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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le mercredi 25 février 1998 - Vol. 35 N° 36

Consultations particulières sur le projet de loi n° 188 - Loi sur la distribution de produits et services financiers


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Table des matières

Auditions


Autres intervenants
M. Jacques Baril, président
M. François Gendron
M. Cosmo Maciocia
M. Jean Campeau
Mme Monique Gagnon-Tremblay
Mme Nicole Léger
M. Yvan Bordeleau
M. Lawrence S. Bergman
M. Bernard Landry
M. Yves Blais
*M. Jean Martel, CVMQ
*M. Alain Gélinas, idem
*M. Daniel Laurion, idem
*M. Denis Guay, MCQ
*Mme Nicole Fontaine, OPC
*M. Jean-Yves Desrosiers, Regroupement des victimes
des caisses populaires inc.
*M. Serge Dion, idem
*M. Claude Steben, idem
*M. Michel Beaudry, idem
*Mme Anne-Marie Girard-Plouffe, IQPF
*M. Paul-André Comeau, CAI
*M. André Ouimet, idem
*M. Simon Lapointe, idem
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Neuf heures trente-sept minutes)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): À l'ordre, MM. les membres de la commission. La commission des finances publiques est réunie afin de poursuivre la consultation particulière sur le projet de loi n° 188, Loi sur la distribution de produits et services financiers.

M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements qui vous ont été suggérés?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. J'informe les membres de la commission que M. Bergman (D'Arcy-McGee) remplace M. Bourbeau (Laporte).

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci. Les membres ont devant eux l'ordre du jour; je pense que ce n'est pas nécessaire que je leur fasse la lecture. Est-ce que l'ordre du jour est adopté tel que présenté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Adopté.

Nous avons essayé autant que possible d'accommoder les gens, les visiteurs, nos nombreux visiteurs, nous avons aménagé dans une salle à côté un système de son et les gens pourront quand même écouter les échanges, entendre les échanges que nous ferons avec nos invités. Comme je faisais en farce tout à l'heure, ils seront privés, par contre, de la physionomie des membres de la commission. Mais je pense que ce qui est important, d'abord, c'est de prendre connaissance des discussions et des échanges qu'il y aura entre les parlementaires et les groupes d'invités.

Sur ça, monsieur... j'allais dire M. le ministre, mais M. le député d'Abitibi-Ouest aurait quelques mots à ajouter.

M. Gendron: Oui, chers membres de la commission, invités, gens intéressés par le débat que nous poursuivons, je dois excuser ce matin l'absence du ministre des Finances, M. Bernard Landry, qui, dans sa responsabilité de vice-premier ministre, compte tenu que M. Bouchard est à l'extérieur cette semaine... Tout le monde sait qu'il a toujours été de coutume que le Conseil des ministres se réunit tous les mercredis, c'est le cas encore aujourd'hui, et, a fortiori, quand le premier ministre n'est pas là, le rôle du vice-premier ministre, c'est de présider le Conseil des ministres. Alors, M. Landry m'a demandé cet avant-midi de le remplacer, compte tenu de ce que je viens de vous dire. Moi, je tenais à vous informer qu'il s'excusait de ne pas pouvoir être des vôtres. Soyez assurés cependant que je serai encore peut-être triplement attentif pour être certain que j'entends bien les messages et je m'engage, pour la partie dont il m'a demandé d'assumer cette présence, à lui transmettre l'ensemble des commentaires que j'entendrai. On va procéder comme on l'a fait hier, avec beaucoup d'écoute, et j'espère que ce sera peut-être le Conseil des ministres le plus court pour que vous puissiez bénéficier de sa présence rapidement. Parce que, à coup sûr, ce matin, je pense que ça va être impossible, mais il devrait être des nôtres au début de l'après-midi. Bonne journée!

(9 h 40)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le député. Maintenant, je souhaite la bienvenue à nos invités, les représentants de la Commission des valeurs mobilières du Québec, et je demanderais à son président, M. Jean Martel, de bien vouloir nous présenter les personnes qui l'accompagnent et nous faire part de son mémoire.


Auditions


Commission des valeurs mobilières du Québec (CVMQ)

M. Martel (Jean): Merci, M. le Président. Effectivement, permettez-moi d'abord de vous présenter les gens qui m'accompagnent ce matin: à ma gauche, M. Daniel Laurion, qui est chef du bureau des commissaires, à la Commission des valeurs mobilières du Québec; à ma droite, Alain Gélinas, qui est avocat chez nous et qui est également chef du bureau du chef de l'exploitation à la Commission.

M. le Président, la Commission des valeurs mobilières joue, depuis plus de 30 ans, le rôle de régulateur des marchés de valeurs mobilières du Québec. Essentiellement, notre mission est de nous assurer que ces marchés fonctionnent bien, pour paraphraser le texte de notre loi organique, la Loi sur les valeurs mobilières. Ceci nous amène à poursuivre trois objectifs: l'efficacité et le développement de nos marchés, l'encadrement des intermédiaires en valeurs mobilières par l'application de règles et normes, ainsi que la protection de l'investisseur, notamment par l'accès à l'information dont il a besoin pour prendre ses décisions d'investissement.

Cette mission nous appelle aussi à superviser l'activité des organismes d'autoréglementation. On les appelle les OAR, dans notre jargon, et c'est un groupe où l'on retrouve des associations dites professionnelles du marché, selon le langage qui est utilisé par le législateur dans notre loi, des marchés organisés, comme la Bourse de Montréal, et des chambres de compensation d'opérations sur valeurs. Ce sont là des organismes que la Commission reconnaît à des fins d'autoréglementation et auxquels elle délègue certains de ses pouvoirs afin de permettre au milieu de se prendre en main. Ce mandat qui nous est confié, M. le Président, est donc très large et, avec les moyens d'action dont nous disposons, il nous permet de suivre et de réagir plus facilement aux mutations rapides et constantes de l'industrie des services financiers. Nous servons ainsi la capitalisation des entreprises présentes chez nous, la gestion fructueuse des épargnes de nos concitoyens, la santé de notre système financier et, par voie de conséquence, l'économie du Québec dans son ensemble.

M. le Président, la Commission des valeurs mobilières du Québec a décidé de prendre part au débat auquel donne lieu le projet de loi n° 188 sur la distribution de produits et services financiers parce que, au-delà du fait qu'elle considère absolument nécessaire de procéder à la restructuration du secteur de l'intermédiation de marché au Québec, elle estime que ce secteur n'a pas les moyens qu'on y procède autrement que de la meilleure façon. Nous pensons que notre organisation peut vous aider et peut aider le gouvernement à y parvenir.

Forcément, nous avons un intérêt institutionnel, pour ainsi dire, dans l'avenir du secteur des intermédiaires qui agissent eux-mêmes à l'acquis des investisseurs et dans l'avenir des organisations qui, comme le Bureau des services financiers, joueront un rôle d'infrastructure du marché au cours des années qui viennent. Le projet de loi n° 188 est au coeur de cet avenir, puisque, en effet, ses dispositions instaureront un ordre nouveau dans un des secteurs les plus dynamiques du marché des valeurs mobilières, celui des fonds mutuels. Il ramènera ainsi le monde du courtage en épargne collective sous une nouvelle structure administrative ayant un caractère d'OAR en quelque sorte, le Bureau des services financiers, lequel administrera les règles adoptées en la matière par notre Commission. De plus, le projet de loi confiera à la CVMQ une certaine supervision de cette nouvelle structure pour ce qui a trait au volet de sa mission qui touche les valeurs mobilières.

Le mémoire que nous vous avons soumis, M. le Président, exprime généralement notre satisfaction face à un exercice législatif qui nous apparaît rechercher un équilibre optimal et qui est manifestement soucieux de réconcilier les intérêts divers, pour ne pas dire divergents, qui continuent de se confronter à l'heure actuelle au sujet de la vision véhiculée par le projet de loi n° 188. Nous accordons cet appui, il va sans dire, en fonction de notre domaine de compétence, en portant donc une attention spéciale aux matières qui intéressent le secteur des valeurs mobilières tant directement qu'indirectement, et nous confirmons, sans pour autant nous fermer, évidemment, aux améliorations, que le texte actuel du projet de loi n° 188 nous occasionnera un niveau, je dirais, tolérable, gérable de difficultés dans la poursuite de notre mission.

Plus globalement, nous constatons en outre que le projet de loi n° 188 a le potentiel requis pour faciliter la poursuite de plusieurs politiques québécoises que nous jugeons vitales pour le secteur des valeurs mobilières. Ainsi, les orientations qui y sont traduites présentent, selon nous, le potentiel requis pour amener une réduction du fardeau réglementaire, pour contribuer à une simplification de l'encadrement normatif et, enfin, pour remédier aux multiples inconvénients découlant de ce que nous percevons comme étant une surabondance d'organismes de réglementation institués il y a bientôt 10 ans par la Loi sur les intermédiaires de marché.

Permettez-moi, M. le Président, de revenir sur le mémoire que nous vous avons présenté afin de mettre en lumière certains points saillants. Nous sommes d'avis, et cela a été affirmé dès l'introduction du mémoire, que le projet de loi offre une réponse adéquate aux enjeux fondamentaux soulevés par l'évolution du secteur des services financiers, et cela, tant sur le plan de la protection du consommateur ou de l'investisseur que sur celui de l'efficacité des marchés. Il nous apparaît en particulier que l'intégration entre le marché des produits d'assurance de personnes et celui des valeurs mobilières ainsi que le besoin qui en découle de soumettre les joueurs concurrents à des règles suffisamment identiques ont joué un rôle déterminant dans le choix des mesures présentées dans le projet de loi. C'est, à notre avis, ce qui rend souhaitable la création d'une seule et même autorité d'autoréglementation ou de surveillance, comme le Bureau des services financiers, à l'égard des intermédiaires qui poursuivent des activités autant en assurance que dans le domaine des fonds communs de placement.

Nous remarquons cependant que le projet de loi ne prévoit pas l'obligation pour un représentant en assurance d'être rattaché à un cabinet doté de la personnalité juridique, responsable des gestes de ses intermédiaires, pleinement assuré et obligé à la supervision de son personnel. On sait que ces obligations existent déjà dans le secteur des valeurs mobilières et qu'elles sont maintenues par le représentant en épargne collective. Nous ne comprenons pas pourquoi on établit des règles moins exigeantes pour le représentant en assurance qui distribue les fonds distincts d'un assureur alors que ce produit est tout à fait semblable aux fonds communs de placement. Pourquoi moins bien protéger le consommateur qui investit dans le fonds distinct d'un assureur par rapport à celui qui investit dans un fonds mutuel?

Nous faisons aussi remarquer à notre mémoire, comme je le soulignais tout à l'heure, que le projet de loi dans sa forme actuelle contient un train de mesures susceptibles de favoriser une plus grande efficacité du marché par la réduction significative du fardeau de la réglementation. Mais, comme le partage des responsabilités entre le Bureau et les Chambres ne semble pas faire l'unanimité, nous recommandons cependant la prudence face à toute velléité d'impliquer davantage les Chambres dans l'exercice des fonctions de réglementation et de surveillance qui sont nécessaires à la mise en oeuvre du projet de loi. Car, selon nous, elles ne constituent pas une base suffisamment stable pour asseoir de telles fonctions, du moins en ce qui a trait au secteur des valeurs mobilières et au marché où celles-ci sont transigées.

Cela dit, au climat quelque peu tumultueux – à tout le moins, c'est ce qu'on en dit dans le public. Remarquez bien que je trouve qu'il n'y a pas de tumulte ici aujourd'hui – mais considérant les suggestions diverses d'amendements au projet de loi qui vous ont été adressées, il est apparu opportun à notre Commission de tenter de donner plus de relief à ces préoccupations de régulateur de marchés, car, après tout, ce sera à elle qu'il appartiendra ultimement de réaliser les objets de cette loi en ce qui a trait à notre secteur.

(9 h 50)

M. le Président, il nous apparaît souhaitable, dans le cadre de l'élaboration d'une législation comme le projet de loi sur la distribution de produits et services financiers qui touche tant d'acteurs du secteur, de rechercher les consensus les plus larges possible. C'est probablement une condition préalable au succès d'un tel exercice et, manifestement, je pense que vous l'avez bien compris. Cependant, nous croyons qu'une telle démarche doit également prendre en compte les défis administratifs que peut poser une telle loi pour des organismes qui, comme le futur Bureau des services financiers ou la CVMQ, seront appelés à l'administrer. Ces défis sont en effet de plus en plus imposants – il faut l'avouer – depuis que les régulateurs d'un monde financier sans frontières, où s'expriment une multitude de fournisseurs de services et de distributeurs de produits, n'ont plus le choix que d'ajuster leur règles internes en fonction de celles qui sont appliquées dans les autres juridictions. C'est encore plus vrai pour le Canada où les marchés de valeurs mobilières sont fortement intégrés et où la compétence en ce domaine est exercée par les provinces.

De l'expérience acquise au cours des dernières années dans l'application de la Loi sur les valeurs mobilières, nous dégageons trois principes qui devraient, selon nous, vous guider dans votre réflexion sur le projet de loi n° 188.

Le premier principe fait écho à ce que je viens d'indiquer. C'est qu'aujourd'hui, dans l'espace économique canadien, l'activité d'intermédiation de produits et services financiers ne peut être envisagée à la lumière du seul contexte québécois. Au terme de vos consultations, M. le Président, on se sera infailliblement réclamé, à plusieurs reprises sans doute, de la globalisation de la fonction d'intermédiation de marché pour tirer les conclusions qui, prétendument, répondent parfaitement aux besoins québécois et qui devraient donc vous guider aux fins du projet de loi n° 188.

Or, je vous ferai remarquer que cette même dialectique impose aussi de réaliser qu'aujourd'hui les besoins québécois en matière d'industries et de services financiers ne peuvent être satisfaits de façon durable que si les solutions retenues sont raisonnablement compatibles avec les solutions réglementaires retenues par nos voisins et nos partenaires commerciaux. Le législateur doit être visionnaire et, nous semble-t-il, se garder des politiques réglementaires qui, en dernière analyse, sont incapables de réconciliation ou d'harmonisation avec celles des juridictions où notre secteur financier entretient des échanges. De même, les structures organisant la réglementation du secteur doivent être conçues de telle manière que leur administration respective puisse s'arrimer assez facilement. C'est le prix à payer pour avoir les moyens d'éliminer les duplications et contrôler les coûts réglementaires, deux conditions préalables à la compétitivité des acteurs. C'est aussi la porte d'accès aux marchés extraprovinciaux, ce qui est bien important dans le monde décloisonné et, comment dirais-je, internationalisé dans lequel nous avons à évoluer du point de vue des produits et services financiers.

Nous avons dégagé un deuxième principe des 10 ans d'application de la Loi sur les intermédiaires de marché. Et là, M. le Président, je ne pense pas que, lorsqu'on fait cette lecture-là, on parle à travers notre chapeau. La Loi sur les intermédiaires de marché a quand même rapproché beaucoup les intermédiaires de marché, les intermédiaires en valeurs mobilières et ceux qui sont actifs dans les autres secteurs. Ça nous a donc, en quelque sorte, appelés à apprivoiser cette loi-là, et je pense qu'on est capables quand même d'en arriver à certains constats.

Le deuxième principe est que la multiplicité des OAR, des organismes d'autoréglementation, alliée à un partage de responsabilités qui les incite à la concurrence, est certainement propice à l'escalade dans l'exercice des pouvoirs réglementaires. À terme, cela débouche sur une complexité plus grande du cadre normatif. Cette dynamique complique singulièrement la vie du réglementé, celui qui a à vivre avec ça, du régulateur qui est chargé de superviser les organismes d'autoréglementation et même celle du gouvernement qui se retrouve souvent obligé d'intégrer lui-même les normes provenant des différents OAR, donnant parfois lieu à des arbitrages douloureux pour le milieu.

M. le Président, nous ne remettons aucunement en question la bonne foi des intervenants et le fait qu'ils aient à coeur, tout comme nous, l'intérêt du consommateur. Ce que nous disons, c'est que le bilan d'application de la Loi sur les intermédiaires de marché démontre qu'elle a donné naissance à ce que j'appellerais pratiquement un labyrinthe réglementaire qui a été porté par une structure sectorielle qui était diffuse et dont la gouverne a été, à l'occasion, perturbée, je dirais même dans certains cas presque paralysée, par le choc des idées entre les différents intervenants. On ne peut pas s'empêcher de croire qu'il y ait eu des coûts à ça, des coûts sociaux, des coûts économiques, compétitivité, efficacité, je pense que c'est un fait. Cette expérience de l'application de la loi 134 parle par elle-même et je pense qu'elle est suffisamment éloquente pour inciter à la prudence en ce qui a trait au projet de loi n° 188.

C'est pourquoi nous jugeons capital de retenir, au niveau de la direction du Bureau des services financiers et de l'exercice de ses pouvoirs d'autoréglementation, une structure décisionnelle qui soit davantage un gage de stabilité et d'efficacité plutôt qu'un gage d'instabilité. Pour y parvenir, nous croyons qu'il faut marier les différentes cultures du secteur plutôt que de céder à l'envie d'accorder la priorité à une culture donnée au détriment des autres. Il ne faut pas, selon nous, imposer la réinvention de choses qui fonctionnent déjà très bien.

Enfin, nous avançons un troisième principe. C'est que le souci de protéger la juridiction du Québec en valeurs mobilières doit pouvoir s'exprimer dans l'assurance que ce secteur demeure ouvert sur l'extérieur tant pour que nos intermédiaires puissent y ramifier leurs opérations que pour permettre aux investisseurs québécois de bénéficier de la concurrence d'origine extraprovinciale. Doivent être privilégiées les solutions qui offrent à l'investisseur québécois la possibilité d'obtenir au Québec des services financiers à des coûts qui, par rapport à ceux qu'il peut obtenir à l'extérieur du Québec, demeurent compétitifs. De même, selon la Commission, la réponse réglementaire à l'activité de marchés qui sont intégrés, comme les marchés canadiens, doit être également intégrée au même titre, puisque, face à un système de réglementation qui est incohérent ou inefficace parce que peu soucieux de ce qui se passe en dehors de son territoire, la menace puis – parce que, en fait, cela, par le fait même, rend incohérent et inefficace l'ensemble de ce que j'appellerais le réseau pancanadien d'autorités en valeurs mobilières... je pense que la menace d'une structure fédérale de réglementation des valeurs mobilières peut revenir nous hanter assez rapidement.

Une fois ces principes posés, M. le Président, en quoi sont-ils pertinents à votre réflexion sur le projet de loi sur la distribution de produits et services financiers? Quant à nous, l'application de ces principes à ce que j'appellerais la problématique du projet de loi n° 188 permet de dégager certaines conclusions qui devraient être autant de paramètres à suivre. Les voici.

D'abord, les conditions institutionnelles dans lesquelles le Bureau des services financiers aura à s'acquitter de sa mission et à exercer ses pouvoirs en valeurs mobilières devraient être suffisamment flexibles. Il faut se garder, nous semble-t-il, des modèles trop complexes et qui, même s'ils ont l'heur d'accommoder certaines situations, peuvent devenir très rapidement ingouvernables.

La structure retenue devrait, dans tous les cas, réserver à la CVMQ une capacité de superviser efficacement les activités du Bureau et lui fournir les moyens d'agencer son action en matière de valeurs mobilières avec celle des autres OAR appelés à interagir avec lui dans le même secteur ou dans un secteur connexe, et ce, tant au Québec qu'à l'extérieur du Québec.

Troisièmement, la CVMQ devrait être l'agent exclusivement chargé d'élaborer les règles et normes destinées à encadrer l'activité des intermédiaires en valeurs mobilières qui seront à la fois assujettis à sa juridiction et à celle du Bureau.

Et, enfin, le Bureau devrait être structuré d'une manière qui ne mette pas en péril sa capacité d'être dirigé efficacement et d'être ainsi en mesure de s'acquitter fidèlement, objectivement et impartialement de ses responsabilités d'administration des règles que nous aurons élaborées.

Si le législateur se détourne de ces paramètres, contrairement à ce que propose l'actuel projet de loi n° 188, le cadre réglementaire institué en conséquence pourrait vraisemblablement devenir impropre à remplir les fins auxquelles on le destinait, pour le plus grand bien du secteur des intermédiaires. Permettez-moi, M. le Président, de vous donner quelques exemples concrets tirés de notre table de travail, lesquels illustrent cet avancé.

(10 heures)

Comme vous le savez, M. le Président, l'une des politiques les plus constantes des gouvernements québécois dans le secteur financier depuis les années quatre-vingt a été de promouvoir l'harmonisation des normes et règles régissant le commerce et l'activité en valeurs mobilières. C'est une politique qui est littéralement entrée dans les moeurs pour la simple et bonne raison que, sans harmonisation, les concepts d'union économique, d'élimination des barrières au commerce intérieur, de libre circulation des services d'intermédiation en valeurs mobilières, même, jusqu'à un certain point, le cumul des permis, tout ça n'aurait que peu d'applications pratiques, s'il n'y avait pas d'harmonisation. En vertu du projet de loi, les représentants d'épargne collective qui oeuvrent au sein de cabinets de courtage en valeurs mobilières de plein exercice demeureront assujettis à la réglementation actuelle ainsi qu'au régime d'autoréglementation par OAR reconnu en vertu de la Loi sur les valeurs mobilières. Ce sera donc un beau défi pour la Commission que de s'assurer qu'en tout temps les normes applicables au représentant en fonds mutuels rattaché à un courtier de plein exercice ne soient pas substantiellement différentes de celles qu'on établira à l'intention du représentant d'exercice restreint en fonds mutuels qui, lui, tombera sous la juridiction du Bureau des services financiers. Si ces normes-là, qui s'appliquent à ces deux intervenants qui sont en concurrence, ne sont pas harmonisées, il en résultera éventuellement des déséquilibres concurrentiels qui seront inéquitables pour l'un ou l'autre groupe.

De même, l'administration des normes établies par la Commission, qui relèvera, selon le cas, du Bureau ou d'un OAR reconnu en vertu de la Loi sur les valeurs mobilières, devra être l'objet d'une supervision assez serrée de la part de la Commission pour s'assurer que l'un ou l'autre organisme ait une action cohérente dans son application des règles. Dans le cas contraire, on risque là de laisser se développer des biais réglementaires qui viendront fausser les conditions de concurrence. Autrement dit, c'est bien beau d'avoir des règles similaires pour deux intervenants qui sont assujettis à la surveillance de deux intervenants, mais, si les intervenants, le Bureau ou l'Association des courtiers en valeurs mobilières, par exemple, ont une façon différente d'appliquer les mêmes règles, bien, il va en résulter des inéquités, c'est certain. Et ça, il faut prévenir ça, sans ça on se trouve à favoriser des conditions qui vont affecter la concurrence.

Les deux situations que nous venons d'aborder se compliquent sensiblement, selon ce que l'on se propose de faire dans un environnement multijuridictionnel, par exemple dans l'ensemble du marché canadien. Dans le domaine des fonds mutuels où les compagnies de fonds sont en grande majorité torontoises, c'est tout naturel de se préoccuper de ça. À cet égard, nous croyons qu'il sera possible de réaliser un travail de réglementation qui soit suffisamment cohérent à l'échelle canadienne, mais il ne faut pas se surprendre qu'à l'occasion il y ait des choses dans la réglementation qui soient là non pas pour répondre à des besoins strictement québécois, mais pour assurer une certaine capacité de faire affaire dans plusieurs juridictions.

Par ailleurs, et ça, je pense que c'est très important, c'est quelque chose qu'on tenait absolument à souligner, c'est que les autres provinces canadiennes sont à créer, dans le reste du pays, un organisme d'autoréglementation conjoint qui est issu – «conjoint», c'est-à-dire qu'on dit qui aura juridiction éventuellement dans le reste du Canada... C'est un organisme qui va être issu d'un rapprochement entre l'Institut des fonds d'investissements du Canada et l'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières. Ce nouvel OAR, lorsqu'il sera reconnu par les autres autorités canadiennes en valeurs mobilières, deviendra donc, par la force des choses, un partenaire important du Bureau dans sa fonction de supervision des représentants qui font affaire dans plusieurs provinces, dont le Québec. Il faut souligner, M. le Président, que ce nouvel OAR du reste du pays fonctionnera sur des bases très classiques par rapport à la pratique d'autoréglementation généralement reconnue dans le secteur des valeurs mobilières. Le travail d'arrimage à réaliser pour faire en sorte que les deux organisations puissent se comprendre, dans un premier temps, et collaborer efficacement, dans un deuxième temps, c'est un travail qui va être probablement laborieux et certainement crucial pour l'avenir, je pense, du secteur d'intermédiation.

Dans cette perspective, il est clair qu'il y aura avantage à limiter l'innovation gratuite dans la structure du Bureau si l'on veut que, pour ce qui concerne le secteur des valeurs mobilières à tout le moins, il puisse jouer un rôle bénéfique au Québec sur le plan national. Si sa nature et sa dynamique administratives sont trop étrangères au modèle d'OAR auquel les groupes d'industries sont habitués, sa capacité d'interagir fructueusement avec ces autres organismes sera beaucoup trop limitée et ça affectera certainement, je pense, l'influence du Bureau dans l'avenir de la réglementation sur une base inter... ou multilatérale, ou interjuridictionnelle au Canada. Ça, je pense que c'est bien important.

Un dernier point sur lequel j'aimerais insister, si vous me le permettez, M. le Président, porte sur les mécanismes d'indemnisation qui sont mis en place par le projet de loi n° 188. Ces mécanismes préoccupent beaucoup les autres groupes d'industries et autorités en valeurs mobilières au Canada parce que, justement, on est à créer le nouveau modèle commun d'autoréglementation pour le reste du pays. Alors, on sait qu'ailleurs cet organisme sera relié au Fonds canadien de protection des épargnants qui, jusqu'ici, a joué un rôle d'indemnisation pour les cabinets de courtage en valeurs mobilières qui sont membres de l'ACCOVAM ou de l'une des quatre bourses canadiennes. C'est donc dire que le Fonds de protection des épargnants, c'est un organisme qu'on a reconnu en vertu de notre loi et qui est présent au Québec. Donc, déjà, on s'interroge sur les situations dans lesquelles pourront se retrouver les courtiers et représentants opérant dans plus d'une province, dont le Québec, plus particulièrement quant à la couverture des responsabilités dont ils pourront se représenter bénéficiaires. Et on soulève une problématique qui n'est pas sans rappeler celle de l'assurance des dépôts, parce que, en fait, l'assurance des dépôts, pour plusieurs institutions financières qui en recueillent, ça a été souvent utilisé pratiquement comme une représentation de nature à rassurer les clients, en disant: Regardez, nous, on est assurés autant par la Société d'assurance-dépôts du Canada que par la Régie de l'assurance-dépôts du Québec, donc, c'est beaucoup plus sécure chez nous qu'ailleurs. Alors, si on a des divergences trop importantes sur le plan de la reconnaissance des dépôts, il risque d'avoir le phénomène un peu semblable.

Donc, M. le Président, le projet de loi n° 188, c'est une législation qui est technique, qui est complexe, qui est spécialisée, mais qui respecte quand même une logique qui est très similaire à celle qui est sous-jacente à la Loi sur les valeurs mobilières. C'est celle qui veut que la vérité se trouve probablement au point de jonction des meilleurs intérêts du public, prestataires de services et consommateurs de produits financiers, des intermédiaires, qui sont les traits d'union rémunérés entre investisseurs et producteurs financiers, et les sociétés – donc, dans notre cas, les sociétés de fonds mutuels – qui sont en quête d'actifs à gérer moyennant rémunération. Autrement dit, il faut viser un juste équilibre entre les besoins de chaque groupe d'intervenants et les besoins du système financier lui-même.

La Commission des valeurs mobilières, après analyse du projet de loi n° 188, estime que le législateur s'est sensiblement rapproché de ce point d'équilibre. Dans le meilleur intérêt de toutes les parties prenantes, nous pensons que tout accommodement apporté à ces dispositions, du moins en ce qui a trait aux valeurs mobilières, devrait tendre à s'en rapprocher davantage plutôt que de s'en écarter. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. Martel, pour la présentation de votre mémoire, de vos opinions. Maintenant, je laisserai la parole au député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Alors, M. Martel, M. Laurion et M. Gélinas, qui représentez la Commission des valeurs mobilières du Québec, je veux vous remercier au nom du gouvernement, puisqu'il s'agit d'une excellente contribution. C'est évident que l'expérience, l'expertise et le champ d'activité couvert par la Commission des valeurs mobilières vous donnent sûrement une capacité de conseil et d'analyse qui devrait, je pense, aider le gouvernement à faire les bons choix. En tout cas, moi, je le souhaite ardemment.

Lorsqu'on est animé... Je vous rappelle juste deux phrases de votre mémoire. Vous considérez qu'il était nécessaire de procéder à la restructuration du secteur de l'intermédiation de marché; c'est un objectif, je pense, que le gouvernement partage. Vous mentionnez également que, de plus, ce secteur-là n'a pas les moyens, compte tenu du grand nombre d'intervenants et de l'impact que ça peut avoir sur l'économie québécoise dans sa globalité... vous dites: «n'a pas les moyens qu'on procède autrement que de la meilleure façon». J'indique là qu'il s'agit de tout un défi, et ce n'est pas évident d'y parvenir, même si, globalement, votre avis est plutôt favorable au projet de loi, même s'il y a certaines réserves que vous exposez correctement.

Moi, je voudrais aborder deux premières questions, puis mon collègue de Crémazie poursuivra. Une première, parce qu'elle a occupé une place importante, en tout cas, dans j'appellerais ça l'opinion publique de ce dossier-là, ou d'autres appelleraient ça les lobbys de part et d'autre, mais peu importe. Il y a beaucoup de gens qui ont porté des jugements assez sévères sur toute la notion de responsabilité professionnelle. Et la question précise que je vous pose, M. Martel, c'est que... Il y a plusieurs associations, regroupements ou autres qui sont d'avis que le fait d'envisager de rattacher les intermédiaires de marché, quel que soit le secteur dans lequel ils oeuvrent, à un cabinet – même si le terme n'existe pas, avec les guillemets on peut dire à peu près n'importe quoi, là – ça «déprofessionnalise», ça déresponsabilise les représentants. J'aimerais ça avoir votre avis très sincère là-dessus, parce que vous avez quand même une bonne expertise dans des domaines connexes. Ce serait important, je pense, de nous éclairer davantage là-dessus, parce que c'est une notion fondamentale.

(10 h 10)

M. Martel (Jean): On n'est pas tout à fait d'accord avec ça. Au contraire, je pense que toute l'histoire de la réglementation des valeurs mobilières au Canada a plutôt tendance à démontrer les grands avantages de pouvoir, d'une part, responsabiliser les représentants pour leurs faits et gestes, mais aussi de s'adjoindre les directions et, je dirais, mettre de notre côté la régie d'entreprise qui va avec l'administration des cabinets auxquels ces représentants-là sont rattachés. Et c'est plutôt l'approche qui est traditionnellement retenue dans notre monde, c'est de dire: Écoutez, on a des représentants en valeurs mobilières, vous êtes responsables et on va vous surveiller; éventuellement, s'il y a des écarts ou de la délinquance, on va vous traduire devant la justice disciplinaire, d'une part. Mais aussi on s'assure d'avoir des têtes de pont, je pense, dans les opérations au jour le jour pour aider le processus de supervision et de réglementation des représentants. Ces têtes de pont là, c'est les cabinets. On a des mécanismes d'accréditation, si vous voulez, de ceux qui sont des dirigeants des cabinets pour s'assurer finalement qu'il puisse y avoir une fluidité, une osmose entre les préoccupations de réglementation, de sécurité et de bon fonctionnement qui sont défendues par la Commission et les opérations mêmes dans le marché qui se poursuivent via les représentants, et cette osmose-là, ça se fait via le cabinet. Dans le fond, ce n'est pas déresponsabiliser des représentants que, en plus de se faire, responsabiliser également les cabinets pour s'assurer que... leur faire jouer un rôle qui nous assure finalement que les représentants respectent leurs responsabilités. Sans ça, écoutez, je pense que l'adage qui est devenu classique, c'est celui qui est souvent utilisé, le célèbre adage qui vient de la Securities and Exchange Commission américaine: On ne peut pas mettre un policier à tous les coins de rues pour s'assurer finalement que les marchés fonctionnent bien. Il faut reposer sur une autoréglementation qui se fait au niveau de l'industrie. Et, dans notre cas, nous, on pense que... en tout cas, on a eu de fort bons résultats en faisant reposer cette autoréglementation-là sur deux bases: premièrement, le représentant lui-même et, deuxièmement, le cabinet, et c'est certain qu'on ne veut pas se démarquer de cette approche-là qui a été très fructueuse jusqu'ici.

M. Gendron: Si le gouvernement envisageait, par exemple, pour les représentants en assurance d'être rattachés à plusieurs cabinets, avez-vous une opinion là-dessus? Ce serait quoi, votre commentaire? Si on envisageait ça, pour que les représentants en assurance, on les rattache à plusieurs cabinets. Parce que là, ce qui est prévu, ce n'est pas le cas. Avez-vous une opinion? Avez-vous un point de vue? Ça a de l'allure? Ça n'en a pas?

M. Martel (Jean): Nous, on préfère qu'ils soient rattachés à un seul cabinet, parce que c'est justement en raison des motifs que je viens de vous expliquer. C'est sûr que, si on ne met pas toutes les chances de notre côté d'avoir un système qui va se surveiller lui-même...

M. Gendron: Parfait, c'est clair. Un seul cabinet.

L'autre question que je voudrais poser également, puis ça a été repris par toutes sortes d'intervenants, avec raison... je pense qu'il y a beaucoup d'intermédiaires de marché, lorsque ça a été dans la distribution de produits et services financiers, qui étaient très sensibles à une réalité, qu'il faudrait, d'après moi, comme gouvernement, s'assurer de mieux baliser, et c'est toute la question de la confidentialité des renseignements de toute nature, la préservation de la confidentialité des renseignements. Vous avez été très silencieux là-dessus. Y «a-tu» une raison? «C'est-y» parce que ce qu'il y a dans le projet de loi vous agrée ou si c'est parce que c'est des aspects que vous n'avez pas voulu fouiller?

M. Martel (Jean): M. Gélinas, si vous voulez, si vous permettez, pourrait peut-être...

M. Gélinas (Alain): Suite à un examen, M. le Président, du projet de loi, on a remarqué que plusieurs articles du projet de loi couvrent cet aspect-là, selon nous, sensiblement bien, donc c'est pour ça... On est très soucieux de cette question-là, mais, suite à l'examen du projet de loi, on pense que, au niveau des systèmes informatiques, au niveau de l'information, au niveau de la transmission des renseignements médicaux, on trouve que c'est bien couvert au niveau, globalement, du projet de loi. C'est pour ça qu'on n'en a pas tenu compte dans le mémoire.

M. Gendron: Donc, je vais être certain que vous affirmez, là: vous l'avez vu, vous avez regardé ça...

M. Gélinas (Alain): C'est ça.

M. Gendron: ...et vous trouvez que, sur cet élément-là, les aspects que vous avez lus dans le projet de loi permettent de conférer une certaine crédibilité à notre capacité, à date, avec ce qu'il y a là, de préserver la confidentialité des renseignements.

M. Gélinas (Alain): On trouve que les balises sont adéquates.

M. Gendron: Je voudrais juste peut-être terminer avant de passer à... bien, ça va être l'opposition, puis on va revenir. Vous aviez des craintes concernant les pouvoirs au niveau des chambres. Il y en a plusieurs qui sont venus nous dire: Bien, ça, on n'est pas trop favorables à ça. Vous, vous allez dans le même sens, mais avec ce que j'appelle une réduction, un caveat, ou une atténuation du jugement en disant: Bien, écoutez, en autant qu'ils n'aient pas grand-chose à faire, ça ne nous fatigue pas beaucoup.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gendron: Alors, c'est quoi, là? C'est parce que c'est ça que ça veut dire, si on se parle clairement. Alors, c'est quoi, vos craintes, exactement?

M. Martel (Jean): Bien, c'est sûr que, comment dirais-je, si on remet un pouvoir de surveillance d'un marché financier, ça doit s'exercer de façon prévisible pour tous les acteurs, sans ça les gens n'iront pas dans ce marché-là. Et dans un environnement où on est internationalisé, il faut qu'on puisse à tout le moins présenter une image de sécurité, de stabilité, et le fait qu'il va y avoir une certaine application immuable des règles de façon constante, de telle sorte que les gens puissent mettre leur argent sur le marché et se sentir en confiance... En tout cas, lorsque, éventuellement, on place un tel pouvoir entre les mains d'une organisation qui est issue de groupes qui élisent des représentants et donc qui, dans le fond, répondent à une dynamique corporative qui vient un peu changer la dynamique générale de réglementation, nous, on pense que c'est de nature à insécuriser la fonction de réglementation et de supervision et on ne pense pas que ce soit une bonne idée.

M. Gendron: Ça va.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Ça va? Merci, M. le député d'Abitibi-Ouest. Maintenant, c'est au tour du député de Viger.

M. Maciocia: Merci, M. le Président. Merci, M. Martel, M. Gélinas et M. Laurion. J'irai tout droit à deux ou trois questions que j'aurais à vous poser. Ma première: En vous entendant tout à l'heure, dois-je comprendre que le Bureau, en réalité, devrait être un peu sous la responsabilité de la Commission des valeurs mobilières? Parce que, en vous entendant tout à l'heure, il y a certains domaines dans lesquels le Bureau devrait être quasiment sous la tutelle ou sous la responsabilité de la Commission des valeurs mobilières.

M. Martel (Jean): Bien, ça, c'est sûr que j'ai... C'est posé une réserve qui va dans le sens de dire: En autant que nos compétences puis nos responsabilités sont concernées, on pense que, s'il y a des choses à modifier, ça devrait aller plus dans le sens que vous évoquez que dans un sens différent. Comme je vous le dis, j'ai passé de nombreuses heures à essayer d'expliquer un peu partout au Canada, où il y a quand même des intervenants qui sont présents ici, au Québec... à leur expliquer quelle était la structure du Bureau et comment c'était pour fonctionner. Et je pense qu'un des bouts que j'ai eu beaucoup de difficultés à expliquer aux gens ou à apporter des réponses, c'est quand les gens me demandaient: Oui, mais comment ça va fonctionner et dans quelle mesure est-ce qu'on va être capables de travailler avec ces gens-là? Là, on leur dit: Écoutez, nous, c'est sûr que la Commission approuve les règles, puis leur administration est confiée au Bureau, mais c'est évident que, par exemple, par rapport à la Bourse de Montréal, on va avoir pas mal moins de droits de regard; même si on est quand même assez discrets dans leur exercice, mais on a quand même les moyens d'intervenir si besoin est, on va avoir pas mal moins de droits de regard à l'égard du Bureau.

Alors, s'il doit y avoir un certain carrefour ou l'intégration de ce qui va se faire par le Bureau puis ce qui va se faire ailleurs dans d'autres domaines, ce carrefour-là peut se faire. Nous autres, on pense que, normalement, ça devrait être la Commission qui fasse ça. C'est sûr qu'on peut appeler ça une tutelle. Je pense que ce n'est pas de la tutelle, c'est, à un moment donné, d'avoir les moyens de pouvoir faire évoluer les choses de façon cohérente. Parce que, si on n'a pas ces moyens-là puis si ça commence à partir de tous les bords, on va se le faire reprocher, et je pense que les gens vont se mettre à critiquer 188 en disant qu'il ne fait pas le travail.

M. Maciocia: Parfait. Je vous remercie. J'espère que le député d'Abitibi-Ouest a pris en note ces remarques de la Commission des valeurs mobilières et va les référer au ministre au moment opportun.

Ma deuxième question...

M. Gendron: C'est pour ça...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Maciocia: ...M. le Président, c'est: Comment ça se passe, l'indépendance des courtiers en valeurs mobilières chez vous? Voulez-vous nous expliquer un peu comment ça se passe à l'intérieur de votre organisme?

M. Laurion (Daniel): En quel sens, l'indépendance?

(10 h 20)

M. Maciocia: Disons, de quelle manière ces gens-là sont indépendants vis-à-vis, par exemple, les différentes compagnies avec lesquelles ils font affaire et qui sont d'une certaine indépendance aussi vis-à-vis... entre les compagnies avec lesquelles ils font affaire puis les clients?

M. Laurion (Daniel): La première obligation des personnes qui sont inscrites, elle est envers le client. La réglementation dans le secteur des valeurs mobilières à ce niveau-là, elle est très claire. La personne qui s'adresse à son client doit agir en professionnel avisé. Alors, à ce niveau-là, le représentant doit toujours offrir à son client le produit qui lui convient le mieux. Maintenant, il est évident, par exemple dans l'industrie des fonds mutuels, qu'il y a au-dessus d'un millier de fonds qui sont offerts; il y a beaucoup de produits qui sont équivalents ou qui sont carrément remplaçables; il n'y a aucune organisation qui offre sur une base normale les 1 000 produits, il y a des sous-ensembles qui existent; et il n'y a pas de limitation vraiment à cet égard-là. Et l'individu est toujours indépendant face à la firme, puisque son premier devoir est envers le client et c'est le client qu'il doit servir. Ce n'est pas la firme qui va dire à son représentant: C'est tel type de produit que tu dois lui offrir plutôt qu'un autre. Au contraire.

M. Maciocia: Dois-je comprendre que c'est un peu dans le même sens qu'un courtier en assurance, dans le sens que le courtier est un peu le représentant du client et ce n'est pas, disons, le mandataire de la compagnie? Dois-je comprendre que, dans votre cas, c'est plus ou moins la même chose?

M. Laurion (Daniel): C'est un peu comme ça que ça se passe dans la vie réelle, effectivement.

M. Martel (Jean): Je dirais que ça donne peut-être le même résultat, mais, dans le fond, ce n'est pas... Le représentant en valeurs mobilières, c'est celui qui va conseiller le client et qui va lui procurer le produit qui fait son affaire en fonction de son niveau de tolérance au risque, de sa situation, etc. Ce n'est pas un représentant qui va se retourner puis qui va dire: Écoutez, je suis votre agent et je vous représente vis-à-vis de telle compagnie de fonds mutuels. Là, le parallèle n'est pas parfait, je pense, avec le courtage en assurance.

M. Maciocia: Je comprends très bien. Mais vous êtes, si je peux dire, très préoccupé, disons, de garder cette indépendance des courtiers en valeurs mobilières. Je crois que c'est très, très, très, très important pour vous.

M. Martel (Jean): Ce qui est fondamental, c'est que le représentant ait toujours l'attitude de pouvoir répondre d'une façon qui concorde bien avec les prescriptions et les besoins qui lui sont exprimés par l'investisseur.

M. Maciocia: Une autre question, M. le Président. Est-ce qu'il y a de l'inspection professionnelle auprès des représentants d'épargne collective des valeurs mobilières comme il y en a dans l'assurance actuellement?

M. Martel (Jean): En fait, dépendamment de l'inscription, on n'a pas d'organisme d'autoréglementation dans le secteur du courtage à exercice restreint, ce qui inclut la catégorie des gens qui distribuent des fonds communs de placement. On en a un qui fonctionne du côté du plein exercice. Il y a certaines personnes qui se spécialisent dans la distribution de valeurs mobilières qui sont visées par le projet de loi qui sont membres de cette organisation-là, donc qui ont une inscription de plein exercice. Mais, pour les gens qui sont simplement distributeurs de fonds mutuels, il n'y a pas d'organisme d'autoréglementation. Ça veut donc dire que c'est de la supervision et un processus disciplinaire qui sont assurés directement par la Commission. C'est un peu de cette situation-là dont on va se distancer à l'extérieur du Québec, justement par la création de l'organisme d'autoréglementation que je vous ai indiqué tout à l'heure.

M. Maciocia: Parfait. Ma dernière question, de curiosité, comme ça. Viateur Gagnon puis Maxime Bernier, l'ex-attaché politique du ministre Landry, est-ce qu'ils sont chez vous?

M. Martel (Jean): Oui, ils sont chez nous, effectivement.

M. Maciocia: Ils travaillent chez vous. J'aurais aimé que Viateur Gagnon soit ici, parce que tout le monde pense ici, ou la très grande majorité pense que c'est un peu le penseur de la loi n° 188.

M. Martel (Jean): C'est un peu quoi?

M. Maciocia: Le penseur de la loi n° 188. Quelle est un peu la raison pour laquelle il n'est pas ici?

M. Martel (Jean): Bon, bien, M. le Président, je pense que je voulais... À un moment donné, j'ai pensé peut-être aborder cette question-là directement dans mes notes de présentation, puis finalement j'ai abandonné la chose parce que ce n'est certainement pas un secret que M. Gagnon a travaillé, dans sa vie passée, au ministère des Finances, et je pense qu'il a rendu des bons services. Par contre, je peux vous garantir, dire publiquement que le travail qu'il a réalisé pour les fins de cette loi-là a été fait à distance et puis que mon personnel a passé des heures de négociations assez ardues avec lui relativement à ça, à ce projet de loi là. Par contre, je pense que le ministre l'a fait remarquer hier, dire: S'il y a un esprit d'ouverture puis on veut partir avec ce que j'appellerais un «clean slate», je m'en serais voulu de venir déranger un peu cette situation-là.

M. Maciocia: Parfait. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le député de Viger. Maintenant, M. le député de Crémazie, vous avez des questions, des commentaires?

M. Campeau: Oui, M. le Président. Ma question principale, M. le Président, ce serait qu'on parle de la banque-assurances, le fait que de l'assurance pourrait être vendue dans les caisses populaires. Ce que je voudrais savoir, c'est: Vous, là, qu'est-ce que vous en pensez vraiment, de ce sujet-là? Le fond de votre pensée. Et si la loi devait passer telle quelle, telle qu'elle est présentée, telle que le ministre des Finances en a parlé hier aussi, combien vite la Banque centrale au Canada, le gouvernement fédéral qui, bien souvent, il ne faut pas le blâmer, suit le Québec dans ses mouvements parce qu'il les trouve bons... combien de temps ça va prendre à la Banque centrale à s'ajuster, elle, et à permettre à toutes les banques à charte de vendre de l'assurance dans ses succursales? Mais la première question, c'est: Vous, qu'est-ce que vous pensez de ça? Puis la deuxième: Après que la loi aura été adoptée, combien de temps ça va prendre au Canada à s'ajuster à tout ça?

M. Martel (Jean): Bon. Je pense, M. le Président... c'est certain que c'est une question éminemment intéressante. Mais je ne pense pas qu'on puisse... j'allais dire, je ne pense pas qu'on ait les moyens d'avoir une idée institutionnelle sur cette question-là. Premièrement, on ne réglemente pas les banques, sauf quand elles font des affaires en valeurs mobilières, puis on ne réglemente pas l'assurance non plus. C'est sûr que je pourrais vous formuler une opinion personnelle sur cette question-là, mais je ne voudrais pas que sa substance rejaillisse sur l'organisation que je préside. Mais c'est sûr que, nous, il peut y avoir un certain nombre d'analogies, je pense, à tirer d'une mesure qui permettrait la distribution au détail de produits d'assurance dans les institutions de dépôts. Il pourrait y avoir certaines analogies sur le plan de notre façon d'ajuster notre régime réglementaire pour faire en sorte qu'il puisse y avoir une distance, qu'il puisse y avoir évidemment l'indépendance à laquelle on référait tout à l'heure. Mais je pense que c'est assez difficile pour nous d'exprimer une opinion là-dessus.

M. Campeau: Bon, je vais vous laisser vous en sortir.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Ça ne te tenterait pas de revenir sur la deuxième question?

M. Campeau: Non, non...

Une voix: Là, c'est la première, à laquelle il ne veut pas répondre.

M. Martel (Jean): La deuxième, quelle est-elle?

Une voix: La deuxième, il est capable de répondre.

M. Martel (Jean): C'est laquelle, la deuxième?

M. Campeau: La deuxième, c'est...

M. Martel (Jean): Ça prendrait combien de temps? Je pense que le citoyen Martel pourrait probablement donner un avis là-dessus, mais je pense que... On regarde un peu la situation qu'on a vécue au Québec au cours des dernières années et il y a effectivement distribution d'un certain nombre de produits d'assurance dans certaines institutions de dépôts au Québec. Et je pense certainement pas faire, être présomptueux, mais simplement faire une lecture historique. Je pense que l'histoire nous a enseigné que, en dépit de cette situation-là, les groupes de pression sur le gouvernement fédéral, qui invoquaient cette situation-là au Québec pour l'étendre ailleurs au Canada, ont fait un peu chou blanc. Et, au contraire, je pense qu'il y a eu pratiquement des ovations debout au Parlement du Canada pour appuyer le fait que c'était bloqué. Alors, est-ce que la même recette, la même argumentation peut servir à faire évoluer les choses de façon différente? Je ne le sais pas. Peut-être.

(10 h 30)

M. Campeau: On nous a dit hier ou on a perçu que la fusion de la Banque de Montréal avec la Banque Royale pourrait être un élément important pour repousser l'autorisation de la Banque centrale aux banques de vendre de l'assurance ou pas. Ça me semble curieux, mais c'est ça qu'on a perçu. Je ne dis pas que c'est ça qu'on a dit exactement. Est-ce que vous, vous êtes en mesure, à cause de votre poste, de penser qu'il y a des tractations qui se font entre les banques à charte pour permettre la fusion de la Banque de Montréal et de la Banque Royale et que, en contrepartie – ce que je trouve curieux – la Banque centrale ou le gouvernement central dirait aux banques: Achalez-nous pas avec la permission de vendre de l'assurance dans les succursales, en retour, on va vous donner la fusion?

La fusion, c'est quand même un sujet fort discutable parce que, au Canada, il y a comme une oligopole chez les banques. Les banques à charte de classe A sont vraiment favorisées, M. le Président. Au cours des 30 ou 40 dernières années, elles ont été favorisées, on a comme empêché la compétition d'entrer. Là, à partir du 1er janvier 1999, ça va être fini, ça, il va y avoir une plus grande ouverture et le consommateur, le client, en sera mieux servi. Contrairement à Matthew Barrett, qui dit que les frais bancaires au Canada sont parmi les plus bas. Il faudrait repasser parce que les études démontrent le contraire: les consommateurs, au Canada, je ne dis pas qu'ils se font exploiter par les banques, mais les banques ne leur font pas de cadeau dans les frais bancaires. Et ça touche aussi les caisses populaires; ne nous trompons pas, on parle du secteur au complet.

Alors, vous, est-ce que vous pensez que c'est une tractation, la fusion de la Banque de Montréal avec la Banque Royale versus le pouvoir pour les banques de vendre de l'assurance dans les succursales?

M. Martel (Jean): C'est certainement une question dont je peux parler parce que, dans le fond, on est impliqué par cette opération-là. On a eu des présentations qui nous ont été faites par les deux banques concernées pour la simple et bonne raison qu'elles contrôlent toutes deux un courtier en valeurs mobilières, une grande firme de valeurs mobilières, importante, nationale. Ce qui veut donc dire que DS et la filiale de valeurs mobilières de la Banque de Montréal, Nesbitt, viendraient se fusionner et donc créeraient également dans notre monde un géant.

C'est assez difficile de spéculer sur le fait qu'il puisse y avoir un tel échange, M. le Président. Par contre, nous, on est en mesure de réaliser que, dans le monde bancaire lui-même, la question de savoir si on devrait donner un aval à cette fusion projetée ou non, c'est une question qui est très chaudement débattue. Il y a plusieurs lectures qui sont faites de cette situation-là. Moi, je pense que c'est probablement plus une question de fondement même du système financier, cette question de la fusion des banques, et non pas, je pense, une question de distribution, un problème de distribution de produits financiers.

M. Campeau: J'aurais d'autres questions, mais, là-dessus, pour terminer ce secteur-là, on comprenait dans les journaux que M. Barrett avait dit que c'était pour le bien de tous les Canadiens, la fusion. Vous croyez ça, vous?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Martel (Jean): En fait, je pense que la compagnie ou la banque qui pourrait être issue d'une telle fusion, c'est probablement par ses faits et gestes et non pas par le principe finalement de sa création qu'elle va servir le bien commun, c'est dans sa façon de se comporter. Qu'il y ait des préoccupations à l'effet que ça puisse éventuellement réduire la concurrence d'une façon qui pourrait être préjudiciable aux consommateurs, je pense que c'est normal que les gens puissent se préoccuper de cet aspect-là a priori. Est-ce que le fait que les banques étrangères puissent avoir un accès plus facile au marché du Québec viendra contrebalancer ce mouvement-là? Je pense que c'est tout aussi acceptable a priori, je pense qu'on peut certainement présumer de ça assez facilement.

M. Campeau: M. le président, si vous me le permettez, une question maintenant sur les Chambres. Il y a certains organismes qui nous ont dit – Option consommateurs, par exemple – que la déontologie ne devrait pas être confiée aux Chambres. Dans le Bureau, il y a la formation de deux Chambres. Vous, qu'est-ce que vous pensez de ça? Pensez-vous que les fonctions devraient être confiées aux Chambres ou confiées au gouvernement, la déontologie, ou directement au Bureau?

M. Martel (Jean): Bon. J'ai parlé tout à l'heure que je pense que la piste la plus prometteuse, c'était peut-être de favoriser un mariage des cultures. C'est certainement un principe qu'on s'est appliqué à nous aussi quand on nous a consulté sur le projet de loi n° 188 parce que, évidemment, je pense que ça allait de soi qu'on puisse formuler certains commentaires au stade de son élaboration. La déontologie dans notre secteur, ça se fait soit directement ou soit via un organisme d'autoréglementation reconnu sur lequel on exerce les contrôles que, je vous le disais tout à l'heure, on n'a pas vis-à-vis du Bureau. Donc, une bonne façon de contourner un peu cet aménagement structurel que représente le Bureau, c'était de donner les pouvoirs de prescrire les règles directement à la Commission.

Dans un autre secteur, dans le secteur de l'assurance, ça peut peut-être... En tout cas, de la façon dont le projet de loi est conçu, ça peut fonctionner, probablement que ça peut fonctionner. C'est ce qu'on pense. Évidemment, quant à nous, le deuxième moyen terme qu'on est allé chercher dans le projet de loi, c'est de dire: Bien, écoutez, la Chambre de la sécurité financière va être consultée par la Commission et elle va avoir son mot à dire. Habituellement, nous, quand on consulte, ce n'est pas par principe, c'est évidemment pour pouvoir avoir un input de l'industrie. Alors, dans la mesure où le système est bien conçu, nous, on est assez confiants qu'on puisse réglementer la déontologie d'une façon qui va être aux meilleurs intérêts du consommateur.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Crémazie...

M. Campeau: Oui.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): ...tout le monde reconnaît votre grande connaissance du secteur financier, mais le rôle ingrat du président est pratiquement de vous dire que c'est assez, à cause du temps. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Campeau: Alors, j'accepte votre ingratitude!

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le député de Crémazie. Mme la députée de Saint-François.

Mme Gagnon-Tremblay: Oui, merci, M. le Président. Moi, j'aurais trois questions. Avant de poser mes questions, je reconnais l'enthousiasme de la Commission des valeurs mobilières à ce que le projet de loi soit adopté, mais en même temps je suis persuadée aussi que vous reconnaissez qu'il y a beaucoup d'améliorations à y apporter. Je sais que vous allez avoir à gérer avec le Bureau cette loi, mais je pense qu'il y a beaucoup d'améliorations.

J'ai un point surtout. J'ai remarqué un peu votre tiédeur face à la protection du consommateur, peut-être parce que vous n'avez pas eu le temps beaucoup d'élaborer là-dessus. Et je remarque qu'à la page 4 de votre mémoire, il est mentionné: «La Commission des valeurs mobilières, est-il nécessaire de le rappeler, appuie toutes les mesures du projet de loi qui se proposent d'améliorer les protections dont bénéficie le consommateur ou l'investisseur pourvu qu'elles respectent, en revanche, les besoins légitimes des marchés et de ceux qui y participent.»

Je dois vous dire que, moi, ça m'a un peu beaucoup dérangée dans le sens que, pour moi, la protection du consommateur, bon, va au-delà de tout ce qu'on peut déterminer des besoins légitimes du marché. Je pense que c'est la première règle. Bon, je pense qu'on est d'accord pour dire qu'il faut, tôt ou tard, penser au décloisonnement, mais aussi, la protection du consommateur, pour moi, est beaucoup plus importante que quoi que ce soit au niveau des marchés. Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus parce que ça m'a un petit peu intriguée.

M. Martel (Jean): Bien, écoutez, je pense qu'on n'a pas le choix que de penser comme ça parce que c'est la mission fondamentale de la Commission, la mission qui nous a été confiée par la Loi sur les valeurs mobilières qui veut ça. Dans le fond, on est le gardien du bon fonctionnement du marché. C'est ça, la première règle. Et le bon fonctionnement, ça s'articule de différentes façons. Ça s'articule notamment par la protection de l'investisseur, par l'encadrement des intermédiaires, par la supervision des organismes d'autoréglementation. Alors, un marché financier, un marché des valeurs mobilières qui fonctionne bien, c'est un marché qui réussit à faire tout ça en même temps.

(10 h 40)

Donc, c'est sûr qu'on peut amener un niveau de réglementation extrêmement élevé pour assurer vraiment, atteindre les objectifs de protection du consommateur les plus impressionnants possible mais, à un moment donné, il faut qu'il y ait des intermédiaires qui soient capables d'opérer sur le marché, il faut que l'épargne des investisseurs puisse se rendre aux entreprises. Il faut que tout ça, ça se fasse pour en arriver à un système qui fonctionne. Et je pense que la clé du succès dans tout ça – puis, en tout cas, ce n'est pas toujours facile, puis c'est un peu un défi qui se pose à vous aussi – c'est d'en arriver à un point d'équilibre où tout le monde va être content, parce qu'il n'y a pas d'autres façons de s'en sortir, je pense.

Donc, il faut réaliser une chose aussi, c'est qu'un investisseur, il veut être capable de s'adresser à un marché qui est capable de répondre à ses besoins. On parlait tout à l'heure du fait qu'une des règles principales, c'est que l'intermédiaire connaisse son client, c'est-à-dire qu'il fasse son enquête pour savoir: Écoutez, là, êtes-vous quelqu'un qui est extrêmement peureux ou êtes-vous quelqu'un qui veut prendre des risques importants en Bourse? Voulez-vous avoir un dépôt? Voulez-vous avoir d'autre chose? Est-ce que vous voulez vous en aller dans des marchés exotiques ou rester ici, au Québec, puis acheter des obligations de Placements Québec?

Alors, une fois que ça, c'est fait, il faut que l'intermédiaire soit capable de réaliser l'opération. Et, pour faire ça, il faut que cet intermédiaire-là soit encadré d'une façon qui ne soit pas paralysante. Puis, si on pousse trop du côté de la protection du consommateur, peut-être qu'on va en arriver à un tel niveau de paralysie, auquel cas notre marché, ne fonctionnant pas suffisamment bien, va perdre des volumes d'opération au profit d'autres marchés qui, eux, sont capables de faire ça. C'est un peu ça, là; c'est un peu le déchirement auquel on est confronté quotidiennement.

Mme Gagnon-Tremblay: Vous avez dit aussi qu'il ne fallait pas fausser les conditions de concurrence. Compte tenu de la volonté du gouvernement de décloisonner et d'inclure, entre autres, les banques, les caisses, le marché bancaire – je pense surtout aux caisses populaires, parce que peut-être que c'est plus diversifié, compte tenu qu'on en retrouve dans toutes les régions et tout ça, et que, bon, déjà, de l'information est véhiculée à l'intérieur, soit par la Loi sur l'accès à l'information ou soit encore par le projet de loi n° 167, qui sera adopté ultérieurement en vertu de l'article 55 ou en vertu, entre autres, de ce projet de loi qu'on étudie présentement – est-ce que vous croyez, compte tenu de cet ensemble de données véhiculées à l'intérieur, par exemple, des caisses populaires, croyez-vous qu'à ce moment-là, face, par exemple, actuellement, aux intermédiaires, aux assureurs de toutes sortes, ça ne fausse pas les conditions de concurrence? Comment vous voyez ça? Est-ce que ça peut être, pour vous, une condition... Est-ce que ça pourrait vouloir dire fausser les conditions de concurrence? Parce que ça nous a été soulevé beaucoup hier, entre autres.

M. Martel (Jean): C'est sûr que la concurrence peut être influencée effectivement par la réglementation, la façon dont les exigences, les normes, les règles qu'on va appliquer à l'un par rapport à l'autre... Et ça peut se faire de deux façons. Vous parlez des caisses populaires ou des institutions de dépôts; elles sont déjà réglementées, je dirais, sur une base corporative, en raison de leurs activités. Les caisses d'épargne et de crédit sont réglementées en vertu d'une loi qui est faite pour elles. Mais la Loi sur les valeurs mobilières et la loi sur la distribution de produits et services financiers, ce sont deux lois qui se rattachent à une fonction, à une opération, à une activité de ces corporations-là.

Donc, déjà, au niveau de la corporation, il peut y avoir un encadrement qui dit: Ah, bien, simplement, on veut faciliter les opérations d'une institution par rapport à l'autre, puis il y a des choix qui sont faits. Mais, sur une base opérationnelle comme la distribution de produits et services financiers, ce n'est pas compliqué, il faut en arriver à établir un certain dénominateur commun puis être capable de traduire dans les faits le principe que le meilleur gagne. On dit: Dans le fond, celui qui est le meilleur intermédiaire, qui est le plus efficace normalement devrait être celui qui réussit le mieux. C'est ça, le principe.

Mme Gagnon-Tremblay: Oui. Mais, si, par contre, celui qui réussit le mieux, c'est celui qui a le plus d'informations, qui a la possibilité d'avoir accès à plus d'informations? Parce qu'on me dit finalement – et je ne suis pas une experte en la matière – qu'une fois que ce projet sera adopté, les caisses populaires auront des données, et même plus que le ministère du Revenu actuellement, sur les personnes. Donc, c'est dans ce sens-là. Est-ce que les autres ont les mêmes... peuvent concurrencer, les autres intervenants, s'ils n'ont pas ces mêmes données?

M. Gélinas (Alain): Nous croyons, suite à l'examen du projet de loi, que les règles en place concernant la confidentialité des informations personnelles sont suffisantes, comme je le disais tantôt, pour, dans le fond, empêcher qu'on se serve de cet avantage-là au détriment des consommateurs. Donc, pour nous, comme monsieur...

Mme Gagnon-Tremblay: Donc, ça devra être très étanche.

M. Gélinas (Alain): Oui, je suis d'accord avec vous.

Mme Gagnon-Tremblay: Et ma dernière question, une très courte: Beaucoup d'intervenants ne sont pas tellement chauds à l'effet de créer les Chambres d'assurance. Est-ce que, pour vous, c'est une nécessité que d'avoir ces Chambres? Est-ce que ce n'est pas une structure en supplément, encore? Est-ce qu'on ne pourrait pas y arriver autrement?

M. Martel (Jean): C'est sûr que c'est assez difficile pour nous de passer un jugement là-dessus parce que c'est un peu, j'appellerais ça, étranger, cette façon de structurer une réglementation quand on regarde ça d'un point de vue qui vient du secteur des valeurs mobilières. Le secteur des valeurs mobilières, c'est: la Commission reconnait une organisation pour faire quelque chose, elle lui délègue de ses pouvoirs à elle, la Commission, puis, après ça, elle supervise l'exercice des pouvoirs qu'elle a délégués. Donc, voyez-vous, si on n'est pas content du travail qui est fait, on enlève les pouvoirs ou on révoque la reconnaissance, puis on rapatrie nos affaires.

Tandis que là... C'est ça que je disais: Dans le fond, il y a un certain nombre de réalités qui se sont développées dans l'application de la Loi sur les intermédiaires de marché, pendant les 10 ans qu'on vient de vivre et, ce que je comprends, c'est que la politique sous-jacente, c'est d'accommoder ces réalités-là puis de les intégrer dans le nouveau modèle. Nous, on pense que ça n'occasionne pas nécessairement de difficultés pour le monde des valeurs mobilières. C'est un peu, comme on le disait tout à l'heure, un rôle plus consultatif pour nous. Nous, on est bien heureux avec ça parce que ça s'intègre très bien, ça se réconcilie très bien avec notre façon de faire les choses, par ailleurs.

Mme Gagnon-Tremblay: Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Bien, Mme la députée de Saint-François. Je vais accorder une courte question au député de Viger, très courte.

M. Maciocia: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Je ne sais pas si c'est par sympathie envers le député de Crémazie que vous allez m'obliger à être ingrat aussi envers vous.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Maciocia: Merci, M. le Président. À ce que je comprends, votre marché est un marché à risque, ce n'est pas un marché qui offre de la protection d'assurance. Si je comprends bien, votre marché, c'est un marché uniquement à risque. Et, par reflet, si je comprends bien, l'encadrement du projet de loi n° 188 reflète un peu plus votre secteur que celui de l'assurance. Dois-je comprendre que c'est ça, la raison pour laquelle vous êtes en faveur du projet de loi n° 188? Il y a une grosse différence entre les deux: vous, vous êtes un marché à risque, tandis que nous, dans le projet de loi, il y a l'aspect primordial, si je peux dire, qui concerne la protection de l'assurance.

M. Martel (Jean): Ce n'est pas nécessairement la nature des produits concernés qui fait la différence, je pense. Je pense qu'une des différences fondamentales, c'est que, dans le monde des valeurs mobilières, c'est l'investisseur qui assume le risque, c'est-à-dire que le représentant, l'intermédiaire éclaire la prise de décision. Nous, comme Commission, nous nous assurons que l'investisseur ait une information qui soit complète, qui soit exacte et qui soit compréhensible; après coup, c'est l'investisseur lui-même, en fonction de ses propres besoins, qui prend la décision. C'est sûr que dans le domaine de l'assurance il y a un certain apprivoisement, si vous voulez, mais...

M. Maciocia: C'est ça, ce n'est pas la même chose.

M. Martel (Jean): ...c'est différent, vous avez raison.

M. Maciocia: Parfait. Merci, monsieur.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci. Merci à nos invités, M. Martel et ses compagnons.

Et, sur ça, je vais inviter le représentant du Mouvement carrossiers Québec à prendre place, et je vais suspendre seulement quelques minutes.

(Suspension de la séance à 10 h 50)

(Reprise à 10 h 51)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): À l'ordre, s'il vous plaît! J'invite M. Guay et ses compagnons à prendre place. Avant que M. Guay soit prêt, je tiens d'abord à nous excuser encore une fois auprès de nombreux invités qui, à cause de l'exiguïté de la salle, ne peuvent prendre place parmi nous. J'ai obtenu, ce matin, qu'on puisse diffuser dans une autre salle la tenue de nos propos, j'ai fait des démarches pour obtenir le salon rouge, la salle du Conseil exécutif, mais c'est Hydro-Québec qui fait valoir son plan de développement stratégique actuellement et on me dit qu'il y a des écrans géants avec toutes sortes de moyens techniques qu'il est pratiquement impossible d'installer dans cette salle-ci. Mais on ne désespère pas encore, peut-être que cet après-midi, ça viendra. Donc, on regrette ces inconvénients mais, à partir du 10, on nous assure que nous aurons la salle du Conseil législatif.

Sur ça, est-ce que M. Guay est prêt? Pas tout à fait? On va vous laisser le temps, encore quelques instants, pour vous préparer. Quand vous êtes prêt, vous me faites signe. Vous êtes prêt? Bien. Bienvenue, M. Guay, bienvenue à vos collaborateurs et collaboratrices que je vous invite immédiatement à nous présenter d'abord, et après, nous faire part de vos commentaires et de votre mémoire.


Mouvement carrossiers Québec (MCQ)

M. Guay (Denis): Merci, M. le Président. Je voudrais vous présenter nos membres ici, à cette table: Jacques Vendette, de la région de Lanaudière–Laval; Me Montigny, notre procureur; Alice St-Louis, carrossière et directeur régional de la région Mauricie–Bois-Francs; Yvon Laforest, directeur de la région de l'Estrie au niveau du Mouvement carrossiers Québec; et aussi Réjean Charest, qui n'avait pas de place ici présentement, qui est de la région de la Montérégie.

Tout d'abord, je vais vous dire un peu comment on va procéder. Je voudrais aussi remercier tous nos collègues qui sont ici. On a des gens de la Gaspésie qui ont eu l'audace de braver la tempête, d'être là. Les gens du Lac-Saint-Jean, de la Montérégie, de l'Estrie. Des gens de partout à travers le Québec: Montréal, Laval, Lanaudière. Des gens qui s'occupent de leur cause et qui veulent exprimer exactement et appuyer notre démarche politique entreprise depuis un an et demi. Il y a aussi deux autobus de Trois-Rivières qui sont là pour appuyer ce qu'on entreprend; donc, je les remercie d'avoir pris le soin de se déplacer. Je voudrais aussi remercier les membres de cette commission de nous avoir invités à participer à cette audition. En même temps, je voudrais commencer par une remarque que je veux faire à la commission. À la suite de ça, je vais lire le mémoire puis on passera aux questions, si vous le voulez bien.

Donc, nous, comme carrossiers, on n'est peut-être pas des gens qui ont la scolarité que les gens d'ici, dans cette salle, peuvent avoir, mais on a beaucoup de courage, beaucoup de coeur au travail, et surtout un sens d'observation. On remarquait, Jean Montigny et moi, hier, en passant, que le travail de députés, députés libéraux, députés péquistes, ministres, les gens de la commission, des gens qui travaillent quasiment, pas jour et nuit mais tout près, des fois jusqu'à 23 heures, minuit, pas de vie de famille, pas d'enfants, etc., Donc, je tiens à féliciter ces gens-là, qui travaillent pour la société québécoise, parce que vous êtes souvent plus critiqués que remerciés. Mais je veux m'exprimer au nom de ceux qui ne sont pas capables de le dire ou ceux qui n'ont pas l'occasion de le dire, vous remercier de ce que vous faites, parce que je sais que foncièrement, tout ce que vous entreprenez, c'est pour le bien de la société. Donc, autant les députés, les ministres, le ministre Landry, qui a eu la disponibilité de nous recevoir à quelques reprises dans notre dossier, Bernard Turgeon, le sous-ministre qui nous a rencontrés, dont les gens ont été très accueillants et très réceptifs à nos revendications. On est très, très fier de voir que l'appareil politique est en santé et que les gens sont de très bonne foi. Je vous en remercie et, au nom de ceux qui ne peuvent pas s'exprimer, je vous dis merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): On comprend votre appréciation, que nous apprécions nous autres mêmes, mais j'invite les gens à ne pas manifester leur approbation, le règlement ne le permet pas. Je le fais avec toute la délicatesse que je peux, mais je suis obligé de le faire.

M. Guay (Denis): Merci, M. le Président. Donc, je vais lire le mémoire du Mouvement carrossiers Québec. Le Mouvement carrossiers Québec tient tout d'abord à remercier la commission des finances publiques pour l'invitation qui lui a été faite le 19 décembre 1997 de participer aux consultations particulières relatives au projet de loi n° 188, intitulé Loi sur la distribution de produits et services financiers.

Le Mouvement carrossiers Québec représente plus de 700 membres, dont principalement des ateliers de carrosserie faisant affaire dans toutes les régions du Québec, mais aussi des individus, qu'ils soient professeurs en carrosserie, carrossiers ou étudiants. Nos membres sont impliqués activement dans la recherche d'un juste équilibre avec les différents intervenants du milieu de la réparation automobile au Québec pour permettre, d'une part, à tous d'exercer sereinement leurs activités commerciales et, d'autre part, d'assurer la protection et le respect des droits d'automobilistes québécois.

Ainsi, le Mouvement carrossiers Québec a depuis plusieurs années, et plus particulièrement depuis les derniers mois, sensibilisé l'opinion publique et le gouvernement à la nécessité d'une réforme de la Loi sur l'assurance automobile du Québec pour mettre un frein au dirigisme pratiqué par certains assureurs automobile faisant affaire au Québec, qui, par leur pratique, briment les droits des assurés, des carrossiers et des estimateurs et centres d'estimation en faisant fi des dispositions de la Loi sur l'assurance automobile du Québec. Le Mouvement carrossiers Québec n'est d'ailleurs pas seul à soutenir que le dirigisme doit être aboli puisque la Corporation des concessionnaires d'automobiles du Québec, regroupant plus de 850 concessionnaires d'automobiles du Québec, et la Fédération canadienne des entreprises indépendantes, FCEI, ont joint leurs efforts à ceux du Mouvement carrossiers Québec pour dénoncer cette pratique.

Nous sommes heureux de participer à ces consultations particulières relatives au projet de loi n° 188 pour être en mesure de vous communiquer nos commentaires, puisque nous sommes bien involontairement témoins, sinon victimes, dans notre industrie des conséquences d'une trop forte emprise de certains intervenants qui tentent de s'accaparer le contrôle de toutes les étapes de la réparation automobile en exerçant, tant sur les carrossiers que sur les automobilistes, des pressions indues.

(11 heures)

Pour bien comprendre le sens de nos observations sur le projet de loi n° 188, permettez-nous une légère digression qui, en plus d'en informer certains, vous permettra d'évaluer à leur juste valeur nos quelques remarques. Le Mouvement carrossiers Québec remettait, en avril 1997, au ministre des Finances, qui est responsable de l'application des titres VI et VII de la Loi sur l'assurance automobile du Québec, un mémoire intitulé Le dirigisme: le viol de l'article 171 de la Loi sur l'assurance automobile et ses conséquences , dont vous trouverez copie jointe en annexe du présent mémoire, dénonçant le non-respect systématique de la loi, plus particulièrement de l'article 171 de celle-ci qui prévoit, entre autres: «Le Groupement – des assureurs – doit établir ou agréer des centres d'estimation chargés de faire l'évaluation du dommage subi par une automobile.

«Le Groupement détermine les normes d'établissement et d'opération des centres qu'il agrée ainsi que les conditions de retrait de son agrément.

«Les centres d'estimation établis ou agréés en vertu du présent article doivent offrir leurs services à tout assureur agréé et chacun des assureurs agréés doit recourir aux services de ces centres à toutes les fois que la chose est possible.» Et, par ça, si on est capable de diriger un véhicule chez un carrossier, on est capable de le diriger chez un centre d'estimation.

«Le Groupement est en outre responsable de la qualification des personnes qui désirent agir à titre d'estimateur. À cette fin, il établit et administre des programmes de formation et détermine les exigences minimales que requiert l'exercice de l'activité d'estimateur.»

Le Groupement auquel fait référence cet article est le GAA, Groupement des assureurs automobiles. Vous aurez noté que le troisième alinéa de cet article prévoit que – et permettez-moi de citer à nouveau cet extrait essentiel à votre meilleure compréhension – «chacun des assureurs agréés doit recourir aux services de ces centres à toutes les fois que la chose est possible».

Or, la réalité aujourd'hui est tout autre. En effet, ce que le législateur québécois avait prévu en 1978 lors de l'adoption de cette loi visait à garantir à l'automobiliste une estimation indépendante tant des assureurs que des carrossiers en chargeant le GAA d'agréer des centres d'estimation qui seraient des entreprises indépendantes n'appartenant ni aux assureurs ni aux carrossiers et libres de fournir une estimation juste et équitable dans tout le processus de réparation... que pour l'assureur, protégeant par le fait même l'automobiliste québécois. Ce système d'estimation des dommages qui, lors de son adoption en 1978, comme aujourd'hui d'ailleurs, reflétait la sagesse du législateur de l'époque a cependant tellement déplu à certains assureurs automobiles du Québec qu'ils en sont venus, après avoir tenté à de nombreuses reprises de faire amender la loi, à carrément ignorer ces dispositions comme si elles n'existaient pas.

Le Mouvement carrossiers Québec a donc demandé au ministre responsable d'intervenir et ce dernier a chargé, au cours de l'été dernier, l'Inspecteur général des institutions financières de se pencher sur la question pour lui faire rapport. Le Mouvement carrossiers Québec a ainsi été appelé à déposer un mémoire dans le cadre de la consultation relative à la révision de la Loi sur l'assurance automobile du Québec tenue par l'Inspecteur général des institutions financières, et vous trouverez en ce sens, aussi jointe en annexe au présent mémoire, copie du document que nous avons produit à l'occasion de cette consultation.

Il est important de noter que l'Inspecteur général des institutions financières, après avoir consulté différents intervenants, dont la Corporation des concessionnaires d'automobiles du Québec, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante et l'Association des consommateurs du Québec, pour ne nommer que ceux-là, et, bien entendu, le Mouvement carrossiers Québec, en est venu à la conclusion que certains assureurs, par leur pratique, dépassaient parfois les bornes et, je dirais même, très souvent les bornes. En fait, ce n'est pas un, mais deux rapports que l'Inspecteur général des institutions financières a remis au vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances sur le sujet, puisqu'un premier rapport sur les pratiques de certains assureurs automobiles en matière de règlement de sinistre était soumis au ministre responsable en mai 1997 et, suite à des consultations additionnelles, un second rapport proposant, cette fois, des modifications à la Loi sur l'assurance automobile était soumis au ministre en novembre 1997.

Ainsi, l'Inspecteur général des institutions financières constatait, en mai 1997, qu'«il peut être parfois difficile pour l'assuré d'exercer son libre choix dans un contexte où ces pratiques commerciales se manifestent avec de plus en plus d'acuité», concluant que «cela peut devenir critiquable à bien des égards». Dans son rapport de novembre 1997, l'Inspecteur général des institutions financières définit ainsi le dirigisme: «...ce vocable décrit la situation où un assureur conclut des ententes avec un ou des carrossiers et vers lesquels il tente de diriger ses assurés pour la réparation de leur véhicule suite à un accident.» Qualifiant le dirigisme de «problème qui a été à la base de ce rapport», l'Inspecteur général des institutions financières propose de nombreuses modifications à la Loi sur l'assurance automobile du Québec.

Ayant été informé par les médias de la démarche entreprise auprès du gouvernement par nos membres et par la Corporation des concessionnaires d'automobiles du Québec et la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, nous avons reçu de nombreux appels d'automobilistes québécois qui, tentant d'exercer leur droit de choisir leur carrossier et d'obtenir une estimation indépendante des dommages causés à leur véhicule, se sont vu menacer de sanctions économiques par leur assureur. En fait, la majorité des membres du Mouvement carrossiers Québec que nous représentons aujourd'hui devant vous se font aussi menacer et brimer quotidiennement dans leur entreprise de façon très concrète en étant considérés comme des indésirables en raison de la démarche entreprise auprès du gouvernement pour faire respecter les dispositions de la Loi sur l'assurance automobile du Québec et notamment l'article 171.

C'est pourquoi c'est avec un grand intérêt que nous avons pris connaissance du projet de loi n° 188. Nous constatons avec plaisir et approuvons la volonté du ministre de créer un organisme unique, soit le Bureau des services financiers, pour chapeauter cette industrie, ainsi que la création de la Chambre de la sécurité financière et de la Chambre de l'assurance. Nous approuvons plus particulièrement le mode d'élection des membres au sein de ces Chambres par les différents intervenants de l'industrie, puisque cela rejoint les recommandations que nous avons faites au ministre des Finances pour régir l'industrie de la carrosserie.

Nous notons, à l'article 9 du projet de loi n° 188, l'exclusion des personnes physiques qui exercent l'activité d'estimateur au sens du titre VI de la Loi sur l'assurance automobile du Québec de la définition des experts en sinistre prévue à la loi et espérons que cette exclusion s'explique par la volonté du législateur de régir l'exercice des activités desdits estimateurs lors d'un amendement imminent à la Loi sur l'assurance automobile du Québec.

Pour répondre à une demande pressante formulée en ce sens, on retrouve au chapitre II, à la section I traitant des représentants en assurance, des dispositions relatives à la possibilité pour un représentant en assurance qui agit pour le compte d'une institution de dépôts inscrite comme cabinet de recueillir certaines informations tout en tentant d'assurer un certain cloisonnement entre les opérations dites financières et celles relatives à l'assurance pour éviter de la confusion au sein du public et un échange d'informations entre différents départements d'une même institution.

Nous comprenons aisément ce que législativement on tente d'obtenir, mais, à la lumière du traitement réservé par certaines institutions aux dispositions de la Loi sur l'assurance automobile du Québec, forts de notre expérience dans ce domaine, nous ne pouvons que vous exprimer nos doutes quant aux chances de succès des mesures de protection que le projet de loi tente d'instaurer. Déjà, il nous a été rapporté des cas où, non satisfaits d'une proposition de règlement d'une réclamation en dommages automobiles qui leur était faite, des assurés québécois se sont fait répondre que, si l'assurance-habitation, par exemple, avait été contractée auprès du même assureur, l'offre de règlement aurait été substantiellement supérieure et grandement facilitée.

Comment croire qu'à l'intérieur d'une même institution des barrières étanches pourront être érigées entre le secteur financier et le secteur des assurances alors que, dans notre domaine de la réparation automobile, certains assureurs s'immiscent directement dans les ateliers de réparation et tentent même aujourd'hui de convaincre le législateur d'autoriser des réparateurs automobiles à faire l'estimation des dommages qu'ils auront à réparer? Nous soumettons respectueusement qu'en théorie on peut peut-être concevoir l'existence de telles protections, mais qu'en pratique l'usage nous a démontré la fragilité d'une telle situation.

Quant à la section II traitant des experts en sinistre et plus particulièrement l'article 35 du projet de loi, nous notons que le législateur suggère qu'un expert en sinistre ne puisse être autorisé à agir dans une autre discipline. Nous sommes d'autant plus d'accord avec cette proposition que nous nous sommes opposés vigoureusement à la suggestion que des carrossiers puissent agir à titre d'estimateur de dommages en y voyant un conflit d'intérêts évident.

(11 h 10)

Nos remarques précédentes concernant l'étanchéité relative à la circulation des renseignements sont les mêmes en ce qui concerne l'article 83 du projet de loi lorsqu'on constate que le législateur croit pouvoir, par règlement, assurer une certaine indépendance d'un département par rapport à un autre à l'intérieur des établissements d'une même institution de dépôts. Qu'il nous soit permis à cet égard de vous citer, par exemple, le cas de certains de nos membres qui se sont plaints sans succès auprès de leur caisse populaire Desjardins du fait que la compagnie d'assurances faisant partie du même groupe leur volait du travail pour le diriger vers d'autres ateliers de carrosserie. Nos membres se sont élevés contre cette pratique du dirigisme puisqu'ils transigent leurs affaires financières avec la caisse populaire Desjardins et qu'un autre membre du mouvement les prive de revenus rendant ainsi le respect de leurs obligations financières envers leur institution d'autant plus difficile à rencontrer. Si tel est le cas dans le domaine de la réparation automobile, comment croire à la protection réglementaire que le législateur prétend accorder à l'article 83 de la loi?

Nous concluons ainsi nos commentaires en vous suggérant de prendre en considération l'intérêt des consommateurs québécois avant d'autoriser un trop grand décloisonnement en tenant compte du peu de respect accordé aux lois existantes par certaines institutions avant d'ouvrir la porte à ce qui pourrait, dans les années à venir, devenir une nouvelle source d'abus.

Je vous remercie de votre attention et je voudrais terminer avec une petite parenthèse. Le Mouvement Desjardins vous a rappelé probablement hier, par un certain petit cadeau à offrir à chacun des députés, que le libre choix du consommateur, ça pèse lourd dans la balance. Ce qui est bon pour le projet de loi n° 188, c'est aussi bon pour le projet de loi qui va venir tantôt dans la Loi sur l'assurance automobile. Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. Guay, pour la présentation de votre mémoire. Je laisse immédiatement la parole au député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: M. Guay, bonjour, ainsi que les gens qui vous accompagnent. Je voudrais également saluer toute votre large délégation de plusieurs régions du Québec, ceux qui ont décidé de vous accompagner dans la présentation de votre mémoire. Nous les saluons même s'ils ne sont pas tous directement devant nous. Je veux également vous remercier pour vos propos généreux d'entrée de jeu, lorsque vous avez cru utile de rappeler notre misérable condition de travailleur et de travailleuse.

M. Guay (Denis): C'est gratuit.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gendron: Oui, c'est ce que j'ai aimé, c'est ce que j'ai apprécié. Alors, merci beaucoup. Parce qu'on le sait qu'on est presque au salaire minimum si on regarde les nombreuses heures qu'on doit mettre là-dedans et tous les impacts gravissimus que ça a sur nos familles, et ainsi de suite. Alors, merci beaucoup pour vos propos généreux. Ça prouve qu'il n'est pas nécessaire toujours d'être bardé de diplômes ou d'instruction pour être capable de faire des commentaires généreux, du coeur, intelligents dans les circonstances pour nous autres. Alors, merci beaucoup. C'est parce que, moi, normalement, j'aurais droit à des applaudissements.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Baril, Arthabaska): C'est en dehors des règles parce que...

M. Gendron: On va suivre les règles alors.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): C'est parce que, si on accepte les applaudissements ou les remarques positives, il va falloir accepter aussi celles qui sont négatives.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Là, ça va être au président à trancher. Des fois, ce ne sera pas facile.

M. Gendron: Trêve de plaisanterie, M. Guay, merci d'être là. Vous avez fait le choix de profiter de cette offre d'échanges, d'éclairage pour nous rappeler ce que vous êtes et nous rappeler que vous en avez beaucoup contre le dirigisme, parce que ce n'est pas la première fois que nous avons l'occasion d'être saisis des réalités que vous défendez. Et, moi, je veux tout simplement vous dire, parce que ce matin – je l'ai dit à d'autres – compte tenu des obligations de M. Landry qui est au Conseil des ministres, je le remplace... et je tiens à dire, pour des gens qui seraient peut-être moins informés sur votre situation, qu'on connaît la problématique vécue dans le secteur que vous couvrez. Le gouvernement, par le biais de l'Inspecteur général des institutions financières, a effectué des travaux significatifs à ce sujet. Il y a deux rapports qui ont été rendus publics – je le dis pour le bénéfice de tout le monde – par l'Inspecteur général, un en juin 1997 et un en novembre 1997, et, vous, je sais que vous savez tout ça, et votre monde aussi. Les intervenants ont été sollicités pour réagir à ces rapports. Il y a eu des réactions qui ont été colligées. Le ministre a même eu l'occasion, selon l'information que j'ai, de vous rencontrer dernièrement et sur le rapport et sur votre réaction, ou vos réactions. Il entend faire la même chose prochainement avec les assureurs parce que, eux autres aussi, ils ont leur point de vue. Et nous souhaitons qu'avec ces dernières étapes ça permettra au gouvernement de terminer ses réflexions et d'arriver avec des solutions qu'il entend proposer. Alors, moi, je tenais à faire cette mise au point, parce que c'est l'information dont je dispose.

Quant au projet de loi que nous avons à étudier, je le répète, essentiellement vos remarques ont porté sur autre chose, mais ça ne signifie pas votre désintérêt sur le 188, au contraire, parce que vous en avez quand même parlé dans votre mémoire. Et, moi, je voudrais aborder peut-être une question principale qui a été reprise par plusieurs. Je trouve que c'est celle-là qui mérite le plus d'avoir votre éclairage, et elle concerne votre expertise ou votre pratique sur la question des renseignements confidentiels, tout un aspect majeur. Vous dites: Nous autres, on a des doutes; nous autres, on a des inquiétudes sérieuses. J'aimerais ça que vous soyez peut-être un peu plus volubile. Je me rappelle, dans une page, vous dites: Si c'est comme ce qu'on connaît, on a des sérieux doutes. Et là la question précise, c'est que... Vous êtes quand même au courant que... à ma connaissance, il y a sept, huit articles très précis dans le projet de loi: 18, 76, 83, et ainsi de suite, concernant les renseignements personnels. Est-ce que, même si vous avez tout vu ça puis vous avez tout lu ça, vous considérez qu'on prend des chances comme législateurs s'il n'y a pas d'autres mesures plus hermétiques pour s'assurer qu'un certain nombre de renseignements ne viendraient pas concurrencer déloyalement ou d'une façon abusive le secteur représenté?

M. Guay (Denis): Je vous réponds là-dessus en disant qu'on a quand même suivi les autres commissions parlementaires, l'autre commission, voilà un an et demi, et, dans le rapport Baril, ça disait qu'il devrait y avoir des lieux distincts pour vendre de l'assurance dans la caisse populaire. Ce n'est plus ça aujourd'hui. C'est dans la même boîte, avec un mur légal, qu'on dit. Comment va-t-on respecter un mur légal quand il y a un article de loi qui est violé systématiquement par les gros qui, eux, écrasent tout sur leur passage parce que la loi, ce n'est pas important, on va la changer. Mais, en attendant qu'on la change, elle est là, on ne la respecte pas. Comment vont-ils respecter un mur, un mur légal? Ce n'est pas évident.

M. Gendron: Sur quel aspect précis – juste pour avoir l'occasion d'apprécier davantage – vous croyez qu'ils ne respectent pas la loi?

M. Guay (Denis): Sur l'article 171, l'obligation d'un assureur d'envoyer un véhicule accidenté, par l'entremise de son propriétaire, dans un centre d'estimation. C'est la loi depuis 1978. C'est vous, les péquistes, qui l'avez adoptée, et elle n'est pas respectée. On est même rendu à demander au Procureur général de peut-être faire une enquête publique ou peut-être demander de forcer les assureurs à respecter la loi. Donc, comment vont-ils respecter un mur légal – c'est assez large, un mur légal – alors que tout le monde est au courant de toutes nos affaires. Tu vas à la banque, tu vas à la caisse, ils te déculottent, ils font tout, puis tu ne vois rien passer.

M. Gendron: O.K. C'est important, je pense. Alors, vous, votre raisonnement, c'est par analogie, si vous me permettez l'expression, par analogie. Vous dites: Puisque, dans le domaine que nous connaissons bien, il y a des dispositions précises qui nous régissent, dont l'article que vous venez de citer, et il n'est pas respecté, en conséquence, ce n'est pas parce qu'il y aura éventuellement un engagement d'avoir un mur légal – comme vous dites – qui est imposé dans la loi que ça offre la sécurité que vous croyez qu'il devrait y avoir.

M. Guay (Denis): Il n'y en aura pas de sécurité. Si vous me permettez, M. le député...

M. Gendron: Oui, oui, je vous permets, vous êtes notre hôte.

M. Guay (Denis): ...j'ai un article dans le journal Le Soleil , ici, qui est de Pierre Michaud, de Desjardins, qui avoue effectivement au journal: «M. Michaud reconnaît que Desjardins ne demande pas à ses assurés de passer par les centres d'évaluation», alors que c'est la loi. Est-ce que Desjardins va demander aux gens de passer des messages d'un côté à l'autre des locaux? Moi, je ne crois pas à ça. C'est notre humble avis, là, qu'on vous dit. Mais, si la loi n'est pas respectée, puis c'est clair dans la loi qu'elle doit être respectée, comment vont-ils respecter un mur légal?

M. Gendron: Dans une loi comme celle dont on discute, concernant l'ensemble des intermédiaires de marché, M. Guay... parce que, à la conclusion, de toute façon, vous sembliez également mettre un accent assez fort sur la protection du consommateur, vous dites: Il faudrait, avant d'envisager un trop grand décloisonnement, s'assurer que les balises offrant une meilleure protection du consommateur sont plus fortes. Mis à part la question des renseignements personnels, est-ce qu'il y a d'autres aspects où vous trouvez que, dans ce que nous discutons, éventuellement, le consommateur prend des risques?

(11 h 20)

M. Guay (Denis): Je trouve ça le fun, votre question, parce que, oui, il y en a un aspect auquel les gens n'ont peut-être pas pensé. Si on regarde la Commission d'accès à l'information, la Société de l'assurance automobile, au niveau des fichiers de sinistres, des dossiers de conduite, etc., j'ai remarqué que, lors de la demande des assureurs dans leur mémoire qu'ils ont présenté à l'Inspecteur des institutions financières, les assureurs demandent au gouvernement d'avoir la charge de l'administration de ces renseignements-là. Et pourquoi le demandent-ils? Parce qu'ils savent qu'à un moment donné, quand les banques vont être dans le marché, et les caisses populaires qui vont avoir une multitude de renseignements personnels, pour affronter le manque de données qu'ils ont présentement, parce que le courtier ne peut pas aller chercher la banque de données que l'assureur peut aller chercher par son cabinet – on voit venir ça... c'est que le gouvernement est en train de dire: Si on donne une chance à Desjardins et aux autres institutions d'aller chercher de l'information et de décloisonner puis de faire passer l'information d'un côté à l'autre, bien, on voudrait permettre aussi aux courtiers, puis aux autres naturellement, d'aller chercher de l'information. Donc, on demande d'aller chercher, si on veut, la charge du fichier central. Donc, ça commence à être inquiétant. Si tu donnes de quoi à un, il faut que tu le donnes à l'autre. Si tu ne le donnes pas à personne, ça ne fait pas de chialage.

M. Gendron: Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Bien, M. le député d'Abitibi-Ouest. Maintenant, la parole est au député de Viger.

M. Maciocia: Merci, M. le Président. Merci, M. Guay, d'être devant nous avec tous vos gens qui sont concernés justement par votre présence ici aujourd'hui. Moi, je dirai que vous avez toute notre gratitude d'être venu ici devant cette commission. Même si on peut laisser supposer que vous ne parlez absolument pas quasiment du projet de loi n° 188, je voudrais rappeler quand même que vous étiez là sur la révision de la Loi sur les intermédiaires de marché à l'automne 1996 et je crois que, par respect, il fallait quand même que vous soyez ici parce que c'est le prolongement de cette loi qu'on a devant nous, la 188. Par conséquent, moi, je considère que c'est important que vous soyez devant cette commission pour expliquer vos craintes et vos aspirations vis-à-vis, pas seulement de ce projet de loi là, mais de vos revendications à vous.

M. Guay (Denis): M. le député, je voudrais rajouter une petite parenthèse. Effectivement, on est content. Mais je voudrais vous mentionner qu'on n'a pas demandé à être ici aujourd'hui. On a été invité par le gouvernement. Donc, on apprécie d'autant plus le fait. Merci.

M. Maciocia: Moi, je vais directement à deux, trois questions que je voudrais vous poser. Il y en a une qui a été posée par le député d'Abitibi-Ouest. À la page 6 de votre mémoire, le dernier paragraphe, vous dites: «Quant à la section II traitant des experts en sinistre et plus particulièrement l'article 35 du projet de loi, nous notons que le législateur suggère qu'un expert en sinistre ne puisse être autorisé à agir dans une autre discipline. Nous sommes d'autant plus d'accord avec cette proposition que nous nous sommes opposés vigoureusement à la suggestion que des carrossiers puissent agir à titre d'estimateur de dommages en y voyant un conflit d'intérêts évident.» Ma question est très simple: Est-ce qu'il y a des carrossiers qui font de l'estimation des dommages actuellement?

M. Guay (Denis): Effectivement. Le fait que les assureurs ne veulent pas respecter l'article 171 pour diriger un assuré vers un centre d'estimation, ça leur permet de choisir des carrossiers désignés, dont le carrossier va retourner, «kickback», une ristourne de volume à la fin du mois, passer des véhicules gratuits, etc., mettez-en. Tout ce qu'il peut faire pour se déculotter, il va le faire, O.K.? Ce que ça permet à ces gens-là, c'est de profiter d'une situation. Et là ça devient le carrossier qui devient l'évaluateur. Donc, dans un cas, il va surestimer l'évaluation pour être capable de récupérer sa marge de manoeuvre qu'il a envoyée à l'assureur à la fin du mois ou, dans l'autre cas, parce qu'il a peur de perdre sa relation d'affaires avec l'assureur, il va sous-estimer les dommages et il va mal réparer le véhicule. Donc, ce qu'on dit: Il y a un conflit d'intérêts. Puis c'est drôle parce que l'évaluateur est devenu le gestionnaire de portefeuille de l'assureur. C'est incroyable! C'est lui qui détermine combien il y a de dommages, c'est lui qui répare. Il n'y a pas d'intervenant sur les lieux, un intermédiaire, qui peut savoir s'il y a des dommages antérieurs à l'accident ou pas. C'est lui qui intervient comme expert en sinistre. Il devient un expert en sinistre.

J'en ai ici une copie justement, un véhicule... Regardez bien. C'est marqué: «L'assuré a été dirigé vers votre atelier.» Puis, pendant ce temps-là, les assureurs ont fait un code d'éthique, ici, c'est marqué: «Jamais un évaluateur ne devra avoir un atelier de réparation.» Ce n'est pas moi qui l'ai fait, c'est le Groupement des assureurs. Puis, en même temps, de l'autre côté: «Le véhicule a été dirigé dans votre atelier.» Merci beaucoup. Trois mots qu'ils ont dit: «Le véhicule est accidenté: le pare-chocs avant, l'aile gauche, l'antenne, etc. Fais l'estimé.» Personne n'a vu le véhicule, personne d'indépendant.

Donc, ce qu'on dit, c'est que les assureurs doivent assurer, les réparateurs doivent réparer, puis les estimateurs doivent estimer. Plus de conflit d'intérêts, plus de collusion, plus de magouille, plus de pouvoir de faire chanter le monde, de faire du terrorisme économique comme on subit. Parce que, présentement, il y a de nos membres qui se font visiter par Desjardins, puis Desjardins leur dit: Si tu ne donnes pas ta démission au sein du MCQ, tu n'auras plus jamais d'ouvrage de nous. Puis je l'ai ici, la lettre de démission, je vais vous la lire: «Le 3 novembre, j'apprends que je ne suis plus inscrit sur la liste des réparateurs d'autos pour Desjardins. La raison, c'est parce que je fais partie du MCQ. C'est pour cela que je vous donne ma démission comme directeur adjoint régional au Mouvement carrossiers Québec. J'ai été très heureux de pouvoir vous côtoyer, vous m'avez beaucoup appris, et je vous en suis très reconnaissant.» Notre meilleur membre qu'on n'avait pas dans la Beauce. On a 700 membres. Si on n'avait pas de terrorisme économique comme ça, on aurait 1 500 membres, puis la misère serait finie au Québec, les gens seraient respectés, et, nous, on serait capables de faire notre travail de façon adéquate, professionnelle, sans voler qui que ce soit, et qu'on nous redonne ce qui nous revient. Donc, si la loi n'est pas respectée, vous êtes loin de voir une loi respectée au niveau de 188, ça, je vous le dis.

M. Maciocia: M. le Président, je dois vous poser une question aussi, toujours sur le projet de loi n° 188. Vous avez parlé tout à l'heure de la vente d'assurance dans les caisses populaires, dans le même endroit, et tout ça. Dois-je comprendre que vous êtes d'accord avec la recommandation 2 du rapport Baril, où on dit exactement, si j'ai bien compris vos mots: «Nous, nous disions à ce moment-là que nous étions d'accord avec la distribution des produits d'assurance dans une institution de dépôts, mais à condition que: établir un encadrement uniforme, offrir des produits d'assurance par une filiale dédiée à ces activités, assurer la distribution des produits d'assurance par des intermédiaires dûment qualifiés, interdire le cumul des fonctions, ça veut dire le double emploi, et prévoir les dispositions régissant l'utilisation des renseignements personnels, et utiliser des espaces réservés, ça veut dire locaux distincts, pour la vente des produits d'assurance.» Vous êtes d'accord avec la recommandation du rapport Baril vis-à-vis cette situation.

M. Guay (Denis): Absolument d'accord. Et je voudrais rajouter là-dessus. Il y a tellement de terrorisme économique que nos gens se font vider leur shop par Desjardins. Et, plus que ça, nos gens ont porté plainte à Claude Béland et John Harbour, qui était là à l'époque parce qu'il n'est plus là aujourd'hui, ils ont porté plainte et ont dit: Si ça continue comme ça, on va sortir nos opérations bancaires. Ce qui est aberrant... Quand je fais des réunions dans toutes les régions du Québec présentement, on a un sondage à la fin de la réunion, on demande aux gens: Avec quelle institution financière faites-vous affaire, les banques ou les caisses? À 90 %, c'est la caisse. Pendant que l'individu, le commerçant ou le carrossier fait affaire avec la caisse pour son compte courant, ses achats d'équipements, location Desjardins, etc., mets-en, en même temps – ce qui est assez paradoxal – il se fait sortir son gagne-pain de la bouche.

Les gens ont rencontré la caisse. À la caisse, ils ont dit: On va regarder ça. On a envoyé une lettre à Desjardins, Assurances générales Desjardins, et, à partir de là, la caisse a pris une résolution, et je vous la dis: «Vous trouverez ci-joint une copie d'une résolution d'une réunion du conseil d'administration de la Caisse populaire Desjardins de Saint-Gédéon, Beauce, tenue le 21 février 1994. Espérant le tout conforme à vos exigences.» Et je vous lis la résolution: «Sur proposition dûment appuyée, il est résolu, à l'unanimité, de faire des pressions sur les Assurances générales des caisses Desjardins afin que nos membres de nos caisses puissent obtenir leur part de marché pour les réparations d'autos et que, si un terrain d'entente n'est pas trouvé, la Caisse populaire Desjardins de Saint-Gédéon verra à reconsidérer sa décision d'offrir des produits d'assurance des Assurances générales des caisses.»

La caisse Desjardins dit: Si tu continues à écoeurer notre monde, on ne voudra plus vendre d'assurance dans notre caisse. Donc, c'est inquiétant. Puis on se fait vider de même partout au Québec. Parce que, quand tu fais du dirigisme, c'est parce que tu as promis du volume à un gars, à un carrossier ou deux. Puis, pour promettre du volume et pour respecter ton entente de volume pour avoir tes rabais, bien, tu es obligé de vider 12 carrossiers autour qui ont le droit de gagner leur vie, eux autres aussi. C'est ça, le problème.

M. Maciocia: Ma dernière question, M. le Président. À la page 6, vous dites, au troisième paragraphe: «Déjà, il nous a été rapporté des cas où, non satisfaits d'une proposition de règlement d'une réclamation en dommages automobiles qui leur était faite, des assurés québécois se sont fait répondre que, si l'assurance-habitation, par exemple, avait été contractée auprès du même assureur, l'offre de règlement aurait été substantiellement supérieure et grandement facilitée.» Est-ce que vous avez des exemples?

(11 h 30)

M. Guay (Denis): Oui, on a même des témoignages de gens, si plus tard on peut s'en servir en enquête publique, peut-être. Avant de régler un dossier avec une cliente qui est dans la région de Montérégie, qui a téléphoné chez nous suite à un appel aux automobilistes qu'on faisait par le Journal de Montréal pour dire aux gens: Si vous avez été victimes dans vos droits de choisir votre carrossier ou si vous avez eu des problèmes avec votre carrossier ou avec un assureur, téléphonez-nous, la dame m'a téléphoné, m'a raconté son problème. Effectivement, quand ça a été le temps de régler, ils ont dit: Madame, ça a été long, votre affaire, si vous aviez pris de l'assurance-habitation, on aurait peut-être payé un peu mieux. Puis j'ai le témoignage, si vous le voulez, je suis prêt à vous le déposer n'importe quand. On aurait payé mieux puis on aurait payé plus rapidement. C'est ça, du chantage économique. Puis c'est Desjardins. Ça, ça nous écoeure pas à peu près de se faire... On appelle ça une coopérative.

Moi, je me fais vider mon garage. Ça fait 15 ans que je suis à mon compte, je suis le seul, entre Québec et Montréal, à être accrédité par le Club automobile et je suis fiché dans l'écran de Desjardins comme carrossier indésirable. À chaque fois qu'un client veut venir chez nous, l'agent de réclamation regarde dans la machine: Madame, on ne veut pas que vous alliez là, c'est un problème, aller là. C'est dur, gagner sa vie comme ça. Puis les gens autour de moi, ici... Au Lac-Saint-Jean, ça a passé dans le journal du Lac-Saint-Jean, la semaine dernière, les gens sont allés rencontrer le ministre Brassard. Donc, on a beaucoup de chemin à faire, avant de faire une loi n° 188 et de la faire respecter. C'est du terrorisme économique.

On avait un lobbyiste, pendant un an, qu'on a payé pour nous mettre dans notre démarche politique. Le 16 février dernier, on a reçu un téléphone de Desjardins, ils lui ont dit: Si tu ne lâches pas le MCQ, tu n'auras plus de business de nous autres et, si tu le lâches, on va t'en donner plus. Bien, il nous a lâchés. Ça fait que c'est grave, hein? On a notre voyage, je peux vous le dire. On n'a pas le droit de gagner notre vie. C'est comme si je m'en allais devant Desjardins puis, à chaque client qui rentre là, je disais: Ça coûte plus cher ici, puis vous allez être mal servis. Je ne suis pas sûr qu'ils aimeraient ça. C'est pour ça qu'on est rendu là, messieurs les députés et mesdames les députées. Je ne sais pas si ça répond à votre question.

M. Maciocia: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Oui, je vais peut-être revenir, parce que c'est quand même assez lourd à porter, le jugement que vous venez de porter. Non, mais une question très simple: Est-ce que vous croyez – parce que je ne suis pas ici pour juger – que d'autres compagnies d'assurance, selon votre connaissance, font également du dirigisme?

M. Guay (Denis): Énormément. Puis, si vous voulez en être sûrs, je sais qu'il y a un proche – parce que je n'ai pas tout des ennemis dans les assureurs, il y en a des gens qui me respectent – qui m'a confirmé que, lorsqu'on a brassé ça dans les journaux, dans Le Soleil – ça a commencé l'année passée au mois de février – le Groupement des assureurs a ordonné une petite enquête interne: à tous les assureurs d'envoyer, avec un formulaire, le dirigisme qui était en proportion chez-eux. On n'a jamais pu mettre la main dessus. Là, je ne sais pas s'ils vont fausser les données, parce qu'on voudrait les avoir; ça, c'est leur problème. Mais il y en a une petite étude qui a été faite. Puis, dans le cas des gens qui se font vider leur garage, quand tu rencontres ton client dans un centre d'achats puis qu'il te dit: Moi, je voulais aller chez vous, mais ils m'ont dit que, si j'allais chez vous, ils ne paieraient même pas la facture, c'est dérangeant, ça.

M. Gendron: «Ils m'ont dit», c'est toutes sortes de compagnies d'assurance?

M. Guay (Denis): Non, non. On a les noms de nos clients puis on a des... C'est plusieurs... Les assureurs?

M. Gendron: Non, non. Je le sais, M. Guay, que c'est vos clients puis vos gens de l'association. Mais, moi, ce que je voulais savoir: Est-ce que la pratique, selon ce que vous venez d'affirmer, est très largement répandue chez à peu près toutes les «cies» d'assurances? C'est ça que je veux savoir.

M. Guay (Denis): O.K. Je vous réponds là-dessus, M. le député. Ça se fait chez les plus gros assureurs parce que les plus gros assureurs... Il y a dix assureurs au Québec qui contrôlent 85 % de toute la vente d'assurance, et les dix assureurs le font. Et là, voyant que ça brasse pas mal, les assureurs passent dans la revue Le Journal de l'assurance que les carrossiers sont comme des espèces de contracteurs généraux, des espèces de ci, des espèces de ça, puis, là, eux-autres, ils ont commencé à dire: On va changer le terme de dirigisme. Ils veulent appeler ça du référencement. C'est beau.

M. Gendron: Alors, les pécheurs sont nombreux. C'est ça que vous dites.

M. Guy (Denis): Oui.

M. Gendron: Je vous remercie, M. Guay.

M. Guay (Denis): Merci beaucoup.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci. Est-ce qu'il y a d'autres questions, d'autres commentaires? M. le député de Viger.

M. Maciocia: Dois-je comprendre que, d'après vous, ce serait mieux que ça ne se vende pas, de l'assurance, que ce soit aux caisses, et que ce aux banques et que ce soit un peu partout?

M. Guay (Denis): Nous autres, on est d'accord là-dessus, que chacun ait son champ de compétence. Nous, on n'ira pas faire l'ouvrage des assureurs. Qu'ils ne viennent pas faire notre ouvrage. Donc, dans les banques qu'ils vendent des produits financiers puis dans les caisses aussi, et que les assureurs restent assureurs.

M. Maciocia: Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. Guay.

M. Guay (Denis): Merci de votre attention.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): On remercie tous ceux qui vous accompagnent, également les nombreux membres de votre Mouvement qui sont venus vous supporter ce matin.

Et, sur ça, j'invite les représentants et les représentantes de l'Office de la protection du consommateur à prendre place. Et je suspends pour quelques minutes seulement.

(Suspension de la séance à 11 h 35)

(Reprise à 11 h 42)


Documents déposés

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Mesdames, messieurs, la commission reprend ses travaux. Avant d'entendre nos invités, j'aimerais déposer tout un dossier que M. Guay m'a remis, qui confirme les avancés ou les dires dont il a fait part durant la commission. Donc, ce dossier-là est déposé devant la commission.

Sur ce, j'invite les représentantes et les représentants de l'Office de la protection du consommateur à nous faire part de leur mémoire. Et j'invite Mme Nicole Fontaine à nous présenter les personnes qui l'accompagnent. Bienvenue.


Office de la protection du consommateur (OPC)

Mme Fontaine (Nicole): Merci, M. le Président. C'est avec plaisir que nous nous présentons devant la commission aujourd'hui, à votre invitation. Je vais présenter les gens qui m'accompagnent. Alors, à mon extrême gauche, M. Mignault, qui est membre du conseil d'administration de l'Office, à ma gauche immédiate, Me Jean-Louis Renaud, qui est juriste en droit de la consommation, et à ma droite Mme Linda Young, qui est agente de recherche à l'Office, et Mme Sylvie Côté, qui est adjointe à la présidence. Ces personnes m'accompagnent aujourd'hui.

Il nous fait plaisir, bien sûr, de saisir l'occasion de nous exprimer au sujet de l'important projet de loi qui est devant nous et qui donne suite au rapport quinquennal sur la mise en oeuvre de la Loi sur les intermédiaires de marché déposée il y a déjà un an devant la commission du budget et de l'administration.

L'Office a eu l'occasion à quelques reprises de formuler des recommandations, au fil des étapes préliminaires menant au dépôt de l'actuel projet de loi. Et nous constatons avec satisfaction que plusieurs de nos demandes ont été favorablement accueillies et qu'on retrouve ces propositions dans la loi actuelle.

L'Office souscrit aux grands objectifs poursuivis par l'État dans la mise en place de ce cadre législatif, qui sont de favoriser la déréglementation, le décloisonnement des produits et des services et la concurrence, dans un contexte où le Québec s'inscrit dans une conjoncture qui est internationale.

Par ailleurs – et nous aimerions le citer – un récent sondage de l'Institut national de la qualité, réalisé en 1997 auprès de plus de 8 000 consommateurs, indique que les banques et les compagnies d'assurances offrent le pire ou, en tout cas, un des pires service à la clientèle, présentement, dans toute l'industrie financière, et ça, tel que perçu par les consommateurs. Donc, l'Office est préoccupé des résultats des changements qui sont proposés dans le projet de loi pour les consommateurs, compte tenu qu'il y aura un décloisonnement important, puisque ces changements se feront avec des partenaires qui ne semblent pas valoriser – ou, en tout cas, ils le valorisent, mais sûrement pas suffisamment efficacement – le service adéquat à leur clientèle que sont les consommateurs.

Ainsi, déjà en introduction, nous voulons suggérer d'améliorer l'article 15 en y ajoutant la notion d'«agir au mieux des intérêts de leurs clients», en plus de celle qui s'y trouve déjà, d'«agir avec, bien sûr, honnêteté et loyauté dans les relations avec leurs clients». Le projet de loi viendra modifier considérablement les relations d'affaires entre les consommateurs et les fournisseurs dans un secteur d'activité qui est en pleine croissance. Les produits qui sont offerts aux consommateurs deviennent de plus en plus variés et complexes, et ceux-ci devront donc avoir facilement accès à une information qui devrait davantage être accessible – pas en terme de volume, mais en terme d'accessibilité et de compréhension – et compréhensible pour que les consommateurs puissent exercer leur choix de manière judicieuse et éclairée.

Le regroupement d'un ensemble de produits financiers sous une même enseigne encouragera, bien sûr, une fidélisation des comportements des consommateurs, puisqu'ils trouveront des avantages évidents à s'approvisionner auprès d'un même fournisseur. Mais ce regroupement comporte aussi des pièges. Le consommateur qui concentre tous ses achats au même endroit aura moins tendance à comparer les prix et les produits qui sont proposés par d'autres fournisseurs. Il sera moins porté à vérifier si la proposition qui lui est faite est vraiment celle qui répond le mieux à ses besoins et au meilleur coût possible. C'est pour ça qu'on met tellement l'accent sur une information qui soit compréhensible.

Par ailleurs, la concurrence accrue qui est visée par le projet de loi et qui devrait être suscitée par ce projet de loi à court terme, on pense, s'atténuera à plus long terme, avec la percée du marché par les institutions financières et le rachat de nombreux petits représentants par ces institutions. Et, dans ce contexte probable de concentration éventuelle à moyen et long terme des services entre les mains de quelques grandes entreprises, nous pensons qu'il n'est pas évident que le consommateur y trouvera effectivement les avantages d'un contexte qui se voulait plus concurrentiel. Alors, ce sont nos commentaires d'introduction.

Le projet de loi comporte un bon nombre de dispositions, par ailleurs, qui visent à protéger les consommateurs. Et, tablant sur ces acquis, nous soumettons d'autres propositions aujourd'hui, de même que des commentaires et des questionnements sur les thèmes suivants:

la relation contractuelle, la protection de la vie privée, le rôle du Bureau et des chambres, l'information du public et les garanties de remplacement et les garanties supplémentaires.

Concernant la relation contractuelle, le projet de loi prévoit l'interdiction d'assujettir la conclusion d'un contrat à celle d'un autre. On pense qu'il devrait également prévoir le droit du client de résilier son contrat d'assurance en tout temps, sans compromettre, par exemple, le maintien d'un prêt à l'occasion duquel il aurait contracté ce contrat d'assurance.

La notion de pression indue que nous retrouvons à l'article 17.1 nous apparaît être sujette à interprétation. Doit-on la comprendre dans le sens de coercition ou d'insistance exagérée? Ou s'agit-il de la pression qui est subie par le consommateur ou de la pression qui est perçue par lui? Il y a là de l'interprétation possible. Et, pour éviter tout problème dans la compréhension de ces termes, nous proposons de définir plus précisément dans la loi ce qu'il faut considérer comme étant de la pression indue. Une jurisprudence, d'ailleurs, existe à cet effet-là.

L'article 17.2 comporte une disposition qui donne au consommateur un droit de résolution de son contrat dans les dix jours, s'il croit avoir été contraint. On retrouve une disposition semblable à l'article 39, mais par ailleurs, cette fois-ci, pour cinq jours. Nous suggérons d'harmoniser cette notion et de la ramener partout à 10 jours, pour plus de clarté, de cohérence et que le consommateur s'y retrouve.

L'article 22, tel que formulé actuellement, définit les tâches qu'un représentant, dans une institution de dépôts, ne peut exercer afin d'éviter tout conflit d'intérêts. Or, dans ce marché, qui est en évolution rapide, il est fortement possible que les tâches des représentants évoluent dans l'avenir, et ces nouvelles attributions qui s'y seront ajoutées n'auront pas été prévues par la loi soit pour les inclure ou pour les exclure, et, donc, des problèmes de conflits d'intérêts pourront alors se poser et assez rapidement. Nous proposons de modifier la formulation de cet article afin d'y énumérer de façon limitative les tâches que peut exercer un représentant plutôt que celles qu'il ne peut exercer, de façon à ce que ce soit reconsidéré à chaque fois.

L'article 29 stipule que le représentant doit, lors d'un renouvellement, informer son client des polices qu'il a étudiées, pour lui faire la meilleure proposition possible. Cette mesure, à notre avis, devrait être renforcée probablement au niveau d'une réglementation, pour faciliter la prise de décision du consommateur. Ici, nous proposons qu'elle soit reformulée à l'effet de fournir au consommateur un tableau comparatif des principales clauses et de la prime de chacune des polices considérées par le représentant dans l'étude de son dossier, et non pas seulement une liste de fournisseurs considérés.

(11 h 50)

L'article 120 interdit la perception d'une prime au comptant, ce qui nous paraît contestable, en fait, en vertu de l'article 8 de la Loi sur la monnaie, qui attribue aux pièces et aux billets de notre monnaie le pouvoir de libérer de toute dette ou obligation. Nous croyons que cet article prive le consommateur d'un mode de paiement et que ça l'encourage à en utiliser un autre qui lui encoure des frais. Pour contourner ces problèmes, nous recommandons de reformuler l'article pour éliminer l'interdiction de percevoir une prime au comptant. Pour la protection du consommateur, nous recommandons, par contre, d'y ajouter une disposition particulière dans le cas où le représentant recevrait le paiement d'une prime en argent comptant qui pourrait être, par exemple, l'obligation de remettre à son client un reçu prénuméroté.

Les articles 357 à 359 stipulent que l'assureur doit déposer son guide de distribution au Bureau. Nous recommandons ici d'ajouter une disposition qui oblige l'assureur à obtenir l'approbation de son guide par le Bureau avant de le faire parvenir à ses distributeurs, pour éviter des confusions, à savoir quel guide est approuvé ou modifié.

Enfin, la question de la compétence des distributeurs nous préoccupe grandement dans un secteur qui est quand même hautement spécialisé et qui est souvent de compréhension difficile pour la majorité des consommateurs. Et nous pensons que la formation est ici une condition qui est essentielle pour assurer la qualité des services à la population. L'expérience vécue par des consommateurs, par exemple – et qu'on a pu vivre, à l'Office – qui ont acheté une garantie supplémentaire d'automobile d'occasion, nous incite à la prudence. Nous recommandons ici que tous les distributeurs soient tenus de recevoir une formation adéquate, même si elle n'est pas de durée très longue, complétée d'une formation continue puisque les produits évoluent, afin de maintenir à jour leurs connaissances dans ce secteur d'activité.

L'article 380 mentionne que certains produits d'assurance ne peuvent être offerts que par des distributeurs titulaires d'un certificat restreint. Nous recommandons ici de modifier le principe sous-jacent à cet article et de plutôt le reformuler à l'effet que tout les produits d'assurance ne puisse être offerts que par un distributeur titulaire d'un certificat restreint. Cela garantirait un meilleur service et la compétence des distributeurs.

La question, maintenant, de la protection des renseignements personnels. Nous sommes satisfaits de constater que plusieurs mesures ont déjà été introduites dans le projet de loi relativement à la protection des renseignements personnels et médicaux des assurés. Mentionnons, entre autres, l'obligation des représentants de transférer tous les renseignements recueillis auprès d'un assuré au cabinet dont il dépend – par exemple, l'article 18 – l'obligation de consigner sur un formulaire distinct et de ne transmettre à l'assureur que les renseignements médicaux ou qui concernent les habitudes de vie et d'autres éléments.

Mais, malgré ces dispositions, nous craignons que la vie privée des consommateurs ne soit encore menacée, dans la mesure où les assureurs pourraient recueillir plus d'information que celle qui est vraiment requise expressément pour les fins de leur travail. L'article 21 prévoit en effet que le représentant ne peut recueillir que les articles pertinents pour lui permettre de mieux répondre aux besoins de son client. Or, la notion de pertinence ne limite pas la cueillette de renseignements à ceux qui sont nécessaires ou indispensables. Et c'est pourquoi nous suggérons de remplacer, dans cet article, le mot «pertinent» par «nécessaire» et d'interpréter le mot «nécessaire» dans le sens donné par la Commission d'accès à l'information, en particulier dans le jugement Bellerose.

La protection de la vie privée nous apparaît comme étant aussi une question d'attitude et de valeurs. Il n'y a jamais de protection mur à mur, avec ce qu'on peut prévoir comme règlement. Et, quelles que soient les mesures prévues à la loi, les risques de fuite demeurent toujours possibles, à moins que toutes les personnes concernées ne se fassent une règle morale d'assurer la confidentialité des renseignements personnels dont elles ont la garde et de prendre toutes les précautions à cet effet.

Nous croyons qu'il est de la responsabilité de chaque organisation ou, donc, cabinet de développer une telle culture et de faire en sorte que la préoccupation d'assurer la protection des renseignements personnels devienne constante et soit renouvelée pour tous les employés par les représentants ou par les cabinets et les distributeurs. Nous pensons que le Bureau, entre autres, devrait en faire régulièrement la promotion ou le rappel.

Enfin, il nous semble que le projet de loi devrait prévoir un accès à son dossier en tout temps pour le consommateur et la possibilité pour lui de le modifier. Le consommateur pourrait avoir oublié de transmettre une information et souhaiter corriger la situation, ou encore, sa réalité personnelle pourrait avoir évolué.

Quant à la conclusion d'ententes avec le gouvernement ou un de ses organismes ou ordre professionnel, nous comprenons que le Bureau doit consulter et obtenir l'avis selon l'article 157, sinon, la permission de la Commission d'accès à l'information. L'article ne nous apparaît pas suffisamment clair. Nous suggérons que ces ententes soient carrément supervisées et autorisées par la Commission d'accès, comme ça a pu se faire à plusieurs reprises dans les dernières années.

La question, maintenant, de la structure du Bureau et des chambres. Ici, le citoyen consommateur, doit pouvoir s'attendre à un mode de fonctionnement qui est simple, qui est peu coûteux, qui assure que des produits et des services de grande qualité lui soient offerts. Il doit s'attendre aussi à ce que cette structure d'encadrement, tout en étant régie par la loi, conserve une certaine indépendance et une autonomie de fonctionnement. Et la structure prévue, comportant certains aspects quasi judiciaires – par exemple, le jugement d'un membre du Bureau sur le comportement fautif d'un représentant – il semble important de conserver une distance entre le Bureau et l'instance politique, à notre avis. Et nous pensons que l'article 199 devrait être revu à cet effet.

Le partage des responsabilités entre le Bureau et les chambres nous questionne ici aussi à plusieurs égards. La structure qui est proposée nous apparaît encore trop fragmentée entre plusieurs instances: les chambres, la Commission, le Bureau. Il appartient au Bureau de réglementer les conditions générales d'opération dans le domaine de l'assurance et de voir à la gestion des plaintes et à la surveillance de la discipline des représentants de cabinets ainsi que des représentants et sociétés autonomes. Quant aux chambres, elles se voient investies de la responsabilité de la formation permanente, des services aux membres et de la gestion des appellations réservées. Elles ont aussi le pouvoir d'aviser le Bureau, mais, par ailleurs, à moins que ça soit une erreur dans l'article, à l'article 305, c'est le Bureau qui détermine la composition des comités prévus à cette fin et mis sur pied par les chambres.

Il y a un chevauchement. En tout cas, on trouve ça compliqué. Et à cela s'ajoute un partage de certaines responsabilités entre le Bureau et la Commission des valeurs mobilières, selon le domaine d'activité des représentants. Il nous semble ici que ce mode de fonctionnement, que cette fragmentation des responsabilités entre plusieurs partenaires exigeront des efforts de coordination importants: par exemple les chambres qui conçoivent les codes de déontologie, mais c'est le Bureau qui l'applique. Il me semble que c'est comme une chaîne de montage. Et ça comporte des risques certains de conflits et de temps passé à la coordination entre les instances qui sont concernées ici, dans le modèle d'encadrement.

Il nous apparaît aussi que le système des chambres proposé dans ce projet de loi présente des similitudes avec celui du système d'encadrement des professions au Québec. Et on s'est demandé s'il n'était pas indiqué d'harmoniser complètement le système proposé pour les services financiers avec celui des professions déjà en place. Par contre, ce ne sont pas nécessairement des professionnels, au sens du Code des professions. Et, donc, on se questionne. Est-il par ailleurs nécessaire de maintenir les chambres telles qu'elles sont? Est-ce que le Bureau ne pourrait pas remplir complètement ses fonctions et diminuer ainsi la fragmentation, agir comme guichet unique? Et je sais qu'on n'est pas les seuls à questionner ça. Ça revient.

Quant au conseil d'administration de la chambre, le projet de loi prévoit cinq membres du Bureau désignés par les chambres, alors que les 10 autres sont nommés par le ministre. On pense qu'on devrait envisager ici une représentation du public, soit des consommateurs, au conseil d'administration du Bureau de même que sur le comité de discipline. Une telle approche, à notre avis, s'inscrit dans le sens de favoriser une autorégulation, une surveillance indépendante et l'ouverture sur le milieu.

Enfin, la loi prévoit la mise en place par le Bureau d'un service de réception des plaintes des consommateurs. Nous sommes très heureux de cela. Nous voudrions que ce service soit significatif. Et nous recommandons que ce service des plaintes soit placé à un niveau élevé dans l'organisation et que ses activités fassent l'objet d'un compte rendu dans le rapport annuel de l'organisme, qu'on sache quel est le profil des plaintes que le Bureau reçoit, de façon à ce que ça serve de feedback pour améliorer les services aux consommateurs.

(12 heures)

Les cabinets. La loi prévoit l'obligation pour les cabinets, pour les représentants et pour les sociétés autonomes de maintenir un établissement d'affaires au Québec. Nous proposons que la loi prévoie également l'obligation pour les représentants en valeurs mobilières de détenir un compte en fidéicommis ouvert et maintenu au Québec. En cas de problème, en effet, avec une entreprise, il est ainsi plus facile d'avoir accès aux informations pertinentes et d'exercer, s'il y a lieu, les recours prévus pour récupérer ces sommes.

Mais ça, c'est sans tenir compte du fait que le commerce électronique est maintenant avec nous, que les achats électroniques sont de plus en plus avec nous et vont s'accentuer, dans le futur. Et je pense que la loi devrait en tenir compte, prévoir des modalités. Déjà, à l'Office de la protection du consommateur, on fait souvent affaire avec des compagnies transnationales. Et la question de maintenir un établissement d'affaires au Québec, quand il s'agit de services qui peuvent très bien se contracter par une voie électronique... Le problème, on l'a déjà. Il faudrait que, dans le projet de loi, il y ait une réglementation d'encadrement du commerce électronique qui soit prévue. On ne la voit poindre nulle part au Québec, présentement, mais ça s'en vient très rapidement. Déjà, on a plusieurs demandes, des appels des consommateurs à cet effet-là. Et ça va être vrai aussi pour les produits d'assurance, les produits de valeurs mobilières.

Nous soumettons à votre attention aussi le problème d'identification des succursales. Dans le cas, il s'agirait de grandes corporations comme les banques. L'émission d'un seul certificat par cabinet comporte le risque d'avoir un certificat, par exemple, de la Banque royale, alors qu'il y a de multiples succursales partout, et on pense que ça ne permettrait pas de savoir quels problèmes il y a dans telle succursale. Il faudrait s'assurer d'une identification des succursales, de façon à être capable de savoir où sont les problèmes et que telle ou telle succursale soit sanctionnée et que, dans le rapport annuel, ça apparaisse aussi. Nous recommandons donc d'émettre, à chaque succursale d'un cabinet, peut-être pas un certificat nommément, mais un duplicata numéroté, possiblement, du certificat émis à ce cabinet, afin qu'il puisse avoir une identité distincte et transparente et qu'il puisse être reconnu par les groupes de consommateurs.

L'information du public. La loi prévoit la publication périodique par le Bureau d'un bulletin qui est destiné à informer le grand public. Encore là, ce mécanisme d'information nous apparaît trop limitatif, Il est rapidement désuet, compte tenu qu'il existe maintenant une multitude de supports écrits, électroniques et de tous ordres. Je pense qu'il faut que la loi prévoie une multitude de supports, là aussi, pour tenir compte de l'évolution des communications. Et nous recommandons de reformuler l'article 158 à cet effet-là.

Par ailleurs, l'information à donner au public devra s'adapter à différents publics cibles. Il n'y a pas un groupe de consommateurs cible, il y a beaucoup de publics cibles; les publicités en tiennent compte. Moi, je pense que l'information qu'on veut transmettre au public devrait aussi en tenir compte et s'attacher à avoir des messages peut-être ciblés, différenciés par groupes de clientèles. C'est un défi qui n'est pas facile, mais je pense que, pour rendre compréhensibles les différents produits offerts, il faudrait qu'à l'instar de la publicité qui est devenue extrêmement habile... Il s'engage même maintenant des anthropologues pour savoir quels sont les besoins des consommateurs. Pourquoi, dans les produits financiers, on ne devrait pas aussi cibler les messages, les rendre accessibles?

Nous recommandons également à l'intention des consommateurs que les contrats soient mieux vulgarisés et compréhensibles pour tous. Je dis «à l'intention des consommateurs», mais j'aurais le goût d'ajouter à l'intention aussi des distributeurs et des représentants, car je ne suis pas certaine qu'ils s'y retrouvent aussi tout le temps facilement.

La compréhension du contrat, c'est une condition préalable à toute transaction. Et nous savons tous à quel point cette étape, lorsqu'elle est escamotée ou que ce n'est pas clair, il y a une source de mésentente et de difficulté en cours d'application. Ce n'est pas pour rien qu'à l'Office de la protection du consommateur on reçoit 300 000 appels de plaintes par année, c'est souvent relié à des contrats qui ne sont pas clairs ou que les gens n'ont pas lu. Le consommateur a une responsabilité de lire, mais encore faut-il que ce soit lisible et compréhensible.

Nous croyons que des contrats, donc, plus facilement compréhensibles seront utiles ici. Et pourquoi on s'adresse à ça? C'est qu'on pense que, peut-être, il y aurait lieu de penser à une formule de contrat type de base pour des services de base ou des produits financiers de base pour que, d'abord, ce soit plus facile de comparer d'une institution à l'autre, pour le consommateur, et qu'il puisse plus facilement s'y retrouver.

Nous suggérons, de plus, aux entreprises de prévoir un guide d'utilisation de la police d'assurance à l'intention des consommateurs. Ce guide pourrait fournir des informations essentielles en cas de réclamation ou de sinistre, les numéros de téléphone, les coordonnées des services à la clientèle, certaines informations comme les droits d'annulation du consommateur. Les actions à prendre en cas de sinistre – on vient de le vivre – seraient d'autant plus facilitées, plutôt que d'assister à une confusion, à un cafouillage, comme dans certains cas. On vient de le vivre, à l'occasion du verglas.

Enfin, le Bureau pourrait également prévoir aussi la possibilité pour les consommateurs d'obtenir de l'information de façon personnalisée ou sur demande, par exemple par téléphone. Et ça pourrait être une espèce de guichet unique facilement accessible et gratuitement pour le consommateur.

Je termine avec les garanties de remplacement et les garanties supplémentaires, qui sont une réalité que l'Office vit régulièrement. Au cours des dernières années, nous avons reçu des plaintes de divers intervenants du domaine de l'assurance et de l'automobile au sujet des garanties de remplacement. Le contrat de garantie de remplacement couvre un risque de perte totale et permanente d'une auto en cas d'accident, de feu ou de vol. Or, un contrat de cette nature relève normalement du contrat d'assurance et ressemble à une clause de valeur de mise à neuf incluse dans les polices d'assurance couvrant les automobiles. Et même les assureurs admettent du bout des lèvres que ces garanties constituent un produit d'assurance qui est déguisé.

Les consommateurs sont actuellement peu protégés devant ces pseudogaranties. D'une part, l'Office n'émet aucun permis pour ce genre de produit financier – donc, pas de garantie financière – et les entreprises qui vendent ces garanties de remplacement ne sont pas tenues de déposer un cautionnement auprès de l'Office. D'autre part, ces garanties de remplacement présentent les caractéristiques d'un contrat d'assurance et ne sont pas régies par la Loi sur la protection du consommateur, sauf pour ce qui est des pratiques commerciales interdites. Il n'existe donc aucune garantie financière pour le consommateur en cas de fermeture d'une entreprise qui vend ce produit.

Heureusement, le décloisonnement qui est proposé par le projet de loi, votre projet de loi, permettra de remédier à la problématique des contrats dits de garantie de remplacement, ce qui n'était pas le cas jusqu'à maintenant. Et je pense que ça a fait partie de nos recommandations, dans les derniers mois, et ça a été retenu. En effet, ce produit financier pourra maintenant être vendu directement au public par des distributeurs avec certificat restreint et permettra d'éviter ainsi l'utilisation d'artifices pour camoufler la vraie nature de ces contrats, qui sont vraiment des contrats d'assurance. Ça va, pour les garanties de remplacement.

Les garanties supplémentaires, maintenant. Le décloisonnement qui est proposé par le projet de loi aura pour effet bénéfique de permettre aux compagnies d'assurances de percer ce marché – ça pourrait être offert par les assureurs – en vendant directement ce produit aux consommateurs par l'intermédiaire de distributeurs indépendants, et c'est bien. Ces compagnies devaient auparavant transiger par l'intermédiaire d'un courtier d'assurances, ce qui, vous comprendrez, était vraiment inefficace. On n'avait pas un courtier dans chaque garage, chaque vendeur d'automobiles. C'était efficace et peu accessible aux consommateurs.

Mais, avec la loi n° 188, le projet de loi, il y aurait deux régimes parallèles de services d'assurance, soit un régime pour les compagnies d'assurances, qui vont vendre des garanties supplémentaires en vertu de la Loi sur la distribution des produits et services financiers, et un autre pour les entreprises qui ne sont pas des compagnies d'assurances, mais qui peuvent le faire en vertu de la Loi sur la protection du consommateur. Donc, là, on va avoir les garanties supplémentaires qui peuvent être offertes par deux voies, et il nous semble inopportun de maintenir ces deux régimes. On pense que les consommateurs seraient certainement mieux servis si tous les produits d'assurance étaient réglementés par un seul et même régime. Donc, dans cette optique-là, nous proposons d'amender la Loi sur les assurances pour y inclure les contrats de garantie supplémentaire afin de faire en sorte qu'il n'y ait qu'un seul régime applicable à ce type de produit financier.

En conclusion, nous voulons vous remercier de nous avoir invités à représenter les intérêts des consommateurs. Ce projet de loi comporte des mesures intéressantes pour eux. Mais, devant la multitude et la complexité croissante des différents produits et services financiers, nous réitérons la nécessité pour le consommateur d'obtenir de l'information qui soit claire, qui soit compréhensible, qui soit simple autant que possible, tant en ce qui concerne son contrat que les différents outils promotionnels qui lui sont proposés.

Il semble également important de permettre la participation du public, des consommateurs aux structures d'encadrement dans le domaine des services financiers. Nous souhaitons que ces structures soient peu coûteuses, qu'elles soient le plus clairement délimitées, qu'elles aient des responsabilités claires, pas fragmentées et qu'elles présentent un mode d'imputabilité qui soit transparent. Je vous remercie de votre attention. C'était l'essentiel des commentaires et suggestions que l'Office souhaitait vous présenter.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): C'est nous qui vous remercions, Mme Fontaine, de cette présentation. Et j'accorde la parole à la députée de LaFontaine.

Mme Léger: Pointe-aux-Trembles.

(12 h 10)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): J'ai dit LaFontaine?

Mme Léger: Ce n'est pas loin.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Pointe-aux-Trembles, excusez, ma chère madame. C'est parce que je pensais à votre père, qui était député de LaFontaine.

Mme Léger: Oui.

M. Gendron: Lafontaine, c'est le futur maire de Montréal.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Aïe! là, je recule loin. Excusez!

Mme Léger: Bonjour, Mme Fontaine, peut-être Mme Lafontaine. Mme Fontaine, vous étiez...

Mme Fontaine (Nicole): Ma grand-mère était une Lafontaine.

Mme Léger: Ah, oui! Alors, Mme Fontaine, comme présidente de l'Office de la protection du consommateur – parce qu'on s'est déjà rencontré en ces murs en d'autres mandats – à la lumière de votre mémoire et de votre présentation, l'Office de la protection du consommateur, je vois qu'il est en accord, particulièrement, à l'égard du projet de loi n° 188, sur le décloisonnement, d'une part, la place accordée à la protection du consommateur dans le projet de loi, quoique certaines modifications que vous apportez sont suggérées, également, les mesures relatives à la protection des renseignements personnels et médicaux des assurés et les garanties en placement.

Par contre, vous recommandez, entre autres – j'aimerais que vous puissiez développer votre idée – l'harmonisation complète du système proposé pour les services financiers avec celui des professions déjà en place, puisque vous nous avez dit que le système des chambres proposé présente des similitudes – c'est ce que vous avez employé, tout à l'heure – avec le système d'encadrement des professions du Québec. Vous savez déjà que les associations représentant les intermédiaires en assurance ne sont pas satisfaites de la façon dont leur profession est traitée dans le projet de loi. Alors, voulez-vous développer cette idée-là, de cette approche que vous apportez?

Mme Fontaine (Nicole): C'est que les chambres, la façon dont elles sont proposées, ressemblent beaucoup à des ordres professionnels. Elles assurent une formation permanente, elles assurent l'implication de leurs membres dans leur conseil d'administration, elles déterminent le montant de cotisation requis pour chaque membre. Par ailleurs, ce ne sont pas les chambres, comme les ordres professionnels, qui recueillent ces cotisations, mais c'est plutôt le Bureau. Alors, là, on a une espèce de fragmentation, la nécessité de se coordonner. Et aussi, ce sont les chambres qui s'occupent des types ou des appellations contrôlées, comme c'est écrit dans la loi. Donc, ça ressemble pas mal à un ordre professionnel, et les ordres professionnels fonctionnent avec chacun une loi et, au sein du Code des professions, avec l'Office des professions, qui chapeaute tout ça.

Il y a des similarités. Il y a le Bureau des services financiers qui, d'une certaine façon, va un peu chapeauter, et il y aura des membres des chambres qui vont siéger au Bureau. Alors, la question qu'on se posait, on s'est dit: Est-ce qu'on crée un système d'encadrement professionnel du même type que celui prévu dans le Code des professions? Il y a des similarités. Cependant, ce ne sont pas des professionnels au sens de la loi sur les professions. Ce n'est donc pas ce même type là. Et on s'est dit: Ou bien on les met carrément avec l'Office des professions, et ça devient des ordres professionnels, ou bien, si on ne fait pas ça, on se questionne sur la nécessité de prévoir, dans la loi, des chambres, d'autant plus que ces chambres-là pourraient, sous forme d'association volontaire, exercer à peu près les mêmes fonctions. Il y en a déjà qui le font, comme les courtiers, je pense, les courtiers en valeurs mobilières, en immobilier, qui fonctionnent déjà comme ça. C'est sur une base volontaire. Ils font de la formation permanente, de l'encadrement de leurs membres, ils peuvent se doter d'un code d'éthique, et, donc, ça permet une certaine autorégulation.

Donc, on se disait: Pourquoi ne pas donner la fonction principale, le pouvoir principal, dans ce secteur-là, au Bureau des services financiers, avec l'obligation de prévoir un code de déontologie, quitte à consulter, à créer des comités qui peuvent être volontaires et à s'assurer d'avoir un comité de discipline – c'est ce qui est prévu dans la loi – et, donc, avoir la pleine responsabilité? Je n'ai pas participé à tous les débats, auparavant, et ce n'est pas un secteur dans lequel on est, nous, à l'Office, spécialistes, mais l'impression que ça donne, c'est que, bon, on a créé le Bureau, c'est vraiment l'entité la plus importante, mais qu'il y a deux chambres, parce qu'il faut bien partager quand même un petit peu à la marge et s'assurer d'une participation.

L'intention est louable, mais ce que nous craignons, c'est que... C'est sûr que, pour le code de déontologie, par exemple, ou pour d'autres fonctions qui se trouvent être un peu partagées entre le Bureau et les chambres, nécessairement, il va falloir qu'ils se parlent, sûrement, c'est souhaitable, mais il va falloir qu'ils s'entendent. Et ça crée des lieux, des occasions propices à des frictions ou à des conflits. Et pour le consommateur, lui, qui s'attend aux services derrière ça, ça crée une lourdeur importante dans l'appareil et une perte de temps qui ne nous semblent pas très constructives. Si bien que, comme on ne veut pas en faire vraiment un système d'ordre professionnel comme on en a déjà un, ça ne semble pas être l'intention, puisqu'on ne l'a pas harmonisé, on se dit: Ne créons pas quelque chose qui va y ressembler tout en ne l'étant pas, circonscrivons correctement les fonctions et les responsabilités essentielles et, donc, donnons tout ça au Bureau.

Mme Léger: Vous suggérez, vous recommandez aussi de revoir l'article 199. Cette recommandation que vous apportez peut surprendre, étant donné que le projet de loi lui-même donne assez peu de pouvoirs au ministre et au gouvernement. Plusieurs organismes ont souligné que le Bureau est pourvu de beaucoup de pouvoirs réglementaires et que le gouvernement devrait en récupérer. Alors, pouvez-vous expliquer votre position à ce sujet-là?

Mme Fontaine (Nicole): L'article 199, en fait, ce que nous voulions souligner, c'est que l'instance politique a les pouvoirs prévus dans la loi, et nous pensions qu'il y avait là un danger parce que le Bureau, selon certains aspects, a un certain pouvoir quasi judiciaire, en ce sens qu'il a un pouvoir de réprimande – il y a un syndic, il y a un comité de discipline – et il peu être amené à prendre des décisions qui pourraient être interpellables devant la loi, qui pourraient être contestables. Un professionnel ou un intermédiaire ou un cabinet pourrait ne pas être d'accord d'avoir été radié, mettons, et aller devant les tribunaux. Et là le Bureau se retrouve à ne pas avoir complète autonomie ou séparation des pouvoirs, puisqu'on prévoit que le ministre peut donner des orientations et des objectifs. On pense qu'il y a là un danger. Et c'est simplement ce qu'on souhaitait souligner, par rapport à une partie du pouvoir du Bureau, qui est quasi judiciaire, de créer une perception de possible conflit d'intérêts. Alors, c'était une prudence qu'on voulait manifester.

Mme Léger: Aussi, vous recommandez d'éliminer l'interdiction de percevoir une prime en argent liquide. Parce que l'article 120, tel quel, vise uniquement le représentant ou la société autonome. Alors, pourquoi vous apportez cette interdiction-là?

Mme Fontaine (Nicole): Parce qu'on pense que c'est en conflit avec la Loi sur la monnaie. La Loi sur la monnaie prévoit qu'on peut liquider toute dette ou s'acquitter de paiements avec du comptant. Et aussi, c'est sûr qu'en payant par chèque ou par carte de crédit il y a des frais reliés à ça, et certains consommateurs pourraient souhaiter payer comptant. Donc, c'est pour permettre un libre choix. Et, pour s'assurer que ce libre choix-là puisse être exercé par le consommateur sans qu'il en subisse des conséquences par ailleurs négatives, c'est là qu'on proposait qu'il y ait un reçu prénuméroté, qui est vraiment la preuve qu'il a payé, puisque, quand on paie au comptant, il ne reste pas toujours une preuve de cela. Il aurait cette preuve, mais ça lui donne quand même un libre choix qui, peut-être, ne sera pas exercé par une grande marge de la population, mais, à mon avis, qui devrait pouvoir être conservé de façon à être en harmonie avec la Loi sur la monnaie.

Mme Léger: Mme Plamondon, du Service d'aide aux consommateurs, je lui ai posé cette question-là et je voulais avoir votre opinion à vous. Quel est le rôle du consommateur dans tout ce projet de loi là? Où vous le voyez?

Mme Fontaine (Nicole): Je pense que le projet prévoit déjà pas mal de protection pour le consommateur, mais, nous, on pense qu'il pourrait exercer encore davantage une implication, mettons par au moins trois axes. Je pense que le consommateur devrait être clairement impliqué dans la structure d'encadrement. Je pense qu'on ne peut pas passer à côté de ça maintenant. Les consommateurs sont plus informés et devraient pouvoir participer à la structure d'encadrement, au conseil d'administration, au comité de discipline, possiblement au fonds, aussi, dans la gestion du fonds d'indemnisation. Et je pense que c'est là un aspect important. Ils pourraient influencer, à ce moment-là, et collaborer, proposer d'autres formules plus adéquates pour les consommateurs.

(12 h 20)

Un autre aspect qui m'apparaît important pour le consommateur, c'est de prévoir une place importante pour le service des plaintes, parce que c'est là que le consommateur va aussi avoir une voix, se plaindre, dire... Et, Dieu sait, personne ne va être inondé. Au Québec, on ne se plaint pas tant que ça. On n'est pas une population qui va dire: Oui, je suis satisfaite de tel service, ou: Non, je ne le suis pas. Quand les gens ne le sont pas, il y a seulement une petite portion de la population qui va prendre la peine de se plaindre. Et c'est dommage, parce que, quand les gens ne se plaignent pas, on ne sait pas si le produit est de qualité.

Mme Léger: Ils viennent voir leur député.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Fontaine (Nicole): Peut-être que les députés devraient comptabiliser... Leur bureau de plaintes...

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Fontaine (Nicole): Vous avez raison, c'est vrai que les consommateurs font souvent ça. Mais, en ayant un bureau de service des plaintes qui rend la chose facile pour le consommateur, je pense que ça va permettre... C'est pour ça qu'il faut que ce service des plaintes soit bien structuré, qu'il soit à haut niveau pour qu'on puisse dire: Voici le profil des plaintes concernant les produits et les services financiers, et qu'on en tienne compte et qu'on puisse en faire un bilan chaque année. Et je souhaite que dans le rapport annuel aussi, en en faisant le bilan, on dise comment on a donné suite. Est-ce qu'on a pu changer des choses dans la structure, quand c'est possible, pour corriger la situation, pour améliorer? En fait, c'est vraiment une rétroaction intéressante sur les services offerts que d'avoir un service des plaintes qui soit bien structuré. Alors, c'était une deuxième possibilité.

Et la troisième possibilité, c'est que le consommateur, ce n'est pas quelqu'un, non plus, qui doit être passif; il l'est, trop souvent. Le consommateur a des droits, mais, je le dis souvent, on le dit toujours, le consommateur a des responsabilités. Sa responsabilité c'est de s'informer, de comparer. Mais, pour ce faire, et c'est pour ça qu'on le demande, il faut qu'il ait les outils, et ce qu'on lui donne comme information, comme contrat, comme dépliant d'information publicitaire, il faut que ce soit compréhensible.

Mme Léger: Mais, tout à l'heure, vous l'avez glissé que vous avez beaucoup de plaintes au niveau de la compréhension des contrats, etc. Alors, pourquoi vous ne proposez pas un genre de formulaire type, modèle qui pourrait être pincé au contrat – c'est mon collègue de Crémazie qui m'a apporté ça, tout à l'heure – qui soit simple, à une feuille et plutôt compréhensible au niveau du consommateur que compréhensible par les compagnies d'assurances?

Mme Fontaine (Nicole): En fait, ce qui serait intéressant... Je comprends que c'est un formulaire pour recevoir les plaintes que vous suggérez?

Mme Léger: Oui.

Mme Fontaine (Nicole): Je pense que, dans les hôtels, très souvent, on va retrouver sur notre table de chevet une demande d'appréciation du service. Il serait vraiment innovateur que les compagnies de produits et services financiers joignent à la conclusion de leurs contrats une demande pour donner une appréciation du service donné. Je pense que ce serait vraiment très intéressant.

Mme Léger: Mais même les contrats d'assurance, souvent c'est assez complexe et ça a deux, trois pages, c'est plus compris par la compagnie que par le consommateur lui-même, en fin de compte.

Mme Fontaine (Nicole): Tout à fait. Vous avez tout à fait raison. C'est pour ça que tout à l'heure je proposais dans mes recommandations qu'il serait sage, il serait bon, je pense, de penser à un contrat type assez simple qui comporte... en tout cas qui soit beaucoup plus limpide qu'il l'est présentement, pour que le consommateur puisse se retrouver.

Une voix: Un contrat...

Mme Léger: Un contrat pas écrit par un avocat, comme il me dit.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Léger: Alors, merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles. J'accorde la parole au député de Viger.

M. Maciocia: Merci, M. le Président. Merci, Mme Fontaine, d'avoir présenté ce mémoire devant nous, ce matin. Je pense que la protection du consommateur, c'est la première, je pourrais dire, préoccupation des membres de cette commission, j'imagine, vis-à-vis spécialement un projet de loi aussi lourd de conséquences que le projet de loi n° 188.

Ma première question, Mme Fontaine, c'est qu'à la page 2 de votre mémoire au dernier paragraphe, vous vous inquiétez de la concurrence à long terme, avec le projet de loi n° 188, et vous dites même: «Dans un tel contexte de concentration des services entre les mains de quelques entreprises, il n'est pas évident qu'on y trouvera effectivement des avantages d'un contexte plus concurrentiel.» Pourriez-vous un peu élaborer sur ça, Mme Fontaine? Parce que je pense que c'est un élément très essentiel, très important dans le projet de loi n° 188.

Mme Fontaine (Nicole): Effectivement, je pense qu'en permettant un décloisonnement les banques offrent déjà, mais vont pouvoir offrir plus facilement, et les caisses populaires, de l'assurance, même à leurs comptoirs de services, et que la concurrence va être là. Mais on assiste déjà, et plusieurs annonces ont été faites dans ce sens-là, à des fusionnements, à des regroupements de banques, de fiducies. Donc, ces regroupements-là font partie de la toile de fond internationale, présentement. Le Québec est là-dedans aussi, avec même un peu de retard. Donc, il y aura des fusions, des regroupements qui font en sorte que la compétition qui peut s'exercer maintenant, qui va encore s'exercer va être moins possible, il va y avoir moins de compétiteurs sur le marché. Et, la compétition, ce n'est pas le seul élément, mais elle joue un rôle important dans le maintien de prix compétitifs. On dit «des prix compétitifs», donc la meilleure offre possible au consommateur, pour essayer d'aller le chercher, puisque, là, effectivement, le marché est fortement en compétition. Mais, si, au lieu – je mets un chiffre fictif – d'une quinzaine de joueurs, on se retrouve avec quatre, il y a un plus grand danger que la compétition soit là mais moins féroce. Il y a des dangers évidents qu'on va s'entendre sur des prix et que le consommateur s'y retrouvera moins. C'est un danger.

Cependant, après avoir parlé avec quelques spécialistes financiers, on nous dit – j'entends, mais ça serait intéressant que ça soit davantage documenté – qu'en Europe par exemple, en Hollande, semble-t-il, on a quelques grandes institutions financières, mais que les prix sont maintenus quand même à des niveaux intéressants pour les consommateurs. Par quels moyens? Comment? Est-ce qu'il y a une fixation des prix? Je pense que ça gagnerait à être documenté davantage et que, possiblement, le grand public sache un peu quelles sont les toiles de fond qui existent un peu partout, dans le contexte de regroupements d'entreprises ou d'institutions financières.

Est-ce que vraiment les prix et les services pour les consommateurs vont être maintenus de façon intéressante? Ou est-ce qu'il y a d'autres moyens que seulement la compétition pour maintenir ces prix-là? Est-ce que les économies d'échelle permettent que les prix soient maintenus à un bas niveau? Je pense que le consommateur se pose beaucoup de questions là-dessus. Le public en général ne sait pas, ne sait pas trop ce qui se passe ailleurs. Sûrement, c'est un rôle que l'Office devrait pouvoir jouer, de documenter ces situations-là, mais aussi les institutions financières également.

M. Maciocia: J'enchaîne avec ma deuxième question, Mme Fontaine. C'est justement, à la page 1, vous écrivez aussi que «selon un récent sondage de l'Institut national de la qualité, les banques offrent les pires services à la clientèle dans toute l'industrie financière». Et, par conséquent, vous ne craignez pas justement de leur donner encore la possibilité spécialement de vendre de l'assurance, car c'est un produit très délicat pour le consommateur?

Mme Fontaine (Nicole): D'où nos réserves et nos suggestions. C'est pour ça que nous faisons les recommandations que nous faisons. Ce sondage, ce n'est pas la Bible, non plus, mais c'est un indicateur de ce que les consommateurs pensent. Et les consommateurs sondés pensent ça présentement, qu'ils ne sont pas très bien servis et que ce n'est pas facile pour eux de comprendre les produits et services. Ils ne se sentent pas bien traités par les banques et aussi par les compagnies d'assurances, alors que ce n'est pas le cas pour les caisses populaires. Curieusement, le sondage indique que le consommateur a la perception qu'au moins le service semble bien donné ou, en tout cas, qu'il y a une intention de bien le donner par les caisses populaires. C'est une question de perception.

Et, oui, donc, ça veut dire que les gens, ils sont inquiets. Ils se disent... Ça va devenir des partenaires très importants pour l'ensemble des produits financiers. Ils sont inquiets, à savoir: Est-ce qu'ils vont être mieux servis? Est-ce qu'ils vont s'y comprendre mieux? Et c'est ce que nous souhaitons refléter. C'est pour ça que nous voudrions que le projet de loi comporte d'autres mesures – celles que nous avons proposées aujourd'hui – de façon à s'assurer que le service soit plus facile à saisir par le consommateur.

M. Maciocia: À la page 8 et au début de la page 9 de votre mémoire, vous proposez d'«énumérer de façon limitative les tâches que peut exercer un représentant, plutôt que celles qu'il ne peut exercer». D'après vous, quel avantage on aura à enlever ça, «limitatif» plutôt que tel que libellé à l'intérieur du projet de loi?

(12 h 30)

Mme Fontaine (Nicole): C'est que ce que nous percevons de la loi, du projet de loi, à cet effet-là, c'est qu'on va dire ce que les représentants ne peuvent pas faire. Or, le marché évolue tellement rapidement. C'est-à-dire qu'il y a trois ou quatre choses, mettons, qu'ils ne peuvent pas faire, mais, au fil des ans... Ça veut dire qu'ils peuvent faire tout le reste. Et ce qui n'est pas écrit dans la loi, qu'ils ne peuvent pas faire, graduellement ils pourront le faire, j'imagine – le marché évolue rapidement, très, très rapidement – et donc c'est là qu'on pense qu'il pourra se créer des conflits d'intérêts. La loi n'interdit pas de faire autre chose, elle dit: Ces quatre éléments-là, vous ne les faites pas – mettons que c'est quatre. Alors, vont se greffer au fur et à mesure d'autres fonctions. Ce n'est pas qu'on est contre que d'autres fonctions, d'autres responsabilités se greffent, mais c'est qu'on voudrait être assurés qu'il y a une étude, qu'il y a une analyse de ces nouvelles tâches ou de ces nouvelles responsabilités qui se fasse pour s'assurer qu'il n'y a pas de conflit d'intérêts. Et, plus que ça... la question du conflit d'intérêts, mais aussi la question de la formation adéquate, c'est une autre des grandes préoccupations, je pense, du public. Les commentaires qu'on a eus aussi, les inquiétudes qu'on nous manifeste à l'Office à l'effet que: Est-ce que les gens qui vont nous offrir ces produits-là au comptoir, qu'on appelle de plus en plus des conseillers financiers, est-ce qu'ils ont vraiment toute la formation? Et la réponse, c'est: On est loin d'être sûr et, dans certains cas, c'est non. Et ça nous préoccupe grandement, sachant que c'est un marché qui évolue rapidement et sachant qu'au fil des années et des mois – ça évolue très vite – des nouvelles responsabilités pourraient se greffer et que personne... en tout cas, il n'y aura pas dans la loi de mécanisme de prévu pour assurer le consommateur que, oui, il y aura une analyse, une vérification qu'effectivement ces responsabilités-là peuvent, avec une assurance de qualité, se greffer, qu'il n'y aura pas de conflit d'intérêts.

M. Maciocia: Une autre question, M. le Président. Mme Plamondon et aussi Option consommateurs nous ont dit très clairement que les endroits utilisés pour la vente d'assurance, dans tout cabinet, institution de dépôts et autres, soient des endroits réservés, fermés et utilisés exclusivement à cette fin et que la personne qui vend de l'assurance, elle vend uniquement de l'assurance et seulement ça, elle ne doit pas faire autre chose. Est-ce que vous êtes d'accord avec cette position de Mme Plamondon et d'Option consommateurs?

Mme Fontaine (Nicole): Nous avons brièvement examiné cette question. Je pense que, par rapport à la proposition que ces ventes se fassent dans un espace séparé et réservé, nous sommes d'accord avec ça parce qu'il y a là des échanges d'informations à caractère personnel et confidentiel et que, donc, ça ne peut pas se faire au comptoir, devant tout le monde. Ça, c'est un élément.

L'autre élément. Nous pensons et nous sommes d'accord avec ce que proposent Mme Plamondon et Option consommateurs à l'effet que ce soit offert seulement par des personnes qui ne vont qu'offrir ces produits-là, d'assurance, pour au moins une raison. C'est que les produits sont déjà suffisamment complexes que, en phase de transition, ça nous apparaît une garantie de qualité et de bonne formation que ça se fasse comme ça. Cependant, nous sommes quand même bien conscients que, de plus en plus, on s'en va vers des représentants style guichet unique qui devraient éventuellement pouvoir offrir une gamme de services différents et que, éventuellement, dans quelques années, dépendamment de la vitesse à laquelle ça évolue, certainement cette question-là va revenir sur le tapis et on pourra se demander: Est-ce que les représentants ne devraient pas offrir une gamme de services diversifiés et être capables d'être un conseiller mais pour plusieurs sortes de produits? Je pense que la prudence nous impose de dire: Allons-y par étapes et commençons par réserver la vente d'assurance à un représentant qui est déjà dans ce domaine-là présentement.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Ça va, M. le député de Viger?

M. Maciocia: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député d'Abitibi-Ouest, rapidement.

M. Gendron: Oui. Mme Fontaine, ainsi que tous vos collaborateurs et collaboratrices, on tient... en tout cas, au nom du gouvernement, moi, je veux vous remercier énormément, pas en conclusion, mais d'avoir été des nôtres, compte tenu que c'est difficilement envisageable, une loi sur la distribution des produits financiers, et que le consommateur qui joue un rôle prépondérant... De bénéficier de l'éclairage des gens de l'Office, c'est intéressant pour le législateur qui veut effectivement bonifier, améliorer le projet de loi. Alors, merci d'être là, merci de la collaboration positive que vous avez apportée.

J'ai une, peut-être deux questions. Une première. Vous êtes la troisième, je pense, instance, ou organisme, qui suggérez que la notion de «pression indue», qui est une notion importante, soit davantage resserrée, définie. Il y a une autre thèse qui m'apparaît non négligeable. En tout cas, moi, je ne suis pas avocat, mais je connais cette thèse. À chaque fois qu'on tente de définir plus précisément un défini, c'est là qu'on commet une erreur parce qu'on limite son application, on restreint son application, alors qu'on sent, dans votre mémoire, que vous voulez l'inverse au nom de ce que vous défendez. Alors, la question précise que je vous pose: Qu'est-ce qui fait que vous n'êtes pas de l'école de pensée que, s'il y a un terme qui ne gagne pas à être défini plus précisément, c'est bien celui-là? Qu'est-ce qui fait que vous n'êtes pas de cette école de pensée? Vous m'avez bien compris, là? Parce que, chez plusieurs, c'est un terme qui gagne à rester non défini. Et là il couvre à peu près tout ce que vous voulez comme notion quand on parle de «pression indue». Vous, vous nous dites l'inverse. Au nom de quelle école de pensée?

Mme Fontaine (Nicole): Bien, je vous dirais que ce n'est pas au nom d'une école de pensée, mais peut-être plus au nom...

M. Gendron: D'une pratique courante?

Mme Fontaine (Nicole): Oui.

M. Gendron: J'aime mieux ça.

Mme Fontaine (Nicole): Au nom de ce qu'on entend régulièrement à l'Office. Par exemple, dans la conclusion de contrats où, souvent, des consommateurs vont téléphoner et dire s'être sentis forcés, ou incités fortement, ou bien: Je ne l'aurais pas eu si je... je ne l'aurais pas pris, mais ça venait avec. Une question des ventes liées, très proche de la pression qui peut être perçue indue. Comme vous le savez, on achète tous, on est tous des consommateurs et, parfois, on n'est pas... on pense avoir été incité peut-être trop fortement, mais est-ce que c'est indu? C'est tellement complexe, cette notion-là, qu'on pense que d'avoir quelques balises... Puis je comprends la difficulté de la chose, parce qu'on l'a discutée, nous aussi, pour savoir un peu quand est-ce que ça devient indu. Puis on a même consulté de la jurisprudence qu'on cite dans notre mémoire. Et des juges ont longuement statué aussi là-dessus. Je sais bien que ce n'est pas facile. Mais il nous apparaîtrait être utile pour le consommateur d'avoir au moins quelques balises pour qu'il puisse s'y retrouver. Un consommateur qui est très vulnérable, se retrouver dans une situation de quelqu'un qui connaît beaucoup beaucoup le produit, et lui qui ne connaît rien, peut se sentir... ne verrait pas qu'il y a une pression indue sur lui ou ne s'en apercevra pas parce qu'il dit: Moi, je ne connais rien là-dedans. Quelqu'un qui est un peu plus éduqué, formé, va peut-être plus facilement faire les nuances. Donc, on se dit: Est-ce qu'il ne serait pas utile d'avoir des balises?

M. Gendron: Bien, c'est important. En tout cas, ça a l'air plus qu'un mot, Mme Fontaine. Moi, en tout cas, au nom du consommateur, j'ai l'impression que ce que vous réclamez, ce n'est pas des précisions dans la loi parce qu'on va avoir l'effet inverse. Moi, je pense ça en tout cas. Parce que vous venez de le dire vous-même, vous dites: Écoutez, regardez, le consommateur, quand il m'appelle... certains ont été forcés, incités fortement, pression forte. Est-ce que ce ne serait pas mieux de ne pas aller plus loin dans la loi? Puis là, c'est une question que je vous pose compte tenu de votre expérience. Mais avoir un nota bene pour le consommateur – puis, moi, je trouve que ce n'est pas pareil – avoir une note qui dirait: Nous, quand on a mis ça là, ça veut dire à peu près tout ça là. Mais c'est une note d'explication sur le sens que le législateur donne à «pression indue», mais qui, à ma connaissance, ne ferait qu'éclairer le jugement du consommateur pour être certain qu'à chaque fois que lui pense qu'il y a eu des comportements qui ressemblent à ça, il exerce le recours qui est prévu quand il y a des pressions indues. Je ne sais pas. Vous comprenez ma distinction?

Mme Fontaine (Nicole): Vous touchez là un point important. Je pense que le consommateur, lui, ne lit pas les lois tous les jours. Alors, c'est probablement important que ce que vous suggérez, qu'il y ait une note, mais peut-être dans la législation... Mais la note devrait peut-être se situer aussi dans le contrat qu'il est en train de signer – ça peut être là – et l'informer de son droit de résiliation s'il y a eu une pression indue. Mais là il va se reposer la question: C'est quoi, une pression indue? Je suggérerais peut-être plus que ce soit dans un code d'éthique des cabinets ou des institutions, qu'il y ait là un code d'éthique – il pourrait être affiché sur le mur – de: quelles sont les meilleures conditions dans lesquelles le contrat devrait être conclu, des droits du consommateur par rapport à ce contrat-là, donc son droit de résiliation, et peut-être des balises qui viendraient indiquer quelles sont ou quelles pourraient être des situations de pression indue.

M. Gendron: En tout cas, merci là-dessus. Puis je vous invite à rester vigilants parce qu'on sent qu'il y a de quoi là. On sent qu'il y a de quoi là parce qu'il y a trop de consommateurs qui sont revenus là-dessus, c'est-à-dire des groupes qui représentent les intérêts des consommateurs, pour dire: Bien, écoutez, on va rester avec le livre, le livre étant la pression de nos amis juristes qui disent: Nous, on a la vérité et on pense que c'est une notion qui gagne à ne pas être précisée. Ce n'est pas votre version, en tout cas.

(12 h 40)

Mme Fontaine (Nicole): Non, ce n'est pas notre version.

M. Gendron: Merci beaucoup.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le député d'Abitibi-Ouest. Maintenant, pour une rapide question, si possible, le député de l'Acadie. Et le député de D'Arcy-McGee aussi m'avait demandé la parole, parce que, déjà, le temps est écoulé.

M. Bordeleau: J'ai juste une question rapide. Dans votre mémoire, à la page 11, vous faites référence aux distributeurs et vous dites: «L'expérience vécue par des consommateurs qui ont acheté une garantie supplémentaire de vendeurs d'automobiles d'occasion nous incite à la prudence. Ainsi, nous recommandons que tous les distributeurs soient tenus de recevoir une formation adéquate, complétée d'une formation continue, etc.» Alors, vous dites: «...que les distributeurs soient tenus de recevoir une formation adéquate.»

Dans la loi, à l'article 353, dans le chapitre «Distribution sans représentant», on dit: «Le distributeur est la personne – l'article 353 – qui, dans le cadre de ses activités qui ne sont pas du domaine de l'assurance, offre de façon accessoire, pour le compte d'un assureur, une couverture d'assurance afférente à un bien qu'elle distribue ou qui y fait adhérer un client.» Alors, ici, on dit que le distributeur, c'est la personne. À l'article 370, on dit: «Un distributeur doit, avant d'offrir un produit d'assurance, prendre les dispositions afin que toute personne à qui est confiée la tâche de le distribuer ait une bonne connaissance du guide de distribution relatif à ce produit.» Alors, ici, on fait une distinction entre «le distributeur» et «la personne». Il me semble qu'il y a quelque chose, qu'il y a une ambiguïté entre les articles 353 et 370.

Maintenant, quand vous dites dans votre mémoire que le distributeur doit recevoir une formation adéquate, à qui vous faites référence? À la personne à laquelle on réfère à l'article 370 ou au distributeur qui semble être une personne différente ou une entité différente?

Mme Fontaine (Nicole): Bien, je pense qu'on fait référence à la personne qui va vendre le produit, et notre souci, c'est de s'assurer que cette personne-là a la formation suffisante. On voit que le distributeur – mettons que c'est un regroupement, le distributeur – a la responsabilité de produire un guide de distribution, mais, par expérience, on sait trop souvent qu'un distributeur va le lire, peut-être distraitement, peut-être même pas, le guide va être sur la tablette, et va quand même vendre son produit. Et nous, ce dont on voudrait s'assurer – c'est pour ça qu'on propose que tous les distributeurs aient des certificats restreints – on veut s'assurer qu'au-delà du fait qu'on va lui donner un guide, ou peut-être qu'il le recevra par la poste, on veut s'assurer qu'il a une formation. C'est peut-être une demi-journée, ça dépendra de la complexité du produit qu'il a à offrir, mais on veut que l'entreprise ou l'institution qui va lui envoyer son guide de distribution, on veut s'assurer que cette entreprise-là va former son distributeur, va s'assurer que le guide de distribution, il l'a bien intégré, qu'il l'a bien compris et qu'il est capable d'éclairer le consommateur. C'est ça, notre souci, c'est ce qu'on veut. Et on veut, pour être sûr que le distributeur ait eu cette formation-là, pour garantir qu'il l'ait eue, bien, que, là, on lui délivre un certificat restreint.

M. Bordeleau: O.K.

Mme Fontaine (Nicole): Donc, il est tenu d'assister à cette formation-là.

M. Bordeleau: Mais ce à quoi vous faites référence, si je comprends bien, ce qui est dans votre mémoire à la page 11, vous faites référence à la personne qui vend.

Mme Fontaine (Nicole): Oui.

M. Bordeleau: Comment vous lisez l'article 370 quand on dit qu'«un distributeur doit, avant d'offrir un produit d'assurance, prendre les dispositions afin que toute personne à qui est confiée la tâche de le distribuer...» Là, on fait référence à deux... Ce que vous m'avez dit, ça s'applique à la personne qui va avoir à le vendre. Mais le distributeur qui est là, c'est qui, ça, exactement, et en quoi... Est-ce que c'est la compagnie, par exemple, Tilden, qui demande à ses personnes de vendre de l'assurance? Bon, la personne qui vend de l'assurance devrait avoir l'information. Mais Tilden, la compagnie comme telle, devrait recevoir de la formation?

Mme Fontaine (Nicole): Mais ce qu'on comprend là, c'est qu'on appelle «distributeur» également la compagnie qui va préparer ce guide-là, et on utilise le même mot...

Une voix: Qui va vendre.

Mme Fontaine (Nicole): Qui va vendre, et on utilise le même mot pour la personne elle-même qui va distribuer le produit.

M. Bordeleau: O.K.

Mme Fontaine (Nicole): Je pense que c'est peut-être la confusion, l'utilisation du même mot pour couvrir deux réalités.

M. Bordeleau: Je comprends que vous faites référence à la personne au titre... plus la personne qui a affaire avec le client qu'à l'entité qui peut ne pas être une personne et qui peut être le distributeur.

Mme Fontaine (Nicole): C'est ça.

M. Bordeleau: Parfait. Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de D'Arcy-McGee, rapidement, s'il vous plaît.

M. Bergman: Merci. Mme Fontaine, dans vos commentaires sur l'article 120, vous dites que l'article prive le consommateur d'un mode de paiement et vous demandez au législateur de reformuler l'article pour éliminer l'interdiction de percevoir une prime au comptant, avec l'obligation de remettre à son client un reçu prénuméroté. Mais est-ce que vous ne pensez pas qu'un paiement en monnaie constitue un manque de preuve concrète pour le consommateur pour construire son dossier? Un paiement par chèque évite toute possibilité d'abus ou de détournement de fonds. Aussi, le paiement par chèque est une manière plus efficace pour le consommateur. Et un paiement par chèque donne plus de sécurité pour le consommateur et pour le marchand.

Mme Fontaine (Nicole): Vous avez raison de dire que le paiement par chèque donne au consommateur plus de sécurité en ce sens qu'il lui reste une preuve. Il peut recevoir une copie de son chèque encaissé. Il a une preuve. Notre intention, en suggérant que le paiement au comptant soit quand même possible, c'est tout simplement de rendre possibles des choix au consommateur. Nous ne recommandons pas qu'il utilise ce type de paiement là en particulier, mais nous voulons rendre les choix possibles. C'est une des raisons. L'autre raison, c'est que, à notre avis, la Loi sur la monnaie fait en sorte que cette disposition-là pourrait être contestable, parce que la Loi sur la monnaie dit bien qu'on peut payer au comptant. On ne peut pas contourner ça, elle est là, la loi. Or, nous, on suggère de permettre ce choix-là dans le projet de loi n° 188, mais, pour rejoindre votre préoccupation de sécurité, qu'il y ait un reçu prénuméroté, que, dès que la personne remet l'argent au comptant, le distributeur ou le représentant soit tenu de remettre un reçu prénuméroté, ce qui ferait en sorte que le consommateur aurait une preuve de son paiement.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Ça va? Ça vous convient?

M. Bergman: Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): On remercie Mme Fontaine, ainsi que les gens qui vous accompagnent. Je souhaite un bon repas à tout le monde et on se donne rendez-vous à cet après-midi, 14 heures.

Mme Fontaine (Nicole): Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Bienvenue, madame.

(Suspension de la séance à 12 h 48)

(Reprise à 14 h 11)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): À l'ordre! Mmes et MM. les membres, la commission des finances publiques, se réunit à nouveau pour poursuivre la consultation particulière sur le projet de loi n° 188, Loi sur la distribution de produits et services financiers.

Encore une fois, comme je l'ai fait ce matin, nous nous excusons auprès de nos invités et de leurs supporters à l'effet que la salle est trop petite pour recevoir tout le monde. Mais nous avons essayé ce matin tant bien que mal de répondre quand même à votre démarche de venir à Québec pour appuyer vos représentants en ouvrant une autre salle et en faisant installer un système de son, en plus, ce qui est inhabituel, et en ouvrant les portes, en arrière, pour qu'il y ait plus de personnes qui puissent participer à nos travaux. Donc, tout en appréciant la collaboration que vous nous faites... La salle du Conseil législatif, en haut, est réservée pour entendre Hydro-Québec sur le plan de développement stratégique d'Hydro, et ça prenait des écrans géants, avec toutes sortes de systèmes électroniques sophistiqués qui ne pouvaient pas être installés dans cette salle-ci. Mais, à partir du mois de mars, quand les journées seront déterminées, nous aurons la salle du Conseil législatif et nous pourrons recevoir tous les gens qui sont bien intéressés à suivre nos travaux.

Donc, sur ça, j'invite les représentants du Regroupement des victimes des caisses populaires Desjardins, M. Jean-Yves Desrosiers à présenter son mémoire, mais d'abord à nous présenter les personnes qui l'accompagnent. Vous avez environ une vingtaine de minutes, M. Desrosiers, pour nous présenter votre mémoire, et chaque groupe parlementaire a un autre 20 minutes. Et, si vous prenez plus que ça, il reste moins de temps aux groupes parlementaires pour vous questionner sur votre mémoire.


Regroupement des victimes des caisses populaires inc.

M. Desrosiers (Jean-Yves): Nous vous remercions de donner l'occasion au Regroupement de venir exposer ses observations et ses recommandations relativement à ce projet de loi. Il manque une personne, qui va venir nous rejoindre, je pense, qui a un problème de stationnement. À mon extrême droite, il y a M. Michel Beaudry, qui est un ex-agent d'assurances générales de Desjardins, qui, maintenant, a de sérieux problèmes d'assurance-invalidité parce qu'on prend tous les moyens pour ne pas le payer, depuis un bon bout de temps. À ma droite, ici, il y a M. Claude Stébenne, qui est l'ex-directeur général de la Caisse populaire de Sherbrooke-Est, qu'on a congédié sans motif et qui se débat depuis un bon bout de temps dans le harcèlement avec les gens de Desjardins pour obtenir ses dossiers. Il a gagné encore récemment, en cour, et, chez Desjardins, on a décidé d'aller encore une fois en appel, à moins que la raison ait prévalu. Et je pense qu'ils ont jusqu'à lundi ou vendredi pour décider s'ils retournent en appel ou pas. À ma gauche, Serge Dion, qui est aussi un ex-directeur général de la Caisse populaire de Saint-Charles-sur-Richelieu, congédié parce qu'il est tombé malade par malchance, à un moment donné. On a mis 22 à 24 mois avant d'au moins lui donner une note de référence et on a tout fait pour le discréditer, même si les lettres de recommandation qu'on a, qui viennent d'un peu partout, sont très éclairantes. M. Stébenne est un bâtisseur de la Caisse de Sherbrooke-Est, caisse qui a fait beaucoup parler d'elle et qui va faire encore parler prochainement.

Bien entendu, on ne représentera pas, aujourd'hui... on va vous laisser nos documents, parce qu'on est allé plus précisément sur certains articles du projet de loi pour soulever certains problèmes de fond dans ce projet-là.

Nous avons aussi, dans la salle, quelques personnes qui sont des victimes des assurances Desjardins, d'autres n'ont pu venir pour des raisons de santé. Une dame venait de sortir de l'hôpital et a dû renoncer. Mais c'est un échantillon de personnes. Je pense que M. Beaudry va très bien représenter le type de problème qui est posé par l'assurance-invalidité chez Desjardins.

On a aussi, et c'est un petit échantillon, ce qui est dans les plumitifs de cours du Québec concernant Desjardins qu'une personne nous a sorti pendant six heures de temps. Il y en a 8 000 et quelques, ici, juste au palais de justice de Montréal, sous un numéro de code. Et, là-dedans, quand on feuillette ça, il y en a au moins 30 % qui touchent les assurances.

Par ailleurs, dans les dossiers que l'on reçoit – parce que, aujourd'hui, on n'amène que quelques cas – on découvre que la réalité assurances – on parle d'assurance-hypothèque, assurance-invalidité – il y a des centaines de cas de personnes qui se débattent actuellement pour essayer d'obtenir justice.

On vous a fait parvenir notre mémoire. C'est un volumineux document, avec des annexes, et tout. Il y avait un sommaire exécutif. Aujourd'hui, on va vous laisser, sous l'analyse de certains articles de la loi, des précisions qui nous apparaissent importantes, qui montrent encore plus que ce projet de loi n'a rien à voir avec la protection du public, au contraire.

L'esprit dans lequel je vais présenter certains éléments et je vais demander à mes collègues de s'exprimer... M. Dion, depuis le mois de juillet, se promène dans plusieurs régions de la province pour faire signer la pétition du Regroupement demandant une enquête publique sur Desjardins, et il est un peu tombé beaucoup de sa chaise, parce que c'est un monsieur qui a travaillé durant 25 ans à peu près chez Desjardins puis, là, il a rencontré le monde qui lui disait ce qu'il pensait de Desjardins puis des problèmes qu'il rencontrait. M. Stébenne a fait une réflexion avec les documents du fondateur Desjardins. Lui, il a vécu beaucoup de problèmes, depuis ce congédiement, et il parle à beaucoup de monde, il est très connu en Estrie. Et M. Beaudry, lui, ça a été sa grande surprise. Ça fait qu'ils peuvent donner des éléments complémentaires.

Pour nous, le débat qui est engagé ici, on s'aperçoit que c'est avant tout un débat de légitimité des commissions parlementaires et du rôle des députés, parce qu'on s'aperçoit, par l'intimidation qui s'est développée puis l'omniprésence du lobbying Desjardins un peu partout, qu'il faut se poser la question: Qui dirige le Québec? Est-ce que c'est les Béland et cie ou si c'est les parlementaires qui ont un rôle à jouer encore? et avoir le souci d'écouter les gens un peu partout et d'écouter ce qu'ils ont à dire dans la province?

C'est bien sûr que, pour beaucoup de monde, oser toucher au mythe Desjardins, c'est un scandale, et tout. Mais, un mythe, quand on s'aperçoit que, derrière, il est plein de faces cachées et peu honorable... Il a engendré au Québec la pauvreté, la misère, la maladie, des suicides. On ne manque pas d'exemples de situations dramatiques. Recevoir à 22 heures, le soir, un appel de quelqu'un qui nous parle de son suicide, c'est très spécial.

L'autre dimension qu'on voudrait confirmer, c'est l'intention gouvernementale d'augmenter la protection des consommateurs dans toute présentation de produits et services financiers. Le projet de loi n° 188 passe complètement à côté.

Confirmer que le projet de loi actuel ne veut en rien corriger les problèmes vécus par les consommateurs de produits d'assurance collective offerts par les institutions de dépôts. Il y a Desjardins qui est un gros problème touchant l'assurance collective; mettons, l'assurance-hypothèque est un exemple. Mais on sait que les banques ont des pratiques, sauf que, si les banques travaillaient mal avec leurs victimes ou les gens qui font des réclamations, comme les journalistes surveillent les banques et ne surveillent pas Desjardins, on verrait apparaître très rapidement les causes problématiques des banques en assurance-invalidité, ce qu'on ne voit pas.

L'autre dimension, c'est de confirmer que ce projet de loi a comme objectif d'avantager un réseau de distribution au détriment des autres, sans respect des règles élémentaires d'évolution des marchés. Ce qui nous frappe, dans le projet de loi, c'est que nulle part, depuis au moins juin 1996 – parce que les travaux ont dû commencer avant – à aucune occasion le gouvernement n'a déposé quelque étude reliée aux consommateurs, à leurs besoins, aux plaintes qu'ils avaient, à ce qu'ils pensaient du réseau de distribution actuel des agents et des courtiers. Les gens, est-ce qu'ils étaient satisfaits du type de services? On ne les a pas, ces études-là, on ne sait pas dans quelle mesure le consommateur a des problèmes.

Par ailleurs, si on vient encore une fois ici, c'est que le projet de loi n° 188 fait qu'il n'existe aucune victime, il n'y a aucun problème, chez Desjardins, c'est normal, puis c'est normal qu'il y ait des dizaines de milliers de personnes qui se retrouvent du jour au lendemain avec des problèmes, que ce soit reliés aux assurances ou que ce soit avec des réclamations qui sont amenées en cour. On leur dit: Prenez des avocats, débrouillez-vous, sachant très bien que les gens n'ont pas les moyens de se défendre. La santé, souvent c'est des gens qui sont sur le dos. On a des personnes qui n'ont pas pu venir parce qu'elles sont sous médicament puis, d'une heure à l'autre, elles ne savent pas leur état.

(14 h 20)

Confirmer aussi que ce projet de loi n'a pas comme objectif de créer des conditions pour augmenter la concurrence et vise plutôt à amplifier un processus de concentration financière inégalé à travers le monde, ce qui n'aide en rien le consommateur. On sait que le Mouvement Desjardins contrôle environ 40 % de l'épargne des Québécois, ce qui n'est sûrement pas un indice de concurrence. Mais il y a plus que ça. Dans des documents internes de Desjardins, on a pu avoir le texte d'une conférence prononcée par M. Louis Boies en janvier 1997. Il est sorti des données intéressantes du rapport de l'Inspecteur général, qui montrent que, de 1989 à 1996, le Mouvement Desjardins a doublé les frais de service qu'il charge aux sociétaires, sans compter la taxe Béland qu'on veut imposer, et on sait que des gens la paient actuellement. Et les profits qui sont faits par Interac, on ne sait pas où ils s'en vont. On a appris par des gens qui sont prêts de ces types d'opérations là qu'une transaction Interac coûte environ 0,04 $ à 0,05 $, et maintenant on est rendu à 1 $, 1,25 $. Ça fait que, les profits, où est-ce qu'ils vont? Et, si Desjardins n'avait pas doublé ses frais de service entre 1989 et 1996, il serait en déficit. C'est pour ça qu'on se pose la question carrément: Si le Mouvement Desjardins se sent si obligé de venir chercher d'autres privilèges auprès du gouvernement, alors qu'il est incapable de générer des surplus ou de rendre des services utiles et reconnus par la population... Parce que les consommateurs ne sortent pas de Desjardins... Dans les documents internes de Desjardins, les dirigeants admettent que les gens s'en vont; ce qui fait qu'il y a un problème, ils le savent. Mais, quand on voit les principes directeurs qu'ils véhiculent actuellement, qui parlent de respect de la personne, et tout ça, et que, dans la réalité, ce n'est pas le cas, il faut se poser des questions.

Il y a beaucoup d'observations dans le texte qu'on laisse aujourd'hui. Mais je vais prendre l'article 60 parce que c'est un point intéressant. L'article 60 va définir qui sont les cabinets qui vont avoir le droit d'opérer au Québec. Là, il se pose une question intéressante: Qu'est-ce qui va se passer avec les banques qui sont de juridiction fédérale? Pensez-vous qu'elles vont accepter d'être sous la juridiction provinciale de l'Inspecteur général pour se faire vérifier, et tout ça? Ce serait surprenant.

Par ailleurs, dans cet article 60, on constate qu'en même temps il y a un paradoxe, c'est que le gouvernement permettrait l'entrée des banques, donc le Mouvement Desjardins ferait face à une concurrence bien plus grande, ce qui serait à l'avantage des consommateurs. Nous, on est bien d'accord. Mais, en même temps, dans le projet de loi tel qu'on le rédige, c'est carrément pour essayer de sauver les meubles de Desjardins, mais pas pour répondre aux attentes des consommateurs.

Comme le temps a coulé vite. Dans le texte qu'on laisse aujourd'hui, on a abordé certains problèmes d'articles bien précis de la loi. Je vais prendre un autre exemple. Dans les articles 2 à 7, on définit ce qu'est un représentant ou pas, mais ce dont on s'aperçoit, c'est que, plus loin, quand on vient au chapitre sur les distributeurs d'assurance puis les assureurs qui vont s'occuper des distributeurs, ce n'est pas les mêmes règles de qualification professionnelle, de compétence, de responsabilité professionnelle qu'on leur impose. On va continuer à vendre, dans un supposé cabinet séparé, de l'assurance-vie ou d'autres types d'assurance par agents et courtiers, pendant que les employés de la caisse vont continuer à vendre des assurances-hypothèque et maintenir les mêmes problèmes qu'aujourd'hui. Pourquoi deux poids, deux mesures? Puis il y a une disposition quelque part, un article qui permettrait, dans un cabinet, à un représentant d'accorder du crédit. Donc, est-ce que c'est du crédit qui vient de la caisse, à côté? C'est quoi, la notion? Comment on sépare le cabinet de la caisse ou de la succursale bancaire?

Il y a un flou considérable dans plusieurs articles de la loi. On dit: On protège les consommateurs. Mais quels consommateurs? On ne sait pas où ils sont, on ne sait pas ce qu'ils pensent. On n'a jamais fait déposer les études qui montraient que les consommateurs ne sont pas satisfaits du réseau des agents et courtiers puis des assureurs directs qui opèrent au Québec. On se pose des questions.

C'est bien sûr que ce projet de loi là... Tous les gens, actuellement, qui sont dans les cours de justice ou des personnes qui ont des problèmes concrets reliés aux assurances, on les ignore complètement, on dit: Ils n'existent pas, ces gens-là. Et nous, on pourrait vous en amener des cas sans aucun problème. Juste, pour quelqu'un, aller passer une journée au palais de justice de Montréal et aller faire sortir la suite de ça: il y en a 10 000, 15 000. On nous dit qu'il y a au minimum 30 000 à 35 000 causes impliquant Desjardins, dans les cours de justice du Québec. C'est très payant pour les avocats, ça. Ils n'ont pas intérêt à ce que les problèmes se règlent. Ils n'ont pas intérêt – comme M. Beaudry, c'est tellement évident, son dossier – à ce que ça se règle.

Je vais m'en tenir à ça. À travers ça, j'ai soulevé des éléments principaux de nos préoccupations. Je demanderais à Serge, qui s'est promené dans plusieurs régions, comment il est tombé de son piédestal vis-à-vis de Desjardins en écoutant les gens.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. Serge Dion?

M. Desrosiers (Jean-Yves): M. Serge Dion.

M. Dion (Serge): Merci. Pour vous corriger, M. Desrosiers, j'ai commencé le 7 août et j'ai terminé ma petite tournée provinciale à la fin de l'été. D'ailleurs, j'ai rencontré M. Bernard Landry, durant ma tournée, dans mon comté – bonjour, M. Landry – qui est mon député. Je le salue en passant. J'ai fait, dans les caisses populaires, 25 ans: 22 ans comme directeur d'une petite caisse populaire – environ de six, sept employés – et puis trois ans dernièrement, comme administrateur. C'est donc dire que j'ai les deux facettes: en tant qu'employé et en tant que patron, on peut dire. D'ailleurs, j'ai eu un genre de lettre d'appréciation de la caisse populaire où j'étais comme quoi j'avais encore gardé mes valeurs coopératives, que j'ai remise à M. Desrosiers tout à l'heure.

Et suite à ça, moi, j'ai eu l'idée, suite, mettons, à la pétition annoncée par le Regroupement, de faire une tournée provinciale avec ma vieille voiture, une Chevrolet 1953 que j'ai lettrée: Demande d'enquête publique sur le Mouvement Desjardins. Et puis, j'ai été très surpris, j'ai été très, très surpris de voir les gens qui ont signé. Mais, remarquez bien, le but, ce n'était pas de les faire signer, pas du tout. C'était plutôt un échange pour voir dans la rue... Quand je dis dans la rue, c'est des gens, des professionnels qui ont signé, c'est des hommes d'affaires, des étudiants aussi qui ont signé. Et puis j'ai été très surpris de voir que même, des fois, on expliquait son cas pendant une demi-heure, une heure et puis, à un moment donné, avant de partir, on disait: Je vais te la signer, ta pétition. Je ne leur demandais même pas de signer la pétition. J'ai été très, très surpris de voir...

Puis même, j'ai invité, par l'entremise de M. Desrosiers, M. Béland à passer une demi-journée avec moi, juste pour voir ce qui se passe dans la rue. Et puis, même, je pourrais vous inviter, au tout début de l'été. C'est surprenant. Parce que, moi, j'étais un gars de Desjardins, et les preuves sont faites, j'ai été très, très surpris de voir la façon... Je peux vous résumer ça, peut-être bien.

J'ai été à Québec, j'ai été à Sherbrooke, j'ai été à Montréal, j'ai été à Rivière-du-Loup, j'ai été partout et je me suis centré surtout où il y avait des foires agricoles, des expositions, des festivals, pour avoir un échantillonnage le plus possible. On dit qu'il y a des gens de Repentigny qui ont signé, et je n'ai pas été là. Il y a des gens de Châteauguay, de Roberval, de Hull, de Gatineau qui étaient en vacances ou qui allaient à l'exposition, de Joliette, de Cap-Rouge, etc. J'ai 3 500 signatures que j'ai ramassées tout seul.

Je vais vous dire – mettons, un résumé – dans la région de Montréal, malheureusement, Desjardins est très mal vu. Et même, on a employé à plusieurs reprises – j'ai été très surpris – le mot «mafia». Ce n'est pas moi qui le dis, on m'a dit ça, dans la région de Montréal, que Desjardins, c'était la grosse mafia. Ce n'est pas flatteur. Dans la région de Québec, les gens parlent beaucoup, ils ne sont pas vulgaires, mais ça signe. Et dans la région de Sherbrooke, j'ai été voir mon collègue, M. Claude Stébenne. On a été au palais de justice une journée, et puis les gens, ils regardent ma voiture, ils viennent nous voir, ils ne disent pas un seul mot, ils signent. C'est assez spécial. J'étais très... Aussi, quand j'ai été au festival du canard, à Knowlton, à ce moment-là, il y des gens de partout dans la province qui m'avaient déjà vu soit à Québec ou à Montréal ou ailleurs et, cette fois-là, ils ont signé. Parce que, au début, ils ne pensaient pas que c'était crédible. Ça fait que la deuxième fois, ils sont venus me voir, ils ont dit: Je t'ai vu à telle place, là, je signe.

Il faut dire qu'il y a des gens qui ont dit: Ça donne quoi, une pétition? Absolument rien, parce que, en fin de compte, ça va donner quoi? Ils vont dire: O.K., on va faire une enquête publique, tout ça, puis, après ça, ça va dormir sur les tablettes. On va faire semblant de faire quelque chose puis ça va dormir sur les tablettes. Il y a une dame de la région de Granby, elle, elle a été plus drastique, et je n'étais pas du tout d'accord avec elle. Elle a dit: On devrait fermer nos comptes dans Desjardins, pour les faire réfléchir. Remarquez bien que je ne suis pas d'accord avec ça, parce que je suis un gars de coopération, je suis un gars de Desjardins.

Moi, je dis qu'on peut être progressif, aller vers le progrès, mais en respectant les humains. Et c'est là qu'est le problème, c'est qu'on ne respecte plus les humains, dans Desjardins. Supposons que c'est une compagnie italienne, irlandaise ou autre qui est ici, au Québec, puis qu'on travaille pour eux autres puis qu'ils ne nous respectent pas; bien, ça peut se comprendre, on n'a aucun contrôle sur la compagnie. Mais Desjardins, c'est à nous autres, c'est à nos grands-pères, c'est à nos parents, qui ont fait du bénévolat, puis qu'on ne soit pas respecté par eux autres... C'est parce que moi, je dis que le problème ne se situe pas nécessairement au niveau des caisses, c'est au niveau des fédérations et de la Confédération. Moi, je résume ça, ceci... J'ai eu un téléphone d'une dame de Radio-Canada. Elle était surprise de voir la façon dont j'ai approché le dossier. Puis j'ai dit: Madame, vérifiez. Elle a vérifié puis elle a vu que c'était vrai.

(14 h 30)

En fin de compte, dans une caisse populaire, quand il y a un problème... que ce soit le directeur, un administrateur, le président ou un employé qui fait une erreur, volontaire ou involontaire, là, il y a une victime qui est le membre. Le membre se plaint un petit peu à la caisse. Là, à ce moment-là, on essaie de cacher le dossier un petit peu pour sauver l'image. C'est toujours l'image qu'on veut sauver. À ce moment-là, la Fédération rentre dans le dossier et, à ce moment-là, bien, c'est sûr que là on essaie de dorer la pilule, et tout ça. Puis, à un moment donné, on dit au membre: Écoutez, on a fait les études, puis la caisse est correcte. Même si elle n'est pas correcte, puis ils le savent qu'elle n'est pas correcte. C'est toujours pour sauver l'image. À ce moment-là, bien, ça, c'est classique, la Fédération va dire: Écoutez, on a fait enquête, vous avez deux choses à faire: vous tournez la page ou vous poursuivez la caisse. C'est un pattern qui revient très souvent.

On a un dossier actuellement d'une dame – je n'irai pas plus loin – un dossier qui est de l'heure. Ça fait un an et quelques mois que Radio-Canada est sur le dossier et que tout le monde, malheureusement, ils ont frôlé la vérité – je parle, mettons, de la caisse populaire. Un employé qui me semble correct, le directeur, lui, pour sauver l'image, il a protégé ça. Un monsieur de la Fédération de Montréal a protégé aussi, un avocat de la Confédération également. Tout le monde dit la même chose. Et puis aussi le Commissaire aux plaintes, qu'on m'a dit dernièrement. Et puis aussi l'assurance de Desjardins, la garantie globale de Desjardins, parce qu'il y a une assurance pour ça. Puis le dossier est à la veille de sortir. Je vous dis que ce n'est pas à l'honneur de Desjardins. Ce n'est pas à son honneur, parce que la personne qui est victime, elle est vulnérable. Je suis convaincu qu'un professionnel, un notaire ou un avocat de 25, 30 ans, on n'aurait pas agi comme ça avec lui, parce que, lui, il est formé, il sait qu'il a ses droits. Mais la madame en question, mais que le dossier sorte... c'est épouvantable de faire ça à une dame, puis peut-être que son mari ou son grand-père a été un bénévole dans un sous-sol d'église. Et le dossier, c'est sûr que là je suis le seul, mettons, à date, qui dit que ça n'a pas d'allure en tant que professionnel de Desjardins, ex-professionnel. Tous les autres, ils disent que ça a du bon sens. Mais attendez de voir le dossier, vous allez voir que...

Puis le problème, c'est que... ça, c'est partout dans nos familles. Quand on commence à mentir ou à protéger quelqu'un, l'autre va le protéger, puis c'est partout pareil, ce n'est pas juste à Desjardins, remarquez bien. C'est pareil dans d'autres compagnies. À la Sûreté du Québec, c'est pareil. C'est partout pareil. À la seule différence que je trouve ça, moi, épouvantable, c'est que Desjardins, ça nous appartient. Excusez l'expression, mais se faire avoir par une compagnie irlandaise, italienne, moi, j'accepte ça.

Des voix: Ha, ha!

M. Dion (Serge): Mais se faire avoir par nos racines, remarquez bien que, là, je n'embarque pas.

Une voix: Une chance que Cosmo n'entend pas ça.

M. Dion (Serge): Ça fait que, là, M. Desrosiers me dit que c'est assez.

M. Desrosiers (Jean-Yves): On va revenir à la période des questions. Quant au problème de confidentialité des renseignements personnels, de l'accès à l'information pour les sociétaires, M. Steben vit le problème relié à la recherche d'obtention de ses dossiers de type administratif depuis un bon bout de temps et ça pose ce problème qui vient très souvent dans le projet de loi: Est-ce qu'on va protéger les renseignements personnels dans la conception qui est là? Parce que je le dis dans le texte qu'on va vous laisser aujourd'hui, c'est que Desjardins prétend qu'il est un réseau. Donc, on peut promener le renseignement entre les assurances, entre les caisses, puis il n'y a pas de problème. On va créer une vaste banque d'informations sur les gens, pas de problème. Les banques n'ont pas le droit de faire ça, puis je pense que les compagnies d'assurances, on ne leur permettrait pas de jouer comme ça, de promener les informations des sociétaires. M. Steben, je pense, peut illustrer ce problème-là qu'il a, lui.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Je voudrais vous indiquer que, déjà, le temps est dépassé, mais je ne veux pas vous limiter. J'ai déjà laissé à un autre groupe jusqu'à 27 minutes pour la présentation et vous avez déjà 23 minutes de prises. Je veux être juste et équitable pour tout le monde.

M. Steben (Claude): O.K. Premièrement, je voudrais dire que j'endosse tout ce que M. Dion puis M. Desrosiers ont dit et puis je suis à 100 % d'accord avec ce qu'ils ont dit.

Moi, ce que j'ai vécu dernièrement, c'est avec Assurance vie Desjardins. Le 23 février 1994, j'ai demandé à Assurance vie Desjardins de me faire parvenir une copie de mon dossier, comme nous le permet la loi d'accès à l'information. On m'a répondu qu'on ne pouvait pas le faire. Un peu plus tard, en mars 1994, je me présente devant la Commission d'accès à l'information puis je gagne ma cause. Ensuite, Assurance vie Desjardins, ils sont allés en appel de cette décision-là. Alors, ça a passé en 1994, le 16 décembre 1994, puis j'ai encore gagné à ce moment-là. Selon la loi, je pense que c'est l'article 68 de la loi qui dit que la compagnie n'a plus le droit d'appel. Eux, ils se sont retournés de bord, ils ont interjeté appel de la décision, ils ont dit... Ils ont fait une requête pour permission d'en appeler de la décision du président de la Commission d'accès à l'information. Puis, ça a été présenté, ça, dernièrement, au mois de janvier 1998. Puis le juge, sur le banc, m'a donné raison.

Alors, là, moi, je ne comprends pas pourquoi Desjardins, lorsqu'il y a une décision de prise, eux autres, il faut toujours qu'ils aillent en appel, puis tout ça. Une chance que, moi... D'abord, je n'avais pas les moyens d'avoir un procureur. Je me suis défendu seul, puis, tout le long, j'ai gagné. Bien, il me semble que Desjardins, à un moment donné, devrait lâcher. Puis je pense que, s'ils avaient pris cet argent-là, ce que ça a coûté pour aller en appel... le dossier, combien il a coûté à Desjardins? Puis Desjardins, quand même, ça nous appartient, ça appartient à tous les Québécois. Ils ont fait dépenser de l'argent à Desjardins. Ils ont fait dépenser de l'argent aussi au palais de justice, si vous voulez, aux cours, puis ainsi de suite, au système juridique. Puis, finalement, on se ramasse avec une décision qu'ils vont... d'après ce qu'ils ont dit à la radio, à Sherbrooke, ils iraient encore en appel de cette décision-là. Sous quelle forme? Je ne le sais pas. Mais ils vont sûrement y aller.

Moi, je me dis: Desjardins, si ça nous appartient, puis Desjardins, si c'est québécois, pourquoi on ne se soumet pas aux lois? C'est sûr, je suis bien d'accord qu'ils soient allés en appel de la première décision de l'arbitre à la Commission d'accès à l'information. Mais, lorsque la loi dit qu'ils n'ont plus le droit d'appel, pourquoi il faut toujours trouver un petit contournement quelque part pour toujours être à part des autres, toujours être... Puis, tu sais, ça coûte de quoi aussi. Ça coûte de quoi. Puis les gens qui se défendent, là, souvent, ou qui devraient se défendre... J'entendais M. Desrosiers parler de certains dossiers tout à l'heure. Si, par exemple, on avait tous les moyens... Vous savez, pour avoir justice au Québec, il faut être bien riche ou bien pauvre. Puis, quand on est entre les deux, on se fait laver. Puis c'est arrivé souvent, ça, dans des cas que M. Desrosiers a présentés. Moi, je me dis: Bien, j'étais assez pauvre... je n'avais pas les moyens d'avoir l'aide juridique; par contre, je ne me suis pas permis de prendre un procureur, j'ai dit: J'y vais tout seul. J'ai été chanceux, ça ne m'a rien coûté, sauf mes voyages, puis ainsi de suite. Mais combien ça a coûté, par exemple, à l'ensemble de Desjardins? Ça, c'est une autre paire de manches. Puis c'est là où je n'en reviens pas, moi. On dépense des fortunes, à Desjardins, à payer des avocats pour défendre des causes, souvent, qui traînent des années de temps, pour dire: Bien, O.K., on les remet, on les remet, on les remet. Soit que les gens se tannent, soit que les gens n'ont pas les moyens de suivre, puis ils perdent en cours de route, puis là, bien, ils font faillite, ils font toutes sortes de choses. En tout cas, moi, c'est ce que j'avais à vous dire, puis je vous remercie de m'avoir écouté. Je ne veux pas m'étirer là-dessus.

M. Desrosiers (Jean-Yves): M. Beaudry est un ex-agent d'Assurances générales Desjardins, mais, lui, il se fait prendre dans la... Quand il y a un problème d'invalidité, on dit: On lui paie un bout de temps, puis on dit, après: Tu n'es plus malade, prouve-le, puis débrouille-toi. Il est un cardiaque à dossier lourd et il s'est permis de se déplacer aujourd'hui – il faut le remercier – dans les conditions de la route. M. Beaudry, brièvement.

M. Beaudry (Michel): Bonjour, mesdames, messieurs. Michel Beaudry. En 1994, je suis tombé invalide, j'ai été hospitalisé. Au cours des deux années suivantes, j'ai subi deux opérations dans un hôpital du Québec, à l'hôpital du Sacré-Coeur où j'ai eu de très bons soins, où j'ai été traité très humainement. J'y vais régulièrement pour d'autres tests et j'ai de très bons soins.

Jusqu'à janvier 1997, je n'ai eu aucun problème, je touchais mon assurance-invalidité d'Assurance vie Desjardins. Mon manuel d'employé disait que j'avais droit à 70 % de mon salaire brut jusqu'à 65 ans avec une indexation maximale annuelle de 3 %.

En janvier 1997, Assurance vie Desjardins m'a demandé de demander au Régime de rentes du Québec mon invalidité. C'est ce que j'ai fait. J'ai dû passer d'autres tests dans une clinique privée. Puis, au bout de quatre mois, le Régime de rentes du Québec a rendu sa décision me déclarant invalide. Ils m'ont fait parvenir un chèque de un an rétroactif. Moi, je savais que ce chèque-là appartenait à Desjardins vie. Alors, je les ai appelés, je leur ai dit: J'ai reçu le chèque; est-ce que je dois le déposer, vous le retirez, ou si je vous le malle? On m'a dit: Ne mallez rien, envoyez-nous des photocopies, on vous envoie des documents. Là, j'ai reçu un document, puis c'est là que je suis resté sidéré: un document dans lequel on me réclamait 3 000 $ de plus que ce que j'avais touché du Régime de rentes du Québec, puis là avec un paquet de chiffres que j'ai essayé de dénoter. Et puis, ce qu'on m'expliquait dans ce document-là, c'est que j'avais le droit de toucher 70 % de 100 % de mon salaire net pour les 24 premiers mois et qu'après ça j'avais le droit de toucher 70 % de 90 % de mon salaire net, ce qui fait une perte de 3 500 $ annuelle. Si vous étalez ça sur 15 ans, avec l'indexation, ça fait une perte de 63 000 $. J'ai appelé, parce que je ne comprenais pas. Mon contrat de travail me disait très clairement que j'avais droit à 70 % de mon salaire brut.

(14 h 40)

En plus, lorsque je suis tombé sur l'assurance longue invalidité, mon employeur m'a fait parvenir une lettre comme quoi je serais payé par Assurance vie Desjardins à 70 % de mon salaire brut. Alors, j'ai expliqué ça à Mme Beaudoin, de l'Assurance vie Desjardins, elle m'a dit: Ce n'est pas mon problème, c'est le problème de votre employeur, appelez-le. Là, j'ai appelé mon employeur, on m'a dit: Ce n'est plus notre problème, c'est le problème de Desjardins vie, appelez-les. Et puis, là, ça fait un an que ça dure, qu'on se chicane.

Ça fait que c'est ça que j'avais à vous dire. Moi, mon dossier est très, très clair, c'est que j'ai un contrat de travail avec un manuel d'employé qui dit que j'ai droit à 70 % de mon salaire brut, et puis ce n'est pas ça qu'on veut me payer.

M. Desrosiers (Jean-Yves): On est prêts à recevoir vos questions. Ce qu'on voulait illustrer à travers des cas ou des expériences, c'est que les victimes puis des problèmes qui se vivent sur le terrain sont multiples. Ils sont là, on veut les ignorer, mais ils sont là partout dans la province. Moi particulièrement, je n'investis pas mes vacances et mes congés juste pour le fun. C'est un travail harassant de traiter les dossiers et de subir le terrorisme de certains individus de Desjardins à l'occasion aussi, puis d'essayer d'amener que la vérité sorte, que les citoyens aient le droit de parler et que les députés qui représentent cette population aient l'occasion de savoir ce qui se passe et de faire un projet de loi qui va respecter ses besoins véritables.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. Desrosiers, de votre présentation, ainsi que les gens qui vous accompagnent. J'accorderai la parole au ministre des Finances. M. le ministre.

M. Landry (Verchères): Oui, j'ai écouté avec intérêt votre présentation, que mon ami Serge Dion m'a faite en pièces détachées d'ailleurs depuis plusieurs années, à chaque fois qu'on se voit. Je pense bien que nulle institution de grande taille n'est à l'abri de tout reproche, et pas plus Desjardins que n'importe quelle autre. J'ai aussi un autre ami qui fait une croisade fabuleuse, lui, contre les banques et qui tient, privément puis publiquement, des discours fort pertinents et prouvant qu'il y a des réformes à faire. C'est d'ailleurs une des raisons pour lesquelles l'Assemblée nationale se penche sur la réforme de la loi de distribution de ces produits, que Desjardins distribue et beaucoup d'autres.

Est-ce que vous croyez que le statu quo, qui a sans doute permis un certain nombre d'histoires d'horreur avec Desjardins et avec d'autres, doit être entretenu ou si le législateur n'a pas le devoir de moderniser sa législation, de la faire avancer, et de consulter la population, comme on le fait aujourd'hui, pour trouver les meilleures manières de prévenir les situations que vous avez dénoncées qui – je ne suis pas en mesure de me prononcer – dans certains cas, peuvent être fondées? Alors, voilà ma première remarque.

La deuxième. Je dois vous dire qu'au début de la commission, dans mes remarques introductives, j'ai fait état du consensus qui existe chez les députés ministériels autour de cette table pour continuer le décloisonnement entrepris de nos institutions financières il y a nombre d'années. Un de mes illustres prédécesseurs, qui avait une très grande compétence et beaucoup d'intuition, a amorcé le mouvement de décloisonnement, il s'agit de Jacques Parizeau. Desjardins en a profité, et d'autres. Et je veux vous dire que, si on décloisonne, ce n'est pas pour une institution ou une autre, ou à cause de ses mérites ou de ses démérites. C'est qu'on veut que l'économie du Québec soit maintenue dans la modernité de la globalisation des marchés et que nos lois soient aussi ouvertes, aussi fluides que celles des grands pays avancés qui ont adopté des législations de même nature auparavant, y compris notre grand voisin du Sud qui partage notre continent, mais aussi des pays sur lesquels nous avons souvent pris modèle et inspiration, comme la France, comme la Grande-Bretagne et comme un certain nombre d'autres. Alors, je vous dis, avec toute la délicatesse possible, que vous avez une sacrée côte à remonter, puisque le gouvernement, sur ce point, a fait son lit.

Sur les autres aspects des choses, on a déjà analysé soigneusement votre mémoire, on va continuer à le faire, espérant pouvoir améliorer notre proposition qui devrait modifier le statu quo, lequel, si je vous ai bien compris, est déplorable.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. Desrosiers.

M. Desrosiers (Jean-Yves): C'est sûr que, dans l'évolution – parce que je suis économiste et je suis quand même, depuis des années, ces débats-là tout en étant en périphérie – c'est sûr qu'il y a une transformation du marché mondial qui touche les institutions financières, mais ça ne veut pas dire... On parle beaucoup de décloisonnement, de mondialisation, de globalisation, mais il y a beaucoup de langage qui est assez obscur pour tout le monde. C'est que, même si on parle de mondialisation, les problèmes quotidiens des gens... les institutions demeurent en place, d'un côté, et les consommateurs devraient être servis. La mondialisation, ces termes-là servent les grandes entités qui font des transactions internationales. Le décloisonnement, moi, j'en suis, de l'ouverture, mais il faut qu'il soit fait selon les mêmes règles pour tout le monde. Qu'on crée, qu'on dise, supposément, décloisonner pour permettre aux banques, aux caisses de vendre de l'assurance, de vendre d'autres produits, bon, sur le plan du principe, c'est difficile de dire qu'on ne peut pas, mais c'est sur les mécanismes, sur les modalités qui sont mises en place: Est-ce qu'on sert vraiment le consommateur, alors même qu'on ne s'est pas posé de questions: Qu'est-ce que le consommateur pense de ce réseau de distribution qu'il y a là actuellement? Est-ce qu'on va mieux le desservir en pensant vendre plus dans les caisses, en créant des cabinets, en créant une bureaucratie?

Le décloisonnement, ça peut prendre plusieurs formes. Comme on utilise dans les communiqués de presse, on parle du mot «optimisation», mais on n'a jamais déposé sur la table, et pas plus devant les parlementaires, des études qui montrent que les consommateurs vont avoir de meilleurs prix, de meilleurs produits après la loi n° 188; il y a un vide d'informations autour du dossier. Le décloisonnement, c'est un principe qui est reconnu, mais là, comme on l'illustre dans notre dossier, c'est que ce n'est pas pour ouvrir sur le même pied à tout le monde, c'est pour en avantager un par rapport aux autres, qui est Desjardins, puis laisser une confusion dans les rôles. Je mentionnais tout à l'heure que dans une caisse – pour prendre un exemple, ça peut être dans une banque – physiquement, on va avoir un cabinet d'assurances, et ce sera peut-être un cabinet où on va avoir acheté des assureurs autour, je ne sais pas, puis, théoriquement, on va vendre au comptoir des assurances-hypothèques, par les mêmes employés qu'actuellement. On va dire: Ah! ils sont mieux formés, puis tout ça. Mais le projet de loi ne change rien, on ne touche pas à l'assurance collective.

L'autre dimension. Dans 379 – la rédaction du mémoire avait une petite erreur, on parlait d'un 10 jours... Dans l'article 379, on ne dit même pas le délai, on prévoit qu'une institution va devoir confirmer à un assuré, ou à une personne, qu'il est bel et bien assuré. Mais on ne dit pas: Est-ce que c'est dans 30 jours, dans deux ans, dans trois ans? Tel que c'est rédigé là, ça va être comme actuellement, où le sociétaire, quand il fera une réclamation, on va lui dire: Tu n'es pas assuré. On n'a rien changé. Il y a un problème de dire comment on organise les services de distribution, mais est-ce qu'on a trouvé les meilleures solutions? Je mentionnais tout à l'heure que, tel que c'est prévu, une personne qui va être dans un cabinet va pouvoir consentir du crédit pour payer des primes d'assurance ou des placements: à quelqu'un, on lui prête de l'argent pour se prendre un REER. C'est qui? Est-ce que c'est vraiment... même si, dans la loi, on dit: Bon, ça va être des entités séparées, ce n'est pas évident. Le décloisonnement, jusqu'où on le pousse?

M. Landry (Verchères): Je voudrais vous suggérer une petite réflexion sur l'article que vous avez mentionné. Vous l'avez sous les yeux sans doute, le 379: «L'institution financière qui, à l'occasion d'un prêt hypothécaire, sollicite l'adhésion d'un client à une assurance sur la vie et la santé d'un débiteur doit, lorsqu'elle place un tel produit, confirmer au client qu'il est assurable.» Il n'y a aucun délai, c'est simultané. C'est ça que le mot «lorsque» veut dire: lorsqu'elle place, elle doit. Alors, vous voyez qu'il y a des façons de lire les articles.

(14 h 50)

M. Desrosiers (Jean-Yves): Mais on l'a fait examiner par des avocats qui nous ont confirmé que c'était une confusion majeure, tel qu'il est rédigé. Il faut que les gens sachent: Est-ce que c'est dans 30 jours qu'ils vont obtenir confirmation ou pas, dans 10 jours, dans un an?

M. Landry (Verchères): Il n'y a pas de délai, on a voulu que ce soit instantané.

M. Desrosiers (Jean-Yves): M. le ministre...

M. Landry (Verchères): Si on met 10 jours, on perd 10 jours.

M. Desrosiers (Jean-Yves): M. Dion aurait un point à apporter.

M. Dion (Serge): Oui. M. Landry, vous avez parlé de modernité. Je suis bien d'accord. Aussi, j'ajouterai peut-être, en haut de ça, «humanité», parce que je pense que, moi, c'est le côté humain que je défends beaucoup là-dedans. Puis même ici, dans le journal local, à Saint-Hyacinthe, j'ai fait paraître, vu que j'étais ex-conseiller municipal, des voeux pour les futures années et puis j'ai marqué ici: «Le défi de l'an 2000. À l'aube de l'an 2000, beaucoup de changements nous attendent.» On est tous d'accord là-dessus. «Tout en étant favorables au progrès, notre défi serait de sauvegarder les valeurs humaines et de faire naître partout dans le monde une grande solidarité humaine.» Et, par un hasard, cette solidarité-là, on l'a connue, parce que je suis dans le triangle glacé, noir, ou tout ce qu'on pourrait dire, et on l'a connue. Je pense qu'il y a une solidarité.

Maintenant, je pense qu'il faut humaniser nos institutions puis il faut commencer par Desjardins. On ne peut pas humaniser, mettons, une banque, parce qu'une banque... des fois, on dit: Ils font de l'argent. Ils font de l'argent, mais c'est normal, ils sont là pour faire de l'argent, c'est à but lucratif. Desjardins, ce n'est pas ça. Ce n'est pas pour aider juste les pauvres, mais, en fin de compte, ils devraient avoir l'aspect humain en premier. Puis, d'après moi, on peut aller vers le progrès, mais avec la touche humaine, puis, s'il n'y a pas Desjardins qui peut faire ça, il n'y a personne qui peut faire ça au Québec.

Puis aussi, moi, j'ai une petite nuance avec, peut-être, le regroupement, un petit peu, par rapport aux assurances Desjardins. Moi, ce que j'ai senti durant mon périple puis ma tournée provinciale durant l'été, parce qu'il y avait trois choses qu'on reprochait à Desjardins en premier: premièrement, charge administrative onéreuse – ça, là, c'est sûr que ça, là, c'est première position; deuxièmement, les assurances; puis troisièmement, la coopération, les valeurs humaines qui s'en vont. Moi, je dis, avec les signatures que j'ai ici, puis j'en ai une page ici... quand on parle de signatures, on parle de signatures en bonne et due forme, avec le nom, l'adresse, le code postal, puis, des fois, le téléphone en plus. Moi, je dis: Pourquoi donner encore d'autres avantages à notre Mouvement Desjardins parce qu'ils n'ont pas la compétence dans les assurances? Parce que, moi, j'ai eu des cas drastiques; des cas drastiques, qu'on m'a dit, qu'on m'a confiés, c'est épouvantable qu'est-ce qui s'est passé.

C'est pour ça que je me dis... moi, je fais une nuance, je suis d'accord, mettons, que ce soit... mais au moins que le côté humain soit respecté puis qu'on agisse pour aider les gens. Desjardins, ça a été fondé par Alphonse Desjardins, en l'an 1900. Pourquoi? Parce qu'on ne pouvait pas avoir de prêts dans une banque, ou à des taux très onéreux et des conditions très onéreuses. À ce moment-là, ils ont dit: Écoutez, vous, monsieur, vous vendez votre ferme à votre garçon; au lieu de déposer votre argent dans une banque, déposez-en une petite partie dans une caisse populaire. Et ça a commencé comme ça pour que les cultivateurs, les fils puissent avoir accès au crédit à des taux intéressants. C'est ça, Desjardins. Mais, aujourd'hui, moi, je vais vous dire franchement, j'invite tout le monde qui veut passer une demi-journée avec moi durant l'été, au début de l'été, vous allez voir que c'est là qu'on a l'heure juste sur les services qu'on a.

Moi, je fais une nuance. Je ne dis pas de ne pas décloisonner, puis tout ça. Je dis: La compétence, puis en axant sur le côté humain. Moi, je suis ouvert, mais il faut la compétence. En réalité, c'est quoi, Desjardins? C'est de donner du service à la population. C'est à nous autres. Même, des fois, j'ai des commentaires; à Québec, justement, on m'a dit: Écoute, ils vont ouvrir des caisses un peu partout dans le monde, puis, nous autres, on nous oublie. Bien, c'est ça, le but de Desjardins. Moi, je ne suis pas contre le décloisonnement, mais je suis pour donner du service puis ne pas perdre le côté humain, parce que, là, je vous dis que, si Desjardins n'a pas le côté humain... Écoutez, c'est ma petite marotte, humain, c'est que, moi, c'est sûr que tout est axé là-dessus. Aujourd'hui, je ne serais pas ici si c'était, mettons, pour une compagnie étrangère ou autre, parce qu'il n'y a rien à faire, mais c'est Desjardins, parce que ça nous appartient puis on peut changer des choses collectivement, pour l'ensemble de la population. Merci, M. Landry et M. le Président.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Viger.

M. Maciocia: Merci, M. le Président. Merci, M. Desrosiers, d'être venu devant nous aujourd'hui. Je pense que vous avez présenté un mémoire assez intéressant pour la commission aujourd'hui.

J'aimerais avant tout rassurer M. Dion. Tout à l'heure, il disait que, probablement, il comprenait de se faire avoir par une compagnie italienne, irlandaise ou autre...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Maciocia: ...que plutôt par Desjardins. Mais je vais vous rassurer. Je vais vous rassurer. Desjardins, ils ne nous ont pas donné cette possibilité-là parce qu'il y avait la fiducie canadienne-italienne et ils l'ont achetée.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Maciocia: Alors, il n'y a pas cette possibilité-là. Mais, pour revenir sur la question – je pense que c'est très important – ce n'est pas seulement le décloisonnement, je pense que c'est la façon dont on va le faire. Et, nous, nous l'avons très bien dit, il y a un rapport de la commission Baril qui a été fait par cette commission-ci, à l'unanimité, où on a posé des balises, on a dit: Voilà, on peut le faire, mais ce sont ça, les conditions avec lesquelles il faut le faire. Et nous, notre premier but, c'est celui-là, la protection du consommateur. Deuxièmement, c'est la question de la compétence et de la certification des gens qui vont vendre de l'assurance. Troisièmement, c'est les ventes reliées, et je pense que vous craignez ça, vous aussi, les ventes reliées qui vont se faire et qui ne doivent pas se faire. Et je pense que c'est la responsabilité de la personne aussi qui vend ces produits-là. Ça doit être: en premier, lui est responsable, puis, en deuxième lieu, aussi le cabinet. C'est ça qu'il faut regarder, la compétence et la certification, les ventes reliées, la responsabilité et, comme je disais, la protection du consommateur. C'est avant qu'il faut le faire, ce n'est pas après qu'il faut le faire.

Et moi, la première question qui me vient à l'esprit, c'est de savoir: Pour les victimes de Desjardins qui s'informent actuellement sur le projet de loi n° 188 pour savoir si, dans ce projet de loi, ou si ce projet de loi là est conçu pour corriger les choses du passé, que répondez-vous aux victimes de Desjardins? Est-ce que ce projet-là corrige les choses du passé?

M. Desrosiers (Jean-Yves): Absolument d'aucune façon, on les ignore, ils n'existent pas, les gens, jusqu'à aujourd'hui... Si on adoptait, mettons, dans un mois ou deux ce projet de loi, tous les gens qui sont pris actuellement avec ces problèmes-là, il n'y a rien de réglé, il n'y a aucune disposition, ils vont continuer à se battre, puis ils n'existent pas. On va continuer à les détruire de toutes sortes de façons. Et pendant ce temps-là, les avocats de Desjardins vont grassement s'enrichir sur le dos de ce monde-là. On ne règle strictement rien de ce côté-là, et c'est très grave.

Par ailleurs, dans les dispositions de 188, en vue du futur, c'est que, dans l'analyse des articles du projet, on constate que... Prenons juste la question de l'assureur distributeur. Actuellement, le problème vient d'une situation assez simple. C'est que, quand les gens – là, je parle d'assurance collective parce que c'est un problème dramatique – quand la personne va dans une caisse signer une formule de prêt, elle remplit un formulaire d'adhésion, elle n'a jamais de contrat garanti. Le jour d'une réclamation, on dit: Il n'y en a pas de contrat. Puis on a fait appeler du monde pour avoir un contrat, ils se sont fait engueuler, des menaces, et tout. C'est que la personne signe un document, remplit une formule, paie des primes, pense être assurée.

Dans le système actuel, c'est que l'employé, qu'il soit bon ou pas, dans la caisse, qui remplit le formulaire, il y a des questions devant lui, il ne se pose pas nécessairement la question; Est-ce que je donne les bons renseignements à la personne devant moi? Est-ce que je suis capable? Il y a des termes médicaux, et tout. Il s'aperçoit que les gens, souvent, ne comprennent pas les termes médicaux qui sont devant eux, ça fait qu'ils remplissent... Mais le jour où la personne a un problème d'invalidité ou qu'il y a un décès – il y a une assurance-hypothèque pour faire rayer le solde – c'est que, là, on dit à la personne... ce n'est plus l'employé qui, par la caisse... La caisse reçoit la réclamation, mais, elle, elle décide si elle l'envoie ou pas à l'assurance. C'est arbitraire. Et là, à ce moment-là, c'est le technicien ou l'employé d'AVDL qui, lui, prend le document puis il dit: Ah! regarde, ils ont répondu ça. Alors, ils ont fait une fausse déclaration. Maintenant, un exemple. On a des cas actuellement assez dramatiques là-dessus. On réécrit aux gens, on dit: On voudrait que vous passiez des examens médicaux. Mais là, c'est trois ans, quatre ans après. Puis les gens, s'ils vont à l'assurance-invalidité, c'est parce qu'ils sont malades. Là, le rapport médical va dire: Monsieur, madame est malade. Mais là on va leur dire: Vous nous avez trompés, vous étiez déjà malade.

(15 heures)

Dans La Presse de la semaine dernière, il y a eu un article important – je vous le ferai tenir. Un avocat de Desjardins, Ducharme, un avocat qui a fait beaucoup d'argent avec Desjardins, qui a écrit, Me Joannisse, un article, un petit article fort intéressant: Le contrat d'assurance et bonne foi vont de pair . Et il se servait de l'article 2409 du Code civil pour amener une dimension fondamentale et dire: Les gens, ils ont le droit d'être respectés. Si on leur a mal fait remplir un questionnaire, pourquoi, après, on les rendrait coupables? Le projet de loi n° 188 ne réglera rien de cette situation, et les problèmes vont continuer. Tous ceux qui sont pris avec les assurances collectives, comme les assurances-hypothèque, les assurances-invalidité, qui ne sont pas des assurances... Parce que, aussitôt que Desjardins se fait prendre, il rembourse la prime. Ce n'est pas de l'assurance. Et ça ne prend pas des grands experts, des actuaires et autres pour le dire.

M. Maciocia: Étant donné que le temps presse, je vais vous poser une autre question, M. Desrosiers. À la page 5 de votre mémoire, au paragraphe 4, vous nous dites que le ministre des Finances s'est engagé dans une véritable opération d'expropriation sur le dos des agents et des courtiers. Êtes-vous en train de nous dire que les règles du projet de loi sont planifiées pour désavantager les agents et les courtiers, contre lesquels on n'a rien à dire actuellement? Parce que je pense que personne, à date, n'a eu un mot à dire contre les agents et les courtiers, sur leurs compétences et sur leur façon de faire. Est-ce que les règles de ce projet de loi là sont faites pour désavantager les agents et les courtiers, comme je disais, vis-à-vis les institutions financières?

M. Desrosiers (Jean-Yves): Disons que, une action planifiée, je ne suis pas en mesure de le dire. C'est aux gens du milieux, aux agents et courtiers, qui probablement connaissent mieux le réseau, de répondre. Le problème que, nous, on voit, c'est que ce n'est pas de diminuer le nombre d'intervenants de réseaux de distribution, il faut les multiplier. Mais là l'opération qui est en cours, des cabinets qu'on va créer, que ce soit Desjardins ou des banques, ils vont racheter plein de bureaux d'assurance existants, on va diminuer la concurrence.

Il y a une autre dimension incidente de ça, c'est que, quand les agents et courtiers ont voulu se créer une caisse d'économie, il y a quelques années, il faut savoir que c'est Béland et compagnie qui ont le droit de vie ou de mort sur la création de caisses d'économie puis de caisses d'épargne au Québec, il n'y a pas de droit à la concurrence, on leur a refusé. Pourquoi ces agents et courtiers-là? C'est qu'ils voulaient devenir indépendants des institutions qui les finançaient. Parce que vous comprenez que, si un agent et un courtier vont dans une banque ou dans une caisse, la caisse, qui vend de l'assurance... Ça va être encore pire dans une structure de cabinet où Desjardins et les banques vont vendre. C'est que les banques, les caisses vont avoir toute l'information sur les opérations des agents et des courtiers. On leur a refusé ça. Ce n'est pas de la concurrence qu'on permet, on ferme la porte.

Le problème des agents et des courtiers... C'est des intervenants dont on n'a pas démontré qu'ils ne faisaient pas bien leur travail. Il n'y a pas d'étude qu'on... Moi, dans ma logique d'économiste, je ne peux pas voir pourquoi on ne met pas sur la table des documents, on ne va pas jusqu'au bout de l'analyse de tout ce qui est de l'environnement et de la distribution des produits et services financiers. Je sais bien que M. Landry a d'énormes pressions du Mouvement Desjardins pour passer au plus vite son projet de loi, mais je ne suis pas sûr que c'est dans l'intérêt public d'accélérer les choses, mais de prendre le temps de fouiller tous les aspects, de ce côté-là.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Ça va, M. le député de Viger? Mme la députée de Saint-François, rapidement. Excusez! M. le ministre.

M. Landry (Verchères): On a des pressions énormes de bien d'autres endroits aussi. Vous n'avez pas assisté à tous les travaux de la commission? Le Conseil des assurances, qui est encore présent dans cette salle, a un très grand intérêt à ce que le statu quo change et à ce que nos lois soient modernisées. Et notre Assemblée nationale travaille pour l'ensemble du Québec, elle ne travaille pas pour un groupe plutôt que pour l'autre, elle travaille pour le bien commun; c'est pour ça qu'on est élus, c'est pour ça que les parlementaires, ici, se consacrent à ces auditions. Alors, des pressions, oui, il en vient de partout. Le phénomène des lobbys, c'est un phénomène caractéristique des sociétés avancées, c'est un signe de démocratie. Nul ne peut s'en plaindre tant que certaines bornes ne sont pas dépassées.

M. Desrosiers (Jean-Yves): Est-ce que je pourrais me permettre un dernier point, un point fondamental pour nous que je n'ai pas amené? C'est qu'il n'existe aucun mécanisme... Dans l'article 85, c'est les cabinets qui vont recevoir les plaintes et les traiter. Il n'y a aucun mécanisme pour protéger les consommateurs, un organisme indépendant de médiation qui pourrait traiter n'importe quel type de cas d'assurance indépendant. C'est un point. Pour nous, c'est le point fondamental. Et l'article 85 va donner aux cabinets cette responsabilité-là. C'est tout à fait inconcevable. Et ce n'est pas plus le Bureau des services financiers qui peut jouer ce rôle-là. Ça prend un organisme de médiation qui va s'occuper d'entendre de façon indépendante et neutre, sans frais pour les victimes, les dossiers et prendre des positions, avec des experts, un véritable service de médiation, peut-être relevant de l'Assemblée nationale, comme le Protecteur du citoyen, je ne sais pas. Mais c'est un élément fondamental.

M. Landry (Verchères): Là, je pense qu'il y a des questions d'interprétation qui se posent. Il faudrait peut-être avoir une séance d'information.

L'article 156: «Le Bureau reçoit les plaintes formulées contre les titulaires de certificat, les cabinets ainsi que les représentants et les sociétés autonomes – un guichet unique: "le Bureau reçoit les plaintes".

«Il peut aussi agir à titre de centre de renseignements et de référence dans le domaine de l'assurance.»

Le nouvel organisme unique que tout le monde réclamait et que, par divers dialogues, on a divisé en chambres, «le Bureau reçoit les plaintes», article 156.

M. Desrosiers (Jean-Yves): Oui, mais là les plaintes vis-à-vis des agents et des courtiers, c'est une chose, mais les problèmes des consommateurs, il faut qu'ils soient traités dans un organisme. On ne sait même pas, dans le Bureau des services financiers, quels groupes de consommateurs – s'il va y en avoir – vont être là. Mais, le traitement des plaintes suppose un travail spécialisé.

M. Landry (Verchères): C'est un autre problème, là. Mais le Bureau reçoit les plaintes. Sur la composition du Bureau, on a eu d'excellentes suggestions aussi. Le Bureau, il sera composé d'un certain nombre d'individus qui peuvent parfaitement être balisés et refléter le consensus de la société québécoise, par conséquent, les consommateurs et les consommatrices. En d'autres termes, peut-être qu'une lecture un peu plus approfondie et un peu plus positive vous ferait trouver quelques vertus à ce projet de loi. On se bat contre le statu quo, vous le voyez bien. Vous venez de nous raconter une série d'horreurs qui tiennent de nos lois actuelles. Tout ce que vous avez raconté aujourd'hui, c'est avant cette loi, c'est sous l'empire des anciennes lois. Alors, vous êtes les meilleurs avocats pour nous démontrer qu'on doit se débarrasser du statu quo.

M. Desrosiers (Jean-Yves): Mais, je prends note que vous nous proposez des rencontres techniques ou autres. Ça nous fera plaisir.

M. Landry (Verchères): Parfaitement. Offre acceptée.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Mme la députée de Saint-François.

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Président. Moi, je voudrais départager deux dossiers. Je pense que la raison pour laquelle on est ici aujourd'hui, c'est pour étudier le projet de loi n° 188 dans le but soit de l'améliorer ou tout simplement si le gouvernement décide de le retirer. Et c'est la raison pour laquelle on entend les différents groupes, et vous, entre autres. Cependant, j'ai comme l'impression que...

Il y a un autre dossier aussi, qui est celui de vos revendications. Et on fait un peu le procès, finalement, de Desjardins, et je vous comprends. Je vous comprends parce que je suis sensible à ce que vous vivez. Vous vivez certains drames, chaque cas est un cas d'espèce, et c'est difficile à vivre, je pense. Et puis, finalement, vous avez l'impression qu'on ne se préoccupe pas de vous ou très peu. Donc, je pense qu'à ce niveau-là Desjardins devra être un peu sensible pour au moins régulariser la situation et essayer de régler les divers problèmes qui existent actuellement. Et, entre autres, je pense qu'il va falloir peut-être sensibiliser davantage les membres, puisqu'on est tous membres et qu'on a tous un mot à dire. Et je pense, qu'à ce moment-là c'est davantage au niveau des membres que vous allez régler vos différents problèmes que peut-être à cette commission parlementaire. Mais je suis très sensible, cependant, à ce que vous vivez, et ce n'est pas facile.

Par contre, je voudrais revenir sur certains points. Vous savez, on fait affaire avec la caisse populaire ou avec d'autres institutions, on est libre, on a le choix. Moi, je fais affaire avec deux banques et la caisse de ma municipalité parce que je n'ai pas l'intention de mettre mes oeufs dans le même panier. Et je décide de faire des dépôts là où je veux et de faire affaire avec une ou l'autre, dépendamment des services qu'on m'offre, tout simplement. Je me souviens, même, quand j'exerçais le notariat, mon compte en fidéicommis était dans la petite caisse populaire de ma municipalité, et j'en était quand même fière parce que c'est aussi, je pense, un fleuron québécois.

Alors donc c'est dommage qu'on puisse retrouver des dossiers comme les vôtres, qui ne sont pas réglés parce que, finalement, ça jette du discrédit sur Desjardins. Parce que, lorsqu'on parle de décloisonnement, ce n'est pas uniquement Desjardins. Lorsqu'on décloisonne, il faut bien se mettre en tête que c'est l'ensemble des institutions, c'est les banques, c'est même les personnes morales, à un moment donné, qui vont pouvoir également faire de l'assurance, ce n'est pas seulement Desjardins, en vertu de l'article 60. Quand on regarde comme il faut, une personne morale, ça peut être aussi bien Wal-Mart, ça peut être aussi bien n'importe quelle compagnie financière, en autant, bien sûr, qu'on crée un cabinet et qu'on est prêt à se conformer pour donner les services.

Tout à l'heure, vous avez parlé, justement, des employés de la caisse. Vous aviez beaucoup de craintes parce qu'ils ne sont pas nécessairement imputables comme un courtier l'est. Cependant, en vertu du projet de loi, justement, c'est qu'on en arrivait à rendre imputable chaque vendeur ou vendeuse d'assurances. À ce moment-là, je pense qu'on pourrait peut-être enrayer cette difficulté.

(15 h 10)

Je pense que la grande question qu'il faut se poser – parce qu'il ne faut pas, je pense, pointer uniquement Desjardins, mais l'ensemble des autres institutions bancaires, ou de dépôts, ou financières, ou quoi que ce soit – c'est: Est-ce qu'on veut décloisonner, oui ou non? Et, si on veut le faire, quels sont les moyens ou les mécanismes qu'on prend pour encadrer et former et aussi respecter toutes les données confidentielles? Alors, je pense que c'est ça, finalement, qu'on doit faire. Et là le point c'est: Est-ce qu'on décloisonne, oui ou non? Je sens que vous avez quand même une certaine réticence, mais ce n'est pas uniquement en fonction de Desjardins, je veux bien comprendre que c'est aussi en fonction de l'ensemble des institutions.

M. Desrosiers (Jean-Yves): Le décloisonnement, sur le plan du principe, ça, on ne peut pas dire non. C'est sur les modalités, sur les façons de faire. Et, dans le projet de loi n° 188, on n'a pas, à notre point de vue, les dispositions pour protéger le consommateur. Le décloisonnement, ce qui va arriver, c'est que le ministre des Finances va permettre que les banques obtiennent du gouvernement fédéral un droit d'entrée et d'élargir, et surtout, ce qui est pour moi extrêmement important... Et votre ami Michaud, à l'émission d'Anne-Marie Dussault, dimanche soir, a dit... Mme Dussault disait: Il ne faut pas permettre aux banques étrangères d'entrer ici. Il a dit: C'est parfait, plus il va y en avoir, mieux ça va être. Mais le problème, c'est que le Mouvement Desjardins ne tient pas tellement à avoir cette concurrence-là. Mais c'était intéressant, ce que M. Michaud disait. Il disait: Ça va être une bonne chose parce que les frais de services, les profits, tout ça va s'ajuster, les services vont s'améliorer.

Vous parliez, tout à l'heure, d'aller au niveau des caisses. Nous, ce qu'on découvre, le problème de Desjardins, c'est qu'ils refusent de reconnaître qu'il y a des problèmes, ils refusent constamment. Les documents principes directeurs qui circulent actuellement, on dit: Ah! il faut respecter les principes humains, puis tout ça – il y a cinq principes directeurs – mais, quand on va sur le terrain, ils font exactement le contraire. Il y a un problème de moralité. Et, nous, on se fait dire par des gens de conseils de surveillance...

Parce que l'intéressant, c'est qu'on a des présidents actifs de caisses qui nous renseignent, qui nous parlent des problèmes à l'interne. Il y a eu des réunions dans la région, hier soir, puis il y a des dirigeants de la Fédération de Québec qui se sont fait parler dans le nez royalement. Mais c'est que, quand des victimes vont rencontrer un conseil de surveillance pour qu'on les aide à envoyer des lettres, le conseil de surveillance dit: Ce n'est pas mon problème.

À Amqui, il y a un dirigeant du conseil de surveillance de caisses qui a dit: Moi, je suis là, on m'a nommé là, mais ce n'est pas ma responsabilité, c'est dans la loi. Et on le voit partout. Le problème que Serge soulève et qu'il vit, c'est qu'il dit: Si les sociétaires se mettaient à poser les vraies questions, puis si on les invitaient vraiment dans les assemblées générales... Parce qu'ils l'apprennent souvent par accident, parce qu'ils vont au guichet automatique. Puis on les pousse à aller dans les guichets automatiques, on dépersonnalise. Ça fait que le monde s'est dit: Pourquoi on irait là? D'abord, ils sortent de Desjardins. Ils gardent des comptes inactifs, ils gardent des parts sociales, de plus en plus. L'arrivée du décloisonnement, il va y avoir du bien.

Moi, j'espère qu'en Gaspésie les Gaspésiens vont cesser d'être arnaqués par les caisses populaires, parce que ce sont les seuls... On a des beaux cas, actuellement, de ce côté-là. C'est que, quand les gens vont avoir d'autres institutions, tant mieux. Mais Desjardins ne résistera pas à la concurrence. Parce qu'il s'agit de rentrer dans une banque, comparé à une caisse, puis de voir qu'on tombe entre le jour et la nuit, puis pas à peu près. Je suis membre d'une banque depuis 36 ans maintenant, mon père, 50 ans, puis il a fait des affaires, et je me suis retrouvé dans une caisse par accident, et je me suis fait arnaquer par un directeur de caisse et son associé sur un condo, puis je me suis dit... C'est là que ça a commencé. Je remercie Béland et compagnie d'avoir protégé ce directeur de caisse là, depuis. Mais ça a permis que je mette du travail pour dire: Si, moi, j'ai eu ce petit problème-là, qu'est-ce qui arrive aux autres?

Il faut que le monde devienne responsable. Le Québec est une société où l'État règle les problèmes pour les autres. Si le monde, dans le milieu, dans les institutions, que ce soit les assemblées de caisses ou autres, ne s'occupent plus de leurs choses parce qu'ils disent: Qu'est-ce que ça donne? on a un problème de société très important. Et, peut-être que, si les gens se mettaient à participer puis à sortir, plein d'individus qui sont dans les caisses...

Je m'excuse, je sais que vous êtes notaire, mais il y a plein de notaires qui contrôlent des caisses dans la province, et on en a fait sortir. On a fait mettre dehors, fait congédier, même, de la Chambre des notaires, le président qui, lui, a fait le coup, le notaire Parker. Il est ruiné, il est en faillite. Mais il y en a d'autres qui s'en viennent. C'est qu'il y a un problème de conflit d'intérêts. M. Gary Caldwell, un sociologue, a soulevé le problème depuis très longtemps. Je m'excuse, M. le Président.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): ...parce que la personne à la console ne me voit pas, c'est pour ça que mon micro n'était pas ouvert. Mais c'est parce qu'on a dépassé le temps. Et je sens que vous êtes parti sur une envolée...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Desrosiers (Jean-Yves): Ah, mais...

Le Président (M. Baril, Arthabaska): ...que je ne conteste pas, remarquez bien. C'est votre droit de vous exprimer, vous êtes venu ici pour ça.

M. Desrosiers (Jean-Yves): On a une quantité de documentation incroyable.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Ah! ça, je ne doute pas de vos capacités pour nous fournir des documents, M. Desrosiers. Mais, sur ce, je vous remercie, vous et vos compagnons, d'être venus nous faire part de vos témoignages, de votre appréciation du projet de loi n° 188.

Et j'invite, par le fait même, les représentants de l'Institut québécois de planification financière à prendre place. Je suspends pour deux minutes.

(Suspension de la séance à 15 h 15)

(Reprise à 15 h 21)


Documents déposés

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Maintenant, Mmes, MM. les membres de la commission, nous allons essayer d'accélérer un peu parce qu'on prend du retard. Avant de saluer nos invités, le Regroupement des victimes de Desjardins dépose un document qui doit être distribué à chaque parlementaire, qui est complémentaire à sa présentation.

Sur ça, j'invite Mme Anne-Marie Girard-Plouffe, présidente de l'Institut québécois de planification financière, à nous présenter les personnes qui l'accompagnent. Je vous souhaite la bienvenue.


Institut québécois de planification financière (IQPF)

Mme Girard-Plouffe (Anne-Marie): Bonjour, M. le Président. À ma gauche, Réjean Ross, premier vice-président, Me Pierre C. Lemoine, avocat-conseil et M. Denis Boucher, second vice-président.

L'Institut québécois de planification financière se présente aujourd'hui devant les membres de cette commission parlementaire avec beaucoup de confiance. Cette confiance découle du fait que nous croyons qu'à l'écoute et à la lecture de ce mémoire les membres de cette commission accueilleront favorablement la proposition de l'Institut, évitant ainsi de faire table rase de tout ce que l'IQPF et ses membres ont accompli depuis six ans.

Rappelons-nous, en effet, que l'Institut, organisme agréé par le ministre des Finances en 1989 pour délivrer les diplômes de planificateur financier, a, depuis ce temps, encadré la formation et remis des diplômes à plus de 3 000 personnes, sans compter les quelque 4 000 étudiants présentement inscrits dans les divers programmes de niveau universitaire dispensés par ses partenaires. C'est à l'IQPF qu'a été confié le mandat de mesurer le degré de compétence en planification financière des étudiants graduant des institutions d'enseignement. À cet effet, l'examen unique conçu et administré par l'Institut est au planificateur financier ce que l'examen du Barreau est aux avocats.

Il va sans dire que l'IQPF est le catalyseur essentiel dans la structure actuelle et à venir. Au Québec, le planificateur financier est devenu bien davantage que la simple traduction du «financial planner», distributeur de produits, au sens où les anglophones l'entendent. Nos diplômés effectuent une démarche complète touchant les sept domaines d'intervention financière. Aucun autre organisme n'est en mesure de se substituer au rôle de l'IQPF pour assurer l'uniformité et le haut niveau de formation des professionnels en planification financière, indépendamment de leur champ d'activité d'origine.

En effet, son statut singulier dans l'univers de la planification financière confère à l'IQPF une vue d'ensemble incontournable et nous autorise à affirmer sans ambages que l'industrie de la planification financière au Québec jouit d'une avance considérable et distincte, en termes de rigueur, de qualité de conseil et de stabilité, tant au Canada que dans l'ensemble des pays industrialisés. Cette avance est confirmée par une étude commandée par l'Institut, qui compare les qualifications et l'environnement de pratique des planificateurs financiers au Québec, au Canada et dans certains pays comparables du G-7. Il en ressort les faits suivants.

Le rôle de formation des membres ainsi que celui de la protection des intérêts du consommateur québécois sont nettement privilégiés par l'IQPF, comparativement aux autres organismes de régie professionnelle. L'IQPF est le seul organisme de régie professionnelle à exiger une formation de niveau universitaire de ses membres et à avoir développé pour ce faire un corpus de 450 heures, en plus d'un cours synthèse et d'un programme de formation continue. L'Institut est le seul organisme de régie professionnelle qui n'entretient pas de liens commerciaux avec ses membres. Cette attitude neutre et objective, qui embrasse tous les facteurs de la planification financière dans une perspective de protection du public, rejoint les préoccupations des deux paliers de gouvernement, tel que démontré dans le rapport Baillie et le mémoire de l'OPQ.

La planification financière, telle que pratiquée au Québec, se positionne de toute évidence à l'avant du peloton mondial. Vous n'avez certainement pas l'intention de mettre en péril notre spécificité québécoise. Cela nous semblait d'autant plus apparent que, dans son rapport quinquennal du mois de juin 1996 sur la mise en oeuvre de la Loi sur les intermédiaires de marché, le ministre des Finances affirmait fièrement que l'IQPF a, depuis 1989, abattu un travail important, comme tous les autres organismes. Le nombre de planificateurs financiers diplômés au Québec en témoigne de façon éloquente. Le modèle québécois semble d'ailleurs inspirer d'autres provinces.

Vint ensuite l'énoncé de politique publié en octobre 1996, par lequel le ministre annonçait son intention de créer un bureau de distribution des produits et services financiers qui regrouperait tous les intermédiaires impliqués dans la vente de produits et services. Nous avons été renversés de constater qu'au terme de cet énoncé de politique l'IQPF ferait partie sans distinction de ce Bureau, dont la vocation première serait d'abord et avant tout la réglementation des intermédiaires et non la formation et le perfectionnement des planificateurs financiers.

S'ensuivirent alors de nombreuses représentations de notre part auprès des principaux intervenants dans ce dossier. Malgré ces représentations, l'orientation première de l'énoncé de politique fut maintenue. Le projet de loi n° 188 va même un peu plus loin que l'intention originale du législateur en faisant abstraction de l'IQPF et en mentionnant peu la pratique de la planification financière. Nous croyons cela néfaste pour la planification financière et pour les intérêts des Québécois. Voici pourquoi.

De prime abord, il importe de bien établir la position de l'IQPF face à la réforme en cours, qui témoigne de la sagesse et de la prévoyance du législateur. En effet, l'industrie des produits et services financiers est en effervescence constante. Règles, produits et stratégies changent à une allure qui dépasse souvent la capacité de l'appareil législatif de suivre et de se tenir à jour. La récente annonce de fusion entre les banques de Montréal et Royale est un cas type on ne peut plus éloquent, à ce chapitre.

Nous n'avons rien contre la création d'un organisme de régie unique. Au contraire, il s'agit là, selon nous, d'une démarche positive qui donnera au gouvernement les outils nécessaires pour veiller à la qualité des produits et à la probité des professionnels qui oeuvrent dans les divers champs d'activité. D'avril 1996 à avril 1997, le membership de l'IQPF a bondi de 60 % et, au rythme actuel, il pourrait bien doubler, d'ici deux ans. Il serait normal qu'une législation appelée à suivre et à régir l'évolution d'un secteur aussi dynamique prévoie la montée de cette discipline et lui fasse une place en conséquence. Or, le projet de loi n° 188 laisse peu de place à la planification financière comme discipline et occulte complètement l'Institut à titre d'organisme de formation et d'administration du diplôme, les deux gages de la protection des intérêts du consommateur. Il s'agit d'une omission qui pourrait avoir de graves conséquences.

La planification financière est un acte défini et encadré par l'Institut et appliqué de façon homogène par tous les planificateurs financiers reconnus sur le territoire du Québec. En l'absence d'un organisme de régie comme l'IQPF, on peut prévoir un morcellement de la définition et de l'application de l'acte de planification financière. En effet, les différents groupes de contrôle et les ordres professionnels auraient le loisir de s'en remettre à leurs statuts et règlements pour régir et bonifier les pratiques professionnelles de leurs membres. Un tel éclatement de l'acte de planification serait une atteinte sérieuse à la qualité des services dispensés aux consommateurs, qui ne jouiraient plus d'une référence unique pour jauger le travail de leurs conseillers.

(15 h 30)

Actuellement, l'Institut est l'organisme de contrôle pour la remise des diplômes et la gestion du titre de planificateur financier. Seuls les détenteurs de ce diplôme peuvent s'afficher comme planificateurs financiers au Québec, ce qui n'est pas le cas ailleurs au Canada et dans les pays industrialisés. Tel que rédigé présentement, le projet de loi ouvre la porte à une multiplication des titres. Ainsi, on pourrait voir apparaître jusqu'à 14 titres différents, certains sanctionnés par des organismes qui appliquent à l'extérieur du Québec des standards moins rigoureux que ceux utilisés actuellement.

La force de l'IQPF réside en sa capacité de centraliser les besoins en formation pour tous les intervenants en planification financière, quelles que soient leurs origines professionnelles. Le projet de loi ne prévoit pas de structures pour accueillir le système actuel de formation développé par l'Institut et s'en remet plutôt aux organismes de régie pour voir à la formation de leurs praticiens. Il en résultera un affaiblissement généralisé des connaissances à moyen terme et un retour au capharnaüm d'approches, d'actes et de théories qui avaient cours avant l'instauration d'une formation pluridisciplinaire uniforme.

Notre suivi du dossier de la réforme de la Loi sur les intermédiaires de marché nous a permis de constater l'étendue et la profondeur de l'action envisagée par le ministre. Nous proposons des modifications simples et harmonieuses qui permettent au gouvernement d'atteindre ses objectifs tout en préservant le leadership mondial dont le Québec s'est doté en planification financière.

L'Institut québécois de planification financière est avant tout un organisme de formation mandaté par le gouvernement. Le programme de base élaboré par l'IQPF inspire les corpus de plusieurs institutions d'enseignement supérieur. L'Institut poursuit aussi le développement d'alliances académiques, ce qui lui permet de centraliser les critères de sélection et les programmes d'enseignement afin de renforcer les normes de pratique.

Nous croyons que ces rôles d'organisme de référence en formation et d'interlocuteur des institutions d'enseignement sont vitaux pour le maintien des hauts standards que le Québec s'est donnés dans l'enseignement et la pratique de la planification financière. C'est pourquoi nous proposons que l'Institut soit inscrit et reconnu dans les dispositions générales de la loi.

L'Institut reconnaît certes la volonté du législateur d'accorder le droit au Bureau qu'il crée d'agir comme guichet unique pour déterminer par règlement la formation et les conditions requises pour la délivrance de certificats à ceux qui se qualifient pour agir comme représentants en assurance de personnes, agents ou courtiers en assurance de dommages, experts en sinistre, planificateurs financiers, représentants en épargne collective, en fonds d'investissement et en plans et bourses d'études.

Mais faut-il pour autant abolir le programme de cours élaboré par l'IQPF, lequel a été approuvé par règlement et a comme mérite d'exister et de bien fonctionner? Faut-il, de plus, enlever à l'IQPF son droit d'accorder un diplôme de planificateur financier? Nous ne croyons pas qu'il s'agisse d'avenues à retenir.

Dans une perspective de réconciliation simple et volontaire du rôle de formation et d'agrément de l'IQPF avec le nouveau rôle du Bureau, l'Institut propose que, si, à l'avenir, nul ne peut utiliser le titre de planificateur financier à moins d'être titulaire d'un certificat délivré à cette fin par le Bureau, nul ne puisse obtenir un certificat du Bureau l'autorisant à agir comme planificateur financier à moins de posséder un diplôme délivré par l'IQPF.

Cet énoncé aurait le mérite de reconduire le rôle actuel de l'IQPF au chapitre de la formation de base et de la délivrance d'un diplôme unique. À cette fin, l'Institut verrait à établir, comme il le fait présentement, par règlement les conditions relatives à la délivrance du diplôme de planificateur financier, alors que le Bureau établirait par règlement les conditions relatives à la délivrance du certificat de planificateur financier. Les amendements mineurs requis pour confirmer ce rôle de l'IQPF seraient largement compensés par le bénéfice d'une formation spécialisée et adaptée aux besoins du milieu. De plus, nous croyons que l'Institut devrait poursuivre son oeuvre dans le domaine de la formation continue et être autorisé à dispenser des cours de formation permanente dans la discipline de la planification financière.

Il s'agit d'une simple question de logique. Tout comme la médecine et l'informatique, la planification financière est un domaine en constante progression, et il est essentiel que les planificateurs financiers aient accès, dans une forme qui leur soit connue et familière, aux informations de pointe dans leur domaine. Nous ne voyons aucun conflit dans cette proposition. Au contraire, nous croyons qu'il s'agit là d'une complémentarité dont bénéficieraient tant le législateur que les intervenants en planification financière. Nous croyons que les planificateurs financiers doivent participer davantage à l'administration et à la planification de leur milieu.

Le projet de loi n° 188 prévoit la création de deux chambres dont celle de la sécurité financière, qui voit sa composition déterminée par l'article 293. Nous constatons ici la création d'une structure complexe, alors que le législateur semblait vouloir rechercher la simplification. Toutefois, l'IQPF est d'avis que, si les deux chambres doivent être conservées, les planificateurs financiers ne sont pas suffisamment représentés à l'intérieur de leur chambre.

L'IQPF sollicite donc la participation de deux de ses membres à la Chambre de la sécurité financière, dont un agira à titre de vice-président de la planification financière aux côtés du vice-président aux assurances et du vice-président aux valeurs mobilières. Le vice-président choisi parmi les planificateurs financiers serait également appelé à siéger au conseil d'administration du Bureau. Ces modifications structurelles permettent de donner une meilleure voix aux planificateurs financiers et assure au Bureau une vue d'ensemble plus articulée du domaine financier.

L'IQPF prend bien acte du fait que la nature modifiée de son statut lui impose de rechercher un nouveau mode de financement. Dans cette optique, nous entendons à brève échéance suggérer l'abolition de la cotisation auprès de nos membres et poursuivre avec une formule de financement qui permettra à l'Institut d'assurer sa pérennité de façon responsable.

Dans l'intérêt d'un changement de régime ordonné, l'IQPF propose que les règlements actuels sur les conditions pour l'obtention d'un diplôme de planificateur financier demeurent en vigueur jusqu'à la promulgation des règlements adoptés en vertu du projet de loi n° 188.

La planification financière, en conclusion, est devenue officiellement une discipline à part entière depuis 1989. Le secteur de la planification financière, au Québec, s'est taillé une réputation de probité, de stabilité et de qualité qui fait l'envie des pays industrialisés. Les planificateurs financiers québécois ont raison d'être fiers du travail accompli, l'Institut québécois de planification financière aussi. Les critères de formation, les normes de pratique et l'acte de planification financière sont tous des éléments qui ont contribué directement à l'évolution de la discipline et à l'avance que le Québec possède dans ce secteur névralgique de l'industrie.

Les propositions soumises aujourd'hui à cette commission permettent de maintenir les acquis en planification financière tout en garantissant que cette discipline évoluera de façon saine, structurée et proactive dans les années à venir. Qui plus est, nous sommes persuadés que le législateur ne souhaite pas diluer l'expertise et freiner l'avance que le Québec s'est donnée à l'échelle internationale. Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, Mme Girard-Plouffe, de votre présentation. Et je laisse la parole au ministre des Finances pour ses commentaires et ses questions.

M. Landry (Verchères): Mme Girard-Plouffe, votre mémoire, d'abord, était extrêmement impressionnant; nous l'avons analysé à fond. Certaines pièces se sont ajoutées au dossier avant que vous nous fassiez cet exposé oral, en particulier une lettre que nous avons reçue hier de l'Université Laval, Direction générale de la formation continue, de M. Bonneau, qui est le directeur général adjoint et le directeur du programme Charles-Pelletier, qui est extrêmement élogieuse, qui confirme en tous points ce que vous dites, qui ajoute des statistiques extrêmement pertinentes, qui parle de chaire d'enseignement de recherche et de planification financière qui sera bientôt créée avec votre collaboration.

De votre présentation, je pense que toutes les personnes présentes dans cette salle s'en sont rendu compte, découle une recherche sincère de l'intérêt public et de l'intérêt du Québec et de notre communauté de la distribution des produits financiers. C'est la raison pour laquelle je suis convaincu – et je vais faire partager, j'imagine, sans difficulté cette opinion à mes collègues de la majorité ministérielle et à ceux de l'opposition officielle, je l'espère aussi – qu'une des phrases clés de votre mémoire devrait aller presque sans changement dans notre loi. Et la phrase, c'est la suivante: «Que nul ne puisse obtenir un certificat du Bureau l'autorisant à agir comme planificateur financier à moins de posséder un diplôme délivré par l'IQPF.» Dans ces conditions, je crois que l'essentiel de ce que vous avez souhaité dans votre mémoire et dans votre intervention sera préservé et que vous pourrez continuer à rendre les services signalés que vous rendez à notre collectivité.

(15 h 40)

Cela dit, je voudrais faire quelques commentaires supplémentaires sur une opinion que vous émettez sur le Bureau. D'abord, vous êtes d'accord avec l'organisme unique, et je crois que vous ne seriez pas particulièrement malheureux si le compromis que j'ai proposé, des deux chambres, était aussi accepté. Ce n'est pas une tragédie pour vous? Enfin, je ne veux pas vous mettre de mots dans la bouche, là. Mais vous savez pourquoi on est passé d'un organisme unique, pur et simple, le Bureau, à deux chambres? C'est parce que nos interlocuteurs du monde de l'assurance nous ont persuadés que les traditions électives qu'ils avaient, que l'animation de leurs associations, etc. pourraient se retrouver dans le nouveau projet de loi. C'est pour ça qu'on a créé les chambres. Vous exprimez certaines réticences sans les rejeter complètement. Alors, j'aimerais avoir votre opinion là-dessus.

Vous dites aussi, dans votre mémoire, que le Bureau est composé de 12 membres dont six nommés par le ministre, y compris le président et le vice-président, et six désignés par les chambres. Quelle serait votre opinion en ce qui concerne la présence de représentants du public, donc la population en général non spécialisée, qui ne vient pas du monde de l'assurance? Comment la population devrait-elle être représentée au Bureau?

Mme Girard-Plouffe (Anne-Marie): Pour répondre d'abord à votre première question en ce qui a trait aux deux chambres, nous précisons d'ailleurs que, dans l'éventualité où ces deux chambres demeurent, ce que nous reprochons à la structure proposée, c'est l'absence, le manque de représentativité des planificateurs financiers. Le seul vice-président qui serait élu au niveau de la planification financière ne serait pas appelé à siéger au Bureau. Et nous trouvons que, à ce moment-là, c'est peu représentatif, puisque les planificateurs financiers, comme vous avez pu le constater, sont de plus en plus nombreux, et il s'agit d'une discipline en soi.

Alors, en ce qui concerne les deux chambres, oui, d'accord, mais c'est important pour nous que nous ayons au moins deux personnes qui représenteraient les planificateurs financiers et, par conséquent, qu'un planificateur financier soit aussi membre du Bureau.

Pour répondre à votre deuxième question, concernant la composition du Bureau, nous ne voyons pas de problème à la présence de consommateurs autour de la table, qui composeraient le Bureau. Je ne pense pas que, ça... On n'a jamais eu de problème avec ça. Comme je vous expliquais tout à l'heure, pour nous, ce qui est vraiment impératif, c'est qu'un planificateur financier soit présent aussi autour de la table, au Bureau.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Ça complète, M. le ministre, vos interrogations?

M. Landry (Verchères): Oui.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Viger.

M. Maciocia: Merci, M. le Président. Merci, Mme Girard-Plouffe, de votre mémoire. Je pense qu'on a eu déjà l'occasion de se rencontrer, même en 1996, quand vous êtes venue devant cette commission. Vraiment, votre document est très, très, je peux dire, rafraîchissant, parce qu'il y a des mots là-dedans qui, nous croyons, doivent absolument être pris en considération. Puis l'opinion du ministre sur la phrase qu'il a mentionnée tout à l'heure, je pense que, de notre côté, il n'y a aucun, aucun problème parce que nous pensons que l'IQPF...

Et c'est ça que je voudrais vous demander, Mme Girard-Plouffe. Vous êtes un organisme qui fonctionne très bien, actuellement. Vous l'avez dit vous-même, vous l'avez répété, puis les informations qu'on a, c'est exactement dans ce sens-là. D'après vous, pourquoi, actuellement, le projet de loi n° 188, il essaie de vous faire disparaître? Parce que, en réalité, c'est ça. S'il est retenu tel qu'il est là, vous êtes portés à disparaître. Et pourtant vous êtes un organisme qui fonctionne très bien, et, même, vis-à-vis du public, vis-à-vis du consommateur, il n'y a jamais eu de problème vis-à-vis des membres de l'IQPF. Est-ce que vous vous êtes posé la question pourquoi on veut vous faire disparaître?

Mme Girard-Plouffe (Anne-Marie): Écoutez, on s'est posé la question: Pourquoi? Mais, ce sur quoi on s'est penché davantage, c'est: Comment faire pour ne pas disparaître? Et nous avons tout simplement pensé que, peut-être, il y avait eu quelque part – comment vous dirais-je – un oubli, une faille et que finalement c'était important que nous revendiquions, donc, le bien-fondé de l'IQPF. Et, si j'ose croire, nous avons été quand même entendus. Et, en ce qui nous concerne, le fait de pouvoir avoir la possibilité de remettre les diplômes de planificateur financier, de continuer à encadrer, à gérer la formation et le titre de planificateur financier auprès de toutes les personnes qui désirent s'adonner à la pratique de cette profession, pour l'Institut, c'est très heureux comme dénouement.

M. Maciocia: Mon autre...

M. Landry (Verchères): Pour le reste de la question, j'ai vérifié auprès de mes conseillers, c'est que nous présumions que, devant les mérites certains de vos travaux en matière de formation en particulier, le Bureau aurait eu recours à vos services. Et on se disait: Il va sans dire. Mais vous nous avez persuadés qu'il va mieux en le disant. Alors, on le dit.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Maciocia: Oui, M. le Président. Je continue, Mme Girard-Plouffe. À la page 7 de votre mémoire, vous nous dites, à un certain moment: «Le décloisonnement a provoqué un tel foisonnement d'approches, de produits et de combinaisons stratégiques que le consommateur éprouve de plus en plus de difficultés à s'y retrouver, d'où, entre autres, la demande grandissante pour la planification financière en tant que service professionnel.» Pourriez-vous un peu élaborer sur cet aspect spécifique de votre mémoire?

Mme Girard-Plouffe (Anne-Marie): Les consommateurs...

M. Maciocia: Parce que vous savez très bien – je m'excuse – que les institutions financières, elles disent le contraire. Elles disent que le consommateur est bien averti et qu'il n'a pas besoin de conseils, qu'il n'a pas besoin de gens qui puissent le conseiller, que ce soit sur la planification financière ou sur l'achat d'assurances et autres.

Mme Girard-Plouffe (Anne-Marie): Écoutez, les consommateurs, justement, aux prises avec ces multitudes de produits sont à la recherche définitivement d'une meilleure compréhension des implications de leurs décisions. Et la planification financière, telle que nous la pratiquons au Québec – soyons bien encore précis à ce niveau – fait appel, comme on vous le disait tout à l'heure, à des compétences bien spécifiques. Et, à l'Institut, nous avons développé ce profil de compétences où nos professionnels ont une approche globale de la situation d'une personne, ce qui, évidemment, aide énormément le consommateur qui se donne la peine de procéder à une planification financière de mieux comprendre les conséquences de ses gestes et les choix qu'il va effectuer concernant sa propre situation financière.

M. Maciocia: Oui, M. le Président, je peux aller très vite. Une grande partie des planificateurs financiers vendent aussi de l'assurance de personnes. Beaucoup de planificateurs financiers vendent aussi de l'assurance-vie et de l'assurance de personnes. D'après vous, qu'est-ce que vous pensez de la vente de ce produit-là sans intermédiaire? Vous savez que le projet de loi parle aussi de la vente de ces produits-là sans intermédiaire. Est-ce que vous êtes d'accord ou vous pensez que ça prendrait des permis restreints? Qu'est-ce que vous pensez de la vente des produits sans intermédiaire?

Mme Girard-Plouffe (Anne-Marie): Je dois vous répondre qu'on ne s'est pas vraiment penchés sur la question. Ce que, nous, on retient, c'est que nous avons des planificateurs financiers qui à la fois sont des distributeurs de produits financiers et qui sont aussi des professionnels, avocats, notaires, comptables agréés. Alors, nous, ce qui nous préoccupe, c'est que le travail en planification financière, que la démarche soit uniforme pour tous les intervenants pour qu'en bout de piste les recommandations, que ce soient de l'assurance, des placements, un testament ou un rapport d'impôt, puissent se faire dans la meilleure compréhension pour le consommateur.

M. Maciocia: La vente spécifique sans intermédiaire, est-ce que vous avez une opinion sur ça, madame?

Mme Girard-Plouffe (Anne-Marie): Écoutez, en tant que représentante de l'Institut québécois de planification financière, comme je vous dis, on ne s'est pas posé la question comme telle, nous, on s'est plutôt interrogés sur quel sera l'avenir de l'IQPF et de quelle manière on peut protéger le public, justement, en formant davantage, de façon uniforme et homogène, les planificateurs financiers.

(15 h 50)

M. Maciocia: Sur la question du Bureau, M. le Président, vous avez dit tout à l'heure que vous aimeriez avoir deux représentants au niveau de la chambre financière. Vous savez que le Bureau, tel que libellé dans le projet de loi, est composé de 15 personnes: 10 sont nommées par le ministre et cinq proviennent des élus qui proviennent des chambres. D'après vous, cette répartition, étant donné que vous en demandez aussi deux, vous en demandez une qui siège au Bureau, est-ce que c'est une répartition honnête, est-ce que c'est une répartition qu'on peut accepter ou, d'après vous, ça devrait être différent?

Mme Girard-Plouffe (Anne-Marie): Comme on en parle, d'ailleurs, nous avons parlé d'avoir un représentant au Bureau, ce qui fait, naturellement, grimper le chiffre à quatre plutôt que trois en ce qui concerne les représentants de la Chambre de la sécurité financière qui siègent avec les gens de la chambre des dommages. Alors, ce qui est important pour nous, comme je vous le disais tout à l'heure, c'est que les planificateurs financiers soient représentés au Bureau, et nous considérons que ça, c'est vraiment impératif.

M. Maciocia: Par conséquent, ou on doit diminuer d'un côté, ou on doit augmenter de l'autre, si je comprends bien.

Mme Girard-Plouffe (Anne-Marie): Il y a des aménagements qui doivent être faits, dans ce contexte-là, c'est évident, puisqu'on parle d'ajouter une personne, du moins du côté de la Chambre de la sécurité financière.

M. Maciocia: Dois-je comprendre – parce que j'ai entendu, tout à l'heure, le ministre – qu'on parlait de 6-6? Mais ça, les 12, c'est seulement pour les deux premières années, je pense, ce n'est pas pour la composition en permanence du Bureau des services financiers. Parce que le Bureau des services financiers est composé de 15 personnes.

Mme Girard-Plouffe (Anne-Marie): Oui. Nous avons émis cette opinion-là, nous avons dit qu'on voyait ça de cette manière parce qu'on n'était pas là pour régler...

M. Maciocia: Si je comprends bien, c'est ça, vous aimeriez que ça soit six élus et six nommés de la part du ministre.

Mme Girard-Plouffe (Anne-Marie): En principe, un nombre qui ressemblerait à ça au niveau des rapports entre les élus et les nommés.

M. Maciocia: Parfait. Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Crémazie.

M. Campeau: Oui, M. le Président. En dehors du projet de loi n° 188, j'aimerais peut-être éclaircir... ou que vous m'aidiez à comprendre encore mieux une autre fois. Quand on parle de planificateur financier, vous avancez que nul ne peut porter ce titre sans être reconnu par l'Institut. Ça, c'est un fait, planificateur financier?

Mme Girard-Plouffe (Anne-Marie): Absolument.

M. Campeau: Maintenant, quand on a un planificateur financier, d'où vient sa rémunération? Est-ce que ce sont des honoraires ou s'il fait une commission? Dans cette façon de rémunérer, il y a quelque chose qui chose qui choque, à un moment donné. On a l'impression que, s'il était vraiment un professionnel, il devrait être payé en honoraires, alors que la perception, c'est qu'il y en a qui sont payés à commission. Comment vous pouvez vivre avec ça?

Mme Girard-Plouffe (Anne-Marie): Si je peux me permettre d'abord une distinction entre les planificateurs financiers, d'une part, et l'IQPF. Quand je vous entretiens aujourd'hui, je vous parle de l'IQPF comme organisme de formation et de diplomation – si je peux me permettre l'expression – des planificateurs financiers. Il est certain que des planificateurs financiers, il y en a dans tous les domaines. Comme je vous disais tout à l'heure, il y a des professionnels qui chargent des honoraires, qui sont soit comptables, avocats, notaires et qui vont aussi instrumenter la planification financière, c'est-à-dire proposer des testaments, proposer des conventions, ils font aussi une forme d'instrumentation, et vous avez les professionnels qui, eux, sont des distributeurs de marchés, et vous avez d'autres professionnels qui vont travailler dans ces institutions financières. Alors, sous forme de salaire, ils peuvent être rémunérés. Ils peuvent être rémunérés sous forme de commission, d'honoraires, de façon mixte.

Ce qui est important, c'est que tous ces professionnels-là, diplômés de l'IQPF, aient une formation de base homogène et sachent les règles, dans ce sens que la transparence, la divulgation, c'est la base de toute transaction éventuelle qui pourrait se faire entre les professionnels et leurs consommateurs. Évidemment, quand vous me posez la question, nous, en tant qu'institut, notre rôle, c'est de former ces gens-là pour leur donner justement le professionnalisme requis pour être capables de servir leurs clients de la façon dont le client va le souhaiter, finalement. Il va aller voir le professionnel qui, au départ, correspond le plus à ses besoins.

M. Campeau: Mais vous ne pensez pas que ça n'aide pas votre organisation ou votre Institut, le fait que, les planificateurs financiers, on parle de commission. Si on a un courtier en valeurs mobilières puis il gère votre portefeuille, c'est plus payant, M. le Président, de faire rouler le portefeuille. Même si ce n'est pas le temps de vendre le Bell parce que... Mais, dès qu'il a monté un peu, le gars, l'intervenant dit: Je vais le faire vendre. Vous ne pensez pas que ça jette tout de suite un petit mal à l'aise...

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Malaise.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Campeau: Un petit malaise.

Mme Girard-Plouffe (Anne-Marie): Si je peux me permettre... Pardon! Je pensais que vous m'aviez posé une question.

M. Campeau: Je m'excuse, je n'avais pas fini. Un malaise sur la profession. C'est comme si vous disiez... En tout cas, je vous laisse, vous m'avez...

Mme Girard-Plouffe (Anne-Marie): Je suis désolée. Vous pouvez être courtier en valeurs mobilières et ne pas être planificateur financier, et vous pouvez être planificateur financier et ne pas nécessairement être un courtier en valeurs mobilières aussi. Un courtier en valeurs mobilières planificateur financier a une vue d'ensemble.

M. Campeau: Je vous arrête tout de suite, là. J'ai donné les courtiers en valeurs mobilières, c'est un exemple que j'ai donné.

Mme Girard-Plouffe (Anne-Marie): Je réponds avec votre exemple, pour vous donner un exemple, justement, qu'un planificateur financier courtier en valeurs mobilières... Vous parliez tout à l'heure de commission, qu'il serait tenté de faire de multiples transactions. Ce courtier-là, en principe, s'il est planificateur financier, il aura une connaissance des impacts fiscaux reliés à ces multiples transactions, il aura une vue d'ensemble et il sera davantage préoccupé des besoins généraux de son client. Enfin, on ose l'espérer. Mais, encore là, ce n'est pas quelque chose qui touche l'IQPF comme telle, puisqu'il s'agit d'une école, finalement, pour former les planificateurs financiers, pour leur donner des outils, des instruments pour mieux faire leur travail.

M. Campeau: Voyez-vous, vous nourrissez mon inquiétude, quand, dans votre vocabulaire, vous dites «on ose espérer». C'est en plein ça, on ose espérer qu'ils soient corrects, mais l'histoire de commission laisse un doute.

Mme Girard-Plouffe (Anne-marie): Auprès du courtier en valeurs mobilières, là...

M. Campeau: Auprès du planificateur financier. Le courtier, on s'y attend. Le planificateur financier, on a l'impression qu'on a des conseils.

Mme Girard-Plouffe (Anne-Marie): Mais, si vous allez voir un courtier, au départ, c'est parce que vous avez un besoin d'aller voir un courtier. Si, d'autant plus, il est planificateur financier, qu'il vous aide à faire votre planification financière, qu'il vous rend service, là, vos possibilités sont élargies.

M. Campeau: Je vous pose la question. Pour certaines personnes, est-ce qu'un planificateur financier ne devrait pas être courtier? Est-ce que l'un ne va pas avec l'autre? Un planificateur financier, est-ce qu'on pourrait dire qu'il ne devrait pas avoir le droit d'être courtier?

Mme Girard-Plouffe (Anne-Marie): Je ne crois pas. Je pense que c'est un plus pour un courtier d'être planificateur financier. Ça lui donne une formation...

M. Campeau: Oui, c'est un plus, c'est un plus. Mais il devrait se dire courtier.

Mme Girard-Plouffe (Anne-Marie): Tout à fait, il se dit courtier.

M. Campeau: O.K. Alors que le planificateur financier ne devrait pas se dire courtier.

Mme Girard-Plouffe (Anne-Marie): Le courtier est planificateur financier. C'est un plus. Comme vous avez un M.B.A. en plus de ce que vous faites au départ. Vous êtes d'abord courtier en valeurs mobilières et planificateur financier.

M. Campeau: Ça ne me convainc pas. Mais, en tout cas, ça va.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): En tout cas, on ne peut pas dire que Mme Plouffe n'a pas tenté de vous convaincre. S'il n'y a pas d'autres membres... Oui, Mme la députée de Saint-François.

Mme Gagnon-Tremblay: Oui, une question très courte. Vous avez souligné tout à l'heure le fait que vous étiez contre la multiplication des titres. Et on a eu l'occasion d'entendre des représentants, des consultants en avantages sociaux, du Québec, qui s'occupent davantage d'assurances et de rentes collectives et qui souhaitaient être reconnus comme dans une discipline au projet de loi, puisqu'on dit que le projet de loi, dans la distribution par un représentant de produits et services financiers, comprend certaines disciplines comme, par exemple, l'assurance de personnes, de dommages. On y ajoute même le courtage en plan de bourses d'études. Est-ce que vous avez certains inconvénients à ce qu'on inclue dans cette discipline les consultants en avantages sociaux?

Mme Girard-Plouffe (Anne-Marie): Quand on parlait, on faisait référence au titre en planification financière uniquement, à savoir que certains organismes pourraient donner un titre, planificateur financier x et l'autre y, essayer de faire comme une forme de distinction qui contribuerait davantage à embrouiller le consommateur.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Bien. On vous remercie, Mme Girard-Plouffe. On remercie également vos supporters.

Sur ce, je vais inviter les représentants de la Commission d'accès à l'information à prendre place. Et je suspends pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 16 heures)

(Reprise à 16 h 5)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Mesdames, messieurs, j'inviterais les membres à prendre place pour qu'on puisse continuer nos travaux et surtout ne pas prendre trop de retard parce que, tout à l'heure, mais qu'il arrive 18 heures, vous allez regarder votre montre. Donc, s'il vous plaît.

Je vais souhaiter la bienvenue aux représentants de la Commission d'accès à l'information. Et j'inviterais M. Paul-André Comeau, le président, à nous présenter les personnes qui l'accompagnent et à nous faire part de ses commentaires sur le projet de loi n° 188.


Commission d'accès à l'information (CAI)

M. Comeau (Paul-André): Je vous remercie, M. le Président. Alors, je suis accompagné, à ma droite, de Me André Ouimet, qui est secrétaire et directeur du service juridique de la Commission, et à ma gauche, de Me Simon Lapointe, qui est directeur intérimaire de l'analyse et de l'évaluation.

Alors, au nom de la Commission, je tiens à vous remercier de nous avoir invités non seulement à venir vous rencontrer, mais à nous pencher sur ce projet de loi qui, évidemment, comme à tout le monde, nous est apparu important, je vous l'avouerai, et complexe, mais aussi porteur de changements dans un univers lui aussi terriblement mutant et dans un domaine surtout qui touche une très grande partie de nos compatriotes. C'est donc un projet de loi d'intérêt immédiat.

À cet égard, ce n'est pas par humilité ni par fausse humilité, mais vous admettrez que la Commission ne s'est intéressée qu'aux dimensions qui visent la protection des renseignements personnels et aussi l'accès aux documents administratifs, le reste étant d'une compétence à laquelle nous ne prétendons pas du tout avoir des titres.

Alors, ma présentation s'axera autour de deux points, simplement. Tout d'abord, j'aimerais dire comment ce projet de loi s'axe et doit être interprété en fonction du régime québécois de protection des renseignements personnels. Et, en fonction de ce régime, dans un deuxième temps, je dégagerai les interrogations et ce qui nous semble être certains problèmes sur lesquels nous attirons l'attention de la commission et qui, à notre point de vue, devraient faire l'objet d'un réexamen pour mener à l'amélioration avant l'adoption du projet de loi, si telle est la décision de l'Assemblée.

La Commission, en recevant le projet, a procédé à son examen en tenant compte, et c'est important, des deux lois, celle de 1982 et celle de 1993, qui composent, je le répète, le régime québécois de protection des renseignements personnels. La Commission, je le répète, n'a aucune compétence dans le fond même du changement qui est proposé, mais elle s'est inspirée d'une attitude qui est devenue caractéristique de sa marque de commerce.

Nous avons envisagé ce projet de loi un peu comme nous le faisons, par exemple, pour les technologies de l'information. C'est-à-dire que la Commission n'a pas du tout l'intention ni la prétention de jouer les Don Quichotte et de s'opposer aux nouvelles technologies de l'information. Si la Commission, en 1982-1983, s'était opposée aux cartes de guichet pour les retraits dans les postes, dans les banques, dans les caisses, etc., ça aurait été sans doute une attitude courageuse, mais qui aurait été nettement démentie par le progrès. À l'égard des technologies de l'information, la Commission tend à voir ce qui peut poser des problèmes à l'égard de la vie privée, et d'une partie de la vie privée, c'est-à-dire celle qui est caractérisée par les renseignements personnels. C'est pourquoi elle incite à la prudence, elle incite à tenter des expériences-pilotes et, si nécessaire, à mettre des balises.

À l'égard du projet de loi n° 188, nous avons procédé exactement de la même façon. Nous avons pris acte de l'intention du gouvernement et du ministre de procéder à un certain décloisonnement des institutions financières. C'est le prérequis, c'est le postulat de départ. Mais, de notre côté, dès le départ, nous annonçons nos couleurs, c'est que nous disons non au décloisonnement des renseignements personnels. Il faut tenir compte des deux volets de cet énoncé, sinon nous allons nous perdre. Le décloisonnement des renseignements personnels irait à l'encontre du régime de protection qui est garanti aux citoyens du Québec par la Charte, par le Code civil et par les deux lois auxquelles j'ai fait référence. C'est donc dire que notre lecture se fait sans aucune concession, à cet égard, aucune concession en ce qui a trait au régime global. Et, ici, je pense qu'il faut situer le projet de loi dans ce régime. Curieusement, lorsque nous avons pris connaissance des débats entourant le projet de loi, il nous a semblé qu'on oubliait cette dimension. Et il faut, je pense, la rappeler, sinon on peut mal répondre à la question qui nous est posée ou semer des inquiétudes.

(16 h 10)

En une phrase, le régime de protection des renseignements personnels, qu'il soit dans le secteur privé comme dans le secteur public, structure et légifère la collecte, l'utilisation, la conservation et la communication des renseignements personnels. Ces principes s'appliquent à toute entreprise, loi n° 188 ou pas.

Deux exemples concrets qui se rattachent maintenant à la loi 188. En vertu des seuls principes actuels qui composent le régime québécois, une institution financière, quelle qu'elle soit, collige des renseignements, par exemple pour accorder une police d'assurance à son client. Ces renseignements personnels, dans l'état actuel du droit, avant même la loi n° 188, ne peuvent être utilisés pour apprécier la possibilité d'accorder un prêt hypothécaire à ce même client. De même, d'un autre côté, le directeur d'une maison de courtage ou d'un cabinet de courtiers, qui vend des produits financiers, des fonds mutuels par exemple, ne peut se servir des renseignements qu'il va obtenir à cette occasion, par exemple pour solliciter ses clients, pour leur offrir des parts du nouveau club de golf dont il vient de se porter acquéreur.

Les principes de la loi sont clairs et ils régissent, je le répète, la collecte, l'utilisation, la conservation et la communication des renseignements personnels. Les principes et les dispositions des lois québécoises de 1982 et 1993 s'appliquent donc à toute manipulation de renseignements personnels et continueront de s'appliquer dans le nouvel environnement qui résulterait de la mise en place de la loi n° 188. Ce principe est une réalité qui découle aussi du caractère exceptionnel de ces deux lois. Ces deux lois, il faut le répéter, jouissent, dans l'arsenal législatif québécois, d'un statut exceptionnel: elles sont prépondérantes. Et vous savez comme moi que, pour déroger à une loi prépondérante, il faut recourir à la fameuse clause «nonobstant». Alors, c'est dire à quel point le régime est en place, et l'interprétation de la loi n° 188 doit se faire en regard de cela.

À cet égard, la Commission a été satisfaite de voir que, dans le projet de loi n° 188, il n'y a aucune disposition dérogatoire à ces deux lois, secteur privé comme secteur public. Et ceci est évidemment un bon signe. Et c'est intéressant pour le citoyen du Québec de voir qu'on a réussi à imaginer ce projet sans recourir à des clauses dérogatoires, parce que les citoyens conservent, à l'égard de leurs renseignements personnels, tous les droits que leur reconnaît la loi et, par exemple, le droit de demander à la Commission d'accès à l'information d'intervenir pour étudier les mésententes, pour trancher des litiges ou pour même faire enquête. D'un autre côté, la Commission, puisqu'il n'y a pas de clauses dérogatoires, conserve tous les pouvoirs qui lui sont conférés par ces deux lois. Je pense qu'il s'agit là de quelque chose qui est à l'avantage du citoyen.

Mais, évidemment, cette loi n° 188 se situe dans un contexte précis. Nous avons relevé un certain nombre de problèmes ou d'imprécisions sur lesquels nous voulons attirer votre attention. C'est la seconde partie, la partie critique de l'examen du projet de loi n° 188, toujours en regard de ces deux législations, de ce régime complet de protection des renseignements personnels.

Globalement, on peut dire que la loi n° 188 prouve que le régime québécois est adaptable, donc qu'il peut être transposé dans une foule d'environnements ou d'univers nouveaux. L'examen de la loi n° 188, nous l'avons fait en fonction de ce qui est un supplément par rapport à ce qui est déjà garanti aux citoyens du Québec, bien sûr, dans la loi sur le secteur privé. Et nous l'avons fait également au regard de ce qui nous semble soit plus faible ou incomplet ou encore imprécis.

Alors, parmi les ajouts significatifs, il nous faut d'abord pointer l'attention qui a été accordée aux renseignements de santé et aux habitudes de vie. Alors, ces renseignements bénéficient, dans la loi n° 188, d'un traitement particulier qui va au-delà de ce que reconnaît le régime actuel de protection des renseignements personnels. Là-dessus, nous sommes contents, rassurés de cela parce que les renseignements de santé comme les habitudes de vie constituent ce qu'on appelle communément des renseignements sensibles, parmi les plus sensibles.

D'ailleurs, dans la plupart des législations occidentales on reconnaît aux renseignements de santé un statut particulier et on leur donne, bien sûr, un traitement analogue, au même titre que les renseignements sur la religion, la filiation partisane, la filiation syndicale ou autres. Ça fait partie de l'univers très protégé des renseignements personnels, domaine dans lequel le législateur québécois ne s'est pas engagé pour des raisons précises.

Ces renseignements de santé, nous comprenons, d'une part, qu'ils sont indispensables, dans certains cas, pour évaluer des risques. Une assurance sur la vie comporte quand même une certaine appréciation des chances de vie d'un individu. Mais nous comprenons aussi et nous insistons sur le fait que ces renseignements doivent être protégés de tous les autres domaines d'activité. Ils doivent donc être blindés d'une façon particulière. Ceci nous semble relativement bien fait.

Par contre, la Commission doit constater, curieusement, qu'on ne suit pas le même fondement pour appliquer une obligation à cet égard en ce qui concerne les institutions de dépôts et les autres organismes. Il y a quelque chose qui nous pose un certain nombre de problèmes, notamment aux articles 26 et 27 de la loi n° 188. Et la Commission recommande vivement que le même traitement soit réservé à tous ces renseignements de santé et d'habitudes de vie, peu importe par qui et le lieu où ils sont détenus. Un renseignement de santé ne change pas de nature ni de valeur selon qu'il est détenu dans une institution de courtage ou dans une institution de dépôts. Je pense qu'il faut être logique et revenir à la nature du renseignement lui-même.

Nous recommandons donc à votre commission et ensuite à l'Assemblée nationale de revoir cette distinction, qui nous paraît dangereuse pour les droits des individus. Ils bénéficieraient, dans certains cas, d'une protection que nous jugeons normale, et elle deviendrait aléatoire, dans d'autres.

M. Gendron: ...à quelle place vous la trouvez?

M. Comeau (Paul-André): Cette distinction, c'est dans les articles 26 et 27, notamment, où on établit une différence entre les renseignements de santé détenus... Ça vous va?

M. Gendron: Ça me va. Excusez-moi.

M. Comeau (Paul-André): Très bien. C'est le premier point qui nous a semblé fragile. De même, la Commission constate avec satisfaction l'inclusion dans l'ensemble de ce projet de loi des pouvoirs d'inspection. Ces pouvoirs d'inspection sont notamment confiés au Bureau des services financiers, à la Commission des valeurs mobilières, au syndic, etc., et ils ont une mission en matière de protection des renseignements personnels, ce qui, encore une fois, nous satisfait. Il s'agit là d'une façon concrète d'assurer le respect des droits qui découlent de la loi, bien sûr, mais c'est une façon également qui s'inscrit dans la philosophie de la Commission d'accès à l'information depuis sa création.

Du même souffle et à l'égard du même sujet, nous nous demandons pourquoi cette obligation de rendre compte des problèmes rencontrés par ce Bureau lors de ses inspections, d'en rendre compte à la Commission, n'est pas étendue aux autres inspecteurs du Bureau des services financiers et autres organismes qui ont une mission d'information et d'inspection. Il me semble qu'il y a un parallélisme là qui devrait être respecté.

À cet égard, la Commission souhaite vivement que, dans son rapport annuel, qui est prévu dans votre législation, le Bureau des services financiers soit tenu de souscrire à une recommandation que viennent d'accepter et d'arrêter les représentants des mégafichiers de l'État. Ces représentants des mégafichiers, après quelques réunions de travail, ont accepté d'inclure maintenant – et ça commencera dès le mois prochain – dans leur rapport annuel le bilan des activités de l'organisme en matière de protection des renseignements personnels et de sécurité informatique.

Nous pensons que ces nouveaux organismes devraient carrément accepter ce qui est, à mon point de vue, une étape supplémentaire volontairement consentie par les représentants des mégafichiers de l'État. Les mégafichiers de l'État, c'est-à-dire les fichiers du Revenu, de la Sûreté du Québec, le CRPQ, de la Sécurité du revenu, maintenant Emploi et Solidarité, de la RAMQ, etc., enfin, il y a sept ou huit grand fichiers qui ont accepté de faire en sorte que les citoyens puissent bénéficier d'une certaine transparence à cet égard, que les problèmes, les modifications et les changements puissent être, d'année en année, portés à la connaissance des lecteurs du rapport annuel.

(16 h 20)

La Commission doit vous faire part, cependant, d'un problème qui est délicat et qui, bien sûr, ne relève pas de votre compétence immédiate, mais nous devons, par honnêteté, vous le signaler. C'est-à-dire que la Chambre de la sécurité financière et la Chambre de l'assurance de dommages sont des entreprises au sens de la loi et du Code civil et elles ont des pouvoirs qui s'apparentent à ceux qui sont conférés aux ordres professionnels. C'est du moins notre lecture.

Cependant, depuis l'entrée en vigueur de la loi sur le secteur privé, l'interprétation du concept d'entreprise fait problème. Et il y a eu un certain nombre de décisions de la Commission, de la Cour du Québec et de la Cour supérieure qui débouchent sur une situation que nous jugeons, avec tout le respect qu'on doit aux tribunaux supérieurs, fâcheuse, en ce sens que, pour le moment, certains ordres professionnels du Québec ne sont pas du tout assujettis à la Loi sur la protection des renseignements personnels, de sorte que, par exemple, les employés de ces ordres professionnels, à moins d'une bienveillance de leurs patrons, ne peuvent aucunement réclamer l'accès à leur dossier d'employé. Ils sont dans une zone de no man's land assez particulière, pour le moment. Et c'est vrai également pour des citoyens qui font l'objet de fichiers personnels, de renseignements personnels détenus par ces organismes. Bien sûr, la plupart du temps, les organismes consentent, mais il n'y a aucune possibilité de contraindre.

La Commission a attiré l'attention du législateur à cet égard dans son rapport quinquennal, et le rapport quinquennal fait actuellement l'objet d'un examen par la commission de la culture, et des modifications législatives devraient être présentées. Aussi, la Commission prend-elle sur elle-même de vous suggérer de clarifier certaines dispositions qui auraient comme conséquence, si elles sont maintenues dans l'état actuel de l'interprétation des clauses par les tribunaux, d'exclure ces chambres de la juridiction de la loi et, bien sûr, d'exclure les citoyens de la protection qui est garantie par le régime québécois.

Là, il y a un problème, je pense, à prendre en considération. Et il ne s'agit pas d'une considération théorique, je vous le dis, il y a effectivement des problèmes précis dans le régime québécois. Alors, la Commission a aligné dans son rapport, vous l'avez vu, un certain nombre d'autres recommandations de caractère plus technique sur lesquelles Me Ouimet et Me Lapointe sont beaucoup mieux qualifiés que moi pour répondre.

Je voudrais cependant, avant de terminer, attirer votre attention sur une recommandation de portée plus générale. C'est-à-dire que le projet de loi n° 188 inscrit la possibilité de confier au ministre un pouvoir réglementaire, notamment aux articles 192 et 384. La Commission en tant que telle n'a rien à dire contre les règlements, mais elle souligne, cependant, ce qui pourrait être le début ou l'initiative d'une brèche dans l'économie générale et le dessein global du régime de protection des renseignements personnels.

Jusqu'ici, le législateur, de façon très claire, a rejeté l'approche sectorielle et a préféré faire en sorte que la loi définisse le régime, définisse également les modalités. Ce régime tient donc dans deux lois, qui tirent sa légitimité du Parlement et non pas d'une décision du gouvernement. Les règlements peuvent aller à l'encontre des lois, surtout dans un domaine semblable, et il y a une propension très nette...

Ceux qui ont assisté aux audiences publiques de la commission de la culture, l'automne dernier, sur la révision de la loi ont clairement énoncé à plusieurs reprises qu'ils voulaient une approche sectorielle, ce qui avait été rejeté de façon très claire par le législateur, au moment de l'adoption de la loi, en 1992 et 1993. En somme, par raisonnement a contrario, la loi n° 188 démontre très clairement qu'il est possible de faire face aux impératifs d'un environnement nouveau sans aucun problème. Alors, pourquoi tenter, pour des raisons peut-être valables, de mettre dans un régime quelque chose qui risque, si on suivait cette pente, de le contredire et de menacer son économie générale?

En somme, la Commission dit oui au décloisonnement financier, puisque c'est un choix de société qui s'est fait ailleurs. Elle dit non très clairement au décloisonnement des renseignements personnels, et cela, en conformité avec le régime de protection des renseignements personnels.

La Commission vous transmet quelques recommandations précises. Mais la Commission tient à assurer l'Assemblée nationale et aussi les Québécois de sa vigilance lors de la mise en place de ces nouvelles institutions, des procédures et des mécanismes qui éventuellement concrétiseraient ce décloisonnement des services financiers. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. Comeau, de vos judicieux conseils. J'accorde la parole au ministre des Finances.

M. Landry (Verchères): M. le président Comeau, votre présence et celle de vos deux collaborateurs rend à notre commission et, partant, à notre Assemblée nationale, dont elle est une émanation, un énorme service. En effet, vous-même et vos deux collaborateurs êtes dans les meilleures autorités occidentales en matière de protection de renseignements personnels et de protection de la vie privée. Votre crédibilité est connue au Québec et à travers le monde. Vous n'avez pas non plus – on l'a vu dans d'autres commissions pour lesquelles vous nous avez honorés de votre présence – la réputation d'être complaisants. Vous n'avez pas la réputation d'avoir les yeux dans votre poche, quand il s'agit de scruter des textes de loi.

Or, ce que nous voulons faire est une chose relativement audacieuse, comme vous l'avez souligné, inspirée par la modernité de l'environnement financier mondial auquel le Québec veut participer. Oui, bien sûr, c'est très important, mais à aucun prix nous ne voudrions faire ce décloisonnement s'il allait mettre en péril la protection des citoyens, la protection des renseignements et la protection de la vie privée.

C'est la raison pour laquelle, dans la version qui est présentement devant l'Assemblée, se retrouvent une vingtaine d'articles spécifiques rencontrant vos préoccupations. C'est la raison pour laquelle nous avons écouté religieusement ce que vous avez dit. Et c'est la raison pour laquelle nous avons procédé à une analyse très approfondie de votre mémoire. Et je vous dis d'avance que l'essentiel des recommandations que vous nous faites sera intégré dans le produit final et dans le résultat ultime de nos travaux.

Si je comprends bien, par ailleurs, il y a un reproche que vous faites, qui est un peu paradoxal. Vous nous soupçonnez de vouloir en faire trop, puisque vous dites: Notre corpus juridique est là, il est intégré, il couvre à peu près l'ensemble des situations et, si vous intervenez par un pouvoir réglementaire émanant d'une autre source, vous risquez de contaminer le produit global. Il faudrait, en d'autres termes, que nous limitions ou que nous essayions d'inscrire dans le projet de loi que tout règlement qui pourrait émaner du Bureau devrait être conforme à notre corpus de loi protégeant les renseignements ou soumis à la Commission éventuellement pour avis et approbation. Ça pourrait être une façon de nous empêcher, par ce Bureau, d'être trop zélés. En tout cas, je voudrais vous entendre là-dessus.

(16 h 30)

Quand vous dites que les chambres devraient être couvertes par la loi, bien entendu. Et je vais vous confesser bien humblement ce qui est arrivé. Vous savez que, dans notre pensée originale, ces chambres-là n'existaient pas; c'était un organisme unique au sens strict du terme. Après dialogue avec nos interlocuteurs du monde de l'assurance, nous avons fait cette concession, à laquelle je souscris pleinement, de la nécessité de ces chambres. Mais on n'a pas transposé notre pensée qui s'appliquait au Bureau aux chambres. Donc, c'est technique, nous allons faire ce que vous nous demandez de faire, c'est dans la nature même des choses.

Vous considérez, par ailleurs, que des renseignements personnels de nature médicale – là, je suis un peu plus pointu – ne devraient pas être conservés par quelque représentant que ce soit. Est-ce que vous pourriez nous expliquer votre position?

Également, plusieurs des intervenants, devant cette commission, en tout cas certains organismes – je peux même dire plusieurs, oui – s'inquiètent de la prolifération de mégabanques de données. Croyez-vous que les articles 91, 94 et 192 du projet de loi constituent un dispositif suffisant?

On dirait que, et à bon droit d'ailleurs, certaines personnes pensent que la noosphère dont avait parlé Teilhard de Chardin est devenue une réalité et que tout est connecté, et que tout se sait, et que tout se connaît dans un grand corpus. C'est vrai qu'on ne peut pas bouder la technologie, vous l'avez dit, mais on ne peut pas laisser la technologie faire n'importe quoi, non plus. Alors, pourriez-vous nous éclairer sur cette inquiétude que certains participants ont énoncée devant nous?

M. Comeau (Paul-André): Alors, pour revenir à votre première remarque en ce qui concerne nos inquiétudes au sujet du pouvoir réglementaire, ce qui nous semble important, et c'est notre lecture, à la Commission, c'est que l'on ne devrait recourir soit au pouvoir réglementaire ou au pouvoir législatif que pour ajouter à la loi et non pas pour faire quelque chose qui soit équivalent et qui soit, évidemment, à rabais, parce que le problème, avec ce genre de règlement, c'est de créer des interprétations différentes pour le même type de renseignement de santé. Si vous voulez, Me Ouimet pourra vous en dire plus long là-dessus, si ça vous intéresse, parce que j'avoue que je ne suis pas ferré dans le domaine.

M. Ouimet (André): En fait, la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé prévoit un ensemble de normes en matière de cueillette, de conservation, d'utilisation et de communication de renseignements personnels. Normalement, la base de la législation en matière de protection des renseignements personnels, elle est là.

Ce que le projet de loi n° 188 fait, c'est qu'il prévoit deux articles où on donne un pouvoir réglementaire, par exemple à 192, à un bureau de déterminer par règlement des règles relatives à la cueillette, à la conservation, à la protection et à la circulation des renseignements personnels. À la Commission, on s'est demandé ce que ça voulait couvrir de plus que ce qui n'est pas déjà couvert par une loi-cadre qui existe actuellement. On a tenté de trouver quelle réalité pouvait être cachée derrière ça et on n'a pas réussi.

Alors, dans ce contexte-là, on s'est dit: Pourquoi donner un pouvoir réglementaire? Est-ce que c'est pour diminuer les règles de protection? Et, à ce moment-là, la Commission serait obligée de s'opposer parce que les règles de protection, comme M. Comeau l'a expliqué tantôt, elles sont minimales dans la loi sur le secteur privé. Est-ce que c'est pour en mettre plus de règles de protection des renseignements personnels? Et, à ce moment-là, on souhaiterait bien les connaître parce qu'elles pourraient se retrouver dans une législation plutôt que dans un règlement, parce qu'il serait intéressant qu'elles se retrouvent, ces règles-là, pour l'ensemble des secteurs et non pas pour un seul secteur en particulier.

M. Landry (Verchères): Auriez-vous un remède juridique à nous suggérer, sans abuser de vos connaissances?

M. Ouimet (André): Un repère juridique?

M. Landry (Verchères): Un remède juridique.

M. Ouimet (André): Un remède juridique? Bien, en fait, vous voyez, la loi de protection des renseignements personnels est révisée à tous les cinq ans, et actuellement on est en révision quinquennale. Il y a eu des audiences d'une commission parlementaire, au cours de l'automne dernier, et le ministre des Relations avec les citoyens, qui est responsable de l'application des deux lois, est à travailler présentement sur des modifications législatives. Alors, peut-être que ce serait l'occasion de profiter de cette révision quinquennale pour ajouter des modifications, si cela s'avérait nécessaire. Et, à ce moment-là, on est prêt à travailler avec les gens de votre ministère pour revoir cela.

M. Landry (Verchères): Très bien.

M. Comeau (Paul-André): Vous avez aussi soulevé, M. le ministre, et j'avoue que je n'ai pas très bien compris... Si j'ai bien compris, c'est moi qui me suis mis les pieds dans les plats. La Commission n'a pas du tout l'intention de dire que, par exemple, un courtier en assurance ne peut pas recueillir des renseignements médicaux ou des renseignements de vie. Mais tout ce qui s'ensuit, c'est l'utilisation et la communication de ces renseignements personnels. Et là nous estimons que les règles qui s'appliqueraient à ce courtier sont exactement les mêmes qui doivent s'appliquer à un agent ou à un employé dans une institution de dépôts. Nous voulons le même parallélisme, à cet égard.

M. Landry (Verchères): ...ce n'était pas tellement de pouvoir recueillir, ça va de soi qu'il faut bien qu'il recueille, mais c'était de conserver.

M. Comeau (Paul-André): Alors, les renseignements en question peuvent être conservés dans le cabinet, l'entité qui s'occupe des assurances, conservés là, bien sûr, selon les règlements de protection, mais non pas transmis dans le même cabinet à une autre entité qui s'occuperait de fonds mutuels ou autre.

M. Landry (Verchères): D'accord. C'est à l'occasion du décloisonnement des institutions, respecter le cloisonnement des informations...

M. Comeau (Paul-André): Exactement. Vous avez aussi parlé de mégabanques, si je me souviens bien.

M. Landry (Verchères): Oui. C'est parce que beaucoup de gens sont venus ici nous dire, avec beaucoup de sincérité, qu'ils s'inquiètent de la prolifération de mégabanques de données. Il y a plusieurs organisations maintenant qui, par renseignements tout à fait ouverts, par «open sources», constituent d'énormes banques. Et, par recoupement, on peut arriver à des choses qui éventuellement pourraient menacer les consommateurs, les consommatrices. Est-ce que ce qu'on dit à 91, 94, 192 et d'autres articles constitue un dispositif suffisant pour empêcher que de tels monstres informatiques ne naissent?

M. Comeau (Paul-André): Écoutez, pour répondre à votre question très concrète, vous avez dans votre projet de loi des provisions, mais il faut revenir, je pense, à la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé. Et la loi définit le régime, et, par exemple, l'un des principes fondamentaux, c'est que des renseignements recueillis à une fin précise ne peuvent pas être utilisés à d'autres fins. Donc, une banque qui contiendrait des renseignements recueillis à des fins d'assurance ne pourrait pas contenir au même moment des renseignements dans le domaine du courtage ou dans tout autre domaine de services financiers. Et, s'il y a interconnexion entre ces banques, là, évidemment il y a un problème. Et il est évident que les dispositions de la loi s'appliquent. Et la Commission conserve son pouvoir d'enquête.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Ça va, M. le ministre?

M. Landry (Verchères): Oui, ça va.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Sur le même sujet, est-ce que vous permettez, Mme la députée de... Sur le même sujet, M. le député d'Abitibi-Ouest, d'abord.

M. Gendron: ...revenir effectivement sur le même sujet, M. Comeau. Moi, c'est un peu ça qui me fatigue aussi. Vous donnez une explication qui est bonne. Mais est-ce que ce n'est pas le propre d'une mégabanque que ça ne puisse pas se réaliser, l'esprit dont vous parlez? Donc, moi, mon inquiétude ce n'est pas tellement: Est-ce qu'il y a des articles qui donnent un peu de sécurité? Ce n'est pas ça, mon problème. Mon problème, c'est que, une mégabanque de données, je ne peux pas imaginer comment on n'arrivera pas à faire ce que les gens ont peur qu'il se fasse. Et me dire – mais là, je veux profiter de votre expérience parce que c'est des domaines que vous connaissez ça bien mieux que moi: Oui, mais il faudrait revenir à l'esprit, et, s'il y avait ça et que les informations que je collige là ne peuvent pas servir à d'autres fins que celles pour lesquelles je les ai colligées, là, vous auriez la sécurité, comment on peut garantir ça dans une mégabanque de données, puisque ce n'est pas pour faire ça? C'est pour faire l'inverse. C'est: plus j'en sais, c'est moi qui vais décider comment je l'utilise. Donc, je ne réaliserai jamais l'objectif prévu à la loi d'accès. Alors, est-ce qu'à ce moment-là il faut dire... Et justement au nom de la technologie... La technologie, j'en suis, les folies, moins. Alors, une mégabanque de données, j'ai peur de ça comme de la peste. A-t-on besoin de ça quand on veut sincèrement s'assurer qu'il n'y aura pas de transfert de données quant à l'usage?

M. Comeau (Paul-André): Pour vous répondre simplement, c'est la bataille de la protection des renseignements personnels. Il est évident que l'idéal de la protection des renseignements personnels dérange et va à l'encontre d'une culture administrative ou commerciale bien implantée. On prend un chemin tout à fait différent.

Prenons, par analogie, dans l'administration publique, où on décrète que les renseignements ne peuvent pas se promener d'un ministère à l'autre, c'est un obstacle considérable. Et, s'il y a des échanges de renseignements, il faut des ententes, etc. On va à l'encontre de ceux qui prétendent que le gouvernement, c'est toute la même chose, d'un ministère à l'autre, c'est le même tronc commun, etc. C'est un idéal qui a été mis en place par le législateur en 1982, avec un certain nombre de procédures. Il y a parfois des échecs, mais, globalement, on a fait des pas considérables. La preuve, c'est les scandales et les allégations à gauche et à droite sur les renseignements personnels, sur le sort réservé aux renseignements personnels. Il y a eu un progrès. C'est évident que, dans chaque technologie, il y a un danger. Les technologies 100 % à l'épreuve, il n'y en a pas. Mais, si on est vigilant et si on fait collectivement bien son boulot, on peut réduire cela.

(16 h 40)

Mais il faut bien se rendre compte qu'on vit, et c'est l'exotisme de la société québécoise, pour le moment, un cheminement unique sur le continent nord-américain. On est la seule société qui s'est dotée d'une législation en matière de protection des renseignements personnels dans le secteur privé. Alors, on va à l'encontre de ce qui est actuellement la norme sur le continent en matière de renseignements personnels. Mais on souscrit, par contre, à des principes qui sont reconnus depuis maintenant presque 30 ans et aux lignes directrices de l'OCDE, les «Fair Information Practice». Alors, c'est un idéal, mais il y a des problèmes.

M. Gendron: Oui, mais – la dernière phrase – une mégabanque de données pour un spécialiste des questions d'accès à l'information, est-ce que vous déconseillez ça ou vous permettez ça, avec ce que vous venez de me dire, si on fait attention puis si on balise? Alors, c'est quoi, votre point de vue? Oui ou non aux mégabanques de données?

M. Comeau (Paul-André): Bien, je pense qu'il faut des mégabanques. Par exemple, Hydro-Québec ne peut pas fonctionner sans une mégabanque, ne serait-ce que par la quantité de renseignements qu'elle doit avoir sur ses clients, et ainsi de suite. Ça, je le pense. Mais le problème, c'est de savoir: Est-ce qu'Hydro-Québec peut ramasser une foule de renseignements sur toutes sortes de sujets qui pourraient être utiles? C'est là que je me dis...

Et l'économie de la loi est claire: on ne peut recueillir que les renseignements nécessaires. Et «nécessaire», par définition et par jurisprudence, ça veut dire indispensable. Alors, à ce moment-là, est-ce qu'il est indispensable de savoir telle chose en fonction de tel objectif? C'est la question à se poser. Et là il y a toute une gestion des renseignements personnels à faire, que les entreprises, que les ministères et les organismes font.

M. Gendron: Merci.

M. Maciocia: Juste une toute petite question, si vous permettez, M. Comeau, juste une sous-question pour enchaîner dans le même sens. Quelle est la différence, pour vous, entre «pertinent», «nécessaire» et «utile»?

M. Comeau (Paul-André): Tout à fait. Alors, là, il y a un sens juridique. Et je vais demander à Me Ouimet de vous répondre de façon très claire, parce que la jurisprudence est claire là-dessus.

M. Landry (Verchères): On a la même question aussi, parce que c'est venu dans une autre intervention.

M. Comeau (Paul-André): Très bien.

M. Ouimet (André): Alors, les deux lois dont on parle contiennent les mots «nécessaire». Alors, c'est une préoccupation de la Commission, on aimerait retrouver dans la loi n° 188 le mot «nécessaire» plutôt que «pertinent» parce que, pour nous, le mot «nécessaire», c'est quelque chose qui est indispensable. Alors, les définitions qu'en a données la Commission, c'est quelque chose qui est indispensable, et, donc, le mot «nécessaire» devrait apparaître dans ce projet de loi là pour être conforme à la législation de protection des renseignements personnels.

M. Landry (Verchères): Écoutez, je pense que vous nous rendez un grand service. Vous êtes les meilleurs experts sur la question. On va prendre l'avis des meilleurs experts puis on va mettre le mot «nécessaire».

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Excusez! Mme la députée de Saint-François.

Mme Gagnon-Tremblay: Oui. Merci, M. le Président. Toujours en relation avec les renseignements personnels, à l'article 22, on dit: «Un représentant en assurance qui agit pour le compte d'une institution de dépôts inscrite comme cabinet ne peut, dans un de ses établissements, effectuer des transactions courantes de dépôt ou de retrait sur un compte de type épargne avec opérations, ni consentir du crédit, sauf pour l'acquisition d'un produit d'assurance ou à des fins de placement.»

Ma question est à deux volets. Est-ce que l'inverse pourrait se produire? C'est-à-dire, dans un premier temps, est-ce qu'une personne qui, par exemple, effectue des transactions courantes de dépôt ou de retrait, ou quoi que ce soit, pourrait divulguer certaines informations au représentant en assurance? Et est-ce que vous êtes au fait que, dans ces institutions de dépôts, par exemple, il y aurait des personnes qui n'effectuent pas ce genre de transaction, qui ne font pas ce genre de transaction, mais qui, malgré tout, auraient accès au fichier des données?

M. Comeau (Paul-André): Je vais demander à Me Ouimet de donner une réponse juridique immédiate.

M. Ouimet (André): La première partie, je ne peux pas vous répondre, je ne sais vraiment pas, il faudrait que je regarde le... Mais, dans la deuxième partie, on ne peut pas avoir accès à des renseignements personnels si on n'en a pas besoin dans le cadre de son travail. Ça, ça signifie que, dans toute organisation, que ce soit une entreprise privée ou un organisme public, les seules personnes qui doivent avoir accès à des renseignements personnels, c'est les personnes qui en ont besoin pour leur travail. Et, nous, on fait régulièrement des vérifications de cet ordre-là. On a régulièrement des plaintes et on va vérifier dans les organismes publics, dans les ministères, dans les entreprises privées pour voir si les personnes qui y ont accès, c'est uniquement les personnes qui en ont besoin. Évidemment, dans le cadre de cette réforme-là, la question va se poser avec encore plus d'acuité. On devra, comme le disait M. Comeau tantôt, être vigilant dans l'application de la loi pour s'assurer que seules les personnes qui en ont besoin ont recours aux renseignements personnels.

Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce qu'il se pourrait que certaines personnes puissent avoir recours à des renseignements personnels, par exemple des personnes qui effectuent ce genre de transactions en vertu de l'article 22? Est-ce qu'il se pourrait...

M. Ouimet (André): Oui, peut-être que ça pourrait arriver. Simon, tu...

M. Lapointe (Simon): Ce qu'il faut savoir, c'est que, en vertu de la loi n° 68, qui est toujours en toile de fond des autres lois qui s'appliquent aussi, la loi oblige une entreprise à assurer la sécurité des renseignements personnels. C'est l'article 10 de la loi n° 68. Or, dans le prolongement de cet énoncé, je pense que l'organisation du travail doit être faite en conséquence du respect de pareille obligation. C'est donc dire que l'organisation du travail doit être faite en fonction du respect de la vie privée et également en fonction des tâches de chacun. Et il faut organiser le travail en conséquence.

Mme Gagnon-Tremblay: Donc, il n'y aurait pas lieu, d'après vous, de renforcer, finalement, cette possibilité, c'est-à-dire ce fait que la personne n'aurait pas accès ou n'aurait pas droit à l'accès aux renseignements. À l'article 22, est-ce qu'il y aurait possibilité, est-ce qu'on devrait l'indiquer pour que ce soit encore plus fort?

M. Comeau (Paul-André): Pendant que Me Lapointe réfléchit, je vais vous donner une analogie, quelque chose sur lequel nous nous sommes penchés au cours des dernières années et qui nous a amené à émettre des lignes directrices. C'est la cueillette par les services de personnel, les directions des ressources humaines du diagnostic médical ou des bulletins de santé des employés à la suite d'une absence. Parce qu'on s'est rendu compte que certains de ces diagnostics circulaient à gauche et à droite, et les personnes n'avaient aucun besoin, n'avaient pas nécessité de ces renseignements, de sorte que nous avons resserré terriblement. Et maintenant, dans les ministères et organismes, il y a un respect qui se fait à cet égard, qui n'est peut-être pas parfait, mais il y a un changement considérable. Donc, nous l'avons constaté. Et je pense qu'à cet égard on pourrait fonctionner de la même façon.

M. Lapointe (Simon): Peut-être, pour compléter la réponse, la lecture que je fais de l'article 22 me semble en harmonie avec l'article 10 de la loi n° 68.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): «C'est-u» complet, M. le député de Viger? Ça va? M. le député de Masson, allez donc.

M. Blais: Oui, c'est sur les mots «nécessaire» et «pertinent». Restons dans Hydro-Québec, comme vous parliez tantôt. Vous dites que normalement vous utilisiez le mot «nécessaire» parce qu'il est à peu près dans toutes les lois, parce que vous dites que les jugements ont déjà dit que ça voulait dire «indispensable». À ce moment-là – première question – pourquoi on ne pourrait pas marquer «indispensable», tout court? Pas besoin d'interpréter et de changer toutes les autres lois, «nécessaire» pour le mot «indispensable».

Mais, cependant, je vais vous demander une chose: Qu'est-ce que les mots «nécessaire», «pertinent», «utile» ou «indispensable» veulent dire pour Hydro-Québec? Demander, supposons, le numéro d'assurance sociale à son client, ce n'est pas permis, mais ce serait très pertinent, s'il déménage, pour aller se faire payer une facture impayée; ce serait utile – si on prenait le mot «utile» – pour son fonctionnement; ce serait nécessaire, si elle veut le rejoindre; ce serait même indispensable, si elle veut se faire payer.

Alors, les qualificatifs me semblent excessivement difficiles à employer, dans ces cas-là, parce que l'utile, le nécessaire, le pertinent ou l'indispensable, ça dépend si on se met à la place de la personne après qui l'on court ou de la personne qui court. Alors, si c'est la personne qui court, l'indispensable n'a pas la même définition que la personne qui est courue. Alors, la personne qui est courue a une définition des mots «indispensable», «utile», «pertinent», «nécessaire», et la personne qui court à une autre définition. Quelle définition doit-on donner dans nos lois? À celui qui court ou à celle qui est courue?

(16 h 50)

M. Ouimet (André): Dans chaque cas où on a à évaluer le critère de la nécessité, on demande à l'organisme de nous faire la preuve de cette nécessité-là. Et, comme on le dit dans notre mémoire, la Commission d'accès à l'information et les tribunaux supérieurs ont reconnu que le terme «nécessaire» a reçu la signification suivante: Requis, indispensable et obligatoire. Alors, on a fixé la barre très haute pour une raison très simple, c'est que la protection des renseignements personnels, c'est un droit fondamental. C'est donc l'organisme ou l'entreprise qui collige qui a le fardeau de démontrer que le renseignement qu'elle recueille est indispensable, obligatoire, nécessaire.

M. Blais: On est dans un cul-de-sac. Vous permettez? Ce n'est pas de la mauvaise volonté. Je suis M. Hydro-Québec – je reste toujours dans votre exemple – si vous déménagez, que vous avez un compte en souffrance et que vous faites ça souvent et que vous ne laissez pas votre adresse, pour moi, c'est requis, obligatoire, nécessaire, utile, pertinent et requis d'avoir votre numéro d'assurance sociale pour vous retrouver. Alors, l'interprétation que l'on fait – la question est vraiment celle-là – est-ce qu'elle est pour la personne qui est courue ou pour la personne qui court? C'est ça, ma question. Parce que les deux ont une définition différente. À quelle personne s'adresse, dans nos lois, tous ces qualificatifs, toutes ces épithètes, tous ces mots qui sont presque des synonymes, mais qui ne veulent pas dire la même chose? Mais, quelle que soit l'interprétation que l'on fasse, si ça s'adresse à la personne qui court ou à la personne qui est courue, c'est différent, comme définition. Voilà.

M. Comeau (Paul-André): D'abord, une chose importante, c'est que, quand on a établi la première loi, on a choisi très consciemment les mots «nécessaire» et «nécessité», le critère... et les autres lois se sont harmonisées en fonction de cela et en fonction des interprétations de la jurisprudence. Alors, comme le disait tout à l'heure Me Ouimet, le fardeau de définir la nécessité, c'est l'entreprise ou le ministère ou l'organisme qui l'a et c'est lui qui doit faire la preuve de cela. Et c'est extrêmement contraignant. Et c'est pas pour rien que les entreprises et les ministères rêvent du mot «pertinent» ou du mot «utile», parce que le critère de nécessité, tel qu'il a été établi par la Commission, en fonction de la loi bien sûr, confirmé par les tribunaux, est extrêmement exigeant. Et c'est, d'après nous, celui qui protège le mieux l'individu, la personne.

M. Blais: Une autre petite... si je peux me permettre. Supposons que je suis toujours M. Hydro-Québec et que je vais en cour pour faire interpréter pour moi, comme Hydro-Québec, le mot «nécessaire». Est-ce que ça a déjà été fait, ça? Est-ce que c'est déjà passé? Est-ce que le mot «nécessaire» s'applique à la personne qui est courue et non pas à moi, qui court? En cour, est-ce que celui qui court est débouté?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Blais: Celui qui court en cour est débouté, celui qui est couru est absout? C'est ça?

M. Comeau (Paul-André): On va demander à Me Ouimet de courir. D'accord?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Blais: De discourir.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Ouimet (André): Dans le cas d'Hydro-Québec, ça a pris, je pense, à peu près un an avant qu'Hydro-Québec réussisse à faire cette démonstration de la nécessité, par exemple de la cueillette du NAS. Parce qu'on a demandé à Hydro-Québec de relever ce fardeau de preuve. Nous, on se place un petit peu au niveau des citoyens puis on dit: Faites-nous la preuve qu'Hydro ne pourra pas fonctionner, ne pourra pas, par exemple, comme vous le disiez, récupérer son argent sans avoir les renseignements. Alors, on a demandé à Hydro, par exemple de faire des sondages, on a demandé à Hydro de faire une étude locale dans la région Saint-Laurent, on a demandé à Hydro une série de questions, et ce n'est qu'au terme de ça que la commission a reconnu, par exemple, dans ce cas-là, la nécessité, tout en lui ordonnant de détruire tous les autres renseignements personnels qu'elle détenait sur les citoyens du Québec.

M. Blais: Merci

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le député de Masson. M. le député de Viger.

M. Maciocia: Oui, merci, M. le Président. M. Comeau, à la page 5 de votre mémoire, au paragraphe 4, vous rappelez, et je cite: «La loi interdit formellement à une entreprise d'utiliser des renseignements personnels à des fins non pertinentes à l'objet déclaré du dossier, à moins d'avoir obtenu un consentement.» J'arrête la citation. À la lumière des pratiques qui sont appliquées actuellement dans les banques et dans les caisses en matière de consentement, estimez-vous que cet article est respecté réellement dans les faits?

M. Comeau (Paul-André): Cette affirmation-là découle à peu près textuellement de l'article 12 de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé. Que les fameux formulaires de consentement ne soient pas toujours – pour employer une expression que vous me pardonnerez – «kosher», il y a un problème, à certains moments. Et il y a une transformation qui est considérable qui a été faite depuis trois ans: la remise à jour des formulaires de consentement, pour précisément respecter cette provision de la loi, pour faire en sorte qu'on n'ait pas des consentements omnibus, en définitive, qui durent pendant des années et des années. Alors, il y a un resserrement à faire. Et notre phrase découle précisément de ce principe de la loi. Mais il y a des problèmes.

M. Landry (Verchères): Je ne sais pas si le député de D'Arcy-McGee serait d'accord avec moi, mais ce n'est pas «koscher» qu'il doit dire...

M. Comeau (Paul-André): Kascher, vous avez raison.

M. Landry (Verchères): ...c'est kascher.

M. Comeau (Paul-André): Vous avez raison, je m'en excuse.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Viger.

M. Maciocia: M. le président, dois-je comprendre que la Commission a certaines craintes, justement, avec des consentements «at large» qui sont donnés actuellement, que ça soit dans les banques ou dans les caisses, et que vous n'êtes pas d'accord avec cette formulation-là?

M. Comeau (Paul-André): Oui, à cet égard, les collaborateurs de Me Lapointe ont travaillé, au fil des années, ces deux dernières années notamment, avec des représentants de courtiers et autres pour en arriver à des formulaires et à des formules de consentement qui soient plus respectueux. Mais c'est un processus extrêmement long. On a enregistré des succès dans certains domaines, mais il reste encore beaucoup à faire, effectivement. Il y a un problème.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): C'est bien. On vous remercie, MM. Lapointe, Ouimet et Comeau, de cette présentation et de l'information que vous nous avez transmise.

J'invite le représentant des consommateurs au Conseil des assurances de dommages à prendre place. Et je suspends pour deux minutes.

(Suspension de la séance à 16 h 57)

(Reprise à 17 h 6)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): À l'ordre! Mesdames, messieurs, j'inviterais les membres de la commission à prendre place afin que nous poursuivions nos travaux, afin d'entendre cette fois-ci le représentant des consommateurs au Conseil des assurances de personnes, qui est M. René Langlois. Et j'invite ce dernier à nous faire part de ses demandes et de ses observations. M. Langlois. Allez.


M. René Langlois, représentant des consommateurs au Conseil des assurances de dommages

M. Langlois (René): M. le vice-premier ministre, M. le Président et distingués membres de la commission et de l'Assemblée nationale, d'abord, merci de me donner à nouveau l'occasion de vous soumettre mes commentaires à titre de représentant des consommateurs au Conseil des assurances de dommages, en complément du mémoire que j'ai transmis à la commission le 13 février dernier.

Je ne suis lié financièrement à aucune personne visée par le projet de loi à l'étude et mon seul intérêt est de remplir avec le plus de rigueur possible le mandat bénévole reçu du gouvernement précédent et continué sous le présent gouvernement.

C'est, à mon sens, du point de vue de la population, et non de celui des institutions financières ou de leurs représentants, que le projet de loi sur la distribution des produits financiers doit être examiné. L'enjeu véritable de cette loi, c'est la capacité de la population à faire face et à se préparer, avec l'aide de l'assurance, aux crises comme celle du verglas. C'est lors de ces drames de la vie que se concrétise vraiment la protection du consommateur en assurances.

Néanmoins, l'effet présumé de la loi sur les parts de marché occupe une telle place dans le débat public que je ne peux rester muet à ce sujet. L'histoire démontre que les parts de marché se gagnent en méritant la confiance des consommateurs et non pas par le lobbying auprès du législateur.

Malgré le tollé soulevé suite aux inondations de sous-sols en novembre 1996, où La Presse titrait: Pas rassurants, les assureurs , le comportement de l'industrie des assurances à l'égard des sinistrés n'a pas changé, mais il s'est fait beaucoup de lobbying. Il n'est pas étonnant dans ces circonstances que la tendance du marché se soit maintenue.

À titre d'illustration, selon une étude publiée en août 1997 par le service de recherche de Wood Gundy, de la CIBC, si la part des assureurs directs en assurance auto au Canada est passée de 2 % – j'ai dit 2 % – à 29 % de 1992 à 1997, c'est que ceux-ci se sont adaptés aux nouvelles préférences des consommateurs d'acheter leur assurance par téléphone et conséquemment à meilleur coût. Les législations provinciales n'ont rien eu à y voir.

Les courtiers comme les autres doivent s'adapter aux attentes des consommateurs, c'est la seule stratégie viable à long terme. Cette commission n'a pas la capacité d'assurer l'avenir du courtage, quelles que soient ses conclusions sur le projet de loi, seuls les courtiers eux-mêmes peuvent le faire en démontrant la valeur ajoutée de leurs services.

(17 h 10)

Incidemment, l'acceptation par les courtiers de commissions inversement proportionnelles aux indemnités versées aux assurés ne constituent pas un bon départ. Il s'agit, en effet, d'une pratique répandue en vertu de laquelle moins le courtier présente de réclamations par rapport aux primes souscrites, plus l'assureur lui versera un boni de fin d'année élevé, en sus des commissions de 20 % en habitation et de 12,5 % en automobile. Ces commissions, dites de contingences, peuvent représenter jusqu'à 80 % des bénéfices nets des courtiers, comme l'affirmait un courtier lors d'une table ronde organisée par le journal de l'assurance, en 1995, et dont je dépose copie auprès de la commission. Le conflit d'intérêt est flagrant et ces commissions inversement proportionnelles aux indemnités devraient être interdites à ceux qui conseillent ou représentent les assurés lors d'un sinistre. Le projet de loi est muet à ce sujet, et j'insiste pour en avoir déjà fait état devant la commission en novembre 1996.

En outre, pour que le consommateur s'y retrouve dans cette loi, l'uniformité de traitement des réseaux de distribution constituerait un élément important de simplification et une meilleure garantie d'efficacité et d'équité. Je réfère ici notamment aux mesures visant la protection des renseignements personnels, l'interdiction de double emploi, l'obligation de vendre de l'assurance dans un endroit prévu à cette fin et l'obligation de déposer dans un compte en fiducie les sommes confiées aux représentants et aux courtiers d'assurances. Pour vraiment protéger le consommateur, ces mesures devraient être étendues à tous, y compris aux courtiers et aux distributeurs sans représentant.

À défaut d'étendre ces mesures à tous, la commission devra prendre en considération qu'en assurance de dommage, au Québec, les assureurs directs, c'est-à-dire ceux qui offrent leurs produits par l'entremise d'agents, sont contrôlés très majoritairement par des Québécois et des Canadiens, alors que les assureurs qui distribuent leurs produits par les courtiers appartiennent très majoritairement aux étrangers. Même si 49 % des primes d'assurance souscrites au Québec par les courtiers le sont auprès d'assureurs à charte québécoise ou canadienne, on doit reconnaître qu'à l'ultime ces primes sont versées principalement aux étrangers qui contrôlent ces assureurs à charte canadienne ou québécoise.

Je vous soumets que, malgré les apparences, en assurance de dommages, la concurrence n'oppose pas tant les assureurs à agents aux assureurs à courtiers, mais plutôt les intérêts québécois et canadiens aux intérêts étrangers, de sorte qu'il faut éviter d'imposer aux rares institutions financières de propriété québécoise des contraintes que n'aurait pas à supporter le réseau de distribution des étrangers.

M. le Président, j'aimerais inviter la commission à remonter dans le temps et à ajouter un élément de fiction à son mandat, même si je suis bien conscient que vous en avez déjà plein les bras. Imaginons que nous sommes quelques années avant la tempête de verglas de janvier dernier et que la commission sait que le verglas frappera lourdement le Québec, sans savoir exactement à quel endroit. Imaginons également que la Loi sur la distribution des produits financiers peut être adoptée avant la catastrophe et qu'il n'y a pas d'élections dans l'air. Comment, alors, aider la population du Québec à y faire face?

Pour que l'assurance joue son rôle, encore faut-il avoir de l'assurance. La loi doit donc en faciliter l'acquisition, tant pour les moins fortunés qui sont plus vulnérables que pour les mieux nantis qui ont plus de biens matériels et de revenus à protéger. À cette fin, on doit donc accroître les façons, les lieux, les moments où le consommateur peut obtenir des protection nécessaires tout en améliorant la diversité des garanties, leur qualité et leur prix. Le projet de loi n° 188 va dans cette direction en proposant de parfaire le décloisonnement, ce qui favorisera un plus large accès au produit et une plus grande concurrence.

Je déplore toutefois que le projet de loi soit muet sur les modes de distribution électroniques en émergence. J'ai appris, en lisant les notes sténographiques de la journée d'hier, qu'il y a un comité spécial qui doit faire rapport, je pense, en mars, ou enfin au cours des prochains mois, et je m'en réjouis.

Le projet de loi reconnaît le libre choix du consommateur. Par contre, on sait que ce dernier ne peut vraiment l'exercer que s'il a accès à une information complète et de qualité lui permettant de sélectionner le produit le mieux adapté au meilleur prix. Entrent alors en scène les agents et les courtiers d'assurances, tous vendeurs de produits financiers. On les souhaite les plus compétents possible, compte tenu de l'extrême complexité des produits.

En effet, on a pu constater depuis 10 ans, à l'occasion des pluies torrentielles, des tornades, des feux de produits chimiques, des gels intenses et des mouvements populaires, que rien n'est simple en assurance. Jusqu'où? Jusqu'au jour où les assureurs présenteront leurs produits de façon plus imagée. On en a entendu parler ce matin, et peut-être que Bill Gates aurait des idées à nous donner là-dessus.

Seul un examen des polices disponibles par un expert pourra contribuer à identifier les innombrables trous dans les garanties. Il importe alors que tous les représentants qui offrent ces produits jouissent d'une formation, d'un soutien technique et d'une garantie de solvabilité minimum uniforme. C'est ce que le projet de loi propose en substance.

Lorsque viendra le jour de la catastrophe, entreront en scène les experts en sinistre devant composer avec les mêmes produits complexes. Encore là, et surtout là, éviter les erreurs vaut mieux que de devoir les corriger. Seule la certification pour tous peut en constituer le gage. C'est aussi l'orientation du projet de loi proposé.

Toutefois, plusieurs mesures d'encadrement demeurent, à mon sens, inutilement complexes et devraient être reconsidérées. À ce sujet, je recommande de retirer du projet les dispositions relatives aux représentants et sociétés autonomes ainsi que celles relatives au maintien de deux classes distinctes d'experts en sinistre. Ces dispositions n'ajoutent rien à la protection du consommateur; au contraire, elles le confondent.

De plus, s'il est souhaitable de permettre au courtier de régler des sinistres sur les polices qu'il a vendues, il doit en être de même de l'agent qui est soumis aux mêmes standards de formation depuis 1990; il en va également de même des experts en sinistre eux-mêmes. Cet assouplissement de la loi permettrait d'ailleurs aux assureurs de mieux répondre aux milliers de demandes d'indemnisation des consommateurs en situation de crise comme celle qu'on connaît aujourd'hui. En pratique, d'ailleurs, je ne suis pas certain que ce ne soit pas déjà le cas, alors que les certifications et que la loi ne le permettent pas vraiment. La loi favoriserait également ainsi la mobilité professionnelle de la main-d'oeuvre.

Mais revenons à notre sinistre. Dès les premières heures de la catastrophe, la population voudra obtenir des informations sur l'étendue des assurances applicables et sur les gestes à poser en regard du sinistre qui l'aura frappée; on l'a vu lors du récent verglas. Ce qui est vrai pour la population en général est également vrai pour les individus. Le sinistré a besoin de savoir rapidement qu'il sera aidé et comment. On ne compte plus les témoignages de déception à l'égard des restrictions et des limitations de garanties, ou encore des valses hésitation de plusieurs assureurs lors des sinistres. Il est donc essentiel qu'un centre de renseignements totalement indépendant des assureurs et de leurs représentants puisse donner l'information requise ou encore valider celle rendue disponible par les assureurs. Le bureau doit avoir l'obligation, et non seulement le pouvoir comme il est inscrit présentement dans le projet, de créer un centre de renseignements.

(17 h 20)

Je termine, M. le Président, sur la question des Chambres et de leurs représentants au Bureau de la distribution des produits et services financiers. Il a maintes fois été démontré, depuis 1990, que les représentants des intermédiaires de marché qui siègent au Conseil des assurances de dommages n'ont pas le recul nécessaire pour permettre à cet organisme, dont la mission unique est la protection du consommateur, de jouer pleinement son rôle. À nouveau, la commission peut constater aujourd'hui l'absence de mémoire du Conseil des assurances de dommages malgré l'invitation lancée. Il en est ainsi encore une fois parce que les représentants des associations de courtiers et d'experts en sinistres qui siègent au Conseil des assurances de dommages ont jugé que la présentation de mémoire par leur association ne permettait pas que le Conseil des assurances de dommages présente son propre mémoire qui pourrait s'avérer contraire au leur.

On doit se rendre à l'évidence, même lorsque l'intérêt des consommateurs l'exige, comme c'est le cas aujourd'hui, les représentants des associations d'intermédiaires de marché n'arrivent pas, souvent, à démontrer le recul nécessaire à la protection des intérêts supérieurs des consommateurs. Les administrateurs du Bureau devraient donc être nommés, tous, de façon à ce qu'en leur âme et conscience ils soient imputables seulement au gouvernement qui, lui, doit rendre compte à la population. Pour ces raisons notamment, les Chambres doivent être simplement retirées du projet.

En conclusion, M. le Président, ce projet de loi doit être adopté si possible avant les élections, mais après avoir été allégé pour en faire non pas la loi des vendeurs de produits financiers mais plutôt celle des acheteurs, la population du Québec. Je vous remercie.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. Langlois, pour votre présentation, et j'accorde la parole au ministre des Finances.

M. Landry (Verchères): Je vous remercie de votre présentation et de votre témoignage, Me Langlois. Il est évident que vous connaissez parfaitement le métier de l'assurance, vous êtes juriste. Comme vous l'avez dit, et chacun le reconnaît, vous n'avez partie liée avec aucun groupe, sauf avec l'ensemble des consommateurs, puisque vous représentez les consommateurs au Conseil. Nous allons donc, avec votre permission, essayer d'exploiter au maximum votre présence parce que, de façon tout à fait légitime, des gens sont venus qui, eux, ont partie liée avec un groupe ou avec l'autre, et nous n'avons aucun reproche à leur faire, il est tout à fait convenable de venir devant son Assemblée nationale pour défendre ses intérêts. Mais, puisque vous semblez vous situer au-dessus de la mêlée, j'aimerais d'abord entendre votre opinion un peu plus poussée sur la question des Chambres.

Le gouvernement, à l'examen du rapport quinquennal et après avoir réfléchi à la question, en était venu à la conclusion d'un organisme unique. Le Bureau ou son équivalent devait assumer les responsabilités qui aujourd'hui sont dévolues partiellement et de concert aux Chambres. C'est un compromis que nous avons fait après discussion avec nos interlocuteurs du monde de l'assurance qui voulaient garder un certain mode électif, une vie associative, une dynamisation du milieu par la participation aux institutions d'autodiscipline et de déontologie. Ce point de vue m'a séduit, j'ai cru ce qu'ils m'ont dit et je l'ai fait intégrer dans notre projet.

Pourquoi y êtes-vous à ce point opposé comme nous l'étions au départ? Et se peut-il qu'en regardant ça de plus près vous trouviez quelque vertu à ces Chambres, qui serait importante pour qu'on arrive à un projet de loi plus consensuel?

M. Langlois (René): Pourquoi pas les Chambres?

M. Landry (Verchères): Exactement.

M. Langlois (René): Probablement parce que, depuis sept ans, au Conseil des assurances de dommages, j'ai vécu un régime analogue à celui-là et qui a démontré à maintes reprises que le recul des élus n'est pas possible lorsqu'il est nécessaire, indispensable, utile, pour la protection des consommateurs. Essentiellement, c'est pour ça. Je pense qu'il est compréhensible et légitime de la part des élus, des intermédiaires, de ne pas faire abstraction des mandats qu'ils ont reçu d'autre part mais, de toute évidence, on n'arrive pas à tirer la ligne entre le mandat, la mission unique du... appelons-le le Bureau. Je peux vous parler du Conseil des assurances de dommages, du Conseil des assurances de personnes. Aujourd'hui, on n'arrive pas à isoler, en pratique, au quotidien, au moment où on tient des conseils d'administration, les objectifs de ces corps-là – Conseil des dommages, Conseil des personnes – de ceux des organismes où l'on est élu.

Et là je pense, par exemple, aux dispositions de la Loi sur les intermédiaires de marché qui prévoyait et qui prévoit toujours que les représentants des associations qui siègent aux différents conseils doivent être des personnes en autorité au sein de leur propre organisation. Alors, comment diable une personne en autorité au sein de l'Association des courtiers ou de l'Association des intermédiaires en assurance de personnes peut instantanément mettre complètement de côté les intérêts d'un organisme où elle siège, souvent qu'elle préside, à tout le moins d'un organisme où elle est en autorité, puisque c'est ce que prévoit le mode de nomination, comment peut-elle faire abstraction donc de toutes les valeurs, de toute la philosophie que cet organisme vend, défend à juste titre, chacun dans son secteur économique?

Les personnes, en pratique, n'arrivent pas à faire la coupure. On se retrouve au Bureau, on se retrouve aux différents conseils et, malheureusement, les intérêts divergents des membres autour de la table finissent, en bout de ligne, par paralyser les travaux. Et c'est pourquoi le Conseil des assurances de dommages, aujourd'hui, n'a pas de mémoire à déposer devant vous alors que la commission aurait besoin de l'expertise de tous les gens qu'il y a au Conseil des dommages. Alors, j'ai pu ramasser un peu d'information, avec l'expérience, et je vous la livre aujourd'hui mais, fondamentalement, c'est pour ça que cette idée de nouvelles Chambres avec des élus ne me sourit pas. Parce que, à mon sens, c'est un gage de difficulté. Les énergies, les ressources qui seront consacrées à tenter de dénouer ces noeuds ne seront pas utilisées pour protéger le consommateur, et c'est là-dessus qu'on doit consacrer toutes nos énergies, la protection du consommateur. C'est la mission unique du Bureau, alors assurons-nous que les ressources du Bureau ne seront pas détournées de la mission qu'on lui confie. Et c'est pour ça que je pense que les Chambres ne devraient pas être maintenues dans le projet, et sûrement pas des élus des Chambres nommés à ce titre au Bureau.

M. Landry (Verchères): Vous êtes plus impitoyable que moi par rapport à la nature humaine, si je comprends bien.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Landry (Verchères): Moi, je suis représentant du comté de Verchères, je siège au Conseil des ministres. Je ne fais pas juste parler du comté de Verchères, j'essaie de prendre les intérêts du Québec au complet. Je fais cette espèce de projection sur les Chambres tout en gardant en tête que, comme au Conseil des ministres, il y a un arbitre ultime, qui est le premier ministre, qui a le pouvoir même de dire: J'ai été ravi de vous avoir comme ministre.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Landry (Verchères): Évidemment, ça crée une espèce d'harmonisation plus spontanée, mais il reste que le Bureau émane largement du gouvernement, donc de la collectivité et d'intérêts qui sont supérieurs aux intérêts particuliers.

Certaines suggestions nous ont été faites quant au Bureau aussi, quant à sa formation, la présence des consommateurs de façon massive, en particulier. En tout cas, votre réflexion est précieuse et, sans abuser de vous, je voudrais vous poser quelques autres questions.

Aujourd'hui, ça a été la fête de Desjardins, si je puis dire.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Landry (Verchères): J'en ai manqué un bout ce matin parce que, justement, j'ai remplacé le premier ministre au Conseil, le premier ministre était absent. Mais il est venu des carrossiers qui lui ont fait faire un tour en carrosse, paraît-il.

Des voix: Ha, ha, ha!

(17 h 30)

M. Landry (Verchères): Et, cet après-midi, on a eu les victimes de Desjardins. C'est tout à fait normal que, quand une institution qui fait 50 % du commerce bancaire au Québec apparaît dans le décor, un certain nombre de mécontentements surgissent.

Mon ami Yves Michaud, par exemple, que l'on surnomme «Robin des banques», il fait faire une sacrée promenade aux banques aussi. Et je pense que tout ça, ça rend service à la société. Mais au fond des choses, vous voyez le nombre de plaintes déposées au Conseil contre des courtiers, des agents, des assureurs et les plaintes déposées contre Desjardins et reliées à Desjardins. Est-ce que vraiment Desjardins est une de vos vedettes en matière de plaintes ou si le péché est équitablement réparti?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Langlois (René): Elle est bien bonne. Sûrement qu'une des raisons pourquoi Desjardins est ainsi rappelé à l'ordre aussi souvent, c'est que Desjardins, c'est connu. Toute proportion gardée, je suis certain qu'ailleurs ce n'est pas beaucoup mieux. Mais on ne parlera probablement pas, sûrement pas devant cette commission, des problèmes que certaines personnes peuvent avoir eus avec l'entreprise ABC. D'abord parce que les journaux n'en parleront pas, personne ne connaît ABC. Desjardins, c'est facile, tout le monde connaît ça.

Mais je vais venir à votre question, si vous me permettez. Les plaintes déposées aux comités de surveillance, en d'autres mots, au syndic, l'équivalent du syndic, au Conseil des assurances de dommages, se répartissent de la façon suivante. Depuis 1990 jusqu'au 31 décembre 1997, sur la base des rapports annuels qui ont été déposés, il y a eu chez les courtiers 785 plaintes aux comités de surveillance – en d'autres termes en discipline – et 23 chez les agents. Et, chez les agents, ça ne comprend pas seulement Desjardins, ça comprend toutes les autres compagnies directes. Alors, ça, ce sont les plaintes déposées dans les comités de surveillance. Déposées maintenant auprès des comités de discipline, il y en a eu 171 chez les courtiers et une chez les agents pour l'ensemble du Québec. Je pourrais ajouter les réclamations reçues au Fonds d'indemnisation pour les opérations malheureuses ou... Je pense que la loi mentionne «malhonnêtes». Il y en a eu 58 chez les courtiers depuis toutes ces années – ce n'est pas énorme, compte tenu de l'envergure des transactions – mais il n'y en a pas eu chez les agents. Zéro! Quant aux réclamations qui ont été jugées recevables par le Fonds d'indemnisation, il y en a eu 29 chez les courtiers et zéro chez les agents. Ça répond?

M. Landry (Verchères): Je pense que ce sont des chiffres assez éloquents disant que la perfection n'est pas de ce monde, mais qu'il n'y a pas non plus d'institutions qui incarnent le vice.

M. Langlois (René): Non. Pas plus là qu'ailleurs.

M. Landry (Verchères): Pas plus là qu'ailleurs. Et pas moins, j'imagine.

M. Langlois (René): Pas moins.

M. Landry (Verchères): L'influence exercée par la législation québécoise, qui en est une de décloisonnement depuis nombre d'années, par rapport à l'expérience canadienne des parts de marché pour la période correspondante, est-ce que certaines comparaisons peuvent nous amener à tirer des conclusions sur le décloisonnement en termes de parts de marché? Est-ce que ma question est suffisamment claire?

M. Langlois (René): Si vous pouviez préciser, j'apprécierais.

M. Landry (Verchères): Bien, Desjardins et la caisse-assurance est une réalité au Québec depuis que Jacques Parizeau a commencé son premier train de mesures de décloisonnement. Est-ce que ça a perturbé totalement le marché de l'assurance IARD, qui est couverte par ce premier décloisonnement?

M. Langlois (René): Pas du tout. Le marché a changé de façon fondamentale. Il y a eu des mouvements extrêmement importants ici, au Québec, comme ailleurs au Canada, et, si le décloisonnement a pu permettre au Québec de renforcer nos propres institutions, ce n'est certes pas ce décloisonnement qui a amené les variations dans les parts de marché ailleurs au Canada. Il y a eu des changements fondamentaux dans les façons pour les consommateurs d'aborder la question des services financiers. C'est vrai à Vancouver, c'est vrai à Toronto, c'est vrai à Calgary, et c'est vrai aussi à Québec, c'est vrai à Montréal.

Ce que le décloisonnement a amené depuis l'intervention de M. Parizeau, à mon sens, c'est certainement de pouvoir permettre aux institutions à propriété québécoise d'être là plutôt que de ne pas y être. Et cela a permis à toutes fins utiles à l'économie de rouler davantage chez nous. On sait aujourd'hui, oui, que Desjardins représente une part de marché importante en assurance des particuliers, mais peut-être est-il préférable qu'une entreprise à propriété québécoise possède ou occupe une place importante dans ce marché plutôt qu'une entreprise hollandaise, une entreprise anglaise ou une entreprise américaine. À tout le moins, on sait que l'argent sera réutilisé dans notre propre économie. À tout le moins, je pense que le décloisonnement, s'il a permis une chose au Québec, c'est bien ça, mais les mouvements de parts de marché de façon générale n'ont pas été imputables à ce décloisonnement, puisqu'on les a connus ailleurs au Canada. Je vous ai mentionné tantôt l'étude de Wood Gundy, que je peux bien déposer également, c'est le numéro du mois d'août 1997.

M. Landry (Verchères): Je pense que Jacques Parizeau serait content d'entendre ce que vous venez de dire, c'est un hommage à son action passée. Décloisonnement, oui, mais même pour les ardents partisans du décloisonnement, dont je suis, parce que ça recoupe aussi une vision plus globale que j'ai de l'économie mondiale, même pour les ardents partisans du décloisonnement, il faut reconnaître que certaines précautions doivent être prises, et nous en prenons dans notre loi: toute la question des ventes liées, que vous avez étudiée puisque vous en parlez dans votre mémoire; à la limite, la question des lieux physiques. Mme Plamondon, par exemple, qui représente aussi des consommateurs comme vous, recommandait que l'assurance se vende dans une pièce fermée.

J'ai fait une objection qui a l'air bien matérialiste, mais ça veut dire que tous les cabinets du Québec devraient faire des modifications physiques à leurs installations pour avoir une pièce fermée, pas rien que Desjardins, puisqu'on traite tout le monde sans discrimination. Est-ce que, si on parlait d'un lieu où la discrétion peut être assurée, ça suffirait ou s'il faut vraiment parler de cloisonnement au sens matériel, comme l'entend un ouvrier de la construction?

M. Langlois (René): Vous savez, s'il est acceptable pour la collectivité que les avocats garantissent de recevoir leurs clients dans un lieu – et c'est ainsi dans notre code de déontologie, au Barreau, vous le savez – propice à assurer la confidentialité, c'est là l'élément clé. Il ne s'agit pas de déterminer si les murs doivent avoir deux pouces d'épais, des murs jusqu'au plafond ou pas, l'élément clé, quant à moi, sur cet aspect de local destiné, est l'assurance de la confidentialité. Si c'est vrai pour défendre – et on connaît l'importance du secret professionnel chez nous – c'est sûrement aussi bon chez les intermédiaires de marché qui recueillent des informations très importantes. Mais il est essentiel, au moins, que cet élément-là soit respecté. Au-delà de ça, je ne suis pas certain qu'il faille imposer aux courtiers également – fondamentalement, je pense que si on s'entend pour dire qu'on doit assurer la confidentialité des informations, on devra le faire sur toute la ligne; si le principe est bon, il est bon complètement – je ne pense pas qu'il soit sage d'aller imposer à tous les courtiers dans la province, pas plus qu'il soit sage d'imposer à toutes les institutions financières qui pourraient être appelées à faire de l'assurance dans les mois à venir ou dans les années à venir, de construire des cloisons. La question n'est pas là, c'est au niveau de la confidentialité.

(17 h 40)

M. Landry (Verchères): Bien, je ne voudrais pas abuser de vous, Me Langlois. J'en aurais d'autres questions – j'ai apprécié énormément vos réponses – mais je pense que je vais laisser la chance à mes collègues de l'opposition officielle, en particulier, dont vous contribuerez à l'édification.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Maciocia: Merci, M. le Président. M. Langlois, juste pour enchaîner un peu sur la question qu'a posée le ministre des Finances tout à l'heure, quand vous parlez de «propice à la confidentialité», pourriez-vous expliquer un peu plus?

M. Langlois (René): Bien, écoutez, je peux citer, à titre d'illustration... Puis c'est notre quotidien, à titre d'avocats. Lorsque l'on prépare un procès, vous avez tous sûrement connu les heureux corridors des palais de justice. Lorsqu'on a le malheur de devoir aller y témoigner, parce que, avant d'y témoigner, on passe souvent beaucoup d'heures dans les corridors, dans à peu près tous les palais il y a des salles réservées pour pouvoir compléter la préparation avec l'avocat. C'est vrai pour toutes les salles de cour.

Ces salles-là, écoutez, ce sont des cubicules. Il y a des palais de justice – je pense au palais de justice de Joliette, quoi qu'il y en ait un nouveau, je pense – où c'est extrêmement modeste. On ne peut pas parler de cloisons; en fait, c'était presque les toilettes. Je badine, là. Mais l'important, c'est d'avoir un lieu où la confidentialité des informations est assurée.

M. Maciocia: Dois-je comprendre que, si on vient à votre bureau d'avocat, vous n'avez pas un bureau fermé? Vous recevez des gens avec décloisonnement, pas dans un bureau fermé? Est-ce que c'est ça?

M. Langlois (René): Non, ce n'est pas ce que je dis. Que ce soit dans une étude légale ou ailleurs, que ce soit dans une institution financière ou ailleurs, ce n'est pas la hauteur des murs qui va faire la différence entre la confidentialité et l'absence de confidentialité, c'est un ensemble de facteurs: la proximité des gens autour, la nature des informations, la nature même du médium pour transmettre l'information. On pourrait parler des téléphones cellulaires, bon. On a vu, il y a quelques années, que des personnes se sont fait jouer des mauvais tours avec les téléphones cellulaires.

Ce n'est pas une question de murs, encore une fois, c'est un ensemble de facteurs. On a une jurisprudence là-dessus établie au Barreau du Québec et, dans les autres professions, je suis convaincu qu'on doit avoir la même chose qui détermine... C'est au mérite de chaque cas. Et il faut surtout s'assurer qu'on puisse adapter les pratiques à l'évolution du marché. Si on établit cette année que les murs doivent être huit pieds jusqu'au plafond, etc., dans trois ans de maintenant, cette mesure-là, on va être pris avec et ça ne fera probablement pas le travail. Et, en cela, je rejoins un peu l'approche du président de la Commission d'accès, qui est passé tantôt. À trop préciser, au fond, on ouvre des trous partout, et il faudrait éviter de faire ça. Il me semble que le rôle de la législation en ces matières, c'est d'établir des principes très clairs. Une fois que le principe clair est établi, bien, assurons-nous que les principes sont respectés.

M. Maciocia: C'est exactement ça. On va dans le même sens, Me Langlois. C'est justement que la confidentialité soit vraiment gardée d'une façon, je dirais, primordiale.

M. Langlois (René): Et l'analyse de la confidentialité, c'est une question de fait qui doit être laissée à l'appréciation des tribunaux ou du Bureau, s'il y a des écarts. Mais je ne pense pas qu'il appartienne au législateur d'aller mettre des détails sur cet élément.

M. Maciocia: Là, je pense que ce n'est pas le même avis que nous ont donné les autres organismes des consommateurs qui sont venus devant vous.

M. Langlois (René): J'en conviens.

M. Maciocia: Ils nous ont dit exactement le contraire.

M. Langlois (René): J'en conviens.

M. Maciocia: Exactement le contraire. Parfait. À la page 2 de votre mémoire...

M. Landry (Verchères): En pratique...

M. Maciocia: M. le ministre... Est-ce que vous permettez, M. le ministre?

M. Landry (Verchères): C'est la même question que vous.

M. Maciocia: Oui, mais là...

M. Landry (Verchères): En pratique, les conceptions de mobilier contemporain qu'on retrouve dans les bureaux du gouvernement, qui sont des grands panneaux capitonnés créant un cubicule, est-ce que, dans les bureaux de courtiers, dans le Bureau dont le député de Charlevoix était l'animateur naguère, est-ce que de telles cloisons assuraient la confidentialité et assurent la confidentialité raisonnablement?

M. Langlois (René): Est-ce que c'est à moi que vous posez la question ou au député de Charlevoix?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Landry (Verchères): Si notre collègue de Charlevoix veut en remettre...

M. Langlois (René): Je vous répondrais: Peut-être que oui, peut-être que non. Tout est une question de fait. Si la personne que l'on reçoit n'est pas capable de contenir son discours, les partitions de tissu, ce n'est pas indiqué.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le député de Viger, d'avoir accepté avec souplesse la question du ministre.

M. Maciocia: Aucun problème, on est dans une commission où on travaille...

M. Landry (Verchères): C'est parce que mon discours était contenu.

M. Maciocia: C'est ça. On travaille, je pense, en étroite collaboration, alors, je ne pense pas qu'il y ait des problèmes dans ce sens-là. Me Langlois.

M. Langlois (René): C'est édifiant.

M. Maciocia: Jusqu'à date, on l'a démontré et je pense que ça pourrait continuer. Je l'espère, au moins, que ça puisse continuer. À la page 2 de votre mémoire, il y a une phrase dont je n'ai pas tellement compris le sens, Me Langlois. Vous nous dites: «C'est pourquoi nous appuyons la décision du gouvernement de viser, par ce projet de loi, l'ensemble des produits financiers, y compris les contrats accessoires. Ceci réduira les inconvénients liés à la vente sans représentant dans les segments de marché où les marges ne peuvent supporter le plein service sans une augmentation excessive des prix.»

J'aurais quelques questions à poser sur ça. J'aimerais que vous m'expliquiez le sens que vous donnez aux marges qui ne peuvent supporter le plein service sans augmentation des prix et, en même temps, quand on achète un produit d'assurance-vie par un réseau sans représentant et qu'on décède, à quoi peut-on s'attendre? Est-ce qu'on va être indemnisé en totalité ou non?

M. Langlois (René): Votre question était sûrement aussi longue que ma phrase. Si vous me permettez, je vais répondre à la dernière partie et, s'il manque un bout de réponse, c'est moi... Excusez, mes adjoints n'ont pas pris les notes.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Est-ce facile de faire le consensus entre vous autres?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Langlois (René): Ce n'est déjà pas toujours facile, mais j'ai un avantage sur plusieurs de ceux qui m'ont précédé à la barre! Quand je mentionne la possibilité d'une augmentation excessive des prix qui pourrait être liée – je suis certain que vous le comprenez – à l'imposition des intermédiaires certifiés dans chacune des transactions, je vais vous donner un exemple. L'assurance-annulation-voyage. Vous prenez probablement de temps à autre l'avion pour vous rendre à Ottawa.

M. Maciocia: À Québec.

M. Langlois (René): Comme vous voulez, pour vous rendre à Québec, mais vous y êtes. Votre billet d'avion vous coûte, je ne sais pas, 300 $ ou quelque chose comme ça. L'assurance-annulation-voyage, qui vous permettrait d'être remboursé pour votre billet d'avion, si jamais votre santé vous interdisait de faire le voyage ou si un de vos proches tombait malade, va vous coûter 3 $. Je ne suis pas certain que l'on pourrait maintenir l'assurance-annulation-voyage à 3 $ si on exigeait que ceux qui la vendent, les agents de voyages, aient aussi une formation complète et aussi universelle que celle des courtiers d'assurances. C'est impensable. La certification tous azimuts, sans égard à la nature du produit, c'est une hérésie. Ça va coûter une fortune à la population.

(17 h 50)

On l'a vu tantôt, ce que l'on doit faire pour que l'assurance joue son rôle, encore doit-on en avoir. On n'en aurait pas si les prix étaient trop élevés. Alors, en certaines circonstances, pour certaines lignes de produits, c'est bien de valeur, mais il va falloir composer avec l'absence d'intermédiaires certifiés. Je ne dis pas, par ailleurs, que l'on ne devrait pas envisager des contrats minimums, des contrats types qui contiendraient les clauses minimums. Ne freinons pas le dynamisme des assureurs, qu'ils en rajoutent sur le tas, j'en suis, mais qu'on prévoie un minimum socialement acceptable.

Écoutez, en assurance-habitation, on a adopté déjà, il y a 20 ans, le bail d'habitation. Je pense que ce n'est pas un contrat qui fait problème; en tout cas, on n'entend pas énormément de critiques à l'égard du bail. Si on l'a fait pour le bail d'habitation, est-ce qu'on ne pourrait pas même l'envisager pour son accessoire, la police habitation? Je ne dis pas de mettre un frein puis dire: C'est ça, puis ce n'est pas d'autre chose, comme en automobile. Mais pour éviter les problèmes, par exemple, qui sont liés dans le cas des produits vendus sans représentant, on devrait peut-être sérieusement considérer la possibilité de prévoir un standard, une norme minimum socialement acceptable en 1998. La norme de 1998 n'est pas celle de 1980 et sûrement pas celle de 2005, mais je pense que ce serait une avenue.

M. Maciocia: Étant donné que vous avez apporté l'exemple de l'assurance-voyage, un contrat d'annulation, une assurance-annulation, ma question est spontanée: Est-ce que vous êtes d'accord avec un permis restreint?

M. Langlois (René): Je pense qu'aménager au bureau la possibilité de décréter des permis restreints est une bonne avenue, on doit maintenir cette possibilité. Et tout est relatif. Si vous me posez la question par rapport aux distributeurs sans représentant, je vous dirais: Le permis restreint, oui, sûrement, parce qu'il y a des types de produits qui ne doivent surtout pas être vendus par des personnes qui n'ont aucune formation. Puis là je pense, par exemple, à l'assurance-hypothèque. C'est déterminant, les économies de nos vies entières passent là, dans nos hypothèques. Il est déterminant donc, il est important, essentiel – et les qualifications du matin me manquent – indispensable, que l'assurance-hypothèque soit vendue par des gens qui connaissent ça. Je ne dis pas que ça doit nécessairement être des courtiers d'assurances qui ont eu les 800 heures de formation qu'on prévoit au Conseil des assurances de dommages, mais, chose certaine, ce n'est pas par une personne qui n'a aucune connaissance de cette industrie-là. La personne qui vend un produit aussi important, aussi déterminant pour la vie entière de nos concitoyens doit avoir une formation minimale pour s'assurer de bien répondre aux besoins.

M. Maciocia: M. le Président, mon autre question. À la page 6 de votre mémoire, vous soutenez l'idée de rattacher le représentant à un cabinet et de responsabiliser les cabinets pour les actes de leurs représentants. Il me vient à l'esprit une question très simple: Vous êtes vous-même un avocat, est-ce que le même modèle, si je puis dire, devrait s'appliquer aussi dans le cas des avocats? Sinon, pourquoi?

M. Langlois (René): Je ne suis pas certain qu'il est du mandat de cette commission de regarder l'ensemble professionnel. Peut-être devrait-on poser la question à l'Office et au ministre de la Justice.

M. Maciocia: Je demande votre opinion.

M. Langlois (René): Mon opinion est à l'effet que les assureurs, qui ont tous les moyens de choisir, former, retenir, alimenter, soutenir leurs représentants, devraient assumer, eux aussi, la responsabilité des actes de leurs représentants. Et il en va de même lorsque l'assureur n'en est pas un à agents, mais lorsqu'il en est un à courtiers. Les courtiers qui se retrouvent au sein d'un cabinet... Au fond, c'est le prolongement de la règle de la responsabilité de l'employeur ou du mandant. Sauf que les dispositions qui sont aujourd'hui dans le projet de loi sont beaucoup plus claires que ce que l'on a connu dans le passé ou encore que ce que la jurisprudence peut nous donner comme image. Est-ce que ça répond à votre question?

M. Maciocia: Pas tout à fait.

M. Langlois (René): Alors, puis-je vous inviter à la reformuler?

M. Maciocia: Je disais: Dans votre cas à vous, en tant qu'avocat, est-ce que ça devrait s'appliquer, le même modèle, le même...

M. Langlois (René): Mais, c'est déjà le cas. C'est déjà le cas.

M. Maciocia: Dans quel sens?

M. Langlois (René): L'assurance-responsabilité professionnelle des avocats, au Barreau du Québec, est une assurance qui couvre tous les membres du Barreau sans exception. Il n'y a pas de fonds autonome de... il y a des avocats qui sont assurés en responsabilité professionnelle.

M. Maciocia: Oui, mais vous n'êtes pas obligés d'être rattachés à un cabinet d'avocats.

M. Langlois (René): Nous ne sommes pas obligés d'être rattachés à un cabinet d'avocat, non.

M. Maciocia: Pourquoi il devrait y avoir cette différence-là?

M. Langlois (René): Je pense qu'il y a un monde entre la prestation...

M. Maciocia: Vous savez que les courtiers aussi, les agents, ont une assurance responsabilité, même eux.

M. Langlois (René): Il y a un monde entre la prestation de services professionnels et la vente de produits conçus par d'autres. Le système professionnel est basé sur la prestation des services conçus par les professionnels eux-mêmes. L'industrie des services financiers, c'est d'abord de la vente de produits financiers, et les produits ne sont pas conçus par les intermédiaires, ils sont conçus par les producteurs, les assureurs. Les courtiers ne vendent pas ce qu'ils veulent, ils vendent ce que les assureurs mettent à leur disposition. C'est deux mondes totalement différents.

Et je vais vous dire, pour compléter, M. le député de Viger... je vais revenir sur un élément mentionné en 1996. Les intermédiaires de marché ne sont pas payés pour conseiller comme le sont les professionnels des 43 ordres, ils sont payés pour vendre. S'ils ne vendent pas, quelle que soit l'étendue des conseils donnés, ils ne sont pas payés. Ça ne signifie pas pour autant qu'ils doivent vendre sans conseiller, mais ils sont d'abord payés pour vendre, pas pour conseiller. Le monde professionnel ne répond pas du tout à cette dynamique-là et je pense qu'on ferait erreur, on suivrait un chemin dangereux en tentant d'intégrer ces deux mondes qui ne se ressemblent pas.

M. Maciocia: Mais, quand même, vous vendez des informations, vous vendez des idées; en conseillant les clients, vous vendez des idées.

M. Langlois (René): Nous avons, par exemple, au Barreau du Québec, l'interdiction formelle de recevoir quelque rémunération que ce soit de nature d'une commission sur un conseil donné. Ça nous est interdit. On n'a pas le droit. On ne pourrait pas, par exemple, conseiller tel client d'acheter tel produit financier puis recevoir un chèque après, si le produit est acheté dans telle institution. On n'a pas le droit de faire ça.

M. Maciocia: Vous voulez me dire que ça n'existe pas, parmi les avocats, des avocats qui travaillent à commission.

M. Langlois (René): Ce n'est pas ce que je vous dis. Ce que je vous dis, c'est que c'est interdit.

M. Maciocia: Mais ça se fait.

M. Langlois (René): C'est vous qui le dites.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Maciocia: On se comprend, on se comprend.

M. Langlois (René): J'espère que non.

(18 heures)

M. Maciocia: O.K. À la page 9 de votre mémoire, vous écrivez que «le consommateur dispose rarement des connaissances nécessaires pour décider de façon éclairée de changer d'assureur ou de produit». Ça, c'est une citation de vous. Si je peux formuler la question: Comment pouvez-vous à la fois écrire cela dans le sens que le consommateur ne connaît pas, n'a pas les connaissances nécessaires pour décider de façon éclairée, être en même temps favorable à la distribution sans représentants?

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. Langlois, si vous permettez, juste, je dois remplir une petite formalité. Puisqu'on dépasse 18 heures, ça me prend le consentement.

Une voix: ...consentement.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Voilà! c'est fait. Ça vous a permis de prendre une gorgée d'eau en même temps. Hein! Ça fait du bien à tout le monde.

Une voix: J'ai même changé mon petit pot.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Ça n'a pas duré assez longtemps, voyez-vous?

M. Langlois (René): Je reconnais qu'il y a là un problème et c'est pourquoi, tantôt, j'ai suggéré qu'on établisse des standards minimums, socialement acceptables, quant à l'étendue des produits qui seraient vendus sans représentant. Il y a un problème, c'est certain.

Mais si on ne fait pas cela, quelle est l'alternative? Réserver toute vente de produits financiers par des représentants? Il ne s'en vendra plus. Ça va coûter trop cher.

Alors, que peut-on faire? Établir des standards minimums. Imposer, par exemple, aux distributeurs sans représentants d'imager leur produits.

Si, depuis 10 ans, Microsoft a réussi à rendre facile d'utilisation les logiciels avec les icônes, si on a réussi à rendre facile d'utilisation un logiciel aussi complexe que le DOS, il y a 10 ans, à partir d'images, je suis certain qu'on peut arriver avec un peu de bonne volonté, un peu d'effort également à mettre sur pied des produits que la population va comprendre. La population est en mesure de comprendre. Nous avons au Québec, heureusement, une population très éduquée, beaucoup plus éduquée ce que l'on retrouve ailleurs dans le monde. Il n'y a pas de raison que cette population instruite n'arrive pas à comprendre les produits qu'on lui livre. Si elle n'y arrive pas, et j'en suis, c'est que les produits sont mal conçus.

Je vais vous donner un exemple. Ma belle famille est dans la région de Saint-Jean. Vous pouvez imaginer de quoi avait l'air la maison, il y a trois semaines, un mois. La police d'assurance-locataire de ma belle-mère, je vous raconte une histoire, compte 64 pages pour un 4 1/2. À lire à la noirceur.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Langlois (René): Alors, vous allez à la page 1, la franchise est de 200 $, à la page 8, c'est rendu à 100 $, à la page 37, c'est rendu à 250 $ puis, finalement, au bout du règlement, bien, il y avait tellement de franchises qu'ils n'ont rien donné. Mais 64 pages pour une police d'assurance-locataire, ça ne tient pas debout.

Il est temps qu'on fasse quelque chose à ce sujet-là. Je ne dis pas, encore une fois, d'adopter un contrat comme celui de l'automobile qui sera universel.

Ce que je dis, c'est: Qu'est-ce qui, pour notre société, serait acceptable? Qu'est-ce qui répondrait aux attentes raisonnables de la population du Québec? Fixons ça comme balise et laissons le dynamisme des assureurs y ajouter par la suite. Peut-être alors, que la concurrence se fera ailleurs que sur le prix, tout à l'avantage des courtiers d'ailleurs.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Ça vous convient, M. le député de Viger. Ah! Si vous en avez encore une, je ne veux pas vous arrêter. Moi, j'ai le consentement. On peut filer jusqu'à 10 heures.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Baril, Arthabaska): 22 heures.

M. Maciocia: Juste une petite dernière, si vous permettez, M. le Président. Vous avez dit tout à l'heure que, probablement, ça coûterait trop cher s'il y avait toujours un représentant ou un courtier ou n'importe qui. Vous avez lu, j'imagine, ou vous avez eu l'occasion de lire le rapport Option consommateurs qui disait, à un certain moment, qu'ils avaient fait une étude, qu'une police d'assurance-vie vendue directement par la compagnie, avec le même prix que ça se vend même par une autre compagnie avec représentant, les ristournes à l'indemnisation étaient uniquement de 8 %.

M. Langlois (René): Il s'agissait des assurances sur carte de crédit.

M. Maciocia: C'est ça.

M. Langlois (René): Pas étonnant. Pas étonnant. Il y a plus d'exclusions que de couverture.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Maciocia: Mais c'est pour ça que je vous dis. J'imagine que vous n'êtes pas d'accord avec ça?

M. Langlois (René): Pas d'accord avec ce type de police là?

M. Maciocia: C'est ça.

M. Langlois (René): C'est indécent. C'est indécent. Avoir des ratios techniques de pertes de 7 %, 8 %, 10 %, ça, ça veut dire qu'à chaque fois que vous payez 100 $, l'assureur en met 90 $ dans ses poches.

M. Maciocia: C'est ça.

M. Langlois (René): C'est très bon pour le commerce. Ça, j'en conviens. Ha, ha, ha! Mais ce n'est pas pour ça qu'on est là, je pense.

M. Maciocia: Parfait.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Ça va?

M. Maciocia: Ça va.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Je vous remercie énormément, M. Langlois. Je pense que vous avez fait progresser beaucoup nos débats aujourd'hui. Je remercie également la participation des membres de la commission et, sur ce, j'ajourne les travaux sine die.

(Fin de la séance à 18 h 6)


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