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Version finale

41e législature, 1re session
(20 mai 2014 au 23 août 2018)

Le jeudi 26 novembre 2015 - Vol. 44 N° 80

Étude détaillée du projet de loi n° 59, Loi édictant la Loi concernant la prévention et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence et apportant diverses modifications législatives pour renforcer la protection des personnes


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Table des matières

Étude détaillée (suite)

Intervenants

M. Guy Ouellette, président

Mme Stéphanie Vallée

Mme Agnès Maltais

Mme Nathalie Roy

Mme Françoise David

Mme Carole Poirier

M. Maka Kotto

M. Richard Merlini

M. Jean Boucher

M. Jean Rousselle

M. Sébastien Proulx

Note de l'éditeur : La commission a aussi siégé en matinée pour l'étude détaillée du projet de loi n° 78,Loi encadrant l'octroi des allocations de transition aux députés qui démissionnent en cours de mandat. Le compte rendu en est publié dans un fascicule distinct.

Journal des débats

(Quinze heures onze minutes)

Le Président (M. Ouellette) : Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des institutions ouverte. Veuillez, s'il vous plaît, vous assurer que vos appareils électroniques sont en mode silencieux afin de ne pas perturber nos travaux.

La commission est réunie afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 59, Loi édictant la Loi concernant la prévention et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence et apportant diverses modifications législatives pour renforcer la protection des personnes.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Polo (Laval-des-Rapides) remplace M. Tanguay (LaFontaine); M. Kotto (Bourget) remplace M. Leclair (Beauharnois); et Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve) remplace M. Marceau (Rousseau).

Étude détaillée (suite)

Le Président (M. Ouellette) : Merci. Lors de notre dernière séance, nous avions poursuivi le débat sur l'alinéa un de l'article 1 édicté par l'article 1 du projet de loi, et, Mme la ministre, vous aviez distribué un amendement qui n'a pas été présenté, vous aviez distribué cet amendement-là pour que les collègues en prennent connaissance. Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais : Oui. Juste pour replacer tout le monde — je sais que la députée de Gouin vient se joindre à nous aussi — puis moi, pour me remettre en mémoire où on était au niveau des amendements qui avaient été déposés par la députée de Montarville, est-ce qu'ils avaient tous été retirés?

Mme Vallée : ...été retirés.

Le Président (M. Ouellette) : Elle avait retiré ses amendements. À ce qu'il semblerait, on repart en neuf.

Mme Maltais : O.K. C'est beau, parfait.

Le Président (M. Ouellette) : Il y a toujours l'amendement que la ministre avait déposé au deuxième alinéa de l'article 1, qui est suspendu. On n'est pas là, on est sur le premier alinéa de l'article 1. Et, s'il n'y a pas d'autre intervention, je vais laisser la parole à Mme la ministre, qui va nous présenter son amendement.

Mme Vallée : L'amendement que je vous propose serait le suivant. Donc, on viendrait modifier le premier alinéa de l'article 1 de la loi proposée par l'article 1 du projet de loi par l'ajout à la fin de «, lesquels peuvent s'exprimer notamment dans un contexte d'intolérance ou de radicalisation pouvant mener à l'extrémisme violent.»

Donc, tel qu'amendé, l'alinéa un de l'article 1 se lirait comme suit : «La présente loi a pour objet d'établir des mesures de prévention et de lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence, lesquels peuvent s'exprimer notamment dans un contexte d'intolérance ou de radicalisation pouvant mener à l'extrémisme violent.»

Le Président (M. Ouellette) : Vous avez des remarques?

Mme Vallée : En fait, M. le Président, hier et avant-hier, on a étudié longuement un amendement qu'avait déposé la députée de Taschereau par lequel elle souhaitait préciser davantage la portée du projet de loi, la portée des dispositions qui visent notamment les discours haineux et les discours incitant à la violence. Elle a manifesté notamment des préoccupations, préoccupations de certains groupes qui considéraient le projet de loi trop large, trop vague, et elle a fait état des craintes que certains groupes nous ont formulées lors des consultations. La députée de Montarville a également déposé un amendement qui avait un peu le même esprit. Donc, ce que je comprends des deux amendements déposés par mes collègues, c'est cette volonté de venir cadrer davantage le discours haineux.

Comme je l'ai expliqué hier, on a des amendements qui sont prévus qui visent le titre du projet de loi, qui visent les attendus du projet de loi. On a des amendements aussi à l'article 1, un amendement qui propose une définition, définition qui vient des décisions de la Cour suprême. Malgré ça, malgré ces amendements-là, on semble vouloir préciser davantage. Moi, je n'ai pas de problème, je n'ai pas de problème à le préciser davantage, mais je ne voudrais pas le préciser et l'amener à viser exclusivement des discours qui font référence exclusivement, par exemple, à un extrémisme religieux. Je cherche la formulation que notre collègue de Montarville avait présentée, on parlait beaucoup d'intégrisme religieux, et c'était trop centré... Puis, comme on en avait discuté la semaine dernière, l'intégrisme n'est pas que religieux, la radicalisation n'est pas que religieuse, elle peut être idéologique. Et donc, dans le fond, ce qu'on souhaite, on veut s'attaquer à l'intolérance, on veut s'attaquer au processus de radicalisation, puis je suis bien d'accord... D'ailleurs, je pense que c'est la députée de Taschereau qui a relu certains passages du plan d'action, et pourquoi pas s'inspirer de notre plan d'action et d'inclure certaines références dans l'article premier?

On a vérifié, évidemment, parce qu'on a toujours eu le souci que les modifications et les amendements qu'on pourrait déposer en cours de route soient conformes avec la charte, soient conformes avec l'esprit du projet de loi. Nos équipes ici ont analysé le tout et considèrent que cette piste d'atterrissage, finalement, qui, dans le fond, se veut une façon de, je l'espère, en arriver à un consensus sur ce premier alinéa, eh bien, ce sont des amendements qui pourraient tout à fait cadrer avec nos préoccupations quant au respect des chartes des droits. Ça ne limite pas et ça ne cible pas un groupe particulier, mais ça cible plutôt une façon et un comportement qui s'expriment par une intolérance et une radicalisation de ceux et celles qui tiennent les discours. Et là on vient chercher, oui, l'intégrisme religieux, auquel faisait référence notre collègue, d'une certaine façon, mais on fait aussi référence à l'intégrisme idéologique, auquel faisait référence la collègue d'Hochelaga-Maisonneuve lorsqu'elle cite certains blogueurs qui ont eu des propos qui ne sont pas plus acceptables.

Alors, pourquoi ne pas, par ce projet de loi, toucher les deux enjeux? Moi, je pense qu'il faut le faire. Alors, cette formulation nous permet de venir sévir contre des propos idéologiques comme ceux que Roosh V, par exemple, ou d'autres blogueurs pourraient tenir et qui inciteraient à la violence et à la haine, notamment, par exemple, à l'égard des femmes, mais ça permettrait aussi de s'attaquer à certains prêches, certains enseignements qui s'attaquent également à des gens qui ont des caractéristiques visées à l'article 10 de la charte.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais : Merci, M. le Président. Je pense qu'on tourne autour, là, vraiment, de l'objet du projet de loi, puis on essaie de le préciser. J'apprécie la démarche que la ministre est en train de faire avec nous, je pense qu'elle essaie de répondre à nos préoccupations.

Maintenant, toute la délicatesse du débat et ce qui fait qu'on avance prudemment, je veux le réexprimer en disant : Écoutez, ce n'est pas anodin, c'est que c'est une loi qui légifère sur la liberté d'expression, alors d'où l'idée de... il faut bien baliser, si on touche à la liberté d'expression, à quoi on touche.

Deuxièmement, nous sommes encore convaincus qu'il n'y avait peut-être pas nécessité de légiférer de cette façon-là. Le gouvernement a déposé une proposition. On va travailler sur la proposition gouvernementale, mais je tiens à réaffirmer, avant qu'on commence à entrer vraiment dans l'article 1, dans l'alinéa un, qu'il y avait d'autres méthodes et que, cette méthode-là, nous ne l'avons pas choisie. Mais nous allons collaborer, dans ce sens d'essayer d'atteindre des objectifs précis qui peuvent nous rassembler, d'où... Sur la radicalisation, il y a eu une bonne réponse, je pense. On va voir dans le détail, mais il y a une bonne réponse. Il est introduit, on apprécie, parce que c'est vraiment l'objectif. O.K.?

Maintenant, demeure le «notamment». Je l'ai dit, d'ailleurs, hier d'entrée de jeu. J'ai dit, il y a deux choses qui me fatiguent : le «notamment»; l'autre, c'était «un contexte d'intolérance». Et la ministre vient encore de ramener le mot «idéologie». À ce que je sache, il est permis de manifester. PEGIDA existe dans des pays et peut faire des manifestations. C'est un mouvement idéologique qui a été cité par la ministre, qui, parfois, nous fait lever... Mettons que ce n'est pas la mienne, mais elle a le droit d'être exprimée sur une place publique, à moins qu'elle ne mène à la violence. Alors, je veux bien comprendre la nécessité du «notamment» et la nécessité du «contexte d'intolérance» parce que c'est à ce mot-là qu'on pourrait peut-être... J'essaie de coller le mot «idéologie» en quelque part. Est-ce que c'est «intolérance»? Est-ce que c'est «radicalisation»? Mais ça fait deux fois que la ministre s'exprime en disant : Il y a des idéologies qu'on ne veut pas. Ça veut dire qu'il y a des idéologies qu'on ne veut pas entendre sur la place publique, là. Je veux faire préciser ça. Ce n'est peut-être pas ça qu'elle voulait dire, mais je veux faire préciser ça.

• (15 h 20) •

Le Président (M. Ouellette) : Mme la ministre.

Mme Vallée : En fait, ce n'est pas des idéologies sur la place publique qu'on ne veut pas entendre, ce n'est pas l'idéologie, mais c'est lorsque le discours porté par une idéologie est un discours qui incite à la haine, qui incite à la violence et qui va amener à l'exclusion de l'autre. C'est ça que l'on vise, on ne vise pas un discours... Comme j'ai mentionné, quelqu'un qui a un discours d'opinion, un discours d'opinion qui est de nature dérangeante, disons, qui ne cadre pas dans le «politically correct», disons-le comme ça, peut tenir son discours, ce n'est pas le problème. Mais, lorsqu'à travers le discours on incite à la violence ou on tient des propos haineux tels que définis, là, des propos qui vont marginaliser le groupe ciblé et qui vont en faire un objet de détestation, par exemple, c'est ça qui est proscrit, qui est visé, ce n'est pas l'idéologie. Il faut bien comprendre puis il faut faire la distinction.

C'est que l'extrémisme, ça se nourrit de différentes idéologies. Parfois, l'extrémisme, il va se nourrir d'idéologies religieuses. Parfois, ce seront des idéologies politiques. Mais c'est le propos haineux incitant à la violence qui est visé. Quelqu'un d'extrême droite qui affirme ses convictions d'extrême droite peut les affirmer. Affirmer ses conceptions d'extrême droite en visant, par exemple, à exclure ou à s'en prendre à des catégories d'individus, en incitant à la violence à l'égard de certains individus, c'est là que le propos n'est plus acceptable. Ce n'est pas le propos, ce n'est pas l'idéologie en soi qui est problématique, c'est le propos tenu qui incite à la violence, qui incite à la haine. C'est toute, toute, toute la différence.

Alors, c'est parce que, si on ne cible... Notre collègue de Montarville ne ciblait que la question religieuse. Puis le meilleur exemple, je crois, qu'on peut avoir et que l'histoire a su nous démontrer, c'est, par exemple, l'idéologie qui a mené à la Deuxième Guerre mondiale. C'était une idéologie qui a été poussée à l'extrême et qui a amené à s'en prendre à certaines catégories d'individus en raison de leur différence. Et le nazisme poussé à l'extrême a mené vers la... mais ce n'était pas une religion, c'était une idéologie politique. C'est pour ça qu'il est important de ne pas faire de distinction, de ne pas cibler exclusivement parce que certaines... il y a des idéologies qui ne sont pas religieuses. On pourrait vouloir s'en prendre à une personne non pas en raison de la foi, mais en raison d'une autre prise de position. Donc, il n'est pas question... puis c'est important de toujours, toujours, toujours revenir à la question : Notre loi vise quoi? Elle vise à prévenir et à lutter contre les discours haineux et les discours qui incitent à la violence. Ce n'est pas le discours politique qui est visé, là, c'est le discours haineux, le discours incitant à la violence. C'est ça qui est visé.

Et ce discours-là, dans quel contexte on le retrouve parce que, là... Et ce que je vous propose, c'est de venir préciser le contexte dans lequel ce discours-là s'exprime, puisque, tant suite aux préoccupations soulevées par la collègue de Montarville que par nos collègues de l'opposition — parce que même le député de Bourget, hier, a fait part de certaines inquiétudes à l'effet que la portée était peut-être trop large, et il était donc peut-être important de le préciser, compte tenu que ce projet de loi s'inscrivait aussi dans le plan de lutte à la radicalisation — donc, d'où l'ajout du «contexte d'intolérance — qui est, à mon avis, important — ou de radicalisation», qui n'est pas nécessairement religieux, qui peut... Parce qu'hier, lorsqu'on a abordé, lorsqu'on a lu différentes définitions de la radicalisation, notamment le fascicule préparé par l'UQAM, on dit : La radicalisation, elle s'exprime... Je veux reprendre le petit guide, le petit glossaire à la fin, la radicalisation, c'est un «processus selon lequel des personnes sont initiées à un message idéologique et à un ensemble de croyances et sont encouragées à remplacer leurs croyances modérées et généralement admises par des opinions extrêmes».

Alors, ce n'est pas l'idée qui est sanctionnée par le projet de loi, c'est le discours haineux. Ce n'est pas le fondement idéologique, politique, c'est vraiment lorsque ce fondement idéologique ou politique est utilisé pour tenir comme base pour un discours qui est haineux ou qui incite à la violence. C'est ça, le problème. Ce n'est pas le discours d'opinion qui est le problème, c'est lorsque le discours d'opinion est poussé, et là il s'en prend à une catégorie de personnes. Donc, c'était vraiment... Puis je pense qu'honnêtement ce n'est peut-être pas mauvais de préciser le contexte. Ça va peut-être permettre de rassurer les gens, et c'était l'objectif aussi qui était visé par les différents amendements, pour préciser le contexte.

Puis d'ailleurs, dans le mémoire de la ville de Montréal — je pense que c'est à la page 14 — on avait une espèce de pyramide qui nous illustrait les modèles de prévention et d'intervention en matière d'incidents et de crimes haineux et puis de quelle façon ça s'exerce, et je pense que, ce diagramme-là, vous l'avez peut-être... La collègue d'Hochelaga-Maisonneuve fait signe, elle se l'est peut-être fait expliquer la semaine dernière lorsqu'elle a rencontré les gens à Montréal, la radicalisation va tranquillement se mettre en branle... Dans un premier temps, on va questionner le vivre-ensemble. L'intolérance va commencer à se manifester par un questionnement sur le vivre-ensemble. Par la suite, il y a un discours, tranquillement, qui va se former. On va consolider le discours, et là vont survenir des incidents haineux. Et là, par la suite, on va envisager la violence comme étant un moyen légitime de s'en prendre à un groupe.

Alors, ce discours-là, le discours haineux, mène à ça. Il mène à la violence parce qu'à force de répéter le discours haineux, le discours qui incite à la violence, ceux qui reçoivent le discours vont finir par l'assimiler et vont finir par concevoir que la violence, elle est correcte lorsqu'elle s'en prend à une personne désignée qui a une caractéristique prévue à l'article 10 de la charte, et c'est là qu'on retrouve les crimes haineux. C'est dans ce contexte-là que ça s'inscrit. Donc, le discours haineux, ça s'inscrit dans la radicalisation, ça s'inscrit dans la violence.

• (15 h 30) •

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais : M. le Président, j'entends bien la ministre. On est dans préciser... Je pose encore une question, la même. On a dans son amendement «, lesquels peuvent s'exprimer notamment», et là il y a un «notamment». Et pourtant le reste, c'est «dans un [discours] d'intolérance ou de radicalisation pouvant mener à l'extrémisme violent». Alors, si ce n'est pas un de ces deux discours-là, c'est quoi? Puis j'ai même, je vous le dis, j'ai déjà des bémols sur «intolérance», là. Mais «lesquels peuvent s'exprimer notamment», c'est parce qu'il y a un «notamment» à cet endroit-là, là. Donc, moi, j'essaie de comprendre quels autres discours peuvent correspondre à autre chose que la définition usuelle, donc, d'«intolérance» ou de «radicalisation». Parce que, là, ça veut dire qu'il y en a d'autres potentiels, ça fait qu'on garde encore quand même... Je comprends qu'on a exprimé une balise en parlant d'intolérance et radicalisation, mais on laisse encore une autre porte ouverte, puis j'essaie de comprendre pourquoi, quel est le sens de cette porte ouverte qui demeure là, à quoi on veut faire affaire.

Parce que, je vais vous le dire honnêtement, la nécessité de... Vous le savez, on a déjà dans le Code criminel les articles 318 à 320 qui protègent les personnes des crimes haineux. O.K.? Il y a possibilité d'aller là. Là, on ouvre une nouvelle législation pour que les gens aient affaire au tribunal de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse avec une nouvelle section qu'on ouvre pour des infractions. Or, il y a encore une ouverture, et la ministre dit : Les discours qui pourraient amener à l'exclusion de l'autre, à le marginaliser. On est encore dans l'interprétation très large. Quand on parle de marginalisation ou d'exclusion, on n'est pas dans «menant à la violence», là. C'est pour ça que je veux... Et le «pouvant mener à l'extrémisme violent», il est dans le «notamment». Donc, il y a autre chose encore. Tant qu'on a le «notamment», là, on a encore une porte assez grande ouverte.

Ça fait que je veux comprendre, à part l'intolérance, la radicalisation pouvant mener à l'extrémisme violent, qu'est-ce qu'il reste? Puis qu'est-ce que la ministre veut garder comme effet de sa loi qu'on ne voit pas?

Le Président (M. Ouellette) : Mme la ministre.

Des voix : ...

Le Président (M. Ouellette) : On va suspendre quelques minutes.

(Suspension de la séance à 15 h 33)

(Reprise à 15 h 44)

Le Président (M. Ouellette) : Nous repartons, nous reprenons nos travaux. Nous en étions sur un commentaire de Mme la députée de Taschereau à la ministre relativement à l'utilisation du mot «notamment» sur l'amendement présenté par Mme la ministre, et je pense que, Mme la ministre, vous avez une réponse à l'interrogation de Mme la députée de Taschereau.

Mme Vallée : Oui. Alors, sur la question de l'utilisation du mot «notamment», on m'indique qu'il ne serait pas nécessaire dans le libellé, puisque le contexte d'intolérance vient, dans le fond, rejoindre les préoccupations et vient rejoindre le fait qu'on ne peut s'en prendre aux gens qui ont une caractéristique commune qui est précisée à l'article 10 de la charte. Donc, le terme «intolérance» vient englober ces différents enjeux là. En fait, c'était ceinture et bretelles, mais peut-être qu'on peut laisser aller les bretelles si... Pour ce qui est du «notamment», là, ça ne semble pas fragiliser le texte.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais : O.K. M. le Président, on est en train d'écrire un amendement qui correspond à ce qu'on veut. Alors, ce sera, en fait, un sous-amendement. Alors, ce serait : Modifier l'amendement du gouvernement... pas du gouvernement... Modifier... Ce n'est pas de même.

Une voix : ...

Mme Maltais : Modifier l'amendement... Comment on l'appelle? Modifier l'amendement modifiant le premier alinéa de l'article 1 de la loi proposée par l'article 1 du projet de loi en remplaçant les mots «, lesquels peuvent s'exprimer notamment» par les mots «s'exprimant au nom du fondamentalisme religieux ou» et en supprimant les mots «d'intolérance ou».

Alors, non, il me manque un bout, là. Excusez-moi, il y a eu vraiment... L'esprit, là, c'est que ça va — je vais vous l'écrire — donner : En remplaçant les mots «, lesquels peuvent s'exprimer notamment dans un contexte d'intolérance ou»... On change ça par «, lesquels s'expriment au nom du fondamentalisme religieux». Et on ajoute «la» entre «de» et «la».

Le Président (M. Ouellette) : Vous le présentez officiellement, votre sous-amendement, Mme la députée de Taschereau?

Mme Maltais : Oui. Je pense qu'il faut que je le réécrive. C'est un sous-amendement, je veux le présenter officiellement.

Le Président (M. Ouellette) : C'est bon. Vous allez...

Mme Maltais : Est-ce que vous me donnez une petite suspension juste pour le réécrire parce qu'il y avait une erreur? Ça ne sera pas long.

Le Président (M. Ouellette) : Oui, c'est ce que je vais faire, on va suspendre quelques instants, le temps que vous me réécriviez...

(Suspension de la séance à 15 h 47)

(Reprise à 15 h 53)

Le Président (M. Ouellette) : On reprend nos travaux. Nous étions à un sous-amendement présenté par Mme la députée de Taschereau. Et, le temps de la rédaction, Mme la députée de Taschereau, vous allez nous présenter votre sous-amendement, et après je vais vous demander de lire le premier alinéa tel que sous-amendé pour la compréhension de tous les parlementaires. Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais : Merci, M. le Président. Alors, ce sous-amendement s'écrirait comme suit :

Modifier l'amendement modifiant le premier alinéa de l'article 1 de la loi proposée par l'article 1 du projet de loi :

1° en remplaçant les mots «, lesquels peuvent s'exprimer notamment» par les mots «s'exprimant au nom du fondamentalisme religieux ou»;

2° en supprimant les mots «d'intolérance ou».

Le résultat donnerait ceci :

«La présente loi a pour objet d'établir des mesures de prévention et de lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence s'exprimant au nom du fondamentalisme religieux ou dans un contexte de radicalisation pouvant mener à l'extrémisme violent.»

Le Président (M. Ouellette) : Vous avez des remarques maintenant?

Mme Maltais : Bien, écoutez, j'ai essayé de conjuguer les désirs que nous avons — et, dans mon grand «nous», j'inclus la deuxième opposition, qui s'est exprimée là-dessus — de cibler un des pans de l'extrémisme violent qui nous dérange, qui est le fondamentalisme religieux. Remarquez que nous disons le mot... au lieu d'«intégrisme», nous disons «fondamentalisme». Puis on pourra revenir sur la définition, mais c'est encore plus étroit, c'est très fort. Ce n'est pas de l'intégrisme. «Fondamentalisme», c'est vraiment les gens qui s'en tiennent à des fondements religieux, on a été beaucoup vérifier dans les dictionnaires.

L'autre chose, c'est un «ou». Donc, c'est, un, le fondamentalisme religieux, ou, deux, la radicalisation pouvant mener à l'extrémisme violent. Donc, il n'y a pas d'exclusion de discours, on va vraiment, là, vers les deux expressions, les deux sens vers lesquels on voulait aller pour nous : fondamentalisme religieux, celui qui est dans le plan de lutte à la radicalisation, et le contexte de radicalisation pouvant mener à l'extrémisme violent, qui est l'autre type de contexte qui a été soulevé dans le cas des exemples qu'on a soulevés récemment.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Le...

Mme Maltais : Si je peux dire, ça correspond exactement aux échanges... En tout cas, de notre côté, là, c'est vraiment l'intention qu'on avait exprimée. Vous voyez qu'on a enlevé le «notamment», mais on a gardé les deux idées. Il y avait l'idée du fondamentalisme religieux, mais il y a aussi l'idée de la radicalisation dans l'extrémisme violent. On n'a pas voulu fonder juste, seulement, sur un, cibler juste, seulement, un type de radicalisme, on a voulu, comme vous le demandiez, avoir deux morceaux, deux secteurs.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Bien, en fait, oui, on a deux secteurs, on a l'intolérance puis on avait, dans notre projet de loi, la radicalisation qui pouvait mener à l'extrémisme violent. Le danger, lorsque l'on cible, par exemple, le fondamentalisme religieux, c'est qu'on est trop ciblé et on fragilise le projet de loi lorsqu'il est question des chartes, et ça le limite. Puis notre objectif, ce n'est justement pas de fragiliser le projet de loi, c'est de lui donner un effet total. Et il n'y a pas que le fondamentalisme religieux qui peut être dangereux. Toute forme, dans le fond, de fondamentalisme, toute idéologie, qu'elle soit religieuse, qu'elle soit politique, lorsqu'elle est utilisée, elle est prise, comme le disait la députée de Taschereau, dans ses fondements et elle est poussée dans son extrême, c'est ce qui est problématique.

Et il n'y a pas que le fondamentalisme religieux, et c'est ça... Puis on en avait parlé, on en a discuté la semaine dernière, on en a discuté un petit peu hier soir avec notre collègue de Montarville, je comprends qu'actuellement il y a cette montée où on souhaite s'attaquer à ce fondamentalisme-là, mais il n'est pas unique, il y a d'autres formes de fondamentalisme qui peuvent mener à des discours haineux, qui peuvent mener à des discours incitant à la violence. Donc, lorsqu'on le limite, d'une part, on fragilise, mais, d'une autre part, on est extrêmement limitatif.

Un fondamentalisme idéologique reposant, je ne sais pas, là, sur une idéologie x ou y, qui serait monté et qui amènerait à la tenue de discours incitant à la haine, ce n'est pas plus acceptable qu'un fondamentalisme religieux. Parce que l'objectif, c'est de s'attaquer aux discours qui amènent à la haine ou qui incitent à la violence, et par une utilisation, dans le fond, ou un détournement, peut-être, d'une idéologie. Et donc se centrer exclusivement sur le fondamentalisme religieux, bien, ça met de côté d'autres types de fondamentalisme qui peuvent être tout aussi dangereux.

Mme Maltais : M. le Président.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais : C'est juste pour dire que je comprends bien la ministre, et on l'a écrit en ce sens-là. Si on le lit bien, je comprends, c'est que la loi veut établir — comme le désire le gouvernement et sur lequel on a déjà débattu en disant : O.K. On peut peut-être s'entendre sur certains éléments — les mesures de prévention et de lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence.

Malgré toute notre, je l'ai dit, difficulté à aller jouer là-dedans, on est quand même encore dans une loi contre les discours haineux et les discours incitant à la violence s'exprimant au nom du fondamentalisme religieux. Donc, on n'est pas contre le fondamentalisme religieux, on est contre les discours haineux s'exprimant au nom de... Donc, on n'est pas dans la lutte au fondamentalisme, là, on est dans les discours haineux et incitant à la violence au nom du fondamentalisme ou...

Et là le «ou» est important. On n'a pas un «et», on a un «ou», c'est «ou dans un contexte de radicalisation», et là on amène tous les types de radicalisation qui peuvent mener à de l'extrémisme violent. C'est un «ou», là, ce n'est pas un «et». Et on y a pensé, au «et», je vais vous dire, mais on a décidé de garder le «ou» pour essayer de trouver une zone de confort pour tout le monde.

• (16 heures) •

Mme Vallée : On porte quelque chose à mon attention, puis je pense que c'est quand même important qu'on en parle. Il a longuement été question lors des consultations de toute la notion de l'islamisme, hein, certains groupes sont venus nous dire : Ce n'est pas une religion, c'est plus profond. Ce n'est pas un mouvement religieux, c'est un mouvement politique. C'est l'islamisme politique, c'est ça. Et on me faisait signe que c'est une idéologie politique, ce n'est pas une idéologie religieuse, ce mouvement-là. Je pense, d'ailleurs, que c'est notre ex-collègue Fatima Houda-Pepin qui nous en a parlé, et, si on veut s'en prendre... La problématique, certains nous disaient : Ce n'est pas l'islam qui amène à la violence. Au contraire, l'islam, c'est une religion qui est pacifiste. Mais l'islamisme politique, ça, poussé à son extrême, peut amener à la violence. Et, si on limite au fondamentalisme religieux, bien, on peut exclure ce type d'idéologie politique qui peut mener à la violence. Donc, comprenez-moi, là, ma préoccupation quant à l'utilisation du terme «fondamentalisme religieux», elle vise à ne pas limiter et permettre aussi de s'en prendre correctement à un fondamentalisme qui pourrait tirer sa source d'une idéologie politique.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais : M. le Président, je le sais, mais, justement, l'islamisme, c'est le fait de quasiment subordonner le politique ou la vie au religieux. Le religieux devient le cadre de vie auquel on subordonne même les lois, les lois deviennent des lois religieuses. Mais c'est basé sur le fondamentalisme religieux. Mais les discours haineux basés sur le fondamentalisme religieux, au nom du fondamentalisme religieux, c'est tout à fait ce que fait l'islamisme. Et je vais ajouter : Le Centre de prévention de la radicalisation menant à la violence a des définitions sur le mot «radicalisation». Et vous allez voir qu'en gardant «radicalisation» on englobe pas mal de choses : «Il n'existe pas de définition universelle sur le phénomène de la radicalisation menant à la violence. Le Centre de prévention [à] la radicalisation [...] le définit toutefois comme étant un processus selon lequel des personnes adoptent un système de croyances extrêmes — comprenant la volonté d'utiliser, d'encourager ou de faciliter la violence — en vue de faire triompher une idéologie, un projet politique ou une cause comme moyen de transformation sociale.

«Ainsi, la radicalisation violente est :

«L'adoption d'une idéologie dont la logique devient un véritable cadre de vie, d'action et de signification pour un individu», blablabla.

Alors, la radicalisation, c'est l'adoption d'une idéologique dont la logique devient un véritable cadre de vie, d'action et mène à la violence, la fusion entre l'idéologie et l'action violente. C'est clair. Et le fondamentalisme religieux est ce dont nous parlons régulièrement. L'islam politique, c'est un fondamentalisme religieux. Ce n'est pas seulement prendre sa religion en intégrité, c'est en faire les fondements des actions de la vie. Qu'on pense, en termes de système de justice, à la charia, qui fait que le religieux devient au-dessus du juridique. C'est vraiment ça.

Donc, nous, pour nous, il y a les deux concepts dont on avait besoin : la lutte aux discours haineux s'exprimant au nom du fondamentalisme religieux, qui est tout le débat qu'on a à toutes les fois qu'on s'est levés, et l'autre, la radicalisation pouvant mener à un extrémisme violent. À la fois on cible, mais on ne sort pas du cadre sur lequel on s'était entendus. Moi, je me sens encore à l'aise avec la définition malgré les commentaires qu'on a actuellement. Je ne sais pas si vous avez des commentaires, Mme la députée, mais nous, on se sent encore à l'aise avec ça.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Montarville.

Mme Roy (Montarville) : Oui. Si je peux m'exprimer, je vais prendre la parole avec grand plaisir. Vraiment, je trouve que la rédaction... je trouve que c'est un amendement ou un sous-amendement, appelez-le comme vous voulez, là...

Le Président (M. Ouellette) : C'est un sous-amendement.

Mme Roy (Montarville) : C'est un sous-amendement — merci beaucoup, M. le Président, de m'éclairer — qui répond à toute la problématique initiale et qui répond aussi à l'objet même qui a amené le gouvernement à présenter son plan de radicalisation puis à la problématique qui est une problématique, qu'on le veuille ou non, qui est issue de discours, de prêches, d'enseignements, et c'est ce qu'on tente de contrer, mais qui provient en grande partie, en majeure partie et surtout — c'était le point de départ de tout — d'une radicalisation des jeunes, mais qui, elle, a été faite, cette radicalisation, à cause d'un contexte religieux. Et le fait que vous mettiez «au nom d'un fondamentalisme religieux», c'est encore plus précis que... Nous souhaitions «intégrisme religieux», mais là on met ça encore... Pour être sûrs qu'on ne touche pas à personne puis qu'on n'insulte pas personne pour qui l'intégrisme religieux serait un choix personnel, c'est encore plus pointu, plus précis, et moi, je pense qu'en tant que législateurs... Mme la ministre nous dit que c'est trop limitatif. Moi, au contraire, je trouve que ça cible encore plus précisément la problématique à laquelle nous sommes tous attablés ici pour nous attarder puis tenter, tenter de trouver une solution pour ne pas qu'on en arrive à des discours et surtout à cette radicalisation qui mène au terrorisme, là, ou à des actes extrêmement violents.

Donc, dans la formulation de la collègue de l'opposition officielle, moi, je trouve ça rassurant de voir les termes «ces discours qui s'expriment au nom du fondamentalisme religieux dans un contexte de radicalisation» parce que c'est vraiment l'environnement dans lequel nous vivons actuellement, dans ce contexte de radicalisation, et une radicalisation est là... Pour être encore plus précis, on ne parle pas de n'importe quelle radicalisation, on parle d'une radicalisation pouvant mener à l'extrémisme violent. Les collègues du gouvernement nous faisaient remarquer que la radicalisation, ce n'est pas nécessairement violent, puis ce n'est pas nécessairement terroriste, puis c'est... Tout à fait. Alors, lorsqu'on précise «de radicalisation pouvant mener à l'extrémisme violent», on s'entend que ce n'est pas quelqu'un qui aurait des idées x, y, z radicales. Radicales, soit, mais c'est un pays libre, il a le droit de les exprimer. Mais qui ne mènent pas à un extrémisme violent, et c'est ça qu'on veut contrer depuis le début, depuis un an et demi, c'est cet extrémisme violent.

En fait, l'extrémisme violent, c'est le point de chute, c'est la fin, mais nous, on veut s'attaquer à avant que ça arrive, là. Un coup qu'on est rendus là, il est trop tard pour agir. Soit, agir contre des discours haineux incitant à la violence. Soit. Mais que ces discours-là soient issus de quelque chose, et c'est à ce quelque chose là aussi... Il faut le nommer, ce quelque chose, et c'est pour ça que je trouve que c'est extrêmement... c'est bien rédigé.

Et vous avez enlevé le «notamment», et je vous dirais, chers collègues, que peut-être que le «notamment» aurait avantage à y demeurer parce que ça permettrait à la ministre de ne pas dire que vous êtes trop limitatifs en mettant «notamment». C'est juste le fait que, si Mme la ministre veut aussi s'attaquer aux discours du rappeur, par exemple, bien, en mettant «notamment», elle pourrait y aller dans un contexte de radicalisation, un contexte qui mène à un extrémisme violent. Donc, le «notamment» pourrait réapparaître. Mais moi, j'aime beaucoup — et ça me réconforte — de voir les termes «le fondamentalisme religieux», qui est encore plus précis.

Et ici remarquez, M. le Président, on ne vise aucune religion, aucune. Moi, j'aurais mis «islamisme radical», mais c'est épouvantable, parler d'islamisme. On n'a pas le droit de dire ça au Québec, là, on est des racistes puis on est des islamophobes. Bon. Mais le fait de parler de fondamentalisme religieux touche toutes les religions et n'en touche pas une. Donc, avis aux intéressés. Et c'est pour ça que j'apprécie la formulation, la façon dont c'est rédigé, mais je soumets qu'on pourrait élargir en mettant «notamment» pour toucher à d'autres types de discours. Mais le fait qu'il soit là, je pense que ça a son importance. Puis ça a son importance aussi, M. le Président, parce que, dites-vous, on est des législateurs autour de la table, puis il y a plusieurs juristes, il y a les juristes de l'État, M. et Mme Tout-le-monde, qui n'ont peut-être pas eu l'occasion de se taper un bac en droit, un Barreau, une maîtrise, puis rajoutez-en, pour comprendre ça, là, il faut qu'ils sachent à quoi le discours s'attaque, puis de quel discours on parle, puis un discours qui provient d'où, et je pense qu'il faut nommer les choses dans ce contexte-là.

Alors, moi, je trouve que vous avez fait une bonne rédaction, collègues, et j'apprécierais que la partie gouvernementale voie le fait qu'on nomme les choses et, surtout, que ça permettrait aux citoyens de comprendre aussi de quels types de discours on parle ou, du moins, de quels endroits ou de quelles sphères ces discours pourraient venir. Et c'est plus précis, et moi, je ne suis pas sûre que ça ne passe pas le test des chartes, là, loin de là. Loin de là parce que ce n'est aucune religion qui est visée. C'était mon commentaire.

• (16 h 10) •

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Gouin, est-ce que vous avez un commentaire sur le sous-amendement de Mme la députée de Taschereau?

Mme David (Gouin) : Oui, M. le Président. En fait, là, je pense que la question qui est posée ici, c'est : Est-ce que, oui ou non — et de quelle façon si on dit oui, là — on veut mentionner qu'il puisse être question, à un moment donné, là, quand on parle de discours haineux et incitant à la violence, de religion? Est-ce que, oui ou non, le mot «religion», «religieux» — enfin, vous comprenez, là — apparaîtra dans l'objet de la loi? Puis après, bien, selon qu'on dise oui ou non, on va chercher toutes sortes de formulations.

Moi, jusqu'à présent, j'hésitais beaucoup à dire oui, compte tenu du contexte — moi, j'ose le dire — d'une certaine intolérance au Québec. Si ma collègue de Montarville pense que le Québec a de l'intolérance face au mot «islamophobie», moi, je dirais que le Québec, mais ce n'est jamais tout le Québec, là, de toute façon... mais qu'un certain nombre de nos concitoyens ont un certain nombre de difficultés aussi avec le mot «religion». Il y a des mots comme ça. Bon. Et souvent, ces temps-ci, quand on parle de religion, on parle d'une religion parce que l'autre, celle qui fut un jour la mienne, on en parle pas mal moins. Alors, c'est pour ça que j'hésitais beaucoup.

Là, je me dis : Au fond, il y a quand même des idéologies religieuses qui, dans leurs aspects les plus extrêmes, finissent par conduire à des gestes qu'on dit radicaux, mais, en fait, des gestes extrémistes, violents, etc. À quoi bon le nier, puisque c'est un fait? Cependant, j'hésite beaucoup à ce qu'on parle de fondamentalisme religieux parce que la définition du fondamentalisme religieux, là, c'est un phénomène qui consiste à adopter une interprétation littérale des textes sacrés et à tenter de respecter également à la lettre tous les commandements qu'ils contiennent. Autrement dit, les fondamentalistes religieux — et il y en a dans plein de religions — sont des gens qui ont une interprétation littérale de ce qu'eux considèrent comme étant des textes sacrés qui ont été écrits parfois il y a 800, 1 000 ans, 2 000 ans. Bon. Il y en a qui sont, malgré tout, fort sympathiques, hein? Il y a plein de gens, là, qui se promènent en touristes pour aller voir les amish aux États-Unis, là. Bon. Maintenant, comment vivent les femmes dans tous ces fondamentalismes religieux? Ça, c'est une bonne question.

Mais, ceci dit, le commun des mortels ne jugera pas inconcevable de cohabiter avec des gens qui ont une vision littérale de la religion, on en a des exemples aussi au Québec. C'est pour ça que j'hésite à penser qu'on va parler de fondamentalisme religieux. Je trouve que c'est trop large, c'est-à-dire que ça recouvre à la fois, oui, c'est vrai, l'islamisme politique, mais aussi des gens parfaitement paisibles qui pratiquent d'autres sortes de religions et les pratiquent avec une vision fondamentaliste.

Alors, personnellement — là, je ne peux pas le faire, mais je dis juste comment je réfléchis mon affaire pour essayer, autant que faire se peut, d'apporter un petit coup de main, puis, si ce n'est pas bon, ce ne sera pas bon, on discute, là — je dirais plutôt, après «incitant à la violence», «s'exprimant au nom d'idéologies sociales, politiques ou religieuses — et je ne mettrais pas de "ou", moi, je n'en mettrais pas — dans un contexte de radicalisation — la même chose, là — pouvant mener à l'extrémisme violent». Donc, oui, j'inclus le mot «religion», mais j'élargis le tout en disant : Il y a des idéologies sociales, politiques, religieuses — là, c'est des «ou», là, «sociales, politiques ou religieuses» — et j'enlève le «ou» qui suit parce que c'est dans un contexte de radicalisation pouvant mener à l'extrémisme violent, c'est de ça qu'on veut parler, là. Enfin, c'est une suggestion, M. le Président, on ne va pas faire des sous-amendements des sous-amendements. Donc, c'est une humble suggestion qui essaie de rallier un peu les opinions des collègues autour de la table.

Le Président (M. Ouellette) : Ça aide à alimenter le débat, Mme la députée de Gouin.

Mme David (Gouin) : Merci.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Taschereau, vous n'avez pas d'autre commentaire avant que Mme la ministre... Oui?

Mme Maltais : Comme on est encore sur notre sous-amendement, puisqu'il n'y a pas eu de dépôt d'amendement de la part...

Le Président (M. Ouellette) : Bien oui, on est sur votre sous-amendement, Mme la députée de Taschereau. D'ailleurs, j'ai demandé à la collègue de Gouin ses commentaires sur votre sous-amendement, j'étais très clair, Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais : Oui, voilà. Alors, je vais vous dire, M. le Président, c'est que c'est bien pour cela que ce n'est pas le fondamentalisme religieux qui est visé par cette loi — et c'est très important pour nous — c'est le discours haineux ou incitant à la violence, c'est encore ça, là. Puis, je le dis, on le fait quasiment à notre corps défendant, mais on dit : Puisqu'il nous faut aborder la chose, on reste dans la même chose, c'est le discours — puis là on est dans du sérieux — discours haineux. Déjà, moi, personnellement, là, «discours incitant à la violence» ou «appelant à la violence», je suis plutôt dans ce camp-là. Mais je peux prendre «discours haineux» parce qu'on le sait qu'il y a maintenant une définition, puis on va travailler sur la définition tout à l'heure. Mais «discours haineux et incitant à la violence» et «discours incitant à la violence» qui s'exprime au nom de, au nom de, et dans un contexte de.

Donc, moi, je pense qu'on a fait attention, là-dedans, là, à ne viser, d'abord, effectivement, aucune religion, deuxièmement, à ne viser que des discours. Mais la situation est telle actuellement que ce dont on parle, c'est d'un plan de lutte à la radicalisation dans un contexte où des jeunes sont entraînés par l'islamisme, par des... Moi, je n'y crois même pas que c'est au nom de la religion. Comme je le dis, là, si vous croyez en Dieu, votre Dieu est sûrement amour dans votre tête parce que ça ne se peut pas autrement. Mais moi, je pense qu'il faut nommer les choses, on l'a dit, pour rassurer tout le monde. C'est là, puis on laisse la porte ouverte à «la radicalisation menant à la violence» parce qu'une loi doit être plus large que ce dont on veut parler maintenant, il faut penser à l'avenir. En tout cas, je vous ai entendu, je vous ai écouté, mais je me sens encore à l'aise avec ce qu'on a apporté.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la ministre.

• (16 h 20) •

Mme Vallée : Bon, on a plein de trucs, plein de trucs, peut-être, à partager avec les collègues. Dans un premier temps, j'entends la collègue de Montarville lorsqu'elle dit : Bien, il faut que les citoyens comprennent ce à quoi on s'attaque. En même temps, il y a quand même une façon de rédiger la législation qui est importante parce que, lorsqu'on confère un caractère plus précis, plus pointu, peut-être discriminatoire dans la loi, bien, on crée un problème. Alors, dans la loi, soit qu'on vise un ensemble ou on ne vise rien. Mais on ne peut pas viser, par exemple, la religion, même si c'est... Lorsqu'on vise juste un motif, on donne au projet de loi un caractère qui est discriminatoire d'une certaine façon parce que «religieux», même si c'est toutes les religions, comme le mentionnait la collègue de Montarville, ça donne quand même un caractère discriminatoire parce qu'au niveau constitutionnel le législateur doit viser tous les motifs et ne pas en exclure. Et ça, ça a été repris dans un arrêt de la Cour suprême — je pense que c'est Vriend contre Alberta — qui a invalidé une disposition de l'Alberta qui visait tous les groupes protégés tout en excluant les homosexuels. Alors, il faut faire attention. Ce n'est pas une volonté de ne pas nommer les choses, mais il faut quand même faire attention dans notre rédaction parce qu'on veut que notre loi puisse être solide puis puisse être utile.

L'autre chose, dans le sous-amendement qui nous a été présenté, il y a un enjeu parce que l'utilisation du «peut» pourrait être interprétée comme un «doit», et ça va limiter, ça pourrait être limitatif. Encore une fois, l'utilisation de «peut s'exprimer», ça pourrait être très limitatif dans son interprétation. Alors, c'est des mises en garde, puis je pense que c'est important de les mentionner parce que, on l'a dit, nous, notre préoccupation dans tout ça, c'est d'assurer que le tout s'inscrive, évidemment, dans le respect des chartes.

Je veux simplement rappeler aux collègues, lorsque je vous ai déposé l'ensemble des amendements la semaine dernière, c'était aussi pour permettre d'avoir une vision plus globale de notre vision pour être capables de faire un travail plus complet. Je vous rappelle simplement que, lorsqu'on arrivera au deuxième alinéa, il y a un amendement qui est prévu au deuxième alinéa, et, dans le deuxième amendement, on fait référence aux préceptes sur lesquels s'appuient les propos, les propos haineux ou les propos incitant à la violence, qu'ils soient religieux...

Alors, par exemple, si on prend le texte tel que nous l'avons proposé initialement, l'article 1, là, se lirait comme suit : «La présente loi a pour objet d'établir des mesures de prévention et de lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence, lesquels peuvent s'exprimer dans un contexte de radicalisation — et là je le lis avec les amendements qu'on vous a proposés, là, ce n'est pas parce que j'exclus les vôtres, c'est tout simplement parce que c'est ce qui a été préparé — pouvant mener à l'extrémisme violent ou dans un contexte d'intolérance.»

Deuxième alinéa : «Elle s'applique aux discours haineux et aux discours incitant à la violence tenus ou diffusés publiquement, peu importe les préceptes sur lesquels ils s'appuient, qu'ils soient religieux ou autres, et qui visent un groupe de personnes qui présentent une caractéristique commune identifiée comme un motif de discrimination interdit à l'article 10 de la Charte des droits et libertés de la personne.»

Et là : «Est un discours haineux, un discours visé...» Là, on arrive avec la définition qui vous est proposée de discours haineux.

Donc, on rejoint, d'une certaine façon, la préoccupation des collègues de cibler l'ensemble des discours et on y fait référence, mais on ne cible pas exclusivement que le discours religieux ou le discours qui s'appuie sur un précepte d'ordre religieux. Il y en a, des discours qui s'appuient sur des préceptes d'ordre religieux, les collègues en ont fait état. Mais on a aussi des discours haineux qui s'appuient sur d'autres formes de préceptes, et il ne faudrait pas les exclure. Donc là, je pense, ça fait quand même un certain clin d'oeil aux préoccupations qui ont été soulevées par les collègues sans limiter et sans fragiliser la disposition. C'est sûr qu'en fonction du règlement on étudie alinéa par alinéa, mais il ne faut pas oublier qu'il y a quand même dans la démarche certaines propositions.

Puis je remercie un membre de l'équipe qui m'a si gentiment rappelé qu'on a un auteur, Mario Bettati, qui, dans un livre, Terrorisme — Les voies de la coopération internationale, indiquait ce qui suit : «Le terrorisme naît et prospère là où les droits de l'homme sont bafoués.» Évidemment. Alors, ça, c'est important pour nous de conserver la notion d'intolérance parce qu'à partir du moment où on bafoue et on permet des brèches dans le respect des droits, et notamment dans les droits qui sont protégés et les caractéristiques protégées par l'article 10, bien, on laisse la place... Lorsqu'on permet d'attaquer, par un discours haineux, un discours à la violence, des gens qui ont déjà une protection reconnue par la charte, bien, on permet de faire une petite brèche, et, dans la radicalisation, bien, on utilise cette petite brèche là et on attaque, puis tranquillement le discours va se former, puis va prendre racine, et puis va grandir, puis va mener à toute cette radicalisation qu'on souhaite stopper puis enrayer.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais : Bien là, c'est parce qu'on est en train de toucher aux droits, là, on est en train de toucher à la liberté d'expression. C'est ça qu'on est en train de faire, on est en train de toucher à un des droits les plus fondamentaux, la liberté d'expression. Et il y a déjà un encadrement, qui sont les articles 318 à 320 du Code criminel. Alors là, on prend ça puis, dans le cadre d'un plan de lutte à la radicalisation, on amène une loi qui proscrit le discours haineux ou menant à la violence. Comprenez bien que nous, on veut ramener ça à l'intention, au contexte, mais ce qui va amener à... À mon sens, un, ce qui va arriver à l'article 2 ne ramène pas, ça reste la même porte. «Les préceptes[...], qu'ils soient religieux ou autres», alors, voilà, on ne resserre pas, là, on dit «qu'ils soient religieux ou autres». C'est encore très, très, très vaste, très large. On met le mot «religion», mais on ne resserre pas.

Deuxièmement, je ne comprends pas encore qui on vise actuellement au Québec. Les LGBT sont venus dire : C'est par l'éducation, par la prévention. Les communautés juives et israéliennes, les Noirs sont venus dire... C'est eux qui sont les plus grandes victimes de crimes haineux. Qui ont veut viser? Je comprends qu'on veuille ne pas pointer une religion. Ça, je le comprends. C'est pour ça qu'on a écrit comme ça. Ça, je le comprends. Puis je comprends qu'on veuille attaquer les discours haineux menant à la violence, et pas tous les discours. Ça, O.K., on essaie, mais je m'excuse, nous, on pense qu'il faut nommer pour rassurer, puis ce n'est pas l'amendement qui s'en vient au deuxième alinéa qui me rassure. Je le dis honnêtement tout de suite, là, ça ne me rassure pas, ça. On en débattra parce que ça ne me rassure pas.

Alors moi, je pense encore que notre amendement nous permet de passer au travers. Et je rajouterai que «pouvant mener à l'extrémisme violence», c'est exactement l'expression qui est dans l'amendement de la ministre. Donc, le «pouvant», il est dans l'amendement de la ministre. C'est nous qui avons enlevé l'autre «pouvant». Nous l'avons supprimé, d'accord? Les «peut» et les «doit», là, il ne faut pas jouer beaucoup avec ça dans la loi. C'est délicat, on le sait. Il y a eu beaucoup de discussions dans ces salles au sujet de «peut» et «doit». On a enlevé le premier «pouvant mener», justement parce qu'on le trouvait flou. Mais, le deuxième, on l'a laissé là. C'est l'amendement de la ministre, ce n'est pas le nôtre. On l'a gardé pour ça, en essayant de conserver le maximum de la proposition ministérielle.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la ministre.

• (16 h 30) •

Mme Vallée : Je comprends qu'on légifère et qu'on vient limiter la liberté d'expression. Puis ça, on l'a dit, puis on l'a fait selon les paramètres de la Cour suprême parce que, justement, c'est important, lorsqu'il est question de droits et libertés, de ne pas improviser et de ne pas aller au-delà de ce qu'on connaît qui a été précisé et limité. Alors, c'est ce qu'on fait, et je vous dirais que les amendements que l'on a déposés visent, justement, même à recadrer de façon encore plus précise le discours qui est visé par la présente loi, le recadrer dans un contexte particulier.

Je mentionne encore une fois que, lorsque l'on vise particulièrement, par exemple, le fondamentalisme religieux sans faire référence aux autres types de fondamentalisme, on fragilise notre loi. Alors, c'est pour ça que je vous soumets que ce qui vous est proposé, ce qu'on vous propose est susceptible d'être plus englobant, donc permet d'agir et d'intervenir dans le cadre de discours haineux qui pourraient s'exprimer au nom d'une autre forme de fondamentalisme que le fondamentalisme religieux. Tout à l'heure, on a discuté d'une idéologie politique, et je vous dirais, M. le Président, la notre collègue de Taschereau nous dit : Bien, il faut nommer les choses. Bien, on les nomme, les choses, dans ce projet de loi là et je pense qu'on ne ferme pas la porte à d'autres formes...

C'est parce qu'aujourd'hui on a une situation x puis on fait référence... On a fait beaucoup référence aux événements tragiques qui sont survenus l'an dernier, mais est-ce qu'il pourrait y avoir une radicalisation qui pourrait tirer son origine d'autres types de fondements, et qui pourrait aussi mener à la violence, et qui pourrait aussi mener à des situations tragiques? Il ne faudrait pas avoir fermé la porte à une intervention, d'une part, il ne faudrait pas avoir limité notre intervention. Et ce qui est présenté permet d'intervenir dans le contexte qui est mis de l'avant par nos collègues. Donc, ça nous permet d'intervenir dans le cadre de discours qui proviendraient, par exemple, d'une idéologie, un fondamentalisme religieux. Ça le permet et ça permet aussi d'intervenir dans d'autres types de discours qui seraient menés par une autre forme de fondamentalisme puis qui auraient comme même objectif, là... C'est-à-dire un discours qui est haineux puis un discours qui incite à la violence, on s'entend, là, ce n'est pas la dissidence, puis ce n'est pas l'idée choquante, puis ce n'est pas les propos.

On jasait tout à l'heure à micros fermés, les propos misogynes, on n'aime pas ça, là, ça n'a pas sa place. Mais ce n'est pas ça qui est touché, c'est le propos qui incite à la violence, qui est poussé... La misogynie poussée à son extrême qui va venir inciter à la violence à l'égard des femmes, ça, ce n'est pas acceptable dans une société libre et démocratique. Être misogyne, c'est malheureux, mais ce n'est pas... Et avoir des propos misogynes, c'est malheureux, mais ce n'est pas ce qui est touché. Bon, hein, il y a des gens qui, publiquement, tiennent des propos misogynes. Ce n'est pas ces propos-là qui sont touchés, mais c'est le propos de l'individu qui, en tenant des propos misogynes, par exemple, pourrait dire : Bien là, les femmes, il faut leur sacrer une volée, par exemple, ou il faut les... En tout cas, on ne reprendra pas les propos épouvantables qu'on a pu lire sur certains blogues, mais c'est le propos qui incite à la violence qui est touché. Et ce propos-là, il peut être le fruit, oui, de l'expression d'une forme de fondamentalisme religieux, c'est vrai, mais il peut être aussi... tirer sa source d'une autre forme d'idéologie de fondamentalisme qui n'est pas que religieuse.

Alors, lorsqu'on précise... Et je comprends, puis parfois le... On l'a mentionné, je crois que c'est le député de Bourget qui disait que le pavé de l'enfer...

Une voix : ...

Mme Vallée : ...ou la voie de l'enfer est pavée de bonnes intentions. Ça peut aussi revenir... c'est-à-dire qu'à trop vouloir préciser on peut limiter la portée de notre projet de loi et même le fragiliser au point qu'on ne sera pas en mesure d'intervenir là où on le souhaite.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais : M. le Président, c'est parce que là où on le souhaite... C'est peut-être ça, les mots clés, «intervenir là où on le souhaite». Sur quoi voulons-nous intervenir? Actuellement, là, si cette loi-là est sur la table, c'est à cause du fondamentalisme religieux, des discours haineux issus du fondamentalisme religieux menant à l'extrémisme violent ou à la radicalisation menant à l'extrémisme violent. C'est là-dessus qu'on est. Il n'y a pas eu d'appel à, tout à coup, la couverture de la charte face aux discours haineux. Il y a des groupes qui sont venus nous dire : Ne faites pas ça, ce n'est pas comme ça qu'on intervient. Le Québec a choisi la prévention et l'éducation, c'est là, là. Il est là, le noeud, là. Alors, est-ce qu'on intervient sur la situation actuelle dans le cadre du plan de lutte à la radicalisation en parlant du fondamentalisme religieux, non pas des discours haineux et incitant à la violence s'exprimant au nom du fondamentalisme religieux ou dans un contexte de radicalisation pouvant mener à l'extrémisme violent? Et c'est ça qu'on est supposés viser.

Ça fait que, l'ouverture large, là, on n'est pas là-dedans. On essaie de se rejoindre à un endroit, mais, l'ouverture large, on n'est pas là-dedans. Alors, moi, je cherche encore qu'est-ce que la ministre veut empêcher, quel cas n'est pas couvert par 318 à 320 du Code criminel. Ils sont couverts par ça. Si un homme menace de tuer les femmes, bien, on envoie la police. On essaie, des fois, de les envoyer... Ma collègue dit : Des fois, c'est plus long qu'on pense, mais...

Une voix : ...

Mme Maltais : C'est ça. Récemment, il y a un jeune qui était sur Facebook qui a menacé, là... il voulait tuer des Arabes, il voulait tuer des musulmans, c'est épouvantable! On l'a arrêté, ça a été instantané. Il n'y en a pas eu, de problème. La police a débarqué, il a eu une amende. C'est là, il y a des choses qui sont déjà là. Ça fait qu'on ajoute, là. On ne part pas à zéro, on ajoute. Ça fait qu'on essaie d'ajouter à travers le contexte actuel ce qui nous manque. Mais, quand il y a quelqu'un qui dit : Je vais aller les tuer, ou je vais vous tuer, ou allez les tuer, ça débarque parce que c'est inacceptable dans une société. Mais ça, pour nous autres, c'est déjà inscrit dans nos lois, il y a des codes, le Code criminel.

À côté de ça, tu as une nouvelle loi qui, à notre avis, est trop large puis qui donne des pouvoirs à la Commission des droits de la personne, qui s'est exprimée un peu trop peut-être. Peut-être qu'il y a un président qui est allé plus loin que ce que la ministre aurait voulu aller. Peut-être, c'est ça. Peut-être que le président est allé trop loin puis a créé un climat qui fait qu'aujourd'hui on est un peu pris, autour de la table, à essayer de circonscrire le débat. Mais on est là-dedans. C'est ça, la situation. Alors, on essaie d'en sortir. Puis moi, je trouve que notre amendement nous permet d'en sortir tout en étant assez ouverts pour permettre de pallier à d'autres situations qui pourraient advenir, qui ne sont pas déjà couvertes par nos règles. Voilà, M. le Président.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Gouin, vous aimeriez intervenir sur le sous-amendement de Mme la députée de Taschereau?

Mme David (Gouin) : Oui, M. le Président, mais je vais aussi me permettre, parce que la députée de Taschereau vient de le faire, d'élargir un tout petit peu. D'abord, juste peut-être au cas où ça intéresse les collègues, il a été demandé cette semaine si des exemples de lois circonscrivant ou voulant lutter contre le discours haineux et incitant à la violence existaient. Nous avons fait une recherche, mon équipe et moi, et, si les collègues sont intéressés, ça me fera plaisir de leur transmettre les résultats de notre recherche, qui indiquent sans l'ombre d'un doute que, oui, à travers le monde, et particulièrement en Occident, plusieurs pays se sont penchés sur la question du discours haineux parce que plusieurs pays estiment qu'il est en augmentation et, donc, se sont donné des mesures législatives pour le circonscrire. Donc, voilà. Je l'ai, je peux le... Bon.

Sur le sous-amendement de la collègue de Taschereau, je disais tout à l'heure : Au fond, il y a une question qu'on doit se poser collectivement, c'est : Est-ce que, oui ou non, on veut que la notion religieuse, religion... enfin, ce mot-là, là, est-ce qu'on veut qu'il apparaisse à l'article 1 du projet de loi? Mais là je comprends qu'il y a une deuxième question, parce que la collègue de Taschereau vient de la poser, c'est : Voulons-nous circonscrire l'objet de la loi à tout ce qui entoure les événements qu'on a connus depuis un an, un an et demi, donc qui avaient trait, effectivement, à quelques — parce que ce n'est pas des milliers, là — jeunes sous l'emprise d'une idéologie dite religieuse, mais, en fait, politique, fanatique, etc.? Est-ce qu'on veut arrêter là ou est-ce que, réfléchissant à la notion plus générale de discours haineux, on veut ratisser plus large? Puis c'est une vraie question.

Et je pense, moi, maintenant, après plusieurs mois, qu'on aurait intérêt à ratisser plus large. Et c'est pour ça que, donc, oui, je suggère que le mot «religieux», «religion», «religieuse»... en tout cas, apparaisse, je n'ai pas de problème avec ça, mais il me semble qu'il doit être clair que le projet de loi ratisse plus large et, donc, va circonscrire de façon claire et nette, là, les discours haineux et incitant à la violence qui peuvent venir de toutes sortes d'idéologies, pas seulement religieuses, mais autres.

• (16 h 40) •

Alors, le problème, pour moi, du sous-amendement, c'est qu'il est, malgré la qualité d'inscrire la question religieuse... je le trouve un peu trop restrictif parce que, même s'il y a un «ou» quelque part, là, après «religieux», en fait je pense qu'à peu près n'importe qui va comprendre que l'objet central de la loi, c'est la lutte au radicalisme issu de certains fondamentalismes religieux. Je comprends que, si on lit attentivement avec, tu sais, presque une loupe, là, on va comprendre que, non, non, ce n'est pas seulement à propos de la religion parce qu'il y a le «ou», hein, «ou dans un contexte de radicalisation». Oui, mais le contexte de radicalisation auquel M., Mme Tout-le-monde fait référence quand il parle de ça depuis un an, c'est le contexte de radicalisation dans le cadre d'une idéologie politico-religieuse, là, qui s'appelle l'islamisme politique.

Moi, je pense qu'on aurait avantage... j'essaie de rester sur le sous-amendement, mais je pense qu'on aurait avantage à élargir pour parler, effectivement, d'idéologies religieuses — je n'ai pas de problème avec ça — mais d'idéologies sociales, politiques ou religieuses, que tout le monde comprenne qu'on n'a pas le droit de s'adonner à l'extrémisme violent, que ce soit prétendument pour des raisons religieuses, mais que ça soit aussi pour des raisons sociales ou politiques, on n'a pas le droit.

Puis je sais que, sur le fond, on est d'accord, il n'y a personne ici qui pense que quiconque a le droit de s'adonner à l'extrémisme au nom de quoi que ce soit. Ça, je le sais qu'on est d'accord là-dessus. Mais, si on est d'accord là-dessus, pourquoi on ne l'écrit pas? Juste parce qu'on veut à tout prix rester dans le cadre du dépôt du plan puis des projets de loi... je ne me souviens plus de la date exacte, là, mais au mois de juin? Il me semble qu'on est capables d'élargir puis qu'à l'instar de d'autres pays dans le monde on peut convenir ensemble que, dans l'ensemble, le Québec est une terre paisible où il fait bon vivre et où le débat démocratique s'exprime, mais est-ce qu'on est capables de convenir qu'il y a des moments où ce qu'on voit, c'est une certaine montée de l'intolérance, une certaine montée de formes de haine à l'égard, entre autres, de certaines minorités religieuses? Entre autres, pas seulement, parce qu'il y a les femmes aussi. Bref, moi, je souhaite que, dans le fond, qu'on accepte ensemble d'élargir la portée du projet de loi et de ne pas uniquement faire référence aux événements tragiques — oui, bien sûr — qui ont eu lieu au Québec ou à Ottawa, là, depuis un an, un an et demi.

Donc, il y a deux discussions ici en même temps. Oui ou non, on inclut la question religieuse dans l'article 1? Moi, je dis oui. D'autres disent : Oui, comment on le fait? Je ne sais pas si la ministre dit oui, exactement, là. J'aimerais ça, bien saisir. Mais est-ce qu'on l'inclut parmi d'autres, oui ou non? Puis, deuxièmement, est-ce qu'on est prêts à, quand même, élargir un peu la portée du projet de loi pour qu'on ne parle pas que de radicaux, entre guillemets — ou, enfin, moi, je les appelle plutôt des extrémistes, là — qui agissent de façon violente au nom, prétendument, d'une religion? Parce qu'on s'entend pour dire que c'est prétendument. Je pense que, là-dessus, on s'entend très bien.

Il me semble que, si on s'entend sur la portée de la loi et sur le fait d'y inclure, oui, l'extrémisme qui peut prendre la forme de l'adhésion à une religion, on devrait être capables d'écrire et de mettre les bons mots aux bons endroits. Je pense que c'est ce qu'on essaie de faire, d'ailleurs.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, Mme la députée de Gouin. Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Poirier : Merci. Je pense que la députée de Gouin vient de toucher un point absolument essentiel. Les propositions que la ministre nous a faites jusqu'à ce jour, il y a un mot qui n'apparaît pas et c'est le mot «religieux», et moi, je vais demander tout simplement à la ministre... Parce qu'on aura beau faire tous les amendements qu'on voudra, on pense, de ce côté-ci de la table, que le mot «religieux»... Parce que, dans les propositions qu'on a faites, il était là, le mot «religieux». Alors, moi, je veux juste comprendre pourquoi ce mot-là ne peut pas apparaître selon ce que propose la ministre. Parce qu'on peut bien essayer, là, de se le dire, M. le Président, tous ensemble, là, mais le fondamentalisme religieux est un problème, là, en tant que tel, là. Il y a là une dérive que l'on voit un peu partout actuellement sur la planète qui fait en sorte que des victimes innocentes sont frappées tous les jours.

Alors, moi, je veux juste comprendre, du point de vue de la ministre, est-ce que c'est une position gouvernementale à l'effet que le mot «religieux» ne doit pas se retrouver dans l'article 1, tout simplement. C'est une question toute simple. Je pense que ça va aussi nous éclairer de ce côté-ci à savoir est-ce qu'il y a un problème à mettre le mot «religieux», oui ou non. S'il n'y en a pas, travaillons où on peut le mettre et où il serait le mieux...

Mme Maltais : Dans le premier alinéa.

Mme Poirier : Tout à fait. Parce que je le rappelle, là, l'objet de la loi, on le sait, c'est le nerf de la guerre, là. Et, si on ne vient pas nommer d'entrée de jeu, en tout cas, ce qui nous apparaît ici être la volonté du pourquoi on est assis ici, qui est qu'il y a un problème en lien avec... Pour nous, on l'appelle le fondamentalisme religieux. Moi, je veux connaître la position de la ministre, tout simplement.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la ministre.

Mme Vallée : M. le Président, je pense que j'ai été quand même assez claire au cours des derniers jours. Lorsqu'on cible, qu'il s'agisse d'une religion ou d'un critère particulier, on limite la portée du projet de loi, et l'objectif n'est pas de limiter. La radicalisation peut être le fait de pousser à l'extrême, oui, une idéologie religieuse, mais une idéologie politique aussi ou une autre forme d'idéologie. De cibler le caractère religieux du fondamentalisme ou de la radicalisation d'une idéologie vient limiter la portée du projet de loi, et ce n'est pas ce qui est souhaité. On ne veut pas le limiter qu'à ce type d'extrémisme, de radicalisme parce qu'il y a dans la société... il peut y avoir d'autres formes de radicalisation. Et de le préciser, parce qu'on le fait... Dans l'amendement que je vous propose, au deuxième alinéa, ce n'est pas de dire : On ne veut pas que le mot «religion» ou «religieux» apparaisse du tout dans le projet de loi, là, ce n'est pas ça. On le précise, on y fait référence au deuxième alinéa, on en parle.

Mais quel est l'objet réel? C'est de s'attaquer au discours qui est haineux, au discours qui incite à la violence, qui s'inscrit dans un contexte particulier. Puis ça, on le reconnaît. Au départ, on ne l'avait pas précisé, puis je vous dirais que là-dessus... Puis ce n'était pas par manque de volonté, c'était tout simplement que, pour nous, c'était clair. Mais parfois il y a lieu de préciser davantage, puis, là-dessus, je suis bien d'accord avec les collègues, trouvons — puis c'est là-dessus qu'on travaille actuellement — une façon de le préciser puis une façon de l'exprimer qui fera l'affaire de tout le monde.

Donc, ce discours haineux, il s'inscrit dans quel type de contexte? Il s'inscrit dans un contexte qui peut mener à l'extrémisme violent et qui peut être aussi dans un contexte d'intolérance. Alors, ça, c'est le contexte dans lequel le discours haineux s'inscrit. Donc, ça vient, je crois... puis je pense que ça va venir rassurer des gens qui, dans le cadre des consultations, ont soulevé certaines préoccupations. Et parfait si on vient les rassurer.

Par la suite, la loi s'applique de quelle façon? Quelle est l'application de la loi? Bien, elle va s'appliquer au discours haineux puis au discours incitant à la violence, peu importent les préceptes sur lesquels ils s'appuient, qu'ils soient religieux ou autres. Parce qu'il n'y a pas que les préceptes religieux, il peut y avoir d'autres préceptes qui mènent à ce type de discours là, puis il ne faudrait pas être limitatif. Mais on le précise, le précepte religieux.

Alors, là-dessus, je pense que c'est important de le mentionner, on n'est pas allergiques au mot «religion», là, ce n'est pas ça. On ne fait pas d'urticaire parce qu'on fait référence à la religion, pas du tout. Mais il faudrait éviter que notre loi, dans ses objectifs, soit limitée exclusivement. Et donc on le prévoit de cette façon-là, puis là, par la suite, on y va avec la définition. Donc, ce n'est pas un manque de volonté, c'est dans la logique de la rédaction. Et puis tout ça s'est fait, évidemment, accompagné — puis, je vous dirais, beaucoup accompagné — de notre équipe de légistes et de constitutionnalistes parce que nous avons le souci de déposer un projet de loi...

Puis, à juste titre, lorsque la députée de Taschereau nous dit : On vient limiter la liberté d'expression, il faut s'assurer de ne pas la limiter et de ne pas tomber dans une loi qui pourrait être perçue comme une loi de censure, une loi liberticide, comme certains ont pu la qualifier, ce qui n'est pas le cas. Et je ne veux pas parce que la liberté d'expression, elle est essentielle. Parce que, le jour où on va venir s'attaquer à la liberté d'expression dans un autre niveau, bien là on risque, justement, de venir donner raison à ceux et celles qui nous attaquent, à ceux et celles qui s'en prennent à la démocratie et qui en... Alors, dans une société libre et démocratique, on peut rire d'une religion, on peut tenir des propos qui dérangent, mais on ne peut pas inciter à la violence.

• (16 h 50) •

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Poirier : Je ne pense pas que l'intention, en introduisant les mots «fondamentalisme religieux», est de cibler une religion. Le fondamentalisme religieux ne cible pas une religion, il cible les religions. Alors, pour moi, le fait d'écrire «fondamentalisme religieux», ce n'est pas de cibler une religion, mais c'est de nommer ce phénomène qui est le fondamentalisme religieux comme étant une des causes qui peut mener à l'extrémisme violent.

Et, dans la façon de le rédiger que ma collègue a proposée, ce qu'on... Et je le relis pour qu'on se comprenne bien. Dans le fond, ce qu'on dit, c'est que «la présente loi a pour objet d'établir des mesures de prévention et de lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence s'exprimant au nom du fondamentalisme religieux ou dans un contexte d'intolérance ou...» Excusez, on enlève... «...dans un contexte de radicalisation pouvant mener à l'extrémisme...». Alors, ce «ou»-là vient faire la différence et vient aussi donner un autre poids aux mots. Ce n'est pas que le fondamentalisme religieux qu'on vise en tant que tel, c'est le discours qui est tenu dans un cadre de fondamentalisme religieux ou...

Mme Maltais : De radicalisation.

Mme Poirier : ...de radicalisation. Alors, ça ne vient pas l'isoler comme étant lui par lui-même, mais ça vient nommer le fondamentalisme religieux comme étant une forme d'expression qui, dans le cadre d'un discours haineux, ne nous apparaît pas acceptable. C'est ce que ça vient dire. Et, pour moi, ça ne vient pas cibler aucune religion, bien au contraire. Parce que je nous rappellerai qu'on a eu certains curés catholiques qui en ont dit, des choses pas catholiques, hein, on va se le dire comme ça. Du fondamentalisme religieux, on en a vu dans la religion catholique, là. Je l'ai toujours dit, quand les curés se sont mis à gérer les chambres à coucher des Québécois, là, ça en était, du fondamentalisme religieux, ça, et c'est de ça... Mais là on est dans le discours haineux. Alors, à partir du moment où le discours haineux s'attache au fondamentalisme religieux de quelque religion que ça voudra ou dans un contexte de radicalisation, un ou l'autre, ça ne m'apparaît pas menaçant.

Parce que la ministre nous a dit : Il faut qu'on inscrive le contexte particulier du discours. Bien, un des contextes, c'est le fondamentalisme religieux, et ne pas le nommer à cette étape-ci... Et je prends l'amendement que la ministre souhaite amener plus tard, quand il nous dit «peu importe les préceptes religieux ou autres», on pourra très bien le dire encore là, là, mais je pense qu'à un moment donné un chat c'est un chat, hein, il faut le nommer, et je pense qu'on est rendus là. Et ne pas introduire dans ce premier alinéa, là... la planète entière parle de ça, là. Est-ce qu'on va se cacher en arrière puis on va faire semblant que ça n'existe pas? On s'attaque à quoi? Qu'est-ce qu'on dénonce tous les jours?

On passe des motions à l'Assemblée nationale, M. le Président, tous les jours pour dénoncer les barbaries et le terrorisme qui arrivent partout dans le monde au nom de quoi? Sûrement pas au nom de juste la radicalisation, là, les gens, actuellement, qui provoquent des actes innommables... Encore ce matin, là, Boko Haram en a tué 15, là. Ce n'est sûrement pas parce que ça lui tentait ce matin et qu'il s'est réveillé en se disant : Je vais aller faire ça juste pour une seule et unique raison qui est en dehors de cet endoctrinement qui est le leur. C'est du fondamentalisme religieux, M. le Président, là. Ces gens-là veulent implanter un État islamique, mais basé sur une théorie politique où on utilise le religieux pour convaincre les gens. C'est de ça dont on parle, là. Alors, je ne sais pas pourquoi on a peur de nommer le fondamentalisme religieux. Ça m'apparaît tellement minimal, et je me demande même si on ne devrait pas même prendre du temps, M. le Président, de réflexion.

Parce que, quand je regarde mes collègues d'à côté qui... on s'approche tous ensemble vers cette même... je me dis : On ne doit pas être si fous que ça d'un bord de la tête... d'un bord de la taille... de la table. Je vais le dire. Je commence à être fatiguée, moi aussi. On ne doit pas être si à côté de nos... Puis on vit tous les mêmes actes présentement, on vit tous cette même situation politique mondiale de menaces. Et on ne veut pas céder à la menace, on ne veut pas céder à ça, mais je ne peux pas admettre que la ministre nous dise : On ne veut pas cibler une religion. Le fondamentalisme religieux, je le répète, il n'est pas islamique, il n'est pas catholique...

Une voix : Hindou...

Mme Poirier : ...il n'est pas judaïque, il n'est pas hindouiste. Hindouiste? Hindou? Hindou? Hindouiste? Bien, ça finissait tous par des «iques». Alors, tu sais, ce n'est pas ça. Mais il faut s'assurer qu'on puisse regarder la chose de façon large pour, justement, faire en sorte qu'on puisse... Moi, je ne voudrais pas qu'on échappe quelque chose. Puis la ministre a raison, elle a dit tout à l'heure : Il ne faut pas se substituer à ce qui existe déjà. Ma collègue dit : Attention! On n'est pas dans la liberté d'expression, il ne faut pas toucher à ça. J'en suis, mais il y a des gens qui sont endoctrinés et qui tiennent des discours haineux qu'on ne peut même pas imaginer. Mais ils les tiennent à partir de quoi? Et ces conditions et ce contexte particulier que la ministre nomme, c'est un contexte de fondamentalisme religieux. C'est de ça dont on parle. M. le Président, je demande à la ministre de reconsidérer cette proposition parce qu'il ne s'agit pas ici de venir dénoncer une pratique religieuse en tant que telle, on vient dénoncer des gens qui, au nom d'une certaine religion, au nom de leur religion, sont amenés à adopter un discours dont on ne fait pas l'admission. On n'en veut pas, de ce discours-là, parce que ce discours-là, il amène d'autres à se radicaliser et à commettre des gestes violents.

Prenons le cas du jeune à Saint-Jean-sur-Richelieu. C'est un jeune Québécois, là, il s'est radicalisé au nom d'un fondamentalisme religieux. Pas besoin de faire de ligne, là, il me semble que c'est clair. Il a tué un soldat parce que le soldat représente, justement, tout ce que lui combat présentement. Lui, c'est un soldat d'Allah. Alors, le soldat qui est devant lui est un adversaire...

• (17 heures) •

M. Kotto : Un mécréant.

Mme Poirier : ... — un mécréant, tu as raison, collègue — parce qu'il ne partage pas la même religion. Est-ce qu'on est d'accord avec ça? Moi, là, que ma collègue d'en face soit protestante, que l'autre d'à côté pratique l'islam, que l'autre d'à côté pratique le Krishna, etc., ce n'est pas de mes affaires. Ce n'est pas de mes affaires. Par contre, si les propos que les personnes tiennent au nom de quelconque religion amènent des gens à être violents, ah! là, là, il faut intervenir, là, il faut qu'il se passe quelque chose. M. le Président, je plaide pour que la ministre refasse cette réflexion-là. Et tout est perfectible, là, hein? On est là-dedans, tout est perfectible. Mais je pense qu'il ne faut pas faire l'économie, il ne faut pas faire l'économie de venir nommer les vraies choses dans ce premier alinéa là, il ne faut pas faire l'économie de ça, non.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la ministre.

Mme Vallée : M. le Président, je pense que le projet de loi vise ce que notre collègue a mentionné. Il vise aussi d'autres formes de radicalisation qui peuvent amener des gens à poser des gestes violents et aussi à tenir des discours haineux qui vont tranquillement créer une intolérance qui pourrait amener ceux qui reçoivent le discours à manifester une forme de violence. Je l'ai dit, il y a une volonté de rédiger le projet de loi de façon à ce qu'il puisse être solide et permettre de toucher à l'ensemble des formes de radicalisation, l'ensemble des formes d'intolérance.

Pour ce qui est de la référence à la religion, je l'ai mentionné, elle est au deuxième alinéa. Honnêtement, là, M. le Président, je pense avoir quand même démontré une écoute assez proactive, en ce sens que l'article 1, avec l'ensemble des amendements qui sont proposés — puis on aura la chance aussi de travailler les autres alinéas — est quand même pas mal bonifié si on le compare à l'article 1 de la première mouture du projet de loi. Il démontre cette volonté de rejoindre les collègues, mais il doit aussi... et je pense que nous avons la responsabilité de s'assurer que cet article soit conforme et ne vienne pas fragiliser la loi.

Donc, honnêtement, là, je suis allée quand même... et, dans les amendements, j'ai quand même précisé la portée du projet de loi, mais il n'est pas opportun, dans l'objet de la loi, de faire cette référence au fondamentalisme religieux, ou à l'intégrisme religieux, ou peu importe. Puis, par contre, cette précision quant à la religion ou à d'autres motifs se retrouve au niveau de l'application. Je pense que je réponds et je crois qu'on répond de façon assez claire à plusieurs préoccupations, puis ça nous permet de ne pas être limitatifs non plus dans le type de discours, et le type de propos, et surtout la source de ce discours, la source idéologique à la base de ces discours.

Le Président (M. Ouellette) : Je présume qu'on va au député de Bourget.

M. Kotto : Oui. M. le Président, je voudrais juste renforcer le propos que vient de tenir ma collègue d'Hochelaga pour rappeler le contexte dans lequel ce travail a été amorcé, travail qui nous amène cette proposition de projet de loi qui est destiné à contribuer à la lutte contre une nébuleuse que nous savons tentaculaire. Et, à la source de cette nébuleuse, ici comme ailleurs, il a été identifié une source, et c'est la même source, que ce soit Charlie Hebdo, Saint-Jean-sur-le-Richelieu, Ottawa, Paris, Beyrouth, Ankara, Fotokol au Cameroun, Tunis. Quelle forme de radicalisme on retrouve un peu partout et ici, au Québec? Bien, c'est le fondamentalisme religieux. Quelle idéologie politique pose problème relativement à tous ces phénomènes? C'est l'islamisme politique.

M. le Président, parmi les groupes qui sont venus exprimer leur avis sur ce projet de loi, plusieurs ont émis des réserves, et je pense aux Juristes pour la défense de l'égalité et des libertés fondamentales, M. Grey. Je pense à GRIS-Québec, je pense au Conseil québécois LGBT, à la Table ronde du Mois de l'histoire des Noirs; à l'Association canadienne des libertés civiles, à l'Association des Nord-Africains pour la laïcité et au Centre consultatif des relations juives et israéliennes. Vous me permettrez de revenir sur certains de leurs commentaires en commission parlementaire pour nous éclairer, disons, pour nous aider à réfléchir de façon rationnelle.

Donc, Le Centre consultatif des relations juives et israéliennes, le 20 août dernier, a souligné par la voix de son porte-parole, M. Del Negro — il en est le vice-président — il a dit que «bien que ce soit tout à l'honneur du gouvernement de tenter de protéger les membres les plus vulnérables de la société contre les messages de haine, il est nécessaire de veiller à ce que la législation trouve un juste équilibre entre la liberté d'expression et la protection contre la haine.» Parce que l'avenue que choisit le gouvernement dans cet exercice en est une qui, justement, peut nous amener dans des dérives si, d'aventure, les propositions de sous-amendement et d'amendement sur la table ne sont pas considérées.

• (17 h 10) •

Je continue. M. Del Negro disait : «Faisant partie d'un groupe qui, historiquement et aujourd'hui encore, est la cible fréquente de crimes motivés par la haine, nous sommes sensibles à la question et nous nous opposons catégoriquement aux discours haineux sous toutes leurs formes. Une législation — dit-il — de ce genre comporte cependant le risque inhérent d'être détournée pour réduire au silence toute critique et étouffer le droit légitime d'expression.» D'où l'impératif de spécifier ce contre quoi nous nous attaquons. D'où l'impératif de désigner l'objet réel, pas diffus, auquel nous nous attaquons.

Il poursuit : «Dans notre société démocratique, la liberté d'expression est un droit fondamental inaliénable pour tous ses citoyens. Le projet de loi n° 59, tel que présenté, aurait un impact aussi négatif qu'involontaire sur la liberté d'expression, voire un effet de censure.» C'est un représentant d'une communauté qui, historiquement, en a vu des vertes et des pas mûres. Et il poursuit : «En effet, étant donné l'absence d'équité procédurale et de lourdes conséquences punitives pour les personnes jugées coupables par le Tribunal des droits de la personne, il est à craindre qu'un climat d'autocensure s'instaure au Québec. De plus, l'absence de règles et de directives claires offertes par la loi au tribunal révèle une lacune évidente en matière de justice procédurale.»

Il continue : «...il nous paraît périlleux de se servir du droit civil pour accomplir ce qui est traité de façon adéquate par le droit criminel. Le projet de loi n'établit pas un juste équilibre entre la garantie de la liberté d'expression et la protection contre la haine et ne met pas en place les garanties procédurales nécessaires pour assurer le respect des droits et libertés des citoyens. Dans sa forme actuelle...» Là, c'est plus général, mais ce général, évidemment, s'il n'est pas dans l'objet en discussion en ce moment, on aura manqué notre cible. «Dans sa forme actuelle, le projet de loi risque de créer un climat d'autocensure indésirable et incompatible avec les droits et libertés fondamentaux. Nous estimons donc que le projet de loi n° 59 doit être revu de fond en comble et amendé en profondeur et faire ensuite l'objet de nouvelles consultations et auditions publiques...»

Et je pense que la ministre, avec beaucoup de bonne volonté... Je suis persuadé qu'elle n'est pas seule sur le dossier et elle s'appuie sur un caucus ou un Conseil des ministres pour avancer dans l'exercice qui nous occupe ici aujourd'hui. Mais la connaissant fondamentalement, je suis persuadé qu'elle est sensible aux arguments ici évoqués de ce côté-ci de la table.

J'apporterais également le témoignage des Nord-Africains pour la laïcité qui sont passés ici. C'était le 22 août dernier. Ils ont soutenu que, face au discours haineux et au discours incitant à la violence, une action ferme est certes... notamment en raison de la montée fulgurante du groupe terroriste qualifié État islamique, Daesh. Pour ceux qui ne veulent pas, disons, y donner énormément d'importance, il met de l'avant également la divulgation très facile de discours haineux sur le cyberespace, mais il insiste beaucoup sur les prédicateurs islamistes. Et, parenthèse, les islamistes n'ont rien à voir avec les musulmans, on le sait très bien. Ce sont des entités qui se considèrent humaines et qui instrumentalisent une religion, qui la détournent de son objet noble. Et ces islamistes, dit-il, prônent le djihad armé ici même, dans nos écoles. C'est des gens qui vivent avec nous, c'est des Nord-Africains, ils savent, ils connaissent leur milieu. Ils prônent le djihad armé dans nos écoles, dans nos mosquées, dans des centres communautaires et dans des espaces apprenants mobiles.

Alors, malgré cela, le porte-parole, M. Ferid Chikhi a dit : «Nous nous inquiétons pour la liberté d'expression au Québec. Notre crainte provient du flou qui règne autour de la notion [...] qu'est un discours haineux». On a beau vouloir apporter des amendements pour préciser ce que cela veut dire, mais cela ne sera pas perçu par celles et ceux qui ont cette lecture, cette approche fondamentaliste en toutes choses, en tout comportement dans la cité. En l'occurrence, ceux qui veulent subordonner le politique au religieux ne liront pas la chose de la même manière. Je ne me souviens plus très bien de la personne, mais c'était un témoignage intéressant qui disait : À partir du moment où vous êtes attaqué, notons devant la Commission des droits de la personne, de la jeunesse et... Commission des droits de la...

Mme Maltais : Personne et des droits de la jeunesse.

M. Kotto : ...personne et des droits de la jeunesse alors que vous n'êtes coupable de rien, le temps que vous perdez déjà dans le cadre scolaire, dans le milieu scolaire, le temps que vous investissez pour vous défendre vous-même, c'est du temps perdu, c'est des conséquences que vous... Nous sommes au moment où nous travaillons sur ce projet de loi, nous sommes loin d'imaginer qu'ils peuvent entraver la vie de quelqu'un, qu'ils peuvent entraver même la vie familiale de quelqu'un. Donc, c'est des mises en garde importantes.

J'évoque ça, je pourrais aller également rappeler ce que nous disait la communauté LGBT, ce que nous disait la Chaire de recherche sur l'homophobie, ce que nous disait la table ronde du Mois de l'histoire des Noirs. Tous veulent qu'on circonscrive ce projet de loi relativement à l'objet qui est d'actualité. On ne peut pas se mettre la tête dans le sable, nous sommes en guerre, M. le Président, et c'est une guerre qui a été déclarée il y a longtemps déjà. Certains en ont pris conscience seulement à partir du moment où ils ont été attaqués dans leur chair. Et nous sommes, Dieu merci — entre guillemets, Dieu — à l'abri pour l'instant de ces attaques massives. Mais, considérant ce qui se lit à gauche et à droite en Allemagne et par les services de renseignements en France, aux États-Unis par la CIA, on n'est pas à l'abri, ça peut arriver. Mais, sur le terrain aujourd'hui, il y a des jardiniers de la haine. Et, ces jardiniers, nous les connaissons. Ce ne sont pas des gens dans la sphère politique qui tiennent des discours radicaux ou qui incitent à la haine, ce ne sont pas des gens dans le milieu artistique qui tiennent ces discours. Il y a des individus qui sont identifiables, et j'espère, à la lumière du rapport que va déposer le centre de lutte contre...

Une voix : Sur la radicalisation.

M. Kotto : ...sur la radicalisation... Ce rapport va être déposé bientôt et il va nous éclairer davantage sur ces enjeux.

Donc, M. le Président, j'en appelle à notre perspicacité, à notre intelligence collective pour que nous nommions un chat un chat et que nous aidions notre société à lutter de façon claire, nette contre cette menace qu'il ne faut, à aucun moment, comparer à, disons, des langages dérapés et qui n'entraînent pas nécessairement aux mêmes conclusions constatées hier encore en France, aujourd'hui au Cameroun, à Tunis, à Ankara, à Beyrouth. C'est très sérieux, M. le Président, on ne peut pas badiner avec cet enjeu-là. Merci.

Le Président (M. Ouellette) : Commentaires, Mme la ministre?

• (17 h 20) •

Mme Vallée : Je tiens à rassurer notre collègue de Bourget, on ne badine pas. On ne badine pas, on a tous à coeur les enjeux auxquels il a fait référence. Et je crois que le sérieux de notre démarche se démontre par cette collaboration, cette volonté de collaboration et d'ouverture quant aux amendements que nous avons présentés, que nous présenterons certainement éventuellement dans le projet de loi. Il y en a beaucoup, et j'invite les collègues à en prendre connaissance. Je sais, j'en ai fait mention à quelques reprises, il y a plusieurs amendements qui font suite aux consultations. Donc, si on reprend les discours, si on reprend chacun des mémoires, il est possible que ces mémoires et ces préoccupations n'aient pas à être réitérés, puisqu'ils ont déjà fait l'objet d'amendements, les éléments soulevés ont fait l'objet d'amendements. Donc, moi, je tiens à travailler de façon proactive. Voilà.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais : Oui, M. le Président. Écoutez, je vais demander quelque chose à la ministre. Je vais essayer de sortir, là, du cercle dans lequel on est. Je lui ai dit, on cherche à sortir de ce cercle-là, mais on prend le temps parce que c'est l'article 1, et l'article 1 est fondamental. On le sait, après, on en parlait, c'est toute une mécanique qui se met en branle. Si on s'entend sur 1, après on va être dans l'application, les moyens, puis... Bon.

Là, nous, on propose de dire : Les discours haineux qui s'expriment au nom du fondamentalisme religieux, et tout ça, est-ce qu'il y a un sous-amendement ou quelque chose... Est-ce qu'il y a un mot qui permettrait... À partir du moment où on vous dit : Nous, on veut nommer le fondamentalisme religieux, est-ce qu'il y a un mot qui pourrait permettre de rassurer la ministre quant à l'ouverture que ça dénote, mais de ne pas oublier cette notion fondamentale pour nous? Est-ce qu'elle est prête à accueillir ça? Est-ce qu'elle a des idées? Peut-être qu'on en a. Alors, est-ce qu'à partir de la matière qu'on propose il y a matière à discussion pour aller chercher quelque chose qui pourrait la satisfaire ou c'est non parce qu'on parle de fondamentalisme religieux? Parce que ça, pour moi, ça règle déjà une partie du débat. Sinon, moi, je vais en chercher, là, je suis assez habile, on est assez habiles, puis il n'est pas mauvais du tout, mon jeune nouveau, pour trouver des solutions.

Mme Vallée : Il arrive dans un moment... Il n'y a pas meilleur projet de loi pour apprendre l'abc de la procédure parlementaire.

Le Président (M. Ouellette) : Probablement que sa probation pourrait être plus vite qu'il pense. Mme la ministre.

Mme Vallée : Écoutez, on a fait l'exercice, puis c'est un petit peu pour ça... Nous, on vous le propose de la façon qu'est rédigée la référence qui s'appuie sur des préceptes religieux auxquels on fait référence au deuxième alinéa de l'article 1. Puis on le campe quand même dans l'article 1 parce que l'article 1 est bien important.

Donc, je vous dirais, puis en toute amitié, que l'effort, on l'a fait. On est conscients, là, on a entendu, on vous a entendus, on a entendu la collègue de Montarville. Excusez-moi, M. le Président, on a entendu la députée de Taschereau, je ne voulais pas vous manquer de respect. Mais on a entendu, on essaie, par ce qui vous est proposé, d'avoir une piste d'atterrissage. Et j'ai aussi été à l'écoute des préoccupations que notre collègue de Gouin a soulevées aussi. Alors, avec, évidemment, notre équipe de juristes, avec les limites, et aussi les décisions, et les enseignements des tribunaux, de la Cour suprême, on vous propose une rédaction qui fait référence... Parce que je comprends, je comprends qu'on souhaite faire cette référence-là, mais, en même temps, elle n'est pas exclusive. Mais elle est là, elle est là.

Mais je veux juste simplement vous rappeler que... Puis je l'ai mentionné tout à l'heure, il y a la Cour suprême qui, dans un dossier... Tout à l'heure, en réponse à un amendement de notre collègue de Montarville, dans l'affaire Vriend contre Alberta, il a été établi que, lorsqu'on vise un seul motif, par exemple la religion, même si c'est toutes les religions, on donne une certaine forme de caractère discriminatoire parce qu'au niveau constitutionnel le législateur doit viser l'ensemble des motifs et ne doit pas en exclure. Donc, en précisant seulement qu'un type de fondamentalisme, je crains qu'on vienne affaiblir, même si notre objectif, c'est de nommer... Puis ça ne vient, en aucun cas, empêcher de combattre cette forme de radicalisation, au contraire.

Mais, si on le précise puis qu'on fragilise notre projet de loi, est-ce qu'on ne vient pas poser un geste à l'inverse? On a des outils, on a le Code criminel. Là, on veut donner des outils additionnels, des procédures de nature civile. Donc, on donne des outils additionnels, puis on verra plus loin d'autres mesures aussi pour protéger les femmes, les enfants contre, parfois, un radicalisme ou un fondamentalisme qui est poussé à l'extrême puis qui vient porter atteinte. Ça, on va le voir un petit peu plus loin dans le projet de loi, mais il est important de donner les dents nécessaires.

Je comprends qu'on veuille le cadrer dans le contexte de la lutte à la radicalisation, c'est tout à fait correct. Puis, honnêtement, je m'en veux un peu de ne pas avoir fait le clin d'oeil au plan. Mais c'est ce qui arrive parfois, on rédige des projets de loi, on rédige des plans en parallèle, puis... Et, là-dessus, je pense que la référence au plan est importante, tout à fait. C'est s'inscrit dans le plan, et on en parle. C'est un outil qui nous permet... Dans le fond, le plan en fait mention, fait mention de notre loi, donc, qui a un effet miroir. Je pense que c'est important. Puis on essaie de le faire d'une façon qui va permettre quand même à notre loi d'avoir les reins suffisamment solides pour passer à travers une contestation si elle devait être contestée par ceux et celles qui voudraient utiliser leurs discours à des fins qui pourraient amener à la radicalisation. Donc, il y a des gens qui vont vouloir l'attaquer pas pour les mêmes raisons, pour les mauvaises raisons. C'est possible, ça. Alors, ne permettons pas cette attaque-là en visant précisément certaines choses et en la rendant peut-être potentiellement discriminatoire.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée...

Mme Vallée : Alors, c'est vraiment l'objectif qui est visé, puis je comprends très bien qu'on souhaite préciser. En tout cas, je pense qu'on fait des efforts quand même. Il y a des efforts qui sont faits, et ça vous démontre notre volonté.

Puis surtout le député de Bourget nous disait : Je ne doute pas de la bonne foi de la collègue. Soyez assurés de ma bonne foi, chers collègues, là-dedans, on souhaite vraiment rallier... Puis, honnêtement, si on était capables d'avoir un projet de loi qui rallie l'ensemble de nos formations politiques, je pense qu'on a tous... Tu sais, on souhaite s'attaquer à cette radicalisation, on souhaite s'attaquer à cette intolérance. On a différents points de vue, on a imaginé, chacun à notre façon, différents outils, mais il y en a qui doivent rire de nous voir divisés sur cette question-là, alors qu'on devrait trouver une façon de s'entendre. En tout cas, ça, c'est en toute candeur que je vous le dis parce que je crois qu'on fait face, comme le disait notre collègue tout à l'heure, à une menace qui est grande, on fait face à des phénomènes qui sont complexes, auxquels on doit s'attaquer de différentes façons. Ça, c'est une des façons. Ce n'est pas le moyen exclusif et unique, c'est une poignée qui nous permet de nous attaquer à ces phénomènes-là.

Puis je pense que notre message, pour être plus fort devant cet adversaire qui se manifeste de différentes façons, je pense qu'il faut le faire ensemble. Puis maintenant, bien, ensemble, ça me demande, à moi aussi, de regarder avec vous puis de trouver le point d'atterrissage commun. Parce qu'ils doivent vraiment se délecter de nous entendre et de nous voir nous diviser sur les moyens de mettre un terme à cette radicalisation.

• (17 h 30) •

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais : Merci, M. le Président. C'est intéressant, ce que dit la ministre. Je comprends, déjà on s'était entendus. Puis elle a dit : C'est vrai, j'aurais dû mettre le mot «radicalisation», on va... C'est pour ça qu'on l'a gardé puis qu'on veut... On pense qu'elle l'a proposé, on le propose aussi. Là-dessus, on s'était entendus. Je pense qu'on va le retrouver. Ça, je pense qu'on y gagne tous et toutes.

Maintenant, sur le phénomène du fondamentalisme religieux, ce qu'elle nous propose, qu'elle a évoqué... J'ai pris en note vite, là. Si jamais je me trompe, si je suis allée trop vite quand j'ai pris une note... Je vais le lire... Bien, ça va...

Mme Vallée : Simplement, là, je veux simplement dire : On vous a fait...

Le Président (M. Ouellette) : Mme la ministre.

Mme Vallée : On vous a distribué, là, simplement pour votre bonne compréhension le texte complet, là. Parce que, parfois, on travaille avec un bout d'amendement, puis ce n'est pas toujours évident, alors on voulait que tout le monde ait accès à la même info que j'avais sous les yeux.

Mme Maltais : Alors, je comprends que la ministre a mis le mot «religieux», mais la façon dont elle l'a inscrit, on n'est pas rendus au deuxième alinéa, mais déjà je dis que, peu importent les préceptes sur lesquels ils s'appuient, qu'ils soient religieux ou autres, ce n'est pas une balise, c'est une ouverture large comme une porte de grange, à mon sens. C'est tous les préceptes, qu'ils soient religieux ou autres. Donc, ça, ce n'est pas une balise, c'est une porte de grange pour moi, là. Et je le dis tout de suite, on ira là tantôt.

Mais ce qu'elle a dit tout à l'heure, la ministre, c'est : On ne peut pas... Vous avez peur de faire attaquer le projet de loi par les chartes, par les gens qui pourraient aller devant la Cour suprême. Je le comprends, à chaque fois qu'on a amené un projet de loi — je l'ai vécu récemment — il y a toujours, toujours un juriste qui dit qu'on va se ramasser en Cour suprême puis que ça va contre la Charte des droits et libertés du Canada, je suis bien habituée. Mais, à un moment donné, il faut bouger, on s'entend. Sauf que là, nous, on ne voulait pas aller là. Ça fait que, si on y va, on veut baliser. Alors, je vais avoir une proposition qui va peut-être... Ça va exactement dans le sens des propos de la ministre. Je vais faire un sous-sous-amendement, M. le Président. Alors...

Le Président (M. Ouellette) : Ça a l'air qu'on ne peut pas faire ça.

Mme Maltais : On ne peut pas sous-amender un amendement?

Le Président (M. Ouellette) : On ne peut pas sous-sous-sous.

Mme Maltais : O.K. Alors, je reviendrai avec... Mais c'est une...

Le Président (M. Ouellette) : Mais on pourrait peut-être, sans que vous en fassiez un sous-sous...

Mme Poirier : Elle peut le lire.

Le Président (M. Ouellette) : Mais vous pourriez peut-être, dans le cadre de notre réflexion...

Mme Maltais : Bien, moi, je pense que je vais d'abord demander de... Si on se rend là, là, si la... On se rendra jusqu'à celui-là, mais, après ça, je le ramènerai parce que je pense que c'est une solution, genre ajouter «principalement ceux», hein, «ceux s'exprimant dans un...», ta, ta, ta. O.K.? Vous voyez, «principalement ceux s'exprimant au nom du fondamentalisme religieux»? O.K.? Je vous fais un... je le sors tout de suite, «principalement ceux». Ça s'en vient. Mais ça, automatiquement on rentre dans exactement... On ne ferme pas, on balise, mais on se garde une porte ouverte. C'est exactement ça qu'on veut. Ça fait que je suis là-dedans. Mais évidemment, pour nous, ce n'est pas principalement ça, là, qu'on veut, là, c'est «incitant à la violence s'exprimant au nom du fondamentalisme religieux ou dans un contexte de radicalisation». Tout est là. Tout ce qu'on vise est là.

Alors, M. le Président, je pense, je n'ai plus le temps pour m'exprimer sur mon sous-amendement, mais je... Puis j'écoute la ministre, je regarde ce qu'on a entre les mains, puis c'est exactement... je ne vois pas le problème, je ne vois pas le problème.

Des voix : ...

Le Président (M. Ouellette) : On va suspendre quelques minutes.

(Suspension de la séance à 17 h 34)

(Reprise à 17 h 47)

Le Président (M. Ouellette) : On reprend. Nous reprenons nos travaux. Nous en sommes toujours à étudier le sous-amendement présenté par Mme la députée de Taschereau, et je pense que, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, vous voulez ajouter à notre réflexion?

Mme Poirier : Bien, écoutez, M. le Président, je pense que, l'amendement déposé par ma collègue, je me suis exprimée précédemment là-dessus. Je veux juste vous dire que je comprends les réponses de la collègue ministre de l'autre côté, je comprends qu'elle souhaite apporter un amendement plus loin pour parler des préceptes religieux.

On a eu une discussion autour de comment réécrire... Dans le fond, le but, c'est qu'on essaie de réécrire un paragraphe qui nous apparaît, je pense, à l'ensemble des gens qui sont ici... qui ne répond pas de façon assez forte à l'intention du législateur. On ne retrouve pas, pour le moment, le... on retrouve des mots trop forts, des mots pas assez forts, des intentions qu'on ne lit pas de la même façon des deux côtés de la table.

Vous savez, M. le Président, le fondamentalisme religieux... C'est toujours le fun de regarder des... Attendez une seconde, là, je reviens à ma définition, là, de WikiLeaks. Je vais juste nous lire, le fondamentalisme, là, la définition sur Wikipédia, puis ça nous donne, des fois, des petites idées. On dit : «Le fondamentalisme est né aux États-Unis — alors, pour ceux qui vont nous dire qu'on est juste dans une religion, là, on n'est pas sur le bon continent — dans le contexte du protestantisme.» Alors, déjà là, vous voyez, on n'est pas dans la bonne religion puis on n'est pas sur le bon continent de ceux qu'on pense viser. «En 1919, des pasteurs presbytériens, baptistes et méthodistes fondent la World's Christian Fundamentals Association pour défendre les points de la foi qui leur paraissent fondamentaux. Ils soutiennent en particulier une interprétation littérale de la Bible. Prenant à la lettre le récit de la création du monde en six jours dans la Genèse, ils rejettent les théories de Darwin sur les origines de l'homme et sur l'évolution.»

«Par extension, interprétation littérale de tous textes, par exemple juridiques ou religieux.» C'est là qu'on arrive dans le fondamentalisme juridique.

• (17 h 50) •

«...le fondamentalisme est opposé à la séparation des ordres religieux et politiques et il entend subordonner [la] politique au religieux. C'est un principe ancien qui est particulièrement virulent dans l'islam aujourd'hui, mais qui a prévalu aussi dans d'autres religions dans le passé.»

Alors, à partir de là, M. le Président, je pense que, dans le fond, le fondamentalisme, là, c'est l'utilisation de la religion par le politique. C'est de ça qu'on parle, là. Alors, quand nous, on vient nommer le fondamentalisme religieux, c'est ce qu'on vient nommer. Dans le fond, c'est l'utilisation politique du religieux. Dans le fond, on vient utiliser ce que la ministre appelle plus loin des préceptes religieux. Mais nous, on veut le verbaliser à côté des mots «discours haineux». Pour nous, c'est important de les mettre un à côté de l'autre, mais tout de suite, d'entrée de jeu, au premier alinéa de l'article 1.

Ma collègue parlait tout à l'heure de «principalement», tout à l'heure, qu'elle aurait peut-être souhaité en venir à ajouter les mots «principalement ceux s'exprimant au nom du fondamentalisme religieux ou dans un contexte de radicalisation». L'intention, là, c'est simple, M. le Président. Ce qu'on veut, ce n'est pas n'importe quel discours haineux, on veut baliser les discours haineux. On veut venir dire — et je prends les mots de la ministre — des discours haineux qui s'inscrivent dans quel contexte particulier. Et le contexte particulier, c'est celui qui, actuellement, mondialement, là, est devant nous, là. Et le contexte, bien, c'est un contexte de fondamentalisme religieux, entre autres, qui, aussi, fait en sorte que des gens se radicalisent et qu'ils vont jusqu'à commettre l'irréparable. Je vous parlais, M. le Président, de Boko Haram ce matin, là. Ce n'est pas des doux, là, ce n'est pas des gens qui font dans la dentelle, là. Et ces gens-là, là, quand ces gens-là entrent en quelque part et qu'ils, au nom d'Allahu akbar! tuent des gens, bien, ce n'est pas au nom de d'autre chose que de ce fondamentalisme religieux.

Alors, faire abstraction de ça dans l'intention de la loi... Si on peut l'écrire autrement, si on l'écrit de cette façon-là, moi, je pense qu'il faut le nommer, il faut nommer le problème, d'entrée de jeu, auquel on s'attaque. Et, si on ne le nomme pas, je pense qu'on passe à côté du principal enjeu auquel on veut s'attaquer par ce projet de loi là. En tout cas, j'espère que c'est le principal enjeu auquel on veut s'attaquer dans le projet de loi. Moi, je veux bien qu'on me parle des discours haineux, mais ce n'est pas n'importe quel discours haineux, c'est ceux qui incitent à la violence, c'est ceux qui amènent des gens à commettre des actes violents. Et ceux, actuellement, qui commettent des actes violents par le discours haineux, bien, c'est ceux qui sont dans un cadre de fondamentalisme religieux. Alors, je souhaite, M. le Président, que nous obtenions l'assentiment de la ministre sur cet amendement.

Le Président (M. Ouellette) : Commentaire, Mme la ministre, avant que je passe au député de Bourget?

Mme Vallée : Je pense qu'on est allés... Puis je le redis, M. le Président, on est allés au plus loin où on peut aller dans la rédaction du projet de loi pour en assurer sa stabilité. On s'est inspirés des enseignements de la Cour suprême aussi pour les amendements que nous avons présentés. Mais, malheureusement, l'amendement qui est présenté... Puis je comprends les explications des collègues, mais il risque de fragiliser la loi. Et, bien honnêtement, M. le Président, je ne voudrais pas, d'emblée, fragiliser une loi. Les équipes qui sont ici avec nous et qui suivent nos travaux depuis les tout débuts travaillent très fort, puis, je dois vous dire, je les remercie, mais là, actuellement, on souhaite préciser l'objet, on le précise. Dans les amendements qu'on va déposer à l'article 1, on va venir, je crois, rejoindre les préoccupations qui ont été soulevées, mais d'une façon qui protégera notre législation.

Et, pour moi, c'est très important. Puis c'est d'ailleurs ce que le premier ministre a mentionné, je crois, la semaine dernière lorsqu'il échangeait, je pense, avec le chef de la deuxième opposition en disant : Nous, on est ouverts, on va travailler ce projet de loi là, mais chose certaine, on veut s'assurer que ce qui sera présenté sera respectueux des chartes et passera les tests. Et, moi, ce que je vous propose, c'est une rédaction qui nous permet d'être solides quant à notre projet de loi et qui vise aussi... Parce que ce n'est pas seulement que d'être solides, mais c'est aussi de viser les éléments et les problématiques, le type de discours auxquels on a fait référence, et on les vise. On ne les exclut pas, on les vise. Les discours qui mènent à des actes violents et qui sont portés par une radicalisation d'une idéologie religieuse sont visés. Si c'est une idéologie politique, c'est visé. On ne limite pas. On ne limite pas, et je pense... Et on ne limite pas parce que le discours haineux ou incitant à la violence, c'est grave. Mais ce n'est pas que le fait du fondamentalisme religieux, il y a d'autres types de radicalisation qui peuvent mener à ce type de discours là et il faut aussi s'y attaquer.

Alors, pour ça... Et ce n'est pas par manque de bonne volonté, ce n'est pas par manque de volonté, c'est tout simplement pour les principes que je vous soulève. Et, encore une fois, je vous réitère que, lorsque nous arriverons au deuxième alinéa, on présentera des amendements, je crois, qui permettent aussi de rassurer certains et certaines qui avaient soulevé des préoccupations quant à des protections indues que certains pourraient tenter de rechercher.

Le Président (M. Ouellette) : M. le député de Bourget, vous allez nous emmener à la pause?

M. Kotto : Je ne sais pas, M. le Président, parce que j'ai une question, si la ministre le permet, une question à lui poser : En quoi la proposition de ma collègue de Taschereau serait-elle problématique relativement à une lecture au niveau de la Cour suprême concrètement, là?

Le Président (M. Ouellette) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Excusez-moi, c'est parce qu'on parlait en même temps, alors je n'ai pas compris.

Le Président (M. Ouellette) : Non, mais...

M. Kotto : Oui. Non, je me demandais sur quel plan ou sur quel point précisément, concrètement, la proposition de ma collègue de Taschereau, son amendement serait battu, disons-le aussi simplement, à la Cour suprême?

Le Président (M. Ouellette) : Mme la ministre.

Mme Vallée : On ne fera pas le débat judiciaire ici, mais je veux simplement... Puis je reviens, puis je l'ai mentionné tout à l'heure, lorsqu'on entre et on précise, à force de trop vouloir préciser, ça peut conférer un caractère discriminatoire à une loi. Alors, si on précise, par exemple, exclusivement sur le caractère religieux, ça pourrait être interprété comme conférant un caractère discriminatoire. Et puis la Cour suprême a déjà, dans d'autres types de législation, indiqué que, lorsqu'on vise un seul motif, on donne un caractère discriminatoire à un projet de loi.

Alors, je l'ai mentionné, et puis on... Et, d'un autre côté aussi, lorsque l'amendement de notre collègue créait... Là, je ne me souviens plus du terme qui est utilisé, là, le «principalement», c'est ça?

Une voix : ...

• (18 heures) •

Mme Vallée : Le «principalement», on fait indirectement une hiérarchisation du type de discours qui pourrait être visé. Et un discours haineux ou un discours qui incite à la violence, dans le contexte qu'on a présenté, peu importe son fondement, que le fondement soit religieux, que le fondement soit philosophique, si ce discours amène à la détestation de l'autre, si ce discours amène à la violence, c'est ce à quoi on s'attaque. Donc, oui, dans certains cas, le fondement, ce sera un fondement religieux, mais, dans d'autres cas, ça peut être un fondement idéologique.

Par exemple, le collègue de La Prairie a fait référence, au début de nos travaux, au nazisme. Il y a des discours qui étaient haineux, qui étaient tenus au nom de cette idéologie. Ce n'était pas une religion, puis ça a causé bien des dégâts. Alors, je pense qu'on ne limite pas la portée du projet de loi, on ne hiérarchise pas de types de discours. Un discours haineux incitant à la violence qui s'inscrit dans un contexte de radicalisation, c'est non. Et puis je pense que c'est quand même... Et on va le définir, le discours haineux, là, on va venir le préciser parce que ce n'est pas, comme je l'ai mentionné à tant de reprises, ce n'est pas n'importe quel discours. Ce n'est pas un discours de dissidence, ce n'est pas un discours de critique, là, c'est beaucoup plus profond que ça, c'est beaucoup plus fort que ça. Puis ça cause bien des torts, et ça s'inscrit dans un processus de radicalisation, malheureusement.

Et là on me dit que je dois arrêter. On n'arrête pas de me lancer des petits papiers — stop, stop, stop — parce qu'il est 18 heures et que le président veut aller souper.

Des voix : Ha, ha, ha!

Le Président (M. Ouellette) : ...on me prête des intentions. On me prête des intentions.

Mais, à la demande générale, compte tenu de l'heure, la commission suspend ses travaux jusqu'à 19 h 30 dans cette salle. Donc, vous pouvez laisser vos choses ici, on va s'assurer de barrer la porte.

(Suspension de la séance à 18  h 2)

(Reprise à 19 h 40)

Le Président (M. Ouellette) : À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des institutions reprend ses travaux. Veuillez, s'il vous plaît, vous assurer que vos appareils électroniques sont en mode silencieux afin de ne pas perturber nos travaux.

Je vous rappelle que la commission est réunie afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 59, Loi édictant la Loi concernant la prévention et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence et apportant diverses modifications législatives pour renforcer la protection des personnes.

Lors de la suspension de nos travaux, nous en étions à l'étude du sous-amendement de Mme la députée de Taschereau. Et, je pense, c'est Mme la ministre qui avait la parole, qui avait terminé... dépassé l'heure quelque peu, mais je pense que vous aviez terminé votre explication, Mme la ministre?

Mme Vallée : Oui.

Le Président (M. Ouellette) : Donc, nous serions prêts à voter sur le sous-amendement de Mme la députée de Taschereau. Est-ce que le sous-amendement de Mme la députée de Taschereau est adopté?

Des voix : ...

Mme Maltais : Vote par appel nominal.

Le Président (M. Ouellette) : Vote par appel nominal, Mme la secrétaire.

La Secrétaire : Mme Maltais (Taschereau)?

Mme Maltais : Pour.

La Secrétaire : Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve)?

Mme Poirier : Pour.

La Secrétaire : M. Kotto (Bourget)?

M. Kotto : Pour.

La Secrétaire : Mme Roy (Montarville)?

Mme Roy (Montarville) : Pour.

La Secrétaire : Mme Vallée (Gatineau)?

Mme Vallée : Contre.

La Secrétaire : M. Merlini (La Prairie)?

M. Merlini : Contre.

La Secrétaire : M. Boucher (Ungava)?

M. Boucher : Contre.

La Secrétaire : M. Rousselle (Vimont)?

M. Rousselle : Contre.

La Secrétaire : M. Proulx (Jean-Talon)?

M. Proulx : Contre.

La Secrétaire : M. Ouellette (Chomedey)?

Le Président (M. Ouellette) : Je vais m'abstenir. Donc, le sous-amendement est rejeté?

La Secrétaire : Oui.

Le Président (M. Ouellette) : Pour la suite de nos travaux, Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais : M. le Président, je voudrais savoir de la ministre si elle a quelque chose qui nous permette de nous rapprocher. Je ne sais pas si elle a une autre proposition dans le sens de ce qu'on propose.

M. Merlini : Maintenant, question de directive, M. le Président, mais devrait-on retomber à l'amendement que la ministre avait proposé, étant donné que le sous-amendement a été défait?

Le Président (M. Ouellette) : Oui, on est là. C'est pour ça que, suite aux commentaires de Mme la députée de Taschereau, je redonne la parole à Mme la ministre.

M. Merlini : O.K. Très bien.

Mme Vallée : Bien, en fait, M. le Président, je pense qu'on a eu la discussion. J'ai fait état de la situation, je pense qu'il faut voir l'alinéa un dans son ensemble, dans le texte dans lequel il devra s'inscrire, avec la volonté que nous avons d'apporter certains amendements à l'alinéa deux également. D'ailleurs, c'est un petit peu comme ça que l'analyse et l'appréciation d'un texte doivent se faire, dans son ensemble, et non pas alinéa par alinéa.

Donc, ceci étant dit, je pense que je vous dirais, M. le Président, que j'ai fait preuve de beaucoup de souplesse. Et, je pense, aussi on a fait preuve de bonne volonté, mais je ne suis pas dans une partie de tango, d'avance, recule, avance, recule. Ce que j'ai déposé, c'est ce que je pouvais déposer dans le contexte de l'esprit de la loi. Puis c'est sûr qu'il y a parfois, là, des petits amendements de choix de mots, mais, au niveau de l'esprit de l'amendement puis au niveau de l'esprit... j'ai joué pas mal mes cartes, dans le sens que j'ai présenté ce que je considérais être une voie ou une piste d'atterrissage intéressante pour nous permettre de poursuivre l'étude des différents articles et du projet de loi.

Le Président (M. Ouellette) : Donc, Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais : Alors, M. le Président, on comprend bien la ministre. On sait qu'elle a ajouté, entre autres, l'histoire de la radicalisation, sur laquelle, on le dit, on s'entend. On la retrouve d'ailleurs dans toutes les propositions qu'on fait, ainsi que la finale pouvant mener à l'extrémisme violent. Là-dedans, on sait que tout le monde... Puis on n'est pas dans un jeu de tango, là, nous, on essaie de baliser la loi pour qu'elle arrive aux fins auxquelles, je pense, les gens s'attendent, puis les gens qui sont venus en commission parlementaire aussi. Alors, je vais avoir un amendement.

Le Président (M. Ouellette) : Un sous-amendement à l'amendement de la ministre?

Mme Maltais : Oui.

Le Président (M. Ouellette) : Vous voulez nous en faire lecture, madame...

Mme Maltais : ...faire la lecture et vous le déposer?

Le Président (M. Ouellette) : Oui.

Mme Maltais : Toujours en ayant écouté la ministre. Je vous expliquerai pourquoi après on l'a écrit comme ça.

Sous-amendement : Remplacer le premier alinéa de l'article 1 de la loi proposée par l'article 1 du projet de loi par le suivant :

«La présente loi a pour objet d'établir des mesures de prévention et de lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence s'exprimant au nom du djihadisme ou dans un contexte de radicalisation pouvant mener à l'extrémisme violent.» Je vais déposer.

Le Président (M. Ouellette) : Oui. On regarde...

Je vais suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 19 h 45)

(Reprise à 20 heures)

Le Président (M. Ouellette) : Nous reprenons nos travaux. Nous en sommes à Mme la députée de Taschereau, qui va nous présenter un sous-amendement qui a été préparé durant notre suspension. Mme la députée de Taschereau, vous nous présentez votre sous-amendement.

Mme Maltais : D'accord. Alors, modifier l'amendement modifiant le premier alinéa de l'article 1 proposé par l'article 1 du projet de loi en remplaçant les mots «, lesquels peuvent s'exprimer notamment dans un contexte d'intolérance ou» par les mots «s'exprimant au nom du djihadisme ou dans un contexte».

Alors, ce que ça va donner comme résultat, c'est :

«La présente loi a pour objet d'établir des mesures de prévention et de lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence s'exprimant au nom du djihadisme ou dans un contexte de radicalisation pouvant mener à l'extrémisme violent.»

La différence avec l'amendement...

Une voix : Le sous-amendement.

Mme Maltais : Le sous-amendement, mais la différence avec l'amendement proposé par la ministre est ici. Nous savions que le mot «notamment » nous dérangeait beaucoup. Et l'autre chose, c'était «, lesquels peuvent s'exprimer notamment dans un contexte d'intolérance». On l'a dit, on a beaucoup de difficultés avec le mot «intolérance». Puis l'autre partie, «radicalisation pouvant mener à l'extrémisme violent», ça, on s'est bien entendus.

Maintenant, est-ce qu'on parle d'un contexte d'intolérance ou bien on parle de ce que nous croyons véritablement être le problème social et le problème que nous ont soumis les gens qui sont venus en commission parlementaire, c'est-à-dire le djihadisme? Tout à l'heure, on a essayé, je vais vous dire, ce que je considère la meilleure proposition, qui était de dire à cet endroit-là «le fondamentalisme religieux». Ça, à mon sens, c'était la meilleure proposition. On en avait parlé ensemble, les collègues, et je pense que ça exprimait bien... Maintenant, la ministre se sent mal à l'aise avec l'idée de cibler le monde religieux. Puis on ne peut pas cibler une religion, on ne peut pas cibler le religieux, alors c'est mon collègue de Bourget qui s'est mis à jongler sur ce bout-là, le fondamentalisme religieux, en essayant d'éviter les écueils que nous indique la ministre.

On veut que ça passe le cap de la constitutionnalité des lois. Là-dessus, je vous dirais qu'à chaque fois qu'on a déposé des lois, les juristes, c'est leur métier, nous annoncent toujours des dangers qui, parfois, ne se réalisent pas. Des fois, je ne veux pas vous... Je vous respecte beaucoup, les juristes, moi, je dis : Les juristes doivent être frileux parce qu'ils doivent nous prévenir des dangers, mais les légistes doivent être courageux. Ils doivent parfois décider de s'investir dans un domaine et d'aller plus loin que ce que le légiste nous propose. Alors, l'idée, nous, c'est de... au lieu de s'exprimer au nom du fondamentalisme religieux, qui a été rejeté, au lieu de s'exprimer notamment dans un contexte d'intolérance, que nous trouvons, à notre avis, beaucoup trop large, nous proposons le mot «djihadisme».

Qu'est-ce que je djihadisme? «Le djihadisme — je suis sur Wikipédia — est une doctrine contemporaine au sein de l'islamisme — pas de l'islam, l'islamisme, qui est donc le politico-religieux — qui prône l'utilisation de la violence pour la réalisation des objectifs islamistes. Bien que le djihadisme soit dérivé du djihad, ce dernier est un élément important de l'islam qui n'est pas nécessairement violent.» Donc, c'est pour ça que ce n'est pas le djihad. Le djihad, ça fait partie de la religion. Le djihadisme, c'est un peu une dérive vers la violence. Alors, le mot est précis, c'est pour ça qu'on va vers ça.

Je suis allée voir certains savants... Farhad Khosrokhavar, directeur d'études à l'EHESS : «Le djihadisme est "l'idéologie totalitaire la plus élaborée depuis le communisme et le nazisme" — intéressant, parce que ce sont les exemples que nous présente la ministre — et certains djihadistes peuvent même être chiites.» Bon. Mais, «selon lui, "les idéologues [djihadistes] intègrent les idées extrémistes occidentales, notamment de l'extrême gauche et de l'extrême droite, et présentent une version de l'islam qui tente de briser le tabou de la ‘sécularisation irréversible'"»

Et ils sont totalement... Évidemment, dans le monde entier... le monde occidental, en tout cas, et dans la plupart du monde entier, on condamne le djihadisme, dans le sens où la violence n'est pas un mode de dialogue entre les religions. La violence n'est pas acceptable dans une société comme un mode de dialogue, point. Et, entre les religions, encore moins. Alors, la proposition qu'on fait pour éviter de tomber dans le piège — pas pour nous, mais que la ministre considère un piège, le fondamentalisme religieux — c'est d'en arriver à utiliser le vrai mot, le mot qui parle à tout le monde, là, c'est «djihadisme». Alors, voilà notre proposition.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la ministre, vous avez des commentaires?

Mme Vallée : En fait, ma crainte — et comprenez-moi, là, on condamne, évidemment, toute forme de djihadisme — c'est qu'en le ciblant de façon très, très précise et en le rattachant à une seule et unique idéologie qui est tout à fait condamnable, là — là-dessus, là, je tiens à le préciser, là — on donne une ouverture à quelqu'un pour présenter une... Quelqu'un pourrait dire : Ah non! ce n'est pas au nom du djihadisme, ces propos-là, ou c'est en un autre nom. C'est qu'en précisant, parfois, en étant trop pointu, on donne des pistes de sortie à certains et à certaines. Donc, parfois, à trop préciser, on va avoir l'effet contraire de ce qu'on souhaite du projet de loi. C'est un petit peu la crainte.

Puis, en même temps, ce n'est pas que ce type... tout ce qui dérive du djihadisme est tout à fait inacceptable, mais, au-delà de ça, un discours qui est haineux et qui incite à la violence, s'il est fondé sur une autre forme d'idéologie, par exemple le néonazisme... Ça existe, il y a des groupuscules et même des groupes d'extrême droite qui tiennent des propos qui incitent à la violence à l'égard de certaines personnes. Donc, il faudrait éviter que notre loi soit tellement précise qu'elle ne permette pas de s'attaquer à d'autres formes d'idéologies qui prônent l'utilisation de la violence, qui prônent l'utilisation de la haine pour exclure des gens, et dans un contexte, évidemment, de radicalisation. En fait, c'est ça, le danger à trop cibler.

Alors, peu importe, là, le terme ou peu importe ce qui sera identifié, à trop cibler, on risque de manquer notre cible. Et je ne voudrais pas que ça puisse être le cas parce qu'advenant... Là, actuellement, la problématique, la grande problématique que nous vivons non seulement ici, mais ailleurs sur la planète, oui, elle est liée avec la montée, malheureusement, du djihadisme, c'est vrai. Mais il y a aussi d'autres problématiques, il y a aussi d'autres formes de radicalisation qui peuvent mener à la violence, et cette forme de radicalisation, bien que moins médiatisée, est tout aussi dommageable.

Mme Maltais : M. le Président.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Taschereau.

• (20 h 10) •

Mme Maltais : Je comprends, mais c'est parce que nous, on veut amender l'amendement de la ministre parce que l'amendement de la ministre, lui, il est trop vague. Il est trop vague. «Dans un contexte d'intolérance», c'est ça qu'elle nous propose. Ça, là, c'est exactement l'insécurité totale qu'on a entendue en commission parlementaire. Ça fait que, là, nous, on pointe vers le problème social. «Fondamentalisme religieux» a été refusé, c'était le meilleur mot. Maintenant qu'on n'a pas le meilleur mot, bien, on va se diriger vers autre chose. Mais le meilleur mot, là, celui qui décrit le mieux la situation, il a été rejeté. Alors, on va aller vers «djihadisme» parce qu'on va nommer les choses.

Maintenant, on ne peut pas laisser «dans un contexte d'intolérance», on ne peut pas laisser passer ça. «Dans un contexte d'intolérance», là, c'est tout le monde qui peut poursuivre tout le monde. D'ailleurs, parfois, dans ses explications, la ministre dit des choses comme : Il ne faut pas mener à l'exclusion, il ne faut pas marginaliser. Ça, c'est déjà couvert par les plaintes à la CDPDJ. À la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, il y a un système de traitement de plaintes. Puis, quand ça mène à la violence, là, il y a le Code criminel avec les articles de 318 à 320. C'est déjà là. La Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, là, et son système de traitement des plaintes, on ne la crée pas dans cette loi-là, là, elle existe. Le Code criminel, là, ça ne l'enlève pas, là, ça s'ajoute à ça, mais il reste là, le 318 à 320 du Code criminel.

Alors, qu'est-ce qu'on ajoute? Ou bien on ajoute quelque chose de très vague comme un contexte d'intolérance où, là, tout le monde va se retrouver à pouvoir aller devant la CDPDJ — et le voilà, le contexte d'autocensure qu'on s'attend et qu'on ne veut pas — ou bien on pointe le problème qu'on est supposé pointer, c'est-à-dire la lutte à la radicalisation qui est menée par des fondamentalistes religieux qui entraînent nos jeunes dans des combats violents, et tout. Et puis, là, comme on ne peut pas parler de fondamentalisme religieux, bien là on va nommer le problème, qui est le djihadisme.

Moi aussi, j'aimais mieux un autre terme, mais... Par contre, on a toujours vu à garder «ou dans un contexte de radicalisation pouvant mener à l'extrémisme violent», justement pour aller chercher aussi les forces de droite. Ça, on l'entend. Mais, comme je dis, là, on l'a pareil, la CDPDJ, on l'a pareil, 318 à 320 du Code criminel, on ajoute quelque chose. Attention à ce qu'on ajoute. C'est ça, le problème qu'on dit, nous, attention à ce qu'on ajoute. Ça fait qu'on essaie de pointer parce qu'on ajoute quelque chose. On ne découvre pas quelque chose, là, tout à coup. Le discours haineux, c'est déjà tout couvert, là, c'est déjà tout couvert. Maintenant, si on veut pointer quelque chose, bien, pas «dans un contexte d'intolérance», alors on cherche les meilleurs mots pour montrer ce à quoi on veut s'attaquer. M. le Président, c'est pour ça qu'on propose ça, là. Là, je le dis, là, «dans un contexte d'intolérance», c'est intolérable. Ce n'est pas un jeu de mots, là, on ne peut pas le prendre, on ne peut pas l'accepter puis on ne peut pas l'inscrire dans une loi, ce n'est pas vrai qu'on va inscrire «dans un contexte d'intolérance».

J'ai entendu : Il ne faut pas marginaliser. Ça arrive qu'on marginalise, mais... Moi, je trouve ça terrible, dommageable, mais c'est pour ça qu'on a créé la CDPDJ puis qu'il y a un système de traitement de plaintes. Puis je vous rappelle que le Barreau dit : Attention! Vous doublez. Le Barreau disait, si on va là-dedans, exactement la proposition... C'est pour ça qu'on veut l'amender, parce que la proposition qu'on a sur la table, c'est exactement ce que le Barreau nous a dit de ne pas faire, ne pas dédoubler le système de traitement des plaintes de la CDPDJ. Là, il y a quelqu'un qui peut déposer une plainte puis, après ça, déposer une infraction à cette loi-là, peut aller au Code criminel en vertu de 318 à 320. On est rendus en triple, on triple. C'est là que ça n'a pas de bon sens. C'est pour ça qu'on veut le cibler. C'est pour ça qu'on veut ramener. C'est juste pour ça.

Puis c'est ce que les gens nous ont dit en commission parlementaire, M. le Président, ce sont les propos que nous avons entendus en commission parlementaire. On ne l'a pas inventé, je l'ai entendu. J'ai le mémoire du Barreau devant moi, il dit : Attention! Vous doublez. Puis il y a les autres qui sont venus en commission parlementaire nous dire : Vous ouvrez trop large. Puis je le sais que, sur le discours haineux, on va en parler tout à l'heure, mais, sur le fondement de la loi, à qui on s'adresse, là... Parce qu'écoutez on le sait qu'il y a des gens qui savent utiliser nos lois. On le sait, ils savent déjà très bien utiliser nos lois. Mais c'est pour ça qu'on essaie de pointer vers des solutions plus intéressantes, à notre avis, très respectueusement, que ce que le gouvernement nous propose.

Le Président (M. Ouellette) : Commentaires, Mme la ministre?

Mme Vallée : Simplement mentionner que le... Je pense que le Barreau a... Ce n'est pas tout à fait précis, là, on peut revenir sur les citations. J'ai un extrait du mémoire du Barreau, et, à la page 2 de son mémoire, le Barreau nous indique : «D'emblée, le Barreau est favorable à ce que législateur impose des limites aux discours haineux ou incitant à la violence en tant qu'actes discriminatoires et que la Commission des droits de la personne ait un contrôle sur ces dossiers. Nous soulignons qu'un régime administratif éviterait le recours automatique au droit criminel tout en favorisant le respect des droits et libertés de la personne et [...] garantissant le respect des libertés civiles de tous.» Donc, je pense que le Barreau ne vient pas dire que c'est de trop.

Par ailleurs, peut-être juste revenir, lorsque notre collègue mentionnait que le Code criminel existe puis que c'est suffisant, je suis tombée tout à l'heure par pur hasard sur le site du CIJA, qui est venu en commission parlementaire nous dire que le projet de loi n'était pas utile, mais, étrangement, étrangement, sur son site, sur une publication mise à jour le 20 août dernier, l'organisme demande à ce que des dispositions soient mises en place pour protéger les Canadiens des discours haineux et antisémites : «Dans un réel souci de combler le vide qui existe actuellement dans les mesures canadiennes de protection contre la propagande haineuse — ça, c'est à la suite du retrait de l'article 13 de la Loi canadienne sur les droits de la personne — les recommandations du CIJA devraient être adoptées ou, à tout le moins, le pays devrait se doter d'une nouvelle législation qui viendrait remplacer le défunt article 13. Cette loi devrait être rédigée avec en tête la volonté de définir une frontière claire et précise entre ce qui relève de la liberté d'expression et ce qui constitue de la propagande haineuse. Des dispositions spécifiques devraient également être adoptées afin d'éviter toute utilisation abusive de cette nouvelle législation.»

C'est le dernier paragraphe de la page. Donc, tout simplement pour dire que le droit criminel, oui, il existe, le Code criminel existe, mais des outils supplémentaires sont requis et vont permettre de mieux lutter contre le discours haineux, le discours incitant à la violence. Je voulais simplement rappeler tout ça.

Ceci étant, le mot «intolérance», évidemment, ce n'est pas sorti d'un chapeau, c'est à la suite d'une résolution passée par le Conseil de sécurité de l'ONU, donc, qui... Puis je vais vous lire la fin de la résolution : «Profondément préoccupé par le fait que l'incitation à commettre des actes terroristes motivés par l'extrémisme et l'intolérance constitue un grave danger et une menace grandissante pour la jouissance des droits de l'homme, entrave le développement social et économique de tous les États et compromet la stabilité et la prospérité mondiales, et qu'il convient pour l'Organisation des Nations Unies et pour tous les États d'y répondre d'urgence et de façon active, et soulignant qu'il faut prendre aux niveaux national et international toutes les mesures nécessaires et appropriées conformes au droit international pour protéger le droit à la vie...»

Alors, l'intolérance tire sa source de cette résolution. Donc, l'utilisation du terme n'est pas trop vague, elle est inspirée... Et notre moyen, bien, c'est notamment — et je le dis avec un sourire — les dispositions qui vous sont présentées.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais : M. le Président, je vais le lire, le mémoire du Barreau sur le double régime, le régime parallèle. Je l'ai lu déjà, je vais le dire. O.K. : «Ce projet de loi crée, au chapitre III, un nouveau régime législatif destiné à sanctionner l'interdiction, prévue à l'article 2, de tenir ou de diffuser publiquement un discours haineux ou incitant à la violence. Ce nouveau régime s'applique uniquement aux discours visant un groupe de personnes présentant une caractéristique identifiée comme un motif de discrimination interdit à l'article 10 de la charte québécoise. Nous reconnaissons que l'avantage de ce régime est que les groupes de personnes visées sont protégés malgré le défaut d'identifier une victime ou un groupe de victimes précises — ils le reconnaissent. Ce régime serait en parallèle avec le régime de plaintes pour discrimination prévu aux articles 74 et suivants de la charte québécoise. Le projet de loi semble donc établir un motif particulier de discrimination qui nécessite un régime parallèle bien que la Cour suprême du Canada a établi que les discours haineux constituent un acte discriminatoire aux droits de la personne.

«Le Barreau s'interroge sur les conséquences d'un tel régime parallèle, compte tenu des nouvelles responsabilités confiées à la CDPDJ, y compris le dédoublement des procédures et le pouvoir de recevoir des dénonciations. De plus, il reprend — reprise — une série de dispositions de la charte québécoise concernant notamment les pouvoirs d'enquête de la CDPDJ, lesquels devront être interprétés.

«[...]Le Barreau reconnaît la compétence de la province de Québec d'adopter une législation créant des sanctions civiles en matière de discours haineux — oui, on a la compétence. Nous constatons que ce nouveau régime pourrait créer une tension entre les plaintes pour discrimination et les dénonciations anonymes de discours haineux.

• (20 h 20) •

«Le Barreau conclut — alors, conclusion de cette affaire-là — qu'il est possible d'intégrer l'interdiction des discours haineux ou incitant à la violence de l'article 2 du projet de loi au régime actuel des plaintes de la charte québécoise. Ainsi — elle est là, la phrase terrible — un régime spécifique de dénonciation de discours haineux ou incitant à la violence ne serait pas nécessaire.»

«Un régime spécifique de dénonciation de discours haineux ou incitant à la violence ne serait pas nécessaire.» Nous n'avons pas besoin de cette loi. Ça, c'est ce qu'on dit depuis le début. Mais, puisque le gouvernement nous amène dans cette piste-là, puisque le gouvernement décide de faire un régime parallèle et au régime de plaintes de la CDPDJ sur notre territoire — c'est dans nos compétences — mais aussi au Code criminel, articles 318 à 320, puisqu'on a décidé de se complexifier la vie, bien, au moins, n'ouvrons pas un énorme régime de plaintes avec des mots comme «un contexte d'intolérance». Ciblons ce qu'on voulait faire, «djihadisme ou radicalisation pouvant mener à l'extrémisme violent». Et c'est ça, l'avis du Barreau, là, vous pourriez vraiment... vous éviteriez du trouble à toute la société. C'est ça qu'il dit, le Barreau, évitez-nous ce problème-là. Mais, puisque vous voulez le faire, vous pourriez le faire bien plus simplement en intégrant ça au régime actuel des plaintes de la charte québécoise.

Et, quand on arrivera là, moi, je pense que ça, là, le discours haineux, on devrait l'intégrer au régime de plaintes, on ne devrait pas créer un régime de dénonciation. Elle est là, l'erreur. Elle est là, l'erreur, on s'en va dédoubler le régime de plaintes, on s'en va dédoubler le Code criminel, on s'en va dans une troisième voie. Je ne comprends toujours pas pourquoi. Je ne comprends pas pourquoi ce n'est pas juste des plaintes.

Maintenant, puisque le gouvernement a décidé de nous amener sur cette piste-là, ciblons la piste, n'allons pas ouvrir trop large. On dédouble, mettons-en pas plus que ce que le client demande. Qu'est-ce qu'il demande, le client? On l'a entendu dans la société, on l'a entendu de la part de l'opposition, on l'a entendu de la part des groupes en commission parlementaire, il demande de travailler sur le fondamentalisme religieux, la radicalisation, nos jeunes qui sont entraînés dans le djihadisme. Alors, moi, j'essaie de jongler avec ces mots-là puis de nous amener au bon endroit, M. le Président. C'est ça, le sens de l'amendement. Mais le Barreau nous dit : Attention! Vous jouez trop large, vous dédoublez. Puis moi, je dis même : Vous triplez.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Les commentaires du Barreau sont sur la mécanique, pas sur le fond. Mais on a des amendements plus loin sur la mécanique, peut-être qu'un jour on va y arriver.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais : C'est parce que ce n'est pas seulement de la mécanique, là. Le Barreau nous dit : Vous n'avez pas besoin de faire ça, on a déjà un régime de plaintes. Mais, puisque, dans vos compétences, vous choisissez de faire ça, faites attention.

Nous, ce qu'on dit, c'est : Oui, on peut faire ça peut-être. Le gouvernement veut y aller. O.K. On va vous écouter, mais ciblons le travail. «Dans un contexte d'intolérance», là, c'est tout le monde, et son père, et sa mère. C'est ça qui ne marche pas. Ça fait qu'on va remplacer, si vous voulez, «dans un contexte d'intolérance» par des mots qui ciblent le problème. Mais «dans un contexte d'intolérance», ça n'a pas de sens, alors on veut y aller avec «au nom du djihadisme», on nomme le problème.

J'aime mieux «fondamentalisme religieux», mais, puisqu'il faut absolument éliminer ce mot-là, bien, «intolérance», bien, on va y aller pour «djihadisme». C'est notre proposition, on cible la vraie bataille. Elle est là, la bataille. C'est là-dedans que se font entraîner des jeunes en ce moment, c'est au nom du djihadisme que Saint-Jean-sur-Richelieu s'est fait, qu'Ottawa s'est fait. C'est ça, le vrai problème, là. À Paris, c'est ça qui s'est passé. À Bamako, c'est ça qui se passe. À Tunis, c'est ça qui se passe. Le problème mondial est celui-là, mais le problème québécois est le même. On fait partie, nous, du même environnement, c'est un environnement international. Ça fait que, si on crée des outils puis on crée des lois nouvelles...

D'ailleurs, je n'ai pas encore vu de quelle loi on s'inspire. On me parle de dispositions à des endroits, puis tout, mais on ne les voit pas, là. On n'a pas encore eu de dépôt de dispositions qui ont été faites ailleurs, ça fait qu'on ne peut pas s'en inspirer. À un moment donné, on l'aura. Mais, M. le Président, moi, vraiment, là, je crois profondément que nous devons... On a entendu tout le monde en commission parlementaire, il faut qu'on cible les bonnes choses.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la ministre.

Mme Vallée : En fait, je relisais le passage de Mme Eliadis en commission parlementaire, du Barreau encore. Parce que j'étais encore sur les commentaires de la collègue, mais c'est drôle, lorsqu'on relit, elle nous disait : «Nous savons qu'il existe des commentaires qui remettent en question la création des mécanismes civils alors qu'il existe déjà des recours dans le Code criminel. [...]un n'exclut pas l'autre. Il y a plusieurs exemples de problématiques qui sont traitées et sur le plan civil et sur le plan criminel sans aucune contradiction. Il y a une complémentarité entre les deux, et nous soulignons que l'existence du mécanisme civil qui est prévu par le projet de loi n° 59 préconise une approche qui, selon nous, est plus souple et qui respecte davantage les libertés civiles. Il faut reconnaître le caractère discriminatoire des discours haineux. Et, encore une fois, c'est une commission de droit qui devrait avoir la compétence d'intervenir. Nous soulignons que le régime administratif éviterait [les] recours [automatiques] au droit criminel tout en favorisant le respect des droits et libertés de la personne. Voilà la force du projet de loi n° 59.»

Il y a des faiblesses dans la mise en oeuvre, puis on les aborde dans les amendements, mais je veux juste ramener ça.

M. le Président, quant à l'amendement de la collègue, il précise... et je crois qu'il risque, malheureusement, d'aller à l'encontre de ce qu'elle souhaite, ce à quoi elle souhaite s'attaquer. Merci à la gentille personne qui m'a refilé une pastille.

Le Président (M. Ouellette) : On lui demandait, à cette personne-là, si elle n'avait pas du Liquid Paper, mais il semblerait qu'elle a juste des pastilles. M. le député de Bourget.

• (20 h 30) •

M. Kotto : Oui, M. le Président. J'ai entendu dire la ministre qu'elle a fait preuve de beaucoup de souplesse. Ce que nous demandions, ce n'est pas de la souplesse, c'est de l'ouverture. Parce qu'on peut être souple, mais sans jamais réellement, concrètement s'ouvrir aux propositions, notamment, d'amendement ici présentées par ma collègue de Taschereau. La ministre a dit : À trop préciser la loi, il peut arriver qu'on la tue. Préalablement à cela, nous parlions de fondamentalisme religieux. À l'évidence, c'est un concept qui ne l'inspirait pas beaucoup. Elle a évoqué, la ministre, qu'on était dans une forme de stigmatisation — je qualifie son propos — et que cela pourrait être une limite de l'application ou de la validation de la loi devant les tribunaux, notamment la Cour suprême.

Et ma collègue de Taschereau a mis de l'avant un autre concept, celui qui indique l'objet qui nous occupe fondamentalement, le djihadisme, qui n'a rien d'une religion, mais reposant sa philosophie ou son idéologie sur l'islam politique. On ne vise pas un groupe de personnes, on ne vise pas une minorité quelconque ici, au Québec. Avec un tel terme, on vise un phénomène, un phénomène complexe qui fédère en Europe et ailleurs à travers le monde où des gens se défendent, en l'occurrence en France, en Belgique, en Tunisie, au Cameroun, au Liban, un peu partout, et on nomme, on nomme ce culte de la mort comme tel.

Et ici, au Québec, je le disais plus tôt, avant la pause, ce culte de la mort est également proféré dans plusieurs endroits au Québec, on le sait. Le renseignement a orienté ses projecteurs là-dessus, et bientôt, comme je le disais, un rapport sera déposé et nous éclairera sur la réalité du phénomène et la profondeur du cancer, entre guillemets. Je n'ai pas vu d'ouverture du côté ministériel, et cela me préoccupe un peu. Est-ce là l'expression d'une posture qui nous indique qu'il n'y a aucune marge de manoeuvre relativement à un travail de collaboration, une collaboration constructive? Je me pose la question.

Par ailleurs, la ministre évoque la possibilité... Ce n'est même pas une possibilité, c'est une certitude. Elle dit qu'il y a d'autres idéologies qui peuvent amener à la violence au Québec. J'aimerais les entendre, ces idéologies qui peuvent mener à la violence dans le cadre du sujet qui nous occupe. Parce que, M. le Président, je le rappelle pour l'intérêt des personnes qui auront la possibilité d'aller lire le verbatim de nos échanges ici — et d'ailleurs c'est un document qui est en ligne, document relatif à la radicalisation au Québec — Agir, prévenir, détecter et vivre ensemble : Plan gouvernemental 2015-2018, ce qui est dit en introduction : «Au Québec, comme dans d'autres États à l'échelle mondiale, la radicalisation menant à la violence représente actuellement une préoccupation de première importance.»

Or, nous savons, ici, de quoi nous parlons, M. le Président. Ici, comme ailleurs à travers le monde, nous sommes aux prises avec le terrorisme, et ce phénomène est nourri à plusieurs échelles dans la perspective de sa finalité. Il y a l'embrigadement, il y a le conditionnement préalablement à l'embrigadement et aussi cette phase de radicalisation qui amène, à la lumière de ce que l'Europe vit aujourd'hui et les mises en garde qu'on nous fait, notamment du côté américain, à la violence, au terrorisme.

Le document, en introduction, nous dit sur la ligne suivante : «Les événements de nature terroriste survenus à Saint-Jean-sur-Richelieu et à Ottawa en octobre 2014 ont montré que le Québec n'est pas immunisé contre des personnes radicalisées qui peuvent, même avec des moyens rudimentaires, perpétrer des gestes violents au nom d'une idéologie extrémiste.» Tout est dit, là, M. le Président, et la finalité de l'exercice qui nous pose ici depuis deux jours — et même plus si on considère les échanges que nous avons tenus en Chambre — est à l'effet de combattre un phénomène. Alors, je n'arrive pas à comprendre les raisons pour lesquelles, du côté ministériel, on est incapable de faire face à la bête, de la nommer. Ici, ma collègue de Taschereau a fait plusieurs propositions, et, à l'évidence, elles sont écartées du revers de la main, ce qui m'amène, évidemment, à penser que la partie ministérielle a déjà une idée arrêtée dans sa démarche.

En introduction toujours, M. le Président, il est dit : «Par ailleurs, le départ de certains jeunes Québécois et Québécoises pour joindre des groupes terroristes islamistes en Syrie et en Iraq ainsi que l'interpellation d'autres jeunes avant leur départ pour joindre ces groupes mettent en relief l'importance, pour tous les acteurs de la société, de se mobiliser afin de prévenir et de détecter les signes de la radicalisation et d'agir pour contrer les situations qui y sont propices.»

La ministre a dit qu'il y a d'autres formes de radicalisation qui peuvent amener à la violence. Je souhaiterais l'entendre, du haut de son expérience de vie au Québec, dans le Québec contemporain, nous dire quelles sont ces formes de radicalisation qui amènent à la violence, à part les événements cités préalablement, notamment Saint-Jean-sur-Richelieu et Ottawa pour ce qui nous concerne. Je pourrais, par extension, citer Paris, Beyrouth, Ankara, Fotokol, Tunis...

Une voix : Bamako.

M. Kotto : Bamako. J'aimerais l'entendre là-dessus, M. le Président.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la ministre.

Mme Vallée : En fait, M. le Président, je pense que j'ai pas mal fait le tour de la question. Pour ce qui est de l'amendement de notre collègue, on fait état d'une seule et unique idéologie, c'est ce qui, actuellement, est le plus visible, le plus mis en lumière, le plus médiatisé. C'est ce qui, actuellement, retient l'attention planétaire, mais ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas d'autres formes de radicalisme, de radicalisation et de discours haineux, de discours incitant à la violence dans un contexte de radicalisation. Il peut y en avoir d'autres, et nous légiférons non pas seulement que pour contrer... Oui, l'important est de contrer les discours haineux et les discours incitant à la violence, peu importe l'idéologie qui les pousse, dans la mesure où ces discours s'expriment dans un contexte de radicalisation.

Et, M. le Président, je pense que nous avons... Et j'ai démontré ma volonté de travailler en collégialité dans ce dossier-là. J'espère que le député de Bourget ne met pas ça en doute, il peut y arriver des moments où, malheureusement, on ne puisse convenir tous ensemble d'un terme. Pourtant, j'aurais souhaité que nous le puissions, puisque l'objectif, c'est vraiment d'arriver avec quelque chose qui va nous permettre de poser une pierre de plus sur la voie de la... les mesures à prendre pour contrer la radicalisation.

Le Président (M. Ouellette) : M. le député de Bourget.

• (20 h 40) •

M. Kotto : M. le Président, j'aimerais entendre la ministre sur des exemples d'autres idéologies — à part, évidemment, le djihadisme et le fondamentalisme religieux — menant à la violence présentes au Québec. J'aimerais qu'elle nous donne des exemples en dehors de ceux qui nous concernent depuis un bon bout de temps maintenant.

Mme Vallée : On en a, j'en ai fait état. On a les groupes d'extrême droite, on a des groupes néo-nazis. Écoutez, l'hiver dernier, si je me souviens bien, on a fait état dans les médias de propos d'un groupe — et puis, honnêtement, là, je ne l'ai pas à portée de la main — d'extrême droite, je crois, qui avait sévi. Et il y a aussi des groupes néo-nazis, il y a eu des reportages. On en voit, on en a vu, et ils existent. Et, bien honnêtement, les propos incitant à la haine, incitant à la violence tenus par ces groupes-là ne sont pas plus acceptables. C'est une forme d'endoctrinement, c'est une forme de radicalisation.

Et je vous dirais, M. le Président, on est sur l'amendement de notre collègue de Taschereau, moi, je vous ai fait état de mes préoccupations, je vous ai dit que les préoccupations étaient aussi quant au libellé. On a un projet de loi qui doit se lire dans son ensemble. Là, on s'attarde au premier alinéa. L'article 1 comprend, dans sa forme actuelle, deux alinéas. Nous proposons d'en ajouter un troisième. Il doit se lire dans son ensemble. Donc, voilà, c'est...

Le Président (M. Ouellette) : M. le député de Bourget.

M. Kotto : Oui, M. le Président. Si j'ai bonne mémoire, le groupe d'extrême droite auquel fait allusion la ministre est le groupe Pediga, qui est un mouvement qui est inspiré d'un autre né en Allemagne et...

Une voix : ...

M. Kotto : PEGIDA, oui, oui. Par contre, je ne pense pas que l'exercice récemment initié par le gouvernement relativement au phénomène de radicalisation fut inspiré par les exactions de ce groupe-là. Si j'ai bonne mémoire — et je pense en avoir une bonne parce qu'exercée pendant plusieurs années dans un autre métier — c'est Saint-Jean-sur-Richelieu, c'est Ottawa qui, avec les événements dramatiques qui y ont été vécus, ont amené le gouvernement à entreprendre cette démarche.

Force est de constater — et je ne peux pas prêter d'intentions à la ministre ni au parti ministériel — que des exemples d'idéologies menant à la violence ne sont pas à la hauteur — du moins, avec ce seul exemple de PEGIDA — du mal qui ronge nos sociétés aujourd'hui et qui menace de faire tomber notre civilisation. Parce que je le disais tout à l'heure, il s'agit d'une guerre, M. le Président. Et le phénomène de radicalisation en est un qu'on ne peut pas prendre à la légère ou assimiler à d'autres formes de radicalisation hypothétiques parce que ce serait là faire preuve, je dirais, d'un laxisme relatif. Je dis relatif pour atténuer mon propos.

Et cette radicalisation, on le sait... En France seulement, on dénombre 500 jeunes qui se trouvent en Syrie et en Irak aujourd'hui. Au Québec, on en dénombre 40. Et le phénomène, si, d'aventure, il n'est pas adressé, entre guillemets, de façon rigoureuse, et même dans la sphère du débat public, ne peut que générer de l'angoisse, de la peur, de la méfiance. C'est la raison pour laquelle, pour le salut du mieux-vivre ensemble, je dirais, au Québec aujourd'hui, dans l'hypothèse ici dessinée de ne pas nommer un chat un chat, on va, disons, contribuer au malheur du monde parce qu'on a peur de nommer les choses telles qu'elles sont, M. le Président.

J'aime bien échanger avec la ministre, mais je ne pense pas que nous entretenons ici un dialogue constructif depuis le début de cet exercice parce que — sans faire de projection — toutes les propositions d'amendement que ma collègue a déposées sont rejetées, mais sur la base d'un argumentaire qui n'est pas convaincant, sur la base d'un argumentaire qui n'est absolument pas convaincant. Et l'histoire dira, M. le Président... On a un défi énorme à relever avec le terrorisme et ses tenants et aboutissants, et je pense que la sagesse nous impose une démarche claire, tangible, directe, une démarche qui s'oriente essentiellement sur la cible. Mais là, notre cible, je la vois en train de se noyer dans des préoccupations qui n'ont pas du tout la même hauteur au plan de la gravité, au plan de l'urgence.

Mais nous sommes face à un gouvernement majoritaire qui a la liberté et qui a le loisir de faire ce qu'il veut fort de cette majorité, évidemment, et je ne veux simplement pas, M. le Président, avoir le sentiment de perdre mon temps ici. Et, partout en Occident aujourd'hui, on va même un peu plus loin, on ne parle plus de radicalisme, on parle de lutte contre le terrorisme. Il y a du courage de ce côté-là, et je pense, à la lumière de ce que nous vivons comme expérience ici, que nous en manquons, du courage. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la ministre, d'autres commentaires?

Mme Vallée : Vraiment pas.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

• (20 h 50) •

Mme Poirier : Oui, M. le Président. Hier, le Parlement européen a adopté une résolution sur la prévention de la radicalisation et du recrutement de citoyens de l'union par les organisations terroristes. Je ne vous lirai pas la résolution, là, elle a 22 pages. Mais peut-être juste pour se mettre dans le contexte et, surtout, dans le langage de notre collègue européen, je vous lis quelques paragraphes, M. le Président, et on va se comprendre : «Considérant que plus de 5 000 citoyens européens ont rejoint des organisations terroristes et d'autres formations militaires, notamment les rangs du groupe "État islamique", du Front al-Nosra et d'autres organisations[...]; que ce phénomène ne cesse de s'accélérer pour prendre une ampleur considérable;

«Considérant que le terme de radicalisation est désormais employé pour désigner le phénomène selon lequel des personnes adhèrent à des idées, des points de vue et des opinions basés sur l'intolérance et susceptibles de conduire à un extrémisme violent...» Ça, là, c'est la phrase de la ministre. Ce n'est pas compliqué, hein? Il faut reconnaître les choses, là, «de radicalisation pouvant mener à l'extrémisme violent», là, c'est exactement la même chose dans ce paragraphe-là. Mais ça continue, M. le Président.

«Considérant que les récentes attaques terroristes...» Parce qu'eux, ils n'ont pas peur de nommer ça des attaques terroristes en France, en Belgique, en Tunisie, probablement parce qu'ils sont des victimes, alors c'est plus facile, probablement, de se nommer quand on est victime. Et pourtant nous l'avons été à deux reprises, une fois à Saint-Jean, une fois à Ottawa. C'est nos enfants qui sont morts. C'étaient des militaires, je vous le rappellerai. Quand un militaire meurt, c'est toujours un de mes fils qui meurt en tant que tel comme mère de militaire.

Alors : «Considérant que les récentes attaques terroristes en France, en Belgique, en Tunisie et à Copenhague mettent en lumière la menace sécuritaire que constituent la présence et la circulation de ces combattants "étrangers", qui sont souvent des ressortissants de l'Union [...] condamné dans les termes les plus forts ces attaques et s'est engagée à lutter contre le terrorisme aux côtés des États membres[...];

«Considérant que la menace terroriste est importante dans l'Union[...], particulièrement dans les pays[...];

«Considérant que la radicalisation de ces "combattants européens" est un phénomène complexe et dynamique, qui repose sur un ensemble de facteurs globaux, sociologiques et politiques; qu'elle ne correspond pas à un profil unique et touche des hommes, des femmes et surtout des jeunes citoyens[...], qui ont pour point commun le sentiment d'être en rupture avec la société;

«[...]Considérant que le terrorisme et la radicalisation mènent à de nombreux amalgames envers les religions qui entraînent par là même une recrudescence des crimes et des discours de haine motivés par le racisme, la xénophobie ou l'intolérance à l'égard d'une opinion, d'une croyance ou d'une religion; qu'il est essentiel de rappeler que le dévoiement de la religion, et non la religion en tant que telle, est une des causes de la radicalisation;

«Considérant que la radicalisation ne doit pas être associée à une idéologie ou à une religion particulière, mais qu'elle peut toucher n'importe quelle idéologie ou religion...»

M. le Président, et ça continue comme ça, là, pendant des paragraphes et des paragraphes parce qu'eux ont été frappés de plein fouet. Et là, dans les considérants, arrive «valeur ajoutée» européenne dans la prévention du terrorisme. Puis là il y en a à boire et à manger dont, entre autres, l'établissement d'une liste de djihadistes. Alors, ils osent la nommer, eux, la liste des djihadistes.

Alors : «Prévention de l'extrémisme violent et de la radicalisation de terroristes dans les prisons.» Alors, ils prévoient même diviser les terroristes dans les prisons. «Prévention de la radicalisation terroriste sur l'Internet.» Parce qu'on sait que c'est par là qu'elle vient. Je continue : «Prévention de la radicalisation par l'éducation et l'inclusion sociale.» Alors, quand je regarde ça et je regarde le plan, il y a beaucoup de choses qui se ressemblent, mais ils n'ont pas peur de nommer les choses.

Et c'est ça qui me peine, M. le Président, parce que s'empêcher de nommer les phénomènes qui nous attaquent présentement, c'est leur donner de l'espace, c'est faire en sorte que ces phénomènes-là ont, tout simplement, un... C'est presque leur donner — je vais le dire comme il me vient à la tête — une «free ride» en quelque part. Et ça, on ne peut pas admettre ça, M. le Président. On n'a pas le droit de fermer les yeux devant ces choses-là. Et je ne dis pas que la ministre ferme les yeux devant ça. Mais ce que je dis, c'est que de ne pas les nommer, c'est ça que ça veut dire. Et, là-dedans, il y a toutes sortes de demandes, entre autres d'essayer de participer à l'effort de traçabilité des flux financiers — parce qu'on  sait qu'il faut financer ça, cette guerre-là — de s'opposer... Et on demande à tous les Parlements membres du Conseil de l'Europe, justement, d'adopter ce plan de radicalisation, et c'est Rachida Dati, la députée européenne, qui a présenté ce plan et qui en a été la marraine. Très fière que ce soit, d'ailleurs, une femme qui l'ait fait.

Alors, M. le Président, ce que mon collègue amène au niveau du fait de dire que le djihadisme est... Et je veux juste reprendre le texte parce que la ministre a dit : On ne veut pas stigmatiser... Mais ce n'est pas le bon mot, ce n'est pas le mot qu'elle a dit, elle ne veut pas isoler seulement qu'un phénomène. On ne l'isole pas dans la proposition, là, on dit les mots «s'exprimant au nom du djihadisme ou dans un contexte de radicalisation». La porte est grande ouverte à toute autre chose, on vient juste nommer.

Et j'ai comme l'impression qu'on a une peur de vouloir nommer les choses. On n'a pas voulu nommer «fondamentalisme religieux», on ne veut pas nommer «djihadisme». C'est ça, le problème. Est-ce qu'on a peur de se dire que c'est ça, le problème? Est-ce qu'on pense que ce n'est pas ça, le problème? Si ce n'est pas ça, le problème, présentement, qu'on nous le dise. Mais le discours haineux qu'on a présentement devant nous, c'est lequel? C'est, entre autres, celui du djihadisme. C'est, entre autres, celui du djihadisme et celui de la radicalisation menant à l'extrémisme violent. C'est de ça dont on parle. C'est de ça dont tout le monde parle présentement sur la planète. Les gens parlent tous de ça. J'ai comme l'impression qu'il y a juste nous qui avons peur d'en parler.

Alors, M. le Président, je veux juste retrouver mon petit lien que je m'étais trouvé tout à l'heure. S'il peut se charger... Notre Internet n'est pas vite dans la salle. Alors, on a, au Parlement européen, depuis des semaines, travaillé sur, justement, une stratégie commune pour lutter contre la radicalisation de jeunes citoyens européens. C'est là-dessus qu'ils ont travaillé. Mais ils ont inclus à l'intérieur de cette stratégie-là, et c'est ce qui a permis aujourd'hui l'adoption d'une résolution non législative dans leur cas parce que c'est le Parlement européen puis que ça doit aller dans chacun des Parlements pour être concrétisé... Bien, ils ont établi une stratégie globale de lutte contre l'extrémisme appliquée en particulier dans les prisons, en ligne et par le biais de l'éducation et l'inclusion. Ça a été adopté à 548 voix contre 110 — c'est quand même pas pire — au Parlement européen.

Alors, le Parlement propose d'établir une liste noire européenne des djihadistes et des djihadistes terroristes présumés. Il ajoute qu'il est indispensable de parvenir à une définition commune des combattants étrangers afin de pouvoir les poursuivre pénalement à leur retour dans l'Union européenne. Il demande aux États membres de faire en sorte que tout combattant étranger soit soumis sous contrôle judiciaire et, si nécessaire, placé en rétention administrative à son retour en Europe jusqu'à ce que les poursuites judiciaires requises soient engagées.

Nous, on veut circonscrire les discours haineux. Eux, ils veulent attraper les personnes. C'est ça, la différence. Mais on parle du même monde. Nous, quand on a des personnages qui viennent chez nous... Rappelons-nous la résolution que nous avons adoptée ici, au Parlement, en 2011. Nous avons adopté une résolution pour interdire... et pour demander au Canada de ne pas admettre en sol canadien deux personnages qui venaient de tenir des propos homophobes et surtout des propos inadmissibles au niveau des religions, un propos qui venait nous vendre la charia.

Et pourtant ici, en cette Chambre, on se rappellera, une de vos anciennes collègues, M. le Président, Fatima Houda-Pepin, nous a tous convaincus de voter pour une motion pour interdire la charia. Elle nous a tous convaincus de nous mobiliser contre Marion Boyd, en Ontario, qui faisait la promotion de la charia et qui était même en train de convaincre les parlementaires ontariens d'aller de l'avant. Imaginez, l'Ontario aurait passé à la charia. Imaginez, c'est incroyable, on a de la misère à penser à ça. Parce que le but est de, justement, venir nous fragiliser dans nos lois et venir prendre de l'espace dans nos droits. C'est ça que veulent faire les djihadistes. Ils utilisent notre Charte des droits et libertés pour venir fragiliser notre démocratie, c'est ça. Puis, si on n'est pas capables de se dire ici que le but de ces gens-là, c'est de faire de l'occupation du territoire, là, bien, je pense qu'on est dans le champ. C'est ce qu'ils veulent, occuper le territoire tout doucement. Le temps n'est pas important, ça prendra le temps que ça voudra.

 (21 heures) • 

Ça va prendre le temps que ça voudra. Mon collègue disait : Nous sommes en guerre depuis longtemps. Oui, c'est vrai. On a l'impression qu'on ne voit rien, mais c'est ça qui se passe. Ils ont le temps devant eux. Ils ne sont pas dans une question d'il faut faire ça pour hier. Pas du tout, oublions ça, ils sont dans une dynamique de prendre le temps de s'installer, de se multiplier, d'occuper du territoire. Le fait de porter des signes religieux, ça fait un ancrage dans le territoire, ils marquent leur territoire. C'est de ça qu'on parle.

Et cet islamisme radical, qui n'est pas la religion pratiquée par les musulmans de façon correcte, de façon dont ils doivent la pratiquer — qui n'est pas de nos affaires, là — ce n'est pas de cette pratique-là dont on parle. On parle de ceux qui se font endoctriner. On parle de ceux à qui le message est adressé et qui sont des personnes qui acceptent ce message et qui acceptent ce message du djihad d'aller combattre au nom d'un dieu quelconque, au nom de valeurs quelconques. C'est ce message et c'est ce discours haineux que l'on veut arrêter. Mais ce discours haineux s'appelle le djihad présentement... il s'appelle le djihadisme.

Et ne pas vouloir le nommer, bien, c'est de faire l'admission qu'on accepte, on accepte que ces gens-là continuent leur propagande haineuse, continuent d'endoctriner nos jeunes, continuent d'endoctriner des gens. Et c'est de ça dont on parle. Malheureusement, certains ne veulent pas voir la vérité. Certains ne veulent pas voir que nous sommes en état de guerre. Parce qu'on ne la voit pas, la guerre, là, elle est bien plus intelligente, elle est bien plus raffinée, elle est en dessous. Mais on fait semblant, elle ne nous attaque pas. Elle n'a pas attaqué vos enfants, elle n'a pas attaqué personne, mais elle est là. Quand on a envoyé nos militaires en Afghanistan, pensez-vous qu'ils ne l'ont pas vue, cette guerre-là? Bien, ils l'ont vue tous les jours. On a des soldats présentement en Syrie. On l'oublie souvent, là, mais on en a, des soldats, en Syrie présentement. Ils la voient tous les jours, cette guerre-là. On a juste à aller sur Internet. Quand on voit des jeunes qui finissent par revenir... Monsieur... comment il s'appelle, c'est M. Koumba, notre monsieur du centre de radicalisation?

Une voix : Okomba.

Mme Poirier : Okomba?

M. Kotto : Okomba, Herman.

Mme Poirier : Herman. Herman Deparice-Okomba. Je vous le dis, là, la commission devrait l'entendre. On devrait avoir l'obligation de l'entendre dans cette commission-ci. Il nous a raconté comment se passait le fait de recruter des jeunes, comment ça se passe. Il faut aller voir sur Internet, il y a des vidéos où... À Paris, il y a des services d'aide aux parents pour, justement, limiter... Il me reste trois minutes, ça doit être ça? Il m'en reste cinq, c'est encore plus. Je vais avoir le temps de tout vous dire ce que j'ai à vous dire.

Non, mais j'ai comme l'impression qu'on fait semblant, là, que ça n'existe pas, tout ça, là. Il y a des mères qui sont paniquées présentement. M. Okomba, là, reçoit des téléphones de parents qui sont paniqués parce qu'ils voient leur fille se couvrir du jour au lendemain, qui se met à lire le Coran, qui se met à faire la prière cinq fois par jour et qui, comme par hasard, demande son passeport. Ah! regarde donc ça, petits signes, et là le parent dit : Je fais quoi avec ça? Je fais quoi? Bien, il ne peut pas rien faire le parent, il ne peut pas faire grand-chose, à part que d'appeler ce centre-là, puis ce centre-là, appeler la police pour voir qu'est-ce qui s'est passé autour de cette jeune personne là, comment on l'a atteinte, comment on a fait pour atteindre cette personne-là. Et ça, c'est le discours haineux. Et, si le discours haineux n'est pas aussi clair que... et de le nommer comme il le faut dans ce projet de loi là, bien, on ne pourra pas protéger ces jeunes-là qui subissent le discours haineux, malheureusement.

Alors, M. le Président, la ministre nous dit : Il faut regarder l'article 1 dans son ensemble, on va finir par en parler, des préceptes religieux, etc. Mais moi, je vous le dis, c'est au premier alinéa que ça se passe. C'est au premier alinéa qu'on nomme les choses. C'est au premier alinéa où on parle de radicalisation, et il faut absolument nommer. On essaie plusieurs mots depuis le début, le fondamentalisme, le djihadisme. On peut être très créatif, là, mais il va falloir se rendre compte qu'il faut nommer les choses.

Alors, M. le Président, moi, je demande absolument à la ministre, là... On va finir tout à l'heure nos travaux un petit peu plus tard, il nous reste encore 1 h 30 min, là. Moi, j'aimerais ça qu'on ne passe pas encore 1 h 30 min à faire du vocabulaire pour nommer les vraies affaires. Parce que, sinon, je vais être obligée de vous refaire exactement ce que je viens de vous faire, là, puis de nous rappeler qu'on est en guerre, mais qu'on l'oublie puis qu'on pense que ce n'est pas vrai. Merci.

Le Président (M. Ouellette) : M. le député de Bourget, je sais que Mme la députée de Montarville va avoir un commentaire. Si vous voulez permettre à la députée de Montarville...

M. Kotto : Ah! je permets, j'ai été bien éduqué, M. le Président.

Le Président (M. Ouellette) : Non, je ne vous prête aucune bonne intention, M. le député de Bourget, mais je permettrais à Mme la députée de Montarville pour vous laisser prendre votre souffle, M. le député de Bourget... Mme la députée de Montarville.

Mme Roy (Montarville) : Merci beaucoup. Moi, je suis l'ordre de la procédure, là, vous me dites quand parler. J'aime encore ce sous-amendement, je le dis aux collègues de l'opposition officielle, parce qu'on y voit le mot «djihadisme», tout comme j'aimais le mot «fondamentalisme religieux». Mais, tout comme j'aimerais le dire également pour les gens qui nous écoutent, mais ne nous voient pas, malheureusement, que, dès février 2015, il y a plus de 10 mois, nous avons fait un point de presse, nous nous sommes levés en Chambre et nous avons même fait une motion du mercredi où nous disions, justement... et nous implorions la partie gouvernementale d'adopter éventuellement dans son projet de loi des mesures pour contrer l'intégrisme religieux, l'endoctrinement, la radicalisation.

Et je me souviens très bien — et ça me fait chaud au coeur — d'entendre la première opposition dire qu'il faut absolument nommer l'intégrisme religieux, le fondamentalisme, la radicalisation. Parce que nous disions en février 2015, à la Coalition avenir Québec, qu'il fallait, justement, s'en prendre au discours des agents de radicalisation, des prédicateurs autoproclamés, des imams de ce monde radicaux. Nous disions ça, et on nous regardait comme si nous étions des extraterrestres, des radicaux nous-mêmes pour dire des choses semblables, alors que force est de constater que les mois ont passé, que les événements se sont multipliés et qu'on en vient tous à la raison qu'il faut absolument nommer les choses et nommer les problèmes tels qu'ils sont, ne pas avoir peur des mots. Et c'est pour ça que je suis contente de voir que l'opposition officielle se rallie, en quelque sorte, aux propos que nous tenions il y a 10 mois exactement et qu'il faut nommer les choses. Et également il y a des amendements qui s'en viennent où on commence à nommer les choses, mais je poursuis, je signe, il faut être précis. Et précis ne signifie pas exclure, mais plutôt on fait une loi parce qu'il y a un problème, et il faut nommer le problème.

Alors, c'était la raison pour laquelle je voulais intervenir ici, parce qu'en tant que députée, moi, ça m'avait fait beaucoup de peine, ça m'avait blessée de voir dans quelle mesure les collègues, lors de cette motion du mercredi, méprisaient ce que nous disions. C'est tout juste si on ne se faisait pas traîner dans la boue. Parce que, quand même, on a été parlementaire, on a toujours tenu des propos parlementaires, mais on nous prenait pour des illuminés, pour des radicaux parce que nous disions qu'il fallait s'attaquer aux propos des agents de radicalisation, des imams autoproclamés. Ce n'est pas n'importe quel propos. C'est ça, le noeud du problème. C'est ça, la racine du mal.

Et je pense qu'au fil des mois, au fil des événements, les tristes événements que nous avons connus, qui se sont multipliés — et je ne vous les nommerai pas, les collègues de l'opposition officielle l'ont fait abondamment — force est de constater qu'il y a une problématique particulière qui, maintenant, a atteint, ô combien malheureusement, le Québec et le Canada. Nous ne sommes pas à l'abri de ces discours qui montent à la tête de jeunes, de ces agents de radicalisation qui endoctrinent ces jeunes pour une foule de raisons, pour une foule de motifs, mais il faut s'attaquer aux propos avant que le mal n'arrive et avant qu'il ne soit trop tard, avant que ces jeunes partent faire le djihad. Parce que c'est bien ce qu'ils partent faire, les jeunes. Les jeunes du collège Maisonneuve, là, ils n'allaient pas cueillir des fraises, là, ils allaient combattre, faire le djihad, la guerre sainte. Et c'est la raison pour laquelle cet amendement-là est très intéressant lorsqu'on parle d'un contexte, les propos s'exprimant au nom d'un djihadisme. C'est tout aussi juste qu'«intégrisme religieux», que «fondamentalisme religieux», que «radicalisation», qu'«endoctrinement». «Endoctrinement» non plus, on n'en a pas encore parlé, de l'endoctrinement. Me Julius Grey nous parlait d'embrigadement.

Donc, je voulais souligner que je suis ravie de constater que l'opposition officielle a changé de discours depuis février à plusieurs égards au niveau des discours sur lesquels nous devions sévir ou que nous devions empêcher pour, justement, éviter des problèmes. Alors, c'était mon commentaire à ce stade-ci de cet amendement, que je trouve fort agréable et pour lequel nous aurons probablement l'occasion de voter. Merci, M. le Président.

• (21 h 10) •

Le Président (M. Ouellette) : M. le député de Bourget.

M. Kotto : Oui, M. le Président. Juste une petite mise au point fraternelle. C'est qu'à l'époque...

Le Président (M. Ouellette) : À moi?

M. Kotto : Non. Non, c'est relativement aux propos que vient de tenir notre collègue de Montarville. Au moment où M. François Legault lui-même faisait sa proposition lors d'un point de presse, il avait reconnu que sa proposition était trop large et qu'à cet effet on aurait interdit le parti communiste. Donc, on est un peu dans la même approche, là, c'était un peu large. Il n'y avait aucune méchanceté derrière, nous avions une lecture très lucide de ce qui se passait quant au mécanisme qui conduisait nos jeunes, en pleine formation de leur personnalité psychique... qui les entraînait dans les bras des charmeurs religieux fondamentalistes.

Je voudrais, M. le Président, pour inspirer les rêves de la ministre de la Justice cette nuit, rappeler ce que Mme Fatima Houda-Pepin, qui a siégé avec nous de 1994 à 2014... En fait, elle fut d'ailleurs la vice-présidente de notre Assemblée. C'est une personne pour qui j'ai énormément de respect parce que courageuse, très courageuse, qui a toujours nommé les choses comme elles étaient. Elle a dit une chose qu'il faut répéter ad nauseam, elle a dit qu'elle respectait toutes les maisons de Dieu. Elle n'a pas de problème avec Dieu, elle a un problème avec ceux qui se prennent pour Dieu. Et ça, ça indiquait, disons, de sa perspective des choses, le défi qu'elle lançait à ces jardiniers de la haine et du meurtre que nous désignons par fondamentalistes religieux.

Et, M. le Président, je terminerai en disant que refuser de nommer les choses comme elles sont, c'est contribuer à faire des musulmans — des vrais musulmans — des victimes. Ils sont majoritaires, et ces personnes que nous visons dans notre discours sont extrêmement minoritaires, mais très dangereux. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le député de Bourget. Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais : Oui, M. le Président. Écoutez, moi, je remarque que, jusqu'ici, la ministre ne nous a pas nommé les groupes qu'elle visait. Nous, on nomme qui on veut. La ministre nous a parlé de l'époque nazie, nous a parlé de mouvements d'extrême droite qu'on ne connaît pas. Il y a eu, à un moment donné, le mot PEGIDA qui est un des mots... des mouvements d'extrême droite connus. Ils étaient quelques-uns à vouloir faire une manif au mois de mars l'année dernière. Les gens se sont élevés, le maire de Montréal a protesté, nous avons protesté, et la manif est tombée à l'eau, ils étaient trois, quatre. Ça a fini par une manifestation festive des gens antifascistes et anti-PEGIDA dans Le Petit Maghreb, et tout le monde était content parce que, savez-vous quoi, dans le mode actuel de liberté d'expression, la réprobation populaire, le contrediscours a gagné.

Alors, je ne vois pas en quoi le mécanisme n'a pas fonctionné, le mécanisme a fonctionné. Puis, quand il y a des imams religieux qui... il y en a certains qui prônent la radicalisation, à chaque fois on les a dénoncés. Et ce qu'on voulait, ce qu'on veut encore, c'est donner des outils aux municipalités, donner des outils aux commissions scolaires pour qu'ils puissent se débarrasser d'eux et d'elles s'ils viennent dans leurs locaux. Le problème, c'est les centres communautaires aussi.

Mais ça, ça ne règle pas notre problème, l'article qu'on a actuellement. Alors, il y a des jeunes, des fois, qui font des discours... Il y a des discours haineux dans des chansons, on règle ça par la réprobation, qu'on appelle. Mais on ne fonctionne pas en mode : On va vous envoyer en cour. Ça ne marche pas comme ça au Québec, et on n'arrive pas à savoir qui on vise. Nous, on vise le djihadisme comme on visait le fondamentalisme religieux, mais on n'a pas de contre-proposition de l'autre bord, on n'arrive pas à nous nommer qui on vise autre que ce que nous, on nomme. Il n'y en a pas actuellement, là. Les seuls qu'on nomme, c'est nous qui les nommons, mais, à part ça, excusez-moi, là, je ne sais toujours pas qui ce projet de loi vise malgré le temps qu'on a passé, M. le Président.

Le Président (M. Ouellette) : Un dernier commentaire, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve?

Mme Poirier : Non.

Le Président (M. Ouellette) : Nous serions prêts à voter sur le sous-amendement de Mme la députée de Taschereau. Est-ce que le sous-amendement de Mme la députée de Taschereau est adopté?

Mme Maltais : Vote par appel nominal, M. le Président.

Le Président (M. Ouellette) : Vote par appel nominal demandé, Mme la secrétaire.

La Secrétaire : Mme Maltais (Taschereau)?

Mme Maltais : Pour.

La Secrétaire : Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve)?

Mme Poirier : Pour.

La Secrétaire : M. Kotto (Bourget)?

M. Kotto : Pour.

La Secrétaire : Mme Roy (Montarville)?

Mme Roy (Montarville) : Pour.

La Secrétaire : Mme Vallée (Gatineau)?

Mme Vallée : Contre.

La Secrétaire : M. Merlini (La Prairie)?

M. Merlini : Contre.

La Secrétaire : M. Boucher (Ungava)?

M. Boucher : Contre.

La Secrétaire : M. Rousselle (Vimont)?

M. Rousselle : Contre.

La Secrétaire : M. Proulx (Jean-Talon)?

M. Proulx : Contre.

La Secrétaire : M. Ouellette (Chomedey)?

Le Président (M. Ouellette) : Je vais m'abstenir. Donc, le sous-amendement est rejeté. Est-ce qu'on revient à l'amendement de la ministre?

Mme Maltais : On revient à l'amendement de la ministre, je pense.

Le Président (M. Ouellette) : Nous revenons à l'amendement de la ministre.

Mme Maltais : Juste une petite chose. Est-ce que la ministre va nous déposer l'amendement enlevant le «notamment»?

Le Président (M. Ouellette) : Je pense que c'était... Vous m'enlevez les mots de la bouche, Mme la députée de Taschereau, parce qu'effectivement notre discussion était... et le point de Mme la ministre, c'était, effectivement, d'enlever le mot «notamment» et de réaménager la phrase.

Mme Vallée : Bien, en fait, M. le Président, mieux que ça, je vais vous déposer pour la compréhension, parce que je pense que c'est important, je vais vous déposer... On a refait l'amendement, là, en enlevant «notamment», notamment, mais je vais vous déposer... Alors, je vais retirer l'amendement, je vais déposer cet amendement-là, qui est corrigé.

Des voix : ...

Le Président (M. Ouellette) : Effectivement, il faudrait retirer l'amendement qui a été suspendu aussi, qui touchait...

Mme Vallée : Pour les fins de logique et de concordance. Pas de problème.

Le Président (M. Ouellette) : On va suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 21 h 20)

(Reprise à 21 h 31)

Le Président (M. Ouellette) : Nous reprenons nos travaux. Je comprends, Mme la ministre, que vous allez retirer l'amendement que vous nous avez déposé en début de séance cet après-midi qui modifiait le premier alinéa et que vous retirez aussi l'amendement qui avait été suspendu, qui touchait le deuxième alinéa. Et, par souci de compréhension, vous nous introduisez un amendement que vous allez me lire, et après nous aurons la discussion. Parce qu'on a eu des discussions antérieurement sur le «notamment» du premier alinéa, et nous allons terminer la discussion sur le premier alinéa. Donc, je vous propose de me lire le nouvel amendement, Mme la ministre, que vous déposez.

Mme Vallée : Donc, modifier l'article 1 de la loi proposée par l'article 1 du projet de loi :

1° par l'ajout, à la fin du premier alinéa, de «, lesquels peuvent s'exprimer dans un contexte de radicalisation pouvant mener à l'extrémisme violent ou dans un contexte d'intolérance;»

2° par l'insertion, dans le deuxième alinéa et après «publiquement», de «, peu importe les préceptes sur lesquels ils s'appuient, qu'ils soient religieux ou autres, »;

3° par l'ajout, après le deuxième alinéa, du suivant :

«Est un discours haineux, un discours visé au deuxième alinéa qui, aux yeux d'une personne raisonnable, est d'une virulence ou d'un extrême tel qu'il est susceptible d'exposer ce groupe à la marginalisation ou au rejet, à la détestation, au dénigrement ou à l'aversion notamment pour que ce groupe soit perçu comme étant illégitime, dangereux ou ignoble.»

Le Président (M. Ouellette) : Je comprends aussi que vous nous aviez donné le texte tel qu'amendé en rapport avec l'amendement que vous déposez. Nous allons avoir maintenant la discussion sur le premier alinéa, pour lequel vous avez enlevé le mot «notamment», et vous faites un réaménagement dans le premier alinéa.

Mme Vallée : Oui. Bien, le «notamment», je sais qu'il préoccupait un petit peu nos collègues de l'opposition. Et puis il n'était pas nécessaire, donc, à la bonne compréhension du texte, donc on l'a retiré. Et les propos peuvent s'exprimer dans un contexte de radicalisation, qui peuvent mener à l'extrémisme violent ou dans un contexte d'intolérance... Et ça aussi, c'est l'intolérance envers les groupes qui sont visés par l'article 10, qui comportent une caractéristique commune visée à l'article 10.

Je pense qu'on a fait, pour ce qui est de... Parce qu'en fait l'argumentaire est le même que celui que nous avions porté cet après-midi. Il était intéressant de venir préciser le contexte dans lequel les discours s'inscrivaient encore une fois.

Puis là je veux juste un petit peu revenir parce que, tout à l'heure, là, nos trois collègues de l'opposition ont fait leur exposé, puis on laisse sous-entendre qu'on craint de nommer les choses, qu'on a peur. Soyons bien clairs, là, le projet de loi s'inscrit dans un grand plan qui vise un certain nombre de mesures. Ce projet-là vise, oui, à contrer les discours haineux, les discours qui incitent à la violence et vise aussi un certain nombre de mesures qui visent la protection des personnes.

On s'attaque à une problématique de radicalisation qui peut s'inscrire de différentes façons. Notre objectif est d'avoir un projet de loi qui sera solide et qui ne visera pas ou ne ciblera pas exclusivement un type de radicalisation. Bien qu'il soit sur toutes les lèvres actuellement, il existe, et nous le savons, puis je pense qu'on n'a pas à fournir une liste détaillée, dans ce sens que la radicalisation, les propos haineux peuvent s'inscrire dans d'autres contextes que le contexte de l'endoctrinement religieux. Il existe, l'endoctrinement religieux. Il existe, l'endoctrinement idéologique. Cette forme de radicalisme existe, mais il n'est pas exclusif, il en existe d'autres, et je pense qu'il est de notre devoir de poser des gestes qui vont aussi venir barrer la route à toute forme de radicalisme et à toute forme de radicalisme qui va se propager, notamment par la tenue de discours haineux ou incitant à la violence.

Et simple petit clin d'oeil. Parce que le collègue de Bourget m'a prêté des intentions, puis je dois vous avouer, je suis un petit peu déçue. Je suis un petit peu déçue parce que le travail se fait, puis il y a vraiment une volonté d'arriver avec quelque chose, puis d'arriver avec un texte... et de travailler de façon sérieuse. Je ne m'autofilibuste pas, soyez-en certains.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais : Monsieur...

Le Président (M. Ouellette) : Ah! M. le député de Bourget, oui.

M. Kotto : Oui, M. le Président. Je ne saisis pas bien l'attaque frontale de la ministre de la Justice relativement aux propos que j'ai tenus tout à l'heure. Je faisais simplement le point sur le constat relatif à nos échanges. Les efforts, de ce côté-ci, étaient manifestes à l'effet de nommer ce qui est nommable, et, du côté de la seconde opposition, c'était un exercice clair, et mon constat était à l'effet de signifier ce que je voyais de l'autre côté. Il y avait comme une posture, disons, étanche à l'effet de valider dans une approche constructive nos propositions, et c'est ce qui était un peu agaçant. Et je pourrais retourner la pareille à la ministre à l'effet que j'étais déçu par cette posture, là. Pas par elle, mais par la posture. Je comprends le poids d'un caucus relativement à un tel projet de loi, je comprends le poids d'un gouvernement par rapport à un tel projet de loi. Je n'attaquais pas la ministre personnellement, Dieu, entre guillemets, m'en protège. Merci.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais : Bon. M. le Président, je trouve que nos...

Une voix : ...

Mme Maltais : Attendez. Je trouve que nos collègues de la deuxième opposition sont bien... notre collègue est bien patiente. Alors, peut-être qu'elle veut parler maintenant. Ça lui permettra peut-être, c'est ça, d'être payée de sa...

Le Président (M. Ouellette) : ...la récompenser de sa patience?

Mme Maltais : ...d'être payée de sa grande patience.

Le Président (M. Ouellette) : Alors donc, on va récompenser votre patience, Mme la députée de Montarville.

Mme Roy (Montarville) : Trop de sollicitude, merci.

Le Président (M. Ouellette) : On gagne à être connu.

• (21 h 40) •

Mme Roy (Montarville) : C'est beau. Ça va, dans mon cas. Donc, on est toujours... on est sur ce nouvel amendement, ce nouvel article 1, là, avec les trois alinéas. Dans le contenu du premier alinéa, personnellement — je vais parler pour ma formation politique — il y a vraiment des aménagements. On voit que la partie gouvernementale a fait des aménagements pour une tentative de rapprochement. On le sent dans le choix des mots du vocabulaire qui est employé : «La présente loi a pour objet d'établir des mesures de prévention et de lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence, lesquels peuvent s'exprimer dans un contexte de radicalisation...» Nous demandions que le terme «radicalisation» apparaisse. Il apparaît, c'est une bonne chose.

Donc, «dans un contexte de radicalisation pouvant mener à l'extrémisme violent», quand on parle d'extrémisme violent, c'est de tout type d'extrémisme. L'extrémisme religieux peut s'y retrouver également. Donc, il n'est pas nommé, mais il n'est pas exclu. Au contraire, il pourrait être inclus dans l'extrémisme violent ou dans un contexte d'intolérance.

Et, lorsqu'on parle de radicalisation ou d'endoctrinement, ce n'est pas toujours des propos haineux incitant à la violence, mais c'est de l'intolérance aussi, c'est des... Enfin, je reprends, ce sont des discours dans un contexte d'intolérance. Mais, naturellement, je comprends que, pour que la loi s'applique, ils doivent être haineux et incitant à la violence. Mais, dans un contexte d'intolérance — et là je pose peut-être la question à la ministre — quand on parle de contexte d'intolérance, est-ce que le fait, par exemple, de dire que la femme ne peut pas sortir de la maison seule, la femme doit avoir un tuteur, est-ce que c'est un type de propos qui pourrait être couvert? Là, je pose la question dans la mesure où c'est d'une grande intolérance, et d'une inégalité sans borne, et d'un non-respect de l'égalité entre les hommes et les femmes. Donc, est-ce qu'on pourrait l'appliquer à cet égard-là?

Le Président (M. Ouellette) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Bien, tout propos doit être analysé dans le contexte du discours haineux qu'on va valider. Donc, comme je le mentionnais un peu plus tôt, bien qu'inacceptable, simplement dire que la femme n'est pas égale à l'homme, ça ne constitue pas un propos haineux.

Un propos qui amènerait... Puis je réfère au troisième alinéa, où on fait la distinction, puis je réfère aussi un petit peu à l'esprit de Whatcott parce que ce sont ces discours-là, ce sont ces propos-là, ce n'est pas les propos... Le propos choquant qui serait tenu dans un contexte... ou le propos simplement discriminatoire, là, par exemple l'inégalité des hommes... et les femmes ne sont pas égales ou la femme ne peut sortir sans être accompagnée d'un homme, ça, en soi, c'est choquant, ce n'est pas acceptable, honnêtement, mais ce n'est pas un propos haineux.

Ce qui devient un propos haineux et qui pourrait être poussé par l'intolérance, c'est lorsqu'on va isoler une femme, un groupe ou même une religion, si on isole... Par exemple, on isolerait les communautés LGBT d'un côté...Parce qu'on sait que certaines religions s'y attaquent de façon... certaines religions ont une intolérance totale à l'égard de l'homosexualité. Et ça, dans le cadre d'un discours, si on attaque de façon claire et on incite à la haine envers ces groupes-là, ce qui était notamment l'exemple dans Whatcott, à ce moment-là c'est une forme d'intolérance, c'est une forme d'intolérance qui s'inscrit dans... Et le discours haineux s'inscrit dans cette intolérance, cette intolérance qui est aussi de la racine de l'endoctrinement.

Parce que je reviens au triangle que l'on voit de... qui était illustré dans le mémoire de la ville de Montréal. Le principe de la radicalisation qui va amener à la violence, c'est très, très insidieux, puis les discours... Puis je pense même que c'est notre collègue de Montarville qui en avait fait état, c'est que ce n'est pas toujours frontal, là, ça commence tranquillement par un rejet du vivre-ensemble. Alors, à ce moment-là, ce qu'on fait, c'est qu'on va marquer les différences. Ce vivre-ensemble-là, comment on va l'attaquer? Bien, on va l'attaquer en venant isoler des gens en raison de leurs différences. Là, on va commencer, il va y avoir un discours qui va s'articuler autour de ça. On va essayer d'expliquer, de justifier l'isolement de ces gens-là, puis ce discours-là, tranquillement, il va prendre de l'ampleur, il va prendre de la force, et il va devenir plus puissant à l'encontre de ces gens-là, et il va mener éventuellement à des incidents haineux envers ceux et celles qui étaient exclus à la base par le discours lorsqu'on attaquait le vivre-ensemble. Puis, par la suite, ça mène à justifier la violence à l'égard de ces gens-là, à l'égard de ces groupes-là. Et on le voit, c'est un phénomène que l'on constate dans un schéma d'incidents puis de crimes haineux. Alors, les incidents, les crimes haineux ont comme dénominateur commun ce questionnement sur le vivre-ensemble, ce questionnement qui est relatif à la différence de l'autre.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Montarville.

Mme Roy (Montarville) : Je comprends très bien ce que la ministre dit, mais, lorsqu'on lit les autres alinéas... Et je comprends qu'on parle de discours haineux incitant à la violence, mais je voudrais me faire réconforter, en quelque sorte, à l'égard d'un discours qui serait tenu... On va parler encore de la discrimination, surtout l'inégalité hommes-femmes ou la discrimination qui est faite. Vous aviez mis le terme «enseignement» dans l'autre amendement qui a été enlevé, là. Disons que, lorsque des prêches, ou des enseignements, ou un discours qui seraient publiquement diffusés, bon, auraient pour motif de priver un groupe identifié, les femmes, les priver de leurs droits et libertés fondamentaux, de leur dignité aussi, par toutes sortes de stupidités comme marcher en arrière, rester à la maison, se soumettre, et tout ce que vous voulez, là, ce que je comprends, c'est que la loi n'y pourrait rien pour le moment?

Le Président (M. Ouellette) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Parce que la loi sanctionne le discours haineux à l'égard, par exemple, d'une femme, le discours qui incite à la violence. Mais ce type de discours là, il est discriminatoire, certes, et il n'est pas acceptable, mais il ne constitue pas du discours haineux. Et ce que la Cour suprême nous enseigne, c'est que la limite à la liberté d'expression... Et ça rejoint un peu ce que les juristes nous ont dit, c'est qu'il y a des limites à la liberté d'expression, mais ces limites-là s'inscrivent dans un contexte très pointu, et cette limite-là doit être balisée. Dans une société libre et démocratique, on va venir limiter la liberté d'expression non pas en raison du caractère choquant du propos, mais bien en raison du fait que le propos va venir porter atteinte à l'autre, va porter atteinte à la sécurité de l'autre.

Mais je ne veux pas non plus analyser tout ce qui pourrait être soumis éventuellement dans le contexte, ce n'est pas l'objectif de présumer de chaque discours qui pourrait faire l'objet d'une attention. Mais je tiens juste à rappeler que d'ouvrir pour venir sanctionner de façon... un discours qui pourrait aussi être assimilé à un discours sexiste n'entrerait pas dans le contexte parce que... Oui, oui, il y a des religions dans lesquelles on va tenir ce type de discours là, mais on a aussi des gens qui sont simplement ignorants qui tiennent ce discours-là en dehors d'un contexte de religion aussi, là.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Montarville.

Mme Roy (Montarville) : M. le Président, je suis ce que vous dites. Pour que ces discours puissent être sanctionnés, il faut absolument, donc, qu'ils s'inscrivent dans un discours incitant à la violence. Ma question est la suivante : Est-ce qu'enseigner qu'il faut brimer les droits des femmes, mépriser les femmes, brimer leurs droits, brimer leurs droits et libertés, ce n'est pas un discours incitant à la violence? Ce n'est pas une violence que de brimer les droits et libertés de quelqu'un et de demander qu'on le fasse? Est-ce qu'on pourrait l'inscrire là-dedans?

Le Président (M. Ouellette) : Mme la ministre.

• (21 h 50) •

Mme Vallée : Il ne m'appartient pas de juger le discours en question, ce sera... À chaque fois, ce sera à la Commission des droits de la personne et, ultimement, au Tribunal des droits de la personne de prendre les propos, et de les analyser à la lumière de la définition, et voir si le propos vient justement... est considéré comme un discours haineux. Il ne m'appartient pas, aujourd'hui, de prendre quelques mots et hors du contexte. L'analyse qui se fera se fera aussi dans le contexte du discours, est-ce que le discours va amener... Parce que le discours haineux, qu'est-ce que c'est? C'est un discours qui va exposer un groupe de personnes, en raison de leurs caractéristiques communes, au rejet, à la marginalisation, à la détestation, au dénigrement ou à l'aversion, notamment pour que le groupe soit perçu comme étant illégitime, dangereux ou ignoble. Je comprends que c'est bien des mots, c'est bien des concepts, mais c'est dans ce contexte-là que ce sera analysé par le tribunal.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Montarville.

Mme Roy (Montarville) : Oui. Pour poursuivre, donc je comprends qu'il y a un exercice à faire ici pour démontrer que tenter de brimer une femme, par exemple, de ses droits les plus stricts, ses droits et libertés en tant que femme, et de le promouvoir, de le répéter, de l'enseigner, de le diffuser publiquement, il faudrait faire la preuve que ça constitue un discours qui incite à la violence et que c'est une violence en soi que de vouloir brimer les droits et libertés d'une femme.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Bien, il faudra voir le type de discours parce que, là, on y va de... Tu sais, ce que vous présentez, c'est de façon large, il faudra voir le discours en question, là, s'il s'agit d'un prêche, qu'est-ce qu'on retrouve dans le prêche, comment est-ce présenté, quels sont les termes utilisés parce que, parfois, ça va bien au-delà de ça, là, ça va jusqu'à, dans certains cas... Puis je pense qu'on nous en avait cité des exemples en commission parlementaire, non seulement la femme n'est pas considérée comme étant une entité, une personne, mais, en plus, en plus, si elle ne se conforme pas, elle a des sanctions, des sanctions corporelles, des sanctions, ce qui... Et là ça, c'est beaucoup plus clair. Mais il faudra vraiment regarder chaque cas, puis c'est le rôle qu'aura la commission, c'est le rôle qu'aura le tribunal ultimement parce que chaque cas...

Et puis d'ailleurs Whatcott en est une belle illustration, puisqu'ils ont analysé différents types de discours. Parce qu'on avait publié différents pamphlets qui portaient des messages distincts. Certains messages étaient considérés comme des messages haineux, et d'autres n'ont pas été considérés comme des messages haineux. Des messages dérangeants, mais pas des messages haineux méritant d'être sanctionnés. Et c'est cette limite à la liberté d'expression qui vient s'inscrire... Ce sont les paramètres qui ont été donnés parce qu'à un certain moment donné on doit la justifier, cette limite à la liberté d'expression, dans le contexte, et il s'agit des enseignements de Whatcott.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Montarville.

Mme Roy (Montarville) : Merci. Donc, si je vous comprends bien, et ce qui me réconforte, c'est que, lorsque le discours sera clairement incitant à la violence, si on parle d'enseignements, de discours diffusés ou... appelez ça comme vous voulez, mais c'est répété, c'est dit, et il y a des gens qui l'entendent, par exemple, qui incitent à des actes criminels très évidents, tuer les mécréants, tuer ci, tuer ça, bon, là, on pourra sévir. Donc, on pourra sévir sur des prêches, même.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Oui, oui, les prêches sont visés parce qu'on fait référence... au deuxième alinéa, on fait référence aux préceptes sur lesquels vont s'appuyer les discours. Alors, un précepte, c'est un enseignement, c'est... Peu importe le précepte, peu importe l'origine du précepte, religieux ou autre, ce n'est pas plus acceptable. Puis les préceptes, évidemment, c'est un enseignement. Alors, c'était le synonyme, c'est pour ça qu'on a retiré le terme «enseignement» parce que «précepte», c'était plus exact, englobait les enseignements.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Montarville.

Mme Roy (Montarville) : Oui. Je remercie la ministre pour son échange. Je trouve qu'il y a des points là-dessus qui nous aident, et on voit plus précisément où le gouvernement veut aller. Mais je pense qu'on a avancé, on est très loin de la première version du premier pl n° 59, très loin avec cet article. Alors, je vous remercie pour les précisions. Ça complète pour moi pour ce qui est de l'amendement de la ministre.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Taschereau, je vous rappelle, pour les besoins de notre discussion, qu'il y a eu une entente entre les leaders et qu'il nous reste quatre minutes aux travaux que nous avons ce soir. Ça fait que je ne voudrais pas couper votre inspiration, Mme la députée de Taschereau, mais je veux juste vous contexter dans les quelques minutes qu'il nous reste.

Mme Maltais : Merci, M. le Président. Bien, écoutez, il y a une question que je me pose. Nous, on a toujours, dans les amendements qu'on a proposés à la ministre, on a toujours enlevé «lesquels peuvent s'exprimer» parce qu'on trouvait que «lesquels peuvent s'exprimer», il y a un flou. «Lesquels peuvent s'exprimer», ça fait qu'il y en a peut-être qui peuvent s'exprimer, mais peuvent ne pas s'exprimer dans... Tu sais, s'ils peuvent s'exprimer, ils peuvent ne pas s'exprimer. Eh oui! il faut toujours voir le corollaire dans une loi. «Lesquels peuvent s'exprimer», mais ils pourraient aussi ne pas s'exprimer. Ce n'est pas «doivent s'exprimer», c'est «peuvent s'exprimer». Alors, c'est pour ça qu'on disait toujours, nous, «s'exprimant dans un contexte de radicalisation», «des discours s'exprimant dans un contexte de.» Pourquoi est-ce que vous utilisez l'expression «lesquels peuvent s'exprimer»? J'aimerais le comprendre parce que, systématiquement, nous, on a changé cette expression. Il y a sûrement une raison.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la ministre.

Mme Maltais : Vos juristes vont peut-être...

Le Président (M. Ouellette) : Oui, je pense qu'ils sont en consultation, les juristes, sur l'utilisation des mots «lesquels peuvent s'exprimer» avec «s'exprimant», qui est une question fort pertinente d'ailleurs, et probablement que nous aurons une réponse parce que ça s'active en arrière.

Des voix : ...

Le Président (M. Ouellette) : Mme la ministre.

Mme Vallée : C'est que les propos peuvent s'exprimer dans un contexte de radicalisation qui peut mener à l'extrémisme violent, mais ils pourraient s'exprimer dans le contexte de l'intolérance aussi. Dans un contexte d'intolérance, un propos haineux, un propos qui incite à la violence peut s'exprimer là-dedans. L'utilisation du «peut» plutôt que du «doit» ne ferme pas la porte parce que la possibilité... Attendez, c'est juste que j'ai...

Le Président (M. Ouellette) : Ah! Ha! Le télésouffleur vient d'apparaître.

Mme Vallée : Non, j'avais une petite note tout à l'heure... Parce qu'on a une quantité phénoménale de papier. On ne le voit pas ici parce qu'on est hors caméra, mais j'avais vraiment...

Des voix : ...

Le Président (M. Ouellette) : Et vous avez 30 secondes, Mme la ministre, pour nous livrer...

Mme Vallée : Bon. Alors, les tribunaux pourraient interpréter... Si on le prenait, le «pouvant», ça pourrait être plus limitatif que le...

Une voix : ...

• (22 heures) •

Mme Vallée : Oui. «S'exprimant» pourrait être plus limitatif que le terme «peuvent s'exprimer». Et donc, en étant plus limitatif, on pourrait perdre la portée de notre projet de loi dans des contextes et on pourrait donner une défense non souhaitable et non souhaitée dans certains cas.

Mme Maltais : Mais...

Le Président (M. Ouellette) : Réservez vos commentaires pour demain.

Sur ce, après entente avec les leaders, j'ajourne les travaux de la commission sine die.

(Fin de la séance à 22 h 1)

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