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Version finale

36e législature, 1re session
(2 mars 1999 au 9 mars 2001)

Le jeudi 25 mars 1999 - Vol. 36 N° 4

Poursuite du débat sur le discours sur le budget


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Table des matières

Journal des débats


(Quinze heures dix-neuf minutes)

Le Président (M. Simard, Richelieu): La commission des finances publiques est réunie afin de poursuivre le débat sur le discours sur le budget. Je demande au secrétaire d'annoncer les remplacements.

Le Secrétaire: Alors, oui, M. le Président, j'informe les membres de la commission que M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce) remplace Mme Houda-Pepin (La Pinière) et M. Lamoureux (Anjou) remplace Mme Leblanc (Beauce-Sud).

(15 h 20)

Le Président (M. Simard, Richelieu): Pour ce qui est du temps, vous le savez, il nous reste, à partir de maintenant, 3 h 45 min à faire au débat. Conformément aux usages et aux règlements, puisqu'il n'y a pas eu de consensus pour agir autrement, nous allons débattre jusqu'à 18 heures et où nous ajournerons et reprendrons nos travaux mardi matin pour l'heure supplémentaire qui fait partie des exigences de la Chambre. Alors, à ce moment-ci, je crois que la partie ministérielle était celle qui devait prendre la parole. Alors, je demanderais au député de La Prairie de prendre la parole.


Discussion générale (suite)


Mesures pour la relance de Mirabel

M. Geoffrion: Merci, M. le Président. M. le ministre, le 9 mars dernier, parlant de l'atteinte du déficit zéro, vous avez dit qu'après 40 ans il n'était pas trop tôt pour ouvrir un nouveau chapitre de notre vie économique. Ce constat, j'ai le goût de l'appliquer au sujet que je veux aborder avec vous aujourd'hui en disant: Après 25 ans, il n'était pas trop tôt pour ouvrir un nouveau chapitre à Mirabel, et ce nouveau chapitre, il passe par la création de la zone de commerce internationale de Montréal à Mirabel, Mirabel où se vit toujours, vous l'avez souligné à juste titre, un malaise profond résultant de tragiques erreurs de planification de la part du gouvernement central. Mirabel n'est certes pas un moment glorieux de notre passé récent, et nous devons nous réjouir de la création de cette première zone franche de commerce international au Québec. Cette bonne nouvelle a d'ailleurs été bien accueillie par les chroniqueurs économiques. On a particulièrement insisté sur la proximité de Plattsburg où, en 1996, l'aéroport militaire a été converti en zone franche. On en parle notamment dans Le Devoir du 15 mars dernier: Mirabel concurrencera Plattsburg . Je vous cite: «Mirabel devra donc mettre les bouchées doubles pour faire sa niche, mais elle ne devrait pas éprouver trop de difficultés», selon Sylvain Lefebvre, professeur associé au département de géographie de l'UQAM, spécialiste des zones franches à l'échelle mondiale. Je le cite: «Je ne penserais pas que Mirabel ait de la difficulté à prendre son envol de par la présence de Plattsburg, qui n'est pas trop loin. Ainsi, on prévoit que toute l'économie québécoise va profiter de cette nouvelle zone de commerce international grâce notamment aux avantages fiscaux qui seront consentis à des entreprises qui s'installeront dans cette zone.»

J'aimerais savoir, M. le ministre, comment va se faire, par ailleurs, l'arrimage avec Montréal, notamment avec les autorités portuaires. Autrement dit: Quels sont les mécanismes qui ont été prévus pour éviter de concurrencer Montréal?

M. Landry: M. le Président, cette sombre histoire de Mirabel sera sûrement étudiée par les historiens de l'économie – et c'est déjà commencé – comme un des grands fiascos infligés par le gouvernement central à l'économie du Québec.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Il y a des thèses de doctorat qui ont été faites là-dessus.

M. Landry: Exactement, dont le docteur Elliot Feldman, de Harvard, qui a même comparé – le docteur Feldman est Juif, bien entendu – ça à l'Exode, et il a comparé ça aussi, je crois, à la déportation des Acadiens. Mais c'est quand même 10 000 personnes expropriées, 3 000 familles, 97 000 acres, l'équivalent des trois quarts de l'île de Montréal, 30 fois le territoire de l'aéroport de Dorval. Puis tout ça, c'est réduit de 97 000 acres à 17 000 acres, dont 11 000 sont reloués à des agriculteurs. Alors, juste en termes de chiffres, c'est un gâchis incroyable.

Sauf que, étant d'origine acadienne moi-même, je n'admets quand même pas qu'on compare ça à la déportation des Acadiens, non, non, non. Les grands brûlés, puis les églises, puis les maisons, puis les hommes d'un bord, les femmes de l'autre, puis lancés sur les quatre mers, puis ils sont revenus à pied. Mes ancêtres sont revenus à pied, pensez-vous. Mme Maillet a écrit Pélagie la charrette mais, au moins, eux autres avaient une charrette. Alors, non. D'ailleurs, le sous-ministre associé, Marcel Leblanc, n'aimait pas non plus cette comparaison. Je ne sais pas si Marcel est avec nous, aujourd'hui.

Quoi qu'il en soit, c'est un gâchis et qui s'inscrit dans plusieurs autres – et certains ont été évoqués à cette commission par notre critique de l'opposition, d'ailleurs – les grands gâchis qui ont fait un tort invraisemblable à l'économie du Québec, pas irréparable, mais il fallait être fait fort pour s'en sortir. C'est «National Policy» John A. MacDonald, qui nous a coupé notre commerce Nord-Sud et qui a fait que le canal du Richelieu, qui était une voie pour aller de Montréal à New York pour le commerce et l'industrie, a servi, 75 ans plus tard, 100 ans plus tard, aux voiliers des classes moyennes pour les faire aller au lac Champlain. Ce n'était pas ça, l'idée. Alors, le Canada nous a sevré de notre marché du Sud, et on a perdu, entre 1865 et 1935, la moitié de la population du Québec.

Deuxième grand gâchis – parce qu'ils ne se guérissent pas puis ils en font un de façon récurrente – la ligne Borden, notre collègue l'a évoqué, la ligne Borden qui, dans une fédération, établit, ce qu'on n'a jamais vu, une frontière économique intérieure. C'est sans précédent dans l'histoire humaine. Ça a été la canalisation du Saint-Laurent, pas en soi, mais parce qu'elle n'a pas été compensée. Montréal a un avantage de situation extraordinaire: Montréal est en aval des rapides de Lachine. Alors, Montréal s'industrialise largement à cause de cet accident géographique: on fait sauter l'accident géographique. Disons que c'était nécessaire pour la prospérité de la région des Grands Lacs; ne soyons pas mesquins. Mais, si on a fait sauter l'accident géographique, il eut fallu nous compenser de manière industrielle. Au lieu de faire ça, ils nous ont envoyé la péréquation. Ça revient toujours à cette espèce d'aide sociale intraétatique.

Et, enfin, un des derniers grands gâchis en lice – et j'espère qu'il n'y en aura plus parce qu'on va faire ce qu'il faut faire avant qu'ils nous en infligent un autre – c'est Mirabel. Parce que Mirabel, indépendamment des souffrances humaines dont j'ai parlé, c'est la déstructuration du pied des Laurentides, c'est la déstructuration de la zone entre les Laurentides et l'île de Montréal, pour des paramètres qui ne peuvent relever que de la fantaisie ou de l'agressivité anti-Québec. Ce que certains auteurs disent, c'est que le Québec, avec les grands travaux, alors La Manic et Bersimis, avait frappé les imaginations populaires, et ces grands travaux se sont inscrits au coeur de l'imaginaire québécois. Il y a un fin fin à Ottawa qui a dit: «Me too.» Ce qu'il a trouvé, c'est Mirabel. Alors, le résultat a été calamiteux dès le départ parce que Heathrow, qui est un des plus grands aéroports de la planète, 60 000 000 de voyageurs par an aujourd'hui, est plus petit que Dorval. Alors, comment un farfelu a pu penser, il y a 30 ans dans un bureau à Ottawa, qu'on allait faire un aéroport de cette dimension et le remplir, en supposant que ça pouvait avoir du sens? Mais on voit bien que ça n'a pas, tu sais... Tu peux faire plus grand que Heathrow, il y a 30 ans, c'est aberrant; même le faire aujourd'hui, ça serait aberrant.

Mais, une fois qu'ils l'ont eu fait, au lieu de l'alimenter à mort avec des trajets aériens concentrés sur Mirabel, au lieu de dire: Mirabel, notre oeuvre, est la porte d'entrée du Canada, et tous les droits d'atterrissage vont à Mirabel qui devient un «hub» pour entrer au Canada ou en sortir, au lieu de faire ça, ils donnent les droits à Toronto. Alors, là, ils avaient une bonne excuse pour ne pas faire les infrastructures qui font partie aussi du gâchis. Ils n'ont pas fait les infrastructures. En plus, ils avaient commis une erreur de conception: ils ont été faire l'aéroport au nord des pistes plutôt qu'au sud. Alors, là, si tu veux relier par autoroute, il faut que tu creuses en dessous des pistes: vaste programme. Bon. Alors, je n'ai pas besoin d'en dire plus.

(15 h 30)

Le gouvernement du Québec a décidé de peser de tout son poids pour essayer de réparer, pour certaines personnes, l'irréparable, mais au moins pour la région, de réparer les dommages. Alors, on met le paquet. On a une série de mesures fiscales, de divers ordres, et structurelles pour un peu faire, mais avec beaucoup plus d'envergure et de détermination, ce que les Américains ont essayé de faire en recyclant Plattsburgh de base militaire à aéroport civil ou ce qu'ont fait les Irlandais avec Shannon. Et, pour ce faire, nous avons une série de mesures que je vais énumérer: congé fiscal aux entreprises de l'impôt sur le revenu, de la taxe sur le capital et la contribution au Fonds des services de santé, c'est extrêmement important; crédits d'impôt remboursables pour les salaires versés à des employés admissibles, sauf les entreprises manufacturières, parce que, là, on ne veut pas non plus violer les conventions internationales et se mettre en défaut par rapport à NAFTA ou à l'OMC; crédits d'impôt remboursables pour l'acquisition de matériel admissible; aide à la construction de bâtiments; assistance aux entreprises désirant opérer en contexte de zone franche; exemption d'impôts sur le revenu pour les employés étrangers spécialisés. On veut attirer un expert très pointu de Houston, Texas – déjà les salaires à Houston ont une tendance à être pas mal plus élevés que dans la région de Montréal, et en plus les impôts sont plus bas. Alors, ça serait une façon de nous assurer des personnels spécialisés dont nous pouvons avoir besoin.

On prend en même temps des précautions. On prend des précautions parce qu'on ne veut pas ouvrir ça à n'importe quelle activité, on ne veut pas que quelqu'un n'aille pas à Drummondville pour aller à Mirabel. Alors, il faut que ce soit une attraction de l'étranger vers Mirabel dans des activités admissibles, alors admissibles, limitées à trois secteurs reliés aux transports et à l'aviation, ou des activités qui, de toute façon, n'entraînent pas de délocaliser, sauf de l'extérieur, évidemment. Le jeu, c'est de délocaliser l'étranger vers Mirabel.

Logistique internationale, entretien et réparation d'aéronefs, formation complémentaire en aviation et des activités de fabrication légère pour utiliser l'aéroport comme espèce de «hub» où les choses ne sont pas très pondéreuses, donc les composantes peuvent arriver: transformation; réexpédition; aucun déplacement d'activités intra Québec permis; créneaux distincts de ceux des autres entreprises du Québec; desservir principalement des marchés étrangers. Alors, de cette façon, on ne veut pas déshabiller Pierre pour habiller Paul, ou couvrir la tête en découvrant les pieds. On veut que ça soit de l'offshore pur dans toute la mesure du possible et on veut aussi que ça soit très lié au milieu, alors, des structures qui vont avoir des représentants de Montréal, oui, oui de Montréal, c'est à Mirabel, mais la zone, c'est Montréal-Mirabel. Ce n'est pas l'esprit de clocher d'aller faire semblant que Mirabel puis Montréal, vu de Singapour, c'est deux endroits différents. Alors, la promotion se fait Montréal-Mirabel, donc des gens de Montréal, des gens d'Investissement-Québec, des gens de la région, de façon à faire une vaste conspiration pour réparer le dommage fédéral.

Je dis, en terminant, que cet esprit devrait prévaloir pour tout ce qui touche Montréal international. Montréal international, qui fait la promotion de Montréal et de sa région à l'étranger, peut être un merveilleux instrument, surtout quand on voit ce qu'est devenu Montréal aujourd'hui: la capitale nord-américaine des hautes technologies. Aller faire la promotion de Longueuil... Moi, j'adore Longueuil, j'y passe pratiquement tous les jours quand je quitte mon comté pour aller à mon bureau de Montréal. Je le sais que Pratt & Whitney est à Longueuil. Mais il y a trois grands centres d'aérospatiale dans le monde: il y a Toulouse, il y a Seattle et Montréal. Y en a-t-il un ici qui peut nommer une banlieue de Toulouse ou une banlieue de Seattle? Les gens de Toulouse le savent qu'il y a de charmants villages ou même une ville à quelques kilomètres, mais ils font la promotion de Toulouse, ils font la promotion de Seattle. Alors, on veut faire la promotion de Montréal, et avec cet outil: Montréal-Mirabel. J'ai été un peu long, mais la zone est vaste: ça a commencé à 97 000 acres.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Je ne commencerai pas à nommer trois banlieues de Toulouse, mais je vais laisser la parole à la porte-parole de l'opposition.


Variation de la valeur de consolidation des placements

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, je ne sais pas si vous allez me permettre... J'ai une question très pointue. Ensuite, j'ai une question un peu plus étoffée...

Le Président (M. Simard, Richelieu): Absolument.

Mme Jérôme-Forget: ...pour le ministre. J'ai une question pointue.

Une voix: ...

Mme Jérôme-Forget: C'est gentil, vous allez voir. Le plan budgétaire, la section 2, à la page 35.

M. Landry: Section 2, page 35.

Mme Jérôme-Forget: Alors, la variation de la valeur de consolidation des placements, là – c'est simplement de la curiosité – je voudrais que vous m'expliquiez, je ne comprends pas, je n'ai pas d'agenda caché. Je veux juste le deuxième paragraphe: variation de la valeur de consolidation des placements, qui passe en 1994-1995 de moins 1 000 000 000 $, 1 177 000 000 $, à 350 000 000 $, et revient en 1998-1999 à 1 200 000 000 $. Alors, si vous pouviez juste m'expliquer qu'est-ce que ça comprend et qu'est-ce que ça veut dire. C'est de l'ignorance, et j'aimerais ça que vous m'expliquiez.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Je vais inviter peut-être le sous-ministre des Finances à répondre.

M. Godbout (Gilles): Évidemment, c'est très volatile d'année en année.

Mme Jérôme-Forget: Expliquez-moi qu'est ce que ça comporte, monsieur.

M. Godbout (Gilles): La variation de la valeur de consolidation, c'est la différence entre les bénéfices nets des sociétés d'État et les dividendes des sociétés d'État. Donc...

Mme Jérôme-Forget: C'est sa valeur aux livres...

M. Godbout (Gilles): ...sa valeur aux livres.

Mme Jérôme-Forget: ...versus la valeur au marché.

M. Godbout (Gilles): Exactement.

Mme Jérôme-Forget: Alors, ça contient quoi?

M. Godbout (Gilles): Par exemple, Hydro-Québec peut avoir un dividende, une année, de tel montant, à titre d'exemple 200 000 000 $, et des bénéfices nets de 700 000 000 $. Donc, la différence entre les deux, c'est 500 000 000 $. Donc, d'une année à l'autre, évidemment dépendant des types d'entreprises du gouvernement, il peut y avoir des fluctuations très importantes. Et on peut vous donner le détail, là.

Mme Jérôme-Forget: Est-ce que vous pouvez me donner le détail? J'aimerais...

M. Godbout (Gilles): Oui, oui, on peut vous le fournir.

Mme Jérôme-Forget: ...juste, là, comprendre. C'est essentiellement... Par exemple, dans un marché d'actions, vous auriez acheté des actions à 10 $, qui ne valent plus que 5 $ aujourd'hui...

M. Godbout (Gilles): Exactement.

Mme Jérôme-Forget: ...donc il y a une perte dans les livres que vous exprimez de cette façon-là. C'est ça?

M. Landry: Dans le cas d'Hydro-Québec, ça ne joue pas, évidemment, les actions ne sont pas en bourse.

Mme Jérôme-Forget: Mais est-ce que c'est surtout Hydro-Québec, ça?

M. Landry: On possède 100 % des actions.

M. Godbout (Gilles): Il y a beaucoup Hydro-Québec puis il y a beaucoup aussi des entreprises du gouvernement. Donc, c'est la somme de ces variations-là sur la variation de la consolidation.

M. Landry: Il y a beaucoup de gens qui pensent que, quand Hydro-Québec nous verse des dividendes, ça nous fait plus ou moins d'argent dans nos livres. Non, parce qu'ils sont consolidés. C'est deux présentations du même argent. Les dividendes, c'est un mouvement de patrimoine. Et puis les plus et les moins dans le compte courant laissent un solde positif ou négatif. Mais ce n'est pas parce qu'Hydro-Québec ne nous verse pas de dividendes qu'elle ne fait pas de profits.

Mme Jérôme-Forget: Non, non, ça, je comprends ça.

M. Godbout (Gilles): Donc, c'est la différence entre les deux.

Mme Jérôme-Forget: Non, non, ça, je comprends ça. O.K. Mais vous pouvez me déposer la liste, peut-être, qui pourrait nous donner...

M. Godbout (Gilles): On peut vous décomposer... Pour l'ensemble de la société, la liste va composer les différences...

Mme Jérôme-Forget: ...et l'importance de chacune des sociétés.

M. Godbout (Gilles): ...et les fluctuations interannuelles entre 1994 et 1998.

Mme Jérôme-Forget: O.K. De chacune des sociétés. J'apprécierais, là. C'est simplement à titre d'éducation, là. Je fais mes classes.

M. Landry: On en apprend beaucoup dans ces travaux de part et d'autre de la Chambre.


Perte d'avantages fiscaux pour des contribuables ayant touché une augmentation de salaire

Mme Jérôme-Forget: Là, je pense que je vais soulever un problème, M. le Président, qui va... Le ministre des Finances va probablement être d'accord avec moi, à cause du document qu'il a déposé sur la réforme possible ou la consultation au niveau du système de taxation, la non-indexation des tables d'impôt. Il y a deux façons, bien sûr, de combler le déficit: il y a d'abord de couper les dépenses et il y a d'augmenter les revenus. Il y a trois niveaux de tables de taxation. Il y a 20 %, 23 % et 28 %. Et je vais vous donner l'exemple. Le 20 %, il s'applique aux gens qui gagnent entre 0 $ et 25 000 $; le 23 %, entre 25 000 $ et 50 000 $, si je comprends bien; et le 28 %, je pense, de 50 000 $ et plus. Alors, j'ai fait un petit calcul, et on va voir comment est-ce que, dans le fond, des fois, c'est un autre effet pervers. Quelqu'un qui gagne 25 000 $ et qui obtient une augmentation de salaire de 4 %, 4 % sur 25 000 $, ça voulait dire 1 000 $ de plus. Je l'ai mal exprimé ici. Donc, avec une augmentation de salaire de 1 000 $, cet employé gagne 26 000 $. Quand il gagnait 25 000 $, il payait 20 % de son impôt, donc 5 000 $ par année. On lui donne une augmentation; il hausse à 26 000 $. Il paye désormais 5 980 $ d'impôt parce qu'il change d'échelon. Donc, un employeur donne, à quelqu'un qui gagne 25 000 $, 4 % d'augmentation, et il lui reste en poche 20 $ en fin de compte.

(15 h 40)

Alors, vous comprendrez que c'est là un très gros désincitatif à travailler. C'est un très gros incitatif pour l'employeur, finalement, de donner une augmentation, parce que l'employeur donne une augmentation quand même importante; 4 % de nos jours, c'est beaucoup, ce n'est pas négligeable. Et ça donne une allure que le gouvernement triche. Ça donne une image que, ce que je reçois, le gouvernement vient me le chercher en totalité, parce que, quand on a une augmentation, vraiment, on s'attend à ce que notre chèque de paye reflète cette augmentation-là. Donc, il enlève l'effet motivateur de travailler plus fort pour plus d'argent, et, comme je disais, une telle situation diminue la crédibilité de notre système fiscal.

Bien sûr que j'ai choisi l'exemple où il y a un virage, où l'échelle s'applique, je suis bien consciente de ça. Mais il y a bien des gens qui tombent tout à coup dans des échelles comme ça, où ils ont une bonne augmentation salariale, et ça se traduit par quelques miettes. Et je me demandais, finalement, qu'est-ce que le ministre des Finances pensait de ça, parce qu'il invoque souvent que la progressivité est très importante dans sa vue. Moi, j'ai des réserves, parce que, quand, à un moment donné il y a seulement un groupe de citoyens qui s'avèrent à payer des impôts, tout à coup, on doit sentir une certaine injustice. Et j'aimerais savoir qu'est-ce qu'il compte faire pour contrer une situation qui, à mon avis, donne une très mauvaise image des politiciens en général, et certainement du gouvernement, qu'ils soient d'un parti ou de l'autre, quand on voit une situation comme ça.

M. Landry: Tous les gouvernements se posent ce problème-là. C'est un problème technique sérieux, puis la seule façon de le régler, c'est de baisser les impôts et les taxes. Parce que, même là, dans le petit calcul simple que vous avez fait, j'avais cru déceler une erreur technique – et puis, en tout respect, j'aurais pu la faire moi-même, vous n'êtes pas comptable puis moi non plus – puis mes experts la décèlent aussi: c'est parce que le taux marginal ne s'applique pas à l'ensemble du revenu.

Mme Jérôme-Forget: Ah! C'est vrai.

M. Landry: Ah! Alors, c'est des choses d'extrême complexité. C'est pour ça que le gouvernement du Canada, qui est un gouvernement respectable – sauf de la façon dont il traite le Québec, mais, ça, c'est une autre affaire – a prévu une indexation établie sur la croissance des prix à la consommation. C'est une bonne façon de faire, si elle excède 3 %. Mais ça fait combien d'années que ça n'a pas excédé 3 %? Donc, pas d'indexation du tout, parce que l'inflation est à un, virgule et des poussières. Au Québec, on n'a pas indexé depuis 1993, et puis c'était au taux de 2 %. Alors, comme c'est un mécanisme délicat – puis on va le voir quand les gens vont venir témoigner puis quand on va faire notre grande étude fiscale – et que commencer à jouer avec les taux marginaux est une opération très périlleuse, parce que, là, on a une belle courbe lisse, on a une courbe sociale-démocrate lisse, et la meilleure façon, c'est de baisser les impôts.

Autrefois, les gouvernements volaient littéralement, entre guillemets, les populations, parce que les taux d'inflation se situaient plusieurs années de suite autour de 10 %, vous vous rendez compte. C'est pour ça qu'il y avait un vieil axiome, que les économistes connaissaient, qui disait: en haut de 15 % d'inflation, la démocratie n'est plus possible. Bien, je comprends, ça met le monde en maudit: ils se font voler chez le marchand puis ils se font voler par l'État. Mais, quand on est à 1 %, un, virgule quelques, je pense que la meilleure manière, c'est celle qu'on va prendre: on va baisser les impôts. Et c'est ça que les fédéraux ont fait, mais pas beaucoup. M. Martin, il a baissé les impôts, dans son dernier budget, et, pour le Québec, ça donne 400 000 000 $. C'est presque pas beaucoup. C'est ce qu'on veut faire, nous, l'an prochain. Ça va faire 800 000 000 $, quand même, pour le Québec. Puis, si on peut faire plus, on fera plus, puis ça paraîtra. Mais, avant d'aller jouer dans nos courbes, j'y pense à deux fois.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Une sous-question, si vous me permettez, purement technique, M. le ministre, là-dessus. Et c'est peut-être le sous-ministre des Finances qui connaît mieux ça que nous. On fonctionne donc par paliers. À partir d'un certain palier, le taux marginal se trouve à brusquement changer, mais sur la somme excédant, évidemment, le palier inférieur. Est-ce qu'il y a des modèles qui ont été développés – et ça va être utile, je pense, dans nos discussions pour la commission – de transitivité, si j'ose dire, de phases transitoires moins spectaculaires que des...

M. Godbout (Gilles): Dans le fond... Gilles Godbout.

M. Landry: Sous-ministre des Finances.

M. Godbout (Gilles): Dans le fond, tout ce qu'on vise évidemment par les taux marginaux, c'est le dessin à la marge, c'est d'avoir une courbe de taux moyens plus ou moins progressive, parce que le résultat, c'est toujours une courbe de taux moyens. Et vous avez, dans le document qui a été cité précédemment, Réduction de l'impôt des particuliers, le dessin de la courbe des taux moyens québécois pour une famille avec deux enfants.

M. Landry: Page 23.

M. Godbout (Gilles): C'est cette courbe-là qu'on vise.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Elle est presque continue.

M. Godbout (Gilles): Elle est continue évidemment, elle est progressive, et c'est le jugement sur lequel vont s'appuyer les gouvernements, donc, pour plus ou moins redistribuer. Parce que, un des choix aussi qui pourrait être fait par un gouvernement, c'est d'avoir un seul taux.

Mme Jérôme-Forget: Voilà.

M. Godbout (Gilles): Évidemment, ça implique qu'il y a moins de redistribution dans le haut de la courbe et moins de taxation dans le haut de la courbe.

Mme Jérôme-Forget: Mais, vous savez, nous aurons des occasions d'en débattre, de ça. Nous avons un ami commun, Pierre Fortin...

M. Landry: Oui.

Mme Jérôme-Forget: ...et vous êtes au courant que Pierre a quand même écrit plusieurs articles à cet effet, à l'effet que, finalement, le taux unique, et d'ailleurs il a évolué vers un deuxième taux, mais même le taux unique, il avait fait la démonstration que ça pouvait être basé sur un principe d'équité, même. On pouvait trouver des solutions aux problèmes au niveau des échelons où les salaires sont les plus bas. Il y a d'autres solutions. Mais il est clair que, l'idée d'avoir des taux progressifs comme ça, ce n'est pas nécessairement démontré que c'est plus équitable. On voit les erreurs de parcours comme une... Je comprends, là, qu'il y a eu une erreur dans ma démonstration, mais il n'en demeure pas moins qu'il y a de plus en plus de discours qui se tiennent à l'effet que le taux progressif n'est pas aussi équitable qu'on veut bien nous le faire croire.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Merci, Mme la députée. Nous allons maintenant passer aux questions du côté ministériel, et M. le député de La Peltrie va poser une question.


Investissements en matière d'éducation

M. Côté (La Peltrie): Merci, M. le Président. M. le ministre, notre gouvernement a résolument centré son action sur les jeunes, au fond, pour les jeunes. Alors, on parle beaucoup de l'économie du savoir, des nouvelles technologies, parce qu'elles sont d'abord et avant tout le champ de prédilection, je pense, pour nos jeunes, notre jeunesse, cette avenue-là. C'est dans ce contexte qu'ils reçoivent la formation. Ce sont vers ces domaines qu'ils sont orientés et c'est dans cet environnement-là qu'ils vivent leur quotidien. Donc, toutes ces mesures et tous les incitatifs fiscaux et financiers que le gouvernement a mis sur pied pour eux, entre autres les 600 000 000 $ qui sont consacrés à l'éducation puis à la jeunesse, je pense qu'ils sont là pour le prouver. Puis je pense que, encore cette année, l'engagement du gouvernement, là, il est formel puis qu'il n'y aura pas d'augmentation de frais de scolarité pour nos étudiants, même pour notre prochain mandat.

Mais est-ce que les investissements qui sont annoncés dans le budget en matière d'éducation sont suffisants? Ou encore, si on regarde avec d'autres de nos voisins ou encore avec d'autres pays peut-être aussi, est-ce qu'on se compare avantageusement, parce qu'on voit qu'il y a encore beaucoup de demandes qui se font du côté de l'éducation, on a eu encore une démonstration hier. Alors, j'aimerais un peu vous entendre sur cet aspect-là des investissements en matière d'éducation.

M. Landry: Oui, je vais le faire. Mais, pendant qu'on complète la documentation là-dessus, je voudrais répondre brièvement sur les taux uniques.

(15 h 50)

D'abord, notre ami commun, je l'ai vu ce matin, tiens, il est à Québec. Il faisait un brillant exposé à la rencontre des décideurs agricoles, et ce n'était pas sur le taux unique. Un des premiers à poser le problème, c'est un de nos illustres devanciers, Jacques Parizeau, qui a produit un livre blanc sur la question en 1984 où il a fait ressortir les incongruités du taux marginal. C'est une fatalité, évidemment. Dès qu'on entre dans ce processus, on va avoir des absurdités. Alors, le taux unique corrige ça, c'est vrai. Mais, après ça, il faut corriger les injustices sociales du taux unique. Le taux unique, je ne vois pas pourquoi quelqu'un qui gagne 50 000 $ serait au même taux que Paul Desmarais. Alors, là, il faut compenser, rétablir la justice sociale. Ça se fait. Il y a divers mécanismes. On avait parlé de l'impôt négatif autrefois, on avait parlé de toutes sortes de formules, et ça, curieusement, et la droite et la gauche étaient d'accord là-dessus, même les économistes dits de droite, bien que le vocabulaire soit un peu désuet, comme vous l'avez dit hier, pensaient de la même façon. C'était une espèce de pompe aspirante foulante. C'est ça, leur image. On en prend puis on donne, puis, avec ça, on établit la justice. On pourra étudier ça lors de notre commission parlementaire, mais il faut bien garder en tête que la beauté des taux différenciés, c'est la répartition de la richesse.

Moi, une des raisons pour lesquelles j'ai toujours admiré beaucoup certains aspects de la mentalité des États-Unis d'Amérique, c'est la rigueur fiscale. Il faut payer ses taxes aux États-Unis. D'abord, l'IRS, l'Internal Revenue Service, c'est à peu près ce qu'il y a de plus cruel au monde pour faire payer. Ils ne discutent pas. Le voile corporatif ne joue pas, c'est-à-dire qu'on peut se retrouver en prison, même si c'est la compagnie qui soi-disant a fait le forfait. C'est dur. Ils jouent dur, et c'est probablement avec ça qu'ils ont maintenu une certaine cohésion sociale: Payez vos impôts. C'est ce que les gens font. Évidemment, il y a bien d'autres aspects odieux d'un système aussi dur. Je ne voudrais pas avoir leur système de santé puis je ne voudrais pas avoir leur sécurité urbaine non plus.

Une voix: ...

M. Landry: Pardon?

Mme Jérôme-Forget: À un moment donné, également – je m'excuse, M. le député – quand les impôts sont trop élevés, c'est là qu'il y a de la fraude.

M. Landry: Oui, mais on ne peut pas parler des États-Unis «at large» non plus, vous savez, parce qu'il y a des États qui n'ont pratiquement pas d'impôts sur le revenu, mais l'État de New York en a. Je pense que même la ville de New York a un impôt sur le revenu.

Mme Jérôme-Forget: Oui.

M. Landry: Alors, on ne peut pas écrire à Washington puis dire: Envoyez-nous votre table d'impôts. Ça ne veut rien dire. Il faut regarder État par État. En tout cas, j'espère qu'on aura toutes ces discussions passionnantes in tempore opportuno, avant longtemps donc.

Maintenant, on revient à l'éducation, à la question de notre collègue. Hier, il y a un journaliste qui m'a posé une question assez insultante, comme si notre système d'éducation c'était le tiers-monde, etc. Moi, j'ai enseigné dans le tiers-monde, dans plusieurs villes du tiers-monde. J'aurais voulu que ce gars-là me suive, à Chilpancingo, dans l'État du Guerrero. Il verrait c'est quoi un système d'éducation du tiers-monde, ou en Guinée, Conakry, ou à Kigali, ou à Butare. Il verrait c'est quoi, un État du tiers-monde.

Je me rappelle, une fois... J'ai enseigné pendant une dizaine d'années dans une même université tiers-mondiste. La première année où j'y suis allé, le recteur a dit: Je vais vous donner la seule salle climatisée, parce que ça va être pénible pour vous. La température montait à 100°. Alors, il me présente aux étudiants et aux étudiantes dans la salle, puis le ronron de la machine commence. Ça s'arrête un quart d'heure après. Ça n'est jamais reparti dans 10 ans. Le recteur dit: J'ai fait ce que j'ai pu mais j'ai d'autres choses à payer que de la climatisation pour des professeurs occidentaux. Si ça avait marché, tant mieux; ça n'a pas marché.

Alors, tout ça pour dire qu'on a un système d'éducation qui coûte cher aux contribuables, qui dépense beaucoup d'argent et qui donne une qualité surprenante, remarquable. Regardez les tests soit de l'OCDE, soit les tests canadiens de l'aptitude des étudiants, des étudiantes et vous allez voir que le Québec gagne souvent des concours objectifs dans plusieurs catégories dont des catégories absolument vitales: mathématique...

Une voix: ...

M. Landry: ...pardon?

Le Président (M. Simard, Richelieu): Comptabilité.

M. Landry: Comptabilité, sciences. Alors, il ne faut pas médire notre système... Voyez-vous, vous ne pouvez pas savoir comme c'est facile d'être ministre des Finances. Quand tu n'as pas ton chiffre, ton sous-ministre te le passe. J'ai même déjà dit que le ministre des Finances pourrait être un parfait imbécile, et ça prendrait des mois avant que les gens s'en aperçoivent.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Landry: Pardon?

Une voix: ...

M. Landry: C'est peut-être déjà arrivé, d'ailleurs.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Landry: Alors, au moment même où je vous parlais des résultats, le sous-ministre me tend ceci, là: Épreuves de mathématique. Moyenne des élèves du Québec: troisième année, 55,7 %; Canada, 47 %. Quatrième année, 69 %; Canada, 60 %. Moyenne des élèves du Québec: 60 %, en première année secondaire; Canada 51 % – des gros écarts, hein. Secondaire, deuxième année: Québec, 67 %; Canada, 58 %. Sciences, maintenant, secteurs vitaux, là. Moyenne des élèves du Québec, troisième année primaire, la même qu'au Canada: 53 %, 52 %. Quatrième année: Québec, 64,5 %; Canada, 63,6 %. Première année secondaire: Québec, 53,8 %; Canada, 54 %. Mais, deuxième année secondaire, ils se rattrapent: Québec, 59 %; Canada, 58 %. Tout ça pour dire qu'on sait compter, puis ça marche, et puis qu'on est au moins dans la bonne moyenne occidentale puis qu'on est supérieur à la moyenne canadienne. Justement, notre ami Pierre Fortin, il a commencé son discours ce matin par une blague. Il a dit: Il y a trois sortes d'économistes: ceux qui savent compter et ceux qui ne savent pas compter.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Oh! c'est dur pour les économistes.

M. Landry: Alors, les jeunes du Québec savent compter; et, oui, il y a eu des tensions. On a eu quatre années assez difficiles, justement, parce que des gens, avant nous, ne savaient pas compter et qu'on a monté un déficit à 6 000 000 000 $. Mais, malgré ça, le système a vécu, le système vit, il sort ses diplômés de façon récurrente, chaque année.

Il y a quand même des choses qui commencent à nous inquiéter, et c'est pour ça qu'on a essayé de les corriger dès cette année, faisant, j'en ai la conviction profonde – on le savait avant le budget puis on le sait après – ce que la population voulait qu'on fasse. La population, qu'est-ce qu'elle avait en tête? Elle avait en tête santé, éducation, baisse d'impôts; c'est exactement ce qu'on a fait. En éducation, 170 000 000 $, en 1998-1999, pour rembourser une partie des déficits accumulés au cours des dernières années – on a bouché le trou, comme on a fait dans la santé – puis versement de l'aide via présentation d'un plan assurant le retour à l'équilibre, parce qu'on ne veut pas qu'ils reviennent dans les mêmes ornières; 30 000 000 $ additionnels, parce que, ça, en Chambre, on s'était fait ramasser à quelques reprises, les députés qui étaient là s'en souviennent, ils rigolaient de nous, soi-disant qu'il n'y avait pas de livres dans les écoles, puis des histoires d'horreur, puis celui qui disait qu'on avait des livres qui montraient encore, dans la géographie, l'Union Soviétique, alors que l'Union Soviétique n'existe plus – bon, alors, 30 000 000 $ additionnels pour l'achat de livres, de dictionnaires, de grammaires; 10 000 000 $ pour l'achat de livres dans les bibliothèques scolaires; 24 000 000 $ pour l'achat de dictionnaires, grammaires dans les écoles; 58 000 000 $ sur deux ans pour la réforme de l'éducation qui avait été annoncée par notre collègue qui est aujourd'hui ministre de la Santé; 24 000 000 $ sur deux ans pour soutenir le développement de la main-d'oeuvre hautement spécialisée dans les secteurs de la technologie et de l'information.

Là, on était inquiet, parce qu'on a eu des représentations, à plusieurs reprises, de l'industrie, à cause du développement spectaculaire de Montréal: 4 000 emplois nouveaux dans la Cité du multimédia en six mois, alors qu'on en a prédit 10 000 en quatre ans. On commençait à avoir une tension sur la main-d'oeuvre, alors, on met 24 000 000 $ sur deux ans. On met 10 000 000 $ pour répondre aux besoins de formation continue des enseignants et membres des directions d'école; 6 000 000 $ pour aider au maintien de l'équilibre budgétaire des cégeps; 4 500 000 $ pour les emplois stages d'été dans la fonction publique.

En d'autres termes, le temps des compressions est fini. Ce n'est pas encore le temps des cathédrales, mais on va continuer à améliorer les choses qui sont déjà, retenons bien ça, tout à fait acceptables par rapport à la moyenne de notre continent.

(16 heures)

Le Président (M. Simard, Richelieu): Merci. Je passe maintenant la parole au député de Nelligan et vice-président de la commission des finances.


Taxes sur la masse salariale

M. Williams: Merci, M. le Président. Je voudrais retourner à un sujet sur lequel, je pense, vous avez discuté un peu mardi. Malheureusement, j'étais retourné dans mon comté, je n'étais pas capable de continuer à participer au débat, parce que j'ai eu une rencontre avec l'Association des gestionnaires d'achats, Purchasing Managers, comme on dit en anglais, et j'ai eu une excellente discussion avec eux. Et, j'ouvre une parenthèse, de plus en plus on demande à nos gestionnaires d'achats de faire un excellent travail à cause de la pression pour sauver de l'argent. J'ai aussi rencontré plusieurs représentants de chambres de commerce et d'entreprises de mon comté. Mais ce n'est pas une question de comté, a priori, c'est sur toutes les questions de taxes sur la masse salariale, et je pense que vous avez discuté de ça un peu, mais j'ai promis à ces représentants que j'allais demander au ministre des Finances, qui est devant nous pour 10 heures, une question fort simple, parce que je pense qu'il y a unanimité autour de cette table que, effectivement, on veut baisser les impôts. Je pense que nous avons tous notre perspective, comment on peut faire ça, et mon collègue le député de Marguerite-Bourgeoys a bel et bien défendu notre position, M. le Président.

Avec ça, je ne mets pas en doute tous les chiffres que nous avons déjà discutés, mais tous les secteurs d'entreprises, au moins ceux et celles qui ont parlé avec moi, disent que c'est une taxe négative, ce n'est pas une taxe qui veut encourager. Ils ont tous demandé de baisser la taxe sur la masse salariale. Le budget, M. le Président, que M. le ministre a déposé cette année ne parle pas de ça. Je voudrais lui demander... et je dis tout de suite que je vais sortir la galée après et je vais envoyer sa réponse aux personnes qui me l'ont demandée. On cherche la transparence. Le budget, c'est une série de choix. Pourquoi vous n'avez pas choisi, cette année, de baisser les taxes sur la masse salariale? C'était quoi, votre stratégie? C'est quoi, l'impact? Et je vous donne la chance d'expliquer ça parce que, chez nous, les entreprises ont demandé ça dans les plus brefs délais. Je vous laisse la chance de répondre à mes questions, et peut-être qu'on pourra avoir un échange après.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Je voudrais juste signaler que la question a déjà été posée. Il y a eu une longue réponse. C'est la même question.

M. Williams: Oui. Et j'ai dit que...

Le Président (M. Simard, Richelieu): Mais pour être bien certain que vous puissiez...

M. Williams: Oui, mais j'ai lu les galées et j'ai pensé que c'était nécessaire de retourner sur ça et d'avoir une clarification. Et ce n'est pas un commentaire sur les réponses, mais des dossiers aussi complexes que ça, de temps en temps, ce n'est pas une répétition. J'ai mentionné que c'était un sujet, M. le Président, déjà abordé.

M. Landry: Surtout parce que ça va dans son comté, ça va me faire plaisir de répondre parce que, le début de ma réponse, c'est de dire que la principale taxe sur la masse salariale, elle n'est pas payée à Québec, elle est payée à Ottawa, c'est l'assurance-chômage.

M. Williams: Oui, oui.

M. Landry: Surtout dans votre comté, s'il y a des gens qui veulent se débarrasser de cette taxe fédérale, ils savent quoi faire, massivement proposer...

M. Williams: Si vous voulez aller dans ce débat, M. le ministre...

M. Landry: Dans mon comté...

M. Williams: ...on peut commencer cet après-midi, si vous voulez.

M. Landry: Dans mon comté de Verchères, ils ont voté oui à 72 %, dans le comté de Verchères. Alors, eux autres, ils savent comment se débarrasser de cette taxe sur la masse salariale payée à Ottawa, mais dans votre comté, bien, ça apporte un beau sujet de réflexion.

Mais je vais aller plus loin. Pourquoi je ne l'ai pas fait? Je vais vous dire pourquoi je ne l'ai pas fait puis, comme le député est intelligent et qu'il a cette réputation, je suis sûr qu'à ma place – ça ne risque pas de lui arriver pour l'instant – il aurait fait la même chose que moi. Écoutez-moi bien, vous allez être d'accord avec moi.

D'abord, quand vous dites que je...

M. Williams: Pas avec votre préambule, certainement, là.

M. Landry: ...ne l'ai pas fait... Franchement, je ne m'attendais pas à ça non plus, mais avec le reste, il y a une possibilité de compromis. Vous dites que je ne l'ai pas fait, c'est à moitié vrai. Je l'ai fait pour les PME. J'ai déjà commencé à faire la désescalade de la taxe à la masse salariale par une baisse pouvant atteindre 37 % de la taxe de la masse salariale, soit une diminution de 4,26 % à 2,70 % qui se fera en trois étapes: le 1er janvier 1999, réduction de 4,26 % à 4 %; le 1er janvier 2000, le taux réduit à nouveau de 4 % à 3,22 %; et, le 1er janvier 2001, le taux diminuera une troisième fois, passant de 3,22 % à 2,7 %; et des remboursements additionnels de la TVQ de 23 000 000 $ pour les PME, cette fois-ci à compter du 1er juillet 1999.

Alors, des gens, que vous avez peut-être rencontrés, d'ailleurs, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, disent ceci: «Le budget 1998-1999 marque d'importantes victoires pour la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante qui se bat depuis plusieurs années pour réduire le fardeau fiscal des petites et moyennes entreprises. Cette année, deux victoires de taille ont marqué le budget Landry: une réduction des taxes sur la masse salariale et la hausse du seuil d'application pour le remboursement de la taxe sur les intrants à l'égard de la TVQ.» Des choses, donc, que je viens d'évoquer.

Mais je vais compléter ma réponse d'une façon, à mon avis, qui scelle le débat, au moins pour l'instant. Notre taxe sur la masse salariale, elle est tout à fait montrable par rapport à nos concurrents occidentaux. Je vais vous donner quelques exemples: la Californie est à 13,2 % – c'est censé être le parangon de la civilisation contemporaine – le Massachusetts, un voisin plus immédiat, très avancé aussi, très évolué 12,9 %, l'État de New York, notre voisin, 12,7 %, la Pennsylvanie 12,1 %, et le Québec 11,9 %. Et globalement, la fiscalité des entreprises est de 900 000 000 $ au moins plus basse au Québec qu'en Ontario, notre voisin qui, par ailleurs, lui, pour sa taxe à la masse salariale, est à 10,9 %.

Alors, je pense que ce n'est pas là qu'on a la plus grande vulnérabilité fiscale, c'est vraiment l'impôt sur les personnes physiques, puis c'est là qu'est la priorité, surtout après ce que je viens de faire pour les PME. En Ontario, n'oubliez pas aussi, comme ils n'ont pas à harmoniser leur fiscalité avec les fédéraux, ils n'ont pas de remboursement des intrants sur les taxes. Alors, ils ont une vieille taxe cumulative, alors que nous autres on a la vertu de la TVA, la taxe à la valeur ajoutée, déductible.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Est-ce qu'il vous a convaincu, M. le député de Nelligan?

M. Williams: Pas de la première partie.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Je parlais de la deuxième.

M. Williams: Il n'a pas à me convaincre. Actuellement, M. le ministre a raconté une petite blague, peut-être est-ce que je peux en raconter une autre aussi parce que nous avons parlé avec beaucoup de PME. Elles ont toutes dit: Effectivement, vous avez toute une stratégie pour les PME, une stratégie assez intéressante. Malheureusement, toutes ces PME étaient des grandes entreprises avant que vous entriez. Alors, en tout cas, c'étaient les petites entreprises...

M. Landry: Disons Bombardier. Elle est devenue troisième avionneur du monde depuis que nous sommes au pouvoir.

M. Williams: Oui. Si j'ai bien compris la réponse du ministre, ce n'est pas son intention, à cause des chiffres qui sont déposés, d'aller plus loin pour baisser les taxes sur la masse salariale; ce n'est pas sa stratégie, si j'ai bel et bien compris ce qui était effectivement à la fin de son intervention, le message à ces entreprises, les annonces que vous avez bel et bien faites jusqu'à 2002. «That's it», c'est tout. Vous n'allez pas plus loin que ça.

M. Landry: Non. Franchement, d'abord...

M. Williams: Je ne cherche pas à faire...

M. Landry: Non, non, non, je comprends très bien puis...

M. Williams: C'est pourquoi je n'ai pas répondu à votre préambule.

M. Landry: Je vais lui dire le fond de ma pensée. Le fond de ma pensée, c'est que ce n'est pas une priorité pour nous. Ce qu'on a décidé de faire, on le fait. Parce que je ne sais pas s'il était dans la salle quand j'ai dit que, pour rattraper l'Ontario au plan des personnes physiques, impôts sur les particuliers, ça prendrait 5 000 000 000 $, que je n'ai pas. Et on a déjà décidé de baisser de 1 500 000 000 $ et plus dans le mandat, puis on fera plus si c'est possible, mais c'est déjà loin du 5 000 000 000 $, ça, puis l'Ontario peut continuer encore à baisser ses impôts. Alors, la grande priorité, c'est vraiment l'impôt sur les personnes physiques. Et il ne faut pas s'attendre à des baisses autres que celle annoncée pour la taxe sur la masse salariale, pour les raisons que j'ai dites.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Merci beaucoup. Le député d'Abitibi-Ouest a manifesté le premier son intention de parler, du côté ministériel.


Perspectives d'avenir pour l'enseignement universitaire

M. Gendron: Ah! Le premier, je ne suis pas sûr. C'est parce que je voudrais faire un autre petit bout sur l'éducation, qui est très importante comme mission de l'État, et en particulier sur le financement de nos universités. Je sais, M. le ministre des Finances, que ça serait préférable, si on n'avait pas 12 heures à faire sur le budget, d'être plus avancé dans la présente année et de voir un peu comment l'université, après les mesures que vous avez annoncées dans votre budget, qui vont leur donner un coup de pouce sur l'atténuation, entre autres, des déficits accumulés dans le monde de l'éducation... Mais, au-delà de ça, déjà, dans les prévisions budgétaires de certaines universités... puis là je parle un peu de la mienne qui a fait de très, très, très gros efforts pour éviter que son déficit soit significatif. C'est probablement la plus grande université dans le monde, en termes d'étendue puis en étudiants. En termes d'étendue parce que, bien oui, elle offre de l'enseignement universitaire de qualité dans 17 sous-centres. C'est intéressant pour les gens de savoir que l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue offre de l'enseignement universitaire de qualité à Ville-Marie, à Matagami, à Lebel-sur-Quévillon à La Sarre, à Val-d'Or, à Senneterre, ainsi de suite. Mais, pour ce faire, pour ce faire et pour avoir cette accessibilité de l'enseignement universitaire en particulier chez la clientèle adulte... Et c'est de plus le cas chez nous: les étudiants réguliers, premier cycle, pour toutes sortes de raisons, dès qu'ils sont obligés de s'expatrier pour de l'enseignement universitaire, bien, aussi bien le faire, à tort ou à raison... Là, chez les jeunes qui font ce choix-là, ils s'en vont à l'extérieur. Et l'offre d'options est plus large aussi, la plage d'options est plus large par rapport aux formations anticipées.

(16 h 10)

Mais j'ai été sensible – ça m'arrive, là – à quelques articles. Je ne parle pas nécessairement de l'entièreté de l'article de La Tribune , il y a une couple de jours, de M. Jacques Pronovost. Et je ne parle pas nécessairement de son style, qu'est-ce qu'il a voulu illustrer. Je parle de la problématique qu'il a campée: M. le ministre des Finances, c'est bien beau, vous donnez un bon coup de pouce, vous allez atténuer les déficits accumulés, mais dans l'année en cours il y a plusieurs universités qui seront obligées de prévoir un déficit parce qu'elles disent: Si on veut maintenir soit l'offre éducative, parfois à cause de problèmes de décentralisation comme je vis en Abitibi, parfois à cause d'options, peu importent les raisons... elles prévoient être obligées encore de budgétiser, si vous me permettez l'expression, un déficit.

L'information que j'ai, c'est que vous avez dit – puis là vous me corrigerez s'il y a des choses qui ne sont pas correctes – il me semble que j'ai vu en quelque part que vous leur donnez quatre ans pour présenter des budgets équilibrés pour l'ensemble des universités. Oui, vous prévoyez... Vous n'avez pas vu ça? En tout cas, on me corrigera tantôt mais, moi, j'ai vu ça quelque part, là, et si ce n'est pas à la bonne place, vous me le direz. En exigeant des universités de présenter des budgets équilibrés dans quatre ans pour avoir droit à leur part du gâteau sur l'ardoise, le ministre veut certes les responsabiliser pour qu'elles continuent une réforme qui... Bon, ainsi de suite. Mais, dans certains cas, c'est jouer trop fort le jeu de la carotte et du bâton, parce qu'il n'y a pas de capacité pour elles de faire ça, les universités. Et moi, je n'ai pas toutes les données pour porter le jugement. Alors, vous me direz tantôt si c'est vrai ou si ce n'est pas vrai.

L'autre élément que je voudrais, dans vos commentaires, si c'est possible, que vous indiquiez c'est quoi, les éléments les plus créateurs de dépassement pour le milieu universitaire. Est-ce qu'il y a eu des discussions avec le ministre de l'Éducation ou vous, M. le ministre des Finances, à l'effet qu'il serait en mesure, lui, de vous indiquer les endroits qui font le plus mal, soit parfois un budget de recherche qu'on est obligé de réduire – ce que je ne sais pas. Parce que je crois que M. Legault, notre collègue, M. François Legault, ministre de l'Éducation, partage une partie de la prétention à l'effet qu'il va falloir remettre un peu d'argent dans le monde universitaire, et assez rapidement, sans avoir la contrainte qu'il semble qui leur est imposée: qu'il n'est pas question qu'on vous redonne du fric ou de l'argent neuf, à moins que vous ne nous montriez l'ardoise et qu'elle soit dégagée de toute corruption déficitaire. Alors, là, vous aviez tantôt des citations. Si ce n'est pas le cas, bien, moi, je vais respirer un peu mieux. Mais j'aimerais ça que vous me parliez un peu de ça, là, parce que c'est une préoccupation qui grandit dans le monde universitaire de dire: Oui, on sent que le gouvernement est sensible, oui, on sent que le gouvernement fait des efforts, mais on ne réussira pas à offrir un enseignement de qualité universitaire comme on devrait. À des places, c'est les équipements qui sont désuets et vétustes, à des places, c'est les laboratoires de recherche qui en ont pris pour leur coup.

C'est quoi, les échanges que vous avez eus, vous, avec notre collègue de l'Éducation pour s'assurer au moins que dans l'étude qu'on fait le ministre des Finances a cette sensibilité-là? Et, même si on aura à faire un débat sur le partage des surplus – puis ça, c'est connu du public, puis c'est connu qu'il y a beaucoup de gens qui souhaitent une baisse des impôts des contribuables – on ne peut pas tout faire en même temps. Ça, je suis conscient de ça. Et parce qu'on ne peut pas tout faire en même temps, il faut quand même garder des priorités fondamentales sur les missions éducatives et les grandes missions de l'État. Si c'est vrai que les universités sont en difficulté et que, là, on a surtout pallié au plus urgent, de baisser leurs déficits, mais qu'il y en a d'anticipés en se forçant, j'aimerais ça vous entendre un peu, là, comment vous voyez la suite des choses pour l'enseignement universitaire.

M. Landry: Bon, d'abord, comme notre collègue de Nelligan va envoyer les galées de la question précédente, je voudrais qu'il envoie ce que je vais dire maintenant aussi, s'il vous plaît. C'est juste un préambule pour répondre à mon collègue, mais un préambule de 600 000 000 $.

C'est que le gouvernement du Canada, qui a refait ses finances sur notre dos et sur le dos des chômeurs par la caisse d'assurance-chômage et aussi par certains efforts qu'il a faits – je ne veux pas être injuste pour M. Martin – il revient dans nos juridictions sacrées, l'éducation, avec une Fondation des bourses du millénaire, et la part québécoise là-dedans est de 600 000 000 $. Si nous avions ce 600 000 000 $, on l'aurait réinjecté cette année, comme a dit mon collègue de l'Éducation, et tous les problèmes que vous avez évoqués auraient leur solution. Tous.

Les gens disent: Vous en parlez beaucoup. Ils n'ont rien vu encore. On va en parler, puis on va en parler beaucoup, ainsi que du rôle d'un grand gestionnaire québécois qui, de façon incompréhensible – je pense à M. Jean Monty, le patron de BCE, qui est un homme qui a une réputation de gestionnaire rigoureux, donc qui combat le gaspillage, qui combat la gabegie – préside, là, le gaspillage et la gabegie. Comment a-t-il pu se laisser entraîner dans une telle aventure, et quand aura-t-il la vertu d'en sortir? Voilà deux questions vitales que je lui ai posées personnellement. Je lui ai écrit un petit mot à cet effet. Je vais revenir à la charge. C'est insensé. M. Monty devrait dire: Je me suis fourvoyé. Le Québec a besoin de cet argent pour ses universités, pour former des bons ingénieurs, hommes et femmes – pour Bell Canada en particulier – et pour former la jeunesse, et je me récuse, et je ne suis plus complice du fait que l'on viole les juridictions du Québec et qu'on gaspille.

Et pourquoi on gaspille? Parce qu'on a le meilleur système de prêts et bourses au Canada. On a prêts et bourses, ce que le reste du Canada n'a pas. Nos étudiants et étudiantes sont les moins endettés du Canada. À quoi rime cette plaisanterie?

Il y avait M. Serge Saucier, à RCMP, qui avait accepté le conseil. Il en a démissionné. Il n'est plus là. Alors, on ne peut plus dire la même chose de monsieur... Ah, bien, je vous l'apprends, hein? Ma collègue ne le savait pas. Je le dis, là. M. Serge Saucier, il n'est plus à la Fondation des bourses du millénaire. Sauf qu'il reste deux grands administrateurs québécois auxquels j'adresse, moins directement, avec moins d'insistance, les mêmes remarques qu'à M. Monty. Il s'agit du patron de l'Alcan, M. Jacques Bourgie, et il s'agit d'une jeune femme qui est bien connue et qui fait une brillante carrière, c'est Micheline Charest, dans les arts de l'interprétation. Ça s'appelle comment?

Le Président (M. Simard, Richelieu): CINARS.

M. Landry: CINARS. Bien, je les supplie, les trois, de penser à la jeunesse québécoise. Mon collègue aurait 600 000 000 $ demain matin pour régler tous les problèmes que vous avez évoqués.

Cela dit, il y a sans doute des situations particulières parce que, globalement, je vais donner une série de chiffres qui me font penser que certaines personnes ont raison puis d'autres dramatisent. Et c'est vrai que l'université à laquelle vous avez fait allusion est une université régionale, filiale de l'Université du Québec, qu'elle couvre un territoire, sans doute la plus grande université du monde en termes territorial, qu'elle n'est pas dans la même situation que telle autre qui est concentrée dans quatre coins de rues à Montréal. Mais, globalement, le Québec se classe parmi les premiers, tant sur le plan canadien qu'international, en ce qui a trait aux dépenses d'éducation par élève, pour ce qui est de l'importance des dépenses d'éducation par rapport à notre richesse. Alors, on est déjà dans les meilleurs. Si on en met plus, on va être encore plus dans les meilleurs, admis, mais on n'est pas en détresse.

En 1997-1998, la dépense par étudiant des universités – c'est surtout des universités dont vous m'avez parlé – 11 489 $ au Québec, plus élevé que notre puissant voisin ontarien dont le PNB est de 20 % plus élevé et qui, lui, est à 10 356 $. Alors, l'Ontario, plus riche, moins de dépenses universitaires par tête. Et, dans le reste du Canada, il est à 11 000 $. Il y a de quoi rendre perplexe.

Le nombre moyen d'élèves par enseignant au primaire, secondaire, est moins élevé au Québec, 16, qu'en Ontario, 18,8, et qu'aux États-Unis, 16,7. Alors, normalement, il y a plus d'attention maîtres, enseignants, enseignantes au Québec, puisque le ratio est plus bas.

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, vous m'avez corrigée tantôt puis je vous en remercie. En Ontario, par ailleurs, les frais de scolarité sont beaucoup plus élevés et, par conséquent, par tête de pipe, il y a plus d'argent pour les étudiants.

M. Landry: J'y venais.

Mme Jérôme-Forget: Ah! Je m'excuse. Excusez-moi.

(16 h 20)

M. Landry: J'y venais, madame. En raison de la générosité du régime québécois d'aide financière aux études, les étudiants québécois sont parmi les moins endettés du Canada. L'en-dette est de 11 127 $ par étudiant au Québec à la fin d'un bac, contre 19 810 $ en moyenne dans les autres provinces. Alors, l'argent est au passif de ces étudiants qui sont endettés. Ils paient des frais de scolarité élevés mais, en fait, ils ne les paient pas, ils les empruntent. Alors, c'est dans leur passif.

Et les frais de scolarité, maintenant. 1997-1998, au Québec, 1 690 $, la moitié de ceux demandés en Ontario, 3 286 $, et ailleurs au reste du Canada, 3 181 $. Les frais de scolarité n'ont presque pas augmenté depuis 1993-1994 au Québec, alors qu'en Ontario ils augmentaient de 12 % par année, en moyenne.

Le ratio profs d'université, maintenant. Profs d'université, étudiants par professeur: au Québec, on a 9 000 professeurs d'université, ce qui fait 17 étudiants et étudiantes par 1,5 prof – 0,5 prof, c'est statistique, tout le monde l'aura compris! – Ontario, 12 545 professeurs d'université, étudiants-prof: le ratio est de 20,1.

Alors, il faut écouter avec sympathie nos jeunes qui étaient dans la rue hier. Il faut dire que, pour une raison ou pour une autre, les jeunes, presque par définition, descendent dans la rue. Et je vais vous faire une confession, c'est moi qui ai inauguré, il y a 40 ans, ce genre de descente annuelle. J'étais président des étudiants de l'Université de Montréal, ce qui était déjà une grosse machine à protestation, je vous le garantis. Mais, non content, j'ai fondé l'Union générale des étudiants du Québec, ce qui avait pour effet immédiat de grossir encore les manifestations. D'ailleurs, nos collègues de McGill faisaient partie, avec nous, de cette association.

Savez-vous quelle était notre principale revendication? C'est pour ça que...

Une voix: ...

M. Landry: Non. Ah, non! Les tramways, ça, c'étaient des manifs ponctuelles plus vicieuses encore. On avait des grandes gaules, puis on défaisait le trolley, ça fait que tout arrêtait. Ça, je n'aurais peut-être pas dû le dire. Heureusement, il n'y a plus de trolleys aujourd'hui, ils ne peuvent pas prendre mon conseil. Non?

La première manif importante et sérieuse qu'on a faite, c'était pour avoir un système de prêts et bourses. Et j'étais venu ici, à Québec, rencontrer M. Paul Gérin-Lajoie, ministre de l'Éducation de l'époque, qui nous avait fait rencontrer son premier ministre, M. Jean Lesage, puis on avait discuté très sérieusement de la nécessité impérieuse de mettre sur pied un système de prêts et bourses.

Alors, quand je les voyais dans la rue hier pour en avoir plus, je suis tout à fait d'accord, surtout que ces jeunes ne sont pas bêtes, ils sont allés au bureau de Jean Monty finir la manif. Alors, là, je regrettais de ne pas être avec eux.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Pas nous. Pas nous.

M. Landry: Alors, c'est pour ça qu'il ne faut pas dramatiser. Ah! Pas vous, je le sais, pas vous, vous êtes les porte-parole des fédéraux, vous êtes leur succursale. Tu ne vas pas manifester contre ta succursale.

Alors, tout ça pour dire qu'il faut relativiser les choses. Les gens de l'éducation, les recteurs, les enseignants, les enseignantes, ils font un métier extrêmement difficile. Le métier est plus difficile aujourd'hui qu'il ne l'était il y a 25 ou 30 ans, surtout dans certains segments sociologiques, dans certains quartiers de certaines villes. Tout ça doit être compris, doit être regardé avec le plus d'humanité possible, sans oublier, par ailleurs, que les contribuables québécois font un effort élevé par rapport aux contribuables occidentaux pour leur système d'éducation.

M. Gendron: M. le Président, pour un commentaire, vous me permettrez, certain. Je pense que le ministre avait raison tantôt, en parlant des ratios maître-élèves. Mais, là-dessus, je leur dois ça comme ex-leader syndical des profs primaire-secondaire, ayant enseigné moi-même une dizaine d'années, le ratio au Québec a toujours été moins élevé qu'en Ontario en termes de charges éducatives, mais il y a un méchant écart sur le salaire moyen, et de tout temps. Le salaire au primaire-secondaire du prof québécois versus le salaire en Ontario, ce n'est pas loin de 8 000 $ et quelque chose, en moyenne, de surplus en Ontario. C'est des choix de société. Je veux dire, en Ontario, quand ils négocient une convention collective, enseigner un peu plus réclame un meilleur salaire; ici, on a toujours mis un peu plus l'accent sur la qualité de l'enseignement. Et enseigner au Québec, c'est toujours plus compliqué pour toutes sortes de questions de valeurs, éclatement des familles, le taux de divorce est bien bien plus élevé, et ainsi de suite. Je ne ferai pas d'analyse sociologique, mais il faut toujours prendre l'ensemble. Et moi, là où je suis quand même content, c'est plus une donne qui est universelle, c'est le produit intérieur brut. C'est quand un État comme le nôtre, tout petit, réussit à mettre plus d'argent en éducation versus l'Ontario, c'est quand même... On peut leur dire, on peut en remettre comme priorité dans la mission éducative, mais à ce moment-là c'est quand même une donnée qu'il faut avoir pour porter un jugement qualitatif.

M. Landry: C'est parce qu'on partage largement ces vues qu'on a remis de l'argent en éducation, et la population pense comme nous. Je crois qu'on a frappé juste: santé, éducation, baisse d'impôts, déficit zéro.

Mme Jérôme-Forget: ...ministre, simplement...

Le Président (M. Simard, Richelieu): Absolument, madame. C'est votre tour.


Difficulté de retenir au Québec les meilleurs chercheurs universitaires

Mme Jérôme-Forget: ...au niveau de l'éducation universitaire, par ailleurs, le discours que j'entends, c'est que la situation semble plus dramatique en dépit des statistiques que vous avez données. Est-ce qu'il y a de l'exagération? Je ne sais pas, mais il semblerait qu'on vit, en Amérique du Nord, et à cause d'un décision prise de ne pas hausser les frais de scolarité, ça peut se traduire éventuellement par une baisse de la qualité de l'enseignement au niveau des universités, ce qu'on me dit en tous les cas, que par rapport à ce qui se passe aux États-Unis notamment, pas seulement l'Ontario et le reste du Canada, mais on a quand même des universités, nos professeurs. Je veux bien que du côté francophone cela représente un moins grand problème possiblement, mais malgré tout je lisais, par exemple, le départ prochain d'un de nos bons économistes, Thomas Lemieux, qui est spécialisé dans l'économie du travail à l'Université de Montréal, à qui dans mon ancien emploi on faisait appel très souvent et qui quitte Montréal pour s'en aller en Colombie-Britannique, et il quitte avec son épouse qui est également économiste. Il y a plusieurs exemples comme ça. Et si nos universités ne sont pas capables, par une rémunération suffisante, capables de conserver les meilleurs talents, il est bien sûr que les meilleurs, c'est eux qui vont pouvoir partir.

Bon, il y en a qui vont rester. Moi, vous savez, je suis une Québécoise pure laine, je vais mourir ici, c'est bien entendu, mais il y a des jeunes qui peuvent se sentir attirés. Il semblerait qu'il y ait des recteurs qui trouvent extrêmement difficile de retenir certains cerveaux qui sont un atout incroyable au Québec. En dépit des statistiques que vous nous avez données précédemment, je sens qu'il y a de plus en plus un problème au niveau de nos universités. Je sens qu'il y a un problème qui devient plus crucial, et j'aimerais vous entendre sur ça parce que, je ne veux pas exagérer, bien sûr, plus qu'il ne le faut. Comme vous savez, je suis nouvelle en politique, alors, la démagogie, ça ne m'appartient pas beaucoup encore. Ça va venir. Apparemment il semblerait que... Je regarde mes collègues de part et d'autre et puis ça vient vite. Ça s'apprend vite. Alors..

Une voix: ...

Mme Jérôme-Forget: Oui, oui. Bien, vous êtes nouveau vous aussi, vous aussi vous trouvez ça nouveau, ce côté-là. Alors, je ne sais pas ce que vous en pensez, M. le ministre, mais le recteur, par exemple, de l'Université de Montréal, Robert Lacroix, je pense qu'il trouve ça extrêmement difficile, le cas de Thomas Lemieux. Puis il y a eu un scientifique – je ne rappelle plus de son nom – mais au niveau de la physique, quelqu'un qui est parti nettement pour les États-Unis. Bon, il y a des gens qu'on ne pourra pas retenir à cause des salaires absolument faramineux qu'on va donner à ces gens-là, mais je pense que j'aimerais ça vous entendre sur ça.

(16 h 30)

M. Landry: D'abord, je dois dire que j'ai eu, moi, une connaissance assez étroite du milieu universitaire, puis de ce que vous dites, j'en prends et j'en laisse. Je m'explique. J'ai enseigné dans un département de sciences administratives qui est le plus gros du Québec, qui est plus jeune qu'HEC mais qui est beaucoup plus gros, puis qui est extrêmement dynamique, puis on est situé sur la bouche de métro Berri-Demontigny, puis des gens descendent des gratte-ciel à 5 heures, puis ils viennent suivre nos cours de 6 heures à 9 heures. Et puis, dans ce département, c'est à ça que je veux en venir, un sur deux de mes collègues n'était pas né au Québec; ils étaient des Québécois et Québécoises issus de l'immigration. Je ne sais pas s'il y a un ratio plus élevé que ça dans n'importe quelle université au Canada, voire au monde. C'était un sur deux. Ce qui créait d'ailleurs une diversité fabuleuse, parce que un tel était diplômé de Harvard, tel autre de Grenoble, tel autre de Varsovie. C'était un brassage intellectuel fabuleux. Encore cette semaine, dans les journaux, il y a une polémique d'un Français qui se bat bec et ongles pour venir enseigner dans la même université. Alors, il n'y a pas juste du «partage», il doit y avoir du «rentrage» quelque part. Et ça, moi, ça ne me désole pas plus qu'il ne faut. Au contraire. Si Montréal est Montréal, c'est largement parce qu'une grande partie de nos Ph.D. sont formés aux États-Unis d'Amérique puis l'autre partie en Europe, puis, quand ils reviennent à la maison, ça fait un fabuleux brassage.

Il y a des gens qui ne pourront jamais, par ailleurs, résister à l'attrait de l'argent que sécrète la plus grande puissance de l'histoire humaine, les États-Unis d'Amérique, qui est située à quelques centaines de kilomètres au sud et qui, en termes de compétition purement financière, pendant des années prévisibles, en tout cas, va nous battre. Mais ce n'est pas la seule motivation. La députée l'a dit, elle est Québécoise, elle a même dit «pure laine». Moi, je n'emploie plus ce mot-là, je vais vous dire. Il se trouve que ce mot-là, il fait partie de l'industrie du textile, pas de la sociologie québécoise.

Mme Jérôme-Forget: C'était une image, M. le ministre.

M. Landry: Je le comprends, puis je ne prête aucune mauvaise intention à la députée. Et je lui souhaite de ne jamais être démagogue, c'est une très belle vertu. Je lui souhaite d'être 40 ans dans cette Chambre, si ça ne la fatigue pas trop, et de ne pas être démagogue après 40 ans. Et, mes collègues et moi, ça fait déjà un bout de temps, moi, je suis le doyen du Conseil des ministres.

Mme Jérôme-Forget: Et vous n'êtes jamais démagogue.

M. Landry: Non.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Landry: Si je vous disais ça, je le serais. Si je vous disais, ça, je le ferais. Pourquoi?

Mme Jérôme-Forget: J'apprécie votre franchise.

M. Landry: Parce qu'un accident est vite arrivé. Vous l'apprendrez vous-même, hein?

Mme Jérôme-Forget: D'accord.

M. Landry: Dans l'ardeur des combats, des fois, il y a des mots, il y a des flèches qui partent à la vitesse de l'éclair, des Scuds ou des Patriots. Dans notre cas, c'est plus des Patriots.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Landry: Mais, globalement, il faut chercher à servir le public dans ce métier-là avec un haut standard, ce que font mes collègues. Mon collègue de Bellechasse, c'est un ancien maire, c'est un ancien enseignant et directeur d'école, je crois. Il est venu ici pour servir le public. Je n'ai jamais entendu une parole démagogique sortir de sa bouche, et ça fait quand même un sacré bout de temps qu'il est ici. Notre collègue qui est assis à côté de lui, le député de La Prairie, vient d'arriver, lui. Alors, il a le même problème que vous: rester vierge.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Landry: J'espère qu'il le restera. Notre collègue de La Peltrie, bien, lui, il est entre les deux, puis ainsi de suite.

Une voix: La démagogie, ça s'apprend...

M. Landry: La démagogie, ça s'apprend, puis il y en a qui ont plus de talent que d'autres. Alors...

Le Président (M. Simard, Richelieu): Pourrais-je vous ramener, M. le ministre, au budget?

M. Landry: C'est ça. Oui, d'accord. Oui, on est loin du budget, mais c'est ça que je voulais vous répondre, là, que c'est vrai qu'on peut avoir peut-être, à Cornell, 350 000 $ par année, mais Cornell, c'est Cornell, puis, avant que l'Université du Québec à Trois-Rivières puisse payer ça, bien, il va falloir qu'on en vende des pâtes et papiers puis qu'on batte les États-Unis sur l'économie. Quand on les aura battus sur l'économie, on pourra les battre sur les salaires puis sur les moyens.

Je me souviens, j'enseignais aussi dans une université française... Il n'y a pas si longtemps que ça, j'enseignais comme professeur invité à Sup de Co, à Rouen, une excellente école aussi. Mes collègues disaient: Le gouvernement français nous donne les crédits à doses homéopathiques. Tu te rends compte, ça veut dire qu'ils n'avaient pas un rond pour faire marcher leur université. À doses homéopathiques. Alors, nous autres, on n'a pas mis l'argent à doses homéopathiques, on a donné un bon coup cette année, puis j'espère qu'on pourra faire mieux dans les années à venir.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Bon, il y a eu un petit déséquilibre dans l'alternance, mais c'est tout à fait normal. Je vais, avant de vous reconnaître, reconnaître la partie ministérielle pour une courte question, pour revenir à l'équilibre. Alors, M. le député de Bellechasse, dont on a vanté les mérites antidémagogiques.


Aide à la restructuration des lignes ferroviaires

M. Lachance: Ça va être très bref, M. le Président. Dans mes cours d'histoire, naguère, j'ai appris que le chemin de fer avait été un des éléments importants pour la création de ce grand pays où nos ancêtres avaient mis beaucoup d'espoir. On parlait du Grand Tronc d'une façon spécifique. Or, avec les années, on s'est rendu compte que le chemin de fer s'est désagrégé, un peu à l'image de ce grand pays où nos ancêtres avaient mis de l'espoir, pour faire en sorte que, aujourd'hui, les voies ferrées au Québec, il ne reste pas grand-chose. Dans ma circonscription, il en reste seulement une qui est encore active dans la partie nord. C'est celle qui est utilisée, entre autres, par Ultramar et qui permet la circulation entre l'ouest et l'est. Mais il y en avait beaucoup plus que ça auparavant.

Alors, je vois que M. le ministre des Finances, dans son dernier budget, a prévu une somme de 19 000 000 $ répartie sur cinq ans, dont 3 000 000 $ cette année, pour donner un coup de pouce à la réhabilitation, à la restructuration des lignes ferroviaires secondaires. Est-ce que je dois comprendre dans ça que le gouvernement du Québec est en train de se substituer au gouvernement central pour reprendre là où les fédéraux ont laissé tomber, malheureusement? Je dis malheureusement parce que notre réseau routier actuel n'avait pas été conçu pour le trafic intense qu'il connaît présentement avec toutes les conséquences que ça signifie. Est-ce qu'on est sur le point de voir arriver non seulement de l'argent, mais une politique ferroviaire au Québec qui serait la politique du gouvernement du Québec?

M. Landry: On va essayer de ne pas refaire les erreurs du gouvernement central, mais il y a du vrai dans ce que le député de Bellechasse vient de dire, nous allons assumer nos responsabilités quant aux chemins de fer qui ne sortent pas de notre territoire national. Et on en a quand même pour un total de... En lignes secondaires et principales, en lignes secondaires surtout, ce qu'on appelle les CFIL, et les chemins de fer des compagnies minières, il y a 1 772 km de chemins de fer, au Québec, qui sont sous notre juridiction. Je dis qu'on ne fera pas les erreurs du gouvernement fédéral parce qu'on ne va pas les nationaliser. On ne va pas les faire passer au patrimoine de l'État, ce qui ne déplaira pas à notre collègue de Marguerite-Bourgeoys, mais on va les aider. On va les aider, puis on va les aider d'une façon pragmatique.

Lors d'une récente visite dans le comté de Frontenac, des industriels m'ont démontré de façon claire et nette que la revitalisation du Québec Central était essentielle à leur expansion – pas de chemin de fer, pas d'expansion – parce que ça fait baisser leurs coûts de production rendu aux clients. Alors, c'est pour ça qu'on a mis dans le budget des aides considérables. Les chemins de fer dont il s'agit, c'est Québec Central, par exemple, c'est Chemin de fer Québec-Sud, c'est Chemin de fer Baie-des-Chaleurs. Alors, on va les aider à améliorer leurs voies, réhabiliter pour les raisons évoquées par le député: sauvegarde du patrimoine routier, moins de camions lourds par exemple, sécurité de la population. On sait, hélas, que, même dans les meilleures conditions, ces poids lourds sont souvent impliqués dans des accidents malgré toutes les mesures de sécurité qu'on essaie de prendre.

Il y a des régions telles que l'Abitibi qui, lorsque les routes sont bloquées ou impraticables, sont isolées sur le plan commercial et industriel. Le chemin de fer peut nous aider à vaincre ces difficultés, et, en plus, bien, ça favorise le développement régional parce qu'on a un transport économique des matières premières pondéreuses, le bois, les minerais.

Alors, c'est la raison pour laquelle on a fait cet effort pour les chemins de fer. Il y a une symbolique là-dedans, mais ce n'est pas l'essentiel. C'est vrai que le Canada, c'est un rêve de promoteur de chemin de fer parce que, encore aujourd'hui – peu de gens savent ça – 90 % de la population du Canada vit dans un long corridor de 150 km de large situé au nord immédiat de la frontière américaine. Alors, c'est sûr qu'un promoteur de chemin de fer qui regardait la carte du Canada, il disait: Voici un pays idéal pour moi. Et, d'ailleurs, ils ont dominé le Canada de toutes les façons. Il y en a eu des vertes et des pas mûres, hein, et ce n'était pas toujours marqué du plus haut niveau d'éthique. Mais, effectivement, c'est le passé. Maintenant, l'essentiel de l'activité ferroviaire des grandes compagnies du temps se fait dans l'Ouest du Canada, et d'ailleurs ils ont eu tendance à déménager leurs sièges sociaux vers Winnipeg, vers Calgary parce que, là, se trouve leur clientèle. Mais, nous, on a une clientèle locale importante, puis on a l'intention d'aider ces petites sociétés de chemin de fer à desservir l'économie.

(16 h 40)

Le Président (M. Simard, Richelieu): Merci, M. le ministre. M. le député de Nelligan.


Modalités de l'élimination de la dette des établissements de santé

M. Williams: Oui. Merci, M. le Président. Je prends comme acquis que toute la documentation du ministère des Finances est bel et bien faite, que chaque mot est pondéré dans son discours et que chaque chiffre est étudié, évalué, réévalué et vérifié partout. Et je voudrais juste mieux comprendre qu'est-ce qu'ils vont faire avec quelques chiffres, particulièrement dans le système de santé. Après quatre ans de coupures sévères, que nous avons tous vues – et je ne ferai pas un long discours sur ça...

M. Landry: Non, non, compris, compris, compris.

M. Williams: ... – on arrive, sur la page 12, III.a, avec 700 000 000 $ pour éliminer la dette des établissements. Je présume que le ministère des Finances et je présume que le ministre des Finances a étudié ça avant de prononcer son discours, qu'il y a une liste bien faite, assez claire de quels sont les établissements et c'est quoi, la dette, exactement, de chacun de ces établissements. Je voudrais que le ministre des Finances dépose aujourd'hui... qu'on puisse savoir exactement comment ils vont dépenser le 700 000 000 $, quels établissements, quels montants.

M. Landry: Bon. Alors, je vais vous dire effectivement que chaque mot et chaque chiffre du discours du budget est soigneusement étudié. Si vous voyiez les brouillons de ce discours, c'est monstrueux. Il paraît que Balzac raturait à quatre ou cinq fois par ligne, bien, on rédige d'une manière balzacienne, je vous le garantis.

M. Williams: C'est pourquoi je suis convaincu que vous avez une étude exacte de comment vous allez dépenser 700 000 000 $, établissement par établissement.

M. Landry: Oui. Puis je vais vous dire pourquoi on ne vous la donnera pas, la liste, et on l'a: parce qu'on s'est rendu compte dans notre étude pointue que certains endettés l'étaient largement par laxisme et par négligence, parce qu'ils n'avaient pas fait leur travail et avaient mal géré, et certains autres endettés n'y étaient pour rien, c'étaient les circonstances de leur situation géographique, de la moyenne d'âge dans leur aire de desserte. Alors, on n'a pas voulu humilier l'un ou l'autre et singulariser l'un ou l'autre. Ça aurait pu être tentant. Il y en a, ça nous aurait tenté en diable, tu sais, celui-ci et celui-là qui fait à peu près n'importe quoi, mais on a décidé que la ministre de la Santé allait discuter avec chacun d'entre eux. On lui a donné 700 000 000 $ pour boucher les trous puis 300 000 000 $ pour récompenser les bons et conforter les moins bons à revenir dans le droit chemin. Et ça, ça va se faire par cas individuels, direction d'hôpital par direction d'hôpital.

M. Williams: Mais, si je mets votre réponse maintenant avec vos mots, le troisième paragraphe de cette section: «La totalité du déficit des établissements, soit 700 000 000 $, sera épongée dès cette année»...

M. Landry: Oui.

M. Williams: ...vous allez éliminer les dettes de tous les établissements malgré le fait que vous-même avez juste dit que, dans quelques cas, c'est de la mauvaise gérance, ils n'ont pas suivi les règles, mais vous allez éliminer leur dette?

M. Landry: Oui.

M. Williams: Comme ministre des Finances, est-ce que vous êtes à l'aise avec le message que vous êtes en train de passer?

M. Landry: Je vais vous rappeler la phrase exacte, là, on a comparé ça aux écuries d'Augias. On n'a pas mis le mot «écuries», mais c'était ça. Et un des travaux d'Hercule, c'était de nettoyer les écuries d'Augias, puis il a détourné un fleuve pour le faire. Alors, c'est ça qu'on a fait, on a nettoyé, et puis même si ce n'était pas beau. Ce n'est pas toujours beau, nettoyer les écuries. Alors, c'est sûr qu'il y a des gens qui ont mal géré qui vont voir leur ardoise nettoyée pareil, mais on ne pense pas à ceux qui ont mal géré, on pense aux malades, parce que, si on ne nettoie pas l'ardoise, on va être obligés de faire des compressions, de faire des coupures, de payer des intérêts. Donc, au lieu de mettre l'argent dans la salle d'urgence, ils vont le mettre dans la salle du banquier pour payer leurs intérêts à la banque. Alors, on a décidé de vraiment passer l'éponge après mûre réflexion. Le problème que vous soulevez, là, nous nous le sommes posé à nous-mêmes, et là on a décidé ce qu'on a décidé, mais on a redonné 300 000 000 $ à la ministre de la Santé pour récompenser les bons gestionnaires, pour consolider les forts puis ramener les faibles.

M. Williams: Une des pierres angulaires de votre annonce de santé était le 700 000 000 $, et vous dites aujourd'hui que nous n'êtes pas capable de déposer la liste d'établissements malgré que vous avez référé vous-même que c'est effectivement... 80 % de ce montant est constaté dans seulement 10 établissements. On cherche la transparence, on cherche l'information. On part de 700 000 000 $ de fonds publics, de vos taxes. Et je comprends la réponse du ministre, qu'il y a des raisons pour plusieurs cas, une grande partie de ça, il y a quelques exceptions. Je ne veux pas avoir la liste avec un point noir à côté des mauvais, selon le ministre, mais la question comme député pendant le premier débat sur le budget devant la commission des finances publiques, c'est fort simple. 7 000 000 $, c'est beaucoup de nos taxes, je voudrais – sans commentaire, quels sont les bons et quels sont les mauvais – que le ministre dépose la liste qui est en arrière de ce chiffre de 700 000 000 $. Parce que j'apprécie la franchise du ministre que ça existe, une liste. Ce n'est pas une surprise, quand le ministère arrive avec 700 000 000 $, je présume qu'il y a une liste bel et bien faite. Je voudrais que le ministre dépose cette liste aujourd'hui.

M. Landry: Je vais accéder partiellement à votre demande.

M. Williams: Ah, on commence.

M. Landry: Je vais déposer un aggloméré, c'est-à-dire que vous allez savoir combien il y a d'établissements en surplus. Parce qu'il y en a qui sont en surplus, vous savez ça?

M. Williams: Oui.

M. Landry: Et pour quelles années, le surplus courant, le surplus accumulé pour 1994-1995, 1995-1996, 1996-1997, 1997-1998, 1998-1999. Je vais vous donner les établissements en déficit. Je vais vous en donner le nombre, leur déficit courant, leur déficit accumulé pour les mêmes années.

Et puis je vais vous dire les directives de la ministre: «Les régies régionales de la santé et des services sociaux devront convenir d'une démarche et d'objectifs chiffrés de retour à l'équilibre budgétaire des établissements en déficit, particulièrement ceux dans la situation financière la plus critique. De plus, des mesures incitatives et pénalisantes seront mises en place pour récompenser les succès et sanctionner les échecs.»

Et, enfin, je vais faire une suggestion. Aux crédits de la ministre de la Santé, si elle veut sortir établissement par établissement jusque dans le moindre détail, elle le fera. Au ministère des Finances, nous autres, on travaille par agrégat. La ministre de la Santé travaille plus au scalpel et au bistouri. Vous lui demanderez, puis, si elle pense qu'elle peut le faire, bien, elle le fera, puis vous aurez toutes les informations dont vous avez besoin.

Mme Jérôme-Forget: Concernant, M. le ministre, ce que vous dites – je m'excuse, deux secondes – c'est que c'est la régie régionale qui va essentiellement déterminer parce que la régie régionale, elle a suivi les efforts faits par les établissements, O.K.? Parce que...

M. Landry: Oui. «Les régies régionales de la santé et des services sociaux devront convenir d'une démarche et d'objectifs chiffrés de retour à l'équilibre budgétaire des établissements en déficit, particulièrement ceux dans la situation financière la plus critique.» Ça, c'est la situation normative, si on veut. Puis les chiffres, bien, ma collègue de la Santé fera ce qu'elle voudra avec, moi, je vous donne les agrégats.

M. Williams: Il n'y a aucun doute que la ministre...

M. Landry: Je sais que vous travaillez dans l'intérêt public et non pas par une curiosité malsaine. Alors, si vous travaillez dans l'intérêt public...

M. Williams: Excusez-moi, là.

M. Landry: Non, non, non. Je dis que ce n'est pas par une curiosité malsaine, vous travaillez dans l'intérêt public. Vous saisissez mes paroles telles qu'elles sont, là. Hein?

M. Williams: Non, non.

M. Landry: Non, mais c'est qu'il y a des femmes qui sont assez raides aussi, là. On a vu des débats, ici, assez corsés, hein?

M. Williams: Quand on parle de 700 000 000 $ de nos impôts, effectivement, je cherche l'information pour le bien-être de la population. Nous avons fait...

M. Landry: Oui. Et, moi, je vous en donne de l'information agglomérée et je vous dis que la meilleure source, la meilleure source, c'est ma collègue de la Santé. Et, si elle juge à propos de le faire, bien, à ses crédits – ça s'en vient, là, les études des crédits des ministères – vous aurez des heures et des heures pour aller jusqu'au moindre hôpital, jusqu'au centre hospitalier le plus prestigieux, puis vous saurez de quoi ça retourne si elle veut bien vous le dire.

M. Williams: Compte sur l'opposition officielle pour aller chercher l'information pour le bien-être de la population.

M. Landry: Parfait!

M. Williams: Mais la question était fort simple, et c'est assez important, les chiffres qu'on discute, le débat sur la santé, qu'on ne commence pas aujourd'hui... C'est très important pour le bien-être de la société, et on arrive avec un chiffre de 700 000 000 $ d'éliminer le déficit. C'est un geste qu'on peut faire un long débat. On peut passer les 10 heures de cette commission sur le principe d'éliminer les dettes, etc., que...

M. Landry: Absolument.

(16 h 50)

M. Williams: ...je n'insisterai pas de faire ça aujourd'hui. Je voudrais demander... Et, si j'ai besoin d'utiliser les lois d'accès à l'information, peut-être que j'ai besoin de le faire, mais j'ai pensé qu'avec le bon climat que nous avons commencé... La question n'est pas qu'est-ce la ministre va faire avec les crédits, j'ai voulu avoir la liste, établissement par établissement, qui est en arrière de votre chiffre, de vos mots, de votre budget. S'il y a une différence après les ajustements, effectivement, comme la députée de Marguerite-Bourgeoys a mentionné, que, avec les régies régionales, ils ont eu ajustement... Mais on arrive quand même avec le 700 000 000 $, là. Ce n'est pas la fin du monde, mais la question... Parce que je voudrais bien comprendre comment votre ministère arrive avec le chiffre 700 000 000 $, c'est pourquoi j'ai pensé que la chose la plus simple est de dire quel établissement, quel montant. Si j'ai bien compris, vous ne voulez pas déposer ça aujourd'hui malgré le débat sur le budget. J'ai pensé que la question est fort simple. Et on parle des établissements publics, avec de l'argent public. Moi, je dis que c'est une question de forte pertinence, et il n'y a aucune raison de ne pas déposer la liste.

Le Président (M. Simard, Richelieu): M. le ministre.

M. Landry: Nous autres, on ne gère pas les hôpitaux ni les régies régionales, le ministère nous envoie les chiffres. Il nous envoie les chiffres agglomérés, il nous envoie les chiffres en détail. Je vous les donne, les chiffres agglomérés. On l'a sous les yeux, là. On a fait une simple addition des facteurs que je vous ai dits tout à l'heure, puis ça arrive à 745 000 000 $, et puis c'est ça, les chiffres, puis c'est le ministère de la Santé qui est la meilleure source. Vous n'avez pas besoin, à mon avis, d'aller à l'accès à l'information, mais, si vous voulez y aller, allez-y tant que vous voudrez. Ça se peut très bien que ma collègue de la Santé décide de vous donner la liste en détail, et c'est elle qui va juger de ça. C'est elle qui est ministre de la Santé, ce n'est pas nous. Nous, on est dans l'argent, on n'est pas dans les soins de santé.


Document déposé

Le Président (M. Simard, Richelieu): Je tiens pour acquis que cette liste sera maintenant déposée au secrétariat de la commission.

M. Landry: L'aggloméré est déposé.

M. Williams: Une dernière question sur la santé, pas sur la liste. J'accepte qu'est-ce que le ministre a déposé maintenant et je vais lire avec beaucoup d'intérêt.

M. Landry: C'est ce que je vous ai lu. C'est déjà au Journal des débats , mais vous allez l'avoir chiffré en tableaux.

M. Williams: Oui, oui, et, compte sur moi, je vais demander nos questions à la ministre de la Santé et des Services sociaux. Page 14, premier paragraphe, vous avez parlé d'un établissement de santé d'une importance cruciale en raison de sa vocation spécifique et de ses responsabilités nationales et vous avez parlé du Centre hospitalier universitaire de Montréal, le CHUM, qui serait doté des équipements techniques et immobiliers dont il a besoin, soit sur ses trois sites, soit regroupés en un seul lieu, afin d'en faire rapidement l'un des établissements les plus performants de sa catégorie. Je trouve cette phrase fort intéressante, et c'est un poids lourd d'appui. Et, ce n'est pas un commentaire politique, c'est... Quand le ministre des Finances discute ça, c'est un message assez clair.

J'ai pensé qu'il va y avoir un autre paragraphe après ça sur le Centre universitaire de McGill et je voudrais juste demander au ministre... Il y a six lignes assez claires sur le Centre hospitalier universitaire de Montréal, est-ce que vous mettez la même importance, la même préoccupation, la même énergie et engagement à l'autre? Parce qu'il y a effectivement, comme vous le savez, deux réseaux, et, si on peut avancer les deux, là, je pense que ça va être fantastique pour le Québec.

M. Landry: J'espère bien que les deux projets vont se réaliser. Si le député était à ma place, il ferait la même chose que moi. Moi, j'ai mis l'insistance sur un grand centre hospitalier universitaire qui, potentiellement, dessert 82 % de la population. C'est le grand hôpital francophone du Québec, et c'est normal qu'on y mette cette attention. Et surtout qu'il y a un débat et qu'il y a une difficulté. Il y a même une querelle. Je n'ai pas entendu parler de tel débat, telle difficulté, telle querelle pour son équivalent anglophone. Alors, il est normal que je sois plus documenté sur l'un que sur l'autre parce que dans un cas il y a une problématique, dans l'autre on ne m'en a soumis aucune. Alors, c'est ça, l'explication.

M. Williams: Les deux projets ont le même appui du ministre des Finances?

M. Landry: L'autre, je ne le connais guère. Je n'en ai pas entendu parler, et puis il n'y a pas de querelle, apparente en tout cas, à moins qu'elle couve sous la cendre, tandis qu'au CHUM c'était malheureusement devenu, cette décision des trois sites, l'objet de dissensions graves. Vous avez vu ce qu'en ont dit certains médecins, il y a eu des sondages de faits. Alors, c'est le CHUM qui va décider, comme dans le cas de l'hôpital anglophone. C'est le CHUM qui va décider, mais, moi, je lui dis que, s'il se décide pour un site, le gouvernement du Québec l'appuiera totalement.

M. Williams: Oui. Et le message est assez clair dans votre budget, j'ai voulu juste donner une chance aujourd'hui d'aussi passer un message positif pour le projet qui vient de McGill parce que je pense que Montréal et Québec sont beaucoup plus forts avec les deux. Mais, effectivement, il y a une différence entre les deux.

M. Landry: Il paraît que c'est un bon projet et qu'il avance bien, le projet de McGill. Alors, s'il était à ma place... Autrefois, on disait: agir en bon père de famille. Aujourd'hui, ça ne se dit plus. On pourrait dire: agir en bons parents. Si le député était à ma place, est-ce qu'il se pencherait sur ce qu'il entend d'un projet qui est dans la controverse, la querelle et les problèmes ou sur un projet qui est solide et qui avance bien? Alors, j'ai eu le réflexe d'un bon parent. Quand j'étais à la Faculté de droit, on appelait ça «un bon père de famille», mais c'était discriminatoire, et aujourd'hui je corrige mon vocabulaire.

M. Williams: Merci.

M. Landry: Je suis, de ce point de vue, «politically correct».

Le Président (M. Simard, Richelieu): De ce point de vue.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Williams: Ha, ha, ha! Merci pour cette correction, M. le Président.

M. Landry: Je l'ai dit, je l'ai dit.

M. Williams: Oui. Et mon...

M. Landry: Parce que la rectitude politique, pour moi, ce n'est pas un idéal dans la vie. Quand tu as quelque chose à dire, il faut que tu le dises.

M. Williams: Effectivement.

M. Landry: Ça ne sert à rien de prendre 56 000 formules pour camoufler sa pensée et pratiquer la langue de bois qui était la caractéristique d'une chose que vous abhorrez comme moi, l'Union soviétique, aujourd'hui disparue.

M. Williams: Aujourd'hui, je voudrais juste passer le message au ministre qu'effectivement il y a deux excellents projets, et on doit s'assurer comme société que les deux avancent le plus vite possible.

M. Landry: Eh oui, surtout quand, dans un endroit aussi avancé que le Canada dit l'être, on a fermé le dernier hôpital francophone de l'Ontario, exemple abject s'il en fut. Le Québec...

M. Williams: Si vous voulez commencer ça, M. le ministre, vous avez fermé le dernier hôpital anglophone dans la ville de Québec.

M. Landry: ...on doit avancer... Pardon?

M. Williams: Ne commence pas.

M. Landry: Ah oui, je commence et je le redis!

M. Williams: Vous avez fermé le dernier hôpital anglophone à Québec.

Une voix: Il n'est même pas fermé.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Bon. Je pense que les tours de parole...

M. Landry: Il n'est pas fermé.

Le Président (M. Simard, Richelieu): ...s'accordent par le président. Alors, je n'ai donné la parole à personne et je considère...

M. Landry: Les Franco-Ontariens sont devant les tribunaux pour conserver leur hôpital, mais le Québec n'agira jamais de cette manière par rapport à sa minorité anglophone, ça, c'est sûr.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Alors, je demande donc à la partie ministérielle. M. le député de La Peltrie, à vous la parole.


Croissance des exportations vers le sud

M. Côté (La Peltrie): Merci, M. le Président. Ma question à M. le ministre va porter sur l'exportation. Vous déclarez dans le discours du budget que la décennie qui s'achève a été celle du succès des échanges Québec–États-Unis, et puis que la prochaine décennie devrait être la décennie québécoise des Amériques et nous permettre de pousser plus loin vers le sud nos exportations, et puis que l'objectif, c'est de tripler le nombre d'entreprises qui exportent vers le sud. Même de ça, vous consacrez 5 000 000 $.

Et aussi, vous créez l'Office Québec-Amériques pour la jeunesse. J'aimerais que vous me parliez un petit peu de l'objectif de créer cet Office Québec-Amériques pour la jeunesse parce que... Puis je voudrais savoir aussi... Bon, là, vous voulez aller plus vers le sud, est-ce que... Aux États-Unis, j'imagine qu'il y a encore un potentiel à exploiter qui est énorme, est-ce que tout ça va se faire quand même en parallèle?

M. Landry: Bon. D'abord, 80 % de nos exportations internationales sont dirigées directement vers les États-Unis d'Amérique, et c'est un formidable marché, il est en expansion et il est en croissance d'à peu près 15 % par an. Nos ventes nord-sud croissent d'à peu près 15 % par an, alors que nos ventes est-ouest sont à peu près stables à 2 %, 3 % par an. Si on enlève l'inflation pour rétablir en volume plutôt qu'en valeur, vous voyez que l'avenir est au sud. C'est d'ailleurs un des grands reproches que je fais au Canada et à la «National Policy» du premier premier ministre du Canada John A. Macdonald, il nous a coupés de notre commerce naturel. Le Québec serait beaucoup plus riche, beaucoup plus prospère, le Québec ressemblerait beaucoup plus à la Nouvelle-Angleterre en termes de prospérité si on ne nous avait pas coupés notre commerce nord-sud, ce qui nous a fait perdre la moitié de notre population. J'ai déjà dit ça à plusieurs reprises.

Alors, l'effort américain, maintenant que le libre-échange est établi – pas depuis longtemps parce qu'il y avait un calendrier d'application de 10 ans, puis, peu à peu, on a gagné nos épaulettes aux États-Unis – là, on doit aller plus loin, plus loin au sud. Et notre démarche, elle est inspirée du formidable succès des relations économiques franco-québécoises. Et les relations économiques franco-québécoises, elles n'ont pas commencé par l'économie, elles ont commencé par la culture, elles ont commencé par la volonté politique et l'Office franco-québécois pour la jeunesse. C'est à ça que je voulais en venir.

(17 heures)

Je crois qu'à ce jour 70 000 Québécois et Québécoises, qui, au début, étaient jeunes mais le sont moins aujourd'hui, parce que c'est des adultes maintenant puis c'est des gens de 50 et même 60 ans, sont allés en France et autant de jeunes Français, Françaises sont venus ici. Ça a tissé entre les deux pays des liens d'une puissance incroyable. Il y a des stagiaires, ex-stagiaires de l'Office franco-québécois pour la jeunesse qui sont restés en contact toute leur vie, et maintenant c'est leurs enfants qui sont en contact. Voyez-vous ce que ça peut tisser?

Alors, c'est pour ça que maintenant les relations économiques franco-québecoises sont à un flot extraordinaire. Toutes les grandes multinationales et transnationales françaises sont établies, d'une façon ou d'une autre, au Québec. Toutes les grandes multi ou transnationales québécoises – je pense à Quebecor, à Bombardier, à Cascades – sont établies en France, de telle sorte que l'investissement français au Québec est probablement inférieur par tête à l'investissement québécois en France, donc une solide relation d'égal à égal. C'est ce qu'on voudrait établir, sur quelques décennies, avec l'Amérique latine.

Il est naturel que le Québec puisse facilement travailler avec les Latino-Américains. Nous sommes nous-mêmes des Latino-Américains. Nous sommes les Latins du Nord. «Somos los Latinos del Norte». Et ça, c'est une circonstance extraordinaire pour tisser des liens qui deviendront de plus en plus économiques et matériels. Alors, office pour les relations avec la jeunesse de l'Amérique latine, qui pourrait, à terme, être une de nos offensives commerciales les plus payantes et les plus lucratives, parce qu'il y a du monde dans l'Amérique latine. Il y a autour de 50 000 000 de Français. Rien qu'au Mexique, il y a 85 000 000 d'habitants. L'Argentine, c'est un pays de la taille du Canada en population, ou à peu près. Le grand Brésil, ça s'en va vers 200 000 000 d'habitants.

Alors, si on réussit le moindrement à faire une solidarité latine, culturelle d'abord et économique par la suite, on va prendre place dans ce qui est en train de se constituer et qui est une vaste zone de libre-échange et un espace d'intégration économique du cercle polaire à la Terre de feu. C'est la conférence de Miami qui l'a proclamé. Pour l'instant, c'est une théorie, bien que nous ayons au nord l'ALENA, qu'ils aient au sud Mercosur où le grand Brésil, avec l'Argentine et l'Uruguay et le Paraguay sont dans une zone d'intégration économique qui va ressembler à l'Europe. Si le Québec réussit à se connecter là-dessus comme il s'est connecté à l'Europe, on va avoir des dividendes extraordinaires. C'est pour ça que c'est un bon placement.

M. Côté (La Peltrie): Et puis, vous parlez aussi de crédits de 1 500 000 $ pour accentuer la cadence de pénétration des PME sur tous les marchés étrangers. Est-ce qu'il y a des secteurs où c'est privilégié en termes de PME qui peuvent utiliser ce créneau-là?

M. Landry: Pas vraiment. Souvent l'attaque PME, c'est, pour parler espagnol encore une fois, «all out», c'est-à-dire qu'on ne sait jamais avec les PME ce qui va arriver. Une bonne idée est une bonne idée, et puis on les aide pratiquement tous. Notre but, c'est 2 000 de plus d'exportatrices en l'an 2000. Puis il va y avoir des choses des fois en apparence incongrues. Tout le monde connaît cette gastronomie québécoise qu'on appelle vulgairement des oreilles de crisse. Plusieurs pensent que c'est typiquement québécois et qu'il n'y a jamais personne dans le monde entier qui a mangé une pareille affaire. Archifaux. En Amérique latine, ils mangent des oreilles de crisse, ils appellent ça des «cicerones». Or, il y a une entreprise, croyez-le ou non – c'est vrai, là – qui s'est aperçue de ça que des «cicerones» et des oreilles de crisse, c'était la même chose. Il fait maintenant un fabuleux commerce Nord-Sud d'oreilles de crisse. Alors, tu ne peux pas être sélectif. Ça, tu ne peux pas y penser. Tu sais, si j'avais fait une politique au ministère de l'Industrie et du Commerce...

Mme Jérôme-Forget: Ça, je suis d'accord avec vous, M. le ministre.

M. Landry: ...j'aurais oublié. Je n'aurais pas pensé aux «cicerones».

Mme Jérôme-Forget: Vous voyez.

M. Landry: Alors, c'est ça, la réponse. On attaque des quatre fers et tant qu'on peut, puis à un moment donné il va y avoir un succès extraordinaire dans des domaines en apparence anodins. Merci.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Merci, M. le ministre. La parole maintenant est au député de Notre-Dame-de-Grâce.


Familles touchées par l'augmentation des montants pour frais de garde

M. Copeman: Merci, M. le Président. J'aimerais à ma façon contribuer très humblement à l'édification du ministre des Finances...

M. Landry: Ah! Tout est encore possible.

M. Copeman: ...en ce qui concerne l'hôpital Montfort. Moi, je suis convaincu qu'il doit savoir que son ami David Levine, dont l'arrivée un peu controversée à l'Ottawa General est maintenant beaucoup plus solide, travaille présentement à un plan d'amalgamation de services de sauvetage pour l'hôpital Montfort, que le dossier avance très bien... assez bien, je dirais, assez bien. Ça s'adonne, M. le Président, que de temps en temps nous sommes en communication avec des homologues de notre province voisine, l'Ontario. Alors, c'est effectivement par des échanges avec ces homologues qu'on peut constater de telles choses. Alors, c'est sûr que l'affaire n'est pas réglée, mais il y a de bons espoirs. Il y a de bons espoirs, M. le Président. L'Hôpital général d'Ottawa, je pense, va travailler un plan qui pourrait satisfaire, à bien des égards, la demande de la communauté.

M. le Président, je voulais en discuter un peu avec le ministre des Finances, la question des mesures, dans le budget, qui touchent la famille, en tant que porte-parole de l'opposition officielle en matière de famille et enfance. D'emblée, M. le Président, juste pour démontrer à quel point je suis attentivement les paroles du ministre des Finances, il a dit, l'année dernière, lors de son discours du budget, à la page 19, et je le cite: «C'est pourquoi, afin de faire du Québec une économie d'avant-garde et pour répondre aux attentes de nos concitoyens, le gouvernement s'engage, après l'atteinte du déficit zéro, à ce que la plus grande partie de sa marge de manoeuvre serve à poursuivre la réduction des impôts et des taxes.» C'était une déclaration du ministre des Finances.

On dit, en anglais, M. le Président: «Only a fool doesn't change his mind», et c'est bon, c'est bon de temps en temps de changer d'opinion. Mais, semble-t-il, cette année, le ministre des Finances a changé d'opinion, a changé de... Bien, si le député d'Abitibi, là, pense que la plus grande marge de manoeuvre a été consacrée à une réduction d'impôts dans le budget, il va m'éclairer, je suis convaincu de ça. Oui, oui, je n'en doute pas. Encore une fois, pour citer le vice-premier ministre qui a cité Pauline Julien, très éloquemment: «C'est par amour que nous changeons d'histoire, c'est par amour que nous changeons l'histoire.» Il aurait pu également indiquer: C'est par pragmatisme qu'on change d'opinion. Ce n'est pas mauvais. Ce n'est pas mauvais, c'est une bonne chose, de temps en temps, de changer d'opinion. Moi, je pense que le ministre des Finances a changé d'opinion. Il a décidé...

M. Landry: Donc, le député s'apprête à devenir souverainiste.

M. Copeman: Ah! Il n'y a pas grand danger de ça, M. le ministre des Finances.

M. Landry: Donc, il ne change pas d'idée, le député.

M. Copeman: Il n'y a pas grand danger de ça. M. le Président, on aurait pu s'attendre à des baisses d'impôts plus importantes annoncées par le ministre des Finances; il a annoncé une réduction d'impôts de 400 000 000 $ à partir du 1er juillet, dont les modalités seront déterminées à une date ultérieure, après consultation, ainsi de suite. Une question générale un peu plus précise pour le ministre des Finances: Parmi, à peu près, la cinquantaine de mesures fiscales contenues dans les renseignements supplémentaires sur les mesures du budget, les mesures affectant les revenus, une cinquantaine de mesures, on en trouve deux autres – il y a évidemment la réduction d'impôts générale pour tout le monde, de 400 000 000 $ – sous la rubrique Amélioration de l'aide fiscale aux familles. Deux autres. Il y a une hausse de 2 000 $ à 3 000 $ du crédit d'impôt remboursable maximal pour frais d'adoption, qui devrait toucher un nombre limité de familles québécoises. Ça ne peut pas toucher des centaines de millions...

M. Landry: Ça, c'est sûr.

M. Copeman: C'est sûr. Alors, c'est peut-être une bonne amélioration, mais avec une application très restreinte. Je pense qu'on sera d'accord là-dessus.

(17 h 10)

Une deuxième, qui est la hausse des montants maximaux des frais de garde d'enfants admissibles. C'est celle-là qui m'intrigue un peu plus parce que, pendant toute l'implantation des garderies à 5 $, nous, on avait plaidé, de notre côté de la table, de la Chambre, qu'il y avait d'autres choix familiaux que la garde, que le développement des places à contribution réduite était une bonne chose – personne ne nie ça – mais qu'il y avait des familles qui font d'autres choix. Elles font d'autres choix. Elles font le choix de garder leurs enfants chez eux avec une gardienne, avec une voisine, et ainsi de suite. Et nous, on avait toujours dit: C'est important que ces familles-là reçoivent de l'aide fiscale de l'État. Moi-même, mes enfants sont tous passés par des garderies à but non lucratif – maintenant des CPE – sauf en bas âge, parce qu'en bas âge moi et mon épouse nous avons décidé qu'on ne voulait pas que mes enfants soient dans un lieu de garderie qui est un peu plus institutionnel en bas de 18 mois. C'est un choix qu'on a fait, choix légitime. Ça marche très bien pour certaines familles mais, nous, on a fait le choix de garder les enfants chez nous. Et je pense que c'est important que l'État donne un certain support financier à des familles qui font un choix autre que de faire garder leurs enfants en installation ou même en milieu familial par un CPE.

Là on voit qu'il y a une hausse des montants maximums. Est-ce que le ministre des Finances peut me dire combien de familles vont être touchées par cette hausse-là, dans un premier temps? Moi, je pense, M. le Président – je le vois un peu au pif – que ça devrait être assez minime parce que... Peut-être pour un enfant, ça pourrait être impressionnant, mais quand on tombe à un deuxième puis à un troisième enfant... Là, j'ai une famille de trois, moi. Je n'ai jamais payé à la limite de mes maximums mes frais de garde pour trois enfants. Jamais. Je serais curieux de savoir combien de familles touchent le maximum avec un certain nombre d'enfants.

Et je pose la question parce que, M. le Président, dans le même cahier, on trouve, à la page 1 de la section 4, que cette mesure a un impact sur le fardeau fiscal, pour une année, de 2 000 000 $. J'imagine que, ça, c'est la part pour les familles. Mais l'impact financier pour le gouvernement du Québec est nul. Nul. Probablement parce qu'il y a de moins en moins de familles qui réclament, il y a de moins en moins de familles qui réclament des frais de garde à cause de l'implantation des garderies à 5 $. Si c'est le cas, j'aimerais bien qu'on m'explique. Comment se fait-il que, dans un premier temps, semble-t-il, les familles québécoises vont sortir gagnantes de 2 000 000 $, mais avec aucun impact financier pour le gouvernement? Et combien de familles vont toucher cette amélioration dans les montants maximums pour frais de garde?

Le Président (M. Simard, Richelieu): M. le ministre.

M. Landry: Je vais essayer de répondre à à peu près tout ce que le député a évoqué, puis je vais aussi utiliser les experts qui m'accompagnent pour aller même dans des détails plus pointus.

Mais une chose très générale. Si je comprends bien, son introduction était une apologie de la liberté de changer d'idée, et même de la vertu de changer d'idée quand c'est nécessaire. J'y souscris. Et même, c'est l'histoire de millions et de millions de Québécois et de Québécoises sur une option politique fondamentale. Nous étions tous fédéralistes il y a 40 ans. Moi, je ne sais pas s'il le sait – il sait que David Levine est mon ami, alors, il connaît peut-être d'autres détails de ma vie personnelle – j'étais adjoint exécutif d'un ministre libéral pendant un certain nombre d'années, qui s'appelait René Lévesque. Et, à cette époque-là, la vision du Québec que nous défendons aujourd'hui était marginale. Il ne devait pas y avoir 2 % de souverainistes. Donc, il y avait 98 % de fédéralistes. Aujourd'hui, il y a à peu près 50 % de souverainistes, à peu près 60 % chez les francophones. Ça veut dire qu'il reste 50 % de fédéralistes. Si vous suivez les courbes, nous sommes partis de presque rien pour presque la majorité, et vous êtes partis de presque tout pour presque la minorité. Ça veut dire que votre apologie au changement d'idée, M. le député, il y a des millions de Québécois et de Québécoises qui vont en être ravis.

Et, à mon avis, le mouvement n'est pas terminé parce qu'il y a une lourde tendance, là. Quand on parle de 100 % puis qu'on est rendu à 50 %, c'est qu'on tombe vers le sol avec la vitesse d'un Boeing dont les quatre moteurs seraient arrêtés, tandis que, quand on part de presque 0 % puis qu'on croise le 50 %, c'est qu'on a un puissant vecteur, comme une fusée qui nous pousse vers plus haut encore. Donc, parfait, changeons d'idée.

Vous avez parlé aussi de mon ami David Levine à qui on a infligé des souffrances invraisemblables, des menaces physiques à lui, à sa famille. Il n'y a rien qu'on ne lui a pas fait, avec un degré de fanatisme que je n'ai jamais vu dans notre brave Québec. Quand j'ai vu les saloperies qui ont été faites à David Levine, j'ai été fier du Québec. Je ne me souviens pas dans l'histoire du Québec de quelqu'un qui a été à ce point persécuté pour ses convictions politiques. J'aime mieux que ces saletés soient de l'autre côté que du nôtre.

Mais il a mentionné Levine pour parler surtout de l'hôpital Montfort. Bien, si le député est satisfait de ce qui se passe à l'hôpital Montfort, je lui conseille de ne pas trop s'en vanter auprès des Franco-Ontariens qui, eux, ne sont pas satisfaits du tout. Mme Lalonde – je l'ai vue encore il n'y a pas si longtemps à la télévision, je ne sais pas si c'était en reprise ou autrement – n'était pas contente. Ils sont devant les tribunaux. Est-ce que les anglophones du Québec, dans quelque partie du Québec, ont été obligés d'aller devant les tribunaux pour avoir un hôpital? Ils ont des hôpitaux, au pluriel, et des grands, et des magnifiques. Et d'ailleurs, la notion...

M. Copeman: D'ailleurs, M. le ministre, si vous me permettez, effectivement, Julius Grey a tenté une poursuite contre le gouvernement du Québec à l'égard de la fermeture de plusieurs hôpitaux anglophones.

M. Landry: Oui, mais on fermait...

M. Copeman: On a été devant les tribunaux, effectivement.

M. Landry: Oui, mais on fermait des hôpitaux francophones en plus grand nombre encore. Ce n'est pas du tout... On a parlé de démagogie, notre collègue en parlait tout à l'heure. Si vous comparez la fermeture de Montfort aux fermetures d'hôpitaux francophones et anglophones nécessaires pour réussir le virage ambulatoire, là on est dans deux ordres d'idées. J'espère que, de bonne foi, le député...

M. Copeman: Tout à fait. Je voulais juste corriger le ministre des Finances quand il a dit: les anglophones n'ont pas été devant les cours. Nous étions devant les cours.

M. Landry: Pas pour la même chose. Pas parce qu'on est en train de vous fermer le dernier hôpital anglophone du Québec. Ce n'est pas notre intention, le Québec ne le fera jamais. J'espère que jamais personne au Québec ne pensera à ça, ni de fermer le dernier, ni l'avant-dernier, ni les autres. D'autant plus que la notion s'estompe. Un des grands hôpitaux anglophones, soi-disant, du Québec, qui est le Montréal Neurological Institute, l'Institut neurologique de Montréal, a comme chirurgien-chef un homme extrêmement brillant qui fait école dans le monde entier, qui était mon confrère au Séminaire de Joliette et qui s'appelle le Dr André Olivier, et ainsi et suite. Alors, le Québec et l'Ontario, fort heureusement, ce n'est pas la même chose, puis j'espère qu'on ne les suivra jamais là-dessus. Mais Mme Lalonde n'est pas contente.

Revenons aux impôts. Notre promesse électorale était de baisser les impôts avec l'essentiel de notre marge de manoeuvre une fois satisfaites les urgences en santé et en éducation, quand le déficit zéro adviendrait. Quand on a fait cette promesse, le déficit zéro, il était pour 1999-2000. Vous vous souvenez de la courbe: on part de 6 et puis on s'en va à 3,9, 3,2, 2,2, 1,2, zéro. L'économie performe beaucoup plus qu'on pensait. Le 1 100 000 000 $ de déficit prévu pour 1998-1999 est effacé par la performance de l'économie qui nous en rapporte 1,3. Puis, en plus, on a ce qu'on appelle un «windfall profit», la péréquation fédérale rajustée sur les chiffres de 1997, qui nous permet de faire des choses qui n'auraient pas été pensables autrement. Mais notre engagement, c'était 1999-2000. Après le déficit zéro, notre marge de manoeuvre sera consacrée, pour l'essentiel, à la baisse des impôts. Je crois que nous allons réaliser cette promesse, parce que 400 000 000 $ d'impôts pour l'an 2000, ça voudrait dire qu'on aurait une marge de manoeuvre de peut-être 800 000 000 $, disons, si on en prend l'essentiel, autour de 800 000 000 $. J'espère qu'on aura 1 200 000 000 $, et j'espère qu'on aura plus. Si on a plus, on saura quoi faire. Nous ne sommes pas à convaincre sur la nécessité de baisser les impôts. Et vous avez raison aussi de dire que nos deux petites mesures de cette année, ce n'est pas la révolution fiscale.

L'adoption internationale, c'est un phénomène à encourager, c'est un dévouement extraordinaire, c'est aussi une grande autosatisfaction, par ailleurs. Les parents qui adoptent, ils sont aussi les bénéficiaires de cette adoption; le député lui-même a des enfants, je n'ai pas besoin de lui faire de dessin, ni à personne. Mais c'est combien de familles qui vont en profiter? Mille par année. Mais ça fait ça de pris.

(17 h 20)

Quant à la question des garderies, il y avait des choix à faire. Moi, je pense que les garderies à 5 $, c'est un choix fantastique, et que ça accommode le plus grand nombre, et que, dans la vie de certaines femmes en particulier, c'est révolutionnaire. À mon âge, nos couples se débrouillaient comme ils pouvaient, fondaient des garderies à but non lucratif. J'ai même vu une fois – je n'étais pas content ce coup-là – une de mes petites filles, elle devait avoir trois ans, à la télé, elle tenait une pancarte puis elle manifestait en disant: «On veut des garderies populaires.» Et j'ai dit: «Un instant, là. On a beau être à gauche, on n'est pas pour commencer à trois ans.» Mais c'était ça dans le temps. Aujourd'hui, ce n'est plus ça. On en a des garderies populaires à 5 $, puis je trouve ça extraordinaire. Est-ce que ça a laissé dans l'ombre certains parents méritants? On a essayé d'attaquer, là, un peu par la bande, mais ça va faire... Encore là, ce n'est pas un révolution. Voulez-vous expliquer exactement ce qui va arriver avec notre mesure? M. Jean St-Gelais, sous-ministre associé, Finances.

M. St-Gelais (Jean): Oui. La mesure consiste essentiellement, pour les parents qui n'ont pas accès aux centres de la petite enfance, les garderies à 5 $, à augmenter au maximum des frais admissibles pour faire en sorte que le coût par jour, quand on calcule le nombre moyen de jours qui est utilisé en garderie... Présentement, on estimait qu'on couvrait jusqu'à environ 19 $ par jour, alors que le coût moyen est de 22 $ au Québec. Et, en augmentant le maximum de 5 000 $ à 7 000 $, on va se trouver à couvrir jusqu'à 25 $ par jour. Donc, ceux qui ne sont pas dans les garderies à 5 $, on s'assure que, lorsqu'ils ont à payer 22 $, on couvre, et ceux qui ont à payer plus, on couvre jusqu'à 25 $. Ça nous coûte 2 000 000 $. On va être en mesure de vous fournir – peut-être pas aujourd'hui – les statistiques sur le nombre de ménages qui vont y avoir droit. Le coût de 2 000 000 $, ce n'est pas juste une simple règle de trois parce que ce ne sont pas tous les ménages qui atteignent le maximum du crédit. Alors, quand on augmente le maximum, c'est vrai que le coût n'est pas élevé. Et puis on va s'assurer que les années financières, on va demander qu'on fasse les vérifications, qu'on puisse vous transmettre, si vous le désirez, tous les tableaux sur les clientèles, les hypothèses qu'on a retenues, puis...

Le Président (M. Simard, Richelieu): Oui, M. St-Gelais. Mme la porte-parole, pour une question complémentaire.

Mme Jérôme-Forget: Bon. Je suis sûre que vous êtes au courant de tout le débat, parce que, dans mon ancienne vie encore, comme j'ai beaucoup écrit, M. le ministre, mais, ça, ce n'est pas moi qui l'avais...

M. Landry: Je m'apprête à publier une anthologie de vos oeuvres. Ha, ha, ha! Avec des morceaux choisis, évidemment.

Mme Jérôme-Forget: Ah! bien oui. Il faut tous les lire, par exemple.

Il y a eu une étude, justement pour discuter de ça, faite par l'institut de recherche où j'étais, une institution politique publique, par Philippe Mulligan, Robert Barry, qui est un ancien fonctionnaire que vous connaissez peut-être, et Pierre Lefebvre. Et je ne veux pas l'apporter simplement, mais je pense qu'il y a une question fondamentale à se poser pour les familles, justement au niveau de l'équité verticale, qu'on appelle dans le jargon, c'est-à-dire de prendre de l'argent des gens qui n'ont pas d'enfants et de le donner à des gens qui ont des enfants. Puis pas le donner seulement à un certain groupe d'âge, mais le donner à toutes les personnes qui ont des enfants. Parce qu'il y a un coût énorme à avoir des enfants, pour les familles. Et c'est ça que je ne vois pas traduit dans le document, si on peut parler d'absence, là. Une discussion à cet effet, qui aurait pu être salutaire pour améliorer et enrichir le débat à cet égard-là... Je ne sais pas si, M. le ministre, vous voulez répondre ou si vous voulez que...

M. Landry: D'abord, je suis pas mal sûr que cette discussion, on va l'avoir ici-même quand le public va venir témoigner devant notre commission. Il y a sûrement des parents dans cette situation qui viendront représenter ou individuellement nous dire ce que vous dites là. Et on va regarder, mais il ne faut pas oublier que la courbe des impôts au Québec... Les impôts sont lourds au Québec, les plus lourds au Canada sur les personnes physiques, on le sait, mais la courbe québécoise est la plus sociale et la plus socialement juste de toutes les courbes au Canada et, partant, en Amérique. Je vous le réitère, le revenu d'intersection – c'est-à-dire quand la courbe québécoise rencontre la courbe ontarienne – pour un ménage ayant deux enfants et un revenu de travail, se situe à 46 672 $. C'est-à-dire que ceux qui sont en Ontario, qui sont dans cette condition-là, ils envient le même ménage au Québec. Ceci dit, c'est l'ensemble qu'il faut tasser vers le bas. Je ne suis pas content que nos impôts soient élevés comme ça, puis on va les baisser, mais je suis assez fier que les plus démunis et les moins fortunés soient mieux traités que les autres.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Je pense que, là, il y a une question de gestion de temps interne, mais je peux vous accorder une petite question.

M. Copeman: Juste sur la réponse du sous-ministre, parce que c'est ça qui m'intéresse à ce moment-ci. D'ailleurs, il faut, je pense, faire attention parce qu'il y a une effarante combinaison des choses qui peut exister à un moment donné. Là, moi, j'ai une fille qui bénéficie de la garderie à 5 $ depuis le 1er septembre 1998, alors, pour une partie de l'année fiscale, elle est tombée dans le régime du crédit d'impôt remboursable de frais de garde; pour l'autre partie du régime, elle est couverte dans le 5 $. Mes deux autres garçons qui sont de l'âge scolaire, je paie pour des frais de garde après l'école parce qu'ils ne sont pas éligibles, où je suis, pour les frais de garde en milieu scolaire de 5 $. Il y a la période estivale où il n'y a rien qui s'applique, sauf les frais de garde. Alors, il y a une combinaison de plusieurs facteurs qui fait en sorte que ce n'est pas facile de jouer dans la fiscalité. Moi, je viens, M. le Président, de compléter mes déclarations d'impôts.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Je pensais que c'était une consultation fiscale que vous demandiez. Ha, ha, ha!

M. Copeman: Bien, j'en ai besoin, M. le Président. Je peux vous dire une chose, je sais que le ministre est particulièrement fier de son régime simplifié, et je lui donne raison sur certains points. Je ne sais pas si, lui, il fait ses propres déclarations d'impôts. Moi, je le fais pour moi, mon épouse, à cause... Les frais de garde et ainsi de suite, c'est toute une job, c'est toute une job. On a peut-être fait du progrès, il y en a encore beaucoup à faire. Mais ce n'est pas là le sens de la question. Quand le sous-ministre a dit: On augmente le maximum pour tenter d'être capables de couvrir, à 22 $, les frais dans une période de garde, qui est évaluée à 261 jours par année, c'est ça qu'on paie dans les 5 $. Évidemment, on ne récupère pas toute la somme, on récupère jusqu'à un maximum de 50 % selon... En tout cas, je sais que le minimum est de 23 %, je pense. Je suis dans la catégorie où je récupère 23 %. Je pense que le maximum est de 50 %. Je suis convaincu que le ministre le sait, on ne peut pas prétendre qu'on récupère 100 % de ces frais parce qu'ils sont juste récupérés à 50 % comme maximum.

Alors, c'est vrai qu'on a augmenté le plafond. Je serais curieux de voir, et peut-être qu'à l'avenir le ministre pourra déposer le nombre de familles qui seront touchées par cette mesure. Je penserais, juste intuitivement, que c'est relativement modeste.

M. Landry: On pense ça aussi mais, s'il y en avait quelques milliers qui étaient contents, on serait contents pour eux. Il ne faut pas minimiser l'effort parce qu'il est petit. Effectivement, quand vous étiez au pouvoir, je faisais mon rapport d'impôts moi-même. C'était d'une complexité extrême, formules sans fin. J'aurais aimé vivre sous notre propre régime et utiliser la formule simplifiée. Mais depuis que je suis ministre des Finances, on m'a déconseillé – je pense, c'était sage – de faire mon rapport d'impôts moi-même. Alors, je confie ça à des professionnels, de façon que toute sécurité soit assurée et ce sont des professionnels suivant leur discipline. Mais j'aurais aimé ça l'avoir, la formule simplifiée, dans le temps, mais elle n'existait pas, on n'était pas encore arrivés.

Pour le reste, on va l'avoir, la discussion en profondeur, pendant des heures et des heures et des heures.

M. Copeman: Et des heures.

M. Landry: Je l'espère. Puis les gens viendront, ils prendront place, puis ils nous diront nos quatre vérités et les leurs.

M. Copeman: Et on y sera.

M. Landry: Ah! ça, je n'en doute pas.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Je signale, d'ailleurs, à ce sujet, que le comité directeur se réunit la semaine prochaine pour déjà commencer à établir un début de calendrier de programmes de recherche. Enfin, nous nous sommes engagés l'autre jour à faire un excellent travail et, M. le ministre, nous allons le faire.

(17 h 30)

M. le député d'Abitibi-Ouest... non, pardon, c'était... Oui, M. le député d'Abitibi-Ouest, j'avais bien vu, c'est à vous la parole.


Critères ayant guidé le ministre des Finances dans ses choix budgétaires (suite)

M. Gendron: Oui, merci, M. le Président. Alors, très simplement, je voulais revenir sur une question qu'on a traitée, où le député de Notre-Dame-de-Grâce ainsi que son collègue n'étaient pas ici – et il n'y a pas de jugement là-dedans; c'est normal, ils ne peuvent pas toujours être présents – toute la question de la crédibilité pour un gouvernement, et un de ses piliers qui est le ministre des Finances, ce qui est important dans un gouvernement crédible. Quand le député de NDG ou Notre-Dame-de-Grâce laissait voir tantôt que le ministre des Finances aurait modifié sa pensée parce qu'il avait pris l'engagement de baisser les impôts des contribuables – puis il est assez grand garçon pour justifier ses engagements – moi, ce n'est pas là-dessus que je le reprends. C'est qu'il y a une étape majeure – et, moi, j'y tiens – qui s'est passée et qui affecte la crédibilité des gouvernements, qui s'appelle les engagements électoraux d'une équipe électorale à un moment fort en démocratie, qui est une sanction par le peuple: comment vous trouvez qu'on a fait ça? Puis une demande, bien sûr légitime, de renouvellement de mandat. Alors, c'est ce qui est arrivé récemment, il y a eu une élection au Québec, vous devez vous en rappeler...

Des voix: Oui, on a été...

M. Gendron: Non, bien, je comprends. On sait à quelle place, d'une part. Ça, on peut en discuter. Deuxièmement, je veux dire, je peux vous parler... Oui, justement, je pourrais parler un peu de certaines façons d'avoir du vote. Je pourrais vous parler que, dans certains comtés francophones, êtes-vous au courant que c'est votre pire volée que vous n'avez jamais eue durant les 40 dernières années? Ah! oui, je n'ai jamais vu ça.

M. Copeman: ...référendum, hein. Oui. Taux de rejet de 11 %.

M. Gendron: Oui... Moi, je voulais faire une discussion sérieuse, oui...

M. Landry: La population pénale...

M. Copeman: 11 % de taux de rejet, dans Chomedey, au référendum.

M. Landry: ...avec plaidoyer de culpabilité. Plaidoyer de culpabilité.

Le Président (M. Simard, Richelieu): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, je prends pour acquis que, puisqu'il y a à ma droite une partie ministérielle et à ma gauche l'opposition, il y a donc eu victoire électorale d'une partie sur l'autre.

M. Gendron: Et là, au-delà des danses à 10 $, vous avez ajouté les votes à 10 $. Alors, moi, je ne serais pas très fier. Si vous voulez en parler, il y aura d'autres forums. Moi, je voulais tout simplement vous signaler que, nous, quand on fait une campagne électorale, c'est important de respecter l'électorat – qui nous a fait confiance à nouveau, en passant – dans le système qu'on connaît. Puis, moi, je ne me sens pas battu pantoute, là. Quand il y a un vote en Chambre, je me sens élu en étoile parce qu'on a le double de vous autres. Parce que c'est ça, le système, c'est celui qu'on connaît, puis ça démontre que vous êtes vraiment concentrés. Ce qu'il reste de libéraux, c'est découpé sur la carte, hein. Les frontières, puis... Vous le savez, vous vivez là, vous êtes un député de là. Je vous félicite, bravo, bien représentés, merci beaucoup.

Mais le point que je veux souligner, c'est que dans la campagne électorale il y avait des engagements très précis que, si la population nous faisait confiance, on tenterait de continuer à avoir l'honnêteté de présenter des budgets équilibrés qui, autant dans le résultat que dans les prévisions, se ressemblent. Je ne sais pas ce que vous avez fait, vous autres, là. Entre les résultats puis les prévisions, il y a toujours un écart de 1 000 000 000 $. Bon. Ça n'a pas l'air de vous déranger, ça, 1 000 000 000 $ d'écart, c'est les contribuables qui payaient. Nous, on a dit: Budget rééquilibré. Puis, deuxièmement, on a dit: Il va être urgent, après l'atteinte du déficit zéro – puis là, tant mieux, on l'a devancé d'une année – de remettre de l'argent en santé, en éducation. On a dit ça, et ça, ça faisait l'objet d'engagements électoraux fermes et chiffrés. Je me rappelle la couleur du petit feuillet ou de l'imprimé et, pour nous, ça a de l'importance, c'est majeur, je voulais revenir là-dessus. Alors, que le ministre des Finances ait dit – puis c'est son plein droit – que les impôts des contribuables, des particuliers au Québec sont trop élevés, bien, j'espère qu'il l'a dit, c'est vrai. Il ne l'a pas rien que dit, il l'a écrit partout. Puis, dans tous vos discours, vous avez bien fait de répéter la même chose, vous avez dit: On n'a jamais vu un document si bien fait, qui s'appelle La réduction des impôts des particuliers , qui traite de cette question-là, qu'on va débattre pendant des heures et des heures.

M. Copeman: Et des heures.

M. Gendron: Oui, parce que c'est une question majeure, importante pour essayer qu'est-ce qu'on fait puis comment s'assurer qu'il n'y a pas d'inéquité, d'injustice. Surtout si on retouche parfois les courbes, la baisse d'impôts, le partage des surplus, il y a beaucoup de choses à discuter là-dedans.

Moi, je voulais tout simplement – en terminant là-dessus parce que je pourrais faire long, là – savoir du ministre des Finances si, effectivement, le ministre des Finances n'était pas conscient, lorsqu'il a fait le budget, que c'était davantage, compte tenu de la place qu'occupe la politique budgétaire d'un gouvernement suite à une réélection, qu'il était plus significatif de traduire par la politique budgétaire du gouvernement dans le dernier budget du ministre des Finances les engagements électoraux qui avaient permis de reconduire cette équipe électorale. Et ça, ça voulait dire: déficit zéro, santé, éducation, emploi, puis, s'il y a de la marge, on va l'affecter au niveau du contribuable. Mais il n'y a pas l'air d'en rester, parce que l'éducation dit: On n'en a pas encore assez. La preuve, un certain nombre de gens ont des questions là-dessus, légitimement. Moi, je trouve qu'en éducation il reste encore des choses à faire, même chose en santé. Mais arrêtez de véhiculer que c'est parce qu'on ne serait pas conscients de la nécessité d'une baisse des impôts des contribuables québécois. En tout cas, moi, j'en suis fermement convaincu et je crois que mon ministre aussi.

Mais là, question: Est-ce qu'il peut commenter un peu qu'effectivement ce qui l'a guidé dans sa politique budgétaire qu'on appelle le budget, c'est la plateforme, les engagements de l'équipe ministérielle qui a été réélue et, conclusion, le respect d'engagements pris envers l'électorat qui nous a fait confiance à nouveau?

M. Landry: Nos malheureux collègues d'en face, d'une certaine façon, je le dis avec beaucoup de sympathie, sont arrivés au Parti libéral à une période extrêmement sombre dans l'histoire de ce parti. Moi, j'ai eu le plaisir d'appartenir au parti où ils se trouvent aujourd'hui dans une période de gloire. Le chef s'appelait Jean Lesage, il y avait des gens comme René Lévesque autour de lui, Eric Kierans, Pierre Laporte, Georges-Émile Lapalme, et il dirigeait le Québec vers de glorieuses années, les années de la Révolution tranquille. Nos deux malheureux collègues arrivent...

Une voix: ...

M. Landry: Pardon?

Des voix: ...

M. Landry: Nos deux malheureux collègues arrivent à un moment donné où le Parti libéral s'est déshonoré et a déshonoré le Québec, et en particulier en matière économique et financière. On ne peut pas le leur reprocher, ce n'est pas eux qui ont pris les décisions. La députée n'était pas élue puis l'autre non plus, sauf que c'est un héritage d'une lourdeur incroyable. Et c'est pour ça que le Parti libéral est arrivé à son score le plus bas depuis la Révolution tranquille, je pense, hein.

Une voix: ...

M. Landry: Ils ne sont jamais allés aussi bas que ça parce que c'est ce qu'ils méritent. C'est ce qu'ils méritent. Pourquoi est-ce qu'ils méritent ça? Bien, je vais vous donner les écarts entre les prévisions de leurs discours du budget puis les résultats réels aux comptes publics. Je l'ai déjà donné, je pense, dans la commission, mais...

Une voix: ...

M. Landry: Oui, je vous l'ai déjà donné mais, lui, il n'était pas là. Pouvez-vous lui passer...

M. Copeman: Je l'ai déjà entendu en Chambre, M. le ministre. Vous pouvez repasser. Je lis les galées.

M. Landry: O.K. Je vais repasser, mais je vais vous dire une petite anecdote qui montre qu'il faut faire attention au ressentiment entre les peuples. Il y a un jeune garçon qui sort du métro de Paris puis il voit un Anglais puis il lui donne un coup de pied. Alors, l'Anglais est très surpris et dit: Qu'est-ce que c'est ça? What is that? Bien, il lui dit: Vous avez tué Jeanne d'Arc. Oui, mais, il dit: Ça fait 800 ans de ça. Oui, mais, il dit: Moi, je l'ai appris juste ce matin.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Landry: Alors, il faut faire attention au ressentiment, hein. Alors, vous n'étiez pas là quand je l'ai donné, mais il est déposé.

Une voix: ...

M. Landry: Puis vous ne me donnerez pas un coup de pied non plus. Vous pouvez me donner un coup de gueule de temps en temps.

M. Copeman: Mutuellement.

M. Landry: O.K. Alors, je reviens à notre propos. Le Parti libéral s'est malheureusement déshonoré. Il a perdu toute crédibilité financière avec cette série de déficits et toute crédibilité économique parce que, pendant que le Canada créait 206 000 emplois, le Parti libéral à la tête du Québec faisait que le Québec en créait zéro. On n'a jamais vu une affaire comme ça. Et, des fois, le chef libéral d'aujourd'hui, qui n'était pas là lui non plus, dit: Oui, ça va bien au Québec, mais le Canada fait mieux. Non, non, non, ce n'est pas exact. Et, dans leur temps surtout, le Canada faisait beaucoup mieux puis, le Québec, c'était lamentable: création nette d'emplois, zéro en quatre ans. Et, en plus, mandat par mandat, on va vous donner ça parce que, ça, c'est une autre légende, aussi, que colportent les libéraux et les fédéralistes. Ils disent: Quand les souverainistes sont au pouvoir, l'économie du Québec va plus mal que celle du Canada. Faux. Légendaire. Légendaire et faux.

(17 h 40)

Je vous donne la part d'emplois créés par le Québec sur la création d'emplois totale sous le gouvernement Lévesque: 15 novembre 1976 au 1er décembre 1985: 18,1 %. Vous retenez le chiffre? Sous Robert Bourassa: 2 décembre 1985 au 11 septembre 1994: 15,5 %. Alors, là, toute chose étant égale d'ailleurs, comme eux l'ont dit, là, la conjoncture du Canada et celle du Québec dans un espace économique intégré est la même. Les péquistes font mieux. Les libéraux viennent, la performance misérable que l'on sait; les péquistes reviennent: septembre 1994 à février 1999: 16,3 %. Donc, les libéraux ont battu les records de l'ineptie économique depuis 1976. Il faut le faire. Il faut le faire. Vous n'étiez pas là dans ce temps-là, mais les plus vieux dans cette salle se souviennent. Moi, j'étais ministre du Développement économique du gouvernement Lévesque, puis il y avait un certain Reed Scowen, un homme très sympathique, vraiment. Vous, je ne vous connais pas beaucoup, mais je connais bien Reed Scowen, puis c'est quelqu'un de vraiment très bien. Je vous souhaite d'être aussi bien que lui. Mais il m'attaquait...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Simard, Richelieu): Excellent délégué du Québec.

M. Landry: Excellent délégué du Québec à New York, que nous avons maintenu en poste...

Une voix: Et Londres.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Et nous l'avons maintenu en poste.

M. Landry: Et Londres. Nous l'avons maintenu en poste tellement on avait de l'estime pour lui. Mais Reed Scowen, pendant 10 ans, m'a attaqué sur la fuite et l'exode des sièges sociaux. Montréal était devenu un désert, puis tous les sièges sociaux étaient partis, à Toronto essentiellement, quand ce n'était pas plus loin. Mais, ça aussi, c'était faux. On l'a vu dans les journaux torontois qui ont fait une étude sur la situation des sièges sociaux. Non seulement Montréal est toujours la capitale des sièges sociaux au Canada mais s'est consolidée en nombre de sièges sociaux et en actifs. Et une fois, j'avais dit à Reed: Tu fais le Bonhomme Sept Heures puis le gripette. Il dit: Le Bonhomme Sept Heures, j'ai compris, mais gripette... Il a été obligé d'aller dans son dictionnaire. C'est ça qu'il faisait.

En 1988, à Montréal, il y avait 84 sièges sociaux. En 1998, il y en a 88. Puis on parle des 500 plus grandes entreprises du Canada, là. L'actif en 1988, c'était 29 000 000 000 $; aujourd'hui, c'est 35 000 000 000 $. À Toronto, en 1988, il y en avait 295, la place où Reed Scowen me disait que tous nos sièges sociaux s'en allaient. En 1998, ils sont tombés à 185. Calgary est passée de 43 à 61, Vancouver de 39 à 50, et Montréal reste la capitale des sièges sociaux du Canada. Qu'est-ce que c'est que ce cirque qui a duré pendant 10 ans? Alors, vous parliez de gens qui pouvaient changer d'idée...

M. Copeman: Il faudrait que je fasse mieux que Reed Scowen, d'abord?

M. Landry: Ah! oui, il faudrait que vous fassiez mieux. Et je vais vous suggérer une voie pour battre Reed de façon admirable: changez d'idée quant à votre option constitutionnelle.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Landry: En constatant que Reed, votre prédécesseur...

M. Copeman: Il n'avait pas changé d'idée.

M. Landry: Non, mais il s'est trompé totalement, pendant 10 ans, sur l'efficacité économique du gouvernement du Parti québécois et du gouvernement libéral, et en particulier sur les sièges sociaux. Alors, évidemment, on ne force pas la clientèle, d'aucune façon, mais je pense que...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Landry: Je vais conclure en disant que, si jamais vous changez d'idée, on va taper 95 %.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Merci, M. le ministre. Est-ce qu'on compte sur le week-end pour votre période de réflexion, M. le député?

M. Copeman: Vous savez, M. le Président, un grand politicien a déjà dit: There are three types of lies: there are lies, damned lies and statistics.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Ha, ha, ha!

M. Copeman: C'était Winston Churchill.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Mme la porte-parole de l'opposition.

Mme Jérôme-Forget: Alors, moi, je voulais revenir...

M. Landry: Il traitait le Mahãtma Gãndhi de fakir, aussi. Alors, il fallait en prendre et en laisser de Churchill. Il a eu des hauts et des bas. Il paraît que ça dépendait des heures du jour aussi.


Importance des sièges sociaux à Montréal

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, je veux revenir sur un point parce que le ministre a parlé de quelque chose, il a trouvé des vertus à ne pas être démagogique. Et je pense qu'effectivement il y a des vertus dans ça, surtout quand il est entouré avec tout son personnel du ministère des Finances. Et, dans ma réplique au ministre des Finances, j'ai bien pris soin de dire que nous avions tous péché au niveau de la non-responsabilité à l'endroit des déficits et de la dette. Et je pense que nous avons tous péché parce que nous avons cru que nous pouvions hypothéquer l'avenir de nos enfants et, effectivement, on l'a fait au niveau de plusieurs années.

Par ailleurs, je disais également que nous n'étions pas seuls dans cet espace, que plusieurs pays, à peu près toutes les provinces, plusieurs États étaient dans cette même situation. Alors, j'ai regardé, par ailleurs, le déficit et la dette totale. Et vous l'avez sûrement également parce que je me suis inspirée de vos chiffres. Et je regardais, sous le Parti québécois de 1976 à 1986, la dette est passée de 6 000 000 000 $ à 34 000 000 000 $, une augmentation de 500 %. Évidemment, encore là, il faut faire attention, je vais être d'accord avec vous; on partait d'un chiffre plus bas, donc c'est plus facile quand on augmente, bien sûr. Donc, je suis tout à fait d'accord, M. le ministre. Je regarde, après ça, sous le régime libéral, 31 000 000 000 $ à 76 000 000 000 $, encore là, une augmentation importante, très importante: 200 %.

Le point que je veux faire: je trouve un peu odieux... Et je vous concéderai que nous aurions dû commencer plus tôt. Je concéderai ça au ministre des Finances. Mais de dire que le Parti libéral du Québec s'est déshonoré et que le Parti québécois a toujours été vertueux, je pense que c'est une nette exagération.

Je voudrais revenir sur un autre point que le ministre des Finances faisait, et le point que je voudrais faire, c'est que l'histoire a des vertus et l'histoire nous rend modestes. Je me rappelle que, le ministre des Finances, il venait tout juste de se faire élire lors de ce dernier mandat, et j'avais été l'écouter à Montréal où il nous avait raconté de façon très humoristique et très sympathique, d'ailleurs, que, alors qu'il avait été battu lors d'une campagne électorale, il y avait peu de gens qui lui téléphonaient et il y avait peu de gens qui venaient le visiter, le consulter.

Histoire de dire que, la politique, c'est quelque chose qui passe, qui est éphémère, et je ne me réjouirai pas plus qu'il faut à l'effet que, le pouvoir, c'est quelque chose que vous avez dans les mains de façon éternelle. D'accord? Alors, quand vous dites que nous nous sommes fait battre, effectivement, c'est une réalité, on en est conscients, mais que c'est quelque chose qui vous laissait croire que c'est quelque chose qui va perdurer, je comprends que vous le souhaitiez, mais j'apprécierais votre modestie que vous avez eue quand vous veniez de vous faire élire. Elle avait bien meilleur goût puis elle était plus amusante, à mon avis, parce que vous aviez raconté ça de façon très amusante.

Quand vous parlez des sièges sociaux, j'aimerais regarder de façon détaillée ce qui se passe au niveau du détail de tout ça. Je ne veux pas nier que Montréal soit une ville intéressante. Étant Montréalaise dans l'âme et adorant cette ville, vous comprendrez que je ne suis pas là pour dénigrer Montréal. Mais quand on affirme, par ailleurs, qu'il y a plus de sièges sociaux à Montréal, j'ai de la misère à le croire, surtout quand je vais à Toronto périodiquement. Est-ce que ce serait que, par exemple, il y a des coquilles vides dans ça, comme la Banque Royale, par exemple, qui a son siège social à Montréal? Est-ce que c'est un nombre avec des petites entreprises? Mais je sais que, quand je me déménage à Toronto périodiquement, c'est clair que ça paraît qu'il y a des sièges sociaux à Toronto. Et les gens d'entreprise vont vous dire que la finance se situe maintenant à Toronto.

Alors, je ne veux pas faire le plaidoyer pour Toronto. D'accord? Je pense que les gens de Toronto sont là pour se défendre eux-mêmes, mais je ne sais pas jusqu'à quel point il n'y a pas un peu d'exagération dans les propos que vous tenez.

M. Landry: Bon, alors, j'apprécie la façon...

Mme Jérôme-Forget: Et peut-être que vous allez pouvoir m'éclairer. Je le souhaiterais, là.

M. Landry: Ah! je vais vous éclairer parce que...

Mme Jérôme-Forget: Mais donnez-moi la liste, là, puis on pourrait faire la liste des...

M. Landry: Je vais vous donner la réponse précise. Si j'avais parlé en nombre de sièges sociaux, votre objection aurait pu être valable. Si je n'en avais parlé qu'en nombre, mais je n'ai pas parlé qu'en nombre, j'ai parlé en actif. Alors, je vais vous le redire. D'abord, c'est les 500 plus grandes – alors, on ne compte pas les sièges sociaux à deux personnes – classement Financial Post : le nombre à Montréal en 1988, 84; en 1998, quatre de plus. Mais l'actif – et c'est là qu'est le coeur de la question – en 1988, 29 % de l'actif canadien; en 1998, 35 %.

Alors, c'est irréfutable, Toronto n'a que 27 % de l'actif canadien en 1998, Calgary en a 19 % et Vancouver 10 %. Alors, la patrie des sièges sociaux dans l'espace économique canadien, c'est Montréal, en nombre et en actif.

(17 h 50)

Une voix: La Banque Royale est là-dedans?

M. Landry: La Banque Royale est-elle là-dedans? Ça doit.

Une voix: Elles sont toutes là-dedans.

M. Landry: Bien oui, mais elles paient leurs impôts et puis, comme les impôts sur les corporations sont plus bas au Québec, la Banque Royale déclare plus de profits au Québec qu'à Toronto. Les actifs sous gestion sont là, puis les impôts sont payés. C'est ça qui nous intéresse, puis les emplois aussi. Et alors, ce que conclut le Financial Post , il conclut que Montréal consolide sa position en matière de sièges sociaux. Et l'article était intitulé: Head offices flee Toronto putting Montréal back in the lead . Alors, alléluia!

Mme Jérôme-Forget: Je suis très contente.

M. Landry: C'est choquant, par exemple, quand on a essayé de nous faire croire le contraire pendant 10 ans, mais c'est la vie. La vie, c'est dur des fois.

Sur les montants de déficit, je pense qu'on s'est bien expliqué là-dessus. Quand Jacques Parizeau est devenu ministre des Finances, la dette totale en pourcentage du PIB était de 12,3 %. Quand il est parti, elle était de 27 %. Alors, c'est comme le salarié qui gagne 50 000 $ par an puis qui est endetté de 5 000 $, il a encore de la marge, il peut aller jusqu'à 10 000 $. Mais, quand il a quitté, Parizeau, c'est-à-dire quand les libéraux sont arrivés, ont était à 27 % du PIB. Il était temps d'arrêter. Ils n'ont pas arrêté du tout. Ils ont continué: 29 %, 29 %, 29 %, 28 %, 29 %, 32 %, 37 %, 40 %. Jusqu'à 40 %. Alors, là, c'est le gars qui gagne 50 000 $ par année puis qui est endetté de 25 000 $, puis il continue. Il fallait arrêter. Puis c'est ça, l'erreur historique du Parti libéral: ils n'ont pas arrêté. Alors que, Parizeau, il était encore dans un ratio d'endettement acceptable... Et les agences de crédit s'en sont rendu compte tout de suite. Les agences de crédit n'ont pas décoté Parizeau, mais elles ont décoté les libéraux, combien... six fois.

Mme Jérôme-Forget: Non, mais, ça, là, six fois, M. le ministre, vous avez...

M. Landry: Je compte toutes les agences.

Mme Jérôme-Forget: C'est ça.

M. Landry: C'est vrai.

Mme Jérôme-Forget: Je ne vous dirai pas que c'est valable de dire que ce n'est pas dramatique de subir une décote. Je ne dirai pas ça, mais c'était deux décotes, mais par plusieurs maisons à deux périodes différentes.

M. Landry: Bien oui, mais je vous jure que, quand ça arrive, là...

Mme Jérôme-Forget: Ah! oui, oui. Non, non, mais c'est deux décotes.

M. Landry: ...en Chambre, on a la question à chaque fois.

Mme Jérôme-Forget: Oui, oui d'accord. Non, non, je suis d'accord avec vous. Mais je voudrais simplement faire un rappel également qu'en 1991-1992 il y a eu une récession importante...

M. Landry: Oui.

Mme Jérôme-Forget: ...et, en période de récession, c'est un peu, dans le fond... On prévient ce gouvernement actuel qu'en période de récession, évidemment, les tâches, la lourdeur, le poids de l'économie est beaucoup plus lourd sur le gouvernement parce qu'il y a des responsabilités.

M. Landry: Savez-vous pourquoi on le sait? Parce qu'on a essuyé, nous, pendant qu'on était au pouvoir, la plus raide depuis 1929.

Mme Jérôme-Forget: En 1981-1982.

M. Landry: Alors, ce que vous dites est vrai, puis on l'a appris «the hard way», comme on dit.

Mme Jérôme-Forget: C'est ça. Je ne sais pas, est-ce que tu as des questions? Moi, je n'ai pas de questions préparées. J'avais peut-être des points. Ah! oui, tiens, peut-être. Il nous reste quelques...

Le Président (M. Simard, Richelieu): Pourtant, votre leader m'a assuré que vous aviez besoin encore d'au moins deux heures.

Mme Jérôme-Forget: Oui, oui. Non, non. J'ai des choses pour plus longtemps.

M. Landry: Elle va recharger ses accumulateurs en fin de semaine.


Rendements de la Société générale de financement

Mme Jérôme-Forget: Non, non, j'ai des choses pour plus longtemps, mais ce sont des points.

Vous avez affirmé hier, de vos fonctionnaires, que le taux moyen pour la SGF... Vous comprendrez que, la SGF, c'est «touchy» pour moi. Alors, le taux moyen était de 9 % – il cherche ma citation, j'ai mon article, mais je vais vous prendre, par exemple, dans l'article, parce que vous avez seulement une partie, je vous préviens. J'espère que vous avez l'article au complet...

M. Landry: On ne demande qu'à apprendre.

Mme Jérôme-Forget: O.K. Parce que j'ai apporté mon article également. Mais ce qui m'intéresse, moi, M. le Président, c'est les rendements. J'ai les rendements ici, de la Société générale de financement. Et, par exemple, j'ai 1997-1998, le rendement de la Bourse de Toronto était de 15 %, alors que le rendement de la SGF aurait été de 4,6 %. J'ai l'année précédente, 1996, un taux de rendement, encore de la Bourse de Toronto, de 28 %; le taux de rendement de la Caisse de dépôt est de 4 %. Bon. Il est arrivé Bécancour. Bécancour a renfloué...

M. Landry: 500 000 000 $ d'un coup.

Mme Jérôme-Forget: D'un coup. Alors, ça, on le reconnaît. Ma question, moi, au ministre des Finances, est la suivante: Voyant le bilan... Et d'ailleurs, quand j'avais écrit mon article, j'avais commencé par une phrase: «La Société générale de financement, c'est comme un chat, ça a sept vies; ça réapparaît tout le temps sous différentes vies.» Puis, je l'avais enlevée parce que je trouvais ça un peu péjoratif, et j'avais décidé, quand même, d'être un peu plus sympathique. Je me dis: Quels sont les critères que vous allez utiliser? Est-ce que vous allez utiliser un critère par année, moyen au niveau de cinq ans? Quels sont les critères qui vont vous faire décider que c'est un organisme qu'il faut maintenir et qui est utile, et que ça peut combler des lacunes que vous estimez que le marché actuel ne peut pas combler?

M. Landry: D'abord, il ne faut pas oublier que l'argent dont il dispose, nous l'empruntons à 5 %. Alors, s'il a un impact économique véritable et qu'en plus il nous donne en haut de 5 %, je gagne sur tous les tableaux. Je gagne à l'impact économique et je gagne au rendement.

Mme Jérôme-Forget: Mais pourquoi vous pensez que vous allez faire 9 %? Parce que l'an dernier c'était 4 %, l'autre année avant... Est-ce que c'est exact, ça, ou si j'ai des mauvais chiffres?

M. Landry: Bien, je vais vous dire. Il y a une expression que j'ai employée dans le budget et que j'avais employée dans le budget il y a quelques années: l'État, quand il intervient dans l'économie, n'est pas sous pression du marché boursier. Vous me citez le TSE, très bien, mais la vertu principale de l'État, c'est qu'il maîtrise le temps. Je vous enverrai un ouvrage, d'ailleurs, qui va vous intéresser, d'un certain Delmas qui a écrit un ouvrage qui s'appelle Le maître des horloges . Et le thème de cet ouvrage, c'est de dire que, parfois, on peut sacrifier un rendement immédiat...

Mme Jérôme-Forget: Oui, oui. Ça, je suis d'accord.

M. Landry: ...prendre six au lieu de 12 pour avoir 24 plus tard.

Mme Jérôme-Forget: Plutôt que d'avoir 12, c'est ça. D'accord.

M. Landry: Ou pour avoir 12. Alors, la philosophie qui préside à la nouvelle SGF, c'est toujours minoritaire, vous le suggérez dans l'article. Deuxièmement, rentable, base d'affaires, mais aussi, comme je le dis dans le budget de cette année, Le maître des horloges . Alors, s'il y avait, disons, pour toujours parler le jargon nord-américain, 10 «star tops» l'an prochain, mais des fabuleux «star tops», hein – d'ailleurs, ils ont 5 000 000 000 $ de mémoires de signés avec des entreprises – bien, je ne m'attendrais pas à des rendements immédiats de 12.

Mme Jérôme-Forget: Ou même sur les 12.

M. Landry: Ou même sur les 12.

Mme Jérôme-Forget: D'accord.

M. Landry: Alors...

Mme Jérôme-Forget: Mais quels sont les critères que vous allez utiliser, M. le ministre, pour juger que ça fonctionne? Est-ce que vous allez vous donner une période de cinq ans? De trois ans? De 10 ans? Qu'est-ce que vous allez utiliser comme barème?

M. Landry: Je vais faire des moyennes annuelles puis je vais voir si ça s'améliore ou si ça ne s'améliore pas. Mais je n'interviens jamais cas par cas, là.

Mme Jérôme-Forget: Non, non.

M. Landry: Il y a un bon conseil d'administration, je leur fais confiance. Il y a un bon président-directeur général et puis ils répondent de leurs actes. Mais à chaque année on fait la moyenne. Quand je dis «chaque année», on n'attend pas un an pour les appeler. On les suit, on peut dire, quasiment de semaine en semaine, hein.

Mme Jérôme-Forget: Parce que, est-ce que je me trompe, mais les résultats l'an dernier et l'année précédente n'étaient pas très bons? Est-ce que les chiffres, monsieur, que j'avance, de 4,6 % de rendement en 1997, 4,3 % en 1996... Bon, évidemment, j'arrive en 1995, 46 %, parce que c'était Bécancour.

M. Landry: Pechiney.

Mme Jérôme-Forget: Alors, est-ce que je me trompe dans mes chiffres?

Le Président (M. Simard, Richelieu): Ce sera la dernière réponse de la journée, M. Leblanc. Est-ce que vous la donnez?

M. Leblanc (Marcel): Marcel Leblanc, sous-ministre associé. Je pense que, lorsqu'on juge la SGF, comme n'importe laquelle des entreprises, on doit la juger sur une longue période. Ils sont dans une période, actuellement, d'investissements. Et donc, sur une longue période, M. le ministre a référé que ça donnait un rendement qui est plus élevé que le coût de nos emprunts. Même lorsqu'on prend la moyenne des cinq dernières années, c'est de loin, et même du double du rendement de nos emprunts. Alors...

(18 heures)

Mme Jérôme-Forget: Oui, d'accord, mais c'est Bécancour, là. Il faut toujours sortir... Non, non, mais il faut toujours...

M. Landry: Il y a eu des malheurs, aussi.

Mme Jérôme-Forget: Je suis contente. Non, non, mais il faut se réjouir des bonheurs.

M. Landry: Il y a eu des malheurs énormes: MIL Davie.

Mme Jérôme-Forget: Oui, oui. Non, non. C'est ça.

M. Landry: On a fait un «write-off» de quoi, à MIL?

M. Leblanc (Marcel): Les pertes MIL Davie sont majeures.

Le Président (M. Simard, Richelieu): Bon, là-dessus, je dois évidemment me conformer – et ce n'est pas sans agrément – à l'ordre de la Chambre et ajourner nos travaux au mardi 30 mars 1999, à compter de 9 h 30.

(Fin de la séance à 18 h 1)


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