L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Commission des finances publiques

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission des finances publiques

Version finale

36e législature, 2e session
(22 mars 2001 au 12 mars 2003)

Le mardi 13 août 2002 - Vol. 37 N° 78

Consultations particulières sur le projet de loi n° 107 - Loi sur l'Agence nationale d'encadrement du secteur financier


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures trente-six minutes)

Le Président (M. Paré): À l'ordre! La commission des finances publiques est réunie afin de procéder aux auditions publiques dans le cadre de la consultation générale sur le projet de loi n° 107, Loi sur l'Agence nationale d'encadrement du secteur financier.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Bergman (D'Arcy-McGee) remplace M. Williams (Nelligan).

Le Président (M. Paré): Merci. Maintenant, aujourd'hui, l'ordre du jour sera: 9 h 30, les remarques préliminaires du groupe parlementaire formant le gouvernement, donc celles de Mme la ministre; et, à 9 h 45, les remarques préliminaires du groupe parlementaire formant l'opposition officielle, Mme Jérôme-Forget, députée de Marguerite-Bourgeoys; et nous entendrons, à 10 heures, l'Association des banquiers canadiens, suivie de la Bourse de Montréal et de l'Institut des fonds d'investissement du Canada pour cet avant-midi.

À 12 h 30, il y aura suspension, et, à 14 heures, nous redébuterons nos travaux jusqu'à 18 heures. Nous entendrons, à 14 heures, Regroupement des cabinets de courtage d'assurance du Québec; les Partenaires Cartier à 15 heures; à 16 heures, l'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières; et, enfin, à 17 heures, la Commission des valeurs mobilières du Québec.

Donc, au niveau des remarques préliminaires, je vous rappelle qu'il y a 15 minutes pour le groupe ministériel et 15 minutes pour l'opposition officielle. Et, par la suite, nous entendrons le premier groupe. Le premier groupe aura 20 minutes pour la présentation de son mémoire et 40 minutes pour les échanges, excepté celui de midi où il y aura 10 minutes au niveau de la présentation du mémoire et 10 minutes au niveau des échanges avec les parlementaires. Merci et bienvenue.

Nous voyons aussi, dans les trois jours d'auditions publiques que nous aurons, qu'il y a un trou pour mercredi, c'est-à-dire demain après-midi. Il y a un groupe qui s'est désisté. Donc, s'il y avait des recommandations ou des suggestions de la part des deux groupes parlementaires pour le remplacement de ce groupe-là, vos suggestions seraient les bienvenues.

Remarques préliminaires

Donc, nous allons débuter nos travaux. Mme la ministre.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci beaucoup, M. le Président. Je veux saluer tous nos collègues de la commission ? je les remercie d'être là aujourd'hui, en plein milieu de l'été ? et saluer aussi les gens qui vont nous accompagner tout au long de nos travaux.

Il me fait plaisir de participer à cette commission et, plus spécialement, à cette consultation particulière sur le projet de loi n° 107 qui crée l'Agence nationale d'encadrement du secteur financier. Étant donné, d'ailleurs, la vaste consultation menée par le groupe de travail sur l'encadrement du secteur financier, le groupe Martineau, pour l'élaboration de son rapport, je comprends, M. le Président, que cette consultation, notre consultation, là, celle que nous engageons aujourd'hui a principalement pour but de jeter davantage d'éclairage sur certains aspects du projet de loi et évidemment d'examiner certaines critiques formulées à cet égard.

Vous allez me permettre d'abord de dire quelques mots sur ce qui m'a motivée à mettre en marche les présents travaux, et ce, malgré les nombreuses initiatives récentes en matière de réglementation du secteur. Comme vous le savez, M. le Président, le Québec a modernisé la réglementation du secteur pour tenir compte principalement des phénomènes de décloisonnement, de convergence intersectorielle, avec comme résultat aujourd'hui que le secteur financier québécois est l'un des secteurs les mieux adaptés aux grandes tendances en termes de réglementation en Amérique du Nord. Cependant, la structure d'encadrement, c'est-à-dire l'ensemble des organismes chargés de l'encadrement, demeure, croyons-nous, une structure qui a été conçue pour encadrer un secteur financier cloisonné, et le projet de loi n° 107 vise donc à adapter la structure d'encadrement du Québec à un secteur financier qui, lui, est maintenant décloisonné. Donc, la restructuration du système d'encadrement du secteur financier du Québec constitue ici une étape de modernisation, une étape de modernisation du processus et de l'encadrement lui-même du secteur financier.

n (9 h 40) n

Le projet de loi n° 107 vient donc donner suite aux recommandations unanimes ? je vous le ferai remarquer, et c'est important ? recommandations unanimes des membres du groupe Martineau. Et vous allez me permettre, M. le Président, de rappeler la compétence des membres de ce groupe de travail qui a produit une analyse dont la qualité n'a jamais été mise en doute.

D'abord, ce groupe était composé des personnes suivantes: Mme Dominique Vachon, économiste reconnue et qui était à ce moment-là vice-présidente et économiste en chef à la Banque Nationale du Canada; M. Claude Béland, évidemment, qui est actuellement professeur invité à l'Université du Québec, mais qui a été président du Mouvement Desjardins de 1986 à 2000; M. Pierre Carrier, fellow, comptable en management accrédité, ancien secrétaire de l'Office de protection du consommateur et actuellement membre du comité administratif et du Bureau de l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec; M. Yvon Charest, actuaire, fellow de la Société des actuaires ainsi que de l'Institut canadien des actuaires et actuellement président en chef de la direction de L'Industrielle-Alliance; Pierre Comtois, diplômé en sciences comptables des HEC, planificateur financier, actuellement vice-président du conseil d'Optimum, Gestion de placements. M. Comtois siège également au conseil d'administration de la banque Martin, Morel, qui est une société française, et est également membre du comité de placement et du comité marketing du Fonds des professionnels du Québec. M. Pierre Lorrain, titulaire d'un doctorat en administration de l'Université Harvard, administrateur invité auprès des HEC et qui a joué un rôle important dans plusieurs institutions financières du Québec. Il a occupé pendant 12 ans le poste de vice-président du conseil et président Québec, Merrill, Lynch, Canada. Il a été nommé Officier de l'Ordre du Canada et Chevalier de l'Ordre national du Mérite de la République française.

Je prends la peine d'identifier les curriculums de chacune de ces personnes pour bien camper le sérieux des propositions qui nous ont été faites. Et, comme nous retenons à 90 % ce qu'on nous a recommandé, bien j'imagine qu'on tirera aussi d'autres types de conclusions en ce sens.

Et, finalement, le groupe de travail était présidé par Me Yvon Martineau. M.B.A., associé principal du cabinet Fasken, Martineau. Il se spécialise en droit corporatif et commercial et a été président du conseil d'administration du groupe Hydro-Québec, et il siège maintenant sur différents conseils d'administration, dont Le Groupe Canam Manac et Jean Coutu.

J'avais prévu et suggéré entendre, lors des consultations auxquelles nous procédons, le président du groupe de travail sur l'encadrement du secteur financier. Cependant, l'opposition ne semblait pas être d'accord avec cela. Je le trouve dommage, mais, M. le Président, vous nous ouvrez une porte aujourd'hui en nous disant qu'il y a la possibilité... C'est-à-dire qu'un groupe s'étant désisté, il y aurait une possibilité que l'on puisse recevoir les représentants du groupe Martineau, Me Martineau lui-même. Si les membres de la commission étaient d'accord, je vous propose, M. le Président, que nous invitions Me Martineau à venir nous présenter les conclusions de son rapport ou, tout simplement, à se rendre disponible pour répondre à des questions que nous pourrions soulever. Nous pourrons étudier cela après ma présentation, M. le Président.

Alors donc, qu'est-ce qui s'est passé? Le groupe Martineau a déposé son rapport en décembre dernier. Je le rappelle, un rapport excellent, appuyé sur des analyses sérieuses. Et, loin d'avoir travaillé en vase clos, le groupe Martineau a procédé à une vaste consultation publique. D'ailleurs, presque toutes les personnes qui seront entendues ici soit ont fait des représentations auprès du groupe Martineau en présentant un mémoire dans certains cas et, dans d'autres, tout simplement en rencontrant les membres du groupe.

Alors, le groupe Martineau arrive à certains constats, je les rappelle brièvement. Le consommateur se retrouve difficilement dans la multitude d'organismes chargés de sa protection. La présence de plusieurs organismes d'encadrement augmente le fardeau administratif que doit supporter l'industrie, donc un éparpillement des forces au sein de plusieurs organismes qui réduit la capacité du Québec d'exercer ses compétences dans le secteur financier auprès d'un même assujetti.

Alors, pour établir ensuite quelles structures d'encadrement permettraient de répondre le mieux à l'ensemble, au secteur financier et au consommateur, le groupe Martineau a étudié à fond la question de l'encadrement. Il a donc rencontré chacun des organismes actuels d'encadrement pour bien comprendre les défis auxquels chacun sont confrontés. Il a examiné ce qui se fait ailleurs dans le monde, a rencontré des personnes bien au fait des réformes, des personnes qui venaient du Royaume-Uni, de France, d'Australie, a examiné les standards internationaux en matière d'encadrement. Bref, il a effectué un travail sérieux, sans compromis, axé d'abord et avant tout et presque entièrement sur l'intérêt public, ce qui est tout à l'honneur des membres de ce groupe. Donc, le gouvernement n'a eu aucune difficulté à endosser l'essentiel des recommandations du rapport Martineau.

Alors, je prends pour acquis que les membres de la commission sont sans doute assez familiers avec le rapport Martineau et avec le contenu du projet de loi. Donc, je vais ne faire qu'un rapide survol des éléments essentiels du projet de loi. D'abord, ce projet de loi est très volumineux, mais je voudrais rappeler une chose, c'est que plus des deux tiers des articles proposés apportent des modifications de concordance à différentes lois. Donc, l'essentiel du projet de loi se retrouve dans les premiers 150 articles, et c'est là qu'est vraiment la proposition que nous faisons aujourd'hui, M. le Président.

Donc, cette loi, elle instituera l'Agence nationale d'encadrement du secteur financier. Elle sera chargée d'administrer les lois relatives au secteur financier, qui sont actuellement administrées par l'Inspecteur général des institutions financières, la Commission des valeurs mobilières du Québec, le Bureau des services financiers et la Régie de l'assurance-dépôts du Québec. L'Agence assumera, de plus, les responsabilités d'encadrement présentement assumées par l'Institut québécois de planification financière et le Fonds d'indemnisation des services financiers.

Conformément, entre autres, au principe selon lequel le consommateur doit savoir facilement à qui s'adresser en cas de problème et celui qui veut ? autre principe ? qui veut que le fardeau administratif supporté par l'industrie soit le plus léger possible, le projet de loi confie l'ensemble des responsabilités d'encadrement à un seul organisme de façon à offrir un guichet unique pour le consommateur et aussi un guichet unique pour l'industrie.

Certains considèrent qu'un tel organisme constituera un monstre ? je le mets entre guillemets ? à administrer. Permettez-moi, M. le Président, de mentionner que, premièrement, la préoccupation du groupe Martineau ? et c'est aussi la nôtre ? c'est de faciliter la vie au consommateur et à l'industrie et non pas faciliter la vie à son dirigeant. Deuxièmement, il existe des organismes d'encadrement beaucoup plus gros qui encadrent des secteurs beaucoup plus importants, et ça fonctionne bien. Comme nous recevrons des représentants de l'industrie et des consommateurs, je suis certaine qu'ils voudront nous indiquer dans quelle mesure un guichet unique, tant pour les consommateurs que pour l'industrie, est une mesure souhaitable.

Donc, l'Agence sera dirigée par un président-directeur général nommé par le gouvernement, tel que nous le propose le groupe Martineau. Ce président-directeur général sera assisté par des surintendants qu'il aura nommés. Et, vous le savez sans doute, M. le Président, le modèle d'un dirigeant unique, ce n'est pas nouveau, on le retrouve ici même, au Québec, chez l'Inspecteur général, on le retrouve aussi au fédéral avec le Surintendant des institutions financières fédéral, et, selon le groupe Martineau, ce modèle est celui qui permet de mieux satisfaire les principes d'efficacité, d'indépendance, d'imputabilité qui sont des principes notamment reconnus par le groupe de travail.

Certains prétendent, M. le Président, que l'on accorde trop de pouvoirs à une seule personne. Est-ce vraiment tant de pouvoirs quand on considère que la Securities and Exchange Commission, chez nos voisins américains, est une organisation de 2 900 employés répartis dans 11 bureaux régionaux avec un budget de trois quarts de milliard de dollars ? américains, bien entendu ? et qui veille sur les plus gros marchés de valeurs du monde, dirigée présentement par trois commissaires, incluant le président? Je pense qu'il sera intéressant d'entendre nos invités à ce sujet.

Encore une fois, pour répondre aux principes d'efficacité, d'efficience, d'adaptabilité prévus au rapport Martineau, mais aussi aux besoins et surtout aux besoins des consommateurs et de l'industrie, l'Agence a une mission en cinq volets. Le premier volet: prêter assistance au consommateur, notamment en établissant des programmes éducationnels en matière de consommation de produits et de services financiers, en assurant le traitement des plaintes des consommateurs et en donnant accès à des services de règlement de différends, première mission; deuxième mission, veiller à ce que les institutions financières et autres intervenants du secteur financier respectent les normes de solvabilité qui leur sont applicables et se conforment aux obligations que la loi leur impose; troisièmement, assurer l'encadrement des activités de distribution de produits et de services financiers; quatrième volet de la loi, assurer l'encadrement du marché des valeurs mobilières; et cinquième volet, voir à la mise en place de programmes d'indemnisation des consommateurs de produits et services financiers et administrer les fonds d'indemnisation prévus dans la législation.

n (9 h 50) n

Pour qu'au sein de l'organisme chaque aspect de la mission de l'Agence reçoive toute l'attention requise, cinq directions sont créées: l'encadrement de l'assistance aux consommateurs, l'encadrement de la solvabilité, l'encadrement de la distribution, l'encadrement des marchés de valeurs et la direction de l'encadrement de l'indemnisation. Les tâches d'encadrement seront accomplies par les différentes directions, mais le président-directeur général sera en mesure d'assurer une coordination des activités et la cohérence des interventions ainsi que de permettre l'arbitrage requis en fonction de l'intérêt public. Le regroupement de l'ensemble des activités permettra notamment d'éviter que certaines situations problématiques soient ignorées parce que les différents organismes d'encadrement concernés considèrent que le problème ne les concerne pas et qu'il appartient à un autre organisme d'intervenir. Ça ne se posera plus, bien sûr. Il n'y aura plus de brèche dans la structure d'encadrement, et cela répond aux principes du groupe de travail selon lequel la structure d'encadrement doit permettre une surveillance efficace du secteur financier. Je pense qu'il me reste...

Le Président (M. Paré): Deux minutes.

Mme Marois: Deux minutes seulement, M. le Président?

Le Président (M. Paré): Oui.

Mme Marois: Bon, d'accord. Alors, je vais rapidement passer maintenant au Conseil de la régie administrative. Ayant choisi de confier la direction de l'Agence à une seule personne, le groupe Martineau propose que cette personne puisse bénéficier des conseils de gens expérimentés en matière de gestion d'entreprises. Donc, la loi crée au sein de l'Agence un conseil consultatif de la régie administrative qui est composé de sept membres, dont un président nommé par le ministre des Finances, et ce conseil sera chargé d'aviser l'Agence sur la conformité de ses actions avec sa mission et sur toute question qui concerne sa régie, comme les prévisions budgétaires, le plan d'activité annuel, le plan d'effectifs ou la nomination des surintendants. De plus, ce Conseil pourra formuler des avis ponctuels. Alors, M. le Président, j'aimerais entendre les invités sur cette question, bien sûr, qui est au coeur de nos débats.

Le projet de loi institue un bureau de révision qui est un organisme indépendant de l'Agence et qui exerce des fonctions juridictionnelles. La création du Bureau de révision fait partie de la démarche de déjudiciarisation du processus décisionnel au sein de l'Agence. Ainsi, les décisions de l'Agence en toutes matières, et cela, y compris dans le domaine des valeurs mobilières, se feront conformément aux règles de justice administrative prévues par la Loi sur la justice administrative, c'est-à-dire de façon plus simple, plus efficace, mais toujours de façon aussi impartiale.

Alors, M. le Président, le projet de loi confère au gouvernement un contrôle sur la croissance de l'Agence et introduit certaines dispositions visant à assurer la transparence de sa gestion. En effet, M. le Président, plusieurs personnes nous ont mis en garde contre les dangers d'une croissance débridée de l'Agence et à l'instar de certaines commissions des valeurs mobilières d'autres provinces, d'ailleurs, selon le rapport de l'Institut Fraser, ou encore d'un possible manque de transparence dans sa gestion. Donc, pour prévenir tout abus, la loi prévoit que les prévisions budgétaires de l'Agence, son plan d'activité devront être approuvés par le gouvernement.

L'indépendance de l'Agence sera reconnue. Pour nous, c'est absolument essentiel à sa crédibilité. Donc, l'Agence sera totalement indépendante du gouvernement et du ministre quant à l'application des lois. En effet, ni le gouvernement ni le ministre n'aura quelque moyen que ce soit d'intervenir directement ou indirectement ? je conclus, M. le Président ? dans les prises de décision de l'Agence concernant l'application de la loi.

Alors, en terminant, M. le Président, faire une dernière mise au point, le projet de loi n° 107 vise à réformer la structure d'encadrement du secteur financier québécois. C'est une réforme de structure. Parfois, il faut en faire pour les simplifier, pour donner accès plus facilement aux consommateurs et aux institutions, et donc une réforme de structure et non des règles d'encadrement. Nous avons donc résisté tout au long du projet de loi à corriger les règlements d'encadrement. C'est plus tard et dans une seconde étape que nous travaillerons à ce projet qui est un projet colossal, M. le Président. Alors, j'invite tout le monde à être conscient de cette situation, bien sûr, puisque nous nous attaquons à la structure, moins aux règlements, pour ne pas dire pas du tout aux règlements. Mais, plus tard, ce sera l'autre défi que nous aurons à relever ensemble avec tous les partenaires concernés.

Je suis donc heureuse de pouvoir participer à cette commission ce matin, d'entendre ceux et celles qui veulent nous apporter leur point de vue, leur éclairage, nous permettant ainsi d'aménager, de corriger certaines choses. Et l'intention du gouvernement est de procéder assez rapidement à l'automne, une fois que nous aurons entendu les gens, à des propositions d'amendement s'il y a lieu, mais surtout à l'étude article par article. Merci beaucoup.

Le Président (M. Paré): Merci, Mme la ministre. Avant de procéder à l'audition de Mme la critique, j'aimerais rappeler aux gens de la salle, pour la bonne tenue de nos travaux, d'éteindre leurs cellulaires, s'il vous plaît, de s'assurer que vos cellulaires soient fermés.

Donc, pour les prochaines 15 minutes, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, la parole est à vous.

Mme Monique Jérôme-Forget

Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. D'abord, je voudrais remercier les gens qui ont préparé des mémoires. Tout ça s'est passé durant l'été. Je dois vous dire que, grâce au ciel, il faisait beau, et j'ai pu justement passer plusieurs heures à ma maison de campagne et digérer les nombreux mémoires qui nous ont été soumis.

Je voudrais également, M. le Président, souligner la qualité des mémoires, la réflexion que chacun d'entre vous avez faite à l'intérieur des mémoires que vous nous avez soumis. On sent que les gens, les différents groupes ont voulu améliorer ce projet de loi, Mme la ministre, ils ont voulu participer à la réforme du secteur financier, notamment sa réglementation, et, par conséquent, l'effort que vous avez déployé, je veux tous vous féliciter, parce que, dans des volets ou d'autres, la qualité des mémoires est remarquable.

J'avais beaucoup insisté pour avoir une commission parlementaire et entendre les parties. J'avais beaucoup insisté sur ça parce qu'il m'est apparu important que, suite au rapport Martineau et suite au dépôt du projet de loi, avec lequel, l'intention, M. le Président, nous sommes parfaitement en accord, il fallait arriver à un décloisonnement de la réglementation dans le secteur financier, puisque le secteur s'est transformé durant les dernières années. Par conséquent, j'endosse tout à fait la démarche. Par ailleurs, il fallait le faire et le bien faire. Et le bien faire, ça nécessitait qu'on aille entendre les gens du milieu qui vivent quotidiennement les irritants qu'apporte la réglementation au Québec et au Canada. Je pense qu'il y a eu plusieurs démonstrations dans les différents mémoires démontrant la lourdeur pour les intervenants du milieu... la lourdeur, dis-je, de toute cette réglementation qui s'entrecoupe et qui ajoute des coûts remarquables aux gens qui sont impliqués dans ce secteur.

D'ailleurs, je voulais noter, je n'avais pas pris connaissance d'une étude qui avait été faite lorsque le Financial Services Authority avait été créé en Angleterre. Il y a eu une étude, à laquelle a référé M. Garcia, de la Standard Life, démontrant qu'au Canada les coûts sont deux fois plus élevés qu'ailleurs, et on me dit qu'au Québec c'est deux fois plus élevé que dans l'ensemble du Canada. C'est donc dire que le ménage, il faut qu'il soit fait, il faut qu'il soit bien fait, et il y a lieu non pas de tant se presser, au contraire, d'être prudent et de bien le faire. Et, Mme la ministre, sachez que vous allez avoir mon entière collaboration pour nous assurer que ce projet de loi, dans deux ans et dans trois ans, on ne sera pas en train de le refaire, hein, de la réamender et de recommencer à nouveau.

Parce que rappelons-nous que toute la réforme qui a eu lieu dans le domaine du secteur financier, en particulier la dernière décennie, il y a eu de tels changements qu'il faut que le secteur réglementaire s'adapte à tous ces changements. L'idée, là, de l'ancien temps qu'on allait à son guichet de banque, on avait un carnet de banque, rappelez-vous, M. le Président, un carnet de banque... Et, je me rappelle, quand j'étais jeune, même, il y avait l'agent d'assurances qui passait une fois par année pour mettre à jour la police d'assurance de la famille, mettre à jour. Aujourd'hui, c'est fini, ce temps-là. Ce temps-là est révolu, le marché est complètement décloisonné. Vous allez sur votre ordinateur et, très souvent, vous prenez votre information directement de votre ordinateur. Et, par conséquent, il est clair que les gouvernements et la réglementation doivent s'ajuster à ça.

Alors, je dois vous dire que j'ai beaucoup apprécié, j'ai beaucoup appris, à part ça, à lire les mémoires. J'ai beaucoup appris parce que je sentais qu'il y avait une expertise dans chacun des mémoires.

À votre invitation, Mme la ministre, ça fait deux fois ou trois fois qu'on m'appelle de votre bureau pour faire venir M. Martineau. Bon. C'était là votre intention, vous en profitez ce matin parce qu'il y a une ouverture. Moi, je vous dis qu'il y a suffisamment de gens à qui on a refusé de les entendre, parce que supposément on n'avait pas le temps, parce qu'il y a plusieurs mémoires qui ont été déposés et qu'on n'entend pas, alors...

n (10 heures) n

Mme Marois: Non. M. le Président, s'il y a des gens que l'on a refusés, alors, je veux savoir lesquels, parce que nous avons accepté toutes les demandes qui nous ont été faites et nous avons même invité le Barreau, s'il voulait venir par exemple...

Mme Jérôme-Forget: Bon. Parfait, Mme la ministre.

Mme Marois: ...et celui-ci a dit qu'il était représenté assez bien par le Conseil interprofessionnel, ce qui est correct. On a accepté son point de vue.

Mme Jérôme-Forget: Bon. Mme la ministre, alors...

Mme Marois: S'il y a d'autres organismes qui veulent venir, je suis disponible.

Le Président (M. Paré): Merci, Mme la ministre.

Mme Jérôme-Forget: ...nous proposerons que d'autres intervenants viennent durant cette période-là, mais il est clair que M. Martineau, qui a rédigé son mémoire, est, à mon avis, en conflit d'intérêts parce que voilà des gens qui, aujourd'hui, sont censés examiner non seulement le mémoire, mais le projet de loi et poser...

Donc, la tribune, là, n'est plus au gouvernement, la tribune n'est pas la commission Martineau. La tribune, elle est offerte aux gens du milieu. C'est à eux qu'appartient cette tribune, durant les trois prochains jours.

Je disais donc, M. le Président, qu'il est temps de décloisonner les organismes de surveillance du secteur financier après avoir décloisonné les institutions financières. Ça s'avère finalement une idée de base. Nous avons, à la lumière des mémoires, à la lumière d'un nombre important de mémoires... Ce n'est pas seulement l'envergure de la nouvelle Agence ou les pouvoirs donnés seulement à son président. Bien sûr que, quand on compare le Québec à la Securities Commission aux États-Unis, hein, on va se rendre compte que c'est bien petit.

Ce n'est pas ça. Le problème qu'il y a dans le projet de loi actuel, c'est le côté quasi judiciaire de la Commission des valeurs mobilières qui, elle, joue un rôle très important d'impartialité et doit maintenir ce rôle d'impartialité et doit, à mon avis, se fonder à l'intérieur justement du système canadien et du système nord-américain et, je pousserais même, à l'intérieur de la culture internationale.

Tous les déboires ? et vous savez, M. le Président, on s'est penchés sur ça récemment ? tous les déboires actuels se passent principalement dans le secteur des valeurs mobilières. Que ce soient les WorldCom ou les Enron ou, pardonnez-moi, mais CINAR, il va falloir qu'on surveille davantage le secteur des valeurs mobilières; c'est le secteur qui est en danger. Et on a tenté ? notre commission justement ? d'examiner, s'il y avait lieu, de poser des gestes dans ce secteur-là. Par conséquent, je pense que ce n'est pas tant la grosseur de l'organisme ou de l'Agence comme de donner une image, de créer un organisme si différent au Québec de ce qui se passe autour de nous que, finalement, ça mette en péril des activités que font chacun des organismes, tout simplement parce que l'organisme de réglementation, notamment la Commission des valeurs mobilières, qui, elle, est perçue par tout le monde comme étant impartiale à cause de son volet quasi judiciaire, on doit maintenir ce volet-là. Et, moi, j'estime ? et ma formation politique, je pense, l'estime ? qu'un bureau de révision ça n'a pas l'impartialité d'un forum quasi judiciaire d'une Commission des valeurs mobilières.

Ayant été présidente de la CSST, il y avait un bureau de révision, mais, par ailleurs, suivez ce bureau de révision qui s'est transformé, dans le fond, en révision administrative; il y avait la CALP, la Commission d'appel, qui était complètement indépendante, sur laquelle je n'avais aucun contrôle quant à son budget, le budget était décidé à l'extérieur. Donc, la notion d'impartialité dans le secteur financier, c'est une notion fondamentale.

De plus, je pense, le premier qui a sonné l'alarme, c'est M. Michaud qui nous a fait voir les incohérences dans une même personne et une même tête, de devoir garder des informations secrètes: l'Inspecteur général des institutions financières qui doit permettre, n'est-ce pas, à une institution financière de fonctionner mais quand même servir de chien de garde quant à son capital, et, par ailleurs, la Commission des valeurs mobilières, elle, qui a la mission de tout divulguer; elle doit être ouverte.

Par conséquent, moi, je pense qu'il y a lieu de se pencher encore, M. le Président, et d'améliorer ce projet de loi pour nous assurer que nous gardons un volet quasi judiciaire, que nous assumons la responsabilité du surintendant de l'IGIF ? l'Inspecteur général des institutions financières ? pour nous assurer qu'il y a ce volet de transparence dans un cas et de confidentialité dans l'autre, mais, malgré tout, qu'on garde, au niveau administratif, pour harmoniser les règlements, la réglementation, pour harmoniser les obligations de se rapporter à cinq ou six personnes différentes, bien, M. le Président, je pense que, là, il y a lieu d'avoir une Agence pour ce volet-là, le côté administratif. Mais on aurait tort aujourd'hui de créer un organisme exclusivement administratif, un peu comme une régie, alors que, dans le milieu canadien, le milieu nord-américain, c'est le style plus Commission des valeurs mobilières et commissaires qui, dans le fond, garde un volet quasi judiciaire.

Alors, M. le Président, moi, je pense qu'il y a lieu de s'interroger et d'améliorer le projet de loi, et, à la lumière de ce qu'on va nous dire ? parce qu'il y a plusieurs membres, plusieurs mémoires qui soulèvent ce volet-là ? je pense qu'on devra apporter des amendements à ce projet de loi. Je souhaite vivement que la ministre soit ouverte à pouvoir apporter des amendements importants à ce projet de loi, de sorte que, demain, on sera en mesure de répondre aux besoins de la communauté des affaires, du milieu financier et de répondre aux attentes de ce milieu-là.

Parce que, rappelons-nous, M. le Président, en 1998, nous avons eu un projet de loi, le projet de loi, la loi n° 188 ? tout le monde s'en rappelle, ici, dans la salle. Là, aujourd'hui, on est en train encore de se poser des questions. Tant qu'à le faire il faudrait le faire bien, cette fois; il faudrait le faire bien. Et vous savez, M. le Président, ce n'est pas nouveau, là.

Je me rappelle ? et on m'a rappelé d'ailleurs des membres, qui ont soumis des mémoires, avec qui j'ai communiqué ? que Mme Robic, dans son testament, en décembre 1993, avait précisément suggéré qu'on fusionne l'IGIF et la Commission des valeurs mobilières, tout en gardant le rôle quasi judiciaire de la Commission des valeurs mobilières.

Alors, disons que ça fait depuis une décennie au moins que tout le monde veut apporter des changements importants à tout le secteur financier, de réglementation financière. Et, M. le Président, moi, aujourd'hui, je suis très heureuse d'entendre les gens, j'étais très heureuse de lire les mémoires, et je puis vous dire que je les ai tous lus attentivement, en dépit du fait du soleil et du beau temps. Mais probablement que c'est ça, le calme autour de moi, qui m'a permis justement de pouvoir me concentrer et de penser que le milieu financier, c'est le milieu le plus excitant de la terre. Merci, M. le Président. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Paré): Merci, Mme la députée. Est-ce qu'il y aurait d'autres remarques préliminaires de la part de l'opposition? Il vous reste trois minutes. Est-ce qu'il y a d'autres remarques préliminaires? Merci.

Auditions

Nous sommes prêts à entendre le premier groupe: L'Association des banquiers canadiens. Bienvenue, messieurs. M. Pierre Desroches, M. Jacques Hébert et Me Daniel Ferron. La parole est à vous.

Association des banquiers
canadiens (ABC)

M. Desroches (Pierre): Merci, M. le Président, Mme la ministre, Mmes et MM. les membres de la commission. Mon nom est Pierre Desroches. Je suis ici en la qualité de président du Comité du Québec de l'Association des banquiers canadiens qui regroupe en fait toutes les banques à charte faisant affaire au Québec. Permettez-moi... On vous a présenté les gens qui m'accompagnent: M. Hébert et M. Ferron.

La Direction du Québec de l'Association des banquiers canadiens est heureuse de saisir l'occasion qui lui est offerte de commenter le projet de loi n° 107. D'entrée de jeu, l'ABC appuie la démarche du gouvernement qui vise à réviser la structure d'encadrement du secteur financier afin de suivre l'évolution des marchés ainsi que les mesures ayant pour objectifs d'assurer la protection et le respect des intérêts du consommateur.

Notre analyse du projet de loi n° 107 nous amène à formuler cinq commentaires principaux que voici. Notre premier commentaire a trait au Conseil consultatif de régie administrative prévu aux articles 46 et suivants du projet de loi.

Nous avons constaté que l'Agence nationale d'encadrement du secteur financier ne sera pas dotée d'un conseil d'administration formé de représentants du milieu, comme c'est le cas actuellement pour le Bureau des services financiers. Toutefois, le projet de loi prévoit la création d'un Conseil consultatif de régie administrative composé de sept membres nommés par le ministre des Finances qui aura pour fonction de donner des avis à l'Agence sur la conformité de ses actions avec sa mission et sa régie interne.

n (10 h 10) n

Nous croyons que la centralisation des pouvoirs aux mains d'un président-directeur général, possiblement assisté d'administrateurs, contribuera à éliminer les multiples problèmes découlant de la structure actuelle de fonctionnement du Bureau des services financiers. Celle-ci favorise trop souvent au conseil d'administration les débats stériles et les affrontements entre les représentants des divers secteurs de l'industrie de services financiers. Toutefois, nous sommes d'avis qu'il faudrait tout autant éviter la situation inverse où les divers intervenants du secteur financier seraient totalement absents du pouvoir décisionnel dans la structure d'encadrement prévue. L'ABC estime donc que le Conseil consultatif serait un bon forum permettant aux divers intervenants du milieu d'apporter leur contribution et leurs expériences à une saine gestion de l'Agence. À cet effet, nous souhaiterions vivement que le gouvernement aille de l'avant avec cette proposition et que l'industrie bancaire puisse occuper un siège au Conseil.

Notre deuxième commentaire, en fait, notre source principale de préoccupation, concerne le maintien des Chambres. Malgré la recommandation du Groupe de travail à l'effet d'inclure la Chambre de sécurité financière et la Chambre de l'assurance de dommages parmi les organismes à fusionner au sein d'une seule Agence, le projet de loi propose non seulement le maintien des deux Chambres, mais également leur reconnaissance automatique à titre d'organisme d'autoréglementation.

Or, comme l'ABC l'avait longuement exposé dans son mémoire présenté au Groupe de travail en août 2001, ces deux entités sont justement et précisément à l'origine de la plupart des nombreux problèmes soulevés par l'industrie bancaire et d'autres institutions financières oeuvrant au Québec.

Du point de vue des groupes financiers bancaires, la mise en application de la Loi sur la distribution de produits et services financiers a été et demeure toujours laborieuse. Elle a nécessité l'instauration de mesures transitoires complexes et par la suite l'adoption d'un nombre important de règlements. Il s'agit d'une pièce législative fort enchevêtrée, problématique à maints égards et de compréhension difficile, tant pour les intermédiaires et les institutions qu'elle vise à encadrer que pour les consommateurs qu'elle cherche pourtant à mieux protéger.

À titre d'exemple, les normes relatives à la formation continue obligatoire, à la discipline et à la déontologie relèvent actuellement de la juridiction de deux organismes principaux, à savoir la Chambre de la sécurité financière et la Chambre de l'assurance dommages. Toutefois, cette règle souffre de nombreuses exceptions qui font en sorte qu'il est extrêmement difficile pour le consommateur de s'y retrouver.

Ainsi, en matière de planification financière, un total de six organismes ? j'ai bien dit six ? se partagent la juridiction à l'égard des personnes autorisées à porter le titre de planificateur financier: d'abord, le Bureau des services financiers pour l'obtention d'un certificat, la Chambre de la sécurité financière pour ce qui est de la discipline et de la déontologie, l'Institut québécois de planification financière pour ce qui est de l'obtention du diplôme et de la formation continue obligatoire, et trois ordres professionnels dont les membres sont autorisés à porter le titre de planificateur financier et qui ont signé une convention avec le Bureau des services financiers, soient l'Ordre des administrateurs agréés du Québec, la Chambre des notaires du Québec et l'Ordre des comptables généraux licenciés du Québec.

Les membres de ces trois ordres sont autorisés à porter le titre de planificateur financier, échappent à la juridiction de la Loi sur la distribution de produits et services financiers et de l'Institut québécois de planification financière, puisque, en vertu de l'article 59 et suivants de cette dernière loi, c'est l'ordre professionnel lui-même qui doit veiller à la discipline et établir les normes de déontologie et de formation continue de ces personnes.

Par contre, les dispositions pénales prévues à la Loi sur la distribution de produits et services financiers continuent de s'appliquer à ces professionnels. Cette situation n'est toutefois pas permanente, puisque les conventions entre les ordres professionnels et le Bureau des services financiers ne peuvent avoir une durée de plus de cinq ans et doivent donc être renégociées régulièrement. C'est vous dire l'enchevêtrement de cette pieuvre bureaucratique.

Autre exemple frappant. La Commission des valeurs mobilières, le Bureau des services financiers et la Chambre de la sécurité financière se partagent la juridiction à l'égard des représentants en épargne collective, en contrats d'investissement et en plans de bourses d'études. Encore là, il n'est pas exagéré de parler de complication inutile et de lourdeur qui entraînent des coûts importants, tant pour le gouvernement que pour l'industrie, ces coûts étant d'ailleurs assumés, en bout de ligne, par le consommateur.

Bien que nous persistions à croire qu'un regroupement de tous les organismes existants permettrait à coup sûr d'amorcer une rationalisation de la structure des frais découlant de l'application de la loi, nous sommes profondément convaincus que le maintien des deux Chambres ne contribuera d'aucune façon à réduire la multitude de frais imposés aux cabinets et à leurs employés, ce qui diminuera considérablement les bénéfices résultant du regroupement proposé par le projet de loi n° 107.

Nous croyons également que le maintien des deux Chambres contribuera à perpétuer l'approche rigide actuellement appliquée par ces dernières, laquelle tient peu compte du rôle que souhaitent jouer les cabinets en matière de conformité de leurs représentants et qui est mal adaptée à la structure du fonctionnement des groupes financiers bancaires, à plus forte raison dans le cadre d'une relation employeur-employé.

En définitive, le maintien de ces deux Chambres réduira considérablement les bénéfices pouvant découler d'un regroupement des organismes de réglementation et de contrôle car cela perpétuera le dédoublement, les chevauchements, la multiplication des frais ainsi que la confusion qui est justement à l'origine des malaises persistants et de l'insatisfaction générale à l'égard du système actuel non seulement au sein des intervenants du secteur financier, mais également chez les consommateurs. Dans cet esprit, nous exhortons les membres de la commission à reconsidérer cet aspect du projet de loi.

Notre troisième commentaire, portant sur la juridiction à l'égard des représentants en épargne collective, découle directement de la proposition de maintenir la Chambre de la sécurité financière. Le projet de loi propose le maintien intégral de la juridiction de la Chambre de la sécurité financière à l'égard des représentants en épargne collective. Encore ici, une telle orientation risque de contribuer à maintenir une grande partie des irritants et des dédoublements qui découlent du système actuel d'encadrement et qui a été dénoncée par plusieurs organismes, dont l'ABC.

Lors de l'adoption de la Loi sur la distribution de produits et services financiers, nos membres avaient vivement contesté le transfert de juridiction de la Commission des valeurs mobilières du Québec au Bureau des services financiers à l'égard de certaines catégories de représentants en épargne collective, en contrats d'investissement et en plans de bourses d'études. Tel qu'exposé en détail dans notre mémoire présenté au Groupe de travail, l'ABC persiste à croire fermement que le législateur devrait maintenir la juridiction complète de la future Direction de l'encadrement des marchés de l'Agence à l'égard de ces représentants.

L'ABC affirme sans hésitation que le partage des responsabilités instauré par la loi n° 188 n'a apporté aucune amélioration par rapport au système qui prévalait avant son adoption. Au contraire, ce nouveau système n'a fait que contribuer à engendrer des coûts administratifs, que l'on considère inutiles, et compliquer sans raison la gestion des dossiers de représentants visés.

Comme le projet de loi qui est devant nous maintient l'existence de la Chambre de la sécurité financière, l'industrie bancaire s'interroge sérieusement sur l'utilité de conserver, à l'égard des représentants en épargne collective, en contrats d'investissement et en plans de bourses d'études, un double régime d'encadrement impliquant l'Agence et la Chambre de la sécurité financière. Nous recommandons que la juridiction quant à ces représentants revienne en totalité à l'Agence... à la Direction de l'encadrement des marchés de l'Agence, qui prendra le relais de la Commission des valeurs mobilières.

Notre quatrième sujet de préoccupation a trait à la juridiction à l'égard des planificateurs financiers qui, comme le commentaire précédant, découle des dispositions du projet de loi proposant le maintien de la Chambre de la sécurité financière.

Nous avons tout d'abord noté avec satisfaction que le projet de loi n° 107 propose de transférer à l'Agence le pouvoir actuellement accordé à l'Institut québécois de planification financière de déterminer, par règlement, les règles relatives à la formation continue obligatoire applicables aux planificateurs financiers. Nous comprenons que ce pouvoir appartiendra désormais à l'Agence.

n (10 h 20) n

Nous nous réjouissons également de constater que le projet de loi propose l'abrogation des articles 59 à 69 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers qui prévoient la possibilité d'ententes entre le Bureau des services financiers et les ordres professionnels dont les membres sont autorisés à porter le titre de planificateur financier afin de déterminer les responsabilités de ces ordres.

Ces modifications impliquent donc qu'à l'avenir c'est la nouvelle Agence qui aura principalement juridiction sur les planificateurs financiers, qu'il soient membres ou non d'un ordre professionnel. Malheureusement, cela ne signifie pas pour autant que l'Agence conservera en totalité cette juridiction, puisqu'elle pourra déléguer tout ou partie de son pouvoir à un ou plusieurs organismes d'autoréglementation qui pourraient en faire la demande.

Comme mentionné précédemment, le projet de loi prévoit déjà une délégation de certains pouvoirs à la Chambre de la sécurité financière en matière d'enquêtes, de discipline et de déontologie à l'égard des planificateurs financiers. Par ailleurs, l'Agence pourrait décider de déléguer certains de ses autres pouvoirs en matière de planification financière à d'autres organismes d'autoréglementation comme, par exemple, l'Institut québécois de planification financière ou des ordres professionnels.

En ce sens, bien que nous reconnaissions les efforts du législateur pour éliminer les dédoublements en matière de planification financière, nous sommes déçus que le projet de loi maintienne la juridiction de la Chambre de la sécurité financière dans ce secteur et persistons à croire que seule l'Agence devrait avoir pleine et entière juridiction dans ce domaine afin d'éliminer complètement le dédoublement inutile et les coûts en découlant.

À défaut de demeurer sous la seule juridiction de l'Agence, les planificateurs financiers, plutôt que de risquer d'être soumis au contrôle de plusieurs organismes de surveillance, devraient être constitués en ordre professionnel afin d'être soumis au régime de fonctionnement prévu au Code des professions, ce qui assurerait un meilleur contrôle sur la qualité des actes professionnels des membres de ce nouvel ordre.

Le cinquième et dernier commentaire dont nous aimerions vous entretenir concerne le Réseau de conciliation du secteur financier. Le gouvernement s'est engagé à s'assurer que les consommateurs du Québec aient accès à des mécanismes de recours appropriés pour résoudre tout problème qu'ils estiment avoir en matière de services financiers.

Le secteur bancaire partage totalement cet engagement. De concert avec d'autres fournisseurs de services financiers, il a pris des mesures afin de créer le Réseau de conciliation du secteur financier, lequel offrira aux consommateurs de services financiers un point d'accès unique à un système de recours approprié, qu'il s'agisse de services d'ombudsmen du fournisseur de services financiers ou de services d'ombudsmen à l'échelle sectorielle.

Supervisé par un conseil d'administration indépendant, le Réseau sera aussi responsable d'établir des normes, de faire des rapports sur la conformité de ces normes, d'encourager les meilleures pratiques, de sensibiliser le grand public aux services offerts et de faire rapport sur les activités et les réalisations du Réseau.

Le conseil d'administration sera dirigé par une présidente indépendante, Mme Huguette Labelle, chancelier de l'Université d'Ottawa. Y siégeront également deux administrateurs provenant du Québec: Mme Madeleine Plamondon, présidente et directrice du Service d'aide au consommateur de Shawinigan, et M. Jean Houde, premier vice-président affaires corporatives de la Banque Nationale du Canada.

Le cadre organisationnel, les structures de régie interne du Centre et les trois services d'ombudsmen sectoriels sont déjà en place. Ils couvrent les services bancaires, les valeurs mobilières, l'assurance vie, l'assurance maladie et, enfin, les assurances générales. On est à embaucher le personnel du Centre d'orientation des consommateurs et à constituer une vaste base de données afin de permettre à ce dernier d'orienter les demandes de renseignements des consommateurs vers la personne-ressource appropriée pour assurer le règlement de la plainte au sein de l'entreprise visée ou des services d'ombudsmen sectoriels. Ces services seront offerts partout au pays et auront une présence physique à Montréal.

Le Réseau devrait être pleinement fonctionnel au début de l'automne. Nous sommes confiants qu'il répondra aux attentes du gouvernement en matière de mécanisme de recours, sans frais, opportun et efficace pour les consommateurs du Québec. Nous incitons donc le gouvernement du Québec à évaluer le fonctionnement du Réseau et à ne pas prendre de mesures en vue d'établir un mécanisme de recours différent à l'intention des consommateurs du Québec.

En conclusion, l'ABC appuie le gouvernement du Québec dans toute initiative visant à améliorer la concurrence entre les institutions financières faisant affaire sur le territoire québécois, et ce, même si nous sommes toujours d'avis qu'une réglementation nationale constitue le meilleur moyen de mettre en oeuvre un contexte réglementaire efficace à l'égard des services financiers. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Paré): Merci beaucoup, M. Desroches. S'il n'y a pas d'autres commentaires ? il vous reste encore trois minutes ? de vos collègues, nous allons passer tout de suite à la période des échanges. Mme la ministre.

Mme Marois: Alors, je vous remercie, M. le Président. Merci beaucoup pour votre présentation qui est particulièrement fouillée et intéressante. Je pense que vous soulevez un certain nombre de questions, entre autres sur les Chambres. Je crois qu'un de mes collègues reviendra sur ça pour aller un petit peu plus loin avec vous.

Mais, d'abord, d'entrée de jeu ? et je voudrais vous entendre sur cela en particulier ? je vous remercie pour l'appui que vous donnez, enfin, au principe du projet de loi, et, pour l'essentiel, aux actions qui y sont proposées, aux transformations qui y sont proposées, avec toutes les nuances que vous apportez dans certains secteurs et sur certains sujets.

Mais il y a une chose qui revient dans votre mémoire et dans la synthèse aussi que vous nous avez présentée, c'est l'importance que nous agissions rapidement. On dit: «Nous encourageons vivement ? là, je vous cite ? le gouvernement à procéder le plus rapidement possible à l'adoption du projet de loi afin de réduire, dans la mesure du possible, les risques de départ des employés visés ou l'incertitude, en général, du secteur.»

Et ça, on le ressent en filigrane, un peu partout dans votre mémoire. J'aimerais que vous m'expliquiez en quoi vous croyez qu'il est important que nous procédions rapidement pour éviter les problèmes que vous soulevez et dans quelle mesure ces problèmes risqueraient de devenir encore plus importants si nous n'agissions pas.

Le Président (M. Paré): M. Desroches ou M. Hébert?

M. Hébert (Jacques): M. Hébert. D'entrée de jeu, Mme la ministre, j'aimerais souligner, pour employer une figure de style, que, pour les institutions financières du Québec ? et j'inclus non seulement les banques, mais les caisses populaires ? nous pensons que le chemin de croix a assez duré.

La lourdeur administrative de la loi n° 188 et de tout ce qui en découle, c'est tellement important pour nous qu'il faut absolument que ça change. Donc, nous avons insisté effectivement pour dire qu'on doit procéder avec rapidité. Cependant, ça ne veut pas dire avec précipitation; il y a une immense différence entre les deux.

Oui, nous sommes d'avis que le gouvernement doit bouger dans les meilleurs délais possibles, mais il est extrêmement important que vous preniez le temps d'examiner tous les mémoires qui ont été soumis non seulement le nôtre, qui est, bien sûr, le meilleur, mais également les autres qui seront présentés...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Hébert (Jacques): ...parce que l'intervention de chaque groupe impliqué est extrêmement importante. Il y a certainement des points sur lesquels nous, nous n'avons pas insisté ? par choix, bien sûr ? sur lesquels les autres ont porté plus d'attention, et c'est parfaitement normal. Oui, donc, pour résumer, nous souhaitons que vous procédiez avec une rapidité intelligente, mais, encore là, sans bousculer les choses.

Le Président (M. Paré): Merci.

Mme Marois: D'accord. Je...

M. Desroches (Pierre): J'aimerais peut-être rajouter aussi...

Mme Marois: Oui.

Le Président (M. Paré): M. Desroches.

M. Desroches (Pierre): ...quand vous disiez tout à l'heure sauvegarder la compétence, je pense qu'on reconnaît tous qu'il existe au niveau des organismes qui sont déjà actuellement en place un niveau de compétence, qu'il faut vraiment assurer la pérennité de cette compétence-là à l'intérieur de l'Agence, et c'est pour cette raison que, souvent, l'incertitude porte à la réflexion, et une réflexion, des fois, peut porter au départ. Je pense que le Québec serait perdant de perdre les compétences qui existent actuellement au sein de ces organismes-là. Et, dans ce sens-là, bien, l'ABC dit: Allons-y avec diligence et récupérons toute cette compétence qui existe au sein de ces différents organismes.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Desroches. Mme la ministre.

Mme Marois: Oui. Je vous remercie de ces commentaires, et c'est vraiment l'intention que nous avons aussi, comme je le mentionnais tout à l'heure, de procéder mais de le faire de façon ordonnée, et les propos que vous tenez comme association ou que d'autres vont nous présenter, les commentaires, les remarques, on va les étudier et on a déjà commencé à le faire, vous en conviendrez sûrement ? ha, ha, ha! ? et on va les analyser très correctement, de telle sorte qu'on puisse améliorer le projet qui est devant nous.

n(10 h 30)n

Mais ? et je le redis parce que c'est important justement pour que les institutions, les milieux financiers soient rassurés en ce sens-là ? nous croyons qu'il y a des changements à faire, nous allons les faire, nous allons prendre le temps qu'il faut. Mais le temps qu'il faut ne veut pas dire traîner, et, dans les prochains mois, si tel était le voeu de l'Assemblée nationale, je souhaiterais que l'on procède avant la fin de l'année, parce que ça fait déjà quand même un long moment. Il y a eu la loi n° 188, mais il y a eu la commission Martineau aussi et il y a eu toutes les discussions depuis. Et c'est vrai qu'il y a des compromis dans ce projet, on le sait bien, tous, mais je crois que ce sont des compromis qui nous permettent de faire un très grand pas dans la bonne direction et qui en même temps est respectueux des institutions que l'on a déjà. Bon.

Je veux aller un petit peu plus loin sur une question plus pointue, peut-être, enfin, pointue ou plus précise. Au fédéral, on sait que les banques ? puisque vous en êtes ? sont supervisées par le Surintendant des institutions financières. Et, selon vous, est-ce que le Bureau du Surintendant rencontre des difficultés à être reconnu par les autres organismes d'encadrement parce qu'il ne serait pas dirigé par un conseil d'administration? Parce que, ça, c'est une question qui revient régulièrement dans les mémoires ou qui est soulevée et, pour moi, c'est important. Je vais vous poser ma question sous un autre angle: Est-ce que vous pensez que le Surintendant des institutions financières ferait mieux valoir les intérêts du Canada ? prenons-le comme ça ? s'il était fragmenté en plusieurs organismes?

Le Président (M. Paré): M. Desroches? M. Hébert.

M. Hébert (Jacques): À l'heure actuelle, ce qu'on constate, c'est que le système fonctionne bien. Votre question est un petit peu théorique: Que se passerait-il si les choses étaient autrement? Bien, il faudrait que les choses soient autrement et qu'on expérimente la situation pour pouvoir répondre de façon précise.

Mme Marois: Vous comprenez le parallèle que je fais, hein?

M. Hébert (Jacques): Oui, absolument. Mais, dans les faits, on constate que ça fonctionne bien. Nous, dans notre mémoire, la question qui était posée en ce qui concerne le conseil consultatif ou le conseil d'administration, on s'est prononcés sur le projet de loi comme tel. Le projet de loi parle non pas d'un conseil d'administration, mais d'un conseil consultatif. On dit: Consultatif, oui, on en est, à condition bien sûr qu'on y soit. Sauf qu'on a une phrase dans notre mémoire disant: Attention, il y a d'autres possibilités, et l'une d'elles est un conseil d'administration. Il y a plusieurs organismes qui fonctionnent avec des conseils d'administration, je pense à la Régie des rentes du Québec, par exemple, et beaucoup d'autres qu'on pourrait nommer. Bien, on n'est pas contre ça, pas du tout.

Ce que nous souhaitons, c'est que, dans l'ensemble, la structure qui sera mise en place soit, entre guillemets, reconnue par les gens d'affaires aux plans national et international. Si une personne qui veut investir au Québec, par exemple, observe la réglementation et s'il se sent complètement perdu, ce n'est pas de nature à favoriser la bonne marche des affaires et les investissements au Québec. Pourtant, que souhaitons-nous, tous ensemble? Une seule chose: c'est que l'économie du Québec s'améliore, que ce soit créateur d'emplois et que le mieux-être au Québec soit plus prononcé encore.

Donc, quelle que soit la mesure finale qui sera choisie, la structure finale, ce que nous souhaitons, c'est qu'on garde toujours à l'esprit qu'il y a des objectifs précis: simplification de la structure ? actuellement, c'est beaucoup trop compliqué ? réduction des coûts extrêmement importants, parce que, vous le savez, quels que soient les domaines, que ce soient les banquiers, les caisses populaires ou les assureurs, nous refilons la facture aux consommateurs, c'est connu; troisièmement, la protection du consommateur, je pense, est extrêmement importante. Or, à l'heure actuelle, c'est tellement compliqué, alambiqué, lourd que même le consommateur qu'on veut protéger ne s'y retrouve pas.

Alors, il va se trouver des groupes pour nous dire: Oui, ça prend absolument un conseil d'administration. D'autres nous diront: Non, ça prend plutôt un conseil consultatif. Le Barreau s'est prononcé là-dessus. Nos amis les assureurs vont se prononcer là-dessus. Ce que nous souhaitons, nous, ultimement ? et on ne s'attachera pas, comme une peau de chagrin, à la structure comme telle ? on veut que ça fonctionne mieux...

M. Desroches (Pierre): Et que ce soit crédible.

M. Hébert (Jacques): ...et que ce soit absolument crédible, bien sûr.

Mme Marois: Vous faites une recommandation sur le comité consultatif, là, où vous dites: On aimerait avoir un siège. La philosophie qui est derrière ce conseil-là, ce n'est pas nécessairement ? et je vous pose la question et je veux avoir vos commentaires ? ce n'est pas nécessairement qu'il y ait un représentant de votre organisation ou de votre association, un représentant de l'Association des assureurs, bon, peu importe, mais qu'il y ait des gens qui viennent de ces et de vos milieux, qui ont soit eu une expérience pertinente, intéressante dans ces secteurs, qui y sont peut-être moins actifs, pour éviter qu'on se retrouve avec des gens qui sont là pour défendre un point de vue qui est le point de vue de leur organisation. Et ça, c'est une de mes préoccupations.

Peut-être devons-nous procéder autrement, et je suis disponible pour en discuter; c'est pour ça qu'on fait cette rencontre et cette consultation. Alors, j'aimerais ça avoir votre point de vue là-dessus, parce que vous connaissez le BSF actuellement, et je pense que vous êtes conscient de certaines difficultés que ça a soulevé qu'il y ait des gens de chacun des secteurs où on finit par ne pas résoudre les conflits qui apparaissent au fur et à mesure des débats et des discussions.

Le Président (M. Paré): M. Desroches.

M. Desroches (Pierre): Oui. Je crois qu'il y a une réalité qu'il ne faut pas oublier. Je pense que ce conseil consultatif là doit gérer le présent et l'avenir. Je ne doute pas de la compétence des gens qui ont déjà occupé ces postes-là, mais je pense que ce qu'on veut y instaurer, à l'intérieur de l'Agence, c'est une dynamique qui nous permet de porter les services financiers au Québec à une nouvelle étape. Et les changements ? vous l'avez dit tout à l'heure ? ces changements-là sont fréquents, sont quotidiens même actuellement et, même dans la culture de certains secteurs d'activité, on entrevoit déjà des changements.

Ce que je dis, c'est que l'industrie, comme l'industrie bancaire ou d'autres types d'industrie, je crois qu'ils sont les plus habilités à s'asseoir au sein de ça et de définir un avenir à l'Agence et de la maintenir toujours dans une réalité qui est vraiment quotidienne, parce que, en fait, c'est eux qui vont vivre cet... Je pense que, oui, il va exister des débats au sein de ce conseil consultatif, mais ça va être un débat, je pense, avec un objectif de vraiment porter l'Agence à des sommets plus hauts. Je pense que le Québec a toujours été une tête de file au Canada en matière de services financiers et je pense qu'elle doit continuer à se donner cette direction-là. On trouve que... Bien, un représentant de l'industrie serait vraiment plus approprié pour définir avec eux ce qu'est l'avenir.

Mme Marois: D'accord.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Hébert.

Mme Marois: Il pourrait venir de ce milieu mais ne pas nécessairement être lié actuellement, par exemple, directement à l'une ou l'autre des institutions. Je pose la question, là.

Le Président (M. Paré): M. Hébert.

M. Hébert (Jacques): Ce que nous voulons éviter, en somme, c'est ce qui s'est produit et se produit encore au Bureau des services financiers où les membres du conseil d'administration représentent férocement leur industrie. Et il y a des débats houleux, me dit-on, et effectivement chacun essaie de tirer la couverte de son côté, ce qui est tout à fait normal. Nous, qui représentons pourtant 50 % de l'industrie des secteurs financiers au Québec, n'étions pas représentés directement. On nous a expliqué, à maintes reprises, qu'il y avait et qu'il y a encore un porte-parole, un représentant pour l'industrie des services financiers. Par le plus grand des hasards, c'est quelqu'un de Desjardins. Nous avons obtenu une collaboration soutenue, je dois le dire, d'Yves Morency qui effectivement nous représentait là-bas. On aime beaucoup sa voix, à Yves, mais on aurait aimé ça avoir nos propres oreilles sur place.

Alors, il faut éviter ça à nouveau, parce qu'effectivement, nous, on se sentait en dehors du débat et, comme on représente quelque 35 000 employés au Québec, je pense que c'est important qu'on soit entendus. Donc, si vous retombez dans le même piège que le Bureau des services financiers, vous allez avoir des gens qui vont se chicaner au bureau d'administration et qui ne prendront pas nécessairement les bonnes décisions. Alors, quelle que soit la formule qui sera retenue ultimement, il faut qu'elle soit marquée au coin de l'efficacité et que ça ne devienne pas une tribune où les gens se chicanent pour aller chercher le plus d'avantages pour leurs propres industries.

Et, l'idée d'aller chercher des gens d'expérience dans le secteur financier, ça m'apparaît souhaitable, et je pense que ce que M. Desroches a voulu dire, c'est qu'il est important, à cause de la rapidité des changements dans le secteur, que ces gens-là ne soient pas trop décalés.

Mme Marois: ...qu'ils soient bien branchés. Oui, c'est ça.

M. Desroches (Pierre): C'est important qu'ils soient en fait... qu'ils aient un contact avec la réalité et surtout l'évolution. Je pense que, si on regarde les cycles d'évolution, au sein du secteur financier, ils sont de plus en plus rapides. Ils étaient sur cinq ans, 10 ans. Ils sont rendus sur deux ans, trois ans. Et l'évolution de certains des professionnels qui sont à l'intérieur du système bancaire actuel, leur évolution est fulgurante. Ça fait que ça devient important d'avoir des gens qui ont certains contacts avec cette réalité-là et qui ont une certaine perspective de temps. Des personnes ayant trop de décalage entre ce qu'elles ont occupé et ce qui se présente dans l'avenir pourraient peut-être causer un préjudice à l'avancement de l'Agence.

M. Hébert (Jacques): Et il nous fera un immense plaisir de fournir au ministre la liste complète de gens qui pourraient siéger au Sénat.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Marois: Ça me fera plaisir de les recevoir aussi.

Bon. Certains voient un problème... Ce sera ma dernière question à ce moment-ci, M. le Président, parce que je sais qu'un collègue veut aussi intervenir. Bon. Certains voient un problème entre la divulgation de l'information prudentielle d'une institution financière et les informations aux fins des valeurs mobilières. Ça, c'est un débat qui a cours aussi. Est-ce que les banques que vous représentez et qui sont les premières visées par une question comme celle-là y voient un problème, un problème sérieux? Puis, dans cette perspective où nous... enfin, moi, à ce moment-ci, ça ne m'apparaît pas comme étant quelque chose d'absolument impossible à résoudre, est-ce que justement l'Agence ne pourrait pas faire l'arbitrage nécessaire lorsque de telles questions se posent en fonction de l'intérêt public? Parce que l'Agence, elle ne sera là que pour s'assurer du respect de l'intérêt public; évidemment, après ça, d'un certain nombre d'autres fonctions, mais c'est d'abord et avant tout sa mission, si on veut.

n(10 h 40)n

Le Président (M. Paré): Me Ferron.

M. Ferron (Daniel): Oui. Écoutez, nous, on a regardé ça. Évidemment, c'était parmi nos préoccupations, mais, en le regardant, on n'a pas vu de problème majeur là. D'ailleurs, dans le rapport Martineau, dans notre mémoire qu'on avait soumis au comité Martineau, on avait déjà approuvé le genre de structure que vous proposez dans le projet de loi. Donc, pour nous, on n'avait pas un problème majeur avec ça.

Mme Marois: Bon, d'accord. C'est important parce que ça a été soulevé à quelques reprises. Merci.

Le Président (M. Paré): Merci, Me Ferron. Nous allons passer au député de La Prairie pour une courte question et une courte réponse.

M. Geoffrion: Merci, M. le Président. Messieurs, bienvenue à cette commission. Vous avez mis beaucoup d'emphase, c'est le moins qu'on puisse dire, sur... Vous avez enfin une certaine réserve sur le maintien des deux chambres, là. Bon. Notamment, la Chambre de la sécurité financière, à ce que je sache, n'a pas de pouvoir direct sur les banques. Et dans votre sommaire de votre mémoire, bon, vous parlez d'une approche rigide actuellement appliquée par ces chambres. Je veux savoir un petit peu ce que vous entendez par là. Mais surtout, dans le paragraphe suivant, vous faites référence à des effets chez les... en bout de ligne, là, en maintenant les deux chambres, advenant la création de l'Agence, qu'il y a des effets chez les consommateurs. Alors, moi, je veux savoir... Comment ceux-ci peuvent-ils être pénalisés en maintenant les deux chambres suite à la création de cette Agence? Je suis un néophyte là-dedans, je veux juste comprendre, parce que vous faites référence aux consommateurs, et ça, comme représentant, ça m'intéresse. Est-ce que vous comprenez bien ce que je... Oui?

M. Desroches (Pierre): Absolument. Je vais commencer, et peut-être que mes confrères pourront enchaîner. Je pense que ce qu'on veut éliminer à l'intérieur de cette situation-là qui existe actuellement, c'est une confusion potentielle. Je pense que ce qui arrive, c'est que le consommateur, quand il voit un planificateur financier, il veut savoir où aller s'il n'est pas satisfait des services ou bien s'il veut se poser des questions par rapport à ce genre d'encadrement là. Il ne veut pas être obligé de considérer: Est-ce que c'est de la déontologie? Est-ce que c'est un manque de formation? Est-ce que... Ce genre de situation là, c'est une situation qui sème la confusion actuellement à l'intérieur de l'industrie et qui force l'industrie à se créer des structures ou des organisations pour essayer d'atténuer ce genre de confusion potentielle là qui existe à l'intérieur de ça. Ça fait que, en fait, l'élimination des chambres, c'est l'élimination d'un deuxième représentant ou d'une deuxième organisation qui régit un groupe.

Ce qu'on dit, c'est... En fait, si l'Agence prend, donnons-les à l'Agence ou créons un organisme qui va prendre les planificateurs financiers. Évitons le dédoublement qui fait que la Chambre en prend une partie, l'Agence contrôle une autre partie. Ce qu'on dit, c'est: Tout ce que ça va réussir, c'est augmenter les coûts, parce qu'on va faire affaire avec deux organismes différents, maintenir les relations avec deux organismes différents. Et puis, deuxièmement, je pense que ça ne sert ni le groupe qui est en question ni les consommateurs. Ce qu'on dit, c'est: Le consommateur, ce qu'il veut, c'est un instrument clair, qu'il n'y ait pas d'ambiguïté, et que, à l'intérieur de l'Agence même, on décide d'avoir un petit groupe de déontologie qui s'occupe... Il n'y a pas de problème à l'intérieur de ça.

Ce qu'on dit, c'est: Créons un point, un guichet unique qui fait que, quand quelqu'un veut discuter de quelque chose, il puisse être en mesure d'aller vraiment toucher l'endroit sans se poser des questions ou sans faire des interprétations de la situation qu'il vit. Actuellement, dans le monde bancaire, si une personne n'est pas satisfaite à l'intérieur de sa relation, elle va aller à l'ombudsman bancaire de l'institution financière qui, lui, a juridiction sur toutes les composantes de l'organisation. Que ce soit un courtier, que ce soit un service, que ce soit le secteur commercial, le secteur des PME, cette personne-là est habilitée à régler, peu importe le problème qui se présente devant elle, peu importe l'organisme qui est considéré à l'intérieur de l'organisation. Ce qu'on veut, c'est ce genre de modèle là au sein de l'Agence où l'Agence, elle, gère ces situations par la suite.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Desroches. Oui, monsieur...

M. Hébert (Jacques): Permettez-moi de donner l'exemple du Bureau des services financiers. Si ma mémoire m'est fidèle ? on me permettra de me tromper un peu sur les chiffres ? le Bureau devait être géré par une cinquantaine de personnes initialement, c'est ce qu'on avait compris lors de la création du Bureau. On est rendu à 175, 200 personnes. Donc, c'est dire que les choses se sont compliquées. Et le salaire de ces gens-là, l'espace qu'ils occupent, et toutes les lois et réglementations qu'ils créent, ça signifie des coûts astronomiques pour l'industrie des services financiers. Et, vous le savez, nous sommes des organismes à but lucratif, donc, quand on reçoit la facture, on la refile à quelqu'un. On la refile à qui? Au consommateur. On dit: Ça suffit! Que les planificateurs financiers doivent se rapporter à six organismes différents, c'est incroyable, c'est un peu scandaleux. On dirait que ces organismes-là, notamment les chambres, ont une capacité d'autoclonage extraordinaire, et, si... dans la salle, il pourrait m'appuyer là-dessus. Et ça, il faut que ça cesse. On a développé au Québec une manie, quels que soient les gouvernements, une manie d'alourdir toujours la réglementation et au point tel que l'investisseur qui pense s'en venir au Québec y réfléchit à deux fois. Premièrement, souvent il ne s'y reconnaît pas, parce que les structures sont trop différentes de ce qui se fait ailleurs au pays ou même à l'échelle internationale; et, deuxièmement, lorsqu'il voit les coûts, c'est tentant pour lui d'examiner ailleurs ce qui se fait pour voir s'il ne ferait pas des meilleures affaires à meilleurs coûts ailleurs. On vous dit que nous avons atteint un point de saturation en termes de lourdeurs administratives et de coûts, et ça doit absolument cesser.

Je ne sais pas si Daniel veut ajouter quelque chose.

Le Président (M. Paré): Me Ferron.

M. Ferron (Daniel): Juste pour ajouter. Un exemple qu'on donne dans notre mémoire, qui nous pose un problème sérieux avec les chambres, surtout la Chambre de la sécurité financière, c'est qu'ils ne tiennent pas compte du tout de notre structure de fonctionnement, ce qui s'appelle un «cabinet». Alors que, eux, ils font affaire avec des individus qui sont les conseillers, nous, on voudrait qu'ils fassent affaire avec le cabinet qui est géré par l'institution financière, et ça, ça ne fonctionne pas dans leur système de pensée. Alors, ça nous pose des problèmes, parce que, un exemple, s'il y a une plainte contre un individu qui est membre d'un cabinet, par exemple, un conseiller financier, à ce moment-là, le cabinet n'est même pas avisé par la Chambre qu'il y a eu une plainte. Alors, je sais que, dans le projet de loi, on veut corriger ça, mais il y a d'autres exemples aussi qui ne sont pas corrigés dans le projet de loi, par exemple, la formation continue, entre autres, où on voudrait que ce soit le cabinet qui puisse gérer la formation continue et non que ce soit chaque individu qui gère sa propre formation. Alors, ça en est des exemples.

Le Président (M. Paré): Merci, Me Ferron. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. Alors, encore une fois, je veux vous féliciter pour la qualité de votre mémoire. Moi, je voulais savoir... Je comprends que votre mémoire a mis l'emphase beaucoup... principalement sur l'idée d'inclure les deux chambres à l'intérieur de l'Agence. Moi, j'aimerais connaître votre position sur la structure actuelle proposée dans l'actuel projet de loi. Vous avez probablement lu plusieurs mémoires, on en a entendu parler, M. Michaud a été le premier à sonner l'alarme à l'effet d'intégrer l'IGIF, la CVMQ, le Bureau des services financiers et la nécessité de maintenir une direction collégiale à l'intérieur de cette boîte-là.

On a reçu un mémoire, pour dépôt seulement, de la Banque Nationale ? vous avez certainement pris connaissance de ce mémoire ? un mémoire court, succinct, je dois dire, et bien argumenté. Et, en page 2 du mémoire, M. Houde de la Banque Nationale dit ceci: «Nous portons à votre attention le fait que, au Canada et de par le monde, les régulateurs en valeurs mobilières prônent la collégialité décisionnelle dans les structures de réglementation en place. L'abrogation de ce principe pourrait affecter la reconnaissance de l'Agence par les autres régulateurs canadiens en valeurs mobilières ainsi que leur collaboration avec cette dernière. Le fait de marginaliser le Québec à cet égard risque fort bien de miner la confiance des investisseurs internationaux envers le marché québécois et ainsi de réduire l'arrivée de capitaux étrangers.»

Ce point-là a été soulevé également par la Bourse de Montréal, le Barreau, l'ACCOVAM, bien sûr j'ai mentionné M. Michaud, M. Garcia le soulève dans son mémoire de la Standard Life. J'aimerais savoir la position de l'Association des banquiers du Canada à ce sujet.

M. Desroches (Pierre): Je dois dire que la...

Le Président (M. Paré): M. Desroches.

M. Desroches (Pierre): Pardon. Je dois dire que la position de la Banque Nationale ne diffère pas tellement de celle de l'ABC...

Mme Jérôme-Forget: Je suis d'accord.

n(10 h 50)n

M. Desroches (Pierre): ...puis je pense que, tout à l'heure, M. Hébert en a fait état. Ce qu'on veut absolument, c'est que la structure organisationnelle soit vraiment identifiable, très claire, précise sur les responsabilités de chacune des parties; qu'elle soit également crédible, autant pour l'industrie que pour les consommateurs, que pour les communautés d'affaires. Je pense qu'il est très important, et c'est un peu ce qui est dit à l'intérieur de ça... C'est que vous avez un président qui peut passer d'un rôle d'enquêteur à décideur. Il porte plusieurs chapeaux à l'intérieur. Le président de l'Agence, le président-directeur général, va porter plusieurs chapeaux. Il faut créer un encadrement dans lequel il va être supporté dans ça, parce que, en fait, il devient l'instrument de crédibilité de l'Agence à l'intérieur. C'est pour ça qu'on dit: Il faut que le rôle du conseil consultatif, ou d'un conseil d'administration, ou soit des administrateurs, ou des membres de conseil, soit suffisamment précis, suffisamment clair et qu'il puisse pousser suffisamment loin pour crédibiliser l'Agence auprès des principaux intervenants du milieu.

On ne peut pas avoir strictement... Puis je pense qu'il y a un danger et que d'ignorer aujourd'hui, ce serait regrettable, puisqu'on ne mettrait pas en place... On a le temps de faire cette structure-là, de regarder cette structure-là et de créer une structure qui protège l'Agence de ce genre de situation-là où le président-directeur général peut se retrouver, dans certaines situations, en conflit d'intérêts à cause du nombre et de la largeur des responsabilités qu'il porte. Ce qui donne autant plus d'importance à soit créer un conseil consultatif ou créer un conseil d'administration ou des administrateurs qui va faire que, en fait, le président est supporté dans sa démarche qu'il doit faire.

Le Président (M. Paré): M. Hébert.

M. Hébert (Jacques): Oui. Il faut comprendre un peu comment on fonctionne à l'Association. C'est simple, c'est que notre mémoire représente l'ensemble des vues de l'industrie, donc de nos 57 membres. Et, vous comprenez, nous étions limités par le temps et par l'espace. Mais voici qu'un de nos membres, qui est en fait la banque la plus présente au Québec, nous dit: Attention, nous, nous sommes parfaitement d'accord avec votre mémoire, sauf que nous voulons faire un ajout, parce que ça nous apparaît particulièrement important; êtes-vous en accord avec ça? Bien sûr que nous le sommes. Alors donc, la Banque Nationale a soulevé un point qui lui était particulièrement important mais qui ne va pas, je pense, en contradiction avec l'ensemble de la proposition présentée par nos membres, parce que nos membres voulaient que nous insistions sur la lourdeur administrative et l'imposition des coûts. Donc, c'est pour ça que nous avons parlé beaucoup de l'existence ou non des deux chambres.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Hébert. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Jérôme-Forget: Oui. Je veux revenir sur ce volet, M. le Président, parce que ce n'est pas tant la grosseur de l'Agence qui nous inquiète ou qui m'inquiète personnellement, c'est le rôle du président-directeur général qui, à certains moments donnés, va devoir porter différents chapeaux. Et, vous savez, la justice, elle doit avoir l'apparence de justice. Il ne doit pas y avoir de confusion chez les gens à savoir que, le jugement qu'on a donné suite à une revendication qu'ils ont exprimée, ce jugement soit légitime. Or, avec une structure où vous avez la même personne qui assume tous ces rôles, il y a un danger réel, soulevé d'ailleurs par le Barreau et par plusieurs personnes. Et c'est la raison pour laquelle je vous pose la question, parce que ça m'apparaît fondamental dans le projet de loi actuel.

L'idée de créer un conseil consultatif, ce n'est pas mauvais. Mais il y a bien du monde qui met en place des conseils consultatifs. Ça n'a même pas besoin d'être dans une loi. Effectivement, un conseil consultatif, on s'entoure de gens du milieu et puis on va chercher l'information la plus pertinente sur un sujet particulier. Moi, je pense que ce n'est pas là que vont émaner les problèmes au niveau de cette nouvelle Agence. Le problème de l'Agence, c'est que le système nord-américain met l'emphase sur le côté des commissions des valeurs mobilières. Et, à cause des problèmes actuels, moi, je prévoie que ça va augmenter d'aller dans ce secteur-là, que ça va augmenter.

Alors, c'est pour ça que je voulais savoir. Puisque vous n'en parliez pas dans votre mémoire, j'ai présumé que vous aviez voulu mettre un focus sur un autre volet. Comme l'a très bien exprimé M. Hébert, l'intention, ce n'était pas pour se désolidariser de la position prise par la Banque Nationale du Canada, pas du tout, mais mettre l'emphase sur d'autres volets, notamment les coûts rattachés à toute cette réglementation-là.

Mais, moi, ce qui me préoccupe, c'est que le Québec ne se marginalise pas à l'intérieur et du Canada et de l'Amérique du Nord avec une structure qui ne colle pas du tout à la structure que les autres connaissent. Le secteur financier, là ? vous le savez mieux que moi, vous êtes dans ce milieu-là; je ne suis pas dans ce milieu-là ? vous savez que c'est un secteur un peu conservateur, un peu craintif, et puis, s'il y a une structure très différente... Le président de la Bourse, notamment, prétend qu'il aurait eu des problèmes à aller rencontrer et à obtenir sa reconnaissance au niveau américain s'il n'avait pas eu la Commission des valeurs mobilières derrière lui. C'est fondamental comme prise de position, fondamental!

Le Président (M. Paré): M. Desroches.

M. Desroches (Pierre): Je pense que... D'abord, je dois vous dire que je fais partie de la Banque Nationale du Canada, ce qui veut dire que ce mémoire-là, j'ai eu l'occasion de le lire avant, et je ne suis pas en désaccord, je suis vraiment en accord avec ce qui se dit là-dedans. Mais ce que j'aimerais peut-être faire ressortir, c'est que je pense que l'Association des banquiers canadiens reconnaît le danger de la centralisation du pouvoir au niveau du président-directeur général. Je pense que toutes les parties disent: C'est une responsabilité énorme, parce que ça devient un instrument de crédibilité face à la population en général, à l'industrie des services financiers et à toutes les composantes qu'il y a à l'intérieur de ça, ce qui veut dire que c'est un rôle extrêmement important.

Ce qu'on dit, ce qu'on souligne aussi, c'est que le rôle du conseil consultatif ? qui n'est pas tout à fait, tout à fait défini encore, qui a encore un espace ? ce qu'il doit faire, c'est supporter cette crédibilité-là et créer un type d'encadrement. Même si vous avez un conseil consultatif, nous autres, on préfère... Si vous nous donnez la préférence, on va vous dire, nous autres: Un conseil d'administration. Pourquoi? Parce qu'on reconnaît que les administrateurs à l'intérieur d'un organisme semblable ont des responsabilités qui sont énormes, ils sont participants, ils sont partie intégrante des décisions du président et en assument la responsabilité qui y est associée comme administrateurs d'une société comme l'Agence comme telle. Mais, si vous dites: Avez-vous une préférence? On va vous dire: Je pense qu'un conseil d'administration... L'ABC l'a dit, si vous nous faisiez une proposition sur un conseil d'administration...

Ce qu'on dit, c'est: Si vous allez vers un conseil consultatif, il est extrêmement important que ce conseil consultatif là ait des dents, soit capable de gérer l'environnement et soit capable de supporter un directeur général qui a beaucoup de pouvoirs et qui, à certains égards, va porter plusieurs types de chapeaux. Je pense que le conseil consultatif va être habilité à faire ça, soit de créer des comités à l'intérieur du groupe, soit un sanctionnement de certaines de ses décisions. Mais il devient essentiel... parce que, comme vous l'avez dit, si cette Agence-là est réputée être bonne, elle va être un instrument d'essor, tandis que, si, demain matin, les gens commencent à avoir des doutes quant à la crédibilité de l'Agence, on va se retrouver dans une situation désastreuse, devant une situation où les conflits vont commencer à se générer même à l'intérieur du conseil consultatif, et ça, je pense que ça ne servira ni le Québec ni l'industrie.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Desroches. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Jérôme-Forget: Je voulais savoir, très brièvement: Est-ce que vous croyez que le Fonds d'indemnisation, qui a une mission bien différente, devrait faire partie de l'Agence? Parce que, en Angleterre notamment, c'est autonome; généralement... en Ontario, ils l'ont fait de façon autonome. Alors, est-ce que vous croyez que ça devrait faire partie de l'Agence?

M. Desroches (Pierre): Notre opinion, c'est: Oui, elle devrait faire partie de l'Agence, parce qu'on croit que c'est une des composantes naturelles de l'Agence.

Mme Jérôme-Forget: Maintenant, vous mentionnez... Probablement que mon collègue va vouloir intervenir sur ça, parce qu'il m'a demandé de lui laisser du temps. Je ne sais pas combien il me reste de temps, M. le Président.

Le Président (M. Paré): Quatre minutes.

Mme Jérôme-Forget: Quatre minutes. Je vais amorcer justement le problème d'une corporation professionnelle pour les planificateurs financiers. Vous mentionnez dans votre mémoire que vous souhaitez vivement avoir un ordre professionnel distinct pour les planificateurs financiers. Qu'est-ce que vous pensez de cette position? Est-ce que vous la maintenez toujours? Est-ce que vous pensez que tous les gens qui oeuvrent dans ce secteur-là doivent, devraient devoir se soumettre à cet ordre professionnel?

Le Président (M. Paré): Me Ferron.

M. Ferron (Daniel): Écoutez, nous, en fait, notre position de base, c'est que ? et vous l'avez vu d'ailleurs dans la présentation ? actuellement, c'est la confusion, il y a trop d'intervenants, donc on aimerait que ce soit ramené à l'Agence comme telle en totalité. Mais, si on veut avoir une solution de rechange, nous, c'est la meilleure solution, la création d'un ordre professionnel. Si mon souvenir est bon, ça avait été proposé, même, à l'origine, avec la Loi sur les intermédiaires de marché; au début, on voulait aller dans ce sens-là. Et ça n'a pas été ça, on a décidé de régir le titre plutôt que l'activité. Mais, nous, on maintient que, si on veut faire un ménage là-dedans et si on ne veut pas que l'Agence se disperse en disséminant certains de ses pouvoirs à toutes sortes de groupes, à ce moment-là on est mieux d'aller dans le sens d'un ordre professionnel.

n(11 heures)n

Le Président (M. Paré): M. Desroches, vous voulez ajouter?

M. Desroches (Pierre): Oui. Le secteur des planificateurs financiers est un secteur qui prend de plus en plus d'ampleur, qui va jouer un rôle extrêmement important dans la pérennité du patrimoine québécois et, je pense, la pérennité du patrimoine canadien. Je veux dire, quand on a dit un ordre professionnel, ce qu'on a dit en clair, c'est: On ne veut pas que les pouvoirs soient partagés, on ne veut pas que l'Agence exerce son pouvoir de déléguer à gauche et à droite pour des raisons, peut-être, qui sont valables à son niveau. Mais ce qu'on dit, c'est: Protégeons le plus possible cette sphère d'activité qu'on appelle la planification financière. Coordonnons-les de façon globale, peu importe où ils se trouvent. Un médecin, peu importe où il se trouve, il y a un organisme qui le contrôle.

Ce qu'on dit, c'est que les planificateurs financiers vont devenir... Puis ils vont prendre tellement d'importance dans l'avenir que les disperser, soit la déontologie d'un côté, soit la formation continue de l'autre, soit l'attribution des diplômes, soit l'intégration à l'intérieur des groupes professionnels... Ce qu'on dit, c'est: Ils sont planificateurs financiers, puis, faute d'être... Dans la mesure de le faire au niveau de l'Agence, ce qu'on dit, c'est... On va jusqu'à dire: Formez un corps professionnel, parce que vous jouez avec un élément très important qui s'appelle la pérennité du patrimoine québécois. Ces gens-là vont conseiller les gens. Puis ce qu'on dit, c'est: Diminuons la confusion. Ce n'est pas les obligations que, je pense, les institutions financières ont peur, c'est simplement la confusion, de dire: Il y a un niveau ici qui est là, puis l'autre niveau est là, puis l'autre niveau est là. Je pense que ce qu'il faut, c'est vraiment encadrer cette profession-là, créer un cadre dans lequel ces gens-là vont se développer puis qu'on va avoir un bon contrôle de la qualité des services qu'on va offrir.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Desroches. Vous voulez ajouter?

M. Hébert (Jacques): Rapidement. Si un consommateur se sent lésé...

Le Président (M. Paré): Il vous reste du temps encore. Excusez-moi...

M. Hébert (Jacques): ...ou mal servi par un planificateur financier, supposons que c'est un notaire, par exemple, où va-t-il porter plainte? À la Chambre des notaires? À l'Agence? À l'Institut québécois de planification financière? C'est le fouillis total. Nous, nous disons ceci: Donnez le devoir, le pouvoir à qui vous voulez. L'Institut québécois de planification financière pourrait très bien devenir l'organisme, au singulier, qui chapeaute absolument tout. Mais, quand vous commencez à multiplier ? une exception pour les notaire, une exception pour les comptables, une exception pour les avocats ? ça n'en finit plus, le consommateur, qui n'est pas un expert, ne s'y retrouve plus. Alors, de grâce, choisissez la solution que vous voulez ? nous, nous pensions qu'idéalement ça pourrait être un ordre professionnel ? mais choisissez une solution unique au nom du consommateur québécois qui n'en finit plus de souffrir.

Le Président (M. Paré): Merci. M. le député de D'Arcy-McGee, la parole est à vous. Il vous reste encore quatre minutes. Je m'excuse, tout à l'heure, j'ai fait une erreur.

M. Bergman: Merci, M. le Président. M. Desroches, pour faire suite à votre réponse, la planification financière est une composante importante de l'exercice de plusieurs professions réglementées par le Code des professions. Vous en avez mentionné trois, mais, en fait, il y a les administrateurs agréés, les avocats, les comptables agréés, les comptables en management accrédités, les comptables généraux licenciés, les notaires. Et, avec le projet de loi n° 107, il y a un silence à l'égard de la législation professionnelle, constituant, comme vous avez mentionné, un dédoublement inutile. Alors, pourquoi est-ce qu'on ne peut pas reconnaître l'existence des planificateurs financiers, qui est une composante importante des six professions que je viens de mentionner? Pourquoi créer un autre ordre professionnel quand vous avez les structures dans les six ordres qui existent maintenant?

Le Président (M. Paré): Me Ferron.

M. Ferron (Daniel): Écoutez, la raison est bien simple, c'est qu'actuellement, c'est... Bon, il y a... Vous les avez tous nommés. Nous, on avait nommé seulement ceux qui avaient signé une entente avec le Bureau des services financiers, mais évidemment il y en a d'autres aussi. C'est qu'actuellement chaque ordre professionnel, d'abord, peut imposer ses propres normes. Il n'y a pas d'uniformité d'un ordre professionnel à l'autre. Je vous donne... Par exemple, dans un cabinet administré par une institution financière, on peut retrouver des gens qui sont membres d'aucun ordre professionnel, on peut retrouver des gens qui sont membres de plusieurs ordres professionnels, et les règles de formation, entre autres formation continue, ne sont pas les mêmes nulle part. Et, c'est pour ça, c'est la confusion.

Et, nous, on maintient que les ordres professionnels ne sont pas qualifiés pour assurer la discipline de ces gens-là parce que ce n'est pas l'objet principal de leur mandat. Par exemple, je vous donne la Chambre des notaires ? j'en suis membre, donc je sais de quoi je parle ? on régit, par un code de déontologie, l'activité des notaires, mais celle de planificateur financier comme telle, c'est un peu flottant, puis le syndic n'est pas nécessairement formé pour surveiller toutes les activités de ces gens-là à titre de planificateurs financiers. Donc, on maintient que ou on uniformise à l'intérieur de l'Agence ou on crée vraiment un ordre professionnel qui va être capable de bien gérer ces gens-là et de bien les surveiller et, en bout de ligne, protéger le consommateur.

M. Desroches (Pierre): Parce que vous pouvez avoir autant...

Le Président (M. Paré): M. Desroches.

M. Desroches (Pierre): Pardon, M. le Président, je m'excuse. Mais vous pouvez avoir autant de niveaux de compétence et des niveaux d'encadrement que vous avez de différents organismes qui sont là-dedans. Et si on avait une profession qui...Si cette profession-là était en déclin ou était remplacée par d'autres... Non, je pense qu'on a une profession qui est en plein envol et qui va prendre une importance capitale, et ça devient extrêmement important que le consommateur, en bout de ligne, puisse reconnaître la signification d'un titre par un niveau de compétence, qu'il le fasse soit directement ou indirectement. Mais, en fait, le consommateur, ce qu'il fait, c'est qu'il reconnaît un niveau de confiance ou de crédibilité. En fait, je pense que ce qu'il faut, c'est défendre ça en tous points pour créer un niveau de compétence qui soit reconnu, peu importe où cette profession-là est exercée, à l'intérieur de quel cadre professionnel elle est exercée.

Et c'est dans ce sens-là que l'Association dit: Il faut cesser ce qui existe actuellement, parce que, pour certaines personnes, c'est un travail d'appoint, ce n'est pas quelque chose qu'il fait de façon unilatérale, à tous les jours, ça fait qu'il n'est pas obligé de se maintenir, tandis que, dans d'autres cas, vous avez des planificateurs financiers qui ne vivent que de ça, cette profession-là, qui se sont créé des niveaux d'encadrement qui sont très, très précis. Ce qu'on dit, c'est qu'il est temps, avec l'ampleur de cette profession-là, de créer vraiment un niveau de compétence qui soit reconnu à travers tout le Québec.

Le Président (M. Paré): Merci. M. Hébert, vous ajoutez?

M. Hébert (Jacques): Certainement. Nous vivons ça particulièrement dans l'industrie bancaire où certains de nos employés sont avocats, comptables, notaires, banquiers de carrière, et plusieurs de ces gens-là font de la planification financière. Alors, nous-mêmes, nous reconnaissons que nous avons de la difficulté à gérer, à la limite, leurs compétences et surtout qui va les réglementer au point de vue déontologie. Alors, nous admettons que, dans notre propre industrie, ça représente un défi majeur qui pourrait possiblement amener des situations fort désagréables pour des consommateurs qui pourraient se retrouver lésés. Qui sait?

Donc, nous vous disons: S'il vous plaît, en autant que cela est possible, définissez une fois pour toutes la structure de la planification financière, et il faut y coller et développer, comme M. Desroches l'a dit, cette profession qui va prendre de plus en plus d'importance.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Hébert. Sur ce, ça termine votre intervention. Je vous remercie de votre contribution à cette commission. Et j'inviterais la Bourse de Montréal à se présenter ici, à l'avant.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Paré): À l'ordre, s'il vous plaît! Bienvenue, M. Bertrand et les gens qui vous accompagnent. Si vous voulez nous les présenter, s'il vous plaît, et débuter votre mémoire. Vous avez 20 minutes pour votre présentation, et, par la suite, nous aurons 40 minutes d'échanges avec les parlementaires.

Bourse de Montréal

M. Bertrand (Luc): Merci, M. le Président et merci aux membres de la commission de recevoir, ce matin, la Bourse de Montréal et de nous écouter sur le projet de loi n° 107. Ce matin, je suis accompagné par Mme Joëlle Saint-Arnault, qui est avocate à la Bourse de Montréal, et qui est secrétaire générale également, et responsable des affaires juridiques. Et, également, je suis accompagné de M. Jean-Charles Robillard, qui est responsable des communications à la Bourse de Montréal.

n(11 h 10)n

Tant pour des raisons conjoncturelles que structurelles, la Bourse de Montréal espère convaincre cette commission et les députés de l'Assemblée nationale de l'importance de maintenir la structure actuelle de la CVMQ afin d'assurer le développement international du secteur financier du Québec et de la Bourse de Montréal. Mais, d'abord, permettez-moi de résumer rapidement les récents développements de la Bourse et, par le fait même, vous démontrer l'importance du rôle de la CVMQ dans la transformation de la Bourse de Montréal depuis les dernières années.

La restructuration des marchés canadiens de 1999, qui a été notamment initiée par la Bourse de Montréal, a permis à la Bourse de Montréal de devenir une Bourse spécialisée dans un marché de très grande valeur ajoutée, soit celui de produits dérivés standardisés. Aujourd'hui, il se négocie quotidiennement sur la Bourse de Montréal quelque 20 milliards de dollars de valeurs notionnelles. En plus, la Chambre de compensation des produits dérivés, une filiale à part entière de la Bourse, gère sur une base continue un risque notionnel de l'intérêt en cours de l'ordre de 220 milliards de dollars. Également, la Chambre de compensation détient quelque 665 millions de dollars à titre de dépôts de garantie et de fonds de prévoyance qui sont déposés par ses membres. Si vous me permettez, en termes de comparaison, la Bourse de Toronto transige quotidiennement 2,7 milliards de dollars de valeurs. Il est compréhensible qu'une valeur notionnelle n'est pas une valeur comptant, mais néanmoins ça vous donne l'ordre de grandeur du rôle que joue Bourse de Montréal dans les marchés financiers.

Donc, en tenant compte du caractère de la fonction unique de la Bourse de Montréal, on comprend rapidement l'important rôle qu'elle joue dans les marchés financiers. Quoique encore mal connue, il n'en demeure pas moins que la Bourse est au coeur de l'activité financière canadienne et nord-américaine. Il faut également noter ? et ceci, pour nous, c'est très important ? que 50 % de notre activité est générée par des usagers étrangers et notamment américains.

La Bourse a entrepris, à l'instar de la restructuration des marchés de 1999, une profonde transformation structurelle. D'abord, elle procéda à la démutualisation. Le tout fut exécuté en quatre mois, soit un temps record, et ce, largement à cause du climat de coopération entre le personnel de la CVMQ et celui de la Bourse de Montréal. En parallèle avec le processus de la démutualisation, la Bourse a entrepris l'automatisation de ses opérations qui lui a permis de devenir la première Bourse traditionnelle et intégrée dans les produits dérivés dans les Amériques entièrement automatisée, une transformation tant organisationnelle que structurelle et informatique qui lui a d'ailleurs mérité des prix d'excellence. Là encore, le rôle de la CVMQ, qui a dû approuver le nouveau modèle de marché proposé par la Bourse, a été crucial.

Il faut donc bien comprendre la complexité et les nombreux éléments hautement problématiques qu'une transformation d'entreprise réglementée comme la Bourse peut engendrer. En tant que OAR, Bourse et compensateur, sans la compréhension et la vision d'une équipe dédiée et disciplinée d'encadrement que fut et qu'est la CVMQ, la Bourse de Montréal n'aurait pas été capable d'exécuter dans un temps quand même très court son ambitieux projet de transformation. Le développement technologique de la Bourse lui a d'ailleurs permis de conclure un partenariat avec le Boston Stock Exchange et le courtier Timberhill pour le lancement, aux États-Unis, d'une nouvelle Bourse d'options sur actions qu'on appelle «Box», et cette Bourse sera entièrement automatisée et basée sur le modèle de marché revu et approuvé par la CVMQ. Et ce modèle a été approuvé par la CVMQ pour le Canada en entier.

Reconnaissant la force du modèle utilisé par la Bourse, quatre grands courtiers américains sont récemment devenus actionnaires de notre projet. Ces courtiers sont J.P. Morgan, UBS Warburg, CS First Boston et Salomon Smith Barney. Le modèle de la Bourse de Montréal, avec quelques nuances, est présentement à l'étude pour approbation par la Securities and Exchange Commission à Washington. Ici, le Québec et la CVMQ ont été pionniers dans l'acceptation d'un nouveau modèle de marché qui n'existe pas encore dans les Amériques, et je pense que ça vaut la peine de le mentionner.

Autre percée importante en ce qui a trait à la stratégie nord-américaine de la Bourse, en février dernier, la Bourse a obtenu de la Commodity Futures Trading Commission une reconnaissance qu'on appelle «no-action relief». En gros, cette reconnaissance permet l'accès direct des courtiers et usagers américains à la plateforme électronique de la Bourse. D'ailleurs, le concept d'accès à distance transfrontalière et électronique est la pierre angulaire du plan d'affaires de la Bourse de Montréal. La Bourse a obtenu, dans un laps de temps quasi record, la reconnaissance demandée à la CFTC, et ce, malgré le 11 septembre. Et je mentionne ça parce que le CFTC ont perdu des effectifs très importants à cause des bureaux qu'ils avaient dans une des deux tours du World Trade Center. Alors, vous pouvez voir les problèmes administratifs que ça a créé au CFTC. Mais, malgré ceci, je pense que, grâce au rôle déterminant de la CVMQ et au modèle reconnu et homogène d'encadrement réglementaire en place au Québec, ceci a permis à la Bourse de Montréal d'obtenir, en février dernier, la reconnaissance qu'on recherchait.

Et, permettez-moi une parenthèse additionnelle ici, avant d'entreprendre le processus de demande au CFTC pour cette reconnaissance, la présidente de la Commission des valeurs mobilières et moi-même ont rencontré l'homologue de la présidente, le «chairman» Newsome, de la CFTC, et je suis convaincu que cette première rencontre a permis, rapidement, au «chairman» de la CFTC et à son entourage de saisir que l'encadrement réglementaire dans les valeurs mobilières, au Québec, est analogue à celui qu'ils ont au CFTC, à Washington.

Comme vous pouvez le constater, la qualité du marché de la Bourse de Montréal est largement fonction de l'encadrement de son régulateur. Nous savons très bien que les grands intermédiaires de marché ainsi que les usagers sophistiqués, qu'ils soient d'ici ou de l'étranger, n'utiliseront pas la Bourse de Montréal s'il existe le moindre doute que l'encadrement n'est pas du plus haut standard international.

La CVMQ a fait un travail exemplaire pour suivre et appuyer la Bourse dans son grand virage. À titre d'exemple, quelque 3 500 heures de cours sur les produits dérivés présentés par l'Institut des dérivés de la Bourse de Montréal et par l'ICVM ont été suivies, en 2002 et 2001, par quelque 125 employés de la Commission. Il est clair que la CVMQ se distingue au Canada comme étant la Commission spécialisée dans l'encadrement du marché standardisé des produits dérivés. La Commission a déployé des efforts considérables pour que l'encadrement soit harmonisé avec les changements structurels, technologiques et organisationnels de l'industrie, et ce, malgré des conditions de marché très difficiles. Indéniablement, la crédibilité de la CVMQ assure à Montréal et au Québec une place de choix dans les grands débats ici et à l'étranger et, de ce fait, positionne Montréal et le Québec parmi les centres financiers importants du monde. Il est donc compréhensible que les autres commissions canadiennes n'hésitent pas à reconnaître la CVMQ comme l'autorité en matière de produits dérivés, un aspect d'une très grande importance pour le fonctionnement pancanadien de la Bourse.

D'ailleurs, reconnaissant que la juridiction des valeurs mobilières est du ressort des provinces, la Bourse travaille et discute avec les régulateurs canadiens de l'importance de développer sur une base continue un régime de concertation dans lequel la CVMQ est, en ce qui concerne les produits dérivés, l'autorité d'encadrement principale au Canada. À notre avis, ce modèle offre la meilleure solution aux provinces désirant maintenir leurs responsabilités et pouvoirs dans ce secteur. Or, la Bourse préconise une forme de délégation de la réglementation à l'autorité réglementaire où est situé le marché.

La Bourse favorise l'encadrement des valeurs mobilières et, plus particulièrement, des produits dérivés au Québec par la Commission des valeurs mobilières pour les motifs qu'on vient de présenter. Par ailleurs, si la structure proposée dans le projet de loi n° 107 doit être adaptée, la Bourse estime que des changements doivent donc être apportés pour tenir compte du contexte de l'encadrement des produits dérivés au Québec et des contraintes auxquelles le marché doit faire face dans le cadre de la mondialisation. Il faut reconnaître que le projet de loi n° 107 revêt un caractère fondamental pour le domaine financier au Québec et, plus particulièrement, pour le secteur des valeurs mobilières, car c'est une restructuration significative du secteur financier au Québec.

En résumé, l'essentiel des propos de la Bourse au groupe Martineau était de souligner l'importance de maintenir et de favoriser l'existence d'une autorité québécoise en valeurs mobilières efficace, crédible au niveau international et dotée d'une expertise de pointe dans le domaine des produits dérivés afin d'encourager l'évolution de ce marché au Québec et permettre à la Bourse de concurrencer les marchés déjà importants de produits dérivés qui existent à travers le monde.

n(11 h 20)n

Parmi les diverses préoccupations et changements que nous tenons à discuter, nous aimerions en soulever trois précisément, en plus d'une observation.

D'abord, la structure administrative proposée, qui consiste à nommer un président-directeur général pour administrer l'ensemble des affaires de l'Agence et qui détient à lui seul le contrôle ultime des décisions, semble comporter certaines lacunes. La tendance actuelle, d'ailleurs, au niveau des organismes de réglementation, est la décentralisation des décisions. C'est ainsi que le personnel professionnel ayant une formation technique se voit de plus en plus attribuer des responsabilités décisionnelles importantes, ce qui favorise une gestion efficace et de pointe des affaires courantes des administrés. Les décisions de ce personnel doivent évidemment pouvoir être révisées par une instance d'appel formée de personnes ayant également une formation et une expérience pertinentes.

Le projet de loi n° 107 ne prévoit pas une telle structure. Selon le projet, le pouvoir est concentré entre les mains du président-directeur général qui peut, certes, déléguer ses pouvoirs, mais ceux-ci demeurent néanmoins entre ses mains. Cette structure nous paraît pouvoir comporter un effet de lourdeur administrative qui n'est certainement pas recherchée par le législateur. En effet, si toute décision est sujette à révision ou approbation par le président-directeur général, cette structure peut provoquer un goulot d'étranglement compte tenu de l'ensemble des responsabilités importantes du président-directeur général découlant de la fusion de plusieurs organismes financiers importants.

De plus, la concertation décisionnelle du pouvoir auprès d'une seule personne sans structure de révision de décisions opérationnelles pose le problème de l'apparence d'impartialité et d'indépendance du processus décisionnel étant donné l'absence d'une structure collégiale de prise de décision formée de personnes spécialisées dans le domaine d'expertise pertinent et qui sont nommées de façon à éviter les conflits d'intérêts.

Par ailleurs, l'absence d'une telle structure collégiale peut avoir des répercussions sur la reconnaissance de l'Agence par les autorités réglementaires étrangères. En effet, spécialement dans le domaine des valeurs mobilières, les autorités réglementaires ont en place une structure formée de plusieurs individus qui peut aller de cinq à 15 personnes qui ont le pouvoir et la responsabilité de statuer en révision des décisions du personnel de l'organisme, le cas échéant.

À cet égard, il est important de souligner que la structure de tout organisme spécialisé en valeurs mobilières devrait respecter la structure de l'ensemble des autorités réglementaires à travers le monde. En effet, dans un domaine comme celui des valeurs mobilières, où les transactions transfrontalières sont de plus en plus fréquentes, la reconnaissance mutuelle des autorités réglementaires est cruciale pour assurer le bon fonctionnement des marchés. Or, le Québec jouit de cette reconnaissance mutuelle de plusieurs pays à l'heure actuelle en grande partie à cause du fait que sa structure réglementaire est semblable aux autres pays et aux autres provinces du Canada.

Changer cette structure de façon significative, comme c'est le cas dans le projet n° 107, peut avoir des conséquences négatives. Par exemple, les provinces canadiennes ont mis en place un système de collaboration et de reconnaissance mutuelle qui permet à un organisme comme la Bourse de faire affaire principalement avec une seule autorité réglementaire au Canada afin d'assurer son encadrement. Ce système est basé sur la similitude des structures réglementaires en place. Au Québec, c'est la Commission des valeurs mobilières, évidemment, qui assure cet encadrement pour la Bourse.

Un changement significatif de structure au Québec pourrait remettre en question la reconnaissance mutuelle entre provinces. Une telle conséquence serait néfaste pour le bon fonctionnement des marchés et ne pourrait que favoriser des projets alternatifs tels que, malheureusement, la création d'une commission nationale dans le domaine des valeurs mobilières.

La Bourse recommande donc que le projet de loi n° 107 soit modifié pour créer une structure décisionnelle qui prévoit la formation d'un conseil ou d'un comité spécialisé en valeurs mobilières qui agirait, au même titre que les commissaires de la Commission des valeurs mobilières existante, en révision des décisions prises par le personnel de l'Agence, le cas échéant. De plus, le personnel de l'Agence devrait être formé de personnes avec une formation et une expérience de pointe dans le domaine des produits dérivés.

Deuxième grande préoccupation qui nous préoccupe, notamment l'encadrement des organismes autoréglementaires. Spécifiquement, la Bourse a une sérieuse réserve par rapport à la reconnaissance et l'encadrement des OAR dans le domaine des valeurs mobilières. Le projet de loi n° 107 prévoit que les OAR régis par la Loi sur les valeurs mobilières du Québec, dont la Bourse fait partie, devront faire approuver toutes les modifications à leurs documents constitutifs, règlements intérieurs ou règles de fonctionnement par le ministre des Finances, et toute reconnaissance de nouveaux OAR relève du ministre. Et je fais allusion notamment à l'article 64 à 70 du projet de loi. Ce processus, unique au Québec, sera applicable seulement aux OAR en valeurs mobilières.

Ces dispositions comportent plusieurs inconvénients. Tout d'abord, il faut savoir qu'un OAR évolue rapidement et doit modifier ses règles de fonctionnement sur une base régulière. Il est donc essentiel d'avoir un processus en place qui permet l'étude rapide des changements de règles. Ce processus existe présentement. Le personnel de la Commission examine les règles de la Bourse et les approuve. Ce système est efficace, car il est géré par un groupe de personnes spécialisées dans un cadre administratif. Il est difficile d'imaginer que l'approbation des règles de fonctionnement par le ministre pourra atteindre le même niveau d'efficacité compte tenu des responsabilités assumées par le ministre et son personnel.

Le personnel de la Commission collabore avec la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario sur la base d'une entente de reconnaissance mutuelle selon laquelle la Commission québécoise agit à titre d'autorité principale pour les organismes québécois qui exercent des activités en Ontario et ailleurs au Canada. Cette entente évite à la Bourse de Montréal d'avoir à faire approuver ses règles de fonctionnement par plus qu'une commission.

En enlevant la responsabilité de l'approbation des règles à l'organisme réglementaire pour la donner au ministre, le projet de loi vient changer la structure réglementaire au Canada. Ceci peut avoir pour effet la remise en question des ententes de reconnaissance mutuelle au Canada, car le Québec serait alors le seul territoire en Amérique du Nord où la reconnaissance et l'encadrement des OAR relèvent du gouvernement plutôt que d'un organisme ayant un pouvoir décisionnel indépendant du gouvernement.

De plus, le pouvoir de l'État sur un OAR va à l'encontre des principes reconnus par l'Organisation internationale des valeurs mobilières, soit l'OICV. D'ailleurs, l'OICV a adopté en septembre 1998 des objectifs et principes de la régulation financière. L'un de ces principes est l'indépendance du régulateur de toute ingérence politique. Permettez-nous de citer un passage fort à propos du document de l'OICV auquel ont adhéré toutes les commission de valeurs mobilières du monde industrialisé, y compris, évidemment, la Commission des valeurs mobilières du Québec.

Je cite: «Dans certaines juridictions, des aspects spécifiques de la politique de régulation sont soumis à consultation du gouvernement, d'un ministère ou de toute autre autorité, ou même, dans certains cas, doivent être approuvés par ces derniers. Les circonstances dans lesquelles un telle consultation ou une telle approbation est exigée ou permise doivent être claires, et le processus doit être suffisamment transparent ou soumis à la révision afin de garantir son intégrité. De manière générale, il ne convient pas, dans de telles circonstances, d'inclure un pouvoir de décision sur les questions techniques au jour le jour.» Et je citais, comme je vous le disais, du document de l'OICV.

Il n'y a aucun doute que l'approbation des règles de fonctionnement d'un OAR est une question technique au jour le jour. Donc, ce pouvoir devrait être exercé par le personnel de l'organisme de réglementation et non par le ministre. Si le Québec se démarque en cette matière, les autres membres de l'OICV peuvent questionner l'encadrement des OAR au Québec, car non seulement le pouvoir est transféré au niveau politique, mais les règles du jeu ne sont pas précises.

Quelles seront les règles applicables pour la reconnaissance d'un OAR? Le projet de loi n° 107 ne le dit pas. Les OAR seront-ils tous traités de la même façon au Québec? Il n'y a pas de réponse dans le projet de loi n° 107, et la discrétion repose sur le ministre. Or, les principes de l'OICV stipulent que les responsabilités du régulateur doivent être claires et objectivement établies et, dans la mesure du possible, indépendantes du gouvernement. De plus, ces mêmes principes précisent que, lorsque le gouvernement ou un ministère est consulté ou qu'une approbation lui est demandée, le processus doit être suffisamment transparent ou soumis à révision afin de garantir son intégrité.

Une voix: Il reste une minute.

M. Bertrand (Luc): La Bourse est inquiète, car elle craint une réaction négative des régulateurs canadiens et internationaux alors qu'elle a besoin plus que jamais d'une reconnaissance internationale pour développer son marché électronique de produits dérivés. Par exemple, la reconnaissance de la Bourse par la U.S. Commodity Futures Trading Commission permettant aux courtiers américains de transiger les produits de la Bourse et de les offrir à leurs clients américains est basée en partie sur le système d'encadrement mis en place au Québec par la Commission et à l'adhésion aux principes de l'OICV. D'ailleurs, la crédibilité de la Commission au sein de l'OICV a contribué à la reconnaissance de la Bourse par l'autorité américaine.

Il me reste...

n(11 h 30)n

Le Président (M. Paré): Merci, M. Bertrand...

M. Bertrand (Luc): D'accord.

Le Président (M. Paré): ...c'est terminé. Donc, Mme la ministre, si vous voulez débuter la période d'échange, s'il vous plaît.

Mme Marois: Oui. Alors, merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Paré): ...

Mme Jérôme-Forget: ...on va faire? Parce qu'on est en retard. Est-ce qu'on va continuer plus tard...

Le Président (M. Paré): Oui, on va continuer. On va demander la permission, un consentement des deux côtés de la Chambre pour...

Mme Jérôme-Forget: D'accord.

Le Président (M. Paré): Merci. Mme la...

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. Moi, je veux vous souhaiter la bienvenue à notre commission et je vous remercie de votre présentation. Vous savez l'intérêt que porte le gouvernement du Québec à la Bourse de Montréal. Vous le savez d'une façon très concrète, parce que je pense que nous avons toujours voulu vous accompagner de telle sorte qu'on puisse préserver l'existence, chez nous, d'une telle institution et d'une telle organisation, et j'étais heureuse d'entendre, ce matin, les progrès que vous connaissez. Et, quand une institution de chez nous progresse, je pense que c'est tout le Québec qui progresse. Alors, je veux vous en féliciter aussi, parce que, je le répète, pour nous, c'était très important que la Bourse de Montréal, avec ses spécificités, bien sûr, nous le savons, puisse continuer d'assumer son rôle au sein de notre société.

Bon, peut-être d'abord un premier commentaire sur l'Organisation internationale des commissions de valeurs, là, l'OICV, et ses principes et ses règles, parce que vous avez terminé par ça, là. Enfin, vous l'avez abordé d'une façon assez élaborée en parlant de l'encadrement et de la reconnaissance des organismes d'autoréglementation, les OAR, c'est ça, en disant, bon, bien, qu'on irait, dans notre loi, à l'encontre des principes reconnus et adoptés par l'OICV dans le fait que nous allions encadrer les OAR et que nous allions approuver les règlements ? comme gouvernement, s'entend ? les règlements qu'allaient devoir adopter les OAR.

Bon, d'abord je veux vous rassurer, nous avons analysé et évalué chacun des principes relatifs à l'organisme d'encadrement, qui sont reconnus par l'Organisation internationale des commissions de valeurs. C'est fondamental, évidemment, pour notre crédibilité et pour la crédibilité de l'institution qu'on va mettre en place. Alors, nous avons regardé les principes relatifs à l'organisme d'encadrement et nous les avons mis en regard des nouvelles fonctions et nouveaux rôles que nous confions à l'Agence nationale d'encadrement, et je peux vous assurer que les craintes que vous avez ou le doute que vous soulevez, pour nous, n'existent pas, parce que nous nous sommes justement assurés de cela. Pourquoi? Parce que, comme je le mentionnais, c'est absolument essentiel si on veut que notre nouvelle institution ait de la crédibilité, puisse participer aux forums internationaux sans qu'il n'y ait aucun doute à cet égard. Bon.

Ce qui va m'amener à vous dire que, dans la loi, ce que nous prévoyons, ce n'est pas d'adopter des règles qui concernent le travail au jour le jour d'un OAR, mais essentiellement d'adopter celles qui auraient des impacts directs sur les assujettis, et pas plus, pas moins. Donc, quand... Et je vous entendais, là, tout à l'heure formellement dire: Bon, bien, allez-vous venir vous mêler de ce qui se passe au jour le jour? Non. Ce n'est pas notre intention, ce n'est pas notre objectif, ce n'est pas la perspective que nous avons. Mais, cependant, ce qui serait un peu particulier, finalement, c'est qu'on encadrerait et on réglementerait les fonctions assumées par la Commission des valeurs mobilières qui s'intègrent évidemment dans l'Agence, mais dont les fonctions demeurent... On n'élimine aucune des fonctions de la Commission des valeurs mobilières, hein, et ses compétences et ses responsabilités. Elles vont être assumées à l'intérieur de l'Agence selon un certain nombre de modalités qui peuvent être différentes, bien sûr, mais, sur le fond des choses ? et ça, c'est important aussi ? on ne remet pas en question les responsabilités de contrôle de la Commission. Ils vont continuer de s'exercer, ces contrôles-là.

Et, donc, ce qui serait un peu particulier, c'est que, dans le fond, on approuverait les réglementations de l'Agence, comme nous approuvons actuellement la réglementation de la Commission des valeurs mobilières, et on n'approuverait pas les réglementations lorsque, encore une fois, elles ont un impact sur les assujettis des OAR. Alors, c'est simplement cette portion-là, si on veut, des règlements qui devront être approuvés par le gouvernement, mais qui origineront, bien sûr, de l'OAR. Alors, en ce sens-là, je veux vous rassurer, là, parce que c'est une des préoccupations qu'on a eues depuis le début. Et, moi, j'en ai discuté longuement avec mes gens pour m'assurer qu'on aurait à cet égard un projet de loi blindé pour être capable de continuer à assumer nos responsabilités et à participer aux forums nationaux, aux forums fédéraux ou internationaux. Alors, ça, c'est... Et, s'il y a lieu de nous en assurer encore mieux, on le fera. Je peux vous confirmer cela ce matin. Bon.

Maintenant, l'autre aspect. Dans votre mémoire et par rapport à ce que vous avez tenu comme propos, il y a une petite différence en disant que vous souhaitiez, par exemple, que... C'est ici: «...l'importance de maintenir et de favoriser l'existence d'une autorité québécoise en valeurs mobilières efficace, crédible au niveau international et dotée d'une expertise de pointe dans le domaine des produits dérivés afin d'encourager l'évolution de ce marché au Québec et permettre à la Bourse de concurrencer les marchés.» Vous l'avez redit tout à l'heure, c'est très bien. Puis, je pense que votre message est fort, est important, puis on le comprend bien, et on l'entend bien, et notre intention n'est pas de diminuer l'importance de ces institutions et de leur rôle. Au contraire, je pense qu'on se tirerait dans le pied si on devait faire ça, hein? Bon. Mais, dans vos propos, tout à l'heure, vous sembliez dire que vous souhaitiez conserver la Commission des valeurs mobilières, alors que, nous, ce qu'on dit, c'est: Nous conservons évidemment les rôles et les responsabilités, ça va de soi, mais ils s'exerceront à l'intérieur de l'Agence. Et, dans votre mémoire, vous étiez plus nuancés. Enfin, je veux voir si c'est effectivement une réflexion que vous avez faite depuis.

Puis je veux vous ramener au projet de loi. Quand on dit qu'on concentre entre les mains d'une seule personne de grandes responsabilités, c'est vrai, mais la loi va très loin dans la définition des responsabilités de chacun des surintendants ou de chacune des missions de l'organisation. Et là, à ce moment-là, cette direction, cette personne à la direction de l'Agence, soit-elle très forte et veuille-t-elle exercer son autorité, elle devra le faire dans le contexte de la loi. Et là la loi, elle, elle est très claire en disant que devront être constituées à l'intérieur de l'Agence telle, telle... Sont instituées au sein de l'Agence la Direction de l'encadrement de l'assistance aux consommateurs, solvabilité, distribution, marchés de valeurs et indemnisation. Et, à l'intérieur de ça, il y a des missions qui sont assumées. Donc, le président ou la présidente ne pourra pas faire ce qu'elle veut, on se comprend bien? Ça, c'est fondamental.

Et non seulement cela, mais, comme nous ne révisons pas actuellement les lois et règlements de chacune de ces organisations ? c'est une seconde étape qui nous amènera à faire ça pour mieux intégrer, etc. ? à ce moment-ci, nous regroupons au sein d'une même structure des fonctions qui sont actuellement éparses et qui nous amènent parfois à des risques d'incohérence, bien sûr, et surtout qui nous amènent à moins bien servir le consommateur qui, lui, a à aller vers plusieurs directions. Je pense qu'on n'a pas besoin de revoir le petit tableau qu'on a dans le rapport Martineau. Alors, j'aimerais ça, vous réentendre là-dessus, parce que qu'est-ce qu'on devrait préciser de plus dans la loi, s'il y a lieu, pour nous assurer que les missions de chacune de ces nouvelles, si on veut, directions ou agences dans l'Agence nationale soient définies autrement?

Comprenez-vous? Parce que je comprends votre intention. Nous avons la même et nous souhaitons cependant établir un petit peu plus de cohérence, de coordination. L'objectif n'est pas de réduire les coûts, mais nous pensons que ça pourra avoir un effet à moyen et long terme sur la réduction des coûts. D'autres avant vous l'ont dit, d'autres, dans les mémoires, le disent, ça coûte cher, tous ces organismes d'encadrement. En les regroupant, je crois qu'il y aura certaines économies d'échelle à moyenne et longue périodes. Même si ce n'est pas le premier objectif, on s'entend bien. Mais, je reviens à mon propos principal, ce qu'on dit ici, dans la loi, c'est qu'on définit bien les rôles et responsabilités de chacun. Et, en plus, on ne change pas les lois fondamentales de chacune de ces organisations-là, hein? Elles continueront d'assumer les responsabilités qu'elles assument maintenant, mais dans un cadre un peu différent.

n(11 h 40)n

Or, qu'est-ce qu'on pourrait faire de plus de différent, mais qui ne serait pas de dire: Je garde les organismes les uns à côté des autres? Ça, c'est exclu. Alors, qu'est-ce qu'on peut faire de plus ou de mieux pour nous assurer que chacune des missions vont être bien remplies?

Le Président (M. Paré): M. Bertrand.

M. Bertrand (Luc): Merci, Mme la ministre. Et, je vous remercie de vos commentaires du début à l'égard de la Bourse, j'apprécie ça. Puis je suis le premier à reconnaître que le travail qu'on a fait avec... Surtout les gens de votre ministère, au fil des années, nous ont aidé énormément. J'admets que nos propos causent une problématique assez importante à l'égard de l'intention de la loi n° 107 de tenter de rationaliser ? je pense que c'est le meilleur mot que je puisse trouver ? l'encadrement des services financiers. Et la problématique vient encore plus problématique par le fait que vous avez au Québec une institution, notamment la Bourse de Montréal, dont son avenir est largement dépendant de son succès à l'étranger, et d'ailleurs que la réorganisation de la Bourse a été principalement structurée dans cette fonction. J'ai mentionné dans ma présentation qu'on a été chercher une reconnaissance des Américains. Notre prochaine étape, c'est Londres, c'est le Royaume-Uni, et on pense que ça va continuer. Donc, c'est le concept, là, ou ce que, nous autres, on appelle l'accès à distance à une plateforme électronique.

Donc, il est clair que, dans le moment, la structure qu'on connaît, la structure qui régit et qui encadre la Bourse de Montréal nous dessert très, très bien, et je ne vous cacherai pas qu'en tant que président de l'organisation, quand quelque chose fonctionne bien, que ça baigne dans l'huile, puis que ça avance, et puis les projets évoluent, tu te poses la question: Bien, pourquoi changer les choses, n'est-ce pas? Ça fonctionne et puis... Puis ça fonctionne parce qu'il y a eu beaucoup de travail de réalisé au fil des années pour se comprendre avec la Commission. La Bourse et la Commission, on se parle régulièrement. Nos équipes se parlent, on s'échange... Et c'est la façon que ça devrait se faire d'ailleurs. Et c'est ça qui fait qu'un J.P. Morgan, ou un Goldman Sachs, ou un Carr Futures, qui est à la veille d'arriver au Québec, on me dit, n'a pas d'hésitation à venir ici. Pourquoi? Parce qu'on voit qu'il y a un encadrement qui est solide et il y a une organisation, la Bourse elle-même, qui fonctionne bien avec l'encadrement.

Alors, en ce qui concerne la restructuration qui est proposée par la loi n° 107, j'admets candidement que ça nous pose de sérieux problèmes. On craint qu'on va se retrouver avec une nouvelle dynamique qu'on doit réapprendre, avec laquelle on doit recomposer. Bourse de Montréal, c'est quand même une PME, il faut s'entendre. On gère un risque énorme, j'admets. Quelque 200 milliards de dollars de risque, c'est qu'est-ce qui est géré par les spécialistes de la Bourse dans le champ de la compensation. On évolue rapidement sur le plan technologique, on fait beaucoup de choses, mais c'est quand même une entreprise de 170 employés avec quelque 35, 40 millions de revenus. On n'a pas les ressources. Mme Saint-Arnault, là, ça, c'est notre contentieux, et tout. On a vraiment des ressources limitées pour faire qu'est-ce qu'on veut faire et concurrencer Eurex à Francfort, Life à Londres, le Chicago Mercantile à Chicago, le CBOT à Chicago, Amex À New York.

Ce sont nos concurrents et puis ce sont des concurrents, évidemment, qui sont bien organisés. Ils sont riches, ils sont agressifs, mais ils ont des grosses structures. Alors, nous, étant donné qu'on est plus petit, on peut bouger plus rapidement, et c'est qu'est-ce qui nous a amenés à conclure cette entente très rapidement avec Boston et les banquiers de New York pour lancer une plateforme révolutionnaire qui va être opérée de Montréal, en passant. The Securities and Exchange Commission, dans ses délibérations, vont venir voir la Commission des valeurs mobilières à un moment donné, parce qu'ils vont demander de faire l'inspection des lieux de la Bourse de Montréal où sont situés les ordinateurs de cette nouvelle Bourse. Bourse de Montréal va opérer l'infrastructure informatique, la Bourse de Boston va être l'organisme autoréglementaire.

Alors, vous pouvez voir qu'est-ce qui est en train de se produire dans notre milieu. Et, quand le SEC, va dire: Bon, bien, on s'en vient voir qui au Québec, un surintendant qui est responsable des valeurs mobilières, ou un directeur général qui va en avoir les bras pleins avec une multitude de questions, ou... Ma préférence, évidemment, c'est la structure actuelle: un président ou une présidente de la Commission des valeurs mobilières qui connaît le dossier dans ses détails les plus précis pour pouvoir facilement communiquer avec les agents du SEC ou, enfin, les instances de la Securities and Exchange Commission qui vont vouloir signer un protocole quelconque pour cette nouvelle Bourse.

Alors, vous pouvez voir un peu, là, la problématique que pose 107. On reconnaît le bien-fondé de 107, on reconnaît la nécessité d'un guichet unique, on reconnaît la nécessité de tenter de réduire les coûts de la réglementation, mais, étant donné de l'ouverture que nous... la direction qu'a prise Bourse de Montréal, il faut absolument qu'on garde, au minimum, une structure qui est aussi harmonieuse avec les autres autorités réglementaires, surtout américaines, parce que c'est là où est notre commerce. Et, il faut que je l'admette, 107 vient bouleverser, changer radicalement la structure qu'on connaît puis dans laquelle on peut facilement évoluer présentement en termes d'entreprise commerciale.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Bertrand. Mme la ministre, il reste cinq minutes.

Mme Marois: Je vous remercie, M. le Président. Il y a une chose que je trouve intéressante dans ce que vous dites. Plusieurs choses, dans le fond, que je trouve intéressantes dans ce que vous dites. D'abord, vous nous indiquez qu'il y a maintenant une saine collaboration qui s'est établie entre les gens de la Commission et la Bourse, de telle sorte que cette connaissance mutuelle que vous avez l'un de l'autre fait en sorte que vous pouvez agir rapidement, avec efficacité et, évidemment, obtenir toutes les autorisations nécessaires et éventuellement conclure toutes les ententes nécessaires avec d'autres partenaires étrangers. Demain matin, ce sont les mêmes personnes que celles qui sont à la Commission qui formeront la Direction de l'encadrement des valeurs. À ce moment-là, ces ententes que vous avez établies, ce partenariat que vous avez avec eux, il continuera essentiellement, il ne se modifiera pas, puisque la loi ne se modifie pas sur son fond, hein, c'est sur son... Et, par ailleurs, normalement, ce sont les mêmes personnes qu'on y retrouverait. Alors, ma conclusion, c'est que c'est vrai qu'il y a des changements qui sont proposés ici et que tout changement, quand on a une relation positive et quand ça va bien avec une organisation, on craint que ça dérange, c'est normal. Mais, moi, je reste confiante et persuadée que, parce que justement nous conservons les mêmes institutions, mais dans un encadrement différent, cette saine relation, elle pourra se continuer.

Et vous faisiez référence à l'Angleterre, enfin au Royaume-Uni, puisque vous voulez avoir éventuellement des ententes avec des entreprises de la City peut-être, enfin à Londres. Mais vous savez qu'au Royaume-Uni ils ont refait au complet leur régime, ils ont revu au complet leur régime et maintenant ils ont adopté une organisation unique qui encadre les secteurs financiers, et ça ne les a pas fait perdre pour autant ni leur crédibilité ni leur capacité d'intervenir, d'agir. Alors, le défi que nous avons bien sûr, c'est de nous assurer que l'expertise qui est acquise dans chacune des institutions qu'on regroupera puisse être préservée ? et c'est l'intention du législateur ? et donc que l'on puisse non seulement préserver cela, mais même décupler la capacité que l'on pourrait avoir de mieux encadrer, de mieux offrir des services, de mieux protéger l'intérêt public, parce que, en bout de ligne et en prémisse, c'est d'abord ça qui nous guide actuellement, c'est l'intérêt public.

Alors, je prends bonne note de vos commentaires. On verra, dans l'étude du projet de loi, comment on peut vous rassurer puis s'assurer surtout qu'on respecte, je dirais, les grands principes qui ont permis à la Bourse d'opérer, de fonctionner, d'être efficace et à la Commission d'assumer ses responsabilités. C'est ce que nous cherchons avec la loi qui est là et absolument pas de reculer, on le comprendra bien.

Le Président (M. Paré): Merci, Mme la ministre.

Mme Marois: Je pense que j'ai un collègue qui voulait poser une question. Est-ce qu'il a...

Le Président (M. Paré): Oui, M. le député de Bertrand. M. le député de Bertrand, il reste une minute.

M. Cousineau: Merci, M. le Président...

Mme Marois: ...aborder la question de l'international aussi? Excuse-moi, ça va.

n(11 h 50)n

M. Cousineau: Parler un petit peu, là, de la structure administrative. Merci, M. le Président. Bonjour, M. Bertrand, M. Robillard et puis Mme Saint-Arnault. Bienvenue à cette commission. Écoutez, je regarde le mémoire que vous nous avez déposé, puis, au niveau de la structure administrative de l'Agence, bien vous vous questionnez beaucoup puis vous... En tout cas, ça a de l'air un petit peu, là, à vous déranger, le fait qu'on parle d'un président-directeur général et puis qu'on devrait s'ajuster en symbiose avec ce qui se fait ailleurs. Mais, là ce qu'on regarde ? puis ça vous le dites très bien, là, aux pages 2, 3 et 4 de votre mémoire ? vous mentionnez: «Le pouvoir est concentré entre les mains du président-directeur général...» Vous dites, de plus: «La concentration décisionnelle du pouvoir auprès d'une seule personne sans structure de révision des décisions opérationnelles pose le problème de l'apparence d'impartialité et d'indépendance du processus décisionnel.» Vous dites aussi: «...l'absence d'une structure collégiale de prise de décision formée de personnes spécialisées dans leur domaine d'expertise pertinent et qui sont nommées de façon à éviter les conflits d'intérêts.» Vous préconisez, en fin de compte, la mise en place d'une structure collégiale de cinq à 10 personnes oeuvrant dans le domaine et puis...

Mais je veux quand même mentionner: Aux États-Unis, bon, la structure qui existe présentement, qui est la Securities and Exchange Commission, il n'y a qu'un président-directeur général avec deux commissaires pour à peu près 3 000 employés, si on considère les bureaux régionaux, pour un budget d'à peu près 1 milliard. Qu'est-ce que vous en savez de cette structure-là aux États-Unis, là, qui, pourtant, là, est... C'est une structure qui est quand même très restreinte.

Le Président (M. Paré): M. Bertrand.

M. Bertrand (Luc): D'abord, la première chose qu'il faut dire au sujet de Securities and Exchange Commission, c'est qu'ils ne s'occupent que de valeurs mobilières, ils ne font rien d'autre. D'ailleurs, le domaine des contrats à terme, les «commodities» puis les «futures», c'est une autre agence qui s'appelle le CFTC, là, à laquelle on faisait allusion tantôt. Donc, quand on parle d'encadrement réglementaire dans le domaine des valeurs aux États-Unis, il faut penser qu'il y a deux agences: le SEC, qui ne fait que les valeurs mobilières, et le CFTC, qui fait ce qu'on appelle les «futures» et les «commodities». Ici, au Canada, on appelle ça... En français, c'est des contrats à terme. Bourse de Montréal fait les deux. Au Canada, et au Québec en particulier, c'est la même organisation qui régit les contrats à terme et les valeurs mobilières, c'est la Commission des valeurs mobilières. Alors, je pense que le parallèle avec le SEC ne s'applique pas ici. C'est vraiment une institution dédiée à un secteur précis et qui... Je ne veux pas vous induire en erreur, mais je pensais qu'il y avait cinq commissaires. Je pense qu'il y a deux, qu'il en manque... En tout cas, je sais qu'ils sont en réorganisation. Je pense qu'il y a cinq commissaires, mais prenez-moi pas pour acquis sur ça...

Mme Marois: La loi prévoit...

M. Bertrand (Luc): La loi prévoit, je pense, cinq commissaires du SEC.

Mme Marois: Il y en a deux qui n'ont jamais été nommés, me dit-on, là.

M. Bertrand (Luc): Oui. Mais l'important, c'est quand même... Et je le vis présentement, parce que ça fait quelques meetings qu'on a avec les instances décisionnelles de l'équipe qui s'occupe de la réglementation des marchés au SEC. On est là évidemment pour notre projet du Boston Options Exchange, et le travail se fait, là, avec une équipe très spécialisée, dédiée évidemment à l'encadrement des marchés des valeurs, et puis c'est un travail qui est laborieux. Croyez-moi, là, c'est un fardeau qui demande beaucoup de temps. Mais, une fois que le staff du SEC va avoir accepté le modèle de marché qu'on propose ? on espère que ça va être d'ici la fin septembre ? là, c'est publié dans qu'est-ce qu'ils appellent le «Federal Registry». Et là il y a une période de consultation de 30 jours, et ça remonte uniquement au commissaire, qui est le Collège, que malheureusement on ne retrouve pas dans le projet de loi n° 107... Ça remonte uniquement au Collège s'il y a une intervention de l'industrie qui demande une audience. Alors, le travail se fait vraiment, là, à distance non seulement du Collège ? en haut du Collège, évidemment, il y a le Congrès américain et tous les comités du Congrès qui revoient les activités du Securities and Exchange Commission ? mais le travail se fait entre les dirigeants ? dans notre cas, c'est Boston, Timber Hill, J.P. Morgan, Bourse de Montréal, etc. ? et le staff du SEC. La décision se prend là.

Le Président (M. Paré): M. Bertrand, je dois vous interrompre. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. Alors, d'abord, félicitations, M. le président, pour votre mémoire qui était succinct mais très clair, au point. Je dois vous dire que votre mémoire m'a beaucoup influencée pour voir les dangers de la façon dont la nouvelle Agence va être gérée avec un président-directeur général et exclusivement un comité aviseur pour le conseiller, etc.

La ministre posait la question: Qu'est-ce qu'il faudrait faire de différent? Il y avait une approche, qui se dirigeait plus du côté prudentiel, de l'IGIF. Et il y a une approche qui serait orientée vers la CVMQ, la Commission des valeurs mobilières. En lisant le projet de loi, je pense qu'il opte pour une approche prudentielle, une agence administrative, et le côté Commission des valeurs mobilières, tribunal quasi judiciaire, à mon avis, devient subalterne au reste. Il y avait lieu de créer une agence avec, principalement, en vue l'idée de conserver la Commission des valeurs mobilières, premièrement, et d'ajouter à cette Commission, à ces commissaires, qui pourraient jouer le rôle de conseil d'administration une partie du temps et commissaires impartiaux quasi judiciaires une autre partie du temps... ajouter à ça l'Inspecteur général des institutions financières, ajouter à ça le Bureau des services financiers pour harmoniser la réglementation et faire qu'on diminue les coûts. Pas seulement les coûts que l'on voit, que l'on charge, mais les coûts en termes de temps. Or, le projet de loi, actuellement, ne propose pas cette formule-là. Je ne pense pas qu'il propose cette formule-là.

Je pense que la Commission des valeurs mobilières devient un élément à l'intérieur d'un organisme, et là le président, d'ailleurs, va devoir choisir le surintendant avec la formule actuelle. Ça, je pense que la ministre serait probablement ouverte pour modifier ça. Elle avait indiqué, un moment donné, qu'elle pourrait envisager les surintendants.

Mme Marois: ...

Mme Jérôme-Forget: C'est ça. Mais il n'en demeure pas moins que la tournure du projet de loi a opté pour une approche prudentielle plutôt qu'une approche de Commission de valeurs mobilières, qui est la grande tendance aujourd'hui. On l'a vu, à cause des scandales qu'on a eus récemment, le mouvement est dans le sens inverse. Le mouvement, il y a 10 ans, ça aurait peut-être été différent. Mais, aujourd'hui, c'est un mouvement différent.

Et je suis d'accord avec vous que l'idée de conserver la Commission des valeurs mobilières ou, du moins, sa mission à l'avant-garde du projet de loi, à l'avant-garde du projet de loi, et d'ajouter à cette Commission tous ces autres volets, administratif, normatif, d'harmonisation d'un organisme à un autre... Je pense que ça s'explique, mais vous le dites très bien dans votre mémoire que ça, ça risque de mettre en danger certaines démarches que vous avez entreprises. Vous y avez fait mention plus tôt. Et non seulement que ça va à l'encontre de certaines démarches que vous avez entreprises, mais ça va à l'encontre du climat actuel en Amérique du Nord, que ce soient nos voisins, l'Ontario, qui, rappelons-le, a la plus grosse Commission des valeurs mobilières, bon, que ce soient nos voisins du Sud, encore plus grosse, la Securities Commission, qui, elle, manifestement, joue un rôle déterminant, et elle est même mise sur la sellette constamment et elle l'a été récemment vu les problèmes qu'ont connus les Enron de ce monde et les WorldCom de ce monde.

Alors, la ministre vous posait la question: Comment est-ce qu'il faudrait modifier le projet de loi? Est-ce que ce n'est pas de changer un peu la mentalité du projet de loi et de mettre l'emphase sur le côté quasi judiciaire de cet organisme tout en y ajoutant tous les autres volets qui sont importants, mais qui, manifestement, requièrent un volet administratif, un président-directeur général qui suit, n'est-ce pas, les activités, qui fait la réglementation, la normalisation et qui oeuvre pour bien gérer toute cette Agence? Est-ce que ce n'est pas là une solution?

Le Président (M. Paré): M. Bertrand.

n(12 heures)n

M. Bertrand (Luc): Bien, écoutez, je ne peux pas contredire votre raisonnement, là, sur la division des responsabilités, il est fort possible que ce soit une façon de s'orienter. Je vais vous dire très candidement, par contre, que ma préférence personnelle, c'est qu'on garde la Commission intacte, telle qu'elle est, et qu'on trouve un moyen de l'intégrer peut-être, par la façon que vous venez de le décrire, dans la nouvelle Agence ou enfin qu'elle ait une fonction qui est distincte à elle étant donné la nature précise de l'encadrement qu'elle doit faire. Il est fort possible que vous êtes sur une bonne piste. Je pense que ça demande beaucoup de réflexion encore, parce qu'il est clair qu'on doit rationaliser l'encadrement des services financiers au Québec, mais sans qu'on perde les acquis. Et puis je trouve que, dans 107, on perd beaucoup d'acquis, malheureusement, et on perd l'homogénéité qu'on a avec les autres juridictions.

Mais, je vais être honnête avec vous, à la Bourse, on n'a pas fait la réflexion sur le modèle optimal. Qu'est-ce qu'on représente aujourd'hui, c'est qu'il faut absolument trouver une façon de garder les acquis que la CVMQ a et comment on encadre ça sur une base administrative. Et là, quand je parle des acquis, je parle du Collège, je parle de l'indépendance de l'organisation, je parle de son habileté à pouvoir travailler sur la scène internationale sans que les gens posent la question, à savoir: Bon, bien, c'est quel genre d'organisation encore? On n'est pas dans une situation, au Québec, où on a le temps de s'expliquer. Il faut fonctionner comme les autres fonctionnent si on veut être concurrentiels sur la place financière qui est très concurrentielle. Alors, je vais vous dire, ce n'est pas un problème facile, si on tient absolument à ne pas faire cette séparation prudentielle, comme vous mentionnez.

Mme Jérôme-Forget: Vous savez qu'en Ontario, notamment, ils ont incorporé l'IGIF à leur Commission des valeurs mobilières. Dans la réorganisation, ils ont... Ce dont je vous parlais, c'est un peu la formule qu'a mis en place l'Ontario et qui met plus d'emphase sur le côté quasi judiciaire de l'organisme pour le renforcer. Alors, c'est pour ça que je vous posais la question, à savoir... Quant à vous, ce que vous me dites, vous êtes prêts à ce qu'il y ait une agence à la condition qu'il y ait une Commission des valeurs mobilières à côté, indépendante, autonome, avec son propre président et ne faisant pas partie de cette Agence. C'est votre premier choix. Votre premier choix, c'est cela.

M. Bertrand (Luc): Vous dites... C'est ça que je souhaiterais, moi. Oui, c'est certain. Joëlle.

Le Président (M. Paré): Mme Saint-Arnault.

Mme Saint-Arnault (Joëlle): Oui, si vous me permettez. En fait, notre préoccupation, c'est que l'Agence, la division de l'Agence qui gère les valeurs mobilières et surtout les produits dérivés, soit spécialisée, formée de personnes qui ont l'expérience, les compétences pour nous suivre, comme la Commission nous a suivis jusqu'à maintenant, et pour encadrer de façon adéquate. Parce qu'il faut comprendre que le domaine des valeurs mobilières, mais particulièrement le domaine des produits dérivés, est hyperspécialisé. Et c'est pourquoi, avec la Commission, nous avons fait un cheminement, nous avons même collaboré à leur donner des cours pour qu'ils améliorent leur connaissance des produits dérivés, qui est loin d'être un domaine très connu au Canada à ce moment-ci. Et nous avons avantage à nous faire connaître.

Maintenant, c'est sûr que le monde en Amérique du Nord fonctionne avec des commissions formées d'un collège qui prend des décisions par rapport aux opérations des bourses de valeurs mobilières. C'est la façon reconnue de procéder en Amérique du Nord. Alors, notre préoccupation, c'est qu'on change un peu cette façon de fonctionner qui va faire qu'on peut se questionner. Je suis très contente d'entendre, Mme la ministre, que vous allez apporter probablement des précisions par rapport à l'encadrement au jour le jour d'un organisme comme le nôtre, d'un organisme d'autoréglementation, parce que nous avons des règlements à faire modifier, à changer sur une base régulière. Alors, il est important d'avoir une équipe administrative qui est capable de gérer ces questions-là. En plus ? et c'est notre préoccupation au niveau de l'OICV ? c'est que l'OICV insiste pour que le gouvernement ne soit pas impliqué directement dans l'encadrement des bourses, des organismes de compensation et des OAR. Donc, nous avons cette préoccupation-là. C'est important. Vous savez, notre industrie est basée sur la confiance de l'encadrement. Alors, c'est important que nous ne nous démarquions pas trop de ce qui se fait dans la balance du monde.

Par ailleurs, si nous réussissons à avoir à l'intérieur de cette Agence une structure qui dénote une impartialité, qui est formée de personnes, comme, par exemple, une espèce de conseil d'administration ou un conseil spécialisé à l'intérieur de la division qui pourrait être une instance même d'appel au... Parce que, présentement, il y a une structure qui est la suivante, c'est qu'il y a une structure administrative et il y a possibilité d'aller devant la Commission quand il y a désaccord, par exemple, sur l'approbation d'une règle, tandis que, dans le projet de loi n° 107, on ne voit pas ça. Tout de suite, ça va de la division au président-directeur général. Alors, nous, ce que nous préconisons, c'est d'avoir une structure semblable à ce qui existe présentement où il y a un mécanisme de révision possible, mais par des gens spécialisés dans le domaine et qui connaissent bien les rouages.

Alors, voilà un peu où nous nous positionnons. Mais c'est sûr que ce que nous connaissons, c'est le fonctionnement de la Commission des valeurs mobilières, et nous estimons que c'est un organisme qui nous a beaucoup aidés dans nos démarches jusqu'à présent.

Le Président (M. Paré): Merci, Mme Saint-Arnault. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Jérôme-Forget: Moi, je veux... Brièvement, vous ne vous êtes pas prononcés pour ça, mais est-ce que vous pensez que les organismes d'indemnisation devraient faire partie de cette Agence ou s'ils devraient être séparés?

M. Bertrand (Luc): Je peux seulement parler pour le domaine des valeurs mobilières. Dans le moment, on a le Fonds de protection des investisseurs, qui fonctionne très bien. Nous, on a souvent eu à traiter avec le Fonds. Moi-même, j'ai siégé sur le Fonds pendant plusieurs années, et je vois mal pourquoi on devrait changer cette structure à ce moment-ci, parce que ça fonctionne. Donc, moi, je ne l'intégrerais pas. Ça, c'est ma façon de voir les choses. L'industrie, au Canada, s'est bien autoréglementée dans ce sens-là et prend bien en charge ces choses. Donc, je vois mal pourquoi ça devrait être une agence qui le fasse pour l'industrie.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Bertrand. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Jérôme-Forget: Vous mentionniez plus tôt le danger de la perception, de l'apparence d'ingérence du gouvernement. Même si c'est à l'intérieur de l'organisme, les commissions des valeurs mobilières, généralement, sont jalouses de leur autonomie des gouvernements. Est-ce que la formule actuelle risque de causer problème simplement parce que.... Pour revenir à ma proposition d'une tête avec, dans le fond, deux chapeaux ou à peu près, est-ce que, à ce moment-là, il y aurait un danger? Parce que, si l'Ontario a fusionné son IGIF et la Commission des valeurs mobilières, vous, est-ce que vous percevez ça comme un danger d'incorporer l'IGIF à l'intérieur de l'Agence ou, s'il y avait une Commission des valeurs mobilières plus forte, plus grande, un Bureau des services financiers, si vous pensez que... Quelle image ça donnerait sur le plan international?

Le Président (M. Paré): M. Bertrand.

M. Bertrand (Luc): Savez-vous, l'image, à l'international, c'est la transparence, la collégialité, enfin, le système qui permet que, si on a un désaccord en tant qu'organisations réglementées, on puisse se rapporter à un collège quelconque. Maintenant, la structure administrative, évidemment, va déterminer d'une façon ou d'une autre si les décisions sont prises à ce niveau-là. Mais qu'est-ce qui est important, je pense, à l'international, c'est qu'on s'en tienne aussi près que possible à la lettre et à l'esprit des règles que suggère l'OICV et que... Quand on lit ces règles-là ou les propos de l'OICV, c'est de garder aussi loin que possible le politique et l'administration avec un collège qui permet aux intervenants une porte quelconque pour régler les problèmes.

n(12 h 10)n

Donc, comme je vous dis, nous, dans le moment, ça fonctionne très bien. Alors, on accepte difficilement qu'on vienne changer des choses. Et commencer une grande réflexion sur une restructuration de l'encadrement, pour nous, on aimerait bien que vous trouviez une façon de maintenir l'acquis de la CVMQ dans cette grande restructuration du projet n° 107. Et je vous admets, là, qu'il n'y a pas de formule magique ici. C'est problématique, mais indéniablement je suis certain qu'il doit y avoir une façon de trouver une manière d'organiser la chose pour que ça rejoigne l'objectif du gouvernement.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Bertrand. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Jérôme-Forget: Bien, M. le Président, comme j'ai un déjeuner ce midi, alors, peut-être que ce serait bon de laisser la place au prochain intervenant.

Le Président (M. Paré): Donc, il me reste à vous remercier, M. Bertrand, accompagné de Mme Saint-Arnault et de M. Robillard. Au plaisir. Merci de votre contribution.

J'inviterais l'autre groupe, le Fonds d'investissement du Canada, à se présenter, s'il vous plaît.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Paré): Bienvenue, Mme Vézina. Si vous voulez nous présenter les gens qui vous accompagnent et débuter. Vous avez 10 minutes pour votre présentation et, de part et d'autre, nous aurons 10 minutes d'échanges avec vous. Merci.

Institut des fonds d'investissement
du Canada (IFIC)

Mme Vézina (Johanne): Merci, M. le Président, Mme la vice-première ministre et membres de la commission. Je suis Johanne Vézina, présidente du Conseil des fonds d'investissement du Québec et vice-présidente Clients et expansion d'entreprises chez Gestion financière Talvest. Je suis accompagnée de deux membres du conseil d'administration du Conseil des fonds d'investissement, qu'on appellera, pour la rapidité de l'affaire, le CFIQ dorénavant. Alors, à ma droite, M. Michel Fragasso, qui est président du Comité de réglementation du CFIQ et président et chef de la direction de Capital Teraxis, un distributeur de produits financiers au Québec; à ma gauche, M. Éric Lapierre, qui est conseiller juridique chez Les Services Investors.

Le Conseil des fonds d'investissement du Québec a pris connaissance avec intérêt du projet n° 107 et accueille favorablement la venue de cet ouvrage législatif majeur piloté par Mme Marois. Notre association regroupe la presque totalité des manufacturiers en fonds communs d'investissement, des gestionnaires de portefeuilles et des cabinets qui constituent l'industrie des fonds communs de placement au Québec. Nos membres emploient plus de 20 000 représentants en épargne collective, sans compter le personnel administratif, les conseillers en investissement, qui gèrent plus de 60 milliards de dollars de l'épargne québécoise.

Le Conseil est appuyé par un groupe d'employés permanents, puisque notre association a surtout oeuvré, évolué et démontré son dynamisme, depuis deux décennies, à travers la grande implication de certains bénévoles, dont nous sommes, les trois ici, et qui sont généralement des bénévoles qui proviennent entièrement du secteur d'activité des fonds communs de placement.

Nos membres saluent la volonté de votre gouvernement, par le projet de loi n° 107, d'intégrer tous les organismes d'encadrement actuels du secteur en une seule agence. Nous appuyons fortement cet effort du gouvernement de viser par là un régime de réglementation plus efficace et plus accessible. Notre intérêt à voir l'Agence atteindre les objectifs que vous lui fixez s'accompagne de notre souci que sa loi constitutive demeure, pour l'industrie des fonds communs de placement, une structure évolutive qui peut relever, au fil des années, les défis du contexte économique financier particulier de notre industrie.

Nous aimerions donc partager avec vous ce souci à l'égard de certains sujets touchés par le projet de loi n° 105. Nous avons, à cet effet, cinq items dont nous aimerions discuter. Ces items font d'ailleurs le consensus au sein de l'industrie, au sein du Conseil des fonds d'investissement, et certains membres importants du Conseil vont reprendre certains de ces thèmes face à la commission, chacun indépendamment, qu'on pense à Partenaires Cartier ou Standard Life qui sont des membres du Conseil des fonds d'investissement.

Le projet de loi n° 107 crée un Conseil consultatif de régie administrative composé de sept membres nommés par le ministre. Ces personnes sont choisies pour leur connaissance du secteur financier ainsi que pour leur expertise en matière de gestion administrative. Nommés par la ministre, les membres du comité consultatif échappent à l'autorité de l'Agence. Les fonctions qui sont conférées par l'article 54 du projet de loi accordent au comité consultatif un pouvoir de supervision sur la conformité de la conduite de l'Agence à l'égard de sa mission et un pouvoir de recommandation auprès de l'Agence et du ministre responsable des activités de l'Agence.

Étant donné l'importance du rôle que le projet de loi n° 107 accorde au comité consultatif et de l'influence qu'il peut exercer dans l'accomplissement de celui-ci, il nous semblerait important que le projet de loi n° 107 prévoit un processus de recommandation permettant aux représentants de l'industrie des services financiers d'assister la ministre dans la sélection de candidats qualifiés. Ces représentants proviendraient de différents organismes regroupant les membres de chacun des principaux volets du secteur financier. Quant aux candidats eux-mêmes au comité consultatif, nous recommandons qu'ils ne soient plus actifs au sein de l'industrie mais jouissent, par contre, d'une réputation et d'une expérience reconnue. Un tel processus de recommandation apporterait à chaque groupe du secteur financier la confiance que les particularités qui sont propres à son secteur soient pleinement appréciées au sein du comité en question.

Je passe à la recommandation. Nous recommandons l'inclusion au projet de loi n° 107 d'un processus de recommandation permettant aux principaux organismes du secteur financier d'assister la ministre dans le choix de candidats au comité consultatif de régie d'entreprise. Ceux-ci devraient être issus du milieu financier mais ne plus y être actifs.

Je passe la parole à mon collègue, Michel Fragasso, pour les deux prochains points.

M. Fragasso (Michel): Merci, Mme la présidente. Évidemment, en tant que distributeur, j'aimerais développer deux thématiques qui appuient la loi n° 107.

Le premier point. Le projet de loi n° 107 prévoit des dispositions permettant à l'Agence de reconnaître des organismes d'autoréglementation et de leur déléguer le rôle d'encadrer une activité régie par les lois applicables du secteur financier. En ce qui concerne une telle reconnaissance, l'article 65 établit plus précisément comme critère que les documents constitutifs du candidat et sa réglementation interne permettent que le pouvoir décisionnel relatif à l'encadrement d'une activité régie par une loi visée à l'annexe 1 puisse principalement être exercé par des personnes qui résident au Québec.

Or, le seul organisme d'autoréglementation du Canada visant la distribution de fonds communs de placement qui réponde aux qualifications structurelles présentées à l'article 64 et aux objectifs d'accessibilité et de contrôle visés à l'article 66 est l'Association canadienne des courtiers en fonds mutuels qui, communément, est appelée le Mutual Fund Dealers Association ou encore le MFDA. Il s'agit du seul organisme d'autoréglementation du Canada qui regroupe à la fois les activités de supervision des cabinets ainsi que les représentants. Le MFDA ayant une vocation pancanadienne, sa charte et ses règles internes visent à assurer une réglementation uniforme pour toutes les juridictions qui les reconnaissent. Il ne peut donc morceler l'exercice de son pouvoir décisionnel sur l'encadrement des activités de ses membres selon la juridiction d'accueil. Par contre, chacune des autorités réglementaires en valeurs mobilières doit d'abord reconnaître le MFDA afin qu'il puisse exercer ses activités. Des règles internes du MFDA prévoient aussi un pouvoir de révision et ses décisions par l'autorité réglementaire compétente. Et chacune de ces autorités peut révoquer sa reconnaissance du MFDA en tout temps.

Dans cette mesure, la charte et la réglementation interne du MFDA nous paraissent respecter les champs de compétence du Québec. Le MFDA ne serait d'ailleurs pas le seul organisme d'autoréglementation à être reconnu par les autorités québécoises en valeurs mobilières et dont le pouvoir décisionnel d'encadrement ne serait pas principalement exercé par des représentants résidant au Québec. La Bourse de Toronto serait un exemple d'organisme d'autoréglementation extraprovincial reconnu au Québec. Tout comme la Bourse de Toronto, le MFDA, s'il était reconnu par l'Agence, pourrait assurer l'application de règles uniformes d'encadrement. Dans le cas du MFDA, l'application de ces règles toucherait tant les cabinets que leurs représentants dans toutes les juridictions qui le reconnaissent, y compris le Québec. Le MFDA serait en mesure de fournir au public une protection uniforme à l'égard de la vente de produits semblables. Pour ces raisons, nous vous prions de prévoir des accommodements particuliers aux organismes d'autoréglementation pancanadiens pour leur permettre l'accès au marché québécois.

n(12 h 20)n

Nous recommandons donc, en conclusion, que le projet de loi n° 107 permette aux OAR d'être reconnus par l'Agence même si leur pouvoir décisionnel d'encadrement n'est pas exercé principalement au Québec.

Une autre thématique, très chère aux distributeurs, est évidemment les plaintes formulées contre les titulaires de certificats. En vertu de l'article 371 de la loi n° 107, vous avez prévu une modification de la loi pour assurer aux cabinets en épargnes collectives qu'ils soient avisés par l'Agence du dépôt et de la nature de toute plainte contre un titulaire de certificat rattaché à ces cabinets. Ce mécanisme permet dorénavant aux cabinets, informés du dépôt d'une telle plainte, de prendre des mesures nécessaires à la protection des clients desservis par le titulaire pendant le traitement de la plainte par l'Agence. La reconnaissance par les cabinets des plaintes portées contre les titulaires de certificats rattachés à ceux-ci est un élément important du rôle de supervision qui incombe aux cabinets. Aussi, nous souhaitons vivement que ces dispositions et leur portée soient maintenues dans la législation finale telles qu'elles apparaissent présentement au projet de loi n° 107.

En conclusion, nous recommandons que des dispositions de l'article 371 du projet de loi n° 107 soient maintenues telles quelles dans la législation finale.

Alors, merci, M. le Président, Mme la vice-première ministre. Je cède la parole à M. Éric Lapierre, de chez Investors, qui travaille plus au niveau de la gestion de portefeuilles.

Le Président (M. Paré): Malheureusement, votre temps imparti est terminé. Donc, je donnerais la parole à Mme la ministre. Peut-être qu'il y aura des questions, là, de...

Mme Jérôme-Forget: En principe, on avait une demi-heure pour ce groupe.

Le Président (M. Paré): Exactement. Nous aurons une demi-heure aussi.

Mme Jérôme-Forget: Alors, comment allouez-vous le temps? 10, 10?

Le Président (M. Paré): 10, 10, 10. Donc, ils ont pris 10 minutes. Mme la ministre, vous avez 10 minutes.

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. Bien, écoutez, je vais demander à M. Lapierre de nous dire les recommandations qu'il voulait nous présenter en quelques instants. Puis, après, j'ai des questions quand même très précises.

Le Président (M. Paré): Allez-y, M. Lapierre.

M. Lapierre (Éric): Merci, Mme la vice-première ministre. Bon. Première recommandation. Nous recommandons que le projet de loi n° 107 prévoie des dispositions modificatives relatives à la Loi sur la distribution de produits et services financiers pour y incorporer un régime de dispenses propres à cette loi. Et nous recommandons également que le projet de loi n° 107 prévoie des dispositions modificatives à la Loi sur la distribution de produits et services financiers afin qu'elle permette à l'Agence d'adopter des normes dans le domaine régi par cette loi.

Mme Marois: Merci, M. Lapierre. Alors, j'avais effectivement les recommandations devant moi, mais je pense que c'est intéressant pour les fins de la commission que vous puissiez les mentionner, et ça va me permettre immédiatement sur ces deux aspects-là, les deux dernières recommandations que vous nous faites, de vous indiquer que ce ne sont pas des recommandations que nous rejetons, mais ce sont des recommandations que nous traiterions dans un deuxième temps au sens où je l'ai expliqué à quelques organisations qui sont venues... aux organisations qui sont venues ce matin présenter des mémoires. On se comprend bien qu'actuellement l'objectif, c'est de constituer l'Agence pour nous permettre de regrouper, au sein d'une même institution, les organismes responsables de l'encadrement des institutions financières, responsables aussi de protéger les intérêts des consommateurs qui est un des premiers objectifs, je vous dirais, de la constitution de l'Agence, mais dans un... et donc pas à ce moment-ci de revoir les lois, les règlements de chacune de ces institutions, sauf celles qui demandent essentiellement certaines concordances pour permettre à l'Agence d'opérer. Mais cependant, dans un second temps, lorsqu'on aura institué l'Agence, constitué cette nouvelle institution, là, nous procéderons à une révision en profondeur de chacune des lois, et ce sont des débats qu'on devra avoir bien sûr.

Par ailleurs, j'ai une question plus précise sur les recommandations que vous faites en ce qui a trait au Mutual Fund Dealers Association. La crainte que nous avons à ce moment-ci de reconnaître différents OAR, c'est qu'on assiste à une véritable multiplication de ces organisations. Et vous savez que l'un des objectifs que nous avions fixés à la commission Martineau et qu'elle-même a repris et nous a proposé de retenir, c'est vraiment qu'on évite des chevauchements puis une multiplication des nouvelles organisations. D'ailleurs, on le voit bien, la constitution de l'Agence amène à ce qu'on retrouve au sein d'une institution toutes les différentes agences qu'on a maintenant et qui sont autonomes complètement.

Alors, ma crainte, c'est, si on ouvre une porte là, si on ne doit pas l'ouvrir ailleurs. Et est-ce qu'on ne retombe pas dans le même travers qu'on veut éviter? Parce que vous savez qu'on en reconnaît déjà officiellement dans la loi, des OAR.

Le Président (M. Paré): M. Fragasso.

M. Fragasso (Michel): Je vous dirais que vous avez raison. Disons que le problème majeur, c'est que tous les courtiers en épargne collective québécois, dont le siège social est au Québec, ont d'énormes difficultés, par les deux régimes de loi, à pouvoir s'étendre à travers l'ensemble du Canada. Donc, tout courtier en épargne collective québécois, actuellement, est pénalisé. Il y a eu différentes discussions qui se sont faites du côté du Bureau des services financiers puis du MFDA pour harmoniser le système politique, mais je vous dirais que c'est réellement quelque chose de très complexe pour un courtier en épargne collective québécois de prendre de l'expansion à l'extérieur du Canada. Il faut créer deux systèmes de charte, deux systèmes de conformité, il y a beaucoup de coûts d'impliqués, les marges de profit sont très petites, ce qui fait que c'est extrêmement difficile pour un courtier québécois d'avoir de l'expansion du côté extérieur. Puis l'inverse est vrai aussi, pour les gens qui sont basés à l'extérieur, d'opérer au Québec.

Alors, évidemment, tout l'esprit en arrière du MFDA était d'harmoniser ces lois-là ou encore qu'il y ait ? puis c'est ça qui avait été, peut-être, travaillé ? ...de travailler sur une reconnaissance mutuelle ou de réciprocité avec le MFDA, le Bureau et l'Agence. Mais, quoi qu'il en soit, la suggestion du MFDA était celle qui était plus facile.

Le Président (M. Paré): Mme Vézina, vous voulez ajouter?

Mme Vézina (Johanne): Merci, oui. Pour m'être intéressée à la question, la réglementation du MFDA est relativement semblable à celle que l'on retrouve au niveau de la Loi des produits et services financiers. Ce sont les différences qui, finalement, causent problème et augmentent les coûts face à nos distributeurs puis à leur possibilité de prendre de l'expansion et de développer des affaires hors Québec. Alors, l'important, c'est de trouver une façon que l'OAR s'entende et fasse en sorte que l'Agence puisse reconnaître ce qui se fait du côté de l'OAR et vice versa. Il y a sûrement des terrains d'entente qui pourraient faire en sorte qu'une harmonisation soit possible et facilite la vie à nos distributeurs, puisque, présentement, ils ont un désavantage concurrentiel face à ceux qui ont leurs sièges sociaux hors Québec.

Le Président (M. Paré): Merci, madame.

Mme Marois: Mais, est-ce que c'est juste ? ce sera ma dernière question ? que le MFDA avait refusé une entente qui était sur le point de se conclure entre les deux organisations?

Mme Vézina (Johanne): Je pense que c'est dans la façon dont l'entente aurait pu être conclue, où il y avait un certain désaccord. Mais il y a certainement, à ma connaissance, un grand intérêt de part et d'autre à vouloir trouver un terrain d'harmonisation, et je pense que c'est dans la mécanique qui doit simplement être élaborée de façon un peu plus précise.

M. Fragasso (Michel): Maintenant, je peux peut-être rajouter. Un des gros éléments était évidemment le pouvoir de vérification des gens de Toronto au niveau des courtiers en épargne collective québécois, qui est un élément qu'il ne faut pas toucher et puis qui est un élément, de l'autre côté, qu'on voulait toucher. Alors, je vous dirais que le gros écueil a été là.

Mme Marois: D'accord. Ça va. Merci.

Le Président (M. Paré): Merci, Mme la ministre. J'ai besoin du consentement de cette commission pour continuer nos échanges jusqu'à... Il nous reste 10 minutes, les 10 minutes, là, que...

Mme Marois: Ça va, on l'avait pris pour acquis.

Le Président (M. Paré): Il y a consentement. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Jérôme-Forget: Alors, M. le Président, moi, je voudrais savoir... que vous articuliez, parce que, moi aussi, j'étais sous l'impression qu'il y avait eu une amorce de négociation entre le Bureau des services financiers et le Mutual Fund Dealers Association. On aurait invoqué que l'arrivée du projet de loi n° 108 allait mettre un frein à ces négociations-là, parce qu'il y avait un changement de structures envisagé, et donc ce serait la raison. Ce que vous dites, par ailleurs, c'est que le différend entre le Bureau des services financiers et le Mutual Fund Dealers Association est beaucoup moins important que ce qu'on nous a laissé croire à l'extérieur et que, par conséquent, il y aurait une telle entente à amorcer.

Le Président (M. Paré): Mme Vézina.

n(12 h 30)n

Mme Vézina (Johanne): Merci. Évidemment, je ne peux pas me prononcer ni au nom du Bureau des services financiers ni au nom du MFDA. Cependant, comme présidente du CFIQ, on est très habitué, au CFIQ, à avoir confiance que les consensus sont toujours possibles. En ce sens-là, je sais que beaucoup de travail a été fait, et on a identifié, des deux parts, des deux côtés, les éléments qui sont différents et qui devraient être harmonisés le cas échéant. Le fait que le travail d'harmonisation ou de négociation, je vous dirais, a cessé est effectivement dû au fait que le MFDA souhaite pouvoir se faire reconnaître comme OAR par l'Agence et en quelque sorte, donc, reprendre le travail d'harmonisation sous la nouvelle structure qui est proposée, puisque le Conseil des fonds d'investissement, entre autres, supporte entièrement le concept de l'Agence. Alors, il y a... Évidemment, c'est toujours sur les points de différenciation qui sont souvent les points qui peuvent mener à des achoppements mais qui peuvent aussi, avec la meilleure volonté, finir par trouver une solution de consensus.

Le Président (M. Paré): Merci, Mme Vézina. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Jérôme-Forget: Est-ce qu'il y a l'équivalence où vous auriez, par exemple, à la Commission de l'Ontario une reconnaissance? Est-ce que c'est une approche qui est fréquente? Est-ce que c'est une approche qui est utilisée, de reconnaître un OAR dans une autre province?

Le Président (M. Paré): M. Fragasso.

M. Fragasso (Michel): Je vous dirais que, du côté du MFDA, le MFDA a été reconnu dans toutes les provinces. Ça a été un processus assez long. Actuellement, le MFDA est reconnu partout. Donc, le MFDA a un statut d'OAR à travers l'ensemble du Canada sur le secteur des fonds mutuels. Le Québec avait le BSF puis, à ce moment-là, on m'avait demandé d'intervenir pour essayer de rapprocher les parties. Et puis, évidemment, tout avait bien été sauf le dernier élément, dont on parle, là, qui était l'élément de vérification. Puis, à ce moment-là, le MFDA a dit: On va attendre de voir ce que la loi n° 107 amène sur les critères d'OAR. Puis, par la suite, d'autres gestes qu'on fait, soit qu'ils vont en fin de compte soumettre une demande ou encore il y aurait d'autres tractations de faites pour travailler sur une base de ce qu'on appelle une «mutual alliance», c'est-à-dire la réciprocité pour échanger des informations d'une part à d'autre mais d'une manière plus restreinte que l'accès complet aux livres.

Mme Jérôme-Forget: Qu'est-ce que ça représente pour vos membres, notamment, en termes de coûts?

M. Fragasso (Michel): Une double incorporation. Actuellement, c'est que, quand il y a une signature, quand on a une opération hors Québec ? comme c'est mon cas ? quand on signe, on s'engage à accepter ces règles-là à travers tout le pays. Alors, en conséquence, il faut recréer une nouvelle charte pour le Québec qui est indépendante de l'autre, tout recréer un système de conformité en double. Il faut tout créer en double. Puis, évidemment, c'est très onéreux. Puis les courtiers en épargne collective, comme opérations, ce sont des opérations qui travaillent avec des marges extrêmement petites. Alors, évidemment, ça pénalise beaucoup les firmes ayant leur siège social au Québec par ces doubles structures-là.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Fragasso. Les questions étant terminées, je vous remercie de votre contribution et bon dîner à tout le monde. Nous reprendrons nos travaux à 14 heures avec le Regroupement des cabinets de courtage d'assurance du Québec. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 33)

 

(Reprise à 14 h 7)

Le Président (M. Paré): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission des finances publiques est réunie afin de procéder aux auditions publiques dans le cadre de la consultation générale sur le projet de loi n° 107, Loi sur l'Agence nationale d'encadrement du secteur financier.

Donc, à l'ordre du jour cet après-midi, le Regroupement des cabinets de courtage d'assurance du Québec ? ils sont déjà des nôtres; par la suite, à 15 heures, Partenaires Cartier; à 16 heures, Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières; à 17 heures, Commission des valeurs mobilières du Québec et ajournement à 18 heures.

Donc, bienvenue au Regroupement des cabinets de courtage. Monsieur, si vous voulez présenter les gens qui vous accompagnent, s'il vous plaît. Vous avez 20 minutes pour faire votre présentation et il y aura des échanges de part et d'autre ici pour les deux partis, le parti ministériel et l'opposition, de 20 minutes chacun. Merci.

Regroupement des cabinets de courtage
d'assurance du Québec (RCCAQ)

M. Biron (Georges): Merci. Il me fait plaisir de vous présenter M. Hubert Brunet qui est le directeur général du Regroupement des cabinets de courtage d'Assurance du Québec et Mme Joan Bernard qui est la vice-présidente. Personnellement, je suis Georges Biron, président du Regroupement des cabinets de courtage.

Le Président (M. Paré): Bienvenue.

M. Biron (Georges): Merci beaucoup. Nous remercions la commission de permettre au RCCAQ de lui faire cette présentation et Mme la ministre d'être présente, ce qui est un honneur encore plus grand.

Notre mémoire vous a été distribué et nous présumons que vous l'avez tous lu. Donc, je ne me limiterai pas à élaborer sur tous les points qui y sont mentionnés, je vais surtout parler des points qui nous semblent les plus importants.

Pour nous, un organisme d'autoréglementation ? OAR ? pour les représentants en assurance de dommages, est le point le plus important parce qu'il fournit un encadrement qui est nécessaire dans le marché où nous sommes, qui est un marché où nous faisons affaire au consommateur.

Le Regroupement représente plus de 70 % des cabinets de courtage d'assurance de dommages au Québec qui totalisent au-delà de 3 500 courtiers et 9 500 employés. Il s'agit en majorité de PME qui sont disséminées un peu partout, dans la province.

Par les responsabilités vis-à-vis du public dans la vente d'assurances, particulièrement les produits qui vont aux consommateurs, comme l'assurance automobile et l'assurance habitation, vous comprendrez que l'encadrement est nécessaire, et il a existé depuis le début des années soixante qui était l'Association des courtiers d'assurances du Québec, et nous reconnaissons qu'il faut le continuer pour la protection du public.

n(14 h 10)n

L'organisme d'autoréglementation est important pour nous parce que c'est un jugement par des pairs. Donc, ce sont des individus qui savent un peu comment ça se passe, sur le plancher. Ce n'est pas juste des... Ce n'est pas des questions théoriques puis dire: C'est supposé être de même, de même. C'est du monde qui sont habitués à la pratique de ce métier-là, et c'est pour ça que l'autoréglementation, c'est très important. Et, dans ce sens-là, nous, on est favorables au projet de loi n° 107 qui prône un organisme d'autoréglementation pour les représentants en assurance de dommages.

L'assurance de dommages a un caractère très distinctif des autres industries financières, services financiers, comme l'assurance-vie, les placements, les fonds mutuels, les valeurs mobilières, parce que nous, essentiellement, ce n'est pas de la gestion du patrimoine mais de la protection que l'on vend, en cas d'accident. Le processus est très différent, les règles de comportement sont différentes, et c'est une des raisons qui nous motivent à vouloir avoir un organisme différent, ce que nous avions déjà d'ailleurs dans la loi n° 188 avec la Chambre d'assurance de dommages qui agit comme un organisme d'autoréglementation aujourd'hui, qui est reconnue dans le projet de loi. Étant donné que la Chambre d'assurance de dommages est déjà en place, connaît les enjeux et représente quand même beaucoup d'expérience dans l'industrie de l'assurance, c'est la raison pour laquelle, en ayant ces conditions réunies, nous sommes définitivement en faveur du projet de loi n° 107.

Je vais laisser notre directeur général continuer à élaborer sur certains points.

Le Président (M. Paré): M. Brunet.

M. Brunet (Hubert): Oui. Alors, comme notre président, M. Biron, vient de le dire, je pense qu'on n'a pas à vous convaincre de l'importance d'un organisme d'autoréglementation.

D'ailleurs, l'évolution au Québec, on reconnaît que le gouvernement a été très, très proactif au Québec avec la loi n° 134 et par la suite la loi n° 188 et maintenant avec le projet de loi n° 107, a été proactif dans ce domaine-là. On est la province au Québec... au Canada, je parle, où la réglementation est la mieux encadrée. On sait qu'il y a des provinces au Québec... au Canada, excusez, où il n'y en a à peu près pas, de réglementation. Alors, je pense qu'on n'a pas à vous convaincre de ça.

Le point le plus important pour nous dans ce mémoire-là... Comme M. Biron vous l'a dit, on est d'accord avec le projet de loi. La mise en garde qu'on veut faire, c'est que, oui, c'est essentiel qu'il y ait un organisme d'autoréglementation, qu'il y ait un organisme distinct pour les représentants en assurance de dommages et qu'il y ait un seul organisme de représentation pour tous les représentants en assurance de dommages. Alors, c'est une condition essentielle pour nous, parce que, nous, on dit que tous les individus ? parce qu'on parle ici d'individus qui doivent être soumis à l'organisme d'autoréglementation ? tous les individus qui veulent offrir ou distribuer des produits d'assurance doivent être soumis aux mêmes règles, à la même loi et au même organisme. C'est important pour nous parce que ces conditions-là vont faire en sorte que l'équité réglementaire et l'équité concurrentielle vont être respectées.

Nous, on dit que soustraire une catégorie de représentants serait une injustice et créerait une inéquité réglementaire et concurrentielle. On sait qu'il y a peut-être des organismes qui vont se présenter devant cette commission et qui vont invoquer des motifs ou des raisons pour justement vouloir soustraire peut-être un segment ou une classe de représentants.

On a lu les journaux, comme vous l'avez fait, et on invoque, dans certains cas, le coût, les coûts qui sont représentés ou que ça implique. Nous, on est conscients qu'il y a des coûts qui sont reliés à ça, mais je voudrais juste mentionner à cette commission que les coûts sont les mêmes pour un cabinet de courtage ou pour un assureur. Alors, si c'est cher pour un assureur, c'est cher également pour un cabinet de courtage. Et, toutes proportions gardées, les cabinets de courtage doivent défrayer les coûts à même les commissions, tandis que les assureurs défraient les coûts avec des primes. Alors, toutes proportions gardées, si on est d'accord que ça coûte cher, ça coûte cher aussi pour des représentants pour les cabinets de courtage et pour les courtiers.

Scinder également un organisme d'autoréglementation en deux, ça voudrait dire, à la limite, d'augmenter les coûts. Si un organisme se met en place et qu'on répartit les coûts parmi un plus grand nombre d'assujettis, alors les coûts, en principe, devraient être réduits pour ces assujettis-là.

On a entendu aussi, et on a lu dans les journaux, il y en a qui prétendent avoir la capacité de s'autoréglementer. Évidemment, on n'est pas d'accord avec ça. Quand on parle de protection du public, il est important qu'il y ait un organisme qui soit en place et qui ait juridiction sur tous ceux et celles qui distribuent et qui offrent de l'assurance au public, et ce ne doit être qu'un organisme unique.

Quand on parle aussi du fardeau administratif, il faut réaliser que l'assujettissement à un organisme d'autoréglementation, ça ne concerne que des individus. Alors, des individus qui détiennent un certificat les autorisant à distribuer des produits d'assurance sont assujettis à un organisme d'autoréglementation. Ça ne représente pas de fardeau additionnel pour une entreprise. Que ce soit un cabinet de courtage ou un assureur qui désire employer un individu, cet individu-là doit détenir un certificat et doit payer une cotisation à un organisme d'autoréglementation et y est assujetti. Alors, en soi, ça ne représente pas de fardeau administratif supplémentaire.

On a eu des commentaires de nos membres, aussi. Il y a de nos membres qui font de grands cabinets de courtage, qui nous ont transmis la réflexion suivante à l'effet qu'ils sont tout aussi bien structurés que certains assureurs pour s'autoréglementer et que ces cabinets-là sont prêts à suivre la règle de l'organisme d'autoréglementation unique.

Alors, comme M. Biron vous l'a mentionné, on n'est pas ici pour vous relire le mémoire qu'on vous a présenté. Il y a un autre, dans notre mémoire, un autre sujet qui est d'une certaine importance pour nous, c'est la distribution sans représentant. On peut comprendre que ça ne regarde pas, ce sujet-là, l'organisme d'autoréglementation, mais on aimerait que cette commission le prenne en considération dans ses recommandations à l'Agence, la prochaine Agence d'encadrement.

Il y a présentement beaucoup de distribution sans représentant qui s'effectue et il y a une prolifération actuellement... et on aimerait que la commission et que l'Agence jettent un coup d'oeil là-dessus parce que ça devient inquiétant. Alors, je ne veux pas élaborer, je ne veux pas aller plus loin dans ce dossier-là. Vous pourrez lire, dans le mémoire qu'on vous a remis, un peu plus en détail sur le sujet.

Le Président (M. Paré): Merci, monsieur... Est-ce que c'est complété pour votre présentation?

M. Brunet (Hubert): Oui, ça complète. Oui.

Le Président (M. Paré): Oui? Vous allez me permettre de peut-être poser la première question parce que c'est justement le dernier... Dans vos recommandations, la dernière recommandation, la quatrième recommandation que vous faites: «Mandater l'Agence pour statuer rapidement sur les cas de distribution sans représentant», voulez-vous élaborer un peu qu'est-ce... Parce que j'ai regardé dans votre mémoire puis j'ai un peu de misère à cerner le...

M. Brunet (Hubert): Bien, en fait, ce qui arrive, c'est que présentement, pour offrir ou pour distribuer, vendre un produit d'assurance, en principe ça prend un certificat qui est émis par le Bureau des services financiers.

On s'aperçoit présentement qu'il y a de l'assurance et des produits d'assurance qui sont distribués par l'entremise d'individus qui ne détiennent pas de certificat. Des exemples, il y en a dans notre mémoire. Comme exemple, il y a Canadian Tire qui, ouvertement... Si vous avez une carte de crédit Canadian Tire, vous allez recevoir dans votre état de compte un document qui dit: «Canadian Tire vous offre un programme d'assurance.» Alors, c'est eux qui l'ont écrit, là. O.K.? On vous offre un produit. À ce que je sache, Canadian Tire ne détient pas de permis, ne détient pas de certificat, et les employés de Canadian Tire ne détiennent pas de permis ou de certificat.

n(14 h 20)n

Alors, c'est le genre de pratique illégale qui se fait présentement et que nous dénonçons. Il y en a d'autres, ce n'est pas les seuls. Il y a une compagnie qui vend et qui installe les systèmes d'alarme et qui offre de façon systématique à ses clients, lorsqu'ils installent un système d'alarme, une police d'assurance habitation, et ça se fait par l'entremise d'un individu qui installe les systèmes d'alarme. Alors, ce n'est pas une personne qui détient un certificat émis par le Bureau des services financiers.

Alors, ce qu'on dit dans notre mémoire, c'est qu'il y a présentement une prolifération de ces ventes-là. Ça peut devenir attrayant pour des compagnies de cartes de crédit ou pour différentes compagnies d'inclure dans ses avantages un programme comme ça, mais, nous, ce qu'on dit, c'est que ces produits-là doivent être distribués par des représentants certifiés. Alors, c'est la mise en garde qu'on voulait faire.

Le Président (M. Paré): O.K. Merci de la précision, M. Brunet. Mme la ministre.

Mme Marois: Merci beaucoup. Alors, bonjour et bienvenue. Ça me fait plaisir de vous recevoir, cet après-midi. On a eu des discussions intenses avec certains de vos représentants. Je pense qu'on arrive avec un projet de loi qui permet de tenir compte des particularités propres à votre secteur d'intervention, que vous avez fait valoir cet après-midi, bien sûr, mais que vous aviez déjà présentées dans d'autres forums ou avec de vos partenaires.

Deux questions. D'abord, je pense qu'on convient tous que la priorité du gouvernement dans le cas présent, c'est de protéger le consommateur, hein, de s'assurer que l'intérêt public est bien préservé. Est-ce que vous croyez que la proposition que nous avons déposée en ce sens par la création d'une agence unique va nous permettre d'atteindre cet objectif-là? Ça, c'est la première question.

La seconde. Vous dites être en accord avec des organismes d'autoréglementation ? je pense que vous avez bien fait valoir le point ? mais vous semblez craindre un peu leur multiplication, moi aussi. Ha, ha, ha! Alors, je vous pose la question: De quelle manière l'Agence devrait exercer à cet égard-là sa discrétion en matière de reconnaissance d'autres organismes d'autoréglementation?

Le Président (M. Paré): M. Biron.

M. Biron (Georges): Je vais passer à la première... la première question, c'est la protection du consommateur. C'est certain que, pour nous aussi, c'est très important comme courtiers en assurance de dommages parce que toutes nos PME ne pourraient survivre si on servait mal nos clients qui sont des consommateurs.

Pourquoi que la réglementation... aujourd'hui, c'est parce qu'il y a des pressions par des compagnies ou des manufacturiers qui font de la distribution, comme les assureurs directs, pour essayer de soustraire leurs représentants à ces rigueurs, si vous voulez, aux règlements qu'ils doivent observer, à l'éthique, au code d'éthique qu'ils doivent observer en pensant que, étant donné que leurs agents sont des employés, ils sont capables de se discipliner eux autres mêmes. Mais, à ce moment-là, nous croyons que l'intérêt du public n'est pas servi de la même façon par une compagnie qui va dire: Moi, j'autodiscipline mes agents, que de les soumettre tous au même organisme de réglementation pour permettre à tous les consommateurs, peu importe le réseau qu'ils utilisent pour se procurer leur assurance de dommages, qu'ils aient toujours la même compétence en avant d'eux, le même code d'éthique et les mêmes recours en cas d'un mauvais service ou de la fausse représentation...

Donc, c'est pour ça qu'on vient à l'autre question qu'on dit: Pas une multiplication des OAR. On dit: Un seul OAR pour toute l'industrie de l'assurance de dommages. On ne voudrait pas qu'il y en ait deux ou trois. Parce que le réseau de distribution est différent; il y en a qui opèrent par des agents qui vendent leurs propres produits puis il y en a d'autres que c'est par des courtiers ou ça pourrait être par Internet ou n'importe quoi. Nous pensons que ça devrait être un seul organisme pour que, bien, la compétition soit à armes égales, que les règles du jeu soient bien établies, Et, aussi, automatiquement, le consommateur est mieux protégé et est assuré de toujours avoir un standard minimum de protection. Je ne sais pas si ça répond...

Mme Marois: Oui, oui, ça répond tout à fait à ma question.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Biron.

Mme Marois: Juste une autre par rapport à ce que vous dites dans votre mémoire, à la page 12. Vous dites: «L'article 684 ne prévoit pas de mesures transitoires dans l'hypothèse d'une révocation du statut d'une Chambre. Qu'advient-il, par exemple, d'un fonds de réserve ou d'un surplus?», etc.

En fait, à ce moment-là, si jamais ça devait arriver, c'est vraiment l'Agence qui serait l'organisme ou l'institution identifié pour prendre la relève. Mais, évidemment, ce n'est pas prévu, là, qu'on fasse comme ça, mais c'est parce que vous soulevez la question. Il dit: «Il nous semble préférable qu'un pouvoir aussi important soit attribué à une institution qui est établie par le législateur lui-même.» Pour nous, ça allait de soi que, si jamais un tel événement se produisait, c'est l'Agence qui prendrait la relève.

Le Président (M. Paré): M. Brunet.

M. Brunet (Hubert): Oui. En fait, cette remarque-là, c'est qu'on essaie de faire la démonstration que c'est une condition essentielle à ce qu'il y ait un organisme d'autoréglementation, qu'il y en ait un seul. Nous, on privilégie la Chambre parce que la Chambre est déjà en place. On ne veut pas réinventer ce qui existe déjà.

Le danger qu'on voyait là, c'est qu'on ne voulait pas en fait que, si jamais, pour une raison ou pour une autre, la Chambre devait disparaître, on ne voulait pas qu'elle soit remplacée par deux organismes d'autoréglementation.

Mme Marois: ...

M. Brunet (Hubert): Parce que, tantôt, vous parliez de multiplication. Nous, on dit: Tous ceux qui vendent des produits semblables devraient être régis par le même organisme.

Mme Marois: C'est ça. Bon. Parfait. Ça répond à mes questions. Je vous remercie. Ça va pour l'instant, M. le Président.

Le Président (M. Paré): Merci, Mme la ministre. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Jérôme-Forget: Je ne pensais pas que le 20 minutes était pris. D'abord, bienvenue. Moi, vous avez mentionné justement la distribution sans représentant. Pour un peu poursuivre la question qu'a soulevée le président de notre commission, qu'est-ce que vous faites quand tous les services, désormais, sont offerts par Internet? Comment vous pouvez contrôler la distribution sans représentant alors que les gens sont capables d'obtenir des produits, ici ou ailleurs, simplement en ouvrant leur ordinateur? Est-ce qu'il n'y a pas un côté, là, démodé de dire: Autant où je stocke l'idée qu'il faut que les gens soient bien formés, il semblerait que la tendance, c'est qu'on va vers l'achat souvent de produits, électroniquement.

Le Président (M. Paré): M. Brunet.

M. Brunet (Hubert): Oui, on est d'accord avec vous. Par contre, là, on parle d'une loi, un projet de loi sur l'encadrement du secteur financier. On est d'accord qu'il commence à y avoir, dans le domaine de l'assurance, des transactions qui s'effectuent sur Internet. Par contre, je peux facilement vous avouer qu'il y a très peu de transactions qui s'effectuent sans l'intervention humaine. C'est-à-dire que, l'assurance, ce n'est pas un produit, c'est un service, et on voit rarement une transaction qui va s'effectuer sur l'Internet sans l'intervention d'un représentant qui doit donner des conseils à des individus, avant la conclusion d'un contrat. Alors, dans ce cas-là, l'intervention qu'on fait, c'est que, à tout le moins, ces individus-là, qui prodiguent des conseils, devraient détenir des certificats.

Et si je reviens à la question de Mme la ministre tantôt, quand elle parlait: Est-ce que le projet de loi vous satisfait quant à la protection? il y a deux éléments, hein, dans ce projet de loi là. Il y a l'autoréglementation qui vise des individus justement qui détiennent des certificats, et, justement, il y a l'Agence qui émet les certificats à des entreprises ou à des cabinets. Et c'est pour ça qu'on disait dans notre mémoire que l'Agence devrait être saisie de ce problème-là. Ce n'est pas... Ça, c'est une pratique, O.K. d'assurance. Alors, ça ne relève pas, là, de l'autoréglementation de l'individu qui pratique dans ce domaine-là. Alors, nous, on considère ça comme une pratique illégale. Ce sont des corporations, ce sont des compagnies qui instaurent ces régimes-là, ces pratiques-là, et, à ce moment-là, c'est l'Agence qui devrait s'assurer que ça ne se fasse pas.

n(14 h 30)n

Mme Jérôme-Forget: ...également en tête... Par exemple, il y a des cartes de crédit qui vous donnent automatiquement de l'assurance voyage. Est-ce que ça, vous incluez ça dans le côté qui devrait être illégal?

M. Brunet (Hubert): C'est déjà prévu dans la loi n° 188. Il y a l'assurance voyage, c'est prévu que ça peut être... Ça fait partie, là, de ce qu'on appelle la distribution sans représentant, l'assurance crédit, l'assurance location de véhicules à court terme. Alors, c'est déjà prévu dans la loi. Ça, on reconnaît ça, que les agences de voyages peuvent vendre de l'assurance voyage, que des comptoirs de location de véhicules automobiles peuvent inclure l'assurance du véhicule à court terme pour une location à court terme. Ça, c'est déjà prévu. Mais, lorsque ça déborde le cadre de la loi n° 188, on aimerait que quelqu'un intervienne et dise: Bien, là, là, ça dépasse le cadre de la loi, et vous devez respecter la loi.

Le Président (M. Paré): Merci.

Mme Jérôme-Forget: D'accord. Est-ce que vous avez des questions?

Le Président (M. Paré): Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, c'est terminé?

Mme Jérôme-Forget: Moi, je n'ai plus de questions.

Le Président (M. Paré): De ce côté-ci, il y avait une question. M. le député de Duplessis.

M. Duguay: Merci beaucoup, M. le Président. Moi également, je désire vous souhaiter la bienvenue à cette commission. Et c'est sûr que votre mémoire, on a eu l'occasion de le regarder, et on a glissé un peu sur la loi n° 188. Moi, j'ai une toute petite question: Est-ce que, dans son ensemble, la loi n° 188 vous convient comme elle est?

M. Biron (Georges): Oui, dans son ensemble, on n'a pas de problèmes. Il y a quelques articles, peut-être, comme l'article 28 qu'on parlait de faire une modification un peu, là, mais, pour le reste, on a appris à vivre avec.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Biron (Georges): Non, mais on ne pense pas qu'ici c'est une commission pour changer la loi n° 188.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Biron. Mme la ministre.

Mme Marois: Je veux juste ajouter une chose. Par rapport à d'autres problèmes qui pourraient être soulevés, comme des biens qui seraient assurés sans avoir à être assujettis aux organismes d'autoréglementation ou le travail de ces gens-là pour des biens particuliers, toutes ces questions, évidemment, elles seront éventuellement abordées, mais, comme je l'ai dit depuis ce matin, dans un deuxième temps, au sens où, pour l'instant, ce que l'on souhaite, c'est réorganiser les organismes de contrôle, de supervision, de conseil, de telle sorte qu'on crée cette Agence nationale d'encadrement qui va continuer à appliquer les lois qui sont déjà là, n'est-ce pas? Mais, éventuellement, dans un second temps, une fois cette institution mise en place, on devrait travailler à la révision d'un certain nombre de nos lois pour les améliorer, les bonifier et nous assurer aussi qu'il n'y a pas ? je cherche le terme français, là ? qu'il n'y a pas de superposition d'une loi par rapport à une autre et de lacunes ? ça, c'est sûr ? à corriger.

Alors, dans un premier temps, nous constituons l'Agence. On va écouter tout ce que les gens ont à nous dire, évidemment, en commission pour bonifier déjà le projet qui est devant nous. Cette loi adoptée et cette Agence constituée, on pourra passer à une autre étape qui nous amènera à réviser sûrement un certain nombre de lois. Mais, pour l'instant, on ne retouche pas aux lois et à leur contenu pour ce qui est des protections actuelles. Les seuls changements qu'on fait, c'est les changements de concordance, là, compte tenu qu'on retrouve les institutions dans une même organisation. Alors moi, ça va, M. le Président.

Le Président (M. Paré): M. Biron.

M. Biron (Georges); On vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Paré): Merci de votre contribution à cette commission puis...

Mme Marois: Je pense que madame voulait dire quelques mots.

Le Président (M. Paré): Oui, Mme Bernard, le mot de la fin.

Mme Bernard (Joan): Puis, juste en réponse à Mme Marois, on ne veut pas que vous modifiiez 188, sauf que vous savez qu'on travaille très fort sur la loi n° 13. Puis, plus souvent qu'à notre tour, on est venu ici, on veut juste qu'on fasse respecter des normes de distribution.

Mme Marois: D'accord. J'ai bien compris.

Le Président (M. Paré): Merci, Mme Bernard. Merci, M. Biron. Merci, M. Brunet. J'inviterais le groupe suivant, c'est-à-dire Partenaires Cartier, à s'approcher, s'il vous plaît.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Paré): Bonjour, M. Dumont. J'aimerais que vous nous présentiez les gens qui vous accompagnent. Vous aurez, comme les autres groupes, 20 minutes pour votre présentation et 20 minutes, pour les gens de la commission, échanger avec vous de part et d'autre. Merci.

Partenaires Cartier

M. Dumont (Jean): Merci, M. le Président, merci, Mme la ministre d'offrir à Partenaires Cartier l'opportunité, là, de donner nos opinions, là, sur le projet n° 107. C'est bien moi, je suis Jean Dumont. Je suis président du conseil d'administration. À ma gauche, Richard Boivin, qui est le vice-président aux affaires corporatives de la société au Québec; et, à ma droite, Jean Morissette, qui est le président de la société au Québec.

Le Président (M. Paré): Bienvenue, messieurs.

M. Dumont (Jean): Merci. Notre société, très simplement, Partenaires Cartier, a débuté ses activités à la fin de 1989 par une suite d'acquisitions de six entreprises dans le domaine du placement, six entreprises québécoises et canadiennes. Sur une période de neuf mois, des investissements totaux d'environ 140 millions ont été faits pour l'achat de ces sociétés-là, et l'objectif était très simple, c'est de faire de cette entreprise québécoise un chef de file dans les services financiers québécois et canadiens. Et c'est le défi qu'on s'est donné, puis on croit qu'aujourd'hui nous sommes sur la bonne voie, car aujourd'hui nous sommes le deuxième distributeur en fonds d'investissement au Canada, l'un des plus importants courtiers en assurance encore là et au Canada et un joueur de plus en plus présent dans le secteur des valeurs mobilières où nous regroupons 400 individus qui sont courtiers en valeurs mobilières chez nous.

Juste pour vous donner une idée de grandeur, encore là, de l'étendue de l'opération, nos revenus sont de l'ordre de 225 millions par année. Nous regroupons dans... Quand on fait le compte de nos clients, nous regroupons 700 000 clients à travers le Canada qui ont des actifs totaux de 17 milliards de dollars en valeurs mobilières et en fonds d'investissement, et nos représentants à travers le Canada totalisent 4 000 individus. Donc, vous comprenez, par cette courte description là, qu'on a un intérêt à ce que l'encadrement des services financiers au Québec soit très efficace évidemment, et, aujourd'hui, on veut focusser sur cette efficacité québécoise. Bien qu'on va faire la remarque qu'on aimerait bien que ça soit harmonisé avec le reste du Canada, mais notre intérêt, c'est une harmonisation au Québec. Et nous favorisons la projection évidemment, là, des intérêts, là, des épargnants dans cet environnement réglementaire, là, qu'on voudrait le plus simple possible pour ne pas rendre trop complexes les activités de nos intermédiaires.

Je vais demander à Richard de faire les commentaires particuliers, et Jean Morissette, moi-même et Richard seront à votre disposition, là, pour répondre à des questions.

Le Président (M. Paré): M. Boivin.

M. Boivin (Richard): M. le Président, en fait, vous devez savoir que Partenaires Cartier, de par le mémoire qui a été déposé, appuie le projet de loi dans sa démarche. On appuie le gouvernement dans cette démarche de tenter d'atteindre une harmonisation plus grande du système d'encadrement financier, de faire en sorte que ce soit plus efficace et plus facile pour le consommateur de se retrouver dans cet encadrement et, pour les distributeurs, les cabinets comme nous, de faire en sorte de travailler plus aisément dans le quotidien.

Nous avons présenté sept commentaires particuliers qui sont des commentaires plus techniques dans le sens d'essayer de voir si on ne pouvait pas encore améliorer un projet de loi qui, quant à nous, fait déjà un grand effort pour simplifier l'organisation, la surveillance des activités des institutions financières et des intermédiaires de marché au Québec.

n(14 h 40)n

Le premier point sur lequel j'aimerais revenir, c'est celui de la superagence. Je dois vous dire que nous ne sommes pas nécessairement en désaccord avec une superstructure, et on comprend l'objectif qui est de faire en sorte que tous les intervenants se regroupent à l'intérieur d'une même organisation de façon à ce qu'on puisse harmoniser davantage les réglementations, les façons de faire, les manières d'intervenir auprès des assujettis.

Ce que nous craignons par ailleurs, c'est que la réforme vise rapidement trop haut. Nous craignons que le mandat... que l'objectif soit assez difficile à réaliser à court terme et nous aurions plutôt préféré que le gouvernement y aille peut-être avec deux étapes, c'est-à-dire, dans un premier temps, de fusionner ensemble des organisations, des organismes ou des missions de ces organismes qui ont, si vous voulez, la même finalité. Donc, on aurait préféré voir ici les représentations que nous avions faites auprès du groupe de travail Martineau de spécialiser, dans un premier temps, deux agences, une qui aurait comme mandat de voir à réglementer et encadrer la solvabilité des institutions financières et une autre qui, à ce moment-ci, verrait à encadrer la distribution, donc essentiellement les intermédiaires de marché, de manière, donc, à garder les spécialités qu'on a actuellement dans toutes ces organisations-là, faire une réforme qui serait peut-être plus facile à réaliser à court terme, et quitte à voir, dans cinq ans ou dans une période de temps qui pourrait être déterminée autrement, s'il est toujours possible et opportun de mettre sous un même chapeau et la solvabilité et la distribution. Il pourrait être créé un comité de liaison entre les deux agences, et ce comité de liaison pourrait avoir, entre autres, comme mission, au bout de cinq ans, de faire rapport à l'Assemblée nationale pour voir l'opportunité, toujours, de fusionner toutes les organisations sous le même chapeau.

Par ailleurs, on l'a vu ce matin, il y a des débats importants sur la structure elle-même, à savoir est-ce qu'elle doit être collégiale, est-ce qu'elle doit être dirigée par un seul individu. Chez Partenaires Cartier, nous n'avons pas d'objection et nous ne voyons pas de problème à ce que l'organisme soit dirigé par un seul individu plutôt qu'un conseil d'administration. C'est deux possibilités, c'est deux structures qu'on rencontre ici et là, tant au Canada que dans le monde, et je pense qu'à ce moment-ci c'est un choix qui peut être fait. Nous pensons qu'une structure dirigée par un seul individu, dans des situations d'urgence, peut peut-être permettre une meilleure efficacité. On voit plus facilement un organisme collégial quand vient le temps d'élaborer les normes, de réglementer, mais, quand vient le temps d'intervenir pour arrêter des activités illégales, saisir les actifs d'institutions financières en difficulté, peut-être qu'un organisme chapeauté par un seul individu peut être plus efficace. Mais, là-dessus, nous laissons à l'Assemblée nationale le choix de déterminer le modèle. Mais tout simplement pour vous dire que nous sommes à l'aise avec celui qui est présenté, avec un directeur général.

Les organismes d'autoréglementation. D'emblée, nous partageons les conclusions du projet de loi, à savoir de reconnaître immédiatement les deux chambres actuelles comme organismes d'autoréglementation. Nous ne voulons pas dire que tout est parfait actuellement, mais nous pensons qu'il est nécessaire d'avoir une continuité dans ce qui s'est fait et dans ce qu'on veut faire. Quand on a vécu le changement de loi en 1999 avec la loi n° 188, ça a été compliqué avant que les organismes s'installent, sachent exactement comment se gouverner eux-mêmes et communiquent, en fait, avec les assujettis, et qu'on soit tous sur la même longueur d'onde. Je vous dirais qu'il y a eu beaucoup d'améliorations et qu'actuellement les relations vont bien, et donc je pense qu'il serait néfaste de recréer ce qui existe actuellement. Et nous sommes donc d'accord avec la reconnaissance automatique des chambres telle que vous l'avez prévue dans le projet de loi.

Toutefois, nous constatons qu'un organisme qui a une importance capitale au Québec... Mon président l'a dit, nous avons des activités en valeurs mobilières. Donc, nous sommes membres de l'ACCOVAM. Nous constatons que, dans le projet de loi actuel, l'ACCOVAM n'est pas automatiquement reconnue. Alors, nous craignons que ce fait crée un vide juridique entre le moment où l'Agence sera créée et le moment où l'ACCOVAM pourra être reconnue. Nous nous demandons qu'est-ce qui va arriver des situations présentes: la réglementation de l'ACCOVAM qui s'applique actuellement, les dossiers de plaintes actuellement sous enquête, sous étude, des auditions qui sont pendantes devant l'ACCOVAM. Alors, nous craignons que la façon dont le projet est fait, que ça crée potentiellement un vide juridique.

Nous aurions préféré que le projet de loi reconnaisse l'ACCOVAM pour une certaine période de temps ? mettons, six mois ? quitte à laisser à l'Agence et à l'ACCOVAM le soin de négocier des ententes qui permettraient une continuité dans la supervision des assujettis. Ce qu'on constate également à cet égard dans le projet de loi, c'est que la loi ne dit pas exactement qu'est-ce qui arrive du jour au lendemain, une fois que l'Agence décide de retirer son agrément à un organisme d'autoréglementation. Alors, tous les dossiers en cours, la loi n'est pas explicite. Est-ce que c'est un pouvoir discrétionnaire qui est laissé au président-directeur général? On n'en sait rien. Mais je pense qu'il y aurait avantage à préciser davantage comment les dossiers en cours vont être traités, soit par l'Agence ou par une autre autorité, un autre organisme d'autoréglementation éventuellement.

Troisième point que nous voulons aborder, c'est la création du Bureau de révision. Alors, nous sommes d'accord avec la création du Bureau de révision tel que vous l'avez prévu dans le projet de loi. Ce que nous remarquons par ailleurs, notre lecture nous fait croire et comprendre que ce Bureau de révision ne sera compétent qu'à l'égard des décisions qui vont relever de la Loi sur les valeurs mobilières, donc possiblement de tout pouvoir délégué en vertu de la Loi sur les valeurs mobilières ou des décisions que pourra éventuellement prendre l'ACCOVAM si elle est reconnue. Alors, ce qu'on constate, c'est qu'on le fait du côté des valeurs mobilières et on ne le prévoit pas du côté de l'épargne collective ou du côté des représentants en assurance.

Ce qu'on veut communiquer ici à la commission parlementaire, c'est que si vous introduisez des mécanismes dans la loi au profit du consommateur, nous sommes entièrement d'accord avec cette approche-là, mais nous aimerions que tous les secteurs d'activité soient traités de la même façon et que, donc, si vous créez un bureau de révision en valeurs mobilières, qu'il soit aussi compétent pour le domaine de l'épargne collective et éventuellement de l'assurance, parce que, actuellement, on voit mal comment le consommateur va s'y retrouver. S'il est servi par un conseiller en placements, il va avoir un certain recours; s'il est servi par un représentant en épargne collective, ça va être un autre recours. Éventuellement, il va avoir accès à la Cour du Québec; dans un autre cas, Bureau de révision et, par la suite, la Cour du Québec. Ça crée des situations qui sont difficiles pour le consommateur. Ça crée des situations qui sont compliquées pour les assujettis et les cabinets et les représentants.

Dans le même ordre d'idées, vous créez un comité de révision, comité de révision qui aura comme fonction, à l'intérieur de la loi n° 188, de vérifier les motifs ou d'entendre en révision les plaintes que le syndic d'une des chambres pourra ne pas avoir traitées, aura décidé de ne pas regarder, de ne pas traiter. Nous sommes entièrement d'accord avec la création de ce comité de révision, mais, encore là, nous nous demandons pourquoi on ne fait pas la même chose, on ne crée pas le même type de pouvoir et de droit du côté des valeurs mobilières pour un consommateur qui est servi par un conseiller en placements.

n(14 h 50)n

Notre cinquième point est celui qui porte sur le traitement des plaintes. Nous sommes entièrement d'accord avec les amendements qui sont faits dans les différentes lois sectorielles pour gérer les plaintes auprès du consommateur. Nous nous interrogeons cependant sur une disposition que l'on retrouve dans toutes les lois sectorielles. Essentiellement, ce que ça dit, c'est que «l'Agence peut, avec l'autorisation du gouvernement, conclure avec tout organisme ou personne morale une entente pour l'examen des plaintes formulées par des personnes insatisfaites de leur conclusion». Nous nous interrogeons sur l'opportunité d'une telle disposition. Il va y avoir une agence, il va y avoir un bureau de révision en valeurs mobilières, un comité de révision du côté de l'épargne collective, il va y avoir des AOR qui vont avoir aussi des pouvoirs d'entendre des plaintes. Nous nous demandons à qui cette disposition s'adresse, quels genres d'organismes additionnels pourraient éventuellement entendre les plaintes et nous craignons que, si c'est délégué à des organismes tiers qui ne sont ni AOR ni à l'intérieur de la constitution même de l'Agence, que ça crée de la distorsion, que ça crée des façons différentes de travailler selon les différents secteurs d'activité. Et, encore là, nous pensons que le projet de loi, malheureusement, manque un peu à l'objectif d'harmonisation et de simplification.

Sixième point que nous voulons aborder, c'est le pouvoir de l'Agence d'émettre des instructions générales et des directives. Nous constatons que les différentes lois sectorielles en assurance, la Loi sur les sociétés de fiducie et les sociétés d'épargne sont modifiées pour permettre à l'Agence d'émettre des directives. On dit que ces directives sont indicatives de l'exercice des pouvoirs discrétionnaires conférés selon les différentes lois. On constate également que la Commission des valeurs mobilières, déjà, a un pouvoir d'instructions générales et que ces instructions servent à définir les exigences découlant des éléments de la mission de la Commission, lesquels vont revenir, ces pouvoirs-là, éventuellement à l'Agence. Et nous sommes entièrement d'accord avec une approche de directives ou d'instructions générales. Ce que nous aimerions, c'est que le gouvernement, c'est que le Parlement, c'est que l'Assemblée nationale, autant que faire se peut, utilise les mêmes termes pour définir les mêmes pouvoirs dans un premier temps, parce que, on le sait, dès le moment où les lois ne sont pas écrites de la même façon pour définir les mêmes pouvoirs, souvent de savants juristes vont trouver à faire des interprétations qui vont nous emmener peut-être dans des directions qu'on n'avait même pas imaginées.

On constate par ailleurs que ce pouvoir de directives, actuellement, n'est pas donné à l'Agence en ce qui concerne la loi n° 188. À notre avis, c'est une lacune. On sait qu'actuellement déjà le Bureau des services financiers émet des directives sans avoir formellement ce pouvoir encadré dans sa loi constitutive. Un pouvoir de directives d'un organisme alors que le pouvoir n'est pas expressément conféré dans une loi, on le sait, ça crée des difficultés d'application. C'est plus des recommandations que des directives. Ça crée de l'inéquité parce que certains assujettis vont les appliquer et d'autres, peut-être, ne le feront pas. Et possiblement que ces directives ne seront pas exécutoires. Nous préférerions que l'Agence, dans toutes ses missions, quel que soit le secteur d'activité qui est sous sa juridiction... que l'Agence puisse émettre des directives ou des instructions générales si vous préférez.

Enfin, notre dernier point veut traiter des mécanismes d'harmonisation des différentes règles. L'objectif du projet de loi est de trouver à simplifier l'organisation du travail des intermédiaires, l'organisation du travail des cabinets, l'organisation du travail des institutions financières, donner au consommateur de meilleurs véhicules pour faire valoir ses droits, des appels qui sont simples, des appels qui vont toujours être logés, autant que faire se peut, de la même façon selon qu'il aura été servi par un représentant d'assurance, un conseiller en placements ou un représentant à l'épargne collective, peu importe.

Donc, il est très important que l'Agence ait un pouvoir clair pour harmoniser les règles qui vont s'appliquer. Et, avec la prolifération possible des organismes d'autoréglementation, il est à craindre que ce qui est peut-être simple aujourd'hui dans certains secteurs devienne peut-être plus compliqué, donc, encore là, qu'on manque les objectifs de la réforme. Il faut donc s'assurer que l'Agence ou que l'organisme qui sera reconnu puisse, dans des cas simples d'harmonisation d'écriture de textes, de règlements ou de normes, ou de lignes directrices d'un organisme versus un autre... que l'Agence puisse facilement faire en sorte qu'on dise toujours la même chose quand on veut viser les mêmes effets.

Et c'est sûr que l'article 72, actuellement, donne à l'Agence le pouvoir de forcer les organismes d'autoréglementation à modifier leurs règlements, à modifier leurs normes, mais on pense que, même à l'intérieur des règlements actuels et des lois actuelles sectorielles, sans faire de réforme, mais juste s'assurer que, dans les différents secteurs d'activité, quand on vise le même objectif, on le dit de la même façon, donc que l'Agence, ou que le gouvernement par un pouvoir réglementaire, ou que le comité de transition puisse faire en sorte que, dans la mesure du possible, quand on vise un effet, quel que soit le secteur d'activité, si c'est le même effet qu'on veut, qu'on le dise de la même façon. Autrement, ça complique les choses, ça complique les opérations commerciales, et on vit constamment des situations où on peut faire une chose d'une façon et on ne peut pas la faire d'une autre. Mais, en réalité, tout serait permis ou tout serait permis de la même façon, mais tout simplement le problème provient du fait qu'on doit travailler avec des textes qui n'ont pas été écrits par les mêmes personnes aux mêmes époques.

Alors, M. le Président, je terminerais ici mes remarques administratives ou techniques. Et, si on a encore quelques minutes, peut-être que M. Morissette pourrait rajouter.

Le Président (M. Paré): C'est malheureusement fini. Donc, par les questions peut-être, Mme la... Je vous donne la parole, Mme la ministre.

Mme Marois: Alors, merci beaucoup, M. le Président. Je vais effectivement procéder comme je l'ai fait tout à l'heure avec l'organisme qui vous a précédés. Si vous voulez ajouter quelques remarques pour terminer votre présentation, je vous permets de le faire sur mon temps.

M. Morissette (Jean): C'est bien aimable, on apprécie, Mme la ministre.

Le Président (M. Paré): Allez-y.

M. Morissette (Jean): M. le Président, je serai très bref, donc je n'utiliserai pas beaucoup de votre temps.

Mme Marois: C'est le nôtre de toute façon. Le vôtre et le nôtre.

M. Morissette (Jean): Fantastique! Je pense que, pour nous, le projet de loi n° 107, c'est une opportunité majeure de franchir une autre étape dans le développement d'une approche cohérente pour la réglementation, l'encadrement de tout ce qui est intermédiation de marché, intermédiation financière. Et, malgré les grands progrès qui ont été réalisés, là, dans tous les domaines au cours des dernières années par nos organismes, il y a encore du chemin à faire. Mes collègues, tantôt, faisaient état, là, des différences qui existent entre chaque ligne d'affaires quand on pratique la même activité, et on pense que le projet de loi, dans sa forme actuelle, est de nature à nous permettre de progresser encore plus pour s'assurer que les cabinets, les courtiers, les intermédiaires, les clients vont être servis et opérés de la même façon quelle que soit la ligne d'affaires. Et, je pense que c'est le point que je tiens à faire valoir, c'est une problématique réelle dans l'exercice quotidien de nos pratiques. Dans les solutions qu'on doit offrir à nos clients, on utilise les produits d'assurance, de valeurs mobilières, de placement, et ces produits-là ne peuvent pas être distribués avec les mêmes règles et les mêmes façons partout, et ça pose problème.

L'on on pense aussi que d'arriver à une plus grande harmonisation à l'intérieur de notre marché québécois, ça pourra aussi éventuellement faciliter l'harmonisation avec les autres réglementations auxquelles on doit faire face dans les autres marchés canadiens. Et ça aussi, pour une organisation qui opère à travers toutes les provinces canadiennes, c'est une problématique majeure. Plusieurs de nos courtiers ont des permis pas seulement au Québec, ils en ont en Ontario, et d'avoir de multiples organismes de chaque côté des provinces et puis à l'intérieur d'une province, c'est un coût et c'est aussi, je pense, une situation qui ne dessert pas nécessairement le client.

Donc, on vous encourage fortement à progresser avec le projet de loi. Dans sa forme principale, il nous convient, et on n'hésite pas à vous inciter, s'il le faut, à utiliser une stratégie étapiste si ça devenait trop compliqué de tout faire en même temps. On pense qu'un début d'harmonisation est préférable à la situation actuelle. Je vous remercie.

Le Président (M. Paré): Merci.

M. Dumont (Jean): ...Sartre a déjà dit, fait un commentaire qui disait: Choisir son confesseur, c'est choisir sa réponse. Nous, ce qu'on fait, ça fait depuis deux ans qu'on essaie de consolider un très grand nombre d'entreprises, et on a décidé de prendre une forme étapiste, d'adopter une forme étapiste et, dans ce contexte-là de notre vécu, on trouve que ça a bien du bon sens.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Dumont.

Mme Marois: ...que votre expérience peut être pertinente et utile. Bien, je vous remercie beaucoup de votre présentation, c'est très intéressant. Et je vous remercie aussi de vos propos plus généraux justement concernant le fait qu'il est important de progresser. Rome ne s'est pas construite en un jour, je dirais, je rappellerais. Et, effectivement, dans le fond, ce que vous soulevez comme questions, beaucoup des questions que vous soulevez sont des éléments d'harmonisation des lois qui sont administrées par l'une ou l'autre des institutions à l'heure actuelle, et vous avez totalement raison dans beaucoup de cas ou d'éléments que vous nous apportez où on devrait traiter de la même façon le consommateur, peu importe l'institution à laquelle il a à s'adresser, compte tenu que c'est un produit financier, par exemple, ou que les règles générales s'appliquant devraient être les mêmes.

n(15 heures)n

Et je ne veux pas reprendre, là, l'une ou l'autre des propositions que vous nous faites mais qui est en ce sens-là. Vous allez plus loin que ce que l'on fait maintenant, mais c'est là qu'on veut aller éventuellement, cependant. Parce que nous pensons que non seulement, dans le sens où vous l'avez dit, on aura des gains d'efficacité et de productivité, mais on aura des gains pour améliorer les services aux citoyens, aux consommateurs, dans le cas d'entreprises, ou à vous-mêmes comme actionnaires, évidemment. Et je pense que, là, tout ce qu'on peut faire pour améliorer cette situation, tant mieux, et on le fera. Bon.

Et je comprends que vous souhaitiez que nous harmonisions encore davantage que ce qui est proposé ici. Mais, comme je vous le mentionnais, c'est notre intention, mais on ne peut pas tout faire en même temps. Alors, on commence par constituer l'Agence. Et son premier mandat, une fois constituée, ce sera d'harmoniser le plus possible ce qui doit s'harmoniser, sans faire perdre ? et ça, c'est le défi, je pense, qui va devoir être relevé par l'Agence ? les spécifiques propres à chacune des responsabilités confiées à l'Agence.

On a eu, ce matin, des gens qui nous ont dit: Bon, bien, la Commission des valeurs mobilières, il ne faudrait pas y toucher puis il ne faudrait pas rien changer là; ou il faudrait par ailleurs s'assurer que l'expertise accumulée à un endroit ne soit pas éparpillée dans l'Agence et perdue. On est d'accord avec ça aussi. Pas d'accord avec le fait qu'on conserve chaque institution, c'est ce qu'on veut régler comme problème, bon. Mais on est d'accord que l'expertise ne se perde pas et que les spécifiques et les spécialités propres puissent être conservés. Donc, dans un premier temps, on ne touche pas aux lois et règlements, sauf là où il y a vraiment incompatibilité complète.

Second temps, on va aborder toutes les questions que vous avez soulevées, particulièrement vous, monsieur, dans votre présentation. Et je crois que le principal défi va être donc celui-là: conserver les spécifiques, harmoniser et faire en sorte qu'on ait des gains d'efficacité pour mieux servir nos concitoyens, pour mieux répondre aux besoins des entreprises. Bon.

Maintenant, je viens avec des questions un petit peu plus concrètes et précises. Ah oui! peut-être un autre commentaire ? je pensais à ça en même temps que je pensais à ma question ? sur l'ACCOVAM; en fait, il y aura un an de transition, hein? La loi prévoit qu'on aura un comité d'implantation, si on veut. Il y aura donc un an de transition. Et, moi, ce que je pense ? et c'est comme ça qu'on le voit ? s'il faut préciser, on le précisera.

C'est que, d'abord, un, les discussions avec l'ACCOVAM devraient se continuer, se finaliser, et les tâches, et les responsabilités et les activités devraient pouvoir continuer de se faire sans changement. En tout cas, c'est comme ça que, moi, j'interprète ? je me tourne vers mes spécialistes, là ? mais c'est la perspective. S'il faut le préciser, moi, je suis prête à ce qu'on le regarde dans ce sens-là. Vous vouliez commenter sur ça, puis je vais revenir ensuite sur une autre question qui est plus sur votre proposition originale parce qu'elle n'est pas semblable à aucune autre.

Le Président (M. Paré): M. Boivin.

M. Boivin (Richard): Oui, M. le Président. En fait, Mme la ministre, je suis bien content d'entendre vos commentaires sur les propos que nous avons tenus. Notre crainte est que, tel que libellé actuellement, si jamais... Je comprends très bien que le projet de loi va prendre facilement un an avant d'être mis en place, que l'Agence soit constituée et que, d'ici là, on peut espérer que l'ACCOVAM sera reconnue. Sauf que l'ACCOVAM a des activités au Québec depuis plusieurs années ? au moins depuis 1983 et même bien avant ? et elle n'a jamais été formellement reconnue par la Commission des valeurs mobilières.

Donc, tel que le projet de loi est présentement présenté, il y a un danger que, si jamais les discussions perdurent et qu'il y a des problèmes techniques, on se retrouve à une date donnée où l'ACCOVAM n'aura plus aucun pouvoir au Québec. Et, que ce soit l'ACCOVAM ou tout autre organisme d'autoréglementation qui a des activités actuellement au Québec, je pense qu'il faut que le projet de loi prévoie exactement qu'est-ce qui va arriver si jamais ces organismes-là cessaient d'avoir le droit de réglementer et d'avoir des activités de surveillance et de contrôle au Québec.

Mme Marois: Alors, on prend bonne note de votre préoccupation, qui est aussi la nôtre, et on va s'assurer de voir, s'il y a lieu, d'introduire des éléments dans la loi pour que cette éventualité ne se présente pas.

Bon. Maintenant, je reviens à une question, là, plus concrète par rapport à votre recommandation. En fait, vous recommandez dans votre proposition d'intégrer la partie prudentielle des valeurs mobilières dans un organisme qui aurait également, si je comprends bien, là, la responsabilité de l'encadrement des institutions financières. Or, certains considèrent, dans les discussions qu'on a eues jusqu'à maintenant, que ces fonctions sont conflictuelles. Qu'en pensez-vous? Un. Puisque vous en faites la proposition, j'imagine que vous y avez réfléchi, bien sûr.

Par ailleurs, je décode de vos propos ou de votre présentation que votre véritable réserve par rapport à l'organisme que l'on crée, qui est cette Agence, tient surtout à l'ampleur de la tâche à réaliser d'un coup plutôt qu'au fond même, au fondement même, qui serait pour vous acceptable, que la constitution de cette organisation. Je vous pose la question.

Le Président (M. Paré): M. Boivin.

M. Boivin (Richard): Effectivement. En fait, notre crainte, c'est que le modèle soit un beau modèle théorique mais qu'en pratique il soit difficile de le réaliser. Une agence qui va avoir à la fois à surveiller des institutions financières dans leur capacité financière de répondre à leurs obligations, d'appliquer des règles prudentielles, comme vous dites, et, d'un autre côté, la même Agence va avoir également à superviser le volet des ventes, le volet de la distribution, le volet de la déontologie des intermédiaires auprès du consommateur. Il peut arriver que, dans des périodes difficiles, les priorités soient très compliquées à établir et qu'un secteur soit temporairement défavorisé par rapport à un autre.

On veut créer aussi une plus grande harmonisation, une plus grande synergie autour de la table. Sauf que, le mandat étant tellement large, je pense que le défi va être énorme. Ça peut marcher, ça peut très bien réussir, comme ça peut être un flop monumental, si les gens nommés ne réalisent pas, ne sont pas capables d'établir cette synergie-là.

Ce qu'on pense, c'est qu'à court terme, si on met ensemble des gens qui ont la même expertise, les mêmes préoccupations, l'encadrement financier, déterminer des normes prudentielles de saines pratiques financières, de saines pratiques commerciales, c'est plus facile à réaliser du jour au lendemain que de tout faire en même temps. De l'autre côté, si on spécialise des gens qui sont des spécialistes de la déontologie, de l'inspection, de l'enquête, de traiter des plaintes du consommateur par rapport à la distribution, par rapport aux ventes, cela peut être plus facile à réaliser.

Et, d'ailleurs, si je prends comme exemple un organisme d'autoréglementation, avec lequel on doit composer actuellement, qui est encore l'ACCOVAM, l'ACCOVAM a, à l'intérieur de son organisation, deux volets de conformité. Elle a le volet de conformité des opérations, les règles prudentielles de capital, volet de conformité des ventes qui est essentiellement comment les cabinets et les conseillers en placements se gouvernent, agissent et servent correctement ou pas les consommateurs. Donc, nous pensons qu'il serait plus facile, à court terme, de réaliser la fusion de deux agences spécialisées.

Le comité de liaison pourrait très bien faire en sorte que les zones grises... qu'un guichet unique, par exemple, pour le consommateur qui veut déposer une plainte... que ce soit plus facile pour lui qu'on prenne en main sa plainte puis on l'achemine au bon organisme ou que, en termes de réglementation, souvent, un secteur peut avoir une influence sur l'autre, que le comité de liaison s'assure qu'il y ait cohérence. Ce comité-là pourrait voir comment on évolue dans chacun des secteurs d'activité et faire des recommandations au bout d'une certaine période ? mettons, cinq ans ? pour faire en sorte que, si, oui, il est toujours opportun de fusionner sous un même chapeau les deux activités, qu'on le fasse à ce moment-là. Mais on aura déjà beaucoup d'acquis, on aura déjà consolidé et harmonisé dans deux grands axes d'activités particulières avec des spécificités, des compétences particulières.

Mme Marois: D'accord, je vois bien. Et vous ne voyez pas de conflit d'intérêts de regrouper, là, sous un même chapeau la partie prudentielle des valeurs mobilières et celle qui serait responsable de l'encadrement des institutions financières.

n(15 h 10)n

M. Boivin (Richard): Nous n'en voyons pas, et, enfin, qu'on appelle l'organisme une agence, une commission, un inspecteur général, nous, on ne voit que de la sémantique, là-dedans. Ce qui est important, ce sont les pouvoirs qui vont être donnés à l'organisation. Que ce soit un conseil d'administration ou un président-directeur général, ce sont les pouvoirs que cette organisation-là aura et c'est comment elle les exercera dans le concret.

J'ai entendu parler, ce matin, de reconnaissance de l'Agence auprès d'organismes internationaux. Que l'Agence soit composée d'un conseil d'administration ou d'un directeur général, qu'elle soit unique ou qu'il y en ait deux, ça va dépendre de comment cette organisation-là va travailler et agir. C'est l'efficacité qu'elle va démontrer, la rapidité d'exécution et d'intervention qui va faire en sorte qu'elle va avoir une reconnaissance.

Mme Marois: Et, d'ailleurs ? c'est très intéressant, effectivement, ce que vous apportez ? d'ailleurs, dans la perspective d'une certaine prudence, on a prévu une période tampon d'implantation pour nous assurer qu'on ne perde pas les expertises puis qu'on garde l'efficacité et même qu'on l'augmente, finalement. Bon. Même si je peux être en désaccord avec certaines de vos propositions, je pense que la philosophie qu'il y a derrière ça rejoint la Nôtre.

Je vous remercie. Je ne sais pas, peut-être que de mes collègues reviendront. Pour l'instant, ça va.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Boivin. Oui, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Jérôme-Forget: J'ai une question. Puis, après ça, je vais donner la parole à mes collègues.

Le Président (M. Paré): Oui, M. le député de D'Arcy-McGee m'a demandé la parole.

M. Bergman: Merci, monsieur...

Mme Jérôme-Forget: Je vais poser une petite question, puis, après ça, je...

Le Président (M. Paré): O.K. Allez-y.

Mme Jérôme-Forget: Moi, tout d'abord, je veux vous remercier pour votre mémoire. Je l'ai trouvé très intéressant. Et je ne connaissais pas votre organisme, alors, je suis d'autant plus intéressée parce que je vois que c'est un organisme qui a progressé et qui a grossi, et j'entends même des velléités de grossir encore. Alors, je vous félicite. On se réjouit de voir des entrepreneurs avoir autant de succès ici, au Québec.

Par ailleurs, je voudrais vous poser une question, bien sûr, sur votre mémoire. Vous demandez comment il se fait que vous semblez peu vous préoccuper du volet important quasi judiciaire de la Commission des valeurs mobilières. Vous rattachez ? à moins que j'ai mal compris votre mémoire ? mais vous rattachez à l'IGIF, à l'Inspecteur général des institutions financières, la Commission des valeurs mobilières, et, ensuite, vous créez un deuxième organisme, celui-là, du Bureau des services financiers, qui s'occupera des maisons, des services à la clientèle.

Il y a plusieurs intervenants ? vous avez lu, sûrement, les mémoires du Barreau, vous avez lu probablement d'autres mémoires également qui nous ont été déposés ? qui ont souligné l'importance de l'apparence de non-conflit d'intérêts entre, d'une part, l'organisme qui vérifie la solvabilité, l'IGIF, la solvabilité d'une compagnie d'assurance, et la Commission des valeurs mobilières qui, elle, doit faire des arbitrages au niveau des valeurs mobilières.

Vous semblez rattacher à l'IGIF tout ce volet de la Commission des valeurs mobilières et peu vous préoccuper de la culture actuelle dans le monde financier qui semble être beaucoup plus préoccupé par les valeurs mobilières que par la solvabilité de certaines grandes entreprises.

Est-ce que, à la lumière de ce qui s'est passé récemment, vous ne pensez pas que votre mémoire ou votre position déroge un peu du climat dans lequel on vit actuellement et également sur ce qui se passe autour de nous, notamment ce dont je faisais mention ce matin, ce qui se passe en Ontario et aux États-Unis? Ce sont toujours les Commissions des valeurs mobilières qui sont interpellées pour venir apporter des correctifs dans le marché.

Or, vous, vous dites: Bien, moi, c'est moins important, c'est l'IGIF qui semble être important, la solvabilité des entreprises, principalement d'assurance, manifestement. Alors, je ne sais pas si j'adresse ma question à vous ou au président du conseil.

Le Président (M. Paré): M. Dumont ou M. Boivin? M. Boivin.

M. Boivin (Richard): Merci, M. le Président. En fait, on ne favorise pas l'intégration de la Commission des valeurs mobilières à l'intérieur de l'Inspecteur général ou vice-versa. Ce qu'on dit, ce qu'on propose, un peu comme le projet de loi le fait mais d'une façon plus générale pour l'ensemble des secteurs d'activité, c'est: Mettez sous une même organisation tout ce qui est règles prudentielles, mettez sous une même organisation les règles de capitalisation, mais laissez à la Commission des valeurs mobilières, qui deviendra une agence ou qui sera représentée par un directeur général, les mêmes pouvoirs quasi judiciaires.

Et je pense que, actuellement, le projet de loi ne change en rien les pouvoirs de la Commission des valeurs mobilières. Ce qu'il fait, il change tout simplement la composition ou la structure. C'est: d'une commission avec des commissaires, on propose un président-directeur général mais qui aura exactement les mêmes pouvoirs que la Commission des valeurs mobilières a actuellement, pouvoirs qu'il pourra déléguer également à des surintendants, donc dans un secteur qui est la distribution, si vous voulez, des valeurs mobilières, les règles prudentielles, la divulgation des émetteurs, toutes ces choses qui interpellent actuellement la Commission des valeurs mobilières.

Si ma lecture est bonne, la loi actuelle, telle que déposée ? le projet de loi n° 107 ? ne vient pas d'aucune façon diminuer les pouvoirs de l'organisme. On change le nom de l'organisme, on change un conseil collégial pour remettre les pouvoirs entre les mains d'un individu peut-être, mais les pouvoirs quasi judiciaires ne sont aucunement modifiés.

Mme Jérôme-Forget: Monsieur, vous êtes président d'une société. Le président d'une société, c'est le patron, et, si le patron est responsable de la nomination des gens qui travaillent pour lui ou elle, il est clair que c'est cette personne-là qui est responsable d'embaucher les individus et de déterminer qui va remplir telle fonction. Même si la fonction est bien articulée à l'intérieur de la loi, il n'en demeure pas moins que, en tant que président-directeur général, si je nomme du monde, c'est clair que j'ai beaucoup d'autorité.

M. Boivin (Richard): Oui, mais... bifurquer.

Mme Jérôme-Forget: Ils ne peuvent pas bifurquer, mais la nomination ou de dénommer quelqu'un également, c'est un pouvoir important dans un organisme. Vous le savez, vous êtes président d'une société.

Alors, de dire que le président-directeur général a les mêmes pouvoirs que les commissaires, avant, à la Commission des valeurs mobilières, qui faisaient les arbitrages, qui parfois pouvaient aller à l'encontre de ce que la présidence faisait, je pense que la formule qui nous est proposée est bien différente, là. Je pense qu'elle est très différente.

Enfin, écoutez, je ne peux pas... Je vais vous laisser la parole, là, mais j'ai une perception différente du projet de loi.

M. Boivin (Richard): Et, effectivement, Mme la députée, elle est différente, j'en conviens. Mais tout ce que je voulais préciser, c'est que, fondamentalement, les pouvoirs de l'organisme n'étaient pas changés ou modifiés. C'était la façon peut-être... et, là-dessus, je suis d'accord avec vous. Il est clair que, à l'interne, la vie interne de l'organisme, si jamais on crée l'Agence telle qu'elle est proposée, les jeux de pouvoir ou décisionnels à l'intérieur de l'organisme ne se feront pas de la même façon avec un président-directeur général qu'ils peuvent se faire actuellement avec des commissaires ou qu'on peut voir dans les organisations avec un conseil d'administration.

Mais on a actuellement, au Québec, un Inspecteur général qui est un individu, qui a aussi des pouvoirs quasi judiciaires. Au fédéral, vous avez le Bureau du Surintendant fédéral qui possède également des pouvoirs quasi judiciaires, et la formule fonctionne très bien.

Mme Jérôme-Forget: Le Surintendant... l'IGIF relève de la ministre des Finances.

Mme Marois: La Commission des valeurs mobilières aussi.

Mme Jérôme-Forget: Oui, mais il y a beaucoup plus d'autonomie.

Mme Marois: Mais on ne change pas, là, les règles pour ce qui est de l'autonomie.

Mme Jérôme-Forget: Bien, en tout cas, je vais laisser à mes collègues le soin de poser les autres questions.

Le Président (M. Paré): Oui. M. Morissette, vous vouliez ajouter?

M. Morissette (Jean): Oui. Je pense que le point qui est soulevé par madame est extrêmement important. Je pense que notre intention, en se présentant ici, aujourd'hui, n'était pas de vous suggérer des règles de gouvernance, ce n'est pas notre spécialité.

Notre intérêt en se présentant ici, aujourd'hui, est essentiellement de vous faire valoir l'importance qu'il y a pour l'industrie et le consommateur d'amener l'exercice de la réglementation, que ce soit du côté valeurs mobilières, Fonds, assurance, sous un parapluie qui fait que c'est efficace.

Aujourd'hui, sans contester l'efficacité d'un domaine par rapport à l'autre, c'est un fait qu'il y a des écarts importants entre l'application des trois. Et, tout à l'heure, je vous mentionnais que l'offre de solution à nos clients au Québec, en Ontario, en Colombie-Britannique, ça nécessite généralement, pour nous, à travers un cycle de vie d'un client, le recours à chacun des produits dans les trois lignes d'affaires et certaines autres où la non-cohérence de l'application de la réglementation entre les lignes d'affaires est un problème majeur. Je pense qu'on se fiera à vous beaucoup plus pour les questions de gouvernance de l'organisme; ce n'est pas notre spécialité. Je pense que ce n'était pas ça qui était l'objectif de notre mémoire.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Morissette. M. le député de D'Arcy-McGee.

n(15 h 20)n

M. Bergman: Merci, M. le Président. M. Dumont, merci pour votre présentation. Dans la section VI, les pouvoirs de l'agence d'émettre des instructions générales, vous faites référence, dans le cadre d'une réforme qui veut simplifier et organiser les méthodes de surveillance, que vous comprenez mal que le législateur ne profite pas de l'occasion pour simplifier les concepts et utiliser les mêmes termes pour décrire les mêmes pouvoirs. Pouvez-vous expliquer votre demande ou votre concept, ici?

Le Président (M. Paré): M. Boivin.

M. Boivin (Richard): En fait, nous, ce qu'on dit, c'est qu'il nous semble que la façon dont le projet de loi décrit un pouvoir de directive à l'Agence dans certaines lois et la façon dont on décrit le pouvoir d'instruction générale dans la Loi sur les valeurs mobilières, pouvoir qui va revenir éventuellement à l'Agence, il nous semble qu'on vise et qu'on veut dire la même chose.

Tout ce qu'on constate, c'est qu'on utilise un langage différent, des définitions qui ne sont pas tout à fait identiques, et on craint qu'à ce moment-là dans le quotidien on en arrive à trouver des nuances et que ces nuances-là deviennent importantes. Alors qu'actuellement j'ai toute l'impression de croire qu'on veut faire exactement la même chose, il est dangereux que, par la suite, une fois qu'on appliquera ces dispositions-là, des gens en arrivent à faire les nuances et les distinctions.

Ce qu'on demande au gouvernement, c'est: Tant qu'à faire une réforme où on veut harmoniser... Je comprends la ministre de dire: On ne veut pas pour l'instant modifier les lois, on veut tout simplement créer une agence qui va avoir un pouvoir d'harmonisation, mais qu'à l'intérieur même du projet de loi n° 107 on fasse un deuxième tour de table pour s'assurer que, oui, vraiment, on utilise toujours les mêmes termes pour parler des mêmes affaires, s'assurer qu'à ce moment-là on ne créera pas de distinctions et de distorsions dans le système.

Le Président (M. Paré): M. le député de D'Arcy-McGee. M. Boivin, vous voulez compléter?

M. Boivin (Richard): Oui, peut-être juste un exemple. On vit constamment dans des définitions, où, par exemple, un conseiller en placements qui vend un fonds mutuel doit le faire d'une façon, selon des textes où on... En fait, tous les textes là-dedans, dans ce domaine-là, disent que le conseiller, le représentant en épargne collective doit servir les intérêts de son client, doit favoriser l'intérêt de son client et faire en sorte que le produit qu'il lui offre convient bien à sa situation.

Le conseiller en placements va être encadré, pour respecter cette norme-là, avec des textes qui sont différents de ceux qu'on applique en épargne collective. Ça nous amène à bâtir des systèmes de surveillance, à mettre en place des gens qui doivent appliquer des normes, où, souvent, avec le temps, avec l'interprétation que les organismes peuvent en faire, ils sont arrivés finalement à faire en sorte qu'on doit agir d'une façon dans un cas, différemment ou légèrement différemment dans un autre.

Mais ça nous amène à mettre en place des systèmes différents, à engager du personnel différent. On arrive avec le même produit qui est un fonds mutuel mais qui se retrouve à l'intérieur d'un fonds distinct de compagnie d'assurance, et, voilà, on a encore d'autres règles qui s'appliquent. Et, souvent, le législateur ou les organismes qui réglementaient voulaient dire la même chose, mais, malheureusement, ils ne l'ont pas écrit avec le même crayon et au même moment, et, nous, après, on est pris à administrer ça, et ça nous cause des problèmes énormes pour nous et pour le consommateur, également.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Boivin, de cette précision. Mme la députée de Beauce-Sud.

Mme Leblanc: Merci. Alors, bonjour à vous trois, et je voulais vous remercier aussi pour votre présentation. Comme ma collègue le disait, c'est un peu particulier de vous entendre, d'abord parce que vous me semblez des gens de terrain, et, comme on dit en Beauce, quand vous êtes des gens de terrain, vous êtes des gens près du milieu, et ce n'est pas la grande philosophie, mais on veut que ça marche, on veut que ce soit efficace. Et c'est le fun que vous oeuvriez justement dans plusieurs secteurs comme l'assurance vie, les valeurs mobilières, l'épargne collective. Alors, ça vous donne une vue d'ensemble que peut-être d'autres organismes, d'autres intervenants dans le marché financier n'ont pas.

Vous avez soulevé le fait que le projet de loi n° 107 prévoit un bureau de révision mais seulement pour le domaine des valeurs mobilières alors qu'il n'y a pas de bureau de révision prévu dans les autres domaines.

Vous avez parlé pour les assureurs, pour traiter les plaintes concernant les assureurs. Vous avez raison, le projet de loi est complètement muet, là-dessus. On voit que l'organisme en question de réglementation peut entendre une personne, a l'obligation de l'entendre, mais, après ça, ça s'arrête là, il n'y a pas de moyen de demander une révision pour la personne qui est concernée. Vous mentionnez, à cet effet-là, qu'il faudrait que le même bureau de révision qui traite des valeurs mobilières puisse traiter les plaintes concernant les assureurs.

Et là, j'ai un peu de difficulté à vous suivre, parce qu'on sait que, par exemple ? et vous venez de le mentionner ? les gens qui oeuvrent dans le domaine des valeurs mobilières ont des compétences très spécifiques, ceux qui oeuvrent en assurance vie souvent n'oeuvrent pas en assurance de dommages parce que, ça aussi, ça demande des compétences très spécifiques et très spécialisées.

Alors, comment un bureau de révision qui doit traiter des problèmes au niveau des valeurs mobilières pourrait être compétent en même temps de traiter des problèmes qui relèvent de l'assurance vie ou de l'assurance de dommages, par exemple? Comment vous voyez la chose?

Le Président (M. Paré): M. Boivin.

M. Boivin (Richard): En fait, quand on parle de produits financiers aujourd'hui, que ce soit un produit catalogué comme valeur mobilière, comme produit d'épargne ou souvent comme produit d'assurance vie, dans un très grand nombre de cas, on est devant le même produit financier; on offre aux consommateurs exactement le même produit d'épargne.

La façon dont il est vendu, la façon dont le représentant, que ça soit en épargne collective ou en valeurs mobilières ou en assurance, va faire ses représentations, va servir son client sont sensiblement les mêmes règles, les mêmes façons de faire. Donc, ce qu'on dit, c'est que, si le gouvernement, si l'Assemblée nationale trouve opportun de créer un bureau de révision où le consommateur pourra faire entendre une plainte qui n'a pas été traitée correctement selon lui, on vient de lui donner un droit de se faire entendre, un droit additionnel de se faire entendre. On est d'accord avec ça.

Tout ce qu'on dit, c'est que, si on le fait pour les valeurs mobilières, ce bureau-là soit aussi compétent pour entendre la plainte du consommateur qui a pu acheter, une journée, un fonds mutuel par un conseiller en placements qui est régi par la Loi sur les valeurs mobilières, le lendemain, le même fonds de placement par un représentant en épargne collective qui est assujetti au BSF, et, le surlendemain, il va acheter exactement le même fonds dans un produit financier qu'on va appeler un fonds distinct, produit d'assurance. Et c'est le même produit financier, et les trois représentants vont avoir agi sensiblement de la même façon, vont devoir, encore là, revoir les objectifs de placement du client, s'assurer que le produit correspond à son profil.

Ce qu'on dit, c'est que, si on pense que le consommateur doit avoir un droit additionnel de se faire entendre quand sa plainte n'est pas traitée ou n'est pas traitée correctement selon lui, bien, qu'on ne le fasse pas uniquement dans un secteur d'activité, qu'on le fasse de la même façon dans tous les secteurs d'activité.

Mme Leblanc: Je suis bien d'accord avec vous si on parle toujours du même produit financier. Mais, si on parle de produit financier différent, quelqu'un qui va avoir vendu une action cotée à la bourse qui devait produire tel rendement sur tant d'années ou tant de mois et quelqu'un qui va vendre une police d'assurance qui n'est pas tout à fait adéquate selon les besoins du client et qui se ramasse finalement avec des problèmes à la suite de ça, est-ce que vous pensez qu'une personne qui siège sur le bureau de révision pourrait avoir toutes ces compétences-là pour juger si, oui ou non, le courtier, le conseiller en placements ou l'assureur a commis une faute ou n'a pas commis de faute?

Le Président (M. Paré): M. Morissette.

M. Morissette (Jean): Je pense que la question que vous soulevez est importante. Je pense aussi ? on parlait de pratique puis de terrain tout à l'heure: il y aura toujours des cas d'exception, puis un bureau de révision devra s'entourer d'experts et de personnes capables de traiter tous les dossiers incluant les cas plus complexes.

Mais, dans la réalité, dans la pratique, je pense qu'on a tendance à surestimer la complexité du produit valeurs mobilières par rapport à un produit fonds de placement ou un produit assurance. Un conseiller en épargne collective aujourd'hui vend des fonds mutuels qui sont investis dans des «edge funds», beaucoup plus compliqués que n'importe quel produit de valeurs mobilières. Aujourd'hui, un courtier, un représentant en assurance vie vend très peu de garantie d'assurance vie et vend un produit de placement, qui est... comme un conseiller à l'épargne collective, le vend dans un REER; lui, il le vend dans une police universelle.

C'est le gros de notre industrie. Et c'est clair que la tendance à dire: Bon, le produit risqué, compliqué, c'est les valeurs mobilières, puis, les autres, ça devrait être réglementé autrement, ce n'est plus vrai, ça ne colle plus avec la réalité d'aujourd'hui. Un investisseur, un épargnant, un client qui achète un produit d'assurance vie peut et achète effectivement aujourd'hui un produit qui peut être beaucoup plus risqué que tout ce qu'il peut se procurer dans une bourse canadienne.

n(15 h 30)n

Donc, il est important que le Bureau de révision ou tout organisme qui permet à un consommateur d'être entendu ait la capacité de traiter les trois cas également. C'est la même chose. Et un investisseur, un client qui investit dans un fonds de placement n'est pas un client moins important qu'un client qui investit dans des valeurs mobilières. Et c'est une problématique qu'on a aujourd'hui dans notre industrie. D'ailleurs, l'industrie d'épargne collective et de l'assurance a accès à des ressources, à des organismes de réglementation qui, souvent, ont beaucoup moins d'expertise que ce qu'on a eu traditionnellement en valeurs mobilières, et ça ne correspond plus à la réalité de ce qui est vendu.

Le Président (M. Paré): M. Dumont, vous voulez compléter.

M. Dumont (Jean): Un autre élément qui est lié à ça, c'est que ce qu'on doit comprendre c'est que, si vous comparez un produit d'assurance tel que décrit par Jean et vous prenez un fonds commun ordinaire, les besoins de déclaration, les besoins d'information qui doivent être soumis aussi à l'individu qui achète, ils sont différents. Pour des produits qui sont, supposément, différents ? puis ceux qui sont dans le milieu financier vont dire qu'il n'y a vraiment pas de différence ? les exigences d'information lorsqu'une transaction se fait en fonds d'investissement par rapport aux exigences d'information qui doivent être données à un client lorsqu'il fait une transaction en assurance sont totalement différentes aussi. Ça fait qu'il y a des... Les différences ne sont pas juste dans l'interprétation après les faits, elles sont lorsque, au point d'entrée, au point de vente, les instruments financiers qui devraient être pareils ont des normes de communication qui sont totalement différentes.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Dumont. Ça complète votre intervention. On vous remercie de votre contribution à cette commission. Donc, j'appellerais maintenant l'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Paré): Bienvenue, M. Oliver, bienvenue, M. Lemay, Mme Lanoix et M. LaRochelle, à cette commission, représentants de l'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières. Vous aurez 20 minutes pour faire votre présentation et, par la suite, il y aura 40 minutes d'échange entre les parlementaires. Donc, vous pouvez nous présenter, M. Oliver, les gens qui vous accompagnent.

Association canadienne des courtiers
en valeurs mobilières (ACCOVAM)

M. Lemay (Jacques): C'est plutôt, moi. Mon nom est Jacques Lemay.

Le Président (M. Paré): Ah! Excusez-moi.

M. Lemay (Jacques): Je suis le président du Conseil de la section du Québec de l'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières qu'on nomme aussi par son acronyme ACCOVAM. Je voudrais vous remercier très sincèrement de nous donner l'occasion de se faire entendre aujourd'hui par cette commission. Comme vous l'avez dit, je suis accompagné de Mme Fernande Lanoix, à ma gauche, directrice générale du bureau de Montréal de l'ACCOVAM; à ma droite, de M. Jos Oliver, chef de la direction de l'ACCOVAM; et, à mon extrême droite, Me Luc LaRochelle, avocat de pratique privée du bureau Borden Ladner Gervais de Montréal qui agit comme conseiller juridique de l'Association.

Comme vous le savez, l'ACCOVAM est une association de courtiers en valeurs mobilières, une association de courtiers qui exercent leurs activités au Canada. Elle a été créée par des courtiers qui voulaient se donner des règles de conduite qui visaient à protéger leur industrie. Les sociétés, par leur adhésion, reconnaissent l'ACCOVAM. Il n'y a pas de contestation dans sa légitimité. La législation sur les valeurs mobilières au Canada prévoit aussi la reconnaissance de l'ACCOVAM comme organisme d'autoréglementation. Notre principal objet, notre principale mission est d'adopter et de faire respecter des normes professionnelles qui sont propres à éviter des conduites contraires à l'intérêt public. L'ACCOVAM est donc un élément qui est constitutif de l'encadrement des services financiers en matière de valeurs mobilières.

L'ACCOVAM n'est pas une création de la loi. Comme je l'ai dit tantôt, elle a été formée par des courtiers, mais, par ailleurs, elle est, ou a été, reconnue par les autorités réglementaires qui l'ont fait suite à des dispositions à cet effet dans leur législation constitutive. L'ACCOVAM joue donc un rôle d'autoréglementation ou de réglementation que d'autres n'exercent pas. Nous avons donc une autorité. Une partie de responsabilité de réglementation de l'industrie des valeurs mobilières nous incombe. Pour être plus précis, pour rattacher notre présentation aujourd'hui, nous sommes donc un organisme d'autoréglementation visé ou qui serait visé par le titre III du projet de loi n° 107 sur l'Agence nationale d'encadrement du service financier. D'ailleurs, le rapport du groupe Martineau a donné l'exemple, pour ne pas dire cité en exemple l'ACCOVAM comme organisme d'autoréglementation.

Je vais laisser mon collègue Jos Oliver vous entretenir de l'ACCOVAM. Je reviendrai par la suite avec quelques remarques.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Lemay. M. Oliver.

M. Oliver (Joseph J.): M. le Président, comme mon collègue l'a constaté, l'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières est l'organisme national d'autoréglementation et de représentation du secteur des valeurs mobilières. Elle compte parmi ses membres plus de 190 courtiers en valeurs mobilières, dont 79 sociétés membres conduisent leurs activités au Québec. L'Association réglemente les activités des courtiers en valeurs mobilières tant en ce qui a trait au capital nécessaire qu'à la conduite des affaires. Pour devenir membre, une société doit respecter les exigences rigoureuses en matière de capital, faire la preuve qu'elle est en mesure et désireuse de mener ses activités conformément aux statuts, règlements et principes directeurs de l'Association et accepter d'être soumise à une surveillance constante. Quant au personnel des sociétés membres qui traitent avec le public, il doit posséder les qualifications requises, se soumettre à des examens préalables à leur inscription et aux exigences de formation continue à leur inscription.

n(15 h 40)n

La protection des investisseurs est l'une des priorités. Depuis sa création en 1916, l'ACCOVAM a évolué pour devenir une organisation nationale décentralisée. Elle mène ses activités grâce à un réseau exhaustif de comités nationaux et régionaux composés de membres de l'industrie qui font valoir le point de vue diversifié des entreprises et des régions géographiques. Les buts de l'ACCOVAM sont de protéger les investisseurs, d'assurer l'intégrité du marché et de favoriser l'équité, la compétitivité et l'efficacité des marchés des capitaux. C'est en considérant le mandat de l'Association que nous vous faisons nos représentations aujourd'hui.

Je voudrais faire quelques commentaires sur la perspective canadienne et internationale avant de rendre la parole à mon collègue Jacques Lemay.

Comme organisme d'autoréglementation national, nous sommes impliqués avec les autorités canadiennes en valeurs mobilières et donc avec la Commission des valeurs mobilières. Nous avons été témoins du travail très efficace que la Commission des valeurs mobilières du Québec et sa présidente ont fait en représentant les intérêts du Québec, les investisseurs québécois et l'industrie des valeurs mobilières au Québec. L'influence du Québec pourrait être diminuée si la Commission devait être éliminée pour être remplacée par une agence divisée de façon fonctionnelle, comme cela est suggéré dans le projet de loi. L'expertise serait diluée à travers cette Agence où personne n'aurait pour fonction de se concentrer sur le domaine des valeurs mobilières et sur les règles techniques qui les gouvernent.

L'ACCOVAM entretient aussi des relations avec les autorités américaines, donc les autorités réglementaires et les organismes d'autoréglementation. L'Association est aussi membre de l'Organisation internationale des commissions de valeurs, parmi d'autres organisations internationales. Nous constatons à chaque jour combien les marchés des capitaux deviennent de plus en plus globaux. Nous constatons aussi l'influence du marché américain, qui représente 45 % du marché global, sur les entreprises et les investisseurs canadiens. Encore une fois, les intérêts du Québec peuvent être compromis s'ils ne sont pas représentés par un organisme qui soit, comme dans le reste du monde, expert et indépendant.

Le marché des capitaux canadiens ne représente que 2 % du marché global. C'est donc un défi particulièrement grave pour toute autorité réglementaire de représenter les intérêts du Québec et du Canada. Ce défi est de plus en plus grand devant la réaction agressive des autorités réglementaires américaines face au scandale qui affecte les marchés financiers ces jours-ci. Les entreprises du Québec ont besoin d'un accès efficace aux marchés canadien et américain pour assurer leur croissance. L'intérêt de ces entreprises et des investisseurs canadiens doit être sérieusement considéré avant de créer une structure qui n'a aucun correspondant chez nos voisins. C'est l'une des raisons pour laquelle vous devriez considérer préserver l'intégrité de la CVMQ dans le cadre d'une approche sectorielle au sein de l'Agence.

Le Président (M. Paré): M. Lemay.

M. Lemay (Jacques): Merci. Je ne répéterai pas le contenu de notre mémoire. J'ai écourté un peu les représentations verbales en attendant certains échanges. Particulièrement ce matin, certains points ont été faits, soulevés, et des réponses ont été données. Par contre, évidemment, notre mémoire tient toujours dans son intégralité. L'objectif de l'ACCOVAM en vous faisant ces représentations aujourd'hui, c'est de rechercher la meilleure protection possible des investisseurs, qui découle de l'objet principal de l'ACCOVAM, comme je l'ai dit tantôt, c'est-à-dire l'efficacité et l'intégrité des marchés, autre façon de parler de l'intérêt public.

Un des prétextes au travail du groupe Martineau et à l'effort de restructurer l'encadrement des services financiers au Québec a été le changement de structures dans l'industrie des valeurs mobilières. J'ai eu la chance de travailler quelques mois dans une industrie des valeurs mobilières qui constituait à l'époque un des quatre piliers, qui était indépendant des banques, quelques mois tout au plus, et j'ai donc vécu depuis... nous avons vécu dans notre industrie l'intégration des services de valeurs mobilières, des principaux courtiers en valeurs mobilières, qui ont été acquis par les principales banques au Canada. Et, à l'époque, ce qu'on pouvait croire, c'est que, les banques étant à ce point importantes, leur culture étant à ce point importante, l'industrie des valeurs mobilières telle qu'on la connaissait à l'époque allait disparaître ou se transformer d'une façon importante pour s'intégrer au reste des activités des grandes banques canadiennes.

Or, ce qui est arrivé, c'est que les courtiers en valeurs mobilières ont gardé leur identité, l'industrie des valeurs mobilières a gardé son identité, et, d'une certaine façon, c'est plutôt le contraire quant à l'influence des cultures de l'une et de l'autre des industries, on peut dire, sous certains aspects, que l'industrie des valeurs mobilières a influencé l'industrie bancaire au Canada. Donc, si la restructuration qu'on envisage aujourd'hui découle, entre autres, du changement structurel dans l'industrie, il faut y penser à deux fois avant de conclure qu'il n'y a plus d'industrie de valeurs mobilières au Canada et, évidemment, qu'il n'y a plus besoin d'un encadrement spécifique à l'industrie des valeurs mobilières au Canada.

Ce qui est aujourd'hui, c'est une approche sectorielle divisée entre différentes autorités réglementaires. Ce qu'on propose, c'est de transformer cette approche sectorielle dans une approche fonctionnelle, c'est-à-dire de réunir les différentes fonctions des différentes entreprises qui offrent des services financiers en transformant, si vous voulez, l'approche qu'on a eue jusqu'à maintenant. Or, dans l'industrie des valeurs mobilières, il y a beaucoup plus d'interrelations ou de correspondances ou de concomitances entre les différentes fonctions à l'intérieur de l'industrie. Pensons, par exemple, à ce qu'on peut appeler la «fabrication des valeurs mobilières», le dépôt des prospectus pour les fins de distribution de titres. La distribution de titres et la négociation de ces titres-là sont un continuum d'activités reliées qui exigent une expertise spécifique à notre industrie. Il y a donc une interrelation sectorielle qui n'a pas nécessairement son pendant d'un point de vue fonctionnel avec d'autres industries. Alors, si on veut acheter un certificat de dépôt, ce n'est pas exactement la même chose que d'acheter une action qui est offerte sur la base d'un prospectus, bien que cette fonction de distribution de titres ou de produits financiers soit rapprochée dans l'approche fonctionnelle.

n(15 h 50)n

Ce que nous voudrions vous représenter aujourd'hui, c'est qu'il faudrait se servir de la crédibilité et des compétences qui existent déjà pour construire l'avenir de l'encadrement des services financiers. Ça veut dire se servir de la crédibilité, de l'expertise qui se trouve à la Commission des valeurs mobilières du Québec plutôt que de la fondre dans un nouvel organisme qui, par ailleurs, n'a pas d'équivalent dans les autres juridictions qui sont, encore une fois, concomitantes ou voisines. C'est aussi important de conserver la crédibilité de la Commission des valeurs mobilières pour ceux qui en ont besoin, entre autres, par exemple, les entreprises qui comptent sur la crédibilité de la Commission lorsqu'elles se soumettent à sa juridiction. Lorsqu'une entreprise devient un émetteur assujetti, elle choisit une juridiction qui est, par exemple, celle de la Commission des valeurs mobilières du Québec. Cette entreprise, qui voudrait faire appel aux marchés dans les autres juridictions, aux États-Unis, par exemple, doit pouvoir compter sur la crédibilité de la Commission pour avoir accès au marché américain. La solution, si la Commission ou l'agence ou l'autorité réglementaire n'avait pas cette crédibilité, la solution, pour les entreprises du Québec, ce serait tout simplement de faire fi du Québec et de faire un appel public à l'épargne aux États-Unis, comme si elle était une entreprise américaine, sans offrir ses titres au Canada. Vous savez, nous savons que ça s'est fait pour des raisons d'affaires. Ça peut se faire aussi pour des raisons d'encadrement réglementaire.

Les asymétries qu'on retrouve dans la structure proposée ont nécessairement un coût. Ce n'est pas gratuit. Il faudrait se demander quels sont les bénéfices qu'on recherche pour justifier une telle restructuration. Alors, on pourrait se demander: Pourquoi protéger différemment les investisseurs au Québec des investisseurs en Ontario ou des investisseurs américains? Qu'est-ce qui serait mieux fait, fait différemment, qui ferait en sorte qu'on serait mieux protégé? Et j'entends que la loi constitutive ne vise pas spécifiquement cet aspect, mais il faudrait quand même se poser la question: Pourquoi payer d'un changement de structure? Quel serait le bénéfice par ailleurs?

Il faudrait aussi se demander comment l'approche fonctionnelle conserverait l'expertise. J'entends que les individus qui sont actuellement au sein de la Commission seraient au sein de l'Agence, donc ils continueraient à remplir leurs fonctions avec leur expérience, leur expertise. Or, il va bien se trouver quelqu'un en quelque part qui va devoir apprendre un autre métier, qui va devoir avoir une approche mixte. Ce ne sera peut-être pas le président-directeur général, ce ne sera peut-être pas le surintendant de cette fonction-là, mais, en quelque part, il va falloir qu'un individu intègre, personnalise le pont entre les différentes industries de telle sorte qu'il ait une expertise fonctionnelle donnée. Donc, il va bien falloir... Je comprends que les individus vont rester, mais il va bien falloir qu'il y en ait quelques-uns qui apprennent un nouveau métier, donc diluent, d'une certaine façon, leur expertise.

Imaginons aussi, par exemple, restructurer le Fonds canadien de protection des épargnants. C'est une possibilité qu'on pourrait entrevoir avec la restructuration de l'encadrement. Or, ce Fonds est canadien. Il est rattaché à une industrie pancanadienne. Il réunit des courtiers qui ont des opérations à travers le Canada. Il cherche à indemniser des activités ou il cherche à indemniser des clients de courtiers en valeurs mobilières sans qu'il n'y ait de correspondance avec d'autres systèmes d'indemnisation. Qu'on pense au système d'indemnisation fédéral pour les banques. Comment est-ce qu'on peut imaginer ajuster, transformer, adapter le Fonds canadien de protection des épargnants pour en faire un fonds qui se rattacherait à l'Agence?

La réalité ? c'est important de nous le demander ? la réalité, c'est que l'industrie des valeurs mobilières, elle existe toujours en tant que telle. On a craint ou on a pensé qu'elle allait disparaître pour devenir une des composantes des services financiers, mais ça n'a pas été le cas jusqu'à maintenant. On réfère encore aux courtiers ? et là j'entends la personne qui exerce le métier de conseiller financier au sein des maisons de courtage ? on réfère à ces gens de façon assez familière comme étant des courtiers, mon courtier, votre courtier. Ce métier, il existe. Il répond à un besoin ou à des besoins spécifiques des investisseurs. Il est encadré, fortement encadré. Les courtiers doivent être responsables de leurs gestes, de leurs recommandations auprès de leurs clients et, d'une certaine façon, c'est une forme de protection qu'il y ait un individu en quelque part qui soit responsable de ses gestes. Et, d'une certaine façon, il ne faudrait pas que le métier de courtier soit escamoté, oublié. Je ne dirais pas que c'est un métier traditionnel. C'est un métier qui existe depuis plus longtemps sous différents vocables. Mais une chose est certaine, c'est qu'il ne faudrait pas que le métier de courtier en valeurs mobilières disparaisse alors que nos voisins ont toujours cette structure, cette mentalité d'avoir accès à un courtier pour faire des investissements dans les marchés des capitaux.

Donc, ce que nous vous disons, c'est: le plus possible, dans la structure proposée, le plus possible retenir des caractéristiques d'une approche sectorielle et le plus possible utiliser les cadres existants qui fonctionnent, qui sont crédibles, qui ont leurs pendants à l'international et qui donnent une crédibilité au marché financier du Québec.

Maintenant, si je peux suggérer un amendement relativement secondaire ? mais je comprends que c'est aussi l'objet de la commission de considérer certains amendements ? par exemple, il faudrait...

Le Président (M. Paré): En terminant, s'il vous plaît, votre temps est...

M. Lemay (Jacques): Bien, il faudrait une mesure transitoire pour l'ACCOVAM tout simplement, et comme c'est le cas de l'article 351 de la Loi sur les valeurs mobilières; sans ça, il y aura un vide juridique. Il faudrait m'expliquer comment, entre minuit et huit heures et demie le matin, on va pouvoir reconnaître l'ACCOVAM, parce que c'est un exercice qui va prendre plus que quelques heures au petit matin, pour que l'ACCOVAM, dans cet avant-midi là, ne soit pas... ne fasse pas face à un vide juridique.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Lemay. Mme la ministre.

Mme Marois: Alors, merci, M. le président, je vous remercie de votre présentation. On va commencer par régler la dernière chose que vous avez mentionnée. Et je ne sais pas si vous étiez dans la pièce lorsqu'on a débattu avec ceux qui vous ont précédés, mais j'ai bien indiqué que la façon dont nous voyions la suite des choses, c'est que, dans le cas de l'ACCOVAM, compte tenu qu'il y aura une période de transition pour l'implantation de l'Agence, nous pensons que les règles vont continuer de s'appliquer telles qu'elles s'appliquent maintenant et que l'ACCOVAM pourra continuer de fonctionner. Mais, cependant, on comprendra que ça ne vous enlèvera pas l'obligation d'être reconnus formellement. Là, c'est conditionnel, dans le fond, votre travail, votre possibilité d'agir au Québec. Il faudra qu'on arrive à résoudre cette difficulté que nous avons, hein, et puis, dans l'année qui vient, il faudra que vous puissiez être reconnus formellement. Il faudra trouver un terrain d'entente à cet égard-là. Je pense que vous convenez de ça aussi. Mais, dans notre perspective, il y a cette année de transition qui devrait nous permettre de voir l'ACCOVAM continuer d'assumer ses activités. S'il faut préciser des choses, on le fera, mais c'était la perspective que nous envisagions. Bon.

Moi, je veux revenir sur quelques commentaires que vous avez faits, entre autres, sur la question de la crédibilité de la nouvelle organisation. Bon. Sur la question des spécifiques propres à votre marché, aux courtiers en valeurs mobilières ou aux valeurs mobilières comme telles, nous ne modifions pas les lois qui concernent chacune des institutions. Les institutions vont se retrouver dans une même agence, qui est l'Agence nationale, et, éventuellement, on travaillera à l'harmonisation des lois. Mais, pour l'instant, ce qu'on fait, c'est que chaque organisation va continuer d'appliquer la loi qui la concerne ou qui les concerne.

Et, quand on parle, entre autres, de la question de l'appel ou du rôle de l'Agence pour ce qui est de la révision, bien, il n'y a que les valeurs mobilières, dans le fond, qui sont en cause ici; parce que, dans les autres cas, il y a des syndics dans les chambres, c'est bien ça, et il y a d'autres processus de prévus. Alors donc, forcément, ce sera spécialisé. Je ne sais pas si vous me suivez, là.

Une voix: ...

Mme Marois: Bon. Alors... Mais, ça, on ne peut pas présumer de l'avenir dans le sens où, pour l'instant, il n'y a rien qui prévoit le contraire. Donc, à partir de là, on pourra, dans un an, se reposer un certain nombre de questions si nous le voulons. Mais, pour l'instant, on ne prévoit pas de changement à cet égard-là. Bon.

Alors, maintenant, je reviens sur la question de la crédibilité de l'institution, parce que, pour moi, c'est aussi important que pour vous ? et peut-être même davantage à cause de ma fonction, évidemment, au sein du gouvernement du Québec. Et, dans la perspective où j'ai à me préoccuper, comme personne responsable des finances publiques, de l'encadrement des institutions financières, j'ai à me préoccuper de la crédibilité justement des institutions que l'on constitue, de leur capacité d'encadrer, de représenter et d'être reconnues sur la scène financière internationale, si vous me permettez cela.

n(16 heures)n

Alors, je regarde ce qui se passe dans d'autres États et je regarde, entre autres, en Angleterre, au Royaume-Uni, et c'est un des endroits où on a regardé, où la commission Martineau, le groupe Martineau a eu des... avec lesquels... Il y a eu des gens qui ont été rencontrés, excusez-moi, qui venaient du Royaume-Uni et Londres, qui est une des principales places financières du monde, on va convenir de ça aussi. Le représentant de la Bourse, tout à l'heure, nous disait qu'ils étaient en train de procéder peut-être à des ententes avec des institutions londoniennes. Or, cette grande place financière qu'est Londres, actuellement, possède une institution... Le Royaume-Uni possède une institution qui est une agence, qui est le Financial Services Autority, qui est un organisme d'encadrement unique pour le secteur financier du Royaume-Uni, puis ça ne lui enlève pas sa crédibilité, ça ne lui enlève pas sa capacité d'agir. Et, moi, en ce sens-là, je pense que notre responsabilité, c'est de nous assurer que les mandats, les tâches, les responsabilités assumés par l'une ou l'autre des institutions actuelles que l'on regroupera sous l'Agence continuent d'être assumés complètement, avec rigueur, bien sûr, et prouvant donc ainsi qu'on est tout à fait capable, même si le modèle organisationnel est un peu différent, d'assurer crédibilité, transparence et aussi protection de l'intérêt public, parce que c'est le premier objectif qu'on a. C'est mon premier commentaire.

M. Lemay (Jacques): Oui. Bien, il faudra... Je devrai penser un peu à la... Est-ce que c'est le bureau de transition qui va reconnaître le quorum? C'est une question. Sur la question de la crédibilité, je vais faire un commentaire sur le Royaume-Uni. De tout temps, notre régime de valeurs mobilières a été calqué sur le régime américain, et la réalité, c'est que les entreprises canadiennes, québécoises vont beaucoup plus souvent sur le marché américain qu'à Londres et qu'il a été un temps où aller au marché de Londres pour faire un appel public à l'épargne, ça pouvait se faire, je vais faire une image, mais «on the back of an envelope». Je ne suis pas certain que, dans un certain vide ou dans un certain encadrement clairsemé du Royaume-Uni où on a créé cette agence-là, qu'on peut considérer que c'est le meilleur précédent. C'est un précédent, mais il faudrait... Nous pensons que le meilleur précédent, c'est celui qui s'appuie sur l'histoire de l'encadrement des valeurs mobilières au Québec, au Canada et en Amérique du Nord. Et, quand on parle de marchés globaux, il faut savoir que la réalité, de jour en jour, c'est beaucoup plus de parler de marchés continentaux, donc beaucoup plus d'échanges de capitaux entre les États-Unis et le Canada, les États-Unis et le Québec, beaucoup plus d'efforts pour avoir accès au marché des capitaux américains, beaucoup plus d'efforts pour avoir des organismes de transaction de titres qui nous donnent ouverture à ces marchés-là, beaucoup plus d'efforts de ce côté-là que des efforts pour s'aligner sur le marché londonien. Ça n'enlève pas l'importance du marché londonien par ailleurs.

Le Président (M. Paré): Oui.

M. Oliver (Joseph J.): Oui. Peut-être, je peux mentionner aussi que l'approche au Royaume-Uni, c'est plus mixte ou plus... Ce n'est pas fonctionnel du tout. C'est plutôt sectoriel que fonctionnel. Aussi, la création de FSA là-bas est par suite des scandales, et le système d'autoréglementation était assez faible. Alors, il y avait des raisons différentes qui ont poussé le gouvernement à agir là-bas.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Oliver.

Mme Marois: Mais je ne disconviens pas du fait que nous avons des relations, au plan des affaires, beaucoup plus importantes avec nos voisins américains ou avec le reste du Canada. Ça, je suis d'accord avec vous, mais, cependant, je donnais cet exemple pour bien indiquer qu'il y avait d'autres modèles d'organisations et que ça ne leur faisait pas perdre pour autant leur crédibilité. Et c'est plus sous cet angle-là que je présentais cet exemple qui est celui du Royaume-Uni. Et, moi, je pense que la crédibilité d'une organisation, ça ne repose pas nécessairement sur le modèle organisationnel, mais ça repose vraiment sur la rigueur, sur le respect des règles de droit, sur la transparence, sur la fiabilité des gestes posés et des évaluations faites, et, en ce sens-là, je pense qu'on a une assez bonne expertise.

Et, comme cette expertise, on veut la préserver dans la nouvelle Agence, parce que d'abord et avant tout on va regrouper des organisations sans modifier leur loi, éventuellement, par ailleurs ? et ça, je pense qu'il faut être clair et je ne veux pas raconter, dire des choses qui seraient fausses, au contraire ? ce que l'on veut faire éventuellement, par ailleurs, c'est mieux harmoniser les lois. Et ça, je pense que c'est souhaitable. Il y en a d'autres avant vous qui sont venus pour dire comment les processus étaient différents selon le produit financier auquel on faisait référence, alors, pour le consommateur, qu'il puisse avoir un lieu d'accès, d'abord, un cadre, une sorte de guichet unique ? j'y vais toujours avec prudence sur la question de guichet unique, on a essayé dans tellement de secteurs, mais quand même ? et un processus qui est bien connu, et qui est facilement identifiable, et qui ne varie pas trop d'une institution à l'autre, mais tenant compte, bien sûr, des particularités propres. Je pense que c'est là qu'on va chercher la crédibilité. Alors, je me permets, là, ce commentaire.

Par rapport à l'Ontario, l'Ontario propose actuellement, là... Ce n'est pas revenu en débat dernièrement, mais elle propose une modification. Le projet de loi, il leur propose une modification aussi de l'institution qui va dans le sens de regroupement d'un certain nombre d'activités, et ça lui permettra pour autant de continuer à assumer sa fonction avec toute la fiabilité et la crédibilité nécessaires, me semble-t-il.

Le Président (M. Paré): M. Lemay.

M. Oliver (Joseph J.): Il y a...

Le Président (M. Paré): Oh! M. Oliver.

M. Oliver (Joseph J.): ...une différence en Ontario.

Mme Marois: Oui, ça, je suis consciente qu'il y a une différence.

M. Oliver (Joseph J.): Et, ce n'est pas vraiment une fusion, c'est plutôt une acquisition, par la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario, de Fisco, et on ne craint pas la dilution des compétences là-bas.

Le Président (M. Paré): Mme la ministre.

Mme Marois: Bon, une question que je voulais aborder avec vous, là. D'abord, un commentaire et ensuite une question. À la fin de votre mémoire, vous indiquez qu'on ne devrait pas mettre en veilleuse les efforts d'harmonisation qui ont été entrepris entre les différentes commissions de valeurs mobilières. Ça, c'est l'avant-dernier paragraphe du petit mémoire que vous avez déposé. Loin de nous cette idée que de cesser de travailler à cette harmonisation. Donc, en ce sens-là, nous voulons garder le cap sur cela. Mais, il y a une chose cependant qui doit être claire, c'est que nous allons conserver nos responsabilités et les assumer comme Québécois. Et, en ce sens, pour nous, il n'est pas question qu'il y ait une commission des valeurs mobilières pancanadienne qui intègre toutes les responsabilités et qui les assume, et on se situe dans la droite ligne de tout ce que les premiers ministres, peu importe leur allégeance politique, ont défendu... tous les premiers ministres du Québec ont défendu jusqu'ici, et tous les ministres des Finances aussi, bon, pour tenir compte de notre spécifique, de notre réalité propre et de l'initiative que nous pourrions prendre dans un ou l'autre secteur financier, et je pense qu'il faut conserver ce pouvoir d'initiative. Et, comme légalement il est très clair que cette responsabilité relève de notre juridiction ? ce n'est pas le bon terme, là, mais de notre...

Une voix: ...

Mme Marois: Pardon?

Une voix: Compétence.

Mme Marois: ... ? de notre compétence, voilà, on ne va pas renoncer à ça, ça va de soi. Et, actuellement, on entend dans les cercles financiers que, cependant, la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario aimerait bien devenir éventuellement la Commission des valeurs mobilières pancanadienne. Qu'est-ce que c'est que la position de l'ACCOVAM à ce sujet?

Le Président (M. Paré): ...

n(16 h 10)n

M. Lemay (Jacques): Écoutez, je pense que l'ACCOVAM cherche des moyens d'harmoniser, comme vous venez de le suggérer. Il y a plusieurs avenues pour harmoniser les législations de valeurs mobilières. Je pense qu'on peut convenir dans cette salle que l'adoption d'une législation éventuelle où on ne verrait qu'une seule commission des valeurs mobilières au Canada est impossible, et nous en conviendrons. Est-ce que la perception de cette impossibilité-là ou très grande improbabilité est très claire à Toronto? Je n'en suis pas certain, mais elle est claire dans mon esprit. Et, donc, en ce sens-là, je pense qu'on n'a pas de débat très long à faire.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Lemay. M. le député de Masson, s'il vous plaît.

M. Labbé: ...dans le même sens, M. le Président. C'était, en fait, toute la question d'autonomie de la Commission des valeurs mobilières par rapport justement à la structure, leur réaction par rapport à Toronto. Alors, ça a bien répondu.

Le Président (M. Paré): Donc, la réponse vous suffit?

M. Labbé: Oui.

Le Président (M. Paré): Mme la ministre, avez-vous d'autres interventions?

Mme Marois: Oui. Il y a un mémoire qui a été produit récemment, on dit le rapport préliminaire du comité d'étude de cinq ans sur la Loi sur les valeurs mobilières de l'Ontario. Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion d'en prendre connaissance, mais on souligne dans ce rapport... Spécifiquement sur l'ACCOVAM, on dit ceci: Question urgente concernant le régime d'autoréglementation en Ontario et le conflit d'intérêts potentiel entre le rôle réglementaire et le rôle d'intérêt public d'un OAR, donc d'un organisme d'autoréglementation, et ses objectifs commerciaux. Et, on cite formellement, on dit: Par exemple, au Canada, l'ACCOVAM est à la fois un OAR et une association professionnelle des maisons de courtage en valeurs. Et on dit: Est-ce que ça ne risque pas de présenter un conflit, un possible ou un potentiel conflit d'intérêts? Et, comme on le discute ici, je me dis: Vous avez sûrement réfléchi à cette question aussi parce qu'on est confronté à la même réalité.

M. Lemay (Jacques): Peut-être un commentaire... Pardon.

Le Président (M. Paré): M. Lemay.

M. Lemay (Jacques): Peut-être un commentaire. L'autoréglementation, ça implique un conflit d'intérêts, vous allez en convenir. Maintenant, il faut gérer ce conflit d'intérêts là. Je vais laisser mon collègue...

Mme Marois: Remarquez que, nous, la loi prévoit qu'il y a des organismes d'autoréglementation, donc... Mais, comme ce rapport le soulevait, il faisait référence en particulier à l'ACCOVAM, je me suis dit: Sûrement que l'ACCOVAM a dû réfléchir à ces questions-là et avoir un point de vue là-dessus.

Le Président (M. Paré): M. Oliver.

M. Oliver (Joseph J.): Oui. On est en train de préparer une réponse au comité, mais, évidemment, Mme la ministre, comme vous avez dit, on a réfléchi sur la question. Le vrai conflit, comme mon collègue a suggéré, c'est le conflit d'intérêts dans l'autoréglementation, c'était absolument évident. Mais on a des «checks and balances» pour protéger les directeurs indépendants, l'approbation de tous les règlements, la surveillance de la Commission de l'Ontario, du Québec et partout au Canada, et le fait que nos règlements sont publiés, et tout ça. Alors, comme ça, on gère les conflits dans le rôle de régime d'autoréglementation.

Alors, la question, c'est que si on représente l'industrie, est-ce que le conflit est exagéré? Et, premièrement, il faut dire que la plupart des représentations ne s'occupent pas du tout de la réglementation, elles s'occupent de la politique fiscale, de la question d'accès aux marchés étrangers. Alors, ça veut dire qu'il y a beaucoup de sujets qui ne s'occupent pas de la réglementation. Alors, on peut mettre ces sujets à côté. La question, c'est: Est-ce qu'il y a un conflit qui peut arriver entre les intérêts commerciaux de nos membres dans la perspective de la réglementation? Si on examine un OAR dit pur comme le MFDA, qui n'est pas reconnu ici, je comprends, mais le MFDA est en train de... est reconnu dans le reste du Canada... Quand on a créé le livre de règlements, les courtiers, les distributeurs de fonds mutuels étaient impliqués dans chaque stade de la création des règlements dans une manière tout à fait semblable que le moyen par lequel nos membres, à l'ACCOVAM, sont engagés dans le développement des règlements. Alors, à notre point de vue, il y a un conflit théorique qui est ajouté au conflit qui existe déjà dans l'autoréglementation, mais on ne voit pas un conflit additionnel qu'on ne peut pas régler d'une manière adéquate.

Mme Marois: Ça va. Je vous remercie.

Le Président (M. Paré): Merci beaucoup, M. Oliver. Merci, Mme la ministre, votre temps est épuisé. Maintenant, Mme la députée de Beauce-Sud m'a demandé la parole.

Mme Leblanc: Oui. Merci, M. le Président. Alors, je vais te repasser la parole, je n'en ai pas pour longtemps. On sait, et vous savez, que le projet de loi n° 107 prévoit le fait de créer, si vous voulez, des organismes d'autoréglemention, des OAR, et, de toute évidence, il apparaît que l'ACCOVAM pourrait, sans trop de difficulté, se faire reconnaître comme un organisme d'autoréglementation. Vous avez soulevé dans votre présentation votre crainte à l'effet qu'il y ait un vide juridique entre le moment où l'Agence sera créée et le moment où l'ACCOVAM sera reconnue par l'Agence, et je pense que vous avez tout à fait raison de vous inquiéter, puisqu'il n'y aucune mesure transitoire de prévue au projet de loi. La ministre a parlé tantôt de terrain d'entente, mais est-ce que ce terrain d'entente là sera conclu avant l'adoption du projet de loi n° 107 ou après l'adoption? Toute la différence est là, parce que, si on lit l'article 57, qui vous concerne, qui concerne les organismes d'autoréglementation, on lit bien, c'est très clair, qu'«une personne morale ou une société ne peut encadrer ou réglementer la conduite de ses membres relative à l'exercice au Québec d'une activité régie par une loi visée à l'Annexe 1 que si elle est reconnue par l'Agence à titre d'organisme d'autoréglementation, aux conditions que cette dernière détermine».

Alors, est-ce que vous souhaitez vraiment qu'il y ait des amendements apportés au projet de loi n° 107 dans le sens qu'on prenne la peine de préciser ces mesures transitoires là avant l'adoption du projet de loi n° 107?

M. LaRochelle (Luc): Le dossier de la reconnaissance est ouvert depuis longtemps, c'est évident. C'est une espèce de valse, là, qui dure depuis des années entre l'ACCOVAM et le gouvernement. Je pense que c'est un petit peu inquiétant de se faire répondre: Pendant l'année de transition, vous en discuterez, parce qu'une des réalités, c'est que la Commission des valeurs mobilières, actuellement, qui va rester, j'imagine, en fonction jusqu'à ce que l'Agence existe, cette Commission-là, elle a pris, dans certains dossiers que je ne nommerai pas maintenant, l'attitude de dire: Bien, écoutez, là, on ne peut pas prendre de grosses décisions, parce qu'on sait qu'on va être remplacé d'ici un an par l'Agence. Autrement dit, il y a le danger que la Commission ne prenne pas la responsabilité de reconnaître une organisation qu'elle n'a pas reconnue pour toutes sortes de raisons depuis une quinzaine d'années que je m'occupe de ce dossier-là, et il y a eu d'autres avocats avant. Donc, je pense qu'il est extrêmement important qu'on encadre de façon beaucoup plus précise que la ministre semble vouloir le faire ce dossier-là. Il est important... Soit ce sera décidé avant ou après l'entrée en vigueur de cette loi-là, mais je ne pense pas qu'on puisse dire: Pendant la période de transition, la Commission le fera, parce que la réalité, c'est qu'elle ne le fera pas pour des raisons très évidentes.

Le Président (M. Paré): Merci, M. LaRochelle. Mme la députée de Beauce-Sud.

Mme Leblanc: Ça va, M. le Président.

Le Président (M. Paré): Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. Alors, d'abord, je veux vous féliciter pour votre mémoire. À la lecture de votre mémoire, essentiellement, vous recommandez, pour la Commission des valeurs mobilières, le statu quo si je comprends bien.

Le Président (M. Paré): M. Lemay.

M. Lemay (Jacques): Ce que nous disons spécifiquement, la phrase, je pense, se lit comme suit: Nous ne souhaitions pas la disparition de la Commission des valeurs mobilières. Et ce que nous souhaitons, c'est qu'elle soit... d'une certaine façon, que son intégrité ? peut-être pas son intégralité, mais son intégrité ? soit conservée et qu'on se serve de sa crédibilité et de son expertise pour bâtir cette nouvelle structure, cette nouvelle Agence.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Lemay. Madame...

n(16 h 20)n

Mme Jérôme-Forget: Est-ce que, à cet égard, vous seriez plus confortables avec une agence axée principalement sur la Commission des valeurs mobilières, comme ce sera le cas en Ontario notamment, plutôt que le contraire, actuellement, où l'Agence devient un organisme beaucoup plus administratif? Je dirais même également axé beaucoup sur l'IGIF, mais je dirais plutôt un organisme administratif. Est-ce que... La question est simple, est-ce qu'une formule plus axée sur le modèle de l'Ontario vous rendrait confortables?

Le Président (M. Paré): M. Lemay.

M. Lemay (Jacques): Bien, si on retient la collégialité, le caractère de la Commission, si on se demande un peu quel nom on devrait donner à cet organisme-là, qui serait, d'une certaine façon, séparé, inclus ou complémentaire à l'Agence, on pourrait l'appeler un office, un bureau. Pourquoi pas l'appeler «commission». Comme elle s'occuperait de valeurs mobilières, pourquoi pas l'appeler «Commission des valeurs mobilières»? Donc, d'une certaine façon, ce que nous vous demandons, c'est: Conservons cette identité-là ou cette intégrité-là, pour ne pas dire l'identité de la Commission. Ou encore servons-nous de cette Commission-là, un peu comme ça s'est fait en Ontario, pour intégrer d'autres activités qui ont besoin de réglementation et qui sont rapprochées, d'une certaine façon, de la Commission. Donc, le modèle de l'Ontario conserve l'expertise, conserve la crédibilité et la représentativité tant au niveau de l'Ontario qu'au niveau national ou international. Si ce modèle rencontre ces préoccupations-là, pourquoi pas?

Le Président (M. Paré): Merci, M. Lemay. Mme la députée.

Mme Jérôme-Forget: Alors, imaginons qu'on l'appelle «agence» et qu'elle soit complètement orientée plus vers les commissions des valeurs mobilières, un peu ce qui s'est passé en Ontario. Évidemment, je ne suis pas ministre, alors c'est clair que ça ne se passera pas comme ça, probablement, mais, on ne sait jamais, l'avenir peut apporter des changements. On ne sait jamais. Alors, est-ce que vous seriez confortables à ce moment-là? Est-ce que le nom vous gêne, d'une agence incluant la Commission des valeurs mobilières?

Le Président (M. Paré): M. Lemay.

M. Lemay (Jacques): Pas très sérieusement. Si le vocable anglais était «commission», peut-être que ça fonctionnerait. Il va falloir faire un travail important pour bâtir la crédibilité de cette Agence-là. Si on change de nom, hein, il y a une raison. On va devoir convenir qu'on en discute de la crédibilité maintenant entre nous et que cette crédibilité-là, on va devoir l'établir pour nous, on va devoir s'en satisfaire nous-mêmes avant de pouvoir aller vendre cette Agence-là au niveau national et international.

Le président-directeur général de l'Agence va avoir les mains pleines. Il va donc devoir faire en plus son démarchage, ses représentations pour expliquer aux gens: Écoutez, on n'est pas «all things to all people», là, on n'est pas un conglomérat, là, on est spécialisé sous certains aspects de valeurs mobilières. Il va y avoir une petite explication, là. Il va falloir arriver une journée ou deux avant les réunions d'autorités en valeurs mobilières pour expliquer ce que c'est, cette Agence-là, et le temps qu'on va prendre pour expliquer cette nouvelle réalité là, je ne suis pas sûr qu'on va gagner beaucoup, là.

Mme Jérôme-Forget: On ne fera pas autre chose. Alors, essentiellement, ce que vous dites dans votre mémoire, notamment, vous tenez beaucoup au commissaire, puisqu'il donne le volet quasi judiciaire à la Commission des valeurs mobilières, donc sa crédibilité, indépendance même à l'endroit de sa présidente, d'accord? Et, par conséquent, c'est le volet que vous voulez conserver absolument pour vous allier aux partenaires de même type, que ce soit en Ontario ou aux États-Unis, et que, par conséquent, l'image dans ce secteur-là serait très importante pour la crédibilité et la reconnaissance mutuelle.

Le Président (M. Paré): M. Lemay.

M. Lemay (Jacques): Oui, la perception jusqu'à un certain point, c'est la réalité effectivement.

Mme Jérôme-Forget: D'accord. Moi, je n'ai plus de questions, est-ce que...

Le Président (M. Paré): Vous avez terminé? Merci, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Jérôme-Forget: ...un nouveau gouvernement un jour.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Lemay et les gens qui vous accompagnent, de votre présentation et de votre contribution à cette commission. Donc, j'appellerais la Commission des valeurs mobilières du Québec.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Paré): ...quelques instants pour attendre l'arrivée de nos gens de la Commission des valeurs mobilières du Québec.

(Suspension de la séance à 16 h 27)

(Reprise à 16 h 28)

Le Président (M. Paré): À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, nous recevons la Commission des valeurs mobilières du Québec, représentée par Mme Carmen Crépin, la présidente, accompagnée de M. Daniel Laurion et Mme Linda Levasseur. Mais je pense qu'il y a quelques erreurs. Donc, je vous donne la parole, Mme Crépin, et présentez les gens qui vous accompagnent.

Commission des valeurs
mobilières du Québec (CVMQ)

Mme Crépin (Carmen): D'accord. Alors, je vous remercie. Alors, effectivement, je suis accompagnée de M. Daniel Laurion, qui est directeur général exploitations; de M. Viateur Gagnon, qui est membre de la Commission et vice-président. Je suis également accompagnée des membres de la Commission, qui sont ici dans la salle, Me Claire Richer, M. Jean-Marie Gagnon, Me Micheline Brochu de même que Me Mark Rosenstein.

Le Président (M. Paré): Bonjour et bienvenue. Maintenant, Mme Crépin, je vous rappelle que vous avez 20 minutes pour nous présenter votre mémoire ? vous avez l'habitude de cette commission, on vous a reçue à quelques occasions ? et, par la suite, les deux groupes parlementaires auront 20 minutes pour avoir des questions et des échanges avec vous. Merci.

Mme Crépin (Carmen): Je vous remercie. Avant de débuter, j'aimerais préciser, pour le bénéfice de la ministre des Finances et pour les membres de cette commission, que je n'ai accordé aucune entrevue, hier, à Radio-Canada. M. Michel Morin a utilisé des photos d'archives sans cependant préciser qu'il utilisait des photos d'archives. Je tiens donc à réitérer ? et le mémoire de la Commission le démontre abondamment ? que je souscris, de même que la Commission, au principe du rapport Martineau qui a inspiré le projet de loi. La CVMQ n'avait d'ailleurs accordé aucune entrevue sur ce projet par déférence pour la ministre et pour les parlementaires.

n(16 h 30)n

L'objectif de la Commission, dans l'analyse du projet de loi, vise à faire en sorte que l'Agence soit pleinement crédible et opérationnelle lors de sa mise en place. Et je remercie à nouveau la ministre d'avoir suscité une occasion d'échange comme celle que nous avons aujourd'hui.

Alors, plus officiellement, M. le Président, Mme la vice-première ministre et ministre des Finances, membres de la commission des finances publiques, c'est toujours un honneur pour la Commission des valeurs mobilières du Québec de participer aux réflexions de la commission des finances publiques. Les discussions que nous avons eues, au cours des trois dernières années, démontrent votre intérêt soutenu pour le fonctionnement et le développement des marchés financiers du Québec.

Le projet de loi, soumis à l'examen de votre commission, s'inspire des travaux du groupe de travail sur l'encadrement du secteur financier présidé par Me Yvon Martineau et qui a remis son rapport en décembre 2001. Les membres de ce groupe de travail ont ainsi apporté une contribution importante à la réflexion sur les activités de réglementation en matière financière au Québec. La Commission des valeurs mobilières du Québec partage et appuie les principes directeurs énoncés dans ce rapport.

En particulier, la Commission est sensible à l'importance de faciliter l'accès des consommateurs aux services auxquels ils sont en droit de s'attendre ainsi qu'à la nécessité d'alléger le fardeau administratif des émetteurs et des intermédiaires financiers. C'est en ce sens, face aux consommateurs, que la recommandation de créer un guichet unique prend tout son sens. Face aux émetteurs et aux intermédiaires financiers, nous tenons à qualifier cet appui notamment en raison des événements qui ont marqué les marchés financiers au cours des derniers mois.

Il n'est pas exagéré de dire que les marchés financiers mondiaux, incluant ceux du Québec, traversent actuellement une crise de confiance majeure. Le maintien, certains diront même le rétablissement de cette confiance, passe notamment par un encadrement réglementaire rigoureux. Aussi, la volonté d'alléger le fardeau réglementaire ne doit pas aboutir à un relâchement de la vigilance, ni à une réduction des exigences, ni même à une diminution de la capacité de policer les marchés. Pour les émetteurs et pour les intermédiaires, il peut être frustrant de s'acquitter d'obligations de transparence et de rendre des comptes à des autorités réglementaires. Les événements récents aux États-Unis nous rappellent cependant que ces obligations ne sont pas le fruit de caprices, elles sont une condition indispensable au maintien de la confiance dans les institutions et au maintien de la confiance dans les mécanismes et dans les règles du marché. À l'instar des autres législateurs et des autres autorités réglementaires à travers le monde, le Québec doit réaffirmer sa volonté de maintenir les standards les plus élevés sur ses marchés.

Si nous croyons nécessaire de rappeler ce principe aujourd'hui, c'est que le rapport du groupe de travail, dans le contexte où il a été publié, n'y faisait référence qu'accessoirement. Loin de nous l'idée de lui en faire reproche, les événements qui ont mis cette préoccupation à l'avant-scène ont largement été publicisés après la fin des travaux de ce groupe de travail. Il est toutefois crucial de tenir compte de ce nouveau contexte en examinant le projet de loi n° 107.

Par ailleurs, tout autant que par l'encadrement réglementaire comme tel, la crédibilité du marché et la confiance des investisseurs passent par des mécanismes de réglementation et d'autoréglementation à l'abri des conflits d'intérêts. Il est donc essentiel que les dispositions du projet de loi n° 107 contribuent à asseoir la crédibilité de l'Agence sur des bases indiscutables, et ce, non seulement auprès des participants québécois des marchés financiers, mais aussi à l'étranger. Cette crédibilité va donc dépendre de l'image que présentera l'Agence au niveau de son indépendance, de son impartialité et de sa gouvernance tout autant que de sa capacité à assumer ses responsabilités de façon efficace et efficiente. C'est plus particulièrement sur ces aspects que nous voulons attirer votre attention aujourd'hui.

Le projet de loi n° 107 propose une structure qui concentre le pouvoir décisionnel de l'Agence sur une seule personne. Dans le secteur des valeurs mobilières, cela revient à dire que les fonctions de réglementation et de supervision, les fonctions quasi judiciaires et le rôle de tribunal administratif actuellement exercés de façon collégiale par la Commission le seront par une seule personne. La concentration de tous les pouvoirs entre les mains d'une seule personne, qui sera à la fois responsable de la gestion de l'Agence et dépositaire de tous ces pouvoirs décisionnels en première instance, place cette dernière dans une situation constante d'apparence de conflits d'intérêts et soulèvera des questions récurrentes sur son impartialité. La délégation de certaines de ces responsabilités au personnel de l'Agence ne changera pas cette situation, puisque le président-directeur général demeurera, en vertu de la loi, le supérieur hiérarchique ultime de ces mandataires. De plus, rien dans le projet de loi n'impose l'obligation à cette personne de tenir des audiences pour entendre les parties en première instance ni ne fournit de garanties procédurales pouvant permettre aux parties impliquées de faire valoir leurs droits ou leurs arguments. Enfin, le rôle du Bureau de révision demeure très limité.

Outre l'indépendance, la collégialité et l'expertise, la structure proposée remet en question l'exclusion de la CVMQ de la réforme des tribunaux administratifs, exclusion qui a à nouveau été confirmée par le projet de loi n° 57, sanctionné en octobre 2001. Le projet de loi n° 57 a renforcé les mécanismes déjà existants de la Loi sur les valeurs mobilières en interdisant, notamment, à un membre de siéger s'il a examiné une affaire en vue d'instituer une enquête. L'augmentation du nombre de membres visait aussi à renforcer l'indépendance et l'expertise en permettant de constituer plus systématiquement des bancs de trois membres même si le quorum est de deux membres.

Mais, par-delà les considérations liées à la jurisprudence et à l'impartialité, la concentration des pouvoirs entre les mains d'une seule personne soulève d'autres enjeux en matière d'indépendance. Précisons tout de suite que personne ne conteste ni l'autorité ni la légitimité des gouvernements responsables de constituer des autorités de réglementation, d'en définir les pouvoirs et les attributions, d'en nommer ou d'en révoquer les dirigeants. Mais, une fois en place et dans la mesure où ils s'acquittent de leur mission, il est indispensable que ces organismes publics de réglementation disposent de la latitude nécessaire pour remplir leur rôle.

Comme le rappelait à juste titre le rapport du groupe de travail, ce principe d'indépendance fait explicitement partie des 30 principes de régulation, établis par l'Organisation internationale des commissions de valeurs, qui précisent les normes minimales de qualité que doivent chercher à respecter les organismes nationaux de réglementation. Ces principes sont d'ailleurs utilisés par le Fonds monétaire international et par la Banque mondiale pour évaluer la qualité des marchés financiers et des régimes de réglementation, incluant ceux du Canada et du Québec.

Outre l'indépendance, le projet de loi soulève des enjeux en matière de gouvernance. L'Agence, qui héritera des responsabilités actuelles de la CVMQ, devra rapidement se positionner et asseoir sa crédibilité en matière de gouvernance. Rappelons que, pour l'essentiel, les règles de gouvernance visent à établir les mécanismes qui permettent aux actionnaires et à la direction des entreprises de développer des relations mutuellement bénéfiques et soucieuses de leurs droits et responsabilités. Elles ont pris une importance accrue depuis les années quatre-vingt-dix, notamment en ce qui concerne le rôle et la composition des conseils d'administration et le cumul des fonctions de direction.

Les enjeux de la gouvernance ne se limitent pas aux seules entreprises. Ils sont souvent au centre des discussions que la CVMQ poursuit avec les organismes d'autoréglementation lorsque vient le moment de traiter leur demande de reconnaissance ou d'approbation de règles. À cet égard, le projet de loi n° 107, avec le Conseil consultatif de régie administrative, s'éloigne des standards. Le rôle qui lui est dévolu est même, à certains égards, contradictoire avec l'autorité donnée au président-directeur général, qui est la base même de la structure proposée pour l'Agence. Sur cette question également, la nouvelle Agence ne peut qu'être interpellée en regard de sa crédibilité et de son efficacité.

Un autre sujet sur lequel nous aimerions attirer votre attention est celui des organismes d'autoréglementation. Nous partageons les objectifs sous-jacents au projet de loi en cette matière, lesquels visent à assurer que les OAR actifs en valeurs mobilières fournissent les garanties nécessaires de représentativité, d'équité et de transparence. Nous sommes également d'accord que, dans le cas des dossiers qui concernent des membres ou des activités localisés au Québec, ces OAR devraient prévoir des mécanismes décisionnels reposant sur des intervenants québécois.

Nous croyons toutefois que le projet de loi devrait fixer ces grands objectifs tout en confiant à l'Agence le soin d'en préciser les modalités. On devrait donc faire confiance à l'Agence et lui donner tous les pouvoirs nécessaires. Ce faisant, on laisse également, ainsi, la porte ouverte à des ententes de réciprocité ou de reconnaissance mutuelle avec d'autres régulateurs. De telles ententes existent déjà à l'heure actuelle; elles doivent faire l'objet d'autorisation de la part des autorités gouvernementales concernées. Les interventions autres devraient se faire de manière exceptionnelle lorsqu'on aura de bonnes raisons de croire que l'intérêt public est compromis.

n(16 h 40)n

Revenons sur les gains qui peuvent résulter du regroupement d'organismes de réglementation. Les expériences de l'étranger ? en Europe notamment ? ont fait récemment apparaître certains constats sur les activités qui gagnent à être regroupées et sur celles entre lesquelles il serait préférable de garder une certaine distance au plan fonctionnel. En effet, de plus en plus, il ressort que les activités de réglementation de marché ont intérêt à être regroupées ensemble de la même façon que les activités de réglementation prudentielle ont intérêt à l'être de leur côté. L'intégration de ces deux secteurs amène des difficultés de fonctionnement liées à leur nature et à leurs différences propres. C'est pourquoi l'évolution la plus récente, avec la législation qui vient d'être adoptée par les Pays-Bas et les annonces de la France, s'articule sur des regroupements de ces secteurs suivant une approche dite «Twin Peaks». Je suis désolée, nous n'avons pas encore trouvé une version française qui reflète la même idée. Cette approche «Twin Peaks»repose sur une différence entre la réglementation prudentielle et la réglementation de marché.

En effet, la réglementation prudentielle se préoccupe surtout des seuils de capitalisation et de la solvabilité des institutions. Elle se caractérise par des évaluations et par une gestion de risques systémique qui appelle le plus souvent une grande confidentialité. Les régulateurs prudentiels cherchent le plus possible à régler les problèmes avant qu'ils ne soient connus pour empêcher leur propagation à l'ensemble du système financier. C'est donc le principe de confidentialité qui prend le pas pour établir les niveaux de contrôle souhaitables.

À l'opposé, la réglementation de marché qui prédomine en valeurs mobilières repose, d'une part, sur l'élaboration de règles d'encadrement et, d'autre part, sur des principes de divulgation et de transparence qui visent à assurer l'intégrité des marchés. Il n'est donc pas surprenant ? et les événements récents, particulièrement aux États-Unis, le mettent en lumière ? que les autorités de valeurs mobilières mettent l'accent sur le développement, par exemple, de régimes d'information continue, soit l'information accessible le plus rapidement possible à tous les participants du marché en même temps.

La dichotomie du secteur des valeurs mobilières et de l'approche prudentielle, qui ont chacun leur raison d'être, se poursuit dans la façon dont s'exercent les activités d'«enforcement». Les documents d'analyse de la Commission soulèvent à cet égard des problèmes d'application au secteur des valeurs mobilières, secteur qui appelle à l'heure actuelle des actions encore plus nombreuses et plus sévères. La transparence du secteur des valeurs mobilières prend ici un sens additionnel avec l'effet dissuasif de la tenue d'audiences publiques et de sanctions connues publiquement. Nous vous joignons quelques notes sur cette approche «Twin Peaks» qui démontrent qu'elle s'intègre avec les objectifs du groupe de travail et du projet de loi n° 107 tout en répondant non seulement aux caractéristiques propres à chacun des secteurs concernés, mais aussi aux nouveaux impératifs de l'ensemble des marchés.

Au nom des membres de la Commission ici présents et au nom du personnel ici représenté, je vous remercie.

Le Président (M. Paré): Merci, Mme Crépin. Mme la ministre.

Mme Marois: Alors, merci beaucoup, M. le Président. Je vous remercie de cette présentation et de l'excellent mémoire que vous nous déposez. Je vous remercie aussi de vos commentaires préalables à la présentation de votre mémoire. Je pense que tous les membres de la commission et moi-même apprécions de toute façon l'attitude que vous avez toujours eue à titre de président de la Commission des valeurs mobilières, dans le respect que vous avez du rôle des parlementaires, et on vous en sait gré. Alors, je vous remercie de ces commentaires. Je n'avais aucun doute, d'ailleurs.

Bon. Je veux revenir maintenant... Parce qu'il y a beaucoup de propositions que vous faites ou du moins d'éclairages que vous nous apportez sur lesquels, je pense, nous devons pouvoir engager la discussion. D'abord, peut-être juste une question très, très concrète: Quand vous citez, dans la synthèse de votre mémoire et que vous nous avez présenté, en ce qui concerne l'OICV, où vous indiquez que les interventions en matière réglementaire, par exemple, devraient se faire de manière exceptionnelle lorsqu'on aura de bonnes raisons de croire que l'intérêt public est compromis et que cela va respecter ainsi les règles de l'OICV. Et je veux vous rassurer à cet égard. C'est vraiment l'intention du législateur. L'OICV indique dans ses règles qu'il ne convient pas dans certaines circonstances d'inclure un pouvoir de décision sur les questions techniques au jour le jour, et c'est surtout ce que nous ne voulons pas faire, d'intervenir au jour le jour, mais nous voulons pouvoir, lorsque des assujettis sont concernés, approuver les règlements, et ça ne concerne pas la régie de l'entreprise au quotidien. Ça, c'est important de le dire, la régie de l'institution au quotidien, pour ne pas qu'il y ait d'ambiguïté. D'ailleurs, on l'a précisé devant d'autres représentations qui nous ont été faites à cet égard.

Une chose qui me préoccupe beaucoup aussi, c'est évidemment tout ce qui s'est passé du côté de nos voisins américains dans les derniers mois et dernières semaines. Évidemment, ça soulève beaucoup de questions, beaucoup d'inquiétude, et vous aviez fait parvenir d'ailleurs au président de la commission des finances publiques, concernant le cas Enron, une série de questions et de commentaires qu'il vous apparaissait pertinent d'aborder éventuellement avec les membres de la commission ? parce que les membres de la commission souhaitent débattre de cela. Et, vous, vous dites dans cette lettre: «Plusieurs enjeux, qui ne sont pas nouveaux et qui ont fait l'objet ces dernières années d'interventions précises des autorités réglementaires et des organismes de normalisation des services financiers, font en sorte que nous pouvons regrouper ces enjeux sous trois grandes catégories.» Et là on nous dit: «Les normes comptables actuellement en vigueur au Québec et dans les autres pays suffisent-elles à assurer que les informations financières publiées par les entreprises reflètent fidèlement la situation réelle de ces entreprises, incluant une appréciation valable de leur profil de risque? Les mécanismes reconnus de gouvernance d'entreprise offrent-ils des protections adéquates aux actionnaires qui veulent s'assurer d'une saine gestion?» Bon, je ne continue pas, là, c'est une série de questions que vous souleviez qui sont tout à fait pertinentes et intéressantes. Et vous soulignez dans votre présentation aujourd'hui que le contexte nord-américain a changé depuis le dépôt du rapport Martineau et, donc, qu'il faudrait se préoccuper de ces questions.

Mais ce que je veux soulever auprès de vous, c'est que, ces questions que vous soulevez, elles sont pertinentes, elles doivent obtenir réponse, surtout, mais la loi que nous étudions aujourd'hui, qui est une loi que nous étudierons éventuellement et sur laquelle nous nous penchons aujourd'hui, est une loi qui regroupe des institutions sans changer nécessairement les règles en ce qui concerne les matières comptables de normalisation ou autres qui, elles, devront être changées éventuellement, à mon point de vue, pour être resserrées. Je crois qu'on devrait répondre positivement à un certain nombre de questions que vous posez ici et, dans un autre forum, avoir cette discussion, probablement à la commission, ici, pour que cela amène des changements dans les lois qui encadrent les organismes et réglementent les entreprises.

Alors, est-ce que vous partagez mon analyse à ce point de vue là que la loi actuelle n'aborde pas cette question-là, parce qu'elle n'est qu'une loi qui restructure les institutions, mais qu'elle ne touche pas à l'essence même de chacune des institutions et à leur rôle propre, ce que nous devrions faire éventuellement, et toucher, donc, les questions que vous soulevez ici?

Le Président (M. Paré): Mme Crépin.

Mme Crépin (Carmen): En fait, si je prends un exemple avec l'analyse que nous avons faite sur les dispositions en matière d'«enforcement»... Là où je dis que les autorités américaines nous interpellent, lorsque vous regardez, par exemple, la loi Sarbanes-Oxley qui vient de sortir aux États-Unis, il y a des changements dans les règles de gouvernance, des changements dans les règles de valeurs mobilières, des changements dans les normes comptables, et la pression de ce qui se passe aux États-Unis est très forte pour qu'on adopte les mêmes règles.

Ce que nous avons soulevé à l'heure actuelle dans le projet de loi n° 107, ce sont, en matière d'«enforcement», certaines applications nouvelles par rapport à la loi actuelle des valeurs mobilières qui nous apparaissent intéressantes, mais soulever plus de problèmes que n'en régler par rapport à ce qui peut nous arriver des États-Unis. Donc, en ce sens-là, il y a une pression publique très forte pour que les autorités réglementaires fassent de l'«enforcement» de façon efficace, qu'elles en fassent plus. Il y a même une pression pour que, sur certains sujets, y compris même des sujets de régie d'entreprise, on puisse assortir des sanctions de peine de prison. Les analyses que nous avons faites sur certains éléments du projet de loi nous apparaissent affaiblir la loi actuelle, plutôt, par rapport à la pratique que nous avons dans le secteur des valeurs mobilières. D'ailleurs, on a déjà transmis des propositions de modification au personnel du ministère des Finances sur ces dispositions spécifiques là.

n(16 h 50)n

Le Président (M. Paré): Merci.

Mme Marois: D'accord. Mais on convient que, pour aller plus loin, c'est des changements d'un autre ordre que ceux qu'on propose ici.

Mme Crépin (Carmen): La structure est une chose; les pouvoirs qu'on donne aux autorités réglementaires en sont une autre.

Mme Marois: Exactement. Bon. Alors, on est d'accord, et un certain nombre des recommandations que vous nous faites et qui sont aux Finances sont actuellement sous évaluation et pourront être retenues. D'ailleurs, je veux rassurer les membres de la commission et les gens qui nous écoutent que nous... j'ai une très grande préoccupation quant à la nécessité de mieux encadrer, d'être plus exigeant, d'avoir des règles de plus grande transparence encore, s'il en est, d'avoir aussi des pénalités plus significatives lorsqu'on voit comment on a déjoué les systèmes du côté américain et les impacts que ça a sur tout, et sur les épargnants et sur le personnel de ces entreprises. On pense à Enron, bien sûr, mais on a vu qu'il y avait d'autres exemples pas plus heureux et tout aussi condamnables, si on veut. Et je pense qu'on doit faire le maximum de ce qui est en notre pouvoir pour agir en conséquence, ici, dans cette perspective de mieux protéger les intérêts du public. Et tout ce que nous pourrons faire, nous le ferons.

Bon. Maintenant, je veux revenir sur évidemment toute la question de l'indépendance et de l'impartialité d'une nouvelle institution comme l'Agence. Actuellement, la Loi sur les valeurs mobilières concentre sur les commissaires encore plus de pouvoirs, puisque les commissaires entendent même les révisions, hein, c'est bien ce qui se passe. Et, dans le cas de la loi n° 107, ce qu'on propose, c'est que ce soit un bureau indépendant qui procède à la révision. Est-ce qu'à ce moment-là ça n'introduit pas plus d'impartialité et, par le fait même ? je me répète ? d'indépendance par rapport aux décisions de la Commission à l'heure actuelle et vis-à-vis celles que pourrait prendre l'Agence dans un tel contexte? Je pense que vous me suivez bien.

Le Président (M. Paré): Mme Crépin.

Mme Crépin (Carmen): Je comprends, je pense, votre idée. Si je regarde le fonctionnement actuel, je vous dirais que... Prenons l'exemple de l'analyse de prospectus ou d'une demande de dispense, ce sont des pouvoirs qui sont souvent exercés par la Commission mais délégués au personnel. Donc, la décision se prend par du personnel spécialisé en première instance.

Mme Marois: Et pas par la loi. Pas par la loi, par vos propres règles d'organisation et de gérance.

Mme Crépin (Carmen): C'est la loi qui prévoit que... C'est la loi. Toutes les commissions de valeurs mobilières sont structurées de la même façon...

Mme Marois: Mais que vous pouvez déléguer, c'est dans la loi.

Mme Crépin (Carmen): Que l'autorité ultime est exercée, mais qu'il y a toutes les opérations au jour le jour et de contact avec les émetteurs ou les intermédiaires qui se prennent par le personnel. Donc, ça permet de rencontrer les demandes avec efficacité et célérité. S'il y a des problèmes, il y a un appel au niveau de la Commission. Il y a quand même certains types de décision que la Commission ne délègue pas. Par exemple, lorsque vient le temps de suspendre un courtier, c'est clair, ce courtier-là, même si le personnel a une opinion, il a le droit d'être convoqué publiquement devant la Commission, d'être représenté par avocat et de se faire entendre. Dans le cas de la loi n° 107, la décision est prise en première instance sans qu'il ait... en tout cas, la loi ne répond pas au principe de représentativité qu'un justiciable, dans une circonstance comme celle-là, pourrait avoir.

Mme Marois: C'est ça. En fait, on applique essentiellement les principes de la Loi sur la justice administrative qui nous permet d'assurer, croyons-nous, une impartialité, la transparence, les règles d'équité, de justice. Évidemment, tous les droits... les recours sont possibles en dehors de ce mécanisme de révision, bien sûr, mais imaginons... Parce que je comprends ce que vous dites. C'est que, dans le fond, le travail se fait par du personnel, et ensuite les commissaires sont saisis si on ne trouve pas, enfin, entente ou s'il y a désaccord quant aux décisions qui sont prises par le personnel. Mais, ici, on va plus loin, on dit: Ça sera possible, mais, en plus, il y a un Bureau de révision. Alors, il me semblait, là ? j'essaie de voir comment on peut améliorer tout ça ? il me semblait qu'il y avait là, donc, encore, je dirais, plus d'impartialité.

Mme Crépin (Carmen): À l'heure actuelle, c'est clair qu'il y a certaines décisions qui sont déléguées au personnel, mais il y en a d'autres qui sont prises à toutes les semaines par des membres de la Commission. Les membres de la Commission siègent deux à trois fois par semaine en audiences publiques lorsque c'est nécessaire. Donc, ce mécanisme-là existe et il fonctionne, et ce sont donc toujours, lorsque la Commission décide... c'est au moins deux membres, idéalement trois membres, et, par rapport au principe qu'on fait valoir. Comme, par exemple, je suis membre de la Commission, mais j'ai choisi, parce que j'occupe des postes administratifs de supervision du personnel, de ne jamais siéger pour garder un mur de Chine avec le fonctionnement du tribunal.

Notre lecture de l'analyse du projet de loi telle qu'elle est, sur le Bureau de révision, son rôle est extrêmement limité par rapport au fonctionnement actuel. Je comprends de votre intervention que ce n'est peut-être pas ce que vous souhaitez et qu'il y a peut-être moyen de l'améliorer à cet égard-là.

Mme Marois: Exactement, tout à fait. On s'entend très, très bien. Et, par ailleurs, ce que vous décrivez comme processus de fonctionnement de l'actuelle Commission... rien n'empêcherait que, par décision interne, on continue de procéder de cette façon-là.

Mme Crépin (Carmen): Les décisions que nous avons analysées et sur lesquelles nous avons basé nos commentaires font valoir que, sur certaines questions de droit des individus comme, par exemple, la question d'un courtier, il aurait le droit d'être représenté et d'être entendu par un tribunal impartial, et ce, dès le premier niveau de la première instance. Dans le projet de loi n° 107, la première décision qui concerne le courtier pourrait être prise par le P.D.G., dans son bureau, sur dossier, sans que le courtier puisse être représenté par avocat ou se faire entendre. C'est en ce sens-là que nous soulignons que le fait que ça puisse aller en appel au Bureau de révision rend la décision de première instance attaquable.

Mme Marois: O.K. Mais c'est en vertu de la Loi... en fait, pas influencé, mais inspiré de la Loi sur la justice administrative, où nous déjudiciarisons le processus, bien sûr, mais nous n'enlevons pas le droit de recours et le droit de révision. On se comprend bien.

Mme Crépin (Carmen): Mais, à deux reprises, le législateur du Québec a exclu la CVMQ de cette loi-là pour conserver le caractère particulier du tribunal à cause de la nature des dossiers et également, aussi, de l'harmonisation avec les autres juridictions. N'oublions pas, par exemple, que, dans le cas d'une fraude qui pourrait impliquer un émetteur qui a des activités dans plusieurs juridictions au Québec, les commissions peuvent faire enquête ensemble et elles peuvent ensuite faire une audition conjointe pour établir les sanctions. Ce que nous soumettons, c'est que ce processus-là, qui tend à se développer, parce que les enquêtes sont longues, complexes et coûteuses, nous ne le retrouvons pas dans le projet de loi, et ça nous apparaît un élément du fonctionnement du tribunal qui pourrait avoir intérêt à être préservé. Mais je pense que ce n'est pas incompatible, sur le plan philosophique, avec tout ce que vous dites.

Mme Marois: Tout à fait, et moi, dans ce sens, tout ce que nous pourrons revoir et réviser pour le bonifier dans la perspective que vous présentez, je suis tout à fait disponible pour le faire et je demande à mes gens de travailler en ce sens-là, parce que l'objectif que l'on a et qui est le même, j'en suis persuadée, c'est évidemment d'abord l'intérêt public, celui du consommateur, le bon fonctionnement du marché, la crédibilité de l'institution, parce que, ensuite, ça permet, je dirais, à tout le secteur lui-même d'y trouver aussi sa propre crédibilité, parce que les organismes de régulation, d'encadrement sont suffisamment rigoureux et reconnus pour assurer cela.

n(17 heures)n

Alors, je veux vous rassurer dans cette perspective, c'est vraiment ce que nous recherchons ensemble, mais en croyant que le fait que nous retrouvions sous une même agence les différentes responsabilités va permettre de désalourdir les processus, de faciliter l'accès, nous l'espérons aussi, de faire en sorte que l'information circule mieux pour mieux protéger et le consommateur, l'investisseur. On sait qu'il y a eu des situations où il y a des institutions... en fait, des entreprises qui se sont trouvées entre deux chaises au détriment des consommateurs et des investisseurs. Mais c'est vraiment la perspective. Ça va pour l'instant. Je reviendrai, M. le Président.

Le Président (M. Paré): Merci, Mme la ministre. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. Alors, je suis bien contente d'entendre la ministre nous informer qu'elle va apporter des modifications, parce que le mémoire que vous soumettez souligne parfaitement la différence de vision entre ce que vous avez fait jusqu'à maintenant, un tribunal quasi judiciaire, et la proposition actuelle du projet de loi qui nous est soumis, c'est-à-dire une approche beaucoup plus de régie administrative, je dirais le volet prudentiel qui est mis de l'avant par opposition au volet de protection des valeurs mobilières.

Vous avez parfaitement raison de le souligner dans votre mémoire, parce que le climat actuel va dans le sens contraire. Le climat actuel, que ce soient les Enron ou les WorldCom de ce monde, va tout à fait dans le sens opposé, c'est-à-dire de renforcer les commissions de valeurs mobilières. Que ce soit le Securities Commission, que ce soit le Ontario Securities Commission, je veux dire, c'est la tendance actuelle, parce qu'on veut absolument garder ce côté quasi judiciaire à l'organisme qui va arbitrer les conflits dans le secteur financier. Alors, je suis parfaitement d'accord avec vous.

Maintenant, advenant le cas où vous auriez à proposer une agence ou quelque formule de regroupement... Parce qu'il y a des façons de le faire où on peut effectivement regrouper la Commission des valeurs mobilières, et l'Inspecteur général des institutions financières, et y compris le Bureau des services financiers tout en gardant le volet commission des valeurs mobilières, c'est-à-dire le volet quasi judiciaire, est-ce que vous avez des propositions à faire advenant le cas où il y aurait des recommandations de modifications à l'actuel projet de loi? Je ne sais pas si vous voulez répondre, si vous voulez demander à un de vos acolytes de répondre, là, mais j'aimerais ça que vous me donniez une vision de la façon dont vous verriez la Commission des valeurs mobilières fonctionner à l'intérieur d'une agence, à mon avis, en prendre le leadership, mais assumer également une espèce de cohérence dans le secteur financier.

Le Président (M. Paré): Mme Crépin.

Mme Crépin (Carmen): Votre question est difficile en ce sens que de déterminer la formule appropriée, quelque part, une partie de la réponse appartient au législateur. Par contre, à partir de l'analyse que nous avons faite du secteur des valeurs mobilières dans le projet de loi n° 107... Et ce que j'ai trouvé intéressant avec l'approche «Twin Peaks», c'est que c'est une approche qui, éventuellement, rencontre les objectifs recherchés et qui ouvre la porte à toutes les structurations que le législateur pourrait trouver souhaitables en tenant compte des caractéristiques des institutions qui se retrouvent sur notre marché au Québec.

C'est intéressant, ça permet de faire les regroupements fonctionnels ou autres que le législateur du Québec trouve souhaitables en fonction de l'efficacité qu'il recherche. C'est une porte ouverte, c'est une approche, c'est pour ça que nous l'avons soumis. Et elle se développe de plus en plus en Europe, notamment, comme je l'ai dit tantôt, sur la base du fait que, principalement, la réglementation dans le secteur prudentiel repose sur la confidentialité, alors que, dans le secteur des valeurs mobilières, elle repose sur la transparence. Ce sont donc deux principes philosophiques qui s'opposent et la philosophie, donc, derrière ce qu'est en train de faire, par exemple, la France, c'est-à-dire on opère des regroupements, parce que, oui, il y a du mérite à faire des regroupements et de faire travailler ensemble des choses qui devraient être ensemble, mais on garde une certaine différence ou on fait une structure qui va permettre à chaque secteur d'être regroupé suivant ses caractéristiques propres et de pouvoir fonctionner par la suite suivant ses caractéristiques propres et les impératifs et les besoins différents, peut-être, du consommateur et du marché.

Mme Jérôme-Forget: Le «Twin Peaks», là, dont vous parlez, c'est l'idée que les commissaires peuvent fonctionner en tant que commissaires et peuvent fonctionner comme conseil d'administration? Est-ce que c'est bien ça?

Mme Crépin (Carmen): Cette approche laisse toutes les portes ouvertes. Vous pourriez avoir un regroupement avec chacun des secteurs, toutes les portes sont ouvertes avec cette approche-là.

Mme Jérôme-Forget: Mais, excusez-moi, là, je veux comprendre, est-ce que c'est dans la participation de l'IGIF qui aurait une tête et la Commission des valeurs mobilières qui aurait une autre tête ou si c'est le fonctionnement, le «Twin Peaks», de l'Agence ou de l'organisme dans sa totalité, à savoir que ses commissaires ont deux chapeaux, les commissaires sont, d'une part, des commissaires et, d'autre part, ils sont également des membres d'un conseil d'administration? Et, quand ils passent d'une chambre, ils portent le chapeau de Commission des valeurs mobilières? Et, quand ils vont dans l'autre chambre en face, ce sont des membres d'un conseil d'administration?

Mme Crépin (Carmen): L'idée sous-jacente, c'est que chacun des secteurs appelle des expertises différentes. Donc, ce que l'approche... En tout cas, ce que, par exemple, les autorités françaises veulent faire, c'est: On regroupe, par exemple, d'un côté les secteurs de l'assurance, on leur donne les expertises, les conseils d'administration, c'est requis, souhaitable. Et on peut faire le même type de regroupement, mais les deux regroupements peuvent être viables au sein d'une même agence.

Mme Jérôme-Forget: Donc, est-ce que vous voulez dire à ce moment-là... Parce que le «Twin Peaks», c'est très important, là, il faut le comprendre. Est-ce que vous voulez dire, à ce moment-là, que le surintendant responsable des assurances serait autonome du président-directeur général?

Mme Crépin (Carmen): Je n'ai pas poussé la réflexion sur le «Twin Peaks» à ce stade. Ce que je soulève comme préoccupation, c'est que le secteur des valeurs mobilières et le secteur prudentiel ont des philosophies, des expertises différentes. Ce que cette approche permet de faire, c'est de faire un regroupement qui est souhaité, comme la création d'une agence, mais, en même temps, de faire un regroupement qui permet de mettre ensemble des choses qui se préoccupent des mêmes questions et qui ont l'expertise pour les régler. La question de la structure qui l'entoure par la suite, elle peut être beaucoup plus fonction de nos besoins propres ici. L'idée qui est la plus importante, c'est: On met le prudentiel ensemble et on met le secteur des valeurs mobilières ensemble. La structure qui va faire que les deux secteurs fonctionnent, comment ils se coordonnent, elle est ouverte aux besoins que le législateur du Québec peut voir en fonction des institutions qui existent ici.

Mme Jérôme-Forget: Alors, écoutez, j'ai de la misère à comprendre votre «Twin Peaks», là. Parce que je le cherchais, là, puis à quelle page dans votre mémoire est-ce décrit? Je m'excuse, là, parce que...

Mme Crépin (Carmen): On a fait un petit diagramme à la fin de l'allocution.

Mme Jérôme-Forget: O.K. D'accord. Donc, le «Twin Peaks», c'est vraiment deux organismes, l'IGIF et la Commission des valeurs mobilières?

Mme Crépin (Carmen): Le «Twin Peaks», ce sont deux regroupements: un regroupement du secteur prudentiel et un regroupement du secteur des valeurs mobilières avec les structures de coordination qu'on voudra bien y voir.

Mme Jérôme-Forget: D'accord. Et se raccroche le Bureau des secteurs financiers dans chacun des groupes selon qu'il relève de chacun des secteurs.

Mme Crépin (Carmen): Ça peut être une approche.

Mme Jérôme-Forget: D'accord. O.K.

Le Président (M. Paré): Merci, Mme la députée. M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Bergman: Merci, M. le Président. Merci pour votre mémoire, Mme Crépin. Et, annexé à votre mémoire, vous avez un document de réflexion. La section V est intitulée Le projet de loi et l'indépendance et l'impartialité du président-directeur général. Pouvez-vous donner à la commission vos pensées sur l'indépendance et l'impartialité du président-directeur général? Et comment est-ce que qu'un manque d'indépendance et d'impartialité va affecter la crédibilité de l'Agence?

Le Président (M. Paré): M. Gagnon.

n(17 h 10)n

M. Gagnon (Viateur): Le président-directeur général va assumer beaucoup des fonctions qui, à l'heure actuelle, sont remplies par différentes personnes à la Commission. Il y a un petit tribunal, il est tout petit. C'est un tribunal, un bureau de révision, donc ce n'est pas l'important du volume des décisions qu'on prend. Depuis que je suis à la Commission ? ça fait cinq ans ? il y a à peu près 10 décisions qui étaient en appel de... Donc, tout ce qui n'est pas mis dans le tribunal se retrouve ailleurs.

Comme la ministre a dit, la loi n'a pas été changée, donc tous les pouvoirs qui étaient assumés par les commissaires et le personnel, tout ce qui n'est pas au tribunal se retrouve ailleurs. Et, dans ce qui se retrouve ailleurs, ça se retrouve comme... Il y a des fonctions judiciaires, quasi judiciaires, il y a différentes fonctions là-dedans, elles se retrouvent... C'est comme si on donnait aujourd'hui... on abolissait la Commission, on faisait un petit tribunal puis on donnait tous les pouvoirs au personnel de la Commission, pouvoirs judiciaires et tous les autres. Alors, c'est le cumul de ces fonctions-là par ce qui est le personnel de l'Agence, c'est de là qu'origine l'impartialité, la partialité ou l'image de partialité, compte tenu des jugements de la Cour suprême au Canada. Donc, c'est une affaire de structure, là. Donc, la crédibilité, ça, c'est une question de perception, je ne peux pas élaborer beaucoup là-dessus, mais, dans les faits, je peux vous dire que ça ne sera pas très long que la constitutionnalité de cette loi-là va être mise en question par quelqu'un sur lequel la Commission va avoir enquêté et qui ne sera pas satisfait ou qui va avoir certaines craintes, il va soulever l'inconstitutionnalité de cette loi-là, et c'est ce que le mémoire, le document de réflexion dit.

M. Bergman: Alors, dans ce sens, ça va affecter la crédibilité de l'Agence.

M. Gagnon (Viateur): Bien, moi, ce n'est pas la crédibilité en tant que telle qui me préoccupe, c'est s'il fallait que la structure de cette Agence-là soit remise en question, qu'on questionne la constitutionnalité de ça, que ça soit déclaré inconstitutionnel, on va se trouver dans de beaux draps.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Gagnon. Est-ce que, M. le député de D'Arcy-McGee, vous avez d'autres questions? Mme la députée de Beauce-Sud? O.K. Donc, il me reste à vous remercier de votre contribution ici, à la commission. Un dernier mot de la fin, Mme la ministre?

Mme Marois: Oui, M. le Président. Oui, certainement, je veux vous remercier aussi. Et je pense que nous avons tenté de préparer le projet de loi en évaluant les risques aussi à cet égard-là pour les éviter. Et, en resserrant certaines règles, nous pensons être capables de tenir compte d'un bon nombre de vos remarques et d'améliorer très nettement l'encadrement des institutions qui vont nous permettre de mieux protéger l'intérêt public au Québec. Je vous remercie beaucoup de votre présentation.

Le Président (M. Paré): Merci beaucoup. Donc, j'ajourne les travaux de la commission au mercredi 14 août 2002, à 9 h 30. Merci.

(Fin de la séance à 17 h 13)


Document(s) associé(s) à la séance