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Commission permanente de la Fonction publique
Conflit de travail dans les secteurs public et
parapublic
Séance du jeudi 4 mai 1972
(Seize heures trente-deux minutes)
M. LAMONTAGNE (président de la commission-permanente de la
fonction publique): A l'ordre, messieurs!
Au début des travaux, je voudrais d'abord aviser qu'on m'a
informé des changements suivants: M. Hardy, député de
Terrebonne, remplacera M. Cloutier, député d'Ahuntsic, et le
député de Dubuc remplacera le député de Chicoutimi.
Pour continuer les travaux d'hier, je donnerai la parole immédiatement
au ministre de la Fonction publique.
Syndicat des agents de la paix
M. L'ALLIER: M. le Président, j'ai cru entendre tout à
l'heure et vous pourrez peut-être poser la question que le
représentant du Syndicat des agents de la paix de la fonction publique
avait quelque chose à dire à ce moment-ci. Comme je ne sais pas
de quoi il s'agit, peut-être pourrait-il nous le dire. Il faut comprendre
que le représentant du syndicat souhaiterait être de nouveau
entendu à la commission, à un moment donné.
M. LACAS: C'est bien ça, M. le Président. Noël Lacas,
du Syndicat des agents de la paix de la fonction publique. Nous avons
négocié aujourd'hui, nous négocions la semaine prochaine
et, tel que je l'ai dit la semaine dernière, nous prétendons ne
pas être couverts par le bill 19, à cause d'un droit que nous
avons dans la Loi de la fonction publique. Nous avions demandé, le 10
mars 1972, la permission de passer devant une commission parlementaire pour
discuter de tout le problème des agents de la paix de la fonction
publique.
Si je pouvais avoir la garantie que nous ne sommes pas couverts par la
loi 19, je n'aurais pas d'objection à attendre quelques jours pour
présenter un mémoire devant une commission parlementaire
particulière. D'un autre côté, si vous êtes pour nous
inclure à l'intérieur d'un décret possible, il est
sûr qu'il faudrait nous présenter devant vous pour expliquer tout
le problème des agents de la paix de la fonction publique.
Alors, voici la demande que je fais: s'il était possible que je
me présente devant la commission parlementaire actuelle, le lundi 15
mai, je pourrais déposer un mémoire complet sur tout le
problème des agents de la paix de la fonction publique. Par contre, si
on m'informe que les travaux qui se font actuellement n'englobent pas les
agents de la paix de la fonction publique, je n'ai pas d'objection à
attendre quelques jours passé le 15 mai pour me présenter devant
une commission parlementaire particulière pour discuter du cas des
agents de la paix. C'est la raison de mon intervention ici cette
après-midi.
M. L'ALLIER: M. le Président, je remercie le représentant
du syndicat de ce qu'il vient de nous dire. Sur ce point, je crois que nous
pourrions entendre le représentant du Syndicat des agents de la paix,
à la fin des travaux de cette commission, qui peuvent durer jusqu'au 15
mai. Il est possible, toutefois, que, si les travaux étaient
terminés avant cette date, nous soyons en mesure d'en donner avis au
représentant du syndicat, qui pourrait, à la fin des travaux de
la commission, sur les questions de la table centrale et des tables
sectorielles, faire les représentations qu'il souhaite à la
commission.
M. LACAS: Est-ce que cela veut dire qu'il serait possible que je vienne
avant le 15 mai?
M. L'ALLIER: Ce serait possible si la commission avait terminé
ses travaux avant cette date. Alors, nous pourrions vous donner avis, si vous
voulez, pour vous permettre de présenter ce mémoire.
M. LACAS: Alors, c'est à moi de me préparer pour mardi ou
mercredi de la semaine prochaine.
M. L'ALLIER: Bien, il est vraisemblable que les travaux peuvent se
terminer mardi ou mercredi de la semaine prochaine ou peuvent se continuer,
suivant...
M. LACAS: Est-ce que vous allez m'aviser par l'entremise du procureur
patronal, Me Drouin?
M. L'ALLIER: Par le secrétariat des commissions.
M. LACAS: Par le secrétariat des commissions. Alors, vous
m'avertirez assez tôt. Je préparerai cela en fin de semaine, et je
serai prêt à me présenter devant vous avec un
mémoire complet.
M. LE PRESIDENT: Le député de Montcalm.
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, j'aurais une question au
ministre et une question au représentant des agents de la paix. Le
représentant du syndicat a soulevé deux points:
premièrement, sont;ils couverts par la loi 19 ou non? C'est
la question qui a été posée, la semaine dernière,
par plusieurs organismes dont les agents de la paix. Le ministre n'y a pas
encore apporté de réponse. Il devait consulter
ses conseillers, rencontrer le conseil des ministres. Depuis ce
temps-là, il s'est écoulé pratiquement une semaine. D a
certainement eu le temps de rencontrer ses conseillers et le conseil des
ministres. Est-ce qu'il serait prêt à faire part à la
population de son interprétation de la loi et du nombre de syndicats
couverts ou non? S'il ne le peut pas, quand pourrait-il nous faire part de
cette réponse?
M. L'ALLIER: M. le Président, je voudrais, tout simplement, dire
ici que, d'après toutes les interprétations juridiques que nous
avons, le Syndicat des agents de la paix est effectivement couvert par la loi
no 19 actuellement.
M. MASSE (Montcalm): Est-ce que le ministre a l'intention d'apporter des
modifications par amendement à la loi concernant ceux qui
n'étaient pas touchés par le problème qu'a voulu
résoudre le gouvernement? Est-ce qu'il va, quand même, les tenir
à l'intérieur de la loi ou permettre que le processus de
négociation normal se continue pour ceux qu'il ne voulait pas viser,
semble-t-il?
M. L'ALLIER: Sur ce point, je me souviens d'une question du
député de Montcalm. A la fin des travaux de la commission, je
serai en mesure de donner la position du gouvernement, lorsque nous aurons
entendu vraiment toutes les parties, ainsi que les membres de la commission sur
cette question. Comme il s'en souviendra, de ceux qui ne sont pas dans le front
commun, certains groupes sont en processus normal de négociation,
d'autres ont effectivement fait la grève et d'autres n'étaient
plus en négociation, mais n'étaient pas en grève non plus,
de sorte qu'il est peut-être difficile de donner une réponse
globale à partir, par exemple, d'une distinction entre le front commun
et les 40,000 qui ne sont pas dans le front commun. C'est donc ce sur quoi nous
travaillons actuellement. Je solliciterai l'avis des membres de la commission
lorsque nous aurons entendu tous les rapports techniques qui seront
présentés, pour qu'à la fin des travaux de la commission
ou le plus rapidement possible après nous puissions
être en mesure d'aviser les intéressés de l'attitude du
gouvernement et, s'il y a lieu, de procéder à des
modifications.
M. MASSE (Montcalm): Je pense que le ministre de la Fonction publique
admettra que le climat aux tables de négociation, pour des groupes
particuliers, peut être affecté par le fait de savoir s'ils sont
ou ne sont pas couverts par la loi no 19.
Il y a des groupes qui ne peuvent manifestement pas être couverts
par la loi no 19, entre autres les agents de la paix puisqu'ils n'avaient
même pas le droit de faire la grève. Ils n'étaient
même pas à cette table de négociation, si mes
renseignements sont exacts. De toute façon, ils ne pouvaient pas
être couverts par cette loi.
Alors, manifestement, ils n'ont pas à être à
l'intérieur de la loi no 19. D'autre part, s'ils continuent à
négocier, aujourd'hui, demain et la semaine prochaine, dans un climat
où ils ne savent pas s'ils auront une convention collective
décrétée ou si, au contraire, ils pourront la
négocier normalement, cela ne peut pas faire autrement que d'affecter le
climat à la table de négociation. On ne négocie pas dans
la même atmosphère selon qu'on est à l'intérieur de
la loi no 19 ou à l'extérieur, surtout quand on plaide qu'on n'a
pas à être dans la loi no 19.
C'est pourquoi je pense que le ministre devrait formuler sa
réponse bien avant la fin des travaux de cette commission parce qu'elle
n'a pas fixé la date de la fin de ses travaux. Elle peut se rendre
jusqu'au 1er juin.
M. GARNEAU: Le 15 mai.
M. MASSE (Montcalm): Jusqu'au moment où les décrets
peuvent être appliqués. Le 15 mai. Il ne faudrait pas
nécessairement attendre cela, puisque votre décision va affecter
le climat des négociations. Je pense que dans ce sens il serait urgent
de répondre au moins si vous ne pouvez pas répondre pour
tous les groupes pour les groupes où c'est manifeste,
c'est-à-dire, entre autres, les agents de la paix je ne veux pas
tous les nommer plus une deuxième catégorie, celle de ceux
qui n'étaient même pas en négociation parce qu'ils
n'étaient pas en période de fin de convention collective. Ils ont
encore des conventions. Ce groupe, manifestement, n'a pas à être,
en pratique, inclus dans la loi no 19.
Il y a des groupes où c'est quand même simple à
déterminer. J'admets qu'il y a d'autres groupes où c'est
peut-être un peu plus compliqué. La Chambre se réunit, de
toute façon, tous les jours. Je pense bien que vous auriez l'accord des
partis pour faire rapidement passer cela en priorité afin que les
amendements puissent être apportés dans le but de libérer
le climat psychologique déjà suffisamment tendu dans ce
domaine.
M. GARNEAU: Est-ce que le député de Montcalm parle au nom
d'un parti?
M. MASSE (Montcalm): Non, mais je connais suffisamment la bonne foi des
partis d'opposition pour savoir que, sur un problème semblable, ils
seraient d'accord pour encourager le gouvernement.
M. HARDY: Le député de Montcalm devient le commun
dénominateur des oppositions!
M. MASSE (Montcalm): Dénominateur, oui. Commun? Cela est une
autre affaire.
M. LACROIX: Cela dépend des opinions. M. L'ALLIER: En
fait,...
M. MASSE (Montcalm): Je pense que le ministre voit bien le point.
M. L'ALLIER: ... je comprends très bien la question posée.
Je comprends aussi les difficultés que peut présenter...
M. MASSE (Montcalm): Ce n'est pas une attrape.
M. L'ALLIER: ... cette situation.
M. MASSE (Montcalm): Ce n'est pas ça du tout.
M. L'ALLIER: Non? Par ailleurs, je voudrais répéter ici
l'assurance que nous avons donnée que l'attitude ou l'esprit du
gouvernement est de faire en sorte que, lorsque les processus normaux de
négociation sont en cours et se déroulent d'une façon
régulière, il n'est pas dans l'intérêt ni du
syndicalisme,.ni du gouvernement, ni de personne, en définitive, que ces
processus soient modifiés d'une façon extérieure.
C'est dans cet esprit, je crois, que les pourparlers aux tables de
négociation, qui sont actuellement soumises à la loi 19, doivent
se poursuivre.
Par ailleurs, je prends aussi note de votre suggestion que le
gouvernement réponde à cette question si possible avant la fin
des travaux de la commission. Je verrai à faire l'impossible pour vous
donner satisfaction.
M. MASSE (Montcalm): Je pense que c'est important parce qu'au fond la
réponse du ministre, c'est qu'on négocie de bonne foi, etc. Mais
la bonne foi, elle a été pour le moins rompue avec la loi 19, et
les gens peuvent penser que ce n'est peut-être pas toujours
nécessairement une bonne foi pour les autres.
Ma deuxième question s'adresse au représentant des agents
de la paix. Vous parlez de soumettre à la commission un mémoire
sur l'ensemble de la question des agents de la paix. Est-ce que, dans votre
esprit, il y a une relation entre la négociation et ce mémoire?
Si la convention était signée entre les agents de la paix et le
gouvernement, y aurait-il quand même lieu, dans votre esprit, de
soumettre un mémoire à la commission?
M. LACAS: Oui, il y aurait sûrement quand même lieu de
soumettre un mémoire à la commission. Si la négociation
n'était pas terminée, il y aurait sûrement un lien direct,
mais, si la convention était signée, cela ne nous
empêcherait pas, quand même, de venir devant cette commission
parlementaire pour expliquer dans quel climat nous sommes dans le domaine de la
négociation, alors que nous n'avons pas le droit à l'arbitrage,
que nous n'avons pas le droit de grève, que nous n'avons pas le droit
d'affiliation à aucune centrale syndicale. Nous n'avons pas droit
à des médiateurs, pas droit à des conciliateurs, rien. En
somme, nous sommes obligés de prendre ce que le gouvernement nous donne.
Nous n'avons personne qui puisse entendre nos argumentations d'une façon
logique, nous donner un peu de justice et d'équité.
Si je prenais la réponse du ministre, cet après-midi, et
que je la rendais publique, à savoir que, dans l'espace de dix minutes,
nous sommes assujettis à la loi 19, je vous prie de me croire, il y
aurait un éclair dans le ciel du Québec. A la dernière
séance où nous étions ici, j'ai posé la question
assez directement, en prétendant que nous n'étions pas couverts
par la loi 19. Nous demandions, à un moment donné, qu'on nous
dise carrément que nous ne sommes pas couverts. Mon exécutif,
actuellement, est à Québec. Si je m'en retourne et que je dis que
le ministre L'Allier vient de déclarer que je suis assujetti à la
loi 19, je vous prie de me croire, vous allez en entendre parler dans un assez
bref délai.
Ce n'est pas une question de chantage, mais c'est que c'est une
question, à un moment donné, de relations dans le domaine de la
négociation. On n'a pas le droit de grève dans une loi et, dans
une autre loi, la loi 19, on nous dit: Vous n'avez pas le droit de
grève. C'est ce que j'ai répété la dernière
fois: Vous ne pouvez quand même pas m'enlever ce que je n'ai pas.
C'est sur ce point. Je ne sais pas ce qui se passe dans les autres
domaines où les employés sont assujettis, quand même, au
code du travail et tout cela. La seule relation qu'il y a avec le code du
travail, dans le projet de loi no 55, en ce qui nous concerne, c'est
l'inclusion ou l'exclusion de personnes dans l'unité de
négociation.
Vous comprendrez comme moi, M. le ministre, que j'aime beaucoup mieux
prendre sous réserve la réponse que vous donnez.
M. L'ALLIER: C'est cela.
M. LACAS: Parce que je vous prie de me croire que nous ne sommes pas du
tout intéressés...
M. MASSE (Montcalm): De fait, légalement, les agents de la paix
sont couverts par la loi 19.
M. L'ALLIER: C'est cela.
M. MASSE (Montcalm): Mais l'intention du gouvernement, si je comprends
bien, serait de les faire sortir. Nous, ce que nous voulons savoir, c'est
quand. Quand le gouvernement proposera-t-il au Parlement des amendements qui
sortiront les agents de la paix de la loi 19, comme d'autres groupes qu'il y
aurait à sortir?
Mais là c'est vous qui êtes ici, nous parlons
spécifiquement...
M. LACAS: Moi, je parle des agents de la paix, parce que dans le bill 55
il est déjà prévu
un article où il est dit que nous n'avons pas le droit à
l'arbitrage, ni à la grève, ni même à la
conciliation, alors que tous les autres groupes qui sont devant vous ont quand
même un certain droit à la grève légale. Et le bill
19 a été mis en place pour arrêter, cette grève
légale.
Seulement, par ricochet, ç'a affecté les autres groupes
qui continuaient de négocier. Mais il reste un fait, c'est que nous nous
n'avons pas ce droit de grève. Vous ne pouvez quand même pas nous
l'enlever dans un autre bill.
M. MASSE (Montcalm): Mais la convention décrétée,
ça relève du bill 19. On ne peut pas vous enlever le droit de
grève, vous ne l'aviez pas. Mais vous aviez quand même droit
à une convention collective négociée. Mais dans la loi 19
vous n'avez plus droit à ça, si vous ne vous êtes pas
entendus avant une certaine date.
M. LACAS: C'est bien sûr que, si nous ne nous entendons pas et que
vous me dites que je suis couvert par la loi, on va sûrement nous imposer
une ordonnance. Vous parlez de décret, vous autres. Comme je le disais
à Me Drouin ce matin, j'ai l'impression que c'est plutôt une
ordonnance qu'un décret, parce que, dans le domaine du travail, quand on
parle de décret, c'est l'extension juridique des conventions. Ce sont
des mots qui nous mettent un peu mal à l'aise.
Quand on parle de décret, on dit que les conventions sont
signées et que par décret on les prolonge aux autres. C'est
plutôt une ordonnance que vous allez sortir, beaucoup plus qu'un
décret. C'est l'impression que j'ai. Je veux savoir de la commission de
la fonction publique si, dans cette ordonnance, vous englobez les agents de la
paix de la fonction publique. Est-ce que nous allons tomber dans l'ordonnance,
oui ou non? C'est tout ce que je demande. Nous allons nous arranger avec le
reste.
M. L'ALLIER: Tout ce que je peux dire ici, c'est de souhaiter que les
négociations se poursuivent et le plus rapidement possible.
Deuxièmement, je peux assurer le représentant du syndicat que,
les mécanismes de négociation et l'ensemble des conditions de
négociation de la convention collective des agents de la paix, c'est une
question qui me préoccupe personnellement, parce que c'est une situation
particulière qui n'est peut-être pas la meilleure. Effectivement,
il faudra peut-être revoir de quelle façon ça pourrait
être ajusté ou amélioré dans un sens ou dans
l'autre.
Le président du syndicat a fait état du fait qu'il n'a pas
le droit de grève, mais on s'est de fait retrouvé avec une
grève.
M. MASSE (Montcalm): Un arrêt de travail, une vacance.
M. L'ALLIER: Un arrêt de travail, reste à voir quels sont
les...
M. MASSE (Montcalm): Parce que, si ç'avait été une
grève, vous auriez dû prendre des injonctions.
M. L'ALLIER: De toute façon, il faut revoir probablement
l'ensemble de ces mécanismes.
M. BURNS: Vu qu'ils portent un uniforme, c'est plus difficile de prendre
des injonctions.
M. MASSE (Montcalm): C'est pour ça qu'on devrait appeler
ça un arrêt de travail, non pas une grève.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît!
M. L'ALLIER: Vous n'étiez pas conscient que les
infirmières portent un uniforme?
M. BURNS: Oui, ce n'est pas dans le sens de l'uniforme. Je pensais
plutôt à la Sûreté du Québec.
M. LE PRESIDENT: Le député de Dubuc.
M. BOIVIN: Vous nous dites que vous n'avez pas le droit de grève,
que vous n'avez pas le droit à la conciliation ni à la
médiation. Je ne vois pas, moi, que des agents de la paix n'aient pas
droit à la conciliation. Avez-vous demandé un conciliateur au
ministre du Travail? Avez-vous demandé un médiateur?
M. LACAS: Cher monsieur, si vous saviez tout ce que nous avons
demandé aux ministres qui ont précédé depuis que
nous sommes accrédité. Il ne s'est pas passé six mois sans
que nous présentions un mémoire aux différents ministres
qui ont été là.
M. BOIVIN: Mais qu'est-ce qui vous fait dire...
M. LACAS: On a demandé des formules de la Sûreté du
Québec. Ils ont un genre de comité paritaire. On a demandé
des systèmes d'arbitrage. On a même dit, à un moment
donné: On est prêt à subir un arbitrage avec sentence non
exécutoire...
M. BOIVIN: Qu'est-ce qui vous fait dire que vous n'avez pas le
droit?
M. LACAS: C'est dans le bill. C'est dans la Loi de la fonction
publique.
M. L'ALLIER: Sur un point, M. le Président, nous avons
déjà entendu le représentant du syndicat. Nous avons
convenu de l'entendre de nouveau à la fin des travaux de cette
commission pour lui permettre de déposer un mémoire, et le
député de Montcalm a une question à poser. Je proposerais,
pour faire suite à ce que j'ai dit à l'effet que nous allions le
plus rapidement possible donner des indications de
l'action que le gouvernement entend prendre pour tous ces groupes, que
nous passions aux travaux de la commission sur le fond, en assurant le
représentant du syndicat qu'il sera entendu dès la fin des
travaux de la commission et au cours de cette commission parlementaire.
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, c'est la dernière
question: puisque le ministre n'a pas encore rendu publique sa décision
ou fait connaître sa décision, ici j'émets une
hypothèse, c'est qu'il ne l'a pas prise encore. S'il ne l'a pas prise,
qu'est-ce qu'il lui reste comme étape à franchir? Je m'explique:
s'il lui manque des détails, des explications ou des
interprétations, peut-être que les groupes qui, eux, se sentent
concernés pourraient soumettre au ministre soit des mémoires,
soit des avis quant aux raisons qui devraient les exclure du projet de loi
19.
Depuis une semaine il était normal de regarder le dossier, de
consulter des gens, de rencontrer le conseil des ministres, mais ces
étapes-là auraient pu être franchies. Si elles n'ont pas
été franchies, c'est qu'il y a une raison particulière,
soit qu'il manque des informations au ministre ou autres raisons. Qu'est-ce qui
manque pour que la décision soit prise?
M. L'ALLIER: Nous voulons, comme je l'ai dit, M. le Président,
continuer d'entendre les membres de cette commission et nous voulons faire le
point sur l'ensemble de la question. Parallèlement à cela, nous
étudions les situations particulières de chacun des groupes qui a
été couvert par la loi 19 et qui ne faisait pas partie du front
commun et qui n'était pas en grève à toutes fins pratiques
au moment de la loi 19. Et ce qui nous manque ce n'est pas d'avoir de nouvelles
informations.
Nous avons les mémoires des groupes qui ont été
déposés. En même temps que les travaux de cette commission
se poursuivent, en même temps que nous poursuivons de notre
côté l'étude de cette question, nous souhaitons
étudier les meilleurs mécanismes pour en arriver à donner
satisfaction à ces groupes, tout en protégeant le processus
normal de négociation.
Or, ce n'es pas quelques jours de plus, si par ailleurs les
négociations se poursuivent normalement, qui pourraient mettre
véritablement en danger ce processus normal de négociation. Je
peux assurer le député que, quant à moi, je ferai
l'impossible pour régler rapidement ces questions.
M. LE PRESIDENT: Le député de Maisonneuve.
M. BURNS: M. le Président, moi, je veux dire au ministre que ce
n'est pas du tout dans le but de harceler... Je vais attendre. Vu que je
m'adresse au ministre, j'aimerais autant qu'il m'écoute.
M. L'ALLIER: C'était un message très urgent pour quelqu'un
qui est peut-être dans cette salle.
M. BURNS: C'est parfait. J'explique pourquoi j'ai attendu. Je veux tout
simplement dire au ministre que ce n'est pas du tout dans le but de le harceler
qu'on pose constamment cette question à savoir: Qu'est-ce qui va
arriver, qu'est-ce qui va advenir de ces gens qui prétendent qu'ils ne
devraient pas être régis par la Loi 19? La raison, à mon
avis, saute aux yeux, elle est assez évidente.
Vous avez un délai qui est quand même relativement court
pour les séances de la commission parlementaire qui doit faire rapport
le 15 mai, et ce décret ou, si M. Lacas aime mieux, l'ordonnance,
pour éviter la confusion avec la Loi d'extension des conventions
collectives ou cette ordonnance peut être
décrétée entre le 1er juin, si je ne me trompe pas... en
tout cas au plus tard le 30 juin pour être en vigueur le 30 juin.
Cette atmosphère, pour les gens qui considèrent qu'ils ne
devraient pas être régis par la loi, n'est sûrement pas
propice à une négociation qui puisse aboutir dans des
délais autres que ceux qui sont fixés pour le décret
lui-même. C'est dans ce sens-là que nous revenons constamment sur
la question.
M. L'ALLIER: Je suis d'accord avec le député, et je
comprends très bien le sens des interventions. Ceci dit, au cours des
prochains jours, d'ici à ce que le gouvernement donne le sens des
décisions qu'il entend prendre, compte tenu, par ailleurs, du fait que
j'ai bien indiqué que nous ferions l'impossible pour maintenir le
processus régulier, je crois que pour les parties même s'il
y a certains inconvénients, je l'admets bien, au niveau de la table de
négociation par l'effet du bill 19 et surtout par l'incertitude de ce
qui se passe les prochains jours peuvent s'inscrire dans un processus de
négociation régulier. Le temps qui court pourrait et peut,
même s'il est un peu plus gris qu'ensoleillé, servir utilement
à la négociation. C'est ce que je souhaite, pour ma part.
De toute façon, au début ou au plus tard, au milieu de la
semaine, je crois que nous serons en mesure de dire exactement ce que nous
ferons. Sur ce point, encore une fois, lorsque nous aurons des propositions, je
souhaiterais pouvoir les aborder rapidement avec les membres de la commission
parlementaire.
M. BURNS: Je tiens à vous signaler que cela fait
déjà au-delà d'une semaine...
M. L'ALLIER: Je le sais.
M. BURNS: ... que ce problème est sur la table. Il y a eu au
moins deux conseils des ministres depuis ce temps-là.
M. L'ALLIER: Oui, mais les travaux de la commission se poursuivent, et
j'avais indiqué...
M. BURNS: Oui, d'accord.
M. MASSE (Montcalm): Les travaux qu'il reste à faire, ce n'est
pas ceux-là qui vont vous éclairer dans ce type de
décision. On va étudier les questions de calcul de la masse
salariale.
M. L'ALLIER: Ceci dit, les négociations se poursuivront aux
tables de négociation. Ce sont des choses qui influencent
également la décision que l'on peut prendre. Il est possible que,
dans certains cas, on soit à quelques jours de la signature d'une
convention collective et, à ce moment-là, le problème
devient un faux problème.
M. MASSE (Montcalm): Bien non! Il reste tous ceux qui ont
déjà des conventions collectives et qui ne sont même pas en
période de négociation. Cela ne peut pas être
réglé par...
M. L'ALLIER: Je ne peux pas répondre autrement que par ce que
j'ai déjà répondu. Au cours de la semaine prochaine...
M. MASSE (Montcalm): Vous me permettrez de poser la question la semaine
prochaine?
M. L'ALLIER: Vous aurez peut-être même la réponse
avant de poser la question.
M. LE PRESIDENT: J'inviterais M. Lacas à terminer son
intervention.
M. LACAS: Je pense que ce pourrait être très simple, M. le
Président. Il faudrait tout simplement dire que nous ne sommes pas
couverts par le bill 19 afin que nous puissions continuer de négocier,
et revenir devant une commission parlementaire particulière. Si jamais
nous voulons prendre d'autres vacances, vous sortirez d'autres lois. Vous
êtes capables d'en adopter, d'autres lois.
Alors, je pense qu'en ce qui concerne la loi 19 nous ne devrions pas
être là. Nous voulons nous faire entendre devant une commission
parlementaire et continuer de négocier. Si jamais nous prenons d'autres
vacances, vous vous réunirez au conseil des ministres et vous sortirez
une loi spéciale pour nous.
M. GARNEAU: M. Lacas, si vous menez la discussion sur ce ton-là,
vous allez certainement vous rendre compte que ce n'est peut-être pas
agréable pour votre syndicat, mais que ce n'est certainement pas
agréable, non plus, pour la commission. Je trouve, pour ma part, que
c'est une façon très cavalière de venir témoigner
devant cette commission. C'est pourquoi, M. le Président, je
suggérerais que nous passions aux travaux que nous avions prévus
pour aujourd'hui.
M. LACAS: Alors, je pars avec l'idée que nous sommes assujettis
à la loi 19. Est-ce que je pars avec ce principe-là?
M. LE PRESIDENT: M. Lacas, un membre de la commission voudrait...
M. MASSE (Montcalm): Légalement, oui.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît! M. Lacas, tel que
convenu, nous vous avons accordé le privilège d'être
entendu cet après-midi. En même temps, vous avez reçu une
invitation à vous présenter à nouveau la semaine
prochaine, à la suite d'une invitation qui vous sera transmise par le
secrétaire des commissions, M. Pouliot.
M. LACAS: Je vous remercie beaucoup, et je m'excuse si j'ai
blessé quelqu'un.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. Lacas.
Pour continuer nos travaux en conformité avec l'ordre du jour...
Oui, M. le député de Maisonneuve.
M. BURNS: Je serai très bref, M. le Président,
étant donné que nous sommes sur ce point de la convocation ou
d'invitations faites à des personnes. Les membres de la commission ont
sans doute reçu une lettre d'un groupe qui s'appelle le comité ad
hoc des agents de rentes à la Régie des rentes du Québec.
J'aimerais savoir, à ce stade-ci, si la même invitation vaudrait
pour eux, même si, structurellement parlant, ce ne sont pas des
associations au sens de la loi. La commission va-t-elle accepter de les
entendre?
M. LE PRESIDENT: Je vais répondre personnellement à
ça, si vous me le permettez. En conformité avec l'avis qu'ont
donné eux-mêmes les membres de la commission au début des
travaux, vous aviez convenu, sur proposition du député de
Maisonneuve, d'accepter des dépôts de documents sans explication,
jusqu'à un certain point. Une exception, avec votre collaboration, a
été faite cet après-midi.
M. BURNS: M. le Président, je m'excuse de vous interrompre, mais
il ne faudrait pas donner à la motion que j'avais faite un sens qu'elle
n'a pas et une extension qu'elle ne doit pas avoir.
La motion que j'ai faite au début des travaux était
à l'effet que les deux parties en ce qui nous concernait,
c'étaient le front commun et les représentants du gouvernement
déposent le dossier, nous donnent les explications
nécessaires pour comprendre leur point de vue et qu'ensuite nous
entrions dans le fond, uniquement. C'était dans ce sens-là. Je
n'avais pas du tout, quand j'ai fait ma motion, l'intention de bloquer
l'intervention de personnes autres qui auraient quelque chose à nous
dire, comme, semble-t-il, un groupe de personnes qui nous en a donné
avis. Je ne voudrais pas qu'on m'inter-
prête mal. Si on retourne à la motion que j'ai faite, on va
se rendre compte qu'il s'agissait principalement de recevoir, d'abord, les
dépositions sur le conflit lui-même, la situation des
négociations elles-mêmes, de la part des deux parties qu'on peut
appeler les parties identifiables à la négociation. Cela ne
touchait pas et ne visait pas, à mon sens, les autres personnes qui
voudraient venir déposer devant la commission.
M. LE PRESIDENT: Je pense que nous comprenons très bien la
question. Je vais inviter le député de Maisonneuve à poser
la question aux membres de la commission de manière que ça
n'engendre pas de débat. La commission se prononcera par oui ou par non
sur la question que vous posez, de manière à ne pas retarder les
débats.
M. GARNEAU: Si je comprends bien la question du député de
Maisonneuve, il s'agit d'un groupe d'employés qui ne seraient pas
satisfaits de la classification qu'ils ont eue?
M. BURNS: Je ne veux pas entrer dans le fond, mais le texte que j'ai lu
très rapidement en venant ici tantôt me laisse entendre que la
nouvelle classification qu'on leur donne pourrait leur causer des
problèmes.
Ils ont une lettre qu'ils ont adressée à tous les membres
de la commission et il me semble que ces gens veulent se faire entendre. Je ne
sais pas, je pose le problème à la commission.
M. GARNEAU: Je n'ai pas pris connaissance de cette lettre mais, s'il
s'agit d'un problème de classification, le député de
Maisonneuve sait comme moi que cela ne relève pas de la commission
parlementaire de la fonction publique mais bien de la Commission de la fonction
publique, qui est responsable de la classification des employés. D'abord
ce n'est pas une matière négociable, et cela ne relève pas
de cette commission parlementaire. Deuxièmement, si ces gens-là
sont membre d'un syndicat, comme je le crois, ils ont des porte-parole. C'est
à eux de venir s'exprimer. S'il faut commencer à entendre des
groupuscules à l'intérieur de groupes syndicaux, on n'en finira
plus. D'autant plus que ce n'est pas une matière négociable,
parce que c'est la classification et non pas les taux de salaires
correspondants à ces classifications.
M. BURNS: Pas plus que je pense que c'est l'endroit où on va
régler les problèmes actuellement en négociation. Cela est
unanime, je pense, des deux côtés de la table. C'est bien
évident que ce n'est pas cela. Mais, s'il s'agit de se mettre au courant
d'une situation, si ces gens-là agissent contrairement aux
intérêts généraux de leur syndicat, ce n'est pas
à moi de le juger. C'est leur syndicat qui le leur dira. Dans le fond,
je pose une question aussi large que celle-ci: Est-ce que la commission est
prête à entendre des représentations particulières
à la suite du dépôt des documents, soit avant, à la
suite ou à l'occasion de la discussion du fond du problème? C'est
la question que je pose à la commission.
M. BOIVIN: Quant à mon parti, sur la question que pose le
député de Maisonneuve, je n'ai aucune objection qu'on entende
tous ceux qui veulent se faire entendre, quitte à leur dire qu'ils sont
hors d'ordre. C'est bien clair que ce n'est pas ici, à la commission,
qu'on va faire une négociation. Mais, d'un autre côté,
refuser...
M. GARNEAU: Ce n'est pas une question du même ordre...
M. BOIVIN: Mais, d'un autre côté, on ne le sait pas. Il y a
peut-être des choses à dire mais ils ne sont pas là pour le
dire. Je n'ai pas d'objection à ce qu'on les entende quitte à
leur dire que, s'ils veulent venir négocier ici à la commission,
ce n'est pas la place.
M. HARDY: Cela veut dire que le mandat qui a été
donné à la commission parlementaire par l'Assemblée
nationale...
M. BOIVIN : Oui, mais on le leur dira. Quand on les entendra, on le
verra s'ils veulent venir négocier ou s'ils veulent se faire entendre
sur d'autres points.
M. HARDY: Dans cet esprit, il faudrait que le mandat qui a
été confié à la commission parlementaire de la
fonction publique par l'Assemblée nationale soit modifié.
M. BOIVIN: Mais, pour savoir ce qu'ils veulent nous dire, il faut les
entendre.
M. L'ALLIER: M. le Président, si on parlait de ce principe, il
faudrait entendre n'importe qui.
M. HARDY: A sa face même, on peut déceler si ce qu'un
groupe va venir nous dire fait partie du mandat de la commission ou non. Il
semble bien que le groupe en question, à sa face même ce
qu'il veut venir nous dire n'est pas inclus actuellement dans le mandat
de la commission.
M. BOIVIN: Je ne sais pas, parce que je ne les ai pas entendus.
Maintenant, ils nous diront, lors de l'audition...
M. BURNS: M. le Président, je pose la question, tout en
étant bien d'accord sur l'interprétation du député
de Terrebonne. La loi, actuellement, dans le fond, ne nous donne pas le mandat
d'entendre des gens autres que des représentants d'associations. C'est
bien clair.
M. LE PRESIDENT: Je voudrais faire une suggestion, si vous me permettez,
pour éviter peut-être d'en arriver à un vote. Chaque membre
d'un parti pourrait prendre connaissance du mémoire et analyser,
peut-être d'ici quelques minutes, s'il y a lieu ou non d'entendre ces
parties. Sinon, nous devrons procéder au vote en vertu de l'article 8 de
la loi qui dit que nous devons recevoir "les explications relatives à la
négociation d'ententes collectives entre les associations de
salariés et les employeurs". Pour éviter tout conflit et surtout
un vote des membres de la commission, je suggérerais cette formule.
M. MASSE (Montcalm): L'article 8 dit plus que ce que vous venez de dire,
M. le Président. Il dit: "Entendre les représentants des
associations des salariés et les représentants des associations
patronales." Il s'agit de savoir si le mémoire qui a été
déposé est un mémoire de représentants...
M. BURNS: Non, non! ce n'en est pas un.
M. MASSE (Montcalm): Ah, ce n'en est pas un? Nous sommes tous d'accord.
Il n'y a pas de doute.
M. L'ALLIER: Le mémoire peut facilement être adressé
à tous les députés de l'Assemblée nationale.
M. MASSE (Montcalm): Alors, la question est: Est-ce que nous
élargissons le mandat pour recevoir des gens qui, manifestement, ne sont
pas des représentants des associations pour leur permettre de faire
leurs doléances?
M. HARDY: Nous ne pouvons pas élargir notre mandat.
M. MASSE (Montcalm): C'est là que se situe le vrai
problème.
M. LE PRESIDENT: Vous comprendrez...
M. MASSE (Montcalm): La commission est quand même libre de les
entendre. Je veux dire que, légalement, nous ne sommes pas
obligés de le faire. Mais la loi ne nous empêche pas de le faire,
si nous le désirons.
M. L'ALLIER: De la même façon que nous pourrions, à
ce moment-là...
UNE VOIX: II est clair, le mandat.
M. L'ALLIER: ... entendre les associations de parents qui ont des
doléances à faire contre les enseignants qui ont fait des
grèves, etc. Nous n'en sortirons plus.
M. HARDY: M. le Président, je ne peux pas partager l'opinion du
député de Montcalm. La commission parlementaire est une
prolongation ou une délégation de pouvoirs de l'Assemblée
nationale. Une commission parlementaire ne peut pas, d'elle-même,
décider quel va être son mandat. C'est la commission de
l'Assemblée nationale qui lui confie un mandat et c'est elle qui est
mandant, à ce moment-là, et c'est elle seulement qui peut
déterminer l'éventail ou la dimension du mandat.
M. MASSE (Montcalm): Oui, mais la loi, telle que rédigée,
nous oblige à recevoir les représentants des associations. Elle
ne nous oblige pas à ne pas recevoir d'autres groupes. Alors, si nous
désirons les recevoir, parce que nous croyons que cela va
éclairer notre jugement, je pense qu'il faudrait le faire. Mais si nous
décidons que cela n'éclaire pas notre jugement et si nous nous en
tenons au sens restrictif de la loi, là vous avez une raison
légale de ne pas les recevoir.
M. L'ALLIER: C'est un faux problème, M. le Président, si
vous me permettez. Ce qui compte, en définitive, c'est l'information des
députés de l'Assemblée nationale. Alors, il ne s'agit pas
là d'un document hautement confidentiel qui vient de je ne sais quelle
source obscure. Pourquoi le document ne serait-il pas communiqué aux
membres de l'Assemblée nationale, mais non pas à la commission,
par les intéressés puisqu'ils ne sont pas des
représentants d'associations de salariés? L'objectif est atteint.
Les députés sont informés. Si les membres de la
commission, qui sont aussi membres de l'Assemblée nationale, veulent,
à un moment donné, revenir sur cette question, ils seront libres
de le faire.
Mais l'objectif que cherchent à atteindre ces personnes, c'est
d'informer les membres de l'Assemblée nationale. Tous les jours, nous
recevons des documents qui nous sont envoyés par des groupes qui veulent
nous sensibiliser à tel ou tel point. M. le Président, c'est
donc...
M. LE PRESIDENT: Je pourrais peut-être faire remarquer aux membres
de la commission que, depuis quelques jours, plusieurs mémoires ou
documents ont été transmis au secrétaire des commissions.
Ils n'ont pas fait l'objet d'une déclaration publique par des
représentants, ici devant la commission.
Je crois que, dans les circonstances, il y aurait peut-être lieu
de procéder de la même manière, sinon, en vertu de
l'article 8, je me verrai dans l'obligation de demander aux membres de la
commission de se prononcer officiellement.
M. MASSE (Montcalm): Je pense que ce n'est pas compliqué. Si le
gouvernement, il a la majorité à la commission de toute
façon, ne désire pas les entendre, il ne sert à rien d'en
discuter pendant deux jours.
M. L'ALLIER: Ce n'est pas une question de vouloir les entendre ou de ne
pas vouloir les entendre.
M. MASSE (Montcalm): Non, il décide d'appliquer la loi, telle
qu'elle est là.
M. L'ALLIER: C'est une question d'entendre ici les gens qui peuvent,
d'une façon pertinente au débat et à la loi no 19, venir
faire des représentations.
Pour ma part, toute abstraction faite de cette commission parlementaire,
je suis bien prêt â entendre n'importe qui qui veut nous dire
n'importe quelle chose sur n'importe quel sujet mais dans le cadre de cette
commission, à moins d'ouvrir une porte sur l'ensemble des
représentations de l'ensemble de groupes ou de sous-groupes ou de
sous-sous-groupes d'employés, je ne vois pas comment on en sortirait. Il
ne faudrait donc pas interpréter cela comme un refus de prendre
connaissance du document qui est là. Bien au contraire, je
suggérerais qu'il soit distribué, par l'association ou autrement,
à tous les membres de l'Assemblée nationale.
M. VEILLEUX: M. le Président, je propose qu'on s'en tienne
à l'article 8 de la loi, pour aujourd'hui, et qu'on commence. Tous les
jours, c'est comme cela. On se pose des points d'interrogation sur
différentes choses. L'article 8 est là, qu'on commence donc!
M. MASSE (Montcalm): L'homme intelligent s'interroge, que
voulez-vous?
M. LE PRESIDENT: Pour répondre adéquatement, si possible,
au député de Saint-Jacques...
M. VEILLEUX: S'interroger pour le plaisir de s'écouter'dans un
miroir!
M. LE PRESIDENT: ... il est évident que tel que cela a
été mentionné par le député de Terrebonne,
antérieurement, qu'à titre de président, on peut
étendre le mandat confié à la commission par l'article 8
de la loi 19. Cependant, à titre d'information aux membres de la
commission, il y aurait peut-être lieu, après les auditions de la
partie patronale, de vous faire part de tout document qui aurait pu être
transmis au secrétaire des commissions, M. Pouliot, tel que
suggéré au début de la présente commission par le
ministre de la Fonction publique, dans le cas des agents de la paix, avec M.
Lacas.
Je pense que pour aujourd'hui, nous pourrions tout simplement continuer
les travaux que nous avons annoncés hier soir, dont vous aviez convenu,
d'ailleurs, et entendre le représentant de la partie patronale qui doit,
au moins pour une heure de temps, vous faire part de ses commentaires. Il est
déjà cinq heures dix. Par la suite, la semaine prochaine, compte
tenu que nous devons faire rapport le 15 mai, je pense que nous aurons le temps
de faire état de toute documentation transmise au secrétaire des
commissions.
M. MASSE (Montcalm): Je pense que vous avez outrepassé une
question d'ordre du jour. Les documents que le secrétaire de la
commission reçoit, il devrait les faire parvenir aux
députés dès réception, si vous voulez que nous en
prenions connaissance et ne pas attendre pour nous les envoyer dans un paquet
la semaine prochaine. Ce ne sont quand même pas des documents
confidentiels. Puisqu'ils sont envoyés pour les membres de la
commission, qu'il les expédie immédiatement à nos
bureaux.
M. VEILLEUX: Vous vous interrogez encore.
M. MASSE (Montcalm): Continuellement, mon cher monsieur. C'est cela,
l'évolution!
Assurance-salaire
M. L'ALLIER: M. le Président, si vous le permettez, nous allons
poursuivre les travaux que nous avions commencés. Après avoir
entendu le ministre des Affaires sociales nous faire un exposé
technique, extrêmement intéressant, sur la question du
régime de retraite, je demanderais maintenant au directeur
général de la rémunération, au ministère de
la Fonction publique, M. Bernard Angers, de présenter le dossier
technique sur l'assurance-salaire, pour enchaîner ensuite avec des
explications quant aux mécanismes de calcul et d'application des
principes sur lesquels nous avons pris une décision, à savoir que
les employés des secteurs public et parapublic soient payés
suivant la moyenne généralement observée.
Qu'est-ce que cette moyenne généralement observée?
Comment se calcule-t-elle? A partir de quelle base cela se fait-il?
Deuxièmement, lorsqu'on parle des salaires qui doivent être
ajustés suivant l'augmentation du coût de la vie et
l'accroissement de la richesse collective, on n'arrive pas à cela en
consultant les almanachs. Il faut faire des travaux techniques hautement
spécialisés. Je voudrais aussi que le directeur
général de la rémunération puisse faire part aux
membres de la commission des moyens qui sont pris pour en arriver à
établir, de la façon la plus scientifique possible, les bases sur
lesquelles, ensuite, sont faites les offres aux tables de négociations.
Nous pourrons, à ce moment-là, entendre, à une autre
séance, le porte-parole aux tables de négociations.
J'ai donc, dans un premier temps, donné les principes sous
lesquels nous avions pris des décisions. Je demanderais au directeur de
la rémunération d'expliquer la base de ces principes et les
mécanismes d'élaboration et d'application de ces principes de la
politique de rémunération.
M. LE PRESIDENT: M. Angers.
M. ANGERS: Merci. Comme vous le savez, à la table centrale de
négociation, il y a quatre sujets qui avaient été inscrits
à l'ordre du jour: La question salariale, la question de la
sécurité ou de la stabilité d'emploi. Ces deux
matières ont fait l'objet de discussions assez serrées. Il y
avait deux autres sujets, qui avaient été inscrits d'un commun
accord, qui, eux, ont fait l'objet presque de monologues du côté
patronal: II s'agit du régime de retraite et de la question de
l'assurance-salaire.
Si vous n'y voyez pas d'objection, j'aimerais, au nom du gouvernement et
de ses partenaires, vous faire part, en bref, de ce qu'est l'assurance-salaire,
sa nature, certains de ses mérites et ce qu'elle vise, quoi!
Vous savez qu'il y a présentement différents
systèmes que certaines personnes qualifient de vieillots
couvrant le salarié lorsqu'il doit s'absenter pour motif de maladie de
plus ou moins longue durée. Le régime le plus répandu est
celui qui est dit des caisses de crédits qui consiste à permettre
à un employé d'accumuler, pour chacune de ses années de
service, des crédits d'absence qu'il pourra utiliser en cas de
maladie.
Habituellement, l'employé acquiert quinze jours par année,
ce qui veut dire qu'en pratique, pour obtenir une protection d'un an, pour
avoir droit à un crédit qui correspondra à un an de
travail, il faut travailler au moins seize ou dix-sept ans.
Ces systèmes sont monnayables, en tout ou en partie, dans le
secteur de la fonction publique, dans le secteur hospitalier et du
côté scolaire pour certains enseignants qui avaient ce qu'on
appelle des droits acquis. Dans les autres cas, c'est non monnayable,
c'est-à-dire que les crédits servent en cas de maladie. Lors de
la retraite ou de la mise à pied, l'individu laisse sa caisse telle
qu'elle est.
Certaines autres situations existent. Des plans d'assurance-salaire
existent pour le personnel de soutien des CEGEP et certains groupes
d'infirmières. Mais ces régimes n'ont rien de comparable avec
celui qui a été soumis par le gouvernement et ses partenaires. Il
s'agit essentiellement d'une proposition en quatre points qui constitue
vraiment une alternative au régime de congés de maladie qui,
entre nous, protège très bien les absences de courte durée
ou les fins de semaine prolongées dans bien des cas. Mais, par contre,
il ne protège aucunement le salarié qui est vraiment malade et
encore moins le salarié qui doit abandonner le travail pour des
périodes de quatre, cinq ou six ans.
La proposition qui a été soumise qui n'a pas fait
l'objet de discussions sérieuses avec les organisations syndicales mais
qui a fait l'objet de modification unilatérales en cours de route par le
gouvernement et ses partenaires est donc composée de quatre
éléments.
Le premier c'est un régime collectif assuré
d'indemnité en cas d'invalidité de courte durée, ce qu'on
appelle communément l'assurance-salaire. Substantiellement, c'est un
régime qui assure au salarié, sans qu'il lui en coûte un
sou, son salaire pour une absence pouvant se prolonger jusqu'à la
cinquante-deuxième semaine, c'est-à-dire un an de salaire,
à compter de la troisième journée, pour chaque absence,
les deux premières journées étant, en quelque sorte,
à sa charge, mais sujettes à un versement au début de
l'année, ou à une autre période à préciser,
d'un montant d'argent équivalent à deux jours de salaire.
C'est-à-dire qu'au début de l'année, l'enseignant ou le
fonctionnaire couvert par le régime reçoit une indemnité
correspondant à deux jours de salaire. On appelle ça de
l'auto-assurance. S'il est malade, il utilise ces montants d'argent, sinon ils
constituent en quelque sorte des crédits pour les mauvaises
années.
Et s'il doit s'absenter à la suite d'un accident ou pour un autre
motif, il est assuré d'avoir une protection pouvant aller jusqu'à
90 p.c. de son salaire, et ce pour un an, sans qu'il lui en coûte un
sou.
Je dirais qu'on a beaucoup exagéré au sujet de ce qu'il
advenait des caisses de crédits ou des congés accumulés.
Je ne voudrais pas faire des procès d'intention, mais il s'est dit
tellement de choses à ce sujet par certaines organisations avec
lesquelles nous avions affaire. Il s'est dit, par exemple, que nous passions la
hache dans les congés de maladie, que tout le monde allait les perdre,
que c'était quelque chose d'assez épouvantable.
Or, la proposition qui a été soumise et qui a
été améliorée dans un deuxième temps
prévoit que personne ne perd les jours qu'il a accumulés au titre
des caisses de crédits et que chaque fois que ces personnes sont
malades, elles peuvent les utiliser pour couvrir les deux premiers jours
d'absence.
De plus, à l'occasion de l'implantation d'un nouveau
régime de retraite, on permet même au salarié de racheter
certaines de ses années de service en utilisant les jours qu'il peut
avoir en caisse, les jours monnayables étant comptés à
pleine valeur et les jours non monnayables à demi-valeur. Je pense
principalement au cas des enseignants où des dispositions
prévoyaient l'utilisation des jours en caisse à d'autres fins,
comme le perfectionnement; bien, cela a été maintenu.
Donc, un système d'assurance-salaire aux frais de l'employeur,
troisième journée, 52 semaines, avec une prime d'autoassurance,
versée à tous les salariés au début de
l'année, correspondant à deux jours de travail;
possibilité d'utiliser les jours en caisse pour les deux premiers jours
et de les utiliser aussi pour racheter des années de service pour fins
du régime de rentes. Cela, c'est le premier plan de l'assurance
collective.
Le deuxième, il s'agit d'un régime collectif assuré
de rentes aux survivants en cas de décès
avant la retraite. C'est une sorte d'assurance-vie, quoi. Il peut fort
bien arriver qu'un salarié décède avant qu'il ait atteint
l'âge de la retraite. Or, avec les régimes existants
présentement, seuls les fonctionnaires et les enseignants peuvent
recevoir, d'un certaine manière, une rente qui n'a rien à voir
avec celle qui est prévue ici en raison du régime de
retraite...
Or, ici, la veuve et les enfants vont recevoir une rente qui correspond
en quelque sorte au salaire ou à la rente que l'individu aurait
reçu s'il avait continué à travailler, et ce
jusqu'à la retraite. Il s'agit donc d'une sorte d'assurance-vie assez et
même très intéressante qui protège la veuve et ses
enfants et cela est fondé sur ce que l'individu aurait reçu s'il
avait continué à travailler jusqu'à l'âge de sa
retraite.
La deuxième partie de cet élément, c'est qu'on
protège aussi, de la même manière, le salarié qui
tombe malade, et ça pour un très long terme, lorsqu'il devient
invalide et ne peut plus travailler. A l'heure actuelle, il n'y a rien qui le
protège. S'il a des crédits accumulés pour la retraite,
bien, il doit attendre d'avoir atteint l'âge de la retraite et,
entre-temps, je présume qu'il se prévaut de certaines
dispositions du régime de sécurité sociale.
Or, ici, ce qui est offert, c'est une rente pour aller jusqu'à 90
p.c. du salaire de l'individu au moment de son invalidité et qui est
calculée de la même manière que la rente de veuve,
c'est-à-dire qu'on fait comme si l'individu avait continué
à travailler, à contribuer à son régime de retraite
et on lui verse une indemnité qui va durer jusqu'à l'âge de
la retraite. A ce moment-là, c'est le régime de retraite qui
continue. Pour ces deux éléments, la seule contribution qui est
maintenant demandée aux salariés, c'est 6/10 de 1 p.c. de son
salaire. Cela veut dire qu'un salarié qui gagne $6,000 n'aurait
qu'à verser $36 par année, l'employeur prenant le reste à
sa charge, pour obtenir ces deux types de rentes, c'est-à-dire rente en
cas d'invalidité qui excède un an et rente en cas de
décès pour les survivants.
M. BOIVIN: Qu'arrivera-t-il à ceux qui ne sont pas
assurés? Le ministre des Affaires sociales nous disait qu'il y a 125,000
personnes qui ne sont pas assurées actuellement. Alors, pour la
première année, est-ce que ça sera 6/10 de 1 p.c, mais que
l'employeur paiera la différence?
M. ANGERS: C'est-à-dire qu'ici, c'est le régime
d'assurances. Dans le régime de retraite, on a retiré la partie
invalidité et la partie rente aux survivants pour la couvrir par voie
d'assurances collective. Ce qui est demandé ici aux salariés,
c'est 6/10 de 1 p.c. pour avoir un tel plan d'assurance, l'employeur supportant
le reste. Il n'y a pas d'implantation progressive.
M. BOIVIN: Même la première année pour ceux qui ne
sont pas assurés.
M. ANGERS: C'est-à-dire que seuls ceux qui sont assurés
ici fourniraient 6/10 de 1 p.c.
M. BOIVIN: Mais il y en a 125,000 qui ne sont pas assurés.
M. ANGERS: Cela concerne la retraite proprement dite. Ici, c'est
l'assurance-salaire; il n'y a pas de chevauchement entre les deux
régimes. Ces bénéfices-ci amènent le salarié
à la retraite.
A partir de ce moment-là, c'est le régime dont vous a
parlé M. Castonguay hier qui entre en ligne de compte. Ce régime
est implanté sur une période de trois ans tandis que celui-ci
demanderait immédiatement, c'est-à-dire dès l'implantation
du régime, probablement pas avant 1973, le versement de 6/10 de 1 p.c.
de la part du salarié pour obtenir ce bénéfice.
Le quatrième élément de la proposition concerne ce
qu'il est convenu d'appeler les assurances collectives: assurance-maladie,
chambre, produits pharmaceutiques, etc. Vous savez qu'à la suite de
l'implantation de la Régie de l'assurance-maladie les sommes
prévues à ces fins ont été diminuées d'une
façon assez draconienne. L'intention ici est de prévoir une
utilisation rationnelle de ces sommes. Le gouvernement et ses partenaires sont
prêts à offrir une contribution de $5 pour une personne
célibataire et de $15 pour une personne mariée en faisant
l'hypothèse que le salarié fait de même, donc 50-50.
M. LATULIPPE: Me permettez-vous une question? Quelle est la part du
gouvernement, dans le régime de l'assurance-salaire, en pourcentage?
M. ANGERS: On a quelquefois posé des questions sur la valeur du
régime ici. On voulait savoir ce que cela valait par rapport à ce
qui pouvait exister présentement. La réponse fournie à ce
moment-là est qu'en termes de bénéfices il n'y a aucune
comparaison possible. Dès l'instant où les gens regardent cela
d'assez près, surtout ceux qui ont un statut de marié, ils en
viennent à la conclusion qu'en termes de bénéfices c'est
bon. En termes de coût, les caisses de crédit, compte tenu de leur
utilisation, ont une valeur estimée à entre 4 p.c. et 4.5 p.c;
4.5 p.c. étant une caisse monnayable, 4 p.c. et 3.5 p.c. étant
une caisse non monnayable. On peut dire que dans l'ensemble c'est autour de 4
p.c.
La proposition présentée ici, en faisant des
hypothèses parce qu'on n'a pas le choix, on n'oblige pas tout le
monde à participer à tous les plans se situe autour de 5
p.c. Ces 5 p.c. vont tendre, avec les années, vers 4 p.c,
c'est-à-dire à peu près le coût des régimes
actuels. Si cela coûte plus cher aujourd'hui, c'est qu'on permet à
des gens qui ont accumulé des jours de maladie de les utiliser d'abord
de telle sorte que les premières journées de salaire, pendant
quel-
ques années, ne feront jamais l'objet de coupure, à toutes
fins pratiques. Sur un terme assez long, le niveau ou la valeur de ce
régime rejoindra approximativement ce que peuvent représenter les
caisses de crédit non monnayables. En d'autres termes, ce sera un peu
moins que ce que représentent les caisses de crédit monnayables.
Est-ce que cela répond à votre question?
M. LATULIPPE: Oui, merci.
M. ANGERS: Ce sujet ou ce point, comme je l'ai déjà
mentionné, n'a pas fait l'objet de discussions sauf que la proposition
qui vous est formulée cet après-midi a été l'objet
de deux types de modifications et je vous fait part de la dernière
modification seulement. Elle a été améliorée deux
fois.
M. LE PRESIDENT: Le député de Montcalm.
M. MASSE (Montcalm): Cela m'apparaît une proposition très
bonne de la part du gouvernement par rapport à la situation qui
existait. Je ne peux qu'espérer que le syndicat puisse aborder les
négociations. Il y a peut-être lieu d'améliorer certains
points mais il semble difficile au gouvernement d'améliorer des points
quand il ne sait pas lesquels devraient être améliorés
parce que le syndicat ne lui en fait pas part.
Globalement, c'est un secteur de la convention qui m'apparaît
très intéressant. Maintenant, j'aurais deux types de questions
à poser. Si le gouvernement met en place un système semblable,
c'est qu'il y a des absences. Le ministère de la Fonction publique
a-t-il les pourcentages d'absences? Là, cela couvrirait les 250,000
employés du secteur, aussi bien les fonctionnaires que les
employés des commissions scolaires et des hôpitaux. Quel est le
pourcentage d'absences par rapport aux présences dans le secteur
public?
Des statistiques sur les absences, bien sûr qu'il y en a eu, et il
y en a eu de transmises aux organisations syndicales, principalement lors des
échanges du comité technique. Et ici, présentement, j'ai
en tête un chiffre, c'est celui du milieu hospitalier où on a
constaté, en analysant une période d'une année, qu'il y a
dix jours d'absence par tête. Et ce qui nous a le plus frappés,
c'est que le taux d'absence est le même au niveau des hommes. Et les
hommes et les femmes, en milieu hospitalier ont dix jours d'absence par
année. Je ne voudrais pas nommer des entreprises extérieures,
mais on constate que les absences qui sont plutôt du type normal se
situent autour de cinq ou six. Donc, il y a certainement eu des abus de ce
côté.
Sans juger chacun des individus, on peut dire que statistiquement, dans
l'ensemble, il y a un comportement qui est assez surprenant, surtout celui
d'avoir un nombre de jours d'absence aussi grand chez les hommes que chez les
femmes en milieu hospitalier. Je ne veux pas porter de jugement sur la valeur
des hommes en milieu hospitalier...
M. MASSE (Montcalm): Est-ce que le milieu hospitalier se distingue
nettement par rapport aux autres secteurs publics?
M. ANGERS: Oui, encore là je suis obligé de recourir
à des souvenirs pas immémoriaux mais quand même anciens:
dans la fonction publique, pour les fonctionnaires, c'est autour de huit, je
crois, pour les professionnels, cinq ou six. Il y a des variations selon les
groupes, et le milieu hospitalier était celui qui nous a le plus
frappés avec une certaine commission scolaire de la province de
Québec où les absences sont de cette nature.
M. MASSE (Montcalm): A la lumière des renseignements que vous
venez de fournir, serait-il normal de conclure que dans le secteur public le
taux d'absence est plus élevé que dans les autres secteurs
d'activités du Québec?
M. ANGERS: Nous n'avons pas eu tout le loisir d'étudier les
comportements d'absences dans le secteur privé, secteurs industriel et
commercial, et c'est pourquoi, dans la politique de rémunération,
la moyenne observée l'a été uniquement sur les salaires,
et les statistiques que nous avons nous indiquent que les régimes,
même ceux qui sont présentés actuellement, sont
supérieurs et plus avantageux que ce que l'on observe du
côté privé. On a seulement les indications limitées
qui nous indiquent quand même que le taux d'absence est plus fort dans le
secteur public et de beaucoup, que ce qui se pratique dans le secteur
privé et même par rapport au gouvernement
fédéral.
M. MASSE (Montcalm): Je pense que si tel est le cas, que dans le secteur
public les taux d'absence sont plus élevés que dans le secteur
privé, et même plus élevés que dans d'autres
secteurs publics, vous parlez du gouvernement fédéral, ça
représente des fonds, ça représente de l'argent. Je pense
qu'il serait important que, peut-être pas nécessairement
aujourd'hui, le gouvernement fasse une véritable étude de cette
question et trouve les causes, pas uniquement une étude pour dire:
Voilà, nos gens sont plus absents qu'ailleurs. Il y a des raisons
à ça, et si ce sont des raisons de non motivation ou
d'indiscipline, je pense que ça doit être corrigé parce
qu'à la fin, ça représente, pour les contribuables, je ne
sais pas quel montant, mais certainement des sommes d'argents qui ne servent
pas aux fins pour lesquelles les impôts ont été
payés. Il serait important d'avoir là-dessus, de la part du
gouvernement, une campagne de motivation du côté de ses
fonctionnaires et une campagne d'information du côté de la
population. Ce sont des choses que nous avons le droit de savoir.
Maintenant, je pose une deuxième question: Quel est le
pourcentage que vous estimez entre les absences motivées et les absences
non motivées?
M. ANGERS: Pour répondre à votre deuxième question,
nous n'avons pas poussé notre étude pour voir si les absences
étaient motivées ou non, et nous n'avons pas voulu porter de
jugement sur la valeur de certains certificats médicaux.
M. MASSE (Montcalm): Mais il y a certainement des techniques pour le
savoir, il serait important de le savoir. Maintenant, dernière question;
l'expérience que vous avez de l'économie du Québec et des
relations de travail vous permet-elle de juger l'offre que vous faites par
rapport à ce qu'ont les autres Québécois dans d'autres
domaines,...
M. ANGERS: Oui.
M. MASSE (Montcalm): C'est-à-dire, si vous faites cette offre
pour 300,000 Québécois qui travaillent pour le secteur public,
est-ce que, par rapport aux autres Québécois, ça se
compare avantageusement ou si c'est supérieur?
Où cela pourrait-il se situer dans l'ensemble de
l'économie?
M. ANGERS: Au niveau des bénéfices marginaux, pour prendre
la dernière question, il est de commune renommée que les
bénéfices dans la Fonction publique ou dans le secteur public
sont quand même assez alléchants. Historiquement, cela s'explique:
c'est que, dans certaines années difficiles sans vouloir porter
de jugement sur les gouvernements...
M. MASSE (Montcalm): La période de M. Honoré Mercier,
particulièrement.
M. ANGERS: ... prenons les années 1950 à 1964 les
salaires, dans le secteur public, étaient tout ce qu'il y avait d'en
deçà de la moyenne observée par rapport à
l'ensemble des salaires versés au Québec. Une des façons
de compenser, c'était de procurer des bénéfices
supérieurs: les caisses de crédit, par exemple. Le gouvernement a
eu un tel régime bien avant le secteur hospitalier, pour prendre un cas
concret, ou même avant l'éducation. Au niveau du régime de
retraite, le ministre des Affaires sociales, hier, nous a donné
l'état de la situation. Depuis cent ans que cela existe dans le secteur
public, année après année, des améliorations ont
été apportées pour des motifs habituellement humanitaires
et sans avoir calculé le coût de ce que pourrait
représenter ces amendements graduels au cours des années. De
telle sorte qu'on a, aujourd'hui, des bénéfices qui sont
généralement supérieurs à ce qui existe partout
ailleurs.
L'explication est historique. C'est qu'au lieu de verser des salaires on
améliorait les bénéfices.
M. MASSE (Montcalm): Oui, mais actuellement?
M. ANGERS: Actuellement, les bénéfices sont encore
à un niveau supérieur. Si on prend les congés sociaux, les
jours fériés, il y a plus de jours possibles d'absence ou
d'occasions de célébration dans le secteur public qu'il peut y en
avoir dans le secteur privé. Il y en a 12 ou 13. Cela dépend des
secteurs.
UNE VOIX: Les gens sont plus religieux.
M. MASSE (Montcalm): Est-ce que je peux conclure en disant que le
système que vous offrez est nettement supérieur à ce qui
existe dans les autres types d'entreprises au Québec, pour à peu
près tous les secteurs?
M. ANGERS: Oui. Dans l'ensemble, certainement. La proposition qui est
là n'a pas pour objet de pénaliser l'ensemble du personnel du
secteur public, de telle sorte qu'on n'a pas abordé d'une façon
systématique les bénéfices marginaux. Ici, je pourrais
donner un exemple. Prenons le cas des infirmières. Elles ont un mois de
vacances dans le système. C'est plus que ce qui existe ailleurs. On n'a
pas touché à cela.
Vous avez posé trois questions. Je voudrais revenir à la
deuxième. Vous avez demandé s'il y avait eu des études de
faites sur ce que pourraient être les motifs ou qu'est-ce que cela
pourrait représenter. Ce qu'on doit vous dire, c'est que, comme
hypothèse de fond je le dis sans rire, quoi on a
présumé qu'il était essentiel que les travailleurs restent
au travail et que leur activité était nécessaire au
système. Etant fonctionnaire, je n'aime pas les remarques
désobligeantes dont on peut souvent être l'objet sur la nature ou
la valeur de notre travail, lorsqu'on dit qu'on perd beaucoup de temps.
L'hypothèse, dans tous les calculs, c'est qu'une journée
de travail de fonctionnaires est essentielle et qu'une journée d'absence
est une perte sèche.
M. MASSE (Montcalm): Vous avez certainement l'accord du gouvernement
là-dessus. La preuve, c'est qu'il a rappelé au travail ses
fonctionnaires.
M. ANGERS: De telle sorte que la chance a été
donnée au coureur tout au long des travaux, qu'il s'agisse de la
retraite ou du régime d'assurance collectif.
M. GARNEAU: M. Angers, est-ce que vous pourriez ajouter quelques
remarques concernant les parties du régime qui sont obligatoires et les
parties qui sont facultatives?
M. ANGERS: L'assurance-salaire de la première année,
c'est-à-dire de la troisième journée à 52 semaines,
est obligatoire. Mais les jours en caisse accumulés peuvent être
utilisés, comme je l'ai dit tantôt, à de multiples fins.
Dans aucun
cas, il n'y a perte. Même la valeur de ces jours s'est vu attacher
un taux d'intérêt de 5 p.c. Quant aux autres
éléments de la proposition qui sont, disons,
nécessairement reliés les uns aux autres, ils sont
facultatifs.
Les trois autres parties sont facultatives, c'est-à-dire la rente
aux survivants, la rente en cas d'invalidité de longue durée,
c'est-à-dire de la date d'invalidité jusqu'à la retraite,
et le régime complémentaire d'assurance-maladie.
Le seul endroit où il y avait obligation dans un système
d'assurances collectives de ce type, c'était dans le milieu de
l'enseignement pour les enseignants affiliés à la Corporation des
enseignants du Québec. Seuls les objecteurs de conscience pouvaient se
retirer du plan. Partout ailleurs, c'était facultatif. Cette fois-ci,
même la Corporation des enseignants a demandé que
l'adhésion soit facultative.
Donc, assurance-salaire, un an, troisième journée, 52
semaines, obligatoire. Les trois autres éléments sont de nature
facultative. Aussi, les estimations que nous vous avons fournies sont
fondées sur certaines hypothèses de participation. Il s'agit
d'estimations parce que nous n'avons pas encore lancé, disons, d'appels
d'offres pour le régime en question. Ce sont des estimations...
M. MASSE (Montcalm): C'est évident qu'il est normal, de la part
du gouvernement, de nous faire connaître les dossiers avantageux pour la
partie syndicale. Mais cela représente, en argent, combien par rapport
à ce qui existait?
M. ANGERS: C'est-à-dire que...
M. MASSE (Montcalm): L'évaluation.
M. ANGERS: Je vais revenir sur une réponse déjà
donnée, c'est que nous estimons les régimes de congés de
maladie, selon qu'ils sont monnayables ou non, à des valeurs
différentes. Un régime de congés de maladie monnayable, a
une valeur estimée autour de 4.5 p.c. Nous estimons cela comme valeur.
Cela n'implique pas nécessairement des déboursés.
M. MASSE (Montcalm): Oui.
M. ANGERS: Un individu qui s'absente du travail, selon
l'hypothèse de la nécessité de sa présence au
travail ou non nous avons dit qu'il était nécessaire qu'il
soit au travail s'il s'absente, on perd, de telle sorte que cela
représente 4.5 p.c.
UNE VOIX: De quoi?
M. ANGERS: De la masse salariale. C'est une estimation de caisse de
crédits monnayables pour l'ensemble du secteur public.
M. MASSE (Montcalm): La masse salariale, vous le fixez à quoi? A
un milliard de dollars?
M. ANGERS: A $1,530,000,000. Mais il ne s'agit pas de
déboursés effectifs, immédiats. Un individu qui s'absente
de son travail ne donne pas de services. Donc, il n'y a pas eu de rendement.
Cela n'implique pas un déboursé additionnel en sus de son salaire
bien que nous ayons payé pour un service non obtenu.
M. MASSE (Montcalm): C'est ça, d'accord.
M. ANGERS: Si nous prenons la partie assurance-salaire, avec les
différents éléments, en raison de l'utilisation
échelonnée sur une période donnée des congés
de maladie, c'est autour de 5 p.c. Cela va descendre vers 4 p.c. dans trois ou
quatre ans, dès que la majorité des employés auront soit
épuisé les congés de maladie ou deviendront moins
majoritaires.
M. MASSE (Montcalm): Est-ce que le ministre de la Fonction publique
aurait l'intention de demander à son collègue des Affaires
sociales de décréter un tel système pour l'ensemble des
Québécois?
M. L'ALLIER: Vous pouvez lui poser la question directement.
M. MASSE (Montcalm): II y a quand même beaucoup de gens. C'est
pour cela que je faisais la relation, tout à l'heure, avec tous ceux qui
oeuvrent dans d'autres secteurs d'activités. Je pense que je l'ai dit.
C'est nettement avantageux, en tout cas, pour un pourcentage très
élevé de Québécois, mais c'est quand même
payé par les impôts des Québécois qui n'ont pas ce
type d'avantage ailleurs. Il serait donc normal, je ne dis pas dans la
même année, que ce secteur de sécurité, dans le
domaine du travail, soit le plus rapidement possible étendu à
l'ensemble des Québécois.
M. CASTONGUAY: Le seul commentaire que je peux faire à ce sujet,
M. le Président, c'est qu'il me semble que cette suggestion, bien
qu'intéressante, déborde quelque peu du sujet. Nous avons
déjà indiqué nos priorités, le cheminement que nous
voulons poursuivre quant aux mesures de sécurité de revenu. Cette
mesure qui est vraiment pour la couverture à plus court terme nous
semble devoir passer après quelques étapes qui touchent des
manques à gagner à plus long terme pour des catégories
plus défavorisées.
M. MASSE (Montcalm): Cela déborde du sujet mais encore plus du
budget, je pense bien.
M. CASTONGUAY: Oui.
M. ANGERS: Je voudrais ajouter quelque chose au sujet des avantages
supérieurs accordés aux employés du secteur public. C'est
qu'une des règles de fond que le gouvernement et ses partenaires se sont
données dans la poursuite de ces négociations, c'était,
autant que possible, de
ne pas diminuer les bénéfices octroyés soit en
vertu de conventions collectives, soit en vertu de règles
administratives auxquelles le gouvernement avait participé
De cette façon, les bénéfices marginaux n'ont pas
été dépréciés, ni
améliorés.
M. GARNEAU: Je voudrais poser une question à M. Angers.
Evidemment, on pourra peut-être dire que je connais la réponse. Je
me suis fait poser cette question à quelques reprises. Il semble qu'il y
ait eu de mauvaises interprétations, dans certains milieux.
Dans le programme d'assurance-salaire, de rentes pour la veuve et les
orphelins ou encore en cas d'invalidité, est-ce que ce plan
empêcherait, par exemple, les enseignants qui sont groupés en
corporation de souscrire de leur propre gré à un plan collectif
d'assurance-vie?
M. ANGERS: D'abord, il est toujours possible, même avec cela, pour
les individus ou pour les associations, de prendre des assurances
excédentaires. Mais, pour répondre aussi en partie aux allusions
qui ont été faites, c'est que ce sujet n'a presque pas fait
l'objet de discussion, de telle sorte qu'on n'a même pas pu aborder, cela
va de soi, la façon de prévoir le choix des assureurs. Il n'y a
même pas eu de discussion. S'il n'y a pas eu de discussion sur le fond,
il y en a eu encore moins sur la méthode de sélection des
compagnies d'assurance.
M. MASSE (Montcalm): Vous n'êtes pas fermés à toute
discussion, à la table de négociation, devant les remarques du
syndicat, mais le problème, c'est que vous n'avez pas eu ces
remarques.
M. ANGERS: C'est cela. On n'en a pas eu.
M. L'ALLIER: On a clairement indiqué, à la table de
négociation, qu'il s'agissait là d'un sujet qui nous paraissait,
d'abord, extrêmement important. C'est pourquoi nous avions insisté
pour l'inclure à la table centrale.
Deuxièmement, nous avons également indiqué à
la partie syndicale que nous étions prêts à discuter avec
elle des modalités d'application et des modalités d'ajustement de
ce nouveau plan pour l'avenir.
Deux éléments doivent ressortir de ce qu'a dit M. Angers,
entre autres choses. C'est qu'un tel plan d'assurance favorise d'une
façon particulière les nouveaux employés, les jeunes
employés du gouvernement, de telle sorte qu'ils ont une couverture,
dès le début de l'emploi, qui est égale à celle de
n'importe quel autre employé, même s'il a 20 ou 25 ans
d'expérience.
Par ailleurs, elle ne défavorise pas les anciens employés
non plus parce que ceux-là ont, si vous voulez, une couverture qui est
la même, par l'assurance-salaire, mais gardent aussi le
bénéfice des caisses de congés accumulés, en ce
sens qu'ils peuvent s'en servir à d'autres fins. Et, en fin d'emploi, il
y a des modalités qui sont à discuter, mais nous avons bien
assuré la partie syndicale qu'il n'y aurait pas de perte de ces jours
accumulés. De la sorte, la couverture est égale pour tout le
monde. Ceux qui, au début, auraient eu dix jours de couverture, suivant
l'ancien régime, ont en fait une couverture complète et totale.
Ceux qui en fin de carrière, par exemple, avaient une couverture
considérable, due à leur banque de congés, conservent les
bénéfices de cette banque et conservent en même temps une
couverture générale.
M. BOIVIN: Est-ce que cela a été l'objet de la rupture des
négociations ou si c'est pour donner des explications sur les
informations qui manquaient à la population?
M. L'ALLIER: Cela n'a pas été l'objet de la rupture des
négociations. Nous n'avons tout simplement reçu aucune
contreproposition là-dessus. La seule contreproposition, pour être
très précis, que nous avons reçue a été de
mettre cela de côté, complètement, et de continuer comme
avant.
M. BOIVIN: Les raisons, c'est qu'on disait qu'ils perdaient les jours
accumulés. Alors, je comprends très bien, cela donne des
explications.
M. LALLIER: On a laissé entendre assez facilement aux
employés qu'un tel régime leur faisait perdre le
bénéfice des caisses de congés accumulés.
Ce qui est exact c'est qu'aucun jour de congé de maladie
accumulé n'est perdu; ce qui est exact également c'est que, dans
la mesure où on implantera précisément un régime
qui donne cette couverture, il n'y aura plus à l'avenir d'accumulation
de congés de maladie, ce qui est normal.
Par ailleurs, on ajoute, en comptant, pour chaque employé, qu'il
soit ou non malade dans l'année, et. à chaque année
l'équivalent en argent de deux jours de son traitement. Et ça,
c'est donné à tous les employés. Si un bonhomme n'est pas
malade de l'année, il a quand même l'argent. Il met ça en
banque ou il en fait ce qu'il veut.
M. BOIVIN: Si je comprends bien on a dévié un peu
de la discussion il y avait beaucoup d'absence par maladie. Je ne crois
pas que ce soit avec un tel programme qu'on corrige la situation au point de
vue administratif. Et ce serait peut-être mauvais de laisser entendre
qu'on adopte ce régime d'assurance pour contrôler les
congés de maladie.
Je crois que ce serait à un bureau médical d'exiger un
rapport. C'est peut-être une chose qui manque ici dans le domaine public,
qu'on ait un bureau médical à l'embauchage et qu'on voit les gens
qu'on embauche dans le domaine
public pour avoir un certain contrôle. Il ne faudrait pas tout de
même parce qu'on empirerait la situation dire qu'on propose
un tel programme pour contrôler les congés inutiles.
M. L'ALLIER: D'ailleurs, ce n'est pas le but premier de
l'opération. Je prends note avec intérêt de la suggestion
que vous faites. Nous avons regardé cette question-là. Ce sont
des choses qui pourraient faire l'objet de discussions ultérieures.
Maintenant, nous présumons que, quand des gens s'absentent en
disant que c'est pour maladie. Ils sont effectivement malades. Nous ne pouvons
pas partir d'une présomption de mauvaise foi...
M. BOIVIN: II faut que ce soit contrôlé par la
médecine.
M. L'ALLIER: C'est ça. Mais le fait de verser en argent comptant,
au début de chaque année, deux jours de traitement sur une
année de travail de 200 jours qui est l'équivalent,
à toutes fins pratiques, de 1 p.c. du salaire, qu'on le calcule 1 p.c.
de la masse salariale c'est une incitation probablement aussi à
rester au travail, de la même façon que, comme dans tous les plans
d'assurance, le déductible si je peux employer l'expression
de deux jours pour les congés de maladie est également une
incitation à rester au travail.
Mais le but premier n'est pas celui-là, c'est de fournir à
l'ensemble des employés des secteurs public et parapublic des
prestations égales, quel que soit le nombre d'année en fonction.
Vous avez des personnes mariées, à un moment donné, qui
doivent s'absenter pour toutes sortes de raisons, maternité et autres. A
ce moment-là, on met une couverture. Et la protection pour les absences
pour maladie n'est pas liée à l'ancienneté, mais vraiment
aux besoins réels de l'absence pour maladie ou invalidité.
M. MASSE (Montcalm): Le système me semble intéressant,
mais il y a peut-être des modalités qui pourraient être
corrigées.
M. L'ALLIER: Absolument.
M. MASSE (Montcalm): L'inconvénient c'est qu'on n'a pas les
points de vue du syndicat. Mais ce n'est certainement pas le point sur lequel
les négociations ont brisé.
M. L'ALLIER: Non.
M. MASSE'(Montcalm): Alors, est-ce qu'on pourrait aborder des points
plus litigieux?
M. L'ALLIER: Ce qui nous amène à parler, en fait, de la
politique salariale et de ses modalités...
M. MASSE (Montcalm): C'est ça.
M. L'ALLIER: ... dans la mesure où, précisément, le
gouvernement a pris la décision d'élaborer une politique
salariale basée essentiellement sur cette moyenne
généralement observée et de traiter également de la
même façon les employés du secteur public et les
employés des autres secteurs au Québec. Et ça nous
amène au fond...
M. MASSE (Montcalm): Je ne sais pas quelle est la longueur de
l'exposé, mais il serait peut-être intéressant de l'avoir
tout d'un bloc. Il ne reste que quelques minutes avant six heures. Nous pouvons
ajourner à huit heures ou bien, si l'exposé ne prend que quelques
minutes...
M. BOIVIN: Avant d'entendre le négociateur, pendant les quelques
minutes qui restent peut-être avant six heures, j'aimerais poser quelques
questions que je devais lui poser au commencement de son intervention. Je
voudrais savoir le mandat qu'a reçu le négociateur en chef, le
porte-parole de la table centrale de négociation. Je voudrais savoir si
M. Langlois a été aussi le porte-parole de ces associés au
patronat que sont les commissions scolaires, même si c'est par des gens
élus, et s'il aurait été mandaté aussi par les
commissions scolaires. Je voudrais savoir s'il a reçu un mandat de
négociation de l'Association des hôpitaux, qui sont aussi nos
partenaires dans le patronat et qui sont aussi les partenaires du ministre de
la Fonction publique. Alors, il y aurait peut-être moyen de parler un peu
du mandat exact qu'a reçu M. Langlois à la table de
négociations centrale. Soit que lui-même ou que le ministre de la
Fonction publique le fasse.
M. L'ALLIER: Oui, M. Langlois est absent, comme je l'ai dit hier. Il
fera son exposé sur la table centrale demain matin, à la reprise
des travaux. Ce soir, M. Angers continuera à expliquer les
modalités de la politique salariale et ses assises techniques et
scientifiques, si vous voulez. Par ailleurs, pour ce qui est du mandat du
porte-parole, il faut distinguer entre les mandats aux tables sectorielles et
les mandats à la table centrale.
A la table centrale, Me Langlois avait un mandat du gouvernement et de
ses partenaires, défini conjointement. D'ailleurs, je crois qu'au
début de son exposé il pourrait lui-même donner les limites
de son mandat. Nous pourrons même demander, à ce moment-là,
aux représentants de la Fédération des commissions
scolaires et à ceux dé l'Association des hôpitaux de
confirmer précisément qu'il parlait également et
pleinement en leur nom et que les mandats étaient vraiment des
mandats.
Oui, il y a une restriction effectivement qui pourrait être
précisée par Me Langlois, c'est que, du côté des
commissions scolaires anglo-
phones, nous n'avions pas de mandat à la table centrale. Me
Langlois n'avait pas de mandat à la table centrale de parler pour eux.
Je crois, d'ailleurs, que Me Langlois n'avait pas davantage un mandat des
enseignants anglophones.
M. BURNS: II n'a pas un mandat des enseignants francophones, non plus,
je pense.
M. L'ALLIER: Non.
M. BOIVIN: Mais est-ce qu'ils faisaient partie du front commun?
M. MASSE (Montcalm): Ce mandat n'avait pas été
négocié par le ministre des Finances?
M. L'ALLIER: Les commissions scolaires anglophones ne faisaient pas
partie du front commun patronal, pas plus que, je crois, la majorité des
enseignants anglophones ne faisaient partie du front commun syndical.
M. BOIVIN: Alors, aux tables sectorielles, qui était le
porte-parole? Est-ce que c'était le même qu'à la table
centrale?
M. L'ALLIER: Ce n'était pas le même. A chaque table
sectorielle, il y avait un porte-parole.
M. BOIVIN: Alors jusqu'à six heures, on peut parler
là-dessus qui était porte-parole dans chacun des
secteurs?
M. MASSE (Montcalm): Avant de tomber dans les secteurs, je pense qu'une
question se pose, quand même, à ce moment-ci: Comment se fait-il
que vous n'aviez pas mandat, pour la partie patronale, des commissions
scolaires anglophones et que vous aviez mandat pour l'ensemble des autres
commissions scolaires francophones et des autres secteurs, soit les
hôpitaux et la fonction publique?
M. L'ALLIER: Bien, c'est très simple. La table centrale
était un mécanisme de négociation volontaire qui
n'était pas prévu par la loi. C'est de consentement, en fait,
que, du côté patronal comme du côté syndical, il y a
eu des regroupements. Or, au moment où le gouvernement et ses
partenaires ont décidé de faire des contrepropositions et
d'accepter une discussion à la table centrale on pourra me
corriger si ma réponse est inexacte une partie de la partie
patronale, notamment les commissions scolaires anglophones, ont
décidé que, quant à elles, elles souhaitaient continuer la
négociation à la table sectorielle qu'elles n'étaient pas
représentées et qu'elles n'avaient pas le mandat d'être
présentes à la table centrale de négociations du
côté patronal.
Nous avons pris acte de cette situation et nous avons quand même,
avec la Fédération des commissions scolaires et l'Association des
hôpi- taux, procédé à la négociation à
la table centrale. Il s'agissait...
M. MASSE (Montcalm): Le syndicat des enseignants anglophones ne faisait
pas non plus partie du front commun?
M. L'ALLIER: La PAPT, non. Les deux syndicats anglophones n'en faisaient
pas partie, sauf certains membres de la PACT qui étaient à la
fois à la table centrale et ailleurs.
M. MASSE (Montcalm): En général, la table centrale ne
concernait que les secteurs francophones?
M. L'ALLIER: De fait, oui, c'est ce qui est arrivé.
C'était un regroupement volontaire de chaque côté. Pour
préciser ma réponse au député de Montcalm, le
ministre des Affaires sociales me souligne que, du côté des
affaires sociales, les secteurs anglophones étaient inclus à la
table centrale des deux côtés également, à
l'intérieur de l'Association des hôpitaux.
M. BOIVIN: Ds acceptaient le porte-parole du gouvernement?
M. L'ALLIER: Oui.
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, s'il n'y a pas d'autres
questions, on pourrait ajourner à 8 heures et quart, compte tenu de la
réception.
M. BURNS: J'aurais une question avant. M. Angers nous a parlé
tantôt de taux d'absences ou de taux d'utilisation des crédits de
congés de maladie. Vos statistiques, je pense, sont prises dans le
domaine hospitalier seulement. Ai-je bien compris?
M. ANGERS: C'est un exemple pris dans le milieu hospitalier.
M. BURNS: II était de...
M. ANGERS: De dix jours par année...
M. BURNS: Par année, par employé.
M. ANGERS: ... par employé, en moyenne.
M. BURNS: Avez-vous des statistiques pour les autres domaines?
M. ANGERS: Pour la fonction publique, 8. 13 p.c., c'est-à-dire 8
jours par année; les hôpitaux, 10. 07, disons 10 jours; la SAQ ou
la RAQ, 9. 2. Dans l'enseignement, c'est incomplet. Il y a des commissions
scolaires pour lesquelles on en a, mais le nombre de jours est certainement
inférieur. Le calendrier scolaire ou le nombre de jours de travail d'un
enseignant je ne parle pas de ses soirs est de 190 jours
par année alors que le salarié normal ce qui ne
veut pas dire que l'enseignant n'est pas un salarié normal le
fonctionnaire, travaille 260 jours.
M. BURNS: Dernière question, là-dessus. Vous avez, je
pense, fait état peut-être pas directement mais en tout cas
je l'ai compris comme cela d'un assez fort pourcentage de
bénéfices marginaux, en général dans la fonction
publique.
Avez-vous là-dessus des statistiques? Quel est le pourcentage du
coût peut-être du coût moyen pour un
fonctionnaire ou un employé hospitalier, le pourcentage de ce qui est
consacré à ces bénéfices marginaux?
M. ANGERS: Le premier type de réponse c'est que c'est très
variable, d'un secteur à l'autre. Le régime de retraite existe
dans la fonction publique, il n'existe pas, à toutes fins utiles, du
côté hospitalier. Automatiquement, vous avez 10 p.c. à 12
p.c. d'écart instantané. Un ordre de grandeur, c'est certainement
25 p.c, 27 p.c. Du côté des fonctionnaires, 30 p.c, 32 p.c, c'est
très variable. Les infirmières ont un mois de vacances; à
côté, un préposé à l'entretien ménager
aura trois semaines. Cela varie d'un groupe à l'autre, d'un secteur
à l'autre. On n'a pas harmonisé ces bénéfices au
même titre qu'on l'a fait ou tenté de le faire pour le
régime de retraite, l'assurance-salaire et les salaires. Il y a des
variations d'un secteur à l'autre.
M. BURNS: Alors, ça se situerait, selon les groupes, entre 25
p.c. et 30 p.c.
M. ANGERS: Je dirais de 20 p.c. à 35 p.c. sans
exagérer.
M. LE PRESIDENT: Le député de Montcalm.
M. MASSE (Montcalm): Le député de Saint-Jean
réfléchit-il ou s'il dort?
M.ANGERS: Le régime de retraite est le plus gros
bénéfice.
M. LE PRESIDENT: Les travaux sont suspendus jusqu'à huit heures
quinze.
(Suspension de la séance à 17 h 57).
Reprise de la séance à 20 h 25
M. LAMONTAGNE (président de la commission permanente de la
fonction publique): A l'ordre, messieurs!
A la suite de nos travaux, cet après-midi, je donne la parole
immédiatement à M. Angers.
M. BOIVIN: M. le Président, ce qui m'intéresse...
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Dubuc.
M. BOIVIN: ... d'entendre, ici, à la commission de la fonction
publique, ce n'est pas nécessairement l'étalage de tout ce que le
gouvernement a proposé à la table, où on n'a d'ailleurs
pas négocié. Il y a eu un blocage à la table centrale. Ce
qui m'intéresse, c'est la sécurité, sujet dont vous avez
parlé cet après-midi, et dont on entend parler par les petits de
la fonction publique, les 125,000 qui n'auraient pas de sécurité,
qui n'ont pas d'assurance et qui nous disent: On nous offre de la
sécurité sociale, c'est pour demain. On déduit 5 p.c. de
notre salaire et il ne reste rien pour l'augmentation du coût de la vie.
On dit: S'ils nous donnent 5 p.c. et s'ils nous le mangent avec la
sécurité pour l'avenir, il ne nous reste rien pour l'augmentation
du coût de la vie.
Cela ne m'intéresse pas de savoir tout ce que le gouvernement a
offert, même la sécurité. On sait qu'il s'est fait beaucoup
de travail des deux côtés, du côté syndical et du
côté patronal. On en a eu la preuve dans tout ce qui s'est
publié; on a cela sur la table. Ceux qui ont voulu s'informer n'ont eu
qu'à consulter tout ce qui a été écrit. Cela a
coûté assez cher, tout ce début de négociation.
Peut-être que cela a coûté près de $1 million.
Ce à quoi je m'attends, c'est qu'on nous dise, de façon
particulière, où cela a bloqué à la table de
négociation. Cela a-t-il bloqué du côté des tables
centrales? Est-ce qu'on peut dire que les tables sectorielles n'ont pas
marché? Je ne le croirais pas. Qu'on nous donne les informations pour
que le public et non seulement le public, mais les
intéressés, les syndiqués prennent connaissance
réellement de ce que vous avez offert.
Encore une fois, j'insiste sur l'augmentation du coût de la vie
qui justifie les demandes syndicales, et la sécurité doit
être peut-être au-dessus du coût de la vie. C'est une chose
nouvelle qu'on offre peut-être à 125,000 petits employés.
Il faudrait qu'ils aient l'assurance que dans la grille, dans le cadre
établi, ils aient l'accélaration nécessaire pour payer le
coût de la vie et les avantages sociaux auxquels ils ont droit.
M. GARNEAU: M. le Président, c'est une question qui serait
peut-être embarrassante pour M. Angers, qui est ici en tant que
technicien pour expliquer le mécanisme des propositions
patronales.
Le député de Dubuc a posé la même question,
hier, au ministre des Affaires sociales concernant le régime de
retraite. Le ministre des Affaires sociales avait répondu, je pense,
à la question du député de Dubuc. Mais, pour ce qui est de
l'augmentation du coût de la vie, justement, la raison pour laquelle M.
Angers est ici, c'est pour expliquer comment, au niveau du ministère de
la Fonction publique, sur le plan technique, nous en sommes arrivés
à offrir une croissance de la rémunération basée
sur un certain nombre de facteurs. Pour voir si cette politique a
été bien appliquée, il faut savoir comment on a
utilisé les statistiques, comment on en est arrivé à
établir que le coût de la vie était de tant, que
l'augmentation de la productivité ou de la richesse collective
était de tant, comment on est arrivé, également, à
observer ce qu'était la moyenne des salaires au Québec pour des
emplois similaires. Demain, il avait été convenu que le
porte-parole patronal donnerait la façon dont cela s'était
déroulé à la table centrale et indiquerait les points
où il y a eu discussions, les points où cela a
achoppé.
Je pense que, ce soir, il faudrait poursuivre le travail technique qui a
été demandé à M. Angers, justement pour être
en mesure, plus tard, de discuter sur le plan des principes. A ce
moment-là, les questions s'adresseront probablement au ministre de la
Fonction publique. Mais, avant, il faudrait savoir comment les calculs ont
été faits. Je ne crois pas que cette démonstration ait
été faite, d'abord, en public. Elle a été faite
à la table centrale de négociation; il y a eu, je pense,
plusieurs séances où cette démonstration a
été faite. Mais elle n'a jamais été faite, à
mon sens, devant les députés, soit en Chambre ou encore en
commission parlementaire. Ce serait peut-être une bonne chose de
connaître ce mécanisme avant de pouvoir discuter si nos offres
patronales étaient suffisantes pour couvrir le coût de la vie.
C'est pourquoi, M. le Président, je suggérerais que nous
poursuivions dans le sens où nous nous étions engagés
avant le dfner. Les autres interrogations que le député de Dubuc
avait pourraient faire l'object de questions lorsque nous aurons, demain,
l'exposé du porte-parole de la partie patronale, du gouvernement et de
ses adjoints, ainsi que des autres parties, l'Association des hôpitaux et
la Fédération des commissions scolaires. Ces questions pourront
être plus facilement discutables, à ce moment-là.
M. BOIVIN: C'est parce que toutes ces questions s'adressent au ministre
des Affaires sociales. J'ai suivi avec attention le ministre de la Fonction
publique...
UNE VOIX: L'honorable!
M. BOIVIN: ... qui répondait assez facile- ment à toutes
les questions qui lui étaient posées à la
télévision. Il disait que c'étaient des objectifs sociaux,
laissant supposer qu'on ne pouvait pas, à une table de
négociation, répondre à tous les objectifs sociaux
sous-entendus du ministre des Affaires sociales.
Je le comprends. Il y a des gens qui sont arrivés avec une
philosophie: $100 au moins. Il y a eu beaucoup de discussions là-dessus.
Il faudrait rassurer le public et ces petits employés. Il y a un
coût de la vie qui est rigide. On a parlé de $100, c'est
peut-être trop. Mais il me semble qu'on avance quand on rassure tous ces
gens; qu'on les assure qu'ils auront le nécessaire de la vie dans un
salaire de base.
On dit que la ligne de pauvreté, c'est $3,400 ou $3,700 par
année.
UNE VOLX: II faudrait spécifier que c'est pour deux
personnes.
M. BOIVIN : II faudrait s'assurer que ce ne soit pas un objectif social;
c'est peut-être nécessaire que tous ceux qui travaillent,
actuellement, à la fonction publique soient assurés du salaire de
base que commande le coût de la vie.
Les bénéfices sociaux, c'est bien beau. Ils se disent:
C'est aujourd'hui que nous vivons. Ce n'est pas pour demain. C'est comme cela
qu'ils nous répondent. C'est pour raccourcir les discussions que je vous
dis cela. Quand même vous nous étaleriez toute l'affaire, nous ne
sommes pas ici pour négocier. C'est une question principale: Vous devez
donner l'information d'abord à ces intéressés et ensuite
au public.
M. LE PRESIDENT: Le député de Montcalm.
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, je pense que le
député de Dubuc aurait certainement une partie de la
réponse à sa question s'il laissait le représentant du
gouvernement suivre l'ordre du jour, c'est-à-dire faire
l'élaboration des principes qui ont amené une politique
salariale, à l'intérieur desquels ils ont certainement dû
tenir compte des questions du député de Dubuc. S'ils n'en ont pas
tenu compte, il sera de notre responsabilité de leur mettre le point
dessus.
M. BOIVIN: Quelle est la réponse du ministre de la Fonction
publique? Ce n'est pas le député de Montcalm qui va me
répondre.
M. MASSE (Montcalm): II y a eu un ordre du jour d'établi, M. le
Président.
M. BOIVIN : Hier, j'ai eu à la réponse...
M. MASSE (Montcalm): Je pense que le président devrait rappeler
l'assemblée à l'ordre et suivre l'ordre du jour qui a
été établi.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. MASSE (Montcalm): L'ordre du jour a été établi
pour tout le monde, y compris le représentant du comté de
Dubuc.
M. BOIVIN: Je ne veux pas perdre mon temps ici à négocier.
Je veux avoir le principal. Où bloquent les négociations? J'ai
suivi d'assez près les dernières négociations, qui n'ont
pas abouti à une grève. En 1966, quand nous sommes arrivés
au pouvoir, nous avons eu la grève. Nous avons eu toute cette
grève à régler. Je veux me servir de l'expérience
que j'ai acquise dans la fonction publique, surtout dans le secteur de la
santé, pour aider le gouvernement non pas pour lui nuire
à régler cette situation très difficile. Mais ne perdons
pas notre temps ici, à la commission de la fonction publique, pour
étaler toute une politique; il n'est pas nécessaire que nous la
connaissions et qu'elle apparaisse ici, à la commission.
M. LE PRESIDENT: Le ministre de la Fonction publique.
M. L'ALLIER: Je dois dire que les propos du député de
Dubuc me surprennent un peu. Je crois qu'il est nécessaire en
définitive que l'on connaisse la politique du gouvernement pour,
précisément, comme l'a dit le député de Montcalm,
pouvoir évaluer si cette politique est une politique raisonnable, compte
tenu du fait que ni le Parti libéral, ni l'Unité-Québec,
ni aucun parti de cette Assemblée nationale n'a reçu le mandat de
modifier d'une façon radicale les structures sociales, les structures de
main-d'oeuvre, les structures économiques du Québec.
Les propositions que nous avons faites, je crois qu'il faut les
expliquer et donner en fait la base de ces politiques. La question du
député de Dubuc est la suivante: Où est-ce que les
négociations achoppent?
Les négociations se sont interrompues le soir de la
réunion du Château Frontenac précisément parce que,
malgré deux modifications coup sur coup, ou à peu près, de
la partie patronale, du côté syndical on a continué
d'exiger un salaire de $100 par semaine, $100 par semaine comme salaire de
recrutement des employés les moins bien payés en troisième
année de la convention collective, ce qui pour ces employés
représentait des augmentations de traitement de l'ordre d'environ 50
p.c.
Les propositions que nous avons faites sont à l'effet de donner
aux employés des secteurs de la fonction publique et des secteurs public
et parapublic des conditions de travail qui sont égales ou
supérieures à celles qui sont consenties à la
majorité des travailleurs québécois pour des emplois
similaires et dans des conditions similaires: heures de travail, etc.
Lorsque le gouvernement a pris la décision et c'est une
décision politique de payer les employés des secteurs
public et parapublic suivant cette moyenne généralement
observée au Québec pour des emplois similaires ou comparables, il
a pris la décision en fait de ne pas favoriser des travailleurs, parce
qu'ils sont dans les secteurs public et parapublic, payés par l'ensemble
des contribuables, par rapport à l'ensemble des autres travailleurs du
Québec.
Cette décision a été prise, entre autres, parce que
précisément le gouvernement n'a pas été élu
avec mandat de payer les gens suivant leurs besoins mais bien suivant la
prestation de travail fourni.
Si nous poussions à l'extrême cette proposition de payer
les gens suivant leurs besoins, nous en arriverions, d'abord, à
établir ce que j'appellerais un salaire familial, ce qui est
rejeté du côté syndical, notamment par le président
de la CSN.
Nous en arriverions, plus loin, à faire en sorte
qu'indépendamment du travail fourni, de la qualité du travail
fourni, du niveau de travail fourni, il faudrait payer les gens suivant le
nombre d'enfants, suivant les besoins sociaux, suivant leur rang social. Nous
avons, quant à nous, opté pour le même principe que celui
qui est préconisé par le front commun: à travail
égal, salaire égal. Mais, à travail égal, salaire
égal sur l'ensemble du territoire québécois parce
qu'un gouvernement a une responsabilité à l'égard de
l'ensemble de la population et non pas nécessairement à
travail égal, salaire égal à l'intérieur de cette
serre chaude que constitue la fonction publique.
Il est vrai que 11 p.c. des travailleurs au Québec,
salariés, syndiqués, sont dans la fonction publique. C'est 11
p.c. Il est vrai, cependant, que 35 p.c. seulement des travailleurs
québécois sont syndiqués, au Québec. Un
gouvernement a la responsabilité, bien sûr, de penser à ses
employés, de penser à ceux qui travaillent pour la population
dans les secteurs public et parapublic, mais il a aussi une
responsabilité à l'égard de l'ensemble de la population et
de l'ensemble des travailleurs.
C'est pourquoi, quant à nous, nous partons de ce principe,
à savoir que, s'il faut donner des conditions de travail comparables
dans les secteurs public et parapublic, compte tenu, en même temps, du
fait, comme l'a souligné M. Angers cet après-midi
répondant aux questions du député de Montcalm et du
député de Maisonneuve également, que, sur les prestations
de bénéfices marginaux, le gouvernement se situe non pas dans la
moyenne, mais légèrement et souvent bien au-delà de cette
moyenne, nous devons, par des mesures sociales, combler les besoins de ceux qui
sont dans des situations familiales ou dans des situations sociales telles que
le seul travail ne suffit pas.
Le député de Dubuc connaît l'assurance-maladie. Il
connaît également l'ensemble des prestations sociales. Je ne
voudrais pas insister là-dessus. Soixante-dix pour cent du budget du
Québec est actuellement consacré à des prestations
sociales ou à des dépenses d'éducation. Nous avons, bien
sûr, une responsabilité à
l'égard de nos employés qui sont, en fait, les
employés de la population.
Cette responsabilité, nous croyons l'assumer pleinement lorsque
nous proposons de donner, par négociation si possible, parce que c'est
toujours la meilleure voie, ou sinon par décret parce
qu'après l'expiration des conventions collectives depuis un an ou plus,
il faut que les employés connaissent leurs conditions de travail, et il
est essentiel, pour qu'un Etat fonctionne normalement, que ces conditions de
travail soient planifiées et connues nous devons leur donner les
meilleures conditions de travail mais compte tenu de l'ensemble de la politique
québécoise.
C'est pourquoi je rejoins la proposition du député de
Montcalm. Il est important que, cette décision politique ayant
été prise, nous puissions entendre, pour que vous puissiez la
critiquer, poser des questions, la rejeter ou l'accepter, le directeur
général de la rémunération afin qu'il nous dise de
quelle façon cette moyenne généralement observée
est calculée. Ce n'est pas de la même façon qu'elle est
calculée, bien sûr, au gouvernement fédéral, mais
elle tient compte de la situation de l'ensemble des travailleurs au
Québec. C'est à cela que nous nous sommes attachés.
Il pourra nous parler également de l'accroissement du coût
de la vie, de l'accroissement de la richesse collective qui sont, si vous
voulez, les assises de l'établissement de cette moyenne
généralement observée. L'objectif du gouvernement n'a pas
été c'est indiqué depuis le 30 mars 1971 dans la
politique salariale d'essayer de financer ou d'épargner de
l'argent sur le dos de ses employés mais, bien au contraire, de leur
donner des conditions de travail telles qu'ils puissent fournir à
l'ensemble de la population les meilleurs services possibles.
Je pourrais continuer en donnant des exemples significatifs, bien
sûr, mais qui n'ajouteraient rien au débat. Par exemple, pour 200
ou 250 postes d'agent de bureau au gouvernement, nous avons 2,500 à
3,000 candidatures. Ce n'est pas un argument que je voudrais employer; je ne
voudrais pas ici employer des arguments de cette nature. Il nous faut davantage
nous arrêter aux assises mêmes de la politique gouvernementale de
rémunération qui se situe précisément dans cette
optique de conditions de travail acceptables à la fois par les
employés des secteurs public et parapublic et à la fois par
l'ensemble de la population. C'est cet objectif que nous avons voulu
indépendamment des pressions exercées sur le gouvernement par
tous les moyens et que nous voudrons toujours atteindre.
En ce sens-là, M. le Président, je vous demanderais de
donner la parole au directeur général de la
rémunération pour que nous puissions connaître les assises
de cette politique gouvernementale quitte à ce que, demain et dans les
jours qui suivront, le porte-parole gouvernemental aux tables de
négociation don- ne le contenu et les détails et réponde
aux questions sur les contenus et détails de la négociation
proprement dite à la table centrale. Cette table centrale est le
résultat d'un consensus et d'une entente entre les parties. Ce n'est pas
une table imposée par la loi, et elle ne vient pas contredire les tables
sectorielles où doivent, à mon avis et depuis toujours, je
l'ai dit se situer, de fait, les négociations si elles visent le
premier objectif qui doit être le premier objectif à la fois du
gouvernement et des représentants des employeurs, celui de
négocier les meilleures conditions de travail possible pour les
employés des secteurs public et parapublic, c'est-à-dire les
tables sectorielles de négociation.
M. BOIVIN: Alors, c'est la table sectorielle de la fonction publique que
nous allons entendre.
M. L'ALLIER: Nous entendrons maintenant, M. le Président, si vous
êtes d'accord, M. Angers donner les assises de la politique salariale ou
de la politique de rémunération du gouvernement, politique que le
front commun syndical a voulu négocier à la table centrale,
politique que nous avons, dans ces assises fondamentales, depuis le 30 mars
1971, refusé de négocier parce que c'est là la
responsabilité du gouvernement, mais que nous avons appliquée
dans les offres qui ont été faites à chacune des tables
sectorielles. Ayant pris connaissance de ces assises scientifiques de la
politique salariale du gouvernement, nous pourrons entendre le processus de
négociation à la table centrale et nous pourrons ensuite entendre
les porte-parole aux tables sectorielles de négociation où
s'applique de fait cette politique salariale.
M. LE PRESIDENT: M. Angers. Politique salariale
M. ANGERS: Merci. La question qui a été le plus longuement
débattue et discutée à la table centrale a sans doute
été la question salariale proprement dite. Un bref rappel de la
situation. Sur ce qu'est la politique salariale ou la partie de la politique de
rémunération qui touche les salaires, on distingue deux parties:
premièrement, l'organisation des rémunérations,
c'est-à-dire la parité des salaires entre les hommes et les
femmes, l'harmonisation et certains autres principes et, d'autre part, le
niveau de ces mêmes salaires et de ces mêmes traitements. Au cours
des discussions centrales au sujet de l'organisation des
rémunérations, le débat a surtout porté sur la
règle 1 2 de la politique de rémunération
concernant les traitements, qui prévoit une harmonisation des
traitements pour des emplois similaires. Elle a aussi porté sur les
rythmes d'accroissement, la moyenne observée et sur les rythmes de
croisière.
Je pense qu'il serait intéressant de vous fournir l'explication
qui a été présentée aux organisations syndicales
sur chacun des éléments en question.
Au sujet de l'harmonisation des traitements, il s'agit d'une
règle d'équité qui consiste à garantir aux
salariés du secteur public une certaine identité ou similitude
dans les traitements pour un emploi identique ou analogue, qu'il soit
exercé dans le secteur de l'éducation, dans celui des affaires
sociales, dans la fonction publique ou des offices et régies. Par
exemple, qu'une dactylo, dans l'un ou l'autre de ces endroits, puisse recevoir
un traitement soit identique ou semblable. La même chose pour un
journalier.
D'une façon plus simple, les organisations syndicales ont
parlé plutôt d'identité de traitement ou à travail
égal, salaire égal. Sur le fond proprement dit, il n'y a pas de
problème. Il est entendu que, toutes choses étant égales,
il n'y a aucune raison de procurer des traitements différents.
Cependant, la situation du monde pour reprendre une expression du
sous-ministre de la Fonction publique, du monde réel ce n'est pas
tout à fait cela. Toutes choses, ne sont pas toutes égales.
Au cours de l'année qui a précédé la
négociation, à la Direction générale de la
rémunération, des analystes se sont penchés pour essayer
de rendre, chaque fois que possible dans le fond, identique la
rémunération des divers postes dans le secteur public. Pour ce
faire, les experts en fait, ce sont des experts qui travaillent chez
nous, cela arrive souvent au gouvernement ont poussé à
fond cette étude des tâches et cela, de concert avec les experts
des différents secteurs, des directeurs de personnel dans le secteur
hospitalier, dans les commissions scolaires ou, entre autres, à la
Société des alcools. Après des sessions de travail assez
ardues, ils sont arrivés à la préparation de travaux, que
vous avez en mains dans une des chemises qui vous ont été
remises, qui présentent ce qu'on appelle un tableau d'appariement des
emplois. Chaque fois qu'il y a deux fonctions dans le secteur public, on a
tenté de les comparer avec ce qui se faisait dans d'autres secteurs.
Par exemple, un journalier: On a regardé la fonction dans la
fonction publique, dans les hôpitaux, dans les institutions de
bien-être, commissions scolaires, agences, commissions de formation
professionnelle, CEGEP, SAQ et raffineries de sucre. Les différents
spécialistes en personnel sont venus. Ils ont regardé, à
partir de leur plan de classification, des fonctions et ils ont dit: Dans le
cas des journaliers, oui, si un journalier fait sensiblement la même
chose qu'à la fonction publique; le secteur hospitalier a dit aussi la
même chose. Au bout de la ligne, il y a un tableau représentant
les différentes fonctions qu'on retrouve dans le secteur public plus
d'une fois; elles ont été appariées. Le journalier, dans
le secteur public, est sur la même ligne, même s'il porte un titre
différent, d'un secteur à l'autre. La première
démarche a été d'essayer de placer sur une même
ligne des contenus de tranches identiques. On peut fort bien avoir des titres
de fonctions identiques et des contenus différents. Par exemple, un
journalier n'a pas tout à fait le même nom dans tous le secteur
public.
Dans la fonction publique, cela ne va pas trop mal pour un journalier.
Dans les hôpitaux, on appelle cela journalier et/ou préposé
au terrain. Donc, la première démarche, essayer de placer sur une
même ligne des fonctions qui se ressemblent. Cela a produit des tableaux
très complexes où on retrouve au-delà de 150 titres
d'emplois regroupant à peu près 600 fonctions d'un secteur
à l'autre.
Première démarche: placer sur une même ligne des
fonctions qui se ressemblent ou qui sont analogues.
La deuxième démarche a consisté à
définir des salaires pour ce personnel, à savoir si nous allons
donner un salaire identique ou semblable d'un secteur à l'autre. La
complication vient du fait que, d'un secteur à l'autre, les plans de
classification ne sont pas identiques.
Par exemple, dans la fonction publique, vous avez un plan qui est tout
ce qui a de plus sophistiqué, qui correspond aux multiples fonctions
d'un gouvernement. Elles sont pas mal plus complexes que les fonctions d'une
commission scolaire. Je ne veux pas dire que ce n'est pas plus compliqué
dans une commission scolaire. C'est la même chose dans le secteur
hospitalier.
Dans le secteur des commissions scolaires et du soutien, un plan de
classification a été fait qui est plus simple d'application parce
que les fonctions d'une commission scolaire, c'est pas mal plus
standardisé. On n'a pas, comme au gouvernement, à émettre
des permis de chasse ou des plaques d'immatriculation ou à
prélever des impôts. C'est la prestation d'enseignement. Du
côté des fonctions de bureau proprement dites, c'est pas mal plus
simple. C'est standard. Au gouvernement, les fonctions sont multiples. Il y a
ce qu'on appelle des plans de carrière.
Donc, une fois qu'on a appareillé les emplois, il s'agit de
procurer des salaires identiques chaque fois que les contenus sont les
mêmes ou des salaires semblables lorsque ce n'est pas tout à fait
pareil. Les motifs de cette règle, M. L'Allier les a
présentés hier. Fondamentalement, c'est une règle
d'équité pour les salariés de savoir qu'en pratiquant leur
métier ou leur profession dans une commission scolaire ou au
gouvernement ils ont l'impression, en même temps que l'assurance qu'ils
ne sont pas maltraités par rapport à d'autres.
Il y a aussi des motifs d'ordre économique ou financier. C'est
qu'il n'est pas question d'entreprendre ou d'organiser une surenchère
à même les deniers publics. Je pense que cela a été
assez bien expliqué depuis le début des négociations.
Du côté du personnel ouvrier, cet objectif de rendre
identiques des salaires a été, à toutes fins pratiques,
réalisé au cours des négociations. C'est-à-dire
qu'un journalier qu'il travaille au gouvernement, dans un hôpital
ou dans une commission scolaire est payé exactement de la
même manière. C'est la même chose pour une aide domestique.
C'est la même chose pour un électricien. Ici, on a fait
préparer une série de tableaux qui vous montrent que dans le cas
des ouvriers, dans le cas du personnel de bureau et dans le cas des fonctions
de type professionnel, cette règle a été suivie. Chaque
fois que c'était possible, chaque fois que les contenus de tâches
étaient identiques, les niveaux de rémunération ont
été fixés exactement au même salaire. C'est le cas
des enseignants aussi. Vous avez une échelle pour les enseignants qui
est exactement la même, qu'il s'agisse de l'enseignement
élémentaire, de l'enseignement secondaire ou de l'enseignement
collégial.
Chez les ouvriers, chez les enseignants, chez les professionnels, pour
les niveaux d'exécution et dans les emplois de bureau, chaque fois que
c'était possible, les rémunérations sont identiques.
Dans les autres cas, lorsque ce n'est pas identique c'est surtout
vrai du côté des employés de bureau et d'un certain nombre
de professionnels, j'aurai l'occasion d'aller plus loin dans les explications
dans leurs cas tantôt il y a toujours une motivation ou un motif
en arrière de ça. Le motif qu'on retrouve le plus
fréquemment, ce sont les exigences d'entrée qui sont
différentes. A certains endroits, on va exiger une onzième
année et trois ans d'expérience. A un autre endroit, on va
demander tout simplement une onzième année. Donc, il y a des
variations dans les exigences d'emploi, selon les besoins des commissions
scolaires ou les besoins du gouvernement. Il est entendu que dans un plan comme
celui que vous avez ici, celui de la fonction publique, c'est très
raffiné: onze ans de scolarité, cinq ans d'expérience.
Dans les commissions scolaires, avec le nouveau plan, c'est aussi
raffiné mais les exigences peuvent varier, selon les besoins. A la
Société des alcools, cela varie aussi. De telle sorte que,
lorsque ce n'est pas pareil, il y a des raisons. Les principales, sont les
exigences d'entrée.
La seconde, c'est le fait qu'à la fonction publique, en raison de
la multiplication des tâches de bureau, on a des plans, qui sont
plutôt du type carrière, qui permettent des affectations plus
souples et plus diversifées alors que dans les commissions scolaires et
les hôpitaux, les assimilations sont assez directes: commis à la
paie, commis au poinçon.
A la fonction publique, si ce n'était pas le cas, il y aurait un
plan de classification de 900 emplois, alors que le plan comporte 76 corps
d'emplois.
Un problème majeur se pose du côté des
professionnels, bien que cela n'ait aucun lien avec les $100 par semaine, vous
pouvez bien vous l'imaginer. Certains d'entre vous sont familiers avec les
plans de classification: il y a trois classes de professionnels. Il y a la
classe 3 et la classe 2 où les professionnels exercent des fonctions au
niveau de l'exécution. La classe 1, ici, rémunère son
homme dans l'ordre de $12,000 à $16,000. Il est possible dans la
fonction publique, d'y adhérer par voie de concours.
M. GAGNON: Avez-vous des copies de cela?
M. ANGERS: Je crois qu'il y a eu au début distribution d'un
feuillet à chacun des membres de la commission. Il a, d'ailleurs,
été distribué à tous les syndiqués.
Tenez.
M. GAGNON: Vous êtes charmant.
M. ANGERS: Donc, la classe 1 des professionnels, au gouvernement, est
admissible seulement sur compétence vraiment spéciale; elle
comprend les fabricants de normes ou les grands experts soit en impôts ou
en différentes disciplines.
Dans le secteur parapublic, vous vous imaginez bien que les fonctions de
normalisation, la fabrication de normes, sont quand même moins
répandues. On applique des normes dans les commissions scolaires, dans
les hôpitaux. Au gouvernement, il s'en fabrique. Alors, dans ce secteur,
les syndicats ont demandé que la classe 1 soit effectivement
octroyée telle quelle. Le gouvernement et les organismes partenaires s'y
sont opposé en prétendant, à juste titre, qu'en termes de
carrière il est possible, pour un individu qui exerce sa fonction de
professionnel dans une commission scolaire ou dans un hôpital, en raison
du supplément on offre un supplément à un type qui
est chef d'équipe; son salaire de professionnel, plus tant d'argent
d'atteindre ces niveaux de rémunération.
D'autre part, les cadres intermédiaires, dans un hôpital,
dans le fond, sont du niveau de la classe 1 au gouvernement. Je vais donner un
exemple: au gouvernement, on a 600 agents de gestion financière, une
grosse concentration d'agents. Dans le milieu hospitalier, il y en a 200. Il y
en a à peu près un ou deux par hôpital. Au gouvernement, il
y en a 600. Vous voyez que les normes d'évaluation de ces gens sont
certainement différentes. Dans une boîte de 25 professionnels, il
est entendu que les normes d'évaluation réciproques sont
complètement différentes de celles d'une boîte où on
a deux professionnels. Les possibilités de promotion sont pas mal plus
grandes dans le milieu hospitalier et dans le milieu scolaire. Statistiquement,
il nous a été donné de vérifier c'est cela
qu'il a été intéressant de constater que, dans les
milieux hospitalier et scolaire, même si la classe 1 des professionnels,
comme telle, n'existe pas, en raison des structures administratives
différentes, on retrouve le même nombre de personnes à ce
niveau. Il y a 30 p.c. de
professionnels, au gouvernement, qui sont au niveau de la classe 1. Dans
le milieu hospitalier, on a découvert, à la suite de recherches
statistiques, qu'il y a 30 p.c. de professionnels qui, effectivement, se
situent soit comme chefs d'équipe ou directeurs de service,
c'est-à-dire exactement au même niveau que la classe 1 du
gouvernement.
En bref, ce principe d'égalisation ou d'identité de
traitements a fait l'objet de discussions très serrées. Le
gouvernement et ses partenaires, à la suite des discussions, ont
consenti à arrondir des coins ou à appliquer d'une façon
moins stricte la politique en question. Pour le personnel ouvrier, pour les
enseignants, c'était déjà le cas et, pour nombre d'emplois
de techniciens et de bureau, les rémunérations sont quasi
identiques. Dans les autres cas, tel que je l'ai exprimé, lorsque ce
n'est pas identique, il y a des motifs qui relèvent plutôt des
exigences à l'entrée, de telle sorte que les maximums de
carrière sont, à toutes fins pratiques, les mêmes.
Je vous réfère au tableau que vous avez ici. Vous allez
voir qu'au niveau professionnel, les classes 3 et 2 sont exactement les
mêmes partout; au niveau des employés de bureau, les maximums de
carrière pour le personnel sont les mêmes.
M. BOIVIN : Est-ce que je pourrais poser une question?
Dans la définition et la classification des tâches,
qu'est-ce que le syndicat a à dire? C'est ça qu'il
m'intéresse de savoir. Dans ce que vous venez de nous décrire, la
classification et la définition des tâches, quel a
été le rôle du syndicat?
M. ANGERS: Si on prend chacun des secteurs, au gouvernement, la
Commission de la fonction publique a juridiction exclusive en vertu de la Loi
de la fonction publique. Il y a eu des consultations avec le syndicat pour
élaborer ce nouveau plan de classification.
Du côté hospitalier, le plan de classification est depuis
plusieurs années inclus dans la convention collective, de telle sorte
que des aménagements se font périodiquement par voie de
négociation collective.
Dans le secteur du soutien scolaire, c'est-à-dire le nouveau
grand groupe qui comporte 20,000 employés qui négocient pour la
première fois à l'échelle du Québec, un nouveau
plan soutien scolaire, ce sont les concierges et les employés de
bureau et aussi le personnel professionnel des commissions scolaires de
classification a été élaboré au ministère de
la Fonction publique, avec la direction générale de la
planification du ministère de l'Education, qui constitue en quelque
sorte la base des emplois qui existent dans le secteur scolaire, et à
partir duquel des tarifs ont été ajustés, ont
été mis là-dessus.
Dans ce cas-là, ce n'est pas par voie de négociation.
C'est une politique, en quelque sorte, du gouvernement et de ses partenaires de
prendre une initiative dans un premier temps parce que c'est la
première convention collective de mettre de l'ordre dans un
secteur où il y a 300 conventions collectives avec des descriptions
abracadabrantes à travers la province de Québec.
Donc, un effort qui a duré plus d'un an. Les experts des
commissions scolaires, de la Fonction publique et de l'Education ont
préparé un plan de classification qui a été remis
aux organisations syndicales en même temps que les propositions
salariales.
M. BOIVIN: Cela a été accepté par le syndicat?
M. ANGERS: II n'y a pas eu de réaction, ni bonne ni mauvaise,
comme telle, c'est-à-dire qu'il est entendu qu'au niveau de la table
sectorielle il y a eu une remise du plan de classification et je présume
que les syndicats ont été invités à faire part de
leurs commentaires. Mais ce sont 300 conventions collectives qui existaient,
une situation très variée d'un endroit à l'autre. Et ici
c'est un effort de standardisation dans un premier temps, un plan de
classification élaboré au niveau du gouvernement et de ses
partenaires remis aux organisations syndicales et aux commissions scolaires. Et
s'il y avait des commentaires à faire, il est toujours possible de les
faire, de dire que, dans tel cas, on a l'impression que ça ne correspond
pas à la réalité. Le gouvernement et les commissions
scolaires ne sont pas réfractaires à l'idée
d'étudier des situations qui peuvent ne pas correspondre à la
réalité.
De telle sorte que les plans de classification comme tels n'ont pas
constitué un problème majeur, c'est plutôt d'essayer de
rendre identiques les rémunérations dans tout le système,
ce que nous avons tenté de faire. Nous référant au
gouvernement et aux partenaires, nous avons tenté, chaque fois que
possible, de donner l'identité de taux. Et sur la première
feuille que vous avez, vous voyez que c'est partout pareil dans le cas des
ouvriers, presque pareil dans le cas des employés de bureau, les
différences s'expliquant dans chacun des cas.
Et du côté des professionnels, exactement la même
chose pour les niveaux d'exécution. Aucune variation en termes
d'échelles de salaire. Le minimum et le maximum sont les
mêmes.
Et lorsqu'il y a des variations entre les employés de bureau et
les techniciens, il y a toujours un motif qui n'est pas arbitraire mais qui est
toujours justifié sur le plan technique. Autant que faire se peut, il y
a des justifications qui peuvent être présentées, qui ont
été présentées et qui auraient été
présentées si on avait pu poursuivre ça plus loin.
M. GAGNON: Disons qu'au niveau des demandes syndicales ou salariales,
appelons ça comme on voudra, d'abord il y a deux aspects:
l'aspect théorique et l'aspect pratique. L'aspect
théorique, c'est le paiement de $100 par semaine pour tout travailleur,
comme revenu minimum.
Théoriquement, je ne crois pas qu'on puisse s'opposer à
ça. Evidemment, celui qui parle est un père de dix enfants. Nous
sommes députés, nous avons un salaire de $15,000 et tous les
députés sont sur la même base. Est-ce qu'à ce
moment-là on doit faire une distinction entre un célibataire ou
une personne mariée? A tout événement, aucune personne ne
peut penser, dans le contexte actuel, avoir un salaire théoriquement
moindre que $100 par semaine. Cent dollars par semaine, actuellement, ça
représente environ un salaire de $20 aux années quarante. Je me
situe, à ce moment-là, très bien dans un contexte
économique.
Or, je ne m'oppose pas, comme je vous le dis, théoriquement,
à un salaire minimum de $100 par semaine, ce qui doit répondre
à un besoin de la population ouvrière. Quoique le ministre des
Affaires sociales ait répondu qu'en ce qui concerne ce minimum le
ministère des Affaires sociales était là pour combler la
différence, lorsqu'il s'agissait de personnes mariées, par des
allocations familiales, moi, je vous dirai sincèrement, comme
père de famille et comme député qui reçoit une
multitude de gens, que lorsque le ministre des Affaires sociales parle de
rajuster cela à même les allocations sociales, ce n'est pas
réaliste. Lorsque ça vient dans la pratique des choses, on
réalise que les normes qui sont établies par le gouvernement
actuel changent tous les mois, comme je l'ai constaté, encore tout
dernièrement, entre autres dans mon comté. A des assistés
sociaux qui devaient parcourir des distances de 50 ou 60 milles, le
ministère des Affaires sociales payait le dîner et, tout
dernièrement, pas plus tard qu'il y a trois semaines, un mois, on a
reçu des instructions du ministère des Affaires sociales de
retrancher cette part de contribution sociale qu'on apportait aux
étudiants des familles déjà citées.
Alors, ça, c'est théorique, mais le travailleur n'est pas
bête et il sait que ça ne se passe pas de cette
façon-là dans la réalité des choses.
Théoriquement, moi personnellement, en tant que député
d'Unité-Québec, je dis: Ce qu'ils demandent, c'est absolument
réaliste face à des obligations familiales. C'est là que
je me demande je vais terminer si le gouvernement ne devrait pas
reconnaître cela et dire: Oui, dans l'aspect théorique, on ne peut
pas penser qu'un travailleur reçoive moins de $100 par semaine.
Dans la réalité des choses, c'est une autre paire de
manches. Je le comprends et je l'admets. Mais, quand on lit le document de la
campagne électorale de nos bons amis d'en face, au cours de
l'année 1970, on s'aperçoit, à un moment donné,
qu'on ne tombe pas sur la même voie lorsqu'il s'agit de la campagne et
lorsqu'il s'agit de l'administration d'un gouvernement. Dans la
réalité des choses, évidemment, ça demande
l'imposition de taxes, c'est-à-dire un déboursé
budgétaire considérable. J'aimerais que le ministre de la
Fonction publique nous dise ce que ça demande et qu'il n'ait pas la
même attitude qu'il a eue devant M. Pepin au débat
télévisé. Lorsque M. Pepin a parlé des obligations
et a dit que les taux d'intérêt étaient fixés,
c'était facile. Il s'agissait de dire: Ce n'est pas nous qui les fixons;
c'est le preneur qui les fixe. Lorsque M. Pepin a dit: Voulez-vous qu'on fasse
un référendum sur les $100 par semaine, j'ai été
surpris de ne pas entendre dire par le ministre de la Fonction publique:
Voulez-vous également qu'on fasse un référendum pour
savoir si la population est pour le droit de grève dans la fonction
publique?
A ce moment-là, disons que, face à la population du
Québec, le ministre de la Fonction publique n'a pas eu l'avantage. Mais
j'aimerais connaître de la part du ministre de la Fonction publique quel
serait le déboursé supplémentaire que la province serait
appelée à payer à même son budget. Le ministre des
Finances, qui est devant moi, est capable de donner des chiffres, étant
un économiste brillant. Quels seraient les déboursés que
ça demanderait à la province, si on acceptait un salaire minimum
de $100 par semaine et qu'est-ce que ça demanderait comme imposition de
taxes?
Alors, je laisse la parole au ministre de la Fonction publique.
M. L'ALLIER: Le député de Gaspé-Nord est
très gentil de me laisser la parole. D'abord, ce qu'il vient de nous
dire, en fait, est un peu contradictoire avec ce qu'a dit son chef, mais
ça, c'est sans importance.
M.GAGNON: J'ai dit théoriquement, là; il ne faut pas que
le ministre se trompe. Le chef ne s'est jamais prononcé contre les
$100.
M. L'ALLIER: Ni pour.
M. GAGNON: M. Lévesque, oui. Théoriquement, je suis
pour.
M. L'ALLIER: Théoriquement vous êtes pour tout,
effectivement.
M. GAGNON: M. Lévesque.
M. L'ALLIER: Je voudrais, tout simplement, vous poser une question pour
être capable de répondre à la question.
M. BOIVIN: C'est la même chose.
M. L'ALLIER: Si le député de Dubuc me permettait de
parler; je vais le laisser parler, tout à l'heure, sur ce
point-là. Est-ce que le député de Gaspé-Nord est
d'accord sur un salaire de $100 par semaine uniquement pour un petit groupe
là, dans la fonction publique ou si c'est pour l'ensemble des
travailleurs du Québec?
M. GAGNON: Je dis théoriquement.
M. L'ALLIER: Théoriquement.
M. GAGNON: Comme salaire minimum.
M. L'ALLIER: Pour l'ensemble des travailleurs?
M. GAGNON: Pour l'ensemble des travailleurs.
M. L'ALLIER: C'est excellent.
M. GAGNON: Je parle de l'aspect théorique.
M. L'ALLIER: C'est effectivement un nouveau contrat social qu'il
faudrait inscrire à son programme politique pour la prochaine
campagne.
M. GAGNON: C'est possible, on y verra.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît ! Laissons parler le
ministre de la Fonction publique et, après, le député de
Frontenac.
M. L'ALLIER: Je pense que, si on offrait à la population un
salaire minimum de $150 ou de $200, on aurait encore plus de monde qui voterait
pour. Plus ce serait haut comme salaire minimum de base pour l'ensemble des
travailleurs et des citoyens du Québec, mieux ce serait.
Théoriquement, je ne peux pas être plus d'accord avec lui. Plus on
trouvera de moyens faisant en sorte que l'ensemble des travailleurs du
Québec aient les revenus minimums les plus élevés possible
mais tout le monde je ne peux pas être contre cela. Je l'ai
dit, d'ailleurs, à M. Pepin.
Comme objectif social, faites-en un élément de votre
politique au moment de la prochaine campagne. Nous en ferons peut-être un
élément de notre campagne et quelqu'un d'autre en fera
peut-être un élément de sa campagne, à ce
moment-là. C'est une décision politique et il faut pouvoir le
réaliser, bien sûr. Il faudra ensuite le respecter.
M. MASSE (Montcalm): II y a des promesses comme cela, avec des chiffres
mirobolants, et on les oublie en cours de route.
M. BOIVIN: II ne faut pas oublier que ce sont deux choses, l'objectif
social et la réalité.
M. L'ALLIER: Ce sont deux choses différentes, effectivement. H
faut distinguer entre les deux. Je l'ai fait et je ne voudrais pas revenir
là-dessus. Je crois que nous nous éloignons actuellement du
débat. Combien cela coûterait-il? Plusieurs centaines de millions,
c'est évident. Qu'est-ce que cela donnerait? C'est une autre question.
On parle ici non pas de l'ensemble des travailleurs du Québec qui
gagnent moins de $100 par semaine mais de ceux qui sont dans les secteurs
public et parapublic.
Peut-on, à partir des fonds publics, des taxes de ceux qui
gagnent moins de $100 par semaine, payer à ceux qui font des fonctions
identiques dans la fonction publique des salaires nettement au-dessus de ce que
reçoivent ceux qui paient des taxes? C'est la question fondamentale. Je
crois que, pour une meilleure compréhension du sujet, il faudrait
permettre au directeur de la rémunération de continuer sur ce
point son exposé quitte je suis tout à fait d'accord avec
le député de Gaspé-Nord à ce que nous
reprenions ensuite le débat politique sur cette question.
Doit-on donner, tendre ou viser à $85, $90, $100 ou $125 par
semaine pour l'ensemble des travailleurs? Est-ce que cela doit se faire au
niveau salarial ou au niveau de la politique sociale? J'aimerais entendre
l'opinion du député de Gaspé-Nord parlant au nom de son
parti, bien sûr, comme membre de la commission. Je pourrai aussi donner
l'opinion de mon parti sur cette question. Je suis sûr que les autres
partis pourront aussi donner une opinion là-dessus. Pour l'instant, je
crois que l'on devrait revenir à l'exposé du directeur de la
rémunération, qui est un exposé technique mais qui
explique la base de la politique que nous avons prise, quitte, ensuite,
à la discuter, cette politique, à la plaider. Vous pourrez
être pour ou contre, n'avoir pas d'opinion. Quant à nous, c'est
l'option que nous avons prise et c'est celle sur laquelle nous serons
jugés à l'élection.
M. LE PRESIDENT: M. Angers.
M. ANGERS: Merci. Le deuxième élément de la
politique de rémunération du gouvernement en ce qui a trait au
salaire et qui a été, lui aussi, longuement débattu
concerne ce qu'il est convenu d'appeler la moyenne généralement
observée au Québec. La première assise du niveau de
rémunération des employés du secteur public, selon cette
même politique, est que les rémunérations se situeront au
niveau de la moyenne généralement observée.
M. L'Allier vous a présenté les motifs sous-jacents
à ce principe, ce n'est pas mon rôle de les reprendre. Vous vous
imaginez bien que sur le plan technique la définition de la moyenne
observée a posé certains problèmes. C'est une
opération assez complexe. Ce que je puis vous dire au point de
départ, c'est qu'il s'agit d'une bonne moyenne et non pas d'une moyenne
qui tient compte de ce qu'on appelle parfois des "sweatshops" ou des
entreprises de petite dimension qui ne traitent pas nécessairement bien
leur personnel. Il s'agit d'une bonne moyenne et en même temps d'une
moyenne qui couvre substantiellement la région métropolitaine de
Montréal.
Sur le plan technique, comment s'y est-on pris pour réaliser
l'objectif de la politique gouvernementale, c'est-à-dire de rechercher
la
moyenne observée? On y est allé de la façon
suivante: Il existe, d'une part, des relevés extérieurs faits par
des entreprises qui ont acquis une certaine réputation. Ici, je voudrais
mentionner, par exemple, le Bureau de recherche sur les traitements du
gouvernement fédéral, le ministère du Travail
fédéral, une entreprise québécoise au titre
anglais, le Quebec Industrial Relations Institute, et la compagnie de
téléphone Bell, qui fait aussi des relevés. D'autres
entreprises ou d'autres organisations font des relevés mais les
principales sont celles-là.
La Direction générale de la rémunération a
aussi entrepris des relevés de salaire.
Nous sommes allés voir dans des entreprises comment on payait les
gens, comment on organisait les échelles de salaires, comment on
harmonisait aussi les traitements.
Nous nous sommes limités, pour définir le niveau de
rémunération, à des relevés extérieurs pour
ne pas être accusés je ne dirais pas de partisanerie mais de
préjugés, de telle sorte que nos relevés ont surtout servi
à l'organisation des échelles de salaire, par exemple
définir le quantum des augmentations statutaires, le nombre
d'échelons, une série d'éléments de cette
nature.
Nous avons et c'est la première fois que ç'a
été fait tenté de raccourcir autant que possible le
délai entre l'année du nouveau salaire et le relevé de
salaire, de telle sorte que nous avons cherché à couvrir
l'année précédant, en quelque sorte, immédiatement
le terme des conventions collectives. On peut dire que ç'a
été un effort systématique entrepris pour la
première fois.
Parmi les entreprises qui ont pu être relevées dans ces
opérations, je voudrais quand même mentionner, pour votre
information vous avez déjà, je crois, dans le dossier qui
vous a été remis par M. L'Allier le document en question
une liste non exhaustive, ça va de soi, d'entreprises qui ont pu se
retrouver là-dedans. Il y a Air Canada, Bell Canada, CIL, Canadian
Marconi, Canadian Pacific Railways, Ville de Montréal, Northern
Electric, United Aircraft, Banque de Montréal, Canadair, CIP, CNR,
Dupont du Canada, Imperial Tobacco, Montreal Trust, Prudential Insurance
Company et certaines autres. Ce ne sont pas des petites boites, il y a beaucoup
de grosses entreprises dans les relevés en question et ces entreprises
exercent une influence prépondérante, vous vous imaginez bien,
dans les différents relevés de salaires.
Comme, dans le secteur public, il y a entre 600 et 800 emplois
différents, qui, lorsque regroupés, peuvent totaliser 200
à 300 emplois substantiellement différents, vous comprenez qu'il
est à peu près impossible de recenser tous et chacun de ces
emplois. Alors, nous nous y sommes pris par le biais de la méthode des
tâches repères, des emplois repères, c'est-à-dire en
identifiant, dans le secteur public, des emplois qui sont de commune
renommée, que l'on trouve à peu près partout et qui sont
assez standard et en même temps, facilement identifiables. Pour ce faire,
nous avons choisi onze emplois complètement différents du
côté des bureaux, huit chez les techniciens, quatorze chez les
professionnels et dix-huit chez le personnel ouvrier, ce qui totalise 51
emplois mais ce qui représente tout de même la majorité du
personnel, c'est-à-dire que de ces 51 emplois, les 14 chez les
professionnels regroupent 59 p.c. du personnel; les 8 chez les techniciens, 43
p.c; chez les employés de bureau, les 11 emplois regroupent 73 p.c. du
personnel; et les 18 chez les ouvriers représentent 46 p.c. du
personnel. De telle sorte que les emplois repères qui ont pu être
identifiés sur le marché à partir des relevés
constituent la base de l'application de la moyenne observée.
Donc, la majorité du personnel est couverte automatiquement par
la moyenne observée. Il est entendu que nous n'avons pas appliqué
bêtement la moyenne qu'on a pu constater sur le marché du travail.
Par exemple, nous nous sommes donné une règle qu'on a
qualifiée de seuil de tolérance, c'est-à-dire qu'avant
d'appliquer un gel de salaire, nous nous sommes dit: Nous ne le ferons pas tant
que le taux observé ne sera pas de 5 p.c. supérieur à
celui qui existe; et, inversement, pour ce qui est du rattrapage on a dit: On
va rattraper jusqu'à concurrence de moins 3 p.c. La balance étant
toujours favorable aux emplois qui se situent au-dessus de la moyenne, de telle
sorte que ça n'a pas été une application bête,
mathématique, technocratique de la moyenne observée.
Il y a eu un seuil de tolérance qui a permis, tout compte fait,
de ne pas remettre tout en question dans les plans de
rémunération de la fonction publique. La majorité des
emplois ont été couverts par cela. Pour ce qui est des autres
emplois, on a procédé d'une façon différente. Il y
a des fonctions qui ne se retrouvent qu'au gouvernement, comme les agents de la
paix, par exemple, pour prendre un groupe il n'y a que le gouvernement
qui embauche des types semblables ou les enseignants ou d'autres
fonctions, comme des fonctions très spécialisées, des
mécaniciens de machines fixes, telle classe, certains métiers
très spécialisés. Dans ces cas on a procédé
d'une façon indirecte.
Dans le cas des enseignants, nous y sommes allés par la voie des
emplois alternatifs. C'est-à-dire que le gouvernement et les commissions
scolaires ont décidé de continuer les politiques qui
étaient en vigueur depuis 1966, principalement en 1965-1966 et de ne pas
utiliser la capacité du gouvernement sur le marché du travail
pour ambitionner, pour utiliser son pouvoir de recrutement particulier. On
s'est dit: La seule façon de procéder, c'est de trouver ou de
définir des fonctions, des emplois alternatifs. C'est-à-dire
qu'un enseignant qui a 14 ans de scolarité, cela ressemble
dangereusement, en termes d'emploi, à un technicien en sciences humaines
ou un technicien en génie, de la même façon qu'un
enseignant qui aurait une
formation universitaire ressemble en quelque sorte, ou du moins
espère avoir d'une certaine manière un salaire de
professionnel.
Sans qu'il y ait d'identité mathématique, simplement pour
votre édification, on pourrait mentionner que le 'salaire d'un
enseignant avec 14 ans de scolarité, varie de $6,326 à $10,336.
Au niveau des techniciens en sciences humaines constaté sur le
marché du travail, on arrive à $6,340 et $10,327. Donc, il y a
une analogie assez directe par voie d'inférence.
Du côté des professionnels, c'est un peu la même
chose. Le minimum à l'entrée et le maximum pour un type qui a 19
ans de scolarité correspondent substantiellement aux salaires qui sont
offerts aux professionnels. Dans aucun cas un enseignant ne reçoit moins
qu'un agent de bureau ou un employé de secrétariat parce que les
enseignants ont un plan de rémunération assez particulier qui est
fondé sur la scolarité et l'expérience. Ce qui n'est pas
le cas pour les fonctions que l'on retrouve sur le marché du travail
où la scolarité n'est pas l'unique facteur
déterminant.
Compte tenu du plan particulier de classification des enseignants, qui
est fonction de la scolarité et de l'expérience, le gouvernement
et ses partenaires ont tenté, par le biais des emplois alternatifs, de
définir des perspectives de carrières qui, tout compte fait, se
comparent avantageusement avec des fonctions qu'on a pu observer sur le
marché du travail comme des techniciens, des professionnels ou des
semi-professionnels.
Il faut aussi mentionner qu'un enseignant a toujours la
possibilité, année après année, de poursuivre des
études et d'atteindre ainsi des niveaux de rémunération
supérieurs. Je suis convaincu que la plupart d'entre vous sont au
courant des échelles de salaires des enseignants. Chez les enseignants
les qualifications varient de douze à vingt ans. C'est-à-dire que
cela correspond à un secondaire plus une année et ici, c'est un
niveau de doctorat. Vous avez un peu de tout. La rémunération ne
peut pas être identique. Donc, tenant compte des plans universels ou
quasi universels fondés sur la qualification et l'expérience, on
a tenté de continuer l'effort qui est en cours depuis plusieurs
années de rémunérer les gens selon les emplois alternatifs
possibles et de ne pas utiliser le pouvoir d'embauche. Parce que le
gouvernement et les commissions scolaires ont un pouvoir: ils sont les seuls
employeurs, à toutes fins pratiques, des enseignants. Si cela
fonctionnait sur la base stricte du marché, il n'y a pas de doute que
les salaires des enseignants ne seraient pas au niveau où ils sont
présentement.
Dans le cas des enseignants et des infirmières, c'est la logique
qui a pu être suivie.
Dans le cas des agents de la paix, cela ne correspond à rien en
termes d'emplois alternatifs. Ce sont des gens qui pourraient être
journaliers mais qui ne sont pas des journaliers parce qu'ils ont des
responsabilités pas mal plus fortes. Ce ne sont pas des techniciens.
Dans ces cas, pour éviter l'arbitraire parce que, tout au long
des règles de la politique de salaire, l'arbitraire a été
mis, autant que possible, de côté on a essayé de
définir des règles mathématiques statistiques de
définition de place des différents groupes. Pour les agents de la
paix, ce qui a été fait, cela a été de prendre un
surveillant d'institution au Québec, de comparer le statut de ce
personnage à l'Ontario, par exemple, ou au fédéral, par
rapport à un ensemble d'emploi. On a dit: Un surveillant d'institution
au Québec ou en Ontario, comment évaluent-ils cela par rapport
à un infirmier, un ingénieur, un employé de
secrétariat? Au fédéral, de la même manière.
Comment font-ils ça? L'interrelation ou le statut
socio-économique que peut reconnaître l'Ontario ou le
fédéral en ce domaine, mais pas au niveau de la
rémunération, simplement la place de l'emploi, on va l'appliquer
ici. C'est ce qui a fait qu'en vertu de la politique de
rémunération qui accepte, en quelque sorte, les interrelations
observées ailleurs pour les emplois où il n'y a pas de
marché les agents de la paix ont vu leur statut socio-économique
amélioré, encore une fois, de 2 p.c. à 10 p.c, en termes
de rattrapage, selon cette méthode.
Du côté du personnel ouvrier, les emplois qu'on ne
retrouvait pas sur le marché, la même approche s'est faite.
C'est-à-dire qu'on a comparé aux entreprises analogues au
fédéral, en Ontario, aux entreprises d'importance au
Québec, à la ville de Montréal. On s'est demandé
comment ils situaient cet emploi par rapport à un journalier.
Mathématiquement, on a accepté les interrelations, ce qui a fait
que des gens en bon nombre ont rattrapé.
Donc, la moyenne observée, c'est la base. Elle a
été établie statistiquement, pas d'une façon
bête. Je ne veux pas vendre notre matériel, sauf qu'il n'a pas
été fait d'une façon bête. Cela couvre les
entreprises qui ne sont pas de petites dimensions, des entreprises qui,
parfois, abusent de leur personnel, je présume. C'est ce qu'on dit
souvent. Cela couvre de grandes entreprises. C'est concentré dans la
région de Montréal. Et ici je pense que c'est important que vous
réalisiez que la moyenne généralement observée au
Québec a un penchant montréalais assez marqué.
Du côté des professionnels, par exemple, les relevés
utilisés couvrent la région métropolitaine dans l'ordre de
79 p.c. à 95 p.c, suivant les occupations.
Du côté des techniciens, la région
métropolitaine, parmi les relevés utilisés, est couverte
à 78 p.c. Ce sont tous des renseignements qui ont été
fournis aux organisations syndicales.
Du côté des ' fonctionnaires, suivant des relevés
utilisés quand je parle de fonctionnaires, ce sont les emplois de
bureau et de soutien administratif la région de Montréal
couvre 97.5 p.c. des relevés du PRB, c'est-à-dire le Bureau de
recherche sur les traitements. Le
ministère fédéral du Travail, 75 p.c. QIRI, 100
p.c. Bell Canada, 100 p.c.
Du côté des ouvriers, le ministère du Travail couvre
la région métropolitaine à raison de 75 p.c. et le Bureau
de recherche sur les traitements, à raison de 49 p.c. Donc, une moyenne
québécoise, forte concentration montréalaise qui
correspond, en quelque sorte, à la répartition industrielle. Cela
a eu pour effet pratique de procurer du rattrapage de l'ordre de 1.3 p.c.
à l'ensemble des salariés. Il est entendu qu'il y en a qui n'ont
rien eu en termes de rattrapage. Les enseignants n'ont rien eu au niveau du
rattrapage, ni les professionnels, ni les techniciens. Les salaires
versés ici se situent dans la moyenne et dans la bonne moyenne
précédemment décrite.
Le personnel ouvrier, les journaliers ont rattrapé
substantiellement: $2.39...
M. BOIVIN: Est-ce que ce travail a été contesté par
les syndicats?
M. ANGERS: Le débat a porté sur le plan qui n'est pas le
mien, le plan politique.
M. BOIVIN: Global.
M. ANGERS: On a dit: on n'accepte pas la moyenne observée.
M. L'ALLIER: C'est ça.
M. ANGERS: Le journalier a rattrapé; de $2.29 qu'il avait, il est
passé à $2.46, avant même que l'on applique le rythme de
croisière.
L'électricien, c'était la même chose. Nous avons
fait un effort spécial ici et c'est extrêmement important. C'est
qu'avant même que les organisations syndicales manifestent leurs
préférences pour les salariés à moindre revenu le
gouvernement a reconnu qu'il serait très bien de ne pas pénaliser
le personnel à faible revenu, même si on constate que, sur le
marché du travail, les traitements sont inférieurs à ceux
qui étaient offerts par nous.
Ainsi, par exemple, l'aide domestique, c'est-à-dire, dans le
milieu hospitalier c'est surtout là qu'on la rencontre la
demoiselle ou la dame habituellement, ce sont des femmes qui
veille à la propreté ou encore qui fournit son aide au personnel
des cuisines pour distribuer les rafrafchissements, etc., les constatations,
sur le marché, nous indiquaient $1.82. Le gouvernement payait
déjà, pour ce même personnel, $1.90, $2.02, $2.14, soit
trois taux de salaire pour cette fonction. Le gouvernement, avant même
les négociations et avant même les discussions avec les
organisations syndicales, a dit: II n'est pas question de baisser les taux de
ce personnel. On va y mettre un rythme d'accroissement, de telle sorte qu'avant
même les demandes syndicales, au niveau des présentations
d'offres, l'automne dernier, le gouvernement avait répondu à
cette demande en ayant une attention particulière pour les gens à
plus faibles salaires, c'est-à-dire les préposés à
l'entretien ménager dans le système.
C'est la base. Une fois qu'on a établi la moyenne
observée, au point de départ, il s'agit de définir de
quelle manière, au cours des ententes, les rythmes de croisière
ou d'augmentation seront définis. Or, le gouvernement en est
arrivé à la conclusion que l'ensemble des
rémunérations devrait suivre la tendance, d'une part, de l'indice
des prix à la consommation et, d'autre part, que les augmentations de
salaires devraient avoir pour effet de permettre aux salariés de
participer à l'amélioration de la richesse collective, dans la
mesure de leur participation.
Pour ce faire, il s'est agi d'utiliser un indice de productivité.
Donc, prix et productivité comme rythmes d'accroissement. Encore
là, pour éviter de tomber dans l'arbitraire et dans les
soubresauts saisonniers, le gouvernement, de concert avec ses partenaires, a
jugé sage les statistiques le confirmeront par la suite, vous le
verrez d'utiliser plutôt des tendances, c'est-à-dire
d'utiliser la dernière décennie comme base des rythmes
d'accroissement, plutôt que d'utiliser une année par rapport
à l'autre. Si tel avait été le cas, l'an dernier, les
rythmes de croisière auraient été de 3.8 p.c. parce que
l'indice des prix a monté de 1.9 p.c. et la productivité du
reste, c'est-à-dire 1.9 p.c.
Donc, l'indice des prix à la consommation qui a été
utilisé, c'est celui de Montréal. On a dit que ce n'était
pas représentatif du Québec. C'est possible, mais, grâce au
Bureau fédéral de la statistique la région de
Québec est l'objet d'une attention particulière de la part de ce
même organisme depuis quelques années la confirmation est
venue que la tendance de l'indice de Montréal et de Québec
était la même, de telle sorte que l'indice de Montréal,
avec celui de Québec, donne un portrait de la situation qui
prévaut au Québec. Il est entendu que ce n'est pas l'indice du
Canada qui est utilisé et que, dans tous les cas, c'est la même
chose pour le rythme de croisière que pour la moyenne observée.
Ce sont les prix et la productivité au Québec.
L'indice des prix nous confirme qu'un facteur de 2.3 p.c. pourrait
être affecté, pour la partie du pouvoir d'achat, au titre de
l'accroissement des rémunérations. Si on fractionne cela en deux
périodes, pour 1960-1965, on constate que c'était 1.5 p.c; dans
la deuxième tranche de la décennie, à cause de l'Expo
principalement, cet indice est passé à 3.1 p.c.
Pour la période de 1960-1970, il est de 2. 3 p.c. et les
prévisions qui ont été faites expressément pour les
présentes négociations au ministère de l'Industrie et du
Commerce indiquent que, pour les années 1971 à 1974, c'est autour
de 2. 6 p.c.
Statistiquement, l'an dernier, l'indice des prix s'est accru de 1.9 p.c.
On a souvent tendance à dire que ça monte de plus que ça,
les
prix. Souvent, si on dit ça, c'est parce qu'on n'utilise pas la
tendance annuelle. On va prendre le mois de décembre par exemple et on
va dire: Le mois de décembre de telle année par rapport au mois
de décembre de telle année, il s'est accru de 5. p.c. Mais si on
regardait plus loin et qu'on allait voir deux mois plus tard, au mois de
février on constate que c'est 0. 5 p.c, de telle sorte que l'indice
annuel ne monte pas au même rythme que l'indice d'un mois ou d'un autre.
Il y a des variations substantielles.
De la même manière que lorsqu'on regarde l'indice des prix
à la consommation, on ne prend pas le point d'indice: 128. 9 par rapport
à 123. 8. On voit que ça donne un écart de points qui est
différent de celui du pourcentage. Si ça monte de 3 points, le
pourcentage peut correspondre à 2. 7 p.c.
Donc, l'indice des prix, une tendance de façon à
éviter les soubresauts, à pénaliser le salarié ou
encore à faire sauter indûment des rémunérations qui
plus tard devront être ajustées en sens inverse.
Pour ce qui est de la productivité, l'hypothèse de base
est qu'il n'y a aucune raison qui... Il y a toujours possibilité de
trouver des raisons mais le gouvernement est d'avis... Ici, je m'excuse
d'utiliser l'expression "le gouvernement est d'avis", mais en tout cas
l'impression ou la politique qui est là, c'est que le gouvernement
reconnaît que les salariés du secteur public ont une
productivité au moins égale à la productivité de
l'ensemble des travailleurs québécois.
C'est un élément assez important quand on sait que, dans
certains groupes, on a l'impression que les fonctionnaires ou les
employés d'hôpitaux ne travaillent pas tellement fort;
inversement, quand on est dans le milieu on trouve que ça travaille
fort.
M. GAGNON : Est-ce que ce sont des statistiques fédérales
que vous donnez là?
M. ANGERS: Oui, des statistiques officielles, vérifiables et en
fait non-discutables.
Donc, le gouvernement en est venu à la conclusion que son
entreprise de services, la fonction publique, les hôpitaux, les
commissions scolaires, ce n'était pas une entreprise industrielle
à la fine pointe de la technologie, une entreprise chimique, et aussi,
par voie d'inférence, que le gouvernement ce n'est pas une entreprise de
moulin à vent, une entreprise à productivité ralentie.
Donc, les fonctionnaires, les employés d'hôpitaux, le
gouvernement a présumé pour eux qu'ils avaient une
productivité au moins égale à celle que l'on constate dans
l'ensemble du territoire et que leur rémunération devait
être ajustée en conséquence. C'est pourquoi, à
l'aide des mêmes statistiques et des mêmes tendances, il a
été confirmé ou déduit que la productivité
au Québec, en utilisant le produit national brut en dollars constants
étant donné que nous utilisons les prix d'un autre
côté qui tient compte du nombre de personnes
employées, s'était accrue de 2. 5 p.c. pendant la période.
Si on additionne les deux, on arrive à 4. 8 p.c. et si on regarde les
projections qui avaient été faites, on arrive à 4. 6
p.c.
Pour la même période au Canada, on constate que c'est 5
p.c. dans les deux cas. Les offres qui ont été faites aux
salariés du secteur public correspondent à l'addition de l'indice
des prix et de la productivité au Québec, PNB par personne
employée, c'est-à-dire une mesure de l'effort des salariés
du secteur public dans l'accroissement de la richesse collective qui contribue
au même titre que la moyenne de l'ensemble des salariés à
l'enrichissement collectif.
Le produit national brut par personne employée comme indice de
productivité est une mesure standard reconnue internationalement et
facile. Elle est simple, c'est un autre avantage.
En cours de négociation, les propositions ont été
modifiés, d'une part pour tenir compte des salariés à plus
faible revenu, de telle sorte que leur hausse salariale a été
portée à 5. 5 p.c.
Donc à partir de la moyenne observée, on note un
rattrapage de 1.3 p.c. Le produit national brut par personne employée,
combiné avec l'indice des prix, indiquait 4.8 p.c, ce qui fait une
hausse de rémunération automatique, et ce à l'exclusion
des augmentations statutaires, de 6.1 p.c. en gros.
A cela s'ajoutent les augmentations statutaires et aussi le
vieillissement du personnel, la promotion et le changement dans la composition
de la main-d'oeuvre, c'est-à-dire qu'année après
année, il coûte plus cher de faire fonctionner le secteur public,
du seul fait de l'arrivée de nouveaux produits des écoles.
Il y a dix ans, les techniciens en sciences administratives, ça
n'existait pas. Il y a dix ans, il y a cinq ans. Maintenant, nous en engageons.
Du côté des affaires sociales, vous avez connu ça pas mal,
ça n'existait pas des techniciens en affaires sociales. Il y en a
maintenant. Il faut les rémunérer en conséquence. Donc
cela amène un accroissement de la masse salariale. Tout ça
ensemble, c'est-à-dire les statutaires, la promotion et les changements
dans la composition de la main-d'oeuvre, signifie certainement un pourcentage
qui se situe entre 1.2 p.c. et 1.7 p.c qui s'ajoute à tout ça, de
telle sorte que l'accroissement de la masse salariale dans le secteur public
doit tenir compte de ces différents éléments-là,
parce que ce sont des coûts réels observés.
Une autre façon de vérifier la justesse des propositions
gouvernementales, c'est d'utiliser des statistiques qui nous montrent
l'évolution des gains ou du salaire moyen des employés dans la
société, qu'il s'agisse du Canada ou du Québec. On
constate qu'au cours de la décennie 1960-1970 ou encore 1961-1971,
l'ensemble de ces gains du travail, qui tient compte des augmentations
statutaires, se chiffre à environ 6 p.c.
Or, 4.8 p.c. plus 1.2 p.c. donnent nécessairement 6. p.c. Et il y
a d'autres coûts dans le système: changement dans la
main-d'oeuvre, la promotion. Donc, c'est plus que 6 p.c.; ça va
être autour de 6.5 p.c. approximativement. A cela s'ajoute en
première année le rattrapage. Et sur le plan concret parce
que ce sont des chiffres qui peuvent à la longue fatiguer on peut
dire que les salariés du secteur public, à l'exclusion du
rattrapage, vont recevoir, au cours de la période, des augmentations de
16.2 p.c. à 17.8 p.c. au lieu de 15.1 p.c. original, 4.8 p.c. et 4.8
p.c.
A ces augmentations, comme je l'ai mentionné, s'ajoute 1.3 p.c.
versé au chapitre du rattrapage. Seules les personnes qui sont hors
échelle, qui gagnent plus substantiellement que la moyenne
observée, ne reçoivent pas nécessairement ces montants.
Dans leur cas, contrairement encore à ce qui a pu être dit, il y a
un minimum d'augmentation qui est assuré à tout le monde, minimum
qui se retrouve depuis quelque temps dans les conventions. Il est fixé
à 3 p.c. Donc, personne ne diminue de salaire, tous ont au moins un
minimum d'augmentation sous forme forfaitaire de l'ordre de 3 p.c.
Si on regarde maintenant ce que ça donne en pratique, pour une
dactylo, ça lui donne un traitement horaire variant de $2.26 à
$3.18, c'est-à-dire pour une semaine de 32 1/2 heures, de $73 à
$103 par semaine.
D est entendu que, pour une semaine de 35 heures, le tarif est
corrigé en conséquence; étant donné que la base
horaire sert, le salaire devient de $79 à $111. Le salaire de l'aide
domestique, dont on a parlé, préposé à l'entretien
ménager c'est ce qu'il y a de plus significatif dans le
système pour les moyennement rémunérés qui
varie actuellement de $1.90 à $2.14, sera, à compter du 1er
juillet 1973, c'est-à-dire dans un an et deux mois, de $2.41 et $2.53
après neuf mois de service, c'est-à-dire $93.38 dans le premier
cas et $98.04 pour une semaine de travail de 38 heures et trois quart.
Si cette même personne...
M. BOIVIN: Est-ce que je puis vous poser une question, ici? Cette
augmentation est-elle du salaire ou inclut-elle des bénéfices
marginaux?
M. ANGERS: En salaire seulement. M. BOIVIN: Salaire seulement.
M. ANGERS: Considération particulière apportée par
le gouvernement.
M. BOIVIN: Les bénéfices marginaux en plus?
M. ANGERS: Oui. Les 4.8 p.c. dans ce cas-là sont devenus, dans un
premier temps, 5.5 p.c. et, à la suite de l'effort ultime
présenté par le gouvernement, les rythmes d'accroissement de
salaire sont passés de 4.8 p.c. à 5.3 p.c. et de 5.5 p.c, pour
les plus petits, à 6 p.c, de telle sorte qu'en première
période c'est du 4.8 p.c. à 5.5 p.c? Dans la deuxième
période, c'est de 5.3.p.c. à 6 p.c, dans la troisième
période, de 5.3 p.c à 6 p.c, ce qui fait pour 40 heures, pour une
aide domestique, $96.40 et $101.19.
M. BOIVIN: Pour les bénéfices marginaux, avez-vous le
pourcentage?
M. ANGERS: A cela s'ajoutent les bénéfices marginaux qui
varient d'un secteur à l'autre mais qui se situent autour de 20 p.c
à 25 p.c. on l'a dit cet après-midi suivant
l'existance ou non d'un régime...
M. BOIVIN : Le pourcentage en augmentation?
M. ANGERS: Non, les bénéfices marginaux n'ont pas subi
d'augmentation cette année; ils ont été maintenus, d'une
façon générale, au niveau du statu quo. Il peut y avoir
des exceptions.
M. GAGNON: Une question. Quand vous avez parlé, tout à
l'heure, de l'entreprise privée en vous situant à
Montréal, est-ce que l'entreprise privée vous a donné la
moyenne des salaires pour les personnes à l'emploi au mois? Ou vous
a-t-elle également donné la moyenne de salaire des gens qui
travaillent parfois deux ou trois heures dans la journée et qui sont
appelés à deux ou trois fonctions à gauche et à
droite?
M. ANGERS: Habituellement, les relevés portent à une date
donnée et sur les salaires horaires dans le cas du personnel ouvrier et
du personnel de bureau, salaires horaires payés à ce
moment-là. Dans le cas du ministère du Travail, c'est fait au
mois d'octobre et le bureau de recherche aussi; c'est un portrait de la
situation, en termes d'offre ou de salaire effectivement payé à
un moment donné. Dans la plupart des cas, ce sont des salaires de
conventions collectives.
Donc, c'est un portrait, à un moment donné, au mois de
septembre ou au mois d'octobre, cela varie de septembre à octobre. Ils
prennent un portrait de la situation des salaires effectivement versés
en vertu de conventions ou en vertu de politiques.
M. GAGNON: Disons, par exemple, qu'ils ont fait la moyenne des salaires
sur le nombre d'heures mensuelles. Il y a un bon nombre de personnes, dans les
grosses compagnies, qui travaillent deux, trois ou quatre heures par jour. On
sait qu'ils ont deux ou trois emplois. H s'agit de savoir si, dans ces
statistiques, on a également inclus ces personnes qui travaillent
à temps partiel.
M. ANGERS: Ma réponse à ça est la suivan-
te: Pour éviter ce problème, la technique utilisée
a été de choisir des emplois repères et de ne pas prendre
des emplois où il y a des fluctuations régulières. Une
dactylo, habituellement, dans une entreprise comme la ville de Montréal,
ou Canadair, ou CPR, c'est un emploi stable et on en prend un portrait à
un moment donné; la même chose pour un journalier, de telle sorte
que la fluctuation à laquelle vous référez ne joue pas
dans le cas qui nous concerne. Nous avons choisi des emplois standard, qui sont
facilement identifiables et qui ont un certain caractère de permanence
de par la nature même des fonctions. Même si ce n'est pas la
même personne, un tarif est payé pour une dactylographe et c'est
le tarif en vigueur au moment du relevé qui est utilisé.
C'est pour ça qu'on a choisi des emplois repères. On n'a
pas pris tous les emplois pour contourner les difficultés de cette
nature. On utilise le taux horaire. Ce taux ne réfère pas
à la personne qui exerce la fonction; c'est un taux horaire payé
à une dactylo, quelle qu'elle soit, selon son expérience. Il y a
des échelles de salaire, minimum, maximum. Ce ne sont pas des salaires
payés à des personnes individuelles; ce sont des taux qui
existent soit dans les conventions ou dans les règles administratives.
Tous les emplois de nature fluctuante, on peut dire d'une façon
générale qu'ils ne sont pas utilisés dans les emplois
repères. Là où il y a des cycles, on n'utilise pas
ça. Les emplois de la fonction publique sont plutôt stables, de
telle sorte qu'on a pris des fonctions stables.
M. GAGNON: Ces statistiques ont-elles été montrées
au syndicat à la suite des discussions?
M. L'ALLIER: Elles ont été transmises par écrit,
données dans des échanges qui ont eu lieu, en fait, de mars
à juin 1971. Elles n'ont pas été contestées
à ce moment-là.
M. LE PRESIDENT: Le député de Frontenac.
M. L'ALLIER: Si vous me permettez de faire une petite mise au point
là-dessus, ces statistiques ont été données
à la partie syndicale, au moment de la réunion d'un comité
technique qui a eu lieu à la suite des réunions que nous avons
eues en mars et après mars 1971. Elles n'ont pas été
contestées sur le fond par le syndicat, parce que, de son
côté, il considérait que la moyenne
généralement observée n'était pas une chose dont on
devait tenir compte. C'est là que porte le débat fondamental qui
devient un débat politique. On dit: Quels que soient les moyens que vous
prenez pour l'établir, quelle que soit la validité des chiffres
que vous avancez, que vous énoncez, nous considérons que ce n'est
pas ça qu'il faut prendre, la moyenne. Nous considérons que le
gouvernement doit être le meilleur employeur et qu'il doit payer les plus
petits suivant leurs besoins, non pas suivant ce qu'ils font et suivant ce que
les gens qui font la même chose ailleurs reçoivent. C'est
là que le débat s'est situé. Nous avons fourni ces
chiffres, nous avons tenté de plaider que c'était ce qu'il
fallait faire. Il y a eu absorption de l'information du côté
syndical dans à peu près 50 heures de réunions du
comité technique en présence des représentants du
gouvernement, mais il n'y a pas eu de contestation sur le fond. On a dit: Ce
n'est pas bon.
M. GAGNON: Vous leur avez fourni des statistiques, mais eux, en retour,
n'en ont pas déposé, même si ça avait
été leurs propres statistiques au même niveau que vous.
M. L'ALLIER: Pas dans ce contexte-là. Ils mettaient de
côté, au départ, le principe de cette moyenne.
M. LE PRESIDENT: Le député de Montcalm.
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, je voudrais, d'abord,
féliciter M. Angers pour son exposé. Je pense que personne n'a
mis en doute, ni du côté syndical, ni du côté des
parlementaires, à ma connaissance en tout cas, ses compétences
pour établir une telle politique.
J'aimerais quand même poser quelques questions. Il est
évident que, compte tenu de la capacité de payer d'un
gouvernement, il y a une certaine relation entre les effectifs et les
traitements. Il est évident que pour, la même masse salariale, le
même montant affecté au budget, s'il y a moins de fonctionnaires,
chacun des fonctionnaires peut gagner plus, indépendamment de la moyenne
généralement observée.
Au début de son exposé, il a dit qu'au Québec, on
peut compter que 11 p.c. des travailleurs québécois sont inscrits
dans la fonction publique. Par rapport à d'autres provinces au Canada,
est-ce qu'on retrouve, en Saskatchewan, en Ontario ou dans d'autres
gouvernements qui ont des responsabilités similaires puisque la
constitution, en principe, s'applique partout un même pourcentage?
Est-ce qu'au Québec on a moins de fonctionnaires pour les mêmes
responsabilités ou plus de fonctionnaires? Enfin, je pense que vous
comprenez la question.
M. ANGERS: Comme premier élément de réponse, ce
qu'on doit dire, c'est qu'il n'existe pas de telle négociation
provinciale dans l'une ou l'autre des provinces auxquelles vous faites
référence. En ce qui a trait aux effectifs, la seule indication
qu'on a et qui pourrait nous indiquer qu'on a plus de monde qu'ailleurs, c'est
un rapport de la commission Castonguay où on constate que, pour le
personnel hospitalier, d'une part, il y a plus de monde ici par lit ou par
habitant qu'en Ontario. Du côté scolaire,
nos rapports maître-élèves sont
généralement plus avantageux qu'en Ontario. De telle sorte que je
ne pense pas que cela puisse faire varier substantiellement la proportion des
salariés, mais sur cette base, il semble y avoir plus d'employés
d'hôpitaux au Québec qu'en Ontario, en référence
à des lits ou à des barreaux de chaises.
Dans le cas des enseignants, il semble y avoir plus d'enseignants au
Québec pour un même nombre d'élèves. Donc, il y
aurait un peu plus de fonctions.
M. MASSE (Montcalm): Cela m'amène à deux questions... Une
remarque d'abord. Premièrement, c'est que...
M. BOIVIN : Pour faire suite à la réponse de M.
Angers...
M. MASSE (Montcalm): Oui, mais si vous me permettez, c'est quand
même dans le même ordre...
M. BOIVIN: C'est pour répondre, parce que je ne veux pas laisser
entendre que le Québec administre moins bien. C'est que dans les
hôpitaux, il passe beaucoup plus de malades dans le même lit au
Québec qu'en Ontario. Il y a donc autre chose qui fait varier les
statistiques. Je ne voudrais pas laisser l'impression que dans la province de
Québec, cela coûte plus cher qu'en Ontario.
M. ANGERS: Non, non, absolument pas.
M. BOIVIN: II y a des raisons. C'est-à-dire qu'il passe plus de
malades dans le même lit. Cela prend plus de personnel pour les trois
premiers jours d'hospitalisation.
M. GARNEAU: Est-ce qu'il passe plus de malades dans le même lit en
même temps?
M. LE PRESIDENT: II reste cinq minutes. Le député de
Montcalm va finir brièvement. A l'ordre, s'il vous plaît! Le
député de Montcalm et le député de Frontenac.
M. VEILLEUX: Est-ce que le député de Dubuc veut dire que
les médecins du Québec soignent moins bien que les
médecins de l'Ontario?
M. BOIVIN: Je m'aperçois que c'est difficile à comprendre
pour le député de Saint-Jean. Je vous dis que le malade est
peut-être moins longtemps mais qu'il passe plus de malades dans le
même lit...
DES VOIX: Oui, d'accord.
M. BOIVIN: Le malade coûte plus cher et demande plus de soins les
deux ou trois premiers jours. S'il en passe plus dans le même lit, cela
prend plus de personnel et cela coûte plus cher.
M. HARDY: En d'autres termes, on est moins longtemps à
l'hôpital au Québec.
M. BOIVIN: C'est ça.
M. L'ALLIER: Mais on y est plus souvent.
M. SAINT-GERMAIN: Si on faisait une comparaison, M. le Président,
au sujet du nombre d'enseignants relativement au nombre d'élèves,
entre les institutions publiques et les institutions privées du
Québec; est-ce que vous avez des statistiques là-dessus?
M. ANGERS: Oui. Les institutions privées du Québec qui
sont couvertes par l'une ou l'autre des lois, relativement aux subventions, ont
des rapports maître-élèves exactement identiques à
ceux des institutions publiques.
M. SAINT-GERMAIN: Maintenant,...
M. ANGERS: De telle sorte que dans les anciens collèges
classiques, de niveau collégial, la norme est de 1-15; au niveau
secondaire c'est 1-17, exactement comme dans le secteur public.
M. SAINT-GERMAIN: ... au niveau administratif.
M. ANGERS: Pour des fins de subventions de ces institutions.
M. SAINT-GERMAIN: Au niveau administratif, maintenant?
M. ANGERS: Je n'oserais pas porter de jugement. A ce moment-là,
cela peut mettre en jeu peut-être la plus grande diversité des
services que nous avons dans le secteur public. Nous n'avons pas de
données strictes qui nous permettent de dire qu'il y ait plus de cadres
dans le secteur public que dans le secteur privé.
M. SAINT-GERMAIN: Juste une autre question, M. le Président.
M. ANGERS : Franchement, je ne suis pas en état de dire
ça.
M. SAINT-GERMAIN: Est-ce que, dans l'établissement des moyennes
de salaire, vous avez tenu compte, par exemple, des emplois tels que
débardeurs ou employés de la construction?
M. ANGERS: Les employés de la construction ne sont pas
entrés en ligne de compte pour des raisons qui se comprennent assez
bien. C'est un emploi plutôt cyclique. C'est un emploi d'une
caractéristique vraiment particulière. Il n'y a aucune
permanence. Les emplois utilisés sont des emplois stables qui existent
partout
dans les différentes entreprises. Cela exclut les emplois de type
saisonnier...
M. SAINT-GERMAIN: Les débardeurs.
M. ANGERS: ... comme les employés de la construction et les
débardeurs. C'est exclu.
M. LE PRESIDENT: Le député de Montcalm.
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, pour continuer dans le
même ordre d'idées il semble que la question soulève
de l'intérêt est-ce que le ministère de la Fonction
publique est en mesure puisqu'il vient d'affirmer qu'il y aurait, en
général, plus de fonctionnaires pour des responsabilités
similaires au Québec que dans les autres provinces de donner le
pourcentage par rapport aux 11 p.c. de notre population? On peut jouer dans
l'ordre de quoi? De 0. 5 p.c. ou de 1 p.c?
M. ANGERS: En toute honnêteté, nous n'avons pas les
données nécessaires pour répondre à votre
question.
M. MASSE (Montcalm): Alors, on ne peut pas savoir la réserve de
masse salariale qu'il y aura à distribuer.
M. L'ALLIER: II y a peut-être un point que je voudrais souligner.
C'est que vous savez qu'au plan de la statistique, pour répondre
à votre question dans le domaine de la fonction publique proprement
dit...
M. GAGNON: Ce n'est pas...
M. L'ALLIER: Oui, pour la bonne raison que la définition de la
fonction publique varie d'une province à l'autre. Par exemple, ici, la
personne employée par la Commission des accidents du travail fait partie
de la fonction publique au Québec, alors qu'elle n'en fait pas partie en
Ontario. L'assurance-hospitalisation, chez nous, c'est un groupe de
fonctionnaires qui sont dans le ministère des Affaires sociales. Donc,
ils sont fonctionnaires. En Ontario, vous avez une commission qui est en
dehors. C'est la commission de l'assurance-hospitalisation, ou je ne sais trop.
Ses employés ne font pas partie de la fonction publique.
Alors, pour avoir une définition des emplois identiques, qui nous
donnerait l'effectif de la fonction publique, puisque la définition
varie, ce n'est pas possible.
M. MASSE (Montcalm): II reste qu'un certain nombre d'individus
travaillent pour les services publics et qui sont payés à
même les fonds publics. Il est certain qu'ici, une partie du
bien-être relève de la ville de Montréal. Il n'est pas
certain qu'à Toronto, cette délégation ait
été faite.
A un moment donné, au niveau d'une recherche, il y a moyen de
classer tout ce monde, leurs traitements dépendant directement des
revenus de l'Etat, de l'impôt. C'est possible de le faire.
M. L'ALLIER: Oui, compte tenu de la diversité des rôles
aussi.
M. MASSE (Montcalm): Oui, oui!
M. L'ALLIER: Vous pouvez avoir des rôles sur lesquels il y a un
accent plus particulier, au Québec, et qui sont inexistants en Ontario.
La Régie des rentes en est un exemple.
M. MASSE (Montcalm): Est-ce que nous continuons, M. le
Président?
M. LE PRESIDENT: Nous allons donner la parole au député de
Frontenac.
M. MASSE (Montcalm): D'accord!
M. LE PRESIDENT: Après Montcalm, Frontenac.
M. MASSE (Montcalm): C'est juste pour savoir parce qu'il y a
encore beaucoup de questions si M. Angers reviendra demain pour
répondre à ces questions. J'aurais d'autres questions à
poser.
UNE VOIX: Oui, demain.
M. LE PRESIDENT: Le député de Frontenac.
M. LATULIPPE: M. le Président, je voudrais également
féliciter M. Angers pour son exposé. Il est certain que la
moyenne observée, de la façon dont on s'y est pris, mérite
certainement beaucoup d'éloges.
Cependant, ce qui m'intéresse davantage, c'est le rythme de
croisière. Tout à l'heure, le ministre a dit que cela n'avait pas
été remis en question par la partie syndicale. J'ai ici des
documents, qui nous ont été fournis par des
éléments de la CEQ, qui nous indiquent que, justement, eux, ils
n'acceptent pas les termes de base et qu'ils ont remis cela en question.
Peut-être que cela n'a pas été exposé aux tables
centrales ou ailleurs mais, de toute façon, manifestement, ils nous
soumettent qu'ils n'acceptent pas les définitions telles que nous les
retrouvons, telles que vous semblez les avoir exposées tout à
l'heure.
Notamment, un des arguments principaux qu'ils soutenaient, c'est qu'il
existe, dans la période choisie, qui est 1960-1970, une grande variation
entre les premières années et les dernières années,
due, sans doute, à l'accroissement de l'effectif
québécois, à cause de l'Expo et ce que cela a
entraîné. Je ne sais pas si vous êtes au courant de ce
document, ils considèrent que...
M. GAGNON: Par qui cela a-t-il été
préparé?
M. LATULIPPE: Je ne le sais pas. Cela a été soumis par le
front.
M. GAGNON: Par le syndicat.
M. LATULIPPE: Le front a certainement fait du travail
là-dessus.
UNE VOIX: De Frontenac?
M. LATULIPPE: Pas le front de Frontenac, le front FTQ, CSN et...
M. GARNEAU: Mais quand vous parlez du taux, parlez-vous de
l'augmentation des prix â la consommation ou de d'autres choses?
M. LATULIPPE: Je parle des prix à la consommation, justement,
ainsi que du taux de productivité. Par exemple, ici vous avez la
variation des pourcentages d'indice des prix à la consommation. Il y a
quand même une forte différence entre les premières et les
dernières années. On donne la moyenne de 1960 à 1970: 2.3
p.c, de 1964 à 1970: 2.9 p.c.
M. ANGERS: De 2.6 p.c.
M. LATULIPPE: Ici, vous avez l'indice des prix à la consommation
pour 1964-1970: 3.6 p.c. et, pour 1960-1970: 2.7 p.c, à peu près
dans le même ordre que...
M. GARNEAU: Est-ce que ce sont les indices québécois ou
canadiens?
M. LATULIPPE: Malheureusement, ce n'est pas spécifié. Ce
doit être fédéral, BFS. Je reprends ici le tableau à
l'indice québécois. Il y a, tout de même, une très
grande variante. Ils n'acceptent pas tout le produit national brut. Ils font un
dégrossissage, ils soustraient l'accroissement naturel de la population
et ils en arrivent, eux, à un rythme de croisière selon les
mêmes normes, disent-ils, que celles déjà établies
ici, de 6.7 p.c, alors que nous arrivions à 4.8 p.c.
M. ANGERS: Je n'ai pas eu le document comme tel. Eux, ce qu'ils ont
fait, c'est qu'ils ont pris le produit national brut, mais ils ne l'ont pas
utilisé sous l'aspect de la productivité. Us auraient dû
prendre la main-d'oeuvre, parce que c'est l'accroissement de la population des
personnes employées qui fait qu'on peut mesu- rer la
productivité. Ce n'est pas l'introduction d'un enfant dans la
société qui fait que la productivité nationale augmente.
La productivité du père s'est améliorée sans aucun
doute.
Or, le nombre de personnes employées au Québec monte deux
fois plus vite que la population. C'est entendu que, lorsqu'on veut mesurer la
productivité, on est obligé de prendre les personnes
employées. Si la population montait au même rythme que le nombre
de personnes employées, on n'aurait pas de problème. Mais vu que,
pour les fins de la démonstration, la population monte moins vite, ils
l'ont utilisée de telle sorte que ce n'est pas une mesure de
productivité; c'est une mesure de produit national brut par tête
d'habitant et non pas par personne employée. Ce qui fait que ce n'est
pas une mesure de productivité.
M. GAGNON: Alors, eux se seraient servis de la moyenne des travailleurs
et vous autres de la moyenne de la population?
M. ANGERS: L'inverse.
M. LATULIPPE: J'aurais encore une petite observation.
M. MASSE (Montcalm): II y en a encore beaucoup. Il faudrait savoir si on
n'en pose pas parce que nous arrêtons ou si nous n'arrêtons
pas.
M. L'ALLIER: II y a ici deux possibilités, si je peux me
permettre. Le directeur de la rémunération pourrait être
disponible mardi et nous pourrions entendre, au cours de la séance de la
commission demain matin, à partir de onze heures, le porte-parole
patronal à la table de négociation. S'il y a d'autres questions
à poser au directeur de la rémunération, il serait
disponible mardi pour y répondre.
M. MASSE (Montcalm): J'en aurais d'autres, parce qu'il y a
évidemment des principes derrière ça. Ces
principes-là, il faudrait les étudier.
D'accord, mardi.
M. L'ALLIER: Est-ce que je pourrais proposer l'ajournement de la
séance à demain matin, onze heures?
M. LE PRESIDENT: Nous ajournons nos travaux à demain,
après la période des questions, à la salle 81-A.
(Fin de la séance à 22 h 4)
Séance du vendredi 5 mai 1972
(Onze heures une minute):
M. LAMONTAGNE (président de la commission permanente de la
fonction publique): A l'ordre, messieurs! Je voudrais informer les membres de
la commission des changements dont on m'a avisé pour les présents
travaux. M. Tremblay, député de Sainte-Marie, remplace M. Burns
député de Maisonneuve et M. Boivin, député de
Dubuc, remplace M. Tremblay, député de Chicoutimi. Le ministre de
la Fonction publique.
M. L'ALLIER: M. le Président, nous avons entendu, hier, le
directeur général de la rémunération qui nous a
expliqué les assises scientifiques et les bases techniques sur
lesquelles s'appuie la décision politique du gouvernement de
rémunérer les employés des secteurs public et parapublic
conformément à ce qu'il a été convenu d'appeler, et
ce qui est, en fait, la moyenne généralement observée au
Québec. Les membres de la commission ont mentionné et ont
indiqué leur intérêt à poser de nouvelles questions
au directeur de la rémunération. Celui-ci n'étant pas
disponible ce matin mais l'étant la semaine prochaine, le directeur
général de la rémunération reviendra mardi lorsque
la commission parlementaire se réunira pour répondre aux
questions, notamment, du député de Maisonneuve et du
député de Montcalm.
Ce matin, M. le Président, je crois que nous pourrions
procéder, comme convenu il y a quelques jours, soit d'entendre le
porte-parole de la partie patronale à la table de négociation,
faire le point, quant à lui, sur ces négociations, nous donner,
à la fois, le déroulement des négociations et leur contenu
et nous indiquer également les points sur lesquels a achoppé la
négociation.
Le porte-parole patronal à la table centrale de
négociation n'est évidemment pas le même qu'aux tables
sectorielles de négociation, sauf pour trois tables, il nous indiquera
lesquelles. A la table centrale des négociations il était le
porte-parole du gouvernement, de la Fédération des commissions
scolaires et de l'Association des hôpitaux.
Alors, M. le Président, nous pourrions entendre maintenant le
porte-parole de la partie patronale, Me Reynold Langlois.
M. LE PRESIDENT: Le député de Sainte-Marie.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Est-ce que je pourrais demander un
renseignement? A quelle heure ajournons-nous?
M. LE PRESIDENT: A une heure. A moins qu'il y ait vote en Chambre
avant.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Mais cela ne dépassera pas une heure,
probablement.
M. LE PRESIDENT: Non.
M. L'ALLIER: M. le Président, j'ai ici la liste des tables
sectorielles ainsi que la composition de chacune de ces tables et le nom des
porte-parole. C'est un document qui pourrait être distribué aux
membres de la commission et qui répondrait, en fait, à la
question.
M. LE PRESIDENT: M. Langlois.
Négociation avec le front commun
M. LANGLOIS: M. le Président, les rencontres de
négociation ont débuté à Québec le 16 mars
1972 au Holiday Inn.
Je pense qu'il y aurait peut-être lieu de vous lire ce matin au
départ une lettre qu'écrivait le ministre de la Fonction publique
à M. Marcel Pepin en sa qualité de porte-parole du front commun.
Cette lettre devait résumer les décisions qui avaient
été prises à l'occasion d'une rencontre
préliminaire du 13 mars sur les sujets qui devaient être
abordés à la table des négociations. Cette lettre se
lisait comme suit: "M. le Président, lors de la rencontre du 13 mars
1972 à Montréal, entre le front commun syndical, le gouvernement
et ses partenaires, nous avons soumis une proposition reliée de la part
du gouvernement à l'acceptation de négociations à une
table centrale. Nous avons alors proposé que les sujets devant faire
l'objet des négociations à la table centrale soient les suivants:
d'abord les salaires, divisés en apparie-ment des fonctions ou le
"matching", organisation et structure, niveau et rythme; deuxièmement,
régime de retraite, échange dans le cadre d'une
législation éventuelle, assurance-salaire, assurance collective.
"Nous avons par la suite consenti à ajouter aux trois sujets
proposés plus haut celui de la sécurité d'emploi. Suite
à l'accord donné par le front commun syndical à cette
proposition globale, nous avons également convenu, premièrement,
que les négociations commencent d'abord par l'article des salaires;
deuxièmement, que seuls les points ci-haut mentionnés sur
lesquels les deux parties se seraient mises d'accord à la table centrale
pourraient lui être référés en cas de
désaccord dans leur application aux tables sectorielles;
troisièmement, que les décisions prises à la table
centrale soient définitives et valables pour les tables sectorielles;
quatrièmement, que la représentation syndicale à cette
table centrale ne dépasse pas quelque vingt personnes par centrale
syndicale; cinquièmement, que les négociations commencent jeudi
le 16 mars 1972 à Québec dans des locaux à être
déterminés. Je veux croire, M. le président, que ces
négociations à une table centrale apporteront les
résultats que vous espérez et que nous souhaitons, soit un accord
à la satisfaction de toutes les parties en cause. Vous priant de me
croire.
Le ministre."
Lorsque les parties se furent mises d'accord,
et cette lettre résumait bien le cadre à
l'intérieur duquel devaient se dérouler la négociation, le
sous-ministre de la Fonction publique, M. Bolduc, pria les représentants
du front commun de préciser leur demande sur la sécurité
d'emploi soulignant que la partie syndicale n'avait pas jusqu'à cette
date soumis de texte ou de demande précise sur cette question. Donc, au
16 mars, il n'y avait aucune demande du front commun sur la
sécurité d'emploi. Salaires
M. LANGLOIS: Sur cette intervention du sous-ministre, le porte parole du
front commun s'engagea à produire les demandes syndicales en
matière de sécurité d'emploi dans les jours suivants. Par
la suite, la première question abordée fut celle de
l'harmonisation des traitements pour des emplois similaires.
En réponse à des questions posées par le front
commun, nous avons expliqué que l'harmonisation implique que les
perspectives de rémunération sont identiques pour des classes
d'emplois où les exigences, les attributions et les conditions
d'exercice sont identiques et les taux de traitement sont uniques et que les
échelles comportent le même nombre d'échelons. Le terme
harmonisation, avons-nous continué, signifie également que les
perspectives de rémunération se ressemblent dans les autres
situations où les exigences, les attributions et les conditions
d'exercice étant parfois analogues, il faut surtout tenir compte des
aspects administratifs, des plans de classification, des niveaux de
responsabilité, du type, de la dimension des organisations et des
contrôles propres aux différentes institutions. Dans ce dernier
cas, les plans de traitement, suivant les offres salariales du gouvernement,
prévoient des perspectives semblables, compte tenu, entre autres
facteurs, du caractère plus ou moins automatique des augmentations
annuelles reliées à l'expérience. En pratique, il s'agit
d'une similitude fondée sur la carrière et non pas l'alignement
purement mathématique.
Après avoir fait un bref tour d'horizon des trois autres sujets
de discussion, la séance fut ajournée et, le 17 mars, nous avons
présenté un certain nombre de tableaux indiquant de quelle
façon les fonctions qui se retrouvent à plus d'un endroit dans
les secteurs public et parapublic ont été appareillées
dans l'effort d'harmonisation des traitements proposés comme l'un des
principes de la politique salariale du gouvernement. Dans le dossier que le
gouvernement a déposé au début des
délibérations de cette commission, M. le Président, vous
retrouvez ces tableaux qui indiquent l'appariement des fonctions pour les trois
catégories d'emplois, soit la catégorie des professionnels, la
catégorie des emplois de bureaux et assimilés et la
catégorie des ouvriers. Ces tableaux furent expliqués et
commentés par les deux parties, tout au cours de cette journée du
17 mars, ainsi que le 18 alors qu'à cette date il fut convenu de former
un sous-comité technique composé de représentants des deux
parties afin de prendre connaissance des appariements effectués et des
motifs qui ont servi à appareiller les différentes fonctions.
Les négociations furent ensuite suspendues dans
l'après-midi du 18 et reprirent le 20 mars, soit le lundi suivant. Au
cours des séances du 20 et du 21 mars, il fut principalement question du
rythme de croisière proposé dans la politique salariale du
gouvernement, c'est-à-dire un rythme de croisière moyen de 4.8
p.c. basé d'une part sur l'augmentation projetée du coût de
la vie au cours des années de convention et d'autre part sur
l'augmentation de l'indice de la productivité, c'est-à-dire le
produit national brut réel par personne employée. Nous avons
ainsi expliqué que le rythme de croisière proposé dans les
offres du gouvernement postule que les fonctionnaires et les autres
employés des secteurs public et parapublic sont aussi efficaces que les
employés du secteur privé, car les offres du gouvernement
proposent qu'ils participent pleinement à l'augmentation de la
productivité qui a été évaluée, suivant
l'expérience de la dernière décennie, à un taux
d'augmentation annuel de 2 1/2 p.c.
Nous avons expliqué que les projections pour 1971
s'étaient révélées très optimistes. Les
chiffres .réels démontraient une augmentation de la
productivité de 1.9 p.c., plutôt que de 2.5 p.c. Nous avons
également exposé que, vu le grand nombre de fonctions où
la rémunération est basée sur un plan de carrière
prévoyant des augmentations annuelles statutaires basées sur
l'expérience, le rythme réel d'augmentation des traitements est
non seulement de 4.8 p.c, mais de plus de 6 p.c. en termes d'accroissement de
la masse salariale et de quelque 8 p.c. pour bien des individus, compte tenu
des augmentations statutaires qui s'ajoutent au redressement annuel des
échelles proposées, au rythme de 4.8 p.c, sauf évidemment
pour les emplois hors échelle ou hors échelon.
Les représentants du front commun ont beaucoup insisté, au
cours de cette réunion, sur le fait que les petits salariés
étaient plus sensibles aux augmentations des indices des prix à
la consommation et que, par conséquent, ils devaient être l'objet
d'augmentations de salaire supérieures, afin de ne pas être pris
au dépourvu, si les projections se révélaient fausses. Ils
ont expliqué que c'était là la base de leur demande de
$100 par semaine comme revenu minimum garanti par année, pour les petits
salariés.
Régimes de protection
M. LANGLOIS: Au cours de cette séance du 21 mars, nous avons
également remis à la partie syndicale une proposition quant au
régime de protection contre les risques, maladie, décès et
invalidité, applicable aux employés des secteurs public et
parapublic, en remplacement des systèmes de protection qui existent dans
certr.i-nes conventions sous forme de jours-maladie ou sous forme de garanties
quelconques de traite-
ment en cas de maladie. Vous trouverez d'ailleurs l'exposé
complet de ce projet gouvernemental parmi les documents qui ont fait l'objet
d'un dépôt de la part du gouvernement au début des
délibérations de cette commission.
La proposition que nous avons déposée, en
résumé, comporte quatre éléments: un régime
collectif assuré d'indemnité en cas d'invalidité de courte
durée, c'est-à-dire une assurance-salaire; un régime
collectif assuré de rente de survivants en cas de décès de
l'employé avant l'âge de la retraite; un régime collectif
assuré de rente en cas d'invalidité de longue durée et,
enfin, comme quatrième élément, un régime
complémentaire de l'assurance-maladie.
Nous avons expliqué que ces régimes seraient applicables
à tous les employés des secteurs public et parapublic et que le
régime collectif assuré d'indemnité en cas
d'invalidité de courte durée, c'est-à-dire des maladies
dont la durée est inférieure à 52 semaines, serait
assumé à part entière par le gouvernement, alors que les
trois autres régimes seraient à frais partagés.
Nous avons expliqué que les avantages de ces nouveaux
régimes étaient multiples et que, tout en accordant une
protection valable contre la maladie, ils encourageaient la présence au
travail. Ce qui n'est pas le cas des caisses de congés de maladie
actuelles.
Nous avons également expliqué que les modalités
relatives à la transition des régimes antérieurs au
nouveau régime seraient déterminées en tenant compte de la
nature des divers régimes antérieurs et en
référence aux modalités définies dans le cas des
banques de congés de maladie.
Nous avons exposé dès ce moment-là que les
dispositions transitoires ou les dispositions susceptibles de protéger,
ce que nous avons convenu d'appeler les droits acquis, devaient faire l'objet
d'ententes et de discussions. Je dois dire dès ce moment-ci qu'il n'y a
eu aucune discussion possible au niveau de la table centrale sur la protection
des droits acquis. Vous verrez plus tard que nous avons nous-mêmes
proposé des assouplissements à cette partie du plan, sans avoir
eu le bénéfice d'échange avec la partie syndicale.
Nous avons proposé que, dans le cas de banques de congés
de maladie, l'accumulation des jours et leur valeur seraient
arrêtées à la date de mise en place du nouveau
régime. Nous avons également proposé que l'utilisation de
ces jours ou leur liquidation à la cessation d'emploi, le cas
échéant, devait faire l'objet de modalités à
être négociées. Nous avons aussi dit que les jours
actuellement accumulés dans les caisses de congés de maladie
pourraient notamment être utilisés pour couvrir les absences des
deux premiers jours. Il faut bien le dire, le régime assuré
d'indemnité, pour les maladies de moins de 52 semaines, couvrirait 90
p.c. du salaire et ce à compter du troisième jour ouvrable de
maladie. Il y a donc deux jours de carence avant que le régime ne
commence à s'appliquer.
Nous avons offert de payer une indemnité annuelle
équivalant à deux jours de vacances comme prime, si vous voulez,
pour couvrir ces deux jours non couverts par le plan. Enfin, nous avons
expliqué que l'employé étant son propre assureur quant aux
deux premiers jours d'absence, le gouvernement lui paierait annuellement une
indemnité d'un montant égal au traitement régulier d'un
jour et demi de travail, précisant que cette indemnité serait
payable indépendamment du nombre réel de jours d'absence et du
travail. Elle serait directement versée par le gouvernement à
l'employé concerné.
Les porte-parole du front commun nous ont demandé si la
proposition du gouvernement sur la protection contre la maladie était
indissociable de la proposition faite préalablement sur le régime
supplémentaire de rentes. Nous avons répondu que oui, dans
l'état des propositions à cette date. Le 22 mars, les parties ont
constaté que le comité des appariements avait fait des
progrès et qu'il y avait eu accord sur un certain nombre de fonctions au
niveau de la catégorie des ouvriers. Il fut donc décidé
que le comité devrait continuer à siéger
parallèlement aux séances de la table centrale.
Quant au reste de la journée, elle fut consacrée
principalement à discuter du régime de protection contre la
maladie ainsi que du régime supplémentaire de rentes sans
toutefois que nous ayons reçu de contreproposition quelconque du front
commun sur ces deux sujets.
Sécurité d'emploi et de
traitement
M. LANGLOIS: C'est le 23 mars que nous avons déposé la
contreproposition du gouvernement et de ses partenaires, à la demande
d'une sécurité totale de traitement et d'emploi
présentée par le front commun. Il faut bien dire que cette
demande du front commun de sécurité d'emploi, au sens de la
partie patronale c'est mal libeller cette demande que de l'appeler strictement
une sécurité d'emploi, car la demande dans son état actuel
constitue non seulement une sécurité absolue d'emploi mais aussi
une sécurité absolue de traitement.
Si vous référez au document qui fait l'objet du
dépôt de la partie syndicale sur leur demande de
sécurité d'emploi, vous verrez que suivant cette demande tout
employé du secteur public ou parapublic, qu'il travaille pour le
gouvernement, pour une institution hospitalière ou une institution de
bien-être ou qu'il travaille dans le secteur de l'éducation, que
ce soit comme professeur ou soutien scolaire, bénéficierait d'une
sécurité absolue d'emploi et une garantie absolue de traitement
dès qu'il aurait acquis six mois d'ancienneté,
c'est-à-dire six mois après son embauche.
Le plan proposé par la partie syndicale prévoit aussi
qu'aucun employeur ne peut embaucher un employé aussi longtemps qu'il y
a des salariés disponibles, répondant aux exigen-
ces normales du poste, dans une espèce de "pool" intersectoriel
administré conjointement et par les syndicats et par le gouvernement. Il
serait aux frais exclusivement du gouvernement, non seulement quant à
ses frais d'administration mais également quant aux traitements à
être payés aux salariés qui tombent dans ce "pool". Cela se
trouve à la page 3 du document.
Egalement à la page 3 du document, on impose à l'employeur
de la fonction publique ou du secteur parapublic l'obligation de prouver que
l'employé n'est pas qualifié pour entrer dans un poste. On donne
également au salarié le privilège de choisir parmi les
postes vacants. Mais le régime proposé par la partie syndicale
n'oblige pas le salarié d'accepter un poste pour lequel il serait
qualifié.
Par conséquent, si par hypothèse on offre à un
salarié un poste pour lequel il est qualifié et que cette offre
comporte, suivant la demande du front commun, un salaire identique et une
pleine compensation pour les frais de déplacement et de
déménagement, malgré cela et malgré que
l'employé continue à recevoir son traitement, il n'est pas
obligé, suivant la proposition syndicale, d'accepter le poste. Il peut
choisir de rester à ne rien faire dans le "pool" à plein salaire.
A la page 4 du document du front commun: Le salarié en
disponibilité reçoit son plein traitement jusqu'à ce qu'il
soit replacé, lequel traitement serait assumé par l'Etat. D faut
bien dire cependant que ce traitement est perdu après six mois d'un
refus d'affectation par un salarié." Le "pool" est à
l'administration paritaire, comme je le disais tantôt et le coût du
pool est absorbé, ainsi que le salaire du personnel et des
salariés en disponibilité, exclusivement par le gouvernement. D
faut bien dire, enfin, que dans l'ensemble...
M. GARNEAU: Est-ce que je pourrais poser une question? Est-ce que, dans
la proposition syndicale, les députés étaient inclus?
M. LANGLOIS: Malheureusement pas.
M. CLOUTIER (Ahuntsic): Pas de sécurité d'emploi, par
conséquent.
M. MASSE (Montcalm): Ce ne sont pas tous les employés de
l'Etat?
M. LANGLOIS: J'ai dit: Les employés des secteurs public et
parapublic.
M. MASSE (Montcalm): Parce que les députés sont
payés par l'Etat.
M. L'ALLIER: Ils sont payés par l'Etat mais il y a seulement les
ministres qui, au sens de la loi, sont considérés comme
fonctionnaires.
M. MASSE (Montcalm): Les ministres sont là-dedans.
M. CLOUTIER (Ahuntsic): Sans aucune sécurité d'emploi, je
tiens à le souligner.
M. MASSE (Montcalm): Les ministres sont inclus dans la proposition mais
non les députés.
M. LANGLOIS: Est-ce que vous êtes considérés comme
des salariés?
M. MASSE (Montcalm): Ils sont considérés comme
fonctionnaires, les ministres.
M. L'ALLIER: Occasionnels.
M. MASSE (Montcalm): Ce sont des occasionnels.
UNE VOIX: Temporaires.
M. CLOUTIER (Ahuntsic): Et susceptibles de se recycler rapidement.
M. MASSE (Montcalm): Ceux-là ne sont pas éligibles au
"pool".
M. LANGLOIS: II faut bien dire enfin que le dernier
élément de cette proposition syndicale est qu'aucune
organisation, aucun organisme, aucune institution dans le secteur public
donc, cela implique le gouvernement ou dans le secteur parapublic, les
hôpitaux, les commissions scolaires, etc., ne pourrait faire de
changement dans les structures administratives sans le consentement du conseil
d'administration paritaire du "pool" qui administre les gens en
disponibilité. C'est donc dire que cette proposition, à toutes
fins pratiques, empêcherait toute l'administration publique et
parapu-blique de faire tout changement administratif quelconque, sans le
consentement de la partie syndicale.
Donc, nous avons répondu le 23 mars en déposant un
protocole de sécurité d'emploi qui a été
distribué, il y a quelques jours, par la partie patronale pour
compléter le dépôt des documents déjà fait
devant cette commission. S'il n'a pas été déposé,
je le dépose actuellement. Ce protocole d'entente en matière de
sécurité d'emploi propose d'abord l'établissement de
mécanismes sectoriels de placement, là où il n'en existe
pas présentement. Il propose ensuite un bureau intersectoriel et
provincial de placement, un comité consultatif paritaire, le recyclage
et un préavis d'au moins deux mois à tout employé mis
à pied pour surplus de personnel. Il est évident que le protocole
d'entente déposé par le gouvernement n'est pas du tout comparable
à la demande faite par le front commun.
Cette journée du 23 mars fut consacrée à
l'étude du protocole d'entente du gouvernement ainsi qu'à
l'étude du document qui contient les demandes syndicales en
matière de sécurité d'emploi.
Principes de la politique salariale
M. LANGLOIS: La journée du vendredi 24 mars fut sans doute un des
points tournants de la négociation à la table centrale, du moins
nous le croyions à ce moment-là. En effet, à cette date,
nous avions complété, quant à nous, l'exposé
détaillé des principes de la politique salariale et
également l'explication des modalités d'application de chacun de
ces principes. Nous avions pris soin jusqu'à ce moment d'exposer cette
politique dans ses moindres détails et d'expliquer également les
motifs profonds qui étaient à la base de l'application de ces
principes. Le sous-ministre de la Fonction publique a alors
déclaré que le temps était venu de réaliser qu'on
devait poursuivre le travail, soit dans un sens tel que cela nous mène
à une entente plutôt que de continuer un échange ou un
exposé réciproque de principes sans qu'il y ait de compromis.
C'est alors que les porte-parole du front commun ont posé trois
questions au chapitre des salaires.
La première: Est-ce que les parties ne pourraient pas s'entendre
pour qu'il y ait un seul taux de rémunération pour une fonction
dans la catégorie des emplois dits ouvriers? Quelques mots
d'explication. Dans la catégorie des emplois ouvriers, nous avions
offert une échelle de rémunération proposant un taux
d'embauche et ensuite un ou deux taux suivant chaque fonction, et la partie
syndicale demandait que les ouvriers soient payés à taux unique
par fonction.
La deuxième question: Est-ce que les parties ne pourraient pas
être d'accord pour que les fonctions appariées reçoivent un
niveau de traitement mathématiquement identique? C'est-à-dire
que, si vous consultez le tableau des appartements ou les tableaux
d'appariements qui ont été déposés, le front commun
nous demandait que, pour une fonction sur une même ligne, les taux
horaires ou les salaires annuels soient mathématiquement identiques dans
chacun des secteurs, soit le secteur des affaires sociales, celui de la
fonction publique, etc.
Troisième question: Le gouvernement est-il opposé de
façon définitive à la demande de $100 par semaine comme
salaire minimum dans les secteurs public et parapublic?
Les trois questions ayant été posées, les
séances furent ajournées au 27 mars, au moment où nous
avons répondu aux trois questions.
A la première question qui nous avait été
posée, c'est-à-dire si on pouvait s'entendre pour qu'il y ait un
taux unique par fonction-ouvrier, nous avons d'abord souligné que les
offres gouvernementales déposées dans les différents
secteurs jusqu'à maintenant apportaient une amélioration
considérable à la situation qui prévalait sous l'empire
des anciennes conventions.
En effet, si vous consultez les demandes, vous verrez que dans tous les
cas où le gouvernement a jugé que c'était possible et
souhaitable de le faire, le nombre de taux a été diminué
de telle sorte qu'en troisième période, pour ce qu'on pourrait
appeler les ouvriers spécialisés ou
semi-spécialisés, les offres gouvernementales proposent un taux
par fonction à l'exception du barbier-coiffeur pour des raisons
particulières.
Pour les autres fonctions d'ouvriers qu'on peut qualifier de non
spécialisées, c'est-à-dire en bas de journalier, le nombre
de taux a été réduit de façon qu'en
troisième période il y ait un maximum de deux taux.
Nous avons déclaré que, si l'objectif visé par le
front commun est l'unité complète de taux dans le secteur ouvrier
pour les fonctions qualifiées d'ouvrier non spécialisé,
nous ne voyions pas comment le gouvernement pourrait consentir à ce que
cet objectif soit atteint dans le cours de la convention. Cependant, le
gouvernement s'est dit prêt, tout en continuant à faire la
distinction entre ouvrier spécialisé ou
semi-spécialisé d'une part et ouvrier non
spécialisé d'autre part, à continuer dans le cours de la
convention l'effort de réduction des taux déjà
amorcés. Quant aux ouvriers non spécialisés, le
gouvernement a exprimé l'avis que le minimum de nombre de taux est
atteint, c'est-à-dire deux, mais qu'il était prêt cependant
à normaliser la période au cours de laquelle le premier taux est
payé à un nouvel employé. En résumé, pour
les fonctions d'ouvrier spécialisé et
semi-spécialisé, le gouvernement s'est déclaré
prêt à continuer l'effort déjà reflété
dans les offres pour réduire le nombre de taux. Quant aux autres, la
période au cours de laquelle le premier taux est payé, le
gouvernement s'est déclaré prêt à la réviser.
Nous avons cependant posé une condition préalable à
l'application de cette réponse à l'effet qu'on devait s'entendre
sur l'appariement des fonctions suivant les propositions déjà
faites par le gouvernement et qui faisaient l'objet, à l'époque,
d'une analyse au niveau du comité technique des appariements de la table
centrale.
A la deuxième question à l'effet de savoir si on pouvait
s'entendre pour rendre des taux identiques par fonction appariée, nous
avons repris brièvement certaines explications données
précédemment sur les principes adoptés et les
méthodes suivies pour en arriver à l'harmonisation des fonctions
dans la proposition gouvernementale déposée aux
différentes tables sectorielles. Nous avons également
souligné que les offres gouvernementales constituaient une nette
amélioration sur la situation prévalant jusqu'à maintenant
à l'effet que les taux sont maintenant harmonisés et, dans les
cas où cela est possible, mathématiquement identiques. Nous avons
souligné que, si l'objectif visé par le front commun était
d'obtenir l'identité mathématique complète ou absolue des
taux par fonction appariée, le gouvernement ne voyait pas comment cela
pourrait être atteint pour trois raisons que nous avons qualifiées
de fonda-
mentales qui empêchent l'identité mathématique
absolue des taux. La première, pour une même fonction
appariée, lorsque nous passons d'un secteur à l'autre, nous
faisons face à un plan de classification du type de position par rapport
à un plan de carrière. Par exemple, le personnel de bureau dans
les CEGEP comparé au personnel de bureau dans la fonction publique.
Deuxième raison, en analysant les exigences à l'entrée des
différentes fonctions appariées, nous notons des
différences qui doivent se réfléter dans les taux. La
troisième raison est que le minimum et le maximum de certaines
échelles, surtout dans le domaine hospitalier, sont différents
des minimums et des maximums des échelles des fonctions appariées
et ce, parce que le gouvernement a voulu respecter dans ses offres des
caractéristiques qu'on pourrait appeler historiques de ces
échelles dans le secteur hospitalier.
C'est en raison des trois motifs ou raisons mentionnées ci-haut
que l'identité mathématique absolue ne se reflète pas dans
les propositions gouvernementales pour les employés dont la fonction
tombe dans la catégorie des employés de bureau ou des
techniciens. Il faut également souligner que dans certains cas des
fonctions ont fait l'objet de gel parce qu'elles étaient
rémunérées à un taux supérieur à la
moyenne généralement observée. Il est bon de noter que
l'identité mathématique des taux a été
réalisée pour ce qui a trait aux professionnels, au niveau
d'exécution.
Pour ce qui a trait à la catégorie des fonctions dites
ouvrières, le gouvernement a reconnu que les difficultés au
niveau des employés de bureau et des techniciens pour réaliser
cette identité mathématique, n'existe pas au niveau de cette
catégorie d'employés qui sont les ouvriers. Nous nous sommes par
conséquent déclarés prêts à atteindre
l'objectif de l'identité mathématique de taux par fonction
appariée en cours de convention, basée cependant sur la moyenne
généralement observée au Québec.
Deux exceptions cependant à cet engagement. C'est le cas encore
du barbier-coiffeur, dans les hôpitaux et du préposé aux
autopsies, au gouvernement.
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, la question du
barbier-coiffeur, est-ce que celui du premier ministre est inclus dans la
proposition ou s'il est hors cadre?
M. LE PRESIDENT: Ce n'est pas hors cadre, c'est hors d'ordre. M.
Langlois.
M. GARNEAU: Ce n'est pas un fonctionnaire, ce n'est pas un ouvrier de la
fonction publique, payé à même les fonds publics.
M. MASSE: (Montcalm): C'est un autre temporaire?
M. GARNEAU: II n'est pas payé avec des fonds publics.
M. MASSE (Montcalm): C'est un occasionnel.
M. BOIVIN: Un barbier qui suit le premier ministre.
M. GARNEAU: II a droit d'avoir les services voulus.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): II ne le suit pas, il lui coupe les
cheveux.
M. LE PRESIDENT: M. Langlois.
M. LANGLOIS: La fonction de barbier-coiffeur est traitée de
façon particulière à cause du fait que sous cette
désignation vous avez des barbiers-coiffeurs qui travaillent dans des
hôpitaux, donc qui ont des fonctions avec des malades et d'autres qui
sont dans des institutions pénitentiaires. Les exigences de la
tâche n'étant pas les mêmes, les échelles de
traitement ne sont pas identiques.
M. MASSE (Montcalm): Si on fait une description de la tâche du
barbier-coiffeur du premier ministre, peut-on arriver dans cette
classification?
M. LANGLOIS: Quant aux préposés aux autopsies, au
gouvernement, il travaillent à l'Institut médico-légal et
le contenu de la tâche n'est pas le même que dans les autres
secteurs.
Nous avons conditionné l'explication de cet engagement en
réponse à la deuxième question, à l'acceptation par
le front commun de deux conditions. Que l'identité mathématique,
dans la mesure où elle sera réalisée, soit sur la base de
la moyenne observée et que l'appariement des fonctions proposé
par le gouvernement soit accepté.
Donc, en résumé, le gouvernement se déclarait
prêt, en réponse à cette deuxième question, à
réaliser l'identité mathématique de taux au niveau des
fonctions ouvrières, au cours de la convention mais sur la base de la
moyenne observée et sujet à deux exceptions et à la
condition toutefois qu'on puisse s'entendre sur la moyenne
généralement observée de même que sur les
appariements.
La troisième question était la suivante, et c'était
probablement pour la partie syndicale la plus importante des trois: Le
gouvernement est-il opposé à $100 par semaine au cours de la
convention comme salaire minimum en suivant certaines modalités, compte
tenu du fait qu'il y a déjà un an d'expiré depuis la fin
des conventions dans la plupart des cas? Nous avons répondu à
cette question en disant que le gouvernement n'était pas en
désaccord au niveau des principes sur un objectif comme
celui-là,
c'est-à-dire $100 par semaine mais que cette demande postulait
une politique de revenu familial plutôt qu'une politique de salaire. Nous
avons aussi souligné la situation privilégiée dans
laquelle seraient placés les salariés des secteurs public et
parapublic si le salaire minimum de $100 par semaine était
accordé par rapport à l'ensemble des travailleurs du
Québec. En somme, nous avons exposé qu'à notre avis, si
cette demande était accordée, cela équivaudrait à
faire subventionner les employés de l'Etat par l'ensemble du public.
Suivant les observations faites sur le marché du travail au
Québec, les taux de salaires offerts pour les gens concernés par
cette demande du front commun, sont au moins égaux à la moyenne
généralement observée au Québec pour des emplois
similaires ou analogues et souvent supérieurs.
Nous avons dit clairement au front commun à ce moment-là
que, si leur objectif était d'obtenir un salaire minimum de $100 par
semaine au cours de la convention, qu'il n'en était pas question.
Cependant, avons-nous ajouté, le gouvernement a reconnu qu'il
n'était pas insensible aux arguments apportés quant aux besoins
des moins rémunérés, quant au fait que ces gens sont plus
sensibles que les autres aux augmentations des prix à la consommation et
que l'application stricte de la politique salariale peut leur donner des
augmentations qui en chiffres absolus, paraissent à première vue
plus faibles. Nous avons souligné que les propositions gouvernementales
déposées à ce jour réflétaient d'ailleurs
ces préoccupations jusqu'à un certain point. En effet une
considération particulière a été
démontrée pour certains cas de moins
rémunérés. Nous avons proposé, à titre
d'exemple, l'analyse des offres faites pour la préposée à
l'entretien ménager qui, si nous nous étions fiés à
la moyenne observée au Québec, aurait pu se voir offrir un taux
horaire de $1.82 mais qui, suivant les offres déposées, s'est vu
offrir une échelle de traitement de $2.02, $2.13 et $2.23 en
période 1.
C'est-à-dire que son taux horaire de la dernière
année de la convention expirée est majoré de 4.8 p.c.
malgré le fait que son taux horaire fût déjà
supérieur à la moyenne observée au Québec.
Cet exemple, avons-nous expliqué, était donné
simplement pour illustrer la préoccupation du gouvernement pour les
moins rémunérés, dans ses offres initiales et
n'était pas une indication d'une méthode à utiliser pour
atteindre un objectif semblable pour les autres moins
rémunérés.
Conséquemment, nous avons déclaré que le
gouvernement était disposé à réévaluer
l'application de la politique salariale, telle qu'exposée
préalablement pour les moins rémunérés, de
façon à les augmenter, compte tenu de leur situation
particulière. Nous avons conditionné cependant cette
réévaluation de l'application de la politique salariale, à
ce que la partie syndicale exprime son accord à l'application de la
politi- que salariale telle que déposée, pour ceux qui ne sont
pas dans cette catégorie de ce qu'on pourrait appeler les moins bien
rémunérés. Nous avons indiqué que, pour nous,
l'application de la politique salariale, telle que déposée,
comportait deux éléments, soit la moyenne observée et le
rythme de croisière de 4.8 p.c.
Nous avons posé comme deuxième condition que l'objectif
à atteindre dans cet objectif tienne compte de la variation dans les
semaines de travail, à l'intérieur des secteurs public et
parapublic, ainsi que des perspectives de rémunération, dans les
cas où la rémunération est basée sur un plan de
carrière.
C'étaient là les trois réponses données aux
trois questions posées par le syndicat, lesquelles trois réponses
indiquaient, de façon claire, que les offres gouvernementales sur les
trois sujets mentionnés n'étaient pas rigides, mais qu'elles
étaient l'objet des négociations. Après un ajournement de
quelque temps, les porte-parole du front commun nous ont fait savoir qu'ils
trouvaient nos réponses imprécises et non conformes et ont
qualifié les conditions posées comme préalables à
la négociation, dans ces trois cas, comme étant
complètement inacceptables, sans soit dit en passant
proposer de compromis sur ces préalables. Là-dessus, le
débat fut ajourné au 28 mars.
Vous vous souviendrez que le 28 mars était la date de la
grève générale de 24 heures qui avait été
prévue d'abord pour le 24, mais qui a été reportée
à cause de la tempête, apparemment. Nous avons donc discuté
de cette grève et des mesures prises par le gouvernement pour assurer la
sécurité et la santé publiques. Puis les
représentants du front commun nous ont exposé les bases de leurs
demandes, soit l'augmentation du coût de la vie et une participation
adéquate à l'augmentation de la richesse collective. Cette
journée fut marquée surtout par le fait que le front commun posa
treize questions d'ordre technique au gouvernement, lesquelles questions
concernaient, pour la plupart, les offres gouvernementales
déposées pour le secteur de l'éducation. Une fois les
treize questions posées, la séance fut ajournée, pour
permettre à la partie patronale de donner les réponses
demandées à ces treize questions.
Sécurité d'emploi chez les
enseignants
M. LANGLOIS: C'est le lendemain, soit le 29 mars, que les
réponses furent données. Devant les réponses aux treize
questions, le front commun se déclara satisfait du soin apporté
à répondre aux questions, tout en déclarant n'être
pas nécessairement d'accord sur les explications données. Puis ce
fut, je crois, la partie importante de la journée. Le sous-ministre de
l'Education, M. Yves Martin, est venu exposer la position du gouvernement sur
les demandes de sécurité d'emploi absolue du front commun, dans
le secteur de l'éducation. M. Martin a expliqué que c'est dans le
contexte
général de l'évolution démographique du
Québec qu'il faut d'emblée situer la question de la
sécurité d'emploi chez les enseignants des commissions scolaires
et des collèges, la scolarisation étant désormais'
à peu près complète, au niveau de la maternelle, de
l'élémentaire et du secondaire.
M. Martin a expliqué qu'avec assez de certitude nous devons
prévoir que la clientèle de la maternelle diminuera d'environ
100,400 enfants à quelque 84,600 enfants en 1976-1977. Il a
expliqué que la clientèle de l'élémentaire passera
de 875,000 en 1971-1972 à 738,000 en 1976-1977, une baisse de
près de 140,000 enfants. La clientèle du secondaire augmentera de
615,000 en 1971-1972 à 670,000 en 1976-1977 et diminuera par la suite.
Enfin, la clientèle globale des commissions scolaires passera de
1,590,000 en 1971-1972 à 1,490,000 en 1976-1977, donc une baisse globale
d'environ 100,000. Dans les collèges, comme la chose est normale, en
raison du processus de scolarisation amorcé plus tard à ce
niveau, les inscriptions passeront par un maximum dans les années 1978
ou 1979.
Si l'on interprète, de continuer le sous-ministre, la
sécurité d'emploi comme la garantie qu'aucun enseignant ne
pourrait être remercié à l'avenir, par ce qu'il est convenu
d'appeler un motif de surplus de personnel, il a expliqué qu'on voyait
aisément la dimension du problème posé.
Car, sur la base des chiffres absolus, on doit prévoir que le
système d'enseignement aura besoin d'ici cinq ans de quelque 400
jardinières de moins, d'environ 5,000 enseignants de moins et de quelque
3,200 enseignants de plus au secondaire avant que ne commence une diminution
facilement prévisible de la clientèle, même à ce
niveau.
Ce sont là des chiffres absolus et on sait qu'une analyse plus
raffinée devrait faire intervenir divers facteurs de pondération,
notamment les départs dus à la retraite, les départs
volontaires pour les motifs les plus divers, tels que le décès,
etc. Suivant M. Martin, le gouvernement, les commissions scolaires et les
collèges ont l'obligation de tenir compte des implications d'une
sécurité d'emploi telle que définie plus haut chez les
enseignants.
Ces implications sont extrêmement sérieuses à
plusieurs égards, notamment en ce qui concerne l'économie
générale du système scolaire, la péréquation
des ressources et des services et la qualité de l'enseignement.
Après avoir expliqué chacune des implications concernées,
M. Martin a conclu en disant qu'à partir des exigences de l'ensemble de
notre système d'éducation, il faut tout autant reconnaître
les responsabilités du système d'éducation des commissions
scolaires, des collèges, du ministère de l'Education, de l'Etat,
à l'égard du personnel qui a consacré quelques
années, parfois beaucoup d'années, au progrès de
l'éducation au Québec, avec une détermination et un
engagement qu'on a mal- heureusement souvent tendance à sous-estimer
parce que l'on n'a pas encore perçu les effets profonds de ce qui s'est
accompli chez nous dans le domaine de l'éducation, depuis un peu plus de
dix ans et surtout depuis 1964.
C'est autour de ces responsabilités que devrait se centrer le
débat sur la question de la sécurité d'emploi chez les
enseignants. Si la sécurité d'emploi telle que définie
plus haut est incompatible avec les objectifs de notre système
d'enseignement, en définitive, avec le bien commun de notre
collectivité, le même souci de l'intérêt public
commande que soient définis et mis en application des mécanismes
permettant d'atténuer les effets pour les individus d'une
évolution objective de la situation dans laquelle se trouvera
placé notre système d'éducation.
Nous avons alors exposé que la réponse du gouvernement
à la demande syndicale sur la sécurité d'emploi
déposée au cours des négociations répond aux
objectifs exposés par M. Martin. En effet, le gouvernement a offert au
front commun d'établir un bureau de placement dans le secteur de
l'éducation pour le personnel de soutien scolaire qui n'avait aucun
mécanisme favorisant la mobilité du personnel mis à pied
pour le surplus de personnel.
Le gouvernement est d'avis que ce bureau de placement pour le personnel
de soutien scolaire pourrait rendre autant de services au personnel du soutien
scolaire qu'a pu en rendre celui qui a été établi en 1968
pour les enseignants. En effet, il faut bien noter que, sur 75,000 enseignants,
moins de 400 n'ont pas été relocalisés l'année
dernière, ce qui constitue un taux de friction occupationnelle
extrêmement faible, si on le compare plus particulièrement au
climat qui prévaut généralement au Québec au niveau
des emplois.
Comme deuxième proposition, le gouvernement a offert
d'établir, en collaboration avec le ministère du Travail et de la
Main-d'Oeuvre, un bureau intersectoriel de placement chargé de faciliter
la mobilité du personnel mis en disponibilité. A ce comité
de placement administré et financé entièrement par le
gouvernement serait venu s'ajouter un comité consultatif paritaire, donc
à représentation patronale-syndicale, chargé d'aviser le
comité intersectoriel et les comités sectoriels existants de
placement sur les méthodes à utiliser pour être plus
efficaces et atteindre leurs objectifs.
Nous avons également pris l'engagement de mettre à la
disposition du personnel en disponibilité des programmes de recyclage
appropriés ainsi que de négocier au niveau de chacune des
conventions collectives un préavis d'au moins deux mois au cas de mise
à pied pour surplus de personnel. Cette proposition du gouvernement a
été rejetée comme étant inacceptable par le front
commun et n'a fait l'objet d'aucune discussion au niveau de la table
centrale.
Le 30 mars 1972, les porte-parole du front commun ont demandé que
les journalistes soient admis aux discussions dans le cadre des
négociations. Là-dessus, nous avons répondu que le
gouvernement était venu pour négocier sérieusement et
qu'il n'était pas question que la table des négociations devienne
une arène politique ou une table de spectacle.
Nous avons par conséquent proposé que le temps
était venu de prendre les moyens nécessaires pour discuter
sérieusement et sans contrainte, afin d'explorer les possibilités
de règlement. A la demande du front commun, la séance fut
ajournée et les parties ont convenu, par l'entremise de leurs
porte-parole respectifs, de tenter l'expérience des négociations
en comité restreint où le front commun serait
représenté par les trois présidents des centrales
syndicales et le gouvernement par quatre représentants, soit le
sous-ministre de la Ponction publique, le sous-ministre adjoint aux relations
de travail, le directeur général de la rémunération
et votre humble serviteur.
Le comité restreint s'est effectivement réuni les 30 et 31
mars, les 1er, 2 et 3 avril. De l'avis de tous, les réunions furent
fructueuses, la discussion franche et, à ce titre, il faut le
répéter, de l'avis de tous, c'est donc dire, y compris des
porte-parole du front commun, un certain rapprochement fut amorcé.
Il avait été convenu par les parties que les discussions
au niveau de ce comité restreint demeureraient confidentielles à
moins qu'un accord sur tous les points ne soit conclu. Nous nous étions
fixé également jusqu'au mardi 4 avril pour faire rapport à
nos comités de négociation respectifs sur l'opportunité de
continuer en comité restreint.
Lors de la réunion du 4 avril, c'est-à-dire la
réunion de la grande table, les représentants du front commun ont
admis publiquement que les discussions en comité restreint avaient
été très fructueuses et avaient marqué un certain
progrès mais, chose surprenante, ils prétendaient qu'ils ne
voyaient pas l'utilité de continuer cette formule pour le moment. Nous
avons exprimé, quant à nous, notre surprise publiquement, car
nous nous expliquions difficilement pourquoi, après avoir trouvé
un mécanisme efficace de négociation, on devait le mettre de
côté pour le moment. Nous avons eu notre réponse à
cette question à peine 24 heures plus tard. Soit dit en passant, 24
heures plus tard, c'est à ce moment-là que nous avons appris la
tournée provinciale que voulaient amorcer les trois présidents
des centrales.
Proposition du front commun
M. LANGLOIS: Entre-temps, à cette même séance du 4
avril, les représentants du front commun firent une proposition
salariale globale constituant une modification de leur demande originale.
Substantiellement, cette proposition du front commun consiste à reporter
en troisième année l'objectif d'un taux horaire minimum de
traitement de $3.08 l'heure, c'est-à-dire $100 par semaine pour 32
heures et demie d'ouvrage. Ils ont proposé de combler la
différence entre les salaires actuels et la résultante de
l'application de leurs $3.08 et de leurs échelles en troisième
année par des augmentations progressives qui ferment l'écart au
rythme d'un tiers par année ou 33 p.c. par année.
Ils ont conditionné cette proposition à l'acceptation de
toutes les normes, de tous les principes et de toutes les modalités
d'application contenus dans leurs documents de méthodes qui avaient
été déposés en même temps que leurs demandes
salariales. Autrement dit, ils étaient prêts à reporter en
troisième année leur $100 par semaine à la condition qu'on
accepte intégralement leur politique de rémunération, leur
technique de construction d'échelle et leur rythme de
croisière.
Enfin, dans le cas où, malgré les augmentations de salaire
obtenues suivant les méthodes proposées, celles-ci étaient
moins que 7 p.c. pour une fonction donnée, la différence devait
être comblée par un montant forfaitaire de telle sorte
qu'annuellement un employé ne reçoive jamais moins que 7 p.c.
d'augmentation. A l'analyse, nous nous sommes rendu compte que cette
proposition comportait une demande d'augmentation de salaire de plus de 8.9
p.c. la première année, 8.2 p.c. la deuxième année
et 7.6 p.c. la troisième année, sans tenir compte du minimum de 7
p.c. d'augmentation demandé pour les fonctions où un tel rythme
de croisière ne serait pas atteint. Nous nous sommes également
rendu compte que les demandes du front commun comportaient une augmentation de
masse salariale de l'ordre de $408 millions en trois ans ou des
déboursés supplémentaires répartis sur trois ans de
l'ordre de plus de $800 millions, sans tenir compte de l'augmentation minimum
de 7 p.c.
Avec cette proposition du front commun, l'écart entre la demande
syndicale et les offres du gouvernement était maintenant de l'ordre de
quelque $150 millions en terme d'accroissement de masse salariale, à
l'exclusion des 7 p.c, ou de l'ordre de $300 millions en terme de
déboursés additionnels répartis sur trois ans. Plus tard,
nous avons découvert que, compte tenu de ces 7 p.c, l'écart en
terme d'accroissement de masse, au lieu d'être de $150 millions,
était en réalité de $172 millions. Ces 7 p.c.
coûtaient $22 millions de plus.
Compte tenu des remarques que nous avions déjà faites
depuis le début des négociations, de toute évidence, la
proposition syndicale était irréaliste et inacceptable. Nous
n'avons pas voulu donner au front commun l'illusion que nous étions
prêts à considérer sérieusement une telle
proposition. Mais au lieu de nous en tenir à une position strictement
négative, nous avons souligné dans l'intérêt des
négociations qu'il nous fallait faire une contreproposition, ce que nous
ayons fait sur le champ.
Nous avons d'abord indiqué au front commun que sa proposition
était inacceptable parce que irréaliste, que la ronde des
millions était
terminée et que nous n'étions plus à la
période de 1960-1970, où il y avait fallu mettre de l'ordre dans
les traitements payés dans les secteurs public et parapublic pour des
raisons qu'il serait inutile de rappeler puisqu'elles sont de
notoriété publique. Nous avons rappelé qu'il restait un
seul secteur où il n'y avait pas eu d'ordre de mis dans les traitements;
il s'agit du secteur du soutien scolaire qui fait l'objet d'augmentations
moyennes supérieures à 24 p.c. pour les trois années au
cours de la convention.
Suivant les propositions actuelles du gouvernement au niveau du soutien
scolaire, il y a plusieurs employés qui recevront, dès la
première année, des augmentations de traitement annuel
supérieures à $1,000. Il faut bien le souligner.
Proposition gouvernementale
M. LANGLOIS: Nous avons ensuite procédé au
dépôt de la proposition gouvernementale dans les termes suivants
et je répète ici exactement les termes de la proposition
pour ne pas qu'il y ait de confusion sur la portée de cette proposition
que nous avons faite le 4 avril : Lundi, le 27 mars dernier, avons-nous
dit, nous répondions â trois questions que le front commun avait
posées, dont une concernait la demande des $100 par semaine comme
salaire minimum dans les secteurs public et parapublic. Vous vous souviendrez
que nous avions répondu à la question relative aux $100 en
affirmant que le gouvernement était prêt à assouplir
l'application de la politique salariale aux moins
rémunérés, compte tenu du fait que ceux-ci sont plus
sensibles aux augmentations du coût de la vie et que les augmentations
traduites en chiffres absolus pourraient paraître, à
première vue, relativement plus faibles.
Nous avions alors posé deux conditions préalables au
dépôt d'une proposition détaillée en ce sens, et ces
conditions étaient que la politique salariale telle que
déposée par le gouvernement soit appliquée pour ceux qui
ne sont pas des moins rémunérés et que l'objectif à
atteindre, soit le taux minimum à atteindre, tienne compte de la
variation dans la durée des semaines de travail à
l'intérieur des secteurs public et parapublic, c'est-à-dire cette
variation qui veut que dans certains secteurs, les employés travaillent
32 1/2 heures et dans d'autres, 38 3/4 heures et même 40 heures. Ces deux
questions préalables constituent pour le gouvernement des questions
fondamentales. En effet, d'une part, un effort particulier pour les moins
rémunérés ne doit pas servir de prétexte et
nous avons insisté là-dessus pour obtenir des
augmentations pour les employés qui ne tombent pas dans cette
catégorie. Si tel était le cas, le gouvernement serait
obligé de mettre en doute les véritables motifs qui sous-tendent
la demande du front commun de $100 par semaine comme rémunération
minimale. Est-ce une préoccupation sociale ou un argument additionnel
pour augmenter les demandes salariales pour l'ensemble des employés du
secteur public?
Quant à nous, nous avons tenu pour acquis que c'était une
préoccupation sociale et c'est dans ce sens que la proposition
gouvernementale a été formulée. D'autre part, avons-nous
continué et c'était la deuxième condition
l'objectif doit être envisagé dans le cadre d'une semaine normale
de travail de façon à ne pas, à l'occasion d'une semaine
de travail relativement courte, gonfler artificiellement les taux horaires
requis pour atteindre cet objectif, lequel gonflement de taux accorderait aux
salariés des secteurs public et parapublic un statut
privilégié par rapport aux salariés du secteur
privé.
Le front commun nous l'avons rappelé avait
répondu à notre offre simplement en la qualifiant
d'imprécise. Il avait refusé de rencontrer les conditions
préalables posées. Nous leur avons rappelé qu'ils
n'avaient même pas cru opportun d'explorer le contenu de notre offre en
tentant de poser, par exemple, des solutions de rechanges aux conditions
préalables posées. Malgré cette attitude, nous avons
décidé de présenter cette proposition de façon
détaillée. L'objectif de la proposition, c'est que le
gouvernement établisse un taux minimum de $2.50 l'heure dès le
début de la troisième période de la convention,
c'est-à-dire la période communément appelée,
période P-3 et ce, suivant certaines modalités. Il faut bien
noter qu'un tel taux, c'est-à-dire un taux de $2.50 basé sur une
semaine de travail de 40 heures, procure un revenu annuel de $5,200 pour un
revenu hebdomadaire de $100 par semaine. Pour le personnel ouvrier, au
début de la troisième période de la convention, le taux
unique, ou dans le cas des fonctions à plus d'un taux, le taux minimum,
serait au moins égal à $2.50 l'heure. Quant au personnel de
bureau et au personnel assimilé au personnel de bureau, au début
de la troisième période de la convention, le taux au point milieu
des échelles serait au moins égal à $2.50 l'heure. La
méthode proposée pour atteindre cet objectif fut l'augmentation
du rythme de croisière. En effet, en augmentant substantiellement le
pourcentage annuel d'augmentation des moins rémunérés, il
est possible d'atteindre l'objectif dès le début de la
troisième période de la convention, c'est-à-dire, à
toutes fins pratiques maintenant, le 1er juillet 1973.
Voici l'application de la méthode, à la catégorie
"ouvrier". Nous expliquerons l'application de la méthode, à la
catégorie des employés de bureau et techniciens. Pour les
ouvriers, c'est-à-dire tous les employés classés dans une
fonction ouvrière dont le taux de salaire horaire unique, ou maximun
selon le cas, se situe entre $2.23 et $2.54 en période 1, au terme des
offres gouvernementales déjà déposées, le rythme de
croisière serait l'objet de la considération spéciale,
c'est-à-dire une augmen-
tation de pourcentage annuel supérieure à 4.8 p.c.
Traduit en description de fonctions, cela comprend les fonctions
suivantes: dans le secteur hospitalier, les fonctions situées entre aide
général féminin de cuisine et auxiliaire en alimentation;
dans la fonction publique, les fonctions comprises entre aide domestique et
nettoyeur-laveur; dans le secteur de l'éducation, les fonctions
comprises entre aide général féminin de cuisine et
préposé masculin de buanderie et à la
Société des alcools, les fonctions situées entre
étiqueteuse et chef de groupe. Traduit en nombre, 32,000 ouvriers et
gens du personnel d'entretien environ recevraient une considération
particulière, c'est-à-dire un rythme supérieur à
4.8 p.c. Nous avons souligné que le rythme de croisière
spécial que nous proposions s'appliquait évidemment à tous
les taux d'une fonction et non pas, dans le cas où il y a plus d'un
taux, uniquement au taux maximum.
La méthode propose que le taux d'augmentation annuel varie entre
4.8 p.c. et 5.5 p.c. par année. Il passe à 4.9 p.c. pour les
fonctions dont le taux horaire est de $2.54 suivant les offres originales
déposées et ce en augmentant graduellement jusqu'à 5.5
p.c. pour les fonctions dont le taux de salaire est de $2.23.
Il faut bien dire que c'était l'état des
dépôts, le 4 avril. Vous vous souviendrez que nous avons
augmenté à nouveau cette proposition pour porter les taux de
rémunération de 5.3 p.c. à 6 p.c. pour ces mêmes
personnes, c'est-à-dire ces 32,000 ouvriers et gens du personnel
d'entretien.
M. BOIVIN: Est-ce que cela implique l'injection de $32,900,000?
M. LANGLOIS: C'est l'injection de $11,500,000.
M. BOIVIN: De $11,500,000. Cela a été fait, à ce
moment-là, le 4 avril.
M. LANGLOIS: Cela a été fait le 4 avril, monsieur. C'est
exact.
En conséquence, moins un employé est payé, plus son
pourcentage d'augmentation annuelle est élevé. Nous avons
posé une exception à la considération particulière,
et c'est pour les employées classées comme filles de table dont
le salaire tient compte des suppléments provenant des pourboires. C'est
commun dans l'ensemble du marché du travail, cette façon de
traiter les filles de table. Voilà pour les 32,000 ouvriers et les gens
du personnel de soutien affectés par cette considération
spéciale. Quant aux employés classés comme personnel de
bureau ou techniciens, tous les salariés de cette catégorie
classés dans une fonction dont le point milieu de l'échelle se
situe à un niveau analogue aux taux des ouvriers
précédemment cité, en période de 1, au terme de nos
offres déjà déposées suivant la proposition,
seraient l'objet de la considération spéciale,
c'est-à-dire plus de 4.8 p.c. d'augmentation entre 4.8 p.c. et 5.5 p.c.
Traduit en description de fonctions, cela comprend les fonctions suivantes:
pour le secteur hospitalier, les fonctions situées entre dactylo junior
et opératrice de machine comptable; pour la fonction publique, les
fonctions comprises entre dactylo grade 11 et sténo grade 11; pour le
secteur de l'éducation, les fonctions comprises entre auxiliaire en
informatique 11 et auxiliaire de bureau et pour la SAQ, la
Société des alcools, les fonctions comprises entre dactylo junior
et auxiliaire de bureau.
Traduit en nombre d'employés, plus de 5,200 employés de
bureau bénéficient directement de cette considération
particulière et aussi 5,000 employés additionnels seraient
affectés par inference soit un total de 10,200 employés qui
recevraient une considération particulière dans ce secteur. Donc,
ajouté aux quelques 32,000 mentionnés, la proposition
gouvernementale du 4 avril touchait directement ou par inférence 42,000
des 200,000 représentés par le front commun.
Comme ces employés sont rémunérés sur un
plan de carrière, c'est-à-dire les employés de bureau,
c'est la perspective de rémunération qui tient compte du taux
minimum de $2.50. C'est pourquoi la technique de construction des
échelles demande que le point milieu de l'échelle soit
ajusté, de façon à procurer les $2.50 comme point milieu
minimum en cours de convention à compter, par conséquent, du 1er
juillet 1973.
La technique utilisée est également la même,
c'est-à-dire l'augmentation du rythme de croisière qui varie de
4.9 p.c. à 5.5 p.c. en augmentant vers les fonctions les moins
payées. C'est le système d'une courbe.
Nous avons posé deux exceptions à la considération
particulière, soit l'auxiliaire familiale parce qu'elle est
rémunérée suivant deux classes et le responsable de salle
de quilles je crois qu'il y en a un dans tout le secteur qui
reçoit, en plus de son salaire, une commission sur le chiffre
d'affaires.
Nous avons proposé comme corollaire et non pas comme
condition à l'acceptation de cette proposition du gouvernement
d'augmenter la semaine de travail dans le secteur public et dans le secteur
hospitalier, afin d'aider les salariés à rencontrer leur objectif
qui est d'avoir un revenu minimum de $100 par semaine. En effet, nous avons
proposé d'augmenter la semaine de travail chez les fonctionnaires de 32
1/2 à 35 heures en deux étapes: l'une à compter du 1er
janvier 1973 et l'autre à compter du 1er janvier 1974. Cela impliquerait
une augmentation de quinze minutes par jour.
Pour le soutien hospitalier, nous avons proposé d'augmenter la
semaine de travail de 38 3/4 heures à 40 heures à compter du
1er
Janvier 1973. Cette proposition du gouvernement a l'avantage de
rencontrer un objectif qui procure aux salariés un revenu de $100 par
semaine de 40 heures de travail sans toutefois servir de prétexe
à gonfler les salaires de ceux qui ne sont pas les moins
rémunérés. Cette proposition du gouvernement sur la
semaine de travail a peut-être été mal perçue. Il ne
s'agit pas, nous devons le répéter, d'une condition, nous avons
pris comme attitude que si la demande du front commun au niveau du $100
était d'assurer un certain revenu garanti dans une semaine, nous
étions prêts â nous engager à garantir un minimum
d'heures. C'est dans cette perspective que la proposition gouvernementale a
été faite d'augmenter par exemple dans la fonction publique les
salariés de 32 h 1/2 heures à 35 heures graduellement, de les
rémunérer pour ces heures de façon à augmenter leur
"take home pay" hebdomadaire et non pas comme condition d'acceptation de la
proposition.
M. BOIVIN: Ces $32 millions est-ce que cela fait partie de cela?
M. LANGLOIS: Non, c'est encore dans les $11.5 millions, mais
l'augmentation de la semaine de travail n'a pas été
comptée dans les implications pécuniaires de ces $11.5
millions.
M. BOIVIN: Qu'est-ce que cela impliquait, quel montant est-ce que cela
donnait, cette augmentation de salaire?
M. LANGLOIS: C'est proportionnel au nombre d'heures, une heure et quart
sur 32 heures.
M. BOIVIN: Mais, comme masse globale, qu'est-ce que cela donnait?
M. LANGLOIS: Pour tout le monde?
M. BOIVIN: Pour tout le monde, l'offre que vous avez faite de prolonger
de 15 minutes pour augmenter le salaire, qu'est-ce que cela impliquait en
argent?
M. LANGLOIS: Pour tous ceux qui sont à 32 1/2 heures, vous
en avez à peu près 35,000 la masse salariale de ces
gens-là doit être en gros de $200 millions. Par conséquent,
cela aurait impliqué en gros $20 millions de plus. Sauf
qu'évidemment, cela aurait eu un effet sur l'effectif.
C'est-à-dire que, si vous augmentez les heures, il y a un volume
d'ouvrage qui se fait, ce qui signifie que, pendant les années à
venir, vous êtes en mesure de comprimer les additions d'effectif.
M. BOIVIN: Mais cela ne faisait pas partie des $32 millions?
M. LANGLOIS: Non.
M. BOIVIN: Nous en sommes toujours aux $11 millions.
M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Jean.
M. VEILLEUX: M. le Président, j'aurais peut-être dû
poser la question à M. Angers hier, lorsqu'on établit une moyenne
de salaires en partant de sondages, si je peux m'exprimer ainsi, à
partir de l'industrie privée contenant un certain nombre
d'employés, est-ce qu'en même temps on a fait le pourcentage
d'heures de travail des employés de ces industries?
M. BOLDUC: On a toujours raisonné sur une base horaire. Par
conséquent, c'est un problème qui ne se pose pas. On part avec
une unité de mesure qui est valable dans tous les cas. C'est pour
ça qu'en ramenant l'étude du marché du travail au tarif
horaire, le problème se trouve à être...
M. VEILLEUX: Je regarde les échelles, si la semaine était
de 40 heures, comme on le retrouve assez souvent dans l'industrie
privée, la très très grande majorité des
fonctionnaires toucherait les $100 par semaine. Etant donné qu'on est
à 32 heures, 35 heures ou 38 3/4 heures, il manque... Dans l'industrie
privée, est-ce qu'il s'agit d'une moyenne de 32 heures, 35 heures, 38
1/2 heures, 40 heures, qu'est-ce que c'est?
M. BOLDUC: Chez le personnel ouvrier c'est toujours 40 heures et plus et
chez le personnel de bureau, c'est 35 heures, 37 1/2 heures. Les fonctionnaires
fédéraux font, je crois, 37 1/2 heures, c'est entre 35 heures et
37 1/2 heures.
M. VEILLEUX: Au point de vue du nombre d'heures de travail, les
fonctionnaires sont d'une certaine façon privilégiés.
M. BOLDUC: Sauf la ville de Québec, qui est dans une situation un
peu particulière. Ailleurs, je ne pense pas qu'on rencontre un nombre
d'heures de travail hebdomadaire plus faible que dans la fonction publique.
M. VEILLEUX: Merci.
M. LANGLOIS: La proposition que nous avons faite le 4 avril comportait
également ceci: nous avons déposé une deuxième
proposition, ce 4 avril en même temps que celle sur l'augmentation du
rythme de croisière pour les moins payés, c'est-à-dire
concernant les règles d'intégration du personnel de soutien
hospitalier dans de nouvelles échelles de traitement proposées de
façon à leur accorder des augmentations de salaire de l'ordre de
4.8 p.c. et plus dans certains cas, et ce, conformément aux offres
gouvernementales déposées à cette date à la table
sectorielle des hôpitaux.
C'est-à-dire que dans le secteur hospitalier, on a changé
le nombre d'échelons dans certaines échelles.
Ces deux propositions comportaient pour le gouvernement une augmentation
de la masse salariale de l'ordre de $5 .millions et aux offres
déjà déposées et à des
déboursés additionnels, répartis sur trois ans,
supérieurs à $11,500,000. Donc, c'est l'offre qu'on a
qualifiée de $11,500,000. A la suite de cette proposition du
gouvernement, le front commun demandait un ajournement. Plus tard, dans cette
journée du 4 avril, le front commun a déclaré la
contrepro-position du gouvernement inacceptable et irréaliste.
Après avoir discuté davantage les principes sous-tendant à
la position respective des parties, la séance des négociations
fut ajournée au lendemain sans que nous ayons de contrepro-position de
la partie syndicale. Au début de la séance du 5 avril, nous avons
demandé aux représentants du front commun si le rapport des
journaux publiés le matin à l'effet que les présidents des
centrales partaient en tournée provinciale d'information à
compter de l'après-midi, était vrai ou faux. A ce sujet, les
présidents des centrales ont répondu qu'à moins que le
ministre de la Fonction publique ne soit présent, ils n'étaient
pas prêts à continuer les négociations, sauf si le
gouvernement déposait de nouvelles propositions salariales ainsi qu'une
nouvelle proposition sur la sécurité d'emploi.
M. VEILLEUX: Avant d'aller plus loin, M. le Président, si j'ai
bien compris, le côté syndical n'a fait qu'une contreproposition
en reportant les $100 à trois ans, moyennant certaines conditions.
M. LANGLOIS: C'est exact.
M. VEILLEUX: Est-ce qu'il a fait, lors des discussions salariales
d'autres contrepro-positions ou si ce fut la seule?
M. LANGLOIS: Cela a été la seule. D'ailleurs, ce que je
vous donne là est tout ce qui s'est déroulé. Comme vous le
voyez d'après ce que je vous dis, il n'y a eu qu'une seule proposition,
celle du 4 avril à laquelle nous avons répondu.
M. VEILLEUX: D'accord, je voulais clarifier ce point.
M. LANGLOIS: A ce moment-là, le 5 avril, c'est-à-dire, 24
heures après qu'ils eurent déclaré que le comité
restreint avait été un moyen efficace de négociation mais
qu'ils n'étaient pas prêts à le continuer, selon les
porte-parole du front commun, l'intervention d'un homme politique était
nécessaire pour réduire l'écart entre les propositions
gouvernementales et les demandes du front commun.
Nous avons alors indiqué au front commun que nous avions un
mandat pour négocier et que le ministre de la Fonction publique se
réservait son rôle d'homme politique. Nous avons refusé de
continuer la négociation aussi longtemps que le caractère
représentatif du comité gouvernemental de négociation
était mis en doute par la partie syndicale. Devant le refus du front
commun de retirer sa demande de voir le ministre de la Fonction publique
présent à la table de négociation, nous avons
demandé un ajournement afin d'évaluer la situation et de donner
une réponse définitive au front commun au sujet de cette
demande.
M. VEILLEUX: Excusez-moi encore. Quel était le porte-parole du
front commun à la table centrale? Est-ce que c'était un des
présidents ou si c'était un des négociateurs?
M. LANGLOIS: Le porte-parole était M. Marcel Pepin. A l'occasion,
les deux autres présidents de centrales intervenaient, mais MM. Laberge
et Charbonneau nous ont déclaré à plusieurs reprises que
leurs porte-parole était Marcel Pepin. Je m'excuse parce que j'ai eu la
malchance de faire déformer mon nom et je me vois coupable de la
même erreur à l'endroit de celui qui déforme le mien.
Donc, nous n'avons pas voulu briser les négociations à ce
moment-là. Nous avons dit: Nous voulons avoir jusque dans la
soirée pour vous donner une réponse définitive à
votre demande d'avoir le ministre de la Fonction publique présent. Nous
voulions ce délai pour des raisons évidentes. Face à une
brisure ou à une suspension indéfinie des négociations,
nous voulions consulter le ministre de la Fonction publique et le comité
ministériel chargé de nous mandater sur les négociations.
Nous avons été mandatés dans la soirée du 5 avril
pour donner la réponse textuelle suivante: "Vous avez demandé ce
matin la présence du ministre de la Fonction publique à cette
table comme condition préalable à la poursuite des
négociations. Vous avez voulu supporter cette demande en
alléguant que les négociations n'avaient pas suffisamment
progressé depuis le 16 mars, c'est-à-dire le début de nos
rencontres à cette table centrale. Pourtant, vous avez
déclaré que nos discussions préliminaires du 16 au 29 mars
avaient été nécessaires et utiles. Pourtant c'est le 29
mars que vous acceptiez avec nous de faire l'expérience du comité
restreint. "C'est avec nous que vous avez eu, suivant vos propres mots, des
échanges sérieux et profitables, à l'occasion de ce
comité restreint. C'est hier seulement, soit le 4 avril, que vous
reconnaissiez publiquement le progrès réalisé à
l'occasion des rencontres en comité restreint. C'est hier
toujours en parlant du 4 avril où pour la première fois,
nous nous sommes fait des propositions réciproques, nouvelles qui
constituent un certain rapprochement. Nous ne voyons pas comment, dans un tel
contexte, vous pouvez supporter votre demande, en alléguant que la
négociation n'a pas suffisamment
progressé. D'ailleurs, nous ne pouvons ignorer le fait que
certains journaux annonçaient déjà votre tournée
provinciale, c'est-à-dire, dès le matin du 5 avril. Si le
ministre de la Fonction publique a jugé préférable de ne
pas être présent physiquement à la table de
négociation, c'est qu'il a cru que les parties étaient
conscientes que c'est dans la négociation qu'on en arriverait à
une entente. Conséquemment, il a voulu laisser ax négociateurs du
gouvernement, le soin de faire ce travail, se réservant de jouer le
rôle qui lui est propre, c'est-à-dire celui d'un homme politique.
En tant que tel, le ministre avise le conseil des ministres et obtient le
mandat, ce qu'il a fait depuis le début. En tant qu'homme politique, le
ministre de la Fonction publique n'entend pas intervenir dans le débat
autrement qu'en Chambre ou en commission parlementaire, en cas de faillite de
la solution négociée. Cette prise de position, le ministre de la
Fonction publique l'a exprimée â plusieurs reprises depuis le
début de nos pourparlers et c'est celle du gouvernement. Il n'est donc
pas question pour le ministre de la Fonction publique de revenir publiquement
dans le débat, à cette table, pour deux raisons. D'abord, le
gouvernement ne croit pas que la solution négociée ait
échoué, surtout à la lumière de ce qui s'est
passé, depuis le début des rencontres, à la table
centrale. Deuxièmement, la table des négociations ne doit pas
devenir une arène politique."
Nous avons conclu en disant que, quelle que soit la décision du
front commun à la suite de notre réponse, le gouvernement
demeurait prêt à continuer les négociations, le lendemain
et ce, jusqu'au règlement.
Nous avons enfin posé une question à l'effet que si le
front commun croit que les négociations débordent le contexte
normal de la négociation pour être devenues à
caractère politique, il n'a qu'à le dire clairement. Le
gouvernement prendra les décisions qui s'imposent dans de telles
circonstances. Là-dessus, le front commun imposa une fin de non-recevoir
et déclara qu'il se retirait de la table de négociation, tant et
aussi longtemps que le gouvernement ne se déclarerait pas prêt
à modifier substantiellement ses offres salariales.
Nous avons alors répondu que nous avions déposé une
contreproposition à leur première proposition modifiant leur
demande originale et que c'était maintenant à eux, s'ils
voulaient faire avancer les pourparlers, à répondre à la
proposition que nous leur avions faite.
Le lendemain, le 6 avril, nous nous sommes rendus à la table de
négociation. Nous avons attendu les représentants du front commun
et, devant leur absence, nous l'avons quitté pour ne pas y retourner,
tant et aussi longtemps que le front commun ne se déclarerait pas
prêt à négocier.
Grâce â des communications téléphoniques, des
réunions soi-disant secrètes furent tenues les 13 et 14 avril
1972, entre d'une part les trois présidents de centrales et d'autre part
les quatre représentants du gouvernement qui avaient assisté aux
réunions en comité restreint, auxquels était venu
s'ajouter le ministre de la Fonction publique, M. L'Allier.
Comme vous le savez, une fuite a permis à ces réunions
d'être connues du public. A tout événement, ces
réunions n'ont apporté aucun résultat significatif, si ce
n'est de servir comme un des prétextes du front commun d'accepter enfin
l'invitation inconditionnelle que nous leur lançions depuis le 5 avril,
de reprendre les négociations.
Lors de la reprise des négociations, dans l'après-midi du
17 avril, nous avons offert de déposer une nouvelle offre globale,
modifiant substantiellement les offres déjà
déposées, sur les quatre sujets faisant l'objet des
négociations à la table centrale, à la condition
toutefois, que le front commun réduise ses demandes de plus de $100
millions. C'était le 17 avril, un lundi après-midi. Au moment de
poser cette condition, l'écart entre les offres et les demandes
était estimé à $150 millions parce que nous, nous n'avions
pas été en mesure de calculer, à ce moment-là, les
effets de leur proposition, leurs fameux 7 p.c. minimums. Nous avons su depuis
cette date que l'écart était en réalité de $172
millions au lieu de $150 millions. Quand nous leur proposions de réduire
l'écart de plus de $100 millions, c'est que dans notre esprit
l'écart se situait à ce moment-là à $150
millions.
Nous avons expliqué que cette condition visait à mettre
les parties à portée de voix. Le gouvernement n'avait pas
l'intention de faire une nouvelle offre, si celle-ci n'avait aucune chance
d'être acceptée comme base valable de discussions.
Il faut bien se rappeler que le gouvernement avait déjà
vécu l'expérience d'une rupture de négociations par le
front commun au lendemain du dépôt d'une offre comportant une
injection pécuniaire de plus de $11.5 millions. Nous ne voulions pas,
par conséquent, jeter dans le drain d'autres millions sans raisons
très sérieuses.
Devant le refus des représentants du front commun de modifier de
quelque façon leurs demandes ils ont même refusé de
dire s'ils étaient prêts à les modifier en dernier ressort
nous avons quand même décidé de déposer une
offre globale nouvelle, conscients que nous étions de la gravité
de la situation après plus de sept jours de grève et vu le
désir du gouvernement de tenter un effort ultime pour amener un
règlement négocié, toujours le 17 avril.
M. BOIVIN: $32 millions.
M. LANGLOIS: En termes strictement de stratégie de
négociation, nous étions parfaitement justifiés de ne pas
en déposer, mais conscients que nous étions qu'il y avait 200,000
personnes en grève depuis sept jours et que l'employeur était le
gouvernement, la décision a été prise de faire une
offre.
Le porte-parole du gouvernement a communiqué avec le porte-parole
du front commun, M. Pepin, dans l'après-midi du 17 avril, pour lui
demander une rencontre dans la soirée afin de déposer cette
offre. M. Pepin a refusé la rencontre dans la soirée,
prétextant qu'il n'avait pas le temps de nous rencontrer.
Cette nouvelle offre a donc été déposée
uniquement le 18 avril, soit le lendemain, à sept heures du matin. Cette
proposition du gouvernement qui a été déposée
suggérait ceci à toutes fins pratiques. D'ailleurs, elle est dans
le document du gouvernement résumant les informations sur les
négociations. Les dernières propositions du gouvernement, telles
que déposées, touchaient les quatre sujets de négociation,
c'est-à-dire les salaires, la sécurité d'emploi, le
régime supplémentaire de rentes et l'assurance-salaire.
Il s'agit d'une injection pécuniaire globale de $32.5 millions.
Qu'avons-nous proposé au niveau de l'assurance-salaire? Nous avons
proposé un certain nombre de mécanismes pour assouplir la mise en
application de ce nouveau régime, de façon à
protéger les droits acquis. Nous avons proposé par exemple que
l'indemnité d'auto-assurance qui devait, au départ, être
d'une journée et demie par année, soit portée à
deux jours; nous avons proposé que les banques de congés de
maladie qui avaient été accumulés dans les secteurs
où ces banques existent puissent être utilisés à
certaines fins comme, par exemple, le rachat d'années de service dans
les régimes de retraite. Nous avions proposé dans le plan
original d'assurance-salaire que la valeur de ces jours soit gelée au
1er janvier 1973 et nous avons proposé comme mécanisme
d'adoucissement que si cette valeur est gelée au 1er janvier 1973, elle
porte intérêt au taux de 5 p.c. par année.
Il y a également un certain nombre d'autres assouplissements que
nous avons aussi proposés, c'est-à-dire des modifications de
telle sorte que la proposition du gouvernement au niveau de l'assurance-salaire
puisse être dissociée de sa proposition sur le régime
supplémentaire de rentes.
Le deuxième sujet sur lequel nous avons déposé des
propositions, c'est au niveau de la sécurité d'emploi. Nous avons
proposé au front commun une formule de paye de séparation,
c'est-à-dire que le gouvernement garantit à un enseignant ou
à un employé du personnel du soutien scolaire un certain nombre
de semaines à plein traitement ou presque, afin de lui permettre de se
trouver un autre emploi.
Dans le cas d'un enseignant, nous avons proposé une paie de
séparation basée sur 100 p.c. de son salaire pour les quatre
premières semaines suivant sa mise à pied, 80 p.c. de la
différence entre le montant payé par l'assuran-ce-chômage
et son salaire total à compter de la cinquième semaine
jusqu'à la neuvième semaine et ainsi de suite en baissant
jusqu'aux $100 maximum payés par la Commission d'assuran-
ce-chômage suivant la nouvelle formule d'assurance-chômage,
jusqu'à la vingtième semaine inclusivement.
Pour le personnel de soutien scolaire, cette paie de séparation
se prolongeait jusqu'à la quarantième semaine,
c'est-à-dire presque un an complet. Nous avons également
proposé de payer à une personne qui, au lieu de vouloir se faire
placer ailleurs dans le secteur public et parapublic, décide d'en sortir
complètement une espèce d'indemnité globale, une
indemnité de fin d'emploi qui serait basée sur le nombre
d'années de service.
Au niveau du régime supplémentaire de rentes, le
gouvernement a également modifié sa proposition principalement
pour réduire la contribution de l'employé, compte tenu du plan
d'assurance-salaire qui avait déjà été
proposé et qui prévoyait une certaine indemnité au cas
d'invalidité ou de décès avant d'avoir atteint l'âge
de la retraite mais la proposition principale faite par le gouvernement au
niveau du régime de retraite était de reporter l'augmentation de
la contribution dans la fonction publique et les enseignants de 5 p.c. à
7 p.c., la distribuer sur quatre ans au lieu de deux ans.
Quant aux employés des hôpitaux et soutien scolaire, il est
question de l'implantation d'un nouveau régime. Nous avons
proposé l'implantation progressive des contributions sur trois ans
à compter du 1er janvier 1973 avec, toutefois, tous les
bénéfices dès la première année. D'ailleurs,
ces modalités vous ont été exposées par le ministre
des Affaires sociales au cours de la séance de mercredi
après-midi.
Au niveau des salaires: La proposition du gouvernement était
possiblement la plus importante de toutes les propositions contenues dans ses
propositions globales. Nous avons offert, en périodes deux et trois,
c'est-à-dire à compter du 1er juillet 1972, de majorer les
rythmes de croisière de 1/2 de 1 p.c. sauf dans le cas des
professionnels de la classe 1 de la fonction publique où la majoration
serait de 2 p.c. La résultante donne un rythme de croisière
variant de 5.3 p.c. à 6 p.c. par année pour l'ensemble des
employés du secteur public et parapublic, à l'exception des
professionnels de la classe 1 de la fonction publique dont le rythme de
croisière devient de 5 p.c.
Nous avons également proposé d'augmenter le minimum
d'augmentation sous forme de forfaitaire actuellement 2 1/2 p.c. pour les
salariés hors échelle à 3 p.c. En période 1, les
offres sont demeurées inchangées suivant les propositions du
gouvernement, c'est-à-dire un rythme de croisière variant de 4.8
p.c. à 5.5 p.c, auxquels s'ajoute cependant le rattrapage, ce qui donne
des augmentations moyennes supérieures à 6 p.c. la
première année, de toute façon. Nous avons indiqué
qu'il y avait lieu de négocier la rétroactivité.
Il faut bien noter, comme je viens de le dire, que le pourcentage moyen
d'augmentation de salaire déjà accordé dans nos offres en
période 1
est plus de 6 p.c. compte tenu du rattrapage et de l'augmentation
procentuelle appliquée aux salaires, variant de 4.8 p.c. à 5.5
p.c. Cette modification des offres salariales entraîne un accroissement
de la masse salariale comme suit : en période 2, c'est-à-dire
entre le 1er juillet 1972 et le 30 juin 1973, $8.4 millions et en
période 3, $9.1 millions auxquels s'ajoutent quelque $1.7 millions au
titre de minimum d'augmentation sous forme de forfaitaire.
En termes de déboursés, au cours de la convention, ou
d'injection pécuniaire, si vous voulez, dans la poche des
employés, il s'agit de quelque. $27.5 millions qui s'ajoutent à
plus de $11.5 millions déjà offerts lors de notre première
contreproposition patronale déposée à la table centrale.
Il faut bien noter que les quelque 40,000 moins payés dont on a
parlé tantôt et qui ont fait l'objet ou qui avaient fait l'objet
d'une première contreproposition dès le 4 avril, voient leur
augmentation portée à un pourcentage variant entre 5.4 p.c. et 6
p.c. par année.
En fait, dans la catégorie des ouvriers, 12,000 d'entre eux
bénéficieront de 6 p.c. d'augmentation et 13,000 autres de 5.8
p.c. En conséquence, pour le personnel ouvrier et d'entretien, dans le
cas de fonctions à plus d'un taux, le taux du deuxième
échelon sera de $2.53 l'heure à compter du 1er juillet 1973 et
pour la fonction la moins bien rémunérée. Quant au
personnel de bureau, le point milieu de son échelle sera de $2.53
l'heure pour la classe d'emploi la moins rémunérée et les
employés bénéficiant d'un salaire de $2.53 l'heure en
troisième période recevront donc un salaire hebdomadaire variant
suivant la semaine de travail comme suit: Pour 40 heures, $101.26 par semaine
ou $5,262 par année; pour 38 3/4 heures, $98.04 ou $5,098 par
année; pour 35 heures, $88.55 pour $4,605 et pour 32 1/2 heures, $82.23
pour $4,276. Si l'objectif du front commun, par conséquent, était
de procurer un revenu minimum garanti quelconque, nous avons maintenu notre
offre d'augmenter progressivement la semaine de travail dans la fonction
publique et dans le secteur hospitalier de façon à augmenter le
take-home pay des employés concernés.
Au niveau des salaires, nous avons également offert de
réduire ou de modifier la structure des taux du personnel ouvrier et
d'entretien pour atteindre cet objectif qui nous avait semblé
prioritaire de la part du front commun, et ce à compter du 1er juillet
1972, c'est-à-dire dans moins de deux mois. Le gouvernement a offert de
modifier la structure des taux de façon qu'il y ait un seul taux de
salaire au lieu de deux taux, dans le cas des ouvriers
spécialisés ou semi-spécialisés, ou, plus
précisément, les journaliers et plus. Quant aux autres ouvriers,
comprenant les aides et l'entretien, chaque fonction comportera deux taux au
lieu de trois, donc, nous nous approchons encore de la proposition du front
commun à compter du 1er juillet 1972, et la période pendant
laquelle le premier taux sera payable a été réduite
à neuf mois au lieu de douze et ce à compter du 1er juillet 1972.
Cette autre modification aux offres salariales comporte des
déboursés ou une injection pécuniaire de $5.4 millions
pour la période concernée. Par conséquent, les
déboursés additionnels au cours de l'entente, si vous ajoutez les
$27 millions qui proviennent de l'augmentation des rythmes de croisière
aux $5.4 millions qui proviennent de la modification dans les structures de
salaire, cela nous donne $32.9 millions, dont plus de $19 millions en
accroissement de la masse salariale.
En résumé, pour l'ensemble du personnel syndical des
secteurs public et parapublic, les augmentations varieront sur trois ans,
suivant les propositions faites par le gouvernement jusqu'à maintenant,
de 16.2 p.c. à 17.8 p.c. au lieu des 15.1 p.c. du début. C'est
donc dire que, pendant la négociation à la table centrale, par la
négociation, on a réussi à faire augmenter les offres
gouvernementales de 16.2 p.c. à 17.8 p.c, ce qu'elles sont maintenant,
à partir des 15.1 p.c. du début. A ces augmentations, s'ajoute un
montant de quelque 1.3 p.c. versé au chapitre de rattrapage dès
la première année.
La proposition globale du gouvernement précise également
certaines règles d'intégration dans les nouveaux plans de
classification de façon à sécuriser les employés
dans les secteurs concernés, c'est-à-dire les secteurs de la
fonction publique, du personnel de bureau, des techniciens, ouvriers, la
Société des Alcools, le personnel de bureau de cette
société, le personnel de bureau des CEGEP, dans le secteur des
affaires sociales et dans le soutien scolaire, parce que là, il y a eu
des modifications importantes apportées soit au plan de classification,
soit au plan de rémunération.
Enfin, au chapitre de la rétroactivité, nous avons dit
textuellement ceci dans la proposition: "Le gouvernement et ses partenaires
offrent de négocier des sommes d'argent à être
versées aux employés à titre de
rétroactivité." C'est là l'état des propositions le
18 avril.
Il faut bien dire qu'au niveau de la sécurité d'emploi le
gouvernement a offert de consacrer une somme de plus de $1 million dans le
secteur de l'éducation pour le recyclage du personnel qui pourrait
être déplacé en raison de surplus d'effectifs. De
même, dans le cas des employés mis à pied dans le secteur
scolaire pour des raisons de surplus de personnel, le gouvernement
s'était engagé à verser pour un temps
déterminé la différence entre la prestation de
l'assurance-chômage et le salaire que l'employé percevait lors de
sa mise à pied.
Le 18 avril, la proposition du gouvernement fut reçue par une
demande d'ajournement du front commun pour lui permettre de l'étudier.
Tard dans la soirée du mardi 18 avril, j'ai reçu personnellement
une communication téléphonique du porte-parole du front commun,
M. Marcel Pepin, m'annonçant qu'il ne serait pas
possible de reprendre les négociations avant seize heures le 19.
Je lui ai alors fait sentir l'étonnement de la partie gouvernementale
devant ce retard et, après consultation avec le comité patronal
de négociation, nous avons accepté de le rencontrer â cette
heure, soit seize heures, le 19 avril. Il faut bien noter que c'était
à sept heures le matin, le 18, que la proposition gouvernementale avait
été déposée et que nous étions en pleine
grève générale.
Réunion du Château Frontenac
M. LANGLOIS: Cependant, le lendemain matin, après consultation du
comité ministériel sur les négociations, il fut
décidé d'inviter les principaux représentants du front
commun à livrer leur réponse â la proposition
gouvernementale globale en réunion restreinte à laquelle le
comité ministériel sur les négociations assisterait.
M. BOIVIN: Au Château, ça?
M. LANGLOIS: C'est la réunion du Château.
M. BOIVIN: Le 19 avril.
M. LANGLOIS: Le 19 avril, elle a commencé le 19 avril. Cette
réunion, en fait, a débuté à 18 heures, le 19
avril, pour se terminer à deux heures et demie du matin, le 20. Au cours
de cette réunion...
M. BOIVIN: Qui était présent à cette
réunion?
M. LANGLOIS: Du côté gouvernemental, il y avait le
comité ministériel des négociations auquel se sont
ajoutés les quatre représentants du gouvernement aux
réunions restreintes, c'est-à-dire le sous-ministre de la
Fonction publique, le sous-ministre adjoint aux relations de travail du
ministère de la Fonction publique, le directeur général de
la rémunération du ministère de la Fonction publique et
moi-même, et les quatre ministres faisant partie du comité
ministériel, soit le ministre des Finances, le ministre de l'Education,
le ministre des Affaires sociales et le ministre de la Fonction publique. Du
côté du front commun, les trois présidents des centrales
étaient assistés d'un certain nombre de présidents de
syndicats faisant partie de chacune des centrales concernées.
Au cours de cette réunion, nous avons indiqué que nous
étions prêts à améliorer nos offres sur
l'assurance-salaire, sur le régime de retraite et sur la
sécurité d'emploi, mais qu'il nous fallait voir l'écart
nous séparant au chapitre des salaires et il fallait voir, dis-je, cet
écart réduit substantiellement avant de faire quelque proposition
que ce soit sur ces trois autres sujets.
Devant notre insistance à obtenir une contre- proposition sur la
question salariale, les représentants du front commun ont
commencé par répondre en nous demandant de leur laisser
répartir à leur façon les quelque $300 millions
déjà offerts par le gouvernement. Ils nous ont dit: Donnez-nous
$300 millions et puis on fera ce qu'on voudra avec, on va les répartir
nous-mêmes dans les échelles. Nous avons alors
répliqué qu'il n'en était pas question pour les raisons
déjà expliquées au cours des négociations. Le
gouvernement considérait que c'était sa responsabilité
d'avoir une politique de rémunération et qu'il ne voulait pas
renoncer à prendre ses responsabilités.
Devant cette réponse, on nous demanda un ajournement
jusqu'à 23 heures afin de consulter le comité de
négociation. Après consultation et compte tenu des discussions au
cours de la réunion, nous avons indiqué qu'il était
inutile de fixer une séance de négociation tant et aussi
longtemps que le front commun n'accepterait pas la proposition globale du
gouvernement comme base d'un règlement négocié, compte
tenu des aménagements possibles à l'intérieur de cette
proposition et des assouplissements additionnels indiqués au cours de la
réunion. Autrement dit, le front commun nous a dit, vers deux heures du
matin, après avoir refusé de nous faire une proposition
salariale, qu'il n'était pas en mesure de faire de proposition salariale
et ce malgré le fait qu'il y avait plus de 36 heures qui nous
séparaient depuis le dépôt de la proposition
gouvernementale et les rencontres du Château Frontenac. Nous lui avons
dit, par conséquent, que nous ne voyions pas l'utilité de
reprendre les négociations tant et aussi longtemps que lui ne serait pas
prêt à considérer la proposition gouvernementale globale
comme base valable de règlement, quitte à négocier des
aménagements déjà proposés ou déjà
indiqués, soit à l'intérieur du document que nous lui
avions déposé à sept heures du matin, le 17 avril, soit
les assouplissements additionnels que nous avions indiqués au cours de
la réunion du Château Frontenac.
J'ai personnellement invité le porte-parole du front commun
à communiquer avec moi s'il désirait fixer une séance de
négociation et je dois dire que, depuis le 20 avril à 2 heures et
demie du matin, je n'ai eu aucune communication du porte-parole du front commun
à cet effet.
M. le Président, c'est le déroulement des
négociations tel que vu, évidemment du côté patronal
et je vous remercie de votre patience. J'espère que c'est complet, du
moins je le pense.
M. LE PRESIDENT: Merci beaucoup, M. Langlois. Le député de
Dubuc.
M. BOIVIN: Merci, M. Langlois de nous avoir fait un tel exposé.
J'aurais une question à poser avant de dire ce que je pense de votre
élaboration, c'est-à-dire ce qu'on a élaboré depuis
le commencement de la commission.
La remise des papiers via la commission de la fonction publique a-t-elle
apporté quelque chose au comité de négociation? Il y a eu
un échange de briques, de tous les papiers. Avez-vous trouvé dans
les papiers qui vous ont été remis par les syndicats quelque
chose de nouveau?
M. LANGLOIS: Absolument rien de nouveau quant à moi.
M. BOIVIN: Cela a été la même chose qui s'est
présentée aux tables de négociation?
M. LANGLOIS: Oui.
M. VEILLEUX: Vous parlez de la brique à la commission en haut
ici?
M. BOIVIN: Ce qui a été présenté via la
commission n'a rien apporté ni fait avancer par ces écrits?
M. LANGLOIS: Exact.
M. L'ALLIER: II n'y a aucun document là-dedans qui nous a permis
de croire qu'à un moment ou l'autre on avait mal
interprété telle position syndicale ou qui comportait des choses
qui n'avaient pas été dites à la table de
négociation ou échangées par documents à la table
de négociation.
M. BOIVIN: Je dois apporter des félicitations à tous ceux
qui se sont présentés aux tables, de la façon qu'ils ont
préparé la négociation. Évidemment, les absents ont
toujours tort. Si la partie syndicale était ici, peut-être
aurions-nous des questions à lui poser. On a tort d'être absent.
Evidemment ç'a été préparé comme toutes les
autres négociations par des fonctionnaires, par des gens
spécialisés, ç'a été présenté,
à mon sens, de façon magistrale à la table de
négociation pour ce qu'on en sait et si on croit tout ce que vous nous
avez dit et tout ce qu'on a entendu encore hier soir, c'était une
proposition sérieuse. Quand on sait que la masse salariale n'est pas
négociable, c'est bien clair que le gouvernement doit juger du montant
mis en cause et il y a une répartition qui doit se faire. Bien sûr
non pas uniquement à un côté de la table mais par les deux
parties, je ne blâmerais pas le gouvernement d'abandonner cette
répartition sans que la table patronale ne puisse dire son mot.
Médiation
M. BOIVIN: Je ne peux pas m'expliquer cette rencontre du Château
Frontenac, je reviens encore là-dessus, cet affrontement qui, à
mon sens, n'était pas nécessaire. Vous avez remarqué
qu'à toutes les fois on a insisté pour avoir le ministre à
la table de négociation. Il y a eu cette rencontre secrète dont
on peut dire que c'est plus une rencontre qu'une négociation mais,
à chaque fois qu'un ministre s'est présenté à des
tables de négociation, cela coûte de l'argent, on est
obligé d'ajouter de l'argent. Pour l'affrontement des trois ministres
avec les trois grands du front commun, il me semble qu'il y aurait eu une
option à prendre à ce moment-là. Je me demande pourquoi
vous ne vous êtes pas servi du mécanisme des lois du travail,
nommer, non pas un arbitre je suis contre l'arbitrage obligatoire quand
on sait que la masse salariale n'est pas négociable je me demande
pourquoi le gouvernement n'a pas opté pour faire agir le ministre du
Travail. On aurait pu demander au ministre du Travail d'intervenir, même
le patron, je considère le ministre de la Fonction publique comme le
patron des employés de la fonction publique et parapublique.
Je me demande pourquoi le ministre de la Fonction publique, qui a
très bien travaillé par ailleurs, je l'ai suivi à
la télévision, je l'ai suivi dans ses déclarations, je
l'ai suivi dans son information n'a pas opté plutôt pour le
mécanisme du ministère du Travail, au lieu de faire s'affronter
les trois ministres avec les trois représentants du front commun.
Réellement, je ne serais pas sincère si je ne disais pas ce que
je pense, cet affrontement a été une chose inutile, cela a fait
perdre la face peut-être aux chefs syndicaux. Quand on veut continuer de
négocier, on s'organise pour ne pas faire perdre la face à celui
avec qui on veut dialoguer. Cet affrontement-là, je ne le digère
pas. Le ministre de la Fonction publique aurait pu faire une option d'autant
plus que le ministre du Travail a participé de façon très
active, en dehors de tous les mécanismes dont il dispose, dont le
ministère dispose. Le ministre du Travail était parfaitement
qualifié pour cela pour avoir participé de façon
très active à la dernière négociation. Il me semble
que les mécanismes du ministère du Travail, que
l'expérience particulière et les qualifications du ministre du
Travail étaient une option que le ministre de la Fonction publique
devait étudier de façon particulière avant de faire
s'affronter le gouvernement et les trois membres du front commun, d'autant plus
que on l'a dit il y a environ 50,000 syndiqués qui ne
faisaient pas partie du front commun.
Evidemment, cet affrontement-là nous a amenés au bill 19
qui a pourri définitivement la situation en commandant le retour au
travail des employés. Je ne suis pas capable de m'expliquer que le
ministre de la Fonction publique n'ait pas opté pour le mécanisme
des lois du travail et l'intervention du ministre du Travail. Le ministre du
Travail ne devait pas nécessairement être le médiateur, il
me semble que le gouvernement aurait pu nommer un conciliateur ou un
médiateur spécial pour cette cause. C'est ce que je pense devant
l'exposé qui a été fait. Nous ne sommes pas ici pour
négocier, nous sommes mal placés pour négocier. Nous
n'avons pas non plus la compétence pour entreprendre une
négociation ici à la table de la commission. Le ministre de la
Fonction publique a très bien travaillé par ailleurs, je veux le
répéter. Mais, à un moment donné, peut-être
que la fatique a été la plus forte. Je pense que l'erreur de
stratégie qui aurait pu être faite à ce moment-là
pourrait être encore réparée en demandant au ministre du
Travail d'intervenir ou de nommer un médiateur.
On a vu les enseignants faire une proposition, soit de demander au
conseil de l'éducation d'intervenir. Je ne suis pas d'avis qu'on doive
prendre l'avis du conseil de l'éducation, bien sûr, on l'a dit.
Mais, il y a certainement une personne qui fait partie de ce conseil qui
pourrait être nommée comme médiateur spécial.
Peut-être que j'aurai certaines questions ou certaines choses à
ajouter encore sur l'ensemble, après avoir écouté
attentivement et avoir suivi de façon très substantielle toutes
ces négociations, pour avoir assisté déjà au
travail considérable et très difficile qu'il y a dans une telle
négociation. Merci, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: Le ministre de la Fonction publique.
M. L'ALLIER: M. le Président, je voudrais apporter un certain
nombre de précisions qui répondront probablement aux questions du
député de Dubuc. Je suis conscient des préoccupations qui
l'animent actuellement. Effectivement la complexité du dossier peut nous
faire poser la question: Pourquoi le ministre du Travail n'est-il pas intervenu
ou pourquoi n'y a-t-il pas eu d'autres mécanismes possibles de
négociation?
En fait, lorsque nous nous sommes engagés dans cette ronde de
négociation, il y a maintenant plus d'un an, le gouvernement a dû
faire un certain nombre de choix. Le gouvernement et ses partenaires
étaient conscients de la diversité des tables de
négociation en même temps que du regroupement qui s'opérait
dans cette négociation. Ce n'est pas l'option du ministre de la Fonction
publique proprement dite qui a eu comme résultat d'exclure du
mécanisme de négociation, le ministre du Travail. Mais, c'est
bien une décision du cabinet, une décision du gouvernement,
décision à laquelle, bien sûr, a participé le
ministre du Travail. C'est d'une façon concertée, et d'une
façon tout à fait voulue que le gouvernement s'est donné
ces structures de négociation. C'est-à-dire en premier lieu le
conseil des ministres, ensuite un comité ministériel formé
des ministres représentant les secteurs les plus directement
impliqués par la négociation, à savoir le ministre des
Affaires sociales, le ministre de l'Education, le ministre des Finances et le
ministre de la Fonction publique.
Parce que le conseil des ministres a donné mandat au ministre de
la Fonction publique, de mener cette négociation, c'est au ministre de
la
Fonction publique qu'on a alors confié la responsabilité
ou la présidence, si vous voulez, de ce comité
ministériel. Sous ce comité ministériel,
présidé par le ministre de la Fonction publique, il y avait le
comité de négociation composé à la fois des
principaux fonctionnaires et des porte-parole ainsi que des
représentants de la Fédération des commissions scolaires
et de l'Association des hôpitaux. C'est le mécanisme de
négociation que nous avons voulu adopter pour éviter, au cours de
cette négociation, toute forme d'ambiguïté et tout genre de
situations qui auraient pu laisser croire qu'il y avait division, distinction
ou manque de cohérence dans la position gouvernementale. L'objectif
recherché était précisément que l'attitude
patronale soit canalisée et cristalisée dans un seul
porte-parole, au niveau politique, et dans un seul porte-parole, au niveau de
la négociation, de telle sorte que les positions patronales soient
claires et ne puissent être dissociées ou qu'on ne tente pas de
les disloquer par rapport à ceux qui les transmettent.
Quant à la réunion du Château Frontenac, je dois
souligner qu'il n'y a pas eu d'affrontement. Je ne crois pas que personne,
à mon avis, ait perdu la face au moment de cette réunion. La
réunion du Château Frontenac a effectivement été une
réunion qui s'est située dans le prolongement des réunions
qui ont eu lieu à la table centrale de négociation.
En fait, c'était une réunion du comité restreint de
négociation. Il y avait, d'une part, les représentants syndicaux,
d'autre part les porte-parole de la partie patronale. Les membres du
comité ministériel assistaient à cette réunion pour
réduire à néant, si vous voulez, le délai de
consultation qui existe lorsque la négociation a lieu entre les
porte-parole et ceux qui ont la responsabilité d'analyser les mandats,
de les maintenir ou de les modifier.
Nous avons voulu qu'il n'y ait aucun délai de sorte que les
décisions, s'il y en avait à prendre, puissent se prendre sur le
champ. Mais la négociation et les échanges de négociations
qui ont eu lieu ce soir-là se sont faits strictement par les canaux qui
avaient été suivis jusque là à la table de
négociation, sauf que le comité ministériel était
présent dans la salle, plutôt que d'être présent
à un demi-mille ou à un mille plus loin, au parlement, alors que
la discussion se serait déroulée au Holiday Inn à
Québec par exemple.
Il n'y a pas eu d'affrontement de ce côté. Par ailleurs, la
présence du ministre du Travail lui aurait posé un certain nombre
de problèmes ainsi qu'au gouvernement, et au ministre de la Fonction
publique comme tel. Précisément parce que le ministre de la
Fonction publique et le ministre du Travail, comme les autres ministres, sont
membres d'un même cabinet et sont solidaires dans un même cabinet.
Il est extrêmement difficile d'avoir deux porte-parole avec des mandats
différents dans une même négociation. Il n'y a donc...
M. BOIVIN: J'aurais une question à poser au ministre.
M. L'ALLIER: Oui.
M. BOIVIN: Est-ce que vous croyez que la solidarité
ministérielle défend, que les ministres aient été
là ou non, au ministre du Travail d'intervenir dans ce conflit?
M. L'ALLIER: La solidarité ministérielle n'est pas un
bâillon. Ce n'est pas une chose qui cache les désaccords à
l'intérieur d'un cabinet. C'est le résultat d'une décision
du cabinet, que ce soit le ministre de la Fonction publique plutôt que le
ministre du Travail. C'est en application de cette décision que
ça s'est déroulé comme ça. Ce n'est pas à
l'encontre du ministre du Travail.
M. BOIVIN: Mais qu'est-ce que les ministre ont dit au Château
Frontenac? Ils ont dit que la masse salariale était
déterminée et qu'il n'y en aurait pas plus. Alors, le ministre de
la Fonction publique était capable de dire que c'était la
réponse du gouvernement, que la masse salariale serait la
même.
M. L'ALLIER: Je dois le préciser, nous allions au Château
Frontenac dans l'esprit suivant, c'est-à-dire que nous avions fait une
deuxième contreproposition qui supposait des déboursés de
l'ordre de plus de $32 millions, proposition qui avait été
étudiée ou qui a dû être étudiée par la
partie syndicale pendant au-delà de 30 heures. On l'a souligné
tout à l'heure. Nous allions effectivement au Château Frontenac
pour recevoir une réponse sur la contreproposition que nous avions
faite.
Or, cette réponse pouvait être de plusieurs natures. Elle
pouvait être une réponse carrément négative, une
réponse disant: On accepte votre contreproposition et l'on signe et
c'était plus vraisemblablement une réponse comportant
elle-même une contreproposition syndicale. A ce moment-là, s'il y
avait eu une contreproposition syndicale sérieuse se situant dans le
contexte de la négociation et faisant en sorte que les parties soient
suffisamment rapprochées pour pouvoir poursuivre la négociation,
il aurait fallu, du côté patronal, face à cette
contreproposition syndicale, prendre un certain nombre de décisions,
à savoir est-elle acceptable ou non?
Pour prendre cette décision, les porte-parole n'ont pas le
mandat, face à une contreproposition suivant la nature de la
contreproposition, ils peuvent ne pas avoir le mandat de l'accepter ou
de la refuser. La présence du comité ministériel...
M. BOIVIN: Je remarque...
M. L'ALLIER: ... avait pour but précisément
d'éviter le délai de consultation.
M. BOIVIN: ... que le ministre a été très prudent
et que le front commun a voulu l'amener à la table de négociation
dans une rencontre qu'on dit une négociation secrète, que je peux
appeler une rencontre plutôt qu'une négociation parce qu'il a fait
une nouvelle tentative. Mais pourquoi, au Château, les quatre ministres
étaient-ils là? Je vois ça comme un affrontement.
M. L'ALLIER: Non, je ne peux pas être d'accord.
M. BOIVIN: Psychologiquement, je crois que ce fut très mauvais.
Ce n'est pas pour 24 heures d'une contreproposition que vous auriez pu avoir
par la partie syndicale, que le cabinet aurait pu, après ça, se
prononcer. C'est parce que là, vous êtes en face d'une situation.
Comment faire reprendre ces négociations? Vous dites que la
solidarité ministérielle défend au ministre du Travail
d'intervenir. Comment voulez-vous les faire reprendre?
M. L'ALLIER: Il faut souligner que, lorsque nous nous sommes
rencontrés au Château Frontenac, nous nous attendions à une
contreproposition syndicale et que cette contreproposition syndicale aurait
dû, à ce moment-là, si elle avait été faite,
faire l'objet d'une décision du ministre de la Fonction publique et/ou
du comité ministériel.
M. BOIVIN: Quand on amène les ministres... M. L'ALLIER: ...
deuxièmement...
M. BOIVIN: Quand M. Pepin amène les ministre à la table de
négociation, c'est pour avoir de l'argent.
M. L'ALLIER: Les ministres sont allés â la table de
négociation...
M. BOIVIN: Cela laisse entendre qu'il peut...
M. L'ALLIER: ... non pas pour négocier, mais bien pour faire
sentir que la contreproposition que nous avons faite comme nous l'avons
dit était une proposition ultime. Et nous voulions que, du
côté syndical, on sache que c'était extrêmement
sérieux, précisément ça.
M. BOIVIN: Alors, qu'on nous donne la marche pour faire reprendre les
négociations maintenant.
M. L'ALLIER: Le gouvernement souhaite... M. BOrVIN: Ce qu'on peut
espérer.
M. L'ALLIER: ... une solution négociée de ce conflit. Et
le gouvernement ne peut pas souhaiter à n'importe quel prix que la
solution
soit négociée. En d'autres mots, il est évident
que, si nous acceptions aujourd'hui l'ensemble des demandes syndicales, nous
aurions une solution négociée. Mais, au-delà d'une
certaine limite, il est impossible, si nous voulons assumer nos
responsabilités à l'égard de l'ensemble de la population,
d'accepter de céder et de laisser aller des choses que nous ne pouvons
pas et que nous n'avons pas mandat de la population de laisser aller.
La solution négociée suppose la volonté des deux
parties d'en arriver à un terrain d'entente et que la négociation
se poursuive. Actuellement, le problème politique est posé et
continue d'être posé par le front commun de telle façon
qu'il n'y a pas possibilité de négociation. Le gouvernement devra
prendre ses responsabilités. Par la loi 19, il a ouvert la
possibilité à la négociation; la négociation peut
se poursuivre. Elle a effectivement repris à un certain nombre de tables
sectorielles actuellement.
Mais si, après un certain nombre de jours, tel que prévu
dans la loi 19, il n'est pas possible d'en arriver à une solution
négociée, à l'intérieur des limites et des
extrêmes limites acceptables, non pas uniquement par le gouvernement mais
par le gouvernement au nom de la population, le gouvernement devra, au nom de
la population, prendre les dispositions nécessaires pour garantir des
conditions de travail aux employés des secteurs public et parapublic. En
d'autres mots, si la négociation positive et si une négociation
qui aboutit finalement à des ententes est un objectif vers lequel nous
devons tendre pour l'équilibre et la paix sociale du Québec, on
ne peut cependant pas tendre à n'importe quel prix, à n'importe
quelle condition parce que l'objectif premier et qui vient avant même la
négociation, c'est celui de donner et de conclure des conditions de
travail acceptables pour les employés mais aussi pour toute la
population. Or, si les conditions de travail qu'on nous demande ne sont pas
acceptables à l'ensemble de la population, nous ne pouvons pas les
accepter en négociation.
M. LE PRESIDENT: Le député de Frontenac.
M. VEILLEUX: M. le Président, j'aurais une question à
poser à M. Langlois. Concernant les quatre points discutés
à la table de négociation, est-ce que vous pourriez nous donner
globalement le pourcentage de temps accordé à chacun des points
discutés entre le syndicat... Est-ce qu'il a été plus
discuté du premier point, de salaire que de sécurité
d'emploi, de traitements...
M. LANGLOIS: En termes de pourcentage et sous toutes réserves, je
dirais que nous avons passé 90 p.c. de notre temps sur la question des
salaires, soit en exposé de politiques salariales réciproques ou
en étude de propositions réciproques. Nous avons passé
environ 8 p.c. du temps sur la sécurité d'emploi et 2 p.c. du
temps sur le reste.
M. VEILLEUX: Merci.
M. BOIVIN: Vous avez négocié pendant combien de jours?
M. LANGLOIS: Je peux vous les donner...
M. BOIVIN: Pour une négociation de cette importance, vous n'avez
pas telllement négocié longtemps.
M. L'ALLIER: Tous les jours et chaque fois en présence des
présidents de centrale syndicale, le congé de Pâques y a
passé, la Semaine sainte aussi. Ce fut une négociation
intensive.
M. VEILLEUX: Ce fut ni plus ni moins qu'une Passion.
M. BOIVIN: Combien de jours?
M. LANGLOIS: Cela faisait vingt jours exactement.
M. LE PRESIDENT: Le député de Frontenac.
UNE VOIX: Vingt et un jours en ajoutant le Château Frontenac.
M. LE PRESIDENT: Quelques questions seulement, il est presque 1
heure.
M. LATULIPPE: M. le Président, j'aimerais féliciter M.
Langlaois. Je regrette énormément que la partie syndicale ne soit
pas présente pour reprendre les propos qui ont été tenus.
Je n'en soulignerai qu'un seul.
M. Langlois a parlé de sécurité d'emploi absolue au
niveau de la demande alors que tout ce que nous demandions c'était un
droit de regard, une espèce de formule de cogestion du système de
sécurité d'emploi. Je ne veux pas reprendre tout ça parce
que j'ai ici tout ce qu'on nous a dit. Cela représente quand même
plusieurs minutes de lecture. Si on fait un rapprochement avec ce qui a
été dit, de la part de certains syndicats et ce que vous nous
dites, à quelques endroits on remarque une nette différence dans
l'approche. Peut-être veulent-ils dire la même chose, mais est-ce
que vous pourriez reprendre brièvement là-dessus et dire si
effectivement vous considérez que c'est un système de cogestion
au niveau de la sécurité d'emploi qui a été
proposé?
M. LANGLOIS: II y a une proposition dans la demande syndicale de la
sécurité d'emploi qui équivaut, à toutes fins
pratiques, à la cogestion. C'est cette proposition qui dit qu'il n'y
aura aucun changement dans les structures administratives d'aucun organisme
public ou
parapublic, sans l'accord préalable du comité administrant
le "pool" qui gère le personnel en disponibilité. Ce "pool"
étant administré par un conseil d'administration divisé
à parts égales entre des représentants des employeurs et
des représentants des employés, c'est la formule parfaite de la
cogestion au niveau de l'administration.
Vous avez, je crois, le document global de demande de
sécurité d'emploi du front commun et c'est l'article 11 de ce
document qui le prévoit. Mais je dois dire qu'en plus de cette formule
de cogestion on demande dans le document du front commun, après six mois
de travail, une sécurité absolue et illimitée d'emploi et
garantie absolue et illimitée de plein traitement. Cela revient à
quelques reprises dans le document. Il y a une exception à ça. Si
un employé refuse un poste qui lui est offert, il continue à
recevoir son plein traitement pendant six mois après le refus. Mais si
on ne lui offre pas de poste ou s'il y a des postes disponibles ou même
s'il n'y en n'a pas, il y a garantie absolue de traitement jusqu'à
l'âge de la retraite, si vous voulez, suivant la proposition du front
commun dès qu'il a eu six mois de service.
M. LATULIPPE: Je vous remercie.
M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Jean.
M. VEILLEUX: Sur ce point, M. le Président, si je comprends bien,
advenant le cas où, prenons un exemple concret, une institutrice dans le
village Y était renvoyée à cause d'un surplus de personnel
et qu'on lui offrait l'occasion, selon toujours les propositions, la
contre-proposition syndicale d'aller dans la paroisse X, advenant le cas
où elle refuserait d'y aller, est-ce qu'ils n'ont pas dit, à ce
moment-là: D'accord, on considère l'institutrice comme
n'étant plus à l'emploi, ou s'ils voulaient la fameuse formule du
plein salaire durant six mois?
M. LANGLOIS: La proposition du front commun est à l'effet que
cette personne continue à recevoir son plein traitement pour six mois
après la date de son refus. Ce qui est encore plus extraordinaire dans
cette proposition est que votre institutrice pourrait être une
institutrice encore en période de probation sous l'empire de la loi,
mais par contre elle a une sécurité absolue d'emploi sous
l'empire des conventions. Vous savez que la loi prévoit qu'une
institutrice de deux ans et huit mois peut obtenir une certaine permanence mais
suivant leur demande ce serait réduit à six mois, à toutes
fins pratiques.
M. VEILLEUX: Merci.
M. LE PRESIDENT: Etant donné que M. Langlois pourrait revenir
mardi après-midi, nous allons ajourner les travaux à mardi
après-midi, quatre heures.
(Fin de la séance à 13 h 2)