, Chicoutimi (président de la commission permanente des finances, des comptes publics et du revenu): A l'ordre, messieurs!

La commission se réunit afin d'étudier les crédits du ministère du Revenu, notamment ses travaux. L'honorable ministre du Revenu.

L'effectif du ministère

M. Quenneville: M. le Président, ce matin, on voudrait quand même compléter dès le départ la réponse que nous avions commencé à donner à la question du chef de l'Opposition hier soir quant aux causes des difficultés de recrutement à l'intérieur du ministère.

Pour en arriver là, je pense qu'il y aurait lieu de faire un résumé de tous les arguments qui nous ont amenés à cette question de recrutement.

M. Morin: M. le Président, je ne veux pas interrompre le ministre, sauf pour lui demander, pendant que nous discutons de cela, s'il pourrait nous communiquer la fameuse directive que nous lui avons demandée hier, ce qui nous permettrait de l'examiner pendant qu'on discute.

M. Quenneville: Si vous permettez, on va vous la remettre tantôt. J'arrive justement à ce point dans une minute.

M. Morin: Ah bon! d'accord. C'est bien, merci.

M. Quenneville: Je pense bien que, jusqu'ici, il faut admettre que les débats se sont sûrement déroulés d'une façon sereine et on a recherché une certaine objectivité de part et d'autre pour en arriver à la meilleure recommandation dans l'intérêt du ministère et des contribuables de la province de Québec.

Toutefois, en ce qui touche l'objectivité, j'aurais une remarque à faire au départ. J'entretiens des doutes, ou des réserves à tout le moins, sur l'approche de l'Opposition en se basant sur le rapport du Vérificateur général. Il faut noter que ce rapport concerne les problèmes jusqu'en mars 1975, alors qu'effectivement la discussion des crédits pour 1976/77 devrait, à mon point de vue, plutôt avoir comme prémisses, comme point de départ, les faits tels qu'ils sont aujourd'hui. Je pensé bien que le rapport du Vérificateur général, tel que déposé il y a quelques jours et sur lequel s'est basé le chef de l'Opposition pour apporter certains arguments, ne serait sûrement pas le même pour 1975, c'est-à-dire l'année d'imposition 1975 ou l'année d'activités 1975, d'autant plus que ce même rapport du Vérificateur général n'est pas nuancé comme la note que le même Vérificateur général m'a envoyée au sujet des mêmes activités. Vous me permettrez ici d'apporter un correctif quant à la conclusion, comme je le disais tantôt, qui me semble passablement atténuée. La note date du 27 janvier 1976, elle m'était adressée. Je la lis rapidement. "Les divers commentaires soulevés tout au long du présent rapport gravitent à peu près tous autour d'un dénominateur commun, soit une pénurie de personnel et surtout de personnel qualifié dans tous les secteurs fiscaux du ministère, à partir de celui de la cotisation jusqu'à la division recouvrement en passant par le service du contrôle de la qualité, vérification interne et externe, révision, imposition et délinquance. "Ces remarques relatives au personnel reviennent annuellement dans nos rapports de vérification depuis 1972/73. Le contenu de lettres et mémoires dont nous avons pris connaissance, transmis depuis 1973 par le ministère à la Commission de la fonction publique, pour tenter de remédier à ce problème de personnel, entérine avec à-propos nos constatations à ce sujet lors de vérifications. Nous sommes bien conscients que les solutions à ce problème ne dépendent pas uniquement de votre ministère. Il est évident que les organismes gouvernementaux responsables de l'approbation des effectifs devront apporter une attention particulière à l'étude des requêtes du ministère du Revenu quant à des classements spécifiques de son personnel avec rémunération particulière tout en évaluant la rentabilité financière et physique de telles requêtes. "Nous sommes d'avis que le ministère doit pouvoir compter sur des normes pécuniaires particulières pour favoriser le recrutement d'effectifs qualifiés et leur rétention pour concurrencer les véritables compétiteurs et atteindre un degré d'efficacité normalement requis dans tous les secteurs. "Un personnel qualifié très restreint est à la base de plusieurs déficiences constatées au cours de nos vérifications. "Compte tenu de l'importance du problème et de l'urgence d'y remédier, car, lit-on dans un document sus-mentionné, "non seulement la situation continue à se détériorer mais elle se rapproche du point critique", nous vous encourageons à poursuivre vos démarches auprès des organismes responsables aux fins d'en arriver à un règlement satisfaisant pour tous et ainsi permettre d'une part au gouvernement du Québec d'accroître ses ressources financières et de minimiser les pertes de revenu et d'autre part au ministère d'opérer avec efficacité et d'accorder au public les services dont il est en droit de s'attendre".

Je pense que ça nuance quand même jusqu'à un certain point ce qui apparaît dans le rapport officiel du Vérificateur général.

M. Morin: M. le Président, est-ce que je pourrais demander au ministre s'il voudrait bien déposer une copie de cette lettre pour consultation par les autres membres?

M. Quenneville: Je n'ai pas d'objection, M. le Président, à déposer cette lettre.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): La lettre sera déposée.

M. Quenneville: Je pense quand même qu'il faudrait s'en remettre aux chiffres actuels, comme je le disais tantôt, et il est malheureux que ce rapport sur lequel se base le chef de l'Opposition pour apporter des suggestions, à tout le moins, ne tienne pas compte des efforts qui ont été déployés par le ministère pour améliorer la situation à la suite d'une recommandation du Vérificateur général.

Ce ne sont non seulement des efforts, mais des résultats obtenus depuis mars 1975.

Encore une fois, je pense qu'il faut, sans trop se louanger, dire qu'il y a eu des résultats extraordinaires. C'est ce qui fait que, naturellement, à la lumière de ces résultats obtenus, comme on le disait hier, nous sommes prêts à prouver, avec chiffres et faits à l'appui, que la situation n'est plus la même. Il y a déjà eu une amélioration, on l'a signalé hier, en soulignant le nombre de demandes de la part des cégépiens, ce qui est, à notre avis, un fait nouveau qui prouve hors de tout doute que l'échelonnement des causes semble vouloir différer des causes de difficultés de recrutement, semble vouloir changer et que la question salariale reste quand même en ligne de compte, mais elle n'est pas la seule. A ce sujet, nous donnerons tantôt des faits nouveaux et les raisons qui expliquent à mon avis, toute cette question de difficultés de recrutement.

Je voudrais aussi, ce matin, comme me l'a demandé le premier ministre... le chef de l'Opposition, pardon, déposer...

Non, non!

M. Morin: Je n'ai pas d'objection. Par respect pour le déroulement historique.

M. Quenneville: Non, l'histoire change, vous savez.

Nous sommes prêts à déposer la directive. Je pense que les articles de journaux, cités hier par le chef de l'Opposition, ont donné un ton péjoratif à cette directive. C'est la raison pour laquelle je voudrais, ce matin, déposer cette directive, mais accompagnée de précisions pour en donner le sens exact. Nous en ferons la lecture pour que ce soit inscrit au journal des Débats.

En même temps, pour répondre à une des questions posées par le chef de l'Opposition, hier, nous sommes prêts à déposer également les raisons pour lesquelles il y a eu effectivement des départs. J'ai ici un tableau comparatif expliquant les raisons pour lesquelles il y a eu des départs au ministère.

Nous verrons à ce moment-là que la question salariale n'est peut-être pas en tête de liste. Elle apparaît nécessairement et je peux vous dire que, de plus en plus, elle passe non seulement au deuxième ou au troisième rang, mais elle se noie dans les autres causes qui peuvent expliquer les départs à notre ministère et ce déroulement sur lequel nous sommes d'accord pour dire qu'il est important dans notre ministère.

Si vous me permettez, avant d'aller plus loin, je vais faire lecture de la directive. Est-ce qu'on peut la déposer? Nous allons, au moment de la lecture, déposer le document en question à tous les membres de la commission. Je demanderai au sous-ministre, par la suite, d'apporter peut-être certains éclaircissements relatifs à cette directive qui a été mal interprétée.

M. Morin: Je voudrais, M. le Président, remercier le ministre de son attitude extrêmement ouverte. Cela ne nous empêchera pas, éventuellement, de tenter d'aller au fond des problèmes qu'il a décrits, mais je trouve que, cette année — je l'en félicite — il prend une attitude beaucoup plus ouverte que par le passé. Le dépôt de ce document qui aurait pu être rendu public avant en est une preuve, je pense.

M. Quenneville: Je remercie le chef de l'Opposition. On va arrêter naturellement de...

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): Avant de continuer, je voudrais signaler les changements suivants au niveau des membres de la commission: M. Bacon (fois-Rivières) est remplacé par M. Carpentier (Laviolette), M. Vallières (Richmond) est remplacé par M. Guy Leduc (Taillon).

M. Quenneville: M. le Président, je remercie le chef de l'Opposition de cette remarque. Je peux lui dire qu'on tentera de la justifier jusqu'à la fin des débats sur les crédits du ministère. Il s'agit d'une directive interne de l'administration qui a été signifiée par le sous-ministre en titre, M. Gau-vin, en date du 1er juin 1975. "Exposé. 1. Introduction.

La loi prévoit que les avis d'opposition doivent être signifiés au sous-ministre du Revenu par la poste, sous pli recommandé, dans les 90 jours de la date d'expédition par la poste de l'avis de cotisation.

La loi stipule également que, dès réception de l'avis d'opposition, le ministre doit avec toute la diligence possible examiner de nouveau la cotisation et annuler, ratifier ou modifier cette dernière ou établir une nouvelle cotisation et faire connaître sa décision au contribuable par avis transmis par la poste sous pli recommandé. 2. Enoncé de la politique.

Prendre les mesures nécessaires pour minimiser le nombre d'avis d'opposition.

Faire preuve de diligence et d'équité envers tous les mandataires et les contribuables qui s'opposent à une cotisation et examiner, d'une façon objective, tous les avis d'opposition signifiés au ministre, non dans le but de justifier les cotisations telles qu'elles ont été établies, mais bien de déterminer ce qu'elles devraient être selon les dispositions des différentes lois fiscales.

Etre expéditif dans le traitement de ces avis d'opposition, éviter l'accumulation des dossiers et favoriser la perception des comptes relatifs aux avis de cotisation émis.

"Donner plus d'autonomie aux bureaux régionaux de la vérification, en leur déléguant l'entière responsabilité du règlement de certains dossiers. 3. Mesures préventives:

Afin de minimiser le nombre d'avis d'opposition signifiés au ministre, il convient que les services concernés s'assurent: —de la qualité des vérifications effectuées; —que des cotisations soient établies, dans la mesure du possible, sur les faits réels, et appuyés par des pièces justificatives; — que les contribuables ou mandataires soient informés de façon précise de tout changement apporté à une cotisation; —qu'un projet de cotisation, avec explications pertinentes des changements à apporter, soit soumis au contribuable ou mandataire, à la suite d'une vérification; —qu'un délai soit accordé au contribuable ou mandataire, pour lui permettre de faire l'étude du projet de cotisation et de faire, s'il y a lieu, toute représentation relative au projet; —qu'une mémoire d'entrevue ou d'appel téléphonique (lorsque non traité dans le rapport du vérificateur), concernant toute représentation faite à la suite d'un projet de cotisation soumis, soit complété pour le dossier; —qu'il y ait une distribution rationnelle des formules d'avis d'opposition et que le contribuable ou mandataire ait reçu au préalable toutes les informations nécessaires; —qu'une attention soutenue soit apportée à la révision technique des dossiers de vérification.

Lorsqu'un contribuable ou mandataire manifeste le désir de signifier un avis d'opposition, l'employé à qui il s'adresse doit le diriger vers le service d'où émane la cotisation. Ce service doit alors analyser les raisons invoquées et tenter de solutionner, si possible, le cas avant la signification de l'avis d'opposition. 4. Règles à suivre pour le traitement des avis d'opposition: a) Encourager les bureaux régionaux à communiquer avec les opposants, afin d'obtenir, dans la mesure du possible, un désistement de façon à accélérer le processus de règlement des dossiers, et limiter les requêtes en appel. Lorsque jugé nécessaire, il est recommandé de rencontrer l'opposant ou son représentant dans la mesure où il est physiquement possible de le faire.

Il est très important que toutes les données du cas bien établies et appréciées de façon absolument impartiale et que toute la documentation pertinente à la justification de la cotisation soit conservée au dossier. b)Confier aux bureaux régionaux de la vérification, la responsabilité du règlement de dossiers impliquant un montant de moins de $2500 d'impôt par année d'imposition ou de moins de $5000 de taxe à la consommation par période de douze mois excluant les intérêts et les peines. c) Agir avec célérité et tenir compte de l'aspect rendement, lors de l'examen des dossiers impliquant des montants peu élevés tout en observant l'importance des principes en jeu. d) Dans la mesure du possible, vérifier les dossiers dont les points en litige sont de même nature. En conséquence, l'ordre numérique établi ne constitue pas une règle stricte à suivre dans le traitement des avis d'opposition. e) Sur réception des dossiers au bureau régional, sélectionner et traiter en priorité ceux qui peuvent être réglés rapidement. f)Au service de la révison des bureaux régionaux de la vérification, donner priorité à la révision des dossiers d'opposition. g) Suivre la procédure particulière établie, de façon à accélérer le processus d'émission des avis de nouvelles cotisations à la suite d'une opposition. h) Confier au service d'où émanent les cotisations, pour examen sommaire, les oppositions qui font l'objet d'une signification hors délai afin de s'assurer que les cotisations en question sont conformes aux prescriptions de la loi et ne renferment pas d'erreurs flagrantes. Ces cas n'étant pas reconnus comme une opposition officielle, ils doivent être traités comme toute autre représentation. i) Les cas suivants doivent être soumis, par le bureau régional de la vérification, au service général de la législation: —les cas impliquant un montant de $2500 ou plus d'impôt par année d'imposition ou $5000 ou plus de taxe à la consommation par période de douze mois, excluant les intérêts et les peines; —les cas où les points faisant l'objet du litige sont maintenus en tout ou en partie; —les cas où il y a lieu d'établir une nouvelle cotisation au-delà de la limite de quatre années; —tout cas jugé opportun par le bureau régional, à cause du principe en jeu, ou pour toute autre raison; —tout cas particulier requis selon les instructions du siège social du ministère; —dans les autres cas, le service général de la législation s'assure, périodiquement, du bien-fondé des décisions prises. j) Les cas où les points faisant l'objet du litige sont maintenus en tout ou en partie par le service général de la législation doivent être soumis au sous-ministre. 5. Avis d'opposition reçus ailleurs qu'au service général de la législation.

Ces avis d'opposition doivent être transmis immédiatement au service général de la législation (SGL) avec l'enveloppe d'envoi.

Vous me permettez de déposer le document?

M. Morin: Oui. Cela serait peut-être même utile que dans la transcription, on se serve du document, parce qu'à l'occasion, le ministre a sauté dans l'énumération des premièrement, deuxièmement, troisièmement. Il en a sauté de sorte que cela pourrait devenir inintelligible. Il y aurait peut-être lieu que le document soit transcrit tel quel.

M. Quenneville: Pas d'objection. Je m'excuse encore une fois...

M. Morin: Non. Je vous en prie. Ce n'est pas bien grave. C'est pour la compréhension.

M. Quenneville: Si vous permettez, seulement une minute.

M. Morin: Bien.

M. Quenneville: Tel que je l'annonçais tantôt, nous sommes prêts à déposer aussi en même temps un tableau qui explique les raisons des mouvements de personnel à l'intérieur du ministère. Je pense que c'est de nature à pouvoir... Et ce tableau, naturellement, comporte tous les chiffres concernant la période du 1er avril 1975 au 31 mars 1976.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): Le dépôt est accepté.

Le chef de l'Opposition.

M. Morin: Avant que le sous-ministre ne nous fasse ses commentaires sur la directive interne d'administration, n'y aurait-il pas lieu de revenir sur l'objet de nos débats, au moment où la commission s'est ajournée hier soir, c'est-à-dire sur la question du personnel? Par la suite, le sous-ministre pourrait commenter sa directive, sa circulaire, et nous pourrions — ce sera la question suivante — l'aborder après. C'est pour essayer d'avoir une certaine cohérence dans le déroulement des travaux; si le sous-ministre fait ses commentaires maintenant, il s'écoulerait un certain temps avant qu'on y vienne, parce que je voudrais terminer la question du personnel d'abord.

M. Quenneville: Nous sommes d'accord, M. le Président.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): Le chef de l'Opposition.

M. Morin: M. le Président, revenant sur la question des causes qui peuvent être à l'origine de cette situation chronique de roulement et de manque de personnel au ministère, j'aurais aimé demander au ministre s'il n'est pas d'avis que la différence de l'ordre de $4000, qui existe au départ des échelles provinciales et fédérales, n'est pas l'une des causes importantes de ces difficultés de recrutement que rencontre le ministère. Une telle différence n'est-elle pas vraiment d'une telle grandeur qu'elle est de nature, en fait, à décourager le jeune homme ou l'homme — puisqu'il s'agit des tout premiers grades, des tout premiers barreaux de l'échelle — à nuire à votre recrutement et à favoriser hautement le recrutement par les fédéraux? Je vois que, sur le document qu'on vient de nous donner, la question du meilleur salaire vient en tête de liste pour expliquer les démissions. Je viens de recevoir le document et je constate que l'entreprise privée, pour les agents vérificateurs — c'est bien ce que signifie A.V., en haut de la colonne — offrant de meilleurs salaires, constitue un motif dans 31 cas et le gouvernement fédéral dans 11 cas. Ensuite viennent des raisons de démission qui sont d'une autre nature et qui paraissent beaucoup moins importantes par le nom- bre. Est-ce que, justement, vos échelles de salaire — et on reviendra tout à l'heure à la question des nouvelles catégories dont le sous-ministre m'avait entretenu l'année dernière — n'expliquent pas, dans une large mesure, vos difficultés de recrutement ou les démissions?

M. Quenneville: M. le Président, je ferai remarquer au chef de l'Opposition que, depuis la question des négociations et les offres salariales nouvelles, comme on disait hier, il y a eu une augmentation du nombre de candidats au ministère. Je peux vous dire que ce tableau ne tient peut-être pas compte des modifications que les nouvelles échelles de salaires apportent.

M. Morin: Mais, est-ce que...

M. Quenneville: II y a des concours en marche aussi depuis ce temps, constamment.

M. Morin: Est-ce que vous êtes au courant des concours fédéraux et de l'afflux des candidats au niveau fédéral? Parce qu'avec de meilleurs salaires, le fédéral va peut-être se permettre de prendre les meilleurs candidats et de vous laisser les autres.

M. Quenneville: II y a d'autres facteurs qui entrent en ligne de compte et que nous tenterons d'expliquer.

M. Morin: Oui.

M. Quenneville: Je ne peux pas connaître le nombre de personnes qui vont au fédéral plutôt que de venir au Québec, mais, d'un autre côté, on sait une chose, c'est que, du côté des CEGEP, notre recrutement est sûrement valable; c'est possible également — c'est une présomption de ma part, parce que je ne suis pas du fédéral — que le fédéral ne recrute pas au niveau des CEGEP. C'est possible également qu'il y ait des politiques — pourrais-je dire — de ralentissement du recrutement au niveau fédéral. C'est une présomption de ma part, je ne suis pas du fédéral. Il ne faut pas prendre cela comme une réalité, une vérité.

M. Morin: Vous n'êtes pas au courant de ce qui s'y passe un peu dans vos contacts personnels avec vos collègues fédéraux. Ils doivent bien vous parler un peu.

M. Quenneville: Ce serait du ouï-dire quand même.

M. Morin: On n'est pas devant les tribunaux, M. le Président.

M. Quenneville: Non, mais, quand même, vous savez, on entend bien des choses et parfois la version d'une personne est tout à fait différente de la réalité. Je ne suis pas allé à la source.

M. Morin: Bon.

M. Quenneville: M. le Président, je pense bien que, même si on n'est pas devant les tribunaux, le chef de l'Opposition veut avoir la vérité.

M. Morin: Oui, c'est ce que je recherche avec votre aide.

M. Quenneville: Je regrette, mais je ne peux pas vous la donner parce que je ne suis pas allé à la source, mais il y a une chose certaine, comme on a dit hier, toutefois, c'est du côté des agents vérificateurs — d'ailleurs je le répète encore une fois — depuis que les conventions ont été signées, je crois que nous avons de meilleurs résultats et nous anticipons l'avenir avec un peu plus d'optimisme qu'autrefois. Mais il faut se rappeler quand même que les salaires peuvent influencer un candidat à choisir, par exemple, quand il vient sur le marché du travail, où il doit aller; mais il y a d'autres facteurs essentiels quand même qui doivent être soulignés quand il s'agit de se joindre au ministère du Revenu. Un ministère du Revenu a ses particularités parce qu'il transige constamment avec toute la population et aussi dans un degré de confiance qui doit être tout à fait respecté.

Ceci exige, de la part de nos employés, énormément de caution dans le sens que nous ne permettons pas à un employé d'avoir des emplois extérieurs si ces emplois sont incompatibles avec son travail — ce qu'on ne trouve pas dans l'entreprise privée et peut-être ailleurs également — et que les fonctions d'un vérificateur au ministère du Revenu exige qu'il soit itinérant, autrement dit qu'il passe la majeure partie de l'année à l'extérieur de sa famille, de son lieu familial. Ce sont des conditions de travail exigeantes, difficiles.

Egalement, on exige une compétence particulière, dans le sens que nous avons des lois complexes à administrer. On en a pas seulement une, mais plusieurs, des dizaines, comparativement au fédéral où il n'y a que la Loi de l'impôt sur le revenu. Chez nous, nous avons la Loi de l'impôt sur le revenu, les taxes à la consommation, etc., etc. Aussi, le bassin de recrutement à notre disposition n'est limité qu'à la province de Québec, tandis que le bassin de recrutement du fédéral est au niveau national.

M. Morin: Au niveau fédéral, vous voulez dire. M. Quenneville: Oui, au niveau fédéral. M. Morin: National, c'est Québec.

M. Quenneville: La remarque du député est quand même discutable. C'est peut-être fédéral.

Ce bassin de recrutement n'est pas du même ordre du tout. Tout ceci pour nous faire dire que nous recrutons des gens qui sont intéressés à la chose fiscale. Aussi, ils viennent chez nous, nous les engageons et, si vous remarquez le nombre de mutations que nous avons entre ministères, vous verrez qu'une fois entrés chez nous, constatant certaines choses, entre autres qu'au ministère du Revenu les gens travaillent et ça travaille dur, parce que c'est un secret de polichinelle — d'ailleurs, on en parlait hier — il manque du personnel, c'est évident, d'aucuns sont obligés de suppléer à la tâche, parce que nous ne choisissons pas notre clientèle, nous la subissons. Les 3 millions de contribuables, les 120 000 employeurs, les 115 000 mandataires, et les 85 000 corporations doivent être servis également. Ceci exige de notre personnel énormément d'efforts soutenus.

Il y en a naturellement qui croient que, dans d'autres secteurs, la pression n'est peut-être pas aussi forte. D'ailleurs, le Protecteur du citoyen le mentionnait dans son rapport. Quand je lis, à la page 105 de son sixième rapport annuel en 1974: "Quand on constate l'ordre et la discipline qui, en général, caractérise l'organisation des services de ce ministère, que favorisent mieux qu'ailleurs peut-être les habitudes de rigueur et de sévérité..." Nous exigeons énormément de notre personnel et tous n'ont pas la patience et les aptitudes pour supporter ça. Nous avons des personnes dans certains secteurs qui, après avoir oeuvré quelque temps, demandent des mutations à l'intérieur du ministère, parce que ça les rend nerveux, stressés, etc. Ce sont des conditions particulières qu'on retrouve dans un ministère comme le nôtre...

M. Morin: A l'intérieur du gouvernement, vous voulez dire.

M. Quenneville: A l'intérieur du gouvernement.

M. Morin: Pas à l'intérieur du ministère. M. Quenneville: Non, non!

M. Morin: Vous nous avez dit à l'intérieur du ministère...

M. Quenneville: Même à l'intérieur du ministère, il y a des fonctions de nature telle qu'elles sont plus stressantes que d'autres. Dans ces secteurs, c'est là qu'on retrouve le manque de personnel dont nous avons besoin. Le marché du travail, souvent, ne nous donne pas ces personnes, parce que ce ne sont pas des personnes qui, par définition, sur papier, sont reconnues comme telles, parce que ce sont des aptitudes particulières qu'il leur faut. Je parle, par exemple, de recouvrement. Ce n'est pas nécessairement un professionnel de la vérification fiscale qui devient ipso facto un bon percepteur de taxes.

Ce n'est pas un agent vérificateur, qui, normalement, par définition, est un bon percepteur de taxes, mais c'est un type qui a des aptitudes particulières, une patience, une ténacité, une opiniâtreté qui ne doivent pas broncher.

A part cela, c'est difficile, parce qu'on transige avec des individus, des corpo ations et toutes sortes de contribuables et de mandataires pour extirper d'eux des sommes d'argent afin qu'ils puissent payer leurs impôts.

Ce n'est pas quelque chose que le marché du travail produit. Il faut recruter des gens du secteur,

des gens qui ont une expérience des affaires. Une fois entrés et affectés à ces tâches, il faut les développer, les stimuler, les piquer, les motiver.

Ce n'est pas comme engager un vérificateur dans un autre secteur qui n'est pas itinérant, par exemple. Le vérificateur qui laisse sa famille le lundi matin et qui revient le vendredi soir a une tâche plus difficile. Cela n'aide pas le recrutement.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): L'honorable chef de l'Opposition.

M. Morin: M. le Président, je voudrais qu'il soit clair, en partant, que le ministère a toute notre sympathie sur les difficultés qu'il peut rencontrer dans son recrutement. Que ce soit bien clair. Le sous-ministre a démontré ce que nous savions déjà et c'était bon qu'il le répète, sans doute, que le travail est extrêmement exigeant, que cela demande des aptitudes particulières comme la ténacité, la patience, j'ajouterais la discipline, certainement, dans un travail aussi méticuleux. Cela exige également une expérience des affaires; nous sommes tous d'accord là-dessus.

Mais justement, étant donné la nature du travail, est-ce qu'il n'y aurait pas lieu que vous ayez une échelle qui rémunérerait en conséquence les gens que vous désirez recruter? Etant donné que vous venez justement de faire la démonstration que c'est un travail particulièrement difficile, est-ce que ce n'est pas un argument de plus pour que le ministère voit à ce que ces échelles soient idoines, soient de nature à attirer les gens qui ont toutes ces qualités

M. Quenneville: M. le Président, nous sommes parfaitement d'accord sur l'augmentation, ou du moins une formule qui nous permette d'avoir beaucoup plus d'attrait, non seulement à l'embauchage, mais également une fois que ces gens sont engagés au ministère, qu'on puisse les maintenir en poste, qu'ils soient motivés à rester avec nous.

Ce sont les représentations que nous avons faites depuis déjà plusieurs mois; d'ailleurs, c'est antérieur à mon arrivée au ministère.

M. Morin: Cela fait même des années qu'on ne vous écoute pas, il semble, au gouvernement. C'est un de vos problèmes, si j'ai bien compris.

M. Quenneville: Je pense qu'il y a quand même eu un certain déblocage de ce côté-là et je peux vous dire que nous entendons revenir à la charge. Vous comprendrez facilement que, pendant la période de négocaiton, il nous est passablement difficile d'insister sur cet aspect.

M. Morin: Expliquez-moi cela.

M. Quenneville: Je pense que c'est assez facile à comprendre. Nous interviendrions à ce moment-là dans une période assez difficile. Mais quand même, nous avons fait des progrès de ce côté-là. Je peux vous dire une chose, c'est que nous n'entendons pas conserver ce caractère d'égalité avec les autres ministères. Nous entendons avoir des échelles de salaires qui, comme vous le proposez, soient réellement alléchantes pour les gens qui sont sur le marché du travail.

M. Morin: Ecoutez, cela fait deux ans qu'on en parle. Le ministre suggérait l'an dernier, et on y en avait déjà fait allusion l'année précédente, la création — je me souviens presque des termes exacts — d'une classe différente pour les agents de vérification; ils deviendraient, si le ministère de la Fonction publique était d'accord, naturellement, parce qu'il faut que vous convainquiez le ministère de la Fonction publique également, ce qu'on appelle des techniciens en vérification fiscale. Ceux-ci seraient évidemment mieux payés que les agents de vérification de l'aide sociale, étant donné la nature du travail et étant donné les prérequis, étant donné les qualités que cela exige.

Je voudrais vous demander si le ministre a vraiment insisté pour obtenir la création de cette nouvelle catégorie et comment il se fait que cela n'ait pas débouché. Cela fait deux ans qu'on en parle.

En attendant, vous avez moins de difficultés avec les cégépiens, cette année, c'est possible, mais il reste que pour quelqu'un qui se trouve devant un choix entre un salaire de $8800 et de $12 800, c'est-à-dire une différence de $4000 — elle est de l'ordre de $4000, au départ — le choix est vite fait.

M. Quenneville: M. le Président, tantôt j'ai donné quelques exigences particulières que le ministère du Revenu demande à ses employés. C'était pour expliquer les difficultés de recrutement. Conscients de tout cela depuis bien longtemps, même avant qu'on accorde tant d'importance à ce problème, dans les commissions parlementaires, à l'étude des crédits du ministère du Revenu, les demandes avaient été faites. C'est évident que nous sommes conscients des problèmes que nous avons à envisager au ministère et nous essayons de prendre les moyens que nous avons à notre disposition pour pouvoir les corriger. Mais, nous avons réussi. Tranquillement, nous réussissons, peut-être pas toujours exactement comme on le désirerait, mais, d'un autre côté, on y va notre petit chemin et on essaie de réussir le plus possible dans nos démarches.

Par exemple, le corps des agents de recouvrement a été accepté au sein du ministère du Revenu. Les échelles de salaires sont présentement en voie d'être déterminées. Ce point était en discussion depuis octobre 1974. La même chose, quant aux techniciens en vérification fiscale, les professionnels de la vérification fiscale, nos demandes sont faites depuis octobre 1974, suivant un plan qui est à l'étude depuis ce temps. Là-dessus, on n'a pas eu beaucoup de résultats tangibles.

M. Morin: C'est ce que vous faites à la fonction publique.

M. Quenneville: Auprès de la fonction publique. Mais nous avons réussi, quand même, auprès de la fonction publique et auprès des autres organismes à avoir le corps des agents de recouvrement. Les autres suivront. Quand? Les pressions se font régulièrement. D'ailleurs, je crois bien qu'on ne lâche pas. Mais, chaque chose en son temps.

M. Morin: Chaque chose en son temps, pourvu que ce ne soit pas trop en retard.

M. Quenneville: C'est cela, je ne parle pas de mon temps, je parle du temps des autres.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): Le député d'Abitibi-Ouest.

M. Boutin: Est-ce qu'on a fini la question du personnel?

M. Morin: Pas encore.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): Sur la même question, peut-être que le ministre a quelque chose à ajouter.

M. Quenneville: Je pense bien, comme on vient de le souligner, qu'il y a eu quand même une amélioration. Nous espérons, d'ici quelques mois, obtenir le même résultat au niveau d'autres catégories d'employés, de fonctionnaires, à l'intérieur du ministère. Je pense qu'il y a déjà eu passablement de chemin de fait. Vous pouvez être sûrs que nous allons continuer nos représentations auprès de la fonction publique. Il semble qu'on ait quand même une meilleure écoute depuis quelques mois.

M. Morin: Je commence à le souhaiter vivement, M. le ministre, parce que cela fait cinq ans que cela dure. Depuis tout de même cinq ans, cette situation s'éternise. Le résultat, c'est qu'évidemment le système de perception n'est peut-être pas tout ce qu'il devrait être. Je commence à trouver, personnellement, que d'une année à l'autre, on nous sort évidemment beaucoup de bonnes intentions, mais cela n'a pas l'air d'aboutir.

J'aimerais peut-être poser une question, pour compléter mes renseignements, au sujet de cette nouvelle catégorie de techniciens en vérification fiscale que vous avez proposée à la fonction publique. Est-ce que je peux vous demander si vous avez proposé la création de cette catégorie, en y attachant une échelle de salaires idoine, ou bien si vous avez simplement, pour l'instant, proposé la création du poste?

M. Quenneville: J'ai proposé la création du corps particulier, en premier lieu.

M. Morin: Corps particulier.

M. Quenneville: C'est la première étape.

M. Morin: Etes-vous en mesure d'expliquer la différence que cela ferait au point de vue de la rémunération?

M. Quenneville: Bien, si c'est un nouveau corps, c'est évident que, quand on a fait la demande en 1974, si on avait déterminé des échelles dans le temps, il faudrait les réviser quand même à l'heure actuelle.

M. Morin: J'imagine, étant donné que la décision ne se prend pas.

M. Quenneville: C'est juste. Lorsque la décision sera prise relativement au corps particulier, c'est là qu'on examinera la situation, parce que tout dépend naturellement du marché. Quand on voit, par exemple, du côté des agents de recouvrement où il va nous falloir combler des postes, ce n'est pas qu'on n'ait pas de personnes en poste présentement, mais peut-être ne se qualifieront-elles pas dans le nouveau corps. Il se peut qu'on ait à recruter quelque 130 agents, n'est-ce-pas? Cela ne veut pas dire qu'il y a des gens de l'intérieur qui peuvent se qualifier quand même. C'est évident. Il faudra combler 138 postes pour avoir la structure complète.

M. Morin: Dans le cas des agents de recouvrement, est-ce que vous pouvez me donner la date approximative où ce nouveau corps a été créé? C'est pendant l'année écoulée, n'est-ce-pas?

M. Quenneville: Oui. Cela devrait aboutir dans quelques semaines. Une semaine.

M. Morin: L'échelle de salaires n'est pas encore déterminée?

M. Quenneville: Elle n'est pas approuvée encore.

M. Morin: Mais vous avez déjà proposé une échelle de salaires pour ce corps? Vous attendez maintenant l'approbation définitive...

M. Quenneville: Des recommandations, c'est ça.

M. Morin: ... et de la création et du salaire à y attacher ou...

M. Quenneville: La création, c'est réglé.

M. Morin: Maintenant, vous en êtes au niveau du salaire. Je ne vous demande pas de chiffres, parce que, sans doute, ce renseignement est-il confidentiel, mais est-ce que cela fait une différence substantielle dans les échelles? Est-ce que c'est de nature à attirer, à vous rendre compétitifs par rapport, par exemple, à l'entreprise privée ou au gouvernement fédéral?

M. Quenneville: Ceci est à l'étude présentement. C'est pour cela qu'on dit que, dans une semaine, on devrait le savoir, possiblement une semaine; je présume que cela va être dans une semaine.

M. le Président, il est sûr et certain qu'au départ, nous souhaitons être compétitifs avec l'en-

treprise privée et le gouvernement fédéral quant à l'échelle de salaire. Autrement, nous revenons avec les mêmes difficultés. Je comprends facilement que, s'il n'y avait qu'une différence de $200 ou $300, à ce moment, on peut même dire qu'on est compétitif, parce qu'il y a d'autres facteurs qui entrent en ligne de compte, comme on le soulignait tantôt et qui, en fait, influencent considérablement le recrutement et le maintien en place des fonctionnaires qu'il faut engager.

Peut-être que je pourrais ajouter quelque chose ici. Les différences qu'il peut exister au niveau fédéral et au niveau du Québec, relativement au système salarial, c'est qu'au Québec, c'est un système de carrière, tandis qu'au fédéral, c'est un système de carrière également, mais plutôt basé sur le mérite. Cela fait une différence.

M. Morin: Pourriez-vous expliciter cela un peu?

M. Quenneville: C'est que le système de carrière devient un peu plus mathématique, dans le sens des années d'expérience, etc.

M. Morin: Au Québec. Tandis qu'au fédéral, on choisit davantage selon les aptitudes.

M. Quenneville: ... peut-être la qualité.

M. Morin: Quels avantages voyez-vous alors du côté québécois par rapport au côté fédéral? Cela vous paraît plus avantageux, ce système qu'on pratique ici, à Québec, ou moins avantageux?

M. Quenneville: Je crois que si le système au Québec existe comme tel, c'est parce que c'est ce que les gens ont voulu, parce que ce sont des conventions collectives signées.

M. Morin: Vous voulez dire qu'au Québec prévaut plutôt la notion d'ancienneté alors qu'à Ottawa prévaut davantage celle du mérite, de la qualité?

M. Quenneville: Cela peut vouloir dire cela.

M. Morin: Est-ce que c'est nécessairement un avantage du point de vue du ministère?

M. Quenneville: Pour d'aucuns qui viennent solliciter un emploi, sur une base comparative, à l'entrée, cela peut être différent.

M. Morin: Votre "d'aucuns" est un poème.

M. Quenneville: On fait ce qu'on peut. D'ailleurs, c'est assez rare de trouver de la poésie au ministère du Revenu. Si on peut le faire en poète...

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): ... les contribuables vont être d'accord sur la poésie!

Augmentations salariales

M. Morin: Avec votre permission, on pourrait peut-être jeter un coup d'oeil sur les augmentations salariales telles que proposées. Bien sûr, il y a une différence dans le nombre d'heures, qui passent de 32 1/2 à 35. Compte tenu de cela, on nous dit que les augmentations à l'échelle pour les agents vérificateurs, en particulier, varient de 26,4% au bas de l'échelle jusqu'à 36,5% en s'élevant dans l'échelle.

Pourriez-vous nous indiquer si ces pourcentages incluent les paiements forfaitaires effectués au cours des dernières années au titre de l'indexation des salaires?

M. Quenneville: Nous ne sommes réellement pas en mesure de répondre à cette question. Nous poumons peut-être nous informer et, au cours de la prochaine séance, si prochaine séance il y a, apporter certaines lumières sur cette question.

M. Morin: Je pourrais peut-être répondre moi-même à la question puisque le ministère n'est pas au courant.

M. Quenneville: M. le Président, si vous permettez, avant que le chef de l'Opposition n'aille plus loin. Je pense quand même que cette question relève beaucoup plus du ministère de la Fonction publique que du ministère du Revenu.

M. Morin: Oui, mais cela vous touche de très près.

M. Quenneville: Oui, mais on n'a pas le choix.

M. Morin: Mais je puis vous dire que ces augmentations, puisqu'elles viennent effectivement d'un autre ministère, incluent le forfaitaire de sorte que, dans votre colonne où vous indiquez des pourcentages d'augmentation, vous vous illusionnez grandement si vous pensez que vous offrez 26% d'augmentation par rapport au salaire réel versé l'année dernière. Ce n'est absolument pas de cet ordre et, forcément, l'échelle, si elle ne comporte que des augmentations réduites et qui ne tiennent pas compte du coût de la vie, des nouvelles conditions, j'ai bien l'impression que cela n'est pas de nature non plus à vous aider dans votre recrutement.

De toute façon, j'aimerais bien, pour la suite du débat, que le ministère s'enquière auprès des services appropriés pour découvrir quel est le pourcentage d'augmentation réel par rapport à l'année dernière, pour les agents vérificateurs. Je ne vous demanderai pas cela pour toutes les catégories d'employés de votre ministère, mais pour les agents vérificateurs, c'est-à-dire le corps no 209. Je pense que vous serez vous-même surpris de constater que le pourcentage d'augmentation est beaucoup moins élevé que ce qui semble être indiqué là.

Evidemment, ces taux d'augmentation sont le

reflet de la moyenne des augmentations accordées à l'ensemble des fonctionnaires, ni plus ni moins, de sorte que, là non plus, vous n'êtes pas en mesure de favoriser votre recrutement.

C'est la même chose que pour les autres catégories, c'est-à-dire qu'il n'y a aucune incitation particulière là-dedans au recrutement par votre ministère.

Je vois que le ministre indique qu'il est d'accord. J'aurais aimé avoir des commentaires là-dessus.

Qu'entendez-vous faire pour rectifier cela? Si vous restez dans cette espèce de sauce tomate qui s'applique à tous les fonctionnaires, j'ai l'impression que vous ne progresserez guère, non seulement dans votre recrutement, mais dans la permanence de vos effectifs.

M. Quenneville: Nous sommes d'accord sur l'absence d'attrait peut-être pour le ministère du Revenu des clauses salariales qui ont déjà été acceptées de part et d'autre.

Il n'en reste pas moins que si, en fait, on nous accorde les corps d'emploi tel que nous l'avons demandé, nous serons en mesure, à ce moment, de pouvoir apporter des corrections, des rectifications et peut-être d'avoir des salaires sûrement plus alléchants. Maintenant, pour le moment, c'est réellement anticipé.

M. Morin: Oui, mais, d'année en année — non, ce n'était pas vous l'année dernière — le ministre nous formule des voeux pieux sur ses intentions au cours de l'année qui vient, mais cela ne s'est pas amélioré et cela fait des années que cela dure.

Puis-je demander au ministre s'il va vraiment, avec la combativité que nous lui connaissons, ce dynamisme dont il sait faire preuve à l'occasion, qui foudroie la Chambre? Est-ce qu'il voudrait bien se grouiller cette année et aller chercher les échelles en question?

M. Quenneville: M. le Président, je ferai remarquer au chef de l'Opposition que le dynamisme, ce n'est pas nécessairement casser des vitres et la formule que nous employons est une formule, à mon avis, qui devrait donner d'excellents résultats. Le dynamisme ne se traduit pas seulement par des cris ou de grands élans oratoires. Je pense que, dans une administration, il y a quand même possibilité de faire preuve de dynamisme et d'obtenir des résultats, sans avoir à recourir à ces artifices. Et, M. le Président, je ne veux pas...

M. Morin: Je n'ai jamais demandé au ministre de casser des vitres.

M. Quenneville: Non, mais c'est...

M. Morin: Cela ne serait pas beaucoup son genre.

M. Quenneville: Non, je l'admets au départ, M. le Président...

M. Morin: Mais de faire preuve de ténacité et de parler fort à l'occasion, de savoir taper sur la table, un peu comme certains de ses collègues le font, cela ne lui nuirait pas.

M. Quenneville: Justement, M. le Président.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): A l'ordre! L'honorable ministre.

M. Quenneville: M. le Président, c'est justement ce que je disais tantôt, ce n'est pas le fait de parler fort, c'est d'arriver avec des arguments qui sont forts. C'est justement ce sur quoi nous nous basons pour continuer les revendications que nous faisons auprès des organismes centraux.

M. Morin: M. le Président, si j'en juge d'après le résultat que nous obtenons avec nos arguments qui en général sont forts auprès du gouvernement, ceux du ministre ne devraient pas avoir beaucoup plus de poids. J'ai l'impression que dans ce gouvernement règne le principe qu'on appelle en France la foire d'empoigne; ici, au Québec, on dit au plus fort la poche. J'ai l'impression que, si le ministre veut obtenir des résultats, il va être obligé de se comporter comme ses collègues et d'aller chercher ce qu'il lui faut; autrement, on va se retrouver devant le même problème l'année prochaine.

M. Quenneville: M. le Président, je dois dire au chef de l'Opposition que nous sommes parfaitement convaincus de tout ce qu'il dit. Et je veux dire que... Non, nous sommes convaincus et nous continuons nos efforts dans ce sens, peut-être, encore une fois, chacun a son style; je pense que nous sommes confiants de pouvoir obtenir des résultats.

M. Morin: Je souhaite qu'il en soit ainsi l'année prochaine, M. le ministre...

M. Quenneville: Ainsi soit-il.

M. Morin: Parce que cela serait navrant de se retrouver exactement devant la même situation.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): Est-ce que le sujet est épuisé, cette question, c'est-à-dire, étant donné que le député d'Abitibi-Ouest a demandé la parole...

M. Morin: Oui, seulement...

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi):... il me semble, sur une autre...

M. Morin: M. le Président, d'accord, je veux bien que vous donniez la parole à mon collègue d'Abitibi-Ouest, mais, s'il s'agit de la directive, s'il s'agit de questions sur la directive, j'entends y revenir le premier, si le député n'y a pas d'objection.

M. Boutin: Je veux simplement, M. le Président, continuer sur une question d'intérêt général. Je voudrais savoir du ministre du Revenu s'il a l'in-

tention d'ouvrir un bureau dans la région d'Abitibi-Témiscamingue.

Implantation de bureaux régionaux

M. Quenneville: Vous comprendrez facilement, M. le Président, pour répondre au député d'Abitibi-Ouest, que toute cette étude d'implantation de bureaux est basée sur les besoins créés dans les différentes régions. Ceci n'est sûrement pas impossible, surtout dans les régions excentriques, éloignées où, effectivement, nous avons de la difficulté à pouvoir rendre accessibles toutes les politiques et aussi les renseignements quant à ces mêmes politiques et je peux assurer le ministre, le député, pardon... Cela ne sera pas tellement long... C'est à l'étude actuellement et nous envisageons pouvoir créer davantage des bureaux de renseignements dans la province.

M. Boutin: De renseignements et non nécessairement de perception, si je comprends bien.

M. Quenneville: La politique du ministère veut que nous débutions avec un bureau de renseignements, quitte, par la suite, à ajouter des services, quant à la perception, au fur et à mesure...

M. Boutin: M. le Président, est-ce que c'est l'habitude d'ouvrir un bureau — vu que vous avez toujours des relations avec le ministre du Revenu fédéral — à un même endroit que le fédéral ou si cela n'a aucune importance?

M. Quenneville: Je ne crois pas qu'il y ait tellement d'importance à ce que le bureau du gouvernement provincial soit dans la même localité, si vous voulez, que celui du gouvernement fédéral.

M. Boutin: Est-ce que le ministère du Revenu entend suivre un peu la politique telle que présentée dans le discours inaugural sur la déconcentration administrative?

Quand je parle de déconcentration administrative, je ne veux pas parler de centralisation d'effectifs de bureaux, toujours au même endroit, dans une région, mais qui peut poursuivre le but pour lequel il a été créé de déconcentration, de permettre un meilleur éventail administratif dans toute cette région pour suppléer à l'économie déficiente.

M. Quenneville: M. le Président, c'est justement dans ce sens, en visant la déconcentration, que les efforts du ministère du Revenu se sont faits depuis quelques mois et nous entendons les poursuivre de façon plus accélérée.

M. Boutin: Si on regarde la formule de perception, M. le Président, il m'intéresserait de savoir si chaque rapport d'impôt est fait, lorsque vérifié par le ministère, et refait à la machine. J'imagine que par programmation on lui fournit les données et tout en ressort pour donner le rapport d'impôt. Est-ce que c'est exact? Alors, si c'est exact, qu'est-ce que le ministre pense de la formule des gens qui, de plus en plus — je ne sais pas si c'est exact, mais cela arrive assez régulièrement prennent leurs TP-4, TP-5 et toutes les pièces justificatives, attachent cela à leur rapport d'impôt et demandent au ministre du Revenu de le remplir lui-même?

M. Quenneville: II est possible qu'on ait des cas isolés, mais ce n'est pas un problème présentement.

M. Boutin: Dans le traitement des dossiers et des données du ministère, est-ce que les dossiers antérieurs microfilmés ont un double et en est-il de même pour tout ce que le ministre du Revenu possède? Supposons qu'il y ait un feu, par exemple, à un édifice du gouvernement.

M. Quenneville: Parlez-vous des fichiers mécanographiques ou fichiers physiques?

M. Boutin: N'importe lequel.

M. Quenneville: Je peux vous dire que les fichiers physiques sont conservés pour quelques années, mais, d'un autre côté, tout est dans la mécanographie et les fichiers mécanographiques sont nécessairement en double. C'est évident.

M. Boutin: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): L'honorable chef de l'Opppsition.

Directive concernant les avis d'opposition

M. Morin: M. le Président, je voudrais maintenant aborder la directive émise par le sous-ministre du Revenu le 1er juin 1975, portant le numéro SM-23. Je ne m'attacherai pas à tous les paragraphes de cette directive qui est longue de six pages, mais à quelques points en particulier.

Le premier point, c'est de demander au ministre ou au sous-ministre si cette circulaire, cette directive s'applique aussi bien aux compagnies qu'aux particuliers, aux avis d'opposition signifiés au ministre par les particuliers et les compagnies.

M. Quenneville: M. le Président, quand nous employons, au ministère, le mot "contribuable", un contribuable inclut une corporation aussi bien qu'un particulier.

M. Morin: C'est ce que je pensais. Je voulais que ce soit bien établi au départ. Maintenant, nous tournons vers la page 4 de la circulaire. Au paragraphe 4, sous-paragraphe a), le texte en est le suivant: "Encourager les bureaux régionaux à communiquer avec les opposants afin d'obtenir, dans la mesure du possible, un désistement de façon à accélérer le processus de règlement des dossiers, etc." Est-ce que le ministre pourrait nous expliquer, dans le concret, ce que signifie ce genre de communications entre les agents du ministère et un particulier?

Ai-je raison de croire qu'il s'agit là d'un type de pression morale, chiffrée, si on veut, sur le contribuable?

M. Quenneville: Premièrement, quand on lit une directive comme ça, il faut être dans le contexte et non pas être pris hors contexte. Les gens qui ont reçu cette directive savaient exactement ce qu'on voulait dire, et non pas quand ils ont lu les articles de journaux sur le sujet, quand on a voulu d'une façon subjective faire croire aux gens autre chose. Il faut lire la directive telle qu'elle est. Quand on parle de désistement, vous savez très bien ce qu'est un désistement au point de vue juridique, c'est un désistement qui n'est pas fait sous pression pour la bonne raison qu'il faut examiner les deux côtés de la médaille. D'ailleurs, le texte le dit bien, vous devez regarder chaque cas d'une façon objective et voir si la loi a été bien appliquée et si des erreurs sont faites, les corriger. Il peut y avoir désistement partiel, il peut y avoir désistement global, il peut y avoir désistement quand le contribuable est tout à fait satisfait de la cotisation après explication, il peut y avoir désistement global quand le ministère donne raison au contribuable. Il peut y avoir désistement partiel au cas où un contribuable admet qu'en partie sa cotisation est bonne et pour une autre partie n'est pas bonne. Il n'est pas d'accord, il se désiste pour une partie de la cotisation mais maintient l'autre partie, parce que le ministère reconnaît lui-même, de son côté, qu'il a erré dans une partie de la cotisation, que l'autre partie était correcte et que c'est reconnu par l'autre partie. Il y a une raison peut-être pour laquelle on emploie le mot "de désistement" dans ce contexte, on parle de communiquer avec le contribuable, parce qu'il y a des contribuables qui font des oppositions pour toutes sortes de raisons inimaginables et les motifs des oppositions ne sont pas toujours valides. C'est tellement vrai — on l'a constaté — nous avons des statistiques sur chacun des sujets en opposition d'une façon constante, que, toutes les semaines, nous avons un rapport là-dessus et nous constatons que des gens font des oppositions qui sont tout à fait en dehors du sujet.

Souvent, une communication, un appel téléphonique expliqueraient au contribuable ce qui en est et éviteraient tout un processus lourd et dispendieux, un processus de traitement d'un avis d'opposition et ce serait à la satisfaction du contribuable. Encore là, faut-il qu'il soit consentant; ce n'est pas quelque chose qu'on peut lui imposer de force. Nous avons, par exemple, constaté que plusieurs avis d'opposition étaient justifiés par le fait que le contribuable n'avait pas reçu suffisamment d'explication à la cotisation. La directive dit que dorénavant vous allez donner les explications avant que le contribuable puisse faire un avis d'opposition de façon à pouvoir expliquer le point de vue du ministère, chose qui ne se fait pas dans tous les cas. On a remarqué qu'à la suite d'une explication valable de la cotisation, le contribuable reconnaisait le bien-fondé.

C'est dans cette optique. Il ne faut pas pren- dre ce paragraphe 4a hors contexte de la directive, il faut le prendre dans son contexte total.

M. Morin: Mais le contexte total signifie également chez les contribuables modestes la peur du percepteur, tandis que, lorsque vous avez affaire à une compagnie ou à Lesage, Côté et compagnie, peut-être que le contexte est différent. Un agent, j'imagine, fera moins peur à Lesage et compagnie qu'à Lucien Bédard, de Jonquière.

M. Quenneville: C'est tout à fait une présomption. Si vous lisez l'article 3, qui précède l'article 4, on dit: Mesures préventives. On dit à notre personnel de voir à la qualité des vérifications effectuées; on lui dit: Que les cotisations soient établies correctement. Si on atteint cela, le paragraphe 4 n'a pratiquement plus sa raison d'être.

Si nous ne pouvons pas atteindre ce paragraphe 3 à 100%...

M. Morin: C'est d'accord.

M. Quenneville: ... il est possible qu'il y ait une potentialité des avis d'opposition qui seront encore sans fondement, sans motif raisonnable.

M. Morin: Mais là, je vais m'adresser au ministre, parce que le ministre se tient coi dans ce débat et, pourtant, il y a une question de psychologie à laquelle un médecin peut peut-être être plus sensible.

Je demande au ministre de se mettre à la place du contribuable modeste qui reçoit un appel téléphonique. C'est le ministère qui l'appelle. Est-ce que sa réaction va être la même que si c'est le bureau de Lesage, Côté et compagnie qui répond? Je le demande au ministre comme psychologue, en quelque sorte, avec le gros bon sens qui le caractérise.

M. Quenneville: M. le Président, je ferai remarquer une chose. C'est sûr et certain que la réaction ne sera pas la même. Elle ne sera pas la même non plus entre ce contribuable modeste dont parle le chef de l'Opposition et le chef de l'Opposition lui-même qui, en fait, comme avocat éminent...

M. Morin: Je suis un modeste contribuable.

M. Quenneville:: ... naturellement, n'aura sûrement pas la même réaction devant l'appel du ministère du Revenu. Si cela vaut naturellement pour...

M. Morin: Cela m'impressionne.

M. Quenneville: Oui, je l'espère bien. Cela vous impressionne juste ce qu'il faut à ce moment-là. Vous admettrez une chose, c'est que, si cela vaut pour un certain personnage que vous avez nommé tantôt, cela vaut en même temps pour tous les gens, les comptables, les avocats ou autres, c'est-à-dire les gens qui sont en mesure de recevoir ces appels d'une façon bien différente.

M. Morin: Mais voilà le problème. Si vous avez affaire à un contribuable ou à un avocat, ce n'est pas la même chose. Je crains que le contribuable modeste soit plus facile à impressionner — je me mets à sa place, je n'ai aucune difficulté à me mettre à sa place — est-ce qu'il ne sera pas plus impressionné que si c'était un gros bureau d'avocats ou même un simple avocat qui a le dossier en main?

M. Quenneville: M. le Président, étant donné que le chef de l'Opposition a parlé tout à l'heure du côté psychologique, je voudrais dire au chef de l'Opposition que, forcément, cet aspect qu'il m'attribue se trouve, jusqu'à un certain point, à rejoindre en même temps les autres fonctionnaires. Je peux vous dire qu'à ce moment-là le fonctionnaire qui entre en communication avec le contribuable tient compte de cet élément psychologique. C'est la raison pour laquelle, je pense bien, l'argument tient moins. On ménage davantage le contribuable modeste; on ne l'affronte pas de la même façon. Vous savez que nos fonctionnaires, on l'a dit tantôt...

M. Morin: Cela ouvre quand même la porte à des pressions et à l'arbitraire. Je ne dis pas que, dans tous les cas...

M. Quenneville: Cela pourrait ouvrir la porte, M. le Président, mais je veux vous dire que nous portons une attention bien particulière à cet aspect-là.

M. Morin: Ce n'est pas ce que le texte nous dit.

M. Quenneville: Ce que vous venez de dire.

M. Morin: Votre directive ne va pas dire: Allez-y à fond... j'en suis bien conscient.

M. Quenneville: Mais il faut que vous considériez que le personnel du ministère est un personnel qui oeuvre dans différents secteurs. Au niveau des oppositions, remarquez une chose, c'est le contribuable lui-même qui a décidé de faire opposition. Donc, il est conscient qu'il va sûrement avoir des tractations avec le ministère, tôt ou tard, et qu'il a déjà reçu son avis de cotisation. Il a déjà eu sa réaction personnelle envers le ministère. S'il oppose à la cotisation, c'est parce qu'il a eu une deuxième réaction. Ce serait normal qu'il s'attende à un appel téléphonique du ministère.

D'ailleurs, quand on retarde, Dieu sait que ces gens nous appellent! Ils nous disent: Comment se fait-i! que je n'aie pas eu de nouvelles? Il ne faut pas pousser. Il ne faut pas pousser. Le contribuable qui fait une opposition est conscient que le ministère, tôt ou tard, va communiquer avec lui. L'effet psychologique, c'est lui qui le crée et c'est lui qui, normalement, est souvent plus "agressif" que les employés du ministère qui essaient de faire leur devoir d'une façon consciencieuse.

M. Morin: Vous savez, le contribuable qui est aux prises avec le fisc est rarement aussi "agressif" que vous semblez le dire.

M. Quenneville: Vous croyez? Vous croyez?

M. Morin: Je ne dis pas qu'il n'y en a pas. Il y en a certainement...

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): Pas d'agressivité.

Une Voix: A l'ordre!

M. Morin: ... qui le sont, "agressifs", mais je parle de l'ensemble des citoyens. Je veux dire, Courteline a fait assez de pièces sur les démêlés des pauvres citoyens avec le fisc sans qu'on soit obligé d'insister, M. le Président.

M. Quenneville: En France, dans ma philosophie. Oui, justement, cela ne s'adressait pas au même ministère, j'en suis certain.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): Le député d'Abitibi-Ouest.

M. Boutin: Je voudrais savoir, M. le Président, dans le cas de fraude, est-ce que cela existe beaucoup qu'on établisse la fraude, ou qu'on fasse des enquêtes un peu poussées sur un contribuable? Est-ce que la majorité de ces cas vont toujours en cour? N'y a-t-il jamais de désistement ou si...

M. Quenneville: M. le Président, dans un cas de fraude fiscale ou d'évasion fiscale où il y a poursuite, soyez bien certain que le ministère est en mesure d'avoir la preuve nécessaire pour prouver son point devant les tribunaux.

M. Boutin: Ce que je voulais demander, c'est s'il y en a beaucoup qui se désistent avant d'aller devant les tribunaux, dans les cas de fraude ou s'ils y vont presque tout le temps.

M. Quenneville: II y en a qui se reconnaissent coupables. Il y a aussi le côté du désistement au niveau civil. Après avoir présenté une requête à la Cour provinciale, il y a plusieurs contribuables qui se désistent, avant de plaider. Je pourrais dire qu'à ce niveau la moyenne du ministère est très bonne, dans le sens que, dans les cas qui vont à la Cour provinciale, après opposition, le ministère gagne 80% de ses causes, soit par jugement ou par désistement de la part du contribuable.

M. Boutin: je veux en venir à un autre point sur la même question. Si je reviens à ce que les avis de cotisation soient, dans la mesure du possible, établis sur des faits réels et par des pièces justificatives dans le cas de fraude, c'est qu'on sait que, dans bien des cas, c'est assez difficile, pour des gens qui souvent n'ont peut-être pas tenu leur comptabilité ou autre chose, d'établir des faits exacts. Pour un avis de cotisation qui est assez réel, est-ce que, dans la majorité des cas, les avis de cotisation sont plus hauts que les règlements?

M. Quenneville: M. le Président, je crois, en fait, que, dans nos avis, dans les cas de fraude, nous considérons qu'il y a une cause valable, lorsque nous avons les pièces justificatives et l'évidence nécessaire pour prouver qu'il y a fraude. On ne présume pas la fraude. La fraude, il faut qu'elle soit prouvée. Le ministère s'en tient à récolter les éléments de preuve nécessaires pour produire, devant les tribunaux.

On peut procéder en dehors, si on ne réussit pas à prélever ces éléments de preuves. Le ministère peut prélever des cotisations, selon certaines normes comptables, mais nous ne considérons pas que ces causes sont des causes de fraude que nous pouvons porter devant les tribunaux.

Jusqu'à présent, j'ai l'expérience du ministère. A ma connaissance, nous n'avons perdu qu'une seule cause, en matière d'évasion fiscale, depuis les dix dernières années. Nous avons un record qui est assez bon et nous prenons toutes les précautions nécessaires pour ne pas prendre des mesures à l'encontre des contribuables de façon à entamer les poursuites seulement pour le plaisir de le faire au détriment de la personne humaine.

M. Boutin: Ma question n'était pas tout à fait celle-là. Je voulais savoir si les poursuites qu'on prend — je suis d'accord, on les gagne en majorité — on les gagne sur le taux ou le montant de la poursuite ou si, le règlement, en général, est toujours plus bas.

M. Quenneville: C'est toujours relatif. De bonne foi, on peut tenter de déterminer, le plus près possible, le montant de l'évasion fiscale, mais on ne sait jamais... le contribuable pourrait nous dire, en fait, si...

M. Boutin: Je vais y aller carrément...

M. Quenneville: ... nous n'avons pu établir le montant réel. Si, dans un cas de fraude, nous allons devant les tribunaux, il n'y a pas de doute que nous avons le fardeau de la preuve.

Je crois que dans une bonne partie de nos causes, peut-être au moins 50%, nous avons des plaidoyers de culpabilité. Alors, nous pouvons présumer que le contribuable était pour le moins satisfait des montants réclamés par le fisc.

M. Boutin: Peut-être pour que le ministre puisse rétablir certaines impressions vis-à-vis du ministère du Revenu, mais lorsqu'il y a fraude, on envoie des fois un avis de cotisation de 50% ou 100% plus élevé que la réalité.

M. Quenneville: Non, je dois corriger en disant que nous tentons d'établir le plus correctement possible — même dans des avis de cotisation où il y a défaut de la part du contribuable de maintenir des registres, où — le contribuable a détruit ses registres — des cotisations sur des bases qui se rapprochent le plus possible de la réalité par voie de comparaison avec d'autres commerces, par voie d'échantillonnage ou par voie de rensei- gnements pris dans les comptes de banque, dans les dépôts banquaires ou autres; mais il n'y a pas de tentative, de la part du ministère, de prélever des cotisations qui ne sont pas justifiées.

J'ajouterais, toutefois, qu'il est possible, et cela arrive à plusieurs occasions, que l'avis de cotisation, qui est une cotisation au civil, peut être différent du quantum de la poursuite. Il peut y avoir des ajustements purement techniques du point de vue civil. Il peut y avoir des choses, des faits qui ne sont pas frauduleux du tout, mais d'un autre côté, ce sont des choses qui ne sont pas permises en déduction du revenu, par exemple. Quand on dépose des plaintes et que nous allons en cour pour poursuivre, c'est possible que le quantum de la poursuite soit inférieur à la cotisation totale. De là à dire un à cinq, je crois que c'est un peu exagéré, parce que la fraude fiscale, il faut qu'elle soit prouvée. Or, on ne fait pas de poursuite d'après une présomption, comme cela a été dit au préalable.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): Le chef de l'Opposition.

M. Morin: Je voudrais revenir sur certains aspects de la directive, avant de passer au paragraphe c) sur lequel j'aurai également des questions, et demander quelques détails additionnels pour bien mesurer la portée de la technique de résiliation de désistement mise au point par le ministère. Lorsqu'un fonctionnaire communique avec un opposant, le fait-il exclusivement par téléphone ou rend-il visite au citoyen concerné?

M. Quenneville: Tout dépend naturellement du cas. Si c'est un cas d'exemption personnelle ou des choses comme cela, cela peut s'expliquer au téléphone; mais si cela demande une vérification des faits, c'est évident qu'il faut aller sur place. Si c'est une question de principe, alors la discussion peut se tenir au téléphone, au comptoir de renseignements, etc. Encore là, un grand nombre de cas aussi se règlent par le truchement d'agents, parce qu'on sait particulièrement que plusieurs contribuables, aujourd'hui, ont recours à des organismes pour faire compléter leur déclaration d'impôt, moyennant une somme. Ces organismes se rendent responsables pour faire des représentations auprès du ministère. Souvent, on transige avec des organismes, avec des représentants, des agents autorisés par le contribuable. Ce dernier se fait peut-être représenter par son comptable, parce que ce ne sont pas tous les avocats qui représentent les contribuables. Ces tractations peuvent se faire, tout dépend de la nature du cas, soit par téléphone ou de visu. Aussi, dans certains cas, cela demande une enquête tout à fait nouvelle pour bien établir les faits, de façon que ce ne soient pas seulement des ombres de faits. Car c'est très fondamental — d'ailleurs ma directive le dit — la première chose qui est bien importante dans l'étude d'un avis d'opposition, c'est de s'assurer des faits, après cela, on applique la loi sur les faits.

M. Morin: Bien. Est-ce que vous seriez en mesure de nous donner des chiffres sur le nombre de désistements abandonnés à la suite de l'application de cette directive?

M. Quenneville: Des retraits?

M. Morin: Des retraits, oui, des abandons, le nombre de désistements d'opposition. Est-ce que vous pourriez me donner la réponse?

M. Quenneville: On pourra donner la réponse au début de la prochaine séance.

M. Morin: Oui. J'aimerais aussi avoir un pourcentage par rapport au nombre total d'oppositions qui auraient été déposées auprès du ministère, non seulement en chiffres absolus, mais en pourcentage.

M. Quenneville: D'accord. Nous fournirons les chiffres.

M. Morin: Me tournant vers la critique qui s'est fait jour dans les journaux, je pense en particulier au journal La Presse, je me permets un ou deux passages parce qu'il me semble que certains de vos fonctionnaires — je ne sais pas lesquels — soient gênés par cette directive.

Je lis un ou deux passages particulièrement pertinents. "Cette politique gouvernementale, soutiennent des fonctionnaires — il s'agit de la politique des désistements — vise à éviter que les entreprises surtout disposant du personnel juridique aguerri contestent en cour une décision du ministère, ce qui aurait pour conséquence de créer des effets jurisprudentiels..." — et on ajoute — "... le ministère préfère donc négocier avec les intéressés des ententes qui satisfont toutes les parties". Cette situation était dénoncée par des fonctionnaires qui soutiennent que ce sont surtout les entreprises qui profitent de l'interprétation très large et de l'application discrétionnaire des lois auxquelles cette directive donne lieu.

Pourriez-vous commenter cela? Vous l'avez déjà fait en conférence de presse, mais cela n'avait pas eu l'air de convaincre les journalistes qui s'y trouvaient.

M. Quenneville: Pas du tout. D'ailleurs, les journalistes ne nous ont pas convaincus non plus que ceci est vrai. C'est du oui-dire. Nous avons au-delà de 4000 employés. Alors, certains peut-être se permettent certaines choses qu'ils ne doivent pas se permettre. Il y en a qui, naturellement, ne sont pas toujours d'accord sur les directives qu'ils reçoivent parce qu'ils n'ont pas l'envergure ou encore la perspective du ministère. Ils ne voient que leur petite boîte et il y en a qui fonctionnent avec des visières.

C'est tellement vrai que ces articles de journaux ont réussi à choquer d'une façon bien claire et nette les professionnels qui oeuvrent dans le secteur des oppositions. Et dans le contexte où ceci a pu être obtenu d'un fonctionnaire, je ne sais pas quelle était la poursuite des idées de ce fonc- tionnaire. Il avait peut-être des desseins autres que ceux que la directive visait.

Je peux vous dire que le personnel impliqué par cette directive, au niveau des oppositions, ce sont des professionnels et ils ont été choqués de voir que cette directive ait été mal interprétée et portée au yeux du public d'une façon subjective.

M. Morin: Je veux bien croire le sous-ministre...

M. Quenneville: Croyez-moi.

M. Morin: ... quoique, forcément, c'est seulement en entendant les intéressés aux-mêmes qu'on aurait une idée de ce qu'ils pensent vraiment, et il ne semble pas y avoir unanimité puisque je n'ai pas de raison particulière de mettre en doute ce qui a transpiré dans la Presse.

M. Quenneville: Cette directive a été émise le 1er juin 1975. Je n'ai pas eu de plaintes à ma connaissance et j'ai demandé à mes collaborateurs s'ils avaient eu des plaintes d'interprétation, des plaintes sur la politique à l'intérieur du ministère.

On m'a répondu que non, c'est clair pour les gens qui travaillent au ministère et qui veulent travailler pour le bien du ministère. Mais, l'article du journal est paru le 20 septembre 1975 et c'était la première...

M. Morin: II y en a eu d'autres le 1er octobre aussi.

M. Quenneville: Oui, mais parlons du premier article, celui du 20 septembre. C'est bizarre que certains qui n'étaient pas d'accord avec cette directive, présumément, aient trouvé une raison tout-à-fait immédiate, pourquoi ne l'avaient-ils pas lue? Je ne le sais pas. Mais d'un autre côté, cela a pris deux mois, trois mois avant que cela sorte. Quant aux réactions à l'intérieur du ministère, le personnel qui a lu cette directive n'a pas eu de réactions telles que celles que ont été décrites dans le journal. C'est pour cela que je dis: Les desseins de certains sont obscurs.

Maintenant, M. le Président, j'aimerais ajouter aussi, pour faire suite à la suggestion, du moins à la remarque du chef de l'Opposition, qu'il faudrait nécessairement entendre ces gens. Les gens qui ont déclaré de telles choses aux journalistes.

M. Morin: Cela serait évidemment très difficile.

M. Quenneville: Nous n'avons absolument aucune objection à les entendre. Nous l'aurions d'ailleurs souhaité; peut-être que nous aurions corrigé la situation avant que ces gens ne communiquent, peut-être, remarquez bien, avec le journaliste en question.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): L'honorable chef de l'opposition.

M. Morin: Maintenant, M. le Président, je n'en

crois pas moins qu'il y a là un malaise et qu'il y aurait peut-être lieu que le ministre fasse nuancer la directive de façon qu'il soit clair, non seulement au ministère à qui elle est adressée, mais qu'il soit clair à tout le monde, y compris aux contribuables, qu'il s'agit là de méthodes qui ne sont pas des méthodes de pression sur le contribuable. Cela serait important que ce soit dit un peu plus clairement, parce que la façon dont c'est exprimé, moi, en ce qui me concerne, en tout cas, j'avoue qu'en lisant le paragraphe 4a), ou encore en lisant le paragraphe c) — vers lequel je vais me tourner maintenant — je vous avoue que j'ai l'impression, même si j'étais fonctionnaire recevant cette directive, que cela ouvre la porte à l'arbitraire, que cela ouvre la porte à la discrétion, à une discrétion qui paraît assez peu limitée de la part des fonctionnaires qui ont à appliquer cette directive.

M. Quenneville: M. le Président, je ferai remarquer au chef de l'Opposition, que cette attitude, ou du moins cette volonté de vouloir nuancer, se base surtout sur le fait que le chef de l'Opposition n'a sûrement jamais été fonctionnaire à l'intérieur du ministère du Revenu et cela prend déjà une certaine compréhension des mécanismes à l'intérieur du ministère pour interpréter cette directive. Je pense bien que si nous étions allés plus loin, cela aurait été faire affront à l'intelligence de nos fonctionnaires. Je pense que pour tous ceux qui étaient à l'intérieur de la boîte, à moins de faire preuve de mauvaise volonté, c'était réellement clair et net.

M. Morin: Prenons quand même le paragraphe c... le sous-paragraphe c) du paragraphe 4. où on nous dit que le fonctionnaire, l'agent, doit agir avec célérité et tenir compte de l'aspect rendement.

Ecoutez, un fonctionnaire qui reçoit une telle directive peut être tenté de se dire: si le manque à gagner pour le ministère est faible, on me dit qu'il faut peut-être abandonner, parce que l'aspect rendement, c'est bien clair, cela signifie le montant que le ministère, que le fisc peut en retirer.

Donc, je suis porté à croire, en tout cas, que ce paragraphe aussi ouvre la porte à un certain arbitraire.

Parce que si le niveau du revenu du contribuable, si le manque à gagner est plus grand pour le ministère, alors, peut-être, ce cas-là sera-t-il traité de façon différente que si le manque à gagner est moindre. En tout cas, c'est comme cela qu'à première vue, je dois l'interpréter. Vous me dites que je ne fais pas partie du ministère, c'est exact. Avec les plans de carrières que vous avez et les salaires que vous offrez, j'hésiterais peut-être.

M. Quenneville: M. le Président, il faut dire là-dessus aussi que nous sommes passablement exigeants.

M. Morin: D'après le ministre qu'ils ont, M. le Président, je me pose quelques fois des questions; mais la question n'est pas là.

M. Quenneville: Non, je pense bien, M. le Président, que...

M. Morin: Parce que si on place le problème à ce niveau, je pense que j'ai été plus longtemps fonctionnaire que le ministre actuel. Peut-être pas au Revenu, mais dans d'autres ministères fédéraux, et, à vrai dire, où les exigences étaient certainement aussi élevées que dans les ministères québécois, M. le Président.

M. Quenneville: M. le Président, il faudrait faire remarquer que le chef de l'Opposition a quitté aussi.

M. Morin: Oui, bien sûr, parce que j'estimais qu'au niveau fédéral il était très difficile de faire valoir et de défendre les intérêts québécois. Si vous voulez tout savoir, c'est cela.

M. Quenneville: M. le Président, nous ne ferons pas d'enquête, alors...

M. Morin: Non, je sais bien que le ministre... M. Boutin: A l'ordre!

M. Morin: ...n'a pas à faire enquête, mais s'il veut faire enquête, il est le bienvenu. Je pourrai lui expliquer ce qu'il n'a peut-être pas encore compris, savoir que dans certains ministères fédéraux, on travaille systématiquement contre les intérêts du Québec et je pourrai en faire la preuve, qu'il s'agisse des Affaires extérieures, qu'il s'agisse d'assurance-chômage, qu'il s'agisse de plusieurs autres ministères.

M. Quenneville: M. le Président, je crois comprendre que le chef de l'Opposition...

M. Morin: Par mon expérience personnelle.

M. Quenneville: ...comprend surtout ce qu'il veut comprendre.

M. Morin: Oui. En tout cas, revenons donc à nos moutons, c'est le cas de le dire.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): Je crois que les membres de la commission sont d'accord qu'on s'éloigne sensiblement de la discussion des crédits.

M. Morin: Oui, vous avez raison, M. le Président.

M. Quenneville: M. le Président, au sujet de l'article 4 c).

M. Morin: Oui.

M. Quenneville: je vous réfère au problème dont on a parlé dès le commencement de cette commission où on avait un problème de personnel. Le ministère du Revenu est un ministère qui

se veut rentable. J'ai souligné également que nous recevions des avis d'opposition qui n'étaient pratiquement pas des avis d'opposition, que les gens, au lieu d'écrire une lettre, faisaient des avis d'opposition. Il y a des montants en cause de l'ordre de $5 souvent, des causes de $20. On en a aussi de $100 000 et de plusieurs centaines de milliers de dollars. Il est évident que quand nous n'avons pas tout le personnel qu'il faut, et que le problème en cause n'est pas un problème qui implique un principe de base, qui ne comporte que des faits ou des semblants de faits, alors il faut que l'élément rendement entre en ligne de compte. On dit tout simplement:Disposez des avis d'opposition avec célérité tout en usant de votre jugement et ne passez pas deux semaines sur un cas de $20 quand en réalité il y a d'autres cas, peut-être une centaine d'autres cas, dont les montants sont absolument substantiels. Alors, c'est cela qui est l'essence ici. Les gens qui lisent cela savent très bien ce que nous disons. Ils comprennent cela. C'esl la raison pour laquelle c'est une directive interne d'administration adressée aux gens qui s'y connaissent. Ils n'ont pas à se poser de questions. Ils savent ce qu'on veut dire en déclarant: Ne dépensez pas d'argent, au prix qu'on vous paie, au prix que tout coûte aujourd'hui, essayez donc de travailler sur des cas qui en valent la peine et non pas sur des cas qu'on pourrait laisser aller. On ne serait pas prêt à aller devant les tribunaux pour une cause de $20.

C'est cela qui est l'essence. Pour ne pas que ce soit interprété d'une façon autre, on dit: Agir avec célérité et tenir compte de l'aspect rendement lors de l'examen des dossiers impliquant des montants peu élevés: Vous n'avez pas tout dit. Je le dis ici: Des montants peu élevés, tout en observant l'importance des principes en jeu.

Je ne veux pas qu'on pèche encore et qu'on prenne des choses hors contexte et qu'on ne lise pas tout. Il ne faut pas s'arrêter à la virgule, il faut s'arrêter au point du paragraphe. C'est là qu'on retrouve toute l'essence.

M. Morin: M. le Président, est-ce que le ministre serait en mesure de nous donner également une statistique sur l'application de ce paragraphe c)? Est-ce qu'il est possible de déterminer par exemple le nombre de cas où le ministère a fermé des dossiers parce que l'aspect rendement paraissait négligeable?

M. Quenneville: M. le Président, ces statistiques ne sont pas tenues au ministère et on se fie au jugement des fonctionnaires. Nous ne sentons pas le besoin d'établir des statistiques à ce point de vue.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): Le chef de l'Opposition.

M. Morin: Je me réfère au paragraphe g) du même article 4, qui me semble également appeler des commentaires ou des questions. On nous dit que le fonctionnaire doit suivre la procédure parti- culière établie de façon à accélérer le processus d'émission des avis de nouvelles cotisations à la suite d'une opposition. Donc, il s'agit du cas, si j'ai bien compris, où, l'opposition ayant été jugée re-cevable, pour le tout ou en partie, vous émettez une nouvelle cotisation. Quelle est cette procédure particulière? Est-ce que ça se réfère à une autre directive ou à une coutume au sein du ministère? J'aimerais que le ministre ou le sous-ministre nous explique. C'est un point technique. Cette fois, je suis prêt à recevoir les explications du sous-ministre, mais, sur les questions de principe, j'aimerais beaucoup que ce soit le ministre qui réponde. Quand il s'agit vraiment d'un principe, c'est plutôt sa responsabilité à lui. Sur les questions techniques, je suis bien prêt à m'en remettre au sous-ministre.

M. Quenneville: II est évident que nous nous sommes aperçus que les règlements des oppositions prenaient trop de temps et on demande plus de célérité, que ce soit pour infirmer ou pour confirmer. Si on confirme une cotisation, il est évident qu'il n'y a pas de correction à faire à la cotisation. Donc, cette procédure ne s'applique pas. Cela s'applique seulement là où on infirme ou là où on corrige partiellement une cotisation. Ceci allait dans le flot des nouvelles cotisations et certains contribuables impliqués se plaignaient en disant: Vous nous avez donné raison, mais, d'un autre côté, les avis de nouvelles cotisations ne sortent pas. Pour accélérer tout ce processus, nous avons demandé à la direction générale des opérations de voir à traiter ces nouvelles cotisations à la lumière de la décision rendue dans l'opposition d'une façon encore plus accentuée, plus expédi-tive, afin d'éviter de s'entendre dire qu'on règle le principe mais que, d'un autre côté, on n'entend jamais parler de nous au point de vue de la correction. C'est dans le but d'expédier la procédure de nouvelle cotisation des oppositions qu'on fait référence à une procédure particulière qui se réfère strictement à l'expédition ou qui tend à rendre plus expéditif le système de nouvelles cotisations à la suite d'une opposition.

M. Morin: Maintenant, j'aimerais me tourner vers l'aspect statistique, l'aspect chiffré, une fois de plus. Est-ce que vous pourriez nous dire quel a été le nombre de retraits partiels de l'avis de cotisation? Pourriez-vous nous dire également quel a été le nombre de retraits totaux des avis de cotisation? Forcément, ce serait à la suite d'une opposition, parce que j'imagine que s'il n'y a pas d'opposition, il n'y a pas de retrait. Donc, à la suite d'une opposition, il y a eu des retraits partiels, il y a eu des retraits totaux, j'aimerais savoir combien et ce que ça signifie en pourcentage.

M. Quenneville: D'accord, M. le Président. Nous serons en mesure pour la prochaine séance de pouvoir fournir des chiffres, des statistiques à ce sujet.

M. Morin: Est-ce qu'il serait possible, dans le

cas des retraits totaux — surtout dans ce cas-là, les autres sont d'intérêt aussi, mais peut-être moindre — de régionaliser les données?

M. Quenneville: Non, M. le Président, nous regrettons infiniment, mais la demande du chef de l'Opposition, quant à ces chiffres régionalisés, nous ne sommes pas en mesure de les donner.

M. Morin: Admettons que si techniquement vous n'êtes pas en mesure, laissons tomber. Pourriez-vous, dans les petites statistiques ou les chiffres que vous allez me donner, faire une distinction entre les particuliers et les sociétés ou les compagnies? Cela me paraît plus important. Il me semble que vous devez être en mesure de faire cela.

M. Quenneville: M. le Président, malheureusement, il n'y a pas de distinction, tel que demandé par le chef de l'Opposition; ce n'est pas fait au niveau du ministère. Nous ne sommes pas en mesure de pouvoir faire la répartition entre les causes touchant les particuliers et les causes touchant les corporations.

M. Morin: Mais là, je m'étonne un peu, M. le Président. Est-ce que vous pourriez m'expliquer comment il se fait que vous ne fassiez pas une distinction, même administrativement, entre l'impôt sur le revenu des particuliers et l'impôt sur le bénéfice des sociétés?

M. Quenneville: On n'a pas de raison pour les tenir. On n'en fait pas de distinction. C'est la raison pour laquelle on n'en tient pas. On ne fait pas de distinction. C'est un cas, tout simplement. On ne fait pas de distinction entre les particuliers et les corporations. C'est ce qu'on essaie de nous reprocher.

M. Morin: Mais attention! Ne retournons pas le sens de ma question. Le sens de ma question, c'est que j'aimerais bien savoir combien il y a de retraits partiels ou totaux des avis de cotisation dans le cas des particuliers. J'aimerais le savoir aussi, pour comparer avec le cas des compagnies.

M. Quenneville: M. le Président, justement, on vient d'établir qu'il n'y en a pas de distinction. On ne voit réellement pas le besoin, pour nous, de faire des statistiques démontrant cette distinction. Ce sont tous des contribuables aux yeux du ministère.

M. Morin: Est-ce que vous seriez en mesure de chiffrer les montants, ce que cela signifie au point de vue montants précis, dans le cas des retraits partiels et dans le cas des retraits totaux? Vous n'êtes pas en mesure de chiffrer cela?

M. Quenneville: Non, M. le Président.

M. Morin: De sorte que vous ne savez même pas ce que représentent, comme manque à ga- gner, pour le ministère, les retraits partiels ou globaux des avis de cotisation? Vous m'étonnez beaucoup.

M. Quenneville: C'est dû ou ce n'est pas dû. Ce n'est pas un manque à gagner. Pas du tout.

M. Morin: Mais quand même, j'imagine que vous avez intérêt à savoir la différence entre l'avis initial et le retrait.

M. Quenneville: La préoccupation du ministère, c'est de voir à ce que les impôts dus soient payés et non pas aller chercher des impôts qui ne sont pas dus. Donc si, dans une opposition, on rétablit la situation d'une façon tout à fait équitable, tel que cela doit être, je crois qu'on n'a pas besoin de savoir combien d'impôts indus on a perçus.

M. Morin: M. le Président, le point sur lequel j'achoppe — et je tiens à le dire au ministre — c'est qu'il ne soit pas en mesure de nous dire: Dans les cas que nous avons eus de retraits partiels ou totaux, cela frappe tant de particuliers et tant de compagnies. Cela m'étonne un peu au départ.

M. Boutin: M. le Président, je crois qu'il faudrait quand même souligner qu'on mentionnait au début de cette séance qu'avec le manque de personnel, j'imagine que si on s'en va simplement sur un aspect statistique, il n'y aura plus personne pour recouvrer,

M. Quenneville: Je pense bien que le chef de l'Opposition aurait dû se satisfaire de l'explication qu'on a donnée à l'effet qu'il n'y a pas de distinction, aux yeux du ministère, entre les corporations et les particuliers. Ce sont tous des contribuables pour nous. Je vois mal pourquoi, à un moment donné, on ferait des distinctions dans les statistiques.

M. Morin: C'est à moi, en tant que représentant de l'Opposition, de savoir quand je suis satisfait des explications ou pas.

M. Quenneville: Ah oui! Cette année, je vais vous dire que vous êtes difficile.

M. Morin: Je pense que c'est mon rôle de l'être. Je pense que le ministre doit l'admettre. C'est à moi... C'est mon rôle de m'assurer, c'est même mon rôle constitutionnel de m'assurer que tout se passe normalement. Je pense que personne ne peut me faire grief d'essayer d'aller jusqu'au fond des choses.

M. Quenneville: On ne discute pas, M. le Président, du rôle; on appréhende un peu les excès.

M. Morin: Dans la sûreté, il n'y a pas d'excès. Tant que vous n'avez pas à me révéler des choses qui doivent rester confidentielles, ce qui est une autre affaire, quoique, là aussi, il peut y avoir excès dans la confidentialité, dans le nombre de

choses que vous considérez comme condidentielles... C'est une autre affaire.

M. Quenneville: M. le Président, je vous ferais remarquer...

M. Morin: De toute façon, c'est bien à moi de décider quand je suis satisfait d'une explication ou pas.

M. Quenneville: M. le Président, je comprends que, tantôt, le chef de l'Opposition a dit qu'il n'y a pas d'excès quand il s'agit de sécurité ou de sûreté. Cela vaut dans les deux sens. Il faudrait quand même qu'il comprenne, à un moment donné, qu'au point de vue de la confidentialité, on ne fait jamais trop.

M. Morin: Si, on peut faire trop. Dans la confidentialité, on peut...

M. Quenneville: Pas plus, naturellement, que dans la demande des statistiques.

M. Morin: Vous savez que, dans certains pays... Je rappelle au ministre, pour le cas où il ne le saurait pas, que, dans certains pays européens et en Suède en particulier, le montant payé par chaque contribuable et par chaque société commerciale est public. C'est public. Ce n'est pas affiché au coin des rues et c'est juste, mais vous pouvez toujours le savoir. Cela a des effets tout à fait bénéfiques sur le plan démocratique, parce que tout le monde sait exactement ce qui se passe, alors qu'à l'heure actuelle, dès qu'on tente de le savoir, même par catégorie, on a des difficultés et vous le savez. Quand on tente d'établir ce que cela rapporte au fisc par catégorie, on nous fait des chinoiseries. Je n'ai pas besoin de revenir sur les débats de l'année dernière.

M. Quenneville: M. le Président, il y a d'abord les statistiques fiscales pour donner certains renseignements. Deuxièmement, il faut dire aussi que cette façon de procéder, en Suède ou dans d'autres pays, n'est quand même pas une façon qui est adoptée ici, en Amérique du Nord.

M. Morin: Oui, mais vous n'avez rien réglé en disant cela.

M. Quenneville: Vous non plus, vous n'avez rien réglé.

M. Morin: Vous avez simplement constaté qu'il y a une différence.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): A l'ordre!

M. Quenneville: M. le Président, le chef de l'Opposition n'a rien réglé non plus en apportant cet exemple de la Suède.

M. Morin: J'estime qu'il va falloir en venir là un jour.

M. Boutin: Le jour où tout le monde va perdre la liberté, on va avoir la carte d'identité et tout le monde va avoir la police à ses trousses.

M. Morin: Voyons donc! Est-ce que le député est allé en Suède pour nous parler de perte de liberté en Suède? Non, mais on s'assure beaucoup plus que les gens paient leurs impôts aussi.

M. Boutin: C'est le plus haut taux de suicide au monde.

M. Quenneville: Je voudrais faire remarquer au chef de l'Opposition que, dans l'exposé liminaire, au début, nous avons justement insisté sur la confiance que nous faisons au public, étant donné que notre politique est basée sur l'autocoti-sation.

M. Morin: Oui, c'est une confiance dont il ne faut pas abuser non plus, quand on est le fisc, surtout à l'égard de certaines compagnies.

M. Quenneville: M. le Président, ceci n'élimine pas cette confiance, n'élimine pas les contrôles, les vérifications. Nous l'avons bien signalé, à ce moment.

M. Morin: Non. M. le Président, j'aimerais tout de même souligner au ministre que certains de ses fonctionnaires ont été suffisamment mal à l'aise, devant cette directive, pour la porter à la connaissance du public, la porter à la connaissance de certains journalistes. Je pense qu'il y aurait peut-être intérêt à ce que cette directive soit révisée, dans le sens peut-être de nuances, d'un certain nombre de nuances qui répondraient aux questions que j'ai soulevées ce matin.

Telle quelle, la directive me parait comporter des marges d'interprétation qui peuvent aller jusqu'à l'arbitraire. Je ne dis pas que vos fonctionnaires sont arbitraires; je ne dis pas qu'ils le sont constamment, mais il peut y avoir des cas d'arbitraire et je pense que, si la directive était nuancée, vous éviteriez peut-être davantage ces cas.

M. Quenneville: M. le Président, je ferai remarquer, à ce moment, au chef de l'Opposition, qu'en affirmant que certains fonctionnaires... Ce n'est pas tout à fait juste. Il suffit d'un fonctionnaire qui ait donné ces renseignements ou donné son impression au journaliste pour que le journaliste l'écrive.

M. Morin: Mais vous ne savez pas combien de fonctionnaires, ni moi.

M. Quenneville: Vous ne le savez pas non plus, M. le Président.

M. Morin: Non, c'est exact. Nous ne le savons pas.

M. Quenneville: A ce moment, je pense bien qu'il reste quand même une chose certaine, c'est

que, si, en fait, cette directive avait été nébuleuse ou avait manqué de clarté, nous aurions eu sûrement des demandes de la part du personnel. Nous n'avons eu aucune demande relative à l'explicita-tion de cette directive.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): Le député d'Abitibi-Ouest.

M. Boutin: Je voulais demander au ministre combien de gens sont allés se plaindre de ces directives au sous-ministre ou au ministre en question? S'il y en a qui ne sont pas allés se plaindre, s'ils ne sont pas capables de laver leur linge sale en famille, ce sont des hypocrites ou des traîtres.

M. Morin: Est-ce que le ministre a un commentaire à faire là-dessus?

M. Quenneville: J'avais répondu d'avance naturellement au député d'Abitibi-Ouest en disant qu'on n'a eu aucune demande d'explications relatives à cette directive, d'explications supplémentaires. Je peux vous dire que normalement on aurait eu des demandes si tel en avait été le cas.

M. Morin: Si je comprends bien votre attitude, vous niez totalement tous les allégués qui ont été répandus dans la presse au sujet de la façon dont cette directive est appliquée.

M. Quenneville: Absolument. Nous les avons niés d'ailleurs lors de la première conférence de presse. Nous n'avons pas changé d'attitude depuis ce temps. Nous ne sommes pas d'accord du tout avec l'article. Je peux vous dire — d'ailleurs je l'ai dit hier aussi — qu'effectivement, quant aux chiffres qui apparaissaient dans cet article, que, dans un souci d'honnêteté, nous avons informé le journaliste en question qu'il avait erré grandement, quant aux nombres et à certains chiffres. Lorsqu'il parlait, en particulier...

M. Morin: Je vous ferai remarquer qu'à la suite de tout le branle-bas, on a rejoint à Hull M. Doré qui est le président du syndicat professionnel. M. Doré a déclaré que la situation dénoncée par la presse concorde parfaitement avec la situation qui prévaut au Revenu.

M. Quenneville: M. le Président, je pense bien qu'il est bon de souligner que M. Doré est le chef du syndicat. Je peux vous dire que...

M. Morin: Est-ce que cela le disqualifie automatiquement?

M. Quenneville: Je regrette infiniment, je voudrais terminer ma réponse. Je voudrais vous dire que cette attitude ne nous a pas surpris outre mesure.

M. Morin: Je poursuis. Depuis plusieurs mois, les professionnels, à l'emploi de ce ministère, dénoncent en privé cette situation. Elle n'est pas dif- férente aujourd'hui, elle n'est pas pire, elle est la même. Je n'irai pas désavouer ce qu'un journal a eu le courage d'écrire. Les faits révélés concordent parfaitement avec la situation qui prévaut au Revenu. Est-ce que le fait que M. Doré soit président de son syndicat disqualifie automatiquement ses propos aux yeux du ministre?

M. Quenneville: M. le Président, il n'en est pas question du tout. Quand même, il faut prendre ses propos avec certaines réserves. Il faut quand même faire aussi remarquer au chef de l'Opposition que M. Doré ne fait pas partie des fonctionnaires du ministère. Pour revenir à cette remarque que je faisais tantôt, selon laquelle nous avions corrigé l'article de M. Bercier d'une façon bien honnête, M. Bercier, dans son article, parlait justement de la politique de relations humaines où l'on ne faisait rien pour garder son monde. Il signalait, en particulier, qu'il y avait environ 175 postes vacants à ce moment. Je pense que la correction qu'on a apportée l'a surpris grandement, l'a surpris à deux points de vue peut-être, mais les faits sont là, il y avait au-dessus de 400 postes vacants. Je pense qu'on a été non seulement objectif, mais on a été honnête à ce moment.

Anciens membres de la GRC

M. Morin: Est-il exact, M. le Président, que le ministère ait engagé au moins deux anciens membres de la Gendarmerie royale du Canada pour surveiller le comportement des fonctionnaires du ministère du Revenu.

M. Quenneville: Les antécédents d'un candidate une fonction dans un ministère ne l'éliminent pas. C'est l'expérience de l'individu dans le domaine où il doit oeuvrer au ministère qui nous intéresse. Donc, dans ces secteurs où ces gens oeuvrent, leur expérience, peut-être dans un domaine et dans d'autres domaines, peut être utile et nécessaire à la bonne marche des opérations du ministère.

M. Morin: Donc, des anciens membres de la Gendarmerie royale du Canada existent au sein du ministère?

M. Quenneville: Nous avons déjà répondu, d'ailleurs, à la question de M. Bellemare, au feuilleton, sur ce sujet. Il y a deux anciens membres de la Gendarmerie royale du Canada qui ont été embauchés par le ministère du Revenu, compte tenu de leur expérience et il faut dire que nous sommes très satisfaits de leurs services.

M. Morin: Quelles sont leurs fonctions exactes au sein du ministère?

M. Quenneville: Leus fonctions consistent à assurer au personnel une protection efficace lorsque des plaintes sont formulées contre les employés du ministère par des contribuables ou des mandataires.

Ils effectuent en plus des enquêtes dans des cas de dérogation à la Loi du ministère du Revenu,

à la Loi de la fonction publique et aux directives internes d'administration.

A partir de là, les cas à incidence criminelle sont référés au ministère de la Justice. Ils font en même temps des enquêtes de préemploi pour vérifier les antécédents de certains candidats à des postes au ministère du Revenu.

M. Morin: Sont-ils appelés à surveiller le comportement des autres fonctionnaires du ministère?

M. Quenneville: II faudrait quand même, à ce moment, qu'il y ait des raisons bien valables et bien claires qu'il y a des fonctionnaires qui ont besoin d'une surveillance...

M. Morin:... particulière

M. Quenneville: ... particulière, oui.

M. Morin: Au ministère, si vous recevez des plaintes contre un fonctionnaire, automatiquement, ce sera transmis à ces deux enquêteurs.

M. Quenneville: Tout dépend de la nature des plaintes qui sont portées. Si, en fait, ces plaintes relèvent du mandat des deux anciens agents de la Gendarmerie royale du Canada, on ne voit pas pourquoi ces fonctionnaires de notre ministère ne pourraient pas procéder.

M. Morin: Remplissent-ils également des fonctions comme agents normaux du ministère ou leurs fonctions sont-elles essentiellement des fonctions de surveillance?

M. Quenneville: Nous recevons énormément de plaintes, de ouï-dire, de toutes sortes de gens qui disent que nos employés ont fait ou qu'un tel employé a fait telle ou telle chose. Alors, nous considérons que les employés du ministère doivent être protégés contre la calomnie.

Dans tous les cas, nous essayons de faire la part des choses et de prendre les moyens nécessaires pour que ceux qui essaient de nuire à la réputation du ministère en aient pour leur rhume.

M. Morin: Expliquez-moi cela.

M. Quenneville: J'entends par là qu'il faut qu'ils prouvent que ce qu'ils avancent est vrai. Sans cela, ils doivent se rétracter, parce que nos employés sont vulnérables, ayant un rôle qui n'est pas facile...

M. Morin: C'est juste.

M. Quenneville: ... quand il s'agit d'aller chercher des cents et de cotiser tin contribuable sur des impôts qu'il n'a pas payés. Il se peut donc qu'ils soient parfois coincés dans des situations qui ne sont pas tellement faciles et je crois que le ministère doit protéger ses employés dans ce sens.

M. Morin: Donnez-moi un exemple pour que je vous saisisse mieux.

M. Quenneville: Une personne peut écrire et dire qu'elle a offert ou qu'un employé a demandé des pots-de-vin. Il faudra que l'individu prouve que l'employé a demandé des pots-de-vin parce que c'est tellement facile d'écrire cela.

M. Morin: Bien sûr! Alors, j'imagine donc que ces deux surveillants, ces deux agents du ministère... Dans quelle catégorie se trouvent-ils, soit dit en passant?

M. Quenneville: Ils oeuvrent à la direction générale du personnel. Ce sont des professionnels, attachés d'administration.

M. Morin: Attachés d'administration. Alors, sur réception d'une plainte comme celle-là ou d'une dénonciation comme celle-là, ces deux fonctionnaires sont donc appelés à faire enquête, auprès de la personne qui dénonce et auprès du fonctionnaire. Y a-t-il longtemps qu'ils sont à l'emploi du ministère?

M. Quenneville: M. le Président, il y a un des membres qui a été embauché le 1er décembre 1970 et le deuxième le 4 janvier 1972.

M. Morin: Quelle a été la réaction de vos fonctionnaires à l'arrivée de ces deux enquêteurs?

M. Quenneville: Je crois qu'ils se sentent en général beaucoup plus protégés et je crois aussi que, quand il nous faut sévir, c'est pour le bien du ministère et la renommée du ministère, ce qui a une retombée sur le personnel du ministère.

M. Morin: Quand vous dites sévir, que voulez-vous dire?

M. Quenneville: Ecoutez, il y a des cas, vous savez il y a toutes sortes de choses, alors, c'est évident que, dans certains cas, il faut sévir et prendre les mesures nécessaires, qui s'imposent, et même poursuivre.

M. Morin: Cela, c'est une procédure connue, reconnaissable. Vous ne voulez pas dire intimider les gens.

M. Quenneville: Non, mais, d'un autre côté, par exemple, les gens de la boîte, le ministère, les employés du ministère se sentent rassurés de savoir que les employés du ministère ne sont pas comme cela.

M. Morin: Bien.

M. Quenneville: On a eu l'expérience, dans plusieurs cas, chez la gent contribuable, par exemple, que des personnes ont affirmé qu'elles avaient été victimes de certaines choses. Quand notre personnel ou des gens qui oeuvrent dans ce

secteur ont été les voir, ces personnes ont dit: "Nous ne pensions pas que le ministère du Revenu suivait ces choses." Ces gens avaient nui considérablement à la réputation de tous les autres employés et le fait que nous avons fait des enquêtes dans certains cas a rétabli la confiance des personnes visées vis-à-vis du ministère.

M. Morin: Bon.

M. Quenneville: A plusieurs exemplaires.

M. Morin: Pourriez-vous me donner une idée du nombre de cas qui ont été portés à l'attention de ce service, de ces enquêteurs, du nombre de cas qui ont pu entraîner des semonces ou des renvois de fonctionnaires et du nombre de cas qui ont fait l'objet de poursuites non pas contre le fonctionnaire, mais contre le plaignant, parce que la piainte était non fondée? Est-ce que c'est chiffrable? Ce que je vous demande, c'est une sorte de petit rapport sur le fonctionnement de ces deux enquêteurs. M. le Président, je vais attendre la réponse, mais, après cela, je devrai constater que cela fait plusieurs heures que nous n'avons pas quorum et je demanderai donc qu'on fasse venir les députés qui devraient être parmi nous. Nous n'avons plus qu'un député, M. le Président.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): II est évident que nous n'avons pas le quorum.

M. Quenneville: M. le Président, est-ce qu'on doit comprendre que le chef de l'Opposition veut avoir des chiffres exhaustifs?

M. Morin: Non, je ne veux pas vous forcer à faire des enquêtes qui dureront plusieurs jours au sein du ministère; j'imagine seulement que vous avez une idée grosso modo du fonctionnement de ce service et c'est tout ce que je demande, c'est pour me faire une idée.

M. Quenneville: M. le Président, nous fournirons à la prochaine séance un ordre de grandeur à ce sujet.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): L'honorable chef de l'Opposition a fait remarquer, avec raison, que nous n'avions pas quorum. Mais étant donné l'heure, est-ce que la commission désire appeler le quorum ou suspendre les travaux sine die jusqu'à ce qu'un ordre de la Chambre soit donné.

M. Morin: En espérant qu'on suive cela de façon plus stricte au cours des séances subséquentes, parce que nous ne sommes vraiment pas nombreux.

M. Quenneville: Etant donné que c'est le chef de l'Opposition qui en a fait la remarque, je laisse cela à sa discrétion. On est prêt à continuer.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): Si on est prêt à continuer, il faut faire appeler le quorum. S'il y a entente entre les partis, on pourrait peut-être ajourner.

M. Morin: Moi, cela m'est égal, M. le Président. Je vous avoue que je suis prêt à continuer, à condition que nous ayons quorum, étant donné l'importance du ministère.

M. Quenneville: Nous allons attendre le quorum.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): Appelez le quorum.

Nous allons ajourner les travaux de la commission sine die jusqu'à ce qu'il y ait un ordre de la Chambre de les continuer à une date fixe.

(Fin de la séance à 12 h 48)

Reprise de la séance à 17 h 10

M. Brisson (président de la commission permanente des finances, des comptes publics et du revenu): A l'ordre, messieurs!

M. Chagnon (Lévis) remplace M. Berthiaume (Laprairie); M. Quenneville (Joliette-Montcalm) remplace M. Garneau (Jean-Talon). La parole est à l'honorable ministre.

M. Morin: Je pense que l'honorable ministre désire avoir la parole.

M. Quenneville: M. le Président, à la demande de l'Opposition, ce matin, concernant le service des enquêtes administratives, travail auquel les anciens agents de la Gendarmerie royale sont affectés, nous sommes prêts à déposer les statistiques demandées, couvrant la période du 1er janvier au 31 décembre 1975.

Dans ce service des enquêtes administratives, il y a eu des enquêtes pré-emploi. Je les donne pour le bénéfice du journal des Débats; on va vous distribuer les copies également. A l'article préemploi, il y a eu 48 candidatures recommandées et il y en a eu 13 refusées, pour un total de 61.

M. Morin: Refusées à la suite d'enquêtes faites par vos enquêteurs?

M. Quenneville: Exactement. M. Morin: Ah! bon.

M. Quenneville: Au poste des défalcations, en ce qui concerne les dépenses de voyage, frais de séjour, etc., il y a eu 16 enquêtes effectuées, à la suite desquelles il y a eu une révocation, trois suspensions, une démission, six remboursements mineurs et cinq plaintes non fondées.

En ce qui touche le travail extérieur, c'est-à-dire l'article 6 de la Loi du ministère du Revenu qui ne permet pas à un employé du ministère du Revenu de faire du travail à l'extérieur du ministère sans l'autorisation du ministre ou du sous-ministre, il y a eu 11 enquêtes effectuées. Ces enquêtes furent effectuées à la suite des demandes d'approbation pour travail à l'extérieur et dans les cas de conflit d'intérêts.

M. Morin: Pourriez-vous expliquer cette catégorie? Je saisis assez mal de quoi il s'agit.

M. Quenneville: L'article 6 de la Loi du ministère du Revenu défend à un fonctionnaire du ministère du Revenu d'occuper un emploi à l'extérieur du ministère du Revenu ou d'accepter un travail à l'extérieur du ministère du Revenu. Par exemple, un fonctionnaire chez nous pourrait facilement se permettre de faire des rapports d'impôt, le soir... Ce sont des choses défendues à l'intérieur du ministère du Revenu.

Il y a eu onze enquêtes effectuées à la suite de demandes d'approbation pour travail à l'extérieur. C'est-à-dire que des fonctionnaires ont demandé de faire approuver leur possibilité d'un travail à l'extérieur, de même que dans le cas de conflit d'intérêts.

Au chapitre de la discipline, il y a eu sept enquêtes effectuées, soit pour absentéisme, alcoolisme, etc.

M. Morin: Y a-t-il eu des révocations ou des suspensions?

M. Quenneville: Ni révocation, ni suspension.

Dans l'article plaintes et recherches diverses, il y a eu à peu près 25 enquêtes effectuées. Il s'agit d'enquêtes au sujet de plaintes de vol qui sont référées au service central des réclamations, des enquêtes au sujet d'appels interurbains et des recherches connexes.

M. Morin: Au sein du ministère?

M. Quenneville: Dans les projets spéciaux, il y a eu trois projets spéciaux qui ont été menés à bonne fin, c'est-à-dire: la sécurité des édifices, les mesures d'urgence et le contrôle d'accès aux édifices.

Ce qui totalise 123 enquêtes au cours de cette même période.

Je dépose le document, tel que demandé.

M. Morin: M. le Président, est-ce que je pourrais demander au ministre dans quelle catégorie tombent les plaintes faites ou les accusations qui seraient portées contre des fonctionnaires, comme dans l'exemple que nous donnait le sous-ministre, ce matin.

Quelqu'un écrit au ministère en disant: Je désire vous informer qu'un tel m'a demandé un pot-de-vin ou m'a fait une proposition que je considère comme illégale, est-ce que ce serait dans la catégorie de plaintes et recherches diverses?

M. Quenneville: Oui, dans cette catégorie et aussi dans ia catégorie de discipline.

M. Morin: II y en aurait eu combien de cet ordre qui correspondraient à l'exemple que vous m'avez donné ce matin?

M. Quenneville: Environ quatre à cinq, dans ce domaine. C'est-à-dire qu'il y a eu deux cas, en 1974, dont l'enquête a abouti à des plaintes devant les tribunaux. Dans les deux cas, cela s'est terminé en 1975. Il y en a un, je ne sais pas, qui a plaidé coupable. Dans un autre cas, je ne sais pas si c'est tout à fait terminé. La sentence était censée être rendue le 30 mars. Ce sont deux de nos anciens employés, qui étaient à notre emploi, à l'époque où on a fait l'enquête.

M. Morin: Je vois. Ces deux agents, autrefois, comme disent les étudiants, de la police à "jouai", ils ont pour fonction de surveiller systématiquement les fonctionnaires ou est-ce qu'ils n'interviennent que lorsqu'une plainte est formulée?

M. Quenneville: Que lorsqu'une plainte est formulée. Pour les dépenses de voyage, par exemple, nous avons des plaintes du ministère des Finances, responsable de la comptabilité au ministère du Revenu, qui voit à la dépense, avant paiement. Ces plaintes, naturellement, chaque fois, il faut leur donner suite, à tort ou à raison.

M. Morin: Bien. Merci, M. le Président. Cela répond à nos questions sur ce sujet. Est-ce que le ministre n'avait pas un autre document à nous communiquer?

Oppositions et appels

M. Quenneville: M. le Président, il y a eu une demande aussi de la part de l'Opposition, quant au service des oppositions et appels. Les statistiques couvrent la période du 1er mars 1975 au 29 février 1976.

Il y a eu, comme oppositions reçues, dans le domaine des impôts et taxes, 3672 oppositions. Les cas réglés par décision ministérielle sont de 606, ceux par désistement conditionnel sont de 1480 et ceux par désistement inconditionnel sont de 257, pour un total de 2343.

M. Morin: Est-ce que vous avez un document que vous pourriez me communiquer pour que je puisse...

M. Quenneville: Excusez-moi.

M. Morin: Je vous en prie, ce n'est pas grave.

M. le Président, pour bien comprendre ce tableau et pour en éclairer les diverses dispositions, est-ce que je pourrais demander tout d'abord au ministre de nous expliquer grosso modo les étapes que doit suivre un contribuable pour contester un avis de cotisation?

Je voudrais situer ce document en perspective et voir aux termes de quel cheminement il se situe.

M. Quenneville: Un contribuable reçoit un avis de cotisation de la part du ministère ou un avis de nouvelle cotisation. Il a 90 jours après la date de la mise à la poste de l'avis de cotisation ou de l'avis de nouvelle cotisation pour s'opposer. S'il a l'intention de s'opposer, il doit remplir une formule prescrite à cet effet, dans laquelle il indique la cotisation et les motifs de son opposition. Cette formule doit être envoyée sous pli recommandé au sous-ministre du Revenu et ce document est transmis, après coup, au bureau régional impliqué, c'est-à-dire dans la région où demeure l'individu ou la corporation, et cela est assigné à la division oppositions-appels.

Cette division, après avoir enregistré tout cela, ainsi qu'au siège social — parce que nous avons un contrôle au siège social dans l'enregistrement aussi bien qu'un contrôle satellite dans les bureaux régionaux — étudie le cas à la lumière des faits décelés dans les rapports d'enquête ou encore à la lumière des déclarations telles que produites et telles que corrigées, lesquelles ont été la base de la cotisation.

Ceci est étudié par des gens qui ne connaissent pas du tout le cas. C'est fait d'une façon tout à fait indépendante, c'est un secteur tout à fait à part.

M. Morin: De ceux qui ont établi la cotisation.

M. Quenneville: De ceux qui ont établi la cotisation, que ce soit une première cotisation ou une nouvelle cotisation.

Alors, il y a la possibilité que, après étude, celui qui est préposé à l'étude du cas en vienne à la conclusion que cette opposition doit être confirmée à la lumière des dispositions de la loi et des faits décelés dans le dossier ou encore des faits qui ont été confirmés par une enquête faite par ce secteur, comme je l'ai dit ce matin, une enquête soit de visu ou une enquête sommaire.

M. Morin: Est-ce que je peux vous arrêter une seconde et vous demander — je ne pense pas que le chiffre se trouve dans ce tableau — combien d'avis de cotisation ont été retirés proprio motu par le ministère sur réception d'une opposition?

M. Quenneville: Vous avez des désistements conditionnels. C'est que le ministère ou le contribuable s'est désisté, en partie, de son opposition. C'est-à-dire que le contribuable a admis, en partie, que le ministère était correct ou encore le ministère a admis, en partie, que le contribuable était correct.

M. Morin: Avait raison.

M. Quenneville: Avait raison. C'est un désistement conditionnel à un amendement à la cotisation originale.

Le désistement inconditionnel est celui dans lequel le ministère se retire totalement ou le contribuable se retire totalement et se désiste de l'opposition qu'il a produite.

M. Morin: Ce que j'aimerais, c'est que vous me départagiez, dans les 257 désistements inconditionnels, ceux qui sont du ministère et ceux qui ont été le fait des particuliers ou des contribuables.

M. Quenneville: Je crois que j'ai fait une erreur quand je vous ai exposé le problème du désistement inconditionnel. Dans le désistement inconditionnel, il faut que ce soit absolument le contribuable qui se désiste.

M. Morin: Le contribuable. Est-ce qu'il y a eu des désistements du ministère, je veux dire des cas, comme vous les évoquiez tout à l'heure, où le ministère a renoncé?

M. Quenneville: C'est dans les conditionnels qu'il s'est désisté.

M. Morin: Vous voulez me dire, donc, qu'il n'y a aucun cas où le ministère ait abandonné totalement une cotisation à la suite d'une opposition?

M. Quenneville: Dans le cas que vous précisez, lorsque le ministère conçoit que le contribuable avait raison à 100%, on lui suggère de retirer son avis d'opposition; il le fait, il retire son avis d'opposition à condition que le ministère rétablisse les faits comme ils devraient être.

M. Morin: Vous annulez en quelque sorte...

M. Quenneville: On refait une nouvelle cotisation pour annuler la cotisation ou pour remettre la cotisation telle qu'elle aurait dû être.

M. Morin: Bon.

M. Quenneville: Cela devient inclus dans les désistements conditionnels.

M. Morin: Bon. Mais, en fait, il y en a qui sont inconditionnels. Si vous donnez raison aux contribuables à 100%...

M. Quenneville: Ils ne sont pas inconditionnels. Le contribuable...

M. Morin: ... il faut que le contribuable...

M. Quenneville: ... se désiste si on corrige. Alors, ils sont conditionnels.

M. Morin: Bon, d'accord.

M. Quenneville: Ils sont inconditionnels lorsque le ministère, de lui-même, remet une nouvelle cotisation.

M. Morin: Bon. Je ne veux pas tomber dans le byzantinisme, mais je vais tout de même vous demander ceci: Parmi ces désistements conditionnels, combien y en a-t-il qui correspondent en réalité à des annulations de cotisations par le ministère ou à des annulations de nouvelles cotisations?

M. Quenneville: Je n'ai pas de statistiques ici, mais je crois que c'est aux alentours de 100, 150, peut-être, par année.

M. Morin: 100 à...?

M. Quenneville: 100 à 150.

M. Morin: Sur les 1480?

M. Quenneville: Sur les 148C, oui.

M. Morin: Est-ce que vous êtes en mesure de me préciser s'il s'agit de contribuables particuliers ou de contribuables corporatifs?

M. Quenneville: Non.

M. Morin: C'est bien extraordinaire que vous ne soyez pas en mesure de faire une distinction.

M. Quenneville: Comme il a été dit ce matin, tous les contribuables, ce sont des contribuables. Que ce soit des corporations ou des individus, ce sont des contribuables au sens de la loi. On ne fait pas la distinction. Le nombre d'avis d'opposition reçus, c'est par contribuable.

M. Morin: Oui, je comprends.

M. Quenneville: On a reçu tant d'avis d'opposition des contribuables.

M. Morin: Sauf que, dans un cas, c'est l'impôt sur le revenu, tandis que, dans l'autre cas, c'est l'impôt sur les bénéfices.

M. Quenneville: C'est toujours l'impôt sur le revenu.

M. Morin: Bien. Vous ne faites pas, dans votre pratique administrative, de distinction entre l'un ou l'autre?

M. Quenneville: Non.

M. Morin: Peut-être devriez-vous?

M. Quenneville: On doit remarquer par exemple, que le nombre d'avis d'opposition sur le nombre de cotisations émises est très faible, sur le nombre de contribuables, si on parle d'eux.

M. Morin: Oui, mais peut-être une petite question technique: Est-ce que tous ces cas sont taxés en vertu de la même loi?

M. Quenneville: Ah! oui. On a seulement une loi, c'est la Loi sur les impôts qui s'applique tant aux corporations qu'aux particuliers. Tantôt, il y a des sections spéciales pour les corporations, tantôt des sections spéciales pour les particuliers.

M. Morin: Oui, oui, il y a des chapitres.

M. Quenneville: II y a celui qui a un revenu d'emploi, mais, pour celui qui a un revenu d'entreprise, les corporations et les particuliers sont traités sur le même pied. Les corporations peuvent avoir des dispositions spéciales à elles, lorsqu'il est question de paiements de dividendes, de surplus, mais pour les particuliers, il n'est pas question de cela.

M. Morin: Donc, 100 à 150 cas de retraits dans les faits, d'annulations en quelque sorte des cotisations. Bien, si nous pouvions maintenant franchir un autre pas, il a été fait allusion à diverses reprises, dans les articles de presse dont nous parlions ce matin, au coût des contestations, aux frais juridiques entraînés pour le contribuable qui a besoin d'un juriste, d'un avocat, pour le défendre. Qui supporte les frais juridiques du contribuable dans le cas où il a besoin d'un avocat? C'est le contribuable, si je ne m'abuse.

M. Quenneville: Toujours.

M. Morin: Essentiellement. Et s'il obtient gain de cause?

M. Quenneville: C'est le contribuable qui assume le coût.

M. Morin: Et s'il a gain de cause, est-ce que la réponse est la même?

M. Quenneville: Oui.

M. Morin: Mais nous apprenons tous des choses. Est-ce que vous pouvez me répondre?

M. Quenneville: Bien, normalement, c'est le coût... Où il n'y a pas de coût, c'est quand il y a un appel, une requête, il doit déposer $15. S'il gagne son point à la cour, si le jugement est en sa faveur, les $15 lui sont remis.

M. Morin: Mais les honoraires de son avocat, c'est lui qui les paiera.

M. Quenneville: Vous me permettrez d'ajouter que dans certains jugements, il est prévu que, dans certains cas, le ministère aura la responsabilité des frais juridiques s'il perd la cause.

M. Morin: Oui, c'est à cela que je faisais allusion. Et si le contribuable perd, c'est lui qui assume les frais de cour en plus des honoraires de son avocat.

M. Quenneville: C'est exact.

M. Morin: Devant les frais considérables que cela peut entraîner pour les petits contribuables, on a suggéré, dans certains articles, d'étendre la loi des petites créances au ministère du Revenu. Vous savez qu'à l'heure actuelle cette loi s'applique jusqu'à concurrence, je crois, de $400. Et on a suggéré récemment de monter cela à $1000. Puis-je demander au ministre ce qu'il pense de cette suggestion? Y avez-vous pensé, au ministère? Vous êtes-vous penchés là-dessus?

M. Quenneville: Voici, M. le Président, la loi de l'impôt ne prévoit pas que cette cause puisse être dévolue au tribunal des petites créances.

M. Morin: Je le sais.

M. Quenneville: Vous vouliez savoir quoi?

M. Morin: Je voulais savoir si vous vous êtes penchés sur la possibilité que les petites créances puissent avoir juridiction dans le cas de l'impôt. C'est le sens de ma question. Je le sais bien qu'à l'heure actuelle elles n'ont pas juridiction, mais c'est une suggestion qui a été faite. Je ne sais pas si te ministre a lu les articles qui sont si agréables pour son ministère et qui lui font, à l'occasion, des suggestions, et l'une des suggestions en question était d'étendre la loi des petites créances au ministère du Revenu.

M. Quenneville: II est évident que nous nous sommes penchés là-dessus, tellement que nous nous sommes opposés à ce que ce soit traité comme de petites créances. Et puis la cour nous a donné raison.

M. Morin: Vous vous êtes opposés.

M. Quenneville: Oui, parce qu'en fait, je crois que les petites créances, d'après le tribunal — je ne suis pas un expert là-dedans, vous l'êtes peut-être plus que moi — c'est relatif à des créances entre personnes et non pas en fonction d'une loi statutaire.

M. Morin: Oui, c'est juste. On s'entend parfaitement.

M. Quenneville: A l'heure actuelle, cela ne touche que les causes privées.

M. Morin: La question que je vous posais, c'est une question de politique générale. Dans l'avenir, pensez-vous que cela puisse être envisagé de donner juridiction à la Cour des petites créances, au tribunal qui s'occupe des petites créances et d'appliquer la loi au ministère du Revenu? Si vous avez décidé contre, j'aimerais bien savoir pourquoi.

Vous comprenez dans quel esprit je fais cette suggestion, c'est à cause des frais que cela entraîne pour les petits contribuables.

M. Quenneville: Mais d'un autre côté, la Loi sur les impôts, comme toute autre loi fiscale, demande une quote-part de chacun des contribuables assujettis. Alors si, par le truchement d'un tribunal, ils peuvent dire que les impôts qu'ils doivent ils ne les doivent plus, ce serait à l'encontre d'une loi, et puis là, je me demande dans quelle situation le tribunal serait placé. Autrement dit, cela aurait comme effet d'exempter les contribuables du paiement de leur quote-part des impôts, jusqu'à concurrence de...

M. Morin: Mais j'imagine que le tribunal appliquerait la loi. Il ne pourrait pas faire autrement que d'appliquer la loi. Si la loi des petites créances est étendue au ministère du Revenu, le juge doit appliquer la Loi du ministère du Revenu, non? Il me semble.

M. Quenneville: Je présume. Il est possible, également, que la Cour des petites créances ne donne pas droit d'appel.

M. Morin: Oui, c'est juste.

M. Quenneville: Alors...

M. Morin: Cela peut être modifié peut-être, cela aussi. Cela dépend. On ne parle pas de ce qui existe actuellement. On parle de ce qui pourrait exister pour favoriser le petit contribuable.

M. Quenneville: Cela peut revêtir toutes sor-

tes de formes. Cela peut être un autre genre de tribunal aussi. Ce n'est pas nécessaire que ce soient les petites créances comme telles. Cela peut être un autre genre de tribunal.

M. Morin: Je vous ai mentionné celui-là parce que c'est une suggestion qui a été faite dans la Presse. Je me demandais si vous vous étiez penché sur la suggestion pour voir dans quelle mesure c'était applicable.

M. Quenneville: J'ai lu dans le... En tout cas, peu importe... C'est un domaine qui relève naturellement du ministère de la Justice pour nous donner les cours dont nous avons besoin. Ce n'est pas le ministère du Revenu comme tel, dans ses propres lois, qui peut créer de lui-même des tribunaux...

M. Morin: Non, c'est la Chambre qui peut faire cela. Seulement vous, comme ministère, il me semble que vous pouvez avoir une politique, une opinion là-dessus.

M. Quenneville: De toute façon, on demandera au contentieux.

M. Morin: Mettons que je vous prends un peu par surprise; est-ce que vous voulez regarder cela ensemble et puis on pourrait s'en reparler? Ou alors, est-ce que vous avez pensé à un système autre que celui-là qui permettrait de faciliter les choses au petit contribuable qui, peut-être, aura à faire face à des frais pour le cas où il s'aviserait de contester un avis de cotisation, d'être obligé de prendre un avocat et Dieu sait que les avocats coûtent cher? Je ne fais même pas allusion à ceux qui se trouvent sur la liste du gouvernement. Est-ce qu'on pourra en reparler à l'occasion, si vous voulez? Je suis prêt à attendre une autre séance, si vous voulez bien vous pencher là-dessus.

M. Quenneville: De toute façon, ce problème comme tel pourrait être exploré, mais je ne crois pas qu'il pourrait être réglé dans quelques jours. Je ne crois pas que cela puisse être fait vite comme cela.

M. Morin: Non.

M. Quenneville: Alors, dans une autre séance...

M. Morin: J'ai bien compris cela. Je me demandais si le ministère avait réfléchi là-dessus. C'est peut-être l'occasion de le faire. Je vous demanderai certainement pas de prendre une position définitive là-dessus cette année, mais...

M. Quenneville: Je pense qu'on est prêt à réfléchir là-dessus et on en reparlera plus tard.

M. Morin: On en reparlera, bon! La question serait donc, en gros, celle-ci: Quels seraient les moyens qu'on pourrait mettre en vigueur pour fa- ciliter les choses au petit contribuable, pour diminuer ses frais, pour le cas où il s'aviserait de contester un avis ou un nouvel avis, pour le cas où il ne serait pas d'accord avec le gouvernement? Il faut bien comprendre que, si ces frais sont élevés, cela peut dissuader un petit contribuable d'y avoir recours. Socialement, il n'est pas juste, sur le plan des principes, qu'un gros contribuable ou une société commerciale puisse se faire représenter par des avocats avec tout le déploiement que cela suppose et toute la pression que cela suppose sur le ministère, tandis que le petit contribuable, lui, est livré à lui-même. C'est cela, le sens de ma question.

M. Quenneville: M. le Président, est-ce qu'on pourrait demander exactement ce que le député de Sauvé, le chef de l'Opposition, entend par un petit contribuable?

M. Morin: Mettons le contribuable qui gagne aujourd'hui moins de $10 000 ou $12 000, $15 000, si vous voulez, étant donné la hausse du coût de la vie sous l'empire du présent gouvernement.

M. Quenneville: M. le Président, je pense bien que, rendu à $15 000, je me demande si cela peut être considéré comme un petit contribuable.

M. Morin: Arrêtons-nous à $10 000 ou $12 000, je veux bien. Mais, aujourd'hui, un salaire de $10 000 ou $12 000, c'est très moyen. Même si vous en payez quelque $8000 à l'entrée à vos fonctionnaires, ce n'est pas ainsi que vous allez assurer votre recrutement

M. Quenneville: Pas seulement avec cela, naturellement. On prévoit faire autre chose que cela pour assurer le recrutement.

M. Morin: Oui.

M. Quenneville: C'est ce que nous faisons actuellement, d'ailleurs.

M. Morin: Oui. Ne revenons pas là-dessus. Je suis d'accord que vous allez faire des efforts. Cela fait cinq ans que vous faites des efforts.

M. Quenneville: Non. On fait plus que des efforts. On a déjà obtenu des choses...

M. Lapointe: Dans le salaire de ces dix salariés, le Parti québécois exige $1 par jour?

M. Morin: Comment cela le Parti québécois exige $1 par jour? A quoi faites-vous allusion?

M. Lapointe: Je fais allusion aux documents qui ont été déposés à l'Assemblée nationale par le député de Rouyn-Noranda.

M. Morin: Le Parti québécois n'a jamais exigé quoi que ce soit. Je sais bien qu'il n'y a pas de question de privilège, mais le député doit être mal

renseigné. Ce n'est pas parce que des syndiqués, quelque part au Québec, décident de verser $1 par paie au Parti québécois que c'est à la suggestion du Parti québécois. Cela ne l'est pas.

M. Lapointe: II faudrait le vérifier.

M. Morin: Ah! Mon Dieu, si les députés libéraux de l'Assemblée nationale décidaient demain, de leur proprio motu, de leur propre geste, de donner $1 par paie au Parti québécois, nous ne le refuserions pas.

M. Quenneville: C'est sur le même principe.

M. Lapointe: C'est comme les recenseurs qui font le recensement et qui représentent le Parti québécois.

M. Morin: Oui et qui donnent leur argent au parti.

M. Lapointe: ...volontairement.

M. Morin: Oui, qui remettent volontairement au Parti québécois la somme qu'ils reçoivent comme recenseurs. Je sais que cela peut paraître inconvenable à un libéral, mais cela se fait.

M. Quenneville: Y a-t-il de petits contribuables parmi ces recenseurs? J'imagine.

M. Morin: Oui. Il doit y en avoir.

M. Quenneville: Vous acceptez quand même. Cela ne vous froisse pas trop?

M. Morin: C'est purement volontaire.

M. Quenneville: Pour autant que c'est volontaire...

M. Morin: Nous n'avons pas le droit de l'exiger et nous ne l'exigerions jamais.

M. Quenneville: Vous avez quand même le droit de le refuser.

M. Morin: Ecoutez. Non. Sérieusement... S'agit-il du même ordre d'idées? Allez-vous blâmer les petits contribuables de faire un don à la Croix-Rouge ou au Parti libéral si le coeur leur en dit? Je sais bien qu'il ne doit pas y avoir beaucoup de petits contribuables qui contribuent au Parti libéral, mais cela arrive, figurez-vous, au Parti québécois.

M. Quenneville: J'ai toujours su que les comparaisons clochaient toujours. Je pense maintenant que nous avons quand même une démonstration extraordinaire. Comparer le Parti québécois à la Croix-Rouge! C'est fort!

Le Président (M. Brisson): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Morin: C'est un don volontaire.

M. Quenneville: Hum!

M. Morin: C'est un don volontaire et nous offrons une transfusion politique au Québec.

Le Président (M. Brisson): Etudions-nous le programme 1?

M. Morin: J'avais encore passablement de questions générales. Je m'étais entretenu avec le ministre, au début de la séance, de la possibilité de suspendre nos travaux un peu tôt parce que je dois faire dans une demi-heure un programme de télévision prolongé et je veux avoir le temps de me rendre. Avec votre permission, on pourrait se retrouver ce soir à 20 h 15.

Mais pourrais-je demander au président de s'assurer auprès des fouets du régime que ce soir nous aurons quorum en commençant?

Le Président (M. Brisson): D'accord. La commission suspend ses travaux jusqu'à 20 h 15.

M. Morin: Merci.

M. Quenneville: Et vous amènerez les membres de la Croix-Rouge aussi!

(Fin de la séance à 17 h 43)

Reprise de la séance à 20 h 55

M. Brisson (président de la commission permanente des finances, des comptes publics et du revenu): A l'ordre, messieurs!

M. Chagnon (Lévis) remplace M. Bacon (Trois-Rivières); M. Faucher (Nicolet-Yamaska) remplace M. Berthiaume (Laprairie); M. Fraser (Huntingdon) remplace M. Boutin (Abitibi-Ouest); M. Quenneville (Joliette-Montcalm) remplace M. Garneau (Jean-Talon); M. Tremblay (Iberville) remplace M. Vallières (Richmond).

La parole est au ministre.

M. Quenneville: M. le Président, nous attendons nécessairement les questions de l'Opposition pour continuer, même s'il nous a fallu attendre quelque peu le chef de l'Opposition, qui a sûrement été retenu.

M. Morin: Je m'en excuse auprès du ministre. M. Quenneville: Nous acceptons ses excuses.

M. Morin: Je m'en excuse auprès de tous ceux que j'ai fait attendre. C'est la même histoire que la dernière fois d'ailleurs. Vous allez penser que je le fais exprès. Ce sont les techniciens qui n'étaient pas prêts. Le programme, qui durait une heure, n'en finissait plus!

M. Quenneville: Nous acceptons vos excuses. La formule d'impôt

M. Morin: Nous allons tenter d'être plus expé-ditifs, M. le Président, ce dont personne n'aura à se plaindre. Je vais même laisser de côté toute la question de la Croix-Rouge, sur laquelle je pensais m'attarder, pour aborder la question du formulaire du rapport d'impôt 1975, et, de façon plus large, la question de la complexité croissante des rapports d'impôt, gardant pour plus tard certaines autres questions plus techniques encore.

Vous avez fait publier récemment dans les journaux une sorte d'avis sur le fameux numéro 92. Je vous avoue que cela nous a paru assez inconcevable comme erreur. Ce que je ne suis pas arrivé à comprendre, c'est que vous n'ayez pas testé vos formulaires sur un certain nombre de citoyens avant de les lancer dans le public, de façon à vous assurer que le commun des mortels est capable de suivre le déroulement de la logique du formulaire.

Pour le contribuable salarié qui n'a pas à remplir le tableau 2 de la page 3, la tentation automatique, évidemment, était d'inscrire sur la ligne 92 le montant de sa contribution établi à la ligne 1 e) du tableau 1 de la page 3. Dans mon esprit, cela soulève plusieurs questions, celle du test d'abord. Ne devriez-vous pas vérifier auprès d'un certain nombre de citoyens que vous pourriez inviter, même peut-être un certain nombre de députés de la Chambre? S'ils comprennent, tout le monde va comprendre. C'est une méchanceté que je retire!

M. Fraser: II y a 68% des gens qui ne comprendront jamais!

M. Morin: C'est possible.

M. Saindon: Elle n'est pas nouvelle, celle-là!

M. Morin: Le numéro 92? Oui, je pense que c'est cette année.

M. Saindon: Ne faites pas voir que vous ne comprenez pas. Elle n'est pas nouvelle, celle-là, la petite blague.

M. Morin: La blague de...? M. Saindon: La vôtre!

M. Morin: C'est effectivement une blague. J'espère que le député la prend comme telle.

Ce qui n'est pas une blague, c'est que la correction survient le 18 mars, et sans doute y a-t-il des gens qui ont déjà rempli le formulaire. Il y a des gens qui ont déjà fait leur rapport d'impôt. Le ministère n'aurait-il pas avantage à tester ses formulaires? Première question.

M. Quenneville: Je dois dire tout de suite que ce n'est pas une erreur; la seule erreur qu'il puisse y avoir peut-être, c'est qu'au lieu d'y avoir un point, il y a eu le malheur d'y avoir une petite flèche qui donne justement la tentation que vous disiez tantôt. Parce qu'il y a une petite flèche, les contribuables sont tentés d'aller placer le montant d'une contribution qui, en fait, ne va pas là du tout.

Si le contribuable complète sa formule comme il se doit, à la page 2 et à la page 3, infailliblement, il aura passé pardessus et il verra que le rapport ne se fait pas à cet endroit du tout. Il n'y a pas de rapport à faire à cet endroit. On ne peut pas dire que c'est une erreur. C'est peut-être tentant pour le contribuable et on prend toujours le blâme. Quand on dit que nos formules ne sont pas bien complétées, on dit que c'est notre faute et que ce n'est pas la faute du contribuable. Nous, nous disons toujours cela quand nous avons des choses comme cela. Nous, nous disons que le contribuable doit comprendre nos formules facilement.

Si, à un moment donné, il ne la comprend pas bien, ce n'est pas sa faute à lui, c'est la nôtre. Soyez convaincus de cela, on le fait.

Maintenant, on fait des tests de compréhension de nos formules avec certaines personnes. On a commencé cela depuis quelques années, mais plus on va, plus on fait des tests plus étendus. On augmente le nombre de personnes avec qui on fait ces tests.

M. Morin: Combien, à l'heure actuelle?

M. Quenneville: L'an passé, on l'a fait avec une trentaine de personnes. C'est un échantillonnage qui n'est peut-être pas mauvais. C'est peut-être suffisant, mais ce n'est peut-être pas assez. D'accord.

M. Morin: Les prenez-vous dans tous les milieux?

M. Quenneville: On les prend chez nous, au ministère, mais ce sont des gens qui ne sont pas nécessairement impliqués dans la déclaration d'impôt. Cela peut être une secrétaire d'un certain secteur ou de n'importe où. Ce ne sont pas des gens habitués à compléter leur rapport d'impôt. On prend également des gens qui sont habitués à compléter leur rapport.

Maintenant, soyez assurés que, de ce côté-là, plus on va, plus on essaie d'avoir des formules claires. Avec notre formule, on a aussi notre guide, qui est là pour aider les contribuables. Là aussi, on cherche toujours à avoir des formules nouvelles pour expliquer davantage, pour expliquer mieux, parce qu'on veut tout de même dire des choses, mais on ne veut pas en dire trop pour ne pas mêler les contribuables. Ce n'est pas facile.

Qu'on dise ce qu'on veut, je pense que nos lois d'impôt sont aujourd'hui des lois complexes. Elles ne sont pas faciles. Alors, pour vulgariser toute notre loi, c'est quelque chose d'assez difficile. Pour moi, la seule erreur que nous ayons faite, c'est d'avoir placé une flèche au lieu d'un point, comme on aurait pu le placer ailleurs. Vous savez, c'est un gros point noir.

M. Morin: Oui. Est-ce que vous aviez déjà reçu beaucoup de retours d'impôt, de formulaires, au moment où vous avez décidé de publier cette annonce?

M. Quenneville: On avait reçu des déclarations et il faut vous dire que, pour la majorité des contribuables, cela ne les dérange pas, du moins jusqu'à ce temps-là et à aujourd'hui, parce que 90% des déclarations qu'on reçoit sont des remboursements. Alors ceux qui se sont trompés, tout ce qui arrive, c'est qu'ils ont le plaisir d'avoir un chèque de remboursement d'une valeur plus grande que celui qu'ils s'attendaient d'avoir...

M. Morin: Parce que tout cela est vérifié, automatisé, d'ailleurs, si je comprends bien.

M. Quenneville: Cela pouvait déranger les personnes qui avaient un compte à nous payer. Comme je vous dis, actuellement, 90% reçoivent des remboursements. Donc, cela n'a pas pu déranger beaucoup de gens. On a eu tout de même la décence de penser à publier l'annonce, parce que dès qu'on a reçu nos déclarations d'impôt, on a constaté cette anomalie. Alors, on a eu la décence, aussi vite que possible, de faire publier l'annonce.

Vous comprendrez comme moi qu'avant de préparer une annonce et de s'organiser pour la faire publier et qu'elle paraisse la journée la plus favorable pour les contribuables, cela a pris une couple de semaines avant d'y arriver.

M. Morin: De toute façon, il n'y a pas de conséquence pour le contribuable, puisque vous corrigez automatiquement, même pour ceux qui, sans doute, n'auront pas vu l'annonce, parce que tous les gens ne l'auront pas nécessairement vue.

M. Quenneville: Le programme mécanographique corrige cela.

M. Morin: II le corrige automatiquement. Maintenant, est-ce que cela ne soulève pas tout de même le problème plus vaste de la complexité croissante des formulaires d'impôt? La refonte de la Loi de l'impôt, en 1972, visait, avait pour objectif, entre autres, de simplifier l'impôt, de le ramener vraiment au minimum en ce qui concerne les exemptions, les déductions de toute nature, qu'on est bien forcé de mettre sur les formulaires d'impôt, parce que, constamment, le ministère des Finances modifie ses politiques.

En tout cas, c'était l'avis du prédécesseur du ministre actuel, que cette loi avait essentiellement, pour objectif, qu'un des principaux objectifs était de simplifier la fiscalité pour le contribuable.

Or, je n'ai pas besoin d'être grand clerc pour savoir que, chaque année, maintenant, cela devient de plus en plus complexe. Une année, c'est une déduction nouvelle. Je pense, par exemple, qu'il y a eu toute une kyrielle d'exemptions et de déductions au cours des derniers budgets. Le ministre sait de quoi je parle.

Est-ce qu'il n'y a pas un danger que cela devienne presque inintelligible pour le commun des mortels? Quelle sorte de recommandations votre ministère a-t-il fait, par exemple, au ministre des Finances, pour que l'objectif de la loi de 1972 soit vraiment mis en oeuvre, c'est-à-dire une simplification de la fiscalité et des formulaires?

M. Quenneville: Je ne sais pas, M. le Président, si la réforme fiscale a simplifié les lois. Je crois que, peut-être, dans certains domaines, cela les a compliquées, parce que, si on ajoute le problème de la taxation du gain de capital qui n'existait pas dans la loi de 1971, je crois que c'est une complexité additionnelle. Quant aux exemptions, peut-être que les complexités ne sont pas élargies, mais rien n'empêche le fait que les lois fiscales nord-américaines vont de plus en plus vers la complexité. On veut couvrir passablement plus de situations que celles que les anciennes lois fiscales prévoyaient.

En ce faisant, naturellement, cela demande énormément plus de questions dans la déclaration d'impôt pour savoir si les gens se qualifient et leur donner aussi le moyen de réclamer ce à quoi ils ont droit.

Actuellement, nous sommes rendus à un point, avec l'expérience vécue cette année et vécue par les années passées, que nous nous rendons compte qu'il faut absolument revoir ces déclarations pour les mettre le plus possible à la disposition de ceux qui doivent les remplir. A cet effet, nous avons déjà, depuis, disons, trois semaines ou un mois, formé un comité spécial qui va s'occuper exclusivement de cela, avec des sous-comités au ministère, pour être en mesure, l'an

prochain, d'améliorer le formulaire de la TP-1 aussi bien que le formulaire connexe, que ce soient le guide et les autres formules.

M. Morin: Vous l'avez formé il y a deux ou trois semaines, me dites-vous, ce comité?

M. Quenneville: Oui, mais il a toujours existé. D'un autre côté, ce sont toujours des pressions qui s'ajoutent à d'autres, des priorités qui s'ajoutent à d'autres. On se rend compte aujourd'hui que c'est une tâche de douze mois que de préparer le formulaire que nous avons, parce que, au nombre de formulaires que nous avons au ministère du Revenu, c'est une tâche énorme. Plus les lois se compliquent, naturellement, plus il nous faut essayer de prévoir, dans nos formules, les informations que le contribuable va nous donner pour pouvoir être en mesure de justifier si elles répondent aux critères que la loi exige dans tel ou tel cas. On peut parler des transferts d'exemptions, par exemple, entre conjoints. Ce sont des choses comme cela qui peuvent amener de nombreuses complexités.

Nous essayons le plus possible, M. le Président, de cerner les problèmes, de regarder cela avec des yeux nouveaux, dans le but d'améliorer les formulaires, mais cela ne veut pas dire qu'on répondra toujours aux attentes de tout le monde. D'aucuns veulent des formules particulières pour leur statut social; d'autres en veulent d'un autre genre, pour leur propre statut social, etc. On ne pourra jamais satisfaire tout le monde. Plus cela devient complexe, plus on essaie de vulgariser les choses complexes, plus les dangers d'erreurs sont grands.

C'est toute cette préoccupation que nous avons d'obtenir un bon produit du contribuable, de façon à expédier le plus possible notre procédure pour le satisfaire davantage et d'une façon plus diligente. C'est dans cette optique qu'on va travailler, cette année. C'est déjà commencé. Nous essaierons, durant les quelques mois qui viennent, d'améliorer le formulaire que nous avons, ainsi que les formules connexes.

M. Morin: Je n'en doute pas. Seulement, si vous voulez, on va distinguer deux choses. Il y a d'abord le formulaire lui-même par rapport à la législation. Ce que vous m'avez dit jusqu'ici, c'est que vous tentez de faire le formulaire le plus simple possible, le plus clair possible, le plus abordable possible pour le contribuable, en partant de la législation existante. La question que je vous pose va un petit peu plus loin que cela. Elle est dans la ligne de pensée de M. Marcel Bélanger dans un des exposés qu'il faisait récemment au congrès de l'Association canadienne d'études fiscales. Il allait beaucoup plus loin. Il ne disait pas: II s'agit de faire le plus beau formulaire possible à partir de ce qui existe, mais il faut mettre de l'ordre dans la complexité de la législation fiscale et, à ce moment, forcément, là tâche de faire un formulaire clair et précis se trouve simplifiée. C'est cela le sens de ma question. Je vais plus loin. Je me per- mets de citer Marcel Bélanger qui n'est tout de même pas le premier venu dans ce domaine — je pense bien qu'on l'admettra — qui disait: Les modifications apportées au régime fiscal par le gouvernement fédéral et ses homologues provinciaux aboutissent à un régime d'imposition d'une telle complexité que même les fiscalistes professionnels y perdent leur latin.

Si les fiscalistes professionnels s'y perdent, vous comprenez que le contribuable moyen, l'homo quebecensis, pour parler comme un certain philosophe de Laval, s'y perd d'autant plus. C'est cela le sens de ma question. Cela va plus loin que la clarté du formulaire. Est-ce que votre ministère se préoccupe de la complexité du régime lui-même?

M. Quenneville: M. le Président, je crois que la question du chef de l'Opposition se situe sur un autre plan. Il faut se rappeler que le ministère du Revenu a pour mandat d'administrer les lois fiscales. Donc, nous administrons des lois. Ces lois assortissent à la politique fiscale qui n'est pas la responsabilité du ministère du Revenu.

M. Morin: J'ai manqué la dernière phrase. Ce que vous m'avez dit, en somme, c'est que cela ne relève pas de votre ministère. Cela relève des Finances.

M. Quenneville: C'est cela. Notre mandat, c'est tout simplement de traduire les mesures fiscales à l'intérieur des lois, purement et simplement.

M. Morin: D'accord.

M. Quenneville: Quant aux modifications, aux exemptions, et peut-être essayer d'avoir une certaine cohésion dans les mesures fiscales, cela appartient définitivement au ministère des Finances.

M. Morin: Je me permets, pour qu'on vide la question, de ne pas être d'accord, du moins pas à priori, parce que dans la mesure où vous vous posez comme objectif d'avoir des formulaires le plus simples possible, le plus abordables possible, vous êtes obligés de vous pencher sur la question, la seconde question que j'ai soulevée. Vous ne pouvez pas l'éviter. Si c'est votre responsabilité de faire un formulaire convenable, c'est aussi votre responsabilité de voir à ce que les lois qui vous sont imposées au ministère du Revenu, ne soient également pas trop complexes. En tout cas, est-ce que ce ne serait pas, est-ce qu'on ne pourrait pas dire, à tout le moins, que c'est votre responsabilité de faire valoir auprès du ministère des Finances que la complexité grandissante des lois fiscales vous cause des ennuis et en cause aux contribuables? Vous êtes d'accord. Est-ce qu'il y a des démarches que vous pouvez faire auprès des Finances, que votre comité, celui que vous venez de réactiver, pourrait faire auprès des Finances pour leur souligner l'importance de cette question de complexité des lois fiscales?

M. Quenneville: M. le Président, on est absolument d'accord sur cet aspect. Je peux vous dire que nous ferons les représentations, parce que nous sommes, naturellement, les premiers à bénéficier des solutions qu'apportera le ministère des Finances. I! faut dire que jusqu'ici, remarquez bien que plus cela devenait complexe, plus cela nous a incités à faire déjà des démarches auprès du ministère des Finances. On en avait déjà fait..

M. Morin: Est-ce qu'on peut compter qu'au cours de l'année qui vient, ce serait vraiment sinon une priorité, du moins certainement une question à laquelle vous acoorderez beaucoup d'importance?

M. Quenneville: Exactement, M. le Président. Comité consultatif

M. Morin: Vous avez également, au ministère, et cela se rattache peut-être à cette question — au moins indirectement, cela s'y rattache — un comité consultatif. Nous en avons parlé, d'ailleurs, l'année dernière. Si le ministre a pu lire les débats qui avaient entouré l'étude des crédits de son prédécesseur, nous avions parlé de la représentativité de ce fameux comité consultatif.

J'aimerais vous demander, tout d'abord, si le comité en question a siégé au cours de l'année écoulée. Je vous rappelle que, l'année dernière, c'était sur le point de se réunir et cela pressait. J'ai hâte de voir.

M. Quenneville: Au sujet du comité consultatif, dès mon arrivée au ministère, j'ai été saisi de ce problème qui avait été soulevé depuis au moins l'an dernier, et, je pense, il y a deux ans aussi, au cours de l'étude des crédits du ministère. Nous avons convenu — les sous-ministres et moi-même — de réactiver ce comité consultatif et de nommer de nouveaux membres parce que, depuis 1971, il n'y avait pas eu de réunion de ce comité consultatif.

Nous avons dressé une liste de membres, de candidats susceptibles de remplir ce rôle et de rendre service à l'intérieur de ce comité consultatif.

Nous avons commencé à remercier ceux qui, forcément, avaient rendu des services dans les années 1970-1971. Il y en avait quelques-uns qui avaient été nommés juges entre-temps, etc., et je peux vous dire que nous devons prendre contact ces jours-ci avec les nouveaux membres du comité consultatif. Nous avons quinze noms actuellement de personnes choisies dans les différentes sphères d'activités et nous devrions tenir la première réunion au mois de mai, au plus tard au début de juin.

Il n'y a pas eu de réunion depuis un an.

M. Morin: Non. Je vois bien. Seulement, l'année dernière, on nous avait assurés que ce comité était en voie de restructuration, qu'il allait se réunir — en fait, je ne veux pas vous citer des pa- ges — incessamment, qu'on allait y voir. Alors, une autre année de franchie et, somme toute, vous êtes encore sur le point de le réunir.

M. Quenneville: Exactement.

M. Morin: C'est vraiment sérieux cette fois?

M. Quenneville: C'est sérieux, certainement. Il y a déjà eu des gestes de posés d'ailleurs. Nous avons dissous le comité précédent.

M. Morin: Et qui en faisait partie, soit dit en passant? Ceux qui restaient, en tout cas?

M. Quenneville: De ceux qui restaient, il y a M. Charles McLaughlin. Il y avait un monsieur Cousineau, M. Charles Pelletier, M. Rémi Amyot, M. Heward Stickeman, M. Lucien Bélair et M. Raymond Décary qui a été nommé juge à la Cour de l'échiquier.

M. Morin: Bon. C'est l'ancien comité.

M. Quenneville: L'ancien comité. Il a été dissous. D'ailleurs, le ministre vous l'a dit tantôt. Actuellement, nous sommes à reconstruire un nouveau comité. D'ailleurs, je peux vous le dire. Cela a été la préoccupation du ministre actuel dès son entrée. Mais, d'un autre côté, il fallait faire le nécessaire dans le temps et cela marche d'une façon sérieuse.

M. Morin: Donc, à l'heure actuelle, on peut dire que le comité est presque reconstitué. Combien y aura-t-il de membres?

M. Quenneville: De dix à douze membres, je crois.

M. Morin: II y en avait sept auparavant? C'est cela? Il s'agit donc maintenant d'un élargissement. Dix ou douze membres. Puis-je vous demander combien il y en a de nommés et qui sont-ils?

M. Quenneville: II n'y en a pas de nommé, présentement... On a quinze candidats possibles. C'est qu'il faut faire des contacts au préalable pour connaître s'ils sont d'accord.

M. Morin: D'accord.

M. Quenneville: II va avoir une autre représentativité que celle qui existait auparavant.

M. Morin: Vous élargissez la représentativité, en particulier dans quels domaines, par rapport à ceux qui étaient déjà représentés sur le comité?

M. Quenneville: II faut naturellement des fiscalistes.

M. Morin: Oui, je m'en doutais.

M. Quenneville: Et le mouvement coopératif,

la grande entreprise, la moyenne et la petite entreprise, les autonomes en affaires. Il va y avoir des salariés, la consommation va être représentée, c'est à peu près tout.

M. Morin: Les premières consultations vont porter sur quoi? J'imagine que vous vous êtes également penché là-dessus? Puisque ce comité va se réunir au mois de mai, vous avez déjà, j'imagine, une sorte d'ordre du jour ou est-ce le comité qui fixera lui-même son ordre du jour?

M. Quenneville: Le comité sera un comité consultatif au ministre, alors normalement le comité pourra faire son propre ordre du jour. Le mandat sera semblable à celui qui existait au préalable, peut-être avec quelques petites nuances, mais dans ses grandes lignes, cela sera à peu près la même chose. Cela sera le président qui déterminera, avec le secrétaire ou le vice-président, tout dépendra naturellement de la représentation administrative qu'ils veulent faire dans le comité, l'ordre du jour en premier lieu, et, ainsi de suite.

Ils pourront fixer non seulement l'ordre du jour, mais fixer en même temps la fréquence des réunions. On leur donne à ce moment, le mandat justement de fixer ces choses dès le départ.

M. Morin: Allez-vous vous-même prendre l'initiative de leur poser un certain nombre de problèmes sur lesquels vous compter obtenir leur avis?

M. Quenneville: Oui, certainement.

M. Morin: Selon vous, c'est un comité qui devrait se réunir normalement combien de fois par année?

M. Quenneville: Environ quatre fois par année.

M. Morin: Pour une pleine journée?

M. Quenneville: Bien, à ce moment, tout dépendra de l'ordre du jour. J'imagine facilement qu'il peut y avoir de la matière suffisamment pour cela.

M. Morin: Oui, de toute façon, j'imagine que c'est un comité qui va fonctionner comme un certain nombre d'autres au sein du gouvernement, c'est-à-dire que le travail est fourni d'avance aux membres du comité, pour qu'ils puissent y penser avant de... Donc, ce sont des sessions extrêmement intensives. Est-ce que le ministre aurait objection à communiquer à cette commission la liste des personnes auxquelles on songe à l'heure actuelle?

M. Quenneville: M. le Président, je préférerais sûrement contacter ces gens-là avant, d'abord, de toute façon...

M. Morin: Vous voulez dire qu'ils n'ont pas encore été pressentis.

M. Quenneville: Non. Ils n'ont pas été contactés. Il y a quinze noms, effectivement et on en prendra dix ou douze à l'intérieur de ces quinze.

M. Morin: On est à peu près au même stade où on en était l'année dernière.

M. Quenneville: On n'est pas au même stade, au contraire, on a au moins, quand même, dissous le premier comité consultatif. On a remercié ces gens et naturellement on a une liste de candidats susceptibles de pouvoir nous aider, comme je le disais tantôt, à l'intérieur du comité consultatif. On a, je pense bien, quand même, des orientations nouvelles, dans le sens qu'on essaie d'avoir un éventail de participants, dans toutes les sphères d'activités. C'est quand même un aspect nouveau.

M. Morin: Je cherche des raisons de féliciter le ministre, mais vous ne me voyez pas vous féliciter d'avoir dissous un comité.

M. Quenneville: Non, je pense qu'on a quand même posé des gestes positifs aussi, pas seulement des gestes négatifs. On a quand même fait des efforts pour chercher dans différents milieux. Je peux vous dire que cela ne se fait pas facilement, savoir, obtenir des suggestions et aussi respecter en même temps une certaine distribution géographique. Cela ne se fait pas du jour au lendemain, on a été obligé de consulter des gens, parce que ce ne sont pas nécessairement des gens que nous connaissons qui seront choisis.

M. Morin: La Presse du 4 octobre 1975 rapportait que deux firmes ont été engagées à titre de conseillers en matière de rédaction et de révision des lois fiscales. Est-ce que ces deux firmes agissaient déjà au sein de l'ancien comité ou sont-elles pressenties pour les nouveaux comités?

C'était dans la Presse du 4 octobre et on nous y apprend qu'il s'agit des sociétés Stikeman Elliott Tamaki Mercier et Robb de Montréal et Thorne Riddell & Co., de "Montreal" également.

M. Quenneville: II y a "Desaulniers" aussi! Une Voix: II parle anglais.

M. Morin: Oui... c'est ce qu'on appelle un comité francophone.

M. Quenneville: Of course!

M. Morin: Est-ce que ces deux firmes étaient associées au comité consultatif? Est-ce qu'elles auront...

M. Quenneville: Premièrement, nous n'avons pas engagé de firme. Nous avons engagé deux professionnels fiscalistes. Le premier, M. Claude Desaulniers était un ancien membre du contentieux du ministère du Revenu qui appartenait à la Justice et qui avait oeuvré avec nous dans la rédaction des lois. S'il a laissé le ministère, il a conservé ses talents qui nous étaient absolument utiles dans la réforme fiscale.

M. Morin: Où est-il maintenant, ce Desaulniers?

M. Quenneville: Chez Stikeman, Elliott. Pour M. Helmut Burke, comptable agréé, qui fait partie de la maison dont vous avez mentionné le nom tantôt, il a été engagé également comme fiscaliste lors de la rédaction de la réforme fiscale. Alors, depuis...

M. Morin: Depuis, il est chez Thorne Riddell et Co.

M. Quenneville: Oui.

Je connais le nom de Helmut Burke, mais je ne connais pas la firme, alors cela peut vous dire une chose qu'on n'a pas engagé la firme. Ce sont des professionnels experts en fiscalité. Alors, ce sont des gens qui nous ont rendu des services comme tous les bons professionnels dans ce domaine peuvent rendre à ceux qui les engagent. Nous les avons réengagés ensuite pour les amendements, pour les règlements, pour nous aider à rédiger le tout, parce que nous n'avions pas le personnel disponible pour réaliser ces tâches dans le moment, dans l'échéancier qui nous était fixé. En plus de cela, l'expérience de la réforme nous a aidé également, l'expérience qu'ils avaient acquise avec nous dans la réforme des lois, était une expérience tout à fait valable pour nous. Il ne fallait pas recommencer et je crois qu'ils nous ont rendu des services très valables et nous leur en sommes reconnaissants.

M. Morin: Est-ce que des membres de ces deux études fiscales vont être membres du comité consultatif?

M. Quenneville: Pas nécessairement. M. Morin: M. Stikeman?

M. Quenneville: M. Stikeman était membre de l'ancien comité. Je crois bien que, si on veut des membres d'organismes, il faut bien demander à l'organisme s'il peut disposer du membre qu'on désire. Tout dépendra, n'est-ce pas? D'un autre côté, il nous faut des fiscalistes dans ce comité, parce qu'il faut parler des lois qu'on a à administrer et c'est normal que le ministre soit conseillé par des gens qui s'y connaissent dans le milieu.

M. Morin: Mais, est-ce que les deux firmes auxquelles appartiennent ces experts ne représentent pas un certain nombre de clients privés dans leurs rapports avec le ministère?

M. Quenneville: C'est tout à fait normal d'ailleurs. Tout professionnel, avocat ou comptable agréé représente quelqu'un de l'extérieur. C'est évident. Mais, d'un autre côté, ce sont des professionnels. Ils ont, il ne faut pas l'oublier, prêté serment de confidentialité et ce sont des professionnels que je respecte.

M. Morin: Moi aussi, je les respecte comme professionnels, mais est-ce que ces deux messieurs, pour être plus précis encore, représentent eux-aussi des clients privés auprès du ministère? J'entends M. Desaulniers et M. Burke.

M. Quenneville: C'est possible et je ne vois rien contre cela parce que leurs clients sont traités comme les autres.

M. Morin: Vous n'y voyez pas, comme certains l'on évoqué, en termes exprès dans la presse, une possibilité de conflit d'intérêt?

M. Quenneville: Non, parce que si ces gens sont professionnels, je considère que les gens au ministère du Revenu sont aussi professionnels et peuvent faire la part des choses, comme eux doivent faire la part des choses.

M. Morin: Je sympathise avec le fait que vous n'ayez pas au sein du ministère les experts, quoique moi, je serais personnellement porté à faire davantage confiance aux fonctionnaires que vous êtes qu'à des gens de l'extérieur. Je vous avoue que je ne peux pas m'empêcher de me sentir très mal à l'aise devant ce système. J'imagine que ça devrait aussi vous laisser un peu songeur.

M. Quenneville: Nous en avons au ministère un certain nombre de fonctionnaires très compétents, mais nous n'en avons pas assez, quand il y a un manque, il faut suppléer le manque pour atteindre des objectifs.

M. Morin: Vous savez, il n'y a pas que...

M. Quenneville: Dans la mesure où on peut exercer un certain contrôle, une certaine sécurité.

M. Morin: Vous savez, il y a aussi l'image que le ministère projette à l'extérieur, et je crois que ça n'aide pas le ministère. Vous en penserez ce que vous voudrez, je vous dis ce qui est ressenti à l'extérieur du ministère, de l'autre point de vue. Cela n'aide pas le ministère quand on voit le prix qu'il faut payer pour que vous puissiez consulter ces experts de l'extérieur. C'est beaucoup plus que les honoraires qu'ils vous réclament. C'est l'image du ministère qui risque d'en souffrir. Je ne vous dis pas que ce sont des dégâts irréparables, ce n'est pas ça que je suis en train de dire. Il me semble que vous devriez au moins vous poser la question, parce que quand on voit dans un quotidien qui, ma foi, circule passablement puisqu'il s'agit de la Presse, quand on voit un passage comme ceci, on peut s'interroger sur l'image, la crédibilité du ministère auprès du contribuable moyen. Je cite, "On ne semble pas non plus voir l'incompatibilité de fonction, même si les hauts fonctionnaires eux, n'ont pas le droit de travailler pour des entreprises juridiques ou comptables spécialisées en matière fiscale." Voilà le prix qu'il faut payer. Est-ce que vous n'estimez pas qu'il est très élevé, ce prix, et qu'un ministère comme le vôtre qui touche à un aspect fortement sensible de la chose publique,

puisqu'il touche aux deniers des citoyens et qu'il doit pouvoir compter sur un minimum de confiance de la part des citoyens, est-ce que vous ne croyez pas que cette pratique vous coûte plus cher que vous ne le pensez et que vous auriez plutôt intérêt à l'abandonner?

M. Quenneville: Je voudrais vous dire là-dessus, M. le Président, que ces gens n'ont accès à aucun dossier lorsqu'ils oeuvrent au ministère du Revenu comme professionnels de l'extérieur.

M. Morin: Ce n'est pas la confidentialité qui m'inquiète.

M. Quenneville: Non, il y a aussi le fait que si le réservoir de ces gens qui sont susceptibles de nous aider existait ou qu'on pouvait puiser dans ce réservoir, on n'aurait pas ce problème. Si c'était un problème typique au ministère du Revenu du Québec, peut-être qu'il faudrait se poser des questions. Mais, d'un autre côté, c'est un problème qui existe au niveau national.

M. Morin: Fédéral.

M. Quenneville: Et c'est une politique du gouvernement fédéral d'engager des gens de l'entreprise privée pour l'aider à faire son boulot.

M. Morin: Oui, je sais. Je sais, mais ça ne rend pas la pratique nécessairement plus acceptable.

M. Quenneville: Cela ne rend pas la pratique peut-être plus acceptable à vos yeux, mais ça devient une nécessité qu'on peut contrôler et aussi qu'on doit apprécier, parce que le professionnel qui vient de l'extérieur aider le ministère est dans une situation lui-même difficile vis-à-vis du ministère.

M. Morin: M. le sous-ministre, je vous arrête un instant, parce que c'est une question qui n'est pas technique, c'est un choix politique. C'est l'image du ministère. Ce que je veux, c'est l'avis du ministre, cette fois-ci. En tout respect, j'aimerais bien savoir ce que vous, vous en pensez. Après tout, c'est vous qui êtes le responsable de ce ministère devant l'Assemblée.

M. Quenneville: Ah bon! M. le Président, ce que je pense, c'est que si l'on n'a pas l'effectif pour suffire à la tâche et qu'il faille, à ce moment, recourir à des spécialistes de l'extérieur, je pose la question, à ce moment, au chef de l'Opposition: Où va-t-on prendre les fiscalistes ailleurs qu'aux endroits où il y en a? Nécessairement, on les prend où il y en a. Il se trouve qu'ils sont à l'intérieur, naturellement, de firmes de fiscalistes.

M. Morin: Je pense qu'il faut que le gouvernement prenne les moyens de s'équiper avec le personnel dont il a besoin.

M. Quenneville: C'est ce qu'on tente.

M. Morin: Oui, mais, attention, non pas des gens qui peuvent être en conflit d'intérêts.

M. Quenneville: Pourquoi seraient-ils en conflit d'intérêts plus que les autres? Voyons donc.

M. Morin: Parce que ces gens représentent des clients et que, même inconsciemment, ils peuvent être amenés, peut-être, à prendre des attitudes qui ne sont pas celles de l'Etat, mais l'attitude du contribuable.

M. Quenneville: Oui. Mais, à ce moment, cela ne répond pas à ma question. Où prendriez-vous vos fiscalistes?

M. Morin: J'imagine que M. Desaulniers a déjà été au ministère.

M. Quenneville: II y a déjà été, mais, à un moment donné, il a cru bon quand même de s'en aller dans...

M. Morin: Qu'est-ce qui est arrivé? Vous n'avez pas réussi à le retenir?

M. Quenneville: Je n'étais pas là.

M. Morin: C'est toujours le même problème de la rivalité avec l'entreprise privée et avec le niveau fédéral.

M. Quenneville: On ne nie pas cela. On ne nie pas ce fait. C'est justement ce qu'on a dit hier; effectivement, l'entreprise privée, à un moment donné, pouvait attirer davantage un fiscaliste que les salaires du ministère du Revenu.

M. Morin: Ecoutez, ce n'est pas à moi à répondre à la question...

M. Quenneville: C'est à vous quand même à indiquer... Vous nous blâmez depuis tantôt.

M. Morin: Je vous dis qu'il faut les trouver.

M. Quenneville: Oui, mais donnez-nous des indications.

M. Morin: II faut faire confiance aux gens de votre ministère. Je trouve que c'est un manque de confiance dans les gens de votre ministère.

M. Quenneville: Je regrette infiniment, M. le Président, c'est une information bien gratuite. Je pense quand même que nos fonctionnaires au ministère méritent toute la considération. Nous la donnons. Quand ils sont surchargés, malheureusement, ils ne sont pas en mesure de faire ce travail et il faut aller en dehors.

Vous semblez embêté quand je vous pose la question.

M. Morin: Je vais vous donner des sources.

M. Quenneville: Ah bon!

M. Morin: Avez-vous songé à vous adresser aux universités, à la Canadian Tax Foundation? Avez-vous pensé à M. Marcel Bélanger?

M. Quenneville: M. Gauvin.

M. Morin: Bien non, vous, M. le ministre.

M. Quenneville: Je n'étais pas là. Ne venez pas me demander cela à moi. Un instant, s'il vous plaît!

M. Morin: C'est une question politique. Je ne veux pas embêter votre sous-ministre avec une question qui est celle de l'image de votre ministère.

M. Quenneville: Un instant! Vous me demandez pourquoi ces gens ont été choisis. Ne me demandez pas à moi pourquoi ils ont été choisis, je ne les connais même pas.

M. Morin: Je veux bien que votre sous-ministre réponde, parce que c'est une question de fait. Je n'y ai pas d'objection, mais sur la question de l'image de votre ministère...

M. Quenneville: C'est une affirmation bien gratuite.

M. Morin: ... c'est vous qui en êtes responsable, ce n'est pas votre sous-ministre.

M. Quenneville: De toute façon, depuis que je suis là, il n'y a pas de problème.

M. Morin: II n'y a pas de problème?

M. Quenneville: Ah non! Ils sont tous réglés.

M. Morin: Alors, on perd notre temps?

M. Quenneville: Pardon? Surtout avec les suggestions que vous faites, vous perdez passablement votre temps. Les points que vous soulevez ne sont réellement pas...

M. Morin: Je ne dis pas qu'ils font votre affaire, mais je trouve que c'est une question de principe.

M. Quenneville: Pas du tout.

M. Morin: C'est une question de principe à laquelle nous touchons.

M. Quenneville: Je pense, naturellement, que vous avez des principes qui vous chatouillent un peu.

M. Morin: Mais qui ne semblent pas vous chatouiller suffisamment.

M. Quenneville: Je pense bien que je suis bien à l'aise de...

M. Morin: Ecoutez, on va revenir au sous-ministre. Peut-être qu'il a une explication à nous donner là-dessus. Est-ce que vous avez songé à d'autres organismes, à la Canadian Tax Foundation? Il y a des universitaires qui sont spécialistes de la fiscalité.

M. Quenneville: La Canadian Tax Foundation n'a peut-être pas suffisamment de personnel pour faire toutes les études qu'elle voudrait faire. Vous avez parlé de M. Marcel Bélanger. Il fait partie d'une maison de comptables agréés, également.

M. Morin: II est de retour dans une maison de oomptables agréés?

M. Quenneville: Bélanger, Dallaire, Gagnon et Cie. Est-ce qu'il y en a d'autres?

M. Morin: Et, dans les universités, il y a tout de même maintenant un certain nombre de fiscalistes.

M. Quenneville: Nous avons engagé, pendant la réforme fiscale, un professeur d'université en fiscalité, Me Bertrand.

M. Morin: Oui, qui est maintenant au...

M. Quenneville: Sous-ministre adjoint au fédéral.

M. Morin: Au fédéral, oui, qui s'occupe des ententes illégales; c'est cela? M. Robert Bertrand.

M. Quenneville: Oui.

M. Morin: II n'y en a pas d'autres, comme Robert Bertrand, qui soient du même calibre? Je ne peux que vous féliciter d'avoir eu recours à un homme de ce calibre. Il me semble que c'est là la solution, non pas aller chercher des gens de l'entreprise privée qui représentent des clients auprès du ministère.

M. Quenneville: M. le Président, un professeur d'université est-il exclu de la pratique privée.

M. Morin: Que je sache, oui. En principe, oui. En tout cas, je pense que le professeur Bertrand n'avait pas de clients et ne représentait pas de clients auprès du ministère. Si c'est le cas, j'aimerais bien le savoir parce que l'université normalement ne tolère pas ce genre de double emploi.

M. Quenneville: M. le Président, il semble que le fait pour un professeur de ne pouvoir faire partie de l'entreprise privée, serait quand même un fait passablement nouveau. Connaissez-vous des professeurs en fiscalité qui n'ont pas de bureau?

M. Morin: Oui. Ecoutez, à moins que je ne

fasse erreur et c'est à vous de me le dire. Je ne pense pas que le professeur Robert Bertrand ait eu une pratique privée. Auprès du ministère, il représentait des membres...

M. Quenneville: M. le Président, je regrette infiniment, mais l'information qu'on me donne c'est que le M. Bertrand en question est en pratique privée.

M. Morin: J'allais alors dire que vous lui avez confié la révision de la loi. Cela n'arrange rien, mais n'y a-t-il pas d'autres fiscalistes? Mon propos n'est pas le passé, c'est plutôt l'avenir. N'y a-t-il pas d'autres fiscalistes dans les universités qui ne représentent pas de clients auprès de votre ministère et dont vous pourriez utiliser les services? Je ne pense pas qu'on puisse en démordre. Je pense même que, sur le plan des principes, le sous-ministre va être obligé d'être d'accord avec moi que ce n'est vraiment pas une situation idéale et ce n'est même pas une situation acceptable. Sur le plan des principes.

M. Quenneville: II y a toujours la possibilité, M. le Président, comme on me le fait remarquer, que le professeur d'université, après avoir travaillé au ministère du Revenu retourne à la pratique privée, qu'est-ce que cela change? Où est votre principe à ce moment?

M. Morin: Vous avez aussi des experts qui peuvent, un jour, s'en aller dans la pratique privée, mais quand ils sont chez vous, ils ont le point de vue de l'Etat, ils n'ont pas le point de vue du client.

Non, M. le Président, peut-être n'ai-je pas à insister là-dessus. Je pense que cela se rattache au peu de sens de l'Etat qu'on a au Québec. C'est aussi simple que cela.

M. Fraser:... sont toujours les accusés de tout le monde.

M. Quenneville: Non, non.

M. Fraser: ... peut-être que le monde était un monde qu'il a exécuté lui-même...

M. Morin: Oui, c'est cela. Je n'ai mis l'intégrité d'aucune personne en particulier en question, M. le Président. Ce n'est pas du tout ce dont il est question. Il est question de l'intégrité de l'Etat, de l'intérêt supérieur de l'Etat et, d'autre part, de l'intérêt des particuliers, et on ne doit pas les confondre.

Même si ces messieurs... et je n'ai pas de doute personnellement qu'ils ne soient qualifiés, intègres et honnêtes, mais c'est la question de principes. On ne peut pas mêler, de la sorte, l'Etat et les particuliers.

M. Quenneville: M. le Président, qu'est-ce que cela pourrait être si le chef de l'Opposition avait des doutes sur l'intégrité de quelqu'un, je pense réellement qu'il a poussé un peu loin.

M. Morin: Je viens de dire que je n'en avais pas.

M. Quenneville: Par contre, vous laissez sous-entendre un tas de choses.

M. Morin: C'est une question de principes. On ne doit pas confondre l'Etat et les particuliers. C'est aussi simple que cela. Même quelqu'un qui a l'intégrité la plus complète ne peut pas oublier, dans son subconsient, qu'il représente des clients. C'est le danger. Ou dans certains cas, où il se glisserait parmi eux quelqu'un qui n'est pas intègre, alors là, il risquerait d'y avoir des conflits d'intérêts réels.

Le sous-ministre ne conviendra-t-il pas, à tout le moins, que cette situation n'est pas idéale et qu'il conviendra un jour que le ministère ait ses propres experts, bien à lui?

M. Quenneville: L'idéal serait qu'on ait les experts en nombre.

M. Morin: C'est l'image de l'Etat et du ministère qui en prend un coup. Le ministre fait la moue comme s'il s'en fichait, mais...

M. Quenneville: M. le Président, pas du tout, au contraire, c'est de l'interprétation et d'ailleurs, c'est de l'interprétation depuis longtemps.

M. Morin: Mais ce qui a paru dans la Presse vous donne une idée de l'image que vous projetez.

M. Quenneville: M. le Président, qu'un journaliste, un moment donné, ponde un article comme celui-là, je pense bien que ce n'est pas l'impression et l'image que projette le ministère du Revenu dans la population. Il y a une jolie marge.

M. Morin: Et vous croyez que cela contribue à l'améliorer?

M. Quenneville: Des articles de journaux comme celui-là? C'est sûr que cela n'améliore pas. Je ne les souhaite pas non plus. C'est de la démagogie.

Achat des remboursements

M. Morin: Je continuerai de soutenir que sur le plan des principes, c'est inacceptable. Mais je vois que nous ne pourrons pas nous entendre sur ce principe pourtant élémentaire, de sorte qu'il vaut peut-être mieux passer à autre chose.

Jetons un coup d'oeil sur un sujet qui a déjà fait l'objet d'un débat l'année dernière, c'est l'achat des remboursements. Nous en discutions aux pages B-2173 à B-2177. Nous avons eu déjà un long débat que je ne voudrais pas refaire dans le détail. Le ministre du Revenu a l'habitude de rappeler aux contribuables qu'il est défendu de vendre leur remboursement à des agences spécialisées dans la préparation du rapport d'impôt. Est-ce que je puis lui demander quelle a été l'am-

pleur de ce phénomène au cours de l'année écoulée; est-ce qu'il y a eu une amélioration par rapport aux années précédentes?

M. Quenneville: Voici, M. le Président, au niveau de la Loi du ministère du Revenu, nous défendons les cessions de remboursement. Maintenant, il faut considérer que la loi fédérale n'a pas les mêmes restrictions. Alors, le gouvernement du Canada, le ministère du Revenu national, tolère que des agents, des personnes, des corporations et même des compagnies de finance négocient les remboursements, ce que nous ne tolérons pas.

Nous avons à l'intérieur du ministère des moyens de détecter sur l'ordinateur les personnes qui demandent des remboursements à des adresses postales ou à des adresses spécifiques. Lorsque nous détectons qu'il y a plusieurs remboursements qui sont adressés à une même adresse, nous les arrêtons automatiquement sur l'ordinateur. Nous avons procédé de cette façon l'année dernière et, encore la semaine dernière, nous avions déjà une liste d'une quarantaine de personnes...

M. Morin: Une quarantaine?

M. Quenneville: ... que nous avons détectées et nous arrêtons de façon systématique les remboursements à ces endroits. Nos systèmes sont prévus pour faire une analyse systématique, avec un personnel spécialement qualifié pour vérifier les listes d'ordinateur pour faire cette détection d'une façon systématique. En même temps, nous apportons une vérification particulière à ces escompteurs de remboursements.

M. Morin: L'année dernière, lors de l'étude des crédits, l'ex-ministre du Revenu avait fait la promesse d'exiger une réglementation de la part du ministère des Institutions financières pour la protection du consommateur dans ce domaine. Est-ce qu'il y a eu des suites à ces bonnes intentions ou est-ce que cela a été la même chose que pour d'autres questions dont nous nous sommes entretenus?

M. Quenneville: A cette question, je ne suis pas en mesure de répondre s'il y a eu des démarches ou non auprès du ministère des Institutions financières.

M. Morin: Vous ne savez pas?

M. Quenneville: Je ne sais pas du tout.

M. Morin: Bien, je vous rappelle alors autre chose que disait l'ancien ministre: "Comme nous aurons amendé nos lois d'ici la fin de l'année 1975, ce sera à considérer — je venais de lui dire qu'il faudrait réviser la loi sur ce plan — parce que nous aurons également le résultat concret par l'examen visuel de nos listes. On dit qu'on est rendu à 87 individus actuellement. Comme on va amender — il s'agit de la loi — comme on sera dans l'obligation d'amender notre Loi sur les impôts d'ici la fin de l'année, on prendra en considération les remarques du chef de l'Opposition". Alors, qu'en avez-vous fait?

M. Quenneville: Nous avons déjà, à l'intérieur de la Loi du ministère du Revenu, les dispositions nécessaires pour faire l'arrêt de ces remboursements. Nous avons déjà les dispositions.

M. Morin: Administrativement. M. Quenneville: Oui. M. Morin: Légalement.

M. Quenneville: Légalement, parce que les remboursements sont insaisissables et incessibles. Ce sont les termes de la loi. Si cela existe dans le Québec et que cela se produit avec les remboursements du ministère du Revenu du Québec, nous remboursons les contribuables et non pas les entreprises.

M. Morin: Oui.

M. Quenneville: Si cela continue à se faire au fédéral, ce n'est pas notre domaine.

M. Morin: Bien non. Je suis bien d'accord. Mais ce n'est pas de la loi fédérale que me parlait l'ex-ministre du Revenu.

M. Quenneville: Nous ne remboursons que le contribuable quand on s'aperçoit que l'adresse de casier postal diffère d'avec l'adresse qui est au fichier magnétique, historique, du contribuable. Nous détectons ces cas, comme cela a été explicité tantôt, et nous prenons les moyens pour éviter que ces choses ne se répètent. Nous allons voir les personnes qui essaient de faire ce commerce. Si elles le font pour des remboursements qui ne sont pas des nôtres, ce n'est pas notre domaine, comme ministère du Revenu.

M. Morin: J'avais fait une suggestion concrète, l'année dernière, au ministre. Il m'avait approuvé. Je lui avais fait la suggestion d'ajouter dans la loi une disposition qui ferait qu'en tout état de cause et en tout temps, un contribuable pourrait toujours récupérer un montant d'un remboursement d'impôt qui aurait été versé à un tiers à la suite d'une cession. En fait, c'est la seule sanction possible pratique pour mettre un frein et pour mettre un terme à ce genre de pratique. Si le contribuable peut toujours retrouver son argent et peut toujours actionner le tiers pour le récupérer, à ce moment-là le système perd tout intérêt et il n'y aura plus de ce genre de pratique.

Ne considéreriez-vous pas, comme l'ex-ministre le faisait l'année dernière, que ce serait une disposition utile à ajouter à la loi?

M. Quenneville: C'est possible, mais l'effet est le même, M. le Président. Si nous remboursons le

contribuable qui a négocié son remboursement avec une firme au préalable, c'est évident que la firme n'a aucun recours contre nous. Elle a un recours contre le contribuable qui a reçu son remboursement.

M. Morin: Oui mais justement, est-ce que cela ne devrait pas être interdit? Est-ce que la pratique elle-même ne devrait pas être interdite?

M. Quenneville: Elle l'est pour autant que nos lois sont concernées. C'est incessible.

M. Morin: Oui, mais est-ce que je vous ai bien compris? A moins que j'aie mal suivi votre explication, vous me dites que la tierce personne aurait toujours un recours contre le contribuable à qui vous adressez le chèque.

M. Quenneville: ...C'est parce que...

M. Morin: S'il y a un recours, c'est parce que la chose n'est pas interdite.

M. Quenneville: Non, c'est qu'il y a des prêts d'argent: C'est évident que ce sont des prêts d'argent. Certains achètent le remboursement de l'individu qu'ils estiment à un montant X.

M. Morin: Oui.

M. Quenneville: Alors ils lui remettent l'argent immédiatement.

M. Morin: C'est cela, oui.

M. Quenneville: Ils s'attendent à recevoir l'argent du ministère.

M. Morin: Ah oui. Là, j'ai compris. Vous voulez dire que ce pourquoi ils auraient un recours, c'est non pas la cession mais l'argent prêté.

M. Quenneville: C'est cela.

M. Morin: On est d'accord. En toute logique, cela a du bon sens. Je me réfère tout de même au fait que l'an dernier, le ministre me disait qu'il fallait revoir les lois d'ici la fin de l'année 1975. Est-ce qu'effectivement, cela a été fait? Je ne parle pas des sept petites lois que le ministre a eu le grand honneur de faire adopter par l'Assemblée nationale à la fin de la dernière session.

M. Quenneville: Vous me parlez de l'autre loi pour laquelle, au cours de l'étude, vous êtes arrivé tellement en retard qu'on avait presque terminé.

M. Morin: La dernière fois? M. Quenneville: Oui.

M. Morin: Oui, en particulier celle où vous aviez procédé hors de ma présence.

M. Quenneville: Oui, parce que vous étiez passablement en retard.

M. Morin: Oui mais quelqu'un m'avait remplacé et puis...

M. Quenneville: Le leader de votre parti, d'ailleurs, nous avait dit de procéder sans vous attendre.

M. Morin: Oui.

M. Quenneville: II pensait probablement que vous n'aviez pas tellement de lumière à nous apporter à ce moment-là.

M. Morin: Je ne pense pas que cela ait été le cas. Mais, de toute façon, le ministre semble vouloir faire dévier le débat. S'il veut placer le débat sur ce plan, qu'il n'ait aucune crainte, je peux le suivre sur ce terrain. Puis là, on va s'amuser. Mais je préférerais que le ministre réponde à mes questions. L'année dernière, son collègue parlait d'une révision des lois fiscales avant la fin de l'année 1975. Je vous pose une question qui, ma foi, ne devrait pas prêter à controverse. Je vous demande simplement ce que vous en avez fait.

M. Quenneville: Est-ce que vous parlez de ce cas particulier?

M. Morin: Non, j'ai demandé au sous-ministre s'il comptait inclure ce cas des remboursements dans la future législation, s'il pensait que ce serait utile d'avoir une disposition législative. Vous n'avez peut-être pas suivi ma question. J'ai élargi la question pour dire: L'année dernière, on m'a dit que vous aviez procédé à une révision en profondeur de vos lois fiscales. C'est votre prédécesseur qui le dit en toutes lettres. Je vous ai cité le passage. Je vous demandais si vous avez procédé à cette révision au cours de l'année 1975?

M. Quenneville: II y a eu dans l'air, à ce moment, la loi 59, en décembre, qui est une révision des lois fiscales.

M. Morin: C'était cela que vous vouliez dire? C'était cela que votre prédécesseur voulait dire?

M. Quenneville: Bien, je l'imagine.

M. Morin: La loi 59 ne constitue pas une révision en profondeur.

M. Quenneville: Je ne sais pas de quelle profondeur vous voulez parler à ce moment.

M. Morin: Enfin, je l'avais demandé à votre sous-ministre.

M. Quenneville: M. le Président, le principe est dans la loi. Nous sommes en train d'examiner la situation pour voir si on peut mettre des sanctions.

M. Morin: Bon. Je me satisferai pour cette année encore de cette réponse dans l'espoir que, l'année prochaine, les sanctions puissent paraître.

M. Quenneville: L'article 33 de la Loi du ministère se lit ainsi: Toute somme due par la couronne à l'égard d'une loi fiscale à titre de remboursement est incessible et insaisissable. Vous avez la substance; la loi le dit que ce n'est pas cessible, donc, c'est illégal si c'est fait.

M. Morin: Oui, mais il n'y a pas de sanction.

M. Quenneville: Nous sommes en train d'examiner la situation pour mettre des sanctions, si le besoin se fait sentir.

M. Morin: Cela, M. le Président, c'est une réponse qui a du sens.

M. Fraser: M. le Président...

Le Président (M. Brisson): Le député de Huntingdon.

M. Fraser: Les remboursements qu'on reçoit de l'impôt appartiennent au contribuable, n'est-ce pas? Même s'il ne l'a pas reçu, c'est à lui. Il peut faire ce qu'il veut avec, il peut le vendre, il peut le donner, il peut contribuer à la charité, il peut faire ce qu'il veut avec. Puis, s'il le donne à une compagnie et charge un intérêt en attendant le remboursement, quelle différence, s'il va aux compagnies de finance et emprunte de l'argent à 15%, 18% ou 20% pour payer ses dettes en attendant le remboursement, quelle différence? Est-ce que vous allez fermer toutes les compagnies de finance?

M. Morin: Moi, j'ai ma réponse à votre question, mais je vais laisser le ministre y répondre. Ce sera sans doute beaucoup plus précis.

M. Quenneville: Voyons...

M. Morin: Parce que la moitié de ce que vous venez de dire est illégal, M. le député.

M. Fraser: Non, ce n'est pas illégal.

M. Morin: Laissez le sous-ministre vous répondre.

M. Quenneville: Si le contribuable reçoit un remboursement, il est évident qu'il peut faire ce qu'il veut de son remboursement.

M. Fraser: Oui, Monsieur.

M. Quenneville: Une fois qu'il l'a reçu. Mais il ne peut pas le céder avant de l'avoir reçu, autrement dit, il ne peut pas vendre ses TP-4, il ne peut pas vendre les remboursements susceptibles de lui être remis, d'après la loi. Parce qu'il ne peut pas saisir, tel que la loi le dit. Il ne peut pas le céder, il ne peut pas être saisi, mais il ne peut pas le céder non plus.

M. Morin: M. le Président, incessible. Le problème, ce n'est pas ce que la loi dit, la loi le dit clairement, le problème, c'est la sanction.

Espérons que, l'année prochaine, le problème sera réglé. En tout cas, je peux assurer le ministre que si jamais il présente un amendement à la loi dans ce sens, il aura notre appui le plus entier.

M. Quenneville: M. le Président, je pourrais ajouter qu'il y a une sanction automatique, pour ceux qui ont de telles pratiques parce qu'ils perdent de l'argent qu'ils s'attendaient de recevoir du ministère.

M. Morin: Oui, parce que vous l'envoyez au contribuable. J'aimerais mieux que ce soit clair, parce qu'il peut vous en glisser entre les doigts.

M. Quenneville: Nous surveillons cela comme cela a été dit précédemment d'une façon assidue.

M. Morin: Non, je pense probablement qu'administrativement vous êtes équipés pour filtrer la plupart, mais j'aimerais bien que la loi soit plus claire, c'est tout. Cela me paraîtrait une meilleure garantie.

Valeur des remboursements

Pour ce qui est maintenant des remboursements, l'an dernier, le ministre avait prévu des remboursements de l'ordre de $200 millions. Pour l'année fiscale 1975, il y a eu des changements qui ont été apportés au budget du 17 avril 1975, mais ces changements sont rétroactifs, du moins, certains de ces changements sont rétroactifs au 1er janvier 1975. Toutefois, ce n'est qu'à compter du 1er juillet 1975 que ces changements ont pris effet au niveau des déductions à la source. Cela devrait avoir comme effet d'accroître le montant normal des remboursements. Puis-je vous demander à combien vous estimez ces remboursements à l'heure qu'il est?

M. Quenneville: Nous les estimons à environ $400 millions.

M. Morin: L'an dernier, est-oe que le chiffre de $200 millions s'était avéré exact?

M. Quenneville: II fut de $282 millions l'an dernier. C'est une estimation.

M. Morin: Cette année? M. Quenneville: Oui.

M. Morin: D'accord, j'ai bien compris qu'il s'agissait d'une estimation puisque tout n'est pas rentré encore.

Quel est le taux d'intérêt payé par le ministère sur ces remboursements?

M. Quenneville: A l'heure actuelle, 8% après le 30 avril. Nous payons le même taux que nous réclamons.

Recouvrement des créances

M. Morin: Là-dessus, je n'ai pas d'autres questions, M. le Président. Il s'agissait tout simplement pour nous de vérifier les faits. Passons, si vous le voulez, à la question des mandataires, des taxes perçues. Plus particulièrement, passons au problème de la récupération des taxes perçues par les mandataires et qui sont en difficulté financière. Nous nous en sommes déjà parlé l'année dernière. Je me réfère aux pages 2165 à 2167. Vous vous souviendrez qu'il en était question aussi dans le rapport du Vérificateur général pour 1974 aux pages 4-137 et 4-138.

Je n'ai pas l'intention de vous relire tout cela parce que cela allongerait la séance indûment, mais il en ressort, si je ne m'abuse, que le ministère du Revenu semble plutôt inefficace et qu'en raison de cette inefficacité il se perd des sommes importantes. Ce n'est pas une situation nouvelle, le Vérificateur l'avait déjà soulignée à maintes reprises dans le passé. J'aimerais vous demander — je l'aurais demandé au ministre, mais puisqu'ils se parlent — je vais demander au sous-ministre comment il se fait, par exemple, que 40% des créances en matière de faillite datent depuis 3 ans. C'est ce que nous apprend le Vérificateur général.

M. Quenneville: M. le Président, le Vérificateur général ajoute également la raison d'être de la situation dont on a discuté au commencement de cette commission, à savoir que nous n'avons pas tout le personnel qu'il nous faut dans ce secteur pour pouvoir abattre le volume de travail et prendre les mesures qui s'imposent dans des circonstances particulières.

Nous espérons que, M. le Président, avec le fait que nous avons eu notre corps particulier d'agents de recouvrement, nous pourrons recruter aussitôt que le problème des échelles de traitements sera réglé, de façon à pouvoir recruter le personnel dont nous avons besoin et nous espérons bien pouvoir recruter des gens d'expérience et non pas des gens que nous devons entraîner pour une période de dix-huit mois avant de pouvoir faire le travail qui s'impose.

M. Morin: Finalement, c'est très coûteux de ne pas avoir le personnel requis, c'est très coûteux. Je vois à la page 4-139 du rapport du Vérificateur de 1974, on nous y indique que 19% des créances soumises aux syndics de Montréal ont été recouvrées, seulement 19%. Quand on sait, si je ne me trompe pas, l'Etat a, dans la plupart des cas, une créance privilégiée...

M. Quenneville: Dans le domaine des mandataires, oui.

M. Morin: Dans le domaine des mandataires.

Alors c'est tout de même très bas. Quel aurait été le pourcentage si le ministère était intervenu en temps opportun?

M. Quenneville: Mais, si naturellement le pourcentage est de 19%, cela peut dépendre également de la réalisation des biens du failli.

M. Morin: Oui, bien sûr je m'en doute.

M. Quenneville: Parce que la dette peut-être plus élevée, mais dans ce cas on n'aurait récupéré que 19% de la somme due quand même. Si la somme avait été moindre, cela aurait été 19%. Je veux dire, si on se base sur un cas particulier.

M. Morin: Bien oui, mais comment se fait-il que vous attendiez que la personne soit en faillite pour récupérer? C'est cela qui est étonnant. Les gens accumulent des dettes envers votre ministère, cela s'accumule quelquefois d'année en année puis, tout à coup, ils vous font une belle faillite. Evidemment, vous êtes pris le pantalon baissé, forcément.

M. Quenneville: Vous savez, il y a certains mandataires où il y a quelques mois seulement de délinquance, peut-être deux, trois mois, puis il y a une faillite, et, à cause du fait que le montant, leurs remises sont très élevées, cela peut occasionner un gros montant de dettes. Mais il se peut... Naturellement il y a des cas particuliers où on a remarqué également que nous n'avions pas donné toute l'attention nécessaire à certains, mais nous avons pris des mesures actuellement, malgré que nous manquons de personnel pour oeuvrer dans ce secteur, de façon qu'au moins nous protégions les plus gros mandataires, de façon qu'on minimise les pertes le plus possible.

Nous essayons présentement de donner priorité aux gros montants, aux gros mandataires de façon que, s'il y en a un au moins qui vient en difficulté, qu'on soit en mesure de réduire la perte. Encore là, on ne peut le faire qu'avec le personnel à notre disposition et quand même l'ordinateur pourrait sortir des listes aussi épaisses que sept ou huit pouces, je ne crois pas que nous puissions, avec le personnel disponible dans ce secteur, faire mieux que nous faisons présentement, excepté que d'essayer de minimiser le plus possible les pertes.

M. Morin: Oui, mais prenons certains cas...

M. Quenneville: Ce sont des souhaits qu'il faut faire. Que voulez-vous?

M. Morin: Oui, je comprends que le manque de personnel explique beaucoup de choses, seulement il y a tout de même des situations incroyables. Prenons, par exemple, certains cas cités à la page 3-130 du rapport du Vérificateur, je pense aux mandataires B, ce sont des exemples que le Vérificateur choisit, il s'agit d'un cas de repas et hôtellerie. Rapport mensuel sans remise, aussi

avec remise, chèques sans provision pour les mois de décembre 1969 à avril 1973. Plus bas le cas C, période fautive de septembre 1968 à juillet 1973, cinq ans.

M. Boutin: M. le Président, une question de règlement.

Le Président (M. Brisson): Le député d'Abitibi-Ouest.

M. Boutin: Je voudrais savoir si c'est la commission pour le rapport du Vérificateur général ou si c'est la commission pour étudier les crédits du ministère du Revenu?

Le Président (M. Brisson): Non, mais il est de mise que l'on discute du rapport du Vérificateur général. Ce sont des remarques que le Vérificateur général a faites...

M. Boutin: Cela veut dire qu'on recommencera à l'autre commission, on recommencera la même chose.

M. Quenneville: M. le Président, je voudrais faire remarquer aussi au chef de l'Opposition qu'il s'agit du rapport de l'an dernier qui a déjà été discuté en commission parlementaire.

M. Morin: Oui, mais sans insister sur ces cas, ce soir, je vous fais quand même, pour la première fois je crois, à vous, ces observations. C'est pour vous montrer, parce que le sous-ministre me disait: Quelques mois de ci de là. Ce n'est pas quelques mois, ce sont quelques années de démarches fautives. Je ne continuerai pas, mais souvent, c'est trois ans, quatre ans. Rapport sans remise pour les mois de mars 1971 à janvier 1973. Rapport sans remise pour les mois d'août 1969 à juillet 1972. Je n'ai pas sous les yeux le tout dernier rapport, mais j'imagine qu'il doit se trouver encore aussi quelques beaux exemples de cette sorte.

C'est pourquoi il me semble qu'il y a une priorité. Je sais bien que, chaque fois que je soulève un problème, vous invoquez le manque de personnel.

M. Quenneville: Le secteur des recouvrements est un secteur structuré de façon à prévoir ces choses, parce que là on parle de la délinquance. Le secteur des recouvrements va pour une fois se structurer; il est structuré, mais une fois que l'effectif sera comblé, ces gens s'occuperont de recouvrer les sommes dues qui sont comptabilisées ainsi que de prévoir et de percevoir les montants dus par les délinquants. Donc, nous en faisons actuellement pour autant que nous puissions en faire.

Je crois que nous avons passablement amélioré la situation quant aux délais. Il se peut très bien qu'il y ait présentement des cas isolés, mais normalement, actuellement, nous avons prévu des systèmes qui indiquent immédiatement lorsqu'il y a un délai de plus que quelques mois, et aussi en considérant la somme impliquée. Alors, aussitôt que nous connaissons cela, nous sommes en mesure d'agir le plus possible et le plus vite possible avant que toute chose n'arrive.

M. Morin: Avant.

M. Quenneville: Mais les choses arrivent vite parfois! Dans la situation difficile que nous traversons, avec l'inflation, etc., il faut admettre que les marges de crédit dans les banques pour certaines entreprises ont été réduites considérablement.

M. Morin: Pour les autres mandataires, je veux dire, ceux qui ne sont pas en faillite, nous en avions également parlé l'année dernière, touché quelques mots, et le rapport du vérificateur y fait également allusion. Il s'agit de montants qui sont également significatifs, même s'ils ne sont pas en faillite et je lis la phrase, je ne veux pas insister, mais je pense tout de même qu'il faut que je vous lise cela: "Vu qu'aucune modification majeure n'a été apportée au système de recouvrement et après en avoir discuté avec les officiers responsables, nous sommes d'avis que les commentaires dans les rapports relatifs aux années antérieures, 1972/73, 1973/74 s'appliquent encore."

Donc, il semble bien qu'il n'y ait pas eu d'amélioration sensible.

M. Quenneville: La structure, la description des tâches, tout est là. Nous avons des postes à combler.

M. Morin: La maison n'est pas habitée.

M. Quenneville: Si seul le ministère du Revenu invoquait cette raison, je me poserais des questions, mais quand les gens qui regardent le ministère du Revenu d'un oeil impartial se rendent compte d'une telle situation l'écrivent, je pense qu'il faut y croire.

M. Boutin: M. le Président...

Le Président (M. Brisson): L'honorable député d'Abitibi-Ouest.

M. Boutin: Merci, M. le Président. Je voudrais poser une question au ministre du Revenu. Lorsqu'on regarde la majorité des faillites au Québec, le ministère se trouve nécessairement créancier privilégié. Etant créancier privilégié, on remarque cependant, dans le temps, que certaines personnes obtiennent des libérations de leur faillite, sans avoir payé leur créance privilégiée et elles ont créé une certaine jurisprudence dans la province dans ce domaine.

Est-ce que c'est une chose qui est devenue une habitude ou bien si c'est simplement des cas isolés?

M. Quenneville: M. le Président, vous me permettrez de vous répondre en vous disant que, d'une façon générale, lorsque les faillis s'adres-

sent à la cour pour obtenir une libération, à moins de raisons très particulières, ils obtiennent habituellement la libération de la cour.

La Loi de la faillite a été conçue de façon à permettre à un failli, à une personne insolvable, de se libérer de ses dettes. Alors, si l'on se réfère peut-être à 25 ans en arrière, on reconnaissait qu'un failli, c'était un peu une personne qui était mise en marge de la société, alors qu'avec l'évolution de l'économie et révolution de la société, on reconnaît, à l'heure actuelle, d'une façon générale, à part de cas d'exception, qu'un failli, c'est un peu un malchanceux en affaires ou un individu qui a rencontré des situations particulières. A moins de cas particuliers, la cour libère, de façon habituelle, un failli, lorsque demande est faite par l'entremise du syndic.

M. Boutin: Est-ce que la demande peut être faite par une autre personne que le syndic?

M. Quenneville: Oui, la demande peut être faite par le failli lui-même ou par son procureur, mais habituellement cela se fait par l'entremise du syndic.

M. Boutin: Est-ce que cela arrive assez souvent, à présent?

M. Quenneville: Oui, la libération se fait pratiquement automatiquement. Il est arrivé, dans certains cas ou dans des cas qui sont assez flagrants, où le ministère a tenté de s'opposer. Dans certains cas, nous avons réussi à empêcher une libération temporaire d'un failli. Mais ce sont des cas d'exception. La règle générale veut qu'un failli puisse être libéré de ses dettes.

M. Boutin: Merci.

M. Morin: M. le Président, pendant que le député parlait, j'essayais de voir ce qui me reste et je vois qu'il me reste pour deux heures, deux heures et demi de questions. Nous avons un choix devant nous. Ou bien on continue ce soir et on se réunira juste pour une demi-heure ou une heure la prochaine fois, ou bien on considère qu'à la prochaine séance, on prendra deux heures et on finira.

Je le propose au ministre, parce que ce serait pius simple. Je peux même prendre l'engagement de finir à la prochaine séance. Je vois que je pourrai finir à la prochaine séance.

M. Quenneville: M. le Président, je pense que nous sommes d'accord pour continuer, quitte à finir à la prochaine séance.

Le Président (M. Brisson): La commission ajourne ses travaux sine die.

M. Quenneville: Mais non, on continue.

Le Président (M. Brisson): Vous voulez continuer?

M. Morin: Est-ce que je peux demander au ministre jusqu'à quelle heure il veut continuer? Je veux avoir une idée parce que je veux planifier mon travail en conséquence. Si j'ai plus de temps, je vais m'étendre un peu plus.

M. Quenneville: Je suis...

M. Morin: Justement, un peu de temps, cela ne ferait pas de tort.

M. Quenneville: On peut aller jusqu'à onze heures et demie, minuit.

Taxe sur les maisons mobiles

M. Morin: Bon, d'accord. Non, j'ai encore plusieurs questions. On va commencer par la question de la taxe de 8% sur les maisons mobiles. Il y a eu, à ce sujet, échange de correspondance entre le ministre et moi. Je pense qu'il serait bon que je donne lecture de cette correspondance, si le ministre n'y voit pas d'objection.

Ou plutôt, il vaudrait mieux que je commence par le tout début, parce que c'est un problème qui m'a été soumis. Il y a des contrats, il y a toute une correspondance. Le problème m'est venu d'abord de Port-Cartier, le ministre s'en souviendra, cela a fait l'objet d'une correspondance entre lui et moi.

Port-Cartier, le 24 août 1975. Je joins à la présente une lettre reçue d'un fonctionnaire du Revenu du Québec, ma réponse à ce fonctionnaire et la lettre que j'adresse au ministre responsable de cet état de choses. Je sais — continue la lettre — et je comprends que vous êtes peu nombreux dans l'Opposition et que vous devez étudier plus de dossiers que vous ne pouvez le faire, mais je vous prie de considérer celui-ci car il concerne les petites gens qui, comme moi, paient tous leurs impôts directs et indirects et tentent de s'organiser pour joindre les deux bouts.

Merci de m'avoir lu et j'ai bon espoir que vous tenterez quelque chose à l'Assemblée nationale pour ceux qui n'ont pas les moyens financiers de se payer une petite maison très simple et ne veulent pas prendre un loyer à prix très élevé dans un troisième étage pour que leurs enfants aient le loisir de courir et de sauter dans la maison.

C'était une lettre en provenance de Port-Cartier.

Avec cette lettre, il y avait une formule du ministère du Revenu du Québec dont on m'envoyait copie datée du 7 août 1975 portant sur une maison mobile achetée le 9 février 1975.

La formule porte le numéro BV-382.2.

M. le Président, je pense que nous n'avons pas quorum. Je m'en excuse. Qu'on appelle les députés parce que je vois que ce cas n'a pas l'air d'intéresser mes collègues. Si on n'a pas quorum, on n'a pas quorum, n'est-ce pas, M. le Président?

M. Quenneville: Vous n'aviez pas quorum non plus tantôt quand vous avez demandé de continuer.

M. Morin: Je ne m'en étais pas rendu compte.

Vous auriez dû soulever le problème, M. le ministre.

M. Morin: Je suis prêt à continuer si on peut avoir le quorum. Vraiment, j'ai un cas dont je veux vous entretenir.

M. Fraser: Vous et vos questions ennuyantes, vous achalez tout le monde!

M. Morin: Ce n'est pas parce que vous n'y comprenez rien... Ce n'est pas parce que le député n'y comprend rien que c'est ennuyant. Au contraire, c'est absolument passionnant, mais il faut s'appliquer à comprendre les problèmes.

Le Président (M. Brisson): La commission suspend ses travaux pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 22 h 23)

Reprise de la séance à 22 h 40

Le Président (M. Brisson): Est-ce qu'il y a d'autres questions?

M. Morin: Oui, j'étais, comme vous le savez, au moment où nous avons souligné l'absence de quorum, en train de soulever le problème de la taxe de 8% sur les maisons mobiles. C'est une question qui a des incidences importantes pour les contribuables qui n'ont pas de bien gros revenus. La personne dont je vous entretiens recevait de M. Rolland Marier, du ministère du Revenu, en date du 7 août 1975, une lettre recommandée, en fait un formulaire, no PV-382.2, par lequel on lui réclame, sur le prix d'achat de $12 528, le prix d'achat d'une maison mobile, la taxe de $1002.24. On se rend compte que quelqu'un qui achèie une maison mobile de $12 000 n'est pas une personne qui a de bien gros revenus. C'est même assez réduit comme maison. Mais, pour beaucoup de travailleurs, c'est la seule façon qu'ils aient de se loger convenablement près des lieux de leur travail, surtout si ces lieux de travail sont situés dans une région éloignée comme Port-Cartier. Je ne sais pas si ce monsieur en particulier, qui a reçu cet avis de taxe due, venait de l'extérieur de la Côte-Nord, je ne serais pas surpris.

On lui rappelle que la Loi de l'impôt sur la vente en détail, statuts révisés 1964, chapitre 71, article 6, mieux connu sous le nom de bill 39, du moins le bill 39 avait modifié ses status révisés en 1968, on lui rappelle, dis-je, que cela spécifie que chaque acheteur doit, lors d'une vente en détail dans cette province, payer à Sa Majesté, aux droits de la province, une taxe égale à 8% du prix d'achat de tout bien mobilier. J'ai bien dit bien mobilier, il s'agit d'une maison mobile, M. le Président, mais qui est destinée à devenir, par ses fonctions mêmes, un bien immobilier.

Voilà que ce contribuable reçoit, c'est la dernière chose à laquelle il s'attendait, un avis d'avoir à payer $1000 d'un seul coup au ministère du Revenu du Québec. $1000, personne ne l'a jamais prévenu qu'il aurait à payer cette taxe, il ne s'y attend pas, c'est le genre de contribuable qui achète des maisons comme ça, une maison de $12 000, payable sur un certain nombre d'années, en plus de l'intérêt qu'on lui fait payer. Et voilà qu'arrive cette mauvaise surprise. Je vous dispense de la lecture des lettres que ce contribuable a expédiées au ministre et à l'agent du ministère, M. Roland Marier. Mais, quand même, je voudrais peut-être vous citer un ou deux passages qui me paraissent bien traduire l'aspect humain du problème auquel nous sommes affrontés. "Etant donné que je dois me loger quelque part avec ma famille, écrit-il, si je revendais ma maison mobile pour m'en retourner vivre à loyer, en espérant beaucoup en trouver un à Port-Cartier, aurais-je toujours à payer cette taxe? Si cette solution est écartée et que je n'ai pas les moyens de régler cette note immédiatement, est-il possible de régler cette note par petits versements mensuels? Si je puis régler cette note par petits versements mensuels, je vous propose de le faire par montants de $25 par mois. En effet, mon loyer me coûte environ $226 par mois, incluant le chauffage et l'électricité, et comme il ne reste pas $200 net par semaine sur ma paie, je ne puis me permettre un loyer au-dessus de $250 par mois".

Voilà l'aspect humain bien concret du problème soulevé par ce travailleur de la Côte-Nord. Le ministre a reçu copie de cette correspondance et je lui ai moi-même écrit.

Je pense qu'il serait bon que je rappelle ce que je disais dans cette lettre. C'est en date du 5 septembre 1975: "M. le ministre, je m'adresse à vous relativement à l'application de la Loi de l'impôt sur la vente en détail, laquelle spécifie que chaque acheteur doit, lors d'une vente en détail, payer une taxe égale à 8% du prix d'achat de tout bien mobilier. Le motif de mon intervention concerne l'aspect nettement discriminatoire de l'application de cette taxe à l'achat de maisons mobiles pour fins d'habitations domiciliaires permanentes. Vous n'êtes sûrement pas sans savoir que, pour des milliers de travailleurs, ce genre d'habitations constitue l'unique forme de logements disponibles à un prix qui soit compatible avec leur niveau de revenus. Ceci est particulièrement le cas des travailleurs appelés à travailler dans des régions reconnues pour la rareté chronique de logements." C'est l'aspect social, si vous voulez.

La lettre continue: "D'autre part, il devient de plus en plus évident qu'en raison de !a nature même des emplois disponibles dans certaines de ces régions, la maison mobile, même s'il ne s'agit pas d'un type idéal de logement, constitue la seule formule possible. Dans ces conditions, il m'apparaît que les dispositions actuelles de la loi sont nettement discriminatoires, puisque la loi oblige cette catégorie de travailleurs à supporter un fardeau fiscal supplémentaire sur un bien, en l'occu-rence le logement, qui, de façon générale, n'est pas soumis à la taxe de vente. Je vous soumets donc qu'il est impératif que des changements

soient apportés rapidement à cette loi, afin que les maisons mobiles utilisées à des fins domiciliaires, à titre de résidences principales, soient exemptées de la taxe de 8%, ceci, indépendamment de la notion de permanence de lieu. En ce sens, je considère que l'exemption accordée, lorsqu'il y a vente en bloc de la maison mobile et du terrain, est insuffisante. Aussi, je demeure convaincu que des normes et critères beaucoup plus souples peuvent être appliqués de façon à exempter de cette taxe tous les particuliers faisant l'achat de maisons mobiles destinées à des fins d'habitation principale. Je vous transmets, ci-joint, copie de la correspondance, etc." Je vous dispense des derniers paragraphes et des formules de politesse, par gentillesse et pour gagner du temps.

Voici maintenant la réponse que me fait le ministre. Vous verrez qu'il ne semble pas du tout sensible à ce problème social. Pourtant, comme j'aurai l'occasion de le dire tout à l'heure, c'est vraiment une catastrophe pour le travailleur de voir arriver un montant de $1000 ou de $2000 qui est dû au ministère du Revenu. Je souligne le fait que le 8% en question n'est pas payé seulement sur les matériaux, mais également sur la main-d'oeuvre. L'acheteur d'une maison ordinaire, lui, celui qui se bâtit sur un terrain, ne paie que la taxe sur les matériaux, pas sur la main-d'oeuvre. Tandis que l'acheteur de maison mobile paie les matériaux, la main-d'oeuvre, qui représente au moins la moitié du coût, et le 8% par-dessus, sur l'ensemble du coût. Non seulement cela, mais il paie la taxe sur les profits des intermédiaires qui s'ajoutent au prix de revient du fabricant. Il s'agit d'un bien essentiel. Il s'agit d'un bien dont personne ne peut se passer, pas plus un travailleur de la Côte-Nord que quelqu'un qui vit à Québec ou à Montréal. C'est un véritable problème social. C'est pour cela que je prends la peine de le développer.

Maintenant, écoutez bien la réponse que me fait le ministre, le 26 septembre 1975: "Comme je le mentionne dans la lettre que j'adressais à M. Alain Chamberland — qui est le travailleur dont nous parlons — le 16 courant, je ne crois pas que la taxe payée par l'acheteur d'une maison mobile soit discriminatoire." Je me permets une parenthèse; elle l'est au moins dans la mesure où, s'il avait acheté une maison ordinaire, n'est-ce pas, il n'aurait pas payé sur la main-d'oeuvre, 8% sur la main-d'oeuvre. Je continue la lettre, comme m'y invite le ministre. "Il est vrai que l'acheteur d'une maison conventionnelle ne paie pas de taxe lors de l'achat de sa maison. Toutefois, il ne faut pas perdre de vue que le prix payé par un tel acheteur inclut le coût de la taxe de vente payée par l'entrepreneur à titre de consommateur des matériaux — est-ce que je peux souligner au ministre: à titre de consommateur des matériaux — utilisés pour la construction de cette maison. Il n'est pas question de la main-d'oeuvre.

Ce qui n'est pas Je cas — continue la lettre — du prix payé par l'acheteur d'une maison mobile puisque le constructeur d'une telle maison n'a pas de taxe à payer lors de l'achat des matériaux utilisés pour sa construction.

La lettre continue: Je crois plutôt que l'abolition de la taxe de vente sur les maisons mobiles serait discriminatoire à l'endroit des acquéreurs de maisons ordinaires.

J'ai hâte que vous me fassiez cette démonstration tout à l'heure.

Je vous ferai remarquer que la taxe payée — c'est la lettre qui continue, ce n'est pas moi — par un acheteur de maison mobile est la taxe imposée par la loi à tout acheteur lors de la vente en détail d'un bien mobilier imposable et non une taxe sur le logement.

Sur cela techniquement, je veux bien être d'accord. Seulement, je mets en doute le fait qu'il s'agisse d'un bien mobilier puisqu'il est destiné à être immobilisé. Il est destiné à des fins immobilières.

Pour répondre aux arguments — c'est la lettre qui continue — mentionnés aux troisième et quatrième paragraphes de votre lettre, je ne crois pas que les motifs qui incitent ou obligent une personne à acquérir une maison mobile plutôt qu'un autre type de maison soient des critères qui justifieraient l'abolition de la taxe de vente sur les maisons mobiles. Dans le cas contraire, il faudrait également tenir compte des raisons, tout aussi valables, qui obligent d'autres personnes à acheter une maison conventionnelle et exempter les matériaux qui servent à la construction des maisons de ce genre.

Enfin, je tiens à préciser que si une exemption est accordée dans le cas de certaines ventes en bloc d'une maison mobile avec terrain, une telle exemption réside du fait que la loi ne s'applique pas aux ventes d'immeubles par destination tout comme elle ne s'applique pas aux ventes d'immeubles par nature.

Alors, pour le travailleur, où est la différence, sur le plan social, entre la maison mobile qu'il achète avec un terrain qui n'est pas taxée, qui ne subit pas cette taxe de vente et la maison mobile qu'il achète, qu'il installe lui-même sur un terrain, circonstance dans laquelle il paie la taxe de vente de 8%? Voilà. C'est un problème social qui, je crois, étant donné le nombre de maisons mobiles qui existent au Québec, étant donné que nous avons si peu de politique d'habitation à l'égard de ces travailleurs, c'est un problème social, je crois, de première importance. Je voudrais demander au ministre s'il n'est pas prêt à réviser la politique dont il me fait part dans sa lettre du 26 septembre que j'ai citée presque in extenso. C'est ma première question.

M. Quenneville: M. le Président, je voudrais demander au chef de l'Opposition, le député de Sauvé, si, d'après l'exposé qu'il vient de faire, il veut signifier que l'application de la loi faite par le ministère ne correspond pas à la loi même ou s'il veut tout simplement qu'il y ait un changement du principe qui sous-tend l'application de cette loi.

M. Morin: Nous allons poser les deux questions à tour de rôle, si vous voulez.

M. Quenneville: Non, mais...

M. Morin: Dans la première question, je vais vous demander de justifier l'application de la loi, un cas comme celui-là. M. le Président, j'aimerais à ce qu'on s'entende. Qui pose les questions?

M. Quenneville: On veut vous faire préciser exactement ce que vous voulez savoir, M. le Président.

M. Morin: C'est cela alors. Ma première question...

M. Quenneville: Précisez et après cela on continuera.

M. Morin: Ma première question est celle-ci. Quelles sont les raisons qui vous font appliquer la loi au cas des maisons mobiles? Pourquoi estimez-vous que la loi, qui porte essentiellement sur des biens meubles, soit applicable à un objet qui est destiné à être immobilisé? Et quelle est la différence — je le demande au ministre — fondamentale entre une maison mobile achetée avec terrain sur laquelle ne se paie pas de taxe et la maison mobile que le type installe lui-même sur un terrain après avoir payé la taxe?

M. Quenneville: M. le Président, nous sommes convaincus que nous appliquons la loi et notre rôle au ministère du Revenu est tout simplement de traduire, dans des lois, les décisions, les mesures fiscales qui sont adoptées par le ministère des Finances ou par les autres ministères. A moins, encore une fois, que le chef de l'Opposition veuille absolument changer le principe de la loi, nous croyons que nous avons suivi la loi telle qu'elle existe.

M. Morin: Nous discuterons tout à l'heure à savoir s'il faut changer la loi ou non...

M. Quenneville: Nous, on ne veut pas voir l'aspect social.

M. Morin: ... mais je veux d'abord vous faire préciser votre pensée sur un certain nombre d'éléments qui se trouvent dans votre lettre. Quelle est la différence... Commençons par une question de fait, est-ce que vous allez taxer la maison mobile vendue avec le terrain? Maison mobile, entendons-nous bien, vendue avec le terrain.

M. Quenneville: Je vais reprendre tout simplement le dernier paragraphe de la lettre. Je pense que vous l'aviez compris, je vais le répéter. "Si une exemption est accordée dans le cas de certaines ventes en bloc d'une maison mobile avec terrain, une telle exemption résulte du fait que la loi ne s'applique pas aux ventes d'immeubles par destination, tout comme elle ne s'applique pas aux ventes d'immeubles par nature."

M. Morin: Est-ce que la maison mobile qui est achetée pour être disposée sur un terrain n'est pas un immeuble par destination?

M. Quenneville: Pas nécessairement.

M. Morin: Pas nécessairement, mais est-ce qu'elle ne peut pas le devenir?

M. Quenneville: Pas nécessairement. Vous présumez, à ce moment-là, de la destination.

M. Morin: Mais si elle est effectivement destinée à ça.

M. Quenneville: Vous présumez de la destination, alors, est-ce qu'on va tout simplement tenir compte de la présomption que vous faites? Je ne crois pas, M. le Président. Je demanderais à M. Gauvin qui est ici d'ajouter des commentaires.

M. le Président, une roulotte qui est achetée est une roulotte, le mot le dit.

M. Morin: On parle de maison mobile.

M. Quenneville: Oui, mais c'est une roulotte, une maison mobile. C'est un bien mobilier, qu'on achète...

M. Morin: A perpétuité?

M. Quenneville: Pardon, on achète un bien mobilier d'un vendeur. Le vendeur est censé percevoir la taxe sur un bien mobilier. Par définition, le code civil — je crois que je n'ai pas besoin d'en faire un exposé — est assez clair là-dessus. Si le vendeur ne perçoit pas la taxe, s'il est dans le Québec, il est responsable de la taxe ou du montant équivalent. Si la roulotte a été achetée à l'extérieur de la province, c'est celui qui a fait l'achat du bien qui est imposable. Je ne fais pas référence à aucun cas, je vous parle du principe. C'est un bien meuble par définition et ce n'est pas un immeuble par destination comme l'entend le code civil et comme l'entendent les auteurs qui ont traité des problèmes d'immeubles par destination et immeubles par nature.

Des études assez poussées de la part de notre contentieux et des auteurs qui ont écrit là-dessus ne laissent aucun doute dans l'esprit du ministère et même des juristes dans le domaine. Si on se sert d'un bien meuble et qu'on veut en faire autre chose, c'est une autre affaire, c'est peut-être la raison pour laquelle on dit qu'une roulotte ou maison mobile qui est installée sur un terrain et que le tout est vendu ensemble, c'est un immeuble.

M. Morin: Est-ce que je peux vous poser une petite question avant que vous alliez plus loin? Supposons qu'un individu achète une maison mobile installée sur un terrain, immeuble par destination. Une fois achetée, le lendemain, il enlève les quelques soutiens qui portent la maison, au besoin les pierres, les briques dont il a pu se servir pour la pseudo-fondation — Dieu sait dans quel état vivent certains de ces gens — et part avec. La taxe a-t-elle été payée?

M. Quenneville: Si la taxe n'a pas été payée, il l'a achetée en bloc. Il a acheté un immeuble.

M. Morin: Par destination. Un immeuble par destination.

M. Quenneville: II a acheté un immeuble par définition, qui était sur son terrain propre. S'il le vend, c'est parce qu'il était propriétaire. S'il avait acheté une roulotte qui était sur un terrain loué, je pourrais dire que ce n'est pas un immeuble par destination.

M. Morin: Je vous donne raison là-dessus. Pour cela, d'accord. Pas de question là-dessus, c'est évident.

M. Quenneville: Mais là n'est pas le problème. M. Morin: Non...

M. Quenneville: Là n'est pas le problème. C'est lorsqu'il a fait l'achat, au cours de la vente au détail. Lorsque la vente au détail a été faite, il a fait un achat. Il devient le consommateur du bien ou l'usager du bien, donc, il doit payer la taxe sur un bien meuble.

Maintenant, ce qu'il en fait par après, c'est une autre chose. S'il achète un immeuble qui est déjà installé sur un terrain et qu'il achète le terrain avec, cela fait tout l'immeuble et ce n'est pas taxable. Il n'y a pas d'exemption là-dessus; ce n'est même pas taxable, parce qu'on ne taxe pas les immeubles.

M. Morin: Est-ce que vous vous rendez compte de l'incohérence de ce système?

M. Quenneville: C'est ainsi que le Code civil le dit et que les auteurs qui traitent de ce problème l'interprètent.

M. Morin: Cela fait combien de temps qu'il y a des maisons mobiles au Québec?

M. Quenneville: Cela fait combien de temps qu'il y a des roulottes?

M. Morin: Non. Cela fait combien de temps que la maison mobile est devenue un moyen de se loger au Québec, particulièrement dans certaines régions en voie de développement?

M. Quenneville: Dix ou quinze ans, je pense.

M. Morin: Je pense que vous avez raison. Une bonne dizaine d'années, à tout le moins; peut-être quinze. Je pense que le sous-ministre adjoint a raison.

Ce problème n'est donc pas un problème neuf; il existe depuis longtemps. C'est un mode de vie nouveau, mais qui a déjà une bonne dizaine d'années d'âge. Et vous n'avez pas encore trouvé le moyen de faire entrer des considérations d'ordre social dans votre législation là-dessus? Et vous en êtes rendus à faire des subtilités, à considérer une roulotte qui est sur ses deux roues, mais vendue avec un terrain comme étant immeuble par destination, tandis que la roulotte achetée sur un terrain de stationnement mais immédiatement installée sur un terrain, par l'acheteur, ce n'est pas un immeuble par destination?

Est-ce que vous vous rendez socialement compte de l'incohérence de ce point de vue? Cela fait dix ans que vous êtes affrontés au problème.

M. Quenneville: Ecoutez, la Loi de l'impôt sur la vente en détail, c'est une loi qui prévoit l'imposition d'une taxe sur la vente des biens meubles. Notre rôle est de l'administrer et lorsqu'une vente est faite, la loi dit que la taxe doit être perçue et remise et payée.

C'est ainsi que la loi est rédigée maintenant. Si, naturellement, cela change, cela ne devrait pas être, comme on l'a dit précédemment, la responsabilité du ministère du Revenu.

Maintenant, combien cela fait-il de temps, également, qu'il y a des maisons qui se construisent? Cela fait plus longtemps que les maisons mobiles.

M. Morin: Vous concéderez...

M. Quenneville: Et pourtant, le constructeur qui construit pour une personne est le consommateur des biens qu'il incorpore à la maison. C'est évident que la maison devient un immeuble. Mais avant qu'elle ne devienne un immeuble, les biens ont été achetés, les biens meubles.

M. Morin: Les matériaux.

M. Quenneville: Les matériaux.

M. Morin: Ils ont été taxés.

M. Quenneville: Ils ont été taxés et inclus dans le coût de la propriété.

M. Morin: Oui, oui, oui. Mais la main-d'oeuvre a-t-elle été taxée?

M. Quenneville: Non.

M. Morin: Est-ce qu'elle l'est dans le cas de la maison mobile?

M. Quenneville: Présumément, parce que c'est le prix de vente qui compte.

M. Morin: Présumément. Vous avez de ces euphémismes.

M. Quenneville: Oui, mais écoutez.

M. Morin: Ce n'est pas présumément, c'est...

M. Quenneville: II va sans dire, c'est dans le prix de vente.

M. Morin: J'aime mieux cette réponse-là.

M. Quenneville: Mais, le prix de vente, dans

tous les biens meubles que vous achetez, les biens meubles manufacturés, il y a de la main-d'oeuvre. Il y a de la main-d'oeuvre dans tous les biens manufacturés. C'est le prix de vente qui est imposable. C'est ainsi que c'est fait.

M. Morin: Oui, c'est cela.

M. Quenneville: C'est ainsi que cela existe partout où il y a une taxe de vente au détail.

M. Morin: Bon. Ecoutez, on va mettre de côté la première question. Je vous dis, pour terminer cette discussion, que je ne suis pas d'accord avec votre analyse juridique de ce qu'est un immeuble par destination. J'ai tenté de vous montrer l'incohérence d'un système, d'une règle qui fait que !a maison roulante, la roulotte, comme vous l'appelez, installée sur un terrain est un bien immeuble, tandis que la maison qui est dans le parking voisin et qui est destinée à être installée sur le terrain voisin, elle, est un bien meuble. Il y a quelque chose d'incohérent là.

Ce qui m'étonne, c'est qu'après dix ans maintenant que ce problème existe, votre ministère ne se soit pas avisé qu'il y a là un problème social et que vous taxez certaines maisons à 8% et, les autres, effectivement, en comparaison, à 3%, parce que, dans le cas de la maison mobile, vous taxez non seulement les matériaux, mais vous taxez la main-d'oeuvre et vous taxez le profit des intermédiaires. Si vous n'y voyez pas un problème social, on ne pourra pas s'entendre, sûrement.

M. Quenneville: Où se situe le problème quand même? Est-ce que le problème se situe, M. le Président, au niveau de l'individu qui achète ou au niveau du bien qui est vendu? Est-ce que...

M. Morin: Le problème social est au niveau de l'individu, je peux vous le prouver.

M. Quenneville: Donc, les exemptions permises dans les taxes de vente, ce sont sur les biens meubles, les biens qui sont taxés et non pas les individus qui achètent les biens, les personnes qui achètent les biens. C'est le bien qui est exempté.

Donc, si on exempte les maisons mobiles, ce sont toutes les maisons mobiles qu'on exempte.

M. Morin: Pourquoi? Vous pouvez exempter celles qui sont destinées...

M. Quenneville: Parce qu'on ne peut pas changer... Pourquoi pas?

M. Morin: ... à devenir permanentes, à tous points.

M. Quenneville: Je dis que la jurisprudence a déterminé cela d'une façon assez claire, assez catégorique, quoiqu'il y a encore des traités qui s'écrivent là-dessus, mais rien n'empêche le fait que si on veut créer une exemption dans les taxes de vente, il faut exempter des biens et non pas des personnes, parce que les personnes subissent la taxe, mais, d'un autre côté, sur le bien qu'elles achètent.

M. Fraser: J'ai une question, M. le ministre, à poser à M. Gauvin.

M. Morin: Oui, je...

M. Fraser: Disons qu'un gars achète vingt lots et qu'il installe 20 roulottes permanentes sur ces lots. Est-ce que le manufacturier paie les 8%?

M. Quenneville: Quand il achète...

M. Fraser: Non, mais quand il installe les roulottes, il ne paie pas les 8% non plus?

M. Quennevilie: Non, c'est pour les revendre.

M. Fraser: Comme cela, le manufacturier, c'est le commerce et c'est le détaillant qui doit payer les 8%...

M. Quenneville: On va vendre un immeuble à ce moment.

M. Fraser: II y a une certaine faille dans votre système.

M. Morin: Je suis bien d'accord avec le député. Il a tout à fait compris.

M. Fraser: On échappe à 8%, parce qu'on met cela sur un lot.

M. Quenneville: M. le Président, dans le cas d'un manufacturier de maisons mobiles qui manufacture pour revendre à un grossiste ou à un détaillant, naturellement, la taxe de vente exempte ce bien, parce que c'est un bien pour revendre, parce que la taxe ne s'impose qu'à la vente au détail, à la vente au stade où le consommateur ou l'usager l'achète pour sa propre consommation ou son usage. La taxe s'impose sur le bien et non pas sur la personne.

M. Fraser: ... Mais cela aurait été le même bien que pour les deux autres.

M. Quenneville: Si on veut exempter en fonction des taxes de vente quelque chose, c'est le bien qu'on exempte et non pas la personne, comme à l'impôt sur le revenu, par exemple, c'est la personne. Mais, la taxe de vente...

M. Morin: Oui.

M. Quenneville: ... c'est le bien.

M. Morin: Oui, mais vous ne vous êtes pas avisé qu'il pourrait y avoir une différence entre la petite roulotte sur deux roues qui part en vacances et la roulotte de 20 pieds avec quatre roues et même quelquefois davantage, qui, elle, est une vé-

ritable maison et qu'on ne déplace pas si facilement sur les routes du Québec et qui est destinée à devenir une maison permanente.

M. Fraser: Quand des gens construisent des maisons sur ces mêmes lots, l'entrepreneur va payer 8% sur tous ces matériaux. S'ils installent une roulotte, il est exempté de la taxe de 8%.

M. Quenneville: Parlez-vous d'un entrepreneur qui va installer une roulotte sur un terrain qui appartient à une autre personne?

M. Fraser: Non, c'est pour vendre. M. Quenneville: II vend la roulotte.

M. Fraser: S'il veut acheter un lot et installe une roulotte dessus, sur des fondations, vous êtes exempté de la taxe de 8%. Si vous construisez une maison, vous allez payer 8% sur tous vos matériaux et sur toutes vos choses là-dedans.

M. Quenneville: Mais, dans votre démonstration, qui possède le terrain?

M. Fraser: L'entrepreneur celui qui vend les lots avec les maisons mobiles, parce qu'un particulier ne peut pas acheter un lot et mettre la maison mobile dessus. Si un entrepreneur achète 20 lots et installe 20 maisons mobiles sur ce lot, il est exempté de la taxe. Est-ce que ce n'est pas vrai? Il est exempté des 8%. S'il construit des maisons sur ces lots, il paie les 8% sur tous les matériaux.

M. Quenneville: C'est cela.

M. Fraser: C'est cela, il paie dans le processus d'imposition.

M. Quenneville: Dans le cas de l'entrepreneur qui achète des maisons mobiles pour installer sur lots...

M. Fraser: Lui, il paie?

M. Quenneville: Lui, il paie la taxe de vente lorsqu'il achète des maisons mobiles.

M. Fraser: Parfait, si c'est comme cela.

M. Quenneville: Parce qu'il achète un bien mobilier...

M. Fraser: Pour installer sur ce lot.

M. Quenneville: Normalement, mais quand il les vend, ils les vend, ils les vend comme un immeuble total, en bloc.

M. Fraser: Mais si le gars qui installe les maisons mobiles sur les lots pour les vendre paie 8%, ce serait une double taxation de faire payer l'autre gars aussi, le gars qui achète. Non, mais c'est vrai. Un gars ou l'autre, il faut qu'il paie 8%.

M. Quenneville: II ne paie pas une deuxième fois sur la vente en bloc. L'entrepreneur qui achète une maison mobile posr l'installer sur un terrain doit payer la taxe sur la roulotte.

M. Fraser: C'est parfait.

M. Quenneville: Quand il revend le terrain et la roulotte, il n'y a pas de taxe prélevée.

M. Fraser: S'il fait cela, ce serait une double taxation sur la même chose.

M. Quenneville: Oui.

M. Fraser: C'est d'accord. Je comprends votre "patente" maintenant. C'est l'entrepreneur qui paie 8%, ce n'est pas le gars qui achète.

M. Morin: Pouvez-vous nous affirmer que tous les entrepreneurs en question ont payé la taxe de 8%? Supposons qu'ils installent la maison sur le terrain et que la vente n'est considérée comme close qu'au moment où elle est installée déjà sur le bien immobilier. Techniquement, c'est déjà un immeuble pas destination. Donc, la taxe ne s'applique pas.

M. Quenneville: La taxe s'applique lorsqu'il a acheté la maison.

M. Morin: Oui.

M. Quenneville: C'est là que la taxe s'applique et non pas lorsqu'il l'installe sur le terrain, parce que cela change de nature.

M. Morin: Oui.

M. Quenneville: Cela devient un immeuble.

M. Morin: Vous êtes sûr que vous n'avez pas quelque astucieux personnage qui s'est arrangé pour signer son contrat d'achat au moment où les maisons sont déjà installées sur les lots, parce que c'est une chose que...

M. Quenneville: C'est la raison pour laquelle nous faisons des vérifications, et que nous envoyons des avis de cotisation. C'est la raison pour laquelle certains contribuables, dans certains cas, ne sont pas satisfaits, ne sont pas d'accord avec nous, ils peuvent faire des oppositions en dedans de 90 jours.

M. Morin: Un petit détail complémentaire. Est-ce que, si la maison mobile est vendue usagée, parce que les travailleurs sont souvent itinérants et passent d'un endroit à l'autre, la taxe de vente va être payée une deuxième fois?

M. Quenneville: Oui, sûrement, parce que... Si elle est immobilisée sur le même terrain, la maison et le terrain sont vendus...

M. Morin: Non, on dit qu'elle peut être sur un terrain loué auquel cas elle n'est plus immeuble par destination. Donc, il va falloir payer encore une autre fois la taxe de 8%.

M. Quenneville: La taxe de vente est pyramidale.

M. Morin: Oui, mais après dix ans...

M. Quenneville: Comme l'automobile usagée, d'ailleurs.

M. Morin: C'est une autre affaire.

M. Quenneville: C'est le même principe.

M. Morin: Oui, mais j'ai rarement vu une automobile devenue immeuble par destination, tandis que la maison peut le devenir.

M. Quenneville: II y a des autobus.

M. Morin: Oui, c'est possible; on peut enlever les roues pour les monter, c'est possible. Mais cela, justement, c'est souligner une dimension du problème; c'est qu'à partir du moment où cela a atteint une certaine dimension, cela devient immeuble dans sa nature. Vous ne vous êtes pas avisé une seule fois que si cela dépassait une certaine grandeur, cela pouvait être considéré comme un immeuble, socialement parlant.

M. Quenneville: Cela ne change pas la nature du bien. Socialement parlant, nous appliquons les lois du ministère du Revenu.

M. Morin: Oui.

M. Quenneville: Et vous savez que les lois de taxe de vente sont basées sur le droit civil.

M. Morin: II y aurait une profonde question sociale qu'on pourrait peut-être étudier, mais je pense que nous avons déjà dépassé les dix minu- tes, le moment prévu par le règlement pour l'ajournement des séances de la commission.

Le Président (M. Brisson): Pourrais-je avoir une copie du règlement? Je n'ai pas la mienne.

M. Morin: Je peux vous le citer. C'est l'article 31 et par l'effet de l'article 163 également. C'est bien rare que je fasse de la procédure, je vous l'avouerai. L'article 31 se réfère à l'Assemblée et l'article 163 rend applicable aux commissions le règlement de l'Assemblée.

L'article 31 dit ceci: "Les séances de l'Assemblée sont ajournées à 23 heures les lundi, mardi et jeudi, à 18 heures le mercredi et 13 heures le vendredi...", etc, mais, l'article 163 dit ceci: "A moins de dispositions contraires, les règles relatives à l'Assemblée s'appliquent aux commissions." La même heure de clôture s'applique donc à la commission.

M. Fraser: Sur un point de règlement, M. le Président. Le chef de l'Opposition arrive 45 minutes en retard. Cela veut dire que nous pouvons continuer jusqu'à 11 h 45.

M. Morin: C'est une question différente. Je m'en suis excusé. Mais le règlement, c'est le règlement. D'autres ont dit cela avant moi. Comment disaient-ils cela? Le "règlement, c'est le règlement."

Le Président (M. Brisson): Tout en mentionnant que la commission est souveraine de ses travaux, si elle décidait unanimement de continuer, elle le pourrait.

M. Morin: Elle le pourrait certainement, théoriquement, mais, en ce qui me concerne, je préférerais revenir sur les questions demain. Je sais que je peux terminer à l'intérieur d'une séance.

Le Président (M. Brisson): La commission ajourne ses travaux sine die jusqu'à nouvel ordre de la Chambre.

(Fin de la séance à 23 h 18)

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