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Version finale

36e législature, 2e session
(22 mars 2001 au 12 mars 2003)

Le jeudi 7 février 2002 - Vol. 37 N° 45

Consultation générale sur l'avant-projet de loi instituant l'union civile des personnes de même sexe et modifiant le Code civil et d'autres dispositions législatives, ainsi qu'à l'égard du document de consultation Pour un traitement égalitaire, l'union civile


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Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures trente-huit minutes)

Le Président (M. Gautrin): Chers amis, il est tout petit peu dépassé l'heure, parce que, comme toujours, on a toujours un peu de retard. Alors, je constate le quorum. Je constate le quorum quand mon collègue de Saint-Jean se sera assis. Alors, le collègue de Saint-Jean s'étant assis, nous avons quorum.

Je me permets de rappeler le mandat de la commission: poursuivre la consultation générale et les auditions publiques sur l'avant-projet de loi intitulé la Loi instituant l'union civile des personnes de même sexe et modifiant le Code civil et d'autres dispositions législatives.

M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements, aujourd'hui?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Beaulne (Marguerite-D'Youville) est remplacé par Mme Barbeau (Vanier); Mme Leduc (Mille-Îles) est remplacée par M. Laprise (Roberval); M. Dupuis (Saint-Jean) est remplacé par M. Brodeur (Shefford); et M. Pelletier (Chapleau) est remplacé par Mme Rochefort (Mercier).

Le Président (M. Gautrin): Je vous remercie. Alors, je vais me permettre de vous rappeler l'ordre du jour de notre séance aujourd'hui: à 9 h 30, nous recevons le Groupe gai de l'Université Laval; à 10 h 15, la Communauté franco-protestante de Loretteville et Communauté franco-protestante de Lévis; à 11 heures, le Centre d'information nationale Robert Rumilly; à 11 h 45, l'Association des mères lesbiennes du Québec; à 14 heures, le Parti de la sagesse; à 14 h 45, le Dr Christopher Berry Gray; à 15 h 15, Aux Prismes, plein air et culture; à 16 heures, le Centre d'orientation sexuelle de l'Université McGill; à 16 h 45, le pasteur Paul Gazdik; et à 17 h 15, le Réseau des lesbiennes du Québec. Et ensuite nous ajournerons nos travaux et nous les reprendrons mardi prochain.

Auditions (suite)

Alors, ça me fait plaisir de vous accueillir. Vous êtes Mme Cynthia Beaulé? C'est bien ce que je comprends?

n (9 h 40) n

Mme Beaulé (Cynthia): Oui.

Le Président (M. Gautrin): Vous êtes accompagnée de Peter Rutgers, de Pierre Maltais et d'Olivier Vallerand. Je vais me permettre de vous...

Mme Beaulé (Cynthia): Il y a un petit changement.

Le Président (M. Gautrin): Pardon?

Mme Beaulé (Cynthia): Il y a des petits changements de...

Le Président (M. Gautrin): Alors là vous allez me les présenter tout à l'heure, si je comprends bien. Alors, je vais essayer de vous rappeler brièvement le mode de fonctionnement. Vous avez 45 minutes pour faire votre présentation, qui va être fractionnée... attendez, qui est fractionnée de la manière suivante: 15 minutes pour la présentation de votre mémoire, 15 minutes pour les questions venant des parlementaires ministériels et 15 minutes pour les parlementaires représentant l'opposition officielle.

Alors, Mme Beaulé, vous avez la parole. Et ça serait aimable de nous présenter les personnes qui vous accompagnent à ce moment-là.

Groupe gai de l'Université Laval (GGUL)

Mme Beaulé (Cynthia): Parfait. Alors, moi, je suis du Groupe gai, présidente du Groupe gai de l'Université Laval. Je suis accompagnée d'Olivier Vallerand, \v.-p. aux activités de groupe; de Peter Rutgers, \v.-p. exécutif; et Dany Tremblay-Bouchard, du groupe Arco Iris, qui présentait le mémoire conjointement avec nous, le groupe du cégep de Sainte-Foy; et d'Antoine Coulombe, qui est travailleur social, et qui travaille au cégep de Sainte-Foy, et qui est en même temps membre du Groupe gai de l'Université Laval.

Le Président (M. Gautrin): Parfait. Alors, vous avez la parole, Mme Beaulé.

Mme Beaulé (Cynthia): Parfait. Alors, je vais vous présenter brièvement le Groupe gai de l'université. Il existe depuis 1978. On va bientôt fêter les 25 ans d'existence. Et, en fait, c'est un groupe qui sert de... qui permet aux étudiants de se rencontrer ? on a un local à l'université ? pour créer des liens, pour faciliter les échanges et pour, en fait, participer à plusieurs activités pour faciliter, disons, l'intégration, là, entre nous, d'abord. Donc, je vous présente Dany qui va présenter le groupe Arco Iris.

M. Tremblay-Bouchard (Dany): Le groupe Arco Iris a été créé l'an passé au cégep Sainte-Foy, dont Olivier Vallerand est le cofondateur. Arco Iris, c'est une association gaie dans l'association étudiante. Le comité a été créé dans le but d'aider la communauté homosexuelle et bisexuelle. Comme activités, on offre des groupes de discussion, de l'aide et du soutien, des activités de groupe. Et notre plus grande cause, c'est essayer de faire avancer la cause de l'antidiscrimination au sein du cégep.

Mme Beaulé (Cynthia): Donc, Olivier va vous faire un résumé du mémoire, brièvement.

M. Vallerand (Olivier): Donc, le Groupe gai de l'Université Laval et Arco Iris sont heureux de l'initiative du gouvernement de cet avant-projet de loi. En tant que jeunes et étudiants, on pense que c'est important que la société continue à avancer, que le Québec pose un geste fort pour montrer que notre société est rendue prête à accepter, plus qu'à tolérer vraiment, à accepter la normalité de l'homosexualité au sein de notre société.

Donc, on aimerait que le Québec montre la voie au gouvernement fédéral et aussi à l'international en posant ce geste-là, d'adopter cette loi-là. On est conscient que le gouvernement provincial ne peut pas légiférer dans le cadre du mariage, et tout ça, donc... Et puis, aussi, on n'a pas nécessairement toutes les connaissances techniques pour faire aujourd'hui une présentation vraiment sur les technicalités de la loi. Donc, ce qu'on veut, c'est un geste fort.

Les raisons pour lesquelles on croit à ça, c'est que l'homosexualité n'est pas un choix, c'est un état de fait. Il n'y a aucune pression intérieure ou extérieure, là. Quelqu'un ne peut pas décider de changer d'orientation ou quelqu'un ne peut pas forcer quelqu'un d'autre à changer d'orientation. C'est exactement comme la race d'une personne, tout ça. Donc, ce serait absurde d'interdire le mariage à des personnes de races différentes, donc ça serait aussi absurde d'interdire le mariage, ou l'union civile, ou l'union de toutes sortes à un couple de même sexe. Donc, ce qu'on demande, c'est que ça soit plus qu'une tolérance, vraiment une acceptation.

On considère que l'avant-projet de loi en ce moment a beaucoup de points forts. C'est une excellente initiative. Entre autres, que ça soit célébré devant le même officier que le mariage, ça permet d'arriver vraiment à une égalité plus grande. Qu'il y ait une ouverture en matière de consentement dans les cas d'inaptitude, là, pour les soins, on pense que c'est très bon. Donc, c'est ça, on se prononce en faveur d'un geste rapide du gouvernement. On a certaines revendications, indications à suggérer. Je vais laisser mes collègues...

Le Président (M. Gautrin): Mme Beaulé.

Mme Beaulé (Cynthia): Oui. Alors, nos principales recommandations, c'est justement, comme disait Olivier, un geste fort et rapide, alors que ça fait quand même un certain moment que ça se discute, que plusieurs coalitions gaies et lesbiennes au Québec proposent de changer la loi, et on est très content de l'initiative. Donc, c'est, bien sûr... On recommande aussi que l'union civile soit élargie aux couples hétérosexuels. Et j'ai lu dans les journaux, là, ce matin, que c'était un problème avec la compétence fédérale. Je voudrais plus d'éclaircissement tout à l'heure là-dessus parce qu'on ne comprend pas vraiment pourquoi c'est... de jouer dans le partage des compétences, là, étant donné qu'il y a d'autres quand même différences concernant l'âge et concernant la dissolution par notaire, ça pourrait être avantageux pour les couples hétérosexuels d'avoir accès à cette institution-là aussi. Et, en même temps, ça enlèverait toute discrimination, parce qu'on sent encore un petit peu de discrimination envers les homosexuels, et ce qu'on veut, en fait, c'est fondamental: c'est d'enlever la discrimination. Donc, en créant une ouverture de l'union civile à tous, ça enlève toute discrimination.

Alors, une autre recommandation, bien sûr, c'est de changer et modifier rapidement l'article 365 du Code civil, qui est présentement en Cour suprême par le couple Hendricks-LeBoeuf depuis un certain temps. Donc, si on modifie ça au provincial ? on a le pouvoir de le faire ? donc, si on modifie ça dès maintenant pour changer la mariage qui a eu lieu entre un homme et une femme pour simplement entre deux personnes, ça va éviter la Cour suprême de passer beaucoup de temps là-dessus à analyser ça, donc, pour la déclarer inconstitutionnelle. Donc, je vous laisse Antoine vous parler du point, de la recommandation sur l'immigration.

M. Coulombe (Antoine): Donc, à partir du point d, de la création de règles particulières en matière d'immigration, le Groupe gai de l'Université Laval est très sensible aux réalités des étudiants étrangers qui vont venir à l'Université Laval pour étudier. Donc, ils rencontrent souvent des personnes venant de l'extérieur. Puis c'est sûr qu'on se rend compte que, quand il y a différents pays, il y a différentes lois où il y a encore beaucoup de discrimination par rapport aux personnes homosexuelles dans des pays. Donc, on parle des pays où l'homosexualité n'est pas légale, donc le vécu homosexuel ne peut pas être fait. Ça existe encore. Donc, par rapport à ce point-là, on recommande que des règles particulières soient pensées pour que l'amour entre deux personnes puisse se vivre aussi à travers des pays qui ont des lois différentes, parce que, vivre une relation d'un an, stable, dans un pays où ce n'est pas accepté, l'homosexualité, bien, je pense que c'est un peu impossible. Donc, on vous soumet aussi ce point-là.

Mme Beaulé (Cynthia): Dany va vous présenter notre recommandation sur la parentalité.

M. Tremblay-Bouchard (Dany): O.K. Concernant la parentalité, nous croyons que la nouvelle législation devrait faire une grande place à la parentalité parce que des enfants de couples de même sexe souffrent actuellement d'une inégalité face aux enfants de couples hétérosexuels et, en effet, ils ont un statut presque similaire aux enfants illégitimes d'antan. De plus, contrairement à plusieurs croyances, le fait qu'un enfant soit élevé par un couple homosexuel ne crée aucune carence puis ne fait pas de lui nécessairement un homosexuel.

Finalement, la création d'une union civile sans parentalité reviendrait à créer une séparation entre les couples et leurs familles.

Mme Beaulé (Cynthia): Alors, pour conclure, Olivier va vous présenter un peu notre mémoire.

M. Vallerand (Olivier): Donc, comme j'ai déjà dit, on considère que l'avant-projet de loi, tel que présenté actuellement, est une excellente initiative, c'est un grand pas vers l'égalité. On considère qu'il devrait y avoir le moins de différences possible entre le mariage et l'union civile pour permettre, c'est ça, entre autres, en l'ouvrant aux sexes différents, d'avoir un choix pour tous, donc de créer une égalité totale ? bien, la plus totale possible ? parce que, en créant une institution séparée, ce n'est pas de l'intolérance, mais c'est presque une preuve d'intolérance plutôt que d'acceptation, c'est-à-dire qu'on crée une ségrégation, comme il y en avait envers les gens de races différentes, il n'y a pas si longtemps que ça.

n (9 h 50) n

On pense que la majorité de la population est prête à accepter cet avant-projet de loi là et qu'en expliquant bien ils vont comprendre que, entre autres, des points comme la parentalité, et tout ça, c'est pour le bien des enfants, ce n'est pas nécessairement pour le bien des... c'est pour le bien des couples aussi, mais c'est surtout pour le bien des enfants qui ont... en ce moment, qui peuvent vivre des situations absolument horribles, qui peuvent être séparés d'un parent qui les a élevés, juste parce que c'est un parent de même sexe.

Finalement, la recommandation sur l'immigration est extrêmement importante pour nous parce que le Groupe gai de l'Université Laval est, au quart, composé d'étudiants étrangers. C'est ça. Donc, on est très sensible à ce point-là. Et, en tant que jeunes, on pense que c'est important que la société continue à avancer. Il y a le rapport Mort ou fif, l'an dernier, de Michel Dorais et de Simon-Louis Lajeunesse, qui a fait état de statistiques assez alarmantes en montrant que la discrimination envers les homosexuels était encore une cause importante de suicide chez les jeunes. Donc, on pense qu'un avant-projet de loi tel que celui-ci peut amener à diminuer cette discrimination-là et peut-être sauver des vies. Donc, on est très en faveur de l'avant-projet de loi, en ajoutant les modifications qu'on a présentées aujourd'hui.

Le Président (M. Gautrin): Écoutez, je vous remercie de votre présentation. Nous allons commencer la période d'échange, et je passerai la parole à M. le ministre de la Justice, au nom des députés ministériels.

M. Bégin: Alors, bonjour. Je ne vous nommerai pas tous, mais bienvenue à cette commission. Je vous remercie d'être là. Vous avez le désavantage de venir après beaucoup, beaucoup de présentations, mais il y a quand même des choses intéressantes que vous avez soulevées qui n'ont pas été soulevées, par ailleurs. Et, même vous, vous ne les avez pas dites dans votre présentation et vous me permettrez d'y revenir parce qu'ils sont dans votre mémoire.

D'abord, à l'égard de votre dernière recommandation, celle qui dit: «Que soit utilisé le mot "conjoint en union civile" ou "conjoints" pour désigner les membres des couples en union civile», donc vous nous recommandez d'enlever le mot «partenaires» pour le remplacer par un autre mot. Bon. Fin de la discussion. Mais je voulais le noter parce que vous l'avez mentionné.

Par contre, là où vraiment vous vous démarquez, c'est à la page 6. Vous dites ceci: «C'est pourquoi nous croyons que l'union civile et le mariage ne devraient différer que sur quelques points, parmi lesquels: les mots "mariage" et "époux" (qui ne sont pas de juridiction provinciale), en insistant cependant pour que le terme "conjoint" soit utilisé plutôt que "partenaire"». Et, la phrase suivante: «l'âge minimal de 18 ans ? et là entre parenthèses ? (cette mesure reste discriminatoire, mais, en tant que jeunes, nous considérons comme plus logique que soit ramené l'âge minimal du mariage à l'âge de la majorité plutôt que de descendre l'âge minimal de l'union civile à 16 ans).»

Je pense que là-dessus vous êtes... en tout cas, vous êtes les premiers qui le dites. Pouvez-vous nous parler un petit peu là-dessus, s'il vous plaît?

Le Président (M. Gautrin): M. Vallerand.

M. Vallerand (Olivier): Je vais expliquer notre point. C'est ça, on considère quand même que ce n'est pas nécessairement bon qu'il y ait la différence entre le mariage, qui soit à 16 ans, et l'union civile, à 18 ans. Mais, en même temps, on se dit que c'est sûrement plus logique d'avoir le mariage à 18 ans parce que, si le jeune n'est pas considéré comme majeur pour voter et pour toutes sortes de choses comme ça, on ne considère pas qu'il serait beaucoup plus, disons, responsable d'avoir la grosse décision de se marier. Pas que 18 ans soit nécessairement un âge où le deux ans de différence, entre le 16 ans et le 18 ans, soit un deux ans qui permette beaucoup plus de réfléchir et être plus mature, mais, comme on considère que, pour l'âge du vote, c'est 18 ans, la majorité est 18 ans, le fait de s'unir avec quelqu'un qui est quand même disposé à être une union pour la vie, il faut y avoir pensé, puis on considère qu'à 16 ans on n'a pas nécessairement toute la réflexion et la maturité pour ça. Donc, c'est ça.

M. Bégin: Alors, vous requestionnez la société.

Le Président (M. Gautrin): Est-ce qu'il y a d'autres personnes qui veulent commenter sur le point de vue? Oui?

M. Coulombe (Antoine): Peut-être rajouter que j'ai animé, il y a deux semaines, un groupe de discussion sur l'union civile avec des jeunes qui avaient 17, 18, 19 ans, et c'était ressorti aussi dans le groupe de discussion que, selon eux, c'était plus intéressant à 18 ans. Pour la question de maturité aussi, puis de vécu de la personne.

Le Président (M. Gautrin): M. le ministre.

M. Bégin: Vous constatez que c'est une grande évolution dans une direction imprévue, puisque, lorsque j'ai fait mon cours de droit, le mariage était permis à 12 et 14 ans, et ça a remonté à 16 ans, et là on proposerait 18 ans. Alors, vous voyez que les institutions peuvent évoluer dans toutes les directions, y compris celle-là.

Vous vous êtes interrogés sur l'hétérosexualité, le mot «sexualité». Je pense que c'est Mme Beaulé qui l'a soulevé. Est-ce que je vous ai bien compris en disant que vous vouliez avoir des explications?

Mme Beaulé (Cynthia): Oui, parce que j'ai lu dans le journal en fait que c'était une question difficile à régler, étant donné que le mariage est de compétence fédérale et que, si on enlevait le point que l'union civile doit s'appliquer seulement aux personnes de même sexe, c'est que ça créerait une trop grande... ce serait trop semblable au mariage, donc ce serait dangereux de jouer dans les compétences fédérales. Il y aurait quand même d'autres différences encore, et j'aimerais savoir pourquoi c'est sorti comme ça.

M. Bégin: C'est évident que le mariage est de compétence fédérale...

Le Président (M. Gautrin): Comme vous êtes directement interpellé, M. le ministre, on est en train d'inverser...

M. Bégin: Oui, on renverse la proposition. D'habitude...

Le Président (M. Gautrin): On inverse les fonctions, les témoins questionnent...

M. Bégin: Ha, ha, ha! C'est ça. Mais je pense que c'est d'intérêt public de répondre à votre interrogation.

Le Président (M. Gautrin): Absolument.

M. Bégin: Et, comme vous l'avez bien dit, vous n'êtes pas des techniciens de ça. Vous voulez donner votre perception générale, globale de la chose, que vous êtes favorable, mais pas être des spécialistes sur chacun des points. Donc, c'est tout à fait légitime de répondre à votre interrogation. On va répondre à beaucoup de questions que d'autres personnes peuvent se poser.

En vertu de la Constitution canadienne, le mariage comme le divorce sont de juridiction fédérale. Donc, c'est le gouvernement fédéral qui peut adopter des lois à cet égard. Ça existe depuis toujours ? la Loi sur le divorce, seulement depuis soixante et dix ? mais, quand même, c'est le gouvernement fédéral qui l'a faite. Par contre, la célébration du mariage, alors qui le fait à quel endroit, etc., à quelles conditions de forme, c'est le Québec. Alors, la célébration est de compétence provinciale.

Par contre, si vous regardez les droits de... la Constitution, encore, canadienne dit que les droits et la propriété, les droits civils, c'est de juridiction québécoise. Alors là, si vous regardez le tableau avec des cercles, là, vous voyez trois niveaux: vous voyez la célébration, vous voyez les effets et vous voyez la dissolution, au-dessus de chacun des blocs. Ça, c'est un contrat qui se forme, qui se vit et qui cesse d'exister. Alors, vous pouvez le créer, vous pouvez le faire vivre, vous pouvez le dissoudre. C'est la compétence du Québec.

Si on essaie de faire exactement ça dans le domaine du mariage, nous risquons d'avoir une problème constitutionnel. Par contre, la juridiction que nous avons exercée est, je crois, de juridiction québécoise, et que nous pouvons l'exercer. Et c'est pour ça que nous avons agi dans le créneau qui nous est propre et non pas dans celui des autres.

Le Président (M. Gautrin): Mme Beaulé.

Mme Beaulé (Cynthia): En quoi, en enlevant le critère «les personnes de même sexe dans l'institution de l'union civile», ça va complètement jouer dans les compétences fédérales?

M. Bégin: Là, on tombe dans les raffinements que je ne voudrais pas dire ici non plus, mais il est évident que, si on a une similitude parfaite, on vient de faire indirectement ce que nous ne pouvons pas faire directement. Mais, en ayant une institution qui est différente, pour des motifs différents, je crois que nous avons respecté les compétences réciproques de chacun. C'est le plus loin que je puisse aller dans l'explication.

Le Président (M. Gautrin): Est-ce que vous avez d'autres questions?

Mme Beaulé (Cynthia): Oui. Je voudrais juste rajouter que, en fait, notre point de vue est que le Québec fasse un geste fort et rapide en ce sens et que justement il y aurait encore d'autres différences. Donc, c'est jouer simplement sur le fondamental et l'importance de la non-discrimination.

M. Bégin: Et le Québec va de l'avant avec l'avant-projet de loi en le transformant dans un projet de loi modifié. Évidemment, le gouvernement fédéral aura la balle dans son camp... de dire: Nous pensons que le divorce devrait... pardon, le divorce, excusez-moi, le mariage.

Le Président (M. Gautrin): Il y a des lapsus qui chez vous, cher ami...

M. Bégin: Qui veulent dire beaucoup de choses, hein? Ha, ha, ha!

Le Président (M. Gautrin): ...dire beaucoup de choses. Et venant d'un praticien du droit, c'est...

M. Bégin: ...que j'ai déjà appelé le président M. le juge, alors...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bégin: Donc, le mariage pour les personnes de même sexe pourrait être adopté par le gouvernement fédéral. Ça lui appartiendra. Combien de temps cela prendra-t-il? On ne le sait pas, mais à souhaiter qu'il le fasse le plus rapidement possible.

Le Président (M. Gautrin): Est-ce que vous avez d'autres questions, M. le ministre?

M. Bégin: Non.

Le Président (M. Gautrin): Est-ce qu'il y a des parlementaires ministériels qui auraient des questions? Dans ces conditions-là, je passerai la parole à Mme la députée de Bourassa, qui va vous interroger au nom de l'opposition officielle. Mme la députée de Bourassa.

n(10 heures)n

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Bonjour à vous tous. J'aimerais poser une question et peut-être demander à M. Antoine, je crois que... d'y répondre.

En ce qui a trait à votre recommandation concernant l'ouverture de l'union civile aux hétérosexuels pour éviter de créer un régime d'égalité séparée, vous dites notamment avoir tenu des groupes de discussion et vous avez reçu des commentaires favorables, notamment quant à l'âge.

Est-ce que vous avez abordé cette suggestion-là ? j'imagine ? aussi avec le groupe? Et est-ce que certains étudiants dans le groupe vous ont parlé de la liberté de choix et du rôle de l'État? Est-ce que l'État doit ou pas s'immiscer dans la vie privée? Est-ce que l'État doit ou pas imposer à des couples qui ont pris la décision de ne pas soumettre une relation à un cadre juridique préétabli... Est-ce que l'État doit le faire?

Le Président (M. Gautrin): Alors, qui veut répondre?

M. Coulombe (Antoine): Je dirais que c'est une question un peu plus précise que les questions que nous avons abordées. Donc, si je comprends bien, c'est si l'État doit s'immiscer au niveau de...

Mme Lamquin-Éthier: La vie privée, dans la vie privée. Étendre un régime à des gens qui ont peut-être choisi de ne pas soumettre justement leur union à un cadre juridique préétabli, qui ont choisi, qui ont pris la décision de ne pas se soumettre à un cadre.

M. Coulombe (Antoine): Comme le mariage ou l'union civile.

Mme Lamquin-Éthier: Oui, ou l'union civile.

M. Coulombe (Antoine): Bien, à vrai dire, la question a été abordée dans le sens que certains croient qu'ils préfèrent avoir le choix, c'est-à-dire d'avoir l'option. Moi, je préfère me laisser les deux choix, si un jour je veux vivre une vie commune dans l'union civile ou le mariage, avoir le choix de pouvoir le faire.

Je dirais que, par contre, ce n'est pas unanime que tout le monde veut le faire, veut vivre une vie marié, et tout ça, avec quelqu'un. C'est des choix qui sont plus personnels à ce moment-là. Mais tout le monde jugeait important, par respect, que les personnes homosexuelles comme hétérosexuelles aient le même choix finalement, parce que, de ne pas l'avoir, c'est en quelque sorte créer une séparation ou une forme de discrimination. Donc, leurs réponses allaient beaucoup dans ce sens-là.

Le Président (M. Gautrin): Mme la députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: Peut-être une question concernant votre groupe, qui est à l'Université Laval, qui représente une bonne partie de la clientèle à la fois homosexuelle et bisexuelle des étudiants de l'Université: Avez-vous, depuis le moment où vous êtes en place, constaté, au niveau des mentalités, des attitudes, des changements au niveau de l'institution? Est-ce que c'est différent? Avez-vous recommandé... Parce que beaucoup de gens nous ont parlé d'homophobie, d'hétérosexisme. Ça existe dans différents milieux. On en a parlé hier plus particulièrement au niveau de l'école primaire. Il y a des problèmes au cégep. À l'université, c'est comment? Comment ça se vit? Ces étudiants-là, ils ont auprès de vous, j'imagine, accès à une ressource extrêmement utile. Mais votre ressource permet-elle à ces communautés-là d'aller plus loin, là, en ce qui a trait à la sensibilisation, à l'éducation, aux attitudes, aux mentalités?

Le Président (M. Gautrin): Qui veut répondre?

M. Vallerand (Olivier): Je vais répondre.

Le Président (M. Gautrin): M. Vallerand.

M. Vallerand (Olivier): O.K. Bien sûr, on est tous trop jeunes pour reparler de comment c'était il y a 25 ans. Ce que je peux dire, c'est que, par exemple, par rapport à l'ouverture, le Groupe gai de l'Université Laval a réussi à avoir un local seulement depuis la reconstruction du pavillon Desjardins, donc six, cinq ans; c'est ça, 1996-1997. Avant ça, il n'y avait pas de local, malgré toutes les demandes. Donc, il y a une ouverture qui se fait, tout ça.

Je dirais qu'il y a encore beaucoup de monde qui ont... Il y a encore de la discrimination, ça, c'est sûr. Les gens qui passent devant le local regardent puis font... Ils se posent des questions, tout ça. Il y a des demandes d'information souvent. Il y a des gens qui viennent nous voir, qui assistent aux groupes de discussion et puis qui se rendent compte qu'il n'y a pas de mal à être gai puis ensuite, c'est ça, ils retournent... Quand c'est des étrangers, souvent ils retournent chez eux puis là ils font leur «coming-out» une fois être venus au Québec puis avoir vu comment ça se passait au Québec, puis qu'il y avait une ouverture, que c'était normal. Donc, c'est ça par rapport à l'université.

Pour revenir au cégep aussi, l'an dernier, c'est ça, on a eu des cas de discrimination et puis on est allés voir tous les départements, la direction, tout ça, et puis ce que les professeurs, les directions nous disaient, c'est qu'ils ne le savent pas qu'il y a de la discrimination, ils ne s'en rendent pas compte. Donc, quand on va les voir et qu'on leur dit qu'il y a de la discrimination, ils nous disent: Ah oui? Mais on ne savait pas! On est bien prêts, nous, on est bien ouverts, tout ça. Mais il y a un problème comme de communication. C'est ça qu'on essaie de faire, qu'on essayait de faire au cégep, qu'il continue de faire et à l'université aussi. Cette année, on essaie beaucoup d'afficher le Groupe pour que les gens sachent que ça existe et qu'il y a de la discrimination qui existe. Est-ce que ça répond?

Le Président (M. Gautrin): Est-ce que quelqu'un veut rajouter?

Mme Beaulé (Cynthia): Bien, peut-être, oui.

Le Président (M. Gautrin): Commentaires, Mme Beaulé?

Mme Beaulé (Cynthia): En fait, sur la question: Est-ce que ça permet aux gens homosexuels ou même bisexuels de se sentir mieux une fois qu'ils ont fréquenté le groupe... Est-ce que c'était un peu le sens aussi de la question?

Mme Lamquin-Éthier: Vous leur fournissez un endroit où ils peuvent trouver... vous êtes une ressource pour eux.

Mme Beaulé (Cynthia): Oui. Définitivement.

Mme Lamquin-Éthier: Et à plusieurs niveaux, là, selon ce que j'en comprends.

Mme Beaulé (Cynthia): Oui. Définitivement. On sent que les gens qui fréquentent... qui arrivent pour la première fois au groupe, au départ, il y en a beaucoup qui sont mal à l'aise. Moi de même, la première fois que je suis entrée au groupe, l'an passé, je ne croyais pas devenir présidente. Puis je me suis fait des amis, et puis vraiment ça aide. Je l'ai dit à mes parents par la suite. C'est vraiment de se sentir bien et puis de se sentir avec des amis qui sont comme nous. Donc, on crée vraiment des échanges. En créant des activités de toutes sortes, du genre cinq à sept, tout ça, ça permet les échanges entre nous, puis ça nous permet de se sentir mieux, donc de s'afficher. Et puis c'est en s'affichant que les gens perçoivent que: Ah bien, ah, c'est normal, tu sais. Donc, ce n'est pas vraiment de la provocation, c'est plutôt dire: On est bien là-dedans, puis de se tenir la main en public, tu sais. Voilà.

Le Président (M. Gautrin): Mme la députée de Mercier, est-ce que vous avez un commentaire? Non. Mme la députée de Bourassa, vous n'aviez plus de questions?

Mme Lamquin-Éthier: Bien, ne serait-ce que de vous féliciter dans votre... pour ce que vous faites puis vous encourager à continuer.

Le Président (M. Gautrin): Alors, écoutez, je tiens à vous remercier pour la qualité de votre témoignage, soyez assurés qu'on va essayer d'en tenir compte, et vous remercier d'être venus ici devant nous.

Et je demanderai au groupe suivant, qui est la Communauté franco-protestante de Loretteville et la Communauté franco-protestante de Lévis, d'avoir la gentillesse de se présenter devant nous.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Gautrin): Est-ce que... Ah, je voulais savoir si vous étiez dans la salle, parce qu'on a un petit peu d'avance.

Ça me fait plaisir de vous accueillir. Je vais vous rappeler nos règles de procédure. Il y a 45 minutes qui est accordé pour votre témoignage, qui se répartit en 15 minutes pour la présentation de votre mémoire, 15 minutes pour les questionnements ou les questions provenant des députés ministériels et 15 minutes pour les questions provenant des députés de l'opposition officielle. Peut-être, je ne sais pas, c'est Gilles Marcouiller qui est... C'est vous-même?

M. Marcouiller (Gilles): Oui.

Le Président (M. Gautrin): Est-ce que vous auriez la gentillesse de nous présenter les personnes qui vous accompagnent...

M. Marcouiller (Gilles): Bien sûr.

Le Président (M. Gautrin): ...parce que peut-être que ça a changé par rapport à la liste que j'ai devant moi?

Communauté franco-protestante de Loretteville
et Communauté franco-protestante de Lévis

M. Marcouiller (Gilles): Non, je crois que la liste, elle est toujours à jour. J'aimerais présenter Denise Beaulieu, qui est membre de la Communauté franco-protestante de Loretteville; M. Pierre Mérette, qui est le membre et secrétaire aussi du conseil d'administration du comité franco-protestant de Loretteville...

Le Président (M. Gautrin): Comment?

M. Marcouiller (Gilles): Mérette.

Le Président (M. Gautrin): Parce que je ne l'avais pas sur ma liste.

M. Marcouiller (Gilles): Ah, O.K., elle a pourtant bien été mise à jour. M. Frédéric Picard, qui est membre de la Communauté franco-protestante de Lévis; M. Stéphane Gariépy, qui est membre de la Communauté franco-protestante de Loretteville; ainsi que moi-même, comme pasteur et aussi président du conseil d'administration de la Communauté franco-protestante de Loretteville.

Le Président (M. Gautrin): Parfait. Alors, vous avez la parole.

M. Marcouiller (Gilles): Donc, j'aimerais tout d'abord vous remercier d'avoir accepté de bien nous entendre. Et c'est pour nous un privilège et un honneur aussi d'être dans cette commission parlementaire et de se faire entendre et être assis ici, qui, en passant, est la demeure de tous les Québécois, et nous sommes contents d'y être assis. Nous n'avons pas l'habitude d'être ici, en commission parlementaire, mais c'est une joie de pouvoir y être.

n(10 h 10)n

Donc, les... Je vais juste faire quand même une petite présentation. Je serai le porte-parole pour la présentation. Pendant la période de questions, naturellement, chacun pourra intervenir.

Les communautés franco-protestantes, naturellement, pour ceux qui connaissent l'histoire, ça sonne un peu bizarre. Parce que c'est historiquement un peu une incompatibilité, mais les communautés franco-protestantes existent quand même. Nos communautés existent depuis déjà 10 ans, 10 et 15 ans. Ce sont des petites communautés naturellement qui s'inscrivent dans la tradition chrétienne, donc nous représentons les valeurs et les opinions qui sont de cette tradition et dont beaucoup de catholiques et protestants aussi partagent les opinions similaires.

Notre intervention naturellement, c'est que nous croyons que c'est aussi de notre vocation de s'inscrire dans les affaires de notre société. Nous ne voulons pas faire de la religion telle qu'elle a toujours été faite, et on croit que, dans un régime démocratique, nous pouvons participer à des exercices comme celui-là et en participant, non en cherchant à imposer nos perspectives, mais en collaborant et en travaillant dans la plus grande objectivité possible naturellement pour arriver au mieux-être de la société québécoise.

Donc, ce serait facile, à cause de la nature de ce que l'on est, de croire que nous voulons faire un procès de la condition homosexuelle au Québec, ce qui serait entièrement faux. Je pense qu'agir de cette façon serait d'éviter et de s'éloigner des véritables enjeux pour lesquels nous sommes tous saisis aujourd'hui depuis que cette commission existe et depuis que le débat a été lancé.

Nous travaillons dans le plus grand respect des individus, soyez-en assurés ? et je parle à tous les gens, de quelque orientation sexuelle qu'ils soient ? et nous croyons sincèrement que la démarche qui est faite, de la communauté gaie et lesbienne du Québec, s'inscrit dans une démarche qui est sincère et qu'ils sont convaincus de la légitimité de leurs revendications et, en cela aussi, nous les respectons énormément.

Donc, notre démarche n'est pas contre les gais ou les lesbiennes de Québec. C'est vraiment une démarche, parce que c'est un débat de société, et nous croyons que nous devons réunir tous les organismes et tous les gens pour les meilleures interventions possible pour arriver à prendre les décisions les plus sages.

Cependant, puisque nous vivons quand même ? et ça, c'est juste une petite mise en place, je crois qu'elle est importante à faire, parce qu'on sait que tout ce qui a été rattaché à l'Église, depuis les 40 dernières années... J'ai été le fruit un peu de... les premiers fruits de la Révolution tranquille, et on sait que nous avons accusé l'Église de tous les maux, donc il faut quand même faire quelques mises en place.

Je crois que, dans un exercice comme celui-là, la société québécoise nous permet le pluralisme des idées, le pluralisme des modes de vie, mais ne nous empêche pas de se soustraire à un exercice critique. Et souvent nous entendons, comme ce matin j'ai entendu aussi, que, bon, s'afficher comme homosexuel peut être un risque au sens qu'on peut se faire discriminer. Je crois qu'il faut aussi accepter, comme moi je l'accepte, étant marié et père de trois enfants, j'ai été aussi dans un sens... On me pose souvent la question pourquoi je suis marié, pourquoi j'ai trois enfants, et pourquoi je demeure fidèle à ma femme. On pourrait évoquer facilement de la discrimination. Et je crois qu'il faut accepter, comme on a bien dit ce matin, que ce n'est pas une question de choix, l'orientation sexuelle. On est ce que l'on est, mais je crois qu'il faut assumer aussi dans une société comme la nôtre ce que nous sommes et accepter aussi d'avoir de... lorsqu'on fait un exercice comme celui-là, d'avoir une critique, une critique pas dans le sens de critiquer les gens, mais d'exercer un bon jugement.

Et dernièrement, bien, v'là pas longtemps, je lisais le livre de M. Jacques Grand'Maison qui nous rappelait que, quand le jugement fout le camp... et je me dis: Il y a quand même quelque chose, comme démocratie, comme société pluraliste, où à quelque part toute idée ne doit pas nécessairement prendre forme et elle doit être soumise à la plus grande prudence et la plus grande sagesse. Et c'est dans cet esprit que nous essayons de travailler et de s'insérer dans cette démarche qui reflète le respect d'une grande démocratie.

Donc, pour nous, naturellement, nous croyons que le projet de loi mérite une réflexion profonde, puisque les enjeux réels sont importants. Et, pour nous, on voit deux grands enjeux: naturellement, le droit des enfants, en premier lieu, et la redéfinition de la famille tel qu'il apparaît dans le Code civil québécois. Donc, pour nous, ça, ce sont les grands enjeux.

Dans un premier temps, je vais parler de la question du droit des enfants qui, pour nous, est sûrement la chose la plus importante dans tout le débat. D'ailleurs, M. Bégin l'a très bien mentionné, lors de sa conférence de presse, que même l'opinion québécoise est très partagée sur cette question et elle n'est pas facile à traiter. Elle n'est vraiment pas facile à traiter. Et je crois qu'il faut y travailler un petit peu, et nous aimerions apporter quelques pensées.

Naturellement, nous ne sommes pas des spécialistes. Nous ne sommes pas des gens qui travaillent dans le domaine des lois. Nous sommes seulement des croyants, des chrétiens qui essayons de partager le mieux possible nos connaissances. Espérons que ça pourra quand même ajouter à tout ce qui a déjà été dit.

Je crois que les enfants, et nous croyons que les enfants sont un don et un privilège et non un droit, en ce sens qu'aborder la question de l'adoption des enfants par des couples de même sexe sous l'angle des droits, je crois qu'il y a quelque chose, là, qui n'est pas tout à fait juste. Nous croyons que les enfants représentent... ce sont des humains, ce sont des personnes... et qu'ils sont un don et un privilège. Je crois que c'est une nuance importante.

Le droit québécois établit d'une façon assez claire l'intérêt de l'enfant, et c'est le seul critère prépondérant en tout ce qui affecte les droits de l'enfant. Naturellement, les clauses ne sont pas exhaustives, elles sont là et elles portent à interprétation, et chacun, on doit s'y arrêter, elle est complexe. Mais c'est un critère qui a préséance sur toute autre considération, en incluant les intérêts particuliers et les droits des parents.

Nous sommes à un point où on doit se poser la question dans ce projet de loi: Où est l'intérêt d'enfant? Comment représenter un intérêt d'enfant dans de telles considérations? Nul besoin de rappeler l'article 543 du Code civil, qui dit que «l'adoption ne peut avoir lieu que dans l'intérêt de l'enfant et aux conditions prévues par la loi».

Nous ne croyons pas que ce critère ait été contesté par quiconque devant cette commission. Mais, depuis le début de cette commission il y a deux jours, on entend peu parler de cette notion de la part des communautés gaies et lesbiennes du Québec. Ceux-ci, plutôt, abordent la question de leur point de vue en faisant valoir que les couples de même sexe sont susceptibles de faire d'aussi bons parents que les hétérosexuels et que, dès lors, leur intérêt est préservé. La question n'est pas de savoir, je pense, dans ce contexte-là: Est-ce que les couples de même sexe sont capables d'élever des enfants? Sûrement que des gens seraient capables de bien le faire, sûrement des gens le feraient moins bien. Je pense qu'on peut appliquer le même principe aux couples hétérosexuels: certains élèvent très bien leurs enfants, d'autres les élèvent moins bien. Je pense que ce n'est pas là qu'est le noeud de la question.

La vraie question, plutôt, est de se poser si le fait pour un enfant d'être élevé par deux pères sans mère ou par deux mères sans père est véritablement dans l'intérêt de l'enfant qui se retrouvera un jour dans un contexte familial et qui aura à s'identifier et à y vivre au milieu de la société.

Certains intervenants, cette semaine, entre autres l'Association des centres de jeunesse, ont fait valoir qu'aucune étude aux États-Unis ou au Canada ne pouvait démontrer des impacts négatifs, des impacts soit psychoaffectifs ou qui pourraient jouer sur l'orientation sexuelle des enfants. Naturellement, le phénomène est tout à fait nouveau à une société moderne ou postmoderne ou... Je ne sais pas comment toujours la classer. Cette société fait des choix et elle avance, et on a très peu de données qui sont ramassées. Notre histoire ne nous le permet pas, étant donné que nous avons travaillé dans un cadre précis, et je ne pense pas que d'autres références ailleurs pourraient bien nous aider à ce niveau-là.

Et il n'y a rien qui nous dit qu'il n'y en aurait pas non plus, des conséquences. Et on ne croit pas que quelque scientifique sérieux que ce soit serait prêt à venir ici et déposer dans cette commission avec certitude qu'il n'y en a aucun, impact négatif. C'est comme si moi, de mon côté, j'étais prêt à assurer qu'il n'y a aucun impact négatif pour un enfant de grandir dans un foyer hétérosexuel qui est plutôt dysfonctionnel. Je dirais: Oui, il y a un impact. Et d'ailleurs nous sommes en mesure de le constater déjà depuis quelques années.

Donc, de faire fi de tout ça, je crois que ce serait de travailler un peu à la légère. Je crois qu'il y a un risque et qu'un risque est présent et je crois qu'autant les couples hétérosexuels comme les couples du même sexe doivent travailler dans la transparence dans un dossier comme ça.

C'est bien sûr que c'est facile de faire valoir, par des moyens de communication tels qu'une commission parlementaire ou les médias, et d'essayer de refléter que tout va bien, mais je pense qu'il faut être honnête et se dire les vraies choses dans tout ça.

Donc, on le voit, par exemple, dans les derniers numéros des quelques années de la revue L'actualité ou dans les reportages, par exemple, lorsqu'on pose la question, il est bien évident ? du moins, c'est ce que les enfants semblent dire ? que l'absence des pères les marque énormément dans un foyer hétérosexuel. Donc, si les enfants sont capables de pointer ça, je crois que, dans un même contexte où il y aurait un mariage avec des gens de même sexe, il y aurait sûrement aussi des problèmes qui existeraient.

n(10 h 20)n

Donc, si le gouvernement va de l'avant pour permettre l'adoption des enfants par des couples de même sexe, que va-t-il faire si un jour des études démontraient que des troubles attribuables à leur situation familiale ont été identifiés chez les enfants de couples homosexuels? À ce moment-là, on ne pourra plus reculer l'horloge, on ne pourra plus revenir sur les considérations, on ne pourra pas essayer de réfléchir. On sera obligés d'endosser et de vivre avec les décisions que nous avons prises. Et notre histoire nous rappelle que, des fois, des décisions auraient dû être faites avec une plus grande prudence, une plus grande sagesse.

Naturellement, le futur, nous ne sommes pas des devins, il n'y a pas de boule de cristal pour nous dire comment est-ce que ça va aller. Et je sais que tout le monde travaille dans un intérêt commun, mais en même temps il ne faudrait pas négliger cet aspect-là non plus.

Et ce n'est pas autant ceux qui endosseront et qui rendront possible le projet ? soit que ce soient les autorités gouvernementales ou les parents du même sexe ? mais c'est surtout les enfants qui en subiront, j'ai l'impression, les conséquences les plus grandes, et c'est eux qui seront poignés avec le problème de manière beaucoup plus profonde et qui... ça va sûrement être pour eux... définir et affecter leurs décisions. Donc, c'est quand même...

Je crois que l'article de loi qui travaille... qui nous présente que nous devons travailler dans l'intérêt de l'enfant, il y a beaucoup encore de délibérations qui doivent avoir lieu autour de cette clause-là, mais je crois que c'est la première chose à laquelle on fait appel ce matin, c'est que nous devons travailler dans l'intérêt de l'enfant. Et je crois aussi qu'il y a une question de bon sens. Naturellement, le bon sens fait référence plus à une question de sagesse, de prudence et, ça aussi, je crois que ça doit être inclus.

Et je crois aussi que des questions aussi simples que celles que je vais vous présenter dans quelques instants sont les questions des gens, qui se posent à tous les jours. Hier, j'étais dans les médias, à TQS, et les gens sont vraiment concernés pour des questions vraiment pratico-pratiques. Ce n'est pas tellement la législation de la chose, ce n'est pas nécessairement les droits et libertés, mais les gens sont arrivés avec des questions très pointues et que n'importe qui, n'importe lequel citoyen serait en mesure de dire, et je vous en livre quelques-unes: Qui d'entre nous aurait souhaité être élevé par deux mères sans père ou par deux pères sans mère? Qui d'entre nous, qui avons des enfants, souhaiterait, en cas de décès, confier la garde permanente de ses enfants à un couple qui les priverait du droit légitime à un père ou à une mère? En vertu de quoi ou de quel principe priverait-on des enfants au droit ? car c'est bien là un droit ? d'être élevé et d'être aimé par un père et par une mère? Comment réagit un enfant qui arrive à l'adolescence et qui se compare avec ses camarades qui ont une mère et qui ont un père? Comment peut-on sincèrement et honnêtement imaginer que de vivre toute son enfance et son adolescence dans un milieu homosexuel n'ait aucune influence un tant soit peu sur l'orientation sexuelle de la personne qui a toujours vécu avec deux hommes ou deux femmes? Enfin, est-ce que beaucoup d'entre nous, qui ne sont ni gais ni lesbiennes, auraient vraiment souhaité passer son enfance et grandir dans un contexte homosexuel?

Quand les gens sont saisis de cette question-là ? j'en ai fait l'exercice dans les dernières semaines ? il y a une tournure dans le débat. Ha, ha, ha! Il y a une tournure dans le débat parce qu'on fait référence à notre expérience et on fait référence à ce que l'on souhaite pour les gens qu'on aime et qui sont autour.

Donc, prenons un temps d'y réfléchir, à cette question-là du droit de l'enfant...

Le Président (M. Gautrin): M. Marcouiller, je dois vous rappeler que le temps passe. Il vous resterait deux minutes. Si vous pouviez synthétiser votre pensée.

M. Marcouiller (Gilles): Deux minutes? Parfait. Bien, ça, c'était d'ailleurs le point central. Si vous permettez que je puisse toucher à la question de la famille rapidement...

Le Président (M. Gautrin): Tout à fait.

M. Marcouiller (Gilles):...et puis vous pourrez me rappeler à l'ordre.

Le Président (M. Gautrin): Tout à fait. Non, mais j'essaie de le faire avec discrétion.

M. Marcouiller (Gilles): C'est bien. L'autre enjeu souligné, naturellement, c'est la reconsidération de ce que c'est qu'une famille au Québec. Je crois que la famille est sans contredit l'institution la plus ancienne et la plus naturelle de toutes les sociétés, sans quoi aucune société n'existerait, ni la société québécoise. Je crois qu'il faut se rappeler de ce que nos pères et nos mères ont fait pour le Québec depuis des années et que c'est dans ce cadre-là qu'a été seulement rendu possible tout projet de société et que nous pouvons aujourd'hui encore travailler, sur lequel nous pouvons travailler et l'articuler.

J'essaie d'aller plus vite, je dois sauter quelques lignes. Et si... Par contre... On voit présentement justement la question de l'éclatement des familles et on voit les problèmes sociaux qui sont en train de se passer lorsqu'on parle du taux de suicide chez les adolescents, lorsqu'on parle du taux de suicide chez des hommes entre 19 et 35 ans, les problèmes d'incapacité de s'adapter dans un milieu scolaire. Il y a des problèmes très sérieux et très profonds qui existent actuellement, déjà dans le cadre actuel sur lequel nous travaillons.

Maintenant, est-ce que d'ajouter de nouveaux cadres ou de nouveaux régimes matrimoniaux, est-ce que ça va rendre les choses moins complexes? Je crois que ça va probablement rendre les choses plus complexes. Maintenant, est-ce que nous ne devrions pas plutôt nous attarder à ce qui existe déjà et essayer de donner des moyens aux gens d'essayer de mieux fonctionner dans ce qui existe.

Donc, c'est pour ça que nous vous lançons en quelque sorte les propositions, les recommandations que nous avons faites. Je vais juste les relire:

De surseoir à la présentation et au dépôt de l'Assemblée nationale du projet de loi sur l'union civile des personnes de même sexe afin d'en faire un enjeu électoral lors de la prochaine élection afin que les Québécois puissent se prononcer sur cette question de façon claire. Et la raison, c'est parce que c'est une refonte quand même des institutions fondamentales de notre société qui sont même plus vieilles que notre régime parlementaire;

La deuxième chose, c'est que, dans tous les cas, l'adoption des enfants par des conjoints de même sexe ne soit pas permise dans le projet de loi final si celui-ci vient qu'à y être déposé;

Et que des états généraux soient convoqués par le gouvernement afin de trouver des solutions concrètes aux problèmes vécus par les familles actuelles, et particulièrement par les enfants qui y vivent.

C'est les représentations que nous voulions faire.

Le Président (M. Gautrin): Je vous remercie, M. Marcouiller. Et, pour commencer les échanges, je passerai la parole au ministre de la Justice.

M. Bégin: Alors, merci, madame, messieurs.

Le Président (M. Gautrin): M. le ministre.

M. Bégin: M. Marcouiller, vous avez abordé le dossier sous l'angle des enfants, et je pense que c'est effectivement une bonne façon d'aborder la question. Ça a été celle que la plupart des intervenants, à date, ont eue. Bien sûr qu'on parle de l'institution de l'union civile dans les rapports qu'il crée entre les personnes qui s'unissent, mais on a surtout mis l'accent, les gens qui sont venus ici, sur les enfants. Alors, je pense que, effectivement, c'est l'angle sous lequel on doit regarder cette question-là parce que, dans notre société, que l'on veuille ou qu'on ne le veuille pas, qu'on soit d'accord ou pas, il y a des enfants. Il y a des enfants qui naissent dans des conditions de monoparentalité, il y en a qui naissent dans des conditions où les couples sont gais ou lesbiennes, il y a des adoptions qui sont faites, etc. Donc, c'est une réalité, les enfants, qu'on ne peut pas exclure.

Ce que l'on retient également, c'est que, indépendamment des choix des parents, quelle que soit l'idée qu'on puisse avoir, ces enfants, ils sont là et, si on les regarde pas, ils seront avec ou sans droits, dépendamment de ce que nous ferons.

En 1980, Marc-André Bédard, qui était mon prédécesseur à la Justice, a fait une grande modification à nos lois civiles et en particulier faisait une déclaration importante qui était de dire: Nous faisons disparaître les bâtards, les enfants illégitimes, et dorénavant tous les enfants seront égaux. Mais la société a évolué beaucoup depuis 1980. Par exemple, l'union de fait, qui n'existait à toutes fins pratiques pas à l'époque ? je parle de l'union de fait hétérosexuelle ? qui n'existait à toutes fins pratiques pas, est devenue au Québec une façon de vivre presque aussi importante que le mariage, sinon plus importante même ? pas si on prend la masse totale puis on la divise, mais, si on prend année après année ce qui se passe, il y a plus de gens année après année qui vivent en union de fait que de personnes qui vivent dans le mariage, parce que les gens choisissent ce mode-là.

Et il y a des enfants qui naissent dans ces unions de fait et il y a des droits qui existent puis d'autres qui n'existent pas parce que, à date, le législateur n'a pas donné de droits. Donc, des enfants dans notre société, dans des institutions que nous acceptons, que nous comprenons, ont des traitements différents à cause des choix que nous avons faits par le haut de ne pas les leur donner.

S'est développée par la suite la connaissance et, je dirais, la reconnaissance de l'homosexualité comme étant un état de situation que nous n'avions pas à juger, et vous avez bien dit vous-même que vous ne portiez pas de jugement là-dessus, ça m'apparaît conforme. Mais là où je pense qu'on se sépare, c'est lorsque vous dites: Devons-nous agir à cet égard-là? Et là vous mettez un plateau de la balance, vous mettez: Vous avez un fardeau de preuve à offrir qui est de nous prouver par la négative qu'une telle chose n'arrivera pas.

n(10 h 30)n.

Par contre, ceux qui sont venus ont mis dans le plateau de la balance, pour agir, ce qui se passait. Par exemple, trois jeunes hier, trois beaux jeunes, je devrais dire, sont venus nous témoigner, et je pense qu'ils ont ému toutes les personnes qui étaient ici, pas parce qu'ils étaient cuculs, excusez-moi l'expression, mais parce qu'ils ont eu des propos extraordinaires sur leur façon de se voir et de voir ceux qui les avaient élevés. Et ils disaient: On aimerait que tout le monde puisse vivre comme ça, mais, surtout, ils parlaient des enfants qu'ils avaient été et des conséquences qui découlaient de leur situation. Et, dans le plateau de la balance, ils disaient: Nous, on a été très bien élevés; on est très heureux; mon père, ma mère, c'est extraordinaire; mes deux pères, c'est extraordinaire. Une a même dit: J'ai eu plus d'affection de la part de mon beau-père homosexuel que j'en ai eu de mon père, le conjoint de ma mère. Alors, on voit que c'est très variable comme situation.

La question que je veux vous poser: Quand on regarde par rapport aux enfants, est-ce qu'on doit porter un jugement, exiger une preuve pour leur donner la même chose que les autres enfants, peu importe ce que les parents ont pu faire pour qu'ils naissent?

Le Président (M. Gautrin): Qui veut répondre?

M. Marcouiller (Gilles): Je peux prendre cinq secondes pour y réfléchir?

Le Président (M. Gautrin): Bien sûr.

M. Marcouiller (Gilles): La question est très bonne. Je crois que, dans le fond, ce n'est pas qu'on lance le fardeau de la preuve aux personnes qui pourraient en faire les revendications. Je crois que c'est juste une question de bon sens qu'on est en train de poser, c'est-à-dire, il semble déjà y avoir un problème bien apparent dans notre société pour ce qui est de l'intérêt de l'enfant. J'ai travaillé dans le domaine de l'enseignement pendant plusieurs années. Maintenant, par mes fonctions aussi, je suis appelé à marier des gens, à soutenir des gens. On assiste à des unions, on assiste à des désunions, et je m'aperçois toujours que les drames sont beaucoup plus vécus de manière plus intense chez les enfants des fois que chez les parents, malheureusement. Donc, ce n'est pas nécessairement un fardeau de la preuve que j'essaie de lancer, ce ne serait pas un argument, je pense, qui serait valable. C'est juste que, quand même, je le constate.

Je constate qu'il y a quelque chose qui est quand même nouveau, je constate quand même quelque chose sur lequel nous avons encore moins de données et moins d'information. Je n'enlève pas la bonne volonté des gens qui pourraient s'y engager, mais il y a quand même quelque chose de complexe. C'est sûr qu'il n'y a pas personne encore, en tout cas du moins que je connaisse, qui a voulu se sacrifier sur la place publique en disant: Bien, voici des données et, si vous pensez que les relations hétérosexuelles sont compliquées, regardez les homosexuels, c'est encore peut-être plus complexe. Sauf, hier, l'opinion de quelqu'un qui appelait sur les ondes, quand j'ai appelé, puis... quand j'étais là avec M. Deltell, à TQS, qui a dit: Moi, je suis gai depuis plusieurs années, je connais bien la communauté gaie et je suis contre le projet. J'ai dit: C'est intéressant; on est en ondes, dites pourquoi. Bien, lui, ce qu'il a dit, il a dit: Écoutez, il n'y a pas de données, mais, dans la communauté gaie... il a dit: Si vous pensez que dans les couples hétérosexuels il y a des dysfonctions sérieuses, qu'il y a un problème de relations entre hommes et femmes, vous devriez voir ce qui se passe dans nos communautés.

Et je n'apporte pas ça pour dire que c'est une preuve, ce n'est pas une preuve. Mais, quand même, ce que je suis en train de dire, c'est qu'on travaille déjà dans le complexe, dans le flou, et on ne sait pas à quoi attribuer actuellement les effets sociaux sur les enfants: qui sont responsables de ça? Maintenant, en créant un autre ordre, un nouvel ordre, ce que je suis en train de dire, c'est qu'il ne faut pas s'attendre à ce que ce soit nécessairement moins complexe. Et on peut toujours travailler dans l'intérêt de l'enfant dans les deux cas, ça, je suis bien d'accord avec vous, mais la seule chose que... de dire, c'est qu'il me semble qu'il ne faudrait pas prendre pour acquis que ça va mieux fonctionner, que ça pourrait être égal ou ça pourrait être pire. Je crois qu'il faut être honnête et être objectif dans ça. C'est un peu ce que...

Le Président (M. Gautrin): M. le ministre.

M. Bégin: Je pense que ce serait très utopique de penser que des hommes cesseraient d'être des hommes, que des femmes cesseraient d'être des femmes, quelle que soit la situation. Je pense que l'humanité, c'est une chose complexe, difficile, mais aussi une réalité qui évolue beaucoup. Et je pense que nous devons regarder les choses de cette manière-là.

Tout à l'heure, vous avez sans doute assisté à la présentation des jeunes de l'Université Laval qui disaient: À la limite, on pense que c'est l'âge du mariage qui devrait être monté à 18 ans. Si on regarde, historiquement, c'est tout à fait à l'encontre du courant dominant pendant des siècles. Le Code civil du Québec prévoyait, il n'y a pas longtemps, 12 ans et 14 ans pour le mariage. Et maintenant, l'âge est rendu à 16 ans. Et maintenant, voyez-vous, des jeunes nous disent: Peut-être qu'on devrait aller à 18 ans. Alors, dans cette foulée de regarder les choses qui se passent, parce que les choses, elles sont, et on ne les crée pas, on ne les veut pas, elles sont là, alors on les prend telles quelles.

Et c'est pour ça que je ramène, à l'égard des enfants, la question: Pourquoi ne pas accorder aux enfants les mêmes avantages et également les mêmes obligations à l'égard... qu'on ne leur donne pas les mêmes droits, qu'ils soient nés dans un mariage hétérosexuel, qu'ils soient nés dans une relation hétérosexuelle mais sans mariage ou même sans union de fait, formelle, ou encore monoparentale, et/ou encore dans une relation homosexuelle? Pourquoi? Quand on le regarde du point de vue de l'enfant, est-ce qu'on n'est pas obligé de dire: Ont-ils à subir les choix que des parents ont faits antérieurement? C'est ça, la question.

Le Président (M. Gautrin): M. Picard. Est-ce bien ça?

Une voix: Gariépy.

Le Président (M. Gautrin): Pardon?

Une voix: Gariépy.

Le Président (M. Gautrin): Gariépy?

Une voix: Gariépy, oui.

Le Président (M. Gautrin): Excusez-moi, j'ai fait une petite erreur lorsque j'ai inscrit les noms sur ma petite fiche devant moi pour savoir qui était qui. Alors, excusez-moi.

M. Gariépy (Stéphane): D'accord. J'aimerais apporter un complément de réponse à la question de M. Bégin. En ce qui concerne le fardeau de la preuve, je crois qu'il est un peu hasardeux qu'on puisse établir la preuve sur la base de témoignages qu'on amène dans le public, soit dans les médias ou soit même ici, à la commission, puisque... Bien sûr, si, moi-même, j'étais homosexuel et j'avais à démontrer que deux pères... une famille qui a deux pères et des enfants, on va amener les cas, les exemples qui vont être les plus favorables à notre cause et non l'inverse. Et c'est la même chose, si j'avais à démontrer que le mariage est bon et sain pour les enfants, un couple ? homme et femme ? qui ne présente que des avantages pour les enfants, je n'amènerais pas des mauvais exemples où il y a abus des enfants. Ça, ça va de soi. Alors, baser la preuve sur le simple témoignage, pour moi, je trouve ça personnellement quelque peu incertain.

Mais, pour revenir à la question fondamentale, à savoir: Est-ce qu'on doit étendre finalement ce droit et les avantages qui sont liés aux couples mariés? je crois que, si, déjà, un couple, que ce soit un couple d'hommes, par exemple, où il y a deux pères ? parce que le point que je veux amener est important... si le couple présente déjà deux pères, ils ont l'enfant, c'est qu'il y a déjà un père pour cet enfant dans le couple. Il n'y a pas eu adoption. Donc, déjà, il y a un père dans le couple, l'un des deux pères qui a des droits par rapport à l'enfant qu'il y a dans ce couple homosexuel. Je crois que, jusqu'à une certaine limite, notre système actuel reconnaît que ce père-là est vraiment le père de cet enfant, et ça, c'est stable, quelle que soit la situation qui va suivre dans les années suivantes. Mais d'étendre ce droit-là, paternel, à un second père qui, lui, n'est pas le père biologique naturellement, je crois que là on commence à s'égarer en ce qui concerne l'élargissement des droits.

Le Président (M. Gautrin): J'ai mon collègue...

M. Bégin: Peut-être juste une petite...

Le Président (M. Gautrin): ...il y a le collègue de Frontenac qui voudrait poser une question.

M. Bégin: Peut-être compléter la question du fardeau de la preuve.

Le Président (M. Gautrin): M. le ministre.

M. Bégin: Il est évident que les témoignages, comme vous dites, ce sont des gens qui, librement, ont choisi de venir témoigner dans ce sens-là. Mais il y a aussi, et ça, je me serais attendu à ce qu'elle arrive, cette preuve, si elle existe, qu'on nous établisse que c'est dysfonctionnel pour les enfants, que les couples, ça ne fonctionne pas, qu'il y a des chicanes, bref, que c'est invivable, alors que ce que nous avons de la part des experts que nous avons entendus... Nous entendions hier Mme Julien, docteur en psychiatrie... psychologie. Nous avons entendu Mme Susset aussi. Nous avons eu ? c'est simplement un hasard, mais quand même ? le dépôt par l'Association des pédiatres, 55 000 pédiatres américains qui ne voient aucune difficulté à ce qu'il y ait la reconnaissance, l'adoption des enfants. Il y a quand même quelque chose qui est là, qui dit: Il ne semble pas y avoir de problèmes différents ou aggravés que ceux qu'on retrouve dans la vie de tous les couples, quelle que soit leur orientation sexuelle. Des couples où il y a un ivrogne, des couples où il y a des gens qui couraillent, des couples où ça s'engueule à la journée longue, des couples qui sont vraiment dysfonctionnels, quel que soit le modèle, nous en avons tous connu. Il y a des divorces régulièrement parce que les parties ne s'entendent pas. Il y a des monoparentales. Donc, la situation est toujours complexe. Alors, si on me disait, on m'apportait la preuve ici que vraiment, là, on est dans une situation catastrophique, là, j'aurais attendu cette preuve-là pour dire: Bien, il y a un équilibre entre les deux plateaux.

M. Gariépy (Stéphane): Êtes-vous en train de dire...

Le Président (M. Gautrin): M. Gariépy.

M. Gariépy (Stéphane): Merci. Excusez, M. le Président.

Le Président (M. Gautrin): Allez-y, vous avez la parole.

M. Gariépy (Stéphane): Je ne suis pas habitué aux procédures.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bégin: Nous non plus.

Le Président (M. Gautrin): Non, non, ce n'est pas grave. On va essayer d'être le plus souple possible.

n (10 h 40) n

M. Gariépy (Stéphane): Ce que nous sommes en train de dire en fin de compte, c'est qu'il y a un manque de connaissances fondamental en ce qui concerne le vécu. Le vécu de ce genre de couple est très récent dans l'histoire, entre autres dans notre histoire québécoise. Ce que nous sommes en train d'avouer, c'est que nous avons très peu de connaissances pour prendre une décision qui a quand même des conséquences qui sont immenses pour des enfants. Puis, là-dessus, moi, j'aurais tendance à suggérer, je crois qu'on le propose directement ou implicitement dans notre mémoire, c'est qu'il y aurait lieu d'approfondir cette question. Je crois que la plupart d'entre nous avons entendu ou lu, entendu parler ou lu des livres qui concernent la relation père-fils ou mère-fille. Il existe des livres du genre Père manquant, fils manqué. Il y a eu beaucoup de choses qui ont été écrites en ce qui concerne les relations père-fils ou mère-fille et l'importance du père comme l'importance de la mère. Là, on se retrouve dans une situation de couples homosexuels où, nécessairement, il va y avoir ou une mère absente ou un père absent, parce qu'il va de soi que, si tu as deux pères, il n'y aura pas de mère et, s'il y a deux mères, il n'y aura pas de père.

Le Président (M. Gautrin): Je vous remercie.

M. Gariépy (Stéphane): Merci.

Le Président (M. Gautrin): M. le député de Frontenac, il ne vous reste plus de temps, mais, enfin, je vais être souple.

M. Boulianne: Merci, M. le Président. Alors, bienvenue à la commission. C'est vrai que je pense qu'on a le droit à une diversité d'opinions, ça, je respecte ça, mais je suis un peu ébranlé par ce que j'ai entendu dans un Québec en 2002. Je pense que surtout, et je veux revenir effectivement sur le droit des enfants, à la sécurité des enfants... quand vous affirmez, parce que le ministre en a parlé un peu, que la redéfinition de la famille va avoir des conséquences négatives sur les enfants... Ça fait deux jours qu'on est en commission, et on a entendu, même si M. Gariépy pense que c'est une sélection, on a entendu des témoignages extrêmement importants.

Et je veux revenir aux trois jeunes qui étaient là hier, qui ont été élevés par des familles homosexuelles, pères et mères, des jeunes très solides, matures, très bien structurés, des jeunes qui ont des carrières importantes, dont deux ont terminé, l'autre est en voie de terminaison, qui ont parlé d'amour réciproque entre leurs pères, leurs mères, entre eux aussi, qui ont eu beaucoup d'affection, beaucoup plus que des enfants de couples hétérosexuels, qui ont été, si vous voulez, et qui en parlent avec beaucoup d'émotion... Alors, je ne peux pas comprendre comment vous pouvez affirmer qu'une redéfinition de la famille va avoir des conséquences négatives sur des enfants.

Le Président (M. Gautrin): M. Marcouiller.

M. Marcouiller (Gilles): Si vous permettez, je ne crois pas que c'est ça que nous ayons dit. Je crois...

M. Boulianne: Bien, c'est ce que j'ai lu là, mais...

M. Marcouiller (Gilles): En tout cas, je ne crois pas non plus que c'est ce qui est dans le mémoire. Ce qui est dans le mémoire dit que...

Le Président (M. Gautrin): ...votre pensée.

M. Marcouiller (Gilles): Pardon?

Le Président (M. Gautrin): C'est la chance de préciser votre pensée.

M. Marcouiller (Gilles): Oui. C'est que nous assumons que des adultes agissent en gens responsables, O.K.? alors, peu importe l'orientation sexuelle que l'on ait. On n'est pas en train de dire que c'est de fait que tous les enfants qui grandiraient dans des foyers de personnes de même sexe seraient affectés négativement. Ce que nous disons, c'est qu'il y aura sûrement un impact certain. De le nier, d'en faire fi, je crois que ce ne serait pas honnête, ce ne serait pas transparent. C'est ce que nous disons. Il ne faut pas... Et même si, ici, en commission, nous avons entendu ce qui est là, on pourrait aussi faire paraître des gens que, moi, je connais, que nous connaissons, qui ont vécu aussi la même situation et qui pourraient dire: Pour moi, ça a été négatif. Mais je n'oserais pas les présenter en disant que ça représente les faits scientifiques des choses. Ce que nous disons, c'est que nous invitons à une certaine prudence et à voir qu'il y aura... il y a un impact certain, certain, qui est tout à fait naturel. Je crois que c'est un élément qui découle du bon sens. De dire que les gens ne seront jamais capables d'élever des enfants et que tout ce que ce serait, ce serait négatif, je ne pense pas que ça, c'est ce que nous avons dit, à moins que nous n'ayons pas été assez clairs.

Sur la question de l'évolution, je suis bien d'accord avec vous que les sociétés changent, et notre société a grandement changé, elle est appelée encore à changer dans ce nouveau siècle, sauf, quand même, que le rôle des institutions permet une certaine permanence à l'intérieur de la société. Que ce soit le régime tel que nous le connaissons, par exemple, politique, le régime parlementaire que nous avons choisi ou qui nous a été imposé il y a bien des années, ça représente quand même une institution permanente et qui, en quelque sorte, assure l'identité de tous les Québécois et de toutes les Québécoises et qui nous donne un certain tissu social. Ce que nous disons, ce qu'il y a dans la Charte... dans le Code civil, la famille, pour moi, joue à peu près le même rôle, c'est une institution qui assure une certaine permanence. Maintenant, on peut la travailler, on peut voir comment est-ce qu'elle doit se réarticuler dans le XXIe siècle, mais je crois que les institutions fondamentales qui sont les assises de toute notre société sont en quelque sorte les seules garanties que nous avons sur l'idée d'arriver à bâtir quelque chose qui est en avant. Autrement, si nos institutions fondamentales sont enlevées... bien, enlevons le régime parlementaire, enlevons les parlementaires, enlevons tout ça et créons un nouveau gouvernement. Mais nous ne croyons pas que nous allons travailler dans les meilleures conditions possible.

Donc, ce que nous disons, c'est qu'il faut quand même respecter les institutions que l'on a, les adapter aux nouvelles réalités et, en quelque sorte, s'assurer que vraiment ce qui représente nos fondements soit toujours honoré. C'est ce que nous disons, et je crois que c'est juste légitime et c'est du bon sens d'avoir ce discours-là.

Le Président (M. Gautrin): Brièvement, M. le député de Frontenac.

M. Boulianne: Oui. Donc, ce que vous dites, c'est qu'une union homosexuelle avec des enfants n'est pas une institution fondamentale.

M. Marcouiller (Gilles): Ce que je dis, c'est que le mariage, ce qu'il a toujours été, est une institution fondamentale et que la reconnaissance au mariage... des droits homosexuels n'est pas une institution fondamentale. Elle n'a jamais existé dans le Code civil. On veut l'amender, on va le changer. Et, à ce que je sache, dans l'histoire du Québec, ça ne s'est jamais produit. Donc, je dis qu'elle n'est pas une institution fondamentale. On peut l'établir comme institution fondamentale et la changer. Je ne dis pas que les institutions fondamentales ne doivent pas être transformées.

L'histoire de la civilisation occidentale nous démontre bien qu'on a passé par toutes sortes de changements, sauf que... en étant conscients, nous, dans notre propre milieu, dans notre propre culture, qu'il y a des institutions fondamentales reconnues, et je crois qu'on doit les protéger et s'assurer... Parce qu'elles représentent ce que nous sommes et que, lorsque nous essayons d'insérer de nouvelles institutions fondamentales comme celle-là, il faut le faire avec une grande prudence et sagesse. C'est ce que nous vous disons. Nous ne pouvons pas dire: Bien non, ça va être mauvais. Je n'aurais pas le potentiel, je n'aurais pas la crédibilité de dire: Ça va être mauvais. Ce que je suis en train de dire, c'est qu'il y a une orientation qu'on doit considérer et qu'on doit faire attention dans ce qu'on est en train de faire. Je crois que c'était juste...

Le Président (M. Gautrin): Merci.

M. Boulianne: Juste une dernière remarque. En tout cas, ce n'est pas ce que j'avais lu dans le rapport. Vous, vous apportez des nuances aujourd'hui, là, que ce n'est pas nécessaire...

M. Marcouiller (Gilles): Bien, je ne sais pas. Je suis content de le faire, parce que je ne voudrais pas être perçu comme ça, et ce serait facile, à cause de ce que l'on est, de nous dire: Vous êtes des gens qui sont contre l'évolution de la culture.

Le Président (M. Gautrin): Je me dois de mettre un terme à ce débat...

M. Marcouiller (Gilles): Oui, pardonnez-moi.

Le Président (M. Gautrin): ...compte tenu du temps. Je m'excuse. Si on revient peut-être... Mme la députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. M. Marcouiller, bonjour, Mme Beaulieu, messieurs. Je ne sais pas... Vous savez, c'est très rare que l'opposition officielle va être d'accord avec le côté gouvernemental, mais je vais être d'accord avec M. le ministre qui vous a mentionné, lors des commentaires qu'il a formulés, les témoignages que nous avons reçus, hier, de trois jeunes, évidemment avec les nuances que vous avez vous-même mises, puis M. le ministre en a ajoutées. Mais, à tout le moins, je...

Vous savez, l'intérêt d'une commission, d'une consultation générale et d'auditions publiques, c'est d'avoir accès à des groupes, des associations, des individus qui viennent partager avec nous leur réalité. Et notre souci premier, c'est d'écouter ces groupes-là pour pouvoir apprendre. Parce que, vous savez, c'est difficile de prétendre... surtout, vous l'avez dit, c'est un domaine extrêmement technique, pointu, délicat.

Mais je voudrais attirer l'attention... Je ne sais pas si vous pouvez avoir accès aux mémoires, mais, si jamais vous pouvez le faire, je vous invite à demander des copies. Je peux vous donner les miennes, mais elles sont barbouillées. Je sais que vous le comprendriez... 24M pour le témoignage de Ludovic Maillé-Prévost, vous lisez ça, et je sais que vous avez déjà, probablement, entendu de tels témoignages; il a été effectivement élevé par une mère lesbienne et il nous parle de l'amour, du dévouement, de la tendresse, de l'accompagnement de cette mère-là. C'est extrêmement intéressant, très beau également. On a eu le témoignage de Julie Pétrin, qui a été élevée par son père qui est homosexuel, et, effectivement, elle aussi confirme ce que M. le ministre a dit: l'attention, l'amour, l'encadrement, l'aide pour les devoirs qu'elle a reçue de son beau-père alors qu'elle ne connaît pas son père. Et on a eu aussi le témoignage d'Annick Gariépy, qui est avocate et qui a aussi été élevée par une mère lesbienne, et Annick a terminé son témoignage en nous disant: «J'espère seulement un jour pouvoir marcher aux côtés de ma mère», parce qu'elle vit beaucoup la loi du silence. Vous savez, c'est des sujets qui sont délicats. Et je pense que ces témoignages-là ont pu nous aider et pourront peut-être aider. Je sais qu'il y en a d'autres, mais je sais que vous serez intéressés à les lire. Peut-être que M. le Président pourra vous dire comment c'est possible.

n (10 h 50) n

J'aimerais aussi porter à votre attention le mémoire 19M, ce sont le fruit, évidemment, je vais dire, de quelques recherches empiriques. Parce que je partage votre souci. Y a-t-il des recherches? Depuis combien de temps? Que disent-elles? Sur quoi portent-elles? Alors, cette recherche-là, et c'est le Dre Danielle Julien, qui est Ph.D. au département de psychologie de l'Université du Québec à Montréal. Et il y avait quatre questions qui ont été abordées: «Les enfants de mères lesbiennes ont-ils des problèmes de confusion de genre? Ces enfants ont-ils des problèmes de rôles sexuels? Ces enfants sont-ils plus nombreux que les enfants de parents hétérosexuels à devenir gais ou lesbiennes une fois adulte? Ces enfants sont-ils davantage à risque d'abus sexuels que les enfants de parents hétérosexuels?» La cinquième et dernière: «Ont-ils davantage de problèmes d'anxiété, de concentration et d'intégration sociale à l'école?»

Évidemment, le Dre Julien, tout en reconnaissant les limites de ces recherches, déclare: «Les chercheurs n'ont pas trouvé de différences entre les enfants de parents homosexuels et ceux de parents hétérosexuels: les enfants se développent de manière comparable dans les deux groupes.» Et peut-être que le président pourra vous dire comment vous pourriez y avoir accès.

Et nous aurons, cet après-midi, le Dre Karine Josée Igartua et Me Marie-France Bureau; les c.v. sont extrêmement complets, comme la plupart des c.v. qui ont été soumis en appui aux mémoires. Et elle fait également une revue partielle de la recherche. Et je sais que vous allez trouver ça intéressant. Et mon souci, c'était de partager ce que j'apprends avec vous, parce que je sais que vous êtes préoccupés également par ces questions-là.

Une voix: ...

Le Président (M. Gautrin): Oui, certainement...

M. Mérette (Pierre): M. Mérette.

Le Président (M. Gautrin): Merci. Je m'excuse.

M. Mérette (Pierre): On fait beaucoup état depuis tantôt ? M. le ministre en a parlé, puis Mme la députée en parle depuis tantôt ? du témoignage de ces trois personnes, des trois jeunes dont vous parlez. Je pense qu'on ne met pas en doute la crédibilité, évidemment, du témoignage de ces jeunes-là. Par contre, ce qu'on peut dire, ce que je me demande, c'est: Si, nous, ici, on était arrivés avec trois témoignages contradictoires, c'est-à-dire, des gens qui seraient venus dire ici qu'en ayant vécu dans un milieu homosexuel ils ont subi des séquelles, que ce soit psychologiques ou psychoaffectives, je me demande quelle réaction vous auriez eue. Parce que vous semblez découler une règle générale de ces trois témoignages-là, alors que, d'après moi, c'est juste, en fait, trois témoignages... ce que ça veut dire, là. Si on arrivait avec trois témoignages contradictoires, ça aurait autant de valeur que ces trois témoignages-là. Puis il y en a, il y en a, des jeunes, qui ont vécu des difficultés dans des milieux homosexuels. Mme Beaulieu, qui est ici, est enseignante, puis elle a connu des cas particuliers, et je ne pense pas qu'il faille découler une règle générale de ces trois témoignages-là. C'est ça, c'est l'intervention que je voulais faire. Je pense que c'est une précision importante, parce qu'on semble vouloir insister beaucoup là-dessus, puis je ne pense pas que c'est vraiment significatif, là, comme...

Le Président (M. Gautrin): Si vous me permettez, au nom de la commission, pour vous répondre, je prends la parole. C'est vrai qu'il y a eu des témoignages individuels qui avaient un côté très sensible, hier, et je sais bien qu'on pourrait aussi en présenter, des témoignages, qui présenteraient des situations aussi dramatiques dans ce cas-là. Néanmoins, et je pense que la commission pourrait vous transmettre le rapport d'analyse de Mme Julien, qui dit: Il n'y a pas plus d'incidences parmi les enfants issus de couples à deux parents homosexuels qu'il n'y en a lorsque c'est des parents hétérosexuels. Donc, il y a des cas aussi avec deux parents hétérosexuels qui sont dans les cas problématiques, il y a des enfants problématiques, bien sûr, dans des cas de couples homosexuels, mais il n'y a pas plus d'incidences dans un cas que dans l'autre. Et, si la commission était d'accord, je pense que ce serait intéressant qu'on puisse vous transmettre le document...

Une voix: On ira en chercher.

Le Président (M. Gautrin): On ira en chercher... quitte à ce que, dans le débat, qui est un débat public, vous puissiez intervenir à ce moment-là en critiquant peut-être les études qu'elle a faites d'une manière ou d'une autre. Je pense que Mme la députée de Bourassa veut continuer, ou Mme la députée de Mercier.

Mme Lamquin-Éthier: Bien, je veux vous remercier de ces précisions-là puis du commentaire que vous avez formulé. Mon souci, c'est de partager avec vous. Vous savez, l'objectif, encore une fois, d'une consultation générale, c'est d'avoir accès à de l'information. Alors, c'était mon propos. Et, vous savez, apprécier d'autres...

Le Président (M. Gautrin): Mme Beaulieu voudrait intervenir, c'est ce que j'ai cru comprendre.

Mme Beaulieu (Denise): Oui, ce serait juste pour ajouter une chose ou préciser, parce que, au fond, fondamentalement, ce n'est pas un débat facile. Puis il a été question beaucoup des droits des enfants, du bien-être des enfants qui sont déjà dans une relation... c'est-à-dire dans une famille homosexuelle, puis je pense que, s'il y a quelque chose à faire sur le plan législatif pour justement donner à ces enfants-là les droits qui leur reviennent, je pense que ça doit être fait, là. Mais je veux préciser avec ça... c'est parce que, tantôt, on a parlé... le droit des enfants versus les droits des parents, dans le sens que... le couple homosexuel qui veut adopter des enfants. Bien, je pense que là, comme on disait, comme c'était dit dans le mémoire, les enfants sont un don et non un droit. Parce qu'on ouvre une porte, finalement, à placer des enfants qui ne sont pas au départ dans une situation telle quelle, de parents homosexuels, mais on va les chercher parce qu'on veut un enfant. Je pense qu'il y a toute cette dimension-là où l'enfant... à ce moment-là, on ne peut pas dire qu'on respecte son droit à avoir un père et une mère, parce qu'on va le chercher parce qu'on veut, en tant que couple homosexuel, avoir un enfant. Et là, je trouve, ça cause un problème social important, selon la perception que j'ai de cet aspect particulier, parce qu'on parle beaucoup du bien des enfants à partir des situations de fait, et c'est un fait, le père qui a un fils ou une fille et qui est en relation homosexuelle, il y a une situation qui est là puis qu'il faut regarder attentivement pour que cet enfant-là, justement, ne soit pas pénalisé par la situation. Mais, si on pense à une situation qu'on va créer, est-ce qu'on a vraiment le droit de créer cette situation-là pour un enfant?

Le Président (M. Gautrin): C'est une question. Mme la députée de Mercier, vous avez une question?

Mme Rochefort: Oui, M. le Président, merci.

Le Président (M. Gautrin): Et, moi, j'en aurai une après.

Mme Rochefort: J'ai oeuvré pendant plusieurs années auprès de jeunes de la rue et je peux vous garantir une chose: j'ai vu beaucoup d'enfants se ramasser à la rue après avoir été mis dehors par leurs parents parce qu'ils sont gais, parce qu'ils manquent de... mais je n'ai jamais vu un enfant se ramasser à la rue parce qu'il a des parents homosexuels, et j'en ai vu passer 5 000 par année, donc, dans un premier temps.

Une chose que j'ai retenue dans les auditions qu'on a eues dans les deux derniers jours, c'est particulièrement le témoignage de l'Association des centres jeunesse du Québec. Ils disaient que, pour eux, il n'y avait pas de problème à ce qu'un couple homosexuel adopte ou devienne famille d'accueil ? même, c'est régulier qu'ils soient familles d'accueil, c'est courant ? à condition que les évaluations soient faites le plus honnêtement possible. Actuellement, dans le contexte où on est, un couple hétéro peut faire une demande d'adoption, une personne seule peut faire une demande d'adoption, et un couple gai, il y a une ouverture pour ça. Mais ça a amené depuis des années des personnes homosexuelles à vivre dans le mensonge, et je me demande jusqu'à quel point on peut cautionner le mensonge. Petite réflexion, là.

Le Président (M. Gautrin): Est-ce que quelqu'un veut répondre?

Mme Rochefort: Et je vous dis: À quelque part, on ne devrait pas...

M. Marcouiller (Gilles): C'est une drôle de situation aussi, et on le voit des fois chez des couples hétérosexuels, où, de plus en plus, les gens sont mal à l'aise de dire qu'ils sont mariés: Voici mon épouse, voici mon mari. On dit: Voici mon chum, voici mon conjoint, et on sait qu'ils sont mariés. Donc, des fois, il y a des malaises qui sont créés, c'est dû à des perceptions qui sont bien évidentes dans la société. Dans notre cas, bien, on le sait, c'est parce que le mariage n'est pas quelque chose de valorisé. Donc, on part toujours avec une longueur en arrière, donc les gens essaient de s'organiser pour enlever ça. Ça crée un malaise chez les gens, mais ils vivent avec.

Donc, je suis bien d'accord avec toi que beaucoup de parents ont agi d'une manière irresponsable. Naturellement, c'est plus facile de répertorier l'inventaire, parce que, naturellement, c'est une institution qui est beaucoup plus présente et une réalité beaucoup plus présente dans la société québécoise. Maintenant, dans 40 ans, 50 ans, je le sais, on va se livrer à des exercices, la même chose, on va revenir à des nouvelles données. Et, comme on a dit, je ne pense pas que c'est la question de savoir que ton appartenance sexuelle va faire que tu vas te faire mettre dehors. Ce que j'ai dit tantôt, c'est: Le point-clé de tout ça, c'est d'avoir des adultes qui sont responsables. Si nous avons des adultes qui sont responsables, nous aurons des enfants qui seront responsables aussi. Et dans les deux cas, la responsabilité et l'irresponsabilité, des fois, elle est là. Donc, je pense que c'est ça qui est le noeud de la question. Moi, il y a des gens homosexuels que je connais que je respecte énormément. Ce sont des gens respectables, ce sont des gens très honorables et ce sont des gens responsables dans la société; ils n'agiraient pas d'une façon cavalière, surtout dans l'intervention des enfants, comme j'en connais aussi qui le feraient, et ça va dans les deux sens.

Je pense qu'il faut faire le procès ? c'est quasiment comme ça qu'il faut parler ? il faut faire le procès de cette institution du mariage telle qu'elle a existé toujours, mais il faudrait faire attention aussi de ne pas faire un procès dans le but de la condamner et de ne plus la reconnaître. Je crois qu'il faudrait toujours travailler dans un sens critique et de dire: Il y a des choses que cette institution a apportées, quelles sont les choses qu'une autre institution pourrait apporter? et faire un exercice d'essayer de se libérer de ces espèces de fantômes qui nous suivent ? surtout dans la société québécoise, concernant notre passé ? et essayer d'avoir un peu d'objectivité et de travailler. Mais votre point de vue est très bon, je l'apprécie énormément.

n(11 heures)n

Le Président (M. Gautrin): J'aurais, moi, une question à vous poser. Vous avez insisté beaucoup de votre témoignage sur la dimension de responsabilité envers les enfants mais, malgré tout, dans les couples homosexuels, c'est quand même une minorité des couples homosexuels pour lesquels cette question se pose. Le projet de loi d'union civile veut étendre ou faciliter ou formaliser l'union entre deux personnes de même sexe et l'union va prendre effet dès qu'il y a eu célébration de l'union. Vous êtes vous-même un célébrant, est-ce que vous seriez prêt, si la loi passe, à célébrer le mariage homosexuel?

M. Marcouiller (Gilles): Bien, je crois que M. Bégin était assez clair dans sa conférence de presse, dans le sens qu'il ne voulait pas imposer...

Le Président (M. Gautrin): Absolument. C'est pour ça que je vous pose la question.

M. Marcouiller (Gilles): C'est ça. Je pense que ce qu'il a dit, c'est qu'il ne voulait pas imposer au célébrant de faire ou de ne pas faire et qu'il laissait à la conscience de chaque individu, en toute bonne conscience et liberté. Donc, c'est la réponse que je donnerais à votre question.

Le Président (M. Gautrin): C'est-à-dire votre Église n'est pas fermée éventuellement à célébrer le mariage...

M. Marcouiller (Gilles): Ce que je dis, j'assumerais la liberté de ma conscience et mes engagements aussi dans tout ça, mais dans une ouverture quand même sur les conditions des personnes. Ça, c'est sûr et certain.

Le Président (M. Gautrin): Je vous remercie. Je crois que le temps est écoulé et je tenais à vous remercier de l'éclairage que vous avez apporté à cette commission. Et je demanderai... Je vais suspendre les travaux pour deux minutes et demander au groupe suivant, qui est le Centre d'information Robert Rumilly, qui a le plaisir d'avoir ses locaux dans mon comté ? alors, ça me fait plaisir de les accueillir ? de bien vouloir prendre place. Je suspens pour deux minutes.

(Suspension de la séance à 11 h 2)

(Reprise à 11 h 14)

Le Président (M. Gautrin): Alors, la commission ayant quorum, nous allons reprendre nos travaux et nous allons recevoir le Centre d'information nationale Robert Rumilly qui, je tiens à le signaler, a son siège social dans Verdun. C'est un plaisir de vous accueillir ici.

Alors, je vais vous expliquer notre cadre de fonctionnement. Vous avez 45 minutes qui est accordé pour votre témoignage, réparties de la manière suivante: 15 minutes pour la présentation de votre mémoire, 15 minutes pour les questionnements des députés ministériels et 15 minutes pour les questions venant des députés de l'opposition. Sentez-vous très à l'aise. Malgré le décor formel ici, ce qui nous importe, c'est d'obtenir votre point de vue beaucoup plus que d'être superformel. Alors, vous avez la parole. Je ne sais si c'est M. Noël qui parle ou...

M. Noël (Gilles): C'est-à-dire que je vais commencer par présenter ceux qui vont parler en premier.

Le Président (M. Gautrin): Très bien.

Centre d'information nationale
Robert Rumilly (CINRR)

M. Noël (Gilles): Je me présente, Gilles Noël, président du Centre d'information nationale. Et je suis heureux ici de participer à cette commission parlementaire avec MM. et Mmes les députés, les ministres. Je suis heureux aussi de voir que le président de la commission, c'est mon député de Verdun. Ça nous met dans un contexte qui est plus amical.

Le Président (M. Gautrin): C'est bien.

M. Noël (Gilles): Alors, je vais vous présenter en premier M. Robert Dufour, qui est membre du Centre d'information nationale et qui va vous présenter la partie qui concerne surtout la question de l'adoption des enfants. Alors, M. Dufour, c'est à vous.

Le Président (M. Gautrin): M. Dufour.

M. Dufour (Robert): Bonjour. Je me suis intéressé plus particulièrement, dans ce dossier sur la Loi instituant l'union civile des personnes de même sexe, à la question, là, de préjudice causé aux enfants adoptés dans le cadre de l'union civile des personnes homosexuelles.

Le 6 février 2002, Le Journal de Montréal, en page 18, tirait: Les gais réclament des droits parentaux comparables à ceux du mariage. On peut y lire ce qui suit: «L'union civile consentie aux couples gais devrait comporter des droits parentaux identiques à ceux dévolus aux couples hétérosexuels lors du mariage. En commission parlementaire, à Québec, hier, mardi, des groupes de défense des gais et lesbiennes ont souligné la nécessité de combler le vide juridique qui entoure les enfants de ces unions. Le parrain du projet de loi instituant l'union civile, le ministre de la Justice, M. Bégin, s'est montré sensible à la requête. Les gais proposent la parentalité. La parentalité serait en quelque sorte légalement similaire à la paternité. Cela entraînerait des droits de filiation, notamment par l'adoption des enfants par les conjoints d'un couple gai ou par la signature des deux conjoints d'un certificat de naissance de l'enfant. Le Code civil sera donc modifié pour que la définition de couple fasse état de deux personnes et non pas d'un homme et d'une femme.» Fin de la citation.

La conséquence de cette revendication est claire: l'union civile est donc un terme utilisé pour diminuer l'importance fondamentale du mariage pour la communauté, tel qu'exposé par le juge Pitfield dans la cause Egale Canada Inc. et al. versus The Attorney General of Canada et al., qui citait... le juge citait que l'union civile redéfinit judiciairement le mariage précisé par la «common law». La Constitution soutient que la définition du mariage est l'union d'un homme et d'une femme. Le juge Pitfield, s'adressant en cette cause aux activistes homosexuels, a jugé que leur cause ne tient pas debout, car cela tendrait un piège à la Constitution en opposant une partie de la Constitution à une autre.

Le mercredi 16 janvier 2002, Le Journal de Montréal, à la page 13, tirait ce qui suit: Norvège. Le ministre des Finances épouse son ami Yann Erik. Au dernier paragraphe, on pouvait lire ce qui suit: «Depuis 1993, une loi permet aux couples homosexuels de s'unir dans le cadre d'un pacte qui leur offre tous les droits et devoirs du mariage civil, à l'exception du droit à l'adoption.» Fin de la citation.

À la lumière de l'article du Journal de Montréal d'hier, il est clair que les activistes homosexuels réclament l'union civile, surtout pour le droit à la parentalité. Pourquoi la Norvège a-t-elle exclu le droit à l'adoption dans le pacte de l'homosexuel? À cet égard, nous vous recommandons de consulter le site de l'Internet suivant, là, le rsvpamerica.org.crafting%20aout%2000.htm.

Vous pourriez trouver l'enquête du Dre Judith A. Reisman, un psychiatre, du 7 août 2002, The Institute for Media Education, intitulée Crafting "Gay" Children - An Inquiry into the Abuse of Vulnerable Youth via Government Schooling & Mainstream Media. Les chiffres avancés dans cette enquête ont été rapportés en pourcentage pour faciliter l'interprétation. Les prédateurs sexuels, parmi une population de 100 homosexuels, abuseront de 375 garçons. Les prédateurs sexuels, parmi une population de 100 hétérosexuels, abuseront de neuf filles. La primauté du mariage réside dans sa fonction de transmettre la vie humaine. Les époux ont la responsabilité de prodiguer à leurs enfants amour, gîte, nourriture, protection, éducation, tutelle et valeurs morales.

n(11 h 20)n

En légalisant l'union civile homosexuelle, un juge ne pourrait plus accorder la priorité d'adoption aux couples hétérosexuels, causant ainsi un préjudice irréparable aux enfants sans défense qui seraient laissés à la merci des couples homosexuels potentiellement prédateurs. Certains diront que le même problème peut se poser avec des couples hétérosexuels qui pourraient abuser des enfants adoptés, et nous vous l'accordons. Toutefois, le fait qu'il y ait 42 fois plus de prédateurs sexuels dans la communauté homosexuelle que dans la communauté hétérosexuelle, les chances que l'enfant adopté soit abusé sexuellement seront de 42 fois supérieures chez les couples homosexuels.

Le fait que M. Paul Bégin se soit montré sensible à accorder aux couples homosexuels mariés civilement le droit d'adopter des enfants confirme notre appréhension. Le droit à l'adoption est interdit implicitement en Norvège, il doit être de même au Québec. Le droit des enfants de vivre dans une famille, telle que Dieu l'a toujours voulu, est fondamental dans notre société québécoise à majorité chrétienne à plus de 93 %. En moins d'une semaine, le CNRR a reçu 68 formulaires de pétitions approuvant notre mémoire dont la majorité était accompagnée de commentaires explicites démontrant combien cette loi choque la conscience de la collectivité québécoise.

Le PQ, le PLQ ainsi que l'ADQ auront un jour à payer le prix politique de l'adoption d'une loi qui ne saurait obliger les consciences. Cette loi s'écarte de la raison. Elle est injuste, car elle ne vérifie pas la notion de «loi». Elle serait plutôt une forme de violence.

M. Noël (Gilles): Merci, M. Dufour. C'est maintenant à M. Charles Apestéguy à faire sa présentation sur la souffrance vécue par les homosexuels.

Le Président (M. Gautrin): Monsieur ou père, je ne sais pas si je dois vous appeler père...

M. Apestéguy (Charles): C'est l'abbé Charles Apestéguy. Je suis prêtre catholique. Je suis secrétaire-adjoint du Centre d'information nationale Robert Rumilly. Donc, je me suis intéressé tout particulièrement, dans ce dossier sur la Loi instituant l'union civile des personnes de même sexe, à la question de la souffrance vécue par les personnes affligées du problème de l'homosexualité. La solution à ce problème n'est jamais traitée par les médias d'information qui, au contraire, collaborent trop souvent à faire de la désinformation sur le sujet de l'homosexualité, et je m'explique.

À la une du journal La Presse du lundi 6 août 2001, on pouvait lire en gros titre: Plus de 750 000 personnes chantent leur fierté dans les rues de Montréal. Voici l'affirmation absurde et mensongère écrite par les premières lignes de l'article de La Presse: «Plusieurs centaines de milliers de personnes ? 750 000 aux dires des organisateurs ? ont défilé dans les rues de Montréal hier après-midi pour crier et chanter leur fierté d'être gays, lesbiennes, bisexuels, transsexuels ou travestis, ou tout simplement pour célébrer la diversité.»

Arrêtons-nous quelques instants sur le chiffre de 750 000 personnes défilant à la fête gaie. Lors de la manifestation qui s'est tenue à Montréal contre la fusion des municipalités, on avait estimé à environ 75 000 personnes la foule de manifestants. La circulation était complètement paralysée dans le centre-ville. On veut nous faire croire que la foule du 5 août 2001 défilant à la fête gaie était 10 fois plus nombreuse que celle de la manifestation de Montréal contre les fusions. Si cela était vrai, cela signifie qu'une personne sur deux vivant sur l'île de Montréal est sortie de son domicile pour défiler à la parade gaie, puisque la population de la nouvelle ville de Montréal compte 1,8 million d'habitants.

Le gros bon sens nous indique que ce n'est pas vrai. En présentant cette fausse information en première page de La Presse, on donne l'impression à la population que ceux qui sont en désaccord avec ce genre de manifestation sont minoritaires. Personne n'ose plus s'indigner face à cette attaque contre la dignité humaine. C'est alors que la détresse psychologique s'installe sournoisement et peut même conduire jusqu'au suicide.

Piste de solution. Un nombre non négligeable d'hommes et de femmes présentent des tendances homosexuelles foncières. Ils ne choisissent pas leur condition homosexuelle. Elle constitue pour la plupart d'entre eux une épreuve. Ils doivent être accueillis avec respect, compassion et délicatesse. Nous considérons qu'il faut éviter à leur égard toute marque de discrimination injuste. L'article paru dans La Presse du mardi 21 août 2001 nous donne une compréhension du désarroi vécu dans la population gaie. Cet article, intitulé À l'ombre de la fierté gaie, a été rédigé conjointement par les docteurs Réjean Thomas et Stéphan Lavoie, médecins à la clinique médicale L'Actuel, centre d'excellence VIH, MTS, hépatites. Voici des extraits de cet article:

«Au lendemain des célébrations de la fierté gaie, un constat inquiétant nous est apparu auprès de notre clientèle homosexuelle, soit la recrudescence de cas de la détresse psychologique, de tentatives de suicide et de suicides réussis. L'apparition de ce phénomène nouveau nous inquiète. Pourrait-il y avoir un lien à faire entre l'affirmation massive de cette fierté gaie et lesbienne et l'exacerbation de la détresse psychologique chez certains membres de cette communauté? Chez notre clientèle homosexuelle, nous avons dénombré deux suicides réussis et pas moins d'une douzaine de tentatives, et tous ont mentionné la Semaine de la fierté gaie comme étant un élément stressant. Il va sans dire que cela représente une augmentation significative en comparaison de ce que nous observons le reste de l'année. Malgré la présence des différents organismes communautaires, l'image qui en ressort nous donne l'impression d'une communauté où les gens sont toujours heureux et festifs, où la santé physique et psychologique prédomine. Nous savons très bien que la réalité homosexuelle dans la vie de tous les jours est tout autre et qu'elle est étroitement reliée au sida, à la violence, à la toxicomanie et à la faible estime de soi, pour ne mentionner que ces réalités.»

Cette dernière phrase en dit long sur la véritable réalité vécue par les homosexuels. Voici une piste de solution que l'on trouve dans le magazine Reality, volume XVI, n° 3, mai-juin 2001, publié par Real Women of Canada. Dans une étude récente, le Dr Robert Spitzer, psychiatre et chef des recherches biométriques et professeur de psychiatrie à l'Université Columbia à New York, a interviewé 200 sujets, 143 hommes et 57 femmes, qui affirmaient avoir changé leur orientation sexuelle de homosexuel à hétérosexuel après avoir suivi une thérapie. Ils affirment aussi avoir changé et maintenu leur orientation sexuelle depuis au moins cinq ans. Le rapport disait ce qui suit: «La majorité des sujets disent que leur foi religieuse est très importante dans leur vie. À peu près trois quarts des hommes et la moitié des femmes se sont mariés hétérosexuellement au moment de cette étude. Beaucoup ont voulu changer parce que le style de vie gai n'était pas satisfaisant sur le plan émotif. Beaucoup ont été perturbés par la promiscuité, les relations orageuses, les conflits avec leurs valeurs religieuses et leurs désirs d'être ou de rester mariés hétérosexuellement.»

À la surprise du Dr Spitzer, 67 % des hommes ont affirmé avoir de bons fonctionnements hétérosexuels, même s'ils ont rarement ou jamais éprouvé une attraction pour le sexe opposé avant leur thérapie. La recherche du Dr Spitzer est considérée comme l'investigation la plus détaillée sur les changements d'orientation sexuelle jusqu'à présent. Dans cette recherche, ce sont les homosexuels eux-mêmes qui ont voulu changer leur mode de vie homosexuel parce qu'il n'était pas satisfaisant sur le plan émotif quant à leur bonheur intégral. Il n'est donc pas déraisonnable de penser qu'ils doivent être aidés, car c'est quelque chose qu'ils veulent et ils sont très motivés à le réaliser. Voilà une piste de solution.

La Loi sur l'union civile est un obstacle majeur à la réhabilitation de ceux qui voudraient suivre une thérapie. Le système judiciaire opprimerait ceux qui voudraient briser cette union civile et les découragerait de retrouver un mode de vie satisfaisant sur le plan émotif. Cette loi contraire à l'ordre moral dégénérerait alors en oppression et l'autorité cesserait d'être elle-même.

Le Président (M. Gautrin): Je vous remercie.

n(11 h 30)n

M. Noël (Gilles): Merci, M. Apestéguy, secrétaire-adjoint du CINRR. Je vais maintenant continuer et terminer la présentation. Probablement que vous avez lu ce matin le journal Le Devoir, en page A-4, il est écrit Union civile homosexuelle. Les enfants ont le droit de savoir. Les géniteurs devraient pouvoir être identifiés, fait-on valoir. Je vous ai lu le titre simplement pour vous référer dans le journal, mais je vais vous lire les deux derniers paragraphes qui sont écrits à cette page-là:

«En marge de la commission parlementaire qui se déroule à Québec, le député du Bloc québécois d'Hochelaga-Maisonneuve, Réal Ménard, a demandé hier au ministre fédéral de la Justice, Martin Cauchon, d'ouvrir l'institution du mariage aux conjoints de même sexe. Michael Hendricks et René LeBoeuf se sont joints à lui lors d'une conférence de presse tenue à Montréal. Ce couple réclame de la Cour supérieure un jugement déclaratoire pour rendre inconstitutionnelle la loi fédérale qui permet le mariage entre hommes et femmes seulement.»

Le Président (M. Gautrin): Le temps passe, si vous pouviez synthétiser votre pensée...

M. Noël (Gilles): Oui. La raison pour laquelle je vous ai lu ça... Vous avez aussi dans le mémoire une partie qui traite d'homosexualité et clonage; je vais résumer très, très rapidement. À première vue, on peut trouver cette chose-là farfelue, mais je l'ai vu à la télévision, à Radio-Québec, à un moment donné, sur une émission qui traitait du clonage, où un couple homosexuel était enchanté de voir que maintenant la technologie allait leur permettre, d'ici deux ou trois ans, pour un montant de 50 000 $, d'avoir leurs enfants naturels. Et là-dedans j'ai posé la question: Est-ce qu'un jour, quand cette réalité-là va être normalisée dans la société, est-ce qu'éventuellement on va avoir une demande de la part des homosexuels devant un tribunal pour avoir des enfants naturels comme ça?

Et toutes ces choses-là que je viens de vous dire, l'attaque au mariage entre hommes et femmes qui est déposée en Cour supérieure, ce qu'on a mentionné ici sur l'adoption des enfants, vous n'avez pas d'idée du traumatisme que vous provoquez dans la population actuellement. Vous êtes totalement décrochés de la réalité comme députés. Moi, j'en ai vus, j'ai été à Trois-Rivières à un moment donné, j'ai parlé devant 50 personnes deux jours avant de déposer le mémoire ici. Il y avait un président de comté du Parti libéral qui était présent, qui avait fait deux mandats dans son comté. Il y avait une membre du Parti québécois qui était là, O.K.? Et les deux ont dit la même chose: Je déchire ma carte, c'est fini. Vous choquez la conscience de la collectivité québécoise avec cette loi-là.

Je vais terminer avec une des déclarations que j'ai reçues. J'en ai reçu 68, et puis, c'est sûr, je ne lirai pas les 68 parce que tout le monde va être exaspéré. Vous n'aimerez pas du tout ce qu'on va dire des députés là-dedans, mais c'est ça, c'est le peuple qui parle. Et ici, je l'ai retenue parce que c'est un avocat qui m'écrit et qui dit, dans un petit paragraphe: «This piece of legislature ? pardonnez mon anglais parce que je ne suis pas tellement bon en anglais, là ? coming before the Legislature granting lesbian and homosexual couples the definition and same rights as male and female couples is unequivocal and completely absurd. It would put them in a legal status to legally sue and pursue any catholic parish priest or the Catholic Church itself on legislative ground.» Et je termine là-dessus.

Le Président (M. Gautrin): Je vous remercie, M. Noël. Je vais passer à la période d'échange. Et je commencerai par donner la parole au ministre de la Justice pour commencer les échanges. M. le ministre de la Justice.

M. Bégin: Alors, merci, messieurs. Deux questions. Dans votre mémoire, vous n'abordez pas la question des droits des enfants qui sont là, dans les couples actuellement homosexuels. Est-ce que vous avez une position à l'égard du fait de ce qu'on a entendu depuis deux jours, que les gens disent: Il faudrait accorder des droits aux enfants, indépendamment du statut qu'on pourrait donner à l'union civile? Est-ce que vous avez une position là-dessus?

Le Président (M. Gautrin): M. Noël.

M. Noël (Gilles): Oui. La question d'avoir des enfants pour les couples homosexuels, il a été mentionné antérieurement que c'était fait illégalement. Je m'explique. Si, à un moment donné, une femme qui est lesbienne se fait inséminer artificiellement et qu'elle a un enfant par cette méthode-là, il semble qu'il y aurait un vide juridique sur cette question-là, et ma position là-dessus, ce serait d'interdire ce genre de pratique là. Pour ce qui est des pères et mères biologiques, admettons qu'un homosexuel a eu un enfant avec sa conjointe puis qu'ils se sont divorcé puis qu'à un moment donné il a découvert son homosexualité, bien là l'enfant, est-ce que la garde est par la mère ou par le père? Si la mère est dans un contexte hétérosexuel, moi, je pense qu'il faut favoriser une loi dans laquelle ce sera la mère qui a la garde de l'enfant et non pas le père qui vit une vie homosexuelle. Si la mère est décédée, quelque chose comme ça, puis l'enfant, son père est homosexuel ? je dois dire que la réponse que je vous donne, elle est personnelle et puis elle pourrait être susceptible de réflexion par après ? mais la première réponse que je serais tenté à donner, c'est que c'est son père biologique, il l'a eu avec son épouse, il devrait rester avec son papa.

Mais j'ai entendu au Collège du Vieux Montréal le technicien qui connaissait deux homosexuels qui ont eu deux garçons. Leur sperme a été donné à une mère porteuse et puis c'est comme ça qu'ils ont eu leurs deux garçons. Et cette pratique-là, à mon avis, devrait être interdite.

M. Bégin: Elle est interdite.

M. Noël (Gilles): Alors, elle est interdite? Alors, à ce moment-là, cette pratique-là se fait dans l'illégalité et puis le problème est causé parce que la loi n'est pas appliquée. C'est tout.

M. Bégin: Sur le dernier point, la loi...

Le Président (M. Gautrin): M. le ministre.

M. Bégin: Sur votre dernier point, la loi est formelle, il est interdit... La mère porteuse est interdite au Québec. Je ne dis pas qu'elle est interdite partout, mais la mère porteuse, le phénomène de la mère porteuse est interdit. C'est d'annuler... Le contrat qui permet ça est considéré comme nul, de nullité absolue.

M. Noël (Gilles): C'est ça.

M. Bégin: Mais pas pour le reste. Deuxième question. Vous semblez être préoccupés que l'union civile pourrait imposer à quelqu'un qui est un prêtre ou un membre d'un autre clergé à célébrer l'union civile. Le texte de loi ne dit pas ça, et d'ailleurs ceux qui vous ont précédés... Vous avez été précédés par un pasteur qui a mentionné qu'il ne se sentait pas obligé, il agirait selon ce qu'il pensait, et c'est ce que le texte de loi dit. Il n'impose pas l'obligation à un pasteur ou à un prêtre, à qui deux personnes homosexuelles s'adresseraient, de célébrer l'union civile. Le prêtre ou le pasteur serait libre de dire: Vous avez peut-être le droit, mais allez voir quelqu'un d'autre, par exemple, le maire ou... Plus tard, on verra que la célébration peut être célébrée par d'autres personnes que celles qu'on connaît aujourd'hui.

Le Président (M. Gautrin): M. Noël.

M. Noël (Gilles): Je voudrais faire un commentaire sur cette affirmation-là. On l'a mise en sachant que, oui, il y avait l'article 637 dans le Code civil ? si ma mémoire est bonne, je pense que c'est ça, 637 ? qui permet à un prêtre justement de ne pas célébrer un mariage de cette nature-là. Mais on sait que la Charte des droits et libertés est au-dessus de toute loi et que cette loi-là que vous allez passer, elle est discriminatoire à l'égard des couples homosexuels qui voudraient se marier en religion. Et on le sait très bien.

Et le jour où on va avoir des couples homosexuels qui vont s'amener en Cour supérieure pour dire: Je subis de la discrimination à cause de mon orientation sexuelle. J'ai tenté d'avoir un mariage dans telle église catholique, on m'a refusé, et je passe par la Cour pour réclamer dommages et intérêts. Votre loi ouvre la porte à cela, beaucoup plus grande que ce qui existe actuellement. La possibilité de poursuite existe maintenant, dès maintenant à cause de ça. Mais la légalisation de l'union civile va empirer cette situation-là, et c'est pour ça qu'on l'a laissée.

Le Président (M. Gautrin): Vous n'avez pas de questions. Est-ce que les parlementaires... M. le député de Frontenac.

M. Boulianne: J'ai posé la question du ministre, il m'a répondu. Moi... Vous savez qu'actuellement il y a évidemment des familles homosexuelles, il y a des enfants, il y en a partout. Je ne sais pas combien, il y a des statistiques. Quel est le statut de ces enfants-là aujourd'hui pour vous autres? Est-ce qu'ils ont des droits, comment est-ce que vous les considérez?

M. Noël (Gilles): J'aimerais répondre encore à cette question-là puis, après ça, je laisserai... Je reviens à la question du statut qui est obtenu d'une façon... Est-ce que c'est obtenu de façon légale ou illégale?

M. Boulianne: Peu importe, l'enfant est là!

M. Noël (Gilles): C'est mon interprétation. O.K.?

Le Président (M. Gautrin): M. le député de Frontenac.

M. Noël (Gilles): Bon. Si c'est obtenu dans une situation illégale, il faut légaliser cette situation-là. Et quand vous me donnez, vous me posez cette question-là, je trouve ça un problème tellement complexe, tellement grave que, à mon avis, on ne peut pas donner une réponse tout de suite, aujourd'hui. Tout ce que je vous dis, c'est que cette pratique où l'État n'intervient pas sur la question d'une insémination des mères porteuses, qu'il n'y a pas de législation là-dessus pour interdire, ça va faire qu'on va être pris avec un problème qui va devenir de plus en plus important.

n(11 h 40)n

Et, tout à l'heure, je pense que j'ai répondu à la question de M. le ministre Bégin sur: Qu'est-ce qu'on fait avec les enfants issus de ces unions-là? Et j'ai donné l'exemple d'un père et d'une mère qui... mettons, le couple... L'homme se découvre une homosexualité puis il n'est plus heureux dans son mariage, il se divorce, il a des enfants, et là c'est à la cour à rendre jugement. Et, si j'étais le juge, je donnerais la garde de l'enfant à la mère dans ces conditions-là. Si la mère disparaît pour une raison ou pour une autre, moi, je pense qu'à ce moment-là l'homosexuel devrait garder son enfant. Dans ce cas spécifique là, parce qu'il y a un attachement, ça a été obtenu d'une union entre un homme et une femme qui, après ça, se sont séparés.

Mais de continuer avec le problème d'enfants qui sont formés d'une façon illégale, que la loi interdit, de le tolérer pour en faire un fait accompli et après ça de venir mettre ça dans une commission parlementaire en disant: Bien, qu'est-ce que vous faites avec ça? Moi, je vous dirais: Qu'est-ce que vous avez fait antérieurement pour faire en sorte que cette situation-là ne se produise pas? La réponse, c'est: Rien.

Le Président (M. Gautrin): M. Dufour, vous voulez faire un complément de réponse.

M. Dufour (Robert): Oui. Le statut de l'enfant dans un couple homosexuel, si c'est un enfant biologique d'une des deux personnes, bien, moi, je dirais que c'est à la grâce de Dieu, pareil comme un enfant dans un couple hétérosexuel où il peut y avoir de l'abus sexuel porté aux enfants. C'est sûr qu'il faut renforcer les lois qui protègent les enfants abusés sexuellement ou autrement: violence physique, violence verbale, sexuelle, et toutes les violences qu'on peut faire à un enfant.

Pour ce qui est de l'adoption d'un enfant par un couple homosexuel, même par un couple hétérosexuel, je ne sais pas s'il y a enquête de faite à l'heure actuelle sur le couple. Moi, je crois que, de la minute qu'il y a un doute, un moindre doute que le couple va abuser de l'enfant, ne pas le permettre.

Moi, j'ai été abusé sexuellement, j'avais 12, 13 ans, par un professeur d'école. Je sais c'est quoi, être abusé sexuellement, je sais c'est quoi, être manipulé, être amené à mentir, à se mentir pendant 20 ans parce qu'on a été abusé sexuellement. Ça m'a pris 20 ans avant de le sortir. J'ai six enfants moi-même. Je suis marié ça fait 26 ans et j'ai six enfants, et je ne voudrais pas que mes enfants vivent ce que j'ai vécu. Je pense aux enfants strictement quand je regarde l'union civile gaie.

Maintenant, dans le rapport que j'ai lu ? et le rapport, je l'ai lu, Crafting "Gay" Children, par Judith A. Reisman ? où est-ce qu'ils parlent de la façon... On parle... Les homosexuels, pédérastes ou pédophiles se servent beaucoup d'études menées par des psychologues, des psychiatres en leur faveur pour essayer de dire qu'il n'y a pas de problème à avoir des enfants. Ils se servent même de la controversée étude scientifique du Dr Alfred Kinsey, qui disait que tous les enfants sont sexuels à partir de la naissance, qui a enregistré, avec un enfant de six mois, 26 orgasmes en 24 heures. Comment il a fait pour enregistrer ça? Ça, je ne veux même pas poser la question. Moi, je n'y crois pas pantoute. Je crois qu'un enfant est asexué jusqu'à ce qu'il développe sa sexualité, son corps, vers l'âge de 10, 12 ans. Il commence à se développer et à se découvrir homme ou femme, et, à partir de ce moment-là, quand il a découvert son corps ou en découvrant son corps va découvrir le corps des autres.

Si l'enfant est homosexuel, il est homosexuel. Je n'ai rien contre l'homosexualité. Si le gars veut vivre une homosexualité, c'est ses affaires à lui, ce n'est pas les miennes. Moi, j'ai préféré l'hétérosexualité. Maintenant, d'initier l'enfant à l'homosexualité en bas âge, soit par l'adoption, soit par d'autres façons qu'ils utilisent, que j'ai lues là-dedans, les amener dans un milieu homosexuel, à accepter l'homosexualité comme étant un fait totalement normal, et que c'est normal que les jeunes enfants aient des relations sexuelles avec des hommes plus vieux parce que les enfants sont sexués, c'est là que, moi, je crois qu'il faut mettre un gros bémol. Et les enfants, il faut les protéger de ça.

L'étude dit qu'il y a 42 fois de cas d'abus sexuels causés à des enfants dans un groupe homosexuel que dans un groupe hétérosexuel. Ce 42 fois là, je crois que c'est très important de le garder en tête.

Le Président (M. Gautrin): Je vous remercie. Vous avez d'autres questions, M. le député de Frontenac? Vous avez fait état de l'étude du Dr Reisman. Vous l'avez entre les mains, peut-être voulez-vous la déposer à la commission pour...

M. Dufour (Robert): Cette étude?

Le Président (M. Gautrin): Oui, l'étude du Dr Judith Reisman.

M. Dufour (Robert): Parfait, je vais la déposer.

Document déposé

Le Président (M. Gautrin): Alors, le dépôt est accepté par la commission, de l'étude du Dr Reisman.

Au nom de l'opposition officielle, Mme la députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. M. Morin, bonjour. Messieurs, bonjour. M. Dufour, vous allez déposer l'étude, en fait, l'enquête du Dr Judith A. Reisman. Est-ce que vous avez en main des études ou pouvez-vous nous référer à des études où il y aurait un lien entre prédation sexuelle et homosexualité?

Le Président (M. Gautrin): M. Dufour.

M. Dufour (Robert): Dans celui-là, dans l'étude que je vous présente, ils le démarquent très bien, le lien entre homosexualité et pédasterie.

Mme Lamquin-Éthier: À votre connaissance, existe-t-il d'autres études que celle ici?

M. Dufour (Robert): À ma connaissance... Il doit en exister, mais je n'en ai pas lu.

Le Président (M. Gautrin): Mme la députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: Je sais que ma collègue a des questions.

Le Président (M. Gautrin): Mme la députée de Mercier.

Mme Rochefort: Oui. J'aimerais en savoir plus sur votre Centre d'information nationale. Combien de membres? Existence? La mission entre autres, les objectifs?

Le Président (M. Gautrin): M. Noël.

M. Noël (Gilles): À l'ordinateur, on a actuellement 800 membres. Mais, depuis l'affaire de la commission parlementaire, on en a eu 200 de plus; ils ne sont pas encore entrés là-dedans, puis ça rentre 15, 20 lettres par jour. Je trouve ça phénoménal de voir comment est-ce que ça attise, chez la population... Le fait justement que les gens soient choqués comme ça, là, ça nous amène énormément de monde. Alors, pour répondre à votre question, 800 plus 200 qu'on a reçus récemment, donc ça fait à peu près 1 000 qu'on représente.

Qu'est-ce qu'on est comme organisme? Ça a été créé en 1993 et puis, l'objectif, c'était de défendre la foi, la patrie et la famille qui étaient mises en péril par les lois actuelles. Un des combats sur lesquels on s'est engagés beaucoup, c'était la loi n° 118, qui a fait en sorte que l'école catholique a été abolie. L'école publique catholique a été abolie au Québec malgré que la population constitue 93 %... La population chrétienne constitue 93 %... est à 93 % chrétienne au Québec.

Alors, notre organisme a constaté au fil des années que les lois qui étaient passées étaient de plus en plus répressives à l'égard des chrétiens, et c'est ça qui a fait que le Centre d'information nationale a pris de l'ampleur. Mais je dois dire qu'avec votre... pas votre mémoire, mais votre loi, là, ça nous donne énormément de popularité, c'est évident. Les gens n'acceptent pas ça du tout, du tout, du tout. Puis vous allez avoir des grosses réactions dans les prochains mois, je vous dis. Si vous vous en allez en élection générale là-dessus, ah! vous allez avoir du fun.

Le Président (M. Gautrin): Mme la députée de Mercier.

Mme Rochefort: Oui. Vous parlez de Dieu, vous parlez de religion, donc vous êtes catholiques. Est-ce que votre Dieu est amour?

Une voix: Oui.

M. Noël (Gilles): En haut ici, c'est marqué: Dieu est mon droit, Dieu est amour. Mais il y a certaines choses qu'Il réprime. Voulez-vous que je vous lise saint Paul, qu'est-ce qu'il dit sur l'homosexualité? C'est: Jésus-Christ est amour. Mais en même temps Jésus-Christ a dit, à un moment donné, quelque chose sur le scandale. Je ne sais pas si vous avez été un petit peu à l'église puis vous vous souvenez de sa parole sur le scandale; il dit que celui qui est cause de scandale, qui scandalise un de ses petits, mieux vaudrait qu'il se mette une meule au cou puis se jette en bas de la falaise.

Autrement dit, quand il y a des petits qui ne sont pas aptes à se défendre... Jésus-Christ, pour lui, les petits, c'est ce qu'il y avait de plus grand. D'ailleurs, quand ses apôtres étaient présents, il leur disait toujours: Laissez venir à moi les petits enfants, parce que le royaume des cieux est à eux. Et je dois vous dire une chose, mademoiselle, j'ai pleuré. Robert ici, à côté de moi, a pleuré quand on a préparé ce mémoire-là. Et, quand on a lu l'étude de Judith Reisman, on a pleuré. Et j'ai le goût de pleurer maintenant parce que Dieu est amour, il aime ses enfants, et ce que vous allez faire avec cette loi-là, vous allez causer des préjudices inconcevables à ces enfants-là. Et peut-être parce que Dieu est amour, il nous permet d'exprimer ça aujourd'hui devant vous, madame.

n(11 h 50)n

Le Président (M. Gautrin): Mme la députée de Mercier, vous avez une autre question?

Mme Rochefort: Est-ce que vous considérez normal moralement et éthiquement acceptable que des parents qui aiment leurs enfants ? Dieu est amour ? mettent leurs enfants de 12 ans, 13 ans, 14 ans à la rue en raison de leur orientation sexuelle? Est-ce que vous trouvez ça moralement et éthiquement acceptable?

M. Dufour (Robert): Non, madame, moi, je ne trouve pas ça moralement acceptable qu'un parent mette ses enfants à la rue en raison de son orientation sexuelle. On a d'ailleurs exprimé qu'on ne devrait pas discriminer contre les homosexuels. Et mon but n'est pas de discriminer contre eux autres, c'est d'émettre les faits. O.K.? Ce n'est pas parce qu'on est hétérosexuel qu'on a une capacité d'aimer. Il y a des homosexuels qui ont vécu en couple plusieurs années; 15, 20, 30 ans qu'ils vivent en couple. Je ne considère pas ces couples homosexuels là potentiellement pédérastiques aussi ou prédateurs. O.K.? Moi, ma crainte, la plus grande crainte est ceux justement que c'est le désir plus que l'amour qui prime dans leur vie, qui veulent avoir des enfants dans leur vie pour abuser de ces enfants-là. Ça non plus, madame, ce n'est pas de l'amour, pas plus que la mère qui a mis son enfant dehors. Mais, ça, on ne peut pas empêcher personne d'aimer ou personne de ne pas aimer.

Le Président (M. Gautrin): Père Apestéguy, vous avez un complément de réponse.

M. Apestéguy (Charles): Oui. Moi, je pense qu'il faut faire attention. Souvent, on entend dire: L'Église est contre les homosexuels. L'Église n'est pas contre les homosexuels. Le problème, c'est de distinguer entre personne et l'idée de famille. Qu'est-ce que la famille? Ça, c'est une question. Puis, l'homosexuel, il y a différentes sortes d'homosexuels. Je pense que ce sont des personnes, et l'Église n'est pas prête à les mettre dehors; au contraire, l'Église... J'ai cité d'ailleurs, dans ce document aussi, le nouveau Catéchisme de l'Église catholique qui dit qu'on doit respecter, on ne doit pas faire de discrimination, rien de cela, mais il faut quand même mettre les pendules à l'heure. Moi, je pense que l'Église, comme une mère, elle accueille tout le monde. Mais, à un moment donné, il y a quand même des lois, il y a des fondements, il y a des commandements dans l'Église, il y a les commandements de la Bible, et je pense que l'Église doit être cohérente avec le message qui a toujours été prêché.

Le Président (M. Gautrin): Mme la députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: M. l'abbé Apestéguy, suite aux commentaires que vous venez de formuler, dois-je comprendre que vous êtes d'accord pour l'union civile entre conjoints de même sexe, mais dans la mesure où il n'y aurait pas d'enfant?

Le Président (M. Gautrin): M. Apestéguy.

M. Apestéguy (Charles): Je ne suis pas d'accord avec ça parce qu'on ne peut pas parler de conjoints. Il y a des personnes qui doivent être respectées, qui doivent être aimées, et le Christ est présent pour tout le monde. Et il a donné sa vie, donc le Christ aime tout le monde. Il est amour, mais ça ne veut pas dire que, parce qu'une personne vit une difficulté, nécessairement elle doit avoir tous les droits, elle doit prétendre au moins avoir tous les droits dont elle... Tu sais, il y en a qui prétendent des droits et des choses qui peuvent faire en sorte que... J'aimerais bien obtenir quelque chose, mais je ne peux pas, peut-être ma condition ne me le permet pas. Bon. C'est ça. Ce sont deux choses différentes, à mon avis, et il faut faire attention à ça.

Le Président (M. Gautrin): M. le député de Roberval.

M. Laprise: Merci beaucoup, M. le Président. Dans votre mémoire comme dans celui qui a passé avant vous, on laissait un peu cette crainte-là. Ça laissait percevoir une crainte à savoir que, si on reconnaît des droits à cette minorité-là, on va en faire perdre à la majorité qui... D'après moi, la majorité est encore: l'idée famille est composée d'un homme et d'une femme et des enfants. J'ai moi-même neuf enfants puis j'ai des petits-enfants puis je pense que mes enfants vivent... Il y a des conjoints de fait, il y en a qui sont mariés, mais, par contre, ils vivent dans l'amour, tel que leur mère leur a transmis, je pense, et leur père. Mais je percevais dans votre démarche, dans votre mémoire, cette crainte-là que le fait de donner des droits à une minorité en enlève à la majorité.

Le Président (M. Gautrin): Qui veut répondre?

M. Noël (Gilles): La réponse, elle est ici: journal Le Devoir du 7 février 2002. Nos appréhensions, elles sont écrites noir sur blanc là-dessus. Au moment où on a écrit ce mémoire-là, on ne l'avait pas, ce journal-là, dans les mains. Mais je vous répète ce qui est dit. Pas tout le paragraphe, juste la ligne, là, qui est importante, là: «Ce couple réclame de la Cour supérieure un jugement déclaratoire pour rendre inconstitutionnelle la loi fédérale qui permet le mariage entre hommes et femmes seulement.» Est-ce que ce n'est pas un droit qui nous est enlevé, ça? Noir sur blanc, monsieur. Merci.

Le Président (M. Gautrin): M. le député de Roberval.

M. Laprise: C'est une demande qui a été faite, c'est bien évident. Moi, je ne vous parle pas de cette demande-là. D'ailleurs, je ne partagerais pas cette opinion-là parce que je crois encore énormément à la normalité d'une famille qui est un homme et une femme, avec des enfants, c'est bien évident. Maintenant, est-ce qu'on peut se permettre de ne pas reconnaître le droit des enfants à être éduqués par leurs parents qui ont changé peut-être d'orientation sexuelle à un moment donné, mais dont les parents aussi les aiment? Parce qu'on a été le témoin encore hier de l'attachement de ces parents-là versus leurs enfants.

Maintenant, vous avez parlé tout à l'heure de Jésus-Christ. Je pense que Jésus-Christ a été dans les léproseries puis a rapproché les gens des lépreux. Il est allé soigner des lépreux et il a fait reconnaître aussi le droit de ces personnes-là, qui étaient atteintes de maladies très graves et qui étaient rejetées de la société, et il les a replacées à l'endroit où ils devaient être. Mère Teresa a fait la même chose. Elle s'en est allée auprès de démunis, auprès des gens blessés, poqués par la vie, si vous voulez.

Mais, moi aussi, remarquez bien, je n'étais pas supposé être ici, à cette commission-là, j'ai remplacé quelqu'un d'autre. Et je n'aurais pas été d'accord peut-être avant ces témoignages-là qu'on a eus, avant les mémoires qu'on a eus. Ça ne veut pas dire que je vais être entièrement d'accord sur tout ce qui va être présenté, mais je pense qu'il y a quand même une ouverture d'esprit qu'on se doit d'avoir. J'ai perçu aussi dans d'autres mémoires quand même qu'on donnait beaucoup d'importance à reconnaître les droits des homosexuels, les droits des couples en union de fait, des couples... mais on parlait très peu des familles aussi qui sont mariées puis qui vivent le parfait bonheur. Puis ça ne fait pas de bruit, le bonheur, ça, hein, et c'est encore la majorité. Mais ça ne veut pas dire qu'on ne peut pas reconnaître des droits à la minorité. Et je pense, quand on reconnaît des droits à la minorité, ce n'est pas nécessairement qu'on en enlève à la majorité.

Le Président (M. Gautrin): Alors, j'ai deux interventions. M. Noël, M. Dufour.

M. Noël (Gilles): Oui. Je veux répondre à cette question-là en lisant justement dans notre mémoire la citation du juge... Justice Pitfield. Attendez une seconde, là. C'est au tout début du mémoire. Un instant. O.K. «Le Parlement ne peut pas promulguer une législation pour changer la signification légale du mariage pour inclure l'union de personnes de même sexe. Je partage l'opinion présentée dans la plaidoirie du Procureur général du Canada que le coeur de la distinction entre les relations de même sexe et celles de sexe opposé est tellement évidente dans le contexte canadien qu'il n'existe aucun moyen ? et je répète ? il n'existe aucun moyen d'égaler les relations homosexuelles au mariage et en même temps préserver l'importance fondamentale du mariage pour la communauté.»

n(12 heures)n

Et soyons francs, ici. Soyons francs. L'union civile homosexuelle, O.K., pourquoi ça ne s'appelle pas «mariage homosexuel»? Pour une seule raison, parce que c'est de compétence fédérale. Si j'ai bien compris les interventions qui ont eu lieu cette semaine dans cette commission parlementaire, cette loi-là s'appellerait «mariage civil des personnes de même sexe» au lieu de l'«union civile des personnes de même sexe», s'il n'y avait pas Ottawa. Mais, à cause d'Ottawa, à cause de la Constitution, à cause de la «common law», on l'appelle l'«union civile». Et c'est tout. Et quand vous allez embarquer dans cette voie-là... La déclaration du juge, elle est très, très claire là-dessus. Vous ne pouvez pas conserver la primauté du mariage hétérosexuel avec ça, c'est impossible. Si on est dans une cour de justice, qu'il y a un couple homosexuel d'un bord puis il y a un couple hétérosexuel de l'autre bord, puis pour une raison ou pour une autre ils veulent avoir le même enfant en adoption, le juge ne peut pas trancher en faveur du couple hétérosexuel parce que ce serait de la discrimination. Alors, on met la justice dans une position qui est telle que ça va causer des problèmes de cette nature-là, et c'est les droits de l'enfant qui vont être brimés.

Je répète encore une fois, pour répondre très bien à votre question: Si vous passez ça, c'est une attaque directe au mariage hétérosexuel.

Le Président (M. Gautrin): M. Dufour, vous avez un complément de réponse, et notre temps, après, sera écoulé.

M. Dufour (Robert): Oui. J'ai remarqué, toujours dans l'étude du Dr Reisman, qu'un hétérosexuel, homme ou femme, va avoir à peu près entre trois et 20 partenaires dans sa vie ? je n'ose pas me tromper bien, bien là-dessus ? 20 partenaires qu'on vit avec, dans notre vie. Chez le monde homosexuel, les statistiques sont: 50 % en haut de 500 partenaires dans leur vie et la majorité des autres entre 100 et 500 partenaires dans leur vie. S'ils se marient et qu'ils font comme les couples hétérosexuels: mariage, divorce, mariage, divorce... Nous, on le fait à peu près aux cinq ans; eux autres, ils vont le faire à peu près au combien de temps? Au mois? C'est une des questions que je pose sur la...

Pour répondre un peu à la députée, le vrai sentiment d'amour qui peut exister... Je ne dis pas un couple homosexuel qui vivent ensemble, qui ont des années de vécu ensemble, qui sont heureux ensemble, mais le couple qui se rencontre puis qui veut se marier, puis qui divorce, qui se remarie puis qui se divorce, ça peut créer une grosse problématique. Il faut regarder vraiment, je crois, le vrai sens du mot «amour» à l'intérieur de ces unions-là et essayer de faire la différence entre «désirer quelqu'un» et «aimer quelqu'un».

Le Président (M. Gautrin): Alors, M. Noël, Père Apestéguy, M. Dufour, je tenais à vous remercier pour votre témoignage.

Et je vais appeler le prochain témoin, qui est l'Association des mères lesbiennes du Québec.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Gautrin): ...si vous voulez vous avancer.

Dre Paquette. Dre Paquette, Mme Greenbaum, si vous voulez vous avancer. M. le ministre.

Alors, il me fait plaisir de vous resouhaiter la bienvenue à notre commission. Ce coup-ci, je comprends que vous témoignez non plus en votre nom personnel mais au nom de la l'Association des mères lesbiennes du Québec. On a donc... On accorde 45 minutes ? hier, on avait des périodes de 30 minutes ? 45 minutes qui sont réparties en trois périodes équitables: 15 minutes pour la présentation de votre mémoire, 15 minutes pour les questions provenant des députés ministériels et 15 minutes pour les questions provenant des députés représentant l'opposition officielle. Alors, Dre Paquette, vous avez la parole.

Association des mères lesbiennes du Québec

Mme Paquette (Nicole): Merci. Alors, Nicole Paquette, Mona Greenbaum. L'Association des mères lesbiennes tient à remercier les membres de la commission pour cette audience. L'Association a vu le jour en août 1998. Depuis sa création, plus de 500 femmes et de nombreux enfants se sont joints à ce groupe. Le but premier du groupe est d'appuyer les lesbiennes qui sont mères et celles qui souhaitent le devenir. Il est devenu rapidement évident que le meilleur support à apporter à nos enfants serait une reconnaissance sociale et juridique de nos familles. Un deuxième volet s'est donc ajouté, soit celui de sensibiliser la société à nos familles.

Les membres de l'Association sont très diversifiés, tout comme leur famille. On retrouve des mères lesbiennes monoparentales ou en couple. Les enfants ont été conçus par insémination ou dans le contexte d'une relation hétérosexuelle antérieure. D'autres femmes ont opté pour l'adoption ou la famille d'accueil, ce qui est possible depuis déjà quelques années avec les centres jeunesse du côté anglophone, soit les centres Batshaw.

Deux tiers de nos membres ont eu des enfants à l'intérieur d'un projet de couple lesbien. Ce nombre ira en augmentant à l'avenir. Nous avons, à l'Association des mères lesbiennes, une bonne connaissance des différents types de familles homoparentales, de leurs besoins et de leurs difficultés.

Je voudrais mentionner ici un article de La Presse canadienne par M. Michel Hébert, qui est repris dans Le Devoir et dans La Presse de ce matin. Le groupe précédent en a parlé un peu. Permettez-moi de citer des passages qui contiennent des informations erronées. Je vais vous citer un paragraphe et, après ça, je ferai les corrections. Donc, c'est M. Hébert qui parle: «Il n'est pas inhabituel, bien que ce soit illégal, que des couples de lesbiennes aient recours à une banque de sperme pour avoir un enfant, a-t-on appris hier à la commission parlementaire. Il est aussi connu que des couples d'hommes demandent à une mère porteuse de leur concevoir un enfant. Mais cet enfant a-t-il droit de connaître son père ou sa mère naturel? s'est-on demandé[...].

«Au Québec l'identité des donneurs dans les banques de sperme est gardée secrète.

«Les lesbiennes n'y ont pas accès et vont plutôt en Californie, comme l'a indiqué Mona Greenbaum, lors de son témoignage.»

Alors, permettez-moi de relever les choses qui sont erronées dans le texte. Premièrement, il n'est pas illégal pour les lesbiennes d'avoir recours à des inséminations au Québec ou au Canada. Deuxièmement, les femmes seules hétérosexuelles et les lesbiennes n'ont pas accès aux cliniques de fertilité du Québec en raison de politiques internes de ces cliniques. Toutefois, ces femmes ont accès aux cliniques de fertilité ailleurs au Canada. Troisièmement, de nombreux médecins de famille et des gynécologues du Québec procèdent pour ces femmes, en toute légalité, à des inséminations en utilisant des banques de sperme canadiennes. Quatrièmement, l'identité des donneurs dans les banques de sperme est gardée secrète au Québec comme dans le reste du Canada et dans la grande majorité des banques de sperme américaines. Je pensais qu'il était important de rectifier ceci.

Donc, de retour au mémoire. L'Association des mères lesbiennes aimerait pouvoir applaudir à l'initiative quant à l'avant-projet de loi sur l'union civile. Malheureusement, elle ne peut le faire actuellement en raison de l'absence de considérations à l'égard des enfants. L'avant-projet de loi, dans sa forme actuelle, nie toute protection aux enfants de couples de même sexe. Il est important que cela soit corrigé. Il est injuste que, pour des considérations politiques, des enfants soient laissés sans protection. Les décisions à l'égard des enfants doivent toujours êtres prises en considérant le bien de l'enfant. Il est difficile d'accepter que, pour le bien de nos enfants, un seul parent leur soit reconnu. Que l'on soit en accord ou non avec les familles homoparentales, elles existent et continueront d'exister. Nier leur présence ne règle pas le problème.

Les partenaires qui s'engageront en union civile se verront reconnaître sensiblement les mêmes droits et obligations que ceux découlant du mariage, sauf pour la filiation et les droits parentaux. Selon le gouvernement, l'union civile reflète l'évolution des valeurs de notre société et les besoins exprimés par ses citoyens, de toute évidence à l'exception d'un groupe de citoyens, soit les enfants des couples de même sexe. Peut-être que nos enfants sont les enfants illégitimes d'aujourd'hui. En effet, cette absence de droits et de protection rappelle l'époque où les enfants issus hors des liens du mariage n'étaient pas considérés de façon égalitaire. Nos enfants vivent une discrimination basée sur l'orientation sexuelle de leurs parents. Cette discrimination a des répercussions importantes dans la vie de tous les jours pour nos enfants et nos familles.

n(12 h 10)n

Pour un couple de même sexe, le projet d'avoir des enfants n'est pas simple et ne peut jamais être le fruit du hasard ou d'un accident. Les démarches sont toujours longues et s'étendent généralement sur quelques années. Le processus est presque identique à celui que doivent suivre les couples de sexe différent avec un problème de fertilité.

Pour les couples de lesbiennes qui désirent avoir un enfant, il y a deux possibilités: l'insémination ou l'adoption. L'insémination peut se faire à l'aide d'un donneur connu ou d'un donneur inconnu via une banque de sperme. Dans le cas d'un donneur connu, certains couples choisiront que celui-ci soit impliqué dans la vie de l'enfant. Alors, l'enfant aura un père et une mère, les deux seront légalement reconnus et seront tous deux inscrits sur l'acte de naissance. Dans la majorité des cas, l'enfant vivra avec sa mère biologique et la conjointe de celle-ci. Cette dernière sera une figure parentale importante, mais n'aura pas de reconnaissance légale. Si on veut faire une analogie en termes de parent social et biologique, ce genre de famille ressemble à une famille hétérosexuelle où il y a eu divorce et famille reconstituée. L'enfant a donc deux parents légalement reconnus et une ou deux figures parentales socialement importantes mais sans reconnaissance légale.

Dans le cas d'un projet parental mené à terme par insémination avec l'aide d'un donneur inconnu ou d'un donneur connu qui ne veut pas s'impliquer comme parent, l'enfant n'aura pas de père; il aura deux mères. La mère biologique qui a porté l'enfant sera reconnue légalement. L'autre mère ne pourra inscrire son nom sur l'acte de naissance et n'aura aucune reconnaissance légale. L'enfant n'aura officiellement qu'un seul parent.

Pour les couples gais, la seule possibilité est l'adoption. L'adoption conjointe par un couple de gais ou de lesbiennes n'est pas possible au Québec. Un enfant adopté par un tel couple n'est en fait adopté que par un seul de ses parents. Il n'a donc qu'un seul parent légalement reconnu.

Comme nous l'avons souligné, le projet d'avoir des enfants et les démarches qui s'ensuivent sont presque identiques pour un couple de même sexe et un couple de sexe différent ayant des problèmes de fertilité. Toutefois, la reconnaissance parentale et les droits des enfants sont actuellement traités de façon fort différente dans ces deux types de couples.

Est-ce que le projet d'union civile, tel que présenté actuellement, modifiera la situation? Prenons l'exemple d'un couple de lesbiennes qui s'unirait en union civile et qui déciderait ultérieurement d'avoir des enfants. Le projet de famille serait mené à terme ? des nouvelles techniques de reproduction, donc insémination artificielle, banque de sperme. Un seul parent serait reconnu à l'enfant.

Les couples de sexe différent, mariés ou en union de fait, qui procèdent par insémination pour avoir un enfant ont la chance que l'enfant ait deux parents reconnus. Quelle est la différence ici? Dans les deux cas, nous avons un parent biologique et un parent non biologique. Alors, comment expliquer cette différence de traitement? Cette différence de traitement s'explique par une discrimination basée sur l'orientation sexuelle.

On pourrait envisager une autre situation, soit un couple de même sexe uni par union civile qui déciderait d'adopter un enfant quelques années après la célébration de leur union. Pourquoi est-ce qu'un seul des partenaires pourrait adopter l'enfant quand le projet est partagé par les deux partenaires? Pourquoi est-ce que l'enfant ne se verrait reconnaître qu'un seul parent? Encore ici, cette différence de traitement est difficile à expliquer.

Dans la vie de tous les jours, l'absence de filiation et de droits parentaux crée des problèmes pour l'enfant, les parents, la famille élargie, voire la communauté. Un des parents, dans un couple de même sexe, n'a aucun droit ni devoir à l'égard de son enfant. Cela a des implications importantes si le couple se sépare. Ainsi, un des parents pourrait se désengager du projet familial sans avoir à pourvoir financièrement aux besoins de l'enfant. Inversement, ce parent pourrait se voir privé de la garde, des droits de visite, puisqu'il n'est pas considéré comme membre de la famille.

Dans ces deux situations, les droits de l'enfant sont brimés. Les enfants de couples de même sexe n'ont qu'une filiation. Ils se trouvent systématiquement exclus du privilège d'avoir deux parents. Ainsi, si le parent non reconnu légalement décède sans testament, alors, ses enfants ne feront pas partie de la succession. Les enfants ne font pas naturellement partie de la succession des grands-parents, oncles et tantes du côté du parent sans reconnaissance. Si le parent officiel devenait inapte à prendre des décisions ou décédait, alors l'autre parent ne serait pas automatiquement responsable des enfants.

Évidemment, tous ces problèmes de filiation pourraient être résolus facilement par des ajouts dans le projet de loi sur l'union civile. Encore ici, il est évident que le bien de l'enfant serait mieux assuré si ses deux parents étaient reconnus.

La reconnaissance des deux filiations aurait un effet bénéfique sur les relations avec la famille élargie. En effet, les grands-parents, oncles et tantes seraient tous reconnus également. Cette reconnaissance est importante sur le plan légal, mais aussi, sinon davantage, sur le plan psychologique. En effet, l'implication des membres de la famille est souvent favorisée par le sentiment d'appartenance, et la filiation en fait sûrement partie. La négation d'une partie de la filiation envoie un message ambigu, qui peut contribuer à créer une distance entre les membres d'une même famille.

L'avant-projet de loi mentionne les enfants dans trois articles: 521.5, 521.14 et 521.15. Dans sa forme actuelle, l'autorité parentale accordée à l'article 521.5 de l'avant-projet de loi est une coquille vide, puisqu'elle ne s'accompagne pas de la reconnaissance d'une filiation. Il s'agit d'une grande incohérence de cet avant-projet de loi. On accorde aux deux partenaires de l'union civile l'autorité parentale, mais pas de filiation. Comment appliquer l'article 521.5 dans la vie de tous les jours de ces familles? Et il y aura de grands débats d'interprétation si cela n'est pas modifié.

À l'article 521.14, on mentionne: «À défaut d'une déclaration commune de dissolution reçue devant notaire ou lorsque les intérêts de leurs enfants communs sont en cause, la dissolution doit être prononcée par le tribunal.» En l'absence de filiation, le terme «enfants communs» pourrait être difficile à interpréter.

Enfin, à l'article 521.15, on mentionne: «La dissolution de l'union civile ne prive pas les enfants des avantages qui leur sont assurés par la loi ou le contrat d'union civile.» Encore ici, sans filiation, que penser de la garde partagée, des droits de visite et de la pension alimentaire pour les enfants?

Dans nos familles, la filiation ne peut pas être uniquement reconnue par le sang, puisqu'un des parents ou les deux ne sont pas liés biologiquement à leur enfant. Nous souhaitons que la filiation soit reconnue pour les deux parents de nos enfants, qu'il s'agisse du parent social ou du parent biologique. Il ne s'agit pas d'un précédent, puisque, déjà dans cinq provinces canadiennes, les couples de même sexe peuvent adopter conjointement un enfant. Depuis juillet 2001, la Colombie-Britannique permet l'inscription sur l'acte de naissance du nom des deux mères lors de la naissance d'un enfant par insémination artificielle. Il n'est donc plus nécessaire d'adopter l'enfant. Il a automatiquement deux parents. Cela évite toute la procédure d'adoption.

Les couples de même sexe devraient, comme les époux et les conjoints de fait de sexes différents, avoir le droit d'adopter l'enfant du conjoint. Il s'agit d'une demande d'adoption par consentement spécial. Cette disposition se trouve à l'article 555 du Code civil. Encore ici, il y va de l'intérêt de l'enfant. En effet, si l'enfant n'a qu'un parent et qu'une seule filiation, il est logique que la conjointe ou le conjoint qui joue le rôle de parent soit reconnu si tel est le souhait de cette famille. Cela va de soi pour les couples de sexe différent et ne s'applique pas pour les couples de même sexe. L'avant-projet de loi devrait modifier cela à la fois pour les partenaires d'union civile, mais aussi pour les conjoints de fait de même sexe.

Le gouvernement dans l'avant-projet de loi se propose de retirer le terme de «concubins» et de le remplacer par «conjoints de fait». Pourquoi ne pas ajouter le terme «conjoints en union civile»? Encore ici, un changement en ce sens aurait pour effet de retirer des lois québécoises une discrimination vécue par nos enfants.

Les couples de même sexe ont les mêmes habilités et compétences comme parents que les couples de sexe différent. Les couples de même sexe devraient donc pouvoir adopter conjointement un enfant par l'adoption publique. Actuellement, cela est impossible. Les candidats à l'adoption publique devraient être évalués sans égard à leur orientation sexuelle, puisque cela n'influence pas les compétences parentales. La grille d'évaluation devrait être la même pour tous.

Les couples unis par la future union civile devraient avoir les mêmes privilèges, droits et obligations que les couples mariés de sexe différent en ce qui concerne l'adoption publique. N'oublions pas que nos enfants existent déjà et que toutes les modifications de filiation et de droits parentaux que la nouvelle union civile pourrait contenir devraient pouvoir s'appliquer aux enfants des couples de même sexe de façon rétroactive. Ainsi, pour une période de temps défini, les couples de même sexe avec enfants qui s'uniraient par union civile pourraient se voir accorder des droits de façon automatique bien que leurs parents aient été conçus auparavant. Cela a pour effet de simplifier les procédures juridiques et effacer une partie de la discrimination que ces enfants ont vécu.

Le Président (M. Gautrin): Dre Paquette, le temps passe.

Mme Paquette (Nicole): Les recommandations, puis c'est terminé.

Le Président (M. Gautrin): Allez-y.

Mme Paquette (Nicole): Première recommandation. Les couples de même sexe ont des enfants. Ces enfants méritent une reconnaissance sociale et juridique de leur famille. Nous recommandons que l'union civile contienne des dispositions précises, claires et cohérentes quant à la filiation et aux droits parentaux.

Deuxième recommandation. L'enfant conçu par insémination, issu du projet parental d'un couple de lesbiennes, devrait avoir deux parents reconnus socialement et juridiquement. Nous recommandons que la filiation puisse s'établir par l'inscription sur l'acte de naissance des deux parents, et cela, quel que soit le sexe des parents. Ainsi, deux mères pourraient inscrire leur nom sur l'acte de naissance.

n(12 h 20)n

Troisième recommandation. L'enfant adopté par un couple de même sexe devrait voir ses deux parents reconnus socialement et juridiquement. Nous recommandons que l'adoption conjointe par un couple de même sexe soit possible et qu'ainsi la double filiation soit reconnue.

Quatre. Les parents de même sexe ont des habiletés parentales équivalentes aux parents de sexe différent. Les enfants de famille avec parents de même sexe ont un développement identique aux autres enfants. Nous recommandons que les candidats homosexuels soient considérés au même titre que les candidats hétérosexuels par les services d'adoption publique du Québec. Les conjoints en union civile devraient être considérés au même titre que les conjoints mariés par les services d'adoption publique du Québec et subir la même évaluation.

Cinq. Nous recommandons qu'il soit possible pour un conjoint en union civile d'adopter l'enfant ou les enfants de son conjoint par adoption par consentement spécial, comme c'est le cas actuellement pour les époux et les conjoints de fait. Ainsi, l'article 555 du Code civil devrait être modifié pour inclure le terme «partenaire» ou «conjoint en union civile».

Enfin, la dernière recommandation. Les familles homoparentales existent. De nombreux enfants sont nés par insémination artificielle au sein de ces familles. Si l'union civile comprend la filiation et les droits parentaux, on peut penser que des couples de lesbiennes avec enfant seront intéressés par ce type d'union. Nous recommandons que des dispositions existent de façon temporaire dans l'union civile pour reconnaître de façon rétroactive la double filiation de ces enfants. On pourrait, par exemple, permettre d'ajouter sur un certificat de naissance le nom de l'autre mère; cela éviterait de nombreuses démarches d'adoption, longues et coûteuses pour ces familles.

En terminant, nous tenons à remercier le président et les membres de la commission pour leur ouverture et l'intérêt démontré envers nos enfants et nos familles. La journée d'hier a certainement permis une démystification de nos familles et une meilleure compréhension des enjeux qui seront sûrement fort utiles lors de la rédaction du projet de loi. Nous sommes confiantes que le bien-être de nos enfants sera pris en considération suite à ces audiences. Merci beaucoup.

Le Président (M. Gautrin): Dre Paquette, je vous remercie. Et, pour commencer la période d'échange, je passerai la parole à M. le ministre de la Justice.

M. Bégin: Bon. Rebonjour, mesdames, puisqu'on s'est déjà vus hier. Une première ? je dis «question», mais, en fait, c'est peut-être une occasion de mieux faire comprendre ce que vous avez énoncé à la page 12 et que l'on retrouve dans votre deuxième recommandation. Vous dites: «Depuis juillet 2001, la Colombie-Britannique permet l'inscription sur l'acte de naissance du nom des deux mères lors de la naissance d'un enfant par insémination artificielle. Il n'est donc plus nécessaire d'adopter l'enfant.»

Je le comprends très bien, mais ça pose, ça expose une problématique très clairement, c'est la possibilité que, dès la naissance de l'enfant, au lieu de procéder à l'adoption par la suite par la deuxième mère de l'enfant, en l'enregistrant avec la mère biologique, tout de suite, la filiation est établie, alors que, si on ne fait pas ça par cet enregistrement-là, il faut qu'on passe par l'adoption. C'est ça que vous voulez dire? Donc, il y a deux façons d'établir la filiation, dites-vous, une par l'enregistrement au registre de l'état civil lors de la naissance et l'autre qui serait par l'adoption. Et vous préférez, si je comprends bien, la première à la seconde?

Mme Paquette (Nicole): Ça nous semble plus simple. Ça évite des démarches juridiques. Il me semble que c'est plus simple à la fois pour les individus et à la fois pour la société, ça simplifie le tout. Alors, c'est ce qu'on suggère, effectivement.

M. Bégin: Vous avez abordé, à la page 13, quelque chose que je n'ai pas vu, à moins d'erreur de ma part, jusqu'à ce jour, c'est-à-dire des mesures transitoires. Vous dites, dans le premier paragraphe du haut de la page, là: «N'oublions pas que nos enfants existent déjà et que toutes les modifications de filiation et de droits parentaux que la nouvelle union civile pourrait contenir devraient pouvoir s'appliquer aux enfants de couples de même sexe de façon rétroactive. Ainsi, pour une période de temps définie, les couples de même sexe avec enfant qui s'uniraient par union civile pourraient se voir accorder des droits de façon automatique bien que leurs enfants aient été conçus auparavant.»

Alors, c'est l'aménagement de mesures pour tenir compte de ce qui existe déjà, mais qui n'est pas reconnu légalement, mais, si on faisait l'union civile avec, mettons, la reconnaissance de la filiation et de la parentalité, qui pourrait être reconnu, donc pour les donner aux enfants qui existent déjà. C'est ça?

Le Président (M. Gautrin): Dre Paquette.

M. Bégin: De quelle façon pensez-vous qu'on devrait procéder à permettre ce que vous décrivez là?

Le Président (M. Gautrin): Dre Paquette.

Mme Paquette (Nicole): Étant donné qu'on n'avait pas l'option de devenir partenaires en union civile, évidemment, personne n'a été dans cette option; ça n'a pas empêché les couples de lesbiennes d'avoir des enfants, souvent par insémination. Donc, ces enfants-là existent. Alors, nécessairement, si ces femmes-là décident de devenir partenaires en union civile, les enfants sont là. C'est certain qu'elles pourraient procéder par adoption si cela devenait possible, l'adoption conjointe, mais ça nous semble complexe, coûteux, à la fois pour les individus, à la fois pour la société, que tous ces gens demandent une adoption. Donc, on se dit qu'il devrait y avoir un mécanisme qui simplifierait cela.

Il nous semblait plus simple de modifier le certificat de naissance, là. Je ne sais pas si c'est une bonne suggestion, là, au point de vue technique, mais, dans notre conception, ça nous semblait beaucoup plus simple. Donc, c'est ce qu'on a suggéré. Évidemment, ce serait une mesure temporaire, puisque les nouvelles familles qui se formeraient suite au projet de loi, ce serait... Donc, nécessairement, on demande ça, évidemment, seulement pour une période très transitoire.

M. Bégin: Donc, vous dites: Nous pourrions le permettre, mais ce ne serait pas obligatoire. Autrement dit, vous envisagez la possibilité qu'un enfant de 14 ans dont les deux mères s'uniraient par une union civile puisse dire: Non, non, je ne veux pas être reconnu officiellement, donc je ne m'inscris pas ? si c'est une inscription ? ou, inversement, s'il le désire, bon, l'acte se pose, mais le plus simplement possible, me dites-vous, et pendant une période de temps donnée, pour mettre un terme, là, à toutes les hypothèses, savoir si c'est oui ou si c'est non. C'est ça?

Mme Greenbaum (Mona): C'est ça, oui.

M. Bégin: O.K. Troisième question, une question qui a été abordée par les jeunes, ce matin, des jeunes de l'Université Laval. Vous êtes un petit peu ambivalente sur la question du 16-18 ans. Vous dites: «Nous tenons à souligner deux différences de traitement entre le mariage et l'union civile. D'abord, l'âge d'admissibilité qui est de 16 ans pour le mariage et de 18 ans pour l'union civile. Il nous semble plus sage d'attendre l'âge de 18 ans pour s'engager. Toutefois, encore ici, les homosexuels subissent un traitement différent qui s'explique difficilement.»

Là, vous nous dites: On n'aime pas le différentiel, mais, si nous avions à choisir, nous dirions: 18 ans pour le mariage, 18 ans pour l'union civile. Est-ce que je vous comprends bien?

Mme Paquette (Nicole): Oui. Ça nous semble, en fait, très jeune pour s'engager, 16 ans. En tant qu'Association et en tant que mères, de considérer que nos enfants puissent décider de s'engager dans une relation à long terme à 16 ans, ça nous semble effectivement très jeune. Alors, on préfère 18 ans. Par contre, évidemment, on est un petit peu... on trouve ça bizarre que, quand c'est spécialement dans le cas des gais et des lesbiennes, il faut que ce soit 18 ans.

M. Bégin: 16 ans. 16 ans.

Mme Paquette (Nicole): Donc, ça, ça nous a un peu chatouillées. Mais, effectivement, on trouve que 16 ans, c'est un peu jeune; on serait tout à fait d'accord à étendre ça à 18 ans pour tout le monde, oui.

Le Président (M. Gautrin): Est-ce qu'il y a d'autres questions du côté ministériel? Non. Mme la députée de Bourassa, au nom de l'opposition officielle.

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Une première question. Je crois que vous étiez présente lorsque le groupe précédent s'est fait entendre, et je ne sais pas si je peux me permettre de vous demander: Est-ce que vous pouvez nous référer ou connaissez-vous des études où on ferait un lien entre la prédation sexuelle et l'homosexualité?

Le Président (M. Gautrin): Dre Paquette.

Mme Paquette (Nicole): Je crois que Mme Danielle Julien, hier, a bien répondu à toutes ces questions, qui sont des questions effectivement qui reviennent souvent. Est-ce que les enfants qui sont dans une famille gaie, lesbienne, est-ce que ces enfants-là vont être plus souvent homosexuels que les enfants qui sont dans une famille hétérosexuelle? est-ce que ces enfants-là vont être plus souvent victimes d'abus? Ce sont les questions qui reviennent effectivement assez souvent. Et il y a eu des études qui ont été faites sur ces deux sujets-là et, dans les deux cas... En fait, il y a eu de nombreuses études qui arrivent toujours à la même conclusion: Les enfants ne sont pas plus souvent homosexuels et ne subissent pas plus d'abus sexuels. Même, il semblerait, en fait, qu'ils subissent moins d'abus sexuels.

Pour ce qui est des couples, les femmes en général sont souvent moins ? comment dire ça? ? sont moins prédatrices sexuelles que les hommes. Donc, dans les couples de lesbiennes, les cas d'abus sont excessivement rares. Et, pour ce qui est des couples gais qui ont des enfants, il n'y a pas plus d'abus du côté des couples gais que des couples hétérosexuels.

n(12 h 30)n

Je pense qu'ici il faudrait remettre les pendules à l'heure et voir que, dans les cas de prédation sexuelle, le plus souvent, ce sont les hommes hétérosexuels qui abusent des jeunes filles. Je pense que tout le monde s'entend là-dessus, que c'est ce qui arrive le plus souvent. Alors, je trouve ça un peu étonnant d'entendre encore en 2002... d'associer l'homosexualité à la pédophilie, alors qu'en fait il semblerait que c'est plus l'hétérosexualité qui est associée à la pédophilie. Et ça n'a pas empêché personne, là, il n'y a personne qui oserait dire que les pères devraient être exclus des familles parce qu'il y a un risque d'abus. Alors, je trouve ça très étonnant d'entendre encore en 2002 un groupe sérieux associer «abus sexuel» et «homosexualité». Je trouve ça vraiment très, très humiliant qu'on puisse dire ce genre de choses encore de nos jours.

Le Président (M. Gautrin): Mme la députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: Une dernière question: Est-ce que vous considérez que le gouvernement en place doit redéfinir la notion de «famille» afin de permettre aux couples homosexuels de réclamer des droits parentaux?

Mme Paquette (Nicole): Je ne comprends pas bien votre question.

Mme Lamquin-Éthier: Est-ce que le gouvernement qui est en place doit nécessairement modifier la notion de «famille» pour permettre aux couples homosexuels de réclamer des droits parentaux? Autrement dit, ici, faites-vous une distinction entre filiation et droits parentaux ou exercice des droits parentaux?

Mme Paquette (Nicole): La notion de «famille», c'est une notion très, très complexe et, de définition précise et claire de la famille, à ma connaissance, il n'y en a pas nulle part. Tout le monde s'entend que c'est des gens qui sont réunis par amour et qui vivent les uns avec les autres. Mais je n'ai pas de notion très précise, dans aucun document, de ce qu'est exactement une famille, justement parce que c'est très difficile à définir.

Une chose me semble claire, c'est que les droits parentaux et la filiation sont intimement liés et que d'essayer de dissocier les deux, ça complique beaucoup les choses, et ça va compliquer beaucoup l'interprétation en cas de dilemme, en cas de rupture, en cas de conflit familial, en cas de décès, en cas... À partir du moment où il y a des problèmes, s'il y a des droits parentaux, mais qu'il n'y a pas de filiation, ça pose effectivement un problème. D'ailleurs, souvent, c'est pour ça que les gens vont, quand c'est possible, adopter leurs enfants, parce que c'est toujours bien d'avoir les deux associés. Donc, pour moi, c'est très important que la filiation et les droits parentaux soient reconnus pour nos familles.

Mme Lamquin-Éthier: Merci beaucoup. Nathalie?

Le Président (M. Gautrin): Mme la députée de Mercier, vous avez une question? Moi, j'en ai une aussi. Alors, allez-y.

Mme Rochefort: Très courte, M. le Président. Alors, merci, Docteure. Mardi, on a entendu l'Association des centres jeunesse venir nous expliquer que, eux, ils étaient prêts à évaluer pour l'adoption les couples de même sexe au même titre que les couples hétérosexuels. Ça serait un avis qui a été rendu l'automne dernier. Est-ce que vous en aviez eu vent?

Mme Paquette (Nicole): On est très, très, heureuses, à l'Association. On a écouté ça avec attention, je dois dire, aux audiences de mardi. Pour nous, c'était effectivement quelque chose de nouveau. On n'avait pas cette notion-là. On savait que les centres jeunesse du côté anglophone, depuis déjà quelques années, étudiaient les individus homosexuels de la même façon que les hétérosexuels quand il y avait une demande d'adoption. On est très heureuses de voir que, du côté francophone, ça va être la même chose. Alors, c'est une excellente nouvelle. Mais on n'avait pas ces données-là avant mardi.

Mme Rochefort: O.K.

Le Président (M. Gautrin): Moi, j'ai une dernière question à vous poser. Vous insistez, vous avez... Dans votre présentation, vous avez bien expliqué que, en général, les couples de lesbiennes qui veulent avoir des enfants font... utilisent soit la technique d'insémination assistée soit l'utilisation d'un homme procréateur pour une relation temporaire. Est-ce que... Et donc se pose à ce moment-là la question de filiation dans ce dernier exemple. Et est-ce qu'une des suggestions qui nous a été faites hier, c'est-à-dire que, s'il y a consentement bien sûr, le certificat de naissance puisse inclure plus de deux personnes, mais aille jusqu'à inclure trois personnes, c'est-à-dire le couple de lesbiennes qui choisissent ce projet parental et le père géniteur, est-ce c'est quelque chose sur lequel vous avez réfléchi?

Mme Paquette (Nicole): Oui. C'est quelque chose sur lequel on a réfléchi. C'est une question qui est très, très intéressante, mais qui ne touche pas seulement les couples gais et les couples de lesbiennes. Ce problème de parent social et de parent biologique et comment on doit reconnaître le parent social par rapport au parent biologique, c'est quelque chose de très intéressant et qu'on doit certainement discuter. C'est certain que ça touche certaines de nos familles, mais ça touche aussi les familles hétérosexuelles, toutes les familles qui doivent avoir recours... qui ont un problème de fertilité puis qui ont recours à un donneur. Est-ce que ce donneur-là devrait avoir une certaine reconnaissance comme père géniteur? Question qu'on peut certainement se poser. Toutes les familles reconstituées où il y a un nouveau parent, un parent social qui arrive et puis, si le parent social adopte son enfant, ça fait perdre la filiation antérieure. Dans le cas, disons, d'un décès d'un des deux parents, s'il y a un parent social qui arrive, bien, si ce parent social adopte, l'enfant perd l'ancienne filiation, ce qui n'est certainement pas souhaitable. Je pense qu'effectivement, dans tous ces cas-là, la question que vous posez s'applique: Est-ce qu'il ne devrait pas y avoir reconnaissance d'une figure parentale qui ne serait pas nécessairement le parent biologique ou le parent actif ou...

Bon. Mais je me demande si on doit décider ça dans ce projet-là. Nous, nos seules demandes, c'est d'être considérées de façon égale aux autres citoyens. Mais on serait certainement très intéressées, dans un deuxième temps, de discuter de toute cette problématique, et il va falloir y venir, c'est certain, parce que les familles changent, et la reconnaissance du parent social est de plus en plus importante par rapport aux parents biologiques, qu'il ne faut pas oublier. Donc, effectivement, à l'Association, c'est quelque chose qui nous préoccupe. Mais, pour l'instant, on demande une reconnaissance de deux parents.

Le Président (M. Gautrin): Ceci étant dit, puisque je n'ai plus de questions, je tiens à vous remercier une deuxième fois de votre témoignage. Et je suspends les travaux jusqu'à 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 37)

 

(Reprise à 14 h 5)

Le Président (M. Gautrin): ...le député de Saint-Jean, que nous avons attendu et que... Enfin, nous sommes heureux de vous voir ressurgir, n'est-ce pas? Ceci étant dit, le quorum étant constaté, nous allons reprendre nos travaux en accueillant le Parti de la sagesse. Je crois que vous êtes représentés avec M. Daniel Cormier et M. Eduard Hoyer. C'est bien ça?

Alors, je vous explique le type de notre procédure. Vous avez 45 minutes qui vous sont accordées pour présenter votre point de vue. Ces 45 minutes sont fractionnées de la manière suivante: 15 minutes pour la présentation de votre mémoire, 15 minutes pour les questions provenant des parlementaires ministériels et 15 minutes des parlementaires représentant l'opposition officielle. Alors, je ne sais pas qui est le porte-parole. Est-ce que c'est M. Cormier ou c'est M. Hoyer? Vous êtes?

Parti de la sagesse

M. Hoyer (Eduard): O.K. Bonjour, mon nom, c'est Eduard Hoyer et je suis...

Le Président (M. Gautrin): Ah! très bien. Donc, M. Cormier, c'est l'autre.

M. Hoyer (Eduard): ...et je suis secrétaire-trésorier du Parti de la sagesse. Il me fait plaisir de vous présenter M. Daniel Cormier, chef du Parti de la sagesse et président du Comité du Non. Le Parti de la sagesse est une nouvelle formation. Le but du Parti de la sagesse est de promouvoir et de préserver les valeurs morales qui sont à la base de notre société, civilisation occidentale et qui ont fait la grandeur de notre société québécoise.

Parmi nos membres, nous avons des catholiques, des protestants, des musulmans et des Juifs. Nous avons présenté huit candidats aux élections municipales à Montréal, en novembre 2001, et nous avons reçu l'appui officiel à cette élection de plusieurs organisations politiques, dont le CINRR, qui ont présenté un mémoire ce matin, Campagne vie Québec ? Québec-Vie ? REAL Women of Canada et le Parti héritage chrétien. Nous avons l'intention de présenter des candidats dans les prochaines élections provinciales.

Quant au Comité du Non, c'est une coalition d'organisations profamilles qui se sont opposées à la candidature de Montréal pour la tenue des Jeux gais, à Montréal, 2006. Voici donc M. Daniel Cormier, qui va présenter notre mémoire intitulé Pour la légalisation du vrai mariage.

M. Cormier (Daniel): Merci.

Le Président (M. Gautrin): M. Cormier, vous êtes le bienvenu ici, parmi nous.

M. Cormier (Daniel): Merci beaucoup. M. Hoyer a oublié de mentionner qu'il est aussi rédacteur en chef de la revue Le Vigneron, qui est le bimensuel qui est à plus grand tirage parmi la communauté franco-protestante au Québec. C'est diffusé à travers toutes les églises protestantes de la province de Québec.

Document déposé

Le Président (M. Gautrin): Est-ce que vous voulez faire un dépôt d'une copie de votre journal de manière que nous puissions en avoir le bénéfice d'un numéro?

M. Cormier (Daniel): Oui. D'accord. Aussi, vous allez voir ici, dans le journal, à la page 6, il y a un article que j'ai signé sur les naissances en déclin au Canada et au Québec. Justement, c'est pertinent ici dans le cas que le mariage, comme on va le mentionner, a une grande influence sur la natalité et les naissances.

Bon. Maintenant, notre position: nous sommes contre l'homosexualité. Dans notre mémoire, nous n'avons pas l'intention de faire de revendications vis-à-vis l'union civile entre personnes du même sexe en tant que telle, parce que, pour nous, notre position, c'est que l'homosexualité, ça ne devrait pas être. On est contre l'homosexualité. On n'a pas l'intention de commencer à discuter vraiment sur la modalité dont des personnes devraient exercer l'homosexualité. Que les personnes se sodomisent dans une union libre à l'intérieur d'une union civile ou dans un sauna, pour nous, c'est autant inacceptable d'une façon ou d'une autre. Ce serait un petit peu comme si le gouvernement fédéral décidait de légiférer sur la marijuana, savoir si on vend ça en paquet de 25 ou en paquet de 20, alors que c'est illégal.

Par contre, une chose qu'on aimerait beaucoup porter à votre attention, alors qu'on est en train de faire une refonte, de proposer une refonte vraiment profonde ici du Code civil et du mariage, on veut porter à votre attention que le mariage actuel, indépendamment de l'union civile, est discriminatoire, discriminatoire envers les chrétiens et ceux qui croient dans le mariage tel qu'il a été établi il y a 6 000 ans par le chef suprême du Canada.

n(14 h 10)n

Lorsqu'il a été établi, le mariage, au départ, était une union, une permission légale d'avoir des relations sexuelles entre un homme et une femme unis pour la vie dans le but de fonder une famille où l'homme était le chef de la famille et la femme, sa compagne et mère de leurs futurs enfants. Traditionnellement, dans les cérémonies de mariage, on faisait prêter des voeux aux personnes, c'est-à-dire qu'on demandait: Monsieur, acceptez-vous de prendre cette épouse? Voilà, il allait présenter un... Il est mentionné... Bon, voici, dans... les voeux se disaient un petit peu comme suit ? j'en ai un exemple ici ? l'époux disait: Je promets de t'être fidèle, de t'aimer, de te protéger, de te chérir dans les bons et les mauvais jours, pour le meilleur et pour le pire, et ce, jusqu'à ce que la mort nous sépare. L'épouse disait: Je promets de t'être fidèle, de t'aimer, de t'obéir, de te chérir dans les bons et les mauvais jours, pour le meilleur et pour le pire, et jusqu'à ce que la mort nous sépare.

Un passage des écritures qui est lu traditionnellement dans les cérémonies de mariage, et qui est encore lu, est celui de Éphésiens, dans la Bible, de Éphésiens, chapitre 5, où il est dit, et je cite: «Femmes, soyez soumises à vos maris, comme au Seigneur; car le mari est le chef de la femme, comme le Christ est le chef de l'Église, qui est son corps et dont il est le Sauveur; comme l'Église se soumet au Christ, que les femmes se soumettent en tout à leurs maris. Maris, aimez vos femmes, comme le Christ a aimé l'Église et s'est livré lui-même pour elle...»

Bon. Maintenant, il est clairement établi, dans les écritures et dans la tradition chrétienne, que l'homme est le chef de la famille. Maintenant, les lois ont été changées de sorte qu'on a supprimé un voeu qui était fait à Dieu. Ces gens-là, ils prenaient un engagement, et c'est un voeu qu'ils faisaient à Dieu, et l'Assemblée nationale a pris sur elle l'autorité de dire: Maintenant, vous n'avez plus besoin de respecter ce voeu-là à Dieu. Et non seulement vous n'avez plus l'obligation de le respecter, vous n'avez plus le droit de le faire. Ce n'est même plus légal de le faire.

Maintenant, qu'est-ce qui arrive, c'est que, si on regarde un peu, traditionnellement, on voit que le mariage... On a eu beaucoup de réformes à l'intérieur du mariage, et les réformes du Code civil en matière de mariage ont généralement été présentées comme des victoires du droit des femmes. Cette vision tout à fait féministe de la société prend pour acquis que les lois traditionnelles du mariage ne viennent pas de Dieu, mais ont été plutôt imposées aux femmes par le pouvoir patriarcal des hommes. Toutes les femmes, selon cette vision, sont opprimées par les hommes et ne demandent qu'à être libérées par l'État.

Maintenant, cette vision féministe qui est à la base de nos réformes du Code civil n'est pas partagée par toutes les femmes, loin de là. Beaucoup de femmes croyantes, chrétiennes, musulmanes et autres pratiquent avec conviction leur religion ? ce sont des femmes là, pas des hommes ? et croient dans le bien-fondé des ordonnances divines en matière de mariage. Contrairement à ce que prétendent les féministes, les femmes ne sont pas de pauvres êtres influençables, mais souvent des femmes qui ont du caractère et savent très bien ce qu'elles veulent. Elles sont généralement plus nombreuses et plus ferventes que les hommes. Et c'est une chose qui peut peut-être surprendre beaucoup de personnes: généralement, les femmes sont plus attachées à leur tradition de foi que les hommes, plus nombreuses.

Maintenant, le mariage féministe actuel, en imposant sa vision laïque à toutes les femmes, brime les droits des femmes qui ne partagent pas les convictions religieuses des féministes. Que la loi permette aux femmes qui le désirent d'avoir la même autorité, les mêmes droits, les mêmes responsabilités, les mêmes obligations que leur mari, cela se comprend dans une société libre et démocratique. Mais que la loi interdise, comme elle le fait présentement au Québec, aux couples croyants de se marier selon leurs convictions religieuses, cela ne se comprend plus dans une société libre et démocratique.

Le fait, c'est que... Voyez-vous, dans le mémoire, ici, à partir de la page 2, je relate ici une conversation que j'ai eue avec M. Vinet, en 1996, alors qu'il était directeur de l'inscription des mariages. Et là, cette conversation-là, elle est très, très éloquente dans le sens ici qu'un pasteur n'a pas le droit de lire la Bible pendant sa cérémonie de mariage et de dire aux époux: Voici ce que va être votre mariage. Il doit lire... si vous regardez ici, à la page 3 du mémoire, je pose la question ici: «Qu'en est-il si le célébrant lit, à la place des articles 392 à 396, le passage de la Bible dans Éphésiens 5, qui dit: "Femmes, soyez soumises à vos maris. Maris, aimez vos femmes comme le Seigneur"?» Et la réponse, c'est: «C'est complètement inacceptable. On vit en 1996 ? c'était à l'époque, la conversation ? pas aux temps des anciens. Si le célébrant veut lire le passage de la Bible, il peut le faire, mais il doit aussi lire les articles 392 à 396 du Code civil et expliquer aux futurs époux qu'on est en 1996, et que maintenant ce n'est pas la Bible, c'est le Code civil qui régit le mariage, et que c'est à ça qu'ils s'engagent, et qu'ils devront suivre.»

Maintenant, je vais vous dire, honnêtement, devant vous, que nous avons... que les pasteurs, généralement, les pasteurs dans les églises, ne le font pas. Ils lisent la Bible, ils ne lisent pas le Code civil. Ces mariages-là, selon la loi, ne sont pas légaux. Et à cause qu'on interdit aux gens de se marier selon leurs préceptes religieux, on oblige des citoyens qui n'ont que le désir d'observer la loi et être de bons citoyens, on les oblige d'agir dans l'illégalité.

Voyez-vous, l'article de la loi dans le Code civil, l'article 391 stipule: «Les époux ne peuvent déroger aux dispositions du présent chapitre, quel que soit leur régime matrimonial.» C'est-à-dire que non seulement on oblige des croyants à faire un mariage qui va contre leurs convictions, soit... ? et, normalement, qu'est-ce qu'ils font, c'est qu'ils vont lire la Bible quand même puis ils vont se foutre du Code civil ? on les met dans une situation d'illégalité, parce que, d'après l'article 380, «le mariage qui n'est pas célébré suivant les prescriptions du présent titre et [...] conditions nécessaires à sa formation peut être frappé de nullité». Et on ne leur permet pas même de s'entendre entre eux dans une entente privée, à part, contrairement à loi; par exemple, en Ontario, le Family Act en Ontario.

Si en Ontario quelqu'un se marie sans entente, sans contrat de mariage, sans entente, sans autre entente, il va automatiquement être considéré l'époux et l'épouse, même autorité, mêmes droits comme ici, au Québec. Sauf que la section 52 du Family Act stipule, vous allez me permettre... Je n'ai pas la traduction française, je vais être obligé de le lire ici en anglais.

Le Président (M. Gautrin): Ce n'est pas grave, monsieur. Nous connaissons les deux langues.

M. Cormier (Daniel): D'accord. «A man and a woman who are married to each other or intent to marry may enter into an agreement in which they agree on their respective rights and obligations under the marriage or separation...» Et ici ils peuvent... il dit ici: «...on the annulment or dissolution of their marriage or death, including,

(a) ownership in or division of property;

(b) support obligations;

(c) the right to direct the education and moral training of their children;

(d) any other matter in settlement of their affairs.»

Ce qui veut qu'en Ontario la loi permet à un couple de dire: Bon, voici, on se marie, mais, nous, dans notre couple, ça va être la femme qui va être le chef de la famille. Ils peuvent le faire. Ou ça va être l'homme qui va être le chef de la famille, l'homme voit... est responsable de l'éducation des filles, la femme, des garçons, ou inverse. Ils peuvent s'entendre entre eux de qu'est-ce que va être leur mariage.

n(14 h 20)n

Ici, au Québec, on a passé d'une formule très, très rigide où, selon la loi jusqu'en 1964 ? ça veut dire de 1866 à 1964, ça veut dire pendant près de 100 ans, 98 ans exactement ? la loi disait: Les époux se doivent mutuellement fidélité, secours et assistance, le mari doit protection à sa femme, la femme, obéissance à son mari. On a passé d'un cadre où la femme devait nécessairement... le seul mariage qui existait au Québec, c'était un mariage où la femme devait obéissance à son mari, à l'obligation pour tous les couples d'être égaux où qu'on n'a pas le droit même de s'entendre. Et cette loi-là, de mariage, ici, étant... la loi le décrétant comme étant d'intérêt public, on n'a pas le droit par un contrat privé de la changer. Ça veut dire qu'on oblige les croyants qui croient encore dans la Bible, qui croient encore dans les préceptes originaux du mariage, on les oblige soit à vivre dans l'illégalité, soit à ne pas se marier. D'ailleurs, si vous regardez la conversation que j'ai eue avec M. Vinet, c'est exactement la conclusion à laquelle il arrive lorsque je lui pose la question ici...

Le Président (M. Gautrin): Monsieur...

M. Cormier (Daniel): Oui?

Le Président (M. Gautrin): M. Cormier, le temps passe vite...

M. Cormier (Daniel): D'accord.

Le Président (M. Gautrin): ...est-ce que je peux vous demander de synthétiser peut-être vos pensées?

M. Cormier (Daniel): D'accord. Ce que nous demandons... Finalement, ce que nous demandons ? nous l'avons ici, en conclusion ? nous demandons que, alors que l'Assemblée nationale s'apprête à modifier le Code civil, qu'on modifie l'article 391, premièrement, pour permettre à des chrétiens de se marier selon les principes bibliques dans lesquels ils croient, parce que nous croyons qu'alors qu'on est en train... on fait une loi en disant que, bon, voici les homosexuels, leur mariage n'est pas reconnu. Et on a un groupe important ici dans notre société, des bons citoyens qui sont croyants, et leur mariage n'est pas reconnu. Ils sont obligés aussi de se marier seulement religieusement. Ils ne peuvent pas s'enregistrer à l'état civil, ou il le fait, mais il le fait de mauvaise foi parce que ça va contre l'engagement qu'ils ont pris.

Le Président (M. Gautrin): Je vous remercie M. Cormier. Et nous allons commencer les échanges. Et, à cet effet-là, je passerai la parole au ministre de la Justice.

M. Bégin: M. le Président, messieurs, merci infiniment. Je pense que je ne vous surprendrai pas en disant que votre entrée en matière m'a estomaqué en disant que vous étiez contre l'homosexualité. J'ai eu le temps, en écoutant ce que vous disiez, de regarder votre journal Le Vigneron, à la dernière page, et j'ai lu ce qui suit: «Pensées ? é-e-s ? en ce début d'année... Si nous pouvions réduire la population de la terre à un village d'exactement 100 personnes et que tous les ratios humains demeuraient les mêmes, voici à quoi cela ressemblerait. Il y aurait ? et là ? 14 occidentaux, 57 asiatiques [...] 48 personnes de sexe masculin sur 52 de sexe féminin.» Mais quelque chose qui m'a vraiment étonné: 89 hétérosexuels et 11 homosexuels. Et vous terminez en disant: «Lorsque nous considérons notre monde à partir d'une telle perspective, les besoins d'acceptation des gens, de compréhension et d'éducation sautent aux yeux. Bonne année.»

Comment réconciliez-vous votre affirmation sur l'homosexualité avec une recommandation d'ouverture et d'acceptation?

Le Président (M. Gautrin): Est-ce que M. Cormier ou M. Hoyer voulez répondre?

M. Cormier (Daniel): Moi, je passerais la parole à M. Hoyer parce que...

Le Président (M. Gautrin): C'est lui qui est le rédacteur en chef du journal.

M. Cormier (Daniel): C'est lui qui est rédacteur en chef. Ce n'est pas un article que j'ai écrit, et je ne suis pas, même, d'accord avec les chiffres qui sont là parce que, d'après Statistique Canada, il y a 2 % d'homosexuels.

Le Président (M. Gautrin): Alors, M. Hoyer, vous avez la parole.

M. Hoyer (Eduard): O.K. Je ne suis pas vraiment un expert sur les statistiques. C'est une annonce qui était mise par Jeunesse pour Christ Montréal, alors ça ne vient pas de ma plume. Je ne sais pas si c'est exact. Peut-être M. Cormier sait mieux, peut-être on devrait vérifier nos chiffres.

Le Président (M. Gautrin): Bon, je vous remercie. M. le ministre, vous avez une autre question.

M. Bégin: ...une affirmation assez particulière en disant que Jésus est le chef suprême du Canada.

M. Cormier (Daniel): Bien, ça, c'est ce que dit notre...

M. Bégin: Est-ce que c'est le chef du...

M. Cormier (Daniel): Oui?

M. Bégin: Vous avez parlé d'un parti politique. Est-ce que ce... Je vois qu'il y a une confusion dans les termes ou quoi?

M. Cormier (Daniel): Absolument pas. C'est le statut légal que nous avons au Canada. Si vous regardez dans la Constitution canadienne, la Constitution canadienne commence avec la phrase suivante: «Attendu que le Canada est fondé sur des principes qui reconnaissent la suprématie de Dieu et la primauté du droit.» Suprématie de Dieu veut dire qu'Il est le chef suprême. C'est ça que ça veut dire. Donc, c'est notre Constitution qui le déclare. Ça, c'est notre texte de loi sur lequel sont basées toutes nos lois et notre Constitution, M. le ministre.

M. Bégin: Sur un ton plus humoristique ? je vous le dis d'avance ? pourquoi annoncez-vous la date du référendum? Vous dites: président du Comité du Non, 2006. On ne l'a pas fixée.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Cormier (Daniel): Non, 2006, ce n'est pas la date du référendum, monsieur, parce qu'on ne sait pas en 2006 encore quel parti va être au pouvoir, n'est-ce pas?

Le Président (M. Gautrin): Vous avez parfaitement raison.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Gautrin): Et je vous signale que les libéraux ne feront pas de référendum lorsqu'on sera... Je tiens à vous l'annoncer.

M. Cormier (Daniel): C'est ça, 2006, c'est la date de la tenue des Jeux gais à Montréal. Et le comité, qu'on appelle le Comité du Non 2006, c'est un comité qui a été formé pour s'opposer à la candidature de Montréal aux Jeux gais en 2006.

Une voix: Mais vous avez perdu?

M. Cormier (Daniel): Tout à fait. On ne peut pas toujours gagner.

Le Président (M. Gautrin): Est-ce que d'autres parlementaires ministériels, vous auriez des questions? Mme la députée de Vanier. Non? Alors, Mme la députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: M. le Président, je n'aurai pas de questions, ma collègue en a. Alors, je vais lui céder...

Le Président (M. Gautrin): Mme la députée de Mercier.

Mme Rochefort: Merci, M. le Président. Bonjour. Ce que j'entends de votre mémoire, c'est que vous voulez que les femmes deviennent plus obéissantes face aux hommes, et ce que j'entends ou ce que je retiens aussi ? et le non-verbal de mes collègues féminines a parlé aussi, les dames dans la salle ? vous aimeriez que les femmes retournent à la maison. Est-ce que c'est ce qu'on doit comprendre aussi?

M. Cormier (Daniel): Non, j'aimerais que les femmes aient la liberté. Avant, elles n'avaient pas la liberté, elles étaient obligées d'obéir à leur mari. N'est-ce pas? Maintenant, on ne leur donne pas plus la liberté, on leur dit: Vous devez suivre un modèle de mariage qui va selon la conviction peut-être d'une majorité, mais qui va contre les convictions d'un grand nombre.

Maintenant, ce que nous demandons, nous ne demandons pas à ce que le mariage soit modifié pour qu'on revienne à tel que c'était en 1964, ou qu'on mette que la femme doit être soumise à son mari ou obéir à son mari, mais on demande qu'il puisse y avoir... on permette d'ouvrir une porte ou qu'il puisse y avoir une entente dans le couple, où la femme qui dit: Moi, je crois...

Prenez, comme, par exemple, ma mère. Elle croit dans ses convictions religieuses. Elle a été élevée comme ça. On a un grand nombre de femmes dans notre parti aussi qui croient dans le bien-fondé de... Ce n'est pas parce qu'elles sont imposées. Cette vision-là, que le rôle respectif de l'homme et de la femme est imposé par le pouvoir patriarcal des hommes, puis que c'est tous les hommes qui pensent juste comme ça, puis toutes les femmes sont contre, est fausse. C'est une vision fausse de la société puis de la société dans laquelle on vit. Il y a énormément de femmes qui croient dans le bien-fondé de l'ordonnance divine dans le mariage, et qui y croient du fond de leur coeur, et elles devraient avoir le droit de pratiquer leur foi et leur religion. Et on n'a pas le droit de leur interdire, de leur imposer un mariage selon nos convictions religieuses, à nous, alors qu'elles ont une autre conviction religieuse.

Le Président (M. Gautrin): Mme la députée de Mercier.

Mme Rochefort: Oui. Donc, en ce cas-là, je ne comprends absolument pas comment le fait de légaliser ou d'établir l'union civile pour conjoints de même sexe vient enlever quelque chose à ces femmes-là, qui justement peuvent vivre dans leur foi, en fonction de leur conviction profonde et de l'amour de leur Dieu. À mon sens, ça ne leur enlève rien.

M. Cormier (Daniel): Elles ne peuvent pas le faire actuellement. La loi actuelle ne le permet pas. Nous, ce que nous sommes en train de dire, c'est qu'on est en train de présenter un projet de loi, en disant: Bon, voici, les homosexuels qui veulent se marier sont obligés de se marier devant un pasteur ou un groupement, là, une cérémonie privée. Et ils ne peuvent pas s'enregistrer, ils ne peuvent pas enregistrer leur mariage actuellement. Ça, c'est l'état actuel de la loi. Et on dit que c'est discriminatoire parce que, ces gens-là, on ne reconnaît pas leur union.

Nous, ce qu'on dit ici, c'est qu'il y en a d'autres aussi qui sont exactement dans la même situation. D'ailleurs, si vous lisez ici, à la page 4, lorsque je pose la question, ici: «Un ministre du culte qui, avec le consentement des futurs époux, célèbre un mariage religieux seulement ? bon ? sans enregistrement au bureau de l'état civil, qu'est-ce qui arrive?» Quel aura été le statut? Et la réponse, c'est: «S'ils font cela, ils renoncent aux droits civils du mariage.»

Et on venait juste de me dire que, si un pasteur veut lire la Bible et enseigner les principes bibliques, à ce moment-là, il a juste à ne pas enregistrer le mariage, parce que ça va... parce que les deux sont contradictoires. Donc, on me dit, d'un côté, que le pasteur ne doit pas enregistrer le mariage s'il dit aux gens qu'ils doivent suivre la Bible. Donc, à ce moment-là, on oblige... on met les croyants dans la même situation que les homosexuels sont. Alors, si on veut faire une réforme pour être égalitaire envers tout le monde, on doit être aussi égalitaire envers les croyants qui croient dans le bien-fondé de l'ordonnance.

Le Président (M. Gautrin): Très bien. M. le député de Roberval, vous avez une question à poser.

M. Laprise: Oui, M. le Président. J'ai nettement l'impression que votre bon Dieu n'est pas le même que le mien, parce que...

n(14 h 30)n

M. Cormier (Daniel): C'est très possible, monsieur.

M. Laprise: ...au moment où tout le monde s'attendait autour de lui qu'il allait faire un remaniement ministériel, il a dit: Mon royaume n'est pas de ce monde. Donc, ce n'était pas un homme politique, c'était un homme... Ce royaume du Seigneur, c'est les coeurs des gens. C'est la foi, c'est la croyance, c'est les valeurs profondes qu'on doit inculquer. Et ça, ça doit faire bouger des choses, ça doit permettre à quelqu'un de rayonner dans son milieu.

Moi, j'ai été marié 38 ans. Je ne suis pas marié aujourd'hui parce que ma femme est décédé, mais personne m'ont forcé de me marier à l'église, c'est un choix personnel que j'ai fait. Et l'Église a été pour moi un support, et ça a toujours influencé dans les valeurs profondes que j'ai défendues, et ça influence encore, et c'est comme ça que je vois ma religion. À l'intérieur des gestes que je pose, ça doit paraître quotidiennement, et je crois que le Christ là, ce n'est pas un chef de parti, c'est vraiment l'homme qui est venu sur la terre pour montrer la voie du pardon, la voie de la foi, également la voie de la spiritualité et la voie de la bonne entente aussi entre les races, entre les générations, entre les peuples de différents pays. Et je pense que, si on écoutait vraiment la parole de celui-là qui est venu sur la terre voilà 2000 ans, il y aurait pas mal moins de guerre dans le monde, puis les femmes seraient mieux traitées, puis les enfants aussi, puis tout le monde. Moi, c'est ma perception.

Le Président (M. Gautrin): Je vous remercie, M. le député de Roberval. Peut-être une réaction de la part de M. Hoyer, de M. Cormier.

M. Cormier (Daniel): Oui, je suis tout à fait d'accord avec ce que vous avez dit. Si les gens suivaient l'enseignement de celui qui est venu il y a 2000 ans, on serait dans une meilleure... beaucoup meilleure position, et c'est exactement ce que nous désirons. Nous voulons, par contre, que... On se trouve dans une situation ambiguë lorsqu'on vit dans un pays ou dans une province où que la loi interdit de faire qu'est-ce que lui nous demande. Et on ne cherche pas, ici, à faire une dictature religieuse ou une théocratie. Je crois... et la Bible enseigne clairement que chacun de vous qui êtes assis à l'Assemblée nationale, c'est Dieu qui vous a placé là où vous êtes et c'est devant lui que vous allez avoir à rendre compte, chacun de vous, que toute autorité vient de Dieu, et il passe à travers vous pour exercer son autorité.

Le Président (M. Gautrin): M. le député de Roberval.

M. Laprise: Il a chassé les vendeurs du temple et il a dit: Que celui qui est sans péché lui jette la première pierre.

Le Président (M. Gautrin): M. Hoyer, vous voulez depuis longtemps intervenir.

M. Hoyer (Eduard): Oui, merci.

Le Président (M. Gautrin): Ce débat théologique est...

M. Hoyer (Eduard): Non, je ne suis pas un grand théologien. Non, je pense que le devoir de cette commission, c'est surtout pour assurer que les personnes qui sont ensemble, que ça dure. Et je pense qu'avec les lois, souvent, ça ne dure pas, le divorce est trop facile. Et c'est mentionné dans le mémoire que, souvent... Pourquoi est-ce que les parents veulent faire des enfants s'ils pensent, peut-être dans un an, deux ans, trois ans, qu'ils ne vont plus être ensemble? Et, par ailleurs, c'est pour ça qu'on a les statistiques de naissance, ça baisse beaucoup. Pourquoi? Parce que le mariage n'est plus une relation stable et parce que les lois nous permettent tellement facilement de se divorcer, et c'est pour ça que nous devons faire tout, si on veut que la société québécoise, les pure-laine, les Québécois, si on veut qu'on grandisse, bien, il faut qu'il y ait une relation stable pour que les enfants naissent. Merci.

Le Président (M. Gautrin): Je vous remercie. Mme la députée de Mercier, vous voulez intervenir encore?

Mme Rochefort: Dernière question, M. le Président. La conclusion de votre mémoire, en page 14, et je cite: «...à donner à cette union des avantages fiscaux en reconnaissance de la grande valeur de ce type d'union quant à sa contribution à notre société et la perpétuation de notre race.» J'aimerais que vous nous expliquiez votre conception de la perpétuation de notre race.

Le Président (M. Gautrin): M. Cormier.

M. Cormier (Daniel): Bon. Oui. Ici, au Québec, si on regarde au point de vue des naissances, 40 % des couples mariés font plus d'un enfant, 26 % des couples en union libre et 0 % des couples homosexuels. On n'a pas besoin d'un doctorat pour savoir que la stabilité d'un mariage a une influence sur le nombre d'enfants qu'on a. Faire des enfants, c'est un projet à long terme. Lorsqu'on arrive sur le premier enfant, vous allez voir qu'au-dessus de 60 % des premiers enfants, c'est dans des couples en union libre. Mais, lorsque vous arrivez sur un deuxième, troisième enfant ? celui qui est réfléchi normalement ? à ce moment-là, on voit que faire un enfant, c'est un projet à long terme, et ce projet à long terme là se fait dans une relation à long terme. Comme je dis ici, combien d'hommes, sachant qu'ils ont 73 % de chances d'être divorcés dans trois ans et pris à payer une pension alimentaire, à se battre pour voir leurs enfants, seront intéressés à en faire un? De même, combien de femmes, sachant qu'elles ont 73 % de chances de se retrouver dans trois ans monoparentales, prises à élever seules un enfant, sont intéressées à en faire un? Donc, la stabilité du... Il y a une relation tout à fait directe entre la stabilité du mariage et le nombre d'enfants. Le taux de natalité, actuellement, au Québec est en chute libre, O.K., et je pense que je ne vous apprends absolument rien, on bat les records à chaque année.

Hier soir, j'ai regardé encore sur Statistique Québec pour rafraîchir mes chiffres, et ça avait encore diminué, on est rendu... Le nombre de naissances... On fait moins d'enfants qu'on en faisait il y a presque 100 ans. Ça n'a pas d'allure!

Le Président (M. Gautrin): ...synthétique...

M. Cormier (Daniel): Alors qu'on n'avait même pas 2 millions... On avait 1 million et quelques de population puis on faisait plus d'enfants qu'on en fait maintenant. Alors, la question de la relation avec la perpétuation de notre race ou de notre nation... On n'a pas besoin d'être racial ici, on parle ici du peuple québécois, O.K. Quelle que soit la définition qu'on donne à ce peuple-là ? moi, j'ai tendance à être assez inclusif et à inclure les immigrants et tous les nouveaux Québécois ? mais le Québec ne pourra pas... va se retrouver dans une situation vraiment difficile si on ne prend pas des mesures pour favoriser la famille et le couple, parce que c'est le couple stable qui va aider vraiment la famille plus que n'importe quoi d'autre.

Le Président (M. Gautrin): Vous avez d'autres questions? Écoutez, M. Cormier, M. Hoyer, je tenais à vous remercier de votre présentation. Vous avez amené un point de vue qui était original et qui amène... qui est un peu en parallèle avec le projet de loi, mais qui était très original. Alors, je vous remercie de votre contribution.

Et je voudrais demander au Dr Christopher Berry Gray de bien vouloir se présenter devant nous.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Gautrin): M. Gray, vous êtes le bienvenu. You are welcome. Votre mémoire était en anglais. Do you choose to testify in English or in French? It's up to you. That's up to you.

So, in fact, you have 15 minutes, and then we'll split the time between the Official Opposition and the Minister.

M. Gray (Christopher Berry): Merci.

Le Président (M. Gautrin): Alors, monsieur, n'emmenez pas tout le système. Là, vous êtes en train d'emmener le système de la communication.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Gautrin): Ha, ha, ha! O.K. Est-ce qu'il n'y a pas ici quelqu'un qui peut aider à remettre le micro en ordre?

Une voix: ...

Le Président (M. Gautrin): Non, non, mais...

Une voix: ...

Le Président (M. Gautrin): O.K. M. Gray.

M. Gray (Christopher Berry): Merci, monsieur. Vous avez reçu mon mémoire d'avance, mais je vais, si vous me permettez, le présenter en langue anglaise.

Le Président (M. Gautrin): That's up to you...

M. Christopher Berry Gray

M. Gray (Christopher Berry): Very good. Although I'm assuming that the Committee has read the brief and that all I need to do is refresh your memory upon it, I'll nonetheless read a few parts of it...

Le Président (M. Gautrin): O.K.

n(14 h 40)n

M. Gray (Christopher Berry): ...short as it is, three pages.

What's evident is that same-sex unions bill presents not a small but a monumental change to the Constitution of the Québec Province by increasing the number of civil statuses from what has been their standards through the history of civilian jurisprudence to... by adding yet another... the fourth civil part, civil union. The bill does that by projecting amendments to the Civil Code so as to create such unions. I suggest that such an overhaul means almost... justification and but I would suggest that this is absent here.

In order to justify a civil union, at least two things would need to be shown, either that it's needed to increase or to distribute social and economic benefits more equitably or in order to realize political commitments more fully. These two aims correspond respectively to the amendments proposed for various statutory instruments on the one hand in this bill and to the amendments to the Civil Code on the other. It needs to be shown also that there is no better way of accomplishing these aims, that is, another means which would avoid the undesirable features of the means proposed. I suggest that has not been shown.

First of all, amending the variety of statuses and regulations has not been shown necessary in order to correct socioeconomic disadvantage. In fact, that claim is never even put forward by the Government and that is accurate since there is no evidence that the persons to be benefited by these amendments are of a lower income and occupational or educational status than most of the people of Québec. In fact, some evidences indicate a higher income and status. So, there is no suggestion that the expected beneficiaries of these amendments stand in such a deprived, dependent or vulnerable position that they would need these changes, nor that the changes would succeed in remedying a deprivation.

In addition, there are very few benefits among those proposed either to the extracodal amendments or the codal ones which cannot be achieved by private agreement, rather than requiring a top-heavy public contractual regime to achieve them. The rationale for these amendments, then, is primarily of a political character, and not socioeconomic. It's to these political requirements, their presence in the Civil Code and the impact upon them that these piecemeal actions have had that I'll now direct my attention.

In spite of that, it's nonetheless surprising to see a codal amendment projected, when all of the benefits it attempts to achieve would have already been implemented by amendments to many other pieces of legislation and regulation. That would be the better and more careful way to achieve change, if change is thought desirable. I'm suggesting as well that such a change is not desirable on either front.

The remaining benefit to be achieved is the political one: the political benefit of more fully achieving citizen's rights and the dignity. The Government's claim is that the bill helps to achieve that by reducing the lack of equality and the discriminatory treatment to which persons of same-sex orientation are exposed. I suggest to you that there is no discrimination in the sense of the law which this bill remedies and that any remedy it proposes is unsuccessful, and that the detriments from undertaking this set of amendments are more severe than any of the supposed benefits from it.

First of all, that there is no discrimination by reason of sexual orientation in the current regime of marriage, such that it would need to be supplemented by a parallel regime of civil union, appears most strikingly from the fact that no one is excluded from marrying by reason of orientation. Persons of same-sex orientation can and do marry regularly with persons of the other gender. Similarly, heterosexual persons are equally excluded from the regime of marrying one of their own gender. Discrimination then fails to be the case on each of these counts. Instead, lack of sexual diversity is an impediment to marriage as are other nondiscriminatory impediments and with much the same rationale as that to which I will now turn.

One important rationale for excluding siblings, minors and those already married from marrying and for considering their unions to be respectably incest, pederasty or bigamy has to do with their difficulty of fulfilling the obligations for bearing and rearing offspring. The same applies with even more obvious force to non-procreative same-sex couplings, so that the collapse of the same-sex impediment and the construction of the same-sex counterpart to marriage would have a destructive impact upon those other impediments as well to the extent they share the same rationale. In fact, as you know various lobbies are attempting to do just that.

The reason for these impediments is that marriage is sexual, a «vie conjugale» and not merely the «vie commune» of the proposed bill. The sexual activity of marriage is procreative in kind, even when not in a single instance. This peculiarity of marriage is at most a feature which law can recognize and protect. It is no more a matter of legal fiction or of legal creation than that child welfare benefits directly only children, that old-age security benefits directly only the elderly or that midwifery is ensured only for women and prostate surgery is ensured only for men. Human embodiedness, the human cycle of life and the heterosexual fabric of the species and human reproduction are constitutive features of the human condition that law and its public policy must just deal with.

What this indicates is that sexual diversity in marriage has a nondiscriminatory standing and is no offense to equality of persons. And so... And then there is no political reason to supplement marriage by a remedial legal regime of civil union, especially when any of the socioeconomic benefits it might bring are freely available by personal agreement, benefits as suggested whose need is unlikely to be insured anyway.

Le Président (M. Gautrin): May I interrupt you?

M. Gray (Christopher Berry): Yes.

Le Président (M. Gautrin): The 15 minutes which have been allowed to you are almost expired, so, I don't want to be too rigid but could you summarize? You are reading your text, I understand that you need a bit more time, so could you summarize the main ideas?

M. Gray (Christopher Berry): That's fine. I'll use my remaining five minutes, as I count it, for a summary...

Le Président (M. Gautrin): O.K. Go ahead. I don't want to be too rigid. Go ahead but try to summarize the main ideas.

M. Gray (Christopher Berry): Certainly. Given the fact that I've argued that the regime of marriage is nondiscriminatory and requires no supplementary regime to render it more equitable, the contrary however does appear to be the case, that other-gendered marriage is non... is discriminatory. What does it do ? or same-sex civil union rather is ? it obscures the significance of marital bridging over the gender divide, it reduces sexual union from gendered sexual exchange to merely the category of cohabiting relationships with genital intimacy and eliminates the educational opportunity to undo attitudes of gender inequality.

n(14 h 50)n

All of this might be sustainable for some other legal purposes were it not the case that same-sex union would damage marriage. But in fact that is the case. I point you towards one of the three cases which has until recently been under judgment in the provinces of British Columbia, Ontario and Québec. The only judgment rendered so far is that of Mr. Justice Pitfield in Égale Canada against the Attorney General of Canada in the fall of last year, which points out that it is the very fact of what the judge calls parallelism between marriage and the various benefits which... marital benefits which are to be achieved by other legislation which is what has rendered marriage, in the view of the court, discriminatory. That is to say that the very attempt to undo, in what I've suggested is a wrong-headed manner, a supposed discriminatory character of marriage has ended up by being the very feature which leads marriage to be considered discriminatory in the view of the court.

One further point perhaps which is this. That other aspects which civil union damages, gender association and indeed same-sex relationships... is this ? at the bottom perhaps, the small... of my second page, it's: Civil union also reduces the ability to distinguish marriage from same-sex unions. What that does is to abridge a freedom of association of both genders to combine themselves into a regime of their choosing. The further effect is to eliminate same-sex partners' opportunity to design an association peculiarly suited to their novel way of life. Civil union subjects same-sex partners to all of the rights and obligations which attain to marriage. To assume that same-sex marriage is the same as other gendered marriage is a vast oversimplification. I'd suggest that not only it is an imposition upon the rights of other gendered persons but also upon those of same-sex persons themselves.

One last point I make: What this does is to enforce a regime parallel to marriage upon same-sex partners, even when they have no intent to enter it given that their cohabitation itself suffices for a defect of form in the act of same-sex union. This is not unfamiliar, that has been the imposition upon unmarried partnerships since their 1999 confirmation into the Code, despite parties' lack of intent. That is to say, a party who wishes to leave ? other gendered are civil partnership under the 1999 amendments ? could possibly, despite his or her intent not to have been in a union equivalent to marriage... may have that in fact foisted upon them by the very fact of their cohabitation as standing in place of an act. The same provision is present within the current bill.

The other remarks would have had to do with the long-term policy of the Government which Minister Begin announced in his initial press conference which was... within our jurisdiction to replace other-sex marriage with same-sex marriage. My remarks against that long-term proposal can be set aside for the purpose of our present discussion.

Le Président (M. Gautrin): Thank you. And we'll start the exchanges with the Minister of Justice.

M. Bégin: Thank you. I am not sure if I did understand well what you wrote in page 2, first paragraph, but I will read it and ask you the question. And after that, if you permit, I will translate for people looking at us who couldn't understand if they don't speak English: «That there is not discrimination by reason of sexual orientation in the current regime of marriage, such that it would need to be supplemented by a parallel regime of civil union, appears most strikingly from the fact that no one is excluded from marrying by reason of orientation. Persons of same-sex orientation can and do marry regularly, with persons of the other gender.»

Si je comprends bien, vous dites: Il n'y a pas de discrimination pour les homosexuels, puisqu'ils peuvent se marier avec des personnes de sexe opposé. Donc, il n'y a pas de discrimination.

Did I understand you well when you say that there is no discrimination for same-sex persons because they can marry with persons of the other sex? So, there is no discrimination. It's the sense I...

M. Gray (Christopher Berry): That is correct.

M. Bégin: That's correct? O.K.

Le Président (M. Gautrin): That's his point of view.

M. Bégin: Thank you.

Le Président (M. Gautrin): Any other questions?

M. Bégin: No more questions.

Le Président (M. Gautrin): Mr. the MNA for Saint-Jean? So, in that case, for the Official Opposition, the MNA for Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: Thank you, Mr. Chairman. Good afternoon, Dr. Gray.

M. Gray (Christopher Berry): ...

Mme Lamquin-Éthier: I would like to address a question pertaining to page 3 of your brief and I would like you to give me some further information. Do you consider that the same-sex union bill will do indirectly what the law directly forbids? And I'm referring to your statement: «It is meant to come as close as possible to replacing marriage with a supposedly more equitable liaison.» Perhaps you could...

M. Gray (Christopher Berry): ...I suggest that is one of the possibilities. The minister was quite clear in his preliminary remarks in depositing the bill that same-sex union's bill was restricted to same-sex rather than both sexes in order not to run afoul of the federal jurisdiction over marriage capacity.

The bill is proposed in order to stay within the Province of Québec's jurisdictional boundaries. While this is not the main point which I'm stating here, I believe that, in the long run, it will be found to have failed to do so, that it... fail to do so because the construction of a regime explicitly parallel to marriage, even for same-sex persons, will in the long run be considered has the construction of a marital regime albeit an admitted one.

Mme Lamquin-Éthier: Thank you very much, Dr. Gray.

Le Président (M. Gautrin): Any more questions?

Mme Lamquin-Éthier: No further questions. Thank you.

Le Président (M. Gautrin): Do you have any more questions? So I'd like to thank you for your presence here and it has been quite instructive, you know. So, thanks a lot. And I'll call now... Oui. Je vais... Excusez-moi.

Je vais appeler maintenant Aux Prismes, plein air et culture, l'association Aux Prismes, plein air et culture, s'ils pouvaient avoir l'amabilité de se présenter devant nous s'ils sont présents dans la salle. Nous sommes un peu en avance. Dans ces conditions-là, nous allons suspendre pour deux ou trois minutes en attendant que l'association Aux Prismes, plein air et culture se présente. Ils sont dans la salle? Non?

Écoutez-moi. Dans mon ordre du jour, les personnes qui devraient venir, c'est une association qui s'appelle Aux Prismes, plein air et culture, représentée par M. Stéphane Sigouin, François-Luc Valiquette et Pierre Freyssonnet. Est-ce qu'ils sont dans la salle actuellement?

Alors, écoutez, pour respecter... Comme nous sommes un peu en avance, je vais suspendre cinq minutes pour leur laisser la chance de peut-être se présenter. Sinon, est-ce que l'autre groupe, Centre d'orientation sexuelle de l'Université McGill... Vous n'êtes pas là non plus? Alors, écoutez, on va suspendre cinq minutes jusqu'à l'arrivée des témoins.

(Suspension de la séance à 14 h 59)

 

(Reprise à 15 h 15)

Le Président (M. Gautrin): Alors, Mme la députée de Bourassa, si vous regagniez votre siège, nous aurions quorum.

Alors, bonjour. Vous représentez Aux Prismes, plein air et culture. Ça me fait plaisir de vous accueillir ici. Vous allez avoir 15 minutes pour présenter votre mémoire, les ministériels auront 15 minutes pour vous questionner et l'opposition officielle aura 15 minutes aussi pour vous questionner. Alors, je ne sais pas si c'est vous, M. Sigouin, qui faites la présentation du mémoire? Alors, le temps est à vous, vous choisissez comment vous voulez l'utiliser. C'est vous qui êtes maître de votre temps. Alors, je vous écoute.

Aux Prismes, plein air et culture

M. Sigouin (Stéphane): Bonjour. Tout d'abord, je vous remercie de nous accueillir pour la présentation de notre mémoire. Aux Prismes, plein air et culture s'est toujours présentée... a présenté des mémoires lorsque l'occasion lui a été donnée pour des questions sur l'amélioration des droits des personnes homosexuelles, et c'est ce que nous faisons encore aujourd'hui. Je vais vous parler un petit peu de Aux Prismes, plein air et culture, et mon collègue Pierre Freyssonnet va vous décrire le mémoire en tant que tel.

O.K. Alors, Aux Prismes, plein air et culture, c'est une association à but sans lucratif à Montréal qui organise des activités pour les personnes homosexuelles et leurs amis. C'est des activités en général de plein air, des activités sociales et des activités culturelles pour briser l'isolement des membres. En fait, on a beaucoup d'activités qui sont orientées vers le plein air, entre autres les randonnées pédestres, ce qui nous fait dire en guise d'introduction que, nous, Aux Prismes, on dit que l'avant-projet de loi, la loi, c'est un grand pas, un pas important vers l'élimination des discriminations. Je fais un petit peu le lien avec les randonnées pédestres, c'est un pas, on avance quand même beaucoup avec ce mémoire, cette nouvelle loi là si elle était adoptée. Mais il y a certains petits points qui pourraient donner lieu à amélioration pour qu'on puisse grimper la montagne et arriver en haut et voir toute l'étendue du panorama qui est devant nous. Alors, je vais laisser la parole à Pierre.

Le Président (M. Gautrin): M. Freyssonnet, c'est vous qui faites la suite de la présentation?

M. Freyssonnet (Pierre): Oui. Alors, voilà, l'avant-projet de loi déjà, dans sa forme actuelle, quand même est déjà très intéressant, et on veut le souligner et sous certains éléments. Je sais que, personnellement, et beaucoup... Bon. Le mariage est essentiellement trois choses, je pense, c'est-à-dire: un acte légal parce que c'est un contrat, un acte social parce qu'il y a une dimension publique et, dans un certain nombre de cas, un acte religieux. L'avant-projet de loi déjà, dans sa forme actuelle, reconnaît ces trois dimensions-là, et on doit avouer que la présence des trois dimensions nous apparaît particulièrement intéressante et donc, on applaudit beaucoup à cette dimension-là.

L'autre dimension qu'on voit dans l'avant-projet de loi est que, enfin, on a l'impression que l'ensemble des lois du Québec, mais à partir du moment où ce serait adopté, s'appliqueront à nous autant qu'à tous les autres, et je pense que c'est un geste d'inclusion dans la société qui nous apparaît important et pour lequel on fait des démarches depuis plusieurs années et que nous appuyons avec énormément d'empressement et d'énergie.

Une autre dimension du projet de loi qui nous apparaît particulièrement avantageuse aussi est toute la question du consentement aux soins qui est prévue, et qui est un élément important, et qui a peut-être trop tardé. On sait combien de conjoints qui sont peut-être aujourd'hui déjà morts, entre autres du sida, qui ont eu des difficultés à ce niveau-là. Bon. Certains diront peut-être que c'est un peu tard, mais on dira aussi: Mieux vaut tard que jamais. Donc, nous appuyons et nous applaudissons à ça également.

n(15 h 20)n

Évidemment, une autre dimension... Bon. L'union civile, ce n'est pas le mariage. À quelque part, nous avons revendiqué et nous revendiquons toujours le mariage. Nous comprenons que la définition du mariage est de compétence fédérale et donc que le gouvernement ne peut pas statuer là-dessus, il n'en a pas la compétence. Et donc, nous acceptons ça et nous reconnaissons que le Québec, dans la limite de sa juridiction, va aussi loin qu'il est possible d'aller, et nous applaudissons à ce mouvement-là, à cette initiative qui aurait pu être remplacée par un attentisme, que les choses bougent au niveau fédéral, ce qui ne semble pas vouloir se faire dans un avenir prochain.

Ceci dit, il y a quand même des éléments dans cet avant-projet de loi qui nous agacent un peu, et je voudrais prendre quand même quelques minutes pour les souligner. Une première dimension, c'est qu'avec, je pense, une volonté d'éliminer de la discrimination envers les gais, on en crée une nouvelle parce qu'on crée un nouveau statut qui n'est pas accessible à tous. On a souvent dit: Bon. L'égalité séparée n'étant pas l'égalité, ça nous fatigue un peu beaucoup.

C'est quand même la troisième journée de la commission, ici, on en a un peu entendu parler dans les médias, et je sais qu'il y a des inquiétudes à ce niveau-là, au niveau, encore là, du chevauchement des juridictions avec le fédéral. Évidemment, je ne suis pas avocat, je n'ai peut-être pas l'évaluation tout à fait aussi précise et nette que je le voudrais, mais il me semble que j'aurais plus de facilité à défendre que l'union civile est quelque chose de différent du mariage et donc pas couvert par la juridiction fédérale en l'offrant à tout le monde qu'en l'offrant uniquement à une petite portion de la population qui n'a pas accès au mariage. Il me semble que j'aurais tendance plutôt à prendre la chose sous cet angle-là.

Une autre absence dans l'avant-projet de loi actuel est au niveau de l'article 365 du Code civil qui stipule encore qu'un mariage ne peut être consenti qu'entre un homme et une femme. S'il est vrai, et nous acceptons cette réalité-là, que le Québec n'a pas juridiction pour définir le mariage, bien, comment a-t-il juridiction pour inscrire dans le Code civil que c'est réservé aux hommes et aux femmes? Je pense que, même si son effet était uniquement symbolique, je pense qu'il y aurait là un geste de bonne volonté qui serait fort bien accueilli d'enlever cette chose-là qui, de toute façon, n'a aucune portée juridique compte tenu que la compétence est au fédéral.

De même, il y a toute la question du silence dans l'avant-projet de loi sur la parentalité, l'adoption, ces choses-là. Il en a été beaucoup question, je pense, dans vos deux premières journées; en tout cas, on en a beaucoup eu des échos dans les médias. Je ne voudrais pas prendre beaucoup de temps pour rentrer dans le détail à ce niveau-là, sinon que pour mentionner qu'effectivement, des enfants qui sont élevés par des couples homosexuels, ça existe, et je ne crois pas que ce soit sain dans une société de les ignorer. D'autre part, au niveau de l'adoption, je pense qu'il est aussi clair que... que ce soit deux hommes ou deux femmes, ils peuvent ? à mon avis, c'est une évidence ? être des parents aussi bons que l'ensemble des parents moyens de la société hétérosexuelle et qu'à ce niveau-là... parce que, entendons-nous bien, l'idéal... vous êtes parents, il n'y a personne qui l'atteint, hein?

Dernière chose qui nous turlupine un peu, qui est peut-être accessoire, c'est l'utilisation, pour les gens qui accéderaient à l'union civile, du terme «partenaire» qui a une connotation business qu'on trouve bien, bien, bien agaçante. Ce n'est pas évident de trouver un terme qui soit vraiment une alternative intéressante pour nous. On n'est pas arrivé à une suggestion, malheureusement. On aurait bien aimé. Mais on trouvait important de souligner que, si vous avez d'autres suggestions, on est probablement prêt à se rallier plus facilement qu'au terme «partenaire», qui a des connotations...

Une voix: ...

M. Freyssonnet (Pierre): Ha, ha, ha!. Alors, bien, je pense que c'est l'ensemble, je pense que c'est les principales choses sur lesquelles on voulait...

Le Président (M. Gautrin): Je vous remercie, M. Freyssonnet, et je vais donner, pour la période d'échange, la parole à M. le ministre pour débuter les échanges.

M. Bégin: Merci, MM. les présentateurs de ce mémoire. Vous êtes en bonne compagnie pour ne pas aimer le mot «partenaire», je pense qu'à peu près tous ceux et celles que nous avons entendus jusqu'à date nous ont dit qu'ils préféreraient un autre terme, et celui qui est revenu le plus souvent, c'est «conjoint civil».

M. Freyssonnet (Pierre): Ça nous irait tout à fait.

M. Bégin: Bon. Alors, je pense que le message est arrivé à terme.

Ensuite, évidemment, vous soulevez de façon très générale, mais aussi à point, puisque nous avons déjà entendu plusieurs mémoires et ils l'ont soulevé... c'est le silence de l'avant-projet de loi sur toute la question de la reconnaissance de la parentalité et du droit à l'adoption, et j'ajouterais la filiation comme telle, et là-dessus, je pense que vous rejoignez la plupart de ceux qui sont venus.

Un point seulement peut-être, parce que vous avez le désavantage d'être dans la troisième journée, donc votre originalité disparaît un peu, est masquée par celle des autres qui vous ont précédés, mais il y a quand même un point que vous soulevez. Il n'est pas nouveau, mais je pense qu'on n'en a pas souvent parlé beaucoup. Vous dites, à la page qui serait 4, puisque vous n'avez pas paginé, là: «Ensuite, l'avant-projet de loi ne modifie pas l'article 365 du Code civil.» Vous seriez bien, en passant, pour travailler à mon ministère, parce que je suis obligé de me battre tout le temps pour qu'ils paginent les pages.. les textes.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bégin: Là, ils sont pas mal maintenant, ils le font, mais ça a été longtemps sans qu'ils le fassent.

Le Président (M. Gautrin): Autrement dit, c'est une offre d'emploi que vous leur faites?

M. Bégin: Bien, quasiment, là.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bégin: Mais vous allez avoir de la concurrence. «Celui-ci stipule toujours qu'un mariage ne peut être contracté "qu'entre un homme et une femme".» Et là vous dites: «Si le gouvernement admet n'avoir aucune juridiction au niveau de la définition du mariage, comment peut-il avoir le droit d'inscrire ces mots?» C'est une façon originale d'aborder la question. Voulez-vous vous exprimer là-dessus un peu?

Le Président (M. Gautrin): M. Freyssonnet.

M. Freyssonnet (Pierre): Oui, bien, écoutez, vous dire... Si vous dites que la définition du mariage est fédérale, c'est donc au fédéral qu'il appartient de définir si le mariage se définit entre un homme et une femme ou entre n'importe qui ? et là j'élargirai pas mes exemples inutilement. Mais il me semble que, si cette juridiction-là... s'il n'appartient pas au gouvernement du Québec de dire que le mariage peut être contracté entre deux hommes ou entre deux femmes, comment peut-il avoir la juridiction de dire que c'est entre un homme et une femme? Il me semble que c'est... on n'a pas plus le droit d'un bord que de l'autre.

Le Président (M. Gautrin): Je vous remercie. M. le ministre, vous avez d'autres questions?

M. Bégin: Non, mais, comme je dis à ces gens, ils ont vraiment couvert l'ensemble de la problématique, nous l'avons également fait. Je ne voudrais pas être redondant strictement pour vous poser des questions, mais, quand vous traitez la question de la parentalité, de la filiation dans une seule phrase, nous vous rejoignons parce que ça a déjà été abordé en long et en large. Alors, M. le Président, ça va être à mes collègues de poser des questions.

Le Président (M. Gautrin): Parmi les parlementaires ministériels, y a-t-il des gens... M. le député de Roberval.

M. Laprise: Si je comprends bien, vous dites qu'on devrait éliminer le mot «mariage» dans le cadre des couples... l'homme et la femme?

M. Freyssonnet (Pierre): Éliminer les mots «homme et femme» dans le cadre du mariage, effectivement, au niveau du Code civil, puisque, de toute façon, comme je disais il y a deux instants, vous dites que vous n'avez pas le droit de dire que c'est deux hommes ou que c'est deux femmes, logiquement, me semble-t-il...

Le Président (M. Gautrin): Vous utiliseriez le terme «deux personnes physiques».

M. Freyssonnet (Pierre): Oui ou...

M. Valiquette (François-Luc): Deux personnes consentantes majeures, tout simplement.

Le Président (M. Gautrin): Majeures, ça veut dire que, vous, vous limiteriez après 18 ans.

M. Valiquette (François-Luc): Bien, c'est-à-dire qu'en bas de 18 ans il faut encore demander la permission à papa ou à maman.

Une voix: Pas dans le cas de l'union civile.

n(15 h 30)n

M. Bégin: Des gens nous ont dit ? tant qu'à être sur cette question-là, vous permettez, M. le député? ? il y a des gens qui nous ont dit qu'ils préféreraient que l'âge du mariage soit porté à 18 ans, comme dans l'union civile. Avez-vous une réaction là-dessus?

M. Sigouin (Stéphane): On n'a pas de recommandation de groupe, pas en tant...

Le Président (M. Gautrin): Mais, implicitement, M. Valiquette, puisque vous avez utilisé le terme «majeur»...

M. Valiquette (François-Luc): J'ai utilisé le terme «majeur» pour...

Le Président (M. Gautrin): ...vous l'utilisez implicitement pour 18 ans.

M. Valiquette (François-Luc): Voilà.

Le Président (M. Gautrin): M. le député de Roberval.

M. Laprise: Je vais émettre tout simplement la réserve suivante: c'est que c'est aller loin pas mal dans votre démarche, selon ma perception à moi. Je n'engage pas mes collègues, mais je trouve que ça m'interpelle beaucoup, cette définition-là puis cette obligation d'éliminer vraiment ce qui est dans les moeurs québécoises depuis nombre d'années et qui était aussi un choix que les gens faisaient concernant le mariage civil et le mariage religieux également. Parce que, autrefois, le mariage religieux comprenait également le mariage civil parce que la légalité des choses se faisait là. Maintenant, aujourd'hui, il y a le mariage civil qui est plus répandu au niveau des juges, et certains juges de paix, qui le font dans les cours juridiques.

Maintenant, le mariage, ça a toujours été en premier lieu, je pense, l'union de l'homme et de la femme. C'est ce qui a été défini au point de départ. Enlever ça pour donner place à d'autres choses, moi, en tout cas, ça me dérange. Je donne mon opinion.

M. Valiquette (François-Luc): M. le député, si je peux me permettre une observation.

Le Président (M. Gautrin): M. Valiquette.

M. Valiquette (François-Luc): Si on considère que le Code civil est le reflet de la pensée de la population, je vous ferais remarquer qu'il y a une quarantaine d'années vous n'auriez pas quorum aujourd'hui parce que la femme était considérée comme une mineure. Alors, est-ce que c'est vraiment le reflet de la population, le Code civil, ou si le Code civil ne doit pas être le reflet d'une réalité changeante?

M. Freyssonnet (Pierre): Peut-être, pour ajouter.

Le Président (M. Gautrin): M. Freyssonnet.

M. Freyssonnet (Pierre): Je pense que la question est tout simplement de dire que, à partir du moment où le gouvernement du Québec actuel dit qu'il n'a pas la juridiction sur la définition du mariage, à la limite ne remplaçons pas les mots «le mariage se fait entre un homme et une femme», enlevons-le tout simplement, puisque, de toute façon, ce n'est pas de la juridiction du Québec, de le dire ou de dire autre chose.

M. Valiquette (François-Luc): Laissons l'odieux au gouvernement fédéral de décider qui peut se marier.

Le Président (M. Gautrin): Je vous remercie. Est-ce que, chez les ministériels, vous avez d'autres... M. le député de Roberval.

M. Laprise: ...qui a été émise par l'autre monsieur tout à l'heure. C'est sûr que, lorsqu'on a reconnu que la femme avait le droit de vote, on n'a pas éliminé le nom de l'homme pour avoir le droit de vote également, là. On n'a pas dit: Maintenant, c'est juste les femmes qui ont le droit de vote, on a rajouté la femme sans toutefois changer le nom de l'homme pour leur donner le droit de vote, tu sais.

M. Valiquette (François-Luc): Je ne parlais pas du droit de vote, M. le député, je parlais du droit à la femme de pouvoir recevoir un chèque à son nom, de pouvoir être l'égale de l'homme sur le plan financier.

M. Laprise: Mais on n'a pas pour autant ôté le droit à l'homme d'avoir ces choses à son nom aussi, tout en donnant le nom de la femme.

M. Valiquette (François-Luc): Mais là il n'est pas question d'enlever quoi que ce soit à qui que ce soit, M. le député. C'est tout simplement d'ouvrir une réalité à l'ensemble de la population et non pas à une majorité.

Le Président (M. Gautrin): Alors, je vous remercie. Les échanges prennent un caractère un peu passionné dans cette fin d'après-midi. Alors, Mme la députée de Mercier. Mme la députée de Bourassa, vous voulez commencer la première?

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Gautrin): Excusez-moi.

Mme Lamquin-Éthier: Bonjour, MM. Sigouin, Valiquette et Freyssonnet. J'ai pris également bonne note des recommandations que vous avez formulées, alors je ne voudrais pas revenir là-dessus. J'aimerais savoir... Parce que vous nous avez fort bien exprimé quant à rendre accessible l'union civile à tous les citoyens quant à l'article 365, à l'accès à la parentalité, quant au terme «partenaire», qui ne vous convenait pas, et au consentement aux soins.

Je sais que vous faites a priori des activités à caractère plein air, culture, donc... Mais, quand même, est-ce que les gens qui fréquentent votre organisation ont eu l'occasion de vous exprimer ce qu'ils en pensaient, du projet de loi? Est-ce qu'ils ont fait des commentaires? Est-ce qu'ils s'ouvrent à vous? Est-ce qu'ils partagent?

M. Sigouin (Stéphane): On en a discuté à notre dernier conseil d'administration, le mémoire a été approuvé au conseil d'administration. Les gens en parlent...

Mme Lamquin-Éthier: Les membres individuellement?

M. Sigouin (Stéphane): ...c'est sûr, quand même, entre eux autres. On écoute ce que nos membres en disent. On organise 75 activités environ par année, alors c'est une ou deux activités par semaine, des activités autant culturelles, sociales et... Alors, on rencontre quand même souvent nos membres, des activités qui regroupent en général de 30 à 100 personnes, tout dépendamment des activités. Alors, c'est quand même l'occasion d'avoir beaucoup d'échange avec ces membres-là.

M. Freyssonnet (Pierre): Pour ajouter. Il reste que les positions qu'on a défendues dans le mémoire sont... découlent directement, de toute façon, de positions de principe qui sont, je pense, très généralement approuvées au sein de notre organisme, qui sont des choses qu'on a déjà dites à des occasions précédentes. Et, dans la mesure où il n'y avait pas d'énormes nouveautés dans notre discours, on n'a effectivement pas monté de consultations formelles. Mais il reste que les principes qu'on défend et qu'on a défendus sont, je pense, sans questions, endossés par l'ensemble de nos membres et l'ensemble, je dirais même, des gens qui ont été membres depuis que notre organisme existe, il y a bientôt neuf ans.

M. Sigouin (Stéphane): Qui sont, entre autres, l'élimination de toutes les discriminations. C'est le point de base, de référence de tous nos...

M. Freyssonnet (Pierre): De toutes nos prises de décision.

M. Sigouin (Stéphane): ...nos interventions. C'est l'élimination de toutes les discriminations.

Mme Lamquin-Éthier: Avez-vous eu l'occasion...

Le Président (M. Gautrin): Mme la députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Est-ce que vous avez eu l'occasion de discuter plus amplement, par exemple, de la procédure quant à la dissolution qui est prévue dans l'avant-projet de loi, c'est-à-dire que ça sera par une déclaration commune notariée? Avez-vous eu des commentaires là-dessus ou le temps vous a manqué pour aborder cette question-là?

M. Sigouin (Stéphane): On a probablement manqué de temps. Moi, je n'ai pas eu de... personnellement, je ne peux pas parler au...

M. Freyssonnet (Pierre): Bon, alors je pense que... En tout cas, les quelques réactions que j'ai eues, il n'y en a pas eu des tonnes, là, mais c'est des choses qui ont... je pense, qui sont intéressantes et qui sont bien accueillies.

Mme Lamquin-Éthier: Merci beaucoup, M. Freyssonnet.

Le Président (M. Gautrin): Mme la députée de Mercier.

Mme Rochefort: Merci, M. le Président. L'avant-projet de loi a été déposé à la veille des Fêtes, durant la période, donc, de Noël. Plusieurs de vos membres sont retournés dans leur famille. Est-ce que vous pourriez nous parler si vous avez eu des réactions venant des familles, des amis autour? Je pense, par exemple, aux mères, aux pères, aux oncles, aux tantes.

Le Président (M. Gautrin): M. Sigouin, vous...

M. Sigouin (Stéphane): Bien, en fait, pour mon expérience personnelle, c'est sûr que, moi, je vis une très belle relation avec mes parents. Et je vis en union de fait depuis 21 ans bientôt, et c'est sûr que ça me plairait bien de pouvoir avoir la possibilité d'entrer dans... avoir un vrai contrat, disons, un contrat public, civil, et peut-être même religieux, on verra, là, mais... Et c'est quelque chose qui ne rebute pas, absolument pas mes parents, là, de... Leur réaction est quand même très, très bonne de ce côté-là. Je suis sûr que ça serait très, très, très bien accueilli dans ma famille, avec les cousins aussi. On les rencontre souvent et... Tu sais, c'est comme... c'est comme un fait, c'est un fait accompli, c'est là. On est ensemble et on est aussi bien accueilli. Puis c'est sûr qu'ils trouveraient très bien qu'on pourrait démontrer ça par quelque chose de plus que qu'est-ce qu'on peut faire présentement.

Le Président (M. Gautrin): M. Valiquette, vous avez un complément de réponse.

M. Valiquette (François-Luc): Moi, j'ai eu du feedback, si on peut dire, de mes trois filles, parce que j'ai été marié pendant 12 ans, et, d'une voix commune, elles m'ont dit: Vas-y, tu es capable, tu as raison.

M. Freyssonnet (Pierre): Oui, bien, chez nous, écoutez, ça...

Le Président (M. Gautrin): M. Freyssonnet.

M. Freyssonnet (Pierre): ... ? oui ? ça a eu, je vous dirais, assez peu d'écho parce que je pense que c'est... Moi, en tout cas, ma perception c'est que ça va de soi. Ce n'est même pas, ce n'est même pas matière à le souligner. Ça passe, moi, je pense, très bien.

M. Sigouin (Stéphane): Je pourrais peut-être aller un petit peu plus loin, au-delà de... même des familles. J'en ai parlé à mes supérieurs au travail et je travaille quand même dans un milieu qui est assez...

Une voix: Conservateur.

M. Sigouin (Stéphane): ...conservateur. Je suis actuaire dans une compagnie d'assurances. Et c'est quand même, là... Oui, ils sont au courant que je viens ici aujourd'hui parler du contrat d'union civile, et c'est très bien accueilli. Les réactions sont très bonnes.

M. Valiquette (François-Luc): La société québécoise a beaucoup évolué dans les dernières années.

n(15 h 40)n

Le Président (M. Gautrin): Est-ce qu'il y a d'autres questions? Dans ces conditions-là, ça me fait plaisir de vous remercier pour la qualité de votre témoignage et ce que vous nous avez apporté. Et je vais demander maintenant au Dre Igartua et à Me Marie-France Bureau de vouloir se présenter devant nous.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Gautrin): Ça me fait plaisir de vous souhaiter la bienvenue devant notre commission. Vous représentez le Centre d'orientation sexuelle de l'Université McGill. À l'heure actuelle, je vous ai expliqué, vous êtes au courant de nos règles de procédure. Vous allez avoir 15 minutes pour présenter votre mémoire. Les parlementaires ministériels ont 15 minutes d'échange avec vous, et l'opposition officielle a aussi 15 minutes d'échange. J'essaie de gérer le temps d'une manière souple, de manière que personne ne se sente outragé. Alors, madame... Je ne sais pas qui fait la présentation. Est-ce que c'est Me Bureau ou...

Mme Bureau (Marie-France): Merci, M. le Président. On va alterner pour la présentation d'aujourd'hui.

Le Président (M. Gautrin): Ah, vous allez alterner.

Mme Bureau (Marie-France): Alors...

Le Président (M. Gautrin): Bien, peut-être, si vous nous disiez qui est qui, ça nous permettrait de savoir.

Centre d'orientation sexuelle
de l'Université McGill (COSUM)

Mme Bureau (Marie-France): Je suis Me Marie-France Bureau, et c'est le docteure Karine Igartua, pour le Centre d'orientation sexuelle de l'Université McGill. Alors, merci d'abord de nous avoir invitées à témoigner devant cette commission. Nous souhaitons, à titre introductif, préciser que le Centre d'orientation sexuelle de l'Université McGill, donc COSUM, félicite le gouvernement du Québec d'avoir pris l'initiative d'accorder aux conjoints de même sexe un traitement égalitaire. Il s'agit d'une grande avancée juridique qui s'inscrit dans les engagements de non-discrimination pris par le Québec dès 1977, avec l'adoption de la Charte des droits et libertés.

À titre préliminaire, nous voulons préciser que COSUM considère que l'égalité réelle pour les conjoints de même sexe réside ultimement dans leur accès au mariage. Évidemment, bien que le Québec n'ait pas la compétence constitutionnelle pour légiférer sur les conditions de fond du mariage, nous croyons néanmoins que le Québec pourrait agir dans ce débat tout d'abord en abrogeant l'exigence d'hétérosexualité contenue au second alinéa du désormais célèbre article 365 ? je crois qu'on n'est pas les premiers à vous faire part de cette suggestion ? et, d'autre part, nous croyons que le Procureur général du Québec pourrait mettre fin à sa contestation dans le dossier entrepris devant la Cour supérieure par MM. Hendricks et LeBoeuf.

Alors, notre présentation va essentiellement porter sur deux points principalement, le premier étant l'élargissement de l'accès de l'union aux couples hétérosexuels, d'abord, et, deuxièmement, sur la question de la parentalité homosexuelle. Alors, nous recommandons au gouvernement d'ouvrir l'accès à l'union civile à tous les couples non mariés, nonobstant leur orientation sexuelle. Pour nous, l'établissement d'un état civil homosexuel et la création d'un régime distinct s'apparentent à la ségrégation et à la doctrine du «separate but equal», qui est dorénavant rejeté en droit canadien, et ils ne constituent pas une approche acceptable de l'égalité. Nous croyons qu'au-delà des considérations d'ordre juridique plusieurs facteurs militent en faveur de l'adoption d'un régime inclusif. Les homosexuels ont historiquement été victimes de marginalisation et de stigmatisation, et nous croyons qu'un traitement séparé risque de perpétuer l'exclusion et les préjugés maintenus à l'égard des homosexuels. Le Dre Igartua va traiter des conséquences de la stigmatisation sur la santé mentale.

Je voudrais juste souligner quelques arguments en faveur, qui militent en faveur de l'ouverture de l'union à tous les conjoints non mariés, même si on peut considérer, et je crois que c'est une position qui a été amenée à plusieurs reprises, que ce serait un régime ou une mesure transitoire en attendant que le Parlement fédéral élargisse l'accès au mariage aux conjoints de même sexe.

En premier lieu, nous croyons qu'il ne faut pas présumer de l'intention du législateur fédéral à cet égard-là. D'ailleurs, deux fois plutôt qu'une, le Parlement fédéral a signifié le caractère essentiellement hétérosexuel du mariage. Et, deuxièmement, on ne peut pas non plus prévoir la décision que la Cour suprême va apporter à cette question-là, ce qui peut d'ailleurs prendre plusieurs années avant qu'on ait une décision. Donc, on croit que le gouvernement devrait opter pour un régime inclusif.

Comme nous le soulignons dans notre mémoire, forcer les individus à revendiquer un statut homosexuel pose de nombreux problèmes. Nous songeons d'abord à des considérations relatives à la protection de la vie privée. Les problèmes reliés à la divulgation et à l'échange de renseignements personnels sont légion à l'ère des communications électroniques, et nous pensons qu'a fortiori il est difficile de contrôler qui et dans quel contexte seront communiquées les données relatives à l'état civil.

Un ami juriste, spécialiste de l'histoire juridique des homosexuels, me rappelait récemment un danger que pourrait constituer la création d'un état civil exclusivement homosexuel à l'étranger. Sans même penser aux pays où l'homosexualité est encore punissable par la peine de mort, songeons tout simplement à des pays plus proches de nous tels que les États-Unis ou le Mexique, où beaucoup de Québécois ont à voyager, que ce soit pour des vacances, pour le commerce ou pour le travail. Plusieurs de ces juridictions dans ces États n'offrent aucune protection juridique contre la discrimination envers les homosexuels. De plus, le fait d'être identifié comme homosexuel peut constituer un danger et une menace pour la sécurité physique des personnes dans plusieurs de ces États.

Alors, pensons aux fréquentes situations où l'on demande à une personne de révéler son état civil pour obtenir un visa, un permis ou un travail. Avec l'union civile telle qu'elle est actuellement, la personne sera identifiée, fichée comme étant homosexuelle, alors que le statut, l'état civil «marié» ne comprend rien de vraiment stigmatisant. Alors, je vais laisser la parole au Dre Igartua sur la question des conséquences sur la santé mentale de la stigmatisation. Merci.

Le Président (M. Gautrin): Docteure.

Mme Igartua (Karine Josée): Malgré la Charte des droits et libertés, la discrimination face à l'homosexualité existe encore au Québec. Certaines formes de discrimination continuent carrément, à l'encontre de la Charte; je parle de violence physique, de menaces de mort, de viols, de vandalisme et d'autres crimes haineux, de discrimination à l'emploi et au logement. D'autres formes de discrimination ne font pas l'objet de législation: les moqueries de cour d'école, le mépris ou le reniement de la famille d'origine, la violence psychologique et l'absence de visibilité des familles et des unions homosexuelles dans nos institutions. D'autres formes de discrimination sont encore consacrées dans le Code civil: l'empêchement de l'accès au mariage, l'impossibilité de partage de l'autorité parentale sont des exemples de cela.

Toutes ces formes de discrimination envoient le même message puissant que les homosexuels ne sont pas des citoyens à part entière et qu'ils n'ont pas le même droit de respect que les hétérosexuels. Cette discrimination a des effets dévastateurs sur la santé mentale des personnes et de leurs proches. Homophobie interne est le terme clinique utilisé pour désigner une haine de soi résultant de l'internalisation de ces messages négatifs sur l'homosexualité.

L'homophobie interne est présente à différents degrés chez toute personne élevée dans une société où l'homosexualité est marginalisée. Afin de s'épanouir pleinement, la personne homosexuelle doit se conscientiser à ces messages négatifs qu'elle a reçus et, en plus, s'en défaire. Ce n'est pas toujours une mince tâche. Les recherches ont démontré que l'homophobie interne est reliée à la dépression, à l'anxiété, à l'abus de substances, à l'abus d'alcool, aux difficultés relationnelles, à une pauvre estime de soi et même au suicide. À COSUM, nous aidons régulièrement des patients aux prises avec ces problèmes de santé mentale, et je vous en donnerai des exemples à la période d'échange, si vous le désirez.

Le suicide chez les jeunes est un problème si sérieux qu'il mérite que je m'y attarde quelques instants, malgré notre horaire chargé. D'après les autopsies psychologiques, les experts estiment qu'un suicide sur trois est complété par un jeune troublé par son orientation sexuelle. D'autres études nous indiquent que de 50 à 70 % des jeunes homosexuels auront des idées suicidaires et que 30 à 40 % passeront à l'acte. Souvent, ceci se passe au moment de leur dévoilement de leur orientation sexuelle. Cette découverte est si douloureuse parce que le jeune est témoin de la discrimination qui perdure face à l'homosexualité dans notre société.

n(15 h 50)n

Le gouvernement peut, en faisant les modifications nécessaires à son projet de loi, d'une part, éliminer la discrimination consacrée dans le Code civil et, d'autre part, envoyer le message à la population que les homosexuels méritent le même respect que tous les autres citoyens. Ce faisant, le gouvernement contribuera à changer l'image de l'homosexualité et à réduire les autres formes de discrimination qui sont difficilement visées par la législation. Ce changement d'attitude sociétale aura pour effet de réduire l'homophobie interne et, donc, d'améliorer la santé mentale et la qualité de vie de ces citoyens homosexuels.

Mme Bureau (Marie-France): Merci. Je propose maintenant de passer à notre second point qui est la reconnaissance de la parentalité homosexuelle. Même si actuellement rien n'interdit à des couples de même sexe d'adopter des enfants et que l'article 555 du Code civil permet le consentement spécial à l'adoption en faveur du conjoint ? on en a fait état à plusieurs reprises dans les derniers jours ? nous croyons que le législateur devrait revoir toutes les dispositions du Code civil relatives à la parentalité de façon à traiter les parents hétérosexuels et homosexuels de la même façon. Cela inclurait d'abord l'adoption, la filiation, l'autorité parentale, la présomption de paternité, qui pourrait devenir, dans le cadre de l'union, une présomption de parentalité, et des dispositions relatives à la procréation médicalement assistée.

Les amendements prévus à l'avant-projet de loi clarifient la question du consentement spécial dans le cas des modifications à 555, mais nous croyons néanmoins que ce n'est pas suffisant. Dans son état actuel, le Code est ambigu sur la question et ne reconnaît pas de façon expresse les liens entre les parents homosexuels et leurs enfants. Nous croyons que plusieurs arguments militent en faveur de la reconnaissance explicite de la parentalité, que nous avons regroupés en cinq points.

Le premier point est l'objectif législatif poursuivi. Tous les mécanismes prévus au Code civil, notamment la filiation, la notion d'autorité parentale, la présomption de paternité, la possession d'état et les règles de responsabilité dans le cadre d'un projet parental réalisé avec l'aide de la procréation médicalement assistée, tous ces mécanismes-là qu'on a introduits au Code ont un objectif législatif. Ces concepts ont pour but de protéger les enfants, de favoriser la responsabilité des parents, d'assurer la stabilité et la pérennité du lien parents-enfant, de favoriser la paix sociale, et, dans certains cas, ces dispositions visent à protéger spécifiquement la mère ou les conjoints. Or, si le législateur considère qu'il est important de protéger ces liens et de promouvoir ces objectifs dans le cadre de la famille hétérosexuelle, il n'y a aucune raison d'exclure les familles homoparentales de cet éventail de protection qu'on croit bon en tant que société.

La deuxième série d'arguments a trait à la conséquence de l'ambiguïté actuelle. Laisser planer l'ambiguïté au regard de la filiation et des responsabilités parentales aurait pour conséquence d'en faire payer le prix aux parents homosexuels et à leurs enfants. Il serait injuste de laisser les familles homoparentales dans l'incertitude et de leur imposer le fardeau de régler au cas par cas devant les tribunaux les litiges qui risquent d'arriver. D'ailleurs, la solution de judiciariser et d'y aller au cas par cas présente certains inconvénients au point de vue de la stabilité juridique. On en a d'ailleurs des exemples en Californie ? je pourrai revenir là-dessus pendant la période d'échange si nécessaire.

Troisième série d'arguments pour la reconnaissance explicite est la question de la filiation directe pour les lesbiennes concevant un enfant par insémination artificielle dans le cadre de leur union. Donc, de permettre l'établissement d'une filiation à l'égard de parents de même sexe permettrait aux couples de lesbiennes ayant un enfant par insémination artificielle de s'inscrire comme parents à l'acte de naissance dès la naissance de l'enfant, donc sans passer par l'étape additionnelle de l'adoption, donc sans les obliger de judiciariser l'adoption de leurs propres enfants, tel qu'il est désormais possible en Colombie-Britannique. Puis je pourrai aussi revenir sur ces questions-là, ce pour quoi le législateur a opté en Colombie-Britannique.

Quatrième série d'arguments est la question de la fonction du droit et de l'importance symbolique de la reconnaissance des liens. Reconnaître officiellement dans la loi les droits et obligations des parents homosexuels ? il s'agit essentiellement d'obligations ? profiterait non seulement aux familles, mais à l'État et à la société dans son ensemble. Une société démocratique, fondée sur des principes d'égalité, s'exprime dans ses lois qui reflètent les valeurs profondes auxquelles elle veut adhérer. La société québécoise croit à la protection et à l'égalité des enfants, à l'importance de la stabilité et de la pérennité du lien parents-enfant et à l'importance de la famille pour l'épanouissement de la société dans son ensemble. Le droit civil devrait refléter ces valeurs expressément en consacrant la parentalité homosexuelle.

Évidemment, notre cinquième point, et non le moindre, est la question du bien-être des enfants et de la compétence parentale. Et là-dessus, je cède la parole au Dre Igartua.

Mme Igartua (Karine Josée): Le professeure Danielle Julien vous a entretenu hier sur l'état des recherches sur le bien-être des enfants élevés par les parents homosexuels. Permettez-moi alors simplement de réitérer certains points.

Les recherches qui se font depuis le début des années soixante-dix ont d'abord été entreprises pour répondre au questionnement des tribunaux qui devaient trancher sur la garde des enfants dans le cas de divorce où un parent était homosexuel. On cherchait à savoir ce qui était dans le meilleur intérêt de l'enfant. C'est la même réflexion que nous devons faire avec cet avant-projet de loi aujourd'hui.

On a d'abord comparé les compétences parentales des parents homosexuels et hétérosexuels, attitudes, comportements, personnalité, adaptation, rôles de genre; on n'a trouvé aucune différence. On a ensuite comparé les enfants, développement social, développement émotif, intelligence, personnalité, jugement moral, identité et rôles de genre, orientation sexuelle; encore là aucune différence.

L'ensemble des données scientifiques disponibles nous permet d'affirmer que les enfants issus de familles homoparentales ont un développement psychosocial sain et à tous égards comparable à celui des enfants de parents hétérosexuels. C'est d'ailleurs en s'appuyant sur une revue de cette littérature que The American Academy of Pediatrics a publié un énoncé en faveur de l'adoption, par le conjoint de même sexe, des enfants de son conjoint.

Cette association qui représente plus de 50 000 pédiatres a comme intérêt premier la santé des enfants. Ils affirment que le bien-être des enfants est mieux assuré quand ils ont deux parents légaux plutôt qu'un parent légal et un parent non reconnu. Ils appuient donc tout effort législatif pour assurer la stabilité et la sécurité des familles homoparentales. Vous avez déjà en annexe de notre mémoire les énoncés du American Psychiatric Association et du American Psychoanalytic Association en faveur du mariage pour les couples de même sexe. Ces énoncés traitent sommairement des droits des enfants.

Le Président (M. Gautrin): Le temps est écoulé, je ne veux pas vous empêcher de...

Mme Igartua (Karine Josée): Laissez-moi 30 secondes.

Le Président (M. Gautrin): Ah! absolument. Il n'y a pas de problème. Mais soyez consciente qu'il faudrait peut-être que vous arriviez à condenser votre pensée.

Mme Igartua (Karine Josée): Parfait. Donc, puisque l'énoncé des pédiatres vient de paraître cette semaine, je vous le soumets aujourd'hui. Je vous en ai apporté des copies, de l'énoncé exact. C'est un résumé clair des connaissances actuelles publiées par un organisme très réputé. Le gouvernement ne se trompe pas en se fiant sur les recommandations des pédiatres pour légiférer dans le meilleur intérêt des enfants. Merci.

Le Président (M. Gautrin): Alors, vous voulez faire un dépôt à la commission? Peut-être que c'est le même qui nous a déjà été déposé hier?

Mme Igartua (Karine Josée): C'est l'article intégral qui a paru dans la revue...

Document déposé

Le Président (M. Gautrin): Je ne pense pas que c'est celui qu'on a eu hier, mais, écoutez, ce n'est pas grave qu'on fasse deux dépôts. Alors, nous allons accepter le dépôt que vous nous donnez.

Et nous allons commencer la période d'échange avec M. le ministre de la Justice.

M. Bégin: Merci, mesdames. Je pense que vous avez apporté un élément que nous n'avions pas vu jusqu'à présent, c'est les effets qui découlaient de certaines décisions qui avaient été prises ou qui pourraient être prises, par exemple, lorsqu'une personne va à l'étranger, l'accès à l'information, etc. Vous êtes les premières à nous l'avoir souligné, et je vous en remercie, parce que le but d'une commission comme celle-là justement, c'est de s'enrichir du maximum d'informations pour être en mesure de prendre une décision éclairée. Vous avez apporté quelque chose que même mes gens ici, qui sont des spécialistes, n'avaient pas vu encore. Alors, merci infiniment.

C'est relié directement à cette question que vous soulevez à la page 7 de votre mémoire, qui est celle des sexes et évidemment d'accès à l'union civile pour les conjoints de même sexe, bien sûr, mais également pour les hétérosexuels. Et vous avez fait référence à la Nouvelle-Écosse, mais aussi au ministère de la Justice albertain qui aurait fait, en janvier 2002, une initiative similaire. Je n'ai pas...

Mme Bureau (Marie-France): ...annonce...

M. Bégin: Oui, je comprends, mais, souvent l'annonce... On sait bien que les ministres, c'est des annonces qu'ils font, mais un jour ça se transpose en réalité.

Mme Bureau (Marie-France): Nous l'espérons.

M. Bégin: La preuve, nous sommes ici aujourd'hui.

Le Président (M. Gautrin): Pas toujours dans votre cas.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bégin: Pardon?

Le Président (M. Gautrin): Allez, allez, continuez. C'est une petite boutade simplement.

Mme Bureau (Marie-France): ...il y a deux semaines.

M. Bégin: Ha, ha, ha! Je pense que, si nous sommes ici, donc il doit y avoir un certain lien.

Mme Bureau (Marie-France): C'est ça. Mais ils ont annoncé par ailleurs qu'ils avaient l'intention de faire un partenariat, une union très similaire au mariage, ouvert à tous.

M. Bégin: À tous.

Mme Bureau (Marie-France): Oui.

M. Bégin: O.K. Bon. Est-ce que vous avez une documentation, un papier...

Une voix: Écoutez, c'était une dépêche par l'Internet que je pourrais essayer de retrouver.

n(16 heures)n

M. Bégin: S'il vous plaît, j'apprécierais. D'ailleurs, nos travaux ne sont pas terminés, donc vous pourriez l'envoyer au Secrétariat de la commission...

Mme Bureau (Marie-France): Parfait. Je m'y engage.

M. Bégin: ...comme vous avez envoyé votre mémoire.

Mme Bureau (Marie-France): Je l'ai peut-être ici, je vérifierai après, sinon je l'enverrai.

M. Bégin: D'accord. De sorte que, lors de notre prochaine séance, la semaine prochaine, on pourrait en prendre connaissance. Merci.

Mme Bureau (Marie-France): Très bien.

M. Bégin: Donc, en Nouvelle-Écosse, si je comprends bien, c'est ouvert aux deux, c'est le partenariat. Connaissez-vous... L'institution en général, est-ce qu'elle est semblable à l'union civile que nous avons ici sous tous ses aspects ou s'il y a des différences de taille?

Mme Bureau (Marie-France): Il y a des différences, parce que c'est moins... probablement moins complet. Par ailleurs, c'est toujours difficile de faire des comparaisons, je trouve, entre des provinces de «common law» puis le droit civil, parce que déjà il y a des obligations de support, il y a la notion de «common law spouse». Beaucoup de droits existent en dépit du statut conjugal. Comme, vous savez très bien, par rapport aux obligations alimentaires à l'égard des enfants. Par ailleurs, la notion de «in loco parentis» ou de «parent psychologique» est beaucoup plus développée. Donc, ils ont déjà, je crois ? et, en plus, la Nouvelle-Écosse, comme on le sait, est parmi les cinq aussi, maintenant, provinces canadiennes qui ont la notion de «second parent's adoption», qu'ils appellent, ou l'adoption par le conjoint... l'adoption, par une personne, de l'enfant de son conjoint. Donc, ça a été accordé par jurisprudence. L'arrêt est d'ailleurs cité dans le mémoire ? donc ils ont la possibilité d'adopter l'enfant de leur conjoint, d'exercer l'autorité parentale.

Il y a plusieurs notions d'«aliments» qui existent indépendamment du mariage, contrairement au droit civil, où on sait que les régimes sont vraiment différenciés entre le mariage et l'union de fait, et ils ont ajouté toute une série de droits. Donc, dans l'ensemble, ça fait un régime assez substantiel.

M. Bégin: Je vous demande ça parce que j'ai une bonne partie des réponses aux questions que je pose, mais ce n'est pas le cas de tout le monde, et, vu que vous êtes avocate, vous avez certainement dû regarder l'ensemble des législations, vous y faites référence. C'est pour ça que je vous pose ces questions-là. Parce que souvent on fait référence au PACS, en France.

Mme Bureau (Marie-France): Je n'aurais pas fait d'analogie avec le PACS, par exemple.

M. Bégin: Non, non, je comprends, mais on sait qu'il y en a une, différence, énorme. Par exemple, il n'y a pas de célébration; c'est l'enregistrement mais c'est ouvert à tous, sans distinction. À certains égards donc, ça ressemble beaucoup, mais, à d'autres égards, c'est très différent. C'est pour ça que c'est toujours, comme vous dites, dangereux ou difficile de comparer, mais c'est quand même aidant de savoir qu'ailleurs on a pu aller dans telle direction, aussi loin qu'on y va ou moins, et connaître aussi les motifs pour lesquels on l'a fait ou encore pourquoi on ne l'a pas fait.

Alors, est-ce que vous avez une connaissance d'un endroit où on est allé aussi loin dans toutes les directions, là, que, par exemple: ouvert à tout le monde, célébration, qu'il y a la parentalité, la filiation, enfin tout ce dont on discute depuis trois jours ici, là, toutes les facettes? Est-ce que vous connaissez un endroit?

Mme Bureau (Marie-France): Disons, un parallèle qui est intéressant est celui des Pays-Bas, évidemment, où il y avait un partenariat ouvert aux conjoints de même sexe comme aux hétérosexuels. D'ailleurs, beaucoup d'hétérosexuels s'en sont prévalus. Et on a quand même... Le législateur a quand même décidé que ça s'apparentait à une idée d'égalité séparée, puisque les hétérosexuels avaient quand même droit de choisir le mariage. On a donc légalisé le mariage pour les conjoints de même sexe en janvier 2001. Donc, il y a un précédent où on a eu les deux institutions en même temps parce qu'ils ont gardé le partenariat encore aujourd'hui; ils ont décidé de le garder pour un certain nombre d'années afin de voir si ça gardait une certaine popularité pour ceux qui ne voulaient pas, pour des raisons ou d'autres, s'associer à l'institution du mariage, par exemple.

Donc, on pourrait concevoir, même si on dit que c'est temporaire, de dire: Bon, on fait une institution inclusive qui ne force pas à revendiquer un statut, qui n'est pas stigmatisante, qui est inclusive, qui est ouverte à tous et, quand le mariage arrivera, si tel est le cas, on pourrait réviser la pertinence de le garder ou de faire comme les Pays-Bas ont fait. Je crois que c'est cinq ans qu'ils se sont donnés pour voir si ça valait le coup de le garder.

M. Bégin: Donc, ils ont trois statuts, là?

Mme Bureau (Marie-France): Exactement.

M. Bégin: Mariage, union civile et l'union de fait.

Mme Bureau (Marie-France): Exactement.

M. Bégin:...excusez-moi, je me suis étouffé. C'est avec de l'eau que je l'ai fait. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: ...chercher du vin?

M. Bégin: Ah, peut-être. Donc, à l'égard des enfants, dans les trois statuts, est-ce que vous savez s'il y a... Évidemment, on ne connaît pas leur régime de base, là, mais ça doit être un droit civil dans ce pays-là aussi. Est-ce qu'ils ont, pour les enfants, exactement l'égalité de droits? Le savez-vous?

Mme Bureau (Marie-France): Ça, d'ailleurs, je pourrais vous y revenir avec plus de détails, parce que je ne me souviens plus s'il y a des distinctions, il faudrait que je revérifie. Par contre, il y a une autre analogie qui a été faite souvent devant la commission à l'égard du Vermont, où il y a une union civile. Puis je trouve que c'est un peu un mauvais exemple, encore une fois. C'est un bon exemple en ce sens que l'union civile du Vermont est vraiment complète, c'est vraiment comme le mariage, il y a tous les droits, mais il faut bien se rappeler que, dans la décision de Baker, dans l'arrêt qui a été devant le plus haut tribunal du Vermont, qui a donné droit au requérant qui voulait l'ouverture du mariage pour les conjoints de même sexe, le tribunal a offert au législateur le choix, soit d'ouvrir le mariage ou donner un statut avec exactement les mêmes droits. Et c'est le législateur du Vermont qui a finalement opté pour l'égalité séparée.

Ce n'est pas parce que ça s'est fait une fois qu'on est obligé de le répéter. Parce que c'est douteux d'un point de vue... De plusieurs points de vue, c'est excessivement critiqué. Mais, dans l'union civile, par contre, du Vermont, il y a des droits d'adoption, et les conjoints dans l'union ont aussi... Ils ont aussi instauré une présomption de parentalité comme celle qu'on suggère pour l'enfant né dans l'année suivant la célébration.

M. Bégin: Même principe que pour le mariage ici.

Mme Bureau (Marie-France): Voilà.

M. Bégin: Merci.

Le Président (M. Gautrin): Vous avez terminé, M. le ministre?

M. Bégin: Oui. Bien, j'avais aussi cette...

Le Président (M. Gautrin): Donc, vous n'avez pas terminé.

M. Bégin: ...référence aux études de Mme Julien sur les tabous, en fait, les mythes, qui, par les questions qu'elle posait, nous montrait que tout ça, avec des études qu'ils auraient faites, ce n'était pas fondé, les craintes qui, chez certaines personnes, existaient. J'aimerais quand même que vous repreniez peut-être, si vous avez des recherches vous-même ou si vous connaissez d'autres recherches que celles de Mme Julien pour étayer ses avancées... Celles-là qui sont quand même importantes. Et on a entendu ce matin ? même en début d'après-midi ? des gens qui, sans le dire peut-être ouvertement, contestaient fortement les prémisses que vous énoncez. Pouvez-vous?

Mme Igartua (Karine Josée): Oui.

Le Président (M. Gautrin): Mme Igartua.

Mme Igartua (Karine Josée): Oui, merci. D'abord, je vais vous donner un petit peu l'historique des recherches parce que ça a commencé au début des années soixante-dix. Je pense à Green, par exemple. C'est beaucoup de recherches qui ont été effectuées aux États-Unis, particulièrement en Californie. Les premières recherches ont comparé des mères ? c'est surtout des femmes, il y a 30 ans, là, on s'entend ? ont comparé des mères homosexuelles, des mères hétérosexuelles, les deux ayant eu leurs enfants dans le cadre d'un mariage hétérosexuel. Donc, les enfants qui étaient comparés étaient tous des enfants du divorce, et on comparait les enfants avec une mère divorcée hétérosexuelle et une mère divorcée homosexuelle. Et le contrôle, on s'assurait que ni l'une ni l'autre, des groupes de mères, avait un autre homme au foyer; donc, on s'assurait vraiment d'avoir une femme à la charge de ces enfants-là. Par contre, l'erreur qu'on a faite dans ces études-là, c'est qu'on n'a pas contrôlé pour une deuxième femme au foyer.

Alors, certaines de ces études ont en fait montré que les enfants des lesbiennes étaient encore mieux adaptés. Et, quand on a regardé ensuite les résultats, on a dû se dire: C'est parce qu'il y a deux parents qui s'occupent de ces enfants-là, en l'occurrence deux femmes, puis que les enfants de mères hétérosexuelles ont juste la mère hétérosexuelle qui s'en occupe. L'autre différence qu'on a trouvée dans ces deux groupes de mères là, c'est que les femmes lesbiennes sont plus préoccupées à avoir des rôles masculins pour leurs enfants. Ça ne va pas de soi...

M. Bégin: Pour leurs...

Mme Igartua (Karine Josée): Pour leurs enfants.

M. Bégin: Leurs enfants.

Mme Igartua (Karine Josée): Ça ne va pas de soi, d'avoir des hommes dans la vie d'une lesbienne; donc, les lesbiennes font plus d'efforts pour garantir des rôles masculins à leurs enfants. Ça, c'est les deux différences qui ont été trouvées sur cette série d'études.

M. Bégin: Est-ce que vous pouvez nous parler ? je ne sais pas si c'est la bonne expression ? du nombre de personnes qui font l'objet de ces recherches? Est-ce que c'est 100 personnes, 1 000 personnes, c'est quoi?

Mme Igartua (Karine Josée): Chaque... Parce que ce n'est pas une recherche. On doit parler d'une vingtaine ou d'une trentaine d'études, et chacune de ces études peut avoir un nombre de familles variant entre peut-être 40 et 400, là, ça dépend de la grosseur de l'étude en particulier dont on parle. La première série d'études, c'était vraiment sur des femmes qui s'étaient divorcé. Maintenant, il y a eu un «gayby-boom» ? ils appellent, en Californie ? c'est-à-dire des familles homoparentales où les enfants sont issus de l'union, soit par adoption ou soit avec l'accès aux cliniques de fertilité. Et ça, ça fait déjà une bonne vingtaine d'années que ça se fait en Californie. Donc, la seconde génération d'études porte vraiment sur ces enfants-là. Donc, ce n'est pas des enfants qui sont sujets au divorce. On parle de familles nucléaires: d'une part, avec deux mères et, d'une part, avec une mère et un père. Et, encore là, on voit très peu de différences.

n(16 h 10)n

Me Bureau et moi étions dans l'auto en montant de Montréal, mais on a eu des échos de ce que vous avez entendu ce matin. Et je n'ai malheureusement pas pu entendre exactement ce qui s'est dit, mais ce qu'on m'a répété, c'est qu'il y avait... on s'inquiétait par rapport à l'abus sexuel des enfants. Si je peux me permettre quelques mots là-dessus, on sait ? en psychiatrie, c'est très clair ? que les abuseurs sexuels sont à 95 % et plus mâles et hétérosexuels.

M. Bégin: Hétérosexuels?

Mme Igartua (Karine Josée): Hétérosexuels. La plupart des enfants sont abusés par des hommes et la plupart, la grosse majorité de ces hommes-là sont hétérosexuels. On a demandé à nos collègues d'effectuer une recherche sur l'Internet pour essayer de retrouver l'étude dont on vous parlait ce matin. Ce qu'on a retrouvé, c'est une page Web de quelqu'un qui fait beaucoup de... qui est un militantiste, mais pas un article comme tel avec une méthodologie scientifique qu'on pouvait critiquer ou même analyser.

Le Président (M. Gautrin): Vous permettez que M. le président, avant de passer la parole à M. le député de Roberval... On a actuellement l'article parce qu'il nous l'ont déposé. Moi, je suggérerais, si vous étiez prêt à en obtenir copie et peut-être faire valoir à la commission votre point de vue d'experts. Alors, peut-être le secrétaire pourrait vous donner transcript de ce qui a été déposé par les témoins ce matin, qui est un article signé par Mme Judith Reisman, et à ce moment-là que vous soyez en mesure, le cas échéant, de faire parvenir par écrit à la commission le point de vue que vous pouvez avoir comme experts.

Mme Igartua (Karine Josée): Merci. Merci, je m'engage à le faire.

M. Bégin: Ce que le président ne vous dit pas, c'est que c'est bénévole.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Igartua (Karine Josée): Oui. Ce n'est pas grave, je m'engage à le faire.

Le Président (M. Gautrin): Vous savez... Est-ce que vous avez terminé, M. le ministre?

M. Bégin: Oui, oui, oui.

Le Président (M. Gautrin): Il y a peu de temps, mais mon collègue de Roberval voudrait vous poser des questions.

M. Laprise: Une question très brève. Selon les résultats de votre recherche concernant l'adoption, vous seriez plus favorables à donner en adoption un enfant à un couple de femmes qu'à un couple d'hommes, selon les dires, selon le résultat de votre recherche.

Mme Igartua (Karine Josée): Je pense que vous m'avez mal comprise. Ce que les... Quand il y a eu la différence entre les enfants, c'est qu'on comparait dans le fond deux femmes à une femme. Alors, si vous me demandez: Est-ce que c'est mieux qu'un enfant ait un parent ou deux parents? Je vais vous dire: Les recherches sont très claires, les enfants vont mieux quand il y a deux parents, et ça, quel que soit le sexe des parents.

Le Président (M. Gautrin): Je vous remercie. Je passe maintenant la parole, pour l'opposition officielle, à Mme la députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Alors, bonjour Dre Igartua. J'espère que je prononce bien votre nom. Bonjour, Me Bureau également. Une première question au docteure. Lorsque vous avez évoqué la question du suicide chez les hommes, les jeunes hommes homosexuels, vous avez dit que c'était un problème qui était sérieux et qui mérite qu'on s'y attarde un peu, et j'apprécierais si vous pouviez le faire avec nous. Notamment, pouvez-vous nous préciser un petit peu qu'est-ce qu'il en est au niveau des infrastructures d'accueil pour les jeunes gais et des lesbiennes? Deux, pourriez-vous nous dire si les services de santé et les services sociaux sont adaptés aux réalités des personnes gaies et lesbiennes? Et, trois, est-ce que vous considérez que la stratégie québécoise d'action face au suicide est inclusive quant à la population homosexuelle ou quant aux populations homosexuelles? Est-ce qu'elle les inclut actuellement?

Le Président (M. Gautrin): Dre Igartua.

Mme Igartua (Karine Josée): Oui, merci. D'abord, je veux vous parler de la cohorte Omega. Je ne sais pas si vous êtes au courant de cette étude qui est une étude québécoise. C'est pour ça que je prends celle-là en particulier. C'est une étude dont le but était de regarder les risques de séroconversion pour le VIH. Ce qu'on s'est rendu compte dans les analyses intérimaires, c'est que le risque de suicide était plus élevé que le risque de séroconversion par le VIH. Alors, ça a été des données qui ont été très alarmantes et qui ont déjà été présentées dans des colloques scientifiques malgré...

M. Bégin: Excusez, madame...

Mme Igartua (Karine Josée): Oui.

M. Bégin: C'est parce que je n'ai pas compris puis peut-être d'autres. «Hétéroconversion», qu'est-ce que ça veut dire?

Mme Igartua (Karine Josée): Séroconversion.

M. Bégin: Ah! Excusez.

Mme Igartua (Karine Josée): Séroconversion, c'est-à-dire on prenait...

Le Président (M. Gautrin): C'était ce matin, on parlait de l'hétéroconversion.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Igartua (Karine Josée): Je pourrais vous entretenir sur ça pour un bout, mais...

M. Bégin: Bon. Alors, ça méritait éclaircissement. Ha, ha, ha!

Mme Igartua (Karine Josée): Donc, la séroconversion, c'est-à-dire de passer de ne pas avoir le VIH à attraper le VIH. Le risque de suicide ou de tentative de suicide était plus élevé que le risque d'attraper le VIH. Donc ça, c'est des résultats qui ont été présentés dans des colloques sur le suicide, des colloques internationaux, parce que c'étaient des données qui étaient très, très importantes.

Maintenant, pour ce qui est de l'infrastructure, pour répondre plus précisément à votre question, COSUM, le Centre dans lequel je travaille, est le seul centre au Québec et même au Canada qui s'occupe de la santé mentale des personnes gaies ou lesbiennes ou même des personnes qui se questionnent sur leur orientation sexuelle. On est une clinique non sectorisée, on reçoit des patients de partout. Évidemment, à cause de la difficulté de transport, c'est rare qu'on reçoit des patients des quatre coins du Québec, mais ça nous arrive, des fois. On fait aussi beaucoup de formation aux professionnels de la santé parce qu'on se rend compte que ça ne fait pas partie du curriculum de formation des médecins, des infirmières, des travailleurs sociaux, des psychologues. Donc, il y a des gens qui viennent chez nous en stage pour avoir des formations et, depuis les trois années qu'on est ouvert, on a formé justement psychologues, sexologues, infirmiers, résidents en psychiatrie, étudiants en médecine.

Est-ce que les services sociaux sont adaptés? Je pense qu'il y a des orientations ministérielles là-dessus qui ont demandé d'adapter les services. Malheureusement, les fonds n'ont pas suivi et donc les gens se plaignent encore qu'ils sont stigmatisés, même par les professionnels de la santé. Je pourrais vous donner plusieurs histoires de cas de gens qui ont été consultés ? des collègues de ma propre profession ? et qui se sont fait dire que tous leurs problèmes étaient à cause de leur orientation sexuelle et que, s'ils pouvaient simplement régler leur conflit et devenir hétérosexuels, il n'y en aurait plus, de problème. Évidemment, l'effet dévastateur sur l'estime de soi des patients est incroyable.

Et la dernière chose que vous m'avez demandée, la stratégie?

Mme Lamquin-Éthier: Oui, la stratégie québécoise d'action face au suicide, est-ce que ça inclut les populations homosexuelles?

Mme Igartua (Karine Josée): Je ne suis pas au courant de stratégies qui visent spécifiquement cette population et je pense que c'est ça qu'il faudrait ajouter dans ces stratégies: c'est de changer la vision de l'homosexualité pour que les jeunes qui se découvrent cette orientation-là ne voient pas leur futur comme étant néant ou comme étant du noir. Donc, je pense que, oui, il faudrait avoir des stratégies qui visent cette population spécifiquement.

Mme Lamquin-Éthier: Merci beaucoup. Question pour Me Bureau. Est-ce que vous avez eu l'occasion d'analyser en profondeur les législations des autres pays où il y a union civile pour voir, parmi ceux qui ont accordé l'adoption et ceux qui ne l'ont pas accordée, quelles seraient les raisons, les motifs ou...

Le Président (M. Gautrin): Me Bureau.

Mme Bureau (Marie-France): Mettons que c'est un débat qui est en train de se faire dans plusieurs pays occidentaux; on n'est pas les seuls à se poser des questions. Mais si on prend, par exemple, un exemple qui est assez proche de nous, la Colombie-Britannique, c'est un exemple... Même si on sait qu'il y a cinq ou maintenant six provinces, je crois, canadiennes qui permettent l'adoption du conjoint de même sexe, par résultat de jurisprudence finalement, la Colombie-Britannique a procédé différemment. Ils ont vraiment décidé de changer la situation par la voie législative, c'est-à-dire qu'en 1995 ils ont d'abord réformé la Loi sur l'adoption et, ensuite, en 1996, ont suivi des modifications au Family Relations Act; puis la seconde loi, c'est le Family Maintenance Enforcement Act. Donc, c'est tout ce qui a rapport à... toutes les lois, les législations qui ont rapport à la parenté ou la parentalité, si on veut, donc tout ce qui concerne...

n(16 h 20)n

Ce qu'on a fait finalement, puis ça, c'est aussi une question de... C'est un régime de «common law» ou de droit statutaire, si on veut. On a modifié les définitions de «spouse» et «parent», donc «conjoint» et «parent», pour s'appliquer indistinctement aux homosexuels, aux hétérosexuels. Ce qui fait que tout ce qui concerne l'accès, la garde, les obligations alimentaires, l'adoption conjointe, c'est-à-dire par un couple ou l'adoption comme deuxième parent, tout a été changé de façon à ce que la loi soit identique pour les homosexuels ou les hétérosexuels. La seule différence qui subsistait en Colombie-Britannique puis qui n'avait pas été prévue ou enfin qui avait été omise par le législateur était la question dont j'ai parlé, qui est la filiation pour les lesbiennes ayant un enfant par insémination artificielle dans le cadre de leur union. À ce moment-là, en Colombie-Britannique, on leur permettait simplement ? à la mère non biologique ? de devenir parent avec l'étape additionnelle de l'adoption privée, si on veut, ce qui était accordé. Mais ça créait un problème parce qu'il y avait deux régimes alors que, pour tout le reste, la législation était égale.

Dans ce cas-ci, les hétérosexuels qui avaient un enfant par insémination artificielle, ce qui se fait souvent, pour le père, il n'avait qu'à s'inscrire directement à l'acte de naissance. Pour la mère, ce n'était pas possible. Ça a été contesté et, ça, ça a été fait devant le British Columbia Human Rights Commission, donc le Tribunal des droits de la personne, et les parents qui ont amené la contestation ont remporté le droit de s'inscrire directement à l'acte de naissance en août 2001. Donc, depuis le mois d'août, en Colombie-Britannique, la situation est exactement identique. Les lois ont été changées de façon complète, et c'est peut-être une des juridictions qui est la plus avancée à ma connaissance à tout point de vue.

Il est important de noter que le gouvernement de la Colombie-Britannique a annoncé, autour du 24 décembre, qu'il renonçait à en appeler de la décision. Donc, c'est l'état du droit actuellement.

Le Président (M. Gautrin): Moi, j'ai une question.

Mme Lamquin-Éthier: Parce que vous avez mentionné tout à l'heure... Je m'excuse, M. le Président.

Le Président (M. Gautrin): Ne vous excusez pas.

Mme Lamquin-Éthier: Bon. C'est à la page 13 de votre mémoire, où vous évoquez certaines situations au niveau international et pancanadien, et vous avez notamment parlé de la Californie. Vous disiez à ce moment-là que vous n'étiez pas en faveur d'une approche cas par cas, et, pour mieux nous l'expliquer, je crois...

Mme Bureau (Marie-France): Quand j'ai dit un exemple, l'approche cas par cas, en plus d'avoir des problèmes... de causer des problèmes pour certaines situations qui ne seraient pas réglées quant à la filiation et puis un problème d'accès à la justice puis de fardeau aux familles, le cas par cas reste du cas par cas. La chose jugée s'applique quand même aux parties qui se sont présentées devant le tribunal, dans les circonstances x, y, z qui étaient présentées au tribunal en Californie où des adoptions du deuxième parent, si on peut se comprendre là, donc l'adoption par le conjoint, ont été accordées largement, par milliers, depuis, je crois, au moins 15 ou 20 ans en Californie. On pourrait vérifier les années, mais ça fait très longtemps que ça se fait ? les tribunaux de première instance accordaient ces adoptions-là. Il y avait des précédents, des milliers de familles s'en sont prévalues, et récemment une cour d'appel, une cour des plus hautes instances d'un des circuits californiens a décidé d'invalider ces adoptions-là et de dire que ce n'est pas le législateur qui a décidé ça, peut-être que... pour des points de vue, des questions de filiation, etc., et c'est en ce moment devant les tribunaux.

Tout ça pour dire que ça serait plus sûr de prendre une position comme société et de faire une législation qui est claire à l'égard de tout le monde. Puis, dans le cas du droit de la famille en général, le fait d'être clair et de favoriser la stabilité, parce qu'il est question d'enfants et de familles, il n'y a pas de raison de procéder différemment dans ce cas-ci.

Le Président (M. Gautrin): Ça va, Mme la députée de Bourassa?

Mme Lamquin-Éthier: Oui. Excusez-moi, M. le Président.

Le Président (M. Gautrin): C'est rien. Moi, j'ai une seule question à vous poser. Vous avez eu l'amabilité de joindre à votre mémoire le rapport du Comité des gais et lesbiennes et bisexuels de l'American Psychiatric Association. Dans ce rapport, à sa page 2, du rapport, qui est à la fin de votre mémoire, il y a un énoncé des droits qui sont importants dans une union civile, qui sont à peu près couverts dans leur ensemble par le projet d'union civile, à l'exception d'un, et qui n'a pas encore été abordé, et qui est celui d'avoir l'immunité ou de ne pas avoir à témoigner envers...

M. Bégin: C'est dans le projet de loi.

Le Président (M. Gautrin): C'est dans le projet de loi?

M. Bégin: Oui. Vous permettez? Dans le tableau que vous voyez...

Le Président (M. Gautrin): Parce que ce n'est pas dans le tableau.

M. Bégin: ...c'est marqué «non exhaustif». Justement, c'est un des points qui est inclus dans le projet de loi mais qu'on n'a pas mis, parce que c'est intéressant mais ce n'est pas ce que les gens recherchent d'abord pour voir si...

Le Président (M. Gautrin): Non, non, je comprends, mais, moi, je voulais m'assurer... Comme j'avais la liste, je voulais m'assurer...

M. Bégin: C'est inclus, c'est inclus, oui.

Mme Bureau (Marie-France): ...les exclusions pour être forcé à témoigner, oui. Non, c'est inclus. Oui.

M. Bégin: C'est inclus dans le projet.

Le Président (M. Gautrin): C'est inclus dans le projet de loi. J'ai une dernière question. Me Bureau, vous avez déposé votre thèse de maîtrise, si je comprends bien.

Mme Bureau (Marie-France): Je le ferai cet automne, l'automne prochain.

Le Président (M. Gautrin): Ah bon! Dans ces conditions-là, c'est inutile de vous demander de nous en envoyer une copie.

Mme Bureau (Marie-France): C'est en progrès.

Le Président (M. Gautrin): C'est en progrès. Alors, je tiens, au nom de la commission, de vous remercier pour les informations que vous nous avez données, et je demanderais au prochain témoin, qui est le pasteur Gazdik, de bien vouloir se présenter.

Je vais suspendre deux minutes pour permettre aux gens de se dire au revoir.

(Suspension de la séance à 16 h 25)

 

(Reprise à 16 h 27)

Le Président (M. Gautrin): Si on avait un ministre, on pourrait peut-être recommencer! Me Paul.

M. Bégin: Oui, je suis là.

Le Président (M. Gautrin): Alors, la commission ayant à nouveau quorum, nous sommes prêts à reprendre nos travaux, et ça me fait plaisir de recevoir le pasteur Paul Gazdik. Je me permets de vous rappeler nos règles de procédure. Il y a une dizaine de minutes pour la présentation de votre mémoire ? parce que je vois qu'on vous a donné seulement 30 minutes ? et après 10 minutes-10 minutes pour les questions des parlementaires ministériels et de l'opposition. Nous sommes relativement souples et, l'important pour nous, c'est de bien comprendre le message que vous venez nous transmettre. Pasteur.

M. Gazdik (Paul): Merci. J'espère que vous avez tous une copie du mémoire que j'ai présenté.

Le Président (M. Gautrin): Moi, je n'en ai pas. Un président, c'est toujours servi en dernier. Alors, pasteur, vous avez la parole.

M. Gazdik (Paul): Oui. Ce n'est pas la même chose que j'ai envoyé par courriel, qui était en fin de compte juste une lettre de mes pensées que j'avais mises informellement. Alors, j'ai mis quelque chose d'un peu plus formel ensemble en tant que mémoire.

Le Président (M. Gautrin): Ce n'est pas le même? Parce que mon collègue ministériel me demande: Est-ce que ceci, c'est le même que vous avez envoyé mais en français?

M. Bégin: En anglais.

M. Gazdik (Paul): Non, ce n'est pas juste... Ce n'est pas simplement une traduction.

Le Président (M. Gautrin): Donc, c'est le document que vous nous déposez qui est celui qui fait foi?

M. Gazdik (Paul): Des mêmes idées mais plus détaillées, plus formelles.

Le Président (M. Gautrin): J'imagine que vous n'avez pas changé d'idée. Alors, vous avez la parole.

M. Paul Gazdik

M. Gazdik (Paul): O.K. Merci. Chers membres du conseil parlementaire, merci pour l'opportunité de vous présenter mon mémoire. Je suis né à Trois-Rivières en 1986. Mon enfance a été passée à Shawinigan-Sud et à Québec. Je suis marié depuis 1988 et père depuis 1994, pasteur à temps plein depuis 1992. J'ai été appelé à travailler à Québec et sur la rive sud de Montréal, où nous demeurons présentement. Mon travail consiste, entre autres, à être éducateur, conseiller, intervenant au plan social, physique, émotionnel et économique.

J'ai la famille à coeur. On vit dans une société où beaucoup de gens souffrent, y compris au niveau familial. Je le sais très bien, car la grande partie de mon temps et de mes énergies est consacrée à aider le noyau familial au Québec, dans toutes ses réalités. Voici les raisons pour lesquelles je crois que la loi proposée est un pas dans la mauvaise direction.

n(16 h 30)n

Premièrement, l'union civile de personnes de même sexe n'est pas égale au mariage et, de ce fait, ne devrait pas permettre l'accès aux mêmes droits, privilèges et bénéfices accordés à ce dernier. Physiquement, moralement et socialement, les deux types de relation sont différents. Ce n'est pas une question de discrimination mais de distinction. Par définition, le mariage est l'union de deux personnes de sexe opposé. Cette union n'a pas comme seul but la procréation mais, certes, la procréation demeure un de ses grands avantages. C'est pour cette raison que toute société a intérêt à protéger le caractère unique du mariage, puisqu'il est intimement lié à la notion du noyau familial qui, à son tour, est intimement lié à l'existence même de toute société.

Une société peut exister sans l'union civile de personnes de même sexe, mais pas sans l'union de couples hétérosexuels. Les deux types d'union sont différents, et c'est pour cela que les bénéfices et privilèges ne devraient pas être les mêmes. Ce serait une erreur pour le gouvernement du Québec que d'affaiblir davantage la base maritale, donc familiale, de notre société qui est déjà en état de détresse, surtout lorsqu'on considère le fait que des études ont déjà établi un lien étroit entre le bien-être physique, social et économique d'une société et de la stabilité du mariage.

Deuxièmement, le concept d'égalité entre l'union civile des personnes de même sexe et le mariage réduit ce dernier à une relation d'adultes consentants. Mais le mariage est, par définition, une relation entre deux personnes intrinsèquement et extrinsèquement différentes. Ce sont ces différences innées qui donnent au couple hétérosexuel son sens véritable sur le plan de la survie de la race humaine. La majorité préfère choisir encore de se marier dans une église, non pas seulement par tradition, mais à cause du fait que cela demeure un moyen concret d'affirmer notre destinée humaine. Le mariage est plus qu'un contrat légal entre adultes, il est une expression de notre destin qui est au coeur même de notre survie et de notre prospérité en tant que province.

Troisièmement, cette loi ouvre toute grande la porte permettant aux couples de même sexe d'adopter des enfants au même titre que les couples hétérosexuels. La science nous dit que la nature ne fait rien sans raison, le hasard n'existe pas. On ose même parler d'un certain principe premier pour tout ce qui existe. Les couples hétérosexuels sont capables de procréer parce que la nature a déterminé que ceci était bon pour la progéniture aux plans physique, émotionnel, spirituel, moral, intellectuel et social. Malgré le fait que j'ai rencontré beaucoup de familles monoparentales qui étaient contentes d'avoir mis fin à une mauvaise relation, je n'en ai pas encore rencontré qui étaient contentes d'élever leurs enfants sans une présence masculine ou féminine. Au contraire, je constate toujours la même crainte, qui est celle de ne pas pouvoir donner tout ce qui est nécessaire pour le développement normal des enfants. Ce n'est pas une question de manque de compétence ou d'amour quelconque, mais d'un manque de complémentarité. Deux parents de même sexe ne peuvent donner ce que la nature a déterminé... serait mieux donné par des parents du sexe opposé.

Ma femme et moi avons adopté deux beaux enfants, et cela prend le meilleur de nos différences naturelles pour bien les élever. C'est un fait que l'on prend pour acquis dans notre société qu'un enfant qui grandit sans l'influence matrimoniale et patrimoniale est en manque, non pas au niveau d'amour mais au plan du développement social, physique, mental et émotionnel. David Hume, en méditant sur les idées exprimées par Aristote, dit: «Celui qui réfléchit sur la durée et la fragilité de l'enfance, tout en tenant compte de l'apport naturel des deux sexes à leur progéniture, va facilement percevoir qu'il faut l'union d'un mâle et d'une femelle pour l'éducation des jeunes et que cette union doit être d'une durée considérable.»

Quatrièmement, la science n'a prouvé qu'une chose: que l'hétérosexualité est naturelle et génétique. Par le fait même, la science n'a jamais prouvé que l'homosexualité est tributaire d'un choix naturel, biologique ou génétique. Donc, à moins d'avis contraire crédible, il n'y a aucune raison de considérer que l'union homosexuelle est égale à l'union de mariage, avec tous ses privilèges et bénéfices.

Cinquièmement, le rôle du gouvernement est de protéger l'intégrité de sa fondation, l'institution du mariage et le noyau familial. Ce n'est pas dans l'intérêt d'un bon gouvernement de se laisser intimider par des décisions prises à la cour et d'ainsi légifier dans un sens qui n'est pas pour le bien de la société en général. Chaque jour, je fais face à des gens qui ont grandi dans la confusion quant à leur identité et à leur rôle dans la société. N'ajoutez pas à cette confusion. Émotionnellement, physiquement, psychologiquement et même financièrement, nous ne pouvons plus supporter le poids de telles erreurs. La loi propose non pas l'élévation du statut des couples de même sexe, mais l'abaissement du mariage.

De votre propre aveu, cette loi n'affecte que 3 % des 20 % de la population québécoise qui favorisent l'union civile. «Homophobie» a perdu son sens véritable, qui est la peur de l'homosexuel, l'homosexuel quant à ses pratiques sexuelles. Ce terme semble maintenant s'appliquer plutôt à la peur que de plus en plus de gens éprouvent de s'opposer à l'agenda homosexuel.

Sixièmement, la responsabilité du gouvernement est de maintenir la justice et la moralité. Notre notion même de justice et de moralité a subi de durs coups portés par une philosophie erronée des derniers temps que j'appelle la «foi en la relativité absolue». Je crains le fait que, de plus en plus, rien ne nous choque ou ne nous offense, surtout sur le plan moral et sexuel.

Là-dessus, j'aimerais vous lire ces paroles bibliques tirées de l'Épître aux Romains qui, même si elles ont été écrites il y a 20 siècles, sont néanmoins prophétiques et pertinentes: «En effet, Dieu manifeste sa colère depuis le ciel sur tout péché et tout mal commis par les hommes qui, par leurs mauvaises actions, empêchent la vérité d'agir. Dieu les punit, car ce que l'on peut connaître de Dieu est clair pour eux: Dieu lui-même le leur a montré clairement. En effet, depuis que Dieu a créé le monde, ses qualités invisibles, c'est-à-dire sa puissance éternelle et sa nature divine, se voient dans les oeuvres qu'il a faites. C'est là que les hommes peuvent les connaître, de sorte qu'ils sont sans excuse. Ils connaissent Dieu, mais ils ne l'honorent pas et ne le remercient pas comme il convient de le faire pour Dieu. Au contraire, leurs pensées sont devenues stupides et leur coeur insensé s'est rempli d'obscurité. Ils déclarent être sages, mais ils sont fous [...].

«Ils échangent la vérité concernant Dieu contre le mensonge; ils adorent et servent ce que Dieu a créé au lieu du Créateur lui-même [...].

«C'est pourquoi Dieu les a livrés à des passions honteuses. Leurs femmes elles-mêmes changent les relations naturelles en des relations contre nature. De même, les hommes abandonnent les relations naturelles avec la femme et brûlent de désir les uns pour les autres. Les hommes commettent des actions honteuses les uns avec les autres et reçoivent ainsi eux-mêmes la punition que mérite leur égarement.

«Comme ils ont refusé de reconnaître Dieu, Dieu les a livrés à leur intelligence déréglée, pour qu'ils fassent ce qu'ils ne devraient pas faire. Ils sont remplis de toute sorte d'injustice, de mal, d'envie et de méchanceté; ils sont pleins de jalousie, de meurtres, de querelles, de ruses, de malices. Ils répandent des bavardages et disent du mal les uns des autres; ils sont ennemis de Dieu, insolents, orgueilleux, vantards. Ils inventent des nouveaux moyens de faire le mal et sont rebelles à leurs parents. Ils sont sans conscience et ne tiennent pas leurs promesses; ils sont durs et sans pitié pour les autres. Ils connaissent bien le jugement de Dieu [...]. Pourtant, ils continuent à commettre de telles actions et, de plus, approuvent ceux qui les commettent aussi.»

Dieu soit loué, car il y a toujours un moyen de nous sortir du pétrin, et cela commence toujours en se retournant vers la vérité. Encore une fois, merci du temps que vous m'accordiez, surtout en vue de l'heure...

Le Président (M. Gautrin): Je vous remercie. Et nous allons commencer les échanges avec le ministre de la Justice.

M. Bégin: Merci, M. Gazdik. Je suis persuadé que vous pensez comme moi qu'on peut avoir un homme ou une femme qui croit en Dieu, avec tout ce qu'on peut y rattacher, et qu'il soit ou elle soit un excellent citoyen à tous égards et qu'on ait un homme ou une femme qui ne croit absolument pas en Dieu quel qu'il soit, en aucun Dieu, et être un citoyen, une citoyenne absolument exemplaire à tous égards. Je vois que vous opinez, vous êtes d'accord avec cette prétention, et je partage ce point de vue là, tout à fait.

Mais, à partir de là ? reprenons un peu ce que mon collègue le député de Roberval a dit plus tôt ? qu'est-ce que ça enlève au mariage ou qu'est-ce que ça enlève à quelqu'un de donner quelque chose d'autre à une autre personne? Qu'est-ce que ça enlève au mariage hétérosexuel que des personnes qui ne sont pas dans la même situation reçoivent la capacité légale de s'unir dans une relation d'un autre type dans le but de s'aimer d'abord et, par ailleurs, souvent d'avoir un projet parental, différent bien sûr de celui que l'on connaît, mais que je crois que vous acceptez, puisque vous dites vous-même que vous avez adopté deux beaux enfants et que la nature ne fait rien sans raison?

Mon idée était de vous demander quelle est la raison qu'avait la nature de faire en sorte que vous puissiez adopter deux enfants. Moi, je trouve ça extraordinaire que vous ayez adopté deux enfants. Mais je suis persuadé que toute situation ne peut pas être pareille. Et, si vous l'avez fait, c'est soit par un choix, soit par une obligation, l'incapacité d'en avoir vous-même, ou encore purement et simplement par générosité d'en adopter, des enfants, pour eux, pour vous, etc.

n(16 h 40)n

Est-ce que, dans le fond, ce que vous nous dites là, c'est un peu nier cette capacité d'avoir... et d'être différent et d'avoir des droits identiques aux autres? Un peu comme je vous disais pour le chrétien ou celui qui croit en Dieu puis celui qui n'y croit pas, dans la mesure où tous les deux se comportent tout à fait correctement dans la société...

Le Président (M. Gautrin): M. Gazdik.

M. Gazdik (Paul): Je reconnais la diversité. Ce n'est pas le fait qu'il existe la diversité qui m'amène à avoir un problème avec le projet de loi, si je comprends bien votre question. C'est plutôt le fait qu'on est en train de dire: Voici, on a l'institution du mariage, connue sous sa forme traditionnelle, protégée par la loi, etc., et maintenant, on veut aussi établir un autre type de relation, union civile, sans prendre le terme de «mariage» qui est en question, si je comprends aussi, et de dire: Mais c'est la même chose, il a droit tout aux mêmes privilèges. Mais, quand je regarde simplement, je dis: Mais les deux relations ne sont pas pareilles. Les relations... Une relation de quelqu'un du même sexe n'est pas la même relation, même au niveau physique, naturelle, qu'un couple hétérosexuel. Alors, je ne comprends pas pourquoi, dans ce sens-là, on voudrait donner les mêmes bénéfices, les mêmes droits, les mêmes privilèges si, de nature, les relations ne sont pas pareilles.

M. Bégin: Mais qu'est-ce que ça change, que les personnes ne soient pas les mêmes? Qu'est-ce que ça change, de dire: Nous donnons à un homme et une femme qui s'unissent dans une institution en vue de faire telle chose, on leur donne certains droits ? parce qu'il y a aussi certaines obligations les unes à l'égard des autres et, par rapport aux enfants qui peuvent naître de là ? qu'est-ce que ça fait, d'accorder à un couple, qui n'est pas un homme et une femme mais deux hommes et/ou deux femmes, la possibilité de s'unir dans le même esprit que celui de l'homme et de la femme et qui ont possiblement des enfants, ou qui veulent en avoir, ou qui ont le projet parental d'en avoir? Qu'est-ce que ça enlève au mariage que ces personnes puissent bénéficier de quelque chose qui est, je dirais, pour les fins de la discussion, identique? Par exemple, vous avez les effets qui sont écrits au tableau, vous les voyez, ce sont les mêmes. Qu'est-ce que ça enlève au mariage que de donner... à d'autres?

C'est un peu comme de se poser la question, pour ma mère qui a eu 11 enfants, et j'étais un évidemment de ceux-là, moi, je n'ai jamais eu le sentiment que, parce qu'elle aimait mes frères et mes soeurs, elle m'aimait moins moi-même. J'ai toujours pensé qu'elle m'aimait autant. Maintenant, certaines fois, elle m'haïssait un peu parce que j'étais très malcommode, mais...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bégin:...je savais quand même qu'elle m'aimait.

Le Président (M. Gautrin): Vous deviez être pas mal haïssable.

M. Bégin: Ha, ha, ha! Ça, je peux vous le confirmer. Ha, ha, ha! Mais donc, ça n'enlève rien à l'un ou à l'autre. Il me semble que les deux peuvent coexister tout en étant différents. Ce n'est pas réduire l'un par rapport à l'autre, c'est simplement de pouvoir mettre tout le monde dans une situation où ils peuvent s'exprimer au maximum de leur potentialité.

M. Gazdik (Paul): Mais je répondrais deux choses là-dessus. Premièrement, c'est parce que, pour moi, le mariage est beaucoup plus, comme j'ai exprimé, que l'union de simplement de deux personnes. Il y a quelque chose de naturel, de biologique, qui fait partie de qui on est en termes d'êtres humains et qu'on ne serait pas ici si ça ne serait pas de ça. Quand je parle du mariage, je suis en train de parler évidemment d'un contexte d'une relation entre un homme et une femme.

Deuxièmement, c'est parce que... Dans ce sens-là, c'est pour ça que j'ai un problème parce que je crois que, oui, ça enlève quelque chose à cette relation-là. C'est la nature même qui existe, qui dit, qui nous dicte que c'est ça, une relation qui doit exister.

Et, deuxièmement, c'est parce que, encore en prenant à la nature même, je regarde et, oui, je suis au courant même des personnes qui ont présenté avant moi, à propos de ce que les pédiatres aux États-Unis ont déclaré, qu'il n'y a aucune différence, mais je suis loin d'être convaincu. Et je ne pense pas être le seul. Je crois qu'aussi il y a des études qui démontrent que le meilleur environnement ? parlant d'une façon générale, parce que je dois dire, si on y va cas par cas, ce sera complètement différent ? mais d'une façon générale, c'est que les enfants soient élevés ? meilleure situation possible ? par une mère et un père, mariés, qui sont dévoués à ? comment dire? ? leur progéniture pendant une longue période de temps et qui vont pouvoir, chacun, amener les compétences qu'ils ont, qui sont différentes.

Le Président (M. Gautrin): Est-ce qu'il y a... M. le député de Roberval.

M. Laprise: Est-ce que votre définition voudrait dire, par exemple, que vous voulez mettre en valeur et conserver cette complémentarité de l'homme et de la femme dans le couple? Un peu comme dans la nature, l'énergie, ça prend le négatif et le positif pour créer la lumière, créer la chaleur. Deux négatifs, deux positifs, ça ne marche pas ensemble, ça fait une explosion. Alors, vous dites, vous: Pour vraiment garder la primauté du mariage, il faut garder... on le retrouve dans la complémentarité de l'homme et la femme, pour la famille.

M. Gazdik (Paul): Oui.

Le Président (M. Gautrin): Un peu plus compliqué.

M. Laprise: Est-ce qu'à ce moment-là ça veut dire qu'on ne peut pas reconnaître à la fois, également, que cette complémentarité-là devienne un support à l'autre partie de la population qui est différente?

M. Gazdik (Paul): Je dis... Je pense comprendre ce que vous voulez dire. Ce n'est pas que je le prends comme une offense à mon mariage personnel ou aux personnes qui sont mariées, d'une façon que, là, mon épouse et moi, on n'agira plus d'une façon convenable l'un envers l'autre avec nos enfants, ce n'est pas dans ce sens-là que je le prends, d'une façon personnelle, mais c'est plutôt du fait que, même en tant que pasteur, je crois qu'on a déjà, et comme j'exprime, déjà assez de problèmes au niveau de la base que j'appellerais «la base familiale» et de l'unité familiale que d'essayer d'élargir un peu notre concept de qu'est-ce que c'est, le mariage et l'union civile, qui a le même titre, les mêmes bénéfices, mêmes droits, ce qui équivaut au mariage, en l'élargissant, tout ce qu'on est en train de faire, c'est, en fin de compte, de diluer la base qui est vraiment à la source de notre survie en tant que société. C'est ça, mon souci.

Le Président (M. Gautrin): Mme la députée de Bourassa, au nom de l'opposition officielle.

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Bonjour, M. Gazdik. Est-ce qu'il est permis... Est-ce que vous avec vous la copie du premier document que vous avez déposé?

M. Gazdik (Paul): J'ai une copie avec moi, oui.

Mme Lamquin-Éthier: Parce qu'on pourrait... Vous dites: «The most obvious physical difference between same-sex partners and heterosexual ones is how by nature one can reproduce and the other not», ce qui me fait penser que votre conception de la famille est d'abord et avant tout très biologique. Est-ce que...

M. Gazdik (Paul): Non, écoutez, quand... J'essaie de faire ? comment dire? ? de clarifier ça dans le mémoire que j'ai présenté. C'est définitivement une des distinctions qu'on ne peut pas manquer; c'est là, c'est évident, mais, de là à dire que le mariage, ce n'est qu'une institution pour produire des enfants, non, du tout, que c'est juste une question biologique et que les gens doivent se marier juste pour une question biologique, non. Mais je vois le tout rattaché ensemble par contre, et je ne pense pas que je suis le seul pour le voir. Même en tant que quelqu'un qui conseille des gens qui se marient, ce n'est pas mon habitude de commencer de parler question d'enfance et d'avoir des enfants, parce qu'on parle de mariage et d'un couple et de l'amour que deux personnes peuvent avoir l'un pour l'autre. Mais, naturellement, les gens pensent toujours à ça aussi dans le contexte du mariage, et c'est lié, c'est lié ensemble. C'est naturel et lié.

Mme Lamquin-Éthier: Dans votre première version, vous dites également ? puis si vous aviez la gentillesse de m'éclairer davantage: «Time and time again history has demonstrated what happens when societies/civilizations become hedonistic and self-indulgent. They die from within.» Qu'est-ce que vous voulez dire exactement?

n(16 h 50)n

M. Gazdik (Paul): Je ne suis pas un historien par profession, mais ce que j'ai été enseigné à l'école, ce que j'ai appris, dans ce que j'ai lu et dans mon éducation, c'est le simple fait que toute société est à risque dans une mesure ou une autre par les décisions qu'ils vont prendre. Et ce n'est pas juste une question ? comment pourrais-je dire? ? ce n'est pas juste une question de quel pays qu'on va conquérir, est-ce qu'on va être pacifique ou non, mais même par rapport aux lois qui régissent la moralité ou non du peuple en question. Puis, dans les cours d'histoire même, ce que j'ai appris, c'est qu'on a eu ces... Quand on parle de l'Empire romain, il y a beaucoup de raisons, par exemple, pourquoi que l'Empire romain a eu un déclin. Mais, dans ? comment dire? ? dans mon apprentissage même, c'était aussi la compréhension que les décisions, les changements qu'ils ont faits au plan moral étaient aussi partie preneur dans le déclin de l'Empire. C'est tout.

Mme Lamquin-Éthier: Dans votre mémoire, version 2...

M. Gazdik (Paul): Oui.

Mme Lamquin-Éthier: ...complémentaire, vous dites: «L'homophobie a perdu son sens véritable, qui est la peur de l'homosexuel quant à ses pratiques sexuelles. Ce terme semble maintenant s'appliquer plutôt à la peur que de plus en plus de gens éprouvent de s'opposer à l'agenda homosexuel.» Que voulez-vous dire?

M. Gazdik (Paul): Oui. En passant, quand je dis le terme, à son sens qu'on le comprend, je parle d'une façon commune. Ce n'est pas le terme exact. Parce que les dames qui étaient ici auparavant ont clairement défini ce que c'est, «l'homophobie» dans son sens propre, mais moi, je parlais plutôt de la façon que les gens l'utilisent couramment. Et tout ce que je voulais dire, c'est que, quand, moi, j'ai commencé, depuis que j'ai envoyé le document, commencé à faire des recherches un peu sur un peu plus que ce que j'ai entendu aux nouvelles, j'ai remarqué qu'une façon d'avancer des projets de loi, c'est, en premier temps, de faire des pressions dans les cours, et c'est là que beaucoup de choses commencent. Et ça, ça m'effraie parce que, là, je me demande: Est-ce qu'on est en train d'entamer des projets de loi parce qu'on voit une raison légitime ou est-ce que c'est plutôt parce que, en fin de compte, on se voit un peu la main forcée?

Le Président (M. Gautrin): ...

Mme Lamquin-Éthier: Oui, merci.

Le Président (M. Gautrin): J'aurais une dernière question à vous poser. Vous êtes un homme de Dieu, vous êtes un célébrant, vous répandez un message qui est un message essentiellement d'amour. Prenons l'hypothèse que la loi soit acceptée telle qu'elle est, même si vous avez des réticences par rapport à cette loi-là, que deux personnes homosexuelles qui s'aiment et qui démontrent à vos yeux qu'ils ont un rapport essentiellement d'amour et une liaison qui a un caractère de stabilité et de pérennité... seriez-vous prêt, vous comme pasteur et célébrant, à les unir?

M. Gazdik (Paul): Non.

Le Président (M. Gautrin): O.K. Bien, je vous remercie. Au nom de la commission, je tiens à vous remercier quand même de la franchise de votre témoignage et de l'apport que vous avez apporté. Merci.

Attendez avant de partir, tout le monde, là. Étant donné... Je tiens à vous annoncer que le dernier témoin, le Réseau des lesbiennes du Québec, n'a pas pu se présenter devant nous, compte tenu de problèmes de santé. Donc, je vais ajourner nos travaux au 12 février à 9 h 30. La commission est ajournée.

(Fin de la séance à 16 h 54)


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