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Version finale

31e législature, 3e session
(21 février 1978 au 20 février 1979)

Le mercredi 7 juin 1978 - Vol. 20 N° 112

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude des crédits du ministère de l'Immigration


Journal des débats

 

Étude des crédits du ministère de l'Immigration

(Dix heures dix minutes)

Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission de l'immigration se réunit pour étudier les crédits budgétaires du ministère de l'Immigration.

Les membres de cette assemblée sont: M. Alfred (Papineau), M. Blank (Saint-Louis), M. Bro-chu (Richmond), M. Couture (Saint-Henri), M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Laplante (Bourassa), M. Lefebvre (Viau), M. Marchand (Laurier), M. Martel (Richelieu). M. Bellemare (Johnson), est-ce que vous remplacez quelqu'un? Vous êtes comme intervenant?

M. Bellemare: Non, je suis désigné à la commission de l'immigration.

Le Président (M. Jolivet): Donc, en remplacement de M. Brochu (Richmond), puisque vous êtes intervenant à la commission.

M. Bellemare: C'est M. Brochu qui est intervenant.

Le Président (M. Jolivet): D'accord, cela va.

M. Bellemare: Pour l'Immigration, le Travail et la Main-d'Oeuvre, la Fonction publique, c'est moi.

Le Président (M. Jolivet): Mais, d'une façon ou d'une autre, je dois, pour les besoins...

M. Bellemare: C'est M. Brochu qui était ici l'année passée, parce que j'étais malade.

Le Président (M. Jolivet): Selon les textes que j'ai, M. Brochu est membre et vous êtes intervenant, donc vous devenez...

M. Bellemare: Si je l'avais su, je ne serais pas ici.

Le Président (M. Jolivet): Donc, vous devenez membre, en remplacement M. Brochu pour le début.

M. Bellemare: Comme vous voudrez!

Le Président (M. Jolivet): Je voudrais avoir un rapporteur. M. Lefebvre (Viau).

M. le ministre, vous avez la parole.

Exposé préliminaire du ministre M. Jacques Couture

M. Couture: M. le Président, il me fait plaisir de souhaiter la bienvenue aux rescapés de la nuit dernière. Je voudrais signifier, au départ, que je souhaite que nos travaux à cette commission par- lementaire puissent, pour les uns et les autres, nous sensibiliser davantage aux objectifs que nous devrions avoir en commun d'apporter des interventions intéressantes et efficaces et auprès des candidats à l'étranger, et auprès de ceux qui arrivent ici.

Avant de commencer mon petit exposé, j'aimerais présenter ceux qui m'accompagnent. Je vais essayer de les identifier tous. Vous avez ici M. Martin, sous-ministre, M. Vigneau, M. Cloutier, trois sous-ministres adjoints, M. Fournier, directeur du personnel, M. Miron, chef de cabinet, M. Dion, attaché de presse, M. Barberis qui est membre du cabinet.

M. le Président, j'aimerais profiter de l'étude en commission des crédits du ministère de l'Immigration pour exposer les grandes lignes des politiques que nous essayons de réaliser depuis un an et demi, politiques que nous voulons poursuivre.

En 1978/79, nos priorités sont de commencer à doter le ministère de l'Immigration du Québec des instruments nécessaires à la réalisation d'une politique d'immigration globale et efficace. Cela implique la maîtrise par le Québec de la sélection des immigrants à l'étranger. Cela implique aussi de disposer d'une connaissance du marché du travail qui permette de recruter et d'orienter les immigrants en fonction des capacités d'absorption du Québec en main-d'oeuvre.

Deuxièmement, nous travaillons à doter le ministère de l'Immigration du Québec d'une politique et d'instruments d'information et de communication visant deux objectifs: favoriser les relations entre les groupes ethniques et la communauté francophone du Québec, et favoriser ainsi la connaissance réciproque des uns et des autres, en mettant l'accent évidemment sur les nouveaux arrivés, et aussi, assurer aux immigrants une connaissance, une présence véritable des services gouvernementaux qui leur sont offerts et des ressources communautaires de leurs quartiers.

M. le Président, j'aimerais, au lendemain de la parution du livre blanc de la politique québécoise du développement culturel, citer un passage qui a trait directement aux minorités, aux politiques d'immigration. Je pense que cela peut donner la toile de fond de nos politiques. Dans ce document, volume I, à la page 83, dans le chapitre consacré à la culture québécoise et aux minorités, nous disons ceci: "Depuis 1970, le Québec reçoit chaque année environ 25 000 immigrants. Leur période initiale d'adaptation, environ trois ans, conditionne en grande partie leur mode ultérieur de participation à la vie québécoise. Or, jusqu'ici, le gouvernement s'est peu préoccupé de créer des structures adéquates. "

Je fais un petit commentaire sur cette phrase. Je pense que c'est lie surtout au fait que c'est un ministère qui est assez jeune. Je ne veux pas être injuste pour mes prédécesseurs, il y a eu une amorce graduelle de l'intervention du gouvernement à cet effet. Je ferme ma petite parenthèse et je continue à citer le livre blanc du développement culturel: "À cet égard, les diverses commu-

nautés ethniques ont dû puiser, à même leurs propres ressources, pour des services d'accueil, d'aide, de consultation et d'orientation. Le ministère de l'Immigration a investi tardivement dans ce domaine où il n'occupe guère encore une place importante par comparaison avec les services déjà offerts par les minorités ethniques, en particulier par la communauté anglophone. L'État devra consolider au plus tôt son rôle dans ce domaine. Il représente éminemment la société d'accueil. Le ministère de l'Immigration du Québec s'emploie activement à redéfinir une politique en ce sens. Un principe fondamental l'inspire dans ses activités favorisant l'adaptation des immigrants aussi bien que dans ses relations avec les Néo-Québécois: il vise à éliminer la bureaucratisation. Les préoccupations personnelles, familiales du Néo-Québécois ne doivent pas être sacrifiées à des considérations normatives: règlements, structures, statistiques, procédures, etc. Pour y arriver, les contacts concrets et suivis avec les minorités déjà établies au Québec permettront une authentique insertion des nouveaux venus dans la vie de notre collectivité. "Le ministère de l'Immigration veut utiliser les centres d'orientation et de formation des immigrants, appelés COFI, comme instruments offrant des services au sein même des milieux où vivent concrètement les Néo-Québécois. Les COFI deviendront des centres de service polyvalents couvrant des domaines aussi variés que l'accueil, l'enseignement du français, le service social, l'emploi, les activités socioculturelles, en coordination, selon le cas, avec les ministères et les institutions concernés: centres de main-d'oeuvre, CLSC, centres de services sociaux". Nous y reviendrons tout à l'heure. "Les services offerts devront s'identifier à la réalité des quartiers et des communautés locales qui sont les milieux de vie immédiats des immigrants. Des efforts seront faits pour créer des comités immigrants québécois dans les quartiers, afin de favoriser l'insertion des Néo-Québécois à la société québécoise. Une attention spéciale sera accordée aux travailleurs immigrants qui sont souvent exploités au travail et aux réfugiés qui vivent des expériences douloureuses. Si on considère que les membres des différents groupes ethniques qui habitent le Québec sont au moins 500 000, on comprend l'urgence de leur insertion dans la vie québécoise. Notre projet collectif ne peut pas faire abstraction de ces Néo-Québécois qu'il faut associer à part entière au mouvement historique du peuple québécois vers son plein épanouissement. "Récemment, le gouvernement du Québec a signé une entente importante sur l'immigration avec le gouvernement du Canada. Pour la première fois de son histoire, le Québec assumera ses responsabilités dans la sélection des immigrants en exerçant des pouvoirs décisionnels. En conséquence, le Québec pourra se donner une politique de l'immigration qui reflétera davantage ses besoins économiques, culturels et sociaux. Cette entente montre que le Québec s'intéresse de plus en plus aux immigrants. Aucun immigrant ne pourra venir ici sans avoir eu une entrevue avec un fonctionnaire québécois qui lui aura expliqué la réalité québécoise dans ses divers aspects (la loi 101. etc.). L'immigrant saura à quoi s'attendre et il y a fort à parier qu'ayant décidé de venir chez nous, il s'insérera harmonieusement dans la société québécoise et pourra contribuer à bâtir une société plus ouverte".

M. le Président, j'ai cité ce passage important du livre blanc du développement culturel parce qu'il exprime actuellement la volonté politique du gouvernement québécois en rapport avec les immigrants, les milieux ethniques et le rôle de l'État.

Je vous rappelle, M. le Président, les principes qui, du point de vue québécois, ont été défendus, lors de la négociation de cette entente dont nous venons de parler: l'établissement de ressortissants étrangers au Québec doit répondre à des besoins de main-d'oeuvre et doit aussi contribuer au développement économique et à l'enrichissement socioculturel du Québec, compte tenu de sa spécificité française. Il importe d'assurer une sélection cohérente et harmonieuse des immigrants et des travailleurs temporaires, en fonction des capacités d'accueil économiques, démographiques et socioculturelles du Québec. Le Québec entend se prononcer sur la venue des ressortissants étrangers, de manière à sélectionner ceux qui pourront s'intégrer rapidement et avec succès à la société québécoise.

Le respect des principes de la réunification des familles, la volonté du Québec d'assumer sa part de responsabilités internationales en matière d'accueil humanitaire, notamment envers les réfugiés, ce sont des principes qui, pour nous, sont très importants. C'est parce que ces principes ont été admis par le gouvernement du Canada que nous avons pu en arriver à une entente. Cette entente signée — je vous le rappelle — le 20 février 1978 entrera en vigueur dès que nous aurons défini les critères québécois de sélection et que nous aurons sanctionné ces pouvoirs de recommandation par une loi, c'est-à-dire, M. le Président, que la Loi de l'immigration actuelle ne nous permet pas, de l'avis des juristes, de réglementer l'admission des immigrants, c'est-à-dire la sélection des immigrants à l'étranger.

Nous mettrons tous nos efforts à raffiner les critères québécois de sélection. Cette étape constituera un premier pas dans la préparation à plus long terme d'une véritable loi québécoise de l'immigration, et j'espère, mes chers collègues, que vous aurez la joie de participer à son élaboration et à sa critique, sans doute. Je peux aujourd hui vous dire que la politique du Québec, quant à la sélection des immigrants, sera conçue et mise en oeuvre en vue de promouvoir les intérêts fondamentaux du Québec et en vue de répondre à ses responsabilités vis-à-vis de la communauté internationale, tout en respectant et en cherchant à répondre aussi aux besoins mêmes du candidat à l'étranger. C'est une chose que je répète souvent, je crois, qu'autant on doit sélectionner en vue des besoins d'une société, autant on doit considérer les besoins du candidat et y répondre.

Cette politique s'exprimera dans les critères de sélection — cela va véhiculer nos objectifs — et

fera en sorte que les ressortissants étrangers souhaitant s'établir au Québec à titre permanent ou temporaire soient soumis à des critères qui tiennent compte de leur capacité d'adaptation et en ne faisant aucune discrimination de race, de nationalité, de couleur, de religion ou de sexe. Cette politique favorisera aussi la réunion des familles et le rétablissement des réfugiés et des personnes déplacées ou persécutées. Cette politique facilitera ensuite l'insertion des immigrants dans la société québécoise, compte tenu de son caractère français.

En pratique, tout ressortissant étranger qui souhaite s'établir au Québec devra, au préalable obtenir d'un conseiller à l'immigration du Québec, un certificat de sélection. Un immigrant doit démontrer, à la satisfaction du conseiller à l'immigration du Québec, qu'il répond aux normes de sélection réglementaires fixées en vue de déterminer son aptitude et celle de ses personnes à charge à s'établir avec succès au Québec, compte tenu des capacités d'accueil économiques, démographiques et culturelles de la société québécoise. Ces normes de sélection sont basées sur des critères tels que la formation et l'expérience professionnelle du requérant, la demande au Québec dans sa profession, son âge et ses qualités personnelles, son instruction générale, ses connaissances linguistiques, l'aide qu'il peut recevoir de parents ou d'amis résidant au Québec, les ressources communautaires et la situation de l'emploi à son lieu de destination. Je dois dire que, pour le moment, nous sommes assez avancés dans la définition des critères québécois de sélection. Et nous n'hésitons pas à demander les avis du comité consultatif à cet égard.

Pour finir sur ce chapitre, M. le Président, je dois dire cette année, après avoir vécu la commission parlementaire de l'immigration l'année dernière, qui a été presque historique, où on a fait l'unanimité sur la revendication du Québec à obtenir des pouvoirs dans la sélection des immigrants à l'étranger, je dois dire qu'après un an, la mission est accomplie et je le dois aussi à l'appui de plusieurs membres de cette commission, l'année dernière.

Je veux profiter de l'occasion pour féliciter le Comité consultatif de l'immigration qui a abattu un travail extraordinaire cette année. Le mandat des membres, qui devait se terminer au mois de mars, a été prolongé jusqu'en septembre. Ceci nous permettra de mieux préparer la nomination des prochains membres du comité. Une vaste consultation commencera très prochainement à ce sujet. Le comité consultatif constitue un instrument privilégié des milieux ethniques auprès du gouvernement, les recommandations transmises par le comité ont, en effet, beaucoup influencé nos décisions au niveau du ministère; du colloque sur les réfugiés organisé par le comité consultatif, pour donner un exemple, nous sommes en train de tirer les fondements d'une politique généreuse 3t réaliste envers les réfugiés. Nous savons aussi qu'il y a eu un vaste colloque au mois de juin, année dernière, qui a rassemblé plus de 500 personnes de toutes les ethnies, de toutes les associations possibles et impossibles, je dirais, qui, nous ont tracé les voies d'une politique québécoise de l'immigration.

Le remplacement des membres du comité se fera par rotation progressive. On veillera à ce que, tour à tour, les plus importantes communautés ethniques soient représentées. Le ministre nommera donc les nouveaux membres après consultation. Ces nominations devront respecter les recommandations suivantes — M. le Président, je les énumère, parce qu'elles ne sont pas longues, pour informer les membres de la commission parlementaire des paramètres que nous nous donnons pour la nomination des prochains membres du Comité consultatif de l'immigration — voici les paramètres ou les balises ou les critères pour la nomination de ces membres: Le comité devra dans sa composition, 1) représenter les communautés ethniques les plus importantes au Québec; 2) tenir compte de l'importance des groupes d'immigration récente; 3) être constitué par une majorité de Québécois d'origine ethnique, donc au comité il y aura une majorité de Québécois de nouvelle souche ou de Néo-Québécois; 4) assurer une représentation régionale; 5) prendre en considération l'expérience acquise dans le domaine des relations avec les immigrants; 6) comprendre des spécialistes en démographie ou main-d'oeuvre, par exemple, pour une complémentarité de tous les membres; 7) être constitué par des personnes qui sont reconnues par le milieu et qui ont une certaine disponibilité. Ce sont des recommandations même du comité consultatif sortant, pour la nomination des prochains membres.

Nous avons aussi demandé l'avis du comité consultatif dans l'élaboration d'une toute nouvelle politique d'aide financière. Le montant même des subventions est substantiellement accru de près de $500 000. $500 000 de plus cette année en subventions pour les communautés ethniques, pour mieux inciter les organismes intéressés à l'immigration à poursuivre leur collaboration avec le ministère et leur aide aux immigrants. La philosophie de base, c'est de reconnaître ces groupes ethniques — souvent, ils nous l'ont demandé, je pense que les membres de cette commission en sont très conscients — comme des partenaires de l'État. L'État ne doit pas jouer tous les rôles, ne doit pas les remplacer, il doit identifier ses responsabilités, identifier les responsabilités des communautés ethniques et les aider à les assumer.

Désormais, les organismes susceptibles de bénéficier de cette aide gouvernementale savent mieux à quoi s'en tenir sur les critères qu'ils doivent remplir pour obtenir l'aide souhaitée. La politique d'aide financière du ministère de l'Immigration du Québec vise à promouvoir les objectifs globaux du ministère, à savoir: l'adaptation et l'intégration des immigrants à la communauté québécoise. Par conséquent, les demandes d'aide financière doivent contribuer à l'atteinte de ces objectifs. La politique d'aide financière comporte quatre volets, soit le programme de subventions, le programme d'activités d'adaptation, le programme d'aide contractuelle et le programme des langues ethniques.

Les principaux objectifs de cette politique d'aide financière sont les suivants: 1) établir un réseau d'organismes dont l'action et les services soient étroitement reliés aux différents services et programmes du ministère de l'Immigration du Québec; espèce de prolongement de ce que l'on fait, en les considérant comme des partenaires; 2) rendre efficaces toute action et toute intervention des organismes qui se situent dans le prolongement des actions et des services du ministère de l'Immigration du Québec, c'est ce qu'on appelle le budget de fonctionnement; 3) faire assumer par le milieu les objectifs d'adaptation et d'intégration du ministère de l'Immigration. (10 h 30)

Quelques statistiques suffisent à démontrer l'importance des nouveaux Québécois dans la vie du Québec et l'urgence de leur insertion dans la société québécoise. Le Québec reçoit en moyenne, depuis 1961, 28 000 immigrants par année. Durant les 30 dernières années, 850 000 immigrants ont choisi le Québec. Ceux qui décident de rester chez nous s'installent à plus de 80% dans la région métropolitaine de Montréal.

En 1971, la population dite ethnique constituait 10,4% de la population totale du Québec. On peut évaluer à près d'un demi-million actuellement, et même plus, les membres des différents groupes ethniques qui habitent le Québec. Mais c'est un fait qu'à peu près 300 000 immigrants ont quitté le Québec depuis 1960, après être venus y vivre quelque temps. C'est un fait et je pense que c'est une réalité que l'on doit regarder en face et y chercher des solutions. C'est bien beau de sélectionner des immigrants, de les recevoir, de bien les accueillir, mais s'ils ne restent pas au Québec, je pense qu'on investit pour rien.

Sans entrer dans une étude exhaustive des causes de ces migrations, on peut dire sans risque de se tromper que les fonctionnaires fédéraux qui ont fait la sélection des immigrants dans le passé n'ont pas tenu suffisamment compte des caractéristiques propres du Québec. Grâce à l'entente que nous venons de signer, ce sont des fonctionnaires québécois qui feront la sélection des immigrants destinés à venir s'installer au Québec. C'était à peu près accepté par tout le monde qu'il y avait environ 30% de toute l'immigration sélectionnée auparavant qui ne coïncidait pas avec les besoins de la société québécoise au niveau économique, ou à tous les autres niveaux.

Grâce à cette meilleure sélection et grâce aussi aux qualités de l'accueil en milieu québécois, nous pouvons prévoir que les immigrants qui viennent au Québec — nous l'espérons du moins — puissent s'y installer en permanence. Le ministère veut de plus en plus mettre l'accent sur la qualité de l'accueil, la qualité des interventions sur place, enfin soutenir les immigrants et les communautés d'accueil à jouer un meilleur rôle pour qu'ils s'enracinent dans la société québécoise.

Dans ce contexte, le ministère québécois de l'Immigration a un rôle capital à jouer, tant auprès des membres actuels des groupes ethniques qu'auprès des immigrants à venir. Ce rôle consiste essentiellement à favoriser l'insertion des immi- grants dans la vie québécoise, en les accueillant et en les aidant à s'adapter a un contexte nouveau pour eux. Au cours des dix dernières années — j'aborde une des interventions majeures au ministère que sont les COFI; pour nous, c'est un instrument de choix pour cette insertion des immigrants à la société québécoise — les COFI ont été. pour plus de 30 000 immigrants, le principal créneau de leur intégration a la société québécoise: 30 000 immigrants, c'est quand même beaucoup de monde. À travers bien des aléas et des vicissitudes, ils sont demeurés fidèles à leur mission originale: favoriser l'adaptation des nouveaux arrivants par l'enseignement du français, entre autres.

Sans renier ce but premier, les COFI d'aujourd'hui — et je rejoins ce qu'on disait dans le livre blanc — veulent élargir leur champ d'activités, répondant en cela aux demandes tant des communautés ethniques que des stagiaires. Devant le véritable traumatisme que crée pour l'immigrant le fait de devoir s'adapter à une langue, une culture, voire une civilisation si différente par son régime social, économique, politique, les moyens a mettre en oeuvre sont immenses. De plus en plus conscient de cette situation, le ministère de l'Immigration du Québec a décidé de réorienter l'action des COFI. Bien sûr, ils continueront d'enseigner le français; ils le feront avec des formules beaucoup plus souples qui s'adresseront à une clientèle beaucoup plus vaste. Présentement, les étudiants qui vont aux COFI sont sélectionnés pas les centres de main-d'oeuvre du Canada. Les critères utilisés par ces derniers font que nous ne rejoignons qu'environ 30% de la clientèle potentielle. Pour nous, la clientèle potentielle des COFI. ce sont tous les immigrants qui ne parlent pas français.

Tout en continuant de recevoir cette clientèle, le ministère de l'Immigration du Québec a déjà entrepris des démarches pour rejoindre toute la clientèle. C'est ainsi que des formules très souples: cours du soir, de fin de semaine, de fin d'après-midi, cours pour clientèle très spécifique: mères de famille, travailleurs spécialisés, etc., ont été mis sur pied. Déjà une quinzaine de professeurs libérés de l'enseignement régulier, à la suite de la fermeture de dix classes, sont au travail. Divisés en deux groupes, le premier établit des contacts avec les groupes ethniques, afin de mettre sur pied des formules qui leur conviennent le mieux, tandis que le deuxième élabore les instruments pédagogiques les mieux adaptés à ces personnes. C'est un proramme typiquement québécois.

Progressivement, cette transformation s'effectue. Déjà, des formules ont été mises au point avec la communauté bengali de la rive sud. Des rencontres ont également eu lieu avec des représentants des communautés italienne, juive et tibétaine. On négocie aussi avec la communauté chinoise.

Généralement donnés dans nos différents COFI, ces cours sur mesure seront aussi donnés dans les milieux de vie de quartier ou lieu de travail. On peut prendre, par exemple, des garçons ou des filles de table dans les restaurants grecs italiens ou chinois qui, parce qu'ils sont écrasés par le travail, n'ont jamais eu l'occasion de suivre

un cours de français et ne sont pas capables de le suivre aux heures régulières. On fait un cours sur mesure aux heures qui leur conviennent.

La souplesse de la formule n'a pas manqué d'attirer l'attention des groupes ethniques et les demandes sont nombreuses. À côté de ces nouveaux cours qui sont plus qu'une simple modulation de notre action passée, nous nous employons à développer et à mettre en application l'idée d'un COFI totalement renouvelé.

Déjà, des actions concrètes ont été entreprises. Que l'on songe, par exemple, à l'expérience du COFI de Hull où l'on a pu envoyer en stage de travail tous les finissants du COFI. Suite à ce stage, plusieurs stagiaires ont été embauchés par le commerce ou l'industrie qui les avait reçus; c'est le prolongement de la présence du COFI dans le milieu de travail.

Inutile de préciser que de telles actions ne peuvent réussir qu'avec la participation et la collaboration active de la population et des employeurs. C'est une préoccupation que nous avons de faire jouer au milieu de vie ses responsabilités normales.

D'ailleurs, toute volonté d'aider les Néo-Québécois est condamnée à la stérilité, si elle ne s'appuie pas sur un engagement réel de la population. C'est cette population que le nouveau COFI veut rejoindre en lui ouvrant ses portes et ses services.

Ici encore, il ne s'agit pas uniquement de lointaines orientations, mais de réalisations fort concrètes. Partout où cela est possible, nous offrons, dans les garderies des COFI, des places en nombre égal aux enfants québécois. C'est notamment le cas à Québec et à Hull. Nous mettons à la disposition des groupes organisés du quartier nos salles de réunion pour favoriser l'insertion dans le milieu. Nos étudiants participent de plus en plus à la vie du quartier et aux activités qui l'animent.

Nous avons adopté la formule des petits pas, dont vous avez entendu parler dans d'autres domaines, pas tant par le choix que par nécessité — M. Marchand qui connaît bien Mao a dû certainement lire ses oeuvres là-dessus.

M. Marchand: Je vous le laisse. Vous vous entendez beaucoup mieux avec lui que moi.

M. Couture: Les conversions peuvent être tardives, mais elles existent quand même. ...Donc, choix d'une approche pragmatique qui tienne compte à la fois du vécu des Néo-Québécois et des COFI, choix également d'une volonté de ne pas doubler des services déjà offerts par d'autres organismes publics ou parapublics, nécessité aussi de recycler le personnel traditionnellement affecté à d'autres tâches et d'aménager les locaux en fonction de leur nouveau rôle, parce que, si on ne veut pas faire seulement du français, il faut recycler les professeurs qui seront appelés à oeuvrer dans d'autres domaines.

Nous prévoyons pour le début de l'automne être en mesure d'offrir dans au moins un COFI tous les services d'information, d'accueil, de recherche d'emploi et de service social que l'on retrouve actuellement au ministère dans cette préparation de la déconcentration du ministère, et reprendre dans les COFI certains services qui sont donnés au central.

Mais déjà, au COFI de Québec, nous offrons aux Néo-Québécois qui s'y présentent, qu'ils soient ou pas inscrits au COFI, l'aide d'un conseiller en emploi et d'un agent d'aide sociale en plus de tous les services habituels du COFI.

Certains COFI, notamment ceux à l'extérieur de Montréal, ont développé d'importants liens avec les associations locales, particulièrement pour l'accueil des réfugiés. Nous avons eu une expérience à Sherbrooke où c'est le COFI qui a réalisé l'accueil d'un groupe de réfugiés chiliens.

Dès leur arrivée en terre québécoise, nos services accueillent les réfugiés et les dirigent vers le COFI où le personnel a organisé une opération pour trouver logements, vêtements, etc.

Des accords opérationnels aussi ont été conclus avec les CLSC concernés. Le COFI se veut être ouvert aux Québécois, anciens et nouveaux et, surtout, il se veut le lien de l'ouverture à la solidarité humaine.

Tous ces objectifs que nous cherchons à réaliser au ministère ont, comme toile de fond, deux principes. En premier lieu, on ne pourra pas bâtir le Québec de demain, quel qu'il soit d'ailleurs, sans la contribution de ces 500 000 nouveaux Québécois. Je suis certain d'avoir l'accord de mes collègues la-dessus. Des études confirment, d'ailleurs, l'apport substantiel des immigrants au développement économique du Québec. Dans cette perspective, le ministère de l'Immigration a un rôle d'animation et d'information. Le gouvernement à lui seul ne réussira pas à faire que les nouveaux Québécois se sentent chez eux chez nous. On ne peut pas remplacer l'effort d'accueil et d'ouverture de tous les Québécois. Il faut que l'ensemble des Québécois se sente responsable de l'insertion des immigrants à la vie québécoise. Là-dessus, je dois avouer que nous avons encore du chemin à faire pour que toute la société québécoise participe à cette ouverture pour l'arrivée des immigrants.

Le ministère québécois de l'Immigration va porter aussi une attention particulière aux travailleurs immigrants. On sait que dans les premières années, l'immigrant se fait souvent exploiter au travail et se sent isolé et démuni. Afin de défendre les droits des travailleurs immigrants et d'intervenir auprès des employeurs et des syndicats, un poste de secrétaire délégué auprès des travailleurs immigrants a été créé à cet égard. Il va être annoncé dans les prochains jours. En plus, des gestes précis ont été posés en faveur des réfugiés politiques. À l'occasion de la réception du prix Nobel de la paix par l'organisme Amnistie internationale, j'ai participé à une rencontre avec des responsables québécois de cet organisme auxquels j'ai apporté mon plus entier appui. Une fois de plus, j'ai pu me rendre compte, comme vous autres, des situations intolérables dans lesquelles se trouvent des milliers de citoyens dans le monde

qui sont emprisonnés et torturés à cause de leurs idées politiques.

La présence, parmi nous, d'un certain nombre de réfugiés politiques est un rappel à nos obligations de solidarité internationale. Je pense qu'on ne peut pas se battre pour la liberté ici et les droits individuels sans être préoccupés de la défense de ces mêmes droits et de ces mêmes libertés partout dans le monde et sans faire un effort en conséquence.

M. Marchand: Avez-vous l'intention de vider les camps de Sibérie?

M. Couture: Tous les camps. Afin de coordonner l'ensemble des activités reliées aux réfugiés, un poste de secrétaire délégué aux réfugiés a été créé afin d'établir les liens nécessaires avec les différents organismes publics et privés intéressés tant sur le plan international que national. Pour rassurer mon excellent ami du comté de Laurier, je dois dire que tous nos efforts faits depuis plusieurs mois dans la politique aux réfugiés n'ont fait aucune distinction d'idéologie politique. Pour moi, les réfugiés, quels qu'ils soient, de quelque pays qu'ils viennent, sont des victimes avant tout. Vous en avez la preuve dans les chiffres qu'on pourra vous donner des réfugiés qu'on a fait venir, autant du Cambodge, du Chili, des pays d'Europe de l'Est ou de n'importe où ailleurs au monde. Là-dessus, on s'appuie uniquement sur la définition et les recommandations du Haut-Commissariat des Nations-Unies pour les réfugiés.

En tenant compte de nos objectifs et de nos priorités, 18 nouveaux postes ont été créés au ministère: 12 postes en raison du développement des services à l'étranger nécessité par le rôle important du Québec dans la sélection des immigrants, suite à la récente entente; 2 postes à la direction de l'adaptation pour développer l'accueil aux immigrants, principalement, à Dorval; 2 postes à la direction des communications, en raison de l'accent que le ministère veut apporter au travail de cette direction dans l'information sur les services offerts; 2 postes au secrétariat en raison de l'intérêt du ministère, que j'ai souvent rappelé, envers les réfugiés et les travailleurs immigrants.

Comme on le voit, les nouveaux effectifs s'expliquent principalement par les retombées de l'entente et par les nouveaux objectifs. Les fonctionnaires du Québec à l'étranger joueront un rôle décisif qui contribuera à valoriser l'importance du Québec à travers le monde et sa volonté ferme de participer à la vie internationale. J'ai pu me rendre compte, lors de mon récent voyage en Europe, des possibilités très intéressantes qui s'offrent désormais à un gouvernement québécois qui, pour la première fois de son histoire, assume des responsabilités réelles dans la sélection des immigrants. À cet égard, entre autres, au Portugal, en Italie, surtout, c'est un problème qui les concerne davantage, et j'ai obtenu des accords de principe avec les gouvernements de ces pays pour, qu'avant même l'arrivée, la venue des candidats en territoire québécois, on les prépare sur place, on les informe et on leur donne les rudiments de langue française.

(10 h 45)

Je tiens, en terminant mes remarques préliminaires, à souligner le travail remarquable accompli par les fonctionnaires de mon ministère — il y en a plusieurs autour de moi — qui sont en bonne partie responsables du bilan que je crois très positif de la dernière année et que je viens rapidement de vous faire, en espérant que vous voudrez vous associer a ces orientations.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Saint-Louis.

Remarques de l'Opposition

M. Harry Blank

M. Blank: Ce sera relativement bref, voyant qu'on a déjà passé une grande partie de cette journée en session, avec quelques heures de repos, nous sommes ici pour discuter au meilleur de notre capacité, à ce moment-ci, les crédits de...

M. Marchand: On a donné la chance au ministre de se reposer.

M. Blank: C'est vrai, le ministre a pu se reposer.

M. Couture: II travaillait, la nuit passée aussi, le ministre.

M. Blank: Je constate que, l'an passé, a l'étude des crédits, le bébé du ministre était l'entente qu'il avait conclue avec le gouvernement fédéral au sujet de la sélection des immigrants. C'était le projet principal l'an passé. Comme il l'a dit, nous, dans l'Opposition, sommes tellement heureux aussi qu'on ait cette entente qui donne un certain droit au Québec dans la sélection des immigrants, mais je veux que le ministre soit franc: ce n'est pas un droit absolu. Le fédéral a encore un mot à dire dans la sélection, voyant qu'il n'y a pas encore de frontière entre l'Ontario et pas de frontière entre le Nouveau-Brunswick. Nous sommes encore — je pense qu'on le restera pour longtemps...

M. Couture: Pour un certain temps.

M. Blank: ... chacun a droit à son opinion à cette table, mais, jusqu'à ce moment, on doit vivre avec la situation actuelle. Mais essayer de créer une situation où le monde va penser que c'est le Québec seul qui fait le choix des immigrants, ce n'est pas vrai, et le ministre est au courant que le fédéral a un mot à dire, et je ne suis pas certain que ce ne soit pas le mot de la fin. Mais ce n'est pas ce à quoi je m'oppose. Je ne m'oppose pas à ce programme, parce que chaque région du Canada est un peu différente de l'autre, et le Québec, c'est différent. Les immigrants doivent le savoir avant de venir; quand ils sont ici, il y a une différence, et ils doivent le savoir.

La seule chose que je constate, partout, dans les discours du ministre, et même quand il a lu le livre blanc, il a mis complètement de côté le fait anglais. On ne peut pas mettre de côté un million de la population du Québec et dire que ça n'existe pas. On est entouré par les anglophones partout au Canada et aux États-Unis. Essayer de cacher ça aux futurs immigrants ou à ceux qui sont ici, je pense que ça fait tort à ces gens-là, parce que, comme tout le monde le sait, la langue principale au Québec, c'est le français, mais l'anglais est là aussi et on ne doit pas mettre l'anglais complètement de côté. Ce sont les remarques que je fais à ce sujet.

Sur la question des réfugiés, il n'y a personne qui peut s'opposer au fait de faire venir au Québec ou au Canada des gens qui sont de vrais réfugiés. À la suite des remarques de mon confrère, le député de Laurier, le ministre a répondu qu'au Québec, dans le programme possible, en ce qui a trait aux réfugiés, il n'y a aucune question d'idéologie, de race, de couleur, etc. C'est très beau d'avoir ces mots, mais les faits actuels... C'est vrai qu'on a des réfugiés du Cambodge et du Vietnam ici actuellement, mais ce n'est pas le Québec qui les a fait venir ici. C'est le fédéral qui a fait venir ces gens ici. Par contre, dans les discours du ministre ou du ministère de l'Immigration, on trouve toujours les mêmes réfugiés, les Chiliens, les Argentins et des gens semblables. On n'entend pas parler des gens qui sont dans les camps de Sibérie, des blancs qui se sauvent de la Rhodésie, des Portugais qui sont partis de Mozambique et d'Angola. Une chose aussi est très curieuse: Le ministre veut avoir des immigrants qui peuvent s'intégrer à la culture et à la société québécoises. Il y a des réfugiés en grand nombre dans une partie du monde à qui s'applique ce critère. Il y a les Vietnamiens qui sont dans des camps de la Thaïlande, des Philippines et de la Malaisie et d'après les dernières nouvelles que j'ai vues à la télévision la semaine dernière, c'est difficile de remplir le Canada en ce moment. Je pense qu'il y a un quota de 50 familles par mois. C'est difficile de trouver ces 50 familles. Je dois dire que c'est très difficile d'avoir 50 familles vietnamiennes et de les faire venir au Canada. Pourquoi le ministre de l'Immigration du Québec n'est-il pas là? Ce sont des gens qui sont élevés dans la langue française, dans la culture française. Est-ce qu'il n'y a pas....

M. Couture: Vous voulez que je réponde tout à l'heure, je suppose, parce que j'ai des réponses.

M. Blank: Oui. Je fais des constatations. Peut-être qu'il y a des choses que je ne sais pas. Je sais que le Canada, en ce moment, sans aucune autre entente, veut avoir 50 familles vietnamiennes au Canada, chaque mois. Mais pour une raison ou pour une autre, elles ne viennent pas, parce qu'elles ne sont pas au courant qu'il y a une place au Canada, au Québec, où elles peuvent s'intégrer facilement. Est-ce que c'est parce que cela ne fait pas partie de la pensée politique du ministre? Je ne le sais pas. Mais je trouve très curieux de voir qu'il n'y a pas de représentant de la province de Québec dans ces camps de réfugiés pour faire venir ces gens-là, qui, comme je le disais, sont déjà à moitié dans notre communauté française.

M. Couture: Est-ce que pour les Vietnamiens vous voulez avoir une réponse tout de suite?

M. Blank: Oui, si vous voulez.

M. Couture: De fait, quand vous dites que c'est seulement le Canada qui sélectionne les réfugiés, c'est vrai dans un sens. Mais ce qui se passe actuellement, c'est que chaque fois qu'il y a une sélection de réfugiés ou une arrivée possible de réfugiés de l'étranger, le ministre fédéral nous en informe et même le comité mixte. Suite à l'entente, ce comité va être extrêmement important. Toutes les informations vont aller là. Maintenant, chaque fois qu'il y a des réfugiés qui doivent venir, on nous en informe et alors on exprime notre souhait d'en recevoir tant ou tant.

Par rapport aux Vietnamiens — parce que je veux vous laisser parler, je vais seulement prendre ce point-là — pour les 50 familles, le Québec a dit: On va prendre quinze familles sur les 50. Quinze sur 50 par rapport au Canada, c'est quand même une bonne proportion, comparativement à notre population dans tout le Canada. Alors ces quinze familles... Chaque fois qu'il vient des familles vietnamiennes, cela nous donne 30% du mouvement des réfugiés vietnamiens qui viennent. Vous avez raison, elles ont des difficultés à venir. Je peux vous informer à ce sujet-là que j'ai reçu la visite, il y a trois jours, du consul américain à Québec, qui a déjà fait partie de l'organisme américain au Viêt-nam même.

M. Blank: II a déjà été consul au Vietnam.

M. Couture: Oui, il connaît très bien la situation et il est venu se plaindre à moi que cela n'allait pas assez vite et il offre sa collaboration au gouvernement du Québec pour faciliter l'arrivée d'Indochinois. Je lui ai dit qu'on était tout à fait ouvert là-dessus. Cela répond à votre question?

M. Blank: D'accord. Aussi, je me pose une question à ce stade-ci. Est-ce que le Québec est vraiment...

M. Couture: M y a aussi quinze familles cambodgiennes qu'on reçoit chaque mois. Quinze familles vietnamiennes et quinze familles cambodgiennes, ce qui fait trente familles d'Indochinois.

M. Blank: Quand le Québec veut sélectionner des réfugiés, est-ce que le Québec est en position de vraiment faire des recherches sur les antécédents des réfugiés, parce qu'il y a des réfugiés et il y a aussi des réfugiés entre guillemets. Parfois c'est très dangereux.

M. Couiure: Parlez-vous d'un général qui est venu à Montréal?

M. Blank: Oui, je parle du général. Voilà un exemple. Avec tout l'appareil fédéral, l'Interpol et tout cela, on n'a pas découvert ses antécédents avant son arrivée ici. Comment le Québec va-t-il découvrir les antécédents de ces gens-là, sans avoir tous ces appareils? Est-ce qu'il va encore avoir besoin du soutien fédéral ou international? Je pense qu'à ce moment-ci, la Sûreté du Québec n'est pas membre directement de l'Interpol pour savoir exactement qui vient.

M. Couture: Voulez-vous un commentaire là-dessus?

M. Blank: D'accord, si vous voulez.

M. Couture: Justement, vous parliez tout à l'heure des limites de l'entente, nous en sommes extrêmement conscients. Pour l'admission, nous n'avons aucun mot à dire. Nous pouvons sélectionner un certain nombre d'immigrants, c'est la raison pour laquelle nous sommes souverainistes d'ailleurs. Mais le Canada, de fait, par l'admission, par l'émission du visa, fait le contrôle au nom de la sécurité nationale. C'est seulement le gouvernement fédéral qui a juridiction, qui est équipé au niveau des instruments à cet égard, sauf que nous, par rapport à cette fameuse sécurité nationale, nous commençons à nous interroger. Vous savez que le ministre de la Justice s'interroge. Quand on connaît le comportement de la GRC au cours des dernières années, cela nous préoccupe.

Pour la sélection des immigrants, c'est mon intention d'avoir des discussions viriles, pour employer une expression connue, avec les membres du gouvernement fédéral, pour qu'on partage, je ne dis pas qu'on fasse nous-mêmes une évaluation de la sécurité nationale, mais qu'on partage certaines informations et qu'on nous prouve que, quand ils refusent tel ou tel réfugié, ils ont des raisons sérieuses de le refuser. Parce que je pense que, s'ils acceptent le principe que le Québec doit choisir ses immigrants et ses réfugiés, ils doivent reconnaître — c'est dans la même cohérence, dans la même ligne de pensée — au Québec la maturité nécessaire pour faire lui-même ses évaluations sur la sécurité de ses individus.

M. Blank: D'accord. C'est tout ce que j'ai à dire sur la question des réfugiés. L'autre bébé du ministre, cette année, c'est l'extension des activités des COFI. Il semble, d'après ce qu'il a dit et ce qu'il a lu dans le livre blanc, qu'il veut faire des COFI les CLSC des immigrants. Il y a une phrase dans le livre blanc qui m'a frappé; il veut qu'avec l'utilisation des COFI, les immigrants s'intègrent au mouvement historique du peuple français, du peuple canadien-français. C'est là que je trouve qu'il y a un grand risque.

M. Couture: Ce n'est pas tel quel.

M. Blank: Oui, lisez-le.

M. Couture: Ce n'est pas canadien-français.

M. Blank: Pas canadien-français, d'accord...

M. Marchand: Le peuple québécois.

M. Blank: ... le peuple québécois français.

M. Couture: Les Québécois, c'est tout le monde, c'est vous et moi.

M. Blank: Non...

M. Couture: Ce sont les Anglais aussi.

M. Blank: Ce n'est pas ça que vous devez dire, c'est exactement ça... Mais ça, j'ai peur...

M. Couture: Voulez-vous que je vous le cite exactement, pour les fins du journal des Débats? Le livre blanc dit ceci: "Notre projet collectif ne peut pas faire abstraction de ces Néo-Québécois qu'il faut associer à part entière au mouvement historique du peuple québécois vers son plein épanouissement". Et le peuple québécois, comme vous le savez, ça comprend tous les Québécois...

M. Blank: Mais la phrase...

M. Marchand: ... mouvement historique...

M. Blank: ... cette phrase-là veut dire seulement une chose...

M. Couture: La participation de toutes les communautés, même les anglophones, au mouvement historique des Québécois.

M. Blank: Est-ce que je peux donner mon interprétation?

M. Marchand: C'est quoi, le mouvement historique?

M. Blank: C'est exactement ça.

M. Couture: C'est la continuité d'aspiration; l'Union Nationale, en 1936, à un moment donné...

M. Blank: M. le Président, est-ce que j'ai la parole?

M. Couture: ... a débloqué certaines choses. Le Président (M. Jolivet): Oui.

M. Couture: II y en a deux qui me posent des questions.

M. Blank: Je ne vous ai pas posé de questions.

M. Bellemare: Ce ne sont plus des discours d'introduction; ce sont des éléments qui vont venir plus tard. Je pense que les questions et réponses qui sont faites présentement...

Le Président (M. Jolivet): J'attendais une intervention, parce que j'ai cru comprendre tout à l'heure qu'on voulait avoir une grande souplesse. Je suis prêt à considérer votre appel au règlement. Que le député de Saint-Louis fasse son intervention sur les remarques générales pour permettre au député de Johnson de faire la sienne ensuite.

M. Blank: D'accord, je vais faire...

Le Président (M. Jolivet): Quitte a ce que le ministre...

M. Blank: Je réitère ma peur sur la question des COFI élargis; c'est qu'on veut les utiliser comme une arme politique pour essayer, comme on dit en anglais, le "brain-wash" des immigrants. J'ai peur qu'il arrive ce qui est arrivé à certains CLSC. Cela a été confirmé par les quatre ou cinq mots que le ministre a lus du livre blanc. On veut utiliser les COFI, non seulement pour aider les immigrants, mais pour essayer de les convaincre de la pensée politique du gouvernement actuel. Je pense que la, on doit "draw the line".

M. Alfred: What? M. Blank: What? M. Alfred: Je n'ai pas compris.

M. Blank: Vous n'avez pas compris? J'ai dit qu'on doit arrêter, à certains endroits, les COFI pour donner les services aux immigrants, d'accord. Mais s'en servir comme une arme politique du gouvernement, c'est une autre histoire. J'ai peur, d'après les discussions du livre blanc, qu'on utilise les COFI à ces fins.

M. Alfred: On va les "québécoiser".

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Johnson.

M. Maurice Bellemare

M. Bellemare: M. le Président, ma participation comme représentant de mon parti me rappelle que c'est l'Union Nationale qui, en 1956, a été, dès le début, le premier parti à penser à un ministère de l'Immigration par une motion faite en Chambre, débattue par M. Loubier, notre ancien chef, et qui a donné les prémices de ce ministère. Il ne faut pas oublier qu'en 1956, il y avait un revers à l'immigration. On constatait, dans le mouvement ouvrier, particulièrement dans nos syndicats, que le gouvernement en faisait trop pour l'immigration. C'est avec beaucoup de courage que Loubier et moi-même avons entrepris de faire cette lutte contre ce mythe qu'on faisait de l'immigration, disant que c'était pour détruire les positions de nos Canadiens, de nos Québécois. On a réussi, je pense, à obtenir, à ce moment-là, l'unanimité de la Chambre. (11 heures)

C'est en 1971 que MM. Lang et Cloutier ont signé les premières ententes fédérales. En octobre 1975, ce sont MM. Andras et Bienvenue qui ont signé d'autres participations à l'immigration. Et ce sont MM. Couture et Cullen qui viennent de terminer ce qu'on a, avec beaucoup de plaisir, lu et relu, l'entente entre le gouvernement du Canada, la collaboration en matière d'immigration et celui de Québec.

Je dois dire que je suis très heureux de féliciter le ministre de cet apport particulier surtout aujourd'hui, dans un état de fait. On reconnaît maintenant certaines juridictions, particulièrement en considération du choix, de la sélection qui doit être faite au début. Je pense que le 20 février 1978 restera dans nos annales politiques un geste fort apprécié. Cela ne s'est pas fait tout seul. On doit rendre hommage à tous nos prédécesseurs d'avoir participé, progressivement, par des bonnes procédures, à en venir à une entente fédérale.

Cela prouve que dans un pays comme le nôtre, il y a moyen de s'entendre sur diverses questions et de rester dans la confédération canadienne, sans prêcher la séparation. Ce qui nous donne des droits, la reconnaissance de certains droits qui nous sont acquis, particulièrement en ce qui concerne les Québécois en particulier.

D'ailleurs, je pense que, depuis 1956, on a admis, dans la province de Québec, plus de 20 000 réfugiés, ce qui représente à peu près 27% des réfugiés politiques. Je pense que c'est une annotation qui mérite d'être soulignée. En étant dans un pays comme le nôtre, le Canada, on participe en même temps à beaucoup de services qui nous sont fournis par l'autre gouvernement, le gouvernement central, mais à cause de sa longue expérience dans la matière, cela fait qu'aujourd'hui, à cause de vos précédesseurs et à cause du travail que vos officiers ont accompli, sous votre juridiction, on en est venu, le 20 février 1978, à une entente remarquable, qui va passer à l'histoire et qui va servir au prochain débat référendaire, pour prouver la nécessité qu'il y a de demeurer dans un pays comme le nôtre.

Une chose est certaine, auparavant, on parlait de Canada, dans l'immigration. Maintenant, on parle de Québec. C'est grâce à ce document. C'est un document qui va demeurer historique, parce que je pense que si c'est possible, dans un domaine comme celui-là, où la juridiction fédérale, en vertu de l'acte constitutionnel, était partagée, qui n'avait jamais été occupée par la province précédemment, maintenant que c'est fait, on voit que la conciliation, que la bonne entente peut régner, sans casser de vitres nulle part et surtout en en bénéficiant largement, au point de vue sélection, au point de vue participation.

M. le Président, je voudrais simplement attirer l'attention du ministre sur deux choses: Le comité consultatif, d'abord. Est-ce que c'est encore M. Bonhomme qui en est le président?

M. Couture: Oui.

M. Bellemare: II y avait quinze membres. Je pense que le ministre nous a fait une déclaration

ministérielle le 16 mars 1977, pour nous déclarer que: Le conseil consultatif de l'immigration a donné lieu à des interprétations que je me dois de rectifier.

Rappelons que selon la Loi de l'immigration, à l'article 9, un comité consultatif peut conseiller le ministre, sur toute question que ce dernier lui soumet, relativement à l'immigration, à l'adoption d'immigrants en nouveaux milieux et a la conservation des coutumes ethniques.

La nomination de ce comité, disait-il, a été préparée avec beaucoup de soin.

Je voudrais savoir du ministre ce matin, si c'est possible, ceux qui vont être changés, dans le comité consultatif, pendant l'année en cours. Je vais nommer les noms et vous me direz, oui ou non, si ces gens doivent demeurer ou non, ou s'ils sont encore là.

M. Couture: Est-ce que c'est votre déclaration préliminaire?

M. Bellemare: Préliminaire, oui, parce que...

M. Couture: Je vais vous dire immédiatement qu'il n'y a rien d'arrêté sur le choix de l'un ou l'autre qui pourrait rester au comité. De fait, c'est mon intention d'en garder le tiers pour assurer la continuité avec les travaux précédents, mais je n'ai pas fait de choix encore.

Si vous avez des suggestions ou des recommandations, vous pourrez toujours m'écrire.

M. Bellemare: Non, c'est que j'ai eu, de la part d'un de ces membres, certaines remarques qui m'ont été faites. Je voudrais, ce matin...

M. Alfred: Un espion. M. Bellemare: Comment? M. Alfred: Un espion.

M. Bellemare: Un espion. Peut-être que cela existait ailleurs qu'ici dans notre province. Vous pouvez peut-être en parler avec connaissance de cause.

Je pense, M. le Président, qu'il reste que, de par l'information que j'ai eue, il ne semblait pas y avoir une certaine unanimité sur certaines questions primordiales. Il y avait de la dissension parmi certains membres qui semblaient ne pas trop se côtoyer.

M. Couture: Cela vous inquiète quand les gens ne pensent pas toujours la même chose? Ici, on ne pense pas tous la même chose.

M. Bellemare: Dans mon parti d'ailleurs, on l'a prouvé à maintes circonstances, par trois grands congrès qui nous ont divisés, c'est possible ailleurs que chez vous.

Mais je voudrais savoir si ce comité consultatif qui sera refait cette année va changer beaucoup de choses, pas seulement chez les membres, mais dans la pensée qu'ils ont de collaborer afin d'établir véritablement ce dont le ministre a besoin, cette information unifiée pour en faire véritablement une législation qui s'adapte aux besoins. Votre loi constitutive, il va falloir que vous la refassiez cette année. Impossible de penser d'y aller autrement, parce que votre loi constitutive n'est pas faite selon les règlements. Je pense que le ministre est bien au courant qu'il s'apprête probablement à présenter à l'Assemblée nationale, avant longtemps, une nouvelle Loi de l'immigration où. particulièrement, toute la réglementation sera contenue. Cela n'est pas dans la loi constitutive. Je pense qu'il y a là un lapsus extraordinaire. Mais, pour revenir au conseil consultatif, j'aimerais savoir si le ministre a été mis au courant de certaines dissensions qui sont apparues à certaines réunions. C'est une question à laquelle pourra me répondre le ministre en temps et lieu.

M. Couture: Pas tout de suite, tout à l'heure.

M. Bellemare: Non, pas tout de suite, d'ailleurs, j'ai d'autres questions.

Il existe un certain pouvoir dans la loi constitutive du ministère qui permet en vertu de la loi à 7000 étudiants étrangers de venir chez nous et de se parfaire au point de vue éducationnel. Cela leur coûte entre $400 et $700 de contribution. Le gouvernement, le ministère affecte $50 millions à ces étudiants. Le ministre pourrait-il me donner un certain aperçu...

M. Couture: Le ministère ou le gouvernement? Le gouvernement.

M. Bellemare: Le gouvernement. M. Couture: Pas le ministère.

M. Bellemare: Le gouvernement reçoit ici 7000 immigrants dans les différentes institutions. Cela leur coûte entre $400 et $700 et cela coûte à la province $50 millions. Ce sont des gens qui viennent chez nous se parfaire, à McGill, à Laval, à Montréal, à Concordia ou ailleurs, et qui retournent chez eux par après sans nous laisser grand-chose, parce que, de ces 7000 étudiants, d'après les statistiques des recherchistes, il n'y en a pas 1% qui restent.

M. Blank: Ils n'en ont pas le droit.

M. Bellemare: Ils n'en ont pas le droit. Ils peuvent s'intégrer, par exemple. Ils ont le droit de s'intégrer, en vertu...

M. Couture: Ils ont un visa d'étudiant, ils n'ont pas de visa d'immigrant.

M. Bellemare: Ils ont un visa d'étudiant, mais, selon la procédure canadienne...

M. Couture: Plus maintenant, d'aucune façon.

M. Blank: Tout le monde en arrière!

M. Bellemare: Le gouvernement va-t-il maintenir ces $50 millions de dépenses encore cette année quand même?

M. Couture: Voulez-vous la réponse tout de suite?

M. Bellemare: Non, ne me répondez pas, parce que j'en ai trop.

Il reste une chose que je voudrais bien savoir. Dans le rapport du Vérificateur de la province... Il y a deux annotations qui me chicotent énormément. Le rapport annuel du Vérificateur général, à la page 1-85, par exemple, il parle des frais partagés. Les comptes à recevoir proviennent de la réclamation faite au gouvernement du Canada, dans le cas du programme à frais partagés et ils sont enregistrés aux livres lorsque la réclamation est envoyée au gouvernement fédéral seulement.

Nous sommes d'opinion, dit le vérificateur que, tant pour l'exactitude que pour l'exercice d'un meilleur contrôle de ces comptes à recevoir, le revenu devrait être inscrit aux livres en même temps que l'on comptabilise la dépense et le compte à payer. Est-ce que le ministre pourrait nous dire si cette recommandation... Est-ce que le ministre a apporté son attention à ce contrôle comptable, oui ou non? Est-ce que c'est resté dans le même état ou est-ce qu'on a fait des efforts pour que ces frais partagés qui sont une réclamation au gouvernement fédéral soient véritablement inscrits aux livres lorsqu'ils sont des comptes à recevoir?

La deuxième chose, c'est que le vérificateur condamne le ministre très vertement sur l'absentéisme de ses employés. Il dit même: "Nous avons constaté de fortes faiblesses au niveau de l'assiduité. À notre avis, tous les employés du ministère de l'Immigration, tant à Montréal qu'à l'extérieur, devraient remplir une fiche de présence au travail ou signer un registre ".

Si le vérificateur s'est rendu compte qu'il y a un manque d'assiduité, soit à Montréal ou soit dans le ministère ici à Québec, c'est parce que cela doit être grave. Le ministre doit sûrement être mis au courant. Ses fonctionnaires, particulièrement, doivent apporter un remède adéquat à cette réglementation le plus tôt possible. Si c'est fait, tant mieux; qu'on nous le dise.

L'autre chose, c'est parce qu'il y a des dépenses imputées dans le budget du ministère qui devraient faire l'objet d'une vérification par la direction du personnel et de la comptabilité. Une personne en autorité devrait contresigner ce document. Le Conseil du trésor a autorisé le directeur général du système du ministère de la Fonction publique à signer les demandes de paiements relativement aux traitements et aux autres allocations afférentes. Ces dépenses imputées dans le budget du ministère devraient faire l'objet d'une autre vérification par la direction du personnel et de la comptabilité. Une personne en autorité devrait contresigner ce document. C'est une autre question à laquelle le ministre pourrit peut-être répondre en disant: Oui, nous avons lu cette remarque dans le rapport du vérificateur concernant le service de l'immigration. Nous sommes prêts à vous dire, M. le député, que dans ces trois remarques il y a eu véritablement un apport tout à fait particulier.

M. le Président, pour revenir à l'entente Couture-Cullen, je pense qu'après avoir relu la constitution canadienne d'une manière très particulière on a constaté que l'article touchant l'immigration est un domaine de compétences partagées. C'est à partir de là, je pense, que s'est faite l'évolution. Cette évolution est réellement remarquable aujourd'hui, puisque nous avons un document d'une grande valeur pour nous, les Québécois, qui maintenant allons participer d'une manière plus directe à ce partage de responsabilités en déléguant, dans tous les cas, des personnes autorisées pour faire la sélection.

M. le Président, je ne voudrais pas terminer sans vous dire qu'en ce qui regarde notre parti, nous n'avons presque pas d'autres questions. Je voudrais, si c'était possible, qu'on puisse terminer pour 13 heures, parce que cet après-midi, comme leader parlementaire en Chambre, je serai obligé de faire adopter certains projets de loi en troisième lecture et même en deuxième lecture, comme le dit notre programme de la semaine. (11 h 15)

Quant à moi, les questions seront très peu nombreuses. Si on donne réponse à cette intervention que j'ai voulu faire dans un esprit de collaboration. Nous ne sommes plus au temps où on avait peur des immigrants; même si on a 359 000 chômeurs, on continue quand même la politique de l'immigration, mais je pense que, comme le disait si bien mon collègue de Saint-Louis, il y a des cas particuliers qui mériteraient peut-être une sélection au point de vue de leurs antécédents qui devraient être plus détaillés. Je n'ai pas besoin de vous citer les noms de certaines personnes qui ont fait la manchette des journaux. Mon aimable collègue de Saint-Louis, lui-même, s'est porté à la défense personnelle d'un personnage illustre. Il est allé lui-même sur les lieux pour défendre et surtout pour régler ce problème. Il a prouvé qu'il était véritablement un homme qui pouvait véritablement servir et son pays et sa province.

Merci.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Papineau.

Commentaires de M. Jean Alfred

M. Alfred: M. le Président, je n'ai pas grand chose à dire. Cependant, je tiens à remercier le ministre de l'Immigration québécoise et les fonctionnaires aussi de ce ministère de l'Immigration qui travaillent très fort en vue de favoriser l'intégration des immigrants à la collectivité québécoise.

Ce qui a été fait depuis au moins deux ans, et ce qui a été fait également par le Parti libéral, me

permet de croire que ces fonctionnaires ont fait un bon travail. D'après ce que je vois, d'après mes rencontres avec les travailleurs de COFI aussi, je me rends compte que moi, je ne suis plus un immigrant, je suis un Québécois. Les autres qui vont venir seront de plus en plus accueillis dans cette terre clémente où nous faisons tout ce qui est bien pour que ceux qui viennent ici se sentent réellement chez eux dans une terre vraiment française.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre. M. Blank: ... avec...

Réponse du ministre

M. Couture: M. le Président, je crois sentir chez mes collègues ce désir d'aller assez rapidement. J'y vois, moi, un aspect très positif et je m'en félicite, dans un certain sens. J'imagine que c'est une façon de nous dire que, dans les grandes lignes, les orientations que nous prenons au ministère de l'Immigration sont aussi assumées par l'Opposition — je dis bien dans ses grandes lignes — et qu'elle soutient l'effort du gouvernement dans ce sens. Je l'apprécie beaucoup et je l'en remercie.

M. le Président, je voudrais simplement répondre à certaines questions, commenter certains points qui ont été soulevés par mes collègues des oppositions. D'abord, on a fait état, et chez le député de Saint-Louis et chez le député de Johnson, d'une part des limites de l'entente, et d'autre part aussi, du fait que l'entente est un bon signe que le fédéralisme marche bien et qu'on doit s'en réjouir.

Permettez-moi, M. le Président, d'une part, de voir...

M. Bellemare: C'est une admission qui va être remarquable.

M. Couture: ... une contradiction dans ces deux énoncés, parce que le député de Saint-Louis a quasiment tourné le fer dans la plaie en disant: Finalement, vous savez, la sélection des immigrants n'est pas complète. Je ne sais même pas si le fédéral n'aura pas le dernier mot sur tout. Il a semblé minimiser pas mal la portée de l'entente et, à certains égards, il a raison. C'est-à-dire que s'il arrivait que le gouvernement du Canada soit de mauvaise foi... Je dis bien si, parce que je dois quand même, pour être juste pour mon interlocuteur actuel au gouvernement du Canada, mon homologue, auquel je rends hommage pour sa bonne foi et sa bonne volonté, mais s'il arrivait que le gouvernement du Canada... Vous savez, le député de Johnson connaît très bien les imprévus et les méandres de la vie politique qui peuvent arriver, à un moment donné, à un gouvernement qui applique cette entente d'une façon tout à fait détournée de ses objectifs, et pour pouvoir brimer peut-être les aspects positifs de cette entente, il n'aurait qu'à jouer sur l'admission, sur le mécanisme d'admission et bloquer, à bien des points de vue, les possibilités réelles du gouvernement du Québec d'assumer...

M. Bellemare: Avec cette entente-là, vous avez tous les moyens de le prévenir.

M. Couture: Oui, mais là je réponds au député de Saint-Louis, M. le Président. Il pourrait à ce moment-là, bloquer les efforts réels du Québec dans une véritable politique d'immigration. Donc, il y a des limites... M. le Président, est-ce que j'ai la parole?

M. Bellemare: Oui, vous l'avez, mais j'ai le droit de me parler. Je dis que ce n'est pas possible.

M. Couture: En effet, M. le Président, lentente comporte ses limites, c'est la raison pour laquelle j'ai déclaré, à cette occasion, que pour nous, c'est satisfaisant dans le cadre actuel et c'est notre devoir et notre responsabilité de jouer à plein les règles du jeu, parce qu'étant élus dans ce cadre-là, nous devions, je pense, comme gouvernement responsable, chercher à revendiquer tout ce qui était possible dans le système fédéral actuel. Mais j'ai toujours souligné le fait suivant qui est extrêmement important: c'est que cela demeure une étape. Le député de Johnson parlait de cette continuité. Il y a eu une motion, à un moment donné, en 1956, il y a eu un ministère, il y a eu des ententes, etc., et il dit: Là on arrive à une autre étape et pour nous, c'est vraiment une autre étape, c'est-à-dire que pour exercer nos véritables pouvoirs, pour élaborer une politique d'immigration complète et satisfaisante, il faudra, évidemment, le contrôle des frontières, il faudra la souveraineté, il faudra nous-même, non seulement sélectionner les immigrants, mais pouvoir émettre les visas. C'est notre position comme gouvernement et vous la connaissez bien. Donc, les limites, pour nous, c'est un appel à plus de pouvoirs et plus de pouvoirs, c'est la souveraineté politique du Québec.

Par ailleurs, pour en finir sur cet aspect, le député de Johnson disait que c'est un excellent instrument pour prouver le bon côté du fédéralisme. J'ajouterais ceci. Évidemment, dans le cadre actuel, on peut se réjouir qu'on puisse, par la constitution que nous connaissons et sous laquelle nous vivons, utiliser ces pouvoirs au regard même de cette constitution, mais si vraiment ce fédéralisme-là était possible et rencontrait tous les objectifs et toutes les aspirations des Québécois, on n'aurait pas, depuis 100 ans, ces batailles constitutionnelles à n'en plus finir et ces frustrations nombreuses des Québécois et du gouvernement québécois en matière sociale, en matière de main-d'oeuvre, etc. J'annonce tout de suite au député de Johnson, s'il veut bien me...

M. Bellemare: ... de la main-d'oeuvre du ministère du Travail, je suppose.

M. Couture: II y a la main-d'oeuvre, justement, qui est l'instrument du marché du travail, qui est entre les mains du fédéral; si le fédéral est de bonne foi et s'il veut vraiment prouver que ce fédéralisme et bon pour les Québécois, que demain matin il nous donne tout le réseau de main-d'oeuvre. C'est l'instrument essentiel d'une politique d'immigration.

M. le Président, on pourrait débattre longtemps, mais je pense qu'on aura d'autres occasions de discuter de ces aspects extrêmement importants du débat constitutionnel. Le député de Saint-Louis parlait surtout en référence au livre blanc et évidemment, sachant que je l'assumais totalement, il se plaignait que le fait anglais était complètement ignoré dans cette énonciation des principes et des objectifs. Je crois que le député de Saint-Louis est injuste à ce point de vue-là, parce qu'il y a un chapitre, précédant les remarques que j'ai faites sur les minorités ethniques, extrêmement bien articulé sur le rôle de la communauté anglophone.

M. Blank: M. le ministre m'a peut-être mal compris.

M. Couture: Faites-en une question de privilège.

M. Blank: II n'y a pas de question de privilège ici en commission. Je n'ai pas parlé des anglophones, des groupes minoritaires qui sont ici. Je parle de votre oeuvre, de sélectionner des immigrants, les instructions, la propagande normale, je ne parle pas de propagande politique, la propagande dans ces sommets, dans tout cela, c'est là que je dis qu'il y a une absence totale du fait anglais. Je ne parle pas des gens qui sont ici, je pense qu'avec les immigrants, on tient pour acquis qu'il n'existe pas des gens anglais et que l'anglais est peut-être nécessaire pour vivre, même à Québec.

M. Couture: J'ai des réponses bien précises là-dessus. D'une part, je dois rappeler au député de Saint-Louis que sur le comité consultatif dont j'ai nommé les membres l'année dernière, il y a un M. John O'Brien, qui est recteur de l'Université Concordia. Alors tous les...

M. Blank: C'est un de mes électeurs, à part cela.

M. Couture: Si ce n'est pas un signe que le ministère de l'Immigration et son ministre et le gouvernement reconnaissent le rôle de la communauté anglophone, même par rapport à l'élaboration des politiques d'immigration, par rapport aussi à la réflexion qu'on doit faire en matière de sélection des immigrants, d'accueil, etc, on a identifié ce rôle en nommant M. O'Brien qui est recteur à Concordia.

Je voudrais aussi lui souligner que dans la grille québécoise que nous préparons, effectivement, dans les points attribués au titre de la langue, il y aura reconnaissance du fait québécois, du fait que l'Amérique du Nord; quand on vient en Amérique du Nord, s'établir au Québec, on arrive dans un bassin à majorité francophone, mais aussi dans cet immense bassin anglophone. Je pense qu'à ce point de vue, il pourra être rassuré. S'il veut davantage un engagement de ma part, je peux l'assurer d'une façon précise et ferme que pour moi, la politique d'immigration, nos interventions, j'attends de la communauté anglophone du Québec quelle y joue un rôle actif. Je pense qu'actuellement, elle est bien située, elle est bien placée pour convaincre beaucoup de communautés ethniques qui, malheureusement, dans le passé, s'identifiaient à la minorité anglophone.

Je dois dire aussi qu'on doit porter un certain fardeau d'une faute, d'une erreur de notre part, de manque de communication ou de manque d'intervention vigoureuse pour attirer les immigrants et les communautés ethniques à la majorité francophone.

Mais de fait, il y a beaucoup d'immigrants récents ou de communautés ethniques qui se sont identifiés à la minorité anglophone et si la communauté anglophone veut jouer un rôle actif dans nos politiques d'intervention et d'accueil, elle devra faire cet effort, qui devra être vigoureux, pour convaincre tous ces ressortissants étrangers qui se sont identifiés à cette communauté anglophone, et les aider aussi, à accepter la réalité québécoise telle qu'elle est.

Je poursuis, M. le Président. Je ne reviendrai pas trop aux réfugiés, où on faisait une espèce de procès d'intention au ministre en disant que le ministre s'occupait seulement des réfugiés politiques de gauche, semble-t-il. Je pense que j'ai prouvé, par des chiffres et par des faits que, pour moi, le choix des réfugiés est lié davantage — c'est un principe fondamental — à la situation tragique de ces réfugiés, non pas à leurs idées politiques.

On a parlé des COFI, le député de Saint-Louis s'inquiétait que les COFI puissent jouer un rôle de "brainwashing" auprès des immigrants pour les attirer ou qu'ils soient des instruments pour passer un message politique aux immigrants. M. le Président, je veux rappeler que quand on parle des COFI, quand on énumère simplement les services qu'on prévoit donner dans les prochains COFI, c'est-à-dire des services polyvalents couvrant des domaines aussi variés que l'accueil, l'enseignement du français, le service social, l'emploi, les activités socio-culturelles, ce sont purement et simplement des interventions que tout le réseau actuel public donne et développe auprès de tous les Québécois.

Vous aviez peut-être raison d'associer un peu ces COFI de l'avenir, mais si peu, aux CLSC, dans le sens suivant, c'est que dans les premiers mois, sinon les premières années de l'arrivée des immigrants, ils connaissent mal les ressources communautaires, ils connaissent mal les réseaux publics; donc le COFI est une espèce d'introduction des immigrants à l'utilisation du réseau public.

Alors, c'est la raison pour laquelle nous donnons comme condition essentielle que les COFI

soient reliés de très près aux CLSC et aux Centres de main-d'oeuvre et à toutes les institutions qui devront, pour l'avenir, desservir tous les Québécois et les immigrants. C'est une préparation à l'utilisation de ce réseau public. (11 h 30)

II n'y aura d'aucune façon de propagande politique, dans ces institutions, comme il n'y en a pas dans le réseau public. Quand il y en a, on nous le signale et on corrige vite la situation. Vous avez vu, hier, à l'Assemblée nationale, que le premier ministre a apporté une correction rapide à un fait qu'on lui a signalé, qui pouvait prêter à critique, par rapport à ce qu'on pourrait appeler de la propagande politique.

Je prends bonne note de la préoccupation de M. le député de Saint-Louis, mais je l'assure dès maintenant que ce sont des services polyvalents pour tous les immigrants, sans aucune intention de progagande politique.

J'en arrive aux questions du député de Johnson. Avant que je l'oublie, M. le Président, je voudrais signaler la présence très modeste, au fond de la salle, du nouveau sous-ministre de l'Immigration, M. Florian Rompré, qui entre en fonction le 12 juin prochain. Vous le connaissez sans doute, je lui souhaite la plus cordiale bienvenue chez nous.

Je continue sur les interrogations du député de Johnson. Il parlait du comité consultatif et de la nomination des membres. Il disait: Est-ce que vous pouvez nous assurer que les travaux du prochain comité consultatif seront marqués d'une certaine unanimité ou d'une harmonie de débat, etc.?

Je suis un peu surpris de ses remarques parce que, vraiment, je n'ai jamais eu d'échos des dissensions graves à ce comité consultatif.

M. Bellemare: Tant mieux que je vous le dise. Discussion générale

M. Couture: J'en prends bonne note. Au contraire, je pense que la meilleure façon de juger les travaux de ce comité, c'est par ses travaux et par ses interventions. Au contraire je crois que, dans le milieu ethnique, même dans le milieu québécois, simplement en énumérant ses interventions et ses travaux, la consultation qu'il a faite, les colloques qu'il a organisés, le succès de ces colloques, j'ai tout lieu de croire que ce ne serait pas le fruit d'un comité qui serait divisé ou qui fonctionnerait mal.

M. Bellemare: Ce n'est pas cela que j'ai dit. J'ai dit qu'il y a certaines dissensions entre les membres du comité. Rien que cela.

M. Couture: S'il y a des dissensions, cela me paraît plutôt positif. On n'a qu'à regarder les noms de ceux qui sont nommés au comité consultatif. Chacun, par une personnalité différente, par un milieu ethnique différent, par définition, apporte un éclairage qui n'est pas le même, qui n'est pas identique. Cela me paraît un enrichissement pour tout le monde. Non, je ne vois pas de problème et je ne veux pas insister là-dessus.

M. Bellemare: Le ministre nous a dit qu'il y en aurait un tiers qui demeureraient...

M. Couture: Oui, il y en aura un tiers qui resteront, effectivement.

M. Bellemare: Sur les quinze?

M. Couture: Effectivement. Un tiers, pour assurer la continuité des travaux du comité.

M. Bellemare: Est-ce en vertu de la constitution même du comité consultatif?

M. Couture: Non, c'est simplement une espèce de...

M. Bellemare: Une rotation se fait partout, dans tous les comités consultatifs, un an, deux ans, trois ans et cela tourne naturellement.

M. Couture: C'est un règlement que nous nous donnons pour assurer la bonne marche de ce comité.

M. Bellemare: Oui, mais si vous en changez dix en même temps?

M. Couture: Non, j'en garde le tiers.

M. Bellemare: Vous en gardez cinq. Donc, il va en partir dix.

M. Couture: II va en partir dix, oui. Cela me paraît suffisant.

M. Bellemare: Moi, cela me paraît trop.

M. Couture: Je reçois vos remarques. Mais j'ai eu d'autres remarques aussi des membres du comité et des milieux ethniques. Je pense que les gens s'attendent qu'on garde un noyau. Ce noyau, est-ce qu'il sera formé de cinq, quatre, six ou trois personnes? On pourra en discuter.

M. Bellemare: C'est là que va être le problème. C'est qui et qui?

M. Couture: Vous le verrez.

M. Bellemare: Cela peut être un sujet de dissension.

M. Couture: S'ils vivent dans la dissension, ils s'entendent très bien pour les rapports et les travaux qu'ils mènent. Vraiment, je ne peux entrer dans les détails. C'est aussi une façon, pour le ministre, de respecter l'autonomie de gestion et de fonctionnement de ce comité.

M. le Président, on avait parlé des étudiants étrangers. On faisait état qu'il y avait 7000 étu-

diants étrangers qui coûtaient $50 millions au Québec. Depuis quelques semaines déjà, le ministre de l'Éducation a annoncé la nouvelle politique du gouvernement à cet effet. Dorénavant, les étudiants étrangers auront à défrayer leurs études dans les universités québécoises.

M. Bellemare: À 100%?

M. Couture: Oui, oui. Sous réserve d'ententes possibles avec certains pays et, aussi, avec l'octroi d'un certain nombre de prêts-bourses aux étudiants étrangers.

M. Bellemare: Merci.

M. Couture: Vous me permettrez, M. le Président, de ne pas donner le détail de cette politique, parce qu'elle relève du ministère de l'Éducation mais, au besoin, si le député de Johnson veut qu'on lui fasse parvenir le détail de toute cette politique, il nous fera plaisir de le faire. C'est vraiment changé à partir de septembre prochain, les étudiants étrangers au Québec auront à défrayer leurs frais de scolarité, mais on aura quand même un certain nombre de prêts-bourses.

M. Bellemare: Dans quelle proportion les 7000 étudiants sont-ils d'ascendance française?

M. Couture: Je n'ai pas les chiffres, M. le Président. Je sais que la majorité sont des étudiants américains...

M. Bellemare: Ce sont des sujets américains?

M. Couture: Des étudiants américains. D'ailleurs, moi-même, comme ministre de l'Immigration, je me préoccupais de la retombée de cette politique. Je me suis assuré auprès de mon collègue de l'Éducation que le gouvernement préparait, en parallèle et peut-être aussi par correction, une politique d'aide à certains types d'étudiants étrangers, surtout ceux qui viennent des pays du tiers monde et aussi une possibilité de préparer des accords avec certains pays du tiers monde pour ne pas pénaliser des étudiants étrangers qui ont besoin des universités occidentales.

M. Bellemare: Le ministère de l'Immigration n'a aucun contact avec ces 7000 étudiants?

M. Couture: On a des contacts par certaines activités, mais on n'a pas de juridiction sur eux.

M. Bellemare: Vous n'avez aucun contact avec eux?

M. Couture: On a des contacts quand il y a des fêtes de groupes ethniques à Montréal et que je suis invité ou que des membres du ministère sont invités, des fonctionnaires. Bien souvent les étudiants étrangers qui appartiennent à cette ethnie sont présents. Ils viennent nous voir aussi. D'ailleurs, je peux même dire que j'ai une rencon- tre dans deux jours avec un médecin immigrant qui se plaint de certaines politiques québécoises. C'est le rôle que je me donne à certains points de vue, de recevoir leurs représentations, d'écouter leurs griefs et de faire, vis-à-vis de mon collègue, des recommandations à cet égard, si c'est utile ou non.

Le député de Johnson a fait état du rapport du Vérificateur général, à propos des frais partagés et de comptes à recevoir dont on n'aurait pas un contrôle comptable. J'avoue que c'est une question pas mal technique. Tout ce qu'on peut vous dire là-dessus, c'est que l'inscription des sommes reçues du fédéral se fait trois fois par année; elle n'est pas faite par les fonctionnaires de l'Immigration mais par le service comptable qui relève du ministère des Finances. On m'informe que ce service a pris note des remarques du vérificateur sur la situation et que celle-ci devrait être corrigée cette année. On remercie le député de Johnson de nous en avoir fait part; cela nous permettra peut-être de vérifier justement si on en tiendra compte cette année.

Une autre question. Dans le même rapport, le député de Johnson faisait état de l'absentéisme des employés et...

M. Bellemare: C'est le rapport, ce n'est pas moi qui ai dit cela.

M. Couture: Vous faisiez état du rapport qui nous informait là-dessus. Semble-t-il qu'il y aurait un manque d'assiduité, qu'on ne remplissait pas la fiche de présence. C'est corrigé.

M. Bellemare: Bon, cela va, bonne nouvelle.

M. Couture: Maintenant, on remplit les formules; sauf que, dans les COFI, paraît-il, ce n'est pas nécessaire de les remplir parce que, quand le professeur n'est pas là, cela paraît tout de suite. Quand il est là, cela paraît encore plus.

M. Bellemare: M. de La Palice.

M. Couture: En effet. Dans la dernière question le député de Johnson parlait de...

M. Bellemare: Les dépenses imputées.

M. Couture: Et des documents qui n'étaient pas contresignés, n'est-ce pas?

M. Bellemare: Oui, certaines dépenses imputées au budget du ministère devaient faire l'objet d'une vérification par la direction du personnel. Il devrait y avoir une autorité pour contresigner tous les documents.

M. Couture: Avec l'aide du ministère des Finances et du Conseil du trésor, le ministère possède les signatures nécessaires qui amènent les personnes responsables à contresigner, de façon officielle, les engagements à incidence financière. C'est une situation qui n'est pas, paraît-

il, propre au ministère de l'Immigration et j'imagine que vous avez dû avoir ces remarques pour d'autres ministères.

M. Bellemare: On n'est pas ici pour juger les autres, ce sont vos crédits.

M. Couture: On retrouve cette situation dans plusieurs ministères et on m'informe — vous voyez si on prévient, on accepte vite et on corrige vite les situations — que tout est corrigé maintenant.

M. Bellemare: Vous avez nommé une personne en autorité?

M. Couture: Oui, c'est corrigé, il y a quelqu'un en autorité qui...

M. Bellemare: II y avait quelqu'un pour répondre à...

M. Couture: C'est le directeur de l'administration du personnel.

M. Bellemare: Qui est-ce?

M. Couture: Ce sont MM. Veilleux et Fournier qui contresignent.

M. Bellemare: Veilleux...

M. Couture: Ils sont d'ailleurs tous deux ici.

M. Bellemare: Je suis bien content de savoir que le Vérificateur général n'aura pas à écrire cela à nouveau dans les projets.

Une voix: Cela va faire moins de lecture! M. Couture: M. le Président...

M. Bellemare: Cela fera moins de lecture! Je suis très attentif à ce que le Vérificateur dit, parce que, quand j'ai été ministre et qu'il touchait à mon ministère, soit de l'Industrie et du Commerce, soit du Travail, on appliquait immédiatement les réformes que nous soulignait le Vérificateur. Je pense que ces gens, qui ont la mission de vérifier sur place tout le processus administratif, nous rendent d'immenses services. C'est là qu'on peut véritablement améliorer l'administration d'un ministère.

M. Couture: Cela vous honore, M. le député de Johnson.

M. Bellemare: Cela me décore!

Le Président (M. Jolivet): On peut maintenant appeler le programme 1.

M. Bellemare: M. le Président, je ne sais pas si vous avez beaucoup de remarques, mais, maintenant que la discussion générale est faite, il est inutile de vouloir prolonger pour rien les discussions sur les éléments. Je serais prêt à accepter les éléments 1, 2 et 3.

M. Blank: M. le Président, j'aurais quelques questions.

M. Bellemare: D'accord, faites votre devoir, je n'ai aucune objection.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Saint-Louis, est-ce que vous voulez, pour l'entendement, aller dans l'ensemble du programme?

M. Blank: Dans l'ensemble, parce qu'il n'y a pas tellement... C'est un programme.

M. Couture: Est-ce qu'on adoptera, à la fin, les trois éléments?

M. Blank: Oui, ensemble. M. Couture: D'accord.

M. Blank: Je voudrais donner la chance au ministre de nous commenter son voyage en Europe. Est-ce que le ministre...

M. Bellemare: II n'a pas été longtemps, seulement 17 jours!

M. Blank: Seulement 17 jours!

M. Couture: Mais on fait beaucoup de choses en 17 jours, vous savez, quand on veut.

M. Bellemare: Oui, surtout pendant une nuit! M. Couture: Non. je ne suis pas allé à Pigalle!

M. Bellemare: Vous n'êtes pas allé a Pigalle. mais vous êtes allé à Montmartre, par exemple!

M. Couture: J'ai lu les revues et les journaux!

M. Bellemare: On m'a aussi dit que vous étiez allé à Montmartre.

M. Couture: M. le Président, question de privilège, c'est une fausse information!

M. Bellemare: Non...

M. Blank: À Rome, le "party" de la dolce vita.

M. Couture: II y a des aspects intéressants de la vie romaine!

M. Blank: Le ministre a-t-il voyagé seul ou si une partie des fonctionnaires de son cabinet l'accompagnait?

M. Couture: Nous étions une délégation de quatre personnes. Il y avait M. Martin, il y avait mon chef de cabinet, M. Miron, M. Larivière, qui est membre du cabinet et qui a été deux ou trois ans agent d'immigration à Rome. Il connaît bien l'italien et, comme je devais rester une semaine en Italie, je l'ai amené avec moi.

M. Blank: Est-ce que toutes les dépenses étaient défrayées par le gouvernement ou est-ce que des groupements italiens comme Congretta ou d'autres participaient aux dépenses?

M. Couture: C'est-à-dire qu'à toutes les places où nous étions reçus par d'autres, ce n'est pas nous qui défrayions les dépenses.

M. Blank: Non, je parle des frais de voyage, les hôtels, etc.

M. Couture: Tout a été payé par le gouvernement, sauf notre séjour à Grenoble. La ville de Grenoble, par grande délicatesse et à cause de l'amitié qui me lie à elle, a voulu assumer les frais de cette fin de semaine, ces deux jours à Grenoble.

M. Blank: En parlant des réfugiés, je constate, par des rapports de journaux et à cause de ce que le ministre dit aujourd'hui, que vous avez eu un très bon accueil au Portugal.

M. Couture: Oui, en effet.

M. Bellemare: II a signé une entente avec le Portugal!

M. Couture: On n'a rien signé encore, ce sont des accords de principe.

M. Bellemare: Oui, mais...

M. Couture: II y a des fonctionnaires qui vont aller préparer la signature du contrat. (11 h 45)

M. Bellemare: C'est ce qu'on a appris quand vous êtes revenu, que vous en aviez fait une avec le Portugal et une avec l'Italie.

M. Couture: C'est exact.

M. Bellemare: Si ce n'est pas vrai, il n'y en a pas.

M. Couture: Ce sont des accords de principe, ce ne sont pas encore des signatures.

M. Bellemare: Des accords de principe qui ont été ratifiés par les ministères...

M. Couture: J'ai vraiment, à ce point de vue, si l'information n'est pas complète ou si vous avez été mal informé... un accord de principe, c'est un accord de principe; c'est assez important. On s'est entendu sur certaines choses, en Italie, en France et au Portugal. La suite à donner à ces accords de principe, c'est un haut fonctionnaire du ministère ou des Affaires intergouvemementales qui ira faire préparer, de façon concrète, la réalisation de cet accord de principe et, éventuellement, il y aura en bonne et due forme une signature des deux gouvernements.

M. Bellemare: Est-ce que vous avez une personne en permanence dans chacun de ces pays, attachée à la province de Québec?

M. Couture: Oui. En Italie, il y a la délégation générale du Québec à Milan, nous avons un agent d'immigration du ministère à Milan et nous en avons deux à Rome. Au Portugal, il n'y avait rien, il y avait seulement l'ambassade du Canada. Nous allons bientôt ouvrir un bureau d'immigration au Portugal avec deux agents d'immigration du Québec.

M. Blank: Au Portugal, il y a un problème particulier. Je suis certain que la colonie portugaise de Montréal a déjà fait des représentations au ministre; j'aimerais savoir si elle fait partie de la discussion au Portugal ou même avec M. Cullen à Ottawa, la question des gens qui sont des réfugiés, mais qui ne sont pas des réfugiés. Je parle des gens du Mozambique et d'Angola qui sont vraiment des réfugiés selon la définition de Genève, sauf qu'ils ont un passeport portugais et leur droit d'être réfugiés a été refusé. Ces gens ont des problèmes, comme des réfugiés chiliens et argentins ainsi que vietnamiens, ils sont tous chassés de leur maison, ils perdent tout pour des raisons politiques. C'est une classe particulière. Il y a ici, à Montréal, dans la colonie portugaise, beaucoup de gens qui oni des membres de leur famille à qui on n'a donné aucune préférence, nonobstant le fait qu'à un moment donné, ils ont donné des droits spéciaux à des Libanais à cause d'une guerre civile pendant laquelle ils déportaient tout le monde. Tous les Libanais avaient des chances de se prévaloir de ces privilèges spéciaux. Je ne m'oppose pas à cela, parce que notre politique de l'immigration, notre politique pour les réfugiés va dans ce sens.

Ici, on a un groupe particulier et je dois dire que ces gens pourraient s'intégrer facilement à la communauté francophone de Québec. Les Portugais sont ceux qui peuvent le mieux s'intégrer parmi les étrangers. C'est peut-être parce qu'étant un peuple latin, la langue n'est pas tellement différente. Je voudrais savoir si le ministre a discuté de ce problème avec des ministres et des autorités du Portugal et avec M. Cullen, ici au Canada.

M. Couture: M. le Président, je partage entièrement le point de vue du député de Saint-Louis sur la grande facilité et l'excellente adaptation des Portugais au Québec; je pense que vous avez une colonie importante dans votre comté. C'était une des raisons qui m'ont incité à vouloir rencontrer les autorités du gouvernement du Portugal, surtout par l'importance de cette communauté, ici au Québec, leur facilité d'adaptation et cette bonne immigration éventuelle que nous aurions du Portugal.

J'ai appris des choses assez étonnantes là-bas. D'abord, il y a 80 000 Portugais qui veulent immigrer — cela ne veut pas dire qu'ils veulent venir ici — et qui font la demande dans les servi-

ces gouvernementaux du Portugal pour immigrer, surtout des gens d'Angola et du Mozambique; il y en a aussi du continent, il y en a des Açores; on m'a dit qu'il y en avait... Ceux qui sont à Hull, d'où viennent-ils? Des Açores... c'est parce qu'ils ont des parents, ici.

M. Blank: Si vous passez par là, vous verrez des maisons peintes en bleu; vous saurez que ce sont des gens de là-bas.

M. Couture: En effet, parce que c'est une bonne immigration, parce que la demande est forte au Portugal et comme nous étions absents sur place, j'ai fait comprendre et j'ai convaincu assez facilement les autorités du gouvernement du Portugal que nous pourrions nous installer là et essayer de développer davantage cette immigration vers le Québec. Je pense que le processus est en marche, c'est déclanché, et nous allons même préparer, sur place — cela va commencer par un projet pilote — les futurs candidats du Portugal au Québec, en les informant et en leur donnant les rudiments de la langue française.

Je vois, par les chiffres de l'année 1977, l'entrée des Angolais et des gens de la Mozambique — je ne sais pas comment on les appelle — je vous apporte ces chiffres, parce que ce que vous avez dit n'est pas tout à fait exact. Il y a eu, en 1977, 751 entrées au Canada, des gens de l'Angola et du Mozambique; le Québec en a reçu 158, soit 21%. Donc, il y a quand même eu, à un certain point de vue, entrée de tels ressortissants.

M. Blank: M. le ministre, ces gens sont entrés selon les critères actuels; il n'y avait aucune préférence spéciale. Je ne parle pas par expérience personnelle. La question est: Est-ce que le ministre fera ou a déjà fait des représentations pour donner une priorité, peut-être des points de plus, ou mettre de côté les critères de l'approbation du bureau de la main-d'oeuvre, quelque chose comme cela. C'est là le blocage.

M. Couture: En effet, cela bloque. L'application de la grille canadienne au Portugal donne comme résultat qu'il y a peu de personnes qui entrent, qui passent. On m'a signalé souvent, ici, des Portugais sur place, et là-bas, que, parfois, il y a beaucoup de gens qui veulent venir, mais se sont découragés — de fait, il y a moins d'inscriptions à l'ambassade canadienne — parce que, il y a deux ans, entre autres, on bloquait presque systématiquement l'entrée de Portugais au Canada, ne serait-ce que par l'application de la grille canadienne.

Avec une grille québécoise et avec cette priorité que nous donnons pour certaines clientèles d'immigrants, je peux vous assurer — je ne peux pas préjuger du résultat au bout de la ligne — que nous allons faire un effort spécial pour cette forte demande de Portugais au Canada. S'il le faut — c'est pour cela que c'est tellement important de bien connaître le marché du travail, d'avoir les instruments d'une politique de main-d'oeuvre à l'immigration — je crois qu'avec une collaboration directe du gouvernement du Portugal, beaucoup de gens sont plus ou moins préparés à notre marché du travail; on pourrait même, à plus long terme, préparer les gens sur place à venir au Québec. Je vous donne la réponse telle quelle, mais je pense qu'on partage, vous et moi, cette préoccupation de faire entrer beaucoup plus de Portugais, de favoriser cette immigration.

M. Blank: D'accord, merci. Comme politique générale, en décembre 1976, le ministre de l'Immigration, à l'époque, a annoncé que le projet de loi du ministère de l'Immigration serait mis de côté. Un an après, dans le Vieux-Québec, au mois de novembre 1977, le ministre a affirmé qu'il y a pas mal de gens qui souhaitent un ministère des Ressources humaines. On ne peut pas faire une politique de l'immigration sans une connaissance du marché du travail. Est-ce que c'est un changement de pensée depuis 1976? Si oui, quand mettrez-vous à l'oeuvre cette initiative qui a été prise par le gouvernement Bourassa?

M. Couture: Ce n'est pas un changement de politique. Il y avait ces projets de loi qui avaient été déposés sous le gouvernement Bourassa, sur la population. Nous ne les avons pas retenus; je ne les ai pas retenus, en arrivant au ministère, parce que nous voulions reprendre l'ensemble de ces questions. Les critiques qu'on faisait sur ces projets de loi, je les partageais, on les trouvait pas mal trop globalisants; on voulait refaire le monde à travers ces projets de loi. On trouvait cela un peu trop vaste. On a voulu, dans un premier temps, travailler sur la possibilité — vous connaissez les circonstances de mon départ du ministère du Travail, où la Main-d'oeuvre devait venir à l'Immigration — mais le pouvoir nous ayant appris que le changement de structures ne se fait pas aussi vite que I'on pense et que l'on voudrait, cela nous donne un peu plus de temps mais ce n'est pas pour autant exclu. C'est-à-dire que je crois qu'au gouvernement — au sein du Parti québécois — ce sont même des propositions qui ont été débattues à des congrès. L'avenir est du côté d'une restructuration d'un ministère qui regrouperait, évidemment, l'immigration et la main-d'oeuvre et qu'on pourrait identifier comme ressources humaines.

À ce stade-ci — et ce n'est pas une décision, évidemment, qui relève de moi, cela relève du gouvernement et en premier lieu, des intentions du premier ministre — je dois vous dire que les études se poursuivent. Étant donné la complexité de ces réaménagements, il faut y mettre plus de temps que prévu, mais je pense que le dossier avance, peut-être moins vite que, personnellement, je ne le souhaiterais, mais il avance, c'est le principal.

M. Bellemare: À petits pas.

M. Blank: Le ministre a parlé de sa nouvelle loi de l'immigration ou Loi modifiant la Loi du ministère, ou d'une loi d'un futur Conseil consultatif

de l'immigration. Est-ce que ces lois sont en préparation et quand va-t-il les déposer en Chambre?

M. Couture: En ce qui concerne la loi du Conseil consultatif de l'immigration, de fait, on a préparé un projet de loi et il est encore là, on est encore en discussion, surtout sur l'avis des juristes selon lequel semble-t-il, cela ne sera pas nécessaire de faire une loi type là-dessus. L'article 9 de la Loi du ministère nous donne les pouvoirs, évidemment, d'avoir un comité consultatif, mais même pour les objectifs selon lesquels on voulait élargir davantage les responsabilités et les orientations du comité consultatif. On pensait que la Loi était nécessaire à cet égard. Les juristes nous indiquent que cela ne sera pas nécessaire. Alors, c'est en discussion. Pour la loi de...

M. Bellemare: ... du ministère lui-même...

M. Couture: ... l'immigration du Québec, pour appliquer l'entente actuelle que nous avons signée il faut, de toute façon, soit amender la Loi du ministère de l'Immigration pour nous donner le pouvoir de réglementation, soit créer une loi ad hoc — je dis bien une loi ad hoc, parce que vous comprenez qu'on ne peut pas faire, sur le plan québécois, en peu de temps, dans quelques mois, la grande loi de l'immigration du Québec, qui serait le pendant du bill C-24. Cela n'est pas possible de le faire rapidement. D'autre part, l'entente stipule qu'elle doit entrer en vigueur au plus tard le premier janvier 1979. Donc, nous sommes en train de préparer un instrument législatif pour nous donner le pouvoir d'appliquer l'entente.

M. Bellemare: Pour la Loi constitutive, mon cher monsieur, on prévoit une réglementation. Ce n'est pas tout refaire le ministère...

M. Couture: Non, c'est pour cela qu'à ce point de vue-là, la loi ad hoc ou les amendements à la loi du ministère ne sont pas sorciers. Ce qui est complexe — et vous allez me comprendre immédiatement quand je vais vous dire de quoi il s'agit — ce sont les règlements, c'est la grille québécoise. Faire une grille québécoise, c'est quand même véhiculer des objectifs, une philosophie et une politique; alors je pense qu'on doit quand même y mettre un peu plus de temps. Parce que si c'était seulement de dire: II nous faut une loi pour faire des règlements ou il nous faut amender la loi, cela serait assez simple. Alors on peut mettre un peu plus de temps pour raffiner cette grille québécoise, mais j'espère — je pensais le faire avant... Évidemment on ne peut pas passer cette loi avant juin, avant le départ pour les vacances, parce qu'il aurait fallu la déposer avant le 1er juin. Je pensais pouvoir déposer cette loi ou ces amendements à la Loi du ministère avant le 23 juin. On n'est pas sûr, mais si ce n'est pas avant le départ pour les vacances, cela sera, très rapidement, à la rentrée.

M. Bellemare: À cause du 1er janvier 1979, l'entente Couture-Cullen.

M. Couture: II faut absolument légiférer avant le 1er janvier, mais j'imagine qu'avec la collaboration de l'Opposition qui est bien connue, cela devrait aller assez rapidement.

M. Blank: Pas de problème pour cela. J'ai constaté un état de fait. Je ne sais pas si cela vient de cette entente ou d'une autre entente. Quand vient le choix des entrepreneurs qui viennent au Québec— il me semble, avec mon expérience personnelle — que le droit de veto serait du domaine du Québec, c'est-à-dire que les autorités fédérales n'acceptent, à ce moment-ci, aucun entrepreneur, à moins que son projet n'ait été approuvé par le ministre de l'Immigration du Québec. Est-ce que c'est une entente spéciale ou est-ce une...

M. Bellemare: ... non seulement, c'est en pourparler.

M. Couture: Actuellement, l'entrepreneur investisseur qui vient... C'est-à-dire que dans la loi actuelle, il est obligé, quand même... Vous avez raison, si on peut dire; tant qu'on n'a pas ce pouvoir, nous-mêmes, de sélectionner... Si c'est un indépendant, on va avoir ce pouvoir avec l'entente, mais au moment où l'on se parle, c'est le fédéral qui donne son dernier mot sur l'entrée de cet entrepreneur investisseur, pas en tant qu'entrepreneur investisseur, mais tout simplement en tant que candidat d'immigration au Canada. (12 heures)

M. Blank: Je vous dirai franchement, avec mon expérience à l'immigration fédérale, qu'ils n'accepteront pas un entrepreneur à moins d'avoir l'accord du Québec. Je voudrais savoir comment...

M. Couture: C'est une entente bona fide, et le Québec est consulté.

M. Blank: D'accord. Je veux savoir ce qui est fait là-dedans ou si cela vient de... Je ne m'y objecte pas, parce qu'ils ont raison. J'ai toujours pensé que l'État fédéral n'avait jamais pris assez de précautions pour savoir si c'est un entrepreneur ou non. Au moins les gens de Québec font faire une petite enquête au moins pour savoir si c'est vraiment un entrepreneur ou quelqu'un qui essaie de passer à côté des règlements.

M. Couture: Si vous me permettez, à l'occasion de cette question, j'aimerais simplement dire un mot sur ce service des entrepreneurs investisseurs qui est extrêmement important dans la conjoncture économique actuelle. Vous savez tous a quel point il a des préjugés. Quand il y a beaucoup de chômage, les gens disent: Les immigrants viennent nous voler nos jobs et cela nuit au développement économique. Ce service, au ministère, on pense qu'il est important et à ce point de vue, cela peut équilibrer une immigration qui ne répond pas toujours à des besoins de main-d'oeuvre ou à des offres d'emploi. Je peux simplement vous rappeler un chiffre... Le service des entrepreneurs investisseurs, au cours des années 1976 et 1977, avait recruté des immigrants qui ont investi $44 millions au Québec...

M. Bellemare: Des Italiens ou des Français...

M. Couture: II y a de tout: des agriculteurs français, des agriculteurs suisses, il y a des Italiens...

M. Bellemare: Des gars du Bangladesh.

M. Couture: Si vous voulez le détail, on va vous rapporter; il y en a d'Asie aussi, il y en a un certain nombre de Hong Kong. Dans un an, on est rendu à $69 millions investis au Québec par le biais de l'entrée d'immigrants entrepreneurs investisseurs. Je pense que c'est quand même intéressant à signaler; c'est une augmentation de $25 millions.

On peut dire, aussi, qu'il y a eu 194 entreprises créées en 1977/78, contre 141 l'année précédente. Cela progresse. Dans la conjoncture économique actuelle, je pense qu'on ne peut que s'en réjouir. Le nombre d'emplois créés par ces investissements a été de 1116, contre 820 en 1976. L'année dernière, on a créé, par l'entrée de ces entrepreneurs investisseurs immigrants, 1116 emplois. Je pense que la contribution du ministère de l'Immigration, à ce point de vue, est assez intéressante.

Les principaux secteurs où les capitaux ont été investis sont les suivants: l'agriculture, S15 millions; l'industrie manufacturière, S16 millions; le commerce et les services, $38 millions.

M. Blank: D'accord. Sur un autre sujet, le ministre a manifesté l'intention de créer un poste de secrétaire délégué auprès des travailleurs immigrants, dont le rôle serait de défendre les droits des travailleurs. Est-ce qu'il est encore du même avis?

M. Couture: II est créé. Le poste de secrétaire délégué auprès des travailleurs immigrants a été créé justement pour être un peu la conscience — si je peux m'exprimer ainsi — du ministère, pour la défense des travailleurs immigrants pouvant être exploités, comme chacun le sait, et le poste de secrétaire délégué aux réfugiés. Ce sont deux postes qui ont été acceptés par le Conseil du trésor: ils sont inscrits dans le budget de l'année prochaine, ils ont été finalisés au ministère, ils sont à l'étude a la Commission de la fonction publique. Ils sont dans la filière de la Commission de la fonction publique avant d'être annoncés publiquement. C'est dans la machine.

M. Blank: C'est dans la machine... Vous ne pouvez pas nommer ces gens...

M. Couture: Ils devraient être publiquement offerts d'ici quelques semaines.

Postes à l'étranger

M. Blank: D'accord. Combien de postes ajou-terez-vous a l'étranger, cette année, dans ce projet?

M. Couture: Douze postes.

M. Blank: Douze nouveaux postes?

M. Couture: Oui, douze postes avec le soutien technique; en fait, c'est huit postes nouveaux d'agents d'immigration à l'étranger. Si vous voulez, je peux vous donner les pays et les endroits où ils vont travailler. Ce qui va s'ajouter, c'est: Lisbonne, deux postes; on va ouvrir deux postes à Buenos Aires; trois postes à Hong Kong — on est rendu à sept — et on ajoute deux postes en Amérique centrale.

M. Blank: Ces deux postes vont coûter combien? Quel est le montant que cela va coûter en salaires?

M. Couture: Je n'ai aucune idée, je vais m'informer. C'est une moyenne de $20 000 par poste; ce sont des conseillers à l'immigration.

M. Blank: Est-ce qu'ils vont occuper des locaux fédéraux?

M. Couture: C'est une bonne question. Normalement, ces conseillers à l'immigration sont dans les ambassades canadiennes. Nous en avons déjà un certain nombre qui exercent leurs fonctions dans l'ambassade canadienne. Il y a une entente spéciale là-dessus; il faut que le bureau Immigration-Québec soit clairement identifié, et il y a des locaux réservés à l'Immigration-Québec. C'est vraiment identifié comme tel.

M. Bellemare: Comme Toronto l'a.

M. Couture: Oui. Je ne sais pas si Toronto l'a.

M. Bellemare: L'Ontario, c'est l'Ontario.

M. Couture: C'est mon intention — c'est lié à une négociation avec le fédéral — d'ouvrir des bureaux d'Immigration-Québec en dehors des ambassades canadiennes. Je dois dire que je veux être assez prudent là-dessus, parce que, dans ce domaine, il y a parfois des avantages à être dans l'ambassade canadienne. Il y a tous les services, les dossiers sont là, c'est plus vite pour le candidat d'aller d'un étage à l'autre. J'en tiens compte, mais, dans certains cas, nous allons ouvrir des locaux à l'extérieur de l'ambassade canadienne, entre autres, à Lisbonne, très probablement, parce qu'il n'y a plus de place à l'ambassade canadienne, et, aussi, pour nous, c'est manifester peut-être un intérêt plus particulier pour ces pays. Il n'y a pas de politique arrêtée à cet égard. Je ne peux pas dire que, dorénavant, on va toujours être en dehors de l'ambassade canadienne. Cela dépend des pays en question et aussi des possibilités offertes au Québec.

M. Blank: Dans ces pays où on vous loge aux ambassades canadiennes, est-ce que vous payez un loyer ou si c'est gratuit?

M. Couture: On paie un loyer. Le détail de cela...

M. Blank: Seulement en général.

M. Marchand: Les frais de secrétariat.

M. Couture: ... je veux laisser... On paie un loyer, mais il y a des services communs qui sont offerts par l'ambassade canadienne. Nous payons les dépenses courantes. C'est le ministère des Affaires intergouvernementales qui paie à l'étranger, pas nous, c'est le gouvernement du Québec.

Fédération des minorités

M. Blank: Le 11 mars 1978, le Montreal Star a publié un article intitulé: "Minorities are planning their own federation". On veut créer une fédération permanente des minorités pour donner certains services aux immigrants, pour promouvoir le rapprochement entre les communautés, promouvoir la question de la langue, etc. Est-ce que le ministre est d'accord avec les objectifs de cette fédération? Est-ce qu'il y a eu une communication avec ces gens?

M. Couture: Je suis porté à respecter les initiatives des groupes ethniques. Je ne veux vraiment pas m'en mêler. Si les groupes ethniques veulent s'organiser en fédération — remarquez que cela existe, il y a des fédérations de groupes ethniques, plus d'une même — je ne veux pas intervenir là-dedans. Ce que je souhaite, c'est que l'organisation d'une fédération de minorités ou de groupes ethniques se fasse dans une perspective positive, dans un effort de rassembler des gens qui voudront mieux s'intégrer à la réalité dans laquelle ils vivent et non pas — je ne veux pas faire de procès d'intention ni porter un jugement — s'organiser simplement pour s'opposer à une réalité, à la société québécoise.

Je dois dire que j'ai eu beaucoup de contacts avec les milieux ethniques, depuis plusieurs mois, c'est une des priorités que je me donne de les rencontrer souvent. Je sens actuellement, dans plusieurs de ces milieux, une ouverture nouvelle; je pense qu'ils cherchent des moyens de s'associer à ce qu'on fait. Quand je dis "ce qu'on fait", c'est ce que la société québécoise leur offre, etc.

M. Blank: Est-ce que cette fédération est en communication avec le ministre?

M. Couture: Pas jusqu'à maintenant.

M. Blank: C'est-à-dire qu'il n'est pas question de subvention, si ce n'est pas demandé.

M. Couture: II est possible que cela arrive, parce que, souvent...

M. Blank: Au mois de mars cette année, vous êtes certainement au courant de l'affaire de "Ici Québec", avec l'article sur le sionisme qui a provoqué beaucoup de tension entre des Canadiens français et des Juifs. Est-ce que le ministre pourrait nous dire s'il y a eu des commentaires personnels de la part de la communauté juive sur cette question?

M. Couture: J'ai eu des commentaires personnels, une rencontre, pas directement à l'occasion de cet article, mais comme je suis disponible et que j'ouvre ma porte à n'importe quel groupe, des représentants de la communauté séfarade de Montréal sont venus me rencontrer quelques jours après la parution de cet article; ils m'ont fait état de leurs représentations et, à ce point-de vue, j'ai manifesté ma position ferme là-dessus, sans porter jugement d'aucune façon sur ce qui a été écrit, ce n'est pas mon rôle et, en ce qui me concerne, j'ai dit que jamais je n'adopterais d'attitude qui pourrait être qualifiée de raciste ou antisémite.

M. Blank: Vous n'avez pas jugé à propos de faire vos remarques en public, vos déclarations...

M. Couture: C'est-à-dire que... M. Blank: Les représentants....

M. Couture: Si on avait sollicité cette déclaration, je l'aurais faite, mais comme le ministre d'État au développement culturel avait fait la mise au point, ainsi que le ministre de l'Éducation et le premier ministre, cela me paraissait suffisant comme image de la position du gouvernement.

M. Bellemare: Le plus important, c'était que cela vienne du ministre de l'Immigration.

M. Couture: II est encore temps... Je la fais, elle devient publique.

M. Blank: En parlant de la question, il prend l'initiative. En parlant de la fonction publique... est-ce que le ministre prend des procédures spéciales pour essayer d'ouvrir la fonction publique aux immigrants?

M. Couture: C'est une bonne question.

M. Bellemare: Combien y en a-t-il? Il n'y en a pas un.

M. Couture: II y en a.

M. Blank: II y en avait un hier, le ministre de l'Industrie et du Commerce était ici...

M. Couture: Au ministère de l'Immigration, nous avons un bon nombre de fonctionnaires, surtout dans les COFI. Je n'ai pas le nombre exact, mais je pense que c'est le ministère qui fait le plus d'efforts pour... on a 40% des fonctionnaires qui sont des immigrants, nouveaux ou moins nouveaux. Je pense que ce ministère donne l'exemple.

M. Bellemare: 40% sur?

M. Couture: 40% sur 100%.

M. Bellemare: 40% sur le nombre d'employés...

M. Couture: On va vous donner des chiffres. On a 466...

M. Bellemare: 40% sur 10?

M. Couture: Non, sur 466... 40% c'est 85, à peu près, 85 fonctionnaires qui sont d'origine ethnique étrangère.

M. Blank: Est-ce que vous avez un programme spécial pour essayer de convaincre le ministre de la Fonction publique de faire de même dans d'autres ministères?

M. Couture: Oui, on me rappelle que j'ai écrit une lettre, il y a quelques mois, à la fonction publique pour continuer à faire mes représentations. D'ailleurs, le ministre a donné réponse à cette lettre. Je pense qu'on essaie, actuellement... Je peux vous assurer qu'il y aura des corrections prochainement.

M. Bellemare: C'est-à-dire une augmentation du pourcentage.

M. Couture: Oui, il y a un effort. Il y a même des directives dans certains ministères où on demande qu'il y ait une meilleure proportion, surtout, je pense, à l'Éducation.

M. Blank: Concernant les subventions, je constate qu'il y a des subventions aux garderies. De quelle façon le ministère s'y prend-il pour choisir ces garderies? Est-ce qu'il y a des critères?

M. Couture: II y avait des subventions aux garderies; on a aboli le programme de subventions aux garderies. La raison précise, c'est que, d'abord, je crois que la responsabilité des garderies au Québec, c'est le ministère des Affaires sociales qui doit l'assumer. Ce n'est pas au ministère de l'Immigration à entretenir ou à subventionner des garderies. C'est toujours dans la même cohérence philosophique. Si on veut que les immigrants, les groupes ethniques se sentent des québécois à part entière, je pense qu'ils doivent utiliser les ministères et les services qui sont offerts à tous les Québécois. La garderie, au Québec, relève du ministère des Affaires sociales.

Il y a une autre raison aussi, c'est qu'avec la loi 101, nous croyons que le rôle qui nous était assigné auparavant de les séduire, de préparer les immigrants, leur faire prendre conscience de la nécessité d'aller dans le réseau francophone à l'école, commençait par la garderie. C'est un peu cela qui était à l'origine des subventions aux garderies pour les groupes ethniques. On disait: Comme ils ont la liberté de choix pour l'école, pour les attirer à l'école francophone, on y va, par la garderie, par les parents qui viennent y conduire leurs enfants, ils chantent en français, ils parlent un peu français, ils balbutient en français, cela peut les inciter à envoyer leurs enfants à l'école francophone.

M. Bellemare: C'est mieux que de les séduire, parce que, dans le petit Larousse, les séduire...

M. Couture: Les séduire, au sens profond du mot... (12 h 15)

M. Bellemare: Oui, mais...

M. Blank: Avec le changement à votre loi 101. vous allez de "incitation" à "collusion".

M. Couture: Avec la loi 101, on ne sent plus la même responsabilité à l'immigration.

M. Blank: Oui. c'est parce que les gens sont forcés.

M. Couture: Ils ne sont pas forcés, ils sont prévenus et ils sont obligés. C'est le ministère des Affaires sociales, à mon avis, qui doit assumer cette responsabilité.

Subventions

M. Blank: Vous donnez tellement de subventions, à qui en donnez-vous? Qui fait le choix, quels sont les critères pour ces subventions? Quel est le montant global?

M. Couture: Pour ne pas m'étendre là-dessus, on peut déposer un document qui me paraît important: c'est la nouvelle politique de subvention du ministère de l'Immigration. C'est ce qu'on appelle la politique d'action concertée. Cela vous intéresse sans doute d'avoir ces documents.

C'est une politique qui a quatre volets: l'aide au fonctionnement des organismes, les activités d'adaptation: ce sont les comités québécois immigrants que j'ai mis sur pied. Une politique d'aide contractuelle sur des projets précis et le programme des langues ethniques. Nous allons vous laisser les documents sur cette politique, avec les critères généraux d'admissibilité et les marches à suivre pour recevoir la subvention. C'est le service de l'adaptation, ce sont les fonctionnaires qui administrent cela. Si cela peut vous rassurer — de toute façon, cela me fait plaisir de le dire — j'ai voulu dépolitiser les subventions du ministère.

Auparavant — et sans vouloir porter de jugement, je pense que chacun fait ses choix — je crois que c'était malsain que ce fût le ministre qui fût un peu l'interlocuteur, qui fût l'instrument de l'attribution des subventions.

M. Bellemare: Ce n'est pas le ministre qui émet les chèques.

M. Couture: Pas du tout. Ce n'est pas le ministre qui va donner le chèque non plus.

M. Bellemare: Ni le député de Vanier.

M. Couture: Ce sont les fonctionnaires. Nous avons établi notre politique. Les critères sont là. Nous l'avons élaborée. Nous en avons discuté avec l'exécutif. Nous l'avons acceptée. La politique est là, les fonctionnaires l'appliquent. Au lieu de venir voir le ministre, de faire toutes sortes de lobbying, les organismes savent à quoi s'en tenir. Ils vont voir les fonctionnaires et le programme est administré en conséquence. C'est public.

M. Blank: Allons-nous en avoir des copies? M. Couture: Oui.

M. Blank: Avez-vous une liste des subventions de l'année passée?

M. Couture: Oui, nous avons cette liste: les montants qu'ils ont reçus, le nombre d'organismes. Je pense que vous l'avez dans votre cahier.

M. Blank: Non.

M. Couture: Nous allons vous la donner.

L'an passé, il y avait moins de subventions que cette année. Cette année, les subventions sont augmentées de $500 000.

M. Blank: Avec les nouveaux critères? M. Couture: Avec les nouveaux critères. M. Blank: D'accord.

M. Couture: Vous avez les détails sur ceux qui ont reçu les montants, etc.

M. Blank: Avant que je continue avec mes autres questions, je pense que le député de Laurier a une question.

M. Marchand: M. le Président, je voudrais demander au ministre si, après la rencontre que vous avez eue avec les communautés grecques, le 30 septembre dernier, le ministère a établi des contacts nouveaux avec cette communauté qui semble un peu mécontente de l'approche du gouvernement vis-à-vis de la communauté grecque? Avez-vous l'intention d'améliorer les relations?

M. Couture: Je suis heureux de vous dire que, dimanche prochain, je vais au vélodrome. J'ai été invité à la grande manifestation annuelle des élèves qui donnent un spectacle.

M. Marchand: Oui, ce sont les olympiades pour la jeunesse.

M. Couture: Je suis l'invité d'honneur, le dimanche soir, au Reine Elisabeth, de la communauté grecque. Ce n'est pas que nos relations soient mauvaises. Loin de là. J'ai rencontré quelquefois certaines communautés, mais nous allons faire des efforts pour intensifier nos relations avec la communauté grecque.

M. Marchand: D'autres groupes ethniques vous ont-ils fait des revendications dans le même sens que celles des communautés grecques?

M. Couture: Non. À un moment donné, il y a eu la Fédération des groupes ethniques du Québec qui se plaignait que les relations n'étaient pas assez étroites avec le gouvernement. J'ai saisi l'occasion pour lui dire: Je n'ai pas eu d'invitation formelle. Je suis prêt à vous rencontrer en tout temps. J'ai rencontré le président deux fois. La fédération m'a invité à une conférence et à une discussion, c'est ce que j'ai fait dernièrement. Pour répondre à vos questions, il n'y avait que ce groupe qui avait apporté certains griefs. Pour les autres, on n'en a pas d'écho; au contraire, je pense que les gens sont satisfaits.

M. Bellemare: Est-ce que cela vient de Papa-christidis?

M. Marchand: Est-ce que... M. Couture: Pardon?

M. Bellemare: Est-ce que cela vient de Papa-christidis?

M. Marchand: Est-ce que le ministre a l'intention d'y aller par contact personnel plutôt que par le conseil consultatif?

M. Bellemare: II vient de nous le dire.

M. Couture: Le comité consultatif, c'est l'instrument au niveau des recommandations sur les objectifs du ministère. Je fais beaucoup de contacts personnels, en effet.

M. Blank: ... votre photo dans les journaux, chaque jour, chaque danse...

M. Couture: Là, ils sont en train de...

M. Blank: Vous prenez des cours de danse?

M. Couture: ... j'allais donner quelques anecdotes, mais je pense que ce n'est pas le lieu. Avec certains ministres fédéraux, on est en train de se rencontrer un peu trop souvent, cela devient compromettant, les ministres fédéraux féminins.

Immigrants et migrants

M. Blank: On a ici un ministre de l'Immigration, on aura de l'immigration au Québec, mais, sur l'autre côté de la médaille, l'émigration, les journaux parlent beaucoup de l'exode des Québécois. Le ministre pourrait-il nous dire s'il fait faire des études par son ministère en vue de connaître les causes de cet exode, ceux qui laissent le Québec? Est-ce que ce sont des Québécois ou des immigrants? Est-ce qu'il y a des études qui ont été faites9

M. Couture: II y a une étude qui a été commandée l'année dernière, à l'Université de Montréal. On aura le rapport final bientôt. L'étude portait sur les motivations des immigrants internationaux et les motivations des migrants canadiens. Cette recherche a été confiée au centre de sondage de l'Université de Montréal. L'enquête a été faite et les données préliminaires sont présentement disponibles.

Je vous donne les données préliminaires: Les résultats de l'enquête démontrent que, pour les immigrants internationaux, les motivations économiques sont importantes, mais non les plus importantes, et beaucoup d'autres motivations entrent en ligne; on a 29% pour les facteurs économiques; 9% pour les facteurs familiaux; 9% pour les facteurs juridiques et politiques; 2% pour les facteurs culturels; 0,9% pour les facteurs écologiques; goût de l'aventure et du voyage, 18%; étude pour étude, 10%; divers, 10%. Pour les migrants interprovinciaux, c'est-à-dire ceux qui partiraient du Québec pour aller ailleurs, les facteurs économiques comptent pour 53%. Je pense que cela nous permet de conclure ou d'arriver à une conclusion provisoire. C'est que c'est extrêmement important que la sélection des immigrants coïncide avec une bonne insertion dans la société québécoise, aux niveaux économique, culturel, etc.

Dès que l'immigrant ne reçoit pas ici ce a quoi il s'attendait ou ce qu'on lui a proposé, il ne reste pas.

M. Blank: Pensez-vous faire une étude ou des démarches spéciales pour que de vrais Québécois ne deviennent pas des immigrants en Ontario?

M. Couture: Je pense que le député de Saint-Louis aimerait qu'on oblige les gens à rester sur place; ce serait peut-être une façon un peu totalitaire d'intervenir.

M. Blank: C'est fait par les actes.

M. Couture: Ah! oui. À ce point de vue, je pense que notre préoccupation, c'est de donner le goût du Québec à tous les Québécois et le goût d'y rester. C'est dans ce sens qu'on travaille.

M. Bellemare: Est-ce que le ministre confirme les 76 000 qui sont disparus durant l'année?

M. Couture: Ce n'est pas 76 000, c'est 72 000 et c'est moins qu'en 1970, sous un gouvernement libéral.

M. Blank: II y avait des événements particuliers et on ne veut pas que cela se répète.

M. Couture: Bien, il y a toujours des événements particuliers.

M. Blank: Oui, il y en a eu le 15 novembre.

M. Couture: C'est un événement qui peut stimuler.

M. Blank: L'autre jour, à une question en Chambre, vous avez dit que vous feriez des démarches pour avoir une réponse; peut-être avez-vous la réponse aujourd'hui, cela concerne les médecins immigrants.

M. Couture: La réponse viendra, je peux demander a mon collègue des Affaires sociales de donner une réponse en Chambre là-dessus. Il y a un contingentement des résidents étrangers dans les hôpitaux du Québec, pas seulement pour les étrangers, pour les Québécois aussi. Alors, le ministère des Affaires sociales — c'est un constat — s'aperçoit qu'on en arrive à une saturation des médecins au Québec. Donc, on ne peut pas, d'une part, ouvrir les portes très larges aux médecins étrangers et leur assurer un poste ici et, en même temps, quand on arrive sur place, s'apercevoir qu'il y a trop de médecins.

Ce que nous allons faire, au ministère de l'Immigration — c'est déjà commencé — délibérément, c'est que nous décourageons toute entrée de médecins étrangers au Québec. S'ils veulent venir au Québec, nous les informons qu'ils peuvent venir au Québec — on ne peut pas empêcher quelqu'un de venir s'il passe la grille — qu'ils n'ont aucune assurance de pouvoir pratiquer au Québec.

M. Bellemare: Je vous encourage à les diriger vers la CAT.

M. Couture: Peut-être.

M. Bellemare: On en manque énormément.

M. Couture: J'en prends note.

M. Marchand: M. le ministre, au sujet...

M. Couture: Je voulais seulement finir ma réponse là-dessus. C'est qu'ici, il y a des cas plus tragiques de médecins qui sont au Québec et qui ont des difficultés à se placer, qui ont des difficultés a obtenir leur certificat, qui ne peuvent pas aller dans les hôpitaux. J'ai eu l'assurance du docteur Lazure, mon collègue, que les cas seraient étudiés un par un et, au niveau humanitaire, le ministère des Affaires sociales ne tiendra pas compte de son seuil de contingentement quand on peut trouver que certains cas devraient être acceptés dans les hôpitaux.

M. Marchand: En les dirigeant vers des centres éloignés, des grands centres, par exemple, vers les municipalités, est-ce qu'il n'y aurait pas une solution...

M. Couture: C'est cela qui...

M. Marchand: ... qui permettrait d'en accepter, parce qu'il ne faut quand même pas oublier que, pour les médecins résidents dans les hôpitaux, si vous calculez la proportion de nos médecins qui s'en vont étudier à l'extérieur, je pense qu'on peut calculer un pourcentage très fort au-

dessus de 70% et 80% de nos médecins spécialistes qui sont allés faire leur spécialité à l'extérieur du Québec et qui sont acceptés aux États-Unis, à Philadelphie, partout, à Londres, dans les grandes villes; il faut aussi faire attention que nos médecins soient aussi acceptés à l'extérieur pour aller...

M. Couture: Je pense que cela entre dans les bons échanges qu'on doit avoir entre pays, parce qu'on a beaucoup de Québécois qui s'en vont aux États-Unis comme résidents. Remarquez que c'est une responsabilité...

M. Marchand: Quand on met une clôture autour d'une province, on a des chances que les autres nous empêchent de traverser cette clôture pour aller là-bas.

M. Couture: Je suis tout à fait d'accord là-dessus. Il faut organiser les échanges.

M. Marchand: Ce qui est le danger, d'ailleurs, de la séparation du Québec.

M. Couture: Oui, mais l'association...

M. Marchand: Faire un ghetto québécois des Canadiens français dans un milieu de 250 millions.

M. Couture: Ce qui est l'avantage de l'association...

M. Marchand: L'association, vous avez de la misère à la faire seulement sur la taxe de vente.

M. Couture: On l'a faite sur l'entente en immigration, en tout cas.

M. Marchand: On verra ce que cela donnera. M. Couture: C'est déjà un bon départ.

M. Blank: M. le ministre, je voudrais vous poser une question sur le budget actuel. C'est une de mes dernières questions, parce qu'on doit terminer à 12 h 30, vous avez un caucus et je ne veux pas déranger vos affaires.

M. Couture: Je ne suis d'ailleurs pas certain qu'ils accepteraient.

Crédits

M. Blank: Vous avez parlé, au colloque sur l'immigration le 5 juin 1977, et vous l'avez affirmé en septembre 1977 dans le vieux Québec-Monde, même en octobre, le Droit a annoncé que le ministre était obligé de doubler le budget de son ministère consacré à l'information, et vous avez fait cela partout.

Après les nombreuses déclarations du ministre, il est apparu qu'il fallait donner de meilleures informations aux immigrants; le ministre pourrait-il nous expliquer pourquoi il y a une diminution de la catégorie communications dans tous les élé- ments, sauf l'élément 3, qui ne connaît qu'une faible augmentation de $50 000?

M. Couture: J'aime bien cela, M. le Président, quand les gens se plaignent qu'on n'a pas assez de budget. Continuez à parler dans ce sens, cela nous aide. On est tout à fait d'accord.

En ce qui concerne cette question précise, je dois vous dire qu'aux communications, nous avons deux nouveaux postes et nous avons dû augmenter le budget à cet effet. C'est cela qui est important, pour nous, comme priorité, c'est de se donner des instruments un peu plus étendus pour sensibiliser les Québécois à cette responsabilité par rapport à l'accueil aux immigrants.

Dans les autres éléments, il y a une diminution, et les raisons principales sont les compressions budgétaires en termes d'équipement et de fournitures. Par exemple, dans les COFI, nous avons à peu près les équipements nécessaires, on n'a plus besoin de faire des achats comme on en a fait il y a deux ou trois ans, donc cela a diminué le budget. Le budget n'est pas diminué pour des fins de communications, il est diminué au titre et au poste des équipements et des fournitures. Si vous voulez d'autres détails, on pourrait vous les faire parvenir.

M. Blank: Non, c'est correct. À Québec-Canada, en juin 1978, vous avez parlé de créer un mouvement populaire d'ouverture envers les nouveaux Québécois. Comment feriez-vous cela?

M. Couture: II y a un plan de communications qui a été fait au service des communications, lequel peut s'échelonner sur deux ou trois années à venir, où on voudrait, j'espère, à l'automne, commencer une campagne de publicité dans les grands media électroniques, entre autres, pour sensibiliser le Québécois à sa responsabilité vis-à-vis de l'immigrant et l'accueil qu'il doit développer face à l'arrivée des immigrants. Ce plan, je pourrais aussi vous le transmettre, si cela vous intéresse, éventuellement, mais nous planifions en conséquence, nous allons le faire. Nous avons cela dans le... (12 h 30)

M. Blank: Une dernière question.

M. Bellemare: C'est vous qui l'avez.

M. Blank: On voit beaucoup d'actions populaires ici. J'espère que vous changerez...

M. Couture: Êtes-vous contre les actions populaires?

M. Blank: Non, mais je veux qu'il y ait un équilibre, des deux côtés de la médaille.

M. Couture: C'est quoi, l'équilibre, par rapport à populaire? Est-ce impopulaire?

M. Blank: Pas impopulaire, mais des gens qui professent une idéologie un peu différente.

M. Bellemare: Différente, oui.

M. Couture: Mais là, vous portez des jugements sur ces groupes populaires.

M. Blank: Ils sont tous dans mon comté. Je les connais tous. D'accord. De mon siège, ici, je garantis que les subventions sont plus de 50% vers le côté gauche et au centre et rien à droite.

M. Couture: C'est peut-être parce que c'est à la gauche qu'il y a le plus de militantisme.

M. Blank: Je ne dis pas qu'ils ont raison, mais nous, on leur donne de l'argent.

M. Couture: M. le Président, je n'aimerais pas qu'on porte des jugements sur les groupes comme tels. Si on respecte l'autonomie des groupes, s'ils sont des partenaires pour le ministère de l'Immigration, qu'ils remplissent les critères de notre politique de subventions, nous n'avons pas à faire des...

M. Blank: Quels étaient vos critères à ce moment-là?

M. Couture: L'année dernière, les critères ressemblaient passablement à ceux que nous avons cette année, sauf que nous n'avions pas un budget de fonctionnement comme tel pour les groupes de Néo-québécois. C'était seulement pour les groupes québécois.

M. Marchand: Est-ce que le ministre pourrait déposer les critères de cette année et de l'an passé?

M. Couture: Nous l'avons fait tout à l'heure.

M. Blank: Seulement une dernière question. M. Vigneault est ici. Il a parlé d'un vieux Québec Monde, disant que les COFI ont une clientèle potentielle de 40%. Sur quoi cette estimation est- elle basée? Il peut répondre, s'il veut. Je n'ai pas d'objection.

M. Couture: M. Vigneault, prenez donc la parole.

C'est basé sur une étude que nous avons faite. La clientèle potentielle pour nous, c'est sur l'ensemble des immigrants qui ont entre 18 et 60 ans et qui sont considérés comme la population active, c'est-à-dire de la population qui se dirige vers le marché du travail. Or, nous avons compté combien il en arrivait au Québec chaque année et, de ceux-là, nous avons fait une proportion par rapport au nombre de ceux qui, officiellement, étaient acceptés par les CMC pour se diriger vers les COFI. C'est dans ce sens que nous sommes arrivés à ce chiffre.

M. Blank: D'accord. Merci pour moi et mon collègue.

Le Président (M. Jolivet): Élément 1, adopté. M. Blank: Adopté.

M. Bellemare: Adopté.

Le Président (M. Jolivet): Elément 2. adopté.

M. Bellemare: Adopté.

Le Président (M. Jolivet): Elément 3. adopté. Programme 1, adopté. Je clos les débats de cette commission et je remercie les membres de cette assemblée.

M. Blank: À l'année prochaine.

M. Couture: Merci, chers collègues. À l'année prochaine.

Le Président (M. Jolivet): Le programme est donc adopté au complet. Les travaux de cette commission sont ajournés sine die.

(Fin de la séance à 12 h 33)

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