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Version finale

36e législature, 1re session
(2 mars 1999 au 9 mars 2001)

Le jeudi 3 février 2000 - Vol. 36 N° 52

Examen des orientations, des activités et de la gestion de la Commission des valeurs mobilières du Québec


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Table des matières

Exposé sur la restructuration de la Bourse de Montréal

Exposé sur la vision stratégique de la Commission des valeurs mobilières du Québec (CVMQ)

Remarques finales


Autres intervenants
M. Normand Duguay, président suppléant
Mme Fatima Houda-Pepin
M. Serge Geoffrion
Mme Diane Leblanc
*Mme Carmen Crépin, CVMQ
*M. Daniel Laurion, idem
*M. Guy Lemoine, idem
*M. Jacques Labelle, idem
*M. Jean Lorrain, idem
*M. Denis Dubé, idem
*Mme Diane Joly, idem
*Mme Linda Levasseur, idem
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Neuf heures trente-sept minutes)

Le Président (M. Simard, Richelieu): Nous allons commencer nos travaux. La commission des finances publiques, vous le savez, est réunie aujourd'hui pour la deuxième journée afin de poursuivre l'examen des activités, des orientations et de la gestion de la Commission des valeurs mobilières du Québec en vertu de l'article 294 des règles de procédure de l'Assemblée nationale. Alors, bonjour, tout le monde. Nous sommes heureux de reprendre, ce matin.

Je pense qu'il n'y a pas de remplacements, M. le secrétaire.

Le Secrétaire: Non, M. le Président, il n'y a aucun remplacement.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Ainsi que nous l'avions convenu au tout début de nos travaux, le thème abordé ce matin sera celui de la réorganisation de la Bourse de Montréal et toutes les questions qui entourent cela, évidemment non pas en fonction de l'effet de cette décision sur l'économie québécoise, sur le gouvernement du Québec, sur la Bourse, mais sur l'action de la CVMQ, parce que c'est la CVMQ qui est ici. J'ai donc l'impression qu'il y aura beaucoup de questions et que certaines auront des réponses. D'autres seront moins précises parce que nous sommes dans un sujet en évolution, si j'ai bien compris.

Alors, peut-être que nous allons d'abord vous demander de présenter vos remarques à ce sujet, pour ensuite réagir.


Exposé sur la restructuration de la Bourse de Montréal

Mme Crépin (Carmen): D'accord. Ce que j'avais pensé faire, peut-être, c'est un rappel des principales dates et des principales décisions simplement pour, dans le fond, qu'on puisse discuter de la situation actuelle en perspective avec ce qui s'est passé. Donc, c'est assez bref. On peut donc rappeler qu'en mars 1999 la CVMQ a été saisie d'un projet de restructuration des marchés boursiers canadiens qui avaient été initiés par les bourses elles-mêmes. En vertu de ce projet, les bourses se spécialisent à l'intérieur du marché canadien: Toronto dans les grandes capitalisations, la Bourse de l'Ouest dans les petites et Montréal dans les produits dérivés.

Les objectifs du plan mis de l'avant par les bourses étaient d'une part de réduire leurs coûts de fonctionnement, d'augmenter la compétitivité internationale du marché canadien avec une restructuration qui visait à donner une efficacité plus grande au marché canadien et de répondre aux besoins de leurs diverses clientèles, notamment la fragmentation du marché. C'est un phénomène qui faisait en sorte que, avant la restructuration, par exemple, un investisseur qui voulait acheter des titres de BCA pouvait avoir un prix différent s'il s'informait pour faire sa transaction à Toronto, ou à Vancouver, ou à Montréal. Donc, cet effet-là, avec la restructuration et la spécialisation, on ne le retrouve plus, et c'est quand même à l'avantage de la clientèle, puisque la clientèle est sûre qu'elle a un prix et que, si le marché fonctionne bien, le prix qui lui est offert, c'est le meilleur.

(9 h 40)

Le rôle de la CVMQ, dans ce contexte-là, c'était donc d'analyser le projet de restructuration en fonction des aspects réglementaires qui étaient impliqués et de sa propre mission, de voir au bon fonctionnement des marchés et à la protection des investisseurs. Ce qui était le rôle de la CVMQ à l'intérieur de la décision, ce n'était pas d'analyser le bien-fondé ou les aspects commerciaux ni d'examiner le projet en fonction des politiques économiques; le rôle de la CVMQ était de se prononcer sur le projet, de l'approuver ou de le refuser. Ce n'était pas à l'intérieur de sa mission de penser à élaborer un projet différent, elle avait à apprécier à l'intérieur de sa mission le projet élaboré par les bourses.

C'est donc dans ce contexte-là que la Commission a rendu sa décision, en juin 1999, où elle approuve le projet, mais où elle a mis un certain nombre de conditions que la CVMQ estimait de nature à respecter sa mission, c'est-à-dire – à l'époque, ce n'était pas fait – que le projet reçoive l'aval de chacune des bourses concernées, que la Bourse de l'Ouest, CDNX, soit constituée – ça requérait une législation des Législatures de l'Alberta et de la Colombie-Britannique – que la CVMQ puisse approuver toutes les ententes accessoires liées à ce projet de réorganisation, que la CVMQ reconnaisse la Bourse de Toronto et la Bourse de l'Ouest au même titre qu'elle reconnaissait déjà la Bourse de Montréal et qu'elle avait une juridiction à l'égard de la Bourse de Montréal, et que, au niveau des deux autres bourses concernées, on puisse avoir un bureau régional à Montréal avec certaines caractéristiques. Les caractéristiques visaient également à permettre de maintenir la juridiction de la Commission, sa juridiction à l'égard des émetteurs et des investisseurs du Québec.

C'est pour ça que la CVMQ a dit que ces bureaux de la Bourse de Toronto, par exemple, devaient avoir un pouvoir décisionnel, se doivent d'être des bureaux permanents et autonomes, que la nature et la qualité des services offerts, par exemple, par la Bourse de Toronto à Montréal doivent être les mêmes que pour les services qui étaient offerts par la Bourse de Montréal aux entreprises qui peuvent être transférées, que ces bureaux doivent offrir des services en français, être composés d'instances décisionnelles formées d'une majorité de personnes qui résident au Québec et que leurs décisions doivent être révisables par la CVMQ, et également que, par exemple, la Bourse de Toronto doit se doter d'une structure de régie d'entreprise, pour ces bureaux de Montréal, avec une représentation québécoise appropriée.

Les impacts et les enjeux qui sont sous-tendus avec cette décision. Premier impact: au niveau des produits dérivés, on sait que le succès en cette matière dépend davantage de la qualité du produit que de la quantité. À l'égard des nouveaux produits, le rôle et la nature du travail qui est fait par la CVMQ – on en a déjà discuté un petit peu hier – ne changent pas parce que, effectivement, c'est une activité qui va s'exercer en continuum. Cependant, la spécialisation bien sûr implique que le volume d'activités sera plus grand, qu'on verra apparaître de nouveaux produits et donc que nous devrons augmenter la compétence de nos ressources et éventuellement embaucher de nouvelles ressources pour être capables de suivre cette évolution.

Au niveau des marchés canadiens, la restructuration qui a été proposée par les bourses s'inscrit dans un contexte de mondialisation, et c'est dans ce contexte-là qu'il faut apprécier le projet. À partir du moment où on restructure le marché canadien avec des entités qui se spécialisent, sur le plan réglementaire, la spécialisation appelle beaucoup d'éléments de concertation et d'harmonisation entre les commissions de valeurs. Ça, les médias n'en ont pas parlé, mais, à partir du mois de juin, beaucoup de discussions ont eu lieu entre les commissions pour arriver à retenir un mode de supervision où chacune conserve sa juridiction – et notamment la CVMQ – mais, en même temps, le fait de façon à ne pas créer un fardeau indu sur les bourses concernées.

L'impact de cette restructuration au niveau des émetteurs du Québec. Je pense que la restructuration ne modifie aucunement le rôle de la CVMQ à l'égard de l'ensemble des émetteurs du Québec. Les préoccupations de la CVMQ à leur égard sont constantes et elles se retrouvent dans toutes les activités de supervision que la CVMQ pourra exercer à l'égard des nouvelles bourses, comme elle les exerçait déjà à l'égard de la Bourse de Montréal. La recherche de financement, les montages financiers, avec les conditions mises de l'avant, font en sorte que les émetteurs peuvent continuer à travailler avec les courtiers, les avocats, les comptables du Québec avec lesquels ils faisaient affaire. C'est l'inscription, par la suite, qui peut appeler des modalités différentes, mais, pour l'entreprise, dans son travail de préparation, dans l'expertise sur laquelle elle s'appuie, il n'y a pas de changement. L'avantage aussi – et c'est pourquoi cette exigence-là apparaît dans la décision de la CVMQ – d'un bureau de la Bourse de Toronto à Montréal, par exemple, c'est que l'émetteur pourra s'adresser directement à une personne physique à proximité. Il pourra le faire en français pour tous les services que la Bourse doit lui dispenser.

Pour les épargnants du Québec, cette restructuration-là, en principe, ne change rien, puisque le lieu physique de l'inscription ne modifie pas la capacité de l'investisseur de faire des transactions. Le premier contact et la personne avec laquelle l'investisseur interagit, c'est son courtier. Le courtier, lui, par la suite, bien sûr, aura des liens électroniques et des lieux électroniques d'exécution différents.

C'est important de préciser que ça fait partie aussi des raisons pour lesquelles la CVMQ a insisté, dans sa décision, pour que le bureau régional offre des services en français. C'est donc important, les investisseurs ont le droit de faire des plaintes à une Bourse qui est reconnue par la CVMQ. Donc, ils doivent pouvoir s'adresser à eux dans leur langue. Et la CVMQ, lorsqu'elle a reconnu une Bourse comme OAR, peut entendre en appel certaines des décisions qui sont rendues si le plaignant n'est pas satisfait.

La situation actuelle, pour l'instant, au niveau de la Bourse de Montréal. La Bourse de Montréal, donc, même si elle se spécialise, conserve son statut d'organisme d'autoréglementation reconnu par la CVMQ. Elle va se faire reconnaître en Ontario, par exemple. Nous savons que des travaux sont en cours pour vraisemblablement accueillir à partir du mois de mars tout le marché des options qui était à Toronto et dont le transfert doit se faire en vertu de l'entente de restructuration. La Bourse de Montréal est en négociation avec le réseau Globex pour un lien électronique, un accès international à un marché de produits dérivés, et, depuis l'automne et jusqu'à ce que la Bourse de Toronto ait loué ses locaux et recruté du personnel, c'est par entente de services entre la Bourse de Toronto, par exemple, et la Bourse de Montréal que la Bourse de Montréal offre des services aux entreprises et aux émetteurs du Québec par le biais d'employés de la Bourse de Montréal. Maintenant, la Bourse va être prête à avoir ses propres locaux, ses propres employés, mais, dans l'intervalle, l'entente de services avec la Bourse de Montréal visait à faire en sorte que les émetteurs continuent à avoir un interlocuteur.

(9 h 50)

Au niveau de la Bourse de Toronto, en décembre, la CVMQ a accordé une dispense de reconnaissance temporaire à la Bourse de Toronto parce que la demande de reconnaissance va avec l'examen détaillé de l'ensemble des règles de fonctionnement. La Bourse de Toronto a amorcé un processus de démutualisation qui devrait se traduire par une législation au mois de mars. Donc, l'approbation officielle, nous pourrons la faire avec les nouveaux documents constitutifs et les règles qui seront modifiées. Pour la demande de dispense de reconnaissance temporaire, on pouvait procéder avec les règles actuelles, avec lesquelles nous étions déjà passablement familiers. Nous sommes à examiner l'ensemble des nouvelles règles qui devront faire partie de la reconnaissance officielle, et, bien sûr, nous suivons de près ce qui se passe avec la Bourse de Toronto quant à l'ouverture de son bureau régional, et, s'il y a des ententes accessoires que nous devons approuver, nous nous assurerons que nous les recevons en temps opportun pour être capables de les analyser avant de devoir le faire.

Au niveau de la Bourse de l'Ouest, la Bourse de l'Ouest a conclu un contrat d'impartition de la plateforme électronique avec la Bourse de Montréal. Cela s'est fait au mois de décembre. Donc, c'est un système électronique. Par ailleurs, en ce qui concerne les activités que la Bourse de l'Ouest pourrait exercer à Montréal, les discussions sont encore en cours entre la Bourse de l'Ouest et la Bourse de Montréal et nous attendons de voir quels sont les services que la Bourse de l'Ouest pourra offrir pour déterminer la nature des approbations que nous devrons donner. Ça, c'est la toile de fond.


Discussion générale

Le Président (M. Simard, Richelieu): Alors, c'est une lecture intéressante de la toile de fond que nous avons tous vécue au cours de l'année 1999, avec tous ces rebondissements, ces prises de position et ces décisions. Nous allons donc procéder à un certain nombre d'échanges avec vous. Je vais inviter d'abord le député d'Abitibi-Ouest à vous poser un certain nombre de questions, et je me permettrai peut-être aussi de vous en poser quelques-unes.


Garanties exigées pour l'approbation de la restructuration

M. Gendron: Certainement, si vous voulez enrichir le débat, M. le Président. C'est évident, Mme la présidente – merci de la présentation – qu'il s'agit d'un sujet qui a intéressé énormément tous les intervenants financiers. Il s'est dit passablement de choses, et je pense qu'on pourrait refaire effectivement plusieurs débats sur des aspects plus liés au contexte financier. Mais, moi, puisqu'on vous reçoit ce matin, j'aimerais mieux, dans un premier temps, en tout cas, tenter de rester dans vos responsabilités et l'espèce d'analyse qui a été faite par la Commission des valeurs mobilières sur le projet de restructuration.

Lorsque la Commission des valeurs mobilières a dit oui, elle a posé un certain nombre de conditions. Et ce serait peut-être ma première, très générale, puis j'aurai des questions plus spécifiques après. Moi, l'inquiétude que j'ai et que tout le monde... Il ne fallait pas être grand clerc pour dire c'est qui... Tu sais, la CVMQ donne le feu vert au projet mais pose... Que ce soit sept ou neuf, ça dépend comment on décortique vos affaires. Moi, je me fous du nombre, mais ma préoccupation, c'est: Qui va s'occuper concrètement de faire respecter ces conditions-là et quelles garanties nous avons, nous, les Québécois, que, pour les conditions posées, vous avez les outils qu'il faut, la réglementation qu'il faut pour s'assurer qu'il y aura des coups de baguette qui pourront se donner, si c'est ça qu'il faut donner, il y aura des correctifs qui seront apportés à des décisions qui n'iront pas dans le sens des engagements pris?

Parce que, si on fait la lecture que, au niveau du financier, globalement, c'est très questionnable et qu'on reste avec un tout petit... Si, en plus, les conditions sur lesquelles vous vous êtes appuyés pour donner votre accord, après analyse, étant l'instance appropriée pour conseiller le gouvernement, nous indiquaient qu'il y en a peu qui pouvaient être respectées, on serait drôlement déçus. Alors, moi, ce matin, j'aimerais ça savoir... Et je ne veux pas nécessairement qu'on reprenne chacune des conditions, mais vous êtes assez habitués avec ce dossier-là, vous aviez au moins trois, quatre conditions légitimes pour donner votre accord, qui venaient atténuer les inquiétudes et les pertes que le Québec pourrait subir globalement. Alors, qu'en est-il exactement? Quels sont les moyens que vous avez et quelles sont les garanties que vous avez qu'à ce chapitre nous serons préservés?

Mme Crépin (Carmen): Les conditions visent à faire en sorte que la CVMQ puisse être capable de continuer à remplir son rôle face aux émetteurs puis aux investisseurs du Québec à l'égard des nouvelles bourses, comme elle le faisait à l'égard de la Bourse de Montréal. Donc, à l'égard de la Bourse de Montréal, ce rôle-là s'exerçait, un, par la formalité de la reconnaissance. Avec la formalité de reconnaissance, il faut approuver toutes les règles de fonctionnement. Il faut également approuver toutes les règles de fonctionnement lorsque la Bourse décide d'y apporter des modifications. La supervision s'exerce aussi par des pouvoirs d'inspection et d'enquête sur un organisme reconnu avec les sanctions possibles qui sont là. Donc, les conditions visent à transposer, dans le fond, ce que la CVMQ pouvait faire à l'égard de la Bourse de Montréal à l'égard des autres bourses.

C'est pour ça aussi qu'on dit qu'il faut faire en sorte que toute la juridiction de la CVMQ puisse être respectée, que la restructuration n'opère pas, avec un changement de lieu physique, un transfert de juridiction à l'égard d'entreprises ou d'investisseurs du Québec, et ça, on est en train de travailler pour s'assurer que les conditions sont respectées. Le dossier bouge à toutes les semaines parce que je pense que ce qui a été discuté, c'était comme un cadre global. Tranquillement, nous, au fil des semaines, on entre dans le détail des choses à examiner.

M. Gendron: Oui, mais, Mme la présidente, quand vous dites: On est en train de travailler pour s'assurer que nous ayons les mécanismes de contrôle – je vais appeler ça de même – pour que les conditions posées soient respectées, ça fait déjà plusieurs semaines que la décision est prise, le dossier est derrière nous, est-ce que, à ce moment-ci, vous avez des indications qu'il y aurait du glissement déjà à certains égards par rapport à des conditions posées ou sinon si ça va bien? Et, selon les échanges que vous avez avec les autres bourses, que ce soit celle de Toronto ou particulièrement celle de l'Ouest, parce que, elle, elle me préoccupe davantage, compte tenu qu'elle partait d'à peu près rien puis avec aucune règle – ça, c'est résumé court, mais c'est à peu près ça pareil – alors j'aimerais ça avoir plus de précisions là-dessus, puisque vous devriez avoir une position précise, en particulier concernant la Bourse de l'Ouest, surtout en matière d'autoréglementation, parce qu'il faut se rappeler que l'objectif, c'était qu'on filait inquiets, globalement, par rapport à la qualité optimale d'une telle Bourse liée aux intérêts de nos investisseurs, et particulièrement du volet minier, moi, qui me préoccupe beaucoup, sachant que tout ce qui était rejeté à Toronto pouvait être bienvenu à Vancouver, dans l'Ouest.

Le Président (M. Simard, Richelieu): ...

M. Gendron: Pardon?

Le Président (M. Simard, Richelieu): Dans quelles conditions?

M. Gendron: Oui, oui, mais c'est ça. Je veux dire, ça reste... Eu égard à la qualité, c'est questionnable, en tout cas.

Mme Crépin (Carmen): Allons-y, d'abord, par exemple, avec la Bourse de Toronto. Bon, en décembre, on a été capables de donner une reconnaissance à la Bourse temporaire – cette reconnaissance est établie jusqu'au 31 mars – une reconnaissance temporaire parce que, les règles de la Bourse de Toronto, on les a réexaminées, mais on les connaissait déjà. Pourquoi la reconnaissance est temporaire? D'abord, on sait qu'il y a un changement de statut, qu'il y a des documents constitutifs, et ça nous donne le temps... C'est un travail qui se fait présentement. On a un comité à l'interne qui examine ça. Si la Bourse de Toronto adopte, avec son changement de statut, de nouvelles règles, il faut qu'on les regarde en fonction des intérêts et des besoins des émetteurs du Québec, et, dans les discussions qu'on a avec elle, s'il y a des règles qui ne font pas notre affaire, on le lui dit puis on discute avec elle: Ça, on n'aime pas ça, arrivez avec autre chose si vous voulez avoir votre approbation. Ça, ce travail-là, je dirais, va bien avec la Bourse de Toronto.

Au niveau de la Bourse de l'Ouest, il faut se rappeler que c'est une fusion, et les autorités réglementaires, dans l'Ouest, se sont départagé – Alberta et Colombie-Britannique – la supervision de la nouvelle Bourse. Bon, les deux bourses concernées avaient des règles, là la nouvelle Bourse de l'Ouest a des règles. Compte tenu de ces règles, il faut le regarder en détail.

Peut-être que M. Laurion pourrait vous redonner un petit plus l'historique, là, comment c'était, les deux bourses, puis la fusion, qu'est-ce qu'on retrouve maintenant.

(10 heures)

M. Laurion (Daniel): Les règles de la Bourse fusionnée sont, en fait, une fusion des règles des deux bourses qui étaient là, à Vancouver et en Alberta. Cependant, vous parliez de la qualité du marché. Il faut comprendre que le marché de compagnies à petite capitalisation est fort différent du marché des sociétés seniors. La dynamique est différente. En plus de ça, l'organisation technique du marché dans l'Ouest est différente. Il y a un certain nombre de caractéristiques d'organisation du marché qui sont différentes de celles qu'on connaissait à Montréal et à Toronto, ça demande une analyse importante. Il faut également comprendre qu'au cours des cinq dernières années la Bourse de Vancouver en particulier a développé de façon extrêmement importante ses capacités de surveillance du marché. On le voit lorsqu'on regarde les activités disciplinaires de l'organisation et des commissions qui les supervisent, et ces activités disciplinaires là sont très nombreuses. Il est évident cependant que c'est toujours des titres spéculatifs, et qui dit spéculation dit des efforts de surveillance très particuliers. Nous pensons que ces efforts-là sont consentis, présentement. Il est évident que, dans le cours de nos discussions avec eux, c'est un élément important. Il faut que les efforts continuent d'être là, et les efforts de supervision également de la part des commissions.

M. Gendron: Sur le volet, là, que, dès aujourd'hui, vous auriez des indications qu'un certain nombre de conditions ne seraient pas respectées, vous ne m'avez pas répondu, donc c'est...

Mme Crépin (Carmen): O.K.

M. Gendron: Allez-y donc.

Mme Crépin (Carmen): Donc, à partir de ces travaux-là, c'est évident que nous devrons nous positionner, comme Commission, sur quelles sont les modalités optimales de reconnaissance ou quels sont les moyens techniques prévus dans la loi que nous devrons retenir et qui sont compatibles avec notre décision.

Là où vous avez raison aussi, c'est que, si l'on s'apercevait, effectivement, qu'il y a des éléments de notre décision qu'on n'est pas capables de rencontrer – parce que tout ça n'est pas statique; il y avait un portrait au mois de juin, le portrait réel aujourd'hui, il est fort différent de celui qu'il y avait au mois de juin; il y a une multitude d'interlocuteurs, même dans le dossier, qui ont changé – je pense qu'il nous appartiendrait, comme Commission, de dire: Bon, bien là, notre décision, est-ce que nous devons la réviser? Et, si on la révise, c'est comment? Et ce processus-là, si on fait ça, aussi ça implique quand même une démarche qui doit être communiquée et rendue publique.


Arrivée du marché des produits dérivés

M. Gendron: Et je voudrais – parce que le temps file – regarder un peu aussi la question de ce qu'il nous reste, là, qui est l'exclusivité canadienne du secteur des produits dérivés. Comment la CVMQ est en mesure de faire face à cette nouvelle situation qui est un marché à bâtir, à définir pour nous, même s'il existait ailleurs – il existait aux États-Unis? Et est-ce que vous avez un avis à l'effet que le développement qu'on dit très en croissance mais hors Bourse... C'est plus ça qu'on sent, là, très en croissance, mais hors Bourse. Partagez-vous cet avis-là? Première question, j'aimerais ça avoir votre point de vue là-dessus. Puis, deuxièmement, bien, que ce soit oui ou non sur l'avis que je viens d'émettre, là, que c'est surtout hors Bourse en termes de phénomène de croissance, comment la Commission des valeurs est en mesure de faire face à cette nouvelle situation là de l'arrivée des produits dérivés?

Mme Crépin (Carmen): À l'heure actuelle, il y a à peu près une quinzaine de produits dérivés qui ont déjà été développés par la Bourse de Montréal. Je m'excuse du jargon, là, mais c'est les BAX, les CGF, les CGB. Il y a déjà aussi des exigences bien précises pour exercer dans ces produits-là. Donc, ça, ce sont des sujets sur lesquels la Commission s'est déjà penchée. C'est depuis 1988 que la Bourse de Montréal a commencé à développer des produits dérivés et que la CVMQ l'accompagne dans sa démarche. Alors, oui, on se prépare à faire face à un accroissement de volume, ça, c'est certain.

Maintenant, pour ce qui est du développement possible des produits dérivés hors Bourse, ça, M. Laurion, si vous faisiez un petit commentaire là-dessus?

M. Laurion (Daniel): Il faut comprendre que, les produits hors Bourse – vous avez raison en disant qu'il y a des sommes faramineuses qui passent dans ces produits-là – ce sont très principalement des institutions financières qui utilisent ces produits-là. En fin de compte, ce sont des arrangements particuliers. Lorsqu'on parle de swaps de taux d'intérêt, par exemple, ou de divers échanges, c'est vraiment une négociation bipartite où deux institutions ont des positions qui sont complémentaires ou à l'opposé et où on décide de faire un contrat entre les deux. Ces choses-là vont toujours exister.

On peut penser qu'un certain nombre de ces produits-là, avec les années, se standardisent. Dans la mesure où ils se standardisent, il y a une possibilité de plus en plus intéressante de les intégrer au marché boursier, au marché public qui, lui, offre des produits qui sont standardisés, qui ne sont pas faits pour une position en particulier. Alors, il y a toujours un mélange des deux. Les institutions utilisent les deux marchés, mais, évidemment, c'est plus simple de faire une opération avec une autre banque, une banque canadienne, avec une banque suisse, et on s'échange quelques centaines de millions en valeurs sous-jacentes d'un contrat, chose qui serait impensable à faire en Bourse.

Mme Crépin (Carmen): Juste un élément de précision additionnel. Au Service des OAR, à la Commission, à l'heure actuelle, il y a huit postes occupés, un poste vacant. Dans notre nouveau plan d'effectif, on compte ajouter 11 personnes à l'égard de la juridiction sur les organismes d'autoréglementation.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Une dernière question.

M. Gendron: Oui, parce qu'il me reste une petite minute.

Le Président (M. Simard, Richelieu): La députée de Beauce-Sud n'est pas ici, présentement.

M. Gendron: Elle est là. Elle accepte pour ma petite minute?

Le Président (M. Simard, Richelieu): Il te reste 30 secondes.

M. Gendron: Trente secondes. Quant aux produits dérivés, là, c'est parce qu'on dit: C'est un marché à forte croissance. O.K.? Puisque vous venez de commenter, j'aimerais avoir votre point de vue. Est-ce que vous partagez l'information que c'est à forte croissance sur le plan mondial? Parce que, nous, au Canada, on n'a pas cette habitude-là et on est très loin de la progression ailleurs. Et, quand on dit «marché en forte croissance», un, hors Bourse et externe au Canada, vous n'êtes pas inquiète? Je voudrais avoir un avis là-dessus. Moi, je prétends que, même si on tente de le développer à mort, il n'y a pas tant de potentiel que ça. C'est quoi, votre avis là-dessus?

M. Laurion (Daniel): Le volume sur la Bourse de Montréal actuellement sur ses produits dérivés provient à plus de 50 % d'étrangers, de non-Canadiens. En plus de ça, la signature de l'entente au niveau du réseau Globex par la Bourse de Montréal est un élément extrêmement important de sa stratégie à plus long terme. Ce que cette entente-là permet de faire, c'est vraiment de donner accès des produits de la Bourse de Montréal aux divers marchés qui font partie de ce réseau-là, et on parle de Chicago, on parle de Paris, on parle de Singapour et de São Paulo, actuellement. Alors, c'est vraiment une fenêtre internationale extrêmement importante.

Ça protège en même temps les produits de la Bourse de Montréal, parce que ce que cette entente-là fait, au-delà d'une technologie commune, c'est dire: Moi, Chicago, je ne développerai pas de produits qui vont entrer en concurrence avec toi, Montréal, parce que mes gens ici auront accès à ces produits-là via notre entente. Alors, oui, au plan international, il y a un grand développement. Il faut tabler là-dessus. La Bourse prend les mesures pour le faire, et on a tout lieu d'être confiant que la croissance qui est là va se réaliser.

Au niveau canadien, historiquement, les gestionnaires de fonds canadiens ont toujours été très prudents, mais il y a un développement de l'utilisation des produits dérivés qui arrivent, qu'on parle des fonds communs de placement, qui vont commencer à les utiliser davantage. Les règles s'assouplissent à ce niveau-là. Les grandes institutions financières, les compagnies d'assurances, les fonds de pension ont commencé à apprivoiser ça avec les années. Ça va se développer. Les possibilités de stratégie intéressante sont là, et je pense qu'encore une fois il va s'agir, pour la Bourse, de faire son marketing de façon efficace pour inviter les institutions à utiliser davantage les produits.

Le Président (M. Simard, Richelieu): D'où je conclus que vous y croyez.

M. Laurion (Daniel): Personnellement, oui.

Le Président (M. Simard, Richelieu): J'ai bien compris. Ça ne coûtera pas le 10 000 000 $ qui avait été prévu, par contre.

M. Laurion (Daniel): 10 000 000 $?

Le Président (M. Simard, Richelieu): Dans l'entente, il y avait 10 000 000 $ qui avaient été prévus pour l'achat de – comment s'appelait-elle? – OM...

M. Gendron: La plateforme électronique.

Le Président (M. Simard, Richelieu): ...la plateforme électronique. Ça s'est avéré gratuit, finalement. J'espère...

Une voix: Il n'y a rien de gratuit.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Non, il n'y a rien de gratuit.

(10 h 10)

M. Laurion (Daniel): En fait, à la Bourse de Montréal, actuellement, la plateforme OM n'est pas une plateforme compatible avec le réseau Globex. Alors, il faut comprendre qu'il y a des négociations par rapport à la technologie au niveau du réseau Globex. Bien sûr que ces négociations-là auront une influence sur l'entente canadienne avec Toronto, mais les gens de Toronto, de la Bourse de Toronto, non seulement comprennent, mais sont très favorables à ce que l'entente avec le réseau Globex se réalise. Alors, c'est quelque chose qui devra être discuté, qui n'est pas complété présentement mais qui devrait se compléter dans les prochaines semaines.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Donc, aujourd'hui, la CVMQ croit fermement que ça va fonctionner.

Mme Crépin (Carmen): Je ferais une nuance. La CVMQ a approuvé le projet d'entente, elle a mis des conditions, et son rôle, c'est de s'assurer que les conditions qu'elle a mises seront respectées parce que ces conditions-là s'adressent aux émetteurs et aux investisseurs du Québec. Comme je l'ai dit tantôt, les coûts que les bourses se font entre elles, l'aspect rentabilité, ce n'est pas ce que la Commission regarde; ce qu'elle regarde, c'est le bon fonctionnement du marché et la protection des émetteurs et des investisseurs qui y sont.

Le Président (M. Simard, Richelieu): On y reviendra. J'aurais une question complémentaire immédiate.

Mme Crépin (Carmen): D'accord.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Oui. Merci. Si vous permettez, vous l'admettez vous-même, une forte partie de ces produits dérivés se font déjà hors Bourse. La Bourse, dans ce domaine-là, n'est pas simplement un lieu de transactions mais un fournisseur de transactions. Elle crée un produit qu'elle vend. Est-ce que vous ne pensez pas qu'une large partie de ce secteur des dérivés va échapper, par définition, à votre champ de contrôle parce qu'ils vont se passer hors Bourse, hors contrôle?

Mme Crépin (Carmen): Je ne penserais pas qu'on puisse conclure ça maintenant. Si vous regardez, par exemple, à l'heure actuelle, à la Bourse de Montréal, les transactions sur le seul produit BAX, il y a 30 000 $ par jour de valeurs sous-jacentes de 1 000 000 $, ce qui veut dire qu'il y a 30 000 000 000 $ de valeurs qui se transigent quotidiennement à la Bourse de Montréal sur un seul produit, et il y a plusieurs études qui ont été faites sur le fait qu'un marché... Chaque marché doit être attrayant à l'échelle mondiale, puisqu'on est dans un contexte de mondialisation. Donc, la restructuration des bourses vise à augmenter l'efficacité du marché canadien. Il y a plusieurs études auxquelles on a eu accès qui disent, par exemple, qu'un marché efficace doit nécessairement comprendre un bon marché de produits dérivés.

C'est évident, je pense que, dans toutes les discussions que nous avons avec la Bourse de Montréal, les dirigeants en sont conscients, que le défi de prendre leur place dans ce marché, il est très grand, et ils le savent. D'ailleurs, les journaux en font état, la Bourse recherche activement un nouveau président. C'est évident que le choix de ce nouveau président va nous donner un signal par rapport à leur volonté d'aller de l'avant avec ça. Mais le défi, il est là. Notre rôle consiste à les suivre et à faire en sorte que les approbations qu'on donne aux nouveaux produits qui sont développés sont compatibles avec les intérêts des émetteurs d'ici.

Le Président (M. Simard, Richelieu): On va avoir l'occasion de se reparler tout à l'heure. Je m'excuse. Je remercie d'ailleurs...

Mme Jérôme-Forget: Je vais suivre un peu ce que le président a abordé, pour ensuite revenir à une autre question. Les produits dérivés, c'est comme le domaine de la réassurance. D'accord? C'est un produit qui s'adresse principalement à des investisseurs très avertis, à des grandes entreprises, à des compagnies d'assurances, à des gens qui veulent protéger des sommes très importantes, et, au départ, le produit dérivé était un produit «custom-made», à la carte. C'était moi qui trouvais quelqu'un qui me donnait une garantie, une protection, comme dans le domaine de la réassurance on va se réassurer contre les ouragans, on va se réassurer contre des désastres. Mais, au départ, le produit dérivé était un produit pour me protéger, pour protéger mon avenir.

Faisant référence à ce qui s'est passé hier, voyant les marchés qui sont si volatiles dans le moment, il y en a plusieurs qui veulent justement protéger leurs épargnes et donc qui vont prendre un produit pour... Vous parliez justement...

Une voix: BAX.

Mme Jérôme-Forget: ...pas du BAX mais des produits des mutuelles. Des gens comme ça vont vouloir se protéger. Alors, je pense que c'est exact qu'il va toujours y avoir une partie qui échappe parce qu'il y a des gens qui travaillent dans les produits dérivés et qui ne travaillent pas dans des «packages». Parce que, nous, ce qu'on offre, ce en quoi on veut se spécialiser à la Bourse de Montréal, ce sont des produits, d'accord, qu'on vend à des milliers d'exemplaires, d'où l'attrait économique de vendre des produits comme ça.


Investissements dans les petites entreprises

Moi, je voudrais revenir à autre chose qui est votre mission et qui demeure votre mission. Il y a une partie des entreprises – je pense que c'est à un capital inférieur à 4 000 000 $ – qui vont demeurer à la Bourse de Montréal. Moi, j'ai eu de l'information de gens qui ont travaillé à la Bourse, d'anciens vice-présidents, et qui me disaient que le domaine le plus dangereux pour les épargnants, ce dont parlait le député de La Prairie, ce sont précisément ces petites entreprises où les gens investissent et où la Bourse de Montréal ou la Commission des valeurs mobilières n'investit pas beaucoup de ressources pour les surveiller parce que ce sont des petites entreprises, qu'il y en a plusieurs, et donc on ne met pas les ressources. Et là, justement, on me disait que c'est l'endroit où les épargnants sont les plus vulnérables parce qu'on n'a pas fait des prospectus d'envergure, parce qu'on n'a pas fait le suivi. Qu'est-ce que vous dites de ça?

Mme Crépin (Carmen): Je pense que c'est important de rappeler qu'à l'égard des émetteurs, quand une entreprise, peu importe le secteur d'activité, veut venir chercher du financement au Québec, notre rôle, c'est de donner des approbations sur le contenu du prospectus ou de la notice d'offre. Donc, ce n'est pas pour rien que, fonction des secteurs, premièrement, on fait notre travail, mais nos exigences doivent être grandes dans les éléments du prospectus qui concernent la divulgation des risques, et ça, c'est vrai pour tous les secteurs, peu importe la taille de l'entreprise ou son financement. Lorsqu'on approuve un prospectus, il faut qu'on s'assure que l'information, elle est complète, elle est claire, elle est compréhensible par la personne auprès de laquelle on recherche un financement. Plus le secteur est risqué, plus il faut que le prospectus fasse ressortir les risques inhérents à l'activité et les chances que le placement qui est recherché va permettre à l'entreprise de croître.

Deuxièmement, ça fait aussi partie des raisons pour lesquelles, au niveau des ACVM, on veut justement s'engager à l'intérieur d'un régime d'information continue, c'est-à-dire qu'on fait déjà un travail pointu d'approbation au niveau du financement sur le marché primaire. On pense que plus le marché secondaire se développe et plus ce ne sont pas nécessairement, par exemple, des investisseurs institutionnels qui font des transactions sur le marché secondaire. C'est important que tous les investisseurs qui transigent sur le marché secondaire, un, aient accès à l'information. Il y a maintenant des moyens technologiques pour permettre de diffuser, par exemple, rapidement les états financiers, mais l'information qui est diffusée... Notre rôle, c'est d'augmenter aussi la supervision et l'approbation de cette information continue.

Mme Jérôme-Forget: Permettez-moi, Mme la présidente, de vous poser la question directement: Il y a combien de personnes que vous avez affectées pour surveiller ces entreprises?

Mme Crépin (Carmen): La Direction du marché des capitaux...

Mme Jérôme-Forget: Des petites, là.

Mme Crépin (Carmen): ...de mémoire, comporte, je pense, 32 ou 34 postes occupés sur 43. On a l'intention, dans notre nouveau plan d'effectif, de hausser ça à 53.

Mme Jérôme-Forget: Bon. Alors, est-ce que vous estimez que ce nombre est suffisant pour surveiller l'épargne de ce monde dont on parle, là, les petites entreprises? D'abord, combien ça va laisser d'entreprises inscrites au Québec, les petites entreprises de moins de 4 000 000 $? Deux cents et quelques?

Mme Crépin (Carmen): Cent quarante.

Mme Jérôme-Forget: Bon. Alors, les suivre périodiquement, trimestriellement, j'imagine...

Mme Crépin (Carmen): Alors, à la Direction du marché des capitaux, dans le suivi de l'information financière, actuellement, il y a 13 postes. Donc, on veut ajouter neuf postes dans le suivi des activités financières: cinq analystes en valeurs mobilières et quatre nouveaux techniciens assignés aux émetteurs assujettis.

Mme Jérôme-Forget: Donc, ça, c'est pour les petites entreprises de moins de... C'est confiné à ça. Ça, c'est l'objectif de suivre ces entreprises-là.

Mme Crépin (Carmen): L'objectif de suivre les émetteurs assujettis, toutes les entreprises qui font appel à l'épargne.

(10 h 20)

Mme Jérôme-Forget: D'accord. Donc, est-ce que les entreprises du Québec qui vont s'inscrire à Toronto vont devoir passer par la Commission des valeurs mobilières? Est-ce que ce n'est pas ça, elles vont devoir encore passer effectivement par la Commission des valeurs mobilières, et ensuite la Commission des valeurs mobilières va transmettre son sceau ou son approbation pour que l'entreprise puisse s'inscrire à Toronto?

Mme Crépin (Carmen): Dès qu'une entreprise sollicite du financement au Québec, qu'elle soit du Québec ou qu'elle soit de l'extérieur du Québec, la CVMQ doit viser le prospectus.

Mme Jérôme-Forget: D'accord. Mais, si j'ai bien compris hier ce que vous avez dit, c'est qu'il y avait une spécialisation, vous alliez vous entendre pour que la Commission des valeurs mobilières ne répète pas le même travail fait par une autre commission des valeurs mobilières.

Mme Crépin (Carmen): Par contre, nous avons accès au travail qui est fait par l'autre, nous l'analysons et nous avons – c'est un régime facultatif – la capacité de sortir. Donc, à l'heure actuelle, si on regarde comment fonctionne ce régime-là, on a exercé notre droit d'«opting out» dans 25 % des dossiers parce qu'on estimait que nous avions besoin de rendre notre décision et de l'assortir de conditions qui visaient à protéger le marché du Québec.

Mme Jérôme-Forget: Alors, ma question, j'y reviens. Peut-être que vous ne l'avez pas, et c'est possible que vous n'ayez pas la réponse. Je vous posais la question spécifiquement pour les petites entreprises de moins de 4 000 000 $ de capital.

Le Président (M. Simard, Richelieu): À ce sujet, est-ce qu'on pourrait avoir des précisions sur le nombre? Vous avez dit 140, en septembre, le ministre parlait de 125, on me parlait la semaine dernière d'à peu près 80.

Mme Jérôme-Forget: Bien, ça, ça peut varier.

Le Président (M. Simard, Richelieu): C'est quoi, actuellement, selon vous? De quelle importance parle-t-on?

M. Lemoine (Guy): Si vous me permettez, les cours rapportés aujourd'hui dans le journal indiquent des transactions sur environ 80 sociétés inscrites à la Bourse de Montréal actuellement.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Voilà. Mes renseignements sont bons.

Mme Jérôme-Forget: Des transactions.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Vivantes, actives.

Mme Jérôme-Forget: Aujourd'hui, mais il y en a peut-être plus qui n'ont pas eu de transactions.

Mme Crépin (Carmen): Moi, en tout cas, ce que je peux vous dire, c'est qu'au 31 décembre 1999, inscrites à la Bourse de Montréal, il y en avait 140.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Inscrites.

Mme Crépin (Carmen): Inscrites. Et, pour répondre de façon plus spécifique à votre question, oui, je l'avais expliqué hier, comme il y a 5 000 émetteurs, on fait nécessairement du travail d'examen par voie d'échantillonnage où on s'appuie sur le travail des autres commissions, mais, dans l'échantillonnage, nous ciblons de façon spécifique toujours en priorité les compagnies québécoises.

Mme Jérôme-Forget: Alors, est-ce que je dois comprendre que vous regardez l'ensemble des compagnies québécoises, y compris celles qui ont plus que 4 000 000 $ de capital? Ma question est très précise, et peut-être que vous n'avez pas la réponse, mais ce qu'on m'a rapporté, c'était que les petites entreprises de moins de 4 000 000 $, c'était là où l'épargnant prenait souvent le plus de risques. C'est un peu comme, à Vancouver, le Penny Stock. D'accord? C'est un marché de risque, et les gens le savent. C'est un marché de mines, on en trouve ou on n'en trouve pas. Parfois, on a estimé qu'on allait avoir un grand rendement, on avait de grands espoirs, puis il n'y a rien. Parfois, on aurait pensé qu'il y aurait peu, puis il y a eu beaucoup. Il y a eu des histoires à succès là-dedans.

Je parle des petites entreprises, les 140 qui vont rester au Québec. Quelles sont les ressources que vous avez l'intention d'affecter à ces petites entreprises là pour surveiller ce marché-là qui va rester chez nous?

M. Labelle (Jacques): Si vous permettez, quand on regarde les sociétés qui vont rester inscrites à la cote de la Bourse, premièrement, la supervision de la Commission s'exerce à différents niveaux. On va oublier l'aspect au niveau de nouveaux financements, parce que, là, ça rentre dans le processus normal, c'est-à-dire soit prospectus soit notice d'offre, et ça, chacune fait l'objet d'un examen détaillé. On parle plutôt, à ce moment-ci, au niveau de l'information continue, au niveau du suivi sur les opérations sur la Bourse.

La Commission exerce son contrôle, comme Mme Crépin l'a mentionné, via son service d'information continue qui, lui, est chargé de tout le suivi de l'émetteur, de toutes les communications de l'émetteur, c'est-à-dire ses états financiers, ses communiqués de presse, son rapport annuel. L'échantillonnage veut que l'on fasse le tour de nos sociétés dans une période donnée et comprend des petites sociétés à petite capitalisation mais comprend aussi des émetteurs à plus grande capitalisation. Comme on l'a mentionné, le nombre d'effectifs dans ce service-là est actuellement de 13, et on en ajoute neuf.

Maintenant, le travail de surveillance face aux opérations sur le marché se fait aussi via notre Service d'inspection et d'enquêtes, et tout ce qui relève de la conformité et de l'application qui s'occupe des courtiers. La Bourse de Montréal a elle-même son système de surveillance au niveau des opérations comme telles. Si le marché est anormal, soit à cause de l'augmentation du volume ou de l'augmentation du prix qui est inexpliquée, à ce moment-là il y a des contacts qui vont se faire généralement entre la Bourse et l'émetteur, mais souvent aussi la Commission va être impliquée dans ces dossiers-là, c'est-à-dire ceux qui présentent un plus grave problème. On a vu des cas où les membres indépendants du conseil d'administration démissionnaient; il fallait donc aller chercher des motifs. À ce moment-là, la Commission travaille conjointement avec la Bourse. Et, quand on dit «conjointement», c'est que, deux heures plus tard, on est en réunion avec les dirigeants de l'émetteur ou les vérificateurs pour savoir exactement ce qui se passe.

Donc, je ne peux pas vous répondre à savoir: Nous avons x personnes qui s'occupent de ça, compte tenu que c'est un travail continu, si on veut, dans les opérations quotidiennes normales, courantes de la Commission, qui implique différents services.

Mme Jérôme-Forget: Est-ce que vous êtes d'accord avec le bilan de ce que cette personne-là me disait – évidemment, elle n'était pas une employée de la Commission des valeurs mobilières, elle était une employée de la Bourse de Montréal – que ces petites entreprises étaient moins suivies, qu'il y avait un chien de garde, là, qui n'était pas aussi présent qu'il aurait dû l'être?

M. Labelle (Jacques): Moi, je ne suis pas d'accord avec cette affirmation-là.

Mme Crépin (Carmen): Pas à notre niveau. À notre niveau, on exerce nos activités d'information continue à l'égard de toutes les entreprises qui sont inscrites.


Contrôle des nouveaux produits dérivés

Mme Jérôme-Forget: Je vais donc revenir maintenant aux produits dérivés. Je me demandais quel était le rôle de la Commission des valeurs mobilières pour surveiller un produit dérivé.

Mme Crépin (Carmen): Il faut l'approuver au préalable avant qu'il soit offert sur le marché. Donc, ça veut dire qu'on doit discuter avec la Bourse pour regarder les caractéristiques du produit, mesurer son effet sur le marché.

Mme Jérôme-Forget: Alors, qu'est-ce que vous surveillez dans le... Parce qu'un produit dérivé, si je comprends bien, c'est un produit qui doit répondre à une protection additionnelle. Je veux dire, c'est une protection, je me protège contre le risque. D'accord? Et je me demandais: Qu'est-ce que vous surveillez quand vous surveillez un produit dérivé? Qu'est-ce que c'est que vous regardez principalement quand vous surveillez un produit dérivé?

M. Laurion (Daniel): Sur le produit comme tel, c'est un peu comme vous le dites, des gens transigent à l'égard des produits dérivés. Nos efforts vont davantage porter sur l'utilisation qui en est faite. Alors, est-ce que d'une part ça va s'adresser plutôt du côté de l'investisseur? Est-ce que le courtier a engagé son client dans des produits dérivés alors que ça ne lui convient pas, alors qu'on lui suggère des stratégies spéculatives plutôt que des stratégies qui seraient défensives, qui seraient protectrices de sa capitalisation? C'est plutôt le genre de choses qu'on va faire.

Le travail au niveau du produit dérivé, comme disait Mme Crépin, se fait au moment de l'approbation. La conception du produit est importante, la relation entre le produit dérivé et le marché au comptant lorsqu'on parle, par exemple, des produits sur obligation du Canada, le produit sur lequel il porte, quelle quantité, sur quoi ça porte, est-ce que ça va être facilement transigeable, est-ce que ça aura une influence sur le marché au comptant, parce que le marché des produits dérivés et le marché au comptant sont reliés. Par exemple, on parle des options sur action. Dans la mesure où vous avez un bon marché d'options sur action, ça implique des indications sur le prix appréhendé de l'action elle-même et ça va influencer le marché de l'action.

(10 h 30)

Alors, c'est vraiment au niveau de la conception qu'on va discuter de quelles sont les relations... Est-ce que de travailler sur le produit dérivé, ça pourrait éventuellement permettre de tenter de manipuler le marché au comptant? On peut penser à certains marchés de métaux, par exemple, où il y a eu des tentations, où on a vu un certain nombre de choses. Alors, c'est à ce niveau-là que notre travail va arriver. Une fois qu'on est convaincus que le produit est bien conçu, est bien structuré, comme je disais tantôt, la surveillance et le contrôle de la Commission vont plutôt s'exercer sur l'utilisation qui en est faite et le respect des règles qui ont été mises de l'avant et qui nous ont satisfaits de prime abord.

Mme Jérôme-Forget: Bon, comme vous avez ouvert la porte... Est-ce que j'ai encore du temps?

Le Président (M. Simard, Richelieu): Oui, oui. Il n'y en a plus, mais vous...

Mme Jérôme-Forget: Ah bien, je vais donner ma place.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Non, non, on gardera quand même quelques minutes. Je sais que Mme la députée de La Pinière...

Mme Houda-Pepin: Laissez-la aller.

Mme Jérôme-Forget: Alors, vous nous ouvrez la porte au niveau des métaux, par exemple. Comme on a des métaux, au Québec, ça pourrait être intéressant de comprendre justement comment ça peut se passer. Vous dites: Quel pourrait être l'impact d'un produit dérivé sur le marché au comptant? Qu'est-ce que vous regarderiez, à la Commission des valeurs mobilières? Par exemple, qu'est-ce que vous empêcheriez? Et là j'y vais simplement par curiosité, pour m'informer. J'aimerais savoir qu'est-ce que vous empêcheriez, par exemple. Donnez-moi un exemple de quelque chose. Imaginons que quelqu'un vous arrive avec un produit.

M. Laurion (Daniel): Des limites de position, par exemple, seraient certainement quelque chose qu'il serait important de regarder. Si, en tant que gros investisseur, je peux prendre une position sur les produits dérivés qui me permet d'acquérir ou d'influencer le marché au comptant ou si je peux prendre des titres dérivés qui vont contrôler des millions et des millions de tonnes d'un métal, par exemple, je pourrais influencer le prix de ce métal-là et là vraiment avoir un effet très négatif sur le marché, et sur les autres opérateurs, et, bon, sur l'utilisation industrielle de ce métal-là, etc. Alors, ça fait partie des choses qu'on va regarder.

Maintenant, il faut comprendre que la Bourse de Montréal ne semble pas vouloir se spécialiser dans les produits dérivés de ce type-là mais dans des produits dérivés sur instruments financiers. Alors, c'est toujours un petit peu la même logique, sur combien ça porte, quel genre de limite de position, quel genre de marge on va permettre, l'ensemble des aspects spéculatifs qui sont là. Mais, bon, les métaux, c'était plus un exemple. Je ne pense pas que Montréal – à court terme, en tout cas – ait une intention de s'en aller là-dedans. C'est un autre type de spécialisation.

Mme Jérôme-Forget: Je vais revenir peut-être...

Le Président (M. Simard, Richelieu): Allez-y, allez-y.


Prêt de titres par les courtiers

Mme Jérôme-Forget: Alors, puisque vous parlez de l'impact sur le prix, je vais vous poser une autre question, à ce moment-là, qui n'est pas reliée aux produits dérivés. Si j'ai des titres... J'achète des titres d'une compagnie. Je suis sûre qu'il y a peu de gens ici, de notre côté, qui vont être au courant de ça, à peu près certaine. C'est très intéressant, vous allez voir, parce qu'il y a quelqu'un qui m'a mise au parfum. J'achète des titres d'une corporation, je les laisse chez mon courtier, généralement. Le courtier loue, je pense, mes titres. C'est exact? Est-ce que je me trompe, là? Et vous prenez mes titres et vous les achetez, espérant... Vous les louez. Je vous les prête puis je ne le sais pas, que je vous les prête, et vous risquez de pouvoir faire de l'argent sur ces titres qu'on vous a loués. Qu'est-ce que la Commission des valeurs mobilières contrôle dans ça? Bien, peut-être que ce n'est pas les produits dérivés, là, c'est peut-être quelqu'un d'autre qui peut répondre, parce que ça, je sais que c'est une question assez pointue.

Mme Crépin (Carmen): L'activité de prêt de titres en soi fait en sorte que, effectivement, comme vous le dites, quelqu'un qui a, mettons, des titres, il dit: Moi, j'ai beaucoup d'actions de Bombardier, je fais du prêt de titres parce que, lorsque je fais l'activité de prêt de titres, le courtier à qui je les prête me paie un prix de location. Donc, moi, comme propriétaire de mes titres, je fais de l'argent avec mon prix de location. Bon, ce que ça fait dans le système...

Mme Jérôme-Forget: Vous dites «moi qui prête mes titres»?

Mme Crépin (Carmen): Oui.

Le Président (M. Simard, Richelieu): C'est le courtier, là.

Mme Jérôme-Forget: Le courtier.

Mme Crépin (Carmen): Non, le propriétaire des titres.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Le propriétaire des titres.

Mme Jérôme-Forget: Il n'est pas au courant qu'on prête ses titres.

Mme Crépin (Carmen): Non, mais il est au courant... C'est-à-dire, il doit nécessairement dire: J'ai un bloc... Bien, admettons, j'ai 5 000 actions de Bombardier, j'autorise mon courtier à faire du prêt de titres avec.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Ah, il y a une autorisation nécessaire.

Mme Jérôme-Forget: Bien, écoutez, je n'ai jamais entendu parler de quelqu'un – puis ça se fait beaucoup – à qui on demandait une autorisation pour louer ou prêter les titres pendant un certain temps. Jamais. Et Bombardier... Si vous regardez, d'ailleurs, ça apparaît dans les cotes, hein? Je veux dire, j'ai appris ça, là, on regardait, ça apparaît, les prêts de titres, les gens, et il y a des volumes énormes dans ça, énormes, donc ça a un impact sur le prix, ça a un impact pour avoir des volumes aussi importants. Il y en a beaucoup, là, des prêts de titres. Il y a un impact sur le prix.

M. Labelle (Jacques): Si vous permettez...

Mme Crépin (Carmen): Pas nécessairement.

M. Labelle (Jacques): Excusez-moi, Mme Crépin.

Mme Crépin (Carmen): Vas-y donc.

M. Labelle (Jacques): ...il y a beaucoup de choses, parce que je vous écoute parler et que je pense qu'il y a plusieurs notions qui interviennent en même temps...

Le Président (M. Simard, Richelieu): Alors, c'est le temps de nous clarifier ça.

M. Labelle (Jacques): ...et qui peuvent avoir des impacts. Certains prétendent que ça a des impacts, d'autres prétendent que ça n'a pas d'impact, à savoir: Qu'est-ce qu'un courtier peut faire avec les titres qu'il détient pour son client? Dans tous les contrats qui interviennent entre le client et le courtier lors de l'ouverture de comptes, tout ce que le courtier peut faire avec les titres est déjà prévu par les contrats. Le contrat peut prévoir différentes choses, et il y a aussi plusieurs contrats qui peuvent être signés, et c'est ce pour quoi souvent des gens ne sont même pas au courant qu'ils ont donné telle ou telle autorisation.

Ce qui arrive, c'est qu'effectivement le client peut autoriser le prêt de titres. Le client qui a, lui aussi, un compte sur marge pense qu'il détient tous les titres, mais, malheureusement, c'est que le courtier peut aussi se payer à même ces actions sur marge parce que le client a signé ce qu'on peut appeler un nantissement en faveur du courtier par rapport aux titres qu'il pense avoir acquis. Et certains prétendent que, justement, l'utilisation, disons, par le courtier des actions pour faire de la vente à découvert avec un autre client, ça aura un impact très négatif ou peut avoir un impact négatif sur le cours, en général, du titre.

Ça, il y a différentes études qui ont été faites, et personne n'est arrivé à la conclusion que ça avait un impact négatif sur le titre; pas le prêt de titres, mais, si on pense à la vente à découvert, qui est un phénomène qui existe à travers tous les marchés financiers organisés, qui existe depuis longtemps, il y a effectivement beaucoup d'actions qui semblent se promener, puis là tu cherches le véritable propriétaire et tu dis: Où il est? Et est-ce que cette vente à découvert là va avoir permis justement d'amener plus d'actions en vente sur le marché, donc va avoir eu un effet baissier? Les études qui ont été faites n'ont jamais démontré qu'il y avait un impact négatif sur le titre.

On pense que le prêt de titres, c'est la même chose, le «securities lending», c'est la même chose, mais tout ce que le courtier peut faire avec les titres de son client a été préalablement autorisé par le client lors de l'ouverture du compte. Souvent – et ça, je dois l'admettre pour avoir parlé à plusieurs clients à travers ma carrière – les clients ne sont pas nécessairement conscients de la totalité des pouvoirs qu'ils donnent à leur courtier.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Extrêmement intéressant. Mme la députée de La Pinière, vous aviez une question que vous voulez poser maintenant?

Mme Houda-Pepin: Quelques questions, M. le Président. Je vous remercie. On a combien de temps?

Le Président (M. Simard, Richelieu): Écoutez, le bloc était de 15 minutes, il a été dépassé. Si vous permettez, je vais poser quelques questions et je vous reviens tout de suite.

Mme Houda-Pepin: Ah, d'accord, allez-y, sinon...

Le Président (M. Simard, Richelieu): Ça vous va?

Mme Houda-Pepin: Oui.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Très bien. Je pense qu'on a tout intérêt – à moins qu'il y ait d'autres questions à droite – à creuser les questions et à ne pas trop aller dans plusieurs directions en même temps.


Défis posés par la restructuration

Mais je veux revenir à la décision du 29 juin, celle que vous avez prise d'appuyer l'accord pour le changement de statut de la Bourse de Montréal. Mais là c'est encore général, et je sais que vous avez répondu partiellement tout à l'heure. Et là on est obligés de revenir un petit peu aux questions de gestion que nous avons abordées hier. Comment, concrètement, comptez-vous faire face aux nouveaux défis posés par cette réalité, la réalité qui est multiple, on le rappelle, celle de l'inscription au NDX, la Bourse de l'Ouest qui est encore virtuelle? Enfin, il y a encore des éléments réglementaires qui ne sont pas là. À Toronto, c'est sans doute beaucoup plus simple, puisque déjà il y avait une longue tradition de collaboration, et j'imagine que ça a dû se poursuivre entre-temps. Ce groupe reste quand même d'une centaine d'entreprises dont la députée de Marguerite-Bourgeoys vous a entretenu tout à l'heure, et, à travers ça, au milieu de tout ça, il y a toute une situation boursière qui, elle, est en évolution. On parle notamment de la possibilité d'une entrée plus directe de NASDAQ soit à Montréal soit à Toronto, Montréal et ailleurs, enfin une présence plus concrète de NASDAQ qui, elle, pour les courtiers, en tout cas, se fait de façon électronique. Comment, ce nouveau rôle, vous entendez le jouer avec les effectifs que vous avez ou le plan d'effectif que vous vous êtes donné?

(10 h 40)

Mme Crépin (Carmen): Quand on parle des bourses, on parle d'organismes d'autoréglementation que l'on reconnaît. Donc, à l'heure actuelle, il y en avait un, il y en aura un plus grand nombre.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Oui. Je vous arrête là. C'est vrai, les rapports avec les bourses, il n'y a pas de problème là-dessus, mais les rapports avec vos clients, c'est-à-dire la protection des investisseurs, se trouvent par le fait même aussi transformés, les bourses étant évidemment le lieu où ces investisseurs, où les courtiers font leurs transactions. Mais vous avez à continuer votre mandat essentiel de protection des épargnants, comme disait le député de La Prairie hier.

Mme Crépin (Carmen): Oui. C'est pour ça que notre rôle face aux émetteurs, c'est de nous assurer que les règles de fonctionnement des nouvelles bourses sont propices à leurs activités et que ces règles-là aussi protègent les investisseurs du Québec. Donc, c'est par le contrôle sur les règles, par l'approbation qu'on doit donner aux modifications des règles qu'on s'assure que les intérêts des émetteurs et des investisseurs du Québec sont protégés. Ce que ça fait, c'est qu'on peut avoir un plus grand volume de règles à regarder, mais ça, on le sait, on se prépare à y faire face. C'est pour ça qu'on veut augmenter les effectifs dans cette équipe-là. Je ne suis pas sûre que je réponds adéquatement à votre question, mais peut-être que je ne la comprends pas bien non plus.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Donc, en augmentant les effectifs, vous allez faire face aux nouvelles réalités. Ce que j'essaie de mieux...

Mme Crépin (Carmen): En les spécialisant aussi, en leur permettant d'acquérir les connaissances requises. Si la Bourse de Montréal, par exemple, se spécialise dans les produits dérivés, c'est sûr que les effectifs qui sont déjà spécialisés en produits dérivés dans cette équipe-là vont continuer à acquérir de nouvelles connaissances. Pour les activités de la Bourse de Toronto, même si c'est la Bourse de Toronto maintenant qui exerce des activités par rapport à des émetteurs ici, dans le quotidien, pour nous, rien n'a changé, on a juste changé de Bourse. Mais on l'a quand même reconnue et on a approuvé ses règles.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Et vos rapports avec les courtiers, qui sont vos intermédiaires...

Mme Crépin (Carmen): Demeurent aussi.

Le Président (M. Simard, Richelieu): ...demeurent les mêmes.

Mme Crépin (Carmen): Oui.


Transfert du marché des options de la Bourse de Toronto

Le Président (M. Simard, Richelieu): D'accord. Au niveau de la réglementation, où en êtes-vous avec Toronto? Est-ce que vous êtes à la veille d'une entente avec la Bourse de Toronto, puisqu'elle sera présente? Ce bureau régional doit s'ouvrir incessamment. Vous m'avez parlé tout à l'heure du mois de mars?

Mme Crépin (Carmen): Notre décision de reconnaissance temporaire se termine en mars parce que la Bourse de Toronto était confiante d'avoir, à cette date-là, procédé à son changement de statut. Pour l'instant, les échanges que nous avons, c'est que nous savons que la Bourse de Toronto, elle a loué? En tout cas, elle est en train de louer ses locaux et procède à du recrutement de personnel. Nous, on a des discussions constantes avec la Bourse de Toronto. On a déjà commencé à examiner les nouvelles règles.

Le Président (M. Simard, Richelieu): C'est ce que j'allais vous demander.

Mme Crépin (Carmen): Oui, oui, on a déjà commencé à le faire.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Vous n'attendez pas que ce soit complété pour le faire, vous le faites au fur et à mesure avec eux.

Mme Crépin (Carmen): Oui. M. Laurion siège sur un comité qui travaille régulièrement avec la Bourse de Toronto.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Peut-être nous expliquer le fonctionnement du système.

M. Laurion (Daniel): Bien, les règles de la Bourse de Toronto, ce qu'il faut comprendre, d'abord, c'est qu'elles sont, je dirais, à 95 % identiques aux règles de la Bourse de Montréal, avec lesquelles nous étions très familiers. Alors, au niveau de l'organisation du marché, des règles techniques, des possibilités pour les firmes de courtage, des différentes options qui s'offrent à elles sur le marché, ce genre de choses là...

Le Président (M. Simard, Richelieu): C'est la même culture boursière.

M. Laurion (Daniel): ...c'est la même culture et, à ce moment-là, ça nous a facilité la tâche d'autant.

Dans le cadre de la démutualisation de la Bourse de Toronto, il y a un certain nombre de choses qui sont modifiées. Au niveau, par exemple, du conseil des gouverneurs, qui devient un conseil d'administration, bon, il y a un certain nombre d'éléments qui sont là et qui sont modifiés pour ça. Mais, à cette occasion-là, la Bourse de Toronto ne modifie pas l'organisation de son marché, et donc ça nous facilite la tâche, en quelque sorte. Les discussions là-dessus sont relativement avancées.

Au niveau du bureau de Montréal, la Bourse est à compléter l'embauche de personnes. Ils ont déjà trois ou quatre personnes d'embauchées. Alors, il y a déjà des services qui sont offerts. Les contacts avec les entreprises du Québec qui sont cotées à la Bourse de Toronto présentement indiquent qu'une très grande majorité d'entre elles se préparent à utiliser les services du bureau de Montréal et sont non seulement disposées à le faire, mais vont le faire, en ont l'intention. Alors, ça confirme un peu que finalement la décision de la Commission et les intentions de la Bourse vont dans le même sens, c'est-à-dire que, pour la Bourse de Toronto, le Québec est un marché important, est un marché important au niveau de son secteur de sciences de la vie, par exemple, au niveau des technologies de l'information où on a des entreprises en croissance, et la Bourse nous dit, en tout cas, qu'elle a l'intention de mettre les efforts non seulement pour rentabiliser ce bureau-là, mais pour vraiment faire une expansion des affaires ici.

Notre rôle là-dedans, c'est bien sûr de les encourager à le faire en respectant les éléments de la décision. Alors, au niveau des aspects décisionnels, ce genre de choses là, on s'est pratiquement entendus sur la majorité des décisions qui pourraient affecter les émetteurs, qui les rendrait, comment ça se passerait, où les discussions auraient lieu, quelles seraient les possibilités d'appel, tout ce genre de choses là. Il y a beaucoup de choses qui sont très avancées de ce côté-là, au niveau de conclure et d'arriver à... Pour nous, le personnel, c'est important d'avoir une conclusion satisfaisante, par rapport à la décision de la Commission, de façon à présenter un dossier aux membres de la Commission d'ici la fin mars avec une recommandation de reconnaissance, ou bien, si on n'arrive pas à l'endroit où ce serait nécessaire d'arriver en fonction des directives qu'on a, de dire à la Commission: Bien, écoutez, on ne s'est pas entendus avec la Bourse et nous devons faire telle ou telle chose selon les circonstances.

Le Président (M. Simard, Richelieu): À votre connaissance, est-ce que des garanties claires ont été données quant aux services en français au Québec à tous les usagers qui voudront utiliser le français?

M. Laurion (Daniel): Présentement, je puis vous dire que les gens à l'emploi de la Bourse de Toronto à Montréal sont des francophones. Alors, je ne vois pas vraiment de difficultés par rapport à ça. Il y a également que la patronne de tout ce secteur est une Acadienne du Nouveau-Brunswick qui parle un excellent français elle-même. Alors, à la limite, il pourrait y avoir quelqu'un de la haute direction de la Bourse de Toronto qui soit impliqué, qui parle couramment français. C'est clair que les services à Montréal sont en français.

Mme Crépin (Carmen): Mais notre rôle, c'est de nous assurer que ces services-là seront offerts.

Le Président (M. Simard, Richelieu): En terminant, les usagers, les investisseurs québécois devront, pour les investissements consistants, enfin de plus d'un certain montant, répondant à certains critères, aller à la Bourse de Toronto, mais déjà une bonne partie vont aussi directement à Chicago, à New York. Quelle est la proportion actuellement des investisseurs, des entreprises québécoises qui sont inscrites sur les bourses américaines?

Mme Crépin (Carmen): Avant la restructuration des bourses, plusieurs grandes entreprises du Québec étaient interlistées, c'est-à-dire qu'elles étaient inscrites à Montréal et à Toronto. Alors, celles qui étaient interlistées, sur 614, il y en avait 550. C'est donc dire que, techniquement, il y a 64 entreprises québécoises qui répondent aux nouveaux critères de la restructuration, qui ont donc transféré leur inscription de Montréal à Toronto. Et, le nombre d'entreprises québécoises listées à NASDAQ, je n'ai pas le chiffre mais je peux vous le trouver.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Peut-être que, plus tard dans la journée, vous pourrez nous fournir le chiffre.

Mme Crépin (Carmen): Oui.

Le Président (M. Simard, Richelieu): M. le député de La Prairie, pour compléter.

M. Geoffrion: Sur un autre sujet.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Sur un autre sujet? Allez-y.


Fonds canadien de protection des épargnants

M. Geoffrion: En marge de votre décision du 29 juin, il y a eu des audiences publiques les 3, 4 et 7 juin à Montréal. Il y a un certain nombre d'organismes qui ont présenté un mémoire, d'autres qui y sont allés de commentaires, et c'est un petit peu le sens de ma question: Le Fonds canadien de protection des épargnants, premièrement, qu'est-ce que c'est? Et, deuxièmement, est-ce qu'ils ont présenté un mémoire? Et, si oui, est-ce qu'il est possible d'en avoir une copie ou, du moins, la conclusion de leurs commentaires? Instruisez-moi un petit peu sur ce fonds.

Mme Crépin (Carmen): Les mémoires sont tous sur notre site Internet. Maintenant, pour ce qui est de ce que c'est que le Fonds de protection, M. Lorrain est celui qui est en contact régulier avec le fonds de protection.

M. Geoffrion: D'accord.

(10 h 50)

M. Lorrain (Jean): Le Fonds canadien de protection des épargnants est une création des années quatre-vingt, grosso modo. Dès qu'un courtier est inscrit en plein exercice, c'est-à-dire qu'il peut vendre tout type de produits financiers, le courtier comme tel est membre d'une association, c'est-à-dire d'un organisme d'autoréglementation, et, de ce fait, de par les réglementations, est obligé d'adhérer au Fonds canadien de protection des épargnants. Le fonds vise à protéger les investisseurs contre une situation d'insolvabilité du courtier. Donc, si le courtier devient insolvable, le compte du client est protégé à hauteur de 1 000 000 $, et c'est là le but principal du fonds d'indemnisation.

Le fonds d'indemnisation sert également à assurer un certain suivi au niveau des courtiers qui sont inscrits auprès des bourses. Alors, ils procèdent, eux autres aussi, à une évaluation de la situation du capital des courtiers de façon à s'assurer que les courtiers respectent les normes de capitalisation requises. Donc, ils exercent un devoir de supervision, de surveillance économique des courtiers et de protection des investisseurs.

M. Geoffrion: Est-ce que vous avez en mémoire un petit peu leurs commentaires face au projet?

M. Lorrain (Jean): De mémoire – et je vous dis bien «de mémoire» – ce dont je me souviens, c'est que le Fonds canadien de protection est venu simplement faire une présentation sur la nature de ses activités. Ils ne se sont pas tellement investis sur une position à l'égard de la restructuration des marchés, leur position était beaucoup plus en termes de continuation des opérations du fonds dans une nouvelle structure boursière canadienne.

M. Geoffrion: D'accord. Merci.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Mme la députée de La Pinière, maintenant.


Impacts de la restructuration sur les emplois

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Au niveau de la restructuration des bourses canadiennes, est-ce que vous avez analysé l'impact en termes d'emplois sur la Bourse de Montréal à court, à moyen et à long terme? Est-ce que cette restructuration a un impact sur l'emploi? Et quel est le nombre d'emplois qui sont reliés à la Bourse de Montréal par rapport à ceux qui sont reliés à la Bourse de Toronto et à la Bourse de l'Ouest?

M. Labelle (Jacques): Dans le cadre de la décision de la Commission sur la restructuration des bourses, l'impact au niveau des emplois n'a pas été pris en compte par la Commission. La Commission a décidé et a exprimé clairement qu'elle n'avait pas... et ne voulait pas se prononcer sur cet aspect, considérant que son rôle était autre, et la Commission ne s'est pas prononcée là-dessus.

Mme Houda-Pepin: Pourtant, il me semble extrêmement important, comme facteur de prise de décision, de regarder un peu l'impact sur l'industrie à Montréal.

M. Labelle (Jacques): La Commission s'est assurée, face à l'industrie en général, justement par les conditions qu'elle a imposées et... qu'il y avait encore, malgré la restructuration, un marché de valeurs mobilières qui continuait à exister au Québec, donc elle prenait en compte l'impact de nos courtiers québécois, et, en maintenant et en exigeant que ces bourses-là soient reconnues comme organismes d'autoréglementation, en exigeant les points de services à Montréal, les bureaux décisionnels, je pense que ça répondait aussi à la préoccupation de s'assurer que le courtier québécois continuerait à faire affaire en sol québécois pour les investisseurs, généralement des investisseurs québécois. Donc, ça, c'était pris en compte, oui, mais pas tellement en fonction du nombre d'emplois créés.

Mme Houda-Pepin: Ou perdus, dépendamment. À votre connaissance, est-ce qu'il y a des emplois qui se sont perdus dans cette restructuration? Est-ce qu'on peut avoir un ordre de grandeur?

M. Labelle (Jacques): Je n'ai pas les données pour pouvoir vous indiquer une réponse juste à ce point de vue là.

Mme Houda-Pepin: On peut les avoir ultérieurement?

M. Labelle (Jacques): Oui.


Élargissement du marché des produits dérivés

Mme Houda-Pepin: D'accord. Merci. On assiste, dans cet exercice-là de restructuration, en fait, à deux courants, là, je dirais même deux philosophies, mais qui s'affrontent. Le premier, c'est l'ouverture et la globalisation des institutions financières, y compris les bourses, notamment via les bourses électroniques. Le président parlait tantôt de NASDAQ, et, dans le cas qui est devant nous, il y a une restructuration qui se traduit par une spécialisation dans un segment particulier du marché financier, et, pour ce qui concerne la Bourse de Montréal, c'est les produits dérivés.

Est-ce qu'il y a, à votre avis, une possibilité que la Bourse de Montréal, qui s'est spécialisée dans les produits dérivés, puisse à long terme aussi croître dans le sens de la globalisation? Est-ce qu'il y a un avenir, finalement, au-delà de nos frontières, au-delà de notre marché, pour que la Bourse de Montréal puisse avoir un rayonnement au-delà de nos frontières de façon significative?

Mme Crépin (Carmen): Si je prends l'élément de votre question, je pense qu'effectivement le projet de la Bourse de Montréal de se spécialiser dans les produits dérivés, c'est qu'elle voyait un avenir et des possibilités de croissance d'activité. C'est évident que c'est un défi, mais la Bourse de Montréal estime qu'il y a une niche à développer. Et, même si je ne suis pas capable de vous donner le nombre, c'est évident que, plus la Bourse de Montréal va développer son réseau d'activité de produits dérivés, plus elle va créer des emplois spécialisés qui vont autour avec la négociation ou le développement de ces produits-là. L'alliance de la Bourse de Montréal avec le réseau Globex vise à donner une vision internationale et un accès sur d'autres marchés, donc il peut y avoir un avenir là.

Quel sera le marché? Par exemple, si on prend juste la restructuration aujourd'hui du marché canadien, qu'est-ce ça va être dans cinq ans? Comment ça aura évolué? C'est très long, cinq ans. Je lisais un petit entrefilet disant que, par exemple, d'ici les prochains 10 ans... L'actuel président de la Securities Exchange Commission, à Davos, disait qu'il y aurait une plateforme unique au monde et un seul régulateur. La Securities Exchange Commission, c'est sa vision de l'avenir. Alors donc, ça veut dire que, quand on dit que nous avons un grand défi, je pense qu'il est là. Les technologies et l'avenir, on ne sait pas comment ça peut évoluer, mais c'est évident que plus la Bourse de Montréal va développer des produits dérivés, plus c'est un marché qui va augmenter, et, c'est évident, l'intérêt d'avoir ce marché-là à Montréal, c'est toute la création des emplois qui vont avec.


Système de négociation alternatif (suite)

Mme Houda-Pepin: Et quel est l'impact de ces bourses électroniques en particulier? Je sais que la Commission des valeurs mobilières avait mis sur pied, je pense, un groupe de travail en 1996 pour analyser l'impact de l'électronisation des transactions financières sur la Commission, sur son mandat, sur sa capacité d'agir comme régulateur du marché. Est-ce qu'il y a des conclusions auxquelles vous avez abouti? Et est-ce que vous pensez que la Commission a les outils nécessaires, les pouvoirs nécessaires pour remplir son mandat dans le cadre de ce contexte de mutation profonde? Parce que, là, c'est rendu que l'investisseur, le petit épargnant, de chez lui, à partir de son microordinateur est capable de transiger en «line».

Il y a toute la nouvelle question du «day-trading», la spéculation sur séance, qui fait qu'on est déjà rendus très loin. L'investisseur, lui, est rendu beaucoup plus loin que l'industrie papier, puisque c'est la monnaie électronique, c'est des transactions électroniques. Tout ça est virtuel, mais en même temps c'est réel. Alors, dans ce contexte-là, c'est quoi, le pouvoir que la Commission a vraiment pour contrôler et exercer son mandat? Est-ce qu'elle a les outils et les ressources humaines, technologiques pour encadrer tout ce trafic qui échappe littéralement à son contrôle?

(11 heures)

Mme Crépin (Carmen): Je vais partir avec le premier élément de votre question, les systèmes de négociation alternatifs. Vous avez raison, le cadre réglementaire qui a été publié au cours de l'été a été établi par la CVMQ en collaboration avec les autres autorités de valeurs mobilières au Canada, et ce cadre réglementaire qui est proposé pour commentaires à l'industrie est inspiré des règles qui ont été établies aux États-Unis par la Securities Exchange Commission. Les systèmes de négociation alternatifs, ce sont des systèmes de jumelage d'ordre et d'achat. C'est donc un système qui ne fait que, si vous voulez, un «matching» virtuel. Donc, par rapport à une Bourse traditionnelle qui, elle, va coter des compagnies, va faire des activités de surveillance sur les courtiers qui sont membres, la différence principale, c'est que c'est simplement un ordre d'appareillage d'ordre d'achat et de vente.

À l'heure actuelle, aux États-Unis, ces systèmes-là représentent 8 % du volume des bourses, 35 % du volume de NASDAQ. Ils s'inscrivent à la fois en compétition et en complémentarité. Le cadre réglementaire qui a été proposé par les ACVM, c'est de dire: Nous estimons que ces nouveaux systèmes électroniques peuvent apporter une concurrence dans le système dans le marché canadien, et la position qui est sous-jacente, c'est d'estimer que la concurrence, de prime abord, elle est bonne parce qu'elle va favoriser un meilleur prix pour les investisseurs. Cependant, il faut quand même assurer un marché ordonné. Donc, les règles qui sont proposées dans cette norme-là visent, de la même façon, à faire un marché ordonné, mais en même temps à instaurer une concurrence qui va permettre aux clients d'aller chercher le meilleur prix possible sur le marché.

Donc, les règles qui doivent être proposées, c'est que, si on veut un marché ordonné et que le client puisse toujours en tout temps aller chercher le meilleur prix, on dit que c'est comme deux marchés, deux systèmes, il faut qu'ils soient appareillés ensemble quelque part. C'est pour ça qu'aux États-Unis on parle maintenant d'une espèce de boîte noire qui ferait une interface entre les bourses traditionnelles et les ATS. L'idéal, c'est que tout le monde puisse intégrer les prix et les transactions possibles dans le système, parce que, quand le courtier va faire sa transaction, le système doit pouvoir générer le meilleur prix pour le client.

À l'heure actuelle, ce cadre réglementaire là fonctionne aux États-Unis, et, avant d'ouvrir la porte et de reconnaître éventuellement des systèmes de négociation alternatifs au Canada, on a établi le cadre réglementaire. La période pour faire des commentaires se terminait en novembre et décembre. Il y a un comité de travail qui siège au niveau des ACVM pour ramasser tous les commentaires de l'industrie. Ça revient pour discussion au niveau de l'ensemble des commissions pour qu'on puisse prendre une position et dire si, oui ou non, on ouvre la porte.

À l'heure actuelle, les possibilités pour un système de négociation alternatif seraient soit d'être reconnu comme Bourse ou d'être reconnu comme un courtier. Ce sont les deux moyens que les autorités canadiennes de valeurs mobilières ont estimées utiles, justement, pour être capables de garder la juridiction à l'égard de ces nouveaux systèmes là. Donc, à ce moment-là, on approuve les règles de fonctionnement, nous avons des pouvoirs d'inspection.

Mme Houda-Pepin: Il n'en demeure pas moins que la spéculation sur séance, le «day-trading», lui, fait encourir à l'investisseur, la personne privée, chez elle, des risques, et ces risques-là engendrent éventuellement une intervention de la Commission des valeurs mobilières parce que c'est son mandat. Et, comme c'est des transactions qui se passent hors de son contrôle, c'est là où je veux comprendre un peu comment est-ce que vous allez continuer à jouer votre rôle, entre guillemets – excusez l'expression – de chien de garde, d'une part et, d'autre part, même au niveau de l'action a posteriori, parce que la Commission, c'est aussi un quasi-tribunal, éventuellement. C'est quoi, les moyens dont vous disposez actuellement pour gérer ce type de problèmes qui se posent, dû aux nouveaux modèles de négociation financière? C'est ça, ma préoccupation.

Mme Crépin (Carmen): Vous avez raison, les technologies favorisent l'émergence de nouvelles activités. La spéculation sur séance est un bon exemple. L'investisseur qui veut faire ses transactions, même s'il opère à partir de son ordinateur, il est, même s'il ne s'en rend pas compte, relié à un courtier qui est, lui, relié aux différents marchés sur lesquels il veut transiger. C'est pour ça que – et, justement, la décision a été rendue publique cette semaine, mercredi – la CVMQ s'est posé la question sur l'opportunité d'autoriser la spéculation sur séance et a rendu une décision à laquelle elle établit un certain nombre de conditions qui sont de nature à permettre l'activité, mais à la permettre de façon ordonnée et à nous permettre aussi d'intervenir si les conditions qu'on met ne sont pas respectées.

À titre d'exemple, la publicité pour attirer les investisseurs qui veulent faire du «day-trading» devra être déposée auprès de la Commission. Concernant l'ouverture de compte du client avec le courtier, on a établi des règles, et là-dessus, à l'heure actuelle, je peux vous dire qu'on est plus sévères qu'aux États-Unis. Il faut donc que le client qui ouvre un compte puisse disposer d'une somme de 25 000 $US. On l'a mis en US parce que, la plupart du temps, les clients intéressés à faire de l'activité de «day-trading» veulent transiger sur le marché américain. Donc, il faut qu'ils aient 25 000 $US. Les positions sont liquidées à la fin de chaque jour, et, s'il y a des pertes qui sont subies, le client doit remettre... Il doit toujours conserver son 25 000 $US. À la différence de ce qui se passe aux États-Unis, la CVMQ a mis des conditions pour interdire au courtier de faire un prêt à un client qui n'aurait pas son 25 000 $ pour liquider sa position à tous les jours.

On interdit également au courtier d'agir comme intermédiaire pour faire des prêts entre ses clients. Le client qui va faire de l'activité doit suivre une formation pour en comprendre les risques, et également il doit suivre une formation pour bien comprendre la technologie du courtier qu'il va utiliser. Il y a, sur cette base-là, un courtier qui a été autorisé à offrir l'activité de «day-trading» à ses clients. Nous avons une autre demande pendante que nous examinons, et, lorsque les membres de la Commission ont rendu cette décision-là en janvier, on a insisté pour que dans six mois on puisse avoir une évaluation: Est-ce que les conditions sont trop sévères par rapport à ce qui se fait aux États-Unis ou si on continue à aller de l'avant? Donc, les conditions qu'on a mises visent, dans le fond, à protéger l'investisseur en s'assurant que celui qui prend ce risque-là est conscient du risque et qu'il a la capacité de le faire, et, notre rôle de chien de garde, on va être capables de l'exercer à l'égard du courtier qui ne respecterait pas les conditions qu'on lui impose. Alors, on peut le suspendre.

Mme Houda-Pepin: Avez-vous une idée du volume des transactions électroniques qui se font par rapport au modèle traditionnel et des tendances?

M. Laurion (Daniel): Au niveau de l'utilisation de l'Internet, on n'a pas vraiment de données précises très récentes sur ça, mais le Canada, en général, est à peu près au même degré d'avancement que la majorité des pays européens, et on est tous derrière les États-Unis où, là, il y a une utilisation d'Internet vraiment extraordinaire.

Un autre aspect de la question que vous avez posée tantôt, c'est: Comment la Commission peut faire, compte tenu qu'Internet et les moyens technologiques éliminent les frontières? Bien, la communauté, si vous voulez, des régulateurs de marché s'est penchée là-dessus. Il y a un rapport qui a été publié par l'Organisation internationale des commissions de valeurs à la fin de 1998 sur l'utilisation d'Internet et qui suggérait un certain nombre de normes ou un certain nombre de choses qui devraient être faites à l'égard de l'utilisation de l'Internet dans ces contextes-là. Je prends, par exemple, un courtier qui offre ses services sur Internet. Il doit mentionner là où ses services sont offerts. Ça doit être précis, et il doit y avoir des moyens qui sont mis en place pour éviter qu'il fasse affaire avec des gens qui proviennent d'endroits où il ne possède pas l'inscription, où il n'est pas en règle avec les autorités réglementaires.

(11 h 10)

À partir de ça, les gens ont convenu que la norme devrait être que, si l'information est là à la base, si les moyens sont pris pour l'organisation, par exemple, pour un courtier des États-Unis qui n'aurait pas l'inscription au Québec pour offrir des services, à ce moment-là la Commission ne ferait pas de geste à l'égard du fait que finalement l'information sur ce courtier-là, sur les services offerts, est disponible à toute personne qui est reliée sur Internet au Québec.

Il y a une question d'appréciation de faits. C'est des choses qui évoluent très rapidement, ces technologies-là. Mais les commissions, ensemble, dans les différents pays, travaillent sur cette question-là et regardent des façons de collaborer justement pour éviter que des fraudes puissent se faire à partir d'un endroit x vers un endroit y. C'est tellement facile. Internet amène des défis qui sont vraiment extraordinairement difficiles. Une disparition de preuve en l'espace de quelques secondes... Si on l'élimine, on fait disparaître le site. Bon, il y a une dynamique qui est toute différente.

M. Lemoine (Guy): Si vous permettez, peut-être que j'aimerais ajouter une précision quant à l'utilisation de l'Internet. Ce n'est pas parce qu'une personne utilise l'Internet qu'elle ne bénéficie plus des services d'un courtier. En fait, pour qu'une personne puisse effectuer une transaction boursière, elle doit le faire par l'intermédiaire d'un courtier qui s'assurera et qui assurera au marché que la commande sera bel et bien respectée, et exécutée, et compensée éventuellement par l'intermédiaire des chambres de compensation. L'Internet ne constitue qu'un mode de communication entre l'investisseur et son courtier. Il peut le faire dorénavant en passant par un ordinateur plutôt que de le faire par téléphone, ou de vive voix, ou par correspondance, mais il entre néanmoins en relation avec le courtier qui recevra par ailleurs une rémunération pour le service qu'il dispense au client et la protection qu'il lui accorde, advenant que le courtier fasse des recommandations à son client. Alors, pour qu'un client puisse effectuer une transaction, il doit nécessairement avoir un compte chez un courtier qui doit satisfaire aux exigences traditionnelles qui sont imposées par la Commission, tout comme si la communication s'effectuait verbalement ou par écrit.

Mme Houda-Pepin: Il n'en demeure pas moins qu'il y a une sorte de consultation électronique où on peut communiquer électroniquement avec le courtier et une consultation verbale ou directe où, là, on parle avec le courtier. Et d'ailleurs je crois que les tarifs de consultation sont différents selon qu'on communique avec un site d'un courtier ou qu'on communique avec le courtier lui-même, et cela va de soi que les conseils donnés à la personne qui veut investir finalement sont différents. La valeur de l'information est différente parce que, là, on va avoir plus de précisions, on est plus avisé. Et, comme on est dans un monde très volatile, parce que l'information financière évolue très rapidement – dans le même jour, les données ne sont plus les mêmes – c'est évident qu'il y a une qualité de l'information qui est perdue lorsqu'on ne transige pas directement, comme vous dites, avec le courtier mais électroniquement, en passant par une adresse d'un courtier. C'est différent.

Mme Crépin (Carmen): C'est ça qui est important. Le lien avec le courtier, même si le client ne le voit pas, il est là quand même, et, notre juridiction, c'est là-dessus qu'elle s'exerce.

Le Président (M. Simard, Richelieu): On avait longuement abordé ces questions hier. Nous allons passer à autre chose. Mais j'ai, comme vous tous sans doute, fait des transactions à la banque, au comptoir une grande partie de ma vie, ensuite à un guichet électronique, maintenant je fais ça directement sur mon écran, mais c'est toujours la CIBC ou la caisse populaire. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Jérôme-Forget: Mais je posais la question, M. le Président: Est-ce que la tendance ne va pas dans la direction opposée, c'est-à-dire de diminuer progressivement le rôle du courtier? Je pense à NASDAQ, par exemple.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Le courtier à escompte.

Mme Jérôme-Forget: Il y a le courtier à escompte, effectivement. Mais, à NASDAQ, est-ce que ça se passe toujours avec un courtier?

M. Lemoine (Guy): Oui. C'est que le client peut décider de faire affaire avec un courtier de plein exercice ou de faire affaire avec un courtier à escompte.

Mme Jérôme-Forget: Oui, ça, je sais ça.

M. Lemoine (Guy): S'il fait affaire avec un courtier de plein exercice, il bénéficie habituellement de recommandations. Si le client estime que, pour réduire ses frais de commission...

Mme Jérôme-Forget: C'est là où il doit payer 2 % de commission par transaction.

M. Lemoine (Guy): Exact. S'il veut réduire ses frais de transaction et qu'il s'estime déjà suffisamment informé, il peut décider, pour réduire, donc, ses frais, de passer par l'intermédiaire d'un courtier exécutant qui effectuera l'opération à moindres frais. Beaucoup de gens passent dorénavant par l'intermédiaire de ce genre de firmes pour réduire leurs frais et peut-être maximiser leurs profits, mais moyennant moins de conseils.

Mme Jérôme-Forget: Oui, d'accord. Je parle de la tendance. Vous avez parlé justement, à Davos, des propos tenus par quelqu'un qui disait qu'à l'avenir tout va sembler avoir une espèce de synergie, ou les choses vont se concentrer à des endroits très particuliers. On peut présumer qu'il pouvait rêver en couleur, mais peut-être qu'il avait eu une intuition, cet homme-là. Est-ce qu'on ne se dirige pas ou la personne justement ne va pas vouloir avoir accès directement, à cause de l'Internet qui donne beaucoup d'information, malgré tout, en dépit du fait qu'on dit toujours que maintenant on est moins protégé? Moi, à mon avis, c'est le contraire, depuis qu'on a l'Internet, on est capable de vérifier l'information d'un courtier parce que le courtier, c'était une personne qui avait son intérêt également – ce n'est pas toujours l'intérêt du client lorsqu'il est en affaires – alors que, moi, je pense que, si je suis capable d'aller vérifier l'information qui existe sur l'Internet d'une évaluation d'une maison de courtage, d'une autre maison de courtage, d'un autre consultant qui donne l'évaluation d'une entreprise, j'ai beaucoup plus d'information qu'on en avait antérieurement.

Alors, la question que je pose, c'est: Est-ce qu'on ne se dirige pas justement dans un monde où les commissions des valeurs mobilières vont être dans la position du CRTC? Le CRTC, qui doit contrôler ou supposément amener une certaine cohérence dans la protection des ondes ou de la programmation, trouve cela de plus en plus difficile parce que, évidemment, les canaux passent et puis que les gens ont accès à 100, 150, et on parle de 300 canaux. Est-ce que les commissions des valeurs mobilières ne vont pas connaître le même phénomène, la même réaction? Parce que les gens vont offrir des services, et, à cause également des coûts – parce que des maisons de courtage, ce n'est pas bon marché; même si on passe par un nouveau, c'est un courtier exécutant – pour essayer de sauver les commissions, il risque qu'on soit capable d'avoir des services encore plus économiques en évitant encore de passer par des gens. Et, comme, les gens, il y en a qui vont devenir de plus en plus sophistiqués, ils vont décider de passer outre aux courtiers. Est-ce que vous ne croyez pas qu'il y a là un danger ou des opportunités, ça dépend comment on regarde la vie, là? Moi, je pense que, avec l'Internet, contrairement à ce qui se dit, qu'on a plus d'information, qu'on n'est pas protégé, on est protégé parce qu'on a une information additionnelle.

Mme Crépin (Carmen): Je partage votre avis, c'est probablement ça aussi qui explique l'attrait de plus en plus grand des investisseurs pour faire affaire avec un courtier à escompte, puisqu'ils me disent: Par Internet, j'ai accès à l'information, je peux la lire et l'analyser moi-même comme un courtier et je vais prendre mes décisions d'investissement. Donc, pour l'instant, le lien électronique avec le courtier, dans ce contexte-là, il se fait au niveau de l'exécution de la transaction. Mais, à titre d'exemple, en avril 1999, la CVMQ a publié les résultats d'un sondage Angus Reid qui disait que la majorité des Québécois, 86 %, n'utilisent pas l'Internet pour rechercher des investissements potentiels, et ce, même si 47 % y ont accès. Bon, je pense que c'est une donnée qui date d'avril 1999. Fort probablement que, quand on regarde ce qui se passe dans les médias ces derniers jours, les courtiers à escompte ont peine à répondre à la demande de leurs clients. C'est peut-être un phénomène qui est en train de changer. Pour l'instant, même si le client ne le voit pas, le client par Internet qui utilise le service du courtier pour l'exécution des transactions... On pense que les règles qui permettent aux autorités réglementaires d'intervenir via le courtier sont encore adéquates, mais je partage tout à fait votre opinion à l'effet qu'il faut s'interroger: Pendant combien de temps elles seront encore adéquates?

(11 h 20)

C'est pour ça aussi qu'au niveau des autorités réglementaires il faut qu'on regarde les liens électroniques. Est-ce qu'il y a des normes à faire de façon harmonisée entre les autorités réglementaires, sur les liens électroniques entre les courtiers et entre les courtiers et les bourses? C'est peut-être l'avenir par rapport à, si vous voulez, ce qui sera l'élément d'accès d'une juridiction. Cette problématique-là, elle interpelle la CVMQ comme les autres commissions au Canada et comme les autres régulateurs dans le monde. C'est pour ça qu'à l'OICV il y a un groupe de travail sur lequel nous avons un participant qui s'occupe des problèmes d'Internet et de liens électroniques. Mais répondre à: Est-ce que c'est ça? je ne peux pas dire plus que: On pense qu'il va falloir évoluer mais on ne sait pas encore comment.

M. Laurion (Daniel): Mais, pour l'instant, le courtier ou, en tout cas, une forme de courtier sera toujours nécessaire, particulièrement pour l'aspect règlement de la transaction. Il faut une garantie pour que le marché fonctionne, une garantie que ça va se régler, que l'argent va être là, que la capitalisation va être là, que le paiement va se faire puis que l'échange va se faire, en réalité. Alors, présentement, le rôle du courtier, même si on a une quasi- désintermédiation parce qu'on a l'impression d'accéder au marché directement... Le marché lui-même, que ce soit une Bourse ou un autre marché, ne voit pas le client, lui. Ce qu'il voit, c'est courtier X qui fait une transaction, puis son point d'ancrage est sur ce courtier-là. C'est là où est sa garantie que l'autre côté de l'opération va se régler.


Création d'un centre boursier

Le Président (M. Simard, Richelieu): Avant de passer la parole au député d'Abitibi-Ouest, je me raccroche à ce que vous venez de dire. Mais il n'y a pas un phénomène aussi nouveau – on est toujours dans les phénomènes en pleine évolution – un autre phénomène qui va, lui, presque complètement... Il peut sembler paradoxal qu'un certain nombre de bourses – je pense à Francfort, je pense à Milan, à Paris, beaucoup à Paris, actuellement – se mettent à être des instruments-conseils, à couver, à prendre sous leur aile un certain nombre de «start-up» d'entreprises nouvelles, à leur permettre d'aller rencontrer les investisseurs les plus susceptibles d'investir dans ces nouvelles sociétés là. Il y a tout un marché, ce qu'on appelle un nouveau marché, qui se développe dans un certain nombre de bourses où, là, le lien entre la Bourse et non pas, cette fois-ci, l'investisseur mais surtout l'entreprise émettrice devient beaucoup plus étroit qu'autrefois. Est-ce que vous assistez à ce phénomène-là actuellement?

M. Laurion (Daniel): Absolument.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Est-ce qu'on va le voir chez nous?

M. Laurion (Daniel): Bien, écoutez, on a déjà parlé d'un centre boursier sous l'égide de la Bourse de Montréal. Je pense que vous tapez dans le mille. Les marchés, c'est une chose, mais il y a un tas de services où les bourses peuvent diversifier leurs opérations, si vous voulez, et assurer une croissance de leurs marchés par rapport à ça justement en allant se présenter aux investisseurs, en allant faire de la promotion auprès des émetteurs potentiels. Tout ça, à long terme, c'est une stratégie de croissance de marchés, avec des services qui sont là et pour lesquels il y a un besoin.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Ce centre boursier, il était dans la recommandation du mois de mars, non pas dans vos conditions, mais vous aviez souligné dans votre rapport cette existence. Où est-ce qu'il en est, là? Est-ce que ça existe? Son existence virtuelle est rendue où?

Mme Crépin (Carmen): Je peux vous dire que là-dessus j'ai eu des discussions la semaine dernière avec le président du conseil de la Bourse de Montréal qui m'a dit: Nous avons annoncé que nous étions prêts à faire des investissements dans ce centre boursier; nous avons l'intention de procéder et de tenir parole. Je pense que le projet, tel que je le comprends, c'est de réunir plusieurs investisseurs. La Bourse de Montréal voulait, quant à elle, investir une somme de 1 000 000 $ à raison de 100 000 $ par année et donc continuer à faire des investissements annuellement. Bon. Alors, ça fait partie des préoccupations que nous avons, puisque les bourses elles-mêmes ont annoncé ça, et c'est un élément qu'on va suivre avec le nouveau président de la Bourse. Je pense que c'est une initiative intéressante pour les petites entreprises que la création de ce centre.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Si je prends pour acquis que la Bourse de Montréal, qui est une entreprise privée, a reçu 28 000 000 $ de compensation ou va recevoir de Toronto à peu près 28 000 000 $ de compensation, ce que vous m'annoncez là, 100 000 $ par année, ça ne me semble pas être trop au-dessus de leurs moyens, hein?

Mme Crépin (Carmen): C'est la dernière information que j'ai eue la semaine dernière.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Disons que ça me semble bien timide, tout ça. M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Lors des audiences que la Commission des valeurs mobilières a organisées sur la restructuration, il y a beaucoup d'intervenants, à tort ou à raison – je ne suis pas en mesure d'apprécier si leurs arguments étaient fondés – qui ont questionné la pertinence du délai, le fameux 10 ans de l'entente. C'est revenu souvent de plusieurs intervenants quand on regarde le résultat des audiences, là, à deux chapitres. Il y en a qui disaient: Bon, bien, après 10 ans, il arrive quoi? C'est le blackout total, on ne sait pas ce qui se passe, on recommence, on efface. Alors, j'aimerais avoir un avis là-dessus.


Situation au terme de l'entente avec la Bourse de Toronto

Deuxièmement, l'autre volet sur le 10 ans, ils pensaient, certains, lors des audiences, qu'il y aurait un danger si jamais la Bourse devenait – ce qu'on souhaite; en tout cas, moi, je le souhaite le plus possible – très performante et connaissait une grande expansion dans les produits dérivés, que, là, ce soit très intéressant pour Toronto qui, habituellement, ne laisse pas aller les bonnes affaires sur le plan de la business. Puis là je vous ai entendus, tantôt, vous avez dit: Cinq ans, c'est long beaucoup. Vous avez dit ça tantôt. Alors, 10 ans pour vous, ça doit être très long. Vous n'avez sûrement pas les mêmes inquiétudes que tous ces gens-là. Alors là, j'essaie de faire un ajustement. Ces gens-là étaient mal branchés? C'est quoi, l'affaire?

Puis je fais ça un peu sur le ton de l'humour, mais c'est sérieux, je pense, les deux éléments principaux. Est-ce que vous avez des éléments de sécurité à nous offrir, si jamais on performait – ce que je souhaite – que la Bourse de Toronto ne remettra pas la patte sur un produit qu'on aurait développé avec succès? Puis l'autre volet: Est-ce que, après 10 ans, tout est à recommencer puis il y a une nouvelle négociation?

Mme Crépin (Carmen): Si vous permettez, moi, je vais répondre à la deuxième question puis demander à M. Labelle de commenter sur le 10 ans...

M. Gendron: À votre choix, à votre goût, vous êtes la présidente.

Mme Crépin (Carmen): ...parce qu'il a été impliqué dans le dossier. Sur les produits dérivés, effectivement, la restructuration prévoit le transfert de toutes les activités de produits dérivés de la Bourse de Toronto à la Bourse de Montréal. Les travaux sont en cours à Montréal pour les supports informatiques qui sont requis, et ça fait partie des éléments sur lesquels on se reprononce au mois de mars, que le transfert soit effectué suivant le calendrier. Donc, Toronto aura transféré ses produits dérivés.

Le marché du produit dérivé, je pense que c'est la Bourse de Montréal qui va le développer, et elle veut le développer de façon internationale avec son alliance dans le réseau Globex. Donc, c'est son marché, c'est son défi, et elle doit mettre les efforts requis pour le développer. Mais le transfert par Toronto, c'est un élément de la restructuration, et, si on a approuvé la restructuration, c'était conditionnel à ce que le transfert soit fait. Donc, ça fait partie des éléments qu'on va regarder avec les approbations qu'on donne et des éléments de suivi. Sur le 10 ans, Me Labelle.

M. Labelle (Jacques): Merci. Effectivement, le délai de 10 ans a posé certains questionnements. Il a posé des questionnements au niveau même de la Commission, à tout le moins au niveau du personnel de la Commission, parce que, lorsque le personnel a présenté son analyse ou sa vision des choses lors des audiences, on a noté que ce délai de 10 ans pouvait comporter un certain risque, surtout quant à l'exercice de la juridiction du Québec sur ce marché qui s'installait et sur le marché qui aurait lieu dans 10 ans, ce pour quoi on voulait, ou enfin on exprimait, à ce moment-là, que le 10 ans devrait se retrouver aussi dans les règles peut-être des bourses, des nouvelles bourses qu'on va accueillir comme organisme d'autoréglementation.

(11 h 30)

Mais je pense que la Commission a réglé tout notre problème, ou enfin les préoccupations qu'on avait au niveau personnel à ce moment-là, en exigeant justement la reconnaissance de ces deux nouvelles bourses par la Commission du Québec parce que, une fois qu'une Bourse est reconnue par la Commission du Québec, elle ne peut pas non plus cesser ses activités sans obtenir l'autorisation de la Commission du Québec pour arrêter ses activités. Donc, même si c'est un délai de 10 ans et si on ne voulait pas renouveler le contrat après 10 ans ou si on ne voulait plus faire affaire en territoire québécois après 10 ans, la Commission serait automatiquement impliquée dans le dossier. Quels seront ses pouvoirs, quels seront ses agissements dans 10 ans? Ça, je pense que 10 ans, effectivement, c'est très long, et c'est peut-être un peu prématuré pour essayer même de trouver une réponse à ça, sauf que ce n'est pas une clause de 10 ans où, après 10 ans, tout le monde se ramasse les mains vides sans pouvoir d'intervention. La Commission a réglé, je pense, en grande partie le problème en gardant ce pouvoir d'intervention après 10 ans.

M. Gendron: O.K. Mais, quant à l'inquiétude que certains avaient, aux audiences, que le marché se développe, même si je reconnais que vous venez d'indiquer que vous avez un pouvoir d'intervention, que Toronto ait des vélléités de reprendre le marché du dérivé, vous ne dites pas: C'est impossible.

M. Labelle (Jacques): Il n'y a rien d'impossible.

M. Gendron: Voilà. Par contre, vous dites: Par le biais du contrôle qu'on a, il y aura, à tout le moins, une discussion. Autant quelqu'un qui prétend ça, que c'est quasiment de l'acquis que, si c'est bon, Toronto va remettre la patte là-dessus, vous avez autant de raisons de dire: Non, il y aurait des discussions, et on a les moyens de contrer ça, mais sans donner la garantie.

M. Labelle (Jacques): Il y a tout de même le fait que les bourses, si on prend Toronto et Montréal, sont en relation contractuelle. Il y a des engagements qui ont été pris de part et d'autre par les deux bourses, les deux bourses ont reconnu qu'elles concentreraient leurs activités, l'une dans les transactions sur actions et l'autre sur les dérivés. Si jamais justement Toronto voulait reprendre des négociations sur les dérivés, je pense que la Bourse de Montréal aussi serait là pour faire respecter son contrat. La Bourse de Montréal aura aussi, elle, certains droits. La même chose si Montréal devait, à un moment donné, décider de reprendre l'inscription de sociétés à grande capitalisation à Montréal au détriment de Toronto. Je veux dire, lorsqu'on parle de Toronto qui prendrait la main sur les titres de Montréal, l'inverse serait possible. Je pense que plus Montréal sera développée dans les matières de dérivés, plus Montréal sera forte en matière de dérivés et plus elle pourra tenir tête aussi à quelqu'un d'autre qui voudrait venir la compétitionner et, pire, aller à l'encontre d'un contrat signé qui donne des ouvertures à des dommages ou poursuites, en n'oubliant pas aussi l'intervention possible des régulateurs, parce que les régulateurs ont un pouvoir direct.

M. Gendron: Bien, moi, je vous remercie, vous deux. Et, juste là-dessus, là, un commentaire, parce que, effectivement, l'objectif qu'on a, nous autres, de scruter le travail de la Commission des valeurs mobilières, il peut être très pragmatique à des égards: Avez-vous les ressources, êtes-vous capables de faire votre travail, ainsi de suite? Mais il s'est dit pas mal de choses et il s'est écrit pas mal de choses. Là-dessus, ce qui m'inquiétait un peu dans les écrits à caractère financier, c'est qu'il y avait un certain nombre de gratuités, genre ce qu'on vient de discuter. C'était presque automatique que, si jamais on se développait un peu fort puis qu'on était un peu trop bon, on reperdrait ça après 10 ans. Je l'ai lu, je l'ai vu, je l'ai sous mes yeux. Je ne citerai pas nécessairement l'article et le journaliste, que je respecte.

Et le fait d'avoir l'occasion de vous avoir, la question avait double but: un, offrir un peu de sécurité parce que, je répète, quand on lit les procès-verbaux de vos audiences, cet aspect-là est venu fréquemment, couramment, et on sent cette latente inquiétude par rapport à l'expiration du délai, que l'habitué de jouer dans le milieu des affaires – c'est peut-être un problème culturel qu'on traîne encore, là – il va remettre la patte sur la bonne affaire, puis, nous autres, on se sera fait avoir encore. Alors, vous dites: Normalement, des gens du milieu des affaires devraient savoir un peu ce que ça signifie, ça, les engagements contractuels. Et les bourses... ça ne nous offre pas toute la sécurité mais il n'y a pas d'automatisme là-dedans.


Reconnaissance de la Bourse à titre d'organisme d'autoréglementation

Deuxième question, vous avez énormément insisté, vous, la Commission des valeurs mobilières, sur l'importance que la restructuration garantisse que la Bourse de Toronto soit reconnue comme un organisme autonome de régulation, un OAR. Moi, j'aimerais ça que vous fassiez quelques phrases là-dessus. Je vous cite, là: «Il nous apparaît que l'action requise est urgente, car la concurrence s'installe très rapidement à l'échelle nord-américaine.»

Juste une seconde, je veux être sûr d'avoir la bonne citation. Et vous mettiez l'importance... «Quant à nous – et c'est vous autres qui parlez, là – il serait important que la Bourse de développement soit reconnue comme un OAR pour pouvoir mener au Québec les activités qu'elle envisage.» J'aimerais ça que vous donniez un peu plus d'informations. Pourquoi c'est aussi majeur que ça, cette reconnaissance d'organisme autonome de régulation?

Mme Crépin (Carmen): On le voyait de la même façon que par rapport à la Bourse de Toronto. C'est que, si on veut que la CVMQ soit capable de jouer son rôle à l'égard des entreprises du Québec et des investisseurs, il faut qu'elle puisse avoir un pouvoir d'intervention ou d'approbation sur les activités qu'une autre Bourse va exercer au Québec. Donc, pour l'instant, les intentions ou ce que la Bourse de l'Ouest veut exercer comme activités au Québec, ce n'est pas encore clairement défini. Alors là, il faut ajuster, dans le fond, la reconnaissance, mais c'est évident que...

La reconnaissance, pourquoi c'est important? C'est que, s'il y a exercice d'activités, la reconnaissance, ça nous donne un droit d'intervenir. Ça nous donne un droit d'intervenir sur les règles, les modifications aux règles. C'est la clé pour exercer notre juridiction.

M. Gendron: Ça va. Vous poursuiviez, je vous cite toujours, vous dites: «Si la Commission accordait une telle reconnaissance, nous aurions éventuellement à vivre de nouveaux problèmes de conflit juridictionnel.» Alors, est-ce que vous pourriez être plus spécifique?

Mme Crépin (Carmen): ...

M. Gendron: Oui, oui, je suis dans vos affaires. Je sais que je suis dans vos affaires. C'est pour ça. Je les ai lues, vos affaires.

Mme Crépin (Carmen): Oui, oui, j'essayais de le retracer.

M. Labelle (Jacques): À savoir, premièrement, quel était...

M. Gendron: Oui, plus précisément, parce que je ne suis pas assez spécialisé pour comprendre la création des nouveaux problèmes de conflit juridictionnel. Parce que ce que je comprends, c'est que d'une part vous souhaitez quelque chose qui est légitime. Quand on est un organisme autonome de régulation, ça permet, comme vous dites, d'exercer un petit peu la fonction contrôle. Ça, je n'ai pas de trouble. Donc, c'est bénéfique de l'avoir. Mais là vous demandez quelque chose de souhaitable mais qui crée passablement de juridiction conflictuelle. Alors, pour quelqu'un qui est un peu plus profane dans ces choses-là, être en mesure d'identifier deux, trois secteurs, dire: Oui, c'est vrai, c'est là que ça va poser des conflits additionnels, je ne le vois pas, moi, là.

M. Labelle (Jacques): D'accord. On fait juste un petit recul de 30 secondes pour aller directement à votre question, à savoir que, à la Bourse de Montréal qui existait ou telle qu'elle existait, on offrait aux investisseurs québécois, aux entreprises québécoises, tous les services qu'on va chercher normalement sur une Bourse. Notamment au niveau des transactions, on avait des transactions sur actions, grande, petite capitalisation, et des transactions sur dérivés, et la Bourse de Montréal est reconnue comme organisme d'autoréglementation par la Commission, surveillé par la Commission, avec des changements de règles approuvés par la Commission aussi.

Lorsqu'on a présenté la restructuration des bourses au Canada, on a pris ce marché complet pour le diviser en trois, c'est-à-dire que Montréal offrait le dérivé, Toronto, la grande capitalisation et la nouvelle Bourse de l'Ouest, la petite capitalisation, si bien que, face à l'investisseur, il fallait qu'il s'adresse maintenant à trois guichets différents selon le produit qu'il voulait offrir.

Nous, notre rôle, il est fonction de la protection de l'investisseur. Donc, on s'est dit: Même si la Bourse de Toronto et la nouvelle Bourse de l'Ouest sont à l'extérieur du pays, comme nos investisseurs québécois vont y intervenir, est-ce que ces bourses-là exercent l'activité de Bourse au Québec? Et, si oui, est-ce que, comme Commission, je dois continuer à exercer mon contrôle? Je pense que les réponses étaient en soi évidentes: on arrive à oui deux fois. Donc, la Commission reconnaît la Bourse de Toronto et la nouvelle Bourse de l'Ouest comme organismes d'autoréglementation pour justement pouvoir avoir un contrôle sur ces deux bourses-là, pour toujours pouvoir exercer pleinement tous les pouvoirs qu'on avait versus Montréal à l'époque. Maintenant, ces mêmes pouvoirs s'exercent versus trois bourses pour faire un total.

Lorsqu'on parle de conflit juridictionnel, il est évident que ces bourses-là opèrent aussi sur d'autres territoires, c'est-à-dire Toronto sur le territoire de l'Ontario, dans l'Ouest aussi, la Bourse de l'Ouest qui va avoir des bureaux à Toronto. Chacune des bourses est de compétence... Chacune des provinces, disons, a la compétence en valeurs mobilières, et chacune des provinces doit approuver les modifications aux règles de ces bourses-là. Donc, si Toronto veut faire modifier une règle, elle doit la faire approuver au Québec et la faire approuver en Ontario. Il se peut que les régulateurs ne soient pas d'accord sur la nouvelle règle et sur sa portée, ce qui est susceptible d'amener un conflit juridictionnel entre le Québec et l'Ontario sur un point donné. La même chose avec l'Ouest.

Le Président (M. Duguay): Merci, M. le député.

M. Gendron: J'ai fini?

(11 h 40)

Le Président (M. Duguay): Oui, t'as fini. Ha, ha, ha! T'as même empiété un petit peu. Alors, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, est-ce que vous...


Fonds canadien de protection des épargnants (suite)

Mme Jérôme-Forget: Oui. Je voulais revenir à un point qui a été soulevé antérieurement, c'était le fonds d'indemnisation. Quels sont les courtiers qui doivent s'inscrire à ce fonds, puisque c'est une police d'assurance? Vous avez dit: Ça a jusqu'à l'équivalent de 1 000 000 $. Je présume que des grosses maisons de courtage, des courtiers... Est-ce que chaque courtier dans une maison de courtage doit nécessairement s'inscrire auprès de ce fonds d'indemnisation?

M. Lorrain (Jean): Il ne faut pas considérer chaque courtier à l'intérieur d'une maison de courtage, il faut parler des maisons de courtage qui sont inscrites auprès de la Commission à titre de courtiers de plein exercice. Tous les courtiers inscrits auprès de la Commission dans cette catégorie-là, donc offrant la capacité de placer tous les types de produits, quels qu'ils soient, tous les courtiers quels qu'ils soient, donc, sont requis d'être membres du Fonds canadien de protection des épargnants, c'est une exigence. Donc, tous ces courtiers-là, qu'ils soient grands ou petits, font bénéficier leur clientèle de cette protection-là en cas d'insolvabilité.

Mme Jérôme-Forget: Moi, on m'a informée – encore là, est-ce que j'ai une mauvaise information? c'est tout à fait possible – que, si un courtier donne un conseil à un client et que ce courtier vole, est condamné, a volé, par la suite, le client perd son argent.

M. Lorrain (Jean): Il faut bien se comprendre et, encore une fois, faire bien comme il faut la distinction qui existe entre ce qu'on appelle un courtier...

Mme Jérôme-Forget: Oui, bien sûr.

M. Lorrain (Jean): ...et l'individu qui travaille pour ce courtier-là, qu'on qualifie de représentant, qui est également inscrit tant auprès de la Commission que des organismes d'autoréglementation. Donc, le fonds d'indemnisation, son but au départ n'est pas de protéger contre les fraudes, sa création ne visait pas cette fin-là en soi; le but fondamental du fonds d'indemnisation, c'était de protéger contre les conséquences économiques d'une faillite d'un courtier. Le courtier détenant les titres des clients, finalement faisant des opérations commerciales importantes en termes de valeurs pour le client, en cas d'insolvabilité, le client pouvait se retrouver avec des difficultés. Donc, on visait à protéger l'intégrité de son capital placé auprès dudit courtier. Donc, c'était le but unique.

Par ailleurs, il est évident que les régimes ordinaires de droit continuent à s'appliquer à l'égard de la protection de l'épargnant. Ça veut dire quoi? Ça veut dire qu'il y a des assurances en cas de fraude. Donc, le courtier, c'est-à-dire la boîte qui opère, doit posséder, en vertu de notre réglementation, des assurances suffisantes pour protéger les investisseurs. Également, le courtier lui-même a une responsabilité à l'égard des gestes posés par son représentant en cas de fraude ou, c'est-à-dire, en cas de mauvais conseil qui équivaut à une faute professionnelle ou frauduleuse.

Mme Jérôme-Forget: Je parle de fraude.

M. Lorrain (Jean): Si on parle de fraude, à ce moment-là, encore une fois, le courtier, à titre de commettant, a une responsabilité pour son membre, pour son représentant qui fait des opérations, et il y a des assurances qui doivent couvrir, effectivement, qui doivent protéger les investisseurs. Mais le fonds d'indemnisation n'a pas ce rôle-là, fondamentalement.

Mme Jérôme-Forget: Il ne sert pas à ça. D'accord. Donc, ce que vous me dites, l'information que j'avais à l'effet que la maison de courtage n'était pas tenue d'indemniser une personne qui avait été en contact avec un courtier fraudeur, c'est inexact.

M. Lorrain (Jean): C'est inexact.

Mme Jérôme-Forget: O.K. Alors, votre mission, c'est de protéger l'épargnant également.


Protection des investisseurs dans les compagnies d'assurances

Je vais reprendre un exemple, là, les cas qui sont en cause avec Gestion Alternative. Donc, il y a plusieurs de ces courtiers qui oeuvrent dans la communauté. Il semblerait que vous ayez très peu de contrôle sur ces individus. Est-ce que je me trompe?

M. Lorrain (Jean): Mme Crépin, lorsqu'elle a répondu hier aux questions relativement à L'Alternative, a clairement mentionné qu'il y avait un grand nombre de courtiers en assurance qui avaient opéré là-dedans. Pas à dire qu'il n'y avait pas de courtiers en valeurs mobilières, il a pu y en avoir, et les enquêtes menées par la Commission devront déterminer leur responsabilité dans ce cadre-là, mais, majoritairement, il semble que ce soit plus un réseau de distribution d'assurances qui ait fait la vente et la promotion des placements dans le cadre de L'Alternative.

S'il s'agit de ce type de réseau là, de prime abord, nous n'exerçons pas un contrôle, une supervision immédiate, dans le sens que ce n'est pas comme un courtier inscrit auprès de la Commission qu'on supervise par des inspections, par des contrôles informatifs réguliers dans l'année. S'il s'agit de courtiers en assurance, par exemple, ou d'autres types d'intermédiaires financiers, la Commission n'exerce pas un contrôle immédiat sur ceux-ci.

Mme Jérôme-Forget: Alors, écoutez, votre mission, c'est de protéger l'épargnant.

M. Lorrain (Jean): Exact.

Mme Jérôme-Forget: C'est ça, la mission de la Commission. Comment se fait-il qu'on ait des règles aussi rigoureuses quand on s'adresse à un groupe de courtiers, puis que l'autre, il semblerait, a à peu près les mêmes pouvoirs, puis que vous n'exercez pas la protection voulue pour l'épargnant? Donc, il n'a pas besoin d'avoir d'assurance, si je comprends bien, il n'est pas obligé de s'inscrire au Fonds de protection ou d'indemnisation. Qu'est-ce qui arrive à tous ces épargnants-là qui ont investi 25 000 $, 50 000 $, 60 000 $ et qui semblent avoir perdu leur argent? Comment se fait-il que la Commission n'ait pas en place un outil qui forcerait, je ne sais pas... Est-ce qu'il y a quelque chose de possible?

M. Lorrain (Jean): Encore une fois, c'est une question de juridiction fondamentale. Si une personne n'est pas dans le cadre immédiat de notre juridiction, nous ne pouvons lui imposer des obligations ni lui imposer une supervision qu'elle ne désire pas avoir parce qu'elle ne relève pas de la juridiction immédiate de la Commission. Elle peut relever d'autres organismes voulus par le législateur.

Par exemple, à l'heure actuelle, depuis le mois d'octobre, le Bureau des services financiers a juridiction sur ce type d'individus là. Pourquoi? Parce que, effectivement, ils oeuvrent dans un secteur d'activité qui n'était pas le nôtre, qui n'était pas sous notre juridiction en vertu de notre loi, et que c'est eux qui doivent élaborer les règles de fonctionnement de ces individus dans le marché, donc les règles de protection également. Je ne veux pas nécessairement faire l'apologie, si vous voulez, des règles que le Bureau des services financiers pourra mettre en place en vue de protéger les investisseurs dans le domaine de l'assurance, c'est un domaine qui est un peu à l'extérieur de celui de la Commission des valeurs mobilières.

Par ailleurs, la Commission continue à exercer son rôle fondamental de protection des épargnants dans la mesure où, même si ces personnes-là sont à l'extérieur de la juridiction immédiate, si elles posent des gestes en vue de faire des placements qui, eux, tombent sous la juridiction de la Commission... Donc, si, par exemple, un individu place une valeur mobilière sans les inscriptions, sans les prospectus, à ce moment-là la Commission fera valoir sa juridiction pleinement par les poursuites pénales qu'elle pourra intenter, par les ordonnances de blocage qu'elle a déjà exercées, entre autres, dans le dossier de L'Alternative et par tous autres moyens légaux à sa disposition pour assurer la protection de l'épargnant.

Mme Jérôme-Forget: Écoutez, là, moi, je parle de gens qui ne sont manifestement pas des investisseurs très sophistiqués. Il semblerait que ces gens-là portent le même nom, ils s'appellent des courtiers aussi. Ils ont des sceaux, ces gens-là. Ils ont quelque chose, ça a l'air bien officiel. Même, il y en a qui ont investi leurs REER dans ça. D'accord? Donc, ils ont pris leurs épargnes pour leur retraite. Alors, pour les gens, un sceau, ça vaut presque un autre sceau.

Je comprends que vous n'ayez pas le mandat, la mission, peut-être que ça ne relève pas de votre niveau, puisque les compagnies d'assurances, ça relève probablement de l'Inspecteur général des institutions financières pour obtenir le permis, mais les courtiers aussi relèvent de l'Inspecteur général des institutions financières.

M. Lorrain (Jean): Les courtiers en assurance relevaient...

Mme Jérôme-Forget: ...qui ont vendu, donc, ces produits-là. Alors, ce que je trouve difficile, moi, à comprendre, c'est qu'on ait un organisme comme la Commission des valeurs mobilières dont la mission, c'est de protéger l'investisseur, les gens qui veulent émettre des émissions publiques et également les épargnants qui veulent acheter de ces produits-là, puis là on nous dit: Bien, eux autres, ils sont de plein droit, de plein exercice, comme si les gens comprenaient ces mots-là. Il n'y a personne qui comprend ça, là. Soyons bien clairs, il n'y a personne qui sait la différence. On utilise la même terminologie, ce sont des courtiers malgré tout. Et là, tout à coup, les gens, on apprend qu'ils n'ont ni assurance ni vraiment ne relèvent de la Commission des valeurs mobilières. Alors, les gens ne savent même pas où s'orienter.

(11 h 50)

Qu'est-ce que la Commission des valeurs mobilières peut faire ou qu'est-ce que, nous, nous pouvons faire ici pour amener un éclairage sur ça, pour aider les gens à mieux saisir quand est-ce qu'ils prennent vraiment des risques? Si vous allez auprès de telles personnes, bien là vous prenez des risques, il n'y a aucune protection. Ces gens-là, ils n'ont aucune obligation de s'assurer, ils ne sont pas surveillés, il n'y a rien qui existe comme chien de garde. Comprenez mon point, là. Je veux dire, le monde, il n'a pas tout des doctorats en investissement avant d'aller investir quelque part. Il y a du monde qui investit ses petites épargnes. Puis je pense qu'on a eu un exemple frappant récemment où les gens ont été très perturbés parce qu'ils ont perdu – ils pensent, en tout cas, avoir perdu – ce qu'ils avaient.

Mme Crépin (Carmen): Je pense que, à partir du moment où on exerce des fonctions qui sont établies par une loi, notre rôle premier, c'est de l'exercer au maximum à l'intérieur de cette loi-là. Par ailleurs, dans l'exemple que vous citez, effectivement, comme il y avait d'autres juridictions concernées, c'est évident que, dès que nous avons amorcé notre enquête, nous avons tenté de nous concerter avec l'autre juridiction concernée pour être sûrs que toutes les actions qui ont à être posées par les autorités concernées le soient. On ne peut pas, quant à nous, déborder de notre mandat, mais, bien évidemment, l'autre autorité a, elle aussi, des devoirs et une mission à remplir à l'égard des épargnants. Ce qu'on peut faire, c'est de se concerter le plus possible avec eux. Est-ce que, par la suite...

Bon, le législateur a amorcé quand même une réforme, avec la loi n° 188, en créant un nouvel organisme. Ce nouvel organisme là va exercer les activités à l'égard de ces courtiers-là. Je pense que le Québec, si je compare avec les discussions auxquelles j'ai assisté, malgré tout, au niveau des autres juridictions, a déjà avancé par rapport à d'autres juridictions dans, mettons, les appellations, ne seraient-ce que les appellations. Justement, qui a le droit de s'appeler courtier? Qui a le droit de s'appeler planificateur financier? Quelles sont les exigences requises? Quels sont les cours qui doivent être fournis? Quel est le contrôle qui se fait là-dessus? Le législateur québécois a mis en marche des choses là-dessus. C'est probablement des cas pratiques et l'évolution de la situation qui vont permettre de réagir à ces...

Mme Jérôme-Forget: Est-ce que vous pouvez nous éclairer, nous, comme personnes qui peuvent peut-être avoir, en tout cas, à réfléchir à ça? Parce que tout le marché financier est en train de se transformer. Vous avez les compagnies d'assurances qui commencent à vendre d'autres produits et qui envahissent d'autres secteurs, vous avez les banques qui sont en train également d'élargir leur mission ou leur volet. Tout ce marché qui est en train de se repositionner pour envahir à peu près tous les marchés, chacun avec sa mission respective, comment est-ce que vous voyez ça pour la Commission des valeurs mobilières et encore la protection – je reviens toujours à ce que le député de La Prairie disait – de l'épargnant qui, lui, ne se retrouve pas toujours dans tout ça?

Mme Crépin (Carmen): Je pense que notre rôle, c'est d'être à l'affût des éléments qui peuvent avoir un impact, et c'est évident qu'on peut faire des recommandations. Comme la semaine dernière, à titre d'exemple, on discutait avec les gens du ministère des Finances du Québec par rapport au projet du gouvernement fédéral d'établir une agence de protection des droits des épargnants à l'égard des gens qui investissent dans le secteur des valeurs mobilières. Depuis mon arrivée à la Commission, on a eu plusieurs discussions, au niveau des ACVM, là-dessus. On en a discuté pour s'entendre que, un, oublions les questions de juridiction, pourquoi créer une nouvelle agence alors que chaque autorité réglementaire exerce des pouvoirs à l'égard de la protection des épargnants, et qu'elles collaborent entre elles à cet égard-là? Et nous avons convenu, au niveau des ACVM, chacune dans notre juridiction, de faire les démarches requises auprès des gouvernements qui nous ont confié ces responsabilités.

Mme Jérôme-Forget: Mais ma question, madame, ce n'est pas ça, là. Moi, ce n'est pas ce que les gouvernements et les commissions des valeurs mobilières font; ce qui m'intéresse, c'est l'épargne des citoyens. Je pose la question en termes d'épargne des citoyens. Et là vous avez justement les banques qui relèvent du gouvernement fédéral. D'accord? Vous avez par ailleurs les compagnies d'assurances qui relèvent également de l'Inspecteur général des institutions financières, mais essentiellement également du Surintendant. Moi, je reviens à mon épargnant. Il s'adresse à des gens. Lui, il ne sait pas qu'il y en a qui relèvent du Québec puis qu'il y en a d'autres qui relèvent du gouvernement fédéral. Les gens ne comprennent pas ça. C'est un monde complexe, les gens de l'épargne. Moi, ce qui m'intéresse de savoir, c'est quelles sont les recommandations que vous avez à faire pour protéger le petit épargnant, de sorte que, s'il faut qu'on établisse des règles ou des ententes...

Je comprends qu'il faut que le monde se parle, parce que ce sont des niveaux de juridiction différents. C'est clair qu'il faut que vous vous parliez, il n'y a pas d'erreur, parce que les banques vont commencer à vendre des produits qui sont vendus autrement puis que les compagnies d'assurances le font aussi. C'est clair. On le voit, il s'est passé quelque chose. Alors, qu'est-ce que vous recommandez pour protéger monsieur et madame qui investissent leurs REER à raison de 75 000 $, puis qui mettent ça dans un fonds, puis dont la personne qui est là n'a pas de garantie, n'est pas surveillée de la façon dont on pense qu'elle devrait être surveillée?

Mme Crépin (Carmen): En ce qui concerne la Commission, on a deux volets principaux d'action. On a, à l'égard des épargnants, une mission importante d'information et de sensibilisation. Il faut leur fournir de l'information parce qu'ils pourront prendre des décisions plus appropriées. C'est important aussi de leur fournir de l'information sur le fait qu'on existe, sur le fait que, par exemple, s'ils ont été mal conseillés par leur courtier, ils peuvent s'adresser à nous et que nous avons des pouvoirs d'intervention. De la même façon, à l'intérieur des pouvoirs qui nous sont déjà dévolus, s'il y a des pouvoirs qu'on estime qu'on devrait avoir, des nouveaux pouvoirs, des pouvoirs accrus et des recours qu'on pourrait mettre à la disposition des épargnants, c'est à nous de les proposer, comme nous avons l'intention de le faire avec le projet de loi n° 57.

Mme Jérôme-Forget: Merci.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Je vous remercie beaucoup. D'un commun accord, il est bientôt midi, donc nous allons suspendre nos travaux jusqu'à 14 heures. Alors, bon appétit et à tout à l'heure.

(Suspension de la séance à 11 h 58)

(Reprise à 14 h 6)

Le Président (M. Simard, Richelieu): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, nous sommes heureux de reprendre nos travaux. Cet après-midi, Mme la présidente, je vais d'abord vous permettre de compléter certaines réponses que vous avez différées ce matin, et nous allons donc ensuite passer à l'étude de la vision stratégique de la CVMQ. On m'a fait comprendre que vous aviez une présentation à faire d'une trentaine de minutes, et nous vous interrogerons. Nous tenterons de terminer nos travaux pour 16 heures, mais ça ne dépassera pas 16 h 30, de toute façon. Je crois que nous aurons le temps, dans cette période de temps, de vous poser les questions nécessaires. Alors, je vous laisse donc donner les réponses que vous aviez reportées ce matin.


Titres inscrits aux bourses montréalaise et américaines

Mme Crépin (Carmen): O.K. Donc, sur les 754 titres qui étaient inscrits à la Bourse de Montréal avant la restructuration des bourses, il y en a 109 qui sont interlistés sur des bourses américaines. La statistique n'est pas capable de la décomposer si c'est NASDAQ ou d'autres bourses, mais il y en a 109, donc. Et, pour la question des emplois, au niveau de la Bourse de Montréal comme telle, le nombre de postes perdus avec la restructuration, c'est 9, le nombre de postes créés, 5 et, par ailleurs, les postes à venir, 14.


Impacts de la restructuration sur les emplois (suite)

Pour ce qui est de l'emploi dans l'ensemble de l'industrie, les données ne sont pas disponibles. Ce qu'on peut dire, par ailleurs, c'est que le marché, qui est haussier depuis quelque temps, peut rendre extrêmement difficile une comparaison des données sur l'emploi en lien avec la restructuration. L'effervescence du marché est telle que, par exemple, à l'heure actuelle, Placements Banque Nationale veut embaucher 40 personnes et pense qu'elle va avoir de la difficulté à combler ce nombre d'emplois parce qu'il n'y a pas de personnes disponibles sur le marché.

Mme Jérôme-Forget: Vous êtes en compétition avec ça, madame, pour recruter?

Mme Crépin (Carmen): C'est ça.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Mais dans d'excellentes conditions.

Mme Houda-Pepin: Et, pour les autres bourses, vous n'avez pas d'idée pour comparer?

Mme Crépin (Carmen): Pour les autres bourses, on veut essayer de fournir l'information complémentaire, mais, pour aujourd'hui, on n'était pas capables de vous sortir ça.

Mme Houda-Pepin: Montréal, Toronto. D'accord, plus tard.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Alors, arrivons-en à cette vision stratégique de la CVMQ. Je pense que c'est au coeur des préoccupations de cette commission, Mme la présidente, parce que, dans le fond, faire le bilan des dernières années, des transformations de la Bourse de Montréal de cette année, tout ça... C'était très important de voir un petit peu quelles étaient les dernières nouvelles au plan réglementaire. Mais ce qui intéresse d'abord et avant tout cette commission, c'est l'avenir, c'est: À partir de maintenant, comment assurerons-nous mieux la défense des investisseurs, comment la réglementation sera de plus en plus efficace? Alors, pour ça, vous vous êtes penchée sur vos moyens et vos perspectives, et je vais maintenant vous écouter là-dessus.


Exposé sur la vision stratégique de la Commission des valeurs mobilières du Québec (CVMQ)

Mme Crépin (Carmen): Un petit point d'information en fonction du document qui a été préparé. On disait que c'était la première fois que la CVMQ se lançait dans un exercice de vision stratégique. Je dirais plutôt que c'est la troisième fois, puisque, en 1991-1992, la CVMQ a fait, à tout le moins, un exercice de gestion intégrale, l'examen des 12 dimensions de l'efficacité, donc, qui permettent de donner certains éléments de prospective. En 1993, la CVMQ a fait une évaluation de l'ensemble de ses services en vue de réaligner son service à la clientèle et, naturellement, à l'occasion du changement de statut, la Commission a dû réaligner tous les modes de préparation de son budget. Donc, quand on a démarré l'exercice qui s'est fait cet automne, on a quand même tenu compte de tout ce qui avait été fait antérieurement pour garder une certaine continuité.

(14 h 10)

Je vous avais transmis un document explicatif de la démarche. Je pense que ça pourrait expliquer un peu le type de démarche que nous avions choisi d'amorcer pour faire la vision stratégique. En gros, avec l'aide de consultants, nous avons procédé à une série d'entrevues à l'externe et à l'interne. Bien évidemment, notre échéancier, on l'a établi en fonction de pouvoir vous présenter, à tout le moins à la présente commission, les résultats de ce que j'appelle la «première étape», c'est-à-dire la définition des principaux éléments d'une mission de même que les principales priorités.

À la suite de la commission, c'est prévu qu'en février nous allons retravailler. Donc, c'est très utile de pouvoir en discuter aujourd'hui parce que les priorités qu'on a ciblées avec certains éléments d'action envisagés, s'il faut les enrichir et les remodifier, vos commentaires vont nous aider. C'est notre matériel pour repartir les discussions puis essayer de faire des plans d'action par direction. On veut le faire sur trois ans puis être capables de le mettre à jour par la suite.

Donc, les entrevues qui ont eu lieu à l'interne et à l'externe. À l'interne, on a fait un échantillonnage d'employés à la fois des gens qui étaient à la Commission depuis longtemps, donc qui avaient beaucoup d'expérience, mais aussi des jeunes qui venaient d'arriver, en posant les questions: Qu'est-ce qui vous a intéressés à venir avec la Commission? Pourquoi vous êtes ici? Pourquoi vous aimez ça? Qu'est-ce qui vous intéresse? Comment vous voyez l'avenir et les enjeux? Et, à l'externe, on s'est adressés à des professionnels de l'industrie qui nous connaissent bien, avec qui on travaille tous les jours. Notamment, la CVMQ peut compter sur l'appui de deux comités consultatifs externes, un comité consultatif juridique et un comité consultatif comptable. Ces gens-là nous offrent leur collaboration sur une base bénévole, ils nous fournissent leur opinion, on peut les rencontrer facilement, c'est une source d'information pointue sur ce que pense l'industrie, en plus des commentaires additionnels. Donc, sur une base individuelle, ces personnes-là ont été rencontrées pour qu'elles puissent nous faire leurs commentaires sur comment elles voyaient notre rôle actuel, comment elles voyaient l'avenir, et nous donner un peu leur opinion. On est partis de tout ça.

À l'interne, au niveau du comité de direction, on a pris tous les éléments qu'on avait recueillis à la fois de l'interne et de l'externe, on les a brassés pour essayer d'articuler un texte de mission qui n'est peut-être pas d'une écriture la plus heureuse mais où on a, dans le fond, discuté de chaque mot puis du pourquoi on le met comme ça. Et je l'ai fait, l'exercice, avec le comité de direction, avec un comité de direction élargi, c'est-à-dire qu'on a rejoint certains chefs de service aussi pour les faire participer à la démarche.

La discussion s'est faite avec les membres de la Commission, et, en décembre, j'ai fait deux rencontres avec l'ensemble des employés pour présenter les éléments, voir les priorités puis essayer de donner un peu aux employés du feedback sur la démarche, mais avoir aussi des commentaires. Je pense qu'il y a une bonne adhésion à la vision qui se dégage, et la prochaine étape, ça va être d'articuler par direction qu'est-ce que ça veut dire et comment les gens s'organisent. Donc, vraiment, à chaque fois qu'on a pu discuter, notre objectif, c'était d'abord d'établir un consensus, de s'entendre autour des enjeux – est-ce qu'on les voit tous de la même façon, est-ce qu'on priorise de la même façon – pour arriver à dire quelles sont les orientations et les principales priorités que l'on devrait dégager. Donc, des fois je disais à certains groupes d'employés: Écoutez, je pense qu'il faut qu'on voie l'avenir de la même façon puis qu'on détermine ensemble comment on s'organise pour y faire face. Donc, ça, c'est au niveau de la démarche.

Le premier élément qui a été rediscuté, ça a été la mission. On s'est posé la question: Est-ce que la mission, telle qu'elle est écrite dans la loi, elle tient toujours? Est-ce que nous devrions penser à la changer? Est-ce qu'on devrait ajouter des éléments à cette mission-là? Donc, on peut résumer, on dit: Bon, notre mission, c'est clair, on en a parlé: favoriser le bon fonctionnement du marché, assurer la protection des épargnants contre les pratiques déloyales, abusives ou frauduleuses, régir l'information des actionnaires et du public sur les personnes qui font appel public à l'épargne et encadrer les activités des différents professionnels du marché.

Autant de l'interne que de l'externe, de façon unanime et, je dirais, au début de toutes les discussions, les gens disent: Non, la mission, elle est correcte, la mission n'a pas à être changée; par contre, il est important, face à l'avenir et aux défis qui s'en viennent, que vous puissiez préciser le comment et que vous vous donniez aussi les moyens requis pour la réaliser. Certains commentaires, sans tomber dans des scénarios totalement pessimistes, disaient: Il faut que vous soyez en mesure tout le temps de justifier ce que vous faites et il faut qu'à la fois les émetteurs, l'industrie et les investisseurs comprennent que vous êtes là pour les aider et que vous jouez votre rôle de façon efficace – c'est au bénéfice de tout le monde.

À titre d'exemple, j'ai extrait... C'est entre guillemets parce que ce sont des citations des entrevues qui ont été réalisées. J'ai essayé de cibler certains commentaires que je trouvais peut-être plus intéressants. Au niveau de l'externe, les personnes consultées nous disent: La CVMQ a déjà été un leader, mais elle s'est fait dépasser par les commissions de l'Ontario, de l'Alberta et de la Colombie-Britannique. Elle doit se positionner publiquement par rapport à tout ce qui se passe dans l'environnement. À l'interne aussi, on la sent, la place que prend la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario au niveau des ACVM, et c'est vrai, à certains égards, que la CVMQ a été capable d'être un leader. Je dirais, par exemple, au cours de la dernière année, que la CVMQ a été probablement la première commission à insister pour qu'on ait des comités de vigie sur le passage à l'an 2000. Nous avons organisé notre comité, ajusté en conséquence notre site Internet. L'idée a été récupérée par l'Ontario qui a dit: Bien, tiens, c'est intéressant, on aura aussi un centre de vigie pour le passage à l'an 2000 en Ontario.

Ce qu'on a fait, nous, c'est qu'on a gardé notre centre de vigie auquel l'industrie a répondu. Il y a près de 200 courtiers qui ont transmis les informations qui étaient requises. Pendant toute la période des fêtes, notre centre de vigie a fonctionné, et on était en relation avec le centre de vigie qui était à Toronto et en contact avec les autres commissions. Mais, à la base, la première Commission qui a insisté pour le faire, ça a été la CVMQ.

Un autre commentaire qui est assez... Bon, j'ai pris ceux qui étaient peut-être les plus parlants: Le poids des initiatives de la CVMQ au niveau canadien est loin d'être proportionnel au poids de l'économie du Québec et de ses émetteurs au Canada. Un autre commentaire en lien avec la mission: La CVMQ n'a pas de rôle à se donner pour la promotion de la croissance économique, son rôle est de réglementer et de protéger les investisseurs. La croissance économique dépend d'un climat de confiance à l'égard de l'intégrité du marché financier. C'est donc en jouant pleinement notre rôle à l'égard du marché qu'on peut contribuer à la croissance de l'économie du Québec. La CVMQ doit reconstruire sa crédibilité afin d'imposer le respect. On en a parlé hier et ce matin, c'est important que l'industrie ait confiance dans le rôle qu'on joue, que le public aussi ait confiance dans ce qu'on fait.

(14 h 20)

La CVMQ doit absolument se définir des principes de base afin de donner un minimum de prévisibilité à son action. Ce que les personnes consultées nous disaient, c'est: On aimerait avoir des échanges réguliers avec vous sur de nouvelles problématiques pour pouvoir échanger sans que ce soit l'occasion d'une demande spécifique qui est faite devant la Commission, échanger sur une nouvelle tendance ou quelque chose qui se passe dans l'industrie. On voudrait pouvoir vous donner notre opinion, pouvoir discuter avec vous, et, si vous avez un enlignement qui est pris – l'industrie nous dit – ce serait bon pour nous de connaître dans quel sens vous allez; ça va nous permettre d'orienter notre action, de vous présenter des demandes qui vont être efficaces. Donc, il y a eu plusieurs propositions pour dire: On devrait avoir sur certains sujets des groupes de travail avec l'industrie. Cette façon de procéder, si on le fait de façon générale et si on discute d'un problème, ça ne préjuge pas, par exemple, du rôle de la Commission dans sa fonction de tribunal lorsqu'elle aura à rendre des décisions spécifiques sur certains sujets, mais, au moins, on pourrait savoir un peu comment on pense, comment on approche une problématique, et ça, on a commencé à travailler pour dire quels sont les sujets sur lesquels on aimerait discuter avec l'industrie, essayer de déterminer des intervenants dans l'industrie avec lesquels on pourrait échanger.

Ils nous donnent une opinion, ils nous apportent aussi une partie de leur expertise. On n'est pas obligés d'être d'accord, mais, au moins, je pense que ça vaut la peine de les écouter. Ce sont des gens dans le milieu qui connaissent quand même la... Excusez, je veux dire la business, mais...

Des voix: ...

Mme Crépin (Carmen): C'est ça. Ha, ha, ha!

M. Gendron: Ah, c'est correct parce que c'est marqué d'améliorer les connaissances de l'anglais par le personnel.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Crépin (Carmen): Un autre commentaire qui est revenu souvent, c'est: La CVMQ devrait être plus rigoureuse dans l'«enforcement» des transactions d'initiés, notamment. Mais le commentaire était beaucoup plus global. La transaction d'initié était un exemple où on disait: La Commission devrait être plus rigoureuse dans les activités d'«enforcement», elle devrait se concentrer sur quelques bons dossiers et les mener à terme de façon à inspirer la crainte de Dieu à tout le monde.

Une voix: C'est un objectif.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Crépin (Carmen): Je trouvais qu'elle était bien illustrée. C'est ça. Et le commentaire – puis je connais très bien la personne qui a fait ce commentaire-là – c'était de dire: Ce n'est pas de jouer à la police inutilement, mais c'est évident que, si vous faites quelques bons coups et que vous les publicisez, vous aurez un effet dissuasif. Donc, il y a des gens sur le marché qui vont dire: Attention, c'est peut-être mieux de ne pas prendre de chance, parce que, si on se fait pincer, ça va mal aller.

Un autre commentaire, donc: Sans être complaisant, il ne faudrait pas imposer des exigences de divulgation inutilement coûteuses aux PME. On se dirige de plus en plus vers un régime d'information continue. L'information continue, c'est: on demande aux émetteurs d'améliorer de façon constante la qualité de l'information qu'ils distribuent. C'est évident qu'il faut essayer de doser ça en fonction des activités des entreprises, de la taille des entreprises. La divulgation peut amener des coûts. Donc, c'est un élément sur lequel, le projet de régime d'information intégrée, on attend des commentaires et on recherche aussi des commentaires des PME, parce qu'on sait que certaines exigences peuvent être plus lourdes pour elles. On verra donc comment on peut à la fois répondre à notre besoin de qualité et en même temps permettre aux entreprises de pouvoir continuer à se développer.

Quelques commentaires, par exemple, qui viennent de l'externe encore: La CVMQ, donc, devrait être plus proactive avec le milieu économique québécois, organiser des conférences, participer à des discussions. Le commentaire est venu aussi: La CVMQ, manque évident de ressources expérimentées à cause des échelles salariales. L'industrie les connaît, nos problèmes, elle le sait. La CVMQ doit trouver le moyen d'attirer et de conserver des ressources humaines compétentes. On peut travailler sur nos échelles salariales, on peut aussi – c'est ce qu'on veut faire avec les prochaines négociations – travailler sur nos autres conditions d'emploi. Le travail à faire est intéressant, les dossiers sont intéressants. On peut créer aussi d'autres conditions qui vont nous permettre d'intéresser les gens aux activités qu'on fait.

L'amélioration de la connaissance de l'anglais, c'est évident. De plus en plus, par exemple, si un financement se fait à l'échelle canadienne, notre personnel doit discuter avec le personnel des autres commissions. Si on élargit à l'international, c'est évident que les discussions se font souvent en anglais. Disons qu'on commence quand même à voir quelquefois aussi l'espagnol qui prend une certaine place, mais l'anglais reste la langue prédominante.

Certains commentaires recueillis à l'interne. On a posé la question de façon aussi carrée aux employés en disant: Vous êtes à la Commission, vous la connaissez; est-ce que la CVMQ a toujours sa place, est-ce qu'elle est appelée à changer dans un contexte de mondialisation? La réponse est venue, c'est: Oui, la mission tient toujours, et on pense que la CVMQ a sa place; mais, pour être efficace, elle doit se redéfinir des principes de base et de priorité, embaucher des ressources expérimentées en plus grand nombre et maintenir sa participation à des initiatives nationales et à des forums internationaux.

Parce que c'est une source d'information, que c'est un réseau de contacts, plus on va travailler avec d'autres juridictions pour harmoniser les régimes réglementaires, plus également on contribuera à faciliter l'accès à ces marchés-là aux entreprises du Québec. À titre d'exemple, nous avons reçu à quelques reprises, dans notre programme de délégation, un groupe de personnes qui travaillent à la Commission des valeurs mobilières du Maroc. Elles viennent s'inspirer de comment on fonctionne pour établir leurs propres règles. En plus d'avoir des interlocuteurs avec qui on peut parler, on a donc des marchés qui se structurent et s'organisent avec des modes de fonctionnement qui sont compatibles aux nôtres.

À l'intérieur de cet exercice-là, on a regardé, donc, nos enjeux. Alors, on a pris un certain nombre d'enjeux sur lesquels on a réfléchi en disant: Au cours des trois dernières années, est-ce que ces enjeux-là ont augmenté ou s'ils sont disparus? Et, s'ils ont augmenté, comment? Alors, si je prends, par exemple, la mondialisation des marchés, on dit: Bon, la mondialisation, ça se caractérise par la fluidité des capitaux, il y a une grande concurrence réglementaire, les capitaux vont aller vers les marchés qui sont les mieux organisés, qui sont accessibles, qui sont transparents, qui sont efficaces, il y a une diversification des investisseurs institutionnels, il y a une croissance des émissions internationales, et, dans ce contexte-là, le défi de surveillance des institutions financières et des firmes de courtage est important. Donc, cet enjeu-là, trois flèches: c'est un enjeu qui depuis trois ans augmente et c'est un enjeu qui va nous interpeller de façon importante au cours des prochaines années. À court terme, c'est évident que c'est la concurrence et l'attrait du marché américain qui sont les plus importants.

Deuxième enjeu, les émetteurs québécois sur les marchés étrangers. À l'heure actuelle, même avant la restructuration, n'importe quelle entreprise du Québec peut aller se lister sur NASDAQ. Quand on regarde évoluer la valeur des actions inscrites à NASDAQ, on peut dire: Est-ce que NASDAQ est une façon pour une entreprise ou si c'est une Bourse qui offre de meilleures garanties de croissance rapide? Il y a un marché qui est différent du nôtre, et je pense que la restructuration des bourses n'est pas étrangère à cet attrait que peut exercer NASDAQ. Il faut quand même prendre en considération aussi que, pour beaucoup d'entreprises québécoises, surtout des petites, une inscription à NASDAQ, c'est coûteux en termes de frais d'entrée, c'est coûteux aussi en termes d'éléments d'information continue. Donc, il y a un défi pour la Commission, comme pour d'autres intervenants dans le marché au Québec, de maintenir un marché attrayant et crédible à Montréal.

L'intégration et la concentration de l'industrie. Effectivement, il y a un rôle grandissant des banques et le défi du monitoring des risques qui est concentré dans quelques grandes institutions. La rationalisation des bourses, la fusion des maisons de courtage sont d'autres phénomènes qui contribuent à cette concentration de l'industrie. Donc, qui dit concentration dit plus grande difficulté pour créer des conditions de concurrence.

(14 h 30)

Les nouveaux instruments financiers. On a parlé beaucoup des produits dérivés. Il y a des produits dérivés qui ne sont pas réglementés. Donc, la restructuration qui a été faite répond à une nécessité d'affirmer la position de Montréal dans ce domaine. La CVMQ se doit donc, par son action, d'être capable d'appuyer la Bourse de Montréal, et on sait que, autant les produits dérivés que de nouveaux types de produits, il va en arriver. Il faut qu'on soit capables, au fur et à mesure, d'en analyser les impacts sur notre marché.

Les développements technologiques. Les marchés sont sans frontières. Les régulateurs fonctionnent avec des juridictions basées sur des frontières géographiques. Le défi de protection des investisseurs individuels sur chacun des marchés, il augmente, et on pense que, de la même façon qu'on peut fonctionner en concertation et même avec d'autres commissions pour l'encadrement du marché, il y a peut-être aussi des activités liées à la protection des investisseurs sur lesquelles on peut prendre des ententes de coopération avec d'autres régulateurs.

Dernier enjeu dont nous avons abondamment discuté: l'émergence d'une commission canadienne. On ne parle pas ici d'une commission créée nécessairement par le gouvernement fédéral mais bien plutôt par rapport à la place que le Québec peut prendre au sein des ACVM par rapport au rôle que peut jouer l'Ontario. La CVMQ estime qu'on a une certaine capacité de création et d'innovation. Donc, on veut prendre notre place pour défendre notre point de vue. Quand, dans certaines circonstances, on peut considérer que ça peut prendre deux ans, deux ans et demi ou trois ans pour élaborer des normes, consulter l'industrie, c'est évident que ce n'est pas en bout de ligne qu'on peut faire une intervention efficace.

Les spécificités du marché du Québec. Il y a des groupes de travail au niveau canadien ou à l'international sur lesquels il faut qu'on travaille pour être sûrs que les normes qui vont être adoptées répondent aux caractéristiques de notre marché. Alors, comme je vous dis, ce n'est peut-être pas d'une rédaction nécessairement la plus harmonieuse, mais ça s'est fait pendant plusieurs jours. On collait les mots pour faire une phrase complète. Et la vision sur laquelle on s'entend comme positionnement pour l'avenir, c'est que la CVMQ est un organisme dont l'action est guidée par des principes qui visent à assurer – et le mot est important – l'intégrité, l'efficacité et l'efficience des marchés financiers québécois dans un environnement mondial. Pour ce faire, la CVMQ doit démontrer sa légitimité et sa crédibilité tant au niveau québécois, canadien que nord-américain et mondial par son esprit d'ouverture aux changements, par une approche proactive face aux nouvelles façons de faire tant des investisseurs, des émetteurs que des intermédiaires de marché, par la qualité de son action au niveau québécois, particulièrement par son application dynamique et rigoureuse de la loi et des règlements, par le leadership qu'elle exerce au sein des forums interjuridictionnels, par la qualité de sa collaboration, la pertinence de son expertise et, à l'interne, bien sûr, par l'efficacité de ses processus d'affaires, donc agir localement mais à l'intérieur d'une pensée mondiale.

Une fois que nous avons établi que c'est par là qu'on veut aller, qu'est-ce qu'on a dégagé? On a donc dégagé, au niveau de la direction, un certain nombre d'objectifs sur lesquels, pour l'instant, il n'y a pas encore nécessairement beaucoup de chair, mais on pense que ce sont les principaux qu'on voudrait retravailler sur un plan institutionnel et éventuellement traduire en plan d'action au niveau de chacune des directions concernées. Un même objectif n'a pas nécessairement la même importance dans chaque secteur d'activité de la Commission, et on les a classés par ordre.

Le premier, l'application, les activités d'«enforcement»: être diligent et rigoureux, réduire les délais, augmenter la qualité et la fréquence des inspections. Donc, on s'est adressés à cette question-là. On a essayé de rapprocher les inspections et les enquêtes pour faire en sorte que l'information, que les dossiers puissent avancer plus facilement, de réduire les délais dans certaines circonstances. C'est évident, quand on parle d'«enforcement», on parle éventuellement de procédures sur le plan juridique. Il faut aussi qu'on s'assure d'une preuve qui est de qualité. Il faut donc aussi qu'on regarde la rapidité du service qui nous est fourni par notre Direction des affaires juridiques. Et, dans notre plan d'effectif, c'est une activité... En fait, l'«enforcement», c'est le secteur où on voudrait augmenter les ressources en plus grand nombre.

Les rôles de la CVMQ dans les nouveaux marchés: définir notre rôle, préciser les éléments de surveillance qu'on veut jouer par rapport aux systèmes de négociation alternatifs, favoriser les échanges avec les intervenants concernés. En ce qui concerne les systèmes de négociation alternatifs, pour l'instant, toutes les commissions de valeurs mobilières au Canada regardent ce qui se passe aux États-Unis. Je dirais que, par rapport à évaluer l'impact sur le marché, on en discute avec les autres commissions, on est tous au même niveau. Nous, on veut creuser la question parce que la compétition, ou la concurrence, vient des systèmes de négociation alternatifs. Quand on regarde comment ces systèmes-là ont pris une place sur le marché américain au cours des deux dernières années, on peut constater que ces systèmes-là, à l'heure actuelle, jouent, par exemple par rapport même à la Bourse de New York ou même à NASDAQ, le rôle que NASDAQ a joué par rapport à la Bourse de New York il y a 10 ans. Donc, la concurrence, elle est là.

Il y en a neuf actuellement aux États-Unis. Il y a déjà eu des fusions à l'intérieur de ceux qui existent sur le marché américain. Ce sont des systèmes technologiques qui évoluent rapidement. Les gens qui les opèrent sont très agressifs pour prendre les parts de marché. Ils sont rendus à 38 % du marché, à 35 % du NASDAQ. En deux ans, ils ont pris leur place rapidement. C'est donc important que, nous... Même si on travaille avec les ACVM pour savoir comment on ouvre la porte à cette concurrence-là, est-ce que notre marché québécois a des caractéristiques qui pourraient nous amener à ajouter des conditions qui ne sont peut-être pas nécessaires dans d'autres juridictions?

Au niveau du marché des capitaux, la CVMQ se caractérise déjà par un service de qualité et rapide aux émetteurs, et là-dessus – on en parlait à midi – on peut avoir l'air de se taper les bretelles, mais, au niveau du service aux émetteurs, les gens dans l'industrie nous le disent, ils sont satisfaits. Ils arrivent avec des dossiers urgents, on est capables de répondre à la demande. On veut donc maintenir la qualité de notre service et répondre à leurs besoins. On veut aussi – et ça, c'est une façon d'améliorer nos échanges avec l'industrie, c'est elle qui nous l'a dit – améliorer la transparence et la prévisibilité des processus d'approbation en diffusant des positions. On a deux façons d'essayer d'améliorer la prévisibilité de notre action. En discutant avec l'industrie, bien sûr, on peut lui faire connaître notre tendance sur certains types de sujets. On pourrait même penser à dire: À partir du moment où on a examiné une question, on pourrait se rédiger une position de principe, la rendre publique, la communiquer à l'industrie en disant: Si on vous dessine sur certains sujets, voici le cadre des exigences à l'intérieur desquelles on veut que vous entriez. C'est sûr qu'il faut se donner la marge de manoeuvre en fonction des différentes situations d'adapter une décision; mais ce que les gens de l'industrie nous disent, c'est: Faites-nous connaître à l'avance, sur certains sujets, ce que vous pensez, c'est important pour nous; on veut travailler avec vous.

(14 h 40)

Ensuite, à l'interne aussi, la loi prévoit qu'on peut déléguer certains pouvoirs. Donc, si, sur certains types de sujets, on a une position qui est claire et qu'on la répète dans tous les cas, plutôt que, par exemple, d'avoir un dossier qui franchit toutes les étapes à l'interne et qui monte, si vous voulez, au niveau du Tribunal, on peut utiliser aussi notre délégation au directeur général ou à la Direction du marché des capitaux. Quand on applique des décisions, il s'agit de vérifier si certains dossiers correspondent aux critères qu'on a établis. Si la décision est déléguée à la directrice, par exemple, du marché des capitaux, on vient de réduire les délais, on vient de couper deux étapes d'approbation. On vient de couper des délais, on améliore donc le service qu'on rend à l'industrie.

Au niveau de la réglementation, définir des principes de base et des priorités. Il y a une foule de comités qui existent au niveau des ACVM. On n'a pas les ressources pour participer nécessairement à tous les comités; il faut donc regarder les comités, les mandats, choisir ceux sur lesquels on pense qu'on a des choses importantes à dire et essayer de prendre le leadership. Le personnel de la Commission peut, dans certains cas, être président d'un groupe de travail qui fait rapport aux autorités canadiennes de valeurs mobilières. C'est un rôle, c'est une place qu'on veut prendre parce que c'est dans la détermination des normes qu'on peut exercer une influence. Et cibler, donc, notre participation, c'est vrai pour les ACVM, c'est vrai aussi pour l'international, compte tenu des coûts aussi.

Je le disais, par exemple, sur les comités formés par la NASAA, il y en a 30, on en a choisi trois: le comité qui s'adresse à l'éducation des investisseurs, celui qui regarde le développement du marché secondaire, puis le troisième, c'est l'«enforcement». L'«enforcement», on l'a mis comme première priorité. On veut augmenter nos actions là-dessus.

Au niveau de l'éducation des investisseurs, on veut accentuer nos efforts, essayer de regarder tous les moyens qu'on utilise, les évaluer, les ajuster en conséquence. Cette année, on a eu une campagne sur Internet. Il y a des bannières de la Commission qui apparaissent sur certains sites d'information ciblés sur Internet. La technologie maintenant nous permet de savoir combien de personnes, à partir de cette information-là, sont venues visiter notre site et rechercher de l'information. Et aussi on voudrait repenser beaucoup notre site Internet, le rendre plus attrayant, que les gens viennent le visiter et le consulter.

Mme Jérôme-Forget: Madame, est-ce que je peux...

Mme Crépin (Carmen): Oui.

Mme Jérôme-Forget: Il y a combien de personnes qui sont allées visiter...

Mme Crépin (Carmen): Sur le site?

M. Dubé (Denis): C'est parce que la campagne Internet dure six semaines, donc on va avoir les résultats à la fin de la campagne. Les informations que j'ai jusqu'à maintenant me disent qu'il y a beaucoup de gens qui visitent le site.

Mme Jérôme-Forget: Alors, ils voient ça, le site.

M. Dubé (Denis): À la fin de la campagne, on va savoir combien de gens sont venus sur le site grâce à la publicité, d'où proviennent ces gens-là, quelles pages ils ont visitées. Donc, ça va nous permettre de réorienter, d'analyser, d'évaluer nos gestes. Mais, pour l'instant, il n'y a pas encore de chiffres parce qu'on est en pleine campagne.

Mme Crépin (Carmen): Également, finalement, sur le plan de l'organisation et du fonctionnement, favoriser la mobilité interne du personnel. S'il y a des gens qui ont pris une expertise directe avec les émetteurs, par exemple, à la Direction du marché des capitaux, ça peut être des personnes intéressantes pour siéger sur des comités de travail avec les ACVM quand on élabore des normes. Ils ont été en contact avec l'industrie, ils peuvent donner un point de vue pratique. Un plan de relève pour nos postes-clés, quels sont nos secteurs stratégiques, cibler nos efforts de recrutement sur ces postes-là.

Dans le contexte de la Commission, un programme d'accueil pour les nouveaux employés, c'est important. Au cours des deux, trois dernières années, on a recruté des jeunes. 30 %?

Une voix: Une cinquantaine.

Mme Crépin (Carmen): C'est une cinquante de jeunes qu'on a embauchés. C'est important de bien les encadrer, de bien les former. Également, développer un programme de formation technique et d'habileté de gestion et d'intervention en comité interjuridictionnel, former notre personnel pour qu'il soit capable de prendre sa place sur certains groupes de travail, insister davantage sur les sujets qui nous intéressent, la prendre, la présidence de groupes de travail au niveau des ACVM, et choisir nos sujets.

Les prochaines étapes, ça, c'est, si vous voulez, le canevas de base, les priorités qu'on a dégagées. On veut travailler aux plans d'action par direction, établir les budgets en conséquence et développer... On a déjà peut-être eu certains indicatifs de mesure, mais on voudrait vraiment développer des indicateurs de performance. Les indicateurs de performance, ça peut être utile pour mesurer la portée de nos activités, ça peut être également une façon d'améliorer nos conditions salariales, par exemple, si on pouvait proposer et élaborer un plan de bonis. Un plan de bonis, c'est une façon de motiver les employés avec des objectifs. Mais, pour que ce soit efficace, il faut leur donner des objectifs atteignables et mesurables.

Alors, nous avons donc fini, complété cette première discussion pour établir les enjeux puis voir un peu ce que ça peut représenter. On a fini ça en décembre. Et, la prochaine étape, on va travailler plus en détail. Quand on en a parlé avec à la fois les chefs de service, les directeurs et les employés, on voulait arriver non pas à faire nécessairement un document très exhaustif mais à dire: Nous avons des actions ciblées; on est peut-être mieux, un peu comme pour certains dossiers, de dire: On prend une ou deux actions, on les cible, on les mène à terme, on veut obtenir du résultat avec, que de se donner un plan trop ambitieux. Bien sûr, c'est évident aussi, on a des ressources à recruter dans l'intervalle, mais ce qu'on pense, c'est que, en redéfinissant d'abord nos propres priorités, en regardant où on peut être plus efficaces, on est quand même capables de commencer à bouger tout de suite.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Merci beaucoup, Mme la Présidente. Évidemment, nous avions pris connaissance d'un certain nombre de ces points au cours des dernières semaines, donc pas trop de surprises. Mais, en même temps, vous comprendrez que ça risque de soulever pas mal de questions et de commentaires. Il s'agit surtout du dernier thème de notre rencontre. Vous verrez que, probablement, de la part des intervenants, il y aura, à partir justement de votre plan stratégique, des commentaires de nature générale ou, en tout cas, spécifique mais qui concernent l'ensemble de votre action.


Discussion générale

Alors, je demande au député d'Abitibi-Ouest peut-être de faire la première intervention.


Disponibilité du plan stratégique

M. Gendron: Merci, M. le Président. Je tiens à vous remercier sincèrement, Mme Crépin. Je pense que c'est important que nous ayons l'occasion de regarder un peu plus la prospective, ou ce qu'on appelle communément la vision stratégique de la Commission.

Une première question qui, d'après moi, se pose. Alors, je m'essaie, je la pose: Il n'y aurait pas eu de demande des parlementaires de vous voir, de vous rencontrer, ce qu'on appelle chez nous un mandat d'initiative? Si je m'étais présenté chez vous, à la Commission des valeurs mobilières, puis que je vous avais demandé: Est-ce que je peux avoir copie de votre plan stratégique de développement pour les prochaines années? est-ce que j'aurais eu droit à peu près à la même information que vous venez de nous faire connaître?

Mme Crépin (Carmen): Ça, on a fait tout ça. On a commencé au mois d'octobre et on a terminé au mois de... Le 23 décembre, j'avais encore des rencontres avec les employés. On a essayé de remettre ça en forme. Oui, l'objectif, c'est que ça va devenir un document public.

M. Gendron: Non, non, mais je veux être bien clair. Mandat d'initiative ou pas, est-ce qu'il y avait déjà...

Une voix: ...

M. Gendron: Bien, c'est ce qu'on fait, là. On appelle ça un mandat d'initiative des membres de la commission. Ça avait été expliqué au début. Mais ce n'est pas grave, là. C'est ce qu'on appelle un mandat d'initiative des membres d'une commission parlementaire.

Le Président (M. Simard, Richelieu): ...

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Gendron: Ah oui. Alors, il n'y a pas de commission parlementaire qui demande de regarder ce que la Commission des valeurs mobilières fait, puis ainsi de suite. Est-ce qu'on dispose... parlementaire qui serait présenté du même outil d'information que vous venez de nous divulguer?

Mme Crépin (Carmen): Ah! la démarche, on l'aurait faite de toute façon; on a simplement ajusté l'échéancier en fonction de ça. Idéalement, par exemple, je vous dis, j'aurais peut-être voulu rencontrer tous les employés sur une base individuelle pour discuter avec eux de leur vision. Je l'ai fait par l'intermédiaire de consultants à certains égards, je l'ai fait moi-même aussi. Mais l'idée, c'est que, si on veut amener une adhésion à des objectifs, je pense qu'il faut parler des objectifs avec les personnes concernées, parce que, si on veut que les gens travaillent à la réalisation de ces objectifs-là, leur capacité va être...

M. Gendron: Pas de problème, je n'en disconviens pas. Merci beaucoup. Mais je crois que c'est important. Ça veut dire que...

Mme Crépin (Carmen): Mais on l'aurait fait pareil.

M. Gendron: Voilà. Mandat d'initiative ou pas, il y avait, à la Commission des valeurs mobilières, cette préoccupation d'avoir un plan stratégique, compte tenu de la bousculade, de tout ce qu'on a fait depuis une journée et demie. Et là, après midi, on n'a pas beaucoup de temps pour faire la dimension plan stratégique. Donc, vous dites: Oui, nous avions cette préoccupation. Je voulais le vérifier et je l'ai fait. Merci beaucoup.


Définition de la mission et des principes de base

Deuxième question assez rapide, et je ne veux pas chinoiser, là, comme l'ancien prof que je suis, mais des fois ça peut ressembler à ça. Première page, page 2...

(14 h 50)

Une voix: Pas de chinoiseries?

M. Gendron: Oui, oui. Excuse.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Pas d'allusion aux populations de votre comté, madame.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Il n'oserait pas.

M. Gendron: Sérieux, là, première affaire, mission de la Commission des valeurs mobilières, très clair, quatre items, ta, ta, ta. Unanime, rien à changer. C'est écrit noir sur blanc, rien à changer. Par contre, vous dites qu'il faut travailler sur le comment puis les moyens. Ça, c'est parfait. Un peu plus loin – c'est parce que c'est quand même écrit, c'est un texte qui circule – à la page 4: «Cependant, la Commission des valeurs mobilières doit, pour remplir efficacement son rôle[...] – ainsi de suite – redéfinir ses principes de base.» Rien à changer dans sa mission puis redéfinir les principes de base, là on est dans...

Mme Crépin (Carmen): Attention!

M. Gendron: Oui. C'est pour ça que je veux faire attention, je veux être certain de...

Mme Crépin (Carmen): C'est un exemple de commentaires qu'on a recueillis à l'externe.

M. Gendron: J'ai compris ça.

Mme Crépin (Carmen): Donc, on a pris toutes sortes de commentaires pour dire qu'est-ce que les gens pensent de nous, qu'est-ce qu'ils pensent qu'on devrait faire, puis on les a tous pris, les commentaires qu'on a eus, un à un, puis des fois on avait des discussions, on disait: Les gens de l'industrie nous disent ça. On n'était pas nécessairement toujours d'accord avec ce que les gens de l'industrie nous disaient.

M. Gendron: Non, mais je l'ai vu, que ça venait de l'interne, sauf que, moi, j'ai compris que la mission de la Commission des valeurs... Ça, j'avais vu ça, que c'était de l'interne, sincèrement, là. Mais, à la page 2, la mission de la Commission des valeurs mobilières... C'est un mémoire qui nous est présenté par vous, donc par la Commission des valeurs mobilières. Puis là elle dit très clairement – et il n'y a pas de piège dans ma question: Un, deux, trois, quatre, favoriser, assurer, régir... Parfait, unanime. Alors, je prétends que c'est les membres de la Commission des valeurs mobilières qui sont unanimes. Ils disent: On n'a rien à changer, sauf le comment puis le moyen.

Mme Crépin (Carmen): Oui.

M. Gendron: Dans la synthèse des commentaires recueillis à l'interne, c'est on ne peut plus clair, c'est la même CMVQ qui dit: On doit redéfinir nos principes de base et nos priorités. Là, je trouve qu'on est proche de la même réalité, mais en disant le contraire. Alors, j'ai un problème.

Mme Crépin (Carmen): O.K. Je vais essayer de l'expliquer autrement. Quant à moi, quand on dit «se donner un minimum de prévisibilité», c'est arriver dans les moyens de réaliser notre mission. Ce qui est dit à la fois à l'interne et à l'externe, c'est: Sur certains sujets, permettez donc à l'industrie de savoir où est-ce qu'elle s'en va, qu'est-ce qu'elle pense. Si on sait ce qu'elle pense, on va travailler en conséquence plutôt que d'attendre qu'éventuellement les gens nous présentent une demande formelle, puis là ils ont travaillé pendant un an, puis on dit: On n'est pas d'accord avec ça. Donc, ils disent: Quand vous avez une orientation ou un enlignement, faites-nous-le connaître un peu à l'avance, ça va être plus facile pour nous. Puis, à l'interne aussi, pour les employés, c'est plus facile aussi de savoir...

Parce que, là, il faut faire une distinction, il y a le personnel et la Commission. Certains types de décisions relèvent du tribunal. Donc, on peut avoir aussi des orientations qui sont données par le tribunal et qui vont guider l'action du personnel. C'est important que le personnel sache, sur certains sujets, qu'est-ce que le tribunal pense ou comment le tribunal veut s'enligner sur certains sujets.

Ce dont on a discuté ce matin sur le «day-trading», c'est un bon exemple. Le personnel est arrivé avec une proposition, ça a été discuté à deux reprises en séance avec les membres de la Commission, et là ce qu'on fait, c'est qu'on publie, dans le fond, ce qu'on pense du sujet puis comment on pense que ça veut être encadré.


Établissement d'indicateurs de performance et d'une rémunération assortie

M. Gendron: O.K. Page 6, vous dites: «La vision proposée par la Commission des valeurs mobilières...» Bon, au-delà de la prose immensément intéressante – parce que, pour de vrai, c'est de la belle prose – il y a une phrase, là, qui est le fun beaucoup: «La CMVQ est un organisme dont l'action est guidée par des principes visant à assurer l'intégrité, l'efficacité et l'efficience.» Je n'ai aucun, aucun problème avec ça comme parlementaire et surtout pas quand vous dites, au bas: «Il faudrait penser mondialement puis agir localement.» Donc, on s'entend sur la mission, pas de problème. Non seulement la prose est belle, mais, les objectifs, tout est là, ça me convient. Mais, dans le fond, ça veut dire qu'il faut mettre l'accent sur les moyens puis sur le comment.

Question précise: Est-ce que vous avez pensé – parce que c'est surtout là-dessus qu'il faut agir – que ça vous prendrait des indicateurs de performance qui soient fixés très précisément? Et, pour donner encore plus d'attrait à les rencontrer, ces indicateurs de performance là, est-ce que vous avez envisagé d'avoir une rémunération ou qu'un certain pourcentage de la rémunération soit donné, lié à l'atteinte des indicateurs de performance? Parce que, avec la nouvelle loi, vous allez être une boîte qui, de plus en plus, va avoir un degré d'autonomie, ce qui est légitime. Vous avez parlé que vous êtes en discussion syndicale avec les trois nouvelles unités d'accréditation, donc, moi, ça m'intéresserait... Parce que ça, c'est concret, là. Est-ce que vous allez en avoir, des indicateurs de performance? Est-ce que vous avez commencé à réfléchir là-dessus?

Mme Crépin (Carmen): Oui.

M. Gendron: Oui? Je vous laisse aller un peu.

Mme Crépin (Carmen): O.K.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Ha, ha, ha! Là, il vous a surpris, hein?

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Crépin (Carmen): M. Labelle va vous donner quelques détails sur ce qu'on a amorcé.

Le Président (M. Simard, Richelieu): M. Labelle.

M. Labelle (Jacques): Je vous remercie. Dans le cadre de notre plan directeur informatique... C'est-à-dire que la Commission est en exercice depuis pratiquement...

Une voix: ...déposé en mars.

M. Labelle (Jacques): Déposé en mars auprès de la direction, pour lequel on avait travaillé avant. Le plan directeur informatique à la Commission est plus qu'une simple façon d'utiliser les ordinateurs, c'est un plan directeur qui nous a permis de revoir l'ensemble des processus opérationnels de la Commission, et ce, en prenant chaque poste occupé par un employé de façon à identifier justement tout le processus opérationnel, comment l'informatique peut nous aider. Mais ça nous a permis aussi de nous requestionner sur des étapes peut-être qui maintenant étaient inutiles, qui n'avaient pas de valeur ajoutée.

À l'intérieur du développement justement de ce plan directeur informatique, on a demandé à nos gens de prévoir certaines unités de mesure pour nous permettre de quantifier finalement l'atteinte de certains résultats ou pas. C'est sûr que ce n'est pas une chose qui peut se faire mécaniquement, surtout pas dans le travail dans lequel nos employés oeuvrent, sauf qu'on s'est dit: Le plan directeur va nous aider sur plusieurs aspects. À titre d'exemple, lorsqu'on étudie des demandes, il y a des délais qui sont fixés, c'est-à-dire que je dois fournir des commentaires dans cinq jours, l'autre doit me répondre dans deux jours, etc. On s'est dit: On va mesurer ces délais-là. Ces délais-là vont nous permettre de voir si nous les respectons ou pas. Si on ne les respecte pas, pourquoi? Si, oui, on les respecte toujours, est-ce qu'on peut les diminuer? Donc, on s'est situé certaines cibles qui vont nous permettre de mesurer et de définir des indicateurs de performance.

C'est sûr que, pour certains autres secteurs d'activité, il devient très difficile d'établir des indicateurs de performance. À titre d'exemple, si on se fixe un nombre de dossiers d'enquête à terminer dans une période donnée, c'est un indicateur de performance qui peut être très difficile, un, à établir, compte tenu que, lorsque nous commençons une enquête à la Commission, on ne sait pas comment ça finit et surtout quand elle finit. On a vu des enquêtes qui commençaient, où l'enquête semblait banale, et plus on avançait dans l'enquête, plus l'enquête prenait de l'ampleur et plus le dossier était long à réaliser. Donc, oui, on a commencé à penser à nos indicateurs de performance. Il va falloir le penser de façon plus approfondie selon les secteurs, justement, parce qu'on ne peut pas établir des unités de mesure seulement.

M. Gendron: Ça va. Et, sur la rémunération, un certain pourcentage de la rémunération qui...

M. Labelle (Jacques): Effectivement, c'est qu'on a déjà présenté au gouvernement et au Conseil du trésor des propositions salariales, ou enfin une structure de rémunération pour nos employés, et ça, depuis bientôt deux ans maintenant qu'on travaille là-dessus. On a toujours envisagé d'avoir une partie payable sous forme de bonis justement de façon à pouvoir reconnaître finalement l'effort de l'employé qui a atteint les objectifs qui lui étaient fixés.

M. Gendron: Et, dans votre esprit, est-ce que c'est plus large que juste le personnel cadre? Parce que, moi, en tout cas, dans ma question, il ne faut pas que ce soit juste le personnel cadre.

M. Labelle (Jacques): Oui, ça s'étendait à l'ensemble du personnel.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Sur le même sujet, le député de Duplessis voulait ajouter quelque chose.

(15 heures)

M. Duguay: Oui. Bien, c'est sûr, et on en a parlé un petit peu hier aussi, toute la problématique de l'aspect salarial. Mais vous êtes conscients aussi que, dans tout le secteur qui gravite autour de la fonction publique, même parapublique, il y a eu un paquet d'études qui ont été mises sur pied, notamment depuis 1983, dans ce coin-là, où on a essayé de trouver des méthodes pour uniformiser les échelles de salaires en fonction des emplois comparables. Or, il y avait aussi une étude de points et de facteurs qui avait été mise sur pied. Alors, comment pensez-vous, vous autres, avec ce que vous avez déposé au Conseil du trésor, pouvoir passer à côté et recréer, en tout cas à mon avis, toute la problématique qu'on vivait il y a plusieurs années où, là, on avait des échelles de salaires qui étaient disproportionnelles en fonction de certains ministères et organismes et où on s'était ramassé dans un moyen paquet de problèmes parce que plus l'organisme ou plus la société était capable de payer, plus on avait des salaires qui étaient... pour des emplois comparables? Alors, je ne sais pas comment est-ce que...

Le Président (M. Simard, Richelieu): Je pourrais peut-être, avant que vous ne répondiez, répondre un peu au député de Duplessis. Dans cette même salle, la semaine dernière, nous avons adopté 88, je pense, des 92 articles de la loi n° 82 et, dans ces articles-là, vous le savez bien, on a adopté – et c'est déjà adopté en deuxième lecture, donc ça s'en vient, là – la possibilité que vous échappiez au contrôle d'effectif, que vous ne soyez plus soumis au contrôle d'effectif. Et d'ailleurs un autre article permet à des organismes semblables d'avoir des politiques différentes. Donc, la liberté est inscrite maintenant dans la loi, la souplesse est maintenant dans la loi. Jusqu'à maintenant, la question que vous posiez se serait posée de façon très rigoureuse. Elle va être moins pertinente à partir de la loi n° 82.

M. Duguay: Alors, je présume que c'est à partir des dispositions de la loi n° 82 que vous vous appuyez?

Une voix: Oui.

M. Duguay: D'accord.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Merci beaucoup. J'aurais une série de questions, mais je reviendrai après.


Importance de la réglementation actuelle

Bon, on peut bien commencer maintenant. Merci. Il y a des commentaires qui apparaissent dans votre étude, dans votre réflexion, qui me rassurent; d'autres m'inquiètent. Lorsqu'un commentaire apparaît et qu'il dit: Il faut diminuer les exigences, par exemple, de rédaction de prospectus pour les PME, c'est trop lent, lorsqu'on nous dit: Le souci doit être à la rapidité, à l'efficacité, j'en suis, mais constatons que, dans cette période d'intense activité, de marché haussier, tout le monde veut que ça aille plus vite. Je ne suis pas certain qu'à long terme on gagnera à accélérer, à être moins rigoureux, au contraire. Il me semble – et je pense que la députée de Marguerite-Bourgeoys l'a fait valoir à plusieurs reprises et je suis parfaitement d'accord avec elle là-dessus – qu'à la fin de la journée c'est la crédibilité qui va jouer, c'est la capacité de s'être imposé par sa rigueur, par une application rigoureuse, et efficace, et transparente, et rapide. Mais la rigueur absolue... J'ose employer le mot «absolue», là. Vous êtes là pour protéger l'épargnant, vous êtes là pour protéger le public, et, même s'il y a une ébullition actuelle sur les marchés, même si les gens voudraient vous faire sauter... Je vous assure, les gens qui jouent sur ordinateur et qui essaient tout de suite de placer des sommes rapidement, d'avoir des revenus très rapides, de faire des bénéfices instantanés, actuellement ils voudraient faire sauter les contrôles de la CVMQ, ne plus avoir besoin de passer par des courtiers. Tout ça est une tendance lourde de l'ébullition actuelle.

Mais, sans jouer les Cassandre, le marché haussier va rebaisser, il a toujours rebaissé. Et, dans certains secteurs, comme disent les courtiers actuellement, les secteurs hot, eh bien, il y a de forts risques que ça baisse radicalement et prochainement. Sans faire de prévisions, c'est presque mathématique. Par exemple, tout ce qui est dans le domaine de la haute technologie, où il y a un emballement incroyable, mondial et une surévaluation des titres, je n'ai rencontré encore aucun analyste qui puisse prétendre que les titres ne sont pas surévalués. Si un titre est surévalué, il va finir par connaître la vérité des prix, un matin. Donc, vous allez vous retrouvez peut-être dans deux mois, peut-être dans deux ans, mais il arrivera un moment où des gens perdront massivement de l'argent et se retourneront vers la Commission, vers le gouvernement, vers le législateur et diront: Avez-vous été assez rigoureux? Avez-vous mis suffisamment de signaux rouges dans le parcours pour que la protection du public ait été assurée de façon maximale? Combien d'aigrefins se sont glissés en cours de route dans ceux qui ont réussi à aller chercher l'épargne populaire dans des dossiers qui semblaient tellement mirifiques?

On est dans cette période-là, et ce n'est certainement pas... C'est un commentaire général mais issu de vos propos de tout à l'heure. Il me semble, en tout cas – et j'aimerais avoir votre commentaire là-dessus – que c'est le dernier moment actuellement pour baisser les bras face à la réglementation. Plus une société se dirige vers une libéralisation, une déréglementation, une ouverture, plus les organismes de contrôle doivent être d'une vigilance absolue. Il me semble que ça, ça devrait être un principe qui devrait être maintenu sans faille.

Mme Crépin (Carmen): Lorsque je vous ai présenté certaines citations au début, c'étaient des commentaires que nous avions recueillis et discutés parce qu'on voulait connaître ce que pensait l'industrie de nous. Ça ne veut pas dire qu'on est d'accord avec, mais c'est quand même un message que nous avons eu, c'est-à-dire: Prenez en compte, dans l'établissement des normes, que le marché québécois n'est peut-être pas exactement le même que celui des autres juridictions au Canada. Donc, c'est sûr que l'industrie le sait, qu'on travaille dans un contexte d'harmonisation, mais les caractéristiques des entreprises qui vont faire appel à du financement au Québec ne sont pas les mêmes que celles que l'on retrouve en Ontario. Les exigences, par exemple, d'information continue auxquelles la Commission de l'Ontario peut penser, elles peuvent être bonnes pour nous aussi, mais ça ne veut pas dire qu'il faut les adapter sans réfléchir.

Je partage tout à fait vos commentaires sur la rigueur. Ce que je dis, c'est rigueur mais souplesse en même temps aussi pour tenir compte des besoins de nos émetteurs et des caractéristiques de notre marché. Pour moi, le message qui vient à l'intérieur de ça, c'est, au contraire, une mise en garde de notre industrie: Attention, prenez donc toujours en compte nos besoins, nos caractéristiques lorsque vous établissez des normes. Mais c'est évident – l'industrie le sait – qu'on s'en va vers un régime où on a des exigences accrues, et c'est pour ça que, quand on propose une nouvelle norme, on la soumet à la consultation pour l'industrie, on recueille ses commentaires. Nous devons les analyser, les évaluer pour arriver à dire: Même si certains commentaires sont faits ou si on prend une position que l'industrie n'aime pas, on pourrait se retrouver en situation où on saurait que l'industrie ne l'aime pas, mais où on va expliquer pourquoi il faut avoir ces exigences-là, parce que, nous, on a à tenir compte à la fois des besoins des émetteurs, mais aussi il faut placer ça en équilibre avec la protection des épargnants. C'est une préoccupation que, nous, nous devons avoir. L'émetteur qui nous fait son commentaire va faire son commentaire en fonction de sa situation à lui, et c'est notre rôle de prendre les deux en compte.


Poursuites dans les cas de délits d'initiés

Le Président (M. Simard, Richelieu): Parce que votre capital, c'est votre crédibilité. La députée de Marguerite-Bourgeoys l'a rappelé à plusieurs reprises, là, tout ce marché fonctionne parce qu'on a confiance que les règles sont respectées, et il me semble que, là-dessus, ce devrait être au coeur de votre plan stratégique non seulement de maintenir, mais d'amplifier.

Je vais prendre un exemple. Je ne voudrais pas ouvrir une boîte de Pandore, mais il y a des articles qui sont parus au cours des derniers mois, des dernières semaines, là, sur les délits d'initiés. Sur votre attitude face aux délits d'initiés, la députée de Marguerite-Bourgeoys a fait allusion au faible pourcentage de poursuites qui ont été menées à terme. La réputation dans le milieu financier actuellement – soyons, entre nous, très clairs – n'est pas excellente là-dessus, au contraire, c'est le moins qu'on puisse dire. On peut actuellement dire qu'il y a très peu de chances que des délits d'initiés aboutissent par des condamnations de tribunaux. Statistiquement, là, il semble évident que, à moins qu'on ferme les yeux, la réalité, c'est que les gens font des délits d'initiés actuellement au Québec. Certains viennent à vos oreilles, des enquêtes sont faites, mais l'aboutissement d'une preuve construite qui aboutit à des condamnations, les chances statistiques sont extrêmement faibles. Ce n'est pas normal. Si on dit que la crédibilité dans un marché en pleine ébullition est un élément essentiel, ce n'est pas normal.

(15 h 10)

Je reviens à votre plan d'effectif. Il y a quelques commentaires auxquels vous avez fait allusion, par exemple la possibilité d'impartition. Vous avez répondu hier que vos services juridiques prenaient tout en compte, tout en charge, et vous n'aviez pas le recours à toutes fins pratiques à des bureaux extérieurs. Peut-être que ce serait une solution, mais enfin. Mais, quelle que soit la solution, il en faut une. On ne peut plus laisser le public croire que des cas ne sont pas poursuivis. Donc, il y a un encouragement tacite à ce qu'il y ait des délits d'initiés parce que les chances d'être attrapé sont relativement minces. Enfin, c'est un commentaire qui attend votre commentaire mais qui ne semble pas trouver sa réponse dans votre vision stratégique actuelle.

Mme Crépin (Carmen): O.K. Comme premier commentaire, je dirais que, lorsqu'on parle, par exemple, d'allégement du fardeau réglementaire, ça ne veut pas dire de le mettre de côté. Il faut adapter le fardeau réglementaire aux exigences.

Au niveau des déclarations d'initiés, par exemple, c'est vrai, on en a discuté beaucoup, les exigences des tribunaux sont grandes. Peut-être, effectivement, devons-nous songer à plusieurs moyens d'action. Un recours pénal, oui, mais peut-être aussi, comme ça peut se faire aux États-Unis, introduire dans notre législation des possibilités de recours civil ou alors de sanctions à l'encontre des dirigeants.

Pour ce qui est des services juridiques et de l'impartition, M. Labelle.

M. Labelle (Jacques): Si on fait une relation entre les services juridiques et justement les délits d'initiés, je ne pense pas du tout que le peu de succès de la Commission devant les tribunaux soit fonction de la qualité des procureurs de la Commission qui ont été impliqués...

Le Président (M. Simard, Richelieu): Je n'ai pas voulu dire ça non plus.

M. Labelle (Jacques): ...dans ces dossiers-là, et je ne pense pas que nous ayons de plus grandes chances de succès devant les tribunaux avec des procureurs de l'externe. Comme il a été mentionné, malheureusement, les tribunaux ont augmenté le standard exigé au niveau de la preuve. Les tribunaux sont allés au-delà de ce que notre loi, la Loi sur les valeurs mobilières, prévoyait même, ce qui rend très difficile le succès des poursuites en matière pénale, sauf que le délit d'initié... Il est évident que la poursuite devant le tribunal constitue un moyen dissuasif, oui. Par contre, l'enquête constitue, elle aussi, un moyen dissuasif parce que, lorsque la Commission fait enquête en matière de délits d'initiés, comme dans les autres domaines aussi, notre enquête ne se fait pas en vase clos. On doit nécessairement recueillir la preuve documentaire, on recueille aussi le témoignage. Nous vivons tout de même dans un milieu qui est assez petit, et, du moment que quelqu'un est convoqué pour témoigner sur un dossier, ça fait très vite le tour de la communauté financière au Québec, si bien que je pense que, ne serait-ce que l'enquête, c'est un moyen dissuasif qui est très bon.

On a décidé – et ça, pas fonction de notre présence ici aujourd'hui, pas fonction des commentaires qu'on a pu lire dans les journaux – que le domaine des transactions d'initiés a toujours été un domaine qui intéressait la Commission du Québec et dans lequel on était très actifs. Je vais vous rappeler le chiffre qu'on vous a cité: nous avons actuellement 28 dossiers d'enquête en cours dans le domaine du délit d'initié. Donc, c'est une grande préoccupation. Peut-être que, dans la vision stratégique, on ne l'a pas vu identifiée sous ce vocable-là, sauf que, justement, quand on va arriver au plan d'action par direction... Parce que, lorsqu'on va vouloir aussi parler d'«enforcement», il va falloir cibler le type d'enquête que l'on veut effectuer, que l'on veut favoriser, et ça, ce sera fonction justement des types d'abus que l'on constate sur le marché. Si on devait constater qu'il y a beaucoup de placements illégaux actions qui donneraient droit à un avantage fiscal, sans doute qu'on serait portés à aller faire plus d'enquêtes dans ce domaine-là. Donc, si vous n'avez pas retrouvé le délit d'initié dans la vision stratégique qu'on vous a distribuée, ce n'est pas que ça n'existe pas comme préoccupation à la Commission, et ça, c'est constant et depuis très, très longtemps.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Ce que vous me dites me rassure parce que ça n'y est effectivement pas. Et, au niveau de l'«enforcement», ce que vous me dites me rassure aussi beaucoup.

Mme Jérôme-Forget: M. le Président.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Je vous en prie.

Mme Jérôme-Forget: Une question.

Le Président (M. Simard, Richelieu): C'est à vous, maintenant. Prenez tout le temps qu'il vous faut.


Liste des objectifs identifiés

Mme Jérôme-Forget: D'accord. Alors, Mme la présidente, ma question est peut-être prématurée, parce que vous êtes à la première étape. Vous avez défini la mission, qui est semblable à celle qui existait antérieurement, et ma question, c'est plutôt en termes d'objectifs. Si je vous posais la question, si je vous disais: Vous avez deux objectifs... Je vous demande: Quelles sont les deux choses que vous voudriez faire, et que vous estimez qu'elles n'ont pas été faites, et qui constitueraient une approche nouvelle à la Commission des valeurs mobilières du Québec?

Mme Crépin (Carmen): Deux objectifs?

Mme Jérôme-Forget: Bien, j'imagine que, dans votre réflexion, à part de dire que la mission est encore la même que ce qu'elle était, tout ce brassage d'idées vous a fait identifier des problèmes particuliers, que ce soit la présence des SNA aux États-Unis, qui représente maintenant, si j'ai bien compris le chiffre, 38 % du marché. C'est donc un marché important, une tendance lourde. D'accord? Alors, face à ça, on peut regarder tous les objectifs de la boîte, mais, à ce moment-là, on risque de perdre le phare, on risque de perdre une couple d'objectifs qui s'en viennent de façon prédominante. C'est pour ça que je vous pose la question. J'imagine que, dans toute cette réflexion, vous vous êtes rendu compte qu'il y a des lacunes, à cause du nouvel environnement, qui sont plus importantes que d'autres.

Mme Crépin (Carmen): Je vous dirais que, probablement assez rapidement après mon arrivée, je regardais ce qui se passait. Effectivement, les enjeux, et tout, et l'accent, l'«enforcement», le fait qu'on retrouve l'«enforcement» comme première priorité, les efforts que l'on met avec les inspections et les enquêtes, c'est un aspect important de notre mission. C'est aussi un élément qui est important pour notre crédibilité. Même si les dossiers sont difficiles à faire, fort probablement que nous pouvons dire: On en a choisi quelques-uns, on les travaille de façon à essayer d'obtenir un résultat, quitte peut-être à laisser tomber... Si on n'est pas capables de travailler 28 dossiers d'affilée, on est peut-être mieux d'en prendre cinq, d'avoir des chances de faire un travail efficace avec ces cinq-là, parce que ça obtient un résultat sur le marché et que ça nous permet de confirmer notre crédibilité face à l'industrie. Donc, l'«enforcement», pour moi, ce n'est pas surprenant qu'on le retrouve en première priorité.

L'autre élément, je dirais, proactif: regarder ce qui s'en vient, commencer à réfléchir sur comment on se positionne, comment ça nous interpelle, analyser les impacts, trouver les personnes dans l'industrie qui vont nous aider à réfléchir sur les impacts pour arriver à dire, en fonction des impacts, comment on oriente notre action. Est-ce qu'on la maintient telle quelle? Est-ce qu'on a des propositions à faire ou à demander, à changer? Je dirais que c'est ça.


Décloisonnement des institutions financières

Mme Jérôme-Forget: D'accord. Au niveau de l'environnement, j'ai fait référence ce matin justement au décloisonnement au niveau des institutions financières. Donc, vous avez des compagnies d'assurances qui s'approchent des banques, vous avez des banques qui s'approchent des maisons de courtage, qui fusionnent. Qu'est-ce que ça pose comme problème particulier à la Commission des valeurs mobilières dans son plan d'action pour réagir à ce nouvel environnement?

Mme Crépin (Carmen): Je vous dirais, de prime abord, que certainement ça ramène aussi les exigences de concertation entre les différentes autorités. C'est évident qu'on peut regarder notre mission, elle est axée sur les valeurs mobilières, mais il faut la regarder dans l'environnement global. Il y a d'autres régulateurs qui interviennent. C'est important qu'on puisse aussi échanger de l'information sur ce qui se passe dans le marché, sur les intervenants, avec eux, et éventuellement se concerter avec eux sur certaines actions. C'est vrai, admettons, au niveau des ACVM, dans l'encadrement réglementaire, c'est vrai ici, au niveau du Québec, avec les autres entités qui existent. Il y a des forums qui existent, par exemple, aux ACVM. C'est important. Tantôt, on avait des discussions, on a donné de l'information au Bureau des services financiers pour dire: Il y a des comités de travail ou des secteurs qui vous interpellent. C'est important que le Bureau des services financiers participe à ces forums-là parce que c'est lui qui va être impliqué dans la surveillance de certains types d'intermédiaires sur le marché maintenant. Donc, il faut aussi se concerter dans l'établissement des règles. On ne peut pas avoir deux philosophies d'action face à différentes facettes de gens qui interviennent sur le secteur financier.

Mme Jérôme-Forget: Est-ce que vous avez – peut-être que ça ne relève pas essentiellement de la Commission des valeurs mobilières, ou ce serait peut-être prétentieux pour elle de l'imaginer – examiné la possibilité de fusionner la Commission des valeurs mobilières avec l'Inspecteur général des institutions financières, par exemple?

(15 h 20)

Mme Crépin (Carmen): Je vais vous avouer que c'est une question à laquelle, personnellement, je n'ai pas réfléchi. Je pense que, une discussion de cet ordre-là, il faudrait que je l'aie avec les gens du ministère des Finances, bien sûr. Il peut y avoir avantage à placer des choses ensemble, mais parfois aussi on crée des monstres. Alors, je pense que, avant de procéder à des réformes dans le secteur, il faut bien y penser. Il faut être capable de voir quels sont les avantages recherchés. Et est-ce que, quand on le fait, on se donne les moyens de les rencontrer?

Le Président (M. Simard, Richelieu): C'est sur du financement.

Mme Jérôme-Forget: Le but de... Pardon?

Le Président (M. Simard, Richelieu): C'est sur du financement par les clients.

Mme Jérôme-Forget: Oui, mais, M. le Président, ce pour quoi je soulève ce point-là, c'est à cause justement du décloisonnement des institutions financières. C'est parce que c'est ça qui est en train de se passer dans le milieu financier. Et, comme c'est en train de se passer dans le milieu financier, bien, on penserait que les organismes qui s'occupent de réglementer s'adapteraient à ce nouvel environnement aussi qui risque de se passer. Alors, d'avoir deux organismes qui se penchent et qui touchent à des volets différents, il est clair que ça peut être problématique. En tous les cas, on l'a vu dans un cas particulier, le cas de L'Alternative, comme je l'ai soulevé antérieurement. On l'a vu, il y avait un cas où on avait accordé un permis, et, dans l'autre cas, c'était tout le système de distribution, comme vous savez.


Établissement d'indicateurs de performance et d'une rémunération assortie (suite)

J'aimerais revenir sur un point qui a été fait antérieurement au niveau des indicateurs de performance et de la possibilité d'utiliser les bonis pour rémunérer les employés. Dans le secteur financier, puisque c'est le secteur avec lequel vous travaillez, on a évidemment beaucoup de bonis, et le boni est basé uniquement, ou presque, sur la performance de l'entreprise, la performance d'une direction, le résultat économique de l'entreprise. Or, dans le secteur public, quand il y avait des bonis qui étaient donnés, ce que j'ai vu, moi, jusqu'à maintenant – et j'ai été dans des situations où on a donné des bonis – c'est qu,il y avait une espèce de nivellement à travers toute l'entreprise. C'était très difficile de déterminer qui le méritait et qui ne le méritait pas, souvent parce que le travail, comme le disait très bien antérieurement le président, c'est que c'est un travail quantitatif, bien sûr, mais il y a un travail qualitatif à faire, et, par conséquent, vous avez mentionné également plus tôt que parfois il vaut peut-être mieux harnacher cinq causes seulement mais les mener à bout pour envoyer un message à l'environnement sur lequel on veut jouer un certain contrôle. Donc, les indicateurs de performance sont difficiles à déterminer dans ces cas-là. La qualité du travail versus la quantité des décisions, c'est difficile à estimer. Si vous estimez que ce serait là une approche possible de rémunération, comment est-ce que vous pourriez régler ce problème-là?

Mme Crépin (Carmen): Bon, ça fait partie des formules que l'on examine bien sûr quand on parle d'indicateurs de performance. Il faut aussi, à l'interne, établir des processus de gestion où les employés ont des objectifs, des évaluations, et le boni fait partie de l'évaluation. On peut penser à différentes formules, combiner, par exemple, une formule de bonis où un pourcentage du calcul se fait sur la performance globale de l'entreprise, une partie qui concerne la performance de l'individu. La grande difficulté dans une organisation comme la CVMQ, c'est, sur certains types de services, de trouver la bonne formule pour établir un indicateur de performance.

Si je me réfère à une de mes vies antérieures, à la Caisse de dépôt, j'ai participé aux travaux pour élaborer des formules de bonis. On prend un gestionnaire, on lui donne un portefeuille puis on dit: Ton objectif de performance, c'est de battre le TSE de 300 points de base. C'est facile à établir, c'est facile à mesurer. Dans notre secteur, ce n'est pas la même chose. J'ai eu plusieurs discussions avec des gens à l'intérieur déjà du gouvernement aussi parce que je sais que le projet de loi n° 82 et le nouveau cadre de gestion du gouvernement mettent cette approche en évidence de trouver s'il n'y aurait pas des gens déjà qui travaillent avec des comparables qu'on pourrait adapter. Nous, on a commencé des travaux là-dessus, mais on est encore à peaufiner, à dire: Oui, on pense que ce serait intéressant, mais, si on pense à une formule de bonis, nécessairement il faut pouvoir l'adapter, il faut la jouxter à une mesure d'indication de performance, d'analyse de performance. Il faut qu'on trouve un outil adapté à nous.

Mme Jérôme-Forget: Je vais être très cruelle, madame: Est-ce que vous n'êtes pas en train d'essayer de faire indirectement ce que vous devriez faire directement? Par là je veux dire qu'il y a des gens que vous devez attirer, aller chercher, essayer de séduire pour se joindre à votre Commission des valeurs mobilières pour en faire la meilleure, pour être sûre qu'elle est perçue comme étant un organisme très crédible. Est-ce que ce n'est pas tout simplement qu'il faudrait offrir une rémunération qui vous permettrait d'aller chercher des gens de ce calibre-là?

Mme Crépin (Carmen): Quand on parle de programme de rémunération, on parle d'honoraires de base et on parle de programme de bonis. Par contre, une comparable comme telle dans l'industrie, qui va fournir le type de services qu'on fait... Notre travail ne s'apparente pas nécessairement, dans la mesure de son efficacité, à celui d'un courtier. Quelqu'un qui a une expérience chez un courtier, ça peut être une bonne ressource pour nous avec une expérience pertinente, mais on ne mesurera pas nécessairement sa performance dans notre organisation comme elle se mesurait chez le courtier.

Mme Jérôme-Forget: Bien sûr, bien sûr.

Mme Crépin (Carmen): Et c'est là-dessus que je dis: Dans notre plan, on en prévoit la formule, mais c'est évident qu'il faut la bâtir. On a commencé des travaux là-dessus.

Mme Jérôme-Forget: D'accord. Mais le point que je faisais, c'était: Est-ce que vous croyez que vous allez pouvoir attirer des gens avec une formule comme ça alors que déjà vous êtes défavorisés au niveau salarial par rapport au milieu?

Mme Crépin (Carmen): Ce qu'on vise à trouver, c'est une formule de rémunération complète qui puisse être un certain comparable avec notre marché.

Mme Jérôme-Forget: D'accord.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. C'est très intéressant, en fait, comme exercice que vous nous proposez de voir. Donc, il y a, d'un côté, un exercice de consultation auprès du personnel et des ressources externes qui vous amène à définir une vision et, à partir de là, à déterminer vos objectifs institutionnels qui devraient vous conduire au plan stratégique. Le plan stratégique, il va être prêt quand?

Mme Crépin (Carmen): L'objectif, c'est d'avoir un document final pour le mois de juin.

Mme Houda-Pepin: 2000?

Mme Crépin (Carmen): Oui.


Protection contre la fraude

Mme Houda-Pepin: D'accord. Maintenant, à la page 6, la vision de la Commission des valeurs mobilières, j'ai essayé de la comparer avec le mandat, la mission, en fait, qui figure à la page 3 du document que vous nous avez présenté, et donc je lis que «la Commission des valeurs mobilières est un organisme dont l'action est guidée par les principes visant à assurer l'intégrité, l'efficacité et l'efficience des marchés financiers québécois dans l'environnement mondial». Et, en regardant le mandat tel que défini à la page 3 du document que vous nous avez déposé, c'est: présentation et mission de la Commission. Il manque un élément très important à votre vision, et c'est celui d'assurer la protection des épargnants contre les pratiques déloyales, abusives et frauduleuses – ça, c'est à la page 3.

Je questionne un peu le fait que ça ne se retrouve pas dans votre vision, telle que définie, qui va vous guider dans votre plan stratégique, considérant qu'on fait face aux bourses électroniques, qu'on fait face aussi à toute la nouvelle dynamique du «day-trading» et à tout ce que cela engendre comme possibilités de fraude dont l'épargnant a besoin d'être protégé. Alors, pourriez-vous m'expliquer comment ça se fait que ce pan, qui est important, de votre mission ne figure plus dans votre vision?

Mme Crépin (Carmen): O.K. La vision, d'abord, on l'a conçue comme un élément en disant: Quelle est l'orientation qu'on prend pour l'assurer? Donc, dans l'articulation de la vision, on ne vise pas à répéter la mission, elle est implicitement contenue dedans. C'est une...

(15 h 30)

Mme Houda-Pepin: Bien, c'est ça qui m'inquiète, Mme Crépin. C'est que cet élément-là pour moi, il est central à votre mission, la protection des épargnants contre les pratiques déloyales, abusives et frauduleuses, d'autant plus qu'on rentre dans une dynamique où il y a des risques de plus en plus grands que les épargnants puissent être justement l'objet de ces fraudes. Alors, comment ça se fait que cet élément de la protection des épargnants n'est pas retenu dans votre vision? Moi, il me semble que, pour un organisme qui veut se donner des indicateurs de performance, l'idée centrale de votre vision, de votre mission, devrait être la protection des épargnants et que vous preniez les moyens d'atteindre cet objectif, les moyens étant, bon, tout le reste, là, l'efficacité, l'efficience, l'intégrité du système, et tout ça, parce que, en fait, il faut donner un service aux épargnants, il faut les protéger. C'est comme ça que je voyais les choses.

Mme Crépin (Carmen): Je comprends votre point. Quand on parle de nos clientèles, quand on présente nos clientèles, on dit: Nos clientèles, ce sont les émetteurs, les courtiers...

Mme Houda-Pepin: Les investisseurs.

Mme Crépin (Carmen): ...les organismes d'autoréglementation, et, la quatrième clientèle, les épargnants, on la présente souvent comme le maintien de l'intégrité du marché parce qu'on dit que tout ce qu'on fait en regard de chacune des trois autres clientèles, on le fait pour la protection des investisseurs en contribuant à un marché qui est efficace.

Mme Houda-Pepin: Oui, mais vous comprendrez, Mme Crépin, que les autres clientèles que vous desservez, elles sont suffisamment équipées pour s'assurer qu'elles-mêmes ne fassent pas l'objet d'une fraude, et que le maillon le plus faible dans la chaîne que vous représentez, c'est justement l'épargnant parce que c'est lui qui peut faire l'objet d'un risque de fraude, c'est lui qui peut ne pas avoir la bonne information, c'est lui qui peut se faire prendre dans un guêpier. C'est à lui qu'il faut penser. Je ne dis pas qu'il faut négliger les autres, parce que le système est complexe, mais cette dimension-là me semble capitale pour le travail que la Commission serait appelée à faire de plus en plus dans la nouvelle vision que vous devez vous donner, pour ne pas l'oublier et pour envoyer un signal clair d'abord aux parlementaires – parce qu'on est là pour vous écouter – mais surtout à la population. Il me semble que ça devrait se retrouver – c'est un message que je vous fais – partout dans votre mission, dans votre vision, parce que c'est central à votre mission et que c'est au coeur de la crédibilité dont on a parlé tantôt. Il me semble.

Mme Crépin (Carmen): C'est ça. En fait, quand je dis «il est là», il est là parce que tout ce qu'on fait à l'égard de notre action ou de nos clientèles, on le fait en fonction de l'investisseur. Si je reprends le libellé comme tel de la vision, donc, quand on parle d'intégrité des marchés, on parle d'un marché où les investisseurs peuvent agir d'une façon sécure. Également, dans la vision, quand on parle de l'«enforcement», la priorité qu'on y attache, c'est nécessairement en fonction de la protection des investisseurs.

Mme Houda-Pepin: J'ai compris ça, sauf que je vous dis: Le message qu'il faut envoyer à la population, c'est de dire que vous vous souciez aussi, et que c'est dans votre mandat également, d'assurer la protection des épargnants parce que c'est central. Je comprends que c'est implicite. Moi, je vous dis de le rendre explicite, et comme ça il n'y aura pas d'ambiguïté.

Ceci étant dit, je voulais aussi vous féliciter pour la publicité qui passe à la télévision. Je trouve ça extrêmement intéressant, et c'est d'autant plus – comment dirais-je? – efficace que la voix de l'artiste, qui apparaît un peu, sa voix surtout, elle porte très bien votre message. Alors, je tenais à vous le dire. Moi, j'ai vu la publicité plusieurs fois; elle m'a à chaque fois accrochée, puis chaque fois je trouvais ça très intelligent comme moyen d'éduquer.

Le Président (M. Simard, Richelieu): On va la retenir pour la campagne référendaire.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Crépin (Carmen): Ce qui est intéressant, c'est que le message que nous voulions passer avec cette publicité, c'est l'importance que l'on accorde à l'«enforcement».

Mme Houda-Pepin: Voilà. Bien, justement, voyez-vous, vous parliez là-dedans de l'épargnant, hein? C'était évident, c'était un message qu'on pouvait aller chercher.


Effets de la restructuration des bourses sur la Commission

Dernière petite question, parce que ma collègue a aussi des questions. À la page 7, dans les objectifs institutionnels, vous dites: «À la suite de la restructuration des bourses canadiennes, définir le rôle de la Commission des valeurs mobilières du Québec.» Ce matin, dans votre présentation, Mme Crépin, j'ai cru comprendre que vous nous aviez dit que le fait qu'il y ait eu cette restructuration des bourses n'a pas eu d'effet sur la Commission des valeurs mobilières en termes de moyens, de mandat, que ça ne vous a pas amené vraiment de bouleversements ou de changements du tout. Alors, comment expliquer qu'ici, à la page 7, vous dites qu'il y a un lien de cause à effet entre la restructuration des bourses et la redéfinition du rôle de la Commission des valeurs mobilières?

Mme Crépin (Carmen): L'idée qui est sous-jacente à ça, même si l'écriture est... parce que ce que je vous ai donné, là, ça n'a pas été nécessairement très peaufiné, c'est de dire: Est-ce que la restructuration nous amène à repenser comment on intervient? Si c'est ça, nous savons que nous avons l'opportunité de revenir au printemps avec des amendements à la loi. Donc, c'est en ce sens-là. On pense que la façon dont la loi est structurée, dont on peut exercer nos pouvoirs à l'égard d'un OAR, est efficace, mais ici c'est parce que la restructuration, c'est un dossier qui évolue, et certains éléments changent à toutes les semaines. Si c'est ça, nous devrons pouvoir ajuster nos moyens d'action.


Protection contre la fraude (suite)

Sur le libellé de la vision, je voudrais vous dire: Je suis très heureuse qu'on puisse en discuter aujourd'hui. Le texte n'est pas final...

Mme Houda-Pepin: Ah bon! Tant mieux, tant mieux!

Mme Crépin (Carmen): ...alors on va donc ajouter le mot... On va trouver...

Mme Houda-Pepin: La phrase.

Mme Crépin (Carmen): ...la phrase pour que ça apparaisse dans ce texte-là parce que, éventuellement, notre vision, on voudrait pouvoir la communiquer et la rendre publique.

Mme Houda-Pepin: En fait, c'est assurer la protection des épargnants, et ça devient de plus en plus – comment dirais-je? – justifié dans le contexte actuel.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Absolument. Mme la députée de Beauce-Sud.

Mme Leblanc: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Est-ce qu'il fait moins froid dans la Beauce-Sud que dans la Beauce-Nord?

Mme Leblanc: C'est toujours plus beau dans le Sud.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Oui, hein?


Liste des objectifs identifiés (suite)

Mme Leblanc: Mme Crépin, le rapport annuel 1998-1999 de la Commission ne comprend pas d'objectifs précis en ce qui a trait à vos orientations. Toutefois, on voit que vous êtes à établir justement cette planification stratégique pour l'an 2000. Est-ce que ça veut dire que dorénavant il sera possible de retrouver, à l'intérieur de vos prochains rapports annuels, des objectifs mesurables, en termes de qualité et de quantité, qui vont faire en sorte que les parlementaires pourront mieux apprécier si, oui ou non, la Commission a atteint ses objectifs?

Mme Crépin (Carmen): C'est évident que les objectifs qu'on veut se donner, ça va apparaître dans notre rapport annuel de la même façon que tous les éléments d'information qu'on donne régulièrement sur nos activités. Donc, si on a des programmes de rémunération, des indicateurs, on va retrouver cette information-là dans le rapport annuel.

Mme Leblanc: Mais je veux bien spécifier que j'entends par là des objectifs précis, mesurables, quantifiables, qualifiables, et tout ça.

Mme Crépin (Carmen): Oui. C'est ça, ça n'apparaît pas dans le rapport annuel cette année parce qu'on était en train de le faire. Donc, dans le prochain, notre objectif, c'est d'avoir un plan articulé, peut-être pas nécessairement qui contient 25 choses à faire, mais un plan articulé avec des cibles précises, pour le mois de juin, et donc ça va apparaître dans le rapport annuel de l'an prochain. Est-ce qu'on peut... Juste un petit complément.

Mme Leblanc: Oui, allez, allez.

M. Labelle (Jacques): Juste sur ce point-là, j'aimerais vous préciser par contre qu'il y a certains objectifs précis qui ne sont pas mentionnés dans le rapport annuel. Je prévois déjà la problématique à savoir si je décide, au niveau «enforcement», d'accentuer mes efforts d'enquête dans l'information privilégiée, dans les états financiers ou dans d'autres choses, si j'annonce déjà où sont mes priorités. J'aurais crainte que ça affecte mon travail d'«enforcement». Donc, il y aura peut-être des choses justement où il faut être prudent aussi dans l'information qu'on véhicule, parce que le rapport annuel est un document qui est distribué. Ce ne serait pas, disons, de l'information non présente parce qu'on en a honte ou qu'on est gênés de l'information, mais ce serait plutôt une sélection pour ne pas nuire à notre action.

(15 h 40)

Mme Leblanc: Mais, sans dire dans quel domaine vous entendez faire de l'«enforcement», il y a moyen de savoir, par exemple, que vous voulez atteindre tel objectif à ce niveau-là, à ce chapitre-là. Il y a l'industrie qui disait, dans ses commentaires, souhaiter avoir de plus en plus d'échanges avec la Commission pour être capable de s'ajuster plus rapidement. Je veux savoir si la Commission entend donner suite et, si oui, de quelle façon vous allez vous y prendre pour orienter le développement du marché et informer les émetteurs des innovations technologiques et des normes internationales en matière de réglementation.

Mme Crépin (Carmen): On a pensé à cibler des sujets avec lesquels on peut avoir des échanges avec l'industrie. En plus de notre bulletin, on prépare présentement une «newsletter» destinée justement à l'industrie. C'est un projet sur lequel on devrait aboutir au cours des prochaines semaines. Ça rencontre tout à fait l'objectif que vous décrivez.


Organisation de rencontres avec l'industrie

Mme Leblanc: O.K. Vous n'avez pas l'intention de faire des forums dans lesquels l'industrie serait invitée une fois par année, par exemple, ou deux fois par année, ou dépendamment des besoins, ou des informations, par exemple, que vous auriez pu recueillir au niveau international ou national et qui pourraient faire en sorte que c'est important que l'industrie connaisse ces orientations-là immédiatement?

Mme Crépin (Carmen): C'est aussi une formule à laquelle on pense, en fonction des sujets ou des besoins. D'ailleurs, cette année, à la CVMQ, on a profité de mon arrivée pour faire un cocktail-rencontre avec l'industrie. La réaction de l'industrie a été très positive, et il y a plusieurs messages qui ont été manifestés à cette occasion-là pour dire: Écoutez, on trouve ça intéressant de vous rencontrer dans un cadre qui n'est pas nécessairement litigieux où on ne s'entend pas sur un dossier, donc d'avoir des occasions d'échanges. C'était une première. C'est sûr qu'on peut envisager certainement d'autres activités qui seraient plus pointues en termes de discussion sur des contenus.

M. Lemoine (Guy): Nous participons également à certains comités consultatifs, notamment avec un groupe d'avocats impliqués dans le secteur des valeurs mobilières et des firmes de comptables.

Mme Leblanc: Alors, plus spécifiquement, de façon plus pointue sur les aspects qui les concernent?

M. Lemoine (Guy): De façon régulière.

Mme Leblanc: De façon régulière. O.K. Je vois qu'il y a un désir aussi pour la Commission d'accroître son leadership sur la scène canadienne et internationale. Ça ne fait pas partie toutefois de votre mission. Je me demandais pourquoi, si c'est un enjeu majeur, vous ne l'incluez pas directement dans votre mission. Vous avez décidé – en tout cas, de la manière dont on peut le lire – que vous gardez le statu quo sur votre mission. Pourquoi vous avez fait ce choix-là?

Mme Crépin (Carmen): C'est clair, là, la CVMQ participe depuis 10 ans aux discussions qui se font au niveau des ACVM à l'échelle du Canada. C'est important parce que c'est une table de réflexion sur plusieurs mécaniques d'encadrement du marché. La façon dont ça fonctionne, c'est que certaines problématiques sont amenées par les différentes juridictions. C'est une mise en commun des réflexions qui se font là-dessus, et, si le sujet semble d'importance, on s'y attaque, il y a un groupe de travail qui est formé. Il y a présentement probablement une bonne quarantaine de groupes de travail qui fonctionnent sur ces sujets-là.

La dynamique est la même à l'international. On ne l'a pas intégrée dans la mission parce que, pour nous, c'est un moyen de rencontrer la mission. Ce n'est pas une fin en soi, c'est un moyen d'arriver à la rencontrer. La mondialisation appelle de la concertation dans l'élaboration des cadres réglementaires dans l'avenir, un peu de la même façon qu'on pense qu'on a déjà un régime d'examen concerté. On appelle ça un peu... Dans l'examen, par exemple, d'un prospectus, pour décider de le viser, c'est un «mutual reliance system», c'est-à-dire qu'on s'appuie sur une autre autorité pour fonder notre propre opinion. Ce qu'on fait à l'échelle canadienne, on pourrait éventuellement envisager qu'on le fait avec d'autres juridictions à l'international. Est-ce qu'il n'y aurait pas aussi des protocoles d'entente sur des activités d'inspection qu'on pourrait signer avec d'autres instances? Donc, notre présence, on l'établit sur les sujets et les forums qui ont des liens avec les caractéristiques de notre marché, et c'est pour ça qu'on continue à la développer. Pour moi, c'est un moyen par rapport à notre mission.

Mme Leblanc: Je vous dis ça parce que, dans plusieurs missions d'entreprises qui produisent des produits ou des services, on voit souvent «être le chef de file en matière de», alors qu'on ne le retrouve pas, par exemple, dans la mission de la CVMQ. Alors, de là vient ma question.

Je vois que vous avez plutôt l'intention de continuer à participer aux réunions de l'ACVM mais que vous serez peut-être absents de certains comités qui seraient moins intéressants pour vous. Est-ce que c'est exact?

Mme Crépin (Carmen): Bien, à partir du moment où il y a une multitude de comités, c'est évident qu'on doit prioriser ceux qui s'adressent à des sujets qui nous intéressent. Au niveau des ACVM, on participe à presque tous les comités. Au niveau de l'OICV, on participe aux comités techniques, il y a cinq sous-groupes de travail, il y a quatre autres groupes de travail auxquels on participe. Quand on parle de la NASAA qui réunit les deux Amériques, il y a 30 groupes de travail; on a choisi de participer à trois. En fonction de l'évolution des marchés, l'année prochaine, on pourrait participer à cinq, on pourrait participer à 10. Notre action, on doit la cibler en fonction de notre mission ici et faire nos choix, puis aussi il faut tenir compte de nos ressources.

Mme Leblanc: Pour nous donner peut-être un aperçu de l'ampleur du travail qui peut se faire sur la scène canadienne et internationale, pouvez-vous nous dire combien il y a de comités à l'ACVM ou à l'OICV et à quelle fréquence les réunions se tiennent?

M. Labelle (Jacques): Premièrement, au niveau de l'OICV, il y a cinq groupes de travail qui se réunissent, je dirais, quatre fois par année. Peut-être qu'on pourrait demander à Mme Joly, qui est en charge de la réglementation... Et c'est son personnel qui est...

Mme Leblanc: Hé, qu'elle va être contente! Elle va répondre à une question!

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Joly (Diane): Comme Me Labelle le disait, au niveau international, les comités se réunissent environ quatre fois par année. Au niveau canadien, je n'ai pas le nombre exact, mais, je dirais, c'est au moins 20 à 25 comités. Les gens se rencontrent, disons, en réunion, face à face, peut-être maximum quatre fois par année, mais plusieurs de ces groupes de travail tiennent des téléphones-conférences hebdomadaires pour faire le suivi de l'évolution des dossiers. Comme, bon, quand on a mis sur pied le régime d'examen concerté, on l'a proposé comme projet, mais en même temps on l'a mis aussi comme projet-pilote pour voir en cours de route, avant de l'adopter de façon finale, où pouvaient être les principaux problèmes, et le groupe de travail avait et a encore régulièrement des téléphones-conférences toutes les semaines pour essayer d'évaluer où sont les problèmes potentiels.

Mme Leblanc: Par curiosité, Mme Joly, où se tiennent ces réunions-là? Est-ce que ça se tient toujours à Toronto ou s'il y a une alternance dans les...

Mme Joly (Diane): Il y a une alternance. Disons que les réunions se tiennent généralement à Montréal, à Toronto, à Calgary ou à Vancouver. Ce sont les quatre principales provinces qui participent aux groupes de travail, donc nous faisons une rotation des différents lieux de réunion.

Mme Crépin (Carmen): La réunion des ACVM ce printemps, elle va avoir lieu à Montréal.

Mme Leblanc: Parfait.

Mme Crépin (Carmen): De la NASAA aussi.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Mme la députée de Beauce-Sud, je ne veux pas vous interrompre, mais ça fait quand même...

Mme Leblanc: J'avais juste une petite dernière question.

Le Président (M. Simard, Richelieu): ...trente-trois minutes, mais jeunes. Je vais quand même vous accorder une dernière question.

Mme Leblanc: Hé! que vous êtes aimable, M. le Président!

Le Président (M. Simard, Richelieu): Je ne veux surtout pas que vous m'accusiez de ne pas vous donner suffisamment de temps.

Mme Houda-Pepin: Vous mettez ça entre parenthèses.


Création d'une commission fédérale

Mme Leblanc: Exactement. Alors, une petite dernière question. Ça concerne l'émergence d'une commission canadienne. Je vois là que c'est une préoccupation de la Commission des valeurs mobilières du Québec, et vous tenez à établir le leadership du Québec là-dedans. Qu'est-ce que vous devrez surveiller dans la création de cette Commission-là pour les intérêts du Québec?

Mme Crépin (Carmen): Pourriez-vous me...

Mme Leblanc: Est-ce qu'il y a des enjeux, par exemple, à l'effet qu'on crée une commission canadienne, qui vont faire en sorte que le Québec pourrait être appelé à perdre une mainmise sur certains aspects? Est-ce qu'il y a des aspects que vous devrez surveiller particulièrement ou si ça va de soi, on va créer une commission canadienne et on en fera partie?

(15 h 50)

Mme Crépin (Carmen): Les discussions ont déjà eu lieu au niveau des ACVM par rapport à une commission canadienne créée par le fédéral. Il y a un constat qui est clair au niveau de chacune des juridictions en valeurs mobilières, c'est de dire qu'on pense que la formule des ACVM, qui permet de mettre en commun certains sujets, est meilleure parce que c'est un système en vertu duquel chaque juridiction garde sa pleine autorité. Depuis qu'on a mis en place, par exemple, le régime d'examen concerté, chaque juridiction s'appuie sur une autre, oui, mais elle conserve en tout temps le droit de se retirer. Puis, comme je l'ai dit, dans l'examen des prospectus, notre droit d'«opting out», on l'exerce à 25 % du temps. Donc, là-dessus, les autres juridictions pensent la même chose, et donc on fait front commun par rapport à une telle proposition.

L'enjeu est peut-être plus sur le poids d'une juridiction par rapport à une autre, et c'est évident que l'Ontario a plus de ressources que toutes les autres commissions qui sont là. Par ailleurs, les discussions, les groupes de travail, on y participe, on prend notre place. Plusieurs sujets remontent pour discussion au niveau des présidents des commissions, donc j'ai participé, quoi, à une par mois depuis que je suis arrivée, à deux où on est présent physiquement tout le monde, et les sujets se débattent. Parfois, la Colombie-Britannique et l'Alberta pensent comme le Québec puis contre l'Ontario, puis des fois c'est l'Ontario... C'est pour ça que c'est important qu'on soit présent à ces forums-là, parce qu'on discute de comment on va encadrer certains marchés. Donc, si on a des problèmes, une vision, c'est en discutant là qu'il faut qu'on l'impose, et souvent les caractéristiques du marché ne sont pas... Il y a beaucoup de choses qui sont semblables. L'idée, c'est d'arriver à faire une norme où, les éléments qui nous importent, on les retrouve à l'intérieur de la norme qui va être adoptée.

Mme Leblanc: Merci.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Une dernière question au député d'Abitibi-Ouest avant de passer à la phase de tirer quelques conclusions de ces deux jours d'audience. À moins que vous ayez d'autres questions, je serais très heureux de... Allez.


Programmes d'éducation des investisseurs

M. Gendron: Moi, j'avais un court commentaire sur une question de la députée de Beauce-Sud. Je suis plutôt d'avis, moi, que vous avez raison de croire que les participations aux comités ou aux échanges avec les autres commissions de valeurs mobilières, c'est plus un moyen, une façon de faire votre travail qu'une mission de la Commission des valeurs mobilières du Québec. Alors, moi, j'aurais été très surpris de voir ça, là, dans la mission. Je trouve que vous avez la bonne formule de ne pas le mettre là, ce n'est pas une mission. Mais, logiquement – puis je pense que vous avez bien répondu – que la Commission des valeurs mobilières du Québec soit associée aux partenaires canadiens pour avoir des liens, d'une part, et être au fait des échanges puis de tout ce qui permet d'exercer mieux votre fonction de régulation des contacts avec les autres, ça ne nuit pas. Je ne souhaiterais pas, moi, que vous les multipliiez. Par exemple, ce n'est pas parce qu'il y a 25 comités canadiens qu'il faut nécessairement participer à toutes ces réunions et à tous ces forums.

La question que je veux poser, c'est: Dans les objectifs institutionnels – je crois, encore là, avec raison – vous avez insisté, sans trop cependant le définir... Puis ce n'est pas anormal, on ne peut pas tout faire. Puis, moi, en passant, encore un petit commentaire, je préfère vraiment «investisseur» plutôt qu'«épargnant» parce que, d'abord, c'est plus moderne, ça correspond bien plus à la réalité d'aujourd'hui. Quand on est dans le secteur que vous êtes comme Commission des valeurs mobilières, quand on est avec la loi de modernisation des intermédiaires de marché, laisser trop voir la notion que, oui, si vous êtes dans ce grand club là, c'est plus avec la notion d'«épargnant», qui est une notion de plus grande sécurité des mouvements de capitaux, je trouve que c'est de tricher un peu avec la réalité. Moi, je le dis comme je pense, là. Quand tu joues à ça, t'es un investisseur, puis il ne faut pas avoir peur des mots.

J'aime bien mieux faire une éducation – c'est pour ça que j'arrive à ma question – et accentuer l'éducation, mais des investisseurs, parce que c'est ça qu'ils font. Et là, là-dessus, ma question très précise, c'est plus sur la forme, parce que j'ai entendu, vous avez dit: Écoutez, on va demander qu'ils viennent sur notre site Internet, puis tout ça. Mais, moi, je voudrais plus que ça parce qu'il y a vraiment un effort important à faire pour que la Commission des valeurs mobilières du Québec mette ce sujet-là d'un renforcement de l'éducation des investisseurs, compte tenu des dangers qui grandissent, puis là on repart avec l'exemple de ma revue tantôt, puis ainsi de suite.

Alors, un petit plus précisément, au-delà de votre site Internet, est-ce que vous avez l'intention de dégager un peu de ressources, de dégager un peu de programmes et de réflexion pour que vous ayez quelques programmes vraiment adaptés qui permettraient de pouvoir dire: On progresse au niveau de l'éducation des investisseurs?

Mme Crépin (Carmen): C'est évident. On veut utiliser tous les moyens qui sont possibles. L'année dernière, dans le cadre de la Semaine nationale d'éducation des investisseurs, il y a des séminaires qui ont été organisés dans certaines villes au Québec. À chaque fois, on avait donc des conférenciers qui rejoignaient plusieurs groupes cibles.

On veut continuer à travailler à essayer de cibler des groupes: l'âge d'or, les jeunes. On vient de lancer notre campagne pour le secondaire; on va aller chercher 90 000 jeunes. La capsule qu'on a faite pour ça, on peut peut-être l'adapter ou au moins en penser une autre pour d'autres clientèles. On voudrait aussi, dans certains programmes qui sont dispensés, que nos employés puissent participer à des forums, à des tribunes. Oui, on a déjà amorcé des choses.

Quand on dit, dans notre objectif, qu'on veut accentuer les efforts, c'est qu'on veut en faire plus. On veut donc cibler. Là, on a vraiment ciblé les personnes âgées et les jeunes: les jeunes parce que c'est important pour l'avenir; les personnes âgées, bien, c'est une clientèle qui est fortement sollicitée. C'est important de leur fournir de l'information. On travaille beaucoup avec des organismes qui dispensent de la formation. On a des demandes parfois pour s'associer à eux. Les conditions qu'on pourrait mettre pour s'associer à un organisme qui dispense de la formation... On dit: Bon, si vous voulez bâtir des programmes pour des groupes cibles qu'on trouve intéressants, on va travailler avec vous, mais on va approuver les contenus de formation que vous donnez, on va regarder par qui vous les faites donner. On peut s'impliquer éventuellement, nous aussi, là-dedans. Alors, oui, on veut en faire plus.

M. Gendron: Merci.

M. Dubé (Denis): Même, M. Gendron, pour compléter, on a publié, depuis un an, à peu près neuf nouvelles brochures qui s'adressent aux investisseurs. On a envoyé ces brochures-là à l'ensemble des membres de l'Assemblée nationale parce que vous êtes sollicités par vos électeurs, et on vous en a fait part pour que vous puissiez transmettre cette information-là à vos électeurs de façon à ce que les gens soient mieux outillés et mieux informés.

Le Président (M. Simard, Richelieu): D'autres questions? Mme la députée de La Pinière.


Délais de traitement des dossiers d'enquête

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup. Je voudrais savoir comment fonctionne actuellement votre système d'enquête et quelles sont les améliorations que vous souhaiteriez y apporter. Par exemple, vous rendez des décisions dans quels délais? Vous avez combien de personnes qui siègent comme membres du tribunal ou qui sont dans le processus de traitement des plaintes? Et à quelle fréquence est-ce que les membres siègent pour traiter ces dossiers-là?

Mme Crépin (Carmen): Au niveau des effectifs qui sont aux enquêtes, il y a actuellement, au niveau inspection et enquêtes, 16 postes. Dans notre nouveau plan d'effectif, on veut en ajouter 18. C'est donc dire la priorité...

Mme Houda-Pepin: Plus que doubler.

Mme Crépin (Carmen): ...oui, qu'on attache à l'«enforcement». Au niveau des délais, bon, je l'ai dit tantôt, on veut, au niveau des enquêtes, peut-être en cibler quelques-unes et aboutir, donc intensifier nos efforts pour obtenir des résultats rapidement. Ceci dit, chaque cas est fonction de la complexité des dossiers et de la preuve à recueillir.

(16 heures)

Pour ce qui est de la fonction tribunal, qui concerne vraiment la Commission comme telle, je vous dirais qu'il y a des réunions régulières, deux par semaine, et qu'au besoin, lorsqu'il y a nécessité de convoquer le tribunal, on peut le faire sur une base ad hoc.

Mme Houda-Pepin: Ça prend combien de temps en moyenne pour traiter un dossier au niveau de l'enquête? En moyenne.

Une voix: Peut-être qu'on pourrait demander au directeur des enquêtes...

Mme Crépin (Carmen): Des enquêtes de vous donner une petite moyenne.

M. Lorrain (Jean): Il n'y a pas de normes, on ne peut pas répondre en fonction d'une moyenne parce que ce serait tricher sur la réalité des dossiers qu'on a à traiter. Un dossier qui peut être très complexe peut être mené, mettons, en six mois si on est chanceux et qu'on trouve l'information aisément. Mais même un dossier facile, lui, va faire le contraire, il va prendre deux ans ou trois ans, et ça peut être l'inverse. Donc, c'est difficile de vous traduire ça dans un délai précis et avec une moyenne qui vous reflète correctement le travail qui est effectué au niveau des enquêtes.

Mme Houda-Pepin: Mais est-ce que les dossiers sont majoritairement traités dans un délai de six mois, dans un délai d'un an, la majorité des dossiers qui constituent pour vous la plupart des plaintes que vous recevez?

M. Lorrain (Jean): Il faut distinguer ce qui est plainte et ce qui est dossier d'enquête, parce qu'une plainte, ça peut être simplement un dossier à traiter de façon à régler un problème qui peut intervenir, par exemple, entre un intermédiaire de marché et un investisseur. La Commission aura un programme à cet égard-là au niveau du traitement des plaintes.

Lorsqu'on se transporte sur le terrain des enquêtes à proprement parler, écoutez, normalement, les dossiers prennent en moyenne entre six et huit mois, et le plus long, ça va aller à deux ans, deux ans et demi, trois ans, ça dépend. Mais, quand on parle de dossiers qui sont aussi longs que ceux-là, il faut comprendre qu'on est dans un domaine où, au niveau juridique, on est dans le domaine de la preuve documentaire, c'est-à-dire qu'on doit ramasser énormément de documents, les analyser, obtenir les interrogatoires des gens. Donc, c'est un processus qui est nécessairement long. On n'enquête pas, si vous voulez... Ce n'est pas comme des voies de fait sur un individu. Si c'est un événement très isolé, est-ce qu'il y a un témoin? On rencontre rapidement le témoin et on a les éléments de preuve suffisants. Dans le domaine, je n'appellerais pas ça du crime économique mais donc de la fraude à la Loi sur les valeurs mobilières, on est nécessairement dans un domaine technique et très documentaire et donc beaucoup plus long à enquêter.

Mme Houda-Pepin: Mais est-ce que, ces délais-là, dans votre nouvelle vision stratégique, vous allez tenter de les réduire? Parce que ça me semble quand même des délais assez longs pour rendre justice.

M. Lorrain (Jean): Je dirais que c'est une priorité de pouvoir prendre les dossiers et de pouvoir les amener le plus rapidement possible devant les tribunaux ou devant la Commission des valeurs mobilières de façon à ce que, lorsque ce dossier-là est traité devant la Commission ou devant le tribunal, il ait un impact publicitaire, si on veut, ou un impact sur l'information donnée aux gens et sur les mesures de prudence à apporter. Il y a un élément de formation, avec ces dossiers-là, pour réprimer les infractions. Alors, oui, c'est certain que c'est une volonté de faire que les dossiers arrivent beaucoup plus rapidement.

Encore une fois, par ailleurs – et je pense que je rejoins peut-être un des commentaires qui ont été faits préalablement – on ne doit pas non plus procéder à une enquête indûment rapidement, au risque de se retrouver avec un dossier incomplet qui risque d'être rejeté par les tribunaux. Il y a un minimum de prudence également à cet égard-là.

Mme Houda-Pepin: Mais j'imagine que, dans le processus de traitement, là, je ne sais pas dans les détails comment ça marche, mais, lorsque vous recevez une plainte, la première chose, c'est de vérifier s'il y a un minimum de fondement, si vous êtes capables de trouver justement la preuve documentaire pour appuyer votre dossier, et l'étape d'enquête suit. S'il y a un minimum de fondement, si vous avez la documentation, si vous avez, autrement dit, un cas solide, vous allez plus loin, sinon vous allez aviser les gens, le plaignant que sa cause ne peut pas aller vers une enquête. C'est bien ça?

M. Labelle (Jacques): Si vous permettez, de façon à rétablir juste un tout petit peu, pour voir la vitesse d'action de la Commission, c'est que, dans les dossiers d'enquête, comme M. Lorrain vous l'a souligné, c'est très difficile à établir, un temps moyen pour compléter le dossier, sauf qu'on peut regarder de ce bout-ci de la lorgnette, c'est-à-dire combien de temps est-ce que ça nous prend pour initier le dossier d'enquête. Dès que la Commission est informée d'éléments qui lui font penser qu'il peut y avoir infraction à la loi, le dossier est traité immédiatement. Il n'y a pas de dossiers qui sont mis en attente et qui ne seront regardés que dans un mois ou que dans deux mois, il y a une réaction immédiate, de façon à voir si l'infraction ou le geste reproché est en train de se commettre, de façon à permettre à la Commission de rendre une décision, à ce moment-là, qui est une décision pour interdire de continuer l'infraction, qui est l'équivalent finalement d'une injonction obtenue par un tribunal, si on s'aperçoit que c'est des gens qui ont investi de l'argent et que l'argent est en train de disparaître, de permettre à la Commission de faire un blocage de fonds, qui est l'équivalent d'une saisie émanant d'un tribunal. Donc, les dossiers sont traités immédiatement lorsqu'on est au courant.

Et, si, effectivement, l'infraction qu'on reproche est une infraction qui s'est passée il y a deux ans, pour ce dossier-là, il peut y avoir un délai entre le moment où je vais effectuer vraiment mon enquête pour cueillir la preuve pour aller devant le tribunal... C'est sûr que la priorité va toujours à l'infraction qui est en train de se commettre.

Mme Houda-Pepin: Mais, pour revenir aux indicateurs de performance, peut-être qu'un des indicateurs ce serait de réduire les délais, ce serait de traiter les demandes rapidement, ce serait de les traiter plus efficacement, en termes de consolider la crédibilité ou de rétablir, comme on a dit, la crédibilité de la Commission.


Préparation du plan d'action

Je voudrais revenir à votre plan d'action en cours de préparation. Ce plan d'action, il va se faire par direction. Est-ce qu'il y a des directions qui vont être modifiées à l'interne? Vous avez actuellement sept directions et 17 services. Comment va se faire, à l'interne, la restructuration, si on peut dire, en fonction de la nouvelle vision, des nouvelles orientations?

Mme Crépin (Carmen): Elle est axée sur le fait que les directions qui sont en place demeurent. Ce qu'on veut, c'est un plan d'action corporatif, mais arriver à pouvoir traduire ce plan d'action corporatif en actions ponctuelles pour chacune des directions.

Si on prend la direction de la conformité, là, c'est sûr qu'on peut penser à dire: Bien là on travaille sur les délais pour traiter les enquêtes, alors qu'au marché des capitaux on peut travailler, par exemple, plus sur les délais pour viser un prospectus.

Mme Houda-Pepin: O.K. Vous avez actuellement un budget de l'ordre de 34 000 000 $. On vient d'entendre que vous allez plus que doubler les effectifs au niveau de l'enquête. Vous comptez sur des revenus de quoi en 2000-2001?

Mme Levasseur (Linda): Quand on parle, d'abord, d'un budget de 34 000 000 $, le 34 000 000 $, ce sont les revenus.

Mme Houda-Pepin: Ce sont les revenus, oui, c'est vrai.

Mme Levasseur (Linda): Le budget 1999-2000 établit le niveau de dépenses à 22 000 000 $.

Mme Houda-Pepin: O.K.

Mme Levasseur (Linda): Actuellement, dans le 22 000 000 $, il y a autour de 56 % de dépenses qui sont constituées des salaires et avantages sociaux. Ce budget-là prévoyait, à la toute fin de l'année, 198 ressources – c'est avant qu'on fixe notre plan d'effectif provisoire – mais avec une entrée de ressources graduelle. On est à préparer, on est à faire l'exercice des prévisions budgétaires 2000-2001. Quant à vous dire exactement à combien se situeront les prévisions au chapitre des traitements et avantages sociaux, l'exercice n'est pas complété et, encore une fois, ce ne sera pas une année où les effectifs seront en place toute l'année.

Mme Houda-Pepin: Mais vous prévoyez une augmentation de combien en pourcentage du budget actuel?

Mme Levasseur (Linda): Le plan d'effectif qu'on est à regarder amènerait notre niveau de ressources autour de quelque 240 ressources. En ce moment, on est à 152 effectifs réguliers. Donc, il reste quand même...

Mme Houda-Pepin: Mais, en termes de budget, en termes de masse salariale, ça représente quoi exactement?

Mme Levasseur (Linda): Bien là il faudrait faire le calcul basé sur notre niveau de rémunération actuel. Encore là, on ne sait pas si ce niveau de rémunération là bougera. Donc, on n'a pas fait d'extrapolation.

Mme Houda-Pepin: Et vous n'avez pas un ordre de grandeur.

Mme Levasseur (Linda): Bien, je peux vous le faire.

(16 h 10)

Mme Houda-Pepin: Oui. Je vais vous laisser, là-dessus, trouver la réponse.


Outils législatifs et réglementaires requis

J'ai une autre question par rapport à la réglementation, qui est un des objectifs institutionnels que vous vous êtes fixés. Comme vous êtes un organisme qui vit dans le monde – c'est le cas de le dire parce qu'il y a beaucoup d'organismes qui gravitent et avec lesquels vous êtes en interaction sur le plan mondial – donc il y a un volet international à la réglementation puis il y a un volet proprement québécois. Quels sont les outils législatifs où vous êtes en demande par rapport au gouvernement pour pouvoir faire votre travail, remplir la mission que vous vous êtes donnée?

Mme Crépin (Carmen): On a besoin – on pourra en reparler; dans le projet de loi n° 57, c'était déjà sur la table – de pouvoir disposer de pouvoirs réglementaires pour encadrer certains secteurs d'activité.

Mme Houda-Pepin: Comme par exemple...

Mme Crépin (Carmen): Donc, par exemple: faire enquête dans le cadre de l'exécution d'un accord intervenu avec une personne ou un organisme du Québec ou de l'extérieur du Québec; pour les placements internationaux, donner à la CVMQ le pouvoir d'accepter que certains documents ou attestations prévus à la Loi sur les valeurs mobilières qui sont adoptés par une autre autorité législative puissent être acceptés si la CVMQ estime que le contenu, la valeur de l'information qu'ils contiennent est équivalente à celle que prévoit notre loi; se fonder sur l'examen d'un dossier fait par une autre autorité dans le cadre des accords de concertation, comme nous avons maintenant avec les ACVM; et également pouvoir échanger des renseignements avec d'autres régulateurs dans le cadre d'enquêtes qui pourraient avoir une portée à l'extérieur du Québec.

Mme Houda-Pepin: Donc, ces objectifs que vous vous donnez sur le plan législatif, en fait, c'est des demandes que vous formulez au législateur, le projet de loi n° 57 ne vous les offre pas entièrement.

M. Labelle (Jacques): Le projet de loi n° 57 offre la plupart des moyens requis par la Commission pour, selon nous, bien exercer nos fonctions. Comme on a tenté de vous l'expliquer depuis deux jours, notre préoccupation, c'est et on espère que ça restera toujours l'investisseur, donc, dans le projet de loi n° 57. Et ce n'est pas une chose nouvelle, c'est une chose qui existait déjà. Donc, le projet de loi n° 57 contient déjà des dispositions à cet effet-là. C'est pourquoi on avait recommandé, à l'époque, d'inclure une possibilité pour la Commission d'imposer des amendes administratives contre des individus de façon à avoir des recours qui soient beaucoup plus rapides que devant les tribunaux. C'est pour ça qu'on a demandé aussi la possibilité, dans certaines circonstances, de pouvoir intenter des recours en matière civile pour et au nom de l'investisseur de façon à ce que l'investisseur puisse être indemnisé d'un dommage subi par suite d'une faute commise dans le domaine des valeurs mobilières.

Donc, on pense que, oui, le projet de loi n° 57 contient les grands éléments dont on peut avoir besoin. C'est certain que ce projet de loi là a tout de même deux ans environ d'âge, qu'il devra être aussi repensé pour être certain qu'on couvre la totalité des besoins de la Commission pour remplir sa mission, mais, généralement, c'est assez complet.

Mme Houda-Pepin: Est-ce que j'ai le temps de poser une autre petite question?

Le Président (M. Simard, Richelieu): Vous avez épuisé votre temps, mais je vous accorde avec grand plaisir une dernière question.


Avenir de la Bourse de Montréal et de NASDAQ

Mme Houda-Pepin: Ah! c'est gentil. Merci beaucoup. Je voudrais revenir sur NASDAQ. Donc, c'est une Bourse new-yorkaise, une Bourse électronique qui est courtisée hautement et par la Bourse de Montréal et par la Bourse de Toronto, et je voudrais avoir un peu votre réflexion là-dessus, quel est l'avenir de la Bourse de Montréal par rapport à NASDAQ. Est-ce qu'il y a une possibilité de partenariat ou est-ce que vous pensez que le TGV va passer ailleurs et qu'on va le regarder de loin?

Mme Crépin (Carmen): Écoutez, je ne peux pas vraiment me placer à la place de la Bourse de Montréal pour savoir si elle a envie de conclure une alliance avec NASDAQ, mais...

Mme Houda-Pepin: De toute évidence oui, puisqu'il y a une mission qui est allée à New York pour rencontrer le...

Mme Crépin (Carmen): Cela n'implique pas la Commission des valeurs mobilières qui aura, comme tribunal, à se prononcer sur la reconnaissance de...

Mme Houda-Pepin: Non, je sais. Je m'adresse à vous comme experte du domaine financier qui réglemente aussi la Bourse de Montréal.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Une experte indépendante. Nous avons la présidente de la CVMQ, et ses frais de consultation...

Mme Crépin (Carmen): J'ai perdu votre question.

Mme Houda-Pepin: NASDAQ et la Bourse de Montréal.

Mme Crépin (Carmen): O.K. Écoutez, je pense que ce qu'il peut être intéressant de considérer, c'est que, dans le cadre réglementaire, donc dans l'énoncé qui a été publié par les ACVM concernant les SNA, ce cadre-là repose sur le fait qu'on estime qu'une compétition qui s'exercerait sur le marché canadien par une autre forme de marché... L'énoncé réglementaire est fait pour dire: En même temps qu'on pense que la compétition peut être bonne pour les investisseurs sur le marché, il faut quand même s'assurer qu'en ouvrant la porte à de la compétition on ne produit pas d'effet négatif sur le marché. Donc, en ce sens-là, que la compétition vienne de NASDAQ ou d'un SNA, c'est probablement les modalités techniques d'exercice d'activités sur le marché qui seront différentes.

Mais, dans ce contexte-là, donc, si un SNA ou NASDAQ est intéressé à venir faire des activités au Québec, pour l'instant, par exemple, comme NASDAQ est une Bourse, un SNA, le cadre prévoit qu'elle doit choisir: se faire reconnaître soit comme une Bourse parce qu'elle exerce une activité de marché qui ressemble à celle d'une Bourse, c'est-à-dire qu'elle peut inscrire et exécuter des transactions, ou, si c'est simplement un système électronique, on parle d'exécution de transactions, donc d'une fonction qui s'apparente plus à celle d'un courtier qui va être membre d'une Bourse.

Mme Houda-Pepin: Merci. J'ai eu du plaisir à échanger avec vous.


Remarques finales


M. Sylvain Simard, président

Le Président (M. Simard, Richelieu): Merci beaucoup. Merci aux membres de la commission. Nous sommes donc arrivés au terme de nos travaux, et j'aimerais rappeler un certain nombre de choses, d'abord rappeler ce que nous avons fait au cours des deux dernières journées. Je pense que la présentation que vous nous avez faite hier, une présentation complète, nous a permis à tous ici, de ce côté-ci, de mieux connaître le fonctionnement de la Commission des valeurs mobilières. La Commission des valeurs mobilières, Mme la députée de La Pinière, je pense, tout à l'heure faisait remarquer qu'elle a actuellement une publicité télévisée. Je pense que, pour le grand public, souvent c'est une première perception d'une institution assez discrète, feutrée. D'ailleurs, personne ne vous demande de lancer des jeux-questionnaires et de faire de la publicité comme si vous étiez une boîte de savon. Mais il est bon que la population connaisse davantage votre fonctionnement.

Il était, en tout cas, essentiel que la commission des finances publiques de l'Assemblée nationale, que les parlementaires connaissent mieux le fonctionnement de vos activités, et je pense que la présentation que vous nous avez faite, les documents que vous nous avez transmis au cours des dernières semaines nous ont d'abord permis cela, une meilleure connaissance des enjeux qui se posent à votre Commission, de ses moyens, de ses objectifs, et vous l'avez présentée, je pense, avec beaucoup de transparence. Vous avez répondu, je crois, sans langue de bois – en tout cas, nous ne l'avons pas décelé dans la plupart de vos réponses – avec une grande rigueur, un professionnalisme de la part de tous ceux qui sont ici autour de la table, et je pense que les membres de cette commission vous savent gré de cette ouverture et de cette possibilité pour nous d'avoir accès vraiment directement à vos préoccupations, à vos moyens, à vos objectifs.

(16 h 20)

Je ne voudrais pas tirer de conclusion définitive de ce que vous avez dit, de ce qui ressort des commentaires tant du parti de l'opposition que du parti gouvernemental durant ces deux derniers jours, mais il y a quelques consensus qui se sont manifestement dégagés. Cette rigueur à laquelle vous vous identifiez vous-mêmes, nous y tenons plus que tous, sans doute, parce que nous sentons bien que la protection du public, et j'entends ici autant le public investisseur que les sociétés qui vont sur le marché pour financer la relance de l'économie québécoise... Cette rigueur est une nécessité absolue, et il faut continuer et même améliorer votre façon d'appliquer cette rigueur-là.

On a parlé de crédibilité comme étant la clé essentielle de votre reconnaissance et de l'efficacité de votre travail. Je pense qu'il faut conclure aujourd'hui que les parlementaires, ici, tiennent à ce que la Commission des valeurs mobilières du Québec, si elle ne l'est déjà, devienne un modèle de rigueur, un modèle d'efficacité dans l'application de la réglementation, qu'elle ait cette crédibilité qui est la clé, qui est l'essence même de son existence et de son fonctionnement. Il faut que le secteur financier puisse s'appuyer sur cette crédibilité, et cette crédibilité ne peut venir que par l'extrême rigueur que vous avez à appliquer votre loi et à faire face aux défis nouveaux que pose un marché en pleine ébullition, en pleine transformation. Donc, il s'agit de maintenir la confiance, il s'agit de vous doter aussi des instruments de gestion qui vous permettent de faire face à ces défis nouveaux.

Nous avons abordé, et vous avez vu avec quelle compréhension de ce côté-ci, vos difficultés par rapport aux problèmes du marché, quant à vos problèmes de main-d'oeuvre, de plan d'effectif. Nous comprenons très bien vos problèmes. Vous avez aussi compris dans quel contexte se situent évidemment vos requêtes. Mais il n'en demeure pas moins que vous avez manifestement obtenu, de ce côté-ci, une oreille très compréhensive pour ce qui est de votre plan d'effectif, pour ce qui est des exigences que pose actuellement, au plan de la compétence, le recrutement d'un personnel qualifié qui justement puisse faire face à ces exigences de rigueur et de crédibilité. De ce côté-ci, je pense qu'il y a eu suffisamment d'échanges et de convergence pour souhaiter... Et je pense que tout le monde se ralliera à cette proposition. Si elle ne sied pas, vous me le direz.

J'ai l'intention de communiquer avec le vice-président au cours des prochaines semaines pour qu'un comité directeur se penche sur l'hypothèse de rédiger un certain nombre de recommandations, de conclusions de ces deux jours de mandat d'initiative concernant la Commission des valeurs mobilières du Québec, et je souhaiterais qu'une séance de travail nous permette d'arriver à des recommandations ou, en tout cas, à des conclusions communes. Si ce n'est pas possible, nous en prendrons bonne note et acte. Mais je souhaiterais que, au-delà du simple dialogue qui s'est instauré aujourd'hui, vous ayez peut-être une position de la commission des finances publiques de l'Assemblée nationale sur certains des grands enjeux qui ont été évoqués ici au cours des deux dernières journées.

Enfin, je veux remercier les membres de la commission, de chaque côté, de la civilité et de la parfaite correction dans lesquelles tous ces débats se sont déroulés. Je vais inviter évidemment ceux qui le souhaitent, à partir de maintenant, à dire quelques mots de conclusion ou de remerciement. Personnellement, en tout cas, je veux vous remercier et souhaiter que... Évidemment, nous ne vous convoquerons pas au cours des six prochains mois, rassurez-vous, mais nous serons très heureux de vous revoir, le cas échéant. Est-ce que d'autres membres de la commission souhaitent dire quelques mots?


Mme Monique Jérôme-Forget

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, je veux remercier également tout le monde de s'être déplacé, d'avoir préparé des documents de façon si professionnelle et d'avoir pris autant de soin pour nous présenter l'agenda, les objectifs, les problèmes et les priorités finalement qu'il nous a démontrés. Et je dois vous dire que, à vous avoir entendus durant la dernière journée et demie, vous avez souvent parlé d'une expression d'ailleurs que je ne connaissais pas, l'«enforcement», c'est-à-dire d'être sûr qu'il y a un suivi sur des enquêtes, ou des plaintes, ou des choses à corriger au niveau de la Commission, et pour nous il est clair que c'est certainement une priorité et c'est clair que c'est une priorité pour à peu près tout le monde en face de vous. Nous avons tous trouvé que c'était là probablement le point le plus névralgique de la Commission des valeurs mobilières. Et je dois vous dire, madame, qu'après six mois de travail vous vous êtes bien tirée d'affaire. Vous étiez bien préparée et vous avez su répondre à nos questions. Alors, je vous félicite.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Merci beaucoup. Moi, j'inviterais maintenant celui qui a servi, en fait, vous l'avez compris, de porte-parole du côté gouvernemental, le député d'Abitibi-Ouest, peut-être à faire quelques commentaires de fin de séance.


M. François Gendron

M. Gendron: Ah bien, très, très simplement, vous, Mme la présidente, et toute votre équipe, moi également, je veux vous remercier du fond du coeur, parce qu'on a passé deux journées où on sentait qu'il y avait cette volonté de répondre très correctement, très franchement, avec beaucoup de préparation – ça s'est senti – de professionnalisme, de distinction. Alors, je pense que ça a été plaisant de travailler avec vous. Et, un peu comme la députée de Marguerite-Bourgeoys vient de le faire, c'est évident qu'elle est toute nouvelle, cette nouvelle présidente, mais elle a du niveau, du gabarit, et on a senti qu'elle était entrée vraiment dedans. Alors, je vous souhaite bonne chance, et je pense que la volonté que, vous, vous avez, ainsi que l'ensemble des membres de la Commission des valeurs mobilières du Québec, d'en faire une où on n'aura pas besoin d'inscrire dans sa mission que c'est une chef de file, c'est ce que je vous souhaite.

Mme Houda-Pepin: Si vous permettez, M. le Président, je voudrais également remercier toute l'équipe qui accompagne la présidente. Je sais que c'est un travail rigoureux qui a été fait. Je vous remercie parce qu'on a appris de vous, aujourd'hui, et c'est ça qui est l'essentiel. Et on va attendre votre plan stratégique.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Alors, sur ces dernières paroles, je vais simplement ajourner nos travaux sine die et vous remercier.

(Fin de la séance à 16 h 27)


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