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Version finale

32e législature, 4e session
(23 mars 1983 au 20 juin 1984)

Le mercredi 4 avril 1984 - Vol. 27 N° 4

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude des crédits du ministère des Relations internationales


Journal des débats

 

(Dix heures dix minutes)

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission des institutions se réunit ce matin aux fins d'étudier les crédits budgétaires du ministère des Relations internationales pour l'année financière 1984-1985. Nous faisons l'expérience d'un nouveau règlement; je demanderais la clémence des membres de cette commission, car il ne sera peut-être pas facile de l'interpréter, vu que nous étions habitués à l'ancien. Ne me demandez pas ce qui est changé, on le verra au fur et à mesure.

Un premier changement est que le ministre est en face de nous; autrefois, il était à côté de moi. Autre changement: lorsque des fonctionnaires répondront aux questions, le temps qu'ils prendront sera enlevé au ministre, mais ceux-ci parleront en leur nom alors qu'autrefois ils parlaient au nom du ministre.

Je demanderais maintenant au secrétaire de nous faire savoir s'il y a des remplacements parmi les membres.

Le Secrétaire: Je vous annonce un seul remplacement: M. Gérard D. Levesque (Bonaventure) est remplacé par M. Lincoln (Nelligan).

Le Président (M. Gagnon): Est-ce qu'il y a des remarques préliminaires? M. le ministre.

Remarques préliminaires M. Bernard Landry

M. Landry: Oui, M. le Président. Je voudrais d'abord vous dire qu'en ce qui me concerne, vous voir de côté ou vous voir de face est toujours un plaisir renouvelé. Cependant, le fait que je sois assis ici, à la suite des nouvelles dispositions de notre règlement, me rend plus positif vis-à-vis du travail de cette commission. En d'autres termes, je souscris, non seulement par solidarité, aux nouvelles dispositions qui régissent nos travaux, mais je souscris aussi comme démocrate, comme individu et comme contribuable intéressé à ce que notre Assemblée nationale ait la vue la plus pénétrante possible des choses dans tous les secteurs de l'administration.

J'en profite pour complimenter le président de la commission qui, non seulement assiste en tant que président à sa première défense des crédits, mais aussi parce qu'il est l'inspirateur et celui qui a donné le souffle nécessaire à la mise en route de cette réforme majeure qui déjà, vous l'avez vu dans certaines publications spécialisées, dans certains journaux, fait l'envie des autres Parlements du Canada. Et si nous réussissions en pratique comme nous avons réussi dans les textes et les écrits, cela ferait l'envie peut-être de tous les Parlements avant longtemps. Je pense que le président, de cette manière, a passé à l'histoire de nos institutions démocratiques. Les fonctionnaires qui m'accompagnent seront sans doute ravis de savoir que c'est l'un de leurs anciens camarades qui, maintenant, préside cette commission et qu'il a fait non pas ses premières armes administratives, mais l'essentiel de sa carrière au ministère des Affaires intergouvernementales, une composante du nouveau ministère...

Je voudrais évidemment aussi complimenter le vice-président de la commission. Je crois que l'Opposition aurait pu faire un plus mauvais choix. Car déjà avant que nous ne connaissions cette formule, M. le député de Jean-Talon s'est intéressé à toutes les questions touchant les relations internationales, le commerce extérieur. Il était venu à la commission parlementaire au nom de sa formation politique pour la Loi sur le ministère du Commerce extérieur. L'an dernier il a été un intervenant majeur dans la défense des crédits du ministère des Affaires intergouvernementales. Je pense que l'Opposition a bien joué le jeu en nommant à cette importante commission des institutions le député de Jean-Talon.

Je voudrais aussi, comme c'est l'usage, M. le Président de séance, vous présenter ceux et celles qui m'accompagnent. Il y a d'abord, Mme Paule Leduc, sous-ministre des Relations internationales; M. Claude Rocquet, sous-ministre associé du même ministère; M. Claude H. Roy, mon directeur de cabinet; M. Gilbert L'Heureux, le directeur général de l'administration; M. Jacques Pouliot, le directeur du personnel. Non, M. Jacques Pouliot est le directeur du budget; M. Marcel Perreault, le directeur du personnel; M. Bertrand Juneau, analyste à la direction du budget.

Vous avez ouvert cette séance, M. le Président, en disant que vous demandiez

l'indulgence parce que c'était la première fois que vous présidiez une défense de crédits suivant le nouveau règlement. Permettez-moi de vous imiter dans cette voie et de vous demander l'indulgence, parce que moi c'est la première fois que je défends les crédits du ministère des Relations internationales, et il serait au dessus de l'intelligence normale que d'avoir, en si peu de semaines, assimilé totalement les rouages compliqués et les arcanes de la politique étrangère du Québec. Mais avec l'aide des fonctionnaires, j'essaierai de faire de mon mieux pour donner à cette commission une information totale, complète et pénétrante.

En guise de remarques préliminaires proprement dites, je voudrais évoquer brièvement quatre thèmes touchant aux relations internationales du Québec.

Pourquoi est-ce que le Québec a des relations internationales vastes, étendues, et organiques qui font l'objet de crédits? Par exemple, pourquoi la municipalité de Laval n'a pas de relations internationales, à toutes fins utiles? Pour une première raison, c'est à cause de la loi. Nous sommes, ici, dans le Parlement d'un État au sens le plus fort de la législation internationale et du droit des gens. Cet État possède certaines sphères de souveraineté, c'est-à-dire que ce Parlement est le décideur final pour plusieurs aspects qui touchent à la vie des citoyens et des citoyennes du Québec. En cela, en droit britannique comme en droit public en général, cet État est souverain pour plusieurs secteurs de son activité. S'il est souverain pour plusieurs secteurs de son activité interne, cela veut dire que nul ne peut lui dicter sa façon de projeter à l'extérieur ses souverainetés internes.

Il est vrai que dans la fédération canadienne la personnalité juridique internationale la plus complète a son siège au gouvernement du Canada. Nul ne le conteste, étant bien entendu que plusieurs veulent changer cet état de choses et qu'ils ne sont pas encore tout à fait en majorité; mais mon plus ardent désir, comme celui de ceux de mes collègues du parti ministériel, est qu'ils le soient un jour. Entre-temps, nul ne conteste que l'intervenant majeur sur la scène internationale c'est le gouvernement du Canada. Mais même s'il est un intervenant majeur, ses pouvoirs constitutionnels ne lui donnent pas le droit de modifier nos souverainetés internes ni d'agir sur nos souverainetés internes dans leur prolongement externe. C'est-à-dire que le gouvernement du Canada ne pourrait pas forcer ce Parlement à modifier sa législation sociale pour l'ajuster à une convention que le gouvernement du Canada aurait signée avec l'Organisation mondiale de la santé, par exemple. La souveraineté est ici.

Par voie de conséquence et toujours dans le domaine juridique, le Québec possède une des caractéristiques de la souveraineté internationale des États, c'est-à-dire le droit de signer des ententes, ce qu'on appelle le jus tractatuum, qui a été analysé dans de nombreux ouvrages connus par les membres de cette commission, je le présume.

Une deuxième remarque: les relations internationales du Québec sont fondées sur une très longue tradition. Dans un système juridique d'inspiration surtout britannique, la tradition, les précédents finissent par constituer un corpus que l'on appelle les conventions et qui, de ce point de vue, acquièrent une force presque égale à celle des textes.

Or, depuis très longtemps, le Québec a une politique étrangère. Dans un cas en particulier qui est un cas d'espèce, celui d'un autre grand État ami, la République française, le Québec a été représenté auprès de la République française avant le gouvernement du Canada. En effet, à la fin du siècle dernier, le gouvernement du Québec a eu un délégué à Paris qui s'appelait M. Fabre. Je ne connais pas la biographie de cette personne, sauf par les écrits humoristiques du capitaine Capp, mais il devait vraiment être très bon, parce qu'après trois mois de représentation du Québec, il fut engagé par le gouvernement du Canada et fut le premier représentant du Canada en France.

Donc, cette activité se fonde sur une tradition qui n'a pas commencé hier. Elle fut évidemment revitalisée à l'occasion de ce que l'on a appelé la révolution tranquille. On se souvient de l'ouverture au début des années soixante d'une délégation du Québec à Paris qui, encore parce que c'est un cas d'espèce, a été accueillie par la République française, non pas comme une ambassade avec tous les droits et prérogatives, mais je pourrais dire presque sans forcer la réalité.

Le troisième point dont je veux parler c'est la réalité des relations internationales du Québec. On pourrait dire dans une interprétation stricte et centralisatrice de la fédération canadienne, comme on en a entendu une exprimée à l'Université Laval en fin de semaine dernière, que toutes les provinces ont des relations internationales: l'Île-du-Prince-Édouard, pour prendre un exemple qui m'est cher, pourrait prétendre -puisque son statut juridique est le même que celui du Québec, d'après certains esprits juridiques qui, à mon avis, sont dans l'erreur - qu'il y a l'île-du-Prince-Édouard internationale, que l'île-du-Prince-Édouard signe avec tous les États de la terre et que l'Île-du-Prince-Édouard a une diplomatie, sauf que ce n'est pas la réalité. Sans aucun mépris pour cette île, le jour où les diplomates de l'île-du-Prince-Édouard débarqueraient à Londres ou à Paris ou à Hong Kong ou à Singapour, il se pourrait que

certains caricaturistes se servent de l'événement. Personne n'a tendance à faire cela quand la réalité internationale du Québec est exprimée à l'intérieur comme à l'extérieur.

Je fais une parenthèse à ce sujet pour dire à la commission, qui peut-être sera intéressée à cet événement, que déjà au mois de juin qui vient, les intervenants québécois, réunis dans un sommet, les intervenants classiques, les agents économiques, les agents sociaux, participeront à quelques jours de réflexion sur le Québec dans le monde. Ces jours de juin serviront à faire l'état de la situation et la préparation d'une deuxième phase de ce sommet qui aura lieu à l'automne. Au cours de l'été, les intervenants québécois, publics, privés, coopératifs, gouvernementaux mèneront des tables de concertation, des tables de consultation pour préparer la deuxième phase de l'événement qui aura pour mission d'analyser, d'élargir, de consolider, de rendre plus cohérente cette grande réalité qu'est le Québec international et qu'est le Québec dans le monde.

Loin de moi la pensée que les relations internationales du Québec ne sont que le fait des gouvernements ou du gouvernement. Cela serait même plutôt le contraire dans l'état actuel des choses et il n'est pas sûr que cela devrait être changé. En effet, de grandes agences privées du Québec et, en particulier, l'Église catholique du Québec et d'autres Églises du Québec, depuis très longtemps, avant même que les grands concepts d'aide au développement du tiers monde, avant même que les grandes organisations internationales, OMS, ONUDI, n'existent, déjà des milliers de Québécois et de Québécoises parcouraient toutes les mers du monde et allaient sur tous les continents pour répandre, du point de vue de l'Église, la parole évangélique mais aussi, et à un très haut degré, donner à ces populations des services sociaux, des services éducationnels. C'est devenu une image d'Épinal que de penser à la petite soeur blanche d'Afrique qui a quitté Pont-Viau pour aller dans des pays lointains jouer son rôle d'infirmière ou d'institutrice.

C'est donc une grande réalité et aussi -je termine avec ce quatrième thème - un impératif économique. À l'heure où les sociétés occidentales, presque sans exception - il y a des exceptions qui méritent d'être analysées - ont toutes les peines du monde à employer leur main-d'oeuvre active, en d'autres termes, à l'heure où les sociétés occidentales sont aux prises, pour des raisons de structure profonde, avec des problèmes de chômage de niveau élevé, il est devenu clair et net que le commerce international et sa fluidité, que la coopération économique internationale, dans un contexte de fluidité la plus grande possible, est devenue une des solutions, sinon la solution, à ce problème languissant des sociétés occidentales et de leur jeunesse en particulier qu'est le chômage, le sous-emploi et le non-emploi.

Maintenant, la population du Québec est sensibilisée à ces questions. Les gens d'affaires, comme tous les décideurs, les gens de l'éducation, les gens des services sociaux, sont sensibilisés à cette question que le gouvernement du Québec et son Parlement ont le devoir d'élargir et de consolider les relations internationales du Québec.

Je vous rapporte une anecdote sans donner de nom, et j'espère que l'Opposition n'en donnera pas. Un ancien ministre du gouvernement du Québec, d'un régime qui n'est pas le nôtre, avait eu l'idée il y a quelques années - il n'y a pas 25 ans - de faire un ministère du Commerce extérieur. Sa suggestion avait été vertement rejetée, froidement rejetée, parce qu'on disait: Cela n'a pas de bon sens, cela dépend d'Ottawa et la population ne sera jamais d'accord avec cela, etc. Quand le ministère du Commerce extérieur est né, vous l'avez remarqué, ce fut dans un concert d'éloges de la part de la communauté des affaires en particulier.

Je pousse mon exemple encore plus loin. Il y a quelques semaines, sous l'empire de la Loi sur l'exécutif, le premier ministre a créé un ministère des Relations internationales. Voilà qui est maintenant beaucoup plus explicite que l'ancienne appellation d'un ministère qui faisait quand même déjà cela: le ministère des Affaires intergouvernementales. De nouveau, concert d'éloges, aucune protestation ni d'un gouvernement qui aurait pu voir la chose avec un esprit chagrin, ni d'aucun segment de l'opinion publique québécoise.

M. Rivest: ...c'est pour cela que M. Morin...

M. Landry: Voulez-vous me citer des textes, M. le Vice-Président de la commission.

Le Président (M. Gagnon): Vous avez la parole, M. le ministre.

Une voix: Je m'excuse, M. le Président.

M. Landry: Parce que le vice-président peut verbalement m'interrompre. La longue amitié qui nous unit fait que je ne me formalise pas du fait, mais j'aimerais mieux, s'il est sérieux, qu'il dépose les textes comme j'ai l'intention d'en déposer pendant les six heures où nous serons ici.

M. Rivest: Vous avez déposé le ministre.

M. Landry: Je pense que dans le système parlementaire britannique, ce n'est pas à un membre du Conseil des ministres d'en promouvoir ou d'en démettre un autre.

M. le Président, c'étaient mes remarques préliminaires. J'espère qu'elles n'ont pas été trop longues et qu'elles ont été suffisamment stimulantes. Si je regarde les réactions du vice-président, le mot "stimulant" serait une litote, il a l'air plutôt excité; mais pour les autres qui réagissent normalement à mes propos j'espère que vous les avez trouvé stimulants sur le plan intellectuel. (10 h 30)

Le Président (M. Gagnon): Merci M. le ministre. M. le Président de la commission et député de Trois-Rivières.

M. Denis Vaugeois

M. Vaugeois: Merci, M. le Président. Jusqu'à la fin cela allait assez bien, mais quand vous avez parlé de qui démet les ministres mon collègue de droite et moi avons frémi.

C'est la faute au député de Jean-Talon.

M. Landry: Peut-être que l'un et l'autre, à cause de cela, vont être promis à un brillant avenir?

M. Vaugeois: Là, je suis sûr que cela m'a permis de passer à l'histoire et je pense que c'est la même chose pour le député de Lafontaine.

M. le ministre, vous avez eu effectivement des propos bien stimulants et je trouve que cela fait du bien d'entendre de tels propos au début de travaux. Je ne les reprendrai pas parce que j'ai de très brèves questions à vous poser, mais je vais quand même évoquer le premier point que vous avez développé en comparant la ville de Laval avec Ottawa.

Quand vous soulignez qu'Ottawa est un intervenant majeur sur le plan international, évidemment, il n'y a pas de risque à le dire, mais je reste toujours préoccupé par le fait que le gouvernement fédéral s'est arrogé, en matière internationale, des pouvoirs qu'aucun texte ne lui accordait. La constitution canadienne ou l'Acte de l'Amérique du Nord britannique n'ont jamais accordé à Ottawa, à l'origine, des pouvoirs que ce gouvernement, avec les années, s'est attribué. Évidemment, il ne s'est pas trouvé de provinces pour contester assez tôt, et le gouvernement de Londres a vu d'un oeil complice une très lente évolution de fait et non pas de droit. Il reste que pendant cette lente évolution, le gouvernement du Québec, qui était le seul gouvernement représentant nettement une communauté francophone en Amérique, a posé des gestes antérieurs au gouvernement fédéral sur le plan international. Je pense aux agents d'immigration, à des agents économiques, à des représentants à l'étranger. Nous avons ouvert des représentations à l'étranger avant le gouvernement fédéral. Ce dernier a récupéré, d'ailleurs, certains de ces postes ouverts à l'étranger.

Ceci étant dit, cela ne remet pas en question une réalité que vous avez soulignée, mais cela m'amène à dire que si on voulait remonter sur le plan de la tradition ou de l'histoire, il y a des faits qu'il importerait encore aujourd'hui de mettre davantage en lumière. D'ailleurs, nous avons tout récemment fêté le centième anniversaire de l'ouverture de notre première représentation à Paris. Je me souviens qu'à l'époque l'ambassadeur de Grande-Bretagne s'inquiétait de cette représentation, et il le faisait au nom du Canada.

Je passe par dessus d'autres propos que vous avez tenus, tout en soulignant qu'ils ont aussi dû être assez agréables à entendre pour l'Opposition puisque au fond vous vous êtes rattaché, pour une bonne partie de vos propos, à la doctrine libérale des années soixante en reprenant sans le dire les théories de Paul Gérin-Lajoie, qui à l'époque étaient novatrices et également stimulantes. Je ne vous fais pas grief de les avoir rappelées aujourd'hui. Je pense que c'est quelque chose qui nous est propre, qui nous est commun en tant que parlementaires québécois, qui avons choisi d'être actifs à Québec et non pas dans un autre gouvernement ou un autre Parlement. Là-dessus, il y a une base commune, c'est que tous les hommes politiques québécois veulent assumer un certain nombre de responsabilités à l'intérieur et leur prolongement à l'extérieur. Nous n'avons pas été les premiers à le défendre. C'est bon de le rappeler. Souvent on nous attaque sur ce terrain alors qu'on oublie que des gestes intéressants, positifs, ont été posés par des gouvernement antérieurs.

Maintenant, les modifications importantes qui ont touché le ministère que vous représentez ce matin provoquent une certaine nostalgie chez un ancien fonctionnaire, inutile de le taire. Ce ministère a été bâti lentement à travers maintes difficultés et après autant d'années on ne peut que se poser quelques questions. Je voudrais vous en poser une sur un ton un peu taquin. À partir du moment où l'on distingue affaires canadiennes et affaires internationales, des malins pourraient comprendre que notre gouvernement, après avoir considéré à la suite de plusieurs autres les relations avec Ottawa d'abord sous l'angle de relations intergouvernementales assimilables à des relations internationales puisque chapeautées par une même structure supérieure, en serait venu à considérer progressivement les affaires canadiennes comme des affaires intérieures. Donc, les positions constitutionnelles de ce gouvernement auraient évolué dans un sens assez étonnant, compte tenu de ses objectifs

constitutionnels. La question est mi-sérieuse mi-taquine.

Une deuxième question, beaucoup plus sérieuse pour moi, c'est la façon de travailler des bureaux à l'étranger. Je ne fais pas de nuance entre bureau, délégation, délégation générale. Je pense que le problème est un peu toujours le même. Si le poste est important le principal titulaire a à coordonner des fonctionnaires qui viennent de plusieurs ministères, ou encore, s'ils ne viennent pas de plusieurs ministères, ils ont à rendre compte dans des secteurs qui touchent plusieurs ministères. Il se pose donc un important problème de coordination. Je voudrais savoir comment à l'avenir vous entrevoyez ce travail de coordination de nos chefs de poste à l'étranger? Également si on s'en va dans un poste restreint dans un bureau restreint, le problème est à l'inverse. Nous avons peu de monde, un titulaire avec très peu de personnel de soutien, peu de collaborateurs mais on lui demande - me semblait-il à l'époque, et je voudrais savoir si c'est encore la même chose aujourd'hui -de faire plus que de représenter son secteur et de représenter également le gouvernement du Québec. Même si son premier mandat est économique, on lui demande de ne pas être étranger à un visiteur qui lui parlerait de cinéma, d'autant plus que tout finalement a une dimension économique. Je voudrais savoir ce que vous faites de vos fonctionnaires à l'étranger et des conseillers polyvalents quand ils occupent de petits postes, si vous leur donnez un mandat assez général et comment vous organisez et articulez vos relations avec les autres ministères.

Une dernière petite question pour l'instant. Je réagis à votre dernière remarque; j'endosse l'impératif économique, mais en même temps je voudrais être certain d'entendre le ministre responsable des Relations internationales et non pas le ministre du Commerce extérieur. Vous avez là deux ministères différents et je pense qu'il est important de marquer la différence. Je n'accepterai jamais facilement qu'on ramène les relations internationales à une dimension économique. Il me semble que l'évolution du monde - vous y avez fait allusion - nous a amené d'un type de relations internationales qui privilégiaient la guerre et le commerce - les relations internationales ont longtemps été la guerre et le commerce - à des relations beaucoup plus complètes où la santé, le travail, la culture trouvent leur place. C'est fondé non seulement sur une évolution de civilisation et de société partout dans le monde mais, également, sur le fait qu'on ne peut développer un secteur sans toucher les autres secteurs. On ne peut pas développer le secteur économique sans développer les sciences, les connaissances.

Le développement économique est fondé sur l'évolution des sciences et des connaissances. Tout ce que je pourrais dire est bien connu; il me semble que tous les pays tiennent à développer des échanges dans tous les domaines, la plupart du temps en souhaitant que le développement économique en soit influencé. On est conscient que si la cible est l'économie, on passe à côté. Il faut, pour développer l'économie, investir dans ce qui l'entoure. Cela passe également par le niveau politique. Tous les États prennent plus de place que jamais auparavant et il n'est pas possible de régler les relations internationales sans avoir un niveau politique d'intervention significatif d'où, à mon avis, l'importance de votre ministère, d'où, à mon avis, l'importance d'affirmer par tous les moyens les responsabilités d'un État comme l'État québécois sur le plan intérieur comme sur le plan extérieur.

J'aimerais vous voir réagir à ces propos. Je pense bien qu'on sera d'accord, mais cela me rassurerait de vous l'entendre dire après vous avoir entendu évoquer des impératifs économiques.

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre, avant de vous laisser la parole, je voudrais dire au député de Trois-Rivières et président de cette commission que si le ministre choisit de répondre immédiatement à vos questions, ce sera pris sur votre temps.

M. Bernard Landry

M. Landry: Est-ce que c'est ce que le président a choisi? Il dit qu'il est d'accord. M. le Président, vous avez évoqué cinq questions qui sont toutes d'une importance considérable. À vos propos préliminaires on voit que vous avez été élevé dans le sérail, au meilleur sens du terme, et que toutes ces questions n'ont plus de secret pour vous.

La première question, l'action du gouvernement du Canada. Je partage votre point de vue selon lequel, de facto et pas à pas, le gouvernement du Canada a essayé d'établir une évolution du système fédéral en parallèle avec ce qui s'est passé aux États-Unis d'Amérique et centraliser, parfois subrepticement, sans le dire, parfois en le disant comme l'a fait le premier ministre du Canada samedi dernier, d'une façon claire, toute la vie collective et étatique, au point où vraiment les États que sont les provinces, dans la bouche de certains porte-parole fédéraux et de certains technocrates fédéraux, sont des espèces de nuisances, des séquelles historiques sans lesquelles tout irait beaucoup mieux.

C'est, selon moi, politiquement une mauvaise démarche. Mais n'entrons pas dans la question politique. C'est juridiquement une erreur. Ce n'est pas ce que les textes, ce que les conventions constitutionnelles

donnaient comme responsabilités au gouvernement du Canada; ce n'étaient ni l'esprit, ni le texte des grandes lois constitutionnelles et des grandes conventions qui nous régissent. Ils l'ont fait parfois d'une façon formelle et parfois - je ne veux pas parler de guerre de drapeaux - de façon larvée, souvent comme une machine technocratique qui fait du zèle et qui est même plus catholique que le pape. Quand le pape s'appelle Trudeau, être plus catholique que lui cela veut dire être pas mal catholique en termes de centralisation.

Je vous donne un exemple concret qui va aussi, j'imagine, frapper les porte-parole de l'Opposition parce que cela s'applique sous n'importe quel régime québécois. Lorsqu'il y a une conférence fédérale-provinciale à Ottawa - j'ai suivi ces événements depuis les années soixante, je suis allé à ces tables, aussi bien avec M. Jean Lesage qu'avec M. Daniel Johnson - il fût toujours dit, soit expressément, soit implicitement, que ces tables étaient une réunion où il y avait un primus inter pares. Vous me suivez? Le primus, c'est le premier ministre du Canada avec les pares qui sont les premiers ministres des provinces.

Or, transposée sur le plan international, la technocratie fédérale est arrivée à une doctrine absurde qui veut qu'un premier ministre de province, à l'extérieur du Canada, soit sur le plan international l'égal d'un ministre fédéral. Alors, comment se fait-il que lorsque le premier ministre du Québec - disons quand c'était M. Robert Bourassa - s'assoit à Ottawa à une conférence fédérale-provinciale, il est "par" de "pares" avec le primus qui est Trudeau et dès qu'il est à l'étranger, il devient le "par" d'autres "pares" qui s'appellent André Ouellet, etc. C'est d'une absurdité même sur le plan logique.

Alors, il y a eu un glissement, M. le Président de la commission, vous avez parfaitement raison; il y a eu un gauchissement, qui a souvent été fait par des gens de droite d'ailleurs, des grands textes et de l'esprit de la constitution du Canada en matière internationale.

Deuxième question: Vous avez évoqué une nostalgie qui est facile à comprendre pour moi, vous avez parlé de nostalgie d'ancien fonctionnaire. Mes nostalgies, ce serait quand je regarde ce qu'est devenu le ministère des Richesses naturelles. Je suis un ancien fonctionnaire du ministère des Richesses naturelles: c'était mon port d'attache, nos locaux étaient au boulevard de l'Entente. Il y avait vraiment un esprit de corps dans les services des mines en particulier, de l'hydrologie. Qu'est-il advenu de tout cela? Il est advenu le grand ministère de l'Énergie et des Ressources. On n'arrête pas le progrès, comme on dit, on n'arrête pas l'évolution et il n'y a pas de rupture doctrinale, je pense, entre vous, M. le Président, entre mon prédécesseur Jacques-Yvan Morin et moi-même sur cette question: les relations internationales du Québec ont évolué et elles doivent, sur le plan organique, sur le plan administratif, refléter les évolutions récentes.

La troisième question que vous avez posée, à la blague, pourrait donner lieu à des interprétations d'ailleurs tout à fait opposées à celles que vous avez évoquées du fait qu'il y ait maintenant un ministère des Affaires intergouvernementales canadiennes. D'abord, le Québec reste représenté par des délégations dans le territoire canadien. On pourrait dire tout simplement que, pour des raisons historiques, des raisons d'échanges économiques constants on a spécialisé une partie de notre action intergouvernementale et extraterritoriale à cause des spécificités du territoire canadien. C'est un peu comme quand le gouvernement américain a décidé, il y a quelques mois, de nommer un sous-secrétaire d'État aux Affaires canadiennes, M. Midas; cela ne veut pas dire que Washington considère le Canada comme un territoire intérieur même si dans la comptabilité de certaines firmes, on parle du "Internal market" en incluant Toronto et Montréal. Cela veut dire qu'on spécialise un segment de l'administration des questions extraterritoriales en raison de particularismes historiques, et il y en a vraiment un avec le Canada. Ce serait s'aveugler que de le nier.

Quatrième question: La coordination des bureaux à l'étranger. Vous avez parlé de l'avenir de la coordination. L'avenir ne sera pas tellement différent du passé, je vais vous dire pourquoi. C'est parce que le passé était relativement bon. Les délégués, les délégués généraux, les chefs de poste en général ont toujours été les coordonnateurs de l'action du Québec dans le pays d'accueil, même si des fonctionnaires spécialisés comme ceux des ministères de l'Immigration, du Commerce extérieur peuvent répondre à des "desks" -comme on dit - différents. Vous savez que même la Sûreté du Québec est représentée à la Délégation générale du Québec à Paris. Il n'est pas question que nous développions aux Relations internationales une section des affaires policières, mais le délégué reste le grand coordonnateur dans chaque poste. Des fois c'est simple, il n'a qu'a se coordonner lui-même, comme notre vaillant représentant en Haïti qui s'occupe surtout d'immigration; il dirige son personnel de soutien et c'est tout, il est seul.

En général, même dans les grandes délégations comme celle de Paris, le glissement et l'adaptation s'étaient faits spontanément. J'ai souvent donné l'exemple de M. Yves Michaud, brillant délégué général du Québec à Paris, ancien membre des deux formations politiques représentées à cette table, lequel, n'était pas au départ un

économique. Personne n'a pensé que l'ancien directeur de La Patrie était un "économique" par définition sauf qu'il l'est devenu; le besoin crée l'organe. Dans les grands dossiers économiques, notre délégué général est intervenu brillamment, comme il l'a fait dans les autres dossiers.

Maintenant la dernière question que vous avez posée, et la dernière réponse que je donne: cette espèce de dichotomie de ce qui est économique et de ce qui ne l'est pas, et d'une certaine tendance panéconomique -on peut toujours dire que tout est économique. Si le Québec vend un bien d'équipement à un pays du tiers-monde il y a un aspect économique classique, c'est une vente. Mais s'il donne le bien en question, cela peut être économique pareil parce que le bien a été fabriqué ici; il y a donc une dimension économique; et il peut aussi servir dans le pays d'accueil à des fins purement économiques même si c'est au titre de l'aide. Au cours de la semaine, notre Assemblée nationale et moi-même avons eu l'honneur de rencontrer deux ministres de pays en voie de développement, la République centrafricaine et le Togo. Ces deux collègues africains m'ont longuement expliqué que l'objectif principal de leurs pays c'était l'autosuffisance alimentaire, c'était de nourrir leur population sans avoir à importer ou, s'ils importent, au moins en ayant dégagé des devises d'exportation pour payer leur facture alimentaire. C'est de l'économie, c'est évident. Mais cela n'a pas le même sens que si nous faisons une exportation d'agro-alimentaire à la ville de New York, grand pays occidental développé où le problème est plutôt à inverse: les gens ont plutôt trop de calories que pas assez.

Alors, il y a une espèce de panéconomisme dans les relations. Cependant, je souscris tout à fait à ce qu'a exprimé le député de Trois-Rivières, qu'il ne faut pas se laisser emporter, il ne faut pas dériver vers un mercantilisme grossier, l'aide reste l'aide. Le développement induit à partir de dons de la collectivité québécoise en experts, en argent, etc. ne pourra jamais être qualifié comme un phénomène microéconomique ordinaire. Le fait que j'occupe le poste de chef de deux ministères dont l'un en apparence est beaucoup plus économique que l'autre ne me permettra jamais de dériver vers une attitude mercantile, qui ne serait pas le voeu du Parlement et qui ne serait pas le voeu de la population du Québec.

Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le ministre.

Est-ce que vous voulez compléter? Non. M. le député de Jean-Talon et vice-président de cette commission. (10 h 45)

M. Jean-Claude Rivest

M. Rivest: M. le Président, très brièvement étant donné que mon collègue, le député de Nelligan, étudiera de plus près les crédits, je voudrais simplement faire une remarque sur les propos du ministre. C'est sûr que dans le domaine des relations internationales, étant donné les orientations de fond, il ne faut pas perdre la perspective des différences et faire croire à un unanimisme qui n'existerait pas entre les deux formations politiques. Notre perspective de la promotion des relations internationales du Québec se situe dans le cadre du fédéralisme canadien. Je parle pour les membres de notre formation politique. L'impression générale, non seulement la vôtre, puisque vous arrivez dans le domaine, comme celle de vos prédécesseurs depuis 1976 en particulier, a toujours été de faire comme si le fédéralisme canadien n'existait pas et n'était pas une réalité. Si bien que, lorsque vous exprimez ou vous référez à la théorie développée par M. Paul Gérin-Lajoie, je pense, d'une façon beaucoup plus systématique sur l'extension des responsabilités attribuées aux États membres de la fédération sur le plan international, vous référez par exemple nommément à la question des traités. Or, la théorie du droit constitutionnel canadien est fort bien établie. Le gouvernement canadien, quand il s'agit de traités, en particulier multilatéraux, a le pouvoir constitutionnel de négocier les traités, de les signer, sauf que la théorie c'est qu'il ne peut pas dans le cadre du fédéralisme canadien - ce qu'on appelle "l'implementation" - les mettre en oeuvre sans l'accord... Cela est l'ordre constitutionnel canadien.

Pour prendre juste cet exemple, nulle part dans le passé, on n'a senti des initiatives qui sont venues de la part du gouvernement du Québec dans le domaine des relations internationales pour dire: On a tel ou tel intérêt, en termes de développement, comme société québécoise définie, à ce que le gouvernement canadien aille dans telle ou telle direction. Nulle part on n'a eu une déclaration de cela. Lorsque vous parlez des relations multilatérales, on en a une qui est très bien organisée. Pour vous montrer qu'il est possible pour le gouvernement du Québec de prendre une initiative, ce que votre gouvernement n'a jamais fait, n'a jamais en tout cas réussi à faire, on en a réussi une. Vous parliez de l'époque de 1960, on parle de l'époque de 1970 au niveau de l'Agence de coopération technique et culturelle. On a donné un délai considérable aux activités internationales du Québec, parce que l'on a négocié et conclu avec le gouvernement canadien un statut de gouvernement participant au sein de l'Agence de coopération technique et culturelle, lequel

donne au Québec... parce que le Québec avait des objectifs propres préalablement établis qui ont été présentés en tant que tels au niveau du gouvernement canadien, où l'action du gouvernement canadien a été concertée en quelque sorte. Voilà une initiative de cohérence qui a été prise et je pourrais peut-être donner la plus spectaculaire, celle des relations directes et privilégiées avec la France, une autre initiative qui a été prise et qui existe. Mais il ne faut pas oublier de dire que cet accord, en 1964, a été conclu à l'intérieur d'un accord-cadre signé par le premier ministre de l'époque M. Lesage et le premier ministre du Canada qui était M. Lester-B. Pearson.

Alors, je veux vous indiquer que, comme ministre responsable des Relations internationales, étant donné que vous arrivez dans le secteur et que vos prédécesseurs ne l'ont pas fait, vous auriez intérêt à établir très clairement... Peut-être que dans le domaine d'ailleurs, et on y reviendra lors de l'étude des autres crédits... Je sais que vous avez fait des déclarations publiques dans le domaine du commerce extérieur qui me sont apparues comme manifestant une volonté de votre part d'articuler les initiatives québécoises avec celles du gouvernement canadien. Je ne sais pas s'il existe une entente écrite, ou si c'est simplement au niveau des intentions, ou s'il y a un protocole ou une pratique dont vous avez convenu avec le gouvernement canadien, mais ce que je voudrais vous entendre dire comme ministre responsable des Relations internationales au cours de l'étude des crédits, et mon collègue dira davantage, c'est que prenant acte jusqu'à nouvel ordre, comme vous l'avez indiqué, que le Québec s'inscrit dans le fédéralisme canadien, j'aimerais bien que quelque part et à quelque moment vienne du ministère des Relations internationales une volonté clairement exprimée, des objectifs non seulement économiques mais, comme le disait le président de la commission, des objectifs dans les autres domaines du Québec, dans le domaine international et que, ayant cela, vous en arriviez avec vos interlocuteurs au niveau du gouvernement canadien à demander, à négocier et à conclure si possible les espaces nécessaires dont le Québec a besoin sur le plan international. Cela s'est fait à l'intérieur d'un régime fédéral. Peut-être que l'attitude du premier ministre du Canada actuel, M. Trudeau, ne s'y prêtait pas, j'en conviens volontiers; mais il est bien possible que certaines évolutions puissent se produire à ce niveau et qu'il y ait d'autres avenues.

Tant et aussi longtemps que le gouvernement du Québec se contentera simplement d'une espèce d'attitude qui fait en sorte qu'on essaie par toutes sortes de techniques et d'opérations ad hoc de contrer, ou de faire semblant, ou de faire comme si le gouvernement canadien n'existait pas, parce qu'on a en tête une certaine idée qui n'est pas encore passée dans l'opinion publique, eh bien, on avance à tâtons. Il ne se dégage aucune espèce d'impression de cohérence, de volonté claire sur ce que le Québec exige sur le plan international et surtout, et c'est peut-être là la faille la plus grande, de signification profonde. Pour l'opinion publique québécoise, il y a un problème de crédibilité toujours qui s'est posé depuis un certain nombre d'années sur les actions internationales du Québec, parce qu'on n'a jamais réussi au niveau du ministère des Affaires intergouvernementales à définir, en termes de développement et de conséquences concrètes pour le Québec, la dimension internationale. Comment se fait-il qu'on ne sait pas - et je donne encore l'exemple du commerce extérieur parce que je trouve que vous avez, M. le ministre, personnellement ouvert une voie intéressante - si vous vous félicitez d'un accueil que le milieu des entreprises a donné aux initiatives que vous avez prises dans le domaine des relations extérieures, parce que les entreprises ont senti dans l'initiative que votre gouvernement prenait des possibilités de développement? C'est peut-être le seul domaine.

Je voudrais que, comme ministre des Relations internationales, l'on sente aussi que dans le domaine culturel, dans le domaine de l'éducation, dans le domaine de la santé, dans tout autre domaine, vous faites en sorte que le gouvernement du Québec définisse ses priorités, qu'il les inscrive et qu'il les communique d'une façon claire, nette et crédible au gouvernement canadien. Dès lors qu'arriveront des événements comme le sommet de la francophonie, par exemple, au lieu de sombrer dans une aventure uniquement politique, qui est une espèce de chassé-croisé politique où les velléités du Parti québécois sont contrées par les velléités du gouvernement fédéral, où personne ne réussit à se rendre au premier but parce que la politique s'empare de cela... Derrière des initiatives comme celles-là il pourrait y avoir, en termes de société québécoise francophone, des avenues extrêmement prometteuses, si jamais la politique quittait un peu ce domaine pour que les ministres, autant à Ottawa qu'à Québec, se rabattent davantage sur ce qu'il y aurait comme retombées significatives au niveau du développement du Québec.

Ce sont les remarques que je voulais vous faire. Mon collègue le député de Nelligan va suivre de plus près chacun des crédits. Mon point est que dans ce domaine comme dans les autres domaines des relations fédérales-provinciales, à cause de l'option politique que vous avez, il n'y a pas eu, au niveau des relations internationales,

une initiative vraiment explicite, concrète, une volonté de négocier à l'intérieur du régime fédéral, si bien que les attitudes du gouvernement du Québec ont malheureusement été uniquement des attitudes défensives, des attitudes de tactique, de stratégie qui, à mon sens, non seulement privaient le Québec d'occasions de se servir de cette dimension internationale pour appuyer ses iniatives internes de développement, mais qui ont été aussi, dans l'opinion publique et d'une façon très large, la raison fondamentale du manque de crédibilité qu'a toujours eu l'action internationale malheureusement - je dis malheureusement parce que c'est une conviction profonde chez moi - qu'a toujours eu l'action internationale du Québec à l'étranger dans l'opinion publique.

Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le député de Jean-Talon. Nous allons continuer avec le député de Nelligan et par la suite vous pourrez... Vous aimez mieux répondre tout de suite? Cela enlèverait...

M. Landry: Moi, je n'ai pas de préférence, M. le Président. Si le vice-président veut que je réponde tout de suite, je vais le faire.

M. Rivest: Non, le député de Nelligan va compléter ces remarques préliminaires. Vous répondrez après.

Le Président (M. Gagnon): Le député de Nelligan va compléter les remarques et vous répondrez par la suite.

M. Landry: Très bien.

M. Clifford Lincoln

M. Lincoln: M. le Président, je ne veux pas être très long, mais je voudrais m'associer aux remarques du ministre et féliciter chaleureusement le Président de la commission, le parrain de la réforme parlementaire. Je pense que nous sommes tous très heureux de voir qu'il a pris une part si active à l'instauration du système des commissions. Je suis sûr que ce sera un grand pas en avant pour tous. Je voudrais féliciter très chaleureusement le président et le vice-président, le député de Jean-Talon.

Toutefois, j'ai malheureusement une remarque un peu négative à faire. J'aurais espéré que ce renouveau parlementaire du règlement eut été complet dans sa première année. Je réalise qu'il y a toujours des problèmes de rodage, mais je ne peux que m'associer aux paroles prononcées hier à l'Assemblée nationale par mon collègue de Westmount au sujet des livres de crédits. Il me semble que les crédits budgétaires sont la partie primordiale de notre travail parlementaire. C'est en fait notre façon de venir questionner le gouvernement une fois par année. Nous avons quelques heures mises à notre disposition pour vraiment vérifier ce qui se passe à l'intérieur des budgets, faire un tour d'horizon. Il semble que c'est un travail crucial.

Cette année-ci encore, comme le soulignait hier le député de Westmount, les livres des crédits sont arrivés la veille même de l'étude des crédits. Dans le cas spécifique qui nous occupe aujourd'hui, nous avons eu ce livre de crédits vendredi après-midi. Donc, si l'on fait abstraction de la fin de semaine, nous avons eu deux jours pour travailler sur un livre de crédits qui comporte des dépenses de l'ordre de 50 000 000 $ pour les contribuables du Québec.

Ce qui m'a le plus frappé dans toute cette affaire, ce qui rend la chose encore plus malheureuse, c'est que, à la première page du livre de crédits, avant qu'on continue plus loin, il y a une note qui se lit comme suit et je cite: "Au moment du dernier remaniement ministériel qui, comme on le sait, s'est fait avant l'ouverture de la présente séance de l'Assemblée nationale, donc au début de mars, le livre des crédits 1984-1985 était imprimé." Donc, il était déjà prêt à ce moment. On continue en disant: "Comme les crédits apparaissaient toujours sous le vocable Affaires intergouvernementales, nous présentons ce cahier explicatif sous une forme semblable à celle des années passées." Donc, il n'y a pas eu de changement. "Nous tenons à signaler que le programme 1: Affaires canadiennes, correspond aux Affaires intergouvernementales canadiennes et les programmes 2, 3 et 4 au ministère des Relations internationales." (11 heures)

Donc, en fait, le livre des crédits était prêt au début de mars, quelque part à ce temps. Le livre des crédits était déjà prêt. Tout ce qu'il y a eu, ce sont des changements de titres, de sections pour les affaires canadiennes, quelques titres. Mais, en fait, le gros du travail, tous les chiffres, toutes les réponses et toutes les informations étaient déjà là. Je ne sais pas pourquoi ce livre ne nous a pas été envoyé à l'ouverture de la saison parlementaire pour qu'on puisse au moins avoir une ou deux semaines pour l'étudier. Je trouve cela très regrettable. Je voudrais signaler que l'année prochaine nous pourrions avoir deux semaines pour l'étude de ces crédits, pour l'étude de l'utilisation de l'argent des contribuables du Québec.

Je pense qu'il est de mise de féliciter le ministre du Commerce extérieur pour sa nouvelle nomination internationale comme ministre des Relations du Québec. J'espère qu'il se servira, comme mon collègue de

Jean-Talon l'a souligné, du même pragmatisme dont il s'est félicité dans le travail de son ministère du Commerce extérieur. En fait, c'est peut-être la chose qui a fait que, comme l'a souligné mon collègue, le milieu des affaires a accueilli positivement les efforts du ministre du Commerce extérieur, car justement il y a eu un pragmatisme qui s'est fait. Le ministre a bien fait attention - à part un ou deux incidents de parcours que nous n'allons pas mentionner - en général et en grande partie il a travaillé au sein de la machine qu'il a acceptée. Nous sommes dans la fédération canadienne, et il faudra travailler pour rendre ce ministère efficace au sein de l'appareil actuel, puisqu'il est là. C'est de ce pragmatisme qu'il s'est félicité à plusieurs reprises. Je ne sais pas dans combien d'articles j'ai lu, combien de fois à la radio et à la télévision j'ai entendu le ministre dire qu'il était pragmatique. Nous sommes au sein de la fédération canadienne, il faut travailler au sein de ce système; ce ministère en sera un qui va s'adapter aux circonstances.

C'est peut-être cela, comme l'a souligné si judicieusement mon collègue, qui fait problème de l'autre côté, parce qu'on n'a jamais peut-être été aussi pragmatique. On a été très flou, très caché, très secret dans nos relations internationales. C'est peut-être à cause de ce contraste que le milieu des affaires a accueilli avec tellement de pragmatisme le ministère du Commerce extérieur, parce qu'il pense que c'est une réalité qui cadre avec l'appareil actuel fédéral, économique et autre, et que dans l'autre ministère on réussit tellement mal peut-être à définir où on s'en va. Nos objectifs, du moins, ne sont certainement pas très officiels; ils semblent être très officieux.

Je voudrais revenir à novembre 1982, l'époque où mon collègue de Jean-Talon et moi avons mené le débat sur la formation du ministère du Commerce extérieur. À cette époque le ministre se souviendra que nous, comme formation politique libérale, nous avons malheureusement voté contre l'adoption du projet de loi. Nos réserves à ce sujet sont très clairement exprimées dans les débats. Nous sommes 100% pour l'installation d'un appareil pour le commerce extérieur. Personne ne peut s'opposer au progrès économique du Québec, c'est certain. En même temps, nous avions souligné qu'avant de commencer un nouveau ministère, il fallait coordonner l'action des ministères actuels qui s'engagent dans tout l'appareil -comme l'a souligné le député de Trois-Rivières - des relations internationales globales du Québec. À ce moment-là, nous voyions toute sorte de conflits potentiels, parce qu'il n'y avait pas une coordination de base qui s'était faite au départ selon les lois. Il y avait une loi des affaires intergouvernementales qui chapeautait celle du nouveau ministère du Commerce extérieur. Il y avait des conflits immenses qui allaient se présenter au fil des années, nous l'avons souligné. Nous avons présenté je ne sais combien d'amendements pour essayer de faire une coordination plus logique au sein de ces ministères pour que ces appareils ministériels séparés se rencontrent dans un objectif commun pour essayer d'élaborer une politique globale du commerce extérieur et des relations internationales.

On nous a dit: Écoutez, libéraux, vous êtes toujours à trouver toutes sortes de choses, des loups-garous partout. Il n'y a aucun problème. On va faire du rodage. Tout cela va très bien aller. On sait ce qui s'est produit. Tout au long des mois il y a eu toutes sortes d'articles relatant des querelles interministérielles entre le ministre des Affaires intergouvernementales, qui lui entre dans l'économie pour essayer de protéger ses flancs, et le ministre du Commerce extérieur. C'étaient presque des conflits de personnalité qui avaient l'air d'être continuels, jusqu'au point où le premier ministre a lui-même admis officiellement qu'il avait eu besoin de faire l'arbitrage des conflits entre les deux ministères ou les deux ministres. Ces remous ont continué jusqu'à la fin, jusqu'au départ du ministre des Affaires intergouvernementales.

Cela m'a fait sourire quand le ministre a dit tout à l'heure qu'il y avait eu un concert d'éloges quand on a mis sur pied le ministère des Relations internationales. Et lorsque mon collègue a interrompu pour demander qu'on lui parle de Jacques-Yvan Morin, je n'ai pas pu m'empêcher de regarder la lettre de démission de M. Jacques-Yvan Morin qui dit: "J'entends également quitter mon siège de député, ne voulant en aucune façon me porter caution des décisions retenues pour résoudre les problèmes." C'est-à-dire que M. Jacques-Yvan Morin, qui était le ministre des Affaires intergouvernementales, ne pense pas que les solutions retenues pour résoudre les problèmes de coordination des deux ministères étaient des solutions très efficaces. On n'a pas pu s'empêcher de sourire quand le ministre a rendu hommage au président, au vice-président et à beaucoup de personnes. Peut-être est-ce symptomatique, mais il a oublié de rendre hommage à son prédécesseur, M. Jacques-Yvan Morin, qui a rendu de nombreux services au Québec, quoique nous ne partagions pas ses vues sur la question.

Une voix: L'autre avant aussi.

M. Lincoln: Justement. Toute notre action depuis le mois de novembre 1982 a été de dire qu'il fallait de la cohérence au

sein de ces ministères. Il fallait avoir des objectifs clairs; il fallait avoir des structures qui puissent coordonner le travail. Qu'a-t-on fait? Il faut se demander si nous en sommes arrivés à une conclusion, à une décision qui permettra cette coordination beaucoup plus logique. On pourrait dire que, maintenant qu'il n'y a qu'un seul ministre, la coordination se fera mais on peut se poser la question si ce n'est pas un pansement pour une très grosse blessure, un pansement pour une maladie endémique, pour une maladie très profonde.

Qu'a-t-on fait? Il y avait deux personnes; il y avait un conflit de personnalité entre deux ministres qui ne voyaient pas les choses de la même façon. Comment a-t-on résolu le problème? Le problème a été résolu par le départ d'une des deux personnes; une des deux personnes a gagné la bataille. C'est bien cela. Est-ce que les structures, est-ce que le fondement même de la question, est-ce que la base qui a causé le conflit de personnalité a changé? Je sais qu'il est trop tôt pour poser la question au ministre parce qu'on vient juste de faire des changements dans ces ministères. C'est donc trop tôt pour poser la question, mais je lisais l'autre jour, avec beaucoup de soin, les remarques du ministre dans une interview qu'il accordait à la Presse Plus dans lequel il disait que ce qui était bon, avec cette nouvelle structure, c'était d'avoir deux ministères avec deux vocations parallèles mais très différentes. L'un est très économique, c'est-à-dire structuré sur l'économie, très pragmatique et l'autre est plus flou, plus global; il englobe les politiques sociopolitiques du Québec, culturelles. Il faut donc qu'il y ait deux ministères parallèles, mais la coordination se fera par le ministre et son cabinet.

Nous nous posons une question. Est-ce que le problème fondamental des relations qui existaient entre les deux ministères avant était un problème d'objectifs conflictuels? Est-ce qu'il s'agissait de problèmes de structures qui ne s'harmonisaient pas? Est-ce que c'était simplement le problème de la personnalité de ministres qui ne s'entendaient pas? Il faut bien, si on est cartésien, en arriver à une logique des choses. Puisqu'une personne a quitté le terrain, a quitté la scène et qu'une autre l'a remplacée pour chapeauter les deux ministères, cela a été un problème de personnalité puisque les structures ne changent pas. Ce n'était pas un conflit de structures; ce n'était pas un conflit d'objectifs entre ces deux ministères. Pourtant, lorsqu'on lisait les écrits de nombreux fonctionnaires, les documents qui ont été fournis à la presse, on pouvait voir que cela allait beaucoup plus loin, que le conflit des deux ministres était en fait un reflet, une extension des problèmes structurels et des problèmes d'objectifs qui se posaient au sein de ces deux ministères.

Maintenant, je pose la question à savoir comment cette coordination va se faire par le ministre et son cabinet? Donc, cela devient une coordination politique, cela ne devient pas une coordination objective des objectifs, cela devient une coordination politique au sein d'un cabinet et du ministre. Est-ce qu'on dit que toute la question des conflits qui existaient avant va maintenant être résolue par une gestion politique du ministre et de son cabinet. J'espère que ce ministre va le demeurer jusqu'à la prochaine élection. Ce n'est pas certain, car ce ne sont pas toujours les mêmes ministres. On l'a vu: le personnel des cabinets des ministres change. Qu'est-ce qui arriverait si le ministre changeait demain matin, lui qui se dit très pragmatique, lui qui va organiser son affaire d'une façon très pragmatique. Qu'est-ce qui arriverait si c'était un ministre qui avait des idées très différentes concernant les orientations du Québec à l'étranger qui avait à décider, seul ou avec son cabinet politique, lui qui aurait à ce moment le soin de diriger tout l'appareil et de coordonner cet appareil immense de deux ministères cruciaux pour le Québec?

Par exemple, on peut parler de menaces de démission. Après la démission de M. Jacques-Yvan Morin, cela a été officiel que plusieurs fonctionnaires ont dit: Nous aussi on démissionne parce qu'on n'est pas d'accord avec les politiques qui ont été mises en place pour régler le problème. Alors, il faut se poser la question, à savoir si cela va beaucoup plus loin que le conflit de personnalités des ministres eux-mêmes. Si c'était simplement un conflit de personnalités des ministres à ce moment, il faudrait se poser la question à savoir si toute cette bagarre s'est faite parce qu'il y avait un conflit de personnalités seulement entre deux personnes. On refuse de croire que c'est rien que cela. Car si c'était cela, cela aurait été une chose très superficielle. Je ne peux pas croire que M. Jacques-Yvan Morin, qui donnait sa démission en disant: Je ne veux en aucune façon me porter caution des décisions retenues pour résoudre les problèmes, il parlait seulement à l'échelle des personnalités. Je suis sûr qu'il parlait beaucoup plus profondément que cela. Je ne vois rien dans ce cahier des crédits qui donne même la moindre esquisse qu'on va faire ce changement de structure, cette coordination de base que nous avons essayé de souligner depuis le début et que mon collègue a souligné avant en disant: II faut d'abord se donner des objectifs de base, il faut savoir où on s'en va... Quand on était là, et qu'on posait des gestes pour la personnalité extérieure du Québec, avec laquelle nous avons été d'accord, le ministère des Affaires intergouvernementales étant né sous l'égide libérale, cela avait été de dire:

Nous sommes au sein du fédéralisme canadien. Et c'est là qu'on se pose des questions, et qu'on demande au ministre de nous dire clairement si c'est cela qu'il entend faire: s'il entend diriger les relations internationales avec le même pragmatisme dont il s'est servi comme ministre du Commerce extérieur.

On pose une deuxième question. Ce qui me frappe et dont je veux vous faire part: il y a une seconde confusion. On reçoit ce livre vendredi après-midi, on a deux jours pour l'étudier. Je commence à lire. À la première page je vois Affaires canadiennes, et ensuite on voit dessus deux ministères: il y a celui des Affaires canadiennes et celui des Relations internationales, comme si ce livre avait trait aux deux ministères. En fait, cela semble être le cas. Je dis à mon collègue de Jean-Talon, de se préparer pour les premières heures. On s'organise pour partager un peu le temps. Mais par la suite on apprend que les Affaires canadiennes ne passeront pas en même temps. L'étude des crédits ne se fera pas en même temps, cela se fera au sein de la Justice.

M. Vaugeois: ...après ou avant. (11 h 15)

M. Lincoln: Non, je parle du point de vue structurel. On n'examine pas maintenant les crédits du ministère des Affaires intergouvernementales sous deux sous-ministères. On semble examiner les Relations internationales et les Affaires canadiennes comme des ministères séparés, ce dernier sous l'égide du ministre de la Justice. Également, on se demande comment la coordonnation va se faire au niveau des Affaires canadiennes, parce que les Affaires canadiennes, du point du vue du Québec, c'est capital: c'est capital du point de vue intérieur, c'est surtout capital du point de vue extérieur, comme on l'a dit. Comment fait-on cette coordination? Quand on regarde les organigrammes, par exemple Affaires canadiennes, on a tout un secteur des relations internationales pour les affaires canadiennes. Je suppose que pour les Affaires canadiennes elles-mêmes, c'est tout le secteur que sont les affaires canadiennes. Comment les deux se marient-elles? Comment les deux se rejoignent-elles? Encore là, on se pose la question: est-ce que là aussi on ne va pas arriver à une espèce de conflit de personnalité sachant, par exemple, que les deux ministres ont surtout des aspirations futures? Peut-être qu'ils vont essayer de se voler la vedette.

Par exemple, dans des réunions canadiennes ayant trait aux relations extérieures, et aux relations intérieures, on se demande lequel sera prépondérant? Avant, il n'y avait pas ce problème parce que M. Jacques-Yvan Morin allait signer des traités, que ce soit des relations ayant trait aux relations internationales ou intérieures, il allait signer tous les traités au nom du Québec. Tandis que là, au niveau des fonctionnaires même, comment tout cela va-t-il se passer? C'est sur cela que nous allons poser plusieurs questions.

En passant nous sommes contents de voir le député de Lafontaine. Je pensais qu'il était ici pour les Affaires canadiennes, mais peut-être que les affaires canadiennes une fois que c'est à Ottawa, cela a un intérêt que national. Alors, là il y aura un autre problème.

En tout cas, c'est cela la question fondamentale que nous allons poser au ministre au cours de l'étude de ces crédits. Nous voulons savoir ce qui a changé vraiment puisque rien n'a l'air d'avoir changé. On dit qu'on a accueilli tout cela avec un concert d'éloges. Je ne sais pas de quel côté le concert est venu, mais enfin c'est un concert qu'on peut nommer d'unilatéral. De toute façon on se pose la question à savoir: Qu'est-ce qui a changé fondamentalement? Quels sont les objectifs en général que le ministre se pose? Il a deux ministères sous son contrôle. Selon ce qu'il nous dit, il va faire la coordination des deux ministères avec son cabinet politique. On lui pose la question: Est-ce que c'est une gestion politique qui va se passer? Comment est-ce qu'une coordination peut se faire au niveau du cabinet d'un ministre et changer d'un ministre à l'autre? Est-ce qu'il n'y a pas un continuum d'objectifs? Est-ce qu'il n'y a pas un continuum dans la coordination des structures? Il faut se poser la question qu'on avait posée au début de novembre 1982: Est-ce qu'on devrait revoir toute la question du commerce extérieur, par exemple? Se dire: Bon, est-ce que le commerce extérieur et les relations extérieures devraient être un ministère global avec des objectifs très larges et avec des priorités établies qui seraient, selon les vues du député de Trois-Rivières et du ministre, non pas prioritairement économiques? Mais à ce moment situons-les. Disons-le. Est-ce qu'on ferait un seul ministère pour assurer quecette coordination se fasse au sein de l'appareil du ministère? Est-ce que le commerce extérieur devrait être rattaché comme il l'était dans le passé au ministère de l'Industrie et du Commerce et laissant les Relations extérieures de côté? C'est cela les questions fondamentales qu'il faut se poser parce qu'on a n'a rien résolu, qu'on est au point de départ et tout ce qu'on a fait c'est qu'on a réglé une question de fond par une solution de personnalité. C'est dans cette ligne de pensée que nous allons poser des questions au ministre des Relations internationales.

M. Landry: Merci.

Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le député de Nelligan.

Avant de laisser la parole au ministre je voudrais reprendre certaines choses que j'ai dites tantôt pour ne pas induire la commission en erreur. Je me rends compte que pour le temps de parole de 20 minutes, il est dit à l'article 201: "Sauf dispositions contraires, le député qui a la parole peut s'exprimer pendant 20 minutes. Cependant, ce temps est réduit à 10 minutes dans des motions de forme". Par contre, à l'article 151 il est dit: "Toute commission peut, du consentement unanime de ses membres, déroger aux règles relatives au temps de parole". Ce qui veut dire que la commission peut établir le temps de parole qu'on veut donner à chacun des membres. Tantôt, lorsque j'ai dit au ministre que s'il répondait il prenait le temps du président de la commission et du député de Trois-Rivières, je faisais erreur aussi. Le président ou le ministre qui répond à ses crédits en commission peut intervenir aussi souvent qu'il le désire. Je m'excuse auprès du député de Trois-Rivières si je lui ai enlevé le droit de parole.

M. le député de Trois-Rivières.

M. Vaugeois: Cela va, M. le Président. Vous êtes bien gentil, d'ailleurs, de présider notre séance. Alors, on ne vous chicanera pas sur cela.

Ce que j'aimerais proposer aux membres de la commission, c'est que l'étude des crédits est un exercice qui est plus important pour l'Opposition que pour nous, on en convient, mais qui n'est pas sans intérêt pour nous. Si on était d'accord, on pourrait, à partir des questions que va poser l'Opposition, s'inscrire tout de suite si nous avons une question à ajouter sur cela.

M. Lincoln: Avec plaisir. Une voix: Pas de formalisme.

M. Lincoln: On ne va pas faire de formalisme du tout.

Le Président (M. Gagnon): Si je comprends bien le droit de parole, les membres de la commission consentent à 20 minutes par intervenant.

M. Vaugeois: La règle prévoit dix minutes. Si quelqu'un a besoin d'un peu plus de dix minutes...

Le Président (M. Gagnon): Non, c'est 20 minutes sur chaque élément.

M. Vaugeois: Sur chaque élément, mais le droit de parole de chacun.

M. Rivest: M. le Président, les membres de la commission et dans le sens des propos du président, je pense bien qu'on ne fera pas de drame de minutage. On essaiera de part et d'autre de ne pas abuser pour permettre aux collègues de s'exprimer.

Le Président (M. Gagnon): Cela va. Je voulais tout simplement rectifier ces faits, compte tenu des décisions que j'avais rendues précédemment. M. le ministre.

M. Bernard Landry

M. Landry: Merci, M. le Président. Je vais d'abord essayer de répondre le plus systématiquement possible au député de Jean-Talon dont l'intervention s'articule autour d'un thème principal qui est l'insertion du Québec dans la fédération canadienne et l'attitude du présent gouvernement vis-à-vis de cette insertion.

D'abord, je ferai remarquer qu'il y a beaucoup plus de similitude entre l'attitude du présent gouvernement et des gouvernements antérieurs du Québec face aux questions internationales que le député de Jean-Talon veut bien le laisser entendre. Comme le député de Trois-Rivières qui a été un observateur attentif, moi-même et tous ceux que la question intéresse, savons très bien et de science certaine, et n'oubliez pas que les archives existent au ministère des Affaires intergouvernementales, que la "lutte", entre guillemets, pour la reconnaissance internationale du Québec n'a pas été l'apanage du présent gouvernement et que nous ne sommes pas les seules victimes d'une certaine mesquinerie fédérale et d'une attitude réductrice en cette matière qui a été servie froidement à l'ancien premier ministre du Québec, qui a précédé immédiatement M. Lévesque et à Daniel Johnson ou à certains de ses ministes comme Jean-Jacques Bertrand, Jean-Guy Cardinal et Marcel Masse. L'expression "guerre des drapeaux" qui s'est appliquée à certains épisodes n'a pas été inventée depuis 1976. Je pense avoir bien dit pourquoi. Avec une doctrine centralisatrice clairement exprimée par le chef du gouvernement canadien, des arguments surabondants ont été donnés à des technocrates fédéraux à la pensée réductrice pour pourchasser littéralement les ministres et les fonctionnaires québécois dans tout leur travail concernant les relations internationales du Québec.

La petite histoire et peut-être la grande retiendra qu'un ministre du gouvernement du Québec s'est vu menacé de se faire retirer son passeport par le gouvernement du Canada.

M. Rivest: Folklore.

M. Landry: Si on vous retirait votre passeport, M. le député de Jean-Talon, je ne

sais pas quel genre de folklore vous pourriez décrire pour illustrer votre réaction. On a menacé un ministre du gouvernement du Québec, un membre de l'exécutif du chef de cette province, comme les fédéraux aiment dire, ce qui est la réalité juridique, parce qu'il ne marchait pas au doigt et à la baguette vis-à-vis des diktats du gouvernement du Canada, et ce n'était pas un ministre du gouvernement du Parti québécois. L'incident est bien connu et est consigné aux archives et il passera à l'histoire.

M. Rivest: C'était qui?

M. Landry: Deuxièmement, le député de Jean-Talon se trompe lorsqu'il dit que seul le gouvernement de Bourassa a signé des accords avec les fédéraux et que notre gouvernement aurait une attitude qui ignorerait l'insertion du Québec dans la fédération canadienne. Soyons bien clairs là-dessus, le présent gouvernement du Québec est un "law-abiding government". Il donne même l'exemple à tous les gouvernements de la fédération dans la réaction au jugement de la Cour suprême du Canada, par exemple, qui s'est attaquée à nos lois en matière linguistique. On n'a pas refait de référendum sur cela. On n'a pas ameuté les populations. On a appliqué le jugement de la Cour suprême du Canada en tenant compte que le Québec est une province du Canada.

Cela dit, j'espère que le député de Jean-Talon, vice-président de la commission, ne pense pas faire une trouvaille en disant qu'on n'est pas d'accord avec la présente situation constitutionnelle du Québec. On n'est absolument pas d'accord. On va consacrer nos meilleures énergies politiques, on va mobiliser, comme on l'a fait dans le passé, et encore plus à l'avenir pour faire en sorte que le Québec devienne un État souverain. Ce n'est pas une trouvaille de la commission des institutions ni d'aucun de ses membres. C'est une affirmation connue urbi et orbi et dans le monde entier chez tous nos interlocuteurs internationaux. Je ne pense pas qu'il y ait lieu de faire de nouvelles avec cela. Mais, les deux membres de ma première partie de la réponse au député de Jean-Talon sont complémentaires et essentiels. Ce gouvernement est là "abiding" et ce gouvernement, dans le contexte démocratique qui est le nôtre et qui sera toujours le nôtre, c'est notre voeu le plus profond, veut modifier profondément les rapports entre le Québec et les autres constituantes de la constitution canadienne. Donc, il y a là une coloration politique qui a été donnée par le député de Jean-Talon qui n'est pas exacte, qui est contraire à la réalité, qui est fausse.

Il y a aussi un exemple que je vais essayer d'élargir un peu. Quand le député de

Jean-Talon dit: Nous, nous avons signé pour l'Agence de coopération technique et vous n'avez rien signé, etc. Premièrement, pour parler de l'Agence de coopération technique, notre position vis-à-vis du sommet francophone qu'il a mis en regard de notre position vis-à-vis de l'agence est rigoureusement symétrique. Le député a lui-même dit - et je me réfère aux notes sténographiques - et convenu que l'attitude du premier ministre du Canada, actuellement M. Pierre Elliott Trudeau, celui qui n'avait que horions, injures et mépris pour l'ancien chef du député de Jean-Talon, est à l'origine du phénomène...

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Landry: ...et si la puissance du Canada a adopté l'attitude qu'elle a adoptée dans l'Agence de coopération technique, si elle ne voulait pas faire d'histoires, si elle ne voulait pas être réductrice pour le Québec, si elle ne voulait pas être mesquine, elle adopterait exactement la même attitude pour le sommet francophone. Tout le monde serait content et les signatures se feraient dans les semaines qui viennent.

M. Rivest: Nous, cela se ferait avec l'Agence, avec nous.

M. Landry: Sauf, sauf, oui, en vous couvrant d'horions et de mépris, vous vous souvenez, le Québec a eu honte en entier des attitudes méprisantes du premier ministre du Canada vis-à-vis de l'ancien premier ministre du Québec.

M. Rivest: ...l'autre côté de la question. Répondez donc à la question. Vous faites de la politique.

M. Landry: Et même si je ne suis pas de votre formation politique, le soir où ces événements sont arrivés j'ai été aussi attristé qu'a pu l'être le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Oui, c'est celai

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre, vous avez la parole. À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Rivest: J'ai posé une question directe et il répond à côté de la question.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Jean-Talon, vous avez posé vos questions. Le ministre est en train d'y répondre.

M. Rivest: Oui mais il répond à côté. Le Président (M. Gagnon): C'est votre

jugement mais au moins écoutez-le vous aurez probablement la chance de revenir sur le sujet. M. le ministre, vous avez la parole.

M. Landry: M. le Président, nous avons tous remarqué en début de séance une excitation particulière du député de Jean-Talon. J'avais cru qu'elle serait provisoire. Étant donné que nous inaugurons un nouveau système et que j'ai écouté religieusement ses paroles, celles du député de Nelligan et celles du député de Trois-Rivières, je croyais qu'il ferait de même quand vous me donneriez le droit de parole. C'est sûrement exceptionnel. J'espère que cette séance de la commission ne créera aucun précédent et qu'à l'avenir le député de Jean-Talon ainsi que les membres de sa formation politique essaieront de donner une autre coloration à ce nouveau système que nous inaugurons ce matin qui n'est pas une foire d'empoigne mais une recherche de la vérité.

Je reviens donc à l'exemplification de la coopération possible dans certains domaines entre le gouvernement du Canada et le gouvernement du Québec et lui qui a donné l'exemple de l'agence, je lui donne l'exemple des accords Cullen-Couture. La constitution du Canada prévoyait, depuis 1967, une responsabilité du gouvernement du Québec dans les questions relatives à l'immigration. (11 h 30)

Notre ex-collègue qui est d'ailleurs devenu coopérant international et qui, aujourd'hui, besogne dans un village africain pour les relations internationales, M. Jacques Couture, a signé avec un ministre fédéral, M. Cullen, les accords Cullen-Couture et il ne s'en souvenait pas. Pourtant, c'était déterminant puisque cela a été signé en 1977 ou 1978. Sans minimiser d'aucune façon l'Agence de coopération technique, les accords Cullen-Couture vont bien au-delà de la francophonie puisqu'ils visent l'ensemble des pays potentiellement fournisseurs d'immigrants au Québec et que nos agents actuellement sont dans le monde entier pour rendre plus fluides, dans la mesure du possible, les flots migratoires vers le Québec. Le Québec en particulier a donné l'exemple au monde entier dans l'affaire des "boat people" où nous avons accueilli beaucoup plus que le contingent canadien proportionnel au Québec de malheureuses victimes de conflit politique en Extrême-Orient.

Le député de Jean-Talon a également parlé en évoquant un certain pragmatisme de mes relations comme ministre du Commerce extérieur avec le ministre du Commerce extérieur du Canada, c'est vrai. Il a laissé entendre que cela dépendait en partie de moi. Est-ce qu'il ne pourrait pas pousser son parallèle et dire que si M. Trudeau et une certaine technocratie réductrice qui l'entoure avaient eu l'attitude de Gerald Regan, l'homologue. C'est vous...

M. Rivest: Répondez donc sur le fond des questions. Vous faites des personnalités tout le long.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Jean-Talon, s'il vous plaît! M. le ministre.

M. Landry: Je ne sais pas si c'est la pleine lune ou quoi? Le député de Jean-Talon a...

M. Rivest: Non, c'est parce que j'ai parlé à Jacques-Yvan Morin récemment.

M. Landry: C'est incroyable.

M. Rivest: C'est Jacques-Yvan qui m'inspire.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Jean-Talon vous n'avez pas le droit de parole. M. le ministre.

M. Rivest: Je m'excuse, M. le Président, je ne le ferai plus.

Le Président (M. Gagnon): On va devoir se servir d'un article sévère du règlement, M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Lequel? Le nouveau.

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.

M. Landry: II est vrai que sous certains auspices favorables, et en particulier quand nous avons des interlocuteurs pragmatiques qui reconnaissent la réalité québécoise, les choses sont plus faciles, elles vont mieux et c'est une lapalissade de le dire.

Le député de Jean-Talon a également parlé des priorités de l'action internationale du Québec. Je vais lui donner une réponse incomplète. Je vais lui dire pourquoi et je pense qu'il sera satisfait. Il existe un jeu de priorités pour l'action internationale du Québec dans le système présent et dans l'état actuel des choses. Je vais me permettre de lui rappeler un texte qu'il a entre les mains et qui est le suivant: Le Québec se situe dans un environnement international qui conditionne son existence et affecte ses intérêts. Son fonctionnement politique, son développement culturel et scientifique, ses échanges économiques, son évolution comme société sont tous soumis à des influences régionales et globales. Ils font tous l'objet d'activités et d'un large rayonnement québécois à l'étranger par un très large éventail d'intervenants privés, publics et gouvernementaux. Enrichir et faire apprécier l'identité propre du Québec,

projeter à l'étranger ses réalités et ses atouts, promouvoir son développement économique et socioculturel ainsi que la qualité de la vie des citoyens, contribuer selon les moyens à une évolution favorable de la communauté internationale, ce sont là pour le gouvernement du Québec des préoccupations qui découlent directement des réalités et des intérêts de base du Québec. C'est-à-dire que nos priorités sont calquées sur nos intérêts de base et sur la réalité. Ce qui veut dire en particulier que sur le plan géographique, c'est bien connu, nos priorités se situent en France et dans les pays francophones et la francophonie au sens large, ce qui, immédiatement, nous met dans un contexte multilatéral qui rejoint plusieurs pays d'Afrique, plusieurs pays du Maghred. Également sur le plan géographique, elles se situent aux États-Unis d'Amérique pour des raisons économiques et pour des raisons politiques, je dirais même des raisons culturelles continentales évidentes. Sur le plan géographique, la France, et les États-Unis d'Amérique constituent les deux piliers essentiels de nos priorités internationales.

Viennent immédiatement ensuite les pays industrialisés regroupés dans l'OCDE en particulier sans en faire une limite. Les pays de l'Europe de l'Ouest et c'est la raison pour laquelle nous sommes représentés en Grande-Bretagne, en Belgique, en République fédérale d'Allemagne et en Italie.

Troisièmement, ce que l'on appelle les nouveaux partenaires et dans le tiers monde en particulier, de très grandes puissances comme la Chine à cause de son importance stratégique mondiale et à cause de son potentiel économique et de son potentiel en termes de clientèle mais aussi l'Amérique latine. Nous sommes présents, comme vous le savez, au Mexique, au Venezuela et nous avons des projets d'élargissement en Amérique latine de la représentation diplomatique du Québec.

De même qu'un effort commencé, en particulier avec les pays du Maghreb mais étendu, de plus en plus, à l'ensemble de l'univers islamique, du monde arabe, à l'Asie avec des expansions dont on parlera peut-être au cours de cette commission, vers Singapour, vers Hong Kong, vers les pays à très forte croissance. Je range l'État d'Israël parmi les pays industrialisés de l'OCDE; nous avons, même si ce pays n'a que quelques millions d'habitants, en raison de son importance stratégique et de la présence au Québec d'une très forte communauté juive de langue française, les séfarades ou les ashkénages plutôt de langue anglaise, des relations importantes que nous entendons également développer.

Voici quelles sont nos priorités et voici pourquoi ma réponse est incomplète. Je l'ai dit dans mon exposé liminaire, ma réponse est incomplète parce que tous les intervenants québécois intéressés aux relations internationales vont se réunir au mois de juin et de nouveau à l'automne.

Le Président (M. Gagnon): Question de règlement.

M. Rivest: C'est justement cela. Je comprends que le ministre a dit que sa réponse était incomplète. Vous venez de nommer des pays, on a cela constamment... Ce que je pense de l'intervention du député de Nelligan, ce qu'on voudrait obtenir par l'étude de ces crédits... Il reste les questions du député de Nelligan. C'est bien beau de faire un tour du monde; c'était plus une réponse concernant la géographie que les objectifs. Vous avez mentionné Israël; ce que je voudrais savoir du ministère des Affaires internationales ce sont les possibilités qui nous intéressent en tant que Québécois pour notre développement. Je voudrais que le ministère des Affaires internationales, dans ses rapports avec l'étranger, nous dise quels sont les objectifs et non qu'il nous éparpille comme on le voit depuis un certain temps dans l'ensemble du monde. Qu'il nous dise: voici, en Israël il y a telle possibilité qui nous intéresse et nous visons à aller dans telle direction; nous en sommes là, nous allons faire cela. C'est ce type de réponse qu'on voudrait de la part du ministre et du ministère des Affaires internationales.

Le Président (M. Gagnon): Merci.

M. Landry: M. le Président, sauf tout le respect que je lui dois, ce n'est pas au député de Nelligan que je répondais, c'est au député de Jean-Talon. Je répondrai au député de Nelligan ensuite.

M. Rivest: Je ne voudrais pas que vous oubliiez les questions du député de Nelligan.

M. Landry: Deuxièmement, j'ai dit que ma réponse était incomplète mais, si je suivais votre question, elle serait encore plus incomplète parce que vous n'avez parlé que des intérêts du Québec. Or, dans la philosophie du ministère des Affaires internationales et du gouvernement, il y a nos intérêts oui et il y a l'intérêt humanitaire de développement de nombreux pays interlocuteurs qui sont en voie de développement et pour lesquels notre population exige, dans des segments de plus en plus informés et de plus en plus importants, que nous fassions des choses qui ne sont pas dans nos intérêts immédiats.

M. Rivest: Commençons par nos intérêts.

M. Landry: Nous n'allons pas transformer l'action internationale du

Québec, comme je l'ai dit précédemment, en une action mercantile à courte vue et qui ne viserait brutalementque nos intérêts. Ceci dit, si vous voulez par la suite - le livre des crédits est vaste - poser des questions sur chacun de nos programmes, leur application dans chacun des pays pour savoir quels hôpitaux nous avons subventionnés, quel genre de spécialistes nous avons fait venir...

M. Rivest: On veut de la substance.

M. Landry: Nous avons des heures et des heures pour l'étude des crédits. Vous ne pouvez donc pas me demander dans des questions générales de couvrir l'ensemble de l'éventail.

Je vous ai dit quelles avaient été nos lignes directrices jusqu'à maintenant sur le plan géographique. J'aurais peut-être insisté un peu plus sur le plan sectoriel mais j'ai confessé au départ par respect pour les interlocuteurs du sommet Québec dans le monde, phase de juin et phase de l'automne, que nous n'aurons pas de grands exposés de politiques de relations internationales avant que les agents économiques et les agents sociaux aient été consultés et nous aient fait savoir...

M. Rivest: Quel aveu!

M. Landry: ...leurs priorités. Nous devrons recolorer probablement complètement notre action et nos priorités. Certaines seront confirmées, certaines nouvelles priorités seront mises de l'avant, mais je crois que l'Opposition aurait mauvaise grâce de ne pas nous laisser consulter les agents avant de prendre une position définitive.

J'arrive maintenant, le plus rapidement et le plus complètement possible, à certaines demandes du député de Nelligan. D'abord, je souscris complètement à toutes les remarques techniques qu'il a faites et le président y a été mêlé, le président de séance comme le président de la commission sur le fait que l'Opposition veut avoir les documents le plus vite possible et être informée le plus vite possible. Je fais quand même certaines réserves. Le livre des crédits, vous l'aviez et vous avez insisté - je pense que vous n'auriez pas dû le faire - sur le fait que, par exemple, les Affaires intergouvernementales canadiennes n'étaient pas séparées dans le livre. Je comprends. Le remaniement est intervenu et les crédits étaient déjà à l'impression.

C'est là une question de calendrier. Je pense que vous ne nous chicanerez pas là-dessus. Si vous trouvez que, pour cette commission comme pour les autres, le fait d'avoir le cahier que le ministère fait parvenir, qui est différent du livre des crédits... Vous aviez tous les chiffres depuis que le livre des crédits est sur la table, mais vous voulez avoir plus tôt le cahier où on vous donne des informations supplémentaires. Très bien. Établissons les normes, établissons une tradition. On est tout à fait d'accord.

Ce qu'on a fait au ministère, on a simplement agi dans les délais que le leader nous avait impartis. Le leader du gouvernement, qui en général, ne fait rien sans accord avec le leader de votre formation politique, nous avait dit: Au plus tard le 30 mars. Le 30 mars, c'était parti. Mais si vous pensez que cela doit être modifié, je serai le premier à souscrire à cela. On est ici pour chercher la vérité et non pour prendre les gens par surprise et leur donner des délais pas suffisamment longs. Deuxième remarque du député de Nelligan. Il a parlé beaucoup de pragmatisme et a fait allusion aux relations que j'avais, par exemple, avec le ministre du Commerce extérieur, le ministre d'État au Commerce extérieur du Canada. Je dois dire d'abord que - je le dis un peu à la blague - qu'ensemble on avait pris une leçon de choses parce qu'une des premières fois où on s'est rencontré, c'était pour jouer au tennis contre McEnroe et Lendell. Inutile de vous dire qu'on a perçu la concurrence étrangère très, très vive déjà dans les premières secondes et qu'on s'est dit l'un et l'autre qu'on devrait peut-être se liguer pour résister. On a très mal résisté de toute façon et même le député de Jean-Talon qui est un excellent tennisman n'aurait pas fait mieux que nous dans les circonstances.

Une voix: Oh! Oh! Oh!

M. Landry: Cela nous a permis... J'aimerais voir cela: Lendell-Rivest.

M. Rivest: Attaquez le fédéralisme tant que vous voudrez mais n'attaquez pas mes talents de joueur de tennis.

M. Landry: J'aimerais cela voir: Lendell-Rivest.

M. Rivest: Oui parce que... Demandez au député de Trois-Rivières.

M. Landry: J'aimerais voir l'un et l'autre contre McEnroe.

M. Vaugeois: Jadis, il m'a battu.

M. Landry: En tout cas, quoi qu'il en soit, oui c'est vrai qu'un pragmatisme est établi qui relevait largement de l'attitude du ministre du Commerce extérieur du Canada, du ministre d'État au Commerce extérieur et relevait largement de la spécificité de l'activité commerciale.

La concurrence est tellement vive en matière internationale que tout en faisant tous les efforts pour promouvoir les ventes

québécoises de biens et de services il serait extrêmement malhabile d'introduire des querelles de juridiction internes importantes et fondamentales dans des activités qui sont déjà tellement concurrentielles à l'étranger.

En d'autres termes, on a déjà assez d'avoir nos concurrents sur le dos. Si on peut, dans une situation constitutionnelle très insatisfaisante, je le réitère, minimiser l'impact sur nos ventes de biens et services pour créer des emplois au Québec, je pense qu'on a le devoir de le faire et que c'était plus facile de le faire avec l'ancien premier ministre de la Nouvelle-Ecosse qu'avec certains autres hommes politiques fédéraux dont l'obsession est de réduire constamment l'action du Québec, dont l'obsession est d'aller à l'encontre de liens qui avaient été faits dans la pratique. On n'a jamais chicané Antonio Barrette dans les quelques mois où il a été premier ministre du Québec quand il recevait des visiteurs étrangers mais on l'a fait pour d'autres premiers ministres du Québec qui ont suivi.

En d'autres termes, les fédéraux ont voulu battre en retraite sur ce que l'histoire et la réalité avaient donné au Québec. Je suis le premier à le déplorer et je suis le premier à constater que lorsqu'un certain pragmatisme s'établit de façon bilatérale, les choses, tout en restant insatisfaisantes, peuvent aller mieux.

Une autre remarque fondamentale du député de Nelligan - là, il va peut-être retourner au journal des Débats dans l'ancienne formule, dans l'ancienne commission parlementaire pour établir, premièrement, que la formation politique de l'Opposition a voté pour le principe de la loi de création du ministère du Commerce extérieur, ce qu'on appelle l'adoption du principe et qu'on appelait autrefois la deuxième lecture. Alors, je vous demanderais de corriger vos propos. Techniquement, vous avez voté pour le principe. Donc, vous étiez d'accord pour la création du ministère du Commerce extérieur. (11 h 45)

M. Rivest: Comme M. Morin.

M. Landry: Deuxièmement, vous aviez, à cette époque...

M. Rivest: Jacques-Yvan aussi.

M. Landry: ...fait un grand nombre de remarques pertinentes, manifestant vos inquiétudes quant à la possibilité de faire fonctionner harmonieusement les nouvelles structures qu'on avait mises sur pied. Encore là, je vous réfère à mes propos consignés au journal des Débats de l'époque. Je vous avais donné raison quant à vos inquiétudes; je les partageais. Je vous avais dit que nous aurions à vivre une période de rodage, d'ajustement, d'adaptation et si, à la fin de cette période de rodage, d'ajustement, d'adaptation, des difficultés trop graves subsistaient, on modifierait les choses, on changerait les lois. C'est ce qu'on a fait. On n'a pas essayé de jouer à cache-cache avec vous.

Même si vous vouliez nous dire que vous avez la science infuse et que vous connaissez cela de A à Z et que vous auriez agi de façon radicalement différente, personne ne vous croira et, personnellement, je ne vous crois pas. Vous étiez comme nous, en abordant un nouveau système, un nouveau jeu institutionnel, craintifs. Nous partagions vos craintes; nous nous engagions dans une période de rodage que nous avons essayé de mener le mieux possible. Certaines contradictions et difficultés de fonctionnement sont apparues, c'est clair et c'est net.

Le premier ministre du Québec, lors du dernier remaniement, utilisant la Loi sur l'exécutif, a modifié la situation comme on s'était engagé à le faire. Je pense qu'un grand principe d'administration est de geler les structures à jamais. Ce qu'on enseigne dans les écoles d'administration aujourd'hui et ce que les chefs de PME savent d'instinct, c'est que c'est le but et l'objectif, ce qu'on appelle la gestion par objectif, qui compte bien plus que la structure. Si la structure n'est pas tout à fait adaptée à la poursuite des objectifs et à l'atteinte des objectifs, on la modifie. On fait des ajustements; on fait des adaptations. Le Québec n'est pas le premier à avoir connu ce problème d'intégration de la nouvelle dimension des relations internationales qui sont les relations économiques et le commerce extérieur.

J'ai rappelé les arbitrages que le président Kennedy lui-même avait dû faire au cours des années soixante alors que la grande machine américaine qui a pourtant beaucoup d'expérience, beaucoup de tradition, connaissait des difficultés du même genre. J'ai rappelé que le gouvernement du Canada a nommé trois ministres pour ce dossier. Il y a, actuellement, trois ministres à Ottawa pour s'occuper des relations internationales et c'est un secret de polichinelle que, là non plus, l'harmonie parfaite et totale que tout le monde souhaite n'a pas été atteinte. Il y a le ministre du Commerce extérieur; il y a M. Pépin qui s'occupe des relations étrangères; il y a le ministre en titre des relations extérieures du Canada. Il est de notoriété publique que ces structures sont également en période de rodage et qu'elles devront s'adapter parce que la réalité a changé.

Vous voyez l'horloge, M. le Président; moi, je ne la vois pas.

M. Rivest: Essayez de répondre précisément aux questions. Il me semble que...

M. Vaugeois: C'est bon.

M. Rivest: Cette espèce de "flâsage".

M. Landry: J'aime mieux l'opinion du président que celle du vice-président qui est teintée de partisanerie.

M. Rivest: C'est long; vous tournez autour du pot.

M. Landry: Ceci dit sur le rodage...

M. Rivest: Cela se répond en trois minutes: oui, on fera cela; non.

M. Landry: Cela se répond peut-être par des esprits simplistes mais j'espère que je ne me rangerai pas dans cette catégorie, même si l'Opposition faisait des pieds et des mains pour arriver à cet objectif.

M. Rivest: On va faire comme Jacques-Yvan, on va s'en aller.

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre, si vous me le permettez, vu qu'il y aura sûrement d'autres questions auxquelles vous devez répondre lors de l'étude détaillée, est-ce qu'on peut vous demander de terminer?

M. Landry: J'insisterais pour rétablir une chose sur laquelle l'Opposition a insisté longuement pour des raisons partisanes bien claires et visibles. Tout ceci aurait découlé d'un conflit de personnalités; c'est faux, archifaux. Je l'ai dit cent fois, la presse la plus critique l'a d'ailleurs reconnu; les analystes les plus critiques de la situation qu'on a vécue au cours de la dernière année ont toujours reconnu qu'il ne s'agissait pas d'une question de relations personnelles. J'ai toujours eu d'excellentes relations personnelles avec mon prédécesseur qui est un militant de notre formation politique et de la cause souverainiste. Il est aussi mon ancien professeur à la faculté de droit; je lui ai rendu hommage à de nombreuses reprises. Je le refais ce matin afin que les plus durs d'oreille finissent par entendre ou qu'au moins ils lisent les journaux. Nous étions en face d'un problème institutionnel; nous n'étions pas en face d'un problème personnel. Mon admiration pour l'ex-député de Sauvé ne s'est jamais démentie et mes relations personnelles avec lui ne se sont jamais démenties tout au cours de cette période de rodage et d'ajustement.

Le député de Nelligan a aussi fait allusion à une question importante, les relations avec les affaires canadiennes. Voici ce que je lui dis: les Affaires intergouvernementales canadiennes sont un ministère intersectoriel, une responsabilité intersectorielle rattachée au Conseil exécutif. Alors, sur le plan technique, les crédits viendront en temps et lieu, mais sur le plan plus fondamental, c'est un ministère intersectoriel pour lequel le ministère des Relations internationales, comme tous les autres, en est un sectoriel. Ce qui veut dire que nous aurons avec ce segment de l'administration les mêmes relations qu'un ministère sectoriel a avec des structures de coordination. L'interlocuteur pour les stratégies, face au gouvernement du Canada, pour les politiques, c'est - sans l'ombre d'un doute - le ministère des Affaires canadiennes. Cependant, pour les contacts - comme la pratique est courante - routiniers, quotidiens, techniques, chaque ministère, le nôtre, comme les autres, poursuivra la pratique établie et prendra contact directement avec les fonctionnaires fédéraux et, éventuellement, avec les ministres fédéraux.

Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le ministre. Est-ce qu'il y a d'autres remarques d'ordre général avant d'entreprendre l'étude des crédits?

M. Rivest: II y a un point, peut-être, que le député de Nelligan a souligné qui m'apparaît très important, c'est la déclaration que vous auriez faite au journal La Presse en ce sens que - je pense que le député de Nelligan a souligné le problème -les relations internationales et les affaires canadiennes relèvent de deux ministres. C'est sûr que dans les relations internationales, il y a toujours une dimension qui concerne la partie fédérale des choses et que vous auriez dit que ce serait votre cabinet politique qui ferait la coordination.

M. Landry: Jamais de la vie.

M. Rivest: Non, vous n'avez pas dit celai

M. Landry: Mais non!

M. Lincoln: M. le Président, si je peux...

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Nelligan.

M. Lincoln: Je pense qu'on n'avait pas touché cet aspect. Là où vous avez parlé de la coordination que vous alliez faire, c'est au niveau des deux ministères que vous chapeautez.

M. Landry: C'est cela et non pas les affaires intercanadiennes qui est une question totalement différente.

M. Lincoln: Oui mais...

M. Rivest: Mais encore là, c'est le

même problème.

M. Lincoln: C'est le même problème mais vous ne l'avez pas touché.

M. Landry: Un problème analogue.

M. Lincoln: La question que j'avais posée, M. le ministre, c'était celle-ci: S'il n'y avait pas de conflit de personnalités d'après vous, donc c'était un conflit institutionnel ou structurel ou d'objectifs ou une combinaison de toutes ces choses. En fait, cela a l'air de découler de la lettre de M. Morin ne voulant, d'aucune façon, "me porter caution à des décisions retenues pour résoudre les problèmes". Donc, il y a des problèmes. Il admet qu'il y a des problèmes.

M. Landry: Qu'est-ce qu'il a de personnel là-dedans, je vous le demande?

M. Lincoln: Oui, d'accord. Si ce n'est pas une question de personnalité, comment est-ce qu'une solution de personnalité va résoudre le problème? C'est la question à laquelle vous n'avez pas répondu. En d'autres mots vous dites: Maintenant on va avoir les deux ministères comme avant. On va les chapeauter d'un ministre et d'un cabinet politique et la coordination va se faire à l'échelle du ministre et du cabinet politique. Je vous demande si ce sera une gestion de politique par le fait même de la coordination qui se fait à votre niveau, au niveau du cabinet politique? Où va être l'implication des sous-ministres, des fonctionnaires qui, eux, assurent le continuum, qui assurent la structure de base, qui assurent que l'objectif et les priorités sont mises en place, sont installées. Si la coordination se fait à travers votre cabinet politique, comment va-t-il y avoir continuum parce que les ministres et les cabinets politiques changent. Tandis que les sous-ministres, les fonctionnaires... Est-ce que ce n'est pas là la base des conflits? N'était-ce pas à cause de toute cette question de structure, d'objectif, de priorité et de mauvaise prise en... J'ai lu, dans la Presse, un article de Mme Leduc qui disait: On n'a pas d'objectif à moyen terme, on n'a pas d'objectif à court terme, il faut refaire toute la machine. Donc, au sein même de la machine, M. Morin lui-même le souligne, il y avait des problèmes institutionnels, il y avait des problèmes de structure, des problèmes de fond. Est-ce qu'une personnalité qui va coordonner cela d'en haut, avec un cabinet politique, ce serait suffisant? Voilà ce que je vous demande. Ou bien c'est un ou bien c'est l'autre. S'il n'y avait pas de conflit de personnalités, c'est institutionnel. Si c'est institutionnel, comment pouvez-vous lui trouver une solution par une simple coordination à votre niveau et au niveau de votre cabinet politique ce qui devient à ce moment une gestion de politique plutôt qu'un "management" par vos sous-ministres et leurs fonctionnaires? C'est ce qu'on vous demande et je pense que c'est une question clé. Je pense que vous n'avez pas touché à ce point dans votre réponse. C'est la raison pour laquelle mon collègue de Jean-Talon a...

M. Landry: Vous avez raison, je n'ai pas répondu. Je n'ai pas répondu parce que le président m'a dit d'abréger et qu'il nous reste plusieurs heures devant nous. Ce n'est pas parce que je ne veux pas répondre, je vais répondre maintenant si vous voulez. Cependant, si je n'ai pas répondu, vous n'avez pas le droit de répondre pour moi. Vous n'avez pas le droit de dire que je réponds en disant que c'est mon cabinet politique qui va faire la coordination, c'est faux. Ce n'est pas exact parce que, premièrement, il y a eu un changement institutionnel profond au sein de la section internationale de l'ex-ministère des Affaires intergouvernementales. Vous l'avez dans les documents. Je comprends que vous ayez eu les documents vendredi, sauf qu'il y a eu une réforme profonde. Vous avez parlé des propos de Mme Leduc que je crois avoir aussi lus dans la Presse il y a de longs mois. C'est l'été dernier, je crois, que Mme Leduc, parlant du ministère des Affaires intergouvernementales, avait dit que des réformes institutionnelles s'imposaient. Or, Mme Leduc n'a pas que parlé, elle a agi. Mme Leduc et l'ensemble de l'équipe se sont livrés précisément - et je n'ai aucun mérite à cela, c'était fait quand je suis arrivé, mais je leur rends hommage pour leurs travaux - à une réforme en profondeur des structures de l'ancien ministère des Affaires intergouvernementales. Vous avez tous les organigrammes et les commentaires. Vous avez même la répartition des crédits suivant le nouvel organigramme. Alors, vous pourrez étudier cela de long en large. Dire que je vais faire faire la coordination par mon cabinet politique, c'est complètement faux; ce qui ne veut pas dire que le fait d'avoir un seul cabinet politique pour deux ministères n'est pas un avantage net. D'abord, c'est une économie d'échelle. Je n'ai pas engagé deux séries de fonctionnaires de cabinet. Alors là on économise déjà un grand nombre de salaires, de personnel de soutien, etc. On économise des locaux et on économise de l'espace. Par exemple, à Québec les services du cabinet du ministre sont regroupés dans les anciens locaux du cabinet du ministre des Affaires intergouvernementales et à Montréal on a fait le contraire. Alors, le ministère des Affaires intergouvernementales s'en va au ministère du Commerce extérieur, cela économise de l'argent. Au-delà des questions d'argent, qui sont quand même toujours importantes dans une commission qui étudie les crédits, il y a

aussi une question d'efficacité, de cohésion et de cohérence. Mais ce n'est qu'un des facteurs de cohérence du nouveau régime.

Vous me dites qu'il va y avoir une gestion politique, je l'espère bien! Ce serait bien nouveau et ce serait une révolution si les ministres ne donnaient pas une impulsion politique aux ministères dont ils sont les chefs. C'est à la base du système même de notre démocratie, autrement il n'y aurait pas nécessité. Je comprends de plus que certains esprits purement technocratiques trouvent que ce n'est pas commode d'avoir des ministres dans un système comme le nôtre, mais je soutiendrai l'inverse jusqu'à mon dernier souffle que c'est à la base même de notre système démocratique. Quand on est chef d'un ministère dans un système parlementaire britannique, on est aussi un élu du peuple et on fait aussi partie d'une majorité gouvernementale. Alors ne vous surprenez pas si je me comporte exactement comme l'esprit de nos institutions me contraint à le faire. Cependant, ce n'est qu'un aspect de la coordination, de l'action du gouvernement. Oui, il y a des implications administratives. Oui, le ministère du Commerce extérieur et le ministère des Relations internationales ont déjà entrepris et vont poursuivre une vaste entreprise de rationalisation, de pontage, suivant l'expression que j'ai employée et qui a été reprise par un analyste dans le journal Le Devoir en particulier, où des économies d'échelle pourront être réalisées.

N'oubliez pas qu'on étudie les crédits ici. Par exemple, on a deux services d'information. On en a un au ministère du Commerce extérieur et on en a un au ministère des Relations internationales. Il est hors de tout doute que si ces deux services réalisent leur pontage, travaillent ensemble et font des rationalisations de leur publication, il y aura des économies de deniers publics, mais il y aura aussi une meilleure information des questions internationales circulant au ministère du Commerce extérieur et au ministère des Affaires intergouvernementales.

Alors, pontage dont je donne un exemple pour un niveau: les communications. Pontage qui sera établi à l'ensemble des activités des deux ministères, à commencer par le ministre - là c'est facile, il n'y en a qu'un - par les sous-ministres, où il y en a deux, par les directeurs généraux, où ils deviennent plus nombreux, sous-ministres associés, etc. Cette opération est en cours et elle est en train de se faire. Elle ne se fera pas dans la bousculade, elle se fera dans l'harmonie. Je pense que vous convenez avec moi... En tout cas, j'ai entendu l'ancien chef du Parti libéral dire que s'il était là il ferait un vrai ministère du Commerce extérieur. D'ailleurs, dans la conférence de presse où il a dit cela, les journalistes lui ont demandé de préciser ce qu'il y avait de différent dans sa politique que ce qu'il y avait dans la nôtre et il n'a pu prononcer le premier mot de l'exemplification de ce qu'il entendait par un vrai ministère. (12 heures)

Tout le monde reconnaît, surtout le milieu des affaires, qu'il y a un intérêt stratégique à avoir un ministère des Relations internationales et un ministère du Commerce extérieur. Ce n'est pas un dogme de foi, ce n'est pas un diktat, cela découle de la nature des choses: des personnalités des invidividus, des diverses compétences en cause, il y a des gens qui sont plus obsédés sur la vente, il y a des gens qui sont plus mercantiles, bon! II y a un avantage stratégique à l'intérieur comme à l'étranger. Ceci dit...

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre, il y a une question de règlement. Le député de Jean-Talon.

M. Rivest: C'est bien intéressant ce que vous dites, mais je voudrais vous souligner, M. le Président, sur un rappel au règlement, que la question comportait uniquement un élément qui était le rôle du cabinet politique par rapport au rôle des sous-ministres. C'est simplement cela. Si le ministre pouvait convenir de façon très amicale parce que l'étude des crédits est quand même assez réduite et que sur une question aussi précise que celle qui a été formulée par mon collègue de Nelligan il me semble que cela se répond en trois phrases et dire: Mon cabinet politique est un cabinet politique. Il ne s'ingérera pas dans l'administration des deux ministères; les sous-ministres ou les hauts fonctionnaires sont assez responsables pour faire cette fonction qui appartient à cela, ou bien ils vont s'immiscer, c'est oui ou non. Il n'est pas nécessaire de nous faire un placotage...

M. Lincoln: Si je peux préciser.

Le Président (M. Gagnon): Sur la question de règlement.

M. Landry: Si j'avais répondu, cela aurait été insulter l'Opposition que lui dire: Mon cabinet politique est un cabinet politique.

M. Lincoln: Si je peux préciser ce que je veux dire parce que je pense que c'est là qu'il y a un malentendu peut-être. Nous, ce qu'on comprend si on lit l'article d'après l'interview très détaillée qu'a donnée le ministre à la presse récemment, Presse Plus, il parlait de deux ministères. Il dit: Deux univers séparés, la cohérence c'est deux univers séparés, la cohérence s'établissant au niveau du ministre et de son cabinet. Ce qui

nous fait poser la question, si moi je lis bien c'est cela que cela dit. Si c'est réellement comme deux univers séparés, deux ministères qui sont parallèles, qui ont des objectifs de complémentarité mais qui tout de même sont différents. Là vous donnez des exemples, du personnel qui est tout à fait différent, les vocations du personnel etc. Tout de même, cela a été là le fond du problème de coordonner l'action économique avec l'action dans les autres secteurs. C'était le problème d'établir des objectifs précis, d'établir des priorités très précises. C'était cela les questions qu'on vous posait que vous posaient mon collègue et moi-même. Quels sont les grands objectifs, non pas des objectifs géographiques, la France d'abord, Israël le numéro 28 et l'Amérique numéro 3? Ce n'est pas cela qu'on posait. Les objectifs globaux de la politique du Québec du point de vue extérieur. C'est là, il y avait sûrement des divergences de vues entre vous, entre le gouvernement et le ministre sortant des Affaires intergouvernementales. Autrement il n'aurait pas dit: "ne voulant en aucune façon me porter caution des décisions retenues pour résoudre les problèmes". Est-ce que la décision retenue pour résoudre le problème était justement deux univers séparés, la cohérence s'établissant au niveau du ministre et de son cabinet?

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.

M. Lincoln: C'est cela qu'on vous demande. Qu'avez-vous voulu dire par cela?

Le Président (M. Gagnon): L'explication de la question étant donnée, M. le ministre vous avez la réponse?

M. Landry: Je ne sais pas si c'est la tournure d'esprit du député de Nelligan ou sa stratégie qui fait qu'il mêle les cartes et qu'il mêle les questions. Il me somme de répondre d'une façon précise à sa question, il la reformule en parlant de mon cabinet politique et des objectifs globaux de la politique internationale du Québec. Il a fait allusion à Descartes dans ses remarques mais je pense qu'il procède plutôt de l'école de Protagoras qui était un philosophe bien antérieur à Descartes et qui s'est illustré par l'invention du sophisme. Vous ne pouvez pas m'acculer à répondre de façon simple à une question que vous avez complexifiée à souhait par tendance naturelle ou par stratégie. Si c'est par stratégie, je le comprends, c'est remédiable, si c'est par tendance naturelle, là c'est une autre affaire. Malgré l'estime personnelle que je porte au député de Nelligan, il a bien le droit d'avoir les tendances personnelles qu'il veut. Mais je pense avoir répondu très longuement avec peut-être surabondance de détails à la question du cabinet politique et ce n'est qu'une des facettes de la cohérence à établir dans les nouvelles structures, l'autre facette étant ce que j'ai décrit comme le phénomène du pontage, et j'ai donné comme exemple la direction des communications. J'aurais pu repasser tous les organigrammes en parallèle et tous les postes des crédits. Je n'ai aucune objection à le faire si vous voulez me poser des questions précises à chaque poste de la dépense.

Je pense aussi avoir été clair mais, Mme Leduc, qui est à mes côtés le serait bien davantage, sur le fait qu'une réforme a été faite en profondeur des structures de l'ex-ministère des Affaires intergouvernementales que vous avez dans le cahier. L'organigramme de ces réformes que les fonctionnaires qui sont avec moi de façon brillante pourraient vous dire pourquoi ces réformes ont été faites et quel en sera l'effet?

Merci.

Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le ministre. Est-ce qu'il y a d'autres remarques préliminaires? Ce qui veut dire qu'à ce moment-ci je peux...

M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: M. le président ou M. le ministre, je ne sais pas. Le ministre vient d'évoquer la possibilité que peut-être Mme Leduc pourrait brièvement nous donner un aperçu des préoccupations que le ministre vient d'évoquer, si le ministre est d'accord.

M. Landry: Je suis parfaitement d'accord et je pense ce serait pour le plus grand enrichissement de la commission que Mme Leduc ou d'autres fonctionnaires supérieurs du ministère puissent exprimer une chose - je l'ai dit dans mes remarques préliminaires - qu'ils ou qu'elles connaissent mieux que moi puisqu'il n'y a que quelques semaines que je suis là.

Le Président (M. Gagnon): Avant de donner la parole à Mme Leduc, je voudrais répondre à des questions qui me sont posées ici à savoir combien de minutes on a pris. D'abord au tout début, j'ai mentionné qu'il y avait un article qui nous permettait de limiter le temps. Je pense qu'unanimement, la commission était d'accord pour qu'on soit assez large là-dessus. À maintenant, le député de Nelligan a pris 23 minutes, le député de Jean-Talon 14 minutes. Est-ce que cela répond à votre question, M. le député de Vachon?

Mme Leduc.

Les structures du ministère

Mme Leduc (Paule): Je crois que la meilleure manière d'expliquer les

changements, c'est en prenant l'organigramme. Nous avions, au cours d'une réflexion que nous avons faite au ministère l'an dernier, jugé que le temps était peut-être venu de mieux articuler nos priorités et nos objectifs. Nous avions dans le ministère des mandats qui étaient donnés à plusieurs directions pour articuler priorités et objectifs. Nous avons jugé qu'il manquait là une certaine coordination. Nous avons donc créé pour résoudre un certain nombre de problèmes de fonctionnement et de mises en place qui nous apparaissaient assez évidents une direction que nous appelons la Direction générale de la planification et qui se trouve raccrochée au sous-ministre associé aux Affaires internationales. Cette nouvelle direction a regroupé un certain nombre de mandats qui étaient assumés par des directions qui ont été abolies mais a aussi créé un certain nombre de directions qui assument des mandats qui n'avaient pas été assumés de façon très organisée dans le ministère. Vous voyez par exemple la Direction de la coordination sectorielle qui regroupe maintenant quatre directions qui étaient séparées et qui faisaient la coordination culturelle, sociale, éducative, économique, etc. sous un seul chapeau.

Nous avons mis en place la Direction des études et politiques, qui a pour mandat précis d'organiser notre pensée et de préciser nos priorités, et cela pourra peut-être répondre à vos questions. Nous avons également mis en place la Direction des affaires multilatérales et francophones. Nous n'avions pas un groupe organisé qui avait pour mandat de travailler uniquement avec les organisations internationales et sur les questions multilatérales. Nous avons pensé, compte tenu de l'évolution de notre travail à l'extérieur, qu'il était prudent et important de mieux organiser notre travail là-dessus.

Nous avons créé une Direction de la programmation qui n'existait pas non plus. La programmation était faite dans chacune des directions. Nous avons pensé qu'il serait utile de mettre une cohérence générale dans l'ensemble de la programmation pour pouvoir mieux l'évaluer, mieux l'organiser et mieux dégager nos priorités. Il y a maintenant une seule direction qui regroupe l'ensemble de la programmation du ministère et cela nous permettra de mieux établir nos priorités et de mieux définir nos objectifs.

Enfin, nous avons mis en place une direction qui n'existait pas non plus qui est la Direction des systèmes d'information. Nous avions un paquet d'informations qui n'étaient pas non plus mises ensemble. Nous avons utilisé un support informatique et une organisation de banque de données pour avoir une meilleure information dans le ministère. Je crois que c'est pour répondre à des réflexions que nous avions menées depuis plusieurs années au ministère. Voilà.

M. Rivest: M. le ministre ou Mme la sous-ministre, une question additionnelle. Cette mise en ordre des activités un peu traditionnelles du ministère de façon qu'on définisse mieux les objectifs et qu'on voie comment cela marche je pense que c'était précisément la préoccupation du député de Nelligan lorsqu'il parlait de coordination. Beaucoup de ces programmes, beaucoup de ces secteurs dans le domaine des relations internationales vont, d'une part, rejoindre des préoccupations et des mandats particuliers qui sont du ressort du ministère du Commerce extérieur et, d'autre part, du ministère des Affaires canadiennes, enfin du ministre délégué aux Affaires canadiennes. Et notre préoccupation sur la base de la question du député de Nelligan, quand il parlait de la coordination, moi personnellement, et je pense que c'est également l'opinion du député de Nelligan, je crois que c'est un prolongement, au fond, à ce qui relève d'une activité proprement internationale et que vous avez organisée au niveau du ministère des Relations internationales. Ce qui nous préoccupait, c'était que tout ce qui se fait comme travaux devra être coordonné d'une part, avec le ministère des Affaires canadiennes et d'autre part, avec certains aspects de l'initiative du ministre à titre de ministre responsable du Commerce extérieur. Nous tenions, par la question que le député de Nelligan a posée, à ce que ces coordinations, ces échanges, ces communications, ces articulations d'initiative ne se fassent pas via le cabinet du ministre mais qu'elles se fassent au niveau de la machine administrative du gouvernement dans chacun des trois modules dont on parle. Comme question additionnelle, je voudrais simplement vous demander s'il y a, actuellement, des réseaux de communication entre cette direction générale et chacun de ses éléments, cette direction oui, et le ministère des Affaires canadiennes, le ministre des Relations internationales et du Commerce extérieur? Au niveau de l'administration proprement dite, est-ce que des articulations sont en place ou pensées?

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.

Mme Leduc: Voulez-vous que je réponde à la question?

Le Président (M. Gagnon): Mme Leduc, M. le ministre?

M. Landry: Oui, ils peuvent répondre. Moi, je répondrai de façon plus générale et la sous-ministre répondra de façon plus technique. J'ai cru l'avoir évoqué. L'opération à laquelle nous nous livrons présentement, l'opération en cours, c'est une

opération pontage, comme je l'ai dit. Alors, que chaque élément de la machine du ministère des Relations internationales établisse les ponts convenables et efficaces avec les éléments qui travaillent sur des questions connexes dans la machine du ministère du Commerce extérieur.

Quant à l'aspect Affaires intergouvernementales canadiennes, j'ai dit quelle est notre doctrine. Nous sommes, par rapport à Affaires intergouvernementales canadiennes, un ministère sectoriel. Nous sommes leur client parce qu'ils font les relations avec le gouvernement du Canada et nous agissons comme client de la même manière que tous les autres ministères le faisaient avec les Affaires intergouvernementales du temps où cette juridiction était aux Affaires intergouvernementales, c'est-à-dire que nous n'élaborons pas de stratégies avec le gouvernement du Canada sans l'intervention des Affaires canadiennes. Nous n'élaborons pas de politiques, nous ne faisons rien sans les informer. Nous ne participons pas à des délégations à Ottawa sans que les Affaires intercanadiennes soient présentes à nos côtés aux tables de négociation et aux tables de discussion. Ce n'est pas original, Mme la sous-ministre, cela s'est toujours fait comme cela du temps où vous aviez cette juridiction et cela va continuer à se faire ainsi maintenant que la juridiction est ailleurs.

Voulez-vous ajouter quelque chose? Peut-être que Mme Leduc, sur le plan technique, pourrait ajouter quelque chose.

M. Rivest: Si vous me le permetttez, à moins que Mme la sous-ministre veuille ajouter quelque chose, donc je comprends des remarques du ministre, que cela se fait bel et bien au niveau de l'administration et non au niveau du cabinet politique.

M. Landry: C'est exact. Par ailleurs, soyons de bon compte. Je dis que c'est une opération en cours.

M. Rivest: Oui.

M. Landry: Je ne veux pas vous induire en erreur en disant que tout est fait mais je crois exprimer la réalité en disant que nous avons l'ambition de tout faire et que nous avons commencé à faire certaines choses.

Le Président (M. Gagnon): Cela va. M. le député de Trois-Rivières.

M. Vaugeois: Des question rapides peut-être à Mme la sous-ministre. L'Agence de coopération...

M. Landry: M. le Vice-Président, excusez-moi, il y a peut-être un élément technique qui va intéresser l'Opposition.

La première directive que j'ai donnée au ministère du Commerce extérieur, comme au ministère des Relations internationales, et je l'ai dit au comité restreint de direction du ministère comme à l'ensemble des cadres, c'est que nous suivons les lignes hiérarchiques. Et moi-même ou mon cabinet politique ne gérons pas d'une façon intempestive les divers départements de la machine administrative. La sous-ministre des Relations internationales et le sous-ministre du Commerce extérieur sont les sous-chefs des deux ministères et c'est par eux que l'information passe, que les consignes passent, que l'action se fait. Cependant, pour des questions fort usuelles, et c'est connu, il y a ce qu'on appelle des passe-partout. Si j'ai besoin d'une information rapide pour répondre à une de vos questions en Chambre et que Mme la sous-ministre est au Moyen-Orient, je vais téléphoner directement dans la machine pour dire: Le député de Jean-Talon veut savoir combien tel truc a coûté. C'est là de la cuisine quotidienne et cela peut se faire par des passe-partout: Les politiques, les directives, les consignes, ligne hiérarchique, la sous-ministre. (12 h 15)

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Vachon. Excusez. M. le député de Trois-Rivières.

M. Vaugeois: Je n'haïrais pas cela être député de Vachon, par exemple.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Trois-Rivières.

L'ACCT

M. Vaugeois: J'ai des petites questions rapides à poser au sous-ministre si vous me permettez. L'Agence de coopération culturelle et technique relève de quelle boîte dans votre organigramme?

Mme Leduc: Si la direction des affaires multilatérales est francophone, il y avait antérieurement une direction des affaires francophones qui organisait les relations avec l'agence de coopération.

Une voix: Oui.

Mme Leduc: Vous voyez là le petit pointillé des affaires multilatérales qui conduit à la délégation aux affaires multilatérales à Paris qui, elle, a des relations avec l'ACCT.

M. Vaugeois: D'accord. Alors, quand les pointillés ou quand les lignes changent de nature, quand on passe d'une ligne continue à une ligne pointillée, est-ce que cela correspond à un phénomène particulier, la ligne d'autorité est moins claire, c'est de la

coordination plutôt que de la supervision ou quoi? Par exemple, on prend la délégation de Paris. On a là un bon exemple. La ligne de rattachement à la direction France est une ligne pointillée; quand on descend vers les boîtes internes, on a une ligne continue qui se termine par des lignes pointillées.

Mme Leduc: Oui. Alors, c'est cela le problème. Tous les délégués à l'étranger dépendent du sous-ministre. C'est la loi qui le dit. Mais, sur le plan fonctionnel, ils ont ce que nous appelons des pupitres. Alors, la ligne pointillée indique le pupitre sur le plan fonctionnel. D'accord? Et, à l'intérieur de la délégation même, par exemple, vous avez Paris où il y a des lignes fermes; le délégué général du Québec à Paris a une ligne ferme par rapport au conseiller aux affaires multilatérales, conseiller... J'étais en train de regarder New York. Mon conseiller politique et conseiller en coopération parce que ces conseillers sont des conseillers fonctionnaires du ministère des Affaires intergouvernementales. Ils reçoivent leurs intructions et leurs mandats du ministère des Affaires intergouvernementales alors que là où il y a une ligne pointillée il y a une partie des mandats qui viennent des autres ministères:' conseillers en immigration, conseillers économiques, conseillers en tourisme.

Il n'y a donc pas une autorité... En tout cas, il y a une autorité partagée du délégué.

M. Vaugeois: D'accord. Est-ce que cela veut dire que ces fonctionnaires dont le champ d'activité correspond à d'autres ministères sont nommés conjointement par le ministre des Relations internationales et par le ministre du secteur concerné?

Mme Leduc: La loi dit que le ministre des Relations internationales, le ministre des Affaires intergouvernementales à l'époque, nomme tous les fonctionnaires à l'étranger. C'est donc le ministre des Relations internationales qui nomme tous les fonctionnaires à l'étranger, y compris ceux des autres ministères, mais sur recommandation du ministre des autres ministères.

M. Vaugeois: D'accord. Une autre question qui est plus générale. Je la poserai d'ailleurs au ministre.

Le gros problème du ministère dont vous êtes responsable a toujours été la coordination avec d'autres ministères. À l'origine d'ailleurs, les éléments constitutifs de ce ministère sont nés dans des ministères sectoriels comme le ministère de l'Éducation et le ministère des Affaires culturelles qui avaient eu un service de coopération avant même que votre ministère existe.

À ses origines, le ministère a été tourné vers les relations fédérales- provinciales et interprovinciales dans une certaine mesure. Le volet international s'est ajouté lentement et péniblement. Cela a provoqué des rattachements au ministère: le service de coopération comme le service de coopération du ministère de l'Éducation, le service de coopération du ministère de la culture ou des Affaires culturelles. Il y a des ministères comme le ministère du Tourisme, comme le ministère de l'Industrie et du Commerce, qui ont été obligés de se rapprocher du ministère des Affaires intergouvernementales à l'époque. Il y a même des ministres qui ont cumulé deux fonctions - je pense à Gérard D. Levesque qui, à un moment donné, s'est promené entre le ministère de l'Industrie et du Commerce et le ministère des Affaires intergouvernementales pour essayer d'atténuer certaines résistances.

Dans votre nouvel organigramme, je ne retrouve pas - peut-être que je ne vois pas très bien - de coordination de contenu, par exemple, l'action du Québec à l'étranger en matière de santé, l'action du Québec à l'étranger en matière d'éducation. Faut-il comprendre que c'est à nouveau au ministère de l'Éducation que se fait cette coordination ou au ministère des Affaires culturelles ou dans les différents ministères concernés ou s'il y a encore un endroit où il peut y avoir une coordination horizontale de cette nature au ministère des Relations internationales?

M. Landry: M. le Président, il n'y a pas qu'un endroit. Il y en a deux au plan des organigrammes. Premièrement, si cette institution que vous connaissez bien qui s'appelle le Comité de coordination des relations autrefois intergouvernementales et aujourd'hui, internationales, le CCRI, le "i" devenant international. Vous avez cela dans l'organigramme immédiatement en dessous et à droite de la case sous-ministérielle. Puisque vous êtes affligés comme moi d'une certaine presbytie qui est survenue à l'âge que nous avons où c'est difficile à lire... À l'avenir je vais demander des choses plus agrandies pour la commission, mais c'est là.

Et l'autre grand poste de coordination c'est celui que vous retrouvez à la direction générale de la planification où là vous avez tous les sectoriels qui sont énumérés et qui sont des interlocuteurs, des sectoriels correspondants dans les ministères: questions sociales, questions éducatives, etc. La première instance que j'ai mentionnée CCRI, ce sont des sous-ministres, cela se fait au niveau des sous-ministres. Quant au niveau ministériel, c'est au Conseil des ministres même que cela se fait par la participation du ministre au Conseil des ministres et la participation du ministre à certains comités ministériels permanents. Le ministre est membre, par exemple, du comité ministériel permanent du développement économique.

La liaison avec les délégations

M. Vaugeois: La liaison avec les délégations et les bureaux, cela commence à être quand même un peu compliqué. Par exemple, le délégué général à Paris a une liaison d'autorité avec le ministre inévitablement et avec le sous-ministre pour une foule de choses, j'imagine qu'à l'occasion il a aussi sur les talons le directeur général de l'administration.

M. Landry: J'espère.

M. Vaugeois; Eux, ils n'espèrent pas, ils trouvent toujours que le directeur de l'administration est achalant.

M. Landry: Eh oui! Mais on l'aime comme cela.

M. Vaugeois: Maintenant, avec mes excuses pour M. L'Heureux, mais je pense bien que je ne dévoile rien en disant que pour les gens à l'étranger, ils ont toujours l'impression d'être incompris. D'ailleurs, c'est un réflexe de l'administration en général de toujours envier les conditions faites aux gens qui sont à l'étranger.

Après cela, il y a donc une liaison à faire avec le bureau, le pupitre de la France mais je ne comprends pas très bien comment la liaison va se faire avec la coordination, l'éducation, la culture, la santé et ainsi de suite parce que là, il n'y a pas de ligne de communication, en pratique. Je pose encore la question.

M. Rivest: Mme Leduc.

Mme Leduc: Les bureaux ont des "desks" pour le fonctionnel, c'est-à-dire, les délégations - je m'excuse - ont des pupitres dans chacune des directions dites géographiques parce que je n'en ai pas parlé. Les directions géographiques sont celles qui mettent en opération la programmation du ministère, les activités du ministère. D'accord'.

Les délégations sur le plan administratif ont également des relations avec la Direction générale de l'administration. D'ailleurs on voit la ligne qui se continue aussi par là.

La coordination pour l'administration de l'ensemble des bureaux se fait à mon niveau par un petit organisme qu'on appelle - dans notre jargon administratif - le BSM, c'est-à-dire le bureau des sous-ministres qui se réunit régulièrement et qui met ensemble toutes les politiques à administrer ou à donner aux bureaux à l'étranger. Ce que nous tentons de faire actuellement pour vous rassurer, M. le député, je sais que les bureaux à l'étranger trouvent toujours que le central prend bien de la place. Et nous sommes en train de repenser aussi notre administration des bureaux à l'étranger pour décentraliser davantage le pouvoir de décision administratif pour éviter qu'il soit obligé constamment de passer par le central pour la moindre petite niaiserie. C'est une orientation que nous prenons de plus en plus et les délégués, je crois, seront satisfaits des décisions qu'on a déjà commencé à prendre pour leur donner plus de pouvoir sur le terrain, moins dépendant du central sur le plan administratif.

M. Vaugeois: Est-ce que les ministères qui sont les plus concernés par les activités internationales du Québec ont tendance à se redonner des services de coopération, de relations extérieures ou si le ministère des Relations internationales offre vraiment ces services?

M. Landry: Je pense qu'il y a une tendance. Je pense que le ministère des Relations internationales va s'opposer à cette tendance au nom de l'efficacité, au nom de l'unicité de la politique et au nom des économies d'échelle. On ne doit pas laisser fleurir dans tous les secteurs de l'administration des boîtes spécialisées de relations internationales d'un certain volume.

Il est sûr que dans un très gros ministère aux crédits abondants et vastes comme le ministère de l'Éducation, cette tendance existe. Ce n'est pas sans mérite que certains fonctionnaires de l'éducation soient un peu plus éveillés que d'autres aux questions internationales par leur passé ou par leurs fonctions. Ce serait néfaste pour l'administration de laisser fleurir cette tendance. La politique du gouvernement va dans le sens de contrer la floraison de sections internationales dans toutes les branches de l'administration. C'est attirant l'international. Tout le monde aime cela l'international, tout le monde veut en faire et souvent tout le monde veut voyager à l'étranger ce qui est un autre aspect des choses. C'est très humain. On peut toujours avoir un voyage d'urgence à Singapour qu'on ne peut pas remettre. Sauf, que pour nous pour notre rôle, si le voyage n'est pas essentiel, vital ou urgent, il sera remis.

M. Vaugeois: M. le Président, je remercie le ministre de ses réponses non seulement parce qu'il a répondu mais parce qu'il a répondu dans un sens qui me fait plaisir à entendre. Je me permettrai un commentaire, lorsqu'on s'adresse à un ministère sectoriel c'est pour avoir un expertise sectorielle. Lorsque l'interlocuteur premier est quelqu'un qui double notre propre compétence internationale souvent cela ne facilite pas les choses et cela grossit les délégations. Ce sera certainement une des difficultés auxquelles le ministre aura à faire face. C'est une tendance de cette

administration québécoise de s'intéresser beaucoup aux relations internationales surtout dans certaines périodes. Je crois que la vigilance du ministère s'impose à cet égard. Si on peut me permettre une remarque à ce sujet, il me semble que ce serait peut-être de bon ton pour le ministère d'affirmer ce que le ministre vient de dire en le traduisant d'une façon plus éloquente dans l'organigramme.

M. Landry: Je vais prendre ces remarques en bonne part, n'est-ce pas?

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Vachon.

Les étudiants étrangers

M. Payne: En ce qui concerne la coordination sectorielle, la brochure qui nous a été livrée sur la question de la politique des étudiants étrangers soulève des discussions. Il y a eu beaucoup de discussions dernièrement dans les journaux, sur la place publique, à savoir quelle était la politique du ministère à cet égard? En ce qui concerne les orientations pour l'avenir, on mentionne qu'au cours de l'année 1984-1985 le ministère des Relations internationales en accord avec le ministère de l'Éducation va renégocier un certain nombre d'ententes, soit une vingtaine d'ententes, avec les pays de l'Amérique latine et les pays africains tant anglophones que francophones. J'aimerais, si c'est possible, qu'on procède à une brève discussion sur la politique du ministère à cet égard. Il s'est créé beaucoup d'inquiétude dans les milieux universitaires anglophones et autres. Je n'ai jamais entendu de la part du ministre et de ses fonctionnaires une justification de cette politique. Je ne la remets pas en question, mais il s'agit d'information.

M. Landry: D'abord, je pense que le Québec a à offrir, aux pays en voie de développement en particulier sur le plan de l'éducation ou sur le plan des transferts de technologie, des choses non négligeables et que peu d'autres pays occidentaux peuvent offrir, en ce sens que nous avons ici la possibilité aussi bien de former dans leur langue des spécialistes du Ghana que des spécialistes de la Réplique centrafricaine, qui, dans la ville de Montréal, pourraient étudier dans la langue qui leur est la plus familière. S'il y a inquiétude parmi la communauté anglophone, je le déplore et je prétends qu'elle n'est pas fondée cette inquiétude. C'est un immense avantage pour le Québec de pouvoir parler à ces interlocuteurs tiers-mondistes en matière d'éducation, de science et de technologie dans les langues occidentales qui leur sont les plus familières. C'est un atout pour notre système d'éducation et nous n'avons pas l'intention de l'oublier ou de le gommer. Cependant, comme nous sommes dans un contexte de rareté des moyens et d'économie des moyens et que le Québec est un espace économique de 6 500 000 d'habitants, il faut faire des choix des fois très douloureux, des fois moyennement douleureux pour vraiment avoir une attitude tiers-mondiste. C'est intéressant pour nous d'avoir de nombreux étudiants de pays occidentaux développés et de pays plus riches que ne l'est le Québec et que ne l'est le Canada. Cependant, on ne veut pas avoir le même traitement financier pour ces étudiants qu'on peut avoir pour les Ghanéens ou les Togolais. (12 h 30)

Le Président (M. Gagnon): Je m'excuse, M. le député de Vachon on vous reconnaîtra immédiatement cet après-midi puisque vous n'avez pas terminé votre droit de parole. Il est 12 h 30.

M. Lincoln: Si le député en convient, une brève question, peut-être qu'on aurait pu finir cinq minutes en retard, cela m'est égal.

M. Payne: Cela m'est égal.

Le Président (M. Gagnon): Alors, cela va. Allez-y d'abord.

M. Payne: Est-ce que la disparité, si cela existe, entre les frais de scolarité pour les milieux anglophones et francophones est explicable exclusivement en fonction des ententes qui sont signées ou qui ont été signées entre le Québec et les autres pays? Y a-t-il d'autres critères possibles pour une telle disparité? Par exemple, je sais et je me souviens, qu'à l'époque où j'ai travaillé avec un certain nombre d'ententes signées avec le "New England States" des États-Unis, ce n'était pas exclusivement le tiers monde qui bénéficiait d'un certain nombre d'ententes avec le Québec. Alors, bref, est-ce que la disparité, si cela existe, entre les quelques étudiants anglophones et francophones, est exclusivement en vertu des ententes qui existent ou est-ce qu'il y a d'autres critères?

M. Landry: Notre attitude générale avec les pays occidentaux développés, donc les États-Unis d'Amérique, c'est la réciprocité. Nous sommes capables de payer, ils sont capables de payer. On ne peut pas avoir la même attitude avec les tiers-mondistes, c'est la raison pour laquelle il y a une discrimination de facto en faveur des étudiants du tiers monde. Mais la discrimination ne doit pas être sur une base linguistique, elle doit être sur la base du revenu per capita du pays que l'on aide. Si on était un pays à 12 000 $ de revenu per capita cela va être sur une base mutuelle. Si

on est en face d'un pays qui a un revenu per capita de 700 $, cela va être de l'aide à l'étranger. Je pense que la collectivité québécoise est très heureuse de le faire. Si vous me dites ultimement on va peut-être avoir plus d'étudiants étrangers francophones que d'anglophones venant des pays du tiers monde, je vais vous répondre qu'il y a là rien d'étonnant puisque le Québec a une mission particulière et une facilité particulière à échanger avec les pays du Maghreb, avec les pays francophones d'Afrique, avec certains pays d'Amérique latine. Tout cela est dans la nature des choses. Dans notre système scolaire, en général au Québec, il y a quoi? Il y a 10% d'étudiants anglophones dans l'ensemble du système parce que cela reflète la réalité sociologique et démographique du Québec. Je n'en fais pas un barème, il se pourrait très bien que pour les étudiants étrangers la proportion d'anglophones soit beaucoup plus élevée et cela fait partie du rayonnement de la mission du Québec. C'est bien comme cela et cela doit être maintenu.

M. Payne: J'ai quelques autres questions à poser à cet égard, mais on pourrait y revenir cet après-midi dans le sens de discuter la politique qui vise les ententes entre le Québec, d'autres pays et d'autres États, les États-Unis, par exemple. Ils sont nombreux les États qui ont des ententes; comme je le disais, les New England States ont des ententes avec le Québec. On pourrait discuter davantage quels sont les critères qui favorisent telle ou telle université ou tel ou tel accord de réciprocité avec les autres pays et les autres États. C'est un sujet qui m'intéresse.

M. Landry: Vous avez raison. Souhaitez-vous qu'on poursuive la discussion ou voulez-vous qu'on y revienne?

M. Payne: Dans mon temps qui me revient cet après-midi, oui.

Le Président (M. Gagnon): Si vous me le permettez, effectivement oui, cet après-midi à la reprise des travaux, on pourrait revenir sur le sujet et après je reconnaîtrai le député de Nelligan. Je voudrais suspendre...

M. Landry: M. le Président de la séance, avant que vous suspendiez...

Le Président (M. Gagnon): Oui, M. le ministre.

M. Landry: ...je voudrais vous demander une information. La défense des crédits cet après-midi est prévue à 16 heures: j'imagine que cela veut dire après la période des questions au cas où elle se prolongerait?

Le Président (M. Gagnon): C'est cela, effectivement.

M. Landry: Très bien.

Le Président (M. Gagnon): C'est ce que j'allais dire.

Les travaux sont suspendus jusqu'après les affaires courantes à l'Assemblée nationale cet après-midi, c'est-à-dire autour de 16 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 35)

(Reprise de la séance à 16 h 14)

Le Président (M. Gagnon): La commission des institutions poursuit ses travaux avec le mandat d'étudier le budget du ministère des Relations internationales pour l'année 1984-1985.

Lors de la suspension de nos travaux, la parole était au député de Vachon qui n'avait pas terminé ses questions. M. le député de Vachon.

M. Payne: Merci, M. le Président. J'ai apprécié les propos du ministre, ses précisions sur la politique en ce qui concerne l'accueil pour les étudiants qui viennent de l'extérieur du Québec. Ma question était pour savoir si la disparité qui existe, apparemment, était en fonction des ententes qui existent avec les pays francophones.

J'aimerais maintenant poser une question plus large, si c'est possible, sur les critères que le ministère se donne pour négocier de telles ententes. J'avais le privilège de travailler dans le cadre de certaines ententes que nous avons, comme je l'ai mentionné, avec les New England States, ententes négociées entre le ministère de l'Éducation et ces États. Ma question serait: Quels sont les critères? Quelle est la politique? Est-ce que nous favorisons les ententes avec tous les États et toutes les universités qui se montrent intéressés à avoir des ententes de réciprocité avec le Québec?

M. Landry: Oui, M. le Président. En ce qui touche les États-Unis d'Amérique, pour ces ententes de réciprocité, je pense que le seul critère est plus il y en a, mieux c'est. C'est une opération compte à compte, qui ne nous coûte rien puisque les Américains accueillent nos étudiants et que nous accueillons les leurs. Étant donné l'avantage extraordinaire que nous avons de posséder une frontière commune avec quatre États des États-Unis d'Amérique et d'être les voisins immédiats de la plus grande puissance économique, scientifique et technologique de l'histoire, je ne vois pas pourquoi on se priverait d'avoir le flot culturel le plus abondant possible et qui ne coûte rien aux

contribuables.

Je vais vous donner une idée de ce qui se fait présentement. Vous avez parlé de New England. On a New England Board of Higher Education, Conférence des recteurs et principaux des universités du Québec, ce sont les deux participants: 260 institutions membres; 33 institutions participantes; étudiants touchés: Américains au Québec 22; Québécois en Nouvelle-Angleterre, 12. C'est notre première année d'opération. On en a avec State University of New York, California State University and College System. Le total est vraiment intéressant: il y a 98 Québécois étudiant aux États-Unis, selon ces modalités, et 100 Américains étudiant au Québec. Alors, on vise actuellement à l'équilibre. Plus il y en aura, mieux ce sera. Il n'y a pas de critères.

M. Payne: Maintenant, pour le cas d'un État ou d'un pays avec lequel il n'y a pas d'entente, est-ce qu'il y a une disparité? Peut-être que la question ne relève même pas du ministère des Affaires intergouvernementales ou du ministère en question. Là où il n'y a pas d'entente, y a-t-il une disparité entre les frais d'admission au Québec pour un francophone et pour un anglophone?

M. Landry: Quand il n'y a pas d'entente, M. le député...

M. Payne: Là-dessus, il y avait beaucoup de discussions.

M. Landry: ...c'est le régime général qui s'applique. Quand il n'y a pas d'entente, il n'y pas de disparité. Il n'y en a pas entre les étrangers et les Québécois, il n'y en a pas entre les anglophones et les francophones. C'est le même prix pour tout le monde s'il n'y a pas d'entente. Quand il y a des ententes bilatérales comme cela, c'est du compte à compte; alors, cela ne s'applique pas, on s'entend bien. Là, vous me parlez de pays qui ne seraient pas les États-Unis d'Amérique, qui ne seraient pas dans ce cadre, et où il n'y aurait pas d'entente. Il n'y a pas de discrimination.

M. Payne: Non, c'est parce que moi-même, comme député, je veux mettre à l'aise les membres de la communauté anglophone qui nous posent, depuis quelques semaines, la question à savoir s'il y a une disparité entre les francophones et les anglophones là où - et on vient tout juste de l'établir - il n'y a pas d'entente.

M. Landry: Bien, il n'y en a pas. Remarquez, encore une fois, que je ne suis pas un spécialiste de cette question. Comme vous l'avez dit vous-même, notre ministère, non plus, n'est pas un spécialiste de cette question parce que c'est le ministère de l'Éducation qui s'occupe du financement des universités et de la tarification. Nous, on sert d'interlocuteurs pour négocier des ententes quand il y en a. Alors, vous ne parlez pas au bon interlocuteur pour les cas où il n'y a pas d'entente.

M. Payne: Oui. La question m'intéressait...

M. Landry: Votre question est remplie d'intérêt.

M. Payne: ...parce que c'était l'objet de l'un des éléments faisant partie des perspectives préliminaires pour l'année prochaine, à la page 64.

M. Landry: Cela, c'est quand on fait des ententes.

M. Payne: Oui, c'est cela. Mais, il y a deux côtés à la même médaille: là où il y a des ententes et là où il n'y en a pas.

M. Landry: Oui, et quand on fait des ententes - j'ai partiellement répondu à votre question ce matin - nous devons utiliser cette circonstance favorable que le Québec compte des universités de langue anglaise, ce qui n'est pas le cas pour la France, la Belgique et la Suisse; les autres pays occidentaux, en général, n'ont des universités que d'une seule langue. Nous en avons des deux langues et cela nous permet d'aider davantage le tiers monde, qu'il soit anglophone ou francophone, en ce qui concerne les langues occidentales parlées par ces pays du tiers monde. Les étudiants anglophones du tiers monde qui veulent étudier en anglais ont un vaste choix d'universités. Comme il y en a des centaines et des centaines aux États-Unis, qu'il en a en Grande-Bretagne, en Australie, en Nouvelle-Zélande, dans le reste du Canada, il ne serait pas incongru que le Québec ouvre ses portes en proportion ou à peu près de ses étudiants anglophones ou francophones à l'intérieur du territoire. En d'autres termes, s'il y avait plus de francophones que d'anglophones, je pense que le gouvernement du Québec ferait bien d'agir ainsi pour les deux raisons que j'ai données. Car on a beaucoup plus de places universitaires francophones qu'anglophones au Québec et cela reflète la composition de la population; deuxièmement, pour un Togolais qui veut étudier en français, s'il ne va pas en Belgique, en Suisse ou en France, il ne peut pratiquement venir qu'au Québec. Si on parle d'un Ghanéen, il peut aller à Perth en Australie, dans tout le réseau universitaire américain, il peut aller dans tout le réseau universitaire canadien, à McGill, à Concordia ou à Bishop.

Le Président (M. Gagnon): Cela va?

M. Payne: Oui, merci. La deuxième question touchait la formation de la main-d'oeuvre médicale à l'étranger. II y a une question sur cette partie du rapport qui touche le secrétariat interministériel mis sur pied il y a quelques années, cela fait référence à quoi? En réalité, on déplore un peu partout le fait qu'on n'a pas besoin de médecins supplémentaires au Québec; il y a plutôt un surplus de médecins.

M. Landry: Ce ne sont pas, non plus, des médecins pour nous. Ce sont des médecins du tiers monde ou de certains pays industrialisés. Ce sont vraiment des pays industrialisés quand on dit la France, la Belgique, l'Espagne. Ce sont des gens qui viennent ici, dans le cadre de la coopération internationale, occuper des postes d'internes et qui retournent ensuite dans leur pays. C'est complètement "irrelevant", pour employer votre langage le plus familier, qu'on ait besoin ou pas de médecins. Ils viennent et ils vont.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? M. Payne: Oui. Merci beaucoup.

Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le député de Vachon. M. le député de Nelligan avant.

M. Vaugeois: Non, c'est parce que c'était sur un des sujets qui avaient été abordés.

M. Lincoln: Moi, je veux bien si c'est pour être bref.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Trois-Rivières.

M. Vaugeois: C'est vrai que c'est sur le même sujet. Le ministre a eu des propos très éloquents pour démontrer la richesse de notre voisin, les États-Unis. Je voulais un peu lui suggérer de ne pas oublier toutes les politiques de réaménagement urbain que pratiquent les Américains, qu'on aurait profit à mieux connaître ici. Alors, si le ministre veut prendre l'initiative de favoriser des missions au niveau municipal, même au niveau des affaires municipales, je pense que cela serait opportun, parce que j'ai vu qu'il avait une grande admiration pour nos voisins. Il y a là un domaine dont on ne profite pas suffisamment, à mon avis, en termes d'expertise.

M. Landry: Je me souviens de la prédilection du député, président de la commission, pour les merveilles d'aménagement de la ville de Boston en particulier. Je partage son admiration. Je voudrais que le même modèle se reproduise, d'abord, à Trois-Rivières et, ensuite, dans plusieurs autres villes du Québec.

M. Rivest: Si le député avait pu être maire.

M. Landry: Non. Je vous remercie. Votre question illustre bien ma pensée que nous avons aux États-Unis, non pas le réservoir de la perfection, ce n'est pas ce que je veux dire, mais un réservoir prodigieux en matière de technologie, en matière d'urbanisme, en matière économique, en matière de culture. Et il faut s'en servir.

Le Président (M. Gagnon): Merci. Je reviens au député de Vachon pour une courte question avez-vous dit?

M. Payne: C'est seulement une petite remarque. Moi aussi, cela m'intéresse beaucoup la politique, les différents programmes. Peut-être que ma suggestion va dans le même sens que celle du député de Trois-Rivières, ce matin: je serais très intéressé à connaître un peu plus le contenu des différents programmes. On parle, à la page 65, de "la formation de la main-d'oeuvre médicale étrangère". Quelques lignes supplémentaires auraient pu répondre à ma question.

M. Landry: M. le député, peut-être, pour répondre immédiatement à votre question, l'un des fonctionnaires pourrait faire quelques considérations descriptives sur ces programmes. Lequel de notre équipe connaît le mieux la question? M. Roquet, sous-ministre associé.

Le Président (M. Gagnon): M. Roquet.

M. Roquet (Claude): M. le Président, sur les quelques thèmes qui ont été évoqués, quelques propos qui pourraient être complétés, si vous le souhaitez, par une documentation additionnelle que le ministre pourrait facilement envoyer aux membres de la commission.

Du côté de la santé, ce qu'il y a à noter, c'est que deux des États en question, la France et la Belgique, font l'objet de coopération structurée avec le Québec. Et c'est dans ce cadre que sont venus, au cours des ans, s'établir des programmes de coopération en matière médicale, lesquels sont extrêmement appréciés. De même, du côté de l'Espagne, notamment de la députation de Madrid, il y a, depuis plus de dix ans, une coopération importante avec l'Institut de cardiologie de Montréal. Et il était assez naturel que certains compléments s'ajoutent en termes de résidents. Il y a eu, cependant, une première extension, ainsi que

le soulignait le ministre, en direction du Liban, depuis maintenant plusieurs années pays très éprouvé. Et une extension est envisagée vers d'autres pays du tiers monde. C'est une des raisons, d'ailleurs, disons un des objets, de la mise en place du comité interministériel mentionné ici, dans les notes. La Tunisie est une cible probable en rapport, notamment, avec un projet de coopération médicale à Sousse.

Pour ce qui est du domaine municipal, je dirais peut-être, si vous le permettez, M. le Président, que c'est identifié comme une cible particulièrement importante de coopération internationale, pour plusieurs raisons. D'abord, il y a, évidemment, au Québec une vie municipale abondante, et c'est un atout, que ce soit celle d'une grande métropole comme Montréal, celle d'une capitale comme Québec ou d'autres municipalités. Il y a là des responsabilités qui relèvent du Québec. Par ailleurs, le milieu municipal est un milieu très preneur d'équipements et de services, on le sait. Les projections pour les vingt prochaines années indiquent une explosion de la population, notamment dans les municipalités du tiers monde, donc une explosion de la demande pour les équipements et services. Il y a là, pour le Québec, à la fois une politique, si vous voulez, institutionnelle pour les municipalités, sociale dans son contenu, mais également à retombées économiques. Et ce n'est pas par hasard que le congrès de la FMVJ a lieu à Montréal en 1984; c'est une initiative qui a été travaillée pendant des années par le ministère des Affaires municipales et le ministère des Relations internationales, ensemble, et également avec les ministères économiques. Nous pouvons envoyer des informations complémentaires, si vous le souhaitez.

Le Président (M. Gagnon): Merci. M. le député de Nelligan.

Représentation à l'étranger

M. Lincoln: Vu le temps qui presse, j'aurais des questions d'ordre général sur la politique et les objectifs du ministère. Peut-être que l'on pourrait laisser cela pour plus tard. Je voudrais aller dans les chiffres maintenant, puisque c'est l'objectif des crédits, peut-être parler un peu de la représentation à l'étranger sur laquelle nous avons pas mal de questions.

Un des objectifs du ministère pour 1984-1985, c'est de renforcer le réseau à l'étranger. Le montant alloué est de 385 700 $. Pourriez-vous nous dire quelles délégations vont être renforcées? En second lieu, on parle dans le cahier des crédits d'ouvrir des délégations à Hong Kong, à Singapour, à Bogota. J'ai noté que Jacques-Yvan Morin écrit, dans son article du Devoir, qu'il est temps d'assurer notre présence à d'autres endroits; il parle du Brésil, d'Alger, de Riad, de Dakar, de Vienne et de la Scandinavie.

Le ministre du Commerce extérieur nous avait dit qu'il était très favorable à la Scandinavie. Alors, j'aurais voulu demander, dans un premier temps, quelles sont les délégations qui doivent être renforcées par rapport aux délégations existantes et, ensuite, quels sont les projets précis pour Hong Kong, Singapour et Bogota. Va-t-on aller plus avant, comme semblait l'indiquer Jacques-Yvan Morin dans son article? A-t-on pensé à d'autres endroits comme le Brésil, l'Algérie, l'Arabie Saoudite, Dakar, Vienne et la Scandinavie? Pourrait-on avoir des réponses précises sur ces deux volets?

M. Landry: Je vais essayer d'être le plus précis possible. Le président en titre de la commission est revenu au fauteuil? (16 h 30)

Le Président (M. Vaugeois): Je remplace le président.

M. Landry: Quelles délégations actuelles sont renforcées? Tokyo, Mexico et Caracas. Quels sont les projets pour l'avenir à court terme, sous réserve, évidemment, de l'approbation par le Conseil des ministres? Quelles sont les recommandations que je vais faire? Comme je l'ai déjà laissé entendre à plusieurs reprises: Hong Kong, Singapour, Bogota et Stockholm.

M. Lincoln: Les autres postes mentionnés dans l'article du Devoir, sans doute que l'ancien ministre les a mentionnés; cela a dû être un sujet de discussion au sein du ministère, je présume. Est-ce pour plus tard? Y a-t-il des possibilités que durant l'année en cours on pense, par exemple, à Alger, à Riad ou à Dakar, ou est-ce pour l'avenir lointain? Y a-t-il des projets en cours pour ces postes?

M. Landry: Je dois vous dire, M. le Président, que si nous disposions simplement de la proportion d'argent québécois envoyé au gouvernement du Canada pour ses réseaux diplomatiques, on couvrirait toutes les capitales importantes de la planète cette année, sauf que tel n'est pas le cas. Nous sommes dans un contexte d'économie des moyens qui force, d'abord, à la réflexion sur l'ouverture de chacune de ces missions -longues analyses, comparaisons, discussions, critiques - et qui force aussi à l'ingéniosité et à l'invention, en particulier par l'utilisation de fonctionnaires itinérants.

Vous avez parlé de Riad. Riad est actuellement cette section du monde couverte, pour la partie économique, par un agent itinérant bien connu, M. Jean Labonté, l'ancien patron de la SDI, un ancien cadre

supérieur du ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme et qui, à peu de frais - parce qu'on a ses frais d'hôtel et de déplacement - assure une présence québécoise pour les questions économiques dans tous les pays du golfe persique.

À titre expérimental, nous avons aussi une entente avec une firme privée qui va assurer une présence québécoise auprès d'institutions internationales en Asie du Sud-Est en particulier. Le gouvernement va utiliser, de façon contractuelle, les services de cette firme. On n'a donc pas de frais fixes, on n'a pas de personnel, on n'a pas de déplacements à payer. C'est un contrat qui va nous assurer une présence sans déployer tout l'appareil diplomatique conventionnel qui coûterait cher.

Je reviens un peu sur mes propos liminaires en réponse à votre question. Il faut bien voir que les contribuables québécois font déjà un très gros effort diplomatique à travers la diplomatie canadienne qui, elle, a des moyens extrêmement considérables. Je vous donne un exemple. Le seul poste de Lima au Pérou, l'ambassade du Canada, coûte 5 000 000 $ pour une ville qui est importante, mais qui n'est pas la plus importante de la planète. Regardez l'argent qu'ils dépensent comparativement au budget du ministère des Relations internationales. Nous dépensons l'argent des contribuables le plus prudemment possible, en essayant d'avoir le meilleur retour possible sur l'investissement.

M. Lincoln: M. le ministre, il y a quelques questions qui sont soulevées par vos réponses. Par exemple, pour ce qui est de renforcer les délégations, vous mentionnez Tokyo, Mexico et Caracas. Tout d'abord, Tokyo, je pense que cela coule un peu de source, je vais la passer. Concernant Mexico, j'aurais aimé savoir quels sont les critères qui ont fait qu'on a choisi cette délégation pour la renforcer. Concernant Caracas, vous dites qu'on a renforcé la délégation, mais, selon les cahiers des crédits, il semblerait qu'au contraire on a diminué les effectifs d'une personne dans le ministère des Relations internationales. Je voulais savoir quels sont les critères qui ont fait choisir ces trois délégations plutôt que d'autres, mais je fais abstraction de Tokyo qui parle pour elle-même. Deuxièmement, j'aurais voulu avoir une précision sur Caracas. Troisièmement, pour les nouvelles délégations, par exemple, Hong Kong, Singapour, Bogota et Stockholm... On est déjà à Hong Kong. À ce moment, on est peut-être un peu confus de ce côté parce qu'on parle du ministère des Relations internationales et du ministère des Affaires internationales. Quand le ministre parle de Hong Kong, Singapour, Bogota et Stockholm, parle-t-il d'une délégation du ministère du

Commerce extérieur, d'une délégation du ministère des Relations internationales ou -puisqu'on regarde le budget du ministère des Relations internationales - strictement du ministère des Relations internationales?

M. Landry: Sur le plan technique, il y a une réponse simple à ce qu'a dit le député, M. le Président. Tous les agents à l'étranger ont leur support logistique fourni par le ministère des Relations internationales. C'est la raison pour laquelle cela apparaît à nos crédits, bien qu'un agent du ministère du Commerce extérieur soit payé par le ministère du Commerce extérieur; il laisse sa trace dans nos crédits parce qu'on le supporte sur le plan logistique. Est-ce que cela éclaircit cette partie de votre question?

M. Lincoln: Partiellement, parce que, quand vous parlez du cas de Caracas, vous dites que vous renforcez la délégation et d'après ce que nous pouvons voir par le cahier des crédits, d'après ce qui se détache, ce sont les Relations internationales comme telles, parce que nous avons fait le partage du personnel entre le ministère des Relations internationales, le ministère du Commerce extérieur et les autres ministères.

Lorsqu'on regarde le ministère des Relations internationales, le personnel qui agit strictement du point de vue des relations internationales, on va voir que, pour le poste de Hong Kong, on a quatre personnes dont deux sont maintenant attitrées aux Relations internationales et deux sont dans d'autres ministères, je suppose l'Immigration. D'après ce que nous voyons, ces personnes sont attitrées aux Relations internationales.

M. Landry: D'abord, quand vous parlez de notre présence à Hong Kong, il ne faut pas se méprendre, il y a une présence québécoise à Hong Kong des officiers de l'immigration, à cause du programme immigrant-investisseur. Mais là, ce dont je vous parle quand je parle de l'extension du réseau, il s'agit véritablement d'une présence québécoise sous forme d'une délégation. Les quatre postes, je les repasse un par un. À Hong Kong, je proposerai qu'il y ait une délégation qui va regrouper un délégué, un agent du commerce extérieur ainsi que nos deux officiers de l'immigration déjà sur place. À Singapour, il s'agira d'un agent du commerce extérieur qui relèvera d'une autre délégation située géographiquement à bonne distance, mais dans le même coin de la planète, c'est-à-dire Tokyo. À Bogota, il s'agira d'un agent du commerce extérieur qui relèvera de la délégation de Caracas. Et à Stockholm, il s'agira d'un agent du commerce extérieur qui relèvera de notre délégation générale de Londres.

M. Rivest: C'est comme cela depuis longtemps.

M. Landry: Pardon!

M. Rivest: C'est comme cela depuis longtemps.

M. Landry: C'est comme cela, M. le député, avec la nuance qu'il n'y a personne. Stockholm relève de...

M. Rivest: II serait en poste à Stockholm?

M. Landry: II y aurait quelqu'un en poste à Stockholm. Je peux maintenant vous dire pourquoi - c'était aussi dans le sens de votre question - on a choisi ces villes. Pour Tokyo, vous avez dit que cela coulait de source; je n'ai pas besoin de fournir de réponse, c'est évident. Pour le Mexique, c'est également évident parce que vous savez que le Mexique est le pays du tiers monde qui, dans les grands endettés, a remonté le plus rapidement la pente, a retrouvé la solvabilité le plus rapidement et de nouveau sa balance des paiements lui permet de redevenir un pays acheteur et un coopérateur technologique et économique pour le Québec.

À Caracas, c'est une question de volume d'activité de la délégation. Nous n'avions pas d'attaché culturel et vous savez qu'il y a des liens culturels évidents qui ont tendance à s'amplifier entre le Québec et l'Amérique latine pour des questions de langue. Nous sommes, comme nous le leur disons et comme ils nous le disent, les Latins du nord. Et pour eux c'est une chose importante que des Nord-Américains, au nord du Mexique, fassent partie d'un univers culturel qui ressemble au leur, le grand univers culturel de la latinité. Caracas est pour nous une plaque tournante, parce que nous ne pouvons pas être présents dans tous les pays d'Amérique latine, malheureusement, pour les raisons que j'ai dites plus tôt. Donc, notre délégué de Caracas a un rayonnement sur la Colombie, sur le Pérou, sur certains pays d'Amérique centrale, je crois. Alors, il ne faut pas prendre la ville de Caracas seulement pour son importance spécifique -c'est important, c'est notre plus grand fournisseur de pétrole, en particulier depuis 75 ans - mais il faut aussi prendre Caracas comme une plaque tournante et une desserte pour un certain nombre d'autres pays de cette région du monde.

M. Lincoln: M. le ministre, si on peut revenir sur la distribution au sein de cette délégation, c'est cela qui nous intéresse réellement parce que nous avons fait une espèce de partage des fonctions pour savoir, par exemple, combien de gens s'intéressent aux questions purement économiques au sein du ministère du Commerce extérieur dans les délégations. Je ne crois pas que les délégations relèvent du ministère des Affaires intergouvernementales, aujourd'hui les Relations internationales. Ce que je veux dire, c'est ceci: Vous prenez la délégation de Mexico, vous parlez de la relève, vous parlez du renouveau économique, l'attente du Mexique, etc. Or, nous, selon nos chiffres, on a quatorze personnes du côté du ministère des Relations internationales et deux personnes qui s'occupent du commerce extérieur. Vous parlez des nouvelles délégations qu'on va ouvrir, Singapour, Bogota, Stockholm: tout cela va aller du côté du commerce extérieur. Ce sont des gens qui vont dépendre du ministère des Relations internationales, mais qui vont avoir comme mission première de s'occuper du commerce extérieur. Nous voulions faire une espèce d'étude coûts-bénéfices pour connaître les gens qui ne sont pas du côté du commerce ou économique. Vous avez vous-même admis qu'il y a comme deux univers, il y a deux paliers. Il y a des gens qui font le côté politique, le côté diplomatique ou le côté autre que le commerce extérieur. Dans certaines délégations, nous avons des chiffres qui démontrent très clairement qu'il y a des gens qui sont affectés purement au côté général des relations internationales par opposition au côté du commerce extérieur.

On revient à Caracas. Vous avez dit que la délégation va être renforcée, mais l'année dernière, il semblerait, d'après les chiffres que nous avions, qu'on avait huit personnes. Il y en avait deux qui étaient au ministère du Commerce extérieur, c'est-à-dire à la section du commerce extérieur, et il y en avait huit autres qui faisaient un travail de relations internationales, diplomatiques, politiques etc. Maintenant, c'est arrivé à sept. Est-ce qu'on pourrait discuter le côté autre que celui des agents du commerce extérieur, qu'on étudiera lorsqu'on étudiera le Commerce extérieur?

M. Landry: D'accord. Vous le dites en terminant votre question, il y a une autre commission, qui s'appelle la commission de l'industrie, de l'économie et du travail, qui va passer en détail les agents du commerce extérieur. Mais là, je crois saisir le sens de votre objection et je vais essayer d'apporter un peu de lumière. Reprenons le poste de Caracas, où il y a un total de dix agents: deux au commerce extérieur, huit aux relations internationales. N'oubliez pas que les Relations internationales fournissent la logistique à tous les autres. Donc, les secrétaires, les téléphonistes, etc., sont compris dans les huit personnes. Disons que les deux au commerce extérieur ont chacun une secrétaire. Votre huit devient six. Il y a une téléphoniste qui travaille au moins à

demi-temps. Alors, cela fait 5 1/2. Un attaché d'administration à mi-temps, cela fait cinq, etc. Le délégué ou délégué général, chef de poste, suivant le cas: à Caracas, c'est un délégué qui est le patron de la maison. Alors ce dernier peut aussi bien consacrer son temps aux activités économiques, aux activités culturelles, aux activités purement politiques.

M. Lincoln: D'accord.

M. Landry: C'est difficile de faire le partage. (16 h 45)

M. Lincoln: D'accord. On arrive quelque part. On dit: On renforce le Mexique, on renforce Mexico, on renforce Caracas. Selon les chiffres qu'on voit ici, il y en a neuf au total à Caracas. L'an dernier, il y en avait dix: cela semble une diminution. Est-ce que cette diminution est au palier des "cléricaux" ou si ce sont des gens à un palier supérieur de la délégation?

M. Landry: Je vais le dire. Oui, M. le Président, ma réponse sera une bonne nouvelle pour le député et pour tout le monde, soit les contribuables. On a augmenté la productivité en ajoutant une machine à traitement de textes. À Caracas comme à Montréal, l'effet net est le même, soit un poste de moins.

M. Lincoln: Au Mexique, où on renforce la délégation, on ajoute deux personnes. Ce qu'on veut savoir, c'est si ce sont des personnes de palier inférieur dans la délégation ou si ce sont des cadres. Lorsqu'on parle de renforcer, s'agit-il de secrétaires, de "cléricaux" ou quoi?

M. Landry: On avait un problème de personnel de soutien, compte tenu du volume des activités. C'est du personnel de soutien qui vient de s'ajouter.

M. Lincoln: En tout, on a ajouté 15 postes à l'étranger, hors Canada, n'est-ce pas?

M. Landry: Oui, vous avez raison M. le député de Nelligan. Par ailleurs, là-dessus il y a beaucoup de recrutés locaux.

M. Lincoln: Est-ce qu'on peut savoir quels sont les critères de la décision d'ajouter des postes, puisque ce ne sont pas tous les 15 postes qui sont allés à Mexico, à Caracas ou à Tokyo? Il y a eu plusieurs endroits où on en a ajouté: à Chicago, à Dallas, etc. Quels sont les critères de la décision qui fait qu'on ajoute des gens? Je ne parle pas des secrétaires ni des sténographes. Je parle de gens qui sont à la délégation comme "seniors", comme cadres, comme exécutants. Quels sont les critères en vertu desquels on décide d'en ajouter ici ou là?

M. Landry: Cela dépend du volume d'activités et du mouvement dans le volume d'activités. Si on voit que, pour des raisons conjoncturelles, le volume d'activités a tendance à décroître, on ne va pas consacrer de ressources excédentaires. Prenons les agents purement de commerce extérieur en Europe de l'Ouest: présentement, à cause du voile monétaire qui fait que nos prix par simple jeu du mouvement monétaire ont augmenté de 40% en Europe de l'Ouest au cours des 15 derniers mois, ce n'est pas le temps en général de multiplier les efforts dans des secteurs où nos chances de "concur-rentialité" sont nulles. Cela dépend du volume d'activités. Cela dépend des succès de cette délégation, de sa facilité à pénétrer le milieu où elle se trouve. Il peut aussi y avoir des événements particuliers comme Dallas. Vous savez que Bell Helicopter a son siège social à Dallas, Fort Worth. Alors, on renforce Dallas à cause d'un très fort mouvement d'activités, d'échanges de cadres et de technologie - pour un certain nombre de mois - d'exportation de biens et de services vers cette région américaine.

M. Lincoln: Est-ce que nous aurions pu avoir un relevé des endroits où il y a des ajouts et des réductions de postes pour cette année?

M. Landry: Je ne sais pas si on a une page pour cela.

M. Lincoln: Pour les 15 postes, est-ce qu'on pourrait avoir un relevé des cadres, des sténographes, du personnel de soutien?

M. Landry: On peut très certainement vous donner ces détails. On peut le faire avec plaisir, avec la réserve qu'on ne peut pas le faire dans les minutes qui suivent.

M. Lincoln: Non, je comprends très bien.

M. Landry: M. L'Heureux, voulez-vous noter que le député aurait besoin d'une ventilation?

M. Lincoln: Est-ce que vous auriez pu nous dire si à Bruxelles, à New York, les réductions de postes ce sont des exécutants, du personnel de soutien? Qu'est-ce qui a été fait surtout par rapport à la réduction d'un poste à New York?

M. Landry: On ne bouge pas à New York, me dit-on. On était 29 et on demeure 29. Vous avez cela...

M. Lincoln: Non, non. C'est vrai qu'on reste à 29. Seulement, c'est le détail. Il y avait trois membres du personnel qui s'occupaient de ce qu'on appelle les autres ministères; il y en avait 22 au ministère des Relations internationales et maintenant c'est 21 et l'autre passe à 1. Alors, qu'est-ce qui a justifié le changement? Le total est bon, mais, au sein de la section ministère des Relations internationales, est-ce que ce fut un exécutant, quelqu'un du personnel de soutien? Est-ce qu'on pourrait le savoir?

M. Landry: On pense, sous toute réserve, que c'est quelqu'un du personnel de soutien.

M. Lincoln: Vous allez nous donner la ventilation ce soir sur cela?

M. Landry: Oui.

M. Lincoln: Est-ce que vous pourriez nous dire ce qui a justifié l'ajout de huit postes à Paris?

M. Landry: Oui, je vais vous le dire. On savait que vous alliez poser la question. Application des accords en matière d'immigration: deux postes. Renforcement de l'équipe s'occupant de 1534-1984 - c'est provisoire, évidemment; c'est une activité ponctuelle: deux postes. Ajout de personnel de soutien pour un conseiller scientifique et technologique - vous savez que les échanges technologiques avec la France augmentent en volume considérablement - on a là une secrétaire donc, un poste. Renforcement de l'équipe s'occupant des affaires francophones et multilatérales: une personne. On a parlé de l'agence ce matin. Alors, l'agence, c'est dans le multilatéral. On a un délégué multilatéral à Paris actuellement, M. Tardif, et on rajoute une personne qui est un professionnel. Enfin, accroissement du soutien du service culturel: deux postes également reliés aux événements de 1534-1984. Cela veut dire quatre personnes pour 1534-1984, pour une opération ponctuelle, qui seront rappelées ou affectées à d'autres tâches quand l'opération sera terminée.

M. Lincoln: Vous avez dit deux personnes à 1534-1984.

M. Landry: J'ai dit quatre personnes en tout. Il y en a deux spécifiquement à 1534-1984 et il y a deux "culturels" reliés à 1534-1984.

M. Lincoln: II y a donc quatre postes temporaires qui vont être résiliés.

M. Landry: Exactement. Oui.

M. Lincoln: Mais 1534-1984, est-ce que c'est comptabilisé au ministère des Relations internationales ou s'il n'y a pas tout un appareil 1534-1984 au ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme qui a déjà un budget spécial pour cela?

M. Landry: Oui, mais n'oubliez pas qu'on fournit toujours la logistique; même si c'est pour un membre de la Sûreté du Québec, comme c'est le cas à Paris, on fournit sa logistique. Alors, ne cherchez pas ses dépenses dans le budget de la sûreté, cherchez-les chez nous. Vous les avez trouvées, d'ailleurs, vous les avez vues. Dans certains cas, si c'est un fonctionnaire aux Relations internationales, on paie tout; si c'est un fonctionnaire d'un autre horizon, on paie la logistique.

M. Lincoln: Alors, à Paris, la représentation Immigration est un personnel de combien sur les 78? Est-ce que vous le savez?

M. Landry: Sept professionnels, cinq ou six de soutien. Je vous ferai remarquer que je n'ai aucune juridiction sur leur travail. Je me doute bien que ces gens sont là parce qu'on a de très longues listes d'attente d'immigrants français voulant venir au Québec. Ces gens, me dit-on, couvrent un très grand nombre de pays, y compris les pays du Maghreb. Vous vous rendez compte qu'ils ont une tâche considérable sur les bras.

M. Lincoln: Compte tenu de l'importance de la délégation de 78 personnes, serait-il possible d'avoir une ventilation des postes occupés par les 78, pas pour le personnel de soutien, mais pour les professionnels?

M. Landry: Le personnel qui s'occupe du fonctionnement vraiment: les cadres et les professionnels?

M. Lincoln: Ou les 66 qui sont comptabilisés au ministère des Relations internationales. C'est cela, les 66.

M. Landry: II y a, à l'annexe "J", une réponse globale à ce que vous dites. Par ailleurs, on peut très bien vous fournir une ventilation de tout cela. Ce n'est pas très compliqué. Je pense qu'à la prochaine séance de notre commission on pourrait déposer cela avec plaisir.

M. Lincoln: Oui, oui, pour chacune des fonctions.

M. Landry: Avec plaisir. Ce n'est pas impossible techniquement.

M. Lincoln: Les 61 personnes au total

qui oeuvrent et qui sont comptabilisées au ministère des Relations internationales aux États-Unis, auriez-vous pu nous indiquer les fonctions qu'elles occupent? Nous comprenons très bien ce que font celles qui sont comptabilisées au ministère du Commerce extérieur. Du point de vue des délégations, du personnel comptabilisé au ministère des Relations internationales aux États-Unis - il y en a six à Chicago et dix à Boston -pourrait-on savoir exactement quelles sont leurs fonctions? Varient-elles d'endroit en endroit ou s'il y a une uniformité d'action par rapport à ces délégations aux États-Unis, à Atlanta, à Dallas, etc?

M. Landry: Vous pouvez assumer que la plupart sont des fonctions économiques, avec l'exception des grandes métropoles culturelles comme New York et Boston et la Côte Ouest. Mais on va vous donner la ventilation. On va vous donner la même pour les États-Unis qu'on vous a donnée pour Paris, mais considérez que, mises à part les grandes métropoles culturelles, ces gens-là s'occupent d'économie surtout.

M. Lincoln: Quand vous voyez New York où on a 21 personnes, je comprends qu'il y a un personnel de soutien quelconque, c'est sûr et c'est normal, en principe. Mais sur un personnel de 29 personnes au total, nous avons 21 personnes qui sont assignées ou comptabilisées au ministère des Relations internationales et il y en a cinq au ministère du Commerce extérieur. Je sais que vous avez pris l'exemple de Boston, pensant qu'il y a autre chose là: on a quatorze personnes en tout, comprenant dix personnes comptabilisées au ministère des Relations internationales et trois seulement au ministère du Commerce extérieur. C'est la même chose pour Chicago; on a dix personnes en tout, dont dix sont au ministère des Relations internationales. Il semblerait que, sur ces 61 personnes, la majorité est comptabilisée au ministère des Relations internationales. Même si on fait exception du personnel de soutien - on ne peut pas avoir seulement du personnel de soutien - il y a sûrement une grosse part de cette délégation qui fait autre chose que de l'économie. C'est ce que l'on veut situer: que font ces gens? Font-ils de la diplomatie ou de la politique? Que font-ils? C'est ce qu'on aimerait savoir.

M. Landry: Bon! On va prendre un cas qui peut l'illustrer particulièrement, c'est le cas de New York avec 29 agents. Là-dessus pour les autres ministères, il y a quatorze personnes sur les 29, et ce sont toutes des fonctions économiques parce que ce sont des fonctions touristiques et de commerce extérieur. Les fonctions touristiques sont économiques, évidemment.

M. Lincoln: Ah oui!

M. Landry: Donnez à chacun une secrétaire et vous êtes déjà rendu aux trois quarts de l'effectif global, parce que, dans les 22 aux Relations internationales, n'oubliez pas qu'il y a toutes les secrétaires des gens qui ont des fonctions économiques et touristiques. Alors, 3 et 4: 7, plus 7: 14, plus une secrétaire à chacun, on est rendu à plus que le compte.

N'oubliez pas aussi que le délégué général, le chef du poste, doit répartir son temps suivant les priorités de sa délégation et suivant l'effort du gros de ses troupes. Alors, à New York, c'est M. Gosselin qui est lui-même d'un horizon économique. C'est un ancien vice-président du Canadien National et il faut que vous le comptiez dans l'effort économique. Il y a aussi des gens qui font autre chose que de l'économique. Ne nous obsédons pas: la question économique est déterminante, on l'a assez dit, mais il y a autre chose aussi dans la vie, fort heureusement, et ces choses s'appellent la culture, l'éducation qui fait partie de la culture au sens large, la science et la technologie.

En général, il y a des retombées économiques qui viennent avec cela. Voyez-vous, on a mentionné tout à l'heure des accords extrêmement intéressants dans le monde universitaire et dans le monde culturel: 100 jeunes Québécois, hommes et femmes qui sont aux États-Unis et autant d'Américains qui sont ici dans nos maisons d'éducation. Bien, il faut que cela soit géré, ces programmes. Il faut que cela soit administré. Il faut que les contacts soient faits. (17 heures)

M. Lincoln: Je comprends, par exemple, qu'on puisse dire que Paris est le centre de la francophonie. C'est le pays le plus important. Culturellement, au Québec, on s'en sert pour le transfert de technologie. Là, on a un personnel de 78 personnes. Mais qu'est-ce qui peut justifier qu'à Bruxelles on ait un personnel composé de 22 personnes, dont 17 affectées au ministère des Relations internationales? On dira que c'est le Marché commun, mais avec Paris qui est tout contre avec un personnel de 78 personnes n'aurait-on pas pu faire en sorte que la délégation de Bruxelles ait un personnel de moins de 22 personnes? Ne pensez-vous pas que c'est une situation qui devrait être revue, une délégation de 22 personnes à Bruxelles, quand on a déjà 78 personnes oeuvrant à Paris?

M. Landry: Encore là, on va regarder Bruxelles en détail. Dans "autres ministères", vous avez dix personnes. Donnez-leur à chacune une secrétaire, comptabilisée dans les 18 aux Relations internationales, et le grand total est de 23. Alors, je ne pense pas

qu'il y ait disproportion. Il a ces documents?

M. Lincoln: Oui.

M. Landry: D'accord. Alors, on va rendre disponible la liste exhaustive; cela fait, évidemment, des documents extrêmement considérables: On a le délégué qui est un cadre supérieur, on a un agent de recherche et planification, spécialiste en sciences de l'éducation, un technicien en administration, un cadre supérieur; on a des gens recrutés localement, on a une personne de l'immigration avec sa secrétaire, un conseiller économique et son soutien. Ce sont des mini-postes au regard de la diplomatie. N'oubliez pas cela. Quand on dit qu'on a 23 personnes, dont plus de la moitié sont au soutien, ce sont des téléphonistes, des télexistes, des gens pour taper des lettres et des messagers. Il y a enfin une philosophie générale dans cela. Le jour où le gouvernement du Québec a décidé de se donner une diplomatie, il est obligé de faire le minimum pour soutenir ses diplomates à l'étranger. Il n'y a personne qui va aller faire le bouffon dans un pays extérieur sans avoir le support logistique lui permettant d'accomplir son travail.

M. Lincoln: II y a sûrement des barèmes, des façons de comparer, des critères de comparaison. L'Ontario a trois personnes à Bruxelles, dont un délégué et deux personnes de soutien, pour un budget de 194 000 $.

M. Landry: Vous parlez de Paris ou de Londres?

M. Lincoln: Je parle de Bruxelles. Je pourrais aussi parler de Paris et de Londres. Là aussi c'est intéressant.

M. Landry: Bien, ce n'est pas tout à fait pareil. La langue anglaise n'est pas l'une des deux langues officielles de la Belgique, "to start with". Alors, les relations culturelles entre la Wallonie et l'Ontario pourraient être relativement minces, de même qu'entre la Flandre et l'Ontario.

M. Lincoln: Oui, mais à ce moment, si l'on commence à faire ce genre de comparaison sur la langue.

M. Landry: On ne commence pas, on finit avec ce genre de comparaison. C'est absolument déterminant.

M. Lincoln: Oui.

M. Landry: Savez-vous combien il y a de fonctionnaires à l'ambassade du Canada à Paris?

M. Lincoln: Non, je ne parle pas de l'ambassade du Canada, je parle de l'Ontario.

M. Landry: Bien moi, je vais vous en parler un peu. Avec notre petit effort de 70 personnes, eux, ils en ont des centaines. Je pense que c'est 500 fonctionnaires dont deux ou trois ambassadeurs en titre avec des chauffeurs, des limousines et des résidences luxueuses à l'orée du bois. Alors, cela veut dire que le Canada a considéré que, parce que le Canada était partiellement de langue française, il mettait le paquet à Paris. Le Québec a fait la même chose.

M. Lincoln: Enfin, on pourra étudier les crédits fédéraux quand l'ex-ministre, M. le député de Lafontaine, sera à Ottawa; il pourra poser des questions. Moi, cela ne m'intéresse pas du tout ce que le Canada fait dans le moment. Tout ce qui m'intéresse, c'est le Québec.

M. Landry: Vous avez parlé de critères de comparaison. Alors, je vous cite l'exemple d'un grand pays occidental, le Canada.

M. Lincoln: Ce n'est pas le point.

Le Président (M. Gagnon): On va essayer de ne pas parler ensemble.

M. Landry: C'est une bonne suggestion, M. le Président, je m'excuse.

M. Lincoln: Je ne pense pas qu'on parle de la même chose parce que, à ce que je sache, en 1984, le Québec n'est pas un pays souverain, n'a pas d'ambassadeur ou ne devrait pas en avoir.

M. Landry: Vous voulez dire qu'on ne doit pas avoir de diplomatie pour cela? Donnez votre pensée clairement si vous pensez que le Québec doit interrompre les efforts diplomatiques...

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre! M. Landry: ...commencés en 1870... M. Lincoln: Voilà:

M. Landry: ...continués par Jean Lesage, Johnson, Bertrand et autres.

M. Lincoln: Voilà qu'on y va!

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre, à l'ordre, s'il vous plaît! On va laisser le député de Nelligan terminer sa question.

M. Lincoln: Voià qu'on y va.

Le Président (M. Gagnon): Après cela,

vous aurez le loisir d'y répondre.

M. Lincoln: Tout ce que j'ai demandé au ministre, bien simplement et je vois que cela l'irrite parce que cela n'a pas beaucoup de sens...

M. Landry: Cela m'irrite profondément de voir un Québécois qui veut saboter notre diplomatie.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Nelligan, vous avez la parole.

M. Lincoln: Enfin, c'est malheureux qu'on ne soit pas à la télévision. J'aurais bien voulu voir les Québécois juger ce genre de démagogie. Tout ce que je demandais au ministre, c'est, concernant la francophonie...

Le Président (M. Gagnon): M. le député, j'aimerais aussi que nos travaux soient télévisés présentement; probablement qu'il y aurait plus de membres de la commission qui seraient ici.

M. Lincoln: D'accord, cela aurait été bon. Tout ce que j'ai demandé au ministre, j'ai dit: On a 78 personnes à Paris; Bruxelles, c'est à la porte de Paris. Je sais aussi bien que lui que la Belgique est à 40% francophone. Ce n'est pas une nouvelle pour qui que ce soit. Mais j'ai dit: Puisqu'on a 78 personnes à Paris, pourquoi est-ce qu'on a un personnel tellement important à Bruxelles? Et là, je me suis dit, quand j'ai vu qu'on avait 22 personnes à Bruxelles, que c'était peut-être le Marché commun.

Regardons l'Ontario; je sais très bien que l'Ontario n'est pas francophone et je n'ai jamais suggéré la chose. Mais on nous a dit, quand on a parlé de la délégation de Bruxelles, que l'effort principal est économique parce que c'est le centre du Marché commun; on le réalise tous. Or, l'Ontario se débrouille avec trois personnes, un délégué et deux employés de bureau. Si on prend la question de la langue, si on prend l'allusion du ministre à savoir que la langue détermine tout, peut-être que l'Ontario devrait avoir 75 personnes à Londres; il en a 17. C'est cela que je voulais faire savoir au ministre; essayer de pénétrer un peu la pensée, la logique qui veut que l'on mette 75 personnes dans un endroit, 22 dans un autre, 14 dans un autre et 12 ailleurs. Il y a sûrement des barèmes.

Je ne pense pas qu'on se compare, aujourd'hui, aux États-Unis, au Canada, au Japon ou à la République fédérale d'Allemagne ou à la France. Je ne pense pas qu'on en soit arrivé là. Quand on fait des critères, il me semble que l'on fait des critères comparables: un critère de population d'abord, un critère du fait qu'on est toujours une province jusqu'à nouvel ordre. Qu'on ait des relations spéciales, nous sommes entièrement d'accord. Alors, qu'on mette le paquet à Paris, là, on peut se l'expliquer parce que c'est la francophonie qu'on vise.

J'ai parlé de Bruxelles, quand le ministre s'est emporté et a commencé son discours. J'ai demandé une comparaison à Bruxelles entre l'Ontario et le Québec. Alors, on m'a expliqué: Le Québec est francophone en partie. Il y a sûrement plus que cela, non?

Le Président (M. Gagnon): Maintenant, si vous le permettez, on va demander au ministre d'y répondre et on va respecter aussi le temps qu'on va lui allouer pour la réponse, de façon que l'on puisse se comprendre. M. le ministre.

M. Landry: Et quel temps m'allouez-vous, M. le Président?

Le Président (M. Gagnon): Le temps que cela vous prendra pour répondre.

M. Landry: Bon. Alors, je comprends le député, il remplit son rôle d'Opposition, donc il faut bien qu'il s'oppose. Mais toutes ces choses-là tombent sous le sens. Parlons, d'abord, de la question des critères. Il n'y a aucun ouvrage scientifique, dans aucune bibliothèque, qui donne des critères pour savoir quelle sera l'importance d'une représentation diplomatique dans un pays. Il faut tenir compte des particularismes culturels, de l'histoire, des choix des gouvernements antérieurs. Si c'était le critère de la population, j'enverrais tout le monde en Chine; ils sont un milliard. Mais ce n'est pas tout à fait comme cela que cela marche, c'est plus subtil que cela. L'action des gouvernements marche par couches de sédimentation, par décisions qui s'emboîtent les unes dans les autres. Cela tombe sous le sens que, le pays avec lequel nous avons le plus de relations étant la République française, c'est là qu'on a mis le gros de nos effectifs: il y a des relations culturelles, des relations politiques, des relations technologiques. Il est essentiel pour le Québec, comme Honoré Mercier l'avait compris, comme Jean Lesage l'a compris, que nous ayons une grosse représentation diplomatique en République française.

Le deuxième pays le plus francophone de la planète, c'est la Belgique: c'est pour cela qu'on a mis, pour l'Europe, le deuxième contingent d'effectifs à Bruxelles. Alors, du fait que nous ayons, par exemple, des coopérations bilatérales avec les deux communautés, les Wallons et les Flamands, cela prend quelques personnes et il y a deux agents, effectivement, pour la coopération. Du fait que Bruxelles soit le siège de la Communauté économique européenne, cela

prend un agent et son soutien logistique, cela prend un agent d'administration, un délégué et l'équipe du Commerce extérieur qui est sur place avec les gens de l'Immigration. Alors, même si je voulais jouer au scientifique et essayer d'inventer des théories sur les critères... J'ai lu quelques ouvrages théoriques sur cela. Les Britanniques sont les plus avancés; ils ont fait la commission Barryll où eux-mêmes admettent que ce n'est pas d'une façon scientifique. On regarde le "output" d'une délégation, on regarde les liens historiques, on regarde les liens politiques. La Grande-Bretagne a fermé son consulat général à Québec, par exemple, parce qu'ils ont trouvé qu'ils étaient capables de tout couvrir à partir de Montréal, j'imagine. Les États-Unis d'Amérique, eux, ont gardé leur consulat général à Québec parce qu'ils ont pensé qu'il fallait un agent à Montréal et un agent à Québec. Des critères scientifiques, il n'y en a pas. J'aime mieux que le député pose des questions précises et dise: Est-ce que tel agent est à tel poste et ne fout rien? S'il fout rien, on va le mettre dehors; je vous garantis qu'on va le remplacer par un meilleur. Mais ce sont des genres de choses comme cela qu'il faut faire. Vous parliez de pragmatisme ce matin, cela avait l'air de vous impressionner beaucoup. Ce qu'on fait, nous, on nomme avec pragmatisme nos agents dans les pays étrangers. Quand on voit qu'ils ne livrent pas la marchandise, on ne laisse pas l'argent des contribuables se gaspiller, on les rappelle.

M. Lincoln: C'est justement ce qu'on demande et on n'a pas eu de réponse. C'est quoi, la marchandise? Comment est-ce que vous évaluez la marchandise? La marchandise, c'est quoi? C'est cela, la grosse question. La question, c'est la marchandise. C'est une marchandise économique. Comment mesurez-vous cette marchandise? Comment pouvez-vous évaluer que quelqu'un livre ou ne livre pas la marchandise? Il y a sûrement une base de comparaison. Lorsque j'ai parlé de population, je n'ai pas parlé de la population des pays où on envoie des délégations; j'ai parlé de nos populations, comparativement à notre base économique. C'est pourquoi j'ai cité l'Ontario, parce qu'il y a une comparaison qui se fait sur une base de population, sur une base économique; c'est cela que j'ai cité. Je n'ai pas parlé de la population des pays où on envoie des gens. Ce que je veux vous dire, c'est comment mesurez-vous cette marchandise? C'est cela, la question. Comment mesurez-vous cette marchandise par rapport à l'évaluation d'autres - appelez cela des provinces, appelez cela des États - pays qui ont des similarités économiques, des similarités de pouvoir se payer des délégations? C'est cela que je vous demande. Comment est-ce qu'on évalue cette marchandise? Cette marchandise, c'est quoi par rapport aux relations internationales?

M. Landry: Ne soyez pas simpliste, M. le député. Quand on emploie le mot marchandise, c'est une figure de style. On n'est pas en train de faire la livraison d'épicerie de porte en porte là et de dire 22 commandes et 44 livres de steak. Ce n'est pas comme cela que cela marche. Je vous réitère que des recherches faites par l'École d'administration du Québec, par les équipes de fonctionnaires des Relations internationales, nous ont amené à conclure qu'il n'existe aucune méthode d'évaluation véritablement scientifique qui ressemblerait à la comptabilité en partie double ou à la comptabilité analytique d'une entreprise. Si c'est cela que vous poursuivez par vos questions, M. le député, je vous rappelle humblement que vous poursuivez une chimère. Ce qu'il faut voir - et cela on l'a fait, on a publié des documents - c'est: est-ce que la présence d'une délégation du Québec dans un pays augmente le flot des échanges commerciaux avec ce pays? C'est ce qui est le plus facilement comptabilisable. Est-ce que la présence de cette délégation augmente le flot des investissements? C'est facilement quantifiable. Est-ce que la sympathie politique a augmenté? Est-ce que le flot d'échanges culturels a augmenté? Est-ce que les romanciers québécois et les poètes québécois sont plus ou moins lu dans les chaumières de Normandie? Là, on sort de l'univers comptable, je vous le garantis.

Alors, on va vous fournir toutes les précisions que nous possédons eu égard aux procédés d'analyse disponibles, mais ne pensez pas qu'on pourra évaluer un service diplomatique, celui du Québec ou celui du Canada, à l'aune utilisée pour établir le rendement d'une PME; ce n'est pas possible. On a déjà publié des études, on peut les redéposer. On a une étude qui est relativement récente: bénéfices-coûts des délégations. Quand? L'an passé. Je pense qu'on va vous l'apporter: je vous conseille la lecture du rapport Berryll en Angleterre; vous allez voir que c'est une problématique très complexe et que le Québec n'a pas la prétention d'avoir réglé les problèmes que les autres grands États n'ont pas réglés.

M. Lincoln: Si on tient pour acquis que ce sont les problèmes...

M. Landry: Je vais vous poser une question: Trouvez-vous qu'il y en a trop de diplomates québécois à l'étranger? Voulez-vous qu'on rapetisse la représentation ou qu'on l'augmente? J'aimerais avoir votre position et celle de votre parti sur cela.

M. Lincoln: C'est à vous qu'on pose des questions. On va vous répondre sur cela,

mais c'est à vous qu'on pose des questions pour le moment. J'espère que vous allez répondre de votre côté. Ce n'est pas à vous de nous poser des questions pour le moment; on n'est pas au pouvoir, c'est vous qui êtes au pouvoir.

M. Landry: Oui, mais cette commission ne recherche pas les ambitions politiques du Parti libéral; elle recherche la vérité. Elle a pour but que chacun des députés présents à cette commission s'en serve pour informer la population et apporter un éclairage sur une question importante, les relations internationales du Québec. J'allais vous fournir l'occasion de nous faire profiter de votre science. Si vous refusez, vous refusez; c'est consigné au journal des Débats. (17 h 15)

M. Lincoln: Ce qui m'intéresse beaucoup plus - au lieu de ces débats stériles que vous faites maintenant - c'est l'étude de l'ENAP que vous citez. Pourriez-vous la déposer?

M. Landry: Oui, je le pourrais.

M. Lincoln: D'accord. C'était le numéro 1. On va demander l'étude de l'ENAP pour voir exactement.

M. Landry: Elle date de 1981.

M. Lincoln: On va commencer par là, on va voir l'étude de l'ENAP. Tout ce que je veux vous dire, c'est que je réalise que le Québec n'a pas la science infuse pour l'évaluation des critères des délégations étrangères. Nous réalisons que c'est très complexe; il y a des évaluations qui ne peuvent pas être comptabilisées.

Naturellement, on n'est pas des grands naïfs, tout le monde sait cela. Mais certainement il y a une évaluation qu'on fait quand on dit: On va mettre une délégation à Riad plutôt qu'à Hong Kong, on va en mettre une à Hong Kong plutôt qu'à Singapour, on va mettre deux personnes de l'Immigration ici parce qu'il y a des gens qui viennent pour l'immigration. Il y a sûrement des barèmes.

Tout ce qu'on essayait de faire quand vous vous êtes emporté, quand vous avez commencé à changer de ton, c'était une comparaison sensée avec l'Ontario pour certains postes car cela avait l'air tout à fait démesuré par rapport au Québec. Si on prend Londres, à ce moment on ne peut pas dire que c'est une affaire de culture pour le Québec, l'anglais n'est pas une culture première pour le Québec, c'est sûr; mais, du côté de l'Ontario...

M. Landry: Vous oubliez notre importante minorité anglophone.

M. Lincoln: Oui, mais eux, ils ont une majorité anglophone. Ce que je voulais vous dire, c'est que même l'Ontario a une délégation moindre à Londres que le Québec. Il y a sûrement une raison pour laquelle l'Ontario, qui fait beaucoup de trafic commercial avec Londres, qui a des échanges culturels, etc. - comme nous, avec Paris - se contente d'une délégation de dix-sept personnes, quand nous, à Londres, on en a vingt et une. C'est ce qu'on voulait vous demander. On voulait essayer de savoir la raison pour laquelle on avait dix-sept personnes à Bruxelles. On ne voulait pas dire qu'il fallait mesurer chaque personne, mais sûrement que, quand on a 50 000 000 $ à dépenser, il y a des endroits à choisir. Cela aurait peut-être été bon d'avoir diminué la délégation de Bruxelles pour mettre quelqu'un ailleurs. C'est cela qu'on veut suggérer ou peut-être même d'éliminer des postes.

M. Landry: Vous voulez suggérer qu'on diminue la délégation de Bruxelles. Est-ce bien cela? Ai-je bien compris? On prend note, on va voir.

M. Lincoln: Je vous ai dit que c'est un exemple. Si on faisait une évaluation, si on se comparait avec certains autres États, certaines autres provinces, certains autres pays qui ont les mêmes contraintes que nous, dans un certain sens, on pourrait peut-être redistribuer notre argent à plus grand profit. On ne le sait pas; c'est la question qu'on vous pose. On n'a pas l'air d'avoir bien des réponses actuellement.

Auriez-vous pu nous donner les critères d'embauche d'un délégué général d'une délégation?

M. Landry: Les critères généraux, évidemment, de la fonction publique, mais également le profil du poste en question. Il y a des postes qui sont plus économiques, d'autres moins. Il y a des incidences linguistiques: par exemple parler le japonais à Tokyo, cela peut faire partie des critères: à New York, ce serait absurde d'avoir la même exigence. Alors, cela varie beaucoup.

Nous avons tendance à prendre des gens de la carrière, comme plusieurs autres diplomaties dans le monde font, mais à prendre aussi des gens de l'extérieur. Cela permet parfois d'avoir une plus grande adéquation entre le poste et l'individu. Cela permet de faire des comparaisons aussi entre les deux cheminements. Alors, il y a des représentants qui sont issus de la fonction publique, il y en a d'autres qui sont contractuels; par exemple M. L'Allier à Bruxelles - vous avez beaucoup parlé de Bruxelles - c'est un contractuel. Vous connaissez l'horizon de carrière de M. L'Allier, il fut ministre de votre formation politique en particulier.

M. Lincoln: II était partisan du oui au référendum.

M. Landry: Pardon'.

M. Lincoln: II était partisan du oui au référendum. Cela a sûrement été un critère.

M. Landry: Oui. Pour vous, est-ce une déchéance? Cela disqualifie un individu? Si cela disqualifie un individu, vous venez de disqualifier 41% de la population du Québec.

M. Lincoln: Non, mais cela a sûrement aidé sa cause.

M. Landry: On ne marchera pas là-dedans. Ce n'est pas parce quelqu'un a voté oui qu'il va être exclu de la diplomatie québécoise. Ce sectarisme n'existe pas dans notre parti.

Alors, je vous dis que ces critères...

M. Lincoln: Mais c'est vous qui avez dit qu'il était un ancien libéral, M. le ministre. Ce n'est pas moi qui ai situé la question...

M. Landry: Oui, oui, bon.

M. Lincoln: ...qu'il était un ancien libéral comme critère. Mais je vous dis aussi: Une partie des critères, c'est qu'il a aussi été un tenant du oui. Cela a sûrement pesé dans la balance.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Nelligan, vous avez posé une question au sujet des critères...

M. Landry: Oui.

Le Président (M. Gagnon): ...d'embauche. Alors, on va laisser le ministre y répondre.

M. Landry: Oui. C'est pour vous dire qu'il n'y a pas de sectarisme dans ces critères. Des fois, ce sont d'anciens libéraux, des fois, ce sont d'anciens péquistes. Yves Michaud est un ancien député libéral et un ancien député du Parti québécois; il a été député des deux formations. Ce n'est pas sur ces bases que la chose se décide. C'est l'adéquation de la personne au poste avec, comme je vous l'ai dit, des horizons professionnels qui, des fois sont de la carrière, des fois du métier des relations internationales ou d'autres métiers. M. Gosselin est un ancien vice-président du Canadien National et il est contractuel également.

M. Lincoln: Pour faire suite à la question que j'ai posée au ministre en Chambre, aujourd'hui, quelle est l'équation entre Me Jean Morin et le poste de délégué d'Atlanta? Qu'est-ce qu'il a de tellement... Est-ce que, au Québec, dans la fonction publique, pour un poste de cette importance, il n'y avait pas quelqu'un qui était dans le métier, qui était déjà dans les rouages du commerce extérieur, des relations internationales ou même quelqu'un de l'extérieur? Est-ce qu'il n'y aurait pas eu beaucoup de gens qui auraient eu des qualifications qui les rendaient plus aptes à être délégué général? Est-ce que, dans ces critères, vous voulez me dire que les antécédents ou les affinités politiques de cette personne n'ont pas joué du tout? Est-ce qu'on se base tout à fait sur le critère du curriculum vitae pour nommer M. Morin?

M. Landry: À l'Assemblée, vous ne m'avez pas posé la question; vous l'avez posée au premier ministre. J'en ai conclu que c'est parce que vous saviez que cet engagement s'est fait avant que j'occupe mes responsabilités ou que je n'étais pas en mesure de répondre à la question. Et je ne suis guère plus en mesure de le faire à ce moment-ci que je ne l'étais; je connais M. Morin, je n'ai pas en tête son curriculum vitée. Je peux l'examiner. Mais, encore une fois, je vous réitère que, si j'avais eu à faire cette nomination, très vraisemblablement j'aurais fait exactement la même; et je vous dis que, dans les gens que nous allons nommer à l'étranger, que nous avons nommés à l'étranger, il se trouvera sans doute des gens qui ont été des militants d'une formation politique ou de l'autre. Cela ne nous apparaît pas un facteur de disqualification. Le fait que M. L'Allier ait été ministre libéral, encore une fois, n'a pas été retenu contre lui, ni pour lui; nous pensions que M. L'Allier pouvait faire le travail à ce moment-là. C'est la même chose pour M. Yves Michaud. Et pour M. Morin, je vais examiner les procédures de sa nomination. Je vais voir son curriculum vitae. Je pourrai mieux vous répondre à la prochaine séance.

M. Lincoln: Est-ce que...

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Nelligan, même si on n'a pas déterminé de temps pour chacun des éléments du programme, il passe tout de même assez vite et je me rends compte qu'on est toujours aux représentations à l'étranger, au programme 2. Il y a aussi les programmes 3 et 4 qui mériteront, probablement, d'être étudiés. Alors, je vous invite, tout simplement, peut-être à prendre un autre programme.

M. Lincoln: M. le Président, je veux vous faire remarquer que le programme 3 relève du ministère du Loisir, de la Chasse

et de la Pêche.

Le Président (M. Gagnon): C'est cela.

M. Lincoln: C'est un programme très court, que mon collègue, le député de Jean-Talon...

Le Président (M. Gagnon): Bon. M. Lincoln: ...va aborder demain. Le Président (M. Gagnon):Oui.

M. Lincoln: Pour le temps, ce sera environ une demi-heure ou trois quarts d'heure.

Le Président (M. Gagnon): Cela va.

M. Lincoln: Ce ne sera pas quelque chose qui va prendre du temps. Je pense que le gros paquet dedans, vous pouvez le voir par les chiffres, c'est 41 000 000 $ au programme 2.

Le Président (M. Gagnon): Cela va.

M. Lincoln: Une grosse partie de ces dépenses est pour les délégations étrangères qui consomment quelque chose comme 17 000 000 $. Il y a en plus la coopération avec l'étranger qui dépend de cela. Je pense que c'est réellement la clé de tout au point de vue budgétaire. C'est pourquoi...

Le Président (M. Gagnon): Cela va. M. Lincoln: ...on insiste là-dessus.

Le Président (M. Gagnon): Je n'ai pas, d'ailleurs, à vous suggérer sur quel programme poser des questions. Je voulais juste vous faire remarquer qu'il y avait d'autres programmes.

M. Lincoln: Je comprends très bien, oui.

M. Landry: Et mon collègue, le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, effectivement - je confirme ce qu'a dit le député - sera ici demain pour défendre ses crédits.

M. Lincoln: Oui. Alors, on ne pourra pas y toucher, de toute façon, aujourd'hui. Dans le cas des délégués généraux et des cadres des délégations, des gens qui ont de hauts postes dans les délégations, quels sont les critères d'embauche? Est-ce que cela suit les critères stricts de la fonction publique? Est-ce qu'il y a des critères déterminés pour ces emplois?

M. Landry: II y a deux façons d'accéder à la carrière diplomatique. La première, c'est par nomination du Conseil des ministres. Cela s'applique aux délégués généraux et aux délégués. Les délégués généraux sont nommés par le Conseil des ministres sur proposition du premier ministre; les délégués sont nommés par le Conseil des ministres sur proposition du ministre. C'est conforme à nos lois et ce ne sont pas des lois que nous avons établies; c'est la loi québécoise qui est comme cela. Le Conseil des ministres juge en son âme et conscience qui il doit nommer aux postes qui relèvent directement de lui. Pour tous les autres cas, c'est-à-dire l'immense majorité, il s'agit de concours suivant les règles de la fonction publique.

M. Lincoln: Pour les délégués généraux et les délégués il n'y a pas de concours.

M. Landry: C'est par décision du Conseil exécutif. C'est comme pour les sous-ministres

M. Lincoln: Oui, d'accord. Est-ce que dans le cas d'un délégué général il y a un tri qui se fait? Est-ce qu'il y a un système quelconque ou bien est-ce qu'on prend une personne qui est invitée et la décision se fait sur cette personne?

M. Landry: En général, on part avec une liste assez large. On consulte, on compare et puis on finit avec une proposition à la table du conseil.

M. Lincoln: Est-ce qu'on aurait pu avoir le curriculum vitae de chaque personne engagée pour les délégations extérieures à titre de délégués ou de délégués généraux à partir de 1983-1984?

M. Landry: Ce sont des documents publics, les curriculum vitae.

M. Lincoln: Oui, c'est cela, je sais que c'est public. Alors, on voudrait les avoir.

M. Landry: Sous réserve que dans un curriculum vitae la personne met ce qu'elle veut.

M. Lincoln: Oui, je suis tout à fait d'accord. J'ai noté que Me Morin a laissé passer des petites particularités.

M. Landry: C'est cela, exactement.

M. Lincoln: Quel est le suivi effectué auprès des délégations par rapport, justement, aux critères d'activités? Est-ce qu'il y a des rapports systématiques, des rapports réguliers qui parviennent des délégations générales, surtout des grandes délégations? Y a-t-il des rapports?

M. Landry: D'abord, on peut dire qu'on a des contacts pratiquement quotidiens avec chacune d'entre elles par télex, par téléphone ou autrement. Mais nous avons des rapports d'activités hebdomadaires, trimestriels et annuels.

M. Lincoln: Est-ce qu'on peut obtenir les rapports annuels faits par les délégations générales?

M. Landry: Non, et je vais vous dire pourquoi. Il ne serait pas dans l'intérêt public de dévoiler toutes nos stratégies commerciales, par exemple, ou nos stratégies économiques, voire nos stratégies politiques. Je pense qu'il n'y a aucune diplomatie au monde qui rend publics les rapports de ses diplomates. Et le Québec ne le fera pas, non plus.

M. Lincoln: Est-ce qu'il y a des stratégies politiques qui demandent à rester tout à fait confidentielles?

M. Landry: Ah oui!

M. Lincoln: Pour quelles raisons?

M. Landry: Vous qui êtes un homme politique, vous ne devriez pas poser cette question.

M. Lincoln: Non, non mais...

M.Landry: Mais puisque vous l'avez posée, j'y réponds avec joie. C'est parce qu'il y a divers intérêts en jeu, il y a des pays tiers qui peuvent voir de façon ombrageuse nos relations avec tel ou tel autre pays. Qu'ils aient raison sur le fond ou non, il y a toujours des perceptions dans ces choses. Encore une fois, ce n'est pas d'intérêt public que l'opinion de notre délégué sur la conjoncture dans tel ou tel pays, opinion qui peut lui être personnelle avec ses moyens d'analyse, opinion que le gouvernement n'endossera pas forcément, soit rendue publique. Je pense que cela tombe sous le sens.

La sous-ministre me donne une raison supplémentaire. Il y a dans ces rapports des comptes rendus d'entretiens avec les autres gouvernements. Alors, là on est lié par le secret avec les autres gouvernements. Les autres gouvernements ne veulent pas que nous rendions public ce qu'il nous ont dit sous le couvert de la confidence.

M. Lincoln: C'était le cas du premier ministre en Italie.

M. Landry: Le premier ministre prend ses responsabilités et vous lui poserez des questions à l'Assemblée nationale, comme vous ne vous êtes pas gêné pour le faire.

(17 h 30)

M. Lincoln: Y a-t-il des rapports trimestriels des délégations qui peuvent être déposés aux députés pour qu'on sache ce qui se passe là-bas?

M. Landry: Encore une fois, je ne suis pas un expert de ces questions, mais je vous donne le jugement de bon sens qui me vient à l'esprit et la réponse, c'est non. Les gens qui m'entourent qui, eux, sont des experts, disent aussi non.

M. Lincoln: On a la totalité du budget pour les délégations extérieures; c'est environ 17 000 000 $, hormis les projets de coopération, etc. Je parle des délégations étrangères, je crois que c'est 16 565 200 $ pour les délégations extérieures du Québec, leur personnel, la représentation à l'étranger. Est-ce qu'on aurait pu avoir une ventilation des sommes affectées à chacune des délégations?

M. Landry: Ah oui! On me dit que vous l'avez déjà à l'annexe I, où vous avez une liste des missions et l'évolution de leur budget.

M. Lincoln: Je m'excuse, j'avais une question.

M. Landry: Allez-y, on n'est pas pressés.

Vous avez compris quand je vous ai dit que c'était à l'annexe I?

M. Lincoln: Oui, oui, j'ai très bien compris. Auriez-vous pu nous situer un peu sur le climat des rapports entre les délégations du Québec et les ambassades fédérales, surtout lorsqu'on a d'importantes délégations, par exemple, à Londres, Paris, Bruxelles, etc?

M. Landry: Comme vous le dites, je peux vous situer un peu, parce que, d'abord, dans mes fonctions antérieures, j'ai eu à visiter la plupart des postes. Je qualifie ces relations en général de bonnes à très bonnes. C'est-à-dire que les équipes de fonctionnaires, de part et d'autre, surtout en ce qui touche les questions commerciales et économiques, que ce soit les gens des Relations internationales ou du Commerce extérieur, entretiennent avec leurs collègues fédéraux des relations de bonnes à très bonnes. Si vous voulez des détails, je vous dirai qu'ils se communiquent leurs dossiers, par exemple, et essaient de conjuguer leurs efforts pour obtenir des commandes et des investissements. Quelquefois, il y a des interfaces politiques où la position du gouvernement du Québec peut être diamétralement opposée à celle du

gouvernement du Canada. Cela ne veut pas dire que cela empoisonne les rapports personnels entre des diplomates professionnels de part et d'autre, mais il peut y avoir des divergences de vues.

Encore une fois, souvenez-vous que ces gens-là sont des diplomates professionnels et qu'ils sont là pour s'entendre avec tout le monde, ce qui ne les empêche pas de dire ce qu'ils ou elles ont à dire, qui est la politique du gouvernement.

M. Lincoln: Je vous demandais cela parce qu'une lettre quelconque a circulé faisant allusion à des remarques qu'avait faites M. Michaud lors de son départ. J'ai aussi remarqué que M. Jacques-Yvan Morin disait dans ses articles que les ambassades canadiennes étaient très jalouses de leurs informations. Cela donnait l'impression, dans certains endroits, surtout en France, que l'ambassade et la délégation étaient presque des espèces de forces armées ennemies qui ne se côtoyaient pas, ne se voyaient pas, se faisaient de la compétition.

M. Landry: Ne faisons pas de mystère. Vous avez largement raison, M. le député. C'est un cas d'espèce, un cas sui generis à cause de la politique spécifique de la République française vis-à-vis du Québec et du Canada et à cause de la politique spécifique du Québec vis-à-vis de la République française. Alors, c'est un endroit où les travaux se font plus en parallèle qu'ailleurs. Vous avez parfaitement raison. C'est un secret de polichinelle et cet état de fait, qui est dans la nature des choses, dure depuis le début des années soixante.

M. Lincoln: Est-ce que cela va en diminuant ou en s'accélérant? Est-ce pire? Est-ce qu'on fait quelque chose du point de vue du Québec pour essayer d'établir des ponts ou est-ce le dialogue de sourds qui continue plus que jamais?

M. Landry: Cela va dépendre. Vous parliez de pragmatisme ce matin. Cela va dépendre du niveau de pragmatisme de ceux qui font la politique du gouvernement du Canada en ces matières. Les technocrates réducteurs fédéraux qui veulent faire, sur le plan international, du Québec ce qu'est la Nouvelle-Écosse vont toujours se buter à une résistance farouche de tous les gouvernements du Québec vis-à-vis d'une telle attitude.

M. Lincoln: Je m'excuse, M. le député. Si le président me l'avait indiqué, j'aurais été très content de vous céder la parole. Je ne savais pas qu'il y avait eu une demande. Il ne m'a rien dit. Alors, je veux bien...

Le Président (M. Gagnon): Cela va. M. le député de Lac-Saint-Jean aussi. Je n'avais pas remarqué que vous aviez demandé la parole.

M. Lincoln: Allez-y. Je m'excuse.

M. Brassard: Non, non. Je viens d'y penser.

M. Lincoln: Je m'excuse. Allez-y.

Le Président (M. Gagnon): Je vous la donne immédiatement.

Bilan des rapports avec la France

M. Brassard: Je viens d'y penser. C'est un peu pour rompre le dialogue aussi entre le ministre et le député de Nelligan. Ce n'est pas le nombre de personnes qu'il y a dans les délégations qui m'intéresse. Je suis en train de lire un peu le bilan des actions sur le plan international et en particulier pour ce qui est de la France. On peut lire, d'abord, dans le bilan que le programme soutien au développement économique - c'est à la page 23 - a permis à un nombre accru d'industriels québécois de se familiariser avec la technologie française et de rencontrer leurs homologues français en vue de conclure éventuellement des ententes.

Également, dans le paragraphe à la page 24 concernant les perspectives, on indique très clairement l'intention du ministère de poursuivre et même d'accentuer son action dans ce domaine. Évidemment, il y a un cas bien connu concernant les microordinateurs, mais j'aimerais avoir peut-être un peu plus de précisions, si c'est possible, sur ces missions d'industriels français, d'industriels québécois en France et également sur ces ententes, soit déjà conclues, soit pouvant éventuellement se conclure, entre industriels français et industriels québécois, et dans quel secteur, s'il n'y a pas là des secrets qu'il convient de ne pas dévoiler.

J'aimerais avoir plus de précisions sur ce dossier des ententes entre industriels de part et d'autre, savoir dans quel secteur cela se situe. Est-ce qu'il y en a plusieurs qui ont été conclues? Est-ce qu'il y en a qui sont en négociation actuellement et qui pourraient bientôt se concrétiser?

M. Landry: M. le Président, on peut dire que le résultat de la coopération franco-québécoise en matière d'échange de technologies a débouché sur des centaines d'ententes en général au niveau de la PME, mais des fois au niveau de la grande entreprise où des technologies françaises sont pratiquées maintenant au Québec, et l'inverse parce que nous sommes aussi des "offreurs" de technologies à un moindre niveau étant donné que notre pays a des dimensions

moindres et souvent des traditions scientifiques un peu moins fortes.

Ce que nous travaillons surtout à l'époque contemporaine, ce sont les bioindustries, la micro-électronique, la télédistribution, l'énergie, les transports, l'agro-alimentaire, la filière bois et la télédétection. On peut dire que dans tous ces domaines des ententes ont été signées ou sont sur le point de l'être. À l'occasion de l'étude des crédits du ministère du Commerce extérieur, il me fera plaisir de déposer la liste que nous possédons, qui est partielle parce que des fois un industriel fait partie d'une de nos missions, un premier débroussaillement se fait, et, dans son rapport de mission, il dit: Je suis à négocier une entente. Mais un chef de PME n'est pas obligé de nous informer de tout ce qu'il fait; il signe son entente huit ou dix mois plus tard et on n'en a pas toujours parlé. C'est pour cela que la liste est partielle, mais, même partielle, ce sont des centaines et des centaines de cas.

M. Brassard: Surtout concernant des transferts technologiques.

M. Landry: C'est surtout concernant des transferts technologiques. Mais il y a aussi énormément d'investissements français au Québec. Par exemple, la moitié des PME présentes dans le parc industriel de la ville de Granby sont le fruit d'investissements français et d'accords franco-québécois. Vous avez la même chose dans les technologies du bois dans le Nord-Ouest. Le grand cas, c'est Forex Leroy: technologie française, technologie québécoise, capitaux français, capitaux québécois. C'est devenu l'une des caractéristiques du développement de la PME québécoise dans les secteurs de pointe d'être associée, sur le plan technologique ou sur le plan du capital, à des entreprises de l'Europe de l'Ouest, parfois des Allemands, parfois des Belges, parfois des Britanniques et le plus souvent des Français.

Le Président (M. Gagnon): Cela va?

M. Brassard: Dans le domaine culturel, on peut aussi lire, à la page 26, que vous avez l'intention de développer des échanges dans le domaines des métiers d'art, de même que de lancer un programme de promotion du livre scientifique québécois en France. Est-ce qu'on connaît un peu le contenu de ce programme de promotion? Également, pour ce qui est des métiers d'art, est-ce que des actions ont été posées ou le seront incessamment de façon à, justement, intensifier les échanges dans ce domaine? Est-ce qu'il a des instances, des organismes québécois qui ont été impliqués dans ce domaine?

M. Landry: On me signale, M. le député, que tout ce qui apparaît au chapitre Perspectives est l'objet actuellement de rédaction de programmes qui seront soumis au mois de mai à la commission conjointe franco-québécoise. Je ne suis pas en mesure, à moins que certains membres de mon équipe ne le soient, de donner de plus grandes précisions. Est-ce que quelqu'un pourrait parler du programme des métiers d'art, en particulier de la promotion du livre scientifique?

Mme Leduc: Nous faisons actuellement des travaux avec les ministères concernés pour déterminer des programmes de coopération avec la France afin de faire avancer des dossiers dont on a déjà beaucoup discuté.

Par exemple, le programme du livre scientifique québécois en France, je dois vous dire que nous en avons parlé à plusieurs reprises en France. Nous avons des difficultés de marché à cause de la clientèle assez fermée des scientifiques pour le livre français. Même en France, ils ont des difficultés pour le livre français. Nous tentons de voir s'il n'y aurait pas des coéditions possibles, des solutions de ce type pour nous permettre de faire valoir, nous aussi, notre livre scientifique en France. Ce sont des discussions que nous avons actuellement avec les Français pour déterminer des modèles qui nous permettraient d'aller de l'avant.

M. Brassard: Est-ce que les organisations québécoises dans ces domaines sont impliquées, les corporations de métiers d'art, par exemple, ou encore les éditeurs?

Mme Leduc: Oui, tout à fait.

M. Landry: Je rajouterais, d'une façon générale, que la coopération franco-québécoise est une aventure qui a pris de très vastes proportions. Cela s'est élaboré longuement, évidemment, cela a commencé au début des années soixante. C'est le plus grand volume de coopération institutionnelle que la République française entreprend avec quelque autre pays du monde. C'est normal, remarquez: il y a un lien historique et la présence d'une population française importante en Amérique du Nord, Montréal est la deuxième ville française du monde. Mais cela répond aussi en partie aux remarques du député de Nelligan. On a 79 personnes sur place, mais c'est le plus grand flot d'échanges que la République française, avec près de 55 000 000 d'habitants, entreprend avec quelque autre pays de la planète. C'est sûr qu'un tel flot demande des énergies et du personnel.

M. Brassard: Dans le domaine culturel,

également, en ce qui a trait au bilan, par exemple, on peut lire ici que les échanges se sont développés, que beaucoup d'artistes et de créateurs sont allés en France et ont même connu un certain succès tout récemment encore. Est-ce que le ministère et la délégation générale contribuent? Est-ce qu'ils apportent une sorte de soutien technique aux artistes qui vont se produire en France? (17 h 45)

M. Landry: La réponse est oui. D'abord, c'est intéressant que vous souligniez ce succès indéniable et prodigieux. Certains de nos amis français en ont même pris ombrage. Il y a certaines semaines de la dernière saison à Paris où la présence québécoise était tellement importante que cela commençait à ressembler à une espèce de monopole, puisqu'il n'y avait que des Québécois affichés aux grands music-halls et dans les salles de spectacles.

Est-ce que nos services donnent un appui? D'abord, oui, un appui technique sur place. II y a des cas d'espèce. Il y a des gens qui ont besoin de nous et d'autres qui n'en ont pas besoin. Il y a des vedettes en devenir qui ont besoin d'être plus supportées que les grandes vedettes qui ont déjà des possibilités financières non négligeables. En général, on travaille cela d'une façon institutionnelle. Ce n'est pas tellement une personne qu'on aide qu'un groupe. On considère cela comme des produits d'exportation. C'est sûr que cela fait un peu prosaïque, un peu mercantile de dire cela mais en termes de balance des paiements, un artiste québécois qui remporte un grand succès dans un pays étranger fait entrer de l'argent autant qu'une PME qui vend des deux par quatre, sans faire de comparaison odieuse. Il y a de grands exemples étrangers qui illustrent bien ma pensée sans ravaler les artistes. Le groupe suédois ABBA, par exemple, fait entrer plus de devises en Suède que des segments entiers de l'industrie nationale suédoise. Durant ses belles années, avant qu'elle ne s'occupe des phoques, Mme Brigitte Bardot faisait entrer plus de devises étrangères en France que la régie Renault elle-même. Les grands succès de vedettes québécoises à Paris sont une contribution importante à notre balance des paiements et à nos exportations. De ce point de vue, on ouvre souvent les programmes APEX du ministère du Commerce extérieur ou il y a des interventions ponctuelles du ministère des Relations internationales par des subventions que l'on attribue encore une fois plus à ceux qui sont d'en devenir qu'à ceux qui sont arrivés.

Nous avons participé au MIDEM dernièrement, qui est une grande foire de distribution de biens culturels. J'ai eu l'honneur d'aller moi-même à cette manifestation. Mme Ginette Reno, à ce moment-là, vendait en France quelques milliers de disques par jour. Donc, c'était un très grand succès. C'est dire que ce n'est pas une mince affaire. Après de patients efforts - il y a eu les grands devanciers comme Félix Leclerc, Raymond Lévesque; en général, il y en avait un par deux ou trois ans - maintenant, ils débarquent en force trois ou quatre par semaine. C'est une activité intéressante parce qu'on a un marché culturel relativement petit, soit 6 500 000 Québécois. Je ne veux pas dire que c'est négligeable, car l'essentiel de notre vie culturelle va toujours se faire ici. Mais qu'on puisse exporter, qu'on puisse déboucher, c'est intéressant sur le plan du rayonnement culturel du Québec et sur le plan économique.

M. Brassard: J'aurais une dernière question. Dans vos remarques préliminaires de ce matin...

M. Landry: M. le député, on m'a communiqué une information - je m'excuse de vous interrompre - qui pourrait donner satisfaction au député de Nelligan. Tous les curriculum vitae des délégués contractuels ont été soumis à la commission des engagements financiers. En 1983-1984, il y avait, en particulier, M. Roger Béland, à Dallas, et M. Jean Morin, à Atlanta. Excusez-moi.

M. Brassard: Ce matin, vous avez parlé, dans vos remarques préliminaires, d'un sommet sur la politique internationale du Québec qui se tiendrait au mois de juin. Nous sommes en avril. Comme on connaît les travaux importants et les efforts considérables qu'il faut déployer pour en arriver à préparer et à tenir un sommet de ce genre, j'imagine qu'au moment où on se parle il y a déjà passablement de choses qui ont été faites en vue du sommet. Est-ce qu'il serait opportun de nous révéler les préparatifs qui sont actuellement en cours et un peu quelle forme va prendre ce sommet? Quels sont les intervenants, les thèmes, la thématique? Est-ce que tout cela commence à être passablement connu?

M. Landry: Oui, les travaux sont assez avancés pour qu'on puisse en parler. Vous savez que le succès d'un sommet réside dans le temps et le soin qu'on a mis à sa préparation. Déjà, les textes ont été votés par le Conseil des ministres au début de la présente année, probablement, au mois de janvier. Mon ex-collègue et le vôtre, l'ancien ministre des Affaires intergouvernementales, et moi-même avons mené de concert une série de recontres préliminaires, de tables de concertation avec les agents économiques: le monde de l'industrie, le Conseil du patronat, etc., les banquiers, les syndicats ouvriers.

Nous avons rencontré les agents dans le secteur des organisations internationales sans but lucratif. Nous avons également rencontré les gens des Communautés culturelles et de l'Immigration; mon collègue des

Communautés culturelles et de l'Immigration a participé à une table de concertation pour le sommet. Nous nous sommes entendus de façon à peu près consensuelle sur la thématique. Je n'ai pas les documents avec moi, mais de mémoire je peux vous révéler une partie du contenu. On n'a pas les documents du sommet ici. Je vais, d'ailleurs, présenter le texte définitif au Conseil des ministres à sa prochaine séance.

Mais les buts du sommet sont d'élargir les relations internationales du Québec, d'informer la population du Québec et les différents segments du public de ce qui se fait, d'introduire, sans être directif ni même planificateur, une espèce de cohérence dans l'effort international de la collectivité québécoise. La thématique recouvrira en particulier notre action vis-à-vis des pays en voie de développement, notre action en matière de promotion des échanges avec les pays développés, particulièrement le commerce extérieur, les investissements étrangers, la coopération technologique, nos politiques d'immigration.

Le sommet aura lieu en deux étapes: la première, un état de la situation. J'ai dit le mois de juin ce matin; je me suis légèrement trompé, c'est fin de mai. À Montréal, fin du mois de mai, tous les agents se réuniront pour faire le point; ils auront l'été pour mener une série de consultations intenses, de tables de concertation pour se revoir à l'automne et, à ce moment, faire la deuxième phase qui, elle, prendra l'allure d'un sommet plus classique, c'est-à-dire avec des engagements du gouvernement, avec des engagements des divers agents, avec des consensus.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Vachon.

M. Lincoln: Est-ce que je pourrais poser une autre question au ministre à la suite de ce qu'on a dit avant?

Le Président (M. Gagnon): Oui, M. le député de Nelligan. Après, ce sera le député de Vachon.

M. Lincoln: M. le ministre, je parlais tout à l'heure des relations provinciales-fédérales, excusez-moi, québécoises parce que provinciales, je sais que cela vous met en colère.

M. Landry: Ce n'est pas le mot, je sais que vous êtes plutôt provincial, mais...

M. Lincoln: Oui. Alors, je vais changer et je vais dire: Québec-Canada à Paris. J'avais pris comme base - je vous en ai parlé - les articles de Jacques-Yvan Morin. Il y avait également la lettre de M. Michaud qui avait été publiée dans la Presse, et là je vais citer une partie du texte qui m'avait frappé. Il parlait de la récupération fédérale, des meilleures réussites, de TVFQ 99 et il concluait sa lettre en disant: "Tout cela pose un problème de fond. Les autorités gouvernementales seraient bien avisées d'en prendre acte et de définir avec notre souhaitable collaboration les éléments d'une contre-offensive visant non seulement à maintenair nos acquis, mais à préparer les voies de l'avenir".

Ce que je voulais vous demander, c'est si la contre-offensive s'est terminée avec le départ de M. Michaud. Est-ce qu'il y a une contre-offensive? Est-ce qu'on considère une contre-offensive? Est-ce qu'on prépare les voies de l'avenir? Qu'est-ce que c'est, "les voies de l'avenir"? Est-ce que c'est cela que la délégation fait en ce moment? Pouvez-vous situer un peu ce que M. Michaud voulait dire et ce qui a été fait à la suite de sa lettre?

M. Landry: Je peux vous situer sur ce qu'il voulait dire. Il voulait dire qu'il avait eu à faire face à un problème classique pour les diplomates de refaire leurs liens et leurs circuits d'information à l'occasion du changement de gouvernement qui est survenu en France, comme chacun le sait. M. Michaud s'est attaqué à cette besogne avec doigté, avec dextérité et il peut dire - il l'a dit d'ailleurs, pas dans cette lettre, mais après - en ce qui concerne les acquis auxquels il fait allusion, qu'ils ont été préservés. Les relations du Québec avec la République française, sous ce gouvernement-ci ou celui qui l'a précédé, ont été marquées par un succès, de la confiance mutuelle et l'augmentation du flot de nos échanges.

Ceci m'amène à parler des perspectives d'avenir. Je pense qu'elles sont excellentes. La coopération franco-québécoise en matière culturelle, mais surtout en matière économique a donné déjà des fruits extraordinaires. Le plus grand investissement industriel de l'histoire du Canada dans un seul coup, Pechiney Ugine Kuhlmann, a été le couronnement de cette affaire. Nous allons tenter d'aménager l'avenir dans le même sens et d'élargir ces relations. D'ailleurs, ce qui vaut pour la France vaut pour plusieurs autres pays, je le souhaite vivement. C'est en France que cela a commencé d'abord et c'est là que les fruits sont les plus tangibles, mais nous n'avons pas une attitude exclusive et c'est de cette manière qu'on va ménager les voies de l'avenir.

Le sommet dont a parlé notre collègue du Lac-Saint-Jean a comme thématique aussi

l'élargissement des relations internationales du Québec, pas uniquement avec la France, mais avec tous les autres interlocuteurs dans le monde. On en saura plus, évidemment, sur l'aménagement de l'avenir à ce moment, quand on aura consulté tous les segments de la société québécoise. C'est la première fois que cela se fait en matière internationale, mais assumez d'ores et déjà que nous sommes en train de faire l'avenir.

M. Lincoln: II parle d'une contre-offensive aux initiatives fédérales. Parlant des voies de l'avenir, selon vous, ces voies voulaient dire les relations avec le nouveau gouvernement français qui était déjà en place, mais est-ce que cela veut dire aussi les voies de l'avenir économique ou les voies de l'avenir par rapport à l'indépendance du Québec?

M. Landry: Je parlais de l'acquis quand je parlais de la contre-offensive.

M. Lincoln: Je parlais des textes de M. Michaud.

M. Landry: Bien oui, mais M. Michaud, justement, parle des acquis. Nous avions à préserver les acquis. Je vous ai dit là-dessus mission accomplie. Les acquis ont été préservés, ont été même améliorés, selon moi, malgré l'offensive du gouvernement du Canada. Je le déplore, je le regrette. Encore une fois, je dis que cela procède d'esprits chagrins vivant à l'ouest de la rivière Outaouais, qui voudraient rétrécir le Québec, nous replier sur notre périmètre. Jamais un gouvernement du Québec n'acceptera cela, pas plus celui auquel j'ai l'honneur d'appartenir que n'importe quel autre dans le passé ou dans l'avenir. Je le souhaite vivement.

Maintenant, par les voies de l'avenir, tel que mentionné dans le texte - je m'en fais l'exégète - j'imagine qu'il veut dire exactement l'objectif qu'on propose au sommet sur le Québec dans le monde, c'est-à-dire l'élargissement de nos relations. L'avenir politique intérieur du Québec, mes positions sont bien connues là-dessus; je ne veux pas vous les reservir, vous finiriez par vous en irriter, mais vous avez bien compris qu'elles ne vont pas dans le sens provincial.

M. Lincoln: Ce que je vous demandais spécifiquement: Y a-t-il une contre-offensive aux initiatives fédérales qui est en branle? Je sais qu'on préserve les acquis, mais il y a une contre-offensive. Y a-t-il un plan de contre-offensive qui est en branle, qui a été étudié? Si M. Michaud, qui était délégué général, a écrit cette lettre, ce ne sont pas des mots, sûrement...

M. Landry: Je ne sais pas si les fédéraux ont des plans. Comme je les connais, je pense qu'ils en ont.

M. Lincoln: Je parle du Québec. Je ne parle pas des fédéraux, on n'est pas au fédéral.

M. Landry: Je vous ai dit: II y a une offensive pour réduire l'action québécoise en France. Notre délégué général, et le ministère, j'imagine, que je ne dirigeais pas à l'époque, a eu une contre-offensive et notre délégué général a dit: Mission accomplie. Je pense que notre délégué général a eu raison. Mission accomplie. Ceux qui voulaient nous rétrécir n'ont pas réussi.

Le Président (M. Gagnon): M. le député...

M. Lincoln: Cela va. Je continuerai demain.

Le Président (M. Gagnon): Cela va. C'est parce qu'il reste deux minutes et M. le député de Vachon avait demandé la parole. M. le député de Vachon.

M. Payne: Un peu plus que deux minutes, peut-être trois ou quatre.

Le Président (M. Gagnon): Je regrette, on va terminer à 18 heures parce qu'on a eu...

M. Payne: Puis-je soulever la question? Dans le domaine des exportations, j'ai eu le plaisir de travailler pendant deux ans avec un groupe de recherchistes de l'Université de Montréal qui ont mis au point un système de logiciel assez avant-gardiste, grâce, en partie, à une subvention considérable de la part du ministère de la Science et de la Technologie visant à aider les marathoniens, les coureurs de longue distance, à mieux planifier le temps prévu pour parcourir le marathon. On sait, d'ailleurs, qu'en ce qui concerne le marathon le Québec n'a rien à apprendre de qui que ce soit dans le monde; après Fukuoka et New York, c'est bien Montréal qui est la première ville sur la carte.

Ils ont mis sur pied ce logiciel. Je n'entrerai pas dans le détail, mais cela offre au coureur une meilleure configuration entre les distances et la vitesse dans sa période d'entraînement. Le logiciel s'appelle Herman. Maintenant, ils se posent cette question: De quelle manière peuvent-ils exporter le produit sans en divulguer le secret? J'ai eu le plaisir de travailler avec eux et c'est quelque chose, à mes yeux, qui est éminemment exportable. Je les ai référés, d'ailleurs, au ministère du Commerce extérieur. Est-ce qu'il y a quelque chose qui existe et que l'on pourrait appeler un guichet unique au

ministère du Commerce extérieur? Quel genre d'accueil offre le ministère à ceux qui voudraient se prévaloir des programmes qui existent pour exporter ce genre de produits?

Le Président (M. Gagnon): Alors, M. le ministre, vous allez avoir jusqu'à demain pour penser à votre réponse. Je voudrais m'excuser auprès du député de Vachon. Je lui ai dit: Seulement deux minutes, mais il a le droit à vingt minutes, comme tout le monde, excepté qu'il restait deux minutes à notre séance d'aujourd'hui. Vous pourrez vous reprendre demain.

M. Payne: C'est cela.

Le Président (M. Gagnon): Sur ce, j'ajourne...

M. Lincoln: Si le ministre veut répondre ce soir, je suis disposé à donner mon consentement pour trois minutes, ce n'est pas un problème.

Le Président (M. Gagnon): Bon, alors, trois minutes.

M. Landry: Je vais essayer de répondre brièvement pour les questions d'exportation. Mais c'est plutôt l'autre commission qui se penchera en détail sur ces questions. Il y a un guichet unique qui, pour quelques semaines encore, est situé à 1, Place Ville-Marie, Montréal, mais qui sera sur la rue Sherbrooke, dans l'édifice de la Banque Mercantile, où le ministère du Commerce extérieur est en train de déménager. Je vois très bien, dans ce cas-là, des programmes APEX pour le marketing à l'étranger d'un produit qui me semble assez extraordinaire. Alors, on peut aller jusqu'à 50 000 $, à condition que l'industriel mette lui-même 50 000 $. On peut aussi avoir des programmes APEX plus modestes pour permettre des déplacements, le transport d'échantillons, la participation à des foires, missions ou expositions. Nos délégations du ministère des Relations internationales seront, toutes et chacune d'entre elles, absolument disponibles pour recevoir ces gens et pour leur indiquer les marchés potentiels dans les territoires de leur juridiction, chef de poste, délégué général ou délégué en tête.

Le Président (M. Gagnon): Merci. Alors, la commission ajourne ses travaux à demain, 11 heures.

(Fin de la séance à 18 h 2)

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