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Version finale

32e législature, 5e session
(16 octobre 1984 au 10 octobre 1985)

Le jeudi 25 avril 1985 - Vol. 28 N° 11

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude des crédits du ministère de la Justice


Journal des débats

 

(Dix heures quinze minutes)

Le Président (M. Gagnon): La commission des institutions se réunit ce matin aux fins de procéder à l'étude des crédits budgétaires du ministère de la Justice pour l'année financière 1985-1986. Lors de la suspension de nos travaux hier, nous étions rendus au programme 4, dont nous avons convenu de suspendre l'étude pour prendre ce matin les programmes 14, 15 et 16. C'est ça?

Une voix: 13, 14, 15 et 16.

Le Président (M. Gagnon): 13, 14, 15 et 16. J'appelle donc immédiatement le programme 13: Sécurité publique. M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements ce matin?

Le Secrétaire: II y a un remplacement de signalé. M. Mailloux (Charlevoix) est remplacé par M. Pagé (Portneuf).

Le Président (M. Gagnon): Merci. Pour le programme 13, avez-vous des remarques à faire, M. le ministre?

M. Johnson (Anjou): Si je comprends bien, M. le Président, on commence avec le dossier de la Sûreté du Québec?

Le Président (M. Gagnon): Sécurité publique.

M. Johnson (Anjou): Sécurité publique ou Sûreté du Québec?

M. Marx: Cela va faire plaisir au ministre.

M. Johnson (Anjou): Pardon?

M. Marx: Cela va faire plaisir au ministre.

M. Johnson (Anjou): Alors, est-ce qu'on commence avec la Sûreté du Québec?

M. Marx: Oui, si vous voulez!

M. Johnson (Anjou): Je pourrais présenter...

Le Président (M. Gagnon): Le programme 15.

Sûreté du Québec

M. Johnson (Anjou): Le directeur de la Sûreté du Québec, M. Beaudoin, est avec nous. Pour l'essentiel, M. le Président, les seuls commentaires ou propos généraux que je pourrais tenir sont les suivants concernant le budget de la Sûreté du Québec. À l'égard du budget de la Sûreté du Québec comme du budget du ministère, la progresion est relativement faible. Au-delà de tout ce qui a pu entourer le conflit sur lequel on pourra revenir quelques secondes, je dirais que les efforts de productivité à la Sûreté du Québec ont été manifestes et évidents depuis deux ou trois ans, notamment par un taux d'attrition naturelle extrêmement élevé sans pour autant qu'on ait procédé à du recrutement. Il y a donc eu un resserrement au niveau des effectifs qui est important et qui s'est donc traduit en termes de productivité du système comme étant une productivité augmentée, d'autant plus que la Sûreté a obtenu des mandats additionnels, notamment ceux de la sécurité routière, ceux de l'inspection des permis d'alcool, de l'application de la loi sur le dégel.

Quant à ce qui a marqué la Sûreté du Québec depuis un an, je dirai que, d'une part, le conflit de travail a produit un climat anormal sur une longue période de mois, qui s'est traduit par un ralentissement des activités, une diminution des activités policières, mais, depuis la décision du 31 mars dernier à l'église Saint-Sacrement de Québec, c'est rentré dans l'ordre. Pour l'essentiel, la reprise dans l'ordre des activités habituelles de la Sûreté du Québec ne peut pas être évaluée autrement que par des appareils statistiques et nos statistiques sont encore incomplètes. On y va de façon un peu empirique. Il y a un retour graduel aux activités habituelles qui s'est effectué depuis le 31 mars. J'ai l'occasion, à tous les sept ou huit jours, de faire le bilan de cela avec les autorités de la Sûreté. Le dernier bilan que j'ai reçu démontrait effectivement qu'à l'égard d'un certain nombre de choses qui avaient fait l'objet de ralentissements on était revenu à un retour quasi à la normale, en tenant compte cependant du fait que, par définition, un policier exerce une sorte de pouvoir discrétionnaire dans ses activités, ce pouvoir ne peut pas faire l'objet de quotas, d'où la difficulté d'évaluer ce qu'est, entre guillemets, un travail "normal" dans bien des circonstances, à moins que ce ne soient des

activités très spécifiques qui peuvent faire l'objet d'un encadrement opérationnel précis, d'une intervention, par exemple, des supérieurs hiérarchiques dans certaines choses qui peuvent être accompagnées d'un ordre spécifique.

Je dirai qu'en matière de discipline, puisque c'était aussi une de nos préoccupations, les choses sont totalement rentrées dans l'ordre. Aucun cas ne nous a été rapporté, depuis le 30 mars, d'un policier qui aurait refusé d'obtempérer à un ordre de ses supérieurs hiérarchiques et, si cela devait arriver, la Loi de police serait appliquée avec beaucoup de rigueur.

Le Président (M. Gagnon): Merci. M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: M. le Président, j'ai deux ou trois petites questions avant qu'on entre vraiment dans le vif du sujet. Premièrement, sur le recrutement, étant donné qu'il va y avoir beaucoup de policiers qui vont prendre leur retraite, est-ce que vous avez l'intention d'implanter un programme d'accès à l'égalité auprès de la Sûreté du Québec? Vous savez, par exemple, que, dans la Gendarmerie royale du Canada, il y a un taux de femmes policiers qui est beaucoup plus important que le pourcentage des femmes policiers à la Sûreté du Québec. Est-ce que vous avez l'intention de mettre sur pied un tel programme? Vous savez que la Loi sur la fonction publique ne s'applique pas à la Sûreté du Québec. Le ministre a pensé bien faire en soustrayant la charte québécoise en ce qui concerne les programmes d'accès à l'égalité à la Sûreté du Québec; la Sûreté n'est donc régie par aucune loi en ce qui concerne les programmes d'accès à l'égalité et je pense, notamment, au cas des femmes sur lequel j'ai déjà sorti des statistiques. Le ministre peut les corriger, parce que ce sont des statistiques qui sont vieilles de six mois maintenant et peut-être que le ministre a de nouvelles statistiques pour prouver que le pourcentage des femmes policiers à la Gendarmerie royale du Canada est encore plus élevé qu'il ne l'était il y a quelques mois.

M. Johnson (Anjou): D'abord, le recrutement. Oui, il devrait y avoir du recrutement. C'est un peu dommage que les négociations aient achoppé sur ce qui, en fin de compte, était un détail pour les policiers, mais un objet important pour le gouvernement, étant donné que ce sur quoi nous avions réussi à nous entendre nous aurait permis de procéder plus rapidement au recrutement.

On parle, sur une période de trois ans, d'un recrutement de l'ordre de 700 à 800 policiers, ce qui sera rendu nécessaire par le taux d'attrition naturelle, les mises à la retraite de celles et ceux - particulièrement ceux - qui ont été embauchés surtout au début des années soixante, au moment de la grande réforme à la Sûreté. Ces gens, maintenant, ont accès, en bonne partie d'ici à trois ou quatre ans, au régime de retraite qu'on a déjà décrit dans le passé.

Dans le cadre de ce recrutement nécessaire, je crois qu'il y a une occasion assez remarquable pour la Sûreté du Québec d'orienter les ressources humaines dans un contexte qui nous permet de nous adapter à certains changements dont celui qui est évoqué par le député. Il faut bien voir d'ailleurs que les mises à la retraite à la Sûreté se caractériseront surtout par une espèce de décapitation statistique de l'encadrement à la Sûreté. Plus on monte en grade chez celles et ceux qui vont prendre leur retraite, chez les hommes en particulier, plus on s'aperçoit que le taux d'attrition va être élevé.

Par exemple, le Procureur général aura à approuver des promotions, je pense, à environ 250 caporaux d'ici à deux ans. Il y a donc des modifications extrêmement importantes sur le plan des ressources humaines qui vont intervenir et je pense que cela doit être saisi comme une occasion, une façon de nous adapter à des réalités changeantes et d'apporter des changements sur le plan de la gestion des ressources humaines.

M. Marx: Qu'est-ce qui arrive avec les programmes d'accès à l'égalité?

M. Johnson (Anjou): Je ne suis pas sûr qu'on parle en termes d'application de programmes d'accès à l'égalité, mais l'état-major de la Sûreté connaît ma préoccupation quant au recrutement féminin. J'ai déjà eu l'occasion de lui faire part de ma préoccupation à cet égard. Quant au recrutement de personnes émanant des groupes ethniques, particulièrement dans la région de Montréal, on m'a déjà dit qu'à l'occasion de concours de recrutement il y avait eu très très peu de candidatures de gens provenant des groupes ethniques.

M. Marx: Je m'excuse, M. le Président, mais...

Le Président (M. Gagnon): Je m'excuse, M. le député, s'il vous plaît... Non. Excusez, on va laisser le ministre répondre et...

M. Marx: On est déjà passé à côté de la question.

Le Président (M. Gagnon): ...il faudrait faire attention pour ne pas parler deux en même temps. Le ministre va finir sa réponse et, après, je vous laisserai la parole, M. le député.

M. Johnson (Anjou): Bon, M. le Président...

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que cela va?

M. Marx: Non, j'apprécie les réponses du ministre, mais on va passer tout l'avant-midi à avoir des réponses sur des questions qu'on n'a pas posées. Les programmes d'accès à l'égalité, le ministre comprend ce que cela veut dire. Si on n'a pas un tel programme à la Sûreté du Québec, il n'y a pas beaucoup de choses qui vont bouger parce que, dans l'état actuel du droit et de la situation, la Sûreté du Québec ne peut pas élaborer un tel programme, car cela irait à l'encontre de la Charte québécoise des droits et libertés de la personne. Donc, si on veut faire quelque chose de sérieux, qu'on ne me dise pas: C'est l'occasion. Le directeur connaît mes sentiments. Le directeur est de bonne foi. Tout cela, c'est bien connu, j'accepte tout cela. Ce que je veux savoir, c'est si vous allez faire quelque chose de concret en ce qui concerne l'égalité des femmes dans la Sûreté du Québec pour augmenter le pourcentage des policiers femmes comme on l'a fait dans d'autres coprs de police. Je peux citer comme exemple la Gendarmerie royale du Canada. Je pense aussi aux corps de police d'Ottawa, de Halifax et d'autres villes de toute l'Amérique du Nord.

M. Johnson (Anjou): Alors, la réponse est oui.

M. Marx: Donc, vous allez avoir un programme d'accès à l'égalité.

M. Johnson (Anjou): La réponse est que, dans la mesure où les dispositions touchant la charte sur les programmes d'accès s'appliqueront, il faut donc une promulgation. On aura l'occasion de s'en reparler quelque part à la fin du mois de mai. La réponse est que la Sûreté du Québec se prépare en termes opérationnels à pouvoir faire du recrutement en fonction de ses préoccupations. Si la charte et les articles de la charte qui doivent s'appliquer sont promulgués, il est évident que les programmes d'accès à l'égalité que la Sûreté du Québec pourrait avoir seront soumis à cette procédure.

M. Marx: Le ministre n'a pas compris ma question. Je pense qu'il ne comprend pas la charte parce que, dans la charte, il est écrit que les programmes d'accès à l'égalité ne s'appliquent pas au gouvernement, ne s'appliquent pas à la Sûreté du Québec. Donc, il y a un vide législatif en ce qui concerne la Sûreté du Québec, parce que la Loi sur la fonction publique ne s'applique pas à la Sûreté du Québec, où on a prévu la possibilité des programmes d'accès à l'égalité. La charte et la réglementation en ce qui concerne les programmes d'accès à l'égalité ne s'appliqueront pas au gouvernement, donc pas à la Sûreté du Québec. Donc, il y a un vide législatif et la Sûreté du Québec ne peut pas instituer un programme d'accès à l'égalité et, d'autre part, c'est défendu par la charte.

M. Johnson (Anjou): Ce que vous me dites, c'est que, juridiquement, la charte excluant les services gouvernementaux, même si on promulguait les articles sur l'accès à l'égalité, il serait interdit de faire des programmes d'accès à l'égalité au gouvernement. Je ne me souviens pas de vous avoir entendu dire cela en commission.

M. Marx: À la Sûreté du Québec, au gouvernement, c'est touché par une autre loi. La Loi sur la fonction publique en prévoit la possibilité, parce qu'il y a deux ans, dans la fonction publique, on a voulu élaborer des programmes. Cela a été jugé invalide à cause de la charte québécoise. On a donc modifié la Loi sur la fonction publique. Vous pouvez consulter votre ancienne ministre déléguée à la Condition féminine, la députée des Îles-de-la-Madeleine, qui est maintenant qualifiée d'orthodoxe. Peut-être qu'on ne se parle plus maintenant entre vous autres.

Le Président (M. Gagnon): Alors, l'intervention est terminée. M. le ministre...

M. Marx: Ce n'est pas le fond de ma question.

Le Président (M. Gagnon): Non, c'est... M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): Alors, je prends bonne note de l'affirmation du député, qui prétend qu'on se serait interdit dans la charte de faire des programmes d'accès à l'égalité.

M. Marx: ...maintenant.

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre, vous avez la parole.

M. Johnson (Anjou): Alors, je prends bonne note de l'affirmation du député et je lui répondrai, étant donné qu'il exige une opinion juridique en bonne et due forme, en temps et lieu. (10 h 30)

M. Marx: D'accord. J'ai seulement une autre question. C'est interdit maintenant d'établir des programmes d'accès à l'égalité, sauf s'il y a un règlement en vertu de la charte. La Sûreté du Québec n'a pas souscrit

à ces programmes d'accès à l'égalité qui sont prévus par la charte. J'attends avec beaucoup d'impatience l'avis du ministre et, le cas échéant, si c'est nécessaire de faire des modifications, l'Opposition serait prête à les adopter dans le cadre du projet de loi omnibus.

Seulement une autre question. Peut-être que le directeur peut répondre à cette question. Est-ce qu'on a fait de l'écoute électronique, cette année, auprès des députés, soit des députés de l'Assemblée nationale, soit des députés fédéraux, depuis la dernière fois que j'ai posé cette question en 1984?

M. Johnson (Anjou): M. le Président, je pense que le député, quand il pose cette question, a peut-être encore une fois oublié ce qu'il aurait dû lire dans le Code criminel. En vertu de la loi et du Code criminel, l'écoute auprès d'un membre de l'Assemblée nationale, du barreau, de la magistrature ou du personnel supérieur du gouvernement - les sous-ministres, sous-chefs, secrétaires généraux et associés, etc. - en vertu de ces dispositions, dis-je, un juge ne peut octroyer une autorisation d'écoute électronique que si le Procureur général lui-même en a autorisé la demande. Donc, les demandes que je pourrais autoriser ou que j'ai autorisées, par définition, sont couvertes. Je devrais dire que les demandes que j'ai autorisées afin qu'elles soient présentées devant un juge -pour qu'on se comprenne bien - sont, par définition, couvertes, je crois, à la fois juridiquement et dans l'esprit du Code criminel, par le secret qui doit entourer ces choses.

En répondant au député oui ou non, il y a eu de l'écoute électronique auprès de membres de l'Assemblée nationale ou d'une autre catégorie visée par le décret qui touche l'autorisation spécifique du Procureur général, je pourrais, d'une façon ou d'une autre, par le seul fait de cette déclaration publique, influencer des enquêtes qui pourraient être en cours. Que je réponde oui ou non au député, je crois que cela pourrait avoir un effet sur des enquêtes qui pourraient être en cours. J'utilise le conditionnel et le député pourra en conclure et en déduire ce qu'il voudra: qu'il y a des députés soumis à l'écoute électronique, comme il n'y en a pas; qu'il y a des enquêtes sur des membres de l'Assemblée nationale, comme il n'y en a pas. Je n'ai pas l'intention, dans un forum public comme celui-ci, de me départir de mes obligations imposées par le Code criminel.

M. Marx: Est-ce que le ministre est au courant que c'est la première fois depuis quelques années que le ministre de la Justice refuse de répondre à une telle question?

M. Johnson (Anjou): Vous avez évoqué vous-même, récemment, en Chambre, au mois de décembre, si je me souviens bien... L'Opposition a elle-même mentionné ce que pourraient être des cas sous enquête. Je dirai qu'on n'est pas ici en termes généraux. Vous avez vous-même évoqué des cas qui pourraient être spécifiques et, en ce sens, je n'entends pas nuire à quelque enquête que ce soit qui pourrait être en cours.

M. Marx: L'Opposition a le devoir, souvent, de poser des questions qui viennent de la population ou de collègues, etc.; je pense que c'est le devoir de l'Opposition et je fais mon devoir parce que, dans le cadre de cette commission, je pose souvent des questions qu'on me demande de vous poser. Si je ne les pose pas, elles ne seront jamais posées. C'est à vous de répondre. Vous avez répondu que vous refusiez de répondre à cette question cette année quoique, l'an dernier, le ministre de la Justice ait répondu et, l'année précédente, le ministre de la Justice ait aussi répondu. Cette année, pour des raisons que vous connaissez vous-même, vous ne voulez pas répondre. J'accepte. Passons à la...

M. Johnson (Anjou): Je dis bien que mes motifs pour ne pas répondre sont ceux que j'ai évoqués, dans la mesure où, publiquement, on a fait état de dossiers qui pourraient être en cours. Je ne peux évidemment pas intervenir dans ce processus.

M. Marx: D'accord. Vous n'allez donc pas répondre en ce qui concerne même les députés à l'Assemblée nationale?

M. Johnson (Anjou): Non! M. Marx: Non?

M. Johnson (Anjou): Je ne répondrai sans doute pas publiquement à cette question. D'ailleurs, le forum que constitue une commission parlementaire publique, compte tenu du rôle des élus, n'est pas le meilleur des forums pour traiter d'un certain nombre de dossiers qui relèvent de la sécurité interne de l'État et de sa façon normale de fonctionner. Cela dit, je n'ai personnellement rien à cacher au député ou à l'Opposition. Je peux répondre des gestes que je pose en tant que ministre de la Justice. Je trouve simplement regrettable qu'on nous expose à un débat public sur un certain nombre de choses qui doivent, par définition, pour les fins de l'efficacité et du respect des droits des personnes, trouver un autre forum que celui d'une commission parlementaire publique.

M. Marx: Parfait, je respecte le virage du gouvernement et du ministre en cette

matière.

Le Président (M. Gagnon): La parole est à M. le député de Portneuf.

Négociation de la convention collective

M. Pagé: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord témoigner mon appréciation à l'égard de M. le ministre, de M. Jacoby et de M. le directeur général de la Sûreté du Québec d'être avec nous ce matin pour répondre aux questions dans le cadre de l'étude des crédits du ministère de la Justice.

Je voudrais poser quelques questions relatives au dossier de la Sûreté du Québec, et plus particulièrement à la période difficile que la Sûreté du Québec, comme entité, a traversée depuis le printemps 1984, que ce soit la direction de la Sûreté du Québec, ou les policiers de la Sûreté du Québec eux-mêmes et, par conséquent, évidemment, la population.

M. le Président, la convention collective des policiers de la Sûreté du Québec était échue depuis la fin de l'année 1983. On se rappellera que, jusqu'en 1980 toute la structure de rémunération des policiers permettant d'établir les conditions de travail et par conséquent de rémunération des policiers de la Sûreté du Québec se faisait sur une base biennale où les échelles de rémunération s'établissaient à partir de convention collective ou de contrat de travail signé par les gouvernements provincial ou municipaux dans sept corps de police qui servaient de référence. Vers 1980, le gouvernement a décidé de se doter d'une nouvelle structure d'appui ou d'un nouveau point d'appui pour élaborer sa négociation avec ses employés. La convention collective est devenue échue en 1983. On se rappellera que les négociations se sont amorcées. On se rappellera que le gouvernement a formulé des offres. On se rappellera aussi dans quelle perspective ces offres ont été déposées. Le gouvernement avait sabré chez les employés des secteurs public, entre autres, et parapublic. Le gouvernement dont vous êtes, M. le ministre, malgré la signature qu'il avait apposée au bas des conventions collectives, à la veijle de la campagne référendaire, a dû constater, au lendemain de l'élection, que l'équilibre des comptes publics du Québec et la situation financière du Québec faisait en sorte que vous aviez signé des documents qui engageaient trop, financièrement, l'État québécois. Je n'ai pas l'intention de me référer longtemps aux lois spéciales qui ont été adoptées et à tout le chaos social que cela a entraîné, toute la démotivation, tous les problèmes qu'on affronte encore aujourd'hui au sein de notre fonction publique comme suite du geste posé par notre gouvernement.

Le gouvernement offrait donc - et vous avez offert, par vos interlocuteurs à la table patronale, avant la demande d'arbitrage -pour l'année 1984, 0 %; pour l'année 1985, l'indice des prix à la consommation moins 1,5 %; et pour 1986, l'indice des prix à la consommation moins 1,5 %. Il va de soi qu'une telle offre allait susciter un débat assez vif entre les parties.

Au mois de juin 1984, le gouvernement décidait de demander l'arbitrage. En droit du travail, tous ceux qui s'intéressent à ces questions savent pertinemment que, lorsqu'une des parties demande l'arbitrage, cela, essentiellement, veut dire ceci: On ne s'entend pas aux tables de négociation, on se donne la main et on réfère tout cela à un arbitre ou une arbitre. Il y aura une sentence qui sera rendue.

Nous convenons que, dans le cas de la Sûreté du Québec et de la loi qui régit de telles négociations, la demande de l'arbitrage par une des parties n'implique pas nécessairement que les deux parties doivent appliquer intégralement la sentence arbitrale. Dans le cas qui nous occupe et si on se réfère à juin 1984, on doit cependant retenir que le gouvernement ayant demandé lui-même l'arbitrage, il se conviait à une responsabilité morale, peut-être pas une responsabilité légale, de donner suite à cette sentence. Or, l'arbitre a siégé pendant les mois de juin et juillet. Peu de temps avant les auditions devant l'arbitre, on se le rappellera, il y avait peut-être 22 ou 23 points qui étaient en suspens à cette table de négociation; dans les jours qui ont suivi l'intention du gouvernement de demander à l'arbitre de se prononcer, ce sont 20 points litigieux qui se sont réglés, à ce moment-là. L'arbitre a donc eu à se prononcer sur deux points en particulier, ce qui facilitait d'autant plus sa tâche.

Le 9 juin, la sentence a été demandée. L'honorable juge Claude-René Dumais a rendu sa sentence le 28 septembre 1984, après la visite du pape, après les festivités entourant l'année 1984. Cette sentence prévoyait des augmentations de 4,5 % pour 1984, de 3,5 %, relatifs à l'inflation, évidemment, pour 1985 et 3,5 % en 1986.

Dans les semaines qui ont suivi le dépôt de cette sentence, le gouvernement a annoncé son intention de ne pas y donner suite, mettant de côté ainsi l'engagement moral auquel il s'était lui-même convié par la demande qu'il formulait à l'arbitre, en juin.

Avec les problèmes qu'on a vécus à l'automne 1984, ce qu'il faut comprendre, c'est que, lorsque c'est le gouvernement qui formule une telle requête, lorsque le premier ministre du Québec, M. René Lévesque, déclare à l'Assemblée nationale, comme il l'a fait en décembre, que, si l'arbitrage a été demandé, c'était strictement et uniquement

pour gagner du temps, il faut comprendre que tout cela, des déclarations comme celles-là et une stratégie, parce que c'était, effectivement, une stratégie, une tactique du gouvernement, suscite des réactions qu'on a vécues comme société, des réactions qui sont malheureuses, non seulement pour les citoyens que cela affecte, mais aussi pour le gouvernement que cela concerne et pour les travailleurs qui vivent ces frustrations et ces problèmes.

À cet égard, M. le Président, je ne voudrais pas - j'ose croire que le ministre saura conduire ses réponses au-delà de toute partisanerie - que le ministre, ce matin, plonge et répète le péché qu'il a parfois l'habitude de commettre, à savoir de rendre plus partisanes ses réponses et de faire en sorte que le débat baisse peut-être de quelques crans. Vous savez, jamais par nos questions, ici, nous n'avons voulu cautionner des gestes qui étaient susceptibles d'affecter la population. Et dans les contacts ou les échanges d'opinion que nous avons eus avec ces travailleurs, nous leur avons clairement indiqué notre solidarité parce que, pour nous, dès le moment où un gouvernement demande l'arbitrage, il se doit de respecter l'engagement moral auquel il se convie lui-même. Finalement, ces gens ont été purement et simplement bernés. Il aurait été beaucoup plus responsable, pour un gouvernement qui se disait incapable de payer plus, d'établir clairement les règles du jeu au mois de juin 1984 et que le gouvernement, par la voix de ses porte-parole à la table des négociations pour les employés de la Sûreté du Québec, dise franchement, loyalement, ouvertement et clairement: Messieurs, mesdames, nous sommes dans l'impossibilité financière de faire plus, et de justifier cette attitude plutôt que d'y aller par une demande d'arbitrage, ce qui aura été - l'histoire en témoigne clairement par les réponses du premier ministre - strictement et uniquement un moyen dilatoire pour gagner du temps. (10 h 45)

Les policiers de la Sûreté du Québec sont aussi conscients que tout autre travailleur du Québec de l'effort qu'ils ont fait ou qu'ils auraient pu faire pour tenter d'améliorer la condition financière du gouvernement. Mais cela ne leur a pas été présenté ainsi. C'est ce qui explique les problèmes qu'on a eu à vivre comme société, que vous avez eu à vivre comme gouvernement et que la Sûreté du Québec -je me réfère à la direction, évidemment - a eu à vivre à l'automne 1984. Ce sont des problèmes qui se sont concrétisés par des gestes peut-être pas toujours justifiables, mais souventefois explicables.

Le but de ma démarche, ce matin, auprès du ministre de la Justice, c'est de lui poser quelques questions. Dans un premier temps, j'aimerais qu'il se réfère au pourquoi des négociations dites intensives de la mi-mars, qui se sont amorcées le 10 mars et qui se sont terminées un peu plus tard, avec une fin de semaine vraiment active en ce qui concerne les rencontres et où les échanges ont achoppé. J'aimerais que le ministre se réfère au processus de négociation qui a suivi l'engagement formulé par le premier ministre à l'Assemblée nationale d'accepter de rencontrer les parties et de s'immiscer lui-même dans la négociation, avec vous comme ministre de la Justice. J'aurai, compte tenu de sa réponse, très probablement quelques questions plus spécifiques à lui poser en regard de cette négociation qui, selon les informations que je possède - il pourra s'y référer, évidemment -comme on le dit souvent, est passée à un cheveu d'un règlement. À la lumière des informations que je possède, si elles sont fondées, on a tous les motifs de croire que, normalement, un gouvernement aurait accepté d'apposer sa signature au bas d'une telle entente. Or, force nous est de constater que ces négociations de dernière minute de la fin du mois de mars, ces négociations intensives ont achoppé. J'aimerais que le ministre de la Justice nous indique pourquoi le gouvernement a adopté une telle attitude en regard de certains points particuliers de l'objet de la négociation.

Le deuxième volet des questions que je poserai, celui-là s'applique particulièrement pour l'avenir; je présume que M. Beaudoin devra être mis à contribution. Le corps policier de la Sûreté du Québec est un corps d'élite; c'est un corps policier qui était et qui doit continuer à être un objet de fierté de la part du Québec et des Québécois. On doit malheureusement retenir qu'à la suite du traitement qui a été imposé à ces travailleurs on ne sent pas la motivation. La motivation ne passe pas à travers les vitres des véhicules automobiles des policiers de la Sûreté du Québec, actuellement. J'aimerais savoir quels sont les efforts que vous entendez déployer pour rétablir un climat de confiance entre les policiers de la Sûreté du Québec et la direction de la Sûreté du Québec. Je retiens qu'il deviendra probablement difficile de rétablir un climat de confiance entre les policiers et le gouvernement, compte tenu des gestes qui ont été posés. Mais, plus particulièrement, M. Beaudoin, lorsqu'on devra vider la question de la négociation, qu'est-ce que vous entendez faire, comme directeur général, pour rétablir le climat de confiance, pour faire en sorte que les gens puissent connaître un degré de motivation aussi élevé que celui qu'ils ont connu dans le passé et que, finalement, on passe à autre chose, et que les gens soient un peu plus heureux dans ce qu'ils font et dans les relations qu'ils ont

avec leur supérieur?

M. le Président, le premier volet des questions que je veux poser ce matin s'adresse à l'honorable ministre de la Justice.

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, je remercie le député de m'éviter de redonner la chronologie des événements, de l'avoir fournie. Cependant, j'ajouterais à cette chronologie, pour la qualifier, qu'il l'a teintée d'une interprétation. Notamment, il a eu un lapsus qui semble être une chose d'ailleurs fréquente dans ce dossier de la Sûreté du Québec par beaucoup d'intervenants. Il a eu un lapsus en disant "en droit du travail", quand on se réfère à un arbitrage, c'est parce que les parties ne conviennent pas entre elles de quelque chose, s'en remettent à un tiers et vont écouter sa décision. Il aurait fallu qu'il dise "en relations du travail", pas "en droit du travail", parce que le droit qui s'applique ici dit bel et bien que ce personnage désigné par le juge en chef de la Cour provinciale fait une recommandation au gouvernement.

Cette recommandation du juge Dumais était inacceptable au Conseil des ministres pour des raisons évidentes et manifestes. Elle aurait eu comme effet de soustraire totalement, mais totalement, un groupe de personnes dans la société à l'effort nécessaire auquel ont été soumis tous les groupes dans la société. D'abord, à la suite de la crise économique, des dizaines de milliers de personnes ont perdu leur emploi, d'autres ont vécu l'insécurité, d'autres ont vécu des réductions de salaire, des gels de traitement, des plafonnements de carrière. Je parle ici du secteur privé. Dans le secteur public et parapublic, 300 000 travailleurs de l'État, M. le Président, dans le contexte que nous connaissons, ont dû se faire imposer cet effort par l'État, au nom de l'intérêt collectif public et pas seulement de la santé des finances publiques, bien que ce fût un facteur important. Cela comprend aussi, M. le Président, les députés de cette Assemblée, les membres du Conseil des ministres de cette assemblée, les sous-ministres, les juges, les médecins; tout le monde dans la société est passé par là. Le résultat, la recommandation du juge Dumais, c'était de faire comme si cela n'avait pas existé. Et cela, c'était inaceptable à nos yeux.

En toute déférence envers le juge, c'était, dans son application, nier le fait qu'il y ait eu un problème économique majeur au Québec. Ce n'est pas parce qu'on porte un costume, que ce soit la vareuse d'un médecin, que ce soit parce qu'on a l'autorité d'un sous-chef, parce qu'on est juge, élu de la population, enseignant, infirmière ou qui que ce soit dans le secteur public et parapublic, qu'on peut être à l'abri des effets de la crise économique. C'est cela qui nous a motivés.

Dans ces circonstances, alors que nous aurions pu souhaiter voir dans cette recommandation un geste qui tenait compte de cet effort nécessaire, malheureusement, l'application de la recommandation de l'arbitre aurait eu comme effet de classer ce corps d'élite dont on parle totalement, mais totalement à l'abri des effets de la crise économique.

Il est évident, M. le Président, qu'en toute équité on ne pouvait accepter cette recommandation. Or, si la recommandation avait dit autre chose, cela aurait été peut-être un autre débat. On ne souhaitait pas que l'arbitre... On souhaitait, comme c'est normal en relation du travail, que l'arbitre, dans le fond, fasse une recommandation au Conseil des ministres qui aille exactement dans le sens de la position patronale, mais, entre vous et moi, on ne s'y attendait pas vraiment. Mais on ne s'attendait pas, à toutes fins utiles, que les effets de cette recommandation, si elle devait être appliquée par le Conseil des ministres, soient d'une telle inéquité à l'égard de l'ensemble des citoyens du Québec. En ce sens, nous avons dû prendre cette décision extrêmement difficile, dans le contexte que le député de Portneuf a décrit.

Quant à la suite des événements, je vais vous la dire en une phrase. Pour moi, M. Raymond Richard, le président du syndicat, a manqué une extraordinaire occasion, au mois de juin dernier, de redorer un blason qui n'avait pas à l'être à ce moment-là, qui n'en avait pas besoin puisqu'il était respecté, mais de polir encore plus ce blason de la Sûreté du Québec. S'il avait de lui-même accepté, voyant que cet effort avait dû être imposé, qu'il n'avait été accepté que par les non-syndiqués, dans l'État, il aurait eu une occasion extraordinaire de faire valoir la dimension sociale de ce groupe dans notre société où, par définition, ces hommes et ces femmes -peu nombreuses, je n'en disconviens pas -exercent un métier qui a une vocation sociale. Si le président du syndicat avait accepté, au mois de juin dernier, M. le Président, un gel d'un an sur la rémunération de la Sûreté du Québec, je dois vous dire que les gars de la Sûreté du Québec auraient pu se promener la tête haute longtemps. C'était son droit; c'était parfaitement son droit de refuser.

Le gouvernement, à ce moment, n'avait pas d'autre choix que d'épuiser les recours. Il a dû épuiser les recours. Il a eu l'espoir, une fraction du temps, que puisse découler une recommandation qui ne soit pas le mandat patronal, mais qui ne soit pas non plus complètement de mettre à l'abri un corps policier des exigences que nous avait

imposées et qu'avait imposées la crise économique à tous les citoyens et citoyennes du Québec.

À partir de là, le dossier est malheureusement passé à un autre niveau. Le dossier s'est politisé. Il s'est politisé de deux façons. Il s'est politisé dans la mesure où le syndicat a choisi de faire valoir son point de vue dans l'opinion publique, en dehors des mécanismes de relations du travail puisqu'ils étaient tous épuisés. Il a choisi de contester la décision gouvernementale qui découlait du décret du mois de novembre et il a choisi de porter ce débat dans l'opinion publique.

En cours de route, il a rencontré un allié dans son discours. Cet allié, c'est la personne, entre autres, qui prétend pouvoir être le prochain premier ministre du Québec; je parle du chef du Parti libéral. Cela aussi a politisé le débat. La situation que nous avons vécue pendant un certain nombre de semaines et de mois est une situation anormale, je n'en disconviens pas, mais où, à mes yeux, les responsabilités doivent être un peu mieux partagées que ce qu'évoquait le député de Portneuf.

Pour revenir à ses deux questions précises sur le processus de négociation qui a suivi le mois de décembre et les raisons pour lesquelles cette négociation intensive a achoppé, je lui dirai, d'une part, que, au moment où ce dossier avait polarisé beaucoup de gens dans l'opinion publique, au moment où l'Opposition, comme c'est son droit, s'était faite le relais de certaines des positions syndicales en Chambre et dans l'opinion publique et au moment où le président du syndicat demandait une rencontre avec le premier ministre, il ne m'apparaissait pas anormal, dans les circonstances, comme ministre de la Justice, que le premier ministre puisse, effectivement, rencontrer la direction du syndicat, ce qui fut fait. Pourquoi? Parce que, au moment où, à toutes fins utiles, l'atmosphère qui est créée devient insoutenable dans une démocratie, les élus de la population n'ont pas le droit de ne pas tenter d'innover avant de faire face à une situation où des mesures draconiennes devraient être prises, ces mesures draconiennes elles-mêmes pouvant mener à une situation de chaos social. (11 heures)

Le premier ministre a donc rencontré les représentants syndicaux. Il était accompagné d'un certain nombre de personnes de son bureau et du Conseil exécutif, du ministre de la Justice et de certains de ses collaborateurs. Dans les jours qui ont suivi, après avoir dégagé avec précision ce que pouvait être la solution à certains problèmes et pour permettre disons-le aussi - une résolution dans ce qu'un expert en relations du travail avait appelé le syndrome du conflit exacerbé, une sortie d'élégance à ceux qui avaient contesté publiquement et politiquement l'autorité civile, cette solution d'élégance, M. le Président, pour eux, ne pouvait en aucune manière amener le gouvernement à remettre en cause le principe de l'application des décrets pour leur durée, non plus que de le faire par accident. Nous avions, sur l'ensemble du dossier, 24 heures avant que le président du syndicat annonce que, à toutes fins utiles, il n'y avait plus rien à faire, une entente dans laquelle le gouvernement pouvait préserver ses principes et dans laquelle, à partir du problème qui va se poser à l'égard du recrutement dans les années qui viennent et d'une forme de gestion plus adéquate des ressources humaines, le syndicat consentait à un certain nombre de choses, le gouvernement aussi y trouvant son compte, à certains égards, financièrement.

Ce qui a achoppé, c'est ce qui, finalement, est un détail, M. le Président. Je vais simplement terminer ma réponse sans me mettre à négocier autour de cette table. Les décrets sont là et ils s'appliquent; ce n'est pas ici qu'on va changer cela, mais il faut peut-être savoir de quoi on parle. On avait une entente sur l'ensemble, M. le Président, sauf sur la question de l'application théorique, sur les trois ou quatre prochaines années, de la sentence arbitrale pour les fins du calcul du régime de retraite.

Je vous ferais remarquer, M. le Président, que, à cinquante-deux ans, après trente-deux ans de service, un policier de la Sûreté du Québec se retire avec un montant annuel égal à 70 % de son traitement moyen des quatre meilleures années, ce qui lui aurait donné, au 1er janvier 1986, 24 066 $. Un retraité, après vingt-sept ans de service -ce qui est le cas de beaucoup d'entre eux -donc, quelque part à la fin de la quarantaine, a une rente égale à 62 % du traitement des quatre meilleures années, soit 21 315 $. Ce que le syndicat demandait là-dessus, M. le Président, c'était qu'on puisse majorer ces prestations pour les quatre prochaines années. Nous étions prêts et consentants à appliquer, dans le cas de la Sûreté du Québec, le même genre de programme que celui que nous avons instauré à certains endroits dans la fonction publique, où on donne un montant forfaitaire au moment de la retraite, si on veut favoriser l'attrition encore plus.

C'est là-dessus que cela a achoppé, M. le Président. Disons qu'on ambitionnait pas mal sur le pain bénit. On trouvait que c'était assez pour notre part et on a été obligé de dire non, là-dessus; non! On a une solution en pratique qui vous permet ici de mettre fin à cela et vous en demandez encore.

M. le Président, mon dernier

commentaire - je crois qu'il me reste trois, quatre, cinq minutes - portera sur une question, dans le fond, que je pourrais peut-être adresser au député. Peut-être que, dans ses questions additionnelles, il pourrait y répondre. Je crois comprendre dans ses propos, et je reverrai la transcription, qu'il considère que, à toutes fins utiles, il s'appliquerait à lui-même l'engagement moral de respecter la recommandation du juge Dumais. Si c'est le cas, M. le Président, pour moi, il y a deux conclusions à cela: la première, ne vous demandez pas pourquoi la négociation avec eux a achoppé. Si le président du syndicat des policiers avait un engagement de la part d'un parti politique d'Opposition qui auraient un meilleur "deal" qu'avec le gouvernement, c'est la première conclusion que j'en tirerais. La deuxième conclusion que j'en tirerais, c'est que ce parti n'est pas encore au pouvoir et qu'il donne sa chemise. Cela m'inquiète pas mal plus pour le Québec, globalement.

Je crois, M. le Président, qu'il est du devoir social d'un gouvernement, qu'il soit du PQ ou du Parti libéral, de faire en sorte, malgré les problèmes d'exacerbation de relations du travail qu'on a trouvés dans ce dossier, il est du devoir moral de quelque parti politique que ce soit de faire en sorte que, dans le cas des policiers comme des autres catégories de la population, l'effort à l'égard des conséquences de la crise économique soit assumé et, si l'Opposition libérale, M. le Président, est prête à remettre en question ce principe, qu'elle dise clairement aux citoyens du Québec qu'elle considère qu'il y a une catégorie à privilégier dans la société, qui s'appellerait les policiers. C'est son droit de le faire, mais qu'elle le dise clairement à nos concitoyens.

Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le ministre. M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Je n'ai pas interrompu le ministre quoiqu'il aurait été très certainement justifié ou possible de le faire, tout au moins. Je n'ai pas l'intention de consacrer le principal de notre temps à discuter dans le cadre d'un débat strictement partisan. Par contre, je ne peux m'empêcher de relever les affirmations et les accusations fausses, gratuites, irresponsables qu'il a formulées à l'égard du chef de notre formation politique, M. Bourassa, qui a toujours fait des déclarations empreintes d'un sens très élevé des responsabilités lorsqu'il a formulé de telles déclarations relatives à ce conflit.

Cependant, je me permettrai de dire au ministre qu'il est regrettable qu'il veuille teinter le débat d'autant de partisanerie et imputer autant de motifs à peu près à tout le monde, dans ses commentaires ce matin.

Je lui demanderais, pour les prochaines questions, d'être peut-être un peu moins fâché, plus calme, plus serein. Ce n'est pas bon pour votre image, vous savez, M. le ministre, vu les prétentions que avez pour la chefferie du Parti québécois. Je vous prierais d'être plus serein. Vos conseillers vont probablement vous dire, à la fin de cette période, que ce n'est pas bon pour votre image de vous fâcher comme cela et de donner des coups de poing sur la table.

M. le Président, j'apprécie que le ministre me confirme lui-même ce matin -parce que la confirmation était venue seulement du premier ministre, M. Lévesque - que le pourquoi de la demande d'arbitrage en juin 1984 était strictement une question de tactique et de stratégie, parce que, si l'argumentation à l'appui de votre position, c'était de faire en sorte que les policiers de la Sûreté du Québec aient à subir le même coup que les travailleurs de l'État, lorsque vous vous référez aux députés, aux ministres, aux médecins, aux juges, aux enseignants, aux infirmiers, vous aviez la responsabilité, si vous aviez été un gouvernement responsable, judicieux, travaillant dans l'intérêt public, de le dire clairement et de l'énoncer loyalement aux travailleurs concernés avant d'aller en arbitrage. Vous venez de nous confirmer ce matin que, lors de la demande d'arbitrage, avant l'arbitrage, votre position était définitive, qu'elle était connue entre vous au Conseil des ministres et que vos intentions étaient arrêtées. M. le ministre, merci de me l'avoir confirmé ce matin. C'est seulement le premier ministre, M. Lévesque qui l'avait confirmé, mais c'est regrettable que vous ayez adopté un tel comportement et par surcroît que vous vous y soyez associé vous-même.

Le ministre ne veut pas revenir à la négociation. Il dit: Je ne toucherai pas à la négociation, mais cela a achoppé sur un détail et nous avions une entente sur la table. Je suis heureux que le ministre nous le confirme, parce que ce sont les informations que nous possédons et le public a le droit de savoir qu'il y avait effectivement une entente sur la table et que le conflit à la Sûreté du Québec était pratiquement réglé. Par contre, il ne veut pas discuter du fond de la négociation. Il ne reprendra pas la négociation ici.

M. le ministre, pouvez-vous nous confirmer qu'à partir du 10 mars des contacts ont été établis entre les représentants patronaux et les représentants du syndicat? Les premiers contacts ont eu lieu le 10 mars, des rencontres le ou vers le 12 mars, des échanges les 13, 14 mars et dans les jours qui ont suivi. Pouvez-vous nous confirmer qu'un des éléments les plus contentieux dans l'ensemble de ce débat était toute la politique de la rémunération et que les parties ont, entre les 10 et 26 mars,

fait un bon bout de chemin ensemble et un chemin assez prolongé pour en arriver à la rédaction de textes dans un document dont l'en-tête porte le titre "Comité sur la rémunération"? Pouvez-vous nous confirmer qu'avant même la rencontre avec le premier ministre ce qui se dégageait des travaux de déblaiement, des travaux préliminaires entre le gouvernement et les policiers, ces échanges conduisaient à un accord portant sur l'établissement de nouvelles structures pour établir les conditions de rémunération des policiers de la Sûreté du Québec au lendemain du 31 décembre 1986 et que cette nouvelle entente ou ce qui se dégageait sur la rémunération prévoyait entre autres, qu'à l'avenir, au 31 décembre 1986, la rémunération des membres de la Sûreté du Québec aurait été comparable à celle de l'ensemble des corps policiers du Québec et qu'à cette fin le comité devait examiner la situation et l'évolution des salaires des principaux corps policiers municipaux du Québec, la situation et l'évolution des salaires du secteur privé et du secteur public québécois, la situation et l'évolution des salaires de la GRC, de l'Ontario Provincial Police et du Toronto métropolitain et que le comité acceptait de tenir compte entre autres de l'évolution de l'indice des prix à la consommation pour les périodes 1984, 1985 et 1986 et la position relative historique des salaires des membres de la Sûreté du Québec? Pouvez-vous confirmer ou infirmer qu'en vertu de cette nouvelle structure de rémunération l'Association des policiers provinciaux du Québec avait accepté - non pas que le gouvernement avait proposé, mais que le gouvernement avait demandé et l'association avait accepté - qu'à partir de 1987 une nouvelle structure de rémunération soit établie pour les nouveaux policiers de la Sûreté du Québec prévoyant entre autres une diminution au sujet de la rémunération de base de 6000 $ par année par policier à l'entrée, que les échelles passaient de 48 à 60 mois et que cette nouvelle structure de rémunération faisait en sorte que le nouveau policier n'aurait jamais rejoint l'ancien taux pour des fonctions équivalentes? C'est le premier volet de ma question. Par la suite, j'aborderai la rencontre du 28 mars.

Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le député. M. le ministre. (11 h 15)

M. Johnson (Anjou): M. le Président, d'abord sur les prolégomènes du député, il n'est pas exact de dire que ce n'était que stratégique ou tactique. Je pense que le député travestit mes propos quand il dit que, sur l'arbitrage, dans le fond, le gouvernement avait déjà arrêté sa position. Il laisse entendre dans le fond que le gouvernement avait déjà pris sa décision avant même de déclencher l'arbitrage. Je dirai: Non, c'est inexact! Ce que j'ai bien dit - il relira la transcription des propos que j'ai eus à la suite de sa première question - j'ai bien dit que l'espoir que nous avions, c'était qu'au cours des délibérations devant le juge-arbitre qui devait faire une recommandation nous parvenions à faire triompher le principe qu'il y avait un effort nécessaire, là comme ailleurs, et l'effet de la sentence, si nous avions dû l'appliquer, cela aurait été de faire en sorte que non. La preuve, M. le Président, c'est que le décret du mois de novembre qui fixe les conditions de travail des policiers sur le plan de leur rémunération n'est pas un décret qui est la position patronale du mois de juin, mais qui se situe quelque part entre la position patronale du mois de juin et la recommandation de l'arbitre. Je pense qu'il faut en être conscient.

Deuxièmement, il n'y a pas de "giddy" là-dedans, il n'y a pas d'histoire. Le président du syndicat savait ce que représentait l'arbitrage. J'ai rencontré M. Raymond Richard pour lui annoncer que nous irions en arbitrage, quelque part au mois de juin. Je ne me souviens pas, je pense que c'est la deuxième ou le troisième semaine de juin, quelque chose comme cela. Je l'ai vu, je pense, à cette époque-là, à deux pu trois reprises. Je lui ai dit, la première fois que je l'ai vu: M. Richard, il est possible que nous allions en arbitrage. Je pense que la seconde fois ou la troisième fois - je ne me souviens pas - je lui ai confirmé que nous avions l'intention d'y aller. Quand j'ai annoncé cela à M. Raymond Richard ou quand j'ai évoqué le fait que nous pourrions aller en arbitrage, il m'a répondu: Nous autres, on trouve cela inacceptable. J'ai dit: Pourquoi? Il a dit: Parce que vous ne serez pas lié par la décision de l'arbitre. C'est M. Raymond Richard qui m'a dit cela, M. le Président. Il ne l'a pas appris dans le journal, lui, au mois de novembre. Au mois de juin, il a dit: Je sais que vous ne serez pas lié par la décision de l'arbitre. Ce qui ne l'a pas empêché, à compter du mois de novembre, de mettre sur pied une campagne de propagande absolument gigantesque qui laissait entendre, et qui avait un relais, un relais politique, M. le Président, qu'à toutes fins utiles on cassait ce qui était une sentence arbitrale. La raison pour laquelle il ne voulait pas y aller, c'est qu'il savait qu'on ne serait pas lié. Je lui ai dit: On va plaider fort, M. Richard, pour faire retenir quelque chose qui colle à notre point de vue par l'arbitre, mais la recommandation du juge Dumais, encore une fois, inclut un principe. Ce principe, c'est que les policiers n'ont pas à être soumis à quelque effort que ce soit qui soit comparable à ce qui a dû être imposé aux autres.

On ne demandait pas de geler rétroactivement la paie des gens, on ne

demandait même pas le phénomène de la piscine, on demandait en pratique dans la rémunération la reconnaissance du principe d'une stabilisation de la masse et de l'effort que cela représente pour chacun pour une période donnée. Quand vous vous ramassez avec une recommandation qui vous coûterait 4,5 % IPC-IPC, je peux vous dire que cela n'a rien à voir avec ce que le Québec a vécu, cela n'a rien à voir avec ce qui se vit encore quotidiennement par des milliers de travailleurs au Québec, qui règlent pour 2 %, qui règlent pour des gels dans le secteur privé. On va continuer de donner des 4,5 % IPC-IPC? Voyons donc! C'est cela le vrai débat, c'est ça le débat de fond qu'il y a derrière cela.

Quant aux propos qui ont fait l'objet d'échanges au niveau du comité mixte à la Sûreté du Québec, qui est une sorte de comité de négociation permanent, je n'ai pas l'intention ici d'y aller heure par heure, téléphone par téléphone; ce n'est pas comme cela - je pense que le député connaît fort bien mon attitude, étant donné qu'il a été critique en matière de relations du travail longtemps, qu'il l'est encore d'ailleurs, si je ne me trompe pas - il sait très bien quelle est mon attitude devant ce type de choses: quand les choses se font en négociation, elles se font en négociation. Je peux, cependant, lui confirmer les contenus qu'il a évoqués, d'autant plus, M. le Président, que ces contenus seront dans le volume 17, no 2, d'avril 1985 d'une revue qui s'appelle Au Devoir, Association des policiers provinciaux du Québec.

À partir de la page 34, on y retrouve tout ce qui a été paraphé lors de ces discussions intensives et, à ce que je sache, sauf erreur, les documents qu'on retrouve là sont rigoureusement exacts. D'ailleurs, je pense que ce sont des photocopies des documents paraphés par mes représentants. Oui, je peux confirmer le contenu. D'ailleurs, il est public. Je ne pense pas que ce soit vendu dans les kiosques, mais c'est un document public.

Dans les circonstances, M. le Président, ce que j'ai à répondre au député, c'est que, oui, cela a achoppé sur la question de l'ajustement possible sur la base d'une tension qui était n'importe où entre 21 300 $ et 24 000 $ pour des gens qui voulaient qu'on en mette entre 90 $ et 500 $ de plus par année. On a dit: Là, c'est assez. C'est assez socialement, c'est assez économiquement, c'est assez politiquement aussi!

C'est assez de faire en sorte qu'on ébranle toute la société, parce qu'on est président d'un syndicat de policiers. C'est assez de s'imaginer qu'on va faire des jeux politiques, qu'on va se fermer les yeux, quand on est président de syndicat, sur le fait que des dossiers d'enquêtes policières se retrouvent entre les mains de députés de l'Opposition.

M. Pagé: Le ministre est en train d'affirmer des choses qui sont complètement fausses et je lui demanderais, s'il a des cas à soumettre, qu'il les soumette, sinon qu'il passe à autre chose.

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre, vous avez la parole.

M. Pagé: À quels dossiers et à quels policiers vous êtes-vous référé, M. le ministre?

M. Johnson (Anjou): C'est assez, M. le Président, de voir...

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre va terminer et vous poserez...

M. Pagé: Non, M. le Président, il ne peut pas se faire des choses aussi graves, aussi lourdes de conséquences que celles que vient de signaler le ministre. Quels dossiers l'Opposition a-t-elle eus dans les mains?

M. Johnson (Anjou): M. le Président, j'ai affirmé que le président de l'APPQ s'est fermé les yeux sur le fait qu'on retrouvait en plein milieu de la période de questions des questions basées sur le contenu d'enquêtes policières.

M. Pagé: Quels dossiers?

M. Johnson (Anjou): Je vous réfère aux transcriptions du mois de décembre.

M. Pagé: Vous affirmez, ce matin, comme ministre de la Justice, lors de l'étude des crédits, que des dossiers ont été transférés par l'Association des policiers provinciaux du Québec à l'Opposition?

M. Johnson (Anjou): Je n'ai pas dit cela. J'ai dit: Lisez la transcription; le président de l'Association des policiers provinciaux du Québec a fermé les yeux sur le fait qu'on pouvait retrouver en Chambre, devant la population, des questions provenant de l'Opposition et qui, de toute évidence, émanaient de renseignements découlant d'enquêtes policières.

M. Pagé: Êtes-vous conscient de l'accusation que vous portez à l'égard des dirigeants de l'Association des policiers provinciaux et des députés?

M. Johnson (Anjou): Je dis que le président de l'APPQ s'est fermé les yeux sur cette question, qu'il aurait dû dénoncer ce processus.

M. Pagé: Vous soutenez aujourd'hui que des députés de l'Opposition, à l'Assemblée nationale du Québec, en décembre, 1984, avaient des dossiers provenant de quelque part à la Sûreté du Québec. Des preuves ou le silence, M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): J'ai affirmé, M. le Président, et je réitère mes affirmations, que les questions de l'Opposition, au mois de décembre, étaient basées sur des renseignements qui étaient relatifs à des enquêtes policières; c'est aussi simple que cela, des renseignements que le Procureur général n'avait même pas entre ses mains, dans certains cas, qui n'étaient pas rendus au bureau du Procureur général. C'est cela que j'affirme, M. le Président, rien de plus, rien de moins.

M. Pagé: Affirmez-vous que des députés de l'Opposition ont eu l'occasion de prendre connaissance de dossiers de police? C'est cela que vous voulez affirmer ce matin? M. le ministre, je vous rappelle que vous êtes ministre de la Justice...

M. Johnson (Anjou): Je dis que les...

M. Pagé: ...et que, vu l'avenir que vous voulez vous tracer, vous devriez être prudent.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Portneuf, vous avez posé une autre question au ministre; M. le ministre devrait répondre.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, avant que le député transforme la commission des crédits en tribunal d'inquisition, je dirai que, de fait...

M. Pagé: C'est gratuit, les accusations que vous partez...

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Portneuf, s'il vous plaît!

M. Johnson (Anjou): ...au mois de décembre - la transcription le démontre -des membres de l'Opposition ont posé des questions en Chambre relativement à des enquêtes policières ou à des activités dans le cadre d'enquêtes policières; c'est ce que j'affirme. Je n'ai pas affirmé, M. le Président, que le député de Portneuf était en train de lire un rapport de police. J'ai dit que ces questions étaient relatives à des activités policières sous enquête.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: Juste une petite précision, parce que je n'ai pas compris. Le mi- nistre a dit: Le président de l'association des policiers a fermé les yeux. Est-ce que le ministre veut dire qu'il a fermé les yeux en tant que président de l'association des policiers ou est-ce qu'il a fermé les yeux en tant que policier? Est-ce que le ministre ne fait aucune distinction?

M. Johnson (Anjou): Je ne fais pas la distinction dans le cas présent. À ma connaissance, le président du syndicat est détaché de façon permanente pour exercer ses fonctions. À ma connaissance, bien qu'il ait le statut de policier, il n'exerce pas des fonctions policières, il ne fait pas d'enquête, il n'est pas en patrouille, il n'a pas de mandat comme personne à la Sûreté du Québec. Il est soumis à un certain nombre de contraintes, comme tout le monde, en vertu de la Loi de police, mais, à ma connaissance, dans son travail de président, en vertu de la convention collective, si je ne m'abuse, il est libéré à temps plein pour faire ce métier. Je crois, d'ailleurs, que cela fait plusieurs années qu'il l'exerce. Ce que j'affirme, M. le Président, c'est qu'on a vécu une période au Québec où, simultanément, il y avait un problème énorme de relations du travail entre l'État et les représentants de ses policiers et qu'en même temps ce dossier a été accompagné d'une atmosphère de questions, d'attitudes et de silences parfois très significatifs qui, à toutes fins utiles, ont transposé ce dossier au niveau politique. Je n'ai rien dit de plus ni de moins que cela.

Je réitère, M. le Président, que ce n'est pas moi qui ai affirmé - et ce n'est pas une lubie, une invention de celui qui vous parle - que le président du syndicat avait eu des communications avec l'Opposition. Je veux simplement vous donner un extrait d'un texte publié par l'association elle-même, toujours dans cette même revue, à la page 20, d'une transcription dans le journal de l'association des policiers d'une entrevue donnée par le président du syndicat: "Nous n'avons pas de promesse du gouvernement libéral qu'advenant la prise de pouvoir par M. Bourassa il accepterait la sentence arbitrale, mais, sauf une chose, dans les discussions qui ont lieu en privé avec le gouvernement libéral, nos espoirs sont que nous aurions enfin un règlement acceptable pour les membres." Ce n'est pas moi qui dis cela, c'est le président de l'APPQ.

Le président du syndicat dit, également, à la page 21 de cette même revue, d'après une transcription d'une entrevue qu'il donnait: "Peut-être que je vous fais retremper dans l'histoire, les libéraux vont peut-être être là dans trois mois."

Ce n'est pas moi, M. le Président, qui affirme que le conflit a été politisé. Je n'ai pas été le premier à affirmer cela. J'avais l'impression qu'il commençait à l'être

un peu à partir du mois de décembre. C'est le président de l'APPQ, M. le Président, et le député de Portneuf, qui connaît très bien le processus des relations du travail, il le connaît parce qu'il en est le critique depuis des années au Parti libéral, sait très bien le genre de situation qu'a vécue le gouvernement et ses conséquences sur la population, sur le climat des troupes, sur l'efficacité des troupes. Il le sait parce que, dans la mesure où le président du syndicat peut affirmer, comme il l'a fait publiquement devant ses 4300 policiers, qu'il a, dit-il, un meilleur "deal" avec le gouvernement libéral qu'avec le Parti québécois, ne vous demandez pas pourquoi il n'y a pas de règlement, M. le Président. C'est cela la politisation d'un conflit. Marine, ce sont des pinottes à côté de cela, M. le Président. C'est cela la politisation d'un conflit, et c'est joué dans un domaine d'une sensibilité incroyable dans une société démocratique comme la nôtre. (11 h 30)

C'est déjà difficile, et j'en souhaite à celui qui pourrait être ministre de la Justice dans un hypothétique gouvernement libéral, d'harmoniser de façon efficace, adéquate, cohérente et crédible les relations entre les pouvoirs civils et les pouvoirs policiers dans une société démocratique. C'est complexe à cause de la neutralité que doit avoir un corps policier, et on sait ce que cela a donné au Québec. Cela a donné une réforme importante au début des années soixante parce que la police était une police politique jusqu'à 1962. C'est cela qui est en cause ici: ce rapprochement entre un parti politique et ceux qui ont du pouvoir au niveau policier. C'est un rapprochement très dangereux. C'est cela que je mets en cause.

Encore une fois, je ne " peux pas affirmer, parce que je ne suis pas témoin de cela, quelle est la nature du "deal". Je peux simplement dire que le président du syndicat évoque lui-même qu'il y a quelque chose de meilleur avec le Parti libéral qu'avec le Parti québécois. Deuxièmement, je peux vous affirmer - évidemment, c'est du ouï-dire, on n'est pas dans un procès ici; on y va avec ce que l'on peut - que ce même président disait à mon représentant personnel, il y a encore quelques jours, qu'il avait rencontré le chef du Parti libéral, qu'il avait rencontré des émissaires du Parti libéral et que ces émissaires du Parti libéral étaient satisfaits de ce qu'il faisait. C'est ce qu'il affirme.

Alors, de deux choses l'une, M. le Président, ou ce que dit M. Raymond Richard est vrai ou c'est faux. Si c'est vrai, M. le Président, c'est très dangereux pour la démocratie quant au sens des responsabilités et quant à la distance nécessaire qui doit exister entre les structures politiques et les corps policiers. C'est dangereux. Ou bien c'est faux, et alors le Parti libéral, et notamment le député de Portneuf en ce moment, est en train de défendre un menteur. Un des deux: ou c'est dangereux ou l'Opposition fait une erreur très grave sur le plan du jugement en défendant un menteur. Mais, dans un cas comme dans l'autre, M. le Président, cela m'inquiète et je vous dirai que cela me donne le goût de me battre pour que ce monde-là ne prenne pas le pouvoir.

M. Pagé: M. le Président.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Avant de passer à quelques questions, je me permets de relever l'une des accusations que le ministre de la Justice vient de formuler. Il a tenté de se rattraper à la fin, un peu plus tard, vu l'impair qu'il venait de commettre, lorsqu'il a évoqué qu'en décembre dernier le président de l'Association des policiers provinciaux, toujours selon lui, ministre de la Justice, aurait fermé les yeux sur des dossiers entre les mains des députés de l'Opposition. Je tiens à indiquer au ministre de la Justice et à ceux qui nous entendent, ceux qui sont ici ou encore ceux qui liront le Journal des débats, que l'énoncé, cette formulation du ministre de la Justice est fausse et même fallacieuse. Elle impute des motifs; elle est irresponsable et elle est purement et simplement démagogique de la part de celui qui, particulièrement dans un débat comme celui-là, devrait être au-dessus de la mêlée et être beaucoup plus judicieux dans ses propos.

Le ministre a continué ce matin à politiser lui-même le débat alors que le forum de ce matin devait nous convier aux négociations: pourquoi cela a achoppé et surtout ce qu'il importe de faire à compter de demain pour le rétablissement d'un climat social serein, pour le rétablissement de la motivation et d'une participation vraiment active des travailleurs de la Sûreté du Québec. Non, le ministre de la Justice, M. le député d'Anjou, a lui-même choisi, ce matin, de politiser, comme je ne l'ai jamais entendu en douze ans de vie politique ici à Québec, un dossier comme celui-là. Et, par surcroît, c'est le Procureur général du Québec et ministre de la Justice.

M. le Président, le ministre s'est référé à des contacts que l'Opposition, notre formation politique, aurait eus avec ces travailleurs. Je dirai au ministre de la Justice, qui a été aussi ministre du Travail, qu'il est explicable, normal et justifié qu'un groupe de travailleurs - que ce soit le syndicat des travailleurs à Marine, que ce soient les travailleurs d'un syndicat de la construction, que ce soient des travailleurs en milieu hospitalier qui ont à souffrir et à

subir des coupures sévères, que ce soient des travailleurs de la Sûreté du Québec qui se voient imposer des conditions à la suite de ce qu'on peut qualifier de pure stratégie gouvernementale, parce que c'est la responsabilité du gouvernement lorsqu'il traite du renouvellement de la convention collective des travailleurs de la Sûreté du Québec, et que celle-ci en est une de relations patron-employés - qu'il est normal que les policiers de la Sûreté du Québec, lorsqu'ils ont à négocier avec le gouvernement comme employés, sensibilisent la presse, la population et les élus ici autour de la table - qu'ils soient de la majorité ou de la minorité - aux problèmes qui les occupent avec le gouvernement, non pas le gouvernement qui a à faire respecter des lois, à gérer, à assumer la gestion d'un appareil judiciaire, mais le gouvernement qui a une responsabilité comme employeur envers eux. Et si le président de l'Association des policiers provinciaux, si les policiers de la Sûreté du Québec indiquent, au moment où on se parle, dans un document, et quel que soit le document, qu'ils ont plus confiance à une formation politique comme la nôtre, je tiens à vous rappeler, M. le ministre, qu'ils ne sont pas les seuls. Les sondages en témoignent clairement. C'est la population qui a plus confiance, actuellement, à l'équipe que nous formons qu'à la vôtre. S'ils indiquent dans un document qu'ils auraient plus confiance à un gouvernement libéral qu'au gouvernement actuel formé par le Parti québécois, c'est qu'ils se rappellent très bien la façon loyale, honnête, franche et ouverte avec laquelle notre gouvernement a toujours négocié ses conditions de travail, sans passe-passe, sans pseudo-préjugé favorable, sans coup de...

M. Johnson (Anjou): On les a reprises chaque fois.

M. Pagé: Ah! c'est ce que vous soutenez, M. le ministre. Vous savez, vos arguments ne tiennent pas; ils ne résistent pas à l'analyse. Et c'est regrettable, mais profondément regrettable que vous politisiez le débat de façon aussi basse, aussi surprenante pour quelqu'un comme vous qui se veut être éventuellement un homme d'État.

M. le Président, j'aimerais demander au ministre de la Justice s'il est exact que, le 28 mars, lors de la rencontre entre M. René Lévesque, vous-même, des collaborateurs, les négociateurs et les représentants des policiers, l'Association des policiers provinciaux a fait valoir les quatre points qui retenaient son attention, qui reflétaient la prise de position, à ce moment-là?

Selon les informations que je possède, dans un premier temps, M. Lévesque aurait souhaité la bienvenue, aurait convenu qu'il fallait régler; il aurait indiqué qu'il apprécierait que l'Association des policiers provinciaux accepte le décret; et il aurait brièvement réagi sur les quatre points portés à l'attention des participants comme étant la position adoptée par l'association.

Dans sa prise de position, l'association demandait, premièrement, à compter du 1er janvier 1987, un ajustement salarial sans effet rétroactif basé sur les normes de la sentence arbitrale, et la poursuite des négociations sur cette base.

Deuxièmement, à compter du 1er janvier 1987, l'association demande un ajustement non rétroactif de la rente de retraite, suivant les mêmes normes, pour les membres retraités, entre le 1er janvier 1984 et le 31 décembre 1986: le point qui a achoppé, selon ce que vous nous avez confirmé ce matin.

Troisièmement, l'extension du régime de retraite aux membres de la Sûreté du Québec, pour une période de cinq ans.

Quatrièmement, la signature d'un protocole de retour au travail dont les modalités restaient à discuter.

Le premier ministre aurait indiqué que le premier point, c'est-à-dire le maintien, le respect du décret - 1er janvier 1987 - et les négociations à partir, comme plancher, de la sentence arbitrale le premier ministre aurait dit que c'était intéressant.

Concernant le deuxième point, celui qui a achoppé, pour les rentes de retraite, le premier ministre n'aurait pas dit un mot.

Pour le troisième point, concernant l'extension du régime de retraite qui, soit dit en passant, ne se négocie pas en même temps que la convention, le premier ministre aurait dit: Pas plus de trois ans.

Quatrièmement, pour le protocole de retour au travail, le premier ministre aurait déclaré: II y aura un protocole de retour au travail, mais il n'est pas question de retirer quelques sanctions disciplinaires qui ont été imposées jusqu'à maintenant.

Partant de là, vous deviez vous rencontrer très tôt dans l'après-midi, après la séance. Tout le monde s'est attendu, apparemment, jusqu'à 22 h 30. Il y a eu des échanges de textes, des communications, etc. Pouvez-vous confirmer ce matin que, premièrement: l'Association des policiers provinciaux acceptait le décret à la condition que, au 1er janvier 1987, la négociation s'amorce à partir, comme base, de la sentence arbitrale et que c'était, en principe, accepté par le gouvernement? Pouvez-vous confirmer, toujours concernant la rémunération, que les deux parties acceptaient une nouvelle structure de rémunération qui faisait en sorte que les nouveaux policiers avaient une échelle de rémunération diminuée de 6000 $? C'est beaucoup d'argent, compte tenu du nombre de policiers qui s'apprêtent à prendre leur

retraite ou qui auraient pu prendre leur retraite d'ici à quelques années. On m'a indiqué qu'il y avait peut-être 400 ou 480 policiers qui auraient dû être embauchés. Imaginez ce que cela pouvait représenter en termes d'économie d'échelle. Il y avait entente là-dessus.

Deuxièmement, l'Association des policiers provinciaux avait accepté la demande formulée par le premier ministre que le régime de retraite était prolongé de trois ans, comme le demandait le gouvernement, alors que la demande initiale était de cinq ans.

Sur le point trois, concernant le protocole de retour au travail, l'Association des policiers provinciaux n'exigeait pas le retrait des sanctions. Elle acceptait le maintien des sanctions et des poursuites, s'il y a lieu. Elle demandait purement et simplement qu'il n'y ait pas de nouvelles poursuites d'entreprises. Concernant le point deux, le point particulier, spécifique s'appliquant seulement à quelques dizaines ou centaines de travailleurs, mais non pas à l'ensemble, concernant l'applicabilité des dispositions de la sentence, en regard de la rente de retraite entre le 1er janvier 1984 et 31 décembre 1986, Me Richard Drouin a indiqué: On s'excuse, cela, on ne peut pas l'accepter; le premier ministre a oublié de vous le dire.

Finalement, il y avait une entente à la table qui était susceptible de recevoir la signature des deux parties. Ce conflit qui avait non seulement duré, mais trop duré était réglé le 28 mars. Le gouvernement y trouvait son compte en ce sens que le décret s'appliquait. Une nouvelle structure de rémunération était établie pour l'avenir qui permettait au gouvernement d'économiser des millions de dollars, de procéder à l'embauche de près de 480 nouveaux policiers, d'appuyer ses offres de rémunération sur une base plus équitable selon lui et plus justifiée selon tout le monde, en regard de ce qui s'était payé pendant ce temps ou de ce qui se payait dans le secteur public, dans le secteur privé et dans les autres corps policiers. C'était acquis au gouvernement que l'Association des policiers provinciaux, qui n'a pas à négocier actuellement le renouvellement des conditions du régime de retraite, acceptait de le faire et acceptait de le reconduire pour trois ans alors que sa demande initiale était de cinq ans. Contrairement à bien des groupes syndicaux qui se retrouvent dans la même position - vous le savez, vous avez été ministre du Travail - l'association ne demandait même pas le retrait des poursuites ou des sanctions. Elle demandait purement et simplement qu'il n'y en ait pas d'autres. (11 h 45)

Finalement, tout cela a achoppé quelque part durant cette fin de semaine lorsque les négociateurs patronaux se sont vu dire: C'est regrettable, sur le petit point numéro deux, le point particulier portant sur l'application de la sentence pour certains travailleurs qui prendront leur retraite entre 1984 et 1986, c'est non.

Nous en concluons, M. le ministre de la Justice, que quelqu'un, quelque part dans ce débat, durant cette fin de semaine, a pris les moyens pour que la négociation achoppe, même si tout le monde avait des motifs de croire qu'on se dirigeait vers un règlement. Même s'il avait été plus utile d'avoir un règlement pour le Québec, pour ses travailleurs, pour les dirigeants de la Sûreté du Québec et pour tout le monde, il y a quelqu'un quelque part qui avait intérêt à ce que cela bloque.

M. le Président, je vais faire le même exercice que le ministre de la Justice et vous m'en excuserez. Le ouï-dire que j'entends, c'est que le ministre de la Justice ne voulait pas que le conflit se règle parce que cela aurait été, pour lui, le premier ministre René Lévesque qui l'aurait réglé; il ne pouvait pas, compte tenu de ses prétentions, faire en sorte qu'un dossier lui ait échappé aussi facilement et qu'il ait été réglé par son supérieur. C'est du ouï-dire, j'en conviens, mais ce qu'on nous dit, c'est que vous aviez tout intérêt, comme ministre de la Justice, à bloquer ce règlement. Vous nous confirmez tout cela ce matin; ce qui est regrettable c'est qu'on devra vivre une situation difficile, délicate, chaotique. Et ce n'est pas vous, comme ministre de la Justice, qui allez le payer; c'est l'ensemble des travailleurs du Québec qui endurent cette situation et ce sont surtout les travailleurs et la direction de la Sûreté du Québec qui doivent souffrir de positions aussi discutables que celles qui ont été adoptées pendant cette fin de semaine. Est-ce que vous niez tout cela?

Le Président (M. Gagnon): Merci M. le député. M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, ce détail dont parle le député de Portneuf, c'est un petit détail de 13 000 000 $, juste pour la Sûreté, sur la période visée. C'est un petit détail qui impliquerait, sur l'ensemble actualisé des régimes de retraite dans le secteur public et parapublic, 200 000 000 $ à l'égard de l'ensemble du secteur public et parapublic. Ce ne sont pas des pinottes, M. le Président.

À notre avis, il était injustifié, dans ce contexte, d'accorder une telle demande. Et je dois vous dire que le refus d'accorder cette demande autrement que par la voie de ce que j'évoquais, qui était le paiement d'un montant forfaitaire plutôt que son inclusion dans les barèmes des prestations de retraite, nous inspirant ainsi des programmes de retraite anticipée applicables dans le secteur

public et parapublic, ce refus, c'était un mandat gouvernemental impliquant donc, par définition, le président du Conseil du trésor, le ministre responsable de la négociation et, dans ce cas spécifique, le premier ministre lui-même. La position qui a été transmise au syndicat était une position gouvernementale.

Deuxièmement, je ne vois pas quel intérêt le député de Portneuf pense que cela aurait servi de se payer le plaisir de faire achopper un règlement; pas avec les efforts qui ont été mis là-dedans, pas avec ce qui a été vécu à la Sûreté du Québec depuis presque un an, pas avec ce que cela implique pour l'avenir, la perturbation du climat que cela a impliquée et les difficultés sur le plan du personnel que cela peut impliquer dans les mois à venir à la Sûreté du Québec.

Mon appréciation, M. le Président, est tout autre. Pendant 24 heures, les représentants syndicaux connaissaient cette question et ont pu réfléchir sur cette question spécifique; pendant tout près de 24 heures, M. le Président, 22 heures, je crois. C'était, je pense, dans la journée du vendredi jusqu'à la journée du samedi. Ils savaient quelle était la position gouvernementale là-dessus. Elle leur a été transmise spécifiquement. Les deux représentants gouvernementaux à la table l'ont évoquée avec précision, ont expliqué que le gouvernement ne pouvait pas céder sur ce point et les raisons pour lesquelles il ne pouvait pas céder. Le gouvernement a ouvert une possibilité de forfaitaire pour le régler.

Ma conclusion, M. le Président, est tout à fait différente de celle du député de Portneuf. S'il veut m'accuser, s'il veut me faire un procès d'intention, comme c'est dans le jeu parlementaire - comme il lui arrive de le qualifier - de le faire, cela le regarde. Mais je vous dirai qu'en regardant froidement - ce qui est très difficile quand on est impliqué dans un dossier comme celui-là - de l'extérieur et en voyant les déclarations de l'association et la politisation du débat, je peux très bien voir qui avait intérêt à ce que cela achoppe. C'est drôle: ce n'est pas le ministre de la Justice qui avait intérêt à ce que cela achoppe.

Cela prend deux personnes pour faire une entente à une table; cela prend deux côtés. On a fait l'équivalent de se plier en deux par en arrière, et puis à un moment donné il y a quelqu'un qui voulait qu'on se plie en quatre. On a été obligés de dire non. Car cela n'avait plus de sens; c'était assez: on parlait d'augmenter de 90 $ à 565 $ des pensions qui sont déjà de 21 000 $ à 24 000 $ par année entre 48 et 52 ans, selon le cas. Là-dessus c'était non. Puis il y avait des impératifs de finances publiques qui s'appliquaient à cela, qui ont été expliqués très clairement aux représentants du syndicat. C'est le syndicat qui n'a pas voulu céder là-dessus.

C'est évident qu'on aurait eu une entente si on avait donné notre chemise. Je comprends, cela a été l'histoire des relations entre les représentants élus de la population et les policiers dans bien des cas, un peu partout en Amérique du Nord: une tendance à vouloir régler à tout prix avec les policiers. Mais nous on dit: Pas à tout prix. Faire des efforts, oui; déjà on a franchi un effort par rapport à la politique de rémunération applicable à l'ensemble des secteurs public et parapublic, mais pas à tout prix.

Et si le député veut faire des procès d'intention, je peux peut-être lui en faire un, et encore une fois en l'analysant strictement en termes de relations du travail. C'est toujours trop quand il y a trois personnes à une table où elles doivent être deux. Normalement, c'est un face à l'autre et parfois un tiers: médiateur, conciliateur, appelons-le ce que l'on veut. Mais quand il y a un tiers dans un conflit de travail qui n'a pas un rôle spécifique, cela mêle les cartes. Et parfois il faut être d'une extrême prudence parce que la perception par une des parties en relations du travail, un tiers, peut y faire quelque chose, peut modifier toute la dynamique. Je vous dis que l'évaluation que j'en fais, dans la mesure où... Ce n',est pas moi, encore une fois, qui le dis, c'est le président de l'association qui l'a dit publiquement. Lui sa perception, compte tenu des relations qu'il a eues avec les représentants de l'Opposition, c'est qu'il y a un meilleur "deal" de toute façon avec un éventuel gouvernement libéral. Pour moi, il y a un poids de responsabilité énorme en termes de relations du travail dans ce qui s'est passé là. Car si c'était vraiment sa perception à la table qu'il pouvait avoir un meilleur "deal" avec l'Opposition, quel intérêt avait-il à régler? C'est cela, la question que je pose. Et qui est ce tiers qui est intervenu, M. le Président? Quelles sont ces rencontres dont on se vante, du côté syndical, avec le "gouvernement" libéral?

C'est clair qu'il y a eu la présence d'un tiers. J'accepte ce que dit le député de Portneuf quant au fait que, quand on est dans l'Opposition, dans un système démocratique, il n'est pas anormal que l'Opposition se renseigne sur ce qui se passe dans un conflit qui a pris une dimension importante ou qui met en cause des principes importants sur le plan de l'évolution des relations du travail. On a vécu cela longtemps: je l'ai vécu, avec le député de Portneuf en face de moi, pendant près de trois ans et demi, au ministère du Travail. Mais le député sait aussi que la présence d'un tiers dans un dossier complexe, c'est quelque chose qui vient perturber la dynamique des relations du travail. Ce tiers, ce n'était pas le gouvernement; le gouvernement était partie à cette

négociation. Ce tiers, c'était l'Opposition. Je lui répondrai pue, s'il veut me faire le procès d'intention d'avoir recherché l'échec de cette négociation, je pourrais lui dire que c'est peut-être la naïveté des interventions, des rencontres ou des communications répétées de la part de l'Opposition avec le syndicat qui ont produit et généré cette situation.

Je pense qu'il faut en tirer des leçons. Il faut en tirer d'autant plus de leçons, M. le Président, que, encore une fois, ce n'est pas n'importe quel syndicat; c'est un syndicat de policiers. S'il y a un domaine de l'administration publique où il faut établir des distances importantes entre les appareils politiques et l'appareil public, c'est bien celui de la police. On est peut-être en train de revenir vingt ans en arrière à cause de cela. Non seulement on aura perturbé un processus que je ne qualifierais même pas de normal, mais un processus d'une complexité incroyable à cause des enjeux, des échéanciers, du contexte et de la politisation. Encore une fois, je ne mets pas en cause le droit strict d'un policier, comme citoyen, de voter pour qui il voudra, et j'ai eu l'occasion de le dire publiquement dans beaucoup d'entrevues, pendant cette négociation: Si les 4300 policiers de la Sûreté du Québec veulent voter pour le Parti libéral, c'est leur droit. Même là, je sais qu'ils ne seront pas les seuls dans la société. Il y a beaucoup de groupes, dans la société, qui vont voter pour le Parti libéral, pour toutes sortes de bonnes ou de moins bonnes raisons: parce qu'ils y trouvent leur intérêt, leur idéologie ou leurs convictions. Mais quand on parle d'un appareil syndical dans le domaine policier, où des lapsus comme ceux qu'on a entendus, parlant d'un "gouvernement" libéral, où des propos comme ceux que j'ai lus dans ces transcriptions des entrevues sont abondants, où l'on politise le dossier exactement comme si c'était dans le secteur privé... Mais c'est dans le secteur policier, ce n'est pas la même chose.

Quand j'entends le député de Portneuf faire une équation entre le rôle de l'Opposition en matière de relations du travail et les techniques utilisées par l'Opposition dans ses relations avec les groupes d'intérêts dans la société, pour l'ensemble de l'activité étatique ou l'ensemble de l'activité privée, et dire que c'est parfaitement normal aussi dans le cas des policiers, je regrette, je ne suis pas d'accord avec cela. La police, dans notre société, a besoin de...

M. Pagé: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Gagnon): Pas de question de règlement, monsieur...

M. Pagé: J'ai le droit de soulever une question de règlement à ce moment-ci, M. le Président.

Le Président (M. Gagnon): Qu'est-ce que c'est?

M. Pagé: Ce que le ministre est en train de dire, c'est faux; ce n'est pas ce que j'ai dit. Il n'y a pas d'équation.

Le Président (M. Gagnon): Un instant!

M. Pagé: J'ai fais référence à l'État employeur et vous le savez, M. le ministre.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Portneuf, un instant! Il vous reste encore six minutes sur ce programme. Je présume que vous allez prendre ces minutes.

M. Pagé: Très probablement, oui.

Le Président (M. Gagnon): On va laisser terminer le ministre et vous aurez la chance de reprendre les propos qui ne font pas votre affaire.

M. Pagé: Est-ce que cela lui donne le droit de dire n'importe quoi?

Le Président (M. Gagnon): Écoutez, je... (12 heures)

M. Johnson (Anjou): M. le Président, je veux bien - je ne sais pas - peut-être nuancer mes propos. Je dis simplement que le député de Portneuf nous expliquait tout à l'heure qu'il justifiait, en m'accusant de politiser ce débat... J'affirme que la présence des représentants de l'Opposition, quels que soient leurs titres, leurs fonctions dans ce dossier, depuis un certain nombre de semaines, était la présence de la nature d'un tiers dans un conflit de travail, au niveau des perceptions que cela projetait sur l'une des parties, entre autres. En soi, en relations du travail, c'est compliqué. Mais, encore une fois, c'est le droit strict de l'Opposition, M. le Président, d'entretenir des relations avec qui elle veut dans des dossiers qui font l'objet de préoccupations publiques. C'est le cas de Marine, du secteur public et parapublic à plusieurs reprises depuis plusieurs années et cela a été vrai des deux côtés de la Chambre. Mais, encore une fois, quand on parle du secteur policier, je prétends que c'est un secteur particulier de la société. C'est d'ailleurs pour cela que ces gens ont, en général, de meilleures conditions de travail qu'ailleurs dans la société, parce que la société a reconnu cela. Il y a aussi des obligations, en termes d'attitude. Je crois que cela nous impose, comme représentants de la population, une obligation de distance. À la fois pour leur permettre de faire leur boulot adéquatement, de conserver

leur neutralité dans ce travail délicat et complexe qui est fait par eux, dans une société démocratique. Comme à l'égard de notre liberté comme élus de la population pour, à un moment donné, tirer la ligne quand il faut la tirer au nom de l'intérêt public. C'est ce que nous avons fait dans ce dossier, M. le Président. Nous avons été obligés de tirer la ligne quelque part, au nom de l'intérêt public.

Alors que le député de Portneuf me décrit la relation de ses représentants ou, enfin, ses collègues, ou, je ne sais pas, des recherchistes, des gens qui travaillent avec le parti d'opposition comme parfaitement normale... Il n'y a rien là! Ce n'est pas vrai qu'il n'y a rien là, M. le Président. Parce qu'il n'y a plus de distance, et c'est dangereux. C'est dangereux pour les deux. C'est dangereux pour le corps policier et c'est dangereux pour les élus. Cela pourrait être tellement dangereux, quand on se fait dire: "Les gouvernements passent, la police reste." Il faut voir ce que cela implique comme attitude et comme nécessité de distance. J'affirme que, devant le procès d'intention qui m'est fait par le député, si le gouvernement peut prendre tous les blâmes qu'il voudra bien lui décerner, si je peux considérer qu'il joue la "game" entre guillemets, en disant que j'avais un intérêt à faire achopper ce règlement, je lui réponds que, compte tenu de ce qui a été dit, ce qui a été fait, ce qui a été dit publiquement, la présence du tiers que constitue l'Opposition est non seulement venue brouiller les pistes, mais asseoir les bases de quelque chose qui est dangereux socialement et politiquement, quant à moi, pour le Québec.

Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le ministre. M. le député de Portneuf...

M. Pagé: Avant de passer à la...

Le Président (M. Gagnon): ...en vous rappelant...

M. Pagé: II me reste six minutes?

Le Président (M. Gagnon): ...qu'il vous reste six minutes...

M. Pagé: D'accord.

Le Président (M. Gagnon): ...sur les deux éléments.

M. Pagé: Avant de passer la parole à M. Beaudoin, je voudrais, premièrement, indiquer au ministre que son raisonnement ne tient pas, que jamais l'Opposition officielle n'a voulu agir comme tiers dans cette négociation. Et il le sait pertinemment, il le sait bien, d'ailleurs, que, jamais notre formation politique, soit par la voix de notre porte-parole, soit par ma voix, soit par la voix de notre chef, n'a voulu se substituer pour prendre fait et cause à la place du gouvernement. Les informations que j'ai portées à l'attention du ministre de la Justice en termes de contenu de négociation, lesquelles m'ont toutes été confirmées ce matin, ont été portées à ma connaissance bien après la ronde de négociations de la fin de semaine du 28 mars, lorsque les jeux étaient faits. Deuxièmement, je tiens à indiquer au ministre de la Justice qu'il aura réussi à éviter un débat sur le fond de chacun de ces points aujourd'hui et ce matin, notamment en amenant un caractère partisan aussi vif, aussi vivement ressenti de sa part dans le débat de ce matin. J'en conclus que le conflit à la Sûreté du Québec était réglé, les policiers avaient accepté le décret, avaient accepté deux points importants formulés par le premier ministre. Le tout a achoppé sur un point et, si cela a achoppé, M. le Président, comme Me Richard Drouin l'a indiqué, c'est soit par le ministre de la Justice dans son propre intérêt pour ne pas perdre le "lead" dans ce dossier et, si tel n'est pas le cas, c'est parce que vous n'avez pas eu le leadership comme ministre de la Justice, comme ministre responsable. Vous n'avez pas eu assez de leadership pour régler ce conflit et régler ce problème qui perdure depuis le début de l'année 1984.

S'il faut se fier sur ce dossier, qu'est-ce que cela nous réserve si jamais les circonstances voulaient que vous preniez les guides de l'État du Québec jusqu'à la fin du présent mandat gouvernemental?

M. Johnson (Anjou): C'est moi qui politise?

Rétablissement d'un climat de confiance

M. Pagé: M. le Président, ma question... Écoutez! Vous nous avez amenés sur ce terrain ce matin et c'est normal, c'est explicable que je n'aie pas à souffrir silencieusement les accusations, plus souvent qu'autrement fausses et fallacieuses, que vous avez portées à notre endroit.

M. Beaudoin, compte tenu des circonstances qui prévalent actuellement, compte tenu du "résultat", qu'est-ce que vous entendez faire comme directeur général de la Sûreté du Québec? Je comprends que vous êtes pris entre l'arbre et l'écorce et je comprends que vous avez, d'un côté, non seulement un interlocuteur, mais le gouvernement qui est là comme patron responsable de la gestion des relations du travail dans sa responsabilité État-employés. Qu'est-ce que vous entendez faire comme directeur général? Je ne veux pas vous amener sur le contenu, je parle pour aujourd'hui et surtout pour demain. Qu'est-ce

que vous entendez faire pour établir un climat plus serein, pour donner de l'air dans les poumons de vos policiers pour qu'ils soient plus motivés, pour que, finalement, on revienne au statu quo ante, avant que le gouvernement, peu importe pour quel motif, s'en mêle de cette façon, pour qu'on revienne, finalement, avec un corps policier qui fait son job, qui est heureux de le faire, qui est motivé pour le faire et ce, dans le meilleur intérêt d'une société qui est la nôtre?

Le Président (M. Gagnon): Juste avant de vous laisser la parole, M. Beaudoin, d'abord, je veux vous identifier pour le Journal des débats et, deuxièmement, vous rappeler que le temps que vous prenez, c'est le temps du ministre, je veux dire que vous parlez au nom du ministre, M. Beaudoin. Vous avez théoriquement 20 minutes pour répondre aux questions.

M. Beaudoin (Jacques): D'abord, je voudrais remercier M. Johnson de me donner l'occasion de répondre à une question de M. Pagé de l'Opposition.

Vous me permettrez, M. Pagé, peut-être de faire une brève rétrospective de la Sûreté du Québec parce qu'on dit que l'histoire se répète à travers les temps et cela va nous permettre un peu de baser ce que je vais vous dire. Ce qu'on entend faire pour l'avenir, cela va être puisé un peu dans le passé.

En 1960, la Sûreté du Québec était ce qu'elle était et, pour tous ceux qui sont ici présents, je pense que vous vous le rappelez fort bien, c'était un corps de police qui avait de très bons éléments dans ses racines, mais avec une mauvaise renommée.

Il y a eu une réforme qui s'est faite de façon a lui donner, premièrement, une intégrité, une fierté et un renom auprès de la population. On a travaillé vaillamment, tous ceux qui étaient là, ceux qui s'y sont joints; au rythme de 300 par année, ils ont travaillé vaillamment à mettre en pratique ces principes en servant la population.

Cela nous amène, en 1966, à une petite perturbation où, à cause un peu de l'intransigeance des autorités du temps ou le manque de notion de la gestion de personnel, on a eu des problèmes. Les premières tractations pour la mise sur pied d'une association syndicale ont pris forme.

En 1967, l'Association des policiers provinciaux du Québec était formée et, en 1969, on avait le premier contrat de travail. Nos policiers travaillaient six jours, sept jours par semaine et ils avaient une journée de congé. C'était une faveur de leur donner une journée de congé.

À ce moment, avec la venue de la première convention collective, chaque policier, pour la plupart, se promenait avec son contrat de travail dans ses poches et on disait: C'est 40 heures par semaine, j'ai mon contrat de travail. Il y a eu une espèce de freinage, mais, finalement, cela est reparti. En 1971, à cause de tous les problèmes de gestion de personnel que nous avions parce que le contexte devenait plus compliqué, on a eu un premier conflit, en 1971, où nos membres sont allés à Drummondville. On est ressorti de cela et on a repris le départ. Finalement, cela nous amène en 1973 où il y a eu une réorganisation globale de la Sûreté du Québec avec la régionalisation telle que nous la connaissons aujourd'hui, les postes de la Sûreté... En somme, ce que vous connaissez.

Cela allait bien. À ce moment-là, on avait 35 % de taux de solution de crimes et environ 35 000 dossiers criminels. Arrive 1977, moment où on devait amorcer la négociation de la convention collective qui était échue. Nous arrive tout à coup la... Vous vous rappelez la commission parlementaire sur la patrouille jumelée où nos gars sont allés à Drummondville. Cela a duré sept jours et, finalement, la conclusion s'est trouvée en commission parlementaire. La commission parlementaire du temps a accepté qu'on permette la patrouille jumelée sur les relèves no 1 et no 3. Cela s'est mis en marche. Le syndicat est retourné à ses activités et nous autres, on a été aux prises avec le problème pendant deux ans. Mais, quand même, on en est sorti.

En cours de route, notre performance s'est améliorée et, l'an dernier, c'est-à-dire en 1983, nous atteignions une année record de 52 % de taux de solution de crimes. Au moment où je vous parle, si on fait la somme des expériences malheureuses qu'on a vécues depuis l'an dernjer, au moment où s'est amorcée la négociation, il y a eu des mesures de pression, il y a eu la barbe et les jeans et les mesures de pression pendant tout l'été. C'était la première phase. La deuxième phase était à la suite du décret.

Il y a des points positifs, quand même, qu'il faut retenir. Ce sont les suivants. Je reçois souvent des lettres de citoyens, des lettres de membres de l'Assemblée nationale sur la qualité du service et, fait étrange, je n'ai jamais reçu de lettres sur la mauvaise qualité du service donné. C'est-à-dire que nos membres se sont efforcés quand même de servir le public, de couvrir toutes les plaintes criminelles, d'enquêter sur tous les dossiers criminels. Au moment où on se parle, notre taux de solution qui, globalement, l'an dernier, a descendu de 6,2 % par rapport à 52 % l'année précédente, est à 53 % au moment où on se parle. C'est-à-dire que nos membres, sous les pressions syndicales qui leur donnaient les orientations, ayant abandonné le travail de sécurité routière, ont concentré leurs efforts sur le côté du Code criminel. Donc, c'est

peut-être un élément positif.

D'autre part, ce qui est assez important, c'est qu'il faut dire quels sont les dommages qu'on s'est causés et comment on a pu affecter notre réputation. Ce que je n'ai pas aimé, parce que j'ai contribué à bâtir cette organisation avec d'autres depuis au-delà de 25 ans, on a essayé de se donner une fierté, de l'efficacité et de la performance et, comme disait le ministre tout à l'heure, de garder un écart entre le politique et la Sûreté de façon que ce soit ce qu'on accepte dans nos sociétés démocratiques...

Donc, si on fait la somme, l'aspect négatif, nos gens ne se sont pas vengés sur les citoyens. Ils ont abandonné la sécurité routière qui est un mandat très important, c'est-à-dire que, l'an dernier, on a connu des baisses de 31 % et 32 % respectivement sur les "transmis" pour vérifications mécaniques et les infractions au Code de la route. Cela s'est traduit par une légère hausse des accidents, des morts aussi, sur les routes. Maintenant, isoler la cause des mortalités sur les routes en fonction du conflit, je ne peux pas le faire et on ne peut pas le faire. Mais, quand même, il reste qu'on peut se poser des questions. Nos gens avaient laissé tomber toute chose qui relevait de leur initiative. (12 h 15)

Comment entend-on repartir? À partir des points positifs que j'ai donnés tout à l'heure; il faut tabler sur nos points forts. Vous savez, un policier, c'est un homme qui entre dans l'organisation pour servir, qu'on forme et qu'on entraîne à travailler constamment sous la pression, sous la pression du public, sous le monitoring des institutions, à savoir les tribunaux, la Commission de police, etc. Le problème qu'on a eu, c'est que tous ces points forts, le syndicat a tranféré cela pour le bien commun de chacun et on a connu des problèmes.

On a une organisation qui est basée sur des objectifs: la performance et l'implication de chacun des membres dans le travail de tous les jours. Donc, on va ramener la fierté, on va les ramener à la police de base - un peu comme un instructeur fait en ramenant son équipe au hockey de base quand cela n'a pas été - à des notions de base: servir le public, constater les infractions et agir, aussi, se faire un devoir que le citoyen soit de mieux en mieux servi, que notre présence sur les routes soit efficace, non exhaustive parce que, pendant un an, le public s'est habitué à avoir un peu de liberté, restaurer l'image par la qualité de notre service, par la qualité de notre performance, ramener le professionnalisme.

Vous savez, ce qui est malheureux actuellement, c'est que nous, la Sûreté du Québec, la direction de la Sûreté du Québec, on s'est efforcé de maintenir le navire la proue dans le vent, en dépit des vents de côté qu'on pouvait avoir. Le seul problème qu'on aura, c'est que, dans notre démocratie, les relations du travail veulent que, en conflit, la direction d'une organisation travaille d'un côté et les synergies des forces travaillent de l'autre côté.

J'ai l'intention de rencontrer le syndicat et en faisant abstraction du problème qui est résorbé, mais qui n'est pas tout à fait réglé pour lui - pour le gouvernement, il est réglé, mais, pour le syndicat, il ne l'est pas - au nom de la loyauté à l'État et de la qualité du service qu'on doit donner aux citoyens, tout cela sous le vocable de la devise qu'on s'est donnée: Service, intégrité, justice...

On a du chemin à faire, mais je pense qu'en puisant dans l'expérience passée de ce que je vous ai donné, on a toujours su rebondir avec efficacité. Je pense qu'en tablant sur les points forts de l'organisation, en disant: II y a eu un problème, oui, mais vous avez un service à donner, vous êtes payés par les citoyens et vous avez un devoir envers l'État du Québec, ensemble, on va mettre en marche tous nos programmes de travail en matière de sécurité routière, de prévention du crime, de contact avec les citoyens, cela devrait marcher.

Je peux vous dire que, actuellement, à tous les sept jours, je transmets au ministre de la Justice un compte rendu statistique, bien entendu, et, depuis trois semaines que les gens ont repris le travail, l'organisation fonctionne à 60 %, 70 % de sa capacité de travail, dans les domaines qui avaient été laissés de côté sous les pressions syndicales. Merci.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: J'ai eu l'occasion, hier, de lire assez vite les quatre communiqués que le ministre a émis. J'étais un peu flatté parce que chacun était une critique du critique de l'Opposition en matière de justice. Donc, je pense que c'est bon.

Ce qui m'a frappé, c'est que... Je lis un communiqué: "Déplorant l'attitude défaitiste et les propos inexacts de M. Herbert Marx..."; après, cela continue avec des inexactitudes du ministre. C'est seulement pour vous donner un exemple parce que nous sommes dans le dossier de la police. Moi, je changerais mon rédacteur de communiqués, si j'étais à la place du ministre. Voilà ce qu'on lit dans le communiqué sur la sécurité publique: "D'autre part, dans son dernier document..." Je pense que ce serait mieux de donner le titre. Je ne sais pas pourquoi le rédacteur n'a pas donné le titre. Je vais le donner, c'est: L'Avenir de la justice au Québec. "... le député de D'Arcy McGee critique les

modifications législatives entrées en vigueur le 1er juin 1980, obligeant toute corporation municipale de 5000 habitants et plus à établir et à maintenir un service de police. Or, comme l'a souligné M. Johnson, cette norme de 5000 reprend la proposition du projet de loi 41 proposé et déposé en 1976 par le gouvernement libéral de M. Bourassa. Le ministre de la Justice a également indiqué que porter le critère de 5000 habitants à 20 000 habitants - et je le souligne - comme le propose M. Marx, provoquerait une série importante d'impacts dont, entre autres, des frais additionnels de 63 700 000 $ pour le gouvernement du Québec." Fin de la citation du communiqué du ministre.

J'ai voulu vérifier si j'avais vraiment dit cela, mais, à la page 107 de mon document qui est déjè vieux de quelques mois... On aurait dû critiquer cela quand cela a été rendu public, pas quelques mois plus tard.

Une voix: C'est dépassé.

M. Marx: Cela ne sera pas dépassé parce que le ministre n'a pas encore donné suite au livre blanc de 1975 du gouvernement Bourassa.

Sur cette question, à la page 108 du document "L'Avenir de la justice au Québec", j'ai écrit: Nous pensons malgré tout qu'il faut repenser le critère de 5000 habitants ou plus inscrit dans la Loi de police; il faut noter que la législation municipale distingue de plus en plus entre les municipalités de 20 000 habitants et plus et les autres. Nous croyons que des municipalités de plus grande taille pourraient fournir des services plus adéquats.

Tout ce que j'ai proposé, c'est qu'on fasse l'étude de cette question. Je n'ai pas fait une recommandation ferme, je n'ai pas dit ce que le ministre a mis dans ma bouche. Je pense que cela démontre que le ministre... Je ne pense pas qu'il soit malhonnête, mais ce que je peux dire, c'est qu'il a été mal "coaché".

Il y en a d'autres. Il critique mes statistiques qui sont dans le dernier rapport publié par son gouvernement, mais je ne peux pas utiliser des statistiques, en décembre 1984, qui n'étaient pas disponibles en 1984. Donc, c'est comme quelqu'un qui va critiquer les statistiques du Canada de 1984 en disant qu'il y a des statistiques de 1985. À chaque fois qu'on étudie un programme où le ministre a fait un communiqué en m'attribuant des mots, des propositions que je n'ai pas faites, je vais le signaler parce que je pense que cela sera bon.

De toute façon, dans mon document, je n'étais pas partisan sur le plan politique et je n'ai même pas mentionné ce que le ministre a fait ou n'a pas fait. J'ai essayé d'être le plus universitaire possible en tant que politicien et je sais que c'est difficile de temps à autre, mais je pense qu'au moins dans ce document j'ai réussi. Je ne dis pas que je réussis à chaque fois, mais je ne dis pas non plus que je veux être assez neutre chaque fois.

Passons à d'autres choses. L'an dernier...

M. Johnson (Anjou): Je m'excuse. Si vous me le permettez, M. le Président, compte tenu de l'heure, on avait convenu, je pense...

M. Marx: Jusqu'à 13 heures.

M. Johnson (Anjou): ...jusqu'à 13 heures, sauf qu'il y a la Commission des droits de la personne. Je pensais qu'on devait couvrir cela aussi. C'est cela, l'entente.

M. Marx: J'ai deux questions dans ce programme et après cela on peut passer à l'autre.

M. Johnson (Anjou): D'accord.

M. Marx: Cela peut être très vite. L'an dernier, le ministre a promis de faire quelque chose en ce qui concerne les critères de taille et de poids des policiers. Est-ce que le ministre est au courant que le gouvernement a donné un contrat de 59 000 $ à des professeurs de l'Université Laval pour faire une étude sur cette question? Donc, douze mois plus tard, où est-ce que nous en sommes? Nous sommes au niveau d'une autre étude à 59 000 $.

M. Johnson (Anjou): Là-dessus, M. le Président, si vous me le permettez, sur cette question, effectivement, le député avait souligné cela. J'ai demandé à la Commission de police, à ce moment, dans le contexte où je sais qu'elle doit revoir ses normes d'embauche, en vertu de la loi... Oui?

Le Président (M. Gagnon): Excusez-moi, M. le ministre. Compte tenu qu'on doit entendre les représentants de la protection civile d'ici une heure, cette question-là se rapporte aux engagements financiers. Je veux bien accepter cette question sur un contrat, mais j'ai l'impression qu'on pourra reprendre la même question aux engagements financiers.

M. Johnson (Anjou): Je veux bien laisser cela à la discrétion de notre collègue de D'Arcy McGee, s'il veut en disposer immédiatement ou plus tard avec les conséquences que cela a sur notre horaire, mais il s'agit essentiellement... C'est une question qu'il avait posée l'an dernier et j'avais demandé à la Commission de police

de se préoccuper de cette question. Le juge Gosselin, président de la Commission de police, pourrait dire où en est ce dossier. Je pense que l'aspect du contrat... C'est un des aspects, oui...

M. Gosselin (Roger): II est exact qu'un contrat a été confié à des spécialistes de l'Université Laval en vue d'élaborer des normes et des tests d'aptitude physique auxquels seraient soumis les candidats à la fonction policière et, une fois ces tests élaborés et complétés, dans le but que les normes soient en relation avec les fonctions policières, il sera possible de modifier les normes relatives à la taille et au poids.

Il faut dire que cette étude a été confiée par l'Office des ressources humaines du Québec et que nous avions intérêt à joindre nos efforts à ceux de l'Office des ressources humaines parce qu'il fallait, de toute façon, élaborer des tests pour les constables spéciaux et les agents de la paix à l'emploi du gouvernement. Les travaux sont en cours, le délai prévu pour compléter ces travaux sera au cours de l'été qui vient. Déjà, des policiers et policières ont été soumis à des tests et des spécialistes les ont accompagnés dans l'exécution de leurs fonctions policières. Ils ont été munis d'appareils spéciaux pour mesurer leurs réactions cardiaques et nous croyons que nous pourrons avoir des normes d'embauche qui soient susceptibles d'être maintenues par les tribunaux advenant qu'elles soient contestées.

M. Marx: M. le Président, je reviens avec cette question, cela fait maintenant deux ans. Si le ministre ne peut pas agir plus vite... L'an dernier, je lui ai posé la question et il a dit que cela serait bientôt. Maintenant, douze mois plus tard, on attend encore l'étude, on va faire d'autres études sur l'étude, parce qu'il faut créer des emplois au Québec. De toute façon, je connais des universitaires qui feraient cette étude pour 52 000 $, 45 000 $, 33 000 $, 29 000 $. Je trouve que 59 000 $, c'est un gaspillage de fonds. Au Canada, dans d'autres villes où il y a des normes, cela n'a pas coûté 59 000 $ et cela n'a pas pris un an. Au Service correctionnel du Canada, la Commission canadienne des droits de la personne a rendu une décision un jour et, le lendemain, il a changé sa politique. Comment se fait-il qu'au Québec, dans votre ministère, cela prenne deux ans, trois ans? Il y a deux points. Je pense que, premièrement, vous êtes trop lents dans ce dossier et que, deuxièmement, cela coûte trop cher.

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): M. le Président...

M. Marx: Qu'est-ce que tu veux!

M. Johnson (Anjou): Avant de laisser la parole au juge Gosselin, rapidement...

M. Marx: Ce n'est pas la faute du président.

M. Johnson (Anjou): Dans le fond, il y avait une approche qui aurait pu consister à...

M. Marx: II sait que j'ai raison.

M. Johnson (Anjou): ...envoyer quelqu'un lui fournir un billet d'avion aller-retour à Toronto. Par ailleurs, vous comprendrez qu'il s'agit d'un règlement de la Commission de police. Je crois que cette responsabilité de la commission à l'égard de la confection d'un projet de règlement qu'elle soumet au gouvernement et qui doit être approuvé doit se faire dans un contexte où la commission considère qu'elle se base sur des éléments qui la satisfont avant de présenter le règlement. En ce sens, la commission a choisi un certain nombre de solutions. Je pense que le juge Gosselin a certaines choses à dire à ce sujet. (12 h 30)

M. Marx: Juste une chose .sur la remarque du ministre...

Le Président (M. Gagnon): Sur la remarque du ministre, oui, mais, tout de suite après, je remets la parole au juge Gosselin parce que tantôt vous l'avez interrompu et il était en train d'expliquer...

M. Marx: Tout ce que je veux dire au ministre, c'est que le président Truman avait sur son bureau une plaque où c'était écrit: "The buck stops here". Ne passez pas le "buck" au président de la Commission de police. Je veux que le "buck" stoppe avec vous. C'est ça le problème.

Le Président (M. Gagnon): M. le juge Gosselin.

M. Gosselin: Voici, M. le Président, c'est que les normes d'embauche qui ont été édictées en 1971 tenaient compte de la situation qui existait dans les divers corps policiers en Amérique du Nord. Depuis ce temps, la Charte des droits et libertés de la personne est venue apporter des modifications. Il nous faut nous assurer que les normes d'embauche des policiers du Québec soient en relation avec les fonctions policières; en d'autres termes, que ce qu'on exige d'eux soit nécessaire pour l'exécution des fonctions policières. Mais, quand on parle d'aller à l'extérieur pour voir ce qui se passe et de tout simplement transposer au Québec les normes qui existent, il y a des divergences aussi. À Calgary et à Edmonton,

les normes varient. À la GRC, les normes varient. Toronto métro vient de confier une étude à une firme de conseillers en administration ou de spécialistes, plutôt, des sciences de l'ergonomie pour qu'on prépare des tests à faire subir aux nouvelles recrues policières. Nous avons cru bon, nous, à tort ou à raison - mais je pense que c'est à raison - de faire faire une étude de façon que les résultats de cette étude nous permettent d'adopter des normes qui soient reliées à la fonction policière et, advenant qu'il y ait contestation de ces normes devant les tribunaux, qu'on puisse les justifier. On n'aurait pas pu justifier les normes que nous aurions pu emprunter à un autre corps policier, qu'il soit américain ou canadien, parce qu'il nous faut tenir compte des particularismes du Québec.

M. Marx: Supposons que la Commission des droits de la personne rende des décisions aujourd'hui et que vous deviez changer cela pour demain matin, si c'était une décision exécutoire, qu'est-ce que vous feriez? Est-ce que cela va prendre encore deux ans avant qu'on fasse le changement? Qu'est-ce qu'on a fait au fédéral, au Service correctionnel, quand il y a eu une décision de la Commission canadienne des droits de la personne? Il a donné suite à cette décision en ce qui concerne les femmes et, maintenant, les femmes sont sur un pied d'égalité avec les hommes.

M. Gosselin: Évidemment, si on abolissait immédiatement les normes relatives au poids et à la grandeur, sans substituer quoi que ce soit, cela présenterait des dangers énormes parce qu'à ce moment-là on serait obligé d'accepter tout candidat à la fonction policière. J'ai rencontré d'ailleurs, au cours de cette étude, les représentants de l'Association des chefs de police du Québec, de la Sûreté du Québec et du service de police de la Communauté urbaine de Montréal pour m'enquérir de la situation dans laquelle seraient les corps policiers advenant qu'on abolisse immédiatement les normes relatives à la taille et au poids. Cela les placerait dans une très mauvaise situation parce qu'à ce moment-là une personne qui mesurerait quatre pieds pourrait se présenter à l'examen ou postuler et être embauchée. Je pense qu'il faut certaines normes, que la personne qui sera policier, qui sera appelée à conduire un véhicule, puisse avoir tout au moins les jambes assez longues pour atteindre les pédales du véhicule.

Je pense que nous sommes dans la bonne voie. Ce sont des experts. Nous n'avons pas, à la commission, des spécialistes pour décrire de tels tests. Je pense qu'on a choisi la bonne voie en ayant recours à des spécialistes en la matière. Il y a eu des retards, évidemment, mais nous croyons que cela se terminera vers la fin de l'été, au mois d'août ou au début de septembre, si bien qu'à l'automne on aura des normes qui pourront être maintenues par les tribunaux.

M. Marx: Vous m'avez fait penser, quand vous avez parlé des jambes qui ne sont pas assez longues, que c'était la raison pour laquelle la CTCUM n'avait jamais engagé de chauffeurs femmes, quoique, à Chicago, 30 % soient des femmes; leurs jambes sont aussi courtes ou aussi longues que celles des Québécoises. Maintenant, qu'est-ce qu'on a à la CTCUM, à Montréal? On a un programme pour engager des femmes et on n'a pas fait toute une étude sur la longueur de leurs jambes. Je pense qu'on va se rendre à destination.

Juste une question pour clore ce débat. Je veux savoir de la part du ministre, qui est quand même le responsable, quand on aura ce règlement.

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): J'ai bien hâte! J'ai pris l'engagement... Il faut bien se rappeler... C'est parce qu'on parle des droits, de la commission, du monde qui mesure quatre pieds, cinq pieds un et de la longueur des jambes, etc. Que je sache, il n'y a pas de droit relié à la non-discrimination en fonction de la taille. Ce problème est venu avec le fait que des personnes de certains groupes ethniques, à toutes fins utiles, se voyaient opposer un refus d'embauche du fait de leur taille et on en a conclu qu'il y avait une espèce d'effet discriminatoire contre certains groupes ethniques à cause de la norme d'embauche quant à la taille. Si je comprends bien, c'est le problème.

M. Marx: Discrimination systématique.

M. Johnson (Anjou): À partir de là - je ne pense pas qu'on ait inscrit dans le "Canada Bill" le droit à la non-discrimination en fonction de la longueur des jambes - il faut toucher à un truc qui s'appelle le règlement, les normes d'embauche, qui doit être soumis par la Commission de. police. La commission, voyant l'ensemble du règlement, n'est pas en train de régler juste la question de savoir si on va changer la norme pour cinq pieds trois, ou je ne sais plus quoi, elle est en train de revoir l'ensemble des normes d'embauche, qui datent déjà de 1971. Elle est préoccupée notamment par cette dimension.

Le député peut avoir son opinion sur le fait qu'on a décidé de faire des études ergonomiques à 59 000 $ à l'Université Laval avec l'Office des ressources humaines du Québec et que, mon Dieu, il y a là la traduction d'un cheminement bien classique

de ce que représente le processus pour en arriver à des études qui nous permettent de conclure à la formulation d'un nouveau règlement dans toutes sortes de domaines. Cependant, je dois dire que la commission veut asseoir ses recommandations de réglementation au gouvernement sur quelque chose d'exhaustif et c'est la voie qu'elle a choisie. Ceci dit, je pense que cela va être réglé et c'est vrai que cela va l'être avec le temps.

M. Marx: Une date, une date, une date!

M. Johnson (Anjou): Je ne peux pas vous donner de date. Peut-être que la Commission de police peut m'inspirer là-dessus et c'est à la condition que le projet de règlement ne comporte pas 36 autres éléments qui font que cela retrousse à gauche et à droite. Il faut bien se comprendre.

M. Marx: Non, non, c'est au ministre de choisir la date et de voir à ce qu'elle soit respectée. Ne passez pas toujours le "buck" comme cela. Cela ne m'intéresse pas. Franchement! Si le ministre ne veut pas me donner la réponse, qu'il ne me la donne pas et on va passer à autre chose.

M. Gosselin: Si vous me permettez, M. le Président, suivant les spécialistes chargés de cette étude, on nous indique qu'elle se terminera au cours du mois d'août ou au tout début de septembre. Dès que l'étude sera terminée, quant à la commission, pour modifier cette partie du règlement, cela pourra se faire immédiatement.

M. Marx: Ce n'est pas sûr que cette étude ne sera pas encore réétudiée par le bureau de je ne sais pas qui, je ne sais pas où. C'est comme pour le Code civil, quelqu'un a déposé un rapport, on est en train de le réviser. Chaque mois, il y a un autre groupe de révision.

Le Président (M. Gagnon): Merci.

M. Marx: Au XXIe siècle, on va avoir un nouveau Code civil s'il n'y a pas de changement de gouvernement.

Le Président (M. Gagnon): Excusez.

M. Gosselin: La validation des tests se fait au fur et à mesure de l'étude.

M. Blouin: Cela va faire l'objet d'un autre communiqué de presse parce que vous venez encore de dire une fausseté.

Le Président (M. Gagnon): Alors, est-ce que les programmes 14 et 15 sont adoptés, M. le député de D'Arcy McGee? En fait, on vient de discuter du 14. Adopté?

M. Marx: On les adopte sans beaucoup d'enthousiasme.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. Le programme 15 est adopté avec tous ses éléments. Je reviens donc au programme 4.

Une voix: Les programmes 13, 14 et 15...

Le Président (M. Gagnon): Ils sont adoptés. Les deux programmes sont adoptés. M. le ministre, les programmes 14 et 15 seulement sont adoptés, pas le programme 13.

M. Johnson (Anjou): Pas le programme 13.

Protection des droits et libertés de la personne (suite)

Le Président (M. Gagnon): Alors, nous revenons donc au programme 4: Protection des droits et libertés de la personne. Cela va?

M. Johnson (Anjou): Je pense que nous en étions aux questions venant du député de D'Arcy McGee.

Le Président (M. Gagnon): Voilà. M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: Quelle était ma dernière, question, hier?

Le Président (M. Gagnon): Je ne l'ai pas notée. On pourrait revoir la transcription.

M. Johnson (Anjou): C'est cela. Hier, nous en étions à la question générale de l'évaluation après dix ans, des bilans, etc., et des pouvoirs de la commission.

M. Marx: Est-ce que le ministre est prêt à faire cette réévaluation, cette étude de toute cette partie de la charte qui touche la commission? Je pense même que le ministre a dit hier que le mandat de la commission était peut-être trop large et qu'il faudrait même revoir le mandat de la commission. Si on prend la Charte des droits et libertés de la personne, la commission a le mandat de... Bon, cela a été changé. Elle avait le mandat de revoir toutes les lois et tous les règlements du Québec afin de vérifier si ces lois et règlements sont en conformité avec la charte. Cela n'a jamais été fait depuis 1975. C'était un travail énorme. J'ai vu dans un des communiqués du ministre que la commission est en train de faire cette étude, mais cela n'a pas été fait

pendant huit ans.

M. Johnson (Anjou): Je m'excuse. C'est la commission de refonte des lois et le ministère de la Justice.

M. Marx: Non. C'était la commission...

M. Johnson (Anjou): Le député a rigoureusement raison ...

M. Marx: C'est cela. À raison...

M. Johnson (Anjou): ...lorsqu'il dit, à l'article 67, dans les mandats...

M. Marx: Je donne cela en exemple. Le mandat est tellement large à la commission...

M. Johnson (Anjou): "Procéder à l'analyse des lois du Québec qui pourraient être contraires à la charte et faire au gouvernement les recommandations appropriées". Bon! En pratique, ce mandat s'est traduit, à l'occasion, par des avis publics de la commission, notamment sur des projets de loi. En ce qui concerne tout le travail de compatibilité entre la charte et l'ensemble de la législation québécoise, c'est le ministère de la Justice qui fait cela. Il en sera question à l'automne de façon que la conformité des lois avec la charte entre en vigueur en 1986.

M. Marx: Non. Je pense que le paragraphe que le ministre a lu a été modifié en 1982. Je pense qu'il y avait un autre paragraphe d, à l'article 67, lorsque la charte a été adoptée en 1975. De toute façon, c'est seulement un exemple pour démontrer que la commission...

M. Johnson (Anjou): Je m'excuse, c'est une question de fait. Ce que je viens de vous lire est ce qui a découlé des amendements justement apportés par la loi de 1982. C'est la codification administrative à jour au 1er mars 1984.

M. Marx: C'est ce que je veux dire. Je pense que le paragraphe d a été modifié en 1982. Mais, avant cela, il y avait...

M. Johnson (Anjou): Avant cela, c'était autre chose...

M. Marx: C'était autre chose, mais semblable, parce que la charte aura maintenant préséance sur les lois antérieures.

M. Johnson (Anjou): C'est cela.

M. Marx: Je veux dire qu'en général la commission a peut-être un mandat trop large et qu'il faudrait peut-être revoir cela sans remettre en cause quoi que ce soit. Est-ce que le ministre est prêt à faire une étude ou une commission? Peut-être que la commission des institutions pourrait avoir le mandat de faire cette étude sur le mandat de la commission, son fonctionnement et ainsi de suite. (12 h 45)

Le Président (M. Gagnon): Je m'excuse, avant de vous laisser la parole, M. le ministre, je me souviens fort bien, hier, lorsque nous avons suspendu ce programme, que des questions avaient été posées au président de la commission, Me Jacques Lachapelle...

M. Marx: C'est cela.

Le Président (M. Gagnon): ...et c'est à ce moment que je l'ai interrompu disant qu'on reviendrait aujourd'hui. Vu qu'il reste seulement quinze minutes pour se rendre à 13 heures, je ne sais pas si Me Lachapelle voudrait répondre aux questions qui lui ont été posées hier.

M. Lachapelle (Jacques): Je pense, quant à moi, avoir fait le tour de cette question qui était: Est-ce que la commission est prête à faire une analyse, à faire une évaluation après dix ans? J'avais indiqué certains constats que j'avais fait en arrivant à la présidence, disant que, effectivement, le mandat était très large, qu'on y voyait certaines ambiguïtés quant à son rôle d'enquêteur, de médiateur et, évidemment, de commission qui recommande en bout de ligne des règlements; également de poursuites, de présence devant les tribunaux en tant qu'avocat représentant les plaignants. Je disais que, quant à nous, à la commission, on voulait justement, profitant de ce dixième anniversaire et d'un mandat qui a été donné à l'Université du Québec à Montréal, regarder l'ensemble des pouvoirs, regarder autant les règles de régie interne que les règles de procédure qui sont actuellement en application devant la commission.

M. Marx: Mais j'aimerais... Je m'excuse, allez-y.

M. Lachapelle: Et c'était finalement un objectif qu'on souhaitait atteindre; parlons d'une douzaine de mois, quand même.

M. Marx: Mais j'aimerais féliciter le président et les commissaires d'avoir pris cette initiative de commander cette étude. Je pense que c'est vraiment la responsabilité des élus de modifier la charte, le cas échéant. C'est pourquoi j'ai demandé au ministre, s'il était prêt à ce qu'un mandat soit confié à la commission des institutions ou à une autre, une commission ad hoc de l'Assemblée nationale, mais que ce soient les

élus qui fassent l'étude de...

M. Johnson (Anjou): M. le Président, il est évident que, si la commission, dans sa onzième année d'existence, en abordant cette onzième année, considère qu'il est temps de faire le bilan de dix ans, d'évaluer un certain nombre de choses, et peut-être de faire des recommandations au gouvernement, il est bien évident qu'ultimement cela va rebondir en Chambre, si le gouvernement y donne suite. Je serais personnellement hésitant à ce stade-ci, au printemps, en tout cas, à considérer qu'on devrait avoir un mandat d'initiative ou quelque chose de cette nature. Je pense qu'il faut laisser à la commission le soin, compte tenu du fait de changements récents dans sa composition, de faire ce bilan à l'occasion de sa dixième année d'existence, de faire un certain nombre de réflexions sur le plan interne. Je crois qu'éventuellement, si cela doit déboucher en termes de modification de mandat, de suggestions, oui, à ce moment-là, les élus pourront être impliqués là-dedans.

Maintenant, je veux bien prendre la remarque du député dont la propension est très nette à vouloir faire faire des études ou à créer des comités. Il disait ce matin qu'il avait surtout une approche universitaire dans ses documents, que j'ai remarquée, d'ailleurs, souvent. Mais disons que l'université, cela marche. C'est très correct, c'est très important, mais il y a un bout aussi où il faut que les affaires marchent. Nos préoccupations sont que, sur le plan concret, ce qu'il y a à faire, c'est de permettre à la commission, au moment où il y a ces changements dans la direction notamment, de faire ce travail d'évaluation, de faire avancer un certain nombre de choses. En même temps, comme je le disais, elle doit continuer de s'étendre sur le territoire et, ensuite, revoir, peut-être dans le contexte d'une sous-commission de la commission des institutions, ces dimensions qui ont trait au fonctionnement, au mandat, aux instruments qui lui sont donnés.

M. Marx: Mais, quand j'ai parlé des études faites par les élus, je veux que les élus soient toujours au travail. Je pense que la population s'attend que nous soyons toujours au travail. Dans ce sens, cela ne coûterait pas...

M. Johnson (Anjou): Je ne sais pas si vous avez des choses à vous reprocher...

M. Marx: ...59 000 $.

M. Johnson (Anjou): ...quant à votre travail, pas moi, en tout cas.

M. Marx: Non. Est-ce que le ministre peut nous assurer qu'au moins les membres de cette commission auront des copies de ces études commandées à l'Université du Québec par la commission des droits?

M. Lachapelle: On est associé, évidemment, à cette étude de l'Université du

Québec et on va collaborer à ce travail.

Alors, c'est bien évident que ces documents seront disponibles...

M. Marx: Seront disponibles.

M. Lachapelle: ...aux membres de la commission et aussi, bien sûr... Également avec la Ligue des droits de la personne.

M. Marx: Avec la Ligue des droits de la personne et l'Université du Québec à Montréal.

M. Lachapelle: L'Université du Québec.

M. Marx: J'ai vu cela dans les documents du ministère, j'imagine que c'est exact, même sur les statistiques. Je pense que la commission a mis sur pied un service ou une direction en ce qui concerne la mise en place des programmes d'accès à l'égalité. Si j'ai bien compris les statistiques, on a même engagé du personnel et je pense que l'Assemblée nationale a déjà adopté un budget pour la mise en place de tels programmes. Ai-je raison de dire cela?

M. Lachapelle: Vous avez bien raison. Effectivement, le Conseil du trésor a octroyé 24 postes à la Commission des droits de la personne pour la mise en place des programmes d'accès à l'égalité. Actuellement, on a procédé au recrutement de certaines personnes, entre autres, la responsable des programmes d'accès à l'égalité qui est en fonction chez nous depuis le 18 mars dernier. On s'apprête, actuellement, à recruter des personnes qui seront des spécialistes dans la recherche et également dans les enquêtes systémiques. On devrait procéder très prochainement à l'embauche de ces personnes.

M. Marx: On a mis sur pied une direction, mais le règlement qui va permettre à la direction de travailler, de faire son travail n'était pas déposé ou n'a pas été déposé encore. Est-ce que le ministre peut nous dire si ce sera pour cette année, l'an prochain, après les prochaines élections? C'est pour quand cela?

M. Johnson (Anjou): Les programmes d'accès sont évidemment reliés à l'ensemble des catégories qui sont couvertes par les dispositions de non-discrimination de la charte. Je crois qu'il y a deux groupes qui, a priori, devraient être privilégiés. C'est l'opinion qu'a le ministre de la Justice; ce

n'est pas nécessairement l'opinion de la commission. Je crois qu'il y a les femmes, compte tenu du fait qu'il faut battre le fer un peu quand il est chaud.

M. Marx: Les femmes policiers.

M. Johnson (Anjou): Toute la question de l'accès... Pardon?

M. Marx: Des femmes policiers.

M. Johnson (Anjou): Oui, les femmes policiers comme dans toutes sortes d'autres... Je crois qu'à l'égard des progrès des conditions économiques des femmes, notamment, il faut faire franchir des pas malgré le contexte économique dans lequel nous vivons. Je crois qu'il faut que ces dossiers avancent. Le deuxième groupe, je crois, ce sont les groupes ethniques.

Soyons concrets. Est-ce que nous voyons vraiment, a priori, l'intérêt de mettre beaucoup d'énergie et des efforts dans les programmes d'accès à l'égalité pour les groupes dont on croirait qu'ils font l'objet d'une discrimination systémique sur la base de leurs opinions politiques? Il y a une question de priorité. Vous ne pouvez pas prendre les treize catégories. Croyons-nous qu'il faille que la Commission des droits de la personne, en ce moment, mette de l'énergie dans le cas des personnes handicapées alors qu'il y a déjà l'Office des personnes handicapées, et que des progrès considérables ont été faits et que sur le plan social ce dossier avance?

M. Marx: II y a une loi spéciale pour cela.

M. Johnson (Anjou): Donc, il y a un certain nombre de choix. Oui, c'est cela.

M. Marx: II y a déjà un programme d'accès à l'égalité pour eux.

Le Président (M. Gagnon): Le ministre a la parole.

M. Johnson (Anjou): Parmi les groupes, je crois, les femmes...

M. Marx: II ne répond pas à la question.

M. Johnson (Anjou): ...les autochtones, les groupes ethniques, pour toutes sortes de raisons, je crois, ce sont des endroits où nous devons bouger. Or, quand on regarde, notamment, le dossier à l'égard des femmes...

M. Marx: Mais quand est-ce que le ministre va déposer le règlement? Je n'ai pas demandé comment est-ce qu'on va élaborer ces programmes. Je veux savoir quand le ministre va déposer le règlement prévu dans la charte québécoise, modification qui a été apportée en 1982 - "a big rush", il faut adopter cela - donc il y a presque trois ans... C'est cela la question.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, le député aura des éléments de réponse à compter du mois de mai.

M. Marx: À compter du mois de?

M. Johnson (Anjou): Mai.

M. Marx: De quelle année?

M. Johnson (Anjou): De cette année.

M. Marx: De cette année? C'est-à-dire que je vais avoir des éléments de réponse.

M. Johnson (Anjou): Voilà!

M. Marx: C'est très élégant, cela! Est-ce qu'on va savoir si le règlement sera déposé à cette session? Ce sont les éléments de réponse? Qu'est-ce qu'on va savoir? Qu'est-ce qu'on va apprendre au mois de mai?

M. Johnson (Anjou): On va peut-être apprendre que dans le cas, notamment, des programmes d'accès à l'égalité en ce qui concerne les femmes, dans le cadre d'une opération extrêmement exigeante de concertation, il y a lieu de s'interroger sur la pertinence de la promulgation de certains articles de la charte, compte tenu de l'expérience que nous pouvons prendre à partir de l'Ontario, par exemple, de l'Australie, entre autres, où il y a eu une évolution extrêmement rapide dans ce domaine et où, déjà, les méthodes privilégiées dans certaines régions du monde occidental en particulier sont remises en cause. Dans la mesure où les articles dont il s'agit ne sont pas promulgués, peut-être pouvons-nous nous interroger. C'est 86, 1, 2 , 3, etc., la partie 3.

M. Marx: Si je comprends bien, le ministre est en train de me dire qu'il n'est pas sûr qu'il va promulguer les articles adoptés à l'Assemblée nationale.

M. Johnson (Anjou): Je ne suis pas sûr qu'il faille tous les promulguer. C'est un fait. Je ne suis pas sûr que ce soit le meilleur instrument pour faire progresser la condition féminine au Québec, en ce moment, dans le contexte actuel.

M. Marx: C'est un aveu important.

M. Johnson (Anjou): Ce n'est pas un

aveu; c'est une constatation.

M. Marx: Ce n'est pas une constatation. L'Assemblée nationale...

M. Johnson (Anjou): Je comprends que le vocabulaire du prétoire obsède le député mais...

M. Marx: ...les députés votent des lois qui ne sont pas mises en vigueur. C'est bien beau de voter des lois, mais c'est le gouvernement qui est en train maintenant de contourner une politique adoptée par l'Assemblée nationale. C'est un détournement de pouvoirs. C'est aussi clair que cela. Il se choque, le député de Rousseau. Il ne doit pas se choquer; cela arrive de temps à autre avec ce gouvernement.

Deuxième question...

Le Président (M. Gagnon): Cela va être la dernière question et on va laisser la réponse au ministre. Après, cela va être la fin. Il va falloir adopter les crédits. M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: ...sur les avantages sociaux en ce qui concerne l'égalité homme-femme, que les femmes vont contester en Ontario à cause de la charte canadienne, mais qu'on ne peut contester ici en vertu de la charte canadienne, étant donné qu'on a mis une clause de dérogation dans nos lois...

M. Blouin: On en a une meilleure.

M. Marx: Vous ne connaissez rien de cela. Ne parlez pas. En ce qui concerne les avantages sociaux, est-ce que le ministre va déposer le règlement...

M. Blouin: L'arrogance libérale!

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Rousseau, vous n'avez pas...

M. Blouin: M. le Président, l'avez-vous entendu?

Le Président (M. Gagnon): Vous n'avez pas demandé la parole, M. le député de Rousseau.

M. Blouin: C'est incroyable! II est fatigué. On va le laisser finir. Allez-y, complétez.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de D'Arcy McGee, complétez votre question, s'il vous plaît.

M. Marx: Est-ce que le ministre a l'intention de déposer le règlement en ce qui concerne les avantages sociaux pour mettre les femmes sur un pied d'égalité avec les hommes, règlement qui est prévu à la partie 4 de la charte québécoise? C'est bien beau de dire qu'on a la meilleure charte au monde et tout cela - effectivement, on a la meilleure de toutes les provinces canadiennes - mais dire que c'est une bonne charte, c'est une chose. On veut que la charte ait des dents pour mordre et pas seulement pour sourire. On attend ces règlements, surtout le deuxième dont j'ai fait mention.

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre, en 30 secondes.

M. Johnson (Anjou): L'adoption du règlement, M. le Président, continuera d'être retardée tant et aussi longtemps que le gouvernement n'aura pas trouvé une solution à la question, notamment, qui est reliée aux ex-religieux enseignants où ce type de problème se pose aussi. Quand on parle de ce type de problème, on parle de dizaines de millions de dollars.

M. Marx: II y a un mot pour résumer tout cela, c'est "cop-out". Le ministre prend un "cop-out", maintenant, en ce qui concerne le dépôt de ces deux règlements qui sont essentiels pour la mise en vigueur de toute la partie 3 et 4... ,

M. Johnson (Anjou): M. le Président, si le député veut nous dire que c'est un "cop-out" dans ce dossier, je pourrai dire que dans le dossier qu'on a traité précédemment, c'est "cop-in".

Le Président (M. Gagnon): Un instant. Est-ce que les programmes 4 à 13, 16 et 17 sont adoptés?

Des voix: Adopté.

M. Marx: Est-ce que...

Le Président (M. Gagnon): C'est adopté.

M. Johnson (Anjou): Adopté.

M. Marx: ...le whip en chef du gouvernement n'a pas quelque chose à dire sur les programmes d'accès à l'égalité.

M. Johnson (Anjou): Je regrette, j'aurais aimé cela que ce soit un peu plus sérieux.

Le Président (M. Gagnon): On aura l'occasion d'y revenir. Les programmes 4 à 13, 16 et 17 sont adoptés. L'ensemble des crédits du ministère de la Justice, pour l'année financière 1985-1986, est-il adopté?

M. Marx: Non. Parce que la commission n'a pas terminé son travail, la commission a fait juste la moitié de son travail.

Le Président (M. Gagnon): Nous avons complété huit heures de travail.

M. Marx: Comment huit heures de travail?

Le Président (M. Gagnon): Huit heures. J'ai les détails ici.

M. Marx: Oui. Pouvez-vous nous les donner?

Le Président (M. Gagnon): De 10 heures à 13 heures... Est-ce que j'ai les dates?

M. Marx: Non, on n'a pas...

Le Président (M. Gagnon): Hier, de 10 heures à 13 heures; de 16 heures...

M. Marx: De 10 heures à 13 heures, hier.

Le Président (M. Gagnon): De 16 h 30 à 18 heures, hier, également. Ce matin, de 10 heures à 13 heures. C'est ce qui fait huit heures.

M. Marx: C'est cela. Hier, ce n'était pas de 10 heures à 13 heures, c'était de 10 h 15 ou 10 h 20... Mais, de toute façon, la commission a neuf heures et demie...

M. Johnson (Anjou): M. le Président, j'étais là à 9 h 55.

Une voix: Voilà.

M. Johnson (Anjou): II y a quand même des limites à...

M. Marx: Si vous étiez là, je ne vous ai pas vu.

Le Président (M. Gagnon): Voilà. Normalement, on a complété nos heures de travail.

M. Johnson (Anjou): Franchement!

M. Marx: Non, on a neuf heures et demie de travail, on n'a pas fait neuf heures et demie.

M. Johnson (Anjou): Quelle est l'entente avec l'Opposition?

Le Président (M. Gagnon): J'ai l'ordre de l'Assemblée nationale à respecter. Nous devrons donc ajourner nos travaux sine die...

M. Marx: Sine die.

Le Président (M. Gagnon): ...et revoir l'entente qu'il y a entre les deux partis.

M. Marx: L'entente - je peux vous la dire, M. le Président - c'est qu'on va faire neuf heures et demie. Mais on n'a pas siégé mardi parce que quelqu'un a voulu changer l'horaire.

Le Président (M. Gagnon): La commission des institutions ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 13 h 2)

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