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Version finale

29e législature, 2e session
(23 février 1971 au 24 décembre 1971)

Le mardi 9 mars 1971 - Vol. 11 N° 16

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Conflit relatif à la classification des enseignants


Journal des débats

 

Commission permanente

de la Fonction publique

Sujet: Conflit relatif à la classification des enseignants

Séance du mardi 9 mars 1971

(Seize heures trois minutes)

M. BOSSE (président de la commission permanente de la Fonction publique): A l'ordre, messieurs! Je déclare ouverte la séance de la commission parlementaire de la Fonction publique.

Organismes représentés

M. LE PRESIDENT: Le but de cette réunion d'aujourd'hui, tel que vient de le déclarer le ministre de la Fonction publique à la Chambre, est de vous saisir du conflit existant présentement chez les professeurs. J'inviterai donc immédiatement le ministre de la Fonction publique à nous résumer la situation. Par la suite, j'inviterai les parties en cause à identifier leurs porte-parole ou peut-être serait-il opportun qu'elles le fassent immédiatement. Les parties en cause voudraient-elles identifier leurs porte-parole, que ce soit la partie syndicale ou la partie patronale?

M. SIROIS: Pour la partie patronale, c'est moi qui ferai l'exposé, Denis Sirois.

M. LE PRESIDENT: Denis Sirois, pour la partie patronale. Pour la partie syndicale?

M. CHARBONNEAU: Yvon Charbonneau, de la CEQ.

M. LE PRESIDENT: Yvon Charbonneau, pour la CEQ.

M. SPARKES: Wendell Sparkes, pour la PAPT.

M. LE PRESIDENT: M. Wendell Sparkes, pour la PAPT.

M. DOBIE: Robert Dobie, pour la Provincial Association of Catholic Teachers.

M. LE PRESIDENT: D'autres parties désirent-elles faire des représentations?

M. PARENT: Raymond Parent, au nom de la CSN et de la FTQ.

M. LE PRESIDENT: Vous comprendrez qu'au tout début nous entendrons les parties immédiatement mêlées au conflit et, ultérieurement, les autres parties. Pour le moment, je demande le nom des porte-parole des parties au conflit. J'inviterai donc immédiatement...

UNE VOIX: La Fédération des unions de familles, représentée ici aujourd'hui, a deux délégués qui vont parler. Ils sont à remplir leur carte...

M. LE PRESIDENT: Très bien. Alors, je prendrai aussi les noms. M. Raymond Parent de la CSN et de la FTQ.

M. BOUCHARD: Louis Bouchard, au nom de l'Association des parents catholiques du Québec, section du diocèse de Montréal.

M. LE PRESIDENT: J'ai compris aussi Mme Gertrude Langlois et Mme Marie Junger.

UNE VOIX: Oui.

M. LE PRESIDENT: D'autres personnes ou d'autres organismes entendent-ils faire des représentations Je vous remercie et j'invite le ministre de la Fonction publique à nous fournir un résumé de la situation.

Situation du conflit

M. L'ALLIER: M. le Président, MM. les membres de la commission parlementaire, mesdames, mesdemoiselles, messieurs, nous sommes réunis en commission parlementaire pour prendre connaissance du litige qui oppose actuellement la partie patronale et la partie syndicale dans le domaine de l'enseignement. Il faut comprendre qu'une commission parlementaire n'a ni mandat, ni pouvoir de négociation; ni mandat, ni pouvoir d'arbitrage; ni mandat, ni pouvoir de conciliation. Le but d'une commission parlementaire, c'est d'informer les parlementaires d'une situation précise et, par leur entremise, d'informer la population de cette situation.

Je laisse, évidemment, aux parties en cause le soin de décrire la situation actuelle, tant la partie syndicale que la partie patronale. Je m'en tiendrai, pour ma part, à essayer de situer le contexte de la séance de la commission parlementaire. Le conflit se situe dans le cadre d'une entente signée par la partie patronale et par la partie syndicale, entente qui a été suivie par la signature de conventions collectives.

Quelques-uns des articles de ces conventions prévoyaient le classement des enseignants. On avait même prévu dans les conventions elles-mêmes et dans l'entente, certains brevets qui étaient déjà catégorisés ou classés. Les mécanismes prévus à l'entente pour continuer le classement ont fonctionné et ont donné lieu, semble-t-il, à des insatisfactions de la part des enseignants. De là, la situation que nous avons connue depuis quelques semaines De là, la volonté des parties — malgré que l'entente et les conventions collectives soient en vigueur jusqu'au 30 juin prochain — de discuter de l'application des mécanismes et des décisions prises par le comité provincial de classification.

Malgré le désir des deux parties de discuter et de négocier au sujet de cette question, il n'a pas été possible pour elles d'en arriver à l'entente souhaitée. De là la convocation de cette commission parlementaire. Je souhaite pour ma part que cette commission parlementaire de la Fonction publique — parce qu'il s'agit essentiellement à ce stade-ci d'une question de relations de travail — ne serve pas de prétexte à des débats qui n'ont rien à voir avec le litige ou le problème en cause et de tribune pour des règlements de compte de quelque nature que ce soit. Je souhaite que cette commission parlementaire travaille essentiellement et positivement à identifier le problème, à en voir les causes, à en voir les effets de sorte que les parties puissent — parce que c'est à elles qu'il appartient de le régler — trouver le plus rapidement possible un terrain d'entente et une solution au problème qui se pose, dans l'intérêt des enfants, dans l'intérêt des parents et dans l'intérêt du Québec tout entier.

C'est donc dans cet esprit que nous devrons cet après-midi entendre les parties. Je suggérerais que chacune d'elles fasse un exposé de la situation, tant du côté patronal que du côté syndical, et qu'à la suite de ces exposés les membres de la commission puissent, par des questions, compléter leur information.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. le ministre. Le représentant de Missisquoi.

Point de vue des partis

M. BERTRAND: M. le Président, je n'ai pas beaucoup à ajouter aux propos qui viennent d'être tenus et qui résument assez bien le problème. Quant à moi, il m'intéresse surtout étant donné que le conflit porte, semble-t-il, principalement sur le problème de la classification, problème extrêmement important puisqu'il pose tout le principe de la scolarité qui est un des facteurs importants et qui sert d'abord à déterminer la qualification des martres. Deuxièmement, cette scolarité est également très importante parce qu'elle est un des deux éléments qui servent à établir le traitement de l'enseignant.

A la dernière convention collective, on a prévu un mécanisme. D'abord un comité local, puis un comité provincial. Il semble que ce mécanisme n'ait pas donné satisfaction. J'aimerais que les parties, dans leurs exposés... Elles seront obligées d'admettre, sans aucun doute, que ce problème existe, puisqu'il a fait l'objet, dans la convention collective qui a été signée le 4 novembre 1969, d'un chapitre portant sur ce problème...

J'aimerais que les parties nous suggèrent un meilleur moyen que celui-ci, un moyen plus juste, plus raisonnable de procéder à une telle classification. A ce moment-là, cela nous permettra sans aucun doute, étant donné que c'est un des buts de la commission, celui d'informer les gens; puis cela permettra au gouvernement d'énoncer sa politique en cette matière.

Au sujet de ce problème de la classification, l'établissement de la scolarité, l'Opposition est prête à entendre les parties, à obtenir l'information que les parties pourront nous transmettre, et à les interroger s'il y a lieu, plutôt après que les parties auront eu l'occasion de présenter leur point de vue.

M. LE PRESIDENT: Voici donc le député de Saint-Jacques.

M. CHARRON: M. le Président, avant de commencer les travaux, j'ai deux excuses à présenter. D'abord d'avoir une communication sensiblement plus longue que celle que vient de faire le député de Missisquoi, et d'autre part, d'avoir à employer dans mon exposé le mot "classification" dont la légitimité française est sérieusement remise en question, ce qui fera savoir au ministre de l'Education et aux enseignants présents, l'importance de l'enseignement de la langue française.

M. le Président, depuis le début de ce conflit, le Parti québécois n'a fait connaître qu'une position officielle ou surtout dogmatique en ce domaine. Cet aspect de notre vie collective est trop important pour que nous y arrivions en coup de vent, ou trop changeant pour que nous y maintenions une rigidité inutile.

Ce qui ne veut pas dire qu'il n'y ait pas en cette matière de sérieux principes en cause, et qu'il soit permis de s'en désintéresser. En fait, c'est la gravité même des orientations en cause qui nous a incités à rechercher le plus d'information possible avant de défendre en ce conflit particulier, l'orientation précise de notre programme en cette matière et d'y rechercher une solution.

Cela ne veut pas dire, non plus, que nous ayons été inactifs. Au contraire, nous avons voulu jouer le plus adéquatement possible notre rôle d'opposition en allant chercher l'information quand elle ne venait pas jusqu'à nous. Je me suis moi-même rendu aux quartiers généraux du syndicat de Montréal en grève, à son assemblée générale même, pour ensuite comparer la teneur de son argumentation aux informations que la partie patronale nous a également fournies à travers des conversations fort intéressantes. A l'une comme à l'autre parties nous sommes reconnaissants de leur collaboration et nous espérons qu'elles retrouveront dans nos positions une compensation aux longs moments qu'elles nous ont accordés.

M. le Président, cette accumulation d'informations nous a fait réaliser la complexité du problème, en même temps que sa profondeur. Sa complexité technique aurait pu nous faire préférer l'abstention ou le silence, mais sa profondeur, dépassant de plusieurs coudées la surface d'une convention collective trouée, nous a fait insister en faveur d'un débat publia Chacune des deux parties s'était alors lancée

dans une chasse à l'opinion qu'il valait mieux, selon nous, canaliser avant de la voir mourir dans un étang de propagande. Ce canal que nous avons choisi, c'est la commission que vous présidez actuellement, M. le Président. C'est pourquoi vous nous avez vus insister, depuis l'ouverture de la session, pour que cette séance ait lieu. Nous espérons que cette minivictoire de notre parti servira l'intérêt des Québécois.

Qu'il me soit permis de faire ici une parenthèse importante. En aucun temps, nous n'avons voulu compromettre, empêcher ou retarder la tenue de négociations entre les deux parties. Au contraire, dans les explications que nous avons fournies à la Chambre, nous disions espérer faire de cette commission un baromètre des négociations entre les deux parties. En insistant pour que ces négociations aient lieu de façon parallèle à nos travaux, nous ne créons pas un précédent. En effet, d'autres conflits dans le secteur public — je ne mentionnerai que celui des hôpitaux ou celui de la Régie des alcools du Québec — ont déjà eu lieu pendant que des négociations se poursuivaient en d'autres salles. Nous voulons répéter la même expérience en ce cas et nous croyons désormais que les deux parties ne devraient pas satisfaire leur besoin très légitime de contact avec le public au détriment d'une solution que nous attendons tous.

A ceux qui diront que la tenue de cette commission se trouve à créer des pressions indues sur les négociations, nous opposons le fait que cette commission parallèle aux négociations peut, en fait, les aider énormément en indiquant rapidement aux négociateurs le fond du problème.

Nous invitons donc le gouvernement et en particulier le ministre de la Fonction publique à revenir en ce domaine sur sa décision, comme il l'a d'ailleurs fait à notre demande sur celle visant la convocation de cette commission.

Si le conflit tire en longueur, M. le Président, il faut aussi admettre que, la fièvre s'éteignant, il nous sera possible maintenant de mieux juger ce qui se passe.

La partie syndicale avait au départ une motivation fort valable à la stratégie qu'elle a adoptée. Le caractère draconien de certaines décisions du comité provincial de classification et surtout leur application par certaines commissions scolaires justifiaient, quant à nous, le bris de contrat que d'ailleurs même l'opinion publique, pourtant si sévère d'habitude à l'égard des enseignants, n'a pas su leur reprocher, chacun en conviendra.

Quand la partie patronale accepta de reculer en cette matière, d'aucuns clamèrent que la partie syndicale venait de perdre toute justification à poursuivre l'option entreprise. Nous ne sommes pas de cet avis. Les enseignants signalaient à bon droit que le fait d'abolir des décisions discriminatoires ou de renoncer au remboursement rétroactif n'apportait pas la justice, il effaçait tout simplement une injustice plus criante que les autres.

Qu'il nous soit permis de signaler au syndicat de Montréal en particulier l'appréciation que nous avons eue de le voir se lancer dans une campagne d'information et d'explication de sa stratégie auprès des parents de Montréal et de s'ouvrir volontairement à la contestation de cette même stratégie par ceux-là mêmes qui financent le système scolaire. J'ai d'ailleurs eu l'occasion moi-même d'assister à l'une de ces réunions. J'en suis sorti fort heureux de la qualité de nos professeurs et en même temps, je dois le dire, du don de parole et de l'intelligence de cette majorité qu'on voudrait trop souvent silencieuse.

S'ils avaient raison de dire que les remboursements n'effacent pas le problème de la classification, ils devaient quand même admettre que le problème découvrait désormais son fond et que la stratégie qu'ils avaient adoptée devait elle-même être réévaluée.

C'est, M. le Président, ce à quoi l'alliance et la centrale à laquelle elle appartient se sont honnêtement lancées et je tiens à les féliciter de la trêve normale et nécessaire qu'elles ont accepté de faire.

Sans vouloir m'immiscer dans les affaires syndicales, qu'il me soit permis quand même de signaler, aux dirigeants syndicaux, au nom de mon parti, que la stratégie qu'ils aborderont désormais, advenant un échec toujours possible de cette commission et des négociations en cours, devra être élaborée en fonction du fond du problème qu'ils nous ont eux-mêmes fait découvrir. Si, comme le signalait le président de l'Alliance des professeurs de Montréal à la présidente de la CECM dans une lettre en date du 5 janvier, et je cite Mathias Rioux: "C'est plus que des demi-mesures qui sont nécessaires au-delà des cataplasmes et des remèdes, c'est le coeur même du système scolaire qu'il aurait fallu dénoncer", il est alors entendu pour nous que l'on ne combat pas le coeur d'un système scolaire comme on combat une déclassification discriminatoire.

L'Etat québécois poursuit aussi en cette matière une politique qu'aucun citoyen ne saurait refuser dans ses principes. C'est, je crois bien, la position qu'avait comprise la partie syndicale au moment de la signature de la convention collective. L'Etat est en cette matière à la recherche d'une cohérence qu'il met du temps à trouver, mais qu'il doit rechercher. La cohérence dans la classification des enseignants était et est toujours aux yeux de tout le monde et, je crois bien, aux yeux de la partie syndicale elle-même, une nécessité. Sans vouloir jouer sur les mots ou faire l'autruche, il est entendu qu'une nouvelle classification implique la déclassification pour certains professeurs.

Le débat doit porter sur l'ampleur, les normes et les correctifs obligatoires que doit apporter l'Etat afin que cette déclassification en vue d'une plus grande justice ne soit pas cause

d'injustices multiples, surtout d'un manque de respect inacceptable pour certains droits acquis.

A cet effet, si nous acceptons le principe, à notre avis essentiel, d'une reclassification, nous ne saurions accepter pour la même raison que le gouvernement s'en empare de façon unilatérale en ne laissant aux principaux intéressés qu'un pouvoir consultatif ou un pouvoir de contestation en arbitrage d'une décision aussi importante. C'est à notre avis l'endoit où le gouvernement, à son tour, vient briser le contrat dont il est partie contractante et qui était devenu consacré aux articles 62-03 et suivants de la convention collective qui régit actuellement le monde scolaire. Le gouvernement serait injustifié de reprendre à son compte la classification des enseignants alors que l'actuelle convention consacrait aux enseignants dans un droit désormais acquis, la possibilité de participer à l'élaboration de ces normes.

Ce n'est pas parce que le mécanisme actuel, prévu à la convention, n'a pas fonctionné que nous devons l'abolir; il s'agit de le remplacer. Nous aurons à revenir, au cours des travaux de cette commission, sur le non-fonctionnement du comité provincial de la classification. Nous voyons quant à nous son échec dans les clauses mécaniques inacceptables, dans le pouvoir discrétionnaire du président et surtout dans l'absence de normes préalablement fixées, autres que le règlement numéro 5 et le règlement numéro 4 du ministère de l'Education. Si nous donnons raison au gouvernement quant au principe d'une classification, nous ne pouvons l'appuyer dans sa démarche actuelle à moins de le voir accepter devant cette commission de rechercher un autre mécanisme paritaire et d'élaborer immédiatement les normes qu'il entend négocier avec la partie syndicale. Nous aurons d'ailleurs, au cours des travaux de cette commission, d'autres suggestions à faire aux deux parties quant aux amendements possibles que nous pouvons voir à la convention collective et qui, selon nous, amélioreraient de façon sensible les relations de travail dans le monde scolaire.

Les enseignants reprochent au gouvernement de ne rechercher une cohérence administrative que dans le domaine précis et fort étroit qui les concerne. Personne ne peut dire qu'ils aient complètement tort. Le beau principe de la cohérence, qui est en administration publique ce que la chasteté est dans la religion, n'est guère le plus appliqué dans le monde de l'éducation. Les enseignants sont bien placés pour en parler, eux qui vivent quotidiennement dans ces innombrables petits fiefs que sont les commissions scolaires et dans cette chasse gardée de la réaction qu'incarne la fédération qui les protège.

Nous connaissons l'intention prochaine et si attendue du gouvernement de légiférer contre ce féodalisme et nous pouvons dire que dans ce domaine précis nous nous prenons à souhaiter presque une déclassification massive.

Ils ont encore plus raison dans un autre domaine — et celui-là est intimement lié au problème qui occupe cette commission — celui du perfectionnement des maîtres. On ne nous reprochera pas d'y voir le fond du problème. Les positions de notre parti, en cette matière, sont très claires. Dès le premier congrès, les membres inscrivaient, à un chapitre de notre programme, ces mots: "Le rôle de l'enseignement dans une société et la nécessité de revaloriser la profession de l'enseignant font de la formation des maîtres une des priorités du système d'enseignement. Cette formation doit favoriser une compétence professionnelle complète et, surtout, assurer des possibilités de recyclage permanent." C'était le programme de notre parti.

Nous pourrions également rappeler avec raison de longs extraits du rapport Parent où les commissaires soulignent avec une insistance et une tenacité inégalables, que cet aspect de notre révolution scolaire en est la pierre de base et que cette priorité des priorités — comme tout le monde allait l'appeler— allait déterminer, par l'importance que le gouvernement allait y accorder, la qualité de la révolution québécoise, dont la révolution scolaire en est à son tour la pierre de base, tous en conviendront. A cette autorité en la matière, combien de déclarations solennelles de chacun des ministres de l'Education pourrions-nous ajouter? Pour tous, la formation des maîtres devait être la priorité et pourtant!

Que l'on comprenne bien le sens de nos remarques et qu'on les situe bien. Il ne s'agit pas de nier les efforts du ministère, en ce domaine. Il s'agit clairement, devant cette commission, de les évaluer et de dire honnêtement qu'aussi ardus qu'ils aient été on doit les reconnaître comme encore insuffisants. Il ne s'agit pas de rechercher chez un ministre et encore moins chez des fonctionnaires la faute qui en ferait les boucs émissaires de l'embonpoint dont souffre actuellement notre système d'éducation, mais il s'agit de décharger les professeurs, dégoûtés d'être les boucs émissaires de chaque crise et d'être encore les seuls à faire quotidiennement les frais de cette entreprise on ne peut plus collective.

Les professeurs ont là-dessus entièrement raison. A ceux qui croient que traiter de ce sujet est s'éloigner du conflit actuel, nous dirons qu'ils se trompent. Car, selon nous, c'est là que réside le problème. Les enseignants et leur centrale syndicale, de façon systématique depuis 1965, ont fait de leur perfectionnement et de leur formation une question primordiale. Pour eux et dans l'esprit du rapport Parent, c'était aussi la priorité des priorités. Personne ne peut dire ici que les enseignants n'ont pas pris leurs responsabilités devant l'ampleur du rôle où notre société les consacrait. Portés au milieu de notre vie collective, à l'endroit même où l'avenir est presque présent, ils n'ont pas lésiné face aux obligations qui leur incom-

baient. Dans une proportion de plus de 60 p. c, par exemple, à Montréal, ils sont retournés sur les bancs de l'école parfaire leur éducation selon les désirs de tous les Québécois. Ils ont eu, en cette matière, la collaboration de la CECM. Voilà qu'aujourd'hui cet effort de perfectionnement se voit à toutes fins pratiques annulé ou sinon sérieusement découragé par les décisions unilatérales du président du comité provincial de classification. Voilà donc que nous retrouvons le problème qui nous préoccupe.

C'est toute la politique de l'Etat à l'égard des enseignants qui se retrouve analysée et contestée par des personnes aussi importantes, par exemple, que la présidente de la CECM, pour qui j'ai un extraordinaire respect. Dans sa déclaration du 28 janvier dernier, Mme Roux disait: "Les cours de perfectionnement organisés par un organisme d'éducation responsable pour répondre dans une période donnée à des besoins particuliers du milieu devraient être reconnus et évalués d'une façon définitive. La commission — en parlant de la CECM — en collaboration avec les universités a pallié pendant de nombreuses années une organisation déficiente de la formation des maîtres en organisant elle-même des cours de perfectionnement qui ont aidé directement les enseignants dans leur travail professionnel. La commission a fortement encouragé ses enseignants à s'inscrire à ces cours et la réponse des maîtres a été enthousiaste.

Ces cours avaient une valeur pédagogique certaine que la commission reconnaissait et reconnaît toujours."

C'est tout cela qui est en cause actuellement et c'est même plus. Non seulement la priorité des priorités sera-t-elle vérifiée dans les réponses gouvernementales, mais c'est aussi dans le seul respect de cette priorité qu'on peut trouver une solution au conflit actuel.

Les enseignants sont parfaitement justifiés, quant à nous, d'exiger de l'Etat le respect de cette priorité, non seulement dans leurs salaires — ce que l'Etat semble prêt à reconnaître pour le perfectionnement déjà acquis, soit la scolarité garantie pour fins de traitement, dans le jargon du milieu — mais aussi dans leur statut professionnel ou, si vous voulez, dans leur situation à la suite d'une reclassification qui est inévitable, tout le monde s'accorde pour le dire. Autrement dit, cette commission ne devrait pas seulement entendre de la partie gouvernementale la justification d'une reclassification — ce sur quoi les deux parties devraient être d'accord, à condition que ces normes soient définies conjointement — mais aussi l'annonce par le même gouvernement d'une politique de recyclage allant dans le plus grand sens de la sacrée cohérence comme du respect des professeurs. A notre avis, c'est sur ce champ extraordinairement important pour tout le Québec que réside la possibilité d'entente.

Voilà pourquoi nous avons dit que le conflit a fait ressortir le problème de fond; c'est, je crois, à cette commission d'y apporter les réponses. Il ne s'agit pas d'élargir indûment le problème ou d'éviter les problèmes techniques. Nous avons la certitude que la solution du conflit y réside. Nous savons bien que ce n'est pas là une question qui se règle en 24 heures. Nous savons même que ce n'est pas en commission parlementaire que cela se fait, mais bien autour d'une table de négociations et par les personnes impliquées directement, mais c'est quand même ici que la politique d'entente pourrait s'esquisser, que les principes de fond doivent apparaître et, je l'espère, apparaîtront.

Les enseignants sont devenus exigeants, comme nous le sommes envers eux. Si nous avons pris autant de temps à décrire ce qui nous apparaît comme le fond du problème, c'était, bien sûr, parce que nous y voyions notre responsabilité, mais aussi parce que le but est presque démesuré. Non seulement nous recherchons un calme scolaire qui ne couvrirait pas l'injustice, mais il s'agit d'éviter une loi spéciale qui ferait entrer le volcan en éruption et audacieusement aussi de déterrer les mines déjà prévisibles enfouies dans le champ de la prochaine négociation pour 1971-1974.

Voilà donc, M. le Président, de quelle façon la formation politique que je représente aborde les travaux de la présente commission.

M. LE PRESIDENT: Je remercie le député de Saint-Jacques de ses brefs propos. J'inviterai le député de Frontenac.

M. CHARRON: Merci, M. le Président.

M. LATULIPPE: Qu'il me soit seulement permis de formuler le voeu que les travaux de la présente commission aboutissent à une solution acceptable pour toutes les parties. C'est le voeu que je formule au nom du parti que je représente.

M. LE PRESIDENT: Très bien. J'invite M. Denis Sirois à nous faire les représentations appropriées.

Partie patronale

M. SIROIS: M. le Président, MM. les membres de la commission...

M. LE PRESIDENT: Si vous voulez d'abord nous donner vos titres et les organismes que vous représentez, pour les fins du procès-verbal.

M. SIROIS: Je suis le représentant de la Fédération des commissions scolaires et du gouvernement à la table de négociations. Je suis, comme certains le disent, le porte-parole patronal.

J'aimerais, sans aucun préambule, essayer d'exposer ce que la partie patronale voit dans la situation actuelle. Mon exposé sera en six points. Sur le premier point, nous aimerions

traiter brièvement des bris de contrats survenus.

Le deuxième point: nous aimerions souligner ce qu'est pour nous le problème actuel et les façons de le résoudre. Le problème actuel pour nous serait les récupérations de salaires et le fonctionnement trop lent du comité provincial de classification.

Le troisième point serait une possibilité, d'après nous, de régler les problèmes actuels à l'intérieur même de l'entente provinciale.

Nous aimerions aussi traiter sommairement de l'offre patronale que nous avons faite et commenter, en dernier lieu, les demandes syndicales quant à la scolarité dite garantie.

M. le Président, comme vous le savez, dans le monde de l'éducation il y a une situation un peu spéciale en ce qui concerne, entre autres, les conventions collectives et les façons d'en arriver là. En novembre 1969, nous avons signé avec la partie syndicale une entente provinciale. Cette entente-là a été signée par la CEQ, la PACT, la PAPT, le gouvernement et les deux fédérations de commissions scolaires. Elle liait donc tous ces organismes provinciaux mais, du même coup, elle liait aussi les syndicats et les commissions scolaires qui appartiennent tous à ces organismes que je viens de mentionner. C'est une première série de signatures.

Par la suite, toutes les commissions scolaires et tous les syndicats d'enseignants ont signé localement la même entente qui est devenue une convention collective. Elles ont toutes signé et elles ont déposé cette entente comme telle au ministère du Travail. Cela devenait une convention collective. Cela liait tous les syndicats et toutes les commissions scolaires.

A un autre moment, vous savez, M. le Président, que les enseignants au Québec ont tous des engagements annuels. C'est une troisième série de signatures. Alors qu'en droit du travail, normalement, une seule signature, soit celle de la convention collective, suffit pour lier les personnes, voilà, que pour nous, trois signatures ne lient personne. Nous avons découvert cela au mois de janvier. Devant ces grèves illégales, nous pouvons appeler cela des bris de contrats, la partie patronale se pose de sérieuses questions sur la valeur des signatures qui ne lient qu'un seul côté. D'autant plus que toutes ces choses arrivent dans le monde de l'éducation. Je ferai remarquer aux membres de la commission que cela fait sept ans, au Québec, que nous n'avons pas eu la paix dans le monde de l'éducation.

Cette fois-ci, nous avions une convention collective qui était censée durer 18 mois ouvrables. Cela n'a pas duré. Il y en a eu des bris de contrats cette année.

Ce qui est plus grave, c'est que l'an passé il y en a eu aussi. Mais l'an passé, ce n'était pas la clause relative au fonctionnement du comité qu'on n'aimait pas; c'était une clause de présence à l'école, une clause voulant que les professeurs soient présents à l'école en même temps que les élèves.

On n'aimait pas cette clause; donc, on est sorti dans la rue. Cette année, le fonctionnement du comité, on n'aime pas cela; on sort dans la rue. Nous nous demandons maintenant quelle sera la clause l'an prochain. Nous essayons de regarder cela tout de suite pour essayer de le prévenir.

Le problème, M. le Président, d'après nous se rattache aux deux points suivants. Premièrement, des récupérations de salaire qui ont été faites. II est vrai qu'il y a eu des récupérations de salaire. Il n'y en a pas eu une tonne, mais il y en a eu. Je veux faire remarquer cependant que ces récupérations de salaire ont été faites dans le cadre de la convention collective actuelle.

D'autre part, j'aimerais apporter tout de suite une précision ou une correction, en ce qui concerne les récupérations de salaire faites à la CECM. On a fait grand état du problème actuel, au début, en ce qui concerne la CECM. Les récupérations à la CECM sont de trois ordres.

Les premières, ce sont les récupérations qui ont été faites pour des enseignants qui auraient épuisé leur caisse de congés de maladie. La caisse étant épuisée, il est évident que lorsqu'il n'y a plus de congés de maladie, on coupe le salaire. C'est une première catégorie. Il faut remarquer que cela n'a aucun rapport avec la classification. A un moment donné, les gens ont tout mis dans le même tas.

Les deuxièmes, M. le Président, sont les récupérations qui ont été faites pour des avances. Il y a eu des avances faites à la CECM avant la signature de la convention actuelle et il y a eu, dans ces avances, des salaires versés à des personnes qui n'y avaient pas droit. Tout le monde était d'accord que s'il y avait des erreurs, la CECM reprenait ces avances. Cela n'a donc encore une fois, M. le Président, aucun rapport avec la classification.

Les troisièmes, ce sont les récupérations pour traitements payés en trop, à des enseignants dont les diplômes et brevets avaient été inscrits à l'entente provinciale. Cela peut avoir un rapport indirect. Ce ne sont pas des avances, c'est par rapport à la classification comme telle de l'entente.

Je ferais remarquer qu'à ce point de l'entente il y a eu $60,871 de récupérations à la CECM. Mais la clause en vertu de laquelle on récupérait a donné aux enseignants, à la même époque, $700,000. On n'a pas parlé des $700,000, j'aime le souligner.

Le deuxième point du problème actuel est, d'après nous, un fonctionnement que nous pourrions qualifier de trop lent du comité provincial de classification.

Avant d'exposer ce que j'ai à dire sur ce point, j'aimerais expliquer sommairement ce qu'est le comité provincial, tel qu'il était prévu dans l'entente. Sa composition était la suivante: trois représentants des organismes syndicaux, trois représentants des organismes patronaux et, de plus, un président. Ce qui faisait sept membres. Quelles étaient les fonctions de ce

comité? En résumé, ce comité devait décider de la classification des instituteurs. Pour ce faire, il devait appliquer deux choses: premièrement, la convention collective comme telle, à l'article 6-1, dans les cas où les catégories des diplômes et brevets étaient inscrites comme telles. Prenons, par exemple, un brevet C dans la convention collective, sa catégorie de salaire était inscrite comme telle à douze ans; pour un brevet B, c'était treize ans; pour un brevet supérieur, garçons, après la page 40, c'était quatroze ans; pour un brevet A, c'était quinze ans; pour un BA, c'était quinze ans, et pour un BA accompagné d'un brevet A, c'était seize ans. A ce sujet, M. le Président, le comité provincial de classification n'avait aucun pouvoir de changer ces catégories. D'ailleurs, il ne l'a pas fait, parce que cela avait été négocié et accepté comme tel.

Deuxièmement, il devait classifier, en vertu du règlement numéro 5, uniquement. Certaines gens parlent du règlement numéro 4, j'aimerais dire immédiatement que le règlement numéro 4 n'a strictement rien à voir dans les discussions actuelles.

Le comité devait classifier ceux qui ne l'étaient pas déjà par la convention et uniquement ceux-là. Il devait faire cela en vertu du règlement numéro 5. Ce règlement lui donnait des critères généraux — si on peut appeler cela ainsi — pour en arriver à une classification uniforme au niveau du Québec.

Quels étaient les pouvoirs des membres du comité provincial? M. le Président, si les six membres représentant les organismes arrivaient à une décision unanime — je dis bien unanime, cela suppose six — à ce moment-là, cette décision était finale. Cependant, dès qu'il y avait dissension ou non-unanimité, c'est le président qui décidait. Des malins ont dit que c'était un comité plus ou moins consultatif, parce qu'il décidait en cas d'unanimité; dans les autres cas, le président décidait après avoir consulté les membres du comité.

Après ce court exposé sur le comité lui-même, j'aimerais expliquer ce qu'on entend par un fonctionnement trop lent du comité. Cela dépend, disons, de plusieurs facteurs. Tout d'abord, les parties — là, ce n'est pas le comité qui est en cause, mais les six parties — ont eu de la difficulté à s'entendre au sujet du président du comité. Elles se sont entendues sur les noms de cinq personnes, à des époques différentes. Malheureusement, chaque fois qu'il y avait entente sur une personne, la personne en question nous disait, deux, trois semaines ou une semaine plus tard, qu'elle n'acceptait pas. Tout cela donnait des délais. Résultat: le 7 mai 1970, M. Rossignol a été nommé par le premier président du tribunal d'arbitrage comme président du comité de classification. Ce fonctionnement était prévu, M. le Président, à l'intérieur même de la convention.

La convention disait que, si les parties ne s'entendaient pas, un arbitrage désignerait qui est président. Les parties ont donc fait un effort cinq fois et, à un moment donné, comme ça ne marchait plus, elles sont allées à l'arbitrage et M. Rossignol a été désigné.

Je note immédiatement que le comité avait comme tâche d'appliquer la convention et le règlement numéro 5 pour classifier les enseignants. Il semble qu'il ait perdu un temps précieux en tentant de négocier le règlement numéro 5 au lieu de l'appliquer. Ce sont deux philosophies très différentes. Si j'ai des normes que j'accepte comme bonnes et que je les applique, cela va relativement bien. Mais si je dis, avant de partir: Les normes ne sont pas bonnes, il faut donc que je négocie le règlement; je ne l'applique pas. C'est plus difficile et c'est plus long.

Pour nous, le problème qui se pose est de savoir qui va faire le travail que faisait auparavant le comité provincial de classification, parce qu'il y a quelqu'un qui doit le faire, ce travail, cela, dans un temps relativement court. En effet, il est très important, M. le Président, que les enseignants soient classifiés rapidement et d'une façon définitive. C'est un problème qui date déjà de quelques années. Il est important qu'on ait des décisions finales et rapides pour les 70,000 enseignants du Québec.

Nous voulons faire cette classification d'après des règles déjà convenues. Or, ces règles sont la classification comme telle à l'entente et le règlement numéro 5, parce que, lui aussi, il fait partie de l'entente. C'est inscrit comme tel. Il nous faut des règles de base. Il ne s'agit pas de changer les règles du jeu et d'obtenir ainsi des salaires supérieurs d'une façon déguisée. Les principes de la classification sont inscrits. Il s'agit de savoir qui va faire le travail du comité. Il devra le faire rapidement, mais en suivant des règles déjà établies.

M. le Président, nous pensons que l'entente provinciale elle-même permet de régler ce problème, à l'article 9.04, entre autres; elle permet de le régler sans heurts et sans grèves. Nous sommes disposés à régler le problème dans le cadre de la convention actuelle. Là-dessus, je ferai remarquer que la convention actuelle ne donne aucune ouverture au droit de grève. Il s'agit pour nous d'un problème d'application de convention collective, ce qui est fort différent d'un problème de renouvellement de convention. La partie patronale n'a pas l'intention, alors que la convention est terminée, de la négocier rétroactivement à trois ans. Il s'agit de faire des ajustements à des clauses qui fonctionnent plus ou moins bien. J'en ai parlé tantôt. Nous sommes prêts à essayer de trouver des mécanismes qui vont ajuster cela.

La partie patronale, par l'entente, a engagé une masse monétaire. Elle s'est engagée à verser des salaires selon des règles de scolarité réelles et non pas selon une scolarité surévaluée artificiellement. Il ne s'agit pas pour nous d'accroître cette masse déjà impressionnante, ni d'accroître les salaires par n'importe quel étalon de mesure.

Maintenant que j'ai situé ce qui était pour nous le problème, j'aimerais parler des offres que nous avons faites jusqu'ici pour le régler. Nous avons fait des offres les 12, 13 et 16 février 1971.

Premièrement, nous avons offert un remboursement intégral des réclamations de salaire faites en 1969-1970 et 1970-1971 comme suite à l'évaluation provisoire de la scolarité.

Deuxièmement, la partie patronale a offert le traitement garanti, quelle que soit la scolarité réelle de l'enseignant; indépendamment de toute classification, nous avons offert le traitement garanti. Il s'agit du traitement au 30 juin 1970, ou postérieurement s'il y a eu augmentation de salaire depuis cette date.

La partie patronale s'est engagée à ne faire aucune réclamation de salaire, par suite de l'évaluation provisoire de la scolarité, quelle que soit la scolarité réelle de l'enseignant, encore une fois.

Quatrièmement, nous avons offert un mécanisme permettant une classification définitive de tous les enseignants d'ici le 1er septembre 1971. Ceci a été fait, justement, en vue de corriger les lenteurs du comité provincial de classification.

De plus, nous avons offert la rétroactivité complète. Ceci veut dire, M. le Président, que si la classification définitive donne droit à un salaire supérieur, l'enseignant recevra son salaire rétroactivement au 1er juillet 1968, s'il y a lieu. D'autre part, si cette classification définitive donne droit à un salaire inférieur à celui qu'il a reçu, nous lui disons qu'aucune somme ne lui sera réclamée.

Nous avons aussi offert, M. le Président, tel qu'on nous l'a demandé à la table et devant les tribunaux de droit commun, d'annuler toutes les décisions du comité provincial de classification. Nous sommes prêts à les annuler toutes, de la première à la dernière, pour, justement, faire effectuer le travail par l'organisme dont j'ai parlé tantôt.

Finalement, la partie patronale est prête à négocier immédiatement la prochaine entente, dès le règlement du présent litige.

J'aimerais, M. le Président, vous exposer un peu ce qui s'est produit — en ce qui concerne les demandes syndicales, il appartiendra au syndicat de les formuler commes telles — j'aimerais exposer sommairement certains points de leurs demandes.

Le 26 janvier 1971, nous avions une demande de scolarité dite garantie. On nous demandait, M. le Président, de payer les instituteurs selon la plus avantageuse des catégories suivantes, pour la durée de la convention, c'est-à- dire, en retournant trois ans en arrière: soit la catégorie des articles 5 et 6 du bill 25; soit la catégorie de l'article 7 du bill 25; soit la catégorie de l'article 9 du bill 25; soit la catégorie de la convention collective 1966-1967; soit la catégorie de la convention collective 1967-1968; soit celle de la conven- tion collective 1968-1969; soit la catégorie de la classification provisoire effectuée selon les articles 6-2.09, 6-2.10 et 6-2.11; soit la catégorie de classification provisoire effectuée selon l'article 10-5.02 d); soit la catégorie inscrite à l'article 6-1; soit, M. le Président, pour le nouvel instituteur engagé, la catégorie qu'il avait dans son ancienne convention. Seulement, cet article représente, pour la CECM, le besoin d'avoir quelque chose comme 300 à 400 conventions pour administrer son affaire. Des gens ont parlé de la meilleure catégorie depuis la Confédération, M. le Président.

A la fin de tout cela, on nous a précisé que ces demandes pouvaient être modifiées, qu'elles n'étaient pas toutes approuvées par les corporations et que l'on n'était pas sûr s'il n'y avait pas autre chose.

C'est vrai, mais de toute façon, ce n'était pas certain. Tout de suite après, M. le Président, il y a eu des grèves illégales jusqu'au 12 février. Les 12 et 13, nous avons fait les offres que je vous ai mentionnées et, le 13, dans l'après-midi, nous avons reçu des demandes différentes de scolarité dite garantie. Je ne reprendrai pas tout. Je les ai, mais ce serait trop long. En tout cas, la demande de scolarité garantie était modifiée une autre fois. On nous demandait, entre autres, soit la scolarité des décisions du comité provincial, soit plusieurs autres classifications. Mais, en même temps, on nous demandait d'annuler les décisions. Alors, nous annulons les décisions. Mais si elles sont plus avantageuses, elles restent là. Elles partent, mais elles ne partent pas. Le 16 février, nous avons fait de nouvelles offres puis, il y a eu des grèves jusqu'au 25 février 1971.

Mercredi, le 25 février, M. le Président, la CEQ s'est opposée à la commission parlementaire proposée par le gouvernement et elle a enjoint ses membres de demeurer au travail dans le but de permettre la reprise immédiate des discussions. Nous avons repris ces discussions devant cet effort valable et louable. Nous avons entrepris les discussions dès le lendemain matin. A ce moment-là, nous avons reçu des demandes nouvelles des corporations d'enseignants. Mais ces demandes-là, au dire même des négociateurs syndicaux, n'étaient pas complètes, surtout en ce qui concerne l'aspect monétaire, à savoir les salaires et la classification.

Vendredi midi, le 26, nous apprenons par la radio que l'une des corporations, à savoir la CEQ, fait de nouvelles demandes plus exigeantes et nouvelles par rapport à celles que nous avions reçues la veille. Nous nous rendons à la table dans l'après-midi même. On répond aux demandes que nous avons reçues par la radio et par une seule des trois corporations; mais cette fois, nous demandons une position écrite, conjointe et complète des trois corporations. La partie syndicale accepte cela. Elle trouve cela normal. On nous dit qu'on va communiquer avec nous dès qu'on aura cela en main.

M. le Président, lundi — j'étais à vendredi —

nous apprenons toujours par la voie des media d'information que l'une des corporations d'enseignants, à savoir la CEQ, nous fait d'autres demandes plus exigeantes que celles qu'elle avait demandées par la radio, le vendredi. Lundi, nous n'avions pas reçu la communication que nous attendions de la part de la partie syndicale et en vertu de ladite communication on était censé nous communiquer les demandes communes des trois corporations. Nous leur avons écrit, leur demandant si, effectivement, on avait une position commune et quand on nous la soumettrait; deuxièmement, si les corporations d'enseignants étaient toujours disposées à enjoindre leurs membres de demeurer au travail. Nous n'avons jamais reçu de réponse. Devant toutes ces demandes qui, jusqu'à certaines époques ont varié même de jour en jour, nous nous sommes formé une certaine idée sur la scolarité garantie. Mais nous ne sommes pas sûrs. Nous ne savons pas exactement ce qu'elles veulent.

Mais si c'est la scolarité garantie, tel que je l'ai mentionné au début, la partie patronale n'est aucunement disposée à l'accorder, pour les motifs suivants:

Premièrement, elle remet en cause ce qu'on convient d'appeler la circulaire du 14 octobre 1966; elle remet en cause le bill 25 lui-même; elle remet en cause toute l'entente provinciale.

Deuxième motif: elle empêche la parité de salaire. On a entendu dire que des syndicats voulaient la parité de salaire. Mais la demande que nous avons, nous, dans l'éducation empêche la parité de salaire et de ce fait recrée rétroactivement à juin 1966 des disparités jugées inacceptables par tout le monde, y compris les corporations d'enseignants, à cette époque-là. Tout le monde, en 1966, trouvait — devant la situation — que ça n'avait pas de bon sens, les disparités qui existaient dans les salaires. La demande que nous avons nous reporte à cette époque-là. Elle recrée de ce fait des injustices à l'égard des enseignants.

Dorénavant, si cette demande était acceptée, à brevets identiques, les salaires ne seraient plus identiques. Tous ont dénoncé ces injustices qui, une fois pour toutes, avaient été réglées par le bill 25 et la convention provinciale. Depuis juillet 1970, c'est la première fois au Québec que la parité de salaire est atteinte. Le rattrapage a fini en juillet 1970. Là nous l'avons, la parité de salaire.

Autre motif pour lequel nous ne pouvons accéder à cette demande, c'est que c'est une planification vers le passé. D'habitude c'est vers le futur, mais là c'est vers le passé. Cela implique des sommes impressionnantes et difficiles à évaluer.

Un autre motif, c'est une demande à peu près impossible à réaliser sur le plan administratif. Même si les gens voulaient le faire, ce n'est à peu près pas possible sur le plan administratif. Il faudrait remonter à juin 1966 et recréer de toutes pièces les désordres qui existaient alors dans la rémunération des enseignants. Il faudrait prendre tout ce qui s'est fait depuis 1966, examiner ça, papier par papier, et essayer de trouver le plus avantageux.

En résumé, nous disons que c'est une demande, non pas de scolarité garantie, mais plutôt de disparité garantie. Avec votre permission, nous aimerions distribuer tout à l'heure aux membres de la commission certains documents que nous avons préparés.

Je vais vous faire un court exposé maintenant, en égard aux demandes de scolarité garantie, pour essayer d'expliquer aux membres de la commission pourquoi nous refusons. J'ai donné des motifs généraux et je vais essayer d'expliquer ça au moyen de tableaux, dans les faits. Ces tableaux seront dans le paquet qu'on distribuera tout à l'heure.

Seulement à titre d'exemple. Autrefois, il existait — quand je dis autrefois, je parle de l'année scolaire 1965-1966 — il y a des gens qui, à ce moment-là, se sont aperçus que les enseignants ne recevaient pas le même salaire, même s'ils avaient les mêmes qualifications et même s'ils fournissaient le même travail.

En 1965-1966, certains ont fait des tableaux, et cela n'avait pas d'allure au point de vue des traitements. C'était la disparité totale. Nous l'avons constaté, à cette époque, en prenant l'exemple d'un instituteur de troisième année qui avait les mêmes qualifications, le même brevet et il n'avait pas le même salaire qu'un autre instituteur de troisième année qui enseignait aux mêmes enfants les mêmes matières. Cet enseignant avait les mêmes qualifications et les mêmes brevets. Les gars avaient tous la même chose, sauf le salaire. Ils faisaient tous le même travail, tous avaient les mêmes qualifications mais ils n'avaient pas les mêmes salaires.

Cet état de choses était dû à des critères disparates de rémunération des enseignants. Un de ces critères était le sexe. Les femmes, en règle générale, recevaient beaucoup moins que les hommes. Je donne un exemple — vous pourrez en prendre d'autres dans les tableaux — à Magog une femme recevait $4,350; un homme $5,700. Il y avait $1,300 de différence avec les mêmes brevets, les mêmes qualifications, le même travail. Le sexe valait cela comme différence.

Un autre critère de paiement était le fait d'enseigner dans une locale plutôt que dans une régionale. Même si cela était dans le même territoire, les gars pouvaient enseigner dans la même ville mais ils n'avaient pas le même salaire; un était engagé par des commissaires régionaux et l'autre par des commissaires locaux. Cela n'avait pas d'allure non plus. Je donne un exemple qui a rapport à ce cas. Une institutrice engagée par la locale de Rimouski recevait $3,000, en 1965-1966. Comparons-la à une institutrice engagée par la Régionale du Bas-Saint-Laurent, dont le siège social est à Rimouski. Elles enseignaient toutes les deux à Rimouski, mais l'institutrice de la régionale

avait $4,100. Il y avait une différence de $1,100 entre les deux. Ce sont deux institutrices. L'écart est beaucoup plus grand entre instituteurs et institutrices. Les $1,100 sont dus aux liens d'emploi. C'était la régionale plutôt que la locale.

Un autre critère qui jouait énormément était le territoire, le fait d'enseigner dans des locales d'un territoire différent. Par exemple, l'institutrice de Rimouski, à sa cinquième année d'expérience, recevait $3,000. Celle de Jacques-Cartier, ayant les mêmes années d'expérience, recevait $5,300. Il y avait $2,300 de différence, pour enseigner toutes les deux en troisième année avec le même brevet et le même diplôme. 0 y avait aussi des disparités dues aux catégories de salaires comme telles. Ainsi, par exemple — là on s'approche de la scolarité garantie — prenons la CECM, à Verdun. J'ai pris Verdun, c'est volontaire parce que c'est une ville dans le centre de Montréal. Un instituteur ayant un brevet et travaillant à Verdun gagnait $250 de plus que celui de Montréal. Ils avaient tous les deux le même brevet. A Verdun, ce brevet rapportait $250 de plus. Cependant, même si cela rapportait $250 de plus, il reste qu'à Verdun l'instituteur était classifié un an plus bas qu'à Montréal.

Parce qu'à Montréal, un brevet académique était dans la catégorie 13, et à Verdun, il était dans la catégorie 12. Mais la catégorie 12 de Verdun avait $250 de plus que celle de la catégorie 13 de Montréal. Alors, quand on nous parle de droits acquis, M. le Président, je pense bien que...

Comparons maintenant le même brevet entre Verdun et Mont-Joli. A Verdun, on trouvait la catégorie 12, tandis qu'à Mont-Joli, on était dans la catégorie 14, c'est un beau chiffre, excepté qu'on n'avait pas de salaire à 14.

L'institutrice de Mont-Joli gagnait $4,600, et celle de Verdun gagnait $5,750. Il y avait une différence de $1,150 en faveur de Verdun. Pourtant à Mont-Joli on était classifié 2 ans plus haut. Il reste que ça donnait $1,150 de moins.

Devant cet état de fait que tout le monde avait constaté à l'époque de 1965-1966, des mesures ont été adoptées pour faire disparaître ces inégalités de salaire. Les trois principales mesures sont: la circulaire du 14 octobre 1966, la loi 25 de février 1967 et la convention provinciale de novembre 1969.

Ces trois mesures ont un même objectif: la parité de salaire. C'est ça l'objectif des trois. Nous avions décidé, et c'est l'esprit qui procède de ces trois mesures, de payer tous les professeurs selon leur scolarité et leur expérience. L'objectif était: à scolarité et expérience égales, salaire égal.

En ce qui concerne l'expérience, il était prévu qu'un enseignant peut augmenter son salaire pendant 15 ans en raison, uniquement, de l'acquisition de l'expérience. Nous soulignons que, dans l'établissement des salaires, c'est peut-être la seule profession où l'expérience peut être monnayée aussi longtemps.

Quant à la scolarité, M. le Président, le deuxième facteur servant à établir le salaire, c'est une unité de mesure basée sur un postulat bien simple: il faut connaître pour transmettre. Les gens ont cru, à un moment donné, que ce serait peut-être mieux de payer les gens d'après leurs connaissances, puisque s'ils en connaissent plus, ils ont plus de chances d'en transmettre davantage ou de mieux transmettre.

Dans ce but-là, les parties ont convenu par l'entente provinciale un système provincial de classification des instituteurs. Elles ont convenu que la classification se ferait à partir du règlement no 5, qui comporte des critères objectifs de classification, à savoir les années de scolarité normales requises pour l'obtention au Québec d'un diplôme ou d'un brevet d'enseignement.

C'est la base du système uniforme, tous les critères y sont mentionnés; il ne reste, M. le Président, qu'à les appliquer. Il reste à trouver quelqu'un qui va les appliquer une fois pour toutes. Deuxièmement, elles ont aussi convenu par convention, de la classification définitive de certains diplômes ou de certains brevets. C'est la liste à laquelle j'ai fait allusion tantôt. M. le Président, dans ces classifications de diplômes et de brevets, on nous dit qu'il est possible qu'il y ait de 20,000 à 25,000 cas déjà réglés dans les classifications déjà faites par la convention.

Les trois mesures dont j'ai parlé tantôt, à savoir la circulaire, le bill 25 et la convention, permettaient, M. le Président — toujours avec comme objectif la parité de salaires — à plus de 40,000 professeurs et à la plupart des institutrices d'effectuer un rattrapage salarial en touchant des hausses de $1000 à $1400. C'était le bill 25 que je prenais comme exemple.

La convention provinciale permet aussi ce rattrapage qui est terminé maintenant depuis le 1er juillet 1970. Depuis cette date, tous les instituteurs du Québec ont le même salaire, sauf ceux qui ont des privilèges, ce que nous pouvons appeler des droits acquis, ou ceux qui en avaient plus avant qui continuent à en garder plus avec un forfaitaire qui s'ajoute à cela.

Alors, la parité par la base est faite; le rattrapage est terminé. Tout ce qui reste de disparité maintenant, M. le Président, ce sont des enseignants qui gagnent plus à cause de protections individuelles permises par la convention.

Les objectifs dont j'ai parlé tantôt, à savoir la parité — M. le Président, j'aimerais le souligner avant de terminer — tout le monde à l'époque était d'accord sur cela; c'était urgent que cela se fasse. Le Conseil supérieur en a parlé. Je vais tout simplement citer l'extrait, à la page 299, Conseil supérieur 1965/66 et 1966/67. La CEQ, alors qu'elle a été consultée en vertu de l'article 13 du bill 25, était d'accord. Elle a recommandé au gouvernement que la négociation se fasse au niveau provincial et cela pour toutes les clauses de la convention. Elle était nécessairement d'accord sur les objectifs de parité salariale. D'ailleurs, le président de la CEQ à

l'époque l'a répété à maintes reprises; c'est une position connue de cette centrale à venir jusqu'aux demandes de scolarité garantie. On était d'accord M. le Président, sur la parité jusqu'à ce qu'on l'atteigne. Le jour où on l'a obtenue, on a dit: Ce n'est plus cela qu'on veut. On veut la disparité. Je m'en vais là, mais probablement que, lorsqu'on aura eu la disparité, on fera d'autres tableaux et on dira: Voyez, cela n'a pas d'allure, donnez-nous la parité!

M. le Président, il y a aussi un autre document dans ce que nous distribuerons tantôt que j'aimerais commenter un peu. Je prends l'exemple de la CECM par rapport à Verdun. Comme je l'ai dit tantôt, un brevet, autrefois, à la CECM, était classé à treize ans. Le même brevet était classé à douze ans à Verdun. Et pourtant, l'enseignant de Verdun, même s'il était classé à douze ans, recevait $250 de plus. M. le Président, ce qu'on nous demande aujourd'hui — cela apparaît dans les chiffres que nous avons produits — c'est la scolarité dite garantie. On veut les treize ans de Montréal, mais avec les salaires de la convention; pas le vieux salaire, mais le nouveau salaire. La vieille classification, mais le nouveau salaire.

On nous demande de donner au professeur qui a un brevet $530 de plus à Montréal qu'à Verdun. C'est l'inverse. En 1965-1966 Verdun avait plus et tout le monde a dit que cela n'avait pas d'allure, mais aujourd'hui on nous demande l'inverse. Il faut que Montréal ait plus que Verdun. Si ce n'était pas justifiable, M. le Président, que Verdun ait plus que Montréal pourquoi Montréal aurait-elle plus que Verdun aujourd'hui?

J'ai un autre exemple, encore plus frappant, quand je compare Verdun avec Mont-Joli. Toujours pour le même brevet, à Mont-Joli un enseignant était dans la catégorie 14. La femme de Mont-Joli recevait, dans cette catégorie, $4,600 tandis qu'à Verdun elle était dans la catégorie 12, mais recevait $5,750, c'est-à-dire $1,150 de plus qu'à Mont-Joli. Aujourd'hui, avec la demande que nous avons, on nous dit: La scolarité garantie, le petit chef qui avait 14 à Mont-Joli, c'est cela qu'on veut. Mais avec le nouveau salaire, ce qui est exactement l'inverse, M. le Président, à Mont-Joli on aurait $1,150 de plus qu'à Verdun. La partie patronale ne voit vraiment pas comment elle pourrait accepter des choses semblables.

En terminant, j'aimerais souligner que nous sommes prêts à régler les problèmes actuels dans le cadre de la convention collective.

M. LE PRESIDENT: Je vous remercie, M. Denis Sirois. Si M. Sirois et les autres intervenants veulent demeurer disponibles, nous allons d'abord entendre, chacun son tour, les opinants et par la suite les membres de la commission poseront les questions opportunes. J'invite M. Charbonneau à nous faire ses représentations.

Un peu de silence, s'il vous plaît, afin de permettre à M. Charbonneau de nous dire d'abord ses fonctions.

Corporation des enseignants Partie syndicale

M. CHARBONNEAU: Depuis le mois d'août, je suis le président de la CEQ. Et depuis dix ans que je suis dans l'enseignement, j'ai la catégorie 18. Je ne suis pas personnellement menacé de déclassification.

Je voudrais, M. le Président, qu'on nous accorde quelques instants pour permettre aux membres de la commission parlementaire de prendre connaissance de l'ensemble des pièces que nous leur avons déposées dans un dossier. Je vais énumérer ces pièces. Nous avons inclus dans cette chemise un dossier "classification", qui est exactement le même que celui que nous avons produit pour nos officiers, nos membres et la presse.

Ce dossier contient les principales pièces, les principaux documents qui font étape dans toute cette histoire de la classification. Vous serez à même de voir jusqu'à quel point nous avons tronqué ou biaisé l'information, n'est-ce pas? De plus, nous avons inclus un dossier spécial d'information que nous avons imprimé pour chacun de nos membres. Vous pourrez, en le feuilletant, voir quel soin nous avons pris à décrire avec précision tout le fonctionnement du mécanisme de classification et ses répercussions éventuelles. Nous avons trouvé que le meilleur argument, quant à nous, était de décrire les offres patronales avec beaucoup de soin dans la page 8, l'avant-dernière page. Nous avons d'ailleurs accordé plus d'espace aux offres patronales qu'à nos propres propositions, étant donné que, pour nous, ceci faisait mieux la preuve que la situation était inacceptable.

M. LE PRESIDENT: Page des décès. M. CHARBONNEAU: Page des décès?

M. LE PRESIDENT: C'est-à-dire, à la page 8, la dernière.

M. CHARBONNEAU: Oui, vous avez raison; M. le Président, je ne peux faire autrement que de vous donner raison en ce préambule. Vous avez aussi d'autres documents, qui sont nos plus récents communiqués sur la situation; nous donnons notre conception sur le gouvernement en tant qu'employeur et aussi la raison pour laquelle nous avons été forcés de réclamer la réunion de la commission parlementaire pour faire plus de lumière dans cette affaire.

Nous avons aussi inclus toutes les décisions du comité provincial de classification, document très technique que vous allez retrouver. Nous avons joint un dossier qui nous vient de l'Alliance de Montréal et qui décrit exactement quels sont les effets de la classification ou reclassification pour les enseignants de ce syndicat. Enfin, nous avons joint de nouveau à cet envoi la lettre que j'adressais moi-même aux membres de l'Assemblée nationale, en date du

23 Janvier, qui, d'après nous, résume à grands traits ce débat. Puisque nous sommes devant une commission parlementaire, M. le Président, je vais commencer par vous dire en quelques mots ce que nous espérons de notre venue ici.

Le conflit sur la classification des enseignants, qui, aux yeux de certains, a dégénéré en une crise scolaire grave, en est arrivé, à notre point de vue, à une véritable impasse. Sans croire aux miracles d'une commission parlementaire, la Corporation des enseignants est tout de même d'avis que, dans les circonstances, un tel recours peut nous permettre de formuler les questions de fond, de situer le débat au-delà de la technique, là où il se doit d'être maintenant.

Disons qu'au point de départ, tout de même, il nous aurait semblé plus normal que le gouvernement convoque la commission parlementaire de l'Education plutôt que celle de la Fonction publique. En effet, le ministre de la Fonction publique, qui est un des signataires de notre entente provinciale, en convoquant sa propre commission parlementaire, se place dans une situation quelque peu délicate, puisqu'il est appelé par la force des choses à être témoin de ce que les parties ont à dire, tout en étant lui-même une partie qui a quelque chose à dire ou, en tout cas, qui a eu quelque chose à dire en février. La commission parlementaire de l'Education aurait été une instance plus appropriée pour toucher le fond du débat, puisque toute cette question est reliée de très près à l'évolution du contexte scolaire depuis 1966, comme l'a dit M. Sirois. Il va sans dire, tout de même que nous constatons avec satisfaction l'addition récente ou la venue du ministre de l'Education aux travaux de cette commission parlementaire, qui rassemble, en outre, deux anciens ministres de l'Education et qui fait place aux représentants de deux formations politiques que nous n'avions pas eu l'occasion de rencontrer lors de nos comparutions antérieures devant d'autres commissions parlementaires.

M. CARDINAL: C'est presqu'un conventum.

M. CHARBONNEAU: Nul doute qu'ainsi constituée, la commission parlementaire nous permettrait tout de même d'aller au fond des choses et ne se contenterait pas de nous faire parler de mécanismes ou de techniques de relations de travail.

Ici, nous devons marquer une certaine inquiétude devant les propos ou l'orientation que le ministre L'Allier a semblé vouloir donner à la commission parlementaire de la Fonction publique dans son allocution du mardi 2 mars, devant l'Assemblée nationale. Tout en convoquant la commission parlementaire et en recevant l'appui des partis de l'Opposition, M. L'Allier a tenu à encadrer de la façon suivante le travail de cette commission. Je cite ses propos: "A l'occasion de la commission parlementaire, dit-il, sera sûrement abordé le fond d'un certain nombre de questions,mais ce n'est pas le but premier de cette commission." Et ensuite, le ministre parle de grève illégale, de difficulté de rencontre entre les parties, de difficulté intersyndicale, et il dit souhaiter que la commission parlementaire fasse la lumière sur toutes ces questions. "Tout au plus, poursuit-il, la commission pourra-t-elle, à mon avis, suggérer des mécanismes pour que les parties puissent continuer à s'intéresser davantage au classement, aux élèves, plutôt qu'à des problèmes qui seraient propres à l'une ou l'autre des parties et qui n'auraient rien à voir avec les problèmes réels".

Quant à la partie syndicale, M. le Président, elle espère vraiment que le débat que nous aurons devant cette commission parlementaire permettra non seulement d'échanger de l'information, objectif que nous partageons avec le ministre L'Allier, mais permettra à tous de se faire une idée réelle des intentions profondes de la partie patronale et du gouvernement dans toute cette affaire. Nous sommes venus ici parce que ce litige, qui était à l'origine un problème de relations de travail, une question technique, est devenu, depuis les deux derniers mois, un problème majeur qui touche toute notre société. A la suite des événements survenus depuis deux mois au sujet de la classification des enseignants, nous pouvons affirmer que ce problème a fait surgir un malaise psychologique profond chez plusieurs groupes de notre société: enseignants, parents, étudiants et autres groupes de travailleurs, même. Et l'attitude globale de la partie patronale, tout au long de cette affaire, n'a pas été sans nous rappeler le bon temps où un premier ministre disait que la reine ne négocie pas avec ses sujets.

Actuellement, la partie syndicale estime que la négociation ne lui a pas fourni et ne peut plus lui fournir par elle seule de réponses satisfaisantes aux questions de fond qui sont en cause, et la CEQ s'attend que, dans les prochaines heures, devant cette commission parlementaire, le gouvernement dise clairement comment, en tant qu'employeur, il entend jouer son rôle sur la classification ou quant à la classification des enseignants.

C'est pourquoi, pour notre part, nous nous opposerons à ce que le débat ne s'en tienne qu'au niveau des mécanismes de relations de travail, des querelles de juridiction ou des analyses subtiles ou stériles de textes des offres patronales ou syndicales seulement. Pour nous, même si nous admettons, avec le ministre de la Fonction publique, qu'une commission parlementaire n'est pas un lieu de négociations en soi, nous ne pouvons accepter cette orientation qui consiste à minimiser le travail de la commission et en restreindre la portée au niveau des recettes et des bons conseils.

Le gouvernement a-t-il, oui ou non, une pensée précise en matière de relations de travail avec ses enseignants? Comment entend-t-il prendre ses responsabilités comme employeur et comme partie à la convention collective?

Comment entend-t-il donner suite à l'insatisfaction que ses représentants ou que ses dirigeants ont exprimée quant au fonctionnement du comité de classification? Comment entend-t-il remédier à cette insatisfaction qui n'était pas que celle des enseignants, comme l'a noté tout de même M. L'Allier dans son introduction? La partie patronale a-t-elle des orientations de fond quant à la négociabilité du classement des enseignants? Et les deux ministres de l'Education et de la Fonction publique veulent-ils vraiment donner le mandat à leurs porte-parole de régler cette question par la libre voie de la négociation?

Quand la partie patronale ou le gouvernement auront répondu de façon satisfaisante à ces questions devant la commission parlementaire, il n'y a pas de doute que les négociations sur le plan technique pourront se poursuivre avec de meilleures chances de succès.

Mais nous voulons que ce soit bien clair au départ : il ne saurait être question pour nous de retourner à une table de pseudo-négociations, pour nous faire offrir des mécanismes de consultation et nous faire dire que nos demandes seront étudiées dans les meilleurs délais.

Nous aussi, nous avons une certaine partie d'information à donner. C'est, évidemment, l'autre face de la lune, la face cachée par M. Sirois, que je vais être obligé de vous révéler.

Nous allons vous expliquer, MM. les membres de la commission parlementaire, comment se crée une impasse en relations de travail au gouvernement du Québec.

Le 4 novembre 1969, au terme d'une négociation qui avait duré 28 mois, nous avons signé une première entente provinciale pour le secteur scolaire. Au chapitre 6, qui traite de la rémunération des enseignants, certains articles prévoient le classement des enseignants pour fins de traitement, sur la base de deux facteurs: scolarité et expérience. L'article 6-1 classe les instituteurs sous neuf catégories, correspondant à des diplômes ou à des études valant de douze à vingt ans de scolarité pour fins de rémunération.

Cependant, c'est ici qu'intervient le rôle du comité de classification, l'évaluation en années de scolarité de certains brevets et de certaines qualifications. Je prends ces expressions parce que ce sont celles de la convention. Naturellement certains et certaines, ça veut dire toute une quantité de titres qui sont énumérés à l'entente — comme le bachelor's degree et certaines autres qualifications additionnelles, ainsi que l'évaluation en scolarité des cours de méthode, fut confiée en priorité au comité provincial de classification. Ce mécanisme est décrit et nous n'avons rien à redire sur la description qu'en a faite M. Sirois et qui vous est, d'ailleurs, présentée dans notre dossier spécial. Le fonctionnement était celui-là.

Comme le précise un autre paragraphe de l'entente, les décisions du comité provincial sont en principe finales, lient l'instituteur, le syndicat, la commission et le ministère et elles doivent être attestées par un écrit officiel, signé par le ministre ou par son représentant. C'est ce qui m'oblige à réfuter tout de suite l'affirmation qui a été faite, à savoir que 25,000 enseignants étaient classés actuellement. Cela n'est pas possible étant donné que le ministre n'a émis aucune attestation de ce genre à 25,000 enseignants. Pour plus de renseignements, on s'en rapportera au dossier.

Ce mécanisme de classification est donc confié à une clause ouverte — en langage de convention collective — c'est-à-dire à un comité qui, sur la base d'études à conduire, prendra des décisions affectant le classement des enseignants, décisions dont la nature est, pour une certaine part, imprévisible au moment de la signature de l'entente.

La nomination du président fut très difficile — on vous l'a dit — mais, finalement, c'est par une décision du président du conseil d'arbitrage provincial que M. Rossignol, fonctionnaire du ministère de l'Education, fut nommé au poste de président du comité provincial et, en quelque sorte, imposé à la partie syndicale.

Le 14 mai 1970, plus de six mois après la signature de l'entente, se tient la première réunion du comité provincial de classification. Ce comité eut, dès le départ, la tâche pénible. Le fonctionnement et l'appui technique à ce comité devaient être fournis par le gouvernement aux termes de l'entente. Sans secrétariat entrafné, sans personnel de recherche pour l'appuyer, ce comité dut mettre les bouchées doubles pour tenter d'établir les normes de classement des catégories de brevets et de titres, que j'ai mentionnés tout à l'heure. En effet, ce travail était déclaré prioritaire et devait être fait avant le 30 novembre 1969. Première réunion du comité, le 14 mai 1970.

Le 19 août 1970, à la suite des décisions prises par le président du comité provincial de classification concernant certains brevets supplémentaires, complémentaires, supérieurs, etc., le représentant de la CEQ au comité provincial de la classification souligne au président du comité que certaines de ses décisions maintiennent ou établissent une discrimination entre les hommes et les femmes qui ont obtenu, par exemple, un brevet supérieur ou complémentaire en 1939 et 1940, puisque l'on reconnaît aux hommes, pour ces mêmes années, une ou deux années de scolarité de plus qu'aux femmes pour des brevets de même validité.

Voilà un genre de décisions qu'a prises le président du comité. Le 20 août 1970, le représentant de la CEQ au comité provincial proteste également contre la manière dont le président du comité prend ses décisions. Il tire ses pouvoirs — nous nous en souvenons — du défaut d'unanimité des six autres. D'après la CEQ, le président ne peut pas et ne doit pas statuer sur des questions qui n'ont pas été soumises pour fins de débats au comité ou qui n'ont pas fait l'objet d'un vote. Si on veut

constater le défaut d'unanimité, il faut premièrement discuter de la chose et deuxièmement faire voter les gens sur la chose. Cela n'a pas été fait dans au moins douze décisions prises par le président du comité.

D'après nous, le président a fait un usage abusif de ses prérogatives dans une douzaine de décisions, et d'autres décisions sont en contravention avec le règlement no 5 que l'on a décelé ou proposé comme norme définitive de classement. Ainsi, la décision 27, que vous trouverez au verso de notre document, se lit comme suit: "Le diplôme d'études collégiales obtenu après deux années d'études dans un CEGEP est évalué à treize ans de scolarité". Or, 80 p. c. à 90 p. c. des étudiants de CEGEP font d'abord douze ans de secondaire et deux ans de collégial, ce qui fait quatorze ans aux termes du règlement 5. On peut le vanter, encore faudrait-il respecter ce document.

Devant cette manière d'agir du président du comité, le représentant de la CEQ conteste officiellement ces décisions le 21 août et se retire du comité devant le refus du président d'amender les décisions et de reconnaître qu'il a abusé de ses prérogatives. Le 25 août, les trois représentants syndicaux de la CEQ et des organismes anglophones, devant l'imbroglio qui était en train de se créer au comité provincial, demandent un ajournement sine die des travaux du comité pour aller vérifier leur mandat auprès de leurs organismes. Le 8 septembre, ils reviennent et déposent une requête au président du comité provincial afin de l'amener à corriger un certain nombre de décisions.

Nous soutenons qu'il a excédé sa juridiction, qu'il n'a pas respecté le fonctionnement prévu et qu'il a dérogé au règlement 5. La réponse du président du comité est qu'il n'y a pas lieu de revenir là-dessus et que ce serait retarder l'évaluation de la scolarité des professeurs au Québec. Pour le président Rossignol, pas de problème. Le comité, par ailleurs, a continué son travail sur d'autres titres qu'il avait à évaluer. En octobre, nous avons cherché à utiliser certaines mesures de recours internes à la convention: procédures de grief, encadrement du président du comité provincial par le président du conseil d'arbitrage provincial. Chaque fois, ce fut peine perdue, ce qui nous confirma d'ailleurs l'à-propos de notre démarche suivante: le 16 novembre 1970, la CEQ obtient une rencontre avec le sous-ministre de l'Education, qui s'était fait accompagner du responsable des relations de travail de ce ministère, M. Huot. Nous leur faisons part des orientations déplorables prises par le président du comité provincial.

M. le sous-ministre nous fait remarquer que si l'on entrevoyait qu'il puisse y avoir quelque chose à faire clarifier, le mécanisme approprié résidait dans l'utilisation de l'article 9.4 de la convention qui nous permet de convoquer les autres parties à l'entente pour discuter d'un problème. Et de plus, nous suggère-t-il, advenant le cas où il n'y aurait pas de terrain d'entente à cette table, il dit qu'il existe des tribunaux de haute instance à qui nous pourrions nous adresser si nous le jugions opportun, ce qui a d'ailleurs scandalisé les sous-ministres d'autres ministères quand on l'a fait.

Le 2 décembre 1970, toujours dans le but de faire comprendre aux autorités que le problème de la classification des enseignants menace de prendre de l'envergure à très court terme, la CEQ et l'Alliance des professeurs de Montréal rencontrent le ministre de l'Education. La CEQ dépose alors un dossier — essentiellement celui qu'on vous a remis dans notre dossier aujourd'hui — et ce dossier fait état des effets néfastes de la déclassification de certains de ses membres, et demande au ministre une intervention rapide et rigoureuse, ce que nous promet le ministre en une réponse claire et rapide à cette question.

Entre-temps, le 15 décembre, les représentants syndicaux, pour donner suite à la suggestion du sous-ministre de l'Education, invitent les représentants de la partie patronale à venir discuter de la question en vertu de l'article 9.4 qui dit que l'on peut se rencontrer de temps en temps pour discuter de tout problème et trouver les solutions. Dans cette convocation, nous mentionnons justement que nous serions intéressés à discuter des problèmes de classification.

Cette lettre fut laissée sans réponse jusqu'au 26 janvier 1971. Je prends le temps de démonter minutieusement ici cette machine à impasses qui se trouve quelque part entre le ministère de l'Education et le ministère de la Fonction publique.

Devant une telle accumulation de négligences de la part de notre employeur, le 19 décembre, le conseil provincial de la CEQ dénonce les lenteurs du comité provincial de classification, autorise le dépôt à la cour Supérieure d'actions en nullité, toujours pour donner suite à la suggestion du sous-ministre de l'Education, en nullité contre certaines décisions du comité provincial, et nous demandons la démission du président du comité provincial, M. Rossignol.

Ces demandes sont acheminées en bonne et due forme au responsable des relations de travail du ministère dès le 23 décembre. Le 11 janvier, M. Huot, le responsable des relations de travail au ministère de l'Education, avise la CEQ de la démission de M. Rossignol de son poste de président du comité provincial en ces termes: "C'est à regret que le sous-ministre de l'Education doit accepter la démission de M. Rossignol, écrit M. Huot, et il se doit de le relever de la tâche que les parties lui avaient confiée." Le travail du comité est alors suspendu jusqu'à nouvel ordre.

Notons en passant que le seul fait que le Président du comité provincial, M. Rossignol, ait cru bon d'adresser sa demande de démission au sous-ministre de l'Education plutôt que de l'adresser aux six parties à l'entente dont il

relevait dans son mandat indique passablement bien l'idée que M. Rossignol se faisait personnellement de son mandat et de son statut.

Nous nous posons carrément la question: le président du comité provincial a-t-il jamais cessé d'être un fonctionnaire du ministère de l'Education?

Vers le 20 janvier, la CEQ conteste officiellement devant la cour Supérieure quinze des quarante décisions du Comité provincial pour les raisons que je vous ai expliquées tout à l'heure.

Le 25 janvier, les enseignants de la région de Montréal passent à l'action directe et, le 26 janvier, à la suite d'invitations répétées et pressantes lancées par les parties syndicales, le gouvernement et la Fédération des commissions scolaires acceptent de nous rencontrer sur la question de la classification, entre autres. Cette première rencontre de négociations, qui fut en réalité une séance d'information à l'adresse de la partie patronale, a permis aux représentants des enseignants d'expliquer toute l'ampleur de la question et de relater les démarches qu'ils avaient menées dans le but d'obtenir une discussion de fond sur la classification.

Notons bien que le 26 janvier les représentants syndicaux sont les seuls à avoir préparé un dossier sur la question, comme ils étaient les seuls d'ailleurs à vouloir discuter de certaines formules de remplacement du Comité provincial de classification actuel, comme ils étaient aussi les seuls à vouloir aborder les problèmes de fond et les critères de classement des enseignants. La partie syndicale a été renversée, le 26 janvier, de constater l'ignorance, affectée ou non, des représentants patronaux qui manifestaient de la naïveté et qui disaient venir voir quel était le problème des enseignants ou le problème du syndicat alors qu'ils étaient accompagnés des représentants de la CECM pour qui le problème n'était sûrement pas un bobard syndical, depuis le début de décembre au moins.

La rencontre suivante, prévue pour le 29 janvier, n'a pas eu lieu parce que la partie patronale s'est mise à exiger des enseignants le retour au travail.

Dès le lundi suivant, le 1er février, il n'y avait aucun débrayage à la CECM. Cependant, les divers membres de la partie patronale n'ont apparemment pu s'entendre pour rencontrer la partie syndicale qui les avait évidemment convoqués pour le lundi suivant.

A compter du 2 février, les débrayages ont recommencé et la partie patronale a toujours posé les mêmes conditions.

Le 12 février, la CEQ obtient de ses syndicats une suspension de l'action pour permettre une séance de négociations intensives qui aurait pu durer trois jours, le 12 février étant un vendredi. Au lieu de nous donner sa conception du problème, la partie patronale se contente encore une fois de poser des questions à la partie syndicale, lui demande de préciser ses revendications et fait semblant de s'étonner de la complexité de la situation.

Le samedi 13 février, après moins de sept heures d'échanges avec la partie syndicale, la partie patronale demande l'ajournement des négociations au mardi 16 février pour étudier la demande syndicale.

Le mardi 16 février, la partie patronale dépose son offre à la partie syndicale mais refuse toute discussion sous prétexte que nous avons brisé la trêve que nous n'avions d'ailleurs annoncée que pour une journée et non pas pour une durée indéterminée. En même temps que cette occasion perdue de négocier pendant trois jours d'une façon intensive, plusieurs groupes d'enseignants ont également perdu tout espoir qu'un règlement satisfaisant puisse être atteint par la voie des négociations directes entre les intéressés, la partie patronale ayant laissé entendre ou ayant laissé l'impression, à chaque fois, de semaine en semaine, qu'elle découvrait le problème et ayant bien laissé voir qu'elle tenait à utiliser les trêves d'enseignants pour d'autres fins que pour négocier vraiment.

Le 23 février, dans un effort ultime de négociation et dans le but de s'assurer en toute bonne foi de l'intention réelle de la partie patronale de négocier la classification des enseignants, la CEQ demande à ses syndicats de suspendre une nouvelle fois l'action et reprendre les négociations.

Le 25 février, il y a une rencontre de trois heures entre les parties. Cette rencontre consiste, une fois de plus, en une série de questions posées par la partie patronale à la partie syndicale. Sous l'apparence de gens bien intentionnés, nous avons encore eu l'impression que les représentants patronaux ont cherché à utiliser une trêve, décrétée dans les circonstances que vous savez, pour faire traîner les discussions.

Evidemment, les prétextes ou les raisons sont nombreux. Etudes, consultations, calculs, mais pas toujours calculs financiers, à notre avis. Il nous est, cependant, apparu clairement, pendant ces journées, que la partie patronale en dehors de la table de négociations s'occupait beaucoup plus de stratégie que d'étude pendant ces heures où elle s'est mise, comme par hasard, à exploiter des thèmes du genre possibilité de sanctions contre des petits groupes d'agitateurs, rivalités intersyndicales, etc.

Le 26 février, devant ce genre de manoeuvres, nous avons demandé à la partie patronale, par la voie de nos représentants et par la voie de la radio deux heures après, de nous dire si, oui ou non, elle était disposée à négocier le classement des enseignants et à enrayer tous les désavantages financiers consécutifs au reclassement de certains enseignants. Ces deux questions n'étaient pas un durcissement de la position syndicale; elles n'étaient que la reprise, en termes simplifiés, de la position syndicale exprimée depuis les vagues rencontres que nous avions eues.

Le même jour, la partie patronale nous rencontre pour nous affirmer que nous avons durci nos positions et qu'elle est disposée à négocier pourvu qu'elle sache ce qu'on lui demande. Pour nous, c'était bien clair: c'étaient deux questions de dix lignes. Devant autant de manoeuvres et de calculs stratégiques de la part de la partie patronale, le conseil provincial de la CEQ le dimanche 28 février, a réaffirmé en séance spéciale son objectif de scolarité garantie et en a conclu que, par la seule voie de la négociation, il n'y avait plus guère de possibilité de faire avancer le débat quant au fond. C'est pourquoi la CEQ a réclamé la convocation d'une commission parlementaire, recours ultime devant permettre, par la suite, à une négociation d'aboutir à de meilleurs résultats, à condition, cependant, que cette commission parlementaire permette à la partie gouvernementale de nous dire comment elle compte s'orienter dorénavant devant les questions de fond que nous avons posées et desquelles nous ne démordrons pas dans le présent débat.

Nous avons maintenant la certitude que le porte-parole patronal, à la table de négociations, ne peut en négocier davantage que ce que lui permettent les orientations générales des autorités dont il dépend. C'est devant une instance politique comme celle-ci que nous espérons obtenir une réponse claire à des questions que nous estimons fort claires. C'est dans cette perspective également que nous souhaitons la contribution des autres membres de la commission parlementaire. Cette chronologie est peut-être un peu fastidieuse. Les événements et les interventions de la CEQ depuis le début de ce litige montrent tout de même jusqu'à quel point la partie , syndicale a été polie et patiente envers la partie patronale depuis le mois d'août dernier; politesse et patience dont nous nous mordons les pouces chèrement aujourd'hui. Nous avons utilisé et épuisé progressivement tous les recours imagina- bles. Nous avons franchi graduellement toutes les étapes, nous avons frappé à toutes les portes; toujours et partout surdité et (ou) mutisme.

Nous pouvons affirmer, pour clore ce bilan, que le gouvernement a fait preuve de négligence devant ce problème, lui qui en a été saisi au niveau du ministre de l'Education, au début de décembre; au niveau du sous-ministre, en novembre et au niveau officiel de la table patronale, dès la mi-décembre. Il ne lui servirait à rien aujourd'hui, d'esquiver les conséquences de ce bébé non désiré qu'est le problème de la classification actuellement.

M. CHARRON: M. Charbonneau, serait-il possible, avant que vous n'entamiez une autre partie de votre exposé, d'ajourner immédiatement. Il faut considérer qu'il est 18 heures. Ou, si vous voulez commencer tout de suite. De toute façon, avant que vous ne preniez un autre cheval de bataille...

M. BERTRAND: Nous aurons terminé d'ailleurs d'ici cinq minutes. Vous êtes obligé de continuer?

M. CHARBONNEAU: Si je veux donner une autre face de la lune, car il faut pouvoir au moins en faire le tour. Nous pouvons revenir.

M. BERTRAND : 8 h 15.

M. LE PRESIDENT: Je n'ai pas d'inconvénient à voir l'autre face de la lune, mais pouvez-vous nous la faire voir à l'intérieur de quatre minutes?

M. CHARBONNEAU: Difficilement, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Dans ce cas, nous ajournons à 8 h 15 et vous nous montrerez alors l'autre face. Merci.

Reprise de la séance à 20 h 25

M. BOSSE (président de la commission permanente de la Fonction publique): A l'ordre, messieurs! Je déclare la séance ouverte et j'invite M. Charbonneau à terminer son exposé et à nous présenter, comme il le disait, l'autre face de la lune.

M. CHARBONNEAU: M. le Président, cet après-midi, j'ai essayé de montrer toutes les étapes par lesquelles la partie syndicale avait passé avant d'en arriver à déclarer que, dans toute cette affaire, nous étions face à une impasse par le recours à la négociation elle-même. J'ai essayé d'être le plus précis possible et de faire état de toutes les démarches que nous avons faites, mais qui sont toujours restées sans réponse valable de celui qui est notre partenaire et qui est coresponsable du bon fonctionnement de cette convention collective au même titre que nous.

J'ai essayé de montrer que, finalement, ce qui pouvait demeurer comme ligne de fond à tout cela, c'est que toute cette affaire de la classification, aux yeux de notre employeur, était un problème de syndicat, un problème d'enseignants et qu'il refusait jusqu'à maintenant d'admettre que lui aussi avait une responsabilité, un devoir quant à la bonne administration de cette convention collective et quant au maintien d'un climat sain de relations de travail avec notre groupe d'employés.

Nous poumons, nous aussi, faire notre revue historique à partir de 1966, comme l'a fait le porte-parole de la partie patronale. Ce serait à partir des mêmes événements, mais, évidemment, pour en tirer d'autres conclusions. J'ai déjà parlé assez longuement sur l'ensemble de cette question. Je voudrais tout simplement dire que, si on veut aller rapidement, depuis 1966, ce qu'on trouve dans notre histoire de relations de travail, c'est une série de normes et de lois. M. Sirois l'a amplement prouvé quand il s'est référé aux normes de 1966, puis au bill 25. Des normes et des lois, c'est peut-être une manière d'établir des relations de travail, mais c'est une manière bien spéciale, il faut l'admettre également. Il a dit que tout cela avait été dans le cadre d'une planification.

Nous pourrions démontrer, nous aussi, que les normes de 1966, le bill 25 de 1967 et la présente convention collective sont parsemés de crans d'arrêt. Quand il dit que toutes ces mesures tendaient à la cohérence du système, nous pourrions montrer qu'au contraire elles ont figé l'évolution normale du système et l'évolution normale d'une politique de main-d'oeuvre dans le secteur scolaire. On les a figées par des normes et des lois, au lieu de les laisser aller selon une évolution qui aurait été plus naturelle, celle du libre jeu de la concurrence et de la mobilité de la main-d'oeuvre dans le secteur scolaire.

C'est bien beau de vanter la cohérence du bill 25! C'était une cohérence de papier premièrement, et ce nivellement des salaires a tout simplement engendré un drainage. Il a fait que les régions éloignées, les régions qui avaient eu de la difficulté à s'attirer un personnel de qualité l'ont perdu au lendemain du bill 25 également.

Parler de cohérence et de nivellement, ce n'est qu'une face du problème. L'autre aspect est que les régions éloignées qui, par le jeu de l'offre et de la demande, pouvaient s'attirer du personnel de qualité comparable à ceux des villes l'ont perdu par la suite, justement par le nivellement qui n'est pas, à notre avis, une véritable planification au service de toutes les régions telles qu'elles sont dans le Québec.

Nous pourrions nous aussi faire cette lecture historique. Tout ce que cela prouverait est que — et M. Sirois l'a fort brillamment fait — les incohérences du passé dans le domaine scolaire sont affreuses, sont multiples et prennent toutes sortes de dimensions. Il a multiplié les exemples — évidemment, avec les données que la Fédération des commissions scolaires peut lui fournir, il est en mesure de le faire bien mieux que nous — des incohérences du passé en nous lançant une demi-douzaine d'exemples que je pourrais reprendre à mon compte, tout simplement en les appelant non des disparités, mais des incohérences subventionnées par l'Etat du Québec.

Ce n'est pas la première fois que la corporation et les syndicats d'enseignants soulignent la lenteur de notre gouvernement à établir sa cohérence dans les administrations scolaires et par contre une certaine hâte — inopportune à notre avis — d'établir cette même cohérence du côté de la main-d'oeuvre. Ce double jeu — tantôt rapide, tantôt lent — est peut-être dû à d'autres considérations que celles auxquelles je veux m'en tenir pour le moment. Cependant, je tiens à souligner et à rappeler que le groupe de travailleurs que nous représentons ne tient pas à payer les dettes et les pots cassés des négligences accumulées au niveau ministériel et gouvernemental du Québec.

La partie patronale s'est chargée de présenter la position syndicale beaucoup mieux d'ailleurs que la position patronale et d'une manière, à mon avis, caricaturale. Je vais essayer de le démontrer.

Premièrement, ce qui a caractérisé, à mon avis, le premier exposé, c'est l'attitude légaliste à laquelle ce porte-parole ou ceux qu'il représente semblent vouloir s'en tenir. Il a parlé avec beaucoup de verve du bris de contrat des enseignants, bris de contrat à trois dimensions, dit-il, au niveau de l'entente, au niveau de la convention, au niveau du contrat individuel. Si nous voulions parler du bris de contrat, nous en aurions une longue liste nous aussi. Je vais, tout simplement, donner deux ou trois exemples. Je pense que nous aurons l'occasion d'en énumérer d'autres, le cas échéant.

Cette convention prévoit également, par une autre clause ouverte, que, sur convocation de la partie syndicale, la partie patronale doit venir continuer à négocier les conditions de travail relatives aux bibliothécaires scolaires et aux professeurs en orientation. Or, après deux convocations dont nous pourrions vous donner les dates, deux convocations laissées sans accusé de réception, cette négociation n'est toujours pas possible. C'est un bris de contrat de la part de la partie patronale.

En vertu de l'annexe 10 de l'entente, un comité provincial doit s'occuper des problèmes relatifs à l'enfance inadaptée. Le président de ce comité est un fonctionnaire du ministère de l'Education, je pense. Pour la première fois, la semaine dernière, ce fonctionnaire a convoqué le comité. Cela aussi, à notre avis, est un bris de contrat, une négligence qui équivaut à un bris de contrat. Ce problème de l'enfance inadaptée ne pourra pas être traité avec tout l'éclairage nécessaire lors de la prochaine négociation parce que ce comité n'a pas travaillé.

Il y a un autre comité provincial qui doit s'occuper d'étudier les modes de consultation à établir au niveau provincial entre les corporations d'enseignants et le ministère de l'Education. Ce comité n'a encore rien produit. Je pense que nous avons toujours montré notre disponibilité à y travailler, mais échafauder un système de consultation à travers les dédales des quelque 400 comités consultatifs que le ministère de l'Education a déjà eus en marche, je pense que c'est un défi, pour le moment, que le ministère de l'Education semble avoir quelque objection à relever.

Cela aussi, à notre avis, c'est une négligence qui équivaut à un bris de contrat.

La classification des enseignants pourra se faire quand les commissions scolaires auront envoyé les dossiers des enseignants au gouvernement. Or, à la fin de décembre, les chiffres officiels au niveau du comité étaient qu'il y avait au maximum 450 commissions scolaires qui avaient envoyé des pièces concernant leurs enseignants au gouvernement.

Donc, 450 sur — ça varie un peu — environ 1,000, je pense que c'est un pourcentage assez faible. De ces 450, à peu près 250 avaient envoyé des dossiers majoritairement complets. Donc, environ 25 p. c. C'était impossible, même si le mécanisme avait bien fonctionné, de réaliser la classification des enseignants comme prévu à l'entente. C'est aussi un bris de contrat, à notre avis.

J'ai commencé ma liste par la fin et je suis rendu à la moitié. Si on veut aborder l'affaire sous l'aspect légaliste, nous pourrions aller loin, nous aussi, dans le portrait que nous pouvons faire de notre employeur.

Quand nous avons entrepris cette discussion sur la classification, après le vide que nous avons rencontré le 26 janvier, nous nous sommes aperçus, quand le ministre de l'Education en particulier est entré dans la ronde, que ce qui intéressait à un très haut point la partie patronale dans son ensemble, c'était d'utiliser les difficultés rencontrées au niveau d'un mécanisme pour se rapproprier d'une façon exclusive le pouvoir d'évaluer la scolarité des enseignants pour fins de traitement.

M. SAINT-PIERRE: M. le Président...

M. CHARBONNEAU: Cela peut équivaloir à un bris de contrat.

M. LE PRESIDENT: Un instant, s'il vous plaît, M. Charbonneau.

M. SAINT-PIERRE: M. le Président, est-ce qu'on me permettrait d'entrer dans la ronde de nouveau? Nous avons fait preuve de beaucoup de patience en écoutant l'exposé de M. Charbonneau. Jusqu'ici, j'ai l'impression qu'on a ouvert bien des portes qui étaient déjà ouvertes, en nous faisant un relevé assez chronologique de tous les événements. M. Charbonneau pourrait-il nous dire précisément quelle solution il entrevoit au problème sans, pour autant, rebrasser tout le passé?

M. CHARBONNEAU: C'est un passé tout à fait récent que j'étais à rebrasser, celui qui n'est pas encore terminé, donc qui s'appele le présent.

M. SAINT-PIERRE: On a un problème. On pourrait en parler pendant cinq ans, mais on veut le résoudre le plus rapidement possible. Pouvez-vous nous dire exactement ce que vous entrevoyez comme possibilités pour résoudre le conflit? Quelle est la position de votre centrale syndicale face au conflit et face à certains de ses éléments? Qu'avez-vous à suggérer?

M. CHARBONNEAU: Si c'est le temps de passer aux choses positives, je vous renverrai — puisque c'est ça que vous appelez du texte positif — aux positions que nous avons transmises à l'avant-dernière page de notre dossier spécial qui s'appelle "Le résumé d'un compromis syndical", présenté le 13 février à 4 heures.

Evidemment, on a fait état tout à l'heure que les demandes syndicales avaient quelque peu été modifiées en cours de route. Ce que n'a pas dit la partie patronale à ce moment-là, c'est qu'elles avaient été modifiées en diminuant. C'est facile de dire que la partie syndicale a changé d'idée, a modifié son texte, mais c'est en retirant des aspects. La dernière position syndicale est celle qui est dans le rectangle de droite sur cette page et le fil de soie qu'a énuméré M. Sirois est pas mal moins long dans cette demande que dans celle qu'il a citée tout à l'heure.

Quand nous parlons de l'obtention d'une scolarité garantie, nous voulons dire que les conditions d'emploi qui ont été reconnues à tel enseignant au moment où il a été engagé par

son employeur ne seront pas changées sans que cela passe par un processus de négociations. Si je veux me résumer le plus simplement, c'est rien que ça et tout ça que cela veut dire.

Ceux qui caricaturent notre pensée en disant que nous sommes contre la planification, que nous sommes pour le retour aux incohérences de 1966, je pense qu'ils devraient plutôt prendre notre position syndicale et l'examiner. Et quand ils disent que nous avons durci progressivement nos positions, c'est sans doute qu'ils font allusion à ce texte du Conseil provincial de la CEQ, du 28 février 1971, que je vous lis, texte qui d'ailleurs n'a pas encore été présenté à la partie patronale, à la table des négociations, puisqu'il n'y a pas eu de séance depuis. "Le Conseil provincial de la CEQ réaffirme son objectif de scolarité garantie et réclame essentiellement, par voie de négociations, que la classification des brevets, diplômes et études soit confirmée dans l'entente provinciale elle-même, sous forme d'une liste applicable uniformément à tous les enseignants de la province."

Ceci est la meilleure réponse que je puisse donner à ceux qui veulent ne voir que des objectifs inaccessibles dans l'expression "scolarité garantie". Il ne faut pas partir en peur avec cette expression; il faut y voir des modalités de la réaliser.

Et, comme l'exprime notre proposition, nous sommes en mesure de discuter de la possibilité de réaliser dans le cadre d'un objectif de scolarité garantie, quelques pas en avant vers l'uniformisation, vers la standardisation provinciale du classement des enseignants. Ce qu'il faut bien voir, c'est que nous sommes à trois mois et demi de l'échéance de cette convention. Ce qu'on n'a pas pu réaliser en termes de planification au niveau des principes avec lesquels nous étions d'accord, ce qu'on n'a pas pu réaliser depuis 1968, nous ne voyons guère comment on pourrait le faire, on pourrait vouloir s'arroger l'autorité de le faire, de la part du gouvernement, en trois mois et demi.

Bien loin d'être pour le retour au passé, aux incohérences du passé, ce que nous voulons, c'est une modification négociée de ces incohérences. Ce à quoi nous nous opposons, c'est la réappropriation exclusive par la partie patronale de l'évaluation de la scolarité des enseignants qui a toujours été un facteur négocié de la rémunération des enseignants. Quand la partie patronale aura dit clairement son intention profonde quant à cette question, il sera possible, sans doute, d'envisager la reprise des négociations un peu plus tard.

Cependant, depuis le début du conflit actuel de la classification des enseignants, il faut bien voir que du côté syndical comme du côté du public, il est extrêmement difficile de percevoir l'intention de la partie patronale. Le problème a peut-être saisi le gouvernement à l'improviste. Cependant, son partenaire, la Fédération des commissions scolaires, veillait au grain. Se faufilant entre les deux ministres, le président de la Fédération des commissions scolaires en janvier et au début de février, s'est comporté en gérant du système. Il a réussi, à notre avis, à bloquer le débat à la fin de janvier et au début de février. Depuis, nous avons été en face d'une espèce de feu d'artifice de déclarations en dehors de la table des négociations pendant que le président de la Fédération des commissions scolaires, vers la mi-février, répétait à Trois-Rivières qu'il était contre toute concession aux syndicats d'enseignants et que, quant à lui, il continuait de préconiser les coupures rétroactives des traitements. Cela après avoir accepté quand même que la partie patronale dépose la position que M. Sirois a décrite. D'une part, le président de la fédération est donc contre toute négociation et contre toute concession.

Pendant ce temps, le ministre de la Fonction publique nous dit d'arrêter nos moyens de pression parce qu'il est prêt à négocier. D'après ce que les journaux nous rapportent, le ministre de l'Education, pour son compte, aurait déclaré que le classement des enseignants n'est pas matière à négociations. Alors, devant un tel chassé-croisé de déclarations quelque peu contradictoires, comment peut-on, du côté syndical, quand on veut négocier, en arriver à une entente, marcher sur du terrain valable et ouvrir des positions, avancer des propositions concrètes d'une façon unilatérale? C'est impensable. Nous sommes disposés à négocier, mais nous voulons bien savoir dans quelle orientation générale la partie patronale est prête à aborder cette négociation. Ce n'est pas par un barrage de stratégie et de propagande, à notre avis, que l'on pourra faire avancer le débat à la table de négociations. Nous nous demandons sérieusement si le gouvernement a vraiment l'intention de régler ce problème de la classification avec l'efficacité et la rentabilité dont il aime étiqueter la plupart de ses opérations.

Les questions pour lesquelles nous aimerions obtenir une réponse dans ce débat — je le répète, cela se situe nettement au-delà des mécanismes des recettes — sont: Comment se fait-il que le ministère de l'Education, informé en novembre et en décembre et, que la partie patronale informée depuis le 15 décembre de la situation, n'aient pas encore formulé de solution valable à tout le problème de la classification et non pas seulement à sa dimension monétaire, et financière à laquelle l'a réduit le porte-parole patronal tout à l'heure? Comment se fait-il que, profitant de difficulté de fonctionnement d'un mécanisme, la partie patronale en profite, au moyen d'un saupoudrage de quelques dizaines de milliers de dollars, pour se réapproprier une partie de convention collective qui avait été l'objet de négociations? Est-ce que le ministère de l'Education et le ministère de la Fonction publique peuvent dire publiquement qu'ils ont été satisfaits du système de classification prévu à l'entente proinciale? Peuvent-ils vraiment affirmer, comme l'a fait le ministre de

la Fonction publique, que ce système n'a indisposé que les enseignants?

Alors, les questions pour lesquelles nous attendons des précisions, dans ce débat, sont: Est-ce que le gouvernement, oui ou non, accepte de négocier, de régler par voie de négociations ce problème de l'établissement des normes d'évaluation de la scolarité des enseignants?

Est-ce que le classement des enseignants est négociable, oui ou non?

Et l'autre question: Est-ce que le gouvernement et les commissions scolaires sont réellement disposés à faire disparaître tous les désavantages financiers — coupures rétroactives, demandes de remboursement, manque à gagner, baisses de traitement au cours de l'année, etc., toutes les formes que cela peut prendre — occasionnés par le déclassement de certains enseignants?

L'offre financière de la partie patronale, nous pourrions démontrer — cela irait mieux avec un tableau parce que c'est assez technique—qu'elle comporte de sérieuses lacunes sur le plan financier. Ce n'est pas tout de dire à quelqu'un qu'on ne lui réclamera pas un certain montant. Il faut encore voir si cette personne ne subit pas, à la suite d'une déclassification, un manque à gagner pendant le reste de sa carrière ou pendant un ou deux ans, si on veut regarder rien que cette entente. On pourra revenir là-dessus s'il y a des questions.

Pour nous, ces questions sont fondamentales. Nous désirons avoir des orientations claires là-dessus, sans quoi il serait difficile de retourner au niveau d'une table de négociation — qui, forcément, plonge dans la technique — s'il n'y a pas d'abord cet éclairage général. Le porte-parole de la partie patronale nous a sommés ces jours-ci de nous brancher. Nous, c'est peut-être dans les branches que nous hésitons, mais lui, c'est dans la forêt. Il devrait choisir la forêt de la négociation ou le fouillis des mesures imposées unilatéralement. C'est facile de dire que la partie syndicale a des demandes confuses. Nous avons essayé de négocier. Nous avons essayé de reformuler nos demandes d'une façon de plus en plus acceptable pour fins de discussion. C'est facile de dire ça quand, de son côté, on n'a qu'une position et que c'est à prendre ou à laisser. On n'en déroge pas. C'est entendu qu'à ce moment on ne peut pas se faire accuser de grand-chose, sauf de ne pas vouloir négocier, sauf de préférer faire des déclarations en dehors de la table qu'à la table. Nous tenons à affirmer que nos récentes demandes ou la récente formulation de nos demandes n'a jamais dérogé au principe de fond que nous avons exprimé le 13 février. Les enseignants sont assez exaspérés de la situation. Vous l'avez vu en février. Ils ne nous autoriseront pas à retourner à une table de pseudo-négociations tant que nous ne saurons pas exactement l'intention réelle et profonde de la partie patronale.

Pour terminer, la CEQ tient tout de même à souligner l'aspect positif de certaines déclara- tions faites par certains éléments de la partie patronale qui ne désirent pas s'en tenir seulement à une attitude légaliste, comme nous en avons eu l'impression, je crois, dans l'exposé du porte-parole patronal. Il y en a dans la partie patronale qui cherchent à affronter le problème en véritables administrateurs. Je pense que c'est dans cette perspective que la CEQ, quant à elle, voudrait que ce débat se poursuive pour en arriver à voir des orientations de fond et non pas nous en restreindre tout simplement à la dimension des bons conseils, des mécanismes et des recettes. Si ce n'était que cela, le travail de la commission parlementaire, nous aurions tourné autour du pot; nous n'aurions rien réglé. Mais nous espérons pouvoir aller plus loin que cela avec vous. Merci.

M. LE PRESIDENT: Merci M. Charbonneau. J'inviterais maintenant M. Sparkes à nous faire son exposé.

Provincial Association of Protestant Teachers

M. Sparkes: M. le Président, membres de la commission, mesdames et messieurs...

M. LE PRESIDENT: M. Sparkes voudrait-il identifier le groupe qu'il représente pour le journal des Débats?

M. SPARKES: Je suis le président de la Provincial Association of Protestant Teachers, et je représente 7,000 enseignants dans le secteur protestant.

Tout d'abord, M. le Président, je crois qu'il y a lieu de constater que nos enseignants ne sont nullement opposés à la formulation d'un système de classement uniforme et cohérent au niveau provincial. Ce qui nous préoccupe, c'est que ce nouveau système ne soit pas imposé d'une manière brutale qui ne respecte pas les droits acquis d'un enseignant à la sécurité professionnelle.

Afin que vous puissiez comprendre plus clairement la position de la Provincial Association of Protestant Teachers dans le présent conflit du classement des enseignants, il est nécessaire que le problème entier soit envisagé dans son ensemble.

Nous avons donné des copies de notre mémoire qui est rédigé dans les deux langues.

Avant l'adoption du bill 60, en 1964, et la nomination d'un ministre de l'Education ainsi que l'établissement d'un ministère unifié de l'Education, il existait dans cette province deux systèmes d'éducation qui étaient presque autonomes: le système scolaire protestant et le système scolaire catholique, chacun étant responsable à son comité respectif selon la confes-sionnalité.

De plusieurs façons, le système protestant était semblable d'aspect à ceux des autres provinces du Canada et à ceux des Etats-Unis. Après 11 ans de scolarité aux niveaux élémen-

taire et secondaire, les étudiants obtenaient un certificat de fin d'études secondaires, et s'ils atteignaient les normes minimales établies par les universités (immatriculation junior, généralement une moyenne de 65 p. c. à 75 p. c. de 10 crédits) ils étaient acceptés en première année des programmes universitaires et, généralement, après quatre ans, ils obtenaient un diplôme appelé "Bachelor's degree". Toutefois, plusieurs écoles du système protestant offraient le programme de douzième année, lequel était reconnu comme équivalant à la première année d'université partout au Canada et les étudiants diplômés de ce programme étaient acceptés directement en deuxième année universitaire.

Ces personnes, généralement, recevaient un "Bachelor's degree" après trois autres années d'études complétées avec succès. Celles qui se dirigeaient vers l'enseignement devaient poursuivre une autre année de formation à l'enseignement, soit à McGill ou à Bishop's dans cette province.

Conséquemment, plusieurs enseignants présentement à l'emploi de commissions scolaires protestantes ont obtenu leur brevet d'enseignement classe 1, après quinze, seize ou dix-sept ans de scolarité, selon l'université qu'ils ont fréquentée, la durée de l'année scolaire et le nombre de matières étudiées par année. Evidemment, certains programmes étaient plus concentrés et accélérés que d'autres, et comme résultat, le système de classement et les échelles de salaire qui en ont résulté durant les négociations entre les syndicats et la PAPT et les commissions scolaires affiliées à la Quebec Association of Protestant School Board réflétaient non seulement les années de scolarité mais également le facteur qualitatif.

En 1953, la faculté d'éducation de McGill, après consultation avec la QAPSB et la PAPT, a introduit un programme concentré de quatre années menant au "Bachelor of Education", lequel programme avait pour but de donner aux futurs enseignants une bonne formation générale ainsi que des méthodes d'enseignement et d'expérience pratique, pour les mieux préparer à la profession d'enseignants.

Il avait alors été convenu par les trois parties que les diplômés de ce programme seraient acceptés à la profession d'enseignants sur la même base que ceux qui possèdent un "Bachelor's degree" plus une formation d'enseignement, et cette entente a été respectée au cours des années jusqu'à ce que le bill 25 soit adopté en février 1967. Jusqu'à ce temps, nos enseignants étaient classés selon les catégories I à VII, lesquelles ne représentaient pas nécessairement les années de scolarité, en plus de la formation secondaire. Conséquemment, ceci représentait un système logique et cohérent de classement pour tous les enseignants à l'emploi des commissions scolaires protestantes.

Le système de classement adopté à la suite du bill 25 était basé strictement sur les années de scolarité et a pris comme base le système d'éducation de langue française ou catholique.

Conséquemment, il fut nécessaire en avril 1967, pour la PAPT et la QAPSB, avec l'approbation du gouvernement, d'accepter un système de classement basé sur les équivalences qui s'appliquerait à l'échelle des salaires à travers la province.

Dans un effort en vue de rendre notre classement équivalent à celui du système catholique, il a été convenu que les enseignants possédant des "Bachelor degrees" avec "majeurs" et "honneurs" décernés par des universités reconnues seraient placés dans la catégorie 16, avec une année de formation pédagogique, dans la 17.

Les détenteurs de "Bachelor degrees" général ou "pass" furent placés dans les catégories 15 ou 16 respectivement. Toutefois, vu que la plupart des universités exigeaient que les étudiants prennent plusieurs cours dans la même discipline, très peu de nos enseignants, en fait, ont été placés dans les catégories 15 ou 16. Cette méthode de classement a été continuée jusqu'à ce que la présente entente entre en vigueur. Après une session de négociations longue et infructueuse sur le problème du classement à la table provinciale en 1968, le sujet a été remis entre les mains d'un comité paritaire — le comité provincial de classification — dont le mandat et les règles de fonctionnement étaient clairement indiqués dans l'entente. D'ailleurs, M. Charbonneau s'y est déjà référé.

Nous croyons fermement que tout système de classement sur le point d'être adopté par le ministère de l'Education doit respecter le principe des droits acquis. Le nouveau système de classification devrait prendre en considération le nouveau mode d'éducation au Québec et s'appliquer à ceux qui entreront dans la profession à l'avenir. Les règles du jeu ne devraient pas être changées sans que les droits acquis, par ceux exerçant présentement la profession d'enseignants, ne soient respectés. Permettez-moi de citer un exemple. A partir de maintenant, un enseignant débutant dans la profession avec un grade universitaire aura au moins 17 ans de scolarité (onze ans aux niveaux élémentaire et secondaire, deux ans de CEGEP, trois ans d'université, plus un an de formation à l'enseignement). Ceci fait 17 ans. Pourquoi un enseignant présentement employé devrait-il subir un déclassement, parce qu'il pouvait, en vertu du système précédent, atteindre le même niveau d'accomplissement en moins d'années, soit l'obtention de son premier diplôme universitaire?

Nous croyons que tout nouveau système de classement doit prendre en considération non seulement les années de scolarité mais également le niveau de connaissances.

Le présent conflit de classification sera résolu seulement lorsque le respect approprié sera accordé aux droits acquis et qu'une reconnaissance complète des équivalences sera établie pour ceux qui font partie du système protestant. Merci, messieurs.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Sparkes. J'inviterais maintenant M. Robert Dobie, président de l'Association provinciale des enseignants catholiques.

Provincial Association of Catholic Teachers

M. DOBIE: Je suis M. Robert Dobie, je représente la Provincial Association of Catholic Teachers, les 5,700 membres enseignants anglo-catholiques de la province.

La position de la Provincial Association of Catholic Teachers est la suivante: les décisions du comité provincial de classification qui ont été établies par l'entente provinciale signée le 4 novembre sont contractuelles et lient les parties. Cependant, il y a un conflit et le conflit est le résultat de plusieurs causes. 1 ) Un certain nombre de décisions du comité provincial de classification ne sont pas satisfaisantes. Par exemple, au comité il n'avait pas été question de certains diplômes, et on a vu dans notre association des gens de l'Inde et du Pakistan qui ont été déclassifiés. Il n'a jamais été question de ces gens-là. 2) Le secrétariat du comité provincial et les moyens de recherche étaient inadéquats. Nous avons présenté un mémoire à ce sujet à la mi-décembre. 3) Les 40 décisions qui ont été rendues ne sont pas complètes. Il y a beaucoup d'autres décisions qui doivent être rendues. Le comité provincial de classification a essayé de classifier des brevets et des diplômes en tenant compte de deux choses: les années réelles de scolarité et le niveau de scolarité.

Nous avons vu qu'il était à peu près impossible que le comité fasse cela. Les décisions du comité sont devenues publiques trop tard. M. Charbonneau a fait allusion tout à l'heure à un ensemble de décisions qui devaient être rendues le 30 novembre 1969. Nous venons juste d'avoir ces décisions.

Si vous me le permettez, M. le Président, je vais continuer en anglais.

However, unsatisfactory we find these decisions, article 9-4.02 of the collective agreement provides for the contractual parties to meet in an effort to resolve these difficulties. Mr. Charbonneau stated that, on a number of occasions, the syndical party sent requests to the government and the "partie patronnale" asking for meetings. In addition, in a letter dated September 28 the Provincial Association of Catholic Teachers requested a meeting for the six parties to discuss the application of the PCC decisions and the problems they had created. That was last September.

Furthermore, on a telegram dated October 9 again our Association invited the "partie patronale" to avail itself of the stipulations of the collective agreement and to meet at the negociating table to iron out some of the problems resulting from the PCC.

Le 18 décembre une demande a été faite à

M. Paul Huot, du service des relations de travail, afin qu'on puisse prendre des mesures pour améliorer le fonctionnement du secrétariat du comité provincial de classification.

Il n'y a aucun doute dans notre esprit qu'une des raisons pour lesquelles le comité provincial n'a pu rendre de décision est que le règlement numéro 5 est assez ambigu.

Pour essayer de résoudre ce problème, nous avons soumis au ministère une liste de recommandations concernant ce règlement. Si on regarde la convention collective, selon la clause 6-2.03 (B) le comité provincial de classification pouvait faire des recommandations pour changer le règlement numéro 5.

Dans notre mémoire, j'ai fait une liste de ces recommandations. Dans ces recommandations nous disons que le règlement numéro 5 doit être révisé. "Scholastics status should be differentiated from classification. A classification system should be established which will clearly differentiate between, on one hand, the years of study and disciplines under the control of institutions of higher, and crowned by degrees, diplomas, etc. and, on the other hand, those unrelated studies which do not culminate in degrees and diplomas."

Une autre recommandation: "A classification system needs to be provided that will diverge from a simple "scholarity principle" that counts only years; we need provisions that will make attractive the earlier choice of studies towards a professional degree or license."

Une autre recommandation: "Now that we have a common educational system, we strongly recommend that a common policy be adopted by Quebec Universities for granting equivalences for qualifications obtained outside this province. This policy might then be invoked for the assigning of classifications."

Ensuite: "That the association, the Provincial Association of Catholic Teachers, participate in any reformulation of guidelines or Regulations governing classifications, so that we might share with the ministry the burden and the responsibility for any new regulation."

Pour résoudre la présente impasse, notre association est prête à considérer toute autre méthode de classifier les enseignants et ceci en négociation avec les cinq autres parties à la table des négociations. Nous insistons cependant pour que, quel que soit le système de classification, on soit d'accord et qu'il y ait égalité entre le secteur urbain et le secteur rural, entre les francophones et les anglophones, entre les protestants et les catholiques et entre ceux qui viennent des sections défavorisées et ceux des sections plus prévilégiées.

Merci, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Je tiens à remercier, avec la permission de la commission, M. Sparkes et M. Dobie du respect dont ils ont fait preuve envers la population du Québec en s'exprimant dans la langue de cette population. J'inviterai

maintenant la Fédération des unions de familles, Mme Gertrude Langlois ou Mme Marie Junger à présenter leur exposé.

Autres organismes Fédération des unions de familles

MME JUNGER: M. le Président mon nom est Marie Junger, responsable du Comité famille-école de la Fédération des unions de familles de la Région de Montréal.

Est-il besoin de vous dire que les parents en ont assez! Pour la première fois dans un conflit scolaire, ils ont réagi en masse. Les assemblées d'information se sont faites de plus en plus nombreuses et la présence des parents de plus en plus assidue. Sans que ce soit devenu un mouvement concerté, ce que nous aurions souhaité, plusieurs parents ont affirmé leur désaccord total face à la situation.

Par exemple, sur l'initiative des associations de parents, dans les écoles primaires suivantes, la première journée, à Saint-Pascal-Baylon, 456 enfants sont gardés à la maison sur un total de 590. A Saint-Antonin, 220 sur un total de 346. A Saint-Clément, Sainte-Emilie et Saint-Paul-de-Viauville, 835 sur 1,988. Au niveau secondaire, à l'école Jean-Baptiste-Meilleur, 500 enfants sont gardés à la maison sur 600 inscrits.

Plusieurs autres écoles où les parents ont agi de façon analogue, ont vu le nombre d'enfants présents à l'école diminuer considérablement pendant plusieurs jours. Les parents ayant travaillé à différents niveaux ont communiqué avec nous et nous ont demandé de travailler avec la fédération afin d'entreprendre une action plus concertée. Dans ces circonstances, la Fédération des unions de familles a voulu servir de carrefour pour permettre à ces parents de s'exprimer.

Nous savons aussi que de nombreux parents ont envoyé des télégrammes, soit à leur député, soit au gouvernement en vue de hâter le règlement du conflit. Vous devez en savoir quelque chose. Chaque année depuis 1967, le secteur public de l'enseignement semble affligé de formes de contestation chroniques qui paralysent le service auquel les enfants ont pleinement droit, sans oublier le droit des parents de compter sur l'efficacité du système scolaire à instruire leurs enfants et pour lequel ils n'ont pas refusé jusqu'ici de payer largement leurs taxes.

L'objectif du bill 25, reprenant l'objectif de la réforme scolaire à l'effet de garantir le droit de l'enfant à l'éducation, a-t-il été atteint? Au contraire, le climat qui règne met en évidence une forme de contestation entre les parties en cause devant laquelle l'enfant au primaire est totalement impuissant. Par ailleurs, l'étudiant au secondaire manifeste sa réaction par des actes qui ne sont pas à sa mesure. On ne peut trop souligner les conséquences néfastes qu'un tel climat peut engendrer dans le milieu étu- diant. Nous sommes particulièrement alarmés du fait que les étudiants du niveau secondaire, malgré une bonne volonté évidente, se retrouvent dangereusement insécurisés devant l'incohérence des politiques scolaires.

Pourquoi le secteur public a-t-il à faire face à des problèmes de cette envergure? Les enseignants peuvent-ils remplir leur tâche avec satisfaction en vivant l'évolution nécessaire de l'enseignement public et ce, depuis les dix dernières années? L'absence de relations humaines causée par le gigantisme des écoles, le contexte social dans lequel les enseignants doivent travailler, la frustration de nombreux enseignants de ne pouvoir exercer leur profession dans le domaine pour lequel ils se sont spécialisés sont, à notre avis, quelques-unes des causes du désordre scolaire que nous vivons depuis de trop nombreuses années.

Sans nullement remettre en cause le principe de la polyvalence ou des équipements scolaires, nous serions enclins à appuyer une récente recommandation du Conseil supérieur de l'éducation à l'effet de regrouper les deux premiers cycles du secondaire. Le choix des options étant plus diversifié, il est naturel de prévoir un regroupement des activités scolaires et parascolaires mieux adapté au développement des adolescents.

Tant pour les professeurs que pour les jeunes, il est indispensable de favoriser le développement d'un sentiment d'appartenance à leur école. Pour ce faire, nous favorisons la décentralisation pédagogique et administrative. Nous croyons qu'il faut repenser la politique de rémunération des enseignants, compte tenu des droits acquis et en envisageant une rémunération qui tienne compte de la formation et des responsabilités des enseignants, quitte à rogner sur les budgets des politiques d'équipement scolaire ou de construction d'écoles.

Dans la conjoncture actuelle, les institutions privées ne semblent pas affectées. C'est, du moins, un secteur où les étudiants ne sont pas perturbés. Nous en sommes satisfaits. Nous nous demandons pourquoi la même situation n'existe pas dans le système public qui, lui, est paralysé. Cet état de choses est pour nous injustifiable et inacceptable, d'autant plus que les institutions privées existent parce qu'elles sont financées à 80 p. c. par les fonds publics. Nous sommes d'accord sur le développement d'un réseau d'institutions privées à condition qu'il s'intègre à une politique de droit à l'éducation pour tous les enfants.

Aujourd'hui, nous sommes de plus en plus inquiets. Nous nous demandons si le secteur public de l'enseignement ne deviendra pas le parent pauvre de la réforme scolaire. Voilà autant de problèmes auxquels on devra trouver des solutions dans les plus brefs délais.

Nous avons quelques recommandations. La réaction des parents dans la crise actuelle prouve qu'ils sont hautement sensibilisés. Ils intensifieront leur action si une solution juste et

équitable ne vient pas mettre un terme, rapidement, à ce conflit qui dure depuis déjà trop longtemps. Il est bon que les autorités en place, tant du côté du gouvernement, des administrations scolaires que des syndicats, réalisent que les parents ne sont pas dupes des jeux politiques et qu'il faille pour cette raison repenser complètement le jeu des négociations dans le secteur public. Par exemple, la décision de convoquer la commission parlementaire de la Fonction publique nous semble être un des mécanismes nouveaux en termes de négociations dans le secteur public. A l'appui de notre demande, nous réitérons ici deux recommandations que nous avons déjà adressées à monsieur le premier ministre, en date du 22 septembre 1970. Des copies avaient été envoyées à l'honorable Raymond Garneau, alors ministre de la Fonction publique, et à l'honorable Guy Saint-Pierre, ministre de l'Education. Voici la teneur de la lettre. "Monsieur le premier ministre, "Nous sommes informés qu'en décembre prochain commenceront de nouvelles négociations dans le secteur de l'enseignement. "Compte tenu des expériences passées où les parents ont dû entrer dans le jeu des pressions politiques; "Compte tenu de notre préoccupation de représenter le droit des enfants dans nos écoles primaires et secondaires; "Conscients que les commissaires représentent en priorité le droit des administrateurs; "Par résolution du conseil d'administration, nous demandons que, dès le début des prochaines négociations entre la CEQ et la FCSCQ, la Fédération des unions de familles soit invitée à déléguer un ou deux observateurs à la table des négociations, tout aussi bien qu'éventuellement une invitation pourrait être adressée aux journalistes. "Conscients qu'une réforme dans les mécanismes de négociations du secteur public ne peut être adoptée en un si court laps de temps; "Nous considérons que notre demande peut créer l'occasion d'une procédure de réforme par étapes. "Compte tenu de nos préoccupations d'établir de nouveaux mécanismes de négociations dans le secteur public; "Attendu qu'en définitive ce sont les corps intermédiaires et l'opinion publique qui influencent le jeu politique qui s'introduit dans les négociations du secteur public; "Attendu que, malheureusement, les négociations du secteur public se déroulent encore de la même façon que dans le secteur privé ; "Nous vous présentons le texte d'une résolution adoptée à cet effet à notre assemblée générale de 1968; "Considérant l'interdépendance des divers secteurs de l'économie — secteur public et secteur privé — entre eux et, partant, les répercussions des conflits du monde du travail sur le bien-être des familles; "Considérant la nécessité d'introduire plus de rationalité dans les mécanismes de négociations, en sorte qu'ils permettent une meilleure vision d'ensemble et de la prévision; "La Fédération des unions de familles propose que soit mise sur pied une commission de médiation polyvalente et permanente, composée de techniciens — économistes, sociologues et autres — et de membres venant des corps consultatifs qui représentent la population auprès des divers ministères; que ladite commission, une fois sa mission terminée et quelle que soit l'issue de son intervention, adresse un rapport aux ministères intéressés et aux parties en cause, rapport qui sera également porté à la connaissance du public. "Nous comptons que vous serez attentif à notre demande et veuillez croire à notre souci sincère de saine collaboration. "Veuillez agréer, monsieur le premier ministre, l'expression de nos sentiments très distingués. "

(signé) "Le conseil d'administration, par: Gertrude Langlois, présidente."

Cette lettre n'a jamais eu de réponse. Merci.

M. LE PRESIDENT: Merci, Mme Junger. J'inviterai maintenant M. Louis Bouchard à nous faire son exposé. M. Bouchard, votre texte ayant été mis à la disposition des membres de la commission, pourriez-vous nous faire un résumé ou indiquer des conclusions succinctes, étant donné l'heure qui s'envole?

Association des parents catholiques

M. BOUCHARD: Etant donné l'heure qui s'envole, M. le Président, étant donné que le problème s'est posé à Montréal, je vais essayer de me limiter à moins d'une vingtaine de minutes; mais je tiens à donner le texte que nous avons préparé, s'il vous plaît, en pensant, en somme, à ces 100,000 enfants qui depuis un mois et demi ont écopé du conflit qui est passé sur leur dos. J'insisterais beaucoup pour donner mon texte, si vous me le permettez. Je vais le limiter et cela va être très bref.

M. LE PRESIDENT: L'indentification d'abord.

M. BOUCHARD: Je représente la section de Montréal, le diocèse de Montréal, de l'Associa-

tion des parents catholiques du Québec. Je tiens cependant à signaler la présence ici d'organismes de contribuables comme la Ligue des propriétaires de Montréal, représentée par M. Loyola Perras et l'Union des ligues de propriétaires de la province de Québec, représentée par M. Paul Bertrand. De même aussi, il y a des parents de Québec qui ont bien voulu faire acte de présence ici avec nous par esprit de solidarité. Je mentionne M. Vincent Brousseau, directeur des relations de parents à la Commission des écoles catholiques de Québec, M. René Mainguy, président de notre section diocésaine de Québec, M. Rodrigue Garon, président des comités de parents de la ville de Québec qui sont sous la juridiction de la Commission scolaire de Québec, Mme Bélanger et d'autres. Je les remercie de leur présence. Ils sont venus ici après avoir lu notre mémoire.

On a beaucoup entendu les expressions "partie patronale" et "partie syndicale" au cours des dernières heures devant cette commission. Nous venons un peu représenter la partie de l'enfant...

M. CHARRON: ... parentale...

M. BOUCHARD: ... de ceux qui sont encore perçus par la population comme les premiers gardiens des droits de l'enfant, les parents. Je remercie particulièrement le ministre de l'Education et le ministre de la Fonction publique d'avoir fait une place sur cette tribune à des voix de parents. J'ai rencontré récemment un père de famille qui habite le même quartier que moi à Montréal et qui voulait me donner son point de vue sur ce problème de la classification des enseignants. Il était révolté à la pensée du traitement qu'on a infligé à ces professeurs qui ont été déclassifiés, appelés à rembourser en vertu d'une décision rétroactive de leur employeur, une partie du salaire qui leur avait été de fait versé. Il était aussi révolté parce que n'importe quel travailleur et non plus seulement des professeurs, ce précédent étant une fois posé, pourrait voir son salaire réduit par le patron par l'effet d'une décision d'une dépréciation de ses diplômes, de ses qualifications ou de ses titres de compétence. Ce père de famille d'un excellent jugement et d'une grande bonne foi fut pour moi un cas exemplaire des effets d'une information de masse globale dans laquelle on met l'accent sur un seul aspect d'un problème. Il ignorait en effet qu'il y avait un comité provincial de négociations qui avait étudié ces questions et qu'il était représentatif des deux côtés, des deux parties. Il ignorait aussi que les années de scolarité étaient déjà établies dans une convention collective, pour la plupart des diplômes, entre autres, par exemple, le baccalauréat ès arts, quinze ans; le brevet A, quinze ans. Il ignorait que cette odieuse rétroactivité qui obligeait des professeurs à rembourser du salaire gagné depuis un an ou deux était due à un double retard: le retard d'abord à signer une convention, — on a mis 28 mois pour la négociation — le retard du comité provincial à se mettre en marche et à rendre des décisions. Il ignorait aussi que cette rétroactivité avait été prévue et agréée par les deux côtés, les syndicats et les patrons. Il ignorait même que les parties avaient signé une convention collective et il ignorait que cette convention provinciale avait eu pour but d'effacer les inégalités d'une commission scolaire à l'autre dans toute la province et que c'était la première fois qu'on tentait d'atteindre cet objectif.

Bref, ce bon père de famille avait gobé dans une information de masse tout juste ce qu'il fallait pour créer chez lui ce sentiment de révolte contre ces injustes et méchants patrons exploiteurs que sont les commissions scolaires et le gouvernement et pour motiver son approbation à peu près totale aux grèves qui ont paralysé les écoles dans la métropole pendant un mois et demi.

Je m'empresse d'ajouter ici deux observations. La première, c'est que la grande majorité des parents que nous avons consultés dans Montréal — même lorsqu'ils connaissent les données du problème que je viens d'exposer — demeurent quand même sympathiques à la cause de ces enseignants qui ont été déclassifiés, parce qu'ils rejettent le principe même d'une décision ayant comme effet rétroactif d'obliger des professeurs à rembourser une partip du salaire qui leur a été versé. Les parents s'étonnent même qu'une telle clause ait été consignée et agréée par les deux parties dans un contrat de travail.

Donc, nous nous sommes réjouis d'apprendre que les deux parties avaient convenu de remettre en question tout ce mécanisme du comité provincial et ses décisions, après les avoir annulées.

Ma deuxième observation est que, mis à part les remboursements de salaire réclamés en vertu de ces décisions rétroactives, les parents ont constaté, comme vous messieurs, que les problèmes du classement que devait résoudre le conseil provincial de classification pour arriver à des normes justes et uniformes dans toute la province sont très complexes et sont compliqués par des droits acquis locaux, vous le savez. Les parents n'ayant pas, eux, des informations suffisantes pour étudier ces cas et rendre un jugement prudent, ils renonçaient évidemment à essayer de proposer des solutions concrètes.

Je ne viens pas ici proposer des solutions concrètes au fond du problème du classement ou de la qualification, au problème concret des cas de professeurs qui ont été déclassifiés. Je résumerai à deux propositions essentielles la position des parents que je représente ici, qui est celle de la section diocésaine de Montréal de l'Association des parents catholiques du Québec.

Premièrement, les parents sont, par rapport aux professeurs, des alliés — si on peut dire — naturels non seulement sympathiques à la cause

de leurs intérêts professionnels, mais disposés en tout temps à entrer en action pour appuyer leurs justes revendications même si, le cas échéant, il peut leur en coûter quelque chose de plus à titre de contribuables.

La deuxième position, c'est que les parents considèrent comme injustes, intolérables, néfastes sous tous les aspects et pour tous, y compris les enseignants, ces grèves, la suppression ou le ralentissement des services d'enseignement systématiquement organisés par lesquels des syndicats d'enseignement, des chefs syndicaux ou des militants syndicaux plus ou moins responsables ou irresponsables prétendent faussement promouvoir les intérêts de la profession enseignante et la justice dans la société.

La justice pour un groupe peut-elle résulter d'injustices flagrantes commises sciemment contre d'autres groupes, d'injustices plus grandes que celles-là même qu'on prétend corriger?

Je veux signaler en passant quelques-uns des effets néfastes de ces grèves, d'abord pour les enseignants. Ayant moi-même fait carrière dans l'enseignement, je ne crois pas me tromper en affirmant que pour l'immense majorité ces grèves placent le professeur dans un dilemme qu'il faut éviter. D'un côté, sa conscience professionnelle, une notion de l'éthique et de la justice face à l'élève qui a droit à ses services et à un contrat de travail qui le lie individuellement; de l'autre, la pression d'un groupe syndical qui lui fait une quasi-obligation contraire de refuser ses services, pressions appuyées, je le veux bien, par des votes d'assemblées syndicales parfois plus ou moins représentatives, parfois survoltées, parfois même cuisinées.

Le deuxième effet négatif pour les enseignants est la perte de salaire pour chacun de ces jours d'absence qu'il encourt alors que ces grèves n'apportent aucun élément de solution.

Un troisième effet négatif pour l'enseignant, est le discrédit que lui vaut à lui et à sa profession un refus de services qui apparaît à une grande partie du public et des parents bien informés comme un acte déloyal et socialement injuste.

Un autre effet négatif, c'est le dilemme où le placent ces grèves face à l'étudiant qui est devant lui et qui l'interroge sur leur bien-fondé.

Rien, en effet, n'est plus contraire à l'acte éducatif, rien n'est plus dérogatoire à l'éthique de sa profession que de provoquer chez ses élèves, par l'information qui leur donne lui-même, un engagement, une action collective ou individuelle qui servira ses propres intérêts.

Quand cette information est partiale, lorsqu'elle est donnée pour provoquer une couverture d'étudiants aux pressions de son propre syndicat, cela peut s'appeler de l'endoctrinement ou autre chose mais non pas de l'éducation. Or, le professeur qui est directement impliqué dans un conflit entre lui-même et son employeur, qui doit expliquer pourquoi lui-même et ses collègues agissent en contravention des lois et de son propre contrat signé peut-il facilement donner à ses élèves une information objective et impartiale? Est-ce bien son rôle de le faire? J'ai été témoin d'une assemblée de parents, où le principal de l'école a été vivement blâmé par des parents. Il avait lui-même invité les élèves de l'école à décider par leur vote si les cours seraient donnés et suivis par les élèves ou s'ils occuperaient les locaux pour appuyer la cause de leurs professeurs. Vous devinez facilement quelle avait été la décision de ces étudiants. Il s'agissait d'étudiants de niveau secondaire informés par les professeurs, poussés par l'attrait du congé de cours et de la contestation, ce qui est bien de leur âge. Ces grèves ont créé dans un très grand nombre d'écoles de Montréal une situation d'inévitables conflits entre les parents et le personnel enseignant. On ne s'est pas privé d'ailleurs d'utiliser les comités consultatifs d'écoles où siègent des professeurs et des parents pour favoriser la stratégie des syndicats en prolongeant le blocage des services. Les parents étaient informés des décisions du comité et, en certains cas, des décisions d'un conseil d'étudiants: Gardez vos enfants à la maison aussi longtemps que le conflit ne sera pas réglé.

Le résultat est que les professeurs pouvaient être présents à l'école, évidemment, et éviter les pénalités pour absence, mais la paralysie des services devenait imputable à la décision des parents ou des étudiants.

J'affirme que de tels procédés donnent de notre profession, de la mienne, de toute la profession enseignante à laquelle j'appartiens encore, une image déformée, défavorable qui ne convient pas à l'ensemble des professeurs de la province.

Je dirais aussi un mot des effets négatifs pour les enfants et les parents. Cela ne sera pas long. Six semaines de cours perdues pour plus de 100,000 enfants et étudiants. On peut en effet compter comme à peu près perdus les jours de classe intermittents qui se sont intercalés pendant cette période. Car le manque d'intérêt, l'attente, l'incertitude, l'énervement, les absences plus nombreuses d'élèves ont pratiquement annulé le rendement pendant toute la période.

Ces grèves tournantes ont créé un effet de fatigue nerveuse, un dégoût peut-être plus néfaste chez les enfants qu'une grève annoncée, suivie et générale. Les grèves, les contestations et les occupations qui se multiplient dans nos écoles secondaires, dans les CEGEP et dans les universités depuis le début de la réforme de l'éducation ne sont peut-être pas étrangères au phénomène de la démission d'étudiants de plus en plus nombreux qui abandonnent les études, à leur écoeurement et aussi à la démission, peut-être, d'excellents éducateurs qui croient que l'école ne devrait pas être le champ privilégié des batailles syndicales ou politiques.

Comment les syndicats peuvent-ils prétendre promouvoir la justice en agissant ainsi à l'endroit de personnes innocentes, les parents et les enfants qu'ils n'ont même pas informés des

données majeures du conflit avant cette décision? Comment peuvent-ils prétendre régler des problèmes par de telles injustices?

J'ajoute un mot en ce qui concerne les contribuables. L'enseignement est un service public payé par les contribuables. Les propriétaires fonciers, pour leur part, fournissent 50 p. c. du budget de la Commission des écoles catholiques de Montréal. Est-il juste de leur faire payer des services qui n'ont pas été rendus? Les dommages causés par les grèves tournantes peuvent s'évaluer en millions de dollars. Les contribuables n'auraient-ils pas le droit moral au moins, sinon légal, de réclamer un dégrèvement de taxe équivalent et d'en faire bénéficier les parents dans des institutions où le service normal sera assuré?

Le plus grand dommage cependant, c'est toute la société québécoise qui le subit. Ce n'est peut-être pas la perte d'argent, la perte d'un mois et demi de cours avec le bilan négatif simplement au plan scolaire.

Le plus grand mal est de convaincre toute notre jeunesse, ou du moins une grande partie de la jeunesse. C'est de convaincre une marge d'adultes mal informés que la société du Québec est devenue une jungle, que seule la force ou certaines formes de violence peuvent créer la société juste, et qu'il est normal d'enfreindre les lois, de prendre comme otages des victimes innocentes, dans le cas présent, les enfants et les parents, et de leur causer des préjudices pour forcer les employeurs et les gouvernants à donner justice aux employés salariés.

J'ajoute que le syndicalisme est dévié. Nous croyons, nous, les parents, qu'une telle mentalité est malsaine, et que, de fait, elle est fausse. Ces grèves n'étaient nullement nécessaires pour gagner la sympathie et l'appui des parents et du public à de légitimes revendications des enseignants. Les syndicats n'ont pas commencé par informer les associations de parents avant de paralyser les services.

Pourquoi n'admet-on pas d'ailleurs des représentants d'associations de parents comme observateurs à la table des négociations? Pourquoi ce huis clos pendant les interminables négociations quand il s'agit de services publics? La sympathie des parents et du public, l'appui dont les enseignants pourraient avoir besoin sont-ils plus facilement gagnés quand on a d'abord commencé par leur créer d'injustes préjudices?

Le problème est profond, on l'a dit tantôt et c'est parfaitement vrai. Il ne tient pas simplement à une mécanique de la convention collective qui aurait mal tourné. J'ajoute que c'est l'instrument essentiel du syndicalisme, la négociation et la signature de contrats de travail qui sont présentement mis en cause, et auxquels on semble préférer parfois des débats ou des conflits de caractère politique avec un entraînement des syndiqués à certaines formes de violence et de mépris des lois.

Mais la profession de l'enseignement est très mal servie par ces techniques. Les grèves dans l'enseignement deviennent plus que jamais une technique dépassée, qui ne peut guère promouvoir ni les intérêts des enseignants, ni ceux de la société, d'une société qui se veut civilisée, et qui reconnaît le droit de l'enfant à l'éducation, et surtout qui entend favoriser la coopération constante des parents et des maîtres dans la poursuite de cet objectif.

J'ajoute un mot sur les autorités responsables, et je dis ici "responsables" dans le sens de ceux qui ont mandat de la société d'assurer des services permanents. Les parents ont l'impression que les autorités responsables sont parfois dépassées. Leur tolérance face à cette déviation de l'action syndicale apparaît comme de la faiblesse, et l'on se demande — je traduis ici une impression qui n'est pas nécessairement la mienne, mais qui s'exprime très souvent dans les conversations privées — on se demande, dis-je, si un pouvoir parallèle n'est pas en fait déjà en place, et en concurrence avec le pouvoir légal et officiel.

Le gouvernement provincial, d'autre part, devrait renoncer à être ou à vouloir être l'employeur commun de tous les professeurs de la province. Il est malsain que tant de salariés, de professionnels relèvent du gouvernement central plutôt que des gouvernements locaux. Comment l'Etat peut-il se donner comme l'arbitre impartial chargé du bien commun dans les conflits entre employeurs et employés lorsqu'il est lui-même l'employeur de tous?

J'oserais signaler de plus deux défauts de la Commission des écoles catholiques de Montréal. J'ai vu tout à l'heure M. Pagé, je tiens à lui dire qu'il ne s'agit pas des défauts des commissaires, je ne leur en connais pas, je parle de la structure.

Premièrement, elle est trop grosse, et, deuxièmement, ses membres sont nommés et non pas élus par les parents et contribuables du milieu. La démocratie vit de gouvernements locaux. Ce n'est pas moi qui l'invente, je le trouve dans les premières pages de l'annexe juridique de la commission Parent.

Des gouvernements élus et responsables devant leur milieu, les administrations monstres d'autre part restent très difficilement en contact constant avec leur milieu. Il est urgent que les parents aient un rôle efficace dans les structures du système. A Montréal, il n'ont aucune voix délibérante. Les écoles sont livrées au pouvoir conjoint de commissaires nommés et de syndicats qui, légalement, n'ont aucune responsabilité vis-à-vis du maintien du service et de la population.

C'est parce que les parents à Montréal n'ont aucune structure efficace, — et j'entends par efficace une structure dans les niveaux décisionnels — c'est peut-être surtout pour ça que la personne humaine de l'enfant et son droit à l'éducation sont publiquement bafoués.

J'ai dit que le bilan des grèves tournantes, qui ont paralysé l'enseignement pendant six semaines, est entièrement négatif. Il est possi-

ble, cependant, qu'un mouvement très positif naisse de ces excès dans les deux groupes concernés: d'abord, chez les enseignants qui pourraient, s'ils le veulent, redresser eux-mêmes les déviations et les déficiences de leur organisation professionnelle en formulant une éthique de la profession enseignante et en mettant sur pied un mécanisme d'autodiscipline qui ne soit pas imposé de l'extérieur. Et aussi chez la masse des parents qui commencent à se rendre compte qu'ils ne peuvent guère attendre que d'eux-mêmes, par leur union et leur engagement dans des associations, le salut de l'école, le progrès de l'éducation et la promotion des vrais intérêts de la jeunesse.

Je termine en résumant quelques recommandations. Premièrement, que les associations de parents aient la liberté de déléguer des observateurs à la table provinciale de négociations des enseignants et des commissions scolaires et aussi dans les négociations locales.

Deuxièmement, que le gouvernement, comme gardien du bien commun et arbitre des conflits entre employeurs et employés, évite d'assumer le double rôle de juge et de partie dans ces conflits et laisse aux gouvernements locaux leur pleine responsabilité d'employeurs.

Troisièmement, que le gouvernement montre plus de fermeté et de confiance dans le bon jugement de la masse des gouvernés en faisant respecter les lois même par les syndicats et en protégeant les droits de l'enfant et des parents injustement lésés par les grèves d'enseignants et par les occupations d'immeubles scolaires, qui se multiplient depuis la réforme de l'éducation à tous les niveaux: élémentaire, secondaire, collégial et supérieur.

Quatrièmement, que, dans la restructuration scolaire de l'île de Montréal, le gouvernement évite de créer une commission scolaire monstre à l'échelle de l'île et qu'il donne à des commissions scolaires moyennes, dont les membres seront élus par les parents et par les contribuables, l'autonomie pédagogique, administrative et la responsabilité, comme employeurs, des professeurs, conformément à la Loi actuelle de l'instruction publique.

Cinquièmement, que les enseignants de tous les niveaux, et les éducateurs de différentes fonctions repensent leur organisation professionnelle en fonction non seulement de certains intérêts de groupe, mais également d'une responsabilité sociale de la profession enseignante et qu'elle se donne des mécanismes internes d'autodiscipline.

Nous avons des motifs de penser que ce mémoire traduit assez fidèlement les désirs non seulement des quelque 35,000 parents qui ont adhéré par des signatures données à l'Association des parents catholiques du Québec, mais d'un nombre peut-être cinq ou dix fois plus grand de parents qui pensent aussi comme nous, mais que nos ressources financières et humaines ne nous ont pas permis encore de rejoindre.

Merci beaucoup, mesdames et messieurs.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Bouchard. J'inviterai maintenant le représentant de la

CSN.

Confédération des syndicats nationaux

M. PARENT: M. le Président, mon nom est Raymond Parent, secrétaire général de la CSN.

M. le Président, messieurs les membres de la commission, je voudrais d'abord préciser que cet après-midi, quand j'ai demandé d'intervenir, j'avais indiqué que je voulais le faire au nom de la CSN et de la FTQ. C'est qu'il est arrivé, cet après-midi, qu'un ministre anglais de l'actuel gouvernement avait réalisé que nous nous échangions tous les deux des mandats, M. Louis Laberge et moi-même. Nous avions une rencontre avec M. le ministre Kevin Drummond, qui était en retard à cause de l'état des routes et nous avions dû nous partager. La situation est rétablie et je n'ai maintenant que mon mandat d'élu, celui de secrétaire de la CSN, M. Laberge étant ici et parlant pour sa centrale. Je me rends compte comme vous que le mandat d'élu est plus ferme que le mandat de nommé.

J'ai écouté l'intervention des deux parties qui sont impliquées de façon plus particulière dans le litige cet après-midi et ce soir. La première chose qui m'a frappé, au nom de la centrale que je représente, c'est le fait qu'on a abordé, surtout du côté patronal, le conflit strictement sous un aspect juridique, légaliste et très restrictif.

Il m'apparaît que c'est un des problèmes concrets que l'on retrouve très souvent dans les conflits de relations patronales et ouvrières, mais qui s'est manifesté, ici, de façon très claire et très nette. La partie patronale a essayé de se justifier très longuement cet après-midi en invoquant des arguments juridiques. La partie syndicale a fait de même sur certains points, mais a quand même essayé d'élargir le débat pour le replacer dans un contexte plus élargi. Quant à moi, c'est un des problèmes qui devraient être considérés à l'heure actuelle par la commission, et la commission doit faire un effort pour dégager tout ce normalisme qu'on essaie d'introduire dans le conflit actuel.

On a beau invoquer que la convention a été négociée et signée, une convention négociée et signée entre des parties, quand les parties sont de bonne foi, ça peut être modifié, ça peut être changé en cours de route par les parties, cela se fait continuellement dans le secteur privé, et pour le gouvernement cela ne serait pas un précédent. Cela se fait continuellement. Nous l'avons fait maintes fois, en particulier dans la première convention avec les fonctionnaires provinciaux quand nous nous sommes rendu compte que certaines dispositions ne s'appliquaient pas ou étaient difficiles d'application. Nous en avons découvert de toutes sortes, ceux qui étaient là s'en souviennent. Les parties se sont assises à la table, et parfois avec difficulté. Certains avaient les jambes plus raides que

d'autres, mais on réussissait quand même ou on a réussi à aborder certains problèmes et à les résoudre en y aportant les modifications qui devaient être apportées.

Je crois que c'est un premier point. Se figer strictement dans le juridisme de la convention existante pour dire que c'est cela qui a été établi et qu'on doit l'appliquer, ce n'est pas satisfaisant devant l'ampleur du problème actuel. Les parties devraient se rasseoir à la table des négociations et reprendre la discussion de bonne foi dans un véritable cadre de négociations.

On a invoqué également le règlement numéro 5. Si je comprends bien, le règlement numéro 5 ce n'est pas une loi, c'est un arrêté ministériel. C'est la loi d'une des parties. Je me rappelle déjà qu'un premier ministre avait dit que la loi de deux parties c'était plus fort que la loi d'une partie. Par conséquent, je pense que même le règlement numéro 5, puisqu'il a été intégré à la convention collective par la volonté des parties, devrait être repris aussi, et s'il doit être assoupli ou corrigé, il devrait l'être conjointement. D'ailleurs, j'indiquerai au ministre de l'Education et au ministre de la Fonction publique que, s'ils ont des scrupules du côté de la possibilité de modifier des règlements, le ministre du Travail connaît cela, lui, l'assouplissement des décrets. Il pourrait les aider. Il pourrait sûrement les aider.

Sur cette première partie-là, par conséquent, il m'apparaît que les choses devraient être reprises avec moins de rigidité. Quant au deuxième point, ce que je comprends, c'est que la loi qui régit à l'heure actuelle les relations de travail chez les enseignants est une législation qui s'appelle le code du travail. Or, la définition de la convention collective dans le code du travail c'est qu'elle permet de négocier tout ce qui concerne les conditions de travail et d'emploi. La classification est une condition de travail. Le classement des employés en est une autre. Egalement, je trouve un peu que la position — pas un peu mais beaucoup — connue du gouvernement et de la Fédération des commissions scolaires est rigide et un peu anachronique.

Je me rappelle avoir négocié, dès 1952, je donnerai deux exemples, dans le secteur privé avec quelqu'un qui représentait une association de patrons à ce moment-là, il est maintenant un des sous-ministres de la Fonction publique — selon la loi qui existait dans le temps, la loi des relations ouvrières et la Loi de la convention collective, des régimes de classification où les parties établissaient les normes et les critères de classification et établissaient conjointement le classement des employés. Cela se faisait en vertu d'un décret sanctionné par le cabinet sous l'égide du ministre du ministre du Travail du temps. C'était en 1952, cela a duré 15 ans. Cela dure encore.

Un autre cas de problème de classification très sérieux qui a existé dans le secteur privé.

C'était en 1957 dans le secteur de l'industrie de l'aluminium. Vous vous rappelez qu'en 1957, il y a eu une grève dans l'aluminium, particulièrement à Arvida. Une des raisons de la grève c'était que les employés ne voulaient plus que le patron seul, en vertu de son droit de gérance, classifie et classe les employés comme il l'entendait. C'était la grève pour le CWS, un système d'évaluation des emplois. La grève a duré quatre mois. Les employés se sont promenés, et les patrons, pendant six semaines, se sont promenés, comme ce soir, du parlement au bureau du ministre du Travail qui agissait comme médiateur.

Finalement ils en sont arrivés à un accord. Il y a eu une convention collective qui a fait que, dans l'industrie de l'aluminium, — et ce n'est pas la seule, je la donne à titre d'exemple — on a établi un système de classification des emplois, de classement des employés.

Quand la classification a été faite, sans déclassement par rapport à l'ancien système — parce qu'il faut bien parler français dans les relations de travail, on connaît le système des "red circles", ça existe, ça existera, même si nous cherchons une parité générale — cela s'est réglé après quatre mois de grève, bien entendu, mais c'était en 1957. Or, en ce qui concerne le secteur public, ou le secteur parapublic, les structures scolaires, les employés, les enseignants sont obligés de reprendre des débats qui ont été conquis dans le secteur privé, avec les employeurs qui avaient quand même des intérêts bien précis; non pas de faire des adultes avec des enfants, mais de fabriquer simplement de l'aluminium ou autres produits. Les employeurs ont reconnu que c'était un mode normal de relations de travail en 1957, que les travailleurs participent eux aussi, comme étant dans l'entreprise, à la détermination de leurs critères de classification et de classement d'emploi. J'ai l'impression que nous observons, un peu, de la part d'un gouvernement qui se veut jeune et dynamique, une position qui a quelque vingt ou vingt-cinq ans de retard. Cela veut dire quelques générations d'enseignants. Il est bien clair que, devant cette situation, comme centrale syndicale, nous appuyons la position des enseignants et nous disons qu'il ne peut y avoir qu'une solution, celle de la reprise des négociations, mais de véritables négociations; non plus avec des pouvoirs discrétionnaires laissés ici et là, mais la véritable négociation pour chercher une solution valable.

Je ne ferai pas de recommandations sur les mécanismes — il appartient aux parties en cause de les trouver — ce serait moraliser que de vouloir porter des jugements et, quant à nous, nous avons dépassé cette période de donner des leçons aux autres. Il y a quand même un point que je voudrais énoncer, c'est un des mécanismes qui existent. Quand j'entendais cet après-midi, le représentant du gouvernement et celui de la Fédération des commissions scolaires, j'avais l'impression de quelqu'un qui avait un

mandat conçu de "Gabriel et Joseph", je comprends qu'à ce moment-là, il pouvait avoir l'allure d'une vierge offensée. J'ai l'impression que le gouvernement devrait clarifier ses mandats de négociations à ce sujet et ne pas avoir de mandat là où il y a de l'ambiguïté comme dans le cas présent, où on ne sait qui représente qui. Il représente la Fédération des commissions scolaires qui a des intérêts différents du gouvernement à certains moments, qui a des intérêts conjoints avec le gouvernement, mais c'est la même personne qui n'a même pas de mandat, autre qu'un mandat spécifique nommé, gouvernemental, qui ne répond même pas à l'obligation qu'on les fonctionnaires publics normalement.

Cela est un des problèmes et je n'attaque pas la personne en cause, mais je crois que c'est un des mécanismes sérieux qui, à l'heure actuelle, fait qu'à la table des négociations, on a toujours le troisième mandataire du deuxième mandataire du premier mandataire de celui qui a le mandat. Cela nous parait être une source de délais, de frictions et de problèmes majeurs. Je pense qu'il y a à l'intérieur de la Fonction publique assez de gens qualifiés pour que le gouvernement clarifie ses mandats, les donne clairement et en porte toute la responsabilité. En conclusion, je ne ferai qu'une remarque plus personnelle, mais qui m'apparaît être la préoccupation de beaucoup de gens à l'heure actuelle: j'ai neuf enfants à l'école et je préférerais que le ministère de l'Education fasse des efforts beaucoup plus poussés pour que mes enfants se classent et se classifient plutôt que de déclassi-fier les enseignants.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Parent. Je pense que nous aurons le temps d'entendre M. Laberge et ceci terminera les représentations des parties.

M. Laberge vous êtes invité à parler.

Fédération des travailleurs du Québec

M. LABERGE: M. le Président, vous bûchez toujours sur moi. Par pur hasard, nous sommes toujours les derniers et vous nous coupez toujours.

M. LE PRESIDENT: On vous garde comme dessert.

M. LABERGE: C'est bien dit, n'est-ce pas?

M. le Président, dans la FTQ, nous représentons quelque 335,000 travailleurs au Québec — je pourrais probablement dire sans exagération quelque 400,000 parents — qui sont groupés, formés. Nous ne sommes pas nommés leurs représentants, mais nous avons été dûment élus. D'ailleurs, j'ai une élection qui s'en vient bientôt où j'aurai à répondre de mon mandat.

Je pense qu'un peu tout le monde au Québec trouve épouvantable la situation qui existe actuellement. Les parents, bien sûr, les enfants aussi et certainement, les enseignants.

Personne ne peut comprendre qu'un conflit qui semble, dans le fond, aussi simple que celui-là puisse durer aussi longtemps. Le problème de classification et de reclassification, nous le connaissons depuis toujours. C'est arrivé partout dans l'industrie et cela arrive encore présentement. Il y a, par exemple, le bill 49 pour la qualification professionnelle, qui va s'appliquer d'abord aux travailleurs de la construction. On a regroupé des familles de métiers et on va exiger des travailleurs de la construction de demain des connaissances plus poussées, une formation plus avancée et tout cela. Nous sommes tous d'accord avec cela. Il n'y a jamais un maudit gars qui a pensé à aller voir un plombier ayant quinze ans d'expérience et à lui dire: Toi, tu vas passer un examen, mon gars, parce qu'on pense que tu n'es plus aussi bon plombier que tu ne l'étais quand on t'a engagé. On aurait le "wrench" dans le front assez raide... Il ne serait pas question de voter ou de choses semblables, je tiens à vous le dire.

Les enseignants, ce n'est quand même pas la CEQ ou l'Alliance qui les ont engagés. Ils ont été engagés par les commissions scolaires contre lesquelles on a récriminé pendant des années parce qu'elles étaient inadéquates, inefficaces et formées de... Franchement, s'il fallait faire passer un examen aux commissaires, on serait surpris en maudit.

M. CHARRON: II y en aurait une bonne "gang" de déclassifiés.

M. LABERGE: II y aurait des ouvertures. Ce serait peut-être une bonne source pour commencer le décompte des 100,000. Ce n'est que par pur hasard. Je n'avais pas été avisé qu'il allait entrer.

M. SAINT-PIERRE : Vous ne parlez pas de M. Daoust?

M. LABERGE: Non. M. Daoust vient de passer son examen. Il est sauf, lui. Pour votre information, si M. Daoust devait partir, il partirait avec énormément de plaisir. Puis-je vous dire que la situation actuelle l'embarrasse quelque peu?

M. SAINT-PIERRE: Vous parlez de son examen comme commissaire?

M. LABERGE: Oui, surtout comme commissaire. Comme syndicaliste, ça l'embarrasse moins. Enfin, pour nous, c'est impensable le conflit qui existe actuellement. Encore une fois, qu'on exige que, demain, les enseignants soient mieux formés et qu'ils soient encore plus compétents qu'ils ne le sont, même les enseignants ne s'opposent pas à cela, au contraire. Mais qu'on dise à des gars: On vous a engagés, on vous a reconnu tant d'années de scolarité — cela veut dire tel salaire, parce que le salaire est rattaché aux années de scolarité et aujourd'hui, ce n'est plus cela, encore une fois, c'est

quelque chose d'impensable. Que la Fédération des commissions scolaires exige que, demain, elle va être la seule à décider de la classification des enseignants, l'employeur le plus rétrograde chez nous ne penserait même pas une chose semblable.

M. SAINT-PIERRE: Ce n'est pas cela.

M. LABERGE: Ce n'est pas cela. J'en ai manqué un bout parce que j'étais avec le ministre des Terres et Forêts. Apparemment, il s'était égaré quelque part, parce qu'il est arrivé en retard au rendez-vous. On ne lui en veut pas, parce qu'il est très agréable.

M. LE PRESIDENT: C'est ce bout-là que vous avez manqué.

M. LABERGE: Informez-moi, mon cher Président.

M. LE PRESIDENT: Les documents ont été déposés. Vous pourriez peut-être les consulter.

M. LABERGE: Je les lirai avec énormément de plaisir.

M. LE PRESIDENT: Vous pouvez continuer.

M. LABERGE: Sans interruption? De toute façon, c'est un problème de classification —du moins, c'est ce que la population comprend — qui, à mon sens, aurait dû être réglé depuis belle lurette! On reproche aux enseignants d'avoir fait des journées d'étude, pour ne pas les appeler des grèves tournantes ou des actions dont la légalité pourrait être mise en doute. Je pense que c'est une réaction fort normale. On ne peut pas, en 1970, dire à des travailleurs comme les enseignants que les principes consacrés depuis toujours dans les relations industrielles ne sont plus reconnus pour ces gens-là. C'est bien assez pour que le vase déborde. Encore une fois, je vous le dis très sincèrement: S'il avait fallu que cela arrive dans l'industrie, il n'aurait même pas été question d'avoir le temps de voter à savoir: Est-ce qu'on fait des journées d'étude ou autre chose? Cela aurait éclaté bien avant cela. Je pense que la commission parlementaire se doit de mettre un terme immédiatement à toute cette discussion. Il va y avoir d'autres négociations prochainement.

S'il y a des problèmes qui ne sont pas réglés, il me semble qu'ils pourraient à un moment donné être réglés lors des prochaines négociations, mais il faut que cesse ce qui se passe actuellement chez les enseignants. Ils demandent ce que tous les autres travailleurs syndiqués ont depuis toujours. Ils demandent que leurs années de scolarité reconnues soient garanties. Toutes les classifications de tous les travailleurs ont toujours été garanties lorsqu'on a établi de nouveaux systèmes de classification. On établit de nouveaux systèmes de classification pour les nouveaux travailleurs qui arrivent dans l'industrie.

Encore une fois dans l'industrie de la construction, il va y avoir demain un nouveau programme de formation et les travailleurs de la construction d'après-demain vont être obligés de répondre à des normes auxquelles les travailleurs d'hier et d'aujourd'hui n'ont pas eu à répondre. Nous sommes d'accord avec ça. Mais il est évident — cela n'a même jamais été soulevé et je suis convaincu que cela n'a même jamais été pensé par la partie patronale — que pour les gars qui étaient en place et qui avaient des droits acquis ces droits ne pouvaient être mis en question. C'est quelque chose d'impensable. Je peux vous dire qu'à la FTQ on a compris, on a sympathisé et on a appuyé d'emblée la réaction normale des enseignants. Ce n'est certainement pas dans l'intérêt de personne que cette situation continue. Je pense que la commission parlementaire doit se placer dans le contexte où les enseignants ont réagi de façon draconienne à une idée réactionnaire qui avait été lancée.

Il ne s'agit pas de jeter de l'huile sur le feu; il s'agit de l'éteindre. Les enseignants doivent savoir que leurs droits, leur scolarité sont garantis. A ce moment si on leur fichait la paix, peut-être bien qu'ils pourraient mieux former nos enfants.

C'est simplement le message que la FTQ voulait vous laisser. Je vous dis tout de suite que je n'ai pas eu le temps de consulter les quelque 400,000 parents que nous représentons. Il est possible que quelques parents ne soient pas tout à fait d'accord avec la position de la FTQ. Je pense que je serais probablement au même niveau que les autres représentants de parents qui n'ont certainement pas eu l'occasion de consulter tous les parents. Merci, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Laberge. Nous ajournons à demain, quatre heures.

(Fin de la séance: 22 h 3)

Séance du mercredi 10 mars 1971

(Dix-sept heures huit minutes)

M. BOSSE (président de a commission permanente de la Fonction publique): A l'ordre, messieurs! Messieurs, mesdames, je déclare la séance ouverte.

Avec l'accord des membres de la commission, je permettrai à M. Pagé, vice-président de la fédération des commissions scolaires de s'exprimer durant une dizaine de minutes au plus. Par la suite, nous procéderons aux questions des membres de la commission et nous ajournerons à six heures pour reprendre demain après-midi à quatre heures.

Silence, s'il vous plaît! M. Pagé est-il présent? Voudrait-il s'approcher du micro, s'identifier d'abord et nous faire son exposé.

Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec

M. PAGE: Je suis Joseph-L. Pagé, vice-président de la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec.

M. le Président, en l'absence du président général, je représente ici cette fédération qui est l'un des trois partenaires de la table patronale. La fédération regroupe environ 4,500 commissaires d'écoles de la province. Elle est constituée de 20 sections dont chacune a son bureau de direction élu par ses membres. Chaque section délègue deux conseillers au conseil d'administration de la fédération. Les commissaires d'écoles du Québec sont les mandataires des parents et des contribuables de leur milieu. Ils forment au point de vue scolaire le gouvernement local qui, dans un régime démocratique, est toujours très important et est, par définition, le plus près de ses administrés.

Les commissaires d'écoles sont, à l'exception de ceux de Montréal et de Québec, élus démocraitquement par les parents et les contribuables. Ils viennent de toutes les classes de la société. On compte parmi eux des cultivateurs, des travailleurs syndiqués, des professionnels, des commerçants et d'autres. Ils sont — si j'ose le dire — comme nos députés, issus des différentes couches sociales de notre population.

On ne peut les déprécier sans du même coup déprécier une grande partie de nos concitoyens. Faut-il ajouter que depuis quelques années des femmes et mères de famille de plus en plus nombreuses deviennent commissaires d'écoles. Pour avoir personnellement travaillé pendant plus de 20 ans avec ces représentants de notre population, je puis vous assurer que j'ai rencontré parmi eux beaucoup de gens qui, à défaut d'une haute scolarité, ont toujours fait preuve d'un jugement sûr.

On peut peut-être dire, à juste raison, qu'il y a trop de commissions scolaires, mais je ne pense pas qu'on puisse dire qu'il y a trop de commissaires pour s'occuper de l'administration de l'éducation de notre jeunesse.

De plus, on doit à la vérité d'indiquer ici que les commissions scolaires sont les véritables employeurs et patrons des enseignants au sens du code du travail et de la Loi de l'instruction publique. A titre de représentant des commissaires d'écoles catholiques du Québec, j'endosse les énoncés du porte-parole patronal qui s'est exprimé hier devant cette commission.

Nous reconnaissons que le classement des enseignants constitue actuellement l'objet d'un certain litige, mais nous croyons que ce litige peut être résolu par des discussions telles que prévues à l'article 9-4.01 de l'entente provinciale, sans qu'il y ait nécessité de recourir à des moyens qui dépassent l'ampleur du problème, qui ne concerne qu'un nombre restreint d'enseignants.

Sans reprendre la preuve faite hier par le porte-parole patronal à l'effet que la scolarité garantie équivaut à des disparités garanties, je voudrais parler des droits et des prérogatives relatifs au classement des enseignants. Il importe ici de distinguer clairement deux choses. Premièrement, le classement et la reconnaissance des brevets d'enseignement, et ensuite, la classification des emplois ou fonctions.

Dans le monde de l'enseignement, il y a, en plus du classement par catégories, des brevets et des diplômes accordant des qualifications personnelles permettant d'enseigner. Il y a une classification des emplois ou des fonctions. Qu'il me suffise d'énumérer quelques exemples: instituteurs, chefs de groupe, animateurs, coor-donnateurs, sous-directeurs, directeurs.

La classification que l'on connaît dans l'industrie est une classification des emplois. Toujours sur le classement des brevets, je voudrais faire miennes les remarques formulées par M. Claude Ryan dans son premier Montréal du 18 février dernier, et je cite: "Les syndicats réclament la scolarité garantie suivant la plus avantageuse des trois formules suivantes: soit la scolarité reconnue par la convention 1966-1968, le bill 25 ou l'entente provinciale 1968-1971."

Il demande aussi que le classement des enseignants soit soumis à la négociation. La première demande — et je continue à citer — dans les termes où elle est formulée est inacceptable. Elle équivaut à nier en pratique l'objectif premier de la politique qui a conduit à une entente provinciale, et qui était de réaliser une égalité raisonnable mais réelle entre tous les enseignants du Québec.

Accepter cette norme serait entériner sans examen toutes les classifications plus ou moins fantaisistes qui ont pu être faites il y a cinq ans et plus par des centaines de commissions scolaires et de syndicats différents. Le gouvernement qui accepterait une démarche semblable se condamnerait à niveler toute chose suivant des normes qui rendraient impossible la rationalité recherchée.

La deuxième demande est, elle aussi, à l'état pur, inacceptable. Tous les gouvernements qui ont légiféré au Canada sur les relations de

travail dans la fonction publique ont soigneusement veillé à exclure du champ de la négociation syndicale le classement des fonctionnaires estimant que celui-ci doit être confié à la seule autorité d'une commission autonome de la fonction publique. Ainsi, la Loi québécoise de la fonction publique, adoptée en 1965, reconnaît clairement le droit des fonctionnaires à la négociation, voire à la grève. Elle établit toutefois, à l'article 21, que le classement du personnel de la fonction publique relève exclusivement de la Commission de la fonction publique et du lieutenant-gouverneur en conseil. Le Parlement fédéral fut appelé deux ans plus tard à prendre position sur le même problème; il le trancha suivant des normes identiques dans le bill C-170 traitant des relations entre employeurs et employés dans la fonction publique du Canada.

Si l'on refusait ce principe, il faudrait accepter, en cas de conflit, la possibilité que celui-ci soit renvoyé à un arbitre extérieur. Or, en agissant ainsi, le ministre de l'Education abdiquerait tout simplement l'une de ses responsabilités essentielles et inaliénables. Il importe aussi de faire connaître aux membres de la commission parlementaire la teneur de l'article 28 de la Loi du Conseil supérieur de l'éducation qui, en bref, se lit comme suit: "Le ministre de l'Education est tenu de préparer les règlements qui doivent: A) régir la classification et la nomenclature des écoles et autres institutions d'enseignement et des diplômes décernés par elles; B) régir les programmes d'étude, les examens, les diplômes, les brevets d'enseignement et la classification du personnel pédagogique pour tous les enseignements sauf les enseignements qui conduisent à un diplôme universitaire".

Vu les dispositions législatives auxquelles je viens de référer, nous croyons logique et endossons la troisième partie des offres patronales qui se lit comme suit: a) Le ministre de l'Education élabore des projets de règles d'application du règlement numéro 5, critère d'évaluation de la scolarité. Ces règles sont soumises à un comité paritaire consultatif composé de représentants de toutes les parties à l'entente; e) De plus à la suite de la classification effectuée par le ministre, l'instituteur peut, dans un délai de deux mois, soumettre son cas à un comité provincial de révision de classification, composé d'un représentant syndical, d'un représentant patronal et d'un président nommé par ces derniers. Ce comité de révision analysera si la décision du ministre est conforme aux règles d'application que le ministre a établies et aux dispositions de l'entente provinciale.

En terminant, nous remercions les membres de la commission parlementaire de nous avoir entendus. Si nous avons une recommandation à leur formuler, c'est d'exiger que les deux parties entreprennent incessamment et diligemment des discussions de bonne foi en vertu de la convention en vigueur et ce pour établir au plus tôt dans toutes les écoles un climat de paix, seul propice à l'oeuvre sociale par éminence que constitue l'éducation de nos enfants et de nos petits-enfants. Merci, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Pagé. J'inviterai maintenant le ministre de l'Education à nous donner son opinion.

Point de vue du ministre de l'Education

M. SAINT-PIERRE: M. le Président, il me semble opportun à ce moment-ci, avant peut-être d'engager un dialogue plus serré avec certains participants sur certains points de vue qui ont été exprimés hier soir, de tenter de répondre à des questions assez directes, et dans un langage particulier, que le président de la Corporation des enseignants du Québec nous a soulevées hier.

Le président de la corporation demande ce que sont les intentions profondes du gouvernement au sujet du classement des enseignants. Il me semble que ses intentions sont claires. Elles sont explicites. Le gouvernement n'a pas de jeu caché ou de visée machiavélique. Ses intentions ont été exprimées conjointement avec celles des fédérations des commissions scolaires lors des discussions entre la partie patronale et la partie syndicale, en vertu justement de tous les mécanismes de négociations que nous nous sommes donnés, en vertu de l'article 9-04 de l'entente provinciale. Le gouvernement et les fédérations de commissions scolaires ont offert toute garantie quant au maintien du traitement des instituteurs et quant à l'élimination de toute rétroactivité résultant du classement des instituteurs.

Deuxièmement, le gouvernement et les fédérations de commissions scolaires reconnaissent que le mécanisme prévu à l'entente, quant au classement, est inadéquat et ils sont prêts à considérer nulles et non avenues les décisions du comité provincial de classification. Aussi, m'apparaît-il opportun de laisser de côté, pour la discussion, toute référence aux décisions, aux mécanismes et à l'opération de ce comité provincial de négociations, puisque, de l'aveu même des parties, nous avons essayé, dans un effort qui a duré plusieurs mois, ce mécanisme de négociations et je pense que la partie syndicale est la première à reconnaître que ce mécanisme n'a pas donné les résultats escomptés. La partie patronale est prête à l'accepter, compte tenu des revendications données; nous sommes prêts à considérer comme nulles et non avenues toutes les décisions. Aussi, faudrait-il considérer que, dans toute argumentation, le fait de citer l'une ou l'autre des décisions portées par M. Rossignol ou le comité ne me semble pas pertinent à tenter de régler le problème actuellement et ne devrait pas être interprété comme une ligne de conduite que le gouvernement, ou que tout autre mécanisme que nous pourrions nous donner, utiliserait pour juger des cas futurs.

Troisièmement, le gouvernement propose de

maintenir le principe reconnu dans l'entente et que les deux parties ont accepté, selon lequel, le règlement numéro 5 du ministre de l'Education doit servir de base, conformément à ce qu'indique son titre, à la détermination de la scolarité des instituteurs pour l'évaluation de leurs qualifications.

Quatrièmement, le gouvernement s'engage, en conséquence, à consacrer la qualification des instituteurs telle qu'établie à partir des critères du règlement numéro 5, règlement, qui pour tous ceux qui l'on lu, est suffisamment précis pour donner un cadre très bien aligné sur le problème que pose la classification des enseignants. Il ne peut donc être question, en aucune manière, de dévaluation de quelque brevet que ce soit, ou de ne pas reconnaître une scolarité faite conformément aux critères établis par le règlement numéro 5.

Cinquièmement, il propose de confier au ministre de l'Education la responsabilité d'appliquer le règlement numéro 5, aux fins d'établir pour chaque institueur la qualification en années de scolarité, conformément à ce règlement. C'est une proposition de la table patronale et je pense que, dans le jeu de la négociation, nous pourrions — mais il semble que la partie syndicale s'est même refusée à étudier avec soin cette proposition — suggérer, par un processus de négociations, d'autres modalités de participation, sauf la dernière contre-offre qui a été faite assez à la hâte dans les derniers jours et par laquelle on a, par après, refusé de jouer le véritable jeu de la négociation, ce même jeu que l'on voudrait reprendre actuellement pour régler l'ensemble du conflit.

Le système proposé a pour résultat que le ministre exerce une responsabilité qui lui appartient selon la loi, celle d'établir une classification des brevets et diplômes, de donner une valeur déterminée à des études faites au Québec ou ailleurs en fonction de la qualification des instituteurs enseignant dans les institutions du Québec visées par l'article 28 de la Loi du Conseil supérieur de l'éducation. Les règles de classification sont soumises pour avis et recommandations à un comité paritaire. Deuxièmement, le classement des instituteurs, en fonction de cette échelle de classification, peut être sujet à un appel ou à un droit de révision où la partie syndicale serait représentée. Ce système, M. le Président, implique premièrement que la qualification est du ressort exclusif du ministre de l'Education qui pourra évidemment faire appel aux spécialistes ou experts en la matière pour l'assister et assurer la plus stricte objectivité à ses décisions.

Il s'agit pour une question d'équivalence de diplômes, de reconnaissance d'années de scolarité, de dégager ce contexte d'une table de relations de travail, contexte dans lequel, au cours de plusieurs des mois passés, nous en sommes arrivés à une impasse, pour confier cela à des spécialistes qui, en dehors de ce contexte des relations de travail, tenteront avec un règlement numéro 5, avec des normes qu'ils auront soumis à une consultation, d'établir exactement cette équivalence, d'établir avec équité et justice pour tous cette première classification des 70,000 enseignants au Québec.

Deuxièmement, que la classification des brevets, diplômes ou des études pertinentes déterminant la qualification des enseignants constitue la traduction en des catégories distinctes de la qualification objectivement déterminée.

Troisièmement, que le classement des enseignants en fonction des catégories ainsi établies est sujet à un droit d'appel ou de révision pour éviter que des erreurs techniques ne causent préjudice à des individus.

Quatrièmement, que les échelles de traitement sont négociées en référence au système de classement des enseignants dans les catégories ainsi déterminées. Les offres patronales qui ont été explicitées indiquent clairement pour la durée de la convention collective actuelle qu'il ne peut être question de perte de salaire sur le plan de la rétroactivité ou sur le plan de perte de salaire vis-à-vis des salaires versés au début de l'entente provinciale. Déjà, le gouvernement est prêt à s'engager immédiatement dans ce processus de négociations pour la prochaine entente collective, processus de négociations qui, comme toutes les négociations, implique dès le départ qu'on peut rouvrir toutes les questions, y compris la détermination de l'opportunité de conserver tel ou tel critère pour établir la rémunération des enseignants.

Pour l'année en cours, dernière année de l'entente, les échelles de traitement sont établies; les traitements versés au 26 janvier 1971 sont garantis. Il reste à classer définitivement les enseignants conformément au règlement no 5, classement correspondant à des catégories de qualification objectives, selon le principe admis par toutes les parties à l'entente provinciale.

Pour l'avenir, le gouvernement et les commissions scolaires entendent respecter le principe admis, selon lequel tous — et je répète tous — les enseignants seront classés selon les mêmes critères dans des catégories déterminées objectivement et avec équité. Il laisse par ailleurs à la négociation entre les parties la question de la rémunération devant s'attacher à chacune de ces catégories. On a fait au cours des discussions référence à l'entreprise privée ou d'autres secteurs d'activités. En aucun cas, on accepterait de négocier une question comme celle de savoir si un individu est qualifié comme plombier ou mécanicien ou comptable, ou ingénieur. On a telle qualification ou on ne l'a pas, en vertu de lois, de règlements ou simplement d'une qualification reconnue par l'entreprise ou même par le syndicat, s'il y a lieu.

Mais, de façon analogue, il faut en arriver à un système où, dans le domaine de l'enseignement, la qualification est établie objectivement, donc soustraite à toute forme de négociation, de marchandage, tout en laissant ouverte à la

négociation et au plein jeu de la négociation, bien entendu, la détermination des traitements s'attachant à tel ou tel niveau de qualification.

C'est, il me semble, une question de logique, d'équité et de gros bon sens. Dans les points soulevés par la partie syndicale, il me vient à l'esprit deux questions que j'aimerais peut-être soulever: A-t-on réellement l'impression, après avoir essayé — et je l'admets très objectivement — de bonne foi de la part des deux parties ce processus de la négociation qui a donné les résultats escomptés? Est-ce qu'on croit réellement qu'on peut de nouveau s'engager dans ce même processus de négociation et arriver à des résultats qui seront autres? Il faut bien admettre que si, dès le départ —on l'admet aujourd'hui — tout l'ensemble de cette question, la qualification de tous les cas des 70,000 professeurs est laissée au jeu de la négociation, on recommencera de nouveau les mêmes schèmes que nous avons développés antérieurement, à savoir un comité conjoint où la partie patronale nommera trois ou quatre représentants; la partie syndicale nommera aussi trois ou quatre représentants; on trouvera de nouveau un président, homme honnête, intègre, compétent, qui aura pour nom M. Rossignol II et qui tentera le plus objectivement possible de poser des questions, mais qui fort probablement, au bout de 24 mois, donnera les mêmes résultats que nous avons escomptés.

Je pose la question. Est-ce que, suite à l'expérience de la négociation, la partie syndicale n'a pas l'impression que recommencer cette même expérience qui, somme toute, se fera toujours dans les mêmes conditions c'est s'engager dans un cul-de-sac, dans une voie sans issue? Une deuxième question me vient à l'esprit: Si nous acceptons intégralement le jeu de la scolarité garantie, n'aurons-nous pas encore au Québec des cas où des professeurs, avec les mêmes diplômes obtenus dans les mêmes années et enseignant les mêmes matières, auront à l'intérieur d'une échelle provinciale des salaires différents? Si on recherche une justice sociale, si on recherche une justice distributive, il me semble que de tels cas — et il y en aurait — seraient une anomalie grave qu'il faudrait de nouveau corriger.

On en vient à la conclusion que la scolarité garantie ne veut pas dire la solution la plus avantageuse pour un professeur mais qu'en toute justice sociale la solution la plus avantageuse obtenue par un de ces professeurs devrait être la solution avantageuse pour tous les professeurs. De telle sorte que, si un professeur avait obtenu, dans une convention collective antérieure, un diplôme correspondant à quinze années de scolarité, même si ceci ne répond nullement, suivant les critères les plus objectifs, à la réalité des faits, il faudrait — si on donne à ce professeur cette scolarité garantie — l'assurer à tous les autres qui ont le même diplôme. On voit dans quelle impasse on s'engage.

Une autre question qui me vient à l'esprit et j'en laisserai aux autres membres de la commission. On a esquissé très brièvement ce bris très grave de contrat. J'ai un respect profond, même si mes responsabilités sont en éducation et non au travail, envers toutes nos lois du travail. Or, il devient évident que, si les conventions collectives signées entre les parties ne signifient plus rien, si les parties peuvent s'engager, soit dans des grèves illégales, soit dans des lock-out illégaux, mieux vaut détruire immédiatement le code du travail et dire que nous revenons, dans tout ce secteur des relations de travail, à un règlement de la jungle.

Si nous admettons la légitimité de l'action posée par les enseignants — je ne l'admets pas de même que la légalité — si nous l'admettons pour une seconde et que nous donnons suite aux revendications données, peut-on me donner une raison valable de la part des enseignants pour laquelle, dans deux semaines, on ne recommencera pas des grèves rotatives pour demander la charge de travail garantie? Le fait qu'un professeur, il y a six ans, dans les anciennes conventions collectives, pouvait enseigner seulement quinze heures et actuellement, suivant une entente de quinze heures de cours par semaine, on lui en demande plus que quinze, pourquoi ne ferait-on pas des grèves rotatives pour obtenir la charge de travail garantie et reprendre, ainsi de suite, pour toutes les questions qui ont pu être réglementées?

Dans le secteur de l'éducation, il y a eu beaucoup d'évolution. Je pense que cela demande de la part de toutes les parties beaucoup de maturité; soit par négociation, soit par discussion, il est essentiel de tenter de trouver des solutions équitables. Je pense qu'il est aussi essentiel de garder ce minimum de bon sens et, sur le point des droits des individus, sur le point des droits du salaire des individus, de tenter de ne pas appliquer des critères de rétroactivité. C'est de bonne foi que nous avons discuté, en décembre ou en janvier; en aucun temps ni le ministre, ni le sous-ministre de l'Education, ni un autre membre de la partie syndicale n'ont indiqué que nous voulions nous asseoir sur la convention collective, ou laissé entendre que nous disions: Vous avez signé la convention, payez pour maintenant.

En tout temps, nous étions prêts à négocier ce problème. En tout temps — nous l'avons indiqué dans notre lettre du 22 janvier, et pour réponse nous avons eu en cour Supérieure une action de la Corporation des enseignants du Québec sur la juridiction de M. Rossignol — nous étions prêts, suivant justement l'esprit de l'entente à nous asseoir autour de ce problème, à l'examiner avec maturité et de lui trouver des solutions.

Qu'a-t-on obtenu? Grèves illégales, recours devant les cours de justice sur la juridiction de ce comité de négociation. Je trouve une certaine anomalie de la part de ceux qui réclament aujourd'hui ce mot "négociation". Je les respecte pour leur jugement, mais il me semble qu'ils

ont faussé au cours des derniers mois l'esprit même de la négociation qui indique que des parties se rencontrent autour d'une table, abordent un problème avec maturité, sans tenter de perpétuer les erreurs du passé, mais qui essaient de les corriger, de trouver une solution équitable et juste à un problème que l'on avait souligné et que nous reconnaissons de bonne foi.

M. LE PRESIDENT: Des questions étant posées, les parties impliquées désirent-elles répondre immédiatement, ou attendre d'autres questions de la part d'autres membres de la commission?

M. CHARBONNEAU: Nous sommes en train de prendre des notes.

M. LE PRESIDENT: Vous êtes en train de prendre des notes. Je permettrai donc à d'autres membres de la commission de poser des questions. Le représentant de Missisquoi.

Echange de vues

M. BERTRAND: J'ai écouté la lecture des mémoires et les propos qui ont été tenus. Je crois réellement qu'il y a une impasse. Je pense que tous l'admettent. Cette impasse provient de deux problèmes. M. Charbonneau a dit qu'il y avait une question de fond et une question de forme.

A première vue, même sans être légaliste, M. Charbonneau, il faut convenir qu'il y a des lois qui existent. Il y a la loi du ministère et il y a les pouvoirs de réglementation. A la lecture du préambule du règlement no 5, on note que ce règlement a été adopté à la suite de quelques attendus. De là sont venues l'autre jour les réflexions que j'ai faites en Chambre, en me demandant si ce n'était pas la commission parlementaire de l'Education plutôt que la commission de la Fonction publique qui devait s'occuper du problème, mais ça n'a pas d'importance puisque les deux ministres sont ici.

Voici les attendus: "Attendu que la scolarité est un des facteurs servant à déterminer la qualification des maîtres" ce qui veut dire la valeur des maîtres suivant leur formation et leurs aptitudes professionnelles; "Attendu qu'il est nécessaire de définir ce facteur de manière qu'on puisse en faire l'appréciation pratique" là, on touchera la question de forme; "Attendu que cette définition de la scolarité et son évaluation sont essentielles, d'une part" — et là, je rejoins un autre règlement, soit le règlement numéro 4 qui est relatif au permis, au brevet d'enseignement, tout le domaine de la formation des maîtres — "Un règlement sur les critères d'évaluation de la scolarité comme facteur servant à déterminer la qualification du personnel enseignant est adopté".

Donc, premièrement, le règlement numéro 5: la scolarité est donc un facteur déterminant de la qualification. Ce n'est pas le seul, j'en conviens, mais c'est l'élément, certainement, fondamental. Cette scolarité est également un des facteurs déterminants de la rémunération qui elle — et votre convention intervenue en novembre 1969 l'indique clairement — est une matière négociable. Il n'y a aucun doute. De là vient que, lorsque vous parlez de négociation, tous ces éléments sont reliés ou directement ou indirectement.

J'ai entendu le ministre qui vient d'adopter une position de principe. Sa position de principe, à première vue — quant à moi — si on examine la question de forme, le comité provincial qui a été chargé d'effectuer le classement, la proposition qu'il vient de faire, à première vue, me semble moins avantageuse pour les syndicats que ne l'est le comité provincial, parce que ce conseil provincial de classement était établi sur une base conjointe et paritaire et ses décisions étaient finales alors que, par la proposition qui vient d'être faite par le ministre, c'est sa décision qui sera finale. Le ministre me répondra là-dessus s'il y a lieu, mais, première chose, le conseil provincial de classement était à première vue, au niveau des principes, un organisme de classement meilleur que celui qui est suggéré par le ministre.

Je voudrais, avant d'élaborer là-dessus — on y reviendra, sans doute continuerons-nous demain, nous aurons davantage le temps d'examiner le texte du ministre, sur la question de forme — tous conviennent qu'il faut établir des bases. Si on dit que la rémunération est sujette à la scolarité et aux années d'expérience, je pense que c'est admis. Vous le dites dans vos documents, c'est admis par toutes les parties. Deux éléments: scolarité et années d'expérience. Il faut qu'on l'établisse, qu'il y ait des catégories.

Une question d'abord pour vous, M. Charbonneau, les catégories que l'on retrouve à la page 41 du chapitre 6 de votre convention collective, catégorie douze ans, par exemple, a) un brevet "C", est-ce que cela est remis en question ou si c'est admis? Ma première question, M. Charbonneau, toutes les catégories que l'on retrouve au chapitre de la rémunération des instituteurs, catégorie douze ans, avec la nomenclature de brevets, de diplômes, catégorie treize ans et ainsi de suite, est-ce que c'est encore admis ou si c'est remis en question?

Etes-vous en état de me répondre immédiatement, M. Charbonneau?

M. LE PRESIDENT: M. Charbonneau, si vous préférez ne pas répondre tout de suite, libre à vous de prendre note de la question et de répondre plus tard.

M. BERTRAND: Voici comment je conçois le problème. Premièrement, les catégories qui

sont là sont des critères sur lesquels le conseil provincial de classement devait se baser et ils étaient admis par les deux parties. Mais au-delà de cela, comme principe fondamental, même s'il est en certains cas ambigu on incomplet, le règlement numéro 5 est-il remis en question, parce que je le considère comme élément fondamental? Le remettez-vous en question? Troisième question: Est-ce qu'au conseil provincial, on a fait, comme le conseil provincial était autorisé à le faire, des recommandations? Ce détail, je le puise à l'article 6-2.03, paragraphe b, sous-alinéa 2, précise que le conseil peut recommander au ministre toute modification audit règlement numéro 5 qui serait d'intérêt général. Ma question est celle-ci. Y a-t-il du des modifications qui ont été demandées au ministre et, si oui, quelle a été la réponse du ministre?

M. LE PRESIDENT: Un instant s'il vous plaît, M. Bertrand. Le représentant de Verchères.

M. SAINT-PIERRE: II me semble que ce sont des questions assez fondamentales et qu'une fois qu'on les a bien comprises, il serait intéressant d'avoir immédiatement peut-être le point de vue de la partie syndicale.

M. BERTRAND: Je voudrais continuer. M. SAINT-PIERRE: Oui.

M. BERTRAND: Parce ce que je tente de faire, M. Charbonneau, et vous me le direz, de même que le représentant patronal, c'est de savoir si l'examen que je fais du problème est conforme à ce qu'il existe. D'abord, je tiens pour acquis qu'il faut des principes pour un classement. Je tiens pour acquis que le règlement numéro 5 en est un. Deuxièmement, il y a des critères également qui auraient été — du moins, à première vue, c'est ce que je constate, des catégories dont on se sert également pour faire le classement. Troisièmement, il y avait possibilité de demander des modifications au règlement numéro 5; je veux savoir s'il y en a eu. Si oui, quelles sont-elles?

Je voudrais à la suite de cela savoir s'il y avait d'autres éléments qui pouvaient servir au comité provincial. Je ne parle pas de M. Rossignol ou des membres au conseil, qui était le mécanisme chargé de concrétiser cette valeur de scolarité de manière à pouvoir établir le traitement qui, lui — je le répète et je pense qu'il n'y a pas de contestation là-dessus — est négociable.

Voilà pour le moment quelques-unes des questions auxquelles j'aimerais obtenir des réponses. J'en aurai d'autres. Celles-là, quant à moi, je les trouve fondamentales.

M. LESSARD: M. le Président, étant donné que nous traitons justement de problèmes extrêmement importants, à savoir le règlement numéro 5, et que j'ai l'impression qu'il va y avoir plusieurs opinants qui vont avoir l'intention de poser des questions sur ce règlement, ne pourrions-nous pas — parce que c'est quand même le fond, c'est extrêmement important dans la discussion — étant donné qu'il y a des questions subsidiaires, poser nous-mêmes les questions que nous voudrions poser au sujet de ce règlement? J'aurais deux petites questions au sujet du règlement numéro 5.

M. LE PRESIDENT: Le député de Saguenay avait demandé la parole. Préalablement, je demanderais à MM. Charbonneau et Sirois de répondre aux questions qu'ont posées le député de Verchères et le député de Missisquoi.

M.BERTRAND: M. Charbonneau, pensez donc à une autre question également. La rétroactivité ne s'applique pas, on nous l'a dit — je pense que les gens l'acceptent — mais il y a le problème des droits acquis, quant à l'avenir. J'aimerais que vous nous expliquiez votre position là-dessus. Pour ce qui est de la rétroactivité, nous prenons la parole du ministre et c'est public d'ailleurs, c'est dans des documents, il n'y en aura pas. Mais les droits acquis, sur le principe des droits acquis.

M. LE PRESIDENT: M. Charbonneau.

M. CHARBONNEAU: Je pense qu'à ce moment-ci, M. le Président, ce qui s'impose c'est de livrer notre pensée principalement quant au règlement numéro 5. Je crois que ça recoupe un certain nombre de questions et nous pourrons sans doute y revenir, mais je vois que nous ajournons dans 15 minutes; à mon avis, j'ai le temps d'exprimer notre pensée sur le règlement numéro 5 pour ce soir.

M. LE PRESIDENT: C'est déjà énorme, je crois.

M. CHARBONNEAU: Pour nous, le règlement no 5 est une mesure administrative, un règlement qui a été adopté au mois de mars 1968 par le ministère de l'Education, au moment où nous venions d'accepter les échelles de traitement proposées ou offertes par la partie patronale en négociations. Je pense que ceci, en termes de chronologie ou de synchronisation des opérations, ne doit pas échapper en tant qu'élément important dans l'histoire de notre dernière négociation. Le règlement no 5 a été adopté un peu après que nous avons accepté les offres patronales en matière de traitement lors de la dernière négociation. Le règlement no 5 porte sur les critères d'évaluation de la scolarité comme facteur servant à déterminer la qualification du personnel enseignant. On vient de le dire et on a même risqué quelques définitions de ce qu'on appelle la qualification du personnel enseignant. Nous allons revenir là-dessus tout à l'heure pour faire des distinctions.

De plus, un élément qui n'a pas été souligné

par les interventions du début, c'est que ce document, ce règlement est devenu une partie intégrante de l'entente provinciale au terme de l'article 6-2.17...

UNE VOIX: II a été intégré...

M. CHARBONNEAU: ...et il est reproduit comme texte officiel à l'annexe 17. On y réfère souvent en disant que c'est un filtre qui doit servir au jugement à porter dans plusieurs cas. Si c'est un élément qui est partie de la convention, c'est devenu la propriété des six parties à l'entente et ce n'est plus, pour la durée de cette convention, propriété exclusive du ministère de l'Education.

En acceptant, lui et nous, le ministère et la CEQ, de considérer ce règlement comme partie intégrante de l'entente, nous avons accepté d'en devenir coresponsables, coadministrateurs, copropriétaires. Il est donc carrément inapproprié, inopportun en cours de convention, quant à nous, de voir tout à coup la partie patronale qui prétend se réapproprier exclusivement,l'administration, l'évolution ou l'avis du règlement no 5. Pour nous, c'est très grave.

Le règlement no 5 est un cadre général qui permet d'évaluer la scolarité des enseignants et j'insiste sur l'expression "cadre général". Le principe du règlement no 5 est d'évaluer comment peuvent s'accumuler des années de scolarité, comment elles peuvent s'additionner. On prévoit aussi de quel type d'années d'études suivies dans des établissements reconnus on va tenir compte, etc., et on prévoit comment va se faire l'addition des années de scolarité générales et des années de scolarité de formation professionnelle. Par exemple, on dit qu'on va compter jusqu'à quinze ans en termes de formation générale, puis on additionne la formation professionnelle. Ce sont des choses comme cela dont il est question dans le règlement numéro 5. Ce cadre général qui prévoit une quantification ou une addition des années, ou une manière d'additionner des années de scolarité, a besoin pour être applicable et pratique, aux termes mêmes du préambule, déjà on le soupçonne, d'être complété de règles d'application. Je me réfère ici à l'article 623 de la convention.

Déjà on voit que, dans l'esprit de ceux qui ont signé ce texte...

M. LE PRESIDENT: Avant de continuer, pour mettre un terme au suspense, seriez-vous assez gentil de nous dire si vous le contestez ou non, si vous remettez en question le règlement numéro 5?

M. CHARBONNEAU: Je peux bien vous dire tout de suite que nous le remettons en question, mais s'il vous plaît, je veux expliquer pourquoi.

M. LE PRESIDENT: Oui, oui. Allez-y, mais pour mettre un terme au suspense...

M. CHARBONNEAU: Si cela met un terme au suspense, tant mieux, mais ce n'est pas fini. Dans l'esprit des signataires de l'entente, déjà on s'aperçoit que le comité provincial est autorisé à faire des règles d'application de ce règlement en cours de route. Un règlement, c'est probablement comme une loi, mais vous êtes mieux placés que moi pour le dire, ça évolue, ça se modifie, ça se transforme, ça s'adapte. Sinon, ça ne favorise guère l'administration. Pour être pratique et utilisable, le règlement no 5 a besoin d'être accompagné d'un ensemble d'autres considérations pour être applicable en termes d'évaluation de la scolarité pour fins de traitement. Le titre du règlement no 5 est "L'évaluation de la scolarité pour fins de qualification". Mais pour fins de traitement, nous avons besoin d'autres considérants que le seul règlement no 5 et, d'ailleurs, les parties à l'entente ont reconnu elles-mêmes l'insuffisance du règlement no 5 si on veut le considérer d'une façon stricte et l'appliquer d'une façon arithmétique à la scolarité des enseignants.

Cette insuffisance du règlement no 5, j'en veux pour exemple l'article 6-1.01 de la convention à la catégorie douze (12) ans de scolarité; il y a des brevets mentionnés dans certains paragraphes qui n'ont pas requis douze ans de scolarité, aux termes du règlement no 5, mais neuf, dix ou onze ans, et pourtant, par entente, dans le cadre d'un respect, d'une considération au sens large du règlement no 5, nous avons quand même mis "catégorie douze ans" sur ces brevets.

J'en veux pour autre exemple, l'article 6-1.08 dans la catégorie 19 ans, pour fins de traitement. Il y a là des gens qui ont des scolarités dépassant 19 ans aux termes du règlement no 5. C'est en particulier le cas de personnes qui ont vingt ou vingt-deux ans de scolarité, sans doctorat. Le règlement no 5 ne mentionne pas la question de doctorat. Aux termes de ce règlement, ces personnes ont donc, peut-être, jusqu'à vingt-deux et vingt-trois ans. Aux termes de la convention 19 ans.

M. LE PRESIDENT: Un instant s'il vous plaît, le député de Bagot.

M. CARDINAL: Je peux vous interrompre? Il y a une chose que je voudrais comprendre. Disons que je réserve pour plus tard mes remarques, je suis dans la période d'exploration pour informer les membres de la commission. Vous parlez à la fois du texte de la convention et des articles 6 avec leurs décimales et vous donnez des exemples que vous comparez à des règles établies par le règlement no 5. Vous nous avez dit que vous contestez le règlement no 5 — je parle d'une façon assez claire — mais dans l'hypothèse où vous contestez les deux, évidemment là on recommence, il va falloir trouver un nouveau mécanisme, vous accepteriez les deux, si vous trouvez des différences importantes entre le règlement no 5 et le texte de la

convention, lequel des deux textes, d'après vous, devrait l'emporter sur l'autre?

M. LE PRESIDENT: L'emporter dans quel sens?

M. CARDINAL: Si le règlement no 5 fait partie de la convention, il en fait partie juridiquement, et comme déjà il y a une convention qui a des articles qui définissent les années de scolarité, s'il y a ce qu'on appelle en anglais des "discrepancies", des manques d'équivalence entre le règlement no 5 et les articles de la convention, lesquels devraient l'emporter?

M. LE PRESIDENT: Avez-vous saisi la question M. Charbonneau?

M. CHARBONNEAU: J'ai saisi la question. Mais la question est une manière propre à M. Cardinal de dire ce que M. Bertrand a appelé une impasse.

Je veux dire qu'il y a des difficultés à faire correspondre un faisceau de critères qui, à la lumière des explications que j'étais en train de donner, ne condordent pas aussi bien qu'on ne le prétend. C'est en même temps une réponse aux questions de M. Bertrand et à la proposition de M. Saint-Pierre, qui dit: II faut effectuer le classement en se servant du règlement no 5. Il a eu des paroles fort louangeuses à l'égard du règlement no 5 comme possibilité de régler la question.

Je suis en train de dire que, même en 1968-1969, nous avons déjà encadré le règlement 5, de beaucoup d'autres considérants et nous avons fixé cela dans des clauses de convention.

Je montre qu'en effet il y a des "discrepancies", comme vous le dites?

M. CARDINAL: II m'arrive parfois d'employer des termes anglais.

M. CHARBONNEAU: Cela a traversé le barrage qu'il y a entre vous et moi.

M. CARDINAL: C'est à cause des difficultés de l'enseignement de la langue française, même dans mon temps.

M. CHARRON: II est le parrain du bill 63.

M. BERTRAND: M. Charbonneau, pendant que vous êtes à détailler certaines catégories et les interprétant en rapport avec le règlement no 5, pouvez-vous en même temps répondre à ma question? Les catégories indiquées dans deux ou trois pages de cette convention, avec les détails que je n'ai pas besoin d'énumérer, est-ce que le syndicat les accepte encore, de même que la nomenclature des brevets et des diplômes qui auraient été reconnus comme représentant une scolarité de douze ans ou si vous remettez également en question ces catégories?

M. CHARBONNEAU: Si je semble hésiter un peu à répondre, ce n'est vraiment pas quant au fond. Je crains que l'on fasse référence à certains textes ou certains avancés que nous avons faits auparavant.

M. BERTRAND: Globalement.

M. CHARBONNEAU: Quant au fond et quant à une nomenclature qui va de douze à vingt en ces termes, avec ce qu'elles contiennent, nous n'essayons pas de remettre cela en question. Tout de suite, je sens que peut-être certaines personnes dans la salle vont faire le lien avec ce que nous avons fait comme proposition en parlant des catégories 1 à 9. Vous allez retrouver cela dans certains de nos textes. Nous avons demandé de reprendre le classement en parlant de 1 à 9 au lieu de 12 à 20. Ma réponse, quant au fond, c'est que nous ne remettons pas en question cette nomenclature. Si nous pouvions vous prouver qu'avec un classement par catégorie, sans mention à tout coup du terme "années de scolarité", on arriverait à faire un classement plus clair pour tout le monde, sans lier toujours la notion de scolarité, alors que cette notion, dans les faits, n'est pas toujours liée; si on arrivait à faire un classement seulement avec la notion de catégories de 1 à 9 qui correspondraient de 12 à 20, en greffant tous les autres diplômes non classés jusqu'à maintenant, si nous arrivions à faire cette preuve, bien sûr, quant aux termes eux-mêmes, que l'on n'appellerait plus cela des classes 12 à 20, mais 1 à 9, avec une conception non liée à la scolarité.

M. BERTRAND: C'est pour cela que je vous l'ai demandé; j'avais vu dans vos documents que vous parliez de nouvelles catégories.

M. CHARBONNEAU: Vous comprenez maintenant qu'il ne s'agit pas de nouvelles dans le sens qu'on démolit ce qui est là, mais qu'on regroupe, qu'on prend cette espèce de grille et qu'on la détache du lien de scolarité à tout prix lien qui ne résiste pas d'ailleurs à l'analyse, ce que j'étais en train de démontrer.

M. LE PRESIDENT: Un instant s'il vous plaît, une sous-question d'abord au député de Bagot, et par la suite au député de Verchères.

M. CARDINAL: Comme j'ai dit tantôt, je me réserve des remarques pour plus tard, seulement c'est vraiment pour se comprendre. Vous avez répondu fort bien, je pense, à la question que je vous ai posée, et je pense que j'ai fort bien compris ce que vous avez voulu dire en distinguant le fond de certaines technicités. Est-ce que, quand même, pour aller plus loin, il s'agirait, dans une hypothèse de travail, d'en venir plutôt à des catégories que j'appellerais d'équivalence plutôt qu'à des catégories

d'années de scolarité qui contiennent une certaine part de fiction?

M. CHARBONNEAU: J'ai l'impression que l'expression que vous employez "catégories d'équivalence" correspond en réalité aux besoins qu'on a pour classer les anciens brevets et les accumulations avec études de perfectionnement et tout ça. Cela rejoindrait plutôt la notion, mais il faudrait bien voir ce qu'il y a sous de telles appellations.

M. CARDINAL: Je préfère vous laisser continuer, j'y reviendrai en temps et lieu, quand les parties se seront exprimées.

M. LE PRESIDENT: Avant que vous continuiez, si vous permettez, le député de Verchères.

M. SAINT-PIERRE: Pour la bonne compréhension, des membres et de toutes les parties, il me semble qu'il y a une distinction très importante à faire entre le contenu de la convention collective et certains documents qui ont pu être ajoutés à la convention collective. Il m'apparaft, par exemple, que le chapitre six est le résultat d'une négociation entre deux parties, une partie syndicale et une partie patronale, dans laquelle, à la suite du règlement no 5 qui est en annexe, on tente et on a tenté d'aller le plus loin possible à la table des négociations, pour indiquer exactement la valeur de certains diplômes en fonction du règlement no 5.

Mais du fait que le règlement no 5 soit dans la convention collective, le texte du règlement no 5 n'est pas le résultat d'une négociation entre les parties, c'est un document qui a été ajouté. Je pense que, si nous suivons votre argumentation, c'est aussi bien dire que c'est le ministère de l'Education qui est sujet aux négociations, et que ce sont toutes les lois de l'éducation qui sont sujettes à la négociation entre les parties.

Il me semble que, pour la bonne compréhension, il faut établir cette distinction entre la responsabilité confiée par la loi à un ministère donné: édicter certains règlements et appliquer ces règlements entrent dans les négociations collectives.

Il me semble que la lettre numéro 6, à la page 164, de M. Cardinal, n'est pas le résultat de la classification. L'ancien ministre de l'Education, à l'époque, pour rendre complètement ce problème au champ de la négociation avait accepté de déléguer, d'abdiquer un droit — et j'insiste — une responsabilité que la loi lui confiait, en confiant, en particulier, les paragraphes 7-2 et 7-5 au comité provincial de négociations, puisque, à l'époque, toutes les parties pensaient qu'autour de la table des négociations, en partant du règlement no 5 qui tentait de mettre de l'ordre dans l'équivalence de nos diplômes, on voulait trouver une classification pour 70,000 enseignants. Depuis, 28 mois se sont écoulés. Est-ce que vous saisissez comme moi cette distinction? Si on se réfère à la Loi du Conseil supérieur de l'Education, est-ce que vous entendez qu'on a accepté de partager en six parties les dispositions de la Loi du Conseil supérieur de l'Education?

M. CARDINAL: Si vous permettez, sans vouloir chicaner le ministre, par ma lettre du 19 juillet 1968, je n'ai pas abdiqué mes responsabilités, j'ai donné un mandat à un comité.

M. CHARBONNEAU: La conclusion que j'apporte aux arguments de M. Saint-Pierre c'est que le ministre, maintenant, veut retirer ce mandat confié à un comité en cours de route par certains aspects, et...

M. SAINT-PIERRE: Je m'excuse, là vous ne me ferez pas dire ce que je n'ai pas voulu dire. Ce que je vous dis c'est que le règlement no 5, quant à moi, c'est comme les règlements nos 1, 2, 3 et 4, c'est comme tous les règlements d'ordre administratif du ministère, c'est un texte de référence qui était dans une convention. Pour ma part, je suis toujours prêt à recevoir des suggestions si on me signale qu'il y a des injustices, des iniquités. Il ne me semble pas que ce soit le fruit de la négociation. Quant à cela, aussi bien dire qu'à la négociation on va discuter de tous les règlements nos 1 et 2, et même la responsabilité.

M. CHARBONNEAU: Je suis d'accord avec vous pour dire que le règlement no 5 n'est pas le fruit d'une négociation, mais cela a été inclus dans une convention comme propriété des six parties et cela en a fait un règlement assez différent, pour le temps de cette convention collective, des autres règlements qui n'ont pas été insérés dans des conventions.

M. SAINT-PIERRE: Parce qu'on n'en avait pas besoin pour les fins de la convention collective. La lettre de M. Cardinal, encore une fois, était simplement pour le bénéfice des six parties, on voulait prouver justement que le ministre de l'Education, comme vous l'avez bien souligné, confiait un mandat, qui lui revenait par la loi, à un comité. Les règlements nos 1 et 2 n'avaient aucune relation avec le problème de la convention collective. Je ne vois pas pourquoi on les aurait mis en annexe.

M. CHARBONNEAU: Ce qui ressort le plus d'une telle distinction sur laquelle vous nous amenez, la distinction — si j'ai bien compris — entre la manière avec laquelle on est arrivé à classer les brevets dans la liste de 6-1 et la manière avec laquelle on veut arriver à faire le reste de la classification, la conclusion qui ressort, c'est que vous voulez employer deux manières différentes.

Vous admettez que, dans 6.01 par négociation, on a classé un grand nombre de brevets et

de titres de scolarité d'enseignants. Tout à coup, on dit: CVst assez, la négociation; le reste, on va le faire tout seul. Moi, c'est la conclusion que je tire des arguments que vous nous fournissez, des explications et des distinctions fort claires que vous apportez.

Ce qui est dans 6-5.08: l'évaluation, en termes d'années de scolarité, des cours de méthode, des cours de perfectionnement, le classement des anciens brevets et les titres anglais, vous dites que, maintenant, ce ne sera plus matière à négociation. Si le règlement no 5 n'était là que pour référence, il m'appartient, semblez-vous dire, et je peux m'autoriser maintenant à terminer ce que la négociation n'a pas terminé.

Si le travail par négociation était admissible par rapport aux responsabilités que vous détenez en tant que ministre de l'Education par la Loi du Conseil supérieur de l'éducation et par les autres lois, si c'était admissible de négocier tout ce qu'il y a dans 6.01 pour en arriver à établir toute cette base de classement par négociation, pourquoi, lorsqu'arrive le temps de terminer le travail, avec ce qu'il y a dans 6-5.08, tout à coup, cela devient-il un assaut grave contre les prérogatives du ministre? Je dis que c'est une négociation qui n'a pas été terminée. Il y avait un mécanisme pour voir à administrer cette fin de négociation. Il n'a pas fonctionné. Nous revenons à l'esprit de base qui est de négocier la classification des enseignants, mais cela n'est pas une infraction à la convention; au contraire, on essaie de terminer cette négociation.

M. LESSARD: M. le Président, au sujet des relations...

M. LE PRESIDENT: Un instant. Devant l'insistance du député de Saguenay, évidemment, je permettrai immédiatement la question.

M. LESSARD: M. le Président, c'est qu'on s'aperçoit, tout simplement, que d'autres participants ici peuvent poser des questions en relation avec le règlement numéro 5. Il me semble que, nous aussi, nous pouvons avoir des questions importantes et que nous devrions avoir la possibilité de les poser. C'est justement en relation avec la question du ministre...

M. LE PRESIDENT: Si vous me le permettez, auparavant. Il ne m'est jamais venu à l'esprit d'empêcher un député de s'exprimer, mais je pense qu'il était important que le ministre de l'Education s'exprimât d'abord. Je vous donne maintenant la parole.

M. LESSARD: Je suis bien d'accord, M. le Président. Il ne s'agit pas de faire des remarques générales sur toute la négociation; il s'agit de parler d'un point particulier, le règlement no 5. On s'aperçoit actuellement qu'en vertu de l'article de la convention collective le règlement no 5 devient partie de la convention.

La question que je veux poser — je pense que cela tourne autour de cette discussion — c'est que d'abord il n'y a pas eu de négociation au sujet du règlement no 5, alors que c'est un article fondamental à l'intérieur de la convention collective. Une autre question: Est-ce qu'il y a eu au moins une consultation au sujet de la concrétisation de ce règlement no 5 auprès des enseignants? Ou est-ce venu tout simplement unilatéralement d'un côté, à savoir le ministère de l'Education? Il reste quand même que le règlement no 5 tourne autour de cela. C'est fondamental. Lorsque nous arrivons, par exemple, à l'application des 15 ans, des 16 ans ou des 17 ans, eh bien, le comité de classification doit juger continuellement, à partir du règlement no 5. En ce qui me concerne, je m'interroge énormément sur le fait que le règlement no 5 ne devrait pas être une partie de la négociation collective parce qu'il est la base même de toutes les catégories de traitement.

M. LE PRESIDENT: Pour l'information des membres de cette commission, à la page 92 de la convention collective, article 10-6.01, où on fait référence aux annexes qui font partie de la convention, nous retrouvons uniquement l'annexe 16, qui fait partie de la convention. Conséquemment, le règlement numéro 11, qui est annexé, ne fait pas partie de la convention. Le règlement no 5 du journal.

M. CARDINAL: Est-ce que je pourrais ajouter un détail? Pourrait-on lire l'article 6-2.17 pour faire la lumière une fois pour toutes là-dessus?

M. CHARBONNEAU: Est-ce que nous pourrions voir...

M. CARDINAL: M. Charbonneau, nous pourrions simplement mentionner un fait qui est la filière normale de la loi — on a demandé s'il y avait eu consultation et ici ce n'est pas une défense que je fais, c'est purement une clarification — la loi actuelle oblige le ministre, quel qu'il soit — enfin dans son sens le plus large, hors toute partisanerie — à consulter le Conseil supérieur de l'Education, lorsqu'il prépare un règlement. Cette consultation a été faite auprès du Conseil supérieur de l'Education qui, dans l'esprit du bill 60 et du bill créant le Conseil supérieur de l'Education, devait représenter les diverses couches de la population. Il faut se replacer en 1968 et non pas en 1970, pour analyser la consultation d'alors.

M. CHARBONNEAU: Elle est bonne, nous n'avons pas été consultés là-dessus.

M. LE PRESIDENT: Je crois que cela répond à la question du député de Saguenay.

M. CHARBONNEAU: Mais, au Conseil supérieur de l'Education, comme il fonctionne, les gens qui sont délégués au Conseil supérieur, qui

y sont présents, ne sont pas des délégués des organismes, mais sont choisis par le ministre de l'Education.

Alors, il est difficile de dire qu'une consultation du Conseil supérieur équivaut à une consultation de la CEQ.

M. CARDINAL: Je n'ai jamais dit cela, M. Charbonneau.

M. CHARBONNEAU: C'est clair. M. Cardi- nal vient de dire avec moi que la CEQ n'a pas été consultée, en réponse à M. Lessard, sur ce règlement.

M. LE PRESIDENT: Un instant s'il vous plaît, des membres de cette commission m'ayant fait remarquer qu'il était six heures passées, j'ajournerais donc à demain, 4 heures.

(Fin de la séance: 18 h 11)

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