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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le mardi 24 février 1998 - Vol. 35 N° 35

Consultations particulières sur le projet de loi n° 188 - Loi sur la distribution de produits et services financiers


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Table des matières

Remarques préliminaires

Auditions

Documents déposés


Autres intervenants
M. Jacques Baril, président
Mme Nicole Léger, présidente suppléante
Mme Monique Gagnon-Tremblay
M. Lawrence S. Bergman
M. Yvan Bordeleau
M. Jean Campeau
*Mme Madeleine Plamondon, SAC
*M. Guy Massé, Conseil des assurances de personnes
*Mme Jocelyne Tremblay, idem
*Mme Simone Bilodeau, idem
*M. Yves Millette, ACCAP
*M. Normand Pépin, idem
*M. Jacques Labrecque, RACQ
*M. Alain Roch, idem
*M. Pierre Piché, RCASQ
*M. Yves Le May, idem
*Mme Louise Rozon, Option consommateurs
*M. Jacques St-Amant, idem
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Neuf heures quarante minutes)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): À l'ordre! Mesdames, messieurs, je souhaite la bienvenue aux membres de la commission ainsi qu'au ministre pour ces séances de consultation que nous allons entendre, entre autres, dans une première étape, dans les deux prochains jours. La commission des finances publiques est réunie afin de procéder à des consultations particulières sur le projet de loi n° 188, Loi sur la distribution de produits et services financiers.

Dans le cadre de ces consultations, le comité directeur, M. Bordeleau et moi-même, avait demandé au secrétaire de la commission de préparer un tableau qui a été distribué à chacun des membres de la commission, et, dans ce tableau, dans la première colonne, on se référait au rapport de la commission qui avait été déposé il y a près d'un an. Dans la deuxième colonne, on a spécifié ou il est écrit les articles qui se réfèrent aux recommandations du rapport de la commission du budget et de l'administration, à l'époque. Et, dans la troisième colonne, il n'y a aucun commentaire, puisque la commission se doit de rester neutre.

Nous avions demandé au secrétaire de la commission de faire ça, mais, bien entendu, ce n'est pas aux fonctionnaires de la commission, aux permanents de la commission de commenter des projets de loi. C'est pour cette raison que je tiens, ce matin, à spécifier que c'est le seul et unique document que la commission a préparé pour aider les parlementaires à faire les comparaisons entre le premier rapport de la commission et le projet de loi qui nous est déposé.

M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements qui vous ont été suggérés?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Donc, j'informe les membres de la commission que M. Bergman (D'Arcy-McGee) va remplacer M. Bourbeau (Laporte).

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci. Les membres de la commission, je crois, ont l'ordre du jour qui leur a été aussi distribué. Je ne sais pas si c'est nécessaire de tous les lire, là, vous en avez sans doute pris connaissance. Je demanderais: Est-ce que l'ordre du jour est adopté tel que déposé? Je vous remercie.

Maintenant, avant d'inviter le ministre, et le porte-parole de l'opposition, et d'autres membres de la commission à prendre la parole pour leurs remarques préliminaires, j'aimerais également faire une mise au point parce que nous avons pris connaissance dans les journaux, dernièrement, que certains députés ou les membres de la commission avaient un parti pris contre les caisses ou le Mouvement Desjardins. On a spécifié que les gens étaient contre la banque ou la caisse-assurance.

Je tiens à rappeler à tous ceux et celles qui nous écoutent que, dès le dépôt du rapport de la commission, qui avait été déposé à l'Assemblée nationale, à la recommandation 2, on disait oui et à la distribution de produits d'assurance par les institutions de dépôts aux conditions qui étaient énumérées dans la recommandation 2. Donc, j'ai été un peu étonné, comme d'autres membres de la commission, de m'être fait, je dirais, un peu... Le mot «accuser» est peut-être grave, est peut-être gros, mais on s'est un peu fait reprocher de dire que la commission des finances est contre la vente ou la distribution de produits financiers et d'assurance dans les institutions de dépôts.

Je tenais à faire cette précision parce que j'ai toujours essayé, et les membres de la commission, je pense, tous ensemble, nous avons toujours essayé de garder une neutralité et une objectivité dans nos recommandations, dans le fonctionnement de la commission. Je pense, en tout cas, que c'était mon devoir, comme président de la commission, au nom des membres de la commission, de rectifier ce tir ou ce ricochet à l'effet que les membres de la commission étaient contre le fait qu'on puisse permettre aux institutions de dépôts d'offrir et de vendre certains services.

Sur ce, M. le ministre, je vous laisse la parole pour vos remarques préliminaires.


Remarques préliminaires


M. Bernard Landry

M. Landry (Verchères): M. le Président, je vous remercie d'abord pour vos propres remarques préliminaires parce qu'elles simplifient sur un point majeur les travaux de notre commission, puisque vous venez de faire allusion à une unanimité qui, si je comprends bien, s'étend aussi aux membres de l'opposition officielle membres de la commission, puisque vous parliez plutôt au nom de la commission.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): S'il y a un membre qui veut contester ce que j'ai dit, il pourra le dire.

M. Landry (Verchères): Il pourra toujours le dire, oui. Mais vous avez bien campé le sujet.

Je tiens aussi à exprimer à toutes les personnes présentes qui ont accepté de s'exprimer devant nous, de s'acquitter d'un devoir de citoyen et de citoyenne... Pour certains et certaines, c'est un devoir civique général parce que ce n'est ni leur métier ni leur profession qui est en cause mais l'intérêt des consommateurs, des consommatrices ou d'autres éléments de notre société, et, pour certains autres, très légitimement, qui viennent ici représenter des points de vue plus pointus sur des choses touchant leur vie professionnelle, c'est l'exercice de leur métier, étant entendu que ce n'est pas parce qu'on défend un point de vue professionnel qu'on est contre le consommateur. On peut très bien défendre les deux à la fois, bien que l'adéquation ne soit pas toujours parfaite; c'est dans la nature des choses.

Notre projet de loi s'inscrit dans une démarche de révision que le ministre responsable de l'application de la Loi sur les intermédiaires de marché a entreprise avec le dépôt du rapport quinquennal, en mai 1996. Depuis, beaucoup de travaux et de consultations ont été menés par un grand nombre de personnes et d'organismes, et je les en remercie.

Il est à noter que c'est le devoir du ministre responsable de procéder à ces révisions, et je pense que législateur a été sage de forcer notre Assemblée nationale à se repencher périodiquement sur un certain nombre de secteurs très importants, comme celui qui nous regroupe ce matin, pour les garder modernes, les garder à jour, les garder dans les grands courants de la mondialisation qui sont la règle de l'économie de notre planète, de plus en plus. Le législateur a voulu que le Québec ne soit jamais en retard et donc il a forcé ces révisions que nous faisons pour nous acquitter de notre devoir parce que je pense que, ni pour le Parti libéral du Québec, ni pour le Parti québécois, ni pour l'Action démocratique, qui n'est pas représentée à notre table... Que ce soit une question idéologique ou partisane, que la Loi des intermédiaires de marché prenne telle ou telle tournure, les partis s'acquittent tout simplement de leur devoir.

Dans le programme de ma formation politique, il n'y a rien concernant directement les choses que nous allons évoquer durant cette commission. Les parlementaires, c'est leur destin, ont à s'occuper du bien commun, des fois dans une optique très partisane, des fois non. Ce matin, visiblement, nous ne sommes pas dans une optique partisane. D'ailleurs, les inspirations de ce rapport étaient déjà, vous le savez, en marche au ministère des Finances avant que le député de Crémazie n'y arrive et avant que votre humble serviteur n'y arrive, et, avant nous, c'était quelqu'un de la formation politique d'en face. Il est donc impératif que le Québec s'adapte aux grandes tendances, telles la globalisation des marchés, la libre circulation des personnes, des biens, des services et des capitaux, et aux changements dans les habitudes des investisseurs et des consommateurs de produits et de services financiers. Ces tendances sont inéluctables, en particulier celles concernant le décloisonnement de la distribution des produits et services financiers dont notre président a parlé dès l'ouverture de la séance.

Le phénomène du décloisonnement peut être observé dans de nombreux pays et dans la plupart des pays dynamiques et en croissance. Je suis de ceux qui croient qu'il est important d'accompagner ce mouvement, de l'encadrer par des mesures appropriées afin que les consommateurs en profitent au maximum. Il est devenu urgent que le Québec complète ses politiques en la matière. Nous n'attendrons pas que d'autres le fassent à notre place, car nous pourrions alors subir des règles du jeu qui ne nous conviennent pas, des règles qui pourraient nuire au développement de notre industrie des services financiers et à nos institutions et qui ne seraient pas adéquates pour la protection du consommateur.

(9 h 50)

Par ailleurs, nous comprenons que les réformes doivent être introduites graduellement pour minimiser les heurts, mais il faut les faire. Depuis mai 1996, nous avons été à l'écoute des gens et désireux de trouver des solutions harmonieuses. Je pense que nous devons garder cette attitude tout au long de cette commission où nous entendrons bien des points de vue. Je suis prêt, comme mes collègues, à examiner toutes les propositions qui seront faites pour améliorer le projet. Encore une fois, nous n'avons pas de religion, sauf celle de l'intérêt public, de l'intérêt des consommateurs et de l'intérêt des divers agents financiers intéressés. Cependant, tout en affichant cette ouverture totale, le gouvernement a certaines convictions, a certains devoirs, et j'aimerais affirmer maintenant bien clairement que nous allons garder le cap sur trois grandes orientations.

Avant de les énumérer, je voudrais aussi ajouter qu'il est de notoriété publique – c'est le moins qu'on puisse dire – que ces travaux et notre projet de loi ont alimenté d'assez vives controverses; c'est normal. Le changement ne doit pas être poursuivi pour le changement, et les propositions de changement doivent être examinées avec soin, puis il y a de gens qui veulent aller plus vite, puis d'autres qui veulent aller moins vite, et c'est dans les nobles compromis que les meilleures lois se fabriquent. C'est la raison pour laquelle, surtout devant les réticences, après que le projet de loi eut été déposé à notre Assemblée nationale, de certains intermédiaires de marché, j'ai décidé – comme c'était mon devoir, d'ailleurs – de m'impliquer personnellement dans certaines tentatives de rapprochement et de négociation des points de vue. Pour le faire, j'ai pris certaines précautions. Je me suis entouré...

C'était à l'époque de la visite du premier ministre en Chine, alors j'étais donc techniquement le premier ministre, ce qui me donne le droit de tirer sur les ressources du premier ministre. Alors, j'ai conscrit le chef de cabinet du premier ministre, M. Hubert Thibault, pour m'aider dans cette tâche, avec mon propre directeur de cabinet, M. Bréard, et ils ont rencontré, dans des séances passionnantes et très fructueuses, des intermédiaires qui sont venus en toute bonne foi dire ce qui ne faisait pas leur affaire dans ce projet et demander un certain nombre de modifications importantes auxquelles nous avons souscrit, des points de vue qui nous ont été exprimés soit à moi, car j'ai participé personnellement à une partie des négociations, soit à mes deux acolytes.

On nous a soumis des choses intéressantes et raisonnables auxquelles nous avons acquiescé. Donc, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes, on a une espèce de compromis – ha, ha, ha! – sauf que nos interlocuteurs, qui sont d'une bonne foi égale à la nôtre, disent ne pas retrouver dans le projet ce que nous avons discuté et ce dont nous avons convenu. C'est très préoccupant de voir que des gens se parlent en toute bonne foi, se parlent longtemps, se parlent des heures et des heures et, apparemment, ne se comprennent pas.

Ce n'est pas tout à fait ça qui est arrivé. Nous ne nous sommes pas compris parfaitement, mais j'ai refait le test avec les députés de notre formation politique présents à cette table pour voir si ce à quoi nous nous étions engagés se retrouvait dans le projet de loi. Il peut y avoir des zones grises, on est ici pour les nettoyer et les éclaircir, mais il est évident qu'un effort très considérable a été fait pour introduire tout ce à quoi nous nous sommes engagés dans le projet.

Ce n'est pas absolument simple de juger d'un texte juridique nouveau, avec des éléments de droit nouveaux, et de croire arriver à la vérité du premier coup. Ainsi, une vieille règle d'interprétation juridique dit que les lois s'interprètent les unes par rapport aux autres et les articles des diverses lois, les uns par rapport aux autres. Alors, on peut avoir convenu une concession sur le point a, disons, et cette concession se retrouve dans les articles a, b, c, d de cette loi, connectés avec c, d, e, f de telle autre loi. L'ensemble répond à la demande. Si on va voir juste un article de la loi, si on voit juste a, on va dire: Aïe! aïe! ce que j'ai demandé n'est pas là. Non, ce que vous avez demandé n'est pas là, mais il est là si on interprète les articles les uns par rapport aux autres et les lois les unes par rapport aux autres.

Cette loi, elle est substantielle, elle est importante, mais la Loi de protection du consommateur existe aussi, la loi d'accès à l'information existe aussi. Donc, globalement, je redis à nos amis intermédiaires de marché qui ont participé de bonne foi à nos négociations que ce à quoi nous nous sommes engagés, nous tenons à nous en acquitter. Et, si la formulation qui se retrouve dans le projet de loi n'est pas suffisamment claire, c'est notre travail de clarifier les choses.

Je ne suis pas en train de dire que tout ce qui est demandé par les intermédiaires est immédiatement accepté par le gouvernement; je suis en train de dire que ce à quoi nous nous sommes engagés de bonne foi, nous tenons à l'exécuter, pas par vertu, mais parce que ce qui nous fut proposé était bon. Ha, ha, ha! Ce n'est pas parce qu'on veut faire plaisir aux intermédiaires, c'est parce que les intermédiaires nous ont dit des choses qui nous ont convaincus, et il faut maintenant que dans le texte de loi se retrouvent ces choses-là.

Évidemment, tout ce que je viens de dire s'applique à la partie la plus contentieuse des trois points maintenant que je vais mentionner, parce que le premier point, dans les objectifs du gouvernement, il n'est pas contentieux. Je pense que le président a ouvert la séance d'une façon assez claire et assez spectaculaire. Le premier point, c'est que le gouvernement a l'intention ferme de parachever le décloisonnement de la distribution des produits et services financiers. Nous irons donc de l'avant avec la caisse-assurance. À l'occasion de cette commission, nous pourrons discuter des modalités de mise en oeuvre concernant, par exemple, la protection des renseignements personnels ou les ventes liées, mais l'objectif du décloisonnement ne sera pas remis en question. J'ai vérifié soigneusement avec les membres de notre formation politique, nous sommes tous d'accord là-dessus, M. le Président, et j'espère et même je crois que l'opposition officielle pense comme nous. Si ce n'est pas le cas, bien, cette commission leur permettra, bien entendu, de faire valoir leurs divergences. Mais, de notre côté, la question est réglée.

Nous pensons qu'il est dans l'intérêt du Québec que la portion du système bancaire sur laquelle nous avons juridiction soit décloisonnée. Jacques Parizeau avait commencé le mouvement il y a une quinzaine d'années, et maintenant il faut le finir. Et Parizeau avait été très, très clairvoyant parce qu'il a été un des premiers ministres des Finances d'Occident à décloisonner ce qui autrefois était considéré comme une hérésie. Chaque segment du système financier devait être totalement imperméable, c'est ce qu'on enseignait dans les facultés d'économie et de finances publiques, même dans les facultés de droit. Parizeau, de façon très audacieuse – et d'ailleurs il venait d'une famille d'assurances; je ne sais pas si ça a influencé son jugement, mais... – il a ébranlé les colonnes du temple, et aujourd'hui, bien, c'est la règle un peu partout dans le monde, et le mouvement s'accentue et s'accélère, dans l'Union économique européenne en particulier. Et, avec le dernier accord de l'Organisation mondiale du commerce sur une globalisation plus poussée encore des institutions financières, ce mouvement va s'accélérer.

Vous savez qu'à partir du 1er janvier 1999, en raison des dernières ententes signées à l'Organisation mondiale du commerce, le monde bancaire sera totalement décloisonné pour toute transaction au-delà de 150 000 $. Ça veut dire que la concurrence bancaire qui, aux yeux de certains, fait défaut... Et je suis aussi de cette école. Il n'y a pas beaucoup de banques au Canada, hein? Et, si on regarde, sans les critiquer de façon virulente, les rémunérations de leurs dirigeants, et les profits encaissés, et les plaintes de nombreux consommateurs et consommatrices, un peu de concurrence ne nuira pas. Mais là, à partir du 1er janvier 1999, ce n'est pas un peu de concurrence, là, c'est une maxiconcurrence pour toutes les opérations économiques commerciales au-delà de 150 000 $.

Le Québec n'a pas juridiction globalement sur ces grands traités internationaux. Le Canada les signe, le Québec fait partie du Canada, mais le Québec a juridiction sur une institution qui représente la moitié du commerce bancaire au Québec, le mouvement coopératif d'épargne et de crédit, qui est essentiellement maintenant le Mouvement Desjardins. La banque au Québec, c'est Desjardins pour 50 %. 50 % du reste, c'est Banque Nationale, et le dernier segment, c'est les banques qui restent, qui sont de très grandes institutions bancaires.

(10 heures)

Il y a même une fusion, dans le dernier segment, qui est proposée, vous savez, et certains ont dit: Ça va diminuer la concurrence. Bien, d'abord, au Québec, ça ne diminuera pas grand-chose parce que 50 %, je vous l'ai dit, c'est Desjardins. Et, pour le reste du Canada, bien, à cause de ce que j'ai dit, en 1999, il va y avoir des effets compensateurs. C'est parce que je ne veux pas élargir trop, trop le débat, là. Mais je pense, donc, que le jour est venu de décloisonner, et c'est ce que nous allons faire, en tout respect pour les opinions contraires que nous entendrons quand même. Mais je ne veux pas donner de faux espoirs – ha, ha, ha! – à ceux qui vont venir nous dire qu'il ne faut pas faire ça. Nous allons les écouter religieusement, surtout qu'un de nos interlocuteurs majeurs dans cette salle, l'Association des intermédiaires en assurance de personnes du Québec, est d'accord avec cette vision des choses dans son mémoire que je cite: «Moins de 10 ans plus tard – on parle du premier décloisonnement – on veut donner aux caisses la latitude de distribuer tous les produits d'assurance de personnes. C'est le premier but du projet de loi n° 188.» C'est plus ou moins vrai que c'est le premier but, mais, en tout cas, c'est un but majeur.

Alors, qu'on le fasse et qu'on permette à Desjardins de distribuer de l'assurance des personnes dans ses caisses. L'AIAPQ ne s'est jamais opposée à cela. Donc, M. le Président, vous faites comme l'AIAPQ, vous dites: Les députés ne se sont jamais opposés à cela non plus.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Ça a toujours été ça.

M. Landry (Verchères): C'est ça. Alors, c'est très réconfortant. Il y a une phrase suivante que je dois citer pour y aller intégralement avec nos amis.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): C'est de comment le faire qu'on discute.

M. Landry (Verchères): Absolument. La phrase suivante, c'est: «Il n'est pas nécessaire d'abolir le cadre de protection actuel pour permettre aux caisses de distribuer de l'assurance.»

Alors, on va regarder maintenant ces modalités. On va regarder ces comment. On va les regarder en détail. Toutes les pierres seront soulevées. Donc, voici le premier point sur lequel le gouvernement a fait son idée.

Le deuxième: il est de la mission première de l'État de protéger les intérêts du public. Dans les services financiers comme dans d'autres domaines, l'État doit s'assurer, en particulier, que les mécanismes appropriés sont en place afin que la vie privée soit respectée et que les institutions et les intermédiaires agissent avec professionnalisme et honnêteté. Il est dans l'intérêt du public aussi que nous favorisions des conditions de marché et une organisation telle que les consommateurs aient accès aux produits et services financiers au meilleur prix possible et qu'ils aient la liberté de choisir le mode de distribution qui leur convienne. D'autres principes sont en cause, tels que l'égalité de traitement pour tous et l'égalité de traitement pour chacun des intervenants au marché. Lors de nos échanges en commission, nous pourrons discuter des modalités les plus appropriées pour que l'intérêt de nos concitoyens et concitoyennes soit le mieux servi possible.

Troisième orientation fondamentale qui découle en partie de la seconde. Au Sommet économique de 1996, le gouvernement s'est commis sur un engagement qui devait s'appliquer aussi à l'industrie des services financiers. L'allégement de la réglementation doit être un leitmotiv constant dans cette réforme afin que l'industrie québécoise puisse devenir plus concurrentielle, qu'elle puisse créer de l'emploi et offrir des produits et services à meilleur prix aux consommateurs. Ici aussi, il y a de la place à la discussion quant aux modalités précises qui doivent être retenues pour alléger la réglementation sans atténuer la protection réelle des consommateurs. Ces grandes orientations sont fondamentales. Il me fera plaisir de les rappeler à l'occasion, mais plusieurs d'entre vous vont le faire avant même que je ne le fasse.

Par ailleurs, je souhaite que nous ayons des discussions ouvertes, franches et créatives sur les modalités du projet de loi. Nous serons à l'écoute des propositions qui permettraient d'améliorer ce projet. Je pense que les membres de cette commission sont aussi bien disposés que je puis l'être moi-même. Par ailleurs, le gouvernement maintiendra le cap, comme je l'ai dit, sur les orientations fondamentales que je viens d'énoncer.

Une brève présentation du projet de loi, maintenant. Les grandes lignes de ce projet sont les suivantes. Un, décloisonnement de la distribution. Assurer un décloisonnement efficace de la distribution des produits et services financiers, objectif majeur du présent projet. Dans le monde occidental, en Europe de l'Ouest en particulier, aux États-Unis d'Amérique, dans les espaces économiques avancés, on a vu un grand mouvement de décloisonnement s'opérer. Ce décloisonnement prend place à travers divers canaux de distribution. Le consommateur se voit offrir divers produits et services financiers sur Internet, sur le téléphone, le guichet automatique, dans les grandes chaînes d'épicerie. Tout le monde a entendu parler de l'entente CIBC-Loblaws. On voit la sagesse du législateur d'avoir provoqué, d'ailleurs, ces révisions périodiques de nos lois, parce que la technologie évolue très rapidement et les faits, on le voit bien, devancent le droit.

Chez nous, il est déjà possible, depuis 1989, tant pour les institutions financières québécoises que pour les bureaux de courtiers, d'offrir, par des intermédiaires certifiés, plusieurs produits et services tels que certificats de dépôt, services de planification financière, rentes, fonds communs de placement, plans de bourses d'études, contrats d'investissement, produits d'assurance, prêts hypothécaires, assurance-crédit, assurance-voyage.

Dans ce contexte, il serait inutile de combattre la tendance au décloisonnement. Ce serait une bataille perdue d'avance. Il faut plutôt accompagner ce mouvement et l'encadrer au profit du consommateur et de l'industrie. Par ailleurs, et c'est là la dimension la plus importante, le décloisonnement représente beaucoup d'avantages pour le consommateur, autant du point de vue du prix des produits que de l'accessibilité réelle à divers produits.

Le projet de loi retient donc cette voie du décloisonnement de la distribution des produits et services financiers, c'est-à-dire qu'une même entreprise, représentants autonomes ou groupe de représentants, assureurs, institutions de dépôts, courtiers en valeurs mobilières de plein exercice ou d'exercice restreint, pourrait offrir une gamme plus large de produits et services financiers.

Est-ce que les règles et les modalités proposées dans le projet de loi sont adéquates? Est-ce qu'elles peuvent être améliorées? Nous sommes ici pour en discuter. Je serai, de même que mes collègues de cette commission, à l'écoute des propositions qui seront faites.

Retenons simplement, pour le moment, que le projet de loi prévoit que tant les institutions financières, à travers leurs représentants autorisés, que les représentants autonomes et les représentants regroupés en cabinet pourront offrir une vaste gamme de produits et services financiers s'ils détiennent, bien entendu, les permis prévus.

Le projet de loi, aussi, introduit plusieurs mesures afin d'améliorer la protection du consommateur. On pourrait discuter, mais l'essentiel du projet de loi tourne autour de la protection du consommateur. La protection des renseignements personnels sera renforcée. Il serait important de se rappeler, au cours de nos discussions, que la Loi sur les renseignements personnels dans le secteur privé, unique au monde, continuera de s'appliquer dans toute sa rigueur. C'est ce que je voulais dire en faisant allusion au fait que les articles d'une loi s'interprètent les uns par rapport aux autres et que les diverses lois s'interprètent dans un contexte législatif et réglementaire plus global.

Notre Loi sur les renseignements personnels dans le secteur privé – d'ailleurs, divers intervenants viendront nous en parler – est la plus avancée du monde. Ce que fait le projet de loi, c'est d'ajouter des dispositions plus contraignantes encore à ce qui l'est déjà beaucoup d'après les observateurs étrangers. Et voici quelques-unes de ces dispositions.

Tous les cabinets devront s'assurer que leurs représentants ne peuvent avoir accès qu'aux renseignements nécessaires à l'exercice de leurs fonctions, uniquement les renseignements nécessaires à l'exercice de leurs fonctions, pas les renseignements nécessaires pour leurs relations publiques, ou leur curiosité personnelle, ou l'établissement de statistiques en vue d'un marketing ultérieur. Les renseignements nécessaires à l'exercice de leurs fonctions.

Les renseignements de nature médicale, maintenant, ou concernant des habitudes de vie feront l'objet d'exigences de confidentialité strictes. Ces renseignements seront d'ailleurs consignés sur un formulaire distinct, qui est l'article 25. Le premier paragraphe que j'ai mentionné, c'était l'article 76.

Lors de ses inspections, maintenant, le Bureau des services financiers devra évaluer les procédures mises en place par un cabinet pour protéger les renseignements personnels de ses clients. Le Bureau fera rapport sur cette question à la Commission d'accès à l'information elle-même.

Nous avons ajouté d'autres mesures pour appuyer la liberté de choix des consommateurs. Par exemple, l'interdiction d'exercer des pressions indues sur un consommateur, article 17, s'ajoutera à l'interdiction de vente liée, c'est-à-dire l'interdiction d'assujettir la conclusion d'un contrat à l'obligation pour le client de conclure un autre contrat; l'obligation pour le représentant d'identifier les besoins du client afin de lui proposer le produit d'assurance qui lui convient le mieux, article 21.

La réglementation de la distribution de certains produits d'assurance, telles l'assurance-voyage et l'assurance collective, sera plus exigeante. L'assureur ainsi que le distributeur seront responsabilisés. Le gouvernement pourra décréter qu'un produit d'assurance ne peut être offert que par un distributeur d'un certificat restreint. Le Bureau que nous allons créer pourra alors imposer à ce distributeur toutes sortes d'exigences pertinentes.

(10 h 10)

La création d'un guichet unique pour le consommateur. En effet, le Bureau des services financiers sera l'organisme à qui il pourra s'adresser pour obtenir des informations ou porter plainte, notamment lorsque la personne, le cabinet ou la société avec lequel il transige détiendra des certificats ou des inscriptions dans plus d'une discipline.

Tous les membres de cette commission qui sont des députés savent qu'une des grandes plaintes de nos concitoyens aujourd'hui, c'est la jungle administrative dans laquelle ils doivent cheminer pour le moindre acte concernant l'administration publique ou la défense de leurs droits. De façon tout à fait normale, on entend des demandes de guichet unique dans tous les secteurs de la vie qui peuvent être compartimentés en guichets uniques. Alors, je pense que, dans un monde aussi vital et aussi complexe que l'intermédiation financière, si pour le profane – ça peut être facile pour ceux qui sont des professionnels de ça – il y a un monde difficile et qui les rend perplexe par sa complexité, c'est bien celui-là. Alors, on va faire oeuvre utile pour nos concitoyens et nos concitoyennes en établissant ce guichet unique.

L'introduction, maintenant, d'un nouveau régime d'indemnisation permettant au consommateur de bénéficier de conditions plus propices à son indemnisation, dans la mesure où il transigera avec un représentant rattaché à un cabinet. Ça ne veut pas dire que, quand il va transiger avec un autonome, il ne sera pas protégé, on va le voir plus loi. Mais, en vertu de ce régime, le cabinet auquel sera rattaché le représentant devra souscrire une assurance pour couvrir la responsabilité qui lui incombe pour toute faute commise par un de ses représentants ou employés dans l'exécution de ses fonctions.

Ça veut dire qu'on a deux niveaux de protection: on a le niveau attaché à la faute de l'individu puis on a le niveau attaché à la faute de l'organisation dont il est partie. C'est des vieux principes de droit qu'on retrouvait depuis toujours dans le Code civil pour le mandant, le mandataire qui étaient liés dans leurs obligations, mais là on va dans des choses beaucoup claires, beaucoup plus pointues, beaucoup plus spécifiques. Deux niveaux de protection pour le consommateur.

Le client lésé pourra alors se retourner, pour obtenir réparation des dommages, soit contre le cabinet qui détiendra toutes les protections nécessaires, soit contre le représentant lui-même. Ceux qui ont pensé – et on pourra entendre des explications supplémentaires – qu'on déresponsabilisait le représentant, je crois, devraient approfondir ces articles qui responsabilisent à la fois le représentant et le cabinet pour une double protection du consommateur.

Finalement, l'obligation pour tout représentant autonome ou société autonome de souscrire une assurance-responsabilité. Cabinet, autonome. Cabinet, doivent évidemment faire face à leur responsabilité, autonome aussi. Et tout autonome, individu autonome ou société autonome, devra souscrire une assurance-responsabilité pour couvrir ses erreurs, omissions et cotiser à un fonds d'indemnisation pour garantir sa responsabilité en raison de fraude ou de manoeuvre dolosive, comme ça se retrouve d'ailleurs dans plusieurs autres de nos lois.

On le constate, M. le Président, les intérêts des consommateurs ont été une préoccupation majeure lors de l'élaboration de ce projet de loi.

La structure proposée, maintenant, qui a beaucoup évoluée, d'ailleurs, au cours des mois de réflexions qui se sont produites au ministère des Finances. Je l'ai dit, ces travaux-là ont été commencés du temps où ceux qui sont en face de nous étaient au pouvoir. Donc, il y a eu toute une réflexion sur les structures. Je peux vous assurer que j'ai été témoin moi-même d'évolution fulgurante de ces propositions au cours des derniers mois et notamment au cours des séances de négociations auxquelles j'ai participé moi-même avec le directeur de cabinet du premier ministre et mon propre directeur de cabinet. On est parti d'une chose considérablement différente par rapport à celle qu'on retrouve dans le projet de loi. Si cette chose peut encore être améliorée, elle le sera, bien entendu. Je ne prétends pas qu'on est arrivé à la perfection du premier coup, mais on a énormément évolué, au ministère des Finances, depuis quelques mois. On a diversifié nos sources d'information professionnelle, on a diversifié, même, la composition de notre personnel pour être sûr qu'on ne serait pas attaché à certains préjugés développés au cours des années antérieures.

La structure proposée, c'est la mise en place, comme vous le savez, de contrôle et supervision du secteur d'une nouvelle manière, d'une manière plus simple, d'une manière allégée, d'une manière s'apparentant à un guichet unique. On veut réduire la complexité et les coûts de l'encadrement tout en augmentant l'efficacité. Réduction de coûts, augmentation d'efficacité.

Présentement, un grand nombre d'organismes et un chevauchement de leurs responsabilités créent, spécialement pour le consommateur, beaucoup de confusion. On est 10 ou 12, dépendant de l'acception qu'on donne au terme «organisme», unités qui s'occupent du secteur. La nouvelle structure sera simple, le consommateur s'y retrouvera facilement.

Comme vous le savez, cette structure comprend trois organismes: le Bureau des services financiers, la Chambre de la sécurité financière et la Chambre de l'assurance de dommages. Le Bureau des services financiers prendrait la relève de sept organismes présentement impliqués dans la supervision et le contrôle des intermédiaires, soit: Inspecteur général des institutions financières, la Commission des valeurs mobilières du Québec, le Conseil des assurances de dommages, le Conseil des assurances de personnes, l'Institut québécois de planification financière, l'Association des intermédiaires en assurance de personnes du Québec et l'Association des courtiers d'assurances de la province de Québec.

Ce n'est d'aucune façon impliqué que ces organisations n'ont pas joué un rôle utile, noble à une époque où le monde de l'assurance n'était pas ce qu'il est devenu aujourd'hui, son imbrication avec les institutions financières, et la vente de produits financiers n'était pas ce qu'elle est devenue aujourd'hui. J'ai dit que Parizeau était d'une famille d'assurance, et il l'était au niveau de la très grande assurance, Gérard Parizeau, etc. Mais, moi aussi, je suis d'une famille d'assurance; mon père était un petit courtier d'assurances à Saint-Jacques-de-Montcalm, à une dizaine de kilomètres à l'ouest de la ville de Joliette, où il gagnait honnêtement sa vie en vendant de l'assurance. Je me souviens du nom d'une compagnie, l'Excelsior Life; je n'en ai pas racheté moi-même par la suite, mais je me souviens de ça et de quelques autres. Ça n'avait rien à voir avec le métier que le député de Charlevoix exerce et exerçait dans son cabinet multidisciplinaire sophistiqué, avancé, où il vend des produits dont mon père n'aurait même pas compris le nom.

Alors, ce n'est pas faire injure aux hommes et aux femmes qui ont oeuvré dans ces nombreuses structures, associations, qui ont rendu de grands services à la collectivité québécoise, de dire: Le jour est venu d'un guichet unique, plus simple, moins coûteux, plus fonctionnel, plus articulé, où les mêmes hommes et les mêmes femmes qui se sont dévoués pour le monde de l'assurance pourront aussi éventuellement continuer leur action avec des instruments plus appropriés, plus modernes, plus conformes à leur talent que des structures héritées par sédimentation des dernières décennies.

Je conclus, M. le Président, pour ne pas alourdir ma présentation et surtout me conformer à mon engagement d'écouter plus que d'autre chose, mais cette intervention initiale est, un, traditionnelle, deux, réglementaire, trois, utile, je l'espère. Je vais maintenant écouter, mais je voudrais rappeler, en terminant, à nos invités et aux membres de la commission que chacun des mots prononcés par eux et par elles sera écouté, analysé, éventuellement introduit dans notre projet de loi, je l'espère. Tout ce qui sera pertinent à nos yeux sera retenu. Mais ce projet de loi qui est devant vous aujourd'hui, il n'est pas celui que des premiers brouillons émanant du ministère des Finances m'avaient proposé. Il a évolué, il a changé. J'espère que la pensée des hommes et des femmes qui vont nous parler maintenant, quand c'est nécessaire, évoluera et changera. Merci, M. le Président.

(10 h 20)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le ministre, de votre exposé. Maintenant, j'accorderai la parole au député de Viger.


M. Cosmo Maciocia

M. Maciocia: Merci, M. le Président. D'entrée de jeu, je ne voudrais pas prêter des intentions au ministre, mais, quand il a donné ses trois orientations, vous avez bien vu que la première, c'est la caisse-assurance, puis la deuxième, c'est protéger les intérêts du consommateur. Pour nous, M. le ministre, c'est l'inverse: c'est la protection du consommateur en premier, puis la caisse-assurance par après. Je voulais seulement mettre ça un peu en perspective, M. le ministre.

M. le Président, c'est avec plaisir pour moi et mes collègues d'être ici aujourd'hui pour entreprendre les auditions de la commission des finances publiques sur le projet de loi n° 188 portant sur la distribution des produits et services financiers. D'ici la mi-mars, nous aurons l'occasion d'entendre plusieurs groupes qui exprimeront leur opinion sur ce projet de loi. On sait déjà, à la lecture des mémoires que nous avons reçus, que beaucoup de modifications nous seront suggérées. On sait aussi que, sur plusieurs points fondamentaux, le projet de loi divise les intervenants plutôt que de les rallier.

Comme vous le savez, M. le Président, c'est la deuxième fois depuis 1996 que nous sommes réunis en commission parlementaire pour étudier la question de la distribution des produits et services financiers. La commission des finances publiques entreprend aujourd'hui un travail qui se situe dans la suite logique du travail fait par la commission du budget et de l'administration il y a 18 mois.

La première fois, l'étude de ce dossier a donné lieu à un fait marquant à l'Assemblée nationale: la publication d'un rapport unanime de tous les députés de la commission, tant les députés ministériels que les députés de l'opposition. Le rapport de cette commission porte d'ailleurs, M. le Président, votre nom. C'est ce qui me donne l'occasion de rappeler tout le plaisir que j'ai eu à participer, sous votre direction, aux travaux de cette commission. Le rapport Baril a été adopté à l'unanimité notamment parce qu'il était une voie raisonnable, celle du progrès et du changement, mais sa rupture brutale et douloureuse avec le passé. C'était la voie du législateur moderne, résolument progressiste mais prudent, celle de l'équilibre et du bon sens et surtout celle du compromis entre des points de vue parfois très divergents, mais néanmoins aussi valables les uns que les autres.

À la lecture des mémoires que nous avons reçus, je constate avec satisfaction, M. le Président, que le rapport Baril est toujours d'actualité, puisque beaucoup s'y réfèrent toujours. Dans ces conditions, l'une des questions très importantes à laquelle nous devons répondre en tant que parlementaires au cours de ce mandat est: Dans quelle mesure le projet de loi n° 188 va-t-il dans le sens des recommandations unanimes faites par la commission en décembre 1996 et dans quelle mesure va-t-il dans le sens contraire? C'est ça la question, M. le Président.

À peu de choses près, la problématique que nous étudierons au cours des prochaines semaines est exactement la même qu'en 1996. Elle n'a pas changé. Il ne s'agit pas, dans mon esprit, de tout reprendre à zéro. En ce sens, le rapport Baril nous sera très utile. Il nous servira de référence et nous aidera à approfondir encore plus chacune des questions très importantes que soulève le projet de loi n° 188. Je ne veux pas dire par là que les travaux de notre commission doivent consister à vérifier point par point, dans les moindres détails, si le projet de loi est le reflet absolument fidèle des recommandations de la commission, mais ils devront consister au minimum à examiner si, dans son esprit, le projet de loi a bel et bien été élaboré sur la foi des observations et du consensus des parlementaires. Malheureusement, après avoir lu le projet de loi et plusieurs des mémoires qui nous ont été acheminés, il serait surprenant que nous arrivions à cette conclusion facilement. Et je vais porter immédiatement à votre attention quelques exemples, M. le Président.

Prenons la question de la distribution des produits d'assurance sans intermédiaire. L'esprit du rapport de la commission était clairement d'aller dans le sens d'un contrôle plus adéquat de ce genre d'activité car c'est là qu'on avait observé le plus grand nombre de problèmes graves pour les consommateurs. Il fallait des intermédiaires, quitte à ne pas poser les mêmes exigences de formation et d'encadrement pour tous. Or, il semble que le projet de loi s'applique plutôt à favoriser la distribution sans intermédiaire au point de permettre virtuellement à n'importe quel produit d'assurance, même des produits complexes, d'être vendu par des personnes non qualifiées, à condition qu'elles le fassent de manière afférente à un bien.

Voilà, M. le Président, un premier constat qui, s'il se vérifie dans le cadre de nos travaux, va dans une direction bien différente de celle du rapport Baril. Une telle orientation peut donner lieu à des situations pour le moins inusitées, où un même produit d'assurance, peu importe sa complexité, pourrait être vendu autant par des personnes sans aucune formation dans le domaine que par des personnes lourdement formées et encadrées professionnellement. Si les audiences devaient révéler que le projet de loi autorise effectivement ce genre de situation, je vous soumets respectueusement, M. le Président, qu'il faudra veiller à changer cela.

Que valent en effet toutes les améliorations que peut contenir le projet de loi en matière de protection du consommateur s'il autorise, par ailleurs, un essor sans précédent de la distribution sans représentant et que le consommateur se voit privé de la plupart de ses recours. Les audiences, je l'espère, vont nous permettre d'éclaircir cette question.

Autre exemple, M. le Président, la distribution des produits d'assurance dans les institutions de dépôts, la fameuse caisse-assurance. Il est clair, M. le Président, que le projet de loi n° 188 vise la libéralisation de la vente des produits d'assurance dans les institutions de dépôts. En ce sens, il est déjà en soi partial. Mais jusqu'où l'est-il? Et l'est-il de façon à garantir une saine concurrence entre les distributeurs de produits d'assurance?

La commission de 1996, après avoir entendu tout le monde sur cette question, avait énoncé une série de conditions avec lesquelles la distribution de produits d'assurance dans les institutions de dépôts pourrait être permise tout en percevant un sain équilibre concurrentiel et une protection adéquate des renseignements personnels, tel que vous l'avez mentionné au début, M. le Président, c'est ça. Beaucoup de mémoires que nous avons reçus affirment aujourd'hui que ces conditions n'ont pas été prises en compte ou qu'elles sont devenues cosmétiques sous la plume des artisans du projet de loi.

La distribution de produits d'assurance dans les institutions de dépôts est l'une des questions très sensibles sinon la plus sensible que nous serons appelés à évaluer dans le cadre du présent mandat. Il est opportun, au moment où nos travaux débutent, de rappeler que les conditions énoncées par le rapport Baril pour assurer un essor équilibré de la vente de produits d'assurance par les institutions de dépôts visaient principalement la protection des renseignements personnels. Est-il besoin de rappeler, M. le Président, combien les institutions de dépôts seraient favorisées si elles étaient autorisées à faire un usage trop permissif de tous les renseignements qu'elles détiennent sur les consommateurs. Les banques ou les caisses savent virtuellement tout sur nos habitudes de consommation, sur nos habitudes d'épargne et de crédit, sur notre situation familiale, sur notre bilan personnel, sur nos transactions courantes, et j'en passe. Avec la vente des produits d'assurance, elles ajouteront la seule information importante qui leur manque, les renseignements sur nos habitudes de vie et notre état de santé.

Beaucoup viendront nous expliquer comment, en pratique, la promiscuité physique et informatique permise par le projet de loi rend inopérantes les restrictions qu'il impose par ailleurs. D'autres nous expliqueront comment les dispositions générales dans ce domaine ont une valeur plus théorique que pratique. On nous expliquera aussi que la concentration de l'épargne dans les institutions de dépôts a un effet fidélisant très puissant sur les consommateurs. D'autres encore nous démontreront comment l'exploitation croisée de tous ces renseignements peut placer les consommateurs dans une situation de dépendance inacceptable et de vulnérabilité vis-à-vis les institutions de dépôts.

(10 h 30)

Notre responsabilité de parlementaires est particulièrement interpellée par la question de la protection des renseignements personnels, car c'est notre responsabilité de donner aux consommateurs des moyens efficaces de contrôler les abus et de contenir la formidable puissance de commercialisation des institutions de dépôts. Les représentations que nous recevrons sur ce sujet sont de la plus grande importance, car nos décisions pourraient exposer des milliers, voire même des millions de consommateurs à des stratégies de sollicitation extrêmement sophistiquées qui auraient été rendues possibles par notre imprévoyance législative. Pire encore, des consommateurs à risque pourraient être privés de produits d'assurance, étant donné la sélection très contrôlée des risques qui peut permettre une exploitation habile des renseignements personnels.

Au centre du débat sur la protection des consommateurs se situe aussi la question de l'encadrement de la pratique. On viendra nous dire à ce sujet que le projet de loi n° 188 s'éloigne dangereusement du principe de la responsabilisation professionnelle qui constitue, depuis très longtemps au Québec, le fondement même de la protection du consommateur. Le ministre disait tout à l'heure que non, que c'est sa version des faits qui est réelle, mais, d'après nous, ce n'est pas comme ça.

À cet égard, il est utile de rappeler que la commission parlementaire de 1996 avait fait l'unanimité sur le fait que la responsabilisation directe des individus impliqués dans la distribution des produits d'assurance constituait la meilleure des formes de protection pour les consommateurs. Elle est la plus préventive des formes de la protection et elle accorde aux consommateurs des recours simples, clairs, non équivoques, dirigés directement contre les individus responsables.

Malgré certaines améliorations, beaucoup de groupes viendront nous dire aussi que le projet de loi perpétue malheureusement un régime de protection à deux vitesses qui fut à l'origine, dans le passé, des principaux abus à l'encontre des consommateurs. Certains nous expliqueront même que le projet de loi aggrave cette situation, dans laquelle cohabite un régime injuste où certains consommateurs faisant affaire avec des personnes qualifiées et certifiées bénéficient d'une protection très étendue et où d'autres consommateurs faisant affaire avec des personnes non qualifiées et non certifiées ne bénéficient d'aucune protection efficace.

Dans le même ordre d'idées, nous verrons aussi que le projet de loi introduit une nouvelle mécanique d'encadrement très complexe par rapport à la situation actuelle. On peut peut-être reprocher à la structure d'encadrement actuelle son nombre d'organismes, mais, au moins, les recours sont clairs, uniformes et non équivoques. Avec le projet de loi n° 188, on nous expliquera que, si le nombre d'organismes diminue, les recours, eux, deviennent compliqués, obscurs et surtout administrés, pour une large part, par des cabinets qui seront juge et partie dans le traitement des plaintes des consommateurs. À tout prendre, nous diront-ils, mieux vaut plusieurs organismes et des recours simples qu'un seul organisme administrant un labyrinthe de recours complexes.

Il faut souligner aussi le fait que la mécanique proposée dans le projet de loi imposera, en pratique, à ceux et celles qui oeuvrent dans le domaine de se constituer un cabinet et reportera sur ce cabinet une grande partie de la responsabilité portée jusqu'ici par le intermédiaires eux-mêmes. On nous dira que cette mécanique a pour effet de déresponsabiliser tout le monde, tant les compagnies, d'un côté, que les intermédiaires de l'autre, en renvoyant les consommateurs au cabinet, des personnes morales dont la responsabilité, par définition, est limitée. Nous entendrons plusieurs personnes s'interroger ouvertement sur les motifs qui justifient l'introduction de cette mécanique totalement neuve et complexe que personne, a priori, parmi les acteurs importants de l'industrie ne semble avoir réclamé. Et, à la question: Cette mécanique complexe constitue-t-elle une amélioration pour les consommateurs? beaucoup nous diront que non.

Dans ces conditions, nous serons en droit de nous demander si l'objectif de simplification des recours poursuivi par le projet de loi a été atteint. La question sera d'autant plus pertinente que l'adoption du projet de loi comporte des dizaines et des dizaines d'objets de réglementation, ce qui ferait grossir d'un coup le corpus réglementaire dans le domaine des services financiers alors qu'on s'emploie, en même temps, à réduire et à contenir l'envahissement de notre vie collective par des réglementations tentaculaires. Il nous faudra être très attentifs à ces arguments, car il ne faudrait pas que le projet de loi entraîne un affaiblissement de la protection des consommateurs en multipliant les échappatoires pour l'industrie et en faisant porter la responsabilité au mauvais endroit.

Dernier exemple, M. le Président. Le rapport Baril recommandait de maintenir la distinction agent-courtier et, dans le même esprit, recommandait le maintien de la limite de 20 % sur la propriété des cabinets de courtage par les assureurs et les institutions de dépôts. Ces deux recommandations allaient de pair. En effet, comment permettre le contrôle d'un cabinet de courtage en assurance par une institution financière et croire en toute honnêteté que ce cabinet continuerait d'avoir toute la liberté de placer les risques de ses clients auprès de n'importe quel assureur dans le marché, comme un courtier doit faire, doit pouvoir le faire.

Or, le projet de loi n° 188 va dans le sens contraire et autorise les assureurs, les caisses ou les banques à créer ou à contrôler les cabinets de courtage dans le domaine des assurances – et ça, M. le Président, entre parenthèses, le ministre avait pris un engagement dans ce sens-là, mais on ne le retrouve pas dans le projet de loi. Dans le domaine des assurances, contrairement à celui des valeurs mobilières, on ne peut pas faire ça sans porter gravement préjudice au statut du courtier et à sa crédibilité dans le marché. Il est l'essence même du courtage en assurance de tendre vers une position d'impartialité et d'indépendance. Il y a donc lieu de s'interroger très sérieusement sur cette orientation mise de l'avant par le projet de loi. On est en droit de se demander ce qu'il resterait du courtage si cette mesure entrait en vigueur et en quoi elle est positive pour les consommateurs puisqu'elle cautionnerait en fait une forme d'imposture.

Ces quelques exemples suffisent, M. le Président, à soulever plusieurs questions sur le projet de loi n° 188. Les audiences que nous entreprendrons aujourd'hui devront nous aider à les éclaircir ainsi que toutes les autres qui seront soulevées en cours de route. J'ai l'intention de conserver le rapport Baril à portée de la main durant tout le mandat de la commission et de veiller à comprendre et à expliquer clairement en quoi le projet de loi s'en rapproche ou s'en éloigne, car ce rapport, malgré les 18 mois écoulés depuis son dépôt, conserve dans ce débat une grande pertinence en raison notamment de son équilibre exemplaire.

La matière que nous examinerons au cours de ce mandat est une matière sensible et complexe, M. le Président, où nos responsabilités de parlementaires et de législateurs sont interpellées très sérieusement. Il s'agit ici non seulement de mondialisation et de grands enjeux, mais il s'agit aussi d'équilibre entre les intérêts commerciaux, le professionnalisme des intervenants dans le domaine et de protection du consommateur. Nous avons la responsabilité de trouver un juste milieu. En matière d'équité et de justice commerciale, je rappelle que notre responsabilité de législateur est de ne favoriser personne au détriment d'autres, encore moins de le faire indûment. En matière de protection du consommateur, notre responsabilité sera de bien distinguer lesquelles des protections mises de l'avant dans le projet de loi constituent une amélioration et lesquelles constituent un recul.

(10 h 40)

Il nous appartient donc maintenant d'entendre ce que les intervenants ont à nous dire sur ce projet de loi. Comme je l'ai dit au début, notre travail sera rendu plus facile par le travail de déblaiement déjà fait par la commission du budget et de l'administration en 1996, dont les recommandations constituent un point de repère important dans des dossiers que nous savons très complexes et très sensibles. Je vous remercie, M. le Président, et je souhaite que nos travaux se déroulent dans une atmosphère constructive. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le député de Viger, de vos remarques et soyez assuré, s'il en est de votre président, qu'on va tout faire pour essayer que ça se déroule d'une façon constructive. Et le député de d'Abitibi-Ouest m'a demandé aussi... il voulait intervenir pour ses remarques préliminaires. Assez brièvement, je ne veux pas vous couper. Je comprends l'importance du sujet.


M. François Gendron

M. Gendron: Je sais. Je souhaiterais qu'on ait plus de temps. Je vais essayer d'être très bref. Je veux faire juste quelques remarques préliminaires compte tenu, à ma connaissance, de l'importance majeure du sujet. Je fais deux constats.

D'abord, ça ne fait aucun doute, quant à moi, que la distribution de produits financiers, qui sont de plus en plus variés, différents, et c'est de plus en plus offert de toutes sortes de façons, oblige à ce que nous soyons des plus attentifs à ces réalités afin de moderniser notre législation. Premier commentaire.

Deuxième commentaire. C'est évident que je crois qu'on ne va pas loin aujourd'hui si on tente de se convaincre qu'il n'y a pas lieu d'être ouverts à la réalité du décloisonnement. Je crois qu'il n'y a à peu près personne dans cette salle qui ne convienne pas que, pour toutes sortes de raisons, parfois technologiques, parfois liées à la globalisation des marchés, parfois liées à des tendances internationales, on a tous, je pense, obligation d'être immensément ouverts à cette réalité du décloisonnement.

Ceci étant dit, par exemple, très rapidement, j'ai apprécié quand le ministre a parlé à plusieurs reprises qu'il sera très attentif, mais j'ai également aussi apprécié quand il a raconté que les tendances étaient fort différentes, à un moment donné, dans ce dossier-là et qu'il a cru bon de s'entourer de ressources du plus haut niveau afin d'entendre les deux tendances les plus majeures – et je ne parle pas de ce que je viens de dire; tout le monde, je suis convaincu, vous savez de quoi je parle – et tenter d'ouvrir à certains égards sur des engagements formels précis.

Et je le cite au texte. À un moment donné, j'entendais le ministre tantôt: «Il y a eu des modifications majeures auxquelles nous avons donné suite.» Ce n'est pas, à tort ou à raison, la perception de plusieurs intervenants avec qui j'ai eu des échanges comme c'est normal quand on représente une population, qu'on essaie de le faire le mieux possible. Je tiens à préciser cependant tout de suite que je ne suis le baron de personne. Je n'en ai pas la hauteur, je n'en ai pas le niveau, je n'en ai pas la personnalité. Alors, je ne suis le baron de personne. Mais je tiens à dire, par exemple, que je serai toujours un ardent défenseur d'engagements pris par mon gouvernement et les collègues ministériels. Je serai toujours un ardent défenseur d'engagements pris.

Or, le ministre responsable tantôt a mentionné avec raison, je crois, qu'un certain nombre d'engagements avaient été pris pour s'assurer qu'au moins à trois égards formels... Et là, là-dessus, je pense que c'est des questions importantes au-delà de la mécanique du projet de loi. Lorsqu'on a à discuter ces questions-là, c'est évident qu'il y a un «mais» sur le «comment» ça doit se réaliser. Et, à ce que je sache, il n'y a pas beaucoup de gens qui n'étaient pas sensibles à ce que, dans les conditions pour la vente de produits d'assurance, il y ait un encadrement qui ait comme conséquence qu'à sa lecture même, pour tout le monde, on ne pouvait pas y déceler quelconque privilège à qui que ce soit. Il va falloir regarder si c'est le cas, à ce chapitre-là.

Deuxièmement, au niveau de la responsabilisation individuelle et personnelle, quand on a affaire à des professionnels et qu'on vise un organisme d'autoréglementation, d'autodiscipline qui, compte tenu justement du sujet majeur, a la responsabilité de se vigorer, se discipliner lui-même eu égard au marché, je pense que c'est important que les gens se sentent responsables professionnellement.

Et je veux juste conclure, parce que je ne veux pas être plus long. J'ai dit tantôt que je serais un défenseur des engagements pris par mes collègues ministériels et le gouvernement. À la lumière de ce que j'ai lu à date, il y a des gens qui prétendent que ce n'est pas le cas. Notre responsabilité, c'est d'être d'une attentivité, même si ça n'existe pas, comme ce n'est pas possible. Je veux dire qu'il va falloir être attentifs à mort. Et c'est ça, l'exercice auquel je vais me convier.

J'étais heureux d'entendre l'engagement ferme du ministre également à ce sujet-là, d'être à l'écoute de ce qui se dira ici. J'espère que les nombreux éclairages que nous allons recevoir, doublés d'une écoute très attentive, triplés, si on est capables, de notre capacité auditive, nous permettront de lire le projet de loi tel qu'il est et non pas à travers le filtre des uns et des autres et d'essayer d'y trouver ce que le ministre a indiqué: un projet de loi sur la distribution des produits d'assurance moderne, adapté à la réalité d'aujourd'hui, qui offre de la sécurité aux consommateurs, compte tenu que, pour chacun d'entre nous, comme parlementaires, c'est un sujet qui, de plus en plus, prend de la place dans l'économie de notre société au niveau de toutes sortes de transactions, de toutes sortes d'activités. Quand on parle d'une loi sur la distribution des produits et services financiers, aujourd'hui ça a une place plus significative que dans le passé, et c'est évident qu'il faut moderniser puis s'adapter à ces réalités-là.

Moi, en conclusion, je tenais à faire ces remarques-là, mais je vais essayer d'être à l'écoute comme ce n'est pas possible afin de se donner toutes les garanties que les engagements qui ont été pris seront livrés. Merci, M. le Président.


Auditions

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le député d'Abitibi-Ouest. S'il n'y a pas d'autres membres de la commission qui veulent intervenir, je vais inviter les représentantes du Service d'aide au consommateur à se présenter à la table, soit Mme Madeleine Plamondon et Mme Aline Duplessis.

On va vous souhaiter la bienvenue. Comme Mme Plamondon est une madame d'expérience en commission parlementaire, on a dû vous rappeler que vous avez une vingtaine de minutes pour la présentation de votre mémoire et que, par la suite, les deux groupes parlementaires auront un temps équivalent pour approfondir votre mémoire par différentes questions ou commentaires. Ça vous va?


Service d'aide au consommateur (SAC)

Mme Plamondon (Madeleine): Merci de m'avoir invitée. Je ne vous lirai pas mon mémoire, vous l'avez lu. J'aimerais, pour commencer, vous dire que le Service d'aide au consommateur, c'est un organisme à but non lucratif qui a comme objectif de renseigner les gens, de les conseiller, d'arbitrer les plaintes quand ça le regarde, de les référer à un autre organisme quand ça ne le regarde pas et de le représenter devant tout organisme privé ou public, comme c'est le cas aujourd'hui.

On a environ 3 000 membres, mais, ce qui est exceptionnel aujourd'hui dans notre présentation, on a l'appui de plusieurs groupes importants du Québec, dont la Fédération des ACEF qui regroupe l'ACEF du Nord de Montréal, de la Mauricie, de Lanaudière, de l'Île-Jésus, de la Rive-Sud de Québec, de Grand-Portage et d'Abitibi-Témiscamingue, ainsi que de la FNACQ qui regroupe Granby, l'Estrie, la Rive-Sud de Montréal et le Regroupement des consommateurs en assurance, ainsi que l'ACEF de Victoriaville et l'ACEF des Basses-Laurentides.

C'est vous dire que ces groupements-là ont décidé de nous appuyer en reconnaissant l'expérience qu'on avait dans ce domaine-là. On était le seul groupe de consommateurs à venir en commission parlementaire en 1996, si vous vous souvenez. Donc, je ne reviendrai pas sur ce qu'on demandait en 1996. Il y a des choses que vous allez reconnaître. Mais, tout d'abord, je dois remercier le gouvernement, ceux qui ont fait le projet de loi, d'avoir inscrit dans le projet de loi le registre des assurances sur lequel on s'était prononcés. On avait fait une étude exhaustive là-dessus. C'était une façon, en tout cas, de faciliter la succession d'un individu qui est décédé, d'accéder aux polices d'assurance, parce que, souvent, c'est des gens qui sont disséminés un peu partout dans la province et qui ne savent pas exactement ce que le décédé à laissé.

D'autres vous diront peut-être que ça va être onéreux. Vous savez – je fais juste le dire rapidement – que c'était non seulement pas onéreux, mais c'était payant, parce qu'on avait donné en exemple la Chambre des notaires et le Barreau qui géraient le registre des testaments, puis c'était payant.

(10 h 50)

Si on regarde les accords de principe, dans notre mémoire on s'est attardés, vous le comprendrez bien, à la protection des renseignements personnels. La protection des renseignements personnels, on juge que c'est «indispensable», au lieu de «pertinent» ou «nécessaire», qui devrait paraître partout où les mots «pertinent» et «nécessaire» sont là. Pourquoi? Parce que «pertinent», ça peut tenir lieu d'«utile» et ça peut donner lieu à une cueillette d'informations qui couvrent à peu près n'importe quoi. «Nécessaire», c'est qu'il y a deux écoles de pensée: il y a une école de pensée qui peut interpréter ça encore dans le sens d'«utile», tandis que d'autres le prendront dans le sens d'«indispensable». À moins que le législateur dise clairement que «nécessaire» doit être interprété dans le sens d'«indispensable», il faudra le remplacer par «indispensable». Mais ce n'est pas «nécessaire» dans le sens d'«utile».

Les règles de confidentialité devraient être égales pour tous et non pas seulement pour les institutions de dépôts. Remarquez que, nous, on n'a pas d'avocats pour nous aider. Les gens qui vont nous suivre ont souvent des batteries d'avocats pour avoir passé à travers les 490 articles de votre projet de loi. Ce n'est pas le cas avec nous autres, on les a épluchés un par un, essayé de faire des rapprochements, consulté d'autres gens, demandé des opinions, discuté longuement des dimanches au complet. Tout ça pour vous dire que ce qui ressort, nous, on trouve que les règles de confidentialité devraient s'appliquer pour tous les cabinets et non pas juste les cabinets qui sont des institutions de dépôts.

Si les caisses vendent de l'assurance, il faudra que ça soit dans un endroit qui est réservé, fermé puis utilisé exclusivement à cette fin, pas un petit bureau où un agent – ça va s'appeler un représentant – un représentant va une fois par semaine et que le bureau sert à l'occasion pour offrir du crédit ou offrir autre chose. Ce n'est pas des cabinets itinérants qu'on veut. Si une caisse populaire n'a pas assez de business pour pouvoir s'inscrire comme cabinet, elle devrait laisser le marché aux autres représentants en assurance.

Dans le rapport annuel du Bureau, à un endroit où c'est inscrit, il devrait y avoir la façon dont les administrateurs du Bureau se sont acquittés de leur tâche pour aller vérifier la façon dont avait été respectée la confidentialité des renseignements personnels. Ça devrait faire partie d'une inspection.

On espère que le projet de loi n° 167, qui est venu mener de la confusion dans l'analyse du projet de loi n° 188, n'ouvre pas la porte à une mégabanque de données. On n'a pas été rassurés par des exposés sur la réingénierie dans Desjardins – d'ailleurs, on dit Desjardins, mais ça pourrait être la même chose dans une banque – et on trouve que chaque caisse devrait gérer ses propres données et garder son autonomie. Advenant le cas où les informations, même avec le consentement du consommateur, se retrouveraient dans une mégabanque de données, on aurait plus que des réticences.

Quant aux ventes liées, on devrait les interdire carrément. Sinon, il ne devrait pas y avoir à prouver une pression indue, s'il y a une vente qui s'est faite à l'occasion d'un premier contrat. Si je me réfère à ce qui s'est passé en 1996 au comité sénatorial qui examinait les banques, on disait: Comment on peut définir, à un moment donné, s'il y a eu une suggestion légère, une forte suggestion, une pression légère, une forte pression ou une coercition? Et, à ce moment-là, le Bureau de la concurrence disait: Une vente liée, il n'y a rien là – je vous dit ça dans mes termes – il faut qu'il y ait eu coercition pour que ce soit quelque chose qui soit défendu. Mais le consommateur est vulnérable quand on lui offre un produit, et, si on lui offre un autre produit en même temps et que la suggestion... C'est difficile à établir si la suggestion a été une pression. Donc, advenant le cas où il y aurait un autre contrat qui serait offert en même temps, il devra être résolu, comme c'est mentionné dans le projet de loi, mais aussi sans avoir à prouver qu'il y a eu pression indue ou pression tout court.

L'organisme de contrôle. Je pense que vous savez notre position sur ce point-là. L'organisme de contrôle devrait être simple, un bureau. Nous, on trouve que le titre VI devrait disparaître, qu'il ne devrait pas y avoir de Chambre. On trouve que ça alourdit tout ce qu'il y a là. Et on trouve que les associations d'intermédiaires peuvent très bien non seulement survivre, mais prospérer sans être incluses dans le processus. Je prends comme exemple la Chambre immobilière du Grand Montréal, qui est très prospère. Allez sur l'île des soeurs, allez visiter, vous allez voir ce que ça a l'air; c'est encore plus prospère que l'association elle-même qui gère la Loi sur le courtage immobilier. Donc, si vous voulez avoir un exemple de dynamisme, ce n'est pas nécessairement avec une intégration dans l'organigramme qu'on va donner un rôle important aux associations.

Par contre, le projet de loi rejette – je ne voudrais pas prendre un mot trop fort – de façon un peu méprisante l'expertise des associations. Comme la discipline, l'inspection professionnelle et la déontologie vont être appliquées par le Bureau, on devrait rapatrier ces expertises-là à l'intérieur du Bureau et ne pas automatiquement dissoudre tout ça. Il ne faudrait pas dissoudre puis jeter le bébé avec l'eau du bain.

La distribution sans représentant. En passant, je dois dire que le projet de loi est embêtant à analyser quand on parle de distribution, parce qu'on donne des définitions à un distributeur dans un chapitre, mais on parle de distribution ailleurs, puis ça ne comprend pas le même distributeur qui est dans ce chapitre-là. Les représentants et les distributeurs, il a fallu en discuter longuement avant de se brancher. Donc, tous les distributeurs devraient être soumis au Bureau.

Le guide ne devrait pas servir de contrôle. Ce n'est pas seulement le fait de donner un guide au consommateur qui devrait être un contrôle. C'est un kit d'utilisation. Dans le fond, c'est un kit pour mieux expliquer le produit, lui dire comment faire ses réclamations. C'est quelque chose qui devrait être donné quasiment avec tous les produits. Mais ceux qui distribuent des produits de cette façon-là devraient relever du Bureau et tous les guides qui sont donnés devraient être donnés sans frais. Il ne devrait pas y avoir de frais.

La divulgation des renseignements. On a découvert, nous, que souvent les institutions financières vont donner des ristournes, et ce n'était pas clair que les ristournes étaient incluses dans la divulgation des renseignements. Si quelqu'un, par exemple, achète une automobile et fait financer son automobile dans une institution financière, il faudrait qu'on sache qu'il y a eu ristourne, à ce moment-là, parce qu'il y a des arrangements qui sont pris entre les institutions de dépôts et les garages pour pouvoir se ristourner, pour se faire amener des affaires l'un et l'autre.

Dans la divulgation des renseignements, quand un consommateur pense qu'il fait affaire avec un cabinet qui lui offre un grand choix, il faudrait que non seulement on lui dise comment on en est arrivé là, mais il faudrait qu'on lui donne un état comparatif des prix. Est-ce qu'on a consulté deux compagnies, trois compagnies ou une seule compagnie avant de lui dire: C'est la meilleure proposition qu'on a à vous faire? Parce qu'on sait que, dans le domaine des assurances, ce n'est pas parce que c'est un courtier actuellement qu'on a fait le tour de 10 produits. C'est souvent un, ou deux produits, ou trois produits dans le plus, puisque l'intermédiaire, bien souvent, a des commissions ou des bonis qui sont rattachés au volume de ses ventes.

Dans les devoirs et les responsabilités, les cabinets devraient assumer aussi les fautes qui sont commises, je dirais, à l'occasion de leurs fonctions, pas seulement juste dans l'exercice de leurs fonctions. Les comptes en fidéicommis devraient être pour tous les représentants en assurance.

Finalement, on vous donne les désaccords et les inquiétudes du Service d'aide au consommateur. On est en désaccord avec l'article 120. Nous autres, on considère qu'en tout temps on devrait avoir le privilège de payer comptant. C'est inscrit dans le Code civil. C'est inscrit sur tous les billets de banque, c'est marqué: Ce billet a cours légal. À part des 2 $ puis des 1 $ qui sont achetés de la Monnaie royale canadienne, le reste, on devrait pouvoir payer comme on veut. C'est d'inscrire quelque chose dans une loi qui nous amène à une société sans monnaie. Le Service d'aide au consommateur a souvent dit qu'il n'était pas d'accord, qu'il fallait qu'on garde toujours l'alternative de payer comptant.

Dans les désaccords, comme je vous dis, on est en désaccord avec la création des chambres et on est en désaccord avec l'élection de cinq des administrateurs du Bureau. On veut des gens qui soient nommés, mais, en même temps, on voudrait qu'ils soient imputables. Il faudrait que ce soit inscrit. Ça veut dire qu'il faudrait savoir comment ces gens-là ont voté, de quelle façon ils ont rempli leur mandat de représenter les intérêts des consommateurs, et que ce ne soit pas seulement des nominations qui pourraient être perçues comme étant des nominations politiques.

(11 heures)

On est contre le fait que le gouvernement se soit donné le pouvoir de changer les règles du jeu par décret. On trouve que tous ceux qui devraient avoir un certificat restreint devraient passer par le Bureau des services financiers et non pas par le bureau du ministre.

On voudrait aussi que le projet de loi assure la responsabilisation complète et partagée de tous les intervenants de la chaîne de distribution, quel qu'en soit le mode. Évidemment, on aurait aimé que, attachées au projet de loi n° 188, on nous donne des implications du projet de loi n° 167. On n'est pas certain de l'étanchéité des bases de données dans les cabinets, et ça comprend les institutions de dépôts.

On est déçu que le projet de loi ne prévoie pas d'ombudsman, parce que l'ombudsman aurait eu peut-être une certaine distance par rapport au Bureau qui donne de l'information. Et là le Bureau va recevoir les plaintes. Comment on va pouvoir dire que l'information qui a été donnée est la bonne information, et ensuite juger de la pertinence de cette information-là s'il y a une plainte? Est-ce qu'il n'y aura pas conflit d'intérêts entre celui qui donne l'information et celui qui reçoit la plainte?

On voudrait qu'il y ait des représentants de consommateurs au comité de discipline. Et, enfin, on trouve que le projet de loi n° 188 ne couvre pas la vente directe ni la vente par Internet. C'est une lacune. J'imagine que, à un moment donné... On m'a dit qu'il y avait un comité qui se penchait sur ce problème-là, mais de plus en plus les gens vont faire affaire directement.

En conclusion, j'aimerais vous rappeler que Consumers International, dont le Service d'aide au consommateur fait partie, concluait à son dernier congrès au Chili, en novembre, que le résultat le plus important du congrès avait été la nouvelle compréhension des organismes de consommateurs sur l'impact de la mondialisation des marchés sur le quotidien des consommateurs. C'est un mouvement, la globalisation, qui tend à réduire le pouvoir des gouvernements à exercer des contrôles qui sont importants pour nous. C'est pourquoi les organismes doivent être présents à toutes les étapes, dans tous les comités, parce que c'est là que les consommateurs vont exercer leurs pouvoirs parce que nous pourrons de moins en moins dépendre de l'État. Ce mémoire-là, ça constitue un exercice dans ce sens-là. Il faudra que le gouvernement retienne que les consommateurs sont une force et que la mondialisation ne se fera pas en réduisant leur niveau de protection. Le gouvernement devrait prendre position pour les consommateurs sans aucune équivoque. Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, Mme Plamondon, de la présentation de votre mémoire. Maintenant, le ministre... est-ce que vous avez des questions à poser à Mme Plamondon?

M. Landry (Verchères): Oui, j'aurais quelques remarques et des questions que je vais faire en rafale, puis vous me répondrez globalement, vous réagirez globalement.

D'abord, sur les mots «pertinent, nécessaire et indispensable», on a fait une petite recherche, puis l'Office de la protection du consommateur et la Commission d'accès à l'information nous disent que les tribunaux supérieurs ont interprété le terme «nécessaire» comme «requise, indispensable et obligatoire». Alors, sur le plan technique, ce serait réglé. D'après la Commission d'accès à l'information et l'Office de la protection du consommateur, ça veut dire la même chose; donc, la jurisprudence aurait réglé votre inquiétude. Bien, vous pourrez réagir ensuite; j'espère que vous allez le faire d'ailleurs.

Maintenant, pour l'obligation sur la protection des renseignements personnels, ça ne s'applique présentement qu'aux cabinets, dans notre projet. Vous voulez que ça s'applique aussi à tout intervenant, si je vous comprends bien. Pourquoi est-ce que vous désirez ça, et quel est le sens de votre suggestion?

Quant aux balises qu'on doit mettre pour la caisse-assurance, vous demandez un endroit fermé et utilisé exclusivement à cette fin. Est-ce que pour des raisons d'économie et de commodité pour le consommateur il ne serait pas suffisant de prévoir, comme le gouvernement le fait dans plusieurs de ses bureaux et plusieurs services privés le font dans leurs bureaux, tout simplement un endroit qui permet des échanges à l'abri des indiscrétions, à l'abri des oreilles indiscrètes? Parce que «endroit fermé», là, on rentre dans des problèmes architecturaux et des problèmes de coût qui ne servent pas mieux les fins qu'un endroit protégé des indiscrétions.

Tout ce que vous avez dit sur les renseignements personnels est extrêmement intéressant et sera repris, il faut le dire, par des spécialistes qui vont venir nous en parler, comme la Commission d'accès, comme d'autres groupements.

Enfin, une dernière question, une avant-dernière question, les compagnies d'assurances offrent souvent des réductions de prime aux consommateurs lorsque ces derniers achètent plus d'un produit, par exemple, une assurance auto, une assurance habitation. L'institution redonne ainsi aux consommateurs une partie de l'économie dont elle bénéficie par le traitement simultané des deux produits. Devrait-on s'assurer dans notre projet de loi que cet avantage pour le consommateur soit conservé? Êtes-vous d'accord avec cette façon de faire, et est-ce qu'on doit essayer de s'en assurer dans le projet?

Enfin, vous proposez d'oublier la question des chambres; vous êtes favorable au Bureau, vous avez fait des remarques sur le Bureau, et tout ça. Mais on sait que les chambres permettraient précisément aux associations reconnues par la loi n° 634 de se retrouver en partie dans la structure proposée, et vous savez que ces chambres, c'est une évolution de notre pensée. Dans nos premiers travaux, on n'avait pas pensé à ces chambres. Ces chambres sont venues de nos discussions avec le milieu et ont été évoquées dans nos discussions avec le milieu. Est-ce que vous aimez mieux qu'il y ait des chambres ou qu'il n'y en ait pas, et pourquoi voulez-vous qu'il n'y en ait pas et qu'il n'y ait qu'un Bureau?

Mme Plamondon (Madeleine): Je commence à vous répondre?

M. Landry (Verchères): Attendez, j'ai peut-être une autre chose.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Peut-être une dernière.

M. Landry (Verchères): J'ai oublié une de vos remarques. Ah oui! l'article 120, les paiements comptants. Vous voulez que les paiements comptants soient maintenus. Notre intention, en ne les maintenant pas, était précisément d'assurer une protection plus grande du consommateur, vous comprenez pourquoi, à cet effet, en tout bien tout honneur, sauf qu'il se peut que ça aille contre certaines lois dont le Code civil qui dit qu'on peut toujours payer en argent comptant, et aussi probablement certaines lois tenant à la monnaie, puisque la monnaie est libératoire et que celui qui paie en argent est libéré de son engagement. Alors, peut-être qu'on a plus de difficultés avec notre bonne volonté qu'autrement et on serait porté à vous donner raison. Mais vous prenez bien en compte que c'était pour mieux protéger le consommateur qu'on le faisait.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Allez, Mme Plamondon.

Mme Plamondon (Madeleine): Premièrement, quand vous parlez du mot «pertinent» qui est dans la loi, on devrait l'enlever; ça devrait être soit «nécessaire», soit «indispensable». Le mot «nécessaire», vous avez demandé à la Commission d'accès, c'est vrai, la Commission d'accès a statué que le mot «nécessaire» avait le sens d'indispensable, mais, en contactant quelqu'un de votre bureau, on m'a donné une autre école de pensée avec un autre jugement où on avait déjà dit que ça avait été interprété comme étant utile. Je veux m'assurer que l'interprétation du mot «nécessaire» soit le mot «indispensable», tel qu'il est interprété par la Commission d'accès.

M. Landry (Verchères): On me parle des tribunaux supérieurs, moi, alors ça doit être la Cour supérieure, j'imagine, et la Cour d'appel, au-delà de la Commission, c'est ce que j'ai dans mes notes.

Mme Plamondon (Madeleine): Je ne suis pas sûre, mais ça se «pourrait-u» Doyon, le juge Doyon?

M. Landry (Verchères): Interprété par la Commission et les tribunaux supérieurs, le terme «nécessaire» a reçu la signification de requise, indispensable, obligatoire. On va vérifier dans la jurisprudence, et puis, si vous avez raison, nous allons intégrer votre remarque.

Mme Plamondon (Madeleine): Quant à l'endroit, je faisais remarquer justement à quelqu'un qui tentait de me convaincre aussi que n'importe quel endroit qui était discret ferait l'affaire, quand on passe dans des bureaux à 17 heures, avant de partir, les bureaux sont pleins de papiers. Il est utopique de penser que dans un bureau on va tout serrer, tout mettre sous clef, tous les documents, et qu'au moment où on va s'absenter pour 10 minutes ou pour aller dîner on va encore tout mettre sous clef puis penser que... Non, il faut absolument qu'il y ait un endroit qui soit réservé à cette fin-là, qui soit fermé et qui soit réservé exclusivement. Il ne faut pas qu'il y ait comme une journée où de 14 à 15 heures on vend de l'assurance, de 15 à 16 heures on vend du crédit dans ce petit coin-là. Il ne faut pas que ce soit comme ça. Déjà, pour nous, d'avoir accepté que ce soit à l'intérieur de l'institution et non pas dans une partie annexée, c'est une concession. On n'acceptera jamais que ce soit un coin discret, comme vous dites.

(11 h 10)

La réduction, les rabais. Si c'est un faux rabais puis qu'on fait ça pour vendre un autre produit... il faudra prouver que le rabais est là. Si c'est une campagne ou un peu comme des ventes où on a déjà augmenté le prix du produit pour après vous offrir un rabais sur le deuxième, c'est un faux rabais. Ça fait qu'il faudra penser qu'il faudra que ça soit vraiment un rabais dans le sens que, en comparant des produits analogues, on trouve que c'est un rabais, et non pas un rabais juste pour l'institution qui le propose parce que, à ce moment-là, ça sera un faux rabais.

Quant aux chambres – je pense, même au moment où j'ai siégé comme administrateur au Conseil des assurances de personnes; j'ai siégé deux mandats, j'étais là à la réglementation, je suis au courtage immobilier – vous le savez, quand on est élu, on est élu par nos pairs. Est-ce qu'on va être élu en disant: Je vais aller défendre les intérêts des consommateurs au cas où vous feriez quelque chose de mal? Il n'y a personne qui va vous élire. Vous le savez, vous êtes élu. Vous n'irez pas à l'encontre de ceux qui vont vous élire, vous allez aller dans leurs intérêts.

À ce moment-là, je ne vois pas pourquoi, moi, on ne prendrait pas – il y en a certainement, puis j'en connais beaucoup – des intermédiaires de marchés intègres, honnêtes, qui pourraient être nommés imputables vis-à-vis, puis en même temps qui ont les mains libres et qui n'ont pas besoin d'avoir été élus par les autres intermédiaires. Je trouve que ça serait un atout pour les intermédiaires. Je ne vois pas pourquoi ils seraient élus. Moi, je ne le vois pas comme ça, honnêtement.

Puis quant à l'article 120, le pouvoir de payer comptant, bien, le pouvoir de payer comptant, on va le défendre à mort, parce que même en rencontrant le bureau du premier ministre Chrétien, qui est non seulement dans mon comté, mais juste en face de mon bureau, il y a des pressions pour que l'argent comptant disparaisse. Vous le savez, vous êtes ministre des Finances. Les pressions sont toujours là.

M. Landry (Verchères): Moi, je ne suis pas regardant sur la forme de paiement, je dois vous dire.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Plamondon (Madeleine): Bien moi, je suis regardante. Moi, je suis regardante sur la forme de paiement, parce qu'on laisse des traces avec toute autre forme de paiement que le comptant. Et, si les gens veulent avoir le privilège de payer comptant tout le temps, c'est leur privilège. Ça, 120, on n'en veut pas.

Est-ce que j'ai répondu à toutes vos questions?

M. Landry (Verchères): Peut-être une précision, M. le Président, avec votre permission. Je reviens à l'endroit fermé dont vous parlez. Ce que vous nous dites, c'est que les endroits utilisés pour la vente d'assurances dans tout cabinet, institution de dépôts et autre soient des endroits réservés, fermés et utilisés exclusivement à cette fin. Vous ne pensez pas uniquement à la caisse-assurance, là. Vous pensez à tout cabinet, là.

Mme Plamondon (Madeleine): Partout.

M. Landry (Verchères): On s'embarque dans les gros travaux d'architecture, là.

Mme Plamondon (Madeleine): Non, non. Pas dans les gros... Quand même! les travaux d'architecture. Les gros cabinets, là, ils en ont, une place où la porte est fermée. Donc, il y aurait une place pour vendre ça. Pourquoi on demanderait aux caisses d'avoir une place fermée puis qu'on demanderait à d'autres cabinets de ne pas avoir une place fermée si c'est des cabinets multidisciplinaires? Il faut que les règles soient égales pour tout le monde. Ça, c'est mon opinion.

M. Landry (Verchères): En tout cas, ça, c'est sûr! Si on le fait pour l'un, on le fait pour l'autre. C'est ça que vous voulez dire.

Mme Plamondon (Madeleine): C'est ça. Ça, c'est la même chose pour la formation.

M. Landry (Verchères): C'est cohérent.

Mme Plamondon (Madeleine): La formation, on la donne à un, on est exigeant vis-à-vis de certains, il faut être exigeant vis-à-vis tout le monde. On ne veut pas non plus...

Vous n'avez pas réabordé les décrets, ça me surprend, puisque vous vous étiez réservé le droit par des décrets, c'est un article qui relève de vous, là, dans le projet de loi. Mais les décrets, là, c'est important que ça passe par le Bureau, qu'il n'y en ait pas, de décrets, puis qu'il y ait des certificats restreints qui soient donnés, là.

Je vais vous donner l'exemple de ce qui est vendu chez les garagistes dans le moment: la garantie de remplacement. Nous, on trouve que c'est un produit d'assurance. Le bureau de l'Inspecteur dit que c'est une garantie, l'Office de la protection du consommateur dit que c'est de l'assurance. On vient de finir une étude, nous autres, on trouve que c'est de l'assurance. Ces gens-là devraient être formés. D'ailleurs, dans l'esprit des consommateurs, les gens nous disent: Je «devrais-tu» prendre mon avenant de valeur à neuf chez le concessionnaire? Bien, là, s'ils appellent ça un avenant de valeur à neuf, c'est qu'il y a quelqu'un qui a appelé ça comme ça. Ça fait que ça devrait passer par le Bureau.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Ça va? On va maintenant permettre au député de Viger de faire ses commentaires ou de questionner également.

M. Maciocia: Oui, merci, M. le Président. Mme Plamondon, je suis, sur certains points, beaucoup d'accord avec vous. Principalement, je pense que, nous, de la commission, sur la question du registre des assurances, on était un peu tous d'accord sur la question qu'on puisse avoir ça, parce que, en réalité, ça aide beaucoup le consommateur à résoudre des problèmes en cas de mortalité ou en cas de décès. Puis nous considérons que ça a été une suggestion assez pertinente, et nous souscrivons à cette suggestion-là.

Nous souscrivons aussi, Mme Plamondon – parce que, comme je le disais, pour nous la protection du consommateur est primordiale – à celle que vous venez d'expliquer, mais j'aimerais que vous élaboriez un peu plus, les locaux fermés. Vous nous avez dit tout à l'heure, et je le comprends parce que je vous ai entendue d'autres fois, vous avez déjà fait une – comment je peux dire – concession majeure dans le sens d'accepter qu'on puisse vendre de l'assurance à l'intérieur des caisses – on parle des caisses actuellement, et éventuellement ça va être des banques aussi – mais vous n'accepterez jamais que ce soit pas des locaux fermés.

Est-ce que, à ce moment-là, vous voulez dire aussi que dans ce local fermé il doit se transiger uniquement de l'assurance? Par conséquent, la personne qui vend cette assurance-là doit faire seulement ça, uniquement ça à l'intérieur de ce bureau-là et, disons, que son travail doit concerner uniquement la vente d'assurances, pas autre chose, à l'intérieur de la succursale de la caisse.

Mme Plamondon (Madeleine): Exactement. C'est ça. Vous avez bien compris.

M. Maciocia: Est-ce que c'est ça? Est-ce que je résume bien votre point de vue?

Mme Plamondon (Madeleine): Oui.

Une voix: ...

M. Maciocia: Oui, oui. Partout, M. le ministre. Aucun problème. Aucun problème. Puis ça je peux vous dire, M. le ministre, que le rapport Baril, justement le rapport de la commission allait dans ce sens-là aussi. On allait quasiment dans ce sens-là; si le président peut me confirmer, je suis convaincu que c'est la même opinion que moi qu'il aura.

Mme Plamondon, dans votre...

Le Président (M. Baril, Arthabaska): ...M. le député.

Mme Plamondon (Madeleine): Dans l'article 83, on dit: «Une institution de dépôts inscrite comme cabinet dans une discipline de l'assurance ne peut, par l'entremise d'un représentant en assurance, vendre un produit d'assurance», à moins qu'il y ait un endroit prévu.

On ajouterait aussi: C'est l'accès. Il ne faudrait pas qu'elle ait accès à autre chose. Si elle a accès à des renseignements, mais qu'elle peut juste vendre dans la place qui est prévue, mais que, quand elle est à l'extérieur de cet endroit-là, elle a accès à des renseignements, il ne faudrait pas qu'elle ait accès non plus à d'autres renseignements.

M. Maciocia: C'est ça. Si je comprends bien, comme je l'ai dit tout à l'heure, cette personne-là doit faire uniquement de la vente d'assurances dans ce local fermé; elle ne pourra pas faire autre chose à l'intérieur de la caisse.

Mme Plamondon (Madeleine): C'est ça.

M. Maciocia: Parfait. Mme Plamondon, dans votre mémoire, à un certain moment, vous dites, et je vous cite, à la page 9: «la distribution sans représentant vise les distributeurs dont les activités ne sont pas du domaine de l'assurance.»

À partir du moment où il y a décloisonnement, est-ce qu'on peut toujours considérer que les activités d'une banque ne sont pas du domaine de l'assurance? Et, par conséquent, les banques ne devraient-elles pas distribuer tous leurs produits par l'entremise de représentants? Parce qu'il ne faut pas rêver en couleur, là, si on ouvre aux caisses, Mme Plamondon, vous êtes au courant très clairement que c'est seulement un petit pas à faire, à continuer, que les banques envahissent aussi le domaine des assurances, parce que je ne vois pas comment le fédéral pourrait empêcher que les banques, après qu'on ait ouvert très ouvertement aux caisses de pouvoir faire ça, puissent venir aussi dans ce domaine-là.

Mme Plamondon (Madeleine): Mais c'est pour ça que c'est doublement important ce qui se passe aujourd'hui, hein?

M. Maciocia: C'est exact.

Mme Plamondon (Madeleine): Parce que le gouvernement fédéral, les autres gouvernements provinciaux surveillent ce qui est en train de se passer. Les concessions qu'on fait dans le moment, parce qu'on sait que le décloisonnement est irréversible, le momentum est irréversible, vous aviez raison, M. Landry, quand vous avez dit ça, c'est à contrecoeur qu'on voit cette centralisation des données et des capitaux aussi. Ça fait que c'est pour ça que le gouvernement fédéral, les banquiers doivent saliver à l'idée que Desjardins va vendre de l'assurance.

Il va falloir que le seuil, si vous voulez, soit assez haut pour que, quand viendra le temps pour Martin de faire, lui aussi, son bout de chemin, qu'il n'aille pas en deçà de ce qu'on va accorder ici. C'est pour ça que la protection du consommateur est extrêmement importante, parce que, si on dilue le moindrement ce qu'on demande ici, vous allez voir après ce qui va arriver avec les banques.

(11 h 20)

M. Maciocia: Oui, M. le Président, je peux continuer? M. le Président, j'aurais deux questions à poser encore à Mme Plamondon. Je vous donne les deux, puis vous allez me répondre par après. À la page 12 de votre mémoire, et je vous ai entendue déjà parler tout à l'heure avec le ministre, vous vous dites en désaccord avec le pouvoir que le gouvernement s'est donné de changer les règles du jeu, la question des décrets, et tout ça. J'aimerais que vous élaboriez un peu plus après justement sur cette question du pouvoir que le gouvernement se donne de pouvoir changer les règles du jeu sans que l'Assemblée nationale, sans que les parlementaires qui ont décidé d'adopter ou de faire des changements dans un projet de loi soient mis à contribution en même temps.

Deuxièmement, vous avez réalisé en 1995 une étude sur l'assurance-crédit aux points de vente dans le secteur de la vente d'automobile. Ma question est: Avez-vous retrouvé un ensemble de correctifs à l'intérieur du projet de loi n° 188 qui vient colmater les lacunes que vous avez vécues ou que vous avez vues avec le rapport que vous avez fait en 1995?

Mme Plamondon (Madeleine): On n'a pas étudié parallèlement ce qu'on avait fait avec l'assurance-crédit aux points de vente. Mais ce qu'on recommande ici et qui couvrirait tout ce qu'on avait trouvé, c'est la responsabilisation de tous les intervenants dans la chaîne, à partir de l'assureur jusqu'aux représentants. Ce qu'on trouve qui n'est pas assez campé, ce que je vous disais tantôt, c'est chez les concessionnaires automobiles, par exemple. Si le concessionnaire automobile vend de l'assurance-crédit au point de vente, s'il vend aussi des garanties de remplacement, à ce moment-là, si c'est des guides de distribution qui sont là, le guide de distribution, c'est une information, ce n'est pas un contrôle, ça. À ce moment-là, il n'y a personne qui a un contrôle là-dessus.

Pour décider d'avoir un certificat restreint, le représentant, par exemple, chez un concessionnaire automobile, s'en irait trouver le ministre et demanderait par décret que ça soit reconnu comme un produit d'assurance. Je ne vois pas pourquoi ça serait fait par le ministre plutôt que par le Bureau. Je trouve que ça devrait être fait au Bureau qui devrait déterminer. Le Bureau pourrait avoir des critères qui ne sont pas politiques et des critères qui sont plus rigides.

Par exemple, je reviens à la garantie de remplacement parce que ça ne me rentre pas dans la tête que la garantie de remplacement ne soit pas un produit d'assurance, mais c'est vendu comme étant une garantie. Ceux qui vendent ça n'ont pas de certificat restreint, n'ont pas de certificat pour vendre de l'assurance, puis pourtant il y a un risque, il y a une prime et il y a une indemnisation. Et il y a deux ministères au gouvernement du Québec qui n'étaient pas d'accord longtemps; ils ont fait chacun un petit bout de chemin. Mais je calcule encore que c'est un produit d'assurance. À un moment donné, l'Office disait: Non, c'est un produit d'assurance. Et après l'inspecteur disait: Non, c'est une garantie. Et là ils ont appelé ça une promesse de vente, ils vendent une promesse de vente. Ce n'est pas de même que le consommateur entend ça. Le consommateur pense qu'il lui est vendu un avenant de valeur à neuf étalé sur quatre ans – et qui coûte un bras à part ça.

M. Maciocia: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.

Mme Léger: Bonjour madame. Dans votre mémoire, à la conclusion, vous dites que «le mouvement actuel tend à réduire les pouvoirs des gouvernements à exercer des contrôles qui sont importants pour les consommateurs». Comment voyez-vous votre positionnement, et comment assumer un plus grand rôle de participation au sein des pouvoirs décisionnels, puisque vous dites que les consommateurs sont une force et qu'il faudrait en tenir compte. Comment vous voyez votre rôle?

Mme Plamondon (Madeleine): En mars 1997, j'étais à l'OCDE, sur le commerce électronique. Et il n'y a pas eu d'entente qui est sortie de ça. Pourtant, il y avait des experts de plusieurs pays. C'est qu'un produit peut être conçu dans un pays, mis en marché dans l'autre pays et acheté dans un autre pays. Qui est responsable? Même si le Québec ou le Canada ou un autre faisait des règlements, il n'y en a pas un qui va contrôler toute la réglementation. Il va falloir qu'il y ait des accords internationaux.

En attendant, comme ce n'est pas l'État qui contrôle, qui va pouvoir tout contrôler dans une mondialisation des marchés, il va falloir donner aux consommateurs et aux groupes de consommateurs des outils et les mettre comme représentants dans toutes les étapes des décisions. C'est dans ce sens-là. On est ici, là, comme consommateurs, on vous donne notre opinion. On siège sur des conseils, on donne notre opinion. C'est pour ça qu'on demande qu'il y ait un consommateur au comité de discipline, c'est pour ça qu'on demande qu'il y ait cinq consommateurs sur le Bureau des services financiers. S'il y a d'autres comités qui envisagent d'avoir le commerce électronique, il faudra que vous mettiez des consommateurs aussi là-dessus pour que, au moins à chaque étape où il se décide des choses dans le quotidien, les consommateurs soient présents. C'est la seule façon et au niveau international aussi. C'est pour ça qu'on fait partie de Consumers International. Parce que, à un moment donné, il faut être présent au Québec, il faut être présent au Canada, il faut être présent en Amérique du Nord puis il faut être présent dans le monde; il faut être présent à toutes les étapes.

Mme Léger: Merci, madame.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Mme la députée de Saint-François.

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Président. Mme Plamondon, votre objectif premier est, bien sûr, d'assurer la protection des consommateurs, et je comprends que, si vous êtes d'accord avec le décloisonnement, c'est tout simplement parce que vous tenez énormément aussi à ce que le consommateur soit bien protégé par des mécanismes clairement identifiés. Et c'est ce que le ministre nous disait aussi.

Cependant, j'ai compris aussi que, s'il y avait une interprétation qui semblait être différente parfois, entre que ce soient les intermédiaires ou qui que ce soit, par rapport au projet de loi, c'est parce que souvent on réfère à d'autres projets de loi et puis peut-être qu'à ce moment-là on n'a pas bien saisi la portée des articles dans ledit projet de loi sur lequel on vous entend.

C'est tout simplement une remarque, et je me dis à ce moment-là, s'il faut référer à d'autres projets de loi pour bien comprendre le projet actuel, qu'il doit y avoir moyen possiblement de l'indiquer clairement de sorte qu'on n'ait pas toujours à se référer. Je comprends qu'il y a des normes à un moment donné qu'on doit respecter par rapport, par exemple, à une terminologie pour faire référence à un autre projet de loi, sauf que, s'il y a des possibilités de l'indiquer clairement dans le projet de loi, je pense qu'on doit le faire.

Et là j'en arrive aussi au fait qu'il serait peut-être souhaitable qu'on retrouve plus de précision dans le projet de loi plutôt que d'y aller par la réglementation. Et là j'en arrive à l'article 83 justement où on parle des établissements où on devra prévoir un lieu qui se retrouve, par exemple, dans la réglementation, c'est-à-dire vous parlez d'un lieu qui est fermé, mais il n'y a rien qui l'indique dans le projet de loi. Tout sera prévu dans la réglementation. Alors donc, il va falloir, à mon avis... ça serait peut-être plus simple de l'inscrire immédiatement dans le projet de loi étant donné que c'est un principe qui m'apparaît quand même très important.

Alors, j'aurais deux questions. Premièrement, lorsque vous parlez d'un endroit, par exemple, privé, d'un endroit fermé dans une institution bancaire ou ailleurs, j'imagine que vous présumez à ce moment-là que n'auront pas accès à cet endroit-là, par exemple, les secrétaires ou les employés de la caisse pour ne pas avoir accès à ces informations spécifiques. Cependant, qu'est-ce que vous pensez du directeur qui, lui, peut-être pourrait aller aux deux endroits? Il pourrait avoir accès à cette information. C'est ma première question: Est-ce que ça suppose que même le directeur est exclu de cet endroit fermé?

Et ma deuxième question, vous avez parlé d'un registre des assureurs, que vous étiez d'accord avec un registre des assureurs. Je tiens à remarquer aussi qu'à l'article 207 le Bureau peut mais n'est pas obligé en vertu du projet de loi actuel, et je me dis à ce moment-là: Est-ce que vous avez vérifié, entre autres avec la Chambre des notaires, la façon dont on procède avec les registres des testaments depuis fort longtemps, et, par exemple, regardé en même temps les coûts? Merci.

Mme Plamondon (Madeleine): Pour répondre à votre dernière question, sur le registre avec la Chambre des notaires puis avec le Barreau, dans une étude qu'on avait faite non seulement on a vérifié, mais on a demandé des statistiques, et c'est là qu'on a vu que, même si les droits pour le consommateur à payer étaient minimes, c'était très payant pour la Chambre des notaires puis le Barreau. Donc, c'est quelque chose qui n'est pas difficile à mettre sur pied puis qui est payant pour le Bureau, qui devra, à un moment donné, se financer.

Quand je disais qu'on ne devrait pas laisser au gouvernement la décision finale en ce qui concerne les règles relatives à l'utilisation des endroits, c'est dans ce sens-là que je disais que ça ne devrait pas retourner au gouvernement mais qu'on devrait l'inscrire dans la loi. On devrait l'inscrire tout de suite dans la loi, c'est ce qu'on recommandait à notre mémoire en page 5.

Mme Gagnon-Tremblay: Et, quant à, par exemple, la possibilité du directeur d'une caisse populaire d'avoir accès aussi bien au secteur de la caisse qu'au bureau des assurances, qui serait un bureau fermé?

(11 h 30)

Mme Plamondon (Madeleine): Non, c'est fermé. Personne n'y a accès, puis ça va directement à l'assureur, comme c'est inscrit dans le projet de loi. C'est pour ça qu'il y a bien des choses qu'on est d'accord avec le projet de loi, c'est pour ça que la première partie du mémoire, c'est sur les accords de principe. Les nuances qu'on apporte, c'est pour bonifier le projet de loi, parce que, dans les accords de principe, on est d'accord qu'il faut protéger les renseignements personnels, qu'il faut divulguer des renseignements, etc. Quant à la liste des désaccords qu'on fait en dernier, il ne faudrait pas oublier tous les accords de principe qu'on met dans la première partie de notre mémoire.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Bergman: Merci beaucoup. Dans les articles 17 et 378 de la loi, on parle des contrats liés et des pressions indues et, dans la page 7 de votre rapport, vous trouvez, comme vous dites, que l'article 17 est ambigu à cause du fait que le fardeau de la preuve est sur le consommateur et qu'il y a un court délai de 10 jours pour que le consommateur prouve qu'il y avait un contrat lié ou une pression indue.

Comment est-ce qu'on peut protéger le consommateur par cet article que, moi, je trouve très général? Comme on dit en anglais, «declaration of motherhood», c'est les principes qui sont normaux. Mais comment est-ce que le consommateur peut prouver une pression quand cette pression est généralement indirecte et quand le consommateur est dans une position de faiblesse quand il fait une application pour un prêt dans une institution financière? Alors, c'est une position de faiblesse pour le consommateur. Est-ce que vous ne pensez pas que le projet de loi doit avoir des balises pour protéger le consommateur, des balises pour éviter des contrats liés, des balises pour éviter des pressions indues?

Mme Plamondon (Madeleine): Pour commencer, ce serait l'idéal qu'il n'y en ait pas, de vente liée, que ce soit interdit. S'il y a une vente que le consommateur juge liée à un premier produit qui a été vendu, un produit de crédit, par exemple, ou n'importe quel autre produit, qu'il n'ait pas à prouver qu'il y a eu pression. Non seulement pression indue, pression tout court, il peut canceller dans les 10 jours. Donc, on voudrait enlever le deuxième paragraphe: «Il ne peut exercer de pressions indues sur le client», c'est point final. S'il y en a un autre de vendu en même temps, la présomption, c'est que le consommateur, il a senti une pression, puis c'est lui qui a raison, puis il cancelle le deuxième contrat.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci. Si les membres de la commission me permettent, j'aurais une question à poser à Mme Plamondon. Sur l'article 83, parce que c'est quand même un article important, fondamental de ce projet de loi, nous sommes tous d'accord à l'effet que le produit d'assurance, entre autres, doit être vendu dans un endroit spécifique, là, fermé ou pas fermé; en tout cas, ça, les discussions sont ouvertes là-dessus. Mais on dit bien «vendre un produit d'assurance dans un de ses établissements qu'à un endroit prévu».

Pensez-vous que le consommateur est suffisamment protégé par cet article-là si on maintient juste le mot «vendre»? Parce qu'il y a quelqu'un qui peut offrir un produit d'assurance sans vendre de l'assurance et qu'on peut avoir une personne... Parce que, là, on suppose, on présume que le représentant, il va avoir toutes les formations puis les certificats voulus, mais une autre personne qui n'a pas de certificat puis qui n'a pas de formation peut offrir un produit d'assurance sans le vendre, puis, après ça, quand il restera juste à bâcler – excusez le mot – le contrat, on le passera dans le petit appartement à côté puis il signera. Pensez-vous que l'article 83 est assez serré pour protéger le consommateur, selon vous?

Mme Plamondon (Madeleine): C'est pour ça que, tantôt, sur la même question, je vous disais que celui qui peut offrir... Moi, je disais «avoir accès à de l'information». Selon la réingénierie de Desjardins, si vous avez eu des démonstrations, on va vous demander, par exemple: Est-ce que vous êtes assuré avec nous pour votre maison? Si vous dites non, ils ne vous demanderont pas avec qui vous êtes assuré, mais la maison va devenir bleue sur l'écran au lieu de rouge. Si on est assuré avec Desjardins, elle devient rouge. Ça fait que, déjà, en ouvrant l'écran, on est capable de savoir que, si c'est bleu, c'est avec un autre. Donc, c'est facile d'arriver puis de dire: Est-ce que vous aimeriez qu'on vous offre ce produit-là – je vous donne un exemple – un produit d'assurance-habitation?

Si, moi, je me sens forcer la main, je veux pouvoir canceller sans que j'aie à prouver que l'offre qu'on m'a faite était une pression, une pression légère, une suggestion, mettez ce que vous voulez, mais qu'il y a eu quelque chose du genre. Si, moi, je me suis sentie dirigée vers ce produit-là, je pourrais annuler, puis on propose dans notre mémoire un formulaire de résolution de contrat.

M. Landry (Verchères): On peut annuler, là, sans qu'il y ait de fardeau de la preuve sur quiconque. Un client peut, par avis transmis par courrier, dans les 10 jours, résoudre le contrat.

Mme Plamondon (Madeleine): Oui, mais on voudrait enlever, dans 17, alinéa deux, «Il ne peut exercer de pressions indues». C'est le «pressions indues» qui me tracasse.

M. Landry (Verchères): Non, mais on se trouve à protéger davantage le consommateur, là. On a deux choses. Le représentant «ne peut exercer de pressions indues – c'est pour protéger le consommateur – ou – à plus forte raison – employer des manoeuvres dolosives pour l'inciter à se procurer un produit ou un service». Mais, qu'il l'ait fait ou qu'il ne l'ait pas fait, le consommateur peut, de toute façon, sans autre examen, annuler le contrat dans les 10 jours.

Mme Plamondon (Madeleine): Ah, vous, vous l'interprétez comme ça, mais, moi, je ne l'interprète pas comme ça. C'est que, moi, je l'interprète que je vais avoir à prouver: Est-ce qu'il y a eu une pression indue? Est-ce qu'il y a eu des manoeuvres dolosives?

M. Landry (Verchères): Moi, je pense qu'on affaiblirait l'article en enlevant ce que vous dites, mais on peut toujours peut-être rajouter au dernier paragraphe, pour que ce soit bien clair... Là, c'est ce qu'on appelle du droit purement potestatif. Vous n'avez pas à prouver quoi que ce soit ni à faire allusion à quoi que ce soit, j'annule le contrat, ça finit là.

Mme Plamondon (Madeleine): Ça fait que vous changeriez le troisième paragraphe?

M. Landry (Verchères): Surtout que les tribunaux, ils interprétaient ça en regardant la loi actuelle. Dans la loi actuelle, il faut faire la preuve. Dans la nouvelle loi... Alors, le juge va comparer les deux. Le législateur ne parle pas pour ne rien dire.

Mme Plamondon (Madeleine): Bien, moi, j'aimerais ça que ce soit plus clair dans le troisième paragraphe.

M. Landry (Verchères): Si on peut l'éclaircir...

Mme Plamondon (Madeleine): Mettons, par exemple...

M. Landry (Verchères): L'intention, c'est que le consommateur, il annule dans les 10 jours à sa pure fantaisie.

Mme Plamondon (Madeleine): Qu'il y ait eu manoeuvres dolosives, qu'il y ait eu pressions indues, qu'il n'y en ait pas eu, faudrait que...

M. Landry (Verchères): Exactement.

Mme Plamondon (Madeleine): Bon, bien, faudrait que ce soit inscrit dans le troisième paragraphe, parce que ce n'est pas clair.

M. Landry (Verchères): On va regarder ça.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de l'Acadie.

M. Bordeleau: Oui. Juste deux ou trois points sur lesquels j'aimerais revenir. Dans la section de l'article 114, la section consacrée aux représentants des sociétés autonomes, on ne fait pas spécifiquement référence aux distributeurs, et je pense à l'article 114. Est-ce que vous croyez, à ce moment-là, qu'on devrait y inclure également les distributeurs? C'est une première question.

Deuxième question, tout à l'heure, vous avez fait référence, en parlant de l'article 83, au fait que les gens qui travaillent dans ces bureaux réservés à la vente d'assurance n'aient pas accès également, hors de ces bureaux-là, à d'autres renseignements qui se retrouveraient, par exemple, dans les succursales de la caisse. Bon, j'ai compris que la façon dont on avait rédigé le projet de loi ne satisfaisait pas les réserves que vous aviez à ce niveau-là. Alors, j'aimerais juste que vous me précisiez un peu plus quelles sont vos attentes à ce niveau-là.

Et le troisième point, bon, étant donné évidemment votre mandat auprès des consommateurs, est-ce que vous ne croyez pas que ce que vous considérez comme inévitable un peu, étant donné l'évolution, cette ouverture de la vente dans les institutions bancaires, peut éventuellement avoir comme effet de centraliser ou de restreindre, de limiter la concurrence, et ça, que ça pourrait être au détriment des consommateurs en bout de ligne?

Mme Plamondon (Madeleine): Ça, on l'a déjà dit dans une étude récente sur la banque-assurance, juste avant que M. Martin fasse son dernier budget puis qu'il annonce aussi qu'il n'accordait pas aux banques la vente d'assurance dans les banques. Ce qui nous agaçait, c'était la concentration des capitaux puis en même temps la protection des renseignements personnels, parce que c'est une concentration dans les deux cas.

Quand on parle de concentration puis qu'on parle de caisse, on n'est pas porté à penser que c'est de la concentration, mais il y a 20 % des sociétaires qui contrôlent 90 % de l'actif des caisses. Donc, à ce moment-là, il y a une certaine concentration à l'intérieur de Desjardins. Mais là n'est pas l'idée de la concentration. La concentration, si on voit les fusions entre les grandes banques, on va voir les banques internationales. Elles sont déjà là, les banques étrangères qui s'en viennent sur notre terrain, au Québec puis au Canada, avec ING, Wells Fargo, puis tout ça. Elles vont nous proposer des produits. Donc, la concurrence, elle va venir des étrangers s'il y a une concentration.

(11 h 40)

Mais, dans le moment, moi, je ne prends ni pour les banques, ni pour les caisses, ni pour les compagnies d'assurances parce que, partout où il y a de l'argent, ça s'entend comme ça. Les banques continuent d'acquérir des compagnies d'assurances, le mouvement s'accentue. Quand ils vont arriver avec le bon prix, tout le monde va être à la même place. Donc, il faut s'assurer, nous autres, qu'on continue à avoir de la compétition, et qu'on continue à être protégés, et que, même en voulant concentrer les capitaux pour pouvoir mieux se défendre sur le plan international, on ne concentre pas l'information aussi, parce qu'à ce moment-là vous allez voir les prétextes qu'ils vont vous donner. Pour ne pas se faire avoir sur le plan national, on va vous dire: Le commerçant, il a peut-être été emprunter à telle caisse puis il a peut-être été emprunter à telle autre, puis l'autre ne le sait pas; faudrait bien partager.

L'article 55 du projet de loi n° 167, c'est ça que ça dit: On va ouvrir entre... Une personne morale va distribuer à une autre personne morale, sans autorisation, des renseignements sur une autre personne morale. Moi, si je laisse aller ça comme consommateur, la brèche est ouverte sur le principe. Puis, quand j'ouvre sur le principe, sur le plan international, ça voudra dire: Olympia & York, là, ceux qui ont prêté à Olympia & York, ils auraient tous dû mettre ça dans la même banque de données pour que le monde voie qu'elle était après prendre une plonge. Mais, si je dis tout ça, je suis obligée de dire «les consommateurs». Pour ne pas que le consommateur aille à telle banque, ou à telle caisse, ou à 10 caisses, bien, on va faire une mégabanque de données puis on va se protéger contre le consommateur. Bien, je suis contre ça. Que l'agent de crédit fasse sa job, qu'il ne se fie pas sur une mégabanque de données.

M. Bordeleau: Les deux autres questions que j'avais mentionnées sur l'article 114 versus l'intégration potentielle des distributeurs et sur la question de l'accès à de l'information hors du bureau fermé, là...

Mme Plamondon (Madeleine): Oui. Mais c'est pour ça que, moi... On disait, dans les désaccords puis les inquiétudes du SAC, qu'on voulait que... Le projet de loi, ce serait trop long d'entrer dans chacun des articles, mais on trouvait que ça n'assurait pas la responsabilisation de la chaîne complète et partagée de tous les intervenants. Il faut que la game soit la même pour tout le monde. Quand il y a quelqu'un qui pourrait être pénalisé, que le distributeur soit pénalisé, que l'assureur soit pénalisé, que, toute la chaîne, on puisse avoir accès, comme recours, à chacun de la chaîne. Il ne faut pas en oublier en cours de route parce que c'est un mode de distribution qui n'est pas comme celui qu'on voulait couvrir. Ça fait que c'est ça, la préoccupation que le gouvernement devrait avoir, de responsabiliser tout le monde dans la chaîne de distribution également. Pas: Ils vont faire un guide, puis ça va être correct.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Ça vous convient, à chacun?

M. Bordeleau: La dernière question que je vous avais demandée, c'est: Qu'est-ce que vous souhaiteriez avoir dans le projet de loi pour compenser les craintes que vous avez à l'égard du fait que les gens qui vont vendre de l'assurance pourraient, à l'extérieur du bureau fermé, avoir accès à d'autres informations dans la succursale de la caisse qui pourraient, à ce moment-là, les mettre dans une situation...

Mme Plamondon (Madeleine): Moi, c'est pour ça que je voulais que chaque caisse qui va vendre de l'assurance soit inscrite comme cabinet et non pas un cabinet qui regrouperait plusieurs caisses. Je vais vous donner mon raisonnement là-dessus, on l'a discuté longuement. C'est que, si la Banque Royale, par exemple, s'inscrit comme cabinet, qu'il y a 10 succursales de la Banque Royale qui font de quoi qui ne serait pas correct, pensez-vous que politiquement ça se fait d'enlever le droit à la Banque Royale, de lui enlever son inscription? Tandis que, si chacun qui vend physiquement des assurances est inscrit comme cabinet et que le Bureau a le pouvoir d'enquêter si ça se fait comme il le faut – puis il doit le mettre dans son rapport annuel – à ce moment-là, s'il y en a qui ne font pas correct, on leur retire leur inscription, puis ceux qui font correct, bien, ils continueront d'être inscrits comme cabinets. Mais, si on se met à donner à la Confédération des caisses une inscription de cabinet, à la Banque Royale, une inscription de cabinet, bien, là ça va être du free-for-all, vous ne les atteindrez jamais.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Ça va?

M. Bordeleau: Oui.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): On vous remercie, Mme Duplessis, Mme Plamondon, pour la présentation de votre mémoire et également le temps et les efforts que vous avez mis pour venir éclairer les membres de la commission.

Sur ça, je vais inviter les représentants et représentantes du Conseil des assurances de personnes à prendre place. Je vais suspendre deux petites minutes.

(Suspension de la séance à 11 h 44)

(Reprise à 11 h 47)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): À l'ordre! Mmes, MM. les membres de la commission, nous allons saluer nos invités, les représentants et représentantes du Conseil des assurances de personnes, dont M. Guy Massé. Silence s'il vous plaît!

M. Guy Massé est le président. S'il veut bien nous présenter les personnes qui l'accompagnent et nous présenter par la suite son mémoire.


Conseil des assurances de personnes

M. Massé (Guy): Merci, M. le Président. D'abord, Mme Simone Bilodeau, de l'ACEF Rive-Sud, de Lévis, à mon extrême droite, qui représente les consommateurs au Conseil des assurances de personnes; Mme Jocelyne Tremblay, à ma droite, intermédiaire en assurance de personnes pour La Mutuelle du Canada, vice-présidente du Conseil et représentante de son secteur d'activité; et, à ma gauche, Mme Myrella Beaulieu, directrice générale du Conseil; M. Jean-Jacques Beldié, qui est vice-président de La Métropolitaine. L'un des représentants des compagnies au Conseil devait être présent; malheureusement, il a été retenu à la dernière heure, il ne sera pas des nôtres, ce matin.

Le Conseil des assurances de personnes vous remercie pour cette deuxième occasion presque dans une année – un an et quelques mois – que vous lui donnez de se prononcer sur une réforme qui lui tient beaucoup à coeur. Le Conseil est heureux de participer à cette consultation de l'Assemblée nationale, mais nous devons vous dire que nous regrettons la longévité du processus. Le Conseil est aussi déçu de constater les profondes divisions de l'industrie qui perdurent depuis la première commission de 1996. Les positions des divers groupes et associations intéressés n'ont pas bougé, et les efforts de conciliation et de rapprochement, à nos yeux, ont resté vains.

La polarisation des opinions et des positions rend pratiquement impossible tout consensus. Il y a vraiment trop, dans cette industrie-ci, d'intérêts divergents. Il incombe donc au gouvernement de trancher. Le Conseil croit en effet que la question doit porter sur l'élargissement de la législation qui doit s'adapter au contexte économique d'aujourd'hui – on en a parlé tantôt – une législation capable de prévoir et d'accueillir les profonds changements qui s'amorcent dans ce domaine. On sait que c'est une transformation radicale qui s'en vient.

(11 h 50)

Nous allons donc aujourd'hui vous rappeler les valeurs et les principes que le Conseil défendait en 1996 et qu'il soutient toujours avec la même unanimité de ses membres, vous exprimer nos commentaires et propositions sur certains aspects primordiaux du projet de loi n° 188 qui s'éloignent, selon nous, de l'esprit, des objectifs mêmes de la réforme, et je vous ferai aussi part de certaines considérations sur tout ce qui gravite autour de ce débat. Je vais d'ailleurs commencer par ce dernier point. En effet, je crois qu'il importe de souligner encore une fois que le Conseil tient sa mission exclusive du gouvernement, qui est la protection du consommateur et de ses membres qui sont nommés par le ministre des Finances. Notre seule mission est donc à la base de tous nos travaux et de toutes nos recommandations.

Le mémoire et l'addenda que nous vous soumettons sont le résultat d'un travail d'équipe qui a fait encore une fois l'unanimité des membres du Conseil qui représentent, rappelons-le, l'ensemble des intervenants de l'industrie, à savoir intermédiaires, compagnies et évidemment consommateurs.

Comme en 1996, le Conseil croit toujours à la nécessité d'une loi sur la distribution des services financiers. Le Conseil croit aussi que la protection du consommateur québécois passe par un encadrement étanche et serré. Bien que nous ne le souhaitions pas, nous croyons que l'évolution des marchés vers la banque-assurance est inévitable. Aussi faut-il que le Québec protège sa juridiction. Ce faisant, en même temps, bien, il va assurer aux intermédiaires des règles d'encadrement équitables pour tous ceux qui oeuvrent pour le compte d'une compagnie d'assurances ou d'une institution de dépôts.

Nous croyons que tous les modes de distribution de produits financiers devraient se retrouver sous une seule autorité, le Bureau. Le gouvernement devrait aussi compléter son projet en soumettant la distribution directe et virtuelle à l'autorité du Bureau également. De plus, nous croyons que le Bureau devrait encadrer toutes les disciplines, comme le projet de loi le propose, de la distribution des produits financiers. Nous croyons que tous les intervenants de la distribution des produits financiers devraient être responsabilisés par la loi n° 188. Nous croyons que la vocation de l'organisme unique doit être claire, sans ambiguïté, puis un organisme neutre, totalement indépendant, neutre par son unique mission de protéger le consommateur puis indépendant par sa composition qui doit éviter qu'un groupe quelconque de l'industrie n'impose son point de vue à l'ensemble.

Donc, en clair, ce que nous proposons, c'est une séparation nette entre le mandat de protection du consommateur et la protection des intérêts professionnels et corporatifs. Une telle séparation des mandats aurait sûrement pour effet de redonner confiance au consommateur dans les institutions vouées à sa protection et donnerait aux intermédiaires la marge de manoeuvre nécessaire à la défense légitime et normale des intérêts de leurs membres. La question n'est donc pas de déterminer qui, dans les intervenants de cette industrie, devrait avoir la main haute sur le contrôle de l'encadrement professionnel; la question, c'est d'établir quel est le meilleur moyen d'accroître la protection du consommateur, quels que soient ses choix.

Je vais maintenant laisser la parole à Mme Tremblay, représentante des intermédiaires au Conseil, qui désire vous transmettre ses commentaires et propositions sur certains aspects du projet de loi qui méritent qu'on s'y attarde quelques instants.

Mme Tremblay (Jocelyne): M. le Président, M. le ministre, Mmes, MM. les députés, j'espère que, ce matin, avec ma grippe d'homme, j'aurai la même performance qu'Elvis Stojko.

Je suis intermédiaire en assurance de personnes depuis 24 ans et, en femme fidèle, j'ai toujours oeuvré auprès de la même compagnie qui m'a toujours supportée dans le développement de ma clientèle et de ma carrière. Je suis active aussi au sein de mon association; d'ailleurs, j'en ai été présidente les années 1992 et 1993. Parallèlement, j'ai été nommée membre du Conseil des assurances de personnes en 1992; présentement, j'en suis la vice-présidente.

Si je suis ici aujourd'hui, c'est parce que je veux vous témoigner de mon expérience, de ses limites et de mes espoirs. Je sais que nous pouvons travailler ensemble, les compagnies, les intermédiaires, les consommateurs, comme de vrais partenaires. Malheureusement, la loi 134 comporte des lacunes majeures qui ont favorisé les luttes et les conflits. M. le ministre, vous nous aideriez beaucoup en légiférant rapidement.

Aujourd'hui, j'aimerais vous entretenir de trois points qui me tiennent particulièrement à coeur: l'urgence de responsabiliser tous les intervenants de la chaîne de distribution, la nécessité d'une loi qui couvre la distribution de tous les produits et services financiers et l'autoréglementation de l'industrie par toutes ses composantes, soit les intermédiaires, les compagnies et les consommateurs.

Pourquoi vous parler de l'urgence de responsabiliser tous les intervenants de la chaîne de distribution? C'est que, dans ma pratique, en tant qu'intermédiaire en assurance de personnes, je constate quotidiennement des lacunes du système d'encadrement actuel. Tantôt, une compagnie favorise indûment les remplacements injustifiés de contrats, tantôt un produit d'assurance est vendu par des moyens mécaniques ou par des personnes qui n'ont pas la compétence nécessaire, et c'est toujours le consommateur, c'est-à-dire mon client, notre client, qui en fait les frais.

Croyez-moi, la responsabilité est complexe pour qui veut aider le consommateur à créer son patrimoine et à le conserver, parce que vous savez que, nous, intermédiaires en assurance de personnes, on crée, on gère et on conserve des patrimoines. Non seulement les intermédiaires en assurance de personnes doivent-ils être compétents et responsables, mais leur valeur ajoutée auprès du consommateur – c'est toujours notre client – doit être supportée par un réseau où tous les intervenants sans exception sont responsables et encadrés, où tous les modes de distribution sont encadrés.

Deuxièmement, de nombreux produits dits accessoires ou de convenance sont à toutes fins pratiques vendus sur le coin du comptoir; je pense à l'assurance-crédit, à l'assurance-voyage. Moi, j'ai des clients qui partent tellement bien protégés, trois assurances pour partir en voyage: assurance sur carte de crédit, assurance de voyage vendue par leur agence de voyages, et ils détiennent déjà une assurance collective auprès de la compagnie où ils travaillent. Alors, ça augmente le coût d'un voyage. Il n'en demeure pas moins que, pour le consommateur qui achète ce produit, le besoin d'être couvert en cas de sinistre est aussi vital que pour un produit acquis lors d'une planification financière à long terme faite par un intermédiaire en assurance de personnes face à face avec son client.

Si ces produits correspondent à un besoin et doivent demeurer sur le marché, le consommateur doit bénéficier de toute l'information nécessaire quant à la couverture du produit et à ses limites. Par ailleurs, il ne faudrait pas, sous prétexte du décloisonnement des institutions et d'une offre globale de tout un éventail de produits, que le client, le consommateur, se trouve à son insu ou bien malgré lui scruté et analysé pour des fins de sollicitation, voire de vente liée. À mon avis, l'histoire médicale tout aussi bien que l'histoire financière d'un individu lui appartiennent. De là, vient la nécessité d'une loi qui couvre toutes les étapes de la distribution de tous les produits financiers.

Enfin, je veux vous entretenir de l'importance que toutes les composantes de l'industrie participent ensemble à leur propre réglementation. Après six ans d'expérimentation, je suis convaincue que, à l'intérieur d'un cadre légal bien équilibré, compagnies, intermédiaires et consommateurs sauront composer pour leur plus grand bénéfice et celui des consommateurs.

Sans prétention, je suis assurée qu'à la lecture de notre mémoire vous saurez trouver plusieurs points démontrant les avantages d'une loi sur la distribution des produits et services financiers regroupant les compagnies, les intermédiaires et les consommateurs autour d'une seule et même table. Nous travaillons fort à la recherche de solutions autant que possible consensuelles et surtout dans le respect de nos différences. Il est l'heure d'user de notre gros bon sens et de faire oeuvre de maturité au profit du consommateur. Pour un tel défi, considérez, M. le Président, M. le ministre, MM. et Mmes les députés, que je suis toujours partante. Je vous remercie.

M. Massé (Guy): Je cède maintenant la parole à notre représentante des consommateurs, Mme Bilodeau.

(12 heures)

Mme Bilodeau (Simone): M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les députés, je voudrais, comme préambule, vous faire partager un état d'âme. Non pas que je déplore d'être avec vous aujourd'hui ici, mais je déplore qu'on ait eu à faire l'exercice en double, c'est-à-dire de présenter un mémoire il y a 18 mois et de le représenter aujourd'hui. Cependant, je ne pouvais consciemment, comme unique représentante des consommateurs au Conseil des assurances de personnes, refuser cette tribune, que vous nous offrez malgré tout, pour faire des recommandations sur le projet de loi n° 188. Je souhaite, par contre, que la voix des consommateurs soit non seulement reçue, mais retenue, comme l'a été celle de l'Association des intermédiaires de marché, comme l'a mentionné le ministre Landry dans son discours d'ouverture.

Ceci étant dit, je vous fais part de mon message. Alors, moi, je vous apporte le témoignage d'une consommatrice «ben ordinaire», comme le dit la chanson populaire, qui se consacre à la défense des droits et à l'éducation des consommateurs depuis 10 ans, maintenant. Il y a des choses bien simples qui compliquent l'existence des consommateurs et qu'ils mélangent, surtout en matière de produits et de services financiers.

La première, c'est de ne pas savoir: de ne pas savoir qui le protège dans tel ou tel cas, de ne pas savoir qui est responsable dans tel ou tel cas, de ne pas savoir de qui c'est l'affaire quand on a un problème ou quand on fait face à un litige. Est-ce l'assureur, est-ce l'agent ou le courtier d'assurances, est-ce l'Office de la protection du consommateur ou est-ce l'ACEF de notre région? Ce n'est jamais aussi évident que cela en a l'air, pour le consommateur à tout le moins. Ce n'est pas péjorativement que je le dis, mais c'est facile d'être ignorant dans des situations où le nombre d'organismes de protection de nos droits est presque aussi nombreux que le nombre de problèmes qu'on peut rencontrer.

Il me semble que ce serait beaucoup plus simple si on pouvait s'en référer à un seul organisme ayant pour unique mission de nous protéger, de nous renseigner et de nous informer. Il me semble que ce serait aussi beaucoup plus simple si cet organisme unique, à vocation unique, regroupait tous ceux avec qui nous sommes appelés à transiger, peu importe le mode d'acquisition des produits ou des services que nous choisirions. Il me semble enfin que ce serait plus simple si toutes les disciplines étaient encadrées par un seul organisme et que les pouvoirs de ce dernier étaient suffisamment grands pour combler les trous qu'ont créés les structures et la législation actuelle. Il me semble donc que la sécurité du consommateur serait plus grande et plus évidente et que les quelques individus ou les quelques cas qui peuvent se permettre de ternir l'industrie pourraient être mieux contrôlés, moins nombreux et moins dommageables pour tous. Alors, les consommateurs, on appuie la création d'un organisme unique parce qu'on veut comprendre plus facilement, on veut savoir plus facilement, on veut régler plus facilement, parce qu'on veut que ce soit clair, net et précis.

La deuxième chose, c'est de ne pas savoir qui fait quoi. Actuellement, dans le domaine des produits et services financiers, il y a cinq organismes qui ont pour mission de protéger les consommateurs. C'est un concept, entre parenthèses, que j'ai entendu galvauder depuis quelques années, la protection du consommateur. Pour les uns, c'est une mission principale; pour d'autres, c'est une mission exclusive. Les uns s'occupent de discipline ou de code d'éthique; les autres s'occupent de punir, de bannir ou de compenser les fraudes ou autres manquements. Il n'est que normal, dans ces conditions, que les uns veuillent les pouvoirs et privilèges des autres, et vice versa.

Mais le consommateur n'est pas toujours au fait des tenants et aboutissants des droits et devoirs de chacun de ces organismes, j'en ai parlé tantôt. Il ne sait même pas toujours qu'ils existent. Mais il est parfois sensibilisé par les médias ou autrement aux conflits et aux dissensions qui voient le jour entre ceux-ci. Et ça, ça mine la confiance envers les uns et les autres et ça se rejette sur toute l'industrie.

Si la législation prévoyait une structure qui établisse clairement les missions et les mandats précis et exclusifs aux uns comme aux autres, il y aurait moins de commérages et moins de méfiance de toutes parts. Tout le monde sait qu'il est difficile de servir deux maîtres à la fois. Alors, pourquoi le législateur ne profiterait-il pas de l'occasion de la présente réforme pour établir des balises claires qui permettraient à tous et à chacun, organismes, regroupements, associations, de se consacrer exclusivement à leurs seules missions et de les mener à bien en y consacrant toutes leurs énergies. Ça aussi, les consommateurs pensent que ce serait plus clair et plus bénéfique pour tout le monde. D'ailleurs, je crois que c'est l'esprit qui animait le rapport quinquennal sur la mise en oeuvre de la Loi sur les intermédiaires de marché.

Je voudrais, en terminant, ajouter quelques mots sur ma participation au Conseil des assurances de personnes, sur lequel je suis depuis deux mandats, donc depuis quatre ans. Nous sommes 10 personnes de diverses provenances, aux intérêts professionnels parfois divergents et aux ambitions différentes. Nous avons participé à la rédaction de deux mémoires, je me répète, dans le cadre de la révision législative actuelle. Nous avons, tous et chacun, pu présenter nos points de vue, nous avons pu en débattre et nous avons pu les faire valoir. Nous en sommes donc chaque fois arrivés à un consensus sur l'essentiel qui est, répétons-le, la protection du consommateur. Nous avons chaque fois adopté nos textes et nos positions à l'unanimité. Nous nous sommes aussi enrichis de nos interrelations et des échanges d'idées, parfois opposées au départ, et de nos concessions respectives.

Alors, je crois que nous avons fait l'expérience et que nous témoignons de la possibilité d'en arriver à des positions convergentes et communes pour la défense et la protection des droits des consommateurs. Le Conseil des assurances de personnes, comme d'autres organismes multipartites, est, je le crois, un microcosme de ce que nous souhaitons pour le futur Bureau des produits et services financiers, à savoir: une table de concertation qui respecte tous ceux et celles qui y participent, à la seule condition que tous et toutes partagent l'objectif commun d'en arriver à des solutions qui assurent la protection des consommateurs qui en ont un grand besoin, de plus en plus.

Et, avant de laisser le micro, j'ajoute ma voix à celle de Mme Plamondon, personnellement, comme consommatrice, dans l'appui de son mémoire. Nous espérons que cette commission nous entendra. Je vous remercie.

M. Massé (Guy): M. le Président, les lois, on le sait, sont créées pour protéger le public et défendre, évidemment, ses droits. Malheureusement, dans le débat actuel, le principal intéressé, en l'occurrence le consommateur, dispose de moyens plus que modestes pour s'y retrouver, et plus modestes sont ceux qu'il a pour exprimer et diffuser son point de vue, à preuve le faible nombre d'organismes dont la mission unique est la protection du consommateur qui sont présents ici à cette commission, qui sont inscrits. Si nos estimations sont justes, les organismes qui ont comme mission de protéger uniquement le consommateur, et pas autre chose, représentent 20 % des organismes, des groupes qui se sont inscrits à la présente commission.

Puis, d'autre part, aussi faut-il se dire qu'on ne voit pas beaucoup de firmes de lobbyistes puis de relations publiques à l'emploi ou au service des associations de consommateurs du Québec. Mme Plamondon, qu'on a entendue tantôt, du Service d'aide au consommateur, comme bien d'autres centres d'aide, d'ailleurs, garde ses sous, elle, pour payer le loyer de ses bureaux à Shawinigan. Alors, il est donc peu probable que vous receviez chez vous, dans votre comté, des avalanches de fax ou des tonnes de lettres de toutes parts. Ils ne se paieront probablement pas non plus des pages de publicité dans les grands quotidiens de Québec. C'est un peu la même chose pour les deux conseils, d'assurances de personnes et de dommages, nos finances sont plutôt modestes.

Par contre, ceux qui défendent leurs marchés, les Desjardins, banques, compagnies d'assurances, disposent de tout un arsenal de moyens. Ceux qui défendent leurs territoires, les associations, les regroupements de tout acabit, ont, avec de gros budgets, développé des machines à convaincre qui feraient pâlir même bien des partis politiques en campagne électorale.

La cause est belle, c'est vrai. Nous voulons tous, évidemment, le bien du consommateur, il faut bien l'admettre. Et il faut admettre qu'on défend aussi d'autres intérêts. Pourquoi ne pas profiter de l'occasion pour avouer que l'industrie des services financiers vise aussi son propre intérêt puis que, dans le fond, c'est légitime? Disons donc les choses clairement et simplement au lieu de confondre les consommateurs avec nos savantes démonstrations. Donnons aux consommateurs un organisme de protection unique et crédible pour qu'ils cessent de s'en remettre à des émissions d'affaires publiques, des lignes ouvertes, des programmes de télévision comme J.E. , La facture , les Mongrain pour se faire entendre.

(12 h 10)

Nous savons, vous et moi, puis il faut se le dire, que, lorsque nous parlons du consommateur, bien dans l'industrie, c'est au mot «client» qu'on pense et quand ce n'est pas au mot «électeur». On pourrait cependant respecter l'électeur, le client, le consommateur en créant un environnement qui respecte et protège la juridiction du Québec, le développement de l'économie de l'ensemble du Québec, les emplois, la compétence, le citoyen dans la constitution et le maintien de son patrimoine puis de sa sécurité financière. Ça, ce serait jouer gagnant-gagnant. Le danger qui nous guette, tous et chacun, est de nous retrancher derrière nos intérêts personnels puis derrière des victoires bien éphémères.

M. le ministre, Mmes et MM. les députés, je fais appel à votre leadership puis à votre sens du devoir. Prenez garde aux propositions de structure qui, sous un vocable ou sous un autre, ne feront que reproduire les incohérences que nous avons dénoncées dans le système actuel. Je pense ici à la tentation de faire du Bureau des services financiers une coquille vide et de créer des structures superposées, de réduire, de diluer la responsabilité du Bureau par une multiplication de structures qui ne fait que reconduire la situation de conflit actuelle que nous déplorons tous.

Enfin, je fais appel à votre courage, et on sait qu'il vous en faudra, je sais qu'il vous sera difficile, voire même très pénible de briser le cercle vicieux des alliances puis des mésalliances qui n'ont souvent comme motif que de faire dévier le débat. D'aucuns, évidemment, souhaiteraient voir le projet de loi reporté à une prochaine Législature. Alors, je pense qu'il faut légiférer sans tarder, puis obligez-nous, en légiférant, à nous asseoir autour d'une même table, celle du Bureau des services financiers, pour trouver nos solutions. Puis, n'ayez crainte, nous les trouverons, nos solutions. Je vous remercie. Il me fait maintenant plaisir de répondre à vos questions.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. Massé. Je vais laisser le ministre faire ses commentaires et poser les questions possibles. M. le ministre.

M. Landry (Verchères): Oui, M. le Président, à chaque fois que j'entends le Conseil et que j'entends M. Massé et les hommes et les femmes qui l'accompagnent, j'ai toujours l'impression d'entendre la voix de gens qui connaissent bien le monde de l'assurance, premièrement, qui souvent personnellement y ont donné leur vie, l'estime, le respect qu'ils considèrent comme un service essentiel à la société et qu'ils et qu'elles essaient au moins de se placer au-dessus de la mêlée. Ça m'apparaît ce que vous tentez faire. Ça ne veut pas dire que vous avez raison, j'imagine, dans tout ce que vous dites, mais vos accents de sincérité devraient impressionner tout le monde autour de cette table et tout le monde dans la salle quant à votre tentative d'aller chercher l'intérêt objectif et le bien commun au-delà des intérêts particuliers.

Par ailleurs, vous avez dit que vous étiez pessimistes sur la capacité consensuelle du monde de l'assurance. Vous pensez que le gouvernement doit trancher. C'est le rôle du gouvernement de trancher quand il doit le faire, ayant entendu tout le monde et essayé tous les rapprochements.

J'aimerais avoir vos commentaires sur ces possibilités de rapprochement à la lumière d'une expérience que j'ai vécue de très près et que j'ai relatée dans mes remarques introductives, d'une tentative de rapprochement avec deux grands groupes impliqués dans le présent débat. Sur les principes, nous nous sommes rapprochés. Nous avons convenu d'un certain nombre de choses qui faisaient consensus au moins dans leur formulation simple. Il y a eu redivision quand ça a été traduit dans le projet de loi, où, là, nos interlocuteurs nous ont dit de bonne foi: Non, ce qu'on voulait ne s'y retrouve pas. Nous, on pense qu'on l'a mis. Bon. Mais ça réduit, il me semble, un peu votre pessimisme fondamental.

J'aimerais vous entendre sur cette capacité que les parties ont encore de cheminer et sur le rôle que le Conseil peut jouer pour faire cheminer les parties, étant entendu que le gouvernement va trancher. C'est notre devoir de législateurs élus. On n'a pas été élus par le monde de l'assurance, on n'a pas été élus par le monde de la banque, les consommateurs sont tous et toutes de nos électeurs et électrices, et notre responsabilité, on va l'assumer, mais on voudrait bien que le monde de l'assurance, dans toutes ses composantes, nous aide à arrondir les angles. Alors, c'est ma première question.

Ma deuxième est question est plus technique. Vous êtes d'accord avec l'organisme unique. D'ailleurs, je vais vous dire, en confidence, que la première fois que j'ai entendu parler de ce dossier, dans les premières heures où je suis devenu ministre des Finances, la plupart des intervenants m'ont dit: Tout le monde est d'accord avec l'organisme unique. Alors, j'ai dit: Tiens, voici un dossier qui va aller bien de façon consensuelle. Pour une fois, il va y en avoir un facile. Je me suis rendu compte après que l'organisme unique, ça n'avait pas la même acception pour tout le monde.

Ce Bureau, avec ses deux chambres, c'est une tentative de consensus. Nous sommes partis d'un bureau, comme vous le savez. Après discussion avec des composantes majeures du monde de l'assurance, on a ajouté les deux chambres. D'abord, qu'est-ce qu'il y a de mauvais à ajouter ces deux chambres et rendre plus confortable la nouvelle institution à certains de nos interlocuteurs majeurs? Et, quant au Bureau et aux chambres, si jamais vous les acceptez, quelle devrait en être la constitution? Et comment est-ce que l'organisme unique que vous préconisez devrait être constitué?

M. Massé (Guy): Voici. Merci de cette question, parce que ça touche un point que nous trouvons crucial au Conseil des assurances. C'est qu'il faut absolument, je pense, si on veut de la cohésion, si on veut éviter de la confrontation, que les mandats des organismes soient clairs.

Dans le projet de loi, M. le ministre, vous avez plus qu'un organisme, puisque vous avez les deux chambres qui sont des personnes morales, donc incorporées, et qui, sur certains plans, relèvent directement de vous. Alors, déjà, ce n'est plus une seule structure, c'est trois structures qui disposent, qui ont, je dirais, toute la semence pour des chicanes futures. Je m'explique. Si on parvient... À mon esprit, ce qui est essentiel, au Conseil, ce qu'on souhaite puis qu'on propose, c'est d'avoir, d'une part, des organismes dont l'unique objet est la protection du consommateur, pas d'autre chose, et des organismes dont l'unique objet est la protection des membres, et le service aux membres, et le support à la profession, et ainsi de suite, de façon complètement détachée l'une de l'autre.

Nous avons proposé, au Conseil, de créer, à l'intérieur du Bureau, et rejoindre l'objectif qui était souhaité en créant les chambres, d'avoir des tables sectorielles qui sont vraiment partie du Bureau, où on va chercher, par ces tables sectorielles, l'expertise même du milieu, de chacun des milieux qui se retrouvent au Bureau. Alors, nous avons proposé des tables sectorielles de façon à ce qu'on ne multiplie pas les structures, qu'on ait une seule structure, les tables sectorielles étant là pour apporter l'expertise. Évidemment, c'est toujours orienté dans le but unique de la protection du consommateur.

Maintenant, nous sommes d'avis qu'il y a une place, et qu'elle est importante, pour une association qui a toute la marge de manoeuvre pour protéger ses membres. Alors, je pense qu'en mettant ça dans les chambres vous rendez les associations, vous dénaturez les associations, vous les mettez dans un cadre où elles perdent des marges de manoeuvre et vous créez une sorte de créature qui risque d'être en conflit avec le Bureau.

Alors, ça nous apparaît une mauvaise orientation, parce qu'on a vécu des partages d'organismes qui avaient aussi des mêmes missions. On a vu toutes les confrontations et les difficultés que ça peut créer. On voudrait éviter ça. Écoutez, ça fait six ans, moi, que je suis au Conseil. Ça fait six ans que je vis des conflits entre organismes. Puis ça fait partie de la nature humaine. Dans n'importe quel milieu, vous mettez des gens dans les organismes, donnez-leur le même objectif, vous allez créer des conflits. On se dit: Ne faites pas ça. Ne prenez pas la même direction. On va recommencer les mêmes guerres. Puis, pendant qu'on guerroie pour les pouvoirs, on ne guerroie pas pour le consommateur.

On dit: Mettez ça clair. Créez des tables sectorielles pour aller chercher l'expertise du milieu pour que les gens, à travers les tables sectorielles, puissent travailler ensemble à définir les règles et puis collaborer avec le Bureau et non pas évidemment être en conflit possiblement avec le Bureau. Et puis les associations peuvent prospérer, se développer et devenir des organismes à la défense, et c'est bien qu'il y ait, de façon claire, des organismes qui défendent leurs membres, qui ont toute la marge de manoeuvre, et c'est clair, ce qu'ils font.

Alors, je pense que les intermédiaires aussi seraient heureux d'avoir un organisme dont le mandat clair est de prendre leur défense et puis de s'occuper d'eux. Alors, c'est tout simplement cette approche-là. La concession que vous avez faite nous apparaît être le commencement de la fin d'une belle structure unique, solide qui a une seule mission. Ça nous inquiète beaucoup, parce qu'on se dit: On est parti à glisser sur une mauvaise pente.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Oui, M. le ministre.

M. Landry (Verchères): J'avais une autre question qui... C'est là que vous voyez bien la difficulté de faire des concessions.

M. Massé (Guy): Ha, ha, ha!

(12 h 20)

M. Landry (Verchères): Parce que, à la moindre concession qu'on fait, on ébranle le bloc monolithique de la pensée parfaite.

M. Massé (Guy): C'est pour ça, M. le ministre, qu'il faut se brancher sur le consommateur et qu'il faut surtout s'assurer qu'on s'occupe de lui d'abord. Puis, évidemment, après, bien, mon Dieu, on essaie de voir à ce que les gens puissent se donner les structures qui répondent à leurs besoins.

M. Landry (Verchères): Vous faites contrepoids, en tout cas, aux nombreuses personnes qui me disent qu'on doit faire des concessions.

Une question plus pointue qui est aussi au coeur du débat. Vous êtes un homme d'assurance bien connu et respecté. Vous occupez vos fonctions depuis plus longtemps que j'occupe les miennes et que le présent gouvernement occupe les siennes. Encore une fois, vous me semblez avoir une vue au-dessus de la mêlée. Nous avons voulu, dans ce projet de loi, garder la responsabilité du représentant. Nous pensons que ce représentant est un professionnel responsable, que ça lui donne des devoirs, des obligations et qu'il peut, comme tout professionnel, avoir à rendre des comptes à des tribunaux dans les cas extrêmes, à des organisations plus paritaires ou de réglementation dans d'autres. Est-ce que, d'après vous, ce projet-là diminue le statut professionnel ou la responsabilité de l'homme ou de la femme d'assurance?

M. Massé (Guy): Peut-être que Mme Tremblay pourrait répondre à cette question-là. Je pense qu'elle est en mesure de...

Mme Tremblay (Jocelyne): O.K. Disons que, nous, en tant qu'intermédiaires en assurance de personnes, j'ai l'impression qu'on travaille en vrais professionnels. J'ai l'impression que, quand j'arrive chez mon client, je suis un professionnel. Dans la loi, il faut absolument que l'on soit reconnus comme des personnes qui ont la formation encadrée de la même manière et qui livrent la même marchandise – je ne dis pas le même produit – au consommateur.

Il y a le mot «représentant», moi, qui me fatigue énormément, si vous me permettez, parce que, pour moi, «représentant» devient «employé». Moi, la journée où je serai employée, j'ai l'impression que je serai beaucoup moins intéressée – c'est terrible, ce que je vous dis là – à continuer. Moi, je suis un professionnel, je suis un travailleur autonome. Je rends compte de mes actes. Si un jour je fais une erreur professionnelle, je veux en répondre comme un vrai professionnel. Je ne sais pas si j'ai répondu à votre question, M. Landry.

M. Landry (Verchères): Vous m'avez répondu plus sur le mot que sur la chose. Je sais qu'on emploie dans la loi le mot «représentant». On ne butera pas sur des mots. On va chercher le meilleur mot pour décrire le travail. Mais c'est que plusieurs nous ont fait l'objection, voire par la voie des journaux: On perd notre statut professionnel, on n'est plus des professionnels. En quoi est-ce que ce projet diminue le statut professionnel?

Mme Tremblay (Jocelyne): C'est d'être rattaché à un cabinet, M. Landry.

M. Landry (Verchères): Oui, mais ce n'est pas obligatoire. On peut ne pas être rattaché à un cabinet. Si c'est là l'objection, ça a été changé. On peut ou ne pas être rattaché à un cabinet.

Mme Tremblay (Jocelyne): C'est complexe, M. Landry.

M. Landry (Verchères): À qui le dites-vous!

Mme Tremblay (Jocelyne): Je sais que, dans la loi, vous voulez que les compagnies se constituent en cabinets et que, nous, en tant qu'intermédiaires, on devienne rattachés à ce cabinet. C'est ça, la loi.

M. Landry (Verchères): Oui, mais on dit ici, de façon très claire, que...

Mme Tremblay (Jocelyne): Et j'ai l'impression que, de cette manière-là, en étant rattachée à un cabinet, ça me déresponsabilise.

M. Landry (Verchères): Oui, mais si vous avez...

Mme Tremblay (Jocelyne): Mais ce n'est pas le cas.

M. Landry (Verchères): ...le droit de ne pas l'être et si la loi dit clairement que vous êtes responsable dans le cabinet personnellement et que le cabinet est responsable aussi, vous qui voulez servir le consommateur, vous voyez bien qu'il y a un double rempart de responsabilité: un personnel et un de cabinet.

Mme Tremblay (Jocelyne): Je n'ai pas de problème.

M. Landry (Verchères): O.K. Et sur le mot, je vais vous dire franchement, on va chercher le meilleur mot, nous autres. C'est vous qui allez vivre avec le mot après, qui allez mettre ça sur vos cartes d'affaires, pas moi. La langue française doit être assez riche pour trouver le bon mot. Moi, quand j'étais jeune, quand mon père était courtier d'assurances justement, on appelait comment les experts en sinistre? Des ajusteurs d'assurances. Vous vous rappelez de ça? Ils tenaient à ça comme à la prunelle de leurs yeux. C'était ajusteurs, et puis c'était correct, mais ce n'était pas français, c'était «adjusters» tout simplement. Aujourd'hui, on parle d'experts en sinistre, bien contents de mettre sur leurs cartes d'affaires «expert en sinistre».

Les mots peuvent évoluer, et ça, je pense bien que nos juristes, à l'aide de l'Office de la langue française, trouveront le mot qui convient. Puis, s'il y a des gens dans cette salle qui veulent nous faire des suggestions pour les mots, que personne ne se gêne.

M. Massé (Guy): Je pourrais peut-être ajouter une petite chose, M. le ministre, si vous me le permettez. Dans le projet de loi, c'est vrai, comme vous le mentionnez, qu'il y en a beaucoup qui se sentent déresponsabilisés. Maintenant, je pense que c'est dû à l'obligation d'appartenir à un cabinet. Mais la question qu'il faut se poser aussi, c'est: Est-ce qu'un courtier en valeurs mobilières est moins professionnel qu'un intermédiaire en assurance? Mais, pourtant, les courtiers ont le rattachement obligatoire à un cabinet.

L'autre question qu'on peut se poser: Est-ce que, pour la protection du consommateur, le rattachement à un cabinet n'est pas en soi une sécurité additionnelle que l'on offre au consommateur? Au bout du compte, en responsabilisant les cabinets, vous allez venir à épurer l'industrie, puis c'est en épurant l'industrie des incompétents et des gens qui ne font pas bien leur travail que vous allez rehausser le niveau professionnel des intermédiaires. Ça aussi, c'est un élément qu'il faut considérer. Je pense que le statut professionnel de l'intermédiaire ne sera pas desservi du fait qu'on mette une responsabilité au-dessus de lui.

M. Landry (Verchères): Surtout que l'article 109 de la loi dit – soyons très pointus – qu'une personne peut s'inscrire auprès du Bureau comme représentant autonome dans toutes les disciplines ou catégories de disciplines. Alors, dire qu'il faut être rattaché à un cabinet n'est pas conforme au texte de la loi.

M. Massé (Guy): Nous avons proposé, M. le ministre, que les intermédiaires puissent s'attacher à n'importe quel cabinet, mais nous avons également proposé d'éliminer le représentant autonome pour une raison, puis je vais vous la donner. Il est reconnu dans le domaine de l'industrie que, pour former un intermédiaire professionnel, de niveau professionnel, ça prend cinq ans. Alors, ce qui veut dire que, pendant ces cinq années-là, l'intermédiaire est ni plus ni moins dans un processus d'apprentissage. Pendant cinq années, il a, pendant ces années-là, l'encadrement de sa compagnie, du cabinet avec lequel il travail. Il est encadré par la compagnie et les instruments qu'elle lui fournit. Mais, après les cinq années, l'intermédiaire prend une distance et peut vraiment assumer toute son autonomie sans encadrement. Ça prend un minimum de cinq ans.

Alors, si vous me dites: Oui, mais 90 % des intermédiaires ont cinq ans et plus, c'est une situation. Mais, si vous dites, par exemple, que 49 % des intermédiaires ont plus de cinq ans d'expérience et que 51 % des intermédiaires ont moins de cinq ans d'expérience... Si je vous disais qu'un intermédiaire sur quatre a moins d'un an d'expérience, un intermédiaire sur quatre, vous rendriez ces gens-là autonomes, tout de suite, comme ça? Leur donner toute la marge de manoeuvre, ne pas responsabiliser la compagnie pour laquelle ils oeuvrent, c'est très dangereux, et ça nous inquiétait beaucoup.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Ça vous convient, M. le ministre?

M. Landry (Verchères): ...

Le Président (M. Baril, Arthabaska): On peut passer la parole au député de Viger.

M. Maciocia: Merci, M. le Président. Merci, M. Massé, du mémoire que vous nous avez présenté. On a eu l'occasion justement de le relire. Vous avez présenté, je dirais, quasiment le même mémoire de 1996. C'est très bien. Vous l'avez déjà dit puis vous l'avez même annoncé dans le supplément, dans les recommandations spécifiques que vous nous avez faites par après, c'est très clair que votre position, elle n'a pas changé. Ça, c'est clair. Puis nous sommes d'accord que votre position ne soit pas changée avec probablement les 18 mois de consultations ou autres qu'il y a eu dans le domaine avec le ministère des Finances, avec le bureau du premier ministre puis avec des organismes intéressés par ce projet de loi là.

Moi, j'aurais quelques questions à vous poser. Premièrement, la question de la recommandation 2 de votre mémoire, à la page 1 de, je vais l'appeler, votre annexe technique à l'addenda. Vous nous dites: «Il y aurait lieu de permettre le rattachement à plusieurs cabinets comme il avait été question lors de l'élaboration du projet de loi.»

Vous l'avez seulement touché, là. Voulez-vous nous expliquer pourquoi le gouvernement, actuellement, il tient à ce que ça soit rattaché uniquement à un seul cabinet? Est-ce que vous avez une raison pour laquelle le gouvernement y tient? Parce que, dans le projet de loi, actuellement, dans l'article 13, il n'y a pas de possibilité de rattachement à plusieurs cabinets, mais on peut se rattacher à un seul cabinet. Quelle est la raison, d'après vous? Est-ce que vous avez étudié ça? Est-ce que vous avez des questions à vous poser, à savoir pourquoi on veut avoir seulement un rattachement à un seul cabinet?

(12 h 30)

M. Massé (Guy): À nos yeux, je pense qu'il y a deux approches. L'approche du gouvernement, c'est, d'une part, vous êtes rattaché entièrement ou, encore, vous êtes libre comme l'air, vous êtes autonome complètement. Pour nous, dans un cas... Puis je vais vous le dire, ce qui est la réalité. Actuellement, vous prenez le représentant qui est exclusif avec sa compagnie. Ce représentant-là est encadré, supervisé, et la compagnie, d'une certaine façon, s'en sent responsable. Ces gens-là sont très bien encadrés. Vous avez le représentant qui est complètement autonome, qui évidemment n'a pas d'encadrement du tout; souvent ce qui se produit, c'est que du fait qu'il n'y ait aucune exigence pour qu'un représentant soit totalement autonome – qu'il soit formé ou non ou avec très peu d'expérience, ça n'a pas d'importance – on considère que c'est un grand danger.

Alors, on préfère obliger le rattachement – tous les représentants rattachés à un ou des cabinets, selon leur choix – mais on dit, par exemple: Tous ceux qui sont dans les cabinets s'en rendront responsables de façon à ce que le consommateur se voit protégé partout de deux façons. La première façon, par le code de déontologie de l'intermédiaire qui, je pense, est important, le code de discipline, qu'il agisse pour l'intermédiaire pour le responsabiliser sur ses conseils et qu'on aille au niveau du cabinet pour responsabiliser sur les pratiques de vente.

Alors, à ce moment-là, pour le consommateur, on a une double protection. Mais, si d'un côté, on dit: Rattaché, il y a une double protection, et, si vous êtes autonome, il n'y a pas de protection, c'est uniquement le code de déontologie; il n'y a pas ce cabinet superviseur qui s'assure à ce que le consommateur soit protégé. On considère que c'est un trou puis que c'est un danger, puis on dit: Il faudrait essayer d'éviter cette situation-là.

Vous savez, le problème, je vais vous le dire. Le problème, ce ne sont pas les 49 % intermédiaires qui ont beaucoup d'expérience, ce sont des professionnels pour la grande majorité, compétents, très professionnels, capables d'assumer l'autonomie, le problème, c'est pour les 51 % qui sont en apprentissage. Et pour vous donner un exemple de ça, c'est que depuis 1991, au Conseil, nous avons reçu 17 000 candidats aux examens, et 14 000 ont reçu leur permis. Mais 14 000 depuis 1991 sur 13 800 intermédiaires actuellement dans le marché, ça vous fait comprendre qu'il y a une rotation importante.

Alors, ça signifie qu'il faut essayer de prévoir, pour ne pas laisser les intermédiaires qui ont peu d'expérience, qui sont en voie d'apprentissage puis en voie de formation, pour leur donner toute l'autonomie puis les laisser en pleine liberté. On dit: Attention! Le consommateur prend de grands risques.

M. Maciocia: Dois-je comprendre que vous n'êtes pas d'accord avec l'article 13 du projet de loi?

M. Massé (Guy): L'article 13 du projet de loi, attendez, on va le regarder. Donc, l'article 13...

M. Maciocia: Parce que l'article 13, il dit: «Un représentant, autre qu'un représentant en valeurs mobilières, ne peut exercer ses activités dans une même discipline que s'il agit pour le compte d'un seul cabinet, que s'il est inscrit comme représentant autonome ou que s'il est un associé ou un employé qui agit pour le compte d'une seule société autonome.»

M. Massé (Guy): Nous ne sommes pas d'accord.

M. Maciocia: Vous n'êtes pas d'accord avec ça?

M. Massé (Guy): Et nous ne sommes pas d'accord avec les autonomes. Mais ça va ensemble, il ne faut pas mal interpréter là.

M. Maciocia: Oui, oui.

M. Massé (Guy): Si on ne fait pas de changement...

M. Maciocia: J'ai compris.

M. Massé (Guy): ...c'est un moindre mal.

M. Maciocia: C'est pour ça que je l'ai cité en entier, l'article.

M. Massé (Guy): D'accord.

M. Maciocia: L'article 13. Je n'ai pas dit, M. Massé, la première moitié ou la deuxième moitié; j'ai dit complètement, l'article 13. Vous n'êtes pas d'accord avec l'article 13, c'est ça?

M. Massé (Guy): Je suis partiellement... Disons que je le suis. Je fais une proposition qui est différente de l'article 13. C'est sûr qu'il y a une différence.

M. Maciocia: C'est ça. C'est exactement ça. À la page 9 de votre mémoire, et toujours là-dedans là, vous dites: «Le Bureau n'a aucun pouvoir quant à l'encadrement des distributeurs. Il ne peut établir aucune exigence de pratique», etc. Est-ce que vous êtes en train de dire que la Loi sur la distribution des produits et services financiers ne permet pas au Bureau de réglementer justement la distribution des produits sans représentant? Et, si c'est ça, ni de la sanctionner. S'il n'a pas le droit, disons, de contrôler la distribution sans représentant, il ne peut plus la sanctionner.

Et comment le Bureau peut-il protéger le public – on parle toujours de la protection du consommateur – s'il n'y a aucun contrôle sur ceux qui agissent comme distributeurs?

M. Massé (Guy): Nous sommes d'avis que personne ne doit échapper au Bureau. Nous croyons que, laisser les distributeurs sans lien, sans être sous la responsabilité du Bureau, c'est une erreur. Nous avons proposé dans le contexte de distributeur... D'une part, il y a le guide qui est là pour encadrer d'une certaine façon la personne qui agit pour le distributeur; nous disons qu'il faut donner au consommateur une copie de ce guide-là, au moins une copie, de façon à ce que le consommateur puisse avoir une copie qu'il pourra annexer à son contrat, une copie qui résume les différentes couvertures et de façon à ce qu'il ne puisse pas y avoir de contradictions entre le guide et la copie que reçoit le consommateur.

Parce que souvent le problème, c'est comment prouver qu'un distributeur a dit toute la vérité ou a donné toute l'information. Alors, si on retrouvait au moins un guide que le consommateur pourrait recevoir quand il se procure son produit, qui résume les garanties et les différentes conditions, ceci annexé à son contrat, il y aurait un recours plus efficace contre le distributeur. Alors, on dit qu'il faut compléter cette démarche-là.

M. Maciocia: Puis quel pouvoir il devrait avoir en plus, le Bureau, pour avoir cette possibilité-là, M. Massé?

M. Massé (Guy): Pardon?

M. Maciocia: Quel pouvoir il devrait avoir?

M. Massé (Guy): Oui, on dit que le Bureau devrait avoir le pouvoir de pouvoir encadrer les activités des distributeurs parce qu'il peut y avoir nécessairement bien des abus. Maintenant, quand on pense à «encadrer», ce n'est pas pour surréglementer et tuer évidemment le canal de distribution, non, mais réglementer pour empêcher les abus les plus flagrants. Alors, il faut accrocher les distributeurs au Bureau.

M. Maciocia: C'est pour ça que les articles 154 et 156 vous causent un peu problème, si je comprends bien.

M. Massé (Guy): Oui, définitivement.

M. Maciocia: Une autre question, M. le Président, si vous permettez, à la page 15 de votre mémoire...

M. Massé (Guy): Le même document?

M. Maciocia: À la page 15, vous dites, à l'article 384, Certificats restreints: Rien n'est prévu concernant la façon dont les titulaires de certificats restreints doivent se présenter aux consommateurs – entre guillemets, titres – la publicité qu'ils peuvent faire et les garanties de solvabilité qu'ils offrent aux consommateurs en cas de faute. Pouvez-vous d'une certaine manière, nous expliquer l'enjeu relié à la solvabilité des distributeurs?

M. Massé (Guy): Nous croyons que de la même façon les certificats restreints devraient être encadrés par le Bureau, et le Bureau devrait établir toute la réglementation autour des pratiques de ceux qui détiennent un certificat restreint. Je pense que c'est également important, pour toujours le même motif, à la base, pour protéger le consommateur. On pense que ça devrait...

M. Maciocia: Quels titres on donnerait à ces personnes-là, parce que vous parlez de titres? Comment se présenter aux consommateurs?

M. Massé (Guy): On n'a pas fait de proposition de titres comme tels, mais on croit que tout ça devrait être réglementé de la façon qu'ils se présentent aux consommateurs, pour s'assurer qu'il y ait toujours transparence, que le consommateur sache à qui...

M. Maciocia: Mais vous dites très clairement: «dont ceux-ci doivent se présenter au consommateur». Concernant la façon dont ceux-ci doivent se présenter au consommateur, quelle est votre suggestion?

M. Massé (Guy): On n'a pas fait de suggestion spécifique là-dessus, mais on dit qu'il faut le prévoir par réglementation.

M. Maciocia: Oui, mais, quand vous dites qu'il faut le prévoir, vous avez dans l'idée quelque chose, de dire: Voilà comment ils devraient s'appeler, ces gens.

M. Massé (Guy): Bon, il faut laisser du travail au Bureau. Il faut laisser le Bureau faire son travail, parce qu'on ne peut pas faire toute la réglementation en faisant une loi. Alors, on se dit qu'il faut donner à l'organisme le pouvoir d'encadrer toutes ces façons de distribuer et de faire toute la réglementation qui s'ajuste à chacun.

M. Maciocia: Je comprends très bien, M. Massé, mais au moment où vous avez rédigé ça, au moment où vous avez libellé cette question, de la manière dont vous l'avez libellée, je ne peux pas imaginer que vous n'avez pas pensé à un titre...

M. Massé (Guy): Non.

(12 h 40)

M. Maciocia: ...pour ces personnes-là.

M. Massé (Guy): Non, absolument pas.

M. Maciocia: C'est parce que, autrement, comment faites-vous pour le dire?

M. Massé (Guy): Bien, écoutez, si on veut tout prévoir, si on veut tomber... Quand on dit qu'on veut que l'organisme, lui, établisse la réglementation, on n'est pas pour commencer, nous, à définir quelle doit être toute la réglementation, sans ça on aurait un mémoire de six pouces d'épais; ça n'aurait pas de bon sens.

On pense que ce qui est essentiel, c'est que le Bureau ait l'autorité d'encadrer toutes ces pratiques-là. De quelle façon? Il décidera lui-même.

M. Maciocia: Ça, je comprends bien. Il faut analyser le problème, et vous dites: A ce problème-là, il faudrait des correctifs. Mais vous n'avez aucune idée quels pourraient être les correctifs pour éliminer ce problème-là?

M. Massé (Guy): Tout ce qu'on vise, c'est... Écoutez, ce n'est pas compliqué, ce qu'on vise partout, c'est la même approche: c'est de la transparence. Il faut que le consommateur sache avec qui il transige, il faut que le consommateur sache quels sont ses recours. Je pense que c'est de la transparence partout. Aujourd'hui, je pense que c'est acquis, ça, ce principe-là, de transparence, dans toutes nos relations, les relations d'affaires. C'est pour ça qu'on ne s'est pas arrêté à définir le mot à mot de chaque règlement, de chaque article.

M. Maciocia: Une autre question, si vous permettez, M. le Président, s'adresse à Mme Bilodeau. Si j'ai bien compris – parce que des fois on n'entend pas tellement bien – vous êtes d'accord avec la présentation et les recommandations faites par Mme Plamondon?

Mme Bilodeau (Simone): Exactement.

M. Maciocia: Parfait. Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Oui. M. Massé et vos collaboratrices, merci d'être là. Je pense que, comme M. le ministre l'a mentionné, puisque votre expérience fait que vous vous placez au-dessus de la mêlée, on devrait en profiter – mais là on a un problème de temps puis c'est toujours ça – pour essayer d'avoir votre opinion sur les questions les plus déchirantes ou les plus fondamentales.

J'étais content que le ministre en aborde une sur la prétention de beaucoup de gens que j'ai rencontrés à l'effet que le projet de loi ne reconnaît plus la responsabilisation individuelle. Je vous ai entendu, c'étaient plus des explications qu'un point de vue. Très clairement: Est-ce que, oui ou non, d'après vous, M. Massé, le projet de loi fait disparaître ces aspects-là auxquels beaucoup d'intervenants ou d'intermédiaires tenaient, puisque vous avez indiqué très clairement que dorénavant, selon vous, ça serait davantage intéressant pour le consommateur si cette responsabilité-là était placée au niveau des cabinets multidisciplinaires? Et là, moi, je ne suis pas d'accord avec vous, mais ce n'est pas grave, parce que vous dites que ça va épurer, puis ainsi de suite. Alors, là, je trouve une contradiction. Si tu le places au niveau du cabinet multidisciplinaire, est-ce que vous ne venez pas de convenir que la responsabilité individuelle est moindre puis qu'elle n'est pas dans le projet de loi, alors qu'on avait donné des garanties là-dessus? C'est quoi, votre point de vue?

M. Massé (Guy): Bon. Alors, je vais essayer d'y répondre le plus clairement possible, parce qu'il m'apparaît tout à fait évident que d'aucune façon ça diminue le professionnalisme de l'intermédiaire, d'aucune façon. D'abord, l'intermédiaire doit se qualifier lui-même, faire la formation, subir les examens, aller chercher son permis. Donc, il est responsable évidemment de son certificat.

Deuxièmement, l'intermédiaire doit répondre à son code de déontologie pour lequel il est entièrement responsable de tous ses conseils. Alors, maintenant, est-ce que l'intermédiaire peut être poursuivi, a toute la responsabilité? Maintenant, ce qu'on a fait, qui est différent, c'est qu'on a placé au-dessus un écran de protection complémentaire pour l'intermédiaire, qui est le cabinet.

Mais regardez bien une chose. On dit: Le cabinet doit avoir une assurance-responsabilité pour se protéger sur les gestes évidemment de ses intermédiaires. Mais attention! L'assureur qui assure le cabinet, lui, peut se retourner de bord puis aller voir l'intermédiaire et se faire payer, se faire rembourser. Ce qui signifie que l'intermédiaire, lui, il doit aussi se procurer une assurance-responsabilité pour se protéger contre un recours possible de l'assureur du cabinet. La responsabilité, elle n'est jamais dissoute pour l'intermédiaire. Tout ce qu'on a fait, c'est en ajouter une plus élargie, une additionnelle sur le cabinet, on ne l'a pas dissoute.

M. Gendron: Bien, en tout cas, on va apprécier ça. Deuxième question, parce que c'est un sujet important, d'après moi aussi, c'est la question des ventes liées. Alors, à un moment donné, il y a des gens qui, clairement, disent: Nous, on voudrait, justement pour la protection du consommateur, éliminer toute possibilité de ventes liées. Je n'ai pas saisi, puis ça se peut que j'aie mal lu, là, votre opinion très clairement là-dessus, parce que vous dites: Nous autres, on aimerait mieux que ça soit bien balisé. Mais, lorsqu'on veut baliser les ventes liées, est-ce qu'on ne vient pas dire qu'on est pour le principe? Alors, moi, je veux vous entendre sur le principe. Est-ce que vous ne croyez pas qu'il faudrait éliminer toute vente liée? C'est quoi, votre point de vue là-dessus?

M. Massé (Guy): Il faut s'entendre, d'abord, pour les ventes liées. Nous, on dit qu'il faut absolument défendre une vente d'un produit qui dépend d'un autre. Ça, c'est une vente liée, c'est illégal à notre sens. Ça devrait être illégal qu'un produit soit vendu obligatoirement: Si tu acceptes d'acheter ce produit-là, je peux te vendre le deuxième. On pense que ça, c'est illégal.

Maintenant, on se dit ceci: Il y a une autre forme de vente qui est plus insidieuse. À titre d'exemple, si je vends un produit à un consommateur, puis je peux faire des petites pressions camouflées pour lui dire: Bien, écoute, si tu prenais le deuxième produit, ça serait plus facile qu'on fasse notre affaire ensemble – une façon de mettre une pression indue. Là on dit ceci: Nous, on propose trente jours de remboursement pour le consommateur sans qu'il y ait à prouver quoi que ce soit. Si, lui, il s'est senti pressurisé, inconfortable, on dit: Au moins 30 jours, ce qui permet à un consommateur de retourner chez lui, parler à son courtier, à son agent, réfléchir à tout ça, puis dire: Finalement, oui, je me suis fait pas mal mettre de la pression, je me fais rembourser. Bien, on se dit que ça, c'est une façon pratique qui ne requiert pas qu'on fasse des poursuites légales, puis tout ce que vous voudrez. On l'obtient, on dit 30 jours, on donne une bonne sécurité à ce moment-là pour le consommateur.

Mme Tremblay (Jocelyne): J'aimerais juste ajouter quelque chose, M. Gendron, s'il vous plaît. Moi, il y a une chose aussi que j'entends par vente liée, c'est que quelqu'un pense qu'une institution financière lui fait un cadeau en lui donnant une hypothèque sur sa maison et que le consommateur se sente obligé d'acheter son assurance- hypothèque auprès de la même institution. Ça, c'est une vente liée, et ça, moi, la première, je suis contre ça. Et je pense que ça ne devrait pas exister.

M. Gendron: Merci. Une autre question rapide, pour des raisons de temps. M. le Président, je suis autorisé?

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Oui, il y a d'autres membres aussi, mais oui, allez, c'est vous autres qui décidez. Ça va couper sur votre heure de dîner.

M. Gendron: Oui, je sais bien, mais on avait... Alors, l'autre question, c'est concernant les renseignements personnels, très rapidement. Vous dites à un moment donné, dans votre mémoire, que les règles de protection des renseignements personnels devraient s'appliquer à toute personne pouvant octroyer du crédit, quelle que soit l'entreprise où elle oeuvre, et non pas seulement aux institutions de dépôts.

Il y a du monde qui prétend aujourd'hui, dans ce monde supposément moderne, qu'il n'y a plus que les institutions de dépôts qui offrent du crédit. J'aimerais ça avoir votre point de vue, une minute, pour être capable d'apprécier ça puis de quantifier le niveau. D'après vous, à part les institutions de dépôts qui offrent du crédit, c'est quoi, le niveau des autres intermédiaires de marché, quels qu'ils soient, qui jouent dans l'offre des crédits, puis à quel pourcentage? Pour être capable d'évaluer si, par rapport à la configuration du Québec, c'est un problème pas très pertinent puis qu'on s'énerve avec ça pour rien, et ça ne me tente pas de le baliser si ce n'est pas majeur. Alors, je voudrais avoir une appréciation de vous.

M. Massé (Guy): D'accord. Voici, d'abord on peut dire ceci. C'est qu'on sait que ce n'est pas réglementé, la question de crédit évidemment. On sait que... Je ne pourrais pas vous dire. Je sais qu'il y a des organismes qui se spécialisent dans le crédit. Je ne pourrais pas vous en faire un inventaire ni vous en donner une importance...

M. Gendron: Ce n'est pas ça. C'est le pourcentage que je veux: c'est majeur, c'est peu significatif ou c'est significatif?

M. Massé (Guy): ...je n'ai pas de chiffres, mais vous avez tous les commerces qui vendent des meubles, qui font... Vous savez, on peut acheter bien des choses: du mobilier, puis c'est du crédit, du crédit à la consommation sous toutes ses formes. Il y a du crédit aussi direct qui se fait, je pense, au consommateur. Puis je pense qu'il y a du crédit hypothécaire qui se fait maintenant de plus en plus en dehors des institutions. Vous avez des courtiers en prêts hypothécaires qui se développent beaucoup. Et puis il faut aussi dire que, de plus en plus, on s'en va vers de l'intégration dans la distribution des produits financiers et les prêts hypothécaires. De plus en plus, vous les retrouvez, ces prêts-là, dans les cabinets multidisciplinaires. Vous avez des courtiers qui font des prêts hypothécaires. Maintenant, tout ça est en train de s'intégrer. Ça ne sera pas long que l'ensemble des... Mais je ne peux pas vous donner...

M. Gendron: Mais pour que ... veuille dire quelque chose... Dans les institutions de dépôts, on avait quoi, M. Massé avant, là? Vous le savez, ce qu'on avait, c'est de l'argent. C'est de ça que je parlais. Vous, avez-vous une opinion que, dans les intermédiaires financiers aujourd'hui, là, de l'argent, moi, je peux avoir ça n'importe où, pas besoin d'aller dans les banques. Parce que le monde qui veut baliser ça, c'est parce qu'ils nous font accroire que c'est un phénomène important. Moi, je n'ai pas cette perception-là. Je voulais la vérifier sur des gens qui sont plus spécialistes que moi et qui sont au-dessus de la mêlée.

M. Massé (Guy): D'accord.

M. Gendron: Alors, avez-vous une opinion là-dessus? C'est majeur, pas majeur?

M. Massé (Guy): Je pense qu'il y a une chose que je peux vous dire. Je ne peux pas vous donner d'évaluation maintenant, mais je peux vous dire que le marché s'en va là par exemple. Le marché s'en va dans cette direction-là.

M. Gendron: De ça, là? C'est de ça que je parle, moi, là.

M. Massé (Guy): Le marché s'en va dans le produit...

M. Gendron: Je ne parle pas des meubles et des hypothèques, là.

(12 h 50)

M. Massé (Guy): Non. Le produit de crédit à la consommation, ce que j'entends, que ce soit le crédit sur les hypothèques, que ce soit le crédit personnel sous toutes ses formes, le crédit commercial, de plus en plus, vous allez le retrouver dans les institutions et dans les cabinets multidisciplinaires. Tranquillement, ça s'en va là. C'est l'avenir.

M. Gendron: Je ne crois pas ça, mais ce n'est pas grave.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Mme la députée de Saint-François.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président. Mme Tremblay, lors de votre présentation, vous avez fait allusion à l'assurance de voyage. Et à la recommandation 45 du mémoire, on écrit: «...il ne faudrait pas attendre d'autres épouvantables histoires avant d'exiger des agents de voyage qu'ils soient titulaires de certificats restreints pour offrir les produits d'assurance.» Alors, vous croyez donc qu'il y a un danger là, de l'assurance-voyage, et qu'on devrait imposer maintenant un certificat restreint. Est-ce qu'il y a d'autres produits qui devraient immédiatement requérir aussi et être distribués par des détenteurs de certificats restreints?

Mme Tremblay (Jocelyne): À part l'assurance-voyage, vous voulez parler?

Mme Gagnon-Tremblay: Oui, oui.

Mme Tremblay (Jocelyne): Vous avez aussi maintenant dans les garages où on vend de l'assurance-invalidité sur le produit, on vend de l'assurance-vie sur le produit, et tout. Vous avez de l'assurance-crédit aussi qui est rattachée aux emprunts. Vous avez toutes ces choses. Alors, nous, ce que nous voulons, c'est que toute personne qui aura à donner un conseil sur un produit d'assurance de personnes soit responsabilisée et ait les mêmes règles que les autres...

Une voix: Sur le Bureau.

Mme Tremblay (Jocelyne): Sur le Bureau. Ce qui se produit, c'est qu'à l'assurance-voyage – et ce que je vous ai dit, madame, tout à l'heure, c'est la vérité – vous avez des gens qui partent en voyage avec trois assurances-voyage. Alors, à un moment donné, c'est toujours la personne, le consommateur, mon client à moi qui paie pour ça. Et si, mettons, l'assurance-voyage a à poser des question – est-ce que vous détenez une assurance collective, par exemple – moi, je me dis qu'il y a un travail à faire de ce côté-là, si on parle toujours dans le sens de la protection du consommateur.

Mme Gagnon-Tremblay: Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, mesdames, messieurs. Merci à nos invités pour avoir présenté ce mémoire.

M. Landry (Verchères): M. le Président, je m'excuse.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Oui, M. le ministre. Oh! C'est vrai, vous m'aviez demandé la parole; excusez, j'avais oublié.

M. Landry (Verchères): Je ne voudrais abuser du temps de personne, mais, puisqu'on a M. Massé et ses collaboratrices, j'aurais encore deux petites questions, si vous voulez bien nous aider encore un tout petit peu. C'est cette question du statut d'autonome. Vous savez que dans nos premières réflexions il n'y avait pas d'autonomes; il fallait travailler en cabinet, pour les raisons que vous avez exprimées. Notre dialogue avec nos amis du monde de l'assurance nous a amenés à faire une concession et revenir au statut d'autonome qui, moi, personnellement, me semblait une bonne chose.

Celui, disons, ou celle qui a travaillé dans un cabinet pendant 10 ans, 15 ans, dit: Je connais ce métier de A à Z, je veux être autonome, je veux travailler seul, je change de lieu physique ou non et je travaille à mon compte. Je pense que c'est une belle chose et une bonne chose que de pouvoir faire cela au nom de la liberté d'entreprise, de la PME, de tout ce que vous voulez. L'objection que vous faites à ça, c'est la formation. Bien, dans le cas que je donne, c'est une personne parfaitement formée. Mais, dans les autres cas, est-ce que le Bureau ne pourrait pas tout simplement mettre les conditions qu'il faut pour être autonome et bien travailler pour le public?

M. Massé (Guy): Oui. Nous avons proposé d'ailleurs, si vous conservez le principe d'autonome, d'exiger au moins cinq années d'expérience, parce qu'on ne peut pas laisser... Quand on dit, je pense que c'est important de retenir ce fait-là, un représentant sur deux est en formation, il y a un roulement dans l'industrie; vous n'êtes pas sans savoir qu'il y a un gros roulement. Alors, un représentant sur deux est en formation; il faut donc tenir compte de cette réalité-là, il faut donc s'assurer à ce qu'on protège le consommateur pour ceux qui sont dans cette période. J'ajouterais aussi une chose. Pendant la période de formation, il faut qu'il y ait des gens qui se rendent responsables davantage. C'est ça ici qu'on dit.

M. Landry (Verchères): Une dernière petite chose. Mais un nom, c'est important – il y a des mots qu'on aime ou qu'on n'aime pas; moi, je n'aime pas le mot provincial, par exemple...

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Landry (Verchères): Non, mais chacun a ses mots préférés. Comment est-ce qu'on va appeler maintenant nos gens d'assurances? Représentant en assurance, moi, je trouve que c'est très bien, c'est très français, c'est ce qui est dans toute la littérature, mais ça peut ne pas... L'Académie française des fois prend des positions diamétralement opposées au français québécois. En matière de féminisation des titres, en particulier, je pense que c'est le Québec qui a raison. Alors, comment est-ce qu'on va les appeler? Courtiers, agents, représentants en assurance? Quel sera le féminin? Comment est-ce qu'on fait ça?

Mme Tremblay (Jocelyne): Moi, M. le ministre, personnellement, si on m'appelle un représentant et que je garde mon statut, parce que ça fait 24 ans que je suis dans ça, d'agent autonome, mon statut de professionnel que j'ai gagné à la sueur de mon front, ça ne me dérange pas. Ce qui est important, et là je parle en tant qu'intermédiaire, 24 ans d'expérience, c'est qu'on ait un statut de professionnel, et je pense que nous l'avons acquis.

Parce que, regardez, présentement au Québec si les familles, si les industries sont aussi bien protégées, au départ ou au décès, à l'invalidité ou à la retraite, c'est parce que chaque jour il y a des agents, des courtiers, des intermédiaires en assurance de personnes qui vont rencontrer ces gens-là, qui font des analyses de besoins et qui répondent aux analyses de besoins de chaque personne qu'ils rencontrent. Ça, c'est un professionnel, M. Landry, qui fait ça.

Alors, moi, que vous m'appeliez représentant, que vous m'appeliez agent, n'importe comment, pourvu que je garde mon statut de professionnel – que j'ai acquis à la sueur de mon front, je vous le répète. Je ne sais pas si vous m'avez compris, mais, moi, la carrière me tient à coeur énormément, les années en arrière, je n'en ai pas autant à faire en avant. Mais je veux laisser au moins un héritage qui fait que l'intermédiaire en assurance de personnes est un professionnel.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. Massé, merci mesdames, de nous avoir présenté votre mémoire. Si les membres me permettent, juste une minute, avant de terminer, j'aimerais expliquer... Parce qu'on m'a informé que les propos que j'ai tenus ce matin, ou la mise au point que j'ai faite ce matin, était le résultat d'une démarche que Desjardins avait faite, que j'aurais croupi sur la pierre que nous avons reçue ce matin et que ça avait eu l'effet escompté par Desjardins.

Ceux qui me connaissent savent très bien que le député d'Arthabaska ne croupit pas si facilement que ça. Et tous les membres de la commission ce matin ont reçu une pierre que je n'ai pas ouverte parce que j'étais choqué, je vais vous dire. Puis, quand on m'a dit ce qu'il y avait d'écrit dans la pierre, j'étais encore plus choqué. Et c'est une pression, je pense, indue sur les parlementaires, de la part de Desjardins, c'est peut-être leur droit de le faire... Mais les propos que j'ai tenus ce matin, j'ai simplement voulu réaffirmer que les membres de la commission n'ont jamais été, et puis ce n'est pas une grande déclaration que j'ai faite ce matin, contre la banque-assurance, et puis c'était dans la recommandation. Ça fait que je veux clarifier parce que je n'aime pas interpréter les gens et puis je n'aime pas qu'on m'interprète non plus. Ce n'était pas ce matin, encore une fois, l'effet de la pierre que nous avons reçue ce matin à nos bureaux juste avant de venir à la commission, et puis paraît-il qu'on voulait nous la distribuer ici sur nos bureaux. Donc cette mise au point faite, et j'espère que c'est dans toute la plus grande clarté possible, je vais suspendre les travaux. Cet après-midi, je vous donne rendez-vous à la salle Louis-Joseph Papineau, à 14 h 00.

Une voix: Alors, on change de salle?

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Oui.

(Suspension de la séance à 12 h 58)

(Reprise à 14 h 17)

La Présidente (Mme Léger): Si vous voulez, on va commencer.


Documents déposés

Juste avant de laisser la parole à l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes, nous avons un dépôt à laisser ici, du Service d'aide au consommateur qui dépose un document pour le bien de tout le monde. On va le distribuer.

Alors, la parole est à l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes. Vous avez une vingtaine de minutes à disposer. On vous écoute.


Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes (ACCAP)

M. Millette (Yves): Mme la Présidente, je suis Yves Millette, vice-président de l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes pour les affaires québécoises. Je suis accompagné aujourd'hui, à ma gauche, de M. Normand Pépin, vice-président exécutif à L'Industrielle-Alliance, compagnie d'assurance sur la vie; à ma droite, de M. Robert Lebeau, vice-président adjoint et vice-directeur juridique de Sun Life; et, à l'extrémité, de M. Denis Lussier, premier vice-président aux ventes de la Standard Life à Montréal.

D'entrée de jeu, le projet de loi n° 188 sur les intermédiaires est une réforme qui finalement est beaucoup plus étendue que celle à laquelle on pouvait s'attendre. C'est une réforme qui touche fondamentalement tous nos aspects de la distribution des produits et services financiers. Quand je dis «nos», c'est les compagnies d'assurances de personnes qui ont été habituées traditionnellement à avoir un certain système de vente. Donc, le projet de loi n° 188 change considérablement les règles du jeu.

On va parler beaucoup de banque-assurance, aujourd'hui. Mais, nous – et on l'a indiqué dans notre mémoire – comme on représente des assureurs qui sont un peu partout au Canada, on a décidé de consulter nos membres de façon large pour connaître leur point de vue sur différents autres aspects du projet de loi qui sont très importants pour eux, par exemple la notion de cabinet versus la notion d'autonome, toute la question de l'assurance-responsabilité et plusieurs autres sujets qu'on peut considérer comme très techniques et sur lesquels on va vouloir, pas nécessairement pour fins d'audition en commission parlementaire, mais vous présenter notre compréhension de certains articles et de certains problèmes d'interprétation qu'on peut y trouver par rapport à nos pratiques.

La distribution des produits d'assurance. On sait que le Canada est un pays où il y a une forte concentration dans les institutions de dépôts. C'est un des pays au monde où la concentration est la plus forte. Le Québec n'échappe pas à ça. Dans notre mémoire, vous avez vu que la principale institution financière au Québec couvre un pourcentage élevé de produits financiers, et vous avez comme deuxième institution financière une banque qui est à charte fédérale et qui a aussi beaucoup d'affaires.

(14 h 20)

Dans une législation comme le projet de loi n° 188, si des avantages sont conférés ou si une législation est en avance sur une autre et permet des choses à l'une, on pense que ça va avoir un effet multiplicateur ou un effet accélérateur, puisque le troisième, le quatrième et le cinquième joueurs sur le marché sont aussi des banques et que les assureurs de personnes, les assureurs de dommages, les fiducies et certains autres ne représentent en général que 10 % à 20 % des affaires de dépôts ou de prêts et des proportions un peu plus élevées de fonds mutuels, de REER et évidemment d'assurance de dommages et d'assurance de personnes.

L'industrie des assurances de personnes est à différencier de l'industrie des assurances de dommages parce que c'est très séparé comme institutions financières. Ce n'est pas du tout le même genre de produits qui sont vendus, ce n'est pas du tout la même façon de procéder, d'établir les réserves, de faire les placements, etc., c'est à beaucoup plus long terme en assurance de personnes. Les compagnies d'assurances de personnes sont très majoritairement locales, si vous voulez, canadiennes ou québécoises. Je dirais que, traditionnellement, elles ont été locales à plus de 80 % et, depuis quelques années, on voit que ce n'est plus seulement 80 %, mais que c'est maintenant 90 %, 92 %, 94 %. En fait, il ne reste que très peu de compagnies étrangères qui vendent des produits d'assurance-vie au Canada, et une de celles-là, c'est la Standard Life qui a son siège social canadien au Québec et qui crée plus d'un millier d'emplois. Les autres, à 40 % du volume des primes, ce sont des compagnies à charte québécoise, ce sont des compagnies implantées ici, au Québec.

On a L'Industrielle-Alliance avec nous et on a aussi des compagnies qui vont faire une présentation tantôt avec le Regroupement des assureurs à charte du Québec. Ces compagnies-là représentent 20 % du marché, ce qui est à peu près l'équivalent du 20 % que représente le Mouvement Desjardins en assurance de personnes. Le reste est distribué par l'ensemble des compagnies. On a, au Québec, quelque chose comme 1 500 points de vente qui sont soit des agences appartenant aux assureurs de personnes, soit des cabinets de courtiers en assurance de personnes qui sont indépendants, qui vendent pour leur compte, et la répartition de ces cabinets-là est à peu près égale à la répartition de la population, c'est-à-dire, par exemple, qu'il y a, de mémoire, 42 %, 43 % de la population qui se retrouve en région et qu'on a 42 %, 43 % de nos forces de vente qui sont en région. Donc, l'industrie de l'assurance-vie est un compétiteur qui est répandu partout au Québec et c'est un compétiteur qui est essentiellement canadien ou québécois.

Ceci étant dit, il est très important pour nos compagnies qu'il y ait égalité des chances dans le marché qui s'établit, dans le décloisonnement qui s'installe, et pour nous le décloisonnement... Une étude qui avait été préparée par la firme d'étude de crédit – «credit agency» – Duff and Phelps, au mois de juin dernier, juin 1997, disait que, dans les pays où la banque-assurance s'installe avec égalité des chances, c'est-à-dire où on adopte, pour la distribution d'assurance dans les banques, le modèle de distribution par des intermédiaires dûment licenciés, etc., la banque-assurance progresse lentement. Mais, dans les pays où on laisse aux institutions de dépôts la jouissance, où on n'encadre que très peu les principaux pouvoirs de l'institution de dépôts, qui sont les banques de données, qui sont l'utilisation du personnel en succursale et les ventes liées, on constate que, dans ces pays-là, il y a une augmentation très rapide de la concentration dans la banque-assurance.

Je vais passer chacun de ces trois points-là avec vous pour voir les problèmes que ça peut poser. Quand on parle des banques de données, évidemment nous croyons que le projet de loi n° 188 s'adresse convenablement à la question de la confidentialité. Je pense que le problème n'est pas nécessairement dans le projet de loi n° 188. On peut parler de certaines dispositions ou de certains mots, mais le problème est plutôt derrière, dans les institutions de dépôts et dans le précédent qui va être posé, parce que la loi sur la protection des renseignements privés est une loi qui a été faite pour protéger les consommateurs ou protéger le commerce – dans le fond, ça comprend même notre industrie, ça comprend l'ensemble des industries – qui a été faite pour protéger ou pour mettre un ensemble d'informations et que c'est basé sur la notion de l'objet du dossier. L'objet du dossier peut être plus ou moins étendu, et on sait que les institutions financières, pour des raisons de réingénierie et de rentabilité, vont essayer – et, quand je parle d'institutions financières, je parle des assureurs aussi – d'avoir un objet aussi large que possible pour pouvoir offrir des produits à leurs clients qui soient plus ciblés en fonction de leurs besoins. À ce moment-là, le problème peut venir du fait qu'on va coupler des banques de données, qu'on va réunir par la banque-assurance ces banques de données là sans nécessairement ajouter aux législations au-delà de 188.

Si on voit les ajouts qui sont faits au projet de loi n° 188, c'est un peu comme si on disait aux individus, aux gens qui sont dans la succursale ou dans la caisse: Vous ne pouvez pas vous crier d'un bord à l'autre d'un comptoir: Aïe, Jeannette, fais-lui pas un prêt, à ce monsieur-là, il est malade. Mais, si Jeannette peut lire le message sur son écran cathodique et que le message a été filtré par en arrière, le résultat est le même. Mais je pense qu'il faut en tenir compte parce que, même si ça se passe dans le «back office», comme on dit souvent, et que ces choses-là sont faites d'abord et avant tout pour améliorer l'efficacité de l'institution financière ou de la compagnie d'assurances, l'objectif est aussi que le consommateur doit être protégé, et ça, cette question-là n'est pas véritablement adressée.

Il y a des problèmes qui peuvent être très sérieux pour les compagnies d'assurances de personnes, entre autres, parce qu'on sait que, de façon traditionnelle, les assureurs n'ont pas accès au système de compensation et que ce sont les banques qui font la compensation de nos paiements, que ce soient des chèques ou des paiements de prime. Donc, les banques connaissent tous nos clients, ils sont dans leurs banques de données et, si on peut cibler ces banques de données là, très rapidement un banquier qui va vouloir vendre de l'assurance va pouvoir connaître notre liste de clients, et ça, ça ne sera pas dans le public, ça ne sera pas contre la loi sur l'accès à l'information si le client a donné son autorisation pour que ces renseignements soient là. Mais on peut s'apercevoir que ça peut faire des changements de clientèle, des déplacements de clientèle, des remplacements, comme on parle souvent en assurance de personnes, assez important de portefeuilles si un des joueurs qui n'était pas là avant, mais qui est là aujourd'hui dispose d'informations que les autres ne possèdent pas. Donc, c'est quelque chose qui est important.

Je veux juste citer les remarques préliminaires du ministre des Relations avec les citoyens, M. Boisclair, qui disait en commission parlementaire, le 7 octobre dernier, qu'à titre de ministre responsable des Relations avec les citoyens et de l'Immigration il considère cette question-là comme primordiale. Ainsi, le développement de certains systèmes d'information, incluant les renseignements sur les individus, a souvent un impact social, politique et économique en plus d'affecter les droits et libertés du citoyen, dont sa vie privée. Ne devrait-il pas y exister un mécanisme d'évaluation de ces impacts-là au préalable?

On pense que l'introduction de la banque-assurance va avoir pour effet d'amener ensemble des informations sur à peu près tous les aspects de la vie du citoyen. Il est évident que les institutions financières, quelles qu'elles soient, sont respectueuses du droit à la vie privée et ne cumuleront pas inutilement des données, mais, comme on dit souvent, le meilleur peut toujours cacher le pire. Comme on n'a pas de culture de la protection des renseignements, c'est des choses qui sont nouvelles, et on travaille beaucoup, aujourd'hui, ça se développe beaucoup avec les réingénieries, et tout ça. Il est facile de perdre de vue ces questions-là.

On pense que cette commission-là doit s'attacher très particulièrement à cette question-là. C'est très important, un, pour des questions de compétition pour notre industrie parce que, dans le fond, nos listes de clients vont être dans les banques, mais c'est aussi très important pour les consommateurs.

(14 h 30)

Le deuxième sujet, c'est l'interdiction du double emploi, c'est-à-dire d'utiliser l'avantage des employés. Cette question-là nous préoccupe beaucoup. Quand on regarde le projet de loi, qu'on le lit, qu'on fait l'interprétation de différents articles, comme l'article 60 qui dit que différentes institutions «peuvent» se constituer en cabinet plutôt que «doivent», l'article 110 qui dit qu'une institution de dépôts ne peut pas placer des assurances avec un autonome ou un cabinet d'autonomes, on peut laisser sous-entendre que c'est possible de le faire avec un cabinet ou par le biais d'un cabinet qui ne vous appartiendrait pas.

Si on va à la distribution sans représentant, on peut avoir des problèmes à interpréter différents articles – je vais juste les nommer et je ne veux pas nécessairement que vous les reteniez – 353, 366 à 368, où on a l'impression que ça peut être la distribution accessoire d'un produit rattaché à un bien auquel on adhère. Mais, quand on arrive à 369, on laisse tomber tout ça puis on parle d'un produit d'assurance. Quand on arrive au chapitre des certificats restreints, on va parler, à 380, d'un certificat restreint rattaché à un bien, alors qu'à 382 on va parler, par la négative, mais d'un produit d'assurance sans parler qu'il est rattaché à un bien.

Et là on commence à se demander: Mais qu'est-ce que ça veut dire? Est-ce qu'on veut permettre aux institutions de dépôts de continuer à vendre des produits... Je vais en prendre un comme ça au hasard parce qu'il est vendu, et qu'il existe, et qu'on pourrait penser qu'il ne sera plus permis à l'avenir, qui s'appelle Sécurivie chez Desjardins. C'est un produit qui s'adresse aux personnes âgées, qui est vendu sur base collective. En fait, des produits comme ça, ça peut se vendre sur base collective. C'est une tendance, c'est une façon d'approcher les consommateurs pour que ce soit moins onéreux au niveau de la distribution. Quand on regarde ça, ça me fait toujours penser quand je vais chez mon banquier et que j'entre dans ma succursale. Vous avez un préposé puis, à gauche, vous avez tout le comptoir, les guichets où on fait des dépôts, etc., puis, à droite, vous avez des services financiers qui sont des CPG, des certificats de placement garanti, qui sont des bons du Trésor – il y en a où vous avez besoin d'un permis – des fonds mutuels, puis, sur le mur, vous voyez une annonce. Souvent, c'est marqué: Votre conseiller en valeurs mobilières, M. Untel, sera présent dans la succursale de telle heure à telle heure, telle date; si vous voulez prendre rendez-vous, veuillez vous adresser au préposé, prendre rendez-vous avec le préposé. Et, quand on regarde le projet de loi n° 188, on se dit: Bon, bien, dans le fond, ce qu'on veut permettre, c'est d'ajouter une autre rangée de produits qui vont être des produits d'assurance.

Disons que, comme on s'intéresse beaucoup au double emploi, on se demande, nous, comment on va pouvoir vendre le produit ou compétitionner, parce qu'il y a peu d'assureurs qui vont être uniquement dans la succursale bancaire. La plupart des assureurs vont continuer à avoir leur réseau traditionnel ou vont essayer de développer d'autres réseaux, et notre façon, je pense bien... Les gens avec moi pourront en débattre, mais il y a beaucoup de recherches qui se font et on met beaucoup d'espoir dans la distribution de produits de convenance qui vont être faits sur une base plus ou moins collective auprès de groupes qu'on va pouvoir joindre, comme des groupes de l'âge d'or, par exemple, ou comme des associations professionnelles, ou des choses comme ça. Ça va être notre façon, les assureurs qui ne peuvent pas distribuer dans les banques, d'aller rejoindre des groupes.

Lorsqu'on regarde le projet de loi, on s'aperçoit que l'article 353 exclut les assureurs parce qu'on dit que ça doit être fait de façon accessoire. Les assureurs font ça à temps plein, à ce que je sache, donc déjà ils ne peuvent pas entrer dans ce chapitre-là. Mais, quand on regarde du côté des ventes avec représentants, bien, là on se retrouve avec l'obligation, même en assurance collective, sauf lorsqu'il s'agit d'assurances collectives avec employés, de faire des ventes avec des représentants pleinement certifiés. Donc, il y a sûrement une question de coûts, il y a sûrement une flexibilité à vendre un produit dans une institution de dépôts sans qu'on ait besoin vraiment de qualifications autres qu'un certain entraînement et un guide de distribution qui, en passant, n'est pas préparé par l'institution de dépôts, mais qui est préparé par l'assureur.

L'assureur qui va vouloir vendre le même produit exactement, bâti de la même façon, s'il veut le vendre en dehors d'une succursale à sa clientèle habituelle, il ne pourra pas le faire, il va devoir adopter des mesures différentes, et pour nous c'est très important si on veut continuer à compétitionner, à ne pas perdre le marché qu'on a déjà.

Le temps me presse un peu, je vais passer tout de suite au dernier point, les ventes liées. Ça, je pense qu'il en a été beaucoup question. Je n'étais pas là, mais on me dit qu'il en a été beaucoup question, ce matin. Certains loustics peuvent dire que, si on défend les pressions indues, c'est qu'on veut permettre les pressions. C'est un peu le problème avec toute la notion des ventes liées. Quand on pense à vente liée, on pense à fraude, on pense à quelque chose d'énorme, on pense à un prêt automobile lié à une assurance automobile qui va coûter 600 $, 700 $, 800 $ par année, on pense à des pressions qui vont être tellement fortes pour induire un consommateur à contracter qu'on va pouvoir prendre des poursuites pénales.

Dans une poursuite pénale, on va interpréter la vente liée de façon restrictive, pour ne pas dire de façon criminelle, mais à ce moment-là on a oublié peut-être les ventes sous pression liées les plus simples. Comme par exemple, si, pour souscrire une assurance dans une institution de dépôts, on oblige ou on vous dit que vous devez d'abord ouvrir un compte d'épargne avec opérations, c'est une petite chose; si après on vous dit que ça va vous coûter bien moins cher de frais si vous maintenez plus que 500 $ par mois dans votre compte, bien, c'est encore une petite chose. Mais, au bout du compte, ça va avoir coûté combien au consommateur? Et c'en est, des ventes liées, au fond, puis je ne pense qu'il y ait un consommateur qui va porter plainte qu'il y a des poursuites pour infraction pénale sur le sujet. Je ne pense pas qu'un consommateur va résilier son contrat, même si les règles pour résilier un contrat sont très souples. Je pense plutôt que le consommateur va laisser porter, et c'est un des problèmes qu'on pourrait éviter en cernant un peu mieux le chapitre sur les ventes liées.

Je vous disais, au début, qu'on voulait présenter un mémoire supplémentaire d'ici quelques semaines. Les sujets qui nous préoccupent le plus particulièrement et qu'on va vouloir redévelopper, c'est toute la structure entre le cabinet et l'autonome parce que, dans une première version du projet de loi, on s'en allait avec toute la structure de cabinet, c'était clair. Mais, quand on a introduit la notion d'autonome, on a perdu un peu la clarté qu'on avait au niveau des cabinets et on aimerait bien la retrouver. Pour nous, c'est toute la question de la responsabilité des assureurs, le «duty of care», comme on dit communément, qui peut être différente dans un cas ou dans l'autre, et on aimerait bien savoir où on se situe. Nos gens regardent ça, c'est très pointu. Ça peut ne pas être évident à première vue, mais il y a beaucoup de problèmes.

Avec l'assurance-responsabilité, lorsqu'on dit dans la loi que l'assurance-responsabilité devra être une prime nivelée ou qu'on pourra niveler la prime, pour nous autres, une assurance-responsabilité, ça peut être un très bon moyen de contrôle. Et, si on le nivelle, bien, on vient de favoriser peut-être les moins bons éléments ou les éléments moins prudents de notre profession. On a des questions aussi à poser sur toute la question des fichiers des polices individuelles, qui sont très complexes pour ce que ça rapporte. Il y a probablement des façons beaucoup plus simples de gérer cette question-là.

Il y a toute la question des pouvoirs législatifs du Bureau. Le Bureau a beaucoup de pouvoirs législatifs, et c'est très difficile de les départir. Quand on regarde tous les pouvoirs du Bureau, l'intervention que la Commission des valeurs mobilières peut faire, spécialement avec l'article 200 qui vient dire que la Commission des valeurs mobilières peut toujours intervenir si elle pense que le marché des valeurs mobilières est en jeu... Il y a l'intervention des chambres aussi qui sont venues se rajouter par après, et on a un peu de difficultés à voir ce que c'est. Il y en a peut-être d'autres que...

J'ai pris mes 20 minutes, et ça va me faire plaisir de répondre à vos questions, M. le Président, ainsi qu'aux membres de la commission.

M. Gendron: M. le Président.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci. Oui, M. le député d'Abitibi-Ouest. J'avais...

M. Gendron: C'est parce que vous aviez l'air de dormir.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Baril, Arthabaska): J'avais compris, j'avais entendu, puis c'était fini aussi. Je n'entendais plus de son, ça fait que je m'imaginais que c'était fini.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. Millette. Je vais laisser la chance au ministre de faire ses commentaires et également de poser des questions.

M. Landry (Verchères): Oui. D'abord, je ne répéterai pas notre argumentation sur la caisse-assurance, je crois que vous ne partagez pas les vues qui sont unanimement partagées – par la majorité gouvernementale de cette commission, en tout cas. Je respecte votre opinion, mais la suite de vos propos dénote chez vous une certaine fatalité parce que vous nous mettez ensuite en situation de limiter les pouvoirs de la caisse qui vendrait de l'assurance et d'assurer un meilleur contrôle. Alors, je vous vois un peu résigné. Mais, par ailleurs, c'est vraiment ce qu'on a l'intention de faire, hein?

(14 h 40)

À l'article 60 en particulier, vous nous proposez, dans votre mémoire, que le Mouvement Desjardins et les banques doivent avoir l'obligation de s'inscrire comme cabinets et être assujettis aux contraintes des articles concernant le double emploi, etc. Bien sûr, bien sûr. Il est clair que les caisses devront s'inscrire comme cabinets pour vendre de l'assurance et, ce faisant, vont retomber dans tous les autres articles, 66, 72, 76, 77, 80, 83, 85. Alors, vous êtes un peu résigné, et j'espère que vous voilà un peu consolé ou rassuré, du moins.

Je vais poser mes questions en cascade, puis vous reviendrez après, s'il vous plaît. Dans votre mémoire, vous nous dites que le distributeur – et ça, ça nous a intrigués – et non l'assureur doit avoir la responsabilité des fameux guides de distribution que la loi va imposer pour certains produits. Est-ce que ce n'est pas le fabricant, l'assureur qui est le mieux placé pour préparer le guide de distribution de son produit? Faisons une mauvaise comparaison avec l'automobile ou n'importe quel outil sophistiqué. Le manuel d'instructions, c'est le fabricant, il me semble. Ça nous a peu étonnés, ça, votre...

M. Millette (Yves): Oui...

M. Landry (Verchères): Vous les prenez en note, s'il vous plaît, puis... Vous avez parlé et dans votre mémoire et dans votre intervention des articles 189 et suivants qui donnent des pouvoirs exorbitants à la Commission des valeurs mobilières. Beaucoup de commentaires ont été faits sur les pouvoirs de réglementation et d'intervention de la Commission et du Bureau. Croyez-vous que le gouvernement devrait se réserver certains de ces pouvoirs de réglementation, que le gouvernement devrait se réserver certains pouvoirs?

Vous nous dites de ne pas séparer le contrôle et la surveillance entre le Bureau, la Commission et les deux chambres. Pourriez-vous préciser ce que vous entendez par «ne pas séparer le contrôle et la surveillance entre le Bureau, la Commission et les deux chambres»?

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. Millette.

M. Millette (Yves): Je prends note de votre commentaire sur l'article 60. Je suis très intéressé mais demeure toujours inquiet quand je regarde certains articles comme l'article 400, les articles de dispositions transitoires, 436 à 440, et quand je regarde certaines dispositions du projet de loi n° 167 amendant la Loi sur les caisses d'épargne et de crédit, projet de loi qui n'est pas encore adopté, mais qui est déjà amendé par les articles 436 à 440. Mais je prends bonne note que vous allez corriger ces questions-là et que vous allez vous assurer que le Mouvement Desjardins et les banques vont devoir s'inscrire comme cabinets.

Pour ce qui est de la question des distributeurs, je vais essayer d'y répondre. Ce n'est pas ma question préférée, là, mais le problème en est un de coûts parce que se rattache au guide de distribution, jusqu'à un certain point, la formation des représentants, des gens qui vont travailler pour le distributeur. C'est – je ne me souviens pas – le 372? Le 355 et les suivants, mais particulièrement un article où les produits sont un peu plus compliqués. Encore là, c'est un peu l'inverse de ce qu'on semble voir du côté des cabinets, où on met une plus grande responsabilité sur le cabinet. Et là on se ramasse avec des gens qui font ça de façon accessoire, si on parle des concessionnaires d'automobiles où on parle de gens qui ont de forts moyens financiers, si on parle des ventes. On semble vouloir renverser le fardeau de la responsabilité sur l'assureur, puis ça, on le comprend mal. Alors, c'est notre problème à ce niveau-là.

Même si on conçoit que c'est celui qui fait le produit qui doit en faire le guide, je suis bien d'accord avec ça; mais, lorsqu'on étend ça un peu plus loin, à la formation des représentants, puis tout ça, on pense que c'est d'aller trop loin. Il y a quand même des coûts importants d'attachés à ça.

Quand on parle de la question de rattacher les pouvoirs au gouvernement, le projet de loi n° 188 est un virage à 180 degrés par rapport à la loi des intermédiaires actuelle où à peu près tous les pouvoirs de réglementation appartenaient au gouvernement. Puis là il y en a très peu qui appartiennent au gouvernement, on les laisse tous au Bureau, et on les laisse au Bureau dans une loi qui n'enferme pas beaucoup ces pouvoirs de réglementation là. Le pouvoir est énoncé, mais il n'est pas encadré, et ça nous préoccupe effectivement beaucoup parce qu'on ne sait pas trop où ça va aller.

Plus particulièrement, on ne sait pas trop qui va siéger au cabinet. On n'a pas beaucoup d'indication dans la loi, et, oui, c'est des choses qui nous inquiètent. On préférerait qu'il y ait une bonne part de la réglementation qui soit au niveau du gouvernement et surtout pas au niveau de la Commission des valeurs mobilières.

On pense que, si le Bureau des services financiers doit agir comme bureau de sous-réglementation pour la Commission des valeurs mobilières, la Commission des valeurs mobilières devrait faire sa réglementation et le Bureau devrait l'harmoniser avec sa législation. S'il y a un problème, c'est le gouvernement qui devrait décider et non pas la Commission, par l'article 200, qui pourrait intervenir parce qu'elle prétend que le marché des valeurs mobilières peut être touché, parce que, là, on va se ramasser avec un système qui est très différent parce que le système de distribution des produits financiers qui ne sont pas des valeurs mobilières est abordé de façon très différente de ce qu'on voit dans les valeurs mobilières. Et peut-être que ça va venir avec le temps. On est fatalistes, comme vous dites, M. le ministre, mais on espère que ça va venir demain, et ça, on veut le voir venir, on veut être capables de s'adapter, parce que c'est des changements qui sont très importants pour la façon de procéder de notre industrie.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Ça va bien?

M. Landry (Verchères): Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Viger.

M. Maciocia: Oui. Merci, M. le Président. Merci, M. Millette, pour le mémoire que vous avez présenté devant nous aujourd'hui. J'ai très bien compris que vous avez une crainte, si je puis dire, d'une certaine manière, assez poussée sur la question de la venue des caisses et des banques dans le domaine de l'assurance des personnes, de l'assurance en général; ça, on l'a compris en faisant un peu le résumé de votre mémoire.

Mes questions vont se limiter à deux ou trois sujets. Premièrement, j'aimerais savoir de vous combien d'employés les compagnies d'assurances de personnes à charte ont ici, au Québec, actuellement.

M. Millette (Yves): Les compagnies d'assurances de personnes à charte du Québec ont plus de 20 000 employés au Québec, dont 5 000 employés environ qui travaillent dans des sièges sociaux, donc des emplois de sièges sociaux.

M. Maciocia: Dois-je comprendre qu'il y a aussi les agents qui sont compris là-dedans?

M. Millette (Yves): Ça comprend les agents.

M. Maciocia: Les 20 000 personnes.

M. Millette (Yves): Oui.

M. Maciocia: Est-ce que vous avez fait une évaluation, si je puis dire, même approximative avec la venue des caisses et des banques dans le domaine de l'assurance? Est-ce que vous prévoyez qu'il puisse y avoir des personnes qui vont perdre leur emploi?

M. Millette (Yves): Bien, écoutez, quand on parle surtout en région, là – parce que les assureurs autant de dommages que de personnes sont très présents en région et sont surtout concentrés dans le domaine de l'assurance – je vous disais tantôt que, globalement, tous les assureurs ne dépassent pas généralement 10 % à 20 % du volume des opérations de dépôts et de prêts, puis on va les retrouver très majoritairement dans des opérations de prêts hypothécaires, ou de prêts commerciaux, ou d'investissements dans des débentures de municipalité lorsqu'on est en région. Donc, on n'est pas une concurrence pour les caisses qui sont en région. Par contre, si les caisses commencent à vendre de l'assurance, elles vont devenir une concurrence directe à nos gens. Combien vont perdre leur emploi? C'est difficile à dire, mais il y a sûrement une rationalisation qui va se faire. Si elle ne se fait pas à l'intérieur du Mouvement Desjardins, elle va se faire de notre côté.

(14 h 50)

M. Maciocia: O.K. À la page 14 de votre mémoire, vous évoquez les risques de ventes liées dans les institutions de dépôts. À la page 14, vous nous dites très clairement qu'il y a des dangers, qu'il y a des risques sur les ventes liées dans les institutions de dépôts. Si je peux vous poser la question, quelle recommandation feriez-vous au gouvernement pour essayer non pas d'éliminer, mais disons... oui, d'éliminer ces risques-là? Est-ce que vous avez des suggestions à faire?

M. Millette (Yves): Je ne suis pas un spécialiste, mais je vous parlais tantôt des petites ventes liées à répétition et je pense que c'est là qu'il faut agir parce que c'est là que, en bout de piste – je ne veux pas parler des frais bancaires, là – il y a de l'argent à faire. Ce n'est pas dans des ventes liées à 800 $ ou 900 $ pour une assurance automobile. Et ça, je pense que le projet de loi l'ignore passablement.

M. Maciocia: Oui, oui. Et, à la page 7, j'ai aussi entendu, mais j'aimerais quand même que vous élaboriez un peu plus sur la question des mégafichiers électroniques et des immenses banques de données qu'auront à ce moment-là les banques ou les caisses. Pourriez-vous élaborer un peu sur le danger de...

M. Millette (Yves): Bon, je peux bien élaborer un petit peu. Toutes les institutions de dépôts ont un accès au système de paiement et, par cet accès-là et par leurs propres transactions, elles ont accès à une foule d'informations sur vos habitudes de consommation, ce que vous dépensez avec votre carte de crédit, entre autres, des choses comme ça, vos habitudes d'épargne, vos sources de revenus, vos biens, vos actifs mobiliers et immobiliers, etc. Donc, elles ont déjà beaucoup d'informations sur vous.

Un assureur, ça a aussi des informations sur ses clients. Par exemple, si on a un assureur automobile, il va connaître l'état de votre maison parce que vous l'avez décrite, il va connaître son âge, il va connaître votre automobile, la classe de risque de votre automobile, il va connaître une série de données comme ça sur votre vie et il va aussi avoir d'autres données sur le nombre d'accidents que vous avez eus, si vous êtes prudent. Il va connaître plusieurs de vos habitudes de vie, autant en assurance-vie qu'en assurance de dommages. Il va savoir que vous faites des sports dangereux, par exemple, il va savoir une foule de choses qui, sans aller jusque dans les renseignements médicaux, pourraient aussi éventuellement inclure certains renseignements médicaux, qui pourraient faire en sorte que, lorsque vous cumulez ces banques-là, que vous faites le couplage de ces banques-là, les institutions de dépôts vont avoir une masse d'informations qui vont permettre de cibler à peu près n'importe quoi.

Je me souviens, j'écoutais une émission à RDI à l'époque du Colloque international sur la protection des renseignements personnels, et il y avait des gens qui étaient là puis qui, sur une base théorique, en disant quels renseignements auxquels ils avaient accès, etc., vous dessinaient un portrait du consommateur qui était assez effarouchant. Si c'est ça qui existe, peut-être qu'il faut s'en préoccuper avant de le faire. Je ne dis pas de vous préoccuper de chaque banque en particulier, mais de vous préoccuper globalement de l'effet que ça peut avoir sur le marché.

J'ai parlé d'un effet particulier, tantôt. C'est que les banques vont connaître nos listes de clients, purement et simplement, et un des fléaux en assurance de personnes – je pense que vous en avez entendu parler par d'autres intervenants – c'est qu'on parle du remplacement de polices. Mais, si vous donnez toute votre banque de clients à un compétiteur, pourquoi il ne s'en servirait pas? Donc, pour nous c'est très important.

M. Maciocia: M. le Président, il y a combien de compagnies d'assurances de personnes à charte québécoise au Québec?

M. Millette (Yves): À charte québécoise, de mémoire, je pense que c'est 25 ou 28, quelque chose comme ça, dont certaines plus petites et d'autres beaucoup plus importantes. Mais, globalement, elles contrôlent 40 % du volume de primes en assurance de personnes au Québec.

M. Maciocia: Et vous en représentez combien dans l'Association?

M. Millette (Yves): Je ne les ai pas comptées. Je crois que c'est 18 parce qu'il y en a qui sont membres de deux associations. L'association qui va venir après nous, plusieurs de ses membres sont membres des deux associations.

M. Maciocia: Ma deuxième question, c'est: Étant donné que vous reprochez au gouvernement de ne pas prendre en considération le danger justement de la venue des banques dans le domaine de l'assurance, est-ce que vous prévoyez – tout à l'heure, j'ai posé la question sur le nombre d'emplois – des conséquences vis-à-vis des compagnies d'assurances de personnes, et particulièrement à charte québécoise, ici, au Québec?

M. Millette (Yves): Je vais répondre de façon globale. Avec tous les acquisitions de portefeuilles, départs de compagnies étrangères, fusions qui se passent, je pense qu'il y a du mouvement dans le marché en fonction de ça. Oui, ça va avoir un impact très important, ça va forcer la réorganisation ou le regroupement des entreprises.

M. Maciocia: Spécialement des plus petites, j'imagine.

M. Millette (Yves): Ce n'est pas nécessairement ce qu'on voit à l'heure actuelle, c'est plutôt des moyennes grosses qui se fusionnent. Quand on parle de London Life et de Great West, là, on ne parle pas des petites. C'est un mouvement qui n'a peut-être pas encore atteint les petites, mais éventuellement c'est sûr que ça va les atteindre parce qu'elles n'auront peut-être pas les ressources nécessaires pour faire face aux mégabanques qui se préparent en attendant.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Ça vous convient, M. le député de Viger?

M. Maciocia: Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Ça vous convient, oui? M. le député de Crémazie.

M. Campeau: Merci, monsieur. Bien, M. Millette, M. Pépin, M. Lussier, M. Lebeau, merci d'avoir pris le temps de venir nous faire part de ce que vous pensez de ce projet de loi n° 188.

Moi, une seule question rapide pour M. Millette ou quelqu'un d'entre vous: En présumant que cette loi n° 188 est adoptée rapidement, combien de temps ça va prendre au fédéral pour autoriser les banques à charte à faire la même chose à travers tout le Canada?

M. Millette (Yves): Je vous ai dit, au début de ma présentation, que vous auriez un effet accélérateur.

M. Campeau: Oui, mais ça veut dire quoi?

M. Millette (Yves): Mais, de toute façon, dans les plus grandes perspectives, on pense que la fusion des banques Royale et de Montréal pourrait faire en sorte que le gouvernement fédéral pense qu'il veut conserver de la concurrence au Canada puis qu'il mette comme condition aux fusions que les banques ne vendent pas d'assurance. À ce moment-là, on aimerait bien que le Québec n'ait pas encore rendu sa décision. Mais c'est des choses qui vont venir dans les prochains mois, ça ne viendra pas en l'an 2010 ou 2020.

M. Campeau: Avec la grande ouverture sur les marchés qui va arriver le 1er janvier 1999, est-ce que vous ne pensez pas que les banques au Canada vont devenir encore plus concurrentes? Parce que, en fait, on a presque, j'ose même dire, un oligopole entre les banques. Les banques de classe A sont vraiment privilégiées, au Canada. Elles ont eu des privilèges que la banque centrale leur a confiés, et ça leur a permis de grossir et de contrôler tout le marché. Ça a empêché aussi d'autres banques venues de l'étranger de se développer. On a comme mis un frein au développement des autres banques. Il y a d'autres banques qui étaient venues ici il y a 30 ans – je pense à la Banque nationale de Paris, par exemple, qui était venue il y a 30 ans – dans l'espoir qu'il y aurait de l'ouverture, et, l'ouverture ne s'étant pas produite, bien, elles sont un peu déçues. Mais là on comprend qu'à partir du 1er janvier 1999 il va y avoir une grande ouverture.

Est-ce que ça va avoir quelque chose à faire dans le domaine de l'assurance? Je comprends que vous me dites que la fusion Banque de Montréal-Banque Royale, si je vous saisis bien, pourrait retarder ça, ce qui voudrait dire que, par certaines négociations entre le gouvernement du Canada pour accepter cette fusion-là, on leur permettrait... Ça fait drôle, quand même. Parce que, si c'est bon, pourquoi il ne le donne pas, puis, si ce n'est pas bon, pourquoi il...

M. Millette (Yves): Oui. Je pense qu'il n'y a rien de foncièrement bon ou de foncièrement mauvais, ça dépend comment ça se produit et dans quelles circonstances ça se produit.

Vous parliez des banques étrangères. Nous, notre position, ce n'est pas de faire de la place aux banques étrangères. Il y en a une, compétition, à l'heure actuelle, je vous l'ai mentionné, dans les régions partout, qui est nos réseaux, que ce soient les nôtres ou ceux des assureurs de dommages, et on ne voudrait pas que vous détruisiez ces réseaux-là ou que ces réseaux-là soient détruits pour faire de la place à une banque universelle ou à une banque virtuelle. Vous ne pourriez pas. On ne pense pas que c'est la bonne façon de faire. Il y en a une, compétition qui se fait à l'heure actuelle dans toutes les régions, dans tous les villages du Québec, et on voudrait qu'elle continue. On ne voudrait pas qu'elle commence à se faire par une banque virtuelle. On pense que peut-être qu'il va falloir augmenter la compétition des banques internationales, mais je ne pense pas que les banques internationales aillent s'installer dans toutes les régions, elles vont rester dans les grands centres.

M. Campeau: Pas sûr. Ce matin, on a passé deux intervenants fort intéressants – bien, vous aussi, là, je ne veux pas nier ça – mais qui nous ont parlé du côté consommateur, du côté de l'acheteur. Vous, dans votre discours, à aucun moment on n'a entendu dire: Pour le bien du consommateur, on va faire telle affaire. Est-ce que pour vous, donc, le consommateur ne compte pas? Il y a juste la profitabilité? Remarquez bien que je ne suis pas contre la profitabilité.

M. Millette (Yves): Il y a bien du monde qui se préoccupe du consommateur, mais, nous, on pense que, s'il y a une concurrence dans le marché, c'est la règle n° 1 pour protéger le consommateur, et je pense que c'est ça qu'on vise.

M. Pépin (Normand): Moi, j'aimerais intervenir à ce moment-ci parce que j'essayais de souffler à Yves «consommateur». J'avais écrit «consommateur» sur mon bout de papier puis je ne réussissais pas à passer le message, alors je vais le passer directement. Non, je pense que c'est important...

M. Campeau: Je vous ai deviné.

M. Pépin (Normand): Au Canada, ce qu'on est en train de faire, et au Québec, il faut se poser la question: Quelle sorte de compétition on veut avoir pour le consommateur? On peut penser qu'il faut s'orienter avec une concentration d'entreprises, d'institutions financières et avoir finalement quatre, cinq grandes institutions financières au Canada qui vont contrôler toute la distribution des services financiers.

(15 heures)

Quand on regarde ça, ça me fait peur un petit peu, parce que, quand je regarde, mettons, les profits des banques et le retour, en fait, sur l'avoir des banques, on parle de 18 %, 20 %. Quand toute une industrie ou 90 % de l'industrie – parce que, si on prend les six grandes banques au Canada, on parle de 90 % de l'industrie bancaire au Canada – bancaire au Canada fait des retours sur l'investissement de l'ordre de 18 %, 19 % et 20 %, bien il y a une question que je me pose: Ou tous ces gestionnaires-là sont des génies puis ils gèrent mieux que les autres ou il n'y a pas de compétition. Et c'est à nous autres de répondre à cette question-là.

Je pense que, dans l'assurance, si on regarde, il y a des compagnies d'assurances qui ont un bon retour sur l'investissement puis il y en a d'autres qui ont des pas mal moins bons retours sur l'investissement. J'arrive d'un voyage aux États-Unis. Je regardais ça. Il y a des compagnies d'assurances aux États-Unis, il y a des banques qui ont des retours sur l'investissement incroyables, 20 % à 25 %, puis il y en a un paquet qui ne font pas de profits, qui ne font pas d'argent, parce qu'il y a de la compétition.

Je pense que c'est la question qu'on doit se poser au Québec et au Canada: Quelle sorte de compétition on veut? Parce que, finalement, c'est le consommateur qui va payer la facture. Et je pense qu'au Canada on a un bel exemple avec l'oligopole des banques, où le manque de compétition fait en sorte que les banques font des profits extraordinaires, peut-être parce qu'ils sont très compétents aussi, mais extraordinaires parce que, peut-être, il n'y a pas de compétition. Et c'est la réponse à laquelle le gouvernement doit répondre.

Et nous autres ici, quand on fait nos présentations, on dit... Et, pour répondre à une autre question, à se dire: Combien d'emplois on va perdre au Québec? je ne le sais pas, puis ce serait une pure spéculation. C'est clair que ça va augmenter la compétition et qu'il va y avoir probablement un mouvement d'emplois d'un type d'entreprise versus un autre ou peut-être que ça va amener tout simplement une entreprise à préserver plus d'emplois. Parce qu'avec le mouvement de consolidation qui se fait dans l'assurance-vie au Canada on est rendu avec des compagnies maintenant qui ont 20 % de part du marché. On n'avait jamais vu ça auparavant. On n'avait jamais vu plus que 10 %.

Et qu'est-ce qu'on veut avoir, au Québec? Ce mouvement de consolidation là se fait au Canada, se fait au Québec. Qu'est-ce qu'on veut au Québec, nous autres? C'est la question à laquelle il faut répondre. On a moins d'entreprises. On a des plus petites entreprises. Quelqu'un a posé la question: Combien il y a d'entreprises québécoises? On parle que les entreprises québécoises contrôlent à peu près 40 % du marché québécois, et la plupart de ces entreprises-là sont petites. Il y en a quelques-unes qui sont grandes, mais la plupart sont petites. Comment vont-elles survivre dans ce monde de consolidation là? Puis quelle sorte de compétition va demeurer après ça pour le consommateur? C'est au gouvernement d'y répondre.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Ça va, M. le député de Crémazie?

M. Campeau: Je fais juste constater que je suis content qu'il n'y a pas eu votre mémo aux consommateurs. Ça vous a donné l'occasion de donner votre point de vue.

M. Pépin (Normand): J'avais dit... silencieux.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le député de Crémazie. Mme la députée de Saint-François.

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Président. Je voudrais revenir sur l'article 60. Vous avez mentionné que vous souhaitiez, bien sûr, que l'établissement au Québec puisse s'inscrire comme cabinet. J'ai compris que le ministre a semblé dire qu'il était d'accord avec ça. Cependant, à l'article 60, il est mentionné: «Seule un personne morale qui a un établissement au Québec peut s'inscrire auprès du Bureau.» Est-ce que, pour vous, le «peut» a un sens d'obligation? Dans le sens, est-ce que le «peut» est «doit» ou bien si on devrait modifier justement cet article pour répondre à votre demande, puisque le ministre semble acquiescer à cette demande?

M. Millette (Yves): On dit souvent que les choses vont sans être dites, mais il vaut toujours mieux quand elles sont dites. Si c'était «doit», ce sera bien plus clair.

Mme Gagnon-Tremblay: Parce que, parfois, on dit que «peut» «doit», mais pas toujours. Il y a eu de longues discussions déjà, en commission parlementaire, sur le «peut» et le «doit». Alors, si c'est ce que vous voulez, il faudrait que cet article soit modifié pour «doit» à la place de «peut», parce que vous n'avez pas trop, trop d'assurance sur votre recommandation.

M. Millette (Yves): Je peux juste vous rappeler que l'article 68 de la loi actuelle, la Loi sur les intermédiaires de marché, utilisait le «doit».

Mme Gagnon-Tremblay: «Doit»?

M. Millette (Yves): Oui.

Mme Gagnon-Tremblay: Alors, si j'ai compris, c'est que le ministre tout à l'heure, comme il était d'accord avec votre...

M. Millette (Yves): Ah! Pardon. C'est le projet antérieur qui avait circulé à l'automne, du projet...

Mme Gagnon-Tremblay: Le ministre semblait être d'accord. J'imagine qu'il est d'accord pour changer «peut» pour «doit».

M. Landry (Verchères): ...

Mme Gagnon-Tremblay: Bon. Parfait. C'est ça de gagner.

M. Landry (Verchères): Je ne dis pas que c'est cet article-là qu'on utilisera, mais on va modifier pour arriver au même résultat.

Mme Gagnon-Tremblay: D'accord. Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, Mme la députée de Saint-François. Merci, MM. les représentants de l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes, de vous avoir donné la peine de nous faire part de vos commentaires.

Et, sur ça, j'invite les représentants du Regroupements des assureurs de personnes à charte du Québec. Je vais suspendre une minute.

(Suspension de la séance à 15 h 5)

(Reprise à 15 h 10)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): S'il vous plaît, mesdames, messieurs, vous êtes sans doute intéressés autant que nous à nous parler et nous à vous entendre. Donc, je voudrais souhaiter la bienvenue aux représentants du Regroupement des assureurs de personnes à charte du Québec. Je vais inviter M. Labrecque, probablement, Jacques Labrecque, à présenter les gens qui l'accompagnent et à nous faire part de leur mémoire.


Regroupement des assureurs de personnes à charte du Québec (RACQ)

M. Labrecque (Jacques): Merci, M. le Président. Alors, mon nom est Jacques Labrecque, effectivement. Je suis le président du conseil d'administration du Regroupement des assureurs de personnes à charte du Québec. Je suis accompagné ici, à la table, de M. Jean LaCouture qui est président et directeur général du Regroupement et de MM. Alain Roch et Gilbert Maltais qui sont membres du comité qui a spécifiquement étudié le projet de loi n° 188.

Je voudrais d'abord remercier la présente commission de nous avoir permis de venir vous présenter notre point de vue. On va essayer de le faire avec les meilleurs arguments possible. Le RACQ ou le Regroupement des assureurs de personnes à charte du Québec réunit 12 compagnies qui ont comme particularités: une première, évidemment, c'est qu'on est tous des entreprises à charte québécoise et non pas à charte fédérale; et la deuxième caractéristique, qui est probablement la plus importante, c'est qu'on a tous une forte concentration de nos affaires dans la province de Québec.

Dans les documents qui ont été publiés par le gouvernement, il a été avancé que l'objectif fondamental de la refonte de la distribution, c'était la protection des intérêts du consommateur. Or, je peux vous dire tout de suite et d'entrée de jeu que le RACQ souscrit à 100 % à cet objectif. Cependant, on ne peut faire abstraction des autres règles sur lesquelles s'appuie le fonctionnement de notre société, à savoir que, au niveau commercial, on est une société de type, je dirais, marché ouvert.

Or, nos recommandations, puisqu'on va en faire quelques-unes, reposent sur deux principes de base: d'abord, la recherche du meilleur intérêt du consommateur et, deuxièmement, l'équité des règles ou des normes applicables aux divers intervenants dans le marché, ce qu'on va appeler l'équilibre des chances.

Vous avez évidemment tous lu le mémoire qu'on a déposé. On y développe quelques points majeurs et plusieurs points secondaires. Aujourd'hui, dans notre présentation verbale, on va s'arrêter tout simplement aux trois points qu'on considère les plus fondamentaux: d'abord, premièrement, l'organisme d'autoréglementation; deuxièmement, ce que, nous, on considère comme étant une absence d'uniformité au niveau des règles et exigences qui s'appliquent aux divers intervenants de la distribution; et, troisièmement, on voudrait commenter sur le double emploi et la protection des renseignements personnels.

Parlons d'abord de l'organisme d'autoréglementation. Depuis le début du premier projet, le RACQ supporte le principe d'un seul organisme d'autoréglementation. Pourquoi? D'abord, on pense que c'est la bonne formule pour qu'il y ait une cohérence au niveau des règles, autant dans leur définition que dans leur application. On pense également que le fait d'avoir un seul organisme va déboucher sur une application uniforme autant au niveau, si vous voulez, encore là, de la discipline que de beaucoup d'autres aspects. On pense que ça va permettre d'éviter les dédoublements et les chevauchements. Finalement, ça devrait permettre, s'il y a vraiment un seul organisme, un fonctionnement plus simple, plus harmonieux et surtout plus économique.

C'est pourquoi le RACQ questionne fortement l'existence même des chambres. À nos yeux, il s'agit là d'un besoin non démontré. Deuxièmement, dans le même élan, nous disons: Si elles doivent exister pour des raisons qui nous échappent, elles devraient indubitablement, à nos yeux, relever directement du Bureau sur tous les aspects. Ça permettrait, si vous voulez, au législateur de faire disparaître l'article 321 qui décide qui a raison en cas de désaccord entre les deux organismes.

Au niveau du conseil d'administration du Bureau, on préconise également depuis le début une composition 5-5-5, 5-5-5 voulant dire cinq des 15 membres émanent du milieu des consommateurs et sont des gens préparés à bien les représenter, cinq émanent du milieu des intermédiaires et cinq autres sont des représentants, si vous voulez, qui ont une formation ou une carrière davantage du côté des assureurs ou des institutions, et au moins une de ces personnes devrait provenir des institutions de dépôts. Les membres du conseil, à nos yeux, devraient être nommées par le ministre et non pas élus et il devrait être clair qu'indépendamment de leurs origines en termes d'expérience ou de compétence ils siègent là à titre personnel. Si le conseil d'administration dans sa composition n'est pas équilibré, nous prétendons que le gouvernement devrait garder le contrôle sur les règlements du Bureau et non pas les laisser entièrement au choix ou au plein pouvoir décisionnel du Bureau.

Le deuxième point où on pense intervenir, et on pense qu'il est important que nous parlions, est sur ce qu'on appelle, nous, la non-uniformité des règles et des exigences. Le projet de loi reconnaît deux approches de distribution: une première que j'appellerais la combinaison cabinet-représentant et une deuxième, plus particulière, qui reconnaît une approche distributeur et, je dirais, personne désignée par le distributeur, mais dont on ne parle jamais dans le projet de loi. Le distributeur, vous le savez tous, on parle de distribution de produits spécifiques type assurance-crédit, assurance-voyage, assurance auto pour la location à court terme.

Le constat du RACQ, après avoir analysé bien comme il faut ce qu'on attend ou ce qu'on exige des deux volets de la distribution est qu'il existe un fort déséquilibre des règles et des exigences entre les deux approches. Et, point fondamental pour le consommateur, tous les réseaux de distribution, même s'ils sont différents en termes d'exigences et de règles, ne seront perçus comme étant également qualifiés par le consommateur. Quand on parle de qualifiés, on parle de qualifiés pour les conseillers et qualifiés pour leur vendre des produits. Autre point, c'est que le consommateur se croira tout aussi bien protégé en termes de responsabilité de la personne à qui il parle par l'un ou l'autre des réseaux.

Or, je vais vous faire une liste des aspects fondamentaux pour lesquels on ne traite pas de façon uniforme les deux approches de distribution: d'abord, en termes de formation, en termes d'accréditation, en termes d'encadrement et de discipline, en termes d'identification de besoins où on n'a des exigences que vis-à-vis le système traditionnel de représentation, en termes d'assurance-responsabilité qui, toujours au niveau du réseau traditionnel, est très exigeant, très précis et, de l'autre côté, il n'existe aucune équivalence.

En ce qui a trait toujours au réseau des intermédiaires ou des représentants, qu'on parle d'assurances de dommages ou d'assurances de personnes, on va au niveau du Bureau établir de la réglementation et des règles en ce qui a trait à la sollicitation, les représentations qui peuvent être ou non faites au client, la publicité qui peut être faite. On va également avoir des exigences au niveau des divulgations d'appartenance à un assureur ou à un autre. On va légiférer – j'espère qu'on va marquer «doit» au lieu de «peut» ici aussi – le fameux remplacement de police. Et les chambres vont, en plus, établir des règles de déontologie, si les chambres existent. Si elles n'existent pas, le Bureau le fera. Mais tous ces aspects-là sont des aspects où on vient bien comme il faut encadrer, par la loi ou la réglementation, mais encadrer le représentant d'un assureur et, de l'autre côté, pour des produits dits accessoires – et ça serait à discuter – on vient tout simplement être beaucoup plus complaisants en termes d'exigences.

Le RACQ reconnaît ouvertement le libre choix du consommateur d'acheter ce qu'il veut, de qui il veut et là où il le veut, sauf que la protection dudit consommateur passe par des règles et des exigences équivalentes tout au moins en ce qui a trait à l'accréditation via un permis minimum restreint, l'assurance-responsabilité obligatoire pour tous les distributeurs, y inclus une agence de location automobile ou une agence de voyages et même une caisse populaire, si vous voulez.

En ce qui a trait également au principe d'identification des besoins, le besoin n'a rien à voir avec le choix du réseau de distribution. Et, finalement, en termes également de remplacement. Ces quatre aspects-là nous apparaissent incontournables en termes de réglementation.

(15 h 20)

Troisième aspect sur lequel on veut insister aujourd'hui, ça regroupe, si vous voulez, le double emploi et les renseignements personnels. Au moment où on se parle, il existe des règles strictes pour ce qui concerne la protection des renseignements personnels, et ça touche les assureurs. C'est la loi 68. Ces règles-là, en ce qui concerne nos activités, touchent la détention d'informations. Ça légifère au niveau de la communication desdites informations à des tiers – et, dans la loi, on reconnaît nos propres compagnies affiliées comme étant des tiers – en ce qui a trait à l'utilisation qu'on peut faire de ces renseignements-là. On vient également être très strict en ce qui a trait au droit de la clientèle ou du consommateur d'avoir accès à ces informations-là et même le droit de les faire rectifier.

Tout à coup survient un phénomène mondial – on le reconnaît – la banque-assurance, ou chez nous c'est plus la caisse-assurance. Et des choses qui étaient jusqu'à maintenant bannies deviennent soudainement vertus. L'employé de la caisse – on parle évidemment de celui qui ne traite pas des comptes d'opération quotidiens – a accès aux renseignements nécessaires à l'exercice de ses fonctions.

Il y a un article du projet de loi qui dit précisément ceci: Si sa fonction dans la caisse est de faire de la prospection et de la vente d'assurance, il a son propre dossier pour ses clients existants à titre d'intermédiaire ou de représentant, il a droit aux dossiers de la caisse à titre d'outils de prospection, puis ça peut faire partie carrément de ses fonctions, et, à ce moment-là, il bénéficie – comme je l'ai entendu dire par ceux qui étaient ici avant moi – de la liste complète de notre clientèle, à savoir qui est assuré où et paie quoi. Que les gens paient par chèque préautorisé, qu'ils paient via un chèque, tout ça passe par la banque ou par la caisse. Donc, le dossier de la caisse inclut l'information financière complète, la liste des chèques et tous les chèques tirés à un assureur.

Pour nous – dans le contexte d'aujourd'hui, on va se qualifier d'assureurs traditionnels, même si ce n'est pas un mot avec lequel je suis le plus à l'aise – assureurs traditionnels, ça équivaut, à toutes fins pratiques, à fournir la liste de notre clientèle à cause du phénomène banque-assurance. Ça nous apparaît carrément non équitable.

On a un problème comparable avec le double emploi. Jusqu'à maintenant, la réglementation du Conseil des assurances de personnes prévoyait l'interdiction du double emploi pour quelqu'un qui était intermédiaire en assurance. Je sais que récemment il y a eu un jugement de la cour qui est venu, je dirais, affaiblir la réglementation existante non pas dans son essence, mais davantage dans sa forme. Mais, quand même, l'intention du Conseil des assurances de personnes a toujours été de voir à interdire le double emploi. Aujourd'hui, nous arrive tout d'un coup une loi qui, elle, vient consacrer pour l'institution de dépôts le phénomène du double emploi, et il est consacré dans la loi. Et, en parallèle, on nous dit qu'au niveau de la réglementation il y aura une réglementation qui sera possible pour contrôler les autres types d'emplois. Ça nous semble être carrément deux poids deux mesures et, par ricochet, inacceptable.

En conclusion, je vous rappelle qu'on avait trois éléments majeurs: on parle d'un seul organisme qui serait le Bureau, on ne voit pas le besoin des chambres, et on veut un conseil composé de façon égale, des consommateurs, des intermédiaires et des institutions; deuxièmement, on souhaite des règles et des exigences équivalentes pour les deux types de réseaux de distribution définis dans le projet de loi; et, finalement, on voudrait que des correctifs soient apportés de façon à rendre plus équitables le concept de double emploi et l'utilisation possible des renseignements personnels.

Il y a plusieurs autres points qui ont été soulevés dans notre mémoire, que vous avez sûrement tous lu, dont, entre autres, l'idée d'un fichier central, soit dit en passant, une solution qui nous apparaît démesurée par rapport aux problèmes qu'on veut solutionner. Ce qui est utilisé comme approche pour l'assurance collective pourrait facilement être étendu aux produits d'assurance individuelle et je suis certain que tous les assureurs se feraient un plaisir de contribuer, comme on le fait d'ailleurs présentement.

Le RACQ demande à ce que ses commentaires et les recommandations que nous vous faisons soient sérieusement étudiés et pris en compte dans la prochaine loi. Un point, peut-être, qui faisait partie de la conclusion de notre mémoire, mais que je vais vous souligner au passage. Si on doit systématiquement permettre aux banques de pouvoir continuer leur expansion – ils ont déjà réglé le cas des sociétés de fiducie et des courtiers en valeurs mobilières – il serait souhaitable qu'on s'assure en cours de route qu'on donne aux compagnies d'assurances existantes – qui font quand même travailler beaucoup de gens au Québec et aussi au Canada, mais particulièrement au Québec – des règles ou un contexte qui leur permet, au moins, de s'adapter à ce nouvel environnement.

On demeure disposés à répondre à vos questions. Les gens avec moi... Je me permets la liberté de trouver quelqu'un pour m'aider à répondre, si vous le voulez bien. Je vous laisse la parole. Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): On vous remercie, M. Labrecque, et soyez assuré que les membres de la commission vont avoir des questions à vous poser. Ça, il n'y a aucun doute là-dessus. M. le ministre, d'abord.

M. Landry (Verchères): Il est sûr, M. Labrecque, qu'on va prendre en compte vos remarques et réflexions, sauf sur les points pour lesquels notre réflexion est déjà terminée; je ne veux pas revenir là-dessus, je pense qu'on se comprend.

Vous avez dit des choses intéressantes, dans votre mémoire, sur l'organisme unique. Vous êtes vraiment des fervents de l'organisme unique. Vous savez que c'était la première réflexion du gouvernement. Vous savez qu'à la suite d'un dialogue soutenu avec d'autres agents du monde des intermédiaires, comme une concession de notre part mais, d'après moi, une bonification de notre projet, nous avons ajouté les chambres en prenant le risque qui a été identifié par M. Massé ce matin, que les chambres, oui, seront des lieux électifs. Donc, quand on parle d'élection, on parle de controverse, voire de discorde, mais on parle aussi de démocratie puis on parle de participation. Vous ne trouvez pas que c'est une amélioration? Même M. Massé lui-même parlait de tables sectorielles, ce matin. C'est une espèce de glissement vers les chambres, ça, à moins que je ne me trompe. Vous ne pensez pas que tout en soutenant l'organisme unique, on peut vouloir le bonifier par une approche élective, donc plus participative et plus démocratique du monde de l'assurance à la gestion de ses affaires? C'est ma première remarque.

Deuxième, bien on l'a posée aux consommateurs et à quelques autres, sur la question des ventes liées. Fréquemment, les compagnies offrent des rabais sur la vente simultanée de deux ou plusieurs produits, par exemple l'assurance automobile, ce qui est une forme de vente liée. Dans votre esprit, est-ce que l'interdiction de ventes liées aurait pour effet de remettre en cause ces avantages financiers pour le consommateur, et qui sont largement pratiquées par divers segments de l'industrie?

Sur le double emploi, je n'exagère pas en disant que vous vous opposez farouchement au concept du double emploi, mais est-ce que ce n'est pas une bataille un peu dépassée, puisqu'on est rendu dans le triple et le quadruple emploi? Depuis 1989 et la loi 134, les intermédiaires peuvent offrir des produits d'assurance: du crédit hypothécaire, de l'assurance de crédit aux petites entreprises, des rentes, des fonds communs de placement. On est rendu à sextuple et octuple emploi. Pourquoi est-ce que vous vous opposez à cette nouvelle façon – nouvelle qui n'est pas si nouvelle que ça, d'ailleurs – de voir les choses dans le monde de l'intermédiation financière?

Enfin, vous dites que l'article 12 devrait être modifié pour y inclure l'assurance collective des personnes, ce qui ne choque pas l'esprit. Ça a peut-être beaucoup de bon sens. Mais notre intention et ce que me disent les juristes, c'est que le Bureau pourra faire de l'assurance collective une catégorie de discipline de l'assurance des personnes et prescrire suivant ce que vous souhaitez. C'est parce qu'on s'est confiné aux catégories classiques. On pourrait dire que l'assurance collective des personnes est une espèce de sous-catégorie ou de catégorie plus ramifiée dont le Bureau pourrait s'occuper. Je ne sais pas ce que vous pensez de ça.

Est-ce que j'ai d'autres choses à vous demander? Oui. Petit détail, mais vous dites que vous vous opposez à la création du registre – pourtant, le registre, là, qui est favorisé par tellement de nos intervenants – puisqu'il représenterait un moyen dont la portée est disproportionnée par rapport aux problèmes qu'il est censé corriger. Alors, comment corriger le problème si ce n'est pas par ça? Et vous dites que ce serait lourd et coûteux. Est-ce que vous avez fait une tentative – vous savez que je suis très sensible à ces arguments – des coûts lourds dont vous parlez?

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Voilà, M. Labrecque, vous en avez assez, là?

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Baril, Arthabaska): C'est juste un départ, hein!

(15 h 30)

M. Labrecque (Jacques): Je vous remercie, M. le ministre. C'est un bon début. Je vais essayer de les reprendre un par un.

Alors, vous parlez du phénomène de bonification des chambres et vous avez parlé aussi, si j'ai bien eu le temps de noter, des avantages d'une approche élective et démocratique où vous anticipez qu'il y ait des débats particuliers. Je vous dirai: Nous, on pense que ces débats-là devraient se faire sur une table plus large au niveau du Bureau, et pas nécessairement uniquement entre les intermédiaires, ce qui va être le phénomène au niveau des chambres – et elles vont être, en plus, bien séparées – des assurances de personnes et des assurances de dommages. Ça ne m'apparaît pas nécessairement une amélioration, mais je peux facilement concéder que, dans votre esprit, ça puisse l'être. Mais, si c'était le cas, je vous dirais: Laissons-les discuter, appliquer toute la démocratie dont notre société aime bien s'enorgueillir, si vous voulez; mais, lorsque viendra le temps de prendre les décisions, pourquoi ne pas les faire dépendre du Bureau, à ce moment-là, puisque le Bureau, lui, a la responsabilité et que vous lui donnez le plein pouvoir?

Si vous voulez que les chambres relèvent du gouvernement, ce qui explique d'ailleurs l'article 321 qui dit: Quand les deux ne sont pas d'accord, c'est le Bureau qui a raison, ça nous apparaît, ça, quelque chose d'inutilement lourd. Maintenant, on ne se battra pas à n'en plus finir. Tout ce qu'on demande, par exemple, c'est qu'il y ait un groupe, parce que, au bout de la course, il y a bien des chances qu'on soit de forts contributeurs à ceux qui vont supporter les coûts. Malheureusement, encore là, je n'ai pas d'estimé de ce que ça va coûter, je n'ai pas encore pu dessiner assez clairement comment ça allait fonctionner.

Deuxièmement, les ventes liées. Je vous concède que nos pratiques dans le monde des institutions financières – et je vais me permettre de dire, au risque de me tromper, peut-être plus particulièrement du côté des institutions de dépôts – font en sorte qu'il peut arriver que le principe des ventes croisées – et non pas des ventes liées, semble-t-il qu'ils n'en font jamais – puisse être à l'avantage du consommateur. Il est à l'avantage du consommateur qui est présent devant un intermédiaire, et qui se plaint, et qui fait de la demande, et qu'on veut aller chercher. Il n'est pas nécessairement à l'avantage du consommateur «at large», ce principe-là, parce que tout le monde n'a pas droit aux mêmes conditions. C'est un point de vue, peut-être que je me trompe, mais c'est notre façon de voir les choses.

Notre opposition farouche – j'aime le mot – au double emploi, c'est dépassé? Peut-être. Il y a une chose que je sais, par exemple, c'est que la législation actuelle fait en sorte qu'on est très segmentés en termes de lois. Je regarde tout simplement l'organisme pour lequel je travaille, il a plusieurs compagnies, on en a au moins sept ou huit, et toute la communication d'information de l'une à l'autre est réglementée, et ça prend l'approbation du consommateur. En vertu de la loi 68, tout est bien segmenté. Et, quand on vient dire que quelqu'un qui travaille dans une institution de dépôts va avoir le droit de vendre lui-même, il a les deux mains dans le... En tout cas.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Labrecque (Jacques): Il a les deux mains dedans, il a tout à sa portée. Ce qu'on n'a pas le droit de faire, vous le lui mettez sur la table, sur un plateau d'argent. Alors, là-dedans, on dit: Oui, fondamentalement, vous avez probablement raison, dans une société aussi libre que la nôtre, on n'a pas à s'opposer à ça, mais, je vais vous répéter, s'il vous plaît, les mêmes chances égales pour tous, dans le même élan. O.K.?

À l'article 12, pour l'assurance collective, je reçois vos commentaires. Vous me dites: Ça va être réglé au niveau de la réglementation, ce n'est pas spécifiquement dans le projet de loi. Ce n'est pas, pour nous, un point fondamental. Et, quant à votre cinquième – et je suis heureux de m'en être rappelé – des cinq, l'opposition au fameux registre des polices – je vais vous dire, c'est l'article 207 – on prévoit une solution qui m'apparaît tout à fait applicable à l'article 209. Ça s'applique pour l'assurance collective. Je fais juste dire: Si elle est bonne pour l'assurance collective, elle va l'être tout autant pour les produits d'assurance individuelle. Et, dans le même élan, malheureusement, je n'ai pas fait d'évaluation, je n'ai pas les chiffres des économies ou de ce que ça va nous coûter de tenir un registre, mais, juste par le raisonnement, c'est un registre qu'il faut créer et auquel tous les assureurs canadiens... On est 150 qui opèrent au Québec, là. On est 150 assureurs qui devront «updater» un fichier commun par client. Imaginez, pour les 150 assureurs qui opèrent, l'«updating» de nos systèmes, et ça, c'est chaque jour où on vend des polices et où il s'en annule. Faudra toujours maintenir ce système-là à date. Ça nous apparaît exorbitant, comme je vous dis, pour un besoin qu'on peut solutionner autrement. Je vous remercie.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. Labrecque, de cette mémoire phénoménale. M. le député de Viger, maintenant.

M. Maciocia: Oui. Merci, M. le Président. Merci, M. Labrecque, du mémoire que vous nous avez présenté aujourd'hui. J'aurais une couple de questions. À la page 4 de votre mémoire, vous dites que «des produits presque identiques, offerts à une même personne, sont souvent l'objet d'exigences réglementaires différentes selon le statut de l'individu qui les offre» – je vous cite. Vous énumérez même, je pense, une quinzaine d'articles qui ont pour effet de craindre davantage la distribution de produits avec représentant comparativement à la distribution de produits sans représentant.

Faut-il croire, comme le projet de loi le propose, qu'il y a deux régimes de distribution parallèles actuellement au lieu d'un seul et avec les mêmes règles? D'après vous, est-ce que c'est les mêmes règles qui s'appliquent, à ce moment-là?

M. Labrecque (Jacques): Je peux répondre tout de suite?

M. Maciocia: Oui.

M. Labrecque (Jacques): La réponse, c'est carrément non, et l'exemple le plus frappant, si vous voulez, que je puis vous donner, c'est quelqu'un qui va à la banque ou à la caisse, qui s'en va chercher un prêt hypothécaire. On lui vend une assurance sur la vie ou la santé qu'on appelle «assurance-hypothèque» et là on dit: C'est une assurance spéciale. Je vais vous dire, ce qu'on vient de lui vendre, c'est une protection d'assurance-vie ou d'assurance-santé pour l'équivalent du montant de son hypothèque, qui va décroissant, donc une assurance décroissante sur la vie ou la santé, et on la lui vend, au niveau de l'institution de dépôts, au moment où la personne est à son sommet, si vous voulez, émotif. On vient de lui apporter la réponse: Oui, on l'accepte, votre prêt hypothécaire. Et là, en même temps, on vient lui vendre une police puis on dit – l'occasion est toute belle: C'est un produit accessoire.

Bien, je vais vous dire, si la personne dit non, qu'elle sort de la caisse ou de la banque – je ne veux pas attaquer plus les caisses que les banques – qu'elle sort de l'institution de dépôts et qu'elle rencontre immédiatement un intermédiaire en assurance de personnes, cet intermédiaire-là, pour pouvoir lui vendre exactement la même assurance-vie décroissante, va être obligé de faire une analyse des besoins et de passer à travers toute la pléiade des exigences réglementaires dont je vous ai parlé tout à l'heure pour pouvoir agir correctement, et ça, je vous dis, c'est se cacher derrière une appellation fausse d'un produit qu'on appelle «de l'assurance-hypothèque», alors que c'est simplement un produit d'assurance-vie vendu à des fins spécifiques. Le même résultat peut être atteint en vendant une police d'assurance décroissante sans même parler de l'hypothèque.

M. Maciocia: J'espère que le ministre a suivi votre raisonnement, M. Labrecque.

M. Labrecque (Jacques): J'essaie d'être clair.

M. Landry (Verchères): Bien, je me mettais à la place du consommateur, je pensais aux 10 jours que j'ai pour résilier.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Labrecque (Jacques): Mais, pour quelqu'un qui s'essaie, c'est comme quand on va voler: si notre seule pénalité, c'est de se faire enlever ce qu'on a volé, ce n'est pas grave. On a 10 jours pour annuler.

M. Maciocia: Et, selon vous, pourquoi le projet est-il fondé sur deux régimes distincts?

M. Labrecque (Jacques): Vous voulez que, moi, je réponde?

M. Maciocia: Oui.

M. Labrecque (Jacques): Je pense qu'il y a eu des pressions de deux sources distinctes.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Bonne déduction, mon cher Watson.

M. Landry (Verchères): Lesquelles?

M. Labrecque (Jacques): Non, non, mais je pense que c'est...

M. Gendron: Ce serait très reconnu.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Labrecque (Jacques): Il est très clair qu'il y a deux forces qui s'affrontent: il y a une force existante puis il y a une tendance internationale, je l'ai dit tout à l'heure. Il faut composer avec les deux. Moi, je ne suis ni contre l'une ni contre l'autre et, quand je dis «moi», je pense que c'est la position globale du RACQ. Vous devinez qu'on a des positions moins unanimes quand on parle de banques-assurances parce qu'on a deux de nos membres qui sont affiliés à des institutions de dépôts.

Mais je pense qu'on devrait viser, dans le projet de loi, à favoriser, si vous voulez, l'essor de la banque-assurance ou de la caisse-assurance; tout est dans la façon dont on le fait, dans la façon dont on vient traiter les gens en place. Je ne vous dirai pas que le système, tel qu'il existait, il était parfait, loin de là. Il y a des lacunes, puis ces lacunes-là, on va être les premiers à vous dire: Faut les corriger. Mais je pense qu'il ne faut pas non plus passer tout droit. Il ne faut pas que ce soit trop permissif.

Je vous parlais d'assurance-hypothèque ou de la caisse-assurance. On a historiquement contourné la loi pour pouvoir faire ces choses-là. C'est de l'assurance, si vous voulez, faussement collective. Ce n'est plus de l'employeur, ça; là, on parle d'association de créditeurs. Alors, on a contourné les lois pour faire ça, puis aujourd'hui c'est comme un droit acquis, puis on vient l'encadrer dans le projet de loi. Ça, on a un petit peu de misère avec ça.

(15 h 40)

Maintenant, je ne vous dis pas qu'on doit être le seul endroit au monde où la banque-assurance est interdite – ça fait longtemps qu'on a dépassé ce stade-là, nous – mais on vous dit: S'il vous plaît, ne brisons pas tout ce qui existe parce qu'il arrive un nouveau joueur.

M. Maciocia: Oui. À la page 6 de votre mémoire, M. Labrecque, au deuxième paragraphe, vous dites: «Concrètement, la loi doit établir clairement que l'employé d'une institution de dépôts ne peut, pour aucune considération, utiliser les informations financières des clients, qui autrement seraient confidentielles, à des fins de sollicitation ou de prospection.» Je m'arrête là, M. Labrecque, parce que ma question...

Est-ce que, d'après vous, l'article 83 du projet de loi vous satisfait, en conséquence de la considération que vous venez de faire? Vous savez que l'article 83 dit: «Une institution de dépôts inscrite comme cabinet dans une discipline de l'assurance ne peut, par l'entremise d'un représentant en assurance, vendre un produit d'assurance dans un de ses établissements qu'à un endroit prévu à cette fin», et tout ça. Dans votre remarque, vous dites: «...que l'employé d'une institution de dépôts ne peut, pour aucune considération, utiliser les informations financières des clients, qui autrement seraient confidentielles, à des fins de sollicitation ou de prospection.»

M. Labrecque (Jacques): J'ai perdu votre dernier bout, je m'excuse, là. À 83, j'étais avec vous. Le dernier point que vous avez lu, c'était quoi?

M. Maciocia: Vous avez lu...

Une voix: Le texte de notre mémoire.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Votre mémoire.

M. Labrecque (Jacques): O.K., notre texte à nous.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Oui, oui.

M. Maciocia: Oui, c'est ça.

M. Labrecque (Jacques): O.K. Bon, je vous dirai: L'article 83, non, ne nous protège pas très bien. Nous, ce n'est pas tellement à quel endroit se passe le péché, c'est: Est-ce qu'il y a péché ou pas?

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Baril, Arthabaska): C'est une réponse assez complète, hein, pas besoin de plus d'explications.

M. Labrecque (Jacques): Non, ce qu'on essaie de dire, c'est que, si l'information disponible à la caisse ou à la banque est à la portée, et disponible, d'une personne qui fait de la prospection d'assurance et éventuellement qui va offrir des produits d'assurance, c'est là qu'est l'essence du déséquilibre quand on parle de déséquilibre des forces ou des chances, si vous voulez. On ne peut pas concevoir que ces informations-là vont être si facilement accessibles à un intermédiaire de marché, à moins qu'en contrepartie on nous permette à nous d'avoir accès à des informations qui nous sont, pour l'instant, tout à fait interdites, même si elles sont déjà disponibles dans notre groupe.

M. Maciocia: Parfait, M. le Président. Je laisse un peu la...

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Oui. Je voudrais, moi également, poursuivre. J'étais content que le ministre aborde, d'après moi, un élément majeur, en tout cas pour plusieurs. Ça l'était également pour vous quand vous avez dit: On s'oppose farouchement, formellement – peu importent les nominatifs – au double emploi. Le ministre a vérifié un peu ce que ça signifiait, en vous indiquant que, de toute façon, c'était un peu, entre guillemets, ne plus être à la mode, puisque, de toute façon, un intermédiaire financier peut faire toutes sortes de choses.

Je ne veux pas vous faire interpréter, mais est-ce que je vous citerais mieux? Parce que, à ma connaissance, moi, ce n'est pas de double emploi que vous avez parlé dans votre mémoire; c'est que vous avez crainte que des gens qui dans le futur auront la possibilité de faire ce qu'ils n'avaient pas avant... bénéficient d'informations privilégiées qui leur permettraient d'être avantagés sur le plan de la concurrence. Est-ce que ce n'est pas plutôt ça qui vous amène à dire: On est contre le double emploi – tout en, d'après moi, n'employant pas la bonne expression? Parce que – je voudrais juste conclure – dans votre mémoire, quand on le lit attentivement – mais j'aimerais que vous soyez plus précis – vous ne croyez pas que l'article 22 est assez hermétique pour vous donner la sécurité que vous voudriez avoir pour ne pas que ça se fasse. Est-ce que je vous interprète bien?

M. Labrecque (Jacques): C'est une interprétation qui va de soi parce que, je vais être d'accord avec vous sur un point, si quelqu'un était, je ne sais pas, moi, électricien et qu'il vendait de l'assurance par ses soirs, on pourrait ne pas trouver ça correct, mais on manquerait d'arguments pour s'y opposer. Le problème, c'est que, là où actuellement on vient créer le double emploi, c'est en plein là où l'information essentielle est disponible à la personne qui va exercer le double emploi.

M. Gendron: O.K. Mais, à quelqu'un qui prétendrait aujourd'hui que, parce que l'intermédiaire de marché ne peut pas offrir des produits d'assurance, du crédit – puis je ne ferai pas la liste d'épicerie, là – bon, bien, ça veut dire que c'est théoriquement possible pour vous autres aussi – le «vous autres aussi» étant les gens qui font ça, assureurs et intermédiaires – que vous pouvez avoir accès aux informations sur les individus de la même façon que les gens provenant des institutions de dépôts, vous, vous diriez: Ce n'est pas possible aujourd'hui pour nous.

M. Labrecque (Jacques): Ce n'est pas possible aujourd'hui à cause de la loi 68. Et l'autre chose qui ne sera pas possible, c'est qu'on n'a pas chez nous de liste de chèques préautorisés ni des chèques qui sont compensés. Ça ne passe pas, chez nous, ça passe uniquement dans les institutions de dépôts, ça.

M. Gendron: Donc, c'est plus le fait d'offrir à d'autres une compétition basée sur des règles distinctes avec des informations privilégiées qui fait qu'il faudrait fermer cette possibilité-là. Et, si cette possibilité-là était fermée, est-ce que ça veut dire que vous continueriez à vous opposer à ce que vous appelez aujourd'hui le «double emploi»?

M. Labrecque (Jacques): Sûrement pas. Faudrait le regarder, quelles sont ces règles-là, mais sûrement pas avec le même... C'était quoi, le mot, M. Landry? «Farouche»? Je ne serais pas aussi farouche.

M. Gendron: Donc, ce n'est pas le double emploi qui vous énerve. C'est ce que j'ai essayé de questionner.

M. Labrecque (Jacques): C'est ce qu'entraîne le double emploi en termes d'accès, vous avez raison.

M. Gendron: Merci. Deuxième question, vous avez appris par la bouche du ministre... Puis ce n'est pas majeur, mais il y a un autre groupe qui va passer tantôt et qui, lui, considère que c'est majeur. C'est la question de considérer les assurances collectives comme étant un secteur tellement spécialisé qu'il devrait être distinct. L'assurance collective devrait être distincte de l'assurance de personnes. Le groupe qui va suivre, il va réclamer ça, puis, lui, il en fait un point majeur. Mais, par contre, dans votre mémoire, vous avez quand même dit: «En ce qui concerne l'article 12, l'importante catégorie que représente l'assurance collective de personnes nous semble avoir été omise et elle devrait faire l'objet d'une discipline spécifique...» Le ministre vous a posé une question là-dessus: Si c'était réglé par voie réglementaire? Vous avez répondu: Bien, on va y penser. Mais supposons que vous ayez eu la réponse du ministre avant de venir ici. Est-ce que vous auriez continué à suggérer pareil d'en faire une discipline spécifique?

M. Labrecque (Jacques): Je crois que oui parce que, si on parle de distribution, les véhicules de distribution de l'assurance collective sont tout à fait différents des véhicules de distribution typiques de l'assurance individuelle dont on parle partout dans le projet de loi.

M. Gendron: Donc, vous souhaitez que par voie législative le législateur retienne la suggestion que vous venez de faire, d'en faire une discipline spécifique.

M. Labrecque (Jacques): Exact.

M. Roch (Alain): En fait, si on a la garantie qu'au niveau soit du Bureau la réglementation fasse en sorte que ce soit une catégorie ou une sous-catégorie spécifique rattachée à une formation spécifique, à ce moment-là on n'a pas de problème avec ça. Ce qu'on veut éviter, c'est que le permis...

Si je le compare à la réglementation actuelle, on a un permis, entre guillemets, fourre-tout qui fait en sorte que quelqu'un peut vendre des produits d'assurance de personnes, avec des «s», sans nécessairement être qualifié pour autant. Alors, ce n'est que le seul... sur ce point.

M. Gendron: M. le Président, merci, ça me va.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le député d'Abitibi-Ouest. Mme la députée de Saint-François aurait quelques questions.

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Président. On vient de répondre à ma première question concernant les consultants en avantages sociaux qui s'occupent des assurances et des rentes collectives. Maintenant, je voudrais revenir sur l'article 22 du projet de loi qui vous inquiète un peu et je me demandais quel serait votre opinion si cet article était modifié de la façon suivante: Un représentant d'assurances qui agit pour le compte d'une institution financière – je ne parle pas de dépôts, là, financière – inscrite comme cabinet ne peut, dans un de ses établissements, avoir accès aux informations reliées aux dossiers de crédit ou de dépôts des clients de cette même institution. Est-ce que cette formulation-là répondrait à votre préoccupation?

M. Labrecque (Jacques): Il faudrait peut-être y ajouter l'impossibilité d'avoir accès à la liste des chèques préautorisés et d'avoir accès aux chèques qui circulent via la banque pour payer de l'assurance, parce que, carrément, tous, tous les paiements de nos polices d'assurance passent par une institution de dépôts.

Mme Gagnon-Tremblay: Bon. Faudrait qu'il accepte des cartes de crédit.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Est-ce que ça termine, Mme la députée de Saint-François? Ça complète?

Mme Gagnon-Tremblay: Oui. Faudrait qu'il accepte des paiements par carte de crédit.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Oui. M. le député de... Oh! M. le ministre, vous voulez...

Mme Gagnon-Tremblay: Faudrait accepter des paiements par carte de crédit.

M. Landry (Verchères): On pourrait peut-être simplifier votre réflexion en vous demandant de considérer l'article 76: «Un cabinet doit prendre les dispositions nécessaires afin que ses représentants ne puissent avoir accès qu'aux renseignements nécessaires à l'exercice de leurs fonctions.»

M. Labrecque (Jacques): M. Landry, je l'ai noté, l'article 76, et c'est justement celui qui me crée des problèmes, puisque... Je regarde chez moi, j'ai des représentants à l'exclusif, j'en ai au-dessus de 100. Ces représentants-là, ce qui est le plus nécessaire à un travail de prospection, c'est justement toute l'information financière qu'on peut retrouver au niveau de la banque: on peut identifier le nombre d'enfants, si l'individu a une maison. On peut tout identifier à partir de là, les besoins d'assurance, sans même faire le moindre effort, tout est disponible. Et, si vous saviez la proportion du temps des intermédiaires qui est consacrée à la prospection, peut-être que ça vous serait plus facile de comprendre. Ça a peut-être l'air spécial, ce que je dis. Ce serait peut-être plus facile de me comprendre là-dessus.

(15 h 50)

M. Landry (Verchères): Je vous comprends très bien puis je voudrais faire une remarque générale, si M. le président le permet, puis je le fais pour vous puis pour tous les autres. Nous sommes absolument opposés à ces transferts de l'information qui créeraient une concurrence déloyale. Nous avons essayé par divers articles de l'exprimer et nous sommes ouverts à toute suggestion nous permettant d'atteindre notre but, notre but étant le même que le vôtre. On s'entend? Puis ça vaut pour tous les intervenants aussi qui ont les mêmes craintes. Ces craintes, nous les partageons, et nous allons faire en sorte, dans la rédaction de cette loi, d'atteindre l'objectif qui est notre objectif commun.

Je n'ai vu personne demander, depuis le début de ces audiences, que les informations circulent, et que ça soit ouvert à tous vents, et que tout le monde puisse se servir dans les banques de données. J'ai entendu le contraire de la part de tout le monde, et le gouvernement partage ces préoccupations. Alors, ce qui nous aiderait maintenant – et ça vaut pour vous comme pour les intervenants suivants – c'est de nous dire comment concrètement arriver à cet objectif qui nous semble commun. Ça vaut pour l'opposition aussi, bien sûr; vous avez déjà commencé à faire des suggestions.

Mme Gagnon-Tremblay: La seule chose dont je me rends compte, c'est que la loi a été rapidement préparée, parce que, là, faudrait revenir carrément avec un nouveau projet de loi, sinon ça va être incroyable, la quantité de papillons qu'on va devoir ajouter au projet de loi. Faudrait peut-être...

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Ça va être le printemps.

M. Landry (Verchères): Ce n'est pas si laid que ça, des papillons, premièrement.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Des monarques, c'est très beau.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Ce serait au printemps. Ha, ha, ha!

Mme Gagnon-Tremblay: Je pense qu'il faudrait la refaire au complet pour répondre... Parce que, finalement, je vois que l'intention du ministre, c'est d'aller dans le sens des recommandations, mais la loi fait défaut à plusieurs égards.

M. Landry (Verchères): Moi, je ne partage pas votre opinion, et on a mis les meilleurs juristes du gouvernement sur cette tâche de rédiger. Je crois que nous ne sommes pas si loin que ça d'une loi presque parfaite.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Landry (Verchères): Quand j'ai fait mettre une dizaine d'articles pour atteindre un but, bien, en rajouter un ou deux et puis repréciser deux ou trois des autres, je pense que, pour une loi aussi complexe et aussi controversée, c'est une approche qui nous conduit vers un produit fini tout à fait acceptable, et c'est l'intention du gouvernement. Ce serait, je crois, décevoir beaucoup d'attentes des gens qui viennent nous voir que de dire qu'on va refaire un nouveau projet de loi. J'ai la conviction morale que nous pouvons, avec celui-ci qui est une excellente base, donner le plus haut niveau de satisfaction aux gens qui s'adressent à nous, étant entendu que personne ne sera totalement satisfait.

Celui qui est parti avec une idée fixe et qui croyait avoir la meilleure solution à tous ces problèmes-là au début de la discussion, il est dans l'erreur, de quelque camp qu'il soit. Mais, pour le reste, je pense qu'on peut progresser, et nos collègues de la commission l'ont déjà fait largement, et on est prêts à continuer.

M. Labrecque (Jacques): M. le ministre, on vous pardonnera si vous n'atteignez pas la totale perfection, mais vos propos en ce qui a trait aux renseignements personnels, sans jeu de mots, sont rassurants. Je vous remercie.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Je remercie nos invités, M. Labrecque et ses compagnons. Et, sur ça, je vais inviter les représentants du Regroupement des consultants en avantages sociaux du Québec à prendre place. Je vais suspendre quelques minutes.

(Suspension de la séance à 15 h 54)

(Reprise à 16 h 2)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Mesdames, messieurs, la commission reprend ses travaux, et, cette fois-ci, nous allons entendre les représentants du Regroupement des consultants en avantages sociaux du Québec.

J'invite M. Piché à nous présenter les personnes qui l'accompagnent et à nous faire part de son mémoire.


Regroupement des consultants en avantages sociaux du Québec (RCASQ)

M. Piché (Pierre): M. le Président, je tiens à vous remercier de l'invitation que vous nous avez faite à participer à cette commission sur les finances publiques. J'aimerais vous présenter mes confrères: à ma gauche, M. Yves Therrien, spécialisé en assurance collective et premier vice-président du Regroupement des consultants en avantages sociaux, et, à ma droite, Me Yves Le May, qui agit à titre de secrétaire-trésorier de notre Regroupement et également à titre de conseiller juridique.

Pour vous expliquer un petit peu la raison d'être de notre présence, j'aimerais mettre en relief l'importance de l'assurance collective dans la population québécoise. Vous avez tous, chacun d'entre vous, dans vos poches quelque part une petite carte d'assurance collective qui vous donne accès à des remboursements de médicaments et de services professionnels, que ce soient des médicaments à la pharmacie ou des professionnels, des chiropraticiens, ces choses-là. Alors, nous, notre champ d'intervention, il est là, et nous intervenons entre le temps que le petit carton se retrouve dans vos poches puis qu'il parte de chez l'assureur. Entre ces deux balises-là, c'est là qu'on intervient.

Nos interventions touchent environ 4 500 000 de la population québécoise. La toute première sécurité financière d'un individu, après son travail lui-même, se retrouve effectivement dans ses avantages sociaux et, bien sûr, à l'intérieur de son assurance collective. Donc, on voit qu'on parle d'un véhicule financier qui, quand même, est très important.

Nous tenons à vous remercier encore une fois de votre invitation à notre participation à la commission, parce que notre Regroupement, malgré tout, n'existe que depuis quelques mois, soit depuis le 21 novembre dernier. Cependant, même si notre existence est très jeune, elle est le fruit de plusieurs années de réflexion et de discussion entre nous tous, membres, individus spécialisés en assurance collective et en avantages sociaux.

Je vous ferai un rappel historique. On va reculer seulement à environ 10 ans en arrière, en 1989, dès l'adoption de la loi 134. Tout juste avant l'application de 134, tous, entre nous, étions membres de l'Association provinciale des assureurs-vie du Québec. Très peu des individus spécialisés en assurance collective et en avantages sociaux étaient membres de cette Association professionnelle. Et, dès l'adoption de 134, un organisme fut créé, qui est l'AIAPQ, l'Association des intermédiaires en assurance de personnes, et tous les individus spécialisés en assurance collective et en avantages sociaux, parce qu'on détenait un permis d'intermédiaire de marché, on est obligatoirement devenus membres de cette Association professionnelle qu'est l'AIAPQ. Or, dès les débuts, les premiers balbutiements de l'AIAPQ, on a assisté à certains regroupements, à des groupuscules d'individus spécialisés en assurance collective et en avantages sociaux, et une discussion, une réflexion a été amorcée: Avons-nous notre place à l'intérieur de l'Association des intermédiaires en assurance de personnes? Qu'avons-nous en commun, sauf l'assurance de personnes?

Donc, nous avons fait part à l'AIAPQ de certaines demandes très particulières, entre autres en matière de formation professionnelle, d'élaboration d'un plan de carrière, d'encadrement professionnel et d'identification d'un code d'éthique, tout ça, bien sûr, afin de mieux protéger les 4 500 000 individus au Québec qui sont couverts par un régime d'assurance collective. Nous avons utilisé à peu près tous les créneaux possibles qui nous sont permis par l'AIAPQ pour véhiculer nos demandes.

Ce qu'il faut comprendre – puis je ne veux pas prêter de mauvaises intentions à l'AIAPQ non plus à l'intérieur de mes propos – c'est que l'AIAPQ contient 13 000 membres, 13 000 intermédiaires en assurance de personnes dont le plan de carrière, le plan de formation de cette Association-là est de devenir un assureur-vie agréé, alors que la plupart d'entre nous, spécialisés en avantages sociaux, ne visons pas du tout, mais pas du tout cette reconnaissance professionnelle là. Or, je comprends très bien l'AIAPQ de ne pas nécessairement prendre acte immédiatement de nos demandes, nous représentons seulement 5 % du membership de l'AIAPQ. Nous partageons des réalités professionnelles tout à fait différentes et très distinctes.

Donc, constatant que le message passait difficilement à l'AIAPQ, nous avons décidé de faire élire un des nôtres au conseil d'administration de l'Association des intermédiaires en assurance de personnes, pour différentes raisons. J'ai dû démissionner de mon poste d'administrateur à l'AIAPQ au mois de janvier dernier notamment pour me consacrer tout à fait à plein temps dans la rédaction de notre mémoire pour qu'on puisse obtenir notre reconnaissance spécifique. Comme je vous le mentionnais, nous rejoignons 60 % de la population québécoise et, pour y parvenir, nous avons besoin de formation très, très, très précise, très spécifique. Je pourrai y revenir tout à l'heure pour vous identifier exactement tous les éléments de formation dont nous avons besoin.

J'aimerais vous donner certains commentaires sur notre appréciation quant au projet n° 188 qui est actuellement sous étude. Bien sûr, considérant notre très jeune existence, il s'avérait très présomptueux de notre part d'analyser chacune des facettes de 188. Nous avons limité notre lecture aux éléments propres à notre spécialité à nous.

Donc, nous avons remarqué rapidement un simple oubli, tel qu'est intitulé notre mémoire. On nous a confondus encore une fois dans la grande famille des intermédiaires en assurance de personnes. Or, c'est ce qui a suscité notre intérêt d'abord et avant tout. Et, de façon globale, on pourrait vous dire que, par la création du Bureau des produits et services financiers, nous sommes d'accord avec la création de cet organisme-là. Cependant, quant aux chambres, les deux chambres qui sont proposées dans le projet de loi, on se demande un petit peu quels seront les pouvoirs réels des chambres. Et est-ce que c'est viable de leur accorder certains pouvoirs? Quant à nous, on pourrait très bien vivre avec un bureau fort, un endroit où nous pourrions nous identifier et faire les représentations d'usage. En gros, c'est un petit peu la lecture que nous faisons de 188.

Bien sûr, le simple oubli, l'assurance collective. Nous sommes environ, comme je vous disais tout à l'heure, 5 % du membership de l'AIAPQ à travailler exclusivement, essentiellement en assurance collective et en avantages sociaux. Notre Regroupement tente de réunir des spécialistes de toutes allégeances, que ce soient, bien sûr, des spécialistes en assurance collective, des spécialistes en gestion des ressources humaines, en droit du travail, en relations industrielles ou des actuaires. Or, chacune de nos interventions s'imbrique de façon très pratique et nerveuse dans les entreprises.

(16 h 10)

Les avantages sociaux qu'on retrouve en entreprise sont très importants et vont devenir encore de plus en plus importants pour le futur. On assiste à des renouvellements de contrats de travail ou à des renouvellements de conventions collectives, actuellement, et ces contrats-là se négocient non seulement sur l'aspect monétaire, mais surtout sur l'aspect normatif. Alors, sur l'aspect normatif, nous y retrouvons bien sûr les avantages sociaux et les régimes d'assurance collective.

Nos différents gouvernements, en appliquant le fameux virage ambulatoire, créent des trous, laissent des services qui sont récupérés par les compagnies d'assurances qui, elles, vont retourner via les régimes d'assurance collective les services qui sont laissés aller par nos différents gouvernements. Or, ça a pour incidence directe de faire augmenter les coûts d'assurance collective dans les entreprises, de venir réduire la marge de profitabilité des entreprises et, bien sûr, de réduire les pouvoirs d'achat, le pouvoir d'achat de tous les travailleurs dans l'entreprise, et nous estimons que cette tendance-là va se poursuivre. Certains soins de santé vont se retrouver au privé et être récupérés par l'ensemble des compagnies d'assurances.

Ce à quoi les propriétaires d'entreprise et les chefs syndicaux s'attendent de nous, c'est qu'on puisse bien les conseiller, bien les guider dans leurs discussions, dans leurs renouvellements de contrats pour faire des bons choix dans le contenu de leurs avantages sociaux, notamment leur régime d'assurance collective. Il y a des coûts financiers très importants qui sont reliés à cet exercice-là, ça a des incidences fiscales importantes également, et nous devons être à la fine pointe pour être en mesure de bien conseiller nos clients.

C'est pour toutes ces raisons que nous réclamons la création d'une spécialité en matière d'assurance collective qui sera soutenue par un programme de formation, un encadrement professionnel et un code d'éthique. Alors, c'était la raison majeure de notre présence, un simple oubli qu'est l'assurance collective. Je vous remercie.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. Piché. M. le ministre, vous avez des questions?

M. Landry (Verchères): Bon. D'abord, bien, c'est assez intéressant, ce que vous nous dites, pour nous ébranler. Ce n'est pas qu'on vous a oubliés, c'est que le Code civil, qui est un document de base, considère que l'assurance des personnes peut être individuelle ou collective. Vous êtes dans le collectif, alors on s'est cantonnés à la catégorie du Code civil.

Mais, en disant – ça, vous le savez aussi – que le Bureau pourrait, par règlement, prévoir une formation minimale en assurance collective, puisque, à l'article 171, on prévoit que le Bureau peut exercer son pouvoir selon les catégories de discipline qu'il peut déterminer, donc il y a une possibilité, dans la loi, de vous traiter de façon spécifique. Mais on pourrait aussi faire l'autre arbitrage et puis simplement rajouter une catégorie. On va réfléchir à cette chose-là qui ne choque pas l'esprit, hein? Surtout, les arguments que vous donnez parlent bien d'une activité de nature spécifique. Entre l'adhésion à un groupe puis la réception de la carte, il y a votre travail; c'était une bonne image.

Par ailleurs, vous abordez certains autres sujets où ça pourrait être intéressant d'avoir votre avis. Plusieurs organismes nous ont suggéré de modifier l'article 13 afin qu'il soit possible à un représentant d'agir pour le compte de plusieurs cabinets. À cause de votre situation particulière, pourriez-vous nous donner votre point de vue sur le sujet? Je pense que, dans votre cas, il y a une application spécifique.

Et enfin, sans parler d'opposition farouche, vous dites que les chambres n'apportent aucune valeur ajoutée à l'encadrement de la distribution. J'ai bien dit pourquoi on est arrivés à l'addition de ces chambres, qu'on pense, après discussion avec des intermédiaires majeurs, qu'il reste cette valeur ajoutée d'une plus grande participation démocratique, d'un processus électif tout en permettant au gouvernement de conserver son arbitrage. Et l'une de ces chambres, évidemment, vise votre segment, les personnes.

Pourriez-vous élaborer un peu et dire pour quelles raisons vous êtes contre la création de ces chambres?

M. Piché (Pierre): Je répondrai à votre première question. Il existe, dans la pratique, un monde de différences entre une intervention qui propose des qualités en assurance collective et en assurance-vie individuelle. D'ailleurs, les statistiques le démontrent très bien, sur 13 000 intermédiaires en assurance de personnes, environ 900 seulement vont recevoir des chèques de commission une fois par année en matière d'assurance collective. Alors, sur 13 000 membres, il y en a environ seulement 900 qui vont faire une intervention à l'occasion en matière d'assurance collective. Et, sur les 900, il y en a environ 300 qui y vont vraiment à temps plein. Les 300 qui travaillent à temps plein en assurance collective et en avantages sociaux ne pratiquent pas du tout en assurance-vie individuelle.

Moi, en ce qui me concerne, j'ai mon permis depuis 15 ans et je n'ai jamais vendu aucun contrat d'assurance-vie individuelle, et c'est le cas de la plupart de nos membres au Regroupement. Aucun de nous ne pratique le double emploi.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Piché (Pierre): On se limite à la spécialité de chacun. Quand un de nos clients a un besoin spécifique en assurance-vie, on va le référer à un intermédiaire de marché. Nous, on va se limiter à nos interventions au niveau des assurances collectives en harmonie avec l'ensemble des autres avantages sociaux dans l'entreprise.

Pour ce qui est des deux autres questions, je laisserai le soin à Me Le May de vous expliquer notre point de vue.

M. Le May (Yves): Sur la première question aussi, j'aimerais souligner que, avant le projet de loi n° 188, il y avait une ambiguïté – qui est encore là parce que la nouvelle législation n'est pas adoptée – à savoir si ça prend réellement un permis pour vendre de l'assurance collective. Il y a un doute là-dessus. Avec 188, il me semble qu'on ferme la porte et que ça prendra effectivement un permis, et c'est pour ça qu'on trouve que c'est très important, à ce stade-ci, de faire admettre cette discipline-là. Quand on compare avec les autres disciplines que vous avez, sans vouloir les dénigrer, le courtage en plan de bourses d'études, ça représente combien monétairement dans la province de Québec par rapport à l'assurance collective où ce sont des centaines de milliards? Alors, c'est sur cette question-là de l'assurance collective.

Sur l'article 13, effectivement, je suis un de ceux qui trouvent qu'il est mal rédigé. Ça peut arriver très souvent, autant pour un intermédiaire de marché en assurance individuelle que pour un intermédiaire de marché en assurance collective, de vouloir faire affaire, dans le futur, avec deux cabinets parce qu'un cabinet va être l'agent général d'une compagnie d'assurances. Alors, s'il fait affaire avec l'agent général de la compagnie X et qu'il veut vendre un produit de la compagnie Y, il ne peut pas le faire, en vertu de l'article 13. Ce sera aussi une possibilité, lorsque la discipline sera reconnue, que l'intermédiaire de marché en assurance de personnes puisse faire affaire avec un cabinet en assurance de personnes et un cabinet en assurance collective, ce qui serait impossible avec l'article 13 tel qu'il est rédigé présentement. Puis ça, c'est un gros problème parce qu'on pense qu'il doit y avoir des échanges entre les intermédiaires de marché en assurance de personnes et ceux qui font de l'assurance collective, et ce, dans les deux sens.

Et, finalement, sur la question des chambres, bien, c'est parce que tout le monde, lors des auditions de la commission à l'automne 1996, s'est prononcé pour un organisme unique. On arrive avec un organisme unique, mais avec un autre en dessous ou dedans, on ne sait pas exactement où il est, qui va essayer d'avoir des pouvoirs, qui va être électif, tandis que l'autre ne le sera pas. Il y a, à mon avis, un nid de chicanes, puis faut qu'il y en ait un, décideur, point, pas deux. C'est dans ce sens-là.

(16 h 20)

M. Landry (Verchères): Tout le monde voulait un organisme unique, mais tout le monde voulait voir le contrôle de cet organisme unique à sa manière. Alors, le compromis qu'on a fait, c'est qu'on a fait un bureau qui reste une émanation de la collectivité à travers l'État. Mais on a permis des expressions à travers les chambres, des diversités, puis on a voulu que le monde de l'assurance reste intéressé à son destin par le processus électif, des élections dont les modalités seront à définir. Des élections par la poste, il y en a dans toutes les organisations aujourd'hui et ça ne choque pas l'esprit. Les professeurs d'université, par exemple, votent pour le recteur à travers des votes postaux, etc.

Alors, on a pensé qu'on ajoutait un aspect de modernité, de démocratisation puis qu'on faisait un lien entre le passé et l'avenir en gardant les chambres, parce que les gens sont habitués de voter dans leurs associations, pour leurs représentants et les gens qui vont s'occuper de la discipline, etc. C'est un compromis entre le passé et l'avenir. J'imagine que, à votre ton, vous pourriez vivre avec.

M. Le May (Yves): Ah oui. Oui. Écoutez, là-dessus, il n'y a pas de problème. Non, non, mais, effectivement, ce n'est pas qu'on...

M. Landry (Verchères): Je pensais que vous alliez dire: Je vais vous échanger ça pour la reconnaissance spécifique de la discipline.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Le May (Yves): Ça, ça va. Ha, ha, ha! O.K. Ça, ça irait, je pense. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Ça complète, M. le ministre, vos commentaires? M. le député de Viger.

M. Maciocia: Oui, M. le Président. M. Piché, merci du mémoire que vous avez présenté devant nous. Je serai très bref. J'ai deux questions à vous poser. Étant donné que vous êtes des spécialistes en assurance collective, j'aimerais vous poser des questions sur l'assurance-crédit et l'assurance-carte de crédit. Est-ce que, d'après vous, ces assurances-là sont des assurances collectives, des vraies assurances collectives? Deuxièmement, est-il exact qu'il y a des problèmes reliés à la confirmation de l'assurabilité avec ce type de produits? Et, d'après vous, est-ce que l'article 379 du projet de loi qui est devant nous, qui oblige l'assuré à confirmer l'assurabilité, est à appliquer pour tous ces produits dits d'assurance collective?

M. Piché (Pierre): Nous, on en fait, une distinction entre les différents produits collectifs. Les produits collectifs de personnes qu'on retrouve en entreprise, ça, pour nous, c'est important; c'est là-dedans qu'on a à intervenir. Maintenant, en ce qui regarde les collectifs d'assurance-crédit, notamment sur les cartes de crédit ou ces trucs-là, on n'a pas fait de grosse réflexion là-dessus parce que ça ne nous rejoint pas, ça, nous; ça ne nous touche pas du tout. Nous, ce qui nous touche, c'est vraiment l'assurance collective qu'on retrouve dans tous les milieux de travail. Peut-être que Me Le May voudrait rajouter, lui.

M. Le May (Yves): Justement, ces assurances collectives là n'ont de collectif que le nom. Elles sont tout simplement des moyens détournés – en tout cas, bien souvent – de vendre de l'assurance sans permis. C'est ça, actuellement. Des assurances-voyages, des assurances-crédits, c'est tout simplement ça.

Alors, quant à l'obligation, effectivement, par rapport à l'article 379 que vous mentionniez tout à l'heure, je pense que c'est un article qui est très valable parce que très souvent les gens qui ont de ces assurances-là n'ont aucune confirmation de leur assureur. L'assureur va leur envoyer normalement un certificat d'assurance, mais ce n'est pas dans tous les cas qu'il y a réellement une confirmation écrite.

M. Maciocia: M. le Président, pour moi, ça va.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Ça complète? Est-ce qu'il y a d'autres membres de la commission qui ont des questions? Faut croire que c'est bien compris et que c'est clair.

Donc, on vous remercie, MM. Piché, Therrien et Le May, de vous être donné la peine de nous présenter votre mémoire. Sur ça, on va inviter les représentants de l'Option consommateurs à prendre place, et je suspends pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 16 h 24)

(Reprise à 16 h 27)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): À l'ordre! Mesdames, messieurs, la commission reprend ses travaux. Afin, entre autres, de ne pas perdre le temps que nous avons récupéré – ça va très bien, bien oui – donc on va laisser le temps à Mme Rozon de se préparer et, lorsqu'elle sera prête, elle pourra nous faire signe. Vous êtes prête, madame?

Mme Rozon (Louise): Oui, c'est bon. Alors, merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): C'est bien. On vous souhaite la bienvenue.


Option consommateurs

Mme Rozon (Louise): Merci beaucoup. M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les députés, nous sommes heureux de venir vous présenter nos commentaires aujourd'hui concernant le projet de loi sur la distribution des produits et services financiers.

Alors, je vais quand même nous présenter rapidement. À ma droite, c'est Me Jacques St-Amant, qui est responsable chez nous de tous les services – en fait, nos recherches concernant nos services financiers – et moi-même, qui suis directrice d'Option consommateurs.

Notre organisme s'intéresse aux problèmes des consommateurs reliés aux services financiers et à la protection des renseignements personnels, et ce, depuis plus de huit ans. Au cours des dernières années, nous nous sommes notamment penchés sur des questions comme le traitement des plaintes au sein des institutions financières. En 1997, nous avons publié une étude sur le marché des assurances accessoires aux cartes de crédit où, entre autres, on constatait que les consommateurs sont le plus souvent victimes de produits de mauvaise qualité et de pratiques commerciales déplorables. Notamment, nous avons examiné plusieurs attestations d'assurance qui comportaient des clauses illégales en vertu de notre droit québécois. Nous sommes donc fort conscients de l'importance du projet de loi et du secteur d'activité que ce projet veut encadrer.

Pour les consommateurs, l'enjeu est simple, il s'agit de protéger leurs biens et leur santé financière en courant des risques aussi réduits que possible. On y arrivera en instaurant, à notre avis, un cadre qui met l'accent sur la simplicité, la discrétion et la sécurité. Nous sommes d'avis que, dans sa charpente, le projet de loi paraît aller dans cette direction. Toutefois, dans le détail, hélas, il s'en éloigne souvent beaucoup trop. On abordera rapidement ces trois dimensions, soit la simplicité, la discrétion et la sécurité, en mettant l'accent sur le régime de la distribution par représentant et on examinera en dernier lieu la distribution des produits sans représentant.

Alors, concernant la simplicité, plusieurs ont souhaité la présence d'une réforme pour unifier l'encadrement des intermédiaires de marché en le confiant à un seul organisme. Voilà qui aurait été simple et que nous aurions applaudi. Les consommateurs, comme tous les intervenants, auraient toujours su à quelle porte frapper. Mais le projet de loi nous propose le revers de la simplicité. On multiplie les structures et les régimes, on divise les responsabilités, certaines questions relèvent du Bureau des services financiers, d'autres, des deux chambres proposées, de certains ordres professionnels, de la Commission des valeurs mobilières.

Le consommateur fera parfois affaire avec un cabinet, dans d'autres cas, avec une société ou un représentant autonome, et ses droits seront différents selon la forme juridique qu'a empruntée l'intermédiaire avec qui il fait affaire. Par exemple, s'il transige directement avec un distributeur, c'est encore un régime différent qui s'appliquera. Et, si le consommateur obtient des produits par un mode de distribution électronique, eh bien, dans ce cas-là, c'est aucun régime qui risque de s'appliquer. Il n'y a rien à gagner, à notre avis, à mettre en place un régime aussi compliqué. Il serait, au contraire, assez simple de mettre un peu d'ordre dans l'encadrement de la distribution et ainsi de mieux servir le public.

(16 h 30)

D'abord, la réglementation de la distribution devrait essentiellement, à notre avis, relever du Bureau des services financiers. Les chambres qu'on veut instituer ne seront d'aucune utilité aux consommateurs. Elles seront sûrement utiles pour les professionnels, mais pas pour les consommateurs. En particulier, il nous paraît inacceptable qu'on leur confie, entre autres, l'adoption de codes de déontologie. On n'a certainement pas fait la preuve que l'autoréglementation d'un tel secteur d'activité soit souhaitable et on a encore moins prouvé que ce secteur a atteint la maturité voulue pour s'autoréglementer. On n'a, entre autres, qu'à penser aux problèmes au renouvellement des polices d'assurance dans les dernières années pour s'en convaincre. On a d'ailleurs publié un dossier sur ce sujet-là dans notre magazine Consommation au cours des derniers mois.

Ensuite, il ne paraît pas souhaitable que des activités de planification financière puissent être encadrées par des ordres professionnels qui ne maîtrisent pas tous cette discipline. On ne s'attend pas d'un avocat ingénieur que toutes ses activités relèvent d'un même ordre professionnel. Les distinctions s'imposent d'elles-mêmes. De la même manière, on est d'avis que le Bureau devrait être le seul organe compétent à l'égard de la planification financière. Alors, un avocat qui désire être planificateur financier devrait être régi également par le Bureau et non seulement par le Barreau.

En troisième lieu, on sème les germes de la confusion la plus complète en donnant des droits différents aux clients de cabinets, de sociétés ou de représentants autonomes. On devrait, à notre avis, éliminer ces distinctions; au moins, on devrait en gommer les effets pour les consommateurs. En particulier, il ne devrait pas y avoir de régimes différents quant au traitement des plaintes et quant au recours au Fonds d'indemnisation. On ne voit pas pourquoi les cabinets ne cotiseraient pas au Fonds d'indemnisation.

En éliminant le rôle des chambres et des ordres professionnels ainsi que les distinctions entre cabinets et représentants autonomes, on ferait déjà un grand pas. On accroîtrait le sentiment de simplicité en améliorant aussi l'information entourant la distribution de produits et services financiers. À cette fin, le Bureau devrait certainement jouer un rôle de diffuseur d'informations à l'égard de ce secteur d'activité et être chargé de mettre en place le régime des assurances individuelles sur la vie.

Concernant la discrétion, maintenant. Notre organisme se préoccupe de ces questions depuis plusieurs années. Me St-Amant a été l'auteur de plusieurs rapports sur la protection des renseignements personnels. C'est donc, a priori, avec intérêt que nous avons constaté que le projet de loi abordait ces questions. Nous sommes toutefois perplexes quant aux dispositions précises que contient le projet dans ce domaine.

Sur le fond, d'abord, on mettrait en place les outils législatifs et réglementaires pour doter le domaine de la distribution de produits et services financiers d'un statut particulier en matière de protection des renseignements personnels. Les assujettis au projet de loi n° 188 pourraient, à terme, être encadrés par un ensemble de règles dans ce domaine qui seraient différentes de celles s'appliquant aux autres entreprises. Or, l'une des grandes forces du régime québécois de protection des renseignements personnels, c'est qu'il est relativement uniforme. Pratiquement toutes les entreprises sont soumises aux mêmes règles, ce qui leur simplifie la vie et simplifie aussi la vie des consommateurs.

Cette ouverture à un régime particulier constituerait un précédent dangereux, à notre avis. Bien d'autres secteurs d'activité risquent de l'invoquer pour réclamer, eux aussi, des règles particulières. On poserait donc, avec le projet de loi n° 188, la première pierre d'une mosaïque dont on n'a pas du tout besoin. Il n'est pas clair, en effet, qu'il soit généralement souhaitable d'établir un régime particulier pour la protection des renseignements personnels dans les secteurs de la distribution des produits financiers. Tout au plus, des précisions comme celles qu'on a voulu apporter avec l'article 28, par exemple, peuvent-elles être utiles.

D'autre part, le régime proposé dans le projet comporte des lacunes techniques. Ainsi, l'article 18 oblige un représentant à transmettre à l'établissement auquel il est rattaché tous les renseignements qu'il recueille sur ses clients, ce qui est, bien sûr, inutilement étendu. L'article 21 évoque la cueillette des renseignements pertinents alors qu'on ne devrait parler que de renseignements nécessaires. Bref, on devrait limiter l'ampleur de l'intrusion du projet de loi n° 188 dans le domaine de la protection des renseignements personnels, puisque ces protections sont déjà régies par une loi, et corriger ces difficultés techniques qui peuvent avoir des conséquences considérables.

Maintenant, concernant la sécurité. On l'a dit plus tôt, l'essentiel est pour nous qu'on prenne des mesures qui réduiront les risques auxquels sont exposés les consommateurs qui confient leur santé financière à des personnes assujetties au projet de loi. La sécurité passe par plusieurs types de mesures: il faut que les assujettis soient compétents et honnêtes; il faut que les règles soient claires et qu'on ait intérêt à les respecter; il faut que les consommateurs aient des recours utiles; il faut aussi s'assurer que ce n'est pas le loup qui garde la bergerie. À tous ces égards, nous sommes d'avis que le projet de loi comporte des lacunes.

Le projet de loi comporte peu de précisions quant à l'encadrement de la formation requise des représentants pour qu'ils puissent obtenir un certificat. On devrait, à cet égard, au moins maintenir un niveau d'exigence égal à celui que pose actuellement la Loi sur les intermédiaires de marché en matière de planification financière, par exemple. Il est impensable que des gens qui n'ont que quelques heures de formation données par leurs employeurs puissent éventuellement vendre des produits financiers, jouant par ailleurs un rôle important dans les affaires personnelles et familiales des consommateurs.

Quant à l'honnêteté, le projet de loi en fait inégalement un critère d'attribution d'un certificat. Il devrait pourtant s'agir partout d'un principe de base. Par ailleurs, on tente, par certaines dispositions, d'encadrer la perception et le traitement des paiements par les distributeurs. Si l'effort est louable, il ne paraît pas du tout certain qu'il puisse obtenir les résultats souhaités. Il faudrait donc raffiner le texte du projet de loi à cet effet.

Il faut que les règles soient claires et publiques. Malheureusement, le projet de loi met en grande partie l'accent sur l'éventuelle adoption de règlements. On ignore pour l'instant ce qu'ils pourraient contenir, de sorte qu'il est difficile d'évaluer l'impact qu'aurait vraiment le nouveau régime. Dans bien des cas, il pourrait même s'écouler bien du temps avant que des règlements soient adoptés, s'ils le sont jamais. On laisserait ainsi l'industrie continuer à faire à sa guise. En fait, on ne veut pas se servir ici des règlements pour préciser la loi, mais pratiquement pour la remplacer. On devrait plutôt établir certaines obligations minimales dans le projet, quitte à ce que des règlements puissent ensuite y ajouter.

De toute manière et quelles que soient les règles, il est souhaitable, à notre avis, qu'on incite l'industrie à s'y conformer par divers moyens, dont la crainte de peine sévère en cas d'infraction. À cet égard, le projet de loi n° 188 n'est clairement pas à la hauteur des besoins. Les amendes prévues sont trop basses et surtout de nombreux comportements, en principe découragés par le projet, ne constitueraient même pas des infractions.

Quant aux recours, rappelons simplement que les clients d'un cabinet ne pourraient faire appel, comme je le soulignais tantôt, au Fonds d'indemnisation mis en place par le projet. Ils n'auraient d'autre recours que de poursuivre le représentant en cause et le cabinet devant les tribunaux. C'est là compliquer la tâche des consommateurs inutilement.

Enfin, tout ce régime vaut dans la mesure où les instances mises en place adopteront des règles justes et le feront respecter équitablement. Il serait dans l'intérêt collectif que tous les intervenants concernés puissent y exprimer leur point de vue. Il est, à cet égard, incompréhensible qu'on écarte le public des organes à qui on voudrait confier le pouvoir de fixer les codes de déontologie des représentants et que le projet ne fournisse aucune précision quant à la provenance des deux tiers des membres du Bureau des services financiers. Il est pourtant essentiel qu'on y retrouve des représentants des clients, des cabinets et représentants qui soient tout à fait indépendants de l'industrie et des exigences à cet égard devraient être précisées dans le texte de la loi. Pour nous, c'est essentiel que les consommateurs puissent siéger sur les différents conseils d'administration qui sont proposés dans le projet de loi. Tant qu'on n'aura pas amélioré ces aspects du projet de loi, nous devrons conclure qu'il n'est pas à la hauteur des attentes qu'il a inspirées.

Maintenant, concernant la distribution des services et produits financiers sans représentant. Le projet met l'accent sur la distribution avec représentant, c'est-à-dire, dans une certaine mesure, sur le passé. L'avenir passera sans doute en bonne partie, par contre, par la distribution sans représentant et notamment par la distribution électronique. Il est inquiétant et regrettable que le projet de loi soit muet à l'égard de ce dernier volet.

(16 h 40)

Quant à la vente de produits financiers par des distributeurs autrement que par des moyens électroniques, il s'agit d'un marché qui nous inquiète considérablement. Notre enquête de 1997, comme je le soulignais tantôt, a indiqué qu'on vend au Québec des assurances coûteuses qui offrent une couverture en dentelle et qui ne sont parfois même pas conformes au Code civil.

Les distributeurs connaissent souvent très mal les produits qu'ils offrent et ne font pas d'efforts particuliers pour simplifier le traitement des plaintes et les réclamations. Entre autres, on a constaté, dans ce secteur d'activité, que les compagnies d'assurances qui sont spécialisées dans la vente de ce genre de produits d'assurance versent un pourcentage plus élevé des primes d'assurance en commissions qu'en indemnités pour les consommateurs.

Le projet de loi met l'accent sur la formation du personnel des distributeurs et l'information aux consommateurs. C'est très bien, mais ce n'est pas suffisant. Il faudrait en plus accorder un délai de résiliation aux consommateurs et préciser qu'en cas de réclamation le distributeur qui ne pourrait pas démontrer qu'il a porté une exclusion pertinente à l'attention du consommateur doit verser au consommateur l'indemnité à laquelle il aurait droit si l'exclusion n'existait pas. De manière plus générale, un effort considérable devrait être effectué par tous les intéressés pour assainir ce marché où les distributeurs reçoivent dans certains cas des commissions, comme je le soulignais, plus élevées que les montants versés en indemnités aux consommateurs.

Alors, pour conclure, le marché de la distribution des produits et services financiers est de plus en plus important et de plus en plus complexe. Il est essentiel que l'État fixe des règles minimales, en concertation avec l'ensemble des intéressés. C'est en principe l'objet du projet de loi n° 188, et nous y souscrivons. Les moyens mis en place ne sont cependant pas à la hauteur des besoins envisagés dans leur ensemble. Dans l'état actuel du projet, les consommateurs n'y verront pas plus clair et il n'est pas du tout certain qu'ils soient vraiment beaucoup mieux protégés à long terme.

Certains aménagements assez simples permettraient, par contre, d'améliorer considérablement ce projet. Il faut mettre l'accent sur la simplicité et la clarté, en gardant toujours en tête les nouveaux modes de distribution de produits. Il faut aussi tout mettre en oeuvre pour que, à l'avenir, les représentants du public puissent participer activement à l'implantation des réformes qui s'imposent.

Alors, il nous fera plaisir maintenant de répondre à vos questions. Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci de votre présentation, Mme Rozon. M. le ministre, vos questions, commentaires.

M. Landry (Verchères): Merci, Mme Rozon. Une de vos suggestions est intéressante et elle rejoint une des réflexions du gouvernement, c'est la composition du Bureau. À l'article 129, on dit que le Bureau est composé de 15 membres. Le ministre en nomme 10, dont le président et le vice-président. Les cinq autres viennent des chambres électives.

Ce que vous nous suggérez fortement, c'est de baliser les nominations des 10 pour que le public, les consommateurs et un éventail de la collectivité soient représentés. Nous trouvons que c'est une suggestion intéressante et on va essayer de voir comment on peut l'articuler sur le plan législatif.

La loi ne l'exclut pas. Le gouvernement aurait très bien pu spontanément... Et un gouvernement sage, comme c'est le cas présentement, du reste...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Landry (Verchères): ...aurait sûrement fait ça. Mais vous voulez qu'on le balise? On pourrait peut-être y songer.

Par ailleurs, tout en demandant ça, vous êtes plutôt fortement opposés aux chambres. Vous ne voyez pas l'utilité de ces chambres. Vous êtes arrivés tardivement, mais on en a discuté abondamment aujourd'hui et ça va revenir aussi demain. Ces chambres ont été ajoutées à la suite d'un dialogue avec des intervenants majeurs du monde de l'assurance, qui nous demandent, au fond, de concilier l'avenir et le passé en gardant un aspect électif à la gestion de la profession. Et le gouvernement s'est rendu à cet argument. C'est pour témoigner de ce désir commun que nous avons créé ces chambres.

Pourquoi est-ce qu'elles vous rebutent à ce point? Ce n'est pas intéressant d'avoir le monde de l'assurance présent au coeur de l'appareil décisionnel et le monde de l'assurance au sens large, dans toutes ses facettes, au coeur de l'appareil décisionnel pour aider l'État à mieux gérer le secteur? C'est ma première question. Je vais vous les poser en rafale. Comme ça, vous pourrez répondre à la fin.

Vous dites également, dans votre mémoire, que le Bureau soit expressément requis d'exercer certains pouvoirs réglementaires. Vous nous demandez ça. Plusieurs organismes ont suggéré que le gouvernement, lui, se réserve plus de pouvoirs réglementaires. Que pensez-vous de cette question?

Les renseignements personnels tiennent aussi une grande place dans vos préoccupations; dans les nôtres aussi, vous pouvez en être certains. Vous suggérez de retirer au Bureau ses pouvoirs en matière de protection des renseignements personnels, alors que d'autres organismes suggèrent de les augmenter. Je vous signale que nous allons entendre, sur ces questions, la Commission d'accès à l'information qui est très spécialisée dans ces matières.

Il est vrai aussi, je vous le dis, que, dans le projet de loi, on a voulu aller plus loin que dans la législation générale de protection des renseignements personnels. Et pourquoi? Parce que, généralement, la protection générale, elle vise des droits fondamentaux: le respect de la vie privée, le respect de l'intimité. Mais là, en plus de toutes ces questions fondamentales, on est dans un univers de vive concurrence économique. Alors, on a voulu rajouter des protections supplémentaires pour que la concurrence reste loyale. C'est pour ça qu'on est allé plus loin. Et certains intervenants nous ont reproché, par ailleurs, d'aller trop loin. Que pensez-vous de ça?

M. St-Amant (Jacques): D'abord, quant aux chambres, le projet de loi leur donne comme premier mandat celui d'établir des codes de déontologie. Et, là-dessus, nous sommes fort portés à tiquer parce qu'il nous semble qu'il n'appartient pas à des corps composés exclusivement de représentants des professions, entre guillemets, de formuler les règles de déontologie qui les régiront. Ça serait, me semble-t-il, un précédent pour le moins inquiétant. En ce sens-là, il nous paraît que c'est, par exemple, davantage au Bureau que ce mandat-là devrait appartenir.

Si on retire ce pouvoir-là aux chambres, la question que nous nous posions, c'est: À quoi servent encore les chambres? Qu'elles puissent jouer un rôle dans le processus électif, ma foi, si c'est ce qu'on veut en faire, on n'a pas d'objection de principe. Là où on voyait une difficulté, c'est dans la mesure où ça devient un autre lieu de pouvoir direct, où ça devient un autre interlocuteur dans le processus, un interlocuteur qui aurait un pouvoir fondamental, celui d'établir, entre autres, des codes de déontologie. Là-dessus, on a des réserves importantes.

Quant à qui devrait réglementer, le Bureau ou le gouvernement, mon vieux souci démocratique me dirait que c'est au gouvernement que ça devrait appartenir, en principe. En pratique, il y a peut-être un certain nombre de choses qu'il est préférable de laisser au Bureau, parce que le gouvernement est déjà débordé et parfois un peu loin de certaines préoccupations. Le pouvoir d'approbation qui est réservé, dans la plupart des cas, au gouvernement, s'il est exercé à bon escient, devrait suffire à baliser l'essentiel de l'exercice du pouvoir réglementaire. Cela dit, si le gouvernement a l'ambition de reprendre lui-même certains de ces pouvoirs, nous y applaudirons, mais j'en serais étonné.

En matière de protection des renseignements personnels...

Mme Rozon (Louise): Peut-être, juste pour compléter par rapport au pouvoir réglementaire. Il y a certains articles où on devrait, à notre avis, en fait, obliger le Bureau à adopter des règlements. On pense, entre autres, à l'article 167 où on parle de la formation minimale requise pour obtenir un certificat, les cas dans lesquels l'obligation de suivre un stage doit s'appliquer ou non. On trouve que c'est des dispositions qui devraient obligatoirement être adoptées par règlement, et on ne devrait pas laisser un pouvoir discrétionnaire au Bureau dans ce cadre-là.

M. St-Amant (Jacques): Quant à la question des renseignements personnels, elle n'est pas du tout simple. A priori, quand nous avons feuilleté le projet de loi, nous étions absolument heureux de voir qu'enfin les législateurs se préoccupaient de façon organisée, structurée de ces questions-là, et tout le mérite en revient sûrement au ministre.

Mais, à bien y réfléchir, la question que ça pose, on l'a notée tantôt, c'est: Est-ce qu'il est souhaitable de commencer à créer des régimes particuliers? Parce que, si on fait ça dans ce cas-ci, on nous dit: On va aller plus loin que la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé. C'est bien, en soi, mais demain ou après demain, s'il y a un gouvernement moins sage et qu'une autre industrie se pointe à l'Assemblée nationale invoquant le précédent d'une réglementation particulière pour une industrie, est-ce qu'il ne sera pas tentant de dire: Oui, on va vous donner, vous aussi, des règles particulières? Ah! et vous aussi. On pourrait se retrouver avec un régime particulièrement bigarré, beaucoup moins intéressant, en bout de ligne, pour les consommateurs et les citoyens en général et, dans certains cas, accordant peut-être moins de droits que ce qui existe actuellement.

(16 h 50)

Celles et ceux qui ont participé au débat entourant l'adoption du projet de loi 68 se souviendront qu'il y a eu, à l'époque, des pressions vigoureuses par un certain nombre d'industries qui disaient: Nous, nous voulons nos règles particulières. Nous, nous voulons notre statut propre. Fort heureusement, le gouvernement, à l'époque, a décidé qu'il y aurait un régime uniforme plus simple à appliquer, plus clair pour tout le monde et qui est de bonne qualité.

Par ailleurs, il est difficile, à ce stade-ci, d'évaluer dans quelle mesure le nouveau régime serait effectivement beaucoup plus intéressant que la loi, parce qu'il reposerait sur des règlements qu'on n'a pas encore vus. Alors, nous prenons acte de l'avis d'intention, mais, mis dans ce contexte général, il ne nous paraît pas certain que ce soit la meilleure manière de procéder, de façon globale, en matière de politique de protection de renseignements personnels. D'autre part, comme on l'a noté dans notre mémoire, il y a deux ou trois virgules qu'il faudrait corriger dans les textes pour assurer, même dans ce qu'on nous propose, que la protection des renseignements personnels est adéquate.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Ça va, M. le ministre?

M. Landry (Verchères): Oui, merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Viger.

M. Maciocia: Oui. Merci, M. le Président. Merci, Mme Rozon, de votre mémoire que vous avez présenté devant nous. Vous écrivez, à la page 7 de votre mémoire, et je vous cite, qu'«on se trouve en présence d'un régime d'une grande complexité». À la page 6 de votre mémoire, vous dites aussi que «le projet, généreux dans son principe, devra faire l'objet d'améliorations appréciables si on veut qu'il soit à la hauteur des aspirations des consommateurs». Plus loin, à la page 13, vous qualifiez l'enchevêtrement avec la CVMQ de «labyrinthe». Encore plus loin, à la page 29, je vous cite encore lorsque vous affirmez que «le consommateur aura à se dépêtrer entre une multitude de recours auprès d'organes différents, dont les attributions sont souvent curieusement découpées et ne lui paraîtront peut-être pas tout à fait limpides». Ça, c'est ce que vous dites dans les différentes pages que je vous lisais tout à l'heure.

M. St-Amant (Jacques): Nous constatons avec plaisir que vous vous êtes retrouvé dans le labyrinthe de notre mémoire.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Maciocia: Oui, oui, c'est ça. Ma question est la suivante: Ai-je bien compris que la structure du projet de loi, la structure même du projet de loi est très difficile, n'est pas simple du tout pour le consommateur? La structure même du projet de loi, est-ce qu'elle est simple, d'après vous, pour le consommateur actuellement, de la façon dont il est libellé, le projet de loi?

M. St-Amant (Jacques): La réponse simple à ça, je pense que c'est non. Le consommateur très moyen, très ordinaire, qui a fait affaire avec quelqu'un qui lui a vendu de l'assurance, par exemple, sait-il s'il a fait affaire avec un cabinet, un représentant autonome, une société autonome? Pas sûr. À qui s'adresse-t-il? À une chambre, au Bureau, au syndic, au comité de discipline, au Fonds d'indemnisation, à la Commission des valeurs mobilières, à un ordre professionnel, dans certains cas, s'il s'agit de planification financière? Je lui souhaite bonne chance. Je nous souhaite bonne chance quand les gens vont nous appeler puis qu'on va tenter d'établir ce qui est leur situation, ce qui a été leur problème. Ils ont fait affaire, à un moment donné, avec quelqu'un qui leur a vendu de l'assurance-vie et qui a aussi fait de la planification financière. Oh Seigneur! À qui s'adresse-t-on? Qui a compétence? Comment ça marche? Est-ce que, au pire, il va devoir s'adresser à la Cour supérieure pour obtenir justice? Bonne chance.

Ce n'est pas une structure simple parce qu'il y a plusieurs portes d'entrée, il y a plusieurs régimes, il y a plusieurs types de représentants régis. Je ne parle même pas de la distribution sans représentant. Je dois dire que, même après l'avoir feuilleté, le projet de loi, à quelques reprises, je suis loin d'être sûr d'avoir compris ce qu'il y a dedans.

M. Maciocia: Et pourtant un des objectifs du projet de loi, c'était...

M. St-Amant (Jacques): L'objectif est noble.

M. Maciocia: ...cela, de simplifier les choses. De ce que je comprends, c'est qu'elles ne seront pas simplifiées; elles sont plutôt alourdies que simplifiées, d'après la nature du projet de loi qu'on a devant nous.

Mme Rozon (Louise): Mais on pense quand même que, dans l'ensemble, le projet de loi a du sens, mais qu'il pourrait y avoir des aménagements mineurs qui amélioreraient grandement la situation et simplifieraient la vie des consommateurs. Parce qu'on propose quand même une série de recommandations. Ce n'est pas de dire: On retravaille tout et on repart à zéro, mais je pense qu'il y a des améliorations qui peuvent être apportées au projet de loi et qui ne sont pas majeures, mais qui simplifieraient beaucoup la vie des consommateurs, ne serait-ce que de donner au Bureau plus de pouvoirs, que les gens aient une seule porte d'entrée, que le Bureau joue un réel rôle d'information aussi auprès du public, on juge que ça, c'est très important, et qu'il soit visible aussi auprès du public.

M. Maciocia: O.K. M. le Président, à la fin de votre mémoire, à la page 41, vous dites: «Ce faisant, ils ont dû composer avec les recommandations pressantes des divers acteurs économiques; certaines ont sans doute pesé plus lourd que d'autres.» Ma question: Quels sont les acteurs économiques qui ont pesé lourd, selon vous?

M. St-Amant (Jacques): À première vue, quand on voit l'accent que le projet de loi met sur les diverses facettes, les diverses modalités de l'exercice du travail de représentant, on se dit qu'il y a bien des gens qui ont dû vouloir faire valoir leurs considérations propres – ce qui est tout à fait légitime, par ailleurs – et le gouvernement a dû composer avec ça. Par contre, et comme on a noté – c'est sans doute en partie de notre faute – on sent que les consommateurs ont été moins immédiatement présents dans le processus. C'est triste, mais nous acceptons de prendre une part du blâme là-dedans.

M. Maciocia: M. le Président, je continue. La recommandation 30 que vous faites dans votre mémoire: «Nous recommandons que les assureurs distribuant de l'assurance sans représentant soient tenus de divulguer périodiquement la proportion des primes perçues relatives à ces produits qui est versée en indemnités.» Pourriez-vous élaborer un peu sur ça?

M. St-Amant (Jacques): Oui, quand on a fait la petite étude, dont on parlait tantôt, sur les assurances associées aux cartes de crédit, on s'est rendu compte de deux choses: d'une part, qu'il est extrêmement difficile de trouver des données précises sur la rentabilité de ce segment très précis de l'industrie de l'assurance, mais quand, par bonheur, on en trouve, on constate qu'il y a certains assureurs spécialisés dans ce créneau-là qui, bon an mal an, versent plus d'argent en commissions aux distributeurs, par exemple les banques et les émetteurs de cartes de crédit, qu'ils en versent en indemnités aux assurés, ce qui est tout à fait anormal dans le monde de l'assurance.

Une des façons intéressantes de contribuer à assainir ce marché-là, ce serait peut-être que les consommateurs se rendent compte que, quand ils achètent une prime d'assurance de ce genre-là, dans le fond, c'est leur émetteur de carte de crédit qui va faire de l'argent. Et, pour ça, il faut que les chiffres sortent.

M. Maciocia: Aussi, M. le Président...

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Bien.

M. Maciocia: ...si je peux continuer, si vous me permettez...

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Ah oui! Vous pouvez continuer. Vous avez encore du temps.

M. Maciocia: ...à la page 32 de votre mémoire, vous revenez sur l'excellente étude que vous avez publiée sur l'assurance-carte de crédit. Ma question est celle-ci: Avez-vous trouvé, à l'intérieur du projet de loi que nous avons devant nous, des correctifs vis-à-vis justement ce rapport que vous avez fait sur les cartes de crédit?

M. St-Amant (Jacques): On constatait deux choses essentiellement dans ce rapport-là, et je vais simplifier. D'une part, que les produits vendus sont de mauvaise qualité. Ce sont des questions qui, en soi, je pense, ne relèvent pas vraiment de l'essence du projet de loi. On peut comprendre qu'on ne les ait pas abordées outre mesure. D'autre part, ce qu'on a constaté également, c'est que les gens qui font la promotion de ces assurances-là, la plupart du temps, ne savent que modérément de quoi ils parlent. Ils ne sont pas très, très soucieux d'assurer un service à la clientèle toujours très rigoureux.

On a vu malheureusement un certain nombre de nos consommateurs qui ne savaient pas vraiment qu'ils étaient assurés ou, quand ils s'adressaient à un assureur pour faire une réclamation, on commençait par leur dire: Ah! Désolé, c'est exclu. Quand ils revenaient à la charge puis quand ils finissaient par retrouver leur attestation, là on finissait par leur donner une indemnité, après qu'ils aient insisté.

Le projet fait des efforts intéressants et appréciables en termes d'exigences de formation et d'information. Nous en sommes, ce sont des pas qui sont essentiels, qui sont utiles. Il y a un certain nombre de petites choses qu'on pourrait faire en plus, notamment préciser, par exemple, que les gens qui acquièrent des assurances de ce genre-là disposent d'un meilleur délai de résiliation. Alors, ce qui va arriver souvent, c'est qu'on s'assure puis, en revenant chez soi, on se dit: Oui, mais, dans le fond, j'avais peut-être déjà, par exemple, une assurance-voyage ailleurs qui couvrait ce risque-là puis je n'y ai pas pensé quand j'ai signé. Tout compte fait, je devrais résilier.

Il y a un certain nombre de petites choses comme ça – et on fait des recommandations particulières dans notre mémoire – qui permettraient d'améliorer encore l'encadrement de ce créneau qui risque de prendre de plus en plus d'importance, notamment parce qu'il est, pour les assureurs, pour les distributeurs extraordinairement rentable.

M. Maciocia: Est-ce que vous êtes d'accord avec des permis restreints justement dans le cas dont vous faites mention actuellement, de l'assurance-voyage ou d'autres assurances qui sont distribuées actuellement par des personnes qui n'ont aucun permis?

(17 heures)

M. St-Amant (Jacques): Il n'y a pas assez longtemps que nous nous intéressons dans le fin détail au domaine de l'assurance pour que je vous donne une réponse claire, ferme et précise. Il est certain que, plus le projet de loi, plus la loi contiendra d'exigences à l'égard de la compétence, de l'encadrement des gens qui proposent ces produits-là, plus nous serons heureux. Est-ce que ça requiert des certificats restreints? Peut-être. Il est certain que, si le gouvernement s'orientait dans ce sens-là, nous l'appuierions avec un grand plaisir. Est-ce que c'est nécessaire? Pour l'instant, je pense que nous allons réserver notre réponse.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Ça va, M. le député?

M. Maciocia: Une autre question, M. le Président, si vous permettez.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Oui, oui, allez.

M. Maciocia: Ce matin, Mme Plamondon, Service d'aide au consommateur, faisait une recommandation qui a été corroborée aussi par le représentant des consommateurs du Conseil des assurances de personnes qui est venu devant nous, et la recommandation se lisait telle quelle: Que les endroits utilisés pour la vente d'assurance dans tout cabinet, institution de dépôts ou autre soient des endroits réservés, fermés et utilisés exclusivement à cette fin. Est-ce que vous êtes d'accord avec cette recommandation-là de Mme Plamondon?

M. St-Amant (Jacques): Ça fait plein de sens.

Mme Rozon (Louise): Oui, effectivement, je pense que c'est une mesure qui pourrait favoriser la confidentialité des informations qui sont données lorsqu'on décide d'obtenir un contrat d'assurance et, en fait, ça permettrait d'avoir une plus grande confidentialité. Oui, on est d'accord.

M. St-Amant (Jacques): Ça permettrait aussi au consommateur de faire un peu mieux la distinction entre les diverses facettes de ses affaires et peut-être de mieux sentir également que, quand il souscrit à une assurance, ça n'est pas lié à l'autre contrat qu'il vient de signer ou qu'il va signer et que c'est quelque chose de différent.

M. Maciocia: O.K. Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Oui, Mme Rozon, M. St-Amant, on doit vous remercier de votre participation, mais également de votre réflexion, parce que je pense qu'un mémoire d'une quarantaine de pages contenant à peu près la même chose, une quarantaine de recommandations, est sûrement une contribution importante, significative.

Je voudrais juste réévaluer quelque chose. À ma connaissance, si j'ai bien noté, Mme Rozon a mentionné qu'avec certaines modifications assez simples ça permettrait d'améliorer très sensiblement le projet de loi. J'ai entendu ça à deux reprises. Vous, M. St-Amant, vous avez dit: J'ai lu ça, puis j'ai eu bien de la misère à comprendre et, dans certains cas, j'ai été obligé de me reprendre trois ou quatre fois avant de comprendre quelque chose.

Il y a comme un problème, là. Alors, ou bien il est exact qu'avec des retouches pas trop importantes sur le fond on améliore sensiblement la compréhension, ou bien c'est cette thèse-là qu'il faut retenir, ou bien... Qu'un spécialiste comme vous, avocat spécialisé au niveau du droit des consommateurs – que l'objectif que le consommateur s'y retrouve le plus facilement possible – nous dise en commission: Moi, je l'ai lu trois fois à certains endroits, puis je ne suis pas sûr d'avoir compris ce qu'il y avait là, ça commence à être plutôt des choses majeures. Alors, c'est quelle version que je dois retenir?

M. St-Amant (Jacques): Il y a une solution très simple à ce dilemme-là, c'est tout simplement d'enlever les quelques dispositions qui causent problème. Comme ça, il n'y aura plus de difficulté.

M. Gendron: Ah! Bien, j'ai compris, sauf que je veux avoir un jugement: Est-ce que, effectivement, sur vos quelque 36 recommandations... Dans cinq, c'est cinq virgules, parce que ça a été dit, à un moment donné, qu'à quatre, cinq places il faut changer les virgules. Pour une quinzaine de recommandations, il s'agirait, selon vous, qu'à n'apporter strictement que des éclaircissements ou des précisions, puis ça améliorerait très sensiblement la compréhension du projet de loi, pour être capable d'évaluer qu'à la fin... De toute façon, selon vous, il se peut que, sur la plupart de vos recommandations, mises à part quelques retouches sur des questions de principe, tout le reste, c'est des clarifications, des ajustements, c'est une meilleure compréhension pour que le consommateur s'y retrouve plus facilement.

M. St-Amant (Jacques): Je pense que les questions de fond, c'est les distinctions qui sont introduites par le projet entre les divers statuts. Ça, c'est vraiment une orientation qui a été prise qui complique considérablement le projet, parce que le consommateur, lui, ne s'y retrouvera jamais entre un représentant autonome, une société autonome, un cabinet, à moins qu'on mette des obligations de publicité et d'information grandes comme ça, et même encore. Déjà, si on éliminait ces distinctions-là ou si on en réduisait considérablement la portée, ça simplifierait beaucoup les choses au niveau des recours, par exemple, dont les consommateurs disposent au niveau des obligations en matière de traitement des plaintes, au niveau du droit de s'adresser au Fonds d'indemnisation. Donc, là, en quelques traits de plume – je caricature un peu – on simplifierait considérablement la vie des consommateurs.

Autre élément, on l'a dit tantôt, si on simplifiait un peu les structures d'encadrement, si on concentrait un peu plus le pouvoir, par exemple, au Bureau, là aussi, il y aurait beaucoup moins matière à ne plus trop savoir qui a compétence, comment ça va se chevaucher, comment tous ces gens-là vont s'entendre pour ne pas se contrarier trop souvent.

Alors, là où c'est compliqué, on peut simplifier facilement en disant: Il y a essentiellement un régime. Il y a des gens qui ont des certificats et qui vendent des produits et il y a une entité qui encadre ça.

M. Gendron: Est-ce que la plupart de vos recommandations, puis possiblement toutes, c'est surtout sous l'angle de la protection du consommateur presque exclusivement qu'elles ont été appréciées ou si, dans certains cas, vous étiez assez informés dans ce domaine-là pour savoir que, dans certaines propositions, c'est suite à l'évolution des cultures des uns et des autres, dans certains cas, c'est suite à des ouvertures qui ont été faites parce qu'il semblerait que certains étaient, et de loin, insatisfaits de ce qui se passait en termes d'évolution du projet de loi? En termes très clairs, exemple, les deux chambres, vous avez donné des précisions, à ma connaissance, c'était un réflexe normal, compte tenu de ce que vous êtes, uniquement axées sous l'angle du consommateur. On se comprend-tu? Est-ce qu'il est arrivé que cet angle-là a été un peu écarté et que vous avez des recommandations qui apprécient également un point de vue, par vous, sur des choses qui ne sont pas nécessairement regardées uniquement sous l'angle du consommateur?

M. St-Amant (Jacques): Notre vocation, c'est d'être une association de consommateurs et donc d'apporter ce point de vue là et d'éclairer, de cette façon-là, vos délibérations. Cela dit, nous sommes aussi des citoyens et puis on peut à l'occasion voir autre chose et le mentionner. Mais la coloration, bien sûr, c'est le point de vue d'une association de consommateurs qui essaie d'être éclairée.

Mme Rozon (Louise): Mais c'est sûr qu'on n'a pas participé dans le cadre de toute l'élaboration, de toutes les discussions qui ont amené au dépôt du projet de loi. On n'a pas été impliqués dans tous ces débats-là. Donc, c'est sûr qu'on n'a peut-être pas un éclairage très élevé, là, par rapport à tous les enjeux qui entourent les différentes professions.

M. Gendron: Pour des responsabilités plus précises, à un moment donné, au niveau du Bureau, vous avez dit: Nous, on souhaiterait qu'effectivement ce ne soit pas... on va regarder ça, mais que ce soit: le législateur oblige que le Bureau, sur certains éléments, statue, si vous me permettez l'expression. Lorsque vous faites cette recommandation-là, est-ce que c'est parce que vous avez la conviction que, sur certains éléments liés à une loi comme on discute, il faut obligatoirement que le consommateur ait des garanties de protection? Et, en conséquence, s'il y a obligation de faire, bien, à ce moment-là, on dit: Au mérite pur, normalement le consommateur est plus protégé. Est-ce que c'est ça qui vous a guidé?

M. St-Amant (Jacques): Oui, parce qu'on a affaire ici à un projet de loi cadre qui, dans beaucoup de domaines, dit essentiellement qu'il y a quelqu'un, en quelque part, qui va adopter des règlements sur... On veut bien présumer de la qualité de ces règlements-là et de la célérité de ces institutions, mais, pour l'instant, on ne sait pas ce qu'on évalue. Ce qu'on sait aussi quand on regarde l'histoire des organismes du même genre au Québec, c'est qu'il y en a qui oublient parfois ou qui n'ont pas encore eu le temps d'exercer les compétences réglementaires qu'ils ont. Et j'ai en tête quelques exemples d'organismes mis sur pied en 1994 qui ont des pouvoirs réglementaires qu'ils n'ont toujours pas exercés, même à l'égard de choses qui sont touchées par le projet de loi, d'ailleurs.

Alors, il y a au moins un certain nombre de domaines où, nous semble-t-il, il faut absolument qu'il y ait des règles. Ou bien, idéalement, elles sont dans la loi elle-même ou il y a, à tout le moins, un plancher qui est fixé dans la loi, quitte à ce que, par règlement, on ajoute ou bien on s'assure qu'il y aura vite des règlements, et de préférence des règlements potables.

M. Gendron: Dernière question pour moi. Dans une loi qui touche la distribution des produits et services financiers, et je ne sais pas si vous étiez ici au moment où ça a été évoqué par d'autres, ça comporte plusieurs cases, plusieurs offres de produits, autant dans la sorte des produits que dans la façon de le faire. Là, je ne reprends pas tout ce que ça peut couvrir, mais je sais que ça touche énormément de contribuables dans le monde que vous connaissez. Si on vous posait une question par rapport à un jugement porté globalement sur le nombre de plaintes eu égard... Je ne veux pas de chose précise. Globalement, est-ce que vous avez des chiffres? Il y a 15 % des consommateurs qui se plaignent que, quand on discute de distribution des produits et services financiers... Il y a 25 % des consommateurs qui trouvent que ça n'a pas de bons sens, ils ne sont pas satisfaits, c'est mal... C'est quoi, votre point de vue par rapport à un jugement quantitatif que vous porteriez sur le nombre de consommateurs qui se disent non adéquatement protégés, eu égard à ce qu'on discute?

(17 h 10)

M. St-Amant (Jacques): L'Association des consommateurs du Québec, qui est un organisme distinct du nôtre, a réalisé il y a un an et demi, à peu près, un sondage pancanadien sur la perception qu'avaient les gens de l'industrie de l'assurance. Malheureusement, je n'ai pas les chiffres précis en tête. Il y avait des proportions considérables, de l'ordre de 60 % et plus des gens qui étaient tout à fait insatisfaits des relations qu'ils avaient, par exemple, avec leur assureur en cas de plainte ou de réclamation. Il suffit de parler aux citoyens pour se rendre compte que personne n'y comprend rien.

Dans le cadre de la petite étude que nous avons faite sur les assurances liées aux cartes de crédit, il y a des gens qui nous ont appelés et qui nous ont dit: Écoutez, moi, j'ai une carte de crédit, mais je ne sais pas trop si je suis assuré. Moi, j'ai une carte de crédit et, maintenant que je vois votre petit papier ou que vous invitez des gens à se renseigner là-dessus, je me rends compte que, oui, je suis assuré; j'avais une réclamation, puis je ne l'ai même pas faite, je n'avais pas réalisé que j'étais assuré. Il y a des gens qui nous ont dit, également: Je me pensais assuré et j'ai appris que je ne l'étais pas, il y avait un trou quelque part dans la police; ou qui nous ont dit: Il a fallu que je m'y reprenne à quatre fois pour qu'un assureur finisse par me donner ce à quoi j'avais droit. Il y a beaucoup d'insatisfaction, c'est assez clair.

Mme Rozon (Louise): Je pense qu'il y a beaucoup de gens, de consommateurs qui, finalement, vont critiquer le milieu de l'assurance en disant: On paie pendant des années et, quand vient le temps de faire une réclamation, on va souvent trouver toutes sortes de raisons pour dire: Ah, bien vous n'êtes pas couvert. Ça, c'est une fuite d'eau continue du toit et ça ne couvre pas les dommages, c'est exclu dans la police d'assurance. Et ça, je pense que ça crée énormément d'insatisfaction.

Aussi, lorsque les gens s'adressent à leur compagnie d'assurances, souvent ils ont le sentiment d'être jugés, comme si la compagnie d'assurances n'avait pas confiance en eux, et on va douter de leur parole. Donc, ça, ça crée énormément d'insatisfaction de la part des consommateurs quand ils s'adressent à leur compagnie d'assurances, entre autres, pour faire une réclamation.

M. Gendron: Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le député d'Abitibi-Ouest. En terminant, M. le député de l'Acadie. Il reste quelques minutes à votre formation.

M. Bordeleau: Juste une question. À la page 31 de votre mémoire, vous faites part d'une inquiétude que vous avez à l'égard de la protection des consommateurs dans les cas où les cabinets coupent les engagements qu'ils ont vis-à-vis certains de leurs représentants, et ce, au niveau de la responsabilité que le cabinet aurait à assumer. C'est en rapport avec l'article 86. Est-ce que vous pourriez – parce que c'est la première fois, je pense, que ce point-là nous est mentionné – nous l'expliquer? C'est à la page 31 de votre mémoire et ça réfère à l'article 86. Est-ce que vous pourriez nous donner plus d'explications, un petit peu, sur l'inquiétude que vous avez et la façon dont vous lisez l'article 86 tel qu'il est rédigé présentement?

M. St-Amant (Jacques): À la vérité, je ne sais pas comment lire l'article 86, ce qui est justement mon problème. Parce qu'on dit, en gros: «Un cabinet qui met fin à ses engagements avec un représentant doit en aviser immédiatement le Bureau.» Et, troisième alinéa: «Le cabinet qui informe le Bureau de ces motifs n'encourt aucune responsabilité civile.»

Il n'encourt aucune responsabilité envers qui? Parce que, pris à la lettre, ça va très, très loin, ce texte-là. Ça veut dire que, moi, cabinet, j'ai un représentant qui a fait des bêtises, je l'ai mis à la porte, j'ai avisé le Bureau, je n'encours plus aucune responsabilité civile, y compris envers les clients, envers les consommateurs? Je ne pense pas que c'est ce qu'on voulait faire, mais je pense qu'il serait fort utile de préciser ce qu'on voulait faire, par exemple, parce que le texte, là-dessus, est un peu large.

J'imagine qu'on voulait dire que le cabinet n'encourait pas de responsabilité envers le représentant parce qu'il a prévenu le Bureau qu'il l'a mis dehors parce que... J'imagine que c'est ce qu'on veut viser, mais on l'a fait d'une façon qui est très, très, très large et qui pourrait être interprétée de façon tout à fait préjudiciable à des consommateurs.

M. Bordeleau: Alors, vous souhaiteriez que ça soit clarifié dans l'esprit de la protection des consommateurs pour que les gens aient quand même des garanties que le cabinet demeure toujours responsable des gestes qu'a posé un ce ses représentants au moment où il travaillait pour le cabinet.

Mme Rozon (Louise): Exactement, c'est ça.

M. St-Amant (Jacques): Voilà, exact.

M. Bordeleau: Parfait. Je vous remercie.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le ministre, une petite question.

M. Landry (Verchères): Je ne voudrais pas que vous nous quittiez en pensant qu'on a oublié totalement votre recommandation sur la distribution purement électronique des produits d'assurance. Vous avez parfaitement raison de souligner ce fait. Ça illustre que les faits vont plus vite que le droit.

Nous avons déjà, il y a quelques mois, mis sur pied un comité d'étude composé du sous-ministre des Finances, de l'Inspecteur général des institutions financières, du président de la Commission des valeurs mobilières du Québec, du président de l'Office de la protection du consommateur et qui va nous faire rapport au printemps, c'est-à-dire dans quelques semaines, sur ce nouvel aspect et cette nouvelle problématique dont nous prendrons compte dans nos lois en temps et lieu. Tout ça est arrivé trop vite pour que le rapport quinquennal ait pu vraiment aborder le sujet, mais c'est une préoccupation que vous faites bien de mettre en lumière. Merci

Mme Rozon (Louise): Merci. On fera nos représentations auprès de la présidente de l'Office, à ce moment-là, concernant ces questions-là.

M. Landry (Verchères): Ah bon, très bien.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): On vous remercie, M. St-Amant, Mme Rozon.

Mme Rozon (Louise): Ça nous fait plaisir.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Je remercie également les membres de la commission d'avoir eu, durant toute la journée, une écoute des plus attentives. Et, sur ça, j'ajourne les travaux à demain, 9 h 30, le 25 février, dans la même salle.

(Fin de la séance à 17 h 15)


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