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Version finale

32e législature, 5e session
(16 octobre 1984 au 10 octobre 1985)

Le mardi 8 octobre 1985 - Vol. 28 N° 22

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation générale sur le projet de règlement sur les programmes d'accès à l'égalité


Journal des débats

 

(Dix heures cinq minutes)

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission des institutions se réunit ce matin et a pour mandat de procéder à une consultation générale sur le projet de règlement sur les programmes d'accès à l'égalité, en vertu du paragraphe b de l'article 86.8, de la Charte des droits et libertés de la personne.

Sont membres de cette commission: MM. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), Blais (Terrebonne), Blouin (Rousseau), de Bellefeuille (Deux-Montagnes), Dussault (Châteauguay), Gagnon (Champlain), Mme Harel (Maisonneuve), MM. Leduc (Fabre), Levesque (Bonaventure), Mailloux (Charlevoix), Marx (D'Arcy McGee), Paquette (Rosemont), Payne (Vachon), Perron (Duplessis), Rivest (Jean-Talon) et Mme Saint-Amand (Jonquière).

Avant de demander au secrétaire de nous annoncer les remplacements de ce matin, je dois vous dire que ces mêmes remplacements prévaudront pendant les quatre jours d'audition que nous aurons. M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

M. Marx: M. le Président, est-ce qu'il sera possible d'apporter des changements aux remplacements, le cas échéant?

Le Président (M. Gagnon): Oui, avec l'unanimité de la commission.

M. Marx: Est-ce qu'on peut s'entendre là-dessus dès maintenant?

Le Président (M. Gagnon): Je suis obligé de vous dire que les remplacements qui se font ce matin sont pour toute la durée de la commission. Mais on pourra peut-être y revenir un peu plus tard?

M. Marx: Très bien. Pour en revenir aux remplacements, M. Dauphin va remplacer M. Mailloux et M. Viau va remplacer M. Levesque. Cela va?

Le Président (M. Gagnon): Cela va. Je dois vous dire qu'en vertu de l'article 130 de notre règlement, effectivement, les remplacements doivent être annoncés au début de la séance de la commission.

M. Marx: M. le Président, nous n'avons pas objection s'il y a d'autres députés qui aimeraient siéger à la commission.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Vachon.

M. Payne: Je voudrais proposer que mon collègue le député d'Iberville, M. Jacques Beauséjour, remplace M. Leduc, député de Fabre, s'il vous plaît!

Le Président (M. Gagnon): Très bien. Est-ce que vous pouvez nous faire connaître les remplacements, M. le secrétaire?

Le Secrétaire: D'accord. Les remplacements sont les suivants: M. Leduc (Fabre) est remplacé par M. Beauséjour (Iberville); M. Levesque (Bonaventure) est remplacé par M. Viau (Saint-Jacques); M. Mailloux (Charlevoix) est remplacé par M. Dauphin (Marquette).

Le Président (M. Gagnon): L'ordre du jour d'aujourd'hui. Nous commencerons dans quelques minutes avec le Comité ad hoc de concertation pour l'accès à l'égalité. Il sera suivi de la Coalition des femmes pour l'accès à l'égalité, du Collectif des femmes immigrantes de Montréal, du Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail Inc., de la Fédération des femmes du Québec, de l'Action travail des femmes, du Comité de condition féminine du Réveil des assistés sociaux de Longueuil.

Nous accorderons 55 minutes par mémoire, soit 20 minutes pour entendre les mémoires et 35 minutes d'échange de points de vue avec les membres de la commission. Une suspension de 5 minutes devrait permettre aux groupes de changer de siège.

M. le député de Vachon.

Motion proposant d'entendre le ministre de la Justice

M. Payne: M. le Président, étant donné que le ministre responsable de la rédaction du projet de règlement est le ministre de la Justice, est-ce que je pourrais proposer que, suivant une tradition, on puisse l'entendre afin qu'il fasse un survol de la situation et ceci, dans une période assez restreinte, une période assez limitée?

Le Président (M. Gagnon): M. le député

de D'Arcy McGee.

M. Marx: M. le Président, les traditions ont changé, mais nous sommes tout à fait d'accord avec cela. Si le ministre veut aller à la table des témoins et se faire entendre par la commission, cela nous ferait bien plaisir d'entendre le ministre.

Le Président (M. Gagnon): La demande du député de Vachon, si je comprends bien, est de permettre au ministre de siéger à cette table avec droit de parole mais sans droit de vote, n'est-ce pas? Cela s'est déjà fait dans le cadre de certaines commissions mais, pour accepter cette demande, je dois obtenir l'unanimité des membres de la commission.

M. Payne: L'esprit de la question est tout simplement que l'on puisse l'entendre sur un sujet aussi névralgique que les programmes d'accès à l'égalité, que ce soit comme témoin à la barre ou ici...

M. Marx: Nous sommes prêts, comme je viens de le dire, à entendre le ministre comme témoin à la table. Cela nous fera un grand plaisir de l'entendre soit aujourd'hui, soit demain, soit jeudi, soit vendredi. À n'importe quel moment, je pense que la commission sera prête à entendre le ministre et, même, s'il y a d'autres ministres qui veulent se faire entendre, je ne crois pas qu'on ait des objections.

Le Président (M. Gagnon): M. le député d'Iberville.

M. Beauséjour: M. le Président, je m'interroge. Quand il s'agit d'un projet de loi, ordinairement, le ministre siège à la table ici. Quand il s'agit d'un projet de règlement, cela découle en réalité d'un projet de loi. Ce que je voudrais savoir, c'est ceci. Selon le règlement, est-ce que cela donnerait aussi le droit au ministre de siéger à notre table?

Le Président (M. Gagnon): Une autre intervention, M. le député de Châteauguay.

M. Dussault: M. le Président, c'est dans le même esprit. Généralement, quand il s'agit d'un projet de loi ou d'un règlement qui, en fait, est de la législation déléguée, tous les membres de la commission consentent à ce que le ministre concerné, responsable, s'assoie avec nous afin, lut aussi, de poser des questions à ceux qui viennent donner leur point de vue sur le projet de loi ou la réglementation. Pourquoi, aujourd'hui, enverrait-on le ministre s'asseoir là-bas pour quelques minutes alors qu'il pourrait, lui aussi, faire oeuvre utile avec nous en entendant et en posant des questions à ceux qui sont invités? Dans ce sens, je ne vois pas pourquoi tous les membres de la commission, à l'unanimité, ne donneraient pas leur consentement pour que le ministre puisse s'asseoir avec nous et faire le travail avec nous.

M. Marx: M. le Président...

Le Président (M. Gagnon): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: ...il me semble que le député de Châteauguay n'a pas tenu compte de la réforme parlementaire que nous avons faite. On a voulu donner plus de responsabilités, plus de pouvoirs aux simples députés, au législatif. C'est pourquoi nous avons fait cette réforme parlementaire.

Le règlement est très clair sur ce point. Le ministre n'a pas le droit de siéger à cette commission. Je vais vous lire les articles 124 et 125 de notre règlement. L'article 124: "Un ministre peut être membre d'une commission pour la durée d'un mandat si la motion d'envoi adoptée par l'Assemblée l'indique." Il n'y a pas de telle motion. L'article 125: "Le ministre ou le député qui présente un projet de loi est membre de plein droit de la commission qui l'étudie" Il ne s'agit pas d'un projet de loi ici. Il y a aussi les articles 119 et 120 qui font la distinction entre un projet de loi et un projet de règlement. À l'article 119 on peut lire: "À la demande de l'Assemblée, les commissions étudient: 1° les projets de loi; 2° les crédits budgétaires; 3° toute autre matière qui leur est confiée." À l'article 120 il est dit: "De leur propre initiative, les commissions étudient: 1° les projets de règlement et les règlements; 2° les orientations, les activités et la gestion des organismes oubliés; 3° les engagements financiers; 4° toute autre matière d'intérêt public." Donc, on a fait cette distinction entre un projet de loi et un projet de règlement. Nous avons devant nous aujourd'hui un projet de règlement.

D'autre part, le mandat que nous avons aujourd'hui vient de la Charte des droits et libertés de la personne. J'aimerais vous lire le premier alinéa de l'article 86.9: "Le gouvernement, après consultation de la commission, publie le projet de règlement à la Gazette officielle du Québec avec un avis indiquant le délai après lequel ce projet sera déposé devant la commission parlementaire élue de la justice et indiquant qu'il pourra être adopté après l'expiration des trente jours suivant le dépôt du rapport de cette commission devant l'Assemblée nationale."

Je continue le deuxième alinéa: "Le gouvernement peut, par la suite, modifier le projet de règlement. Il doit alors, dans ce cas, publier le projet modifié à la Gazette officielle du Québec avec un avis indiquant

qu'il sera adopté sans modification à l'expiration des 30 jours suivant cette publication." Vous voyez que le mandat vient directement de la charte des droits à la commission.

J'ajoute, M. le Président, que le mandat de cette commission est aussi un mandat d'initiative, parce que c'est la commission qui a décidé d'entendre les groupes qui sont ici aujourd'hui. Cela n'est pas exigé par la charte des droits; cela n'est pas exigé par notre règlement; c'est un mandat d'initiative de la commission. Vous savez bien que, lorsqu'il s'agit d'un mandat d'initiative, le ministre ne siège jamais à la commission.

Je souligne aussi que le gouvernement peut bien modifier le règlement à son gré. C'est donc une autre raison pour laquelle ce n'est pas nécessaire que le ministre fasse partie de la commission.

J'aimerais aussi faire remarquer que le gouvernement peut consulter tout le monde. Effectivement, le gouvernement a consulté presque tout le monde à deux ou trois reprises. Si je me fie au mémoire qui a été déposé par la Commission des droits de la personne du Québec, on voit bien que le gouvernement, sur ces projets de règlement, a consulté beaucoup d'organismes au Québec. Malheureusement, l'Opposition n'a pas été consultée, mais tout le monde, à part l'Opposition, a été consulté. Lorsque nous avons fait la réforme parlementaire, la question de la consultation a été soulevée et il a été dit, à cette époque, que le gouvernement aurait le loisir de consulter qui il voudrait, que le ministre pourrait faire une tournée de la province pour consulter des groupes. J'imagine que le ministre a déjà consulté - pas lui, mais son prédécesseur qui est maintenant le premier ministre - et a déjà reçu des mémoires de beaucoup d'associations et de groupes du Québec. Comme je l'ai dit, il y a quelques minutes, nous sommes tout à fait prêts à entendre le ministre s'il veut nous entretenir soit aujourd'hui, soit demain, soit jeudi, ou vendredi; ou encore à tout autre moment.

En conclusion, je trouve que ce serait un précédent très dangereux de permettre à un membre de l'exécutif de siéger à la commission, étant donné que nous sommes en train de donner suite à un mandat d'initiative de la commission. Cela serait un précédent très dangereux, parce qu'on a fait la réforme parlementaire, précisément pour exclure les membres de l'exécutif de ces travaux des commissions. Je ne vois pas pourquoi il serait nécessaire de faire des modifications aujourd'hui. Merci.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Châteauguay.

M. Dussault: J'ai bien écouté le député de D'Arcy McGee et cela me fait sourire un peu parce que le règlement dit bien que l'on peut permettre, à la suite du consentement de la commission, à n'importe quel député de s'ajouter aux travaux d'une commission parlementaire. Le ministre de la Justice est d'abord et avant tout député de Sherbrooke. M. le député de D'Arcy McGee nous dit que le gouvernement, donc, le ministre aura le pouvoir de corriger le règlement. Justement, si on veut qu'il soit bien à l'aise de le corriger selon la volonté des gens qui sont concernés, pourquoi ne lui donnerait-on pas la possibilité de s'installer à la table ici et de poser toutes les questions que lui aussi il lui semble bon de poser pour qu'il soit en mesure de faire les meilleures corrections possible au règlement.

Bien sûr que nous avons connu une réforme parlementaire. Cette réforme parlementaire a surtout maintenant l'avantage pour nous parlementaires de nous permettre des initiatives. Nous avons pris l'initiative. Qu'est-ce qui nous empêche, à l'intérieur de cette initiative, de permettre au ministre de venir lui aussi poser des questions à nos invités? M. le Président, si cela continue comme ça, je vais me demander s'il n'y a pas de la mauvaise foi quelque part? Il n'y aura pas de précédent de créé parce qu'on aura permis au ministre de la Justice de s'installer à la table pour poser des questions lui aussi. Voyons donc! Puisque le règlement prévoit qu'on peut donner, à la suite d'un consentement, ce droit à un ministre, arrêtons de faire du chichi ce matin. Permettons au ministre de s'installer ici pour poser des questions lui aussi.

Autrement, ce qui va arriver, M. le Président, on va lui permettre quelques minutes pour s'asseoir à la table ici. Il va répondre à quelques questions. Après ça, taisez-vous, M. le ministre, et écoutez-nous, lisez les journaux, lisez le Journal des débats, vous pourrez ensuite faire des corrections au règlement. Cela n'a aucun bon sens. Honnêtement, on le fait habituellement, pourquoi ne le ferait-on pas ce matin? Permettons au ministre de s'asseoir à la table et de poser des questions exactement comme nous. Je ne pense pas que cela donne de mauvais résultats. Au contraire, on peut s'attendre que cela donne de meilleurs résultats. Pourquoi ne ferait-on pas ce qu'on fait très souvent?

Le Président (M. Gagnon): Merci. M. le député de D'Arcy McGee, après ce sera le député de Vachon.

M. Marx: J'ai écouté attentivement le député de Châteauguay. Il a bien dit ce qu'il a voulu dire, mais il ne s'est pas appuyé sur le règlement et sur la réforme parlementaire. Je lis à l'article 163: "Toute commission doit entendre un ministre qui

demande à s'exprimer dans le cadre de l'examen d'une affaire." Donc, en vertu de l'article 163 on est prêt à l'entendre.

Deuxièmement, M. le Président, je pense que...

Le Président (M. Gagnon): Je m'excuse, M. le député de D'Arcy McGee, c'est parce que cela fait au moins deux ou trois fois que vous vous appuyez sur le règlement pour dire que le ministre ne doit pas être entendu ou ne doit pas siéger à de cette table.

M. Marx: II n'a pas le droit.

Le Président (M. Gagnon): Vous avez parfaitement raison tant que la commission ne lui donne pas la permission. La commission peut - et c'est là-dessus qu'on plaide actuellement - permettre au ministre de siéger ici sans droit de vote et sans droit de présenter des motions, mais peut lui permettre de siéger ici.

M. Marx: M. le Président, je ne suis pas sûr que la commission pourrait donner la permission au ministre de siéger, mais à part cela le gouvernement...

Le Président (M. Gagnon): L'article 132.

M. Marx: ...est en train de consulter la commission. Si le gouvernement a l'intention de consulter la commission, comme c'est prévu dans la charte, le gouvernement ne doit pas faire partie du groupe qui est consulté. Il y a un conflit. Le ministre veut nous consulter et il veut faire partie de cette commission. Ce sont deux rôles qui sont incompatibles et c'est la raison pour laquelle nous ne voyons pas pourquoi le ministre siégerait comme membre de cette commission.

Le député de Châteauguay a dit que cela s'était toujours fait. Je ne sais pas ce qu'on a fait avant la réforme parlementaire, mais maintenant il y a la réforme parlementaire qui est intervenue et qui a changé les règles du jeu. Nous voulons respecter cette réforme parlementaire et les nouvelles règles du jeu.

Le Président (M. Gagnon): Maintenant, je...

M. Dussauit: M. le Président, ce n'est pas ce que j'ai dit. Ce que j'ai dit, c'est que nous avons fait souvent ce que je demande qu'on fasse ce matin dans le sens de donner la permission à un ministre de s'asseoir à la table ici pour poser des questions. C'est tout simplement ce que je dis.

M. Marx: ...la réforme parlementaire. M. Dussauit: C'est simple, c'est le bâillon qu'on veut imposer au ministre ce matin, c'est clair.

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre! M. le député de Vachon.

M. Payne: On n'en fera pas un plat, on peut clore la discussion là s'il n'y a pas de consentement. Je rappellerais au député de l'Opposition que - il parle de la tradition parlementaire - la tradition parlementaire est fabriquée de toutes sortes de précédents. Je pourrais peut-être lui rappeler que, le 29 août, c'était cette même commission qui avait consenti à entendre avec nous le député de Bertrand, le chef de l'Opposition. Il est venu et il a fait son exposé. Je ne vois pas ce que le député de D'Arcy McGee a à craindre du ministre de la Justice.

On comprend qu'il a préparé un petit exposé à la suite d'une tradition. C'est lui qui était responsable de préparer l'avis è la Gazette officielle... ou son prédécesseur. Il m'apparaissait très normal qu'il prenne quelques minutes pour faire un exposé. C'est en vertu de l'article 132. On n'a pas besoin de faire un plat, ou c'est oui ou c'est non. Sinon, on le laisse tomber.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Deux-Montagnes. Après, ce sera au député de Terrebonne, puis je reviendrai à vous. M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: M. le Président, je m'étonne de l'attitude des ministériels qui sont en train de faire une espèce de "filibuster" qui nous empêche d'aborder rapidement l'étude du projet de règlement. Je crois constater que les ministériels n'ont pas compris ou ne veulent pas maintenir la réforme parlementaire. Ils veulent revenir ' aux habitudes antérieures, à ce qui se passait avant la réforme parlementaire. Je déplore cette situation. Je demande, de façon très pressante, à tous nos collègues d'accepter de fonctionner conformément au règlement tel qu'il a été modifié au moment de la réforme parlementaire afin que nous abordions, le plus rapidement possible, la tâche qui nous a été confiée.

Le Président (M. Gagnon): Dernier intervenant.

Une voix: Non, M. le...

Le Président (M. Gagnon): Je m'excuse. Puisque, effectivement, je me rends compte qu'il n'y a pas de consentement pour entendre le ministre, je ne vois pourquoi on passerait une heure à discuter de cela. Oui, M. le député de Rousseau.

M. Blouin: II y a des points de loi, M. le Président.

Le Président (M. Gagnon): D'abord, j'aimerais reconnaître le député de Terrebonne qui m'a demandé la parole tantôt et je reviendrai à vous.

M. Blais: Merci, M. le Président. Je trouve très curieux, très vexant et très blessant pour tous ceux qui vont présenter un mémoire ici de ne pouvoir s'adresser à celui qui verra à faire respecter ce règlement et que cette personne, qui est le ministre, ne puisse pas poser des questions et demander des explications à ceux qui vont présenter des mémoires. Je trouve cela terrible de la part de l'Opposition de ne pas permettre à tous les groupes qui sont ici ce matin ou à ceux qui seront ici durant les jours qui viennent de" s'adresser au responsable de l'application de ces règlements qui viendront et surtout que celui-ci ne puisse pas poser de questions aux gens qui viennent. Je trouve cela déplorable.

Ces gens ne sont pas ici pour entendre les deux côtés de la table discuter d'une telle chose. Il me semble que cela va de soi que le responsable devrait être à la table pour poser des questions. Je ne veux pas éterniser le débat, mais je trouve cela déplorable, M. le Président.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Rousseau. Je reviendrai à vous après.

M. Blouin: M. le Président, je dois d'abord préciser au député de D'Arcy McGee qu'il y a des précédents, contrairement à ce qu'il disait. Tout récemment, en fait au mois de septembre de cette année, il y a quelques semaines, une commission parlementaire s'est également donné un mandat d'initiative et elle a accepté, comme le prévoit l'article 132, c'est pour cela qu'il est dans nos règlements - que le ministre - en l'occurrence il s'agissait du ministre des Finances - fasse partie de la commission et puisse participer aux travaux de cette commission.

M. le Président, deuxièmement, je suis sûr que le député de D'Arcy McGee n'a pas examiné en détail l'article 86.9 de la Charte des droits et libertés de la personne et qui en se comportant comme il le fait il contrevient à cet article de la loi, à son esprit et à son essence même. Au moment où la Charte des droits et libertés de la personne du Québec a été adoptée, l'article 86.9 prévoyait la tenue de cette commission parlementaire et, comme la réforme parlementaire n'avait pas été adoptée à ce moment, elle prévoyait aussi que le ministre de la Justice, qui sera chargé de parrainer cette réglementation et ensuite de la faire appliquer, puisse en toute logique venir rencontrer les groupes et entendre ce qu'ils ont à dire et ensuite échanger avec eux.

Je suis persuadé que le député de D'Arcy McGee, qui généralement est un bon joueur, à la lumière de ce que je viens de lui dire et conformément à l'article 86.9 de la Charte des droits et libertés de la personne du Québec, pourrait probablement réviser sa position. Conformément à l'intention et à la lettre de cette loi il pourrait permettre - comme il se doit me semble-t-il - au ministre de la Justice d'être entendu. Je rappelle aussi au député de D'Arcy McGee qu'il y a à peine quelques semaines nous avons permis, comme l'article 132 nous en donne la possibilité, au chef de l'Opposition, M. Bourassa de faire partie d'une commission parlementaire, alors que nous aurions bien pu utiliser ces articles de règlement et cette procédure un peu tatillonne pour lui refuser l'accès à une commission. Nous n'avons pas fait cela. Nous avons accueilli le chef de l'Opposition et nous lui avons permis de s'exprimer. Conformément à l'article de la loi que j'ai évoqué tout à l'heure et à la gentilhommerie habituelle du député de D'Arcy McGee, je souhaite donc que le ministre puisse de plein droit - comme la commission a le droit de le faire - participer aux travaux de cette commission, ce qui m'apparaît normal.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: M. le Président, les députés de Vachon et de Rousseau ont oublié que le chef de l'Opposition, le député de Bertrand, ne fait pas encore partie de l'Exécutif; ce sera bientôt, mais à ce moment-ci il n'est pas membre de l'Exécutif, il n'est pas encore le premier ministre du Québec. Donc, quand il a siégé à cette commission il a siégé comme simple député. Nous sommes d'accord pour que n'importe quel député ministériel puisse siéger à cette commission et nous sommes tout à fait d'accord pour permettre au ministre de se faire entendre. Mais qu'est-ce que le député veut dire?

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Rousseau.

M. Blouin: Puisque le député de D'Arcy McGee désire des précisions je le réfère - je crois qu'il n'a pas lu la charte récemment -à l'article 86.9 de la charte, qui précise que le ministre participe à une consultation -celle que nous sommes en train de tenir -qu'il rencontre les groupes qui ont des choses à dire, qu'il peut leur poser des questions et que c'est à la suite de cette consultation que le règlement est adopté et mis en application. Ce qu'est en train de faire le député de D'Arcy McGee c'est de priver le ministre, à cause d'une procédure parlementaire - et pourtant l'article 132 lui permettrait de passer au-dessus de ce tatillonnage - ce que le député de D'Arcy McGee est en train de faire c'est de priver

et les groupes et le ministre d'une consultation essentielle qui est prévue dans la Charte des droits et libertés de la personne du Québec. Par son attitude, il veut tout simplement annuler une bonne partie, une partie importante et substantielle de cette consultation pour en faire une consultation qui limiterait la présence des intervenants aux seuls membres députés de la commission. Cette attitude politique, M. le Président, je laisse à ceux et celles qui nous écoutent le soin de la qualifier. (10 h 30)

M. Marx: M. le Président, le député de Rousseau me fait un procès d'intention. Tout ce que je veux, c'est qu'on respecte la réforme parlementaire, qu'on respecte notre règlement.

J'ajoute, en terminant, que le député de Rousseau est arrivé en retard. Donc, il a manqué toute l'argumentation que j'ai faite au début. L'article B6.9 est un article que j'ai lu à haute voix avant son arrivée. Il est bien écrit que le gouvernement va consulter la commission. Le ministre est membre du gouvernement, il ne peut pas à la fois consulter la commission et siéger en tant que membre de la commission. C'est de mêler les rôles de l'exécutif et c'est ne pas respecter la réforme parlementaire comme l'a dit le député de Deux-Montagnes.

Le Président (M. Gagnon): Je m'excuse! Je veux juste revenir sur un point. Je ne voudrais pas que le public soit induit en erreur. La commission respecterait son règlement en permettant au ministre de siéger à cette table. Le nouveau règlement est clair là-dessus. On peut permettre au ministre, si on est d'accord à l'unanimité, de siéger à cette table. Il ne faut pas dire que ce serait un irrespect du règlement.

M. Blouin: M. le Président, je crois que le député est sur le point de nous donner raison parce qu'à l'article 86.9, lorsqu'on parle de consultation de la commission, on parle de la Commission des droits de la personne et non de la commission parlementaire. On précise justement, dans la deuxième partie de cet article, que la commission parlementaire élue permanente de la justice, dont faisait partie le ministre au moment où la loi a été adoptée, procède à cette consultation. Dans l'article 86.9 de la loi, le ministre consulte la Commission des droits de la personne; ensuite, il participe à cette commission pour rencontrer les groupes qui ont des choses à dire. Comme vous pouvez le voir, M. le député de D'Arcy McGee, vous n'êtes pas sur la bonne longueur d'onde.

M. Marx: M. le Président, le député de Rousseau a oublié une des premières règles de droit, c'est que la dernière loi fait foi.

Le règlement de l'Assemblée nationale fait foi dans le sens que ce qu'on a fait avant la réforme parlementaire était modifié par la réforme parlementaire. Je pense que c'est bien clair.

J'ajoute une autre fois que, si le ministre veut se faire entendre, cela ferait plaisir à la commission de l'entendre.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Châteauguay, en terminant.

M. Dussault: Très brièvement, M. le Président. Je voudrais demander au député de D'Arcy McGee et à ses collègues, au nom de la courtoisie, d'une certaine politesse, au nom d'une courtoisie à l'égard des personnes qui viennent nous parier ce matin, de permettre au ministre de s'asseoir avec nous pour pouvoir leur poser des questions, de façon qu'on atteigne le meilleur résultat possible concernant ce projet-là. C'est une question de courtoisie. Cela nous étonne, ce matin, que cela nous soit refusé par le député de D'Arcy McGee. Ce n'est pas son habitude, M. le Président. Je le supplie de nous faire cette preuve de courtoisie qu'il est capable de donner habituellement à l'égard des personnes qui sont là. Pour une dernière fois, M. le Président.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que cette motion sera adoptée?

Une voix: Un vote nominal, s'il vous plaît!

Le Président (M. Gagnon): II n'y a pas de vote nominal, cela prend l'unanimité. Si un membre s'y oppose...

M. Blais: Pour savoir qui s'y oppose.

M. Marx: II n'y a pas d'unanimité, M. le Président, pour toutes les raisons que j'ai données.

Le Président (M. Gagnon): Voilà!

M. Blais: M. le député de D'Arcy McGee, vous êtes contre le fait que le ministre vienne parler aux groupes.

M. Marx: ...le député de me dire ce que je veux dire.

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous plaît! J'appelle donc le Comité ad hoc de concertation pour l'accès à l'égalité et lui demande de prendre place, s'il vous plaît!

M. Blouin: M. le Président...

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Rousseau.

M. Blouin: ...juste un petit point de droit puisque le député de D'Arcy McGee, semble-t-il, est un expert en droit. Est-ce qu'il réalise qu'il vient de donner priorité à un règlement sur une loi? Est-ce qu'il réalise cela?

M. Marx: Quel règlement? Une voix: C'est incroyablel

M. Blouin: Le règlement de l'Assemblée.

M. Marx: Bien, je ne vois pas la pertinence de cette question.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: M. le Président, je crois me souvenir qu'au tout début de notre séance le député de Vachon a suggéré que le ministre pourrait se présenter à la barre de la commission pour tenir quelques propos d'introduction à cette consultation.

Quant à moi, je ne m'oppose pas à cette suggestion du député de Vachon.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? M. Blouin: M. le Président.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Rousseau.

M. Blouin: Nous allons entendre le premier groupe?

M. de Bellefeuille: Est-ce que je dois comprendre que le ministre refuse d'adresser quelques mots à la commission?

M. Blais: Vous refusez de l'entendre!

M. de Bellefeuille: Non, c'est la suggestion du député de Vachon.

Le Président (M. Gagnon): Vous avez fait une suggestion pour que M. le ministre, s'il en ressent le besoin, aille a la...

M. de Bellefeuille: C'était la suggestion du député de Vachon, M. le Président.

Le Président (M. Gagnon): Vous avez les sièges des témoins. Ce que j'ai à situer, c'est: Est-ce que le ministre est ici, autour de la table, avec nous? Vous avez dit non, même si le règlement le permettait, pour autant qu'on soit unanime ou qu'on soit d'accord. Il n'y a pas d'unanimité, donc, présentement, nous allons entreprendre l'audition des mémoires.

M. le député de D'Arcy McGee, vous avez des mots d'introduction?

M. Marx: Oui, j'ai une déclaration préliminaire, M. le Président.

M. Blouin: M. le Président.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Rousseau.

M. Blouin: Je ne comprends pas à quel jeu joue le député de D'Arcy McGee. Nous sommes ici et le mandat de la commission est d'entendre des groupes, ce n'est pas d'entendre le député de D'Arcy McGee. Je demande, donc, M. le Président, que nous procédions en entendant dès à présent les groupes qui sont venus se faire entendre aujourd'hui.

Des voix: C'est cela.

M. Marx: M. le Président, l'usage de toute commission, en tout temps, c'est d'avoir permis des remarques préliminaires.

Le Président (M. Gagnon): Je m'excuse, M. le député. Effectivement, nous avons un horaire. Vous avez l'horaire devant vous, et cela prend le consentement unanime pour modifier cet horaire. L'horaire des travaux dit que, à 10 heures, 11 heures et ainsi de suite, nous avons des gens à entendre.

M. de Bellefeuille: M. le Président, je ne crois pas que le député de Rousseau ait soulevé cette objection au moment où son collègue, le député de Vachon, a proposé que le ministre se présente à la barre de la commission pour tenir quelques propos d'introduction. Le fait que les ministériels aient changé d'idée et que le ministre ait choisi de se retirer ne prive pas, je crois, le porte-parole de l'Opposition officielle du privilège qu'il a, en vertu de nos habitudes, de nos traditions, de dire quelques mots d'introduction.

Une voix: Je m'oppose...

Le Président (M. Gagnon): Je dois vous dire...

M. de Bellefeuille: Cela ne prend pas un consentement.

Une voix: Le procès-verbal, M. le Président...

M. Payne: Je pense qu'il serait dans l'ordre que je précise que j'avais dit que cela soit ici, soit à la barre. Je n'ai pas précisé exclusivement que ce soit à la barre.

M. Marx: M. le Président, est-ce que vous allez me priver de quelques mots d'introduction. Ce sera la première fois...

Le Président (M. Gagnon); Je dois vous dire, M. le député de D'Arcy McGee, que vous aurez à faire votre introduction tantôt, avant de commencer à poser des questions à nos invités. On a soulevé le fait que je devais faire respecter l'ordre du jour et que, pour modifier l'ordre du jour, cela prend l'unanimité, ce qui ne me semble pas être acquis.

M. de Beliefeuille: M. le Président, j'ai l'impression que les députés ministériels veulent m'empêcher de prononcer quelques mots d'introduction, parce qu'ils n'ont rien à dire sur le fond.

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Marx: lis n'ont rien à dire et s'ils veulent faire des...

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous plaît! J'invite maintenant notre premier groupe d'invités à prendre la parole et à se présenter ainsi que ceux qui les accompagnent. Juste avant, je voudrais vous dire que vous avez environ vingt minutes pour livrer votre mémoire et, après, environ trente-cinq minutes de discussions avec les membres de la commission. Merci.

Auditions

Comité ad hoc de concertation pour l'accès à l'égalité

M. Delgado (Pascual): Premièrement, j'aimerais demander si, dans la salle, il y a un autre collègue de la ville de Québec, M. Kakinsky, de la Confédération des associations linguistiques et culturelles du Québec. Il est invité à siéger avec nous, mais je ne suis pas certain s'il est arrivé. S'il y a quelqu'un ici de la CALCQ, j'aimerais qu'il siège à notre droite.

Nous aimerions tout d'abord remercier le gouvernement de nous donner l'occasion de participer activement à la formulation du règlement qui régira éventuellement les programmes d'accès à l'égalité dans la province.

Mon nom est Pascual Delgado, je suis le coordonnateur du comité ad hoc pour les programmes d'accès à l'égalité. Me Djihanian est aussi président de la Ligue des organisations arméniennes de Montréal; c'est une ligue de la communuauté arménienne.

Le comité ad hoc, comme vous pouvez le voir dans notre mémoire, est un réseau libre, apolitique, non partisan d'associations ethnoculturelles et d'organismes non gouvernementaux situés dans la province de Québec. La liste des membres que vous avez à la page 6 de votre copie représente la liste totale des associations. Mais, pour vous donner une idée du nombre de personnes réellement représentées, le no 3, le Conseil de la communauté noire, en effet, est une fédération de dix groupes, rejoignant à peu près 1000 personnes; la Ligue des organisations arméniennes, c'est cinq associations. La CALCQ, la Confédération des associations linguistiques et culturelles du Québec, représente à peu près 22 associations. On calcule que c'est un mémoire qui représente le point de vue d'à peu près 60 000 citoyens du pays de différents groupes ethniques dont les Chinois québécois, les Noirs québécois, les Haïtiens québécois, les Africains québécois, Portugais, Laotiens, Vietnamiens québécois, Arméniens, Helléniques, Indiens, Italo-Canadiens, Pakistanais, etc.

Vous avez aussi la liste des principes de base de notre association, les objectifs du comité: l'avancement des droits civiques et politiques des Canadiens d'origine autre que celle des deux cultures majoritaires; la promotion de l'égalité intégrale par rapport à l'accès et les opportunités pour les Canadiens d'origine ethnique à travers des actions légales et des programmes positifs et dynamiques dans tous les secteurs de la vie sociale et économique du pays, comprenant les programmes d'accès à l'égalité dans l'emploi, l'accessibilité égale aux institutions et services publics, l'accessibilité égalitaire à l'éducation, l'amélioration de la représentation des Canadiens d'origine ethnique dans la grande presse, les médias, la publicité, et les activités innovatrices comme le lobbying, campagnes de presse et autres; servir de forum pour discuter toutes les questions qui concernent les associations membres dans le but d'unifier leur action; et aussi l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale, ethnique ou religieuse de notre société.

Je ne veux pas lire tout le mémoire, je comprends bien que vous avez déjà eu l'occasion de le lire. Je passe simplement au troisième paragraphe de la page 2. On a constaté certaines anomalies dans les déclarations de l'ancien ministre de la Justice, Pierre Marc Johnson, du 13 juin 1985. Cela concerne la discussion du projet de règlement actuellement à l'étude qui, selon nous, doit être clarifié afin d'éviter toute confusion et tout autre délai.

Premièrement, le ministre avait promis que des mesures seraient prises concernant la mise en oeuvre des programmes s'adressant à un seul des quatre groupes cibles, soit celui des femmes. En effet, on est totalement d'accord avec les programmes pour les femmes, on n'est pas contre, on les appuie fortement, mais cet oubli de la part du ministre Johnson pourrait être interprété comme un refus de facto de reconnaître que les trois autres groupes ont le droit de bénéficier de ces programmes, conformément à l'article 10 de la charte, stipulant qu'on ne

doit pas être victime de discrimination en vertu de la race, de la couleur, de l'origine ethnique ou nationale, de handicap ou de l'utilisation d'un moyen pour pallier ce handicap. En d'autres termes, on parle des Autochtones, des personnes handicapées et des minorités ethniques du Québec.

Deuxième chose, en n'appliquant pas le premier alinéa de l'article 86.2, avec l'intention délibérée de favoriser les programmes volontaires du secteur privé -c'est une erreur dans le texte, je m'excuse -les mécanismes appropriés de mise en application et de surveillance des lois dont est investie la Commission des droits de la personne du Québec ont été effectivement éliminés d'un trait de stylo. Nous estimons que ces pouvoirs doivent être restaurés dans la loi. (10 h 45)

Troisième chose, la déclaration du ministre Johnson confirme la dissociation du gouvernement, pratiquement, de toute la section III par la ratification de l'article 86.7, deuxième alinéa, où il est stipulé que "les articles 86.2 à 86.6 ne s'appliquent pas aux programmes visés dans le présent article", c'est-à-dire au sein des ministères et des organismes d'État. Ce désaveu, ajouté au fait que le gouvernement manque de règlements similaires détaillés régissant ses propres programmes dans l'ensemble de la fonction publique, jette un certain doute quant à l'issue de ces programmes.

Les groupes cibles ont raison de se tenir sur leurs gardes car il n'y a pas eu beaucoup de progrès réalisés dans le passé en ce qui a trait aux programmes d'accès à l'égalité, bien qu'on les ait promis maintes fois aux femmes, aux handicapés physiques depuis 1978 et aux communautés culturelles depuis 1981. Ces dernières, qui comptent pour 20 % de la population du Québec, craignent particulièrement d'être une fois de plus négligées ou oubliées dans l'élaboration des programmes d'égalité d'accès à l'emploi. Nous nous souvenons bien de l'échec lamentable du plan d'action à l'intention des communautés culturelles. Annoncé au printemps 1981, ce plan promettait de rehausser la proportion des membres des communautés culturelles dans la fonction publique du Québec de 2,7 % jusqu'à 9,5 % en 1985, année où nous sommes aujourd'hui. En fait, il semble qu'il se soit plutôt produit une diminution jusqu'à 2,5 % pendant la période en question. Cela veut dire une discrimination négative plutôt que positive.

Cet état de choses, jumelé avec les catégories contradictoires utilisées par le gouvernement pour définir les groupes cibles (la définition contenue dans le plan d'action est différente de celle mentionnée à l'article 10 de la charte) pourrait donner lieu à beaucoup de confusion et retarder indéfiniment l'accès à l'égalité pour les minorités ethniques du Québec. Pour notre comité, les communautés culturelles doivent être définies comme étant toutes les populations autres que canadienne française et britannique. 4. Enfin, dans la déclaration du 13 juin du ministre Johnson, l'actuel premier ministre du Québec, il n'est fait mention d'aucun mécanisme de contrôle qui surveillerait la mise en application de l'obligation contractuelle. Nous croyons que cette obligation constituerait l'outil idéal du gouvernement pour aider les minorités à obtenir l'égalité complète en allouant des subventions et des contrats aux entreprises privées à la condition qu'elles fournissent la preuve que leurs processus d'embauche ne sont pas préjudiciables aux minorités. Mais pour mener à bien cette initiative, il faut veiller à sa mise en application et définir des lignes directrices bien précises. Il est difficile d'imaginer comment le gouvernement pourrait faire respecter efficacement l'obligation contractuelle sans adopter une série de règlements semblables à ceux qui sont à l'étude aujourd'hui - ou bien une mesure qui ferait le lien avec la politique déjà énoncée par le gouvernement - ni affecter un organisme indépendant qui veillerait à ce que l'obligation contractuelle soit remplie (comme c'est le cas aux États-Unis avec l'O.F.C.C.P., Office of Federal Contract Compliance Programs).

Les recommandations qui touchent le projet de règlements. 1. Pour ce qui est de la section IV du projet de règlement, l'article 86.7 de la charte devrait comprendre une définition plus claire du terme "organisme". En effet, on parle de la charte, pas du projet de loi comme tel. Tel que défini en ce moment par l'article 17 du projet de règlement - l'article 17 parle d'un organisme comme étant "un établissement offrant des servivces de santé ou tout autre service ordinairement offert au public" - il est accepté selon les dispositions de la section II du projet de règlement et, par conséquent, conforme aux programmes d'égalité d'accès à l'emploi. Toutefois, comme certains organismes publics et parapublics offrent de tels services, (par exemple, les CLSC, les centres locaux de services communautaires), la définition du terme "organisme" devrait être amendée de façon à englober "tout organisme dont la loi ordonne que les fonctionnaires ou employés soient nommés et rémunérés en vertu de la Loi sur la fonction publique". 2. Dans le cas de l'article 10 du projet de règlement, nous sommes d'avis que l'expression "un employé en autorité" n'est pas assez forte pour laisser entendre que la personne responsable des programmes d'accès à l'égalité dans une entreprise doit relever directement de la plus haute instance. Cette personne doit aussi posséder tous les pouvoirs

et les ressources nécessaires pour assurer que les objectifs et les échéances du programme soient respectés. Nous suggérons de remplacer "un employé en autorité" par "un employé occupant un poste de cadre supérieur". Ce changement permettra à tous les niveaux de l'entreprise en question de faire montre de l'importance que donnent ses dirigeants à l'égalité d'accès à l'emploi. 3. L'une des recommandations émises par la Commission des droits de la personne, qui est absente du projet de règlement, consiste en l'inclusion d'un article obligeant l'employeur à créer un comité spécial chargé de la mise en application du programme. Nous approuvons entièrement cette idée ainsi que la citation tirée de l'étude présentée par la commission à ce sujet en date du 24 novembre 1983, à savoir les commentaires de la Commission des droits sur le projet de règlement concernant les programmes d'accès à l'égalité. On cite directement le texte qui est émis par la commission: "L'employeur doit créer un comité de développement et de coordination du programme ayant notamment pour fonctions: d'effectuer ou coordonner les diverses analyses nécessaires à l'élaboration du programme, de faire les recommandations découlant de ces analyses et de coordonner les mesures de mise en application du programme dans le cadre de l'échéancier prévu."

Nous croyons aussi très fermement qu'un tel comité, créé dans le but de mettre en application un programme dans une entreprise donnée, devra être composé non seulement d'employés de ladite entreprise, mais aussi de représentants du syndicat ou de l'association d'employés et, plus important encore, de quelques porte-parole des groupes cibles ou de groupes bénéficiaires de ces programmes. La création de ce comité pourrait, selon l'article 10, constituer l'une des responsabilités de l'employé chargé de la supervision du programme en question. 4. Notre comité est d'avis que l'article 4 devrait comprendre d'autres critères plus précis sur la phase de mise en oeuvre de l'analyse des effectifs. Plus précisément, nous estimons que l'article 4, paragraphe 2, devrait mentionner, à propos des conditions de travail, les salaires et avantages sociaux; et au paragraphe 3 du même article, il faudrait préciser, en ce qui a trait au terme formation, la scolarité préalable à l'emploi et aussi la formation et le perfectionnement reçus en cours d'emploi.

Il y a d'autres recommandations qui dépassent un peu le projet de règlement, mais que nous voulons toucher. Notamment, nous recommandons que le gouvernement accepte de colliger et de publier toutes les données statistiques et de les rendre accessibles aux groupes visés par le programme. Cela va aider énormément aux entreprises pour pouvoir interpréter quel est le bassin dans un marché de travail, dans une région spécifique, par rapport à chaque groupe cible.

Et finalement, bien que cette dernière recommandation déborde le cadre du présent règlement, nous croyons que la Charte des droits et libertés de la personne du Québec renferme certaines lacunes qui pourraient restreindre la prépondérance des droits civiques, qui devraient prévaloir sur toute autre loi du pays. Nous faisons référence aux articles 51 et 52 de la charte qui, sous la forme actuelle, pourraient atténuer l'efficacité de toute tentative de redressement des inégalités par le simple ajout de la clause suivante: "...à moins que cette loi n'énonce expressément que cette disposition s'applique malgré la charte". Nous demandons l'abrogation de ces articles afin de faire de la charte québécoise la loi la plus importante de toutes leslois passées, présentes et futures de la province de Québec.

Enfin, le comité désire offrir son entière collaboration et ses services de consultation au gouvernement pour aider à la mise en oeuvre de tout programme touchant les minorités ethniques dans la province. Nous tenons aussi à souligner que, sans collaboration étroite, tout programme d'accès à l'égalité est voué à l'échec. Merci.

Le Président (M. Gagnon): Merci. M. le député de Vachon.

M. Payne: J'aimerais remercier M. Delgado, au nom de notre formation, d'avoir contribué d'une manière aussi significative à la réflexion de la commission. J'aurais deux questions à vous poser. D'abord, une question générale parce que cela touche... c'est dans l'intérêt de chaque groupe, je pense, de se poser cette même question, comme nous d'ailleurs. Relativement à la collectivité ethnoculturelle que vous représentez, quelles sont les situations de discrimination systémique que vous avez constatées? Et plus spécifiquement, avez-vous constaté notamment de telles situations en matière de services de santé et en matière d'autres services offerts au public?

M. Oelgado: En effet - si mon collègue veut aussi souligner quelques exemples, je lui donnerai la parole - au niveau de la discrimination systémique au pays, on voit cela partout sur le marché du travail. Un très bon exemple de cela au Québec c'est le cas actuel des médecins qui sont diplômés à l'étranger. Il y en a une centaine, à peu près 150, qui ne peuvent pas pratiquer leur profession, même s'ils sont des médecins, simplement à cause d'une mauvaise interprétation de la période de stage à l'intérieur des hôpitaux et cliniques du Québec. Le Conseil régional de Montréal a essayé plusieurs fois de résoudre cela, mais

il y a eu une espèce de conflit à l'intérieur de la bureaucratie et cela n'a pas pu marcher. Mais il y a encore plusieurs professionnels, à cause du statut rigide demandé par les corporations professionnelles du Québec, soit par le ministère, soit par les syndicats qui, de façon systémique, empêche un professionnel né à l'étranger d'entrer au Québec pour pratiquer sa profession. Parfois, ce sont des citoyens du pays qui ne peuvent pas pratiquer leur profession.

Au niveau de la santé, j'ai moi-même beaucoup d'expérience en ce qui concerne les problèmes du réseau public et parapublic du Québec. Il y a un manque flagrant d'accessibilité dans tous les CLSC et les CSS de la région de Montréal où je pratique. En général, c'est de façon systémique dans tout le système de santé et des services sociaux du Québec. Je veux dire que ce n'est pas délibéré ou de façon volontaire, mais il y a des institutions qui essaient par tous les moyens d'empêcher la rentrée de clients qui proviennent d'une origine autre que francophone et dans certaines parties, d'origine anglophone.

Cela veut dire qu'il y a plusieurs groupes d'immigrants dans la région de Montréal, soit 25 % d'immigrants qui n'ont pas d'accès réel aux centres de services sociaux ou aux centres locaux de services communautaires. Ce sont deux exemples de ce qui se passe au sujet de la santé. Je ne sais pas si cela répond à votre question, M. le député.

M. Payne: Sans entrer trop dans les détails, pourriez-vous indiquer avec un peu plus de précision la nature de la discussion systémique au sujet des médecins venant de l'étranger?

M. Delgado: Oui. En effet, ce qui se passe selon ma compréhension, c'est que l'internat est demandé pour les médecins au même titre que pour les stagiaires, les jeunes qui sortent des cégeps et qui veulent pratiquer la profession. Il y a un quota numérique limité dans toute la province qui empêche effectivement que les médecins pratiquent. C'est seulement une proportion de ces médecins qui peuvent passer par l'internat. Donc, il y a une liste d'attente très longue qui empêche un médecin né à l'étranger d'entrer à l'internat. L'internat se pratique pendant une couple d'années avant d'avoir droit à un diplôme d'équivalence.

Au sujet de l'Office des professions, du Collège des médecins, je pense qu'il y a là aussi d'autres sortes de blocages par rapport aux équivalences dans les crédits des diplômes qui sont émis pour un étranger.

M. Payne: Est-ce l'office ou la corporation?

M. Delgado: En effet, il y a les deux...

M. Payne: Parce qu'il y a l'Office des professions et la corporation des médecins; lequel?

M. Delgado: Je ne peux pas dire exactement lequel des deux. Mais je pense que c'est un problème qui touche les professions, enfin l'un des deux, l'Office des professions ou la corporation qui empêche de donner des équivalences pour les médecins.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Vachon.

M. Payne: Une autre question. Pourriez-vous nous décrire quelques actions concrètes entreprises par le comité ad hoc au cours des dernières années de votre existence, afin d'améliorer la situation des membres des communautés culturelles? Vous n'êtes pas seulement les conseillers car je pense que vous êtes aussi présents dans les communautés. Voulez-vous nous en indiquer les façons?

M. Delgado: On n'a pas fait d'actions publiques très concrètes, simplement parce que nous pensons que la meilleure façon de résoudre les problèmes est par la négociation. On a présenté des mémoires à plusieurs reprises au gouvernement fédéral. Il y a aussi des mémoires qui ont été présentés au sujet de l'affaire du quartier chinois à Montréal, où il y avait un problème assez grave pour la communauté chinoise. On a aussi présenté des mémoires pour défendre les droits des Chinois québécois afin d'avoir un petit quartier où ils pourraient faire leurs affaires.

En effet, depuis deux ans d'existence, notre comité a fait plusieurs représentations devant les gouvernements canadien et québécois. On a aussi participé activement aux audiences publiques de la Communauté urbaine de Montréal en ce qui concerne le sujet de la police et la sous-représentation des personnes d'origine immigrante dans la police de Montréal, où on a fait des représentations à deux différentes reprises. Par les audiences publiques et par les délégations qui visitent les ministères, on essaie de voir au meilleur avancement (11 heures)

M. Payne: Je vous remercie.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? Merci, M. le député de Vachon. M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: Merci, M. le Président. J'aimerais remercier M. Delgado et Me Djihanian d'être venus nous présenter ce mémoire pour le Comité ad hoc de concertation pour l'accès à l'égalité. J'ai quelques

mots d'introduction, M. le Président.

Le Québec a toujours été à la recherche de l'égalité. Si on remonte dans l'histoire, on retrouve une loi de grande importance qui a été adoptée en 1832. Elle porte comme titre: Acte pour déclarer que les personnes qui professent le judaïsme...

Le Président (M. Gagnon): Je m'excuse, M. le député de Rousseau, question de règlement.

M. Blouin: Oui, M. le Président. Je croyais que nous étions ici pour entendre le Comité ad hoc de concertation pour l'accès à l'égalité et je constate que le député de D'Arcy McGee est en train de nous livrer une épître.

Le Président (M. Gagnon): Je m'excuse, M. le député de Rousseau, mais il a été entendu qu'on avait 55 minutes par mémoire, soit environ 20 minutes pour nos invités et 35 minutes pour dialoguer avec les membres de la commission. Jusqu'à présent, M. le député de D'Arcy McGee a à peine employé trente secondes des quelque 14 minutes qu'il peut utiliser.

M. Blouin: M. le Président, oui, je vais laisser la parole au député de D'Arcy McGee, puisque c'est son droit de s'exprimer en commission, mais je veux lui dire, à titre d'information, que malgré l'attitude qu'il a adoptée ce matin et conformément à la Charte québécoise des droits et libertés de la personne, le ministre a pris l'initiative de rencontrer tous les groupes qui veulent le rencontrer et qui veulent lui faire part de leur point de vue.

M. Marx: Malheureusement, M. le Président, le député de Rousseau n'a rien à dire sur le fond.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de D'Arcy McGee, vous avez maintenant la parole.

M. Marx: Je reprends, M. le Président, merci. Le Québec a toujours été à la recherche de l'égalité. Si on remonte dans l'histoire, on retrouve une loi de grande importance qui a été adoptée en 1832. Elle porte comme titre "Acte pour déclarer que les personnes qui professent le judaïsme ont le bénéfice de tous les droits et privilèges des autres sujets de Sa Majesté en cette province".

En effet, cette loi a reconnu les droits religieux et politiques des citoyens juifs du Québec. De plus, cette loi québécoise de 1832 est le fondement de nos lois et chartes provinciales et fédérale protectrices des droits et libertés de la personne. Il faut noter par contre que c'est 27 ans plus tard, en 1859, que le Royaume-Uni a adopté une loi semblable à celle du Québec.

En 1975, le Québec a une autre fois pris les devants en matière des droits et libertés avec l'adoption de la Charte des droits et libertés de la personne. L'article 10 de cette charte rend illégale dans le domaine de l'emploi toute discrimination "fondée sur la race, la couleur, le sexe, la grossesse, l'orientation sexuelle, l'état civil, l'âge sauf dans la mesure, prévue par la loi, la religion, les convictions politiques, la langue, l'origine ethnique ou nationale, la condition sociale, le handicap ou l'utilisation de moyens pour pallier ce handicap".

Il y a bientôt trois ans, l'Assemblée nationale du Québec modifiait de nouveau la Charte des droits et libertés de la personne afin de permettre la mise sur pied de programmes d'accès à l'égalité. Ces derniers programmes visent à améliorer la situation de personnes faisant partie de groupes victimes de discrimination (femmes, personnes handicapées, minorités culturelles et ethniques, autochtones) en s'assurant qu'elles puissent avoir accès aux mêmes possibilités d'emploi que les autres membres de la société. Même si la notion d'égalité implique que des individus différents doivent être traités de la même façon, elle n'empêche certainement pas le respect de leurs différences et de leurs particularités. C'est pourquoi ne pas vouloir reconnaître ces différences peut parfois conduire à nier l'accès à l'égalité des chances et déboucher sur une attitude discriminatoire non intentionnelle.

Nous avons déjà soulevé à plusieurs reprises la question de certains critères d'embauche qui ne tiennent pas compte des caractéristiques physiques des femmes et des membres de certaines communautés culturelles et qui ont parfois pour effet de les empêcher d'avoir accès à la carrière qu'ils souhaiteraient poursuivre. Les exigences de taille au sein de la police en sont un exemple très concret.

Au cours des 25 dernières années, la société québécoise a évolué. L'homogénéité qui la caractérisait a fait place à une plus grande diversité ethnique, culturelle et religieuse. Ce nouveau pluralisme n'a toutefois pas trouvé un très grand écho au sein des institutions gouvernementales et paragouvernementales puisque les individus appartenant à nos diverses communautés culturelles y sont toujours peu nombreux.

La situation des femmes est très semblable puisqu'elles souffrent, elles aussi, d'une sous-représentation presque chronique au niveau des postes de commande dans l'administration publique et parapublique.

Il est vrai que certains progrès ont été réalisés ces dernières années mais beaucoup reste à faire. Cette absence ou sous-représentation de ces divers groupes résulte

de ce que certains appellent la discrimination systémique. La discrimination systémique peut être définie comme non intentionnelle ou institutionnalisée.

Pensons par exemple aux méthodes d'embauche ou aux conditions d'admissibilité qui peuvent avoir pour effet d'exclure certaines personnes. Â ce propos mentionnons, premièrement, que l'exigence de taille pour être policier ou policière, 5 pieds 7 pouces pour un homme et 5 pieds 3 pouces pour une femme, a nécessairement comme effet d'exclure un bon nombre de femmes de même que des candidats asiatiques.

Deuxièmement, la mauvaise évaluation d'un diplôme obtenu ailleurs qu'au Canada peut avoir pour résultat d'exclure des professionnels de certains emplois.

Troisièmement, le fait de chercher des emplois dans les milieux qu'on connaît, "old boy networks", joue contre l'engagement des membres de groupes minoritaires.

Il y a aussi l'effet de dissuasion, le "chill factor". Il s'agit d'une situation où une personne ne pose pas sa candidature parce qu'elle craint d'être mal reçue dans ce milieu de travail. Cette crainte se manifeste surtout lorsque le milieu de travail ne compte aucun employé de son groupe.

La recherche de l'égalité dans l'emploi n'implique pas qu'il faille nécessairement appliquer à tout le monde les mêmes solutions. On doit plutôt chercher d'abord à déterminer et à éliminer autant que possible les obstacles qui empêchent tous les membres de notre société, particulièrement les femmes, les handicapés, les minorités visibles et les autochtones, d'avoir accès à un grand nombre de possibilités d'emploi permettant à chacun et à chacune de développer au mieux ses talents.

Voilà donc définie de façon générale la philosophie sous-jacente au programme d'accès à l'égalité. Nous croyons qu'elle fait l'objet d'un large consensus au sein de notre société.

Par ailleurs, il faut une véritable volonté politique d'implanter ces programmes pour que ces grands principes s'incarnent réellement au sein de notre société. S'il y a un endroit qui devrait servir de modèle afin de produire un quelconque effet d'entraînement, c'est bien au sein des organismes publics et parapublics. C'est là, à notre avis, que l'implantation des programmes d'accès à l'égalité devrait se réaliser en priorité.

La Charte des droits et libertés de la personne prévoit que le projet de règlement ne s'appliquera pas au gouvernement. Toutefois, la charte fait obligation au gouvernement d'implanter des programmes d'accès à l'égalité.

Au-delà des mesures prises, il faut regarder les résultats. C'est bien beau de dire que les programmes d'accès à l'égalité englobent, outre l'embauche, les processus de promotion et de formation, voire les processus de recyclage, mais compte tenu de la limitation des effectifs au sein de la fonction publique et du peu de personnes qui s'y trouvent et qui proviennent des communautés culturelles, on peut à juste titre se demander qui l'on va promouvoir ou recycler.

Pour recycler et promouvoir, encore faut-il qu'il existe des représentants de ces groupes culturels. Il faut que les programmes d'accès à l'égalité à l'intérieur du gouvernement cessent d'être un exercice de propagande.

Rien présentement n'empêche le secteur privé d'implanter des programmes d'accès à l'égalité. Même si la Commission des droits de la personne peut prêter son assistance, elle n'est pas obligée d'approuver les programmes élaborés par le secteur privé sur une base volontaire puisque le premier alinéa de l'article 86.2 n'est pas en vigueur.

Mais pour susciter l'instauration sur une base volontaire de programmes d'accès à l'égalité dans le secteur privé, quitte par la suite à les rendre obligatoires s'il n'y a pas de résultats, il faut, à notre avis, que les organismes gouvernementaux et paragouvernementaux soient les premiers à faire la preuve du bien-fondé et de l'efficacité de tels programmes.

La question plus particulière des programmes d'accès à l'égalité dans l'emploi pour les femmes semble avoir récemment retenu l'attention du gouvernement lorsqu'il avançait l'hypothèse que la meilleure façon d'atteindre cet objectif d'égalité serait de forcer les entreprises qui font affaires avec le gouvernement à s'obliger contractuelle-ment à avoir un tel programme d'accès à l'égalité. Mais, avant que de tels programmes soient ainsi imposés aux entreprises contractant avec le gouvernement, il faudrait, à notre avis, que ce dernier donne l'exemple.

La commission des institutions aborde, aujourd'hui, l'étude du projet de règlement sur les programmes d'accès à l'égalité. Longuement attendu, ce règlement, comme le souligne son premier article, s'appliquera à toute personne qui implantera un programme d'accès à l'égalité sur recommandation de la Commission des droits de la personne ou à la suite d'une ordonnance de tribunal lorsque la demande de la commission n'aura pas été acceptée. La charte spécifie, à son article 86.3, que la commission peut recommander l'implantation d'un tel programme lorsqu'elle constate une situation de discrimination. Si une telle recommandation n'est pas suivie, les tribunaux pourront intervenir. C'est donc dire que, dans un premier temps, les programmes ne sont pas obligatoires mais qu'ils le deviendront uniquement lorsqu'une situation de discrimination sera constatée. Mais, dans les faits, l'impact de ce règlement sera probablement plus important car

les entreprises voudront sans doute se mettre à l'heure de l'égalité.

Une lecture attentive du projet de règlement suggère quelques remarques. J'aimerais vous en faire part afin que les différents intervenants que nous allons entendre puissent clarifier ou répondre à ces interrogations. D'abord, rappelons que ce règlemnent veut remédier à des situations de discrimination systémique envers des groupes, c'est-à-dire que, pour déterminer s'il y a eu discrimination, il faut examiner les répercussions de certains comportements plutôt que de chercher l'intention de leurs auteurs. Alors, pourquoi ne pas préciser ce concept de discrimination systémique afin de bien cerner cette notion qui est au coeur même du projet de règlement?

Le programme d'accès à l'égalité doit également, selon l'article 2 du règlement, comprendre des mécanismes de contrôle afin de vérifier si les objectifs du programme ont été atteints. Quels seront ces mécanismes? Pourquoi ne pas les avoir précisés dans le projet de règlement?

Les objectifs d'égalité devront, selon l'article 3, être exprimés en nombre et en pourcentage pour chaque catégorie d'emploi. Soulignons ici qu'une étude du gouvernement fédéral, le rapport Abella, s'est opposée à l'imposition d'un système de quotas, "notamment parce qu'on a tendance à fixer des quotas trop peu élevés en disant qu'ils sont des minimums et qu'ils finissent par être considérés comme des objectifs maximums, parce que ces quotas peuvent engendrer de la résistance, de la condescendance ou du ressentiment dans le milieu de travail et, enfin, parce qu'ils peuvent être perçus comme insultants pour les personnes qui sont embauchées ou promues en raison de ces quotas, lesquels peuvent ainsi contribuer à dévaloriser les intéressés. L'article 3 du projet de règlement, en prévoyant que les objectifs doivent obligatoirement être exprimés en nombre et en pourcentage avec, possiblement, des marges, serait-il de nature à engendrer les effets négatifs appréhendés par le rapport Abella?

Les objectifs d'égalité doivent être établis après que des analyses d'effectifs, du système d'emploi et de disponibilité ont été effectuées. L'analyse du système d'emploi est au coeur même de tout le processus puisqu'elle permet d'examiner des pratiques apparemment neutres, mais qui ont un effet discriminatoire dans la gestion de l'entreprise. Cependant, l'article 6 du projet de règlement ajoute, si l'on comprend bien son libellé, que des exigences de sécurité ou d'efficacité administrative pourront, à titre d'exception, justifier ou fonder certaines pratiques dites discriminatoires. Mais, que faut-il entendre par "efficacité administrative" ou "exigences de sécurité"?

Ne devrait-on pas préciser ce que l'on veut vraiment autoriser? Il va de soi que la notion d'efficacité administrative au sein d'une entreprise peut recevoir une interprétation plutôt large!

L'analyse de disponibilité énoncée à l'article 5 du projet de règlement cherche à indiquer combien de personnes au sein d'un groupe cible ont la compétence ou les aptitudes pour accéder à des emplois où, présentement, la représentation du groupe est faible. L'analyse doit également indiquer dans quelle mesure les personnes appartenant au groupe cible sont disponibles sur le marché du travail pour tel type d'emploi. Le gouvernement veut englober non seulement l'embauche, mais aussi le processus de formation et le processus de recyclage, mais, comme nous l'avons déjà souligné, le recyclage et la formation ne sont possibles que pour autant qu'il existe au sein de l'entreprise un bassin de personnes représentant les groupes cibles. Si, dans le cas des femmes, cette question de présence au sein de l'entreprise se pose avec moins d'acuité, dans le cas des minorités culturelles, il en va souvent autrement. Pour ce3 dernières, le premier problème, c'est l'embauche, mais là encore faut-il qu'il y ait ouverture de postes. (11 h 15)

L'article 7 aborde la question des mesures qui doivent être entreprises à l'intérieur d'un programme d'accès à l'égalité. Ainsi, un tel programme doit nécessairement prévoir des mesures d'égalité et des mesures de redressement.

Les mesures d'égalité des chances, comme nous le savons, consistent à modifier et à rectifier des procédures d'embauche et de promotion afin d'éliminer la discrimination systémique. Par contre, les mesures de redressement vont plus loin en ce qu'elles permettent d'accorder temporairement des avantages préférentiels aux personnes faisant partie des groupes cibles. Aux États-Unis, une certaine controverse s'est élevée au sujet de ce genre de mesures de redressement que certains opposants ont qualifiées de discrimination à rebours.

Les principaux reproches faits à ce genre de mesures viennent du fait que les bénéficiaires de ces mesures le sont en tant que membres d'un groupe cible, mais ils n'ont pas nécessairement été victimes de discrimination. De plus, le fardeau de ce traitement préférentiel est supporté par des individus qui, parfois, ne sont en rien responsables de la situation.

La Cour suprême des États-Unis, comme on le sait, a plutôt repoussé ces critiques en déclarant que lorsqu'il s'agissait d'implanter une mesure pour réparer l'effet d'une discrimination antérieure, il n'était pas défendu de faire supporter par des tiers une part du fardeau même s'ils n'étaient pas

directement responsables de la situation discriminatoire (voir l'arrêt Fullilove c. Klutznick qui se trouve à la page 448 des US Reports)

Cependant, il faut que la mesure entreprise soit bien circonscrite. Voilà pourquoi, encore une fois, il nous semble que c'est d'abord dans les secteurs public et parapublic que l'on devra roder de telles mesures pour ensuite être capable de les transposer dans d'autres secteurs tout en connaissant leur impact véritable. De plus, il nous semble que les mesures de redressement ne devraient peut-être devenir obligatoires que lorsque les mesures d'égalité des chances se sont avérées insuffisantes, ceci afin d'éviter autant que possible que des tiers ne soient inutilement pénalisés. Nous croyons qu'il vaut mieux adopter une démarche...

M. Beauséjour: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: Je suis à la fin.

Le Président (M. Gagnon): M. le député d'Iberville, une question de règlement.

M. Beauséjour: Je veux savoir, pour protéger les droits des gens qui sont ici aujourd'hui, si l'intervention du député leur enlève du temps.

Le Président (M. Gagnon): Effectivement, vous avez, chaque côté de cette table, quatorze minutes au Parti québécois, quatorze minutes aux libéraux et sept minutes aux députés indépendants pour dialoguer. Si vous prenez les quatorze minutes pour faire votre introduction, il ne vous restera plus de temps pour poser des questions.

M. Marx: J'ai terminé.

Le Président (M. Gagnon): Voilà.

M. Marx: Merci. Nous croyons qu'il vaut mieux adopter une démarche plus flexible et qui évite d'engendrer d'inutiles résistances, tout en prévoyant une alternative lorsqu'il n'y a pas eu amélioration. Bref, nous sommes favorables aux mesures d'égalité et de redressement, le cas échéant. Cependant, le règlement sur les programmes d'accès à l'égalité tel que déposé par le gouvernement nous semble difficilement applicable. Il faut qu'il soit revu afin qu'il puisse être opérationnel d'une façon efficace. De plus, avant de rendre les programmes d'accès à l'égalité obligatoires, peut-être serait-il souhaitable de les appliquer d'abord dans les secteurs public et parapublic afin de bien roder leur élaboration et leur implantation. On pense ainsi aux ministères, aux organismes d'État, aux communautés urbaines, aux administrations municipales, aux corps de police, aux commissions scolaires, aux centres hospitaliers, ainsi qu'aux sociétés d'État.

Cependant, rien ne devrait empêcher la Commission des droits de la personne d'aider le secteur privé à instaurer des programmes d'accès à l'égalité sur une base volontaire. Par la suite, ces programmes devraient également s'imposer obligatoirement au secteur privé, le cas échéant.

Mr Chairman, we are in favour of affirmative action programs. However, we believe that the government and paragovernmental institutions should take the lead in implementing these programs. These institutions include government departments, government agencies, urban communities, municipal administrations, police services, school commissions, hospital centers as well as Crown corporations.

Nothing however should prevent the Québec human rights commission from assisting the private sector from voluntarily implementing such affirmative action programs. Such programs could later be made compulsory in the public sector as well.

But what the Government is saying today, the government is telling the private sector: Do as we tell you to do, do not do as we are doing. We think it is up to the government to take the lead in this whole area of affirmative action programs and start the ball rolling.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de D'Arcy McGee, vous avez largement dépassé votre temps. Est-ce que vous voulez réagir...

M. Marx: Sur ma dernière proposition en ce qui concerne qui doit commencer...

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que vous voulez réagir brièvement aux propos du député de D'Arcy McGee?

M. Delgado: II y a certains points que M. Marx a apportés que je trouve personnellement - je ne parle pas maintenant au nom de la coalition, mais en mon nom personnel - assez intéressants et que nous appuyons en essence. Il faut préciser le sens de discrimination systémique. Dans la charte et dans le projet de règlement, il n'y a aucune mention claire de la discrimination systémique, ce n'est pas défini. Semble-t-il que cela nous amène aux tribunaux pour prouver qu'il y a eu une discrimination volontaire dans chacun des cas.

Cela s'ajoute aussi au cas de la définition de la communauté culturelle dont on parle dans notre mémoire. Les groupes

ethniques ne sont pas définis clairement par la loi comme groupes cibles, et cela nous amène à une situation où il va falloir qu'on passe chaque fois par la commission si nous voulons faire un programme d'accès à l'égalité. Un exemple de cela, ce serait le cas des chauffeurs de taxi, des compagnies de taxi à Montréal où la commission a déclaré qu'il y a eu discrimination concernant les races.

Est-ce qu'à ce moment il y a déjà des mécanismes pour mettre sur pied des programmes d'accès à l'égalité dans l'industrie du taxi? On ne sait pas si c'est déjà commencé, mais au moins la base existe, parce qu'il y a une audition à la commission présentement. Est-ce qu'en ce moment cela s'applique aussi et cela va s'appliquer de la même façon à la communauté chinoise, à la communauté indienne ou à la communauté latin-américaine? Non! C'est une seule décision qui touche une seule communauté, la communauté noire francophone. Au moins qu'il y ait un changement là-dessus! À mon avis, il faut qu'il y ait une catégorie plus claire, plus large qui regroupe toutes les minorités ethniques désavantagées dans un seul groupe.

M. Marx a bien constaté aussi le fait que les mécanismes dans l'article 2 ne sont pas très clairs. Il va falloir que dans le projet de loi les mécanismes soient vraiment définis.

Notamment, à cela j'ajouterais qu'il manque aussi de pouvoir de sanction au niveau de la phraséologie. Â aucun endroit on n'utilise le verbe "doit": l'entreprise doit faire cela. On explique simplement de façon déclarative qu'une entreprise fait un tel programme: l'entreprise engage une telle personne. Ce n'est pas obligatoire, il n'y a pas l'utilisation du verbe devoir là-dedans. L'utiliser serait un moyen pour donner plus de dents, plus de force à l'argument.

À l'article 3, concernant les critiques de M. Marx, franchement je ne vois pas comment on pourrait échapper à la mention d'un nombre d'une certaine catégorie quantitative. Il va falloir qu'à un moment donné on se donne un certain plafond quantitatif; sinon, il n'y a aucun moyen de mesurer le progrès dans l'embauche des personnes. Je comprends bien votre logique. Quand même, les nombres doivent être explicites à un moment; pas un quota, mais un certain plafond quantitatif, sinon il n'y aura aucun moyen de mesurer le progrès du programme.

Finalement, concernant l'article 6, je suis absolument d'accord que les questions de sécurité et d'efficacité ne doivent pas entrer dans des arguments pour empêcher qu'il y ait un programme mis sur pied dans une entreprise. C'est un peu dangereux, dans l'article 6, de mentionner autre chose comme l'efficacité administrative. Pour nous, c'est un peu comme la question de l'expérience canadienne, qui peut s'utiliser comme mesure administrative pour empêcher la rentrée des personnes immigrantes.

C'est simplement un dialogue en termes égaux avec M. Marx là-dessus. Je ne sais pas si tu veux ajouter...

M. Djihanian (Hrair): Je n'ai rien à ajouter à ce que mon collègue M. Delgado a dit. Je me souviens, étant étudiant en histoire au cégep, que mon professeur m'a dit: Lorsque Staline a préparé la constitution de l'Union soviétique, apparemment, c'était la plus avancée au monde à cette époque. Au lieu de vouloir couper un cheveu ici-dans la rédaction des règlements, je veux voir l'action. On parle, on parle, on parle, mais je veux voir l'action. Cela fait plusieurs années qu'on sait qu'il y a un problème quant à l'accès à l'égalité en emploi. En tant qu'avocat, je pratique à Montréal et sais très bien qu'au palais de justice de Montréal, il y seulement deux fonctionnaires qui, à ma connaissance, sont d'origine autre que canadienne-française. J'ai hâte de voir l'accès à l'égalité dans la fonction publique. Je pense que si le gouvernement commence il va créer l'atmosphère et le secteur privé va suivre. Merci.

Le Président (M. Gagnon): Merci.

M. Marx: Nous sommes tout à fait d'accord avec cette prise de position.

Le Président (M. Gagnon): Merci. Je remercie le Comité ad hoc de concertation pour l'accès à l'égalité.

Je demande donc maintenant à la Coalition des femmes pour l'accès à l'égalité de se présenter à la table. Nous allons suspendre nos travaux pendant cinq minutes, le temps de changer de sièges.

(Suspension de la séance à 11 h 27)

(Reprise à 11 h 30)

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre! Nous allons maintenant entendre la Coalition des femmes pour l'accès à l'égalité. À l'ordre, s'il vous plaît! Je demanderais à la porte-parole de se présenter et de présenter les gens qui l'accompagnent. Vous pouvez rester assise.

Coalition des femmes pour l'accès à l'égalité

Mme Novak (Liza): Mon nom est Liza

Novak. M. le Président, Mmes et MM. les députés, avec votre permission, pour la présentation de notre mémoire, nous

aimerions procéder de la façon suivante: d'abord, l'introduction de la Coalition des femmes pour l'accès à l'égalité sera faite par Mme Asselin, de l'R des Centres de femmes du Québec, qui est à ma gauche; ensuite, la présentation du mémoire se fera par moi-même, Mme Liza Novak, du groupe d'aide et d'information sur le harcèlement sexuel au travail; finalement, nous passerons à l'étape des commentaires, des questions et des réponses avec Dominique Leclercq, du groupe Action travail des femmes, qui est à ma droite, Lyse Leduc, du Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail Inc., Denise B. Rochon, de la Fédération des femmes du Québec, Michelle Asselin et moi-même. Cela va?

Le Président (M. Gagnon): Voilà. Je voudrais rappeler à votre groupe, comme on le fait régulièrement, que pour la bonne marche de nos travaux nous disposons de 55 minutes, c'est-à-dire environ 20 minutes pour vous entendre et 35 minutes d'échange de propos avec les membres de la commission. Je vous laisse la parole immédiatement.

Mme Asselin (Michèle): Je vais commencer par vous présenter la Coalition des femmes pour l'accès à l'égalité. C'est une coalition formée de 172 groupes de femmes, comités de femmes de syndicats et de groupes populaires et qui représente au-delà de 350 000 femmes provenant de toutes les régions du Québec. Vous pourrez consulter la liste des groupes qui nous ont appuyées qui est incluse dans le mémoire qu'on vous a déjà présenté.

Nous nous sommes mobilisées au printemps dernier pour réclamer l'entrée en vigueur des articles de la Charte des droits et libertés de la personne permettant la mise en place des programmes d'accès à l'égalité. Nous nous sommes mobilisées aussi pour l'adoption d'une réglementation adéquate telle que celle qui est contenue dans le présent projet de règlement qui définit ce qu'est un véritable programme d'accès à l'égalité et donne les outils suivants à la Commission des droits de la personne du Québec lorsqu'elle recommande ou s'adresse au tribunal pour obtenir un programme d'accès à l'égalité: des objectifs quantifiables, des mesures de redressement, un échancier et des mécanismes de contrôle.

Nous désirons aussi l'obligation contractuelle, c'est-à-dire l'obligation de mettre en place un programme d'accès à l'égalité pour les entreprises obtenant un contrat du gouvernement. Déjà, en octobre 1981, un certain nombre d'entre nous a présenté des mémoires à la commission permanente de la justice chargée de réviser et d'amender la Charte des droits et libertés de la personne pour y inclure les programmes d'accès à l'égalité comme remède à la discrimination systémique.

En juin 1982, le projet de loi 86 a été déposé à l'Assemblée nationale et les groupes de femmes se sont réjouis d'y retrouver une réponse à leur requête en matière d'accès à l'égalité dans le chapitre III de la charte traitant des programmes d'accès à l'égalité. Cependant, ce chapitre n'allait pas être mis en vigueur tant et aussi longtemps qu'une réglementation n'allait pas en définir les règles: c'était une demi-victoire, il fallait encore être "patientes".

Pendant les quarante mois de cette longue "gestation", plusieurs démarches ont été faites afin d'accélérer "l'accouchement": lettres, pressions diverses, interventions multiples... etc.

Or, nous voici réunies dans la "chambre des naissances" ...et nous voulons croire que l'enfant à naître sera fort et en santé, qu'il aura tous ses moyens et tous ses membres et qu'il pourra faire son chemin dans la société québécoise.

En effet, pour les femmes que nous représentons, une action énergique en matière d'égalité s'impose aujourd'hui afin que nous possédions des outils efficaces nous permettant d'améliorer notre situation sur le marché du travail.

Je vais passer la parole pour quelques instants à Mme Denise Rochon.

Le Président (M. Gagnon): Mme Rochon.

Mme Rochon (Denise B.): Je dois dire au nom de la Coalition des femmes pour l'accès à l'égalité que nous regrettons vivement l'absence de M. Fréchette, ministre de la Justice, qui aura à mettre en vigueur le programme d'accès à l'égalité.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: Est-ce que la Coalition des femmes pour l'accès à l'égalité ou d'autres groupes de femmes ont été consultés par le ministre, non pas M. Chevrette, mais M. Johnson ou M. Bédard? Est-ce qu'ils ont été consultés en ce qui concerne le règlement? Est-ce que vous avez eu des projets de règlement avant?

Le Président (M. Gagnon): Nous allons laisser Mme Rochon livrer le message et vous pourrez poser cette question-là tantôt lorsqu'on sera à la période des questions. Mme Rochon.

Mme Rochon: Le regret a été exprimé et je passe la parole à Mme Novak qui va vous faire la présentation du mémoire.

Le Président (M. Gagnon): Mme Novak?

Mme Rochon: Oui.

Mme Novak: Avant de vous faire part de nos recommandations concernant le projet de règlement à l'étude, il nous apparaît essentiel de rappeler à la commission parlementaire certains faits concernant la situation spécifique des femmes: 46 % des femmes sont sur le marché du travail salarié; les femmes constituent 41 % de la main-d'oeuvre active et salariée et leur nombre est en progression constante. D'ici l'an 2000, on prévoit qu'un travailleur sur deux sera une travailleuse; deux femmes sur trois occupant un emploi salarié le sont dans des ghettos d'emploi où prévalent généralement de moins bonnes conditions de travail (salaire, avancement, formation, et même accès difficile à la syndicalisation); de plus, parmi les autres groupes-cibles concernés par le programme d'accès à l'égalité - handicapés, minorités culturelles, Amérindiens, Inuit - environ 50 % sont des femmes.

Le fait d'avoir inclus dans la charte un chapitre sur l'accès à l'égalité constitue une reconnaissance, de la part du législateur, de l'existence de cette discrimination systémique. L'intention doit maintenant être concrétisée.

Nous considérons effectivement qu'une réglementation adéquate sur les programmes d'accès à l'égalité constitue un premier pas indispensable vers un changement des conditions de vie des femmes dans le sens de l'égalité.

Cette réglementation, étant directement reliée aux articles spécifiques de la Charte des droits et libertés de la personne, sert de dernier recours qui, selon nous, aura un effet incitatif pour les employeurs d'assurer le respect du principe d'égalité dans leur pratique. Sans une réglementation adéquate contenant des directives spécifiques essentielles de base, l'obligation contractuelle risque elle aussi d'être inefficace.

Nous traiterons maintenant plus en détail de ces divers sujets en commençant par le projet de règlement de juin 1985. Ensuite, nous aborderons la question de l'obligation contractuelle, les mesures incitatives et les programmes volontaires.

Je me situe à la page 11 du mémoire: le projet de règlement du 26 juin 1985. D'une manière générale, la Coalition des femmes pour l'accès à l'égalité est satisfaite de ce projet de règlement puisqu'il reprend les éléments, pour nous essentiels, contenus dans le précédent, celui d'octobre 1984. Nous allons successivement commenter chaque article et recommander quelques modifications.

Concernant l'article 1, disposition générale portant sur l'application du règle- ment, étant donné qu'il s'agit, en effet, d'un recours de dernière instance qui assurera que le remède proposé mène à un véritable changement de la situation des femmes discriminées, il faut donc garder toutes les "dents" au niveau du règlement. Nous recommandons. donc l'adoption de cet article tel quel.

Concernant l'article 2 de la section II, on ne pourra jamais insister assez sur l'importance et la nécessité que la réglementation prévoie les quatre éléments essentiels que doit contenir un vrai programme d'accès à l'égalité, c'est-à-dire objectifs quantifiables, mesures de redressement, échéancier et mécanismes de contrôle. Nous recommandons l'adoption de cet article tel quel.

Concernant l'article 3, cet article fait référence à des objectifs quantifiables, ce qui est absolument nécessaire pour obtenir un résultat. Nous recommandons l'adoption de cet article tel quel.

Concernant l'article 4, cet article cerne bien ce qui doit ressortir d'une analyse d'effectifs, tant dans les éléments identifiés que dans le rapport comparatif qui est nécessaire pour illustrer la situation des employés du groupe-cible. Nous recommandons que cet article soit adopté tel que formulé.

En ce qui a trait à l'article 5, l'analyse de disponibilité à laquelle se réfère cet article est bien. En effet, on y a précisé non seulement le critère de compétence, mais aussi l'aptitude à l'acquérir dans un délai raisonnable.

Cet aspect est essentiel lorsque l'on songe à briser la discrimination systémique. De plus, le fait d'avoir à considérer, dans une analyse de disponibilité, le bassin de main-d'oeuvre extérieur de l'entreprise possédant les caractéristiques du groupe-cible est capital pour les femmes qui sont nombreuses à vouloir accéder à des emplois.

C'est pourquoi nous recommandons l'adoption de cet article avec l'ajout suivant: "Dans le cas où Statistique Canada n'aurait pas les statistiques nécessaires, il faudrait procéder par approximation d'experts e/s".

Je me situe à la page 13 de ce mémoire, concernant l'article 6, portant sur la définition de l'analyse du système d'emploi. Nous recommandons l'adoption de cet article tel quel. Concernant l'article 7, cet article est un des plus importants du règlement parce qu'il introduit les mesures de redressement, mesures essentielles à un réel programme d'accès à l'égalité. Les deux types de mesures décrites dans cet article sont bien formulés et sont à conserver intégralement. Donc, nous recommandons l'adoption de cet article intégralement.

Concernant l'article 8, des mesures de soutien peuvent s'avérer nécessaires pour permettre aux femmes de surmonter certains

obstacles à l'emploi et le fait que ces mesures soient accessibles à l'ensemble des travailleuses et travailleurs est important. Alors, nous recommandons l'adoption de cet article tel quel.

Concernant l'article 9, portant sur la transmission des informations du programme d'accès à l'égalité recommandé par la commission ou imposé par le tribunal, il est important que les employé e/s d'une entreprise prennent connaissance de l'ensemble des éléments que constitue le programme. Nous recommandons donc que soit ajouté à cet article: "ainsi que l'ensemble des éléments du programme d'accès à l'égalité spécifiés à l'article 2."

Concernant l'article 10 portant sur la responsabilité de l'implantation du programme, puisqu'il s'agit de cas où la discrimination systémique a été prouvée, il nous apparaît essentiel que l'implantation du programme d'accès à l'égalité soit sous la responsabilité entière de l'employeur mis en cause, puisqu'il aura des comptes à rendre, conformément à l'article 11 qui suit.

Il est donc indispensable qu'une personne en autorité dans l'entreprise reçoive un mandat clair en matière d'accès à l'égalité. Selon nous, ce sera à cette personne en autorité de s'assurer de la collaboration souhaitable des syndicats dans l'entreprise, s'il y a lieu, des employés en général et, le cas échéant, de postulants externes ou de personnes-ressources. Donc nous recommandons l'adoption de cet article tel quel.

Concernant l'article 11, portant sur le rapport de l'employeur auquel s'applique un programme, nous recommandons l'adoption cet article avec l'ajout suivant, c'est-à-dire, après le terme "à la commission" et avant le terme "un rapport écrit", des mots: "et à la ou les plaignante(s)". Puisqu'il s'agit de remédier à une situation jugée discriminatoire subie par la ou les plaignante(s), il est important et normal qu'elle(s) prenne(nt) connaissance de l'évolution de l'implantation du programme.

Je me situe à la page 15 de la section III du règlement portant sur l'égalité dans les services d'éducation offerts au public. Nous recommandons l'adoption des articles 12 à 16 tels que formulés. Il est important que les programmes puissent être mis en place dans les réseaux éducatifs, car la discrimination systémique vécue par les femmes sur le marché du travail prend racine dans le système d'éducation et de formation professionnelle.

En ce qui a trait à la section IV portant sur l'égalité dans les services de santé et les autres services offerts au public, nous recommandons l'adoption de l'article 17 tel quel. En ce qui a trait à l'article 18, nous avons assez attendu l'adoption d'un tel règlement. C'est pourquoi celui-ci doit entrer en vigueur le plus rapidement possible maintenant, en tout cas, avant d'éventuelles élections.

Nous recommandons que cet article soit libellé comment suit: "Le présent règlement entre en vigueur à la date de sa publication à la Gazette officielle dans les délais les plus courts."

En tant que coalition représentant plus de 350 000 Québécoises, nous n'accepterons rien de moins que le contenu de ce projet de règlement qui constitue pour nous un instrument garantissant que nous pourrons défendre nos droits. D'ailleurs, nous remarquons que nous avons eu l'appui inconditionnel de M. Herbert Marx par rapport à notre position sur la réglementation, et nous l'en remercions. (11 h 45)

Nous avons donc des recommandations à vous faire, qui sont très importantes pour assurer un véritable accès à l'égalité pour les femmes. Il est bien connu que les procédures pour les causes de discrimination sont particulièrement onéreuses financièrement. Il nous apparaît donc indispensable que le gouvernement mette sur pied un fonds d'aide financière en vue de financer toutes les femmes et tout groupe de femmes voulant porter plainte pour discrimination en emploi, comme l'a annoncé le ministre de la Justice dans un communiqué de presse émis le 23 juin 85, à la suite de l'annonce du plan gouvernemental du 17 mai 1985 lors du colloque sur la sécurité économique québécoise. Nous recommandons donc que soit créé un fonds d'aide financière afin de payer les frais des femmes et groupes de femmes voulant porter plainte pour discrimination en emploi.

Je vais passer à la page 17. C'est le rôle du gouvernement de s'assurer que les entreprises auxquelles il octroie des contrats ne perpétuent pas la discrimination. C'est par le biais de l'obligation contractuelle que le gouvernement assurera que les entreprises qui auront des contrats gouvernementaux mettront sur pied de véritables programmes d'accès à l'égalité conformes à ceux qui sont décrits dans le projet de règlement.

Afin d'éviter tout délai, nous recommandons qu'un décret instaure au plus vite l'obligation contractuelle et que, pour la définition et les critères d'application du programme d'accès à l'égalité, il se réfère à la section II du projet de règlement du 26 juin 1985 qui sera alors, nous l'espérons, adopté.

Ensuite, à la conférence sur la sécurité économique des Québécoises, le 17 mai, le gouvernement s'est engagé à établir l'obligation de mettre sur pied des programmes d'accès à l'égalité pour les femmes pour les entreprises de 100 employés ou plus qui ont des contrats gouvernementaux d'une valeur de 200 000 $. Ce montant ne correspond

pas, selon nous, à la réalité de la structure des entreprises québécoises qui sont, pour la plupart, des petites et moyennes entreprises. C'est pourquoi nous recommandons que ce montant soit abaissé afin qu'une quantité appréciable de programmes d'accès à l'égalité puissent voir le jour au Québec par le biais de l'obligation contractuelle.

Maintenant, nous passons aux mesures incitatives telles que la mise sur pied d'un comité aviseur. La création d'un tel comité, annoncée par le gouvernement le 17 mai 1985, nous apparaît comme une initiative intéressante. Néanmoins, la composition proposée ne nous satisfait pas du tout. Nous recommandons que ce comité soit composé de quatre personnes représentant les employeurs, quatre représentant les syndicats et quatre représentant les femmes à raison d'une représentante des non syndiqués, deux femmes représentant les groupes de femmes et une femme représentant les minorités visibles.

De plus, il serait souhaitable que le gouvernement encourage la création de comités consultatifs dans les entreprises afin d'assurer une participation des représentant e/s des employé e/s sur les questions d'égalité. En outre, nous trouverions très positif que soient associées à cette consultation des femmes de la communauté impliquées dans l'intégration des femmes au marché du travail. Plusieurs groupes de femmes sont actifs sur ces questions et leur expertise pourrait apporter une précieuse contribution.

Par ailleurs, afin de guider toutes les entreprises et d'avoir une vue globale de la situation des travailleuses, nous recommandons que le gouvernement rende obligatoire la remise par toutes les entreprises d'un formulaire type, une fois par année, dans lequel serait consignée une analyse d'effectifs, telle que celle qui est spécifiée à l'article 4 du projet de règlement. Nous trouvons important que ces données soient accessibles au public, comme dans le projet fédéral d'équité en matière d'emploi. En effet, les femmes pourront ainsi suivre de près l'évolution de leur situation dans les entreprises.

Finalement, concernant les programmes volontaires, il est clair pour nous que ces programmes volontairement mis en place par les entreprises n'iront pas aussi loin que ceux qui sont détaillés dans le projet de règlement. Toutefois, nous souhaiterions que les entreprises qui prendront de telles initiatives prennent le projet de règlement comme modèle.

Au nom de la Coalition des femmes pour l'accès à l'égalité, je vous remercie de votre écoute attentive. On est prêtes à répondre à vos questions et à entendre vos commentaires.

Le Président (M. Gagnon): Merci, Mme Novak. M. le député de Vachon.

M. Payne: M. le Président, il s'agit d'un document remarquable. Je voudrais remercier les membres de la coalition qui se sont présentées ce matin: Mme Rochon, Mme Leclercq, Mme Novak, Mme Asselin et Mme Leduc.

En ce qui concerne la remarque de Mme Rochon il y a quelques minutes, nous déplorons également l'absence du ministre ce matin. D'ailleurs, j'avais moi-même proposé au début de la séance, selon une certaine tradition, qu'on entende le ministre responsable de la rédaction du projet de règlement. Il devrait être en mesure de faire un survol de la situation depuis l'adoption de la loi et savoir quels objectifs il se donne pour que, justement, on puisse être mieux renseignés avant de vous entendre comme témoins. Peut-être n'étiez-vous pas ici à ce moment-là, mais nous le déplorons également. Je pense que le ministre est encore disponible pour venir avec nous.

Vous avez d'ailleurs mentionné - d'une certaine façon, nous sommes d'accord - qu'il a fallu du temps pour préparer le règlement. Ce n'est pas à moi de défendre le délai du ministère mais, d'une certaine manière, c'est justifiable compte tenu du fait que les modalités relatives à l'implantation des programmes d'accès n'avaient pas fait l'objet d'un débat global avant 1982 et compte tenu de l'importance que pourraient avoir, sur le plan pratique, toute cette question et le contenu de ce règlement. Je considère qu'il est justifiable que l'entrée en vigueur des dispositions des programmes d'accès à l'égalité soit suspendue pendant une certaine période en attendant, justement, qu'il puisse y avoir un certain consensus. Je vois cela dans un esprit positif, c'est donc un délai nécessaire.

J'aurais une couple de questions qui touchent le rôle de la personne en autorité, comme on y fait référence, par exemple, à l'article 11 du règlement. On dit: "L'employeur auquel s'applique un programme fait parvenir annuellement à la commission un rapport écrit comprenant une description." Et la description suit. C'est une question générale: Comment voyez-vous le rôle de la personne en autorité qui serait responsable ou chargée de l'implantation des programmes d'accès a l'égalité par rapport à l'employé et, bien sûr, par rapport aux syndicats? Concrètement, comment cela serait-il actualisé?

Le Président (M. Gagnon): Mme

Leclercq.

Mme Leclercq (Dominique): J'aimerais répondre à cette question. Premièrement, je voudrais rappeler, par rapport à ce que vous avez

dit avant, qu'il s'agit d'un recours en justice. Demain matin, en admettant que le projet de règlement soit en vigueur, on ne va pas se mettre à poursuivre en justice tous les employeurs du Québec. On est bien clair là-dessus. On est très pressées d'avoir ce projet de règlement afin qu'il y ait des changements et, comme l'a dit ma collègue, que cela incite c'est-à-dire que, demain matin, effectivement, on puisse poursuivre un employeur qui exerce de la discrimination afin que cela serve de pôle d'entraînement pour les autres. Donc, ce n'est pas grand-chose qu'on vous demande aujourd'hui, c'est un minimum et il ne s'agit pas de rendre cela obligatoire du jour au lendemain au Québec. Soyons bien clairs là-dessus.

En ce qui concerne l'employé en autorité, effectivement, quand la Commission des droits de la personne va recommander, à la suite d'une preuve de discrimination, qu'un programme soit implanté dans une entreprise ou qu'un tribunal va le faire, il est évident que le tribunal ou la commission auront affaire à un employé en autorité pour qu'il se passe quelque chose dans l'entreprise pour que les recommandations et le jugement du tribunal soient appliqués. C'est cela qu'on veut dire. Ce ne sera pas si compliqué. Actuellement, le seul exemple qu'on ait au Canada - on est obligé de traverser une frontière - c'est le cas du CN. Il y a eu un employé en autorité de nommé qui doit faire quelque chose qui a rapport avec le tribunal.

Le Président (M. Gagnon): Merci. M. le député de Vachon.

M. Payne: En ce qui concerne l'obligation de mettre sur pied des programmes d'accès à l'égalité pour les femmes, pour les entreprises de 100 employés et plus qui ont des contrats gouvernementaux d'une valeur supérieur à 200 000 $, vous dites que ce montant de 200 000 $ ne correspond pas à la réalité de la structure des entreprises québécoises. Selon vous, à combien devrait être fixé le montant de l'obligation contractuelle à laquelle vous faites référence à la page 17?

Le Président (M. Gagnon): Mme Rochon.

Mme Rochon: Nous nous gardons bien à ce moment-ci d'établir un chiffre, sauf qu'on pourrait peut-être vous dire qu'aux États-Unis, c'est 50 000 $. Cela fait une très grande différence. Je ne sais pas si on irait jusque-là, mais on se réserve de parler de ce montant pour le moment, parce que si vous comprenez aussi, les grandes entreprises au-dessus de 200 000 $ de contrats touchent très peu les femmes parce que les femmes sont réparties dans les petites et moyennes entreprises, dans les commerces et dans l'industrie manufacturière. C'est là qu'elles sont les plus nombreuses. Donc, elles ne seraient pas touchées par un "plancher" -entre guillemets - de 200 000 $.

M. Payne: Je pense que c'est à noter, cette objection. Ce n'était pas, à ma connaissance, soulevé au sommet...

Une voix: ...

M. Payne: Non, la question générale, mais la raison spécifique en ce qui concerne en bas de 200 000 $ n'était pas soulevée. Par contre, c'est une excellente objection de fond au niveau du montant de 200 000 $ qui devrait être prise en considération. Merci beaucoup.

Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le député de Vachon. M. le député de D'Arcy McGee, suivi du député de Deux-Montagnes.

M. Marx: Oui. Merci, M. le Président. J'aimerais remercier Mmes Rochon, Leclercq, Novak, Asselin et Leduc pour leur présentation qui est fort intéressante et fort pertinente. Je retiens les derniers mots de la présentation, à savoir qu'il faut arrêter de parler et qu'il faut commencer à agir. Qu'on pense, par exemple, qu'à la Commission de transport de la Communauté urbaine de Montréal, il n'y a que huit chauffeurs qui sont des femmes sur environ 3500 chauffeurs d'autobus; 8 sur 3500. À Chicago, c'est 30 %; à Buffalo, c'est 18 %. Je pense que les Québécoises peuvent conduire des autobus aussi bien que les femmes à Chicago, à Buffalo ou ailleurs. Qu'on pense qu'à la Commission de police du Québec, nous n'avons jamais eu une femme comme membre de la commission depuis 1968. À travers un bon nombre de gouvernements, on n'a jamais trouvé une femme pour siéger comme membre de cette commission. Donc, il y a beaucoup de choses à faire.

La question que j'aimerais vous poser, c'est que... Deux questions, plutôt. Admettons que le règlement est adopté, vous savez que la Commission des droits de la personne aurait un personnel d'environ 40 personnes pour donner suite à ce règlement. Où est-ce qu'on va commencer? Est-ce qu'on va commencer par le secteur public ou par le secteur parapublic? Est-ce qu'on va commencer par la Commission de transport de la Communauté urbaine de Montréal ou si on va commencer par une entreprise privée?

Et ma deuxième question - j'aimerais poser les deux en même temps - porte sur l'obligation contractuelle que je trouve très intéressante et que vous avez bien présentée. Je pense qu'il sera nécessaire de tenir compte de cette question, mais le fédéral a déjà pris en quelque sorte les devants dans cette question d'obligation contractuelle, parce qu'il va obliger des personnes avec qui

il contracte de respecter les programmes d'accès à l'égalité. Est-ce qu'il y a un danger qu'il y ait une incompatibilité entre la réglementation du Québec et celle du fédéral qui s'applique aux mêmes entreprises? On peut prévoir que l'une exige un comité et l'autre n'en exige pas. Une réglementation exige un comité particulier et l'autre exige un comité formé d'une autre façon, et ainsi de suite... Vous comprenez ce que je veux dire? Parce que aux États-Unis, comme l'a bien souligné Mme Rochon - j'ai cela devant moi: "Government Regulations" - au niveau fédéral, c'est uniforme dans tous les États-Unis. (12 heures)

Le Président (M. Gagnon): Mme Leduc.

Mme Leduc (Lyse): Oui. Je répondrai à la première question de M. Marx, quand il nous demande par où nous allons commencer? Je verrais bien idéalement que nous ne commencions pas toujours par le même secteur public. Je pense qu'avec 40 personnes, il serait normal que la Commission des droits de la personne essaie de créer des modèles tout autant dans l'entreprise privée que dans le secteur public. Je ne pense pas qu'on devrait se cantonner dans un endroit pour commencer parce qu'il y a des modèles à créer partout. Je laisserais à Dominique le soin de répondre sur le sujet du fédéral.

Le Président (M. Gagnon): Mme

Leclercq.

Mme Leclercq: Je voulais aussi dire que ce sera aux femmes de décider par où elles veulent que cela commence puisque nous serons les plaignantes.

M. Marx: C'est cela; les femmes à la commission des droits.

Mme Leclercq: Non, les plaignantes... M. Marx: Oui, oui, je comprends.

Mme Leclercq: ...qui vont encourager la commission à aller dans un sens ou dans l'autre.

En tout cas, en ce qui concerne le projet d'équité en emploi du fédéral, on parle ici d'accès à l'égalité et on veut garder ce terme-là. Au fédéral, on parle d'équité en emploi; ce n'est pas la même chose. Le projet fédérai pour l'obligation contractuelle n'a rien à voir avec le projet de règlement qu'on a ici, parce qu'il n'a pas les dents. Nous, nous voulons les dents, c'est-à-dire les échéanciers, les mesures de redressement objectives, quantifiables. Donc, ce projet de règlement est bien supérieur au projet fédéral. De toute façon, comme le disait ma collègue Denise, au fédéral, c'est un projet; ici, on en est à un règlement qui peut être adopté très vite.

En ce qui concerne les entreprises, d'abord il y a une question de juridiction. Je pense que cela va quand même jouer dans ce cas-là, même dans la question de l'obligation contractuelle. Vous pensez que cela ne jouera pas puisque ce seront des contrats?

M. Marx: C'est cela, ce seront des contrats. Le Québec peut exiger de n'importe quelle compagnie ou même d'une banque qui n'est pas sous sa juridiction, de se conformer d'une façon contractuelle. Je pense que cela sera possible.

Mme Leclercq: Alors, à ce moment-là, ce qui va se produire, c'est que, effectivement, si le projet de règlement est adopté, au niveau du Québec ce sera plus fort qu'au niveau du fédéral. Mais vous avez vu qu'on a quand même recommandé la question du formulaire type. En fait, c'est ce que dit le projet fédéral. C'est simplement un formulaire type. Je ne vois pas en quoi cela pourrait être contradictoire. Il y aura un formulaire type si on suit notre recommandation pour le Québec et pour le fédéral, mais il y aura au niveau du Québec quelque chose de plus fort: c'est le projet de règlement. On va essayer de l'avoir aussi au niveau du fédéral. Soyez-en sûrs.

M. Marx: Mais dans le règlement que nous avons devant nous aujourd'hui, l'obligation contractuelle n'est pas prévue. Les "Contract compliances" ne sont pas prévues dans le règlement actuel du gouvernement.

Mme Leclercq: Non, mais il faudra une nouvelle loi ou un décret pour l'obligation contractuelle. Ce qu'on demande c'est, lorsque ce décret ou cette loi sera adopté, qu'il se reporte au projet de règlement que nous avons à l'étude en ce moment.

M. Marx: Tout à fait d'accord.

Mme Leclercq: Que cela soit lié, voyez-vous.

M. Marx: Mais oui, d'accord.

Mme Leclercq: Sinon, l'obligation contractuelle reviendra, comme au fédéral, à l'équité en emploi. Nous disons, comme nous avons l'expérience américaine et qu'ils ont eu des règlements qui n'avaient pas de dents jusqu'en 1972, que rien ne s'est fait au plan de l'accès à l'égalité de par l'obligation contractuelle. À partir de 1972, ils ont eu un projet de règlement très fort et avec des dents; là, il y a eu des changements. Je vous en dirai plus long ce soir, à 17 heures, quand le groupe Action travail des femmes se fera entendre.

M. Marx: Nous pourrons reprendre cette discussion, mais nous sommes tout à fait d'accord sur le fait que si le gouvernement décide de procéder avec l'obligation contractuelle, cela soit fait d'une façon efficace et qu'on ait des progrès et non seulement des décrets. Merci.

Le Président (M. Gagnon): Merci. M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: Merci M. le Président. Quand vous avez suspendu nos travaux pour quelques instants, je me suis retiré. Quand je suis revenu, Mme Novak avait déjà commencé. J'ai entendu une allusion que le député de Vachon a faite aux paroles tenues par Mme Rochon, que je n'ai par conséquent pas eu l'avantage d'entendre. Mme Rochon aurait dit quelques mots au sujet de l'absence du ministre. J'espère que tout le monde a bien compris que si le ministre est actuellement absent, c'est parce qu'il a décidé de se retirer. Il était présent ce matin. Il y a eu une discussion quant à savoir à quel titre il pourrait participer à nos travaux et, à la suite de cette discussion, le ministre a décidé de se retirer.

M. Blouin: M. le Président... M. de Bellefeuille: Je voudrais...

Le Président (M. Gagnon): Un instant, M. le député de Rousseau.

M. Blouin: Oui, M. le Président, pour que le député de Deux-Montagnes...

Le Président (M. Gagnon): Sur une question de règlement?

M. Blouin: Oui, M. le Président.

M. de Bellefeuille: À votre tour, M. le député.

M. Blouin: Pour que le député de Deux-Montagnes soit bien informé...

M. de Bellefeuille: Selon quel article du règlement?

M. Blouin: Je vais le lui dire. Je lui signifie que le ministre est en train de rencontrer les groupes au moment où nous nous parlons, justement afin d'avoir des échanges avec eux, ce qui lui a été refusé ici, M. le député.

M. de Bellefeuille: Vous avez un talent remarquable...

M. Blouin: Soyez honnête.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Deux-Montagnes, vous avez la parole, mais je ne voudrais quand même pas créer de rumeur. Lorsque le ministre s'est retiré, c'est parce qu'on ne lui a pas permis - ce qu'on aurait pu faire selon notre règlement -de prendre place ici, à cette table, sans droit de vote et sans droit de faire motion. Lorsqu'on dit "se retirer", il faudrait ajouter qu'il était simplement dans l'assistance, ici.

M. le député de Deux-Montagnes, vous avez la parole.

M. de Bellefeuille: Bon. Je trouve que le député de Rousseau a un talent remarquable pour se mettre les pieds dans les plats parce qu'il manifeste une fois de plus son incompréhension totale de l'esprit et du sens de la réforme parlementaire. L'esprit et le sens de la réforme parlementaire est que les commissions permanentes de l'Assemblée nationale étudient de leur propre initiative les projets de règlement et les règlements.

Le Président (M. Gagnon): Je m'excuse, mais nous avons des invités à qui on doit poser des questions. Cette discussion a eu lieu ce matin et on a décidé de ne pas accepter que le ministre prenne part à cette commission. Cette discussion a eu lieu ce matin. Nous devons maintenant nous adresser à nos invités. Entre autres, Mme Rochon, je pense, a quelque chose à ajouter. Il faudrait leur poser des questions sur leur mémoire. Mme Rochon.

M. de Bellefeuille: M. le Président, il me semble que c'est tout à fait régulier, ce que je suis en train de faire.

Une voix: ...

Le Président (M. Gagnon): Un instant, c'est moi qui préside, s'il vous plaît!

M. de Bellefeuille: Le député de Vachon a fait allusion à des propos tenus par Mme Rochon. J'ai quelques petites remarques à faire sur ces propos. Cela me paraît absolument et totalement conforme au règlement de le faire. Libre au ministre de rencontrer les groupes de son côté, c'est parfaitement son droit. Je tiens à assurer Mme Rochon et nos autres invités que ce qui compte ici, c'est que les mémoires soient présentés, entendus, discutés par les membres de la commission parlementaire. C'est le sens de ce qui se passe ici. Ce que le ministre décide de faire de son côté, mot, cela ne me fait ni chaud ni froid, c'est son affaire. La commission doit continuer ses travaux comme si de rien n'était puisque c'est le mandat qu'elle a en vertu de notre règlement.

Ceci dit, je voudrais...

Le Président (M. Gagnon): Je m'excuse, M. le député de Deux-Montages...

M. de Bellefeuille: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Gagnon): ...mais à cette première partie, je pense que Mme Rochon veut réagir.

Mme Rochon: Je pense qu'il est absolument essentiel que M. Fréchette, dans son nouveau rôle de ministre de la Justice, puisse nous poser des questions et puisse entendre tout le débat. C'est vrai que nous pouvons le rencontrer par la suite et lui faire nos représentations, mais je pense que les questions et les réponses qui seront exprimées par ces messieurs et ces dames de la commission offriront un climat très différent de ce que nous aurons à vivre avec lui. Je pense que, pour nous, c'était d'une extrême importance qu'il soit ici. Nous déplorons encore une fois son absence.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Deux-Montagnes.

Une voix: II est toujours temps de changer d'idée.

M. de Bellefeuille: Mme Rochon, un autre jour, dans d'autre3 circonstances, j'essaierai peut-être de m'entretenir avec vous du sens de la réforme parlementaire; là, on a autre chose à faire que de discuter des caprices des ministres, de leur absence ou de leur présence et de tout cela; c'est autre chose.

Des voix: Oh!Oh! Oh!

Le Président (M. Gagnon): Je m'excuse, M. le député de Deux-Montagnes, mais je vais devoir encore une fois vous couper la parole. Le sens de la réforme parlementaire n'était pas en cause. Comme ce débat est télévisé, il ne faudrait pas induire la population en erreur. On avait parfaitement le droit, dans le cadre de la réforme parlementaire, d'accepter que le ministre soit ici à titre d'intervenant à cette commission, mais cela prenait l'appui unanime des membres de la commission, ce qui lui a été refusé.

M. Marx: M. le Président, question de règlement. Vous avez votre opinion, le député de Deux-Montagnes a son opinion...

Le Président (M. Gagnon): Voilà, excepté...

M. Marx: II ne faut pas dire que votre opinion fait foi et que son opinion n'est pas bonne.

Le Président (M. Gagnon): Je m'excuse. À l'ordre! Je m'excuse, c'est moi qui préside la commission et j'ai le devoir de faire respecter le règlement. Chaque fois qu'on tentera d'induire la population en erreur en disant qu'on n'a pas respecté le règlement ou qu'on ne connaissait pas le règlement, je vais prendre sur moi de replacer les faits.

M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: M. le Président, je n'ai jamais soutenu que la réforme parlementaire empêchait le ministre d'être présent. Je n'ai pas parlé de ces questions-là. Votre mise au point me paraît mal venue. Je déplore ce qui semble être chez vous un empressement excessif à intervenir lorsque nous mettons le ministre en cause.

Ceci dit, je voudrais en venir à notre mandat et à ce que nous sommes censés faire ici, M. le Président. Je félicite Mme Novak et le groupe qu'elle représente pour avoir préparé un mémoire clair, précis, direct et vigoureux. Je voudrais simplement relever quelques aspects de ce mémoire. Par exemple, à la page 15 du mémoire, à propos de la section 5, l'article 18. La Coalition des femmes pour l'accès à l'égalité exprime le voeu ou l'avis que le règlement doit entrer en vigueur le plus rapidement possible, maintenant, en tout cas avant d'éventuelles élections.

Il est de notoriété publique que certains groupes dans la population s'opposent à l'adoption de ce règlement. Nous verrons au cours de la suite de nos travaux que des groupes importants, du côté patronal par exemple, s'opposent à l'adoption de ce règlement et s'opposent à l'idée même, pour employer l'expression qu'emploient certains groupes, de la discrimination positive.

Vous pourrez, vous, mesdames, et tous les électeurs et toutes les électrices pourront juger de l'attitude que choisira le gouvernement à savoir s'il doit s'empresser, comme vous le souhaitez, avant les élections d'adopter ce règlement qui est ardemment souhaité par des éléments très importants dans la population. J'oserais même dire que, pour les grandes lignes tout au moins, ce projet de règlement fait consensus dans la population.

Le gouvernement a donc à choisir entre agir conformément à ce consensus ou bien agir conformément aux réticences de certains groupes d'intérêt dans la société. C'est le choix qui se pose au gouvernement. J'ai pu observer, quant à moi, comme vous au cours des derniers mois, que, pour dire le moins, le gouvernement n'a pas manifesté un empressement excessif dans la préparation ou la publication de ce projet de règlement. Cela me porte à craindre que votre voeu ne soit pas exaucé, que ce règlement ne soit pas adopté avant les élections, parce que le gouvernement aurait eu amplement le temps

de le faire s'il avait voulu envisager ces questions avec plus d'empressement.

D'autre part, à la page 16, je voudrais juste vous faire une petite suggestion. Vous recommandez que soit créé un fonds d'aide financière afin de payer les frais des femmes et groupes de femmes voulant porter plainte pour discrimination en emploi. Est-ce qu'il serait exact de dire que vous parlez au nom des femmes parce que c'est ce pourquoi votre coalition a été créé mais que vous n'auriez pas d'objection à ce que ce fonds d'aide financière puisse payer les frais de toute personne et de tout groupe qui voudrait porter plainte pour discrimination en emploi?

Mme Novak: Nous n'avons pas d'objection. Absolument pas!

Mme Leclercq: Les femmes sont quand même une majorité et nous vous le rappelons quand même. Même dans les autres groupes, la moitié est des femmes. Donc, nous sommes une grosse majorité. Alors, on veut le gros du fonds.

M. de Beliefeuille: Vous n'avez pas d'objection à ce que les autres personnes et groupes...

Mme Leclercq: Non.

M. de Bellefeuille: ...puissent aussi profiter de l'existence éventuelle de ce fonds?

Mme Novak: Non. Le ministre de la Justice avait déjà présenté son intention de débloquer un fonds d'aide financière pour les femmes, pour porter plainte au niveau de la discrimination. On le reprend ici, c'est un besoin. C'est sûr qu'on n'a pas d'objection à ce qu'on réponde à ce besoin pour d'autres aussi qui vivent le même genre de problèmes. (12 h 15)

Le Président (M. Gagnon): Mme Rochon avait manifesté le désir de...

Mme Rochon: Je vais passer. Je voulais continuer sur le sujet de l'obligation contractuelle, mais je pense qu'actuellement, ce sont les réponses à M. de Bellefeuille...

M. de Bellefeuille: Ah non! Allez, allez.

Mme Rochon: Bon. M. le député de D'Arcy McGee s'inquiétait tout à l'heure des difficultés qu'on pourrait avoir entre l'application fédérale et l'application provinciale des obligations contractuelles. Si le gouvernement se hâte de mettre en vigueur ce règlement, nous serons les premiers, c'est-à-dire que nous serons avant le gouvernement fédéral, et nous nous chargeons aussi de faire un gros lobbying au niveau fédéral et de défendre les mêmes positions qu'ici, de sorte que le gouvernement fédéral pourrait, je pense, se raviser et faire à peu près les mêmes propositions ou, en fait, s'ajuster au Québec. Ce serait peut-être préférable que de faire le contraire.

Le Président (M. Gagnon): Mme Leclercq.

Mme Leclercq: Si vous le permettez, j'aurais un commentaire à faire à propos des employeurs qui s'opposent au projet de règlement. Est-ce que je peux?

Le Président (M. Gagnon): Oui.

Mme Leclercq: Peut-être connaissez-vous... Enfin, nous savons que les employeurs au Québec, depuis longtemps, s'y opposent. Ils n'aiment pas les objectifs numériques, ils n'aiment pas les échéanciers. Mais, vous avez vu, comme nous, un article dans Fortune récemment, qui est quand même un grand journal américain pour les hommes d'affaires - les 500 plus grosses compagnies, vous connaissez cela; j'ai un exemplaire ici - dans lequel on dit que les employeurs étaient très contents des programmes d'accès à l'égalité institués en vertu de l'obligation contractuelle. Ils s'en réjouissaient et ne voulaient pas que M. Reagan mette la hache là-dedans. Pourquoi s'en réjouissent-ils? Parce qu'il y a un meilleur moral des employés -je ne veux pas faire du sexisme, mais je trouve que c'est bien qu'on soit une société mixte - et j'imagine que c'est pour cela. Il y a aussi une meilleure productivité dans les entreprises grâce à ces programmes d'accès à l'égalité et d'autres avantages encore qu'ils n'ont cessé de démontrer. Moi, je pense que les employeurs du Québec pourraient aller faire de petits stages auprès de leurs confrères américains. Peut-être qu'ils apprendraient des choses.

M. de Bellefeuille: Avez-vous la référence?

Mme Leclercq: Volontiers, je l'ai ici. Je ne vais pas mettre trop de temps...

M. de Bellefeuille: Est-ce qu'on peut avoir la référence?

Mme Leclercq: Oui, oui. Je vais vous la donner tout de suite.

Le Président (M. Gagnon): Alors, vous aurez sûrement l'occasion de le faire.

M. le député de Saint-Jacques a demandé la parole tout à l'heure.

M. Viau: Merci, M. le Président. Je tiens à remercier, d'une part, la coalition

des femmes d'avoir présenté ce mémoire très positif et, d'autre part, je profite de l'occasion pour saluer Mme Asselin, du Centre d'éducation et d'action des femmes de Montréal avec qui j'ai eu l'occasion de travailler. Je tiens à témoigner ici du travail remarquable qui est fait par ce groupe, entre autres, dans un quartier populaire où les conditions de vie des femmes sont l'une de ses préoccupations majeures. Ce qui m'a intéressé, entre autres, c'est votre proposition de modification de l'article 5. J'aimerais que vous me donniez des explications. Comment percevez-vous l'application ou le contrôle à exercer quand on définit l'aptitude à acquérir la compétence? Je pense plus particulièrement aux femmes en milieu populaire et surtout aux jeunes femmes car, souvent, on associe la compétence à l'expérience. Quand on doit appliquer cet article où il y a une carence, j'aimerais que vous m'expliquiez comment vous voyez l'application de l'expression "aptitude à acquérir cette compétence" et comment on peut vraiment l'appliquer.

Le Président (M. Gagnon): Mme Asselin.

Mme Asselin: Oui. Le centre que je représente dans la coalition, aujourd'hui, c'est l'R des centres de femmes du Québec. On va présenter un mémoire demain. Mais je pourrais dire tout de suite que nous sommes très préoccupées par les femmes qui n'ont pas accès à l'emploi, qui ne sont pas dans les statistiques de chômage, qui ne sont nulle part et qui n'ont pas accès à l'autonomie non plus. C'est pour cela qu'à l'article 5, on veut tenir compte des années d'expérience et de service que les femmes ont données dans leur famille ou ont accomplies comme bénévoles dans des organismes bénévoles. C'est un peu à ce niveau qu'on voudrait que le projet de règlement ait des mesures incitatives pour qu'on puisse tenir compte de cela. Par exemple, on tient toujours compte du fait que, culturellement, les hommes ont des aptitudes. Par exemple, s'ils ont travaillé avec leur père dans l'électricité... Cela se fait: on va engager un homme à la maintenance sans qu'il ait nécessairement un diplôme. On tient compte de son expérience à cause d'une certaine culture. On voudrait qu'on fasse la même chose avec les femmes, parce qu'elles ont une expérience valable. On voudrait que ce soit reconnu.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? M. le député de Châteauguay.

M. Dussault: Merci. Brièvement, il a été abordé tout à l'heure, mais très expressément, la question du rôle de la Commission des droits de la personne. On en a parlé en relation un peu avec les priorités, mais j'aimerais savoir si d'une façon générale vous avez des attentes plus larges quant au rôle de la commission à l'égard de ces programmes d'accès à l'égalité?

Mme Leclercq: Ce qu'on souhaite, je pense parler au nom de mes compagnes, c'est que cela fonctionne, que cet organisme administratif fonctionne le mieux possible, le plus rapidement possible surtout. On va faire ce qu'on peut pour que ce soit une réalité. C'est sûr qu'aux États-Unis aussi, ils ont des problèmes avec cela. Les organismes administratifs, les employeurs, les plaignants se sont plaints que c'était un peu trop lent. Alors cela va être un problème auquel il va falloir qu'on veille et vous aussi en tant que députés. Le gouvernement aussi devra veiller à ce que la commission agisse dans les meilleurs délais. Je crois que cela va surtout être une question de délai puisque, d'après notre expérience à nous, plusieurs d'entre nous ont déjà déposé des plaintes à la commission, et nous nous sommes heurtés à ces questions de délais très longs.

M. Dussault: Votre message sera déjà entendu.

Mme Leclercq: Merci.

Le Président (M. Gagnon): M. le député d'Iberville.

M. Beauséjour: À la page 16, il est question d'un fonds d'aide financière. Est-ce qu'à d'autres endroits vous connaissez l'existence d'un fonds d'aide? En gros j'ai l'impression que c'est un aspect qui est important pour aider à l'évolution. Est-ce que cela existe ailleurs?

Mme Rochon: Cela existe. Il y a un programme de ce genre qui a été lancé par des femmes au Canada anglais, qui s'appelle "Leaf", et elles ont déjà fait des collectes d'argent. Elles ont demandé une subvention fédérale de 20 000 000 $. Nous avons toutes signé une pétition par rapport à cela. Il y a déjà des causes très importantes qui vont coûter très cher, qui sont entendues et qui sont soutenues par ces groupes de femmes. M. Mulroney, dernièrement, a mis à la disposition des groupes, pas seulement de femmes, mais comme on nous le demandait tout à l'heure, des groupes de toutes les minorités visées, je crois que c'est 2 000 000 $ actuellement. Ce n'est pas beaucoup, mais c'est quand même une promesse qu'il avait faite pendant les élections. Donc, il a mis cela immédiatement à la disposition des groupes, et j'espère qu'avec notre lobbying, on va pouvoir le faire augmenter progressivement.

M. Beauséjour: Vous souhaitez que le Québec ait aussi un fonds.

Mme Rochon: Absolument parce que cela coûte extrêmement cher; et comme les femmes ne sont pas responsables de leur situation de discrimination, ce n'est pas à elles de payer ces poursuites.

Le Président (M. Gagnon): Mme

Leclercq avait...

Mme Leclercq: Un petit complément. Vous savez qu'il existe le fonds de défense pour les droits linguistiques. C'est un fonds qui a quand même beaucoup d'argent au niveau fédéral. Les causes pour les droits linguistiques coûtent moins cher que les causes de discrimination. Donc, on voudrait un fonds - je ne me souviens plus du montant pour les causes linguistiques, mais enfin un fonds bien plus important au niveau fédéral - qui soit un montant suffisant aussi au niveau du Québec. Il y a quand même cet exemple qui est très important, soit la défense des droits linguistiques.

Le Président (M. Gagnon): Merci. Mme la députée de Jonquière.

Mme Saint-Amand: J'aimerais, comme l'ensemble de mes collègues l'a fait tout à l'heure ajouter mes félicitations au groupe que nous venons d'entendre sur le mémoire qui a été déposé, surtout sur certains points qui ont été mentionnés et qui retiennent l'attention inévitablement. J'aimerais poser quelques questions sur les propositions, les remarques que vous apportez à l'article 9, à la page 13 de votre mémoire. Lorsque vous demandez, lorsque vous dites, par exemple, qu'on devrait porter à la connaissance des employés, l'ensemble des éléments du programme d'accès à l'égalité, je m'inquiète, à ce moment-ci, des futurs employés, d'éventuels employés, de femmes ou de minorités qui aimeraient avoir accès à un emploi dans une entreprise donnée. Est-ce qu'à l'intérieur de votre groupe quelqu'un en particulier s'est penché sur - je n'oserais pas dire l'obligation - la nécessité que les entreprises mettant en vigueur un programme d'accès à l'égalité, disons, d'une manière volontaire... Est-ce qu'on a examiné la façon dont on pourrait les inciter à faire part à d'éventuels employés de l'existence au sein de leur entreprise d'un tel programme d'accès à l'égalité?

Lorsqu'un employeur affiche un poste, par exemple, à l'extérieur du cadre de son entreprise actuelle et que des femmes ou d'autres groupes minoritaires désirent postuler un emploi à l'intérieur de cette entreprise, avez-vous pensé à une façon de prévenir ces éventuels employés de l'existence de ces programmes?

Mme Leclercq: II y a deux choses. Il y a le projet de règlement qui est quand même une question, après preuve en justice, de discrimination, et le programme volontaire. Les choses sont quand même différentes. Je dois dire que, depuis qu'il a été question de ce projet de règlement, à Action travail des femmes, on a commencé à en discuter un peu et aussi, depuis que nous avons eu cette victoire contre les Chemins de fer nationaux du Canada, un certain nombre d'employeurs nous ont pressenties, nous ont téléphoné en nous disant qu'ils souhaitaient élargir leur bassin de femmes employées. J'aime mieux vous dire qu'on a été très contentes. C'est très facile. Les gens connaissent notre numéro. Il est public. Les employeurs peuvent nous faire signe. Il y a aussi d'autres groupes de femmes qui sont là, qui sont connus et qui s'occupent justement des femmes qui veulent avoir accès à de meilleurs emplois et des emplois bien payés dans les grosses compagnies ou dans les entreprises qui ont du travail bien payé.

Le Président (M. Gagnon): Le mot de la fin. Mme Novak.

Mme Novak: Vous dites que c'est le mot de la fin?

Le Président (M. Gagnon): Oui.

Mme Novak: C'est cela, je veux seulement ajouter qu'il y a une entreprise au nord du Québec, SIDBEC-Normines, qui, actuellement, est prise avec une cause de discrimination. Qu'est-ce qui s'est passé? En 1977, elle a fait de la publicité dans les journaux pour recruter des femmes pour travailler dans des milieux non traditionnels. C'est sûr que ce n'était pas un programme d'accès à l'égalité, mais c'était une volonté d'ouvrir les métiers non traditionnels à des femmes. Elle a publicise cela et des femmes ont postulé. C'est une question de trouver les véhicules de transmission d'information et, s'ils n'existent pas, de les créer. Je pense qu'il n'y a pas de problème là-dessus et qu'on a de l'imagination et que des façons de faire existent déjà.

Le Président (M. Gagnon): Je vous remercie, Mmes Rochon, Leclercq, Novak, Asselin et Leduc qui ont parlé au nom de La Coalition des femmes pour l'accès à l'égalité. Nous entendrons maintenant le Collectif des femmes immigrantes de Montréal. Je suspends nos travaux pendant au plus cinq minutes.

(Suspension de la séance à 12 h 28)

(Reprise à 12 h 33)

Le Président (M. Gagnon): A l'ordre, s'il vous plaît! Souhaitons la bienvenue au

Collectif des femmes immigrantes de Montréal. Je demande à la porte-parole de s'identifier et de nous présenter les gens qui l'accompagnent.

Collectif des femmes immigrantes du Québec

Mme Bizzari (Aoura): Je m'appelle Aoura Bizzari. Je suis membre fondateur du collectif et coordonnatrice. Â ma droite il y a Martha Lopez qui est membre de l'exécutif du Collectif des femmes immigrantes et Agnès Beaulieu qui est membre du collectif et agent de recherche.

Le Président (M. Gagnon): Juste avant de vous céder la parole à nouveau, je veux vous rappeler, comme on l'a fait précédemment, que nous disposons d'une période de temps de 55 minutes, soit 20 minutes environ pour vous entendre sur votre mémoire et 35 minutes d'échange de propos avec les membres de la commission. Comme le règlement veut que nous terminions à 13 heures, je demande immédiatement aux membres de la commission si vous êtes d'accord pour qu'on prolonge afin de terminer avec ce groupe?

M. Marx: D'accord.

Le Président (M. Gagnon): Vous êtes d'accord. Madame, je vous cède la parole.

M. de Beliefeuille: Je suis d'une collaboration que nous manifestons toujours, M. le Président.

Le Président (M. Gagnon): Madame, je vous cède la parole.

Mme Bizzari: Comme nous sommes un groupe relativement jeune, j'aimerais parler un peu de notre organisme: le pourquoi de notre existence, qui sommes-nous et qu'est-ce qu'on fait. Ce n'est pas d'aujourd'hui qu'il y a des femmes immigrantes au Québec, mais presque personne ne s'est jamais intéressé à nous. Jusqu'à tout récemment, nous étions considérées comme faisant partie du bagage des hommes.

Au départ, nous voulions travailler avec des femmes immigrantes, ce qui veut dire: femmes nouvellement arrivées au pays. Par la suite, nous nous sommes aperçu que les problèmes étaient bien plus vastes que cela. Même les femmes immigrées depuis longtemps avaient des difficultés d'adaptation ou étaient discriminées. Par exemple, une femme noire qui naît au Québec est souvent considérée immigrante et pas nécessairement une Québécoise.

Nous avons gardé notre nom: Collectif des femmes immigrantes de Montréal, mais nous travaillons avec les femmes des communautés culturelles, ce qui veut dire: femmes nouvellement arrivées au pays; femmes de la vieille immigration qui pourraient être des citoyennes canadiennes, mais qui ne sont pas nécessairement plus intégrées, qui ne parlent pas nécessairement le français; femmes des minorités visibles ou raciales, comme vous voudrez.

Brièvement l'histoire du collectif. En 1982, un groupe d'intervenantes qui travaillaient dans des organismes d'aide aux immigrants ont senti le besoin de se regrouper. Nous voulions briser l'isolement dans lequel on travaillait pour développer de la solidarité entre nous, cela sans distinction d'ethnie, et pour avoir aussi un lien d'action permanente.

L'idée du collectif a germé, a fait son chemin. Et en août 1983 une réunion de fondation rassemblait environ 75 femmes issues d'organismes et de communautés différentes. C'est à partir de ces 75 femmes que le noyau s'est développé. Nous avons appris à nous connaître, à identifier nos objectifs et à entreprendre différentes réalisations.

Aujourd'hui le Collectif des femmes immigrantes de Montréal est un organisme multi-ethnique voué à la promotion des femmes des communautés culturelles et à la défense de leurs droits. Il jouit d'une bonne représentativité au sein des milieux ethniques puisqu'il regroupe des femmes de divers âges, milieux socio-économiques, origines ethniques, nombre d'années de résidence au Québec.

Qu'est-ce qu'on fait? Le collectif offre principalement des services de formation et d'information et, ceux-là, on les offre aux groupes intervenant auprès des communautés culturelles. Il mène également des actions en concertation avec d'autres organismes immigrants et québécois, afin d'améliorer les conditions de vie et de travail des femmes.

Il participe régulièrement à des rencontres de consultation où il est appelé à représenter les intérêts des femmes des communautés culturelles du Québec. À titre d'exemple, ces derniers mois, nous avons participé à la Conférence sur la sécurité économique des Québécoises (Décisions 85), à la Conférence sur les femmes immigrantes à Ottawa en juin 1985, où 45 femmes venant des provinces canadiennes ont rencontré quatre ministres fédéraux, et au Forum des organismes non gouvernementaux à Nairobi, toujours en 1985.

Maintenant, j'aimerais attirer votre attention sur l'importance des programmes d'accès à l'égalité pour les femmes des communautés culturelles.

Les femmes des communautés culturelles sont présentes en grand nombre sur le marché du travail québécois. Ainsi, le recensement de 1981 indique que 119 315 femmes immigrées font partie de la main-d'oeuvre active, ce qui représente 9 % de

l'ensemble des travailleuses québécoises.

Pourtant, elles sont concentrées dans certains secteurs d'activité et certains emplois, alors qu'elles sont fortement sous-représentées dans d'autres. Près des trois quarts d'entre elles se retrouvent dans les activités manufacturières et les services, bien souvent aux échelons les plus bas des emplois dits féminins. Par exemple, 22 % des femmes immigrées travaillent dans l'industrie manufacturière du textile, du vêtement et de la bonneterie, comparativement à moins de 6 % des femmes québécoises nées au Canada. Il s'agit là d'un secteur où les conditions de travail sont très dures: bas salaires, cadences rapides, risques pour la santé et la sécurité, instabilité d'emploi.

Par contre, dans un secteur plus intéressant, comme celui de l'administration publique, on retrouve à peine 2 % d'entre elles. Dans la fonction publique québécoise, les femmes des communautés culturelles représentent moins de 1 % de l'effectif total.

Donc, parce qu'elles sont à la fois femmes et membres de minorités ethniques ou raciales, les femmes des communautés culturelles sont victimes d'une double discrimination qui leur confère un statut largement inférieur au sein de la société québécoise. Celles qui sont plus scolarisées se voient parfois refuser un emploi à cause de la discrimination ethnique ou raciale, ou de la non-reconnaissance de leurs acquis académiques et "expérientiels".

L'absence de mesures de soutien adéquates, telle une formation linguistique et professionnelle accessible, contribue à maintenir dans des ghettos d'emploi celles qui sont moins scolarisées et souvent allophones.

Les femmes des communautés culturelles ont particulièrement besoin de programmes d'accès à l'égalité solides pour avoir accès au marché du travail dans tous les secteurs et à tous les échelons d'emploi et ce, proportionnellement à leur nombre réel. On n'en demande pas plus. Des mesures permettant l'amélioration de la situation d'emploi des femmes en général n'entraîneront pas nécessairement des effets positifs pour les femmes des communautés culturelles si les difficultés spécifiques de celles-ci ne sont pas reconnues.

J'aimerais aussi parler des éléments de cohérence pour l'application du projet de règlement, c'est-à-dire l'obligation contractuelle et le comité aviseur annoncés dans le plan d'action gouvernemental en mai dernier. Nous sommes conscients que cela ne fait pas partie du projet de règlement comme tel, mais nous trouvons qu'il est important tout de même de présenter notre position à ce sujet.

Nous savons tous très bien que les entreprises avec plus de 100 employés ou des contrats de plus de 200 000 $, il n'y en a pas beaucoup au Québec. Donc, notre recommandation en ce qui concerne l'obligation contractuelle est la suivante:

Pour que l'obligation contractuelle constitue une mesure incitative vraiment efficace, elle doit tenir compte de la structure du marché du travail québécois composée majoritairement de petites et moyennes entreprises. Donc, l'obligation contractuelle ne doit pas toucher seulement les grandes entreprises; autrement, cela ne donnera pas grand-chose.

En ce qui concerne le comité-conseil, au Québec, 32 % des travailleuses sont syndiquées. On ne connaît pas le nombre de femmes des communautés culturelles qui sont syndiquées parce qu'il n'y a aucune statistique qui a été faite, aucune recherche, mais si on tient compte des emplois qu'elles occupent dans de petites manufactures, dans les services, etc., on peut bien supposer que les femmes des communautés culturelles syndiquées représentent bien moins que 32 %. C'est pour cela qu'on recommande que le comité-conseil soit formé comme suit: Compte tenu du fait que la majorité des femmes des communautés culturelles n'est pas syndiquée, nous recommandons la création d'un comité-conseil sur l'accès à l'égalité composé de douze membres répartis de la façon suivante: quatre personnes désignées par les organismes patronaux, quatre personnes désignées par les organismes syndicaux, quatre personnes représentant les travailleuses non syndiquées, dont deux désignées par des organismes de femmes des communautés culturelles.

Je vais terminer ma présentation en parlant de nos réactions au projet de règlement. Nous souhaitons - je pense que c'est presque inutile de le dire - qu'un projet de règlement soit adopté et ce, le plus vite possible, afin de permettre enfin que des programmes d'accès à l'égalité puissent voir le jour. Nous croyons que ce projet est bon pour la majorité des femmes du Québec mais, comme les femmes des communautés culturelles sont plus touchées par la discrimination, nous estimons que le projet de règlement dans sa forme actuelle n'améliorera pas vraiment notre situation qui est déjà défavorisée sur le marché du travail. Donc, pour augmenter l'efficacité, nous proposons les modifications suivantes.

Section I - Disposition générale. L'article 1 se lit comme suit: "Le présent règlement s'applique à toute personne qui élabore, implante ou applique un programme d'accès à l'égalité sur recommandation de la commission ou à la suite d'une ordonnance du tribunal."

Notre recommandation. Afin qu'il touche un nombre plus considérable de femmes des communautés culturelles, le

règlement devrait s'appliquer également à toute entreprise, institution ou tout établissement décidant de mettre sur pied un programme d'accès à l'égalité de sa propre initiative, à toute entreprise soumise à l'obligation contractuelle, aux ministères et organismes gouvernementaux.

Section II - Égalité dans l'emploi. "Un programme d'accès à l'égalité contient notamment les éléments suivants: 1. Les objectifs poursuivis quant à l'amélioration de la représentation des membres du groupe cible."

Notre commentaire: II n'y a pas de définition de groupe cible dans ce projet de règlement. Donc, les groupes cibles possibles devraient être clairement définis et les femmes des communautés culturelles devraient être identifiées comme constituant un groupe cible, vu la situation particulière et spécifique qu'on connaît au sein du marché du travail.

Un programme d'accès à l'égalité destiné aux femmes sans distinction n'améliorera pas beaucoup la situation d'emploi des femmes des communautés culturelles, car nous serons toujours les dernières engagées et toujours les dernières promues.

Article 8, toujours dans la même section: "Un programme peut également prévoir des mesures de soutien."

Notre commentaire est le suivant: Si l'on veut que les femmes des communautés culturelles jouissent d'un accès réel et non uniquement théorique à de nouveaux postes dans les entreprises, un programme d'accès à l'égalité doit obligatoirement prévoir des mesures de soutien.

Article 10. "L'employeur confie la responsabilité de l'implantation du programme à un employé en autorité. Celui-ci a notamment pour fonction de coordonner les mesures de mise en application et les mécanismes de contrôle du programme et de veiller au respect de l'échéancier prévu."

Notre position. Pour s'assurer la participation des employées, du syndicat et des membres des groupes cibles dans la mise en oeuvre d'un programme d'accès à l'égalité, l'employeur devrait confier la responsabilité de l'implantation du programme à un comité tripartite. Celui-ci serait composé d'une employée en autorité, d'une employée représentant les groupes victimes de discrimination et d'une employée représentant les syndicats, s'il y a lieu. (12 h 45)

J'ai terminé mon exposé, merci de votre attention.

Le Président (M. Gagnon): Merci, Mme Bizzari. M. le député de Vachon.

M. Payne: Merci, M. le Président. Je veux également remercier Mme Lopez, Mme

Bizzari et Mme Beaulieu pour un exposé qui est clair et simple. Vous avez participé aux discussions à Nairobi, vous avez été consultées dans le passé, et je pense aussi que vous avez collaboré un peu à préparer le mémoire du Conseil des communautés culturelles, Mme Lopez et Mme Beaulieu.

D'abord, quelques commentaires, et ensuite une question. La question de la présence des communautés culturelles dans la fonction publique, c'est quelque chose qui a créé beaucoup de difficultés de toutes sortes, dans un contexte où on a vécu, jusqu'à tout dernièrement, une récession assez incroyable en Occident. Et le Québec n'y a pas échappé. Là où la croissance est de moins deux pour cent annuellement, ça fait en sorte que, effectivement, c'est de plus en plus difficile, dans un certain sens, de recruter pour la fonction publique que ce l'est à l'extérieur d'un certain bassin traditionnel. Toute tentative devrait être entreprise, c'est clair! Mais, en réalité, lorsque la croissance est de moins deux pour cent, c'est plus difficile que ce ne l'était il y a même cinq ans, et je pense que tous les partis politiques le reconnaissent.

En plus, il y a aussi le fait que, souvent, on exagère le nombre de demandes que le gouvernement reçoit de l'ancien Office de recrutement et de sélection du personnel. Souvent, on voit ça dans le milieu des journaux des communautés culturelles, aussi dans les journaux anglophones, on déplore l'absence des minorités dans la fonction publique. C'est à déplorer, mais, en réalité, il ne faut pas exagérer le fait que les demandes ne sont pas excessives non plus. De plus, il y a beaucoup de représentants des membres des communautés culturelles qui ne voudraient pas, pour toutes sortes de raisons valables, se déplacer à l'extérieur de la grande région de Montréal. Or, le bassin, pour la fonction publique, c'est bien sûr la capitale nationale.

D'après votre expérience, les problèmes rencontrés par les femmes des communautés culturelles sont-ils davantage d'ordre systémique, comme, par exemple, l'intégration, l'adaptation à un nouveau contexte socio-économique ou peut-être le fruit d'une discrimination résultant directement de certaines caractéristiques visibles comme, par exemple, la couleur de la peau, ou, comme c'est souvent le cas, la difficulté à maîtriser le français? Est-ce que c'est plutôt systémique ou si c'est plutôt pour d'autres raisons subjectives?

Le Président (M. Gagnon): Mme

Beaulieu?

Mme Beaulieu (Agnès): Oui, d'accord. Je pense qu'il y a un peu des deux, évidemment. Si on regarde la situation des femmes immigrées, c'est plus facile de

parler de femmes immigrées, parce qu'à ce moment-là, on a des statistiques claires. Quand on parle des femmes des communautés culturelles, c'est plus difficile d'obtenir des statistiques claires, mais on reconnaît quand même une division assez radicale entre, d'une part, une proportion d'environ 25 % ou 26 % de femmes qui sont scolarisées et qui ont la capacité d'occuper des postes professionnels ou techniques importants et, d'autre part, un large bassin de femmes qui sont moins scolarisées, qui ont effectivement des problèmes avec la connaissance du français et qui ont parfois des problèmes de scolarité ou même d'analphabétisme.

Nous reconnaissons qu'il y a une large dichotomie, si vous voulez, entre les deux groupes. C'est très clair. D'une part, les femmes qui sont instruites, qui sont scolarisées et qui ont une capacité et, éventuellement, une expérience de travail déjà dans leur pays d'origine, il y a des problèmes qui relèvent beaucoup de la discrimination, je dirais cas par cas, du fait qu'on n'est pas intéressé à recevoir un curriculum vitae d'une femme qui est noire, même si elle est scolarisée. Je pense que c'est très clair. Il n'y a pas beaucoup d'employeurs qui oseraient dire le contraire.

D'autre part, il y a vraiment une discrimination qu'on appellerait systémique et qui est la plus importante, qui est celle contre laquelle on veut lutter le plus: c'est le fait que les femmes immigrées ont vraiment des obstacles difficiles à franchir, au-delà de la bonne volonté de certains groupes, au-delà de la bonne volonté de certains ministères. C'est un fait. Il y a des problèmes qui relèvent de la formation professionnelle; il y a des problèmes qui relèvent de la reconnaissance de leurs acquis académiques et de leur expérience; il y a des problèmes qui relèvent de la difficulté d'accès à des cours de français pour les femmes qui arrivent ici. Il y a des problèmes qui relèvent aussi, comme pour toutes les femmes, des services de garde, des horaires de travail inadéquats. On pourrait vraiment parler de deux types de discrimination sans se tromper. C'est ma réponse.

Le Président (M. Gagnon): Mme Bizzari.

Mme Bizzari: Oui, j'aimerais ajouter quelque chose que je trouve assez positif, parce qu'on a quand même la preuve qu'il est possible d'augmenter la présence des femmes provenant des communautés culturelles dans la fonction publique ou dans n'importe quel autre endroit. La preuve, c'est que lorsque le gouvernement fédéral a voulu augmenter la représentation des Canadiens français dans la fonction publique il s'est donné des objectifs et des échéanciers précis. Les Canadiens français sont alors passés de 12,25 %, qu'ils étaient en 1946, à 26,4 % en 1981, soit un pourcentage correspondant à leur importance numérique proportionnelle à la population canadienne.

Donc, pourquoi ne pourrais-je pas ajouter cela? Comme les familles nées hors du Canada représentent environ 4 % de la main-d'oeuvre totale au Québec, elles devraient peut-être représenter 4 % de la fonction publique et pas nécessairement le maigre 0,7 % de l'effectif total qu'elles représentent maintenant. Si cela s'est déjà fait, pourquoi ne pourrait-on pas le refaire ici? Même s'il y a deux sortes de problèmes, je veux dire...

Le Président (M. Gagnon): Mme Lopez, vous voulez ajouter quelque chose?

Mme Lopez (Martha): Oui, au sujet de ce que vous avez dit quant au manque de représentativité des membres des communautés culturelles dans la fonction publique. Vous avez ajouté qu'il n'y a pas beaucoup de demandes des communautés culturelles. Il serait important d'analyser pourquoi il n'y a pas beaucoup de demandes qui se font. En grande partie, je pense que c'est parce qu'il n'existe pas de mesures de soutien véritables pour les membres des communautés culturelles, afin d'avoir une meilleure préparation pour pouvoir postuler des postes comme cela. Donc, on revient à des mesures de soutien qui s'offrent aux membres des communautés culturelles et aux femmes des communautés culturelles.

M. Payne: II y a eu quelques tentatives intéressantes proposées, par exemple, dans le plan d'action adopté comme politique du gouvernement il y a maintenant quatre ou cinq ans: par exemple, l'accès à un poste en ce qui. concerne les prérequis linguistiques. On a laissé tomber les prérequis linguistiques pour faire en sorte que quelqu'un puisse montrer ses compétences linguistiques après une période de travail comme fonctionnaire, qu'il puisse, par la suite, montrer ses compétences linguistiques et, dans un premier temps, être jugé par le jury exclusivement et seulement sur ses compétences professionnelles. Ce sont les mesures que le gouvernement a préconisées jusqu'à ce moment-ci.

Mais vous, si je vous comprends bien, vous préconisez davantage les quotas avec des échéanciers précis. Qu'est-ce que ce serait exactement? On ne peut pas dire cela en deux mots mais, grosso modo, quels seraient les quotas que vous voudriez voir?

Le Président (M. Gagnon): Mme Bizzari. M. Payne: Si je vous comprends bien. Le Président (M. Gagnon): Mme

Beaulieu.

Mme Bizzari: Je ne trouve pas le mot en français.

Une voix: C'est cela, le problème.

Mme Bizzari: Les quotas, c'est le nombre réel, qu'on ait la proportion. On n'en demande pas plus ni moins, on demande la proportion, qu'on ait les 4 % ou les 5 %, qu'on soit 5 % dans la fonction publique. C'est cela, le quota qu'on demande.

M. Payne: Je comprends bien la notion de contingentement ou de quota, mais ce serait quoi, effectivement? Dès que vous décidez que vous allez avoir 5 % de la communauté culturelle portugaise, un autre 2 %, ce sont des chiffres absolus et derrière tout cela, il y a tout un débat. Je pense qu'on devrait être un peu plus précis au niveau de ce qu'on revendique; pensez-vous?

Mme Beaulieu: J'aimerais répondre à cela. Je pense qu'on n'est pas ici aujourd'hui... En tout cas, notre groupe n'a certainement pas la capacité, en termes de financement et en termes de personnel, pour calculer tous les quotas. Je pense qu'il faut être bien clair. On ne dispose pas d'un large service de recherche. Il faudrait au moins être conscient de cela. D'autre part, on ne parle pas de la communauté portugaise et on ne parle pas de la communauté grecque ou italienne. On a été très clairs au niveau de notre mémoire: on a traité ensemble, en bloc, les femmes des communautés culturelles justement pour arrêter de diviser les communautés.

On revient toujours à ce problème de définition de communauté culturelle. Je vous dirais que même le ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration lui-même a de la difficulté avec sa définition. Donc, nous ne sommes pas les premiers à avoir des difficultés là-dessus.

D'autre part, quand on dit "femmes des communautés culturelles", pour nous, la clientèle cible qu'on privilégie, ce qu'on considère comme étant le groupe cible, ce sont d'abord les femmes qui sont nées à l'extérieur du Canada et dont la langue maternelle, c'est-à-dire la première langue apprise et encore comprise, n'est pas le français ou l'anglais; de plus, ce sont les femmes des minorités visibles, même si elles sont de la deuxième génération, c'est-à-dire même si elles sont nées ici. Pour nous, c'est clair que ce sont là les groupes de femmes les plus défavorisées sur le marché du travail.

Si vous voulez des statistiques, on peut vous en fournir largement pour le prouver. Quand on parle, en tout cas, que les femmes immigrées constituent 4 % de l'ensemble de la main-d'oeuvre, c'est bien clair aussi qu'on ne demande pas que l'an prochain, il y ait 4 % de représentation des femmes des communautés culturelles dans la fonction publique. Je pense cependant que c'est possible d'améliorer la situation progressivement. Je dirais que, quand il y a des possibilités d'emploi qui sont offertes, le gouvernement ne manifeste pas nécessairement l'ouverture nécessaire aux femmes des communautés culturelles. Je citerai à titre d'exemple le Conseil des communautés culturelles, qui a été créé tout récemment: sur quinze membres nommés, il ne comporte que deux femmes issues des communautés culturelles. Je pense que c'est un bon exemple. C'est vrai qu'il y a peu de postes qui sont créés dans la fonction publique, mais quand il y en a, on ne fait certainement pas preuve d'accès à l'égalité, en tout cas. C'est un exemple, je pense, qui peut faire réfléchir.

Le Président (M. Gagnon): Merci. M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: M. le Président, j'aimerais remercier Mmes Lopez, Bizzari et Beaulieu pour avoir fait une présentation un peu unique parce que c'est un son de cloche qu'on entend rarement à l'Assemblée nationale. Il faut l'entendre plus souvent et plus fort. Sur la question des femmes immigrantes dans la fonction publique, je pense que cela prend une certaine volonté politique. Il ne faut pas dire que tous les fonctionnaires travaillent à Québec, que toutes les personnes qui travaillent dans les sociétés d'État, dans les commissions scolaires, dans tous les organismes publics et parapublics sont à Québec. Il y en a un bon nombre qui sont à Montréal, et je pense que ce serait possible, si on a un programme spécifique d'engager des femmes immigrantes dans ces organismes publics et parapublics. Je pense qu'il y a une certaine volonté politique qui manquait jusqu'à ce moment-ci, au moins.

En ce qui concerne les programmes d'intégration des femmes, supposons qu'une femme immigrante vienne au Québec aujourd'hui, est-ce qu'il y a une gamme de programmes d'intégration au niveau de la langue, au niveau du travail, au niveau du soutien? Je pense que ce qu'il faut faire tout de suite, c'est d'avoir des programmes pour intégrer ces femmes dans la société québécoise pour leur permettre de prendre leur place a tous les niveaux.

Le Président (M. Gagnon): Oui?

Mme Beaulieu: Je peux répondre encore.

Le Président (M. Gagnon): Mme

Beaulieu.

Mme Beaulieu: Oui. Il y a évidemment quelques programmes qui sont prévus. Je pense, entre autres, aux COFI qui sont les centres d'orientation et de formation pour les immigrants. Ce sont en gros des cours de langue d'une durée de 30 semaines qui sont offerts aux nouveaux arrivants. Je précise cependant que ce sont des nouveaux arrivants qui se destinent au marché du travail, ce qui limite parfois des femmes qui, au départ, ont de jeunes enfants donc, ne se destinaient pas nécessairement à cela à leur arrivée. Par la suite, elles ont des difficultés à entrer dans ces programmes. Donc, dès le départ, les femmes ont des problèmes particuliers. (13 heures)

On n'entrera pas dans le détail de la Loi sur l'immigration, je pense que ce n'est pas l'endroit, mais il y a quand même des statuts différents qui sont donnés au sens de la Loi sur l'immigration et les femmes plus souvent que les hommes sont admises dans la catégorie que l'on appelle parrainée. Donc, les gens qui font partie de cette catégorie ne reçoivent aucune allocation de formation pour aller suivre des cours de français dans les COFI. C'est donc difficile pour quelqu'un qui arrive au Québec, ne recevant aucune allocation, de vivre de l'air du temps et d'aller suivre des cours de français. Vous reconnaîtrez que c'est un handicap qui est assez sérieux.

Il existe des programmes, mais cela ne touche pas plus - c'est un gros maximum -de 15 % des femmes qui sont admises au Québec qui passent par les COFI à un moment ou à un autre. Je précise que les statistiques montrent que parmi les femmes qui ont été admises au Québec depuis 1968, il y en a quand même 68 % qui ne parlaient pas français à leur arrivée, ce qui est quand même énorme, vous en conviendrez. Il y en a aussi 26 % qui n'ont aucune scolarité. C'est quand même énorme aussi, l'analphabétisme est assez présent, comme vous pouvez le constater, surtout dans certaines communautés. On n'ira pas dans les détails là-dessus.

Le problème, c'est que cela ne s'est pas tellement amélioré par la suite. On se rend compte que les mesures ne sont sans doute pas adéquates, puisque le recensement de 1981 indiquait que 8,6 % des femmes vivant au Québec en ce moment - donc en 1981 - qui étaient nées à l'étranger ne parlaient pas le français. Ce qui est plus que le double de la population masculine dans les mêmes circonstances. Donc, on peut se demander si les femmes vivent des handicaps particuliers quant à l'accès aux cours de français ou si elles travaillent dans des ghettos d'emplois, dans des enclaves ethniques qui sont vraiment les positions les plus basses du marché du travail, qui sont des emplois féminins mais féminins et ethniques, donc les postes les plus bas: les manufactures de textile, de vêtement, la bonneterie. Je n'irai pas dans les détails là-dessus, je pense que vous connaissez, en gros, quelles sont leurs conditions de travail; ce ne sont certainement pas des conditions de travail qui favorisent l'apprentissage du français, qui favorisent l'accès à de nouveaux métiers. Je pense qu'il y a peu de mesures concrètes qui sont vraiment offertes aux femmes dans ce sens.

La formation professionnelle est difficile, elle est difficilement accessible aux femmes qui viennent de l'étranger parce que les prérequis ne correspondent pas nécessairement aux prérequis qu'elles ont. Je sais que la formation professionnelle est surtout de la compétence fédérale, quant à l'accès aux cours offerts par le Centre de main-d'oeuvre mais, quand même, il faut reconnaître qu'il y a très peu de candidatures qui sont acceptées. Les femmes n'ont pas nécessairement les prérequis linguistiques, n'ont pas les équivalences de diplômes qui leur permettent d'avoir accès à ces cours indispensables. Je termine là-dessus.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Marquette.

M. Dauphin: Merci, M. le Président. J'entends souvent l'argument, notamment de la part du ministre ou de son adjoint - je crois que le député de Vachon est l'adjoint du ministre - que les membres des communautés culturelles, autant de sexe féminin que masculin, ne sont pas intéressés à venir vivre à Québec. Je me demande - c'est la question que je vous pose - si le gouvernement du Québec déploie tous ses efforts pour publiciser les offres d'emplois dans les secteurs public et parapublic. Est-ce qu'il utilise les médias ethniques pour publiciser les offres d'emplois? On sait que le ministère est situé à Montréal, et pour cause. Ce serait intéressant de savoir, dans le ministère même des Communautés culturelles, quel est le pourcentage des membres des communautés culturelles...

Mme Beaulieu: 7 %.

M. Dauphin: ...7 %. Malheureusement, le député de Vachon est absent. J'aimerais avoir vos commentaires là-dessus. On parle de volonté politique, est-ce que le gouvernement a effectivement la volonté politique? On se souvient très bien de son plan d'action en 1981. Nous sommes au courant des résultats, cinq ans plus tard. Le CIPACC, dont certains membres sont ici, en a fait état dans ses deux rapports. Le même plan d'action disait qu'en 1985 il faudrait prendre des mesures draconiennes si jamais la situa-

tion ne s'améliorait pas. Il y a des membres ministériels ici, les mesures draconiennes, ce sera quoi? J'aimerais avoir une réponse à ma première question.

Le Président (M. Gagnon): Mme Bizzari.

Mme Bizzari: Quant aux médias, la réponse est que, au cours des deux dernières années, il y a eu trois avis dans le journal ethnique de postes dans la fonction publique quand il y en a eu 200 dans les journaux français ou anglais. Cela vous donne quand même une idée.

Une voix: ...

Mme Bizzari: C'est cela. M. Dauphin: D'accord.

Le Président (M. Gagnon): Cela va, M. le député de Marquette? Mme Beaulieu.

Mme Beaulieu: Juste une petite chose par rapport à la question. Un poste a été créé au ministère des Communautés culturelles, celui d'une responsable de la condition féminine émigrée, et c'est malheureusement une femme d'origine québécoise qui a été nommée.

M. Dauphin: ...communautés culturelles avait été accordé également à des Québécois de vieille souche. D'accord.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: Merci, M. le Président. Je voudrais demander à Mme Bizzari et à ses collègues si elles seraient d'accord avec l'idée qui a été avancée plus tôt ce matin par la Coalition des femmes pour l'accès à l'égalité, de créer un fonds d'aide financière afin de payer les frais des femmes et des groupes de femmes voulant porter plainte pour discrimination en emploi. En discussion, tout à l'heure, je pense qu'on a consenti à élargir cela à toute personne, tout groupe qui voudrait porter plainte pour discrimination en emploi. Ce serait un instrument... Je me rends compte, évidemment, que ce fonds d'aide ne règle pas les problèmes fondamentaux, mais est-ce que cela ne pourrait pas être un outil utile dans les cas où vous avez vraiment mis la main sur un cas patent de discrimination et où il vous manque le financement pour intenter des poursuites?

Mme Bizzari: Oui, en effet, ce serait quelque chose d'utile. Ce n'est pas l'Amérique, mais cela nous aiderait. Comme les femmes ont...

M. de Bellefeuille: On dit: Ce n'est pas le Pérou.

Mme Bizzari: Moi, je viens d'Italie et on disait: Ce n'est pas l'Amérique. Nous sommes d'accord sur les principes de base que la coalition a présentés et sur ce point, où on demande un fonds d'aide, parce que cela nous aiderait, même s'il n'est pas spécifié que le fonds d'aide est pour les femmes. Mais, comme elles l'ont déjà dit, cela sera majoritairement pour nous puisque nous serons les plaidantes. Nous sommes d'accord, on les appuie fortement.

M. de Bellefeuille: Merci.

Le Président (M. Gagnon): M. le député d'iberville.

M. Beauséjour: En page 4, quand vous complétez le thème: Importance des programmes d'accès à l'égalité pour les femmes des communautés culturelles... J'ai vu Mme Bizzari qui a semblé y mettre beaucoup d'importance; je dirais même qu'on sentait dans sa respiration que cela semblait important. Les femmes des communautés culturelles ont particulièrement besoin de solides programmes d'accès à l'égalité. Est-ce que vous avez certaines idées quant à ces programmes qui n'ont peut-être pas été mis en place et qui, d'après vous, devraient être mis au profit des femmes immigrées?

Mme Bizzarri: C'est ce qu'on a proposé ici. C'est la même réponse que ce qu'on a mis dans notre mémoire. C'est ce qu'on souhaite.

Mme Beaulieu: ...d'élargir non seulement aux entreprises qui le font par voie obligatoire, c'est-à-dire par un jugement du tribunal ou sur recommandation de la commission, mais également au gouvernement lui-même qui ne se soustrairait pas à un projet de règlement qu'il présente lui-même. Nous recommandons aussi qu'un jour - enfin, nous le souhaitons - l'obligation contractuelle soit enfin adoptée et que cela soit élargi également à ces entreprises, pour que ce soit vraiment un moyen d'incitation important pour les entreprises. Nous souhaitons donc l'élargir, comme vous l'avez vu, aux entreprises sur une base volontaire, les entreprises qui veulent mettre sur pied un véritable programme d'accès à l'égalité, c'est-à-dire un programme avec des dents, un programme qui prévoit des objectifs, des moyens de contrôle et également des mesures de soutien. Que des programmes de ce type-là soient adoptés par les entreprises et non pas uniquement de petits programmes qui font leur affaire pour soigner leur image de marque, c'est ce que nous souhaitons, c'est ce qu'on entend par des programmes

plus solides.

Le Président (M. Gagnon): Merci. M. le député de Saint-Jacques.

M. Viau: M. le Président, je tiens, d'une part, à remercier votre collectif. Je pense que c'est extrêmement intéressant de voir qu'on a une préoccupation particulière pour les femmes immigrantes qui vivent des conditions de travail, il faut le dire, souvent extrêmement difficiles, en bas d'une moyenne acceptable. Je pense qu'un programme d'accès à l'égalité, selon vos propositions, améliorera d'une certaine façon la qualité de vie générale des femmes immigrantes. Ce que j'ai trouvé de particulier dans votre intervention, c'est que, lorsque vous parlez des programmes d'accès à l'égalité, vous faites une distinction entre les femmes de communautés culturelles ou ethniques nées au Canada et celles qui sont nées a l'extérieur du pays. On peut comprendre par là des femmes de deuxième génération qui sont, en moyenne, beaucoup plus jeunes, j'imagine. Est-ce que vous voyez des problèmes particuliers pour ces femmes de la deuxième génération, ou pour des femmes immigrées plus jeunes, à trouver des emplois ou à percer sur le marché du travail à l'extérieur des emplois traditionnels?

Le Président (M. Gagnon): Mme Beaulieu.

Mme Beaulieu: Oui. Je pense qu'on en a parlé en parlant des femmes des minorités visibles. Des femmes de la deuxième génération, c'est assez clair, on en a parlé au début lorsqu'on a dit qu'elles sont considérées toute leur vie comme immigrantes et que leurs petites-filles se feront encore demander: D'où viens-tu? Tu viens de Notre-Dame-Grâce? Non. Alors, je pense que c'est assez clair à ce niveau-là. Il y a, évidemment, je crois, des problèmes particuliers qu'on pourrait peut-être qualifier d'ordre culturel, d'accès au système d'enseignement, etc. Mais nous avons choisi au sein de notre groupe de traiter de ce qu'on trouve le plus urgent, soit des femmes nées à l'extérieur du Canada et qui sont les femmes des minorités visibles. Pour nous, c'est vraiment la priorité, même si nous sommes conscientes que les femmes de la deuxième génération, que ce soient les femmes d'origine italienne ou portugaise, peuvent avoir des handicaps particuliers sur le marché du travail.

M. Viau: Une autre petite question qui me paraît importante. On a à déterminer un critère d'employabilité pour tout individu en ce qui a trait à son accès potentiel au marché du travail. Est-ce que vous pourriez nous donner des statistiques sur le niveau d'employabilité des femmes nées au Canada? Est-ce que, pour vous, un programme d'accès à l'égalité pourrait facilement être combiné avec un programme de formation particulier pour les femmes pour augmenter leur niveau d'employabilité?

Mme Beaulieu: Comme je l'ai dit au début, il y a quand même une proportion d'une femme immigrée sur quatre qui a une formation universitaire ou de niveau collégial. Donc, je pense que ce sont des femmes qui ont un bon niveau d'employabilité dès le départ. On parle d'une femme sur quatre qui est compétente, qui n'a pas de problèmes particuliers d'accès au marché du travail, sinon la discrimination qu'elle doit vivre. Je pense qu'à ce niveau ce ne sont pas des femmes qui auraient beaucoup de difficulté à s'insérer dans des postes décents. Pour les autres femmes, je crois que des mesures de soutien, si on peut parler en ces termes, ce serait certainement, un accès plus large aux programmes de recyclage. J'ai parlé tout à l'heure des difficultés qu'elles avaient quant à l'accès à la formation professionnelle. Cela pourrait être aussi des cours de français en milieu de travail. Il y a eu des expériences qui ont été faites. Je peux vous dire que cela a été fait à Toronto, à Vancouver, également, dans des usines de textile, avec de très bons résultats, autant pour les employées elles-mêmes que pour l'employeur qui voyait à améliorer le rendement et la capacité de promotion de ses employées. Tout le monde s'en portait beaucoup mieux. Donc, on ne demande pas la lune en demandant des mesures de soutien.

C'est aussi pour cela qu'on dit qu'un programme d'accès à l'égalité doit, obligatoirement, comporter des mesures de soutien. Si on laisse cela à la bonne volonté de l'employeur, nous craignons qu'il n'y ait jamais de mesures de soutien et que, par la suite, l'employeur dise: Eh bien, nous n'avons pas de femmes compétentes pour ces postes, parce qu'il ne fait lui-même aucun effort pour aller chercher cette compétence qui existe et qui ne demande qu'à s'exprimer avec un certain soutien. Nous pensons que ce n'est pas normal que les femmes nées à l'étranger qui sont ici, parfois, depuis 20 ou 30 ans soient encore, dans une proportion d'une sur quatre, dans les entreprises de textile, de vêtement, de bonneterie. Nous pensons que ce n'est pas normal que les femmes qui travaillent le fassent dans une proportion d'à peu près trois sur quatre dans ces entreprises. Nous pensons qu'il y a beaucoup de phénomènes comme ceux-là qui ne sont pas normaux. Il y a vraiment du travail à faire et c'est possible de le faire. Je ne sais pas si cela répond à votre question, mais c'est notre position.

Le Président (M. Gagnon): Alors, merci

à Mmes Lopez, Bizzari et Beaulieu, ainsi qu'au Collectif des femmes immigrantes de Montréal. Je vous donne rendez-vous à 15 heures précises, alors que nous entendrons le Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail Inc. Les travaux sont suspendus jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 h 15)

(Reprise à 15 h 3)

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission des institutions se réunit afin de procéder à une consultation générale sur le projet de règlement sur les programmes d'accès à l'égalité.

Lorsque nous avons suspendu nos travaux nous avions invité le groupe Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail Inc. Je demanderais à Mme Berthiaume et à Mme Leduc - c'est cela?

Une voix: Oui.

Le Président (M. Gagnon): Je vous laisse la parole en vous rappelant que vous avez 55 minutes, soit environ 20 minutes pour nous livrer votre message et 35 minutes de discussion avec les membres de la commission. Bienvenue.

CIAFT

Mme Leduc: M. le Président, on constate que la qualité est quand même la mais on trouve cela un peu bizarre de s'adresser à des sièges vides. Pardon?

Une voix: ...

Mme Leduc: J'ai dit: La qualité est là, mais il me semble qu'il y a petit défaut de quantité à quelque part dans la formation de la commission.

Le Président (M. Gagnon): Je dois vous dire que vous... On peut attendre un peu.

M. Blouin: M. le Président.

Le Président (M. Gagnon): J'ai constaté le quorum et effectivement vous avez raison, Madame, il y a un manque.

M. Blouin: M. le Président, peut-être à titre d'information, ce que je pourrais dire à nos invités c'est que le député de D'Arcy McGee a eu ce matin la même méprise que celle que vous faites maintenant puisque j'écoutais dans mon bureau le début des échanges. Je suis descendu par la suite. Il est très plausible et très probable que la plupart des membres sont à l'écoute de la commission actuellement.

Le Président (M. Gagnon): Je dois tout simplement vous dire que dans la minute qui suit probablement qu'il y a d'autres députés qui vont arriver. Nous allons quand même commencer immédiatement. Le député de Rousseau a dit que des fois on écoutait de notre bureau. Je pense que cela doit être le cas, mais très, très bientôt les membres de cette commission vont être au complet ici.

Mme Leduc: D'accord. M. le Président, MM. les députés, s'il existe encore chez certains des doutes quant à l'existence de la discrimination systémique, je crois que ce court préliminaire est une preuve éclatante. Je veux dire que les résultats de la discrimination systémique se font sentir un peu partout puisque, actuellement, nous sommes des deux côtés de la barrière en tant que femmes et on constate que de ce côté il n'y en a pas beaucoup.

Je me présente. Je suis Lyse Leduc, coordonnatrice au Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail. Je suis impliquée dans le dossier de l'accès à l'égalité. Je l'ai défendu lors de Décisions 85, la Conférence nationale sur la situation économique des femmes au Québec.

Le deuxième porte-parole est Mme Madeleine Berthiaume, qui est membre du conseil d'administration du CIAFT à titre de trésorière et porteuse du dossier accès à l'égalité pour le CIAFT. Mme Berthiaume est conseillère en formation au projet Travail non traditionnel qui vise l'intégration des femmes dans des emplois non traditionnels.

Notre organisme est un organisme à but non lucratif dont les principaux objectifs sont de faire des interventions dans le but de favoriser l'accès des femmes au travail, de créer un mécanisme de concertation entre les groupes de femmes préoccupées par le retour au travail, de faciliter le processus de référence d'information et de consultation entre les groupes de femmes, de permettre le développement d'expertises reliées aux programmes de retour au travail et de faire les recommandations qui s'imposent auprès des différents paliers gouvernementaux afin d'amener les changements ou les réajustements politiques qui répondent davantage aux besoins des femmes en matière de formation, de recyclage ou d'accès au travail.

Notre organisme a deux genres de membres. Nous avons des membres individuels et des groupes. Dans les membres individuels, ce sont des intervenantes qui sont en contact quotidien et direct avec des femmes qui désirent accéder au monde du travail, c'est-à-dire que ces femmes désirent passer de la population active potentielle à la population active tout court. Dans la tranche de la population active, elles veulent passer de la tranche des chômeuses à la

tranche des travailleuses. À travers nos membres individuels, nous sommes en contact annuellement avec environ 10 000 femmes qui ont des problèmes à accéder au marché du travail.

Ceci nous a permis de développer une bonne expertise quant aux besoins des femmes désirant accéder au marché du travail ainsi qu'une connaissance approfondie des difficultés et des barrières qu'elles rencontrent souvent. Cette connaissance nous a amenées à considérer les programmes d'accès à l'égalité comme un dossier prioritaire pour notre association et ce, depuis les tout débuts de sa fondation en janvier 1983. Nos interventions dans ce dossier se sont situées tant dans le cadre de la commission Beaudry que dans celui de la Conférence nationale sur la situation économique des femmes au Québec, tant dans le cadre de la conférence sur l'électronique et l'informatique que dans celui de la rencontre nationale de la concertation sur l'éducation des adultes. Nous croyons donc en l'absolue nécessité des programmes d'accès à l'égalité, que ce soit au niveau de la formation ou au niveau de l'emploi si nous ne voulons pas que l'autonomie financière des femmes par l'accès au travail ne soit encore une utopie en l'an 2000.

Un des moyens privilégiés pour permettre l'implantation ou l'instauration des programmes d'accès à l'égalité est pour nous l'obligation contractuelle. Nous sommes conscientes que l'obligation contractuelle ne fait pas partie de ce règlement. Elle ne faisait pas partie du contexte au moment de la dernière version de ce projet de règlement qui, rappelons-le - l'avant-dernière, avant celle de juin 1985 - date d'octobre 1983 et encore moins en décembre 1982, lors de la présentation de la loi 86.

Cependant, depuis, il y a eu Décisions 85. À ce moment, le présent gouvernement, par la bouche de son premier ministre actuel, M. Pierre-Marc Johnson, s'est engagé à instaurer l'obligation contractuelle. Par cette mesure, rappelons-le, le gouvernement oblige les entreprises qui auront des contrats gouvernementaux à mettre sur pied des programmes d'accès à l'égalité. Rappelons aussi que c'est une mesure semblable qui a permis les gains en emploi pour les femmes et les minorités aux États-Unis et qu'elle est sensiblement bien acceptée par les employeurs chez nos voisins du Sud - comme on a l'habitude de dire - d'où l'importance que nous accordons à sa mise en vigueur de façon adéquate. C'est pourquoi nous avons cherché un moyen rapide et efficace de soumettre au présent règlement les programmes d'accès à l'égalité qui seront mis sur pied dans le cadre de l'obligation contractuelle.

Nous croyons qu'un amendement ou des modifications à la Loi sur l'administration financière, qui détermine les conditions nécessaires afin qu'une entreprise puisse contracter avec le gouvernement, pourraient être ce moyen.

Quant aux critères qui ont été définis à Décisions 85, soit des contrats de 200 000 $ et des entreprises de 200 employés et plus, nous les croyons élevés. Et les premières estimations qui nous sont parvenues nous démontrent qu'avec ces critères et ces barèmes il y aurait à peu près une cinquantaine d'entreprises de touchées au Québec. Cela nous semble peu. Nous préférerions que ces critères soient un peu diminués; disons, des contrats de 100 000 $ et des entreprises de 100 employés, ce qui permettrait peut-être de toucher plus d'entreprises au Québec.

Cependant, ce qui est important pour nous, c'est que les modalités d'application de l'obligation contractuelle se retrouvent quelque part. Nous attendons des décisions concrètes en ce sens pour la deuxième tranche de Décisions 85 qui se tiendra en décembre prochain.

Quant au comité aviseur, autre mesure annoncée à Décisions 85, ayant très peu d'information sur le mécanisme de sélection des participantes et des participants, nous ne pouvons que répéter que nous souhaitons y retrouver quatre femmes représentant les travailleuses non syndiquées.

Mme Berthiaume vous fera part de nos représentations sur chacun des articles du projet de règlement.

Le Président (M. Gagnon): Mme

Berthiaume.

Mme Berthiaume (Madeleine); J'aimerais d'abord dire à cette commission que, dans l'ensemble, ce projet de règlement satisfait nos revendications et nos critères d'un véritable programme d'accès à l'égalité. Pour cette raison, nous ne pourrions tolérer qu'il ne soit amputé en aucune façon à la suite de pressions d'autres groupes socio-économiques. En fait, ce sont des ajouts que nous voudrions voir apporter au projet de règlement et que nous allons justifier en repassant chacun des articles.

Pour ce qui est de l'article 1 de la disposition générale, vous remarquerez que la portée de cet article a été fort restreinte par rapport aux projets de règlement précédant juin 1985. Comme on nous l'avait annoncé a Décisions 85, les programmes volontaires des entreprises échappent au présent règlement. Nous avons accepté cette situation, mais nous insistons pour que ce projet de règlement s'applique dans le cas des programmes volontaires des institutions publiques, du gouvernement et aussi dans le cas de l'obligation contractuelle.

Comme l'a mentionné le Conseil du

statut de la femme dans son mémoire, cet article est le plus important du règlement du fait qu'il fixe la portée des articles suivants. Nous considérons que le ministère de la Justice devrait absolument le revoir.

Par ailleurs, même si cet article libère les entreprises du contrôle a priori de la Commission des droits de la personne, nous croyons qu'elles auraient avantage à adopter des programmes volontaires qui soient conformes à ce règlement si elles veulent éviter que la commission n'exige des modalités par la suite.

L'article 2 porte sur les éléments essentiels d'un programme d'accès à l'égalité. Cet article correspond entièrement aux attentes du CIAFT. Les quatre points qu'on y retrouve sont les quatre conditions prioritaires pour qu'on puisse parler d'un véritable programme d'accès à l'égalité. Nous sommes satisfaites que les pressions faites par la coalition des groupes de femmes et les pressions aussi faites lors de Décisions 85 aient porté fruits à cet égard. Nous recommandons donc que cet article soit adopté tel que proposé.

L'article 3 porte sur les objectifs numériques. Nous espérons qu'il est clair pour tous que les objectifs numériques sont fixés par l'employeur lui-même et non pas, comme certains le pensent encore aujourd'hui, qu'il s'agit de quotas imposés de l'extérieur. Cette façon, à notre avis, de procéder respecte entièrement la culture interne de l'entreprise. Nous souhaitons donc que l'article 3 soit adopté tel quel.

L'article 4 porte sur l'analyse des effectifs. Le CIAFT est entièrement d'accord avec une telle analyse qui démontre une vue réelle de la répartition des emplois à l'intérieur d'une entreprise donnée. Nous souhaitons que cet article soit adopté dans sa forme actuelle.

À l'article 5, on parle de l'analyse de disponibilité. Nous sommes tout à fait favorables à une analyse de disponibilité qui permette d'identifier le potentiel des femmes à l'intérieur de l'entreprise et, finalement, de mieux utiliser leur compétence. Rappelons qu'une meilleure utilisation de la main-d'oeuvre est un facteur d'accroissement de la productivité. (15 h 15)

Quant à une analyse de disponibilité à l'extérieur de l'entreprise, nous croyons, pour éviter des frais à l'entreprise, que le gouvernement devrait l'assumer. Par exemple, on pourrait utiliser le Bureau de la statistique du Québec à cet effet.

Le CIAFT recommande donc qu'un alinéa soit ajouté à l'article 5 précisant que le gouvernement du Québec fournira les informations relatives à la main-d'oeuvre disponible sur le marché du travail.

À l'article 6, le CIAFT se réjouit de trouver une définition juste de la discrimina- tion sytémique. Nous recommandons que l'article 6 soit adopté tel que formulé.

L'article 7 est un article très important qui permet de voir une distinction claire entre les mesures d'égalité des chances et les mesures de redressement. Notre regroupement recommande aussi l'adoption de l'article 7.

À l'article 8, il est prévu qu'un programme peut comprendre des mesures de soutien. Comme groupe travaillant avec des femmes intégrant le marché du travail, nous considérons que cet article est capital et nous espérons que le législateur a véritablement l'intention d'encourager ces mesures. Le CIAFT recommande donc l'adoption de l'article 8.

À l'article 9, qui porte sur l'information qui est véhiculée pour les employé(e)s au sujet des mesures appliquées à l'intérieur de l'entreprise, tel que le recommande le Conseil du statut de la femme, nous recommandons aussi que non seulement les employé(e)s soient informé(e)s des mesures adoptées par l'entreprise, mais également de l'ensemble des mesures de l'article 2 de ce présent règlement. L'expérience américaine a prouvé que plus les employés sont impliqués, plus c'est rentable pour la gestion de l'entreprise.

À l'article 10, on parle de la responsabilité de la personne en autorité à l'intérieur de l'entreprise concernant les programmes d'accès à l'égalité. Nous sommes d'accord avec le contenu de cet article, mais nous souhaiterions y voir ajouter un alinéa précisant également la nécessité d'un comité tripartite qui verrait à assister l'employé en autorité dans la mise en oeuvre des programmes d'accès à l'égalité. Ce comité serait composé d'un représentant de la partie syndicale, de la partie patronale et des groupes cibles.

L'article 11 concerne le rapport annuel qui doit être déposé lors des programmes d'accès à l'égalité. Le CIAFT recommande l'adoption de cet article tel que formulé en y ajoutant l'obligation pour l'employeur d'y inclure des données annuelles sur les taux d'activité de leur main-d'oeuvre par sexe, par catégorie professionnelle, quartile salarial et échelle salariale. Ces informations permettraient à la Commission des droits de la personne d'évaluer s'il y a vraiment des pratiques discriminatoires et cela pourrait se faire à l'aide du formulaire unique.

Un article supplémentaire serait donc nécessaire précisant que la Commission des droits de la personne, en collaboration avec le Bureau de la statistique du Québec, est responsable de la collecte standardisée de ces données, leur compilation, leur analyse, et du dépôt annuel du rapport à l'Assemblée nationale.

Pour la section III concernant les articles 12 à 16 qui ont trait au monde de

l'éducation, le CIAFT appuie l'adoption de ces articles. Il n'est pas suffisant de vouloir changer les règles du jeu du marché du travail. Il faut aussi changer celles du monde scolaire où la formation professionnelle, entre autres, reste encore très sexualisée. Les cinq articles de cette section démontrent une volonté de voir modifier ces réalités et le CIAFT s'en réjouit. D'ailleurs, je pense que des changements importants et significatifs à ce niveau-là pourraient peut-être empêcher qu'on se débatte autour de programmes d'accès à l'égalité.

Mme Leduc: Nous remercions les membres de cette commission de l'intérêt soutenu qu'ils et elles ont accordé à notre présentation. Nous les remercions aussi surtout du rapport qu'ils et elles présenteront au gouvernement car, selon l'assurance que nous avons reçue de représentants tant du parti au pouvoir que de l'Opposition, il existe une réelle volonté politique d'adopter le présent règlement. Donc, ce rapport et ses conclusions ne pourront qu'être en conformité avec nos demandes justes et équitables.

Le CIAFT insiste surtout sur l'urgence d'adopter ce règlement avant les prochaines élections générales au Québec. Si les femmes ont été patientes jusqu'ici, il ne faut pas oublier que la patience est un bien maigre menu qui ne remplit pas les assiettes.

Nous souhaitons que le gouvernement fasse la démonstration de sa réelle volonté quant à la mise en oeuvre des programmes d'accès à l'égalité en tant qu'employeur - là, je vais rejoindre M. Marx - autant que législateur. Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Gagnon): Merci, Mme Leduc. M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: Merci, M. le Président. Je remercie Mme Leduc et Mme Berthiaume d'être venues présenter ce mémoire qui est fort intéressant, surtout en ce qui touche l'obligation contractuelle.

Il ne faut pas oublier qu'il y a des compagnies américaines qui ont des filiales au Québec. Quand les Québécois achètent de ces compagnies aux États-Unis, elles ont un programme d'accès à l'égalité. Quand ils achètent de ces compagnies au Québec, ils n'ont pas de programme d'accès à l'égalité en vigueur. Je pense que cela démontre qu'il y a un peu d'inégalité d'un côté et de l'autre de la frontière.

Je trouve intéressante l'obligation contractuelle parce que nous avons l'expérience américaine qui peut être utile pour la mise en oeuvre de tels programmes, ici au Québec. J'ai deux questions sur ce point. Le gouvernement peut-il exiger que les compagnies avec lesquelles il fait affaires aient des programmes d'accès à l'égalité, alors que, en même temps, le gouvernement n'a pas ces programmes d'accès à l'égalité en vigueur dans ses propres institutions? Je vois mal que le ministère de la Justice demande à la compagnie XYZ d'instaurer un programme d'accès à l'égalité pour avoir un contrat de 100 000 $, alors qu'il n'y a aucun programme d'accès à l'égalité au ministère de la Justice. Ce serait une injustice. Est-ce que vous êtes d'accord avec...

Mme Berthiaume: C'est pour ça qu'on demande qu'il y ait aussi, à l'intérieur du gouvernement, des programmes d'accès à l'égalité.

M. Marx: Je pense que c'est un des problèmes aux États-Unis, ils demandent aux compagnies d'instaurer des programmes qu'ils n'ont pas.

Mme Berthiaume: Il y a deux mesures.

M. Marx: Mais, quand on parle du gouvernement, de l'obligation contractuelle, le "contract compliance", est-ce que vous voulez dire juste les ministères, les organismes d'État ou si on peut inclure les communautés urbaines, les administrations municipales, les corps de police, les commissions scolaires, les centres hospitaliers? Au niveau fédéral, le gouvernement n'a pas la juridiction sur les institutions locales; l'Assemblée nationale a juridiction sur ses institutions locales. Quand on parle de l'obligation contractuelle, est-ce qu'on veut parler seulement du gouvernement et de ses ministères ou si on veut élargir cette idée pour couvrir aussi les hôpitaux, les sociétés d'État et ainsi de suite? Pourquoi laisser échapper les sociétés d'État qui font souvent le commerce, comme la Société des alcools du Québec, et exiger que la compagnie qui produit le vin ait un programme d'accès à l'égalité?

Mme Leduc: À votre première question, nous sommes d'accord. Nous disons, à la page 7 de notre mémoire, que nous acceptons que les programmes volontaires ne soient pas soumis au présent règlement, à part les programmes volontaires en ce qui a trait au gouvernement et aux institutions publiques et l'obligation contractuelle. Je pense que cela répond. Nous pensons que le gouvernement doit, en premier lieu, les instaurer et soumettre ses propres programmes d'accès à l'égalité au projet de règlement qui sera adopté ici.

Maintenant, pour l'obligation contractuelle, ce qui est défini, c'est toute entreprise contractant avec le gouvernement. Y aurait-il lieu d'élargir cela? Évidemment, pour nous, plus il y aura d'entreprises qui seront touchées, mieux ce sera. Cette définition comprend-elle, comme vous l'avez dit, les commissions scolaires et les

hôpitaux? Je pense que cela restera à définir lors de la mise en oeuvre de l'obligation contractuelle.

M. Marx: Parce que, entre le ministère de l'Éducation et une commission scolaire qui donne un contrat, je ne vois pas beaucoup de différence, l'argent vient de la même poche. Je ne vois pourquoi l'une devrait y échapper et l'autre non. C'est à penser, à revoir...

Mme Leduc: Oui, à définir.

M. Marx: ...à définir. Ma deuxième question traite, en ce qui concerne l'article 3, des quotas, des pourcentages. J'ai posé des questions ce matin - je n'ai pas pris position - parce qu'elles étaient soulevées dans le rapport Abella et dans d'autres études. Maintenant, j'aimerais savoir comment vous voyez le problème sous son aspect assez pratique. Si on prend la Sûreté du Québec, on voit qu'il y a moins de 1 % de femmes dans ce corps policier, ce n'est pas énorme, quoique dans les cégeps, en techniques policières, il y en a peut-être 25 %, 30 % et même 40 % qui sont là ou qui font aussi leurs études à l'Institut de police de Nicolet. Si on prend un autre corps de police, la police fédérale, si vous voulez, la Gendarmerie royale du Canada, qui avait déjà des programmes pour intégrer plus de femmes dans son service, il a environ 3,5 % de femmes policiers. Supposons que le gouvernement décide d'avoir un programme d'accès à l'égalité pour les femmes dans la Sûreté du Québec, en vertu de l'article 3, qu'est-ce qu'on va inclure comme quotas? Que va-t-on inclure comme... Les objectifs sont exprimés en nombre et en pourcentage. Comment va-t-on exprimer cela en nombre et en pourcentage pour la Sûreté du Québec? Est-ce que ce serait 3 %, 3,5 %, 10 %, 15 % ou 20 %?

Mme Berthiaume: Ce n'est pas comme cela qu'on voit cela. On a bien dit que l'objectif doit être établi par l'entreprise, l'employeur ou l'institution en question. D'accord?

M. Marx: Donc, c'est la Sûreté du Québec.

Une voix: Avec un comité tripartite.

Mme Berthiaume: Oui, c'est cela. D'ailleurs, le comité tripartite pourrait aussi ajouter à ce niveau-là.

M. Marx: Vous dites que ce sera au gouvernement ou à la Sûreté du Québec.

Mme Berthiaume: Cela dépend, c'est l'entreprise elle-même.

M. Marx: Ici, l'entreprise, c'est la Sûreté du Québec.

Mme Berthiaume: Ah! Alors, c'est la Sûreté du Québec.

Une voix: Mais...

Mme Berthiaume: Mais avec le comité tripartite.

Mme Leduc: Vous permettez? M. Marx: Oui.

Mme Leduc: Quand on parle de l'implantation des programmes d'accès à l'égalité, je pense que, dans le règlement, on dit! Il y aura un ou une employée en autorité qui, à l'intérieur - à ce moment-là, vous me diriez de la Sûreté du Québec - de l'entreprise ou de l'organisme, devra s'occuper de l'implantation de ces programmes-là. Dans notre mémoire nous recommandons qu'en plus de cela il y ait un comité tripartite qui puisse conseiller cet employé-là, justement, pour établir les mécanismes qui seront à déterminer pour cette entreprise. Il n'y a pas de règles générales. C'est traité à la pièce pour chaque entreprise. D'accord?

M. Marx: D'accord. En ce qui concerne la Sûreté du Québec, premièrement - Comment dirais-je - il faut avoir un programme d'égalité parce qu'il y a des barrières maintenant comme la taille. C'est une barrière. Une fois qu'on enlève ces barrières pour permettre aux femmes d'accéder au poste de policier d'une façon égale avec les hommes, si on n'a pas assez de femmes policiers, il faut avoir un programme de redressement et, donc, il faut établir des chiffres et des pourcentages. Ce comité tripartite va se référer à quoi pour établir ces chiffres?

Mme Berthiaume: II pourrait, entre autres, faire une analyse des effectifs à l'intérieur et à l'extérieur du marché du travail.

M. Marx: Mais si on enlève les barrières...

Mme Berthiaume: Je pense que si on a une volonté...

M. Marx: Oui, mais si on enlève les barrières qui existent maintenant, étant donné qu'il n'y a pas de discrimination dans les cégeps en ce qui concerne les cours de techniques policières, les femmes vont accéder au poste de policier. Je pense que quand on a enlevé les barrières dans les facultés de droit et dans les facultés de

médecine... Je pense qu'à la faculté de droit à Laval il y a 52 % de femmes. Donc, s'il y a des redressements à faire, ce n'est pas du côté des femmes. Comprenez-vous ce que je veux dire? Si on enlève les barrières, les femmes vont accéder d'une façon normale et naturelle à ces postes.

Mme Berthiaume: Je pense que c'est un peu plus compliqué que cela.

M. Marx: Plus compliqué que cela?

Mme Berthiaume: Oui. Je vois cela d'une façon un peu plus compliquée. D'abord, vous avez dit qu'au cégep il n'y a pas de barrière, etc., mais vous savez que, quand on parle des perspectives d'emploi, je ne pense pas qu'on cite beaucoup le corps policier comme un débouché intéressant.

M. Marx: II y a maintenant beaucoup de femmes qui trouvent cela très intéressant et qui font... (15 h 30)

Mme Berthiaume: Je suis sûre que celles qui y sont trouvent cela intéressant, mais je pense que pour y accéder il y a un problème ici au niveau de l'orientation...

M. Marx: D'accord.

Mme Berthiaume: ...parce qu'on décourage carrément les étudiantes et les étudiants d'y accéder de façon générale. Il y a des débouchés dont on tient compte et...

M. Marx: II y a un fort pourcentage de femmes dans les cégeps en techniques policières et cela a augmenté depuis quelques années. Oui?

Mme Leduc: C'est vrai. Si je prends ce que vous dites comme réel - je ne mets pas cela en doute - il y a une forte proportion de femmes. Il y a certainement une raison pour laquelle elles n'ont pas accès aux emplois. Si elles désirent y aller, elles sont formées et c'est cela, l'illustration de la discrimination systémique.

M. Marx: C'est sûr.

Mme Leduc: C'est évident.

M. Marx: Ah, c'est sû!

Le Président (M. Gagnon): Attention!

M. Marx: On est d'accord.

Mme Leduc: On est d'accord.

Le Président (M. Gagnon): Je veux bien vous laisser parler comme cela, mais la télévision veut vous suivre et le Journal des débats aussi et, quand on est deux à parler en même temps, c'est difficile d'enregistrer tout ce qu'on doit enregistrer.

Je vous laisse la parole encore une fois.

Mme Leduc: Je pense que le fait d'enlever les barrières était, si vous voulez, ce qu'on appelle l'égalité des chances. Il ne faut pas oublier qu'un programme d'accès à l'égalité est un programme qui préconise des mesures de redressement temporaires pour justement arriver au résultat qu'on souhaite, avoir une juste représentation des femmes dans la force policière, la Sûreté du Québec. Les barrières étant enlevées, comme vous me dites, cela a été l'égalité des chances. Les femmes sont formées. Donc, il y a un autre problème, vu qu'elles n'ont pas accès aux emplois et cet autre problème, nous, on pense que les programmes d'accès à l'égalité sont des mesures temporaires qui vont permettre d'éliminer ce deuxième problème.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: Oui. Je suis tout à fait d'accord avec vous sur cette discrimination systémique. Je pense, pour être juste, que les corps de police ont réagi, ces derniers mois surtout. À la Communauté urbaine de Montréal nous voyons, chaque fois qu'un groupe de policiers est engagé, qu'il y a toujours quelques femmes de plus qu'autrefois.

Une dernière question. J'aimerais vous faire part d'une expérience avec la Commission de transport de la Communauté urbaine de Montréal. J'ai soulevé, ce matin, la situation qu'il n'y a que 8 femmes chauffeurs d'autobus à Montréal sur 3400. À Chicago, il y a 30 % de chauffeurs féminins, 18 % à Buffalo. Je n'ai pas les statistiques pour toutes les villes mais, même à Toronto, il y a 3,5 %; c'est encore mieux qu'à Montréal où c'est 0,2 %.

C'est dans la Gazette du 20 novembre 1984 que l'on pouvait lire que la Commission de transport de la Communauté urbaine de Montréal cherchait 150 femmes comme chauffeurs d'autobus afin d'avoir un noyau, afin de pouvoir dire: Ici, on engage des femmes. Je pense que c'est une des raisons pour lesquelles on n'a pas de femmes dans beaucoup d'institutions, d'organismes: les femmes ne font même pas la demande. Elles regardent et se disent: II n'y a pas de femmes qui sont engagées là, donc ce serait inutile que je pose ma candidature. Cela s'appelle l'effet de dissuasion, the "chilling factor". Les femmes ne se voient pas dans ces institutions.

Est-ce que vous croyez que le but de l'article 3 est, par exemple, de dire: On va engager 150 femmes maintenant, c'est notre

premier objectif? Ce n'est pas parler d'un pourcentage, ce n'est pas décider d'un quota de femmes; on va chercher un certain nombre et on commence comme cela.

Le Président (M. Gagnon): Mme Berthiaume.

Mme Berthiaume: C'est vraiment une mesure quantitative, effectivement, qui est mise de l'avant.

M. Marx: Et vous pensez que cela entre dans le cadre de l'article 3, plus ou moins?

Mme Leduc: C'est un objectif numérique que la compagnie elle-même s'est fixé.

M. Marx: Ce n'est pas un quota, ce n'est pas dire qu'il faut 10 %, 5 % ou 3 %. On dit: On va en chercher un certain nombre et, après cela, on va voir. Je pense que cela fait moins peur aux gens que l'on fasse cela de cette façon. Dire 10 %, 5 %, 3 %, c'est bien difficile.

Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le député. M. le député de Vachon.

M. Payne: Merci, Mme Leduc et Mme Berthiaume, pour votre mémoire étoffé et fort intéressant. Pour en venir tout de suite, à l'essentiel, j'ai bien remarqué vos réserves quant à la définition du mot "organisme" et je partage cette préoccupation mais peut-être pas pour les mêmes raisons, par contre. Si on regarde la charte telle quelle, si on regarde l'article 86.7, le gouvernement doit exiger de ses ministères et organismes l'implantation de programmes d'accès à l'égalité dans les délais qu'il fixe. C'est donc une obligation. C'est sûr que ce n'est pas défini. Vous seriez peut-être d'accord avec moi lorsqu'on voit tout de suite qu'il s'agit là d'une obligation et, d'autre part, si on retourne en arrière à 86.3 - je suis encore dans la partie III sur les programmes d'accès à l'égalité - la commission peut - on parle de la commission, non pas du gouvernement -après enquête, si elle constate une situation de discrimination prévue par l'article 86.1, recommander l'implantation, dans un délai qu'elle fixe, d'un programme d'accès à l'égalité. Je pense qu'il y a une certaine complémentarité entre le rôle, le devoir, l'obligation du gouvernement, d'une part -vous serez peut-être d'accord avec moi - et le privilège de droit de la part de la commission qui peut élargir cette notion d'organisme.

Mme Leduc: Est-ce un commentaire ou une question, M. Payne?

M. Payne: C'est une réflexion que je porte dans le sens que je partage le fond de votre préoccupation, mais je pense que cela peut être nuancé avec cette interprétation de la loi que je vous propose. Qu'en pensez-vous?

Mme Berthiaume: Vous pensez que notre préoccupation n'est pas justifiée, que les dispositions...

M. Payne: Dans le fond c'est justifié; mais je pense qu'une interprétation positive pourrait effectivement... C'est clair dans la loi et dans mon esprit que la commission peut décider à toutes fins utiles ce qu'est un organisme.

Mme Leduc: On serait d'accord que quelqu'un le définisse.

M. Payne: Un autre point, très brièvement, concernant le plan d'action du gouvernement. Le conseil pose plusieurs interrogations - cela m'a frappé, c'est intéressant - concernant l'obligation contractuelle et préconise que le règlement s'y applique. Le conseil demande aussi que quatre femmes, et non pas une seule, représentent les non-syndiqués. J'imagine, et si c'est le cas je serai entièrement d'accord avec vous, que ceux qui sont les plus démunis pour se défendre devraient être les plus armés pour faire des représentations à qui de droit.

Mme Berthiaume: C'est dans ce sens-là qu'on a évidemment demandé qu'il y ait quatre personnes des milieux non syndiqués.

Mme Leduc: Je voudrais faire une certaine précision. Quand on parle du comité aviseur cela ne s'applique pas à l'obligation contractuelle, quant à nous. Ce qui s'appliquerait à l'obligation contractuelle, c'est le comité tripartite qui est dans l'entreprise.

M. Payne: Non, c'est ça.

Mme Leduc: D'accord. On ne demande pas quatre personnes au comité tripartite. Je me suis peut-être trompée en parlant des quatre personnes, en ce qui concerne le comité aviseur.

Mme Berthiaume: C'était pour le comité aviseur effectivement. Le chiffre "quatre" c'était vraiment pour le comité aviseur. Le comité qui conseillera le gouvernement.

M. Payne: Un peu plus tard dans votre discussion sur l'article 11 qui fait partie de la section Il, là où on parle du rapport annuel, j'aurais une question à vous poser. Comment allez-vous répondre - je n'ai pas

de parti pris mais cela m'intéresse - au patronat lorsqu'il dira: II s'agit là de données confidentielles? Vous parlez d'embauche, de départs, de mises à pied. Nous vivons au Québec, comme en Amérique du Nord, dans un monde hautement concurrentiel. On n'est pas d'accord pour faire en sorte d'élargir cet aspect-là dans le règlement. Avez-vous une bonne réponse pour eux?

Mme Berthiaume: Oui. Je pense que ce serait surtout au niveau de l'échelle salariale que les entreprises pourraient être un peu plus pointilleuses.

M. Payne: C'est cela.

Mme Berthiaume: Écoutez, on pourrait s'en tenir à mettre l'écart entre les salaires et ne pas indiquer l'échelle salariale. On pourrait juste parler de l'écart entre les femmes et les hommes. Ce serait suffisant, on aurait un vrai portrait et on n'attaquerait pas la culture interne de l'entreprise. Ce serait un moyen détourné.

M. Payne: Oui, mais...

Mme Berthiaume: Je pense que, si on le veut, on peut très bien trouver des solutions dans ce sens. On est conscientes qu'il faut respecter la culture interne de l'entreprise. On l'a déjà mentionné. Je comprends votre objection ici.

M. Payne: Je me mets dans leur esprit. Mme Berthiaume: Oui.

M. Payne: Parlons des promotions, des départs, des transferts temporaires d'une compagnie voulant concurrencer une compagnie de Toronto située ici au Québec. Si la même loi, de toute évidence, ne s'applique pas dans les deux provinces, il y a une concurrence artificielle et inégale d'une compagnie par rapport à une autre qui est obligée de dire combien de personnes elle a mises à pied, de combien elle a augmenté sa masse salariale pour X, Y, Z personnes, ou qu'elle a promu 20 % de ses cadres l'an passé.

Mme Berthiaume: De là la nécessité d'un comité tripartite pour appuyer la personne en autorité et qui pourrait régler ce genre de problèmes. On a dit que le comité tripartite pourrait être composé de la partie syndicale, de la partie patronale et des employés. A ce moment-là, on pourrait régler ce problème à l'intérieur et s'assurer que la culture interne de l'entreprise soit protégée.

M. Payne: On les voit venir...

Mme Berthiaume: Oui, oui.

M. Payne: Le Conseil du patronat va venir...

Mme Berthiaume: Bien sûr.

M. Payne: ...et il va sauter là-dessus tout de suite.

Mme Berthiaume: Oui, c'est cela. Moi aussi, j'en suis persuadée.

M. Payne: Merci beaucoup.

Le Président (M. Gagnon): Je vous remercie. Il n'y a pas d'autres questions? Cela va? Merci à Mmes Leduc et Berthiaume et au groupe que vous représentez.

Nous allons maintenant inviter l'organisme Action travail des femmes à prendre place. Nous allons suspendre nos travaux durant cinq minutes, le temps que ces personnes prennent place.

(Suspension de la séance à 15 h 42)

(Reprise à 15 h 47)

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous plaîtl La commission des institutions poursuit ses travaux. Avant la suspension je me suis trompé de groupe. J'avais appelé Action travail des femmes alors que nous entendrons la Fédération des femmes du Québec avec Mme Rochon et Mme Couture.

Fédération des femmes du Québec

Je vous souhaite la bienvenue. Je vous fais le même commentaire qu'aux autres groupes. On vous accorde, théoriquement, un maximum de 55 minutes, soit environ 20 minutes pour faire lecture de votre rapport et 35 minutes de dialogue avec les membres de la commission. Je vous cède la parole immédiatement.

Mme Rochon: C'est le mémoire sur le projet de règlement concernant les programmes d'accès a l'égalité de la Fédération des femmes du Québec. La Fédération des femmes du Québec représente des membres individuels regroupés en cinq conseils régionaux et 42 "associations pour un total de 80 000 membres dont une très grande majorité sont des travailleuses rémunérées.

Notre organisme a pour mission de travailler solidairement, dans une perspective féministe, à l'accès des femmes à l'égalité dans tous les domaines. Ses objectifs visent à promouvoir et défendre les droits des femmes, assurer un rôle de critique et de

consultation, de concertation et de pression, et devenir représentatif du plus grand nombre de femmes possible. Vous comprendrez alors que, pour nous, de véritables programmes d'accès à l'égalité s'imposent pour les travailleuses québécoises.

Les participantes à Décisions 85 ont décrit aussi ce que doit comprendre minima-lement un programme d'accès à l'égalité: une analyse d'effectifs et de disponibilité ainsi qu'une analyse du système d'emploi, des objectifs et un échéancier pour réaliser l'égalité en emploi, des mesures de redressement pour corriger la situation présente et un mécanisme de contrôle des résultats. Le projet de règlement déposé le 26 juin dernier est un garde-fou qui tient compte de ces recommandations.

La Fédération des femmes du Québec appuie globalement la position du Conseil du statut de la femme concernant ce projet de règlement. Nous avons, cependant, quelques observations et ajouts à faire. En ce qui concerne l'article 1, par exemple, nous en déplorons la portée limitée. Nous regrettons instamment que la fonction publique ne figure pas explicitement au titre de "personne qui élabore, implante ou applique un programme d'accès à l'égalité".

Ensuite, nous proposons que les entreprises qui obtiennent un contrat gouvernemental ou des subventions du Trésor québécois soient soumises à l'obligation contractuelle de mettre sur pied un programme d'accès à l'égalité conforme au règlement.

Dans les modalités d'application, nous déplorons le barème trop élevé suggéré à Décisions 85, c'est-à-dire l'obligation contractuelle pour les contrats de 200 000 $ et plus. Pour la province de Québec, cela veut dire qu'un très petit nombre d'entreprises seraient touchées. Nous suggérons donc de baisser le barème pour que les femmes entrent en force, non seulement dans les grandes entreprises, mais aussi dans les moyennes entreprises et, éventuellement, les PME.

D'autre part, la Fédération des femmes du Québec regrette que l'élaboration, l'implantation ou l'application d'un programme d'accès à l'égalité soient conditionnées à l'expression d'un aveu ou d'un constat de discrimination, c'est-à-dire les programmes recommandés et imposés. Elle souhaite que l'élaboration, l'implantation et l'application d'un programme d'accès à l'égalité puissent se faire selon le règlement mais sans un tel constat et donc viser les programmes volontaires mis en place au gouvernement et issus de l'obligation contractuelle.

La Fédération des femmes du Québec s'intéresse de près à la reconnaissance des acquis pour les femmes dans l'accessibilité aux études et aussi au marché du travail.

Nous souhaitons donc qu'à l'article 4, en particulier au point 3, et dans l'article 5 l'expérience de travail et les années de service ne se limitent pas à celles acquises ou prestées dans l'entreprise mais que soient également prises en compte l'expérience acquise et les années de service prestées dans le cadre du travail domestique et dans le cadre du travail bénévole. Nous souhaitons des programmes de formation, donc, dans un délai court pour que les femmes puissent postuler un emploi et ensuite se perfectionner après l'embauche.

Afin de le rendre plus précis et plus explicite en matière de sujets à retenir pour effectuer l'analyse du système d'emploi, la Fédération des femmes du Québec propose d'ajouter au point 1 de l'article 6 ce qui suit: "les outils de base de l'évaluation et de la classification des emplois". Parmi les caractéristiques de la discrimination systémique, il y a l'inadéquation d'équipement, la sécurité, les conventions collectives. Nous proposons donc d'ajouter au même article, en point 9, l'équipement requis pour la tâche, en point 10, les exigences de sécurité et, en point 11, les conventions collectives ou décrets.

Depuis longtemps, la Fédération des femmes du Québec souhaite le partage des responsabilités familiales. Il est donc logique que l'article 8 se lise comme suit: "Un programme doit également prévoir des mesures de soutien", et d'ajouter, à la fin du deuxième paragraphe, que les mesures de soutien tiennent compte des responsabilités familiales. Par conséquent, les mots "s'il y a lieu" doivent être omis dans l'article 9. Il nous apparaît que la proposition, à l'article 10, de confier la responsabilité de l'implantation du programme à un employé ou employée en autorité risque de mettre cet employé ou employée en situation de conflit d'intérêts entre sa tâche habituelle et sa fonction relative au programme d'accès à l'égalité.

Il faudrait donc s'assurer de l'objectivité dans le choix de cet employé ou employée qui aurait pour mandat d'exécuter la décision d'un comité dont nous proposons la composition. Nous insistons donc pour qu'à cet article soit prévue, dès l'élaboration d'un programme d'accès à l'égalité, la création d'un comité composé de représentants et représentantes patronaux et patronales, de représentants et représentantes syndicaux et syndicales ainsi que des représentants et représentantes des non-syndiquées tout en prévoyant une représentation des groupes cibles. L'article 10 doit préciser la composition et le mandat de ce comité. Un modèle semblable à celui qui est prévu par la Loi sur la santé et la sécurité du travail pour les comités de santé et sécurité pourrait être retenu.

La Fédération des femmes du Québec

recommande qu'à l'article 11 il soit prévu que les employeurs rédigent un rapport sur un formulaire unique confectionné par la commission afin de garantir la collecte complète des informations pertinentes. L'article doit aussi prévoir la possibilité pour les employés d'obtenir copie dudit rapport. Nous nous inquiétons de plus qu'aucun mécanisme de contestation ne soit prévu à l'encontre d'un employeur qui n'aurait pas respecté le programme prévu. Cette lacune nous paraît devoir être levée au risque de voir cette nouvelle politique rester sans effet.

Il y a dans notre mémoire une petite erreur à la page 6, au bas de la page, où il faudrait lire section III, article 13, plutôt qu'article III. En matière d'éducation, la Fédération des femmes du Québec propose qu'en plus des analyses d'effectifs et de disponibilité le règlement prévoie l'analyse des outils de base d'évaluation des étudiants et des étudiantes, notamment les tests d'aptitude. À l'article 14, ajouter en point 4 la reconnaissance des acquis, comme cela a été proposé précédemment aux articles 4 et 5. Quant à l'article 17, la Fédération des femmes du Québec ne peut se prononcer sur cet article tant qu'une réponse ne sera pas donnée sur la portée de l'article 86.1 de la loi. Qui est visé par cet article? S'agit-il du personnel? S'agit-il des bénéficiaires? S'il s'agit des bénéficiaires, une réserve analogue à celle exprimée dans la section III semble s'imposer.

En conclusion, il est vraisemblable de prévoir que l'application de l'article 86 de la Charte des droits et libertés de la personne, en vigueur depuis juin dernier, permettra une accélération du changement des mentalités des employeurs québécois et, nous l'espérons, facilitera la mise en évidence des effets bénéfiques des programmes d'accès à l'égalité, ce que l'obligation contractuelle mise en vigueur permettra de vérifier. Il faut savoir que l'obligation contractuelle aux États-Unis - vous avez eu un exemplaire, ce matin, d'un article de la revue Fortune qui date du 16 septembre 1985 - a eu force de loi sous la présidence de Richard Nixon, en 1970, et que, même si le président Reagan veut y mettre un terme, la plupart des grandes compagnies américaines vont continuer leurs programmes d'action positive et appliquer les objectifs numériques et les échéanciers.

Je vous cite, entre autres témoignages, comme je le disais ce matin et je le répète, celui de la compagnie Merck, c'est-à-dire du président de la compagnie: "Nous continuerons nos objectifs numériques, indépendamment de ce que le gouvernement fera. Cela fait maintenant partie de notre culture et de nos façons d'administrer." Je trouve cette réflexion extrêmement importante. Il existe de nombreux rapports qui nous prouvent que non seulement les programmes d'accès à l'égalité et l'obligation contractuelle sont faisables, mais qu'ils sont rentables pour les entrepreprises. Tout ceci ne sera possible, cependant, que si le règlement est un véritable encadrement à la mise en place des programmes d'accès à l'égalité.

Il est urgent pour le gouvernement actuel d'en faire l'adoption avant les prochaines élections. Ce serait pour lui une autre réalisation importante pour l'amélioration de la condition féminine et des autres groupes cibles. Si le projet n'est pas adopté, il vous en sera demandé des comptes lors de la prochaine campagne électorale.

Nous sommes déjà très en arrière des États-Unis dans ce domaine. Quinze ans, c'est beaucoup. Alors, le temps presse.

Le Président (M. Gagnon): Merci. Avant de vous laisser la parole, M. le député de D'Arcy McGee, je voudrais seulement vous demander de faire attention lors des interventions. Tantôt, j'ai remarqué que, souvent, deux personnes parlaient ensemble. C'est difficile pour la télévision et pour le Journal des débats de suivre les débats. C'est important de demander la parole avant de la prendre. Ainsi, on est certain que le focus est au bon endroit. M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: Merci, M. le Président. Seulement pour répondre à cette exigence, j'étais tellement excité par certaines des remarques des autres intervenants qu'il m'a été difficile de m'empêcher de dire que j'étais d'accord. Je vous remercie, Mmes Couture et Rochon, pour votre excellente présentation. J'ai deux questions à vous poser. Premièrement, on parle beaucoup de la discrimination systémique, mais personne n'a vraiment décrit ce qu'elle était dans le secteur privé, dans les compagnies. Pouvez-vous nous décrire une situation où il y a de la discrimination systémique dans le secteur privé, dans l'industrie privée? Vous pourriez peut-être nous donner un exemple.

Mme Rochon: Considérez-vous la SAQ comme une industrie privée présentement? J'avais un exemple de la SAQ.

M. Marx: Oui, on peut prendre cela, parce que c'est en vente.

Mme Rochon: C'est parce que les discriminations systémiques sont très subtiles, dans le sens qu'elles sont neutres. Personne ne s'en rend compte habituellement. Par exemple, pour accéder au poste de caissier à la SAQ, il fallait avoir passé par l'entrepôt. Comme on n'acceptait jamais de femmes dans les entrepôts, elles ne pouvaient donc pas, logiquement, accéder au poste de caissier. Il paraît que c'est corrigé. C'est un

exemple...

M. Marx: Très bon.

Mme Rochon: ...qu'on retrouve facilement. Par exemple, la hauteur des instruments, des appareils, qui sont plus hauts que normal pour la grandeur des femmes par rapport à celle des hommes qui, habituellement, les utilisent. Ce sont des barrières, comme vous le disiez tout à l'heure au groupe du CIAFT, mises sans vouloir faire de mal à personne; cela a été établi parce que les employés sont des hommes, en majorité. (16 heures)

M. Marx: D'accord. Je vous remercie pour cet exemple parce que je voulais qu'il y ait un certain nombre d'exemples dans les Débats et pour nos spectateurs afin qu'ils comprennent les problèmes; autrement, on parle en théorie...

Mme Rochon: Oui.

M. Marx: ...et les gens ne peuvent pas coller cela à quelque chose de pratique.

Une deuxième question. Aux articles 4 et 5, vous dites que dans l'analyse de disponibilité, on tienne compte de l'expérience des femmes acquise "dans le cadre du travail domestique et dans le cadre du travail bénévole." Comment concilier qu'on tienne compte du travail domestique et du travail bénévole avec la compétence qui est exigée par l'article 5 où on demande que les femmes soient aussi compétentes que les hommes? Je vous pose cette question: Comment concilier les deux idées?

Mme Rochon: Si vous me le permettez, lorsqu'on a commencé à demander pour l'accessibilité aux études des femmes qui sont restées à la maison, pour aller à l'université, au cégep et tout cela, la reconnaissance des acquis pendant ces années de retraite, si on peut dire, du marché extérieur, on nous avait répondu à ce moment-là qu'il n'était pas possible d'évaluer cela. Maintenant, on le fait au niveau de la reconnaissance des acquis pour l'accessibilité aux études. Je crois que c'est assez facile de faire des grilles semblables. Je prends, par exemple, le cas d'une femme... Pardon?

M. Marx: Non, non, cela va.

Mme Rochon: ...d'une bénévole qui a travaillé pendant de nombreuses années dan3 l'administration d'un projet bénévole. Elle a pris une certaine compétence...

M. Marx: Cela va, oui.

Mme Rochon: ...de gestion et d'administration. On dit toujours: On fait l'éducation sur le tas. J'en suis un exemple: cela fait longtemps que je fais l'éducation sur le tas. Je crois qu'on peut évaluer ses connaissances de gestion tout aussi bien que les connaissances de gestion d'un étudiant qui arrive, par exemple, d'une école d'administration.

M. Marx: D'accord.

Mme Rochon: Pour le travail domestique, il y a beaucoup de choses que les femmes font à l'intérieur de la maison. Elles sont infirmières - je n'ai pas besoin de vous les énumérer, je pense que tout le monde le sait - et, en même temps, les femmes continuent en général à se perfectionner par leurs lectures, par toutes sortes de choses! comité de parents, enfin toutes sortes de choses dans lesquelles elles acquièrent une certaine compétence.

M. Marx: D'accord. Je vous remercie. C'était très explicite et très convaincant.

Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le député. M. le député de Vachon.

M. Payne: Je voudrais remercier la Fédération des femmes du Québec et, particulièrement, Mme Rochon et Mme Couture. Je pense qu'on commence cet après-midi à engager le vrai débat. Moi aussi, je suis intrigué, d'ailleurs depuis fort longtemps, par l'expérience américaine. On se souvient il y a dix ans qu'effectivement il y avait beaucoup de discussions. M. Lyndon Johnson était parmi les premiers présidents à vraiment aborder cette question-là. Souvent, les hommes d'affaires américains avaient peur, soit sur les ondes de la télévision et même lors de rencontres, des programmes d'accès à l'égalité. Cela m'a fait penser à ce truisme: souvent, l'appréhension avant une opération chirurgicale est plus traumatisante que l'opération elle-même. Si on lit un remarquable article de Fortune Magazine d'il y a quelques mois, on peut constater que, même l'ultra-conservatisme - j'embarque dans une certaine partisanerie - de M. Reagan n'a pas beaucoup d'effet sur les 500 plus grandes entreprises des États-Unis qui, elles, semblent croire de toute évidence qu'il vaut mieux se donner des buts, des objectifs, des "goals" comme elles disent plutôt que des quotas. C'est cela qui fonctionne beaucoup mieux.

Je disais à ceux qui vous ont précédées qu'il serait intéressant d'engager le débat avec le Conseil du patronat, les chambres de commerce dans cette salle, à savoir si, véritablement, ils sont convaincus que quelques aspects du programme vont être aussi pénibles qu'ils voudraient nous le laisser croire. C'est le devoir de notre commission

de bien trancher cette question en toute objectivité, dans la mesure du possible.

J'aurais une question. Votre fédération dit regretter que l'implantation des programmes d'accès à l'égalité soit conditionnée à un aveu ou un constat de discrimination. D'après vous, qu'est-ce qui pourrait justifier l'implantation des programmes d'égalité là où il n'y a même pas de suggestion de discrimination? Je pourrais peut-être imaginer. Vous pourrez me dire si je me trompe. Est-ce que c'est parce que vous croyez qu'il vaut mieux prévenir que corriger par la suite?

Mme Rochon; C'est exactement cela. C'est ce qu'on espère. Au fond, quand on veut... Par exemple, s'il y a une cause de discrimination à l'intérieur d'une entreprise, la poursuite qui va être intentée, les délais considérables que cela suppose par l'évaluation de la commission, les recommandations de la commission et l'implantation... Comme on l'a évoqué ce matin avec la coalition, on espère que les compagnies seront assez intéressées, mais aussi comprendront tout le programme d'accès à l'égalité - je pense qu'il y a énormément d'incompréhension à ce niveau - et qu'elles pourront instaurer les programmes d'accès à l'égalité.

Lors d'un colloque que l'Association des manufacturiers canadiens a tenu le printemps dernier, il était évident qu'il y avait beaucoup de leurs clients qui étaient prêts à mettre en oeuvre les programmes d'accès à l'égalité. Lorsque cela a été mis en vigueur le 26, tout de suite, la directrice générale a fait une déclaration disant: Maintenant, nous pouvons les mettre sur pied. Ce qui est dommage, c'est qu'ils les mettent sur pied sans aucun cadre de référence, sans aucun règlement. Donc, il est impossible par la suite de faire une vérification des progrès obtenus parce qu'il faudrait avec des objectifs numériques et avec un échéancier pouvoir déterminer si les objectifs sont atteints ou s'il y a une rectification, par exemple, à l'intérieur des compagnies.

Nous avons lu le mémoire du Conseil du patronat. Il y a de grandes discussions, je pense, à avoir avec eux. Cela fait déjà deux ans que nous en parlons avec le Conseil du patronat autour des tables de conférence et nous nous rendons compte qu'ils n'ont fait aucune démarche de réflexion autre que celle qu'ils avaient entreprise, il y a quelques années. Il y a toujours la confusion des quotas et des objectifs numériques qu'ils mettent tous sous le même vocable. Nous aimerions bien qu'ils prennent connaissance non seulement, comme ils le disent dans leur mémoire, des procès qui ont lieu aux États-Unis actuellement, mais des choses intéressantes qui sont dites dans l'article de Fortune. Donc, ils pourraient voir aussi les effets bénéfiques et le côté bénéfique.

M. Payne: Une petite question. Vous appuyez, bien sûr, globalement, la position du Conseil du statut de la femme qui est un de nos partenaires, disons, comme vous. En toute objectivité, que pensez-vous... Il m'apparaît qu'il y a quelque chose qui, en toute honnêteté, est à remarquer, sinon à déplorer. Le gouvernement se montre très lent à appliquer les normes qu'on a préconisées depuis des années, les objectifs qu'on a préconisés depuis des années.

Mme Rochon: Vous voulez dire à l'intérieur...

M. Payne: Est-ce que vous êtes en discussion avec le Conseil du trésor? Avez-vous des expériences ou des suggestions que vous pouvez apporter à la commission, pourquoi c'est aussi difficile et pénible?

Le Président (M. Gagnon): Mme Rochon.

Mme Rochon: Vous voulez dire à l'intérieur de la fonction publique?

M. Payne: Oui.

Mme Rochon: Bon! Je ne sais pas pourquoi c'est aussi difficile ici. Je sais qu'il y avait eu des propositions de faites il y a trois ans, je pense, par rapport à des programmes à mettre en place. Cela s'est arrêté; pour quelle raison? on ne le sait pas. Ce que je peux vous dire, c'est que je fais partie du comité aviseur fédéral sur les programmes d'accès à l'égalité à l'intérieur de la fonction publique et c'est fort intéressant de voir les programmes qui ne sont pas encore nécessairement tous en fonction, mais toutes les investigations qu'ils ont faites par rapport aux objectifs à atteindre, par rapport aux disponibilités, par rapport aussi à la récession qui fait qu'il n'y a pas beaucoup de mobilité à l'intérieur de l'emploi et tout cela. Ils sont beaucoup plus avancés qu'au Québec et j'aimerais que ce soit le contraire, mais...

M. Payne: Est-ce que je peux juste vous interrompre deux secondes?

Mme Rochon: Oui.

M. Payne: Entre parenthèses, oui et non, dans le sens que le programme, c'est plutôt... C'est l'équité. Il insiste beaucoup sur l'équité qui a une connotation beaucoup...

Mme Rochon: Oui.

M. Payne: ...plus floue que la notion d'égalité, n'est-ce pas?

Mme Rochon: C'est-à-dire... Je

m'excuse, mais la notion d'équité, c'est pour le programme que Mme MacDonald va mettre sur pied par rapport aux obligations contractuelles. Ce dont je vous parle, c'est strictement à l'intérieur de la fonction publique. Il y a des mesures de redressement et non pas seulement d'équité en emploi.

M. Payne: Merci beaucoup.

Le Président (M. Gagnon): Merci. M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: Merci, M. le Président. Je voudrais m'assurer que nous donnons tous un même sens aux mots que nous employons. Le député de D'Arcy McGee vous a interrogée, Mme Rochon, sur le sens du mot "systémique" et vous avez donné des exemples très clairs où il s'agit, par exemple, de l'exigence d'avoir travaillé dans l'entrepôt pour pouvoir devenir caissier. Comme on n'engageait jamais de femmes en entrepôt, il n'y avait jamais de femmes qui devenaient caissières. Cela a dû changer.

Mme Rochon: Oui, cela a changé.

M. de Bellefeuille: Je pense qu'il y a des caissières, quelques-unes.

Mme Rochon: Oui.

M. de Bellefeuille: Bon. Je voudrais savoir si vous incluez les stéréotypes dans votre définition de la discrimination systémique. Par exemple, le député de D'Arcy McGee parlait ce matin du très faible nombre de femmes chauffeurs d'autobus à la CTCUM. J'ai oublié les chiffres, mais cela concerne le nombre de femmes chauffeurs d'autobus.

M. Marx: À Montréal, il y en avait 8 sur 3400.

M. de Bellefeuille: Bon, 8 sur 3400. Il y a sûrement quelque chose quelque part qui appartient sans doute au domaine des stéréotypes. Est-ce que vous incluez les stéréotypes? Les gens se disent spontanément: Ce n'est pas un métier pour les femmes. Est-ce que vous incluez cela dans votre définition de discrimination systémique?

Mme Rochon: La conséquence des stéréotypes millénaires font que l'on n'emploie pas des femmes où les femmes ne veulent pas aller, où les hommes n'acceptent pas que les femmes aillent dans un métier ou une profession. On pense, par exemple, à des femmes mécaniciennes de voiture; il n'y en a pas beaucoup, il y en a quelques-unes, mais elles ont énormément de difficultés à se faire accepter parce qu'il y a encore des stéréotypes, comme vous le dites. Donc, le produit des stéréotypes fait qu'on ne va pas vers cette embauche parce qu'on a des difficultés à continuer. Il faut beaucoup de force aux filles pour ce faire et les hommes ne veulent pas que les femmes soient employées parce que des stéréotypes ont été culturellement transmis.

M. de Bellefeuille: D'accord, mais ce que je vous demande, c'est si, quand vous parlez de discrimination systémique, vous incluez le phénomène des stéréotypes.

Mme Rochon: Oui, oui, c'est cela, c'est un peu la réponse que je vous ai donnée.

M. de Bellefeuille: Bon, merci.

Mme Rochon: Culturellement, c'est cela.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? Oui, M. le député de Saint-Jacques.

M. Viau: Merci, M. le Président. Mme Rochon, il y a quelque chose qui m'intéresse plus particulièrement quand on parle de programme d'accès a l'égalité ou de programme d'emploi pour les femmes. Je viens d'un comté où il y a une grande proportion de femmes qui sont très peu autonomes ou ont peu de formation académique mais elles ont un vécu assez exceptionnel à la suite de leur travail bénévole, etc.

J'aimerais connaître de votre part quel genre d'impact l'implantation d'un programme comme celui-là pourrait avoir sur les quartiers que j'appelle populaires où la moyenne de scolarité et l'âge des femmes, l'expérience pratique, l'employabilité, un terme que l'on emploie souvent... Comment peut-on s'assurer d'une plus grande représentation de ce type de femmes qui veulent s'intégrer au marché du travail mais qui, à cause de toutes sortes de barrières que l'on mentionnait tantôt - le peu d'accessibilité et, encore là, peut-être une culture de quartier - font souvent face à l'impossible? Comment percevez-vous la réaction de ce genre de femmes ou comment percevez-vous l'implantation, pour cette clientèle type, de programmes d'accès à l'égalité?

Mme Rochon: L'implantation pourrait se faire par la conscientisation des organismes, c'est-à-dire des employeurs à l'intérieur de votre comté. J'imagine qu'il y a des entreprises à l'intérieur de votre comté. Je crois aussi qu'il faut faire de l'éducation auprès des femmes elles-mêmes, les conscientiser, par exemple, à aller prouver qu'elles ont un potentiel X pour un travail X quand on demande un employé quelque part. L'impact que cela pourrait avoir, c'est qu'on

utiliserait intelligemment la main-d'oeuvre féminine qui est sous-utilisée. Je pense qu'au Québec on sous-utilise la main-d'oeuvre des femmes, l'intelligence et la créativité des femmes. Je pense qu'elles pourraient très bien être employées. Ce serait un impact... Je ne sais pas si c'est à ce niveau que vous pensez. Au niveau social ou au niveau économique?

M. Viau: Les deux, j'imagine... Mme Rochon: Les deux.

M. Viau: ...parce que quand il y a un impact économique, nécessairement, il y a un impact social.

Mme Rochon: L'impact social serait d'abord que les femmes en prennent conscience et qu'elles aillent prouver à tout le monde qu'elles sont capables de faire certaines choses; l'impact économique serait le résultat que l'on a aux États-Unis, une plus grande productivité, un absentéisme moindre quand les femmes y sont en plus grand nombre. Je pense que cela pourrait être un impact de ce genre-là. Je ne sais pas s'il y a des choses à rajouter là-dessus.

Mme Couture (Louiselle): Je me permettrais juste une remarque supplémentaire. Dans votre comté, par exemple, on doit finalement habituer les femmes à évaluer différemment leur expérience, c'est-à-dire non pas à la comptabiliser mais à tenter de monnayer l'expérience acquise antérieurement. Souvent une femme qui, pour tout un ensemble de raisons fort respectables, ne s'est jamais présentée sur le marché du travail et qui désire le faire à un moment donné doit finalement jeter sur sa propre expérience antérieure un regard différent. Finalement c'est une activité, à certains égards, de formation que des organisations font.

M. Viau: Je suis d'accord avec vous pour dire qu'il y a une conscientisation personnelle à faire quand on décide d'entrer sur le marché du travail, mais la reconnaissance comme telle du travail domestique et du travail bénévole, j'en suis totalement. Il reste que je crois qu'on devrait ou on peut peut-être, c'est vous qui allez me le dire, tenter d'aller plus loin que de dire qu'on inclut ce travail-là, il faut le reconnaître. Avez-vous des façons de permettre à une société comme la nôtre de reconnaître d'une façon ou d'une autre le travail bénévole, le travail des femmes? Quand vous allez postuler un emploi, vous déposez votre curriculum vitae. L'acquis qu'on a d'expérience de travail en milieu familial ou en milieu d'organismes bénévoles ou populaires, comment voyez-vous la reconnaissance de ce travail-là? Comment cela pourrait-il se manifester pour une femme?

Mme Couture: Pour moi, cela pourrait être comptabilisé tout simplement. Si une femme essayait de traduire l'expérience qu'elle fait tous les jours dans sa maison, par exemple, en gestion du temps... Il y a quand même un travail d'organisation dans la tenue d'une maison. Souvent, ce n'est pas reconnu sur le marché du travail et ce n'est pas traduit dans un langage que les employeurs comprennent ou valorisent. Il y a une globalisation du travail domestique ou du travail fait à l'intérieur de la maison qu'on qualifie globalement de travail de la reine du foyer ou de la maîtresse de maison. Ce n'est jamais divisé et ce n'est jamais comptabilisé. Je pense qu'une femme qui se présente sur le marché de l'emploi, c'est évident qu'un employeur sera intéressé, en regardant sa fiche d'emploi ou son curriculum vitae, à voir concrètement dans des termes qu'il comprend ce qu'elle a fait. Si elle a géré un budget, cela arrive bien souvent, cela se dit finalement, toute la gestion que les femmes font de leur temps, de l'argent de la famille. Certaines font des placements, beaucoup font de la recherche. Finalement, c'est la façon de le traduire qui ne se fait pas souvent. C'est-à-dire le traduire dans un langage qu'un employeur comprend et dans un langage qu'il va accepter. Il faut être clair là-dessus.

Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le député. M. le député d'Iberville.

M. Beauséjour: C'est à la page 6 concernant l'article 11, où vous signalez que vous avez une inquiétude qu'aucun mécanisme de contestation ne soit prévu à l'encontre d'un employeur qui n'aurait pas respecté le programme prévu. Je voudrais savoir si votre inquiétude est vraiment fondée.

Mme Rochon: Je pense qu'au fond c'est peut-être une chose que j'aurais dû enlever, parce que je pense que dans la charte on prévoit qu'il y a un mécanisme de recours non seulement pour la discrimination systémique ou la discrimination au départ, mais aussi pour le non-respect de l'employeur vis-à-vis d'un programme déjà établi. Je pense qu'il y a un recours déjà, que j'ai appris tout à l'heure. J'ai passé sur ma phrase alors que j'aurais dû la supprimer. Je m'en excuse.

M. Beauséjour: D'accord, cela vient expliquer mon interrogation.

Mme Rochon: Vous étiez très au courant.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? M. Beauséjour: Oui. Merci.

Le Président (M. Gagnon): II n'y a pas d'autres questions? Je remercie Mme Denise Rochon ainsi que Mme Louiselle Couture et la Fédération des femmes du Québec pour leur excellent mémoire.

J'invite maintenant le groupe Action travail des femmes, représenté par Mme Dominique Leclercq. Nous allons suspendre nos travaux pour cinq minutes.

(Suspension de la séance à 16 h 20)

(Reprise à 16 h 26)

Action travail des femmes

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission des institutions poursuit ses travaux. Lors de la suspension, j'avais invité à prendre place le groupe Action travail des femmes, représenté par Mme Dominique Leclercq ainsi que par Mme Liza Nova? C'est cela?

Une voix: Novak.

Le Président (M. Gagnon): Mme Novak, excusez-moi.

Mme Leclercq: Oui. Justement, ma compagne va m'asssiter au cas où je perdrais la voix. C'est pour cela qu'elle est à côté de moi, aujourd'hui.

Le Président (M. Gagnon): Alors, je n'ai pas à vous rappeler que vous avez 55 minutes. Vous êtes déjà des habituées de la commission. Je vous cède la parole immédiatement.

Mme Leclercq: Oui. Je vous remercie beaucoup. Donc, je suis d'Action travail des femmes, permanente dans l'organisme, qui est un groupe de femmes d'environ 500 membres et qui s'adresse, depuis 1976, aux femmes à la recherche d'un emploi. Notre travail auprès des femmes qui se heurtent à la discrimination systémique quand elles veulent pénétrer des secteurs d'emplois traditionnellement réservés aux hommes, parce que mieux payés, offrant sécurité d'emploi et possibilités de promotion, nous a amenées à réclamer depuis plusieurs années que le Québec adopte une législation efficace pour remédier, précisément, à cette discrimination.

Je suis contente que M. le député de D'Arcy McGee soit revenu, parce que je voudrais lui dire qu'à la CTCUM ce n'est plus 8 chauffeuses d'autobus qu'il y a, mais de 24 à 30. Nous, on le voit comme l'un des premiers fruits de notre victoire contre le Canadien National où on a obtenu, comme vous le savez, pour la première fois au Canada, un programme d'accès à l'égalité imposé par un tribunal à une compagnie. Quelque temps après, on a reçu un appel de la CTCUM qui nous a dit qu'elle voulait engager plus de femmes chauffeurs d'autobus. Nous avons dirigé beaucoup de femmes à la CTCUM, dont une bonne proportion a été sélectionnée. La CTCUM nous en a, d'ailleurs, félicitées. C'est vous dire l'impact que peut avoir sur des compagnies un programme imposé. Ce n'est pas la seule, d'ailleurs, qui nous ait contactées. C'est tout de même quelque chose d'important.

Nous avons présenté des mémoires à chaque commission parlementaire sur l'accès à l'égalité. Je dois dire que nous espérons que celui-ci soit le dernier. Ce n'est pas qu'on n'aime pas venir à Québec, mais cela nous fait quand même énormément de travail et cela nous coûte cher, finalement, et vous savez qu'on n'a pas tellement d'argent.

En adoptant ce projet de règlement du 26 juin 1985, que nous recommandons fortement, ce que nous voulons dire ici, c'est que le Québec serait loin de faire cavalier seul en Amérique du Nord en matière d'accès à l'égalité. C'est ce que nous allons essayer de démontrer dans ce petit mémoire qui est très court, mais qu'on veut comme une espèce de bibliographie sur les rapports que, peut-être, vous aimeriez lire et surtout que ces personnes du Conseil du patronat, de l'Association des manufacturiers, que vous allez rencontrer demain, auraient peut-être intérêt à parcourir plus attentivement. En tout cas, cela ne leur ferait pas de mal.

Nous n'allons pas reprendre les points soulevés ce matin par rapport au projet de règlement, puisque nous avons participe à la rédaction du mémoire de la Coalition des femmes pour l'accès à l'égalité et que nous le soutenons tout à fait. Mais ce mémoire est, dans le fond, un complément à la contribution que nous avons présentée avec nos compagnes, ce matin.

Une fois de plus, nous voulons insister sur la nécessité d'avoir, dans une définition des programmes d'accès à l'égalité, des objectifs numériques et un échéancier, comme c'est le cas du projet de règlement. Sinon il n'y a pas de programmes d'accès à l'égalité. On peut les appeler autrement. On peut les appeler programmes d'équité, on peut les appeler programmes de toutes sortes mais ce ne sont plus des programmes d'accès à l'égalité, voyez-vous?

Alors, notre présentation. L'expérience américaine. Il y a le fameux Titre VII et les cours de justice, le "contract compliance program" qui est l'obligation contractuelle aux États-Unis. Nous allons vous mentionner l'étude du Potomak Institute, le rapport Crump, le rapport Hatch, l'enquête du

Center for National Policy - vous allez excuser mon anglais mais je pense que c'est presque du français dans ce cas. Ensuite, nous verrons la Loi canadienne sur les droits de la personne, ce qu'elle prévoit, les programmes spéciaux en matière d'emploi et ses critères de mise en application. Nous dirons quelques mots sur l'ordonnance du Tribunal canadien des droits de la personne dans la cause Action travail des femmes contre les Chemins de fer nationaux du Canada. Nous allons mentionner la Saskatchewan Human Rights Code et ses règlements qui sont aussi très, très bons. Enfin, nous avons repris en résumé les recommandations sur le projet de règlement et sur l'obligation contractuelle qui sont les mêmes que celles que vous ont faites la Coalition des femmes pour l'accès à l'égalité.

L'expérience américaine. Donc, comme peut-être tout le monde ne le sait pas, il existe deux sortes d'action positive aux États-Unis: celle qui découle du Titre VII du Civil Rights Act, qui a été adopté en 1967, et celle qui découle du décret du président Lyndon Johnson de 1965 dont parlait ma collègue de la Fédération des femmes du Québec tout à l'heure, mais toutes les deux, ces deux types d'action positive aboutissent à des résultats très tangibles pour les femmes et les minorités visibles.

Donc, cette expérience américaine confirme, en effet, l'importance de l'imposition de programmes d'accès à l'égalité par les tribunaux. Nous citons à ce propos MM. Peter Robertson et Daniel Leach, qui sont tous deux des anciens directeurs de la commission américaine chargée de l'application de la loi antidiscriminatoire aux États-Unis. Ces deux personnes disent que ce n'est qu'à cause de l'imposition de programmes par les tribunaux et de menaces de poursuites judiciaires que les employeurs mettent sur pied maintenant des programmes d'accès à l'égalité. Vous avez les deux citations au bas de la page.

De plus, les cours de justice américaines ont choisi d'imposer des objectifs numériques et des échéanciers car elles ont constaté que c'était le seul remède efficace à la discrimination. De nombreux cas de jurisprudence sont cités à ce propos dans le volume "Employment Discrimination Law", qui est un volume comme cela, qui est vert, que je ne vous ai pas apporté aujourd'hui parce qu'il est quand même assez lourd. Je pense que ce serait quand même intéressant de le consulter étant donné que je vous ai indiqué ici les pages bien pertinentes à la question des objectifs numériques et des échéanciers, qui vous disent à quel point cela a été jugé important par les tribunaux et quelle abondante jurisprudence il y a aux États-Unis à ce propos. Il a été publié par l'American Bar Association. Je vous passe les pages.

Maintenant, nous arrivons au décret présidentiel, l'"executive order" 11246 et qui est le fondement de l'obligation contractuelle aux États-Unis. Depuis 1965 et depuis 1968, alors qu'on y a inclus le critère du sexe, parce qu'avant c'était seulement la race, "tout employeur américain qui utilise les services de plus de 50 employés et qui veut soumissionner pour l'obtention d'un contrat gouvernemental valant 50 000 $ ou plus doit démontrer qu'il a adopté une politique de non-discrimination dans l'emploi et qu'il a mis sur pied un programme d'action positive conforme aux instructions détaillées émises par le ministère du Travail. Ce programme doit être en opération si un soumissionnaire désire obtenir un contrat gouvernemental". Ceci est cité à la page 139 de l'Ordonnance du Tribunal canadien des droits de la personne dans la cause Action travail des femmes contre CN. Ce qui est bien important, et je le souligne ici, ce soir, c'est que depuis 1972 ces fameuses instructions détaillées stipulent que ces programmes doivent comporter entre autres des objectifs numériques et un échéancier. C'est cela qui a fait toute la différence; à partir de 1972 dans les programmes d'accès à l'égalité, on a vu qu'il y avait une amélioration absolument incroyable de la situation des femmes dans les entreprises. C'est dans le fond ce que disent les rapports que je vous ai mentionnés tout à l'heure et que je mentionne ici. Vous avez d'abord le premier dans "A decade of new opportunity"... Si tu veux, tu peux peut-être lire cela.

Mme Novak: Il a été publié par le Potomac Institute en 1984. Herbert Hammerman y constate que jusqu'en 1972 les programmes d'accès à l'égalité alors existants n'ont rien changé pour les populations cibles, alors qu'après 1972, année où on a introduit des objectifs quantifiables et un échéancier dans les programmes d'accès à l'égalité imposés par l'obligation contractuelle, cela a fait une différence pour les groupes visés. Je continue?

Le rapport Crump publié en avril 1983 par l'Office of Federal Contract Compliance Programs est une étude faite sur la période de 1974 à 1980 pour comparer la performance des entreprises ayant un contrat avec le gouvernement fédéral couvertes par le "contract compliance program" et celle des autres entreprises.

Et on cite: "Les résultats des analyses montrent que les établissements couverts par l'"executive order" ont fait des gains considérablement plus grands dans l'emploi et la promotion des minorités et des femmes que ceux non couverts et les ont fait dans toutes les catégories d'emploi spécialement étudiées"; c'est la page 7. Nous ne donnerons ici qu'un seul exemple chiffré, tiré de la

page 8 du rapport: "La participation des femmes dans la main-d'oeuvre des entreprises contractantes a augmenté de 15,2 % alors qu'elle n'a augmenté que de 2,2 % dans les cas des non-contractants."

Mme Leclercq: Vous voyez la différence là, 15.2 % des entreprises avec obligation contractuelle et 2.2 % dans les entreprises qui ne l'avaient pas. Je crois que les chiffres parlent d'eux-mêmes. C'est un rapport intéressant à lire si vous voulez le lire.

Mme Novak: Je continue? Mme Leclercq: Oui.

Mme Novak: Rapport de la commission Hatch (Committee on labor and human resources, United States Senate) d'avril 1982. Ce rapport a été fait à la suite d'une année d'étude, lancée en avril 1981, incluant cinq jours d'auditions avec des témoins représentant les femmes, les minorités et les milieux d'affaires, de manière équilibrée. "Les auditions ont révélé un attachement profond des Américains (an "inspiring commitment") de tout milieu à l'intention première de l"'executive order" 11246 d'éliminer les barrières de la discrimination en emploi et d'augmenter les possibilités d'emploi des minorités et des femmes. Ce qui a été l'objet des débats n'a pas été de savoir si l'investissement fédéral dans les chances égales d'emploi ou dans l'action positive devait continuer ou non. Les deux ont reçu un fort appui. L'objet du débat a été l'efficacité de l'Office of Federal Contract Compliance Programs à réaliser l'intention de l'"'executive order" 11246."

Il s'agit donc d'un problème d'efficacité administrative et non d'une remise en cause du bien-fondé des programmes d'accès à l'égalité avec objectifs quantitatifs et échéancier.

Mme Leclercq: Donc, cela est un rapport très important puisque les employeurs aussi bien que les groupes de femmes et de minorités visibles ont été unanimes en disant que c'était vraiment important d'avoir cette obligation contractuelle et ces programmes d'accès à l'égalité, ce qui est tout de même assez intéressant.

Mme Novak: Je continue?

Mme Leclercq: Tu continues, oui.

Mme Novak: Une enquête, publiée en 1983 par le prestigieux Centre pour la politique nationale à Washington, a été faite auprès des 50 entreprises ayant les plus gros contrats avec le gouvernement et sélectionnées au hasard dans 11 villes américaines. On a demandé à la direction de ces entreprises d'évaluer l'obligation contractuelle. Ces employeurs ont attribué la baisse du taux de roulement de la main-d'oeuvre, un meilleur moral du personnel et une productivité accrue aux programmes d'accès à l'égalité qui doivent être mis sur pied comme conditions pour avoir des contrats du gouvernement fédéral. La même étude a aussi démontré que l'obligation contractuelle a permis une amélioration significative de l'emploi des femmes et des minorités dans les 50 entreprises faisant l'objet de l'enquête.

Mme Leclercq: Maintenant, on va changer de pays. Donc, la loi canadienne, entrée en vigueur en 1978, tient largement compte de la jurisprudence américaine. Elle fait état des programmes spéciaux dans ses articles 15.1, 15.2 et 41.2a. Je le dis tout de suite, la loi canadienne prévoit que la discrimination à rebours n'est pas possible, c'est-à-dire que cela n'existe pas au Canada et que cela n'existe pas non plus au Québec avec la fameuse charte, puisque c'est prévu à l'article 86.1: Tout programme d'accès à l'égalité n'est pas discriminatoire. Cela veut dire que la discrimination à rebours n'existe pas au Canada. C'est très important. Aux États-Unis, on a dû aller devant les tribunaux pour remédier à ce problème qui n'avait pas été prévu au départ, mais nous ne l'avons pas. Je vous donne cela comme argument à donner demain aux employeurs.

Donc, il n'y a pas de règlement, à proprement parler, pour la loi canadienne, mais il y a un guide qui s'intitule "Programmes spéciaux en matière d'emploi: critères de mise en application", guide très précis dans lequel on décrit... Je vais te laisser lire, parce que...

Mme Novak: ...dans lequel la Commission canadienne des droits de la personne décrit les trois éléments essentiels d'un programme spécial, c'est-à-dire "visant à améliorer les chances des intéressés en rendant l'effectif plus représentatif". À la page 15, on peut lire que "les objectifs doivent être quantitatifs, c'est-à-dire qu'ils doivent faire état, en termes mesurables, des changements qu'on vise à apporter à la composition de l'effectif; que les objectifs doivent pouvoir être atteints dans des délais précis et raisonnables" et que des mesures doivent être "élaborées et appliquées pour en arriver à une représentation équitable" des groupes cibles désignés.

Enfin, pour évaluer le programme spécial, on essaie de déterminer dans quelle mesure, il a atteint ses objectifs dans les délais prescrits. C'est à la page 16.

Comme vous le savez sans doute, Action travail des femmes a obtenu, pour la première fois au Canada, en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne,

qu'un véritable programme d'accès à l'égalité pour les femmes soit imposé à une compagnie et non des moindres, puisqu'il s'agit des Chemins de fer nationaux du Canada.

Voici ce que dit le Tribunal canadien des droits de la personne pour justifier sa décision rendue le 22 août 1984: "...il sera difficile dans le cas du CN de remédier à la disproportion marquée qui résulte des pratiques suivies depuis des années. Il faut espérer qu'avec le temps, le déséquilibre sera réduit, mais il nous apparaît que la chose ne sera pas possible sans l'imposition d'un programme d'action positive dans le cas qui nous occupe..."

 la page suivante, parce que c'était cité à la page 166, le Tribunal cite EEOC versus Cook Paint and Varnish Co., pages 2104 et 2105, pour expliquer l'imposition temporaire d'un quota, moyen considéré comme le plus efficace pour contrebalancer les effets nocifs du système discriminatoire identifié. (16 h 45)

Nous terminons notre exposé avec un dernier exemple d'une loi accompagnée de règlements forts. Il s'agit du Code des droits de la personne de la Saskatchewan, lequel prévoit des programmes dans son article 47.1 très similaires à l'article 15.1 de la loi canadienne. Les règlements datent de juillet 1979 et sont aussi précis que le projet de règlement que nous examinons présentement au Québec, quant à la mise en oeuvre et au suivi des programmes d'accès à l'égalité.

Finalement, à la dernière page du mémoire d'Action Travail des femmes vous trouverez les recommandations qui ont été soumises ce matin par la Coalition des femmes pour l'accès à l'égalité. Voilà.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? Mme Leclercq: Merci.

Le Président (M. Gagnon): Je vous remercie, Mme Leclerq. Même si vous avez une gorge comme la mienne...

Mme Leclercq: Oui.

Le Président (M. Gagnon): ...un peu grippée, cela a bien été. Je passe immédiatement la parole... Pardon?

M. Marx: ...moi, après cela...

Le Président (M. Gagnon): Voilà. M. le député de Vachon.

M. Payne: Merci, Mme Leclercq.

Le Président (M. Gagnon): Excusez, M. le député de Vachon, c'est le député de D'Arcy McGee, je reviens à vous immédiatement après.

M. Payne: Ah bon!

M. Marx: Merci, M. le Président. J'aimerais remercier Mmes Leclercq et Novak pour une très intéressante présentation. J'aimerais aussi féliciter l'Action Travail des femmes pour la cause qu'elles ont gagnée avec les chemins de fer du Canadien National. J'ai lu la décision un peu en diagonale parce que c'était assez volumineux. J'aimerais vous demander ce que vous avez retiré de cette décision en conclusion. Est-ce que cela vous inspire à procéder de la même façon? Qu'est-ce que cela démontre?

Mme Leclercq: Bien oui. Comme je vous ai dit, naturellement, c'est une procédure très longue d'aller en justice...

M. Marx: C'est cela.

Mme Leclercq: ...mais c'est la seule façon de produire un entraînement des autres compagnies, cela fournit un pool d'entraînement. Quand je vous disais tout à l'heure qu'on a été approchées quand même par la STCUM - ce n'est pas rien - et par d'autres compagnies, et non des moins importantes, à cause de notre victoire... Je crois que c'est directement lié à notre victoire, parce que les compagnies se sont dit: Cela va nous arriver à nous aussi. La preuve de la discrimination systémique, c'est la statistique. Quand on a zéro femme chauffeur, ce n'est pas compliqué à prouver, n'est-ce pas?

M. Marx: C'est cela.

Mme Leclercq: Quand on a zéro femme mécanicien, zéro femme... C'est vite fait. C'est cela, la discrimination systémique.

Évidemment, le fait que les compagnies sachent que les groupes de femmes peuvent aller en justice contre eux, cela ne leur fait pas une très bonne image publique, cela ne leur fait pas une bonne publicité. Nous pensons que c'est pour cela qu'il nous faut cet instrument dans le projet de règlement. C'est sûr qu'on ne va pas pouvoir poursuivre toutes les compagnies. On va en poursuivre seulement quelques-unes, mais cela encouragera les autres à faire quelque chose. C'est donc pour cela qu'il nous faut un projet de règlement très fort, comme celui qui est présentement devant nous. Nous non plus n'accepterons rien de moins.

M. Marx: Donc, si je comprends bien, les compagnies qui vous ont contactées sont plutôt favorables à faire des démarches dans

ce sens c'est-à-dire des programmes d'accès à l'égalité, et de s'y diriger...

Mme Leclercq: C'est cela, elles peuvent le faire puisque l'article 86.1 est maintenant entré en vigueur.

M. Marx: C'est cela.

Mme Leclercq: Donc les programmes volontaires...

M. Marx: Mais les...

Mme Leclercq: Elles peuvent le faire...

M. Marx: Oui.

Mme Leclerccp Ce qu'il y a, c'est que vous voyez l'importance d'avoir quand même le projet de règlement parce qu'elles pourraient bien...

M. Marx: Bien oui.

Mme Leclercq: ...demain ou même déjà maintenant s'arrêter si elles voient que la volonté politique gouvernementale flanche.

M. Marx: Mais s'il n'y a pas de règlement, qu'est-ce que sera un programme d'accès à l'égalité? Si on ne suit rien, il n'y a pas de programme. Je pense qu'il faut avoir un...

Mme Leclercq: C'est cela.

M. Marx: ...modèle quelque part.

Mme Leclercq: Si vous voulez, c'est pour cela qu'il est très important que le gouvernement et vous-même mainteniez votre volonté politique de l'adopter, sinon les compagnies vont dire: Bon, ça y est, on n'a pas besoin de femmes. À nouveau, on repart en arrière.

M. Marx: D'accord. Vous avez parlé des États-Unis et j'ai ici une feuille, qui fait partie de tout contrat où il faut suivre les programmes d'accès à l'égalité, par exemple, l'article 1: "Affirmative action for disabled veterans and veterans of the Vietnam era..." Je ne vais pas citer le paragraphe qui suit, mais il fait référence à un certain nombre de lois et de règlements. Après cela, il y a l'article 2: "Affirmative action for handicapped workers..." On fait référence une autre fois à des lois et des règlements. Après cela, l'article 3: "Equal opportunity clause..." L'article 4: "Compliance with affirmative action, reports and programs..." Vous avez déjà cité cet article qui touche ceux qui veulent faire affaire avec le gouvernement ayant des contrats de 50 000 $ et plus, et ainsi de suite. Donc, effectivement, quelqu'un qui veut faire affaires avec les gouvernements aux États-Unis doit se mettre à l'heure de l'égalité. Il n'y apas de question, et ainsi de suite. Et je trouve que c'est très bon et très intéressant que vous ayez dressé ce bilan de ce qu'on fait aux États-Unis. Cela n'a pas fait couler les États-Unis et cela n'a pas forcé les compagnies à faire faillite non plus.

Mme Leclercq: Et dans les autres provinces canadiennes aussi, en Ontario, vous avez la possibilité d'avoir des programmes d'accès à l'égalité. Il n'y a qu'une seule province qui ne l'a pas. C'est Terre-Neuve.

M. Marx: D'accord, et vous avez souligné qu'en Saskatchewan, il existe un règlement semblable au règlement qui est devant cette commission.

En parlant des États-Unis, j'aimerais vous demander quelles sont les faiblesses des programmes aux États-Unis, de la législation américaine, de la réglementation. Est-ce qu'il y a certaines faiblesses qu'il faut éviter ici?

Mme Leclercq: Je pense qu'on les a évitées. J'en ai cité une tout à l'heure, la discrimination à rebours, par exemple. Donc, on n'a pas ce problème au Canada ni au Québec.

M. Marx: Cela a été réglé. Oui, c'est cela.

Mme Leclercq: C'est quand même un exemple, parce qu'il a fallu aller beaucoup au tribunal aux États-Unis pour en arriver...

M. Marx: Oui, c'était à cause de la constitution américaine. Ici, on a réglé cela par le biais de la charte.

Mme Leclercq: Oui, c'est cela. Ici, c'est réglé.

M. Marx: D'accord.

Mme Leclercq: La charte canadienne et aussi la loi canadienne prévoit... La charte, la Loi canadienne des droits de la personne et la charte du Québec prévoient toutes que ces programmes ne soient pas discriminatoires. Donc, cela veut dire que la discrimination à rebours n'existe pas dans ces trois lois.

M. Marx: Oui, d'accord. Donc, au Québec, il serait impossible de contester la constitutionnalité d'un programme...

Mme Leclercq: Exactement.

M. Marx: ...d'accès à l'égalité. Vous êtes tout à fait d'accord et c'est dans nos

deux chartes.

Mme Leclercq: D'accord. Comme je le disais tout à l'heure, pour en revenir au problème aux États-Unis, cela semble être quand môme d'ordre administratif, un peu ce que disait le rapport que j'ai cité tout à l'heure, c'est-à-dire que l'"Office of Federal Contract Compliance" mettait du temps; il y avait des délais administratifs, etc. Je pense qu'on aura le même genre de problème avec la Commission des droits de la personne, sauf si elle décide - et cela pourrait être décidé après tout - de bien fonctionner. Nous l'espérons très fortement et nous le souhaitons, naturellement. Mais pas de problème d'ordre juridique proprement dit. Je pense que si on a ce projet de règlement, on a déjà au Québec une bonne base pour aller chercher des programmes d'accès à l'égalité, quelques programmes d'accès à l'égalité qui vont être des exemples, et on peut commencer à bâtir à partir de là.

M. Marx: Oui. Étant donné que je suis un ancien commissaire de la Commission des droits de la personne du Québec, je sais que la commission essaie de faire un bon travail et y réussit la plupart du temps, presque toujours. Mais la commission a 40 personnes qui vont s'occuper de ces programmes d'accès à l'égalité. Est-ce que ce serait possible, d'après vos expériences et d'après vos connaissances de l'administration de ces lois aux États-Unis, que 40 personnes fassent tout ce travail pour tous les programmes d'accès à l'égalité au Québec?

Mme Leclercq: Nous, on est très réalistes. On va commencer avec cela. On n'a pas tellement le choix. On ne va pas commencer à dire: On voudrait 1000 personnes.

M. Marx: Oui.

Mme Leclercq: Peut-être qu'on en voudrait 1000.

M. Marx: Non, mais cela...

Mme Leclercq:. On va commencer avec 40. Allons-y et on verra bien, parce que, finalement, si on n'a même pas ce projet de règlement, il faut d'abord avoir cela et ensuite, on verra ce qui ne fonctionne pas.

M. Marx: Oui, mais pour qu'un programme d'accès à l'égalité devienne obligatoire, il faut que la commission prouve qu'il y a une situation de discrimination il faut qu'il y ait une situation de discrimination...

Mme Leclercq: Je m'excuse, mais je n'aime pas tellement que l'on utilise le terme "obligatoire" parce que c'est un terme très ambigu. Il vaut mieux dire un programme imposé par un tribunal...

M. Marx: Imposé, d'accord.

Mme Leclercq: Ou recommandé par la commission.

M. Marx: D'accord, imposé.

Mme Leclercq: Parce qu'il y a eu beaucoup de confusion, à un tel point que des employeurs croyaient que si le règlement était adopté demain, par exemple, ce serait obligatoire dans toutes les compagnies du Québec.

M. Marx: Pour moi, obligatoire veut dire imposé.

Mme Leclercq: Ah bon! Si on s'entend sur le terme, il n'y a pas de problème.

M. Marx: D'accord. Mais avant que ce soit imposé, il faut que la commission constate une situation de discrimination.

Mme Leclercq: Oui.

M. Marx: Donc, cela prendra du temps avant que tout cela fonctionne bien.

Mme Leclercq: Oui.

M. Marx: Parce que les compagnies vont peut-être contester les décisions de la commission, elles vont aller en cour et avant que l'on ait une jurisprudence et tout cela...

Mme Leclercq: Alors, c'est pour cela...

M. Marx: Adopter le règlement, ce n'est pas la fin de la bataille, c'est le début d'une autre époque.

Mme Leclercq: Non, c'est un début et c'est pour cela que l'on demande aussi l'obligation contractuelle qui permettrait d'aller beaucoup plus vite. Mais voyez-vous, on ne peut pas brûler les étapes. Aux États-Unis, il a fallu que les femmes - les Noires aussi - aillent devant les tribunaux afin qu'il y ait après des programmes volontaires qui aient un peu d'allure. On ne peut pas brûler les étapes, il faut d'abord passer par les tribunaux. Après, quand on a l'obligation contractuelle, viennent les programmes volontaires.

Le Président (M. Gagnon): Cela va?

M. Marx: Pour que ce soit un programme en vertu d'une obligation contractuelle, est-ce qu'il faut que la discrimination soit constatée aussi?

Mme Leclercq: Bien non, puisque c'est le gouvernement qui va décréter ou faire une nouvelle loi.

M. Marx: D'accord.

Mme Leclercq: Enfin, un décret est plus rapide, je pense...

M. Marx: D'accord.

Mme Leclercq: ...qui va dire que ceux qui contractent avec le gouvernement ou des organismes gouvernementaux devront avoir un programme d'accès à l'égalité, comme c'est le cas américain. Voyez-vous?

M. Marx: Oui.

Mme Leclercq: À ce moment-là, ce sera différent.

M. Marx: Un dernier mot.

Mme Leclercq: J'ai une question pour vous aussi.

M. Marx: Je vois l'avantage. Cela veut dire qu'il y a une auto-application du règlement, cela veut dire que chaque compagnie qui fait affaires avec le gouvernement applique le règlement par elle-même. "It is self-enforcing".

Mme Leclercq: C'est-à-dire que c'est le gouvernement qui va lui dire: Si vous voulez avoir un contrat avec nous, il faut que vous mettiez sur pied, comme on l'a dit tout à l'heure, un programme d'accès à l'égalité.

M. Marx: C'est cela, donc, c'est "self-enforcing".

Mme Leclercq: C'est cela.

M. Marx: Et chacun, automatiquement, le fera. Il ne sera pas nécessaire de faire toutes ces démarches.

Mme Leclercq: On n'ira pas en justice, non. C'est pour cela que c'est plus rapide, voyez-vous?

M. Marx: C'est plus efficace.

Mme Leclercq: Mais il faut que ce soit avec le projet de règlement quand même, c'est-à-dire qu'il faut que les deux soient liés; le projet de règlement, dans le sens qu'il définit ce qu'est un programme d'accès à l'égalité, parce qu'on ne veut pas se retrouver, comme je le disais ce matin, avec un programme d'équité en emploi.

M. Marx: Si je comprends bien, pour conclure, pour vous, l'obligation contractuelle est tout à fait essentielle et même au coeur d'un vrai programme d'accès à l'égalité à l'échelle du Québec.

Mme Leclercq: Pour nous, ce qui est essentiel, c'est l'adoption du projet de règlement du mois de juin tel qu'il est; ensuite, l'obligation contractuelle et, ensuite, les mesures incitatrices dont le mémoire de la coalition fait état. Mais l'essentiel - c'est l'objet de notre présence aujourd'hui - c'est le projet de règlement.

M. Marx: Oui. Il nous faut le règlement pour que les autres éléments se tiennent.

Mme Leclercq: Exactement, pour obtenir les autres choses.

M. Marx: II faut que ce soit fondé sur quelque chose. Merci beaucoup.

Le Président (M. Gagnon): Merci. M. le député de Vachon.

M. Payne: Mmes Leclercq et Novak, je vous remercie pour votre mémoire de Action travail des femmes. C'est fort intéressant d'analyser l'expérience américaine. Leur réflexion n'est pas terminée non plus, on lit leur réflexion chaque jour dans les journaux américains. En passant, je n'ai pas lu "A Decade of Opportunity", en avez-vous une copie?

Mme Leclercq: Lequel, monsieur?

M. Payne: A Decade of Opportunity. C'est une étude faite par le Potomac Institute, il y a deux ans.

Mme Leclercq: Je ne l'ai pas ici, mais vous pouvez l'avoir à la Commission des droits de la personne du Québec. Vous pourriez en obtenir une copie. (17 heures)

M. Payne: II serait intéressant de le déposer parce que c'était un commentaire assez sérieux...

Mme Leclercq: Oui.

M. Payne: ...sur la situation. Cela pourrait peut-être remettre en question quelques idées que j'avais moi-même. Cela n'empêche pas que je suis encore persuadé par l'école de pensée qui préfère les objectifs et les échéanciers plutôt que les quotas. D'ailleurs, vous faites amplement référence dans votre mémoire à la nécessité d'avoir les objectifs énumérés.

J'aurais quelques considérations politiques sur lesquelles je voudrais demander votre réaction. Ayant à l'esprit l'arrêt Stotts aux États-Unis, lequel risque d'avoir l'effet de remettre en cause beaucoup de nos

objectifs, et plus récemment la décision du juge en chef de la Cour fédérale qui a invalidé l'ordonnance du Tribunal canadien des droits de la personne, cela nous indique que si on suit ce chemin-là on aura des batailles politiques et législatives énormes devant les tribunaux. On sait ce que cela donne.

Mme Leclercq: Vous parlez de l'arrêt Stotts et les pompiers?

M. Payne: Je parle de l'ensemble. Si on s'engage vers une approche plutôt par quotas, avec les objections qu'on a vues ailleurs, que ce soit aux États-Unis ou au Canada, on risque de trouver des embûches et des retards devant les tribunaux. En plus, une autre considération, c'est que là où on a les quotas avec des règlements bien détaillés, cela présume pour le législateur ou pour l'exécutif au moins que vous avez l'obligation de les contrôler. Par exemple, avec la loi 101, une expérience assez comparable avec la situation qu'on voit ici, on avait deux approches possibles. Une qui était excessivement dure, qu'on n'a pas adoptée, pour enquêter sur chaque petite entreprise, pour faire en sorte qu'on puisse vraiment scruter à la loupe chaque geste posé pour faire en sorte que les PME ou les plus grandes entreprises puissent laisser la possibilité aux travailleurs de s'exprimer en français au travail. On n'a pas adopté cette approche-là. C'est plutôt par incitation, dans l'ensemble, parce qu'on n'a pas le moyen de contrôler le règlement.

Si on adopte l'approche par quotas on risque de tomber dans les mêmes situations. Avez-vous des considérations à ce sujet-là?

Mme Leclercq: Dans le projet de règlement on parle d'objectifs numériques. On n'a pas parlé de quotas. Donc, on appuie le projet de règlement. On parle d'objectifs numériques.

Dans l'affaire Stotts dont vous parlez, avec les pompiers, c'est quelque chose qui sera possible aux États-Unis mais qui ne sera pas possible au Québec ou au Canada. Ce sera une chose différente à cause de la manière dont justement les lois sont rédigées. Un programme d'accès à l'égalité n'est pas discriminatoire, comme je le disais tout à l'heure, alors qu'aux États-Unis ils n'ont pas cela. C'est pour cela qu'ils ont en ce moment un petit problème par rapport à l'ancienneté. Nous ne l'aurions pas puisque dans nos lois, charte canadienne, loi canadienne des droits de la personne et charte québécoise, auxquelles les règlements s'attachent, on n'a pas ce problème-là. L'autre chose...

M. Payne: D'accord, on s'entend, parce qu'à un moment donné j'avais compris que vous visiez également les quotas en plus des objectifs numériques.

Mme Leclercq: On a parlé d'objectifs numériques. D'accord?

M. Payne: D'accord.

Mme Leclercq: Dans la décision - je crois que c'est de cette décision-là dont vous parliez - de la Cour d'appel par rapport à la cause ATF contre le CN... Est-ce de cette décision dont vous parliez?

M. Payne: Oui. Action travail des femmes versus CN.

Mme Leclercq: Les trois juges n'étaient pas d'accord, mais c'est le jugement Hugessen... Ce n'est pas qu'il remet en cause la question du contingentement, c'est que c'est une autre question en fait. C'était la question de la prévention versus le rattrapage. Ce n'était pas qu'il remettait en cause... Il a appelé cela le contingentement plutôt que les quotas. Ce qu'il voulait, c'était que cela soit mis pour de la prévention et non pour du rattrapage. Donc, c'est une autre question juridique et je ne pense pas qu'on veuille s'embarquer là-dedans aujourd'hui. Mais il n'a pas vraiment remis en cause la question des quotas, comme il le dit, qui avaient été imposés dans le cas du premier jugement. Vous voyez, je trouve cela quand même important de bien faire la différence à ce sujet.

La dernière chose dont vous parliez, c'était des petites entreprises. C'est sûr qu'on ne pourra pas avoir des programmes d'accès à l'égalité pour les entreprises de moins de 50 employés. Cela n'a aucun sens. Il faudra que ce soit des entreprises ayant un minimum de 50 employés. Je pense qu'on n'a pas trop de problèmes avec les PME.

M. Payne: Oui. Le problème, c'est toujours avec les très petites.

Mme Leclercq: Oui, c'est cela. Mais on ne pourra pas mettre des programmes d'accès à l'égalité.

M. Payne: C'est sûr. Que pensez-vous des 200 000 $... Je pense que, pour les Américains, c'est plutôt 50 000 $.

Mme Leclercq: C'est cela, oui. J'ai même vu dans un texte le montant de 10 000 $ aussi.

M. Payne: Ah oui?

Mme Leclercq: Enfin, disons que c'est 50 000 $. Au Québec, je pense que 200 000 $, c'est quand même beaucoup. Il faudra s'attendre à un petit peu moins. Je

vais redire ce qu'on a dit ce matin à ce propos...

M. Payne: Plusieurs ont...

Mme Leclercq: On dit qu'il faut le diminuer, mais on ne sait pas. Il faudrait voir cela de plus près, effectivement.

M. Payne: Plusieurs groupes, ce matin -deux ou trois, je pense, c'est-à-dire trois avec vous - ont suggéré que cela devrait diminuer.

Mme Leclercq: Oui. Nous aussi, on est d'accord.

M. Payne: Ce serait peut-être, d'ailleurs, une manière subtile de contrôler davantage les PME, en diminuant les 200 000 $ jusqu'à 100 000 $ ou un autre chiffre, n'est-ce pas?

Mme Leclercq: Cela voudrait dire qu'il y aurait plus d'employeurs qui seraient obligés d'avoir des programmes d'accès à l'égalité.

M. Payne: Voilà!

Mme Leclercq: Cela irait plus bas que les grosses compagnies, effectivement...

M. Payne: Donc, vous...

Mme Leclercq: ...mais sans arriver aux petites, petites entreprises. Cela, c'est sûr.

M. Payne: Donc, a fortiori, on pourrait, de cette manière, toucher plus de petites compagnies.

Mme Leclercq: Absolument. Oui, oui. M. Payne: Je vous remercie.

Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le député de Vachon. M. le député de D'Arcy McGee, suivi du député de Rousseau.

M. Marx: J'aimerais souligner qu'aux États-Unis, c'est bien 50 000 $ pour les programmes d'accès à l'égalité. Mais ils ont un autre programme...

Une voix: ...

M. Marx: C'est 50 000 $. Je m'excuse. Il y a un autre programme aussi: "Utilization of Women Owned Business Concerns", c'est-à-dire des entreprises qui appartiennent aux femmes; c'est 500 000 $. J'ai seulement un paragraphe... C'est intéressant aussi, parce que ce n'est pas seulement un programme d'accès à l'égalité mais également pour les entreprises qui appartiennent aux femmes.

Admettons qu'on adopte ce règlement avec des modifications pour le rendre plus fort...

Mme Leclercq: ...II est bien.

M. Marx: D'accord. Admettons qu'on adopte le règlement, admettons que le gouvernement dépose un décret en ce qui concerne l'obligation contractuelle et qu'on applique le règlement à ces compagnies. D'accord? On va rester avec l'article 7, paragraphe 3, qui stipule: "Les mesures de redressement visent à éliminer la discrimination subie par un groupe de personnes en accordant temporairement à ses membres certains avantages préférentiels". C'est-à-iiire éliminer la discrimination subie par un groupe. Il serait donc nécessaire de prouver qu'il y a eu discrimination envers ce groupe avant que le programme de redressement soit appliqué. Il y a toute une démarche. Ce n'est pas comme...

Mme Leclercq: Une démarche juridique. M. Marx: C'est cela.

Mme Leclercq: Il va falloir aller en cour pour...

M. Marx: II va falloir aller en cour, le cas échéant.

Mme Leclercq: ...faire la preuve... Mais la preuve 3ystémique, vous savez qu'elle est très facile à faire, dans le fond. Les statistiques parlent.

M. Marx: Est-ce qu'aux États-Unis, c'est très facile à prouver?

Mme Leclercq: Ce sont les statistiques... C'est cela. Pour les tribunaux américains, ce sont les statistiques qui parlent.

M. Marx: Supposons que je vous dise -je pense que c'est vrai - qu'il y a peu d'hommes qui sont infirmiers. Est-ce que vous allez dire que c'est de la discrimination systémique à cause des chiffres?

Mme Leclercq: Bon. Là, on ne va pas... M. Marx: À cause des...

Mme Leclercq: Attention, parce que là on dit: Les groupes victimes de discrimination. Les hommes blancs en Amérique du Nord...

M. Marx: Dans la profession d'infirmier...

Mme Leclercq: ...ne sont pas des groupes victimes.

Une voix: Ou de secrétaire.

M. Marx: ...ou de secrétaire. Parce qu'il n'y a pas d'homme secrétaire à l'Assemblée nationale, est-ce qu'on va dire qu'à cause des statistiques il y a de la discrimination? Je pense que non.

Mme Leclercq: Non. Des groupes victimes de discrimination en général dans la société.

M. Marx: Non, mais je pense que ce n'est pas assez juste de prendre les statistiques. Peut-être que dans certains cas ce sera assez mais dans d'autres cela prendra une preuve plus concluante, il me semble.

Le Président (M. Gagnon): Mme

Leclercq.

Mme Leclercq: Quand des femmes vont déposer des plaintes parce qu'elles n'ont pas accès au travail dans une compagnie, si elles prouvent qu'il n'y avait pas de femmes dans cette compagnie cela va être suffisant pour un tribunal pour décider d'imposer un programme d'accès à l'égalité. Ce n'est pas plus compliqué que cela, n'est-ce pas?

M. Marx: Je ne suis pas sûr que nos tribunaux seront aussi libéraux que vous dans l'interprétation de ce règlement. C'est à voir.

Mme Leclercq: Je ne dis pas que ce n'est pas une question mais on va les encourager si on peut.

Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le député. M. le député de Rousseau.

M. Blouin: Merci. Mme Leclercq ou Mme Novak, si j'ai compris l'approche que vous nous soumettez, vous souhaitez, que chaque fois qu'une entreprise contracte avec le gouvernement, elle soit dans l'obligation d'implanter un programme d'accès à l'égalité. Vous postulez donc que dans la presque totalité des cas les entreprises ont des problèmes de discrimination systémique. Est-ce que vous seriez en totale contradiction avec une autre approche qui aurait pour effet de dire: Si on observe de la discrimination systémique on exigera un programme d'accès à l'égalité. Mais, dans le cas contraire, pour des entreprises qui sont à leur face même correctes dans leur gestion et dans leur embauche, on n'exigera pas inutilement de programme d'accès à l'égalité.

Mme Leclercq: Vous voulez dire au niveau de l'obligation de contracter avec le gouvernement. C'est sûr que si une entreprise va dire au gouvernement: Écoutez, j'ai tant de femmes dans tel métier et tant de femmes là, le gouvernement va dire, c'est très bien, c'est parfait. Vous pouvez contracter. C'est ce qui se passe aux États-Unis. Si l'entreprise dit qu'elle a un certain nombre de femmes dans les métiers non traditionnels, par exemple, cela va être acceptable. C'est cela un programme d'accès à l'égalité. Cela veut dire qu'ils l'ont déjà fait avant. C'est parfait. Il n'ont qu'à montrer leurs statistiques, c'est tout.

M. Blouin: Autrement dit, dans la mesure où des entreprises agiraient, entre guillemets, "correctement", elles ne seraient pas tenues de multiplier les...

Mme Leclercq: Mais non. C'est sûr que cela va être regardé. C'est cela l'obligation contractuelle. C'est de demander: Avez-vous déjà des femmes - enfin, si on prend le cas des femmes - dans les métiers? Quelle est la répartition des femmes dans votre entreprise? Si on juge que c'est bien, que c'est conforme à ce que cela doit être minimalement, cela ira.

M. Blouin: Et qui devrait déceler ces corrections ou ces incorrections?

Mme Leclercq: C'est le gouvernement, avant de contracter. C'est comme cela que cela se fait aux États-Unis. Ils ont cet Office of Federal Contract Compliance qui est chargé de vérifier si les compagnies ont mis en place, dans le cas où c'était nécessaire, des programmes d'accès à l'égalité ou si elles ont assez de minorité visible ou de femmes dans la compagnie.

M. Blouin: Cela va. Merci.

Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le député de Rousseau. Mme la députée de Jonquière.

Mme Saint-Amand: Merci, M. le Président. Lors de l'intervention du groupe qui vous a précédées, Mme Leclercq et Mme Novak, c'est-à-dire la Fédération des femmes du Québec, on avait élargi la notion d'obligation contractuelle jusqu'à des entreprises subventionnées. C'est le seul groupe qui a mentionné l'obligation pour des entreprises subventionnées. Est-ce que vous avez étudié cette éventualité ou si vous l'avez tout simplement écartée?

Mme Leclercq: Je ne peux pas vous dire qu'on l'a vraiment étudiée mais c'est certain que nous avons déjà mentionné à quel point il y avait beaucoup d'argent des contribuables qui allait dans les subventions. Alors, on ne serait certainement pas en désaccord avec ce genre d'approche de nos collègues, parce qu'on a déjà mentionné à

plusieurs reprises que les subventions données pour installer de la microtechnologie, etc., c'est l'argent des contribuables et qu'on pourrait le vouloir ailleurs, dans les hôpitaux, par exemple. C'est une approche avec laquelle on ne serait pas en désaccord.

Mme Saint-Amand: Êtes-vous informée si cette mesure est en application aux États-Unis?

Mme Leclercq: Pour les...

Mme Saint-Amand: Pour les entreprises subventionnées.

Mme Leclercq: Je ne le sais pas. Je ne pourrais pas vous répondre aujourd'hui mais on peut le savoir très facilement. Je pense que la Commission des droits de la personne pourrait le savoir. Sinon, je peux m'informer et vous répondre.

Mme Saint-Amand: Je vous remercie.

Le Président (M. Gagnon): Merci, Madame. M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: Très brièvement, M. le Président, je voudrais demander à Mme Leclercq et à Mme Novak si elles sont d'accord avec l'idée de la création d'un fonds d'aide pour faciliter le recours aux tribunaux. (17 h 15)

Mme Leclercq: Absolument. Nous étions partie à part entière à la démarche de la coalition et bien sûr que nous sommes absolument d'accord. Nous le réclamons au fédéral aussi, comme vous le savez, parce que, sinon... d'ailleurs, on n'aurait jamais pu payer notre cause en appel pour aller à la Cour suprême contre le Canadien National si on n'avait pas eu... Bon, là le gouvernement fédéral a accordé un fonds pour nous, sinon on n'aurait jamais pu aller en Cour...

M. de Bellefeuille: C'était une décision ad hoc, je crois.

Mme Leclercq: Oui, quant au fonds qui nous a été octroyé. Mais nous l'avons toujours réclamé pour les autres groupes aussi. Nous l'avons réclamé depuis notre première victoire, mais depuis que le CN a décidé d'aller en appel, nous avons réclamé un fonds pour tous les groupes victimes de discrimination.

M. de Bellefeuille: Merci.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de D'Arcy McGee, pour une demi phrase, semble-t-il.

Mme Leclercq: J'ai une dernière question à vous poser à vous, s'il vous plaît.

M. Marx: Je voudrais juste dire que quelqu'un m'a informé qu'en Suède les compagnies qui sont subventionnées doivent avoir des programmes d'accès à l'égalité. Donc, il faut peut-être se mettre à l'heure de la Suède.

Mme Leclercq: Oui, j'aurais pu vous parler de l'Europe. Je ne l'ai pas fait aujourd'hui. Je pensais qu'on avait assez de matière en Amérique du Nord, mais, effectivement, c'est intéressant aussi, bien sûr.

Le Président (M. Gagnon): Alors, vous avez le mot de la fin.

Mme Leclercq: Cela ne va pas être très long. Je vous remercie d'abord de m'avoir écoutée. La question, c'est ce projet de règlement. Quand va-t-il entrer en vigueur et comment, au sujet des délais, cela peut-il se passer? Est-ce que le gouvernement peut décider de l'entrée en vigueur tout de suite?

Le Président (M. Gagnon): J'aimerais pouvoir répondre à votre question, comme président de la commission, mais je pourrais peut-être vous apporter une réponse plus tard. Ce qu'on sait, c'est que, lorsque le travail de la commission sera terminé, on a un rapport à faire, et, par la suite, le règlement devrait entrer en vigueur. Peut-être que demain on pourrait préciser pour donner une réponse plus claire.

Mme Leclercq: Nous la souhaitons fortement parce que si nous avons des élections très bientôt, nous voulons avoir ce projet de règlement avant les élections et je me permets de vous rappeler encore cet après-midi que les femmes sont pressées d'entrer dans les compagnies, d'avoir des meilleurs salaires, des conditions de travail acceptables et une sécurité d'emploi pour pouvoir élever leurs enfants décemment.

Le Président (M. Gagnon): Vous savez, je n'ai pas de pouvoir sur la date des élections. Juste sur la commission parlementaire... Oui, M. le député de Rousseau.

M. Blouin: Peut-être à titre d'information pour Mme Leclercq, qu'on soit ou non en période électorale, le gouvernement peut continuer à adopter des règlements, à les mettre en vigueur. Qu'on soit ou non en période électorale, le processus de réglementation n'arrête pas.

Mme Leclercq: Je trouve cela très important ce que vous me dites aujourd'hui et j'espère bien que cela va être le cas, que

le gouvernement ne s'arrêtera pas dans ce processus entamé.

M. Blouin: Cependant, cela ne signifie pas nécessairement que le programme, théoriquement - ce n'est pas moi qui vais prendre la décision, mais je vous donne des informations techniques - sera accepté avant les élections. Ce que cela signifie, c'est qu'une période électorale n'enraye pas la procédure d'adoption des différents règlements.

Mme Leclercq: Vous voulez dire que si la procédure est entamée, même s'il y a des élections...

M. Blouin: On peut continuer.

Mme Leclercq: ...que cela pourrait être adopté juste après les élections quel que soit le gouvernement en place, du moment que la procédure a été entamée avant.

M. Marx: M. le Président...

Le Président (M. Gagnon): Oui, un instant. M. le député de Vachon, un petit mot aussi, semble-t-il.

M. Payne: Si je vous comprends bien, vous dites que, si l'inimaginable nous arrivait et que c'était, le parti de l'Opposition qui accédait au pouvoir, vous craignez peut-être que cela ne soit pas adopté?

M. Marx: M. le Président...

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Deux-Montagnes, d'abord.

M. de Bellefeuille: Je veux seulement suggérer que le rapport de la commission fasse état de l'intervention extrêmement importante que le député de Rousseau vient de faire. Puisqu'il y a cette possibilité d'élections qui flotte, il faudrait que la commission recommande au gouvernement d'agir même s'il est en campagne électorale.

M. Marx: M. le Président...

Le Président (M. Gagnon): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: J'aimerais apporter une certaine correction parce que je pense que le député de Rousseau était mal renseigné sur cette question de l'adoption et de la mise en vigueur du règlement. Je demande au député de Rousseau de lire l'article 86.9: "Le gouvernement...

M. Blouin: L'article que vous...

Le Président (M. Gagnon): Attention!

M. Marx: Puis-je terminer, M. le Président?

Le Président (M. Gagnon): Je m'excuse, M. le député de Rousseau!

M. Blouin: Oui, M. le Président. Est-ce qu'il s'agit de l'article que vous ne compreniez pas ce matin?

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Rousseau! M. le député de D'Arcy McGee, vous avez la parole.

M. Marx: Article "86.9. Le gouvernement, après consultation de la commission -c'est la Commission des droits de la personne - publie le projet de règlement à la Gazette officielle du Québec avec un avis indiquant le délai après lequel ce projet sera déposé devant la commission parlementaire élue de la justice et indiquant qu'il pourra être adopté après l'expiration des trente jours suivant le dépôt du rapport de cette commission devant l'Assemblée nationale." Donc, M. le Président, il faut que cette commission dépose le rapport devant l'Assemblée nationale avant que le règlement soit adopté.

Donc, s'il y a des élections, il n'y aura pas de dépôt devant l'Assemblée nationale, parce que je ne pense pas qu'elle siège lors des élections. Donc, ce que le député de Rousseau a dit, qu'on peut même adopter un règlement durant la période électorale, ce n'est pas exact dans le sens qu'il faut que le rapport soit déposé devant l'Assemblée nationale et, si les élections sont déclenchées, elle ne siège pas.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Rousseau.

M. Blouin: M. le Président, le député de D'Arcy McGee a beaucoup de difficulté avec l'article 86.9. Ce matin, il confondait la Commission des droits de la personne avec la commission parlementaire et...

M. Marx: Pas du tout, M. le Président.

M. Blouin: ... cet après-midi, ce que j'ai expliqué simplement à nos intervenants, c'est que le gouvernement avait la possibilité, en campagne électorale, évidemment, de procéder selon les prescriptions de la loi.

M. Marx: II faut que ce soit déposé devant l'Assemblée nationale.

Le Président (M. Gagnon): Excusez-moi!

M. Blouin: Ce que je peux vous expliquer à nouveau, c'est que lorsque la commission termine ses travaux, elle dépose

son rapport à l'Assemblée nationale et le gouvernement, qu'il soit ou non en période électorale, peut continuer les procédures prévues dans la loi. Voilà!

M. Marx: Si les élections sont déclenchées la semaine prochaine, l'Assemblée nationale ne siégera pas.

M. Blouin: Mais ce n'est pas vous qui déclenchez les élections.

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît! C'est à cause de cela, madame, que je vous disais que je vais demander plus d'information et que je pourrai vous donner plus de détails demain. Je vous remercie, d'abord, de votre apport à la commission, Mme Leclercq, ainsi que Action travail des femmes. Je vais maintenant inviter le Comité de condition féminine du réveil des assistés sociaux de Longueuil à venir à la table. Nous allons suspendre les travaux pendant cinq minutes.

(Suspension de la séance à 17 h 23)

(Reprise à 17 h 28)

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons maintenant entendre le comité de condition féminine du Réveil des assistés sociaux de Longueuil représenté ici par Mme Danielle Perron.

Juste avant de vous laisser la parole, vous êtes ici depuis le matin, donc vous savez qu'on consacre 55 minutes par mémoire, soit environ 20 minutes pour entendre votre mémoire et 35 minutes d'échanges de propos avec les membres de la commission. Je voudrais aussi demander immédiatement aux membres de la commission la permission de poursuivre après 18 heures pour qu'on puisse terminer les travaux avec ce comité. Vous êtes d'accord?

M. Marx: Consentement.

Le Président (M. Gagnon): En vous souhaitant la bienvenue, je vous laisse le micro immédiatement.

CCFRASL

Mme Perron (Danielle): Bonjour. Je viens me joindre à toutes les femmes, aux organismes de femmes qui ont présenté un mémoire à la commission et aussi aux femmes qui n'ont pas pu venir, souvent par manque de fonds, et qui n'ont pas pu se rendre à Québec. Elles ont quand même présenté un mémoire. J'imagine que plus on est d'organismes qui appuient une telle recommandation, plus cela peut avoir d'impact.

Je viens rendre compte d'un mémoire sur ce projet de règlement sur les programmes d'accès à l'égalité. Je représente, comme vous avez dit tantôt, le comité de la condition féminine du Réveil des assistés sociaux de Longueuil. Nous sommes un organisme à but non lucratif qui regroupe des assistés sociaux grâce aux programmes de relance d'aide à l'emploi du gouvernement. Nous nous occupons principalement de défendre les droits des assistés sociaux, mais en fin de compte, nous sommes des assistés sociaux qui défendons les droits d'autres assistés sociaux en plus de leur fournir une formation, formation dans le sens personnel et social. On les aide a monter des dossiers pour défendre leurs droits, à devenir maîtres d'eux, si vous voulez. On les aide dans une démarche vers l'autonomie, vers une réinsertion sociale afin de leur faire découvrir des moyens de s'en sortir. Si on les aide à trouver des moyens de s'en sortir, on aimerait bien que les futurs employeurs les aident aussi dans leur cheminement parce que, pour nous autres, c'est déjà notre façon de penser. On aimerait que cela continue après, lorsqu'ils vont se trouver de l'emploi et que ce soit facilement accessible pour eux.

Par ce mémoire, nous voulons transmettre à la commission parlementaire notre position spécifique face au projet de règlement sur les programmes d'accès à l'égalité. Notre position a été discutée avec des groupes de femmes de Montréal et des groupes de femmes de la Table régionale de la Montérégie qui regroupe environ 20 groupes de femmes; on a aussi reçu des lettres d'appui de ces groupes-là.

En tant qu'organisme défendant les droits des assistés sociaux et en tant que comité de la condition féminine au sein de cet organisme, nous représentons principalement les femmes assistées sociales monoparentales inscrites dans des programmes de relance du gouvernement.

Notre comité de la condition féminine se dit entièrement d'accord avec le mémoire du CSF, particulièrement les modifications proposées aux articles 1, 5, 9, 10 et 11. Je n'ai pas l'intention de faire tout ce que mes consoeurs ont fait ce matin et cet après-midi par rapport à chaque article. Je crois que vous étiez tous là pour en prendre connaissance. Pour nous, une relève de l'équité sociale, c'est effectivement que s'établisse un programme d'action concrète afin d'abolir les injustices. C'est pour cette raison que nous appuyons fermement la mise en application d'un tel projet de règlement. On n'a pas à faire non plus le consensus; je crois que le consensus est déjà établi sur la nécessité d'un tel programme.

Donc, à partir de notre situation, nous proposons que l'accès à l'égalité soit appliqué par toutes les personnes ou organismes qui

soumettent des projets dans le cadre des programmes de relance, pas seulement dans l'emploi régulier ou dans les études. Peu importent les modalités d'application, notre objectif est clair; c'est plutôt de couvrir les programmes de relance du gouvernement ainsi que les autres programmes de formation de la main-d'oeuvre par les programmes d'accès à l'égalité. Déjà, la loi 86 prévoit que le gouvernement mettra en place de tels programmes dans ses ministères. Pour nous, il est essentiel que le ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu applique ces programmes dans les programmes de relance. Donc, en tant que Comité de la condition féminine du Réveil des assistés sociaux, nous recommandons que l'ensemble du projet de règlement sur l'accès à l'égalité s'applique également au niveau des programmes de relance du gouvernement offerts aux assistés sociaux comme les stages en milieu de travail, les travaux communautaires et j'en passe - il y en a beaucoup - les bourses d'affaires, outils de gestion, soutien à l'emploi et tout cela. C'est un peu tout. Si vous avez des questions...

Le Président (M. Gagnon): Merci. M. le député de Vachon.

M. Payne: J'aime cela. C'est court, c'est succinct, c'est simple et clair. Mme Perron, je vous remercie. C'est clair aussi particulièrement en ce qui concerne les programmes de relance du gouvernement. Je pense que c'est une remarquable suggestion qui devrait être prise en considération sérieusement. Cela pourrait même être discuté dans le cadre de l'ensemble des suggestions apportées aujourd'hui qui touchent, par exemple, tous les programmes d'aide de la part du gouvernement. Il y a d'autres manières de subventionner une entreprise que dans le cadre d'un programme direct de création d'emplois et peut-être que ces entreprises devraient avoir leurs propres conditions d'admissibilité aux programmes.

J'aurais une question, en particulier. Peut-être pouvez-vous, dans l'intérêt de la commission, nous indiquer, relativement au groupe que vous représentez... À propos des femmes assistées sociales monoparentales inscrites aux programmes de relance du gouvernement, quelles sont précisément -vous avez donné quelques indications, mais pas trop - les situations de discrimination que vous avez constatées? Vous avez dit que les chefs de familles monoparentales ne peuvent pas bénéficier des mêmes privilèges que les personnes seules pour un travail équivalent.

Mme Perron: D'accord. Dans le mémoire envoyé, on a peut-être charrié, on en a peut-être mis un peu trop; il porte plutôt sur l'accès à l'égalité des chances prévue par la charte et ce n'est peut-être pas tout à fait pertinent pour votre projet de règlement, mais...

M. Payne: Non. C'est un exemple légitime.

Mme Perron: C'est un exemple? Ah, d'accord. Je vais l'apporter. C'est cela. Les chefs de familles monoparentales, en étant sur un travail quasi bénévole d'un projet de formation ou un projet Déclic, en tout cas, un projet de relance, sont moins rémunérés que les assistés sociaux sans enfant, les assistés sociaux inaptes au travail. On sait que la grosse majorité des adultes aptes au travail, mais non disponibles, est composée de femmes chefs de famille. Donc, elles sont moins rémunérées pour un travail équivalent. Cela rentre dans le cadre du travail égal, salaire égal.

M. Payne: C'est donc en partie à cause de la prise en considération de leurs frais de garde dans la rémunération. Est-ce exact?

Mme Perron: Oui, c'est cela, si facilement déduits de leurs revenus.

M. Payne: Donc, c'est une discrimination.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? Merci, M. le député de Vachon. M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: Merci, M. le Président. J'aimerais remercier Mme Perron pour être venue aujourd'hui présenter ce mémoire. L'effet des programmes d'accès à l'égalité pourrait bien être de permettre aux femmes qui sont des assistées sociales de trouver de l'emploi comme le mentionnent les travaux d'Action travail des femmes. Si on peut avoir ces programmes d'accès à l'égalité, cela pourra ouvrir un certain nombre de postes aux femmes. Je pense que ce serait une excellente chose, étant donné que les femmes qui sont assistées sociales... Il n'y a pas le seul fait d'être assistée sociale, il y a aussi le problème de la discrimination systémique qui les empêche de trouver de l'emploi.

Dans votre mémoire, vous avez écrit que vous voulez que le règlement s'applique également aux programmes de relance du gouvernement offerts aux assistés sociaux. Est-ce que cela veut dire que vous voulez que les femmes assistées sociales soient avantagées par rapport aux hommes, par exemple, qui sont assistés sociaux?

Mme Perron: Non, mais qu'elles soient couvertes au même titre que si elles travaillaient dans une entreprise, ou qu'elles

aient le droit à l'accès autant que dans une entreprise. C'est dans ce sens.

M. Marx: D'accord. Que l'entreprise soit couverte par le règlement.

Mme Perron: Oui, que les gens qui sont engagés par une entreprise sur un projet de relance soient couverts par le règlement sur l'accès à l'égalité.

M. Marx: Oui, cela rejoint ce que la députée de Jonquière a soulevé, que si une entreprise est subventionnée, il faut faire en sorte que cette entreprise soit soumise au règlement? Cela a été soulevé par la députée de Jonquière...

Mme Perron: C'est au même titre.

M. Marx: Oui, c'est cela, c'est une idée à considérer. Merci.

Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le député de D'Arcy McGee. M. le député de Saint-Jacques.

M. Viau: Je tiens à remercier Mme Perron de sa présentation. Première question, est-ce que vous faites partie du regroupement l'OPDS?

Mme Perron: Non.

M. Viau: Vous ne faites pas partie de l'Organisme populaire de défense des droits sociaux?

Mme Perron: Non, mais c'est à peu près dans le même sens que l'on travaille.

M. Viau: Je tiens à féliciter le Réveil des assistés sociaux de Longueuil d'avoir décidé de participer à cette commission. On mentionne là-dedans une chose extrêmement importante, on parle de certains programmes qui ne s'adressent souvent qu'aux jeunes; les programmes Déclic-Jeunesse ne s'adressent qu'aux assistés de moins de 30 ans. Il y a plusieurs interprétations quant à l'évaluation que l'on peut faire de ces programmes afin, d'une part, d'augmenter vraiment l'employabilité et, d'autre part, les motifs qui font que ceux qui en bénéficient veulent vraiment augmenter leur employabilité.

Maintenant, j'aimerais poser une question; cela a constitué l'une de mes préoccupations toute la journée: Quand on a parlé d'assistés sociaux, on a mentionné au cours de la journée des expériences pertinentes connexes pour permettre à une assistée sociale ou à un assisté social - une assistée sociale dans notre cas - de pouvoir se faire accréditer une certaine expérience, soit de travail bénévole en organismes ou encore du travail à la maison. C'est reconnaître le travail ou l'expérience à la maison. Est-ce qu'il est facile pour l'instant de voir dans le milieu une volonté de pouvoir reconnaître justement ce travail-là a la maison ou dans des organismes communautaires?

Mme Perron: On aide justement les gens qui ont recours à notre organisme et qui doivent faire un curriculum vitae pour envoyer aux employeurs. On les aide à faire valoir leur acquis. Tout ce qu'ils ont acquis par le passé par du bénévolat ou par des actions, on leur demande de le mentionner dans un curriculum vitae. On les aide à faire cela pour éventuellement chercher de l'emploi et mettre en valeur leur expérience pour montrer qu'ils n'ont pas niaisé tout le temps.

Les assistés sociaux qui reçoivent des prestations d'aide sociale depuis cinq ans, c'est peut-être un préjugé de dire qu'ils n'ont rien fait pendant cinq ans. Ils sont souvent discriminés au niveau de l'entreprise quand un employeur voit que le gars qui arrive reçoit du bien-être social depuis cinq ans. Tout de suite il est mal vu. Si on essaie de mettre en valeur ses acquis pendant cinq ans, ce qu'il a fait: il n'a peut-être pas trouvé de l'emploi - c'est peut-être deux ans - il n'a peut-être pas trouvé d'emploi mais il a peut-être fait quelque chose d'important. On peut mettre cela en valeur.

M. Viau: Vous avez répondu un peu à ma deuxième question mais je vais vous la poser quand même. Est-ce qu'on peut dire qu'une assistée sociale fait face à une double discrimination, sa condition de femme qui fait en sorte qu'elle se voit confrontée entre autres à des discriminations systémiques et sa condition d'assistée sociale; cela fait en sorte qu'elle a un double handicap pour ce qui est de trouver de l'emploi.

Mme Perron: C'est cela.

M. Viau: Quand on parlait de ces programmes d'accès à l'emploi ou à l'employabilité vous avez mentionné aussi quelque chose d'extrêmement intéressant au niveau des familles monoparentales, c'est-à-dire d'avoir les ressources pour permettre une plus grande autonomie pour permettre justement la recherche d'emploi ou l'intégration sur le marché du travail. Pour vous, est-ce qu'on pourrait pratiquement quantifier cela d'un droit, le droit à l'autonomie? Est-ce qu'on pourrait tirer la ligne et aller jusqu'à dire que la garderie, pour un chef de famille monoparentale vivant sur l'aide sociale, ne compterait pas dans les droits acquis ou droits connexes, faisant partie pour le développement de ces personnes-là de programmes connexes ou de programmes d'appui?

Mme Perron: Oui mais vous pariez de garderie. Est-ce considéré comme un revenu, la garderie?

M. Viau: Non. On parle depuis tantôt de permettre à la femme ou au chef de famille monoparentale de pouvoir avoir accès au travail. Une des barrières les plus importantes pour les chefs de famille monoparentale c'est l'autonomie. C'est une question de pouvoir disposer ou de pouvoir avoir la ressource de faire garder ses enfants ou d'avoir un service de garde qui lui permette d'être autonome. Est-ce qu'on pourrait considérer cela dans les programmes d'accès à l'égalité? Est-ce qu'on pourrait lever ce voile et dire que...

Mme Perron: C'est un programme de soutien, cela fait partie justement du projet de règlement. Puisqu'on parle d'un programme de soutien c'est exactement ce qu'on peut faire valoir.

M. Viau: Quand on parle d'un programme de soutien dans le règlement on pourrait parler entre autres de services de garderie.

Mme Perron: Bien oui. On a passé le temps d'avoir six ou sept enfants. Les femmes ont un, deux ou trois enfants. Donc, elles sont plus sur le marché du travail. Elles ont droit à plus d'accès. Autrefois, quand tu avais huit enfants, ce n'était pas la même situation. On ne peut pas comparer avec un, deux ou trois enfants, surtout quand ils vont à l'école. Il y a seulement peut-être au niveau de la garderie... Cela se fait bien d'avoir un programme de soutien. Tu n'en as pas huit à faire garder; tu en as un ou deux.

Le Président (M. Gagnon): Merci. Je vous remercie beaucoup, Mme Danielle Perron, du mémoire que vous avez présenté à la commission. Cela termine nos travaux pour aujourd'hui.

Avant de vou9 donner rendez-vous demain, à 10 heures, je voudrais vous mentionner que, demain, nous entendrons le Congrès juif canadien, région du Québec, le Conseil du patronat du Québec, le Centre de recherche-action sur les relations raciales, le Barreau du Québec, l'Association des manufacturiers canadiens, division du Québec, la Centrale de l'enseignement du Québec, Centro Donne Montréal, L'R des centres de femmes du Québec. Nous ajournons nos travaux à demain, 10 heures.

(Fin de la séance à 17 h 45)

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