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Version finale

36e législature, 2e session
(22 mars 2001 au 12 mars 2003)

Le mercredi 15 mai 2002 - Vol. 37 N° 75

Consultations particulières sur le projet de loi n° 84 - Loi instituant l'union civile et établissant de nouvelles règles de filiation


Étude détaillée du projet de loi n° 54 - Loi portant réforme du Code de procédure civile


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Table des matières

Consultations particulières sur le projet de loi n° 84 ? Loi instituant
l'union civile et établissant de nouvelles règles de filiation

Étude détaillée du projet de loi n° 54 ? Loi portant réforme du Code de procédure civile

Consultations particulières sur le projet de loi n° 84 ? Loi instituant
l'union civile et établissant de nouvelles règles de filiation

Autres intervenants

 
M. Claude Lachance, président
M. Roger Paquin, président suppléant
M. Henri-François Gautrin
M. Léandre Dion
M. Benoît Pelletier
* M. Raymond St-Gelais, AEQ
* M. Pierre Gaudette, idem
* M. Bertrand Blanchet, idem
* M. Raouf Ayas, idem
* M. Aldé Frenette, ministère de la Justice
* Mme Irène Demczuk, Coalition québécoise pour la reconnaissance
des conjoints et conjointes de même sexe
* M. Pierre Valois, idem
* Mme Annick Gariépy, idem
* Mme Suzanne Vadboncoeur, Barreau du Québec
* M. Dominique Goubau, idem
* Témoins interrogés par les membres de la commission
 
 

Journal des débats

(Neuf heures trente-trois minutes)

Le Président (M. Lachance): À l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare la séance de la commission des institutions ouverte, et le mandat de la commission...

M. Gautrin: On ne pourrait pas attendre Mme Lamquin-Éthier, qui doit arriver d'un instant à l'autre?

Le Président (M. Lachance): Je croyais, M. le député de Verdun, que vous étiez représentant de l'opposition officielle.

M. Gautrin: Non, je ne suis pas porte-parole. Mme Lamquin-Éthier arrive et elle est en train de... Parce qu'on pensait qu'elle était d'abord au La Fontaine. Donc, elle arrive du La Fontaine pour venir nous rejoindre ici.

Consultations particulières
sur le projet de loi n° 84

Le Président (M. Lachance): Alors, voilà. Voilà. Merci. Je rappelle le mandat de la commission, qui est de poursuivre les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 84, Loi instituant l'union civile et établissant de nouvelles règles de filiation.

Est-ce qu'il y a des remplacements, M. le secrétaire?

Le Secrétaire: Non, M. le Président, il n'y a aucun remplacement annoncé.

Le Président (M. Lachance): Merci. Alors, bienvenue à toutes les personnes qui sont dans cette salle, et j'invite immédiatement les personnes qui auraient un téléphone cellulaire ouvert de bien vouloir le fermer pendant la séance, s'il vous plaît.

Auditions

Et, sans plus tarder, je souhaite la bienvenue également aux représentants de l'Assemblée des évêques du Québec et je demande au porte-parole de bien vouloir s'identifier, ainsi que les personnes qui l'accompagnent.

Assemblée des évêques
du Québec (AEQ)

M. St-Gelais (Raymond): Bonjour. Je suis Mgr Raymond St-Gelais, évêque de Nicolet et président de l'Assemblée des évêques du Québec. Je suis en compagnie de Mgr Bertrand Blanchet, qui est évêque à Rimouski et par surcroît biologiste; M. Pierre Gaudette, qui est professeur en éthique; et M. Raouf Ayas, qui est médecin à Montréal, à Laval plus précisément, je crois.

Le Président (M. Lachance): Je vous rappelle que vous avez une présentation, pour nous faire part de vos commentaires, d'une durée de 15 minutes, et par la suite nous aurons les échanges avec les parlementaires des deux côtés de cette table.

M. St-Gelais (Raymond): Alors, nous vous remercions de nous donner... Est-ce que...

Le Président (M. Lachance): Oui. Vous pouvez y aller.

M. St-Gelais (Raymond): Nous vous remercions de nous donner cette opportunité d'apporter notre point de vue dans ce débat sur ce projet de loi sur l'union civile et la filiation. La version actuelle du projet de loi n° 84 apporte à la précédente un nombre considérable de modifications, et celles-ci sont d'une importance telle qu'elles méritent une étude attentive. Notre intervention vise à demander respectueusement au ministre de la Justice de surseoir, pour le moment, à l'adoption de ce projet afin qu'en soient bien pesées toutes les implications pour l'avenir du Québec. Deux points ont retenu notre attention: la spécificité du mariage civil et religieux et l'adoption d'enfants par des couples homosexuels.

La spécificité du mariage. Dans notre réaction au précédent projet de loi, nous avions tenu à souligner la nécessité de conserver au mariage son caractère propre d'union entre deux personnes de sexe différent, et je cite Mgr Blanchet: Depuis des siècles, le mariage est porteur d'un ensemble symbolique unique qui implique, entre autres réalités, la différence sexuelle, le langage des corps qui en résulte, une communication particulière des esprits et des coeurs, une force créatrice ouverte sur le don d'une nouvelle vie. On comprendra alors que vouloir faire de l'union civile un mariage ou son équivalent revient à redéfinir le mariage lui-même. Ce serait transformer avec une étonnante légèreté une institution dont la valeur symbolique culturelle et sociale demeure considérable.

Virer à droite sur un feu rouge n'a guère de portée symbolique; redéfinir le mariage est toute autre chose. Or, à notre grand étonnement, le pas semble avoir été franchi. Dans sa présentation du projet, le communiqué du ministère de la Justice écrit en toutes lettres: «Ce projet de loi propose de modifier également certains articles du Code civil du Québec. Ainsi, le deuxième alinéa de l'article 365 serait reformulé pour éliminer toute référence à la différence de sexe exigée des futurs époux par la loi fédérale. Cet article stipulera désormais que le mariage peut être contracté par "deux personnes qui expriment librement leur consentement libre et éclairé".»

Cette modification rendrait l'ensemble du projet de loi tout à fait inacceptable. Sous prétexte de respecter les tendances sexuelles individuelles, elle ne tient pas compte du caractère propre que la tradition juridique du Québec et de l'ensemble des pays démocratiques a toujours reconnu à l'union matrimoniale et à ce qui en découle naturellement, à savoir la famille naturelle. Dans la mesure où cette union est de soi ouverte à la fécondité, elle est le facteur essentiel de renouvellement de la société, elle est le noyau vivant de la succession, procréation et éducation des générations humaines. À ce titre, elle joue un rôle indispensable.

Premier responsable du bien commun de la société, l'État a l'obligation stricte d'apporter à cette institution toute la protection requise et de la reconnaître dans sa spécificité comme essentiellement distincte de toute autre union entre personnes de même sexe ou de sexe différent. L'égalité devant la loi, en effet, doit respecter le principe de justice qui exige qu'on traite ce qui est égal comme égal et ce qui est différent comme différent. Que par ailleurs il soit nécessaire de reconnaître d'autres types d'union qui doivent accorder certains avantages pour éviter des injustices éventuelles, cela va de soi, mais ces autres unions n'ont pas le caractère fondateur de l'union matrimoniale. À moins évidemment que nous imaginions un monde où la technique remplace la nature et où les enfants deviennent des produits de laboratoire, c'est sur l'union de deux personnes de sexe différent que se réalise essentiellement le renouvellement de la société.

n(9 h 40)n

Une société qui n'accorderait pas au mariage et à la famille l'attention spécifique qui lui est due ne serait pas une société ouverte mais une société qui se meurt. Alors que l'on s'inquiète, avec raison, de la baisse importante de la natalité au Québec, il ne faudrait pas jeter de la confusion dans les esprits et plonger des institutions dans l'ambiguïté. Effectivement, le projet de loi se situe sur ce point dans la ligne de ce que l'on appelle l'idéologie du «gender». Comme le signale un psychanalyste reconnu, Tony Anatrella, ce courant minimise la réalité corporelle et biologique qui inscrit chaque être humain comme homme ou comme femme, lui donnant son identité sexuelle, le sexe réel. Il n'attache de l'importance qu'à la façon dont chacun perçoit et vit subjectivement sa réalité sexuelle, le sexe subjectif. En d'autres mots, ce courant remet en cause la prémisse que l'espèce est intrinsèquement constituée homme et femme dans un rapport de complémentarité qui inclut, d'un point de vue biologique et donc anthropologique, l'enfant.

Le législateur est alors sollicité pour affirmer l'égalité de toutes les tendances sexuelles au détriment de l'identité sexuelle. Et le même auteur ajoute: «Il est particulièrement dangereux de voir le droit se fonder à partir de réalités subjectives au détriment des réalités objectives qui ont une valeur universelle et civilisatrice.» Dans cette ligne, il nous apparaît important que le mariage garde toute sa spécificité de contrat entre personnes de sexe différent.

Ceci étant dit, il ne faut pas fermer les yeux sur les situations problématiques qui peuvent se produire. La commission parlementaire a entendu les témoignages poignants de personnes qui ont subi des injustices dans leur enfance parce que le partenaire de même sexe de leur parent ne jouissait pas d'un certain pouvoir qui aurait pu être bénéfique à l'enfant. Il semble possible ici de trouver des solutions ad hoc sans qu'il soit nécessaire de chambarder toute la législation.

Deuxième point, l'adoption d'enfants par des couples homosexuels. Le deuxième point qui demande une étude plus poussée est celui de l'adoption d'enfants par des couples homosexuels. Encore ici, il faut être attentif aux cas particuliers qui peuvent se présenter, dont certains revêtent une forte charge émotive. Tout en les ayant clairement à l'esprit, le législateur se doit de prendre un certain recul pour envisager le bien de l'ensemble.

Le premier critère à reconnaître est évidemment le bien de l'enfant lui-même. Lorsque l'un des partenaires est son parent biologique, il est possible que l'adoption constitue la meilleure solution. On pourrait sans doute trouver d'autres exemples où une adoption puisse aussi s'avérer souhaitable. Mais nous nous interrogeons fortement sur l'opportunité d'en faire une règle générale et d'étendre à tous les partenaires de même sexe la possibilité d'adopter des enfants qui n'ont pas de lien biologique avec l'un ou l'autre.

Comme on l'a évoqué en commission parlementaire, un certain nombre d'études empiriques menées au cours des dernières années, ont sans doute conclu que les enfants adoptés par des partenaires de même sexe ne présentaient pas plus de problèmes que les enfants adoptés par les parents de sexe différent. À ce sujet, M. Ayas a étudié un certain nombre de ces études où il pourra tantôt en donner certaines appréciations. Une brève exploration sur Internet nous a permis d'en identifier quelques-unes ? vous les avez en note. Une analyse sommaire nous a cependant fait percevoir certaines limites. Nous aimerions, avec l'aide de spécialistes en la matière, pouvoir les examiner de près afin d'en vérifier la portée, l'orientation, la méthodologie et en pondérer la validité scientifique.

Mais ce qui pose question, c'est le fait que d'autres approches psychologiques qui ont fait leurs preuves insistent sur le besoin qu'a l'enfant de se référer à des parents de sexe différent pour atteindre sa propre identité. Il s'agit donc d'un problème de fond qui nécessite des études au moins aussi attentives que celles que l'on mène depuis plusieurs années sur l'opportunité d'enseigner la langue anglaise en première année au primaire.

Par ailleurs, il faudrait à tout prix éviter de poser le problème de l'adoption des enfants dans le contexte d'un prétendu droit pour le couple, quel qu'il soit, à avoir un enfant. Avoir un enfant, ce n'est pas un droit, c'est un privilège et une responsabilité. Le droit au couple, le droit à l'enfant, etc., sont des revendications qui ne peuvent pas être honorées socialement en ces termes à moins de tout contractualiser. Dans ce cas, le bien social, l'intérêt des enfants et le bien commun seront réduits au caprice des subjectivités. Nous ne serons plus dans une société de justice.

Parler du droit à l'enfant, c'est inverser l'ordre des choses, c'est instrumentaliser un être humain, c'est le réduire à l'état d'objet et en faire le moyen de sa propre réalisation personnelle, de son propre épanouissement, ce qui est contraire aux bases mêmes de l'éthique. Or, on semble s'engager sur cette pente dès lors qu'on accorde une importance toute particulière à la procréation assistée et qu'on en fait une option purement personnelle. A-t-on suffisamment pesé tout ce que cela soulève pour l'enfant qui a le droit de connaître ses origines, c'est-à-dire ses père et mère, de qui il détient son patrimoine génétique? A-t-on suffisamment pesé tous les problèmes que cela pose en termes de filiation? Ici aussi, il y a matière à profonde interrogation sur les valeurs que l'État veut promouvoir.

Voilà donc quelques observations que nous avons pu rassembler dans les quelques jours qui nous ont été alloués. Vous aurez compris que notre intention est ici d'inviter le législateur à faire preuve d'une extrême prudence. La version actuelle du projet de loi n° 84 instituant l'union civile et établissant de nouvelles règles de filiation touche des points extrêmement importants qui n'ont pas fait l'objet d'une étude suffisamment approfondie. D'ailleurs, nous comprenons mal l'empressement du ministre de la Justice à faire adopter aussi rapidement une loi aussi lourde de conséquences sans un réel débat public. Qui plus est, nous comprenons mal que ce projet de loi fasse l'objet de moins de circonspection qu'un projet comme le virage à droite au feu rouge sur lequel on a discuté pendant des années et sur lequel on discute encore.

Nous avons, quant à nous, le désir de poursuivre notre réflexion dans un esprit d'ouverture et de dialogue en faisant appel à des spécialistes de ces questions, en particulier à des juristes et à des psychologues, mais, pour cela, il est nécessaire que le projet de loi ne soit pas soumis à l'Assemblée nationale dans sa forme actuelle et qu'un temps additionnel de réflexion soit donné à la société civile.

Le Président (M. Lachance): Alors, merci pour votre présentation. Vous êtes entré à l'intérieur du temps qui vous était imparti, on reconnaît en vous des gens disciplinés. M. le ministre, pour vos commentaires ou questions.

M. Bégin: Alors, merci. Je suis très heureux que l'Église, par le biais de l'Assemblée des évêques, puisse venir en commission parlementaire donner son point de vue là-dessus, puisque c'est un débat, comme vous l'avez dit, important qui a été initié il y a plus longtemps qu'aujourd'hui et que dans le mois qui précède. Comme vous le savez, l'avant-projet de loi a été déposé au mois de décembre. Il était déjà, à ce moment-là, le fruit d'une réflexion gouvernementale bien sûr mais aussi une réflexion dans la société civile, pour reprendre votre expression. Et nous avons choisi justement de ne pas précipiter les choses, au mois de décembre, en déposant un avant-projet de loi et en indiquant spécifiquement que nous excluions de l'avant-projet de loi la question de l'adoption, de la filiation, la parentalité, afin de permettre à tous les gens dans la société de se prononcer sur ça.

Et je dois dire que, comme membre de la commission, j'ai été particulièrement fier de voir que 56 groupes ou individus ont pris la peine de présenter un mémoire. Et, pour la plupart, je pense, c'est 48, ou... je peux me tromper sur le chiffre mais c'est l'ordre de grandeur, qui sont venus, comme vous le faites ce matin... Et j'en vois d'ailleurs plusieurs qui sont ici derrière, là, qui ont tenu à revenir ce matin, même s'ils n'ont pas été invités ? ce n'est pas un reproche, mais je le constate ? et ils sont venus donc nous dire ce qu'ils pensaient. Et ça a été, je pense, un débat non seulement passionnant, mais également de fond parce que des tendances, toutes les tendances ont été exprimées, plus favorables que défavorables, je dois le dire, mais, quand même, les deux aspects ont été soulevés.

n(9 h 50)n

Ceci pour dire que je pense qu'il y a dans la société un débat qui existe et qui est présent, pas latent, qui est présent, c'est-à-dire qu'on le discerne, on le voit et ça se discute. D'ailleurs, les évêques, en tout cas par le biais de Mgr Cyr, au mois de février, avaient fait une déclaration dans le journal, qui n'a pas été contredite, et je pense que c'était également le cas lorsque l'Assemblée des évêques s'est réunie à Trois-Rivières au mois de mars, et où on a retrouvé sensiblement ce que vous venez de dire ce matin mais, je dirais, moins l'aspect de suspension. On y disait ? et vous me corrigerez, parce que je veux être correct ? on y disait: «Nous, nous pensons que le mariage, c'est la façon d'organiser les choses. Nous comprenons cependant qu'il puisse y avoir d'autres façons de faire.» Et Mgr Cyr, lui, disait que l'union civile, je ne sais pas si c'est le bon mot, était comme un peu une trouvaille, une façon de solutionner une partie du problème et, en conséquence, ne voulait pas ni le condamner ni l'approuver mais accepter qu'il puisse y avoir autre chose pour d'autres personnes.

Quant à l'adoption, vous le reprenez en des termes plus sibyllins, mais vous reprenez la même chose lorsque vous dites... Voyons. Oui, c'est ça: «Lorsque l'un des partenaires est son parent biologique, il est possible que l'adoption constitue la meilleure solution.» Alors, ça peut résoudre une partie des problèmes, par exemple, pour les mères lesbiennes qui peuvent procréer, ce qui n'est pas le cas pour les gais qui, biologiquement, pour les raisons que tout le monde connaît bien, ne peuvent pas le faire. Alors, j'ai le sentiment, MM. les évêques, que la société civile est relativement prête.

Et là-dessus j'aimerais juste référer, peut-être que ça vous a échappé, et ça, je pense que ce serait compréhensible, puisque c'est un débat judiciaire, mais il y a la cause de Michael Hendricks et René LeBoeuf contre le Procureur général du Québec et le Procureur général fédéral. La Cour supérieure avait entendu la cause au mois de décembre, et la juge qui avait entendu le dossier a pris connaissance, comme tout citoyen bien sûr, des débats que nous avons eus ici au mois de février et a demandé une réouverture d'enquête pour entendre les avocats à nouveau, pour tenir compte de ce qui s'était passé dans cette enceinte-là. Elle trouvait ça important. Et, effectivement, les parties se sont rendues et le Procureur général du Canada a obtenu l'autorisation de plaider par écrit.

Nous avons reçu cette plaidoirie. Là-dedans, ce que l'on dit essentiellement, c'est qu'il y a une différence entre le mariage et l'union civile. Cependant, ce n'est pas une différence telle qu'elle créerait une discrimination, et ils disent que le mariage peut rester affecté uniquement aux hommes et aux femmes, c'est-à-dire l'hétérosexualité, puisqu'il y a une autre institution équivalente, qui serait l'union civile, qui sera offerte à ceux qui sont de même sexe et/ou hétérosexuels. Autrement dit, on dit: Le mariage n'est pas discriminatoire, parce qu'il n'est pas ouvert aux homosexuels, parce que ? et c'est l'argumentaire, et je vous invite à en faire une lecture ? il y a au Québec une autre institution qui permet une ouverture à une institution semblable non discriminante. Donc, c'est de cette façon-là que le mariage serait correct, et non pas, s'il n'y avait pas d'union civile, a contrario, ça voudrait dire que le mariage constituerait, par son obligation d'être un homme et une femme, un côté discriminatoire à l'égard des homosexuels.

Est-ce que vous avez pris connaissance de ça? Est-ce que ça vous rejoint, parce que vous semblez dire: Le mariage, c'est l'institution? Mais je n'ai pas entendu si, pour vous, il n'y avait qu'une institution ou si, comme pour le gouvernement fédéral, vous pourriez voir une autre institution, qui est l'union civile, que vous ne condamneriez pas mais que vous verriez destinée à certaines personnes qui, elles, verraient dans cette institution l'équivalence de traitement par rapport aux autres couples, aux autres individus.

M. St-Gelais (Raymond): M. Gaudette va...

M. Gaudette (Pierre): Ce qui fait problème, le premier point qui fait problème dans cette argumentation, c'est que, dans le projet de loi actuel, vous changez la définition du mariage, alors que, dans le projet de loi antérieur, le mariage était pour les couples de sexe différent, l'union sociale pour les couples homosexuels.

M. Bégin: J'ai une réponse très courte là-dessus. C'est parce que ça peut régler le problème rapidement. Ce qu'on retrouve au deuxième alinéa de l'article 365 actuel est une condition de fond du mariage. Cette condition-là est de juridiction fédérale. Le Québec ne peut pas, en fait, changer ça. Comprenez-vous? C'est fédéral. Ce que nous pouvons changer, c'est la célébration du mariage, qui est de compétence provinciale en vertu du partage des compétences. Donc, nous n'avons pas à inclure dans le Code civil cette disposition-là, puisque c'est dans la loi fédérale qu'elle se retrouve. C'était comme un miroir, si vous voulez, un reflet de ce qu'il y avait dans la loi fédérale mais qui n'est pas essentiel. Donc, en termes de cohérence, nous l'enlevons du Code civil parce qu'elle n'a pas à être là. C'est juste ça que nous avons fait.

M. Gaudette (Pierre): Mais il reste que, effectivement, il y a un problème de symbolique, parce que c'est le mariage comme tel qui reçoit une définition plus large, et ça crée une confusion dans la perception qu'on peut avoir du mariage.

L'autre point que j'aimerais souligner, c'est: Effectivement, ce qui fait l'originalité du mariage, c'est qu'étant ouvert à l'enfant il oblige l'État, nécessairement, à se préoccuper d'une façon spéciale de cette cellule qui renouvelle la société. Il y a une espèce, je ne dirais pas... Il y a une différence entre ce type d'union entre gens de sexe différent ouverts à la fécondité, d'une part, et tout autre type d'union, que ce soit de gens qui sont de même sexe, pour n'importe quel... même sexe ou de sexe différent, pour n'importe quel projet qui, là, ne... qui, là, n'introduit pas la présence de l'enfant. À tel point que, dans le projet de loi, quand vous parlez de la dissolution de l'union civile... Quand on essaie de se demander la différence entre l'union civile et le mariage dans le projet de loi, une des seules différences qu'on trouve, c'est, au moment de la dissolution, s'il y a des enfants, il faut passer devant le juge dans le cas de l'union civile, et dans le cas du mariage nécessairement, alors que, lorsque l'enfant n'est pas en cause, un simple acte notarié des deux personnes peut conduire à la dissolution de l'union civile.

Il y a déjà même à l'intérieur de la conception de l'union civile, dès qu'il y a un enfant, il y a des provisions particulières qui doivent être prises. Ce que nous lisons dans le mémoire, c'est que le mariage comme tel, comme il est ouvert naturellement à l'enfant, à la procréation de l'enfant, doit faire l'objet d'une attention particulière de la part du législateur.

M. St-Gelais (Raymond): M. le ministre, tantôt vous... Bon. C'est évident que, lorsque nous avons pris la parole en mars, nous n'avions pas... Le projet de loi a été modifié, là. Alors, cette question du mariage... Et c'est pourquoi notre position diffère aujourd'hui, parce qu'il y a des transformations assez importantes. Et Mgr Blanchet pourrait sans doute compléter.

M. Blanchet (Bertrand): Peut-être, oui. Effectivement, nous avions dit que nous ne voyions pas d'objection à ce moment-là à ce que, bon, des couples puissent bénéficier davantage en matière de finances, de l'aide testamentaire, de consentement aux soins, et tout le reste. Mais, ceci étant dit, le sentiment qu'on a présentement, c'est qu'on augmente, je dirais, la confusion qui existe dans la population maintenant à l'égard, un, de l'identité sexuelle, à l'égard du mariage, à l'égard de la famille. On ne sait plus très bien définir une famille aujourd'hui; là, on ne saura plus très bien comment définir le mariage; et, en même temps, beaucoup de gens ont de la difficulté à affirmer ce qu'est une identité sexuelle.

Moi, il me semble que, parce que l'on veut répondre aux besoins des personnes, on est en train de toucher à des choses qui relèvent vraiment du bien commun. Je comprends que c'est difficile pour un législateur d'essayer, bon, d'inclure un peu tout le monde, on ne veut pas marginaliser les gens non plus. Mais, en même temps, ce n'est pas la somme, je dirais, des libertés individuelles qui va permettre à une société d'assurer un bien commun.

n(10 heures)n

Alors, nous, en tout cas, ce qui nous préoccupe beaucoup, c'est cette sorte de confusion qui s'installe de plus en plus parce qu'on ne veut pas porter de jugement sur les choix personnels que font les gens. Nous aussi, nous ne voulons pas en porter. Le concile Vatican II nous a bien dit: Personne ne doit être forcé d'agir contre sa conscience ni, dans une certaine mesure, d'agir selon sa conscience. Bon. Quand on dit «dans une certaine mesure», on peut voir, à ce moment-là, des exigences du bien commun, et, à cet égard-là, moi, il me semble que le fédéral... Je m'excuse de citer ici une décision du Parlement canadien, mais, quand, le 8 juin 1989, on a étudié un projet...

Une voix: 1999.

M. Blanchet (Bertrand): ...1999, on avait un projet qui touchait un peu à cette question, on avait dit, bon, que, de l'avis de la Chambre, il est nécessaire, parallèlement au débat public entourant les récentes décisions judiciaires, de confirmer que le mariage est et doit demeurer exclusivement l'union d'un homme et d'une femme et que le Parlement prendra toutes les mesures voulues, dans les limites de sa compétence, pour préserver au Canada cette définition du mariage. Le désir de préserver la définition du mariage me paraît, à mon sens, très heureuse, et je ne retrouve pas ça bien sûr ici, dans le projet de loi.

Concernant le cas Michael Hendricks auquel vous référiez tout à l'heure, il faut peut-être remarquer aussi que, à la Cour européenne des droits, on a été beaucoup plus prudent à cet égard, puisqu'on n'a pas permis à un homme dont j'oublie le nom d'adopter effectivement des enfants, une personne homosexuelle.

Alors, nous, encore une fois, ce qui nous dérange, là, ce qui nous trouble d'une certaine manière, c'est de voir qu'une question qui nécessiterait beaucoup plus de réflexion est en voie d'être réglée un peu trop rapidement. Et j'aimerais peut-être, si vous le permettez, demander à M. Ayas aussi de dire un petit mot de ces études, dans la mesure où vous estimez que cela convient, là, de ces études qui ont été présentées ici... mériteraient d'être approfondies davantage.

Le Président (M. Lachance): Je vous signale qu'il reste peu de temps pour les échanges du côté ministériel. Oui, Léandre. M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Dion: Merci, M. le Président.

M. Gautrin: M. le Président, je pense que de part et d'autre, compte tenu de l'importance des gens qui viennent témoigner devant nous, on pourrait avoir un peu de souplesse quant au temps et permettre aux ministériels de pouvoir poser des questions qui s'imposent.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Dion: Merci, M. le Président. Alors, bonjour, MM. les évêques. Je veux vous remercier d'être venus ce matin exprimer votre point de vue sur une question extrêmement importante, parce qu'elle touche les fondements mêmes de la société et qu'elle touche aussi au rôle de chacun dans la société, le rôle que vous remplissez, le rôle que l'État remplit. Et je pense que la discussion qu'on a ne peut que nous éclairer réciproquement sur à la fois ce qu'on souhaite faire et les mobiles pour lesquels on le fait.

D'une part, l'institution que vous représentez est extrêmement importante dans la société. Vous avez une mission de donner votre conviction, transférer ou communiquer votre conviction sur le sens de la vie, sur la finalité de la vie et sur les conditions qui permettent le meilleur épanouissement possible de la vie, donc le succès dans la vie, au sens le plus large du terme, c'est-à-dire créer des conditions de bonheur pour chacun en particulier et pour l'ensemble de la société. C'est la mission que je pense que vous remplissez dans la société vue d'un point de vue laïque.

Et évidemment ce n'est pas le même rôle que remplit l'État. L'État, je pense, remplit un autre rôle qui est celui de créer des conditions au moins minimales pour qu'on n'aille pas au-delà de ce qui est acceptable par l'ensemble des citoyens dans nos comportements, ce qui fait qu'on puisse vivre en bonne harmonie en vertu des règles que l'on se donne. Donc, je pense que les règles qu'édicte l'État sont de l'ordre législatif civil alors que celles dont vous faites la promotion sont d'ordre plutôt personnel et moral.

Pour moi, je partage le point de vue de M. le ministre à l'effet que c'est loin d'être un projet de loi qui arrive comme ça, comme un champignon. Ça fait des années qu'on discute de ces questions-là, qu'on hésite, qu'on avance, qu'on recule, parce que c'est une question importante. Mais je pense que, dans la réflexion, il y a une chose qui est extrêmement importante et qu'il ne faut pas oublier: L'être humain réfléchit dans ses actes autant que quand il est seul et qu'il n'a même pas un crayon pour formuler verbalement ce qu'il pense. Et le geste que l'on pose est aussi un acte de réflexion et de création, je pense. Et, dans ce sens-là, moi, je crois qu'on est arrivé au moment où on a à poser un geste concret qui comporte cet engagement de l'ensemble de la société, avec des conséquences que l'on prévoit mais qui ne se réaliseront pas nécessairement dans l'absolu, qui vont se réaliser plus ou moins, et on aura peut-être des corrections ou des améliorations à faire plus tard. Dans ce contexte-là, votre rôle est sans doute celui d'enseigner le chemin le meilleur possible, mais celui de l'État est peut-être de faire en sorte qu'il soit assez large pour être possible.

Alors, dans ce contexte-là, moi, je pense, que la distinction qui existe entre le mariage et l'union civile, à l'état actuel de l'évolution des mentalités, me semble une distinction heureuse parce qu'elle permet de distinguer entre les conceptions... une conception que l'on dirait traditionnelle et une conception qui est moins traditionnelle mais qui a émergé progressivement dans notre société. Pour ma part, vous savez, je pense...

Le Président (M. Lachance): Je m'excuse de vous interrompre, mais il faudrait accélérer.

M. Dion: Oui, le temps court, hein?

Le Président (M. Lachance): Très rapidement.

M. Dion: Il me reste combien de temps?

Le Président (M. Lachance): En fait, il est épuisé, votre temps.

M. Dion: Il est épuisé, mon temps? Et je suis sur la tolérance de mes amis de l'autre côté.

Mme Lamquin-Éthier: Avez-vous une question?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Dion: Oui, j'ai une question. On se croirait à la période de questions. Alors, moi, je trouve qu'il est très important que ce projet de loi procède parce que, vous savez, il y a tellement de cas que l'on voit dans la société où des... Vous savez, les statistiques démontrent qu'il y a beaucoup plus de suicides chez les homosexuels que chez les autres. Il doit y avoir un problème là. Il y a le problème des enfants qui sont nés de parents hétérosexuels mais qui se retrouvent, après la mort ou la séparation, avec un parent homosexuel auquel ils sont extrêmement attachés et dont ils risqueraient d'être détachés par la loi civile si on n'adoptait pas ce projet de loi là. Qu'est-ce que vous pensez de ces situations-là?

Le Président (M. Lachance): Oui, Dr Ayas.

M. Ayas (Raouf): Merci de me donner la parole. Vous avez mentionné tantôt que la réflexion a commencé depuis bien avant décembre. J'ai consulté des collègues psychiatres, psychologues, pédiatres, autour de moi, beaucoup de citoyens et je dois vous dire que les gens n'ont pas une idée claire, même les spécialistes, même les experts. Et les psychiatres que j'ai consultés m'ont dit: Il n'y a pas de données dans la littérature ni dans un sens ni dans l'autre. Il n'y a pas de données probantes. Alors, si vous pensez qu'il y a un consensus, moi, je pense qu'il n'y a pas un consensus. Je pense qu'on doit étudier cette affaire-là avant d'adopter à la hâte quelque chose qui est sur du sable mouvant. Les experts que j'ai consultés m'ont dit: On n'est pas capable de venir témoigner parce qu'on n'a pas assez d'évidences. Le ministre nous a demandé des évidences de médecine, mais ce n'est pas vrai qu'il y en a à ce point-là.

Et Mgr Blanchet a fait référence tantôt au jugement de la Cour des droits de l'homme de Strasbourg du 26 février. Je pense qu'il y a matière à aller chercher cet arrêté et étudier pourquoi la Cour européenne trouve que ce n'était pas possible de confier l'adoption d'un enfant à un parent homosexuel de 45 ans malgré ses qualités exceptionnelles.

Moi, j'ai parcouru le document qui avait été présenté à la commission parlementaire en février, je réfère à ce document-là. J'ai demandé sur quelles bases les études ont été présentées à la commission parlementaire. Je l'ai presque tout lu et je peux vous dire que ce n'est pas vrai qu'il y a un consensus. On peut aller article par article, si on avait du temps, mais ici il y a des études qui se basent sur 30 personnes, 50 personnes, 80 personnes, 200 personnes. Statistiquement, ça n'a aucune valeur. Scientifiquement, ça n'a aucune valeur. Nous, quand on fait des recherches sur un médicament, on l'étudie sur 10 000 personnes, sur 5 000 personnes, sur 20 000 personnes, et, après des années d'étude, on peut même découvrir que ce médicament qui semblait la panacée n'est pas aussi bon qu'on le pensait. Alors, je pense, sur un sujet aussi vital que celui-là, il est vraiment très important que votre commission l'étudie plus à fond.

Le Président (M. Lachance): Mme la députée de Bourassa et porte-parole de l'opposition officielle. Je m'excuse, M. le député de Saint-Hyacinthe, mais il faut procéder.

M. Dion: ...

Le Président (M. Lachance): Oui, mais... Mme la députée de Bourassa, allez-y.

n(10 h 10)n

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. J'aimerais vous souhaiter la bienvenue et vous remercier de participer aux travaux de cette commission, ce qui est important. M. le Président, puis-je m'assurer en premier lieu que vous avez reçu la copie du jugement Hendricks-LeBoeuf? Est-ce qu'elle vous aurait été distribuée ou est-ce que vous l'aviez?

M. Blanchet (Bertrand): Je ne l'ai pas vue, non.

Mme Lamquin-Éthier: Non. M. le ministre, tout à l'heure vous évoquiez le jugement Hendricks-LeBoeuf. Peut-être qu'une copie pourrait...

M. Gautrin: Est-ce qu'il y aurait possibilité à ce moment-là que vous le déposiez formellement à la commission, Luc?

M. Bégin: ...ce que j'ai. Ah, oui, je pourrais déposer devant la commission un document que j'ai ici. Je ferais une seule remarque: c'est une traduction que j'ai demandée, parce que le texte est en anglais, afin que les gens qui ne connaissent pas suffisamment bien l'anglais puissent le faire. Alors, il n'y a pas de garantie de la parfaite traduction. Pour l'avoir lue, je pense que c'est à 99 % la bonne terminologie juridique, pour avoir lu les deux versions. Alors, je dépose devant la commission... À moins qu'on en ait besoin, je le garderais, le temps qu'on entende les témoignages, et le faire photocopier par la suite, si vous permettez.

Le Président (M. Lachance): Très bien, M. le ministre. Mme la députée.

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le ministre. Merci, M. le Président. Vous dites dans votre mémoire, à la page 1: «On comprendra alors que vouloir faire de l'union civile un mariage, ou son équivalent, revient à redéfinir le mariage lui-même.» En page 2: «L'État a l'obligation stricte d'apporter à cette institution qu'est le mariage toute la protection requise.» Et vous concluez en disant: «Il ne faudrait pas jeter de la confusion dans les esprits et plonger les institutions dans l'ambiguïté.»

J'aimerais vous demander: Est-ce que vous craignez que la reconnaissance des couples de même sexe soit préjudiciable, d'une façon ou d'une autre, aux couples hétérosexuels ou, donc, préjudiciable, d'une façon ou d'une autre, au mariage ou à la conception traditionnelle de la famille?

M. St-Gelais (Raymond): Pour moi, l'ambiguïté... Lorsqu'on lit le projet de loi, on dit: Quelle sera vraiment la différence entre l'union civile telle que présentée dans le projet de loi et le mariage civil, si ce n'est que, à la fin, la dissolution est peut-être plus simple lorsqu'il s'agit d'un couple qui n'a pas eu d'enfants, qui n'a pas d'enfants ? là, il s'agit d'un acte notarié. Mais, pour le reste, on se dit: Quel est... Alors là c'est presque une assimilation entre l'union civile et mariage civil, dans l'optique où l'union civile est ouverte à des personnes ou bien des personnes de même sexe ou des personnes de sexe différent. Il y a déjà une ambiguïté assez forte, à ce moment-là, où l'un et l'autre sont presque sur le même pied. Maintenant, peut-être que Pierre Gaudette pourrait dire autre chose ici.

M. Gaudette (Pierre): Bien, simplement, quand on compare l'avant-projet de loi et le projet de loi, dans l'avant-projet de loi, c'était clair, on disait: Le mariage, c'est l'union de personnes de sexe différent; l'union civile, c'est l'union de personnes de même sexe, alors que, dans l'actuel projet, le mariage peut être... En fait, si on lit le texte. Évidemment, il y a la loi fédérale, mais je pense que la définition du Code civil est extrêmement importante pour clarifier les choses. Le mariage est présenté comme l'union de deux personnes, on ne mentionne pas que ce soit de sexe différent, et l'union civile la même chose. Déjà, il y aurait une amélioration si on précisait que le mariage est entre personnes de sexe différent mais que l'union civile peut exister pour des personnes de même sexe ou de sexe différent. C'est un autre type où n'est pas engagé nécessairement la vie... C'est comme un contrat plus privé que le mariage qui est une institution vraiment nécessaire à l'État. Alors, c'est la suppression des deux personnes... des mots «de sexe différent» qui crée beaucoup d'ambiguïté, et on ne sait pas trop où ça va conduire.

M. St-Gelais (Raymond): M. Ayas.

M. Ayas (Raouf): J'aimerais ajouter quelque chose. En rentrant dans cette salle, ici, je vois Dieu et mon droit. J'espère que cette enseigne va rester encore pour longtemps. Mais, sans rentrer dans le judiciaire, je dois dire que, si on se fie à l'expérience multimillénaire de l'Église puis à l'enseignement de Jésus-Christ, Jésus a dit: Vous abandonnerez votre père et votre mère et vous vous unirez pour ne faire qu'une seule chair. C'est le concept chrétien. Et, moi, en tant que chrétien, je salue l'héritage canadien-français de ce peuple, cette civilisation occidentale. Je suis un chrétien du Moyen-Orient et je suis fier d'ajouter notre apport, qui rejoint le vôtre, et j'espère qu'on va continuer avec les valeurs solides pour les améliorer, pas pour les laisser se détériorer.

Le Président (M. Lachance): Mme la députée de Bourassa, oui?

Mme Lamquin-Éthier: Non, je vais passer la parole. Le temps passe.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Je vous remercie. Et pour moi aussi c'est un plaisir de vous saluer ici. Si j'ai bien compris votre témoignage, vous vous inquiétez aujourd'hui du fait que la nouvelle version du projet de loi remet en question le mariage. Et ça, ça vous inquiète, et vous nous dites: Vous, les législateurs, n'allez pas trop loin et ne remettez pas en question ce qui était le mariage comme union entre personnes de sexe différent. Est-ce que j'ai bien compris ça? Et vous nous dites que, dans la rédaction du projet de loi, il y a un danger, à cause de la modification de l'article 365 du...

M. St-Gelais (Raymond): C'est plus profond qu'uniquement le mariage, c'est toute la conception de la sexualité humaine qui est mâle, femelle, avec ouverture sur la vie. Et ça se retrouve dans le mariage, mais c'est la sexualité humaine elle-même qui est remise en question dans sa définition profonde.

M. Gautrin: Je comprends. Maintenant, je reviens sur l'union civile comme telle. Vous n'étiez pas opposé et, père Gaudette, vous venez de le dire, essentiellement, si on laisse l'union civile aux couples de même sexe ou de sexe différent, là, vous n'avez pas de difficultés. Est-ce que je comprends bien votre position?

M. Blanchet (Bertrand): C'est beaucoup plus facile pour nous d'accepter le projet de loi.

M. Gautrin: Si le mariage est bien... et si on distingue entre les deux. Autre question, si vous me permettez. Vous, la loi... Vous êtes actuellement des évêques, mais vous êtes aussi des êtres qui ont le pouvoir de marier, c'est-à-dire vous avez cette possibilité, vous êtes, ce qu'on appelle, des officiers d'état civil. Est-ce que, si la loi sur l'union civile est passée, qui donnerait à ceux qui ont le pouvoir de célébrer le mariage de célébrer l'union civile, est-ce que les évêques de la province de Québec seraient prêts à célébrer les unions civiles entre...

M. St-Gelais (Raymond): Sur ce plan-là, la loi prévoit qu'un ministre du culte ne pourrait pas, contre sa conscience, présider une union civile.

M. Gautrin: Non, absolument. Non, non, je sais bien, contre sa conscience, j'ai bien compris, il n'y aurait pas l'obligation, mais la position, c'est: Est-ce qu'il aurait la permission?

M. Blanchet (Bertrand): Non. Dans l'Église, pour nous, le mariage, c'est une institution qui est aussi un contrat entre un homme et une femme. Et, pour nous, la seule façon, je dirais, de procéder, c'est que le mariage soit religieux. Alors, on n'accepterait pas de marier civilement...

M. Gautrin: Je comprends. Je continue parce que c'est important d'avoir votre point de vue exactement, de bien le comprendre. Autre question sur l'adoption. Vous pensez que la loi donne un droit à l'adoption. La perception que, nous, nous avons eu en commission, c'est que le droit à l'adoption, déjà dans le Code civil, était ouvert aux personnes qui soient... et même à des... des couples de personnes pouvaient adopter. Donc, c'était une situation qui existait déjà.

Les garanties que nous avons à avoir, ce n'est pas au niveau légal, mais au niveau administratif, c'est-à-dire s'assurer que le bien-être de l'enfant et, disons, sa possibilité de se développer soient assurés au moment où on pratique l'adoption. Et là, à l'heure actuelle, on s'est donné au Québec un certain nombre d'éléments: la DPJ, les mécanismes de services sociaux, pour s'assurer que, lorsqu'on confie un enfant à un couple, il ait des garanties suffisantes en quelque sorte de pouvoir se développer et survivre. Est-ce que ceci... on s'entend sur cela ou il y a un problème actuellement de votre point de vue?

M. Blanchet (Bertrand): Il nous paraît difficile de généraliser la possibilité de l'adoption par des personnes homosexuelles, parce qu'il nous semble qu'il faudrait, dans la très grande mesure du possible, réserver l'adoption à des personnes de sexe différent, parce qu'on voit mal comment ce ne serait pas dans un foyer où il y a un père et une mère que l'enfant pourrait naturellement se développer le mieux en termes d'identité sexuelle et en termes de croissance humaine.

M. Gautrin: Je vous remercie. Je comprends ça, mais, ça, vous comprenez que c'est quelque chose qui est mesuré en quelque sorte, et même si on... qui est mesuré par l'ensemble des officiers de services sociaux: psychologues, psychiatres, travailleurs sociaux, qui doivent se pencher sur un cas, un cas d'adoption, le cas échéant, pour s'assurer ce que vous venez de dire.

n(10 h 20)n

Vous me permettez que je pose une question, M. Gabias, sur... Je reviendrai après avec vous. La loi ? et vous n'êtes pas intervenu là-dessus ? la loi ouvre aussi une porte à la double filiation de même sexe, c'est-à-dire, lorsqu'un couple homosexuel fait un projet de parentalité ? il s'agit évidemment dans ce cas-là de couple de lesbiennes ? a un projet de parentalité, et il y a une des deux personnes dans le couple qui va porter l'enfant, l'autre ne le portera pas, le mécanisme se fera évidemment par un mécanisme d'insémination artificielle, et la loi prévoit que ce couple-là... les deux parties au couple auront les responsabilités parentales, c'est-à-dire on aura deux mères qui partageront les responsabilités parentales, avec ce que ça implique, c'est-à-dire, au moment de la dissolution du couple, par exemple, chacune des parties a des responsabilités par rapport à l'enfant, avec ce que ça implique. C'est que, aussi, chacune des parties doit procurer aliments à l'enfant, c'est-à-dire le voir, à ce moment-là, et voir... ont la possibilité d'agir quant à l'éducation externe. Ceci vous pose-t-il problème ou ne vous pose-t-il pas de problème?

M. St-Gelais (Raymond): Peut-être que M. Gaudette pourrait aborder l'aspect... C'est-à-dire que c'est une question... Dans le document, on indique... on se demande si on a mesuré toutes les conséquences de la filiation, puis c'est un point qu'on aimerait discuter davantage.

M. Gautrin: M. Gabias avait un point qu'il voulait intervenir tout à l'heure. Je m'excuse de vous avoir coupé la parole.

Une voix: M. Ayas.

M. Gautrin: Pardon?

Une voix: Dr Ayas.

M. Gautrin: Ayas. Excusez-moi, je vous appelle Gabias. Excusez, je suis désolé.

M. Ayas (Raouf): Les études actuelles qui nous ont été présentées ne montrent aucune garantie pour l'enfant. On pense que ça pourrait l'aider, on pense que c'est mieux d'avoir un parent qui a deux... un enfant qui a deux parents homosexuels plutôt que d'être mal vêtu, mal nourri, puis se retrouver aux urgences souvent, mais il n'y a pas d'étude qui montre qu'il va être dans de meilleures situations. Ce n'est pas clair, ce n'est pas établi.

M. Gautrin: Je comprends, M. Ayas, mais laissez-moi quand même revenir. Là, on n'est pas ici en train d'autoriser ou ne pas autoriser les choix que les lesbiennes peuvent faire de se faire inséminer artificiellement. Ça, c'est une possibilité qu'elles ont. Une fois qu'elles ont fait ce choix, et qui est donc le résultat d'un projet de parentalité commun, n'est-il pas normal que la loi, l'encadrement juridique, ce que, nous, législateurs, nous avons à procurer, l'encadrement juridique permette que les deux parties à ce projet, peut-être que vous réprouvez, je le comprends peut-être, mais à ce projet et les responsabilités juridiques qui découlent du choix qu'elles ont fait initialement... Parce que la situation actuelle, si vous me permettez, c'est que, si on n'inclut pas cette double ou cette biparentalité au point de vue légal, c'est que seule la mère biologique a une responsabilité envers l'enfant, même si cet enfant est le résultat d'un projet de parentalité commun et qui normalement devrait impliquer des responsabilités financières, d'encadrement émotif, etc., des deux partenaires.

M. Ayas (Raouf): L'adoption ne peut pas aller contre la logique. Un enfant, il vient d'une ovule et d'un sperme. On ne peut pas accepter que l'enfant vienne de deux femmes ou de deux hommes.

M. Gautrin: Je me suis mal fait comprendre, M. Ayas. Je ne parle pas d'adoption actuellement. Je suis en train de dire une naissance, donc, l'avènement d'une naissance biologique qui est faite avec une banque de sperme anonyme, vous savez que ça existe actuellement, et qui, par un mécanisme d'insémination dit artificiel... enfant qui, à ce moment, naît, une des deux va être la mère porteuse ? je m'excuse d'utiliser ce terme-là ? va être la mère biologique, mais cet enfant est le résultat d'un projet de parentalité commun à un couple de deux personnes qui sont lesbiennes mais qui vivent en couple et qui veulent élever cet enfant, être une coresponsabilité tant sur le plan financier, émotif, l'encadrement qu'elles doivent apporter, etc. Et ce que le projet de loi donne actuellement, c'est une double responsabilité aux deux parents, puisque c'est le cas à l'heure actuelle, d'avoir la responsabilité d'élever cet enfant que ce soit sur le plan... et que, en cas de rupture de l'union, il faut que chacune des parties ait une responsabilité envers cet enfant et que ce n'est pas seulement la mère qui est la mère biologique qui ait la seule responsabilité.

M. St-Gelais (Raymond): M. Gaudette, peut-être.

M. Gautrin: Excusez-moi, père Gaudette.

M. Gaudette (Pierre): Bien, peut-être que... Au point de départ, évidemment, on peut être plus ou moins d'accord avec un tel projet de parentalité, mais, à partir du moment que l'enfant existe, il faut se mettre du côté de l'enfant et regarder ce qui, dans les circonstances concrètes, va vraiment être le mieux à son service. Et là comment encadrer ça, tout ça, on n'a pas eu le temps d'y réfléchir.

M. Gautrin: Je vous remercie, ça m'éclaire. J'ai terminé, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Ça va? Très bien. Alors, merci pour votre participation aux travaux de cette commission. Messieurs, merci. Et je vais suspendre les travaux pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 10 h 26)

 

(Reprise à 10 h 29)

Étude détaillée du projet de loi n° 54

Code de procédure civile

Des demandes relatives à des petites créances

De la procédure

De l'audience (suite)

Le Président (M. Lachance): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre les travaux de la commission des institutions et poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 54, Loi portant réforme du Code de procédure civile. Alors, nous étions, hier, au moment de l'ajournement de nos travaux, à l'étude de l'article 980, 980 qui était introduit par l'article 138 du projet de loi.

Alors, on m'indique, M. le secrétaire, qu'il n'y a pas de remplacement?

Le Secrétaire: C'est bien ça, M. le Président, il n'y a pas de remplacement annoncé.

n(10 h 30)n

Le Président (M. Lachance): Alors, M. le ministre, nous en sommes à l'article 980. Les autres articles avaient été déjà adoptés.

M. Bégin: Alors, je procède à la lecture, M. le Président?

Le Président (M. Lachance): Oui.

M. Bégin: Alors: «Une partie peut produire une déclaration écrite à titre de témoignage si elle l'a déposée au greffe au moins dix jours avant l'audience et si l'autre partie a été avisée par le greffier de la possibilité d'en prendre connaissance et d'en recevoir copie. Cette dernière peut demander au greffier, le cas échéant, la convocation du déclarant. Le juge condamne aux frais la partie qui a demandé la convocation du déclarant, s'il estime qu'il a été déplacé inutilement et que la déclaration écrite eût été suffisante.»

Alors, c'est un article nouveau, M. le Président, et il prévoit la possibilité pour une partie de produire une déclaration écrite à titre de témoignage, en respectant bien sûr certaines conditions. L'autre partie peut demander la convocation du témoin, et, si elle le fait, le juge appréciera si ça été fait à juste titre, ce qui va apporter quelque chose de plus, ou si ça a été une demande inutile et, en conséquence, être sanctionné par la Cour. C'est une recommandation du Comité. Je pense que ça ne pose pas de problème particulier.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que cet article est adopté?

Mme Lamquin-Éthier: Il est adopté, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Article 981.

M. Bégin:«Le juge peut, s'il estime que l'autre partie n'en subit pas de préjudice ou que les fins de la justice sont ainsi mieux servies, accepter le dépôt d'un document, d'une déclaration ou d'un rapport après l'expiration du délai.»

Encore une fois, M. le Président, c'est un article nouveau. Je viens de décrire ce qu'il en est. Il n'y avait pas, de recommandation, dans le rapport, mais je pense que ça peut faciliter les relations des parties en donnant ce pouvoir au juge, qui évaluera selon les circonstances.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que cet article est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Article 982.

M. Bégin:«Le juge peut, d'office, s'il est d'avis que les fins de la justice peuvent être ainsi mieux servies, visiter les lieux ou ordonner une expertise pour l'appréciation des faits relatifs au litige ou un constat par une personne qualifiée qu'il désigne.

«La procédure applicable à l'expertise ou à un constat est celle que détermine le juge.

«Le juge statue sur les dépens relatifs à l'expertise ou au constat et décide s'ils sont à la charge d'une des parties ou des deux ou, s'il l'estime approprié, à la charge du ministre de la Justice, s'il estime que les fins de la justice sont ainsi mieux servies.»

Alors, cet article, M. le Président, reprend en substance le contenu de l'actuel article 977 en y ajoutant la possibilité d'ordonner, outre une expertise, un constat. On se rappelle le témoignage des huissiers, et je pense que c'est une bonne chose puis des choses qui sont factuelles, je dirais, neutres, qui ne font pas l'objet... qui ne sont pas subjectives mais objectives. Ça peut aider les parties sans que les coûts n'augmentent pour autant.

Le Président (M. Lachance): Cet article est-il adopté?

M. Bégin: Adopté.

Mme Lamquin-Éthier: Il est adopté, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Article 982, adopté. Article 983. M. le ministre.

Du jugement

M. Bégin:«Le jugement est consigné par écrit sous la signature du juge, du greffier spécial ou du greffier qui l'a rendu et contient un bref énoncé des motifs de la décision. Le jugement statuant sur une demande contestée doit être rendu dans les quatre mois de l'audience; tout autre jugement doit être rendu dans les 30 jours à compter du moment où le dossier est complet.

«Sauf si le jugement est rendu à l'audience en présence des parties, le greffier, dès que le jugement est rendu, en transmet une copie certifiée à chacune des parties.

«Le greffier transmet avec la copie du jugement un avis au débiteur l'informant qu'un jugement a été rendu contre lui et qu'à défaut de payer la créance due, ses biens pourront être saisis et, le cas échéant, vendus en justice.»

Alors, ça reprend en substance l'article... les articles, pardon, 978 et 979. Cependant, il vise également à assurer une concordance avec l'article 970 du Code qui a été introduit par notre article 138 du projet de loi en ce qui concerne le pouvoir des greffiers et des greffiers spéciaux de rendre jugement dans certains cas.

Enfin, le troisième alinéa est de droit nouveau et il prévoit l'envoi, avec la copie du jugement, d'un avis au débiteur l'informant, s'il a perdu sa cause, des conséquences du défaut de payer. Alors, c'est en partie une recommandation ? pas le troisième alinéa, mais en général ? de la part du Comité de préciser par écrit et d'exposer les motifs du juge et ses conclusions. C'est ajouté. Je pense que ça ne fait pas de problème.

Le Président (M. Lachance): L'article 983 est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Mme Lamquin-Éthier: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Article 984.

M. Bégin:«984. Le jugement est final et sans appel.

«Une cause relative à une petite créance n'est pas sujette au pouvoir de surveillance et de contrôle de la Cour supérieure, sauf en cas de défaut ou d'excès de compétence.»

Alors, le premier alinéa de 984 reprend le contenu de l'article 980 à l'effet que le jugement est final et sans appel. Le second alinéa, lui, reprend en substance le contenu de l'article 997, qui exclut les jugements relatifs à une petite créance de l'application du pouvoir de surveillance de la Cour supérieure, en prévoyant toutefois la possibilité de le faire dans certains cas particuliers. Le Comité recommandait d'aller dans ce sens-là, et je pense qu'à partir de là il y a une espèce d'unanimité à cet égard.

Le Président (M. Lachance): L'article 984 est-il adopté?

Mme Lamquin-Éthier: Ce qui est embêtant ici, c'est que le jugement... On a compris, hier, évidemment, que M. le ministre avait maintenu sa position d'augmenter la compétence de la division à 7 000, et nous pensions qu'il serait peut-être approprié de revoir certaines des caractéristiques, dont la représentation par avocat et le fait que ce soit sans appel, pour en arriver à une solution de compromis, comme ça se fait ailleurs au Canada, par exemple de prévoir, à 4 000, 5 000 $, que les parties puissent être représentées par avocat ou encore de revoir les modalités relatives à l'appel. Alors, on a compris la position, mais on ne pense pas qu'avec l'augmentation substantielle ce soit dans l'intérêt des justiciables. Donc, ça va être sur division, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Alors, l'article 984 est adopté sur division. L'article 985. Il y a un amendement.

M. Bégin: Oui, M. le Président. Remplacer, dans la deuxième ligne du second alinéa de l'article 985 proposé par l'article 138 du projet de loi, le mot «instituée» par le mot «introduite».

Alors, comme vous voyez, c'est une modification de nature terminologique.

Le Président (M. Lachance): Mme la députée, c'est sur...

Mme Lamquin-Éthier: Ah! c'est sur le 81/2 par 11.

Le Président (M. Lachance): ...81/2 X 11.

M. Bégin: 81/2 X 14.

Le Président (M. Lachance): Bien, moi, j'ai 81/2 X 11. Vous, vous avez les notes explicatives, vous avez les commentaires.

M. Bégin: Ah! Comment ça qu'on ne m'a pas donné la même chose?

Mme Lamquin-Éthier: Non, je ne l'ai pas. J'imagine que c'était dans la dernière série des amendements que vous nous avez remis.

M. Bégin: ...sur le 81/2 X 14.

Mme Lamquin-Éthier: Moi, je suis bien dans le 81/2 X 14.

Le Président (M. Lachance): Ce sera fait, Mme la députée de Bourassa, on va vous remettre...

(Consultation)

Mme Lamquin-Éthier: Ça, c'est ce qui nous avait été remis le 9?

M. Bégin: Oui. Je pense que c'est un des derniers dans la liste qu'on nous avait remise, là, initialement. Écoutez, Mme la députée, on vous donner une nouvelle série d'amendements, parce que là ça peut arriver que...

Mme Lamquin-Éthier: Oui, oui, on me l'a donnée, puis là, entre vous et moi, c'est parce que j'aimerais... Non, je me...

M. Bégin: Non, mais il faut que vous ayez l'instrument pour travailler, là.

Mme Lamquin-Éthier: Attendez, je crois que j'approche.

(Consultation)

M. Bégin: La page précédente. Oui, c'est ça.

Mme Lamquin-Éthier: Bon. Cette quête a été couronnée de succès.

M. Bégin: O.K.

Mme Lamquin-Éthier: Et je vous remercie, hein, d'être...

M. Bégin: Est-ce que ça va pour cet article-là? Oui?

Mme Lamquin-Éthier: Oui, adopté.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'amendement est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Est-ce que l'article 985, tel qu'amendé, est adopté?

Des voix: Adopté.

M. Bégin: M. le Président, l'article... Oups! Excusez.

Le Président (M. Lachance): Adopté.

M. Bégin: Il n'y en a pas, là, hein?

Le Président (M. Lachance): 985 a été adopté tel qu'amendé. L'article 986. M. le ministre.

M. Bégin: Merci.

«986. Sauf si le juge en a ordonné autrement, le jugement peut être exécuté à l'expiration de 30 jours suivant la date à laquelle il a été rendu. S'il est rendu par défaut, ce délai est de 10 jours. Toutefois, le créancier peut, si dans un écrit appuyé de son serment il établit l'un des faits donnant ouverture à une saisie avant jugement, obtenir du juge l'autorisation d'exécuter avant l'expiration de ce délai.

«Si le jugement a ordonné le paiement de la créance par versements ou a entériné une entente intervenue entre le créancier et le débiteur et que ce dernier n'acquitte pas un versement à échéance, le créancier peut demander par écrit au débiteur de lui payer la somme due. Si le débiteur n'effectue pas le versement dans les dix jours de la demande, la totalité de la dette devient exigible et l'exécution est poursuivie.»

Alors, cet article reprend en substance le contenu des articles 982 et 995. Cependant, il s'en distingue en allongeant de 10 jours le délai d'exécution d'un jugement qui est prévu à l'article 992 actuel et en prévoyant, en matière de jugement rendu par défaut, un délai plus court que celui qui existe présentement, soit 10 jours. Alors, ces mesures visent à améliorer l'efficacité de la justice et à donner au débiteur condamné, après audition, le temps suffisant pour trouver une solution lui permettant de satisfaire le jugement rendu contre lui. Les modifications proposées assurent par ailleurs une concordance avec ceux qui sont prévus à l'article 568. Là-dessus, il n'y avait pas de recommandation de la part du Comité de révision, mais nous pensons que c'est une amélioration qui est apportée au régime.

n(10 h 40)n

Le Président (M. Lachance): L'article 986 est-il adopté?

Mme Lamquin-Éthier: M. le ministre, dans le texte, le deuxième paragraphe de l'article 936, on dit: «Le créancier peut demander par écrit au débiteur de lui payer la somme due.» Est-ce que cette demande-là ? je me souviens que c'étaient, je crois, les huissiers qui avaient soulevé cette question-là ? est-ce qu'elle est signifiée au débiteur? Le créancier fait sa demande comment?

M. Bégin: C'est parce que nous sommes, par hypothèse, dans un jugement qui ordonnait le paiement de la créance par versements, et c'était... ou encore il y a eu une entente entre le créancier et le débiteur, et là, tout à coup, il y a défaut d'exécuter. Donc, le créancier, à ce moment-là, peut demander par écrit... Est-ce que l'écrit veut dire un écrit signifié? Pas nécessairement, mais je pense que ce serait la façon sage de le faire. Est-ce que c'est nécessaire de l'indiquer...

Mme Lamquin-Éthier: C'est la question que je posais, oui.

M. Bégin: Parce que, dans le fond, c'est une demande qui lui est faite pour être capable, pour le créancier, d'aller, à défaut, à nouveau... de donner suite à ce second avis, de permettre l'exécution. Donc, ce sera une question de preuve que le créancier devra fournir. J'ai donné un avis, et il n'a pas donné suite, donc exécution.

Mme Lamquin-Éthier: Donc, théoriquement, cette demande-là devrait être signifiée au débiteur?

M. Bégin: Bien, ce serait l'idéal, mais ce n'est pas nécessaire parce que c'est une question de preuve.

Mme Lamquin-Éthier: O.K.

M. Bégin: Si j'envoie, par exemple, une lettre enregistrée à mon débiteur, disant: Écoutez, vous ne respectez pas l'entente, vous ne respectez pas le jugement...

Mme Lamquin-Éthier: En autant qu'il puisse faire la preuve qu'il a demandé le paiement.

M. Bégin: ...il va arriver au greffier, il va dire: Regardez ce que j'ai donné, puis je n'ai pas eu de paiement.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 986 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Article 987. M. le ministre.

M. Bégin:«Le jugement décide des frais, y compris des indemnités dues aux témoins, mais seulement quant à ceux qu'il indique, selon les tarifs en vigueur. Dans les cas de transfert, il décide des frais encourus avant la transmission du dossier pour qu'il soit continué suivant le présent livre.»

Alors, ça reprend en substance les articles 990 et 991 portant sur la condamnation aux frais. Il n'y avait rien, M. le Président, de recommandé dans le Comité de révision.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 987 est adopté?

Mme Lamquin-Éthier: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Article 988.

M. Bégin: Merci. «Dans toute action dont le montant est admissible à titre de petite créance et qui n'est pas instituée suivant le présent livre, le défendeur condamné par défaut de comparaître ou de contester, qui ne s'est pas prévalu de son droit au transfert de la cause, est tenu des frais du demandeur selon les règles applicables suivant les autres livres du Code.»

Cet article reprend encore une fois le contenu de l'actuel article 992 portant sur le remboursement des frais. Il n'y avait pas non plus de recommandation du Comité là-dessus.

Le Président (M. Lachance): L'article 988 est-il adopté?

Mme Lamquin-Éthier: Adopté, M. le Président.

De la rétractation du jugement

Le Président (M. Lachance): Adopté. L'article 989.

M. Bégin: 989. «Chapitre VI. De la rétractation du jugement.

«La partie condamnée par défaut...» Excusez, M. le Président, je...

(Consultation)

M. Bégin: Vous permettez, M. le Président? Je fais une demande de faire une vérification parce qu'il me semble que, de mémoire, on parle de la rétractation d'un jugement et non pas du jugement. Alors, pour le moment, je lis ce que j'ai.

«Chapitre VI. De la rétractation du jugement.

«La partie condamnée par défaut peut, si elle a été, par surprise, par fraude ou pour une autre cause jugée suffisante, empêchée de contester la demande en temps utile ou de comparaître à l'audience, demander que le jugement soit rétracté.

«Une partie peut aussi demander la rétractation du jugement dans les cas prévus par l'article 483 qui ne sont pas incompatibles avec l'application du présent livre.»

Une voix: ...

M. Bégin: Alors, on me dit, M. le Président, que, dans le Code actuel, aux Petites créances, c'est marqué «du jugement», mais, pour la rétractation de jugement, c'est bien marqué «rétractation de jugement».

Le Président (M. Lachance): Qu'est-ce qu'on fait?

M. Bégin: Alors, moi, je pense qu'on devrait mettre «de» pour être en concordance avec l'article 483.

Mme Lamquin-Éthier: ...

Le Président (M. Lachance): Donc, il y aurait un amendement.

M. Bégin: Aïe! comment ça se fait que vous n'aviez pas vu ça, vous autres?

Mme Lamquin-Éthier: ...intitulé dans le deuxième paragraphe.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bégin: Excusez, je taquine un peu les légistes, disant: Comment ça se fait que vous n'avez pas vu ça? Ha, ha, ha!

Mme Lamquin-Éthier: Ils en voient tellement. Donc, vous allez faire deux corrections, et pour l'intitulé et pour le deuxième paragraphe?

M. Bégin: Peut-être que ceci, dans le deuxième paragraphe, c'est peut-être à propos de le marquer, parce que là on parle d'un jugement spécifique, parce que là c'est ce jugement-là qui est en cause, tandis que le titre, lui, c'est pour l'ensemble de la rétractation des jugements et non pas de ce jugement.

Mme Lamquin-Éthier: O.K. De ce jugement dans le cas de...

M. Bégin: Oui.

Le Président (M. Lachance): Donc, il y aurait un amendement à l'article 989. Ça va se rédiger, on va le suspendre et puis on reviendra.

M. Bégin: Ça va. On va le...

Le Président (M. Lachance): C'est juste une question technique, là, très simple.

M. Bégin: ...simplement.

Le Président (M. Lachance): Très bien. Alors, l'article 989 est suspendu. L'article 990. M. le ministre.

M. Bégin:«990. La demande de rétractation est écrite et appuyée d'un affidavit. Elle doit être produite au greffe dans les 15 jours de la connaissance du jugement.

«Le juge ou le greffier examine la demande et décide de sa recevabilité; s'il accepte de la recevoir, l'exécution forcée est suspendue et le greffier avise les parties et les convoque à la date fixée pour la tenue d'une nouvelle audition, tant sur la demande de rétractation que sur le fond du litige.»

Alors, on reprend substantiellement l'article 987 qui porte sur la façon de faire une demande de rétractation de jugement. Il allonge toutefois de cinq jours le délai actuellement prévu pour la production de la demande afin de donner au débiteur une période de temps suffisante pour réagir et consulter un avocat s'il le désire. Donc, c'est au bénéfice de celui qui éventuellement pourra demander la rétractation de jugement parce que c'est des cas quand même relativement complexes pour demander une telle rétractation.

Le Président (M. Lachance): C'est... Oui?

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Le mémoire des huissiers... Dans leur mémoire, les huissiers avaient fait la suggestion que l'article précise que le greffier avise également l'huissier de justice qui a pratiqué la saisie, dans l'hypothèse où cet acte professionnel serait l'élément déclencheur de la demande de rétractation. Qu'en est-il de cette demande-là qui avait été faite par...

M. Bégin: Je dois dire que nous n'y avons pas donné suite par le texte que nous avons là. Mais il est évident, à mon point de vue, que, si l'objet même de la demande de la requête en rétractation du jugement était un acte qu'a posé l'huissier ou a mal exécuté, ça va aller de soi qu'on va le mettre en cause comme étant une des parties, puisqu'on dira: Voici, dans les faits, ce qu'il en est. Et automatiquement on va l'assigner comme étant une des parties qui sera avisée en tant que partie et non pas comme étant l'officier ayant agi. Alors, à ce moment-là, je pense qu'on va rencontrer l'objectif visé par la Chambre des notaires.

Mme Lamquin-Éthier: O.K., sans qu'il y ait modification à proprement parler dans le texte.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 990 est adopté?

Des voix: Adopté.

De l'exécution forcée des jugements

Le Président (M. Lachance): Adopté. L'article 991.

M. Bégin:«Titre III. De l'exécution forcée des jugements.

«991. L'exécution forcée des jugements rendus en matière de petites créances se fait suivant le titre II du livre IV, sous réserve des dispositions du présent titre.»

Alors, ça reprend en substance l'ancien article 993.

Le Président (M. Lachance): Cet article est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. L'article 991 est adopté. Article 992.

M. Bégin:«992. Le créancier peut s'adresser soit à un huissier, soit à un avocat pour faire exécuter le jugement; lorsqu'il est une personne physique, il peut également avoir recours aux services du greffier ou de la personne désignée par le ministre.»

Cette article-là, M. le Président, est de droit nouveau. Il prévoit la possibilité pour le créancier, à son choix, pour faire exécuter son jugement, de s'adresser à un huissier ou à un avocat et, lorsqu'il est une personne physique également, de s'adresser au greffier ou à une personne désignée par le ministre pour ce faire. Cet article vise à assurer au créancier une souplesse en matière d'exécution dans le choix de la personne qui effectuera le travail. C'est une recommandation, on dit, de conférer de nouveau au greffier le rôle. C'était une préoccupation de la députée de Bourassa hier sur l'aide qu'on pouvait apporter au créancier. Donc, ici, c'est le créancier qui détient un jugement, et je crois que c'est important qu'on réintroduise ce service au bénéfice des citoyens.

Mme Lamquin-Éthier: Et c'est d'ailleurs conforme avec une recommandation 6-57 du Comité de révision.

M. Bégin: Oui. Je l'ai. C'est ça, ils disaient de conférer de nouveau parce que ça avait existé, c'était disparu. On le réintroduit.

Le Président (M. Lachance): Très bien. Est-ce que l'article 992 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Article 993.

M. Bégin:«993. Les frais versés au greffier ou à la personne désignée par le ministre et les honoraires des huissiers et des avocats assumés par le créancier pour l'exécution du jugement peuvent être réclamés du débiteur dans les limites des tarifs prévus à ces fins; cette créance est immédiatement exigible du débiteur.»

Donc, ça reprend en substance le premier paragraphe du premier alinéa de l'article 993 actuel. Il assure la concordance avec 992 qui a été introduit par notre article 138, M. le Président, en matière d'exécution. Alors, il n'y avait pas de recommandation du Comité à cet égard.

Le Président (M. Lachance): L'article 993 est-il adopté?

Mme Lamquin-Éthier: M. le Président, dans le texte, dans l'avant-dernière ligne, on parle des tarifs qui sont prévus à cette fin. Donc, on comprend, j'imagine, que c'est le gouvernement qui va établir par règlement le tarif des honoraires des huissiers, assumés par le créancier et exigibles du débiteur.

M. Bégin: Ce sont des tarifs adoptés par le gouvernement, qui sont donc d'application générale à travers le Québec.

n(10 h 50)n

Mme Lamquin-Éthier: O.K. Et le gouvernement, lorsqu'il est question évidemment d'adopter le tarif des honoraires des huissiers, est-ce qu'il consulte le mémoire de la Chambre des huissiers?

M. Bégin: La procédure formelle et la procédure informelle, c'est évidemment: les groupes concernés sont toujours avisés, consultés. Il y a ensuite publication et prépublication, et il y a possibilité, pour les personnes concernées, de faire valoir des représentations, et éventuellement publication, avec corrections, s'il y a lieu.

Mme Lamquin-Éthier: O.K. Il y a une distinction cependant entre l'information et la consultation, mais on prend pour acquis que, habituellement...

M. Bégin: Il y a une consultation préalable. Ordinairement, ça se fait de concert.

Mme Lamquin-Éthier: O.K. Donc, ça pourrait rencontrer la préoccupation de la Chambre des huissiers qu'ils soient consultés.

M. Bégin: Souvent même c'est la Chambre qui nous soulève un problème, et on dit: Oui, on va lui donner suite, ou encore le Barreau, peu importe. Mais ce sont les usagers qui souvent font ressortir une problématique, et donc automatiquement les parties sont consultées.

Le Président (M. Lachance): Cet article est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Article 993, adopté. Article 994. M. le ministre, il y a un amendement.

M. Bégin: M. le Président, oui. Mais là il faudrait faire attention pour qu'on ne se perde pas, puisque nous avons eu dans nos documents un document 8,5 X 14 qui était l'amendement, que nous ne présenterons pas, il y a eu un autre document qui est un 8,5 X 11, que nous avons eu hier, qui était le texte que nous ne prendrons pas, et je viens de faire remettre un nouvel article 994. C'est pour donner suite à une demande du Barreau que tout ça existe. Alors, on est certains, M. le Président, qu'on s'est arrimés correctement, et je ferai donc la lecture de l'article pour être certain qu'on parle de la même chose. Ça va, M. le Président?

Le Président (M. Lachance): Très bien, M. le ministre.

M. Bégin: Alors, l'article 138: Remplacer l'article 994, proposé par l'article 138 du projet de loi, par l'article suivant:

«994. Les demandes incidentes relatives à l'exécution du jugement sont décidées suivant le présent livre. Elles sont présentées sur simple avis écrit au greffier. Le greffier en avise les parties et l'huissier sans délai. Il convoque les parties à la date fixée pour qu'il soit procédé à une audition.

«Toutefois, lorsque la valeur du bien faisant l'objet d'une procédure d'exécution est supérieure à 7 000 $, le tribunal peut ordonner que le dossier soit transféré pour que la procédure soit continuée suivant les autres livres du Code.»

M. le Président, on s'est entendus là-dessus, il n'y a plus de problème et c'est conforme à ce que je disais. Le Barreau, initialement, voulait qu'on parle de la chambre civile. Nous faisons disparaître graduellement cette utilisation du terme. Ça sera fait éventuellement à la Loi sur les tribunaux judiciaires. Donc, nous ne voulions pas l'introduire présentement, et là, finalement, on s'est entendus sur ce texte.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que cet amendement est adopté?

Des voix: Adopté.,

Le Président (M. Lachance): Adopté. Est-ce que l'article 994, tel qu'amendé, est adopté?

Des voix: Adopté.

Dispositions diverses

Le Président (M. Lachance): Adopté. Article 995.

M. Bégin:«Titre IV. Dispositions diverses.

«995. Sous réserve des dispositions du présent livre, les actes de procédure, les avis et les autres documents peuvent être notifiés ou signifiés aux parties, ou au greffier, le cas échéant, par tout mode de transmission approprié.»

Cet article, M. le Président, est de droit nouveau. Il prévoit le mode de notification ou de signification des actes de procédure, des avis et des autres documents en matière de recouvrement de la petite créance. En permettant que la notification ou la signification se fasse par tout mode de transmission approprié, le législateur favorise l'usage des technologies de l'information, dont la fiabilité est maintenant peut-être assurée, répondant ainsi à la modernisation recommandée, souhaitée par bien des gens. Donc, on évolue graduellement avec la solidité des transmissions par les techniques nouvelles.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que cet article est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Article 996.

M. Bégin:«Les actes de procédure pour lesquels le paiement de frais est prévu au tarif de frais judiciaires applicable ne peuvent être reçus par le greffier à moins que le paiement ne soit fait. Il est fait mention sur l'acte de la date de sa production ainsi que de la date et du montant du paiement. Toutefois, la personne qui démontre qu'elle reçoit des prestations en vertu d'un programme de protection sociale prévu à la Loi sur le soutien du revenu et favorisant l'emploi et la solidarité sociale (chapitre S-32.001) est dispensée du paiement de ces frais.

«Si l'introduction de la demande est refusée, la somme transmise avec la demande ou déposée auprès du greffier est remboursée au demandeur.»

Alors, cet article reprend le contenu des articles 989 et 989.1 actuels ainsi que des deuxième et troisième alinéas de l'article 989.2 qui portent sur les frais adjugés par jugement. Il n'y avait pas de recommandation du Comité de révision à cet égard. Ce sont des améliorations que nous apportons au système.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que cet article 996 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. 997. M. le ministre.

M. Bégin:«997. Le gouvernement peut, par règlement, établir:

«a) le tarif des frais judiciaires exigibles pour le dépôt ou la présentation des demandes et autres actes de procédure faits en vertu du présent livre, ainsi que le tarif des honoraires des huissiers et des avocats exigibles du débiteur;

«b) les conditions auxquelles un médiateur doit satisfaire pour être accrédité;

«c) les règles et les obligations auxquelles doit se conformer un médiateur accrédité dans l'exercice de ses fonctions, de même que les sanctions applicables en cas de manquement à ces règles et obligations;

«d) le tarif des honoraires payables par le service de médiation à un médiateur accrédité et le nombre maximum de séances pour lesquelles un médiateur peut recevoir des honoraires pour une même demande.»

Alors, cet article reprend en substance le contenu du premier alinéa de l'actuel article 989.2. Il confie également au gouvernement le pouvoir d'établir le tarif des frais judiciaires exigibles dans certains cas et des honoraires judiciaires payables au médiateur, ainsi que les règles et obligations auxquelles il doit se conformer et les conditions pour être accrédité. Il n'y avait pas de recommandation du rapport du Comité de révision là-dessus. Ça va?

Le Président (M. Lachance): L'article 997 est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Article 998.

M. Bégin:«998. Toute disposition des autres livres du présent Code compatible avec celles du présent livre s'applique au recouvrement des petites créances.»

Alors, ça reprend l'article 996 actuel. Il n'y avait pas de recommandation du Comité.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que cet article est adopté?

Des voix: Adopté.

Mme Lamquin-Éthier: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Bon. Alors là, maintenant, ça termine toute la série d'articles introduits par l'article 138, mais, comme nous avons suspendu l'article 989 pour remplacer le «du» par le «de», on ne peut pas adopter immédiatement l'article 138 qui introduit tout ces articles, alors...

M. Bégin: On me dit qu'il est à la photocopie.

Le Président (M. Lachance): Oui? Bon. Alors, on le fera un peu plus tard.

M. Bégin: Deux minutes. Deux minutes probablement. On va faire l'article, si vous permettez.

Le Président (M. Lachance): Alors, nous allons suspendre quelques instants.

M. Bégin: O.K.

(Suspension de la séance à 10 h 57)

(Reprise à 11 h 1)

De la procédure

De la rétractation du jugement (suite)

Le Président (M. Lachance): À l'ordre! Nous allons reprendre les travaux de la commission. Alors, c'est, M. le ministre, l'amendement en question à l'article 989, mais c'est plutôt dans l'intitulé.

M. Bégin: Exactement, M. le Président. Alors, j'ai fait distribuer l'article 138 qui a été modifié dans son intitulé. Dans l'intitulé du chapitre VI proposé par l'article 138 du projet de loi, remplacer le mot «du» par le mot «de».

Le Président (M. Lachance): Est-ce que cet amendement est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté.

M. Bégin: Est-ce qu'on réadopte l'article, M. le Président?

Le Président (M. Lachance): Oui, M. le ministre. On ne prendra pas le risque d'échapper ça. Alors, est-ce que l'article 138, tel qu'amendé, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté.

Une voix: ...

Le Président (M. Lachance): Oui, effectivement, vous avez raison. L'article 989, on l'avait suspendu. Est-ce que l'article 989 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Alors, je reviens. Est-ce que l'article 138, tel qu'amendé, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le recours collectif

Dispositions introductives

Le Président (M. Lachance): Adopté. Article 139. Il y a un amendement.

M. Bégin: Excusez, M. le Président, je me trompais. C'est 999, hein? O.K. J'étais à 994.

Le Président (M. Lachance): L'article 139.

M. Bégin: Voilà. À l'article 139 du projet de loi:

1° remplacer le paragraphe 1° par le suivant:

1° par le remplacement du paragraphe c par le suivant:

«c) "membre": une personne physique, une personne morale de droit privé, une société ou une association faisant partie d'un groupe pour le compte duquel elle exerce ou entend exercer un recours collectif;»;

2° remplacer, dans la première ligne de l'alinéa proposé par le paragraphe 2°, ce qui suit: «Sous réserve de l'article 1048, une personne morale, une société ou une» par ce qui suit: «La personne morale de droit privé, la société ou l'»;

3° remplacer, dans la troisième ligne de l'alinéa proposé par le paragraphe 2°, le mot «demande» par les mots «requête pour autorisation»;

4° remplacer, dans la quatrième ligne de l'alinéa proposé par le paragraphe 2°, le mot «cinq» par le nombre «50»;

5° supprimer la dernière phrase de l'alinéa proposé par le paragraphe 2°.

M. le Président, compte tenu des nombreux amendements, je pense qu'on devrait lire le texte tel qu'il serait amendé, pour la compréhension de tout le monde.

«999. Dans le présent livre, à moins que le contexte n'indique un sens différent, on entend par:

«a) "jugement": un jugement du tribunal;

«b) "jugement final": le jugement qui dispose des questions de droit ou de fait traitées collectivement;

«c) "membre": une personne physique, une personne morale de droit privé, une société ou une association faisant partie d'un groupe pour le compte duquel elle exerce ou entend exercer un recours collectif;

«d) "recours collectif": le moyen de procédure qui permet à un membre d'agir en demande, sans mandat, pour le compte de tous les membres.

«La personne morale de droit privé, la société ou l'association ne peut être membre d'un groupe que si, en tout temps, au cours de la période de 12 mois qui précède la requête pour autorisation, elle comptait sous sa direction ou sous son contrôle au plus 50 personnes liées à elle par contrat de travail et qu'elle n'est pas liée avec le représentant du groupe.»

Alors, ce que vous pouvez voir, M. le Président, c'est que, lors de nos audiences particulières, nous avons entendu une demande faite par un avocat dont j'oublie le nom ? il s'appelle David...

Mme Lamquin-Éthier: Il s'appelle Éric McDevitt David.

M. Bégin: ...bon, Me David ? et qui nous demandait ce que nous retrouvons ici, à la nuance près qu'on voulait le faire... Non, c'était ça. En fait, il voulait pouvoir prendre un recours de 50 employés et moins, il voulait être à la fois représentant et... On va le faire à 1048, mais là il est membre ici et représentant à 1048 qu'on verra plus loin. Donc, on accorde ça.

La seule nuance: ce serait plus facile à dire en le prenant par la négative, c'est qu'ils n'auront pas accès au fonds qui sert à subventionner ou à aider les groupes qui... Alors, on retrouvera cette même disposition à 1048. Donc, je pense, M. le Président, que ça rencontre substantiellement les recommandations qui étaient faites par le Comité, sa recommandation 6-60.

Mme Lamquin-Éthier: Oui, puis, lors de sa présentation, Me Éric McDevitt David avait également précisé, là, qu'ils étaient d'accord en ce qui avait trait au fonds d'aide pour l'unité... C'est confirmé. J'imagine que vous avez reçu copie de mon...

Le Président (M. Lachance): Est-ce que cet amendement est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Est-ce que l'article 139, tel qu'amendé, est adopté?

Des voix: Adopté.

L'autorisation d'exercer
le recours collectif

Le Président (M. Lachance): Adopté. Article 140. M. le ministre, il y a un amendement.

M. Bégin: Oui, M. le Président. Remplacer l'article 140 du projet de loi par l'article suivant:

140. L'article 1002 de ce Code est modifié:

1° par la suppression, dans les troisième et quatrième lignes du second alinéa, de ce qui suit: «; ses allégations sont appuyées d'un affidavit»;

2° par l'ajout, à la fin du second alinéa et après le mot «collectif», de ce qui suit: «; elle ne peut être contestée qu'oralement et le juge peut permettre la présentation d'une preuve appropriée».

Alors, ça vise à corriger une erreur dans le projet de loi. La demande d'autorisation visée à l'article 1002 n'est pas une demande introductive d'instance, mais une demande d'autorisation d'exercer un recours collectif. Donc, c'est une correction technique qui est faite.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que cet amendement est adopté?

Mme Lamquin-Éthier: Juste un moment, M. le Président.

M. Bégin: ...mauvaise terminologie, et on la corrige.

Mme Lamquin-Éthier: O.K. C'est donc...

M. Bégin: C'est vraiment une correction, là, d'une erreur qui avait été commise.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'amendement est adopté?

Mme Lamquin-Éthier: Oui, adopté, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Est-ce que l'article 140, tel qu'amendé, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Article 141. Il y a un amendement.

M. Bégin: Oui. Supprimer l'article 141 du projet de loi.

Ça vise à assurer la concordance avec le nouvel article 9 qui était introduit par l'article 1 du projet de loi tel qu'amendé, qui ne distingue plus les délais de rigueur des délais impératifs.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que cet amendement est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Est-ce que l'article 141, tel qu'amendé, est adopté?

Mme Lamquin-Éthier: Adopté.

Déroulement du recours

Le Président (M. Lachance): Adopté. Article 142. Il y a un amendement.

M. Bégin: Supprimer l'article 142 du projet de loi.

Alors, vu la nature du recours collectif, il est important de maintenir l'autorisation du tribunal pour permettre aux représentants d'amender un acte de procédure.

Le Président (M. Lachance): L'amendement est-il adopté?

Mme Lamquin-Éthier: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Adopté. L'article 142, tel qu'amendé, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Article 143. Il n'y a pas d'amendement.

M. Bégin: Alors, oui, M. le Président, vous avez ce texte? Oui? Alors, remplacer l'article 1025 proposé par l'article 143 du projet de loi par le suivant:

«1025. L'avis contient les renseignements suivants:

«a) le fait qu'une transaction...»

Mme Lamquin-Éthier: Excusez-moi de vous arrêter dans votre lancée.

Une voix: 143, il n'y a pas d'amendement.

M. Bégin: Ah! Il semble bien que vous ne l'ayez pas eu, madame.

Mme Lamquin-Éthier: Ah! O.K. Il n'y a donc pas d'amendement, M. le Président?

M. Bégin: Oui, c'est ça, ici.

Mme Lamquin-Éthier: Ah! Donc, je ne l'ai pas.

M. Bégin: C'est ça, il est en train de le distribuer. Je croyais que vous l'aviez. Pendant qu'on attend, là, je vous signale que ceci a été convenu avec le Barreau parce qu'il y avait des termes, là, qui étaient «convention d'honoraires»...

Mme Lamquin-Éthier: Bien, je ne vois pas, là. Vous êtes un peu loin, Me Vadboncoeur. Je suis myope. Excusez-moi.

(Consultation)

Le Président (M. Lachance): Ça va? Alors, M. le ministre, si vous voulez expliquer.

M. Bégin: Il va falloir vous acheter des verres, là, vous. La coquetterie n'est pas toujours bonne conseillère.

Mme Lamquin-Éthier: Bien, je n'en veux pas, j'aime mieux rester dans le flou.

M. Bégin: Ha, ha, ha! On ne vous demandera pas sur quoi vous précisez.

Mme Lamquin-Éthier: Les hommes sont tous beaux quand on est... Tous les hommes sont beaux quand c'est un peu flou.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bégin: Oyoyoye! Aïe, Marc, tu viens d'avoir un compliment. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Lachance): M. le ministre, l'amendement, s'il vous plaît.

M. Bégin: Alors, je vais reprendre, M. le Président. Remplacer l'article 1025 proposé par l'article 143 du projet de loi par le suivant:

«1025. L'avis contient les renseignements suivants:

«a) le fait qu'une transaction sera soumise au tribunal pour approbation à une date et à un lieu déterminés;

«b) la nature de la transaction et le mode d'exécution prévu;

n(11 h 10)n

«c) la procédure que suivront les membres pour prouver leur réclamation;

«d) le fait que les membres peuvent faire valoir au tribunal leurs prétentions sur la transaction proposée et sur la disposition du reliquat, le cas échéant.»

Mme Lamquin-Éthier: Autrement dit, la convention d'honoraires.

M. Bégin: Oui, c'est ça. Alors, ça a été convenu, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que cet amendement est adopté?

Des voix: Adopté.

Mme Lamquin-Éthier: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Est-ce que l'article 143, tel qu'amendé, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le jugement

Le recouvrement collectif

Le Président (M. Lachance): Adopté. Article 144. M. le ministre.

M. Bégin: 144. L'article 1032 de ce Code est modifié:

1° par l'ajout, dans le premier alinéa et après le mot «greffe», des mots «ou auprès d'un établissement financier exerçant son activité au Québec»;

2° par l'ajout, après le premier alinéa, du suivant:

«Lorsque le tribunal ordonne le dépôt auprès d'un établissement financier, les membres bénéficient alors des intérêts sur les montants déposés.»

Ça vise à permettre au tribunal d'ordonner le dépôt du montant établi par le jugement dans une banque ou toute autre institution autorisée à recevoir des dépôts d'argent. C'est conforme à une recommandation du Comité.

Mme Lamquin-Éthier: Ah! C'est laquelle, celle-là?

M. Bégin: 6-73.

Mme Lamquin-Éthier: Parfait.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que cet article est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Article 145.

M. Bégin: Ce Code est modifié par l'insertion, après l'article 1033, du suivant:

«1033.1. Le tribunal peut également désigner un tiers pour effectuer la liquidation des réclamations individuelles ou la distribution des montants accordés par jugement à chacun des membres et déterminer sa rémunération.

«La distribution des montants accordés par le jugement ou convenus par transaction homologuée s'effectue sous le contrôle du tribunal.»

C'est un article de droit nouveau. En matière de recours collectif, les parties font fréquemment appel à des tiers pour procéder à la distribution des sommes allouées par le jugement ou encore convenues dans une transaction approuvée par le tribunal. Cette modification-là, outre de donner au tribunal la possibilité de désigner un tiers pour procéder à la liquidation ou à la distribution des sommes accordées aux membres, lui permet aussi d'autoriser la rémunération que le tiers touche et d'en fixer la modalité. Donc, c'est une bonification, et ça, c'était une recommandation aussi du Comité.

Le Président (M. Lachance): Cet article est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Mme Lamquin-Éthier: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Article 146.

M. Bégin: 146. L'article 1035 de ce Code est modifié par l'ajout, dans le paragraphe 1 et après le mot «avis», de ce qui suit: «,et la rémunération visée à l'article 1033.1».

Il n'y avait pas de recommandation, mais ça prévoit le rang où seront collectés la rémunération du tiers et ses frais. Ça assure une concordance avec le nouveau principe qui a été énoncé à 1033.1 tel qu'il était introduit par l'article précédent.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 146 est adopté?

Des voix: Adopté.

Dispositions diverses

Le Président (M. Lachance): Adopté. Article 147. Il y a un amendement.

M. Bégin: Oui, M. le Président. À l'article 1046 proposé par l'article 147 du projet de loi:

1° ajouter, dans la cinquième ligne du premier alinéa proposé et après le mot «publication», ce qui suit: «et, s'il le juge opportun, la diffusion»;

2° ajouter, dans la première ligne du second alinéa proposé et après le mot «publication», les mots «ou la diffusion»;

Alors, c'est une demande du Barreau. Ces avis-là jouent un rôle primordial en matière de recours collectif. Il est donc important de permettre aussi des diffusions des avis, puisque le terme «publication» aurait pu être interprété comme étant limité à un écrit. Alors, c'est une demande de précision, que nous avons apportée à la demande du Barreau.

Le Président (M. Lachance): Oui, Mme la députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. M. le ministre, vous vous souviendrez que, lorsque nous avons entendu Me Éric McDevitt David, il avait soulevé ? et ça, ça concerne la première ligne de 1046: «Un avis doit être donné aux membres.» Et, un petit peu plus loin, on dit: «L'avis indique la description du groupe ainsi que le nom et l'adresse de chacune des parties.» Il avait fait la suggestion qu'on puisse inclure ou l'adresse des parties ou de leurs procureurs et il se demandait s'il y avait une raison de ne pas permettre, dans le texte, l'inclusion de l'article... c'est-à-dire l'adresse des procureurs, et il avait même fait état de menaces qui avaient été faites à des parties, et il croyait préférable...

M. Bégin: Mme la députée, vous avez parfaitement raison. Je ne me souvenais pas, mais, en vous entendant parler, ça me revient, et, effectivement, il n'y avait pas d'objection, à ce qu'il me semble, à ce moment-là. Je propose, M. le Président que, effectivement, nous bonifiions le texte en disant également «un avis au procureur». Alors, je demanderais de suspendre l'étude de l'article, et nous le reprendrons dès que nous aurons la modification souhaitée. Ça vous va?

Le Président (M. Lachance): Très bien. Alors, nous allons suspendre l'étude de l'article 147. 148. M. le ministre.

M. Bégin: 148. L'article 1050.1 de ce Code est modifié par le remplacement du second alinéa par le suivant: «L'honoraire spécial prévu...»

Le Président (M. Lachance): Excusez-moi, c'est moi...

M. Bégin: Oups! Excusez-moi, il y a un amendement, là. Excusez-moi.

Le Président (M. Lachance): Il y a un amendement, un nouvel article, 147.1.

M. Bégin: Excusez. Insérer, après l'article 147 du projet de loi, l'article suivant:

147.1. L'article 1048 de ce Code est modifié:

1° par le remplacement du premier alinéa par le suivant:

«Une personne morale de droit privé, une société et une association comme définies au deuxième alinéa de l'article 999 peut demander pour elle le statut de représentant si:»;

2° par l'ajout, à la fin, de l'alinéa suivant:

«Hormis une personne morale régie par la partie III de la Loi sur les compagnies (chapitre C-38), une coopérative régie par la Loi sur les coopératives (chapitre C-67.2) ou une association de salariés au sens du Code du travail (chapitre C-27), une personne morale de droit privé, une société ou une association ne peut en aucun cas obtenir l'aide financière du Fonds d'aide aux recours collectifs pour exercer son recours.»

Je pense que c'est ce que nous avons déjà discuté. Ça les exclut à ce niveau-là.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que cet amendement est adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 147.1 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Article... Voyons! On y vient. Article 148.

M. Bégin: Il y a un amendement, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Oui.

M. Bégin: À l'article 148 du projet de loi, remplacer, dans les troisième, quatrième et sixième lignes de l'alinéa proposé, les mots «Fonds d'aide au recours collectif» par les mots «Fonds d'aide aux recours ? pluriel ? collectifs».

Donc, c'est un changement du singulier au pluriel. C'est d'ordre grammatical comme changement, alors... C'est que l'appellation a changé. Avant, c'était «du Fonds d'aide» dans la Loi sur le recours collectif. Alors, c'est pour harmoniser, mais ce n'est pas plus que ça.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que cet amendement est adopté?

Mme Lamquin-Éthier: Avant, c'était «sur le recours», puis là c'est...

M. Bégin: C'était «au Fonds d'aide au recours collectif», mais au singulier.

Mme Lamquin-Éthier: Oui, oui. Ah! Donc, on sous-entendait... O.K.

Le Président (M. Lachance): Alors, l'amendement est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Est-ce que l'article 148, tel qu'amendé, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Alors, 148, tel qu'amendé, est adopté. Article 149.

M. Bégin: Ce Code est modifié par l'insertion, après l'article 1050.1, du suivant:

«1050.2. Un registre central des demandes d'autorisation d'exercer un recours collectif est tenu au greffe de la Cour supérieure, sous l'autorité du juge en chef.»

C'est une recommandation qui avait été faite par le Comité. Je pense que ça fait l'unanimité.

Le Président (M. Lachance): Oui, Mme la députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: M. le Président, M. le ministre se souviendra également que Me Éric McDevitt David, lors de l'audition, avait fait la suggestion que le registre central contienne également les avis publiés dans les journaux, les avis qui sont transmis aux membres. Alors, ici, le texte ne fait pas référence...

M. Bégin: M. le Président, j'ai des réserves. J'ai entendu ça, mais là, vraiment, j'ai des réserves parce qu'un registre, c'est pour tenir compte des demandes d'autorisation, que tout le monde sache... Quant au contenu de chacun des recours, je pense que, sachant que...

Mme Lamquin-Éthier: ...avis publiés, pas le contenu des demandes.

M. Bégin: Je sais, mais, quand il y a le registre, c'est celui qui indique les demandes. Automatiquement, par le registre central, on va savoir qu'il y a un recours collectif dans le district, mettons, de Chicoutimi. À partir de là, la personne pourra référer les avis comme tels.

Autrement dit, ce n'est pas un exercice de facilitation pour prendre connaissance du contenu de chacun des avis qui sont au Québec, mais c'est de dire à une partie qui est à Montréal ou à Québec: Oui, il y a un recours, il est à Chicoutimi, district untel, numéro untel. Si vous voulez avoir les avis, adressez-vous au tribunal ou à la juridiction de Chicoutimi, parce que, autrement, le registre, on va en faire quasiment le contenu de tout ce qui existe à travers le Québec. Ce n'est pas l'objectif du registre du tout, du tout. Faciliter le travail des parties, oui, mais pas le faire à leur place non plus.

Mme Lamquin-Éthier: Alors, la suggestion de Me David, c'était que ledit registre inclue les avis aux membres pour que ce soit contenu au registre.

M. Bégin: Mais là-dessus on n'est pas d'accord.

Mme Lamquin-Éthier: O.K.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 149 est adopté?

M. Bégin: Adopté.

Mme Lamquin-Éthier: Sur division.

Le Président (M. Lachance): Adopté sur division. Article 150. Il y a un amendement.

M. Bégin: Supprimer l'article 150 du projet de loi.

Alors, c'est une erreur qui s'était glissée. La référence aux articles 382 à 394 du Code est toujours utile, donc on l'avait supprimée inutilement.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que cet amendement est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Est-ce que l'article 150, tel qu'amendé, est adopté?

M. Bégin: Adopté.

Annexes

Le Président (M. Lachance): Adopté. Article 151.

M. Bégin: 151. Le Livre X de ce Code est abrogé.

Alors, on abroge le Livre X du Code portant sur les annexes, puisque les avis compris actuellement dans ces annexes seront déterminés par le ministre de la Justice pour faciliter les éventuels ajustements postérieurs. Nous avons déjà eu la discussion à cet égard.

n(11 h 20)n

Mme Lamquin-Éthier: O.K. Alors, nous maintenons l'argumentation qui avait été offerte. C'est dommage que ça ne fasse plus partie intégrante du Code de procédure, et ce, dans le meilleur intérêt. Donc c'est sur division.

Autres dispositions modificatives

Le Président (M. Lachance): Alors, l'article 151 est adopté sur division. Article 152, et il y a un amendement.

M. Bégin: Oui. Remplacer l'article 152 du projet de loi par l'article suivant:

152. Ce Code est modifié par le remplacement, partout où il se trouve, dans les articles 112 à 115, 123, 143, à l'intitulé du chapitre II qui suit l'article 146.3 et dans les articles 756, 822 et 822.1, du mot «déclaration» par les mots «requête introductive d'instance». Vraiment, c'est des corrections qui...

Le Président (M. Lachance): Cet amendement est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Est-ce que 152, tel qu'amendé, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Article 153. Un amendement.

M. Bégin: Supprimer l'article 153 du projet de loi.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que cet amendement est adopté?

Mme Lamquin-Éthier: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Est-ce que 153, tel qu'amendé, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. 154, et il y a un amendement.

M. Bégin: Deux secondes, M. le Président.

Mme Lamquin-Éthier: ...l'article 154?

Le Président (M. Lachance): Oui, 154.

M. Bégin: Alors, 154, c'est: Supprimer l'article 154 du projet de loi.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que cet amendement est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Est-ce que l'article 154, tel qu'amendé, est adopté? Je comprends que c'est adopté. Nous en sommes à l'article 155.

Mme Lamquin-Éthier: 155, oui.

Le Président (M. Lachance): Oui?

Dispositions générales

Les tribunaux

Des pouvoirs des tribunaux
et des juges (suite)

M. Bégin: Oh! M. le Président, compte tenu de ce que nous venons d'adopter à 154 ? c'était une question de révision terminologique ? nous avons adopté au tout début un amendement qui était 6.1. Compte tenu de ce que nous venons de faire, il serait approprié de ne pas avoir adopté cet amendement-là. Je ne sais pas si vous me comprenez, M. le Président. Autrement dit, je proposerais qu'on revienne à l'article 6.1 du début de nos travaux et nous retirions...

Le Président (M. Lachance): On va attendre un petit peu, M. le ministre.

M. Bégin: ... ? oui ? nous retirions l'amendement que nous avons adopté.

Mme Lamquin-Éthier: ...

M. Bégin: Vous l'avez déjà.

Mme Lamquin-Éthier: Donc, la Chambre des notaires...

Le Président (M. Lachance): Alors, je comprends que vous faites référence à l'amendement à l'article 154, M. le ministre. Est-ce que c'est ça?

M. Bégin: Non, c'était l'article 53.1.

Le Président (M. Lachance): On ne se comprend pas, là, M. le ministre.

M. Bégin: Si vous permettez, M. Frenette pourrait nous donner le...

Le Président (M. Lachance): Oui. Me Frenette.

M. Frenette (Aldé): C'est que là, 154, on prévoyait l'omnibus qui remplaçait les «requérants intimés» par «demandeurs défendeurs». Ça, c'est toujours utile pour distinguer, en cours d'instance... Le demandeur peut devenir intimé, et le défendeur peut devenir requérant. Sauf qu'il y en a un qui était oublié dans la liste, et au début on l'a introduit à l'article 6.1 pour modifier l'article 53. Celui-là a été déposé, mais, comme on retire 154, il faut retirer le 6.1, l'amendement 6.1.

M. Bégin: En fait, on a fait quelque chose qu'on n'aurait pas dû faire.

Le Président (M. Lachance): À quel endroit qu'on l'a fait?

M. Bégin: À l'article 6.1, au tout début de nos travaux.

Le Président (M. Lachance): Bon bien là, si vous voulez, on va revenir...

M. Bégin: C'est que je proposais, M. le Président, que nous revenions à...

Le Président (M. Lachance): Mais je comprends que 153 et 154, c'est adopté tel qu'amendé. Ça, ça va?

M. Bégin: Oui, ça va bien.

Le Président (M. Lachance): Alors là on revient...

M. Bégin: À 6.1.

Le Président (M. Lachance): ...au début du projet de loi, à l'article?

M. Bégin: Je vais lire comment il se lisait.

Le Président (M. Lachance): 6.1 qui est un nouvel article qui a été ajouté.

M. Bégin: C'est ça.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que là, maintenant, vous...

M. Bégin: On l'enlèverait. C'était: Insérer, après l'article 6 du projet de loi, l'article suivant:

6.1. L'article 53.1 de ce Code est modifié par le remplacement, dans le second alinéa, des mots «L'intimé» par les mots «Le défendeur».

Alors, on veut retirer cet amendement-là. Je pense qu'on va garder le problème dans son ensemble, et on le réglera dans son ensemble et non pas un morceau puis pas l'autre.

Le Président (M. Lachance): Très bien. Est-ce que...

M. Bégin: Est-ce que ça va?

Le Président (M. Lachance): Est-ce que c'est... Ça va? Oui? M. le secrétaire, est-ce que ça va aussi?

Le Secrétaire: ...

Loi sur l'accès aux documents
des organismes publics et sur la protection
des renseignements personnels

Le Président (M. Lachance): Très bien. Alors, c'est fait, 6.1 est retiré, et nous revenons à l'article 155, qui n'a pas été adopté.

M. Bégin: Ce ne sera pas long, M. le Président, j'y arrive.

Le Président (M. Lachance): Auparavant, M. le ministre... Ah! D'accord. C'est beau. 155.

M. Bégin: Ça, c'est fait. 155, oui. Est-ce que je peux y aller?

Le Président (M. Lachance): Oui.

M. Bégin: L'article 146.1 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels est modifié par la suppression du dernier alinéa.

Alors, ça vise à assurer la concordance avec la suppression des articles 266 à 269 du Code, que nous avons adoptée par l'article 51 du projet de loi. Ça parlait de péremption en instance, M. le Président, pour nous rappeler de quoi il s'agissait, là.

Le Président (M. Lachance): Très bien. Alors, est-ce que cet article est adopté?

Des voix: Adopté.

Loi sur les cités et villes

Le Président (M. Lachance): Adopté. Article 156.

M. Bégin: L'article 348.2 de la Loi sur les cités et villes est modifié par le remplacement, dans le second alinéa, des mots «les articles 762 à 773 du» par les mots «les règles applicables à la procédure ordinaire prévues au».

Alors, ça modifie l'article de la Loi sur les cités et les villes afin d'assurer la concordance avec l'article 98 du projet de loi, qui abrogeait les articles 762 à 773 du Code, devenus inutiles en raison de l'introduction au Code de la requête introductive d'instance comme mode procédural unique. C'est vraiment, M. le Président, des articles de concordance, là. Il n'y a pas de contenu là-dedans.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 156 est adopté?

M. Bégin: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Mme la députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: Oui, adopté, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Article 157.

M. Bégin: L'article 348 de cette loi ? donc, on revient à la loi qui est la Loi sur les cités et villes ? est modifié par le remplacement, dans le premier alinéa, des mots «selon les règles prévues aux articles 762 à 773 du» par les mots «selon les règles applicables à la procédure ordinaire prévues au».

Alors, ça modifie l'article pour assurer la concordance encore une fois avec l'article 98. On a l'impression de lire le même article deux fois.

Le Président (M. Lachance): Oui. Est-ce que cet article 157 est adopté?

Des voix: Adopté.

Mme Lamquin-Éthier: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Article 158. M. le ministre.

M. Bégin: L'article 397 de cette loi est modifié par le remplacement des mots «particulières des articles 763 à 773 du» par les mots «applicables à la procédure ordinaire au».

Encore une fois, c'est de la concordance avec la Loi des cités et villes, ou de la Loi des cités et villes avec le Code de procédure, là.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que cet article 158 est adopté?

Des voix: Adopté.

Code des professions

Le Président (M. Lachance): Adopté. Article 159.

M. Bégin: L'article 3.1 du Code des professions est modifié par le remplacement de «94.5» par «94.6».

Évidemment, vous comprenez que c'est une question de concordance, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): L'article 159 est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Mme Lamquin-Éthier: Adopté, M. le Président.

Code municipal du Québec

Le Président (M. Lachance): Adopté. Article 160.

M. Bégin: L'article 437.4 du Code municipal du Québec est modifié par le remplacement, dans le second alinéa, des mots «les articles 762 à 773 du» par les mots «les règles applicables à la procédure ordinaire prévues au».

Encore une fois, c'est assurer la concordance avec le Code municipal et le Code de procédure civile.

Le Président (M. Lachance): Cet article est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Article 161.

M. Bégin: L'article 437.5 de ce Code est modifié par le remplacement ? «de ce Code», c'est le Code municipal, M. le Président ? est modifié par le remplacement, dans le premier alinéa, des mots «prévues aux articles 762 à 773 du» par les mots «applicables à la procédure ordinaire prévues au».

Nous avons déjà adopté un texte semblable pour la Loi des cités et villes.

Le Président (M. Lachance): L'article 161 est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Article 162.

M. Bégin: L'article 690 de ce Code est modifié par le remplacement, dans le premier alinéa, des mots «suivant les règles particulières des articles 763 à 773 du» par les mots «selon les règles applicables à la procédure ordinaire prévues au».

Alors, c'est encore une question de concordance, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Cet article 162 est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Loi sur les cours municipales

Le Président (M. Lachance): Adopté. L'article 163.

M. Bégin: L'article 80 de la Loi sur les cours municipales est modifié par le remplacement de «1 000 $» par «7 000 $».

C'est la juridiction de la cour municipale qui, à sa juridiction, est augmentée à 7 000 $.

Mme Lamquin-Éthier: Sur division, étant entendu que les citoyens... C'est une augmentation qui est extrêmement substantielle, ça passe de 1 000 à 7 000. Alors, malheureusement, ce sont les citoyens qui vont être pénalisés.

Loi sur les élections scolaires

Le Président (M. Lachance): Alors, l'article 163 est adopté sur division. Article 164.

M. Bégin: L'article 179 de la Loi sur les élections scolaires est modifié par le remplacement des mots «aux règles du chapitre I du titre II du livre V du» par les mots «aux règles applicables à la procédure ordinaire prévues au».

Encore une question de concordance, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Cet article est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Loi sur la protection des renseignements
personnels dans le secteur privé

Le Président (M. Lachance): Article 165. M. le ministre.

M. Bégin: L'article 60 de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé est modifié par la suppression du second alinéa.

C'est une concordance avec l'article 51 du projet de loi, qui abroge les articles 266 à 269 ? CPC ? relatifs à la péremption d'instance.

n(11 h 30)n

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 165 est adopté?

Mme Lamquin-Éthier: Adopté, M. le Président.

Loi sur la Régie du logement

Le Président (M. Lachance): Adopté. À l'article 166, il y a un amendement.

M. Bégin: Oui, M. le Président. Remplacer, dans la troisième ligne de l'article 166 du projet de loi, le nombre «993» par le nombre «994».

C'est un oubli qui s'était produit, puisque le titre De l'exécution forcée des jugements comprend les articles 991 à 994. Une correction.

Le Président (M. Lachance): Cet amendement est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Est-ce que l'article 166, tel qu'amendé, est adopté?

Des voix: Adopté.

Loi sur le régime de retraite des employés
du gouvernement et des organismes publics

Le Président (M. Lachance): Adopté. Il y a un nouvel article, 166.1. M. le ministre.

M. Bégin: Insérer, après l'article 166 du projet de loi, l'article suivant.

Mme Lamquin-Éthier: Un instant.

M. Bégin: Oh! pardon.

Mme Lamquin-Éthier: Excusez-nous, là. O.K.

M. Bégin: Donc, insérer après l'article 166 du projet de loi, l'article suivant:

166.1 L'article 137.0.1 de la Loi sur le régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics, (L.R.Q., chapitre R-10) est modifié par le remplacement, dans le second alinéa, de «94.5» par «94.6».

Vous comprendrez, M. le Président, que c'est une correction de concordance.

(Consultation)

Mme Lamquin-Éthier: Concordance. Adopté.

Le Président (M. Lachance): Alors, 166.1 est adopté... cet amendement est adopté. Le nouvel article 166.1 est adopté?

Des voix: Adopté.

Dispositions transitoires et finales

Le Président (M. Lachance): Article 167. Il y a un amendement.

M. Bégin: Oui, M. le Président. Remplacer l'article 167 du projet de loi par l'article suivant:

167. Les dispositions de l'article 2 n'ont pas d'effet à l'égard des causes pendantes en première instance le 1er janvier 2003, ni à l'égard des jugements déjà rendus à cette date et dont les délais d'appel ne sont pas expirés.

M. le Président, c'est un article important malgré son apparence anodine. Ça a fait l'objet d'une discussion avec le Barreau hier. Je ne partageais pas ce qui était dans le projet de loi, mais je partageais ce que le Barreau disait, à savoir que les dossiers qui sont introduits au moment de l'adoption du projet de loi vont pouvoir bénéficier, tout comme les dossiers qui sont introduits après le 1er janvier 2003, des mêmes droits d'appel, par exemple, qui sont accordés. Inversement, ça a pour conséquence que ce qui ne sera plus permis là reste encore possible actuellement. Alors, c'est pour protéger les droits nés des personnes qui ont agi ou qui sont en voie d'agir avant l'entrée en vigueur du projet de loi.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que cet amendement est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Est-ce que l'article 167, tel qu'amendé, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Il y a un nouvel article, 167.1. M. le ministre.

M. Bégin: L'article 167.1, M. le Président?

Le Président (M. Lachance): Oui.

M. Bégin: Insérer, après l'article 166 du projet de loi, l'article suivant:

167.1 Les dispositions de l'article 3 s'appliquent aux causes pendantes en première instance le 1er janvier 2003 et aux jugements déjà rendus à cette date et dont les délais d'appel ne sont pas expirés. Alors, c'est la même clause...

Le Président (M. Lachance): Est-ce qu'il n'y a pas un petit problème, M. le ministre? Il me semble que... On dit: Insérer, après l'article 166... Est-ce qu'on n'aurait pas dû dire «167»?

M. Bégin: Non, j'ai «167».

Mme Lamquin-Éthier: Oui, «167».

M. Bégin: J'ai «167».

Mme Lamquin-Éthier: Non, «166». Vous avez raison, M. le Président.

M. Bégin: Ah! Regardez donc...

Le Président (M. Lachance): Ça arrive de temps en temps.

Mme Lamquin-Éthier: Que vous ayez raison?

M. Bégin: Ha, ha, ha! C'est une attaque que...

Le Président (M. Lachance): Je le prends bien.

M. Bégin: Est-ce que vous considérez que c'est intégré dans la...

Le Président (M. Lachance): Oui. Je pense qu'on peut tout simplement le modifier parce que l'amendement n'est pas encore adopté. Alors, on change le «166» pour «167».

Alors, insérer, après l'article 167 du projet de loi, l'article suivant, 167.1, ce que vous venez de lire, M. le ministre. Est-ce que cet amendement...

M. Bégin: Attendez, M. le Président, parce qu'il est de taille. Je veux faire une référence à l'article 3 lui-même, là. C'est parce que je m'interroge sur le mot «3»... le chiffre.

(Consultation)

M. Bégin: L'article 3 dit: Ce Code est modifié par l'insertion, après l'article 29, du suivant:

«29.1. Lorsqu'un appel a déjà été autorisé par un juge ou interjeté par une partie à l'instance en vertu de l'une ou l'autre des dispositions de la présente section, toute autre partie peut interjeter appel de plein droit.»

Donc, quand il y en a un qui est déjà en appel, l'autre est automatiquement là. Alors, on dit que ça s'applique aux causes pendantes en première instance le 1er janvier 2003.

(Consultation)

M. Bégin: O.K. Alors, M. le Président, si on ne mettait pas ça, ça ne permettait pas l'appel, alors qu'on veut le permettre. En fait, on veut faire en sorte que les personnes qui ont des droits au moment où on adopte le projet de loi ne les perdent pas. Que ce soit dans un sens ou dans l'autre, on veut que ce soit conservé.

Le Président (M. Lachance): La chance au coureur.

M. Bégin: Oui. Ça pourrait être différent, remarquez, c'est fréquemment différent, mais je pense que, dans ce cas-ci, il faut... On le verra tantôt aux Petites créances et à la juridiction, c'est pour favoriser l'utilisation de recours, et non pas l'inverse, par les citoyens.

Une voix: ...

M. Bégin: On me disait que c'est une demande que le Barreau a exigée... a faite.

Le Président (M. Lachance): Très bien. Alors, est-ce que cet amendement est adopté?

Mme Lamquin-Éthier: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que 167.1 est adopté?

Mme Lamquin-Éthier: Adopté, M. le Président.

M. Bégin: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. 168.

M. Bégin: Les dispositions de l'article 4 n'ont pas d'effet à l'égard des causes pendantes devant la Cour supérieure le (alors, indiquer ici la date d'entrée en vigueur du présent article).

C'est dans le même sens. Alors, pour éviter une application rétroactive de l'augmentation du seuil de compétence de la Cour du Québec et pour des raisons de pratique également, il est opportun de ne pas transférer à la Cour du Québec les causes pendantes devant la Cour supérieure dont la valeur en litige est inférieure au nouveau seuil de compétence. Alors, il ne faudrait pas qu'on fasse un transfert de dossiers uniquement par l'adoption du projet de loi, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que j'ai bien compris qu'il y avait un amendement à l'article 168?

M. Bégin: Je n'en ai pas, moi. Oh! attendez une seconde. Oui, oui, oui. C'est parce qu'on m'avait mis un amendement à 171. Donc, je pensais que c'était là. Alors, 167, c'est fait. Me permettez-vous, M. le Président, de recommencer?

Le Président (M. Lachance): Oui, s'il vous plaît, pour ne pas qu'il y ait d'ambiguïté.

M. Bégin: 168. Les dispositions de l'article 4 n'ont pas d'effet à l'égard des causes pendantes devant la Cour supérieure le 1er janvier 2003. Alors, c'est pour éviter un fardeau.

(Consultation)

M. Bégin: C'est ça, on ne veut pas que les dossiers transfèrent d'une juridiction à l'autre par le simple fait de l'adoption du projet de loi. On veut que les dossiers qui sont déjà saisis par une instance continuent de l'être.

Une voix: ...

M. Bégin: M. le Président, je vais demander une suspension de l'article pour une raison que je vais expliquer pour que vous compreniez bien. L'article est bien rédigé, sauf que j'ai demandé que les articles qui portent sur le fait de hausser la juridiction de la Cour des petites créances à 7 000 de même que celle qui a pour effet d'augmenter la juridiction de la Cour du Québec à 70 000 entrent en vigueur le jour de la sanction de la loi et non pas le 1er janvier 2003 parce que, le 2 janvier 2003, à ce moment-là, c'est toutes les questions administratives qui vont entrer en cause. Alors, ça n'enlève rien à l'administration de la cour que les dossiers puissent dès maintenant être portés devant la bonne cour.

Ce n'est pas une question de transfert, c'est juste que le citoyen qui demain matin prend un recours, il dit: Mon action est de 60 000, je peux aller directement en Cour du Québec, ou: J'ai 6 500, je peux aller directement aux Petites créances, sinon nous priverions un citoyen qui, par exemple, a une créance de 6 500, qui devrait la prendre maintenant... Il devrait la prendre devant la Cour du Québec, il ne pourrait pas venir devant la Cour des petites créances, et je voudrais, moi, que les bénéfices soient retirés immédiatement par les citoyens parce que je pense que c'est un avantage pour eux de pouvoir avoir accès aux Petites créances jusqu'à 7 000 $ et à la Cour du Québec jusqu'à 70 000 $. Donc, le texte, tel qu'il est là, il est un article global qui ne fait pas ces nuances-là. Il va falloir, donc... On va retirer l'amendement et on va en faire un second.

(Consultation)

Le Président (M. Lachance): Alors, nous en sommes à l'étude de l'article 168. 168. C'était plus loin, M. le ministre.

M. Bégin: O.K. Alors, on me propose ceci, M. le Président, les légistes, d'adopter 168 actuel, qui serait correct...

Le Président (M. Lachance): Sans amendement.

M. Bégin: ...et on aurait un autre amendement un petit peu plus loin.

Le Président (M. Lachance): Donc, 168, il n'y a pas d'amendement.

M. Bégin: C'est ça. Alors, je le relirais pour les fins des galées.

168. Les dispositions de l'article 4 n'ont pas d'effet à l'égard des causes pendantes devant la Cour supérieure le (indiquer ici la date d'entrée en vigueur du présent article).

Alors, ça, ce serait correct, mais plus loin on mettra une autre disposition pour introduire ce que je viens de mentionner.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que cet article 168 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Article 169. Il y a un amendement. En tout cas, j'en ai un. Je ne sais pas si vous le présentez.

M. Bégin: Oui, je l'ai. Je l'ai. Remplacer, dans la troisième ligne de l'article 169 du projet de loi, ce qui suit: les mots «(indiquer ici la date d'entrée en vigueur du présent article)» par ce qui suit: «1er janvier 2003».

n(11 h 40)n

Ça, c'est parce que, au moment où le projet de loi a été adopté, c'était à la date d'entrée en vigueur déterminée par décret. Là, on détermine que ça va entrer en vigueur le 1er janvier 2003.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que cet amendement est adopté?

M. Bégin: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Est-ce que l'article 169, tel qu'amendé, est adopté?

M. Bégin: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Ça va, Mme la députée de Bourassa? Adopté?

Mme Lamquin-Éthier: Adopté, M. le Président. Excusez.

Le Président (M. Lachance): Je regarde toujours du côté de la loyale opposition de Sa Majesté.

Mme Lamquin-Éthier: Vous faites bien.

Le Président (M. Lachance): L'article 170. M. le ministre.

M. Bégin: Il y a un amendement, M. le Président: Remplacer, dans les première et deuxième lignes du l'article 170 du projet de loi, ce qui suit: «(indiquer ici la date d'entrée en vigueur du présent article)» par ce qui suit: «1er janvier 2003».

Alors, c'est la conséquence de ce que nous avons adopté antérieurement.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que cet amendement est adopté?

Mme Lamquin-Éthier: Il y a juste la formulation, «par la loi ancienne». Est-ce que c'est... En français, c'est comme ça qu'on dit ça?

M. Bégin: Oui.

Mme Lamquin-Éthier: Ah oui? Habituellement?

M. Bégin: Oui. C'est une expression fréquente, «la loi nouvelle» et «la loi ancienne». C'est vraiment la...

Le Président (M. Lachance): Est-ce que cet amendement est adopté?

M. Bégin: Adopté.

Mme Lamquin-Éthier: On le remarque plus, là, étant donné que... Oui, adopté.

Le Président (M. Lachance): Alors, l'amendement est adopté. 170, tel qu'amendé, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Il y a un nouvel article à 170.1.

M. Bégin: Oui, M. le Président. Insérer, après l'article 170 du projet de loi, l'article suivant:

170.1 Le ministre doit, au plus tard le 1er avril 2006, faire au gouvernement un rapport sur la mise en oeuvre du délai de rigueur de 180 jours prévu à l'article 110.1 du Code de procédure civile, sur l'application des règles prévues aux articles 175.1 à 175.3 de ce Code ainsi que sur l'opportunité, le cas échéant, de proposer les modifications qu'il juge utiles.

Le ministre établit des indicateurs lui permettant d'évaluer les résultats de la mise en oeuvre du délai de rigueur de 180 jours et de l'application des règles visées au premier alinéa.

Ce rapport doit être déposé devant l'Assemblée nationale dans les quinze jours suivant sa présentation au gouvernement ou, si elle ne siège pas, dans les quinze jours de la reprise de ses travaux.

Dans l'année qui suit la date de ce dépôt, la commission compétente de l'Assemblée nationale procède à l'étude du rapport et elle entend à ce sujet les observations des personnes et organismes intéressés.

M. le Président, ça a fait l'objet de discussions importantes au comité tripartite. Je vous ai fait part qu'il y avait eu de nombreuses objections qui s'étaient manifestées à l'égard du délai de rigueur de 180 jours, après avoir entendu toutes les parties, et j'avais dit que je me rangeais à leur opinion, en ce sens que j'adoucissais ce délai-là, mais que je voulais m'assurer que l'inquiétude ou la préoccupation que j'avais... que nous n'assisterions pas à des demandes répétées, abusives, en quelque sorte, quand on regarde le système dans son ensemble, qui détruiraient l'esprit même de la réforme. Donc, on s'assure que, dans un certain nombre d'années, l'usage nous dise: Il y a ou il n'y a pas utilisation abusive de cette procédure de sortir du système de 180 jours. Alors, on aura, à ce moment-là, des indicateurs qui seront inscrits dans nos bureaux des palais de justice et on s'assurera que, quand on fera l'étude, on aura des données objectives, non discutables.

Ce sera la pratique et non pas des idéologies, et on pourra dire: Bien, voilà, il y a 2 % des dossiers qui font l'objet de demandes, ce qui est tout à fait raisonnable, ou: Nous assistons à 20 % de demandes, ce qui n'est tout à fait pas dans l'ordre de ce que l'on visait. Alors, on avisera, à ce moment-là, et tout le monde aura des indicateurs. On pourra en tenir compte, on pourra se faire entendre en commission parlementaire et expliquer peut-être le pour et le contre de chacun des points de vue.

Bien, c'est ça, l'esprit de la modification, et je crois que c'est important que nous l'inscrivions dans un texte de loi et qu'on se donne un rendez-vous, tout le monde ensemble, dans x temps pour réévaluer tout ça, et, ça, je pense que tout le monde... pas je pense, tout le monde était d'accord pour le faire.

Mme Lamquin-Éthier: Donc, c'est important, je pense. Dans la mesure où on fait des chambardements qui sont majeurs, importants, il faut subséquemment encore les évaluer. Le «au plus tard le 1er avril 2006», est-ce que c'est un délai de rigueur?

M. Bégin: Bien, c'est soumis maintenant à une procédure un peu allégée. On a assoupli, donc peut-être qu'on pourrait demander un délai. Ha, ha, ha! Mais je me demande avec qui on demanderait le délai.

Mme Lamquin-Éthier: Je me souviens que ça avait été dit dans le cadre de la réforme, vous savez, le virage ambulatoire.

M. Bégin: Là, je suis moins familier, je dois vous dire.

Mme Lamquin-Éthier: Oui, oui, oui. Le gouvernement, votre gouvernement s'était engagé à déposer subséquemment, dans les trois années, un rapport qui viendrait valider un petit peu les objectifs qu'il s'était fixés, voir s'ils avaient été atteints, et je ne me souviens pas que ça été déposé à l'Assemblée nationale.

M. Bégin: J'avoue honnêtement que je ne le sais pas. Mais ce que je peux dire dans ce cas-ci, c'est que les critères, les ? je cherche le mot ? les balises ? non, je cherche le mot ? les paramètres ou les indicateurs vont être indiqués, vont être sur place et vont être partout sur le territoire, et le Barreau, la magistrature, les citoyens auront accès à ces données-là. Donc, à toutes fins pratiques, si jamais le gouvernement n'était pas désireux de le faire, toute personne concernée et intéressée pourrait, peut-être avec un petit peu d'ouvrage, mais arriver à recueillir cette information-là, parce que c'est un renseignement disponible, public. C'est: Y a-t-il eu ou non une requête? Alors, ça pourra se faire, et on obtiendrait le même résultat par la bande, mais je pense bien que personne n'a l'intention de faire cette chose-là, puisque c'est dans l'intérêt de tout le monde de savoir si notre procédure qu'on a changée a bien atteint ses objectifs. Et sinon, que devons-nous faire, à ce moment-là, pour les atteindre?

Mme Lamquin-Éthier: Oui. Effectivement, je pense que c'est... D'ailleurs, c'est dit que c'est très opportun de mettre en place des mécanismes qui vont permettre d'évaluer les résultats.

M. Bégin: À cet égard, je me demande si le texte n'est pas trop restrictif.

Mme Lamquin-Éthier: Oui. Pourquoi est-ce qu'on n'élargirait pas le 180 jours?

M. Bégin: Parce que, si vous partagez mon point de vue à l'effet que ce serait important, il n'y aurait pas simplement le délai de 180 jours, on pourrait voir l'ensemble des éléments pour évaluer.

Est-ce qu'on ne pourrait pas mettre, M. le greffier... Si vous permettez, je vais parler à mon légiste, là. Est-ce qu'on ne pourrait pas mettre un texte qui dirait que... et les autres changements majeurs dans la procédure, vérifier l'atteinte des résultats, des objectifs visés par la réforme? Je pense que, même sans les définir spécifiquement, on pourrait garder celui-là parce qu'il est très, très précis, et aussi les autres objectifs visés par la réforme, le Comité de révision, etc.

Mme Lamquin-Éthier: En termes d'accessibilité à la justice?

M. Bégin: Par exemple.

Mme Lamquin-Éthier: Principalement?

M. Bégin: Oui. Regardez, je propose qu'on suspende une couple de minutes, on va nous rédiger un texte. D'ailleurs, on a d'autres amendements. Je ne sais pas si votre collègue sera là, il y avait le député de Chapleau...

Mme Lamquin-Éthier: Je crois que, malheureusement...

M. Bégin: Il ne pourra pas être là?

Mme Lamquin-Éthier: ...il est retenu à l'extérieur ce matin, mais il va être ici cet après-midi.

M. Bégin: O.K. C'est parce que là on est en mesure de les adopter maintenant, avant la fin. Alors, je propose de les adopter tout de suite, M. le Président.

Mme Lamquin-Éthier: Je sais qu'il était extrêmement intéressé et qu'il souhaitait être présent.

M. Bégin: Je sais, mais on va lui attribuer la paternité...

Mme Lamquin-Éthier: Me permettez-vous de vérifier voir s'il a pu revenir?

M. Bégin: Oui, on a encore le temps, là, je pense. À moins d'erreur, M. le Président, on a encore le temps?

Mme Lamquin-Éthier: Non, c'est parce que je vous trouve bien pressé ce matin.

M. Bégin: On a jusqu'à midi et demi?

Le Président (M. Lachance): Ce qu'on pourrait faire, c'est qu'on pourrait adopter l'article qui a été suspendu, l'article 147, et, avant d'adopter...

M. Bégin: Bon. Mme la députée, pouvez-vous aller vous informer tout de suite voir s'il peut être ici?

Mme Lamquin-Éthier: Oui. Me permettez-vous d'aller vérifier s'il est revenu?

M. Bégin: Oui, oui, oui. Deux minutes, M. le Président. Ça va être plus simple.

Le Président (M. Lachance): Donc, on va suspendre.

M. Bégin: O.K., ça va nous permettre de faire l'amendement maintenant.

(Suspension de la séance à 11 h 48)

 

(Reprise à 11 h 57)

Le Président (M. Lachance): À l'ordre, s'il vous plaît. Alors, nous allons reprendre nos travaux. M. le ministre.

M. Bégin: Oui. 170.1, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Oui.

M. Bégin: Oui. Mais avant, avec votre permission, je reviendrais à l'article 169 et je demanderais, avec votre permission, de retirer cet article-là...

Une voix: L'amendement.

M. Bégin: ...l'amendement que nous avons apporté, parce que tout à l'heure on avait apporté un amendement, et cet amendement-là cause préjudice, compte tenu du fait que j'ai indiqué des changements pour le 7 000 $ et le 70 000 $. Alors, il faudrait qu'on fasse comme on a fait pour 170... Excusez. Oui, on a retiré l'amendement.

Une voix: On a retiré 168, il faudrait retirer l'amendement à 169.

M. Bégin: À 169, excusez. À 168. Il faudrait le faire à 169.

Mme Lamquin-Éthier: Si vous voulez recommencer, M. le ministre, là, ce que vous venez de dire.

M. Bégin: D'ailleurs, quand nous sommes arrivés à 168 du projet, j'avais une modification. J'avais un amendement qui était de dire: Au lieu de marquer la date ? indiquer ici la date d'entrée en vigueur ? on avait mis «le 1er janvier...

Mme Lamquin-Éthier: ...2003».

M. Bégin: Compte tenu que j'ai fait une ouverture pour l'entrée en vigueur rapide de la compétence de 7 000 $ pour les Petites créances et pour 70 000 à la Cour du Québec, les légistes nous indiquaient qu'à ce moment-là il ne fallait pas mettre «le 1er janvier 2003» mais revenir à notre texte antérieur. Nous avons donc pris le 168 tel qu'il était, mais nous avons, dans 169, fait exactement le même exercice, mais nous ne sommes pas revenus au texte antérieur, et là ça nous pose un problème. Il faudrait donc qu'on réadopte l'article 169, tel qu'il est dans notre cahier, et oublier l'amendement qu'on avait proposé, puis tout de suite après on aura d'autres amendements qui vont rendre tout ça cohérent. Je sais que ça peut paraître...

Mme Lamquin-Éthier: Mais seulement en ce qui concerne les dispositions de l'article 4.

M. Bégin: C'est ça, parce qu'il touche à l'article 4 du projet de loi.

Mme Lamquin-Éthier: La compétence. O.K. Ce qui passe de 30 000 à 70 000, Cour du Québec.

M. Bégin: C'est les Petites créances.

Le Président (M. Lachance): En fait, c'est simple, à l'article 169, on retire l'amendement qui référait à la date du 1er janvier 2003.

M. Bégin: Exact.

Mme Lamquin-Éthier: 169 ou 168?

Le Président (M. Lachance): 168 est déjà adopté.

M. Bégin: 168, nous l'avons déjà fait.

Le Président (M. Lachance): C'est déjà fait.

M. Bégin: Et on le ferait maintenant pour 169.

Mme Lamquin-Éthier: O.K.

M. Bégin: Et je proposerais, M. le Président, que nous adoptions l'article 169 tel que nous l'avons.

Le Président (M. Lachance): Tel quel, sans amendement.

M. Bégin: C'est ça. Et je le relirais pour les fins des galées.

Le Président (M. Lachance): Oui, M. le ministre.

M. Bégin: Les dispositions des articles 953 à 955 de ce Code introduits par l'article 138 n'ont pas d'effet à l'égard des causes pendantes devant la Cour du Québec le (et indiquer ici la date d'entrée en vigueur du présent article).

De cette manière-là, nous sommes corrects.

n(12 heures)n

Le Président (M. Lachance): Est-ce que 169 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Ça va, Mme la députée de Bourassa? C'est adopté?

Mme Lamquin-Éthier: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): C'est bien.

M. Bégin: 170 est déjà adopté, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Alors, l'article 170 était déjà adopté. Maintenant, nous en étions à 170.1.

M. Bégin: C'est exact.

Le Président (M. Lachance): On va rester à l'amendement que vous nous aviez déposé et nous allons aborder le nouvel amendement.

M. Bégin: Oui. Nous avions fait une invitation à peut-être élargir le sens de cet article-là. On retrouve donc à la marge l'amendement. Je relirais le premier alinéa de l'article 170.1 de la manière suivante: «Le ministre doit, au plus tard le 1er avril 2006, faire au gouvernement un rapport sur la mise en oeuvre du délai de rigueur de 180 jours prévu à l'article 110.1 du Code de procédure civile, sur l'application des règles prévues aux articles 175.1 à 175.3 de ce Code, sur les autres changements majeurs apportés par la présente réforme ainsi que sur l'opportunité, le cas échéant, de proposer des modifications qu'il juge utiles.» Donc, on élargit. Je pense que, avec ces terminologies-là, on couvre plus grand. Ça va?

Mme Lamquin-Éthier: Je pense que c'est important que ce soit couvert plus grand.

M. Bégin: Oui.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que cet amendement est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que le nouvel article 170.1 est adopté?

Des voix: Adopté.

Code de procédure civile

Le recours collectif

Le jugement

Dispositions diverses (suite)

Le Président (M. Lachance): Adopté. Maintenant, nous pourrions revenir à l'article 147 qui avait été suspendu.

M. Bégin: C'est ça. Je relis.

Le Président (M. Lachance): Nous retirons l'amendement que vous aviez déjà déposé, et vous le remplacez par un nouvel amendement dont vous nous faites la lecture.

M. Bégin: C'est exact. À l'article 1046 proposé par l'article 147 du projet de loi:

1° ajouter, dans la quatrième ligne du premier alinéa proposé et après le mot «parties», les mots «ou, en ce qui concerne l'adresse, celle de leurs procureurs»;

2° ajouter, dans la cinquième ligne du premier alinéa proposé et après le mot «publication», ce qui suit: «et, s'il le juge opportun, la diffusion»;

3° ajouter, dans la première ligne du second alinéa proposé et après le mot «publication», les mots «ou la diffusion»;

4° ajouter, dans la deuxième ligne du second alinéa proposé et après le mot «publication», les mots «ou de cette diffusion».

Donc, ça rencontre l'esprit de ce que vous aviez proposé, Mme la députée, et qui avait été suggéré par Me David.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que cet amendement est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Est-ce que l'article 147, tel qu'amendé, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. M. le ministre.

M. Bégin: On a d'autres dispositions. Est-ce qu'on fait l'entrée en vigueur ou bien si on fait les autres avant?

Le Président (M. Lachance): Est-ce que vous pourriez, oui, faire les autres avant?

M. Bégin: On va distribuer, M. le Président, les articles en question. Parmi ceux-ci se retrouvent trois modifications qui proviennent de la discussion que nous avons eue à la suggestion du député de Chapleau. Ça touche trois articles du Code de procédure civile. Alors, je fais la distribution. Il reste aussi deux ou trois autres amendements sur des sanctions que nous avions abordés au moment de la discussion des articles pertinents, mais nous les aborderions après avoir terminé les autres dispositions.

Dispositions générales

Les tribunaux

De la compétence des tribunaux (suite)

Le Président (M. Lachance): Alors, nous allons revenir avec un amendement qui introduit l'article 2.1 au projet de loi. C'est bien ça, M. le ministre?

M. Bégin: Oui, M. le Président. Alors, l'article 2.1, ça a trait à l'article 29. Insérer, après l'article 2 du projet de loi, l'article suivant:

2.1. L'article 29 de ce Code est remplacé par le suivant:

«29. Est interlocutoire le jugement rendu en cour d'instance avant le jugement final. Le jugement interlocutoire qui met fin à l'instance est sujet à appel conformément aux règles prévues pour le jugement final.

«Tout autre jugement interlocutoire n'est pas sujet à appel immédiat et ne peut être mis en question que sur appel du jugement final, à l'exception de celui qui prononce sur une requête en récusation et de celui qui rejette un moyen déclinatoire de la compétence d'attribution du tribunal, un moyen de non-recevabilité fondée sur la litispendance ou la chose jugée ou une objection à la preuve fondée sur l'article 308 de ce Code ou sur l'article 9 de la Charte des droits et libertés de la personne.»

Alors, ce que vous retrouvez, M. le Président, là-dedans, c'est le fait qu'une partie ne peut pas aller en appel, sauf dans les cas qui sont énumérés là ? la requête en rétractation déclinatoire, etc. ? afin de garder le débat devant le juge saisi. Et, s'il y a des moyens autres que ceux-là qui sont là, il fera valoir devant le tribunal son objection, qui sera évidemment notée, qui aura sans doute un jugement, mais ce sera porté en appel quand le fond du litige sera porté en appel, ce qui évitera l'utilisation de certaines procédures considérées comme étant abusives.

Alors, plutôt que de l'adopter tout de suite, je suggérerais qu'on passe aux autres pour voir si on retrouve le même esprit, là, pour les autres dispositions.

Le Président (M. Lachance): Très bien. Alors, 3.1.

M. Bégin: 3.1 Insérer, après l'article 3 du projet de loi, l'article suivant:

3.1. L'article 33 de ce Code est modifié par l'ajout, à la fin, de l'alinéa suivant: «Quelle que soit la procédure utilisée...» Oups! C'est où que ça va, ça?

(Consultation)

M. Bégin:«Quelle que soit...» Je relis, M. le Président: «Quelle que soit la procédure utilisée, une telle demande ne suspend pas le débat devant les organismes et autres entités visés au premier alinéa ni l'exécution de la décision contestée.»

Alors, on se rappelle que l'article 33, pour ceux qui ne sont pas avocats, c'est l'article qui accorde à la Cour supérieure un pouvoir de surveillance et de contrôle sur tous les autres organismes sous lui. Donc, c'est la capacité d'intervention. C'est un des pouvoirs les plus exorbitants dans notre système juridique, que le contrôle par la Cour supérieure.

Alors, ce que nous voulions, c'est garder le dossier devant l'organisme pour ne pas qu'on en abuse. Alors, on dit: Quelle que soit la procédure utilisée, trouvez le truc que vous voudrez, là, appelez-le comme vous voulez, là, une telle demande ne suspend pas le débat devant l'organisme visé ni l'exécution de la décision contestée. Donc, le débat va continuer à être devant l'organisme en question, quelle que soit la procédure qu'on pourra utiliser. Donc, on ne peut pas utiliser 33 ? pouvoir de surveillance, contrôle ? déguisé sous quelque chapeau que ce soit pour arriver au même résultat.

Mme Lamquin-Éthier: Le texte fait référence à l'organe visé au lieu d'organisme et autres entités. Est-ce que c'est...

M. Bégin: Vous faites bien de le signaler. On devrait corriger, dans la dernière ligne, «devant l'organisme visé». Vous avez tout à fait raison, Mme la députée. Il faudrait qu'on reprenne «devant les...

Une voix: ...devant les organismes...

M. Bégin: ...devant les organismes visés et autres entités visés». En fait... M. le Président, je vais le lire. On va nous remettre un texte qui va tenir compte de ce que je dis, parce que c'est une question simplement de terminologie, mais il faut que ce soit inscrit. «Quelle que soit la procédure utilisée, une telle demande ne suspend pas le débat devant les organismes et autres entités visés au premier alinéa ni l'exécution de la décision contestée.»

Ce sera le texte... ce serait le texte final, et nous aurions un autre article, M. le Président, qui ferait partie de la trilogie, l'article 126.1 qui touche l'article 834.1 du Code et...

Le Président (M. Lachance): ...là-dessus, M. le ministre, que déjà nous avions un article 126.1 qui avait été adopté.

M. Bégin: Oh! Alors, on mettrait «126.2».

Le Président (M. Lachance): Donc, si vous vouliez... Ou bien vous l'enlevez ou bien vous l'ajoutez, mais...

M. Bégin: 126.2, M. le Président?

Le Président (M. Lachance): Bien, il y en avait déjà également, 126.2 puis 126.3.

M. Bégin: Oh! Vous avez plus que l'oeil vigilant, vous êtes dangereux, là.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Lachance): Pourtant, je ne suis pas un juriste, même si je connais bien mon Code municipal. J'ai été maire pendant 14 ans.

M. Bégin: Alors, étant donné qu'il s'insère, M. le Président, entre 834 et 835, qui étaient 126.1 et 126.2, il faudrait que l'article que je vous suggère maintenant porte le numéro 126.1.1. Alors, M. le Président, avec votre permission, l'article 126.1.1: Insérer, après l'article 126.1 du projet de loi, l'article suivant:

126.1.1 L'article 834.1 de ce Code est remplacé par le suivant:

«834.1. Un recours exercé en vertu du présent titre n'opère pas sursis des procédures.»

n(12 h 10)n

Alors, ça veut dire que quelqu'un qui utilise la procédure qui est un recours extraordinaire en vertu de 834.1, il peut le faire, mais ça n'opère pas sursis. Donc, à ce moment-là, les procédures continuent comme si de rien n'était. C'est pour empêcher encore une fois, M. le Président, l'utilisation des procédures techniques pour obtenir des délais, des allers-retours en Cour suprême. Voilà ce que nous avons tenté de mettre en forme, suite aux discussions que le député de Chapleau a faites.

Le Président (M. Lachance): Ça prouve, M. le ministre, que vous avez été attentif aux propos du député de Chapleau. M. le député de Chapleau.

M. Pelletier (Chapleau): Oui. Merci, M. le ministre, merci précisément de l'attention que vous avez portée à mes propos, et par ailleurs merci d'arriver avec des amendements concrets.

Vous me permettrez de formuler cependant les commentaires suivants. En ce qui concerne votre article 2.1, votre nouvel article 2.1 qui remplacerait l'article 29 du Code, je dirais qu'a priori ? je dis bien «a priori» parce que l'examen que j'en fais est assez rapide ? mais, a priori, ça me semble être un bon amendement. Ça me semble être un amendement qui est extrêmement intéressant et qui vise précisément, comme vous l'avez dit, à garder le fond du débat devant le tribunal qui est, en fin de compte, le tribunal de première instance. Donc, ne serait-ce que pour ce motif-là, je trouve que c'est un amendement qui, en tout cas, est sans aucun doute prometteur. Je laisse cependant à ma collègue le soin de se prononcer quant à la position formelle de l'opposition officielle sur ce sujet, mais je dirais que, bon, a priori, je répète, ça m'intéresse.

Cependant, en ce qui concerne l'article 3.1 donc qui vise à modifier l'article 33 du Code, là j'avoue que je me pose un certain nombre de questions, d'abord parce que, normalement, lorsque nous sommes en présence d'une action directe en nullité, c'est parce que l'on prétend que l'organisme qui est saisi d'un dossier ou qui est saisi d'un litige n'a pas la compétence pour en être saisi. Donc, il y a un problème de compétence qui en soi vicie l'ensemble de la démarche, vicie l'ensemble de la procédure. Alors, lorsque l'on dit finalement qu'une telle demande, c'est-à-dire l'action directe en nullité, n'entraîne pas la suspension du débat devant l'organisme visé, je saisis mal l'à-propos d'une recommandation comme celle-là, parce que, en soi, normalement, l'action doit suspendre le débat, puisque c'est la compétence de l'organisme qui est en cause et qui est discutée justement par le biais de l'action directe en nullité. Alors, je vois mal comment le débat pourrait continuer devant l'organisme alors que la compétence même de l'organisme est remise en question.

Une fois que l'action sera tranchée, là on connaîtra la compétence de l'organisme. S'il y a un débat qui est en cours, bien entendu, on connaîtra la compétence de l'organisme, et là, en fonction du jugement, selon le jugement, l'organisme sera dessaisi du litige ou finalement va continuer à trancher l'affaire. Lorsque par ailleurs il y a déjà un jugement qui a été rendu par un organisme et que cette décision-là fait l'objet d'une action directe en nullité, je trouve qu'il est délicat de prévoir que dans tous les cas il y aura exécution de la décision contestée. Je trouve que c'est extrêmement délicat. Il ne devrait y avoir exécution de la décision contestée que dans la mesure où en soi un tribunal ne décide pas du contraire. S'il s'avérait qu'un tribunal soit saisi d'une requête en injonction pour faire cesser l'application de la décision contestée, comme c'est le cas actuellement...

M. Bégin: ...remarquer que le texte ne vise pas cette hypothèse. «Quelle que soit la procédure utilisée, une telle demande ne suspend pas le débat ? le débat ? devant l'organisme visé.» Donc, ça veut dire que, par hypothèse, il n'y a pas eu de jugement. Parce que, si...

M. Pelletier (Chapleau): Dans le premier cas, oui.

M. Bégin: Non, sur l'article 33.

M. Pelletier (Chapleau): Oui.

M. Bégin: Donc, il ne peut pas... Ce que vous discutez n'existe pas dans l'hypothèse.

M. Pelletier (Chapleau): Oui, oui, ça existe. C'est-à-dire qu'il y a deux choses. Vous avez «ne suspend pas le débat devant l'organisme visé» ? ou les organismes visés; ça, c'est une première partie ? puis l'autre partie, «ni l'exécution de la décision contestée». Vous avez deux choses là-dedans. Alors, ce que je vous dis, c'est: concernant le débat, concernant le débat, ça n'a pas d'allure parce que, si ce qu'on remet en cause, c'est la compétence de l'organisme, il est tout à fait normal que le débat s'arrête.

Bon, concernant maintenant la décision contestée, ce que je vous dis, c'est que je suis d'accord avec le principe que la décision contestée doive continuer de s'appliquer, mais à moins qu'un tribunal n'en ordonne autrement. Or, un tribunal pourrait très bien, dans une requête en injonction, en ordonner autrement et déclarer donc que la décision contestée doit cesser de s'appliquer tant et aussi longtemps qu'il ne sera pas statué sur l'action en nullité.

M. Bégin: Mais là ce que vous soulevez là, c'est exactement revenir à la case départ, parce que c'est justement ça qui constitue l'abus et qu'il s'agit d'arrêter. C'est toujours par ce biais-là, toujours par le biais d'une action comme celle-là qu'on prend qu'on le déguise sous quelque forme que ce soit, alors que, dans les faits, la décision contestée, c'est tout autre chose, généralement, que la compétence. Et on utilise tous les moyens possibles en disant: Ah! je m'en vais en nullité là-dessus, on verra bien ce que le tribunal va dire. Et on se retrouve, trois ans et demi plus tard, après avoir eu une décision de la Cour supérieure, de la Cour du Québec, de la Cour d'appel et de la Cour suprême disant: Non, ce n'était pas ça... et nous revenons. Et c'est tout ça, le débat. Et, quand on ouvre cette porte-là, je dis, moi: Aussi bien ne rien faire que de suivre ce que vous dites là, parce que c'est ça, le fond même du litige, c'est ça, qui nous amène devant la Cour suprême, aller-retour, sans qu'on ne puisse rien faire. C'est comme ça, qu'il y a des dossiers qui sont ouverts depuis sept ans, et vous les connaissez, sept ans, d'autres plus, et on n'a même pas commencé à faire un début d'enquête. Sur quoi pensez-vous qu'on s'appuie? Sur ça.

M. Pelletier (Chapleau): Oui. Regardez, M. le ministre. Nous, ce dont on avait parlé, c'était de la possibilité de restreindre, en fin de compte, les mesures interlocutoires lorsqu'il y a de l'abus dans un dossier.

M. Bégin: C'est ça.

M. Pelletier (Chapleau): Oui, mais un instant. Quand vous parlez, là, d'attaquer une décision contestée, bien, d'attaquer une décision, écoutez, vous n'êtes pas dans un moyen interlocutoire, là.

M. Bégin: C'est que vous pensez que, parce que l'on dit qu'on attaque une décision sur la question de la compétence, on exerce un droit de fond et qu'en conséquence on ne peut pas ne pas suspendre le débat et aller devant la Cour supérieure. Je vous dis que c'est un déguisement qui est utilisé par tous les plaideurs, au bénéfice de leurs clients, afin de faire en sorte qu'on se retrouve devant les tribunaux supérieurs plutôt que de laisser à l'organisme le soin de trancher.

Vous n'avez pas compétence parce que, M. le Président, vous connaissez quelqu'un dans la famille, hein? Bon, bien, qu'est-ce que vous voulez qu'on fasse? Ah, c'est une question de compétence. Question de compétence? Bien, elle s'appelle comment, la vraie chose, la vraie bibite, là? Ce n'est pas ça, hein? C'est une requête pour obtenir un délai et faire en sorte qu'on ne puisse pas procéder devant l'organisme parce qu'on a intérêt à ce qu'on ne procède pas devant l'organisme. Ce n'est pas la compétence qui est en cause. Ce n'est pas ça. C'est un déguisement de la chose. Et, à la limite, s'il y avait une question de compétence et qu'il y avait une décision de rendue, l'appel existe, l'évocation existe toujours. Alors, c'est comme un jugement mal fondé sur quelque base que ce soit. Vous avez plaidé devant un juge dont vous reconnaissez la juridiction, puis à la fin vous avez un jugement que vous n'aimez pas. Qu'est-ce que vous faites? Vous allez en Cour d'appel. Sur la base de quoi? Sous différents motifs, d'erreur de droit. Dans certains cas, il faut que vous alliez en évocation parce qu'il n'y a pas d'appel. Quand on est devant un organisme, c'est le biais qu'on doit prendre, d'où le 834.1.

Sincèrement, M. le député de Chapleau, si on ne fait pas ça, oubliez ça, oubliez ça, il n'y a rien. Il n'y a rien. Et, moi, je crois qu'il faut faire ça parce que ça n'a pas de bon sens, ce que nous vivons. Dans certains cas, ça discrédite totalement la justice. Il y a des abus qui se font. C'est rare, c'est des petits nombres, très petits nombres, mais c'est ceux-là qui font le plus mal.

M. Pelletier (Chapleau): M. le ministre, le problème, c'est que l'amendement que vous proposez est lourd de conséquences, très, très lourd de conséquences. On va prendre deux exemples. Prenons l'hypothèse où vous avez une décision qui est rendue par un organisme et que cette décision-là est contestée en vertu de l'article 33. Vous nous dites que finalement la décision qui est contestée ne verra pas ses effets être suspendus, malgré le recours en vertu de l'article 33. Qu'arrive-t-il si c'est un organisme qui délivre des permis d'alcool qui décide de façon illégale, sans avoir la compétence requise, de vous retirer votre permis d'alcool pour votre commerce? Alors, vous avez un vice de compétence dans la décision qui est rendue par l'organisme. Vous allez dire au pauvre commerçant: Va en Cour supérieure, mais tu ne pourras pas obtenir la suspension de la décision attaquée. C'est ça que vous allez lui dire?

M. Bégin: Je vous soumets respectueusement que vous faites une erreur parce que, a priori, nous avons fait un premier choix qui date de longtemps, que nous reprenons régulièrement. C'est que nous disons: Tel organisme a compétence pour rendre une décision, et nous l'admettons sans appel. Nous voulons que ça reste à ce niveau-là. Ce n'est qu'exceptionnellement que l'on permet, par le biais de... Ça peut être de l'article 33, mais là, à 90 %, ce n'est pas de 33, c'est de 834, c'est le recours en vertu de l'évocation de 834. Je ne me rappelle plus comment il s'appelle, là, il a une nouvelle terminologie. Bon. C'est par ce biais-là que vous le faites. Autrement dit, vous vous servez d'un privilège qui vous est accordé de sortir du système qui a été bâti par le législateur de manière exceptionnelle et vous voulez que l'exception soit toujours la règle.

n(12 h 20)n

On n'est pas en question de dire: Vous avez un droit d'appel, vous n'avez pas de droit d'appel. C'est une décision finale dont vous parlez. Et, s'il y a une erreur, vous avez exceptionnellement le droit d'aller devant la Cour en utilisant 834 et de dire: Il y a eu telle affaire, telle affaire, telle affaire. Mais c'est exceptionnel, ça. Ce n'est pas le droit. Le droit, il n'y en a pas, de recours, et c'est voulu par le législateur. On dit: Les décisions de la Régie des alcools sont finales et sans appel. C'est une décision du législateur, ça. C'est ce qu'on veut.

Alors, qu'exceptionnellement quelqu'un puisse en sortir, soit, c'est parfait. On a différents moyens. Mais cette personne qui fait ça, pourquoi verrait-elle la suspension de la décision qui a été rendue? Parce que ça, ce serait présumer que l'organisme n'est pas compétent pour rendre la décision; pas au sens de la compétence, mais incompétent, là, incapable, pas bon, si vous voulez. Alors, on atteint un objectif tout à fait irréaliste.

M. Pelletier (Chapleau): Quand il y a sursis des procédures, c'est évalué, ça, selon les mêmes critères que l'injonction interlocutoire. C'est le tribunal qui va faire la balance finalement des probabilités, des avantages et des inconvénients, puis qui va décider s'il accorde le sursis de la procédure ou non.

M. Bégin: M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Oui, M. le ministre.

M. Bégin: Me permettez-vous? Étant donné que je croyais que nous pouvions adopter ces articles-là rapidement ? ce n'est pas un reproche ? que le temps passe, que nous sommes en mesure d'adopter le projet de loi maintenant, je retire les amendements qui sont là et je reviendrai à la charge à un autre moment.

M. Pelletier (Chapleau): On y reviendra.

M. Bégin: On pourrait adopter l'article qu'il nous reste, 170.1. On ne fera pas de long débat, parce que autrement on est obligés de recommencer un autre jour et je n'ai pas le goût.

Mme Lamquin-Éthier: Quand vous dites que vous allez revenir à un autre moment, ça veut dire quoi, ça?

M. Bégin: À la première occasion.

Mme Lamquin-Éthier: Ça veut dire que... Mais encore?

M. Bégin: Dans la phase II.

Mme Lamquin-Éthier: Dans la phase II?

M. Bégin: Ah, définitivement.

Mme Lamquin-Éthier: O.K. Et vous avez dit que la phase II, ce serait à l'automne?

M. Bégin: C'est-à-dire qu'on va déposer avant la fin de la session le projet, les textes, de manière à permettre à tout le monde d'en prendre connaissance, et, à l'automne, adoption du projet de loi durant la session de l'automne. C'est le projet qu'on caresse.

Le Président (M. Lachance): M. le ministre, vous retirez 2.1, 3.1 et 126.1.1...

M. Bégin: Oui.

Le Président (M. Lachance): ...ou bien s'il y en a là-dedans qui peuvent être adoptés?

Mme Lamquin-Éthier: Donc, vous retirez 126.1.1, article 3.1...

M. Pelletier (Chapleau): Moi, ce que je...

Le Président (M. Lachance): Oui, M. le député de Chapleau.

M. Pelletier (Chapleau): J'aurai éventuellement des commentaires aussi sur 126.1.

M. Bégin: Mais, M. le député, c'est parce que le temps passe et ça compromettrait l'adoption du projet de loi.

M. Pelletier (Chapleau): Oui, tout à fait.

M. Bégin: Si vous permettez, je retire le projet de loi. On aura l'occasion de reprendre notre débat.

M. Pelletier (Chapleau): Oui, oui. J'aurai des commentaires sur 126.1 éventuellement, quand M. le ministre reviendra avec ça, et donc c'est sous réserve de mes commentaires. Puis, pour l'instant, je dirais qu'il n'y a aucun de ces articles-là qui devrait être adopté parce que ça mérite drôlement une réflexion en profondeur, puis sûrement que des gens comme le Barreau vont vouloir commenter.

Le Président (M. Lachance): Très bien. Alors, nous arrivons au dernier article. Oui, Mme la députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: Je veux juste réviser. M. le ministre retire donc 126.1.1, 3.1 et 2.1.

Dispositions transitoires et finales (suite)

M. Bégin: Oui, c'est bien ça. Alors 171, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Oui, le dernier article.

M. Bégin: Remplacer l'article 171 du projet de loi par l'article suivant:

171. Les dispositions de la présente loi entrent en vigueur le 1er janvier 2003, à l'exception de l'article 4 et des articles 953 et 955 introduits par l'article 138 qui entrent en vigueur (indiquer ici la date de la sanction de la présente loi).

Alors, c'est pour le 7 000 et le 70 000 $.

Mme Lamquin-Éthier: Qu'est-ce que vous venez... Excusez-moi, je n'ai pas compris.

M. Bégin: J'ai dit que la loi entre en vigueur le 1er janvier 2003, à l'exception de certains articles qui vont entrer en vigueur le jour de la sanction. C'est les articles qui portent sur la compétence des Petites créances et de la juridiction de la Cour du Québec.

Mme Lamquin-Éthier: O.K. Alors, 2003, c'est important parce qu'il y a eu de nombreux amendements majeurs. Il est nécessaire que l'information pertinente soit donnée à la population, il est nécessaire que la formation soit donnée et même partout au Québec. Vous allez devoir planifier, je pense...

M. Bégin: Tout le monde, Barreau, magistrature et administration, tout le monde va avoir des devoirs à faire.

Mme Lamquin-Éthier: Donc, ce délai-là va donc permettre une juste planification.

M. Bégin: Oui, et ça, ça a été discuté, ça a été au tripartite. J'avais, à ce moment-là, indiqué que ce serait le 1er septembre, et on a plaidé pour le 1er janvier, et les juges ont été informés par écrit de ça déjà depuis un mois, et il n'y a pas de problème à ce niveau-là.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'amendement à l'article 171 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Est-ce que 171, tel qu'amendé, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Est-ce que l'intitulé des titres, livres, chapitres, sections et sous-sections du projet de loi sont adoptés?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que le titre du projet de loi, Loi portant réforme du Code de procédure civile, est adopté?

Des voix: Adopté.

M. Bégin: Je fais une motion de renumérotation, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Oui, vous pouvez y aller, mais... Est-ce que l'ensemble du projet de loi n° 54, tel qu'amendé, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Alors, votre motion, M. le ministre.

M. Bégin: Je fais une motion de renumérotation du projet de loi, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Tel qu'amendé?

M. Bégin: Tel qu'amendé, oui.

Le Président (M. Lachance): Cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté.

M. Bégin: M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Oui.

M. Bégin: J'aurais peut-être une demande particulière à vous faire.

Une voix: ...

Remarques finales

M. Paul Bégin

M. Bégin: Ça comprend tous les renvois internes? Oui. Alors, M. le Président, exceptionnellement, je voudrais profiter de cette occasion d'abord pour remercier tous les collègues, particulièrement ma vis-à-vis qui a offert une grande collaboration dans l'adoption de ce projet de loi, mais je voudrais signaler quelque chose de particulier ? il n'est pas là présentement ? c'est M. Yves Pleau, qui a été un fonctionnaire remarquable depuis de nombreuses années. Je ne compte plus le nombre d'années où il a travaillé au bureau du sous-ministre. C'est vraiment la courroie de transmission entre le cabinet et le bureau du premier ministre de même qu'entre le bureau du sous-ministre et le Conseil exécutif sur la question des projets de loi. M. Pleau occupera dans les prochains jours la fonction de greffier du Conseil exécutif, donc une fonction extrêmement importante qui est une reconnaissance pour le travail extraordinaire de compétence qu'il a fait. Il a servi tout le monde d'une manière indépendante, impartiale, et je crois qu'il a été vraiment un atout pour tout le monde, les parlementaires en particulier, et, moi, je voudrais le remercier publiquement pour ce travail splendide qu'il a fait au cours des années. Ordinairement, on ne fait pas ça, mais je pense que, dans ce cas-ci, ça mérite... et ça traverse, là, les deux côtés de la Chambre. Il n'y a pas de politique partisane à cet égard.

C'est un travail impeccable. Je veux le dire parce qu'il est souvent dans l'ombre. C'est celui qui nous apportait le petit amendement qu'il fallait au bon moment, celui qui faisait ci, celui qui faisait ça. Bref, un gros merci, M. Pleau. J'aurais aimé ça que vous soyez là pour l'entendre. Il est au Conseil exécutif. C'est sa première réunion au Conseil des ministres ce matin, alors il ne pouvait pas être présent.

J'ajouterais aussi que les légistes du ministère ont travaillé, M. le Président, d'une manière absolument incroyable. À plusieurs reprises, ils ont travaillé jusqu'à 3 et 4 heures du matin, dans des conditions matérielles difficiles parce que, je ne sais pas encore pour quelle raison, l'air climatisé est fermé encore la nuit. Alors, à 3 heures du matin, c'est quasiment dans un bain de sauna. Je ne comprends pas le truc, mais ils ont travaillé malgré tout là-dedans. À la blague, ils m'ont demandé de leur fournir un lit de camp, mais ça vous indique à quel point ils ont travaillé fort.

Je voudrais leur dire à tous, M. Frenette, et à tous les autres ? vous le transmettrez à toute l'équipe: Bravo pour le travail exemplaire que vous avez fait! Vous avez eu beaucoup de ténacité, beaucoup de bon caractère, parce que ce n'était pas évidemment facile. Vous avez collaboré avec le Barreau, il y a eu des échanges nombreux et fructueux. Le Barreau a dû faire un travail remarquable aussi parce qu'on est dans le détail. Chaque petit amendement ou sous-amendement exige une minutie, un soin remarquable. Ça a été fourni par tout le monde. Alors, bravo, et je les remercie également. Alors, merci à l'équipe, et j'aurai l'occasion de vous le transmettre autrement, mais je voulais que ce soit inscrit dans les notes de cette commission.

Le Président (M. Lachance): Merci, M. le ministre. Mme la députée de Bourassa, pour vos propos finaux.

Mme Michèle Lamquin-Éthier

Mme Lamquin-Éthier: Alors, permettez-moi également, M. le Président, de vous remercier et de remercier nos collègues ministériels. Il va de soi que des remerciements et des bons voeux sont adressés à Me Pleau qui aborde des responsabilités extrêmement importantes à titre de greffier auprès du Conseil exécutif. Et je pense que, M. le ministre, nous nous rangeons à ce que vous avez dit, et notre reconnaissance également pour les 25 années de service qu'il a rendues à tout le monde.

n(12 h 30)n

Nous remercions également les légistes. J'imagine que vous avez travaillé très fort, ça paraît. Je voudrais remercier plus particulièrement toutes les personnes, les organismes, les individus, des juristes, dont Me David, qui ont participé aux travaux de la présente commission ? évidemment, leur éclairage a été extrêmement utile ? remercier également le Barreau, plus particulièrement Me Vadboncoeur, de même que tous les professionnels qui se sont joints à vous, Me Vadboncoeur, remercier également la Chambre des notaires, la Chambre des huissiers et d'autres personnes. Je voudrais remercier mes collègues dont la participation a également été extrêmement constructive, plus particulièrement mon collègue de Chapleau, ma collègue de Viger et d'autres collègues qui ont prêté main-forte, je pense, aux travaux de cette commission. Et, encore une fois, ça a été extrêmement important.

Et je suis heureuse, M. le ministre, que vous ayez convenu de faire l'évaluation de la présente réforme, et ce, dans le meilleur intérêt des justiciables, pour nous assurer que les objectifs que vous poursuivez vont être atteints et principalement dans le meilleur intérêt des justiciables. C'est pour eux que, comme législateurs, nous avons des préoccupations, et c'est envers eux également qu'on a des responsabilités.

M. Bégin: Je voudrais remercier mes collègues qui m'ont aidé et particulièrement M. le président qui a été particulièrement alerte et vraiment qui a permis des débats tout à fait corrects entre nous. Merci infiniment, tout le monde, et ceux qui nous ont accompagnés...

Mme Lamquin-Éthier: Puis des remerciements à Maître... au secrétaire, oui.

M. Bégin: ...le secrétaire et tous ceux qui nous ont aidés.

Mme Lamquin-Éthier: Et à tous les membres de cette Assemblée également.

Le Président (M. Lachance): Alors, sur ce, sur ces remarques...

M. Bégin: M. le Président, un dernier mot.

Le Président (M. Lachance): Oui.

M. Bégin: C'est le plus beau cadeau de fête qu'on pouvait me faire.

Une voix: J'allais le dire. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Lachance): Ah bon! C'est la fête de M. le ministre. Joyeux anniversaire, M. le ministre!

M. Bégin: C'est aujourd'hui, alors c'est un beau cadeau.

Mme Lamquin-Éthier: Vous me permettrez de vous serrer la main.

Le Président (M. Lachance): Alors, ceci met fin à la sixième séance de l'étude détaillée du projet de loi n° 54, et, comme la commission des institutions a accompli son mandat, j'ajourne les travaux sine die.

(Suspension de la séance à 12 h 32)

 

(Reprise à 15 h 34)

Consultations particulières
sur le projet de loi n° 84

Auditions (suite)

Le Président (M. Lachance): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, la commission des institutions reprend ses travaux cet après-midi, et je rappelle le mandat de la commission, qui est de poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 84, Loi instituant l'union civile et établissant de nouvelles règles de filiation. Est-ce qu'on considère ça comme une nouvelle séance?

Une voix: Non, monsieur.

Le Président (M. Lachance): Très bien. Alors, j'invite...

Des voix: ...

Une voix: Quorum?

Le Président (M. Lachance): Ça m'étonnerait. De toute façon, on vous nous le dire. C'est probablement le quorum.

Une voix: ...

Le Président (M. Lachance): Oui, c'est un quorum. Alors, voilà. Nous allons, avec un peu de retard, permettre à la Coalition québécoise pour la reconnaissance des conjoints et conjointes de même sexe de pouvoir s'exprimer. Vous connaissez les règles du jeu: vous avez un maximum de 15 minutes pour nous faire part de vos commentaires, et, par la suite, des échanges avec les parlementaires. Alors, j'invite la porte-parole à bien vouloir s'identifier, ainsi que les personnes qui l'accompagnent, et je vous souhaite la bienvenue.

Coalition québécoise pour la reconnaissance
des conjoints et conjointes de même sexe

Mme Demczuk (Irène): Merci, M. le Président. Merci de nous avoir invités à cette commission parlementaire. Alors, je me présente, Irène Demczuk, je suis coordonnatrice de la Coalition québécoise pour la reconnaissance des conjoints et conjointes de même sexe. C'est une large coalition qui regroupe les centrales syndicales CSN, CSQ, FTQ, la Fédération des femmes du Québec et les principaux organismes de défense des droits des gais et lesbiennes. Alors, c'est pour ça qu'on est nombreux aujourd'hui. Alors, à ma droite, M. Pierre Valois, qui est président de la Table de concertation des lesbiennes et des gais du Québec et membre de cette Coalition; toujours à ma droite, Mme Nicole Paquette, qui est coordonnatrice de l'Association des mères lesbiennes; à ma gauche, Mme Annick Gariépy, M. Ludovic Maillé-Prévost, Mme Julie Pétrin, qui sont trois jeunes qui ont un parent homosexuel.

Alors, la Coalition québécoise pour la reconnaissance des conjoints et conjointes de même sexe accueille favorablement le projet de loi n° 84 sur l'union civile. Nous saluons cette initiative historique du ministre de la Justice, M. Paul Bégin, qui vise à éliminer la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle dans l'une des plus importantes lois du Québec, le Code civil, de même que dans les lois sociales et administratives. En déposant devant l'Assemblée nationale le projet de loi n° 84, le ministre de la Justice a envoyé un message sans équivoque à la population, à savoir que les personnes homosexuelles, leur couple et leurs enfants ont droit au même respect, à la même dignité et à la même égalité juridique que l'ensemble des couples et des familles du Québec.

Nous tenons à souligner l'écoute exemplaire du ministre et des membres de la commission ainsi que l'immense travail législatif accompli depuis la commission parlementaire sur l'avant-projet de loi en février dernier. Nous avions recommandé beaucoup de modifications lors de la dernière commission parlementaire dont, parmi les plus importantes, la pleine reconnaissance des droits parentaux aux couples de même sexe en matière de filiation et d'adoption ainsi que l'accès à l'union civile à tous les couples non mariés, peu importe leur orientation sexuelle, afin de ne pas créer de stigmatisation. Par sa clarté, sa cohérence et son caractère inclusif, le projet de loi n° 84 correspond à toutes nos attentes. C'est un fait rare en démocratie, c'est un fait d'autant plus rare lorsqu'on appartient à une minorité sociale dont la discrimination a été si longtemps banalisée, et je me dois de le souligner. Les lesbiennes et les gais, qui représentent jusqu'à un demi-million de personnes adultes au Québec, leurs parents, leur famille, leurs alliés et de nombreux experts venus témoigner en commission parlementaire ont été entendus. Et cela, M. Bégin, jamais nous ne l'oublierons.

Le projet de loi n° 84, s'il est adopté, aura un impact social aussi significatif dans la vie quotidienne des gais et lesbiennes que la décriminalisation de l'homosexualité en 1969, car il viendra sceller la fin de la discrimination dans nos lois québécoises. On peut certes anticiper que ce projet de loi sera, dans les années futures, un phare en matière d'égalité juridique pour les personnes homosexuelles tant dans les provinces canadiennes qu'au plan international, en particulier pour les pays de tradition civiliste. Il y a 25 ans cette année, le Québec faisait figure de pionnier en incluant dans sa Charte des droits et libertés de la personne un interdit de discrimination fondée sur l'orientation sexuelle. Avec l'adoption de ce projet de loi, le Québec reprendra son rôle de chef de file mondial au côté des Pays-Bas en matière de reconnaissance du droit à l'égalité pour les personnes homosexuelles.

Ceci étant dit, nos commentaires sur le projet de loi seront brefs. Nous avons déjà souligné l'excellent travail de rédaction de cette législation, sa clarté, sa cohérence. Nous aimerions toutefois porter à votre attention le libellé de l'article 577.1 du projet de loi que nous avons soumis aux membres de la Coalition et qui sont d'avis qu'il devrait être clarifié par une formulation non genrée. Alors, dans le mémoire, il y a une erreur: On ne parle pas de l'article 540 mais 577.1.

Outre cet article qu'on porte à votre attention, notre deuxième commentaire s'adresse à ceux qui doutent encore de la pertinence d'inclure dans ce projet de loi le droit à la filiation pour les couples de même sexe et pour leurs enfants communs. Je ferai ici une série de remarques. Le Québec n'est pas la première société dans le monde à offrir aux couples de même sexe des droits parentaux, six provinces canadiennes permettent déjà aux couples de même sexe d'adopter des enfants. Elles accordent de plus à la conjointe d'une mère lesbienne avec qui elle partage un projet parental le droit d'adopter son enfant. Ce sont, comme vous le savez, l'Ontario, la Colombie-Britannique, l'Alberta, la Saskatchewan, la Nouvelle-Écosse et Terre-Neuve tout dernièrement. Le Manitoba a déposé un projet de loi en ce sens, et, ailleurs dans le monde, les droits parentaux accordés aux conjoints de parents homosexuels sont reconnus: au Danemark, en Suède et en Norvège.

n(15 h 40)n

De plus, les couples de même sexe ont accès aux services d'adoption publics en Islande, aux Pays-Bas, aux États-Unis, notamment dans les États du Vermont et du New Jersey. Le 7 mai dernier, la semaine dernière donc, le premier ministre d'Angleterre a annoncé son intention d'ouvrir l'adoption aux couples de même sexe. L'objectif du gouvernement, et je cite, «est d'augmenter les chances pour les enfants, à travers l'adoption, de grandir dans une famille stable et aimante», a déclaré le ministre de la Santé de l'Angleterre à la Chambre des communes.

Deuxième remarque, le cas de l'Angleterre est intéressant, car l'annonce du premier ministre survient après la décision récente de la Cour européenne des droits de l'homme dans la cause d'un enseignant qui réclamait le droit de pouvoir adopter un enfant en France. Dans son jugement, la Cour européenne ne s'est prononcée ni pour ni contre l'adoption d'enfants par des couples de même sexe, faut-il le rappeler. La Cour a plutôt reconnu la liberté d'action des États sur cette question et a renvoyé le requérant à la réglementation française en matière d'adoption. Ainsi, rien ne nous indique que la décision de la Cour européenne restreindra l'accès des couples de même sexe aux services d'adoption publics dans les pays européens. De plus, la décision de la Cour européenne devra avoir peu d'influence au Canada et au Québec, car le Canada n'est pas signataire de cette Convention européenne des droits de l'homme et parce que la majorité des provinces accorde déjà la possibilité pour les couples de même sexe de recourir aux services d'adoption publics.

Troisième remarque, tous ces pays et provinces canadiennes ont accordé des droits parentaux aux couples homosexuels en se fondant sur des études psychosociales concernant le développement des enfants ayant un ou deux parents homosexuels. À cet égard, les études scientifiques sérieuses... Et vous entendrez demain le Centre d'orientation sexuelle de l'Université McGill qui vous fournira une liste exhaustive, on en a cité quelques-unes, ici, dans le mémoire, mais très exhaustive en ce qui concerne ces études. Or, ces études ont toutes démontré trois grandes choses, à savoir:

1° que les enfants ayant un parent homosexuel n'ont pas plus de chance que les enfants ayant un parent hétérosexuel de développer une orientation homosexuelle;

2° que ces enfants n'ont pas plus de problèmes d'identité sexuelle que les enfants ayant été éduqués dans une famille hétérosexuelle; et

3° que ces enfants ne sont pas plus à risque d'abus sexuels s'ils sont éduqués par un parent homosexuel.

En bref, toutes ces études concluent que l'homosexualité du parent ne compromet ni le développement psychosocial ni la sécurité de l'enfant. Ces études concluent que les enfants qui sont éduqués par un parent homosexuel ont un développement psychosocial normal.

Ces faits, donc quatrième remarque, ont été attestés par l'Association des pédiatres américains, par l'Association des psychologues américains de même que l'Association des travailleurs sociaux américains, qui accueillent toutes favorablement la reconnaissance de droits parentaux aux personnes homosexuelles. Malheureusement, nos ordres professionnels au Québec n'ont pas autant réfléchi sur la question que leurs confrères américains et, à ma connaissance, n'ont pas encore affirmé de position publique à cet effet.

La cinquième remarque concernera les modèles parentaux que peuvent procurer deux pères ou deux mères. Soulignons, à titre illustratif, que, dans le cas d'un couple de femmes, la mère non biologique peut contribuer autant que la mère biologique aux soins et à l'éducation des enfants, en plus d'assumer une part des frais relatifs à l'entretien de ces derniers. Elle représente généralement une figure parentale pour l'enfant et un modèle souvent différent ? et je souligne différent ? de celui que lui offre sa mère. En effet, la complémentarité du couple, son altérité, n'est pas uniquement affaire de sexe biologique. Ce n'est pas parce que les parents ont en commun un sexe biologique féminin qu'ils adoptent nécessairement le même rôle, font preuve des mêmes aptitudes et habilités, ont la même personnalité et la même relation à l'enfant. En ce sens, deux parents de même sexe peuvent offrir à l'enfant des modèles différents d'adultes aimants, sensibles et responsables.

De plus, on ne doit pas présumer parce que l'enfant est éduqué par deux mères qu'il souffrira d'un manque de modèle masculin. La plupart des couples de même sexe qui ont des enfants ont réfléchi longuement à cette question avant de mettre un enfant au monde et s'organisent par la suite pour que l'enfant ait dans son entourage des adultes signifiants de sexe opposé. Et, en définitive, soyons conscients également que ce sont les enfants eux-mêmes qui choisissent qui leur servira de modèle dans la conduite de leur vie.

Sixième remarque, l'orientation sexuelle est quelque chose de fluide qui peut varier au cours d'une vie. Ainsi, des adultes sont devenus homosexuels après une certaine période de vie conjugale avec une personne de sexe opposé. Or, le projet de loi n° 84 ne remet pas en question la filiation des enfants nés d'une union hétérosexuelle antérieure. Ces enfants ont juridiquement un père et une mère, et cela demeurera ainsi même si le parent homosexuel vit avec un conjoint de même sexe en famille recomposée.

Septième remarque, le projet de loi n° 84 clarifie et réglemente notamment la filiation des enfants nés par le biais de la procréation médicalement assistée, que celle-ci se réalise par le biais d'un donneur connu ou anonyme. Le projet de loi ne réglemente pas l'accès des lesbiennes aux cliniques de fertilité, ce n'est pas là son objectif, pas plus qu'il n'ouvre la voie au développement de nouvelles technologies de reproduction humaine. Ces questions, comme vous le savez, sont présentement l'objet d'un projet de loi fédéral. Le projet de loi n° 84 accorde aux couples de lesbiennes qui se prévaudront de l'union civile les mêmes règles de filiation que celles consenties aux personnes mariées qui ont recours à la procréation médicalement assistée.

Huitième remarque, le projet de loi n° 84, en modifiant les règles de la filiation, permettra désormais à un enfant de se voir reconnaître deux parents de même sexe. Cette modification législative permettra aussi aux couples de même sexe d'être évalués comme candidats adoptants. Je vous rappelle que l'adoption se réalise toujours dans l'intérêt supérieur de l'enfant. L'adoption n'est pas un droit, mais l'accès aux services publics d'adoption en est un. De plus, est-il nécessaire de rappeler que les centres jeunesse du Québec évaluent les candidats à l'adoption selon des critères rigoureux. Si un individu ou un couple ne présente pas les qualités nécessaires pour devenir le parent d'un enfant particulier, il n'est pas sélectionné. Si l'on considère qu'un enfant particulier n'a pas les ressources personnelles nécessaires pour vivre dans une famille homoparentale, cet enfant ne sera sans doute pas confié à un couple homosexuel.

Neuvième remarque, les objectifs poursuivis par le projet de loi n° 84 s'inscrivent dans la foulée des orientations ministérielles du ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec intitulées L'adaptation des services sociaux et de santé aux réalités homosexuelles publiées en 1997. Il y a cinq ans déjà, ce ministère enjoignait tous les services sociaux, y compris les services d'adoption, à éliminer leurs pratiques discriminatoires envers les personnes homosexuelles. Dès 1992, le ministère a mis sur pied un programme de formation à l'intention des intervenants du réseau à cet effet. En 2002, plus de 8 600 intervenants du réseau de la santé, des services sociaux et de l'éducation ont suivi cette formation. On doit en conclure que le réseau est déjà sensibilisé, pour une bonne part, à la question des familles homoparentales et qu'il est prêt à appliquer les nouvelles dispositions en matière de filiation et d'adoption préconisées par le projet de loi n° 84. Et j'aimerais déposer à cette commission ces orientations ministérielles du ministère de la Santé et des Services sociaux de même que les programmes de formation du ministère de la Santé.

Le Président (M. Paquin): Alors, j'accueille la pièce.

Mme Demczuk (Irène): Alors, merci. Je conclurai en disant que, à tous ceux qui invoquent des motifs moraux ou religieux pour contrer le projet de loi sur l'union civile, je citerai simplement ces paroles de M. Jean-Claude Leclerc publiées dans Le Devoir du lundi 13 mai 2002. Alors: «L'Église catholique est une Église de compassion, mais prêcher la compassion à l'endroit des homosexuels ne saurait guère compenser le jugement porté contre eux. Qu'on le veuille ou non, des couples de même sexe ont des enfants, vivent en famille et partagent des valeurs familiales avec le reste de la société québécoise. Ce phénomène ira en s'accroissant car le désir de fonder une famille traverse toutes les orientations sexuelles.»

Ce que nous vous demandons et ce que le projet de loi n° 84 accorde, ce sont des conditions plus favorables à l'épanouissement des couples de même sexe et de leurs enfants. Nous le demandons afin de protéger ceux et celles d'entre nous qui prennent soin des enfants sans pouvoir bénéficier de la reconnaissance juridique du statut de parent; nous le réclamons afin que nos enfants soient mieux protégés en cas de maladie, de séparation ou de décès de leurs parents biologiques; nous le réclamons, enfin, afin qu'ils n'aient plus besoin de cacher leur réalité familiale afin de se protéger du jugement et des préjugés des autres.

n(15 h 50)n

Considérant ces remarques, la Coalition québécoise pour la reconnaissance des conjoints et conjointes de même sexe invite tous les partis politiques du Québec représentés à l'Assemblée nationale à donner le même appui unanime qu'ils ont accordé en 1999 à la loi 32 au projet de loi n° 84 sur l'union civile. Et nous aimerions également déposer à cette commission un mémoire qui a été rédigé par Mme Annick Gariépy, qui est à ma gauche et qui donne ses commentaires, livre ses commentaires en ce qui concerne la rédaction de ce projet de loi.

Le Président (M. Paquin): Nous l'avions déjà reçu et nous l'avons déjà distribué.

Mme Demczuk (Irène): Vous l'avez reçu.

Le Président (M. Paquin): Alors, je vous remercie beaucoup, madame. Alors, du côté de la formation formant le gouvernement, il y a combien de personnes qui veulent intervenir? Alors, M. le ministre.

M. Bégin: Très rapidement, parce que, étant donné l'accord complet du groupe avec le projet, il m'apparaît difficile d'échanger en profondeur sur des volets qui seraient à modifier, puisqu'on s'entend. Mais j'aimerais relever le point 9 de votre mémoire, qui se trouve également à la page 9. Là-dessus, vous dites que le ministère de la Santé et des Services sociaux aurait, depuis quelques années, plusieurs années, fait les documents nécessaires pour se rendre prêt... ou rendre ses intervenants prêts à accepter l'arrivée d'un tel processus. Lorsque les gens des centres jeunesse étaient venus, ils nous avaient dit que dans les faits, jusqu'en septembre dernier, ils n'acceptaient pas en fait de reconnaître l'adoption par un couple homosexuel.

Est-ce que vous avez pu savoir, depuis la comparution, qui date quand même déjà de presque trois mois, si, dans les faits, il y a eu des changements de comportements des centres jeunesse? Est-ce qu'on a accepté finalement l'adoption parce que jusqu'alors... Et je pense que Mme Paquette était de celles qui avaient tenté de se prévaloir de ce droit-là et ça lui avait été refusé. Est-ce que vous savez donc s'il y a eu des changements non seulement dans le discours, mais dans l'action?

Mme Demczuk (Irène): Alors, je voudrais rappeler d'abord que les centres jeunesse avaient souligné qu'il y avait une ambiguïté juridique dans le Code civil en ce qui concerne la filiation accordée à deux parents de même sexe. Les centres jeunesse ont fait parvenir à leurs intervenants qui travaillent auprès des familles d'accueil et dans les services d'adoption une directive, à la fin du mois de septembre, leur enjoignant maintenant d'évaluer les couples de même sexe qui voudront adopter des enfants. Depuis donc la dernière commission parlementaire, les centres jeunesse nous ont contactés, au ministère de la Santé et des Services sociaux, afin que nous puissions former les intervenants qui travaillent spécifiquement au niveau de l'adoption. On peut penser, en fait, que les centres jeunesse vont aller de l'avant avec cette ouverture.

Et je veux rappeler également qu'il n'y avait pas d'empêchement dans le Code civil comme tel. Les articles sur l'adoption n'excluaient pas d'emblée les couples de même sexe mais ne garantissaient pas non plus la possibilité pour ces couples de se proposer comme candidats adoptants.

M. Bégin: Une deuxième question, et après je donnerai la parole à mon collègue. Lorsque nous étions en commission parlementaire, était tombé à ce moment-là sur la table un mémoire, plus qu'un mémoire, un document essentiel venant de l'Association américaine des pédiatres. Ça fait, encore une fois, un certain temps, et c'était quelque chose de majeur. Est-ce que, à votre connaissance, il y a eu, je ne sais pas, moi, des réactions, des rapports contradictoires qui ont pu être déposés depuis ce temps-là ou si le document a continué à faire son chemin? Parce qu'il était extrêmement important, en termes d'impact, puisqu'il était fait au nom de l'Association des pédiatres ? c'est 55 000 personnes ? et que ça couvrait une grande période de temps. Donc, ça enlevait l'argumentation à l'effet que ça avait été expérimenté de façon trop courte ou encore sur des nombres de personnes trop petits. Est-ce que vous avez pu voir dans la littérature des changements à cet égard?

Mme Demczuk (Irène): Évidemment, l'espace de trois mois, c'est très long, je peux vous dire, comme sociologue, d'établir des recherches. Il ne faudrait cependant pas invalider des conclusions de recherche dans le domaine psychosocial. Nous ne sommes pas dans le domaine des sciences biologiques. Alors, dans le domaine psychosocial et dans le domaine de la sociologie, quand on emploie une méthode où on utilise des échantillons de 20 personnes, 60 personnes ou 200 personnes, comme ça nous a été cité ce matin, ce sont des échantillons qui peuvent être considérés, en regard d'une question de recherche, comme étant valides et fiables. Ça dépend de ce que vous poursuivez comme objectif dans votre recherche.

À votre question, M. Bégin, il n'y a pas eu, de la part, à ma connaissance, de pédiatres ou de l'Association des pédiatres du Québec ou de l'Ordre des psychologues du Québec, une position qui irait à l'encontre de celle de l'Association des pédiatres américains. Nous avons, comme je le disais plus tôt, des signes qui vont à l'inverse, puisqu'ils ne se sont pas... ces ordres professionnels ne se sont pas prononcés jusqu'à maintenant sur cette question. Et j'aimerais ajouter que, aujourd'hui, se tient un colloque important, l'ACFAS, à l'Université Laval, et une journée entière de colloque est consacrée à cette question, avec des experts de la France et des experts du Québec. Ça se passe aujourd'hui.

M. Bégin: Nous avons le sens de la simultanéité. Ha, ha, ha!

M. Valois (Pierre): Si vous me permettez, j'ai cru comprendre dans votre question, M. le ministre...

Le Président (M. Paquin): Oui, M. Valois.

M. Valois (Pierre): Est-ce qu'il y a des suites aux États-Unis de ce... Et, bon, on n'a pas fait de recherche systématique de ça, mais je suis abonné, comme président de la table de concertation, à plusieurs... pas des engins de recherche, mais disons des groupes qui font systématiquement la recherche des nouvelles qui, bon... de tout ce qui évolue à travers le monde. Et les seules suites qu'on a pu voir à ce niveau-là, c'était, dans les deux ou trois jours qui ont suivi l'annonce de l'Association des pédiatres, deux ou trois commentaires d'inquiétude, je dirais, et, depuis ce temps-là, plus rien.

Alors, ça nous donne deux indices. Un, c'est que, finalement, après deux ou trois interventions individuelles, là, de gens qui étaient inquiets, on croit voir là que, finalement, ça n'a pas fait de levée de boucliers, pour le moins, parce que c'est comme disparu, comme effet. Et donc, on espère simplement que, la lumière ayant été faite, que le... enfin, l'obscurantisme disparaisse tranquillement puis qu'on arrive à des conclusions. Mais, donc, je dirais que la principale réponse, là, que je pourrais vous donner là-dessus, c'est que ça n'a pas fait de levée de boucliers et donc ça devrait aller dans le bon sens.

Documents déposés

Le Président (M. Paquin): Alors, je vais donner bientôt la parole au député de Saint-Hyacinthe, mais, avant, je voudrais préciser avec vous, d'abord, que le mémoire de Mme Gariépy va être reçu à titre de mémoire. Il a déjà été distribué. Par ailleurs, je disais que j'accueillais la pièce, mais, à ma connaissance, il y a trois documents que vous avez déposés. Alors, je voudrais préciser avec vous. Donc, il y a L'adaptation des services sociaux et de santé aux réalités homosexuelles, premier document; deuxième document, Pour une nouvelle vision de l'homosexualité ? Programme de formation, Guide du participant; et Adapter nos interventions aux réalités homosexuelles. C'est bien ça, les trois documents?

Mme Demczuk (Irène): Alors, dans l'ordre inverse, je dirais. Le premier document est sur les orientations ministérielles du ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec, et le cahier jaune Pour une nouvelle vision de l'homosexualité, et Adapter nos interventions aux réalités homosexuelles, volet Jeunes ? parce que c'est une journée sur l'adaptation de nos interventions aux jeunes et à leurs familles ? alors c'est le programme de formation offert par le ministère depuis de nombreuses années.

Le Président (M. Paquin): D'accord. Je reçois les trois documents dans l'ordre que vous avez indiqué, et ils vont être cotés en conséquence.

Mme Demczuk (Irène): D'accord.

Le Président (M. Paquin): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Dion: M. le Président, merci. Alors, merci de venir nous exposer votre point de vue sur cette question extrêmement importante mais aussi extrêmement délicate. Quand on parle de choses comme l'orientation sexuelle, comme de l'amour, comme des enfants, on marche sur un fil qui est très mince, et il est très facile de mettre le pied à côté et de blesser ou l'un ou l'autre. Vous connaissez déjà ma position dans le domaine. Bien sûr, ma position va dans le sens d'un traitement égalitaire de tous les citoyens sans égard aux convictions religieuses de chacune. Mais j'ai quand même deux questions que je voudrais vous poser, deux petites questions.

La première. Je suis un peu mal à l'aise quand, pour défendre la possibilité pour les homosexuels d'adopter des enfants, on parle de droits à avoir des enfants. Pourquoi? C'est vrai que c'est facile pour moi de dire ce que je suis en train de vous dire parce que j'ai des enfants, j'ai le privilège d'avoir des enfants. Bon. Mais il me semble que le fait d'avoir des enfants n'est pas du domaine du droit. C'est: On a des enfants ou on n'en a pas. Il y a des gens qui ont des enfants parce qu'ils l'ont choisi, d'autres sans le vouloir, et d'autres qui le choisissent mais qui ne peuvent pas en avoir. Alors, qu'est-ce que vous dites de ça?

Mme Demczuk (Irène): Pour vous rassurer là-dessus, je n'ai jamais dit le droit d'avoir des enfants, je parle du désir.

M. Dion: Non, je veux avoir votre réaction, qu'est-ce que vous en pensez?

n(16 heures)n

Mme Demczuk (Irène): Oui. Je pense que le désir d'enfants, le désir de fonder une famille est quelque chose qui traverse toutes les orientations sexuelles. Il faut bien comprendre que les personnes homosexuelles, les jeunes qui sont en questionnement sur leur orientation sexuelle et qui deviendront plus tard les adultes qui ont cette orientation sexuelle grandissent avec les mêmes attentes que les adolescents qui découvriront leur hétérosexualité et la vivront. Alors, c'est un désir qui est là et qui donne lieu à, évidemment, la fondation de familles. Et je partage tout à fait votre avis ? et je pense que c'est l'avis de tous les membres de la Coalition ? le désir d'enfant n'est pas un droit et je dirais que le désir d'enfant n'est pas un choix. Je pense que ce projet de loi n'a pas pour objectif de répondre à des droits ou à des choix individuels. Je pense que ce projet de loi a pour objectif de protéger les enfants qui existent déjà aujourd'hui, qui sont dans nos familles puisque leur orientation sexuelle est quelque chose de fluide. Ces enfants aussi donc ont besoin d'être protégés. Mais, je suis tout à fait d'avis ce n'est pas un droit et je rajouterais que l'adoption n'est pas un droit également, comme je l'ai dit tout à l'heure, ça doit se faire dans l'intérêt de l'enfant.

M. Dion: Alors, je vous remercie de votre réponse. Je vais vous poser une question d'un tout autre ordre. Vous avez très bien... D'ailleurs, ce que vous venez de dire est vraiment, est bien dans le sens du document qu'à déposé Mme Gariépy, n'est-ce pas? C'est vraiment dans cette orientation-là qu'elle a fait son mémoire qui est très intéressant.

C'est la question suivante. Vous avez parlé... Vous avez bien fait la distinction entre les questions de religion et de l'État et tout ça tout à l'heure dans votre exposé, et je suis bien d'accord avec vous. Mais, que dites-vous aux gens ? parce qu'on a des gens qui nous écrivent et qui nous envoient des lettres qui nous disent leurs points de vue ? qui disent: Vous savez, le Québec s'est développé dans une culture influencée par la religion, en particulier la religion catholique, mais des religions chrétiennes pour le moins, et qui ont influencé profondément notre culture et, là, vous êtes en train de changer des choses qui sont de notre culture et qui ne sont pas seulement une question religieuse ou une question de convictions religieuses ou quoi que ce soit, vous touchez à quelque chose qui fait partie de notre culture au Québec? Comment répondez-vous à ce genre de questionnement des gens?

Mme Demczuk (Irène): Je pense qu'il n'y a aucune citation dans la Bible qui interdirait les familles homoparentales. Je pense que la religion catholique est une religion d'amour et de compassion. Je pense également que... et c'est pour ça que je pense des représentants de l'Assemblée des évêques sont un peu mal à l'aise aussi sur cette question et reconnaissent l'importance de protéger ces familles.

Les familles homoparentales, les familles que nous fondons, nous ne visons pas à détruire la famille, cela va de soi. Je pense que nous partageons les mêmes valeurs familiales que l'ensemble de la population du Québec. À ceux qui voient là-dedans un sacrilège, je pense qu'il faut prendre acte que, comme je le disais, ces enfants existent et il y en aura d'autres dans l'avenir également puisque, qu'est-ce que vous voulez? l'orientation sexuelle n'est pas quelque chose de fixé à la naissance, c'est quelque chose qui peut changer au cours d'une vie et qui aura, comme il y en a eu, dans le passé, toujours des enfants des couples qui vont se séparer sur cette question et des enfants qui vont grandir avec un parent homosexuel. C'est ce que je répondrais. Je ne pense pas que... Et je pense que si on...

Vous savez, moi, je fais des recherches sur cette question-là depuis de nombreuses années; l'Église s'appuie aussi beaucoup sur une conception qu'il n'existerait que la sexualité procréative dans la nature et chez les êtres humains. Je pense qu'on se mentirait comme société si on ne voyait que la sexualité reproductive comme la seule dimension dans la vie d'un couple parce que, si c'était le cas, écoutez, avec 1,4 enfant au Québec, les couples hétérosexuels ne se rencontreraient pas très souvent lorsqu'on sait qu'en moyenne les femmes et les hommes meurent au quatrième âge.

Alors, vous savez, il y a une diversité des comportements sexuels dans la nature. Il y a une diversité des orientations sexuelles chez les êtres humains. Et je pense que l'Église aurait tout intérêt comme d'autres églises chrétiennes et je vais citer l'Église unie du Canada qui est non pas une secte mais la plus grande Église protestante du Canada, qui accepte qu'il y ait dans ses rangs des hommes et des femmes homosexuels qui sont pasteurs qui acceptent de bénir les unions entre personnes de même sexe, et qui accueillent les familles homoparentales. Je pense qu'il y a d'autres églises chrétiennes qui sont des modèles et qui n'ont pas attendu que l'État donne l'exemple pour pouvoir actualiser leur compassion. Et je souhaite que l'Église catholique chemine en ce sens.

Le Président (M. Paquin): Merci. Je... Merci, M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Dion: ...pas essentiellement instrumental, mais plutôt relationnel.

Le Président (M. Paquin): Alors, je vous remercie beaucoup. Je profite du fait qu'il y a un créneau qui s'est dégagé pour prendre un cinq minutes supplémentaires au bénéfice des membres de la commission pour demander à Mme Gariépy si elle voulait nous dire brièvement: Si on devait retenir un ou deux éléments de son mémoire, ce serait quoi qu'elle souhaiterait qu'on garde comme trace?

Mme Gariépy (Annick): Bien, en fait, aujourd'hui ce n'est pas seulement votre fête, M. le ministre, aujourd'hui, c'est la Journée internationale de la famille. On est en plein dans la semaine québécoise des familles. Et puis je pense que toutes les familles doivent être reconnues et valorisées, la mienne y compris. Et c'est dans ce sens-là que j'ai rédigé un deuxième mémoire, un deuxième témoignage parce que, suite à ma première présentation, en février dernier, il y a beaucoup de choses qui ont changé dans ma vie. Moi, je peux dire que déjà le projet de loi n'est même pas encore adopté et ça change déjà des choses dans ma famille, à l'intérieur même de ma famille. Alors, c'est dans ce but-là que j'ai voulu mettre sur papier... j'ai réalisé que j'avais parlé au nom de plusieurs enfants qui restent silencieux malheureusement, et c'est pour ça que je récidive avec un deuxième témoignage.

Le Président (M. Paquin): Je vous remercie beaucoup. Alors, Mme la critique de l'opposition.

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. M. le Président, vous me permettrez d'accueillir Mme Demczuk, M. Valois, Mme Paquette, et j'aimerais de nouveau féliciter Mme Gariépy, M. Ludovic Maillé-Prévost et Mme Pétrin. Grâce à vos témoignages, nous avons vécu des moments importants lors des auditions, et soyez assurés que nous gardons présentes en mémoire les paroles que vous avez prononcées ces journées-là. Alors, n'ayez pas d'inquiétude.

Mme Gariépy, vous venez de dire ? et je prends votre remarque au vol ? que déjà dans votre famille des choses ont changé. Est-ce que vous pouvez lever le voile sur ce qui a changé déjà ou ce qui commence à changer dans votre famille?

Mme Gariépy (Annick): Bien, comme je l'ai dit la dernière fois, dans ma famille ça a été quelque chose qui n'était pas discuté autour de la table au souper, l'homosexualité de ma mère, mais depuis... Je me rappelle, je peux vous raconter peut-être une anecdote. Ma mère a entendu par les branches que je présentais en commission parlementaire mon mémoire, et donc elle avait syntonisé à la télé le poste où on peut entendre les commissions, et puis je le savais. Quand je suis revenue à la maison, le premier téléphone a été très difficile, je vous avoue qu'il y a eu des larmes. J'ai téléphoné à mère puis je lui ai demandé: Maman, est-ce que tu m'as vue à la télé? Est-ce que j'ai bien parlé? Elle a dit: Tu étais très bonne, tu as bien fait ça, ma fille. Puis ça, ça vaut... Pour moi, là, son assentiment était plus important que tout, encore plus important que ma présence ici. C'est que finalement ça a pu ouvrir la discussion, puis j'ai pu finalement lui dire que j'étais fière, puis que, la honte que j'avais ressentie pendant tant d'années, bien, je ne la traînais plus, et puis que j'étais devenue plus forte grâce à ça. Puis je pense que c'est le message que je peux encore une fois vous envoyer, c'est celui-là.

Mme Lamquin-Éthier: Vous êtes donc d'accord avec un commentaire qui se trouve au mémoire de la Coalition québécoise pour la reconnaissance des conjoints et conjointes du même sexe où il est dit qu'«on peut certes anticiper ce que ce projet de loi sera dans les années futures: un phare en matière d'égalité juridique pour les personnes homosexuelles, tant dans les provinces canadiennes qu'au plan international, et en particulier pour les pays de tradition civiliste». Donc, ce projet de loi là devrait avoir un impact extrêmement positif et à bien des égards.

Mme Gariépy (Annick): Je l'ai pensé comme je le dis dans mon deuxième témoignage qui dépasse l'affaire juridique, parce que, là, on atteint les préjugés, les regards auxquels on est souvent victime. Mais, c'est important, et je le précise encore une fois, que le projet de loi, s'il est adopté, il doit être accompagné d'une série d'actions pour faire reculer l'intolérance qu'il y a encore dans nos écoles, dans nos garderies, dans les différents ministères. Donc, il doit être accompagné de mesures sociales, dans les différents ministères, de programmes en conséquence.

n(16 h 10)n

Mme Lamquin-Éthier: Oui. Je vous rejoins particulièrement à ce sujet-là. On avait eu notamment le témoignage d'une institutrice qui nous avait expliqué comment il était difficile d'intervenir. Elle-même était lesbienne et se trouvait dans une situation extrêmement difficile où elle pouvait intervenir sur la cour d'école pour sanctionner des remarques ou des comportements qu'elle considérait... Puis on était tout à fait d'accord avec ça, et vous avez raison, oui, il va falloir que ce projet-là soit suivi de mesures concrètes. Et je peux vous confirmer ? je l'ai dit au ministre lors de notre intervention, lors de l'adoption du principe du projet de loi n° 84: Nous sommes intervenus en faveur et nous avons assuré le ministre de notre collaboration, et j'aimerais également vous le dire. Et je souhaite effectivement, comme vous le mentionnez dans votre mémoire, que vous puissiez assister du haut des gradins de l'Assemblée nationale à l'adoption du projet de loi.

Si vous me permettez, j'aimerais...

M. Bégin: ...vous êtes invités. Vous allez avoir un carton, s'il faut que vous en ayez un pour être là.

Mme Lamquin-Éthier: Mme Demczuk, pour revenir à votre mémoire qui revient sur les points importants puis qui apporte des précisions encore là extrêmement importantes, le point 7, une petite question: vous mentionnez: «Le projet de loi ne réglemente pas l'accès des lesbiennes aux cliniques de fertilité. Ce n'est pas là son objectif, pas plus qu'il n'ouvre la voie au développement des nouvelles technologies de reproduction humaine.»

Étant entendu que les lesbiennes doivent nécessairement avoir recours aux techniques de reproduction assistées, est-ce que vous ne souhaiteriez pas qu'un tel débat se fasse?

Mme Demczuk (Irène): Je pense qu'un débat sur les nouvelles technologies de reproduction humaine est un débat différent de celui de l'élimination de la discrimination à l'égard des personnes homosexuelles, notamment dans le Code civil. Je pense que ce débat commence à se faire au Canada avec le dépôt du projet de loi fédéral en la matière. Mais je veux simplement ici rappeler que l'accès, pour les lesbiennes, à une clinique de fertilité n'est pas illégale. Je veux aussi rappeler que beaucoup de lesbiennes qui ont un projet parental et donnent naissance à un enfant ne passent pas par des cliniques de fertilité, et c'est pour ça que je préfère l'épithète de parler de procréation alternative plutôt que médicalement assistée, puisque c'est une technique vieille comme le monde qu'on retrouve même dans la Bible.

Alors donc, je pense que ce que ça va permettre aux couples de lesbiennes, cet accès, cette filiation aussi, au fond, de pouvoir s'assurer que les enfants qu'elles mettent au monde soient protégés et que la conjointe de la mère puisse avoir des responsabilités. Parce que là, elle accomplit des devoirs mais ses responsabilités ne sont pas juridiquement enchâssées, je dirais. Donc...

Mais je ne pense pas que ça va ouvrir la voie... Écoutez, l'Ontario a accordé aux couples de lesbiennes et de gais le droit d'adopter, a réglementé la filiation, et nous n'avons pas vu, dans ces provinces canadiennes, que ce soit l'Ontario ou la Colombie-Britannique, une hausse de l'accès aux cliniques de fertilité. Nous n'avons pas vu que ça a permis le développement des nouvelles technologies de procréation humaine.

Et je voudrais rajouter un dernier point à l'effet que les communautés gaies et lesbiennes, leurs alliés, les membres donc de notre Coalition, ne sont pas d'accord avec l'utilisation des mères porteuses. Nos communautés ne supportent pas ça, ne supportent pas donc cette initiative. Alors, on est vraiment ici dans la réglementation des règles de filiation d'enfants qui sont déjà là ou d'enfants qui sont à naître et qui se trouveraient, si ce n'était pas du projet de loi n° 84, privés de droits élémentaires.

Le Président (M. Paquin): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Oui. Je vous remercie. Je ne voudrais pas revenir sur tout le débat, puisqu'on vous a entendus bien souvent. Dans le fond, on a un projet de loi bien simple, hein. Il ne faut pas penser qu'on est en train d'avoir quelque chose de compliqué. Je ne comprends pas d'ailleurs pourquoi on s'énerve tant que ça. Non, mais c'est d'une simplicité enfantine. On est en train de baliser en quelque sorte l'union de deux personnes, un nouveau type d'union qui est accessible aux couples homosexuels et aux couples hétérosexuels aussi.

Sur la question de l'adoption, l'adoption est permise déjà actuellement, et tout le débat autour de l'adoption, c'est un débat qui est de faire confiance à nos services sociaux, savoir comment ils vont s'organiser avec ça. J'imagine qu'il y a des professionnels compétents pour savoir de ne pas confier l'adoption à un couple, qu'il soit hétérosexuel ou homosexuel, à un couple qui n'est pas capable de l'élever. J'imagine que, si jamais ils ne sont pas bons, il serait peut-être bon qu'on les réforme. Ça ne veut pas dire que je suis d'accord avec tout ce qu'a fait votre gouvernement avec les services sociaux.

Mme Lamquin-Éthier: Vous avez bien raison.

M. Gautrin: Non, mais, ceci étant dit, deuxièmement, on crée un phénomène de coresponsabilité lorsqu'il y a un enfant qui naît suite à un projet de parentalité.

Vous suggérez une modification. Je ne la comprends pas. Donc, vous changez l'article 577.1. Bon, je vous rappelle exactement ce que vous nous...

Mme Demczuk (Irène): Alors, c'est juste qu'on a de la difficulté à comprendre la portée de ce nouvel article dans le Code civil, 577.1, et c'est la dernière phrase: «Lorsque aucun des parents n'a de lien biologique avec l'enfant, le rôle de chacun est déterminé, pour l'application des lois, dans le jugement d'adoption.»Alors, la question qu'on se posait, c'est: Comment le juge va-t-il pouvoir déterminer le rôle de chacun? Et notre seule inquiétude, c'est: Écoutez, nous vivons dans des sociétés où on ne cesse de plaquer ? et on appelle ça de l'hétérosexisme ? les rôles homme-femme sur les couples de même sexe. Alors, nous, c'est vraiment dans l'application. Nous souhaitons vivement que, quand un couple est formé de deux femmes et de deux hommes, nous n'attribuons pas à deux femmes, par exemple, à l'une d'entre elles, le rôle de père. Ce sont deux mères. Quand deux hommes vont pouvoir adopter des enfants ensemble, ce n'est pas qu'il y en a un qui a le rôle de la mère et l'autre du père. Ce sont deux pères. Et c'est juste une question de rôle que l'on trouve un peu ambiguë. Ce qu'on aurait peut-être préféré, c'est qu'on parle de déterminer les responsabilités de chacun, étant entendu que c'est un couple de même sexe.

M. Gautrin: Essentiellement, votre critique, c'est auprès du mot «rôle». Plutôt, vous préférez avoir les responsabilités et les devoirs de...

Mme Demczuk (Irène): Tout à fait.

M. Gautrin: Moi, j'utiliserais «devoirs» plutôt que «responsabilités». On aura à débattre là-dessus. Mais le terme «rôle», si je comprends bien, fait référence, à vous, aux schèmes psychologiques qu'on peut avoir recalqué dans les couples homosexuels, des schèmes qui sont des schèmes hétérosexuels, et vous ne voulez pas les voir appliquer, à l'heure actuelle, dans la loi. Est-ce que je comprends bien ce que vous...

Mme Demczuk (Irène): Nous souhaitons que ce ne soit pas interprété de cette façon.

M. Gautrin: O.K. C'était important que vous nous le disiez. Je m'excuse. Tout le monde a peut-être compris, mais, moi, je suis peut-être lent à comprendre et je veux comprendre bien ce que vous vouliez dire.

M. Valois (Pierre): Si vous me permettez. je crois que c'est parce que, dans plein d'endroits de réglementation et de lois, on précise que la mère aura tel rôle, le père aura tel rôle, et ça aurait été bien compliqué peut-être de tout changer ça. Nous ne disons pas: Changez tout ça, pour le moment. Nous disons simplement: Ça nous inquiète un peu qu'on détermine que, dans une union de deux pères, le père X sera le rôle de la mère et le père, vous savez? Bon, ça fait un peu bizarre. Alors, nous souhaitons simplement que, dans l'avenir, on continue à travailler à ces améliorations-là, puis que, dans un délai X, à un moment donné, on aménage ça de telle façon que les juges ne soient pas obligés d'accorder à un homme le rôle de mère et etc.

M. Gautrin: Par contre, le juge pourrait fixer les responsabilités de chacun. Je pense qu'il serait bon de prendre ceci comme papillon éventuel. Vous l'avez pris en note, M. le ministre?

Mme Demczuk (Irène): Peut-être que c'est...

M. Gautrin: Si vous ne l'avez pas pris en note, je vous le rappellerai lorsqu'on le fera article par article.

M. Bégin: ...dans les galées.

Le Président (M. Paquin): Alors, sur cette contribution positive, le mot de la fin avant qu'on vous remette...

Mme Demczuk (Irène): Alors, je dirais que, juste pour... C'est peut-être une formulation non genrée. Si on veut inclure la diversité de notre famille, il va falloir à l'avenir penser à des formulations non genrées. Alors, merci beaucoup de votre écoute, au nom des membres de la Coalition.

Le Président (M. Paquin): Alors, mesdames, messieurs de la Coalition québécoise de la reconnaissance des conjoints et conjointes de même sexe, on vous remercie. On demande de dégager le plus promptement possible afin de permettre la suite de nos travaux. Et, pendant que le Barreau du Québec, représenté par Me Vadboncoeur, se présente à table, je voudrais rappeler aux gens dans la salle d'éviter d'avoir des cellulaires allumés ou des instruments qui peuvent à l'occasion perturber nos travaux.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Paquin): Si vous voulez prendre place.

Alors, vous êtes directrice du Service de recherche et de législation au Barreau du Québec et vous êtes accompagnée de Me Julie Delaney, qui est avocate au Service de recherche et de législation.

n(16 h 20)n

Des voix: ...

Le Président (M. Paquin): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, vous avez une période de 45 minutes à votre disposition. Les 15 premières vous appartiennent pour nous livrer votre message, après quoi on se charge des suivantes. Si vous voulez présenter la troisième personne qui vous accompagne, s'il vous plaît.

Barreau du Québec

Mme Vadboncoeur (Suzanne): Oui. Alors, bonjour, M. le Président. Merci, M. le ministre, Mmes, MM. les députés. Je suis dans un endroit connu. Écoutez, je suis accompagnée effectivement de Me Julie Delaney, qui est au Service de législation du Barreau du Québec et qui travaille avec moi depuis quelque temps, et du professeur Dominique Goubau, qui est professeur à l'Université Laval, à la Faculté de droit de l'Université Laval, en droit de la famille, droit des personnes, droit de l'enfant et enfin tout ce qui concerne les questions qui nous intéressent aujourd'hui.

Simplement pour vous dire d'entrée de jeu que nous n'avons pas eu le temps de faire de mémoire, compte tenu de l'implication de mon service et de moi en particulier dans le projet de loi, qu'on a fini d'étudier ce midi, mais que vous aurez un mémoire au cours de la semaine prochaine lors de l'étude article par article. Donc, aujourd'hui, il n'est pas question évidemment de reprendre le mémoire qu'on vous avait présenté lors de la dernière consultation mais d'insister sur certains points particuliers. Alors, je cède tout de suite la parole au professeur Goubau sur le premier point de notre intervention, qui est l'extension au conjoint de fait hétérosexuel de l'union civile.

M. Goubau (Dominique): Alors, merci, M. le Président, M. le ministre, Mmes, MM. les députés, donc nous avons déjà déposé un mémoire, un premier mémoire dans lequel nous avons clairement soutenu l'initiative du gouvernement en ce qui concerne la création de cette union civile pour les homosexuels, et c'est avec la même clarté que nous nous opposons à l'extension aux couples hétérosexuels, et je vais vous expliquer les raisons de cette opposition.

La première, c'est que nous estimons... Le Barreau du Québec estime que cette extension est totalement inutile en droit. Il s'agit, quand on regarde de près, sauf un petit détail qui est la séparation devant notaire par consentement mutuel, il s'agit en réalité d'un mécanisme qui renvoie, ni plus ni moins, au mariage, aux effets obligatoires du mariage, que ce soit patrimoine familial, régime matrimonial, nommez-les, et, en réalité, l'union civile hétérosexuelle qui serait permise par ce projet de loi est tout simplement le mariage avec cette seule petite différence.

Alors, nous pensons qu'elle est, sur le plan juridique, totalement inutile: le choix existe déjà. Et on risque en plus de banaliser le mariage lui-même dès lors qu'on permet aux couples hétérosexuels de choisir soit le mariage soit quelque chose qui est identique au mariage mais qui n'a pas le mot «mariage», et, par conséquent, nous estimons que cette banalisation est inutile et que, sur le plan juridique, elle ne peut se justifier.

Le Barreau est également d'avis que, sur le plan constitutionnel, cette extension aux couples hétérosexuels est pour le moins discutable. Il s'agit, au fond, de recréer le mariage sans le terme «mariage», et nous avons donc de très grandes réserves sur la validité constitutionnelle de cette extension. Et un effet de cela, c'est de mettre, au fond, une épée de Damoclès sur toute l'institution, parce que, si le projet, parce qu'on l'a extensionné aux couples hétérosexuels, venait à être contesté pour des raisons constitutionnelles, c'est sans doute tout le projet qui peut être en péril, et c'est en tout cas les unions civiles célébrées entre hétérosexuels qui se voient mises en péril de façon évidente, et je pense qu'il y a là un risque à ne pas prendre, d'autant plus que, selon nous, cette extension est totalement inutile. Cela est sans doute plus grave, cette extension aux hétérosexuels est de plus dangereuse, dangereuse pour les conjoints d'abord...

M. Bégin: Le mot m'a échappé. Sans doute?

M. Goubau (Dominique): Dangereuse.

M. Bégin: Dangereuse.

M. Goubau (Dominique): Dangereuse pour les conjoints de même que pour les enfants. Alors, pour les conjoints d'abord parce qu'ils perdent, sans peut-être le savoir, le bénéfice de la Loi sur le divorce. Or, il y a, dans la Loi sur le divorce, un certain nombre de dispositions qui n'existent pas en droit civil, notamment au chapitre des objectifs de l'ordonnance alimentaire entre conjoints, qui ont permis à la Cour suprême d'établir, depuis plusieurs années déjà, le caractère compensatoire indemnitaire de la pension alimentaire. Depuis à peu près 10, 12 ans, la Cour suprême, en interprétant la Loi sur le divorce, a mis en place un certain nombre de protections dont jouissent essentiellement les ex-épouses et dont elles ne jouiront plus lorsqu'elles seront unies civilement et qu'elles n'auront donc plus l'avantage des dispositions de la Loi sur le divorce telles qu'interprétées par les tribunaux depuis maintenant une douzaine d'années.

Pour les enfants également, il y aurait là une perte de droits. La Loi sur le divorce reconnaît clairement la notion de «parent psychologique» ? on a utilisé déjà le terme «in loco parentis» ? la parenté psychologique qui fait que, dans une famille reconstituée en mariage, l'enfant d'un des conjoints mariés, mais qui n'est pas l'enfant du nouveau conjoint, en cas de divorce de cette nouvelle famille, se voit protégé, puisque cet enfant pourra réclamer des aliments au mari. Cela n'est pas possible dans le cadre du Code civil qui ne reconnaît pas la notion «in loco parentis», et, par conséquent, les personnes qui décideraient de s'unir dans le cadre de l'union civile plutôt que de se marier, et donc n'auraient pas le bénéfice de la Loi sur le divorce, eh bien, voilà que les enfants, comme ça arrive souvent, n'auraient pas le bénéfice de cette possibilité de réclamer des aliments au père ou à la mère psychologique qui a agi pendant les années de mariage comme parent de cet enfant sans l'être sur le plan biologique.

Alors, voilà deux effets, tant pour les ex-conjoints que pour les enfants, qui sont des effets néfastes de cette extension, et c'est une raison supplémentaire pour laquelle nous pensons qu'il est totalement inutile d'extensionner à l'égard des hétérosexuels. Et je voudrais tout de suite vous dire: Il ne s'agit pas du tout pour le Barreau, loin de là, de dire: Maintenons l'union civile pour les homosexuels parce qu'il faut quelque chose pour eux qui soit à part, ce n'est pas du tout ça. Le Comité du droit de la famille du Barreau, que j'ai l'honneur de présider, est très clair sur l'idée que, au fond, l'idéal serait sans doute de permettre aux homosexuels de se marier. Mais nous savons tous que cela dépend du fédéral et non pas du provincial. Ce n'est donc pas pour mettre à l'écart les couples homosexuels que nous disons qu'il ne faut pas extensionner aux couples hétérosexuels, mais, au contraire, c'est pour souligner qu'il y aurait là, pour les couples hétérosexuels qui désireraient s'unir civilement plutôt que de se marier, un potentiel de perte de droits aussi bien pour les conjoints que pour les enfants.

Très rapidement, sur la question de la séparation par consentement mutuel devant notaire. Nous avons déjà déploré cette possibilité. Le Barreau est d'avis qu'on enlève ainsi les garanties du débat judiciaire, les garanties du contrôle judiciaire sur les conventions. Je voudrais rappeler à cette Assemblée que, depuis plusieurs années déjà, les tribunaux sont particulièrement sensibles aux droits des femmes dans le cadre de l'homologation des ententes dans le cadre du divorce ou de la séparation. Depuis plusieurs années, les juges se montrent très sensibles à la protection de ces droits et n'hésitent pas à refuser l'homologation d'une convention lorsque les droits, particulièrement de l'ex-conjointe, ne sont pas bien préservés, notamment sur le plan alimentaire. Or, voilà qu'on propose une voie de démariage, de séparation qui évite ce contrôle qui, depuis maintenant une dizaine, une quinzaine d'années, est pourtant un mécanisme qui sert le droit des femmes et qui sert le droit du conjoint le plus démuni à l'occasion d'une séparation ou d'un divorce. Nous pensons qu'il doit y avoir là une vigilance et qu'à tout le moins, comme nous l'avions souligné la dernière fois, il devrait y avoir au moins une homologation par le tribunal, comme cela se fait en matière de tutelle, de curatelle et de régime de protection des inaptes majeurs.

Deux petits détails, mais je vous rappelle que, pour les détails article par article, nous allons donc produire un mémoire qui est plus détaillé que ce que nous pouvons faire ici, mais deux petits points, tout de même. Dans l'avant-projet de loi, concernant l'entente devant notaire, le premier, c'est l'article 521.14, qui est l'article donc 521.14 du projet de loi, dans lequel on indique ceci: «Le contrat de transaction précise la date à laquelle la valeur nette du patrimoine familial est établie. Cette date ne peut être antérieure à la démarche commune de dissolution ni postérieure à la date à laquelle le contrat est reçu devant notaire.»

Nous pensons que c'est là une limitation qui ne devrait pas être dans le projet de loi. Les conjoints devraient, dans leur convention, pouvoir convenir de ce qui leur semble bon, et nous savons que les conjoints pourraient très bien, dans un contrat comme celui-là, renoncer carrément au partage du patrimoine familial. Alors, pourquoi pas? Pourraient-ils s'entendre sur une valeur nette du patrimoine qui soit autre que la valeur nette au moment où ils entament leur démarche devant le notaire? À notre avis, il devrait y avoir là une plus grande liberté des personnes qui décident de se séparer.

n(16 h 30)n

Et dernier petit point avant de laisser la parole à ma consoeur Me Vadboncoeur, dans l'article 144 du projet de loi, il est question de la loi qui facilite la perception des pensions alimentaires. Et il est dit, à l'article 144, que l'article 1 de cette loi serait modifié et, à la lecture de cet article-là, on constate que les conjoints qui vont décider de se séparer devant notaire pourront prévoir par contrat que leur pension alimentaire convenue ne sera pas soumise à la loi sur la perception automatique des pensions alimentaires. Nous soulignons qu'il s'agit là d'une très importante atteinte au principe de l'universalité de la perception des pensions auquel, pourtant, nous pensions que le gouvernement tenait tant.

Vous savez que, aujourd'hui, lorsque des conjoints vont devant le tribunal et dépose une convention qui sera homologuée par le tribunal, ils ne peuvent pas convenir de ne pas être soumis à la perception automatique, à moins de fournir des garanties qui sont prévues par la loi. Or, ici, avec cette modification à l'article 1 de la loi, il sera permis, tout simplement en passant devant un notaire, de se désengager du système de perception automatique via le ministère du Revenu, sans même fournir de garanties supplémentaires. Il nous apparaît qu'il s'agit là d'un recul et certainement de quelque chose à modifier dans le cadre de vos travaux.

Alors, je céderai maintenant la parole à Me Vadboncoeur pour le volet des enfants.

Mme Vadboncoeur (Suzanne): Trois minutes. Bon. Alors, écoutez, le deuxième volet que je voudrais aborder, c'est celui de la filiation. La filiation peut se créer de deux façons: par le biais de l'adoption, d'une part, ou par le biais de la procréation assistée, d'autre part.

En matière d'adoption, nous n'avions pas pris position dans le premier mémoire. On avait appelé le gouvernement à la prudence et on avait voulu favoriser l'optique des droits parentaux par rapport à la création d'un nouveau lien de filiation.

Ici, dans le projet de loi, il y a une confusion entre la filiation et les droits parentaux. Et j'appuie tout à fait ce que les représentants de la Coalition ont dit tantôt: Ce n'est certainement pas aux juges de s'immiscer dans quoi que ce soit pour définir le rôle du père ou de la mère, le tribunal n'a rien à voir là-dedans. Les droits... L'autorité parentale, il s'agit d'un état de fait, enfin, qui découle de la filiation. Alors, dès lors que des parents sont parents... Qu'ils soient deux pères, deux mères, un père, une mère, ce n'est pas ça qui est important, l'important, c'est qu'il y ait un lien de filiation, et de ce lien de filiation découle des droits parentaux, lesquels sont prévus dans un chapitre spécifique du Code civil.

Alors, on n'a pas à mettre dans le chapitre de la filiation des dispositions qui touchent les droits parentaux. Ça n'a absolument pas d'affaires là. Et le juge n'a absolument pas d'affaire non plus à s'immiscer dans cette question-là et dire quel genre de rôle... Ça n'existe pas des rôles de père et de mère dans notre droit civil depuis l'abolition de la puissance paternelle. Alors, il n'y a pas lieu de revenir là-dessus. Donc, je pense que, à l'article 577.1, la dernière phrase doit être complètement biffée.

Deuxièmement, 538.4 également fait allusion à ces rôles de père et mère. Ça aussi, je pense que ça devrait être complètement éliminé. Il faudrait également distinguer, en matière d'adoption, les scénarios possibles. C'est vrai que, selon un consentement spécial, les parents homosexuels ou hétérosexuels peuvent adopter un enfant, ça, ça ne cause pas vraiment une difficulté. Mais, dans d'autres cas, il faut distinguer le scénario d'une adoption qui arrive par un couple homosexuel après que, par exemple, une des conjointes lesbiennes se soit fait inséminer artificiellement, donc soit déjà mère, et après elle rencontre une autre femme et elles décident de vivre ensemble, il faut distinguer l'adoption donc par cette nouvelle conjointe, ce scénario-là, du scénario où l'enfant serait issu d'une union antérieure hétérosexuelle où le père serait soit décédé, soit déchu de l'autorité parentale ou, bon, autrement en dehors du portrait. Cette adoption-là, elle est bien différente, parce qu'il ne faut pas oublier que, dans notre droit, l'adoption rompt complètement les liens de filiation avec la première famille. Mais cet enfant-là qui a connu son père et qui a établi des liens avec cette famille-là, donc ses grands-parents, ses cousins, ses cousines, etc., l'effet de l'adoption rompt complètement ces liens-là. Je ne suis pas certaine que ça soit vraiment dans l'intérêt de l'enfant que tous ces liens-là soient rompus.

Alors, il y a lieu, je pense, de distinguer ces différents scénarios et d'élaborer une réflexion profonde sur toute la notion de l'institution même de l'adoption et prévoir peut-être l'adoption simple dans certains cas, dans ce cas-là. Dans l'adoption simple, qui est prévue dans certains pays d'Europe, il y a certains liens de filiation qui sont maintenus avec la famille, la première famille, si je peux dire, ou la famille du parent qui est hors circuit.

Le Président (M. Lachance): En conclusion, s'il vous plaît.

Mme Vadboncoeur (Suzanne): Alors, en conclusion... C'est dommage parce qu'on n'a pas parlé de la procréation assistée. Je vais y arriver tout de suite. Alors, en conclusion, le chapitre qui porte sur la procréation assistée, à notre avis, ne devrait parler que de procréation médicalement assistée. À l'heure actuelle, quand il y a une relation sexuelle qui s'établit et qu'il y a un enfant qui est issu, le père, qui n'est pas le mari de la mère, peut fort bien déclarer sa paternité. Et là ça nie ce droit-là au père qui aurait des relations sexuelles avec une mère qui elle-même... avec une mère, avec une femme qui elle-même aurait un projet parental avec un autre, une autre, mais dont le projet serait tout à fait ignoré par le monsieur en question. Il ne pourrait pas déclarer sa paternité. Or, la déclaration de paternité, c'est un acte volontaire, et on nie malheureusement ce droit-là. Alors, je pense qu'il faudrait... Puis on répondra aux questions parce que ce n'est peut-être pas clair, clair. J'essaie d'aller très vite. Donc, il faudrait se limiter à la procréation médicalement assistée afin d'éviter de faire perdre des droits à différentes personnes, droits qui existent à l'heure actuelle.

Le Président (M. Lachance): Merci. M. le ministre.

M. Bégin: Alors, merci, Mme Vadboncoeur et M. Goubau, madame... Excusez, votre nom m'échappe, la troisième personne. J'ai écouté avec attention ce que vous avez dit et je pense que, sur les points de vue spécifiques comme le dernier que vous avez abordé, médicalement assistée, ou encore l'article que les intervenants précédents avaient soulevé, c'est-à-dire 577.1, sur les rôles, il est évident qu'il y a des choses qui doivent être regardées de près.

Moi-même, quand j'avais entendu la première intervention, je m'étais tourné vers Me Ducharme pour lui demander: Est-ce qu'on définit les rôles de manière précise dans la loi? Parce que, si on y réfère, c'est donc parce qu'ils existent. S'ils n'existent pas, quand on dit ça, qu'on va attribuer leur rôle, c'est parce qu'on revient dans nos anciens schèmes de pensée qui attribuaient le rôle de papa puis le rôle de maman. Dans le fond, ce que nous avons, c'est deux parents, point à la ligne. Donc, si ce n'est pas techniquement impensable, je pense qu'il va falloir aller dans cette direction-là. Et c'est l'avantage d'un regard extérieur qui lit un texte et qui tout à coup voit ça. Parce que vous êtes deux groupes. Les deux, vous avez mis le doigt sur le même article. Donc, 538.4 s'ajoute à cette ligne-là.

«N'est pas médicalement assistée», un de mes sous-ministres a dit que peut-être on pourrait appeler ça... Au lieu de l'appeler «non médicalement», il y aurait «médicalement assistée», et l'autre, ce serait «amicalement assistée». Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bégin: Comme vous, j'ai souri et même ri. Peut-être devrions-nous y penser. Ha, ha, ha! Mais on voit qu'il y a quelque chose qui n'est pas bien défini et qu'on devrait définir.

Bon. Alors, ça, là-dessus, ça va. Je reviens cependant à la première intervention concernant cette question de l'union civile qui est ouverte aux hétérosexuels. C'est curieux dans la vie comment les facettes d'une même question peuvent être variables. Nous entendons des groupes qui viennent nous dire ceci: C'est bien, votre projet de loi. Votre avant-projet de loi, c'est très, très bien. Vous accordez aux homosexuels, aux gais et lesbiennes, des droits qui sont à peu près les mêmes que ceux des couples hétérosexuels, mais vous reprenez, sans le vouloir... mais vous arrivez au même résultat qu'aux États-Unis quand on dit: Separate but segregate, hein? La ségrégation par la séparation , en fait, on arrive à un autre résultat de discrimination. C'est qu'on met tous les Blancs d'un bord ou tous les Noirs de l'autre, mais on n'arrive pas à régler le véritable problème qui est de dire... qui est la mixité des enfants dans les mêmes écoles, indépendamment de leur couleur de peau, et ainsi de suite. Donc, les gens nous disent ça. Alors, on écoute. Beaucoup de gens viennent nous dire que la seule manière de régler le problème, c'est véritablement d'ouvrir l'union civile aux hétérosexuels. Alors, nous sommes convaincus de la chose et effectivement nous l'inscrivons dans la loi.

n(16 h 40)n

Le gouvernement fédéral, qui est dans un dossier qui s'appelle Hendricks, assiste comme tout le monde à une réouverture d'enquête demandée par la juge qui présidait le procès au mois de décembre, qui réentend les parties, qui écoute ce qui a été dit dans la présente commission parlementaire au mois de février, tous les témoignages et, bon, les avocats témoignent... pas témoignent, mais plaident et finalement le Procureur général dépose sa plaidoirie. Que j'ai déposée ce matin, je l'ai remise tout à l'heure à tout le monde. C'est une traduction que j'ai fait faire. Et là surprise! Surprise, parce que, loin de dire que ça pose un problème constitutionnel, on nous dit que ça nous règle un problème constitutionnel. Ça nous règle le problème constitutionnel que, si, au Québec, on prétend que le mariage est discriminatoire parce qu'il n'est ouvert qu'à un homme et à une femme hétérosexuels, ce mariage est sauvé, parce qu'il existe au Québec une institution qui s'appelle l'union civile, à venir, qui ouvre la possibilité soit aux homosexuels soit aux hétérosexuels de s'unir civilement. C'est donc, disent-ils, une réponse adéquate à l'allégation de discrimination, puisqu'une autre institution est offerte, et les gens peuvent donc se prévaloir de leurs droits. Ce qui a contrario nous laisserait croire que, dans une autre province, si le même argument était soulevé, ils auraient un problème, puisqu'ils ne pourraient pas invoquer l'union civile si elle n'existe pas ailleurs. Donc, il y aurait un problème qui serait là, et énorme.

Alors, on nous dit maintenant: Vous ne devriez pas l'ouvrir aux hétérosexuels parce que vous avez déjà ça dans le mariage civil. Donc, on n'aurait pas besoin de l'ouvrir aux hétérosexuels. La réponse qui nous a été donnée par anticipation à ça, c'est qu'il y a peut-être des raisons pour lesquelles des gens restent unis civilement actuellement, pas dans l'union civile mais des conjoints de faits, ils ne se marient pas ni civilement ni religieusement, c'est parce qu'ils en ont contre l'institution du mariage, chargée qu'elle est, cette institution, dans l'esprit de plusieurs, de tout un passé de domination. Prenez le chemin que vous voulez, là, je ne suis pas un expert dans ce domaine, mais on dit que fort probablement une partie des gens n'ont pas pris ça à cause de cette raison-là.

Là, je reste perplexe dans tout ça et je me dis: Il semble bien qu'on ne puisse pas satisfaire tout le monde et son père en même temps et que nous devions faire un choix. Et je crois que nous devons offrir véritablement ce choix aux citoyens de s'unir civilement, qu'ils soient hétérosexuels ou homosexuels, qu'il y ait une autre institution qui s'appelle le mariage civil à côté, qui est sensiblement la même. Il y a une appellation mais ça n'enlève rien, mais ça laisse au mariage son caractère homme-femme mais aussi civil et/ou religieux. Donc, ça fait une institution qui est plus souple pour les gens qui veulent la choisir. Il y aura à côté une autre institution comme telle.

Moi, le côté inconstitutionnel de le faire, il m'a été plaidé dans les deux sens. Quand je ne l'avais pas, c'était inconstitutionnel; maintenant que je l'ai, c'est inconstitutionnel. J'ai un problème. Alors, je fais mon choix sans tenir compte de ce que le gouvernement fédéral pouvait dire, mais, maintenant qu'ils ont, semble-t-il, partagé mon point de vue, pour une fois, pour une fois...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bégin: ...je dis en cette Assemblée, à mon grand dam, que, bien, que voulez-vous, ils pensent comme il le faut, ils pensent comme nous.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bégin: Non, mais, au-delà de la blague, je vais être très sérieux...

M. Gautrin: ...

M. Bégin: C'est le jour de ma fête, comprenez-vous?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bégin: Non, mais je pense que ça conforte l'opinion à l'effet que nous ne sommes pas à côté de la coche. Je comprends votre interprétation sur la possible contestation de la constitutionnalité, mais je crois être en bonne compagnie pour défendre cette institution-là. Voici pourquoi, sur ce volet-là, je ne sais pas. Excusez, si je fais un dialogue, mais c'est parce que vous avez donné le point et j'aimerais y répondre.

Le deuxième, c'est la perte de garantie de droits. Oui. D'un côté, vous nous dites: Il y a un dédoublement, puis, d'un autre côté, vous nous dites: Ce n'est pas pareil, puisqu'ils n'auront pas les mêmes droits. Alors, encore une fois, là, il y a un problème. Si c'est un dédoublement, c'est pareil; si ce n'est pas pareil, c'est donc différent; si c'est différent, ce n'est pas la même chose. Donc, on a deux institutions qui existent avec les forces et les faiblesses de chacune. Non?

M. Goubau (Dominique): C'est une question?

M. Bégin: C'est un commentaire, mais je pense que ça implique une réponse. Je pense.

M. Goubau (Dominique): Parce que j'aurais tendance à vous répondre. D'abord, je serais d'accord avec vous si vraiment il s'agissait d'une autre institution, mais, dès lors que le mariage, ou l'union civile, telle que proposée, est calquée sur le mariage, je n'y vois pas une autre institution, si ce n'est qu'elle enlève automatiquement le privilège, comme j'ai expliqué tout à l'heure, de passer, en cas de séparation, par la Loi sur le divorce, qui, on ne peut pas le nier, et je vous le dis avec toute la connaissance que j'ai de la jurisprudence en matière de divorce, apporte à la conjointe, aux ex-conjointes... Et c'est un acquis qui est souligné et qui est applaudi par les mouvements féministes au Québec, c'est l'interprétation par la Cour suprême et par les cours ici, au Québec, de la Loi sur le divorce en termes de protection pour les femmes. Cette protection n'existe pas dans le cadre du Code civil, cette protection risque de ne pas exister dans le cadre de l'union civile. Il y a donc une institution qui effectivement semble pareille, sauf qu'il y aura une perte de protection possible pour l'ex-conjointe.

Et je viens de souligner aussi qu'il y aura ? et ça, c'est très clair, je ne vois pas comment on peut le contester ? une perte de droits pour les enfants, puisque la notion in loco parentis... À moins qu'on change la loi, comme nous l'avions proposé la dernière fois que nous sommes venus en commission parlementaire, à moins que le Code civil introduise cette notion in loco parentis. Et je voudrais, juste pour terminer là-dessus, M. le ministre, souligner que ce projet de loi serait peut-être l'occasion, et ce ne serait pas très compliqué sur le plan législatif, puisqu'il s'appuie sur cette idée d'égalité entre les enfants, serait peut-être l'occasion d'éliminer trois inégalités fondamentales entre les enfants dans le Code civil du Québec, selon le statut matrimonial de leurs parents.

Encore au Québec... D'abord, j'ai parlé d'in loco parentis qui ne peut pas être invoqué dans le cadre du Code civil pour les gens non mariés, qui ne peut l'être que pour les gens mariés dans le cadre de leur divorce, c'est une première chose. Il suffirait, comme toutes les autres provinces l'ont fait, de l'intégrer dans le Code civil, et on peut le faire à l'article 585, par exemple, à l'article 585 au chapitre de l'obligation alimentaire.

Deuxième différence, la protection de la résidence familiale prévue par l'article 410, qui est un effet obligatoire du mariage et qui est, et c'est très bien, prévu aussi comme effet obligatoire de l'union civile dans votre projet. Cette protection n'existe pas pour les enfants dont les parents ne sont pas mariés. Or, nous savons, les statistiques sont claires là-dessus, que la majorité des enfants qui naissent au Québec naissent hors mariage. Par conséquent, pour la majorité des enfants qui naissent aujourd'hui au Québec, ils ne sont pas protégés en cas de séparation de leurs parents par ce mécanisme de protection de la résidence familiale en cas d'ordonnance de garde.

Troisième et dernière différence qu'il serait très facile de régler, c'est l'article 525, qui est déjà sur la table dans votre projet de loi. Ce serait, et c'est une proposition que fait le Barreau du Québec, ce serait d'extensionner, comme toutes les autres provinces l'ont fait, la présomption de paternité ou de maternité en dehors du mariage et en dehors de l'union civile. Aujourd'hui, avec le projet de loi... Mais, même aujourd'hui... aujourd'hui, des personnes qui sont mariées depuis deux jours et dont la femme accouche demain matin, le mari est présumé être le père, même s'il n'est pas le père biologiquement. Si vous avez un couple qui vit ensemble depuis 10 ans et ils ont un enfant mais ils ne sont pas mariés, il n'y a pas de présomption de paternité à l'égard de ce père-là, ce qui est une anomalie. Et c'est une anomalie qui a été éliminée dans toutes les autres provinces, et je pense que ce projet devrait être l'occasion d'éliminer ces trois dispositions, 585, 410 et 525, et je pense que ce serait un pas extraordinaire pour l'égalité des enfants.

M. Bégin: Merci, M. Bougau... Goubau, pardon. Je vous avoue que j'entends avec beaucoup de plaisir ce que vous venez de me dire, et la commande est passée tout de suite de faire les corrections qui s'imposent. On m'a indiqué qu'il y avait peut-être des difficultés. Alors, je dis à mes conseillers: Allez voir M. Goubau, il a les réponses. On va être capables de faire les corrections qui s'imposent. Mais il ne faudrait pas que, comme résultat, vous me disiez, après: C'est tellement pareil au mariage qu'il n'y en a plus. Il ne faudrait pas que vous me passiez cet argument-là.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bégin: Et je veux vous dire aussi que, sur votre argument, au début...

Le Président (M. Lachance): Deux minutes, M. le ministre.

M. Bégin: ... ? oui, c'est très court ? vous n'êtes pas encore en bonne compagnie. Moi, je le suis, je suis avec le gouvernement fédéral. À l'article 3.2, avant l'article 30 ? et je lis juste le titre qu'ils ont mis; c'est eux-mêmes qui l'ont mis ? le mariage n'est pas ? et là c'est entre quasiment guillemets ? purement une institution civile. Et le titre à 3.3, après l'article 37: L'union civile proposée ne doit pas être vue comme une institution inférieure, donc étant égale au mariage. Alors, vous voyez que c'était une appréciation différente de la vôtre. J'aime mieux celle-ci parce qu'elle va dans le sens que je pense, mais ça ne veut pas dire que vous avez tort totalement. Et on sait très bien que, dans ces domaines, il n'y a pas de vérité absolue. Il faut admettre humblement qu'on peut ne pas avoir raison, mais souvent ça prend quelques années et une décision finale pour trancher les différends qu'on a entre nous. Alors, merci infiniment pour cette intervention qui va nous aider à améliorer notre projet de loi.

n(16 h 50)n

Le Président (M. Lachance): Merci. Mme la députée de Bourassa et porte-parole de l'opposition officielle.

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Peut-on s'assurer d'abord que les représentants du Barreau du Québec ont reçu copie de la traduction du jugement Hendricks-LeBoeuf? Dans le cas contraire, est-ce qu'on pourrait... M. le Président, est-ce qu'on peut...

Me Vadboncoeur, permettez-moi de vous accueillir, Me Delaney également, professeur Goubau. Bonjour. Merci de venir participer aux travaux de cette commission et de travailler à la bonification du projet de loi.

Professeur Goubau, une première question: Pouvez-vous me dire quels pourraient être les effets sur une famille homoparentale si la loi, le projet de loi n° 84 ou la loi n° 84, venait à être déclarée inconstitutionnelle? Quels seraient les effets sur une famille homoparentale?

M. Goubau (Dominique): Je pense que, personnellement, là, on n'a pas discuté en comité sur la famille, mais je pense bien que le volet union civile de même sexe est solide sur le plan constitutionnel et que, même si le volet union hétérosexuelle venait à être contesté, un tribunal pourrait préserver le volet union de même sexe. Je n'ai pas beaucoup d'hésitation là-dessus.

Mme Lamquin-Éthier: Parfait. M. le Président, je n'aurais pas d'autres questions. Mon collègue aimerait intervenir également.

Le Président (M. Lachance): Oui. M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Monsieur... Me Goubau, j'ai quelques questions, et j'ai de la difficulté à vous suivre. À la fois, vous plaidez en disant: C'est virtuellement la même institution, union civile et mariage, et ensuite, dans nombre d'interventions que j'ai notées ici, vous signalez les différences, en particulier par le fait qu'au moment d'une séparation, c'est-à-dire au moment de la fin de l'union civile, il n'y aurait plus les... les mêmes protections ne seraient plus accordées aux personnes, disons enfants ou l'autre conjoint, en cas de séparation. Donc, de facto, ce n'est pas exactement la même chose, puisque les protections qui sont accordées par l'union civile et celles qui sont accordées par le mariage ne sont pas identiques. C'est ça que j'ai un peu de difficulté à comprendre.

M. Goubau (Dominique): Alors, je vais vous dire, c'est exactement la même institution, il n'y a que deux différences. La première différence est la possibilité, dans l'union civile, de se séparer, je comprends bien... Lorsqu'il n'y a pas d'enfants et que les conjoint unis civilement s'entendent sur toutes les conséquences de leur séparation, ils peuvent le faire devant notaire, ce qu'aujourd'hui les personnes mariées ne peuvent pas faire, c'est bien connu. Donc, ça, c'est la différence la plus importante.

Et puis il y a une différence qui est indirecte et qui est que, par définition, les personnes unies civilement se séparent, que ce soit devant le juge avec des dispositions équivalentes à celles sur la séparation de corps que l'on connaît aujourd'hui ou que ce soit donc devant notaire, mais elles ne passent pas devant un juge en vertu de la Loi sur le divorce. Et donc une différence... Ce n'est pas une différence d'institution mais c'est une différence d'effet au moment de la séparation. C'est que, évidemment, les personnes unies civilement ne peuvent pas divorcer puisqu'elles ne sont pas mariées et que la Loi sur le divorce ne s'applique qu'aux gens mariés.

Ce faisant, compte tenu du fait que depuis une quinzaine d'années la Loi sur le divorce est interprétée par les tribunaux de façon très protectrice pour les ex-conjoints, particulièrement les ex-conjointes, je constate donc que, oui, il y aura de facto une perte de protection possible en cas d'union civile plutôt que de mariage. Raison pour laquelle je préférerais personnellement le mariage de même sexe plutôt que l'union civile.

M. Gautrin: Je comprends le débat, mais chaque verre est à demi plein ou à demi vide. Je comprends que, si vous comparez au mariage, il y a une perte de protection, mais beaucoup de couples choisissent l'union de fait actuellement. Et, si vous comparez l'union civile par rapport à l'union de fait, il y a un gain de protection pour les enfants dans l'union civile. Est-ce que je me trompe ou pas?

M. Goubau (Dominique): Ah, il y a un gain de protection et d'obligations évident, puisque c'est l'équivalent du mariage.

M. Gautrin: C'est ça. Donc, il y a un gain par rapport à la situation qui est le choix que font parfois les couples de vivre en union libre et d'avoir...

M. Goubau (Dominique): Vous savez, personnellement, quand je regarde les statistiques du mariage, le taux de nuptialité des 15 dernières années au Québec, qui est en chute constante et qui n'a pas augmenté au moment de l'adoption de la loi sur le patrimoine familial mais qui est constant d'année en année, et quand on voit les études sur les motivations du mariage, je reprends ce qu'a dit M. le ministre tout à l'heure, c'est un rejet de l'institution mais pas du terme «mariage». C'est un rejet de l'institution pour ce qu'elle est dans ses effets.

Les gens ne veulent pas le carcan du patrimoine familial, ne veulent pas le carcan d'un régime matrimonial, ne veulent pas le carcan d'une possible obligation alimentaire, raison pour laquelle on rejette, pour toutes sortes de raisons mais également pour cette raison-là, et raison pour laquelle on préfère aussi le contrat. Et on sait qu'aujourd'hui les conjoints de fait, donc hors mariage, peuvent très bien contracter. La Cour d'appel, cette année encore, a même permis aux conjoints de fait d'adopter le patrimoine familial par voie contractuelle.

M. Gautrin: Et, vous voyez, l'union civile est plutôt de nature contractuelle, puisqu'elle peut se dissoudre devant notaire.

M. Goubau (Dominique): C'est le seul aspect contractuel. C'est le seul aspect contractuel, parce que c'est une institution comme le mariage, avec une célébration et des effets obligatoires d'ordre public dont le contrat ne peut pas changer les effets. Donc, c'est une institution, et, avec respect, je ne suis pas d'accord de dire que l'union civile est un contrat. L'union civile, tel qu'on le voit dans le projet, c'est une institution, comme le mariage, avec célébration publique et avec publication, avec effets d'ordre public surtout, qui fait qu'il échappe en bonne partie au contrat. Il redevient un peu plus contractuel au moment de la séparation, en ce sens que, s'ils sont d'accord sur tout et qu'il n'y a pas d'enfants, ils pourront le faire devant notaire. Mais c'est le seul petit volet qui est plus contractuel que le mariage.

M. Gautrin: J'ai une question vraiment à poser au spécialiste que vous êtes: Est-ce qu'il existe des couples qui sont mariés dans d'autres juridictions, c'est-à-dire dans d'autres pays, par exemple, et qui, venant ici, sont amenés à pouvoir divorcer suivant la législation, puisque le mariage avait une portée universelle, ils pouvaient... d'une juridiction à une autre? Est-ce que ce serait l'union civile qui serait considérée, à ce moment-là, ou le mariage?

M. Goubau (Dominique): Le mariage. Des personnes mariées à l'extérieur et qui viendraient au Québec, ici?

M. Gautrin: Oui.

M. Goubau (Dominique): Alors, les effets obligatoires du mariage dépendent du domicile des conjoints au moment où ils l'invoquent devant les tribunaux. Et, par conséquent, des étrangers mariés à l'extérieur, deux Italiens, deux Marocains mariés à l'extérieur qui viendraient se séparer ici, on leur appliquerait, s'ils sont domiciliés ici, les effets obligatoires du mariage tel que nous le connaissons dans notre Code civil.

M. Gautrin: Mais ça ne pourrait pas être une union... Une union civile ne pourrait pas se généraliser, à ce moment-là?

M. Goubau (Dominique): Ne pourrait pas?

M. Gautrin: Se généraliser.

M. Goubau (Dominique): Je ne comprends pas la question.

M. Gautrin: Bon. Alors, je vais réexpliquer. Des gens qui sont mariés civilement, c'est-à-dire sous une autre juridiction, c'est le terme «mariage» qui aurait primauté sur le terme «union»?

M. Goubau (Dominique): Et le mariage est reconnu ici.

M. Gautrin: Autrement dit, puisqu'on a, à l'heure actuelle, deux termes qui existent, qui est le terme «mariage» et le terme «union», puisqu'on a les deux...

M. Goubau (Dominique): De même que des Québécois mariés au Québec qui vont s'installer à l'extérieur, dans la plupart des pays occidentaux, on reconnaîtra le mariage québécois et on lui donnera les effets que reconnaît la loi étrangère.

M. Gautrin: Je comprends bien, je comprends bien, mais, comprenez-moi, ma question n'est pas celle-là. Ma question, c'est: À partir du moment où je suis votre raisonnement, où j'ai une même institution qui représente... la même institution quasiment égale pour couvrir ce qu'on qualifierait d'union entre deux personnes de sexe différent, etc., et que j'aurais donc quelqu'un qui viendrait d'un pays, Italien, Marocain, ou etc., où cette distinction entre union civile et mariage ne viendrait pas translater ici au Québec, laquelle des deux aurait primauté, puisqu'il y a équivalence entre les deux unions?

M. Goubau (Dominique): Mais les règles de droit international privé sont très claires. Les règles de droit international privé dans le Code civil prévoient que le mariage, et le terme «mariage» est important...

M. Gautrin: C'est-à-dire, donc, c'est le terme «mariage» qui a primauté?

M. Goubau (Dominique): Oui, oui.

M. Gautrin: Absolument sur le terme «union»?

M. Goubau (Dominique): Et je pense bien que le projet de loi que nous avons devant nous reprend les mêmes dispositions en matière de droit international privé. C'est tout à fait correct que celles que nous connaissons en matière de mariage actuellement, qu'il les extensionne à l'union civile. Et ça, c'est tout à fait correct.

M. Gautrin: Mais vous avez dit qu'il extensionne à l'union civile.

M. Goubau (Dominique): Oui. C'est-à-dire que, si des personnes devaient être dans une institution équivalente à l'union civile mais à l'extérieur, puisqu'on sait qu'il y a de plus en plus, dans d'autres pays, des enregistrements publics de conjoints non mariés, eh bien, on pourrait reconnaître ces unions-là au Québec à partir des dispositions qui sont prévues dans le projet de loi au chapitre du droit international privé.

M. Gautrin: Eh bien, je pense qu'il faudrait peut-être plus que dans une commission parlementaire pour clarifier certains points à ce moment-là. Je vous remercie.

Le Président (M. Lachance): Merci, mesdames, monsieur, pour votre participation aux travaux dans cette commission.

Mme Lamquin-Éthier: Avez-vous d'autres commentaires à formuler ou...

M. Gautrin: Oui. Madame avait d'autres commentaires qu'elle n'a pas eu le temps de faire.

Mme Lamquin-Éthier: Est-ce qu'il reste du temps, M. le Président?

M. Gautrin: Il reste du temps. Alors, écoutez...

Le Président (M. Lachance): Oui, il reste quatre minutes.

M. Gautrin: Alors, on va vous donner... on va vous faire cadeau de nos quatre minutes.

Mme Lamquin-Éthier: La reproduction assistée notamment, je crois?

Mme Vadboncoeur (Suzanne): Oui, c'est ça. Je voulais peut-être un petit peu plus élaborer là-dessus, sur la procréation médicalement assistée. C'est qu'il faut encore une fois distinguer... Puis le projet de loi tantôt parle de procréation assistée, tantôt parle de procréation médicalement assistée. Je pense que c'est voulu. La procréation assistée englobe la médicalement assistée, je crois.

n(17 heures)n

Donc, la procréation assistée, ça change la donne pas mal, parce que, comme je l'ai dit tantôt, à l'heure actuelle, si, moi, je décide de fonder un projet d'union avec une autre femme et que je veux avoir un enfant puis que par ailleurs j'ai des relations sexuelles avec un de mes bons amis qui, lui, m'aime bien, mais, moi, je ne lui parle pas de mon projet, bien, normalement, en droit actuel, là, le mâle, si je peux dire, peut déclarer sa paternité dans l'acte de l'état civil. Mais, avec le projet de loi, il y a une présomption qui est créée en faveur de ma conjointe. Alors, ça nie à mon homme masculin, à mon géniteur, le droit de concrétiser sa volonté, lui, d'être père, puis ça, ça fonctionne...

Le Président (M. Lachance): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Me Vadboncoeur, j'aurais une question, moi, là-dessus, parce que j'ai souvent posé la question: Est-ce que vous ouvririez la porte à la triparentalité, c'est-à-dire la bimaternité plus la parentalité du géniteur? Est-ce que c'est ça que vous voulez ouvrir comme porte?

Mme Vadboncoeur (Suzanne): Non, moi, là-dessus... Bien, écoutez, encore là, là, je donne plus mon opinion personnelle, mais non. Triparentalité, là, moi, j'ai un petit peu de difficultés avec ça.

M. Gautrin: Moi aussi mais...

Mme Vadboncoeur (Suzanne): Dans l'histoire d'adoption simple, là, dont je parlais précédemment, pour ne pas rompre les liens de l'enfant avec sa famille, mettons du côté de son père, il pourrait subsister certains liens de parentalité, mais ça ne lui fait quand même pas deux mères puis un père, là. Non, ça, la pluriparentalité, je ne pense pas qu'on doive aller jusque-là. C'est pourquoi, nous, on recommande que le projet de loi ne vise que la procréation médicalement assistée. Parce que, dans le cadre d'un projet parental, que je conçois tout à fait bien, que deux hommes ou deux femmes veulent avoir une famille, alors, à ce moment-là, que l'enfant naisse suite à une insémination artificielle, aucun problème là-dedans, mais qu'il y ait des inséminations dites de cuisine parce que, bon, il y en a qui se font ça un peu artificiellement, là, puis il y a l'insémination amicale comme on a employé l'expression tantôt, bien là, écoutez, là, c'est complètement d'autres règles du jeu, et il ne faudrait pas enlever des droits à ceux qui en ont présentement.

Moi, je veux bien créer une situation la plus idéale possible pour les couples homosexuels, mais il ne faut quand même pas tout chambarder les règles de filiation qui existent actuellement. La filiation par le sang, là, ça va continuer, ça, là, là. Puis la filiation par le sang, à partir du moment où quelqu'un... En dehors évidemment d'un mariage, parce que, là, il y a des présomptions qui jouent puis qui sont parfois difficiles à éliminer, mais, en dehors du mariage, la déclaration de paternité de quelqu'un, c'est volontaire. Puis, à partir du moment où cette personne-là veut avoir des responsabilités parentales vis-à-vis de l'enfant, bien, libre à lui.

Par contre, à l'inverse ? et je termine là-dessus ? à l'inverse, avec la présomption qui naît de 539, je pense, troisième alinéa, ça va faire en sorte que le mari dont le mariage est fragile et où, dans cette famille-là, où il y a un enfant qui naît, lui va pouvoir dire, malgré la présomption qui existe à l'heure actuelle ? parce que comme Dominique l'a dit tantôt, le mari est présumé être le père, là ? lui, il va pouvoir dire: Ah! non, moi, ce n'est pas moi, ce n'est pas dans le cadre d'un projet parental, donc, ce n'est pas moi qui est le père ? c'est le mari pourtant, là, c'est vrai, pour le moment, c'est lui qui est le père ? parce qu'il voudra peut-être se soustraire à une obligation alimentaire éventuelle vis-à-vis cet enfant-là. Puis là ça va être des débats judiciaires, des questions de preuve, tout ce que vous voulez. Je pense que ce n'est pas souhaitable.

Alors, la filiation par le sang, qu'elle demeure, et la filiation, après ça, si c'est un projet d'adoption ou d'insémination médicalement assistée ou procréation médicalement assistée, ça va.

Le Président (M. Lachance): Alors, rapidement, M. le député.

M. Gautrin: Écoutez, madame, c'est important, ce que vous nous dites là. Je voudrais poser une question, là. Dans un cas d'un couple marié hétérosexuel dont la femme décide d'avoir un enfant avec un géniteur qui n'est pas son mari, il y a présomption de paternité au mari. C'est bien ce que je comprends. Là, si j'ai compris la loi, elle a voulu essayer d'être absolument identique. Il y a une union qui est une union de deux femmes, et elles vont aller chercher un géniteur sur le côté et disent: Il y a présomption de bimaternité dans ce cadre-là, c'est-à-dire de deux personnes qui auront la responsabilité d'élever l'enfant. C'est par similitude, j'ai cru comprendre, dans votre projet de loi, qu'on en est arrivé là.

Vous, vous suggérez que, dans ce cas-là... Parce que vous voyez la difficulté que ça va poser: Dans quel cas ce sera médicalement assisté, dans quel cas ce sera pseudomédicalement assisté? Enfin, je pourrais vous faire toutes sortes d'images qu'on pourrait imaginer dans le médicalement plus ou moins assisté et plus ou moins naturel, ça pourrait... Et la difficulté qu'on pourrait aller dans cette direction... Oui, allez-y.

M. Goubau (Dominique): Mais je pense qu'il ne faut pas oublier que la présomption, aujourd'hui, dans le Code civil est un mode subsidiaire de preuve de la filiation. Si vous avez un couple marié aujourd'hui, madame accouche, le mari est présumé le père de l'enfant. Mais, en réalité, si l'amant de madame décide de s'inscrire comme étant le père, il peut très bien le faire aujourd'hui. Il peut très bien le faire, et la filiation se prouve par l'acte d'état civil. Donc, c'est l'amant qui sera, pour la loi, le père de l'enfant. Et la présomption est subsidiaire, et, par conséquent, la vérité biologique peut très bien apparaître par la simple déclaration de l'amant, si vous voulez, au directeur de l'état civil. Et la présomption, elle existe, mais, en réalité, elle est inférieure comme preuve de filiation que l'acte d'état civil. C'est possible aujourd'hui, il n'y a aucun problème.

Par contre, ce ne serait pas possible dans le cadre d'une insémination artificielle, dans le cadre d'une procréation médicalement assistée, parce que le géniteur, si on peut dire, mais celui qui a offert ses gamètes, celui qui est le donneur anonyme, lui, il ne peut pas venir devant un tribunal et dire: Je veux que mon lien de filiation soit établi, parce qu'on est protégé. Le problème, si on enlève le terme «médicalement» et qu'on met, dans le chapitre sur les procréations assistées, toutes les procréations assistées telles que définies à ces dispositions et qui impliquent même les procréations amicalement assistées, cela voudrait dire que, dans l'exemple que je vous ai donné, l'amant, lui, ne pourrait plus établir sa paternité, parce qu'il y aurait un obstacle dans la mesure où il s'agirait d'une procréation assistée et que, lorsqu'il s'agit d'une procréation assistée, celui qui a fait don de ses gamètes, dans le cadre du projet d'un couple, ne pourrait pas, lui, établir sa paternité ou sa maternité.

Par conséquent, il y aurait un obstacle, et c'est cela qui n'est pas normal. Cela n'est pas normal parce que cela vient enlever des droits fondamentaux non seulement au père potentiel, mais à l'enfant aussi, raison pour laquelle nous disons: Oui, gardons les protections qui existent aujourd'hui et donnons-les également aux couples homosexuels mais dans le cadre de la procréation médicalement assistée. Je pense que c'est quelque chose de très important et sur lequel nous devrons revenir dans notre mémoire et à l'occasion de l'étude article par article.

Le Président (M. Lachance): Alors, nous avons largement dépassé le temps imparti. Merci beaucoup, monsieur, mesdames, pour votre participation aux travaux de cette commission. Nous allons suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 17 h 9)

 

(Reprise à 17 h 17)

Le Président (M. Lachance): À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, nous allons poursuivre ces consultations, et j'invite immédiatement le Dr André Masse à bien vouloir prendre place.

Alors, Dr Masse, vous avez la parole pour les prochaines minutes. Vous avez vu le déroulement de nos travaux? Vous avez un maximum de 15 minutes pour nous faire part de vos commentaires. Bienvenue.

M. André Masse

M. Masse (André): Bien, merci. Bonsoir, M. le ministre, Mmes et MM. les députés, mesdames et messieurs. Je suis pédopsychiatre travaillant depuis 30 ans à l'hôpital Sainte-Justine et 13 ans à l'hôpital Rivière-des-Prairies de Montréal. Au cours de ces années, j'ai été à même de rencontrer des enfants et leurs parents formant des familles qu'on a nommées atypiques puis alternatives avant de les considérer comme des familles différentes, certes, mais familles, avec les rapports, les liens, les attentes et les projets qui constituent la trame visible et invisible de ces structures.

Je ne suis pas sociologue ni ethnologue. Je ne pourrais expliquer et je n'aurais pas pu prévoir ce qui se passe maintenant et je n'oserais pas prédire ce qui vient. Au cours de ces années, j'ai assisté activement aux changements profonds de notre société et de nos sociétés. Ces changements ont influencé les familles et leurs membres. Les femmes ont modifié leur rapport à l'enfant, au couple, à la famille et ont pris une place importante sur la scène du travail en dehors de la maison. Les hommes, de façon moins spectaculaire, se sont approchés des enfants, des bébés, et ont revendiqué un rôle plus immédiat auprès de leurs enfants, tout en changeant un peu leur rapport au couple et à la famille.

Parfois, les catalyseurs de ces changements ont été instrumentaux: par exemple, la maîtrise efficace de la natalité, amenant sa baisse vertigineuse en Occident; la disponibilité de l'analgésie, il y a plus de 100 ans, qui a changé énormément de choses dans notre rapport à la douleur et à la souffrance; la mise au point de lait maternisé, qui a permis de relever la mère de sa fonction d'allaitement; la disponibilité d'outils domestiques conviviaux qui allègent et permettent le partage des tâches à la maison. Par ailleurs, les moteurs de ces bouleversements ont été les prises de conscience de leur situation par les femmes et la reconnaissance légale des réalités de conflits de couples souffrants amenant au divorce. Rappelons-nous cependant que les lois rendant plus facile le divorce ne l'ont pas créé mais reconnu et encadré et ont permis de concrétiser des voies de solution parfois difficiles à des conflits étouffants et destructeurs.

Encore aujourd'hui, la mise en place d'une loi-cadre pour l'union civile ne crée pas cette réalité mais installe des balises qui permettront à des gens de concrétiser leurs projets de famille. Il nous faut aussi constater que cela accompagne d'autres changements majeurs de nos contextes sociaux, que ce soit les changements de travail que tous devront faire au cours de leur carrière, les modifications aux structures d'entreprises, l'apparition des travailleurs autonomes au statut précaire, que ce soit des rapports modifiés, personnalisés, aux événements de la vie, rituels individuels plutôt que sociaux pour la mort, la naissance, pour les mariages, et aux symboles d'autorité par la démocratisation des rapports au niveau des familles et au niveau de certaines structures.

n(17 h 20)n

Alors que la famille moderne avait diminué l'impact du passé et des traditions pour se projeter dans l'avenir, la nouvelle famille contemporaine se concentre sur le présent face à un flou perçu ou ressenti face à l'avenir. Du côté individuel, une certaine prépondérance de recherche de plaisir, de satisfaction rapide contribue aussi à focaliser plus sur le présent et une priorisation du bien-être maintenant plutôt que l'attente d'un avenir... ou la préparation d'un avenir meilleur. Ainsi, le réaménagement familial propose une unité affective agréable où chacun est à son écoute et un peu à l'écoute de l'autre, avec des parents branchés sur les sollicitations de la société de consommation, où l'autorité est confrontée aux forces horizontales des discussions démocratiques.

Dans cet éventail de familles contemporaines, on peut voir des couples hétérosexuels branchés qui cherchent des possibilités de développement, d'expériences nouvelles; des parents monoparentaux, mères surtout, un peu ou beaucoup débordés par le quotidien et ses exigences; des mères monoparentales par choix, où l'enfant est parfois un élément du combat plus qu'une relation... plus qu'un être relationnel en développement avec ses propres besoins. Souvent, les enfants sont un peu perdus par le manque de points de repère ou la puissance qu'ils semblent percevoir de leur position de demandeurs pas toujours pour les amener à des satisfactions, mais pour déranger l'équilibre précaire.

Comment se situe le couple parental homosexuel dans ce contexte? Il est certes très divers. Si on exclut les pervers ou les trop perturbés, comme on le ferait pour n'importe quel couple hétérosexuel, et si on exclut aussi les couples homosexuels qui politiseraient leur parentalité, on rencontre des couples d'adultes bienveillants et amoureux faisant un projet de famille en désirant avoir un enfant, individu distinct en devenir, individu qui doit être accompagné, accueilli, reconnu, à qui on permettra le développement de ses forces, de ses originalités dans un cadre sécurisant offrant une certaine perspective.

Le contexte du couple homosexuel qui désire un enfant l'amènera à réfléchir à sa démarche tant à cause des procédures qu'au questionnement de son entourage même le plus supportant. Au plan du rapport de base à l'enfant, après quelques expériences de repérage des besoins et de réponses adaptées, un adulte responsable peut développer la préoccupation nécessaire à l'installation d'un sentiment de sécurité chez un jeune enfant. Dans l'hypothèse où cette personne a une sécurité personnelle satisfaisante, elle peut représenter un parent adéquat.

Dans notre contexte social, la relation amoureuse est un élément fondamental du projet d'avoir un enfant. La famille nucléaire bénéficie rarement d'un soutien de famille élargie ou de l'attribut, comme on disait avant. Donc, tout repose sur un lien qui est non seulement civil, mais qui est aussi un lien de relation amoureuse entre les deux personnes. Quant à l'accompagnement du développement original d'un enfant, les parents homosexuels devraient être particulièrement sensibilisés aux originalités de l'individu, à la tolérance aux différences que l'on retrouve chez chaque enfant.

Il y a déjà quelques difficultés en vue dans les situations de familles où les parents seraient homosexuels. Tout d'abord, l'isolement et le rejet larvé de ces familles, qui peuvent placer les enfants dans une position d'exclusion ou de stigmatisation face à leurs copains, surtout au niveau de l'école primaire. Deuxièmement, l'exclusion affective de l'autre sexe. Le risque peut être plus grand chez les couples féminins, compte tenu de l'environnement très majoritairement féminin dans le nombre de services de garde et d'écoles primaires. Ce que je veux dire, c'est que les enfants de parents masculins, d'homosexuels masculins, pourraient être... sont plus facilement en contact avec des femmes, dans leur histoire, dans leur environnement, que les parents, par exemple... que les enfants de parents homosexuels féminins, qui risqueraient de moins voir de masculins ou d'être moins en contact avec les masculins si on n'y fait pas attention.

Une autre des difficultés serait l'apparition de caractéristiques très typées chez certains enfants qui pourraient se heurter à des attitudes rejetantes chez des parents, par exemple des enfants très menteurs, bougeants, très sportifs qui sont je ne dirais pas constitutionnellement mais, en tout cas, très précocement comme ça et qui pourraient, dans certaines structures familiales, heurter un peu l'attitude des parents au niveau de leurs traits de comportement. Dans le même sens, un des dangers est l'attitude d'apprentis sorciers des parents qui voudraient tout prévoir, tout décider en faisant fi des réalités, des contingences, des caractéristiques, comme choix du sexe, traits physiques ou psychologiques, et qui pourraient sous-tendre des intolérances ou des rejets.

Cependant, tous les observateurs sensibilisés au développement de l'identité chez les enfants de parents homosexuels ne trouvent rien de dramatique dans les recherches qu'on a faites jusqu'à maintenant. Il n'y a pas d'éléments, même si on en craignait beaucoup, on n'a pas d'éléments certains de dysfonction qui seraient reliés à la structure parentale homosexuelle. Il est certain qu'on n'a pas actuellement un recul très important, et les recherches qui ont été faites ont surtout été faites avec des parents qui étaient engagés, qui étaient, à la limite, des démonstrateurs, je dirais, donc peut-être pas des parents idéaux ou, en tout cas, généraux dans leur attitude, mais, même chez eux, on n'a pas de signes qui rejoignent les inquiétudes qui étaient soulignées ou qui étaient attendues par les professionnels impliqués dans les situations de développement d'enfants. Les aspects inconscients et contradictoires qui sont au soubassement de la personnalité des parents homosexuels pourraient jouer leur tension, mais serait-ce de façon différente des conflits des parents hétérosexuels? Il n'y a rien qui en est plus certain, il n'y a rien qui se dessine dans ce sens-là.

Si on pouvait donner des conseils aux parents de couples... c'est-à-dire aux parents homosexuels, tout d'abord, on donnerait les mêmes conseils qu'aux parents hétérosexuels: On leur dirait d'être attentifs à leur enfant, de l'accompagner d'une façon personnelle et individuelle. Il faudrait encourager, particulièrement pour les parents homosexuels... Et on entendait tout à l'heure les aspects particuliers, par exemple, des inséminations ou des parentalités particulières. Il faudrait reconnaître aux enfants, pour les enfants en tout cas, la richesse des liens et l'importance de ses histoires personnelles pour installer l'enfant dans sa continuité. C'est une crainte et c'est une situation difficile qu'on a actuellement dans le monde en général, finalement, que les parents coupent les liens avec les structures familiales, avec les traditions, avec les traditions historiques même, et se retrouvent très souvent dans un noyau très isolé familialement, avec leur enfant, à essayer de découvrir la voie pour se développer et grandir. Il est certain que les familles homosexuelles pourraient être dans la même difficulté, et de façon particulière, parce que souvent, pas dans tous les cas mais assez souvent, ces parents-là ont de la difficulté à rester en liens affectueux et très efficaces avec leurs parents ou, en tout cas, leur contexte familial. Et, dans ce sens-là, c'est une fragilité d'amener... d'avoir pour ces enfants un isolement subséquent au niveau de leurs liens familiaux.

Ce qui m'apparaît intéressant de proposer, si, encore une fois, on peut donner des conseils, c'est d'encourager et de faciliter le projet d'enfanter, d'organiser la venue au monde et la réception de l'enfant. Quand je dis ces choses-là, c'est d'essayer de travailler, avec ces parents, comme on le fait avec les parents hétérosexuels, quand on peut le faire, d'arriver à travailler avec eux la préparation de la venue de l'enfant, se préparer mentalement à l'accueillir et se préparer à lui faire une place originale. Par la suite bien sûr il faudra encourager l'enfant à grandir, à devenir responsable, engagé et conséquent.

n(17 h 30)n

Une des situations risquées, mais qui n'est pas exclusive aux couples homosexuels, c'est le risque de parentaliser l'enfant, c'est-à-dire que l'enfant très tôt prenne des responsabilités matures ou, en tout cas, hypermatures de comprendre le parent, de comprendre sa situation, de comprendre un peu l'exception dans laquelle il fait partie. Mais, ça, on le rencontre aussi dans les familles monoparentales suite à des divorces ou à des séparations où l'enfant a une espèce de rôle de petit parent, où il n'est pas le confident mais l'accompagnateur, en tout cas, du parent dans sa lutte, ou dans ses difficultés quotidiennes, ou dans sa façon de comprendre la réalité. Alors, c'est certain que, la même chose que pour les parents hétérosexuels, ce conseil se proposerait pour les parents homosexuels.

Enfin, je pense qu'il serait intéressant de prévoir une disponibilité d'aide pour ces parents-là, une aide qui serait accessible facilement et qui serait fournie par des gens qui connaissent cette réalité, qui sont sensibilisés à la réalité, un peu comme on le faisait, il y a maintenant 30 ans à peu près, pour les parents adoptants, qui avaient un service disponible, si on veut, de consultation psychologique ou psychiatrique pour faire face aux situations de développement de leur enfant.

J'ai fait partie d'une de ces équipes-là, au début de mon travail, il y a 30 ans, où une équipe était assignée pour répondre aux besoins. On ne travaillait pas tous les jours, là, ça dépendait des besoins. mais, quand quelqu'un avait une question qui se posait par rapport à son enfant, il avait accès rapidement à des consultations, qu'il y avait une façon de comprendre, de façon différente finalement, la réalité d'un enfant adopté des autres réalités de parentalité qu'on connaissait. Je pense qu'il pourrait y avoir une situation un peu semblable où des équipes seraient sensibilisées finalement aux réalités particulières que vivent ces parents-là et ces enfants-là.

En conclusion, ce que je voulais partager avec vous, c'est un sentiment de modestie, parce que ces mouvements-là nous dépassent, je pense. On ne les prévoyait pas, on ne les prévoit pas. Mais il faut être sensible à ce qui arrive, être capable d'avoir des attitudes souples et de pouvoir s'adapter, viser à accompagner l'adaptation de ces gens-là et de leur réalité, de leurs enfants, et enfin développer, à tous les niveaux, l'éducation: l'éducation des enfants au primaire sur les réalités différentes; l'éducation au secondaire sur les responsabilités des enfants et des futurs parents finalement, dans quelle que soit la situation familiale dans laquelle ils seront impliqués, comment un père reste père même quand il y a une séparation ou il y a un divorce, comment des mères peuvent s'impliquer, s'assurer que les liens vont se continuer; et enfin une formation et une éducation particulières dans les milieux professionnels qui ont à faire face à ces réalités.

Le Président (M. Lachance): Merci, Dr Masse. M. le ministre de la Justice.

M. Bégin: Merci infiniment, Dr Masse, d'abord d'être venu ici et puis pour votre témoignage. Vous savez, ce que vous venez de dire... Vous n'avez pratiquement pas parlé du projet comme tel, sauf que tacitement vous en avez donné votre approbation en disant: Il n'y a rien qui me permet de dire qu'on ne devrait pas faire ça parce que ça poserait des problèmes. Ce que vous nous dites et, si j'ai encore une fois bien compris, c'est que, dans toute situation humaine, il peut y avoir des difficultés particulières propres à une situation et que nous devrions mettre l'accent sur l'aide, les soutiens qu'on peut fournir à ces personnes vivant dans telle situation et que, si elles ont ces soutiens et cette aide-là, il n'y a aucune inquiétude à avoir quant à l'issue du développement d'un enfant et/ou d'un noyau familial. Est-ce que je vous ai bien traduit?

M. Masse (André): Oui, parce que je crois que ces parents-là, quand ils feront une démarche de parentalité, ils feront une démarche plus conséquente parfois que certains parents hétérosexuels qui bénéficient des accidents de la nature pour devenir parents.

M. Bégin: Dans l'étude de l'American Pediatric Association, on mentionne que... je ne connais pas tous les termes, là, mais qu'il n'y a pas de différence entre des enfants élevés par un couple hétérosexuel ou un couple homosexuel qui n'est pas dans les extrêmes, là, des saints ou encore des personnes à problèmes, mais que, pour des parents citoyens réguliers, il n'y a aucune différence. Est-ce que vous endossez totalement cette affirmation à l'effet que tous les tabous, les préjugés qu'on a sur, par exemple, la pédophilie, tous ces éléments qui découleraient supposément du fait de l'homosexualité ou d'un couple homosexuel élevant un enfant, est-ce que vous partagez les conclusions de l'American Association of Pediatry?

M. Masse (André): Tout à fait. De façon générale, je partage des conclusions. Il est certain que des parents homosexuels ou hétérosexuels qui ont des conflits très importants dans leurs relations avec leurs parents, par exemple, ou avec l'autre sexe, bien, auront des signes ou des impacts sur les enfants, mais c'est pareil pour les homosexuels que pour les hétérosexuels.

M. Bégin: Merci.

Le Président (M. Lachance): Mme la députée de Bourassa et porte-parole de l'opposition officielle.

Mme Lamquin-Éthier: Bonjour, Dr Masse. Merci beaucoup. Pouvez-vous élaborer davantage? Vous avez parlé tout à l'heure... Je ne sais pas si ça valait pour... Vous avez parlé d'exclusion affective. Est-ce que ça veut dire que les contacts des enfants de couples gais, il y a une distinction à faire avec les enfants de couples de lesbiennes?

M. Masse (André): C'est-à-dire que la distinction que je faisais, c'était si, par exemple, on a un couple de femmes homosexuelles qui ont des enfants, ils risqueraient, dans certaines situations, d'avoir très peu de contacts avec des hommes significatifs, affectueux, je dirais. Bon. Ça n'élimine pas les amis, mais en dehors des amis. Parce que, ces couples-là, de l'expérience que j'ai eue, étaient quand même relativement isolés, familialement parlant. Donc, ils ont peu de contacts avec les grands-parents, ou tout ça. Je ne dis pas qu'il n'y en a pas mais il y en a... De ceux que je connais, que j'ai connus, il y en avait peu. Donc, il y aurait un risque, pour ces enfants-là, d'avoir moins de contacts avec des masculins significatifs positifs.

Ce n'est pas toujours un grand-père ou un oncle sympathique. Ça peut être aussi un autre. Dernièrement, je donnais un conseil à une maman d'essayer, si elle avait à choisir deux moniteurs, peut-être de prendre un moniteur masculin pour sa fille plutôt qu'un moniteur féminin, s'ils étaient équivalents comme qualité et qu'elle leur faisait confiance, pour que la fille ait une expérience avec un homme qui la reconnaît, qui la félicite, qui l'encourage, et tout ça, et non pas toujours des femmes. Parce qu'il y en a... Les enfants sont entourés de femmes, là, jusqu'à l'adolescence finalement.

Mme Lamquin-Éthier: Il y a... Là, je cherche dans... Il y a eu un groupe que nous avons entendu ce matin, et ils ont parlé d'une étude qui est parue dans la Revue québécoise de psychologie où il est question... Le développement des enfants de parents homosexuels comparé à celui des enfants de parents hétérosexuels. C'est D. Julien, M. Dubé et I. Gagnon. Est-ce que ça vous dit quelque chose?

M. Masse (André): Non.

Mme Lamquin-Éthier: Non? Merci.

Une voix: ...

Mme Lamquin-Éthier: Non. Je ne sais pas si c'est la même.

M. Bégin: C'est la même.

Mme Lamquin-Éthier: Ah oui?

M. Bégin: Oui.

Le Président (M. Lachance): Est-ce qu'il y a d'autres questions?

Mme Lamquin-Éthier: Ah oui.

M. Bégin: S'il n'y a pas d'autres questions, je...

Le Président (M. Lachance): Oui, madame. Ah! Ça va. M. le ministre.

M. Bégin: Croyez-vous que vous pouvez ajouter quelque chose? Vous avez quand même assisté, là, au débat, vous avez pu entendre des choses. Est-ce qu'il y a des éléments qui vous paraissent, là, inexacts par rapport à votre connaissance ? et vous avez bien pris garde de ne pas vouloir être le solutionneur de tous les problèmes ? mais donner une réponse ou un point de vue par rapport à ceux que vous avez entendus? Par exemple, je ne sais pas, quelque chose qui vous aurait choqué ou qui serait, à votre point de vue, tout à fait inexact. Est-ce que vous avez quelque chose comme ça que vous avez entendu et que vous aimeriez relever?

M. Masse (André): Bien, ce qui m'embête un peu, c'est quand on sort des squelettes du placard d'une façon trop rapide. Et je pense que de donner des paternités à des gens qui n'en voulaient pas ou qui n'en voulaient pas beaucoup, ça poserait des problèmes pour des enfants, et je vois mal comment on pourrait gérer ça. Par exemple, j'écoutais la parentalité... la triparentalité. A priori, ce n'est pas impossible, et j'ai rencontré cette année une jeune adulte qui décrivait avec beaucoup d'affection finalement comment ses quatre parents l'avaient aidée à maturer, c'est-à-dire les deux couples. Le couple initial s'était séparé et les deux couples s'occupaient d'elle avec beaucoup d'attention et énormément de pertinence. Et, pour elle, ces quatre parents là ont été une richesse pour elle. Mais c'est rare qu'on a une situation comme ça où les gens sont capables de se réentendre et de ne pas devenir conflictuels. Alors, c'est un peu de la... Bien, pour elle, c'était une réussite, là, et je pense que c'était heureux que ce soit comme ça, mais ça reste l'exception.

Alors, j'ai un peu de difficulté à croire que ça peut être facile de voir un père qui devient ou qui se fait attribuer une paternité qu'il n'avait pas vraiment voulue, parce qu'il est là. Ça m'apparaît un peu compliqué, ça.

n(17 h 40)n

M. Bégin: Feriez-vous une distinction, par rapport à ce débat qui a été fait tout à l'heure, entre la paternité et la ? géniteur ? génitalité? Par exemple, le Barreau soulevait le cas où un ami s'offrirait pour être le géniteur... ou ne serait pas... ou se ferait avoir, d'une certaine manière, dans une relation qui n'était pas destinée à être de l'amour mais plutôt d'avoir du sperme. Donc, on disait, le Barreau disait: Il faudrait... Si le père, cet homme-là, veut être le père, il peut le faire et il l'inscrirait. Mais est-ce que vous verriez d'un bon oeil le fait de dire: On pourrait reconnaître qu'il est le géniteur, donc, pour l'enfant qui voudrait connaître ses antécédents biologiques, ce serait pour lui possible de le faire, mais qu'il ne serait pas le père comme tel, il serait... Il y aurait les deux, le couple, les deux femmes, dans l'hypothèse qui était mentionnée, qui seraient les deux parents. Comment réagissez-vous devant ça?

M. Masse (André): Ma réaction, c'est de partir d'expériences que j'ai eues, finalement, qui recoupent un peu ça, où des enfants ont su ou ont connu leur père géniteur sans... bien, le géniteur sans avoir eu de relation de filiation avec lui. Aucune rencontre, aucune... Ça n'a pas été inintéressant au niveau psychique, j'entends, pour la personne... une des personnes en particulier qui construisait autour de ce père-là quelque chose qu'elle imaginait. Elle ne l'a jamais vu, il est décédé avant qu'elle puisse le rencontrer. Elle sait qui il est... quel nom il a et de quelle famille il vient, mais ce n'est que tardivement qu'elle a rencontré sa famille. Elle avait plus de 30 ans, finalement, quand elle a rencontré la famille. Et, pendant toute son enfance, elle construisait autour de ce père dont elle découvrait progressivement l'identité un circuit organisationnel pour elle. Elle s'organisait mentalement avec ça. Et ça a été assez intéressant quoique très conflictuel au moment de se rapprocher de cette famille-là. Ça n'a pas été du tout évident quand elle est devenue dans la réalité d'aller contacter là.

J'aime mieux faire l'économie autour d'un couple amoureux qui décide ensemble d'avoir un enfant... qui soit homosexuel et qui décide ensemble d'accompagner un enfant là-dedans, que d'avoir référence à un père de passage, généreux lui aussi, mais juste pour le...

M. Bégin: Alors, si je vous comprends bien, entre le droit pour l'enfant d'être élevé par un couple amoureux et, pour cet enfant-là, d'avoir la connaissance du père ou du géniteur, vous préférez le couple qui élève au détriment ? entre guillemets détriment ? du géniteur, qui peut-être est-il le géniteur mais qui n'offre pas à l'enfant des avantages qu'offre le fait d'être élevé dans un milieu amoureux. C'est ça que vous nous dites?

M. Masse (André): Oui. Oui. Et les avantages médicaux génétiques ne sont pas jusqu'à maintenant déterminants pour justifier qu'on recherche les pères géniteurs de façon absolue.

M. Bégin: Merci beaucoup.

Le Président (M. Lachance): Alors, merci, Dr Masse, pour votre participation ici aujourd'hui. Et là-dessus j'ajourne les travaux à demain, 10 h 15 ? notez bien l'heure, 10 h 15 ? ici même, à la salle du Conseil législatif, pour la poursuite de nos travaux, pour les auditions. Alors, demain, à 10 h 15. Voilà. Merci.

(Fin de la séance à 17 h 43)

 


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