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Version finale

42e législature, 1re session
(27 novembre 2018 au 13 octobre 2021)

Le mardi 20 août 2019 - Vol. 45 N° 32

Étude détaillée du projet de loi n° 14, Loi favorisant la transformation numérique de l’administration publique


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Table des matières

Étude détaillée (suite)

Intervenants

M. Simon Allaire, président suppléant

M. Éric Caire

M. Gaétan Barrette

M. Martin Ouellet

Mme Dominique Anglade

M. Denis Tardif

M. Claude Reid

M. François Tremblay

Mme Marie-Louise Tardif

M. Gilles Bélanger

Mme Émilie Foster

*          Mme Nathalie Bacon, Secrétariat du Conseil du trésor

*          Témoin interrogé par les membres de la commission

Journal des débats

(Onze heures neuf minutes)

Le Président (M. Allaire) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Alors, je répète, à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des finances publiques ouverte. Je demande à tous et à toutes de prendre vos appareils électroniques et prendre le temps de les fermer, s'il vous plaît, ou de les mettre à la... d'éteindre votre sonnerie, en fait. Merci.

La commission est réunie afin de pouvoir débuter l'étude détaillée du projet de loi n° 14, la Loi favorisant la transformation numérique de l'administration publique.

Alors, Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. Alors, M. Chassin (Saint-Jérôme) est remplacé par M. Tremblay (Dubuc); M. Émond (Richelieu) est remplacé par Mme Tardif (Laviolette—Saint-Maurice); M. Simard (Montmorency) est remplacé par M. Tardif (Rivière-du-Loup—Témiscouata); et M. Leitão (Robert-Baldwin) est remplacé par Mme Anglade (Saint-Henri—Sainte-Anne).

Étude détaillée (suite)

Le Président (M. Allaire) : Merci, Mme la secrétaire. Alors, si vous vous souvenez, lors de l'ajournement de nos travaux le 14 juin dernier, les discussions portaient sur l'article 3. Le député de La Pinière avait posé une question au ministre, qui avait répondu à la question. Alors, à ce stade-ci, est-ce qu'il y a d'autres interventions concernant l'article 3?

• (11 h 10) •

M. Barrette : L'article 3?

Le Président (M. Allaire) : Oui.

M. Barrette : Bien sûr, je vais avoir... Collègues, est-ce que vous aviez une intervention?

Le Président (M. Allaire) : Non, la parole était à vous... au député de La Pinière. Donc, si vous voulez continuer.

M. Barrette : Oui. Je vais avoir quelques interventions, M. le Président, dans quelques instants, le temps que j'ouvre...

M. Caire : ...

M. Barrette : Oui, voulez-vous relire l'article 3?

Une voix : ...

M. Barrette : Bien, envoyez donc.

Le Président (M. Allaire) : Oui, je pense que ce serait un bon début pour nous remémorer un peu où on était rendus.

M. Caire : Si les collègues sont d'accord, effectivement, se remettre dans le bain tranquillement, pas vite.

Le Président (M. Allaire) : Allez-y, M. le ministre.

M. Caire : Donc, article 3 : «Un organisme public que peut désigner le gouvernement utilise et communique à toute personne ou à tout organisme les renseignements personnels qu'il détient dès lors que cette utilisation ou cette communication est nécessaire à la réalisation d'un projet en ressources informationnelles d'intérêt gouvernemental.

«Le gouvernement peut également confier à un organisme public toute fonction ou toute responsabilité liée à la réalisation d'un tel projet et pourvoir à sa rémunération.

«Un décret pris en application du présent article entre en vigueur le jour de sa publication à la Gazette officielle du Québec ou à une date ultérieure qui y est fixée.

«Le présent article s'applique malgré toute disposition inconciliable d'une loi, dans la mesure où cette disposition est expressément mentionnée au décret pris en application du présent article.»

Le Président (M. Allaire) : Si vous me permettez, M. le ministre, je vous inviterais même à relire vos commentaires, je pense que ça mettrait bien la table pour ce qui s'en vient.

M. Caire : Aucun problème. Aucun problème.

Le Président (M. Allaire) : Parfait, merci. Oui? Ça va?

M. Barrette : Moi, ça va, là, mais pour ceux qui nous écoutent.

M. Caire : O.K. D'accord. Donc, le premier alinéa de l'article 3 du projet de loi confère au gouvernement le pouvoir de désigner un organisme public qui aura, dès l'entrée en vigueur du décret le visant, l'obligation d'utiliser et de communiquer des renseignements personnels qu'il détient si cette utilisation ou cette communication est nécessaire à la réalisation d'un projet en ressources informationnelles d'intérêt gouvernemental.

En vertu de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, les organismes publics doivent assurer la confidentialité des renseignements personnels qu'ils détiennent et ils ne peuvent les utiliser ou les communiquer que pour les fins prévues par cette loi, ce qui inclut d'autres fins que peut prévoir une autre loi.

Le premier alinéa de cet article prévoit une nouvelle fin compatible, soit la réalisation d'un projet en ressources informationnelles d'intérêt gouvernemental. Ainsi, la règle d'utilisation et de communication prévue à cet alinéa serait appliquée dans le cadre de la réalisation d'un tel projet et en toute matière. Des organismes publics pourraient se partager des renseignements personnels une seule fois, de manière périodique ou en continu, pendant la réalisation du projet.

Le deuxième alinéa de cet article confère au gouvernement le pouvoir de confier à un organisme public toute fonction ou responsabilité liée à la réalisation d'un projet en ressources informationnelles d'intérêt gouvernemental. Un organisme public pourrait, à titre d'exemple, être chargé d'offrir des services numériques intégrés non prévus à sa loi constitutive.

Le troisième alinéa de cet article établit une règle d'entrée en vigueur pour le décret pris en vertu du premier ou du deuxième alinéa de cet article.

Le quatrième alinéa de cet article prévoit une règle qui établit la priorité des dispositions prévues à cet article sur toute autre disposition d'une loi. Cette priorité n'est toutefois pas applicable lorsque la disposition inconciliable est celle d'une loi fondamentale telle que la charte ou celle d'une loi dont la dérogation doit être formulée expressément.

La Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, article 168, continue donc de s'appliquer, ainsi que la Loi sur les contrats des organismes publics, article 9. Voilà, M. le Président.

Le Président (M. Allaire) : Merci, M. le ministre. Est-ce que, à ce stade-ci, il y a des interventions concernant l'article 3?

M. Barrette : J'en ai quelques-unes.

Le Président (M. Allaire) : Je cède la parole au député de La Pinière.

M. Barrette : Je vais commencer par la première. Alors, je comprends bien les explications, puis évidemment on ne refera pas le débat qu'on a fait à 1 et 2 sur ce que sont les organismes publics, là, mais 3, de la manière qu'il est libellé. Alors, je reprends le texte du premier alinéa : «Un organisme public...» On s'entend, on avait débattu longuement sur ce qu'est l'organisme public, là, qui est décrit dans l'autre loi, et là on dit : «Un organisme public que peut désigner le gouvernement — ça, on a débattu là-dessus, il n'y en a rien d'autre à ajouter, je pense, on a fait le tour — utilise et communique à toute personne [et] à tout organisme les renseignements personnels qu'il détient», et ainsi de suite, là... à l'intérieur du projet d'intérêt gouvernemental.

«Toute personne [et] tout organisme», comme il n'est pas qualifié, ça veut donc dire «toute personne et tout organisme», incluant les non publics, on s'entend là-dessus?

M. Caire : On s'entend là-dessus.

M. Barrette : Alors, ma lecture est appropriée. Ça signifie donc que, dans le cadre d'un projet d'intérêt gouvernemental, on a établi, dans nos débats précédents, que l'intérêt gouvernemental était défini par «ça nous intéresse», rien de plus. Bon, je ne te dis pas ça négativement. «Ça nous intéresse» étant le gouvernement. Bon, l'intérêt gouvernemental est défini par rien d'autre que «c'est ça qu'on veut faire, puis on le fait». On a débattu là-dessus.

M. Caire : Oui. Mais, si tu te souviens... pardon, excusez-moi, M. le Président, si vous vous souvenez bien, on avait quand même dit qu'à travers la... il y avait des critères qui étaient établis auxquels on pourrait donner un caractère plus formel, j'en conviens.

M. Barrette : Je ne veux pas refaire le débat.

M. Caire : Parfait.

M. Barrette : Parce que ça serait une utilisation abusive de notre temps parlementaire. Mais, disons que je le simplifie, là, je comprends et j'admets que je le simplifie, mais l'intérêt gouvernemental, la définition de ça est relativement large.

M. Caire : Large, oui.

M. Barrette : On va dire ça comme ça, M. le Président. Par contre, c'est encore plus large quand on dit que l'organisme public désigné, c'est correct, je ne conteste pas ça. On ne critique même pas ça parce qu'à un moment donné ce sont des projets dits d'intérêts gouvernementaux mais, en quelque part, expérimentaux, dans le bon sens du terme. On essaie de voir ce qu'on peut faire, puis c'est ça la modernisation à laquelle on veut tous arriver, puis je suis d'accord avec ça. Je l'ai déjà dit précédemment, à plusieurs reprises, c'est un projet de loi avec le fond duquel je suis en accord.

Bon, maintenant, arrive la forme, et là, on est dans la forme. Alors : «[L'organisme] public que peut désigner le gouvernement — on l'a débattu, on s'entend là-dessus — utilise et communique à toute personne ou à tout organisme les renseignements personnels qu'il détient» dans le cadre desdits projets d'intérêts gouvernementaux. Ça, ça veut dire que le gouvernement va potentiellement, et même, je dirais, techniquement, et sans balises autres que la sécurité des renseignements personnels, donner à n'importe qui... puis là je ne dis pas ça méchamment, là, c'est ouvert et c'est à l'extérieur du gouvernement. Ma lecture est correcte, là?

M. Caire : Là-dessus, je vais... Le cadre est quand même plus restreint que ça.

M. Barrette : Je comprends. Les mots ayant un sens...

M. Caire : Oui, oui, mais ce que je veux dire, c'est que les mots ayant un sens...

M. Barrette : M. le Président, si M. le ministre me le permet, je vais le laisser répondre avec plaisir...

M. Caire : Oui, bien sûr. Non, non, mais allez-y, je m'excuse.

M. Barrette : ...parce que c'est là que va être l'objet de notre débat de ce matin puis peut-être de toute la journée. On a restreint les organismes qui peuvent être autorisés à participer à l'intérieur de règles qui vont être définies clairement, mais qui le sont toutes... mais qu'elles sont toutes sous l'égide de la Commission d'accès à l'information, la sécurité des renseignements personnels, et ainsi de suite, mais on est restrictifs dans la détermination des organismes qui peuvent transmettre des données, mais on est totalement ouvert, puis là le ministre va certainement me dire qu'il va y avoir des règles, mais il reste au moins que le texte qui est là, et c'est là ou j'en viens, là, ouvre la porte à la transmission de données personnelles à toute personne et/ou organismes extragouvernementaux, pas paragouvernementaux, extra, à l'extérieur, quelqu'un, quelconque organisation. Et je ne les qualifie pas, là, je suis sur le principe, la lecture, l'interprétation de ce libellé-là. Là, je promets au ministre de ne pas l'interrompre.

Le Président (M. Allaire) : M. le ministre.

M. Caire : Non, c'est correct. Mais ma réponse va être relativement brève, M. le Président, parce que, si on continue la lecture, puis j'entends le commentaire de mon collègue, mais si on continue la lecture de l'article, M. le député de La Pinière, ça vous dit «dès lors». Parce que, oui, c'est «communique à toute personne ou à tout organisme les renseignements personnels qu'il détient dès lors que cette utilisation ou cette communication est nécessaire à la réalisation d'un projet en ressources informationnelles d'intérêt gouvernemental», donc... Puis on avait eu, souvenez-vous, on avait eu un peu ce débat-là où on se disait : Est-ce que des entreprises privées, des consultants pourraient être inclus dans la transmission des renseignements? La réponse à cette question-là est oui, dès lors qu'ils sont partie prenante de la réalisation, et donc, à ce moment-là, ils sont contractuellement liés à des obligations qui sont les mêmes que les organismes publics.

• (11 h 20) •

Et donc ce n'est pas... il ne faut pas lire, dans cet article-là : Dans le cadre d'un projet, je vais diffuser l'information à des entités qui ne seraient pas liées à la réalisation d'un projet. Je ne sais pas si mon explication est claire. Donc, ce n'est pas toute personne selon mon bon plaisir, c'est toute personne qui est partie prenante à la réalisation du projet et toute personne qui a besoin de cette information-là, donc pour qui l'information est nécessaire à la réalisation du projet.

Donc, à la limite, on pourrait même dire que, si l'information que je détiens n'est pas nécessaire au volet que vous êtes en train de réaliser, je ne peux pas vous communiquer cette information-là. Donc, quand on lit l'article dans sa globalité, c'est beaucoup plus restrictif, parce que c'est ceux qui doivent avoir l'information dans le cadre de la réalisation du projet, et ces gens-là sont soit des membres d'un organisme public, donc encadrés évidemment, soit des entreprises, des sous-contractants, des entreprises privées mais qui, contractuellement, vont répondre aux mêmes obligations légales que les organismes publics. Puis je ne sais pas si Me Bacon veut... un supplément d'information évidemment, à moins que ma réponse satisfasse le député de La Pinière et mon collègue de René-Lévesque.

Le Président (M. Allaire) : Merci, M. le ministre. Est-ce que vous voulez que Mme Bacon intervienne?

M. Barrette : Ce n'est pas nécessaire, je pense que c'est clair. Mon objectif, à cette étape-ci de l'étude de l'article 3, est atteint. Je voulais qu'on établisse ça. Et je vais répondre d'une façon tout à fait objective, neutre et non qualifiée au commentaire qu'a fait le ministre, il a dit : Ce ne sera pas sous mon bon vouloir. Bien non, ça va être, selon son bon vouloir, parce que les projets d'intérêt gouvernementaux sont au bon vouloir du ministre, du gouvernement. Ce n'est pas une critique, je ne fais que statuer les choses qui sont dites pour qu'elles soient claires pour nous, les parlementaires, et pour ceux qui nous écoutent.

Donc, on résume : Il faut faire ça. Comment on va le faire? C'est ça qui est le débat. Il y a des règles. L'objectif est de faire circuler les données essentiellement à l'intérieur du gouvernement, peut-être avec d'autres. Il y a des projets d'intérêt gouvernementaux qui sont — je ne dis pas ça méchamment — au bon vouloir. Il y a un vouloir, à quelque part, puis il ne doit sûrement pas être mauvais, il y a un bon vouloir. Et ces projets-là peuvent mettre en cause, amener sur la patinoire des organisations et/ou individus, et l'inverse, peu importe, externes qui, bien évidemment, vont être assujettis aux mêmes règles, et ils vont signer un contrat, on s'entend là-dessus. Mais, sur le principe que des données vont quitter l'État pour aller à l'extérieur, le ministre nous confirme que, oui, dans cette loi-là, ça va potentiellement arriver. Je ne dis pas que ça va arriver nécessairement, mais ça va potentiellement arriver.

Les données sortant de l'État, allant chez une personne, ou un groupe de personnes, ou une entreprise qui signeront des contrats garantissant la sécurité des données, bien là, on vient quand même d'augmenter un niveau de risque en termes de, disons, dissémination inappropriée de données. Et je m'explique, c'est facile, on n'a qu'à regarder Desjardins. On a, nous l'État, nos façons de faire internes, on contrôle notre structure, on a nos données. Techniquement, on contrôle notre personnel, on a nos logiciels, on a nos protocoles, on a tout ça. Donc, on a notre risque à nous, comme État. Je ne lance la pierre à personne, l'objet n'est pas là. L'objet ici, là, est de faire un débat, pour moi, sur la gestion du risque.

Alors, nous avons notre risque interne, qui est ce qu'il est, je ne le qualifie pas de petit, moyen ou grand, je dis juste qu'il n'y a pas de risque zéro, ça n'existe pas, bon. Alors là, on va obligatoirement augmenter notre niveau de risque puisqu'on fait rentrer une autre organisation. Aussi bien... quand bien même ils vont signer des contrats, ils ont leurs risques à eux. Ça, c'est comme en mathématiques : les facteurs d'erreur, ça ne s'additionne pas, ça se multiplie. Ça, c'est un principe... Hein, moi, M. le Président, je dis souvent ça, j'ai élevé mes enfants comme ça, je dis : Écoutez, les mathématiques, chers enfants, c'est du français écrit autrement. C'est vrai. C'est comme le droit, hein, Me Bacon, c'est du français, mais qui n'a pas toujours la même signification que dans le langage commun. Mais c'est les mêmes lettres, c'est les mêmes mots, mais le sens n'est pas toujours le même à cause d'une jurisprudence. Les mathématiques, c'est comme ça.

M. Caire : Il y a moins de chances d'interpréter les mathématiques que le droit, M. le député de La Pinière.

M. Barrette : Ça, c'est vrai. Ça, c'est vrai, mais je fais une analogie mathématique parce qu'elle est tellement appropriée. Alors, on contrôle notre structure, notre environnement, on contrôle nos serveurs, le personnel, nos protocoles, et ainsi de suite, et là on va faire sortir des données ailleurs. Donc, on va... puis je ne dis pas qu'on va le faire tout le temps, mais, obligatoirement, là, on vient augmenter le risque, et ça, ça m'inquiète, nonobstant le fait qu'on va faire signer à ces gens-là des protocoles.

Moi, je vais prendre un exemple simple, puis je ne vais pas les nommer ad nauseam parce que ce n'est pas bon pour eux autres, puis ils ne méritent pas ça, en quelque part. Ce serait arrivé à n'importe qui. Ça peut arriver n'importe où. Alors, l'institution financière qui a vécu un épisode douloureux récemment dans le monde, parce qu'il y en a plusieurs, ils avaient leurs risques et, s'ils étaient ici, en commission parlementaire, ils auraient dit : Écoutez, écoutez, nous autres, là, la sécurité, là, c'est la chose la plus importante pour nous. Les données, c'est la... on protège ça comme la prunelle de nos yeux, ça n'arrivera pas. Mais c'est arrivé.

Moi, je pense que, l'épisode gouvernemental québécois qui a eu lieu, bien, on attend de voir que la lumière se fasse. Ce n'est peut-être pas si négatif que ça s'est... que ça a été rapporté ou évoqué. Parce que, moi, dans mon expérience, là, puis je l'ai dit précédemment, à la RAMQ, là, ça fait plus de... ça va faire bientôt 50 ans qu'ils gardent la donnée, puis on n'a pas eu ça. Ils doivent faire quelque chose de correct, hein? Puis ça veut dire qu'il y a une structure. Il est possible, dans une structure, d'être sécuritaire. Dans le gouvernement, la preuve a été faite, et l'épisode de Revenu Québec est peut-être très véniel et banal. On verra quand ça sortira.

Maintenant, on ne peut pas nier, à mon avis, le fait... Puis je pose la question au ministre : Est-ce qu'il va nier le fait ou réfuter le fait qu'en allant à l'extérieur on multiplie, on augmente le risque, même s'il y a des contrats qui sont signés?

M. Caire : Bien, je vais me permettre peut-être moi aussi une réponse élaborée à la mesure de la question. D'abord...

M. Barrette : ...je prends ça comme un compliment.

M. Caire : Absolument, absolument. Mais je vous retrouve avec beaucoup de plaisir, M. le député de La Pinière, et c'est dit très sincèrement. Ceci étant, je vais juste corriger quelque chose parce que je pense que c'est important de bien situer le contexte. Il n'est pas question... Quand on... Puis pour avoir été moi-même consultant, quand on embauche des consultants, on n'amène pas le projet chez le consultant. On amène le consultant à l'intérieur du projet. Donc, la circulation des données... On ne vient pas d'ouvrir une fenêtre pour dire : Bon, bien, maintenant, nos données s'en vont chez telle ou telle firme de consultants. Les consultants travaillent dans l'environnement gouvernemental, contractuellement.

Une voix : ...

M. Caire : Bien, écoutez, moi, je l'ai vécu comme ça, là. Je n'en ferai pas un absolu, là, mais, honnêtement, de toute façon, c'est la façon dont j'ai... puis l'expérience que j'en ai, puis la façon de travailler, c'est... Puis M. Boivin pourra me corriger si je me trompe parce que je ne voudrais pas induire la commission en erreur, là, mais généralement les consultants viennent travailler ici, et, quand il est question de se servir des environnements de développement du gouvernement, bien, le consultant travaille à l'intérieur de cet environnement-là, et il n'y a pas... il n'est pas question d'amener nos données gouvernementales chez des consultants, à plus forte raison si ces données-là ont un certain niveau de sensibilité. On comprend que, si on parle de données ouvertes, on est ailleurs, mais je suis convaincu que le député de La Pinière ne faisait pas référence à des données ouvertes qui sont, de toute façon, publiques. Ça, c'est un premier élément.

Le deuxième élément, oui, effectivement, il y a un élément de risque, mais est-ce que l'élément de risque augmente parce que la personne a le statut de consultant ou l'élément de risque augmente parce qu'on augmente le nombre de personnes qui interviennent dans le projet? Alors, est-ce que ce risque-là est plus grand parce que la personne a un statut de consultant ou le risque est plus grand parce qu'au lieu d'avoir un nombre x de ressources internes on a un nombre y de ressources internes, qui est plus grand, et donc là il y a un facteur multiplicatif de toute façon? Mais je suis d'accord avec l'énoncé du député de La Pinière. Le risque zéro n'existe pas. Donc, c'est sûr que plus il y a d'intervenants dans un projet, bien, plus il peut y avoir des risques d'erreur. C'est sûr.

• (11 h 30) •

Maintenant, pour la réalisation du projet, on comprend que, si on veut que le projet soit un succès... Donc, ça peut aussi multiplier les facteurs de succès dans le sens où, si on va chercher la bonne personne, le bon niveau d'expertise, bien, on vient peut-être de multiplier nos facteurs de succès. Donc, je veux dire, il y a deux côtés à cette médaille-là, comme à toute chose. Mais, essentiellement, pour ramener ça au... parce qu'on parle donc du premier alinéa de l'article 3, je pense que l'article 3, l'alinéa 1 de l'article 3 nous donne la flexibilité de dire : Les parties prenantes à un projet, dans la mesure où c'est nécessaire à la portion que ces parties prenantes là ont à réaliser, ont à livrer, doivent avoir accès à l'information. Puis ça, c'est essentiel. Je veux dire, M. le Président, on ne peut pas demander à des gens de travailler sur un projet puis ne pas leur donner les outils pour mener à bien le projet, et, dans un projet en ressources informationnelles, bien, c'est sûr que l'information est au coeur du projet. Mais je pense qu'on l'encadre. Tout d'abord, contractuellement, oui, ces entités-là, dans le fond, ont contractuellement les mêmes charges, les mêmes obligations, les mêmes responsabilités, encourent des sanctions s'il y a dérogation aux ententes contractuelles. Donc, ils vont avoir les... il n'y aura pas de différence. Donc, ce n'est pas parce que c'est un consultant, éventuellement, qu'il peut faire, lui, ce qu'il veut avec les données, ce qu'un fonctionnaire ne pourrait pas faire. Et donc il y a déjà... De toute façon, le partage de données, ça, c'était déjà prévu, là, au niveau de la Commission d'accès à l'information. Ce n'est pas... on ne vient pas d'inventer quelque chose de nouveau, il y a déjà des consultants qui ont travaillé sur des projets, qui avaient accès aux données, et ça, c'était déjà prévu. Mais je pense que, quand on indique «dès lors que cette utilisation ou cette communication est nécessaire à la réalisation [du] projet», je pense qu'on vient de créer l'encadrement nécessaire à s'assurer que dans nos bonnes pratiques on ne fera pas n'importe quoi non plus avec les données. Ça, c'est l'article 3, mais il y a d'autres articles aussi plus tard, qu'on verra, qui viennent rajouter des couches de protection.

Le Président (M. Allaire) : C'est bon, M. le ministre?

M. Caire : Oui.

Le Président (M. Allaire) : M. le député de La Pinière.

M. Barrette : Bien, je remercie le ministre de sa réponse, que j'ai bien comprise, mais il y a là, en quelque part... on va appeler ça un accrochage, parce que le ministre nous a dit, là, que dans la vraie vie — c'est à peu près ses paroles — dans la vraie vie, là, puis c'était l'expérience du passé, puis c'est vrai, on amène les consultants à l'intérieur, et là ils traitent de la donnée, ou gèrent, ou font le projet. Ce n'est pas ça que l'article dit, l'article dit «communique à toute personne ou à tout organisme». Mais c'est parce que, quand on communique, là, il me semble qu'il y a une espèce de mouvement vers l'extérieur. Moi, quand je communique avec quelqu'un, je l'appelle chez lui, je lui envoie une lettre, quelque chose de ce genre-là, je m'en vais vers l'extérieur, implicitement, puis je dirais même explicitement. Et c'est là que le droit, évidemment, vient faire son oeuvre. Le sens des mots en droit n'est pas toujours le même que dans le langage commun, puis ce n'est pas une critique, c'est un état de fait.

Moi, pour moi, là, quand je communique des données à quelqu'un, ce n'est pas quelqu'un que je fais venir chez moi pour procéder à une analyse quelconque. Quand je fais réparer ma télévision, c'est bien sûr que je peux faire venir le réparateur. Je l'appelle, puis il vient. Je l'ai fait récemment, d'ailleurs, puis ça se répare, une télévision, contrairement à ce qu'on dit, hein? Bien, il ne faut pas toujours penser qu'il faut en acheter une nouvelle. Mais, à un moment donné, il a fallu que je l'emmène moi-même chez le réparateur, parce qu'il n'avait pas ce qu'il fallait.

Alors, moi, là, ce mot, cette phrase-là, là, «communique à toute personne ou à tout organisme»... Un organisme, là, est-ce qu'on l'emmène ici? Est-ce qu'on va amener un organisme? Une personne, je veux bien l'argument, là, mais la phrase qui est dite là, c'est une phrase dont le mouvement est de l'intérieur vers l'extérieur. C'est ça que ça dit. En tout cas, s'il y a une chose qui est claire, c'est que ça ne dit pas que ce n'est pas permis, ça ne dit pas ça. Ça, c'est clair. Ça ne dit pas que ça va empêcher que les données sortent de l'État, comme ça ne dit pas que ces données-là, à l'intérieur... dans le cadre d'un projet d'intérêt gouvernemental, va être fait à l'interne en amenant des gens. Ça ne le dit pas. La phrase est floue à souhait, je ne dis pas intentionnellement, mais on ne peut pas me critiquer de le lire comme ça. Alors, on a établi, là, qu'on allait communiquer à des gens de l'extérieur. Et là je pense qu'on établit, puis là, le ministre, je vais le laisser me répondre à ça, que cette phrase-là, elle ne dit pas qu'on ne sortira pas des données et elle ne dit pas non plus que ceux qui feront le projet vont le faire à l'intérieur du gouvernement avec une quelconque interdiction, contrôle, autre qu'un contrat, desdites données. C'est ça, là, que ça dit. Puis c'est la... Pour moi, là, à cette étape-ci de l'étude détaillée, c'est le coeur de cet article-là qui est en... Le ministre comprendra aussi que c'est en ligne aussi avec toutes interrogations que j'ai eues avant, là.

Et je vais aller plus loin. Les récents événements sur la planète, parce qu'il n'y en a pas juste eu au Québec, je vous dirais qu'il y a des questions que je me pose et des interventions que je fais aujourd'hui que je n'aurais peut-être pas faites il y a deux ans, trois ans, cinq ans 10 ans. Et là, là, là, je les fais, là. Puis je reviendrai sur d'autres éléments, là, qui ont été mis en lumière, là, cet été dans ce dossier-là. Alors, sur la question du sens de la phrase, j'aimerais entendre le ministre, là.

Le Président (M. Allaire) : M. le ministre, la parole est à vous.

M. Caire : Bien, en fait, je vais répondre au député de La Pinière. C'est vrai que... Je veux dire, je ne contesterai pas son interprétation, ça lui appartient, mais l'intention de l'article 3... Puis, encore là, il faut voir le projet de loi dans sa globalité, mais, si on se concentre sur l'article 3, l'intention de l'article 3, c'est de dire que du moment où un projet est d'intérêt gouvernemental, les parties prenantes au projet doivent se communiquer l'information, doivent faire circuler l'information. Donc, c'est ça qui est essentiellement l'objectif de l'article 3. Après ça, on va voir article 4, les mesures de protection. Et les articles suivants ramènent des mesures de protection, l'évaluation des risques, un régime de protection particulière dépendamment de l'évaluation des risques, l'approbation de la CAI. Donc, dans sa globalité, je pense que le projet de loi...

Puis je partage le point de vue du député de La Pinière. Je pense qu'au Québec, là, il y a beaucoup, beaucoup de monde aujourd'hui qui, par rapport à la protection des données, ont une sensibilité qu'on n'avait pas il y a peut-être six mois à l'époque où, nous, on parlait d'une politique de cybersécurité gouvernementale, là. Je veux dire, moi, quand j'ai annoncé ça, là, je n'ai pas senti que je venais d'ébranler les colonnes du temple, à ce moment-là, là. J'avais plutôt l'impression de prêcher dans le désert. Et aujourd'hui il y a une sensibilité, et je le sens, puis c'est correct, compte tenu des événements.

Maintenant, le projet de loi a été bâti, dans sa globalité, pour répondre à ces préoccupations de sécurité là, mais l'article 3 lui-même, son objet, c'est de dire : Écoutez, là, dans le cadre d'un projet d'intérêt gouvernemental, les organismes qui sont parties prenantes à la réalisation doivent communiquer l'information pour faciliter la réalisation du projet. L'article 3 ne vise que cet aspect-là de la chose. Et je pense qu'il fait bien ce pour quoi il a été écrit.

J'entends le député de La Pinière. Et ce que je dis, c'est que, dans les articles subséquents, je pense qu'on va... je ne veux pas dire adresser, mais on va porter une attention particulière à ces préoccupations-là qui sont tout à fait légitimes et que je partage. Et, si ces articles-là qui ont cette vocation-là, d'amener des régimes de protection, si on pense collectivement qu'on ne met peut-être pas les filets de sécurité nécessaires, bien, moi, je suis ouvert à la discussion. Mais ce que je dis à mon collègue, c'est que, l'article 3, lui, son objet, c'est de donner un cadre général pour dire : Quand vous réalisez un projet en ressources informationnelles, du moment où le gouvernement a dit : C'est un projet en ressources informationnelles d'intérêt gouvernemental, parlez-vous, échangez de l'information, rendez ça fluide, rendez ça facile.

Le Président (M. Allaire) : Merci, M. le ministre. Si vous me permettez, M. le député de La Pinière, il y a le député de René-Lévesque qui souhaite intervenir. Est-ce que c'est correct pour vous, juste pour assurer une cohérence?

M. Barrette : Ça me fait plaisir de laisser la parole à mon collègue.

Le Président (M. Allaire) : La parole est à vous.

• (11 h 40) •

M. Ouellet : Merci beaucoup, M. le Président. D'entrée de jeu, je veux dire que je partage les interrogations du collègue de La Pinière, notamment tel que le libellé est inscrit sur cette possibilité de communiquer à l'externe, tel qu'il est lu dans le présent article. J'ai entendu le ministre que ce qu'on cherche à faire plutôt, c'est d'inviter les gens à y travailler à l'intérieur du gouvernement. Mais, quand on le lit, je peux vous dire que l'intention et de la façon dont il est écrit, c'est deux choses totalement distinctes.

Donc, pour faire avancer la discussion, je pense, M. le ministre, qu'on pourrait plutôt parler de rendre accessibles les informations, plutôt que communiquer. Je m'explique. Si c'est la volonté du gouvernement, de l'organisme public de procéder à des transformations et de discuter avec des personnes ou des organismes, le fait de rendre accessibles ces informations-là, je pense que ça vient protéger la nature même de la donnée, c'est-à-dire à quel endroit elle est. Elle est directement au gouvernement, donc la rendre accessible, c'est permettre son accès. Donc, je dois me déplacer pour y avoir accès. Et donc il n'y a pas cette volonté ténue, je vous dirais, dans le projet de loi en question, sans être péjoratif, de permettre la communication. Ça fait que je pense qu'on pourrait circonscrire certaines de nos craintes, à moi et au député de La Pinière, en rendant plutôt la donnée accessible, plutôt que de la communiquer.

Deuxième chose que j'aimerais valider avec le ministre, lorsqu'il fait référence, à l'article 3, à «toute personne ou tout organisme», je présume, et vous me direz si mon analyse est bonne, on parle de personnes physiques, mais aussi de personnes morales. Et donc je pense que c'est voulu de l'indiquer ainsi, mais je veux juste être certain qu'on couvre tous les champs d'intervention, à savoir qu'une personne dans une entreprise, c'est une chose, mais une personne dans un organisme public en est une autre. Donc, je veux juste être certain qu'on couvre bien la notion d'entreprise privée lorsqu'on parle de personnes parce qu'il n'y a pas de spécificité quant à la personne morale ou non. Et, lorsqu'on parle des organismes, je présume qu'on fait référence à des organismes publics, OBNL, type OBNL.

Je veux juste être bien certain de comprendre parce que «personne» et «organisme», présentement, je le vois large. Si c'est la volonté du ministre, donnez-nous des explications en ce sens. Si ce n'est pas ça, il faut le circonscrire. Bien, dans ce cas-là, indiquons que les personnes, ce sont des personnes morales, dans le cas des entreprises, et les organismes, ce sont des organismes, exemple, sans but lucratif, si c'est le cas qui est visé par l'article en question.

Le Président (M. Allaire) : Allez-y, M. le ministre.

M. Caire : En fait, le terme... puis je vais laisser, avec le consentement des collègues, je vais laisser Me Bacon compléter la réponse parce que là on est dans les aspects plus juridiques et de concordance avec notamment la loi d'accès à l'information. Mais ce que je comprends, c'est que le terme «communiquer» est un terme qu'on doit utiliser, si je comprends bien, Me Bacon, parce que c'est le modèle juridique utilisé dans les autres lois. Là, je vais laisser, avec le consentement des collègues, M. le Président, Me Bacon vous donner une réponse plus éclairée que celle que je pourrais vous donner moi-même.

Le Président (M. Allaire) : Merci, M. le ministre. Alors, est-ce qu'il y a consentement pour permettre à Me Bacon de s'exprimer ici, à la commission? Consentement. Parfait. Merci. Me Bacon, je vous demande de vous présenter, nommer votre titre pour les fins de la diffusion. Merci.

Mme Bacon (Nathalie) : Bonjour. Nathalie Bacon, légiste au Conseil du trésor. Dans le choix des mots, c'est la règle d'utiliser et de communiquer, donc les verbes «utiliser» et «communiquer» sont importants, c'est par cohérence avec la loi sur l'accès, vous l'avez, pas loin, là, sur votre portable, l'article 67.2. Et ce n'est pas seulement l'article 67.2, il y a d'autres articles aussi, là, où on dit : Le principe qu'un organisme fonctionne en silo. À 65.1, où on dit qu'«un renseignement personnel ne peut être utilisé au sein d'un organisme public qu'aux fins pour lesquelles il [est] recueilli». Et le député de La Pinière avait bien compris, là, dans les dernières séances de commission, que le projet de loi avait eu la brillante idée de pouvoir ouvrir au-delà du fonctionnement en silo pour permettre le partage entre organismes publics. Donc, on vient s'inscrire dans 65.1 pour prévoir une autre fin pour laquelle un renseignement peut être communiqué ou utilisé, donc les fins d'un projet en ressources informationnelles d'intérêt gouvernemental. Et c'est à 67.2 que, finalement, le premier alinéa de l'article 3 est un calque de 67.2 pour permettre et aussi l'utilisation, la communication en faveur de toute personne ou organisme partie prenante au projet d'intérêt gouvernemental.

Par «personne», on comprend aux personnes, c'est le sens large, c'est toute personne physique ou personne morale, puis «organisme», c'est aussi au sens large, c'est tout organisme privé ou organisme public, et finalement toutes les formes d'association ou de constitution, alors ça peut comprendre des OBNL, des associations.

Si on utilisait, comme vous le suggérez, l'expression «rendre accessible», la connotation que, moi, ça a tout de suite dans ma tête, c'est rendre accessible au public, alors que ce n'est pas une accessibilité au public, c'est une accessibilité qu'aux fins de la réalisation d'un projet, d'un projet qui va être élaboré, une solution informatique qui va être élaborée de façon confidentielle jusqu'à tant que la solution informatique soit disponible. Ça fait que c'est peut-être là, au niveau des mots, là, qu'on serait en porte à faux avec la loi sur l'accès.

Le Président (M. Allaire) : Vous souhaitez compléter, M. le ministre? Ça va?

M. Caire : Ça va. Je ne sais pas si la réponse satisfait les collègues.

Le Président (M. Allaire) : Oui. Est-ce que ça va? Ça vous convient?

M. Ouellet : Bien, j'aimerais juste compléter.

Le Président (M. Allaire) : Oui. Allez-y, M. le député de René-Lévesque, la parole est à vous.

M. Ouellet : Merci. Merci des précisions. Bien, c'est un petit peu l'essence même de mon intervention, être certain qu'on couvre tous les angles dans le cas des personnes, des organismes. Mais, si je comprends bien, la partie «communique», c'est parce qu'on fait référence à la loi sur l'accès à l'information, donc je pense qu'on traîne peut-être une mauvaise voie depuis trop longtemps. Si effectivement on est obligé de calquer cette loi-là sur des comportements ou des façons de faire issues de l'ère prénumérique, je pense qu'on est en mesure, je vous dirais, de travailler à moderniser cette loi-là, parce que je comprends la nuance, Me Bacon, sur «rendre accessible», mais, avec les nouvelles technologies, «rendre accessible» a un tout autre sens aujourd'hui que le sens légiste que nous avions par le passé. Et donc, ça fait juste renforcir notre prétention qu'effectivement, une fois que ce projet de loi là sera adopté, il faudra, tôt ou tard, s'adresser à l'essence même de la loi à l'accès à l'information. On n'est pas à l'ère du numérique et on ne fait pas mention de nouvelles technologies ou de nouvelles façons de faire, et donc on est comme tenu de faire un copié-collé de ce qui existe, et, dans le fond, on traîne... sans dire que ce sont des mauvaises pratiques, ça, c'est des pratiques qui ont été élaborées contextuellement avec l'état de l'époque, mais il faut comprendre que l'on avance rapidement, et, malheureusement, ces lois-là ne nous donnent pas la sécurité qu'on pense qu'on devrait avoir.

Donc, je remercie Me Bacon pour les précisions, ça précise que la loi n'est pas assez précise à mon goût, mais je comprends que, dans l'état actuel des choses, c'est la façon de faire pour être conforme avec... Ce qu'on demande dans le projet de loi en question, c'est de suspendre certaines règles de la loi sur l'accès à l'information pendant 10 ans. Et si on veut suspendre ces règles-là, il faut quand même s'y référer de façon légistique. Et, si j'ai bien compris, si on erre dans cette façon de faire, on ne sera pas capable de faire la concordance par rapport à la loi du passé. Donc, je vous dirais que ces explications me satisfait, mais, malheureusement, je tombe sur mon appétit et je pense que le ministre est d'accord aussi pour ce qui de la loi à l'accès à l'information. On aura tout un travail à faire pour la suite.

Le Président (M. Allaire) : Merci pour l'intervention. M. le ministre, souhaitez-vous répondre?

M. Caire : Bien, très brièvement, M. le Président. Je partage évidemment la conclusion du collègue sur le fait que nous avons un chantier qui est la loi d'accès à l'information.

Maintenant, sur le projet de loi n° 14, je voudrais quand même peut-être préciser, et on le verra dans les articles subséquents, que cette loi-là amène une transparence quant à l'utilisation des données qui n'est peut-être pas le cas actuellement, hein? Quand deux organismes, actuellement, en fonction de la loi de l'accès à l'information, font une entente de partage de données, ce n'est pas rendu public, là. Tu sais, c'est les deux organismes qui font l'entente, font le partage de données puis ça reste à ce niveau-là, alors qu'avec le projet de loi n° 14, il y aura un rapport qui va être rédigé, qui va être présenté au président du Conseil du trésor, qui va être présenté à la Commission d'accès à l'information et qui va être rendu public sur le site du Conseil du trésor. Donc, on vient quand même rajouter une transparence qui n'existe pas actuellement. Je pense que, de ce point de vue là, le projet de loi n° 14 nous amène ailleurs quant à la transparence de l'utilisation qu'on fait des données, là — bien, c'est dans les articles plus loin, M. le député de René-Lévesque, là — mais il y a cette obligation-là, et il y a une obligation de faire une évaluation des risques, et il y a une obligation maintenant, dans les projets et l'utilisation des données, d'aller chercher l'avis de la Commission de l'accès à l'information.

Donc, il y a quand même des mécanismes de protection. Il y a une possibilité aussi de prendre des régimes de protection particuliers dans le cadre d'un projet, là, si c'est nécessaire. Donc, je comprends que l'article 3 peut donner, s'il est pris isolément, une interprétation mais, quand on le prend dans le cadre du projet de loi, dans sa globalité, ce n'est pas... les mesures de protection sont là, là.

Le Président (M. Allaire) : Est-ce qu'il y a d'autres interventions concernant l'article 3? Allez-y, le député de La Pinière. La parole est à vous.

M. Barrette : Alors... à moins que mon collègue avait d'autres choses, et notre autre collègue peut-être aussi?

Des voix : ...

• (11 h 50) •

M. Barrette : M. le Président, M. le Président, je comprends ce qu'il a dit, le ministre, là, puis c'est vrai, là, que les prochains articles vont traiter d'aspects qui découlent de ce dont on parle actuellement. Alors, ce dont on parle actuellement, bien, on fait le débat de ce que qui s'en vient après. Puis je ne veux pas faire le débat des autres articles avant d'avoir vidé tout ça, cette question-là, parce qu'on ne l'a pas encore vidée, là.

Alors, moi, je suis content de la question qui a été posée, là. Peut-être que je n'avais pas été assez clair moi-même, là, puis je le reconnais, en ce sens que, bon, c'était n'importe qui pour «organisme et personne autre que gouvernementale». Bien, on a maintenant établi qu'il n'y avait pas de limitation dans des OSBL... OBNL, pardon, maintenant, personne morale, et ainsi de suite. C'est donc effectivement, là, confirmé par Me Bacon que ce sont à peu près... Selon le raisonnable vouloir du ministre, ils sont à l'extérieur du gouvernement. Bon, c'est établi.

Maintenant, là où j'ai tiqué tantôt, là, dans la réponse que le ministre a faite à notre collègue de René-Lévesque et à moi aussi, c'est clair que c'est l'intention dans le projet de loi de ne... que les données vont être à l'intérieur, protégées, et ainsi de suite. Moi, je dis ceci au ministre, là : Quand on regarde, et pas juste quand on lit, mais, quand on relit, à lumière des débats qu'on a eus à date, l'intention du projet de loi, dans sa modernisation, c'est la circulation des données à l'intérieur du gouvernement. C'est ça qui est l'intention fondamentale, et ça a été quand même... Ce n'est pas dit explicitement par l'article 1 mais implicitement, puis ce n'est pas loin d'être explicite, pour moi, «favoriser la transformation numérique de l'administration publique», on parle de la transformation numérique de l'administration publique. Par définition, on est interne au gouvernement. On n'est pas à l'extérieur.

Alors, s'il y a une intention qui est clairement, pas mal clairement, puis peut-être pas suffisamment explicitement, mais, pour moi, ça l'est quand même pas mal, claire, comme intention, c'est de gérer, de faire circuler d'une façon appropriée, moderne, transformée, la donnée dans l'administration publique, donc dans le périmètre gouvernemental.

Alors, quand... On ne peut pas, à mon avis, invoquer cette intention-là, à partir du texte proposé du projet de loi n° 14, pour dire que c'est implicite qu'on ne veut pas que ça sorte. C'est plus clair, pour moi...

Une voix : ...

M. Barrette : Non, je n'ai pas dit que le ministre, M. le Président, avait dit ça comme ça. Je dis que le ministre a dit que c'était clair que l'intention du gouvernement... de ce projet de loi là était celle-là. Non, l'intention, là, c'est la transformation numérique pour un meilleur fonctionnement de l'administration publique. Ça arrête là. Il n'y a pas d'intention de ne pas sortir l'information du périmètre gouvernemental. Rien dans le texte n'évoque ça, rien, rien, rien. Bon, je vois que le ministre, par son hochement de tête, est d'accord avec moi.

Bon, ceci étant dit, et là je reprends les propos de Me Bacon, dans la loi de l'accès à l'information, là, communiquer, là, c'est implicitement, presque explicitement, une transmission de données. C'est de même. Il y a une transmission, puis c'est sûr que l'accès à l'information, la loi, c'est sûr que ça traite aussi de nos demandes, comme parlementaires, mais ça traite les journalistes, ça traite le public, ça traite tout le monde.

Accès, c'est communiquer, c'est une transmission d'informations. Donc, on revient à la case départ, qui est : Ça sort-u ou ça ne sort-u pas? Permettez-moi le mauvais français. Donc, ça sort. C'est ça, là, qu'on est obligé de constater ici, ça sort.

Et le projet, lui, là... parce qu'il y a deux volets au projet, là. Dans le débat qu'on a actuellement ce matin, là, il y a deux éléments. Il y en a un sur lequel je m'attarde, là, volontairement, parce qu'on va s'y attarder par la suite aussi... Le ministre, avec raison, nous fait... nous dit que dans les prochains articles on est plus détaillé, et ainsi de suite. Bien oui, on va être plus détaillé, puis il y a des problèmes là aussi. Pourquoi? Bien, à partir du moment où les données sortent, bien là, c'est comme si la donnée, là, qui est pas mal assez bien blindée dans le périmètre gouvernemental, cette donnée-là, il faudrait qu'elle transporte son blindage lorsqu'elle va arriver à l'extérieur.

Et actuellement, là, je ne vois pas dans le projet de loi, autre que par le fait que des gens vont signer des ententes contractuelles de respect des règles qui sont imparties au gouvernement, je ne vois pas, là, comment qu'on va ne pas augmenter les risques. Je ne le vois pas, puis, même si c'est publié sur le site du Conseil du trésor.

Alors, moi, ça me pose un problème, encore là, aujourd'hui parce que ça va sortir. Et je suis surpris. Je suis surpris que le ministre n'ait pas... ne se soit pas attardé à la possibilité... Peut-être que ça vient du fait que le projet de loi a été écrit, évidemment, puis on le comprend, avant les événements récents, mais, là, peut-être qu'il y aurait lieu de s'attarder à ça et de s'assurer que cette gestion-là se fasse peut-être par des contractuels, mais à l'intérieur, qui viennent dans le gouvernement.

Je vais prendre... Je vais faire un parallèle. Quand la RAMQ a réécrit son code... Alors, je n'étais pas en politique à cette époque-là, j'étais sur le conseil d'administration de la RAMQ, l'entreprise est venue réécrire le code. Puis c'est vrai, le ministre l'a dit lui-même, il y en a plein, de contractuels, là, qui viennent faire des travaux dans le gouvernement. C'est vrai. Mais ils sont ici, là. Ils sont dans un périmètre qui est plus surveillé, plus encadré, et ainsi de suite. Alors, là, compte tenu des récents événements, le ministre ne trouve-t-il pas qu'on devrait faire des modifications à l'article 3 pour s'assurer que la donnée reste à l'intérieur du gouvernement en toutes circonstances?

Le Président (M. Allaire) : M. le ministre.

M. Caire : Merci, M. le Président. Bien, je vais revenir sur ce que le député de La Pinière a dit, puis je pense que c'est fondamental. L'objectif du projet de loi, c'est de favoriser la transformation numérique du gouvernement du Québec. Je comprends absolument le contexte. Je comprends absolument le débat que nous faisons sur la protection des données et des renseignements personnels, je le comprends et je partage ces préoccupations-là.

Ceci étant, il ne faut pas que ça devienne... Comment je dirais ça? Puis je veux faire très attention à mes propos parce que je ne veux pas banaliser cette situation-là, elle n'est pas banale. Mais, en même temps, le gouvernement du Québec... la transformation numérique du gouvernement du Québec vise à améliorer, à faciliter la prestation de services à nos concitoyens, vise à améliorer l'efficacité du gouvernement, vise à améliorer la disponibilité des services. Alors, tout l'univers numérique doit être mis à la disposition de nos concitoyens, dans la mesure où c'est possible, dans un objectif de donner les meilleurs services possible, le plus accessible possible, le plus rapidement possible. Donc, on procède à la transformation numérique du gouvernement dans cet objectif-là.

Et là on est face à un défi qui est majeur. Comment... Parce que cette transformation numérique là ne peut se faire qu'à la condition où la donnée est mobile. Il faut rendre la donnée aussi mobile que possible à l'intérieur de ce réseau numérique de prestations de service gouvernementales. Comme je l'ai déjà dit, la loi actuelle ne rend pas ça possible. Maintenant, comment rendre la donnée mobile tout en assurant les plus hauts niveaux de sécurité de la donnée? Ça, c'est le défi qu'on a à réaliser.

Alors, ce que je dis au député de La Pinière, c'est, dans ce contexte-là, ce que l'article 3 nous dit, c'est : Dans une perspective de transformation numérique, la donnée doit être mobile, donc doit être communiquée à ceux pour qui c'est nécessaire. Et, plus tard, donc, les articles subséquents vont nous indiquer : Parfait, la donnée est mobile, mais il faut aussi lui donner le plus haut niveau de protection possible. Et le niveau de protection n'est pas nécessairement associé à un lieu physique. On comprend que l'univers numérique, oui, au final, c'est des serveurs, c'est de la quincaillerie, c'est des fils, mais l'univers numérique, c'est un univers où les frontières sont assez larges.

• (12 heures) •

Donc, quand le député de La Pinière dit : Si la donnée se déplace, le blindage de la donnée doit le suivre, moi, je partage cette image-là. Mais elle sous-entend qu'on est au-delà de la simple sécurité physique de nos données. Et c'est là où je dis, dans les... Et là je reviens à un commentaire, peut-être que, compte tenu des événements récents, le député de La Pinière présuppose qu'on aurait peut-être écrit le projet de loi de façon différente. Non, parce que, cette préoccupation-là, on l'a bien avant les événements récents. En fait, les événements récents nous donnent raison par rapport aux préoccupations qu'on avait déjà exprimées subséquemment, et c'est la raison pour laquelle, dans le projet de loi, il y a plusieurs mesures qui sont mises en place pour assurer la protection des données. Donc, ces mesures-là, elles ne sont pas banales, là. Ce n'est pas... et quand je dis que je pense que, par rapport à la situation actuelle, on améliore ce qui se fait, bien, je le crois sincèrement. Mais à chaque article, sa fonction. L'article 3, lui, dit : la donnée doit être mobile, parce que, si on veut protéger à une transformation numérique du gouvernement, si on veut améliorer notre prestation de services numériques à tous les niveaux, cette donnée-là, elle doit être mobile. Et d'autres articles viendront dire — ce fameux blindage, dont parle le député de La Pinière, qui va protéger nos données — qu'est-ce qu'on va faire puis comment on va le mettre en place pour qu'il suive la donnée dans la nécessaire mobilité que la transformation numérique présuppose.

Le Président (M. Allaire) : Merci, M. le ministre. M. le député de La Pinière, la parole est à vous.

M. Barrette : Là, je vais être un peu plus critique, parce que nous avons, en ce moment précis et présent, un échange pour des sujets qui sont connexes, là, qui sont concurrents. Ce n'est pas les mêmes sujets, pas la même affaire du tout, mais pas du tout, mais vraiment pas.

Le projet de loi dans sa finalité vise à faire en sorte qu'on mette en place des façons de faire, des protocoles, des lignes de codes qui vont permettre à la donnée de promener d'un endroit à l'autre dans le périmètre public, dans le gouvernement. Ça, c'est correct. C'est ça, l'essence du projet de loi. On est d'accord avec ça. Moi... et là, le ministre nous dit : C'est important la mobilité, c'est ça le sens du projet de loi. Bien oui, bien oui, bien oui, on est d'accord. Il n'y a pas de débat là-dessus.

D'ailleurs, non seulement il n'y a pas de débat, en m'en venant, je discutais avec un de mes assistants de la chose suivante, de mon étonnement — encore aujourd'hui, je ne devrais même pas le dire, là, je me demande si je devrais le dire, je le regrette le quasiment — de mon étonnement que personne ne soit encore dans les rideaux, je parle, dans l'espace public, parce qu'on sait que ce sujet-là, dans le passé, a été l'objet de critiques incendiaires, de discours d'une démagogie sans fin quand venait le temps de faire circuler les données d'un bureau à l'autre, là, d'un hôpital à l'autre, d'un CLSC à l'hôpital. Je prends des exemples de mon domaine. Écoutez, là, puis je ne rentrerai pas là-dedans, ça va donner trop d'idées à trop de monde, puis ça va nuire au projet de loi. Alors, je ne ferai pas ça. Je pourrais donner des exemples très démagogiques. Il y en a qui l'ont fait beaucoup dans le passé, et là on n'est pas là. Tant mieux! Alléluia! Mais il n'en reste pas moins que le projet de loi, là, ce qu'il vise à faire, là, c'est que, dans le périmètre gouvernemental, des données puissent être... puissent circuler d'une façon fluide — les mots du ministre, que je prends à mon compte parce que je les ai déjà utilisés moi-même.

Il faut ça mais ça va plus loin, ça va dans l'efficacité du gouvernement, pas juste l'efficacité des services donnés aux citoyens. Ça va plus loin que ça. Ça va dans l'efficacité du gouvernement par une capacité accrue et beaucoup plus fine d'analyse de la donnée, puis je vais la qualifier, je pense, du bon mot, sociétale. Le gouvernement, c'est quelque chose d'extraordinaire, en termes de bases de données. C'est extraordinaire, tout ce qu'il y a là-dedans. Et si on arrive à la traiter, là, d'une façon neutre avec la réserve qu'il faut, avec la profondeur appropriée, puis on est capables de faire ça au Québec, notre Québec va avancer, j'en suis convaincu, nonobstant les épouvantails à moineaux habituels qu'on entend dans l'espace public.

Alors, quand le ministre nous dit : C'est important, là, la mobilité, ça sert à ça, ça sert à arriver à ce que je viens de dire dans les dernières minutes que je viens d'utiliser pour commenter. Oui, mais ce n'est pas de ça que je parle. Moi, je parle de la mobilité non pas à l'intérieur du périmètre gouvernemental, mais bien à l'extérieur. Et je vais reprendre mon expression, il n'y a rien, là, à mon avis, pour le moment, dans ce qui est écrit ici, et compte tenu des circonstances que l'on vit actuellement à l'échelle internationale et locale, qui garantit que le blindage va suivre la donnée, et c'est ça qui m'inquiète.

Alors, l'intention du projet de loi... Ce n'est pas vrai, là, que l'intention, là, c'est que tout se passe à l'interne, on l'a démontré, puis je pense que le ministre l'a bien accepté lui-même par ses réponses, ça va sortir. Moi, je pense que ça ne devrait pas sortir, compte tenu de ce qui se passe aujourd'hui. Et c'est là qu'on est. Alors, la mobilité, moi... il faut qu'on arrête de parler de la mobilité, c'est un sujet en soi, la mobilité. Puis je l'ai dit, à mon grand étonnement, personne n'est dans les rideaux, là, alors que, normalement, il y a 10 ans, là, le projet de loi n'aurait pas été écrit, là, j'en suis convaincu, politiquement, ça n'aurait pas passé la rampe de l'opinion publique ambiante de ce moment-là, qui était erronée et qui a nui, ça nous a ralentis. Et là on essaie de rattraper, puis on fait bien, mais là il y a un risque, la situation a changé. Alors, on s'entend sur la finalité, il n'y a pas de problème mais, la réalité, là, ce n'est pas ça.

Les entreprises, là, ou les personnes, là, ou les gens de l'extérieur qui auront leurs jobs à eux autres, qu'on veut leur donner, là, bien, ça, ça nous ouvre un tout autre champ de débat. Les gens de l'extérieur qui vont venir ici, là, dans ces projets-là, ils viennent ici pourquoi? Pour écrire des lignes de code. C'est pour ça qu'ils viennent, là. Ils viennent regarder nos bases de données puis regarder pourquoi ils ne se parlent pas, regarder pourquoi elles ne sont peut-être pas fonctionnelles, regarder pourquoi c'est si compliqué, même à l'intérieur de la base de données, à l'intérieur de l'organisme public, c'est si difficile d'aller faire telle ou telle analyse. C'est ça qu'ils vont faire. Parce que le ministre a raison, lorsque tout ça va être réglé, lorsque tout ça va être fluide, c'est sûr que le gouvernement va être meilleur sous plusieurs aspects. Je ne répéterai pas ce que je viens de dire il y a quelques instants, mais la finalité de la compagnie, là, c'est essentiellement, essentiellement, de venir écrire des lignes de code.

Et ça, ça nous amène à un autre problème, qui est encore plus fondamental, c'est : Comment ça se fait que l'État n'est pas capable de faire ça? Ça, c'est un problème fondamental. Comment ça se fait que l'État n'est pas capable, n'a pas la capacité, semble-t-il — semble-t-il, ce n'est pas l'opinion des gens à l'interne — de faire ce travail-là? Ça, ça m'inquiète, ça m'inquiète beaucoup. On y reviendra, hein, parce que ce que je viens de dire là, le ministre, je pense qu'il a compris que ça vient toucher un paquet d'éléments dans les articles suivants. Un paquet d'éléments. Alors, l'intention, la vraie intention du projet de loi, là, que personne ne nie, moi, en premier, elle est correcte. C'est le fond, la forme, comment qu'on va le faire.

Et je vais rajouter un élément, qui, lui, est récent, et qui m'a, moi-même, troublé, vraiment beaucoup, beaucoup, beaucoup, parce que je ne pensais pas que c'était apparemment si simple à faire. Les exemples qu'on a eus récemment, qui amenaient des gens ou des organisations, des organismes, peu importe, là, qui amenaient certaines entités extragouvernementales à briser l'anonymat, ça, là, ça devrait nous inquiéter et inquiéter le ministre au plus haut point. J'ai été, pendant des années, celui qui a dit qu'il n'était pas question que des données circulent de façon non anonyme, là, donc dénominalisée, et là on voit dans l'espace public — ce qui signifie qu'à quelque part dans l'espace moins public c'est encore pire, puis c'est de même, en informatique — là, arrivent, surnageant cet environnement-là, des cas qui arrivent à l'espace public où on arrive à dénominaliser des données. Ça, là, c'est inquiétant. Et ça, s'il y a un argument pour ne pas faire circuler, à l'extérieur du périmètre, gouvernemental des données, c'en est un. Il est frais, il est récent, ils y arrivent, moi-même, je ne pensais pas que c'était si simple. Je ne sais pas comment qu'ils le font. Bon, ils mettent en place des algorithmes, les algorithmes mettant ensemble un paquet de données. Puis, à quelque part, là, c'est quasiment en ligne directe avec Cambridge Analytica, là, ça, là. La procédure algorithmique qui est utilisée par ces gens-là pour défaire le code de l'anonymat, c'est par la corrélation algorithmique de données.

Alors, ayant dit cette phrase-là, là, ça devrait être un argument absolu, pas du tout démagogique, là, pour ne pas que ça sorte, pour ne pas que ça sorte. Alors, M. le Président, je viens d'émettre une réflexion qui va me permettre de débattre encore un certain bout de temps là-dessus. J'aimerais bien entendre les commentaires à chaud que le ministre peut nous faire là-dessus.

• (12 h 10) •

Le Président (M. Allaire) : M. le député... M. le ministre, la parole est à vous.

M. Caire : Merci, M. le Président. Si je partage les constats de mon collègue, je n'en partage pas les conclusions, parce qu'on...

Une voix : ...

M. Caire : Je ne partage pas les conclusions.

M. Barrette : Ah! les conclusions.

M. Caire : Parce qu'on analyse sous le même prisme deux univers qui sont différents, l'univers de la donnée qui n'est pas réellement sécurisée... Et j'aime ce que le député de La Pinière vient de dire, parce que méfions-nous, méfions-nous de ces faux sentiments de sécurité, et donc de penser que, parce qu'on a anonymisé une donnée, la rétro-ingénierie ne peut pas être faite. Je suis tout à fait d'accord avec le député de La Pinière, ce qu'il dit est vrai.

Donc, ça nous amène à ce que je disais précédemment, la façon de protéger la donnée doit trouver une solution numérique dans un univers numérique. Ce que le député de La Pinière nous dit, c'est : Créons un coffre-fort gouvernemental dans lequel on va mettre la donnée puis duquel elle ne sortira jamais. Ça, ça va à l'encontre de ce que je disais sur la mobilité de la donnée, que cette mobilité-là puisse être assumée... que cette responsabilité-là, pardon, doit être assumée par cette entité qu'est le gouvernement. Et donc, la solution pour protéger la donnée, elle est à mettre en place par le gouvernement, mais ça n'exclut pas, ça n'exclut pas les partenaires de l'écosystème numérique.

Le gouvernement du Québec, dans la transformation numérique, ne peut pas vivre en autarcie, il y a tout un écosystème numérique qui est en place, duquel on doit tirer des forces, avec lequel on doit travailler. Mais ce qu'on doit faire, c'est de mettre en place des systèmes de protection numériques à une réalité qui est numérique. Puis je ne veux pas faire dire au député de La Pinière ce qu'il n'a pas dit, parce que je pense qu'effectivement il y a un niveau de sécurité physique qui doit entourer la donnée, mais il ne faut surtout pas penser que, parce qu'on a fait ça, tout a été fait et tout a été dit. Et c'est pour ça qu'on dit qu'il doit y avoir une évaluation des risques, parce que la pire chose qui peut nous arriver, c'est de penser que, ah! on a mis ça sur le serveur du gouvernement, tout est beau, tout est beau, on est en sécurité, tout va bien. C'est pour ça qu'on dit : Ça prend une évaluation des risques, ça prend des régimes de protection, ça prend des protocoles de protection, ça prend une façon d'envelopper la donnée dans un régime ou un système de protection qui va faire en sorte qu'on va pouvoir la rendre mobile sans nécessairement la rendre accessible. Et c'est là où j'aime l'intervention, tout à l'heure, de Me Bacon par rapport à la question du commentaire... de l'interrogation du député de René-Lévesque et celle du député de La Pinière, parce que communiquer une donnée et la rendre accessible, c'est deux choses. Oui, on va communiquer la donnée, mais on ne la rendra pas nécessairement accessible.

Et c'est là où je dis que je ne partage pas le point de vue du député de La Pinière, parce que pour lui, la solution, si j'entends bien, c'est de dire : Bien, écoutez, enfermez ça à l'intérieur des systèmes physiques électromécaniques du gouvernement, ne laissez rien sortir de là, puis normalement nos données vont être en sécurité. D'abord, je pense que, dans une perspective de transformation numérique, ça ne serait pas une bonne idée de le faire comme ça. Deuxièmement, je pense, comme je l'ai dit, que la façon de protéger nos données, il faut le voir sous un autre angle que je viens d'énoncer et que je ne répéterai pas, et donc que de communiquer une donnée, ça ne veut pas nécessairement dire la rendre accessible, et c'est là-dessus qu'il faut travailler, c'est sur ces mécaniques-là qu'il faut travailler. Et l'anonymisation des données ne nous a peut-être pas donné le niveau de protection qu'on pensait, de la même façon que d'autres façons de faire, dont on pense qu'elles vont nous protéger, ne nous donneront peut-être pas la protection nécessaire.

Ceci étant dit, je me permets un commentaire plus général, M. le Président. Je comprends que le débat est intéressant dans le cadre du projet de loi n° 14, mais c'est un débat qui est beaucoup plus large que le projet de loi n° 14. Et c'est là où, quand on fera une refonte de la loi d'accès l'information, bien, il y aura peut-être d'autres lois aussi qui seront impactées et pour lesquelles il n'y aura peut-être pas simplement un langage à adopter mais des principes aussi qui devront s'adapter à la réalité du numérique.

Le Président (M. Allaire) : Merci, M. le ministre. M. le député de La Pinière, vous souhaitez intervenir?

M. Barrette : C'est vraiment intéressant, cet échange-là parce que, là, on arrive dans une phase où on met le doigt sur la bonne affaire. Et, pour une raison que je m'explique mal, que c'est peut-être une raison d'incompréhension ou de confusion, on entre dans une période où on mélange des concepts qu'on n'a pas mélangés jusqu'à maintenant, là. Loin de moi d'invoquer quelque article de notre règlement, ce n'est pas ça du tout, là, je pense, ce que le ministre a voulu faire, il ne m'a pas prêté des intentions, il a mal compris ce que je lui ai dit. Et conséquemment il ne met... Son doigt qui est sur la bonne affaire avec le mien, là, on a chacun le doigt dessus, là, il s'en éloigne. Ce n'est pas bon. Je m'explique.

Est-ce que j'ai dit qu'il fallait que la donnée soit dans un coffre-fort et que ça ne circule pas? Je n'ai pas dit ça. Au contraire, je fais la plaidoirie... un plaidoyer, pardon, le plaidoyer de la circulation de la donnée dans les différentes instances gouvernementales, puis c'est correct, c'est ça qui est la finalité du projet de loi. Quelqu'un va écrire les lignes de code pour que le ministère de la Santé, l'Éducation, le Trésor, Revenu Québec, à la fin, ça puisse se parler et qu'ils puissent... et que des analyses puissent se faire. On imagine aujourd'hui à quel point un épidémiologiste, un statisticien, l'Institut de la statistique du Québec pourra sortir de ce genre de donnée là. Alors, je n'ai pas demandé à ce que l'État devienne un coffre-fort où les données sont gelées dans le ciment. Ce n'est pas ça du tout, aucun rapport.

Le ministre fait référence à l'écosystème dans lequel on doit être. Bien oui. Et le ministre nous dit que le citoyen, il faut qu'il ait accès à des données, il faut qu'il ait les réponses à ses questions. Bien oui. Ce dont je parle, c'est la circulation de la donnée potentiellement nominative, parce que décodée à l'extérieur du périmètre.

Et là, là, je vais donner un exemple que j'espère qu'il va éclairer la lanterne du ministre. Je n'ai pas dit non plus que la sécurité, c'était physique, ça n'a aucun rapport. La partie la plus facile de la sécurité aujourd'hui, c'est la partie physique. Il n'y a pas de débat à faire là-dessus, là. Ce n'est pas compliqué, là, c'est la ventilation, des murs de béton de quatre pieds d'épais puis des gardiens de sécurité, là, puis quelqu'un qui contrôle ce qui se passe dans le fil. C'est ce qui se passe dans le fil qui est le problème. Alors là, je vais donner un exemple qui va illustrer mon propos. Le citoyen, là, M. Paul X, ce matin, là, ou cet après-midi, il a une interrogation, il se pose une question sur son rapport d'impôt. Il veut savoir quel est son solde parce qu'il n'est pas sûr d'avoir payé tout ce qu'il avait à payer, mais il a déjà payé telle affaire, puis il voudrait en avoir le coeur net. Puis on sait que clicSEQUR, là, puis cette page-là, là, pour ceux qui l'ont utilisée, mettons que ça pourrait être amélioré, on va dire ça comme ça, mettons, juste ça, un petit peu. Puis mettons qu'il est la personne responsable, puis il a accès au dossier de ces enfants, puis là il veut aller faire... il veut avoir des réponses pour sa famille. C'est lui qui fait le rapport d'impôt de sa femme, ses trois enfants, et ainsi de suite, qui ont entre 16 et 19 ans. Bon. Là, mais là, là, on est compliqués, là, aujourd'hui, là, puis la transformation numérique va régler ça.

• (12 h 20) •

Alors, voici le point dont je veux parler, là, qui est le plus important. Quand le citoyen va poser une question à la base de données, on va lui donner un résultat, et pas nécessairement toute la donnée qui est en arrière. Il faut faire la nuance entre l'interface du citoyen, d'une entreprise, de l'univers, et la base de données gouvernementale, qui, elle, doit être dans ce que le ministre a qualifié de coffre-fort, versus l'interface qui donne un résultat, et non une donnée qui, elle, est dénominalisable. C'est là qu'est la clé.

Moi, là, pour donner une réponse, là, sur une affaire simple comme un rapport d'impôt, là, bien, je ne vais pas faire sortir le dossier au complet. Je ne vais pas faire sortir la pension alimentaire, la ceci, la cela. Non, non. Il y a une question qui a été posée, là, voici la réponse. Et toutes les données qui ont permis d'en arriver au résultat, ça reste là, et ça, ça ne sort pas. Et ça, ne sortant pas, ça ne sera pas dénominalisé, puis ça ne circulera pas, puis ça ne sera pas croisé avec des données de Facebook. Une grosse nuance, là, grosse nuance. Faire sortir de la donnée ouvre la porte à l'analyse de la donnée. Poser une question et donner une réponse dans le cadre de l'accès à l'information, ce n'est pas la même chose.

Pour prendre une image peut-être plus spectaculaire, M. le Président, demander à la bibliothécaire la citation d'un auteur sur telle chose qu'on sait que c'est dans tel livre, bien, je vais avoir un résultat, je vais avoir la citation, je vais me l'envoyer par courriel. Mais je n'aurai pas le livre au complet ni la bibliothèque. Je n'aurai pas un rayon. Je n'aurai pas le livre. J'ai demandé à la bibliothécaire : Pouvez-vous me sortir, parce que je ne m'en rappelle pas exactement, la citation unetelle de tel auteur? Je n'ai pas le livre, là. La bibliothécaire, elle sort... payant, tiens, le service. Ça va vous coûter 5 $. O.K. On m'envoie par courriel la citation précise, exactement ce que j'ai demandé. Je n'ai pas le livre, je n'ai pas le rayon, je n'ai pas la bibliothèque puis je n'ai pas le réseau de bibliothèques. Ça, c'est la différence entre un accès et une transmission de donnée dénominalisable. Parce que c'est ce qu'on a vu...

Une voix : ...

M. Barrette : Bien oui, mais... Oui, bien... Alors, je n'ai pas fini, M. le Président. Alors, au contraire, je vis dans un environnement, et depuis beaucoup plus longtemps que bien du monde autour de la table et qui nous écoute, dans un environnement hypernumérisé, avec bien de la donnée qui se promène, puis c'est correct, et ça se fait. Mais là on arrive dans un autre moment, et ce moment-là est un moment, en quelque part, inquiétant.

Alors, c'est comme ça, là. Alors, je dis au ministre : Comprenez-moi bien, là, je ne veux pas d'avoir un univers parallèle, je veux que l'interface soit telle que la donnée soit totalement protégée, et actuellement l'expérience internationale et québécoise montre le contraire, d'où l'intérêt d'en faire plus que moins. Parce que, quand on commence à avoir des tendances, quand on commence à avoir des événements qui sortent à gauche puis à droite, partout, comme on le voit aujourd'hui, c'est parce qu'il y en a probablement d'autres qu'on ne sait pas, et on doit se prémunir contre ça.

Une voix : ...

M. Barrette : Bien oui, justement. Alors là, d'où la problématique de l'article 3 qui permet à des données de sortir du périmètre gouvernemental, ne serait-ce que pour écrire des lignes de code.

Le Président (M. Allaire) : ...laisser répondre M. le ministre. Simplement souhaiter la bienvenue à la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne, qui s'est jointe à nous. Bienvenue. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Caire : Oui. Je vais essayer, M. le Président. M. le Président, le député de La Pinière...

Le Président (M. Allaire) : ...

M. Caire : Je vais le libeller autrement. Le député de La Pinière, quelquefois, dans son raisonnement... je veux dire, on est en symbiose, et là il me ramène, woup! à une conclusion qui n'est pas soutenue par son argumentaire.

Puis là je vous explique, M. le Président. Quand on dit, dans l'article 3, qu'il doit... que les organismes doivent communiquer, dès lors, que cette utilisation, cette communication est nécessaire à la réalisation, on amène la notion de nécessité. Puis là je l'ai dit, plus tard, il y a des régimes de protection, qui sont prévus, pa, pa, pa, bien, on va discuter de ça. Mais, dans l'argumentaire du député de La Pinière, il nous dit : Écoutez, moi, je fais une requête, je veux avoir une information. Je n'ai pas tout le processus, j'ai le résultat, la réponse à la question que j'ai posée. Donc, on vous communique l'information qui est nécessaire. Je ramène ça dans le cadre du projet de loi n° 14, parce que, là, c'est un principe qui est très général, je le ramène dans le cadre du projet de loi n° 14 où on parle de faire de la réalisation d'un projet. Ce que l'on dit... On ne dit pas : L'information va rester dans un tel périmètre, on dit : L'information qui est communiquée doit être une nécessité pour le destinataire. C'est une nécessité, donc le destinataire a besoin de cette information-là pour réaliser sa prestation de service. C'est ça que l'article 3 dit. On va la faire circuler, la donnée, et on va la faire circuler exclusivement à ceux pour qui c'est nécessaire. Donc, on joue sur la notion de «nécessité», pas sur la notion d'où est-ce que vous êtes physiquement. C'est un petit peu ça que je disais tantôt, puis je ne voulais pas faire dire au député de La Pinière ce qu'il n'a pas dit, loin de moi cette intention. Effectivement, le débat est extrêmement intéressant, puis on va travailler à ce que ça continue comme ça.

Mais la sécurité ne se fait pas en fonction d'un périmètre. La sécurité se fait en fonction de la donnée. On va sécuriser la donnée parce qu'on veut la rendre mobile, et c'est pour ça qu'on dit que, cette donnée-là, elle est communiquée aux personnes pour qui c'est nécessaire, et, plus tard, les régimes de protection... Et c'est pour ça que je dis, là, tu sais, on ne fera pas tout le projet de loi dans l'article 3. Mais, l'article 3, il vient quand même circonscrire à qui on peut communiquer cette information-là sur la notion de nécessité. Parce que, ce qu'on ne veut pas, parce que ce qu'on ne veut pas, c'est que dans une prestation de services... Et, moi, je l'ai vécu, le collègue parle de son bagage d'expérience, ce que je ne conteste pas, soit dit en passant, mais je l'ai vécu, je veux dire, tu es dans un mandat, tu dois réaliser tel ou tel livrable, mais tu n'as pas ce qu'il faut pour travailler. Or, je fais ça comment? Je ne fais pas de magie, là. Donc, on s'assure que, dans la réalisation d'un projet, la donnée, qui est la pâte autour de laquelle on va tout... pour laquelle on crée tout le reste, bien, cette donnée-là, elle va être disponible pour qui en a besoin, pour qui c'est nécessaire. Ce n'est même pas «besoin», c'est pour qui c'est «nécessaire».

Puis je comprends les préoccupations de sécurité de mon collègue, mais je continue à le dire, plus tard dans le projet de loi, on va définir les régimes de protection supplémentaires, on va définir de quelle façon on doit entourer cette donnée-là de la sécurité nécessaire tout en gardant cette fluidité-là, dont il est d'accord avec moi, qui est tout aussi nécessaire. Ça fait que c'est pour ça que, de dire : Je vais établir un périmètre en dehors duquel la donnée ne circulera jamais, on n'atteint pas l'objectif. Ce n'est pas la façon d'atteindre l'objectif. La façon d'atteindre l'objectif, c'est de sécuriser la donnée elle-même parce qu'éventuellement, dans l'écosystème auquel on faisait référence tout à l'heure, on veut que cette donnée-là puisse circuler, et on est capables, on est capables de faire ça. On est capables de dire : Bon, bien, telle ou telle information a un régime de protection qui inclut ça, ça, ça, et qui exclut ça, ça, ça. On est capables de faire ça. Puis je suis convaincu que le collègue...

Pour donner un exemple un peu grossier, mais je pense qu'il va illustrer mon propos, l'information que possède le gouvernement, qu'on rend accessible sur donneesquebec.ca, je pense qu'il va être d'accord avec moi pour dire : On ne mettra pas un système de protection autour de ça, c'est de la donnée publique. Alors, je vais à l'extrême volontairement, mais c'est de l'information gouvernementale, à toutes fins utiles, mais cette information-là n'a pas besoin d'un régime de protection particulier ou même d'un régime de protection tout court, elle est publique, elle est à la disposition de qui veut bien la consulter, voire s'en servir pour développer des applications. Puis, si on va à l'autre bout du spectre, bien, des informations ultrasensibles, données financières du gouvernement du Québec, données budgétaires du gouvernement du Québec, qui sont des informations ultrasensibles, évidemment, on ne peut pas traiter ça de la même façon.

• (12 h 30) •

C'est clair que, oui, tout ça, c'est sous le grand chapeau de la donnée gouvernementale, mais je pense que c'est évident, à sa face même, que le régime de protection dont on va entourer les données financières du gouvernement du Québec versus les statistiques sur les accidents de la route, on peut leur donner la dénomination «informations gouvernementales», mais ce n'est pas la même nécessité de protection. Et donc on n'a pas créé un périmètre autour de la donnée sans égard à la donnée, ce n'est pas la façon de la protéger, c'est la donnée elle-même qu'il faut protéger. Ce n'est pas une espèce de mur de Chine qu'il faut bâtir, puis excusez l'image, là, je ne veux vous prêter des propos que vous n'avez pas tenus, là, mais ce n'est pas... et c'est justement... puis il le disait lui-même tout à l'heure, que de désanonymiser des données, c'était possible. Alors, c'est ce genre de régime de protection là, de faux sentiment de sécurité qu'il faut éviter. Il faut avoir des vraies mesures de protection mais là où c'est nécessaire.

Et donc, encore une fois, il faut se concentrer sur le niveau critique de la donnée et la protéger de façon adéquate mais en fonction du niveau critique de la donnée, et non pas créer une espèce de périmètre de sécurité autour de la donnée gouvernementale sans égard à quelle est cette donnée, à qui est-elle nécessaire, qu'est-ce qu'on doit faire avec, qu'est-ce qu'on ne peut pas faire avec, tu sais, on ne peut pas se dédouaner de se poser ces questions-là et d'avoir une utilisation de la donnée qui est correcte en fonction de son niveau critique. Et c'est ce qu'on fait avec le projet de loi n° 14, c'est exactement ce qu'on fait avec le projet de loi n° 14, on s'adresse à la donnée comme telle, à son niveau critique, à ce qu'on peut faire, à qui est-elle nécessaire, à qui ce n'est pas nécessaire, est-ce que ça nécessite des régimes de protection particuliers, avoir une transparence aussi, qu'est-ce qu'on a fait avec cette donnée-là, il faut être transparent, ça aussi, c'est un régime de protection en soi quand tu déclares l'ensemble de ce qui a été fait avec la donnée comme telle.

Donc, l'article 3, je pense, dans sa forme actuelle, atteint l'objectif, qui est de dire, et je sais que le collègue et moi, on partage cette vision-là, de dire : La donnée doit être mobile, mais pour qui c'est nécessaire.

Le Président (M. Allaire) : Merci, M. le ministre. Vous souhaitez intervenir, M. le député de La Pinière? Allez-y.

M. Barrette : C'est parce que ce n'est pas ça qu'il dit, l'article 3, puis on l'a établi. Quand j'ai posé la question, là, est-ce que... puis Me Bacon l'a confirmé, là, vous êtes deux, là, à l'avoir confirmé, ça fait que c'est clair : Est-ce que ça permet d'envoyer à une tierce partie non gouvernementale de la donnée? La réponse, c'est oui, c'est oui, point final. 3, là, l'article 3, qu'est-ce qu'il dit? Le ministre parle de nécessité, il parle de... ça, c'est une notion de Commission d'accès à l'information, de loi sur l'accès à l'information. Quand il nous dit qui a droit de regarder quoi, à l'intérieur du gouvernement, ce n'est pas de ça que je parle, je ne parle pas de ça. L'article 3, puis son projet de loi ne sert pas à ça. Ça, c'est un débat interne de la refonte de la loi à l'accès à l'information.

Est-ce qu'on peut croiser des données de Revenu Québec avec la santé? Ça, c'est le grand dilemme, ça, c'est l'épouvantail à moineaux, ça, ce n'est pas réglé, ça, c'est la loi à l'accès à l'information. Ce n'est pas de ça qu'on parle puis ce n'est pas ça, la transformation numérique. La transformation numérique, c'est, lorsque ça, ce sera revu, est-ce que nos systématiques électroniquement, là, informatiquement, vont pouvoir faire ça? La compagnie, là, les organismes et personnes qui vont venir procéder au projet d'intérêt gouvernemental, ils viennent regarder si c'est faisable et comment sont construites les bases de données, quels sont les protocoles, qu'est-ce qu'on doit mettre en place pour que ça se fasse. Et l'article 3 dit : Si c'est nécessaire pour l'organisme d'avoir accès à des données actuellement auxquelles il n'a pas accès normalement, on va lui donner. En français, là, on va lui donner une base de données type et assez grosse, ils vont faire leurs tests, ils vont l'avoir, là, il y a le risque, ils vont revenir l'appliquer dans le système.

Le ministre me parle du résultat souhaité par son action, moi, je lui parle de la façon de se rendre là, un : Est-ce que des données peuvent aller à l'extérieur par 3? Oui. Est-ce que c'est nécessaire pour une compagnie d'y avoir accès? C'est marqué, là, si c'est nécessaire, là, on va lui donner. Et, moi, je dis, compte tenu de ce qu'on voit aujourd'hui, il y a un risque là, ne devrait-on pas le faire autrement? Je ne parle pas de l'utilité de croiser une donnée avec une autre, je ne conteste pas ça. Je ne conteste pas la réflexion qui doive être faite pour en arriver à ça et de déterminer ce qu'il va y avoir à la fin. Je ne parle pas de ça.

La compagnie, ou la personne, ou l'organisme qui va venir travailler, là, qui va être interpelé par l'appel d'offres que le gouvernement va faire, à qui la loi va lui dire : Je peux t'envoyer actuellement des données que tu n'aurais pas le droit normalement, je dis : Il y a un problème, là. Je ne dis pas qu'il y a un problème avec le fait que... Je ne parle pas d'une... Je n'ai pas parlé une seule seconde, sauf pour dire qu'il y a des épouvantails, sur la question de la mobilité des données à l'intérieur du gouvernement. L'enjeu, ici, de 3, et c'est établi : des données peuvent sortir à l'extérieur dans un environnement, un écosystème où, actuellement, on sait qu'on peut dénominaliser.

Moi, je vois un risque. Et, bien, je dirais, M. le Président, j'invite le ministre à arrêter de me parler de ce qu'il veut faire comme résultante finale. On est d'accord là-dessus. Aujourd'hui, l'article 3 permet-il de faire sortir du périmètre gouvernemental des données en quantité même significative? La réponse, c'est oui, ça peut sortir. Significative? C'est oui aussi, parce que la complexité du projet de transformation informationnelle d'intérêt gouvernemental, bien, c'est parce que c'est des grosses bases de données. Puis là il y a plein de bugs, il y a plein de ça, il y a plein de cas de figure, puis il va falloir... Bon. Et là, c'est ça qui est le problème. Il est là, le problème. Mon enjeu, à moi, c'est ça. Pas ce qui va se passer dans le gouvernement après. On est d'accord.

Alors, je recommence, puis je termine là-dessus pour ce moment-ci, pour le débat. Est-ce que les données peuvent sortir à des fins de réalisation du projet? La réponse, c'est oui. Confirmé par Me Bacon. Est-ce que ça peut être des données en quantité significative? C'est évident que c'est oui aussi, là. On ne va pas envoyer... On ne va pas faire sortir, là, une base de données de 200 personnes pour voir si ça fonctionne pour 8 millions, là. On sait très bien que ce n'est pas comme ça que ça se passe. Il y a un enjeu de circulation de la donnée. Et la question qui se pose à la fin : Aujourd'hui, avec ce qu'on sait, là, est-ce que c'est sage de faire ça ou est-ce que ça ne devrait pas se faire à l'interne pour des raisons de protection de ces dites données?

Le Président (M. Allaire) : M. le ministre, la parole est à vous.

M. Caire : Bien, M. le Président, si on se fie aux exemples qui sont cités par le député de La Pinière, les risques qui ont été encourus par les entreprises désignées, c'est des risques à l'interne. C'est des risques à l'interne. L'institution financière dont il parle, le risque, il était à l'interne. Revenu Québec, le risque, il était à l'interne. Et c'est pour ça que je suis en partie d'accord, mais la conclusion... C'est la conclusion du député de La Pinière avec laquelle je ne suis pas en accord. Parce que sa conclusion, c'est de dire : Il faut éviter à tout prix, il faut interdire qu'une donnée gouvernementale soit... circule ailleurs que dans une instance gouvernementale. Ça, c'est sa conclusion. Puis ce que j'essaie de lui dire, c'est que la démonstration a été faite, il me semble, en tout respect... Puis je ne veux pas conclure à des enquêtes avant que les enquêteurs en arrivent à la conclusion, mais la démonstration a quand même été faite que les fuites, elles étaient à l'interne.

Donc, ce n'est pas une protection absolue, là. Il ne faut pas penser... C'est comme l'anonymisation des données, là, il ne faut pas penser qu'on est dans une protection absolue. On a anonymisé les données, donc on est protégé, tout va bien. Non. Il le dit lui-même, on est capable de faire la rétro-ingénierie de ça. Alors, ce n'est pas parce qu'on dit : Bon, bien, je mets un mur de Chine sur la donnée, elle ne sortira jamais du gouvernement, et nous sommes en sécurité. Non. Ce n'est pas exact.

• (12 h 40) •

Et c'est là où la notion de nécessité, puis j'ai l'impression que je l'irrite quand je dis ça, mais, en même temps, la notion de nécessité, elle est nécessaire. Excusez le pléonasme, là, mais pourquoi? Parce que ceux... La question qu'il faut se poser, c'est : Est-ce que seuls ceux qui doivent avoir accès à la donnée ont accès à la donnée? Ça, c'est la question, je pense, qu'on doit se poser. Est-ce que la donnée est accessible aux seules personnes pour qui c'est nécessaire? Puis ne pas se demander : Oui, mais est-ce que ce sont des consultants, est-ce que ce sont des OBNL, est-ce que ce sont des membres de la fonction publique, est-ce que ce sont des membres des réseaux d'éducation ou de la santé? Est-ce que ces personnes-là doivent avoir accès à l'information, oui ou non? Est-ce que cette information-là doit être rendue disponible, elle doit être communiquée, oui ou non? Alors, c'est la notion de nécessité, c'est ça qu'elle dit. Et plus tard, je le répète, parce qu'on n'arrête pas la réflexion là, sur la protection des données, mais là on parle de l'article 3, donc on ne refera pas... Comme j'ai dit, on ne va pas intégrer tout le projet de loi à l'intérieur d'un seul article, c'est pour ça qu'il y a d'autres articles, c'est parce que, oui, oui, il y a des mesures de protection additionnelles à mettre en place, oui, il y a d'autres questions à se poser, avec des répondes à donner, puis on va les trouver ailleurs. Mais, dans un contexte où l'article 3, son objectif, dans l'ensemble du projet de loi, c'est de dire : la transformation numérique rend la mobilité de la donnée nécessaire, c'est ce que l'article 3 dit, et le rend nécessaire — pour qui? Pour qui c'est nécessaire, c'est ça qu'il dit, l'article 3 — donc, toute la réflexion en périphérie du collègue... Puis je le comprends, parce qu'il dit : L'article 3 fait en sorte que je pourrais communiquer de l'information à une entité externe du gouvernement. Oui, oui, mais est-ce que c'est nécessaire? Parce qu'il faut se la poser, cette question-là, puis on ne peut pas en arriver à la conclusion ultime qu'on ne veut pas se poser la question : Est-ce qu'on doit le faire? Non, on ne veut pas se poser cette question-là, ce n'est pas du gouvernement, on ne se pose même pas la question : C'est-u nécessaire? Non, on ne se pose pas la question. Il y a la notion de nécessité, elle est extrêmement importante. Et, après ça, du moment où on dit : Oui, c'est nécessaire, bien, est-ce qu'on le fait n'importe comment? Bien non. Mais ça, ce n'est pas le rôle de l'article 3, de définir ça, c'est les articles subséquents qui vont venir définir comment on communique l'information à qui c'est nécessaire de le faire.

Le Président (M. Allaire) : Vous avez terminé, M. le ministre.

M. Caire : Oui.

Le Président (M. Allaire) : Parfait. Merci. M. le député de La Pinière, la parole est à vous.

M. Barrette : On va reprendre une énième fois, on va finir par se comprendre, on va finir par se comprendre. Mais, pour se comprendre, je vais lire l'article : «Un organisme public que peut désigner le gouvernement — bon, le gouvernement désigne, ça, c'est facile — à toute personne ou à tout organisme les renseignements personnels qu'il détient [...] lors [de] cette utilisation ou cette communication est nécessaire...»

On a établi, le ministre l'a dit, que toute personne ou tout organisme, ça peut être du monde de l'extérieur, une compagnie, des individus, c'est établi. Et là ce n'est pas tout, là, il est nécessaire à la réalisation d'un projet en ressources informationnelles d'intérêt gouvernemental. Alors, on a établi que les données peuvent sortir et aller chez un tiers puis si c'est nécessaire pour la réalisation du projet. Le projet de transformation informationnelle vise à faire ce que le ministre nous dit. Qu'est-ce qui va circuler d'une entité à l'autre dans le gouvernement, à quelles conditions, et ainsi de suite. On s'entend là-dessus, hein, on s'entend, là, que la transformation informationnelle, ce n'est pas simplement la fluidité des informations mais aussi la détermination de ce qui va circuler. On s'entend là-dessus puis on s'entend que cette autoroute-là de l'information interne qui va circuler dans le gouvernement à telle ou telle condition, bien, ça va exiger qu'on réécrive des lignes de code. Ça va exiger ça. Alors, le projet de loi, là, c'est un projet qui vise à faire ça, faire circuler des données selon des critères. O.K., ça, ça circule, ça, ça ne circule pas, à telle, telle condition. Il faut réécrire des lignes de code, mais la compagnie, l'organisme, l'individu externe avec qui on va faire affaire pour faire cette réalisation-là, les tests, le déploiement, et ainsi de suite, va pouvoir recevoir des données pour tester son affaire, si on peut le simplifier ainsi.

Alors, mon argument, mon commentaire, ce n'est pas : ça va se promener d'un organisme à l'autre à telle ou telle condition, on le sait, que c'est ça que ça veut faire, puis on est d'accord. Mais celui qui va la faire, la transformation informationnelle... transformation informationnelle, ça veut dire : Ce que vous avez comme logiciel, là, bien, il faut mettre ça à jour. Puis il y a une manière de le faire puis on ne sait pas trop comment — ça, ce n'est pas grave — c'est pour ça qu'on vous engage. Alors, ceux qui vont être engagés pour faire ces projets-là, qui sont des projets test, pilotes, à toutes fins utiles, bien, eux autres, là, pour le faire, on autorise à ce que les données sortent. Alors, c'est pour ça que je dis, là, depuis maintenant presque une heure, on ne parle pas de la même affaire. Le ministre répond tout le temps sur : Oui, mais il faut faire ça. Bien, oui, on est d'accord. Le problème, c'est que, là, aujourd'hui, il y a des données pour le faire qui vont sortir dans un écosystème qui a montré ses failles jusqu'à récemment, et le ministre l'a accepté, ce concept-là. Il a accepté le fait que, quand on sort, on augmente le risque. Alors, il ne faut pas me dire : Le risque n'est jamais zéro. Je le sais, je l'ai dit.

Alors, pourquoi, à ce moment-là, ne serait-il pas plus prudent de faire ça à l'interne? Le ministre a dit lui-même, lui-même, que, oui, ces gens-là peuvent s'amener, on peut les amener dans notre périmètre et le faire là. Pourquoi qu'on ne fait pas ça? Alors là, un article, et c'est ça qui est le coeur de l'affaire, qui permet que ça sorte, et là, toutes les règles de sécurité qu'on va voir plus loin, là, ça va être des règles qui sont les règles standard, ça va être dénomalisé, et ainsi de suite, et là on sait que, là, on vit dans un environnement problématique. Je ne peux pas, je pense, être plus clair que ça. Et il me semble que le ministre, à ma question : Pourquoi qu'on ne le fait pas en dedans? Il ne peut pas me répondre : Oui, mais on veut de la mobilité, puis le député de La Pinière veut qu'on se sépare de... non. Ce n'est pas ça du tout. Ce n'est pas ça du tout. La finalité interne, on s'entend. La façon de le faire, le chemin, autrement dit, là, entre le point a et le point b, on peut faire ce chemin-là dans le périmètre gouvernemental. L'article 3 nous permet de faire un détour vers l'entreprise privée pour arriver au même point b. Je ne débats pas du point b, je débats du détour. Et le ministre est d'accord avec moi, là. La procureure le dit... c'est-u correct, ça, procureure? Non, la...

Une voix : Légiste.

M. Barrette : La légiste, pardon, excusez-moi. Mme la légiste, Me Bacon l'a dit : L'article 3 permet le détour à l'extérieur. Alors, dans un environnement qu'on connaît aujourd'hui, ce n'est pas le point b, là, le point a, on le connaît, c'est ce qu'on veut résoudre. Le point b, on sait à peu près ce qu'on veut, on est d'accord, et là il y a un dilemme. On fait un détour à l'extérieur ou on ne le fait pas. 3 ne permet qu'une chose, pas deux, pas trois, pas quatre, 3, c'est pour permettre le détour à l'extérieur. On est-u heureux avec ça? Moi, j'ai des inquiétudes. Je pense que mon collègue de René-Lévesque a des inquiétudes. Je pense même que mon collègue, muet pour le moment, de Québec solidaire est d'accord avec ça. Il va finir par parler, là, je ne peux pas croire, mais c'est là qu'on est.

Le Président (M. Allaire) : Vous avez terminé votre intervention, M. le député?

M. Barrette : Bien sûr.

Le Président (M. Allaire) : M. le ministre, la parole est à vous.

• (12 h 50) •

M. Caire : M. le Président, là, je pense que c'est le député de La Pinière qui ne comprend pas ce que j'essaie de lui expliquer, qui est la notion de nécessité. C'est parce que le député de La Pinière nous dit : Est-ce que la loi ne devrait pas en arriver à la conclusion qu'il n'est jamais nécessaire d'aller à l'externe? Puis, dans le fond, c'est ça qu'il nous dit : Est-ce que la loi devrait faire en sorte d'interdire qu'au nom de la non-circulation de la donnée, on aille à l'externe? Ce que je lui réponds, c'est : Non. C'est la notion de nécessité. Alors, si cette situation-là, hypothétiquement, se produit, ce que je dis au député de La Pinière, c'est deux choses.

D'abord, ce sera conditionné par la nécessité. Donc, il me dit : Mais pourquoi on ne le fait pas à l'interne? Parce qu'il y aura nécessité de le faire à l'externe. Pourquoi on ne le fera pas à l'interne? Écoutez, là, il faudrait qu'on ait un cas précis, une situation précise pour laquelle une décision a été prise en fonction de cette situation-là précise, mais la loi laisse cette possibilité-là en précisant le caractère de nécessité. Donc, pourquoi? Parce que ce sera nécessaire de le faire de cette façon-là. Ça, c'est la réponse à sa question.

Maintenant, si la nécessité commande qu'on fasse ça, puis ce que le reste du projet de loi va prévoir, c'est qu'on ne le fasse pas n'importe comment, c'est qu'on ne le fasse pas n'importe comment. Et donc, que les mesures de protection qui seront prises seront prises à la satisfaction, notamment, de la Commission d'accès à l'information. Et je veux lui dire que le régime juridique actuel, puis corrigez-vous si je me trompe, là, mais le régime juridique actuel nous permet déjà de faire ça. Tu sais qu'on n'est pas dans du droit nouveau, là, on ne vient pas d'inventer un concept.

Puis je comprends ce que le député de La Pinière me dit : Oui, mais là, la situation a changé. Est-ce que la situation a vraiment changé? On a des cas très clairs de failles de sécurité qui commandent qu'on mette en place des mesures qui vont corriger ces failles-là. Mais je répète à mon collègue que les failles principales viennent d'éléments internes. Et donc, quand on pense sécurité, oui, il faut se protéger contre les intrusions, mais il faut se protéger contre les tirs amis aussi, parce que Desjardins, c'est ça; Revenu, c'est ça. C'est des tirs amis.

Une voix : ...

M. Caire : Oui, tirs amis.

Une voix : Ah! des tirs amis.

M. Caire : Oui.

Une voix : ...

M. Caire : C'est... il y a un r.

M. Barrette : Tirs... Cest-u un m qui est un n?

M. Caire : Il y a un r, M. le député de La Pinière, qui est très important. Tirs amis.

Une voix : ...

M. Caire : Oui, c'est ça, il ne faut pas les confondre. Mais bref, oui, l'article 3, il a raison, l'article 3 pourrait permettre cette situation-là, mais ce que l'article 3 fait aussi, c'est de préciser si c'est nécessaire, s'il y a une nécessité de le faire. Alors, évidemment, la nécessité sera commandée par la situation qu'on vivra et si la conclusion, c'est que c'est nécessaire de le faire, puis je suis convaincu que le député de La Pinière dit : Bon, bien, si nécessaire, si c'est nécessaire, faisons-le, bien les articles subséquents nous permettront de le faire et de bien le faire, de le faire correctement, pas de faire ça n'importe comment.

Mais, tu sais, l'idée... Il faut rassurer nos concitoyens, là. L'objectif, ce n'est pas de dire : On va prendre les données du gouvernement puis qu'on va te garrocher ça à tout un chacun, au bon plaisir de... Tu sais, on n'est pas caves à temps plein, là. On est très préoccupés par la protection des données... à temps partiel... Non, mais j'ai lu dans vos pensées, M. le député de La Pinière.

Une voix : ...

M. Caire : Non, j'ai tout fait ça moi-même, c'est correct. Je me les sers moi-même avec assez de verve.

Donc... Mais tout ça pour dire qu'on est très conscients de l'enjeu, mais je réitère que l'objectif du projet de loi, c'est de procéder à la transformation numérique du gouvernement, le député de La Pinière l'a répété à plusieurs reprises, donc on est en symbiose sur cet objectif-là. Et, oui, il va arriver que des expertises vont nécessiter qu'on aille à l'externe. Tu sais, donc, ça sera par nécessité que nous le ferons, même si j'ai été très clair sur le fait que notre gouvernement souhaitait internaliser, autant que faire se peut, les expertises. J'ai parlé de nos objectifs avec l'Académie de transformations numériques pour permettre à notre monde d'aller chercher ces expertises-là, pour permettre qu'on soit capables de faire le plus possible à l'interne mais à l'impossible, nul n'est tenu, et on ne développera pas toutes les expertises dans tous les champs de compétences que la transformation numérique nous offre.

Et donc, oui, oui, il y aura, possiblement... Je dis possiblement, possiblement, je n'ai pas de scénario précis puis je n'ai pas de projet actuellement qui me disent qu'on va faire ça mais il y a une possibilité. Cette possibilité-là, on doit la garder. J'ai peut-être un point de vue différent avec le député de La Pinière. Je ne pense pas que de fermer cette possibilité-là, de dire : Rien ne devra aller à l'externe... Je pense que ce n'est pas une bonne idée. Je pense qu'il faut garder cette possibilité-là. Il faut l'encadrer, c'est ce qu'on fait à l'article 3, principalement en amenant la notion de nécessité. Donc, déjà, je peux lui dire que, si ça se fait, c'est parce que ça sera nécessaire, et je peux lui dire aussi que, si ça se fait, bien, les autres articles du projet de loi vont nous permettre d'encadrer ça et de revenir à mon propos initial, donc de sécuriser la donnée comme telle.

Et anonymiser la donnée, ce n'est pas nécessairement la meilleure mesure de protection, il en existe d'autres : dans la transmission, il existe d'autres moyens technologiques d'assurer la transmission de la donnée; dans la lecture de la donnée, il y a des moyens technologiques qui existent pour la rendre accessible à qui c'est nécessaire, et pas aux autres. Donc, il y a d'autres supports technologiques qui sont plus performants qu'anonymiser les données. Et ça, là-dessus, bien, on pourra avoir des discussions à point nommé.

Le Président (M. Allaire) : Merci, M. le ministre. M. le député de La Pinière, la parole est à vous.

M. Barrette : Je pense qu'on a fait beaucoup de chemin ce matin. Alors, résumons. Parce que, là, le dernier commentaire du ministre est très intéressant et important.

Une voix : ...

M. Barrette : Oui, mais c'est surtout pour l'admission que ça donne. Alors, on a établi ce matin, là, que l'article 3 permet... Le ministre, là, a concédé, la légiste, Madame... Me Bacon, l'a confirmé — excusez-moi, Me Bacon — l'a confirmé, l'article 3 permet au gouvernement d'envoyer à l'extérieur de son périmètre des données personnelles pour les fins de réalisation du projet de transformation numérique qui va lui être... pas soumis, mais qu'il va choisir. Ça, c'est clair. Le ministre a aussi convenu avec moi que le fait d'aller à l'extérieur pouvait... devrait augmenter les risques, dans l'absolu. Je n'ai pas dit que c'est un risque indu, mais, par définition, ça augmente le risque, le ministre a été d'accord avec ça.

Le ministre, pour nous rassurer, dit que ce sera... ces données-là qui iront à l'extérieur à une quelconque personne et/ou organisme et/ou compagnie privée, ça devra se faire à certaines conditions. Une de ces conditions-là, c'est que ça soit nécessaire, et le ministre insiste beaucoup sur la nécessité comme étant un gage de protection. Là, je ne suis pas d'accord avec ça, parce que ce que le ministre fait, M. le Président, ce n'est pas compliqué, il choisit dans son projet de loi de permettre à des données de sortir du périmètre gouvernemental, il choisit de ne pas le faire à l'interne. Pour me paraphraser, là, me citer, entre le point a et le point b, il choisit la possibilité de faire un détour à l'extérieur du gouvernement, et la nécessité à laquelle il fait référence, c'est la nécessité que la compagnie, ou que le gouvernement, ou les deux ensemble verraient à ce que des données soient transmises à l'extérieur. Si le ministre n'avait pas choisi de faire un détour à l'extérieur du gouvernement, il n'y en aurait pas, de problème, ni risque. La nécessité n'est pas un gage de sécurité, la nécessité est une limitation d'un risque accru dans l'absolu. Ce n'est pas un gage de sécurité additionnel, c'est un gage de limitation de l'accroissement du risque en allant à l'extérieur, dans l'environnement informatique que l'on connaît aujourd'hui, et c'est à ce choix-là que le gouvernement fait face, prendre le détour d'aller à l'extérieur pour arriver à sa finalité, que l'on convient et avec laquelle on est d'accord, plutôt que de rester à l'interne. C'est ça qui est l'enjeu aujourd'hui, pas plus que ça.

Tout le reste, bien, c'est un peu hors sujet. L'article 3, c'est plate peut-être pour le gouvernement, mais c'est ça qu'il dit, et c'est confirmé par Me Bacon. J'y vois encore aujourd'hui un problème... Je vois qu'il ne me reste que quelques secondes.

Le Président (M. Allaire) : En terminant, M. le député. Merci.

M. Barrette : Alors, vous ne serez pas surpris, M. le Président, si nous revenons sur ce sujet-là sous différents angles cet après-midi. Je vous souhaite bon appétit.

Le Président (M. Allaire) : Alors, merci, tout le monde, pour votre belle collaboration ce matin en ce retour de période estivale. Donc, les échanges ont été fructueux et dans le respect de tout le monde.

Donc, compte tenu de l'heure, la commission suspend les travaux jusqu'à 14 heures. Merci.

(Suspension de la séance à 13 heures)

(Reprise à 14 h 2)

Le Président (M. Allaire) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Merci, messieurs. La Commission des finances publiques reprend ses travaux. Je demande donc à tous et à toutes de prendre le temps de fermer la sonnerie de vos appareils électroniques.

Je vous rappelle que la commission se réunit afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 14, la Loi favorisant la transformation numérique de l'administration publique.

Donc, lors de la suspension de nos travaux ce midi, le débat portait sur l'article 3. Juste en guise d'information, je vous donne le temps restant. Donc, M. le député de La Pinière, il vous reste 17 min 35 s, pour être très précis, la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne, vous avez tout votre temps, et le député de René-Lévesque, il reste 75 minutes.

Alors, M. le député de La Pinière, est-ce que vous êtes prêt à prendre la parole?

Une voix : ...

Le Président (M. Allaire) : Oui, la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne. Oui, allez-y, la parole est à vous.

Mme Anglade : Je vous remercie. J'en profite, d'ailleurs, pour saluer tous mes collègues, que je n'avais pas eu l'occasion de saluer avant, puis bon retour au travail à l'Assemblée nationale.

Alors, M. le Président, j'ai pu prendre part aux échanges qui ont eu lieu avant. Les questions que j'ai par rapport à l'article 3 tournent autour du mot «nécessaire», besoin de comprendre comment est-ce qu'on définit la nécessité. Le ministre nous a parlé... nous a dit : Bien, ça, c'est vraiment le critère. À partir du moment où il y a quelque chose qui devient nécessaire, à ce moment-là, ça autorise la personne à pouvoir partager certaines informations. Comment est-ce que c'est défini? Qui le définit? Est-ce qu'il a des exemples qu'il peut nous donner, qui nous permettraient... qui permettraient d'illustrer ce qu'il souhaite faire avec l'article 3?

Le Président (M. Allaire) : Merci, Mme la députée. Donc, la parole est à vous, M. le ministre.

M. Caire : Bien, M. le Président, je pense que la notion de nécessité, là, c'est quelque chose qui est assez connu dans la langue française, là. C'est : Je dois avoir cet accès-là pour être capable de compléter mon mandat. Donc, la notion de nécessité, je pense que ça, c'est assez simple. Je n'ai pas nécessairement d'exemple à lui donner, là, mais je pense que ça va se faire en fonction des projets qui seront sur la table. Mais ce qu'on comprend, par exemple, c'est que, dans le cas d'Accès UniQc, il est nécessaire pour le MTESS, qui fait la réalisation, d'avoir accès aux informations de la RAMQ parce que le MTESS n'a pas une banque de données ou, en tout cas, la meilleure banque de données pour réaliser ce projet-là, c'est celle de la RAMQ. Donc, pour être capable de réaliser le projet, il y a la nécessité d'avoir accès à ces informations-là. Donc, si on prend un exemple plus concret, là, je pense que c'est le meilleur exemple que je peux donner à ma collègue. Mais, quant à la notion de nécessité, bien, c'est ce qui est requis pour la réalisation de la prestation de services, là, c'est la meilleure définition que je pourrais lui donner en fonction de ce qui m'apparaît être le sens commun, là.

Le Président (M. Allaire) : Merci, M. le ministre. Mme la députée, la parole est à vous.

Mme Anglade : Oui, bien, je comprends ce que le député dit quand il dit : Le mot «nécessaire», il est connu dans la langue française, il n'a pas besoin d'explication. Je comprends très bien le mot «nécessaire».

Ce que je cherche à comprendre, ici, c'est qui détermine la nécessité. À partir du moment où il y a une personne qui dit : Bien, moi, j'estime que c'est nécessaire... À combien de reprises dans des projets, des projets pilotes, est-ce qu'on a des gens qui disent : Bien, ça, c'est nécessaire, puis il y en a d'autres qui disent : Bien, pas vraiment, on n'a pas besoin d'aller là? C'est quelque chose qui peut être assez aléatoire.

Est-ce qu'il a l'intention d'encadrer ça minimalement ou de le laisser de manière aussi large? Parce que le sens commun qu'on trouve dans un dictionnaire, c'est bien beau, mais là on parle de données qui touchent les individus, qui touchent les citoyens, alors je pense que, justement, il y a ici, puisqu'on est dans le sens commun de la chose, nécessité de préciser la pensée par rapport à ça. Donc, c'est pour ça que je relance le ministre là-dessus.

Le Président (M. Allaire) : M. le ministre.

M. Caire : Bien, évidemment, ce rôle-là va échoir à ceux qui ont la responsabilité du projet, ceux qui ont la charge du projet. Est-ce que je pense que c'est nécessaire d'aller plus dans le détail sur la définition de ce qui est nécessaire? Non, je pense que le sens commun dicte ce qui est nécessaire ou non. Je veux dire, on sait si, oui ou non, une information doit être communiquée dans l'optique de réaliser un projet.

Je réitère aussi à mes collègues que ce qui va être mis en place pour protéger la donnée, on va le revoir plus loin. Donc, tout ce qui s'appelle évaluation de risques, l'encadrement nécessaire, les régimes de protection particuliers, ça, on va voir ça plus loin dans le projet de loi. Je ne pense pas que, comme je le dis, l'article 3, puis c'est ce que je disais au député de La Pinière, et je me répète, l'article 3, l'objectif est de dire que, dans une perspective de transformation numérique, la mobilité de la donnée est essentielle. C'est ce que l'article 3 précise.

Tout à l'heure, le député de La Pinière disait qu'il n'était pas d'accord avec moi pour dire que la notion de nécessité amenait une protection supplémentaire. À mon tour de ne pas être d'accord avec lui parce que, oui, je pense que, si, déjà, on restreint l'accès aux données aux seules personnes pour qui c'est nécessaire, bien, déjà, on vient de réduire le cercle de ceux qui vont avoir accès à la donnée. Maintenant, si c'était la seule mesure de protection, je vous dirais que c'est insuffisant, clairement. Mais ce n'est pas la seule mesure, et donc la protection, à proprement parler, des données, ça, c'est les articles subséquents où on va vraiment traiter de cette question-là. (Interruption) Excusez-moi, hein.

Le Président (M. Allaire) : Vous avez terminé, M. le ministre?

M. Caire : Oui, oui, absolument.

Le Président (M. Allaire) : Oui, ça va? Oui. La parole est à la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.

Mme Anglade : Oui. Bien, je vais revenir à la charge. Mais, avant de revenir à la charge sur cet élément de nécessité, j'aimerais juste revenir sur un propos qu'a tenu le ministre, et je voulais bien m'assurer d'avoir compris ce qu'il disait.

Tout à l'heure, dans une réponse à mon collègue, il disait : Ça a été fait... la preuve a été faite que ce n'est pas parce que c'est à l'intérieur d'un certain périmètre qu'il n'y a pas de fuites de données, on l'a vu à cause des exemples récents. C'est ce que le ministre disait. Et ceci semblait justifier que, parce que ça peut venir de l'interne ou d'ailleurs, on peut se permettre d'élargir le périmètre. J'aimerais mieux comprendre, saisir la pensée du ministre là-dessus, puis après ça je vais revenir sur le point de la nécessité.

• (14 h 10) •

M. Caire : En fait, je dirais non, puis je suis content que ma collègue me pose la question parce que ce n'était pas ça qui était le sens de mon propos. Ce que je voulais dire, c'est que le fait de limiter l'accès aux seules personnes à l'interne n'était pas une garantie absolue de sécurité. On n'était pas en sécurité parce qu'on limitait exclusivement à l'usage interne les données.

L'autre chose que je disais, c'est que le projet de loi n° 14, on n'est pas dans du droit nouveau. La loi d'accès à l'information prévoit déjà que des informations peuvent être communiquées à des entreprises privées. L'article 67.2 de la loi d'accès à l'information prévoit que ça peut se faire. Ça se fait déjà. Donc, le projet de loi n° 14 n'amène rien de nouveau sur le fait de pouvoir communiquer de l'information à une entreprise autre qu'un organisme public ou un ministère, une entreprise privée, un consultant, un OBNL. Ça, ça se fait déjà, c'est déjà prévu dans la loi d'accès à l'information.

Ce que le projet de loi n° 14 amène, c'est un encadrement qui est supérieur dans cette pratique-là et dans d'autres pratiques. Dans le traitement de l'information en général, on amène un encadrement qui est supérieur, notamment par quelque chose qui, lui, est nouveau, c'est-à-dire l'évaluation des risques. Ça, c'est nouveau. On doit, dans un projet en ressources informationnelles d'intérêt gouvernemental, faire une évaluation des risques quant à l'utilisation des données. Ça, c'est nouveau.

Ce qui est nouveau aussi... (Interruption) Excusez-moi, collègues, hein? (Interruption) Ça, c'est vraiment agaçant.

Une voix : ...prendre de l'eau.

M. Caire : Oui, excusez-moi. (Interruption) Je suis désolé. Ce qui est nouveau aussi, c'est qu'on devra... les responsables du projet devront faire rapport de l'utilisation qu'ils ont faite des données. Ce rapport-là devra être transmis à la CAI et au président du Conseil du trésor, et le rapport en question devra être rendu public sur le site du Conseil du trésor. Donc là, on amène une transparence qui n'existe pas actuellement, parce que, oui, deux organismes peuvent prendre entente sur un échange de données avalisé par la Commission d'accès à l'information, mais ça, il n'y a rien de tout ça qui est rendu public, ni l'entente ni l'utilisation qui aurait été faite des données. Il n'y a rien qui est public.

Alors là, on amène quelque chose qui est nouveau, qui est un facteur, à mon avis, de transparence, et la transparence souvent, c'est un des éléments, pas le seul, mais c'est un des éléments qui assure la protection des données parce que — je pense que la collègue va être d'accord avec moi — quand on agit à la lumière, souvent, on a des comportements plus acceptables que quand on agit dans l'ombre. Donc, ces éléments-là sont nouveaux. Mais ce que je dis aux collègues, c'est que de permettre la communication de renseignements de données... je ne les qualifierais pas parce que, tout à l'heure, le député de La Pinière a dit : les renseignements personnels, moi, je dis : des données dans le cadre de l'utilisation... c'est-à-dire de la réalisation d'un projet, ça, ce n'est pas nouveau, c'est déjà prévu dans la loi d'accès à l'information. Ça se fait déjà. Souvent, ce qui va arriver, c'est que l'organisme public va prendre entente avec l'entreprise privée, et c'est cette entente-là qui fait foi des paramètres d'utilisation. Ça non plus, ce n'est pas nécessairement rendu public.

Donc, je pense qu'on amène des éléments de transparence, et de reddition de comptes, et d'évaluation des risques qui, oui, sont nouveaux et qui vont amener un encadrement de protection supérieur, mais, je le dis et je le répète, le fait que l'entreprise privée ou un tiers puisse utiliser des données dans le cadre de réalisation d'un projet, ça, ce n'est pas nouveau.

Le Président (M. Allaire) : Merci, M. le ministre. La parole est à vous, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.

Mme Anglade : Deux questions. La première, quand le ministre fait référence aux notions de transparence additionnelle qui sont amenées, il fait référence aux éléments additionnels qui sont présentés dans le projet de loi où on dit : Il va falloir déposer, faire rapport, etc., c'est à ça que vous faites référence, quand vous parlez de la transparence additionnelle, qui va venir plus tard dans le projet de loi?

M. Caire : Oui, c'est ça.

Mme Anglade : O.K. Bien, on pourra en discuter...

M. Caire : Mais rapport à transmettre à la Commission d'accès à l'information. Donc, il y a toujours le regard approbateur de la CAI sur ces éléments-là qui sont rajoutés.

Mme Anglade : O.K. Donc, on pourra en discuter au moment venu, quand on regardera ces items-là.

Je veux encore revenir... C'est correct. Non, mais c'est bien correct. Je veux encore revenir, une dernière fois, à la charge sur la notion de nécessité. Est-ce que, d'un point de vue législatif, puis je suis sûre qu'il y a des personnes qui sont bien outillées dans le domaine pour répondre à cette question-là, est-ce qu'il y a moyen d'encadrer davantage la notion de nécessité à l'intérieur d'un projet de loi, dans d'autres...

M. Caire : Bien, je vais laisser Me Bacon répondre.

Mme Anglade : Oui, avec plaisir.

M. Caire : Mais c'est déjà fait, là, Me Bacon me signalait que c'était déjà fait pour la Commission d'accès à l'information. Mais je vais lui laisser compléter cette réponse-là.

Le Président (M. Allaire) : La parole est à vous, Me Caron... Me Bacon, pardon.

Mme Bacon (Nathalie) : Bonjour, M. le Président. Oui, la loi, c'est... le critère, en fait, le critère de nécessité est enchâssé à la loi sur l'accès. Alors, c'est vieux comme le monde. Je ne suis pas une juriste spécialiste en accès, par contre. J'ai accédé au site Internet de la CAI, là, pendant que vous parliez, puis on disait qu'en ce qui concerne la nécessité on doit prouver qu'il y a une fin légitime, importante, réelle et urgente. Alors, on ne transmet pas un paquet de renseignements s'il n'y a pas d'utilité, là, une nécessité.

Le Président (M. Allaire) : Oui, allez-y, Mme la députée.

Mme Anglade : Alors, je vais demander : Pouvez-vous répéter exactement ce que vous venez de dire? Une fin légitime, importante et urgente...

M. Caire : Urgente et réelle.

Mme Anglade : Urgente et réelle. Donc, il y a la notion... Ça, c'est défini... Où est-ce que c'est défini dans cette loi-là?

Mme Bacon (Nathalie) : C'est une référence de la Commission d'accès à l'information sur son site lorsqu'elle explique c'est quoi, les critères de nécessité. Je peux vous donner la référence.

Mme Anglade : D'accord. Est-ce qu'il y a matière... Est-ce que ce critère-là, quand on l'utilise... quand on fait ce projet de loi là ne devrait pas être simplement ajouté? Parce que ce que vous venez de décrire m'apparaît fort pertinent lorsque l'on parle de... Tu sais, il y a urgence d'intervenir, premièrement. C'est important, c'est urgent. Est-ce qu'il n'y a pas matière à ce moment-là, effectivement, de le préciser dans le projet de loi?

Mme Bacon (Nathalie) : On ne le précise pas. La loi sur l'accès utilise le critère de nécessité. Et le mot «nécessité», c'est la commission d'accès qui est venue mettre les balises sur la nécessité.

Mme Anglade : Donc, on n'a aucunement besoin, selon vous, de l'ajouter. En fait, toutes les discussions qu'il y a eu sur la nécessité jusqu'à présent, je pense que ce que vous venez de préciser, là, vient quand même encadrer davantage. Donc, quand je faisais référence à l'encadrement, c'est à ça que je faisais référence. D'où la question que j'ai. Je peux comprendre qu'un thème soit vieux comme le monde, mais, vous savez, on a des lois qui sont vieilles comme le monde puis parfois elles méritent d'être revisitées.

Mme Bacon (Nathalie) : Est-ce que vous aimeriez que je vous lise le passage du site de la commission d'accès, peut-être, pour plus vous alimenter?

Mme Anglade : Si vous le souhaitez.

Mme Bacon (Nathalie) : Ça dit : «Le critère de nécessité est un principe fondamental — donc, un principe fondamental, pas toujours obligé d'être défini, tout le monde en parle, puis, lorsque, bien, de la jurisprudence ou la commission d'accès se prononce, va discuter du critère de nécessité, va expliquer c'est quoi, le principe fondamental, donc — ayant pour objectif de réduire les atteintes à la vie privée des personnes concernées par les renseignements personnels recueillis par les entreprises privées et les organismes [...]. Il n'est pas donc possible de déroger à ce principe, même avec le consentement de la personne concernée.

«Ce principe doit s'interpréter au regard de la finalité poursuivie par l'entreprise [...] ou [...] l'organisme [...]. Un renseignement personnel est nécessaire si la finalité poursuivie est légitime, importante, urgente et réelle et si l'atteinte au droit à la vie privée consécutive à la collecte, [à] la communication ou [...] conservation [...] est [rationnelle par rapport] aux objectifs visés.»

Donc, on voit que, tu sais, ça, moi, c'est... Vous êtes les parlementaires. C'est vous qui faites les lois. Alors, d'aller insérer une définition, si vous voulez ajouter les mots qui sont... Je pense qu'il faudrait l'analyser mais, actuellement, dans le corpus législatif, lorsqu'on dit le critère de nécessité, lorsque c'est nécessaire, alors, ça parle par lui-même, ce principe fondamental là.

Le Président (M. Allaire) : Oui. Allez-y, Mme la députée.

Mme Anglade : Dans le corpus législatif, le mot «nécessaire» se retrouve des milliers de fois.

Mme Bacon (Nathalie) : Oui. Bien, c'est ça, il faudrait que je sois capable de faire la recherche par mot, puis on...

Mme Anglade : Alors, ma question est la suivante. Il se retrouve des milliers de fois, le mot «nécessaire». Donc, est-ce que l'application de ce que vous venez de dire s'applique à chaque fois qu'il est présenté dans le corpus législatif?

Mme Bacon (Nathalie) : À chaque fois qu'il est présenté dans le contexte de l'accès à l'information ou de la protection des renseignements personnels.

Mme Anglade : O.K. Donc, pas nécessairement sur l'ensemble du corpus.

Mme Bacon (Nathalie) : Bien, c'est parce qu'on peut utiliser «nécessaire», mettons, nécessaire pour apporter des soins en santé, mettons.

Mme Anglade : Bien, c'est ça.

Mme Bacon (Nathalie) : Alors, le mot «nécessaire» n'est pas la même chose en santé, en accès à l'information et en protection des renseignements personnels.

Le Président (M. Allaire) : Ça va? Merci, Me Bacon. M. le député de La Pinière souhaite intervenir. Allez-y.

M. Barrette : M. le Président, j'aurais un amendement à déposer...

Le Président (M. Allaire) : O.K. Allez-y.

M. Barrette : ...qui va être distribué dans quelques instants. Et l'amendement se lit comme suit, et il est sur le thème de la nécessité : Modifier le premier alinéa de l'article 3 du projet de loi par l'ajout, suite au mot «nécessaire», de «, tel que déterminé par le ministre,». Est-ce que vous voulez que je l'explique ou qu'on attende qu'il soit distribué?

Le Président (M. Allaire) : Nous allons attendre. Nous allons suspendre les travaux quelques instants, le temps de recevoir l'amendement.

(Suspension de la séance à 14 h 19)

(Reprise à 14 h 25)

Le Président (M. Allaire) : Alors, nous allons maintenant reprendre les travaux. Vous avez, en avant de vous, l'amendement qui vous a été distribué. Le député de La Pinière en a fait la lecture. Maintenant, M. le député de La Pinière, vous voulez nous apporter certaines explications. La parole est à vous.

M. Barrette : Oui, et les explications que je vais donner sont évidemment en lien avec la ligne de questionnement qui a été débutée cet après-midi par ma collègue de Saint-Marie—Sainte-Anne... Saint-Henri—Sainte-Anne, pardon. C'est sur, évidemment, la question de nécessité. Et quand le ministre et Me Bacon, d'un côté comme de l'autre, vous dites : Bien, c'est bien évident, nécessaire, c'est nécessaire. Si c'est si évident que ça, Me Bacon, je le dis avec égards : On n'a pas besoin de se référer à la loi d'accès à l'information. Si c'est si évident que ça, on n'a pas besoin d'avoir des critères. Et ce que je dis, toujours avec égards, c'est que la loi d'accès à l'information, dans nos débats, et c'est admis par tout le monde, des deux côtés, ici, de la Chambre, et spécifiquement par le ministre, et on l'a convenu même en consultation publique, quand les gens de la Commission d'accès à l'information sont venus nous dire eux-mêmes que la loi aujourd'hui était, je vais être poli, désuète, j'irais même jusqu'à dire qu'elle était un frein à la normalisation ou à la modernisation de notre structure numérique informationnelle. Alors, de prendre comme argument les arguments de la loi à l'information, la loi d'accès à l'information, que l'on convient, tout le monde, comme étant désuète, ça m'interpelle.

Alors, à ce moment-là, le «nécessaire» qui... On comprend le sens commun du terme, mais législativement, ce n'est peut-être pas si clair que ça. Je soumets, moi, que ce n'est pas si clair que ça. Surtout, en plus, que la loi d'accès à l'information, elle a été écrite évidemment pour protéger les données personnelles des gens, elle a été écrite aussi pour donner accès, selon un certain nombre de paramètres dans un environnement qui n'est pas celui dont on traite aujourd'hui parce que l'environnement duquel on traite aujourd'hui, il est nouveau. Ça, je pense qu'on en convient tous. Il est nouveau. Et d'ailleurs il est tellement nouveau que le ministre a dit lui-même qu'on arrivait dans du nouveau droit. Loi désuète, nouvel environnement, nouveau droit. Bien, peut-être qu'il a besoin de préciser nouvellement le mot «nécessité», «nécessaire».

Alors, pourquoi «tel que déterminé par le ministre»? On pourrait écrire ça différemment, j'aurai d'ailleurs quelques idées à vous proposer après qu'on ait commencé à en débattre, c'est parce que là, on n'est pas du tout dans une question de demande d'accès à l'information. La loi sur l'accès à l'information, c'est une loi d'accès pour des gens et organismes qui demandent d'avoir accès à de l'information. Là, ici, on ne parle pas d'accès, on parle de développement, de l'utilisation — d'ailleurs, dans l'article 3, c'est de ce dont on parle — on parle aussi d'utiliser des informations dans le cadre d'activités internes. On n'est pas dans la même relation demandeur et receveur. La loi d'accès à l'information, c'est fait pour quelqu'un qui veut avoir accès à une information pour une raison x, et on veut protéger les données. Dans l'exercice actuel de projets de transformation informationnelle d'intérêt gouvernemental, ce n'est pas un accès, là, on veut... c'est l'essence même de la chose, de transformer, de modifier comment l'information circule et/ou est traitée. Ce n'est pas la même chose.

• (14 h 30) •

Alors, les critères, les critères qu'on utilise, là, le concept des critères de la loi d'accès à l'information, ils sont corrects dans la relation qui est la première et non la deuxième, bien, il me semble qu'ils ne s'appliquent pas tels quels dans la deuxième, à mon avis.

Puis je vais aller plus loin, le ministre, là, lui, là, il a la volonté, puis je ne reviens pas sur le fait qu'on est d'accord avec... de transformer le fonctionnement numérique du gouvernement. On est d'accord avec ça. On l'a dit, pas besoin de le redire, même si je le redis. Maintenant, lui, là, il est obligé d'ouvrir la clé de ce code-là, d'ouvrir la clé du dépôt des données et des données pour que la compagnie ou la tierce partie, si ce n'est pas le gouvernement, puisse faire son travail. Alors, sur quels critères va-t-il se baser pour dire : Oui, c'est correct, ça, c'est nécessaire?

Moi, je regarde ça, là. Je suis, par exemple, un sous-traitant. J'ai été choisi par l'État, hein? On est ici dans le bon vouloir, là. L'intérêt gouvernemental, c'est quasi discrétionnaire du ministre et/ou du gouvernement, ou du Trésor, peu importe. Et là on choisit une compagnie. Ah! peut-être qu'il va y avoir des... on ne le sait pas trop, là, mais on y reviendra peut-être un peu plus tard. Mais là il y a quelqu'un qui choisit de l'externe, et cette personne-là, là, va devoir répondre. Et, moi, je suis la compagnie, là. Moi, je suis la compagnie, le ministre m'a choisie pour réécrire le code puis voir si on pouvait faire passer de façon fluide des données de tel ministère à tel ministère, ou de tel organisme paragouvernemental à un ministère. Parfait. Là, je vais voir mon ministre puis je dis : M. le ministre, regardez, là, vous m'avez demandé de faire une job, vous n'allez pas me dire que ce n'est pas légitime, important, urgent — parce que, si vous me stâlez, ça va coûter cher — est irréel de me donner la donnée. Je suis votre sous-traitant, là, ça fait que, tout de suite en partant, là, moi, comme sous-traitant, là, vous allez me dire oui. Mais le ministre, lui, là, il va se baser sur quoi, lui, pour dire oui à des gens qui demandent des informations potentiellement très détaillées qui vont bien au-delà de la loi d'accès à l'information et qui même, normalement, si c'était demandé par n'importe qui d'autre, ça serait non, la réponse? La compagnie qui va devoir réécrire les codes, là, puis faire l'étude de faisabilité de transformer les bases de données, mettre en place la fluidité aux conditions x, y, z, là, bien, il est très probable que cette compagnie-là demande accès à des choses que le commun des mortels, journalistes, le professeur d'université, le chercheur demanderaient et n'y auraient pas accès, là. Alors, il va se baser sur quoi?

Alors, à sa face même, la loi d'accès à l'information, qui est désuète, qui doit être modernisée, qui a été mise en place pour protéger des données, dans un environnement traditionnel, d'une tierce partie extragouvernementale, surtout citoyens, médias et chercheurs... Parce qu'essentiellement c'est qui qui demande des données aujourd'hui? C'est ça, c'est des journalistes, les médias en général, les chercheurs, et les citoyens, puis c'est comme ça, là, que ça se passe. Il n'y a pas... je ne vois pas bien, bien d'autres instances — des syndicats, peut-être, on ne sait jamais. Mais là, on n'est pas là, là. Là, on est dans quelque chose de beaucoup plus profond. La loi n'a pas été écrite pour ça, et, conséquemment, la loi manifestement est désuète par rapport à ce genre de situation là. On en convient tous. Si le ministre n'a pas de critères, comment il va faire, sur la base des critères actuels, pour dire non?

Alors là, je vais plus loin dans mon raisonnement. Moi, là, je suis là, là, puis je suis un informaticien, puis je travaille pour une compagnie x, puis je suis en train de travailler là-dessus, puis je le sais, moi, là, là, que tout ce que j'ai de besoin, là, c'est, mettons, le code postal des individus pour faire mon test. Puis là, pour une raison x, là, par un questionnement d'une certaine obscurité, on va dire, on ne le sait, pas, c'est une compagnie privée, là, on me demande de demander au ministère d'avoir accès aux numéros d'assurance sociale. Sur la base de quoi le ministre va dire non? Parce que, sur la base de la légitimité, de l'importance, de l'urgence et de la réalité, ils sont où, les critères? Ça va être oui, ça, là, parce qu'il va falloir déterminer quelque chose.

Alors, moi, par mon amendement, ce que je souhaite faire, M. le Président, à quelque part, c'est de responsabiliser le ministre et de le rendre imputable, et une des... et ça, c'est ça aussi de la gestion de risques. Quand on force la personne responsable de se soumettre à des critères vis-à-vis une décision potentiellement litigieuse ou lourde de conséquences, ça change la décision. Et, M. le Président, qu'on soit clair, là, je n'ai aucun doute sur le sens des responsabilités du ministre. J'ai des inquiétudes quant aux conséquences du libellé actuel, d'où la proposition d'amendement que je fais.

Le Président (M. Allaire) : Ça va? Merci, M. le député. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Caire : Bien, d'abord, je pense qu'il n'est pas inutile de dire, nonobstant tout ce que vient de dire le député de La Pinière, que le projet de loi n° 14 ne suspend pas l'application de la loi d'accès à l'information et de protection des renseignements personnels, elle continue de s'appliquer. Le projet de loi n° 14 n'a pas non plus pour objet de commencer à modifier la loi d'accès à l'information, elle s'applique, la loi d'accès à l'information. Si on adopte le projet de loi n° 14, la loi d'accès à l'information et de protection des renseignements personnels continue d'être la base qui nous gouverne tous. Donc, en conséquence, les critères, qui ont été définis sur la base de la jurisprudence qui découle de cette loi-là, continuent d'être les critères qui vont nous régir, donc sur quels critères les gestionnaires de projet vont s'appuyer pour déterminer ce qui est nécessaire ou non, sur les critères qui sont ceux qu'on connaît actuellement dans le cadre législatif qui nous gouverne actuellement, et je ne présumerai pas des travaux que l'Assemblée nationale conduira dans le futur. Donc, moi, je travaille avec le cadre législatif actuel. Donc, ça, c'est pour le premier volet qui a été abordé par le député de La Pinière.

Le deuxième, bien, évidemment, si on comprend cet élément-là de réponse, c'est donc la jurisprudence qui doit être les bases sur lesquelles... donc l'interprétation qu'on a faite des lois de l'Assemblée nationale. Et, dans l'univers juridique, c'est comme ça qu'on fonctionne, tu sais, à un moment donné, il y a une interprétation qui se fait des lois, on constitue une jurisprudence, puis c'est cette jurisprudence-là qui fait foi de la façon d'interpréter la loi, les principes de la loi, certains concepts, comme le concept de nécessité, dans le cadre d'accès aux renseignements personnels, comme le précisait Me Bacon. Et je ne pense pas qu'il soit souhaitable, malgré tout le respect que j'ai pour moi-même, que ce soit à moi de déterminer quels sont les critères qui définissent ce qu'est la nécessité puisque notre cadre juridique le fait déjà, c'est déjà prévu dans notre cadre juridique.

Et je répète un élément. Le député de La Pinière dit : On est dans du droit nouveau. C'est vrai, il y a des éléments là-dedans qui sont nouveaux. Je ne sais pas si c'est du droit nouveau, mais il y a des nouveautés au niveau de la protection des renseignements personnels. Par contre, l'accès aux données dans le cadre de la réalisation d'un projet par un tiers, ce n'est pas nouveau, c'est déjà prévu par la loi d'accès à l'information, je le répète, article 67.2. Il y a une jurisprudence qui en a découlé quant à l'interprétation de certains principes, par exemple, le principe de nécessité, et ça, ça continue à s'appliquer, et c'est dans ce cadre-là qu'on doit travailler. Je veux dire, on ne peut pas décider, là, comme ça, woups! la loi, il faut la changer. Oui, mais il y a une façon de faire. L'Assemblée nationale se saisira d'un projet de loi, fera les travaux que l'Assemblée nationale a à faire, changera la loi dans le sens que l'Assemblée nationale décidera qu'elle doit être changée. Mais, en attendant, c'est la loi d'accès à l'information et de la protection des renseignements personnels qui s'applique. Alors, on ne va pas créer un cadre extrajudiciaire, parce qu'on s'entend tous qu'il faut réformer le cadre législatif actuel. On va le réformer puis, bien là, comme je dis, je ne peux pas présumer des travaux.

Mais, non, je ne pense pas que ce soit, dans ce monde-ci ou dans un monde futur, je ne pense pas que ce soit une bonne idée que ce soit le ministre qui détermine l'interprétation de la loi. Je pense que l'Assemblée nationale fera son travail législatif. Le gouvernement fera son travail en édictant des règles d'application des lois, et les tribunaux judiciaires administratifs et autres feront leur travail en interprétant les lois lorsqu'ils seront saisis de certaines causes, de certains dossiers. Puis c'est comme ça qu'on fonctionne dans notre société, puis je pense que ce soit souhaitable que cette façon de faire là perdure.

• (14 h 40) •

Le Président (M. Allaire) : Merci, M. le ministre. M. le député de La Pinière, la parole est à vous.

M. Barrette : Mais, encore une fois, ce n'est pas ça que je demande, là, ce n'est pas ça que je demande du tout, là. Alors, M. le Président, je reprends. Le ministre, comme nous autres, on a tous convenu, et les oppositions aussi, que la loi sur l'accès à l'information, elle est désuète, il faut la moderniser. Je ne demande pas au ministre de moderniser la loi. Ce n'est pas ça que je lui demande. C'est une évidence. Pour moderniser une loi, bon, il y a un processus, que l'on connaît, qui est long et fastidieux, et il est possible que, si on s'engageait dans cette démarche-là aujourd'hui... il est même possible qu'on n'ait pas fini dans le mandat. Je ne demande pas ça au ministre, d'aucune manière.

Je souligne un fait au ministre. Je souligne le fait qu'il admet, comme tout le monde, que la loi est désuète. Le ministre s'appuie pour dire qu'on n'a pas besoin de rien faire... qu'il y a une jurisprudence, sur laquelle il va s'appuyer pour prendre ses décisions. Oui, mais la jurisprudence, elle est faite à partir d'une loi désuète. Et, à ma connaissance, à moins que Me Bacon nous en fasse la démonstration, je ne connais pas de jurisprudence qui s'applique à cette nouvelle situation. J'ai donné un exemple, qui était assez patent, pour dire que les critères de la loi actuelle, et je le répète, qui ont été édictés pour un environnement qui est loin, immensément loin et même pas dans le même univers que ce dont on parle aujourd'hui avec le projet de loi n° 14, ce n'est pas fait pour ça. Et le ministre, il s'appuie sur les critères de la loi dite et admise comme étant désuète et, s'il s'appuie sur la jurisprudence de cette loi-là, il manque son coup. Il aura à faire face à des situations qui peuvent être problématiques.

Et le ministre, par-dessus ça, M. le Président, nous dit que ce n'est pas à lui à s'occuper de ça. Bien, il me semble que, dans notre régime parlementaire... Moi, en tout cas, ayant été ministre, ayant été l'objet d'un certain nombre de critiques et de commentaires, j'ai toujours compris que le ministre était le responsable ultime des démarches de son ministère. Je comprends que le ministre délégué est délégué, mais il n'en reste pas moins qu'il a une responsabilité pareil.

Alors là, il nous dit quoi? Il nous dit : La loi n'est pas assez bonne, il faut la refaire. On ne peut pas la refaire maintenant, on est d'accord. Mais elle pose un problème parce qu'il faut la refaire. Il y a une jurisprudence basée sur une loi qu'il faut refaire, mais, si la jurisprudence est basée sur une loi qu'il faut refaire, bien, il y a un problème. Je lui propose de prendre la responsabilité face à ce problème. Je lui ai donné un exemple patent selon lequel il serait pris, selon la jurisprudence actuelle et selon les critères actuels de la loi désuète, à dire oui à une demande potentiellement intempestive et, aujourd'hui, sa réaction et/ou réponse, c'est : Je n'ai pas besoin de faire ça parce que ça ne peut pas être de ma responsabilité. Je dis non à ça.

Alors, ce que je demande au ministre, M. le Président, ce n'est pas de réécrire la loi sur l'accès à l'information. Il a raison, ce n'est pas sa job. Mais c'est sa job, par exemple, de cesser... saisir l'opportunité législative pour pallier, mettre un bouclier face à d'éventuelles problématiques. Et tout ce que je dis, c'est... Le ministre, là, c'est sûr que, si on met un amendement comme ça, il va y penser deux fois avant de dire oui à une tierce partie, qui, à mon sens, ne devrait pas, aujourd'hui, dans l'environnement que l'on connaît, avoir accès à une certaine profondeur de données personnelles dans notre gouvernement, tout simplement. L'amendement que je dépose à cet instant, dont on débat, est un amendement qui vise absolument et uniquement la protection du public.

Le Président (M. Allaire) : Merci, M. le député. M. le ministre.

M. Caire : Bien, M. le Président, plusieurs éléments, brièvement. Si je suis d'accord que la loi d'accès à l'information, bien évidemment, nécessite une refonte, ça ne veut pas dire que la notion de nécessité est désuète. Je veux dire, la notion de nécessité n'est ni nouvelle ni obsolète. Et donc on a ici une définition basée sur l'expérience de la notion de nécessité qui, à mon avis, est très claire, documentée et faite de façon non arbitraire. Ce que mon collègue de La Pinière propose, c'est de remplacer cette définition-là, qui est le fruit d'un exercice juridique conforme à nos façons de faire, qui, elles, ne sont pas désuètes, pour remplacer la définition d'un concept qui n'est pas désuet. Je veux dire, la notion de nécessité n'est pas tombée en désuétude, là, la transformation numérique ne vient pas de rendre désuète la notion de nécessité, et donc la définition qui en découle ne peut pas être désuète non plus, n'est pas désuète non plus. Je pense que ça fait juste dire qu'est-ce que la nécessité, puis je ne suis pas convaincu, moi, que cette notion-là devrait changer, je pense que c'est très clair. Et donc on remplace quelque chose qui est le fruit d'un exercice conforme à nos pratiques, à notre corpus législatif, qui s'applique encore, par un pouvoir discrétionnaire qui est de dire : C'est moi qui, selon mon bon plaisir, va décider de ce qui est nécessaire ou n'est pas nécessaire. Puis ce n'est pas une question d'assumer ou de ne pas assumer ses responsabilités, mais c'est d'être factuel, de travailler sur des faits, de travailler sur une base législative, de travailler selon un principe d'éviter l'arbitraire puis de ne pas remplacer ça par un critère ou un pouvoir discrétionnaire qui, lui, va être basé sur l'arbitraire. Parce que, là, on va aller dans la définition, parfait, «tel que déterminé par le ministre», O.K., là, la prochaine étape, c'est oui, mais comment le ministre le détermine? Sur quels critères le ministre le détermine? Qu'est-ce qui valide les critères qui vont avoir été élaborés par le ministre qui va déterminer ce qu'est... Bien là, en tout cas, moi, je... Sérieusement, on s'embarque dans un débat qui ne nous amène nulle part, là.

On a une notion qui est bien définie, de nécessité, qui a fait l'objet d'éléments factuels basés sur le factuel par des instances qui ont travaillé là-dessus selon nos façons de faire, sur un corpus législatif qui s'applique, jusqu'à preuve du contraire. Alors, je ne remplacerais pas ça, des assises solides, une définition solide basée sur un processus rigoureux et solide, par un pouvoir discrétionnaire qui va nous amener dans l'arbitraire total. C'est comme je vous dis, là, j'ai beaucoup de respect pour moi-même, mais si, moi, j'étais député de l'opposition, là, puis qu'on me présentait un amendement de même, je monterais aux barricades en disant : Voyons! Le ministre, il se donne beaucoup de pouvoirs, là, il s'aime beaucoup, le ministre, là. Alors, non, je n'ai pas... Je pense que ce n'est pas une bonne idée.

Le Président (M. Allaire) : Merci, M. le ministre. Est-ce qu'il y a d'autres interventions du côté de l'opposition officielle?

M. Barrette : Bien sûr. Bien sûr.

Le Président (M. Allaire) : Allez-y, M. le député de La Pinière.

M. Barrette : Oui. C'est un débat intéressant, mais, encore une fois, encore une fois, on a un mardi intéressant. Alors, ce n'est pas Les Mardis cyclistes de Lachine, là, c'est les mardis circulaires de la commission parlementaire. Alors, M. le Président, quand on... Le ministre, des fois, je pense qu'il se sent coincé, puis là il part sur un autre sujet puis il pense que j'ai dit quelque chose que je n'ai pas dit. Est-ce que quelqu'un ici m'a entendu dire qu'il fallait ne pas tenir compte ou abolir les critères? Non, non, non. Non, je n'ai pas dit ça, je n'ai pas dit qu'il fallait abolir.

M. Caire : ...

M. Barrette : Non. Est-ce que, M. le Président... Pouvez-vous le rappeler à l'ordre, s'il vous plaît? C'est moi qui ai la parole.

Le Président (M. Allaire) : Non, ça va, continuez, M. le député.

M. Barrette : Alors, vous pouvez réécouter les bandes, vous allez constater que je n'ai pas demandé d'abolir, ce n'est pas ça que j'ai dit. J'ai dit qu'à leur face même, bon, et le ministre l'a répété encore une fois, c'est une loi désuète qu'il faut mettre à jour. Parfait. J'ai dit qu'à sa face même les critères actuels ne permettraient pas de dire non à une entreprise, par exemple, dans le contexte de l'application...

M. Caire : ...

M. Barrette : C'est ce que j'ai... M. le Président. M. le Président, je comprends le ministre, là, je le comprends. Mais c'est moi qui ai la parole, là.

Le Président (M. Allaire) : Vous pouvez poursuivre, M. le député.

• (14 h 50) •

M. Barrette : Bon, merci. Alors, à leur face même, ces critères-là ne permettront pas au ministre de dire non dans une circonstance donnée, dont j'ai donné un exemple, alors... Et j'ai dit au ministre qu'il y avait là une opportunité, puisqu'on ne peut pas, dans le temps législatif dans lequel on est, refaire la loi sur l'accès.

Alors, ce que je lui propose, c'est un ajout. Je n'ai pas vu, dans l'amendement que j'ai déposé, faire référence à la loi d'accès, je n'ai pas, dans l'amendement que j'ai proposé, l'abolition des critères, la non-utilisation des critères, je n'ai pas ça. Je n'ai pas parlé de ça. C'est drôle, hein? Je n'ai pas parlé de ça. Vous, M. le Président, m'avez-vous entendu dire ça? Probablement pas. Bon, vous devez rester neutre, mais il n'en reste pas moins que vous ne l'avez pas entendu. Vous ne l'avez pas entendu parce que je ne l'ai pas dit. Je ne l'ai juste pas dit.

J'ai dit : Les critères qui existent actuellement, comme la jurisprudence qui s'y rattache, sont, par définition, désuets si la loi est désuète. Alors, il est donc possible que dans certaines circonstances le ministre puisse se servir de l'existant législatif et jurisprudentiel pour prendre une décision mais il est aussi possible, M. le Président, que ça ne le puisse pas, d'où l'importance, à mon sens, d'avoir une série de critères, et ces critères-là, en quelque part, pour ce qui est de la transparence, parce que j'ai entendu le mot «transparence» dans la bouche du ministre, bien, il me semble que ça, ça devrait être su de tous et de toutes.

Ce qui m'amène, M. le Président, à déposer un sous-amendement qui arrive dans quelques instants. Il est actuellement dans notre réseau informatique...

Le Président (M. Allaire) : Est-ce que vous pouvez le... Oui.

M. Barrette : ...que je vais lire ainsi, M. le Président...

Le Président (M. Allaire) : Allez-y.

M. Barrette : Modifier l'amendement proposé au premier alinéa de l'article 3 du projet de loi par l'ajout, suite aux mots «par le ministre», de «et dont les critères établissant sa nécessité soient rendus publics».

M. le Président, est-ce que vous voulez faire une pause ou j'explique maintenant?

Le Président (M. Allaire) : Oui. Nous allons suspendre les travaux quelques instants.

M. Barrette : Merci, monsieur.

(Suspension de la séance à 14 h 52)

(Reprise à 14 h 54)

Le Président (M. Allaire) : Nous allons donc reprendre les travaux. Donc, je cède la parole au député de La Pinière, qui va nous expliquer son sous-amendement. Merci.

M. Barrette : Oui. Alors, M. le Président, ça fait... c'est en ligne directe avec le débat que nous avons maintenant depuis presque une heure. On a commencé l'après-midi là-dessus, sur le concept de nécessité. On a vu que la nécessité, ça doit se définir. On a vu que la définition qui est utilisée est une définition avec un exemple très simple qui fait en sorte qu'essentiellement un sous-traitant va toujours avoir accès parce que le ministre n'aura pas les leviers, les éléments qui vont lui permettre de dire non. Pourquoi? Parce que la loi actuelle est désuète, jurisprudence et loi sont désuètes.

Et je le répète, le ministre l'a répété lui aussi, il y a quelques minutes, on est dans du nouveau droit, qui est correct, on est d'accord à aller sur ce territoire-là, mais c'est nouveau. Alors, le ministre nous dit : Ah! bien, on ne peut pas, là. On ne peut pas faire ça. Ce n'est pas le ministre qui doit avoir ces responsabilités-là. Bien, le ministre est toujours la personne qui a la responsabilité ultime. Par contre, il est possible, et probable, et normal... peut-être moins dans le cas du ministre délégué actuel, qui a une expertise informatique qu'il nous a évoquée à plusieurs reprises, mais il entouré de gens qui ont cette expertise-là. Je vois le directeur du... le dirigeant principal de l'informatisation... de l'information, qui est là avec nous aujourd'hui, qui est donc à la tête d'une équipe qui a parfaitement les capacités de déterminer les critères selon lesquels on va dire non à une demande qui pourrait être intempestive de la part d'un sous-traitant.

Alors, je le répète, là, pour que tout le monde nous comprenne. On a un projet de loi n° 14 qui vise à refondre la gestion de la donnée à l'intérieur du gouvernement. On la veut mobile, plus fine, plus homogène, et ainsi de suite, pour toutes les raisons qu'on a évoquées. C'est le point b. On part du point a, qui est actuellement. On aurait pu y aller en ligne droite, à l'intérieur du gouvernement, on a choisi de faire un détour par l'externe, le privé. Le privé qui, pour réaliser les projets qui sont arbitrairement sélectionnés par le ministre délégué et le président du Conseil du trésor... ce sous-traitant-là ou cette personne-là va avoir besoin d'avoir accès à des données. Et j'ai donné un exemple comme quoi, bien non, les critères actuels de la loi de l'accès à information, ça va être bien difficile pour le ministre de dire non, d'où les deux amendements que je mets en place. Le ministre devrait ajouter, non pas remplacer les critères existants pour se prémunir contre quelque chose que personne ne veut. Le ministre, comme moi, là, il ne veut pas, là, ça serait... Même moi, là, je suis dans l'opposition, là, je ne voudrais pas que la population perde confiance dans son État. La population est part de l'État. On ne veut pas ça, personne. C'est important, là, ce qui se passe, là.

Alors, le ministre a aujourd'hui une palette de quatre critères qui sont très, très, très larges et antiques, anciens, qui sont mal adaptés à la situation nouvelle — slash, barre oblique par en-avant — au nouveau droit. Il a avec lui une équipe qui peut très bien l'accompagner là-dedans. Et il serait tout à fait normal, ne serait-ce que pour rassurer la population et sécuriser le ministre dans ses actions, d'avoir des critères additionnels sur lesquels se baser pour dire non. Si le ministre nous répond : Bien non, la loi actuelle, elle est bien correcte, bien là, il faudrait à ce moment-là qu'il prenne une position formelle aujourd'hui pour nous dire que la loi d'accès à l'information, elle n'est pas désuète, qu'on ne la refondera pas, on ne la modernisera pas. C'est un ou c'est l'autre, là, ça ne peut pas être les deux en même temps. Alors, il y a une logique là-dedans, là. Il y a une logique qui est assez, à mon avis, implacable.

Alors, moi, j'invite le ministre à ne pas, disons, amener ou impliquer certaines contorsions de mes propos, là. Je n'ai pas dit de remplacer, je lui propose d'en additionner avec l'aide de ses experts, et qu'on le dise publiquement, ça va le protéger. C'est sa responsabilité ultime. Il y a un exercice qui va être fait par ses experts, puis on va être bien contents, sachant que nous, de notre côté, on devrait aller du point a au point b en ligne droite, ce qui n'est pas le cas actuellement.

Le Président (M. Allaire) : Juste avant de vous céder la parole, M. le ministre, c'est l'apprentissage à la vitesse de grand V, comme président, qui se fait actuellement, donc je m'excuse, il y a une petite erreur de procédure qui s'est faite, donc on veut seulement la rectifier. Le député de La Pinière, vous avez déposé un amendement tantôt, ça... non, un amendement dans un premier temps, et... C'est vous qui avez déposé l'amendement, pardon, et, oui, et donc le sous-amendement doit être déposé par la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne. Donc, pour régulariser le tout, j'ai besoin de votre consentement à tous. Est-ce que j'ai votre consentement? Parfait, merci.

M. Barrette : Oui, M. le Président, puis je suis content que ça arrive parce que, vous voyez, là, c'est exactement transposer à ma question ce que je veux dire, hein? Il faut des critères pour corriger des choses parce que, si on y va spontanément, là, si on y va spontanément, il peut arriver quelque chose. Vous voyez, là? C'est exactement ce que je souhaite qu'il soit fait dans le cadre du projet de loi n° 14. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Allaire) : Merci, M. le député. M. le ministre, la parole est à vous.

• (15 heures) •

M. Caire : Merci, M. le Président. Le problème, c'est les fondations sur lesquelles le député de La Pinière construit son argumentaire. Il raisonne dans l'absolu. C'est le «tout ou pantoute». La loi, elle est désuète ou elle est superbonne. Il y a comme... On fait table rase ou on garde tout. Non. La loi, elle est désuète, je le dis, je le répète. Par contre, la notion de nécessité... La notion de nécessité, ça ne vient pas d'arriver, là, puis ça ne va pas se terminer avec la loi d'accès à l'information, là. Alors... Et la définition, les critères, je veux dire, que les données soient utilisées à des fins légitimes, importantes, urgentes, réelles, que ça dépasse la simple pertinence, je n'ai pas besoin de plus que ça.

Un autre élément sur lequel le député de La Pinière raisonne dans l'absolu, un sous-traitant arrive, a besoin de données, évidemment, pour réaliser le mandat, donc, selon les critères, jamais le gouvernement ne pourra lui dire non. Encore là, c'est dans le tout ou pantoute. Ça dépend. Ça dépend. Il aura besoin de données. Aura-t-il besoin de toutes les données que possède le gouvernement? C'est là où on applique le filtre de la définition donnée par la CAI. Vous avez besoin de données, oui, mais cette donnée-là ou cette catégorie de données là, est-ce que c'est à des fins légitimes? Oui. Est-ce que c'est important? Oui. Est-ce que c'est urgent? Oui. Est-ce que c'est réel? Oui. Est-ce que ça dépasse la simple pertinence? Oui. Parfait. Mais cette catégorie-là, est-ce que c'est à des fins légitimes? Non, ça ne fait pas partie de ce qu'on vous a demandé de faire, donc vous n'y avez pas accès.

Alors, c'est sûr que, quand on raisonne dans l'absolu, bien, on va dire oui à tout ou on va dire non à tout. On va tout changer la loi, on ne gardera rien, rien, rien ou on va tout, tout, tout garder, on ne changera rien, rien, rien. Bien, il l'a dit lui-même, la loi a besoin d'être réformée. Donc, il y a des éléments de la loi qu'on va garder, il y a des éléments de loi qui, j'imagine... Puis encore là, je ne veux pas présumer des travaux de l'Assemblée nationale, mais je peux imaginer, je peux concevoir qu'il y a des pans de la loi pour lesquels les députés de l'Assemblée nationale vont arriver à la conclusion qu'ils sont toujours pertinents, toujours d'actualité, d'autres pans de la loi pour lesquels les députés de l'Assemblée nationale vont arriver à la conclusion que, non, ça, compte tenu du nouveau contexte numérique, compte tenu de l'évolution de la société, ça, ça doit être modernisé.

Alors, si on est dans le tout ou dans le pantoute, le député de La Pinière a raison. Mais, si on est plus nuancés, si on fait une analyse exhaustive de l'ensemble des éléments, bien là son raisonnement ne tient plus, et donc son amendement ne tient pas non plus parce que les critères qui définissent la nécessité, à mon avis, sont toujours d'actualité, sont tout à fait pertinents, font bien le travail, sont le résultat d'un travail rigoureux, factuel, basé sur le corpus législatif et établi par des gens dont c'est le travail de le faire. Et de donner un pouvoir discrétionnaire et arbitraire au ministre, bien, à mon avis, ce n'est certainement pas la solution complémentaire ou de remplacement à un travail qui a été fait de façon rigoureuse, factuelle par les gens qui avaient la compétence pour le faire. Ce n'est pas une solution. Le critère de nécessité, à mon avis, n'a pas besoin d'être revu, et donc l'article 3, dans sa forme actuelle, fait parfaitement le travail.

Le Président (M. Allaire) : Merci, M. le ministre. M. le député de La Pinière, la parole est à vous.

M. Barrette : Même les aveugles ont le droit de se cacher les yeux avec leurs mains, là. Il n'y a personne qui empêche ça, là. Alors là, le ministre fait de la négation. Il a le droit de faire de la négation, c'est sa prérogative. Mais, encore une fois, encore une fois, je ne suis pas dans l'absolu, je suis dans la prévention. Les lois, là, ça s'écrit pour ça. Une loi, normalement, je ne devrais pas apprendre ça au ministre, on l'écrit en pensant à tous les cas de figure sachant qu'on ne les prévoira pas tous ou presque. On le sait ça. Alors, je ne suis pas dans l'absolu.

Puis encore, le ministre, encore une fois, il a fait référence au fait que je voulais faire table rase. Bien non! J'additionne, je ne soustrais pas. Je suis surpris de l'attitude du ministre qui ne veut absolument pas qu'il y ait un critère additionnel qu'on ne peut pas mettre dans la loi actuelle, on ne peut pas. On ne peut pas dans l'environnement législatif actuel le faire. Puis, s'il avait pu, il l'aurait fait. C'est comme dans l'annonce, l'annonce qu'on connaît, là : Si ça existait, on le saurait. Et il ne le fait pas. Pourquoi il ne le fait pas? Parce qu'il ne veut pas. Mais pourtant il y a un problème réel, potentiel. Je ne dis pas que ça va arriver, M. le Président, je dis juste qu'il y a un problème potentiel.

Alors, le ministre nous dit, là, que la nécessité, c'est simple, et puis les critères sont clairs. Bien oui, mais, quand on a eu l'échange qu'on a eu tantôt, c'était avec ma collègue, ce n'était pas si simple puis si clair que ça, hein, puisqu'on est obligés d'aller faire référence à la loi. Le ministre nous a redit que la loi était désuète, il nous le dit. Bien, si la loi est désuète, ça veut dire que les critères d'application sont aussi désuets. Ils sont encore parfaits pour le chercheur qui demande d'avoir accès à certaines données. C'est encore parfait, ça a été fait pour ça. L'environnement actuel est différent. La loi d'accès à l'information n'a pas été faite pour ça. La loi d'accès à l'information n'a pas été construite pour une situation où une firme externe... Et je souligne, M. le Président, que le ministre lui-même, maintenant, prend ces exemples-là, hein : Un sous-traitant en informatique — il a prononcé ces mots-là — compagnie... Là, on est en train de refondre la gestion de la donnée, donc la donnée va être rendue accessible par des compagnies externes. C'est le choix du ministre.

Le ministre nous a dit qu'il ne voulait pas avoir, qu'il considérait exagéré d'avoir un pouvoir discrétionnaire et arbitraire — je l'ai noté — sur d'éventuels critères. Mais oui, mais tout le projet de loi est l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire et arbitraire. On a débattu pendant des heures sur ce qu'était un projet d'intérêt gouvernemental. C'est arbitraire, il n'y a pas de critères. Il y en a, là. Ne repartons pas, là... Mais les critères, ils sont tellement légers qu'on est à «discrétionnaire» sans le e à la fin, là, le discrétionnaire juste sans une lettre. Ça l'est, discrétionnaire. À la fin, là, ça va l'être aussi, discrétionnaire, un environnement discrétionnaire que lui a choisi d'écrire dans sa loi. Et nous, comme opposition, on regarde ça puis on dit : M. le ministre délégué, vous êtes dans le discrétionnaire, et vous devriez vous protéger et, par ricochet, protéger le public, parce que vous n'avez pas les moyens de vous défendre contre certaines demandes qui pourraient être intempestives.

Le ministre me dit que je suis dans l'absolu. Bien, je vais lui rétorquer ceci : pour lui, son absolu, c'est qu'on est dans un univers où tout le monde beau, fin aime son prochain et ne fera jamais rien de croche. Ce que je décris comme potentiel, là, situation potentielle, ça n'arrivera pas, c'est sûr, ça n'arrivera pas. Alors, la loi est bonne, puis tout est bon, puis ce que je donne comme exemple, ça... Non, tout peut arriver. C'est l'environnement dans lequel on vit aujourd'hui, tout arrive, puis on veut se prémunir contre ça.

Alors, je le répète, le ministre est dans une situation lui-même arbitraire. Je lui propose de se donner les moyens d'aller un cran plus haut en termes de sécurité. Comment il va faire, là, pour... Quelle analyse? Il va la baser sur quoi? Est-ce que le ministre pense que les gens... Et je le dis en tout respect, est-ce que le ministre pense qu'à la Commission d'accès à l'information on a les compétences informationnelles requises pour traiter de ce genre de situation là? Je pense que, potentiellement, non. Je pense que, là, il y a un enjeu qui est réel, et la façon d'y répondre, c'est de monter d'un cran nos garde-fous législatifs en termes de sécurité.

Alors, non, je ne suis pas dans l'absolu. Non, je ne suis pas dans la table rase. Oui, je souhaite qu'il y en ait un, cran de plus et j'offre, par l'amendement et le sous-amendement, nous offrons la possibilité d'aller là. Puis, je le répète, M. le Président, ces critères-là rendus publics, là, bien, il a l'équipe avec lui pour le faire, ils sont capables de faire ça. On va voir des articles un petit peu plus loin, là, où on va traiter, là, de ce qui va être divulgué, pas divulgué. Bien, peut-être que là, je vais dire que ce qui est proposé, ce n'est pas assez exhaustif. On ne le sait pas, là. Le ministre, rendu à cette étape-ci de nos débats, nous invite un petit peu dans une chambre noire dans laquelle on entre en sortant d'une journée très ensoleillée. Il y a un moment où on ne voit rien, là. Et là, moi, je... plus les travaux avancent et plus on s'adapte à une certaine pénombre législative que l'on voit, et là j'ai l'impression que le ministre voudrait baisser la lumière ambiante un peu plus. Mais, vous savez, la lumière ambiante, dans ce type de salles là, sont rouges. Peut-être que, là, il y aurait lieu de regarder la lumière rouge qui s'allume devant vous.

• (15 h 10) •

M. Caire : ...

M. Barrette : Oui, pour le moment.

Le Président (M. Allaire) : ...M. le ministre, la parole est à vous.

M. Caire : Alors, je vais le dire au micro, le rouge ne me va pas bien du tout, M. le Président. Écoutez, le député de La Pinière, d'entrée d'intervention, a dit quelque chose que je me dois quand même de corriger en disant qu'avec le projet de loi n° 14, on est dans une refonte de la donnée et qu'à partir de maintenant l'entreprise privée aurait accès aux données. Je veux juste dire aux gens qui nous écoutent que ça, c'est une situation qui prévaut par la loi d'accès à l'information, article 67.2. La loi n° 14 ne change rien, n'amène pas cette notion-là, ne modifie pas cette notion-là, sinon par un encadrement qui est supérieur. Puis c'est important de dire les vraies choses, là, parce que, que des firmes qui travaillent avec le gouvernement dans le cadre de réalisations de projets en ressources informationnelles aient eu accès à des données du gouvernement, ce n'est pas nouveau, ce n'est pas un phénomène qui est introduit par le projet de loi n° 14, c'est inexact. Ça, à l'époque où mes collègues étaient au gouvernement, donc dans les 15 années, c'était la situation qui prévalait, c'était ça, ça se faisait, c'était prévu à la loi d'accès à l'information. Donc, ça, c'est important de le dire, là : Notre gouvernement, avec le projet de loi n° 14, n'amène pas une situation nouvelle, où là, à partir de maintenant, les firmes de consultants vont avoir accès aux données gouvernementales dans le cadre de réalisation de projets en ressources... ce n'est pas à... ça a toujours été, ça a toujours été, ce n'est pas nouveau, là. À l'époque où mon collègue de La Pinière était au gouvernement, même chose pour ma collègue de Saint-Henri—Sainte-Anne, c'était la situation, c'était ça, ça fonctionnait comme ça, la loi le prévoyait. Donc, ça, je tiens à le préciser et à le re-re-repréciser parce que, pour l'intégrité de nos débats, je pense qu'il faut être factuel et, factuellement, cet accès-là à nos données par des firmes de consultants n'est pas une situation qui est initiée par le projet de loi n° 14, ça, c'est inexact.

Maintenant, ce dont on parle, c'est de la notion de nécessité. La Commission d'accès à l'information, qui est l'organisation, le chien de garde des données que le gouvernement possède sur nos concitoyens pour s'assurer de sa bonne utilisation a donné une définition de ce qu'était la nécessité. Et, moi, je ne suis pas gêné de regarder nos concitoyens puis de leur dire : Entre le ministre, là, qui va avoir un pouvoir discrétionnaire, voire même arbitraire, de définir c'est quoi, les critères, puis la Commission d'accès à l'information qui l'a fait sur des bases factuelles, sur la base du corpus législatif, lequel des deux vous pensez qui est le plus susceptible de vous donner une définition solide puis une définition qui est de nature à protéger vos renseignements personnels? Bien, je pense que les gens vont dire : Bien, les travaux de la CAI, on a confiance. Ce n'est pas qu'on n'a pas confiance au ministre actuel, au contraire, on a énorme confiance en lui mais la CAI, ce n'est pas mal non plus. Et, très sincèrement, M. le Président, je partage la préoccupation de mes collègues sur la protection de nos données, de nos renseignements personnels mais je le dis et je le répète, le projet de loi n° 14 prévoit, si on s'y rend dans les prochains articles, prévoit des mesures pour qu'on mette en place des régimes de protection, des mesures de protection additionnelles.

Et on peut épiloguer encore plusieurs heures sur la notion de nécessité, en pensant que, là, on vient d'accomplir un acte de protection absolu, mais la notion de nécessité, elle est bien définie, les critères sont clairs, ils n'ont pas été faits de façon arbitraire, ils ont été faits par une instance qui avait l'autorité de le faire, ils ont été appliqués de tout temps de cette façon-là, suite aux jugements qui ont été rendus. Je ne vois pas l'avancée dans le fait de changer ça, de modifier ça et, honnêtement, comme ministre, je regarde les critères puis je ne vois pas quels critères je pourrais rajouter sur la notion de nécessité. Là, on s'entend, on ne parle pas de quelles sont les mesures de protection qu'on peut mettre en place pour mieux protéger nos données, ça, c'est un autre débat. Mais, sur la notion de nécessité, là, quels sont les critères qu'on va rajouter pour rendre la nécessité encore plus nécessaire, sincèrement, là, je pense que, là, on parle pour s'écouter parler, là, je ne veux pas offenser personne, là...

Une voix : ...

M. Caire : Ah! je vous présente mes plus plates excuses, telle n'était pas mon intention. Mais, honnêtement, là, je pense que la notion de nécessité, là, elle est bien campée, elle est bien définie par la bonne instance, de la bonne façon, puis il n'y a pas lieu de donner un pouvoir discrétionnaire ou arbitraire, parce que ce n'est pas la même chose, au ministre. Cette situation-là, elle est claire, puis mon collègue, il dit : Bien, ce n'est pas clair, il faut se référer à la loi. Oui, mais, tu sais, le droit, c'est ça. L'interprétation de la loi, ça se base sur l'interprétation d'autres lois, puis, bon, tout notre corpus législatif fonctionne comme ça. Ça permet à nos avocats de travailler, ce qui est bien — hein, Me Bacon? — ça les rend tellement indispensables.

Mais ceci étant, M. le Président, moi, je pense qu'on travaille avec des bases solides sur la notion de nécessité. Puis, encore une fois, le fait que la nécessité soit bien définie, que les critères soient clairs ne veut pas dire que toute la loi d'accès à l'information est claire, bien définie, puis qu'elle n'a pas besoin... Encore là, c'est là où je dis : Il ne faut pas raisonner dans l'absolu. Mais ce pan-là de la loi, là, la notion de nécessité, ce n'est pas du droit nouveau, ce n'est pas une notion qui est nouvelle, ça n'a pas été amené par le numérique, puis ça va rester ça.

Puis sincèrement, M. le Président, là, il n'y a pas de... je ne vois pas de bonification dans l'amendement et le sous-amendement de mon collègue. Je pense que l'article 3, tel qu'il est rédigé, en tout cas, il fait bien le travail, et je pense que les articles qui vont viser plus spécifiquement la protection des données et des renseignements personnels vont aussi répondre à plusieurs inquiétudes que mes collègues et les concitoyens peuvent avoir.

Le Président (M. Allaire) : Merci, M. le ministre. M. le député de La Pinière, il vous reste 8 min 30 s pour discuter du sous-amendement.

M. Barrette : Écoutez, M. le Président, je suis estomaqué du commentaire du ministre. S'il considère qu'on parle pour ne rien dire, il en a fait, par son projet de loi, un bel exemple patent qui va être voté à l'Assemblée nationale. Parce qu'on sait que l'État, le législateur ne parle pas pour ne rien dire, n'est-ce pas? On l'a même dit ici, en cette commission, à plusieurs reprises. Alors, si je reprends les propos du ministre, mesdames et messieurs qui nous écoutez, ne vous en faites pas, la loi sur l'accès à l'information, là, ce genre de situation là, on a ça depuis toujours, toujours, le ministre le sait, la loi le permet. Bien, pourquoi l'article 3?

Alors, si le ministre se considère obligé d'écrire un article de loi qui permet de transférer des données à l'entreprise privée et implicitement à une hauteur jamais vue, et si le législateur ne légifère pas... ne parle pas pour ne rien dire, pourquoi il l'écrit? Bien, parce que ce n'est pas comme il dit. C'est simple de même. Et on aura remarqué, M. le Président, que, là, le ministre est un petit peu défensif sur ce point-là. Je peux le comprendre. Il n'aurait pas besoin d'être défensif s'il allait dans le sens de ce que l'on propose. Mais non. Mais non.

Puis je vais poser une question, M. le Président, bien simple, là. Le ministre, avant d'écrire son projet de loi, a dû faire des réflexions internes, a dû donner un coup de téléphone à la Commission d'accès à l'information, Mme la juriste, Me Bacon a dû faire de même, puis c'est normal, c'est comme ça que ça se passe, on essaie de s'assurer que tout est cohérent dans notre corpus législatif. Et, dans les situations auxquelles on a eu à faire affaire dans le passé, est-ce que le ministre ou Me Bacon pourrait nous donner un seul exemple, un seul où on a donné accès avec autant de profondeur aux données gouvernementales dans le passé, sous l'ancienne loi d'accès à l'information? Là, ici, on parle de refonte de nos données, là, et on parle obligatoirement de projets où une compagnie — le ministre l'admet — pourrait avoir accès à la totalité des données de deux ministères, par exemple. Y a-tu un seul exemple où on a vu ça, de l'extérieur, transmis à l'extérieur? Ma question est simple : Donnez-moi un seul exemple où, dans la loi actuelle, il a été autorisé qu'on transmette, à l'extérieur du périmètre gouvernemental, des données avec autant de détails et de profondeur que ce qui va être requis pour faire ces projets-là, un.

• (15 h 20) •

Le Président (M. Allaire) : M. le ministre.

M. Caire : Deux choses, M. le Président. Le député de La Pinière me dit : Pourquoi l'article 3? Parce que ce que l'article 3 vient corriger n'a rien à voir avec le fait que des entreprises privées pourraient avoir accès ou non aux données gouvernementales. Ce que l'article 3 vient faire, c'est d'obliger la communication de données entre entités du gouvernement.

M. Barrette : ...

M. Caire : Oui, oui. Bien, M. le Président, là, c'est à mon tour de dire à mon collègue, c'est mon droit de parole.

Le Président (M. Allaire) : Vous pouvez poursuivre, M. le ministre.

M. Caire : Merci. Et donc parce que, dans le cadre législatif actuel, et c'est là... ce n'est pas sur la notion de nécessité que la loi d'accès à l'information doit être revue, c'est sur le fait que la loi d'accès à l'information cloisonne les données. Et donc, outre des ententes complexes qui effectivement ne sont pas de nature publique, l'échange de données devient impossible et, dans le meilleur des cas, voire extrêmement complexe parce que c'est des ententes d'un à un, d'un à l'autre puis, là, ça devient un fouillis. Donc, ce que le projet de loi vient faire, c'est de simplifier l'échange de données entre entités et parties prenantes à la réalisation d'un projet informationnel si l'utilisation de ces données-là est nécessaire, c'est ça que le projet de loi... le 3, bien, c'est-à-dire, l'article 3 et le projet de loi n° 14 vient faire. Ça ne vient pas d'autoriser subitement... Puis c'est cette notion-là, puis, honnêtement, ça, c'est peut-être le... puis je pense qu'on avait des beaux échanges, mais il y a comme une insistance de la part de mon collègue à essayer de nous faire croire que, là, le projet de loi n° 14, contrairement à ce qui se faisait avant, aujourd'hui, là, les entreprises privées vont avoir accès à vos données. Je le dis et je le répète, c'est inexact, ce n'est pas nouveau.

Deuxième argument. O.K., O.K., les entreprises privées avaient accès aux données du gouvernement dans le cadre d'un projet, dans la réalisation d'un projet en ressources informationnelles avant. O.K. Le député de La Pinière vient de l'admettre à demi-mot. Mais là, il dit : Mais là, ce qui est nouveau, c'est la quantité de données. Là, avec ce que vous dites, là, ils avaient accès, ils vont avoir encore accès, mais ils vont avoir accès à plus de données, et là ils vont avoir accès à des données névralgiques. Il le laisse entendre. C'est plus subtil que ça, mais il le laisse entendre. Là, ça va être névralgique. Là, ils vont... M. le Président, ils vont avoir accès aux données qui sont nécessaires, nécessaires à la réalisation du projet. C'est un calque — puis, Me Bacon, vous me corrigerez si je me trompe — mais c'est un calque d'un article de la loi d'accès à l'information qui a pour but de restreindre, aux seules données nécessaires à la réalisation du projet... et c'est ça l'objectif.

Alors, mon collègue de La Pinière peut bien essayer d'attaquer ça de toutes les façons possibles et imaginables pour nous amener sur le terrain de : le projet de loi n° 14 va permettre au gouvernement de donner vos données à l'entreprise privée. C'est inexact. C'est inexact. Ce n'est pas ce que nous faisons. Ce n'est pas l'objet de l'article 3, et l'article 3 n'amène, en cette matière — et encore là, gênez-vous pas pour me corriger si je me trompe, là — n'amène, en cette matière, rien de nouveau. Et on peut dire O.K., je vais essayer d'attaquer ça d'un autre angle en disant : Bien, O.K., mais là ils vont avoir plus de données puis là ils vont avoir des données plus sensibles. Non, ils vont avoir les données dont ils ont besoin, nécessaires à la réalisation du projet si c'est utilisé à des fins légitimes, importantes, urgentes, réelles et si ça dépasse la simple pertinence qui est le critère... Puis ces critères-là me semblent tout à fait corrects. Alors, il n'y a pas une question d'un plus grand volume, il n'y a pas une question de nouvel accès, il n'y a pas une question de laisser entrer qui que ce soit là où il n'y a pas d'affaire à entrer. Le projet de loi n° 14, dans sa globalité, amène des éléments de protection qui n'existaient pas, et l'article 3, l'élément qu'il amène, c'est que le gouvernement, au lieu que ce soient des organismes qui, entre eux, font des ententes complexes... qui restent secrètes, soit dit en passant, hein, parce que c'était ça, là, l'état de fait, là, ce n'est pas que l'entreprise privée n'avait pas accès à nos données à l'époque où mon collègue était aux affaires... ce n'était pas ça, c'était que les organismes qui négociaient entre eux ne rendaient pas publiques les ententes, et l'utilisation qui était faite des données n'était pas rendue publique. Ça, c'était...

Alors, ce que nous, on amène, c'est que ça, ça va être rendu public. D'abord, il n'y aura pas d'entente entre organismes. Le gouvernement va dire : On fait un projet, voici les organismes qui sont impliqués. Vous vous échangez les données qui sont nécessaires à la réalisation du projet. Donc, on vient de débureaucratiser, de simplifier. Par le rapport qui est fait et les avis de la CAI, on ajoute des protections. On rend tout ça public. La finalité, c'est qu'on va donner une meilleure protection, une utilisation plus fluide, plus simple, moins bureaucratique, et une meilleure protection aux données. C'est ça que le projet de loi n° 14 va faire. En aucun temps le projet de loi n° 14 n'amène une notion nouvelle de permettre à l'entreprise privée d'avoir accès à nos données. Ce n'est pas... Le projet de loi n° 14 ne fait pas ça.

Le Président (M. Allaire) : Merci, M. le ministre. Le député de La Pinière souhaite intervenir à nouveau?

M. Barrette : Bien sûr.

Le Président (M. Allaire) : Allez-y.

M. Barrette : C'est toujours plaisant de... C'est plus facile, dans la vie parlementaire, de débattre lorsqu'il y a autant de contradictions en face de soi, là. C'est très facile. Mais je remercie le ministre d'en générer autant en si peu de temps. Je suis content.

Est-ce que j'ai dit, là... Le ministre, encore une fois, il fait exprès, parce que là il est un peu mal à l'aise, là. Je le comprends, là. Je n'ai pas dit que le projet de loi n° 14 visait à ce que l'entreprise privée, au sens général du terme, ait accès à... Je n'ai pas dit ça.

Le ministre nous a même dit que l'article 3, ça visait à faire en sorte qu'il y ait une meilleure communication. Bien oui, la meilleure communication entre les ministères, on l'a dit, on est d'accord avec ça. Mais le ministre choisit sciemment de noyer dans son discours la réponse qu'il m'a donnée plus d'une fois, confirmée, je pense, par Me Bacon, que l'article 3 permettait, dans le cadre des projets d'intérêt gouvernemental en matière de transformation informationnelle, de donner accès d'une façon étendue à des entreprises privées. Mais je n'ai pas parlé de généralisation, j'ai parlé d'un cas de figure.

Pour contrecarrer mon argument, le ministre dit que je dis que... Non, je ne dis pas que... et non seulement que je ne le dis pas, le ministre a admis plus d'une fois que l'article 3 permettait ça. Non seulement il le permettait, mais je pense que le ministre est confortable avec ça. Puis je le vois faire oui de la tête.

Alors, le ministre est confortable avec le fait que des données, de façon extensive, dans le cadre des fameux projets d'intérêt gouvernemental... Et ce sont tous les concepts et tous les mots que j'utilise depuis le début et non ceux que le ministre utilise pour débattre, d'où la contradiction ou les contradictions. Ce n'est pas ça. Le ministre fait oui de la tête. Il dit : Oui, c'est correct qu'une entreprise privée soit là, et que ça soit régi selon des critères qui sont vieux et difficilement applicables.

Et non seulement c'est contraire à ce que je dis, c'est de me mettre des mots dans la bouche que je n'ai pas prononcés, mais je n'ai pas entendu de réponse. Il y a-tu un projet où on a donné accès de façon aussi détaillée, approfondie, à l'entreprise privée, en termes de ressources informationnelles? Parce qu'ici c'est de ça qu'on parle. On parle de données qui vont pouvoir sortir du périmètre gouvernemental par l'article 3 qui a été écrit pour ça. Parce que, comme le dit le ministre, il y a des choses qui se faisaient avant. Si on l'écrit, l'article 3, c'est parce qu'on fait quelque chose de nouveau. Le nouveau, c'est donner accès de façon plus étendue à des entreprises et même, comme c'est écrit dans l'article, de transmettre des données à l'entreprise privée à l'extérieur, tout simplement. Tout simplement.

M. Caire : ...transmettre des... Ce n'est pas nouveau. Ce n'est pas nouveau.

M. Barrette : On l'a débattu, ça...

• (15 h 30) •

M. Caire : Oui, mais ce n'est pas nouveau.

M. Barrette : ...et le ministre l'a admis, M. le Président.

M. Caire : Oui, mais ce n'est pas nouveau.

M. Barrette : La question n'est pas là. J'ai posé une question simple, M. le Président : Y a-t-il un seul exemple où la portée, la profondeur, l'étendue, le niveau de détail des données intragouvernementales aura été transmis à l'extérieur, potentiellement, une seule fois dans l'histoire? La réponse, c'est non, à ça. Parce que, quand il y a eu des travaux d'envergure dans le gouvernement, dans le passé, il y a des consultants qui sont venus s'asseoir dans les officines gouvernementales et ont fait ça sur place. C'est ça, la réalité, et le ministre le sait très bien.

Alors, actuellement, on vit quelque chose de nouveau pour lequel il y a des dangers potentiels. Je ne débats pas de la finalité de l'exercice du projet de loi n° 14, on est d'accord. Que le ministre arrête de prendre des précieuses minutes pour nous dire qu'il veut que le gouvernement marche mieux, informatiquement parlant et informationnellement parlant. On est d'accord. L'enjeu, là, c'est l'article 3, sa possibilité d'envoyer des données à l'extérieur sans vraiment de contrôle, parce qu'il n'y en a pas vraiment. Il y a la loi d'accès à l'information qui est désuète. À mon avis, la Commission d'accès à l'information n'a probablement pas les compétences informationnelles pour faire le détail de ça, ce n'est même pas prévu dans le projet de loi qu'il va y avoir ce genre d'examen détaillé là, on verra ça un petit peu plus loin, c'est un autre enjeu. Il y a un potentiel de problème, et on dépose un amendement et un sous-amendement pour pallier à ça.

Qu'est-ce qu'il y a de si mauvais à s'assurer que, dans un cas particulier ou des cas particuliers où la loi d'accès à l'information ne permettrait pas de dire non parce que c'est trop flou ou trop désuet, on puisse avoir des critères additionnels déterminés par l'équipe que j'imagine très compétente du ministère? Qu'est-ce qu'il y a de si mauvais? Je suis surpris que le ministre refuse. Parce que c'est son argument, il dit : Je ne veux pas avoir cette responsabilité-là, je ne veux pas avoir la responsabilité. C'est quand même surprenant. Vous alliez m'interrompre, M. le Président?

Le Président (M. Allaire) : Oui, effectivement, c'était en conclusion, M. le député. Votre temps est écoulé pour le sous-amendement.

M. Barrette : Ah! Pour le sous-amendement. Alors, M. le Président, en conclusion, je pense que ceux qui nous écoutent, là, ils voient bien que je n'agite pas un épouvantail, là, je fais simplement dire : Il y a un danger, dans ce cas précis là. Je n'ai jamais débordé de ce cas-là, et le ministre refuse d'avoir une responsabilité plus précise et, oui, additionnelle. Le public, je pense, doit être étonné aujourd'hui.

Le Président (M. Allaire) : M. le ministre, est-ce que vous souhaitez répondre?

M. Caire : Bien oui, absolument, M. le Président.

Le Président (M. Allaire) : Allez-y.

M. Caire : Parce que c'est... Alors, dans son argument, le député de La Pinière dit : Bien, je ne dis pas que c'est nouveau, mais, en même temps,il dit : C'est nouveau parce que, là, les données vont pouvoir sortir vers l'entreprise privée. Donc, d'un côté, il dit : Je ne dis pas que c'est nouveau, mais c'est nouveau. Ce n'est pas nouveau. Ce n'est pas nouveau. Mais là il dit : Les données vont sortir sans contrôle. Encore là, c'est une affirmation. Je suis désolé, là, mais si on regarde le projet de loi plus loin, des mécanismes de contrôle, il y en a, internes, externes. C'est donc une affirmation qui est sans fondement. Mais là il dit : J'ai posé une question très simple, très simple : Combien de projets ont eu un accès aussi profond? Mais ça, c'est un jugement de valeur, M. le Président, «un accès aussi profond». Sur quelle base le député de La Pinière peut-il affirmer, lui, que les entreprises privées vont avoir accès à des données profondes, ou sensibles, ou que c'est nouveau? Alors, il nous fait une affirmation qui n'est basée sur rien, qui n'est démontrée sur rien, qui ne repose sur aucun fait, alors que moi, je lui dis : Les critères qui seront appliqués dans le cadre du projet de loi n° 14 ne vont pas amener un volume de données nouveau, ne vont pas amener une nouveauté que des consultants pourraient avoir accès à des données, ce n'est pas nouveau. Mais, par contre, le prisme à travers lequel on va donner les accès sera celui qui a été défini par la Commission d'accès à l'information. Donc, là, on est dans le jugement de valeur, on est dans l'affirmation qui n'est pas factuelle, je suis désolée, et pourtant mon collègue est un scientifique, mais sur quoi se base-t-il pour dire : Ah! bien, là, ils vont avoir un accès plus profond, ils vont avoir un accès plus large, ils vont avoir un accès plus détaillé? Il se base sur quoi pour dire ça? Ça sort d'où, ça? Je veux dire... Mais après ça, il se dit : Mais je ne veux pas brandir des épouvantails, là.

Alors, moi, ce que je dis à nos concitoyens, c'est, comme ça se faisait, oui, le gouvernement du Québec pourrait avoir recours à des consultants. Comme ça se faisait, oui, le gouvernement du Québec pourrait donner des accès si ces accès-là sont nécessaires à la réalisation du projet. Comme ça se faisait, la nécessité de ça sera évaluée sur la base des critères qui ont été déterminés par la Commission d'accès à l'information, le chien de garde des données, le chien de garde du public de l'utilisation des données. Il n'y a rien là-dedans qui est nouveau. Il n'y a rien là-dedans qui est l'apanage du projet de loi n° 14. Ce que le projet de loi n° 14 fait, par contre, c'est de permettre l'échange de données de façon plus fluide, de façon moins bureaucratique, de façon plus efficace entre des entités qui, autrefois, ne pouvaient pas se parler ou plus ou moins, et là pourront le faire.

Mais ce que le projet de loi n° 14 va faire aussi, c'est de faire en sorte que l'utilisation qui aura été faite des données dans le cadre de ce projet-là sera rendue publique. Ça, ça ne se faisait pas. Ça, je n'ai pas entendu mon collègue à date saluer cette avancée-là. Ce qui ne se faisait pas non plus avant, puis ce que tout ce que je viens de vous dire et que le député de La Pinière dénonce, ça se faisait avant. Mais ce que, nous, on amène, c'est une évaluation des risques. Puis ça, ça ne se faisait pas. Il n'y en avait pas, d'évaluation des risques, avant. Il n'y en avait pas de rapport ou d'avis qui... d'avis, c'est-à-dire, demandé à la CAI sur l'utilisation des données dans le cadre d'un projet. Il n'y en avait pas. Là, ça va se faire. Il n'y en avait pas de rapport sur l'utilisation des données. Là, ça va se faire. Et évidemment, comme il n'y avait pas de rapport, il ne pouvait pas être rendu public. Là, il va être rendu public.

Donc, ce que nous avons fait, ce que nous faisons, ce que nous ferons, si effectivement le projet de loi est adopté, c'est d'améliorer les pratiques, et de mieux encadrer les pratiques, et de mieux protéger les données dans le cadre de la réalisation d'un projet en ressources informationnelles. Alors, est-ce que j'ai besoin, moi, d'avoir un pouvoir arbitraire de définir d'autres critères? Je suis en train de dire au député, les critères qui sont là, ils sont complets et ils sont corrects. Je ne vois pas en quoi... Donc, me donner le pouvoir de quoi? De dire ça, là? Je trouve que c'est bien, je trouve que c'est bien fait. Je trouve que c'est sur des bases factuelles. Je trouve que ça a été fait conformément à nos usages, par la bonne organisation, dans le bon contexte. Alors, ce n'est pas que je ne veux pas assumer de responsabilité, au contraire, très fier d'en assumer, des responsabilités, mais je n'ai pas besoin d'aller me mettre les mains là-dedans, la Commission d'accès à l'information le fait et elle le fait très bien.

Le Président (M. Allaire) : Merci, M. le ministre. Alors, est-ce qu'il y a d'autres interventions concernant le sous-amendement de l'amendement de l'article 3? Non. Nous serions donc prêts à procéder à la mise aux voix. Donc, est-ce que le sous-amendement de l'amendement de l'article 3 est adopté?

Des voix : ...

Le Président (M. Allaire) : Donc, le sous-amendement de l'amendement de l'article 3 est rejeté. Nous revenons donc à l'amendement. Est-ce que le député de l'opposition officielle souhaite intervenir? M. le député de La Pinière, la parole est à vous.

M. Barrette : M. le Président, je pense que, là, on a une pièce d'anthologie, vraiment une pièce d'anthologie. Le ministre dit que je fais des jugements de valeur. Alors, le ministre nous dit que la loi est désuète mais, lui, il juge que la loi désuète est suffisante pour exercer ses fonctions. M. le Président, là...

Une voix : La boucle est bouclée.

M. Barrette : ...la boucle est bouclée. C'est ça. C'est... Là, c'est les Mardis des Ha! Ha! Là, c'est parfait. Pour le moment c'est tout.

Le Président (M. Allaire) : Ça va? M. le ministre, voulez-vous faire un commentaire.

M. Caire : C'est correct. Je vais lui laisser cette belle finale.

Le Président (M. Allaire) : Concernant l'amendement de l'article 3, est-ce qu'il y a d'autres interventions? Oui, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.

Mme Anglade : Bien, écoutez, alors on revient à l'amendement initial?

Le Président (M. Allaire) : Oui.

• (15 h 40) •

Mme Anglade : Écoutez, une des choses qui m'a paru intéressante lors des échanges que nous avons eus avec le ministre, c'est qu'au départ on a demandé de clarifier la notion de nécessité, et il nous a dit : Il n'y a pas... Il nous a dit : Connu dans la langue française, c'est connu, le mot, dans la langue française, c'est déjà déterminé, etc. Jamais il ne nous a donné la définition qui a été précisée par la suite par Me Bacon.

Pour moi, ce qui apparaît évident, ce que, puis c'est ce que je disais depuis le départ, il y a matière à clarification. Parce que si, nous, autour de la table, qui sommes des législateurs, on n'arrive pas à expliquer la terminologie, les termes utilisés, pourquoi est-ce qu'on ne viendrait pas justement reprendre ces termes à l'intérieur même du projet de loi? Or, le ministre utilise les mêmes arguments en disant : Bien, écoutez, on n'a pas besoin de le préciser. On vous l'a précisé par la suite, mais il n'était pas plus au courant avant. Au préalable, il ne savait pas comment définir le mot «nécessité».

La question que je me pose... C'est qu'on essaie, ici, d'améliorer le projet de loi, on essaie de le bonifier, on essaie de voir de quelle manière on va être capable d'y ajouter un peu plus de cohérence et plus de structure. Je crois qu'il serait de bon ton de trouver le bon mécanisme pour le faire. Dans ce qui a été proposé par mon collègue, il essaie justement, avec un amendement, de définir davantage, qu'on ait plus de visibilité et plus de transparence. Le ministre nous parlait tout à l'heure de la transparence qu'il y avait à l'intérieur de son projet de loi. On verra tout à l'heure que les éléments de transparence qui sont ajoutés ne sont pas très bien définis. Donc, on pourra en discuter plus tard. Mais je vois mal comment on refuserait de définir davantage le mot «nécessaire».

Alors, sur la question de l'amendement, puisque ce qui est stipulé ici, c'est tel que déterminé par le ministre, la question que j'ai pour le ministre, c'est : Si ce n'est pas cet amendement-là qui nous permet de le faire, est-ce que lui, il a des propositions pour bonifier l'article 3? Est-ce qu'il verrait d'un bon oeil qu'on amène d'autres amendements — on essaie de travailler pour la bonification, comment est-ce qu'il voit les choses? — ou sa réponse, c'est : ni l'amendement, ni le sous-amendement, ni aucun amendement parce que mon projet de loi, tel qu'il est présenté, il est parfait, nous avons atteint la perfection? À moins qu'il soit perfectible, auquel cas je pense qu'il y aurait moyen d'encadrer davantage le terme «nécessité».

Le Président (M. Allaire) : Merci, Mme la députée. M. le ministre.

M. Caire : Bien sûr, que je suis ouvert. D'ailleurs, j'ai déjà... on a déjà accepté des amendements qui ont été proposés par les collègues. Donc, la question n'est pas : Est-ce qu'on est ouverts à accepter des amendements? On l'a déjà fait. J'avais même accepté un amendement qui, ensuite, a été rejeté par le collègue qui avait fait l'amendement, puis ça, c'est une autre pièce d'anthologie, mais on ne reviendra pas là-dessus. Épisode douloureux, s'il en fut.

Et donc sur cet aspect-là, oui, bien sûr, le projet... Mais, en même temps, je pense que... Puis, je veux dire, je ne dirai pas à mes collègues comment faire leur travail. Donc, s'ils souhaitent déposer des amendements, c'est leur prérogative. C'est notre prérogative à nous de juger si le projet de loi... si l'amendement bonifie le projet de loi. Sur l'article 3... Puis moi, j'invite... Parce que les collègues amènent beaucoup de préoccupations tout à fait légitimes, soit dit en passant, sur la protection des données, puis ça, moi, j'en suis, sauf qu'on n'est pas à l'article qui traite de ça. Alors, c'est comme devancer l'article sur lequel on va parler de ces régimes de protection. Et j'entends ma collègue dire, bien... Ça fait quelques allusions qu'elle fait au rapport, à la transparence. Donc, je comprends qu'elle a des suggestions à faire, puis honnêtement, je vais être très intéressé à les entendre. Mais sur l'article 3, le grand débat qu'on fait sur le thème de la nécessité, je pense que ce débat-là a permis... Puis ma collègue sait que les débats qui se tiennent ici peuvent servir aussi à l'interprétation de la loi, donc, l'intention du législateur, c'est les échanges qu'on a, aussi. Ça fait partie des éléments d'interprétation. Donc, il est clair que, dans le cadre du projet de loi n° 14, la définition qui est faite du terme de «nécessité» par la CAI est la bonne définition. Donc, déjà là, dans les règles d'interprétation, nos échanges pourront servir à définir ce qu'est la nécessité, puisque le législateur se sera prononcé là-dessus.

Alors, trop, c'est comme pas assez. C'est juste ça que je veux dire. C'est que je pense qu'on a une définition qui a été bien faite, par la bonne instance, puis je pense qu'elle est... Si ces débats-là ont une utilité, ça aura été de préciser quelle est la bonne définition à accoler à la nécessité dans l'alinéa de l'article 3. Et est-ce que ça peut être bonifié? Moi, je ne vois pas comment. Il me semble que c'est suffisamment clair comme ça, mais si les collègues ont d'autres suggestions, moi, je veux dire, je ne vous dirai certainement pas de ne pas déposer d'amendement, là, tu sais. Voilà.

Le Président (M. Allaire) : Merci, M. le ministre. Députée de Saint-Henri—Sainte-Anne, vous souhaitez intervenir? Non, c'est terminé?

M. Barrette : Alors, M. le Président, le ministre me demandait sur quoi je me basais. Je pense que la réponse que le public attend, ainsi que mes collègues parlementaires... Avez-vous un exemple? Je ne vais pas répéter l'exemple que j'ai demandé, là. Je pense qu'il sait à quoi je fais référence. M. le Président, là, si les projets d'intérêts gouvernementaux ne vont pas plus loin que de partager des adresses postales, on ne fera pas grand-chose, là. Moi, je pense que ça va bien plus loin que ça. Il me demande sur quoi je me base. Bien, je me base sur l'expérience de ce qu'est une base de données, ayant été à la tête d'une organisation qui a les bases de données les plus complexes, et je sais très bien que quand on veut faire... qu'on veut s'assurer de la fluidité dans des bases de données, et le ministre le sait aussi dans la cause des informations, qu'on doit avoir accès la base de données complète, qui, elle, est complexe puis il le sait très bien. Et il sait très bien que l'exercice dans lequel il s'embarque, il est complexe. Et il sait très bien, parce que c'est l'essence d'un projet de loi, il l'a dit lui-même à plusieurs reprises : Il va y avoir un projet, un deuxième, un troisième, un quatrième, un cinquième, un sixième, un septième puis ça va arrêter, là, faute de temps et/ou de budget. Mais ça va être la multiplication des instances, où il va y avoir un potentiel de distribution des données à l'extérieur à une et, sans aucun doute, plusieurs compagnies. Je ne parle pas de... Puis redisons-le, là, ça ne peut pas être un simple échange de codes postaux, ce n'est pas ça. C'est profond, ça ne s'est jamais fait, c'est pour ça que l'article 3, le ministre le dit, ça va se transmettre des données à l'extérieur, et là, actuellement, bien là, on propose d'avoir des garde-fous additionnels, objectifs — objectifs — déterminés par l'équipe du ministre, et il ne veut pas. Ça en dit long, ça en dit long, ça en dit long.

Le Président (M. Allaire) : Merci, M. le député. Votre temps est écoulé. Est-ce que vous souhaitez répondre, M. le ministre? Allez-y, la parole est à vous.

M. Caire : J'étais d'accord avec le député de La Pinière jusqu'à «ça ne s'est jamais fait». Ça, c'est inexact. Ça, c'est inexact, mais... Puis, en plus, c'est que le député de La Pinière me demande : Comparez la gestion des projets qui a été faite à un projet de loi qui n'est pas adopté, et donc la gestion qui serait faite d'un projet de loi qui n'est pas adopté. Je n'en ai pas de projets qui ont été gérés sous le chapeau de la loi n° 14, elle n'est pas adoptée. Alors, tout ce qu'on peut faire, c'est comparer du réel à des hypothèses. À la limite, à des extrapolations. Bien, le député de La Pinière, c'est un homme brillant. Il sait bien que je ne peux pas comparer du réel à des extrapolations, il sait.

Bon, maintenant, il sait aussi que les entreprises qui travaillent avec le gouvernement et qui ont accès aux bases de données qu'il mentionne le font sur des bases contractuelles et il sait très bien, il sait très bien que ces contrats-là... et il l'a dit lui-même, qu'il n'y avait pas eu de fuites de données à la RAMQ. Pourtant, la RAMQ a eu recours à des consultants. Le facteur de risque a été contrôlé et les ententes contractuelles ont été... ont fait en sorte de circonscrire le risque. Pas de l'éliminer, parce qu'il l'a dit lui-même et je suis d'accord, le risque zéro n'existe pas, mais le circonscrire.

Le projet de loi n° 14 ne change rien à ça. C'est ça que je répète et que je répète. Le projet de loi n° 14 n'amène pas la notion qu'une donnée va... Tu sais, ce n'est pas, là, à partir du projet de loi n° 14, là, toutes les données vont sortir du gouvernement, c'est fini. Ce n'est pas ça. Dans l'état actuel des choses, les données peuvent être... peuvent servir à des entreprises de l'externe. C'est déjà ça. Alors, le projet de loi n° 14 ne changera pas ça, ne modifiera pas ça. Je le dis et je le répète, et je ne sais pas sur quel ton, de quelle façon je peux le répéter, ce que le projet de loi n° 14 fait, et le député de La Pinière le sait très bien, c'est de faciliter les échanges entre organismes du gouvernement, dans un contexte de réalisation d'un projet en ressources informationnelles. C'est une notion avec laquelle il est d'accord, et comme on ne change pas ce qui se fait et qu'on améliore ce qui ne se fait pas, j'avoue, des fois, je comprends difficilement les objections de mon collègue quant à l'article 3.

Sur la protection des données et des renseignements personnels, je le dis et je le répète, c'est une situation qui fait l'objet de différents articles du projet de loi et je serai très heureux d'entendre les suggestions des collègues, si tant est qu'ils jugent que le régime ou les protections qui sont offertes et la transparence qui est proposée n'est pas suffisante. Mais pour ce qui est de l'article 3, il faut ce qu'il a à faire.

Le Président (M. Allaire) : Merci, M. le ministre. Est-ce qu'il y a d'autres interventions concernant l'article... l'amendement de l'article 3. Pardon?

Une voix : ...

Le Président (M. Allaire) : Non, le sous-amendement, oui, mais pas l'amendement.

• (15 h 50) •

M. Barrette : M. le Président, vous m'avez épuisé par le temps.

Le Président (M. Allaire) : Est-ce vraiment possible? Donc, puisqu'il n'y a pas d'autres interventions concernant l'amendement, nous allons donc procéder à sa mise aux voix. Donc, est-ce que l'amendement, tel qu'amendé... à l'article 3 est adopté?

M. Barrette : Adopté avec enthousiasme.

Des voix : ...

Le Président (M. Allaire) : Donc, l'amendement à l'article 3 est rejeté. Nous revenons donc à l'article 3. Est-ce que le député de La Pinière souhaite intervenir?

M. Barrette : Avec plaisir, M. le Président.

Le Président (M. Allaire) : Allez-y, la parole est à vous.

M. Barrette : Compte tenu des interventions... Et vous savez, M. le Président, avant d'aller plus loin dans mon intervention, je veux simplement vous dire la chose suivante : J'ai rarement vu le ministre délégué tourner autour du pot autant, là, parce que d'habitude, il est direct, puis là, il tourne autour, puis on n'a pas... C'est très étonnant. Tellement étonnant, M. le Président, que ça m'oblige à déposer un autre amendement à l'article 3 en lien avec, particulièrement, les derniers commentaires qu'il a faits. M. le Président, je le lis ou on attend?

Le Président (M. Allaire) : ...le temps qu'on le distribue.

M. Barrette : Alors, M. le Président, et je l'explique ou j'attends la distribution? J'attends la distribution.

Le Président (M. Allaire) : Oui, après ça.

M. Barrette : M. le Président, l'amendement suivant. L'article 3 du projet de loi est modifié en ajoutant, à la suite du premier alinéa :

«Que tout projet confié à une personne ou un organisme autre que gouvernemental doit être impossible à réaliser à l'intérieur du périmètre gouvernemental.»

Le Président (M. Allaire) : Puisque l'amendement est actuellement en train d'être distribué, je pense que vous pourriez procéder à l'explication en même temps. Ça va, vous pouvez y aller.

M. Barrette : Alors, juste une petite seconde. Alors, M. le Président, le vrai, vrai, vrai enjeu ici aujourd'hui, là, dans les débats que l'on a, là, est d'aller du point a au point b à l'intérieur du gouvernement. Je réitère que le gouvernement a choisi de se permettre, par l'article 3, d'aller faire un détour à l'extérieur. Alors, moi, je pense qu'on devrait statuer sur les possibilités, d'abord, primordiales de faire ce projet-là à l'interne. Alors, ce que ça dit essentiellement, c'est que ça reprend l'article 3 tel qu'il est écrit, mais ça dit : On ira à l'extérieur s'il est démontré qu'on ne puisse pas le faire à l'interne. En réalité, il faudrait le faire à l'interne. Et là, on débattra de la chose.

Le Président (M. Allaire) : Vous avez terminé, M. le ministre... M. le député, pardon?

M. Barrette : Bien, là, on fait-u une pause ou...

Le Président (M. Allaire) : Non, non, on continue. Je pense que tout le monde a reçu l'amendement. Donc, vous avez donné vos explications, est-ce que vous voulez continuer à argumenter?

M. Barrette : Oui, oui, je vais continuer.

Le Président (M. Allaire) : Oui, allez-y.

M. Barrette : Le ministre, dans sa dernière intervention, là, je disais qu'il tournait un petit peu autour du pot, là, je comprends, là, que ça le mette un petit peu mal à l'aise, ce que je propose. Encore une fois, ce n'est pas une question pour mettre le ministre mal à l'aise, là, c'est une question de s'assurer d'avoir une protection maximale.

Une voix : ...

M. Barrette : Non, je n'ai pas dit que le projet de loi n° 14... Arrêtez, M. le ministre, de dire ça. M. le Président, je n'ai pas mentionné une seule fois que le projet de loi n° 14 avait comme finalité d'envoyer les données à l'externe. Je n'ai jamais mentionné ça, pas une fois. Pourtant, il répète, il répète, il répète que c'est ça que... Bien non. C'est un projet de loi d'un projet pilote, c'est expérimental.

Maintenant, il y a des enjeux, et les enjeux, c'est notre capacité de faire ce genre de travaux là à l'interne. Moi, je peux vous dire une chose : Aujourd'hui, là, aujourd'hui, le 20 août 2019, si on avait l'assurance... je pense que le ministre serait heureux si on avait la capacité de faire ça à l'interne. Si on pouvait passer du point a au point b, on n'aurait même pas cette commission parlementaire là ou, si on l'avait, on serait déjà rendu à l'article 12. Je pense qu'il y en a 12. Mais non, on arrête sur 3 à cause des diverses possibilités qui ont été évoquées, que j'ai évoquées, que ma collègue a évoquées depuis le début, qui semblent ne pas inquiéter le ministre. Alors, moi, je dis, par cet amendement-là, faisons-le à l'interne d'abord et faisons la démonstration que l'interne n'est pas capable de le faire.

Le Président (M. Allaire) : M. le ministre, la parole est à vous.

M. Caire : Bien, je comprends l'intention mais je questionne le moyen. Parce que, d'une part, l'objectif du projet de loi n° 14, je le dis et je le répète, n'est pas de gérer le recours à la consultation, ce n'est pas ça l'objet du projet de loi n° 14, on n'est pas en train de faire un débat, à travers le projet de loi n° 14, sur est-ce qu'on doit avoir recours à l'externe, à l'interne dans la réalisation de nos projets. Donc, d'une part, je questionne fortement l'amendement dans le contexte du projet de loi n° 14. D'autre part, je pourrais même aller plus loin et reprendre un peu la technique de mon collègue : Qui décide que c'est impossible? Selon quels critères on décide que c'est impossible? Et jusqu'à quel point il y aura des recours si une décision est prise, que c'est impossible, pour dire, non, nous... Par exemple, le syndicat pourrait dire : Bien non, nous, on juge que c'est possible, le gouvernement, ta, ta, ta. Alors là, est-ce qu'on est en train de créer une espèce de grosse bureaucratie autour de est-ce que c'est possible ou impossible, alors que, dans les faits, bien, je pense que ça, ça relève de la gestion du gouvernement.

Donc, pour ces deux raisons-là, M. le Président, moi, je peux réitérer publiquement l'intention de notre gouvernement d'améliorer, d'augmenter, d'acquérir diverses expertises à l'interne. Avec l'Académie de transformations numériques, on souhaite offrir des formations à notre monde à l'interne, parce que je serai toujours très favorable à ce qu'on puisse, à l'interne, réaliser le maximum de projets, mais le projet de loi n° 14, n'est pas un projet de loi qui vise à gérer ce concept-là d'utiliser l'interne et l'externe, et, en plus, pour les raisons que j'ai évoquées, la gestion de tout cela, l'orchestration de la gestion de tout ça m'apparaît être très complexe, et donc non nécessaire.

Le Président (M. Allaire) : Merci, M. le ministre. M. le député de La Pinière.

M. Barrette : Bien là, M. le Président, là, évidemment que c'est un angle particulier, j'en conviens, mais c'est un angle éminemment pertinent. Le ministre, doit-on lui rappeler ses prises de position, en termes de compétences informationnelles gouvernementales passées? Il y a des gens qui vont penser que le ministre a défendu certaines positions pendant quatre ans, ils ne savent pas que ça doit faire probablement 10 ans, là, qu'il défend ses positions, et là, il a une occasion, absolument, je dirais, rêvée de les mettre en application, et il ne le fait pas. Est-ce que le ministre est en train de nous dire aujourd'hui qu'il renie sa position passée, à l'effet que le gouvernement du Québec ne développe pas suffisamment son expertise et qu'il a une certaine expertise qui lui permettrait de faire ça? Est-ce que le ministre a maintenant, aujourd'hui, changé de position?

M. Caire : Merci, M. le Président. En fait, c'est un peu paradoxal parce que, tout à l'heure, le député de La Pinière voulait me donner un pouvoir arbitraire de fixer des critères sur ce qui est nécessaire, puis là le député de La Pinière veut m'enlever la capacité à dire : Bon, bien, peut-être que ce projet-là, on va aller à l'externe ou on va aller à l'interne. Donc, dans un cas, j'ai un pouvoir très discrétionnaire, puis, dans un autre cas, il faut enlever ça.

Mais je vais répondre plus précisément à sa question : Non, non, je n'ai pas renié mes positions, c'est la raison pour laquelle on a mis en place le Centre québécois d'excellence numérique, parce qu'on veut développer à l'interne différentes expertises en matière de transformation numérique, parce qu'on veut qu'à l'interne notre monde ait la capacité de soutenir les ministères et organismes dans leur transformation. Parce qu'on veut que nos ministères et organismes soient capables de réaliser leur propre transformation numérique, on a demandé à l'Université Laval, à travers l'Académie de transformation numérique, de monter des formations pour être capables de faire une mise à niveau de nos ressources internes pour qu'elles puissent aller chercher cette expertise-là, pour qu'on puisse le réaliser à l'interne. On fait réaliser à l'interne le Programme de consolidation des centres de traitement de l'information. Donc, je pense qu'on a déjà posé des gestes très forts pour signifier notre intention d'internaliser, autant que possible et aussi vite que possible, l'ensemble des opérations du gouvernement en matière, évidemment, de transformation numérique et de technologies de l'information.

Ceci étant dit, je partage cette préoccupation-là d'internaliser notre expertise mais je dis, là, on est en train de faire un débat qui n'est pas du ressort du projet de loi n° 14, donc on sort du projet de loi n° 14, dans un premier temps. Et, dans un deuxième temps, je pense que mon collègue a suffisamment l'expérience du pouvoir pour savoir que la notion d'impossible amène toutes sortes d'autres concepts qui vont... si l'intention est bonne, mais on dit que l'enfer est pavé de bonnes intentions, bien, ça, je pense que ça pourrait nous paver un chemin assez difficile, là.

• (16 heures) •

Le Président (M. Allaire) : Merci, M. le ministre. Oui, allez-y, M. le député.

M. Barrette : ...du ministre. Alors, vous savez, le ministre a été cité cinq jours après avoir été élu, en disant — c'est le ministre, là, qui est cité à propos de l'informatique : «La CAQ a aussi promis de diminuer la dépendance de Québec aux firmes externes en informatique. À titre d'exemple, 200 consultants, dont certains en Inde, ont récemment été embauchés par la SAAQ, pour un projet informatique "par manque d'expertise".» Alors... Puis on s'en va un petit peu plus loin, là, je ne vais pas continuer à citer l'article, il est long, là, ça fait partie d'ailleurs de la politique de la CAQ de s'affranchir de ça.

Alors, le ministre l'a dit précédemment, là, il y a des exemples où l'intervention de l'externe se fait dans le périmètre gouvernemental, et c'est là qu'il est possible de faire le transfert d'expertise, c'est parfaitement faisable. Alors, pourquoi le ministre n'accepte-t-il pas cette vision-là de faire en sorte que ça se fasse à l'interne, qu'on engage du monde, qu'on collabore avec d'autres personnes et que ça se passe à l'intérieur du gouvernement sans qu'il n'y ait de transfert de données à l'extérieur?

D'ailleurs, M. le Président, de la CAQ, à l'exception du centre d'excellence qui aura des effets peut-être un jour, on n'a pas de plan d'embauche, on n'a pas de vision pour faire en sorte qu'on ne soit plus jamais dépendants de l'externe. On voit plutôt une direction contraire. Alors, moi, j'ai bien de la difficulté à concilier les prises de position très affirmatives du député du précédent gouvernement, qui est maintenant ministre. Alors, aujourd'hui, il est parfaitement faisable, parfaitement faisable, à mon sens, d'aller du point a au point b sans faire le détour par l'extérieur, d'où l'amendement qui est proposé.

Le Président (M. Allaire) : M. le ministre.

M. Caire : Bien, je ne redirai pas tout ce que j'ai dit sur les éléments qu'on a mis en place pour faire une démonstration, en tout cas, de mon point de vue, qui est assez claire de notre intention d'internaliser notre expertise. Je réitère que l'amendement amène, dans le projet de loi n° 14, un élément qui n'est pas dans la portée du projet de loi n° 14. Le projet de loi n° 14 n'a pas pour objectif de gérer le recours à l'interne et à l'externe. Donc, ce seul argument-là, en lui-même, est suffisant pour ne pas adhérer à l'amendement du collègue, et je réitère que la notion de ce qui est impossible va amener, à mon sens, une bureaucratie et des démarches administratives extrêmement lourdes, complexes, probablement contre-productives, mais je réaffirme, à micro ouvert, l'intention de notre gouvernement de former les ressources. Parce que le député de La Pinière disait : Je ne vois pas de plan d'embauche. Écoutez, on a... je ne sais pas le chiffre exact, là, mais je pense que c'est 700 postes...

Une voix : ...

M. Caire : 900. On a 900 postes non comblés actuellement au gouvernement du Québec. On est évidemment dans un contexte que le collègue et ma collègue de Saint-Henri—Sainte-Anne connaissent. Donc, ce n'est pas la question de ne pas avoir un plan d'embauche. La question, c'est d'avoir des gens à embaucher. Et un choix que nous avons fait, c'est le choix de former nos ressources qui ont été formées sur des technologies qui sont désuètes ou en voie de l'être, de les amener à de nouvelles compétences, de les amener vers une mise à jour et une optimisation de leurs compétences pour permettre de développer cette expertise-là avec les ressources que nous avons déjà à l'interne. Bien sûr, on continue de chercher et d'embaucher des nouvelles ressources, là. Ça, ce n'est pas mutuellement exclusif. Mais il y a déjà un certain nombre de ressources au sein du gouvernement, et on pense qu'un plan agressif... puis j'utilise le mot «agressif» dans un sens, je dirais, où on va vraiment favoriser la formation de notre monde pour développer l'expertise à l'interne. Donc, ça, je le réitère aussi, là, mais je répète, l'amendement que mon collègue propose nous sort du contexte du projet de loi n° 14, là.

Le Président (M. Allaire) : Merci, M. le ministre. M. le député de La Pinière, vous souhaitez intervenir? Allez-y.

M. Barrette : Ça ne sort pas du tout du projet de loi n° 14, absolument pas. Je le répète, l'article 3, c'est un article qui ouvre la porte à la sortie de la donnée. La seule façon de fermer cette porte-là, si on souhaite la fermer, c'est que les travaux se fassent à l'interne. Or, le ministre, dans ses positions précédentes, lorsqu'il était dans l'opposition, était très clair. Il a le surnom qu'il a, pas par hasard, là, son surnom de shérif de La Peltrie, là, ce n'est pas un hasard. Alors, le ministre, dans ses positions précédentes, était pour que le gouvernement développe une expertise à l'interne appropriée, il était pour l'embauche et, si j'ai bien compris ses propos passés, il était aussi pour une rémunération compétitive. Lorsque le ministre se penche à sa droite pour confirmer le chiffre de 900 postes disponibles, ce sont des postes actuels, ce ne sont pas des postes en développement. Alors que, quand le ministre était, dans le passé, dans l'opposition et qu'il prenait des propositions... des positions, pardon, c'était dans l'esprit de développer une expertise additionnelle et compétitive en termes de compétences avec l'externe.

Là, aujourd'hui, je n'entends pas ça, je n'entends pas ça. Par contre, il y a une opportunité, par le projet de loi n° 14, de faire ça, alors que le projet de loi n° 14, à la fin, ne va pas nécessairement et peut-être même obligatoirement nous amener dans la direction inverse. Et d'aucuns aujourd'hui évoquent la possibilité de l'intention non avouée du gouvernement... ce n'est pas mon mot, ce ne sont pas les mots que je vais prononcer et que je prononce, il y a des gens qui vont accuser le gouvernement de vouloir démanteler l'État, vous l'avez déjà entendu. Puis je ne dis pas que c'est ça, là, je dis simplement qu'actuellement le projet de loi n° 14 est une opportunité, et, bon, la finalité, on la soutient, on l'appuie. L'opportunité de formation et de mise à niveau, elle est là. Sur le plan de la contention des données à l'intérieur du périmètre gouvernemental, c'est possible en faisant venir des consultants à l'externe, et là, ce n'est pas ça, là, qui se passe. Alors là, il y a une double et peut-être triple opportunité, là, au moment où on se parle. Elle n'est pas saisie. Alors, qu'on ne me dise pas qu'on est en dehors de la portée du projet de loi, au contraire.

Alors, c'est sûr que ce n'est pas écrit, là, comme tel, dans le projet de loi, mais le questionnement, il est légitime. Je n'ai pas entendu de la part du gouvernement... Puis je ferai remarquer au ministre délégué qu'il est délégué du président du Conseil du trésor et que c'est dans son environnement législatif que se déterminent les niveaux de rémunération compétitifs, particulièrement dans des secteurs névralgiques comme les TI. N'est-il pas là une opportunité? N'y a-t-il pas là une opportunité que le ministre devrait utiliser pour faire d'une pierre deux coups : développer l'expertise, construire, protéger nos informations, et garder tout ça à l'interne?

Le Président (M. Allaire) : M. le ministre.

M. Caire : Oui, plusieurs notions très différentes qui ont été amenées par le collègue. Sur la rémunération, ça, c'est un élément qui n'a pas rien à voir avec le projet de loi n° 14, oui, c'est vrai, c'est au Conseil du trésor à conduire les négociations, puis le président du Conseil du trésor est l'homme de la situation pour mener à bien ces négociations-là, et sachez qu'il est tout à fait conscient du contexte actuel, tout le Conseil des ministres est conscient du conseil actuel, donc je laisserai le président du Conseil du trésor s'occuper de cet aspect-là. Mais le projet de loi n° 14 n'a rien à voir avec la rémunération des ressources informationnelles. Donc, encore une fois, on est en dehors du débat du projet de loi n° 14. Le projet de loi n° 14 ne vise pas à...

Une voix : ...

M. Caire : Le projet de loi n° 14 ne vise pas...

M. Barrette : ...

Le Président (M. Allaire) : Pouvez-vous répéter, M. le député de La Pinière a mal compris.

M. Caire : Bien, je ne sais pas, là...

M. Barrette : ...à l'extérieur des ressources informationnelles, c'est-u ça que j'ai compris?

M. Caire : Hein?

• (16 h 10) •

M. Barrette : J'ai mal compris, d'abord.

M. Caire : O.K. Non, je n'ai pas dit ça mais ce que je dis, c'est que ce n'est pas l'objet du projet de loi n° 14 de traiter de la rémunération des ressources informationnelles, ça, ce n'est pas le mandat, ce n'est pas... le projet de loi n° 14 ne vise pas ça. Le projet de loi n° 14 ne vise pas non plus à dresser une espèce de périmètre autour des données pour empêcher l'utilisation des données, alors que ça pourrait être nécessaire de le faire. On a eu ce débat-là avec le député. Je pense que le projet de loi n° 14, son objet est clair, il est de rendre la circulation des données aussi fluide que possible. Donc, il n'est pas... il n'a pas... On n'a pas pour objet de dire : Dorénavant, les ressources externes n'auront plus accès à nos données. Ce n'est pas l'objet du projet de loi n° 14. Puis je pense de toute façon que, même si on en arrivait à internaliser nos ressources, comme je le souhaite, il y aura toujours des situations où on aura recours à une expertise externe. On n'aura pas toutes les expertises dans tous les domaines, mais... Bon, peut-être, mais pour l'instant ce n'est pas le cas. Donc, ça ne vise pas ça.

Et essentiellement, si je reviens à l'amendement, ce n'est pas l'objet du projet de loi n° 14 de décider si on fait des recours à l'externe ou à l'interne. Ce n'est pas l'objet du projet de loi n° 14. Alors, pour ces raisons-là, je ne peux pas soutenir l'amendement de mon collègue.

Le Président (M. Allaire) : M. le député de La Pinière.

M. Barrette : Je suis un petit peu surpris de la ligne que prend le ministre délégué, pour une raison bien simple : ça fait des heures qu'on débat de l'article 3 sous l'angle du fait que des données vont s'en aller à l'extérieur, l'objet du projet de loi, ce n'est pas d'envoyer les données à l'extérieur, pourtant, ça fait des heures qu'on débat sur cet angle-là. Alors, cet argument-là, pour ne pas en débattre ou ne pas de recevoir l'amendement, ça ne tient pas, là. Alors, on s'entend, là, là, ce n'est pas ça, l'objet. On l'a tous dit, on est d'accord mais on débat d'un moyen qui peut poser des problèmes.

Alors, moi, qui est en faveur aujourd'hui, dans le contexte ambiant actuel, à garder ce processus-là, cette procédure-là, ces projets-là à l'intérieur du gouvernement aujourd'hui, bien... on prend un chemin qui pourrait être simplement interne si des gestes appropriés étaient posés, et des gestes qui sont en ligne droite avec les interventions que le ministre a faites dans le passé. Et je constate qu'aujourd'hui, bien, ce n'est pas ça qu'on voit. Ce n'est pas ça qu'on voit. Moi, je vois même dans le projet de loi n° 14 une finalité où on va sous-traiter toute cette gestion-là à l'externe. Et, pour sous-traiter, ça va être des portes ouvertes à l'externe pour plusieurs sous-traitants de divers projets, diverses applications, et ainsi de suite. C'est ça que je vois comme potentiel. Je ne dis pas que c'est la finalité, je dis juste que ça, c'est potentiel. Quand la compagnie XYZ va avoir développé un nouveau logiciel pour bien faire parler des données d'un ministère à l'autre, bien, son logiciel va peut-être être bien, bien compliqué. C'est écrit où, là, que le gouvernement est le propriétaire du code? Nulle part. Absolument nulle part. Alors donc, ça va être un sous-traitant? La compagnie va avoir le pied dans la porte, là, c'est sûr. C'est comme ça que ça marche partout au ministère, dans tous les ministères, quand il y a un lien avec l'externe. Alors là, dans la période actuelle où on voit toutes sortes qu'on voudrait qu'il n'arrive pas, il me semble qu'on prend des risques.

Alors, mettons tout ça ensemble, là. Comme on dit dans le langage courant, commun, tout est dans tout, et, dans ce cas-là, tout est vraiment dans tout. Alors là, pourquoi, encore une fois, ne pas saisir cette occasion-là, d'où l'amendement, de faire ce cheminement-là à l'interne, et d'aller à l'externe, je ne ferme même pas la porte, seulement si on n'est pas capable? Il faudrait regarder qu'on soit capable avant, il faudrait qu'il y ait une réflexion, une analyse, un débat public éventuellement, et dans... hein, quelque chose de transparent. Le ministre nous a dit qu'il était... pour lui, c'était important, la transparence. Bien, parfait, soyons transparents. Pourquoi on ne saisit pas cette occasion-là?

Alors, ou bien on la veut, l'expertise... Et moi, j'irais même jusqu'à dire, puis je l'ai déjà dit, je vais le répéter, le volume d'activités informationnelles généré, vécu à tous les jours par le gouvernement dans son ensemble est tel qu'on peut avoir une PME d'informatique, là. Et, si on a une PME d'informatique qui est tributaire ou subsidiaire du gouvernement, c'est sûr qu'il va falloir les payer.

Alors, des fois, je me pose une question bien simple : Qu'est-ce qui est le plus important, ce qui est sur la ligne du budget du Québec au Trésor ou la juste et appropriée dépense qui est faite par le gouvernement? Greffons à ça la sécurité des données.

Le Président (M. Allaire) : M. le ministre.

M. Caire : Bien, M. le Président, je ne conteste pas la pertinence des interrogations de mon collègue, mais on n'est pas dans le projet de loi n° 14 parce que là on est rendu à se questionner sur l'utilisation de logiciels conçus par des entreprises dont le gouvernement du Québec ne serait pas propriétaire des codes.

Le projet de loi n° 14, je le répète, vise à favoriser justement le développement de projets d'intérêt gouvernemental, et donc on peut penser que c'est des projets qui vont être gérés à l'interne, et de rendre ça plus facile dans un contexte où la loi d'accès à l'information, dans certains volets, rend ça peut-être difficile, voire impossible. C'est ça, le projet de loi n° 14.

Donc là, moi, je veux bien gérer de l'internalisation... pardon, débattre de l'internalisation des ressources, je veux bien débattre d'est-ce qu'on acquiert des logiciels propriétaires ou est-ce qu'on devient propriétaire de notre code. Moi, je peux faire tous ces débats-là, là, mais ce n'est pas le projet de loi n° 14 qui va régler toutes ces questions-là, c'est des politiques du gouvernement.

Et j'ai fait part à mon collègue de gestes que nous avons posés, très clairs. M. le Président, on ne va pas... Et le député de La Pinière est au courant, là. C'est 6 millions, l'entente avec l'Université Laval pour la création de l'Académie de transformation numérique. Mettre en place des formations, envoyer des gens, de notre monde à nous autres, à l'interne, en ressources informationnelles, se faire former pour après ça tout donner à des consultants? Bien non. Si on demande à nos gens d'acquérir l'expertise à l'interne, c'est parce qu'on veut le faire à l'interne. Puis, si on se donne un projet de loi comme le projet de loi n° 14, c'est parce qu'on veut qu'à l'interne ce soit plus facile... en fait, que ce soit réalisable, que ce soit faisable. Puis on en a parlé précédemment, de projets qui sont sur la planche à dessin, sur lesquels on travaille, et pour lesquels on a besoin du projet de loi n° 14 pour être capables d'aller de l'avant dans la réalisation, puis ces projets-là, ils sont faits à l'interne. On ne s'en va pas à l'externe.

Ça fait que j'ai l'impression, là, qu'on se met un... Je vais faire attention à ce que je dis, là, mais, oui, toutes ces questions-là sont très certainement légitimes et pertinentes, mais est-ce que c'est pertinent, dans le contexte du projet de loi n° 14 dont ce n'est pas l'objet? Ce n'est pas l'objet du projet de loi n° 14 de répondre à l'ensemble de ces interrogations-là que mon collègue peut avoir. Et, non, je ne vais pas modifier la loi n° 14 pour réformer la loi d'accès à l'information, encadrer l'usage de ressources externes, régler la rémunération des ressources informationnelles du gouvernement du Québec. Tu sais, là, c'est parce qu'à un moment donné ce n'est plus un projet de loi, là, c'est...

Alors, ce qu'on souhaite, c'est créer un contexte législatif qui va nous permettre de réaliser des projets en ressources informationnelles à l'interne par l'échange fluide de données. C'est ça qu'on veut faire avec le projet de loi n° 14, puis le projet de loi n° 14 n'a pas d'autre... Puis c'est déjà beaucoup, là. C'est déjà beaucoup, mais il n'a pas d'autre prétention que ça. Donc, non, on ne va pas gérer le recours à l'externe à travers le projet de loi n° 14, M. le Président.

Le Président (M. Allaire) : Merci, M. le ministre. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député de La Pinière, allez-y, la parole est à vous.

M. Barrette : La question n'est pas de gérer le retour à l'externe par le projet de loi n° 14, mais je vais prendre l'argument a contrario. Est-ce que le ministère que dirige le ministre délégué a fait une analyse, en date d'aujourd'hui, sur la capacité de faire les projets d'intérêt gouvernemental... gouvernementaux, au pluriel, à l'interne?

Le Président (M. Allaire) : ...pouvez-vous... M. le député? Merci

• (16 h 20) •

M. Barrette : Je vais répéter. Est-ce que le ministère — peut-être pas le ministre lui-même — est-ce que le ministère, en date d'aujourd'hui, a fait des analyses pour déterminer si son ministère ou les ministères qu'il chapeaute ont la capacité d'effectuer, de réaliser les projets éventuellement d'intérêt gouvernementaux?

Le Président (M. Allaire) : M. le ministre.

M. Caire : Pour répondre à la question... Parce qu'il y a deux éléments dans ce que le député me demande. C'est notre capacité de planification puis notre capacité de réalisation. La capacité de réalisation, on a le portrait de la main-d'oeuvre. Si c'est ça, la question de mon collègue, ça me fera plaisir de lui transmettre l'information. La capacité de planification, une des raisons qui expliquent la mise en place du Centre québécois d'excellence numérique, c'était de regrouper cette expertise-là. Puis je voyais mon collègue faire non de la tête mais je veux juste peut-être préciser que, dans le passé, s'il y a quelque chose qui a fait défaut dans les projets à portée gouvernementale, ce n'est pas tant la réalisation que la planification. Et s'il y a quelque chose de névralgique, s'il y a un endroit où on doit concentrer l'expertise et où la marge d'erreur est extrêmement mince, c'est dans les phases de planification. Et c'est une des raisons, pas la seule mais une des raisons qui a motivé la mise en place du Centre québécois d'excellence numérique, c'est d'avoir ce niveau d'expertise là qui nous permettait de s'assurer que les projets en phase de planification étaient à un niveau où on pouvait entrer en phase de réalisation avec d'excellentes chances de succès.

M. Barrette : Je vais reposer ma question, parce que, pour...

Le Président (M. Allaire) : Juste un petit instant, M. le député de La Pinière. Aviez-vous terminé?

M. Caire : Oui, oui.

Le Président (M. Allaire) : Oui, parfait. Excusez-moi. Allez-y.

M. Barrette : Parce que, pour ceux qui nous suivent, là, je pense que, pour le commun des mortels, la planification, c'est parce qu'on sait qu'on a la compétence pour le faire. Alors, je vais la poser plus précisément. Dans l'esprit... Est-ce qu'au ministère que dirige le ministre il y a eu des analyses, des réflexions, surtout analyses qui ont été faites pour déterminer si on avait l'expertise nécessaire pour mener à terme, réaliser les projets d'intérêt gouvernementaux?

Le Président (M. Allaire) : M. le ministre.

M. Caire : Ce qu'on a, c'est le profil de nos compétences. C'est-à-dire qu'on est capables de vous dire combien on a de ressources, dans quel secteur d'expertise on a ces ressources-là, dans quelle quantité on a ces ressources-là.

M. Barrette : Moi, je parle de la qualité et non de la quantité. La quantité, on l'a compris.

M. Caire : Mais les deux, les deux. Les champs d'expertise et le nombre.

M. Barrette : Donc, le ministre est en train de nous dire que nous n'avons pas l'expertise nécessaire pour faire les projets d'intérêt gouvernementaux.

M. Caire : Bien, la question de mon collègue, elle est... Je ne peux pas y répondre pour la raison suivante : C'est que les projets gouvernementaux, c'est quoi? De quels projets parle-t-on? Qu'il me dise un projet spécifique puis, là, je vais pouvoir lui dire : Celui-là, on a la capacité. Mais les projets gouvernementaux, ça ne veut rien dire. C'est ça, le problème. Je ne peux pas répondre à cette question-là parce que ce n'est pas une question en soi. Alors, si on me dit par exemple ce que nous avons à l'interne la capacité de réaliser la planification et la réalisation du projet Accès UniQc, je réponds oui, nous avons cette capacité-là. Alors, s'il a d'autres projets en tête, ça va me faire plaisir de lui répondre, mais là...

M. Barrette : Alors, si je comprends bien, si je décode ce qui est un petit peu tortueux dans la réponse du ministre, c'est qu'il a écrit l'article 3 parce qu'il considère qu'il n'a pas la compétence nécessaire pour se réaliser ce qu'il a en tête comme potentiel de projets gouvernementaux. Quand il me demande que je lui en nomme un, M. le Président, les projets d'intérêt gouvernementaux sont déterminés de façon discrétionnaire par le ministre. Je ne peux pas lui en nommer un, ils sont dans sa tête. Bon. Je comprends, là, que je suis un médecin, là, puis que, comme radiologiste, je peux voir au travers de lui. Et je vois au travers de lui, je ne vois pas ce qu'il a dedans lui. Alors là, c'est ça, la réalité, là, M. le Président, là. Alors, je ne peux pas répondre à sa question. Par contre, lui, lui, il me répond, et il nous dit essentiellement que les équipes de TI actuellement en place n'ont pas la compétence nécessaire pour faire ce qu'il pense qui va exister comme projet d'intérêt gouvernemental. C'est étonnant.

M. Caire : Bien, M. le Président, l'erreur, l'énorme erreur que mon collègue commet, c'est de présumer que les plans de transformation numérique des ministères et organismes sont complétés, que nous avons le portrait global de tout ça, alors que c'est un processus qui est en cours.

Je vais expliquer le processus, puis je pense que ça va répondre à sa question. Donc, nous, on a déposé une stratégie... Puis j'avais déjà fait ce débat-là, et je vais refaire cette explication-là. Donc on a déposé une stratégie, parce qu'évidemment ça prend ça pour avoir une planification de transformation numérique des ministères et organismes qui est en cohérence. Donc, ça, c'est la stratégie déposée. Les ministères et organismes vont définir quels sont les projets de transformation numérique auxquels ils doivent procéder, dans l'objectif évidemment d'améliorer et de rendre numériques les services, et ta, ta, ta, et ta, ta, ta. Donc, ça, moi, je n'ai pas... ça, au moment où on se parle, c'est en phase de... puis il va comprendre que, quand on est arrivés, bien, on a pris la situation là où elle était. Donc, il y a cette planification-là qui est à faire. Suite à cette... Et c'est pour ça que je lui dis : Ça, c'est très important, cette phase de planification là, M. le Président. Très important. Et déjà le CQEN est à pied d'oeuvre pour s'assurer que la planification se fasse de façon extrêmement rigoureuse. Et est-ce qu'on a l'expertise pour faire ça? La réponse à cette question-là, c'est oui. Bon, ça, c'est réglé.

Maintenant, sur la phase de réalisation, non, le projet de loi n° 14 n'est pas un aveu que nous ne pouvons pas internaliser la réalisation des plans, au contraire, au contraire, parce que nous disons effectivement qu'il faut s'assurer que les ministères et organismes, dans le cadre d'un projet de réalisation en ressources informationnelles, puissent se communiquer des informations. C'est ça, le projet de loi n° 14.

Donc, là, par quels mécanismes on peut en arriver à dire : Ah! bien, ça, c'est une volonté d'externaliser? Ce processus-là, il appartient au député de La Pinière, ce n'est pas notre processus, ce n'est pas notre vision, ce n'est pas notre objectif. Notre objectif, par le projet de loi n° 14, c'est de favoriser la réalisation de ces projets-là. Est-ce que dans le cadre de la réalisation de ces projets-là, il y aura des recours à l'externe? C'est possible mais, encore là, encore faudrait-il qu'on parle d'un projet précis pour que je puisse apporter une réponse précise. Et, comme, dans la question, on ne parle pas de projet précis, bien, tout ce que je peux donner, c'est une réponse générale. Donc, nous allons développer ces expertises-là à travers l'Académie de transformation numérique, donc nous allons internaliser au maximum notre capacité de réaliser ces plans-là. Et, après ça, est-ce qu'il y aura nécessité d'aller à l'externe? C'est possible et, si c'est le cas, bien, on ira à l'externe, comme ça s'est fait dans le passé.

Mais, tu sais, à moins, comme je dis, que le député ait un projet bien précis en tête, difficile pour moi de lui dire est-ce qu'on a ce champ d'expertise là. Encore faudrait-il que je sache de quel champ d'expertise il parle, parce qu'en transformation numérique, là, il va être d'accord avec moi, ce n'est pas une science universelle, là, ce sont des champs d'expertise précis, que ce soit dans la conception, dans l'analyse, dans l'architecture, dans la programmation, dans la connectivité, dans la cybersécurité, de quelle technologie on parle, on développe selon quels principes, on travaille avec quelle base de données. Il y a plusieurs facteurs qui rentrent en ligne de compte, donc plusieurs expertises à développer. Il y a déjà des expertises qu'on a, au gouvernement, il y a des expertises pour lesquelles on va améliorer la situation, il y a des expertises qu'on doit développer, on va le faire mais on est là-dedans, on est dans ce chantier-là. Mais le projet de loi n° 14, encore une fois, son objectif, c'est de permettre la mobilité de la donnée dans un contexte sécuritaire.

• (16 h 30) •

Le Président (M. Allaire) : M. le député de La Pinière.

M. Barrette : Bien, écoutez, c'est une réponse qui est très intéressante, qui est générale, comme dit le ministre, je pense que c'est le mot qui a été utilisé, mais sa généralité est assez précise. Et je vais le reprendre presque mot à mot, là.

Quand... Ce n'est pas le mot qu'il a utilisé, exactement, là, parce que je ne m'en souviens pas exactement, mais quand, en réponse à ma question, à savoir s'il y a l'expertise au gouvernement pour réaliser les projets, la réponse du ministre a été essentiellement oui pour la conceptualisation de ce qu'on va faire, là, construire le projet, mettre les balises, dessiner ce qu'il va y avoir mais la réalisation, non, bien ça, c'est très intéressant, parce que ce que le ministre vient de dire... heureusement parce que le dirigeant principal de l'information serait bien malheureux si la réponse n'était pas ça parce qu'il aurait été obligé d'admettre, par la voix de son ministre, que les gens qui dirigent n'ont pas la compétence voulue, un peu gênant, mais je remercie le ministre de nous dire qu'il a la compétence mais qu'il n'a pas la quantité pour la réalisation.

Le concept de ce qui va être fait par le projet de loi n° 14, la complexité, elle est là. Dessiner le programme et la réalisation, c'est le déploiement. La réalisation, là, pour laquelle on n'a pas assez de staff, là, de personnel, c'est les techniciens qui sont dans le réseau. C'est ça, la réalité. Et, si c'est ça, la réalité, c'est-à-dire qu'on a la capacité et la compétence conceptuelle pour définir ce que va être le déploiement du projet pour lequel on n'a pas assez de monde, ça veut donc dire que, si on va à l'externe, c'est pour amener à l'interne des bras pour déployer, et que pour ce qui est de la conceptualisation, et donc les tests, et donc l'accès aux données — ah! ah! ah! — ça peut se faire à l'interne, ce qui est l'objet de...

M. le ministre, vous venez de me dire que vous n'avez pas besoin, en aucune circonstance, d'envoyer des données à l'externe parce que les bras pour le déploiement, là, d'un poste à l'autre, d'un serveur à l'autre, là, vous venez de me dire que c'est là que vous avez des problèmes de bras. Parfait. Vous n'avez pas de problème de cerveau, parfait. Bien, amendons l'article 3, faisons les choses à l'interne, et il n'y aura pas de migration ou de circulation des données à l'externe. Ça, là, c'est exactement ce que vous venez de me dire dans d'autres mots.

Le Président (M. Allaire) : M. le ministre.

M. Caire : Non, j'ai dit assez clairement qu'il y avait une possibilité d'avoir un recours à l'externe dans le cadre de projets de développement... de réalisation, c'est-à-dire, de ressources informationnelles. Je me souviens même d'avoir dit que je le souhaitais mais je doutais qu'un jour on soit capables de s'émanciper à 100 % de toute aide externe. J'ai dit ça.

Alors, j'imagine qu'on comprend bien ce qu'on veut comprendre, là, mais ce que je dis, c'est qu'il y a une volonté d'internaliser le plus possible. C'est vrai. Bien sûr que c'est vrai. Bien sûr que c'est ce qu'on souhaite. Mais de là à dire que ça va être à 100 %, ça, j'en doute, d'une part. D'autre part, je continue à dire que l'objet du projet de loi n° 14, ce n'est pas de gérer le recours à l'interne et à l'externe, ça, ça se fait dans une gestion de projet en fonction de la nécessité. Et, dans ce sens-là, l'article 3 fait très bien le travail tel qu'il est.

Le Président (M. Allaire) : M. le député de La Pinière.

M. Barrette : M. le Président, on ne débat pas de l'objet du projet de loi, on débat du moyen, des moyens. Et, je le répète, à la question : Est-ce qu'on a l'expertise?, le ministre a été affirmatif pour dire qu'on avait l'expertise pour les faire, ces projets-là, mais qu'on avait des problèmes de réalisation.

Si, demain matin, là, on a à mettre en place une application sur tous les postes de tel ou tel ministère, et que c'est une application nouvelle et un peu particulière qui demande des ajustements, il y a des techniciens, là, dans la réalisation de ce projet-là qui vont se promener de poste en poste. Ce ne sont pas les gens qui vont écrire les lignes de code, la conceptualisation et le développement dudit produit.

Alors, vous nous avez dit que vous avez l'expertise pour faire ça, et les ajustements en réalisation, le déploiement, bien là, il manque des bras. Donc, conséquemment, on a la possibilité de tout garder le névralgique à l'interne, à moins qu'on choisisse d'aller sciemment, par l'article 3, à l'externe, ce que nous contestons actuellement.

Je n'entends pas ce que je veux bien comprendre, j'entends clairement ce qui est dit mais je le traduis dans des mots clairs pour que tout le monde puisse décoder la contorsion qui est exprimée par le ministre. Puis je le dis bien amicalement parce que je comprends bien sa position. Je comprends sa position. Mais il y a un malaise, c'est normal.

Maintenant, c'est là qu'on est et c'est ça, notre job, là, de faire le tour de ça. Alors, cet amendement-là, là, même que je devrais le sous-amender ou ma collègue devrait le sous-amender pour qu'il soit encore plus incisif, d'où ma question, puis je n'ai pas eu de réponse à ma question. Ah oui! Je l'ai eu, la réponse. Est-ce qu'on a l'expertise? La réponse, c'est oui. Ça a été clair, puis je le dis. Heureusement parce que, là, le dirigeant principal de l'information n'a pas besoin de se retourner vers ses joueurs puis leur dire : Bien, écoutez, j'ai été obligé de dire en commission parlementaire que vous n'étiez pas bons ou pas assez bons. On l'a l'expertise, on l'a. Parfait. Alors, si on l'a, bien, déployons puis ça va se passer dans le périmètre gouvernemental, puis, quand on déploiera, on fera venir une armée d'installateurs. Je caricature. Alors, c'est quoi, le problème avec mon amendement, là?

Le Président (M. Allaire) : M. le ministre.

M. Caire : Bien, il est de deux ordres, et je le répète. D'une part, ce n'est pas l'objet du projet de loi n° 14 de gérer le recours à l'interne, à l'externe. Encore une fois, on ne raisonnera pas dans l'absolu, de dire :Nous avons toutes les expertises à l'interne et nous aurons toujours toutes les expertises à l'interne nécessaires à la réalisation de nos projets en ressources informationnelles. Donc, ça, c'est le premier problème.

Le deuxième problème, comme je l'ai dit, c'est toute la bureaucratie, la complexité de la mise en application. Qu'est-ce qu'un projet qui est impossible à faire à l'interne, selon quels critères, qui les définit, qui détermine ça, quels sont les arbitrages? Donc, ça, c'est le deuxième problème.

Et donc, M. le Président, je continue à dire que ça, ce n'est pas l'objet du projet de loi n° 14 de gérer le recours à l'interne, à l'externe. Je pense qu'il y a une volonté gouvernementale qui est clairement exprimée. Ceci étant, j'ai aussi dit qu'une émancipation totale et complète de tout recours à l'externe m'apparaissait très difficile. Alors, voilà. Je ne peux pas être plus clair que ça, M. le Président, là.

Le Président (M. Allaire) : Merci, M. le ministre. 55 secondes, M. le député de La Pinière.

M. Barrette : Alors, M. le Président, j'aimerais qu'on puisse faire une pause parce qu'à la lumière des échanges qu'on vient d'avoir, ça m'amène à rédiger un sous-amendement qui n'était pas prévu. Alors, j'aimerais faire une pause pour qu'on puisse le concevoir.

Le Président (M. Allaire) : Compte tenu du long bloc, en plus, d'aujourd'hui, je pense que ça serait opportun de prendre une pause de cinq à 10 minutes. Profitons de l'occasion. Parfait? Merci.

(Suspension de la séance à 16 h 37)

(Reprise à 16 h 54)

Le Président (M. Allaire) : Alors, nous allons être prêts à reprendre les travaux. Donc, il y a un sous-amendement qui a été déposé par la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne qui nous sera expliqué par le député de La Pinière. Donc, M. le député de La Pinière, je vous laisse la parole.

M. Barrette : Bon, bien, je vais l'expliquer.

Le Président (M. Allaire) : Ou la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne si elle veut l'expliquer.

M. Barrette : Non, non, ça va, ça va.

Le Président (M. Allaire) : Ça va?

M. Barrette : Alors donc, je fais la lecture du sous-amendement, M. le Président :

L'amendement proposé au premier alinéa de l'article 3 du projet de loi est modifié :

1° par l'ajout, à la suite du mot «Que», des mots «la phase de planification de»;

2° par le remplacement des mots «doit être impossible à réaliser à l'intérieur du périmètre gouvernemental» par «soit effectué à l'intérieur du périmètre gouvernemental afin de s'assurer qu'aucune donnée personnelle ne quitte ledit périmètre».

Alors, cet amendement, M. le Président, est la rédaction, sous une forme législative, du commentaire que le ministre délégué a fait en réponse à ma question. Alors, si nous avons l'expertise au Québec, dans notre personnel informationnel, pour concevoir et développer des applications, donc la planification, et que notre problème en est un de réalisation, et donc de ressources et de déploiement, à toutes fins utiles, qui ne mettent jamais en cause, par définition, le déploiement... pas le déploiement, mais la conceptualisation et le développement de l'application, phase à laquelle on doit avoir accès aux bases de données, bien, c'est tout à fait raisonnable de mettre en amendements, en sous-amendements la réponse que le ministre nous a faite à l'égard de la question que je lui ai posée.

Le Président (M. Allaire) : M. le ministre.

M. Caire : Écoutez, M. le Président, je pense qu'on tourne en rond. Moi, je veux et je vais collaborer avec mes collègues dans l'optique d'améliorer le projet de loi. Ça, ça va. Mais le projet de loi, il a une intention, il a une portée et mes collègues peuvent y voir toutes sortes d'opportunités, de répondre à toutes sortes de questions sur toutes sortes de sujets, mais le projet de loi n° 14, son objectif, il est clair. Sa finalité, elle est claire. Et, dans cette perspective-là, pour répondre à la question que m'a posée précédemment la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne, si les collègues veulent le bonifier, moi, je vais être à l'écoute. Si les collègues veulent se servir du projet de loi n° 14 pour faire à peu près tous les débats, bien, ça, je n'embarquerai pas là-dedans.

Alors, je le dis et je le répète, le projet de loi n° 14 n'a pas pour objet de gérer le recours à l'interne et à l'externe, ce n'est pas son objet. Ce n'est pas ce pour quoi il a été déposé, ce n'est pas ce pour quoi j'espère qu'il sera adopté. Alors, on peut jouer sur les concepts, la planification, nous avons l'expertise, nous n'avons pas l'expertise, nous aurons peut-être l'expertise. Ce n'est pas l'objet du projet de loi n° 14, de gérer le recours à l'interne et à l'externe. Ce n'est pas son objet et nous ne le modifierons pas pour que ça le devienne.

Le Président (M. Allaire) : M. le député de La Pinière.

M. Barrette : Bien, M. le Président, je vais vous avouer une chose, là, ça me fait de la peine que le ministre soupire en commençant son intervention à la suite du dépôt de mon sous-amendement. C'est parce que j'ai l'impression que ça l'impatiente. L'objectif n'est pas d'impatienter le ministre, ce n'est pas ça, l'objectif est d'améliorer le projet de loi, le projet de loi... et on connaît sa finalité, et la finalité clairement exprimée et appuyée par, certainement, l'opposition officielle. Là, je ne veux pas mettre des paroles dans la bouche de mes collègues mais je pense qu'ils se sont exprimés en faveur eux autres aussi du projet de loi, alors, le projet de loi, qui a une finalité, bien, comme toute finalité, il y a un chemin pour s'y rendre. Et le ministre a, dans différents articles, établi des critères, des paramètres qui dessinent le chemin pour se rendre à la finalité qu'il exprime encore aujourd'hui, et, encore une fois, avec laquelle on est d'accord. Alors, le débat qu'on a donc, ipso facto, ce n'est pas sur la finalité comme telle, on est d'accord, mais bien sur le chemin pour s'y rendre.

Et les articles qui sont dans le projet de loi, là, il n'y en a pas une tonne d'articles, là, il y en a 12, et les derniers articles, surtout les trois derniers, là, ils sont des articles de portée purement administrative et routinière pour tous les projets de loi. Il en reste neuf. Puis le 3, et peut-être... On a eu des débats sur 1 et 2, là, bon, c'est correct, on a clarifié des affaires puis c'est clos. Maintenant, l'article 3 est le premier où il n'y a potentiellement pas des litiges mais des interrogations que le ministre lui-même a qualifiées de légitimes, lui-même, là.

Alors, encore une fois, là, on ne propose pas puis on n'insinue pas qu'il y a des intentions cachées, et ainsi de suite. Il n'y a pas ça. Ce n'est pas ça du tout, du tout, du tout. Et on ne sort pas de la portée du projet de loi, puisque le projet de loi, on s'entend sur sa portée mais on ne s'entend pas nécessairement, manifestement, sur les moyens pour y arriver ou le triptyque législatif pour réaliser, appliquer ce projet de loi là. C'est tout.

• (17 heures) •

Alors, on est passé, là, on est passé de situations aussi, je dirais, rocambolesques les unes que les autres, là, une après l'autre, là. Quand le ministre nous dit : Tout ça, c'est prévu dans la loi, et qu'on dit, à plusieurs reprises : Le législateur ne parle pas pour ne rien dire, bien, si on met l'article 3, c'est pour dire une chose autour de laquelle on tourne. Ce n'est pas nous qui tournons autour du pot, là, c'est le ministre.

L'article 3, ça a été admis par le ministre aujourd'hui, est écrit, pas exclusivement mais, entre autres, pour permettre le transfert, l'accès de données personnelles à des entreprises, des organismes, des personnes à l'extérieur du périmètre gouvernemental. C'est simple comme ça.

Alors, si les lois étaient claires et le permettaient avant, pourquoi mettre ça là? Ce n'est pas nécessaire si c'est déjà prévu. Et je vais citer Me Bacon, hein, à juste titre : Il faut qu'on soit cohérent. Bien, la cohérence n'exige pas et ne fait pas la promotion non plus de la répétition. Quand on met un nouvel article, c'est parce qu'il y a une nouvelle affaire, et la seule nouvelle affaire qu'il y a dans l'article 3 par rapport au corpus législatif actuel, c'est la transmission de données.

Oui, oui, oui, la transmission de données est ponctuelle et elle est juste dans le projet de loi n° 14. Oui, oui, c'est correct. Mais, et comme on l'a dit, augmenter les possibilités et les joueurs sur terrain augmente, multiplie les risques. Et, comme je l'ai dit à plusieurs reprises ce matin et cet après-midi, ça, là, ce n'est pas un seul projet avec un seul intervenant extragouvernemental, c'est un, puis un autre, puis un autre, puis un autre. C'est ça, la réalité. Donc, on multiplie les risques.

Et, à l'époque d'aujourd'hui, bien, je pense que tout le monde... On va avoir... Il y a un mandat d'initiative sur une commission parlementaire qui va commencer ses travaux le 28, la semaine prochaine. Ça va être un méchant enjeu, ça là, là. Alors, on s'inscrit là-dedans, tout simplement. On est dans l'air du temps. Je l'ai dit moi-même : Peut-être que je n'aurais pas accroché là-dessus, moi, il y a 10 ans, mais là j'accroche là-dessus parce qu'on est 10 ans plus tard, tiens, c'est la réalité.

Puis là, dans les incohérences, à mon sens, c'est qu'on refuse tous les arguments, tous les amendements qui veulent amener des remèdes, des solutions à des problèmes d'aujourd'hui auxquels les lois actuelles, qui sont désuètes... de l'admission égale et aussi du ministre, sont désuètes... Qu'on ne vienne pas me faire dire que je veux effacer le passé, pas du tout. Moi, je veux juste bonifier le passé pour que ce soit contemporain, en termes de remèdes à des problèmes éventuels qui sont vécus aujourd'hui dans la société occidentale, et qui inclut, à cet égard-là, le Québec.

Bon, j'aborde cet après-midi le problème sous l'angle de l'expertise des professionnels du gouvernement. Je n'en fais pas un débat syndical, j'en fais un débat de faits. Alors, si je fais un débat, moi, sur l'importance d'avoir le contrôle le plus grand possible sur la donnée des citoyennes et des citoyens, bien, je pose la question qui est tout à fait légitime : Est-ce que, dans la phase où on doit avoir accès à la donnée pour développer une application, qui est la phase de planification, est-ce qu'on a l'expertise pour le faire? Ma question a été d'une grande précision et celle du ministre aussi. La réponse, c'est oui. Et, dans la foulée de la réponse, il y avait un «mais», mais, quand on arrive à la réalisation, c'est quoi, la réalisation? C'est essentiellement le déploiement de l'application. Bien, le déploiement de l'application, bon, il manque de bras, puis on le comprend.

Ça veut dire qu'au Québec, là, dans le monde des TI, le dirigeant principal de l'information peut... pourrait élaborer là-dessus, on a différentes catégories de professionnels en TI. On en a qui sont plus techniciens, il y en a qui sont plus programmeurs, concepteurs, et ainsi de suite. Alors, si on nous dit, dans la même phrase, qu'on a l'expertise, mais qu'il nous manque de bras, donc on parle de deux sous-groupes du même grand ensemble qui est celui des TI, bien, c'est parfait. Alors, qu'on aille... qu'on ait recours dans le futur à des gens de l'externe pour le déploiement, c'est correct. Moi, je n'ai pas de problème avec ça, aucun, parce qu'eux autres ne touchent pas à la donnée, puis on ne leur transférera pas des données. Mais, si on a l'expertise pour le faire à l'interne, bien, voilà, faisons-le, fermons cette porte-là et assurons le public de la plus grande sécurité maximale. Le risque zéro n'existe pas, mais le risque maximal, lui, existe, et l'expérience a démontré que, quand ça restait dans le périmètre gouvernemental, le risque était minimal, donc la sécurité maximale.

Je vois mal comment cet amendement-là ou le précédent... ce sous-amendement-là et le précédent peuvent à ce point-là indisposer le ministre. Ce n'est pas une attaque personnelle, ce n'est pas une attaque sur son travail. Je le répète, on est en faveur du projet de loi. Mais ça ne veut pas dire que le projet de loi, il est parfait, puis qu'on ne peut pas apporter quelques modulations qui vont faire un certain nombre de choses, on ne peut pas dire ça. Non. Si c'est ça, là, d'aucuns pourraient dire que c'est de la mauvaise foi ou de l'orgueil politique, là, mon projet de loi était parfait, puis il n'y aura pas de modifications. On n'est pas là. Moi, je n'ai pas de réponses, là, j'ai... nous avons, de notre côté, écrit un amendement qui traduit, en termes législatifs, la réponse que le ministre délégué m'a faite à la question que j'ai posée, à savoir : Est-ce qu'on a l'expertise pour le faire? La réponse a été : Oui, mais il manque des bras pour le déployer. Et là, aujourd'hui, là, là, en réponse, à notre retour après la pause, là, je reçois des soupirs puis je me fais dire qu'on tourne en rond. Bien, si le ministre n'aime pas mon sous-amendement, le sous-amendement qu'on a écrit, bien, peut-être qu'il ne devait pas nous répondre ce qu'il nous a répondu. Est-ce qu'il veut revenir sur sa réponse?

Le Président (M. Allaire) : M. le ministre.

M. Caire : Non.

M. Barrette : Non. Alors donc, la réalité, c'est que, là, il n'y a pas de commentaire. Alors là, je vois qu'on entre dans la phase du «non». Là, on est à la phase du «non». On a tous vécu ça, là. Alors...

M. Caire : Mais tu veux quoi, comme autre réponse? Là, je suis trop précis?

M. Barrette : Alors, est-ce que le ministre peut élaborer son «non»?

M. Caire : Bien non, mais la question, M. le Président, était : Est-ce que je veux revenir sur ma réponse? La réponse, c'est non. Et élaborer de quelle façon? Non, j'ai dit ce que j'ai dit.

M. Barrette : Alors, M. le Président, avec l'intervention que je viens de faire, qui était, il me semble, assez claire, est-ce que le ministre peut nous expliquer maintenant, avec moult détails, à sa convenance, pourquoi il rejette, va rejeter... je sens dans son langage non verbal qu'il va rejeter l'amendement. On ne comprend pas. L'amendement redit ce qu'il a dit. M. le Président, je suis tout ouïe, avec mes deux oreilles.

Le Président (M. Allaire) : M. le ministre.

M. Caire : Bien, je pense que le député de La Pinière comprend au contraire parfaitement pourquoi nous allons rejeter l'amendement. Je l'ai dit, je le répète, le projet de loi n° 14 n'a pas pour objet de gérer le recours à la sous-traitance. En fait, je ne connais pas, à ce jour... Et je vais utiliser un peu sa méthode. Peut-il, lui, me donner un projet de loi qui a été déposé par son gouvernement qui gérait la sous-traitance, qui définissait l'impossibilité d'avoir recours à la sous-traitance, un seul où on a dit : Le gouvernement du Québec va rendre impossible le recours à la sous-traitance? Moi, j'ai évalué pas mal de pièces législatives quand j'étais dans l'opposition, puis je ne me souviens pas d'avoir entendu cette notion-là, de quelque nature que ce soit. Pourquoi? Le projet de loi n° 14 n'a pas pour objet de gérer le recours à la sous-traitance.

J'ai répondu, et je vais continuer à le faire de bonne foi, aux questions du député sur l'état actuel des choses. Mais ça ne veut pas dire que ça devient un prétexte pour que le projet de loi n° 14 nous amène... Parce qu'il a aussi fait référence à la rémunération des ressources informationnelles au sein du gouvernement du Québec. Alors, j'attends l'amendement où il va nous dire qu'on doit fixer le taux horaire de nos ressources informationnelles à tel et tel montants, hein? Il en a parlé, de ça. Donc, j'imagine qu'on va avoir un amendement qui dit qu'on doit payer nos ressources informationnelles à hauteur de...

Il a abordé toutes sortes de sujets, M. le Président, le député de La Pinière, et pour lesquels j'ai donné les réponses qui m'apparaissaient appropriées. Mais tout ça nous amène, très souvent en tout cas, complètement en dehors du cadre du projet de loi n° 14. Nous ne sommes pas dans l'objet du projet de loi n° 14. Ce n'est pas l'objet du projet de loi n° 14 de gérer les ressources externes, ce n'est pas ce pour quoi nous avons déposé le projet de loi n° 14. Le député de La Pinière le sait très bien, il connaît la finalité, il connaît la portée du projet de loi, et nous allons rester à l'intérieur de cette finalité et de cette portée-là, et, si, à l'intérieur de cette finalité et de cette portée-là, mes collègues ont des suggestions à faire pour améliorer le projet de loi, je suis tout ouïe, mais, si mes collègues veulent gérer tous les problèmes de la terre en se servant du projet de loi n° 14, bien, non, c'est sûr que, là, j'aurai peut-être moins d'écoute.

• (17 h 10) •

Le Président (M. Allaire) : M. le député de La Pinière, la parole est à vous.

M. Barrette : Bien, M. le Président, c'est encore une fois étonnant, c'est très étonnant. Alors, M. le Président, si le projet de loi du ministre, le projet de loi n° 14, a un objet et que cet objet-là n'est pas la gestion des ressources à l'externe, c'est correct, mais son projet de loi a quand même prévu d'avoir l'article 3 qui, lui, traite de la gestion des ressources à l'externe en les permettant. Bien, oui.

Une voix : ...

M. Barrette : Mais non. M. le Président, le ministre dit : C'est inexact. Il a admis à multiples reprises que l'article 3 permettait le transfert, la migration, la transmission d'informations personnelles à l'extérieur du périmètre gouvernemental. Il l'a dit lui-même, puis là ce que j'entends à l'instant, c'est que ce n'est peut-être pas vrai, ce qu'il nous a dit. Puis je ne veux pas entrer dans les questions de règlement, là, ce n'est pas mon genre, là, mais il y a une contradiction, là, là. Il l'a dit puis, là, il ne le dit pas. Maintenant, l'objet d'un ministre, là... l'objet d'un projet de loi, là, c'est une chose, et les articles subséquents sont les moyens, et, à la fin, c'est des dates de mise en application. On parle de moyens, je parle des moyens, et il nous répond par l'objet. Là, c'est cacophonique, là, en quelque part. Ce n'est pas la même affaire. Je dis oui, il dit non puis, là, parce qu'il dit non, il a raison. Bien non.

Alors, l'idée, là, ici, c'est de... Ce n'est pas moi qui ai amené ce sujet-là. Le sujet de ladite sous-traitance, moi, je ne l'appelle pas comme ça, ce sujet-là, là, il est amené par l'article 3. Le ministre l'a dit lui-même. Et le sous-amendement qui est déposé actuellement reprend, je le répète, dans des mots légalistes, la réponse du ministre. Je ne vois pas où est le problème.

Si le ministre dit que l'objet, ce n'est pas de permettre à des données de sortir du gouvernement, c'est vrai que ce n'est pas l'objet, mais il écrit à cause... dans la loi, ça va être possible, et il dit que c'était déjà prévu avant. Mais non, il fait un article spécifique pour le permettre. Bien, nous autres, de notre côté, on regarde ça, puis on dit : Oui, mais là c'est parce que ça peut poser des problèmes, là. Puis on essaie de contourner ce problème... pas le contourner, de solutionner ce problème-là, et les solutions, qui sont celles qui sont exprimées par le ministre lui-même, ne reçoivent pas son aval. Alors, le ministre dit une chose, ne l'avalise pas et revient sur l'objet qui n'est pas celui de l'article 3.

Bien là, moi, je veux bien recevoir tous les reproches du ministre, là, mais ce n'est pas moi qui tourne en rond. Moi, je suis directement sur mon point, je suis directement sur mon argument, et on me répond par autre chose. Bon, ce n'est pas de l'évitement fiscal, c'est de l'évitement parlementaire. Alors, on ne peut pas me reprocher, M. le Président, de revenir à chaque fois sur le même point.

Je n'ai pas entendu une seule réponse factuelle sur le sous-amendement, factuelle. Qu'est-ce qui n'est pas correct là-dedans, dans le cadre de la loi, du projet de loi? Qu'est-ce qui vient nuire ici à l'adoption de ce projet de loi et sa mise en application? Qu'est-ce qui vient nuire? C'est qu'est-ce qui fait qu'on ne peut pas adopter ça? Y a-tu une seule réponse?

Puis, là-dessus, je vais faire une remarque, M. le Président, je pense que le ministre, là, quand il était député dans l'opposition, là, il voulait être ministre, il voulait être au pouvoir, bien, c'est à lui à ne pas répondre aux questions, là, ce n'est pas à moi, là. Là, nous autres, notre job, c'est des questions, puis on le fait. Alors, quand il me répond par des questions, bien non, ce n'est pas comme ça que ça marche, là. Vous l'avez, le pouvoir. Félicitations! Bien, répondez maintenant aux questions, là, parce qu'actuellement, là, je n'ai aucune réponse sur ce pourquoi cet amendement-là nuirait à la mise en application du projet de loi, une seule réponse, une tentative d'argument.

Le Président (M. Allaire) : Merci, M. le député. M. le ministre.

M. Caire : J'ai tout répondu à ça, M. le Président, j'ai tout répondu à ça.

M. Barrette : Alors, M. le Président, puisqu'il a répondu à ça, je vais lui demander de répéter, dans tout le choix de mots, là, qu'il a dit, il peut choisir le bout de phrase qui répond nominativement à ça.

Le Président (M. Allaire) : M. le ministre.

M. Caire : M. le Président, j'ai tout répondu à ça. J'ai donné les arguments, pourquoi ce n'était pas pertinent, en quoi ça complexifiait la chose, comment ça réduisait la portée de l'article 3, j'ai tout expliqué ça.

M. Barrette : Non, non, M. le Président, les seules réponses qu'on a eues, c'est : Ce n'est pas dans l'objet, ce n'est pas dans l'objet, ce n'est pas dans l'objet, ça n'a aucun rapport avec l'objet.

M. Caire : Non, non, j'ai élaboré plus que ça, mais...

M. Barrette : Je laisse au ministre la possibilité de s'autociter, une phrase qui va expliquer pourquoi, ça, ça va nuire à son projet de loi.

M. Caire : J'ai expliqué ça, M. le Président, avec beaucoup de commentaires, j'ai élaboré, j'ai tout, tout, tout expliqué ça, je pense que j'ai été assez clair là-dessus.

M. Barrette : Combien de temps qu'il me reste, Mme la secrétaire?

Le Président (M. Allaire) : Cinq minutes.

M. Barrette : Bien, M. le Président, je ne suis pas d'accord avec le ministre.

Une voix : Ça arrive.

M. Barrette : Sur la question de la clarté, là, s'il y a quelque chose qui n'a pas été clair, c'est bien ça, c'est bien ça. Je vais le reprendre, le ministre l'a dit, il l'a dit, la réponse a été relayée, là, à l'oreille du ministre, là, par le dirigeant principal de l'information : On a l'expertise. On a l'expertise, mais il nous manque des bras pour le déploiement. C'est ça qui est écrit dans ce sous-amendement-là. Alors, si le ministre trouve que ça, c'est problématique, c'est donc qu'il est confortable avec l'envoi de données personnelles à l'extérieur du périmètre gouvernemental. Si c'est ça, bien, qu'il le dise : Moi, ministre délégué à la transformation institutionnelle... informationnelle, pardon, informationnelle est en faveur de la migration des données personnelles, gouvernementales à l'extérieur. Est-ce que le ministre souhaite que je l'écrive et qu'on le lise ensemble pour des fins d'archives?

Le Président (M. Allaire) : M. le ministre, la question vous est posée.

M. Caire : Ça va, pas de commentaire, M. le Président.

Le Président (M. Allaire) : M. le député de La Pinière.

M. Barrette : Alors, je vais poser une question : Est-ce que le ministre... Est-ce que ma conclusion est appropriée : Le ministre délégué, le 20 août 2019, favorise la migration de données, aussi petite migration soit-elle, vers des entreprises non gouvernementales?

M. Caire : J'ai répondu à ça, M. le Président, à de nombreuses reprises aujourd'hui.

M. Barrette : Bien, la réponse, c'est oui ou c'est non?

M. Caire : J'ai répondu à ça à de nombreuses reprises aujourd'hui, M. le Président.

Le Président (M. Allaire) : La parole est à vous, M. le député.

M. Barrette : M. le Président, je ne me souviens pas d'avoir posé cette question-là de cette manière-là. Est-ce que, de cette manière-là, la réponse, c'est oui ou c'est non?

Le Président (M. Allaire) : M. le ministre.

M. Caire : C'est beau.

Le Président (M. Allaire) : M. le député de La Pinière, je pense que le ministre souhaite que vous reformuliez les choses autrement ou pour essayer d'être...

M. Barrette : M. le Président, est-ce que j'ai fait une erreur de règlement?

Le Président (M. Allaire) : Non, ce n'est pas ce que j'ai dit.

M. Barrette : Non, alors vous allez me permettre de continuer, hein?

Le Président (M. Allaire) : Vous pouvez continuer, il vous reste effectivement 3 min 46 s.

M. Barrette : Et j'ai respecté les règles, et il n'y a aucune règle qui m'interdit de redemander au ministre si, aujourd'hui, il peut prendre une position formelle à propos de son confort à propos de la migration de données personnelles gouvernementales vers l'entreprise privée.

Le Président (M. Allaire) : M. le ministre.

M. Caire : M. le Président, on n'est pas du tout dans le projet de loi n° 14. J'ai répondu à ça, malgré le fait qu'on digressait, j'ai répondu à ça. Ce que je constate, c'est que je pourrai répondre encore, et encore, et encore, ce ne sera jamais à la satisfaction du député de La Pinière. Donc, je vais le laisser finir son commentaire, je vais l'écouter avec beaucoup d'attention. Et, si tant est que l'opposition a des amendements à déposer dans le cadre et la portée du projet de loi n° 14, qui visent à le bonifier, ça va me faire plaisir de collaborer avec mes collègues, mais on n'est pas dans cette... je ne sens pas qu'on est dans cette dynamique-là actuellement, M. le Président.

Le Président (M. Allaire) : M. le député de La Pinière.

• (17 h 20) •

M. Barrette : Alors, si je comprends bien, M. le Président, là, pour cette partie de notre étude détaillée, aujourd'hui, le ministre délégué à la transformation informationnelle du gouvernement du Québec a concédé, admis et affirmé que, oui, l'article 3 permettait la communication, donc le transfert, la migration, l'envoi de données personnelles de nature gouvernementale à des entreprises, des personnes, des organismes qui sont à l'extérieur du périmètre gouvernemental. Je dis aujourd'hui que le ministre a dit oui à ça, et, quand je lui demande s'il est confortable avec ça, il ne répond pas. Force est de constater qu'il y a là une contradiction, ne serait-ce que dans les prises de position.

La posture du ministre est contradictoire. Il admet qu'il a écrit un texte qui, par son article 3, permet... Et il n'a pas d'hésitation. Non seulement il n'a pas d'hésitation, mais tout amendement allant à l'encontre de cette possibilité-là est rejeté. Le ministre est donc d'accord avec cette situation-là, l'article 3, qui permet... Il a admis que des données personnelles puissent s'en aller à l'entreprise en dehors du périmètre gouvernemental, mais il refuse de nous dire s'il est confortable avec ce concept-là. Il y a donc une contradiction de posture.

Est-ce que le ministre aurait l'obligeance de clarifier, une fois pour toutes, sa posture? M. le Président, est que j'ai fait une erreur de règlement? Je ne pense pas, hein? Merci.

Le Président (M. Allaire) : M. le ministre.

M. Caire : J'invite le député à lire le verbatim de nos échanges, on s'est épanchés là-dessus abondamment.

M. Barrette : «Épancher», M. le Président, est un concept un peu liquide pour moi, j'aime mieux des réponses solides. D'où, encore une fois, M. le Président... Le ministre peut-il clarifier sa posture? Est-il, oui ou non, confortable avec la transmission de données personnelles à l'intérieur du périmètre gouvernemental à des personnes, organismes et/ou entreprises à l'extérieur du périmètre gouvernemental?

M. Caire : J'ai répondu à ça, M. le Président.

Le Président (M. Allaire) : M. le député de La Pinière.

M. Barrette : Il me reste...

Le Président (M. Allaire) : Il vous reste 29 secondes.

M. Barrette : Alors donc, au moment où on se parle, le ministre sera l'auteur d'un projet de loi dont l'article 3 le permet, mais il refuse de prendre position à propos de la permission que lui-même établit dans un texte de loi. C'est quand même impressionnant, M. le Président.

Le Président (M. Allaire) : M. le ministre, est-ce que vous souhaitez répondre?

M. Caire : Non, non, c'est bien.

Le Président (M. Allaire) : M. le député de La Pinière, malheureusement...

M. Barrette : Alors, M. le Président, je ne peux que terminer, dans les quelques secondes qu'il me reste, pour inviter la population à bien réécouter ce petit segment là, qui en dit long sur les positions de principe du gouvernement au pouvoir.

Le Président (M. Allaire) : Est-ce qu'il y a d'autres interventions concernant le sous-amendement?

M. Barrette : Je vais demander un vote nominal, monsieur, s'il n'y a pas d'autres interventions.

Le Président (M. Allaire) : Donc, effectivement, s'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux voix. Donc, est-ce que le sous-amendement à l'article 3 est adopté? Non. Et nous allons procéder par vote nominal, naturellement. C'était dans la séquence. Merci.

La Secrétaire : Oui. Alors, Mme Anglade (Saint-Henri—Sainte-Anne)?

Mme Anglade : Pour.

La Secrétaire : M. Barrette (La Pinière)?

M. Barrette : Pour.

La Secrétaire : M. Caire (La Peltrie)?

M. Caire : Contre.

La Secrétaire : M. Tardif (Rivière-du-Loup—Témiscouata)?

M. Tardif : Contre.

La Secrétaire : M. Reid (Beauharnois)?

M. Reid : Contre.

La Secrétaire : M. Tremblay (Dubuc)?

M. Tremblay : Contre.

La Secrétaire : Mme Tardif (Laviolette—Saint-Maurice)?

Mme Tardif : Contre.

La Secrétaire : M. Bélanger (Orford)?

M. Bélanger : Contre.

La Secrétaire : Mme Foster (Charlevoix—Côte-de-Beaupré)?

Mme Foster : Contre.

La Secrétaire : M. Ouellet (René-Lévesque)?

M. Ouellet : Abstention.

La Secrétaire : Et M. Allaire (Maskinongé)?

Le Président (M. Allaire) : Abstention.

La Secrétaire : C'est rejeté.

Le Président (M. Allaire) : Donc, le sous-amendement est rejeté. Nous revenons donc à l'amendement. Est-ce que le député de La Pinière souhaite intervenir concernant l'amendement?

M. Barrette : Je pense... Ah! sur l'amendement. Non, je n'ai... Il me reste combien de temps?

Le Président (M. Allaire) : Pour l'amendement? Il vous reste 40 secondes pour l'amendement.

M. Caire : On peut dire beaucoup de choses en 40 secondes.

M. Barrette : Ah! M. le Président, en 40 secondes, c'est vrai que je peux dire beaucoup de choses. Mais je vais quand même limiter mes interventions, M. le Président, parce que je pense qu'on vient de faire un exercice qui est certainement éclairant. À l'aube du mandat d'initiative qui va peut-être nous mener à une commission parlementaire sur la sécurité des données personnelles qui sont gérées par l'État, je pense que là on a fait un débat qui était très utile, qui trouvera sans aucun doute écho à cette commission parlementaire là. Je n'ai pas fait mon intervention en fonction de ça, mais force est de constater qu'il y avait une opportunité. Comme j'ai dit tantôt, tout est dans tout, et c'est le cas, dans le cas présent, et j'espère que le ministre aura la chance de participer à ces travaux-là, qui commenceront la semaine prochaine.

Le Président (M. Allaire) : Merci, M. le député. Donc, est-ce qu'il y a d'autres interventions concernant l'amendement à l'article 3? Pas d'autres commentaires? Nous allons donc procéder à la mise aux voix par vote nominal. Mme la secrétaire.

La Secrétaire : Oui. M. Barrette (La Pinière)?

M. Barrette : Pour.

La Secrétaire : Mme Anglade (Saint-Henri—Sainte-Anne)?

Mme Anglade : Pour.

La Secrétaire : M. Caire (La Peltrie)?

M. Caire : Contre.

La Secrétaire : M. Tardif (Rivière-du-Loup—Témiscouata)?

M. Tardif : Excusez-moi, là, je n'ai pas compris la question? Alors, si on me conseille pour de l'autre bord, je vais être contre ici. Merci pour vos...

La Secrétaire : M. Reid (Beauharnois)?

M. Reid : Contre.

La Secrétaire : M. Tremblay (Dubuc)?

M. Tremblay : Contre.

La Secrétaire : Mme Tardif (Laviolette—Saint-Maurice)?

Mme Tardif : Contre.

La Secrétaire : M. Bélanger (Orford)?

M. Bélanger : Contre.

La Secrétaire : Mme Foster (Charlevoix—Côte-de-Beaupré)?

Mme Foster : Contre.

La Secrétaire : M. Ouellet (René-Lévesque)?

M. Ouellet : Pour.

La Secrétaire : M. Allaire (Maskinongé)?

Le Président (M. Allaire) : Abstention.

La Secrétaire : C'est rejeté. L'amendement est rejeté.

Le Président (M. Allaire) : L'amendement est donc rejeté. Nous revenons donc à l'article 3. Est-ce qu'il y a des interventions concernant l'article 3? La députée de Saint-Henri—Sainte-Anne, à vous la parole.

Mme Anglade : Oui, j'ai une intervention, M. le Président. J'aimerais proposer un amendement. Vous voulez que je le lise?

Le Président (M. Allaire) : Oui, s'il vous plaît. Et après on va suspendre.

Mme Anglade : Alors, modifier l'article 3 du projet de loi par l'ajout, suite au mot «nécessaire», de «, c'est-à-dire légitime, réelle, urgente et importante».

Le Président (M. Allaire) : Parfait. Je vous remercie. On va suspendre quelques instants. Merci.

(Suspension de la séance à 17 h 26)

(Reprise à 17 h 59)

Le Président (M. Allaire) : Alors, on serait prêts à reprendre les travaux. Avant la suspension des travaux, la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne a déposé un amendement. Donc, je vous invite à la relire peut-être, et... en fait, on n'avait pas fait la lecture, donc à la lire et à donner vos explications, s'il vous plaît.

M. Barrette : Le.

Le Président (M. Allaire) : Le?

M. Barrette : Le lire.

Mme Anglade : Le lire, l'amendement... c'est «le», amendement.

Le Président (M. Allaire) : Le... Ah! pardon. Le lire.

Mme Anglade : C'est l'amendement, donc, masculin.

Le Président (M. Allaire) : Merci pour la précision.

Mme Anglade : Ça fait plaisir au député de La Pinière, je vous assure.

M. Barrette : Oui, oui, oui.

• (18 heures) •

Mme Anglade : Écoutez, ce qu'on a déposé comme amendement, c'est... vient clarifier... L'objectif depuis le départ pour nous, c'est de clarifier la notion de nécessité. Plus tôt aujourd'hui, il y a eu beaucoup d'échanges sur la question de la nécessité, et Me Bacon est venue nous expliquer que, dans les termes qui sont utilisés, il y avait une définition, déjà, qui prévalait dans le corpus légal, où on disait que «nécessaire», ça voulait dire «légitime, réelle, urgente et importante». Donc, ce qu'on vient faire ici, c'est d'ajouter ces éléments-là, parce qu'à la définition de ce qui nous avait été dit, à la lumière de ce qui nous avait été dit, on a senti le besoin de venir préciser et de venir bonifier le projet de loi pour encadrer davantage la notion de nécessité. Parce qu'être nécessaire ce n'est pas si clair que ça, et puis on a pu le voir dans les échanges, puis ce n'est pas si clair que ça.

Nous avons, par la suite, après le dépôt du projet d'amendement, eu des discussions. Je pense que, du côté du gouvernement, ils vont vouloir faire un amendement, notamment sur le terme «c'est-à-dire», et peut-être apporter d'autres spécifications. Alors, je suis évidemment en faveur de cet amendement-là, mais je suis également prête à entendre ce que mes collègues ont à dire du côté du gouvernement.

Le Président (M. Allaire) : Merci, Mme la députée. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Caire : Bien, effectivement, M. le Président, pour faire écho à ce que la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne vient de dire, comme vous le savez, la jurisprudence évolue, et tout ça est vivant, et donc à la lumière, je dirais, d'une analyse peut-être un peu plus exhaustive, nous allons proposer un sous-amendement, parce qu'il est important de préciser la notion de «nécessaire» pour l'opposition officielle, je le conçois. Mais, de notre côté, il est important aussi de s'assurer de la stabilité du droit, et donc du respect de la jurisprudence. Donc, pour concilier ces deux objectifs-là, celui qui est poursuivi par ma collègue et celui que nous avons du côté des légistes du gouvernement, nous allons proposer un sous-amendement, M. le Président, que je vous lirai...

Le Président (M. Allaire) : ...suspendre les travaux quelques instants?

M. Caire : Bien, je ne sais pas, est-ce qu'on est...

Le Président (M. Allaire) : Est-ce que vous êtes prêt?

M. Caire : Vous êtes satisfaite de ça, Me Bacon?

Mme Bacon (Nathalie) : Bien, pas vraiment de l'écriture, mais oui.

Le Président (M. Allaire) : Allez-y, M. le ministre.

M. Caire : Mais c'est mieux que ce que moi, j'aurais fait, même en prenant mon temps. Donc, M. le Président, l'article 3, nous remplaçons l'amendement proposé par le suivant : ajouter, à la fin du premier alinéa de l'article 3, ce qui suit : «, dans la poursuite d'une finalité légitime et importante», ce qui respecte les dernières décisions des tribunaux en matière de décision qui concerne la définition de la nécessité, et donc qui assurerait une stabilité du droit et un respect du corpus législatif.

Le Président (M. Allaire) : Ce n'est pas que je... Juste le temps de faire des copies à l'ensemble des députés alentour de cette commission...

Donc, je suspends les travaux quelques instants. Merci.

(Suspension de la séance à 18 h 3)

(Reprise à 18 h 7)

Le Président (M. Allaire) : Donc, nous allons reprendre les travaux. Après quelques discussions, je comprends ici que la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne souhaite suspendre l'étude... pas l'étude, mais l'amendement qui a été proposé. Est-ce exact?

Une voix : L'étude de l'amendement.

Le Président (M. Allaire) : L'étude de l'amendement.

Mme Anglade : Alors, avec le consentement de mes collègues, on va suspendre pour bien saisir la proposition d'amendement du côté du gouvernement par rapport à l'amendement qu'on vient de proposer.

Le Président (M. Allaire) : Parfait. Alors, est-ce qu'il y a consentement? Parfait. Donc, M. le ministre, la parole est à vous.

M. Caire : Alors, je vais donc déposer un amendement, qui, je l'espère, trouvera grâce aux yeux de mes collègues de l'opposition, qui se lirait ainsi : L'article 3 du projet de loi est modifié par l'ajout, à la fin du premier alinéa, de ce qui suit :

«, dans la poursuite d'une finalité légitime importante.»

Donc, M. le Président, comme je l'ai expliqué, les récentes décisions qui ont été prises par des tribunaux sur la question de la définition de la nécessité ont circonscrit la définition à ces deux éléments là, jugeant que la notion d'urgence était par trop contraignante, donc pour assurer, comme le disait Me Bacon, la stabilité du droit et le respect de la jurisprudence qui a été établie en cette matière. C'est la raison pour laquelle on fait cette proposition-là à nos collègues des oppositions.

Le Président (M. Allaire) : Est-ce qu'il y a des interventions du côté de l'opposition officielle? M. le député de La Pinière, allez-y.

M. Barrette : Quelques-unes, M. le Président, si ma collègue me permet d'y aller.

Mme Anglade : Avec grand plaisir.

M. Barrette : Bon, écoutez, M. le Président, vous me voyez très officiellement stupéfait de ce revirement de situation là. Alors, si je comprends bien le ministre et... Si j'ai bien compris, je vais reprendre ces mots, là. Ma collègue a présenté un amendement qu'on a accepté de suspendre parce que, pour des raisons techniques, on ne pouvait pas faire les deux en même temps, pour qu'il soit, à toutes fins utiles, là, remplacé par le vôtre, parce que l'argumentaire que vous mettez de l'avant, là, il y a une jurisprudence qui nous dit qu'il faudrait que ce soit écrit comme ça. Écrit comme ça, ça veut dire que les mots de la loi d'accès à l'information, qui sont au nombre de quatre, par la jurisprudence, tombent à deux. C'est ça, là. Si on passe de quatre mots à deux mots, c'est parce qu'il y a eu un problème à utiliser les quatre mots, et que la jurisprudence fait en sorte que, quand on parle de nécessité, ce sont les deux mots pertinents, opérationnels, légalement utilisables. Je ne me trompe pas? Ma question : Je ne me trompe pas, point d'interrogation?

M. Caire : Oui, mais votre micro était encore ouvert, et pas le mien.

Le Président (M. Allaire) : Oui. En fait...

M. Caire : Donc, j'attendais que le président me donne...

M. Barrette : Bien là, ils sont ouverts en même temps. Si vous avez remarqué, là, ils sont ouverts en même temps, là.

Le Président (M. Allaire) : Et avant de vous la parole, M. le ministre, permettez-moi une précision, là. En fait, juste pour que ce soit clair pour les gens qui nous écoutent, là, le sous-amendement lu par M. le ministre avant la pause, naturellement, n'a plus lieu d'être, là. Donc, c'était juste pour clarifier cet élément-là. Donc, la parole est à vous maintenant, M. le ministre.

• (18 h 10) •

M. Caire : Et donc pour répondre à mon collègue de La Pinière, avec le consentement, je laisserais Me Bacon expliquer les dédales juridiques à travers lesquels nous devons passer pour en arriver à cette conclusion-là.

Mme Bacon (Nathalie) : Merci. Oui, bonjour, M. le Président. Tout à l'heure, nous avons parlé qu'il y avait un critère dans la loi sur l'accès puis dans les autres lois qui concernent la protection des renseignements personnels; je pense, notamment, que vous connaissez le Dossier de santé Québec, qui a une loi particulière. Et dans ces lois-là qui traitent de la matière de l'accès à l'information, il est question du critère de transmission, de cueillette ou de communication, d'utilisation nécessaire, donc de critères de nécessité. Et ce qu'on a voulu faire tout à l'heure, et ce que vous avez demandé, là, c'était de décrire c'était quoi, la nécessité, et on vous a expliqué que, sur le site Internet de la CAI, il y avait une page web expressément consacrée à ce qu'on appelait le principe fondamental du critère de nécessité. Et là, la CAI expliquait, dans son site Internet que c'étaient quatre objets : une fin légitime, importante, urgente et réelle, et c'est volontairement, là, qu'on vous a donné cette information-là, tout en précisant qu'on n'avait pas d'expert en accès à l'information, mais, pendant les débats, nous avons reçu un petit courriel, dont nous avons pris connaissance, et on s'est fait mettre... donner l'information à l'effet que... Je vais vous lire la doctrine, on nous a transmis la doctrine. Vous avez déjà, M. Barrette... Dr Barrette, brandi des livres de doctrine. Tout récemment, l'approche très stricte de la Commission d'accès à l'information a été nuancée pour se résumer à des objectifs légitimes, une finalité légitime et importante. Alors, c'est seulement ça, l'explication.

M. Barrette : Mais ça me stupéfait encore plus. On a passé une journée aujourd'hui sur l'importance d'avoir des garde-fous. Ma collègue a déposé un amendement qui ne faisait, ne faisait... Et je m'attendais à ce que vous me disiez que le législateur ne parle pas pour rien dire, donc, qu'il n'y avait pas lieu de reproduire, dans cette loi, un texte qui était dans une autre loi, en l'occurrence la Loi d'accès à l'information, à laquelle vous-même, vous, législateurs, qui avez réfléchi sur ce projet de loi là, avez choisi de vous référer dans tous les débats.

Vous nous avez dit, à plusieurs reprises... «Nécessaire», c'est clair, ce que ça veut dire. Ça se dit en français et, en plus, la Loi d'accès à l'information a des critères qui sont clairs, et il y a une jurisprudence. Ici, là, le débat qu'on a, là, il est à la fin d'un long exercice de réflexion et de rédaction de votre côté, et là, littéralement à minuit et une, parce qu'on a passé notre heure normale, là, on arrive avec une nouvelle jurisprudence qui apparaît par courriel. Je ne conteste pas la validité de la chose, je dis que vous avez argumenté contre tous nos amendements sur la base d'une jurisprudence et d'un texte de loi que ma collègue a proposé d'enchâsser dans la loi actuelle, ce qui était une duplication des lois. Et aujourd'hui, vous nous dites : Ce qu'on vous a dit, là, bien, ce n'est pas exactement vrai, parce qu'aujourd'hui, il y a des mots qui ne sont plus nécessaires, comme «réel» et «urgent». Ça, ce n'est plus nécessaire. Et il reste quoi? Il reste «légitime» et «importante», ce qui m'autoriserait, dans la logique des choses, à refaire tous les arguments que j'ai faits, parce que n'importe quel sous-traitant va dire que c'est légitime et important pour lui, et vous avez refusé tous nos amendements venant donner un peu plus de poids. Votre argumentaire, là, il vient de s'écrouler juridiquement, parce que depuis 11 heures ce matin, vous invoquez, vous vous appuyez sur des textes qu'on a voulu très véniellement, là, ramener dans le texte de loi. Il est déjà là, et là, on apprend, à la dernière seconde, que finalement, ces quatre critères-là ne sont juridiquement et jurisprudentiellement plus bons. Est-ce que le monde qui nous écoute aujourd'hui, là, ça les met en confiance, d'après vous, M. le ministre?

Le Président (M. Allaire) : M. le ministre.

M. Caire : Bien, j'espère. Alors, M. le Président, je vais reprendre l'argumentaire de mon collègue. Il a commencé en disant : Je m'attendais à ce que vous disiez : On n'a pas besoin de répéter ce qui a été dit. Effectivement, on aurait pu faire ça. On aurait pu dire : Écoutez, dans l'état des lieux, le critère de nécessité a été défini, la CAI a, sur son site, des critères auxquels on a fait référence, les tribunaux administratifs amènent des jugements, rendent des conclusions. Ça, ça s'appelle la jurisprudence. Elle existe. Et donc on aurait pu, effectivement, on aurait pu, et c'est ce qu'on faisait initialement parce que dans... Puis Me Bacon a donné des exemples à mon collègue, où le critère de nécessité se réfère à la jurisprudence sans être défini dans la loi. Donc, on aurait pu reproduire ça.

Maintenant, effectivement, toute la journée, mes collègues sont revenus sur l'importance du droit nouveau, de la nouveauté d'ajouter peut-être des éléments dans la loi directement et non pas simplement poursuivre ce qu'on faisait dans les autres législations du Québec, à savoir s'en remettre à la jurisprudence. Mes collègues voulaient absolument qu'on inclue des critères dans la loi. Parfait, faisons ça. Si ça peut satisfaire l'opposition et les rassurer, faisons ça.

Maintenant, en écrivant ça dans un texte de loi, là, on a le choix. On peut dire : Bon, bien, on va prendre le texte de la CAI et on va le reproduire dans la loi. On peut aussi s'en remettre au jugement les plus récents des tribunaux et inscrire ça dans la loi. Et, pour assurer la stabilité du droit, comme je le dis, et la cohérence en fonction de la jurisprudence, qui est en évolution, nous avons choisi la deuxième option, nous proposons la deuxième option. Libre à mon collègue de juger que ce n'est pas suffisant pour lui. C'est correct, mais nous, on pense que c'est un bon compromis entre ce que la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne a proposé...

Puis là, comprenons-nous bien, M. le Président, là, comprenons-nous bien. Là, on parle du mot «réel» et «urgent». Là, on est... puisque là, on a fait le débat de la nécessité, là, on fait le débat d'est-ce qu'il faut mettre «réel» et «urgent» ou si le principe qui est proposé par l'opposition, c'est de venir directement dans la loi, ce qui ne se fait dans aucune autre loi, aucune autre, mais de venir directement dans la loi, de définir, ou d'amorcer, ou je ne sais pas comment le dire, là, mais de mettre des critères reliés à la nécessité qu'on retrouve das le corpus législatif, avec, de notre côté — puis là, je ne sais pas si c'est partagé du côté de l'opposition ou non — avec, de notre côté, une préoccupation de respecter les jugements des tribunaux, d'assurer la stabilité du droit, parce que, je le redis, initialement, nous aurions pu, et le député de La Pinière a tellement raison, nous aurions pu dire : Non, la coutume juridique fait en sorte que cette notion-là n'a pas besoin d'être définie dans la loi. Elle ne l'est dans aucune autre et il n'y a pas de raison pour qu'on le fasse dans cette loi-là, sinon d'avoir un geste d'ouverture envers l'opposition, de dire : Parfait, vous voulez ajouter des critères à la notion de nécessité, ce qui ne se fait pas ailleurs, ce qu'on va faire là, parfait, faisons-le. Mais là, on va le faire, à notre avis à nous, dans le respect de la jurisprudence, et dans le respect de l'évolution de la jurisprudence, et avec l'objectif d'assurer la stabilité du droit.

Donc, là, si mon collègue voit des choses inquiétantes là-dedans, libre à lui, mais à la question est-ce que les gens devraient se sentir rassurés, oui, je pense que oui. Je pense que de vouloir assurer la stabilité du droit, je pense que de vouloir être cohérent dans l'ensemble du corpus législatif du Québec, je pense que, oui, c'est une bonne idée.

Le Président (M. Allaire) : Merci, M. le ministre. M. le député de La Pinière.

• (18 h 20) •

M. Barrette : M. le Président, on va mettre les choses en ordre, ici, là. Que le ministre et son équipe veuillent avoir une cohérence dans le droit, on est tous d'accord. Que le ministre nous dise qu'il faut faire ça pour cette raison-là, on est tous d'accord. Que le ministre nous dise que le droit est en évolution, on est tous d'accord. Le problème, pour ce qui est de la confiance, c'est que l'évolution du droit ne se fait pas dans les minutes pendant lesquelles on débat. Au moment où on se parle, l'évolution du droit, elle est faite et elle rendue où on est rendus aujourd'hui. L'évolution du droit vous a donné, vous, votre équipe, les données nécessaires pour écrire un projet de loi et un argumentaire qui était à date. Moi, je n'ai pas entendu... ou vous pouvez m'indiquer quel jugement est sorti dans la dernière demi-heure pour nous dire qu'il faut faire ça comme ça.

La réalité, là, la réalité, c'est que vous avez essentiellement erré, erré, dans le sens de l'errance. Nous avons passé aujourd'hui des heures à débattre d'un certain nombre de sujets et d'amendements sur lesquels nos arguments ont été réfutés sur la base de ce qui a été nommé comme étant la jurisprudence et les lois.

Ce n'est pas moi qui ai dit que c'est bien correct, la nécessité, c'est écrit dans la loi d'accès à l'information, c'est vous autres. Ce n'est pas moi qui ai dit que les quatre éléments qui étaient dans la loi actuelle étaient suffisants. Ce n'est pas moi qui ai dit que c'était suffisant, en ignorant le fait qu'une jurisprudence avait enlevé deux des critères. Ce n'est pas moi.

Alors, quand on fait un discours aussi affirmatif, de la part du ministre, basé sur des arguments légaux et jurisprudentiels, aussi fermement, et qui se défont à minuit moins une, bien, ce n'est pas ça qui va générer la confiance du public, d'autant plus que nous avons dit que les mots, dans la Commission d'accès à l'information... dans la loi, pardon, étaient, pour nous, insuffisants, il fallait en rajouter. La jurisprudence montre que non seulement ces mots-là ne sont pas suffisants, il y en a trop qui posent problème.

Vous vous êtes appuyé sur quatre mots, en disant à répétition que c'était bien assez. Ces quatre mots-là étaient les quatre piliers de votre château fort de la protection des données. Vous nous dites aujourd'hui que la cour a conclu, de façon jurisprudentielle, que ces quatre mots-là étaient, dans leur entièreté, ensemble, un problème, il fallait en enlever deux. Et nous, on a voulu en mettre d'autres de plus, pas enlever ces mots-là, en mettre de plus.

D'ailleurs, le ministre m'a reproché à plusieurs reprises de vouloir faire table rase sur la loi de l'accès à l'information. Ça s'adonne que les cours... ou la cour a fait table rase sur 50 % des critères qui étaient utilisés. Est-ce que le ministre, à ce moment-là, va critiquer la cour ou la jurisprudence?

Alors, quand on construit, là, un discours, pendant une journée entière, basé sur des précédents, des lois, des textes, une jurisprudence, et que ça vient tomber comme ça à exactement 15 minutes de la fin de notre séance, bien, c'est bien plate, là, mais ce n'est pas comme ça qu'on va avoir confiance.

Et j'exprime, encore une fois, ma déception et mon inquiétude, d'autant plus que les deux mots qu'il reste, qui sont les tests... parce qu'en droit, c'est comme ça que ça marche, c'est un test. On doit... C'est comme le complément d'objet direct, ça s'accorde quand on pose la question : À qui, à quoi? C'est en avant, ça s'accorde.

Là, ici, c'est un test. Est-ce que «légitime et important»... N'importe quel sous-traitant va dire : C'est légitime et important. On a voulu, nous, déposer des amendements pour donner des leviers au ministre pour qu'il puisse protéger les données personnelles des citoyennes et des citoyens dans le cadre du projet de loi n° 14, qui en est un de projets expérimentaux, pilotes, dont la finalité... on l'appuie, mais qui, malheureusement, permet d'envoyer des données à l'extérieur, pour lesquelles on a souhaité avoir des garde-fous additionnels. L'argument contre a été : Les nerfs, Lionel, tout le monde! il y a une loi, tout est là, il y a quatre mots, qu'est-ce que vous voulez de plus? On apprend que là il y a eu errance de votre part, parce qu'en réalité il y a des vérifications que vous n'avez pas faites qui auraient dû être faites avant d'arriver ici. Le projet de loi n'a pas été écrit au mois de juin. Et là on apprend quoi? On apprend que, les quatre mots, ça ne tient plus, il en reste deux, les deux n'ont pas le poids, à mon avis, qui est recherché, et on refuse nos amendements. Comment voulez-vous que la population, aujourd'hui, ait vraiment confiance ?

Et j'ajouterai que, quand j'ai demandé, à de multiples reprises, il y a maintenant environ 45 minutes, au ministre, s'il était confortable, s'il souhaitait... ou moins confortable qu'on envoie des données à l'extérieur, il n'a pas répondu même si l'article 3 le fait. Et aujourd'hui on voit que l'argumentaire qui a été utilisé, avec beaucoup d'insistance, tombe. Tombe par qui? Par la cour, et ça, il me semble que vous auriez dû le savoir. Alors, moi, là, je ne lance pas... je ne veux pas vous mettre mal à l'aise personne, là, ce n'est pas ça, mais c'est malaisant, puis c'est malaisant, puis on n'a pas le choix de le dire.

Alors là, aujourd'hui, là, l'amendement qu'on a déposé, je comprends que, s'il y a une jurisprudence, on ne peut plus le déposer. On l'a suspendu pour qu'on puisse avoir cet échange-là. On l'a. On ne peut plus le déposer, c'est sûr. Sans aucun doute que, dans quelques minutes, on aura à le retirer. Maintenant, je considère que ce qui est là, bon, c'est le strict minimum jurisprudentiel. Mais ceux et celles qui nous écoutent, là, aujourd'hui, là, maintenant, 20 août 2019, à 18 h 26, sont inquiets. Ils ne sont pas rassurés. Ils ne peuvent pas être rassurés, pas avec les échanges qu'on a eus aujourd'hui.

Alors, le ministre nous a dit, M. le Président, qu'on a tourné en rond du côté des oppositions aujourd'hui. C'est ça qu'il nous a dit : On tourne en rond. Bien là, c'est parce que le rond, c'est plus un siphon dans lequel il y a bien des choses qui sont... qui s'en vont au débarras, là, puis il me semble que ce n'est pas comme ça que ça doit se passer. Alors, je me réserve, M. le Président, la possibilité de pouvoir revenir là-dessus, de pouvoir revenir là-dessus. Là, on aura à débattre de ça. Mais je pense qu'on ne peut pas fermer l'article 3 immédiatement compte tenu de ce dénouement-là.

J'annonce très officiellement qu'à moins qu'on ait d'autres amendements demain, parce qu'à ma connaissance on n'a pas de surprises pour les travaux ce soir, il n'y en a pas, bien, c'est sûr qu'on va suspendre l'étude... on va demander la suspension de l'article 3 pour y revenir au cas où on ait des surprises à 4, à 5, à 6, à 7, à 8. Là, on a une surprise, puis je vais terminer là-dessus, là. Il me reste à peu près juste deux minutes, M. le Président, je vous remercie, là, Me Bacon, je vous remercie avoir été transparente. Vous avez été d'une grande honnêteté. Vous avez agi pour le bienfait... le bien-être des citoyens. Vous avez été impeccable. Je vous remercie de nous avoir éclairés sur cet élément-là.

Par contre, M. le ministre, là, vous savez, vous avez refusé — vous, vous avez refusé — un certain nombre d'amendements parce que vous vouliez... vous considériez que le ministre ne devait pas avoir telle ou telle responsabilité additionnelle. Bien, il me semble que, là, vous avez la responsabilité d'arriver ici, en commission parlementaire, en ayant fait le tour du sujet. Cette surprise-là, elle est là, puis c'est correct de l'avoir sortie. Mais, dans le débat qu'on a eu, vous comprendrez les raisons pour lesquelles je fais les interventions que je fais.

À ce stade-ci, M. le Président, je n'ai pas d'autres commentaires à faire. Je vais laisser mon collègue conclure.

Le Président (M. Allaire) : M. le ministre, il vous reste une minute.

M. Caire : Oui, mais je compléterai demain. Mon collègue fait plusieurs erreurs de forme et de fond. Ça donne un bon spectacle, j'en conviens. Mais, sur le plan législatif, il y a des graves lacunes. J'aurai l'occasion d'y répondre. Mais essentiellement je réitère ma confiance à la CAI et effectivement aux tribunaux qui ont apporté des jugements. Toute la journée, j'ai dit que j'avais confiance en ces institutions-là. Je continue à avoir confiance à ces institutions-là. Je continue à penser qu'on doit se référer à leur jugement à eux. Je continue à penser qu'il y a des raisons pour lesquelles la notion de nécessité était présentée sous la forme, donc, pour laquelle elle était présentée dans les autres projets de loi. Puis je comprends que mes collègues, maintenant qu'ils sont dans l'opposition, se sentent l'obligation morale de définir plus amplement, ce qui... volonté qu'ils n'avaient pas à l'époque où ils étaient au gouvernement. Mais je rétière l'ensemble des arguments que j'ai tenus aujourd'hui, et, oui, j'ai rejeté des amendements et je le referais s'ils m'étaient représentés. Mais nous continuerons demain, M. le Président. J'aurai d'autres choses à dire sur l'argumentaire de mon collègue concernant cet amendement-là.

Le Président (M. Allaire) : Merci, M. le ministre. Alors, je vous remercie pour votre belle collaboration, pour cette belle journée.

Compte tenu de l'heure, la commission ajourne ses travaux à demain, mercredi le 21 août, à 9 h 30. Bonne soirée, tout le monde.

(Fin de la séance à 18 h 30)

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