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Version finale

29e législature, 3e session
(7 mars 1972 au 14 mars 1973)

Le mercredi 10 mai 1972 - Vol. 12 N° 20

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Conflit de travail dans les secteurs public et parapublic


Journal des débats

 

Commission permanente de la Fonction nublinue

Conflit de travail dans les secteurs public et parapublic

Séance du mardi 9 mai 1972

(Seize heures)

M. LAMONTAGNE (président de la commission permanente de la fonction publique): A l'ordre, messieurs!

Changements de membres de la commission

M. LE PRESIDENT: On m'informe des changements suivants pour les présents travaux : M. Boivin, député de Dubuc, remplace M. Loubier, député de Bellechasse; M. Ostiguy, député de Rouville, remplace M. Garneau, député de Jean-Talon; M. Marchand, député de Laurier, remplace M. Cloutier, député d'Ahuntsic.

Le ministre de la Fonction publique.

Ordre de travail

M. L'ALLIER: M. le Président, nous continuons les travaux de la commission. Lorsque la commission a ajourné ses travaux, nous étions effectivement à entendre le directeur général de la rémunération, de même que le porte-parole patronal à la table de négociation. Les deux avaient terminé, si ma mémoire est exacte, leur exposé et nous en étions aux questions à leur poser. Le député de Montcalm, en particulier, et d'autres membres de la commission avaient indiqué leur intention de poser des questions tant au directeur général de la rémunération qu'au porte-parole à la table de négociation. Dès qu'ils seront ici, je crois que nous pourrons reprendre ces questions aux techniciens.

Par ailleurs, sur la question de la loi 19, à la suite de la question qui avait été posée par le député de Montcalm et par d'autres membres de cette commission, je dois, à partir des travaux de la commission et à partir des travaux que nous avons faits au ministère, faire un certain nombre de recommandations au conseil des ministres. Dès que la décision sera prise, je ferai connaître les intentions du gouvernement à la suite de ces décisions. J'avais également indiqué mon intention d'informer, d'abord, la commission parlementaire de ces décisions. Alors, si la commission parlementaire siège au moment où cette décision ou ces décisions seront prises, je les porterai à la commission parlementaire, sinon à l'Assemblée nationale. En fait, il sera possible de débattre cette question.

Les patrons et la loi 19

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je désirerais poser une question au ministre de la Fonction publique qui nous a invités à le faire, tout à l'heure, en Chambre. Je comprends que ça ne relève pas spécifiquement de son domaine, à certains égards, mais à d'autres, oui. Est-ce qu'il sait que certains patrons, en l'occurrence, ne respecteraient pas les prescriptions de la loi 19? Est-ce qu'il a été informé de cette situation, dans les hôpitaux notamment?

M. L'ALLIER: M. le Président, je ne suis pas informé de cette situation. Lorsque la question a été posée en Chambre, je l'ai notée. Je vais m'enquérir dès que possible, à titre de renseignement, de l'état de la situation. Je n'ai pas la responsabilité de l'application de la loi 19. C'est la responsabilité du ministre de la Justice, en fait, de voir à l'application de cette loi. Je vais quand même m'enquérir de l'état de la situation, de sorte qu'un rapport véritable puisse être donné soit par le ministre de la Justice ou autrement aux membres de l'Assemblée nationale.

Il y a une question d'établissement de preuve à un moment donné.

Congédiement d'enseignants

M. TREMBLAY (Chicoutimi): D'accord. Maintenant, dans le même ordre d'idées, j'adresse ma question au ministre de la Fonction publique, mais c'est le ministre de l'Education qui est le plus directement en cause. Je pose la question dans l'optique de la sécurité d'emploi dont il a été question et dont il est question dans ces négociations. Pourrions-nous avoir des renseignements précis concernant les congédiements qui doivent survenir dans le domaine des maisons d'enseignement?

Je signale au ministre de la Fonction publique qu'hier, dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, on annonçait qu'au-delà de 700 personnes seraient congédiées soit par manque d'emploi, c'est-à-dire parce qu'on n'a pas besoin de personnel, parce que les permis temporaires ne seraient pas renouvelés ou pour d'autres raisons. Je pose la question au ministre simplement pour qu'il puisse nous fournir des renseignements concernant ce problème en regard des exigences de la partie syndicale au sujet de la sécurité d'emploi.

M. L'ALLIER: Je n'ai, encore une fois, malheureusement aucune réponse immédiate à fournir au député de Chicoutimi sur cette question. Lorsqu'on parle de congédiement d'enseignants, tout dépend de la source de renseignements à l'origine de l'information fournie. Quoi qu'il en soit, un certain nombre sont effectivement renvoyés parce qu'il y a un surplus de personnel, pour certains autres enseignants, le contrat n'est pas renouvelé pour des raisons de non qualification, de non émission de certificat ou autres choses comme celles-là. J'ai parlé de cette question avec le ministre de l'Education, qui m'a dit qu'il ferait le point incessamment sur l'ensemble du dossier afin de donner exactement la situation de ceux qui

sont renvoyés à cause d'un surplus de personnel, ceux qui quittent l'enseignement parce qu'ils demandent d'être mis à la retraite, ceux qui ne sont pas réembauchés pour une question de qualification, etc.

Je crois que ce tableau devrait être fourni aux membres de l'Assemblée nationale pour qu'ils puissent avoir la dimension réelle de la demande syndicale quant à la sécurité d'emploi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le ministre comprend les raisons pour lesquelles je pose cette question. La semaine dernière, le ministre de l'Education déclarait en Chambre qu'à son avis il y aurait 1,000 personnes ou un peu plus qui ne seraient pas réengagées dans des maisons d'enseignement tandis que le renseignement que je viens de donner au ministre indiquerait que dans la seule région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, au-delà de 700 personnes ne trouveraient pas d'emploi dans le monde de l'enseignement.

M. L'ALLIER: Si ma mémoire est exacte sur ce point, M. le Président, le chiffre qui a été énoncé par le ministre de l'Education — sujet à vérification de ma part — ne touchait que les enseignants non réengagés pour surplus de personnel et n'était pas pondéré de la possibilité de réengagement de ces personnes en fonction de la convention collective et à la suite du départ d'enseignants démissionnaires ou mis à la retraite. De sorte que le nombre réel de ceux qui effectivement n'auront pas d'emploi, au début de la prochaine année scolaire, à cause du surplus de personnel, je ne le connais pas. Il devra nécessairement être établi par le ministère de l'Education. Ces chiffres peuvent être très gros ou très petits suivant qu'on fait toutes les pondérations nécessaires. Je crois, comme je le disais tout à l'heure, qu'il est essentiel que les membres de l'Assemblée nationale aient un tableau complet de la situation pour pouvoir juger précisément de la nature et de l'ampleur de la demande syndicale de ce côté.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je remercie le ministre, M. le Président, m'excusant de lui avoir posé des questions qui ne se rattachent peut-être pas directement au sujet que la commission discutait.

M. LE PRESIDENT: Le député de Montcalm.

Rémunération dans le secteur public fédéral

M. MASSE (Montcalm): Pour revenir à l'ordre du jour, je pense qu'il était prévu d'étudier le rapport fait par le directeur de la rémunération au ministère de la Fonction publique, M. Bernard Angers. J'aimerais pouvoir lui adresser quelques questions et formuler quelques commentaires autour de son exposé.

Le directeur de la rémunération nous a expliqué, à une séance précédente, les principes qui avaient guidé la politique salariale du gouvernement ainsi qu'un grand nombre de statistiques au sujet des traitements généralement observés pour des postes similaires.

Evidemment, ces chiffres ont été contestés par les syndicats. Ils sont également, jusqu'à un certain point, contestables au niveau des principes. C'est dans ce secteur que j'aimerais poser mes questions.

Si nous avons bien compris le raisonnement, le ministère de la Fonction publique a tenté d'élaborer une grille en divisant d'abord des fonctions similaires tant dans l'entreprise privée que dans les entreprises publiques, que ce soit les municipalités ou le gouvernement fédéral, ainsi que dans d'autres secteurs publics ou parapublics.

Le gouvernement a-t-il tenu compte des offres ou des traitements déjà existants du gouvernement fédéral et des implications d'injustice que cela pourrait causer?

Pour prendre un exemple dans les postes, une sténo-dactylo travaillant dans la même ville à Montréal, pour un ministère similaire à la Justice, dans deux édifices contigus, est-ce que cette sténo-dactylo recevrait, avec expérience similaire, un traitement quasi identique si elle travaille pour le gouvernement fédéral ou si elle travaille pour le gouvernement provincial?

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Dubuc.

M. BOIVIN: M. le Président, une question de règlement. Toutes ces choses ont été dites alors que le député de Montcalm n'était pas ici. Est-ce qu'on doit recommencer tout le travail qui a été fait auparavant?

M. MASSE (Montcalm): M. le Président, vous me permettrez, sur le point de règlement, d'attirer l'attention sur la question suivante. Jeudi dernier, lorsque le directeur de la rémunération a fait son rapport, nous avons suspendu nos travaux et, à la séance suivante, nous avons entendu le représentant ou le porte-parole du gouvernement aux tables de négociation. Nous avons laissé le député de Dubuc parler longuement. Il était visible que c'était une stratégie d'occuper le plus de temps possible pour mousser l'idée qu'il aurait dû y avoir un médiateur entre le gouvernement et les syndiqués nommé selon le code du travail.

Je ne vois pas pourquoi, vu que le député de Dubuc a exposé ses idées concernant le médiateur, tous les autres députés, membres de cette commission, ne pourraient pas, tel qu'il avait été entendu, poser des questions au directeur de la rémunération pour connaître les principes de fond qui ont guidé le gouvernement dans sa politique salariale.

M. BOIVIN: M. le Président, je vous le répète: Toutes ces choses-là ont été dites lorsque le député de Montcalm était absent.

Alors, est-ce qu'on va recommencer tout ce travail?

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. MASSE (Montcalm): Je vous laisse insister sur l'absence du député, que je conteste pour la forme.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît! Je trouve que vous soulevez un point bien important, à savoir que, si on défendait, à l'Assemblée nationale ou aux commissions, les répétitions, cela diminuerait de beaucoup les travaux de la Chambre. Mais, je pense qu'il ne m'appartient pas, même si le sujet a déjà été traité, d'empêcher un député de poser une question, même sur des aspects différents. En conformité avec l'ordre des travaux que nous avions établi la semaine dernière et pour donner les meilleures informations possible aux députés et à la population, j'inviterais M. Angers à répondre aux questions qui lui seront posées.

M. MASSE (Montcalm): Je pense que nous n'avions pas terminé, loin de là, l'étude du rapport de M. Angers et ce, pour tous les députés de la commission et de tous les partis. Alors, la stratégie d'Unité-Québec d'occuper le plus de temps possible n'est pas valable pour la commission. C'est une question suffisamment importante...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît! Il ne faudrait pas que le député de Montcalm prenne tout le temps aussi.

M. MASSE (Montcalm): Alors, M. le Président, avec votre permission, je vais continuer à élaborer la question.

M. BURNS: II a le droit de constater la stratégie...

M. MASSE (Montcalm): J'ai le droit de la contester aussi, évidemment.

M. BURNS: ... et de la contester aussi.

M. MASSE (Montcalm): Quant à moi, cette stratégie, c'est de l'enfantillage. M. le Président, je pense que le directeur de la rémunération saisit bien le problème. Je crois que ce serait, quant à moi, un point important à éclairer. Est-ce que le gouvernement du Québec considère que, pour des fonctions similaires, les traitements doivent être plus ou moins identiques à ceux versés par le gouvernement fédéral ou si, au contraire, sur le plan de la politique de rémunération, il y aurait en pratique, deux ordres de gouvernement?

Il y aurait ceux qui auraient la chance de travailler pour le gouvernement fédéral et qui recevraient des traitements basés sur l'indice de

Toronto et les autres Québécois qui n'auraient pas cette chance et qui travailleraient dans des secteurs similaires, mais pour un gouvernement qualifié "d'inférieur" au point de vue des traitements. Ce seraient ceux qui travailleraient pour le gouvernement du Québec. Si ce n'est pas le cas, comment réussit-il à contrer cela, en pratique, dans sa politique salariale?

M. ANGERS: Je ne voudrais pas aborder l'aspect politique. Mais ce que je puis dire, c'est que la base fondamentale pour déterminer le niveau de la rémunération est la situation qui prévaut généralement au Québec et qui est observable. Il ne s'agit pas d'utiliser le gouvernement fédéral comme une unité administrative autonome et comme barème de référence. Ce n'est pas ça du tout. C'est la situation qui prévaut au Québec. Le fédéral y est représenté dans les différents relevés de salaire, principalement par des entreprises de la couronne et, en partie, par son activité propre qui s'exerce au niveau du Québec.

Pour répondre carrément, la politique de rémunération du fédéral — en présumant qu'elle ait une certaine cohérence — n'est pas du tout utilisée comme barème pour déterminer la rémunération des employés des secteurs public et parapublic.

Dans les faits, cependant, on constate, lorsqu'on regarde la hiérarchie salariale, qu'il existe quand même un sens commun et que la dactylo est payée un peu moins cher que la sténo, etc. Mais il n'y a aucun lien de cause à effet entre les deux et c'est un hasard si les tarifs sont directement concurrentiels ou non. Dans des catégories d'emplois — pour en prendre une simplement, les agents de la paix, les surveillants d'institutions — si le gouvernement avait opté pour la ligne fédérale, il serait complètement en dehors de tout ce qui se constate dans les autres provinces. Simplement pour mentionner celle-là, du côté des agents de la paix, le gouvernement fédéral, pour des motifs que nous ne connaissons pas et fondé sur une politique qui, elle non plus, semble ne pas avoir été exprimée publiquement autrement que sur la base de la négociation sectorielle, a eu un comportement propre à lui qui ne tient pas du tout compte de ce qu'on constate ailleurs, en Ontario ou en Colombie-Britannique.

M. MASSE (Montcalm): La direction de la rémunération a fait une étude au sujet des différences qu'il peut y avoir entre les offres de traitements du gouvernement fédéral sur le territoire québécois, puisqu'elles sont les mêmes partout, et les offres que le gouvernement du Québec fait pour des fonctions similaires, que ce soit un agent de recherche, un gardien de prison, comme vous dites, un secrétaire, un agent de développement ou autre.

Combien y a-t-il de catégories où il y a un écart? Cela touche combien d'individus? Combien cela pourrait-il coûter au gouvernement du

Québec pour arriver à avoir une politique salariale aussi avantageuse au niveau des traitements que celle qu'offre le gouvernement fédéral?

Je pense que cela a quand même une certaine importance autour de deux idées. Il est évident que si deux exmployeurs se disputent des secteurs ou des promotions d'universitaires avec des niveaux de traitement assez différents, cela ne joue pas en faveur du gouvernement du Québec. Cela, il faut le dire, si c'est le cas. Il est important, pour la population, de savoir combien d'individus cela représente et combien cela vaut d'argent.

Deuxièmement, puisque la politique salariale du gouvernement, à un moment, a des implications budgétaires et touche à un pourcentage du budget affecté au personnel de l'Etat, cela joue évidemment dans la marge de manoeuvre qui reste au gouvernement du Québec pour faire des politiques de développement ou pour faire des politiques économiques. Je pense que c'est un domaine important pour lequel j'aimerais avoir des chiffres de la part du directeur de la rémunération.

M. ANGERS: Nous avons surtout fait notre étude au niveau des cadres, non pas pour déterminer la rémunération des cadres, mais simplement pour constater comment pouvait se situer la rémunération au Québec. On a constaté, à ce niveau, des écarts allant de 10 p.c. à 20 p.c. en faveur du gouvernement fédéral, au niveau des cadres, y compris les sous-ministres.

Au niveau des professionnels, en raison d'une plus grande mobilité de ce personnel — cela semble une des préoccupations du député de Montcalm — en termes de comparaison de taux effectivement payés, en raison de cette mobilité plus grande à l'échelle du territoire canadien, l'écart des salaires est pratiquement inexistant au niveau des professions, en termes d'échelles de salaires. Au niveau des cadres, tel que je l'ai mentionné, c'est entre 10 p.c. et 20 p.c. et cela va à plus de $10,000 au niveau des sous-ministres, en faveur du fédéral.

Quant aux autres emplois, au niveau des techniciens, compte tenu des heures, parce qu'à Ottawa, on travaille cinq heures de plus par semaine qu'ici, au niveau des tarifs horaires, il n'y a pas d'incompatibilité flagrante comparable à celle que l'on retrouve au niveau des cadres. Ce n'est pas du tout la base de la politique gouvernementale.

M. MASSE (Montcalm): Si je comprends bien, plus on monte dans l'échelle de la hiérarchie de l'administration publique, plus l'écart est marqué, pouvant aller jusqu'à 10 p.c. et 20 p.c. entre les gouvernements fédéral et provincial, mais à l'avantage du gouvernement fédéral.

M. ANGERS: Je n'ai pas voulu descendre au niveau du personnel de bureau et ouvrier parce que je n'ai pas les données à la portée de la main.

M. MASSE (Montcalm): Mais en général, ce personnel...

M. ANGERS: On peut dire que les plus grands écarts actuels sont au niveau du personnel des cadres, et c'est encore plus vrai du gouvernement ontarien.

M. MASSE (Montcalm): Alors, face à cette politique plus avantageuse au gouvernement fédéral par rapport au gouvernement provincial pour les cadres et les sous-ministres, et ça peut aller jusqu'à $10,000, est-ce que le gouvernement provincial a senti dans son recrutement des inconvénients? Ce qui arrive c'est que l'individu qui sort de l'université a le choix, pour la même fonction, entre deux gouvernements dont un où il serait payé jusqu'à 20 p.c. de plus. Vous allez admettre que, sur le plan du marché du travail, le gouvernement du Québec est drôlement désavantagé par la politique du gouvernement fédéral.

M. L'ALLIER: La question que pose le député de Montcalm est assez complexe, mais je peux dire qu'au niveau professionnel, il n'y a pas de problème de recrutement. Il faut dire aussi qu'il y a peut-être d'autres facteurs qu'uniquement le facteur salaire qui joue, soit celui de l'éloignement, etc.

Par ailleurs, au niveau des cadres, la mobilité est assez difficile à établir. Bien que les cadres ne sortent pas directement de l'université, on demande un certain nombre d'années d'expérience, et la plupart viennent d'échelons de travail inférieurs. Donc, d'une façon générale il n'est pas possible, si on prend la masse de recrutement, c'est-à-dire le nombre de personnes recrutées par année, de déceler un inconvénient majeur du fait des disparités salariales, d'autant plus que, comment l'a dit le directeur de la rémunération, au niveau professionnel, compte tenu des heures de travail — 37 1/2 heures au fédéral et 32 1/2 heures chez nous — c'est un facteur de pondération.

M. MASSE (Montcalm): Est-ce que le ministre trouve normal qu'il y ait de la part du gouvernement fédéral une telle politique salariale qui va contrer jusqu'à un certain point celle du gouvernement du Québec, étant donné que le gouvernement du Québec plaide sa capacité de payer? C'est son facteur premier au sujet de sa politique de rémunération. Est-ce qu'on peut conclure que le gouvernement fédéral n'a pas la même capacité de payer, qu'il a une capacité de payer plus grande pour des emplois similaires?

M. L'ALLIER: Je ne voudrais pas contredire d'une façon trop précise le député de Montcalm, mais le motif fondamental de la politique

salariale du gouvernement n'est pas la capacité de payer, mais bien le fait qu'on doit payer les employés de l'Etat suivant la moyenne généralement observée au Québec.

Pour ce qui est de la politique salariale du gouvernement fédéral, vous comprendrez que je n'ai pas à dire si c'est une bonne ou mauvaise politique.

Nous en subissons, bien sûr, un certain nombre d'inconvénients lorsqu'on compare, à certains endroits, des emplois. Cela a été souligné par le président du Syndicat des agents de la paix, notamment. Il est sûr que l'idéal serait qu'on puisse en arriver non pas à ajuster les traitements du Québec à ceux du gouvernement fédéral, mais bien en arriver à une plus grande cohérence sur le plan des traitements sur le territoire québécois.

Nos unités de mesure, quant à nous, c'est le territoire du Québec. Et la deuxième unité de mesure, c'est la moyenne des traitements dans les entreprises de 20 employés ou plus observée pour des emplois semblables.

M. MASSE (Montcalm): J'aimerais poser une question dans un autre domaine, à moins qu'il y en ait encore dans celui-ci.

M. LE PRESIDENT: Le député de Frontenac.

M. LATULIPPE: II faudrait revenir non pas justement sur la moyenne observée, mais sur les critères qui ont servi à ébablir le rythme de croisière, puisque c'est de ça, en fait, qu'on discute. J'ai remarqué, comme l'a souligné tout à l'heure le député de Montcalm, que, lorsqu'il s'est agi d'établir des salaires de base on a procédé par une grille qui s'est construite à partir d'une moyenne observée de faits concrets. Vous avez une liste assez volumineuse d'observations que vous aviez faites. Pourquoi n'avez-vous pas procédé exactement de la même façon pour établir justement le rythme de croisière au lieu de procéder par une étude comme celle que décrit un papier remis par les enseignants? Ils ont fait une étude justement sur un certain nombre de contrats de travail qui se sont échelonnés à peu près dans les mêmes secteurs où vous avez fait vos observations. Bien, selon ce que vous m'avez dit, selon ce que j'ai cru comprendre, le papier que j'ai couvre à peu près les mêmes secteurs.

Puis, là, on ne se sert plus du même critère; on va se servir d'un critère qui semble nettement plus avantageux pour le gouvernement qui coûte beaucoup meilleur marché. En terminant, la semaine dernière, M. Angers mentionnait que dans le dossier dont a fait état la CEQ, ils se servaient justement des points qui étaient avantageux pour eux. Dans le même sens, ces gens-là nous disaient que le gouvernement se sert des points qui lui semblent avantageux pour avoir un rythme de croisière qui, selon eux, est nettement inférieur à la moyenne observée, comme rythme de croisière, dans le secteur privé.

M. ANGERS: Ce que nous avons fait pour déterminer le niveau de rémunération des salariés en question, c'est que nous avons utilisé effectivement la moyenne observée, à un moment donné, comme point de départ. Pour essayer de définir un rythme de croisière, il ne s'agissait pas de prendre des entreprises à très forte productivité; c'était le cas de certaines entreprises pétrochimiques ou encore des entreprises aéronautiques. Ce que nous avons tenté de faire, c'est de faire l'hypothèse que les employés du secteur public participent à l'accroissement de la richesse collective dans la mesure de leur contribution. Nous avons supposé qu'ils y participaient autant que la moyenne des entreprises en question, en prenant comme hypothèse fondamentale que les rémunérations croissent notamment en fonction de la productivité et aussi de l'indice des prix.

Pour ce faire, on a regardé la décennie. On n'a pas pris une année qui était déficiente par rapport à une autre qui était plus intéressante; on a pris la décennie de 1960 à 1970. On constate, en regardant cette décennie, que la période de 1961 à 1965, ce n'est pas ce qu'il y a de plus glorieux, ce qu'il y a de plus fameux en termes de croissance. Inversement, si on prend de 1965 à 1970, c'est mieux et c'est surtout dû à la période de l'Expo. En prenant la période de 1960 à 1970, on s'est trouvé à rendre en quelque sorte justice aux employés du secteur public et à leur donner des augmentations qui correspondent normalement à ce que l'on constate. Pour montrer que ce n'étaient pas des données en l'air en elles-mêmes, on est allé plus loin; on a regardé les gains du travail, ce que les salariés dans l'ensemble du Québec ont pu avoir comme rythme moyen d'augmentation au cours de la période 1960 à 1970.

Par cette voie-là, on arrive à la même conclusion. Si on voit souvent des contrats collectifs qui sont signés à 6 p.c, 6 1/2 p.c. ou 5 1/2 p.c. dans le milieu industriel, on ne doit pas perdre de vue que l'entreprise en général ne rémunère pas selon les échelles de salaire. Habituellement, il y a un ou deux taux de salaire et ils n'ont pas ce que l'on pourrait appeler le coût de système.

Elle n'a pas ce qu'on pourrait appeler le coût de système. Elle n'a pas à verser d'augmentations statutaires comme c'est le cas chez les enseignants, chez les infirmières, chez les techniciens ou chez le personnel semi-technique, de telle sorte que si l'on tient compte des coûts qui sont dans le système, c'est-à-dire le vieillissement du personnel principalement ou l'évolution de la main-d'oeuvre, on constate que les rythmes de croisière doivent être corrigés de façon à tenir compte de ces coûts additionnels.

Ainsi, par exemple, on a, pour la période no 2, des rythmes de croisière de 5.3 p.c. à 6 p.c. A

cela s'ajoute, au strict minimum, 1.2 p.c. pour le vieillissement du personnel et peut-être 0.5 p.c. On n'a pas utilisé ce chiffre, simplement parce que les données n'étaient pas suffisantes pour dire que c'était effectivement cela. 11 n'y a aucun doute qu'il faudrait ajouter 0.5 p.c. de plus au 1.2 p.c, ce qui fait des rythmes d'accroissement de masse salariale supérieurs de 1.7 p.c. à ce qui est offert comme taux de salaire. Quand vous augmentez un enseignant de 5.3 p.c. sur un taux de salaire, vous tenez pour acquis que l'individu va avoir des augmentations statutaires. Compte tenu du fait de ceux qui n'en ont pas, il faut que vous ajoutiez 1.2 p.c. plus .5 p.c, ce qui fait finalement que la masse salariale du gouvernement, dans un tel contexte, s'accroît d'un pourcentage qui varie entre 6.5 p.c. et 7 p.c.

Si on prend les gains — c'est la réalité, c'est ce que les gens ont pu recevoir — effectivement gagnés par les employés au niveau de la province de Québec, on constate que cela se situe à 6 p.c. pour la période 1960-1970. Or, les augmentations qui sont présentées en vertu des propositions gouvernementales pour les périodes 2 et 3, c'est-à-dire cette année et l'an prochain, vont varier, simplement au titre du rythme de croisière, de 5.3 p.c. à 6 p.c. et, en termes de coût pour l'entreprise qu'est le secteur public, il faut que vous ajoutiez un pourcentage qui varie vraisemblablement autour de 1.7 p.c. A cela, en première année, vous devez ajouter un rattrapage de l'ordre de 1.3 p.c, de telle sorte que lorsque l'on compare des situations, il faut tenir compte de l'ensemble du portrait pour voir ce que ça donne. On ne prend pas une entreprise de moulins à vent, une entreprise pétrochimique; on prend l'ensemble, ce qui se dégage comme tendances.

Le choix de la période est bien important. Si on prend seulement une année, on peut arriver avec des surprises. Je ne voudrais pas m'embarquer dans les problèmes du Québec sur le plan économique mais vous savez fort bien qu'il y a quand même un certain nombre de chômeurs dans la province de Québec Ce n'est pas l'année 1967.

M. LATULIPPE: J'aimerais discuter d'un autre point que vous avez abordé implicitement. L'autre point sur lequel on insistait énormément — et que les gens que j'ai rencontrés semblaient dire que cela les pénalisait d'une drôle de façon — c'est justement le fait qu'on prenne la dernière décennie alors qu'ils prétendent que si on avait pris seulement les cinq dernières années, cela aurait collé beaucoup plus à la réalité du fait qu'il n'y aurait pas eu une échelle... L'accroissement des coûts étant beaucoup plus accentué dans les cinq dernières années, le coût de la vie, etc., ils se trouvent pénalisés.

M. ANGERS: Ils sont pénalisés par rapport à quoi? Par rapport, peut-être, à l'année 1967, l'année de l'Expo, peut-être. Il n'y a pas d'erreur, si on prend l'évolution réelle de l'économie, les prévisions pour la période qu'on est en train de vivre indiquaient pour le Québec des pourcentages de 4.6 p.c. et pour le Canada de 5 p.c, alors qu'en réalité l'année passée, c'était de 3.8 p.c.

Il est entendu que par rapport à une année choisie ou à un groupe d'années qui tournent autour de la période 1967-1968, les prix ayant monté au Québec de 3.9 p.c. en 1967 alors qu'ils étaient de 1.9 p.c. l'an dernier, si l'on prend cette année-là, je pense que vous avez raison.

Mais, d'un autre côté, si on prend la période 1965-1970, on constate que c'est une donnée autour de 5.4. Si vous comparez ça aux propositions qui ont été faites par le gouvernement, au mois d'avril dernier, les augmentations, en première période, vont varier de 4.8 p.c. à 5.5 p.c; en deuxième, de 5.3 p.c. à 6 p.c; et en troisième, de 5.3 p.c. à 6 p.c, plus 1.3 p.c. de rattrapage en première année, plus les coûts dans le système qui, qu'on le veuille ou non, sont là. Sans qu'on modifie aucunement les structures de salaires, la masse salariale s'accroît d'elle-même.

M. LATULIPPE: Avez-vous fait des projections sur l'avenir pour établir à combien vous évaluez, compte tenu de la conjoncture et de tous les facteurs que vous pouvez invoquer, quelle sera la croissance de l'indice des prix à la consommation?

M. ANGERS: Les prévisions qui ont été faites l'an dernier au service de synthèse économique nous indiquaient que, pour 1971, 1972 et 1973, on pouvait escompter un accroissement moyen, un taux annuel de 4.6 p.c pour le Québec, et pour le Canada, un peu plus, soit de 5 p.c. Si l'on compare ces chiffres à ceux de la décennie qu'on vient de terminer, il y a deux ans, c'est de 4.8 p.c. à 5 p.c. de telle sorte que les prévisions concordent, d'une certaine manière, avec celles de la dernière décennie, et sont un peu surévaluées si on prend une année qui s'appelle l'année 1971 où effectivement, au Québec, ça a été de 3.8 p.c. au lieu de 4.5 p.c

M. LATULIPPE: Toutes ces études sont faites à partir des données du bureau fédéral de la statistique.

M. ANGERS: C'est-à-dire que le ministère de l'Industrie et du Commerce a un service qui s'appelle le service de synthèse économique où le groupe de professionnels qui est là travaille, bien entendu, à partir de données principalement fédérales mais données qui sont corrigées depuis 1965, de façon à produire des données proprement québécoises. La comptabilité du Québec est en branle systématiquement depuis 1964,1965, elle est même remontée aux années quarante, je crois, mais fondamentalement à partir de données fédérales corrigées.

M. LE PRESIDENT: Le député de Montcalm.

M. MASSE (Montcalm): M. le Président, j'aimerais continuer sur le point de tout à l'heure parce que je croyais que le député de Frontenac avait une question à propos de ce que je discutais. Le ministre de la Ponction publique peut-il nous informer s'il existe encore un comité fédéral-provincial au sujet de la politique de rémunération dans les secteurs public et parapublic et, si oui, quels sont les arguments qui ont été présentés par le gouvernement du Québec et la réponse du fédéral quant à savoir que la politique de rémunération doit avoir une certaine équivalence pour les fonctionnaires des deux gouvernements. Sinon, quand croit-il que ce comité devrait être relancé ou devrait exister, parce qu'autrement il y a un danger. Il peut arriver qu'à l'occasion, pour des fonctions similaires, les deux niveaux de gouvernement aient des "traitements différents, ça peut arriver sur une période de la convention collective.

Mais, si au contraire, ça semble généraliser cet écart de de 10 p.c. à 20 p.c. pour les cadres supérieurs, cela peut causer sur plusieurs années de drôles de problèmes qui défavoriseront le recrutement de l'administration québécoise. Je pense que, s'il est normal que la politique salariale soit basée sur une moyenne généralement observée pour des fonctions similaires, il reste que les capacités de payer d'un gouvernement sont limitées par le rendement des impôts. Et, puisque les deux gouvernements ont, en soi, pour ce qui est du territoire québécois, les mêmes citoyens qui paient les impôts, je pense qu'il ne serait pas normal que, comme dirait le sous-ministre de la Fonction publique, le monde réel réalise qu'au niveau des traitements ils ont deux gouvernements, un gouvernement supérieur et un gouvernement inférieur. A la longue, cela peut jouer contre le gouvernement du Québec dans l'application de ses politiques.

M. L'ALLIER: Dois-je comprendre que le député de Montcalm souhaiterait un seul gouvernement?

M. MASSE (Montcalm): M. le Président, je souhaiterais que les deux gouvernements s'entendent au moins sur cela afin qu'il n'y ait pas, pour le monde réel, deux classes de citoyens: ceux qui ont la chance de travailler pour le gouvernement fédéral et les autres qui travaillent pour le gouvernement du Québec, parce que cela ce n'est pas juste.

M. VEILLEUX: Le député de Montcalm se prépare-t-il à aller au fédéral?

M. MASSE (Montcalm): M. le Président, le député de Montcalm, est, pour l'instant, à la commission de la fonction publique, et il aimerait avoir une réponse aux questions qu'il a posées dans le domaine de la fonction publique.

M. L'ALLIER: M. le Président, pour répondre à la première question qui a été posée, il n'y a pas de comité permanent fédéral-provincial sur la question des salaires, il y a des...

M. MASSE (Montcalm): II y en a déjà eu un comité...

M. L'ALLIER: II y a eu des contacts, mais je ne sais pas s'il y a eu un comité permanent structuré qui se réunissait régulièrement. C'est possible, mais actuellement, ça n'existe pas. Il y a des contacts irréguliers ou sporadiques qui se prennent au niveau des fonctionnaires sur l'ensemble de ces questions. Ces contacts nous permettent — du point de vue où on les regarde — des échanges techniques qui nous permettent, en même temps, de constater que, du côté fédéral, on n'a pas perçu, en tout cas, une politique salariale articulée de la même façon que celle qu'on peut avoir ici pour la. bonne raison que les négociations ne se font pas de la même façon, qu'elles ne sont même pas sectorielles et que, souvent, ce sont des unités à peu près autonomes qui négocient.

Y aurait-il utilité à avoir cette liaison permanente au sujet d'une tentative de normalisation des traitements sur le territoire du Québec? Ce n'est pas impossible, mais si on se réfère à d'autres secteurs de coordination dans ces domaines-là — je ne veux pas répondre ici pour le gouvernement fédéral — ce serait peut-être extrêmement difficile pour lui d'avoir une politique salariale pour chacune des provinces dans lesquelles il a des employés.

Les contacts que nous avons sont utiles pour des échanges techniques et, à chaque fois que c'est nécessaire, nous soulignons les inconvénients que nous causent les incohérences relatives qui existent du fait d'une politique qui doit être la même de Halifax à Vancouver, par rapport à des politiques de rémunération que nous devons pratiquer, nous, compte tenu du Québec. Alors, il n'y a pas de comité permanent là-dessus.

Maintenant, il y avait une deuxième question dont je ne me souviens pas.

M. MASSE (Montcalm): M. le Président, je pense que, si le comité n'existe pas, le ministre de la Fonction publique devrait forcer pour qu'il existe. Je sais que le gouvernement fédéral peut être pris avec le problème d'avoir une même politique salariale de Saint-Jean, Terre-Neuve, à Vancouver; pour lui, c'est peut-être son objectif. Mais reste que, sur le territoire québécois, il peut devenir désavantageux pour le gouvernement du Québec, surtout dans les postes supérieurs, d'avoir des écarts de 10 p.c. à 20 p.c. A un moment donné, cela peut défavoriser le Québec au niveau du recrutement d'hommes de valeur pour appliquer les politiques que le Parlement a votées. Compte tenu de sa politique budgétaire, du taux de rémunération et du rendement des impôts, il peut y avoir des problèmes. Mais le gouvernement du

Québec n'accepterait pas que les municipalités offrent des traitements trop élevés pour des fonctions similaires à celles qu'il a dans son propre gouvernement. Je pense que la même politique doit exister avec le gouvernement fédéral. Autrement, cela devient injuste pour le monde réel.

Enfin, si cela n'existe pas, espérons que ces communications existeront. J'aimerais poser une autre question. Face à la politique salariale, les syndicats ont, à plusieurs reprises — enfin, j'ai vu cela dans la publicité — mis en parallèle la politique salariale de la deuxième ronde de négociation, dans laquelle j'ai eu un certain rôle à jouer, et la ronde actuelle de négociation. Ce que j'ai vu dans la publicité, c'est qu'au moins pour deux points ils contestent la position du gouvernement qui dit que c'est une politique salariale dont les principes existent depuis quelques années et qui sont les mêmes pour cette troisième ronde de négociation. Particulièrement, dans l'idée "travail égal, salaire égal", cela me semble avoir été souligné par la publicité des syndicats. Deuxièmement, et pour moi c'est encore plus important, c'est le rendement des impôts. Il me semble que la politique qui a déjà existé disait, auprès des syndicats, que pour les mêmes impôts, selon des rendements identiques, le taux d'augmentation pour les fonctionnaires devra suivre pour toutes les négociations à venir. C'est-à-dire un rendement égal des impôts. Actuellement, les syndicats contestent que la masse salariale qu'offre le gouvernement est proportionnelle au rendement des impôts par rapport à il y a trois ans.

J'aimerais, sur ces deux points, recevoir, de la part du directeur de la rémunération ou du ministre de la Fonction publique, des éclaircissements quant au bien-fondé des revendications syndicales.

M. ANGERS: Simplement pour éviter des débats de type théorique ou méthodologique et pour être pratique, nous avons tenté de voir ce qu'aurait donné, en termes de rythme de croisière général, la méthodologie telle qu'appliquée durant la deuxième ronde de négociation en comparaison de celle qui a été suivie au cours de la présente.

En termes de résultats, on constate — sans discussion méthodologique, parce que c'est compliqué de discuter de méthodes et de modèles, vous vous en doutez bien — que la présente ronde...

M. MASSE (Montcalm): M. le Président, nous ne sommes pas, quand même, les non-instruits de l'ancien premier ministre Lesage!

M. ANGERS: Ce n'est pas dans ce sens-là que j'ai voulu...

M. MASSE (Montcalm): Ah bon! D'accord. M. ANGERS: ... faire une intervention. Je vous prierais de m'excuser si tel est le cas. La présente ronde a, effectivement, pour effet de donner d'une façon concrète, plus aux salariés, que le méthode qui a pu être utilisée lors de la dernière. Je ne sais pas si cela répond, en partie, à la question qui a été posée. L'avantage ou les mérites de la présente méthode, c'est que cela a pour effet de donner plus que la dernière fois. On a tenté, à l'aide des ordinateurs, d'évaluer ce qu'aurait donné la dernière. On est arrivé avec un résultat de 15.3 p.c., à l'exclusion du rattrapage.

En prenant la méthodologie suivie présentement, on arrive à un pourcentage légèrement supérieur, soit 16.2 p.c. Peut-être qu'il n'est pas nécessaire de faire de débat sur la méthode, mais, simplement à l'analyse des résultats, cela aurait certainement pour effet de baisser les augmentations des enseignants, dans ce contexte, de 1.5 p.c. sur trois ans.

M. MASSE (Montcalm): Vous avez certainement présenté cette réponse à la table centrale, et cela n'a pas empêché...

M. ANGERS: Oui, c'est-à-dire que...

M. MASSE (Montcalm): ... les syndicats de continuer, dans leur publicité, à prétendre le contraire.

M. ANGERS: ... le résultat, dans le cas des enseignants, a été fourni à l'occasion d'une rencontre d'un comité restreint où on a indiqué que, par rapport à la méthodologie suivie la dernière fois, les augmentations sont supérieures dans le cas des enseignants, parce que la question était venue spécifiquement sur les enseignants, et en comité restreint.

Mais, tout au long des négociations, nous n'avons pas voulu entreprendre de débat sur les mérites et démérites d'une méthode plutôt que d'une autre. On s'est contenté de regarder les résultats. A moins que vous ne vouliez qu'on aille dans le détail et qu'on dise: Voici, cela s'est fait d'une telle manière avec tel groupe et avec tel autre.

M. MASSE (Montcalm): Cela, c'est pour le rendement des impôts.

M. ANGERS: C'est-à-dire que, si on avait appliqué la méthode suivie lors de la dernière ronde à la présente, on aurait eu, en termes d'augmgmentations pour les salariés, un pourcentage...

M. MASSE (Montcalm): Bon.

M. ANGERS: ... inférieur à celui qui est présentement offert.

M. MASSE (Montcalm): Posons la question autrement, de la façon dont les syndicats peuvent la poser. Quel pourcentage était consacré

au poste "traitements", au budget 70/71 et quel sera le pourcentage consacré au poste "traitements" au budget de 72/73?

M. ANGERS: L'approche suivie dans la présente ronde n'a pas été de prédéterminer un pourcentage du budget; c'est de prendre une masse de traitement donnée, d'appliquer une méthode, la moyenne observée, de dégager les rythmes de croisière pour une période donnée et de payer les salariés en conformité avec ça, même si à la limite cela pouvait avoir pour effet de maintenir le pourcentage constant ou d'en prendre plus ou moins. L'hypothèse qui a été faite n'a pas été de maintenir constante la part du budget qui pourra être consacrée aux traiter ments. Cela peut être plus, cela peut être moins. Cela dépend des endroits.

M. MASSE (Montcalm): C'est cela que je voulais vous entendre dire. C'est ça l'argumentation des syndicats quand ils veulent prouver que l'Etat fait un effort moindre quant à son budget dans la présente négociation que dans l'ancienne. Le raisonnement qu'il font est basé sur l'idée suivante: le rendement des impôts, il y a deux ans, a donné tant de milliards de dollars. Le pourcentage qui était consacré aux traitements était de tant. Cette fois-ci, sans changer les types d'impôts, donc au même rendement, vu l'augmentation de la population ou de l'économie, cela a donné tant de milliards. Le pourcentage, cette fois, qui serait consacré au poste traitements, a diminué de tant pour cent. C'est pour cela qu'ils concluent que l'Etat fait moins d'efforts avec sa proposition par rapport à l'effort qui a été fait il y a trois ans.

M. ANGERS: Nous avons des données appuyées sur des faits en termes d'augmentations pour les salariés concernés.

M. MASSE (Montcalm): Ecoutez, je n'ai pas les chiffres.

M. ANGERS: Mais la preuve est là.

M. MASSE (Montcalm): Je ne fais que reprendre le raisonnement qui vous a probablement été servi par le syndicat. A ce type de raisonnement,vous répondez par une autre méthodologie.

M. ANGERS: C'est vrai.

M. MASSE (Montcalm): Vous ne contestez pas la véracité de leur raisonnement.

M. ANGERS: Le postulat de base est le suivant: le gouvernement s'engage à rémunérer les salariés de la Fonction publique ou du secteur public de telle manière que, quel que soit le résultat de la moyenne observée et des rythmes de croisière — et, poussé à la limite — la partie budgétaire s'ajuste à cette politique. Ce fut une résultante et non pas un prérequis, tel que cela a pu être exprimé dans le passé.

M. MASSE (Montcalm): D'accord.

M. LE PRESIDENT: Le député de Dubuc.

M. BOIVIN: En fait, vous voulez dire que le ministre actuel a été plus généreux que l'ancien.

M. ANGERS: Ce n'était pas l'objet du propos. L'objet du propos était simplement de démontrer — si c'est le résultat qui importe — que le résultat n'est quand même pas si mal, c'est-à-dire qu'il est un peu mieux que ce qu'auraient pu donner strictement les rythmes de croisière, tels qu'appliqués lors de la ronde précédente. C'est une approche différente.

M. MASSE (Montcalm): Maintenant, pour l'autre partie de l'argumentation syndicale, évidemment, le problème est celui que nous avons chaque fois que nous posons une question. On peut bien poser des questions pour connaître la position gouvernementale mais, le syndicat n'étant pas là pour apporter le contrepoids, il est difficile pour nous de nous former un jugement quant à — je ne dis pas à la véracité du gouvernement — mais quant à l'objet de la réponse qu'il nous apporte.

Je voudrais revenir sur le deuxième point: à travail égal, salaire égal. Le principe qui a été mis de l'avant, c'est que pour des postes similaires, peu importe dans quel secteur de l'Etat on travaille, on devait avoir une rémunération plus ou moins identique. Or, il semble que c'est encore la politique du gouvernement dans cette ronde de négociations, mais la partie syndicale plaide qu'à plusieurs reprises, dans l'ensemble de la grille des personnes qui travaillent pour l'Etat, il arrive que, pour des fonctions similaires, la rémunération ne soit pas identique.

M. ANGERS: Jamais, si l'on compare cela aux situations antérieures, il n'y a eu une aussi grande harmonisation dans les traitements que cette fois-ci. C'est à ce point vrai que, pour des catégories complètes de salariés, c'est une identité mathématique.

M. MASSE (Montcalm): Est-ce que les syndicats vous ont apporté des preuves à l'appui de leur argumentation pour dire: Dans tel endroit, tel type de corps de fonctionnaires qui est similaire à tel autre type de corps de fonctionnaires, dans tel autre secteur de l'Etat, il y a un écart de traitements de tant dans les propositions que vous formulez?

M. ANGERS: Cette question a été longuement débattue. Les représentations syndicales ont amené à une plus grande identité, du côté des ouvriers principalement où cette identité est mathématique. Les endroits où ce n'est pas

pareil, c'est semblable, en général, et c'est justifié par des plans de classification différents. L'exemple qui est souvent amené, c'est le plan de la classification de la fonction publique par opposition à celui qui peut prévaloir dans les hôpitaux ou dans les commissions scolaires.

Si on sépare le secteur public en deux, lorsque vous avez un plan de classification fondé sur les positions ou les "jobs" proprement dites, l'harmonisation est tout ce qu'il y a de plus grand, et c'est quasiment l'identité. Mais lorsque, comparé à un plan comme celui de la fonction publique, c'est un chevauchement qui tient compte des plans de classification, cela vaut presque uniquement pour le personnel de bureau et les professionnels.

M. MASSE (Montcalm): Jusqu'à maintenant, vous avez appliqué cette politique pour ce qu'on appelle les secteurs public et parapublic. Est-ce que le gouvernement tient compte ou a l'intention de tenir compte des traitements versés à des organismes qui sont largement subventionnés par l'Etat, disons à 50 p.c. et plus, que ce soient les sténos-dactylos qui oeuvrent pour les conseils régionaux de développement, que ce soit le personnel de cadre ou le personnel de soutien qui oeuvre dans des municipalités ou d'autres organismes — on pourrait en donner des dizaines d'exemples — qui vivent de l'Etat, au point de vue des subventions, donc qui, en tout cas régulièrement, ont du personnel à leur emploi, personnel, au fond, payé par l'Etat et qui ont, à plusieurs reprises, des grilles de traitement très différentes de celles du gouvernement?

C'est le même gouvernement, par ses impôts, qui paie ces organismes. Est-ce que le ministère de la Fonction publique a fait un relevé du nombre de personnes? Il y en a dans les loisirs, il y en a certainement encore dans le domaine de la sécurité sociale, il y en a dans le domaine de la culture. Enfin, il y a encore beaucoup de groupes. Est-ce que, premièrement, il y a eu un relevé de fait de tout organisme dont la subvention par le gouvernement représente 50 p.c. et plus du budget? Deuxièmement, si ce relevé a été fait, est-ce qu'une étude a été faite du personnel de ces organismes? Si oui, troisièmement, est-ce que le gouvernement attachera à ces subventions des conditions quant aux rémunérations du personnel de ces organismes?

M. ANGERS: A la première partie de la question, qui est d'ordre technique, la deuxième semblant plutôt impliquer des politiques gouvernementales, je répondrai que pour les fins de la définition de la rémunération, certaines municipalités d'importance se sont retrouvées dans les relevés de salaires. Je pense principalement à la ville de Montréal et à la ville de Québec.

On sait qu'en général ces municipalités pour des raisons qui leur sont propres — c'est leur histoire — paient légèrement et souvent pas mal plus que le gouvernement proprement dit. De telle sorte que ces municipalités ont exercé une influence — tempérée par la présence d'autres organismes — dans le niveau de rémunération. Il ne faudrait pas non plus exagérer leur présence réelle dans la société en termes d'employés, parce que, sujet à des vérifications postérieures, je pense que le nombre d'employés de ces organismes représente 1/6 du secteur public.

M. MASSE (Montcalm): C'est une question au niveau des principes. La raffinerie de betterave à sucre de Saint-Hilaire n'emploie pas beaucoup de monde. Pourtant au point de vue du travail égal salaire égal, c'est dans la politique salariale du gouvernement. Il y a peut-être une centaine, peut-être mille personnes qui oeuvrent dans ces organismes-là. Je pense que c'est une espèce d'équité. Il faudrait que l'Etat soit équitable vis-à-vis de l'ensemble de ces gens-là.

Il y en a certainement beaucoup dans les municipalités. Il y a quand même plusieurs centaines de municipalités qui sont largement subventionnées par l'Etat. Il y a des organismes de loisirs. Il y en a un peu partout. Et je pense qu'il serait normal, à partir du moment où 50 p.c. du budget sont payés sous forme de subventions par l'Etat, que l'Etat attache entre autres conditions à sa subvention de suivre les lois, les règlements; qu'il attache également comme condition à sa subvention que le personnel de cet organisme-là soit traité — et à la hausse et à la baisse — de la même façon que le personnel de l'Etat, puisque ça devient des organismes très parapublics lorsque 50 p.c. du budget vient de l'Etat.

M. L'ALLIER: II faut distinguer là-dessus effectivement — comme l'a fait le député de Montcalm — qu'un grand nombre d'organismes sont subventionnés à plus de 50 p.c, ce qui n'est pas le cas de la très grande majorité des municipalités, où les subventions se situent entre 15 p.c. et 25 p.c, disons 20 p.c, à ma connaissance.

Pour ce qui est des organismes qui sont très largement subventionnés par l'Etat, notamment les organismes de loisirs, etc., indépendamment du nombre de personnes qui sont employées dans ces organismes, il faudrait tendre le plus rapidement possible à une certaine normalisation relative de la rémunération. La comparaison entre ceux qui travaillent au sein de ces organismes et la fonction publique — c'est là qu'elle est le plus facile à faire — se situe davantage au niveau du personnel de secrétariat, du personnel de bureau, du personnel d'encadrement. Deuxièmement, ce personnel — par exemple dans la fonction publique — a un certain nombre d'avantages marginaux: plans de carrière, permanence, etc., ce qui se retrouve très rarement dans les organismes subventionnés, précisément parce que les subventions sont

pour des courtes périodes. Ces organismes ont des activités extrêmement mobiles, même si on peut déceler après quelques années une permanence dans ces activités.

Or, il faudrait tenir compte de l'ensemble de la situation de travail de ce personnel par rapport à la fonction publique. Mais c'est une préoccupation, que j'ai pour ma part. Et c'est une chose à laquelle il faut tendre, de procéder à cette normalisation plutôt qu'à cette parité de traitements.

M. MASSE (Montcalm): C'est évident qu'il faut tenir compte de ces points-là. Et d'ailleurs le gouvernement, lorsqu'il signe des contrats avec des firmes pour des emplois de plusieurs mois pour des services, tient compte de ces rajustements dans ses traitements. Il y a des normes qui peuvent être suivies. Il est évident que ce n'est pas facile et que ça ne peut pas se faire comme ça en l'espace d'une semaine.

Mais, si on veut être juste pour les contribuables comme pour les fonctionnaires, c'est un point dont on n'a pas tenu compte.

M. L'ALLIER: Je crois que ça s'inscrit précisément dans la poursuite de cet objectif du principe "à travail égal, salaire égal" qui a atteint cette année un niveau qui n'avait pas été atteint dans le passé, pour toute une série de raisons qui sont facilement explicables. Et, si on continue à tendre à l'application de ce principe, qui ne comporte pas nécessairement de rajustement avec les plus hauts traitements — ça ne veut pas nécessairement dire ça — on en arrivera à une normalisation et ça se fera, à mon avis, assez rapidement.

M. MASSE (Montcalm): J'espère que le ministre sera encore là pour l'appliquer. D'ici les prochaines élections.

M. LE PRESIDENT: Le député de Dubuc.

M. BOIVIN: Le personnel des municipalités ne fait pas partie de la fonction publique.

M. L'ALLIER: Non.

M. BOIVIN: Et, de plus, elles ont leur pouvoir de taxation. Ce sont des gouvernements pratiquement autonomes. Alors, je ne vois pas pourquoi on amène la discussion sur le personnel des municipalités. Les commissions scolaires, où il y a des subventions très importantes peuvent peut-être aller jusqu'à 80 p.c.

M. L'ALLIER: Je crois que le député de Montcalm et moi-même avons fait précisément cette distinction. Nous parlions surtout des organismes subventionnés à plus de 50 p.c, alors que pour les municipalités — vous avez raison — les subventions sont inférieures à 20 p.c.

Donc, on n'a pas parlé en fait du personnel des municipalités. Je me suis mal exprimé. On a compris que je parlais du personnel des municipalités au niveau de cette normalisation qui pourrait faire l'objet d'une intervention directe de l'Etat au moment du subventionnement.

Ceci dit, qu'on recherche dans les secteurs public et parapublic le plus grand équilibre pour des fonctions identiques, ça c'est là un principe général et qui déborde celui de la simple recherche de convention collective.

M. LE PRESIDENT: Le député de Frontenac.

Sécurité d'emploi

M. LATULIPPE: J'aurais une dernière question à poser au ministre. C'est sur la sécurité d'emploi au niveau des traitements, au niveau de l'emploi, ces deux points-là. Dans l'ensemble, les gens que nous avons rencontrés auprès de la partie ouvrière nous ont dit qu'en fait ils ne demandaient pas une sécurité absolue, mais qu'ils se limitaient seulement à une cogestion; ils voulaient participer à la décision, être sûrs que l'ancienneté serait respectée, etc. Je ne veux pas élaborer là-dessus, parce que le ministre est déjà passablement au courant des revendications qui se sont faites du côté syndical. C'est dommage que la partie syndicale ne soit pas ici aujourd'hui, justement pour reprendre ce thème ou pour faire des comparaisons avec les déclarations qui ont été faites à la dernière réunion. Est-ce que vous réaffirmez encore la position qui a été soutenue par M. Langlois qu'effectivement la partie syndicale demandait une sécurité absolue au niveau des traitements et au niveau de l'emploi?

Cela semblerait contredire essentiellement un document que j'ai ici et qui m'a été remis par M. Dumont, de la CEQ, Je me le demande. Selon lui, tout ce qu'il exige est une espèce de cogestion, ce qui ne semble pas concorder avec les déclarations que M. Langlois a faites.

M. L'ALLIER: Ce qu'on a demandé pour les enseignants, c'est qu'à un moment donné, en fait au moment du recrutement, si ma mémoire est exacte, ou peu de temps après le recrutement, quand quelqu'un est dans le système d'enseignement, il est dans le système d'enseignement pour le restant de ses jours. Si on n'a pas de travail à lui donner parce qu'il n'y a pas suffisamment d'élèves, on lui donnera autre chose à faire, mais de toute façon il sera sur la liste de paye pour le restant de ses jours. C'est ce qui est demandé.

On continue de prévoir des mécanismes de renvoi pour incompétence, pour ci et pour ça, mais il n'en reste pas moins — là-dessus peut-être que l'on pourrait préciser ce qui a été demandé; peut-être que M. Bolduc pourrait même préciser là-dessus, le porte-parole du

gouvernement n'étant pas ici — si ma mémoire est exacte, qu'on a demandé que lorsque quelqu'un est dans le système d'enseignement, il soit dans le système d'enseignement et que ce n'est pas pour des raisons de manque de travail qu'on puisse le remercier.

M. LATULIPPE: Je pourrais peut-être faire parvenir au ministre, le document que j'ai ici. Je m'excuse, mais il ne correspond pas à ce que les...

M. VEILLEUX: M. le Président, je pourrais peut-être ajouter que j'ai eu la visite d'un représentant de la CEQ qui m'a donné un autre document que celui qu'il mentionne. Pour moi, c'était une autre position qu'il avait relativement à la sécurité d'emploi. Je lui ai dit: Tu devrais retourner à la table sectorielle négocier, c'est le temps, avant que le décret arrive, si vous voulez faire une contreproposition.

M. LATULIPPE: II est difficile de se faire une idée exacte.

M. VEILLEUX: Je pense qu'il y a eu autant de propositions sur la sécurité d'emploi de la part de la CEQ qu'il y a eu de gens qui sont venus rencontrer des députés.

M. MASSE (Montcalm): A la CEQ ont-ils catégorisé les députés selon les documents ou selon les positions? C'est bien sûr que cette question...

M. VEILLEUX: Selon les positions qu'ils ont prises en Chambre.

M. MASSE (Montcalm): Sur cette question de sécurité d'emploi — puisqu'il semble qu'on soit passé à ce chapitre-là — est-ce que le gouvernement a fait des études quant au coût causé par un surcroît d'effectifs dû à une sécurité d'emploi très rigide ou interprétée comme étant très rigide? Qu'est-ce que coûte à l'Etat, pour prendre ma question autrement, la sécurité d'emploi qui est dénoncée par tous ceux qui ne sont pas fonctionnaires et glorifiée par les fonctionnaires? Je pense que c'est ça, le problème de la sécurité d'emploi actuellement. Qu'est-ce que coûte à l'Etat cette sécurité d'emploi, soit en nombre d'effectifs, soit en ralentissements? On sait tous que quelquefois des postes sont gelés parce que les personnes sont considérées comme étant en préretraite.

Il n'y a pas de recrutement, le poste n'est pas occupé. En fait, il arrive toutes sortes de modalités, en pratique là. Je ne voudrais pas en faire la liste. Que représente comme coût social, puis coût monétaire, puis coût de l'efficacité, coût administratif, la sécurité d'emploi?

Il y a beaucoup de mythes autour de cette affaire de part et d'autre. Pour ceux qui sont dans le système, la sécurité d'emploi est très importante. Ils essaient continuellement, dans les conventions collectives, de raffiner la sécurité d'emploi pour s'assurer une permanence de l'entrée à la mort, si je puis dire.

Par contre, le ministère de la Fonction publique, évidemment, est conscient du problème que cela cause et la population entend parler, à maintes reprises, des inconvénients de la sécurité d'emploi. J'aimerais que l'on profite —puisque les spécialistes sont là, de la circonstance, je ne dirais pas pour dégonfler les mythes, mais pour essayer de toucher la réalité de ce qu'est ou de ce que devrait être la sécurité d'emploi. Il est certain que le gouvernement, par les hôpitaux et par son administration, essaie" de rattraper certaines choses qui ont été concédées par tradition ou autrement dans l'affaire de la sécurité d'emploi; les autres plaident des droits acquis.

Le sous-ministre pourrait-il nous brosser les principes de ce que devrait être la sécurité d'emploi?

M. LE PRESIDENT: M. Bolduc.

M. BOLDUC: J'espère que tout le monde est bien conscient que vous me demandez une sorte d'avis sur ce que pourrait être une politique. C'est toujours embêtant pour un fonctionnaire, comme vous le savez.

M. MASSE (Montcalm): Je pourrais le demander au ministre ou à celui qui désirera répondre. Il y a une mythologie autour de la sécurité d'emploi, de part et d'autre; la réalité, c'est quoi?

M. BOLDUC: La réalité juridique actuelle —c'est peut-être un premier point — varie énormément. Il y a trois secteurs, comme vous le savez: l'éducation, les affaires sociales et la fonction publique. Dans le - domaine de la fonction publique proprement dite, il faut distinguer entre les fonctionnaires et les ouvriers. Dans le cas des fonctionnaires, il y a un article de loi qui donne une sorte de sécurité d'emploi statutaire aux fonctionnaires qui ont acquis ce que l'on appelle la permanence. Les fonctionnaires permanents ont, donc, une sorte de sécurité juridique statutaire.

Dans le cas des ouvriers, il y a une sécurité d'emploi aussi au gouvernement, mais pour un groupe nommé d'ouvriers qui ont été inscrits sur une liste en 1964, je ne me souviens pas trop, ou quelque chose comme cela, de sorte qu'il y a une sécurité contractuelle pour des hommes donnés. Je pense qu'ils sont 8,000 environ, les autres n'en ayant point. C'est le régime qui préva,ut actuellement dans la fonction publique.

Dans le cas des hôpitaux ou du secteur hospitalier — je distingue le secteur hospitalier du reste du secteur social parce qu'il y a une différence de situation — il y a une sécurité d'emploi contractuelle qui est acquise pour ceux qui ont plus de deux ans de service et qui

demeurent à l'emploi de l'hôpital. C'est, en somme, le résultat de la convention de la dernière ronde de négociation avec les secteurs hospitaliers. Ce n'est pas le cas dans le secteur, si je ne m'abuse, des agences sociales et des institutions de bien-être où, je pense, il ya un régime de sécurité de revenu, c'est-à-dire une formule qui supplée. Vous savez que la majorité de ces gens-là ne bénéficiaient pas de l'assurance-chômage. Par conséquent, on a un régime de sécurité du revenu diminuant progressivement dans le temps, qui fait qu'à un moment donné il n'y a plus de sécurité. Mais il y a une sorte de situation où existe une sécurité de revenu relative pour une période donnée, ce qui n'est pas la sécurité d'emploi, dans le secteur hospitalier.

Dans le secteur de l'éducation, il n'y a pas de sécurité d'emploi présentement sauf qu'il y a un régime pour les enseignants, comme vous le savez. Je distingue le personnel enseignant du personnel de soutien. Dans le cas du personnel de soutien, il n'y a pas de sécurité d'emploi; dans le cas du personnel enseignant, un groupe se trouve à l'avoir. C'est un groupe de fonctionnaires qui ont été mutés, comme vous le savez, dans le régime des collèges. Ce sont les anciens professeurs qui étaient dans le SPEQ, qui était le syndicat des professeurs de l'Etat, qui ont été mutés dans les collèges. Ces gens-là, au plan personnel avaient la sécurité d'emploi au gouvernement comme fonctionnaires permanents. Du fait de leur transfert, ils ont gardé ce droit qui est en somme, un droit personnel.

Les autres professeurs ne l'ont point. Dans le cas des commissions scolaires, en général, comme vous le savez, il y a un régime d'engagement et de renouvellement de contrat. A toutes fins pratiques, le problème ne s'est pas posé souvent dans le passé, parce qu'il y avait une scolarisation plus accentuée. On allait progressivement vers une scolarisation de plus en plus massive, particulièrement au niveau secondaire et collégial, de sorte que le problème ne se pose pas et ne se posera pas d'ici 1975, au niveau secondaire et au niveau collégial.

On peut toujours en discuter en termes de principes mais le problème ne se pose pas, il se pose au niveau élémentaire.

M. Martin, lors de la présentation qu'il avait faite au comité, à la table centrale, avait donné l'ordre de grandeur. J'ai, pas très loin ici, sous la main, les chiffres en question. Cela concernait évidemment un certain nombre d'employés, mais globalement ce qu'on pourrait dire là-dessus, et ce qui serait peut-être intéressant, c'est qu'il faut distinguer entre le passé et l'avenir.

Pour le passé, la meilleure façon d'examiner les faits, c'est finalement de regarder ce qui s'est produit, le travail qui a été présenté par le directeur du bureau provincial. Vous savez que, lors de la dernière convention des professeurs du secondaire et de l'élémentaire, il a été mis sur pied, conjointement avec les professeurs, un bureau de placement provincial qui a fonctionné effectivement et qui a placé du monde, qui en a placé à un point tel que je pense qu'il y a eu, l'an dernier, si je ne m'abuse, comme 300 ou 400 maîtres, à peu près, qui ne se sont pas trouvé d'emploi finalement, au bout de l'année, sur 72,000. Ce qui me faisait dire à la table centrale qu'il s'agit là d'un taux de non-emploi inférieur à tout ce qu'on rencontre probablement dans tous les pays occidentaux. Je veux dire que c'est un résultat extrêmement fantastique.

Effectivement, vous avez moins de deux dixièmes de 1 p.c. de la masse des professeurs qui, en somme, est inemployée â un moment donné, et on ne sait pas si elle voulait se placer ou pas — ce n'est pas encore acquis — nous ne le savons pas. Mais il reste que de 72,000 personnes, quand il y en a 300 qui n'ont pas d'emploi, vous êtes à un taux en bas de 1 p.c. Il n'y a pas un pays, y compris la Hollande, y compris la Suède, qui a un régime d'emploi comparable à ça. Je pense que, comme catégorie occupationnelle, on peut dire que c'est un marché en équilibre, à toutes fins utiles, en termes d'offre et de demande.

Pour l'avenir... Oui.

M. LATUL1PPE: Combien d'emplois cet organisme-là a-t-il trouvé aux professeurs? En fait, vous nous dites qu'il reste moins de 1 p.c, mais combien d'emplois a-t-il trouvé?

M. BOLDUC: C'est peut-être 4,000, 5,000 ou 6,000, je n'ai pas les chiffres en mémoire. Vous savez qu'il y a trois systèmes, là-dedans: il y a les gens qui, d'un côté, sont tolérés dans le système parce qu'ils ne sont pas légalement qualifiés; vous avez, en dehors de ceux-là, ceux qui ont des permis provisoires d'enseignement; et finalement ceux qui démissionnent effectivement, ceux qui sont forcés de démissionner, et ceux qui ont un comportement tel qu'ils doivent démissionner. Alors, vous avez quatre ou cinq groupes différents. La masse peut constituer, globalement parlant, j'imagine, chaque année, une dizaine de milliers de personnes probablement ou quelque chose comme ça sur 75,000, ou 7,000 ou 8,000 en tout cas.

Mais, là dedans, vous en avez tout de suite qui sont réengagés automatiquement. Ce qui est entendu, avec les maîtres, c'est que ceux qui n'étaient pas légalement qualifiés, à un moment donné il faudrait qu'il y ait un système quelconque pour qu'ils finissent par se qualifier dans l'enseignement. Je pense que ç'a été acquis et, l'an dernier, si je ne m'abuse, il y a eu un certain groupe qui, sur ce plan, a quitté l'enseignement. Ces maîtres n'étaient pas légalement qualités au sens de la Loi de l'instruction publique. Je pense que ce n'est pas cette partie-là, d'ailleurs, qui a posé un problème avec les maîtres, c'est le reste, les autres groupes.

Les autres sont réengagés, en partie, en tout cas, compte tenu de l'évolution de l'effectif sco-

laire, et finalement, il y a un groupe qui finit par ne pas se trouver d'emploi. Et l'an dernier, si je me rappelle bien, je pense que c'est quelque chose comme 300 ou 400. Le sous-ministre de l'Education qui est, en fait, bien plus au courant que moi, pourrait préciser davantage.

M. MARTIN: Les chiffres indiqués sont exacts: pour l'an dernier, c'est environ 300 et quelques détenteurs de brevets — donc des personnes légalement qualifiées — pour lesquelles le bureau n'a pas pu trouver d'emploi. Cette année, je pense que la situation s'annonce...

M. MASSE (Montcalm): Ont-ils été payés quand même ou s'ils ont eu une bourse de perfectionnement? Ils sont sortis du système?

M. MARTIN: Ils sont sortis du système.

M. MASSE (Montcalm): C'est ce qu'on appellerait les "drop-out" de l'éducation.

M. MARTIN: C'est ça. Maintenant, il y en a peut-être dans ça qui sont aux études ou qui ont fait autre chose que nous ne connaissons pas.

M. MASSE (Montcalm): Pas en vertu des ententes.

M. MARTIN: Ils n'ont pas été suivis, ces 300 là. Nous n'avons pas eu de nouvelles d'eux à partir d'octobre.

M. AUDET: Mais cela ne veut pas dire qu'ils ont été refusés.

M. MARTIN: II n'y a pas eu d'emploi qui leur a été offert et qui correspondait à leurs qualifications.

M. MASSE (Montcalm): Mais, les reprenez-vous cette année? Avez-vous encore les listes?

M. MARTIN: Nous avons encore les listes.

M. MASSE (Montcalm): Vous allez leur offrir encore des possibilités de...

M. MARTIN: La situation pour l'an prochain — on vient d'émettre un communiqué, c'est peut-être d'intérêt pour la commission ici de le savoir — l'an prochain on prévoit — les chiffres que je donne sont approximatifs — que le nombre de postes sera d'environ 74,000 dans la commissions scolaires.

La situation actuelle se présente de la façon suivante: en 71/72, environ, à quelques dizaines près, ils sont 71,200 enseignants dans les commissions scolaires. Il y a 3,600 enseignants qui démissionnent d'eux-mêmes ou qui demandent leur mise à la retraite au 8 mai. C'est-à-dire qu'hier il y avait 3,600 personnes qui avaient démissionné ou demandé leur mise à la retraite.

Cela veut dire que, si on déduit ce nombre de 71,200, il en reste 67,600. Il faut en enlever 1,000, chiffre qui correspond au nombre des tolérances d'enseignement, donc des gens qui sont non qualifiés et normalement non qualifiables pour enseigner mais qu'on autorise les commissions scolaires à engager quand elles n'ont trouvé personne pour remplir les postes, personne qui détienne un permis temporaire, un permis permanent ou un brevet. Cela fait donc 66,600 et on en a besoin de 74,000. Il y a donc 7,400 postes à combler par des enseignants légalement qualifiés alors que les surplus de personnel réels, en date du 8 mai, sont 1,128.

Les personnes qui ont reçu un avis de non-réengagement avant le 1er mai, comme la loi l'exige, pour motif de surplus de personnel, cette année, d'après le relevé complet fait au 8 mai, c'est 1,128. Il y en a 384, si mon souvenir est bon, qui ont été remerciées pour cause et qui ont droit à l'arbitrage, s'ils décident d'y recourir. Il y a 1,000 personnes qui ne sont pas encore réengagées parce qu'elles n'ont pas encore reçu du ministère le maintien de l'autorisation provisoire d'enseigner. Pour l'essentiel, peut-être à 99 p.c. ou 99.9 p.c, elles vont être réengagées dès que le ministère aura émis une nouvelle autorisation, ce qui sera fait très probablement d'ici la fin de la semaine. Nous fonctionnons à 400 par jour, environ. Il restera peut-être quelques cas plus difficiles à régler au cours de la semaine prochaine ou dans les quinze jours qui viennent.

Par ailleurs, 2,300 enseignants ont reçu un avis de non-réengagement de leur commission scolaire locale, mais ils sont automatiquement engagés par la régionale où s'en vont leurs élèves par suite du transfert ou de la disparition, si on veut, des septième années. Cela est prévu par notre ancienne entente et c'est consacré. C'est entendu. C'est un droit. Ils suivent leurs élèves. Donc, ces 2,300 personnes devaient, techniquement, être mises à pied mais tout de suite réengagées par la régionale. Donc, effectivement, le point qu'on discute est la question du surplus de personnel pour 72/73 et les non-engagements se chiffrent à 1,128 après le 8 mai.

M. MASSE (Montcalm): L'an dernier, combien y en avait-il?

M. MARTIN: II y a 7,400 postes à pourvoir par des enseignants légalement qualifiés.

M. MASSE (Montcalm): Alors, disons, au 8 mai, c'est 1,128. L'an dernier, il y en avait combien?

M. MARTIN: Au total, en surplus de personnel, l'an passé, je ne me rappelle pas les chiffres précis. Mais, au total, il y au-delà de 4,500, il me semble, avis de non-réengagement pour différentes causes. Il y en avait moins que cette année à cause des septième années.

M. MASSE (Montcalm): C'est parce qu'on sait qu'il en resté 300, d'après ce que disait M. Bolduc.

M. MARTIN: Oui, c'est environ 300, d'après nos listes.

M. MASSE (Montcalm): Alors, on pourrait savoir la proportion de ceux qui pourraient rester si on savait que ce sont 300 de combien. Cette fois-ci, on en a 1,128. Il va en rester à peu près...

M. MARTIN: Je ne sais pas combien il peut en rester. Là-dedans, il y a des cas où on va offrir des postes. Ce sont des gens qui seraient qualifiés mais qui ne seront pas mobiles, notamment des femmes. C'est le cas, surtout à l'élémentaire, des femmes mariées qui ne peuvent pas accepter l'emploi qu'on leur offre dans une commission scolaire à 100 milles de distance, parce qu'elles ne sont pas mobiles.

M. MASSE (Montcalm): II y a au moins des cas nouveaux. L'an dernier, il y avait des cas de mise à la retraite. Cette année, il y en a au moins un qui a été...

M. MARTIN: II y a une marge importante entre 7,400 et 1,128 ou entre 0 et 7,400. Il y a place, je pense, pour l'essentiel, pour tous ceux qui sont brevetés et ceux qui sortiront des écoles de formation.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Laurier.

M. MARCHAND: Combien sortiront des écoles normales, cette année?

M. MARTIN: Comme vous le savez, il n'y a plus d'école normale au sens strict, sauf deux exceptions. Si on tient compte des étudiants engagés dans des programmes de formation de maîtres dans les universités et dans les deux écoles normales qui continuent d'exister, notre chiffre le meilleur, en date d'hier, est d'environ 3,200.

M. MARCHAND: Cela ne comble pas encore les vides.

M. MARTIN: Cela ne les comble pas encore.

Donc, il y aura sans doute encore des gens qui seront employés avec des permis temporaires. Nous serons encore obligés d'engager des gens avec des tolérances d'enseignement pour certains secteurs en 1972-1973.

M. MASSE (Montcalm): Quelle différence faites-vous entre ceux qui ont été mis â la retraite et ceux qui sont mis à l'ombre?

M. MARTIN: Je m'excuse.

M. MASSE (Montcalm): Quelle différence faites-vous entre ceux qui sont mis à la retraite et ceux qui sont mis à l'ombre?

M. MARTIN: Personne n'est mis à la retraite dans l'enseignement.

M. MASSE (Montcalm): II y en a qui sont mis à l'ombre.

M. BURNS: II y en a qui sont mis à l'ombre.

M. MARTIN: Je ne suis pas au courant de ceux qui, dans l'enseignement, étaient effectivement enseignants cette année.

M. LE PRESIDENT: Le député de Dubuc.

M. MARTIN: II n'y a personne qui a enseigné effectivement, cette année, et qui, à ma connaissance, ait été mis à l'ombre.

M. BOIVIN: Je demanderais au sous-ministre si l'information a été donnée comme telle au public. Il me semble qu'il serait bon...

M. MARTIN: Elle est donnée au public...

M. BOIVIN: ... que le public sache qu'il y a 7,400 postes.

M.MARTIN: Environ. Approximativement.

M. BOIVIN: II serait bon de donner l'explication au public pour que les gens voient...

M. MARTIN: Le communiqué...

M. BOIVIN: ... que le problème de sécurité n'est pas si aigu qu'on le pense.

M. MARTIN: Pour répondre au député, dès qu'on a eu tous les chiffres précis, on ne voulait pas sortir de chiffres â 100 p.c, sans avoir fait le tour des commissions scolaires, grâce aux bureaux régionaux du ministère. On a fait cela assez rapidement et on a attendu de les avoir pour ne pas donner des chiffres en l'air — ce qui a été fait cet après-midi, on a préparé un communiqué qui a été diffusé vers trois heures.

M. BOIVIN: D'accord.

M. LE PRESIDENT: Le député de Maisonneuve.

M. MASSE (Montcalm): Le problème va se poser. Vous avez parlé de 1975. A un moment donné, il semble qu'il va y avoir un problème, d'après les positions que vous formulez.

M. MARTIN: J'ai bien pris soin de préciser, quand j'ai exposé le problème, que je parlais en chiffres absolus, globalement. Dans l'ensemble des commissions scolaires, d'ici cinq ans, il y aura 100,000 élèves de moins. Ce qui veut dire,

d'après les normes actuelles de 1-27, 1-17 et 1-40 en maternelle, etc., qu'en gros, le système aura besoin de 5,000 professeurs de moins. Pendant cette période, il y aura quand même des départs. Les chiffres le montrent encore cette année. J'avais pensé que nous aurions peut-être au maximum 2 p.c. ou 3 p.c. de départs, de démissions volontaires et de demandes de mise à la retraite, mais 3,600 cela représente 5 p.c.

Si ce chiffre se maintenait, le système pourrait être en assez bon équilibre. Ce sont des chiffres absolus que je donne. Mais il est clair qu'en chiffres absolus, la diminution va continuer, par la suite, au secondaire et le phénomène va atteindre le collégial plus tard, en 1978 ou 1979. Normalement, cela devrait toucher les universités un jour.

M. MASSE (Montcalm): Est-ce que cela est pour une même proportion d'étudiants dans ce qu'on a appelé les écoles normales, les facultés d'éducation? Ou si, au contraire, pour arriver à avoir cet équilibre dont vous parlez, il faut que le nouvel arrivage d'enseignants soit diminué par rapport à ce qu'il était ces dernières années, c'est-à-dire qu'il va falloir être plus sévère à l'entrée dans les facultés d'éducation...

M. MARTIN: Oui.

M. MASSE (Montcalm): ... ou en mettre moins sur le marché? Est-ce que c'est toutes choses égales?

M.MARTIN: C'est en chiffres absolus. Je pense que là, nous aurons peut-être un problème d'ajustement pendant une certaine période. Il est très probable qu'on ne formera pas assez de maîtres pour des périodes temporaires.

M. MASSE (Montcalm): Oui.

M.MARTIN: Ensuite, on en aura moins besoin.

M. MASSE (Montcalm): Est-ce que vous êtes en relation, au ministère de l'Education, avec...

M.MARTIN: Oui.

M. MASSE (Montcalm): ... les facultés d'éducation pour...

M. MARTIN: Chaque année.

M. MASSE (Montcalm): ... l'acceptation des étudiants?

M. MARTIN: Chaque année, particulièrement depuis deux ans, nous en faisons le tour régulièrement pour, d'abord, les informer des données et, surtout, pour insister sur les secteurs où il y a un surplus. H y a vraiment des surplus en histoire et en français. Ce sont des secteurs où il y a pléthore, si vous voulez. Dans ces secteurs, il ne sert pratiquement à rien, dans l'immédiat, de s'engager dans des programmes de formation de maîtres. C'est pléthorique.

M. MASSE (Montcalm): Oui.

M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Jean.

M. BURNS: De Maisonneuve, M. le Président. Vous m'avez reconnu tantôt.

M. LE PRESIDENT: Le député de Maisonneuve. Bien, je vous ai reconnu mais ne cédez pas votre droit à d'autres.

M. BURNS: Je ne l'ai pas laissé. C'est que le député de Montcalm, comme je l'ai compris, continuait une question qu'il posait déjà.

M. LE PRESIDENT: Le député de Maisonneuve.

M. BURNS: Alors, par politesse, je l'ai laissé continuer.

M. VEILLEUX: Moi, c'est sur les non légalement qualifiés.

M. BURNS: Pour ma part, je suis fasciné — d'ailleurs, c'est au ministre que je vais poser la question — par les chiffres qui sont donnés par le sous-ministre de l'Education. Je ne sais pas si c'est là l'argument du gouvernement pour ne pas accorder la sécurité d'emploi, mais je trouve qu'au contraire, c'est l'argument pour l'accorder et le plus vite possible. C'est parfait actuellement. Vous n'avez pas de danger immédiat de sérieuses mises à pied. Alors, vous vous engagez à quoi, dans le fond? Vous vous engagez à strictement rien. C'est donc une question politique surtout. C'est pour cela que je la pose non pas au sous-ministre, le ministre nous ayant dit que les questions politiques, il fallait les poser plutôt au ministre lui-même, bien que les sous-ministres aient quelque chose à dire dans les politiques du ministère.

M. L'ALLIER: Ils ne sont pas là pour rien!

M. BURNS: Je l'espère, je l'espère. Il reste, quand même, que je veux respecter les règles du jeu. Je pense que c'est au ministre que je m'adresserai plutôt — cela pourrait être interprété comme tel — que de tenter d'embêter un sous-ministre; ce n'est pas le cas.

Je ne comprends strictement rien à la position du gouvernement, actuellement. Vous avez déjà, dans deux secteurs très importants, le secteur hospitalier et le secteur — tout au moins, il est considéré comme tel — de la Société des alcools, la sécurité d'emploi. Je me dis: Pourquoi ne l'accordez-vous pas aux enseignants?

Voici quel est mon raisonnement dans cette remarque. Je me dis que, si vous n'avez pas de problèmes dans l'immédiat, mais que vous les prévoyez pour dans cinq ans, cela vous donne au moins le temps de planifier et de faire une espèce d'inventaire des besoins et des diminutions par rapport aux mises à la retraite, au taux normal des démissions, au taux normal des congédiements, au taux normal des non-réengagements, etc. Vous êtes capables de planifier sur cinq ans. C'est drôlement important pour les enseignants, actuellement, de savoir qu'ils ont un minimum de sécurité d'emploi.

Quand je dis sécurité d'emploi —je m'adresse au ministre de la Fonction publique — je ne dis pas qu'on doive affirmer aux enseignants qu'on leur assure, à tout prix, qu'ils garderont l'emploi où ils sont actuellement jusqu'à leur retraite. Ce n'est pas du tout cela. Il ne faut pas se leurrer quand on parle de sécurité d'emploi. Il s'agit de dire — si c'est la fonction publique qui prend la chose en main, c'est possible — on pourra, si votre emploi disparaît, vous relocaliser. Je pense que M. Charbonneau, sauf erreur, a même parlé de possibilité de sécurité d'emploi intersectorielle et non pas uniquement intrasec-torielle.

Je pense qu'à ce moment-là cela vous donne toute l'ouverture sur le champ de la fonction publique, dans tous les domaines où ce personnel, quand même, avec une scolarité assez élevée, peut être utilisé. Surtout quand on considère — je m'excuse si je me répète là-dessus — la position qu'on a déjà prise ailleurs, je pense, en Chambre. On disait: On investit tellement, depuis quelques années, dans le domaine de l'éducation, je ne vois pas pourquoi on se mettrait à jeter par-dessus bord ces compétences de personnes qui ont de hauts niveaux de scolarité.

Vraiment, je ne comprends pas l'attitude du gouvernement qui refuse aux enseignants, particulièrement, la sécurité d'emploi. Je ne sais pas si le ministre trouve qu'il est trop tôt pour répondre, mais je trouvais que c'était le moment de se poser la question, en entendant ces chiffres qui sont donnés par le sous-ministre de l'Education.

M. BOIVIN: M. le Président, j'ai une question qui serait parallèle à cette affaire. Est-il vrai qu'on refuse aux enseignants la possibilité d'avoir une charte d'association professionnelle? Il me semble qu'une autodiscipline serait utile. Je me suis laissé dire cela par les enseignants. Je leur ai dit: Peut-être que, dans une association professionnelle, vous pourriez planifier votre affaire et y arriver. Parce que, là, c'est le gouvernement qui est là pour juger, peut-être, de la valeur des enseignants.

UNE VOIX: Le code des professions.

M. BOIVIN: Le code des professions, oui. On refuserait aux enseignants la possibilité d'avoir une charte d'une association professionnelle.

M. L'ALLIER: Est-ce le gouvernement ou eux qui la refusent?

M. BOIVIN: On me dit que c'est le gouvernement qui la refusait.

M. L'ALLIER: Ils ne sont pas trop branchés entre une corporation et un syndicat.

M. BURNS: Le projet de loi no 250 n'inclut pas une corporation professionnelle d'enseignants, c'est un fait. D'autre part — je fais également partie de cette autre commission — à ma connaissance, les enseignants n'ont pas fait de représentations à cet effet. Ils ne nous ont pas présenté de mémoire à cet effet.

Actuellement, ils ont, d'ailleurs, la Corporation des enseignants du Québec, la CEQ, qui leur sert de centrale, mais qui, dans le fond, a une structure corporative.

M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Jean.

M. VEILLEUX: Je me souviens qu'il y a quelques années, à un congrès où j'étais présent, on votait justement pour savoir si la corporation devait être soit professionnelle ou syndicale ou garder les deux entités. Le congrès s'était prononcé pour en faire un syndicat. On avait balancé par-dessus bord, en congrès plénier à Québec ou à Montréal, le côté professionnel.

M. BURNS: Moi, je pense que ce n'est pas du tout du même sujet qu'on parle. Je suggère — je le demanderais à M. le président — que le ministre nous parle de ça et qu'après on revienne à l'affaire.

M. BOIVIN: Je l'avais rattaché à ça, parce qu'il est assez dur pour le gouvernement de dire que tel professeur n'est pas qualifié pour telle chose ou dire qu'il y en a 1,000 qui sortent...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît! Le ministre de la Fonction publique jugera s'il doit répondre aux questions.

M. VEILLEUX: C'est parce que moi j'aurais peut-être une question que je pourrais juger précéder la question. Je poserai la mienne après.

M. LE PRESIDENT: Le ministre de la Fonction publique.

M. L'ALLIER: Toute la question de la sécurité d'emploi, ce que je dirai là-dessus en fait est une reprise de ce qu'on a dit et répété à la table de négociation. On pourrait, si on voulait faire un long débat là-dessus, virer la question à l'envers. Je n'ai pas l'intention de le faire. Mais on pourrait dire par exemple...

M. BURNS: Je l'avoue, c'est moi qui l'ai virée à l'envers.

M. L'ALLIER: Mais je pourrais la revirer à l'envers, dire aux enseignants...

M. BURNS: Sauf que ce n'est pas moi qui suis sur le "spot".

M. L'ALLIER: ... précisément il y a moins de 1 p.c. de gens qui sont non réengagés. Qu'est-ce que c'est que cette histoire de bataille là-dessus pour la sécurité d'emploi pour moins de 1 p.c? D'autant plus que ce sont des gens qui ont une assez haute scolarité.

M. BURNS: Quand vous dites: Qu'est-ce que c'est que toute cette bataille-là? Les enseignants sont en droit de se poser de sérieuses questions, parce qu'au chapitre de la sécurité d'emploi ce que vous leur offrez, dans le fond, ce sont des bénéfices supplémentaires d'assurance-chômage.

M. L'ALLIER: C'est exact. Plus un certain nombre de choses.

M. BURNS: A toutes fins pratiques, c'est peut-être une question qui mérite la peine d'être posée.

M. L'ALLIER: Une amélioration d'assurance-chômage, bien sûr, plus un bureau de placement sectoriel et intersectoriel, plus au-delà de $1 million pour le recyclage...

M. BURNS: Cela ne donnera pas grand-chose cette histoire-là, ne nous contons pas de peurs.

M. L'ALLIER: Pourquoi ça ne donnerait pas grand-chose?

M. BURNS: Si ça donnait tellement de quoi, vous n'auriez pas peur de donner la sécurité d'emploi.

M. L'ALLIER: II n'y a pas de lien entre les deux. Dans le passé ça a donné quelque chose. On a vu l'an dernier et les années précédentes.

M. BURNS: La question que je pose au fond: Est-ce idéologique, cette affaire-là? Est-ce un début d'offensive où vous dites: Non, nous la refusons aux enseignants et bientôt nous irons la chercher dans les hôpitaux et bientôt dans la Société des alcools. Si c'est ça je pense que c'est important que le gouvernement le dise. C'est drôlement important, parce qu'il y a des gens qui vont se réveiller; c'est une tendance dans toute la fonction publique en général. Et là je la prends au sens large, je pense même au port de Montréal, aux commissions scolaires qui, pour des raisons que nous n'avons pas à étudier ici, ont été pris par surprise par le droit de grève de 1964-1965. Ils ont accordé certains bénéfices, à ce moment-là, qu'aujourd'hui ils regrettent d'avoir accordés.

Il y a une tendance et, depuis plusieurs années, on met sur le dos des syndicats les grèves qui interviennent dans le secteur public. Il faudrait peut-être se demander aussi si ce n'est pas la responsabilité de certains employeurs qui veulent aller chercher des choses qui sont acquises dans les conventions collectives et qui disent: Bien là, l'atmosphère, l'opinion publique est antigrève, etc., c'est peut-être le bon moment de leur faire faire les grèves.

M. MASSE (Montcalm): Cela revient exactement à la question de départ, cette question de sécurité sociale que nous avons étudiée au début. Cela repose le problème, pas uniquement pour les enseignants, du principe de la sécurité d'emploi dans le secteur public.

Il a été donné, à la demande de l'opinion publique jusqu'à un certain point, à cause de l'ingérence politique — il ne faut pas avoir peur des mots, c'est ça qui était l'affaire — pour assurer aux fonctionnaires une plus grande liberté devant des positions partisanes des employeurs, qui sont nécessairement des employeurs politiques, gouvernement et autres. Avec la syndicalisation, ce danger d'ingérence est moindre parce qu'il y a beaucoup de droits, de tribunaux, de griefs, etc.

C'est pour ça que la question, à mon avis, pour un tableau de ce qui existe se posait au sous-ministre, mais pour l'avenir au ministre — et le député de Maisonneuve a parfaitement raison à ce moment-ci. Est-ce que la sécurité d'emploi, dans les secteurs publics, a la même valeur qu'il y a dix ans? Ou, au contraire, compte tenu de ce que j'ai appelé la mythologie de tout ce qui tourne autour de ça, concernant l'efficacité, concernant le coût social de la sécurité d'emploi, concernant un certain nombre de points, est-ce que le gouvernement — le gouvernement en général, pas nécessairement le Parti libéral — comme principe est en train de remettre en cause l'utilité pour une collectivité d'accorder la sécurité d'emploi dans les secteurs publics, compte tenu du fait que, dans les secteurs privés, ils ne l'ont pas, étant donné que maintenant les traitements sont à peu près identiques et des choses semblables?

C'est ça qui est la question de départ et je pense qu'on y revient, là, après avoir fait une certaine étude sectorielle. Je pense que c'est au ministre de la Fonction publique de répondre à ça: Est-ce qu'il y a encore lieu, au Québec, d'accorder la sécurité d'emploi dans les secteurs publics et pourquoi?

M. L'ALLIER: C'est ça. C'est la question qu'il faut poser, puis c'est une question politique, effectivement. Lorsqu'on parle de la sécurité d'emploi dans le secteur public, on pourrait faire un long historique. Vous avez donné quelques-uns des éléments qui ont amené la

sécurité d'emploi dans le secteur public, notamment dans la fonction publique. Vous demandez si c'est une chose qu'il faut, à un moment donné, revoir: c'est effectivement une question sur laquelle, je pense, tout ministre de la Fonction publique doit se pencher à un moment donné de son travail.

A mon avis, ce n'est pas d'abord au niveau du personnel syndiqué que ça doit se poser. C'est au niveau, peut-être, du personnel supérieur qu'il faut se poser la question, puis étudier l'ensemble des modalités qui font qu'aujourd'hui on se demande si, à un niveau de gérance assez avancé, on doit avoir ou ne pas avoir la sécurité d'emploi, etc. La question doit se poser en ces termes-là. Il faut effectivement que je continue l'étude de ce dossier.

C'est extrêmement important; c'est toute la question de ce qu'on appelle "l'entrepreneur-ship", par exemple, au sein des services publics. Les fonctions étant regroupées suivant des PPBS ou quoi que ce soit, est-ce que la sécurité d'emploi ou la permanence d'emploi correspond toujours à la réalité du marché de la main-d'oeuvre, notamment au niveau supérieur de la fonction publique? Si on doit se poser la question dans les secteurs qui ont déjà la sécurité d'emploi, à mon avis, il faut d'abord la poser pour une catégorie de personnel qui, de fait, n'est pas actuellement syndiquée parce qu'elle est précisément au niveau supérieur de l'administration.

Deuxièmement, pour ce qui est de la sécurité d'emploi chez les enseignants, il y a un principe inhérent au système d'administration scolaire, qui est celui du droit de gestion des commissions scolaires. Il y a les collèges aussi. On a un système qui est basé sur la décentralisation de la gestion.

Or, donner la sécurité d'emploi dans la mesure où précisément la clientèle étudiante est appelée à diminuer supposerait qu'au fur et à mesure de cette diminution, de quelque façon, ce serait l'Etat qui assumerait directement la fonction "personnel", tant au niveau des collèges que des institutions d'enseignement et des commissions scolaires.

Or, le système d'éducation, actuellement, est orienté dans une direction complètement opposée à ça. C'est orienté dans une direction où ce sont précisément les gestionnaires locaux qui ont l'administration du personnel et qui ont le droit de choisir le personnel dont ils ont besoin suivant un certain nombre de normes établies par le ministère de l'Education, bien sûr, quant aux qualifications, etc. C'est ça, la question fondamentale de la sécurité d'emploi.

M. BURNS: Est-ce que le ministre me permet une sous-question sur ce qu'il a commencé à élaborer? Est-ce que vous avez envisagé la possibilité — comme je le mentionnais tantôt, peut-être, un peu à la sauvette là — d'une sécurité d'emploi intersectorielle ou d'une sécurité intrasectorielle par voie intersectorielle? Je m'explique, car ce que je dis a peut-être l'air confus. Quand je parle de sécurité intersectorielle, pour moi — le ministre là-dessus a parfaitement raison — c'est évident que, si on prend un enseignant d'une commission scolaire puis qu'on le ramène dans les cadres gouvernementaux, on le change de secteur.

Le gouvernement, justement, ayant une certaine responsabilité comme le plus gros employeur du Québec, à partir du moment où un certain nombre d'enseignants dans une commission scolaire ne sont plus utiles, c'est-à-dire qu'on n'en a plus besoin au point de vue du nombre, devrait, lui, voir à les relocaliser dans une autre commission scolaire. C'est ça que je veux dire par intrasectorielle par voie intersectorielle.

M. L'ALLIER: Cela veut dire, à ce moment-là, que c'est le gouvernement directement qui assume la fonction de direction du personnel pour l'ensemble des commissions scolaires.

M. BURNS: Exactement. Dans le fond, c'est un peu ce que vous avez fait par votre bill 46, lorsque vous avez dit qu'à toutes ces négociations-là le gouvernement serait présent.

M. L'ALLIER: Présent et partie.

M. BURNS: Oui, mais présent, cela veut dire que vous avez un drôle de droit de veto.

M. L'ALLIER: Ce que vous dites, cela veut dire, en définitive, qu'on inverse le mouvement actuel de décentralisation administrative et que c'est une centralisation administrative en ce qui concerne l'affectation du personnel enseignant et l'ensemble du personnel scolaire.

M. BURNS: Vous l'inversez sous un aspect, sous l'aspect direction-personnel, il n'y a pas de doute. C'est une responsabilité que vous allez être obligé de prendre tôt ou tard. Il est important, à mon avis, que vous preniez cette responsabilité pour vos propres employés du gouvernement. Il y a des "patterns" qui se créent à ces niveaux-là. Je m'excuse, passez-moi l'expression, mais il y a des bordels quelque part au niveau de certains CEGEP un peu partout et vous en subissez les conséquences.

Vous avez trouvé cela tellement important que, dans le bill 46, vous avez pris la peine d'inscrire que la convention collective des corporations scolaires ne serait valide que s'il y avait participation gouvernementale. Vous avez trouvé cela suffisamment important pour l'inscrire. Ne prenez pas le gâteau et n'essayez pas de tout le manger en même temps. On ne peut pas tout avoir. Il y a une responsabilité afféran-te à cela, à mon avis.

M. LE PRESIDENT: Le député de Jacques-Cartier.

M. SAINT-GERMAIN: Je ne suis pas membre de la commission, je ne sais pas si on peut m'accorder la parole.

M. LE PRESIDENT: Oui.

M. SAINT-GERMAIN: De toute façon, j'aurais peut-être un exemple.

M. BURNS: On vous le permet pour autant que vous ne ferez pas un "filibuster".

M. SAINT-GERMAIN: J'aurais un exemple bien pratique, quant à la sécurité d'emploi. Je me souviens très bien qu'un de mes concitoyens de Lachine était venu me voir au bureau. C'était un ancien employé d'une école technique. Vous vous souviendrez que, lorsque les écoles techniques ont été fusionnées avec les commissions scolaires locales, les professeurs, comme les employés des écoles techniques, étaient des fonctionnaires. En vertu de nos lois et de la sécurité d'emploi, ces employés avaient le choix d'être employés par les commissions scolaires qui fusionnaient avec ces écoles techniques ou de demeurer fonctionnaires.

Le citoyen qui était venu me voir avait choisi de demeurer fonctionnaire. Il voyait à l'entretien des bâtisses de l'école technique. On n'avait pas, à Montréal dans ce temps-là, de travail à lui donner. On lui a dit: Va-t-en chez toi, on t'appellera dans une quinzaine de jours et on te dira où tu iras travailler. Cela faisait neuf mois que le type recevait son salaire à ne rien faire, bien assis chez lui et il recevait son chèque par la poste au bout de la semaine. Voilà qu'on a décidé de transférer ce type à Québec parce qu'il y avait une ouverture à Québec. J'avais appelé au ministère de l'Education dans le temps et on m'avait dit que les ouvertures étaient surtout à Québec, au niveau de l'éducation.

J'ai eu l'impression qu'il est venu me voir parce qu'il s'opposait à son transfert à Québec. Je lui ai fait une telle sortie, devant une telle situation — je croyais que pour le contribuable et à titre de député c'était presque un scandale de payer un homme neuf mois à ne rien faire — qu'il n'avait pas poursuivi sont argumentation. De toute façon, on lui avait trouvé un emploi à Québec mais le gouvernement était obligé de payer son voyage et sa pension à Québec. Après calcul, j'en avais déduit que cela coûtait $15 de plus au gouvernement de le laisser à ne rien faire. Si on donnait cet emploi à un citoyen de Québec et qu'on gardait ce type à ne rien faire chez nous, le contribuable ne payait de $15 de plus.

C'est dire que si celui qu'on engageait à Québec recevait de l'assurance-chômage ou des allocations sociales, il était plus avantageux pour le contribuable de faire travailler un Québécois à Québec et de garder l'autre à ne rien faire à Montréal. On m'a dit qu'il y avait plusieurs centaines d'employés des écoles tech- niques dans cette situation. Au moment où ce type est venu me voir, on m'a confirmé qu'il y avait encore plusieurs centaines d'employés des écoles techniques qui, après neuf mois, n'avaient pas été recyclés et qui avaient reçu continuellement leur salaire. Après un bref calcul, cette sécurité d'emploi a coûté aux fonds publics au-delà de $2 millions. Les chiffres que j'avance ne sont peut-être pas exacts; je vous les donne de mémoire et cela fait déjà une couple d'années. Il y a certainement quelqu'un qui peut confirmer ou infirmer ce que j'avance.

M. BURNS: Le député de Jacques-Cartier n'était peut-être pas ici tantôt, mais cette discussion a été amorcée par certains chiffres que le sous-ministre de l'Education nous a donnés, et il nous dit actuellement que ce n'est pas le problème que vous décrivez et auquel on est en droit de s'attendre. C'est plutôt le contraire, il y aurait un besoin de 7,400 enseignants.

M. SAINT-GERMAIN: Je veux simplement savoir si on peut confirmer ou infirmer les chiffres que j'avance. Peut-être cela pourrait-il aider à éclairer la commission.

M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Jean attend peut-être pour faire le tour.

M. VEILLEUX: Les non légalement qualifiés, ça n'a aucun trait aux anciens du SPEQ. Le sous-ministre pourra peut-être répondre, je poserai ma question après.

M. MARTIN: Nous avions, comme vous le savez, 4,000 personnes intégrées aux écoles de commissions scolaires et aux collèges. D y en a eu effectivement, à un certain moment, un nombre considérable, peut-être environ 1,000, mais graduellement ce nombre a diminué. Actuellement, je pense que le nombre ne dépasse pas 300. Nous aurons, à l'occasion de la commission des crédits, un document à distribuer — si vous voulez l'avoir auparavant — je pourrais l'avoir assez rapidement — qui donne l'état exact de la situation aujourd'hui, à propos des surnuméraires dont vous parlez.

M. SAINT-GERMAIN: Mais, ces 300 là ont été payés depuis combien de temps à ne rien faire?

M. MARTIN: La plupart d'entre eux travaillent comme occasionnels ou en tout cas dans des postes en attendant qu'on leur trouve quelque chose dans un poste permanent.

M. SAINT-GERMAIN: Mais n'y a-t-il pas eu, au moins, plusieurs centaines d'employés qui n'ont pas travaillé durant 9, 10 mois, un an...

M. MARTIN: II y en a eu.

M. SAINT-GERMAIN: ... tout en continuant à être payés? Et ça a coûté combien aux fonds publics, avez-vous fait un relevé du chiffre?

M. MARTIN: Nous pourrions le faire mais nous ne l'avons pas fait en tant que tel, je ne crois pas.

M. SAINT-GERMAIN: Ne croyez-vous pas qu'il serait important d'avoir ce chiffre-là.

M. MARTIN: Ceux qui ont été sans travail et payés.

M. SAINT-GERMAIN: Oui.

M. MARTIN". Oui, nous pourrions l'avoir.

M. SAINT-GERMAIN: Et si on faisait une enquête au niveau des hôpitaux, par exemple, dans les endroits où il y a cette sécurité, n'y aurait-il pas moyen de savoir ce que la sécurité d'emploi a coûté aux fonds publics depuis qu'elle existe dans les secteurs qu'on étudie?

M. MASSE (Montcalm): J'aimerais revenir sur un point du député de Maisonneuve, parce que...

M. VEILLEUX: Cela fait quinze minutes que je...

M. MASSE (Montcalm): ... vous maintenez toujours que ce n'est pas dans le débat. Je n'ai pas d'objection à ce que vous la posiez, mais...

M. LE PRESIDENT: Je vais m'informer auprès du député de Saint-Jean: Est-ce sur le sujet?

M. VEILLEUX: Oui, c'est sur le sujet,

M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Jean.

M. BURNS: Je me demande s'il ne serait pas plus pratique que nous vidions le problème que nous sommes à discuter, je n'ai pas d'objection à ce qu'il pose sa question, mais je vous avertis, je vais revenir tout à l'heure.

M. VEILLEUX: Cela pourrait peut-être éclairer certaines données que le sous-ministre a mentionnées tout à l'heure.

M. MASSE (Montcalm): Posez-la parce qu'il faut revenir sur le problème.

M. LE PRESIDENT: Que le député de Saint-Jean pose sa question.

M. VEILLEUX: II y a quelques années, M. le Président, au ministère de l'Education, on a mis sur pied des cours pour non légalement qualifiés. Au moment où ces cours ont été mis en place, je voudrais savoir combien il y avait de professeurs non légalement qualifiés qui, chaque année recevaient, comme cette année, avant le 1er mai, une lettre de renvoi. Ces professeurs non légalement qualifiés avaient jusqu'en 1973 pour se qualifier. Passé 1973, ils ne pouvaient plus rester dans le domaine de l'enseignement. Combien prévoyez-vous de ces non qualifiés qui n'auront pas terminé leur cours en 1973? Nous pourrions savoir combien, à ce moment-là seront définitivement remerciés de l'enseignement.

Une question générale: lorsque la CEQ demandait la sécurité, à la table de négociations, demandait-elle la sécurité à l'intérieur de l'enseignement en général ou d'une commission scolaire donnée?

M. MARTIN: Sur le premier...

M. VEILLEUX: Une dernière question relativement au geste de démissions massives qui avait été posé en 1969 par des enseignants lors de la dernière ronde de négociation. Il y avait eu alors 300 professeurs à l'intérieur de la démission massive et ils n'avaient pas été repris par les commissions scolaires, ils avaient été remerciés. Donc les commissions scolaires avaient profité du fait de la démission pour remercier 300 professeurs; combien sont encore sans emploi parmi ces 300?

M. MARTIN: Sur le dernier point, combien, en 1969, étaient visés? Si mon souvenir est bon, cela dépassait 15,000 personnes qui étaient dans le système, qui n'étaient pas légalement qualifiées et auxquelles s'appliquait le programme que vous avez évoqué. Cette année, le dernier chiffre que j'ai vu des demandes d'autorisation de renouvellement de permis, selon cette formule, est de 7,600.

Nous avons, comme je l'indiquais tantôt, renouvelé des autorisations pour 6,600 environ, puisqu'il en reste 1,000 aujourd'hui. Combien sortiront de ce système en 1973, parce qu'ils n'auront pas rempli les conditions? Je pense que personne ne peut le prévoir actuellement. Ils vont peut-être sortir pour d'autres raisons, mais, en général et d'une façon presque totale, les gens suivent le programme parce que, autrement, on ne renouvellerait pas les autorisations. Ce sont vraiment des exceptions qui ne remplissent les conditions.

Il y a deux conditions pour renouveler l'autorisation: D'abord une recommandation de la commission scolaire et deuxièmement, que la personne ait suivi au moins deux crédits en psychopédagogie pour satisfaire au programme proposé pour la qualification légale.

M. VEILLEUX: Et qu'elle soit dans l'enseignement.

M. MARTIN: Oui, bien sûr.

Sur le dernier point, combien dans les 300?

Cela, je pense qu'on ne pourrait pas le savoir. On n'a pas pu suivre ces personnes. Comme je l'indiquais tout à l'heure, on ne sait pas ce qu'ont fait ces 300 personnes au cours de l'année. Il faudrait faire un relevé spécial.

M. VEILLEUX: D'accord.

M. LE PRESIDENT: Le député de Montcalm.

M. MASSE (Montcalm): M. le Président, je voudrais reprendre la sécurité d'emploi mais par un autre canal. Ce qui a amené l'Etat à se préoccuper de la négociation des conventions collectives dans les secteurs public et parapublic, c'est d'abord la masse salariale impliquée dans l'ensemble de ces secteurs. Quand, tout à l'heure, on disait qu'il y a encore des secteurs où l'Etat, par son budget, est massivement présent, on a dit: Les municipalités ne sont pas à l'intérieur de cela, parce qu'elles ont leur propre taxation et c'est à peu près 20 p.c. Mais il y a beaucoup de commissions scolaires qui étaient comme cela à l'époque et cela n'a pas empêché l'Etat d'intervenir sous différentes formes, graduellement, d'année en année, et finalement s'asseoir à la table de négociation. Il n'est pas dit que dans l'affaire des municipalités, à un moment donné, il ne faudrait pas que l'Etat intervienne aussi. On a vu la municipalité de Montréal, par exemple, qui a ses propres sources de taxation; quand elle a fait ses négociations avec les ingénieurs de la ville de Montréal, cela a affecté drôlement l'ensemble de l'Etat par l'Hydro-Québec et la politique salariale. A un moment donné, la même ville de Montréal venait demander des subventions pour boucler son budget. L'Etat est obligé d'intervenir. C'est par le biais du budget que l'Etat est intervenu.

Dans le cours des négociations s'est produite la normalisation d'un certain nombre de systèmes, que ce soit celui des griefs, que ce soit celui de l'assurance-salaire, que ce soit celui des congés de maladie, etc. Il y a eu une normalisation pour tout ce monde sur des périodes de deux ou trois rondes de négociation.

A l'intérieur de ça, il y a la question de la sécurité sociale. Comme gouvernement, je ne peux pas normaliser la sécurité sociale pour l'ensemble des secteurs puisque je ne suis pas employeur direct de l'ensemble des secteurs. Je suis payeur direct, soit par voie de subventions ou directement comme employeur pour ces gens, mais je ne suis pas celui qui, légalement, les engage. Partant de là, je peux difficilement les transborder d'un secteur à l'autre puisque je n'étais pas présent au moment où cela a été engagé, je ne suis pas celui qui a fait les plans de classification, je ne suis pas celui qui a présidé aux examens, je ne suis pas celui qui leur a donné, au fond, leur certificat d'éligibilité à l'emploi de secrétaire, de sténo, dans telle commission scolaire alors que je le suis au ministère des Terres et Forêts. Donc, je ne peux pas les transborder.

Est-ce qu'au point de vue des principes, il est impossible que l'Etat normalise les plans de classification pour l'ensemble des secteurs public et parapublic? Deuxièmement, que les conditions d'éligibilité aux postes soient les mêmes partout, ce qui ferait que l'Etat ne serait peut-être pas l'employeur direct dans le sens que le Conseil du trésor ne l'emploierait pas directement, mais on serait certain qu'au point de vue de la norme d'emploi, il y aurait équivalence pour toutes les secrétaires, disons, pour prendre l'exemple des secrétaires, peu importe que ce soit dans les hôpitaux, dans les commissions scolaires ou ailleurs.

Si tel est le cas, cela enlève le caractère hypothétique de: Je ne peux pas donner la sécurité d'emploi en les transbordant de secteur à secteur puisque je ne suis pas le même employeur partout. Cela enlèverait au moins ce principe.

Mais il reste un autre problème à poser: quand bien même tout cela serait résolu, est-ce qu'il serait encore dans l'intérêt de l'Etat d'assurer automatiquement une sécurité d'emploi qui, dans un système économique, particulièrement dans les années qu'on vit, vaut beaucoup, tant sur le plan psychologique que sur le plan monétaire, comme garantie pour l'employé?

Or, est-ce que cette garantie doit être donnée à ceux qui travaillent dans le secteur public et ne pas être donnée aux citoyens qui travaillent dans les autres secteurs? Il faut se poser cela aussi, à un moment donné. L'Etat doit être équitable dans ses conditions de travail entre les secteurs public et parapublic.

Deuxièmement, je la repose encore: est-ce que la sécurité d'emploi, c'est une chose qui doit être donnée, ou si cela affecte les conditions d'efficacité et de rendement? On a vu, il y a quelques heures, à cette même commission — le directeur de la rémunération nous a donné des chiffres qui sont spectaculaires — que le taux est de 10 p.c. d'absences dans le secteur public alors qu'il est de 4.5 p.c, si je me souviens bien, dans le secteur privé. Est-ce que cela ne découle pas de la sécurité d'emploi? Je pense qu'il faut discuter du problème dans le sens qu'on a vu tout à l'heure. Techniquement, l'Etat peut arriver à être capable de lever les hypothèques qui l'empêchent d'accorder la sécurité d'emploi intersectorielle et, deuxièmement, quand bien même tout cela serait résolu, est-ce que le ministère de la Fonction publique ne devrait pas étudier l'ensemble de la question?

L'Etat a été amené dans les négociations non pas par un principe premier mais graduellement. Ce qui n'a jamais été fait par la Fonction publique. J'espère que pendant les deux ans de répit, le ministère va pouvoir se poser des questions de fond. Celle de la sécurité d'emploi

en est une. Ces questions, si jamais on a une politique, il faudra les faire connaître avant les négociations par un livre blanc ou autrement pour que tous les groupes intéressés, tant les citoyens que les fonctionnaires, les syndicats que les parlementaires, soient mis au courant avant les négociations pour que cela ne devienne pas un objet de chaos comme celui qu'on connaît actuellement.

Je ne fais pas grief de ne pas l'avoir fait avant, mais là, l'expérience prouve qu'il faudra faire ces prises de position avant les négociations, non pas pendant les négociations.

Je pense que j'ai été assez clair dans l'exposé des deux points, des deux questions. Il ne reste que six minutes. Je pense bien que cela peut être plus long à étudier, mais j'aimerais quand même que le ministre commence à élaborer au moins une réponse à ce problème.

M. L'ALLIER: Sur le problème de la normalisation, il est sûr que techniquement, théoriquement en tout cas, la chose serait possible. Mais cela supposerait un changement considérable des régimes administratifs que nous connaissons au niveau central et aux niveaux décentralisés, notamment des commissions scolaires et des administrateurs de CEGEP. Techniquement, la chose serait possible. On l'a en France, par exemple. Les enseignants, en France, font partie du système de l'Etat. C'est l'Etat qui les affecte.

M. MASSE (Montcalm): Ils sont payés directement par l'Etat.

M. L'ALLIER: Ils sont payés directement par l'Etat. Le bonhomme, s'il est arrivé quarantième sur la liste, s'en va dans le fond du pays et s'il est arrivé premier, il a un choix à Paris, qu'il aime cela ou qu'il n'aime pas cela. C'est un système d'affectation, d'évaluation. C'est un plan de carrière. Si on n'a pas besoin de lui comme enseignant, on pourra toujours l'affecter comme gratte-papier et il n'a pas un mot à dire là-dedans. Mais il a une sécurité d'emploi totale, c'est évident.

M. MASSE (Montcalm): Gratte-papier ou fesse-mathieu.

M. L'ALLIER: Ce n'est pas le système dans lequel on vit pour ce qui est des enseignants. Sur la question des enseignants, ce n'est pas une question de doctrine. C'est une question d'équilibre de gestion entre la gestion centrale, qui a d'abord un rôle de "policy making" et d'établissement de normes et la gestion locale, qui a des responsabilités à l'égard d'une communauté donnée, parce que les gens qui sont là sont élus par un groupe de citoyens, par la majorité de ceux qui participent aux élections et qu'ils ont des responsabilités face à cela. Quand on parle de la qualité de l'enseignement, de choses comme cela, ce sont eux qui ont cette responsa- bilité, partagée, dans certains cas, avec l'Etat, mais ils l'ont au niveau de la gestion du personnel scolaire.

M. MASSE (Montcalm): Je m'excuse mais à ce moment-ci, le ministre doit quand même admettre que c'est le ministère de l'Education qui décrète ce qu'est un enseignant, au point de vue de sa qualification.

M. L'ALLIER: D'accord.

M. MASSE (Montcalm): Rien n'empêche de décréter aussi pour les autres postes, d'avoir un plan de classification. Cela n'empêche pas l'employeur, à la limite, d'avoir le choix, parmi des gens identiques, entre telle ou telle personne. Mais ce dont l'Etat doit s'assurer, dans sa normalisation, c'est que les individus qui travaillent pour l'Etat ont un bagage de connaissances et une crédibilité identiques au départ. C'est là qu'est la pierre d'achoppement, actuellement. Déjà, dans le domaine de l'enseignement, vous le faites pour les enseignants. Mais cela n'empêche pas la déconcentration dont vous parlez.

M. BOLDUC: Si vous me permettez d'intervenir, je ne voudrais pas être irrégulier dans les procédures de la commission mais ce que vous dites est implicite dans les plans de classification existants, c'est-à-dire que selon les employeurs, les plans de classification varient.

Par exemple, dans la fonction publique, il y a plusieurs plans de classification. Il y en a un pour les professionnels, un pour les agents de la paix et un pour les fonctionnaires. Il y en a un autre pour les ouvriers, il y en a même un pour les cadres supérieurs.

Ces plans-là selon les groupes en présence, reposent sur des philosophies parfois différentes. Par exemple, celui des ouvriers repose sur une philosophie qui est différente de celui des professionnels ou celui des cadres supérieurs varie par rapport à celui des employés de bureau. Ces plans non seulement définissent l'ensemble des tâches caractéristiques qu'un employé doit remplir, mais aussi les exigences requises pour les remplir, même les conditions d'avancement, enfin, tout le déroulement de la carrière, dans certains cas.

D'autres employeurs ont choisi d'autres modèles. Par exemple, historiquement, dans les hôpitaux, ce sont des plans de position qu'il y a, parce que ça s'est toujours fait comme ça. Effectivement, même, c'est discuté à l'intérieur des négociations, ces choses-là, c'est-à-dire que le plan de classification est incorporé, est partie intégrante de la convention. Il y est même lié au plan des salaires; en fait, les deux sont ensemble, c'est-à-dire qu'on définit la catégorie d'employés et qu'on met le salaire au bout. Cela, c'est un plan plus axé sur une attitude d'entreprise. Vous avez ça dans la majorité des entreprises. Le plan des hôpitaux, par conséquent, est fait sur cette base-là.

Dans le cas des commissions scolaires et des professeurs de CEGEP, c'est un plan qui est fondé, à toutes fins pratiques, uniquement sur la qualification déterminée à partir de la scolarité et de l'expérience.

Pour le personnel de soutien scolaire — ça, c'est un phénomène nouveau — cette année, étant donné qu'il y avait à peu près 300 conventions, nous avons présenté, à l'intérieur des offres générales que nous avons faites, un plan de classification qui tentait de résoudre le problème du classement du personnel d'une commission scolaire à l'autre. Ce n'était pas facile, parce que vous savez que chacune des conventions pouvait comporter des plans spécifiques différents les uns des autres. Ainsi le plan a été fait de façon à pouvoir intégrer à la fois le classement du personnel d'une commission scolaire comme celle de Montréal et celui des autres commissions locales ou régionales.

Ce plan était nouveau, effectivement. C'est un effort où on pense qu'il y a moyen d'intégrer le personnel en place d'une commission scolaire à l'autre dans un plan de classement qui, lui, a été proposé en même temps que les offres. Pour les collèges, c'était le même phénomène.

D'ailleurs, pour les collèges, il y avait déjà eu non seulement une tentative, mais cette situation-là avait déjà été réglée en 1968-1969. Je tenais à souligner ça parce que les employeurs peuvent avoir des exigences différentes. Quand les taux minimums de traitement varient dans les propositions que nous avons faites, c'est précisément parce que certains employeurs sont plus exigeants que d'autres en termes de conditions de recrutement. Il y en a, par exemple, qui vont exiger deux ou trois ans d'expérience par rapport à d'autres, pour des fonctions semblables.

M. MASSE (Montcalm): Mais, toutes ces exigences peuvent être prévues dans les plans de classification.

M. BOLDUC: C'est ce qu'on appelle la réglementation, c'est-à-dire des normes générales applicables à des ensembles, par opposition à l'application de ces normes à des actions quotidiennes de gestion de personnel, c'est-à-dire d'application en matière de sélection ou d'affectation de personnel.

C'est ce partage de rôles que le ministre a tenté d'expliquer entre, d'un côté, le ministère de l'Education ou le gouvernement comme organisme de normalisation par opposition aux rôles locaux joués par les commissions scolaires ou les CEGEP. C'est un rôle de gestion.

M. MASSE (Montcalm): Tout cela n'empê- che pas quand même une certaine rationalisation en tenant compte des exigences, tant sur le plan régional que sur le plan du type d'emploi. Même il est évident qu'on peut être d'une catégorie de professionnels 1, 2 ou 3, puis avoir des exigences différentes parce que la fonction l'exige.

M. BOLDUC: Oui.

M. MASSE (Montcalm): Rien n'empêche de tout faire ça et que l'Etat soit quand même l'employeur de ce monde-là. Ce qui est important, c'est que l'Etat puisse être certain qu'il n'y a pas des trous dans les plans de classification, qu'on ne puisse pas entrer par des secteurs très faibles au point de vue des exigences et se retrouver, dans un plan de carrière, dans des domaines où ces exigences-là à l'entrée étaient différentes. C'est ça qui est important pour nous. Ce n'est pas de savoir au fond si le chèque vient de M. Untel ou du paie-maître d'ici ou de celui de la régionale Y ou de l'hôpital Z.

Les deux choses qui sont importantes c'est qu'à qualité égale il y a traitement égal. C'est ça la base de la négociation salariale, au point de vue salarial. Deuxièmement, la même équité doit exister au point de vue des plans de classification devant les individus. Troisièmement, il reste à savoir qui va employer, au point de vue du concours, au point de vue du jury, qui va engager.

L'Etat doit avoir la certitude que ces plans de classification, que ces normes sont respectés. De toute façon dans le secteur public ce n'est pas le ministre ou le sous-ministre de la Fonction publique qui engage tout le monde. Il y a une multitude de jurys. Ce sont les ministères, dans un très grand nombre de cas, qui présentent à la fonction publique le résultat de leurs jurys, de leurs concours. Alors, que ce soit le ministère des Terres et Forêts ou la régionale de Sainte-Anne-des-Monts ou l'hôpital Notre-Dame il y a une certaine déconcentration au point de vue de la gérance.

Tout ça accepté, au bout de la ligne rien n'empêche que tout ça existe, au point de vue de ce que l'on appelait la sécurité d'emploi intersectorielle. Ce qui fait que vous ne pouvez pas l'accorder actuellement, c'est que vous plaidez que vous n'êtes pas le patron partout. Mais, si vous respectez toutes ces étapes-là, vous ne pourrez plus avancer cet argument. Il y en aura peut-être d'autres mais ça ne pourra pas être ça comme argument.

Je pense qu'il est six heures, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: La commission ajourne ses travaux à demain après-midi seize heures.

(Fin de la séance à 18 h 1 )

Séance du mercredi 10 mai 1972

(Seize heures quinze minutes)

M. LAMONTAGNE (président de la commission permanente de la fonction publique): A l'ordre, messieurs!

On m'a informé des changements suivants pour les présents travaux: M. Boivin, député de Dubuc, remplace M. Loubier, député de Bellechasse. M. Laurin, député de Bourget, remplace M. Burns, député de Maisonneuve.

Pour poursuivre là où nous en étions hier, je vais donner la parole immédiatement... Oui? Le député de Bourget.

Fin des travaux

M. LAURIN: M. le Président, avant que nous poursuivions les travaux, j'aurais quelques remarques — et même une motion à faire — en ce qui concerne les travaux de la commission. Pour avoir suivi les travaux de la commission dans mon bureau, depuis le début, je sais que tout le monde s'est entendu pour dire que cette commission n'en était pas une de conciliation, que ce n'était pas ici, en somme, que la négociation devait se faire, que le seul bénéfice qu'on pouvait en escompter, c'était plutôt des tentatives de médiation pour rapprocher les deux parties.

Par ailleurs, je me souviens bien que, dans le texte de loi, cette commission devait faire rapport avant le 15 mai, c'est-à-dire d'ici quelques jours, au plus tard. Etant donné le fait qu'une des parties n'a pas été présente à cette commission depuis le début, d'une part, et, d'autre part, que les récents événements nous indiquent que cette partie ne sera pas là, je me demande s'il y a quelque utilité à poursuivre ces travaux qui non seulement rendent la négociation impossible mais, même maintenant, toute médiation assez inutile et impossible ou superflue.

Je me demande s'il n'y aurait pas lieu plutôt que le ministre nous annonce ses intentions. Est-ce que le ministre n'en est pas venu à la conclusion qu'il faut nécessairement, maintenant, que le gouvernement travaille à son décret et que ce décret nous soit présenté le plus tôt possible à l'Assemblée nationale pour que nous puissions en discuter, cette fois, entre tous les partis? Si ce n'était pas l'intention du ministre de nous présenter ce décret le plus tôt possible à l'Assemblée nationale, je me demande si nous ne devrions pas mettre fin aux travaux immédiatement, sine die, aux séances de cette commission. C'est la question que je voudrais poser au ministre.

M. LE PRESIDENT: Le député de Chicoutimi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, avant que le ministre ne réponde, je voudrais porter à votre attention, encore une fois, le fait que la proposition du député de Bourget rejoint exactement celle que j'ai faite, il y a quelques jours, quand j'ai demandé au ministre s'il était possible de ramener la partie syndicale devant la commission parlementaire. Nous sommes tous d'accord pour admettre que cette commission n'est pas une table de négociation. Nous avons été mandatés pour connaître les faits et recevoir les renseignements des deux parties en cause, la partie patronale et la partie syndicale.

Or, l'une de ces parties étant absente, il est bien clair que le gouvernement nous présente sa version. Nous n'avons pas de raison de douter de sa bonne foi. Il reste toutefois que nous n'avons qu'une version et qu'à toutes fins utiles, le travail que nous faisons ici n'a pas de signification et ne peut pas avoir d'efficacité. Nous entendons des propositions, nous les discutons quand elles nous paraissent intéressantes à discuter mais c'est là exercice purement académique puisqu'en définitive, vu l'absence de la partie syndicale, le gouvernement n'aura pas d'autre ressource, pas d'autre recours que de préparer son décret. Il serait extrêmement important, donc, que nous soyons informés le plus tôt possible de la nature, de la portée et du contenu de ce décret.

La proposition du député de Bourget — qui vient au moins une semaine en retard, après celle que j'ai déjà faite — reçoit mon agrément. J'aimerais bien que le ministre nous donne son avis là-dessus.

M. LE PRESIDENT: Le député de Frontenac.

M. LATULIPPE: M. le Président, pour faire suite aux propos qui ont précédé, comme nous l'avons déjà mentionné nous serions également d'accord pour ajourner les travaux. Si le ministre juge qu'il est prêt, déjà, à déposer son décret ou à le faire d'ici quelques jours — on ne sait pas, le travail est peut-être fait depuis un mois parce que tout semble classé d'avance dans votre pensée...

M. L'ALLIER: Dans mon cas?

M. LATULIPPE: Pas dans votre cas, dans le cas de votre ministère.

M. L'ALLIER: Ah bon!

M. LATULIPPE : Je m'excuse, je ne voulais pas personnaliser à ce point. S'il le faut, M. le Président, nous serions même prêts, en tant qu'observateurs, à assister aux négociations qui auront peut-être lieu, à ce moment-là, à Orsainville.

M. L'ALLIER: Je peux vous arranger cela.

M. LE PRESIDENT: Le député de Montcalm.

M. MASSE (Montcalm): M. le Président, je serais également favorable à la motion ou à la proposition formulée par le député de Bourget. Je n'aurai pas la prétention de dire qu'il y a tant de jours, j'avais pensé à cela ou qu'il y a tant de semaines, je l'avais proposé.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous n'aviez pas daigné répondre l'autre jour. Vous avez dit que vous n'aviez rien à dire.

M. MASSE (Montcalm): M. le Président, je ne vois pas pourquoi certains répondent lorsqu'ils ne sont pas interrogés. Ils se sentent peut-être visés.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non mais, M. le Président, j'invoque le règlement.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'invoque le règlement pour vous faire observer que lorsque j'ai fait cette proposition, l'autre jour, le député de Montcalm a déclaré que lui, il ne parlait pas pour ne rien dire. Or aujourd'hui, il revient sur son opinion, et de peur d'être solidaire de son ancien collègue, qu'il n'avait pas le soin d'informer quand il était ministre de la Fonction publique, d'ailleurs — même lorsqu'il s'agissait de mes propres fonctionnaires — voilà que le député de Montcalm se ravise tout à coup et vient au secours de la victoire.

M. MASSE (Montcalm): M. le Président, les vacheries étant passées, nous pourrions revenir aux choses sérieuses.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'invoque le règlement. Je voudrais vous faire observer que le mot que vient d'employer le député de Montcalm peut lui convenir, à lui, mais pas aux membre de cette commission.

M. MASSE (Montcalm): M. le Président, ceux qui se sentent piqués répondent les premiers mais enfin, pour revenir aux choses sérieuses, je pense que la proposition du député de Bourget est sensée. La commission s'est réunie, tel que la loi l'a proposé. Les députés ont pris connaissance, tel que la loi le demandait, des propositions qui ont été faites aux tables sectorielles, à la table centrale, par les associations patronales.

D'autre part, L'Assemblée nationale nous mandatait également pour recevoir les demandes formulées par les parties syndicales. Sans prolonger le débat, vous savez comme moi ce qui s'est produit, de sorte qu'il est difficile, pour les membrees de cette commission d'interroger la partie syndicale sur les faits ou sur les propositions qui ont été formulées.

Je pense que, pour ma part, les fonctionnaires qui sont venus ont très honnêtement informé la commission mais nous ne pouvons formuler un jugement, n'ayant pas entendu l'autre partie. Dans ce sens, le débat peut-être académique, peut être très intéressant.

On peut discuter, en théorie, de la sécurité d'emploi ou de la façon de calculer une moyenne généralement observée ou de la méthodologie pour arriver à cette fin. Il reste que, dans le débat actuel au sujet des négociations dans les secteurs public et parapublic, ça ne me semble pas être l'objet de la commission. Dans ce sens, je me rallierais volontiers à la proposition du député de Bourget, en demandant également que, tel que l'avait laissé entendre le ministre de la Fonction publique, lorsque les décrets seront rédigés, lorsqu'ils seront prêts, si c'est possible, on reconvoque la commission de la fonction publique pour informer les membres de l'intention du gouvernement, soit au sujet des amendements à apporter à la loi 19, soit au sujet des décrets eux-mêmes que le gouvernement, semble-t-il, sera obligé d'imposer, puisque les avenues pour une négociation normale me semblent pour le moins fermées. Dans ce sens-là, je pense qu'il y aurait lieu de suspendre également, pour l'instant, nos travaux.

M. LE PRESIDENT: Le député de Dubuc.

M. BOIVIN: Je ne m'illusionne pas sur le travail qui a été fait ici. Je pose tout simplement la question au ministre: Quelle différence y aura-t-il entre le décret et la proposition gouvernementale actuelle?

M. LE PRESIDENT: Le ministre de la Fonction publique.

M. L'ALLIER: M. le Président, vous m'excuserez, j'étais en consultation. Le député de Dubuc m'excusera également. Je vais lui demander de répéter la dernière partie de sa question.

M. BOIVIN: Je demande au ministre de nous dire quelle différence il y aura entre la proposition gouvernementale qu'il a faite aux trois grands et le décret.

M. L'ALLIER: Je vais d'abord répondre à la question du député de Dubuc, qui se situe à l'intérieur de la commission, pour répondre ensuite aux questions qui ont été soulevées par les députés de Bourget, Chicoutimi, Montcalm, ainsi que par le représentant du Ralliement créditiste.

Les propositions que nous avons faites à la table centrale de négociation n'ont pas été, comme vous le savez, acceptées par le front commun. Elles comportent, cependant, un certain nombre d'éléments qui touchent notamment les salaires et d'autres secteurs, comme la sécurité d'emploi, l'assurance-salaire et le régime de retraire. Je ne peux pas dire, à ce moment-ci, au député de Dubuc quel sera le contenu des décrets, parce que, précisément, conformément à la loi 19, il y a, délai de

négociation jusqu'au 1er juin et qu'effectivement les négociations dans certains secteurs ont repris, et même d'une façon accélérée. Elles doivent, si elles ne se poursuivent pas aujourd'hui, se poursuivre cette semaine.

Il pourra certainement y avoir des différences entre les propositions que nous avons faites au niveau du front commun et les contenus des décrets, si nous sommes obligés de procéder par décrets. Cependant, nous avons assuré les employés que les propositions pécuniaires que nous avions faites leur étaient acquises, en ce sens qu'il n'y aura pas tentative de la part du gouvernement de sauver rétroactivement des fonds, etc.

Pour ce qui est des propositions que nous avons faites sur des questions comme l'assurance-salaire, le régime de retraite, il n'y a eu aucune négociation sur ces questions. Si, au cours de la négociation, il s'est produit certains déblocages, nous en tiendrons vraisemblablement compte, sinon le gouvernement devra sur ces points prendre des décisions qui seront contenues dans les décrets. Pour répondre maintenant aux questions... Oui.

M. BOIVIN: J'aurais une question additionnelle. Il y a 40,000 personnes qui continuent la négociation, mais est-ce que vous avez des espoirs...

M. L'ALLIER: Plus que ça, il y a des tables sectorielles, notamment au niveau des fonctionnaires.

M. BOIVIN: En ce qui regarde ces gens qui continuent la négociation, la réponse est bien, mais qu'est-ce que vous entendez faire avec le front commun? Est-ce qu'il y a des espoirs?

M. L'ALLIER: C'est-à-dire qu'il y a des éléments du front commun qui ont négocié cette semaine et qui doivent normalement négocier de nouveau au cours de cette semaine, comme la table des fonctionnaires par exemple.

M. BOIVIN: Mais est-ce qu'ils se sont dissociés du front commun?

M. L'ALLIER: En fait il y a deux niveaux de négociation. Il y a un niveau de négociation volontaire, qui était la table centrale de négociation et qui portait sur quatre points identifiés et convenus entre les parties. Il y a ensuite la négociation aux tables sectorielles, qui portait essentiellement, suite à la formation de la table centrale sur les clauses normatives. Alors, aux tables sectorielles, la négociation s'est poursuivie et dans certains cas s'est même accélérée, je crois, sur les clauses normatives.

Est-ce que les parties souhaiteront aborder des sujets ou des thèmes de négociation qui étaient réservés à la table centrale, aux tables sectorielles? C'est essentiellement à la partie syndicale qu'il appartient d'en décider. Quoi qu'il en soit, pour répondre précisément à la question que vous avez posée, compte tenu de tous ces facteurs, il n'est même pas possible de vous dire quelles seront les différences qui pourront exister entre l'état des dernières offres qui ont été faites à la table centrale et le contenu des décrets, parce que les décrets porteront effectivement sur des questions qui ont été à la table centrale et aussi sur l'ensemble des conditions de travail qui sont aux tables sectorielles et qui sont en processus de négociations.

M. BOIVIN: Merci, M. le ministre.

M. L'ALLIER: Pour ce qui est de la demande, en fait unanime, de l'Opposition de suspendre ou d'arrêter les travaux de la commission parlementaire de la fonction publique, compte tenu de l'absence de la partie syndicale et compte tenu également du fait que ça peut peut-être constituer un obstacle à la reprise accélérée de négociations dans certains secteurs, je n'ai pas pour ma part à porter de jugement là-dessus. Je crois que les parties peuvent, indépendamment de la commission parlementaire, continuer de négocier au niveau sectoriel.

Toutefois, si c'est le consensus de cette commission, je suis disposé à accepter la proposition et demander que le rapporteur de la commission fasse rapport à l'Assemblée nationale.

Dès que le délai de négociation sera expiré et dès que les décrets seront prêts, il est entendu que je ferai au gouvernement la recommandation de les porter à la connaissance soit de la commission parlementaire, soit même, peut-être, des tables de négociation, soit vraisemble-blement des deux. Quoi qu'il en soit, il me paraîtrait important que ces décrets puissent faire l'objet, non pas d'une renégociation, parce que c'est une décision gouvernementale, c'est le processus normal, mais d'un examen de la part des membres de la commission, comme éventuellement des représentants syndicaux aux tables sectorielles ou à toutes les tables de négociation.

Par ailleurs, un point a été soulevé, vous vous en souvenez, au début des travaux de la commission par le représentant du Syndicat des agents de la paix, qui avait demandé à être entendu par la commission de la fonction publique. Je suis disposé —il n'est pas dans cette salle, mais je suis sûr que le message lui parviendra — quant à moi, à reconvoquer la commission parlementaire de la fonction publique, non pas à l'intérieur du cadre de la Loi 19, mais bien d'une réunion régulière afin que nous puissions, dans les semaines qui viennent, entendre la partie syndicale sur ce point et, éventuellement, faire un certain nombre de propositions quant à l'étude du statut syndical, si vous voulez, ou des moyens de revendication ou de règlement pour ce qui est des agents de la paix.

Nous communiquerons avec le Syndicat des

agents de la paix pour l'aviser de cette décision du gouvernement de l'entendre à la commission parlementaire. Les discussions porteront, à ce moment-là, sur le problème des agents de la paix et ce sera à un jour qui n'est pas éloigné. Suivant l'état des dossiers que nous avons en main et suivant le calendrier des commissions, ce sera peut-être d'ici deux ou trois semaines. Je serais disposé à appuyer la proposition, que je pourrais peut-être qualifier de conjointe, de l'ensemble des membres de l'Opposition de la commission parlementaire pour que les travaux de la commission parlementaire soient arrêtés à ce moment-ci et que le rapporteur fasse rapport à l'Assemblée nationale.

M. LE PRESIDENT: C'est le désir de la commission?

M. LATULIPPE: Est-ce que je pourrais poser une question au ministre?

M. LE PRESIDENT: Le député de Frontenac.

M. LATULIPPE: Si d'autres organismes désirent se faire entendre en même temps que les agents de la paix sur d'autres sujets, y aurait-il possibilité de les entendre?

M. L'ALLIER: Chaque fois qu'un organisme veut se faire entendre par une commission parlementaire, c'est le gouvernement et les membres de la commission qui décident si l'on doit ou non l'entendre. Par ailleurs, ceux qui ont demandé d'une façon précise, et depuis déjà assez longtemps, d'être entendus d'une façon spéciale par la commission parlementaire, ce sont les agents de la paix.

Quant à moi, la décision dont je vous fais part maintenant touche uniquement les agents de la paix et se situe en dehors du cadre de la Loi 19.

M. LATULIPPE: Si vous recevez d'autres demandes d'ici à la convocation, est-ce que vous les accepterez également?

M. L'ALLIER: La commission parlementaire prévue par la loi 19 devait faire rapport le ou avant le 15 mai mais comme la commission parlementaire doit entendre les agents de la paix en dehors de ce délai, la commission de la fonction publique, en séance régulière, entendra les agents de la paix.

Si nous recevons d'autres demandes, il faudra les évaluer. Quant à moi, pour l'instant, la décision porte sur les agents de la paix.

M. LE PRESIDENT: Le député de Notre-Dame-de-Grâces.

M. TETLEY: M. le Président, je voudrais tout simplement noter que je suis personnellement très content du fait que les négociations se poursuivent dans différents secteurs. Il y a surtout des enseignants qui veulent négocier, et je suis très content de la déclaration du ministre. Je parle surtout du PACT, et je crois que le PAPT veut négocier aussi.

M. LE PRESIDENT: Le député de Dorion.

M. BOSSE: Pour les secteurs qui n'auraient pas accepté de négocier, le ministre pourrait-il nous dire si le décret pourrait comporter un certain recul en ce qui a trait aux clauses normatives ou en ce qui a trait aux clauses qui n'ont pas été paraphées entre les parties, ou le statu quo au moins?

M. L'ALLIER: On m'avise, M. le Président, qu'en ce qui a trait aux clauses normatives qui sont déjà dans les conventions collectives, il n'y aura aucun recul.

M. BOSSE: Merci.

M. LATULIPPE: En ce qui concerne les autres organismes qui demandaient d'être exclus, le ministre rendra-t-il publique une déclaration ministérielle à cet effet pour statuer sur la décision?

M. L'ALLIER: La décision du gouvernement sur ce point sera effectivement connue à l'Assemblée nationale dans la mesure où la commission parlementaire ne siège pas. Le gouvernement fera connaître sa décision et ses intentions en ce qui a trait aux associations d'employés qui ont demandé d'être exclus de la loi. Le plus rapidement possible, maintenant, comme je l'ai dit, cette question sera étudiée au conseil des ministres, soit ce soir, soit très, très prochainement.

M. LATULIPPE Merci.

M. LE PRESIDENT: Si j'interprète bien le désir de la commission, la commission de la fonction publique ajourne ses travaux sine die en ce qui concerne le bill 19 et les études présentement en cours.

M. TREMBLAY (Chicoutimi); Elle termine ses travaux et fera rapport.

M. LE PRESIDENT: Elle termine ses travaux et fera rapport mais avec l'entente, par exemple, qu'il y aura...

M. L'ALLIER: Ce n'est pas la même commission.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ce n'est pas le même cas.

M. L'ALLIER: C'est-à-dire que c'est la même commission de la fonction publique mais non pas dans le cadre de la loi 19, de sorte que

la commission de la fonction publique, dans le cadre de la loi 19, termine ses travaux et fait rapport, conformément à la loi.

M. LE PRESIDENT: Très bien. En ce qui concerne les agents de la paix, c'est une autre question que le ministre...

M. L'ALLIER: En ce qui concerne les agents de la paix, la question a été posée et j'ai indiqué l'intention du gouvernement d'accepter la demande des agents de la paix de convoquer pour eux la commission parlementaire de la fonction publique.

M. LE PRESIDENT: Alors, proposé.

M. BOSSE: Est-ce que j'ai compris que la commission se réunirait à nouveau pour regarder le décret lorsqu'il sera préparé?

M. L'ALLIER: Ce que j'ai dit là-dessus, M. le Président, c'est que le gouvernement fera connaître ses intentions sur ce point. Soit que le décret soit de nouveau déposé devant la commission parlementaire, soit qu'il le soit à d'autres instances, notamment aux tables de négociation de quelque façon.

M. BOSSE: Ah oui!

M. L'ALLIER: Maintenant, je ne voudrais pas m'engager ici parce que c'est au gouvernement de prendre cette décision. Pour ma part, je ferai les recommandations que je juge à propos de faire.

M. LE PRESIDENT: La commission parlementaire de la fonction publique ajourne ses travaux sine die. Cette motion est-elle adoptée?

DES VOIX: Adopté.

(Fin de la séance: à 16 h 34)

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