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Version finale

30e législature, 4e session
(16 mars 1976 au 18 octobre 1976)

Le mardi 4 mai 1976 - Vol. 17 N° 49

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude des crédits du ministère de la Fonction publique


Journal des débats

 

Commission permanente de la fonction publique

Etude des crédits du ministère de la Fonction publique

Séance du mardi 4 mai 1976 (Onze heures deux minutes)

M. Kennedy (président de la commission permanente de la fonction publique): A l'ordre, messieurs! Je voudrais indiquer les changements suivants: M. Brown remplace M. Cadieux et M. Lacroix remplace M. Pépin.

Nous avons maintenant quorum et nous allons ouvrir la séance. Je remarque qu'il n'y a aucun membre de l'Opposition. Est-ce que le ministre a des suggestions quant à la tenue de cette commission ou de la procédure à suivre?

M. Parent (Hull): M. le Président, dans les circonstances, étant donné qu'il n'y a pas de présence de l'Opposition, je suggère que nous ajournions cette commission sine die.

Le Président (M. Kennedy): Tout le monde est d'accord? La commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 11 h 3)

Séance du mardi 18 mai 1976

(Dix heures quarante-quatre minutes)

M. Lafrance (président de la commission permanente de la fonction publique): A l'ordre, messieurs!

Nous reprenons l'étude...

M. Burns: Nous ne reprenons pas, nous commençons.

Le Président (M. Lafrance): On me dit qu'il y a déjà eu une séance qui a été de courte durée.

M. Burns: On n'était pas là, donc ce n'était pas commencé.

Le Président (M. Lafrance): Alors, nous commençons l'étude des crédits du ministère de la Fonction publique. Dans le cahier, c'est à la page 13-1.

Le ministre de la Fonction publique.

M. Parent (Hull): M. le Président...

Le Président (M. Lafrance): Je m'excuse, M. le ministre. Avant de débuter, je crois que nous devons nommer un rapporteur. Alors...

M. Dufour: M. Dionne est très bon.

Le Président (M. Lafrance): Je crois que les membres de la commission, unanimement, avaient choisi, M. Boudreault.

M. Dufour: Non! Abstention!

Le Président (M. Lafrance): Adopté. Sur division.

Le ministre de la Fonction publique.

Exposé préliminaire du ministre, M. Oswald Parent

M. Parent (Hull): M. le Président, avant de procéder, en détails, à l'étude des crédits de la Fonction publique, j'aimerais, en premier lieu, souligner que la structure des programmes de cette activité gouvernementale se présente de la façon suivante: Gestion du personnel et aménagement des conditions de travail dans les secteurs de la fonction publique et du péripublic.

La responsabilité de réaliser ce programme incombe au ministère de la Fonction publique dont la structure administrative n'a pas été modifiée au cours de la dernière année.

La recherche sur la rémunération.— Cette activité est conduite par le bureau de recherche sur la rémunération et est dépendante du ministre de la Fonction publique.

Les régimes de retraite et assurance collective sur la vie des fonctionnaires ou employés publics. — La Commission administrative des régimes de retraite qui relève directement du ministre de la Fonction publique assume la responsabilité

de l'application de ce programme.

La Commission de la fonction publique, dont je réponds devant l'Assemblée nationale, est, comme vous le savez déjà, l'organisme gouvernemental responsable principalement du recrutement des employés du gouvernement et de leur classification.

Les préoccupations majeures de la dernière année ont été les suivantes: La détermination des conditions de travail des employés du gouvernement ainsi que des employés d'un certain nombre d'organismes gouvernementaux dont, en vertu de l'article 28 de la loi 95, le ministre de la Fonction publique est de droit partie à la négociation des conventions collectives; la consolidation de certains programmes, en matière de gestion de personnel, l'amélioration d'un certain nombre de pratiques administratives et la déconcentration des différentes activités pour accroître l'efficacité de nos interventions dans des domaines aussi importants que ceux du recrutement et de la diminution des délais dans l'émission des chèques de paie.

Un effort de réflexion qui s'est traduit par la conduite de diverses études ayant pour but d'identifier et d'évaluer les problèmes majeurs dans l'administration de la gestion du personnel au gouvernement ainsi que par la recherche de solutions autant par le biais de la révision des législations en vigueur que par celui de la révision des structures et ce, en vue d'optimiser la gestion des ressources humaines du gouvernement du Québec. On se rappellera d'ailleurs que le discours inaugural de la session faisait part de l'intention du gouvernement d'apporter des modifications dans le secteur de la gestion du personnel.

Afin de donner une idée plus précise des principales activités qui ont été réalisées par chacun des organismes dont j'ai la responsabilité et dont un certain nombre rejoignent les objectifs majeurs que je viens d'énumérer, je me limiterai, M. le Président, à décrire de façon succincte celles qui sont les plus importantes. Au cours de la période des questions, il me fera plaisir de répondre à toute question susceptible d'apporter un éclairage additionnel autant sur ces réalisations que sur celles que je n'aurais pas mentionnées et qui intéresseraient particulièrement les membres de cette commission.

Au chapitre du premier programme, gestion du personnel et aménagement des conditions de travail dans les secteurs de la fonction publique et du péripublic, le bilan des activités les plus marquantes se présente de la façon suivante:

L'année 1975/76 a été des plus significatives au niveau du développement planifié des ressources humaines de la fonction publique puisque C'est le 16 juillet 1975 que le Conseil du trésor approuvait une politique-cadre à cet effet. Le ministère de la Fonction publique s'est ainsi vu doter d'un instrument de travail qui lui permet de mieux remplir un de ses mandats, soit l'accroissement de l'efficacité du personnel. L'objectif de cette politique-cadre est d'assurer une pleine participation des gestionnaires et des employés aux aspects individuels et organisationnels du dévelop- pement des ressources humaines et d'en faire un processus planifié, continu et intégré aux opérations des ministères et organismes. Le champ d'action de cette nouvelle politique-cadre s'inscrit dans des programmes de développement qui peuvent être identifiés par les suivants: l'accueil, la formation et le perfectionnement technique et professionnel, le développement aux différents aspects de la gestion, le fonctionnement des individus, des groupes et des organisations.

Depuis la date du lancement de cette politique-cadre, le ministère de la Fonction publique a apporté son aide technique et professionnelle aux ministères et organismes dans la confection de leurs plans annuels de développement. Parmi ces programmes, et en raison de l'importance de l'intégration des nouveaux fonctionnaires dans leur milieu de travail ou leurs nouvelles fonctions, le ministère a mis sur pfed un programme d'accueil axé sur l'information pertinente diffusée au moment de l'entrée en fonction du nouvel employé ou l'occupation de nouvelles responsabilités. C'est ainsi que le manuel d'accueil ainsi que deux diaporamas sont maintenant disponibles pour ces nouveaux employés.

De plus, le ministère, en collaboration avec l'Ecole nationale d'administration publique, offre à tous les nouveaux cadres du gouvernement un programme d'accueil qui correspond davantage à leurs besoins à titre de hauts fonctionnaires.

Dans un souci d'améliorer la gestion des ressources humaines, le ministère a implanté un certain nombre de programmes de réaffectation ou de perfectionnement. Les principaux sont les suivants:

Le programme de renouvellement de la carrière. Ce programme s'adresse à un certain nombre de cadres supérieurs du gouvernement qui, pour diverses raisons, éprouvent des difficultés de fonctionnement.

Un programme de formation accélérée des futurs cadres en collaboration avec le Conseil du trésor. Ce programme permet à des professionnels du gouvernement de se préparer, à l'intérieur d'un cheminement de carrière accéléré, à accéder à des postes de direction supérieure.

Des programmes de consultation et d'orientation. Ces programmes ont pour objectif d'offrir un service d'aide personnalisée aux employés qui désirent discuter de leur carrière.

Un programme d'évaluation du potentiel des candidats qui désirent participer aux activités de formation et de perfectionnement, notamment celles dispensées par l'Ecole nationale d'administration publique.

Un programme de préparation à la retraite qui a pour but d'informer les fonctionnaires qui prendront leur retraite d'ici 1979. De plus, le ministère fournit la préparation requise à des personnes ressources dans tous les organismes gouvernementaux qui seront appelés à donner elles-mêmes ces programmes de préparation à la retraite.

Il convient, enfin, de noter que le ministère a élaboré, de concert avec le Conseil du statut de la femme, un projet pilote visant à assurer l'égalité

des chances d'emploi pour la femme dans la fonction publique. Ce projet est présentement appliqué au ministère de la Justice.

Le ministère poursuit également ses consultations avec les différents syndicats de la fonction publique en vue de revoir le règlement sur l'éthique et la discipline dans la fonction publique. Des propositions sont également examinées en vue d'étendre en tout ou en partie cette réglementation, aux employés occasionnels, contractuels et politiques du gouvernement. Aussi, je me propose de soumettre au Conseil des ministres, une fois les consultations et les études terminées, des recommandations sur cette question.

Des études d'organisation ont été menées dans quelques organismes gouvernementaux et un projet sur l'octroi de primes à l'initiative a été élaboré. Certains organismes ont ainsi pu bénéficier des recommandations découlant des études organisationnelles, ce qui a eu pour résultat d'améliorer grandement leur efficacité.

Dans le secteur d'activités qui concerne particulièrement la Direction générale des systèmes, les efforts ont été axés sur la réduction des délais dans l'émission du premier chèque de paye d'un employé.

A cet effet, les ministères des Terres et Forêts, de l'Agriculture et du Revenu ont participé à un projet pilote de télétraitement, lequel permet l'utilisation de terminaux pour effectuer la saisie des données à distance et ainsi réduire de façon sensible les délais administratifs.

Le ministère a procédé à l'intégration au système central de paye des ouvriers permanents et temporaires du ministère des Transports, présentement rémunérés par le système de paye variable, ce qui permettra d'éliminer tous les systèmes de paye manuelle et semi-mécanique au gouvernement.

Dans une optique de décentralisation, le ministère a procédé à une modification complète de la procédure de nomination afin d'éliminer les délais encourus lors de la certification d'une nomination par le ministre de la Fonction publique. La nouvelle procédure prévoit la certification globale des nominations par le ministre lors de l'attribution de postes par le Conseil du trésor au début de chaque année ou lors de modifications.

J'aimerais enfin faire part que la direction générale des systèmes a revu une multitude de procédure administratives et mécaniques en vue de donner suite à de nouvelles dispositions approuvées, soit par voie de réglementation, soit par voie de signature de conventions collectives de travail.

En ce qui concerne les relations du travail, on peut souligner qu'un certain nombre d'ententes sont intervenues dans les secteurs de la fonction publique et des organismes gouvernementaux.

Dans le secteur de la fonction publique, le gouvernement du Québec signait, le 18 décembre 1975, une convention collective de travail avec le Syndicat des fonctionnaires provinciaux, unité fonctionnaires et unité ouvriers.

Le 9 mars 1976, l'entente entre le gouvernement du Québec et le Syndicat des professeurs de l'Etat du Québec, concernant certaines conditions de travail particulières au personnel enseignant du Centre d'orientation et de formation des immigrants (COFI), administré par le ministère de l'Immigration, était prolongée.

J'ai signé, le 13 mai dernier, la convention collective avec le Syndicat des professeurs de l'Etat du Québec (SPEQ) et je puis affirmer que les négociations vont bon train avec les autres syndicats de la fonction publique, à savoir, le Syndicat de professionnels du gouvernement du Québec, le Syndicat professionnel des médecins du gouvernement du Québec, l'Association professionnelle des chirurgiens dentistes du gouvernement du Québec et le Syndicat des avocats et notaires de la fonction publique du Québec.

Dans le secteur des organismes gouvernementaux, l'état des négociations se présente de la façon suivante: Mon ministère a participé au règlement des conventions collectives ci-dessous énumérées:

L'Office de Radio-télédiffusion du Québec et le syndicat des réalisateurs;

La Régie du Grand Théâtre et le groupe de machinistes et habilleuses;

REXFOR et le groupe exploitation forestière;

Les sociétés de conservation (Gaspésie et Côte-Nord) et le groupe garde-feu;

La Régie de la Place des Arts et le groupe machinistes;

La Société des traversiers du Québec et les groupes capitaines et mécaniciens;

La Société des alcools du Québec et les techniciens et ouvriers;

II me fait plaisir de faire part que j'ai signé, le 12 mai dernier, l'entente entre le gouvernement et les techniciens de l'Office de radio-télédiffusion du Québec.

Des négociations se poursuivent par ailleurs entre les groupements suivants: Les commissions d'aide juridique et le groupe des avocats et du personnel de soutien; REXFOR et le groupe des employés de voirie; Les sociétés de conservation et six syndicats regroupant des saisonniers garde-feu; La Régie de la Place des arts et les préposés au stationnement et les placeurs; La Société des traversiers du Québec et le personnel de soutien; La Société des alcools du Québec et le personnel de magasin et de bureau; Les commissions de formation professionnelle et les enseignants.

Le gouvernement du Québec a manifesté son intention d'en arriver à des règlements négociés avec tous les groupements que je viens d'énumérer et où des ententes n'ont pas encore été conclues. La signature de plusieurs conventions collectives dans les secteurs de la fonction publique et des organismes gouvernementaux est un signe manifeste de cette volonté gouvernementale.

Au chapitre du deuxième programme, la recherche sur la rémunération, il convient de dégager que cet organisme a conduit plusieurs enquêtes et analyses portant sur les salaires, les bénéfices marginaux, les conditions de travail et autres aspects pertinents pour répondre aux besoins ex-

primés par les ministères de l'Education, des Affaires sociales et de la Fonction publique, qui ont la responsabilité de préparer les mandats de la négociation. Inutile d'ajouter que ces travaux d'enquête et d'analyse ont été très nombreux au cours de la dernière année en raison du renouvellement des conventions collectives de travail dans les secteurs public et parapublic.

Le bureau de recherche sur la rémunération s'est également doté d'un service de documentation et d'information sur les politiques de rémunération et les conditions de travail des diverses instances gouvernementales canadiennes et de certains autres employeurs ainsi que sur toute matière connexe telle que des informations sur les législations en vigueur et les systèmes de classification. Ce bureau, finalement, a joué le rôle d'agent de liaison entre le gouvernement du Québec et tous les employeurs et continuera de le faire au cours de la prochaine année pour procéder à l'échange des données requises à l'accomplissement du mandat qui lui a été confié.

Au chapitre du troisième programme, les régimes de retraite et d'assurance collective sur la vie des fonctionnaires ou employés publics, la commission administrative du régime de retraite s'est vu confier l'administration du régime de retraite des maires et des conseillers des cités et villes et la mise en application de ce régime s'est effectuée au cours de l'année.

La commission a procédé à l'octroi de 2520 nouvelles pensions et a permis à 711 conjoints de bénéficier d'une rente de survivants par suite du décès du participant.

La commission a procédé au remboursement de cotisations à 22 068 employés qui en ont fait la demande, soit: Régime de retraite des fonctionnaires: 2283; Régime de retraite des enseignants: 5917; Régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics: 13 839; les autres régimes: 29.

La commission a statué sur 69 717 demandes de participation à l'un ou l'autre des régimes de retraite; la commission a étudié 22 296 demandes de rachat de service antérieur non contribué; la commission a étudié 4624 demandes de transfert d'un régime de retraite à un autre régime de retraite administré par la Commission administrative des régimes de retraite; la commission a payé aux héritiers légaux de 738 employés une somme de quelque $2 millions en assurance-vie; la commission a étudié 49 178 demandes d'assistance par les employeurs pour des employés qui se sont absentés pour cause de maladie.

Au cours de l'année 1976, la commission procédera au paiement des pensions et des remboursements de cotisations selon les demandes régulières, mais procédera en plus au remboursement de quelque 60 000 employés qui ont cotisé en excédent du maximum alloué, soit par suite de double emploi ou par suite de transfert avec effet rétroactif du Régime de retraite des fonctionnaires ou des enseignants au Régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics.

La commission procédera à l'évaluation actuarielle de tous les régimes de retraite qu'elle administre. Elle remettra à chaque participant un état détaillé de son service et de ses cotisations accumulés dans le but de renseigner les participants et de corriger certaines lacunes qui pourraient s'être glissées, surtout pour les employés féminins, à cause de changement de nom par suite de mariage.

La révision des systèmes administratifs et informatiques sera entreprise en 1976 dans le but d'obtenir une plus grande efficacité administrative et d'assurer en meilleur service aux divers participants des régimes de retraite et d'assurance administrés par la commission.

Au chapitre du quatrième programme (la Commission de la fonction publique), la commission a attaché une importance particulière durant la dernière année à l'amélioration des pratiques et méthodes qu'elle utilise en vue de répondre aux objectifs qui lui sont fixés par la loi de la fonction publique. Ainsi, des actions ont été entreprises en vue de favoriser l'attraction de candidats à la fonction publique et en vue d'atteindre une plus grande efficacité dans la dotation des postes. A cette fin, de nouvelles modalités ont été implantées pour l'organisation et la tenue des concours et des changements visant à en assurer une meilleure gestion ont été apportés dans le domaine de l'informatique. De plus, la commission a élaboré de nouvelles normes en matière de classification des emplois et de sélection du personnel. Enfin, elle a poursuivi la déconcentration territoriale de certaines de ses activités en matière de recrutement et de sélection par l'ouverture de quatre bureaux régionaux qui, au total, sont maintenant au nombre de huit. Le dernier bureau régional, celui de Rouyn-Noranda, sera en place dans quelques mois.

Ces initiatives ont coincidé avec une augmentation sensible du volume des opérations de la commission. En effet, en 1975, celle-ci a émis 10 827 listes d'admissibilité et approuvé 2969 jurys d'examens par rapport respectivement à 8112 listes d'admissibilité et 2708 jurys d'examens pour l'année 1974.

Ainsi, pour le recrutement public aux classes d'emplois autres que celles des emplois supérieurs, près de 65 000 personnes, soit une augmentation de 38% par rapport à l'année 1974, se sont inscrites à ces concours, et la commission a déclaré l'admissibilité de plus de 14 000 d'entre elles, ce qui a permis de combler environ 9000 postes vacants dans les ministères et organismes. Par ailleurs, au niveau des emplois supérieurs, la commission a lancé 390 concours en 1975, soit 17% de plus que l'année précédente, qui ont attiré 4000 candidats dont 500 ont été par la suite déclarés admissibles à cette catégorie d'emploi.

Durant l'année, la commission a aussi procédé à l'adoption de 461 résolutions et de 42 règlements. Il convient également de mentionner que, suite à l'adoption, en mars 1975, du règlement "concernant les emplois ou fonctions d'un caractère occasionnel et leurs titulaires", la

commission est régulièrement intervenue en vue de surveiller l'application de certaines dispositions de ce règlement.

Suite à la signature de la convention collective des fonctionnaires en décembre 1975 et à l'introduction de nouvelles dispositions en vertu desquelles un membre choisi par les employés visés par cette convention est nommé sur les jurys de concours d'avancement de classe, la commission a dû revoir quelques-unes de ses pratiques administratives afin d'appliquer intégralement ces nouvelles clauses de la convention collective.

La commission se propose, au cours de la prochaine année, de réviser un certain nombre de règles de gestion de personnel et de règlements de classification présentement en vigueur et ce, à l'intérieur des comités consultatifs paritaires qui ont été prévus dans certains cas.

Même si les négociations, non seulement dans les secteurs de la fonction publique et du pé-ripublic, mais également dans les autres secteurs gouvernementaux où j'exerce une responsabilité de premier plan, ont été l'activité principale de cette dernière année, il n'en reste pas moins que des études d'envergure ont été menées en vue de réviser l'ensemble de la législation en matière de gestion de personnel et d'introduire de nouvelles règles de gestion à l'endroit des cadres de la fonction publique.

En ce qui a trait à la révision de la législation, certaines hypothèses de travail sont actuellement envisagées par le gouvernement en vue d'atteindre les trois objectifs suivants:

Le renforcement du régime de mérite dans la fonction publique du Québec;

L'amélioration de l'efficacité gouvernementale dans l'administration quotidienne des ressources humaines;

La délégation de pouvoirs en vue de chercher un équilibre entre la souplesse, le fonctionnement et le maintien du régime de mérite.

L'atteinte de ces trois objectifs est une tâche des plus difficiles à effectuer, si l'on tient compte du fait que le modèle d'organisation en vigueur dans la fonction publique du Québec est unique au Canada.

En effet, la multiplicité des organismes centraux responsables de l'élaboration et de l'implantation des programmes de gestion de personnel nuit considérablement à la saine gestion vers laquelle le gouvernement entend se diriger, d'autant plus que tout près de la moitié du budget gouvernemental y est consacrée.

Nous avons déjà constaté les anomalies les plus évidentes qui empêchent la coordination requise pour préparer un certain nombre de programmes. A titre d'exemple, j'aimerais souligner les difficultés quotidiennes de fonctionnement qu'implique la dispersion actuelle d'activités aussi reliées que celles de la classification, de la rémunération et de l'organisation. Ces activités sont présentement sous la responsabilité de trois organismes différents, soit la Commission de la fonction publique, le ministère de la Fonction publique et le Conseil du trésor. Il ne fait aucun doute que de tels chevauchements peuvent se régler facile- ment en apportant les amendements requis aux lois actuelles.

Cependant, le gouvernement s'interroge sur des questions beaucoup plus fondamentales, toujours à l'intérieur des objectifs que j'ai mentionnés, en vue d'apporter une réforme valable de ce secteur important de l'activité gouvernementale.

Le groupe de travail sur l'administration gouvernementale a, d'ailleurs, déjà été saisi des études qui ont été menées à ce sujet et les travaux se poursuivront au cours des prochaines semaines. C'est dans cette optique que j'ai l'intention de soumettre au conseil des ministres des propositions qui toucheront plusieurs aspects susceptibles d'apporter une véritable réforme dans l'administration du personnel.

J'aimerais également faire état des travaux du comité interministériel d'étude sur la gestion des cadres. Je profite de l'occasion pour remercier les membres de ce comité dirigé par Mme Kathleen Francoeur-Hendriks, membre de la Commission de la fonction publique, qui, en plus de leurs activités régulières de travail, ont consacré beaucoup de temps à la préparation de ce document.

Les recommandations qui m'ont été transmises par ce comité ont été appliquées à l'occasion de la détermination des règles de rémunération des adjoints aux cadres supérieurs et des administrateurs, à l'intérieur du règlement prescrivant des directives en vertu de la loi concernant les mesures anti-inflationnistes. Les autres recommandations relatives aux règles de gestion sont présentement à l'étude par le groupe de travail sur l'administration gouvernementale. Comme l'application d'un certain nombre de ces règles implique des modifications aux lois et aux structures actuelles, les constatations du comité interministériel sont envisagées dans le cadre de la réforme que j'ai esquissée précédemment.

Avant de terminer et à la suite de l'expérience que j'ai acquise en tant que ministre de la Fonction publique et ministre responsable de la négociation dans les secteurs public et parapublic, j'ai confié à un groupe de travail la responsabilité de définir un mandat qui serait soumis au conseil des ministres pour réviser le système actuel des relations du travail dans les services publics. Le mandat comporterait deux volets, un premier visant à définir de nouvelles modalités juridiques qui serviraient à déterminer les conditions de travail des employés des services publics, en ayant comme toile de fond que le régime actuel de relations du travail remonte à plusieurs années et n'est qu'une reconduction de celui qui existe dans l'entreprise privée.

Ce nouveau système devrait, de toute évidence, mieux protéger la population dans des situations conflictuelles, tout en permettant aux employés de maintenir un pouvoir de négociation. Le second volet de cette question fort complexe concerne les structures et mécanismes d'ordre administratif qui devraient prévaloir à l'occasion d'une prochaine ronde de négociation.

Je pense que le gigantisme de la structure actuelle et le nombre d'intervenants dans cette négociation expliquent les lenteurs chez les deux

parties.

Finalement, M. le Président, j'aimerais remercier les fonctionnaires de mon ministère et de tous les organismes qui sont sous ma juridiction pour la précieuse collaboration qu'ils m'ont apportée au cours de la dernière année, ce qui m'a permis de m'occuper de l'important dossier des relations du travail et d'en arriver quand même à d'autres importantes réalisations.

Le Président (M. Lafrance): L'honorable député de Maisonneuve.

Remarques de M. Robert Burns

M. Burns: M. le Président, j'espère que le ministre ne s'attend pas que je passe la période de ma courte intervention à encenser le ministère de la Fonction publique relativement... Ce serait malhonnête de ma part, si je le faisais. Je ne pense pas que le ministre s'y attende.

Je veux quand même, M. le Président, de façon assez rapide et assez concise revoir, à la lueur des quelques dernières années, en particulier des événements qu'on vit actuellement au Québec, jusqu'à quel point le ministère de la Fonction publique s'est acquitté ou ne s'est pas acquitté de ses deux grandes fonctions et comment il les remplit actuellement, ces deux fonctions étant, d'une part, la négociation des secteurs public et parapublic... Le ministre parle de péripublic. Est-ce que c'est la nouvelle appellation du secteur parapublic qu'on appelle péripublic?

M. Parent (Hull): Non, c'est le bill 95 qui fait mention de cela.

M. Burns: Non, mais est-ce à la suite de longues recherches que vous en êtes arrivé à cette expression de péripublic plutôt que parapublic? Remarquez que, étymologiquement, en y pensant, cela ne m'apparaît pas comme faux à l'origine, mais est-ce qu'à l'avenir on devra parler de péripublic et de parapublic?

M. Parent (Hull): II y a du parapublic et il y a du péripublic. Il y a les deux.

M. Burns: II s'agira de se débrouiller pour savoir si c'est parapublic ou péripublic. Je reviens à ce que je disais tout à l'heure, les deux principales fonctions du ministère, c'est-à-dire la négociation dans les secteurs public et parapublic ou péripublic et la mise en valeur des ressources humaines. Quant au premier point, c'est-à-dire celui de la négociation, je ne peux que constater — et je pense que le ministre lui-même l'a admis le 2 avril dernier — que le gouvernement a traîné à faire des offres véritablement complètes. C'est une constatation qu'on est obligé de faire dès le départ.

Justement, je parlais du 2 avril, où le ministre admettait qu'il avait négocié beaucoup plus avec la Fédération des commissions scolaires du Québec qu'avec les enseignants au cours des neuf derniers mois. Je pense que le gouvernement a une lourde responsabilité à assumer dans ce domaine.

Je pense que le ministre comprendra très facilement jusqu'à quel point il peut être frustrant, pour des gens qui sont en négociation, de sentir qu'il ne sont pas véritablement en négociation. C'est-à-dire qu'ils sont dans le cadre juridique d'une négociation, mais qu'il n'y a pas de véritable négociation qui se tienne, pour des raisons bien simples et bien apparentes, c'est que la partie patronale n'est pas en mesure de véritablement faire des offres, parce qu'elle n'est pas unifiée.

J'en profite, à ce stade-ci, pour simplement faire un aparté sur une des recommandations que le ministre nous faisait dans son texte d'ouverture. Le ministre nous apprenait qu'il a confié à un groupe de travail le soin de réviser — même si je prends le texte au mot, ce n'est même pas de réviser — le système actuel des relations du travail dans les services publics, mais c'est de définir un mandat qui serait soumis au Conseil des ministres, pour réviser le système actuel des relations du travail dans les services publics. Pourquoi j'accroche cette remarque à cette première remarque que je faisais? C'est que je suis obligé de rappeler au ministre que, dès 1970, le premier ministre, l'actuel député de Bourassa, l'actuel député de Mercier, c'est-à-dire, — excusez-moi, je suis déphasé — avait promis lui-même qu'il allait régler ce problème. En 1972, l'actuel député de Robert Baldwin, le ministre des Richesses naturelles, qui à l'époque avait succédé au député de Deux-Montagnes, comme ministre de la Fonction publique, parlait également de réviser les mécanismes et de confier l'étude au Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre. En 1975, on nous parlait encore — l'année dernière, à l'étude des crédits — d'une nouvelle étude qu'il fallait mettre en place, de nouveaux mécanismes, qu'il fallait impliquer le Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre.

Jusqu'à maintenant, je n'ai pas entendu parler du Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre. C'est peut-être dans ses intentions, je l'ignore. Si je fais référence immédiatement à cette partie du texte du ministre, je la relie à ce que je disais — je pense que le problème actuel — peut-être que le ministre pourrait songer à cet aspect — n'est pas d'unifier la position syndicale, elle est unifiée. On a eu beau tenter de trouver, à gauche et à droite, des raisons de dissociation à l'intérieur du front commun, il n'y en a pas. Je pense que c'est la chose la plus évidente. D'autre part, on ne peut pas dire cela du côté patronal.

Quand vous voyez jusqu'à quel point le gouvernement est obligé d'user de force, de conviction à l'endroit de certaines commissions scolaires qui refusaient d'appliquer en matière de lock-out, entre autres, la solution qui avait été négociée par les représentants gouvernementaux. Quand vous voyez jusqu'à quel point on a tergiversé de ce côté, c'est fort compréhensible que les offres complètes du gouvernement aient tardé autant et, de l'aveu même du ministre, que nous ayons eu du côté gouvernemental beaucoup plus de négociations dans le domaine de l'enseignement avec la Fédération des commissions scolaires qu'avec les enseignants eux-mêmes.

Je profite de l'occasion, étant donné que le ministre nous a mentionné cela dans son énoncé de départ, qu'il veut faire définir un mandat d'un éventuel comité qui va reviser le système actuel des relations du travail, pour lui mentionner que cela vaudrait peut-être la peine qu'il tente, avant de faire cela, de trouver une solution à une position ou comment on en arrive à une position unique du côté patronal, entre autres, dans le domaine de l'enseignement.

En second lieu, relativement aux négociations, l'autre remarque que je suis en mesure de faire, après avoir dit que le gouvernement a traîné véritablement pendant au-delà de neuf mois avant de faire des offres complètes, c'est que le gouvernement n'a pas véritablement négocié jusqu'à maintenant. Il n'a fait que de la stratégie.

Cela pose toute la question, la question qui revient à toutes les années, à toutes les fois qu'il y a une ronde de négociations, à savoir quel type d'employeur le gouvernement doit-il être. Je me souviens que j'ai eu ce même débat avec M. Cour-noyer alors qu'il était ministre de la Fonction publique; je l'ai eu avec M. L'Allier. L'année dernière, on en a discuté à quelques reprises avec l'actuel ministre.

Le problème est de savoir si le gouvernement se doit d'être le meilleur employeur au Québec, ou le pire employeur au Québec, comme il tente de se faire une réputation actuellement, dans les présentes négociations.

Quand je parle du pire employeur, je veux dire l'employeur qui n'agit strictement que sur une base de stratégie, qui n'agit que de façon à en tirer — parce qu'il s'agit beaucoup plus d'un gouvernement parti politique et l'équation entre les deux — une espèce de crédit politique.

Sur l'importante question de la tâche, par exemple, avec la Centrale des enseignants du Québec, cette dernière centrale, par deux fois — je vous le cite à titre d'exemple — a diminué ses demandes, tandis que le gouvernement, à toutes fins pratiques, n'a jamais bougé dans ce domaine.

Il faut ignorer jusqu'à quel point est importante cette question pour les enseignants, cette question de ratio professeur-élèves, cette question de fardeau de la tâche, pour que le gouvernement fasse de la stratégie avec un point aussi important que celui-là. Je vous le cite à titre d'exemple.

A la table des CEGEP, par exemple, l'offre finale du gouvernement est de 100 postes supplémentaires — à moins que le ministre me dise que, dans les derniers jours, il y a eu des changements; c'est possible qu'il y en ait eu, mais, de toute façon, à ma connaissance, ils ne sont pas publics — tout en maintenant, à toutes fins pratiques, le statu quo relativement à ce fameux ratio.

Dans le domaine des affaires sociales, autre exemple, la partie patronale vient, il y a quelques jours, d'accepter — croyez-le ou non — le statu quo sur l'affichage et les droits syndicaux. Cela fait à peine deux semaines que c'est accepté, ce statu quo sur l'affichage et les droits syndicaux. Je fouille dans ma petite expérience d'ancien négociateur en matière de relations patronales-syndicales — je l'avoue ouvertement, du côté syn- dical et fièrement, du côté syndical — je me rappelle que c'étaient des clauses qui, même dans une première convention collective, méritaient à peine cinq minutes de discussion, parce que, rapidement, on s'entendait sur des choses comme cela.

On en est rendu à tout près d'un an de négociation et on vient de régler, sur une base de statu quo, le problème de l'affichage et des droits syndicaux. En tout cas, en ce qui me concerne, dans le domaine hospitalier — c'est un autre exemple du phénomène stratégie beaucoup plus que négociation du côté patronal, dans la présente ronde de négociations — au début de mai, si mes informations sont exactes, on en était encore aux discussions préparatoires sur les 17 points véritablement en litige.

Le ministre pourra peut-être nous dire plus tard que ce n'est pas exact. J'aimerais avoir beaucoup plus de détails que ce qu'il nous a donné dans son énoncé préliminaire relativement à la présente négociation. C'est la chose qui préoccupe actuellement tous les Québécois, qu'ils soient employés des secteurs public et parapublic ou usagers. L'un n'exclut pas l'autre; souvent ce sont les deux.

Autre exemple de stratégie, beaucoup plus que de négociation — là-dessus, j'espère que le ministre nous donnera beaucoup plus de détails qu'il a bien voulu nous en donner dans son exposé préliminaire — à savoir les négociations avec les professionnels du gouvernement. Cette table de négociation, à moins que le ministre nous dise que cela a changé depuis, très récemment, ne négocie pas. Il n'y a pas de véritable négociation. Il n'y en a pas eu, pour une raison bien simple. Il n'y a pas encore une personne, du côté patronal, qui soit, avec autorité, mandatée pour négocier au nom du gouvernement. Comment veut-on, à un moment donné, en arriver normalement à la conclusion d'une négociation avec les professionnels s'il n'y a pas un mandataire de ce côté?

Ce sont ces trois exemples, dans le domaine de l'enseignement, dans le domaine des hôpitaux, dans le domaine de la négociation avec les professionnels qui me font dire que, jusqu'à maintenant, le gouvernement n'a pas véritablement négocié, mais n'a fait que de la stratégie. C'est une erreur grave. Il n'y a rien de plus frustrant, pour les gens qui veulent véritablement en arriver à une solution négociée, que de sentir que non seulement il n'y a pas d'autorité véritable de l'autre côté de la table, mais qu'il n'y a pas de volonté d'en arriver à une solution négociée. Je vous le dis, M. le ministre, et je le dis à vos collègues du cabinet qui, sans doute, ont eu à se pencher sur ce problème à quelques reprises et auront sans doute à se pencher sur lui, tant et aussi longtemps que la présente ronde de négociations avec les secteurs public et parapublic ne sera pas réglée. Je vous dis que c'est jouer véritablement avec le feu. Ce n'est pas possible de mettre en danger l'utilisation des services publics et parapublics au Québec, à cause de phénomènes et de raisons stratégiques.

Je pense que c'est de l'irresponsabilité pure et simple de la part du gouvernement que de jouer

cette carte. Peut-être — je pense tout haut en le disant — que la façon dont, du côté syndical, on a mené le négociations — surtout, je pense que c'est très important on s'est refusé jusqu'à maintenant à poser des gestes ultimes et définitifs — a motivé le gouvernement à essayer de changer une certaine opinion publique, laquelle, actuellement, on sent beaucoup plus favorable au côté syndical qu'au côté patronal dans la présente négociation. Si c'est le cas, je pense que, encore une fois, on peut taxer le gouvernement et ceux qui le représentent dans l'actuelle négociation d'irresponsables et, surtout, on ne peut que regretter ouvertement, publiquement, une telle attitude.

A ce sujet, j'espère que le ministre saura nous donner beaucoup plus de précisions qu'il ne nous en a donné dans son exposé tout à l'heure.

En troisième lieu, M. le Président, toujours relativement à ces négociations, je ne peux m'empêcher de constater que le gouvernement a constamment recherché un certain affrontement avec la partie syndicale

Je pense et, comme je le mentionnais tout à l'heure, c'est quelque chose dont on doit féliciter la partie syndicale jusqu'à maintenant, que sa stratégie à elle a été beaucoup plus franche, beaucoup plus "visière levée" qu'en 1972, et beaucoup plus dirigée vers les possibilités d'une solution négociée. Il n'y a pas eu vraiment du côté syndical, sauf les débrayages sporadiques, et le ministre pourra me dire que c'en est du harcèlement, que c'en est de la désobéissance civile, et que c'en est du refus de l'autorité, etc., mais il n'y a pas eu véritablement du côté syndical, sinon le fait de vouloir mettre le problème devant l'opinion publique, de provocation du style qu'il y avait eu en 1972. Or, dès la négociation avec les employés du gouvernement, les fonctionnaires et les ouvriers, le ministre actuel de la Fonction publique lui-même, agit à mon avis de façon intimidante à l'endroit des fonctionnaires. Je me souviens de cet avertissement qu'il servait aux gens du secteur public, c'est-à-dire carrément les fonctionnaires et les ouvriers du gouvernement, quand il leur disait: Vous savez, si vous ne signez pas votre convention collective avant le 18 décembre, je serai obligé de remettre en question la possibilité de discuter de rétroactivité avec vous. Si ce n'est pas de l'intimidation, je ne sais comment vous qualifiez cela. Je dis qu'il y a une négociation de bonne foi qui se fait. On n'a pas à dire aux gens: II faut que vous régliez. Pour des raisons stratégiques, peut-être que, du côté gouvernemental, c'est intéressant d'avoir d'abord une convention signée et de sortir de ce gros bloc de négociations, un bloc assez important, qui s'appelle les fonctionnaires et les ouvriers du gouvernement. Peut-être que, straté-giquement, le ministre pouvait désirer cela. Mais c'est une stratégie qui, à mon avis, est nocive à long terme, qui fait perdre confiance en la partie patronale, à l'endroit de la partie patronale, à la partie qui doit avoir cette confiance si elle doit véritablement négocier de bonne foi. A mon avis, cela a été le premier geste évident d'intimidation et de provocation, dois-je dire, de la part du gou- vernement, par la bouche de l'actuel ministre de la Fonction publique.

Il y a plus que cela. Le gouvernement a tout d'abord imposé les modalités des négociations et il les a imposées lui-même, notamment en déclarant l'objet des négociations aux tables locales dans le secteur de l'enseignement. C'est une façon de ne pas vouloir négocier d'égal à égal, de vis-à-vis à vis-à-vis. Je suis obligé de le constater, également, dans la façon dont il a mis en application le projet de loi 253, soit lui-même soit par ses mandataires qui ont fait les représentations aux différents commissaires nommés en vertu de la loi 253, que je ne qualifie la Loi des services essentiels dans le domaine hospitalier.

D'abord, il y a une constatation qu'on est obligé de faire, le délai dans la nomination même des commissaires a été un des facteurs, surtout que ce délai prend particulièrement de l'importance du fait que la loi 253, Loi des services essentiels dans le domaine hospitalier, s'inscrivait alors que le processus de négociation actuel était déjà commencé. C'était, à toutes fins pratiques, comme si on avait dit à un club de hockey — en tout cas, ce n'est plus la mode depuis quelques jours les joutes de hockey, tant mieux — en plein milieu d'une partie: Vous savez, il va falloir changer les règles du jeu maintenant que telle équipe gagne 2 à 0. Je pense qu'il n'y a aucune équipe, de quelque nature que ce soit, qui l'accepterait. Ce n'est pas que je veuille associer la négociation dans ce secteur à un jeu, à un sport. Je fais simplement une analogie avec le fait que ce n'est pas possible, à partir du moment où le processus de négociation est engagé, à partir du moment où, en particulier, dans bien des cas, la demande de conciliation avait été faite, donc que le processus amenant vers le droit de grève était engagé, ce n'est pas possible, dis-je, sinon en voulant provoquer les gens, d'amener une loi qui vienne tout à fait faire faire un virage en U dans le tunnel à ces négociations, parce que c'est ça que le bill 253 a fait.

Je n'entre pas, M. le Président, dans la critique même du projet de loi. Je n'en parle que pour étayer, si vous voulez, mon point de vue selon lequel l'attitude du gouvernement en a été une, depuis le début, de provocation à l'endroit des syndicats.

Relativement à cette même loi 253, on a été forcé de constater que certaines décisions qui ont été rendues, et ceci, à la demande des administrateurs des hôpitaux, ont accordé, comme services essentiels, plus de personnel qu'il est normalement prévisible d'en avoir la nuit ou encore en fin de semaine. Il y a même, dans quelques cas, des décisions qui ont exigé ou qui devraient normalement exiger la présence de plus d'employés qu'il y en a lorsque l'établissement fonctionne à plein rendement.

Ce sont des conséquences normales d'un geste précipité qui s'appelle la loi 253. Ce sont des conséquences normales, à mon avis, d'un geste provocant de la part du gouvernement.

Toujours dans le secteur hospitalier, M. le Président, le gouvernement s'est servi, à mon avis,

sans aucune nuance, de la procédure d'injonction, autre élément de provocation quand on sait jusqu'à quel point il est facile, du côté patronal, d'obtenir des injonctions, surtout si on est dans un domaine parapublic ou péripublic, selon l'expression que vous voudrez utiliser.

Quand ça ne dérange pas, une grève — c'est la question de base — ce n'est pas une grève. Il ne faut pas se leurrer là-dessus. Pourquoi les travailleurs feraient-ils une grève s'ils disaient: On ne dérange personne? Mais entre déranger quelqu'un et même déranger tout un secteur d'usagers de la fonction publique et parapublique et empêcher le fonctionnement d'un secteur comme celui-là, il y a une sérieuse marge.

C'est peut-être à l'étude des crédits du ministère de la Justice que je devrais faire la remarque suivante: Je pense que nos juges ont été très, très, très, très prêts à écouter, de tout temps, la partie patronale lorsqu'une requête en injonction se faisait, particulièrement dans le domaine public et parapublic. J'ai essayé de faire des statistiques là-dessus, mais c'est pratiquement impossible de le faire.

Par contre, du côté syndical, lorsqu'on a demandé des injonctions à l'endroit de patrons qui violaient ouvertement des conventions collectives — j'en ai eu personnellement des expériences — c'est drôle comme c'était très difficile d'obtenir une injonction et, à ce moment, le gouvernement n'est pas sans savoir, n'est pas sans connaître cette situation de fait, et le fait de recourir, à la moindre alerte, à la moindre diminution du personnel, au moindre ralentissement de travail dans un hôpital, à l'injonction, je vous dis que c'est un autre élément qui vient s'ajouter à ce tableau de provocations de la part de la partie patronale à l'endroit de la partie syndicale.

Autre point qui aurait pu améliorer l'atmosphère de façon véritablement sensible dans le domaine hospitalier en particulier et dans le domaine de l'enseignement, cela aurait été de suivre la recommandation non seulement des syndicats en présence, mais de tout ce qu'il y avait de personnes qui tentent de se pencher sur le problème de la présente négociation. Entre autres, je pense à certains éditorialistes, que ce soit de la Presse, du Devoir ou d'autres journaux, du Soleil. Vous avez eu un grand nombre de personnes en autorité qui réfléchissent, parce qu'elles trouvent que c'est particulièrement important, cette négociation, et parce qu'elles trouvent que le gouvernement aurait dû, au moins, prendre un certain nombre de leçons de la négociation de 1972, puisque la partie syndicale, elle, en a tiré quelques leçons. Il me semble que le gouvernement, lui aussi, aurait dû tirer quelques leçons et les mettre en application. Mais que tous ces gens, tant du côté syndical qu'un certain nombre de gens en autorité, qui pensent aux problèmes actuels — je ne parle même pas de l'Opposition officielle qui a fait cette suggestion à de nombreuses reprises — je ne comprends pas aujourd'hui comment le gouvernement a, aussi, tant tardé à nommer de véritables négociateurs dans la présente négociation.

Je m'arrête ici. J'ouvre simplement une parenthèse pour relever, encore une fois, parce que le ministre, probablement, s'apprêtera à me donner à nouveau cette réponse parce que, lorsque je lui ai suggéré en Chambre de nommer un médiateur, il m'a dit: Ce n'est pas possible. On ne peut mettre de côté notre pouvoir de négociation. Le gouvernement n'a pas à se lier. Il faisait une équation entre le système de médiation et le système d'arbitrage obligatoire avec sentence finale, applicable aux deux parties, sans appel.

Jamais, au grand jamais — et le ministre devra le reconnaître — la partie syndicale, que ce soit la CEQ ou que ce soit encore les deux autres centrales dans le domaine hospitalier ou dans le domaine qui concerne une partie d'une centrale, l'autre partie de l'enseignement, jamais il n'a été question d'un arbitrage obligatoire liant de façon définitive le gouvernement.

Il a toujours, cependant, été question d'un médiateur qui, avec une certaine autorité morale, viendrait agir comme une espèce de guide à l'endroit des parties qui sont en train de se fourvoyer ou qui étaient, à l'époque, en train de se déchirer de façon irrémédiable.

C'est un autre blâme que j'adresse au gouvernement, ce retard à nommer, véritablement, un médiateur. Ce qui est arrivé, dans le fond, est que le gouvernement a adopté la loi 23, sous un couvert qu'on appelle autrement, qu'on appelle les commissaires aux différends dans le domaine de l'enseignement, on a, à toutes fins pratiques et par force de bras, avec la loi 23, nommé une sorte de système de médiation. Le juge Poirier et ses collègues ne sont ni plus ni moins que des médiateurs. Cela aurait pu se faire bien avant la loi 23 et, sans aucun doute, sans aucun recours à un type de législation comme la loi 23.

La loi 23, elle-même, n'a servi — et cela sera important quand on fera l'examen de cette négociation a posteriori — qu'à retarder les négociations et à mettre — je n'ose même pas dire le bordel dans la situation, mais je le pense — la situation sans dessus, ni dessous pendant une certaine période.

Tout le monde — et je pense que, s'il y a une unanimité qu'on a réussi à trouver depuis le début des négociations, relativement aux gestes posés par le gouvernement... est contre la loi 23 et je ne vous parle pas que des syndiqués, à ce moment.

Je vous parle du milieu anglophone qui s'est exprimé de façon on ne peut plus claire. Les commissaires des commissions scolaires se sont exprimés contre cette attitude en disant que la loi 23 ne faisait que retarder la négociation et surtout, contribuait à gâter davantage l'atmosphère. On en est rendu — et le ministre en sait quelque chose — à voir même les évêques qui se prononcent là-dessus, même un évêque proche du ministre. Je pense que l'évêque de Hull s'est prononcé là-dessus. Je ne sais pas où en est rendu votre polémique avec l'évêque de Hull, relativement...

M. Parent (Hull): II m'a écrit pour me dire qu'il n'y avait pas de polémique.

M. Burns: Je n'ai pas lu les dernières nouvelles là-dessus?

M. Parent (Hull): II m'a écrit pour me dire qu'il n'y avait pas de polémique.

M. Burns: II n'y avait pas de polémique. Bon. Selon ce que j'ai lu dans les journaux, je trouvais qu'il y en avait une sérieuse parce qu'il critiquait, carrément, l'attitude, non seulement de son député, mais du ministre de la Fonction publique, celui chargé de mener à bien la présente négociation.

Quand vous êtes rendu à avoir une unanimité comme cella-là... Pardon?

M. Parent (Hull): Je vous parle de sa lettre que j'ai reçue hier.

M. Burns: Ah bien, moi je ne l'ai pas reçue. Il ne m'a pas envoyé de lettre.

M. Parent (Hull): II n'a pas l'intention d'engager une polémique.

M. Burns: Sauf qu'on doit le féliciter d'avoir eu le courage de le dire ouvertement et je pense que les gens du milieu ecclésiastique, qui s'occupent, je l'admets, du côté spirituel de leurs ouailles, ne peuvent pas négliger le côté temporel, le côté matériel de leurs ouailles. Je pense qu'on doit féliciter des gens du milieu ecclésiastique de prendre de telles positions lorsque le besoin s'en fait sentir et de s'exprimer carrément comme quelqu'un qui a une certaine force, une certaine autorité morale dans la société.

M. Parent (Hull): II faudrait que le député de Maisonneuve sache que l'Assemblée des évêques du Québec n'a pas pris la position qu'a adoptée l'évêque de Hull.

M. Burns: Je vous avoue que je ne veux surtout pas lancer une polémique là-dessus. Je vous le citais en exemple. Ce que j'ai lu me donnait quand même suffisamment le droit de vous dire qu'il y a un évêque très près de vous qui appuyait les revendications des milieux syndicaux relativement à l'aspect inopportun de cette loi no 23.

En somme, M. le Président, tout au long du conflit, tant les déclarations du premier ministre que du ministre de la Fonction publique, à mon avis, n'ont servi que de prétexte à cette politique de provocation. Je ne veux pas faire de procès d'intention au ministre, mais je me demande si cela n'a pas été voulu. Je me rattache à ce que je disais tout à l'heure. Si cela n'a pas été voulu sur le plan stratégique, si on ne l'a pas, du côté gouvernemental et, bon Dieu! ce serait important que le ministre dissipe ce doute non pas dans mon esprit à moi seulement — si ce n'était que moi qui avais ce doute, le ministre pourrait dire: Je me balance du député de Maisonneuve, et cela finirait là, mais dans l'esprit d'une grande partie de la population qui se demende si toute cette stratégie de confrontation n'avait pas été décidée à l'avance, en vue d'en arriver à une situation qui mènerait à un débrayage illimité, à une situation cahotique au Québec telle qu'à nouveau on nous reviendrait avec le papier carbonne de la loi 19 de 1972, pour éventuellement imposer un décret, pour éventuellement mater à nouveau les syndicats et dire: à sa façon — c'est drôle que ce soient deux gouvernements libéraux qui le disent différemment, mais qui disent la même chose — L'Etat ne négocie pas avec ses serviteurs, ou, comme le disait M. Lesage dans le temps: La reine ne négocie pas avec ses sujets. Eventuellement, il a changé d'idée et il a été obligé de se ranger à l'opinion que la reine devait négocier avec ses sujets. Mais je me demande si, dans le fond, l'attitude gouvernementale actuelle n'est pas une réplique de cette attitude, en plus subtil, je suis obligé de l'admettre. Jamais je n'ai entendu ni le premier ministre, ni le ministre de la Fonction publique, ni le ministre du Travail, ni quelque autre ministre dire carrément: Nous n'avons pas affaire à négocier avec les gens qu'on emploie. Nous sommes la reine au Québec et la reine ne négocie pas avec ses sujets. Je n'ai jamais entendu cela. Je dis que cela a été beaucoup plus subtil que cela. Cela a été subtil et beaucoup plus machiavélique que cela, en ce sens que c'est à long terme qu'on se rend compte, à la suite de deux rondes de négociations que ce gouvernement entreprend avec les employés du secteur public et parapublic, qu'on est obligé d'en arriver à la conclusion que c'est possiblement cela qui est derrière l'esprit du gouvernement. J'espère que le ministre saura dissiper ces doutes qui s'inscrivent dans mon esprit et qui s'inscrivent dans l'esprit de beaucoup de gens. Et Dieu sait que vous avez du côté gouvernemental — et cela est admis du côté de l'Opposition — des compétences qui sont capables d'en arriver à une véritable négociation. Vous avez des gens qui connaissent cela. Il n'y a pas de doute là-dessus. Alors, quel est le problème? C'est un problème politique qui est derrière cela. Est-ce qu'on va être obligé nous aussi de reprendre ce que le front commun nous soumet depuis quelque temps et soumet à l'ensemble de la population? Est-ce qu'on va être obligé de reprendre des refrains tels que: Les Jeux olympiques et la baie James, c'est plus important que le personnel enseignant au Québec, que la qualité de l'enseignement au Québec, que le service ou les soins à donner aux malades dans nos hôpitaux et dans nos établissements hospitaliers en général? Est-ce que c'est cela qu'on va être obligé de reprendre pour convaincre le gouvernement que cela prend une véritable négociation?

Entre temps, M. le Président, je vais être obligé de tirer, eu égard et jusqu'à ce que le ministre ait répondu à certaines de mes questions, un certain nombre de conclusions à cela qui sont nécessairement des conséquences à ce que je viens d'énoncer.

En premier lieu, qu'une deuxième ronde de négociation a tout d'abord et avant tout suivi la ligne des intérêts du gouvernement, c'est-à-dire uniquement de tenter de se bâtir, de se monter un capital politique sur le dos des syndicats. Je n'en prends à témoin que la déclaration que le premier

ministre lui-même qui, depuis quelque temps, revient constamment avec le problème de savoir — ce n'est pas possible de faire cela en pleine négociation — si on va bannir une fois pour toutes le droit de grève dans le milieu hospitalier ou encore en général dans le milieu du secteur public et parapublic. Je reproche carrément au premier ministre de faire ce type de déclaration en plein milieu d'une négociation. C'est de bâtir, c'est ce qui étaye ma thèse là-dessus, un capital politique en faveur du gouvernement sur le dos des syndicats.

Bien sûr, la personne qui attend depuis deux semaines, trois semaines ou un mois pour être opérée, aura tendance à donner une réponse très facile et c'est jouer avec ce qu'il y a de plus facile dans les sentiments de la population. Lorsque le premier ministre en tête, lorsque des congrès régionaux du Parti libéral dans tout le Québec prennent des attitudes comme cella-là, posent le problème en pleine négociation, à savoir si on va abolir le droit de grève dans la fonction publique et parapublique, je dis que c'est contraire à une saine atmosphère de négociation.

Autre conclusion à laquelle je dois en arriver jusqu'à ce que le ministre m'ait convaincu du contraire. La façon dont le gouvernement a négocié jusqu'à maintenant — je me reporte également, parce qu'on a deux exemples de ce gouvernement; en fait, c'est, à toutes fins pratiques, le même gouvernement, on peut le qualifier de gouvernement Bourassa — la façon de négocier de ce gouvernement, qu'on change le ministre ou qu'on ne le change pas, on en a eu trois depuis la dernière ronde de négociation, on est obligé d'en arriver à une conclusion: Le gouvernement est incapable ou ne veut pas en arriver véritablement à une solution négociée.

J'ouvre une autre parenthèse là-dessus, M. le Président. Des trois ministres de la Fonction publique qu'on a connus depuis la ronde de négociation en 1972, le seul, et je ne le dis pas de façon méchante à l'endroit du ministre, mais je suis obligé de le dire publiquement parce que ce sont les crédits de son ministère qu'on étudie, le seul ministre qui a réussi à se faire véritablement respecter par la partie syndicale, ç'a été le député de Deux-Montagnes. Par contre, ç'a été celui qui, au moment où il avait engagé un véritable dialogue, s'est fait tout simplement mettre de côté par le gouvernement. Cela indique tout ce que je disais tout à l'heure, une certaine philosophie de confrontation. Non, Jean-Paul L'Allier était trop capable de parler à Pépin, il était trop capable de parler à Charbonneau et il était trop capable de parler à Laberge. Il était trop capable, il a fallu l'enlever pour en mettre un autre qui, lui, va provoquer quelque chose. C'est là qu'est arrivé l'ex-ministre de la Fonction publique, votre prédécesseur.

Peut-être que ce n'est pas votre faute, peut-être que je vous adresse des reproches que vous ne méritez pas comme individu; je ne le sais pas. En tout cas, je vous laisse la chance au coureur, comme on dit. Mais, comme ministre de la Fonction publique, c'est votre rôle à vous de faire comprendre au gouvernement qu'il est en train de commettre des erreurs qui risquent de devenir irréparables dans la présente négociation.

Autre conclusion à laquelle je suis obligé d'en arriver relativement à ce problème de la négociation. La politique actuelle du gouvernement... Cela, on ne se le cachera pas, le fait de ne pas le dire publiquement serait bien gentil et ce serait éviter toutes sortes d'interprétations qu'on pourrait me mettre dans la bouche, mais je pense que je serais malhonnête de ne pas le dire à ce stade-ci, parce que c'est l'occasion rêvée pour le dire. La politique actuelle du gouvernement pousse à la désobéissance. C'est une conclusion qu'il va falloir dire ouvertement.

La politique actuelle du gouvernement est telle qu'on a l'impression que le gouvernement fait des simagrées, fait des fac-similés de négociation, pour éventuellement en arriver à un conflit, à une situation conflictuelle, pour qu'une fois la situation conflictuelle déclenchée, il se sente tout à fait justifié vis-à-vis l'opinion publique de dire; La voici, ma loi spéciale.

C'est le gouvernement, en si courte période, qui a le record des lois spéciales en matière de relations du travail. Cela veut dire quelque chose. Les syndicats ne sont pas plus méchants aujourd'hui qu'ils ne l'étaient il y a dix ans. Ils ne sont pas plus méchants qu'ils ne l'étaient il y a quinze ans. S'il y a quelque chose, je pourrais même dire qu'à l'époque des années soixante, le syndicalisme était beaucoup plus abracadabrant, beaucoup moins organisé, beaucoup moins réfléchi dans ses actions, il était beaucoup plus spontané dans ses actions. A cette époque on pouvait s'attendre à avoir des lois spéciales si le bordel partait au moindre sursaut.

Regardez simplement les statistiques de ce qu'il est convenu d'appeler les grèves illégales, c'est-à-dire les grèves qui ne sont pas faites dans le cadre d'une loi précise. Vous allez voir qu'elles ont très sérieusement diminué, eu égard au nombre de négociations qui, actuellement, nous amènent des conventions collectives.

Cette attitude du gouvernement, par la Loi 23, de même que son attitude en négociation, je le dis, je le répète, pousse à la désobéissance. Toutes ces lois matraques, ces injonctions, les décisions sur les services essentiels dont le gouvernement est responsable, parce que c'est lui qui a mis le mécanisme en place, ne règlent pas véritablement les problèmes. C'est cela qu'une négociation doit amener.

Je ne dis pas que vous devez donner raison à 99.9% à toutes les demandes syndicales, c'est la négociation. Il y a, ce qu'on appelle, du "je-t'en-donne et je-vais-en-prendre" et du "tu-vas-en-prendre et je-t'en-donne". C'est cela, c'est bien sûr. Ce n'est pas parce qu'on interdit la grève qu'il n'y en a plus.

Je souligne au ministre qu'il y a des endroits où vous avez beaucoup plus de grèves qu'au Québec, où la grève est considérée comme quelque chose de séditieux, je vous donne l'exemple de l'Espagne, par exemple. C'est assez intéressant de voir jusqu'à quel point il y a des grèves en Espagne, alors que le geste de faire une grève, en Es-

pagne, est un geste criminel, séditieux, une attaque directe à l'Etat.

C'est donc dire qu'à un moment donné, quand vous avez une attitude, du côté syndical, qui dit: Assez, c'est assez, il n'y a pas de loi qui va venir changer cela, si vous ne voulez pas discuter des véritables problèmes. Ce sont encore moins les injonctions, cette espèce de patente de l'establishment, tout simplement, parce qu'elle a été tellement utilisée, non pas par le côté gouvernemental comme tel, mais avant et antérieurement, par le côté traditionnellement patronal, dans l'industrie privée, que les gens ne croient même plus aux injonctions.

Vous avez un juge aussi honorable, je le dis dans le plein sens du mot, que le juge Deschênes, le juge en chef de la Cour supérieure du Québec qui s'est rendu compte de cela. Il a même dit, dans un de ses jugements, que l'utilisation, le recours à l'injonction, était non seulement nocif pour l'équilibre social, était non seulement mauvais pour cette atmosphère de relation du travail qui est d'abord et avant tout une relation de type de relations humaines, beaucoup plus que de relations juridiques, mais que c'était même dangereux, à long terme, pour la conception même que se faisaient l'ensemble des travailleurs et, par conséquent, éventuellement, l'ensemble des citoyens du système judiciaire.

Le gouvernement ne devrait pas être complice d'une diminution, dans l'esprit de la population, de la valeur du système judiciaire. C'est une de nos épines dorsales, dans une société démocratique. Je pense qu'on doit protéger très fortement cette épine, autant qu'on doit protéger le système parlementaire et autant qu'on doit protéger le système du pouvoir exécutif.

Quatrièmement, M. le Président, dans mes conclusions, l'utilisation irréfléchie de l'intervention législative et judiciaire force lès syndiqués, je le pense, à transgresser les lois et les jugements. C'est cela que j'appelais tout à l'heure une provocation, une incitation à la désobéissance. Elle nuit aux négociations futures. Quelle crédibilité allez-vous avoir si vous avez constamment cette épée de Damoclès au-dessus de la tête des représentants syndicaux et de la masse des travailleurs qu'ils représentent? Elle dénote surtout— j'aimerais que le ministre prenne note de cela, je pense que c'est important, cette remarque de ma part, le ministre en jugera—je pense, la grande faiblesse du gouvernement à discuter avec ses vis-à-vis. Je vous rappelle ce fameux: La reine ne négocie pas avec ses sujets. Pourquoi la reine ne négocie-t-elle pas avec ses sujets? C'est parce que c'est sa force. Le fait de négocier avec ses sujets, c'est un aveu de faiblesse. C'est justement le contraire qu'un Etat responsable doit faire, dans une société démocratique.

Finalement, en cinquième lieu dans mes conclusions, dans cette première partie, je pense que le gouvernement — cela aussi c'est important qu'on le dise —de par son attitude, considère les enseignants comme des ennemis. C'est très grave. Il traite, d'autre part, les employés d'hôpitaux comme des quasi-criminels. Il néglige ses propres professionnels au profit, je dois le dire, des amis du régime. Depuis combien de temps — sur ce troisième point, on aura l'occasion d'en parler aux autres discussions avec d'autres ministères et peut-être même ici — depuis combien de temps réclamons-nous que, du côté professionnel, vous utilisiez les valeurs que vous avez à l'intérieur de la Fonction publique actuelle, plutôt que de remercier, de façon indirecte, de bons travailleurs d'élection, que ce soient des avocats, des notaires ou des architectes ou des ingénieurs, de façon périodique, qu'ils soient cotés A, B, C ou D, peu importe? Plutôt que d'utiliser cette méthode, pourquoi ne revalorisons-nous pas véritablement cette section de la fonction publique, c'est-à-dire les professionnels, en leur donnant véritablement l'importance à laquelle ils ont droit?

En somme, M. le Président, sur ce premier point, il ne s'agit pas de savoir qui doit négocier, C'est simplement une question, à mon avis — c'est le diagnostic que j'oserais poser — de savoir qui est capable de négocier actuellement. Moi, je pense que, de la façon dont les négociations se sont engagées, j'ai été malheureusement obligé d'en arriver à la conclusion que le gouvernement actuel, pour des raisons que je ne comprends pas — je le dis encore une fois — qui ne sont peut-être pas la responsabilité immédiate du ministre, mais que le ministre doit assumer devant l'opinion publique, de la façon dont c'est engagé, je suis obligé de conclure que ce gouvernement est incapable de négocier avec ses employés.

J'ai d'autres remarques, M. le Président, si vous voulez que je continue, ou voulez-vous ajourner immédiatement ou suspendre le débat immédiatement? J'ai d'autres remarques sur le deuxième aspect du ministère qui risquent d'être, sinon aussi longues, du moins aussi substantielles, relativement à la mise en valeur des ressources (humaines que je considère comme étant la deuxième fonction du ministère de la Fonction publique. Libre au ministre, je suis prêt à continuer si vous voulez.

M. Parent (Hull): Je voudrais bien être agréable au député parce que je sais que, de part et d'autre, nous avions tenu... Je suis bien d'accord pour que nous songions à ajourner les débats sine die. Tout ce que je voudrais, c'est peut-être faire une remarque, avant que nous n'ajournions, c'est dire que je voudrais bien que ce soit clairement établi que le gouvernement veut négocier des conventions collectives.

Qu'il y ait eu accrochages, qu'il y ait encore des accrochages, je pense qu'il reste, d'une façon évidente, l'intention bien arrêtée du gouvernement, et de celui qui vous parle, d'en arriver à des conclusions heureuses. Je pense que nous l'avons prouvé par la signature de conventions collectives. On remarquera que dans le contexte de la négociation — j'aurai l'occasion d'y revenir quand vous aurez terminé votre exposé — ce qui nous reste à négocier est en somme relié au front commun. Avec tous les autres syndicats ou presque, nous avons et nous sommes arrivés à des ententes. Nous avons réalisés au-delà de 23 conventions

collectives. Ce n'est pas un indice que le gouvernement ne veut pas négocier. Il y a une politique gouvernementale. Il y a eu des lois adoptées par le Parlement qui ont défini des règles du jeu. J'y reviendrai à une prochaine occasion. Le climat n'est peut-être pas le même que celui de 1972. Je ne veux pas exclure le fait que dans tout ce parcours de la négociation qui, à mon avis, traîne en longueur, ce soit d'une responsabilité exclusivement syndicale.

Je ne voudrais pas dire non plus qu'elle est exclusive à la partie patronale. Les deux parties, à mon avis, quand il s'agit de négociation, peuvent être mises en cause. Je ne pense pas qu'il soit dans l'intérêt de quiconque de tenter de faire le partage des responsabilités, à savoir qui a tort, qui a raison. Ce qui, à mon avis, est essentiel, c'est que nous puissions trouver les formules, des mécanismes qui nous permettent de conclure des ententes collectives. C'est ce que nous recherchons de toute évidence. J'ai répété à plusieurs reprises que je n'envisageais pas, à moins de mesures extrêmes, d'être dans l'obligation de le faire, d'avoir un décret. Je pense que ce n'est pas viable et que c'est difficile dans les années qui suivent un décret, de s'assurer un climat propice aux objectifs que doivent poursuivre les employés de leur côté et des objectifs que recherchent le gouvernement et ses partenaires. C'est pourquoi je dis que nous faisons des efforts inouïs, surhumains, pour tenter de négocier d'une façon pratique, d'une façon qui pourrait nous amener à réaliser des accords. Si nous avons réussi des percées, ce n'est sûrement pas pour encercler le front commun. Ce n'était pas l'intention du gouvernement. Il y a des tables de négociations, il y en a au-delà d'une trentaine. Le jeu de la négociation a pris place. Jusqu'ici, à cause de la structure peut-être complexe — je veux revenir là-dessus — tant de la partie syndicale que patronale, à mon avis, c'est un des dé- fauts de la négociation, et c'est ce qui empêche le dialogue, donc, ce qui empêche d'en arriver à des conclusions plus rapidement que ce qui a été fait jusqu'ici.

Il n'y a aucun doute, dans mon esprit et dans l'esprit du gouvernement, que pour la paix sociale, il est désirable et il est recommandable qu'il y ait des conventions collectives. C'est ce que nous recherchons. C'est cela que je vais tenter, sans brusquer, sans vouloir tenter de détruire un système de protection qui existe pour les employés. Je l'ai reconnu à plusieurs reprises, le syndicat doit exister et le gouvernement doit négocier avec ses employés. Je n'ai pas à me rappeler les séquences que j'ai vécues ici durant les années soixante, alors que le député de Maisonneuve a fait allusion que la reine ne négocie pas avec ses sujets. Cela n'a jamais été une préoccupation dans mon esprit.

Je crois qu'il faut négocier. C'est un aspect qui fait l'enjeu entre deux parties; qu'il s'agisse du gouvernement ou d'un employeur de l'entreprise privée, il doit y avoir négociation entre les deux parties. C'est ce que nous recherchons. C'est ce que nous voulons, des conventions collectives; quant à moi, en tout cas, je vais faire tout le nécessaire pour que nous puissions nous conduire de telle sorte que nous puissions en arriver à des ententes entre les deux parties.

M. Burns: C'est ce que l'Opposition souhaite également.

M. Parent (Hull): M. le Président, je n'ai pas d'objection à ce que nous proposions...

Le Président (M. Lafrance): Sur ces derniers mots, la commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 12 h 6)

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