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Version finale

36e législature, 1re session
(2 mars 1999 au 9 mars 2001)

Le mardi 8 juin 1999 - Vol. 36 N° 20

Étude détaillée du projet de loi n° 52 - Loi modifiant la Loi concernant les enquêtes sur les incendies


Étude détaillée du projet de loi n° 44 - Loi modifiant la Loi de police


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Table des matières

Journal des débats


(Quinze heures cinq minutes)


Projet de loi n° 52

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Alors, la commission des institutions amorce ses travaux relativement au mandat de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 52, Loi modifiant la Loi concernant les enquêtes sur les incendies.

M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Ouimet (Marquette) est remplacé par M. Middlemiss (Pontiac).


Remarques préliminaires

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien. Alors, j'inviterais à ce moment-ci le ministre à bien vouloir prendre la parole au niveau des remarques préliminaires. M. le ministre.


M. Serge Ménard

M. Ménard: Bon. Alors, je serai bref, M. le Président, puisque c'est un projet de loi qui n'est pas très long, puis je ne crois pas qu'il porte vraiment à controverse, parce que je pense, en tout cas pour les raisons qui nous ont amenés à modifier ce projet de loi, que nous devrions probablement les partager avec l'opposition.

Les modifications, certains pourront dire qu'elles étaient attendues depuis longtemps et qu'elles auraient dû être faites depuis longtemps, mais enfin mieux vaut tard que jamais. Elles visent à rendre la Loi concernant les enquêtes sur les incendies conforme aux chartes constitutionnelles actuelles et certainement en tout cas à l'évolution de la jurisprudence qui les a interprétées.

Il s'agit essentiellement d'élargir la portée de la loi en permettant au commissaire-enquêteur de rechercher la cause, l'origine ou les circonstances de tout incendie ou toute explosion ayant causé des dommages à des personnes ou à des biens.

Auparavant, il n'était tenu de rechercher les circonstances que lorsqu'il soupçonnait que l'événement n'était pas accidentel; ce qui l'amenait donc à enquêter sur des incendies d'origine criminelle, faisant ainsi le travail de la police qu'il n'est pas nécessaire d'être fait par un officier et mettant en danger les droits constitutionnels de certains des témoins qui pouvaient être convoqués devant lui.

Alors, le commissaire-enquêteur pourra ensuite déterminer, à la suite de la recherche des causes et des circonstances, l'utilité de mener une enquête et estimer si celle-ci nuira au déroulement d'une enquête policière en cours. Et, s'il est de cet avis, il devra interrompre son enquête jusqu'à ce qu'un jugement final soit rendu.

Alors, comment va-t-il déterminer l'utilité d'une enquête? Il devra, proposons-nous, tenir compte de la nécessité de recourir à l'audition de témoins. Ce pourrait être le cas notamment pour obtenir les informations propres à établir la cause, l'origine ou les circonstances d'un incendie ou d'une explosion, pour informer le public sur la cause, l'origine ou les circonstances d'un incendie ou d'une explosion ou pour permettre la formulation de recommandations visant à assurer une meilleure protection des personnes et des biens.

Il ne pourra pas tenir ou poursuivre une enquête lorsqu'une personne fait l'objet d'une poursuite criminelle, et ce, tant que le jugement n'a pas acquis la force de chose jugée. Cette enquête ne devra pas être utilisée dans le but d'enquêter sur la perpétration alléguée d'infraction criminelle par des personnes nommées.

Le commissaire-enquêteur aura autorité sur la présentation de la preuve et le déroulement de l'enquête alors qu'actuellement ce sont les règles de la preuve en matière criminelle qui s'appliquent. Donc, comme on veut lui enlever tout son caractère d'enquête criminelle, on lui dit qu'il aura autorité sur la présentation de la preuve. Mais on discutera de l'article 25; je pense que l'opposition est soucieuse de la portée véritable de l'article 25. C'est une préoccupation qui l'honore, que je partage, mais je crois qu'essentiellement nous avons choisi peut-être une façon différente qu'aurait choisie l'opposition, mais nous croyons vraiment atteindre le même but. Elle sera exclue du rapport du commissaire... Ah oui, il faudra exclure aussi du rapport du commissaire toute mention relative à un verdict, à un crime ou à une personne qui en serait l'auteur présumé.

Donc, ce projet de loi nous semble justifié parce que le rôle du commissaire-enquêteur a évolué depuis l'adoption de cette loi en 1968 – ça fait maintenant plus de 30 ans – notamment avec la tenue de plusieurs enquêtes publiques sur les incendies ou événements en particulier.

(15 h 10)

Nous le justifions aussi par notre désir de nous assurer davantage de la conformité de ses dispositions avec la Loi constitutionnelle de 1867 et surtout avec la Charte canadienne des droits et libertés. Nous avons le souci ici de voir ses dispositions s'appliquer en harmonie avec celles qui poursuivent des objectifs de même nature et que l'on retrouve dans la Loi sur la recherche des causes et des circonstances de décès.

Mais il reste que le phénomène de l'incendie au Québec demeure très préoccupant. Il y a en moyenne 10 000 incendies de bâtiments par année qui entraînent des pertes matérielles de l'ordre de 370 000 000 $. Malgré que notre bilan sur la vie humaine soit un bilan qui est favorable, généralement plus favorable au Québec que dans la moyenne du reste du Canada, sur les pertes matérielles, notre bilan – et c'est un euphémisme – peut être nettement amélioré. Mais ça, ça fait partie d'un plan que nous avons présenté au congrès de l'Association des chefs de service d'incendie du Québec, et j'en ai d'ailleurs des copies disponibles pour l'opposition. Vous serez parmi les premiers à le recevoir. Il avait été déjà d'abord envoyé, une copie seulement, au président de l'Union des municipalités du Québec et une copie à la présidente de l'Union des municipalités régionales de comté.

Une voix: ...

M. Ménard: Pardon?

Une voix: ...

M. Ménard: Oui, bien, à eux, je leur avais remis avant parce qu'ils pouvaient être appelés à réagir publiquement. Mais on l'a remis hier matin... Non, on l'avait remis aussi au président de l'Association des chefs de service d'incendie du Québec, samedi soir, et puis hier une présentation a été faite à l'ensemble des chefs de service d'incendie.

Alors, nous sommes convaincus, en conclusion, que la recherche des causes et des circonstances des incendies ne peut que contribuer à une meilleure connaissance du phénomène de l'incendie et ce faisant à l'amélioration des mesures de prévention, de protection et de lutte contre l'incendie. C'est là un but, je pense, peut-être radicalement différent de celui qui avait amené la création de cette institution qu'est devenu le Commissaire aux incendies. Donc, plutôt que de l'abolir nous cherchons à lui donner un but différent, utile et exactement semblable aux buts et aux objectifs qui sont poursuivis actuellement par les coroners, mais dans le cas évidemment de perte de vies humaines.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Merci, M. le ministre. Toujours à l'étape des remarques préliminaires, M. le député de Saint-Laurent et porte-parole de l'opposition officielle.


M. Jacques Dupuis

M. Dupuis: Merci, M. le Président. D'entrée de jeu, dans le cadre des remarques préliminaires que j'entends faire au sujet de l'étude article par article du projet de loi n° 52, je voudrais dire que nous nous sommes adressés auprès du bureau du ministre lorsque le projet de loi n° 52 a été déposé à l'Assemblée nationale pour obtenir le mémoire que le ministre avait déposé auprès du Conseil des ministres afin de justifier la décision du Conseil des ministres de permettre l'introduction du projet de loi n° 52. Nous nous sommes fait répondre que le mémoire en question dans son entité était confidentiel et que nous ne pouvions y avoir accès sous aucune considération et que nous ne pouvions avoir accès à quelque partie du mémoire que ce soit, le mémoire ne comportant pas de partie accessible au public.

Ça fait quelques fois que, depuis le début de cette session et au début de ce nouveau mandat, nous nous voyons fermer la porte par le ministre de l'accès au mémoire qu'il soumet au Conseil des ministres. Je voudrais une fois de plus – comme je l'ai fait dans d'autres circonstances – déplorer cette situation et ajouter que je ne comprends pas pourquoi, dans le cas de ce mémoire-ci comme dans le cas du mémoire dont nous parlerons au cours de cette semaine, ayant présidé au dépôt du projet de loi n° 20 sur les modifications à la Loi sur les permis des alcools et à la Loi sur la Régie des loteries, courses et jeux, je ne comprends pas pourquoi le ministre semble s'entêter à vouloir rendre ces mémoires confidentiels.

Je lui rappellerai qu'il n'est pas propriétaire des pouvoirs dont le premier ministre l'a investi, d'une part, qu'il n'est pas propriétaire non plus des arguments qui militent en faveur de modifications des projets de loi et qu'il est au fond, au même titre que le représentant de l'opposition, le représentant à l'Assemblée nationale, auprès du Conseil des ministres, et dans ses capacités, de la population. Or, la population, ce n'est pas seulement la population qui a voté pour le gouvernement; c'est la population qui a exercé son droit de vote et qui a voté pour tous les gens qui sont élus à l'Assemblée nationale, de quelque parti soient-ils. Moi j'aimerais bien...

Je peux comprendre – parce que je pense que je suis quelqu'un de raisonnable – qu'un ministre ne souhaite pas rendre publics certains motifs qui ont présidé au dépôt d'un projet de loi, pour toutes sortes de raisons. Dans le cas du ministre de la Sécurité publique, ça peut être des raisons de sécurité publique effectivement. Je n'ai pas l'intention, je n'aurai pas l'intention et je ne réagirais pas de telle sorte que je n'accepterais pas la parole du ministre de la Sécurité publique si celui-ci me disait: Le mémoire est confidentiel pour des raisons d'ordre et de sécurité publique. Je prendrais sa parole. Mais je vois difficilement comment de telles raisons pourraient militer en faveur du secret dans le cadre du projet de loi n° 52, qui dans le fond rend moderne, rend conforme à des décisions des plus hauts tribunaux du pays la procédure prévue devant le Commissaire aux incendies.

Honnêtement, je ne vois pas ce qui a pu militer en faveur du secret dans ce cas-là, sinon le fait malheureusement – et j'espère que ce n'est pas le cas, le ministre pourra y répondre s'il le veut – que la lecture du mémoire au Conseil des ministres donnerait la possibilité à l'opposition de préparer des arguments pour contredire certaines des affirmations du ministre dans le mémoire qu'il a déposé au Conseil des ministres, comme c'est arrivé, par exemple, dans le cas de la loi modifiant la loi sur les circonstances entourant les décès, le projet de loi n° 19, dont nous avons discuté déjà à l'Assemblée nationale et dont nous avons discuté en étude article par article, et où l'opposition, après avoir eu la possibilité d'étudier le mémoire au Conseil des ministres, a été en mesure de critiquer un certain nombre de positions qui avaient été prises par le ministre dans son mémoire et de faire des vérifications aussi sur certaines affirmations qui avaient été faites.

Alors donc, j'apprécierais que le ministre traite de cette question dans nos échanges que nous avons cet après-midi dans le cadre du projet de loi n° 52 pour respecter la règle de la pertinence, M. le Président, en s'attachant aux raisons qui ont pu le motiver pour refuser de rendre au moins une partie accessible au public, de la rendre accessible à l'opposition en ce qui concerne le mémoire qu'il a soumis pour le projet de loi n° 52.

Ceci étant dit, j'ai déjà indiqué à l'étude article par article que l'opposition n'allait pas faire de difficultés à l'adoption du projet de loi n° 52 parce qu'effectivement, comme l'a dit le ministre à la fois dans son discours lors de l'adoption de principe et comme il l'a redit cet après-midi, le projet de loi n° 52 est un projet de loi que je qualifierai de moderne, et je pense bien que tous les juristes, qui soit ont pratiqué devant les tribunaux ou soit travaillent au ministère de la Justice ou travaillent au ministère de la Sécurité publique et qui se sont penchés sur ce projet de loi là, sont d'avis qu'il était temps probablement que ce projet de loi là soit introduit. Il ressemble étrangement... pas étrangement, excusez-moi, ce n'est pas la bonne expression, il ressemble dans certaines de ses dispositions évidemment... certains de ses articles sont tout à fait pareils à ceux qu'on retrouve dans la loi qui concerne les coroners, et je pense que c'est à escient que ça a été fait de cette façon-là.

(15 h 20)

Moi, je me souviens, le ministre s'en souviendra sûrement... Moi, je n'ai pas pratiqué devant le Commissaire aux incendies depuis un bon bout de temps. J'y suis déjà allé cependant. Je ne suis pas allé devant les coroners depuis très longtemps pour toutes sortes de raisons, mais particulièrement parce que, dans mon ancienne vie, plus récente, j'étais procureur de la couronne, et nous n'allions pas devant ces instances-là. Mais je me souviens – et je suis sûr que le ministre va être d'accord avec moi – quelquefois des cauchemars qui ont entouré les nuits précédant ma présence devant, à l'époque, le coroner Laniel ou le coroner Héroux, ou même Me Delâge qui siège toujours comme commissaire aux incendies, quand j'étais avocat de défense, et que j'étais devant un client qui était témoin important – ils appelaient ça témoin important dans ce temps-là – devant le coroner ou témoin important devant le Commissaire aux incendies – dans le cas du Commissaire aux incendies, suite à un incident qui avait détruit un bâtiment – et qu'on savait très bien que notre client était appelé comme témoin devant le coroner ou devant le Commissaire aux incendies afin de recueillir son témoignage. Il ne bénéficiait pas évidemment de la possibilité de refuser de témoigner; au contraire, s'il refusait de témoigner, il encourait les foudres de la loi.

Alors, partagé, donc, entre cette obligation de conseiller au client de respecter la loi et l'obligation de lui donner un conseil bien avisé en regard des suites qui pourraient être données à son témoignage s'il témoignait effectivement devant le coroner, je me souviens que ça a toujours été un problème – en tout cas je suis sûr, dans le cas du ministre, que ça l'a été, parce qu'on a pratiqué de la même façon, je le sais, quand nous étions avocats de défense – ça a toujours été un problème presque moral de savoir quel conseil il fallait donner au client à ce moment-là. Et je me souviens qu'en certaines occasions il a fallu faire des entourloupettes assez significatives avec nos clients pour ne pas donner un conseil qui serait en marge de la loi mais pour faire en sorte que le conseil soit compris. Je vois le ministre sourire et je suis certain qu'il avait sa propre façon, j'imagine, de s'adresser à ses clients, j'avais la mienne, mais...

M. Ménard: C'est confidentiel.

M. Dupuis: C'est confidentiel; c'est exactement ça que j'allais dire. Mais évidemment il fut un temps où les enquêtes devant le Commissaire aux incendies – et ça n'a rien à voir avec la personnalité de Me Delâge... que les commissaires aux incendies étaient plutôt des expéditions de pêche, pouvaient soit être des expéditions de pêche, ou alors en certaines occasions étaient une façon pour les policiers d'aller recueillir une preuve qu'autrement ils savaient être incapables d'aller recueillir.

D'ailleurs, la Cour d'appel du Québec, dans la cause célèbre que, moi, j'appelle Kabbabe – moi, mon appellation, c'est celle-là; celle du ministre, je l'entendrai s'il le souhaite – dans cette cause, la Cour d'appel, sous la plume de notre ami commun Michel Proulx, avait reproché aux policiers de s'être servis de l'enquête du Commissaire aux incendies pour aller recueillir une preuve directe ou dérivée – dans ce cas-là, c'était une preuve dérivée – qu'autrement ils ne pouvaient pas obtenir. Et c'est la raison pour laquelle, évidemment, dorénavant, à cause du projet de loi n° 52, le Commissaire aux incendies aura un rôle précis à jouer qui sera très différent du rôle que certains voulaient lui voir jouer dans le passé. On en discutera dans chacun des articles.

Le ministre a fait une annonce – samedi dernier, M. le ministre, si je ne me trompe pas, à Rimouski? – au sujet de cette réforme de sécurité incendie qu'il devait introduire après avoir fait une consultation. Je le remercie de me remettre le cahier qu'il vient de me remettre. Je m'en voudrais cependant et j'aurais de la difficulté à m'endormir sereinement ce soir si je ne lui disais pas que l'opposition aussi souvent est appelée à commenter des annonces publiques qui sont faites par les ministres du gouvernement.

Je respecte le ministre et je le loue d'avoir remis aux différents intervenants dans ce domaine-là son cahier afin de leur permettre de réagir publiquement à l'annonce qu'il faisait, mais je lui fais le reproche amical, mais qui normalement en cours de mandat devrait devenir de moins en moins amical si ça devait se reproduire, je lui fais donc aujourd'hui le reproche amical de ne pas avoir la même attitude à l'égard de l'opposition aussi – toujours pour les mêmes raisons que celles que j'ai mentionnées; les membres de l'opposition et les élus qui sont des membres de l'opposition représentent également la population du Québec. Et la population du Québec a le droit de connaître l'opinion de l'opposition officielle sur les annonces du gouvernement pour être capable éventuellement de faire un partage et de décider, lors d'une élection éventuelle, si elle devrait conserver le gouvernement actuel ou si elle devrait en changer.

Donc, j'apprécierais que dorénavant le ministre fasse preuve à la fois de gentilhommerie, qualité que je lui reconnais, mais quelquefois elle se teinte d'une partisanerie de mauvais aloi, la partisanerie de mauvais aloi étant le fait de remettre les documents d'information malheureusement à la dernière minute.

Et, dans le cas de cette annonce-là, je dis tout de suite au ministre que ça n'a pas fait la queue au bureau de comté pour me demander de commenter l'annonce du ministre, mais, si ça avait été le cas, je n'avais que les découpures de journaux pour essayer de commenter.

Ça, ça a deux effets négatifs, ça peut avoir deux effets négatifs pour le ministre. D'abord, moi, tout mon être s'insurge contre le fait d'être obligé de commenter une annonce faite publiquement par le ministre à partir d'une connaissance que j'en aurais de ce que les journalistes en rapportent. Pas parce que les journalistes rapportent mal, mais parce que souvent, pour des raisons de disponibilité de colonnes dans le journal, les rapports ne sont pas complets, vont à l'essentiel. C'est difficile de se faire une opinion sur des découpures de journaux, et j'essaie toujours, dans la mesure du possible, d'éviter de me faire une opinion à partir de découpures de journaux, mais c'est tout ce qu'on avait.

D'autre part, on a essayé d'aller à la conférence de presse du ministre, d'envoyer des gens à la conférence de presse du ministre, pour avoir un peu une idée de ce qui allait se dire et on n'a pas pu y avoir accès pour des raisons que je veux pas commenter ici et que je n'impute pas au ministre de toute façon. Mais je pense que le ministre va admettre avec moi que c'est difficile de commenter une annonce que, lui, semble – et je n'ai pas de doute là-dessus – considérer très importante. C'est difficile de commenter une telle annonce sans avoir les documents justificatifs.

Ceci étant dit, j'ai tout de même eu l'occasion de constater que le ministre va consulter, il va faire une large consultation. Il n'y a pas péril en la demeure; c'est sûr qu'on a le temps de se faire une opinion sur cette consultation-là.

Et j'ai eu l'occasion aussi de constater que le ministre demandera éventuellement, dans le cadre de cette consultation aux municipalités – et j'imagine que c'est ce qui va sortir de la consultation – d'avoir un plan de prévention en incendie et surtout de s'assurer que les personnes, les pompiers – qu'ils soient volontaires ou qu'ils soient permanents – qui agiront le feront avec une formation adéquate.

Alors, ça, évidemment, tout de suite, ça permet à l'observateur de se dire: Il va y avoir des coûts qui vont être associés, j'imagine, à cette réforme, éventuellement. Ça, c'est un des coûts qu'on peut envisager pour les municipalités, celui d'une part de s'assurer de ce que la formation soit adéquate, et, dans certains cas, lorsque la formation ne sera pas adéquate – et je pense qu'on peut déjà s'entendre sur le fait qu'il devra y avoir dans plusieurs cas une formation d'appoint, qui va supporter les coûts de cette formation-là? Je pense que le ministre devrait normalement rapidement indiquer s'il va avoir les moyens, si le gouvernement va lui donner les moyens de ses idéaux et les moyens de ses ambitions.

Alors, c'était mes remarques préliminaires, M. le Président, à ce stade-ci. Je n'aurais pas d'objection à ce que le ministre, de consentement, même si l'étape des remarques préliminaires est terminé, si le ministre veut commenter à ce moment-ci sur deux sujets en particulier.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Brièvement, M. le ministre.

M. Dupuis: Mémoires et...


Discussion générale


Accessibilité des mémoires

M. Ménard: Deux courts commentaires. Les mémoires, vous avez parfaitement raison que, si les mémoires sont accessibles au public, ils sont accessibles à l'opposition, puis je vais voir à ce qu'ils vous soient communiqués dans les plus brefs délais.

Maintenant, les parties confidentielles sont confidentielles pour des raisons qui sont prévues par la loi. Dans ce cas-ci, je peux vous dire que la cause n'était pas terminée et que, donc, je pense qu'on ne pouvait pas sortir le mémoire sans avoir l'accord des avocats du Procureur général. Quand il y a des causes pendantes, c'est qu'il y a des...

M. Dupuis: Ils se sont désistés à quel moment?

M. Ménard: Après la production du mémoire.

M. Dupuis: O.K. Ah! O.K. Parfait. Donc, c'est récent.

M. Ménard: Oui, oui, c'est récent, parce que la Cour suprême...

(15 h 30)

M. Dupuis: O.K. On a fait vérifié, nous, à la Cour suprême. On nous a dit que les parties ne se sont pas désistées. Ils ne nous ont pas dit «désistées», là, mais «choisi de ne pas continuer». C'est ça?

M. Ménard: Bien, la Cour suprême a, comme vous le... Vous semblez être au courant, je pense, presque mieux que moi. Non, c'est parce que je m'aperçois que vous avez bien suivi cette cause, là. Moi, j'en ai tiré les conséquences assez vite. La Cour suprême a eu une attitude qui crée un précédent, tout à fait nouveau, de soulever elle-même la question constitutionnelle, bien que les parties ne l'aient pas soulevée, ni que la Cour d'appel, d'ailleurs, du Québec ne l'ait mentionnée. Alors, ça a placé... Puis elle a donné un délai aux parties pour réfléchir. Notre réflexion fut assez courte pour produire le mémoire, mais avant que les conséquences soient entièrement tirées... Parce qu'il n'y a pas nécessairement que la question constitutionnelle que nous cherchons à corriger présentement, qui était en litige dans cet appel. Mais, finalement, je m'aperçois que ça a été une décision du Procureur général de se désister de l'appel, que je crois. Il me semble avoir vu la signature de M. Pierre Sauvé, que nous connaissons tous les deux.

M. Dupuis: Oui.

M. Ménard: C'est ça. Et c'est signé du 29 avril 1959. Donc, ça a dû...

M. Dupuis: 1999.

M. Ménard: Ensuite, je voudrais préciser une chose, aussi, sur les remarques qui ont été... Je ne voudrais pas que mes sourires laissent croire que je partage tout ce que dit ou tout ce que l'on pourrait déduire de ce qu'a dit l'opposition. Cette loi n'est pas une loi anti-Delâge, je l'ai déjà dit, anti-le Commissaire aux incendies. C'est une loi qui vise l'état actuel de la Loi concernant les enquêtes sur les incendies et qui vise... Peu importe ceux qui sont commissaires ou la façon dont ils auraient exercé leurs fonctions auparavant, ce sont des dispositions que nous estimons nécessaires pour rendre cette loi conforme aux principes constitutionnels qui sont maintenant bien établis par les tribunaux à la suite de la Charte des droits et libertés.

D'autant plus que je dois dire, moi, que je me souviens, dans mon premier mandat, avoir remarqué que le Commissaire Delâge – et je ne donnerai que deux exemples – dans des enquêtes qu'il avait menées et qui ne sont pas effectivement des enquêtes qui portaient sur des incendies criminels, jouait parfaitement le rôle que nous voulons que joue à l'avenir le Commissaire aux incendies, c'est-à-dire d'enquêter en profondeur sur les causes d'un incendie et d'émettre ensuite des recommandations qui vont nous permettre d'éviter ces causes. Je me souviens d'avoir lu avec attention au moins deux rapports d'enquêtes qu'il avait faites à l'époque: l'une sur l'incendie au Club de la Garnison et l'autre sur l'incendie à Warwick où plusieurs pompiers avaient été victimes de l'éclatement d'un réservoir.

Alors, je pense que ceux qui occupent la fonction actuellement sont parfaitement capables de jouer le rôle nouveau que leur amèneront à jouer les amendements que nous apportons, dont nous allons discuter aujourd'hui, à la Loi sur les enquêtes sur les incendies.

M. Dupuis: Si je peux me permettre de demander le consentement de la partie ministérielle, simplement pour ajouter quelques commentaires à ce que le ministre vient de dire.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Brièvement.

M. Dupuis: Je voudrais d'abord dire, M. le ministre, que je vous assure que je n'ai jamais eu l'intention et que je n'exige pas, bien sûr, de voir les parties confidentielles de vos mémoires. Je comprends parfaitement bien que vous avez ce privilège, que dans vos mémoires il peut exister une partie confidentielle, à la condition, évidemment, que cette partie confidentielle respecte les prescriptions de la loi. Et jamais je n'ai eu l'intention de vous demander de me montrer les parties confidentielles des mémoires.

Ce que je sais, par contre, et ce que je vous demanderais à l'avenir, c'est, d'une part, que nous puissions avoir accès à la partie accessible au public de vos mémoires. Vous vous êtes déjà engagé à le faire, et je vous en remercie. J'en prends acte et, moi, je prends pour acquis que la page est tournée à ce sujet-là, et que c'est réglé, et que, dorénavant, il n'y aura pas de problème.

Mais j'aurais aimé, et je vous suggère qu'il ne faudrait pas prendre le pli de rendre tout un mémoire confidentiel afin d'empêcher l'opposition de prendre connaissance de quelque partie du mémoire que ce soit. Et ça, ça arrive en certaines circonstances où on décide que tout le mémoire sera confidentiel. Évidemment, ça empêche l'opposition de prendre connaissance de tout ce qui concerne le mémoire. Et ça, évidemment, éventuellement, si ça devait continuer à se produire, il faudra prendre d'autres moyens pour que ça n'arrive plus. Ça, c'est la première chose.

La deuxième, je n'ai jamais pensé et je ne pense pas – et, si mes propos ont laissé percevoir ça, je m'en excuse, c'est qu'ils étaient ambigus – je ne crois pas que le ministre dépose le projet de loi n° 52 et qu'on doive le qualifier de loi anti-Delâge. Je n'ai jamais pensé ça. M. Delâge est bien connu dans notre profession, et je pense qu'il est bien connu à travers le Québec pour être une personne efficace. Et on ne peut pas reprocher aux gens, on ne peut pas reprocher aux juges, on ne peut pas reprocher au Commissaire, on ne peut pas reprocher au coroner, je pense, d'avoir agi en fonction de la jurisprudence qui existait à l'époque. La jurisprudence évolue et la jurisprudence a évolué énormément, au cours des 10 dernières années particulièrement. Évidemment, les tribunaux on été obligés de s'y conformer à mesure qu'elle évoluait. Et c'est certain que je vais trahir votre âge et le mien, mais, quand je parlais de nos cauchemars avant d'aller plaider devant les coroners ou les commissaires aux incendies de l'époque, je parle de la fin des années soixante-dix et de la décennie qui a suivi. Vous savez que c'était assez, pour employer une expression commune, rock'n'roll, dans ce temps-là, de se présenter devant ces instances-là. C'est à ça que je faisais référence.

Moi, je connais bien M. Delâge; vous le connaissez aussi bien que moi. C'est une personne qui a rendu de grands services. C'est une personne qui va sans doute, sans aucun doute dans mon esprit, être encore plus à l'aise dans le rôle qu'il devra jouer à partir du moment où le projet de loi n° 52 deviendra une loi et sera adopté. Il va être encore plus à l'aise dans son rôle parce qu'il va être efficace. Il va chercher les causes et les circonstances d'un décès. Il n'aura pas à se préoccuper... Pardon?

M. Ménard: D'un incendie.

M. Dupuis: Excusez-moi, d'un incendie ou d'une explosion. Il n'aura pas à se préoccuper d'un certain nombre d'autres considérations que, constitutionnellement, il doit oublier, et, moi, je pense qu'il va être encore plus efficace. Alors, je ne veux pas que mes propos soient perçus à la fois, les miens, comme étant des propos anti-Delâge. Et je ne crois pas et je n'ai jamais cru que vous déposiez cette loi et que, cette loi, vous la déposiez à l'encontre du Commissaire aux incendies. Au contraire, je pense que c'est tout à fait objectivement, j'en suis persuadé, que vous la déposez dans le sens que vous le faites.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien. Alors, nous en sommes à l'étape des motions préliminaires. Concernant l'organisation des travaux, nous procéderons de la façon habituelle, article par article.


Étude détaillée


Recherches

Alors, nous en venons donc à l'étude détaillée, M. le ministre, avec la présentation de l'article 1.

M. Ménard: Bon. L'article 1 propose d'amender l'article 11. Alors, on commence par élargir le champ de compétence du Commissaire en lui permettant de rechercher la cause, l'origine ou les circonstances de tout incendie ou de toute explosion ayant causé des dommages à des personnes ou à des biens.

Alors, on enlève justement son obligation de rechercher les circonstances seulement lorsqu'il a des raisons de croire que cet événement n'est pas accidentel. En fait, on comprend bien, dans le nouveau rôle qu'il aura à jouer, que ce n'est que le type d'incendie sur lequel il pourra enquêter, celui qui est accidentel. Les autres, ils seront enquêtés par la police, n'est-ce pas, pour déterminer qui est responsable d'avoir allumé un incendie volontaire.

(15 h 40)

M. Dupuis: Ça va? Est-ce que vous avez d'autres commentaires, M. le ministre?

M. Ménard: Non.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Saint-Laurent.

M. Dupuis: Oui. Dites-moi, peut-être parce que je ne comprends pas, là, à 34.1, on dit: «La présente loi ne s'applique pas – les amendements que vous introduisez font en sorte que l'article 34.1, on en discutera tantôt – lorsqu'un décès survient à l'occasion de l'incendie ou de l'explosion.»

O.K.? Alors, est-ce que je dois comprendre, et là je reviens à l'article 11, que, dans le cas de décès à la suite d'un incendie ou d'une explosion, ça, ça va être sorti complètement du champ de juridiction du Commissaire aux incendies quand il y aura un décès?

M. Ménard: Sauf erreur, je crois que c'est le cas actuellement.

M. Dupuis: C'est le cas.

M. Ménard: Hein, c'est ça?

M. Dupuis: Bien, c'est le coroner. C'est ça, c'est le coroner. C'est ça.

M. Ménard: Maintenant, vous aurez remarqué qu'à certains moments M. Delâge, qui est Commissaire aux incendies, a été nommé coroner ad hoc.

M. Dupuis: Ah! O.K.

M. Ménard: Et, en fait, c'est le cas des deux rapports auxquels je référais tout à l'heure. Dans les deux cas, il avait été nommé coroner – Warwick et la Garnison – parce qu'il y avait eu des morts dans les deux cas.

M. Dupuis: Oui. Dans le cas de l'Accueil Bonneau, l'explosion à l'Accueil Bonneau?

M. Ménard: C'est la même chose.

M. Dupuis: C'est la même chose, hein?

M. Ménard: C'est un coroner.

M. Dupuis: Est-ce que c'est le Commissaire Delâge qui avait fait enquête là-dedans? De toute façon, peut-être nommé coroner ad hoc, ce n'est pas...

M. Ménard: C'est ça.

M. Dupuis: O.K. C'est correct. Alors, évidemment, dans le cas de l'article 11, c'est la recherche des causes. On va venir tantôt à l'enquête, mais il y a comme une espèce de processus en deux phases, hein. Lorsque l'incendie survient ou l'explosion survient, s'il n'y a pas décès d'une personne, mais qu'il y a dommages causés aux biens ou dommages causés aux personnes... Qu'est-ce que vous entendez par «dommages causés»? C'est des blessures?

M. Ménard: Blessures, oui.

M. Dupuis: Ou alors dommages de perte financière ou, etc?

M. Ménard: Je ne pense pas qu'on parle de dommages causés aux personnes. Ah oui! des dommages. Bien oui, à des personnes. Oui.

M. Dupuis: Oui. «Ayant causé des dommages à des personnes ou à des biens.» Alors, de quelle sorte de dommages parle-t-on? Est-ce que c'est exclusivement des blessures, à l'exception de décès, bien sûr?

Je regarde madame, je m'excuse M. le ministre, parce qu'elle me fait des beaux yeux à chaque fois, et j'aime ça plus que les vôtres. C'est une taquinerie, madame. Ne prenez pas ça... J'espère que ça ne nuira pas à votre carrière, d'ailleurs, là. Ne prenez pas ça au sérieux.

Mais, «dommages causés à des personnes», en fait, si on parlait de blessures, on parlerait de blessures, j'imagine; «dommages causés à des personnes», c'est des dommages d'ordre pécuniaire? J'aimerais ça qu'on qualifie le terme «dommages», et peut-être qu'on pourrait le rendre encore plus précis.

Mme Nadeau (Monique): Je pense que l'expression a été...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Si vous voulez vous identifier, madame, au nom du ministre.

Mme Nadeau (Monique): Oui, Monique Nadeau. Je crois que l'expression a été importée de la Loi concernant la recherche des causes et des circonstances des décès qui parle de dommages, et c'est une expression générale. On ne restreint pas, je veux dire, les dommages aux personnes, les dommages aux biens, alors tant blessures qu'autres dommages.

M. Dupuis: Écoutez, je ne veux pas être plus catholique que le pape, là, mais quant à être là et quant à essayer de faire un projet de loi qui soit le meilleur possible, comme ça doit, je pense, être notre but à tous, est-ce qu'on ne pourrait pas, dans ce cas-là, préciser? Et je n'ai pas prévu d'amendement, mais est-ce qu'il ne serait pas plus logique de dire, si c'est ça que vous voulez dire: Le Commissaire-enquêteur sur les incendies peut rechercher la cause, l'origine ou les circonstances qui ont entouré tout incendie ou toute explosion ayant causé soit des blessures à des personnes ou soit des dommages à des biens?

Mme Nadeau (Monique): Bien, c'est des dommages...

M. Dupuis: Si c'est ça que vous voulez dire.

M. Ménard: Non, mais, je ne voudrais pas éliminer...

M. Dupuis: Non, mais, M. le ministre... M. le Président, je m'excuse, je m'adresse à vous.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Allez-y.

M. Dupuis: C'est que, évidemment, «dommages à des personnes», ça peut être des dommages d'ordre pécuniaire à des personnes par la perte, évidemment, du bien, ou ça peut être des dommages d'ordre corporel causés à des personnes.

M. Ménard: Des blessures.

M. Dupuis: Bien, c'est ça, Si c'est ça, indiquons-le de façon précise pour ne pas donner place à des interprétations.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le ministre.

M. Ménard: Bon, en fait, c'est une remarque pertinente. Ça ne m'avait pas frappé...

M. Dupuis: On peut suspendre.

M. Ménard: ...mais je suis certain que ce que l'on vise, c'est que, quand on cause des dommages à une personne, on n'est pas pour dire: Je vous ai causé du dommage...

M. Dupuis: Oui.

M. Ménard: ...et vous n'avez pas été blessé, mais je vous ai causé du dommage. Et là c'est des dommages à des personnes. Et c'est certainement qu'on ne voudrait pas éliminer ça, cet aspect-là.

M. Dupuis: Exact.

M. Ménard: Bon. Maintenant, on peut causer des dommages à des biens sans savoir au juste à qui on a causé des... Enfin, on ne va pas se préoccuper d'établir la propriété des biens. On peut avoir causé des pertes à... ou à des biens qui appartiennent au domaine public. Mais on veut couvrir le plus large, mais je pense qu'on veut couvrir le cas de blessures également.

Alors, peut-être que la meilleure façon, ce serait d'ajouter: «ayant causé des blessures, des dommages à des personnes ou à des biens»; «des blessures ou des dommages à des personnes ou à des biens».

M. Dupuis: Moi, je suis... M. le Président, excusez-moi. Alors, je suis extrêmement d'accord avec ça, et, pour illustrer mon propos, si vous le permettez, pensons – là je vais penser à une explosion – à l'explosion à Montréal, qui a été reliée sans qu'il y ait preuve... Ah! il y a peut-être eu des accusations, je ne me souviens pas, mais l'explosion qui a fait une victime innocente, le petit Desrochers à Montréal, une explosion qui avait eu lieu suite à une bombe qui avait été placée dans un véhicule. Alors, évidemment, la famille de cet enfant-là, en plus d'avoir le drame qu'elle a vécu, aurait pu prétendre pouvoir poursuivre en dommages et intérêts quelqu'un éventuellement, a subi probablement des dommages psychologiques. Il y a eu des blessures corporelles, il y a eu des dommages psychologiques, il y a des dommages et intérêts, il y a toutes sortes de dommages. Alors, dans le fond, votre précision refléterait tout à fait la réalité de certains événements qui peuvent survenir.

M. Ménard: En tout respect, je ne crois pas que vous ayez le bon exemple parce que la mort du petit Desrochers, c'était évidemment une explosion qui avait une origine criminelle.

M. Dupuis: Oui, c'est vrai, vous avez raison dans ce cas-là. Vous avez raison.

M. Ménard: On ne savait pas qui, mais ce n'est pas le genre de recherche qu'on veut...

M. Dupuis: Vous avez raison. Alors, on peut penser, par exemple qu'un propriétaire de bar qui a mal fait le ménage de son réservoir de gaz propane...

M. Ménard: Bien, lâchons les bars.

Une voix: Une entreprise.

M. Dupuis: Oui, en tout cas, une entreprise, n'importe quoi.

M. Ménard: Une entreprise quelconque.

M. Dupuis: Oui, c'est ça.

M. Ménard: Et puis il y a eu des blessés, puis il y a eu des dommages.

M. Dupuis: Moi, ce que je vous suggère, c'est qu'on suspende – pas la commission, inquiétez-vous pas – l'article 1.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Non, non, c'est ce que j'allais suggérer.

M. Dupuis: Qu'on suspende l'article 1.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Et qu'entre-temps il y ait préparation...

M. Dupuis: D'un amendement.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): ...d'un libellé d'amendement.

M. Dupuis: Selon les termes exacts que le ministre a employés tantôt, qui me semblent refléter...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Il référait à des blessures, ou des dommages à des personnes ou à des biens.

M. Dupuis: Exact.

M. Ménard: Alors, ce serait donc: «toute explosion – la version intégrée – ...

M. Dupuis: Ayant causé des blessures.

M. Ménard: ...ayant causé des blessures...

M. Dupuis: Virgule.

M. Ménard: ...ou des dommages à des personnes ou à des biens.» Il faut bien comprendre que le mot «dommages» s'applique autant aux personnes qu'aux biens.

M. Dupuis: Exact.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Voilà.

M. Dupuis: Exactement.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien. Alors, nous allons...

M. Dupuis: Juste une petite seconde, M. le Président.

Mme Nadeau (Monique): Le dommage, il peut être tant à une personne qu'à un bien.

M. Dupuis: Bien, c'est ça, c'est pour ça qu'on veut le garder.

Mme Nadeau (Monique): Mais il est là. Quand on parle d'un dommage à une personne, si on regarde au sens du dictionnaire, «dommage», le dommage, ça peut comprendre le préjudice corporel. Ou dans le cas d'un préjudice corporel ou dans le cas d'un dommage à un bien, l'expression comprend les deux, de façon très large.

M. Ménard: Si je me coupe, je n'appelle pas ça un dommage.

Mme Nadeau (Monique): Non, mais ça peut se dire, en français, «un dommage à une personne».

M. Ménard: Bon, bien, suspendons, puis regardons le dictionnaire. Mais, comme je vous dis, notre intention, c'est vraiment de viser aussi les blessures.

M. Dupuis: C'est ça.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Saint-Laurent.

M. Dupuis: Et comme les projets de loi, évidemment, doivent refléter autant que possible, sans qu'on trahisse leur esprit, le langage usuel, probablement que l'amendement ne vient pas défaire le sens.

Mme Nadeau (Monique): De toute façon...

M. Dupuis: Au contraire, il vient préciser, jusqu'à un certain point.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien. Alors, l'article 1 est suspendu. Nous en venons à l'article 2.

M. Dupuis: Je ne vous en veux pas d'avoir défendu votre cause.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le ministre.

(15 h 50)

M. Ménard: Alors, l'article 2 propose de modifier l'article 13.

1° par le remplacement, dans les deuxième et troisième lignes du premier alinéa, des mots «que l'incendie ou l'explosion est le résultat d'un simple négligence ou de causes purement accidentelles» par les mots «qu'il n'y a pas lieu de tenir une enquête»;

2° par le remplacement, dans la cinquième ligne du premier alinéa, des mots «l'enquête a été tenue» par les mots «l'incendie ou l'explosion a eu lieu».

Ce qui veut dire que l'article 13 se lira maintenant comme suit:

«Lorsque le commissaire-enquêteur constate, par suite de ses recherches, qu'il n'y a pas lieu de tenir une enquête, il doit dresser un procès-verbal sommaire des renseignements obtenus, le déposer aussitôt que possible dans les archives du greffier de la Cour du district où l'incendie ou l'explosion a eu lieu, et en transmettre copie au directeur général de la prévention des incendies nommé en vertu de la Loi sur la prévention des incendies.»

Alors, il n'y a pas, je pense, grand commentaire à faire, sinon que ça va en concordance avec le nouvel article 11, tel qu'il sera amendé, puisque le sous-amendement que nous voulons lui apporter ne change pas le sens de...

M. Dupuis: Non, effectivement.

M. Ménard: ...l'article 11, tel qu'il sera amendé.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Saint-Laurent.

M. Dupuis: Encore une fois, je ne veux pas être l'empêcheur de tourner en rond, mais j'ai bien compris que, dans le cadre de votre projet de loi, il y a deux – à défaut d'employer une meilleure expression – moments dans l'esprit du Commissaire aux incendies.

Il y a un premier moment qui est le moment où survient l'événement. Le coroner doit d'abord rechercher les causes et les circonstances. Il doit faire la recherche. Il doit rechercher les causes et les circonstances. Et là il doit porter un jugement. Il doit décider s'il va tenir une enquête, s'il y a lieu de tenir une enquête. Mais, dans tous les cas, il doit faire d'abord la recherche.

Je ne dis pas que l'article 13 ne reflète pas cette... C'est bien ça, la réalité, M. le Président, du projet de loi? Il y a deux moments, la recherche et ensuite la décision de tenir ou non une enquête. Est-ce que ça va?

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le ministre.

M. Ménard: Ah! Oui. O.K. Vous disiez, M. le Président?

M. Dupuis: C'est parce que le règlement m'oblige à m'adresser au président, ce que je ne déteste pas du tout.

M. Ménard: O.K. Enfin, ça dit ce que ça dit, là. Il n'est pas obligé d'enquêter. Il n'est pas obligé de faire 10 000 enquêtes par année, en moyenne.

M. Dupuis: C'est ça, mais il doit en faire...

M. Ménard: Il y en a 10 000.

M. Dupuis: S'il y a 10 000 incendies et explosions qui ont causé des dommages ou des blessures à des personnes ou à des biens, il doit faire 10 000 recherches, mais il n'est pas obligé de faire une enquête dans chacune des recherches. C'est ça? Alors donc, il y a une modification supplémentaire, M. le Président.

M. Ménard: Non. Si vous regardez en concordance avec l'article 11 qui précède, maintenant, c'est le terme «peut».

M. Dupuis: O.K.

M. Ménard: Alors, il a une discrétion. Maintenant, parfois, quand il exerce sa discrétion puis qu'il fait des recherches, il peut déterminer qu'il n'y a pas lieu de faire une enquête – faire une enquête, c'est-à-dire convoquer des témoins publiquement, et ainsi de suite. Alors, il peut simplement dresser un procès-verbal sommaire, ce qui ressemble beaucoup au pouvoir des coroners.

M. Dupuis: O.K. Ça va.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Est-ce que l'article 2 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le ministre, nous en sommes à l'article 3.

M. Ménard: Bon. Alors, l'article 3 établit le principe, je dirais, le plus important, celui qui va distinguer le plus l'ancienne loi de la nouvelle loi. Il édicte, et je le cite dans sa version: «13.1. Le commissaire-enquêteur ne peut, à l'occasion de ses recherches, se prononcer sur la responsabilité civile ou criminelle d'une personne.»

M. Dupuis: Un commentaire au sujet de cet article-là. Étant donné que nous nous entendons sur le fait qu'il y a deux moments, si vous voulez, dans la décision que le Commissaire aux incendies prend en ce qui concerne un événement, c'est-à-dire qu'il peut décider de rechercher, et qu'il peut décider, après avoir recherché, de tenir une enquête, est-ce qu'il n'y aurait pas lieu pour bien, bien, bien préciser la portée de l'article, d'ajouter, après «recherche»... Puis là, je vous le dis, je n'ai pas préparé d'amendement parce que je le fais, là, à mesure qu'on en discute là-dessus: «à l'occasion de ses recherches ou au cours de l'enquête, se prononcer sur la responsabilité civile ou criminelle d'une personne.»

M. Ménard: On ne le dit pas plus tard?

M. Dupuis: On va le voir plus tard. On va le voir plus tard, hein, c'est ça? Vous les avez vraiment divisés en deux, les époques, les moments – c'est ça – puis vous avez ajouté des droits et des obligations dans chacun. O.K. C'est beau.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Mme Nadeau, au nom du ministre.

Mme Nadeau (Monique): Oui. C'est que la loi est ainsi faite qu'on parle d'abord des recherches puis, après ça, de l'enquête.

M. Dupuis: O.K.

Mme Nadeau (Monique): Alors, on fait les deux.

M. Dupuis: Ça, c'est un choix que vous avez fait. M. le Président. C'est un choix, j'imagine, que le ministre a fait de vraiment traiter les deux événements de façon séparée dans le projet de loi, c'est-à-dire les recherches et les enquêtes, parce que, au fond, on aurait pu en traiter, on aurait pu unir un certain nombre de notions.

M. Ménard: Non, je ne crois pas. En fait, ce n'est pas comme ça que ça a procédé, là; c'est peut-être le même résultat. C'est simplement qu'on suit, au fond, un modèle, un modèle antérieur – le modèle antérieur suivait la Loi sur les coroners – de façon à avoir des lois qui traitent de choses semblables, de façon à ce qu'elles aient essentiellement la même structure. Ça facilite beaucoup, comme vous le savez, l'étude des lois après, puis la compréhension des lois, quand elles traitent de sujets semblables, qu'elles aient essentiellement la même structure législative, même si cette structure législative aurait pu faire l'objet d'un autre choix...

M. Dupuis: Oui, O.K.

M. Ménard: ...c'est discutable, sans que ce soit mieux ou pire, hein. Mais, à un moment donné, il faut choisir, c'est comme ça. C'est un peu comme un moteur: on peut placer la tête du piston en haut, ou bien sur le côté, ou bien à 90°, ou bien en bas, mais il faut faire un choix.

M. Dupuis: O.K.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Est-ce que l'article 3 est adopté?

M. Dupuis: Ça va.


Enquêtes

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Adopté. L'article 4, M. le ministre.

M. Ménard: Bon. Il s'agit ici de remplacer le premier alinéa de l'article 14 de sorte que le nouvel... Justement, si on lit l'ancien article 14, on voit tout de suite que, si on veut atteindre le but que l'on vise, on doit abolir l'article 14 pour le remplacer, puisque l'ancien article 14 dit que le commissaire-enquêteur doit tenir une enquête lorsqu'il a des raisons de croire que cet incendie ou cette explosion est survenu par suite de la conduite coupable ou de la préméditation de la part d'un tiers.

Alors, là, évidemment, c'est ça qu'on veut enlever pour laisser ça à la police et donner, par contre, le pouvoir d'enquêter les autres incendies. C'est donc que le nouveau premier paragraphe de l'article 14 se lirait comme suit:

«À la suite d'une recherche, le Commissaire-enquêteur sur les incendies peut tenir une enquête sur la cause, l'origine ou les circonstances qui ont entouré un incendie ou une explosion ayant causé – et là on pourra toujours apporter le même amendement qu'à l'article 1, c'est-à-dire ayant causé, donc, probablement – des blessures ou des dommages à des personnes ou à des biens, s'il a des raisons de croire en l'utilité de cette enquête et s'il estime que cette enquête ne nuira pas au déroulement d'une enquête policière en cours.»

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): À ce moment-ci...

M. Ménard: Est-ce que vous voulez le suspendre? On peut peut-être le suspendre.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Est-ce qu'on aurait une proposition d'amendement prête pour le premier article? On pourrait suspendre le quatrième, revenir au premier.

M. Ménard: On va le suspendre puis on va le traiter en même temps, avec le premier.

M. Dupuis: Auriez-vous objection à ce qu'on discute quand même de la portée du...

M. Ménard: Mais on peut discuter, oui, du reste.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Allez-y, M. le député de Saint-Laurent.

(16 heures)

M. Dupuis: Oui, c'est ça, puis on verra. Est-ce qu'il y a, M. le ministre, une disposition semblable dans la Loi entourant les circonstances des décès? Moi, je vais l'appeler la loi des coroners pour qu'on se comprenne. Est-ce qu'il y a une disposition semblable? Je vais vous dire pourquoi. Quand je l'ai lue la première fois, ça m'est apparu extrêmement large que de dire: Si le coroner a des raisons de croire en l'utilité de l'enquête, il fait une enquête. Mais je comprends très bien, M. le ministre, qu'à 14.1 on est venu évidemment ajouter un certain nombre de circonstances qui font en sorte que le coroner peut décider un certain nombre de facteurs qu'il doit prendre en considération aux fins de sa décision de tenir une enquête, mais que de dire simplement...

Je voudrais savoir comment vous avez réussi à justifier le fait que ça soit si large que ça. S'il a des raisons de croire en l'utilité de faire enquête, là, c'est large vrai, ça. Il n'y a aucune balise, sauf son propre jugement qu'il a des raisons de tenir une enquête. Remarquez, comme on a enlevé dans le projet de loi toute possibilité d'énoncer une responsabilité civile ou une responsabilité criminelle, comme on enlève dans le projet de loi toute possibilité de rechercher les auteurs d'un crime éventuel, comme on a enlevé toutes les possibilités d'essayer d'imputer la faute ou non à une personne, ça enlève de l'odieux évidemment, bien sûr, dans le projet de loi et ça enlève de l'odieux à la discrétion qui devient celle du commissaire-enquêteur de décider qu'il est utile de faire une enquête ou non.

Mais j'aimerais ça savoir d'où ça a procédé, cette décision que ça soit si large que ça, si peu balisé. Sauf que, évidemment, j'ai bien compris qu'à 14.1 il y a un certain nombre de facteurs qui peuvent être pris en considération. Ça, je le considère, là. Mais il reste quand même que c'est large.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le ministre.

M. Ménard: Non, mais enfin, la première réponse à ce que vous avez dit, c'est...

M. Dupuis: Article 14.1.

M. Ménard: ...l'article suivant va le baliser. Maintenant, dans les deux cas, on s'est inspiré de la Loi sur les coroners à presque... Oui. D'ailleurs, il faut comprendre que ça correspond à des... Je pense que ça correspond à l'intérêt public en général.

M. Dupuis: Là, on peut avoir une discussion.

M. Ménard: Dans les 10 000 incendies, là, je pense bien qu'il y en a beaucoup où on n'a pas besoin d'obtenir plus d'information pour établir la cause ou l'origine, parce qu'elle est à peu près évidente puis usuelle: une cigarette oubliée, un contact électrique mal fait, un accident de cuisson ou des choses comme celles-là. Sauf si, à un moment donné, le Commissaire aux incendies peut décider qu'il y a tellement d'accidents de cuisson, il serait peut-être bon de faire une enquête sur plusieurs. Alors, comme le coroner le fait à l'occasion, il identifie une source particulière de cause de mort violente et il décide d'enquêter pour faire des recommandations qui vont peut-être faire disparaître un danger commun.

En fait, «pour informer le public», ça reste large, mais c'est évident qu'il y a des incendies qui peuvent, de par leur nature, susciter un tel intérêt dans le public que ça demande une explication, une enquête plus en profondeur. Je pense à peut-être l'incendie d'un cinéma mais qui, par chance, n'aurait pas causé, par miracle, de blessures à personne. Et rare... Bon, bien, dans ce cas-là, puisqu'il s'agit d'un endroit public... Dans le passé – Dieu merci, ça fait longtemps – il y a déjà eu des incendies comme ça qui ont été extrêmement meurtriers. Je pense qu'il suffirait de lire des journaux peut-être de 50 ans antérieurs ou même quand nous étions jeunes. Il y a eu des incendies célèbres comme ça qui ont été extrêmement meurtriers. Alors, le public s'inquiète nécessairement de la sécurité, même s'il n'y avait pas eu mort de personnes, et voudrait avoir... Je pense que c'est assez bien balisé.

M. Dupuis: Bien, c'est-à-dire que...

M. Ménard: Et puis ça lui donne quand même une discrétion, et c'est un peu normal. C'est un officier à qui... Ce n'est pas un juge, ce n'est pas un décideur, mais la nature de son poste amène à ce qu'il ait quand même une certaine discrétion qu'il peut exercer en toute indépendance et sans pression aucune des autorités politiques.

M. Dupuis: Avec votre permission, sur ce sujet-là. Évidemment, il devient une espèce d'autorité administrative, si vous voulez. Enfin, c'est hybride, là, mais... Ce n'est pas tout à fait...

M. Ménard: Ce n'est pas le bon mot, mais je comprends ce que vous voulez dire. Il devient un officier public...

M. Dupuis: Il devient un officier public, c'est ça.

M. Ménard: ...qui jouit d'une certaine indépendance.

M. Dupuis: Qui jouit d'une certaine indépendance, vous avez raison, et sur lequel, tout de même, l'administration – quand je parle d'administration, je parle du gouvernement, bien sûr – a une autorité, et sur lequel l'administration – là, administration entendue au sens de gouvernement, si vous voulez – veut avoir un certain contrôle aussi, j'imagine. On ne peut pas le laisser aller comme il veut, sans baliser. Vous avez balisé, bien sûr, à 14.1, j'en conviens, mais 14.1 n'est pas limitatif, c'est-à-dire que ce n'est pas seulement ces circonstances-là qui peuvent faire en sorte qu'il est justifié de tenir une enquête. Il peut y avoir d'autres raisons, qui ne sont pas mentionnées à 14.1, qui peuvent justifier le Commissaire aux incendies de tenir une enquête. Bon.

Et, moi, je lis ça et je me dis: Il m'apparaît... Et, dans le fond, c'est la question que je vous pose, M. le ministre: Est-ce qu'il ne vous apparaît pas, à la lumière de votre expérience, de votre longue expérience, qu'il n'y aurait pas moyen de baliser un peu plus les raisons pour lesquelles le Commissaire aux incendies peut décider de tenir une... Là, vraiment, il n'y a aucune balise, c'est lui qui décide. Si, ce mois-là, il n'est pas bien occupé, là, puis qu'il y a trois, quatre incendies... Je ne dis pas, là... je ne fais pas de personnalité et je ne veux pas que mes propos, ni les vôtres, ni les miens – on va être bien clairs tout de suite, il ne pourra pas y avoir d'ambiguïté – puissent être interprétés comme faisant référence à M. Delâge, qui est le Commissaire aux incendies célèbre que nous connaissons et pour lequel nous avons beaucoup de respect et que nous reconnaissons comme étant un homme d'une probité totale. C'est-u assez clair? Mais il faudrait s'assurer que, dans toutes les circonstances, il ne faudrait jamais qu'il y ait de doute que les raisons qui militent en faveur qu'il y ait une enquête et qu'on tienne une enquête soient d'autres raisons qui sont celles de l'ordre de l'intérêt public. Il faudrait que jamais il n'y ait de doute à ce sujet-là.

Et, moi, je vous soumets respectueusement... Bien sûr, il faut faire confiance aux officiers publics, je suis d'accord avec ça, mais l'administration devrait avoir, me semble-t-il, le souci tout de même d'introduire une certaine balise. Maintenant, je suis conscient que, dans la loi des coroners – moi, je l'appelle la loi des coroners parce que je suis un vieil avocat puis c'est plus facile de m'exprimer de cette façon-là – la disposition est exactement la même, je suis très conscient de ça. Ça ne veut pas dire qu'il ne faut pas s'interroger. Et à l'occasion de l'étude de ce projet de loi là, bien, il y a peut-être lieu de s'interroger là-dessus. C'est la question que je pose au ministre.

Il m'apparaît que l'administration devrait avoir le souci de s'assurer que dans aucune circonstance la décision de tenir une enquête n'est dictée par autre chose que l'intérêt public. Et est-ce qu'il y a moyen de le faire? Ça, c'est la deuxième question. Si, sur la question de principe, le ministre est d'accord avec les représentations de l'opposition officielle à l'effet que l'administration devrait avoir le souci de s'assurer que, dans toutes les circonstances, c'est l'intérêt public qui dicte la décision de tenir une enquête, ça, c'est une question de principe. Ensuite, est-ce que c'est possible de le faire dans les faits en introduisant quelque chose? Alors, c'est la question que je pose au ministre.

Moi, il m'apparaît, honnêtement, et je termine là-dessus, que l'administration que le ministre représente devrait avoir le souci de s'assurer qu'il n'y ait aucun doute dans l'esprit de personne que, lorsque le Commissaire aux incendies, ou le coroner, on verra, là, éventuellement, quand il décide de tenir une enquête, il n'a que l'intérêt public en tête. Et ça n'a rien à voir avec M. Delâge, là.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Bon. M. le ministre.

(16 h 10)

M. Ménard: Dans la situation actuelle ou bien dans la situation qui serait celle à la suite de l'adoption des amendements que nous proposons, le seul risque que nous courons, c'est que le coroner, pas le coroner, pardon – on a tendance à faire tous la même erreur – que le commissaire-enquêteur sur les incendies fasse trop d'enquêtes sur les incendies, pas qu'il n'en fasse pas assez. S'il n'en fait pas assez, le ministre peut intervenir, parce que je pense que le deuxième paragraphe actuel de l'article 14 prévoit que le ministre peut lui ordonner d'en faire une si c'est dans l'intérêt public. Bon, j'aime bien votre expression «dans l'intérêt public», mais il faut que quelqu'un juge de l'intérêt public dans les cas particuliers. Il y a en moyenne 10 000 incendies, on espère qu'il va y en avoir moins, mais il restera toujours probablement quelques milliers d'incendies par année. C'est évident que le Commissaire aux incendies ne peut pas faire quelques milliers d'enquêtes par année, puis, là-dedans, il ne doit pas y en avoir tellement qui sont d'origine volontaire. Alors, je suis d'accord avec vous qu'il faut que ça soit dans les cas d'intérêt public.

Maintenant, pour l'aider, il faut que quelqu'un décide c'est quoi, l'intérêt public. Je pense que les balises qu'on lui donne, bien que générales, sont suffisantes. Si vous en avez d'autres à suggérer, on peut les prendre en considération, mais je vous signale que l'article qu'on étudie actuellement, c'est lorsqu'il décide, à la suite d'une recherche, de faire une enquête. On lui dit au départ: Vous n'êtes pas obligé de faire des enquêtes sur tout, ça serait inutile. Franchement, on n'est pas pour faire des enquêtes quand les résultats sont évidents. On sait qu'il y a des fumeurs qui fument au lit. On leur recommande de ne pas le faire, mais il y en a encore qui le font pareil, et ça, ça cause des incendies. Bon, bien, quand on le sait, on le publie et puis... À un moment donné, si le Commissaire aux incendies constate qu'il y en a tellement que ça vaudrait la peine de les énumérer puis de suggérer je ne sais pas quoi pour qu'il y en ait moins, mais ça ne serait pas une... En tout cas, je trouve que c'est selon les circonstances, et la personne que l'on nomme là, on la nomme pour un temps défini, à ce que je sache, on lui donne toute indépendance.

Il doit y avoir, quand on parle d'intérêt public, un juge de l'intérêt public. Bien, ça dépend de la qualité de la personne qu'on nomme. Je trouve qu'à partir du moment où on pense qu'on va nommer une personne qui a la qualité... Il va falloir, quand on nomme cette personne, qu'on croie qu'elle ait cette qualité d'avoir assez de jugement pour juger ce qui est d'intérêt public de ce qui est, pour prendre l'expression anglaise, trivial et sans intérêt.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Saint-Laurent.

M. Dupuis: Si vous permettez, M. le Président, d'abord, je dois dire que, puisqu'on est à l'étude de l'article 14, c'est le bon moment de faire les remarques que je fais, parce que le coroner fait d'abord sa recherche et ensuite il prend une décision, la décision de tenir ou non une enquête. Alors, c'est à ce moment-ci que je suggère, si vous deviez considérer que la représentation est pertinente à l'effet de baliser cette décision-là... C'est le bon moment de la faire, la discussion. Maintenant, je vous ferai remarquer, et c'est M. Poirier, qui travaille avec moi, qui me l'a fait remarquer, et c'est tout à fait pertinent, qu'à l'article 103 de la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès, celle que j'appelle toujours la loi des coroners parce que je suis un vieil avocat, il y a une balise pour un coroner qui déciderait qu'une enquête est utile, puisque l'article 103 dit: «Si, au cours ou à la suite de son investigation – qu'on peut apparenter, pour les fins de la discussion, à la recherche – le coroner est d'avis qu'une enquête serait utile, il en fait aussitôt la recommandation au coroner en chef en exposant ses motifs.» Là, il y a une balise, la balise étant: Il a un patron, le coroner, et il décide qu'il serait utile de faire une enquête, il en fait une recommandation à son coroner en chef, à son patron, et il lui expose les motifs pour lesquels il a décidé de tenir une enquête. Là, il y en a une balise: il est obligé d'expliquer la raison pour laquelle il décide de tenir une enquête et il est obligé de l'expliquer à son patron.

M. Ménard: ...

M. Dupuis: Non, allez-y! Non, non, allez-y! Non, non, au contraire, M. le ministre...

M. Ménard: C'est vraiment à la suite...

M. Dupuis: ...vous ne m'insultez pas du tout, moi, j'aime ça quand... Je vais me taire pour que vous puissiez discuter plus sereinement, puis on va continuer la discussion. On ne fait pas d'opposition systématique au projet de loi, là.

M. Ménard: C'est parce que ce que vous me dites me fait poser des questions.

M. Dupuis: On ne fait pas d'opposition systématique au projet de loi; on discute, là.

(Consultation)

M. Dupuis: O.K. Parfait? Ça va? Je peux continuer?

M. Ménard: Oui.

M. Dupuis: Je sais que vous avez la réponse, mais ayez un petit peu de patience, je veux juste terminer mon idée...

M. Ménard: Non, non, c'était la...

M. Dupuis: ...parce que sans ça je vais être frustré puis je vais vouloir la dire pareil.

M. Ménard: ...réponse à une question que je me posais. Ce n'était pas celle que vous posiez, mais à la suite...

M. Dupuis: O.K. C'est beau. Parfait. Bon, alors, je vais finir ce que je dis...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Saint-Laurent, en terminant.

M. Dupuis: ...puis ensuite on pourra continuer. Alors donc, là, il y a une balise. La balise, c'est que le coroner qui prend la décision de tenir une enquête, il a un patron. Alors, il fait la recommandation à son patron de tenir l'enquête et il doit exposer ses motifs pour lesquels il décide. Et là il y a quelqu'un qui peut juger. Il y en a une balise; moi, je n'ai pas de problème avec ça. Évidemment, c'est possible dans la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès, parce que l'organisation des coroners est ainsi faite qu'il y a un coroner en chef, il y a des coroners, il y a des coroners ad hoc à certains moments donnés. Alors, l'organisation est ainsi faite que la balise, elle est à l'intérieur de l'organisation.

Pour ce qui concerne le Commissaire aux incendies, ce n'est pas la même organisation. Le coroner aux incendies, son patron, à moins que je me trompe, M. le ministre, c'est le ministre de la Sécurité publique, directement. Est-ce que je me trompe? Son patron...

M. Ménard: Bien, il faudrait nuancer.

M. Dupuis: ...non, non, mais avec les nuances qui s'imposent, là.

M. Ménard: Le ministre de la Sécurité publique est...

M. Dupuis: Responsable.

M. Ménard: ...responsable, mais ce n'est pas un patron.

M. Dupuis: Non, mais vous comprenez ce que je veux dire. Regardez, l'autorité responsable, l'autorité la plus près qui soit responsable du coroner, lorsqu'il décide de tenir une enquête, c'est le coroner en chef. Alors, l'autorité la plus proche du Commissaire aux incendies, c'est le ministre de la Sécurité publique. C'est dans ce sens-là que je le dis. Le mot «patron», vous avez raison, il était mal employé, mais l'autorité la plus près du Commissaire aux incendies, c'est le ministre responsable. Alors, est-ce qu'il n'y aurait pas lieu de s'interroger à savoir est-ce qu'on ne devrait pas faire la même chose, avoir la même sorte de balise, la même balise dans le projet de loi n° 52 que celle qu'on a dans la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès, c'est-à-dire qu'il devra faire une recommandation au ministre et exposer les motifs?

Je ne dis pas que le ministre va les lire à chaque fois, là, ce n'est pas ça que je dis. Mais l'administré, celui qui paie des impôts, celui qui contribue par ses impôts à l'institution qu'est le Commissaire aux incendies, pourra être certain qu'il y a quelqu'un, une autorité responsable qui peut questionner les décisions du Commissaire aux incendies de tenir des enquêtes. Parce que, si on n'a pas ça... Évidemment, on a une personne qui est assise dans son bureau, qui a un certain nombre de dossiers relativement à des incendies et à des explosions qui sont tous de sa juridiction, elle fait sa recherche et elle décide, sans aucune espèce de balise, de tenir des enquêtes, elle peut se faire un beau rôle pour bien des années à venir. Et là je ne parle pas de M. Delâge, je le dis encore une fois, je ne le répéterai jamais assez. J'aimerais même qu'il soit là pour m'entendre de vive voix.

Mais je pense que c'est important, il m'apparaît que c'est important qu'il y ait une balise. Si vous avez jugé, pardon, si le législateur a jugé important d'inclure à l'article 103 la balise dont je parle... Puis «la balise», là, c'est des mots que j'emploie à défaut de trouver de meilleurs termes, Mme Nadeau me le pardonnera, je n'ai pas toujours le mot juste, vous semblez être meilleure que moi dans ce domaine-là, mais, en tout cas, «la balise», si on a jugé bon, si le législateur a jugé bon de faire cette balise-là, compte tenu de l'organisation, je pense que le législateur devrait aujourd'hui se poser des questions et essayer de trouver une balise pour le Commissaire aux incendies, pour rendre ça conforme à la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès, puisque c'est le même esprit qui doit prévaloir.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le ministre.

(16 h 20)

M. Ménard: Alors, d'abord, objectivement, la balise est la même, puisque le coroner en chef, dans sa décision d'accepter la recommandation de son coroner ou non, doit se demander, celui-ci, s'il estime, s'il a des raisons de croire en l'utilité de cette enquête. La différence, c'est que le coroner a un coroner en chef. Le Commissaire aux incendies n'a pas de commissaire en... Il y en a un seul, donc il n'y a pas de patron à qui se rapporter. Je ne crois pas que ça rassurerait beaucoup le public que de savoir qu'à chaque fois qu'il se demande s'il doit faire une enquête sur un incendie il doit s'adresser au ministre. D'abord, le ministre a d'autres fonctions, d'autres préoccupations, et, si justement on veut que cet officier décide de faire des enquêtes, si on veut qu'il prenne sa décision indépendante, je pense que le public est plus rassuré de son indépendance s'il n'a pas à demander la permission à une autorité politique avant de décider de faire une enquête. J'ai l'impression que, si l'on vous avait... honnêtement, je crois que, si nous avions fait une telle proposition dans cette loi, vous nous auriez dénoncés en disant que nous voulons cacher l'origine de certains incendies, n'est-ce pas? Je ne crois pas que c'est une solution que vous auriez retenue.

Donc, tout ce que je peux répondre, c'est que le critère, le jugement... C'est sûr que la personne qu'on va nommer commissaire aux incendies, c'est une personne qui est capable de porter un jugement. On estime qu'elle est capable de porter un jugement sur l'intérêt public, qu'elle est capable d'appliquer une loi, de reconnaître les balises. C'est évident qu'au bout du compte c'est son jugement. Et ce jugement, nous voulons qu'elle l'exerce en toute indépendance de façon à ce que le public soit rassuré que, effectivement, quand un incendie d'importance a lieu, il ait la liberté d'entreprendre cette enquête même si ça risque de mettre le gouvernement dans l'embarras. Alors, je ne pense pas que ce soit une bonne idée de demander la permission au ministre, puis je ne vois pas à qui d'autre effectivement... Puis je pense que c'est pour ça que vous nous avez fait la suggestion du ministre, c'est parce que vous et moi ne voyons pas à qui d'autre il pourrait demander la permission s'il est tout seul comme commissaire aux incendies.

Maintenant, la loi prévoit quand même qu'il y en aura d'autres, puis ça se peut bien qu'en application... Parce qu'après les consultations qu'ils mèneront, actuellement, indépendamment de ce projet de loi, que nous en venions à la conclusion que nous devrions peut-être nommer un autre commissaire aux incendies... Mais là on leur donnerait à chacun un territoire à couvrir, et, à deux, ils pourraient être chefs dans leur territoire. Et donc il n'y aurait pas lieu de référer à un chef aléatoire comme dans le cas des coroners, qui, eux, sont au-delà d'une dizaine, de mémoire, ils sont une quinzaine.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le porte-parole de l'opposition officielle.

M. Dupuis: M. le Président, je vais tenter une dernière fois de convaincre le ministre de notre point de vue et lui dire que, malheureusement, je ne peux pas accepter l'explication qu'il me donne. Je le trouve habile. Là, il a réussi, dans sa dernière réponse, à déplacer un petit peu le problème. Je vais essayer de le replacer dans son contexte. D'abord, il n'est pas question dans notre esprit de demander ou d'exiger, en vertu de la loi, que le Commissaire aux incendies soit obligé de demander la permission avant de tenir une enquête. Là, ce n'est pas ça du tout. D'ailleurs, ce n'est pas ça qui est prévu dans la Loi sur les coroners.

M. Ménard: Non, non.

M. Dupuis: Non, mais c'est parce que vous avez dit tantôt, M. le ministre, en début d'intervention: Je pense bien que l'opposition nous chicanerait s'il fallait aller jouer dans le statut d'indépendance du Commissaire aux incendies en exigeant qu'il nous demande la permission avant de tenir une enquête. Je n'ai jamais dit cela.

M. Ménard: Non, mais c'est à ça que ça revient.

M. Dupuis: Non, pas du tout, pas du tout. Absolument pas.

M. Ménard: Pensez-y. Ah non!

M. Dupuis: Absolument pas.

M. Ménard: J'ai mal compris votre proposition. Expliquez-moi.

M. Dupuis: Ah non! Absolument pas. L'idée à la base de l'intervention que nous faisons est la suivante: Il faut que le Commissaire aux incendies soit redevable à une autorité quelconque lorsqu'il décide de tenir une enquête, au même titre que le coroner est redevable à son coroner en chef lorsqu'il décide de tenir une enquête. Il lui est redevable parce que, en vertu de la Loi sur la recherche des causes et circonstances de décès, quand il décide de tenir une enquête, il en fait la recommandation au coroner en chef – je n'exige même pas de recommandation à cause de la confection – et il doit exposer les motifs pour lesquels il décide de tenir une enquête. Il ne demande pas la permission à son coroner en chef, le coroner. Le coroner, il fait la recommandation de tenir l'enquête et il expose les motifs pour lesquels il veut faire tenir une enquête. C'est ça qu'il fait. Alors, ce que je dis, c'est que le Commissaire aux incendies devrait être redevable aussi. Ça, c'est la première partie de l'intervention.

La deuxième, c'est... Honnêtement, M. le ministre, ça, ça ne résiste pas à l'analyse, le fait de dire: Écoutez, M. de l'opposition officielle, on ne peut pas retenir votre suggestion parce que, dans le cas du Commissaire aux incendies, il est tout seul au Québec à exercer cette fonction-là, et on l'a fait dans le cas des coroners parce qu'eux autres ils sont organisés en coroner en chef puis différents coroners. Dans ce cas-là, parce que, eux autres, ils ont un coroner en chef, on leur demande de justifier, d'exposer les motifs pour lesquels ils décident de tenir une enquête, ce qu'on ne peut pas faire dans le cas du Commissaire aux incendies parce qu'il est tout seul. Honnêtement, M. le ministre, si on veut pousser le raisonnement au bout, c'est justement parce qu'il est tout seul à exercer cette fonction-là, pour l'instant, qu'il doit y avoir une certaine balise.

Écoutez, ce n'est pas des farces, vous êtes en train de dire, regardez ce qu'on est en train de dire, on est en train de dire que ce monsieur-là – ou cette dame-là, peu importe, parce qu'on ne veut pas faire de personnalité – la personne qui détient la fonction de Commissaire aux incendies fait des recherches et décide sans aucune raison, sans être obligée de le justifier à personne, sans être obligée d'en exposer les motifs à personne, elle est la seule à décider si elle va tenir une enquête. Puis une enquête, là, il y a des coûts à ça, une enquête, et il y a des gens qui vont être cités devant lui, on va le voir tantôt dans 14.1, il va entendre des témoins. Quand il décide de tenir une enquête, il ne fait pas n'importe quoi, là! Là, il décide qu'il entreprend une procédure qui va durer un certain temps, il entend des témoins, il peut assigner devant lui des experts, il peut faire un certain nombre de choses. Et là, lui, il peut décider ça, et il n'y a personne qui n'a rien à redire sur les raisons pour lesquelles il a décidé de tenir une enquête.

Il me semble, à moi, que ça n'a pas de bon sens. Je suis peut-être tout seul à penser comme ça, mais il me semble, à moi, que ça n'a pas de bon sens. Et, quand je dis qu'il me semble que je suis tout seul à penser ça, ce n'est pas tout à fait vrai, parce qu'il y a des législateurs, ou le législateur, si on veut le désincarner, qui, un moment donné, quand il a voté l'article 103 de la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès, il a dit: Il faudrait que le coroner qui décide de tenir une enquête soit au moins obligé d'exposer ses motifs au coroner en chef. Alors donc, ce n'est pas si fou que de prétendre qu'il faudrait que le Commissaire aux incendies soit redevable envers quelqu'un des décisions qu'il prend de tenir une enquête. Moi, je comprends bien que ça répugne – pour employer une expression véhémente – au ministre, probablement, de penser qu'il va recevoir, dans chaque dossier, les motifs du Commissaire aux incendies qui a décidé de tenir une enquête, mais, je veux dire, ce n'est pas une raison pour rejeter la représentation, si vous voulez.

Je ne sais pas si mes collègues ont quelque chose à dire là-dessus.

Une voix: Non, on est d'accord.

M. Dupuis: Merci, M. le député de Chapleau.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le ministre.

M. Ménard: Alors, si je dis: La permission au ministre... Et je pense encore, puis je vais vous exposer pourquoi ça revient au même, ce que vous proposez. Vous voulez placer le commissaire de l'enquête aux incendies qui décide qu'il doit faire, donc il a décidé, dans sa tête, qu'il doit faire une enquête publique. Vous voudriez, avant de faire une enquête publique, qu'il fasse une recommandation à quelqu'un?

M. Dupuis: Honnêtement, non, M. le ministre, même pas, je suis prêt à considérer le fait que... Je m'excuse, j'interviens, parce que...

M. Ménard: Non, mais vous avez raison, ça permet de mieux vous comprendre, ça va me permettre de mieux... Oui?

M. Dupuis: Bon, alors, non, je suis prêt à reconnaître – et de toute façon, c'est la réalité, j'aurais bien mauvaise grâce de ne pas le reconnaître – que l'organisation des coroners n'est pas la même que l'organisation du Commissaire aux incendies, ça, il n'y a pas de problème là-dessus.

Je ne souhaite pas, honnêtement, que le Commissaire aux incendies fasse une recommandation de tenir une enquête et qu'il expose les motifs, mais je veux... je souhaiterais qu'au minimum – je veux, on n'emploie pas ça quand on est législateur, en commission, article par article – je souhaiterais, M. le Président – je vais apprendre, je vais apprendre, je me force pour apprendre – que le Commissaire aux incendies soit au minimum tenu d'exposer par écrit les motifs pour lesquels il décide de tenir une enquête.

M. Ménard: O.K. Donc...

(16 h 30)

M. Dupuis: Je veux simplement terminer mon idée. Pour que l'administration, pour que le ministre, pour que le gouvernement, pour que les administrés, pour que les payeurs d'impôts, pour que tout le monde sache qu'on est capable d'aller scruter, dans toute circonstances, les motifs qui ont poussé le Commissaire aux incendies à tenir une enquête. Je ne dis pas que ça va être contesté à chaque fois; ce n'est pas ça que je dis. Mais il faut qu'on soit capable d'avoir un droit de regard sur cet individu-là, quel qu'il soit, qui exerce une fonction qui entraîne des coûts pour l'administration. Il faut qu'on soit capable d'avoir une poignée...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Saint-Laurent...

M. Dupuis: Vous trouvez que mon temps achève. J'achève aussi.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Oui, mais... Non seulement je l'ai trouvé, mais c'est le cas. C'est le cas, M le député de Saint-Laurent.

M. Dupuis: O.K. Il faut qu'on soit capable d'aller voir quels sont les motifs qui justifient la tenue d'enquête dans tous les cas, parce que c'est notre argent; c'est votre responsabilité au gouvernement, c'est la responsabilité du ministre, c'est notre argent, on est des payeurs d'impôts.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien. M. le ministre.

M. Ménard: O.K. Je comprends que selon vous le coroner fait des recherches sur tout incendie. C'est ça. Jusque-là, ça va.

M. Dupuis: Le Commissaire aux incendies.

M. Ménard: Le Commissaire aux incendies, oui.

M. Dupuis: Ah, c'est correct, je fais la même chose que vous puis je ne vous le reproche pas.

M. Ménard: C'est rien, j'ai dit pire en fin de semaine: je parlais de policiers quand je voulais parler de pompiers. Alors... Ha, ha, ha! Ça m'arrive rarement de faire l'erreur contraire.

Mais, à un moment donné, il faut que le Commissaire aux incendies en arrive à la suite d'une recherche à une décision: Est-ce que je tiens une enquête publique ou si je n'en tiens pas? Bon. Comme il est seul, il ne peut pas faire comme le coroner, il ne peut pas faire une recommandation à son chef parce que son chef, il n'en a pas, hein? Dans les coroners, le coroner quand il en arrive... l'article 103 le dit: Si le coroner, à la suite de son investigation, il est d'avis qu'une enquête serait utile, il ne peut pas la commencer, il faut qu'il fasse la recommandation au coroner en chef en exposant ses motifs. Là, son chef, c'est le coroner en chef, c'est lui qui va décider.

L'article suivant, l'article 104, dit bien: «Au cours ou à la suite d'une investigation, le coroner en chef peut ordonner la tenue d'une enquête sur les causes probables ou les circonstances d'un décès s'il a des raisons de croire à l'utilité de cette enquête et s'il estime que cette enquête ne nuira pas au déroulement d'une enquête policière en cours».

Alors, cette discrétion d'ordonner une enquête publique, c'est un coroner en chef qui la rend, et il justifie l'ensemble de ses décisions une fois par année devant l'Assemblée. Alors, on place le Commissaire aux incendies – qui est seul – dans la même situation que le coroner en chef. Maintenant, je pense aussi que d'habitude, si je me souviens bien des rapports d'enquête du Commissaire aux incendies que j'ai lus, l'une des premières choses que le Commissaire aux incendies explique dans ses recommandations finales, quand il explique le contexte dans lequel il va faire ses recommandations, ce sont les motifs pour lesquels il a décidé de tenir une enquête.

C'est un système qui fonctionne bien, qui a toujours bien fonctionné dans le passé. Je vois bien que, si on doit respecter l'indépendance de cet officier, on doit lui laisser porter ce jugement; ensuite, lui, son imputabilité, c'est au moment où il fera son rapport devant l'Assemblée nationale, et on jugera s'il a bien exercé sa discrétion au cours de l'année, s'il l'a bien exercée en fonction des balises. Puis, si à un moment donné on s'aperçoit qu'effectivement il fait trop d'enquêtes, il se perd, il fait trop d'enquêtes sur tout et sur n'importe quoi plutôt que... ça l'empêche de faire les bonnes enquêtes où il pourrait nous faire des recommandations utiles pour éviter les incendies, bien, on en tirera les conséquences puis on verra quel jugement on doit porter sur lui et si on doit renouveler son mandat. Mais je pense que, dans la nature des choses, il faut donner – puisqu'il est seul – au Commissaire aux incendies les mêmes pouvoirs qu'au coroner en chef sur cette question.

M. Dupuis: Je veux... avec votre permission?

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Saint-Laurent.

M. Dupuis: Avec votre permission, M. le Président, sur le même sujet. Je vais emprunter le droit de parole du député de Chapleau, il me le prête, je pense. Je fais une farce.

M. le Président, M. le ministre, vous avez raison, le coroner en chef, quand il décide de tenir une enquête publique, il a une discrétion.

M. Ménard: ...de l'ordonner, il ne la tient pas nécessairement lui-même, puisque lui...

M. Dupuis: Non, excusez-moi, de l'ordonner, vous avez raison. Lorsque le coroner en chef ordonne la tenue d'une enquête, il le fait s'il a des raisons de croire en l'utilité de cette enquête, et ça, c'est une discrétion. La grosse différence...

M. Ménard: Comme ici.

M. Dupuis: Non. Il y a une vraie différence, c'est la suivante: c'est que, lui, il dispose du rapport du coroner, de la recommandation du coroner et des motifs que le coroner avait pour lui suggérer, à lui, coroner en chef, de tenir une enquête publique. La situation est différente. Le Commissaire aux incendies, là, lui, il est tout seul, et, donc, il ne dispose pas, comme le coroner en chef lorsqu'il ordonne la tenue d'une enquête, d'un rapport avec des motifs. Le coroner en chef, quand il décide qu'il ordonne la tenue d'une enquête publique, il bénéficie du rapport du coroner qui lui a donné les motifs pour lesquels il souhaiterait qu'une enquête se tienne. Le Commissaire aux incendies n'a pas ça.

D'autre part, vous avez dit: Lorsque le Commissaire aux incendies rend sa décision – appelons-le comme ça pour les fins de la discussion – aux termes de son enquête, habituellement il donne les motifs pour lesquels il a décidé de tenir une enquête. Sauf qu'il le fait, mais ce n'est pas prévu dans la loi qu'il le fasse. Alors donc, ça m'amène à vous faire la suggestion...

Une voix: ...

M. Dupuis: Non, le rapport indique... Bien, en fait, dans votre projet de loi à vous, là, dans le projet de loi n° 52, le rapport indique que c'est l'article 28: «Le rapport indique relativement à l'incendie ou l'explosion: la date et le lieu; l'origine et la cause probables; la description des circonstances; s'il y a lieu, toute recommandation visant une meilleure protection des personnes et des biens.»

M. Ménard: Oui, mais regardez l'article 19 de la loi.

M. Dupuis: Je n'ai pas regardé l'article 19. De la loi?

M. Ménard: Si ça ne vous satisfait pas.

M. Dupuis: L'article 19 de la loi actuelle?

M. Ménard: De la loi actuelle. Je me demande si ça ne vous satisferait pas.

M. Dupuis: Mais peu importe, d'ici à ce que je le trouve, alors pourquoi, dans ces circonstances-là – c'est peut-être ça – le Commissaires aux incendies n'aurait-il pas l'obligation, dès qu'il entreprend une enquête publique, d'exposer les motifs pour lesquels il la tient? Obligation.

M. Ménard: Il l'a déjà.

M. Dupuis: O.K. On va regarder l'article.

(Consultation)

M. Dupuis: Moi, ça me convient, ça.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Alors, est-ce que je peux à ce moment-ci vous inviter à passer au projet d'amendement concernant l'article 4?

M. Dupuis: Oui.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Il est de même nature que l'article 1. On reviendra à l'article 1 par la suite.

Alors, l'amendement se lirait comme suit: Insérer, dans la troisième ligne du premier alinéa de l'article 14, tel que remplacé par l'article 4 du présent projet de loi, et après le mot «causé», ce qui suit: «des blessures,».

M. Ménard: «Des blessures ou».

M. Dupuis: Non, non.

M. Ménard: Oui, oui, oui.

Une voix: ...

M. Dupuis: C'est vous... Non, virgule, vous aviez raison.

Une voix: ...causé des blessures, des dommages à des personnes ou à des biens.

M. Dupuis: Oui, oui.

M. Ménard: Non.

M. Dupuis: Oui, et je vous donne tout le crédit. C'est vous qui l'avez dit le premier: des blessures, des dommages à des personnes ou des biens; et là vous englobez toutes les situations.

M. Ménard: Non.

M. Dupuis: Des blessures ou des dommages, vous restreignez un petit peu.

M. Ménard: Non, parce qu'il faut que... si je mets des blessures, des dommages, alors il faudrait lire à ce moment-là... la virgule remplace le «ou» n'est-ce pas?

M. Dupuis: Elle ajoute.

M. Ménard: Enfin, en français avec «et» et «ou», si l'on a trois éléments ou plus, entre le premier et le deuxième la virgule remplace le «ou» qui serait là s'il n'y avait pas trois éléments. N'est-ce pas? Or, dans ce cas-ci, il y a deux éléments, il y a les blessures, d'une part, et les dommages, d'autre part. Et la catégorie des dommages se sépare en deux: ceux qui sont des dommages aux personnes et les dommages aux biens.

M. Dupuis: Eh oui.

M. Ménard: Donc, il y a en fait deux éléments dont le deuxième se divise en deux et non pas trois éléments d'égale valeur.

M. Dupuis: Oui, et c'est pour cette raison-là, si vous me permettez, M. le Président...

M. Ménard: C'est pour ça qu'il faut deux «ou» dans ce cas-ci.

(16 h 40)

M. Dupuis: ...quand on va lire l'article, que la virgule est révélatrice de tous les éléments qu'on a voulu mettre dans l'article. Je vais vous expliquer pourquoi.

M. Ménard: Je pense le contraire...

M. Dupuis: Oui, oui, vous avez le droit, il n'y a pas de problème. On pense le contraire sur un certain nombre de choses, y compris – en tout cas, je n'embarquerai pas là-dedans – certaines déclarations...

M. Ménard: N'allons pas à l'essentiel. Ha, ha, ha!

M. Dupuis: ...de la fin de semaine du premier ministre.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Bien, là, on deviendrait...

M. Ménard: Restons sur l'accessoire.

M. Dupuis: Non, non, mais ce n'est pas mauvais, ça réveille tout le monde, c'est excellent. Ce qu'on veut dire, là, c'est qu'il y a des blessures qui peuvent être causées aux personnes et des dommages qui peuvent causés aux personnes et il y a des dommages qui peuvent être causés aux biens. C'est ça qu'on veut dire. On s'entend là-dessus? C'est ça qu'on veut dire.

Si vous dites «des blessures ou des dommages causés aux personnes ou aux biens», tout le monde va comprendre que blessures, c'est avec personnes et que dommages, c'est avec biens. Alors que, plutôt, si vous dites, comme vous l'avez dit au début, c'était votre instinct qui vous l'a fait dire, c'était votre intuition qui vous l'a fait trouver, «des blessures, des dommages aux personnes et aux biens», tout le monde va comprendre que «blessures» ne peut s'appliquer qu'à personnes et que «dommages» s'applique à personnes et à biens. C'est ce que je vous soumets bien...

M. Ménard: Il faut que ça soient des dommages...

M. Dupuis: Écrivez-le, vous allez le voir. Écrivez-le devant vous, vous allez le voir

M. Ménard: Il faut que ce soient des dommages à des personnes ou à des biens.

M. Dupuis: À des personnes ou à des biens.

M. Ménard: Non, c'est parce que vous avez dit «et».

M. Dupuis: Ah, excusez-moi.

M. Ménard: Non, c'est parce que ça change. Mais je vais vous donner un autre exemple qui va vous convaincre. Supposons que nous ayons non pas deux éléments, blessures et dommages, mais que nous en ayons quatre en tout. Alors, là on dirait: les dommages...

M. Dupuis: On a de la misère à se comprendre avec deux, là, mais si vous voulez en mettre quatre, c'est correct, là.

M. Ménard: Oui, mais c'est parce que vous auriez l'exemple. En tout cas, je peux vous dire simplement, très simplement, qu'en français, la virgule remplace – dans ce cas-là – un «et» ou un «ou», n'est-ce pas, mais elle met les deux choses qui sont de chaque côté sur un même pied. Alors, c'est des blessures ou des dommages, n'est-ce pas? Si ça arrêtait là... Ça va? Mais on veut que les dommages, ce soient les dommages à des personnes ou à des biens.

M. Dupuis: Exact.

M. Ménard: O.K. Donc, on veut subdiviser les dommages. Donc, les dommages... En fait, si je le mets au long en enlevant les virgules, là, et les «ou», ce que l'on veut dire, c'est des blessures ou des dommages à des personnes ou des dommages à des biens. N'est-ce pas? C'est ça, l'intention qu'on a.

M. Dupuis: C'est ça, des blessures ou des dommages à des personnes ou des dommages à des biens.

M. Ménard: Mais plutôt que de dire, plutôt que de répéter...

M. Dupuis: C'est ça qu'on veut dire.

M. Ménard: Mais plutôt, en bon français, que de dire «des dommages à des personnes ou des dommages à des biens», on met «des dommages à des personnes ou à des biens». Puis l'auditeur comprend qu'on a voulu dire des dommages à des personnes ou des dommages à des biens. Mais, si on met une virgule, cette virgule remplace le «ou» qui est entre «personnes» et «biens». Pas le «ou» qui serait entre «blessures» et «dommages». Vous comprenez? Ici, ce qu'on veut avoir, c'est qu'on veut avoir deux catégories de choses...

M. Dupuis: Je comprends très bien.

M. Ménard: ...dont la deuxième se divise en deux. Donc, vous devez avoir deux «ou» dans ce cas-ci.

Sur le plan linguistique, je suis convaincu que... C'est une question de logique. On pourrait dire... Peut-être si on les met en logique symbolique, comme j'ai appris à un moment donné... Je ne sais pas si vous avez appris ça en philosophie, on nous avait appris ça, remplacer par des a ou des b. Peut-être c'est plus simple avec x et y, revenons à la fin. Ce que l'on veut, c'est qu'il fasse enquête sur des x et y, x c'est les blessures, y, ce sont les dommages. Mais les dommages, c'est a et b. Les dommages se composent de a et b, soit des dommages à des personnes, soit des dommages à des biens.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): À ce moment-ci, là, M. le député de Dubuc, je vais vous passer la parole, mais je vais avoir une suggestion à vous faire tout de suite après.

M. Côté (Dubuc): J'aurais peut-être une proposition qui rallierait les deux parties. Si on mettait: soit des blessures, soit des dommages à des personnes ou à des biens.

M. Ménard: Ah! Bien oui, c'est une autre façon d'être encore plus clair. Oui. Là, on est tous d'accord.

M. Dupuis: Là, on est si simple, hein, M. le ministre? Je ne sais pas pourquoi on complique tous les deux les affaires.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): À ce moment-là, est-ce qu'on peut...

M. Dupuis: Non, mais, moi, je veux entendre la suggestion du président.

M. Ménard: Bien, oui, peut-être qu'elle est meilleure. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Non, je n'en ai pas de meilleure. Je pense qu'on était vraiment devant un problème de rédaction de français, à toutes fins pratiques; alors, j'aurais suggéré qu'on suspende et qu'on travaille sur le «phrasing», pardon, sur la formulation, et y revenir par la suite.

M. Dupuis: Moi, j'aime bien la suggestion.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): À ce moment-ci, je pense que c'est une excellente suggestion. Je suggère simplement que nous suspendions l'article pour passer à l'article 5, et on va revenir par la suite aux articles 4 et 1. Alors, M. le ministre, à l'article 5.

Une voix: ...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): On peut le faire toute suite? O.K. Je m'excuse. Revenons donc à l'article 4. J'ai ici le libellé tel qu'il apparaît selon la suggestion du député de Dubuc. Alors, je lis l'ensemble. L'amendement est le suivant:

Insérer dans la troisième ligne du premier alinéa de l'article 14, tel que remplacé par l'article 4 du présent projet de loi, et après le mot «causé», ce qui suit: «soit des blessures, soit».

M. Ménard: Virgule, évidemment.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Virgule, effectivement

M. Dupuis: On ne recommencera pas avec ça.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Soit des virgules... Pardon. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Après ça, on prend un break.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien. Alors, après le mot «causé», ce qui suit: «, soit des blessures soit». Est-ce que cet amendement est adopté?

(Consultation)

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Ça va? Voulez-vous qu'on suspende un petit instant? Oui? Alors, nous suspendons quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 48)

(Reprise à 16 h 57)

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission poursuit ses travaux. Nous en étions donc au projet d'amendement à l'article 4, que je lis:

Insérer, dans la troisième ligne du premier alinéa de l'article 14, tel que remplacé par l'article 4 du présent projet de loi, et après le mot «causé», ce qui suit: «soit des blessures, soit». Est-ce que cet amendement est adopté?

M. Dupuis: L'amendement est adopté.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Adopté. Maintenant, nous en revenons donc à l'article 4 tel qu'amendé. M. le député de Saint-Laurent, vous souhaitiez, avec le consentement, pouvoir réintervenir?

M. Dupuis: Oui, s'il vous plaît.

Une voix: Il y a l'article 1 aussi.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Oui. Nous allons revenir à l'article 1 plus tard.

M. Dupuis: Voulez-vous régler la question de l'article 1, M. Comeau? Si vous voulez, on peut régler la question de l'article 1, l'intervention que je voudrais faire sur l'article 4 est sur un sujet connexe.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Un autre angle.

M. Dupuis: Oui. Sur un sujet connexe. Mais, si vous voulez régler la question de l'article 1, on pourrait le faire tout de suite.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): On pourra y revenir par la suite. Je préférerais qu'on y aille tout de suite, qu'on vide l'article 4.

M. Dupuis: Oui. O.K. C'est beau. C'est vous autres qui menez. Moi, je ne veux pas mener vos affaires.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Allez-y, M. le député de Saint-Laurent, avec le consentement.

M. Dupuis: J'étais dans le corridor, je réfléchissais, et à un moment donné M. Poirier est venu me retrouver, puis là on a commencé à discuter ensemble. On s'est regardés tous les deux puis on s'est dit: Mais il y en a une solution qui est évidente, qu'on n'a pas vue, qui mériterait peut-être de vous la faire pour que vous la considériez, que vous y réfléchissiez.

Qu'est-ce qui empêcherait que le Commissaire aux incendies soit intégré au Bureau des coroners? Dans le fond, quand on y pense, qu'est-ce qui pourrait empêcher que le Commissaire aux incendies soit intégré, soit dans la fonction soit autrement, au Bureau des coroners? Ça réglerait complètement toutes, toutes, toutes ces questions-là. Puis, dans le fond, là, c'est un coroner ou tous les coroners sont des commissaires-enquêteurs. Mais qu'est-ce qui empêcherait ça?

Là, évidemment, c'est un cheveu sur la soupe, c'est une suggestion qui arrive comme un cheveu sur la soupe, mais au fond les deux entités me semblent accomplir des fonctions qui sont semblables pour des motifs qui sont semblables, avec des pouvoirs qui sont semblables, avec des obligations d'agir équitablement qui sont pareilles, le devoir d'agir équitablement, «to act fairly», et qui traitent d'événements qui n'ont pas les mêmes conséquences bien sûr mais qui procèdent de la même farine, si vous me permettez cette expression-là.

Avez-vous déjà songé à ça? Y a-tu au ministère des études qui ont été faites ou est-ce qu'il y a une réflexion qui s'est faite à ce sujet-là? Et est-ce que le ministre trouve que ça serait peut-être pertinent de l'envisager? Je ne dis pas et je ne prétends pas, M. le ministre, que vous puissiez arriver avec une réponse à cette question-là aujourd'hui. Ça mérite qu'on y songe. Mais est-ce qu'à première vue ça vous apparaît comme étant totalement farfelu ou ça pourrait mériter une réflexion?

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le ministre.

(17 heures)

M. Ménard: Je suis bien d'accord, je pense que ça mérite une réflexion. C'est une très bonne suggestion; je vais la prendre en considération. Mais pour le moment vous comprenez...

M. Dupuis: Ha, ha, ha! Que vous avez une façon élégante de repousser le problème. Ha, ha, ha!

M. Ménard: Mais vous avez dit vous-même que vous ne vous attendiez pas à ce que je vous donne une réponse tout de suite. J'aime mieux réfléchir avant de prendre une décision, mais c'est une très bonne suggestion. Je vais lui donner toute l'attention qu'elle mérite.

M. Dupuis: Mais j'ajouterais...

M. Ménard: Pour le moment, nous allons ensemble chercher à régler un problème urgent.

M. Dupuis: Oui, oui, c'est clair.

M. Ménard: Pour le moment, si on le fait, il va falloir amender... D'abord, il va falloir abroger la loi d'enquête sur les incendies, mais il va falloir amender considérablement la Loi sur les coroners. Mais ce serait certainement dans l'intérêt d'une meilleure efficacité. Peut-être que l'on devrait demander à M. Delâge ce qu'il en pense. Ha, ha, ha! Pire, au coroner en chef éventuellement, M. Morin.

M. Dupuis: Au moins, M. Delâge pourrait espérer, à tout le moins, peut-être être nommé coroner en chef. On ne sait jamais.

M. Ménard: De toute façon, il est nommé coroner ad hoc de temps en temps; dans ce temps-là, il est son chef.

M. Dupuis: Oui, je le sais. Je le sais, mais c'est peut-être...

M. Ménard: Il y a des coroners ad hoc qui ont dépensé pas mal plus que des coroners réguliers. Ha, ha, ha!

M. Dupuis: Mais trêve de plaisanteries, pas pour faire allonger le débat, mais ça serait peut-être quelque chose qu'il faudrait envisager éventuellement si on veut... Dans le fond, si on veut être logique, là, il pourrait très bien faire partie du Bureau, être fondu.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien. Alors, à ce moment-ci, est-ce que l'article 4, tel qu'amendé, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Adopté. Nous en revenons à l'article 1 avec un amendement équivalant à celui que nous venons d'étudier. Et je lis l'amendement: Insérer, dans la troisième ligne du premier alinéa de l'article 11, tel que remplacé par l'article 1 du présent projet de loi, et après le mot «causé», les mots «soit des blessures, soit».

Est-ce que l'amendement est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Est-ce que l'article 1, tel qu'amendé, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Nous en venons donc à l'article 5. M. le ministre.

M. Ménard: Je pense que nous avons discuté incidemment de l'article 5 lorsque nous discutions de l'article 4. Mais là vous avez vos balises. Baliser l'expression «pour déterminer l'utilité d'une enquête». Je peux dire aussi, en plus, que ça s'inspire des dispositions semblables dans la Loi sur la recherche des causes et circonstances des décès.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Saint-Laurent.

M. Dupuis: Une première observation qui est banale, là, mais quand on lit... On a voulu coller à la Loi sur la recherche des causes et circonstances des décès, je comprends ça très bien. Et, si on veut le faire jusqu'au bout, là, si on veut suivre le raisonnement jusqu'au bout, il faudrait mettre la même séquence à la suite du «notamment» dans la Loi sur les coroners, comme je l'appelle de façon familière.

Le 1° correspond au 1° de l'article 5 du projet de loi n° 52, c'est-à-dire: «pour obtenir des informations propres à établir la cause, l'origine ou les circonstances de l'incendie ou de l'explosion». Mais le 2°, à l'article 105, c'est le 3° de l'article 5. Alors, je pense qu'il y aurait lieu de faire ça, là, pour empêcher le monde de...

M. Ménard: Faites-vous une proposition de sous-amendement?

M. Dupuis: On pourrait intervertir. Le 3° deviendrait le 2°, puis le 2° deviendrait le 3°. Ça, ça correspondrait exactement. C'est exact, Mme Nadeau, hein? Ça correspondrait exactement à la rédaction?

Mme Nadeau (Monique): C'est qu'on a suggéré de le mettre comme ça...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Mme Nadeau, au nom du ministre.

Mme Nadeau (Monique): ...parce qu'on trouvait que c'était plus conforme à la chronologie des événements. Alors, on était conscient que ce n'était pas tout à fait le même ordre que dans la Loi sur la recherche, mais on trouvait que ça...

M. Dupuis: Vous avez raison, c'est plus logique dans la loi sur le Commissaire aux incendies.

Mme Nadeau (Monique): C'est pour ça qu'on a...

M. Ménard: Non, dans ce que nous allons adopter maintenant.

M. Dupuis: Dans ce que nous allons adopter maintenant. C'est ce que je disais, dans le projet de loi n° 52.

M. Ménard: Nous ferons preuve ensemble de plus de logique que nos prédécesseurs dans la Loi sur la recherche et les circonstances des décès. Ha, ha, ha!

M. Dupuis: Vous avez raison, c'est plus logique dans le cas du projet de loi n° 52, effectivement.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Par conséquent, est-ce que l'article 5 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Adopté. Article 6. M. le ministre.

M. Ménard: Alors, l'article 6, encore une fois, est une conséquence du nouveau rôle que nous voulons donner au Commissaire sur les incendies, mais aussi, surtout, au rôle ancien que nous voulons lui enlever, puisqu'il n'est pas conforme à l'évolution jurisprudentielle sur les exigences constitutionnelles.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Saint-Laurent.

M. Dupuis: Oui. Moi, ça me convient parce que, évidemment, j'imagine facilement... Et essayons de penser à une situation, M. le ministre, où ça ne serait pas ça. Puis c'est peut-être parce que mon raisonnement est trop court, mais je vois difficilement comment, à la suite d'une poursuite criminelle – prenons deux hypothèses – où une personne est déclarée coupable d'incendiat, par exemple, ou d'avoir utilisé une substance explosive, un jugement de culpabilité qui va même jusqu'en Cour suprême du Canada, prenons la situation la pire, et que la cause dure 10 ans, une fois que la personne est trouvée coupable définitivement, il n'y aurait pas lieu de tenir une enquête du Commissaire aux incendies, hein. J'imagine que toutes les circonstances, tous les faits auraient été mis en preuve au cours du procès. Non?

M. Ménard: Oui.

M. Dupuis: J'imagine.

M. Ménard: La seule chose que je vois, c'est qu'on peut criminellement causer un incendie qui aura des conséquences beaucoup plus grandes...

M. Dupuis: Pour des tiers. Oui.

M. Ménard: ...que ce que, normalement, ce crime aurait causé, si ce n'était du défaut d'un système de protection quelconque qui demanderait d'être corrigé.

M. Dupuis: Exact.

M. Ménard: Mais j'ai l'impression que, dans ces circonstances-là, on le constaterait puis on apporterait des correctifs avant que la Cour suprême ait décidé du sort de la personne qui a mis le feu.

M. Dupuis: Vous avez tellement raison...

M. Ménard: Le meilleur exemple, c'est...

M. Dupuis: La négligence criminelle.

M. Ménard: Non. Le meilleur exemple, c'est ce qui est arrivé dans le Nord, vous savez cet accident terrible dans l'Abitibi, où un jeune, dans une maison...

Une voix: À Chapais?

M. Ménard: À Chapais, oui. À Chapais, où les gens fêtaient le Nouvel An, et on avait fait une décoration avec du sapinage tout autour, et le jeune, un geste de fou, il met son briquet sous un sapinage et puis ça a entouré... Bon. Je pense bien que, la leçon, on l'a tirée de ça. Il n'y a plus personne qui réunit une foule puis qui va faire un décor en sapinage. On va trouver des substituts qui vont avoir l'air des sapins, mais qui vont être ignifuges. Mais plus jamais on ne pensera à faire une fête dans pareille circonstance. Alors, dans ce cas-là, on en a un, un exemple d'un crime qui n'avait pas beaucoup de malice, mais qui a eu des conséquences terribles à cause d'un mauvais choix de décorations. Mais, à part ça, je vois que, dans ces cas-là, on tire rapidement les leçons.

M. Dupuis: En fait, l'idée que je soulève, c'est la suivante. Je ne voudrais pas que des pratiques qui seraient dangereuses continuent d'exister parce qu'on ne peut rien faire, parce que le Commissaire aux incendies n'est pas capable de considérer les causes et les circonstances de l'incendie parce qu'il y a une poursuite criminelle contre quelqu'un. Et là je pense à des cas de négligence criminelle, par exemple, où tu as une personne qui n'a pas nécessairement causé volontairement un incendie, mais qui a eu une insouciance déréglée téméraire à l'égard de la vie d'autrui en accomplissant un geste quelconque ou en acceptant qu'une situation continue d'exister, puis ça a provoqué un incendie ou ça a provoqué une explosion. Et là c'est une pratique, et le Commissaire aux incendies pourrait... Si le Commissaire aux incendies tenait une enquête, il pourrait faire des recommandations à des organismes publics, par exemple, de cesser telle pratique, mais il va être empêché de le faire, évidemment, parce qu'il va y avoir une poursuite criminelle qui va avoir été déposée contre quelqu'un, et là, bien, il ne pourra pas tenir son enquête jusqu'à temps que la cause soit terminée.

(17 h 10)

Moi, je comprends bien le principe à la base de ça, c'est évidemment qu'on ne veut pas permettre que, par le biais de l'enquête du Commissaire aux incendies, les droits d'un individu soient affectés de quelque façon que ce soit par l'audition de témoins ou, etc. Et c'est difficile, évidemment, de tenir une enquête du Commissaire aux incendies sans faire venir devant lui et sans entendre, probablement, la personne qui, au premier chef, peut être impliquée dans un incendie. Et là, évidemment, on veut respecter les droits de chacun. Peut-être que je coupe les cheveux en quatre, mais, comme c'est le seul endroit, ici, où on peut se poser intelligemment ce genre de question là, je me permets de la soulever à ce moment-ci.

Et la solution que j'y verrais, si on découvrait qu'il y a un effet pervers au fait d'attendre qu'une poursuite criminelle soit terminée avant que le Commissaire aux incendies puisse tenir une enquête... Je réfléchis tout haut. Lorsqu'une personne est poursuivie ou lorsqu'une personne fait l'objet d'une poursuite criminelle suite à un incendie ou à une explosion, est-ce que j'ai raison de penser, M. le ministre – quand je dis «M. le ministre», je veux dire «M. le Président» et je veux dire «Mme Nadeau» aussi – qu'à ce moment-là c'est la tenue de l'enquête qui est prohibée, quand une personne fait l'objet d'une poursuite criminelle, mais pas la recherche? Est-ce que j'ai raison de penser ça? Autrement dit, est-ce que le Commissaire aux incendies peut faire une recherche malgré le fait qu'une personne fasse l'objet d'une poursuite criminelle ou malgré le fait qu'il y ait une enquête policière qui soit en cours? La recherche. Est-ce que j'ai...

M. Ménard: Je ne crois pas que la recherche soit interdite. On va vérifier...

M. Dupuis: Non, c'est ça. On a peut-être une solution, là.

M. Ménard: Mais il y a une raison à ça.

M. Dupuis: Oui.

M. Ménard: C'est que l'enquête suppose qu'on convoque des témoins.

M. Dupuis: Je vous en aurais offert un, mais votre attachée politique m'a dit...

M. Ménard: Je n'en prends pas.

M. Dupuis: ...pendant la suspension qu'elle voulait vous en offrir un.

M. Ménard: De toute façon, je n'en prendrais pas. Je prendrais plutôt un jus.

M. Dupuis: D'ailleurs, elle m'a même dit qu'elle voulait en offrir à tout le monde du côté ministériel.

Une voix: Je sais que M. Ménard aime beaucoup l'eau.

M. Dupuis: Je m'excuse.

M. Ménard: Non, mais c'est ce qu'il y a de moins dommageable. Non...

M. Dupuis: Oui, il y a une raison, vous me disiez qu'il y a une...

M. Ménard: Oui, il y a une raison. La raison pour laquelle on ne fait pas tenir d'enquête, c'est parce que l'enquête suppose qu'on convoque des témoins. Donc, on veut empêcher que la personne...

M. Dupuis: Exact. Exact.

M. Ménard: ...qui est soupçonnée d'un acte criminel soit appelée à témoigner et à collaborer à sa propre condamnation.

M. Dupuis: C'est ça. C'est ça.

M. Ménard: Donc, s'il n'y a pas d'enquête, même s'il y a une recherche...

M. Dupuis: Il n'y a pas de problème.

M. Ménard: ...ce droit de la personne demeure protégé.

M. Dupuis: Exact. Bien oui. Absolument. Alors...

M. Ménard: C'est parce que j'ai donné à mes collègues un cours d'où ça date, le coroner, puis d'où ça date, le Commissaire aux incendies...

M. Dupuis: Invitez-moi la prochaine fois.

M. Ménard: ...puis je leur ai résumé 40 ans de jurisprudence.

M. Dupuis: Invitez-moi la prochaine fois.

M. Ménard: Ha, ha, ha! Oui, ça, vous auriez pu être là.

M. Dupuis: Ha, ha, ha! Seulement pour cette partie-là?

M. Ménard: Vous auriez peut-être même complété mes explications.

M. Dupuis: Je serais sorti quand?

M. Ménard: Vous auriez peut-être complété mes explications.

M. Dupuis: O.K. Est-ce que c'est clair dans la loi, M. le ministre, que, malgré le fait qu'une personne fasse l'objet d'une poursuite criminelle, ou malgré le fait qu'une enquête policière soit en cours, la recherche est possible, ou c'est une déduction qu'il faut faire de la rédaction de la loi?

M. Ménard: Bien, moi, il me semble que c'est clair dans la loi que la recherche n'est pas...

M. Dupuis: N'est pas couverte.

M. Ménard: C'est le nouvel article 14.

M. Dupuis: La prohibition ne couvre pas la recherche. C'est ça, dans le fond, hein?

M. Ménard: C'est ça. Non, ce n'est pas 14, c'est 11. L'article 11 dit bien: «Le Commissaire-enquêteur sur les incendies peut rechercher la cause, l'origine ou les circonstances qui ont entouré tout incendie ou toute explosion ayant causé des dommages».

(Consultation)

M. Ménard: Oui, oui, ça, on sait qu'il ne peut pas, puis on sait qu'il doit arrêter...

M. Dupuis: Attendez un petit peu. Donnez-moi juste deux secondes.

Il n'y aurait pas lieu de le mentionner nommément, justement pour éviter que, dans les cas où une recommandation pourrait être utile, elle puisse se faire dans le cadre d'une recherche, malgré le fait qu'une personne soit accusée? Non? Vous pensez que c'est assez... O.K.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Alors, est-ce que l'article 6 est adopté? Oui?

Des voix: Adopté.

M. Dupuis: Une seconde, avec votre permission.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Alors, M. le porte-parole de l'opposition, ça va? Adopté?

M. Dupuis: Oui.

M. Bertrand (Portneuf): Donc, nous en venons à l'article 7. M. le ministre.

M. Ménard: Bon. L'article 7 est encore essentiel, si on veut corriger ce que l'on veut corriger, c'est-à-dire enlever à l'enquête du Commissaire aux incendies tout caractère d'enquête criminelle ou d'enquête sur la responsabilité de qui que ce soit. Alors, avant, l'article 25 révélait, au fond, que, comme ça servait un peu à faire des enquêtes criminelles, bien, c'étaient les règles ordinaires de la preuve en matière criminelle qui s'appliquaient. Alors donc, on l'abroge pour le remplacer par le suivant:

«Le Commissaire-enquêteur a autorité sur la présentation de la preuve et le déroulement de l'enquête. Il peut notamment recevoir toute preuve qu'il juge pertinente aux fins de l'enquête, exclure celle qui est de nature répétitive ou dont la valeur probante est minime et limiter l'interrogatoire ou le contre-interrogatoire vexatoire d'un témoin.»

Je crois que, là-dedans, on a dû s'inspirer, encore une fois, d'un article de la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès. Et je pense que c'est à peu près la même chose, mutatis mutandis.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le porte-parole de l'opposition officielle.

M. Dupuis: Évidemment, c'est ma formation de criminaliste et celle du ministre. On n'est pas dans la même position, tous les deux, c'est certain, mais ma formation de criminaliste ayant pratiqué plus particulièrement dans les tribunaux de droit commun et devant des instances quasi judiciaires... Et je reconnais d'emblée qu'il y a une différence entre l'institution que représente le Commissaire aux incendies et un tribunal de droit commun. C'est évident. C'est clair. Et aussi, il y a une différence – vous l'avez dit tantôt – entre une instance quasi judiciaire et le Commissaire aux incendies. Là, d'entrée de jeu, j'en conviens parfaitement.

D'entrée de jeu aussi, je conviens parfaitement qu'il y a un article exactement semblable... pas semblable, pareil. C'est le même article. C'est la reproduction fidèle, je pense, M. le ministre, à moins que je me trompe, de l'article 154 de la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès. Bon.

(17 h 20)

Ceci étant dit, puisque le Commissaire-enquêteur aux incendies peut être assimilé – pas parfaitement, j'en conviens aussi – à ce qu'il est convenu d'appeler une autorité administrative avec plus de pouvoirs, par contre, parce qu'il va tenir des enquêtes, il va entendre des témoins sous serment, il a le devoir d'agir équitablement. «The duty to act fairly», le Commissaire aux incendies l'a, bien sûr. Bien sûr, il ne peut pas s'appliquer parfaitement parce que, dans le devoir d'agir équitablement, il y a l'obligation de respecter la règle audi alteram partem dans le cas d'une autorité... Donc, je comprends, là.

M. Ménard: C'est difficile à déterminer, dans ce cas-ci.

M. Dupuis: Non, non, mais ça ne peut pas, dans ce cas-là.

M. Ménard: C'est ça.

M. Dupuis: Et, au fond, quand je lis l'article 25 – et je vais demander au ministre d'essayer de se désincarner deux, trois minutes...

M. Ménard: Ça fait longtemps que j'essaie. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Dupuis: ...et de retourner dans la peau du criminaliste qu'il fut – et, quand on lit l'article et qu'on constate que le Commissaire-enquêteur... Pas de problème avec le fait qu'il a autorité sur la présentation de la preuve et le déroulement de l'enquête, pas de problème avec ça. «Il peut notamment recevoir toute preuve qu'il juge pertinente aux fins de l'enquête, exclure celle qui est de nature répétitive ou dont la valeur probante est minime et limiter l'interrogatoire ou le contre-interrogatoire vexatoire d'un témoin.»

Moi, là, honnêtement, toutes mes fibres de criminaliste vibrent dans le sens négatif du terme quand je lis que le Commissaire-enquêteur, encore là, n'a aucune balise, quelle qu'elle soit, et que c'est le seul juge de la valeur probante des preuves qui sont présentées devant lui, et c'est le seul juge de la décision qui est sienne de décider si un interrogatoire ou un contre-interrogatoire est vexatoire ou non. Je trouve qu'on lui en donne large. Honnêtement, on lui en donne large. Est-ce que c'est nécessaire?

Et, dans le fond, là, ma remarque est ainsi faite, bien que, dans la Loi sur les coroners ou la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès, on retrouve la même disposition. Est-ce que c'est vraiment nécessaire de l'ouvrir à ce point-là? Moi, ça me...

M. Ménard: Mais d'ouvrir quoi?

M. Dupuis: Bien, de mentionner nommément qu'il est le seul juge de la valeur probante d'une preuve. Je ne sais pas, il y a quelque chose qui me hérisse dans l'article 25. C'est vraiment laissé à la seule, seule, seule, seule, seule décision du Commissaire-enquêteur. Il y a quelque chose qui m'embête là-dedans. Est-ce que ça ne vous embête pas, vous aussi, cette largesse, cette libéralité?

M. Ménard: Bien, moi, c'est drôle, je croyais que ce qui vous aurait embêté, quand vous parlez de votre fibre de criminaliste, c'est de ne pas pouvoir présenter une preuve, que c'est à vous de déterminer qu'une preuve serait pertinente et que le Commissaire-enquêteur pourrait estimer, lui, qu'elle ne l'est pas, et donc ne pas l'admettre.

M. Dupuis: Mais c'est ça. Bien, je me suis mal exprimé. C'est ça que je veux dire. Je veux dire: le Commissaire-enquêteur est le seul juge de la valeur probante d'une preuve, de telle sorte que quelqu'un qui vient devant lui et qui lui demanderait la permission de présenter une preuve n'a pas de poignée, si vous voulez. Il peut décider qu'il est tanné, que son idée est faite: Mon idée est faite, je suis tanné, je ne veux plus vous entendre, bonjour et...

M. Ménard: En tout cas, d'abord, je peux vous dire, la première chose, vous avez remarqué que l'article 25 est rédigé à peu près exactement comme l'article 54 de la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès.

M. Dupuis: Ah oui! O.K. Oui.

M. Ménard: Ensuite, il y a quand même l'article 23 de la Loi sur les enquêtes sur les incendies qui dit que: «Les personnes que le Commissaire-enquêteur juge intéressées ou leurs procureurs peuvent poser aux témoins toutes questions pertinentes pour les fins de l'enquête.» Donc, il y a une obligation d'accepter toutes les questions pertinentes pour les fins de l'enquête.

Mon impression: il doit y avoir une disposition aussi qui détermine que les parties peuvent faire entendre des témoins sur des faits pertinents, enfin, pour voir comment c'est fait. Donc, c'est quand même balisé à l'intérieur même de la loi. Maintenant, c'est vrai que c'est lui qui juge ce qui est pertinent, mais ça, c'est un vieux principe de droit. Toute personne qui préside une enquête est celle qui détermine ce qui est pertinent et ce qui ne l'est pas, quitte au pouvoir de révision générale de la Cour supérieure... Ici, il n'y a pas de tribunal d'appel, donc il y a quand même un pouvoir général de la Cour supérieure.

Ensuite, il y a le devoir, en vertu de la common law, d'agir équitablement, ce qu'on appelle le «duty to act fairly».

Ensuite de ça, il est considéré, puis c'est là que j'ai sorti ma bibliothèque ambulante, là, parce que...

M. Dupuis: Moi, je pensais que c'était votre attaché politique, votre bibliothèque ambulante, mais...

M. Ménard: Bien, ça, c'est une autre.

M. Dupuis: Ha, ha, ha!

M. Ménard: Puis j'ai encore le stock que je traînais comme ministre de la Justice.

M. Dupuis: En tout cas, j'avoue que ça doit être plus agréable de consulter la bibliothèque qui est à votre gauche...

M. Ménard: Ah! celle-là que vous voulez dire. Ah oui!

M. Dupuis: ...oui, oui... que celle que vous avez devant vous.

M. Ménard: Oui.

M. Dupuis: Celle que vous avez devant vous excluant votre interlocuteur, bien sûr.

M. Ménard: Bon, bien, là, vous entrez sur un sujet qui, j'espère, ne sera pas trop glissant. Ha, ha, ha!

Mais l'article 56 de la Charte, hein...

M. Dupuis: Oui.

M. Ménard: ...dit bien que, dans les articles 9, 23 – donc 23 qui est quand même ça... J'ai bien mon soupçon aussi que 30, 31, 34 et 38, ça devrait vouloir dire la même chose, mais, en tout cas, le mot «tribunal» inclut un coroner, un Commissaire-enquêteur sur les incendies. Donc, tous ces autres articles, on peut les revoir l'un après l'autre, qui prévoient, je dirais, l'équité des audiences, le Commissaire aux incendies, en vertu de l'article 56, il est tenu... L'article 25 est utile, encore une fois, sur le plan éducation, pour faire comprendre sommairement aux gens qui lisent cette loi ce que fait le Commissaire sur les incendies, mais il n'est pas limitatif quant aux obligations, quant aux devoirs et aux pouvoirs qu'il a. En tout cas, certainement pas quant aux obligations.

M. Dupuis: C'est clair. Oui, c'est sûr. Moi, évidemment, j'aurais préféré qu'on précise dans le sens du devoir d'agir équitablement, là, parce que, évidemment, quand on le lit... Il y a deux façons de lire un article. Quand on le lit et qu'on est un administré, qu'on prend connaissance de la loi, la réaction, c'est de se dire: Il peut faire ce qu'il veut. C'est ça, la réaction. C'est celle-là.

Une voix: ...

M. Dupuis: Bien oui, il a autorité sur la présentation de la preuve, le déroulement de l'enquête. Bon. Il peut recevoir toute preuve qu'il juge pertinente, c'est lui qui décide ça; exclure celle qui est de nature... Je l'ai déjà entendu.

Il y a trois témoins qu'on voudrait faire entendre. C'est important, de temps en temps, d'avoir... Je ne dis pas toujours, là, je suis conscient de ça; ce n'est pas parce que trois personnes viennent dire la même chose que la valeur probante de la preuve est meilleure. Mais, de temps en temps, c'est important d'avoir une preuve répétitive ou trois témoins qui viennent dire la même chose, pour des raisons qui sont évidentes – on a chacun plaidé. Mais là, si le coroner est tanné de les entendre, il peut dire: Moi, j'en ai assez entendu. J'en ai assez. Tu sais, ça donne une liberté.

(17 h 30)

Évidemment, peut-être que c'est parce qu'on a eu des mauvaises expériences – pas devant M. Delâge, je le précise – mais il est arrivé qu'on a eu de mauvaises expériences, même devant des tribunaux de droit commun, de cette nature-là. Vous avez dû entendre ça dans votre pratique: J'en ai assez entendu, je ne veux plus vous entendre, maître. Bon. Devant un tribunal de droit commun, nos recours sont plus évidents et les règles de justice naturelle, tout comme le devoir de gérer équitablement, ont une meilleure visibilité, pour employer une expression telle. Alors, moi, je n'aurais pas détesté qu'on précise...

Je vous vois sourire, c'est parce que vous avez des noms de juges en tête, je le sais, mais on ne les prononcera pas ici...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Dupuis: ...mais probablement que, lors de l'ajournement, on pourra se les échanger puis, normalement, on ne devrait pas être loin l'un de l'autre.

Mais j'aurais aimé, moi, que soit précisé, jusqu'à un certain point, ce devoir d'agir équitablement pour que l'administré qui... sente qu'il y en a effectivement des balises. C'est simplement ça.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Chapleau.

M. Pelletier (Chapleau): C'est vrai quand même que, quand on lit la première phrase, «le commissaire-enquêteur a autorité sur la présentation de la preuve et le déroulement de l'enquête», et lorsqu'on constate que ce qui suit, c'est une précision, finalement, il y a usage du mot «notamment» par ailleurs – c'est une précision qui est non exhaustive – c'est un peu fourni à titre d'exemple, les pouvoirs dont dispose le commissaire-enquêteur. C'est vrai que la première phrase, elle est quand même assez large, et c'est vrai que, a priori, je dirais que ça pose un problème dans le contexte du devoir d'agir équitablement. Alors, s'il y avait une précision voulant que le commissaire-enquêteur a autorité sur la présentation de la preuve et le déroulement de l'enquête, dans le respect des règles de l'équité procédurale ou dans le respect des règles de la justice fondamentale, dans le respect des règles de la justice naturelle, bon, on verrait au moins une limite au pouvoir du commissaire-enquêteur.

Moi, je comprends très bien l'esprit de cette disposition-là, ici, à l'article 25. Je comprends que l'idée, c'est de se fier au bon jugement du commissaire-enquêteur. Vous l'avez mentionné avec pertinence, il y a toujours un recours en révision, bien entendu, devant la Cour supérieure, c'est sûr. Mais, puisqu'on prend la peine de préciser ici quels sont les pouvoirs du commissaire-enquêteur en ce qui concerne l'administration de la preuve et puis, finalement, la présentation de la preuve puis le déroulement de l'enquête, il me semble qu'un renvoi, une référence aux règles de l'équité, ce ne serait pas quelque chose qui serait, disons, exagéré ou qui serait déplacé. Ça manque, à première vue, à l'article 25.

M. Dupuis: Sous quelle forme le verriez-vous?

M. Ménard: Bien, moi, je n'ai pas fait exprès pour vous laisser parler, mais j'avoue que vous me... À bien y penser, je pense que ça justifierait peut-être un amendement qu'on me propose, surtout que je ne l'avais pas vu comme ça avant. Que diriez-vous d'une expression qui serait: Il doit s'assurer que celle-ci se déroule de façon équitable. Alors, on le mettrait après la première phrase: «Le commissaire-enquêteur a autorité sur la présentation de la preuve et le déroulement de l'enquête. Il doit s'assurer que celle-ci se déroule de façon équitable.» Puis ça continuerait: «Il peut notamment recevoir toute preuve qu'il juge pertinente aux fins de l'enquête.»

M. Dupuis: Oui, ça conviendrait parfaitement.

M. Ménard: Alors, si vous voulez le suggérer, nous sommes d'accord avec vous.

M. Dupuis: Excellent.

Une voix: Je ne sais pas comment rédiger ça, M. le secrétaire, pouvez-vous m'aider?

M. Ménard: Après les mots...

M. Dupuis: Regarde bien ce qu'on va faire. On a fait ça dans d'autres commissions. Quand on s'entend sur un amendement qui est suggéré comme ça, peut-être que vous pourriez le faire préparer par vos gens.

M. Ménard: Il est prêt.

M. Dupuis: Ah, il est prêt. O.K. c'est beau.

M. Ménard: Oui, mais il n'est pas prêt dans le langage avec lequel vous n'êtes pas familier, puis je ne le suis pas encore moi-même.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Alors, ce que je suggère à ce moment-ci, tout simplement...

M. Ménard: Mais c'est après. On dit....

M. Pelletier (Chapleau): Non, mais la même phrase que celle que vous venez d'utiliser. Moi, ça me convient tout à fait.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Je comprends, mais on doit quand même formaliser un petit peu, là, par écrit, la proposition. Alors, ce que je suggère...

M. Dupuis: Je me fie au président pour la forme et à M. Comeau, bien sûr, pour la formulation exacte.

M. Pelletier (Chapleau): Moi, ça me semble tout à fait approprié, ça.

M. Dupuis: Vous prenez votre temps, M. Comeau.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): O.K. Alors, l'article 25 de la loi est remplacé par le suivant. «Le commissaire-enquêteur a autorité sur la présentation de la preuve et le déroulement de l'enquête. Il doit s'assurer que celle-ci se déroule de façon équitable.» Et ensuite on poursuit avec: «Il peut notamment recevoir toute preuve», etc. Ça va?

M. Pelletier (Chapleau): Avec ça, c'est tout à fait complet. C'est encore mieux que de renvoyer à la justice naturelle ou à la justice fondamentale, à mon avis.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): O.K. Alors, est-ce que l'amendement proposé est adopté?

M. Dupuis: Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Est-ce que l'article 7, tel qu'amendé, est adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Adopté? Alors, nous en venons à l'article 8. M. le ministre.

M. Dupuis: Avant qu'on arrive à l'article 8, juste une petite remarque.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Saint-Laurent.

M. Dupuis: Je remercie le ministre de son ouverture d'esprit et j'imagine qu'il pourra suggérer à ses gens, et l'opposition n'aura pas d'objection à l'amendement, peut-être ajouter, dans le... on est rendu au rapport de la commission dans le projet de loi n° 19 qui concerne la Loi sur les recherches des causes et des circonstances des décès... peut-être un amendement au même effet, à l'article 154, je pense. C'était pour le rendre conforme.

M. Ménard: C'est une bonne suggestion. On a le temps d'y penser.

M. Dupuis: Je vous le soumets, là, puis vous avez le temps d'y penser. La seule chose, c'est qu'on pourrait saisir l'opportunité qui nous est donnée.

M. Ménard: C'est ça. Subséquent, c'est ce soir ou c'est demain?

M. Dupuis: Je ne sais pas quand ils vont l'appeler, mais on peut introduire un amendement en troisième lecture.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Troisième lecture, oui, bien sûr.

M. Dupuis: On n'est pas rendu là.

M. Ménard: On peut le faire?

M. Dupuis: Oui, oui, absolument. On n'est pas rendu là, on va faire le rapport de la commission.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Bien sûr sous réserve des consentements usuels ou habituels.

M. Dupuis: Oui, c'est ça, c'est ça. Mais, moi, je m'engage à donner mon consentement à tel amendement, en troisième lecture, si vous voulez.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien. Alors, est-ce que je peux vous inviter à revenir au projet de loi?

M. Dupuis: Oui, excusez-nous, M. le Président, c'est dans notre enthousiasme.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Saint-Laurent, je pense que vos remarques étaient tout à fait pertinentes. À ce moment-ci, j'inviterais le ministre à nous présenter l'article 8.

Une voix: Un enthousiasme contagieux.

M. Dupuis: Contagieux, oui, tout à fait.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): L'article 8.

M. Ménard: Je pense que l'article 8, qui modifie l'article 28, va permettre encore une fois d'établir très bien ce que doit être le nouveau rôle du commissaire sur les incendies par rapport à ce qu'il était anciennement. Alors, anciennement, on parlait de verdict, on parlait qu'il devait mentionner s'il y avait eu crime et, le cas échéant, exposer même le nom de l'auteur présumé. Alors, tout ça, c'est ça qu'on veut enlever pour le remplacer par des dispositions qui en font une personne qui va enquêter sur les incendies de façon à en déterminer les causes ou les circonstances pour qu'éventuellement nous puissions corriger ces causes et éviter dans l'avenir des incendies de même nature.

Donc, je pense que l'essentiel, c'est ce qui est rajouté. Enfin, chacun peut le lire, mais je pense que tout le monde comprend que cet article-là est aussi essentiel si on veut changer le rôle du commissaire sur les incendies.

M. Dupuis: On avait songé – je le dis, là, parce qu'on achève puis il est près de 18 heures – quand on a étudié le projet de loi de façon plus attentive aux fins de l'étude que nous faisons cet après-midi, on s'était demandé s'il ne serait pas pertinent d'ajouter, dans la liste des considérations que le rapport doit indiquer, les dommages. Mais, finalement, on s'est rendu compte qu'il y a une notion subjective, éminemment subjective, dans la notion de dommage dans le cadre de cette loi-là et que ce ne serait pas pratique. Dans le fond, ce n'est pas objectif, ce n'est pas...

M. Ménard: Bien, il faut faire attention.

M. Dupuis: ...on ne peut pas dire... Ils perdent la maison, ça, c'est objectif. Mais il y a des dommages qui sont tout à fait subjectifs et qui entraînent, qui peuvent entraîner des...

M. Ménard: Bien, ça, c'est le rôle des tribunaux civils, puis on n'en veut pas qui se mêlent de ça.

M. Dupuis: Bien, oui, c'est ça, c'est le rôle des tribunaux. C'est ça, c'est pour ça qu'on a retraité sur cet... Ça va.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Est-ce que l'article 8 est adopté?

M. Dupuis: Oui.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Adopté. L'article 9, M. le ministre?

M. Ménard: C'est l'article que je cherchais tout à l'heure et que je trouve, qui est très clair: «Le commissaire-enquêteur ne peut, à l'occasion d'une enquête, se prononcer sur la responsabilité civile ou criminelle d'une personne.»

M. Dupuis: Ça va.

M. Ménard: Alors, ça, encore une fois, c'est mutatis mutandis, la même chose que le coroner.

M. Dupuis: Ça va.

(17 h 40)

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Est-ce que l'article est adopté? Adopté. Article 10.

M. Ménard: Bon. Cet article est de droit nouveau, je crois.

M. Dupuis: Est-ce qu'il y a l'équivalent?

M. Ménard: Par rapport à d'autres lois semblables, l'article 29.1 nous apparaît être assez succinct pour dire l'essentiel de ce qu'il dit, pour couvrir les cas que l'on veut couvrir. Et les cas que l'on veut couvrir, c'est évidemment la protection des droits éventuels de personnes qui seront décidés par une autre instance. Puis elles vont dans le sens aussi de préoccupations importantes et nouvelles, pour lesquelles on accorde de plus en plus d'importance, parce que ce sont des... en fait, c'est le droit à la vie privée qui est de plus en plus menacé par le développement des technologies modernes, les moyens de communication où, là, les gens ont de plus en plus le souci... nous demandent, comme législateur, d'avoir le souci de protéger la vie privée, de concilier ce droit avec la nécessité, par contre, d'une société libre dans laquelle la liberté de l'information est non seulement une valeur importante en soi, mais aussi a une valeur pour la préservation de la démocratie et éventuellement de l'intérêt public de tous.

Donc, on demande au commissaire-enquêteur de déterminer s'il est dans l'intérêt public de protéger la vie privée d'une personne ou de sa réputation. Il pourra interdire la publication, la diffusion de documents, un certain nombre de documents. Ces documents, on les retrouve aux paragraphes b et c de l'article 29.

M. Dupuis: En fait, c'est la déposition des témoins puis les circonstances de l'incendie ou de l'explosion, essentiellement, c'est ça. C'est exact, M. le ministre?

Une voix: ...

M. Dupuis: C'est ça, parce que b, c'est les dépositions des témoins, et c, c'est la date et le lieu, l'origine et la cause probable, la description des circonstances, puis toute recommandation visant une meilleure protection si c'est pour assurer la vie privée des gens, protéger les droits. Dans le fond, c'est la révélation des circonstances qui pourraient enfreindre ou causer problème, et peut-être l'origine et la cause probable aussi, là, bien sûr. La date et le lieu, en général, c'est assez connu. C'est ça, M. le ministre?

M. Ménard: Oui, bien, c'est uniquement ce qui est visé à b et c de l'article 29.

M. Dupuis: Oui, c'est ça, b, c'est la déposition des témoins.

M. Ménard: Et puis c, c'est le rapport...

M. Dupuis: C'est le rapport qu'on vient d'adopter, là, à l'article 28. C'est ça. C'est le rapport qu'on vient d'adopter. Bon, est-ce qu'il y a une raison pour laquelle on n'a pas reproduit... Parce que j'imagine qu'on voulait, M. le ministre – mais faisant référence à Mme Nadeau – faire référence à ce qui est mentionné dans la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès à l'article 146, qui se lit: «S'il l'estime nécessaire à l'intérêt public ou à la protection de la vie privée d'une personne, de sa réputation ou de son droit à un procès juste et équitable, le coroner interdit d'office ou sur demande la publication ou la diffusion d'information relatée ou pouvant être relatée au cours de l'enquête.»

Évidemment, puisqu'on vient de dire que, dans le cas d'une poursuite criminelle, il n'y aura pas de tenue d'une enquête du Commissaire aux incendies, il n'y aurait pas lieu peut-être de reproduire son droit à un procès juste et équitable, à ce moment-ci. C'est un peu ça?

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Mme Nadeau, au nom du ministre.

Mme Nadeau (Monique): Il peut y avoir une question de timing, si vous voulez. C'est qu'il peut arriver que le processus soit commencé puis que les accusations arrivent après puis...

M. Ménard: Ça n'a pas pu être prévu.

Mme Nadeau (Monique): Oui, c'est ça. Au moment où il a commencé, il ne savait pas qu'il y aurait des accusations au criminel. Alors, là, il arrête ça là, puis... Mais il ne faut pas... Ou bien il venait juste de terminer, puis les accusations n'ont pas été...

M. Dupuis: Alors, moi, je n'ai aucun problème avec ça, d'autant plus que, là, je constate – là, je constate, et c'est une mi-boutade – que vous avez rendu le Commissaire aux incendies redevable de cette décision-là au ministre. Là, vous avez jugé qu'il était pertinent qu'il soit redevable au ministre de cette décision-là qui, entre vous et moi, est importante parce qu'elle vise à protéger des droits éventuels des personnes, mais qui est tout aussi importante que la discussion qu'on a eue longuement il y a quelque temps. Là, vous l'avez fait redevable au ministre. Moi, j'apprécie ça puis je pense que c'est très bien que vous l'ayez fait.

Ça, c'est nouveau? C'est de droit nouveau, là, parce qu'il n'y a pas l'équivalent dans...

Une voix: Non.

M. Dupuis: ...dans la Loi sur les coroners, dans la Loi sur la recherche des circonstances, il n'y a pas l'équivalent.

Mme Nadeau (Monique): Ce n'est pas l'équivalent exact. Non.

M. Dupuis: O.K.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): En conséquence, est-ce que l'article est adopté?

Une voix: ...

M. Ménard: Oui, oui, je comprends, là. Une minute!

M. Dupuis: Attends un petit peu.

M. Ménard: Si vous voulez, je pourrais consulter...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Oui, M. le ministre. Voulez-vous qu'on suspende quelques instants?

M. Dupuis: Absolument. Sans aucun problème.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Nous suspendons quelques instants.

(Suspension de la séance à 17 h 47)

(Reprise à 17 h 56)

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Si vous permettez, la commission reprend ses travaux, brièvement.

À ce moment-ci, le président constate qu'étant donné l'heure nous allons suspendre nos travaux jusqu'à 20 heures. Je vous remercie.

(Suspension de la séance à 17 h 57)

(Reprise à 20 h 3)

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): La commission des institutions reprend ses travaux dans le cadre de l'étude détaillée du projet de loi n° 52, Loi modifiant la Loi concernant les enquêtes sur les incendies. Je rappelle que nous étions à l'article 10. Alors, à ce moment-ci, M. le ministre, je pense que vous désiriez faire une intervention?

M. Ménard: Oui. Alors, bon, j'ai voulu vérifier, M. le Président, puis, après vérification... Parce que je n'avais pas dans mes commentaires l'article équivalent de la Loi sur la recherche des circonstances des décès, bon, en tout cas, la Loi sur les coroners, je voulais bien m'assurer que l'article 29.1 est au moins en tous points conforme à un article équivalent, qui est l'article 146. Puis, en fait, je crois même qu'il est amélioré, parce qu'avant de donner un pouvoir au commissaire-enquêteur de limiter la liberté d'information ou la liberté de la presse je voulais m'assurer qu'on ne créait pas un précédent. Et c'est en tous points conforme à l'article 146. Donc, ça permet encore d'avoir deux lois qui sont parallèles dans des sujets qui sont semblables.

Mais il y a une heureuse addition qui est «pour la période qu'il fixe». C'est-à-dire que ça permet au commissaire-enquêteur de faire comme un juge qui entend une enquête préliminaire, d'émettre une ordonnance de non-publicité, mais jusqu'à un certain délai qui ne va pas au-delà du but qui est recherché par l'interdiction, comme, par exemple, pendant l'enquête préliminaire, l'accusé peut demander une ordonnance de non-publicité jusqu'à la fin du procès pour que les gens qui seraient appelés à juger son procès ne soient pas influencés par une preuve qui aurait été diffusée auparavant. Alors, à l'article 146 de la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès, il n'y a pas cette disposition. Mais, pour le reste, c'est à toutes fins pratiques l'équivalent.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien. Est-ce qu'il y a des interventions à ce moment-ci? M. le député de Saint-Laurent.

M. Ménard: Puis, en plus, il y a ici la possibilité pour le ministre – mais ça, il y a des pouvoirs semblables dans la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès – de permettre la publication ou la diffusion de certains renseignements.

M. Dupuis: À quel endroit y a-t-il une disposition semblable à celle qui est inclue dans l'article 10?

M. Ménard: Les articles 100 et 102.

M. Dupuis: Les articles 100 et...

M. Ménard: L'article 102.

M. Dupuis: Permettez-vous, M. le Président...

M. Ménard: Non, non. Prévu au paragraphe 2°.

M. Dupuis: Parce qu'évidemment le ministre... Dans les deux cas, on a une décision d'une part, du coroner, d'autre part, du commissaire-enquêteur aux incendies, qui décident que la déposition de tel témoin ou les dépositions ne seront pas rendues publiques, ou alors que les causes d'un incendie ou les circonstances de l'incendie ou de l'explosion ne seront pas rendues publiques pour des motifs qui sont les siens.

M. Ménard: Non. Qui ne sont pas les siens, qui sont ceux... Il faut quand même qu'il soit assez...

M. Dupuis: Peut interdire...

M. Ménard: Je pense que c'est en application de nos lois.

M. Dupuis: Oui, oui, attendez: «S'il l'estime nécessaire à l'intérêt public...

M. Ménard: Voilà.

M. Dupuis: ...ou à la protection de la vie privée d'une personne, de sa réputation, de son droit à un procès juste et équitable». On s'entend. O.K.

Ce sont des motifs sérieux. Donc, le commissaire-enquêteur aux incendies ne peut pas décider de garder confidentiel – j'emploie l'expression «à escient» – pour d'autres raisons que celles qui sont prévues par la loi... qui sont des motifs sérieux. Vous ne trouvez pas que le ministre se met un poids supplémentaire sur les épaules en se permettant de rendre publiques, malgré l'ordonnance du coroner, pour des fins d'intérêt public, ces informations-là?

Est-ce qu'il ne serait pas plus utile – et je pose la question tant en ce qui concerne la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès que pour le commissaire-enquêteur aux incendies, puisqu'à l'occasion, au cours de cette commission, on s'est posé la question de temps en temps – est-ce qu'il ne serait pas plus utile ou est-ce qu'il ne serait pas mieux aisé de donner la possibilité au coroner de réviser sa décision là-dessus sur représentation de l'une ou de l'autre des parties, comme on le fait dans le cas d'un certain nombre de documents qui sont soit sous scellé ou soit gardés confidentiels devant les tribunaux de droit commun, où les parties peuvent se présenter et faire une requête pour que soit levée l'interdiction?

Et, je vais vous dire, il se crée là un précédent qui peut avoir des effets relativement à d'autres lois. Par exemple, la Loi d'accès aux renseignements, pourquoi il n'y aurait pas une disposition dans la loi d'accès – puis je ne pense pas qu'il y en ait une, d'ailleurs – qui permettrait qu'un renseignement qui doit être gardé confidentiel puisse ne pas l'être si un ministre décide ou si le Conseil des ministres décide que, par intérêt public, on va le rendre public? Il n'y en a pas, de disposition semblable.

(20 h 10)

En tout cas, peut-être que M. le ministre en connaît d'autres, et j'avoue que je ne connais pas toutes les lois, j'avoue que je ne connais pas toutes les dispositions des lois en ce qui concerne ces dispositions-là, mais c'est une disposition qui m'apparaît être assez originale, si vous voulez, la situation étant: le commissaire-enquêteur aux incendies qui tient une enquête décide que certaines choses ne seront pas publiées ou que certaines choses seront gardées confidentielles, il en informe le ministre et ensuite le ministre peut décider, sous réserve que l'intérêt public le requiert, de publier ou de diffuser un renseignement visé par cette interdiction.

Moi, honnêtement, si j'étais ministre de la Sécurité publique, j'hésiterais à m'imposer le fardeau d'être obligé de recevoir des demandes de la part de certaines parties qui auraient pu venir devant le commissaire-enquêteur aux incendies. Puis c'est ça qui va arriver, là, pour toutes sortes de raisons qu'on peut ou non imaginer, pour toutes sortes d'intérêts qu'on peut ou non imaginer, mais que très certainement le ministre va avoir des difficultés à juger. Pourquoi? Parce qu'il ne sera pas au courant du dossier; ce n'est pas lui qui va avoir entendu l'enquête, ce n'est pas lui qui va avoir entendu les parties, ce n'est pas lui qui va avoir rendu la première décision qui motive le fait qu'on garde le renseignement... qu'on mette une ordonnance de non-publication sur le renseignement.

Honnêtement, quand on le regarde de plus près, là... Et, moi, je l'ai regardé de plus près, parce que vous vous souviendrez – puis je n'ai pas de honte à le dire – qu'avant l'ajournement j'ai presque applaudi à cette disposition-là, mais, en la regardant de nouveau et en y réfléchissant de nouveau, je ne suis pas sûr que c'est à la fois très efficace, puis je ne suis pas sûr que le ministre veut se donner ce fardeau-là, moi. Ça vaudrait peut-être la peine qu'on y pense à nouveau.

Il n'y a rien qui empêche – je termine là-dessus, je ne veux pas vous embêter trop longtemps – que le coroner, que le commissaire – excusez-moi, je suis comme vous, M. le ministre, j'emploie le terme «coroner» à mauvais escient de temps en temps – mais il n'y a rien qui empêche que le commissaire-enquêteur aux incendies ait le pouvoir de modifier sa décision sur cet aspect-là lorsque l'intérêt public le requiert, à la requête de l'une quelconque des parties, si on peut employer l'expression «partie», je ne suis pas sûr qu'on puisse employer l'expression «partie», mais d'un quelconque des intervenants...

Une voix: Personne intéressée.

M. Dupuis: ...ou personnes intéressées.

M. Ménard: Bon. D'abord, nous cherchons depuis le début à garder un certain parallélisme, où ça se justifie, entre les deux lois, puisque tout le monde reconnaît qu'au fond il s'agit de fonctions semblables qui se distinguent tout simplement par...

M. Dupuis: ...la matière.

M. Ménard: C'est ça, par le danger ou la cause. Alors, ce sont des dispositions qui ressemblent à celles qui existent dans la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès.

Je peux vous dire en pratique comment on prend ces décisions-là, parce qu'effectivement le ministre est saisi d'un assez grand nombre de requêtes en vertu de l'article 100.

M. Dupuis: Oui?

M. Ménard: Oui. Maintenant, je comprends la logique de ceux qui l'ont conçu dès le début. C'est que ni l'un ni l'autre, ni le commissaire ni le coroner ne sont un tribunal, donc ils ne siègent pas de façon régulière sur les causes dont ils sont saisis. Ils sont saisis d'un incident qui a entraîné la mort ou qui a entraîné un incendie et ils le vident et ensuite ils sont saisis d'un autre incident. Pour qu'ils agissent comme vous le suggérez, il faudrait qu'ils aient l'équivalent d'une cour de pratique dans un tribunal ordinaire.

M. Dupuis: Dans le cas du commissaire-enquêteur aux incendies, il est tout: il est la cour de pratique, il est la cour régulière, il est...

M. Ménard: Non, non, mais il faudrait qu'il siège en pratique de temps en temps...

M. Dupuis: Oui, il faudrait qu'il reçoive des requêtes.

M. Ménard: Qu'il reçoive des requêtes puis qu'il siège en pratique. Alors, d'une part, on ne veut pas qu'il soit un tribunal puis, d'autre part... En tout cas on n'a pas pensé lui donner des pouvoirs d'un tribunal comme ceux-là.

Troisièmement, on cherche aussi à rendre pour les citoyens la requête simple. Il n'y a aucune espèce de formalité pour s'adresser au ministre; il suffit d'une lettre qui lui est envoyée, et puis elle est évidemment classée auprès des fonctionnaires qui étudient les requêtes puis qui éclairent le ministre sur les éléments qui vont lui permettre de déterminer l'intérêt public. Puis, généralement, ils ont aussi leur opinion.

Mais, alors, qu'est-ce qui va déterminer l'intérêt public? Bon. D'abord, pourquoi la requête a-t-elle été accordée? Si c'est pour protéger un procès, les droits à un procès juste et équitable, est-ce que le procès est terminé? Puis est-ce qu'il y a eu jugement final? Puis, s'il y a eu jugement final...

M. Dupuis: Il est-u en appel.

M. Ménard: Maintenant, quel est l'intérêt de la personne qui le demande? Très souvent, pour les choses, ce sont des intérêts qu'on estime légitimes. Par exemple, déterminer le droit à une police d'assurance que détenait la personne qui est décédée. Généralement, il y a un intérêt légitime soit à des gens qui succèdent à celui qui est mort ou à des gens, même, qui avaient des réclamations à faire par rapport à... ou une compagnie d'assurances qui couvrait certains risques mais pas certains autres. Alors, c'est dans ces circonstances-là qu'on permet que l'on diffuse le renseignement qui est visé par l'interdiction prévue à la Loi sur les recherches des causes et des circonstances des décès.

Moi, c'est pour ça que j'ai hésité, je voulais bien vérifier que – puis comme je n'avais pas dans mes notes l'article 146 alors que j'avais les autres – en mettant tout ça dans un même article, 29.1, on n'allait ni trop loin ni pas assez. Après l'avoir étudié attentivement, je trouve qu'il est essentiellement parallèle au pouvoir qui est donné dans le cas des coroners et qu'il apporte, même, une amélioration indiquant au commissaire-enquêteur que de pareilles ordonnances ne sont pas données en principe pour l'éternité. Ça se peut qu'elles soient données pour un certain temps, mais la période qu'il doit fixer est en fonction du but que vise l'ordonnance.

Je ne pense pas que ce soit nécessaire de le préciser, mais je pense qu'un commissaire aux incendies qui a une formation juridique va chercher dans d'autres dispositions de la loi les balises qui vont s'appliquer pour déterminer la période. Alors, si effectivement il a entrepris une enquête sans soupçonner ou sans avoir des raisons de croire que l'incendie était d'origine criminelle mais qu'après avoir entendu les témoins et après avoir examiné l'ensemble des documents et reçu l'ensemble des expertises il en est arrivé à cette conclusion, bien, il va émettre une ordonnance pour une période qu'il fixera probablement comme on l'avait fixée dans le Code criminel, c'est-à-dire jusqu'à ce que le jugement final soit rendu dans telle cause. Puis si c'est pour une autre raison aussi. Alors, je trouve que c'est une amélioration. Puis on reste dans les mêmes balises.

Mais, quant à ce que vous nous suggérez... j'aurais peur que ce que vous suggérez, à moins que vous trouviez une autre façon de le formuler, n'amène les gens à assumer des coûts trop grands ou d'inventer un moyen procédural encore inconnu pour saisir le Commissaire aux incendies d'un incident dans une cause qu'il a déjà entendue ou qu'un prédécesseur aurait déjà entendue.

M. Dupuis: Mais ça, ce danger-là, n'est pas écarté par le fait que ce soit le ministre qui révise la décision du commissaire-enquêteur.

M. Ménard: Oui, parce que...

M. Dupuis: Je comprends votre argument, là, mais...

M. Ménard: Bien, c'est une nouvelle procédure, oui, mais c'est une procédure très simple: il suffit de s'adresser au ministre, puis on s'adresse au ministre par lettre, c'est tout.

M. Dupuis: Moi, je vais vous dire, j'essaie de l'envisager du point de vue de l'administré. Vous, évidemment, c'est votre devoir, puis je ne vous le reproche pas, au contraire, vous l'envisagez du point de vue de l'administration comme ministre responsable; moi, je l'envisage strictement du point de vue de l'administré.

Et ce qui m'embête, entre autres, c'est le fait que, lorsque quelqu'un demande... Et, moi, j'ai trouvé que votre réponse au sujet de la façon dont on vérifie l'intérêt public dont il est question au bureau du ministre ou, enfin, dans l'administration faisait du sens, mais, lorsqu'une partie demande qu'un renseignement fasse l'objet d'une levée d'interdiction de la part du ministre, est-ce que toutes les parties intéressées... Puis j'emploie les mots «parties intéressées» en sachant très bien que l'expression, compte tenu des auditions devant le commissaire-enquêteur aux incendies, n'est peut-être pas nécessairement la meilleure expression, mais je pense qu'on se comprend.

(20 h 20)

Devant le commissaire-enquêteur aux incendies, il y a un certain nombre de personnes intéressées qui se présentent, soit parce qu'elles sont assignées comme témoins ou soit parce qu'il est nécessaire de les entendre pour permettre au commissaire-enquêteur de déterminer les causes et les circonstances d'un sinistre. Alors donc, lorsque quelqu'un, une personne en particulier, une personne intéressée demande que soit levée l'interdiction ou demandera que soit levée l'interdiction, dorénavant, est-ce que toutes les personnes intéressées – il restera à définir ce que ça veut dire, «personnes intéressées» – seront avisées de cette demande-là? Ils peuvent faire valoir des arguments au contraire, parce que...

Au fond, la discussion, c'est ça. Bien sûr, il faut permettre que les choses puissent suivre leur cours, il faut permettre que tous les recours puissent s'exercer, il faut permettre que la vie continue, mais encore faut-il permettre également que toutes les parties qui sont intéressées par une décision soient avisées qu'on demande une modification de décision. Parce que, là, on est dans la situation suivante: il y a l'enquête du Commissaire aux incendies; aux termes de son enquête, au moment où il rédige son rapport, il peut ordonner l'interdiction de diffuser ou de publier un certain nombre de renseignements. Tout le monde est au courant de ça, parce que, en principe, toutes les parties intéressées, j'imagine, ont accès au rapport et reçoivent de toute façon une copie du rapport. Tout le monde est au courant de ça.

Lorsqu'une des parties ou lorsqu'une personne intéressée – peut-être que c'est mieux d'employer cette expression-là – demande la levée de l'interdiction, est-ce que toutes les autres personnes intéressées sont avisées de la demande? Là, si le ministre me répond: Oui, à tout coup on avise tout le monde, là il me rassure, il me rassure pas mal; sinon, il faudra peut-être le prévoir.

M. Ménard: C'est assez clair, dans la nature des demandes, qui on doit... C'est évident qu'on se renseigne tout de suite auprès d'une partie qui va nous sembler avoir un intérêt, mais ce n'est pas nécessairement toutes les parties qui ont été admises à l'enquête, parce que ça dépend de la nature qui a motivé l'interdiction.

M. Dupuis: Je m'excuse, j'ai mal saisi ce que vous venez de dire, c'est parce que je lisais un extrait.

M. Ménard: J'ai dit... Oui, c'est évident que, dans les fonctionnaires qui examinent la demande, ils prennent un certain nombre d'informations pour éclairer le ministre sur les droits qui peuvent être affectés par le maintien ou la levée de l'ordonnance d'interdiction. Ce n'est pas nécessairement toutes les parties qui ont été déclarées parties intéressées à l'enquête du coroner, hein?

M. Dupuis: Exact.

M. Ménard: C'est évident, si la raison, c'est pour protéger ... un procès, bien, à partir du moment où on sait que le procès est terminé...

M. Dupuis: Mais est-ce qu'il n'y aurait pas lieu de...

M. Ménard: Bien, non, on ne le déclarera pas nécessairement, parce que généralement ça s'applique à des rapports de police, presque toutes celles que j'ai vues, moi, c'était pour diffuser des informations qui apparaissaient dans des rapports de police, lesquelles, comme vous le savez, demeurent confidentielles en vertu de la loi sur l'accès à l'information mais sur la protection des renseignements confidentiels.

Écoutez, il y a plusieurs dispositions dans les lois qui prévoient ça, des pouvoirs ministériels. Généralement, les pouvoirs ministériels sont exercés dans le contexte d'un ministère, ce n'est pas une décision... même quand c'est à la discrétion d'un ministre. Puis, je vais vous dire franchement, l'expérience des dernières années nous démontre que c'est encore les endroits où on est le plus sensible à équilibrer les droits. En tant qu'ancien ministre de la Justice, on avait l'impression qu'il y a bien des affaires qui avaient été enlevées au ministère de la Justice, que, si elles avaient été laissées au ministère de la Justice, les décisions auraient été rendues avec une plus grande sensibilité à l'ensemble des droits, parce que ce n'est pas la décision du Procureur général, c'est une décision que le Procureur général prend après que la demande ait été filtrée par un ministère qui a une certaine expérience.

C'est un peu la même chose ici, là. Évidemment, le ministre de la Sécurité publique n'a pas nécessairement, généralement, les mêmes connaissances légales que le ministre de la Justice ni le même entourage.

L'autre solution que je verrais – mais je trouve que ce serait imaginer un autre moyen de procédure inutile, puis, celui-là, il serait coûteux – c'est que ce soit sur requête d'un juge de la Cour du Québec. Mais là il faudrait déterminer à partir de quoi, de quels critères le juge l'accorderait, puis ça obligerait les gens à prendre un avocat puis à prendre une procédure, alors que là, c'est vraiment très simple.

M. Dupuis: Quand vous me dites qu'en général l'entourage d'un ministre – je ne parle pas des personnes – que c'est dans l'entourage d'un ministre qu'on fait le plus attention en général, selon votre expérience, au respect des droits de tout le monde, vous m'ouvrez une porte beaucoup trop grande pour que je n'y entre pas et que j'y mette le pied pour vous signaler que, dans le cas du dossier de Hertel–des Cantons, ça n'a pas été tout à fait le cas, hein?

M. Ménard: On ne parle pas de la même chose, là.

M. Dupuis: Mais cette parenthèse étant faite, je vais revenir à notre propos.

M. Ménard: Vous parlez aussi d'une décision qui est prise dans une situation d'urgence.

M. Dupuis: Ils ont eu un jugement de la Cour supérieure qui leur a donné raison. Le gouvernement a décidé d'aller au-delà du jugement de la Cour supérieure, les tribunaux, hein, pour empêcher l'effet du jugement, alors...

M. Ménard: Mais ce genre de décision...

M. Dupuis: Alors, ça, vous ne me convaincrez pas avec le dossier Hertel–des Cantons.

M. Ménard: Mais ce genre de décision ne risque pas d'être prise dans un contexte...

M. Dupuis: Non, non. J'ai compris.

M. Ménard: ...où le gouvernement se sent pressé de prendre une décision dans l'intérêt public puis avec des intérêts énormes en jeu.

M. Dupuis: Je vous signalerai... Puis je ne veux pas faire une discussion, je veux rester dans la règle de la pertinence, mais c'est impossible de ne pas répondre à ça, M. le Président. Juste une petite phrase puis après ça je vous promets que je reviens à notre propos. La commission Nicolet n'était pas tout à fait d'accord avec ce que le ministre vient de dire au sujet de l'urgence, je vous le signalerai bien respectueusement, M. le ministre. Ceci étant dit...

M. Ménard: Non, non. Ne confondez pas deux choses.

M. Dupuis: Mais, si vous continuez, on va continuer, je suis capable.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Bien, ça dépend, là, qui...

M. Ménard: Bien, c'est vous qui avez commencé.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Un instant, un instant. Non, non.

M. Dupuis: On est peut-être mieux d'arrêter, à moins que le président nous en empêche, ce que je sens qu'il va faire à l'instant même.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Je pense qu'on s'éloigne du sujet effectivement. Alors, je ne sais pas qui a commencé et qui poursuit, mais à ce moment-ci je vous inviterais à revenir au libellé de l'article 10. Et, s'il n'y a pas d'autres interventions, je vous demanderais s'il est adopté à ce moment-ci.

M. Dupuis: Non, pas encore. J'aurais d'autres représentations à faire.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Pas encore. Très bien. Allez-y.

M. Dupuis: Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu – et j'y venais – d'ajouter dans la disposition un amendement qui ferait en sorte que le ministre devrait aviser, avant de modifier la décision du commissaire-enquêteur, les parties intéressées, quitte à définir ce que sont les parties intéressées? Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu d'ajouter cette disposition-là ne serait-ce que pour le fait qu'en principe, en ce qui concerne les interdictions de publier des renseignements ou les interdictions de diffuser des renseignements, c'est la loi d'accès qui est la principale loi qui doit s'appliquer?

Cette disposition-là du projet de loi 52 étant, si vous voulez, supplétive à la loi d'accès, donc, si elle n'était pas là, cette disposition-là, ce serait la loi d'accès qui s'appliquerait. Or, si c'était la loi d'accès qui s'appliquait, il n'y a pas dans la loi d'accès de telle disposition qui permet au ministre, lorsque l'intérêt public le requiert, de publier ou de diffuser un renseignement confidentiel.

Alors donc, si le ministre insiste pour garder cette disposition-là – et je dis «insiste» parce qu'évidemment le poids de la majorité l'emporte toujours – peut-être y aurait-il lieu d'y ajouter une balise – pour employer un mot qu'on a utilisé tout l'après-midi puis qui veut maintenant bien dire ce qu'on veut dire – et aviser les parties que le ministre s'apprête, parce que l'intérêt public le requiert... un avis aux parties qu'il y a une demande pour lever l'interdiction sur un renseignement.

Exemple. Vous avez vous-même donné l'exemple du rapport... En fait, vous avez dit, si j'ai bien compris ce que vous avez dit, je peux ne pas l'avoir compris bien, mais il me semble que ce que vous avez dit, c'est que plus souvent qu'autrement ce sont des renseignements contenus dans un rapport de police qu'on vous demande de...

M. Ménard: Actuellement, oui.

(20 h 30)

M. Dupuis: Je peux bien comprendre qu'une compagnie d'assurances, par exemple, qui est aux prises avec une demande d'indemnisation veuille connaître le contenu du rapport de police qui a été déposé devant le commissaire-enquêteur – ça, je peux très bien comprendre ça – avant de prendre sa décision. Mais là, même si le commissaire-enquêteur aux incendies n'a pas à se demander: «Y a-t-il quelqu'un qui est coupable?» ou n'a pas à s'intéresser de savoir si une personne est responsable de l'incendie, il reste quand même que les causes et les circonstances de l'incendie sont relatées dans un rapport de police, par exemple. S'il n'y avait pas, devant le commissaire-enquêteur aux incendies, de preuves suffisantes qui auraient été faites pour accuser quelqu'un suite à un incendie, mais qu'on a relaté devant le commissaire-enquêteur aux incendies, dans le cadre des circonstances, ce qu'on pourrait appeler des soupçons à l'égard d'une personne, lorsque la compagnie d'assurances reçoit une demande d'indemnisation et que cette personne-là, par exemple, est la propriétaire d'un immeuble qui a passé au feu, et le propriétaire, lui...

L'enquête aux incendies se termine. Évidemment, le commissaire-enquêteur ne prononce pas de verdict de responsabilité civile ou criminelle. Il fait son rapport. Il donne les causes et les circonstances de l'accident. Mais, en donnant les causes et les circonstances de l'accident, il peut, sans être capable d'accuser quelqu'un, accrocher le propriétaire de l'immeuble ou donner des éléments qui font en sorte que la compagnie d'assurances, elle, pourrait s'accrocher à un des éléments pour ne pas indemniser.

Lorsque la compagnie d'assurances va aller vous voir pour vous demander d'obtenir le rapport de police ou d'obtenir un extrait du rapport de police, je pense que le propriétaire de l'immeuble a un intérêt à le savoir, lui, qu'on vous fait une demande pour que le rapport de police soit communiqué à la compagnie d'assurances. Et là, évidemment, envisageons la situation, M. le ministre, où, dans l'exemple que je vous donne, qui peut ne pas être parfait, là, je le dis à mesure que je le réfléchis, mais, dans la situation que vous nous présentez dans le projet de loi n° 52, la compagnie d'assurances demande au ministre d'obtenir une copie du rapport de police. Personne n'est avisé de cela. Et, pour une raison quelconque, vous acquiescez à la demande et vous dites: Bien, il faut régler ce dossier-là, c'est d'intérêt public que ce dossier-là soit terminé, et je diffuse le renseignement. Le propriétaire ne sera pas de bonne humeur. Il ne sera pas de bonne humeur au sens légal du terme, peut-être. Il me reste une minute?

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): ...

M. Dupuis: Seigneur! Seigneur! Merci, M. le Président. Alors donc, est-ce qu'il n'y aurait pas lieu, effectivement, d'y réfléchir un petit peu plus? Ou alors comment réagissez-vous à ce que je vous dis, vous qui, je le sais, êtes un très grand démocrate et respectueux de tous les droits de tous les individus?

M. Ménard: Bon. Je pense que vous êtes vous-même conscient, en en parlant, que vous soulevez peut-être plus de problèmes que de solutions. Nous cherchons à faire deux lois parallèles. Vous avez même fait la suggestion – puis je suis d'accord que c'est une bonne suggestion, que nous allons examiner – que nous devrions peut-être les fondre toutes les deux, auquel cas il y aurait avantage à ce qu'elles soient effectivement assez semblables pour résoudre des situations semblables.

Votre suggestion soulève beaucoup de difficultés, peut soulever beaucoup de difficultés en application lorsque la demande vient longtemps après l'enquête...

M. Dupuis: Longtemps après l'enquête?

M. Ménard: ... – oui – qu'il est difficile de retracer les parties intéressées, que déjà il est difficile de les déterminer au départ. En somme, une soupape de sécurité que l'on cherche à donner pour une information qu'il serait dans l'intérêt public de diffuser à un moment donné, je veux dire, va devenir quelque chose de tellement difficile d'application, de rédaction, finalement on ne donnera jamais la soupape.

Moi, je ne sais pas, ça fait quand même plusieurs années qu'on a des dispositions semblables dans la Loi sur la recherche des causes et circonstances des décès. Il y a plusieurs ministres qui ont passé là-dessus, au moins une bonne demi-douzaine, sinon plus. Ça a toujours relativement bien marché. J'aurais tendance à vous répondre: Puisqu'il est si difficile de trouver une solution à toutes les interrogations que vous posez, pourquoi on n'applique pas le bon vieux principe anglais, n'est-ce pas, «if it ain't broken don't fix it»? Ha, ha, ha! Parce que, au fond, il s'agit d'une soupape très simple. Bien, on peut faire preuve d'imagination, mais je ne sais pas si ça vaut la peine.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Alors, à ce moment-ci, M. le député de Saint-Laurent, s'il y a consentement, je pourrais vous laisser aller au-delà des 30 secondes qu'il vous reste.

M. Dupuis: Est-ce qu'il y a consentement?

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Consentement?

M. Dupuis: C'est un sujet qui... Je ne prendrai pas le reste de la soirée, là. J'ai vraiment des interrogations.

M. Ménard: Bien, j'espère qu'on va finir l'autre projet aussi avant minuit, ce soir.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Allez-y, M. le député de Saint-Laurent.

M. Dupuis: Je ne peux pas promettre ça. Je ne m'engage jamais dans des questions hypothétiques. Entre vous et moi, ce n'est pas parce qu'on veut faire en sorte que les deux lois soient semblables qu'il faut rejeter des arguments qu'on vous soulève dans l'une des deux lois. D'ailleurs, la preuve, c'est que cet après-midi on a soulevé un argument dans le projet de loi n° 52, que vous avez accepté, une suggestion qu'on vous a faite que vous avez acceptée, et vous avez même accepté qu'on pourrait peut-être modifier assez rapidement la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès dans le même sens. Évidemment, si on s'entendait ce soir qu'il y a peut-être lieu effectivement de modifier cet article-là, on pourrait le faire aussi dans la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès. Alors, ça, je pense qu'on s'entend là-dessus, on serait capable de le faire dans les deux cas.

Maintenant, vous avez dit: Je ne vois pas pourquoi on aurait besoin de soupape particulière. Excusez, le problème vient du fait que, dans la loi sur le Commissaire aux incendies, comme il est la seule personne qui exerce cette fonction-là, comme pour l'instant il n'y a qu'une seule personne qui exerce la fonction, évidemment il n'y a jamais de – si je peux employer l'expression – cour d'appel à part du pouvoir de révision des tribunaux de droit commun. Il n'y a jamais de cour d'appel dans son affaire, lui. Il est tout seul, puis il mène son affaire tout seul, puis il prend sa décision tout seul, puis de temps en temps... Il n'y a pas de surveillance qui s'effectue au-delà des surveillances qu'on connaît des assurances légales.

Dans la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès, le coroner fait une investigation. Il soumet son rapport au coroner en chef. Le coroner en chef ou le ministre peut décider, dans cette circonstance-là, de publier ou de diffuser un renseignement. Lorsque l'intérêt public le requiert, le ministre de la Sécurité publique ou le coroner en chef peut publier ou diffuser tout renseignement contenu dans le rapport et dans les documents annexés qui n'est pas public. Le coroner en chef ne peut cependant publier ou diffuser le rapport d'un agent de la paix sans la permission expresse du ministre de la Sécurité publique ou d'une personne que celui-ci autorise à cette fin.

Il y donc des paliers dans la Loi sur les coroners, là, pour employer la vieille expression, qu'il n'y a pas dans la loi sur le Commissaire aux incendies. Dans le fond, c'est ça qui est le... Toute la discussion tourne autour du fait qu'évidemment on veut faire une loi semblable à celle qui existe dans la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès, mais la personne qui exerce... Le bureau n'est pas bâti de la même façon. Ça, c'est une chose.

La deuxième, c'est: je ne sais pas pourquoi je sens dans l'esprit du ministre tout de même que j'ai semé un doute sur le fait – et j'essaie de l'exploiter bien sûr parce que je pense que c'est dans l'intérêt public qu'on aille au fond de cette question-là – sur le fait que, lorsque quelqu'un demande de lever l'interdiction, cette levée d'interdiction pourrait avoir des effets à l'encontre des droits d'une autre personne. Il me semble que cette autre personne là a le droit de savoir que l'une des parties intéressées vient auprès du ministre pour obtenir une levée de l'interdiction du renseignement.

Et je reviens toujours au même exemple que celui que je vous ai donné tantôt: le propriétaire d'un immeuble qui s'aperçoit que le rapport de police qui a servi à la base à l'enquête du Commissaire aux incendies s'en va à la compagnie d'assurances auprès de laquelle il est en demande pour une indemnisation. Lui, là, honnêtement, M. le ministre, il veut savoir qu'il y a une demande qui vous est faite de diffuser à la compagnie d'assurances le rapport de police parce qu'il a des droits à faire valoir. Il a des droits à faire valoir. Il ne veut pas que se produisent des effets pervers à son égard qui ne sont pas prévus dans la loi et dans ce que le commissaire-enquêteur aux incendies a le droit ou n'a pas le droit de déterminer dans le cours de son enquête.

(20 h 40)

Alors donc, peut-être que vous pourriez vous... Moi, je serais prêt à me ranger à ça si vous vous astreigniez, vous, là, évidemment, parce que c'est vous qui détenez le poste au moment où on se parle, si le ministre s'astreignait à s'obliger de donner un avis qu'une demande lui est faite de publier un renseignement. Moi, je pense même que vous seriez dans une meilleure position à tous égards. Parce que, là, évidemment, si vous vous astreignez à donner avis aux gens qui ont été entendus, par exemple, devant le commissaire-enquêteur aux incendies, si vous décidez de permettre la diffusion du renseignement ou de permettre la publication du renseignement, vous allez le faire en toute sérénité. Si personne ne s'est objecté à la demande, ça va être encore plus facile de s'y rendre.

Bon. Là, je conçois bien que votre expérience comme ministre de la Sécurité publique vous permet de dire qu'une disposition semblable dans la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès ne vous a pas causé de problème à venir jusqu'à maintenant, mais, évidemment, il faut bien se rendre compte que vous n'avez pas envoyé d'avis à personne qui avait été entendu devant le coroner ou qui s'était présenté devant le coroner lors des différentes enquêtes dans lesquelles on vous a demandé de lever l'interdiction. Bon. Ça n'a peut-être pas eu des effets, mais je ne pense pas qu'on puisse arrêter la discussion sur cette simple expérience.

M. Ménard: Bon. Moi, je peux... On peut faire avancer le débat. Je pense qu'il faut décider, très honnêtement, à moins d'avoir une solution précise, mais on n'en a pas. Alors...

(Consultation)

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Voulez-vous qu'on suspende? Nous allons suspendre quelques instants.

M. Dupuis: Ça va.

(Suspension de la séance à 20 h 42)

(Reprise à 20 h 43)

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): La commission reprend ses travaux. Alors, à ce moment-ci, nous en serions toujours à l'article 10. Est-ce que l'article est adopté?

Des voix: Adopté.

Une voix: Sur division.


Dispositions pénales et diverses

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Sur division. M. le ministre, à l'article 11.

M. Ménard: Alors, c'est l'article qui distingue carrément les cas, qui détermine où doivent aller les cas où un incendie a entraîné des décès. On dit carrément qu'ils doivent aller chez le coroner plutôt qu'au Commissaire aux incendies.

M. Dupuis: C'est d'ailleurs la lecture... Avec votre permission...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Oui, M. le député.

M. Dupuis: Ça va? Avez-vous des commentaires, M. le ministre?

M. Ménard: Non.

M. Dupuis: C'est d'ailleurs cette disposition-là, quand on a considéré cette disposition-là, qui nous a fait naître l'idée que peut-être, au fond, comme le coroner, comme l'institution du coroner rend des services appréciables semblables à ceux que rend le commissaire-enquêteur aux incendies, comme les deux lois se ressemblent, comme on a réglé les questions des droits constitutionnels, comme on a réglé toutes ces questions-là et qu'au fond, à plusieurs reprises, le ministre au cours de son intervention sur le projet de loi n° 52 a expliqué qu'il souhaitait que le projet de loi n° 52, que la Loi sur les incendies ressemble et ait des dispositions semblables à la Loi sur la recherche des causes et circonstances des décès, il y aurait lieu de continuer la réflexion et peut-être d'aboutir – qui sait? – rapidement sur une fusion des deux institutions dans le cadre de la Loi sur la recherche des causes et circonstances des décès et des incendies et des explosions, ou je ne sais pas quoi, là, vous trouverez un titre.

Mais, dans l'économie du droit, dans l'économie des lois, moi, je pense que ça serait intéressant que vous le fassiez. Je vois qu'il y a de vos collègues ministériels qui semblent être d'accord avec ça. Je ne veux pas les mettre sur la sellette, donc je ne les nommerai pas, mais je les regarde. Il semble que ça pourrait être une idée intéressante. Alors, j'encourage fortement le ministre à poursuivre cette réflexion et peut-être à nous faire bénéficier de cette réflexion en déposant rapidement, si tel est le cas, en ayant évidemment pour le soutenir un mémoire avec une longue partie accessible au public, que nous pourrions consulter. Mais je pense que ce serait une bonne idée de fondre les deux institutions, au fond. Je ne suis pas sûr que M. Delâge va être d'accord avec ça, mais on ne fait pas les lois pour des individus, on les fait dans l'intérêt public et pour l'intérêt de la population.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Considérant... est-ce que l'article 11 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Adopté. Article 12. Est-ce que l'article 12 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Adopté. Est-ce que le titre du projet de loi est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Adopté. Est-ce que l'ensemble du projet de loi, tel qu'amendé, est adopté?

M. Dupuis: Sur division.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Sur division.

M. Dupuis: À cause de notre vote sur...

M. Ménard: L'article 10.

M. Dupuis: ...l'article 10.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Tout à fait, sur l'article 10. Alors, je remercie les membres de la commission pour leur travail de même que les personnes qui nous accompagnent. Et, sur ce, nous allons suspendre pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 20 h 47)

(Reprise à 20 h 48)


Projet de loi n° 44

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission des institutions reprend ses travaux relativement à l'étude détaillée du projet de loi n° 44, Loi modifiant la Loi de police.

Alors, à ce moment-ci, M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements pour cette partie de nos travaux?

Le Secrétaire: Les mêmes, M. le Président. M. Ouimet (Marquette) est remplacé par M. Middlemiss (Pontiac).


Remarques préliminaires

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien. Alors, nous en sommes aux remarques préliminaires. M. le ministre.


M. Serge Ménard

M. Ménard: Bon. Alors, je serai assez bref, M. le Président, parce que c'est une autre loi assez technique qui répond à des problèmes immédiats. Elle vise, au fond, six sujets.

Le premier a trait au nombre de directeurs généraux associés à la Sûreté du Québec. La loi prévoit actuellement qu'il ne peut y en avoir que cinq. Or, des événements récents nous ont démontré qu'il peut arriver toutes sortes de circonstances, ce qui fait qu'on a besoin de nommer plus que cinq directeurs généraux associés. D'ailleurs, il y en a actuellement au moins trois, je crois, sinon même quatre, qui sont des directeurs généraux associés intérimaires, parce que justement les postes étaient occupés par d'autres qui, par contre, ne pouvaient pas les exercer. En plus, éventuellement, on pourrait vouloir décider d'avoir un directeur général associé de plus. Alors, il y a lieu, donc, d'amender la loi pour permettre de corriger les difficultés de la situation actuelle aujourd'hui et si elles se représentent.

(20 h 50)

Ce sont des préoccupations semblables qui nous amènent aussi à demander que, dans le cas des postes de directeurs généraux associés, la limite de 32 ans de service, le gouvernement puisse l'allonger. Nous suivons là un premier amendement qui avait été proposé par le gouvernement précédent pour permettre au gouvernement de ne pas être lié par cette disposition dans le cas du directeur général de la Sûreté du Québec. Il faut nécessairement comprendre qu'au sommet de la pyramide les expertises peuvent être plus rares et certainement plus importantes. C'est important que le gouvernement en place aussi ait confiance dans ses cadres les plus importants et que le gouvernement n'ait pas à respecter cette limite de 32 ans.

Pour le reste, nous estimons qu'il n'y a pas encore lieu d'intervenir. Peut-être d'autres, dans le futur, pourront estimer que c'est nécessaire. Mais on pense que c'est important que l'organisme lui-même se renouvelle et que ce renouvellement assure les jeunes qui poussent de pouvoir atteindre les niveaux les plus élevés si leur travail et les compétences qu'ils ont acquises le leur permettent.

Il y a aussi un changement très particulier pour permettre à quelqu'un que nous nommerions directeur général de la Sûreté du Québec de continuer à souscrire au fonds de pension auquel il souscrivait en tant que haut fonctionnaire. Pourquoi on décide de ne pas aller au-delà du directeur général? C'est que, dans toutes les autres circonstances, le fonds de pension est beaucoup plus avantageux à la Sûreté du Québec que pour les cadres supérieurs du gouvernement. Alors, on suppose que les gens vont aller dans le sens de leur meilleur intérêt et souscrire au fonds de pension de la Sûreté du Québec. J'ai pensé, à un moment donné, qu'on pourrait leur donner le choix, mais c'est la CARRA qui administre justement les caisses, qui reçoit les contributions et qui donnera les prestations qui nous dit que, là, on commencerait à compliquer singulièrement l'administration de cette caisse et puis les prévisions actuarielles.

Alors, dans ce cas-ci, je pense que tout le monde reconnaîtra que, si le gouvernement a décidé de demander à un haut fonctionnaire de carrière d'occuper, dans des circonstances exceptionnelles, le poste de directeur général de la Sûreté du Québec, ce fonctionnaire ne doit pas être pénalisé par une baisse de ses prestations du fonds de pension.

Il y a aussi une disposition assez technique qui oblige une municipalité ou un organisme dont le directeur serait rendu incapable d'agir de le remplacer immédiatement par un directeur intérimaire en attendant de nommer un autre directeur. À notre avis, ça allait sans dire que ça prend toujours un directeur dans un service de police, mais ça a l'air que ce n'était pas l'avis de certaines municipalités. Alors, là, ça va être plus explicite. Ce qui nous apparaissait implicite va être explicite: si un directeur est incapable d'agir, on doit nommer un directeur général intérimaire.

Finalement, la dernière, que j'ai gardée pour la fin et qui est sûrement la plus importante, bien que ce ne soit pas un amendement qui soit très long à exprimer, mais figurez-vous que l'on peut faire un règlement déterminant les exigences de toutes sortes, donc les exigences académiques de ceux qui peuvent entrer dans la police, mais on ne pouvait pas faire un règlement concernant la formation nécessaire pour accéder à des postes qui demandent nécessairement une certaine compétence dans la police. Alors, nous pensons que c'est une faiblesse de la loi qui doit être corrigée.

Éventuellement, nous aurons un règlement sur la formation des enquêteurs et des officiers de police, formation nécessaire. Je sais que l'opposition, lorsqu'on a déposé d'abord le projet de loi, nous demandait qu'est-ce qu'il y aurait dans le règlement et de présenter le règlement. Honnêtement, je crois que ça serait mettre la charrue devant les boeufs. Et puis je me souviens d'une certaine époque où l'opposition critiquait sévèrement le gouvernement pour avoir pris des mesures, laissait entendre que l'Assemblée nationale voterait le pouvoir de faire telle chose. Alors, avant de faire le règlement, en toute logique, il est bon d'obtenir... Parce que le règlement est un pouvoir de l'Exécutif. Alors, avant que l'Exécutif ne se mette à passer un règlement, il est, je pense, plus respectueux de nos institutions de demander aux législateurs de permettre à l'Exécutif d'avoir un tel règlement.

Mais je ne veux pas que l'opposition s'inquiète outre mesure. Je peux vous dire que nous avons une certaine idée de ce qu'il y aura dans ce règlement-là. Et, sans que je sois prêt à en donner un texte précis, je n'ai pas d'objection à discuter d'éléments que je voudrais y voir. D'ailleurs, ce n'est pas «je voudrais y voir». Je pense qu'il y a beaucoup de monde qui connaissent et qui sont intéressés à la santé et à la compétence des services policiers du Québec qui voudraient y voir eux aussi.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le porte-parole de l'opposition officielle et député de Saint-Laurent.


M. Jacques Dupuis

M. Dupuis: Alors, nous allons avoir l'occasion, M. le Président, de discuter au cours de cette soirée des différents articles que le ministre veut voir être adoptés afin de modifier la Loi de police. Les remarques préliminaires seront plus générales que celles de s'attacher à l'un ou l'autre des articles qui seront modifiés.

Le ministre se doute, sans l'ombre d'une hésitation, que je vais l'entretenir du rapport de la commission Poitras et des suites qu'il entend donner au rapport de la commission Poitras et que, sans aucun doute, je vais lui indiquer qu'il est difficile à suivre. Il est difficile à suivre parce que, à ma connaissance, à part de bribes d'orientation de temps en temps, le ministre n'a jamais été en mesure de réussir, semble-t-il, en apparence du moins, à prendre le taureau par les cornes suite au dépôt du rapport de la commission Poitras et à donner une direction – je l'ai dit à plusieurs reprises, je le redis ce soir parce que je ne la sens pas plus – une fois que le rapport de la commission Poitras a été connu, à donner ses orientations générales.

Je sais qu'il y a un plan de redressement qui a été déposé par le directeur de la Sûreté du Québec. Le projet de loi qui nous concerne ce soir vient jouer à la marge et indirectement dans un certain nombre de recommandations qui ont été faites dans le rapport de la commission Poitras. Il y a eu, de temps en temps, certaines déclarations, mais jamais le ministre n'a réussi à s'imposer dans ce dossier-là, à devenir le leader que la Sûreté du Québec a besoin de reconnaître. Et je ne minimise pas, là, le rôle du directeur de la Sûreté du Québec, mais l'autorité politique responsable de la Sûreté du Québec qu'est le ministre de la Sécurité publique n'a jamais malheureusement réussi à se faire valoir. On aurait espéré, après le rapport de la commission Poitras qui était – je le dis – malheureusement susceptible et qui est toujours susceptible, à force d'inaction, de faire en sorte que la crédibilité de la Sûreté du Québec soit affectée pour très longtemps... Et, plus le temps passe, plus il devient et plus il risque de devenir difficile de changer l'impression qui peut se dégager du rapport de la commission Poitras, suite à sa publication, à l'endroit de la Sûreté du Québec.

(21 heures)

Moi, j'ai travaillé avec la Sûreté du Québec. Le ministre a travaillé avec la Sûreté du Québec. Nous savons tous les deux qu'il y a au sein de la Sûreté du Québec une majorité, une très grande majorité d'éléments qui sont tout à fait positifs. J'ai eu l'occasion de le dire, j'ai eu l'occasion de discuter avec eux, la majorité des policiers de la Sûreté du Québec souhaitent que la Sûreté du Québec maintienne, augmente et soit perçue par la population du Québec comme ayant une crédibilité. Pour ça, il faut qu'on donne suite au rapport de la commission Poitras, que la Sûreté du Québec et la population sentent que le ministre responsable de la Sûreté du Québec, le ministre de la Sécurité publique, devienne le leader dans ce dossier-là, le chef de file, le capitaine, le général, celui qui peut réussir à faire en sorte qu'une réforme au sein de la Sûreté du Québec puisse se faire dans l'ordre.

Je donne un exemple. Aucune réforme à la Sûreté du Québec n'est possible si les policiers de la Sûreté du Québec n'embarquent pas. Or, les policiers de la Sûreté du Québec sont représentés par un syndicat, l'Association des policiers provinciaux du Québec, qui est un syndicat puissant. C'est un syndicat qui est fort. À ma connaissance, selon mes informations – je ne les possède pas toutes, si je n'ai pas raison, le ministre me le dira – l'Association des policiers n'a pas été consultée relativement, par exemple, au plan de redressement que le directeur de la Sûreté du Québec a publié récemment. Ils ne sont pas consultés non plus dans les orientations sur lesquelles, peut-être, le ministre est en train de cogiter. Et, si vous ne les consultez pas, si vous ne les associez pas à la réflexion, si le ministre n'indique pas au directeur de la Sûreté du Québec qu'il doit ouvrir le dialogue avec l'Association des policiers, ça ne fonctionnera pas. Ce n'est pas surprenant que, récemment, ils se soient braqués – j'emploie l'expression à escient – dès que ce qu'il est convenu d'appeler le plan de redressement du directeur de la Sûreté du Québec, ou le plan de renouvellement, ou le projet de plan qui a été déposé par le directeur de la Sûreté... Ce n'est pas surprenant que les policiers se soient braqués. Ils se sont braqués, pas parce qu'ils ne sont pas d'accord avec la réforme, me semble-t-il – j'ai entendu des déclarations du président de l'Association – mais parce qu'ils ne sont pas consultés. Ils veulent être partie prenante. Ça, c'est un exemple de ce que le chef de file, de ce que le leader, de ce que le général, de ce que le capitaine doit faire, et ça, c'est le rôle du ministre de la Sécurité publique d'assumer ce leadership-là.

Même le ministre, à l'étude des crédits – nous en avons parlé – sur la consultation avec l'Association des policiers provinciaux du Québec, n'a pas réagi. Même pas depuis, il n'a pas réagi depuis à ce sujet-là. Ça, c'est un exemple dans lequel le ministre, me semble-t-il, malheureusement, passe à côté de ce qu'il devrait faire.

D'autre part, le Conseil de contrôle permanent. La recommandation qui a reçu, je pense, le plus de publicité, à part les autres événements, mais l'une des recommandations qui a reçu le plus de publicité suite à la publication du rapport, c'est la création du Conseil de contrôle permanent. Le ministre, tantôt – je ne sais pas quand – va arriver, j'imagine, avec une orientation sans en avoir discuté publiquement. Je peux le comprendre, mais avec qui en a-t-il discuté à part en cercle fermé, en vase clos? Et, moi, je dis tout de suite au ministre que le Conseil de contrôle permanent, je ne sais pas avec quoi il va arriver. Il ne nous tient pas au courant de ses projets, mais il va falloir que le ministre envisage, entre autres pour ce qui concerne le Conseil de contrôle permanent, de donner un rôle important à des élus. Malheureusement, on est obligé, on est confiné à cette obligation de venir dans ces instances où le ministre n'a pas le choix que de venir nous rencontrer, l'opposition officielle, soit à l'étude des crédits, soit à l'étude des crédits provisoires, soit lors de la discussion de l'étude article par article du projet de loi, pour que nous lui fassions valoir qu'il est temps qu'il se lève et qu'il devienne le chef de file.

Il y a une réforme importante à faire au sein de la Sûreté du Québec. Je l'ai déjà dit, et le ministre est chanceux, personne, à peu près – et ceux qui l'ont fait l'ont fait à la marge – n'a contesté le diagnostic qui était posé dans le rapport de la commission Poitras. À peu de chose près, là, en gros, personne n'a contesté le diagnostic. Si les gens avaient contesté le diagnostic, il aurait été pris avec la décision de savoir s'il acceptait ou non le diagnostic, mais tout le monde, à peu près, a accepté le diagnostic. Il fallait passer tout de suite à la deuxième étape: Qu'est-ce qu'on fait à partir de maintenant? Et, malheureusement, le ministre a failli dans cette responsabilité qui lui incombait, je le répète, de devenir le chef de file. Des fois, je soupçonne même que ça fait l'affaire du ministre que le directeur de la Sûreté du Québec ait déposé, il y a quelques jours, un plan de redressement sans avoir consulté l'Association des policiers provinciaux, qui, il fallait s'y attendre, a réagi en se braquant parce qu'elle n'avait pas été consultée, est sortie publiquement, a donné l'impression qu'elle était contre la réforme, alors que nous savons tous que ce n'est pas le cas, mais que, parce qu'elle n'est pas consultée, elle réagit négativement.

Et là le dossier est bloqué. Là, le dossier est bloqué, et des fois je soupçonne que ça fait l'affaire du ministre que le dossier soit bloqué, parce que ça l'empêche, lui, et ça lui permet, à lui, de se cacher en arrière de ce litige-là entre l'Association des policiers et la Sûreté du Québec pour ne pas lui-même indiquer quelles sont ses orientations sur, entre autres, ce qu'il entend faire avec l'organisme de contrôle qui était suggéré dans le rapport de la commission Poitras. Et là je veux bien qu'on se comprenne. L'opposition ne dit pas qu'elle est en accord avec le genre d'organisme qui est suggéré dans le rapport de la commission Poitras, mais encore faudrait-il que le ministre nous donne ses orientations face à cette recommandation-là.

Alors donc, de temps en temps, on peut s'interroger à savoir si ça ne fait pas l'affaire du ministre que le dossier commence à se bloquer, au niveau de la réforme, entre l'Association des policiers et la direction de la Sûreté du Québec, parce que ça lui permet, à lui, d'éviter de se prononcer sur un certain nombre d'autres recommandations qui ne sont pas touchées dans le plan de redressement.

Le plan de redressement qui a été déposé par le directeur de la Sûreté du Québec, pour ce que j'en connais, est ambitieux et sa réalisation s'étend sur un certain nombre d'années. Il y a des crédits qui sont associés à un certain nombre de réformes. Je n'ai pas entendu, à cette date, le ministre s'exprimer sur les crédits qui devront être alloués, même déjà en 1999-2000, dans le budget qui concerne l'année financière dans laquelle nous sommes, relativement aux sommes qui seront allouées pour commencer le plan de redressement.

À ma connaissance, d'autre part – et les policiers de la Sûreté du Québec sont en négociation au moment où on se parle, il y a des pourparlers – les négociations se font. Là je peux me tromper, le ministre me donnera une indication si je me trompe. Ça se peut que je me trompe, et j'espère que je me trompe. Mais, à ma connaissance, les négociations se font pour le renouvellement du contrat de travail, sans qu'il soit question des recommandations du rapport Poitras et sans qu'il soit question directement de ces recommandations-là, et on ne peut pas les ignorer. Même si on voulait les ignorer, on ne peut pas les ignorer. Ça prend la réforme. Quand je dis «la réforme», ça prend un certain nombre de modifications extrêmement importantes, tant au point de vue des valeurs que de l'organisation du travail, que de l'organisation des relations de travail. Ça prend une réforme importante, et il faut que les policiers soient partie prenante de cette réforme-là. Là, c'est bien mal parti, hein, très mal parti parce qu'ils n'ont pas été consultés.

(21 h 10)

Et ça peut être une stratégie du patron de ne pas les consulter, mais le ministre de la Sécurité publique doit mettre son pied à terre. Il doit avoir à coeur, le ministre de la Sécurité publique, un certain nombre de choses. Il doit avoir à coeur que la Sûreté du Québec puisse être reconnue comme le corps de police qu'elle mérite d'être, c'est-à-dire un corps de police compétent, un corps de police intègre, un corps de police efficace, un corps de police moderne. Elle veut le devenir, elle a besoin d'un ministre de la Sécurité publique qui s'installe à l'avant du navire et qui donne la direction de façon claire et sans aucune espèce d'équivoque. Ce n'est pas ça qu'on retrouve dans l'attitude du ministre. Je le déplore. Je suis certain que les policiers de la Sûreté du Québec le déplorent. Je suis certain que la population le déplore aussi.

Les policiers de la Sûreté du Québec continuent de patrouiller le territoire. Les policiers de la Sûreté du Québec continuent de tenir des enquêtes, de faire des enquêtes criminelles. Les policiers de la Sûreté du Québec continuent d'agir à tous les niveaux, et ils doivent le faire avec une crédibilité qu'il faut leur redonner. Le ministre pourrait jouer un rôle de très grande importance. Bon.

Le ministre me dira: Vous savez, ces choses-là, ça prend du temps. Il faut être capable de réfléchir à ce qu'on va faire, il faut être capable de poser les bons gestes, il faut être capable de faire une vraie réforme. C'est vrai. Je ne dis pas qu'il ne peut pas prendre le temps de faire les choses, mais ce que je dis, c'est qu'on a besoin d'un sens de direction. On a besoin de savoir que le capitaine est là, bien en contrôle de son navire et à l'avant du navire, et que c'est lui qui conduit. Moi, je déplore le fait que ce soit mal parti, et c'est parti négativement. Et je vous le dis, là, la façon dont le dossier est parti ne profite pas plus aux policiers de la Sûreté du Québec qu'au gouvernement et qu'à la population. Il y a quelque chose là-dedans qui fait en sorte que, malheureusement, on ne sent pas la volonté que nous devrions sentir. Et on n'a pas le choix, il va falloir y venir.

Alors, ce sont les représentations que j'avais à faire, M. le Président, dans mes remarques préliminaires au sujet du projet de loi n° 44.


Étude détaillée

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien, M. le porte-parole de l'opposition officielle. Nous en sommes aux motions préliminaires. S'il n'y a pas de telle motion, nous fonctionnerons comme à l'habitude, article par article. Et, à ce moment-ci, j'appellerais l'article 1. M. le ministre.

M. Dupuis: L'article?


Dispositions générales

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): L'article 1.

M. Dupuis: Ça va.

M. Ménard: Bon. C'est justement ça, l'article qui permet d'établir un règlement sur les qualités requises pour exercer certaines fonctions dans les autres corps de police que... Enfin, dans l'ensemble des corps de police du Québec?

Une voix: Partout. C'est la fonction d'enquête...

M. Ménard: Partout.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Saint-Laurent.

M. Dupuis: Oui. Je rappellerais simplement au ministre que c'est le Protecteur du citoyen qui faisait la remarque à l'effet que, malheureusement, le gouvernement avait tendance à légiférer plus par règlement que devant l'Assemblée nationale, que c'est vrai que l'opposition avait concouru à cette remarque du Protecteur du citoyen, et je voulais simplement faire référence à ce que vous aviez dit dans vos remarques préliminaires tantôt.

Ceci étant dit, avez-vous déjà une idée de ce que vous allez mettre dans le règlement éventuel relativement aux qualités requises, au profil que vous allez déterminer, que vous allez avancer? Et avez-vous une idée des qualités principales que vous allez mettre dans le règlement éventuel? Est-ce que le règlement a déjà commencé à être rédigé?

M. Ménard: Ce serait long, mais je peux vous dire, pour vous donner une idée générale: elles sont très semblables à ce que le directeur de la Sûreté du Québec a annoncé pour la Sûreté du Québec.

M. Dupuis: Mais il n'a pas annoncé grand-chose. Il a dit qu'il allait travailler sur le profil de compétence. Il a dit qu'il allait travailler sur le profil. En fait, si j'ai bien compris, là, le directeur de la Sûreté, il a dit qu'il y avait un comité qui travaillait sur le profil que devrait revêtir le parfait enquêteur. Et là c'est mon expression à moi, ce n'est pas la sienne, je vous l'avoue tout de suite. Mais, même dans l'esprit du directeur de la Sûreté, ce n'était pas fixé, ça, le profil.

La seule personne, à ma connaissance, qui l'a fixé, le profil, c'est M. Corbo, dans le rapport Corbo II, et je peux vous donner des extraits. Il a déterminé quatre catégories de savoirs et compétences pour devenir enquêteur: des savoirs et compétences méthodologiques généraux; maîtrise des langues; capacité de lecture et de rédaction; capacité de communication, d'interaction; compétences informatiques; compétences nécessaires à dresser l'histoire de cas; compétences dans la gestion du temps de travail; connaissances juridiques; connaissance des dispositions majeures de la Charte et des interprétations de la jurisprudence; connaissance des dispositions majeures du Code criminel et des autres lois; connaissance des procédures des tribunaux criminels; bon usage des mandats de perquisition et des mandats d'arrestation, le raffiné, etc. qui s'est ajouté; collaboration efficace avec les procureurs; l'application des règles de droit dans les rapports avec les suspects et les prévenus; préparation et prestation du témoignage devant le tribunal; connaissances sociales et culturelles; savoir et connaissances policières; techniques générales d'enquête criminelle; traitement de scènes de crime, y incluant vidéo; techniques d'interrogatoire en personne, y incluant vidéo; perquisitions, fouilles, saisies; recrutement et utilisation d'un informateur; des cours de filature; agent double. Puis il faudrait ajouter à ce que M. Corbo n'avait pas dit dans son rapport: travailleur social, psychologue, etc.

Alors donc, il y a une gamme de connaissances que l'enquêteur devra revêtir pour être capable de coller au profil. Moi, je veux savoir, outre ce que je viens de dire, qui sont des extraits du rapport Corbo, est-ce que le ministre a commencé à se faire une tête sur ce qu'il pourrait mettre dans un règlement éventuel?

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le ministre.

M. Ménard: Oui.

M. Dupuis: C'est quoi?

M. Ménard: Effectivement, ce sera sûrement inspiré du rapport Corbo II, sur la formation.

M. Dupuis: Mais encore.

M. Ménard: Bien, je veux dire... Je ne suis pas pour commencer à le relire au complet, comme vous l'avez fait. Je ne pense pas que ce soit épouvantablement pertinent maintenant parce que, actuellement, la question, c'est: que le gouvernement voudrait-il demander? Et ce que vous avez lu démontre très bien que ce n'est pas le genre de chose qu'on met dans une loi, c'est vraiment le genre de chose qui doit être dans un règlement. Donc, ce qui est pertinent actuellement, c'est de savoir si on a besoin, dans l'état actuel des forces policières au Québec, pour le ministre de la Sécurité publique, pour le ministère, pour le gouvernement, d'établir un règlement sur la formation. Alors, je pense que c'est évident, devant ces carences qui ont été observées par le rapport Corbo, dans les exigences futures que doivent avoir ces enquêteurs, je pense qu'il en ressort une évidence, c'est qu'il faut que le gouvernement réglemente. Et c'est cette nécessité qui nous amène à proposer les trois courtes lignes que représentent les modifications à la Loi de police.

M. Dupuis: Bien, voyez-vous, là, c'est ça. Vous demandez à l'opposition officielle de faire un acte de foi. Or, faire un acte de foi, là, c'est y croire sans comprendre. C'est ça que vous nous demandez de faire, là, vous nous demandez de croire sans comprendre. Vous nous demandez de croire que vous êtes capable, éventuellement, d'arriver avec un règlement qui va comporter un certain nombre de qualités qui devront être requises pour devenir un enquêteur, puis vous nous demandez de faire un acte de foi, de légiférer en ne sachant pas ce que vous allez mettre dans le règlement. C'est ça, le défaut.

Moi, je n'ai jamais dit que vous devriez mettre dans la loi le profil de compétence que ça prend pour devenir un enquêteur de la Sûreté du Québec ou un enquêteur de police, je n'ai jamais dit ça. Ce que j'ai dit, par contre, à l'adoption de principe, c'est: J'espère que, lorsque le ministre va arriver à l'étude article par article du projet de loi, il va être en mesure de nous indiquer ce qu'il entend mettre dans le règlement. Écoutez, là, eh! ça fait depuis le mois de décembre que vous savez que la commission Poitras a des récriminations au sujet de la formation des enquêteurs de la Sûreté du Québec. Vous même, qui avez été criminaliste pendant plusieurs années, et un criminaliste avec une réputation...

(21 h 20)

M. Ménard: Moi, je pense qu'il est hors d'ordre.

M. Dupuis: Je m'excuse...

M. Ménard: D'abord, il ne s'agit pas de la Sûreté du Québec, ici, il s'agit des autres corps de police.

M. Dupuis: Non, non. Une seconde, une seconde!

M. Paradis: M. le Président...

M. Ménard: Lisez la version intégrée.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Paradis: M. le Président, le député de Saint-Laurent avait la parole, le ministre prétend qu'il est hors d'ordre. Il invoque quel article?

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre! Oui, mais, M. le député de Brome-Missisquoi, à ce moment-ci, si vous voulez prendre la parole, je devrai requérir le consentement des membres de la commission.

M. Paradis: Non, non, pas du tout. Je suis un membre volant, M. le Président. Rappelez-vous votre poste de président de l'Assemblée nationale. Vous connaissiez bien le règlement, à cette époque.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Brome-Missisquoi, en fonction...

M. Paradis: Je n'ai pas le droit de vote.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): ...du deuxième alinéa de l'article 132, il est bien indiqué que «Le député qui est membre d'une commission peut participer aux délibérations d'une autre commission, avec la permission de cette dernière...

M. Paradis: Je ne suis pas membre.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): ...mais ne peut y voter ni présenter de motion.»

M. Paradis: Vous commencez à comprendre, là.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Un instant, s'il vous plaît.

M. Paradis: Très bien.

M. Dupuis: Moi, M. le Président, je me suis toujours plaint que le leader n'était pas membre d'une commission, mais là, je comprends pourquoi. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Il me semble, en l'espèce, M. le député de Brome-Missisquoi, que le libellé de l'article 132, deuxième paragraphe, est clair: «Le député qui est membre d'une commission peut participer aux délibérations d'une autre commission, avec la permission de cette dernière, mais ne peut y voter ni présenter une motion.» Alors, le leader de l'opposition officielle est également membre de la commission de l'Assemblée nationale qui est une des commissions permanentes.

Une voix: Ha, ha, ha! C'est la meilleure!

M. Paradis: C'est une nouvelle interprétation, M. le Président. Je vous demanderais de vérifier, là; suspendre quelques instants, vérifier avec la présidence.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Brome-Missisquoi, à ce moment-ci, je pense que le libellé de 132, deuxième paragraphe, est très clair...

M. Paradis: Bien, je vous demande juste de vérifier, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): ...et en votre qualité de...

M. Paradis: M. le Président, je vous demande respectueusement de vérifier.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Je vais suspendre quelques instants pour revérifier, mais, effectivement... Je suspends quelques instants.

(Suspension de la séance à 21 h 23)

(Reprise à 21 h 25)

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Brome-Missisquoi, après vérification, je maintiens ma décision à l'effet que, étant membre de la commission de l'Assemblée nationale, vous n'êtes pas habilité, à moins, bien sûr...

M. Paradis: Non, non, non, non.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): ...d'un consentement des membres de la commission, à prendre la parole.

M. Paradis: Je m'excuse, M. le Président, là, ce que vous rendez comme décision, c'est encore... Vérifiez donc l'article 118 du règlement pour un éclairage additionnel, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Alors, M. le député de Brome-Missisquoi, je constate effectivement que, à l'article 118, nous retrouvons, outre la commission de l'Assemblée nationale et la commission de l'administration publique, neuf commissions dites permanentes de l'Assemblée, et on retrouve la dénomination. Et, en fonction de l'article 115, nous retrouvons la composition de la commission de l'Assemblée nationale...

M. Paradis: ...la commission permanente, à quel endroit? Pouvez-vous m'indiquer?

Une voix: Commission de l'Assemblée nationale.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Je vous réfère à la composition de la commission de l'Assemblée nationale pour constater, à l'article 115, que vous en faites bien partie.

M. Paradis: Je m'excuse, là. Les commissions permanentes: «Outre la commission de l'Assemblée nationale et la commission de l'administration publique, il y a neuf commissions permanentes», leur dénomination et compétence. C'est ça?

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): C'est bien ça.

M. Paradis: Un, deux, trois, quatre, cinq, six, sept... À moins que mon règlement...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Brome-Missisquoi, je vous rappelle, d'une part, que ma décision est rendue sur la question que vous aviez posée...

M. Paradis: Bien, c'est parce qu'elle contredit...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): ...et, d'autre part, je reviens au libellé de l'article 132...

M. Paradis: Je vous indique simplement que votre décision contredit beaucoup d'autres présidences. Vous avez peut-être raison contre les autres, là...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Absolument pas, M. le député de Brome-Missisquoi. Je ne sais pas qu'une décision d'une présidence de commission, en tout cas, à ma connaissance, ait été rendue...

M. Paradis: Vendredi soir dernier, à la commission de l'éducation.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Oui...

M. Paradis: Est-ce que c'est assez récent?

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): ...on m'a mis au fait de cette...

M. Paradis: Cette décision-là, que, vous, vous renversez.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): ...non pas de cette décision, mais de cette participation...

M. Paradis: Non, non. Je m'excuse.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): ...que vous avez effectivement pu avoir dans les travaux de la commission, sans qu'il y ait eu explicitement décision de la présidence.

M. Paradis: Je m'excuse, il y avait eu...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Enfin, pour autant que je puisse me souvenir.

M. Paradis: Je vous demande d'aller vérifier, à ce moment-là, les transcripts de la commission; il y avait eu objection, et la présidence a décidé.

M. Dupuis: Si vous permettez, M. le Président, il m'apparaît que c'est une question assez importante et qui requerrait qu'il y ait une vérification complète qui soit faite avant qu'on poursuive les travaux, pour que l'éclairage soit complet.

M. Paradis: Le droit de parole du député, c'est ce qu'il y a de plus sacré. Si vous avez raison, vous avez raison. Si vous avez tort, vérifiez.

M. Dupuis: Particulièrement le droit de parole des membres de l'opposition, hein. Ce forum-ci, c'est à peu près le seul forum où on peut se faire valoir, sans avoir, évidemment, les règles de la période de questions à l'Assemblée nationale, qui nous sont quand même...

M. Paradis: Si vous pouviez procéder assez rapidement, M. le Président, parce qu'au salon bleu il faut que j'intervienne sur le projet de loi de la Régie de l'assurance-maladie.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien, M. le député de Brome-Missisquoi.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Paradis: Je ne veux pas vous bousculer, prenez le temps nécessaire.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Alors, comme vous mentionniez précédemment, je pense, à l'occasion de l'examen du projet de loi précédent, M. le député de Saint-Laurent, vous avez très bien établi, ou enfin évoqué le fait que la jurisprudence était finalement une chose vivante, et qui pouvait évoluer au fur et à mesure des décisions des présidents, ou enfin des instances concernées. Donc, s'il y avait eu...

M. Paradis: C'est comme le modèle québécois, ça, ça peut évoluer.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): ...M. le député de Saint-Laurent et M. le député de Brome-Missisquoi, une décision qui serait différente de celle que je prends maintenant, j'estime néanmoins que la décision que j'ai prise est la bonne et que, eu égard au libellé de l'article 132, deuxième paragraphe, qui dit que «le député qui est membre d'une commission peut participer aux délibérations d'une autre commission, avec la permission de cette dernière, mais ne peut y voter ni y présenter de motion», eu égard à ce qui est indiqué à l'article 115, par lequel, manifestement, vous faites partie de la commission de l'Assemblée nationale, considérant également que l'article 118 mentionne qu'outre la commission de l'Assemblée nationale et la commission de l'administration publique il y a neuf commissions permanentes, donc ce qui n'exclut pas le fait que vous fassiez partie d'une commission visée à l'article 132, je maintiens, à ce moment-ci, ma décision.

M. Dupuis: M. le Président...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Saint-Laurent, vous avez la parole.

M. Dupuis: ...c'est complètement votre droit de renverser une autre présidence de commission de l'Assemblée nationale, c'est...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Ceci étant dit, M. le député de Brome-Missisquoi, je peux néanmoins demander le consentement de la commission.

M. Dupuis: À ce sujet-là, j'aurais une remarque à faire.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Saint-Laurent.

M. Dupuis: J'allais y venir. Nous sommes ensemble depuis 15 heures, nous avons évidemment discuté d'un autre projet de loi, nous avons eu, je pense, des échanges qui ont été tout à fait civils et qui ont été même extrêmement fructueux, puisque dans le projet de loi précédent nous avons réussi à faire admettre au gouvernement, aux ministériels, un certain nombre d'amendements qui ont bonifié le projet de loi.

(21 h 30)

Je vois difficilement comment, pour ne pas rompre cet équilibre que nous avons réussi à maintenir depuis 15 heures, pour ne pas rompre cette atmosphère de collaboration que nous avons réussi à maintenir depuis 15 heures, les ministériels ne donneraient pas leur consentement pour que le député de Brome-Missisquoi – qui, comme vous le savez, possède une vaste expérience des choses parlementaires, à défaut de posséder une vaste expérience des choses de police, ce qui est tout à son honneur – puisse se faire entendre à cette commission-ci. Alors, je demanderais le consentement des ministériels pour que le député de Brome-Missisquoi puisse intervenir.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Alors, est-ce qu'il y a, donc, consentement pour que le député de Brome-Missisquoi puisse intervenir?

M. Ménard: Non. Nous pensons que sa grande compétence le requiert, de toute évidence, ailleurs, prochainement. Alors, il serait préférable qu'il s'y dirige le plus rapidement possible.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Bon. Alors, nous poursuivons donc...

M. Ménard: Et, par conséquent, nous n'accordons pas notre consentement.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): ...au niveau de l'étude du...

M. Dupuis: Là, moi, je vais répondre à la question de règlement...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Oui, M. le député de Saint-Laurent.

M. Dupuis: ...que le ministre de la Sécurité publique a soulevée tantôt.

M. Ménard: Écoutez, une chose après l'autre. On peut peut-être discuter de la...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Pardon. Un instant.

M. Dupuis: On va finir la question de règlement, là.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Bien sûr. Non, non...

M. Dupuis: Le ministre de la Sécurité publique avait fait une question de règlement.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Est-ce que le ministre a fait une question de règlement sur la question de la pertinence?

M. Dupuis: Absolument. Bien oui.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): O.K. Bon.

M. Dupuis: Je veux répondre à ça.

M. Ménard: C'est là-dessus qu'il voulait parler.

M. Dupuis: Bien oui. Puis je veux répondre à ça...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Saint-Laurent.

M. Ménard: Non, non. Mais, une minute!

M. Dupuis: ...parce que je pense que je vais être d'accord avec lui.

M. Ménard: Alors, il faut d'abord décider si le député de Brome-Missisquoi est plus utile ici ou ailleurs à l'Assemblée.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): À l'ordre! Là, j'ai constaté qu'il n'y avait pas consentement, à ce moment-ci.

M. Paradis: M. le Président, sur votre décision et sur l'absence de consentement, je tiens à assurer le ministre que mon fauteuil ne restera pas vacant, qu'on va procéder correctement pour s'assurer que les choses que j'aurais eu à dire soient dites par quelqu'un d'autre, en prenant le temps nécessaire pour bien les exprimer.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien. Alors, M. le député de Saint-Laurent.

M. Dupuis: Et rien ne peut empêcher le député de Brome-Missisquoi d'assister à la commission. Et, comme le disait un de mes confrères avocat dans le temps où je pratiquais, alors qu'un juge était en train de rendre jugement rejetant sa cause, le juge lui reprochant de faire deux choses en même temps, à cet avocat-là, il répondit au juge: M. le juge, je ne fais pas deux choses, j'en fais trois: j'écoute votre jugement, je prends des notes et je me passe des commentaires. Ha, ha, ha! Alors, rien n'empêcherait le député de Brome-Missisquoi d'écouter nos délibérations et de se passer des commentaires.

Je voudrais répondre à la question de règlement, avec votre permission, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Allez-y, M. le député.

M. Dupuis: Le ministre de la Sécurité...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Je n'avais pas compris que le ministre avait posé une question de règlement, mais...

M. Dupuis: Ah, bien oui! Il me trouvait hors d'ordre.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): ...de toute façon, allez-y.

M. Dupuis: Il me trouvait hors d'ordre, M. le Président. On était en train de parler de l'article 6.1 qui veut conférer au gouvernement le pouvoir de procéder par règlement pour déterminer les qualités requises pour exercer la fonction d'enquêteur dans un corps de police. J'étais en train de lui demander quelle était son opinion sur les qualités qui étaient requises pour devenir enquêteur au sein d'un corps de police, et je lui reprochais de ne pas être capable de nous donner un iota du début d'une qualité requise, et là il a dit que j'étais hors d'ordre.

Alors, si, dorénavant, devant ces commissions, le fait d'être hors d'ordre dépend de la critique qu'on fait à l'endroit du gouvernement, là ils viennent de passer une coche au-dessus des agissements du ministre du Revenu dans le dossier des renseignements personnels. Là, c'est encore pire: on n'a plus le droit de critiquer, on est hors d'ordre quand on critique. Alors, je vous soumets respectueusement, M. le Président, que je n'étais pas hors d'ordre, que je suis tout à fait pertinent dans le sujet et que j'ai le droit de demander au ministre qu'est-ce qu'il entend et qu'est-ce qu'il veut mettre dans son règlement éventuel sur les qualités requises pour être enquêteur dans un corps de police.

Au moment où il est intervenu sur la question de règlement, j'étais en train de commencer à dire ce que je vais terminer une fois que vous aurez statué, si vous me le permettez, sur la question de règlement, que le rapport de la commission Poitras a soulevé un certain nombre de lacunes relativement à la formation des enquêteurs et qu'il pourrait au moins nous entretenir de ces choses-là, au minimum.

Enfin, je vais vous demander de rendre jugement sur la question de règlement. Moi, je vous soumets que j'étais tout à fait pertinent.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Moi, je n'avais pas, en tout cas avec ce que j'ai entendu, considéré que vous étiez hors d'ordre à ce moment-ci, M. le député de Saint-Laurent.

M. Dupuis: Parfait. Alors, vous me permettez de continuer sur mon intervention?

Alors donc, ce que je disais, M. le ministre, c'est que le rapport de la commission Poitras a quand même constaté, si vous voulez, dans le cadre de son enquête, un certain nombre de lacunes qu'il a soulevées et sur lesquelles il a suggéré qu'on agisse dans une réforme. Vous avez beaucoup, beaucoup, beaucoup parlé de la formation des enquêteurs. Vous en avez parlé quand vous avez déposé le projet de loi n° 44 à l'Assemblée nationale; vous en avez parlé, vous avez fait quelques déclarations relatives... Vous nous avez même avoué, à un moment donné, que vous aviez fini de lire le rapport Corbo pendant que vous faisiez du ski dans l'Ouest canadien, après avoir remercié les 32 agents de la paix du Centre de détention de Rivière-des-Prairies. Vous aviez trouvé que c'était un rapport extraordinaire, le rapport Corbo, et que c'était l'un des meilleurs rapports que vous aviez lus. Alors, j'imagine que vous en avez retenu un certain nombre de choses.

Qu'est-ce que vous entendez mettre dans votre règlement? Parce que nous demander à nous, législateurs, ce soir, de voter en faveur d'un article qui vous permettrait de procéder par règlement pour déterminer les qualités requises que ça prend pour être enquêteur dans un corps de police sans nous donner le début du iota des qualités que vous estimez devoir être inscrites dans ce règlement-là, c'est faire injure à l'intelligence. Et, si vous nous demandez de faire un acte de foi, vous nous demandez de croire sans comprendre, on a de la difficulté à faire ça. Moi, j'aimerais ça vous entendre là-dessus. Qu'est-ce que vous avez l'intention de mettre dans ce règlement-là? Ou alors, si vous me dites: Je ne suis pas capable de vous le dire parce qu'on n'est pas prêt à vous le dire, point final, donnez-moi des échéances. Les travaux sont-ils avancés? Travaillez-vous en collaboration avec le directeur de la Sûreté du Québec, avec l'état-major de la Sûreté? Consultez-vous des autorités extérieures? Enfin, j'aimerais ça en savoir un peu plus.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le ministre.

M. Ménard: L'une des grandes qualités du rapport Corbo, c'est sa méthode. Et il nous a appris, avec son... Bien, il ne nous a pas appris, mais il est remarquable de voir qu'il nous demande de faire les choses dans l'ordre et de passer les étapes les unes après les autres dans leur ordre logique.

Alors, la première carence qu'il a remarquée quant à la formation, c'est que le gouvernement n'avait même pas les moyens d'établir par règlement les exigences nécessaires pour exercer la fonction d'enquêteur. Alors, la première réforme – dans l'ordre chronologique et logique – à faire, c'est de s'adresser au législateur pour qu'il permette à l'Exécutif, dans un domaine où ça doit être fait par règlement, d'avoir le pouvoir de faire un règlement sur la formation. C'est ce que vise le court amendement que nous vous proposons.

Je comprends que vous-même êtes convaincu de la nécessité de réglementer la formation. Alors, si vous êtes convaincu de la nécessité de réglementer la formation, vous êtes donc convaincu qu'il faut donner au gouvernement ce pouvoir. C'est ce que nous vous proposons. Je comprends que vous êtes donc d'accord avec l'article 1 de la Loi modifiant la Loi de police et que, donc, il devrait être adopté à l'unanimité.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Saint-Laurent et porte-parole de l'opposition officielle.

M. Dupuis: M. le Président, si le ministre ne fait pas exprès, là je me pose des questions sérieuses sur sa compréhension de la réalité qu'on est en train de vivre ce soir. Alors, j'aime mieux conclure qu'il fait exprès pour ne pas comprendre.

Je n'ai jamais prétendu, jamais, que le ministre n'avait pas le droit de déposer un projet de loi dans lequel il demande le pouvoir de réglementer les qualités requises pour être enquêteur dans un corps de police. Ce que je dis au ministre, c'est: Voici que vous nous conviez à l'étude article par article d'un projet de loi dont le premier article que vous nous soumettez va vous permettre de réglementer pour déterminer quelles qualités seront requises pour devenir un enquêteur dans un corps de police. Et je vous dis: Voici que vous nous demandez un pouvoir de réglementation, mais que, manifestement, à cause de votre refus de répondre, nous devrons conclure que vous n'avez pas la moindre idée de ce que vous allez en faire.

(21 h 40)

Et, au fond, ce que je vous offre comme possibilité, c'est la possibilité, ce soir – et c'est enregistré – de dire aux enquêteurs de la Sûreté du Québec et aux enquêteurs des corps de police à travers le Québec ce que leur ministre de la Sécurité publique, ce que leur ministre responsable de leurs devoirs et fonctions attend d'eux dans tous les corps de police de la province de Québec.

Je vous offre la possibilité, ce soir, pour la première fois depuis le dépôt du rapport Poitras, de dire à la population du Québec ce que leur ministre de la Sécurité publique attend de ses policiers. Je vous offre la possibilité, ce soir, en commission parlementaire, d'indiquer, pour la première fois depuis le dépôt du rapport de la commission Poitras, à la population du Québec comment elle va être représentée par ses policiers qui agissent sur le territoire de la province de Québec.

Ce que je vous tends, M. le ministre, c'est une perche qui va vous permettre de devenir le capitaine, en partie, de devenir le capitaine du navire que vous devez conduire, de vous installer au devant du navire et de donner un sens de la direction, au moins en ce qui concerne les qualités requises pour les policiers. C'est ça que je vous offre comme possibilité. Saisissez-là, bon Dieu! Saisissez-là! Soyez heureux que je vous l'offre. Qu'est-ce que vous attendez de vos policiers? Quelles sont les qualités requises qu'ils devront avoir pour devenir des enquêteurs compétents, modernes, intègres et efficaces?

Il y a des gens, ce soir, qui décident, après l'école secondaire, d'aller au cégep en technique policière. Il y a des gens, cette année, qui ont gradué en technique policière et qui attendent d'entrer à l'Institut de police de Nicolet. Il y a des policiers, ce soir, qui ont l'ambition de devenir des enquêteurs. Il y a des policiers, ce soir, qui ont l'ambition de devenir des officiers dans un corps de police. Ils ont des choix à faire, rapides. Ils veulent savoir ce que le ministre de la Sécurité publique espère pour eux. C'est ça qu'ils veulent savoir. C'est ça que je vous offre comme possibilité. Je ne suis pas contre vous, j'essaye de travailler avec vous, j'essaye de vous donner la possibilité de leur donner une direction. C'est ça que je réclame depuis le mois de janvier, que vous donniez une direction. Voilà un domaine dans lequel vous pouvez la donner, cette direction-là. Je vous offre cette possibilité-là.

M. le ministre, il y a des gens que je connais, des fils de mes amis, des filles de mes amis, qui ont gradué en technique policière cette année, à qui l'on dit: Vous devriez aller faire un diplôme universitaire parce que le gouvernement, tantôt, va légiférer probablement, et il va devoir y avoir un diplôme universitaire. Ça, c'est une chose. Je pense que ça a été dit. Mais il y a aussi des qualités qui sont requises, et vous allez réglementer là-dessus. Donnez donc une indication, ce soir, pour que ces gens-là qui choisissent cette carrière maintenant, pour que ces gens-là qui doivent faire des choix rapides sachent vers quoi s'orienter. C'est ça que je vous offre. Il va y avoir quoi dans votre règlement?

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le ministre.

M. Ménard: Je crois que, si vous me tendez une perche, cela ressemble plus à la perche du pêcheur à la ligne qu'à une perche présentée à quelqu'un qui se noie ou à quelqu'un qui... puis je ne ferai pas l'erreur de mordre à cet hameçon, aussi bien présenté et aussi appétissant puisse-t-il être, n'est-ce pas. D'autant plus que vous avez eu quand même l'amabilité de nous avertir en blâmant le directeur de la Sûreté du Québec d'avoir présenté un projet sans consulter, et vous voudriez, alors que nous sommes dans le processus de consultation que mène actuellement le directeur de la Sûreté du Québec, que je me prononce publiquement sur les détails.

Les grandes lignes de ce que je désire sont connues. J'ai déjà dit que je suis d'accord avec le rapport Corbo II, dans ses grandes lignes. J'ai aussi dit tout de suite que le plan de redressement du directeur de la Sûreté du Québec, il me l'avait soumis, après l'avoir soumis à ses officiers, pour savoir s'il pouvait le soumettre maintenant à l'ensemble des membres de la Sûreté du Québec, non pas pour le négocier, mais pour le consulter. Puis j'étais d'accord pour qu'il le soumette, et donc, s'ils étaient d'accord avec ce plan, que nous puissions rapidement passer à l'action. Mais si, par contre, ils y trouvaient des faiblesses et qu'ils croyaient pouvoir nous convaincre, nous avions un esprit ouvert.

Vous voulez que je ferme mon esprit, ce soir, et que je leur annonce ce qu'ils auront. Je ne tomberai pas dans ce piège. Je crois qu'il est suffisant, étant donné ce que nous avons à décider ce soir, qu'ils soient satisfaits dans les grandes lignes. Je vous dis aussi en passant que, vous ne le savez peut-être pas, mais j'ai été neuf ans dans la marine, et je n'ai jamais vu un capitaine se tenir à l'avant du navire. La place du capitaine, c'est sur le pont de commandement. Et on juge la qualité du capitaine non pas à ce qu'il dit, mais à la façon dont son navire se conduit.

Et, regardez, depuis le rapport de la commission Poitras, ce qui a été réalisé. On a procédé dans l'ordre. D'abord, toutes les personnes qui devaient être satisfaites l'ont été, même si leur avocat a crié très fort qu'il voulait satisfaction dans les jours qui ont suivi; disons qu'il l'a eue dans les semaines qui ont suivi. Et ils ont eu entière satisfaction. Tous les cas qui ont de la discipline ont été traités. Le processus est en marche. La conduite des enquêtes, qui était un des grands... est considérablement améliorée. Le système HOLMES, les éléments suggérés pour mettre le système HOLMES en place sont actuellement en place. Il existe une veille des jugements, de sorte que, si des juges critiquent la conduite d'une enquête par les officiers de la Sûreté du Québec, immédiatement on examine les critiques que le juge a faites. Toutes les déclarations importantes sont vidéographiées. Les enquêteurs qui font ces interrogatoires sont formés, les cours existent. Là on apprend effectivement à ces enquêteurs exactement la méthode américaine – dont j'oublie temporairement le nom – la méthode Reid qui est suggérée. Cette méthode sera évaluée par un comité dont je cherche les membres actuellement, comme le suggérait la commission Poitras. La conduite des enquêtes est sous la direction de quelqu'un qui a été choisi par un comité, avec représentation de l'extérieur, tel que suggéré. Il est en train de transformer la conduite des enquêtes internes; nous lui accordons donc... La formation est en bonne voie. Il y a au-delà d'une trentaine de membres de la Sûreté du Québec qui suivent actuellement des cours universitaires. Les négociations sont en train, mais le processus de négociation suppose, justement, qu'il y aura éventuellement appréciation de points de vue qui pourront être différents et atteinte, si possible, d'un consensus, sinon autrement. Le plan de redressement qui avait été promis, en trois mois, a été préparé, soumis aux autorités compétentes dans l'ordre logique où il devait l'être. D'ailleurs, la seule chose que les membres du syndicat, comme vous l'appelez – mais je préférerais parler de l'Association des policiers – ont critiquée, ce n'est pas le plan lui-même, mais bien les résumés qui, imparfaitement, avaient été révélés dans les journaux, parce qu'on a pu voir que ce qui avait coulé n'était pas tellement le plan que certains travaux préliminaires.

Alors, je pense que...

Une voix: ...

(21 h 50)

M. Ménard: Pardon? Oui, oui, ça aussi. Il y a tout un aspect sur la modernisation technologique qui est en train. Toutes les décisions, maintenant, que vous suggérez vous-même... Vous semblez, vous, penser que le Conseil de contrôle ne doit pas être constitué de la même façon que le suggère la commission Poitras. Si telle était également mon opinion, vous auriez compris qu'à ce moment-là il faudrait en imaginer un autre, qu'il faut cependant atteindre les mêmes buts par comparaison avec des organisations semblables, soumettre cela à des comités ministériels et évaluer les implications budgétaires. Tout ça est en voie d'être fait.

Donc, ce n'est pas parce que vous recherchez le capitaine à un endroit où il n'est jamais, c'est-à-dire à l'avant de son navire, que le capitaine n'est pas parfaitement en contrôle et que le navire n'est pas en train de changer de cap et de prendre, cette fois, le bon cap. Mais, de toute façon, je le répète, nous étudions quelques lignes ici, qui sont le début de ce qui est nécessaire pour que le gouvernement puisse effectivement réglementer la formation.

La première étape, c'est que le gouvernement ait les pouvoirs de réglementer la formation. C'est ça que nous demandons. Et, quand nous aurons le pouvoir de réglementer la formation, nous pourrons réglementer la formation, et alors, quand nous soumettrons les règlements, ils seront soumis à un processus de consultation auquel, pas de doute, vous pourrez participer.

M. Dupuis: Il est difficile pour moi de ne pas sentir l'impatience qui anime certains de mes collègues d'intervenir dans le débat, alors, je vais céder la parole, avec votre permission, sur le même sujet, à ceux qui vous ont demandé la parole.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): J'allais suggérer, effectivement, de reconnaître le député de Chapleau qui avait demandé à prendre la parole.

M. Pelletier (Chapleau): Merci, M. le Président. M. le ministre, le problème que j'ai avec l'article 1, c'est que la modification qui est proposée à l'article 6.1 de la loi confère dans une même disposition, dans le fond, deux pouvoirs réglementaires: on confère, dans un premier temps, le pouvoir de déterminer quels vont être les qualités requises pour exercer la fonction d'enquête dans un corps de police et, dans un deuxième temps, mais toujours dans la même disposition, on confère également le pouvoir de déterminer dans quels cas il va y avoir lieu de faire enquête.

M. Ménard: Faire enquête?

M. Pelletier (Chapleau): Bien oui, parce que, si vous regardez la modification qui est proposée, on dit bien «dans les cas déterminés par le règlement». Les cas déterminés par le règlement, c'est les cas où il va y avoir enquête. Est-ce que vous me comprenez, M. le ministre?

M. Ménard: J'ai de la misère à entendre les deux choses en même temps, là.

M. Pelletier (Chapleau): Regardez, l'article 6.1, présentement, dit ceci: «Outre les pouvoirs de réglementation qui lui sont conférés par la présente loi, le gouvernement peut, par règlement...» Alors, là, il y a un pouvoir réglementaire qui est conféré. Et 6.1, donc, va se lire comme suit. Bien, il y a une modification au paragraphe 6°: va pouvoir, par règlement «déterminer les qualités requises pour exercer la fonction d'enquête dans un corps de police, dans les cas déterminés par le règlement, ainsi que». Et là on continue. Or, vous ne pouvez pas avoir deux pouvoirs réglementaires dans une même disposition. Présentement, il y a deux pouvoirs réglementaires dans la même disposition.

M. Ménard: Le but de cette rédaction-là, il faut bien comprendre que «l'enquête», c'est un terme général. Il y a toutes sortes d'enquêtes dans un corps de police: il y a des enquêtes qui ont relativement peu d'importance, enfin, qui sont élémentaires, puis il y a des enquêtes qui sont plus poussées. Par exemple, faire passer un test d'ivressomètre, c'est quelque chose qui peut être fait par la gendarmerie et qui n'a pas besoin... Je ne dirais même pas faire passer le test d'ivressomètre, mais intercepter une voiture où l'on se doute que la personne conduit avec ses facultés affaiblies, c'est une chose que peut faire un simple patrouilleur, puis il lui suffit de reconnaître suffisamment les symptômes de facultés affaiblies, de conduite avec facultés affaiblies pour emmener cette personne à un technicien qui lui a reçu la formation nécessaire pour faire passer le test de l'ivressomètre.

Mais vous comprendrez que, pour faire une enquête, par exemple sur une agression sexuelle, l'on puisse demander une compétence particulière pour mieux servir les victimes d'agression sexuelle, pour avoir l'empathie nécessaire pour ne pas empirer le mal psychologique, et parfois physique, qui est donné à cette personne. Pour tenir une enquête sur meurtre, on va demander une autre compétence.

Mais vous voyez qu'il y a là toute une gradation d'enquêtes. Alors, c'est pourquoi on dit: On va déterminer les qualités requises pour exercer la fonction d'enquête dans des cas déterminés par le règlement. C'est le règlement qui va établir, par exemple, qu'à partir de tel type d'enquête on doit avoir telle formation; tel autre type d'enquête, on devra avoir une formation plus grande ou différente. C'est ça que ça veut dire, ce que vous avez lu.

Alors, là, ce n'est pas deux règlements, mais ça doit être nécessairement dans le même règlement que l'on doit avoir à sa disposition... un règlement qui dirait: Pour les enquêtes sur agression sexuelle, l'enquêteur devra avoir suivi telle formation particulière; pour les enquêtes de meurtre ou les interrogatoires des gens qui sont soupçonnés de meurtre ou de crimes plus graves ou d'un certain nombre de délits, telle autre formation. Il devrait avoir suivi, par exemple, des cours sur la formule Reid, sur l'interrogatoire, et ainsi de suite. Est-ce que ça vous éclaire?

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Chapleau.

M. Pelletier (Chapleau): Oui, oui. Non, je comprends votre point. Je pense que...

M. Ménard: En fait, c'est le point ministériel.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Oui, allez-y, M. le député de Chapleau.

M. Pelletier (Chapleau): Non, je comprends votre point, M. le ministre, mais, moi, je pense que, en tout cas, le libellé est mal choisi. La phraséologie n'est pas opportune parce que, vraiment, quand on lit ça, on a vraiment l'impression qu'on est présence d'un double pouvoir réglementaire. D'ailleurs, c'est assez inusité qu'on donne un pouvoir au gouvernement d'adopter des règlements puis que, dans le pouvoir habilitant lui-même on rementionne le mot «règlement» dans un paragraphe, finalement, de l'article. C'est très, très inusité que le mot «règlement» se retrouve à la fois dans le paragraphe introductif de l'article puis se retrouve par la suite dans un paragraphe à l'intérieur de l'article lui-même.

Je comprends votre point, là. Moi, personnellement, ce n'est pas comme ça que je l'avais saisi en premier. Maintenant que vous l'expliquez, je le comprends. Mais, moi, je pense que la phraséologie devrait être repensée parce que ça prête réellement à confusion. On a l'impression que vous avez, d'une part, un pouvoir de déterminer quand la fonction d'enquête va devoir être exercée et que, d'autre part, vous avez également le pouvoir de déterminer quels vont être les qualités requises pour exercer la fonction d'enquête. Vous, je comprends votre explication...

M. Ménard: Mais je pense que c'est dans la nature du problème...

M. Pelletier (Chapleau): Si vous me permettez, je vais rien que terminer. Je comprends votre explication, M. le ministre. Vous me dites: Ce que nous voulons, c'est déterminer quelles vont être les qualités requises pour tel ou tel type d'enquête. C'est ça que vous me dites. Mais la phraséologie est mal choisie, et réellement, ça donne toutes les apparences qu'il y a un double pouvoir d'enquête qui est ici confié au gouvernement, ce qui est tout à fait inapproprié au contexte du droit administratif, par ailleurs. Je veux dire, moi, c'est comme ça, en tout cas, que je l'ai lu au début, puis je suis certain que les juristes...

M. Ménard: Peut-être.

M. Pelletier (Chapleau): ...ne pourront pas bénéficier de la lumière de cette commission parlementaire dans leur bureau quand ils vont faire l'analyse de cette disposition, qui pourrait être attaquable, par ailleurs, pour le motif que je viens de vous mentionner, c'est-à-dire l'ambiguïté, la confusion qui règne quant aux termes qui sont employés.

Alors, à nouveau, je comprends votre point, je le saisis. Ce n'est vraiment pas comme ça que, moi, j'avais perçu les choses au début. Et ça veut dire que la phraséologie mériterait d'être réexaminée.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le ministre.

M. Ménard: Oui, mais je pense que vous reconnaîtrez également une autre chose, c'est que ça ne peut pas avoir vraiment de conséquences funestes parce que, qui va exercer le pouvoir qui est donné là? Ça va être le gouvernement. Le gouvernement, il comprendra quand il va l'exercer. Puis c'est de la nature des choses, quand on va se mettre à rédiger un règlement sur la formation ou sur les qualités requises pour faire une enquête, qu'on va être obligé d'établir des niveaux d'enquête en regard de niveaux de formation désirés. Et une personne qui ne comprendrait pas la disposition législative, en allant voir le règlement va tout de suite comprendre pourquoi.

M. Pelletier (Chapleau): Oui.

M. Ménard: Maintenant, il y a peut-être moyen de le dire autrement. Ça, je le reconnais. On peut trouver une façon plus heureuse.

M. Pelletier (Chapleau): Oui.

(22 heures)

M. Ménard: Si on inversait – parce que j'ai l'impression que c'est peut-être ce qui vous a... comme d'ailleur, moi aussi, au début, la première fois, j'étais dans une certaine confusion – si on inversait simplement les termes et si on mettait: Déterminer les qualités requises pour, dans un corps de police, exercer la fonction d'enquête dans les cas déterminés à ce règlement, ou par ce règlement. Mais là je ne le sais pas, là, j'essaie... Ce n'est pas plus beau, ha, ha, ha!

M. Pelletier (Chapleau): En fait, même que techniquement...

M. Ménard: Ça veut dire que, à partir du moment où on comprend, on comprend, quelle que soit la façon dont on l'exprime, mais...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): À ce moment-ci, M. le député de Chapleau, je vous permettrais d'intervenir et dès après on pourrait peut-être passer à la question du député de Chomedey. Ça porte toujours sur l'article 1?

M. Pelletier (Chapleau): Toujours.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Ça pourrait peut-être donner le temps justement aux personnes qui accompagnent le ministre...

M. Dupuis: Il doit rester du temps au député de Chapleau, certain.

M. Pelletier (Chapleau): Oui, oui.

M. Dupuis: ...qui parle.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Ah, non, ce n'est pas qu'il ne reste pas de temps, M. le député de Saint-Laurent...

M. Dupuis: Ah! O.K.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): ...c'est pour permettre, avec les interventions qu'il y a eu, peut-être de préparer un libellé sur lequel nous pourrions revenir ultérieurement.

M. Pelletier (Chapleau): Oui, tout à fait.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Chapleau.

M. Pelletier (Chapleau): Justement, par rapport à ça, moi, j'ai l'impression en tout cas qu'il suffirait de dire que le gouvernement peut tout simplement déterminer quelles sont les qualités requises pour exercer la fonction d'enquête dans un corps de police. Déterminer les qualités requises, quant à moi, ça implique pouvoir faire une classification.

M. Ménard: Oui, n'oubliez pas... Ce texte-là a été quand même vérifié par plusieurs légistes...

M. Pelletier (Chapleau): Ah, oui, je le sais.

M. Ménard: ...puis n'oubliez pas que ça pourrait être examiné à la loupe par des gens qui auraient un intérêt quelconque ou qui voudraient à un moment donné contester le règlement. Il faut que le règlement ait un langage qui va nous assurer qu'on va pouvoir réaliser ce que l'on veut faire. Parce que je pense que, depuis que vous avez compris notre point de vue, je crois comprendre que vous êtes aussi d'accord avec le fait que nous établissions des niveaux de formation différents pour certains types d'enquête.

M. Pelletier (Chapleau): Tout à fait. Tout à fait.

M. Ménard: Donc, il faut que le langage, aussi inélégant fut-il en français, soit juridiquement certain.

M. Pelletier (Chapleau): Oui. C'est ça.

M. Ménard: Et celui-là est apparu aux légistes comme étant juridiquement certain.

M. Pelletier (Chapleau): Oui, mais...

M. Ménard: Je reconnais qu'il n'a pas l'élégance que je souhaite voir dans les lois, que je souhaitais voir dans les textes de lois avant d'être élu, mais j'ai dû depuis faire un compromis entre mes soucis de clarté et la certitude. Puis je pense qu'au-delà de la clarté du français parfois et de la beauté du français il faut absolument être sûr qu'on obtient les pouvoirs dont on a besoin.

M. Pelletier (Chapleau): Oui. Mais, en fait, moi, ce que je propose...

M. Ménard: Et puis on me dit...

M. Pelletier (Chapleau): ...ça serait que la terminologie soit...

M. Ménard: Une dernière chose, M. le député de Chapleau.

M. Pelletier (Chapleau): Oui, allez-y.

M. Ménard: On me dit qu'effectivement il y en a beaucoup, de règlements, qui disent: Dans les cas déterminés par le règlement, dans les cas suivants.

M. Pelletier (Chapleau): Oui, mais, vous savez...

M. Ménard: Alors, le règlement commence ensuite: Dans tel cas, c'est telle disposition qui s'applique – ici, ce serait tel niveau de formation est requis – dans tel autre cas, c'est tel niveau de formation qui est requis, puis dans tel autre cas, c'est tel niveau.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Chapleau.

M. Ménard: Puis ça, je pense que vous avez compris que ça se fait par règlement aussi.

M. Pelletier (Chapleau): Non, non, je comprends votre point. Enfin, moi, je me dis que la terminologie peut être revue. Le fait que ça se retrouve dans plusieurs autres lois, moi, personnellement, ça ne me convainc pas, parce que des erreurs peuvent être aussi répétées, autant – vous l'avez amené vous-même – ça peut être inélégant, autant ça prête aussi à confusion. Je veux dire, vous l'avez dit vous-même qu'à priori vous aviez trouvé que le texte était ambigu. J'ai eu exactement la même réaction. Alors, puisqu'on fait un travail finalement d'amélioration de la législation dans cette commission parlementaire, moi, je pense qu'il est du devoir du gouvernement d'au moins réexaminer la phraséologie pour enlever toute ambiguïté.

Parce que, moi, je ne doute pas du tout de la compétence de vos légistes, mais, quand un avocat, à la première lecture, donc, voit une ambiguïté importante dans l'article, dans le paragraphe, eh bien, écoutez, plusieurs autres vont sans doute la voir aussi, cette ambiguïté-là, et certains qui seront moins bien intentionnés que moi voudront même peut-être finalement en profiter devant les tribunaux. Alors, voilà.

M. Dupuis: Question de règlement.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Question de règlement, M. le député de Saint-Laurent?

M. Dupuis: Oui, une question de règlement, avant de céder la parole à l'un de mes collègues. Si le ministre est d'accord avec l'intervention du député de Chapleau, peut-être y aurait-il lieu de suspendre pour qu'il puisse consulter ses légistes et proposer une nouvelle rédaction de l'article avant que le député de Chomedey et avant que le député de Shefford n'entament leur droit de parole? Ils ont le droit, eux autres, de parler sur la version modifiée, corrigée par le biais d'un amendement de l'article 6.1.

M. Ménard: Voulez-vous qu'on passe à d'autres articles? Parce que les autres articles sont assez techniques, hein? On pourrait peut-être régler les cas faciles.

M. Dupuis: Non, moi, je pense, là...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): À ce moment-ci, M. le député de Saint-Laurent, il ne s'agit pas formellement d'une question de règlement mais d'une suggestion quant à la procédure. C'est tout à fait... l'intervention est tout à fait recevable.

M. Dupuis: C'est ça.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Donc, vous suggérez...

M. Dupuis: Moi, je suggère qu'on suspende.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): L'article?

M. Dupuis: Non, non. Je suggère qu'on suspende la commission pour que le ministre puisse discuter avec ses légistes et nous revenir, proposer soit une nouvelle rédaction ou soit nous dire: Bien, non, j'ai décidé que je ne proposais pas de nouvelle rédaction. Puis on va continuer d'exercer nos droits de parole sur l'article 6.1.

M. Ménard: Juste un instant. La raison pour laquelle je fais une suggestion pour passer à l'autre, c'est parce que je pense qu'il serait peut-être préférable que les juristes y pensent pendant un certain temps. Et peut-être que, d'ici une demi-heure ou trois-quarts d'heure, ils pourraient nous revenir avec quelque chose de mieux. Si ce n'est pas possible – parce qu'il est possible qu'ils reviennent avec la conclusion que ce texte-là est celui qui nous donne le plus de certitude... Pendant ce temps-là, on peut régler d'autres problèmes, nous, qui sont plus faciles à régler. À moins que vous ayez des objections, là.

M. Dupuis: Non.

M. Ménard: Vous savez, j'ai l'impression que, sur les directeurs généraux adjoints, que j'ai appelés par erreur directeurs généraux associés tout à l'heure...

M. Dupuis: Non, mais avant qu'on aborde un autre sujet, là.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Saint-Laurent.

M. Dupuis: Si le ministre ne veut pas retenir la suggestion de suspendre la commission pour voir la rédaction, moi, je pense que mes collègues ont des choses à exprimer sur l'article 6.1, tel que rédigé à ce moment-ci.

M. Ménard: Bon, peut-être que...

M. Dupuis: Donc, je vais demander à ce qu'ils puissent continuer de s'exprimer sur cet article-là.

M. Ménard: Peut-être que ça pourrait les inspirer aussi dans la rédaction. Parce que, là, je comprends que ce n'est pas l'intention du gouvernement sur laquelle vous différez, c'est sur la formulation, dans le cas du député de Chapleau.

Une voix: C'est ça.

M. Dupuis: Il ne faut pas oublier mon intervention.

M. Ménard: Non, non, je ne l'oublie pas. C'est correct.

M. Dupuis: Il me reste encore du temps, je vais revenir.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): À ce moment-ci, M. le député de Chomedey avait demandé à prendre la parole, à intervenir. Donc, je comprends que nous continuons?

M. Dupuis: Oui. Absolument. Excusez-moi, M. le Président, oui.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien. M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Le projet de loi prévoit, à son article premier, que l'article 6.1, sixième paragraphe, serait modifié et se lirait dorénavant comme suit: «Que le gouvernement peut, par règlement, déterminer les qualités requises pour exercer la fonction d'enquête dans un corps de police dans les cas déterminés par le règlement ainsi que pour exercer une fonction ou obtenir un grade dans un corps de police autre que la Sûreté.»

M. le Président, je me permets de souligner d'emblée que la rédaction de la version anglaise de l'article 1 est à mon sens défectueuse, parce que: «to exercice inquiry functions» est bel et bien un calque de ce qu'on retrouve dans la version française, mais elle ne veut strictement rien dire en langue anglaise. C'est dépourvu de signification.

Il faut aussi faire très attention, le mot «enquête» en français a justement deux sens très différents en anglais. Ça peut être tantôt «an inquiry», et on parle de «coroner's inquiry», et ça peut être tantôt «an investigation». Ici, on est en train de parler de «investigation». C'est beaucoup plus simple. C'est une erreur monumentale d'avoir parlé de «inquiry», ici.

(22 h 10)

Par ailleurs, le fait même que l'article 1 renvoie à un règlement qu'on n'a pas encore vu montre bien que malheureusement le Parti québécois a un discours tout à fait différent lorsqu'il est dans l'opposition que lorsqu'il est au pouvoir. C'est incroyable. Si on regarde les discours qui ont toujours été prononcés sur l'importance que si on va faire des choses par règlement, au moins de les avoir devant soi, parce que sinon, qu'est-ce qu'on est en train de faire comme exercice à titre de députés élus pour représenter le peuple, ici, ce soir, on est en train de s'aventurer dans le vide. Il n'y a rien qui nous permet de savoir ce à quoi ça fait référence. Et ce n'est pas correct, partisanerie à part, ce n'est pas correct de demander à des élus qui sont supposés de faire une job correcte en commission parlementaire, de regarder les dispositions d'un projet de loi, de tenter, le cas échéant, de bonifier la loi ou de faire des observations, comme mon collègue le député de Chapleau vient de faire sur la rédaction défectueuse en langue française de l'article 1, mais c'est tout simplement inadmissible de nous demander d'étudier ce projet de loi ci sans nous donner une indication de là où on s'en va.

Oui, j'ai écouté attentivement les propos de mon collègue de Chapleau sur la forme de l'article 1, mais maintenant je vais tenter d'y aller un petit peu plus sur le fond. Le ministre nous faisait un laïus tantôt sur ses expériences dans la marine. Moi, je vais me permettre de parler d'un séjour exactement aussi long que le sien dans la marine à titre de président de l'Office des professions du Québec, parce que, ce qu'on a devant nous, ça ressemble drôlement aux qualifications requises pour exercer une profession ou une spécialité dans une profession.

Moi, je me souviens, pour prendre une analogie, que, pour être membre de l'Ordre des infirmières, auparavant la formation se faisait dans les hôpitaux, puis ça a pris un certain nombre d'années pour rendre ça dans les cégeps, avec un cours de trois ans de cégep. Vous savez, tout le monde veut bonifier ses qualifications et augmenter... comme on dit en anglais: Everybody wants to pull up the drawbridge once they're inside the castle.

Alors, c'est parfois difficile de laisser à ceux et celles qui ont déjà le pouvoir de faire des choses comme des enquêtes, de les laisser, eux, participer éventuellement à la décision de savoir qu'est-ce que ceux qui vont venir après vont avoir besoin comme qualifications pour exercer la même fonction. C'est un peu ce qui va se passer ici, parce que je vois difficilement comment le ministre va commencer à rétroactivement dire que des gens qui sont déjà qualifiés n'auront plus le droit de poser certains gestes. Pour rester avec mon analogie, donc, ça prend dorénavant trois ans de cégep et les examens standard uniformisés à la fin pour s'assurer que la personne a le niveau de compétence requis.

On n'est pas si loin du temps où c'était une révolution d'exiger une fin d'études secondaires pour entrer dans un corps policier au Québec, d'avoir un certain âge, une certaine taille, une certaine force physique. On s'est modernisé, on s'est mis à la page. Et je suis vraiment en mesure de dire que le cours de trois ans qui se donne dans les cégeps ainsi que le cours qui se donne à l'Institut de police du Québec à Nicolet préparent des policiers extraordinaires pour nous protéger, pour appliquer les lois que, nous, on vote, et qui, tous les jours de la semaine, mettent leur vie sur la ligne pour nous défendre. Je trouve ça odieux d'arriver aujourd'hui avec une simple disposition habilitante qui renvoie à un règlement dont on ignore le contenu pour effectuer un changement aussi en profondeur.

Si vous saviez, M. le Président, le nombre de consultations qui doivent avoir lieu avec toutes les institutions d'enseignement, avec toutes les parties impliquées avant de changer des diplômes donnant accès à un ordre professionnel. C'est une des grandes démarches de l'État, ça, finalement, si vous regardez toute la structure qui a été mise en place dans le Code des professions, c'est de l'artillerie lourde parce que ça affecte tellement de choses dans notre société quand on bouge des choses comme ça.

Le ministre arrive tantôt; je l'écoutais, et c'était une désinvolture que je ne lui connaissais pas. Il dit: Écoutez, le gouvernement – en voulant dire lui puis ses collègues du Conseil des ministres, parce que le gouvernement, le monde a tendance à confondre ça avec le Parlement; ce n'est pas la même chose, hein, nous, on ne verra pas ça – le gouvernement a besoin de réglementer, donc c'est ça qu'on vous demande de faire. Puis tous les gens qui avaient un mot à dire? Aie, on a nos comités ministériels, CQFD, et d'autres fonctionnaires qui sont toujours proches des ministres qui vont venir regarder ça, en vase clos. C'est ça qu'il est en train de nous proposer comme démarche. Moi, je trouve ça indécent que le ministre arrive avec ça ce soir, nous dire: Faites-moi un chèque en blanc, là. «Trust me». Faites confiance, ça va se faire correctement.

M. le Président, avant de changer les règles du jeu, les gens qui sont déjà dans les corps de police ont le droit de savoir ce qui va être attendu d'eux autres. Puis je pense aussi aux jeunes qui peuvent, par exemple, venir de finir leur cours de trois ans de cégep. Hé! Ce n'est pas rien, là. Pour devenir policier aujourd'hui, ça prend trois ans postsecondaires au cégep, ça prend un cours extrêmement exigeant et rigoureux à l'Institut de police, qui coûte une fortune, soit dit en passant; ça ne coûte pas la même chose qu'une année universitaire, là, ça coûte la même chose que deux, trois ans d'université pour un cours de quatre mois et les dépenses afférentes à ça. C'est clause orphelin par-dessus clause orphelin, puis en plus les syndicats ont tendance à leur jouer des petits tours. Puis en plus, là, on va arriver ce soir, et dire: Bien, à bien à penser, tu aurais peut-être mieux fait de faire un cours de deux ans de cégep général puis trois ans d'université, d'université de cafétéria quelque part, là, faire quelques cours de socio puis de ceci et de cela, puis là, tout d'un coup, ça, ça va faire un meilleur policier pour défendre le public, pour exercer la fonction enquête.

Basé sur quoi? Ils se basent sur quoi pour dire cela? Pas de preuve, pas d'analyse, pas de document, pas d'étude, rien. Juste: Trust me, moi puis ma gang, on va aller s'occuper de cela. On sait mieux que vous autres, là, ceux qui vont s'occuper de cela, on va décider, puis vous le saurez le jour où le règlement va être publié une première fois à la Gazette officielle du Québec – ce qu'on appelle souvent erronément une pré-publication; une pré-publication, c'est avant que ce soit publié – une première publication à la Gazette officielle du Québec pour commentaires, une petite période de 30 jours, 60 jours. Puis, de toute façon il a le don de se convaincre qu'il a raison puis qu'il n'a pas besoin d'écouter – c'est comme ce soir – alors pourquoi il changerait son règlement après coup?

Pour revenir, il y a 44 professions réglementées au Québec. Le niveau d'instruction passe justement du secondaire – dans le cas des infirmières auxiliaires – au doctorat dans plusieurs cas: optométristes, dentistes, médecins, puis c'est des doctorats de premier cycle, même, c'est un peu compliqué, mais c'est ça.

Pour pouvoir avoir une spécialisation, M. le Président, le niveau de réglementation requis est tout aussi complexe, le décret de consultation est tout aussi exigeant; on ne dit pas du jour au lendemain qu'on va faire une spécialisation dans tel ou tel domaine. Moi, je me souviens d'un travail épique qui avait dû être entrepris pour reconnaître la spécialisation d'urgentologue dans la province de Québec. On était l'une des dernières juridictions en Amérique du Nord à reconnaître les urgentologues, puis ça a été une bataille épique contre l'Ordre des médecins parce qu'à l'époque il y avait plusieurs gens qui disaient: Tout le monde peut faire de l'urgence. Ça a pris énormément de travail pour convaincre que non, ça peut prendre une autre exigence. Il y a eu des preuves qui ont été apportées, il y a une démonstration qui a été faite.

Personne n'est en train de dire que ça ne prend pas un niveau de formation x pour occuper certaines fonctions. L'exemple du ministre est très éloquent, est très persuasif aussi. Il parle d'un cas qui appelle toute notre sensibilité, il parle de quelqu'un qui ferait une enquête sur un viol. C'est sûr qu'on ne veut pas quelqu'un qui n'a aucune capacité interpersonnelle, aucun entregent, aucune formation sur qu'est-ce que c'est que le transfert et le contre-transfert dans une situation de crise comme celle-là. C'est très bien. On peut tous être d'accord avec lui là-dessus, mais il n'a pas le droit non plus de le prendre sur lui-même et de dire: Ça va être ce qu'on va écrire dans le règlement, puis vous n'avez qu'à voter notre loi.

Je sais, M. le Président, que ça fait partie – de bon aloi, hein? – du jeu, dans le sens très correct du terme, du jeu parlementaire de part et d'autre de la table ici, en commission parlementaire, c'est-à-dire que les gens du gouvernement vont voter avec le gouvernement, sauf de rares exceptions. Je me souviens que le courageux député de Drummond, une fois, a voté contre son gouvernement dans un important projet de loi enlevant l'aide qui existait auparavant à la Cour des petites créances pour l'exécution des jugements. Mais il est un exemple rare de courage. Je me souviens aussi du député de Saint-Jean qui s'est levé en Chambre pour rabrouer le meilleur ministre de la Santé et des Services sociaux – celui qu'ils ont dégommé peu de temps après – sur un problème d'hôpitaux dans sa région. Mais c'est plutôt rare. Ce sont des choses qui arrivent, par contre.

La semaine dernière, on a eu un exemple dans le sens inverse où le ministre des Relations avec les citoyens a accepté un amendement proposé par l'opposition dans sa Loi sur le drapeau, et il s'est fait battre par ses députés. Ça, c'était tout aussi intéressant à voir aller, mais ce sont des choses qui arrivent en commission parlementaire.

Ce soir, M. le Président, jeu de bon aloi, l'opposition-gouvernement; à part que, moi, je serais singulièrement gêné d'être un membre du gouvernement et être en train de me faire dire par mon ministre: Casse-toi pas la tête avec ça, là, pose-toi pas de question avec ça, moi, j'ai déjà parlé avec mes fonctionnaires; nous, on sait ce qu'il faut faire là-dedans, on sait ce qui est mieux pour la société, on sait ce qui est mieux pour le public et on sait surtout ce qui est mieux pour vous comme parlementaires.

(22 h 20)

Ce qui est mieux pour vous comme parlementaires, c'est que vous ne posiez pas trop de questions embarrassantes, parce que, moi... M. le Président, de toute façon, de ce côté-ci de la table, il va sans dire que, nous, on ne se laisserait jamais berner par un projet de loi qui est vide de son sens, sans référence à un règlement qu'on refuse de nous montrer. Il n'y a rien qui empêche le ministre de tenir un bon débat public avec à ce moment-là tous les intéressés, pas juste ceux et celles à qui il est intéressé à montrer l'affaire, mais toutes les personnes intéressées à l'affaire vont pouvoir la regarder.

Non, M. le Président, nous, on n'embarquera pas là-dedans. Une disposition habilitante, qui est ni plus ni moins un chèque en blanc pour le ministre de la Sécurité publique, et qui justement exige... c'est le minimum, on devrait avoir au moins une indication du ministre de l'Éducation là-dessus.

C'est de l'éducation supérieure dont il s'agit ici. Ce sont des cours postsecondaires qui existent déjà. Ça interpelle les jeunes qui sont déjà inscrits pour l'automne. Vous savez comme moi que c'est un gros problème qu'on a, les cours dits de techniques au cégep, les cours de trois ans. Je vais donner quelques exemples qui vont sans doute vous dire quelque chose.

Il existe quelque chose qui s'appelle un TRP, un thérapeute en réadaptation physique. Pour devenir TRP, il faut faire trois ans de cégep. Un TRP travaille côte à côte avec un physiothérapeute, mais, pour devenir physiothérapeute, jusqu'à ce qu'on commence à construire des passerelles, tu ne peux toujours pas passer d'une technique au cours universitaire dans le même domaine. Si vous avez un cours de deux ans de cégep en science po, vous pouvez passer à la Faculté de droit sans aucune difficulté. Si vous avez un cours trois ans de cégep en technique policière, même si vous avez les plus hautes notes de la province de Québec, vous ne pouvez pas entrer à la Faculté de droit.

Si vous avez un cours de technique diététique, trois ans, vous travaillez côte à côte avec les diététistes qui sont des gens qui ont fait deux ans de cégep général et qui sont allés faire trois ans d'université après cela, mais il n'y a pas de passerelle. Dans le domaine de l'ingénierie, c'était ainsi avec tous les cours techniques de trois ans jusqu'à temps que, sous l'égide d'un gouvernement libéral précédent, lorsque Claude Ryan était le ministre responsable, on ait bâti une passerelle avec l'École de technologie supérieure, puis dorénavant c'était devenu possible de passer de ton cours cégep trois ans en technique du bâtiment, par exemple, pour aller à l'École de technologie supérieure et finalement devenir ingénieur.

Mais ce que le ministre est en train de faire ici est non seulement, à mon point de vue, vraiment un manque de respect pour tous les parlementaires autour de cette table, mais aussi pour tous les jeunes qui doivent prendre une décision éclairée, informée sur leur avenir. Le ministre est en train de dire: Si tu veux aspirer aux meilleures jobs dans les corps de police, il faut que tu aies une qualification. Alors, je vois tous les jeunes en train de dire: Bon, c'est quoi, la qualification? moi aussi, je veux être enquêteur. Je ne te le dirai pas. Je te le dirai après. Mais comment ça, tu vas me le dire après? Moi, je dois décider si je fais un cours trois ans en technique au cégep ou si je me pointe en cours général, peut-être en socio ou en psycho, puis je me tape trois ans d'université après ça.

C'est une claque sur la gueule des cours de cégep en technique policière, c'est une claque sur la gueule de tous ceux qui sortent de ces programmes-là et qui mettent leur vie en jeu tous les jours de la semaine pour protéger la nôtre, notre vie. Et le ministre dit: Bien, je vais parler avec les gens que ça intéresse, en voulant dire que ce n'est définitivement pas de ces étudiants-là dont il s'agit. Ce n'est pas les gens qui donnent les cours dans les cégeps dont il s'agit; c'est lui puis les officiers de son ministère, sa gang à lui. C'est eux autres qui vont décider ça entre eux autres.

M. le Président, on a évidemment beaucoup plus à dire, puis il y aura sans doute des modifications à proposer à l'article 1, parce qu'il est inacceptable dans sa forme actuelle. Pour l'instant, on voulait dire que c'est non seulement sur la forme que l'article 1 est défaillant, mais l'article 1 est également défaillant quant au fond, car ça demande aux députés de voter un chèque en blanc au gouvernement sans qu'on puisse avoir eu l'occasion d'entendre tous les autres intéressés et intervenants dans cet important dossier. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien. M. le député de Saint-Laurent. Un instant, s'il vous plaît.

M. Dupuis: J'apprécierais savoir combien il me reste de...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Il vous reste huit minutes, M. le député de Saint-Laurent.

M. Dupuis: Je vais les utiliser, avec votre permission.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien. Allez-y.

M. Dupuis: Je vais aller plus loin que le député de Chomedey, qui a fait une intervention qui m'apparaît être tout à fait pertinente. Les réponses que le ministre nous a données, quand on l'a poussé au pied du mur et qu'on lui a demandé de nous donner une indication de ce qu'il envisageait être les qualités requises pour devenir enquêteur, il a dit des choses totalement aberrantes qui démontrent... Et ça m'étonne; je m'en étonne publiquement, mais les policiers vont être très étonnés aussi de s'apercevoir que non seulement, dans l'esprit du ministre, il n'a aucune idée d'où il s'en va avec son pouvoir réglementaire sur les qualités requises pour exercer la fonction d'enquête, mais qu'en plus c'est totalement improvisé dans son esprit et qu'en plus ça dénote une méconnaissance totale du milieu.

Il a dit tantôt – en réponse aux questions du député de Chapleau, si je ne me trompe pas – que dans son esprit ce règlement-là éventuel devrait comporter différents niveaux de formation pour différents postes d'enquêteur...

Une voix: Types d'enquêtes.

M. Dupuis: Pour types d'enquêtes. Ça, là, ça dénote, M. le Président, malheureusement – je le déplore, parce que c'est le ministre de la Sécurité publique, c'est lui qui a la responsabilité – une méconnaissance totale du milieu policier, et je ne peux pas concevoir ça. C'est parce que c'est improvisé, parce que je sais que vous connaissez le milieu policier mieux que ce que vous avez démontré ce soir.

Il y a des corps de police, M. le Président, où il y a trois enquêteurs. Pas 56 000, un. Certains corps de police, un. Mais la Haute-Saint-Charles, ici, dans la région de Québec, il y a trois enquêteurs aux enquêtes criminelles. Le BEC, là, le bureau d'enquêtes criminelles, là, c'est trois enquêteurs, ça. S'il y en a un qui est malade un matin puis que c'est celui qui possède la formation la plus élevée, ça veut dire que, dans une enquête x, qui requiert son niveau de compétence, si les deux autres enquêteurs n'ont pas son niveau de compétence, ils ne sont pas capables de faire l'enquête, ils n'auront pas le droit de faire l'enquête. Ça n'a pas de bon sens ce que vous avez dit. À la Sûreté du Québec, dans les différentes escouades, il y a des remplacements qui doivent s'effectuer, il y a des départs, il y a des maladies, il y a des vacances, il faut faire des enquêtes, souvent on emprunte dans un...

Carcajou – vous connaissez ça, Carcajou – vous prêtez à Carcajou des enquêteurs de certaines escouades spécialisées. Il faut les remplacer, ces enquêteurs-là, quand ils s'en vont à Carcajou, on va puiser dans le personnel des enquêteurs. Et là il va falloir, en plus d'aller chercher un enquêteur pour combler le poste qui est en vacance temporairement – parce que l'enquêteur est prêté à Carcajou temporairement – vérifier son niveau de formation. Vous avez dit qu'il y aurait différents niveaux de formation en rapport avec différents types d'enquête. Ça n'a aucun sens. C'est absolument ingérable. Ça n'a pas de bon sens.

L'autre chose, c'est: Pourquoi quelqu'un s'empêcherait d'aller chercher le niveau maximum d'enquêtes? Celui-là qui est extrêmement ambitieux et qui va vouloir aller toucher à toutes sortes de formes d'enquête à l'intérieur d'un corps de police, il devra posséder la meilleure formation, la formation de type A, de niveau A, si je me fis à ce que vous avez dit, et c'est ingérable pour un service de police.

Alors, quand il y a eu une vacance et qu'on veut remplacer, au sein du bureau des enquêtes, par un patrouiller qui a de l'avenir, par exemple, par un patrouilleur qui démontre un intérêt particulier, on va être incapable de le faire, on va être absolument empêché de le faire parce qu'il n'aura pas le niveau de formation requis pour être capable de faire le type d'enquête qu'on veut lui demander de faire. Ça n'a pas de bon sens. Ça démontre – malheureusement je suis obligé de le dire, là, et ça me fait de la peine de le dire, je vous le dis, parce que c'est important – que le sujet policier au Québec, à cause principalement du rapport de la commission Poitras, est un sujet d'intérêt vers lequel tous les yeux sont tournés actuellement. Puis, honnêtement, M. le ministre, ça me fait de la peine que ça soit improvisé au point où vous le démontrez ce soir. Ça n'a pas de bon sens, c'est triste. C'est triste.

Et peu importe à quel endroit le capitaine du navire se situe sur le navire, là, on sait tous très bien ce qu'on voulait dire. Vous devez assumer le rôle de leader et malheureusement vous ne le faites pas. Et vous l'avez encore prouvé dans le cadre de la discussion au sujet de l'article 6.1.

Aïe! les policiers, là... Moi, je le sais, que le fils du député de Chomedey est à l'Institut de police de Nicolet. Là, lui, il veut savoir vers quoi il va s'orienter, quelles études il va compléter. Parce que, s'il ressemble un petit peu à son père, le fils du député de Chomedey, il doit être ambitieux de la bonne façon puis il doit vouloir atteindre un niveau de compétence important, comme son père probablement le lui a appris. Il veut savoir. Il veut savoir, et c'est impossible, il ne peut pas savoir.

Je vais attendre que le ministre ait fini de rire. Parce qu'il n'y a rien de drôle dans ce qu'on dit, M. le ministre. Vous êtes en train de nous demander d'adopter un article qui va donner un pouvoir de réglementation sur lequel, premièrement, on est obligé de constater que vous n'avez aucune idée de ce que vous allez faire avec, que, deuxièmement, quand vous y réfléchissez un petit peu, on s'aperçoit que c'est complètement improvisé puis, troisièmement, qui dénote une méconnaissance du milieu. J'espère que vous allez vous doter de conseillers – je ne fais pas référence aux gens de votre cabinet, là – professionnels qui vont être capables de vous aviser mieux que ça.

(22 h 30)

Mais demain matin, quand les policiers qui sont déjà en exercice, ou les étudiants de cégep, ou les étudiants de l'Institut de police, ils vont se dire: Il faudrait aller voir ce que le ministre de la Sécurité publique pense de la formation qu'il faudrait acquérir pour devenir enquêteur parce que, moi, j'ai l'ambition de devenir enquêteur, puis qu'ils vont lire les notes de la commission de ce soir, ils vont être déçus, mais ils vont peut-être rire aussi. Puis, s'ils rient, M. le Président, ils ne riront pas des échanges qu'on a eus, ils vont rire de l'attitude que le ministre a eue lors de la commission. Je n'en reviens pas, ça n'a aucun sens.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien. Alors, à ce moment-ci, M. le ministre.

M. Ménard: Bon, je voudrais répondre simplement à ce qui a été exprimé par le député de Chomedey. Il y a des critiques, dans le passé, qui ont été faites à juste titre à des projets de loi qui visaient à donner au gouvernement des pouvoirs qui relèvent plus du législateur que de l'exécutif. Cependant, le pouvoir réglementaire, qui est un pouvoir de l'exécutif... Il y a des circonstances où le pouvoir réglementaire est plus approprié que le pouvoir législatif. Et c'est certain que le genre de critique qui a été repris par le député de Chomedey est juste lorsque le gouvernement désire essentiellement légiférer par règlement, c'est-à-dire exercer un pouvoir qui, normalement, devrait plutôt relever de l'Assemblée législative que du règlement. Sans vouloir établir la limite entre ce qui relève plus du législateur et ce qui doit relever du règlement, je suis certain que, dans son expérience antérieure, le député de Chomedey a pu effectivement établir de pareilles distinctions.

D'ailleurs, il nous en a donné des exemples. Je ne crois pas que la situation des urgentologues ait été déterminée par législation, mais plutôt par règlement. Il a eu à appliquer et à opérer dans un contexte réglementaire, l'un, probablement, des plus complexes qui existent actuellement. Ce contexte réglementaire a été établi par législation. Quand cette législation a été passée, donnant ce pouvoir réglementaire assez complexe qui est initié par une corporation professionnelle, qui doit recevoir l'approbation de l'Office des professions et ensuite revenir souvent devant la Corporation professionnelle, avoir des conditions de publication, je pense qu'il va reconnaître que, la majorité du temps, il s'agissait de choses qu'il était préférable de régler par réglementation que par législation. Mais les dispositions habilitantes de la loi sur les professions, quand elles ont été votées, est-ce qu'on pouvait faire les mêmes critiques? Est-ce qu'on pouvait, à ce moment-là, demander au législateur qui proposait ce pouvoir réglementaire de dire à l'avance ce que seraient tous ces règlements qui seraient passés en vertu de la loi? Je pense bien que poser la question, dans ces cas-là, c'est y répondre.

Pour donner un exemple encore plus précis – évidemment à ceux qui veulent entendre – il y a actuellement, en matière de règlements de police, un règlement sur les règles d'embauche qui existe depuis 1968. C'est donc dire, comptez le nombre de gouvernements qui l'ont appliqué: le gouvernement libéral, le gouvernement de l'Union nationale, le gouvernement du Parti québécois, le gouvernement libéral, et tout le monde reconnaissait en l'exerçant, en le modifiant, qu'un règlement sur les règles d'embauche est vraiment une matière qui relève plus d'un règlement que de l'Assemblée nationale. On n'est pas pour aller discuter à l'Assemblée nationale, à un moment donné, de dire: Bon, maintenant, tel cours est disponible, donc on va amender la loi pour établir que maintenant le règlement sur les pratiques d'embauche va plutôt dire tel cours ou tel autre cours équivalent. Voilà une matière qui doit relever du pouvoir réglementaire.

La formation requise pour conduire des enquêtes ou pour atteindre certains grades est, à mon avis – je le soumets bien respectueusement – une matière semblable. C'est une matière qui relève plutôt de l'autorité réglementaire que de l'autorité législative parce qu'elle doit justement tenir compte de situations qui peuvent évoluer rapidement, la disponibilité des cours, la nécessité de reconnaître l'expérience pratique pour équivaloir à ces cours, et, au fur et à mesure où les cours deviennent disponibles, le règlement peut changer, il peut s'adapter, il est plus souple.

Cela ne veut pas dire qu'au départ le gouvernement demande un chèque en blanc, mais vous voyez bien qu'il faut... Parce que, dans la conduite du pouvoir réglementaire, le gouvernement doit consulter. C'est publié, puis les gens qui sont intéressés, nécessairement, vont venir faire des représentations. Très souvent, même, ils n'attendront pas un nouveau projet de règlement, ils vont eux-mêmes demander des modifications au règlement, ils vont même faire valoir que tel cours dont on espérait qu'il donne tels résultats ne les donne pas et qu'il faut le remplacer pour un autre cours qui est plus adéquat. Voilà une matière qui est vraiment réglementaire. Alors, ces critiques-là, je pense, dans ce cas-ci, bien qu'elles soient établies avec beaucoup d'éloquence, ce sont des critiques qui ne s'appliquent pas à la situation actuelle.

Une chose est certaine, par contre, je peux vous dire que Claude Corbo, ancien recteur de l'Université du Québec à Montréal, dont tout le monde, à commencer par l'opposition, reconnaît la compétence et le remarquable apport qu'il a donné à la société dans les différentes rapports qu'il a écrits sur la fonction policière... Il a écrit non seulement sur la formation, mais... Pardon?

Une voix: La déontologie.

M. Ménard: Mais auparavant sur la déontologie.

Justement, l'une de ces choses, c'est que le gouvernement manque même du pouvoir de réglementer la formation des enquêteurs. Il faut que le gouvernement ait d'abord ce pouvoir, puis ensuite il fait des suggestions sur ce que seront ces règlements. Mais ces règlements, ils devront être élaborés dans un certain processus de consultation.

Je reconnais avec l'opposition que le ministre, il est peut-être préférable qu'il donne les lignes de conduite, les objectifs qu'il vise puis, en gros, la ligne qu'il va suivre, mais sans se lier dans le détail, puisqu'on va engager un processus de consultation. Moi, j'ai exprimé à plusieurs reprises dans quelle ligne et je suis convaincu que les policiers le savent. C'est vrai qu'on nous a demandé une formation accrue pour devenir enquêteur, mais il faudra prévoir que cette formation accrue puisse être donnée, qu'il y ait aussi des équivalences qui soient peut-être établies pour l'expérience, que cela peut prendre un certain temps, toutes des choses que l'on ne doit pas... Je pense qu'il ne vaut pas la peine que l'on discute dans une assemblée délibérante... Imaginez, quand vous voyez la complexité de ces règlements, les modifications qu'il faut leur apporter et le temps que le législateur passe à approuver cinq ou six lignes d'un article de loi, parce qu'il aura une bien plus grande influence qu'un règlement, on ne peut pas passer tout ce temps-là à établir des règlements, ce serait trop, et mieux vaut consulter les bonnes personnes qui vont préparer des choses qui expriment parfois les consensus ou qui donnent des orientations.

Mais ce dont nous discutons actuellement, ce n'est pas, encore une fois, ce que sera le règlement. Mais tout le monde reconnaît qu'il est nécessaire que le gouvernement puisse réglementer la formation, quel qu'il soit, quel que soit le gouvernement. D'ailleurs, le rapport Corbo II a été écrit et produit avant les élections générales. Donc, ce qu'il recommandait de donner... que le gouvernement se donne le pouvoir de réglementer la formation, ce n'était pas à l'avantage d'un parti politique ou de l'autre, il estimait que, quel que soit le parti politique qui occupe, qui a le pouvoir, le gouvernement ait ce pouvoir de réglementer la formation des enquêteurs. C'est tout ce que nous demandons ce soir.

Et, quant au reste, j'ai donné déjà des grandes indications. Ce n'était pas nécessaire de les donner, mais elles sont connues. Et je ne pense pas que ce soit nécessaire d'entrer dans les détails et je n'avais pas préparé, par conséquent, de notes en conséquence, mais vous pouvez être certain que le jour où on discutera – parce qu'on pourra discuter ensemble du règlement sur la formation – je serai parfaitement prêt à répondre avec précision, mais ce n'est pas le temps de le faire aujourd'hui.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Chomedey, il vous reste quatre minutes.

(22 h 40)

M. Mulcair: M. le Président, je tiens à rassurer le ministre sur une chose: sauf erreur, je n'ai entendu personne dire qu'on ne pouvait pas faire ces choses-là dans un règlement et qu'il fallait tout mettre ce genre de détails dans la loi. Le ministre fait référence à une critique valable, à son avis, en ce qui concerne le fait de voter un projet de loi qui ne contiendrait pas assez d'informations qui permettraient à un parlementaire, même bien intentionné et bien informé, peu importe, de savoir ce sur quoi il est en train de voter. Donc, je ne suis pas en train de dire que l'article 1, au mois de juin 1999, devrait commencer à dire: Pour occuper la fonction d'enquêteur dans tel domaine, ça prend un Baccalauréat en psychologie ou un truc comme ça, ce n'est pas là où je suis.

Ce que je suis en train de dire, c'est que le ministre est en train de nous proposer une coquille vide. La coquille, c'est une loi modifiant la Loi sur la police. Il nous dit: Fais-moi confiance que le règlement n'exigerait pas, n'aurait pas exigé l'intervention des législateurs, ça exige juste l'intervention de l'État. Il nous demande de lui faire confiance là-dessus. Moi, je lui demande de nous faire confiance quand on lui dit ceci: On ne demande pas mieux que de le croire, mais encore est-il qu'il faudrait qu'il nous montre... Il nous fait des références on ne peut plus vagues au rapport de M. Corbo; personne n'a dit qu'il n'était pas respecté ou respectable. C'est cette tendance à dire: M. Corbo, qui est très respecté... Comme si on était en train de mettre en doute sa propre crédibilité, M. Corbo. Loin de nous cette idée-là, M. le Président, ce qu'on est en train de dire, c'est que, si le ministre est vraiment convaincu qu'on va se persuader facilement que tout ça, c'est le genre de détails qui doit aller dans un règlement, bien, qu'il le montre.

On n'est pas en train de dire non plus qu'on va adopter ici, en commission parlementaire, mais on peut donner des mandats d'initiative. Les mandats d'initiative, vous le savez peut-être mieux que quiconque, M. le Président, mais c'est issu de grands débats qui ont eu lieu avant les élections générales de 1994. Durant toute cette période-là, la question était souvent autour des règlements, puis la question était de savoir, bon, comment est-ce que les parlementaires à qui on demande de faire des lois peuvent se sentir rassurés qu'ils ne sont pas en train de donner un chèque en blanc au gouvernement, c'est-à-dire aux membres d'un Conseil des ministres, et la manière de le faire, c'est de mettre les cartes sur la table, dire: Écoutez, voici la charpente, voici un projet. Même si le gouvernement a le droit le plus strict de le modifier en suivant les règles de la Loi sur les règlements par après, au moins, on saura un peu dans quoi on veut nous embarquer, puis, à ce moment-là, personne ne dirait: Bien non, ce n'est pas correct, c'est juste une charpente, on n'a aucune idée de l'architecture de l'affaire. Non, on dirait: Bien oui, c'est le genre de chose qui peut se faire par règlement, mais montre-nous le. C'est ça, notre propos, ce soir, M. le Président, du côté de l'opposition. Merci.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Merci, M. le député de Chomedey.

M. Dupuis: Vous me permettez, M. le Président?

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Oui, M. le député de Saint-Laurent, il vous reste...

M. Dupuis: 50 secondes?

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): ...55 secondes pour être plus précis.

M. Dupuis: Ah bon. Alors, écoutez, le ministre nous dit: Moi, je n'avais pas préparé de notes sur ce que requérait la qualité requise d'enquêteur. Ce n'est pas parce qu'on l'a pris par surprise, là, ça démontre un petit peu le genre d'attitude qu'il a à l'égard de l'opposition. Dès l'adoption de principe, dès le discours sur l'adoption de principe du projet de loi n° 44, je lui ai indiqué que, quand on allait aller à l'étude article par article pour étudier le projet de loi n° 44, on allait lui poser des questions sur les qualités qu'il estimait être requises pour devenir enquêteur dans un corps de police. On le lui a dit. Je lui ai dit: M. le ministre, ça ne sert à rien de déposer un article dans lequel vous allez vous donner le pouvoir de réglementer si vous ne nous donnez pas d'indications sur ce que vous entendez mettre dans le règlement, parce qu'on ne veut pas faire cet acte de foi là. Alors donc, il n'a pas préparé de notes malgré le fait qu'il savait – c'est ce que je retiens – qu'on allait lui poser des questions. Ça dénote le genre d'attitude que le ministre a à l'égard de l'opposition, à l'égard des questions qui peuvent lui être posées par l'opposition et ça dénote le genre d'attitude de ce gouvernement-là à l'égard de l'opposition...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): En terminant, M. le député.

M. Dupuis: ...et à l'égard des gens que représente l'opposition, qui sont, pour l'opposition officielle, 43 % des électeurs, et, pour les électeurs qui ont voté pour l'autre parti indépendant, ce qui donne une majorité de plus de 50 % qui n'ont pas voté pour ce gouvernement-là. Mais, pour ce gouvernement-là, ce n'est pas important de les écouter.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Alors, à ce moment-ci, s'il n'y a pas d'autres interventions, je mettrais l'article aux voix. Est-ce que l'article 1...

M. Dupuis: Appel nominal.

M. Mulcair: Il me reste du temps sur l'article 1...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: ... et j'aimerais proposer une modification de l'article 1, M. le Président. Bill n° 44, An Act to amend the Police Act, Section 1 is amended by replacing the words «exercise inquiry functions» by the words «act as an investigator».

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien. Alors pouvez-vous déposer par écrit la proposition d'amendement?

M. Mulcair: C'est fait.

(Consultation)

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Alors, oui, nous allons vous la rendre disponible. À ce moment-ci, il me semble que la proposition d'amendement est recevable. M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: Oui, sur l'amendement, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Sur l'amendement?

M. Mulcair: Oui. Il aurait été possible d'imaginer d'autres solutions de rechange que celle-là, «to exercise inquiry fonctions». Sans vouloir être trop sévère avec des traducteurs qui sont des gens qui ont une excellente formation et qui essaient autant que faire se peut, mais, quand on a une session avec 75 projets de loi, grosso modo, ce n'est pas toujours facile de suivre le rythme avec une rédaction qui puisse satisfaire à toutes ces exigences, et dire «to exercise inquiry fonctions» est ce qu'on appelle en traduction... c'est ce qu'on appelle un calque. C'est tout simplement calquer la version française qui dit «exercer la fonction d'enquête». Ce n'est pas comme ça qu'on le dirait dans un anglais parlé naturellement, on dirait justement, comme je le propose dans la modification, «to act as an investigator». Et, si on voulait vraiment rester avec le verbe et pas avec la fonction, on aurait pu aussi bien dire «to carry out investigations», ça aurait été une autre possibilité. En tout cas, il y a diverses possibilités qui se présentent.

Et je me permets aussi de dire que je ne suis pas absolument rassuré que le mot «within» est le mieux choisi, parce que le «within», en anglais, a tendance à être un petit peu plus spécifique, «à l'intérieur de». Et, je m'explique, on est en train, dans la version française, de dire «déterminer les qualités requises pour exercer la fonction d'enquête dans un corps de police». On se comprend? Dire «dans un corps de police», dans ce temps-là, on comprend ce que ça veut dire en français: on ne peut pas être membre d'un corps de police et exercer une fonction d'enquête au sein de ce corps de police, alors que le «within», en langue anglaise, est un peu plus spécifique, et ça peut vouloir dire, ça pourrait être interprété comme voulant dire justement que personne ne peut enquêter sur ce qui se passe à l'intérieur d'un corps de police. Je ne crois pas que c'est l'intention du ministre, alors il va falloir regarder non seulement comment on le définit, mais il va falloir aussi travailler sur cette notion de «within». Je peux peut-être faire une modification une fois qu'on a traité de la première et parler de «as part of». Alors, c'est ça pour notre première modification.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien. Toujours, donc, sur cette proposition d'amendement, M. le député de Saint-Laurent et porte-parole de l'opposition officielle.

M. Dupuis: Oui, sur l'amendement. L'amendement est d'ailleurs extrêmement pertinent parce que, compte tenu des droits fondamentaux, compte tenu de la jurisprudence, compte tenu de la Charte canadienne des droits, c'est exactement ça qu'on ne veut pas qu'un enquêteur au sein d'un corps de police fasse, des «inquiries» auprès soit de suspects ou auprès de témoins dans des enquêtes.

Et, moi, j'ai noté, parce que j'ai eu l'occasion d'assister à la commission parlementaire qui étudiait le projet de loi dont je ne me souviens pas du numéro, M. le Président, je l'avoue à ma courte honte, mais qui étudiait les dispositions permettant aux conjoints de même sexe d'avoir accès à certaines dispositions...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Le projet n° 32, je crois, 32.

M. Dupuis: Pardon? Trente-deux. C'est vous qui étiez là, je pense, d'ailleurs? Non? Ce n'est pas vous qui l'avez présidée? Et j'ai noté que... Ah oui, vous étiez là, tous, nous avons tous noté ensemble que la version anglaise du projet de loi était totalement inadéquate, et, tout au cours de la soirée, lorsque nous avons regardé la version anglaise du projet de loi, on a été obligé d'apporter des modifications parce que c'était traduit, comme le dit si bien le député de Chomedey, de façon littérale totale, et ça changeait le sens.

(22 h 50)

Dans le cas qui nous occupe, la personne... Et je ne veux pas personnaliser le débat, mais la personne qui a employé l'expression «inquiry» est allée à l'encontre de toutes les tendances jurisprudentielles au sujet de ce qu'on veut éviter qu'un enquêteur de police fasse lorsqu'il tient une enquête. Il y a des droits fondamentaux à respecter, il y a le droit au silence qui doit être respecté, et, quand on fait des «inquiries» auprès d'individus, c'est qu'on pose des questions et qu'on passe outre aux droits fondamentaux auxquels ils ont droit.

Alors, de toute évidence, on ne peut pas accepter que le mot «inquiries», dans la version anglaise du projet de loi, subsiste, et il va très certainement falloir... Et profitons de l'occasion qui nous est donnée maintenant pour parfaire la version anglaise, mais je me souviens que cette commission s'est conduite à la fois du côté ministériel, comme du côté de l'opposition officielle, de façon absolument correcte en ce qui concerne la version anglaise du projet de loi qui était à l'étude, et là je commence à comprendre... Et M. le député de Saint-Jean va être d'accord avec moi qu'il va falloir systématiquement, jusqu'à temps que le problème soit réglé pour la traduction des projets de loi, obtenir les versions anglaises des projets de loi, parce que ça doit être la même chose partout, c'est le deuxième, là, où le sens des mots n'est vraiment pas respecté dans la version anglaise.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le ministre, toujours sur l'amendement?

M. Ménard: Sur l'amendement, je suis très sensible aux représentations du député de Chomedey qui, je pense, maîtrise mieux l'anglais que moi. Cependant, si j'avais un texte de loi qui me disait «to act as an investigator within a police force»...

M. Mulcair: An investigator.

M. Ménard: C'est «tor» qu'il faut dire?

M. Mulcair: Oui, «act as an investigator».

M. Ménard: Ah! On dit «tor»? O.K. Correct. «To act as an investigator within a police force», j'aurais tendance à traduire «d'agir comme enquêteur à l'intérieur d'une force de police».

M. Mulcair: Exact.

M. Ménard: Mais ça n'est pas ce que nous voulons déterminer...

M. Mulcair: D'accord.

M. Ménard: ...ce que nous voulons déterminer, c'est «conduire une enquête».

M. Mulcair: Alors, à ce moment-là, il faut mettre «carry out investigations».

M. Ménard: O.K. «Carry out investigations».

M. Mulcair: Et je serais prêt à faire verbalement cet amendement.

M. Ménard: Ça va. Si vous êtes d'accord avec ça, on pourrait le changer pour ça. Maintenant, sur le mot «inquiry», je me trompe peut-être, mais il me semble avoir vu souvent «Royal Commission of Enquiry».

M. Mulcair: ...

M. Ménard: Juste un instant. Est-ce que je me trompe que c'était «enquiry», e-n-q-u-i-r-y et non pas i-n? C'est i-n?

M. Mulcair: Oui.

M. Ménard: O.K. Maintenant, si je vais dans «inquiry»... Bien, là, il y en a peut-être d'autres meilleurs, mais le Robert & Collins senior, français: «Inquiry» se traduit par «demande de renseignements». «To make inquiries about something [...] se renseigner sur quelqu'un [...] demander des renseignements [...] renseignements pris...» Bon. Tandis qu'«investigator»...

M. Mulcair: «Tion».

M. Ménard: «Tion»? Ça devrait être plus que ça. Parce que remarquez que «inquiry», ici, probablement, couvre plus facilement le travail du patrouilleur qui est appelé sur la scène d'un crime et qui, évidemment, commence «a simple inquiry», ce que nous voulons lui laisser faire, même s'il n'est pas enquêteur, hein, prendre des renseignements.

M. Dupuis: Absolument pas. Absolument pas, voyons donc!

M. Ménard: Oui, oui.

M. Dupuis: Aie! Absolument pas, il n'a pas le droit de prendre des renseignements auprès de l'accusé sans lui donner ses... sans le forcer à respecter les droits fondamentaux de l'accusé. Il n'a pas le droit de faire ça.

M. Ménard: Mais tant qu'il n'y a pas encore d'accusé ni de suspect...

M. Dupuis: Non, non, je comprends, mais il n'a pas le droit d'interroger comme ça, sans donner...

M. Ménard: Mais non, je ne parle pas de l'accusé, là. Il arrive sur les lieux... Il y a eu un vol quelque part, la personne appelle la police, il arrive sur les lieux, il commence «to inquire».

M. Dupuis: Non, il commence «an investigation».

M. Mulcair: Bien oui.

M. Dupuis: «An investigation», parce qu'il ne sait pas ce qu'il va trouver, puis ça se peut que la première personne qu'il trouve, ce soit un suspect ou que ce soit une personne qui soit éventuellement accusée.

M. Ménard: Mais vous avez, au fond, raison, «investigation» se traduit par «examen, enquête». Et puis on met bien, entre parenthèses, «crime», c'est-à-dire examen... Même que, si c'était entre parenthèses...

M. Mulcair: «Police investigation».

M. Ménard: Ah non! O.K. Point-virgule. O.K. «Crime» entre parenthèses, «enquête». Donc, vous avez raison, c'est la... O.K. Alors, on est d'accord avec...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Donc, à ce moment-ci, M. le député de Chomedey...

M. Ménard: Alors, «to carry out»...

M. Mulcair: Je retire l'amendement.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Vous retirez l'amendement.

M. Ménard: Est-ce que vous êtes d'accord avec «investigation functions»?

M. Mulcair: Non, pas «functions», c'est un calque. Ça ne veut rien dire en anglais. Le mot «functions» est en train d'être jammé là-dedans. Ça ne veut strictement rien dire, «functions». «To carry out investigations», ça veut dire quelque chose. «Investigation functions», ça ne veut rien dire en anglais. Ça ne veut rien, rien, rien dire, faites-moi confiance là-dessus, c'est dépourvu de sens. «Investigation functions», ça ne veut rien dire.

Ce n'est pas parce que le mot est utilisé dans la version française qu'on a besoin de le traduire. «An investigation», c'est une fonction d'enquête. «To carry out investigations», c'est tout ce qui est en rapport avec ça, c'est toutes les fonctions qui entourent ça. C'est juste une manière de rendre la même réalité. Ce n'est pas parce que le mot «function» existe et que le mot «fonction» existe qu'on est obligé de le «scotch taper» ici, dans l'article.

M. Ménard: Je pense que vous avez raison. Moi, j'aurais eu, c'est drôle, tendance à écrire «pour conduire une enquête dans un corps de police», mais disons que je vais le laisser en français tel qu'il est. Mais «to carry out investigations» exprime correctement ce que nous voulons. Bien, vous pouvez, si je comprends bien, ne pas être d'accord avec l'article, mais nous aider à l'améliorer.

M. Mulcair: Bien, ça fait partie de la fonction de député.

M. Ménard: De l'opposition.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): À ce moment-ci, nous allons donc tenir compte de la modification à l'amendement...

M. Mulcair: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): ...pour tenir compte de l'expression suivante: «to carry out investigation».

M. Mulcair: Exactement. Les mots «carry out investigations»

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Au pluriel.

M. Mulcair: ...remplaceraient les mots «exercice inquiry functions». Ces trois mots sont remplacés par les trois autres. Maintenant, il nous reste... Je vois qu'il y a une personne qui semble s'intéresser un petit peu plus à la version anglaise, je me permets de souligner une préoccupation que j'ai frôlée tantôt, et c'est à l'égard du mot «within», parce que «for», ça pourrait être très bien ça, «to carry out investigations for a police force», or «as part of a police force», or «as a member of the police force». Ce qu'on ne veut pas que ça dise, l'article 1, c'est de faire des enquêtes sur ce qui se passe à l'interne.

M. Ménard: Vous avez raison là-dessus, ça, c'est certain. Je suis d'accord avec ça.

M. Mulcair: Alors, on peut dire «to carry out investigations as a member of a police force».

Une voix: En tant que membre.

M. Mulcair: En tant que membre.

M. Ménard: Or «for».

M. Mulcair: Or «for».

Une voix: «For a police force».

M. Mulcair: Oui, parce que c'est vrai, s'il travaille pour la Sûreté dans un truc comme Carcajou, c'est «for». S'il vient d'un autre corps de police sans qu'il soit membre de la Sûreté, à ce moment-là, le «for» est peut-être plus large, oui.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Chomedey, est-ce que vous l'intégrez à votre amendement?

M. Mulcair: Oui, on peut justement remplacer les quatre mots suivants, «exercice inquiry functions within», par les mots «carry out investigations for», remplacer les quatre mots par les quatre autres mots.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Alors, je relis donc...

Une voix: L'enquête porte sur le corps de police lui-même?

M. Mulcair: Non, justement pas.

M. Ménard: Non, ce serait «within». Si c'était «whithin», ce serait ça. C'est l'argument du député de Chomedey, et il a raison, je crois.

M. Dupuis: Avec votre permission, peut-être, avec votre consentement, on pourrait peut-être regarder le texte français aussi...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Si vous permettez, est-ce qu'on peut régler la formulation anglaise pour l'instant? On pourrait passer à l'autre ensuite.

M. Dupuis: Absolument.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Donc, l'amendement proposé par le député de Chomedey se lirait ainsi: Section 1 is amended by placing...

M. Mulcair: By replacing.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): ...by replacing the words «exercice inquiry functions within» by the words «carry out investigations for».

M. Mulcair: Exact.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): C'est bien ça? Est-ce qu'il a d'autres interventions sur cette proposition d'amendement? Est-ce que l'amendement est adopté?

M. Mulcair: L'amendement est adopté.

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Bon. Alors, nous passerions maintenant au député de...

M. Ménard: ...on était rendu à demander au vote, je crois. Je le soumets respectueusement, là.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Avant de passer au vote, nous avons d'autres propositions d'amendement sur la version française. M. le député Saint-Laurent à ce moment-ci?

(23 heures)

M. Dupuis: Je veux demander le consentement du groupe ministériel pour discuter, mais on peut même fixer le temps, on ne va pas s'étendre trop longtemps sur la version française. Parce que le ministre a fait une ouverture, et, simplement pour indiquer que ça pourrait ne pas être long, il m'apparaît que «pour exercer la fonction d'enquête dans un corps de police» peut porter à confusion effectivement, comme le député de Chapleau l'a laissé entendre tantôt, et, comme le ministre semblait aussi le considérer, on pourrait remplacer par «pour exercer la fonction d'enquêteur au sein d'un corps de police», ce qui donnerait le sens exact de ce que, il me semble, le ministre souhaite indiquer et qui empêcherait de porter à confusion. Parce que «pour exercer la fonction d'enquête dans un corps de police» peut porter à confusion, on peut penser qu'il s'agit... Nous, on le sait que ce n'est pas ça, là, mais on peut penser qu'il s'agirait d'effectuer une enquête dans un corps de police, alors qu'on précise tout à fait le sens quand on dit «déterminer les qualités requises pour exercer la fonction d'enquêteur au sein d'un corps de police». Ce n'est pas compliqué, c'est simple et ça dit exactement ce que ça veut dire, me semble-t-il.

M. Ménard: ...inquiétude, M. le député de Saint-Laurent, c'est de tomber exactement dans le piège dans lequel on était en train de tomber dans le texte anglais. D'enquêteur sur...

Une voix: ...enquête sur elle-même.

M. Dupuis: Au sein de.

M. Ménard: Au sein d'un...

M. Dupuis: Ce que je suggère, c'est qu'on dise «fonction d'enquêteur au sein d'un corps de police». Voici les qualités requises que ça prendra pour occuper la fonction d'enquêteur au sein d'un corps de police.

M. Ménard: Je crois que «au sein» risque d'être interprété plus restrictivement que «dans un corps de police». Il pourrait être interprété comme voulant dire que ce sont des enquêteurs qui enquêtent sur les crimes qui sont commis à l'intérieur du corps de police, donnant exactement la... Et là la traduction anglaise, il faudra revenir à la traduction anglaise «within». C'est ça, le risque qu'on court.

M. Dupuis: Avez-vous une objection à «exercer la fonction d'enquêteur dans un corps de police»?

(Consultation)

M. Ménard: Vraiment, l'important, nous estimons, pour donner le pouvoir que l'on veut donner – après ça on pourra discuter si on doit le donner ou si on ne doit pas le donner, là – il faut qu'on s'attache à l'action d'enquêter et non à l'état d'enquêteur. Parce que, justement, on veut que certains types d'enquêtes, celles qui sont déterminées par règlement, soient exécutées par des gens qui ont telle formation, telles qualités. Donc, c'est pour ça qu'on utilise les termes de «faire une enquête» plutôt que d'«être un enquêteur». Voyez-vous?

Par exemple, je peux vous le dire, c'est une des choses que l'on veut – puis l'exemple, je ne veux tirer les larmes de personne, mais je donne cet exemple parce que tout le monde le comprend très bien – une enquête sur une agression sexuelle, sauf exception, sauf les constations qui doivent être faites dans un cas de flagrant délit, etc., on veut que ces enquêtes soient menées par des enquêteurs qui ont reçu une formation particulière. Puis il y a certains interrogatoires, certains types d'interrogatoires qui devront être menés par des enquêteurs qui ont reçu une formation particulière.

M. Dupuis: Vous allez avoir du fun devant les tribunaux criminels tantôt.

M. Ménard: Ah!

M. Dupuis: M. le Président, avec votre permission, avec le consentement du ministre...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député.

M. Dupuis: ...vous allez avoir du fun tantôt devant les tribunaux criminels quand une enquête va avoir été commencée par un enquêteur qui ne comporte pas les qualités requises par votre règlement et que les avocats de défense vont contester les preuves qui ont été recueillies parce que l'enquêteur n'a pas la compétence qui est prévue par le règlement.

Honnêtement, M. le ministre, là, je ne le dis pas pour vous embêter, mais je sais que vous avez autant... Vous avez pratiqué, comme moi, devant les tribunaux criminels. Vous savez quelle est l'imagination des plaideurs. Honnêtement, vous êtes en train... Je vous le dis, là, ça vaudrait la peine que vous réfléchissiez à ça parce que vous vous achetez des problèmes.

M. Ménard: Je pourrais vous parler de ça encore longtemps puis engager une autre discussion, mais tenons-nous-en, si vous voulez, juste à la suggestion. Nous préférons «fonction d'enquête» à – qu'est-ce que vous proposiez, là? – ...

M. Dupuis: «Fonction d'enquêteur».

M. Ménard: ...«fonction d'enquêteur».

M. Dupuis: C'est votre choix. M. le député de Chapleau.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Alors, à ce moment-ci, sur l'article en question, M. le député de Chapleau, il vous reste 13 minutes pour intervenir.

M. Pelletier (Chapleau): Alors, ce serait une proposition d'amendement qui chercherait à concilier ce dont j'avais fait mention plus tôt, c'est-à-dire l'ambiguïté qui semblait donc exister dans la proposition d'amendement actuelle puis, d'autre part, ce que j'ai entendu des conversations qui ont eu cours au cours des dernières minutes.

Alors, l'article, donc, 6.1 de la Loi de police serait modifié de façon à ce que le paragraphe 6° se lise comme suit: «déterminer les qualités requises, selon les cas, afin de conduire une enquête pour un corps de police, – et, après ça, l'article continue bien entendu – ainsi que...», ainsi de suite.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Est-ce que vous pourrez nous déposer votre amendement, s'il vous plaît?

M. Pelletier (Chapleau): Oui.

(Consultation)

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Nous allons suspendre quelques secondes ou quelques instants. Merci.

(Suspension de la séance à 23 h 7)

(Reprise à 23 h 16)

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): La commission des institutions reprend ses travaux. Nous en étions donc à un amendement proposé par le député de Chapleau, que je vais vous lire maintenant. Donc, il s'agit de l'article 1: Remplacer les mots «pour exercer la fonction d'enquête dans un corps de police, dans les cas déterminés par le règlement,» par les mots «, selon le cas, afin...

Une voix: Selon les cas.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): ... – pardon, excusez-moi – donc par les mots «, selon les cas, afin de conduire une enquête pour un corps de police,». Donc, je répète, par les mots «, selon les cas, afin de conduire une enquête pour un corps de police,».

M. le député de Chapleau, sur l'amendement.

M. Pelletier (Chapleau): Oui. Je veux tout simplement dire ceci. Comme vous pouvez le voir, c'est quand même une formule qui est allégée par rapport à ce qui existait auparavant, d'une part. D'autre part, je pense qu'elle rejoint les propos qu'a tenus le ministre il y a quelques minutes, voulant que sa préférence allait pour une formulation où on fait allusion que quelqu'un conduit une enquête pour un corps de police. Et, avec «selon les cas», qui est entre virgules, il est très clair que l'on donne le pouvoir d'établir différents cas dans le pouvoir réglementaire et que les qualités requises pour conduire l'enquête vont varier selon les cas, ce qui implique une classification et ce qui implique que les qualités requises soient intimement reliées à la classification en question. Voilà.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Saint-Laurent.

M. Dupuis: M. le Président, j'ai un problème gordien qui est le suivant. Je trouve que le député de Chapleau fait preuve d'extrêmement de compétence en déposant l'amendement qu'il a déposé, mais, sur le fond de l'amendement, je ne peux pas être d'accord, parce que, moi, j'en ai contre justement le fait que le ministre, dans le règlement qu'il va faire adopter éventuellement, souhaite avoir différents niveaux de formation pour différents types d'enquêtes.

Ça n'a aucun sens. Ça ne résiste pas et ça ne résistera pas à l'analyse. Ça ne rencontre pas la réalité de ce qui se passe dans le milieu. Ça va occasionner des problèmes devant les tribunaux, ça va occasionner des problèmes dans la fixation des salaires des enquêteurs, ça va occasionner des problèmes avec les différents syndicats de policiers. Ça n'a aucun sens. Pensez, là, deux secondes et quart, vous allez avoir, à l'intérieur d'un corps de police, des gens qui vont posséder les qualités requises pour faire des types d'enquêtes...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Saint-Laurent...

M. Dupuis: Oui, sur l'amendement.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): ...ici on est sur l'amendement.

M. Dupuis: Bien oui, je parle sur l'amendement, absolument.

M. Pelletier (Chapleau): Il est contre mon amendement.

M. Dupuis: Je suis contre son amendement. Je m'exprime.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): O.K. Bon, allez-y. Excusez-moi.

(23 h 20)

M. Dupuis: Je m'exprime, je suis contre.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): O.K. Ha, ha, ha! Allez-y.

M. Dupuis: Je m'exprime, je suis contre.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: C'est ce que je comprends, là.

M. Ménard: Un point d'interrogation, peut-être, mais faut-il qu'un amendement soit secondé, soit appuyé?

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Non, non.

M. Ménard: Non?

Une voix: Non.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): J'ai à en apprécier la recevabilité, et il m'apparaît manifestement recevable. M. le député de Saint-Laurent.

M. Ménard: Ha, ha, ha!

M. Dupuis: Non, mais, moi, je suis content que le député de Chapleau l'ait déposé, cet amendement-là, parce qu'il nous permet de mieux comprendre ce que le ministre voulait dire dans les réponses aux questions qu'on lui a posées et dans les questions qu'on lui a demandées, auxquelles il avait de la difficulté à répondre en début de soirée. Mais, finalement, à force d'insister, il a réussi à nous donner une indication de ce qu'il voulait entendre. Et là ce qui est clair, c'est que ce que le député de Chapleau apporte comme amendement reflète la volonté exacte de ce que le ministre nous a indiqué qu'il voulait éventuellement mettre dans son règlement.

Alors, je répète, le ministre nous a indiqué qu'il souhaitait qu'éventuellement il y ait différents types de formation pour différents types d'enquêtes. Il nous a bien dit, je l'ai écouté attentivement, par exemple dans le cas des enquêtes pour agression sexuelle, ça va prendre un type de formation particulier et ce ne sont que les gens qui auront reçu cette formation qui pourront faire ce genre d'enquête. Donc, dans d'autres cas, ça serait un autre type de formation qui serait requis pour faire d'autres types d'enquêtes.

Je répète, je ne peux pas être pour l'amendement. Ça n'a pas de bon sens, ce que le ministre veut faire. C'est pour ça que je vous disais en début d'intervention, M. le ministre, que ça serait utile de consulter à l'occasion les associations de policiers, quelles qu'elles soient, dans ce cas-là, parce que je pense que vous ne déposez pas ce projet de loi et l'article 6.1 uniquement pour la Sûreté du Québec, mais pour tous les corps de police au Québec. Alors, ça va être utile de consulter les syndicats.

Parce que, entre vous et moi, là, l'enquêteur qui va avoir la meilleure... La formation requise pour effectuer des enquêtes de meurtre prémédité va certainement être plus importante que la formation requise pour enquêter des voies de fait simples, ou alors des facultés affaiblies, ou alors des délits de fuite. Je veux dire, je pense qu'on peut s'entendre là-dessus, là, selon votre schème de pensée, probablement que l'enquêteur qui va effectuer des enquêtes de meurtre va devoir posséder la formation maximum, le type A, la catégorie A d'enquêteur, comme si on détenait un permis de conduire sur lequel permis de conduire on a le droit de conduire le maximum de véhicules automobiles, la catégorie A, la catégorie B, la catégorie C, la catégorie D. Ces enquêteurs-là, là, ils vont vouloir être payés puis probablement qu'ils vont vouloir faire une différence à l'intérieur du corps de police entre les enquêteurs qui possèdent le maximum de la formation, les enquêteurs qui possèdent la formation d'autres types. Ils vont exiger évidemment des salaires différents. Mais là ça se fait...

Ça, là, il faudrait que vous commenciez à leur en parler, parce que vous allez avoir de la misère à la mettre en application, votre réforme, si vous ne faites pas ça. Alors, ça, c'est le premier problème auquel vous allez avoir à faire face, ce n'est peut-être pas le premier, mais c'est un des problèmes auxquels vous allez avoir à faire face, c'est celui des salaires et c'est celui des négociations aussi avec les différents syndicats des différentes associations policières si vous introduisez un article tel.

L'autre chose. Imaginez un accusé qui fait face à une preuve qui a été recueillie... Parce que c'est bien beau, là, de faire un règlement puis de faire de la théorie, mais, sur le terrain, là, les affaires se passent pas mal plus rapidement qu'on pense. Vous le savez, vous avez pratiqué en droit criminel, j'ai pratiqué en droit criminel, votre sous-ministre aux affaires policières a pratiqué en droit criminel, il y en a peut-être d'autres qui ont pratiqué en droit criminel ici, là, il n'est pas évident, quand il arrive un incident, un acte criminel, la commission d'un acte criminel, qu'on va être capable, dans toutes les occasions, dans toutes les circonstances, surtout quand l'infraction se continue et se perpétue, d'avoir l'enquêteur sous la main qui a la formation équivalente au type d'acte criminel qui vient d'être commis, à la condition qu'on le sache. Souvent, quand on commence une enquête criminelle – Me Racicot le sait – on ne sait pas exactement à quel type de crime on a affaire, d'une part. On ne sait pas non plus quelles accusations on va porter. Et on ne sait pas quel type... Donc, on ne saura pas, en fonction des différents formations que vous allez exiger, quel type d'enquêteur peut faire l'enquête.

Alors, imaginez un accusé qui est devant le tribunal et au sujet duquel on veut déposer une preuve qui a été recueillie par un enquêteur qui ne possède pas la formation équivalente dans votre règlement à celle pour le crime pour lequel on l'accuse ou à celle pour laquelle l'enquête a été effectuée. Alors, il va contester l'admissibilité de la preuve. C'est bien évident.

Là, évidemment, c'est par l'absurde que j'essaie d'amener le ministre à reconsidérer son plan d'exiger différents niveaux de formation par rapport à différents types d'enquêtes. Je veux dire, moi, je pense que le ministre pourrait facilement, très facilement... Ou alors c'est parce que c'est improvisé puis il n'y a pas pensé assez, et il est arrivé en commission, à l'étude article par article, avec la seule idée d'obtenir le pouvoir de réglementer en se disant: On verra bien ce qu'on mettra dans le règlement après. Ce n'est pas important. Je vais aller soutirer le pouvoir de réglementer, puis on verra après, on prendra le temps d'y réfléchir. Et là, poussé par l'opposition à répondre à des questions sur le genre de qualités requises pour devenir enquêteur, bien il a été obligé de répondre puis il s'est fait prendre. Il avait une idée qu'il n'a peut-être pas eu le temps de discuter avec ses conseillers puis il nous a donné cette idée-là, mais elle ne tient pas la route, elle ne tiendra pas la route, à mon avis, à mon humble avis, et le ministre s'achète un paquet de problèmes.

Parlez-en demain, juste pour consulter rapidement, à des gens que vous... Parlez-en à M. Prud'Homme. Demandez à M. Prud'Homme, le président de la Fédération des policiers, parlez-lui-en. Demandez-lui si c'est applicable, du point de vue strictement syndical, d'un point de vue strictement... Ça peut être applicable d'un point de vue syndical, mais vous rendez-vous compte des négociations que ça va prendre? Vous rendez-vous compte du temps que ça va prendre pour arriver à une entente là-dessus? Pensez-vous que les policiers vont accepter de se voir imposer l'obligation de subir une formation qui va leur donner un avantage au niveau des enquêtes qu'ils vont pouvoir effectuer sans demander, sans exiger qu'ils soient payés pour une fois qu'ils vont effectuer le travail? Ça n'a aucun sens.

Si vous êtes prêt à ça, c'est bien, mais vous allez créer, à l'intérieur des corps de police, bien plus de problèmes que vous allez en régler, d'une part. D'autre part, dans les corps de police où le bureau des enquêtes criminelles est restreint... J'ai donné l'exemple de la Sûreté municipale de la Haute-Saint-Charles. On peut donner d'autres exemples d'autres corps de police. Vous en connaissez aussi bien que moi où il n'y a pas beaucoup d'enquêteurs, où le bureau des enquêtes criminelles ne contient pas beaucoup d'enquêteurs. Il y a un, deux ou trois enquêteurs. Il va falloir que ces gens-là aient la formation maximum pour être capables de faire face à toutes les éventualités et à tout genre de crimes qui peuvent se commettre dans leur territoire. Vous ne pourrez pas accepter que, dans un corps de police comme la Sûreté municipale de la Haute-Saint-Charles, vous ayez des enquêteurs qui n'aient pas la formation maximum, parce que, sans ça, vous ne leur donnez pas les possibilités d'effectuer toutes les enquêtes qui peuvent survenir sur leur territoire, à moins que vous ayez en plus l'idée d'empêcher que certains corps de police plus petits ne puissent ou n'aient... qu'il leur soit défendu de faire certains types d'enquêtes. Mais là, là, on s'embarque dans une discussion qui est... Il y a des problèmes à régler, là, chez les policiers, plus urgents que celui-là.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le ministre.

M. Ménard: En tout respect pour les efforts déployés pour chercher à clarifier ce que nous voulions mettre, je pense que le texte qui nous est proposé est beaucoup plus dangereux que celui qu'il veut remplacer et prête plus à confusion.

Supposons que ce soit ce texte-ci plutôt que celui qui a été proposé. J'ai bien peur que les gens qui liraient «déterminer les qualités requises, selon les cas» auraient l'impression que les cas s'appliquent aux personnes qui ont les qualités requises – je pense que, là, il y a un réel sujet – et, ensuite «afin de conduire une enquête pour un corps de police», que cela couvre également ou enfin ouvre la possibilité que certains enquêteurs puissent enquêter pour un corps de police sans en être membres.

(23 h 30)

Donc, je pense que ça illustre les nombreuses difficultés que les légistes ont rencontrées et me confirme dans la conviction de garder le texte tel qu'il est, même si, effectivement, il n'apparaît pas être du français le plus élégant. À tout le moins nous donne-t-il la certitude qu'il exprime ce que nous voulons réglementer. Que le texte ne soit pas élégant a relativement peu de difficulté. Qu'il soit difficile à lire au premier abord pose assez peu de difficulté. D'abord, je vous signalerais que, hélas, il y a encore trop de lois qui sont difficiles à lire, alors qu'elles auraient pu être écrites dans une meilleure langue. Mais, dans ce cas-ci, la difficulté est dans la nature même parce que les gens qui vont avoir à interpréter cet article-là n'auront à l'interpréter que dans la mesure où le gouvernement décide de l'utiliser et de faire un règlement. Et là les gens qui auront envie de le contester seront les gens qui seront contre le règlement, probablement, contre le règlement lui-même.

Mais je reste convaincu que les cours d'appel, si elles sont appelées à décider d'une contestation du règlement, dans l'analyse détaillée, vont en arriver aux conclusions qui m'ont été suggérées, c'est-à-dire qu'il nous permet de réglementer la formation et l'expérience. Au fond, les qualités, c'est ça, hein. Les qualités requises, ça comprend les deux. Ça comprend formation, expérience équivalente, etc., pour exercer la fonction d'enquête, donc, c'est-à-dire, effectivement, pour mener des enquêtes, pour conduire des enquêtes dans un corps de police. Donc, pas pour un corps de police, mais dans un corps de police. Et donc, exercer la fonction d'enquête quand? Dans les cas qui sont déterminés par le règlement. Un pareil règlement ne limitera pas le pouvoir d'agent de la paix, lequel, d'ailleurs, est déterminé par le Code criminel.

Puis l'objet d'un débat criminel, je le dis en tout respect pour le député Dupuis, mais je pense que... le député de Saint-Laurent, plutôt. Le député Dupuis de Saint-Laurent... Ha, ha, ha! Je le dis en tout respect pour lui, mais les contestations en matière criminelle, elles ne se font pas au moment d'un procès criminel, elles ne se font pas sur quel est l'enquêteur qui avait le droit d'enquêter ou qui n'avait pas le droit d'enquêter en vertu de la loi provinciale, hein. Elles se font en vertu du Code criminel ou de la Charte, etc. Bon.

Alors, je ne crois pas que le texte que nous proposons donne plus d'outils à ceux qui, pour des raisons compréhensibles, ne voudraient pas subir le juste châtiment des actions qu'ils ont commises et qu'ils soient sanctionnés par la loi. Mais, par contre, il va assurer le public que, si les enquêteurs n'ont pas la compétence nécessaire pour mener les enquêtes à bien de façon à ce que les enquêtes faites soient admises par les tribunaux, de façon aussi à ce que les enquêteurs ne blessent pas plus les victimes de certains types d'agressions que nécessaire, et ainsi de suite, eh bien, c'est parce que le gouvernement n'aura pas exercé les pouvoirs que la loi lui donnait, car la loi lui donnera maintenant le pouvoir de déterminer la formation et l'expérience, donc l'ensemble des qualités requises pour exercer ces fonctions.

Donc, en tout respect, et j'apprécie les efforts qui ont été faits, qui ont d'abord été précédés d'efforts... enfin, pas... oui, d'efforts, parce que ça en demandait, très honnêtement, pour comprendre notre point de vue. Et je comprends que le député de Chapleau avait bien compris notre point de vue puis il a voulu l'exprimer, mais je me range derrière l'opinion de mes légistes que le texte actuel nous donne la certitude que nous aurons les pouvoirs dont nous avons besoin. Et, quand je dis «nous», ce n'est pas... enfin, comme gouvernement, et ce serait un autre gouvernement que ce serait la même chose. Et ce n'est pas que notre opinion que nous avons besoin de ces règlements-là, mais c'est l'opinion de plusieurs personnes qui ont étudié la question, dont, au premier chef, M. Claude Corbo dans ses rapports, qui nous dit très clairement: Il faut que le gouvernement se donne le pouvoir de réglementer la formation des enquêteurs.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'amendement?

M. Pelletier (Chapleau): On pourrait toujours changer pour dire que le gouvernement peut déterminer les qualités requises selon les cas afin de conduire une enquête dans un corps de police. Bon.

M. Ménard: Mais là, on aurait le danger de «whithin» tout à l'heure, de conduire une enquête...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Nous sommes néanmoins devant un amendement...

M. Ménard: Oui.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): ...et là j'aimerais qu'on dispose de cet amendement-là. Il est toujours loisible à un membre de la commission d'en présenter un autre ultérieurement, mais nous sommes devant un amendement, tel qu'il a été libellé, là. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'amendement? M. le député de Shefford.

M. Brodeur: Une simple observation, M. le Président. Je me place à la place d'un citoyen qui serait assis en arrière, ici, là, qui écouterait le discours qu'il y a alentour de la table depuis quelques heures. Le ministre vient d'admettre que ce n'est pas le français le plus clair qu'on a dans cet article-là...

M. Ménard: Ni élégant.

M. Brodeur: ...ni élégant, qu'il me dit. M. le Président. Puis vous en avez sûrement été témoin régulièrement, que, souvent, les gens ont moins de respect pour les professions juridiques sous prétexte que c'est des discours d'avocats, c'est des discours de juristes, les gens n'y comprennent rien. Imaginez-vous, ce qu'on dit au ministre ici, là... Pourtant, il y a des éminents juristes alentour de cette table: le ministre a été procureur de la couronne; le député de Saint-Laurent a été procureur de la couronne; le député de Chapleau, c'est un éminent professeur à l'Université d'Ottawa, à la Faculté droit...

Une voix: Et c'est un notaire qui parle. Ha, ha, ha!

M. Brodeur: Et on dit – et le ministre l'avoue, et le ministre sait que la meilleure preuve, c'est l'aveu – que le texte n'est pas clair. Donc, c'est de notre devoir, ici, en tant que législateurs, de clarifier ces textes-là. Et, de l'aveu même du ministre il y a quelques instants, il nous dit qu'on pourrait faire mieux. Moi, je ne comprends pas, M. le Président, puis je me place dans la peau du citoyen qui pourrait nous écouter ce soir, que nous ayons l'occasion de bonifier ou de clarifier un article de loi et puis qu'on ne le fasse pas. Le ministre – je reprends ses paroles – disait il y a quelques instants: Il y a trop de lois qui sont difficiles à lire. Je pense que le ministre l'a dit tantôt, il y a trop de lois qui sont difficiles à lire. Nous sommes à l'étude article par article d'un projet de loi, pourquoi ne prenons-nous...

On pourrait prendre le temps. Il est 23 h 40. J'imagine que les gens ici, à 23 h 40, sont peut-être un peu moins vite pour rédiger un article que tout le monde pourrait comprendre, sauf qu'on discute alentour de la table, ici, depuis des heures, des heures. Je pense que le ministre pourrait faire une ouverture, dire: Écoutez, vos argumentations ont bien du bons sens. Même, il avoue lui-même que l'article, il n'est pas clair. Je demande au ministre, tout simplement: Pourquoi tout cet exercice? Imaginez-vous que vous avez un commettant dans votre bureau de comté, qui a assisté à toute cette discussion-là, qui vous a écouté, qui a entendu vos aveux, vos admissions, puis on lui dit: Bien, on laisserait encore une gang de juristes, une gang d'avocats faire des avocasseries, comme ils disent, puis ils se débrouilleront avec ça. Pourquoi ne pas mettre ça clair immédiatement, M. le ministre? C'est la question que je vous pose tout bonnement. Puis je pense que tout citoyen qui aurait écouté les délibérations de ce soir, qui aurait tout simplement entendu tout ce qui s'est dit alentour de la table... Il y a des aveux, il y a la compréhension que cet article-là n'est pas clair. Pourquoi, M. le Président, est-ce que le ministre... C'est la question que je lui pose, là: Pourquoi ne pas tout simplement dire: Bon, bien, un instant. Pendant qu'on est là, j'ai dit moi-même tantôt que trop de lois ne sont pas claires, pourquoi on ne la met pas claire?

C'est le temps, là. Ce n'est pas quand le projet de loi sera adopté qu'il sera le temps de dire: Oui, mais on aurait dû, à cette époque-là, prendre notre temps, arrêter 15 minutes, une demi-heure, remettre ça à demain puis faire un article qui a du bon sens. Un jour, lorsqu'il y aura une commission d'enquête, peut-être dans une année x, il y aura sûrement un procureur, un autre avocat, M. le Président, qui trouvera le moyen de dire, bon, bien, que l'article 1, ce n'est pas clair puis on va s'en servir pour malmener le gouvernement.

(23 h 40)

Le gouvernement a une chance, M. le Président, là, dès ce soir, de dire: On va donner l'exemple, on va faire marche arrière pour quelques instants, on va se rasseoir, on va réécrire l'article pour qu'il soit écrit de façon compréhensible. Là on dirait qu'on dit: Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué? Mais là on fait très compliqué. Je ne pense pas que ça soit sorcier. Je pense que tout le monde maîtrise relativement bien la langue française, d'autres mieux la langue anglaise, mais on peut faire facilement un article qui est clair. Il s'agit de prendre le temps d'y penser.

Puis ce que je suggère au ministre: il peut peut-être se servir du député de Dubuc, qui est notaire, qui, lui, a rédigé toute sa vie, puis il peut sûrement nous mettre un texte sûrement clair. Donc, autre morale de l'histoire: sûrement que les avocats peuvent s'adjoindre les notaires pour rédiger des textes qui sont clairs. Je voudrais entendre le ministre là-dessus.

M. Ménard: Bon, je dirais tout simplement, en tout respect, que l'amendement proposé pour le remplacer n'est guère plus clair. Or, il s'agit de ça actuellement, dont on discute, c'est l'amendement.

Deuxièmement, je n'ai pas dit qu'il n'était pas clair, j'ai dit qu'il n'était pas élégant. Ce n'est pas pareil. Mais il est certain – et c'est la première qualité d'une loi, c'est d'être certaine – qu'il faut – c'est ce que nous a dit Corbo, c'est ce que nous disent plusieurs personnes, et j'ai cru comprendre que c'était également profondément votre avis – que le gouvernement puisse réglementer la formation des enquêteurs. Il se peut, il est même probable qu'il y aura des résistances. Alors, il faut que le législateur donne au gouvernement le pouvoir de réglementer la formation, les qualités requises pour être enquêteur. Ce texte-là nous le donne. Il a été étudié et réétudié par des juristes, on s'est assuré qu'il nous le donnait. Il était difficile à rédiger. La preuve, c'est que, quand on essaie de le remplacer, on soulève des problèmes qui n'avaient pas été prévus. Et, si des gens si intelligents, faisant ces efforts, arrivent à des textes qui soulèvent d'autres problèmes, c'est donc que le problème était difficile. Mais il a été étudié par plusieurs légistes. Une fois qu'on l'a compris, il est clair.

Et puis enfin, je doute que jamais aucun commettant ne viendra dans mon bureau me parler du paragraphe 6° de l'article 6.1 de la Loi de police, pour la bonne raison que, comme je vous l'ai dit, ce texte de loi n'a d'intérêt pour les gens ordinaires qu'à partir du moment où il y a un règlement sur la formation. Et ce qui va intéresser les gens, c'est le règlement sur la formation. Coudon, qui est-ce qui fait nos enquêtes de police? Quelle formation ont-ils, ces gens-là? C'est ça qui va intéresser les gens. Mais de savoir quelle est la nature du texte qui donne le pouvoir au gouvernement de réglementer la formation des enquêteurs, ce n'est pas ça qui les préoccupe.

Mais ceux qui vont se préoccuper, par exemple, du texte puis qui vont y chercher des virgules, qui vont analyser chaque virgule pour savoir s'ils ne pourraient dire que le règlement est ultra vires de ce qui a été donné, ça, ça va être ceux qui vont avoir un intérêt à contester. Alors, les juristes me disent que ce texte est clair. C'est pourquoi je préfère ne pas l'amender, en exprimant, encore une fois, toute mon appréciation pour ceux qui ont voulu le comprendre. L'objectif que nous poursuivions, même s'ils n'étaient pas d'accord avec cet objectif, est pour l'améliorer. Mais je préfère m'en tenir à l'opinion de mes juristes.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Shefford, toujours sur l'amendement.

M. Brodeur: Oui, toujours sur l'amendement, et toujours sur une question de clarté. La réponse du ministre me fait plutôt penser à autre chose. C'est une question d'attitude...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Tout en étant dans le sujet, bien sûr.

M. Brodeur: Tout en étant dans le sujet...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Vous pouvez penser à un autre sujet, mais...

M. Brodeur: Non, non, question d'attitude. Le sujet, on parle d'amendement, on parle de clarté de l'article 1. Tout simplement une question d'attitude. Si chaque ministre puis si le gouvernement dans chacune de ses lois agit de cette façon-là, y va de cette attitude-là, ça fait en sorte qu'on a une législation générale assez floue. Je disais tantôt: Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué?

Il existe un Comité de législation. Est-ce que tous ces projets de loi là sont passés au Comité de législation? Est-ce qu'il existe pour le vrai, ou c'est juste pour la forme qu'il existe un Comité de législation? Lorsqu'on s'aperçoit qu'il y a des articles de cette sorte-là... Parce que je réfère à l'article 1, mais j'ai fait d'autres commissions parlementaires la semaine dernière, puis on a trouvé dans chaque projet de loi des articles de ce genre-là, où l'attitude du gouvernement nous dénote, en fin de compte, je dirais, un manque de respect pour la population. On fait des choses compliquées.

Le ministre disait, à la blague, tantôt: Il n'y a pas un commettant qui va venir dans mon bureau me parler de l'article 1. Moi, j'aimerais ça passer ça dans mon comté, passer ça à tout le monde, puis je mettrais au défi pour voir – il y a 70 000 personnes dans mon comté, à peu près – combien pourraient venir m'expliquer l'article 1. Il y en a peut-être deux, trois – les procureurs de la couronne de Granby, tous ceux de Cowansville, je pense – mais, à part de ça... Je comprends très bien que le ministre nous donne le message que c'est les juristes qui vont jouer dans ces projets de loi là, mais pourquoi ne pas les faire à la portée – au moins essayer de les faire à la portée – le plus possible de n'importe quelle personne qui voudrait s'intéresser à un projet de loi?

Donc, c'est quoi, le processus du Comité de législation? Est-ce qu'on les regarde, ou on regarde un grand principe général, on ne s'attache à aucun des articles en particulier? On a vu ça dans d'autres projets de loi qu'on a étudiés la semaine dernière. Je pense que le ministre fait partie du Comité de législation, j'imagine.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): À ce moment-ci, demander des informations sur le processus du Comité de législation, ça me semble déborder un peu le...

M. Brodeur: Vous pensez, vous?

Une voix: La clarté de l'article.

M. Brodeur: La clarté de l'article.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Bien, ça me semble aller un peu loin.

M. Brodeur: Est-ce que vous le trouvez clair, M. le Président, l'article?

Une voix: Maintenant, oui. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Je n'ai pas d'opinion à exprimer, juste peut-être une préoccupation: si les lois étaient parfaites, ne seraient-elles pas inhumaines?

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Brodeur: Le ministre avouait lui-même qu'au point de départ ça lui a pris une demi-heure avant qu'on puisse saisir, comme disait la ministre de la Justice, tous les tenants et aboutissants de cet article-là. Les avocats qui auront à plaider cet article-là n'auront pas l'éclairage de la commission, comme disait le député de Chapleau...

M. Ménard: Ah oui!

M. Brodeur: ...puis, à ce moment-là, on peut se poser des questions.

M. Ménard: C'est disponible. Il paraît même qu'il y en a qui nous lisent. Alors...

Une voix: Ah! c'est incroyable. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Alors, M. le ministre.

M. Brodeur: Je transmettrai l'offre du ministre à mes collègues avocats lorsqu'ils auront à plaider. Non, je me demande comment fonctionne le Comité de législation quand on laisse passer, là, des articles aussi compliqués que ça puis aussi flous que ça.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le ministre.

M. Ménard: Non, moi, je n'ai plus rien à dire. J'ai tout dit.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'amendement? M. le député de Saint-Laurent.

M. Dupuis: Ce qui est certain, c'est que le ministre est entré en commission avec l'article 1 ce soir en voulant demander la possibilité de se faire donner le pouvoir de réglementer sur les qualités requises pour exercer la fonction d'enquête dans un corps de police, sans vouloir indiquer quelles étaient ces qualités requises. Ça, c'est ça qui est clair.

Et il a commencé la soirée en disant: Écoutez, moi, je viens ici pour chercher le pouvoir de réglementer. Quant à savoir ce que je vais mettre dans le règlement, bien, ça, on verra. Évidemment, poussé dans ses retranchements, il a été obligé de donner la substance, ou enfin une partie de la substance de ce qu'il voulait mettre dans le règlement. Et c'est là qu'on a appris qu'il voulait réglementer en donnant un certain type de formation ou en faisant des différences entre la formation requise pour exercer certains types d'enquêtes.

C'est à cause de l'amendement du député de Chapleau qu'on a été en mesure de s'assurer et de voir clair dans l'intention du ministre dans le pouvoir de réglementer. C'est le député de Chapleau qui a permis que nous sachions que le ministre avait l'intention d'exiger une formation différente pour les différents types d'enquêtes. Et ça, dans ce sens-là, je remercie le député de Chapleau parce que, dans le fond, c'est son amendement qui nous a permis de savoir ça. Bien sûr, en ce qui me concerne, je vais être obligé de voter contre l'amendement du député de Chapleau...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Dupuis: ....parce que...

Une voix: Je pense qu'il y a du monde de Lévis qui va avoir de la misère à comprendre ça.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Saint-Laurent, vous avez la parole.

(23 h 50)

M. Dupuis: Parce que j'estime que cette idée qu'a le ministre de vouloir légiférer, de vouloir déposer un règlement, éventuellement, qui va donner différents types de formations qui seront exigés pour effectuer différents types d'enquêtes n'a pas de bon sens. Il peut trouver ça drôle ce soir, mais il va trouver ça pas mal moins drôle quand il va s'asseoir avec les syndicats des policiers pour négocier une affaire semblable. Et j'espère qu'il a envisagé les conséquences de ses actes à cet égard-là parce que ça ne sera pas évident, d'une part.

D'autre part, il nous met dans la position suivante, celle de dire à nos commettants: On est allé en commission parlementaire pour l'étude article par article d'un projet de loi cette semaine. Le ministre nous a demandé le pouvoir de réglementer sur les qualités requises pour détenir la fonction d'enquêteur dans un corps de police. Ah oui! Puis ça va être quoi, les qualités requises? Bien, je ne suis pas capable de te répondre, il n'a jamais voulu nous le dire. Puis, vous autres, vous avez accepté ça? Bien oui, on a été obligés d'accepter ça. Et c'est exactement ça qu'on ne peut pas faire. On ne peut pas faire ça, on ne peut pas accepter de légiférer un article qui va vous donner le pouvoir de réglementer sans savoir ce que vous allez mettre dans le règlement.

C'est vrai qu'on en sait un petit peu plus qu'en début de soirée. Il reste que, quand on est arrivé ici, ce soir, vous aviez l'intention de ne pas nous dire grand-chose, et c'est la raison pour laquelle non seulement, à regret, je vais voter contre l'amendement du député de Chapleau, mais tantôt, quand on arrivera au vote sur l'article, on sera obligé de voter contre également.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Alors, à ce moment-ci, est-ce que l'amendement est adopté?

M. Ménard: Non.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Non? Il n'est pas adopté. Nous revenons donc au libellé, tel qu'il apparaît au projet de loi, de l'article 1.

Est-ce que l'article 1 est adopté?

Des voix: Adopté.

M. Dupuis: Sur division.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Sur division. Vous aviez une intervention, M...

M. Pelletier (Chapleau): Oui, ça serait pour un autre amendement, une autre proposition d'amendement. Ha, ha, ha!

Une voix: Ah!

M. Pelletier (Chapleau): Je pense que mon collègue de Saint-Laurent va sans doute voter contre.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): À ce moment-ci, M. le député de Chapleau, je considère que l'article a été adopté.

M. Dupuis: Non, je m'excuse, là, question de règlement. Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Oui, sur une question de règlement, M. le député de Saint-Laurent.

M. Dupuis: M. le Président, vous avez appelé le vote, et le député de Chapleau, tout de suite, a levé la main avant...

Une voix: ...

M. Dupuis: On a voté, mais le député de Chapleau avait levé la main pour intervenir, et c'est parce que j'étais en conversation avec quelqu'un que je n'ai pas vu le député de Chapleau demander le droit de parole. Non, non, je m'excuse, là, il y a une question de justice, il y a une question d'équité, le député Chapleau voulait déposer un amendement.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Saint-Laurent, je pense que les choses sont claires, je pense que ce n'est pas nécessaire d'argumenter davantage. Je me dois effectivement de protéger les droits des parlementaires ici, et vous avez raison, au moment où vous avez dit «adopté», le député de Chapleau avait déjà levé la main. Alors, en toute équité et en toute justice, je dois le reconnaître à ce moment-ci.

M. Pelletier (Chapleau): Alors, ma proposition d'amendement viserait à faire en sorte que l'article, donc 6.1 de la Loi de police, soit modifié par l'insertion, au paragraphe 6° et après le mot «requises», de ce qui suit: «d'un agent de la paix pour exercer la fonction d'enquête selon le type d'infraction».

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Vous pouvez nous déposer votre projet, s'il vous plaît?

M. Pelletier (Chapleau): Oui.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Alors, je reprends donc le libellé de l'amendement. Ce serait d'insérer, après le mot «requises»... Donc, il s'agirait de remplacer «pour exercer la fonction d'enquête dans un corps de police dans les cas déterminés par le règlement, ainsi que» par «d'un agent de la paix pour exercer la fonction d'enquête selon le type d'infraction».

Alors, sur l'amendement, M. le député de Chapleau.

M. Pelletier (Chapleau): Oui. En fait, je pense que c'est une proposition d'amendement qui est tout à fait légitime et qui rejoint ce que le ministre a lui-même mentionné, et ce, à l'égard de quoi, d'ailleurs, moi, en ce qui me concerne, a priori, je me pose aussi des questions suite à l'intervention du député de Saint-Laurent. Mais disons que le but, ici, c'est de modifier toujours le paragraphe 6° de façon à ce que le paragraphe 6° soit moins ambigu qu'il l'est actuellement, et plus élégant, par ailleurs, qu'il l'est actuellement.

Alors, ma proposition, donc, vise à faire en sorte que le gouvernement puisse déterminer les qualités requises d'un agent de la paix. Donc, là, clairement, il y a une précision quant à savoir quelle personne est visée. C'est un agent de la paix, donc ça veut dire le membre, finalement, d'un corps de police. Donc, déterminer les qualités requises d'un agent de la paix, voilà déjà une chose qui est claire. Bon. On s'est interrogés là-dessus précédemment: Qui va pouvoir faire l'enquête, en quelque sorte? Bien, là, ici, on le dit, c'est un agent de la paix. Donc, déterminer les qualités requises d'un agent de la paix pour exercer la fonction d'enquête. Alors, je reviens à la formulation qui, finalement, se retrouvait dans la proposition d'amendement formulée par le ministre en début de soirée, et là j'ajoute, à ce moment-là: «selon le type d'infraction». C'est-à-dire que, au lieu d'utiliser l'expression ambiguë «dans les cas déterminés par le règlement», les choses sont claires, c'est selon le type d'infraction. Les qualités requises, donc, vont varier selon le type d'infraction. Je pense que ça rejoint les intentions du ministre. Je pense que ça rejoint les intentions du gouvernement. Moi, ça me semble, en tout cas, beaucoup plus clair. Donc, c'est la proposition que je formule.

Et je dois mentionner à nouveau que notre devoir, c'est vraiment de tout mettre en oeuvre pour améliorer le projet de loi. C'est ça, la finalité d'une commission parlementaire. C'est l'une des tâches essentielles des députés. Les députés à l'Assemblée nationale, essentiellement, ont deux tâches: la première, c'est celle de contrôler le gouvernement, et la deuxième, c'est, finalement, de participer au processus législatif, et d'y participer avec des propositions qui sont de qualité. Et, dans le cas qui nous intéresse ici, moi, je pense que non seulement c'est une proposition légitime, mais je crois que c'est une proposition qui clarifie les choses, et je pense aussi que c'est une proposition qui, finalement, rejoint carrément les intentions du ministre.

Mais je répète que j'ai été vraiment, je dirais, étonné par ce qu'a dit le député de Saint-Laurent un peu plus tôt. Cette question-là va, elle aussi, devoir être réglée en temps opportun quant à savoir comment peut-on classer les qualités requises selon le type d'infraction. Enfin, cette question-là reste ouverte.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien. Alors, merci, M. le député de Chapleau. Alors, étant donné l'heure, la commission ajourne ses travaux sine die. Je vous remercie.

(Fin de la séance à minuit)


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