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Etude du projet de loi no 77
(Dix heures douze minutes)
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît!
La commission de l'immigration se réunit pour étudier
article par article le projet de loi no 77 conformément au mandat de
l'Assemblée nationale.
Les membres de la commission pour la présente séance sont:
M. Alfred (Papineau), M. Bro-chu (Richmond), M. Ciaccia (Mont-Royal), M.
Couture (Saint-Henri), M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Laplante (Bourassa), M.
Marcoux (Rimouski) en remplacement de M. Lefebvre (Viau), M. Blank
(Saint-Louis) en remplacement de M. Marchand (Laurier), M. Boucher
(Rivière-du-Loup) en remplacement de M. Martel (Richelieu). Les
intervenants: M. Bellemare (Johnson), M. Marchand (Laurier), M. Charron
(Saint-Jacques), M. Lessard (Saguenay), M. Roy (Beauce-Sud), Mme Lavoie-Roux
(L'Acadie) en remplacement de M. Saindon (Argenteuil), M. Samson
(Rouyn-Noranda) et M. Vaugeois (Trois-Rivières).
Conformément à une tradition établie, je vais
permettre aux représentants de chaque parti, avant d'appeler l'article
1, de faire une déclaration d'ouverture, si on peut l'appeler ainsi, et,
par la suite, j'appellerai l'article 1. Je vais vous dire également que
ce droit est accordé non seulement aux représentants des partis,
mais à tous les députés, conformément à
l'article 160, et après, ce sera l'appel de l'article 1. M. le
ministre.
Une Voix: Vous nommez un rapporteur?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Ah oui!
c'est vrai, la nomination du rapporteur. M. Boucher
(Rivière-du-Loup)?
M. Boucher: D'accord.
Remarques préliminaires M. Jacques
Couture
M. Couture: M. le Président, permettez-moi d'abord de
souhaiter la bienvenue aux membres de la commission parlementaire qui auront,
dans les prochaines heures, à travailler avec moi pour étudier,
bonifier, s'il y a lieu, le projet de loi no 77. Ce projet de loi s'inscrit
nettement dans la volonté du gouvernement de donner un cadre juridique
à une entente qui a été signée par notre
gouvernement avec le gouvernement du Canada, le 28 février dernier.
Cette entente donne pour la première fois au gouvernement du
Québec la possibilité d'exercer des pouvoirs réels en
matière de sélection des ressortissants étrangers qui
souhaitent s'établir au Québec à titre permanent ou
temporaire. Je crois que nous avions à l'époque recueilli
l'unanimité de l'Assemblée nationale pour se féliciter de
cette entente. (10 h 15)
Nous y voyons, quant à nous, une démonstration
éclatante de notre capacité de négocier avec d'autres
gouvernements et aussi de notre volonté et capacité de
revendiquer dans la continuité des besoins du Québec et dans la
continuité de cette longue série de récupérations
des pouvoirs au Québec. Nous avons, je pense, par cette entente,
prouvé que nous étions fidèles à cette
continuité et que nous étions aussi orientés vers
l'avenir.
Je ne veux pas m'étendre sur ce qui a été dit
longuement au débat en deuxième lecture. Je veux quand même
bien situer ce projet de loi et bien identifier quels étaient nos
objectifs en l'apportant à l'Assemblée nationale. Cette entente
qui nous commandait la mise en vigueur à partir du 1er janvier 1979 nous
commandait aussi de rester finalement assez modestes dans cette première
étape d'intervention gouvernementale en matière d'immigration.
Quand je dis modestes, c'est dans le sens suivant: tous ceux qui ont
l'expérience j'ai d'éminents collègues autour de la
table qui l'ont prouvé et qui en ont l'expérience de la
complexité des lois d'immigration savent très bien que si un
gouvernement, une collectivité, une société veut se donner
ses pouvoirs et veut élaborer une politique complète dans cette
matière, cela, nécessairement, prend de longs mois, sinon
plusieurs années. L'exemple du fédéral là-dessus
est assez éloquent; la loi C-24 a demandé presque cinq ans de
travail, je pense, de longue main, de consultations, et deux ans de travail
acharné en commission parlementaire, au Sénat et en Chambre.
C'est ce qui me fait dire que notre projet de loi 77 est vraiment, pour nous,
une étape et est aussi je dirais un premier type
d'intervention en matière d'immigration. Je l'ai dit au débat en
deuxième lecture et je le répète. Je pense que cela peut
éclairer, peut-être, la modestie de ce projet et aussi
l'orientation que nous voulons donner à l'immigration au
Québec.
Je pense, en effet, qu'il est justifié, à la suite de
cette entente, de se donner rapidement un cadre législatif nous
permettant d'appliquer l'entente en acceptant d'avance que le gouvernement du
Québec, dans un premier temps, ne s'écartera pas, d'une
façon très large, très évidente, de la politique
fédérale qui a une expertise de nombreuses années au
Canada, en cherchant bien à identifier, par l'entente même, ce
qu'on attend du gouvernement du Québec et de quelle façon nous
pouvons y inscrire notre spécificité québécoise, y
inscrire à l'avance certaines orientations pour l'avenir.
Je peux vous dire aussi je l'ai déclaré plusieurs
fois que nous avons l'intention de travailler pendant plusieurs mois,
peut-être dans le cadre des deux prochaines années, à
l'élaboration d'une charte québécoise de l'immigration,
c'est-à-dire qu'il est évident que le fait, pour le
Québec, d'exercer des pouvoirs, le fait, dans les prochains mois,
d'acquérir de l'expertise, le fait de découvrir progressivement
parce que ce sera relativement nouveau pour le gouvernement
québécois d'être présent dans l'exercice des
pouvoirs en immigra-
tion à l'usage, ces besoins québécois, le
fait de chercher aussi à vouloir raffiner cet instrument d'immigration
selon les besoins de la société québécoise nous
aideront, à plus long terme, à mieux circonscrire les objectifs
de notre politique et, effectivement et éventuellement, à
préparer un grand projet de loi québécois de
l'immigration.
Il restera toujours que dans le cadre fédéral actuel
je pense, M. le Président, que vous me permettrez de le rappeler
ces pouvoirs resteront toujours soumis à des contraintes
évidentes. Quelle que soit la volonté politique du Québec
d'intervenir d'une façon efficace et complète en matière
d'immigration, dans le cadre actuel du fédéralisme ce que
l'entente, d'ailleurs, elle-même prescrit le dernier mot, en tout
état de cause, restera toujours au gouvernement fédéral,
ne serait-ce que pour l'émission des visas qui est assortie de
dispositions statutaires au niveau de la santé et de la
sécurité nationale.
J'ai dit assez longuement en deuxième lecture que, pour nous,
c'étaient des contraintes importantes qui nous empêchaient
peut-être d'ambitionner une politique d'immigration réellement
satisfaisante pour le Québec.
Je pense, M. le Président, que tous connaissent nos objectifs
politiques. Pour nous, tout en restant fidèles à cette
continuité dont je parlais tout à l'heure, tout en voulant aussi
démontrer comme gouvernement que nous étions capables de
revendiquer ou de défendre les droits du Québec et d'aller
chercher le maximum de pouvoirs dans ces champs de juridiction je pense
que tous ceux qui ont commenté l'entente ont, à bon droit,
signalé que, dans ce domaine-là, le Québec était
allé vraiment à la limite de ses possibilités et cela est
tout à l'honneur de notre gouvernement tout en étant
fidèles à cette volonté de récupérer les
pouvoirs et c'est ce que nous avons fait nous voulons quand
même, pour l'avenir et c'est le peuple québécois qui
le décidera éventuellement dans un Québec
souverain, pouvoir contrôler complètement l'immigration qui est un
instrument extrêmement important pour une société.
Il est inutile de rappeler ce que plusieurs de mes collègues ont
dit des deux côtés de la Chambre, à quel point, pour une
société donnée, c'est important d'utiliser cet instrument
selon des besoins réels, bien identifiés et aussi qui
répondent aux intérêts mêmes des ressortissants
étrangers qui veulent venir sur notre territoire.
Je ne veux pas m'étendre trop longuement. Je veux rappeler que
j'ai profité comme c'était ma responsabilité
du débat de deuxième lecture pour recueillir des suggestions des
membres de la Chambre. Cela m'a permis de réfléchir sur certaines
dispositions et je serai heureux, à l'occasion de l'étude des
articles, d'apporter certains amendements qui, je le crois et je
l'espère, pourront satisfaire les membres de cette commission
parlementaire et l'Assemblée nationale.
Evidemment, nous aurions pu ouvrir complètement la loi et nous
lancer dans une grande loi d'immigration, mais c'était tout à
fait impossible avec le temps dont nous disposons et les
échéances imposées par l'entente. J'ai été
heureux d'entendre en Chambre que l'Opposition reconnaissait qu'il était
important de ne pas hypothéquer cette entente-là. L'Opposition
m'avait assuré de sa collaboration pour pouvoir compléter ce
projet de loi dans les délais prescrits.
Alors, ce choix que nous avions c'était d'ouvrir la loi,
peut-être d'une façon un peu trop vite et d'introduire une
série de choses qui n'auraient pas été satisfaisantes. On
sait à quel point, avec cette loi, plus on avance dans cette
possibilité d'intervention, plus on a le goût d'aller plus loin.
Je me réserve je le dis d'une façon précise
avec la collaboration de toute la Chambre pour les prochains mois et aussi avec
les milieux concernés, suite à l'expertise que nous allons nous
donner, à l'usage que nous aurons de l'intervention en matière
d'immigration, je me réserve la possibilité de préparer,
avec beaucoup d'intervenants, dans la société
québécoise, cette charte de l'immigration.
Pour le moment, malgré tout, je crois qu'on peut préciser
certaines dispositions de cette loi. C'est ce que je me propose de faire en
vous proposant quelques amendements, sous réserve de ne pas pouvoir
certainement contenter tout le monde et même pas nous, mais en nous
disant que l'objectif de cette loi, il est modeste, c'est de donner un cadre
juridique à l'entente qui a été signée en
février dernier, et que nous restons sur le chantier pour
préparer éventuellement cette grande loi de l'immigration du
Québec.
J'ajouterais aussi que, par l'entente, nous sommes, quand même,
liés, d'une certaine façon, aux dispositions
fédérales et par la formation de ce comité mixte qui est
prévu par l'entente. Nécessairement, notre loi devrait être
appliquée en coordination aussi avec les dispositions
fédérales.
Je termine mon exposé, M. le Président, en rappelant
peut-être que ce que nous travaillons ici, ensemble, a beaucoup
d'importance pour un nombre considérable de citoyens du Québec,
dans l'état actuel de la situation démographique. Tout
simplement, en regardant un peu vers l'avenir, qu'est-ce qui nous attend comme
société? Je crois qu'on a tout intérêt à
penser à l'importance de plus en plus grande qu'aura l'immigration comme
instrument de développement économique, culturel et
démographique de notre société. Donc, je me
félicite d'avance de la collaboration des membres de cette commission
pour que nous débordions peut-être des attitudes qu'on aurait le
goût de garder partisanes et de penser davantage aux objectifs plus
généraux de notre société
québécoise.
Aussi, comme pendant à ce que je viens de dire, je veux rappeler
qu'il y a des milliers et des milliers de citoyens dans le monde qui n'ont plus
de patrie, des milliers et des milliers de citoyens qui, pour des raisons
économiques, cherchent une nouvelle patrie. Notre terre
québécoise est vaste; notre population est, comparativement au
territoire, de volume relativement modeste. Nous som-
mes capables de contribuer à accueillir un nombre assez
raisonnable, du moins suffisant et assez important, de ressortissants
étrangers qui n'attendent que notre volonté politique d'accueil,
notre volonté politique de solidarité internationale pour
contribuer, avec d'autres sociétés du monde, à l'accueil
des immigrants pour leur bonne intégration dans la société
québécoise.
On sait qu'il y a de 8 millions à 10 millions de
réfugiés dans le monde, qu'il y a, par exemple, au Portugal, 80
000 Portugais qui veulent émigrer, et c'est la même chose dans
chaque pays du monde et dans les pays du Tiers-Monde. C'est notre
responsabilité comme parlementaires responsables de garder à
l'esprit ces objectifs et pour notre société
québécoise et pour ceux qui frappent à notre porte qui
attendent de nous des gestes qui ne sont peut-être pas
complètement satisfaisants pour le moment, mais en sachant très
bien que, pour nous, c'est une étape importante que nous voulons bien
réussir. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt (Jonquière): Merci.
M. le député de Mont-Royal.
M. Blank: J'ai une question avant.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci.
M. le député de Mont-Royal.
M. Blank: J'ai une question avant.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui.
M. Blank: Ce n'est pas une question de règlement. Je
constate que tous les membres gouvernementaux de cette commission ont des
dossiers qui ont été préparés. Si ces dossiers ont
été préparés par le département de
recherche, ils y ont droit. Mais, s'ils ont été
préparés par le ministère, pourquoi les autres
députés ne les ont-ils pas?
M. Couture: Je n'ai pas d'objection à ce qu'on vous donne
des explications sur les amendements à mesure qu'ils arriveront. On vous
donnera les explications de ces amendements qui ont été
préparés pour la loi.
M. Blank: Non, je pose une question très directe.
M. Couture: C'est parce que...
M. Blank: Je conçois que tous les membres ont tous un
dossier.
M. Couture: D'accord, mais...
M. Blank: S'il a été préparé par le
département de recherche du Parti québécois...
M. Couture: Parfaitement.
M. Blank: ... vous avez absolument le droit. Mais, si c'est le
ministère qui l'a préparé, je pense que nous aussi on a le
droit de l'avoir.
M. Couture: Je vous réponds précisément
là-dessus. Pour la partie préparée par le
ministère, on vous les donne. Mais, dans le dossier, il y a aussi une
partie politique qui est faite par le cabinet; donc, vous comprenez qu'on se
réserve cette partie-là. Alors, je suis d'accord qu'on distribue
aux membres de la commission ce qui est préparé par le
ministère qui est l'explication des articles et des amendements. (10 h
30)
M. Blank: Je pense qu'on a au moins droit à cela. D'un
autre côté, pour ce qui est préparé par le cabinet,
il y a une différence entre le cabinet et le service des recherches.
M. Couture: Le cabinet politique, c'est en dehors du
ministère comme tel.
M. Blank: Ce n'est pas pire que pour les fonds de recherche du
Parti québécois.
M. Couture: M. le Président!
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Blank: Je ne fais que constater cela, et on va voir si on doit
aller plus loin.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Mont-Royal.
M. John Ciaccia
M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Nous voulons assurer
le ministre de notre collaboration pour ce projet de loi. Nous n'avons pas
l'intention de faire des procédures qui puissent causer des
délais. On connaît l'échéancier de l'entente qui
doit être mise en vigueur à la fin de l'année. Alors, nous
avons l'intention de l'étudier et de le bonifier de bonne foi. Nous
avons approuvé l'entente mais nous voulons nous assurer, par exemple,
que le projet de loi reflète les termes et conditions de cette
entente.
Tantôt, vous avez dit que votre projet de loi était une
étape, que ce n'était pas le temps de faire une charte de
l'immigration mais, quand même, il y a certains principes de base qui
doivent être inclus dans le projet de loi. Même si ce n'est pas la
grande charte que vous espériez avoir, l'effet est que cela ne peut pas
être non plus un chèque en blanc à un ministre pour faire
des règlements sans inclure certains principes que nous
considérons importants.
Le ministre a dit tantôt que vous aviez certaines restrictions et
vous avez parlé de l'avenir d'un Etat souverain. Eh bien, c'est notre
préoccupation! Nous voulons que le projet de loi reflète
l'entente mais pas vos aspirations politiques de l'avenir. Si
jamais cela vient à se concrétiser, vous modifierez le
projet de loi. Vous dites que vous avez des restrictions de la part du
gouvernement fédéral dans le projet de loi. Franchement, quand
vous avez le droit de veto de décider qui va venir au Québec ou
non, je ne sais pas quel pouvoir de plus vous voudriez avoir.
Je vous fais ces remarques en réponse à vos propos au
moment où vous discutiez de cette entente. D'un point de vue, vous
dites: On va discuter du projet de loi sans partisanerie et, de l'autre point
de vue, vous nous donnez vos vues sur l'avenir politique du Québec, sur
l'Etat souverain. Je pense bien qu'on n'étudiera pas le projet de loi
dans cette optique mais dans l'optique de l'entente que vous avez
signée.
Ce n'est pas notre intention de faire des procédures pour causer
des délais qui ne sont pas nécessaires, mais je vais vous
énumérer le genre de principes, de clauses qui devraient
être inclus dans le projet de loi. On va vous donner les raisons pour
lesquelles on veut les inclure et, si vous ne les acceptez pas, vous avez la
majorité, c'est vous qui devrez en subir les conséquences. Nous
voulons voir inclus dans ce projet de loi certains objectifs parce que
maintenant on ne sait pas si le gouvernement est en faveur ou contre
l'immigration. Le projet de loi ne le reflète pas.
Nous voulons avoir une référence et l'inclusion de
certains critères de sélection pour que votre pouvoir de
réglementation ait un cadre. Dans toute loi, il y a un pouvoir de
réglementation, mais, dans la majorité des lois, ce pouvoir se
situe dans le cadre de certains principes. Tel que le projet de loi est
rédigé maintenant, ce cadre n'existe pas. Nous voudrions, sans
vous enlever totalement le pouvoir de réglementation parce qu'on sait
que c'est nécessaire, le situer dans une certaine perspective dans
laquelle vous pouvez faire vos règlements. Nous allons insister sur
l'aspect non discriminatoire du processus de sélection. C'est un
principe très important pour nous et inutile de nous dire que la Charte
des droits de l'homme s'applique au Québec et qu'elle a
préséance sur la loi. La Charte des droits de l'homme ne
s'applique pas. Il y a des doutes quant aux critères de sélection
et, pour enlever tout doute dans l'esprit de ceux qui vont lire la loi et dans
l'esprit de l'Opposition qui est très préoccupée par cet
aspect, nous allons insister et demander au ministre d'inclure cette clause
dans le projet de loi.
Nous voulons aussi avoir une référence à quelques
endroits dans ce projet de loi à l'entente. Qu'on dise que, vraiment,
c'est pour donner effet à l'entente qui a été
signée entre le ministre et le gouvernement fédéral. Nous
voulons aussi voir spécifier le rôle du Conseil consultatif. Il ne
s'agit pas seulement de le créer et de le laisser là pour
l'appeler quand le ministre le jugera bon de le consulter. Nous voulons lui
voir un rôle un peu plus positif. La raison, M. le Président, pour
laquelle je donne ce résumé de ce que nous voulons voir inclus
dans le projet de loi, c'est spécifiquement pour éviter les
débats procéduriers. Sur certains des amendements que nous allons
proposer, on peut toujours soulever des questions de procédure. Je
voudrais que vous le preniez dans cet esprit et, si vous êtes en faveur
du fond de l'amendement, du changement que nous proposons, qu'on le
discute.
Si vous n'êtes pas en faveur, dites-le-nous sans soulever de
débat d'une journée et demie sur la procédure, du genre:
Est-ce que le préambule, on peut le discuter avant ou après?
Est-ce qu'on a le droit d'éliminer certains articles? On connaît
ces règlements. On voudrait les éviter, je pense, des deux
côtés de la table. Vous avez un certain échéancier.
On veut vous aider à le respecter, mais on veut aussi faire les
observations nécessaires sur les différents aspects du projet de
loi qu'on veut faire modifier.
Vous avez dit aussi que vous ne vous écartiez pas de la politique
fédérale. On n'est pas ici pour s'assurer que la politique
fédérale est reflétée dans le projet de loi. S'il y
a des points qui sont bons dans la loi fédérale, on va les porter
à votre attention, mais il y aussi une marge où la politique
fédérale de l'immigration peut s'améliorer. Je pense que
si c'est possible, on devrait pouvoir le faire. Nous n'allons pas être
liés dans ce sens. On va le faire dans le contexte des lois existantes,
mais je crois que les lois existantes sont assez flexibles pour...
M. Couture: Est-ce que vous me permettez juste une petite
correction?
M. Ciaccia: Oui.
M. Couture: Je n'ai pas dit qu'on ne s'écartait pas de la
politique fédérale. J'ai dit que l'entente nous obligeait
à rester dans un cadre qui respecte globalement certains cadres de la
politique fédérale. Nous y sommes obligés par l'entente.
Ce n'est pas une volonté politique de suivre la politique
fédérale. Au contraire!
M. Ciaccia: Mais vous avez aussi une certaine marge. Il y a
certains...
M. Couture: Oui, je sais bien. C'est dans cette marge-là
qu'on travaille.
M. Ciaccia: Très bien. On s'est compris. C'est l'esprit,
M. le Président, dans lequel nous allons aborder l'étude de ce
projet de loi. J'espère que le ministre aura un esprit ouvert aux
amendements que nous allons apporter, pour être conformes et consistants
avec l'ouverture d'esprit qu'il propose lui-même dans le domaine de
l'immigration.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci,
M. le député de Mont-Royal. M. le député de
Richmond.
M. Yvon Brochu
M. Brochu: Merci, M. le Président. Simplement quelques
commentaires au début de nos travaux aujourd'hui. D'abord,
premièrement, pour
m'excuser aussi, au niveau de la deuxième lecture, d'avoir
dû m'absenter. J'étais à l'extérieur à ce
moment. Le député de Gaspé, M. Le Moignan, a
représenté l'Union Nationale et a d'ailleurs fait un certain
nombre de commentaires et de suggestions au ministre, sur lesquels nous aurons
l'occasion de revenir tout au long de nos travaux à cette commission
parlementaire. Le projet de loi 77 s'inscrit donc dans le cadre de cette
entente à laquelle le ministre a fait référence tout
à l'heure, en indiquant l'unanimité également qu'il y
avait eue autour de cette entente à l'époque, celle du 28
février dernier. Je pense que cela a été un moment
important. Cela a aussi indiqué que lorsqu'on peut obtenir un consensus,
si on peut obtenir une homogénéité de pensée, une
unité de pensée et d'objectif sur certains problèmes, sur
certains sujets, il est possible, avec une force beaucoup plus grande,
d'obtenir du pouvoir central les pouvoirs qu'on juge nécessaires d'avoir
au Québec dans différentes matières et plus
particulièrement dans le domaine de l'immigration. On se rappelera que
dès la création du ministère de l'Immigration, en 1968,
sous l'administration de l'Union Nationale à ce moment-là, le
coup d'envoi a été donné dans ce sens pour souligner
l'importance de la juridiction provinciale en matière d'immigration.
J'ai aussi eu l'occasion de souligner à ce moment que l'entente qui est
survenue s'inscrivait exactement dans cette foulée de ceux qui ont
créé le ministère de l'Immigration et qui ont voulu en
reconnaître l'essence même, lui donner une portée en
fonction de la nation québécoise, ce à quoi on peut
s'attendre et ce qu'on peut revendiquer à juste titre. Il fallait donc
démontrer qu'à l'intérieur aussi du cadre de la
Confédération actuelle, qui est discutable, on le sait, et qui
est aussi discutée, on peut arriver à modifier les règles
du jeu pour donner aux partenaires en présence les domaines de
juridiction qui doivent et qui peuvent être en leur pouvoir
d'exercer.
Je pense que cela a été une démonstration
éloquente et une réussite à ce chapitre qui doit
être soulignée. Nous aurons, au cours des discussions à
venir, certaines suggestions à faire et certaines questions à
poser au ministre. Je n'ai pas l'intention, à ce stade-ci, d'entrer dans
les détails sur la réglementation du projet de loi en question.
Je me réserverai d'autres commentaires et d'autres questions au cours de
la discussion que nous aurons.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci. Y
a-t-il d'autres députés qui veulent intervenir?
M. Blank: Certainement.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Saint-Louis.
M. Harry Blank
M. Blank: Je constate que le ministre encore aujourd'hui, comme
il l'a fait en deuxième lecture, se plaint du fait que par cette entente
à ce moment-ci, dans le contexte politique du Canada, il n'a pas les
pleins pouvoirs, il n'a pas le contrôle absolu de l'immigration. Je
répète ce que j'avais dit dans mon discours de deuxième
lecture: je trouve très curieux que le ministre n'ait pas changé
d'idée encore; il est en contradiction avec le premier ministre dans sa
description de la souveraineté-association alors qu'il dit vouloir un
mouvement libre de la population et même un passeport en commun. Pour
avoir un passeport en commun et un mouvement libre de la population, je ne vois
pas comment on peut avoir un contrôle absolu. Je trouve que cela est en
contradiction avec les propos du premier ministre. Je pensais qu'en
deuxième lecture la parole du ministre avait peut-être
dépassé sa pensée. Cela a l'air qu'il se
répète et je vois que nous ne sommes pas plus renseignés
sur cette question de souveraineté-association vis-à-vis de
l'immigration qu'avant.
Deuxièmement, le ministre a parlé des huit millions de
réfugiés dans le monde. Je suis d'accord avec lui, la question
des réfugiés je parle des huit millions de
réfugiés est un problème très aigu à
ce moment-ci. Je suis très heureux qu'on ait réagi un peu; dans
cette loi-ci, on donne la définition d'un réfugié. J'ai
trouvé que les conditions dans la convention de Genève
étaient un peu trop à droite.
Si on lit les journaux aujourd'hui, il y a un cas bien particulier,
celui de 2500 réfugiés vietnamiens qui sont sur un bateau devant
Portland. Ce sont presque tous des gens de culture française. Le
ministre ne pourrait-il pas faire des démarches au fédéral
pour essayer d'avoir ces 2500 personnes et sauver leur vie? Cela prendrait
environ six semaines au bateau pour arriver ici, au Québec, ce serait le
1er janvier 1979. Le ministre aurait le pouvoir de les laisser entrer. Je pense
que ce serait un geste très positif de la part du ministre et de la
province de Québec que d'aider ces gens-là qui, à ce
moment-ci, sont entre la vie et la mort. Il n'y a pas un pays au monde qui veut
les aider. Les Nations Unies font des plaidoyers ici et là. Ce serait
une occasion idéale de démontrer que nous avons un esprit
très ouvert ici, au Québec, et que nous sommes prêts
à accepter ces 2500 vietnamiens qui sont mourants sur ce bateau.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Bourassa.
M. Patrice Laplante
M. Laplante: Je n'ai pas eu la chance de me prononcer beaucoup
sur la deuxième lecture du projet de loi à l'Assemblée
nationale quoique j'aie environ 20% de personnes d'origine ethnique dans mon
comté de Bourassa. (10 h 45)
Le projet de loi no 77, pour moi, est un début. C'est un
début de respect pour l'immigrant qui, déjà, avant de
partir pour le Québec, saura à quoi s'en tenir. Pour moi, c'est
une des phases importantes du projet. Il y a aussi le respect de la famille.
Souvent, à toutes les semaines, je reçois
des membres de groupes ethniques qui veulent faire venir leur
père, leur mère, les frères, les soeurs. C'est très
difficile à ce moment-ci de les faire venir parce que les
critères, actuellement, dans une loi fédérale, sont
restreints suivant l'économie du pays. Il reste, en somme, une grande
difficulté pour ces gens-là de pouvoir faire venir leur
parenté.
Je suis certain que le projet de loi est très bien vu dans le
milieu. J'en ai discuté avec quelques-uns d'entre eux; ils ont
hâte qu'il soit en application. On nous demande actuellement j'en
ai encore reçu à mon bureau lundi si la loi 77 est
déjà en vigueur. On espère qu'elle le sera le plus
tôt possible parce qu'on la voudrait efficace pour tous ces
gens-là. Pour moi, un immigrant est immigrant au moment où il
arrive ici au Québec, et dès l'instant où il commence
à travailler, à prendre nos transports, à faire son
marché comme tout le monde, il n'est plus un immigrant. Il est devenu un
résident du Québec qui, déjà, apporte sa part
à notre communauté dans l'économie.
M. le député de Mont-Royal, tout à l'heure, disait
comment on favorisait l'immigration. Vous aviez un doute là-dessus,
à savoir si on voulait réellement de l'immigration.
M. Ciaccia: Je n'ai pas dit cela...
M. Laplante: C'était dans ce sens-là...
M. Ciaccia: Non, c'était dans le sens que le projet de loi
ne dit pas s'il a comme objectif de la favoriser ou non. Je sais que le
ministre est favorable à l'immigration, mais quand on lit le projet de
loi, on ne voit pas si dans ses objectifs...
M. Laplante: Les textes précisent... D'accord.
M. Ciaccia: ... il est pour ou contre. Je me limitais au projet
de loi.
M. Laplante: D'accord, mais pour enlever toute
ambiguïté, je ne crois pas qu'il y en ait un autour de la table,
ici, qui ne soit pas favorable à l'immigration. Une immigration, en
somme, qui va aussi de pair avec l'économie du pays. On ne peut faire
venir des gens ici pour les priver de nourriture, de vêtement ou de
logement si on n'a rien de cela à leur offrir. A l'immigrant qui vient
ici, on doit aussi offrir le pain. Je suis sensible de ce
côté-là, parce que c'est un droit naturel. On n'a pas
besoin d'inscrire dans le projet de loi le texte des droits de l'homme. En
somme, cela est reconnu par une loi et le bill des droits de l'homme a
priorité sur n'importe laquelle des lois.
Je ne prendrai pas plus de temps. Le député de Mont-Royal
disait aussi de s'inspirer de la loi fédérale si elle est bonne.
Je suis complètement d'accord avec le député de Mont-Royal
là-dessus. Si des articles de loi sont bons dans la politique
fédérale ou dans la politique américaine, n'importe
où au monde où il y a des lois d'immigration dont ont peut
s'inspirer, je pense que c'est avancer, ce n'est pas un recul qu'on peut faire.
Il ne faut pas être gêné d'aller fouiller dans ces
lois-là et de les inscrire dans nos textes.
Sur cela, M. le Président, je vous remercie de la courte
intervention que j'ai pu faire. On est prêt à commencer.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui?
Mme Lavoie-Roux: Je voudrais seulement dire un mot. Je n'ai pas
de commentaire préliminaire à faire. J'entendais le
député de Bourassa qui disait: Enfin, on va pouvoir favoriser les
familles, etc. Je tiendrais quand même à rectifier... Oui, oui, je
suis dessus, M. le ministre, ne vous inquiétez pas...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Ce n'est
pas de cela qu'on parle. J'ai deux oreilles.
Mme Lavoie-Roux: Deux oreilles, bon d'accord. Je tiendrais quand
même à rectifier le fait qu'on peut bien vouloir reprocher au
ministère de l'Immigration fédérale ce que l'on veut, mais
une de ses premières politiques était de favoriser la
réunification des familles. Quand le député de Bourassa
dit: Enfin, on va pouvoir réunir les familles, je pense que c'est
important de remettre cela dans son contexte exact. C'est tout ce que je
voulais ajouter pour l'information des gens.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît, s'il vous plaît, il n'y aura pas de débat
à ce stade-ci. M. le député de Bourassa, s'il vous
plaît!
M. Laplante: II faut vivre ce que l'on vit dans nos bureaux,
actuellement, sur la politique fédérale de favoriser les
familles...
Mme Lavoie-Roux: Non, on ne peut pas dire n'importe quoi.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît! Avant d'appeler l'article 1...
Mme Lavoie-Roux: Quand je vois le monde charrier, moi...
M. Ciaccia: Je voudrais poser une question au ministre...
M. Couture: J'avais de petites réponse pour... Je crois
que ce pourrait...
M. Ciaccia: D'accord.
M. Jacques Couture
M. Couture: Je vais peut-être aller au devant de votre
question. D'abord, je veux vous dire que je suis très heureux de
l'attitude ouverte de l'Opposition face à l'étude du projet de
loi. Je pense qu'en effet on a compris qu'il est important pour nous de
travailler pour des objectifs qui débordent
évidemment ce que nous pouvons être individuellement et
comme membres aussi de formations politiques. Nous sommes vraiment là
pour rejoindre les objectifs du Québec, de la collectivité
québécoise et des immigrants. Je m'en félicite. On m'a
indiqué qu'il y aurait certaines choses qu'on aimerait voir
intégrer au projet de loi. Je peux dire tout de suite, à ce
moment-ci, que j'accepte un certain nombre de suggestions qui ont
été faites. Je dois dire que, depuis plusieurs mois, nous avions
aussi des projets parallèles où on disait: Est-ce qu'on met
beaucoup de choses, est-ce qu'on en met moins, etc? Est-ce qu'on fait une loi
spéciale? A cause des délais, à cause de la
complexité de cette matière, à cause du temps
considérable que cela prend pour élaborer quelque chose de plus
substantiel, nous avons opté pour des amendements à notre loi,
nous donnant un pouvoir législatif pour appliquer l'entente.
Par ailleurs, les amendements que je vais proposer sont de nature, je
pense à rejoindre ce genre de préoccupations qu'on a
exposées tout à l'heure et en deuxième lecture. Entre
autres, je proposerai des amendements pour introduire les objectifs de notre
intervention en matière d'immigration. Nous avons des amendements sur
les objectifs. Nous aurons aussi des indications sur les critères de
sélection dans le projet de loi. Nous aurons aussi certaines
dispositions qui pourront préciser certains articles qu'il y avait dans
le projet de loi no 77, à la suite, d'ailleurs, des interrogations qui
m'avaient été faites en deuxième lecture. Je n'ai pas
retenu toutes ces suggestions et je dirai, à mesure que viendront les
articles, les raisons pour lesquelles nous ne voulons pas céder à
ces demandes. Mais je pense bien que déjà, en vous indiquant que
nous introduisons les principes dans le projet de loi no 77 et certaines autres
dispositions, cela pourra être assez satisfaisant pour l'ensemble des
membres de la commission.
Je veux tout simplement dire un mot aussi sur ce que disait notre ami de
Saint-Louis, à propos du mouvement libre de la population et
peut-être de cette espèce de contradiction, semble-t-il, apparente
qu'il y aurait d'être dans un cadre de souveraineté-association et
d'avoir le pouvoir complet en immigration. C'est évident qu'il y aura
des ajustements à faire et des ententes à faire avec le
gouvernement du Canada, sauf que l'instrument efficace; complet et satisfaisant
en matière d'immigration, c'est l'émission des visas. Surtout,
à mon avis, au niveau de la sécurité nationale, je pense
que c'est clair pour tout le monde au gouvernement que nous voulons, nous, que
ce soit le gouvernement du Québec qui définisse ce qu'est la
sécurité nationale et que lui-même puisse identifier les
conditions pour entrer au territoire québécois selon des
exigences qu'on pourrait avoir pour les ressortissants étrangers.
Evidemment, ce n'est pas le lieu de s'étendre là-dessus, mais je
crois qu'on peut avoir l'instrument d'immigration comme pouvoir complet, tout
en ayant avec les Etats voisins des ententes sur la libre circulation des
personnes, comme cela se passe, d'ailleurs, dans certains pays d'Europe. Pour
la démarche sur les réfugiés...
M. Blank: Vous n'avez pas commenté sur le passeport
commun.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît, à l'ordre!
M. Couture: On en reparlera de cela en temps et lieu. A propos du
mouvement des réfugiés, je peux peut-être dire au
député de Saint-Louis que, récemment il y a des
Vietnamiens on en avait identifié 125 à 150, des petits
bateaux comme on les appelle que personne ne voulait accueillir et le
Québec a accepté de les recevoir ici et ils commencent à
entrer. Il y en a déjà quelques-uns d'entrés. Pour les
2000, vous comprendrez que la contribution du Québec est possible; elle
se fera sans doute et moi-même, je suis très alerté par
cette situation dramatique, absolument incroyable. Nous allons aussi chercher
à participer possiblement à l'accueil d'un certain nombre de ces
réfugiés. Nous sommes dans le programme et le Québec,
c'est la province du Canada qui fait le plus d'efforts pour l'accueil des
réfugiés.
Le représentant du Haut-Commissariat des Nations Unies m'a
demandé, il y a quelques jours, quand il est venu me voir à
Québec, d'accepter un certain nombre de réfugiés chiliens
parmi un groupe de 1000 réfugiés chiliens qui sont en Argentine.
Les Nations Unies cherchent des terres d'accueil pour ces 1000
réfugiés chiliens qui sont dans une situation très
pénible. J'ai indiqué qu'on pouvait accepter 200 de ces
réfugiés. Je pense que, à ce point de vue là, on
rejoint et vos préoccupations et celles de bien des
Québécois.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
J'appelle l'article 1.
M. Ciaccia: Avant d'appeler l'article 1, M. le
Président...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Monsieur, il ne faudrait pas que je permette un débat.
M. Ciaccia: J'ai une question. Non, pas de débat. Je veux
demander au ministre...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Une
question.
M. Ciaccia: ... s'il peut déposer les amendements. Cela
peut nous éviter d'en faire certains si on peut les examiner.
M. Couture: Justement dans l'esprit...
M. Ciaccia: D'accord?
M. Couture: ... de collaboration qui semble prévaloir
à cette commission, je veux bien le faire. Je dépose l'ensemble
des amendements que nous proposons pour le projet de loi 77 et nous vous
donnerons tout le cahier qui donnera les explications afférentes.
M. Ciaccia: ... question. Je sais, M. le Président,
que...
M. Couture: ...
M. Ciaccia: ... si on veut un préambule à une loi,
normalement, d'après les règles de procédure, la
discussion du préambule vient à la fin. Mais je voudrais demander
au ministre à moins que, par le consentement de la commission, on
puisse en discuter avant premièrement, s'il voudrait que je lui
lise le préambule qu'on suggère. Après qu'il en aura pris
connaissance, il pourra nous laisser savoir s'il est prêt à en
discuter maintenant ou s'il insiste pour qu'on discute du projet de loi article
par article et qu'on y revienne à la fin.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député, vous posez la question au ministre, mais j'ai quelque
chose à dire à ce stade-ci.
M. Ciaccia: Au président aussi. Une Voix: En
effet.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Avant
même que vous lisiez le préambule, il faudrait le consentement des
membres de la commission afin qu'on parle de préambule avant l'article 1
parce que, effectivement, vous aviez raison de dire que les règles de
procédure nous obligent à étudier le préambule
lorsque tous les articles auront été adoptés. Donc,
j'aimerais savoir s'il y a un consentement unanime pour qu'on n appelle pas
l'article 1 et qu'on parle de préambule. Sinon, j'appellerai l'article
1.
M. Ciaccia: M. le Président, avant de demander s'il y a
consentement, je voudrais... Je comprends les règles, mais je trouve que
c'est une des règles qu'on devrait éventuellement changer parce
que cela s'appelle préambule.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Mais
elle n'est pas changée.
M. Ciaccia: C'est un peu illogique de discuter du
préambule à la fin. Ce n'est pas un "finambu-le ", c'est un
préambule.
M. Couture: Me permettez-vous de donner ma réponse, M. le
Président? Je dois dire à ce stade-ci que, pour nous, il n'est
pas question, dans le projet de loi 77, d'accepter un préambule parce qe
ce n'est pas une loi générale sur l'immigration. Ce sont des
modifications à la Loi du ministère de l'Immigration.
Probablement que ce que vous voulez introduire dans le préambule se
retrouvera dans les objectifs que nrçius avons identifiés et que
nous insérons à l'article 2. Donc, M. le Président, pour
ce qui me concerne, je voudrais qu'on passe à l'étude article par
article.
M. Ciaccia: Vous ne voulez même pas entendre ce que
j'inclus dans mon préambule.
M. Couture: Vous pourrez en discuter à l'occasion des
objectifs.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît!
M. Ciaccia: C'est un bon esprit de collaboration; cela commence
bien.
M. Couture: Je pense que cela revient tout à fait au
même.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Un
instant. Il n'y aura pas de débat là-dessus.
M. Ciaccia: On vous offre notre collaboration; merci pour la
vôtre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A partir
du moment où une règle de procédure existe, cela prend le
consentement. Comme il y a défaut de consentement, je me dois donc
d'appeler l'article 1, tout en mentionnant au député de
Mont-Royal il le sait fort bien d'ailleurs qu'il pourra, à
l'occasion, revenir pour parler de préambule, mais lorsque les articles
auront été adoptés.
M. Couture: Par préambule, il faut s'entendre pour savoir
ce que vous voulez dire.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît, on ne parle plus de préambule; c'est l'article 1.
J'appelle donc l'article 1. M. le ministre , avez-vous quelque chose à
dire sur l'article 1?
Ressortissant étranger
M. Couture: L'article 1, M. le Président, demeure le
même, mais je pense qu'il est absolument important de le maintenir tel
qu'il est parce qu'il nous permet de nous référer à des
définitions de la Loi sur la citoyenneté. Pour la coordination
nécessaire dans un régime fédéral, nous sommes
obligés, dans la sélection des ressortissants étrangers,
de nous ajuster sur l'identification et la définition de "ressortissant
étranger' et pour le gouvernement du Canada et pour nous. Donc, je n'ai
pas de commentaire bien important à faire là-dessus. Je pense
qu'il est nécessaire de se référer à cette
définition du...
M. Ciaccia: J'ai un amendement à apporter à
l'article 1. (11 heures)
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: J'aurais un amendement à apporter à
l'article 1 qui se lirait comme suit: "Que l'article 1 soit modifié en
ajoutant, à la fin, l'alinéa suivant: L'élaboration de la
politique québécoise d'immigration ainsi que
l'interprétation de la présente loi et de sa
réglementation doivent tenir
compte des objectifs suivants: a) favoriser la poursuite des objectifs
démographiques établis conjointement par les gouvernements
québécois et canadiens; b) assurer la promotion et
l'enrichissement culturel et social du patrimoine québécois; c)
faciliter la réunification des familles; d) encourager et faciliter
l'adaptation et l'intégration des ressortissants étrangers admis
à être permanents; e) avoir à l'égard des
réfugiés une attitude humanitaire; f) respecter le droit de
mobilité de chaque individu à l'intérieur du territoire
québécois; g) s'assurer que l'élaboration des normes et
des critères utilisés dans la sélection des ressortissants
étrangers n'établisse entre les requérants aucune
discrimination fondée sur la race, la nationalité, l'origine
ethnique, la couleur, la religion ou le sexe".
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
ministre.
M. Couture: M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Avant de
parler sur le fond de la motion, j'aimerais qu'on m'instruise quelque peu sur
la recevabilité, parce que je dois vous dire que j'ai des doutes
sérieux quant à l'acceptation de cet amendement à
l'article 1. Je ne dis pas je ne connais pas les autres articles de la
loi que cet amendement ne serait peut-être pas recevable ailleurs.
M. le député de Bourassa.
M. Laplante: Oui. M. le Président, je doute moi-même
beaucoup de la recevabilité de cet article, parce que, si vous vous
référez tout de suite à l'article 3 modifié par le
ministre, on retrouve une partie de ces critères à
l'intérieur, et dans d'autres articles aussi, vous le voyez
là-dessus. En acceptant un tel amendement, je me demande si on ne
défait pas le projet de loi avant de l'étudier article par
article. Quant à moi, cela ne paraît pas recevable parce que c'est
trop tôt; on va retrouver dans les articles suivants la plupart des
choses que propose le député.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Sur la
recevabilité.
M. Blank: Je ne comprends pas que le député de
Bourassa parle de quelque chose qui n'est pas devant nous.
M. Ciaccia: On en peut pas présumer.
M. Blank: On ne peut pas présumer des amendements qui vont
venir. Le cahier ne fait pas partie de la loi. On est à l'article 1 de
la Loi du ministère de l'Immigration. On doit prendre l'article 1 du
chapitre 68 et cet amendement-ci. L'article 1 qui est encore dans la loi dit:
"Le ministre de l'Immigration, désigné dans la présente
loi sous le nom de ministre, est chargé de la direction et de
l'administration du ministère de l'Immigration". Ici, avec les objectifs
et les politiques que le député de Mont-Royal propose, cela est
dans la direction et dans l'administration du ministère, quand vous
lisez l'article 1. Ce n'est pas seulement sur la question de l'amendement du
petit paragraphe qu'on ajoute par la loi 77. Cela doit retourner à
l'ancienne loi et c'est ce qu'il demande l'article
général, l'article 1, de l'administration, la politique du
ministère. On a le droit d'ajouter à ce moment-ci des objectifs.
Peut-être y a-t-il, dans les amendements proposés par le ministre
qui vont venir... On n'est pas encore rendu là. Le ministre peut dire:
Oui, je suis pour cela mais je ne veux pas cela ici, je vais le mettre
après. On veut avoir son opinion.
M. Couture: C'est cela, M. le Président, je veux parler
sur la recevabilité de cet amendement. Je pense qu'il n'est pas
recevable. C'est un projet de loi qui modifie la Loi du ministère de
l'Immigration et, dans l'article 3 de cette loi, la loi originale, on dit ceci:
Le ministre est responsable de la planification, de la coordination et de la
mise en oeuvre des politiques gouvernementales relatives aux immigrants et aux
ressortissants étrangers qui s'établissent temporairement au
Québec à un titre autre que celui de représentant d'un
gouvernement étranger ou de fonctionnaire international. Il a pour
fonction d'informer, de recruter et de sélectionner ces personnes, de
rendre possible leur établissement au Québec et d'assurer leur
intégration harmonieuse au sein de la société
québécoise et plus particulièrement de la majorité
francophone.
M. le Président, c'est l'article 3 qui introduit les principes et
les objectifs de l'immigration. D'ailleurs, nous avons des amendements pour
compléter cette liste d'objectifs et de principes. Je pense que c'est
irrecevable, ce n'est pas au bon endroit.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): C'est
assez. Je ne pense pas que l'amendement apporté par le
député de Mont-Royal aille à l'encontre de l'article 3 que
vient de lire le ministre. Je dois vous avouer qu'il est extrêmement rare
qu'on introduise dans des lois des objectifs, ou dans un article de loi les
objectifs qu'entend poursuivre la loi.
M. Couture: A l'article 3, nous avons les objectifs.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, à l'ordre, s'il vous plaît!
M. Marcoux: L'objectif de l'article 1, c'est de bien
définir un des termes, la notion de "ressortissant étranger". Ce
que je voudrais contester, c'est ce que le député de Saint-Louis
dit lorsqu'il dit que lorsqu'on amende une loi, tous les articles de cette loi,
même si dans le projet de loi, actuellement, il n'est pas proposé
d'y revenir, cela nous donne l'occasion de proposer des amendements sur
n'importe quel article dans le projet de loi qu'on étudie.
M. Blank: Ce n'est pas cela que j'ai dit. J'ai dit: On amende
l'article 1. On veut ajouter un amendement à l'article 1, c'est cela
qu'on fait. On n'ajoute pas...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît! C'est déjà assez
compliqué.
M. Marcoux: Un amendement doit préciser... Le principe est
de définir un nouveau concept ou de préciser le concept de
"ressortissant étranger". Tout amendement doit se référer
à ceci et non à l'ensemble des principes contenus dans la loi
qu'on veut amender parce qu'à ce moment, à chaque fois qu'on
amende une nouvelle loi, le fait d'amender cette loi ouvrirait le débat
sur l'ensemble de la loi alors que ce n'est pas du tout le processus
parlementaire. Les règlements ne nous permettent pas cela. L'objectif de
cet article-ci est de préciser ce qu'est un "ressortissant
étranger " et tout amendement doit concerner ce principe qui devient
principal et que nous sommes en train d'étudier. Ce que vous abordez en
somme pourrait s'inscrire s'il y avait un projet de loi ou s'il y avait
d'autres articles du projet de loi qui proposent de redéfinir quelque
chose de beaucoup plus global, l'ensemble des principes, de la politique, ce
qui n'est pas du tout l'objet de cet article 1. Je conteste
l'interprétation du député de Saint-Louis.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): C'est
assez. J'allais dire, le député de Saint-Louis est intervenu
à temps, que mon expérience d'avocat m'avait
démontré qu'il était rare de constater dans des textes de
loi l'intrusion de voeux pieux ou d'objectifs qu'entend poursuivre une loi,
ainsi de suite. Par exemple, je vois "avoir une attitude humanitaire ", alors
qu'on ne définit pas ce qu'est "une attitude humanitaire ". Donc, je
raisonnais un petit peu comme avocat et je me disais: C'est rare qu'on voit des
articles aussi généraux où on parle des objectifs d'une
loi. Je remarque que l'article 3 de la loi fédérale,
effectivement, nous déclare dans quel but... quels sont les objectifs
poursuivis par la loi. Ma décision, je suis en train de la rendre: je ne
pense pas que cet argument tienne. Donc, il est possible d'introduire ce genre
d'article dans nos lois.
Sauf que je vous inviterais, M. le député de Mont-Royal,
à revenir avec le même amendement à l'article 3. Je pense
réellement que, si on lit l'article 3 de la loi de 1968, chapitre 68, on
se rend compte que c'est à cet article où on donne des pouvoirs
au ministre que votre amendement serait plus facilement non seulement
recevable, mais discutable. Le député de Saint-Louis avait raison
de le mentionner, on modifie actuellement l'article 1 de la loi de 68 qui dit
tout simplement ceci: "Le ministre de l'Immigration, désigné dans
la présente loi sous le nom de ministre, est chargé de la
direction et de l'administration du ministère de l'Immigration". Mais
à l'article 3, par contre, on s'en va réellement dans les
fonctions, dans les attributions du ministère et du ministre de
l'Immigration, de telle sorte que je vous le dis bien honnêtement
je le déclare irrecevable à l'article 1, mais il sera
certainement discutable à l'article 3.
M. Ciaccia: On ne modifie pas l'article 3. Comment peut-on
l'amender?
M. Brochu: On verra. M. Couture: On verra.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Dans le
projet de loi no 77, on fait état de l'article 3.
M. Couture: On a aussi des amendements à l'article 3.
Est-ce que les amendements ont été distribués? Cela
éclairerait les membres de cette commission.
M. Blank: Non, nous n'avons pas les amendements. Est-ce que je
peux avoir mes lois?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Donc,
l'amendement est irrecevable à l'article 1.
Une Voix: On peut appeler le vote.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce
que l'article 1 est adopté? L'article 1 est adopté. Article
2?
M. Blank: Est-ce qu'on peut mettre ici notre amendement? On
demande que l'article 3 soit modifié.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît! Je laisse la parole au ministre.
Objectifs
M. Couture: Nous sommes à l'article 2, M. le
Président. Dans le projet de loi 77, l'article 2 se lisait comme ceci:
"L'article 3 de ladite loi, modifié par l'article 3 du chapitre 9 des
Lois de 1969, par l'article 111 du chapitre 6 des Lois de 1974 et
remplacé par l'article 2 du chapitre 6 des Lois de 1974, est
modifié par l'addition à la fin du troisième alinéa
du paragraphe suivant." Vous avez ici, h) "définir des objectifs quant
au nombre de ressortissants étrangers admissibles au cours d'une
période donnée en tenant compte notamment des besoins
démographiques, économiques et socioculturels des diverses
régions du Québec."
M. le Président, je veux proposer, pour l'article 2 du projet de
loi 77 qui amende l'article 3 de la loi du ministère, les amendements
suivants. Si vous voulez, on peut les distribuer. Dans ces importants
amendements, nous voulons, en effet, tenir compte des préoccupations
qu'on nous a signalées, dont on nous a fait part lors du débat en
deuxième lecture. Dans l'article 3 de la loi du ministère, il y a
déjà un certain nombre de principes établis. Nous voulons
compléter cette
liste de principes et d'objectifs pour mieux préciser de quelle
façon et au nom de quelle philosophie le gouvernement du Québec
entend intervenir en matière d'immigration. M. le Président, vous
me permettrez de lire ces amendements pour adoption. "L'article 3 de ladite
loi, modifié par l'article 3 du chapitre 9 des Lois de 1969, par
l'article 111 du chapitre 6 des Lois de 1974 et remplacé par l'article 2
du chapitre 64 des Lois de 1974 est remplacé par le suivant: 3. Le
ministre est responsable de la planification, de la coordination et de la mise
en oeuvre des politiques gouvernementales relatives aux immigrants et aux
ressortissants étrangers qui s'établissent temporairement au
Québec à un titre autre que celui de représentant d'un
gouvernement étranger ou de fonctionnaire international." (11 h 15)
II a pour fonction d'informer, de recruter, de sélectionner ces
personnes, de rendre possible leur établissement au Québec et
d'assurer leur intégration harmonieuse au sein de la
société québécoise et plus particulièrement
de la majorité francophone." J'arrive aux amendements. Il faudrait lire,
à la suite de ces deux alinéas, ceci: "La sélection des
ressortissants étrangers souhaitant s'établir au Québec
à titre permanent ou temporaire a notamment pour objet de: "a)
contribuer à l'enrichissement du patrimoine socioculturel du
Québec, à la stimulation du développement de son
économie et à la poursuite de ses objectifs
démographiques; "b) faciliter la réunion au Québec des
citoyens canadiens et résidents permanents avec leurs proches parents de
l'étranger; "c) permettre au Québec d'assumer sa part de
responsabilités dans l'accueil des réfugiés et d'autres
personnes qui se trouvent dans des situations particulières de
détresse; "d) favoriser, parmi les ressortissants étrangers qui
en font la demande, la venue de ceux qui pourront s'intégrer avec
succès au Québec; "e) faciliter les conditions du séjour
au Québec des ressortissants étrangers qui désirent
étudier, travailler temporairement ou recevoir un traitement
médical, compte tenu des raisons de leur venue et des capacités
d'accueil du Québec."
M. le Président, je pense qu'on peut déjà, quant
à ces amendements il y en aura d'autres pour l'article 2
aborder le fond. Si vous permettez, j'aimerais donner quelques
détails.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Tout
d'abord, j'aimerais dire ceci. M. le député de Saint-Louis, M. le
député de Richmond, conformément à la tradition,
étant donné que le ministre apporte des amendements à
l'article 2 du projet de loi no 77, j'aimerais que vous considériez que
c'est le nouvel article 2 de la loi 77, tout en vous soulignant que nous avons
bien fait de rejeter l'amendement puisque le député de Mont-Royal
pourra faire tous les amendements qu'il veut parce que nous sommes
réellement dans le sujet.
Donc, ce qui vient d'être lu par le ministre, c'est le nouvel
article 2, et tout ce qui sera proposé, ce seront des amendements et non
pas des sous-amendements, d'accord?
M. Couture: C'est une partie de l'article 2 parce qu'il y a trois
autres amendements. Voulez-vous qu'on les lise?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui.
M. Couture: On va donner en même temps les trois autres
amendements. A la suite de e), à la suite de ce que vous avez ici dans
les nouveaux amendements de l'article 2 du projet de loi no 77, il faudrait
lire ceci. On va en faire la distribution immédiatement. "Le ministre
doit, à ces fins: a) Etudier les données disponibles sur les
besoins de main-d'oeuvre du Québec, les emplois qui y sont disponibles
et la possibilité pour des immigrants de s'y établir en tenant
compte des caractéristiques de la population et des programmes
d'aménagement du territoire." On poursuit avec b).
Le nouvel amendement à c): "Prendre les mesures
nécessaires pour informer, recruter, sélectionner et implanter
ces personnes sur le territoire en fonction des besoins démographiques,
économiques et socioculturels du Québec." On a pas mal
d'amendements.
M. Ciaccia: Vous apportez tous les amendements ce matin.
Franchement, on essaie de suivre, mais...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît! On va se débrouiller.
M. Couture: C'est pour chercher à faire...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Couture: Le nouvel amendement, article h): Définir des
objectifs quant au nombre de ressortissants étrangers admissibles au
cours d'une période donnée en tenant compte notamment des besoins
démographiques, économiques et socioculturels du Québec."
Si vous voulez lire l'ensemble de l'article 2, je peux le lire
complètement, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui.
M. Couture: Je lis au complet l'article 2 tel qu'amendé
actuellement. "L'article 3 de ladite loi, modifié par l'article 3 du
chapitre IX des lois de 1969, par l'article 111 du chapitre VI des lois de 1974
est remplacé par le suivant: 3. Le ministre est responsable de la
planification, de la coordination et de la mise en oeuvre des politiques
gouvernementales relatives aux immigrants et aux ressortissants
étrangers qui s'établissent temporairement au Québec
à un titre autre que celui de représentant d'un gouvernement
étranger ou d'un fonctionnaire international.
II a pour fonction d'informer, de recruter, de sélectionner ces
personnes, de rendre possible leur établissement au Québec et
d'assurer leur intégration harmonieuse au sein de la
société québécoise et plus particulièrement
de la majorité francophone je suis les amendements la
sélection des ressortissants étrangers souhaitant
s'établir au Québec à titre permanent ou temporaire a
notamment pour objet de: a) contribuer à l'enrichissement du patrimoine
socioculturel du Québec, à la stimulation du développement
de son économie et à la poursuite de ses objectifs
démographiques; b) faciliter la réunion au Québec des
citoyens canadiens et résidents permanents avec leurs proches parents de
l'étranger; c) permettre au Québec d'assumer sa part de
responsabilités dans l'accueil des réfugiés et d'autres
personnes qui se trouvent dans des situations particulières de
détresse; d) favoriser, parmi les ressortissants étrangers qui en
font la demande, la venue de ceux qui pourront s'intégrer avec
succès au Québec; e) faciliter les conditions du séjour au
Québec des ressortissants étrangers qui désirent
étudier, travailler temporairement ou recevoir un traitement
médical, compte tenu des raisons de leur venue et des capacités
d'accueil du Québec. Le ministre doit, à ces fins: a)
étudier les données disponibles sur les besoins de main-d'oeuvre
du Québec, les emplois qui y sont disponibles et la possibilité
pour des immigrants de s'y établir, en tenant compte des
caractéristiques de la population et des programmes d'aménagement
du territoire; b) effectuer des études et des recherches sur les bassins
d'émigration susceptibles de fournir au Québec des immigrants et
sur les moyens à mettre en oeuvre pour recruter et sélectionner
ces derniers; c) prendre les mesures nécessaires pour informer,
recruter, sélectionner et implanter ces personnes sur le territoire, en
fonction des besoins démographiques, économiques et
socioculturels du Québec; d) établir et maintenir des services
d'assistance aux immigrants chargés de les accueillir dès leur
arrivée au Québec, de leur prêter l'aide requise, de rester
en contact avec eux et de leur apporter l'appui dont ils ont besoin; e) prendre
les dispositions nécessaires pour que les personnes qui
s'établissent au Québec acquièrent dès leur
arrivée ou même avant qu'elles ne quittent leur pays d'origine la
connaissance de la langue française; f) établir et maintenir des
services d'adaptation chargés de l'intégration harmonieuse des
immigrants au sein de la société québécoise et plus
particulièrement de la majorité francophone; g) on
reviendra là-dessus prendre avec les ministères
intéressés les mesures nécessaires pour établir des
normes pour la reconnaissance au Québec des diplômes obtenus
à l'étranger, des études qui ont été
poursuivies, de la formation qui a été reçue et de
l'expérience acquise en vue de l'attribution d'équivalences
correspondantes; h) qui est nouveau définir des objectifs
quant au nombre de ressortissants étrangers admissibles au cours d'une
période donnée, en tenant compte notamment des besoins
démographiques, économiques et socioculturels du
Québec.
M. le Président, ces amendements sont assez importants, je pense
qu'on devrait, d'une part, donner la philosophie générale de la
production de ces amendements...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Un
instant, vous allez me permettre de dire parce que cela est très
important que ce qui vient d'être lu par le ministre est
dorénavant le nouvel article 2 du projet de loi 77, pour bien se
comprendre. D'accord? M. le ministre.
M. Blank: Je me demande si les deux paragraphes qui sont
actuellement dans le paragraphe 3 de l'ancienne loi restent.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui.
M. Blank: Vous ne trouvez pas qu'il y a
répétition?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Blank: Trop fort ne casse pas!
M. Couture: C'est-à-dire que cela s'inscrit dans la
philosophie des deux premiers paragraphes.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui.
M. Couture: M. le Président, nous avons
réfléchi longuement, pendant plusieurs mois, sur l'importance ou
la nécessité d'introduire ce genre de principe et vous avez dit
à bon droit, tout à l'heure, que ce n'était pas
l'habitude, dans des lois générales, d'indiquer des principes et
de discourir sur une philosophie d'une loi. C'est la raison pour laquelle, dans
la présentation du projet de loi 77, ces principes n'étaient pas
inscrits. A ce moment-là, nous croyions, à bon droit, que nous
avions purement besoin d'un cadre législatif pour nous donner un pouvoir
réglementaire qui, dans les règlements eux-mêmes, donnerait
les indications nécessaires dans l'exercice courant des interventions en
matière d'immigration. C'est ce qu'il faut retenir.
C'est un domaine, quand même , qui est en mouvement, et il ne faut
pas bloquer il faut être prudent dans une loi un certain
nombre de données ou de principes qui nous paralyseraient s'il y avait
des changements dans la politique d'immigration. Sauf qu'après avoir
écouté beaucoup de mes collègues à
l'Assemblée nationale moi-même, c'est une réflexion
que j'avais faite pendant plusieurs mois aussi je dirais qu'il y a un
intérêt pédagogique à inscrire ces principes dans
une loi, parce que, comme on l'a dit à juste raison, on n'a pas affaire
à du béton, on n'a pas affaire à des mesures purement
administratives. Ce sont des personnes humaines qui doivent
éventuellement s'éclairer par une loi et elles cherchent parfois
aussi d'une façon précise et
assez claire à savoir ce que le gouvernement veut quelles sont,
enfin, la politique et la philosophie du gouvernement dans cette matière
aussi importante au niveau humain que l'immigration.
Nous avons donc opté en dernier lieu c'est la raison pour
laquelle j'apporte ces amendements aujourd'hui pour introduire, dans
notre projet de loi 77, un certain nombre de principes qui on le remarquera
pour ceux qui sont familiers avec l'entente, reprennent presque mot à
mot un certain nombre de considérants qui étaient dans l'entente
signée avec le gouvernement du Canada. Cela pour bien indiquer
d'ailleurs je suis certain que cela va plaire à mes
éminents collègues de l'Opposition que ce projet de loi,
ces amendements à la loi du ministère ont pour fonction
principale et objectifs évidents d'appliquer l'entente qui a
été signée avec le gouvernement du Canada.
Là-dessus, c'est clair que par ces amendements nous voulons reprendre un
certain nombre de ces objectifs qui avaient été acceptés
de part et d'autre pour dire clairement maintenant que la loi de l'immigration
du Québec, dans le prochain exercice de ses pouvoirs, se guidera,
s'éclairera par ces principes que l'on trouve d'ailleurs dans l'entente.
Mais cela devient un texte légal qui donne une force, évidemment,
évidente et considérable à cette entente.
M. le Président, j'imagine qu'on va l'étudier
alinéa par alinéa tout à l'heure, cela sera plus
indiqué, mais pour le moment, je voudrais rappeler qu'en lisant ces
amendements, ces objectifs qui sont bien décrits, on couvre assez bien,
il me semble, tout ce que le Québec recherche dans sa politique
d'immigration. Prenez l'amendement a) où on parle de "contribuer
à l'enrichissement du patrimoine socioculturel du Québec,
à la situation du développement de son économie et
à la poursuite de ses objectifs démographiques", je crois qu'en
effet, tout le monde est d'accord pour dire et je suis heureux de voir
qu'on rejoint aussi les préoccupations que l'Opposition nous a
signalées tout à l'heure que l'immigration au
Québec s'inscrit nécessairement dans ces objectifs. S'il y a de
l'immigration, c'est parce qu'effectivement nous sommes persuadés que
c'est un enrichissement collectif. La présence et la venue des
immigrants au Québec, c'est une façon pour nous de nous enrichir
et de nous ouvrir à d'autres réalités et de nous faire
participer, comme Québécois, à la richesse énorme
de toutes les cultures du monde. Quand on dit l'enrichissement du patrimoine
socioculturel du Québec, c'est identifié ici. Il y a des
traditions, il y a une culture, mais la venue des immigrants ne vient pas
freiner ou mettre en danger cette culture. Au contraire, elle vient l'enrichir.
J'image que cela rejoint des préoccupations de tous les
Québécois.
La stimulation du développement de son économie, c'est une
évidence. Je pense qu'en deuxième lecture, nous avons fait
état longuement à quel point la présence, la venue de
milliers d'immigrants au Québec a été un facteur
déterminant pour contribuer à développer l'économie
québécoise. (11 h 30)
On a démontré longuement aussi combien d'immigrants ont
été des créateurs d'emplois au Québec, combien ont
lancé des entreprises, combien surtout, même s'ils n'ont pas
été créateurs d'emplois, par leur dynamisme, par leur
labeur je pense que les gens reconnaissent à quel point les
immigrants là-dessus donnent vraiment, je dirais même, des
leçons à bien du monde par leur travail assidu et
laborieux aident à la bonne santé économique du
Québec. L'immigration, comme instrument de développement
économique, est aussi facilement démontrée par la venue
d'idées nouvelles et tout ce qu'ils apportent de
créativité. Je pense au domaine de la chaussure, entre autres.
J'avais l'exemple dernièrement d'une petite manufacture italienne qui a
lancé un produit sur le marché du Québec qui est
maintenant devenu un produit sur le marché international parce qu'ils
avaient des idées nouvelles. A ce point de vue là, c'est toujours
très positif.
La poursuite des objectifs démographiques, cela va de soi de plus
en plus quand on sait à quel point, à cause du
phénomène de la dénatalité au Québec, nous
aurons besoin, pour rééquilibrer au niveau démographique
notre population, de cet apport d'une immigration continue et soutenue. Dans ce
sens, je pense que, par la réglementation, nous cherchons à
rejoindre une immigration jeune, dynamique. Nous bonifions même la
famille parce que nous savons que, pour une population qui vieillit comme la
nôtre, si l'immigration doit corriger quelque chose, c'est bien au niveau
d'une immigration jeune qui apporte des éléments neufs et
dynamiques.
Au paragraphe b, M. le Président, je pense qu'on n'a pas besoin
d'insister. La réunification des familles est un objectif traditionnel
dans les politiques d'immigration ici même au Canada. Nous endossons
facilement cet objectif. Nous allons même, à ce point de vue
là, à la limite de nos possibilités pour assurer cet
objectif de la réunification des familles. Je crois que cela pourra
aussi satisfaire les nombreuses expressions d'opinions dans les milieux
ethniques où on voulait bien que cette politique se continue au moment
où le Québec exercerait ces pouvoirs.
Le troisième objectif, c'est que le Québec assume sa part
de responsabilités dans l'accueil des réfugiés et d'autres
personnes qui se trouvent dans des situations particulières de
détresse. Je crois que, comme collectivité, si nous devons
intervenir en matière d'immigration, si nous exerçons des
pouvoirs, nous devons aussi assumer un certain nombre de responsabilités
vis-à-vis de tous ceux qui, à l'extérieur, demandent de
venir au Québec. Parmi eux, il y a évidemment les citoyens qui
passent par la filière ordinaire, les indépendants ou les
ressortissants étrangers qui ont de la famille ici, mais il y a aussi
ces 8 millions à 10 millions de personnes qui attendent une terre
d'accueil dans le monde. Je crois que le Québec, comme
société occidentale qui a un niveau de vie assez
élevé, doit comme gouvernement et comme collectivité
assumer ses responsabilités.
Je suis assez fier de sentir dans la population un appui presque
inconditionnel à cette politique
d'accueil des réfugiés et d'acceptation des cas
humanitaires. Je pense que c'est une preuve de l'ouverture des
Québécois sur le monde et c'est également une preuve de
l'ouverture du gouvernement du Québec sur les réalités
internationales. Si jamais on avait besoin de le prouver, nous l'avons
déjà fait depuis plusieurs mois par notre politique des
réfugiés.
Au paragraphe d, M. le Président, on dit qu'on doit favoriser,
parmi les ressortissants étrangers qui en font la demande, la venue de
ceux qui pourront s'intégrer avec succès au Québec. Cela
identifie directement la sélection des indépendants,
c'est-à-dire que, dès qu'il y a une politique d'immigration,
nécessairement il y a des choix qu'on doit faire. Ces choix doivent
être faits d'une façon raisonnable, d'une façon
respectueuse des droits et libertés des personnes, mais selon des
objectifs d'une société donnée. J'insiste beaucoup sur ce
point, parce que je crois que ce n'est pas toujours, quoi qu'on en pense
parfois, des objectifs utilitaires, c'est-à-dire qu'on ne
sélectionne pas des immigrants seulement pour des besoins directs d'une
collectivité et d'une société, c'est aussi pour les
besoins et les intérêts des immigrants eux-mêmes.
Si nous faisons de la sélection à l'étranger pour
les immigrants, c'est parce qu'on souhaiterait qu'eux-mêmes soient bien
choisis face à une société donnée. On cherche aussi
à faire coïncider les objectifs de notre société
québécoise avec les intérêts des immigrants. Si un
immigrant était mal choisi, mal sélectionné, seulement au
niveau économique, si on fait rentrer des gens et si on ne peut pas leur
trouver d'emplois parce qu'il n'y a pas de besoin de main-d'oeuvre dans leur
domaine professionnel, je pense qu'on ne rend pas service ni à la
société québécoise ni aux immigrants, parce que,
évidemment, ils viennent ici, sont frustrés, ne s'adaptent pas
et, souvent, n'y restent pas. On a évalué à environ 30%,
dans les 25 dernières années, l'immigration qui, pour toutes
sortes de raisons je ne mets pas le blâme directement sur les
autorités fédérales comme telles, peut-être parce
que c'est un gouvernement qui est plus loin du monde, etc. avait
été mal sélectionnée, c'est-à-dire qu'on a
fait état suivant que les gens venaient ici et qu'ils n'y restaient pas,
qu'ils s'en allaient.
Je pense que le fait de raffiner notre sélection à
l'étranger nous permettra d'avoir ces pouvoirs nous-mêmes, comme
gouvernement, et nous permettra de mieux faire coïncider la demande des
ressortissants étrangers avec les besoins de notre société
québécoise pour le bien même de ces immigrants. Je me plais
à dire aussi que notre grille de sélection, notre
réglementation à ce sujet, elle est ouverte, elle est
réaliste, elle est généreuse et je pense qu'elle est
équilibrée aussi. Nous verrons, dans les prochains mois
j'imagine que tous les membres de l'Assemblée nationale, les
Québécois et les groupes ethniques, par leurs recommandations et
la réaction qu'il y aura dans les milieux, selon l'exercice de ces
pouvoirs si vraiment on peut ajuster en cours de route cette grille
québécoise.
On parle de faciliter les conditions de séjour au Québec
des ressortissants étrangers qui désirent étudier et
travailler temporairement ou recevoir un traitement médical, compte tenu
des raisons de leur venue et des capacités d'accueil du Québec.
Cela reprend presque mot à mot des principes qui étaient dans
l'entente. C'est aussi en coordination et en harmonie avec les interventions
que le gouvernement fédéral doit avoir dans ce domaine. J'insiste
sur l'importance d'avoir obtenu ces pouvoirs, parce qu'on sait trop qu'un
mauvais contrôle des travailleurs temporaires, entre autres, peut causer
certaines incidences malheureuses au niveau de la main-d'oeuvre, au niveau de
l'emploi. Alors, je crois que, pour le Québec, le fait de pouvoir
exercer ces pouvoirs, le fait de pouvoir, dans ce domaine, assumer une certaine
responsabilité nous permet effectivement, par la connaissance du
marché du travail au Québec, en étant bien précis
et bien rigoureux sur l'acceptation des travailleurs temporaires, une fois
qu'on est certain nous nous donnons des instruments pour le savoir
que ces emplois ne peuvent pas être occupés par des
Québécois ou que les Québécois ne veulent pas les
occuper, je pense qu'à ce point de vue, nous avons cette garantie qu'on
ne peut pas refuser à des citoyens étrangers de venir, si c'est
possible, quand les conditions sont raisonnables et quand il y a des garanties
de protection du marché de l'emploi ici, on ne peut pas leur refuser
à eux aussi de gagner leur vie, ne serait-ce qu'au principe de la libre
circulation des citoyens dans le monde.
Je crois que c'est aussi une façon d'aider les pays du tiers
monde, à un certain point de vue. Mais je fais une réserve et,
là-dessus, je pense que tout le monde a à l'esprit on a eu
beaucoup de représentations du comité consultatif qui nous ont
bien éclairés dans ce domaine extrêmement délicat
qu'il y a eu trop d'exploitation des travailleurs temporaires au
Québec. C'est un domaine facile d'exploitation, et j'ai voulu assortir
ce pouvoir d'une nouvelle dimension, au ministère de l'Immigration du
Québec, où nous aurons bientôt un secrétaire
délégué auprès des travailleurs immigrants qui sera
un peu le protecteur du citoyen des travailleurs immigrants de façon
particulière, aussi pour ces travailleurs temporaires qui sont bien
souvent l'objet ou le sujet d'exploitation.
M. le Président, dans les nouveaux amendements que nous
présentons aujourd'hui dans les autres articles, évidemment quand
on dit d'étudier les données disponibles sur les besoins de
main-d'oeuvre du Québec, les emplois qui y sont disponibles et la
possibilité pour les immigrants de s'y établir en tenant compte
des caractéristiques de la population et des programmes
d'aménagement du territoire, nous avons un principe, un objectif qui
supposent et là-dessus nous mettons en place des instruments
nécessaires une connaissance du marché du travail, une
coordination avec toutes les données du marché du travail, avec
la main-d'oeuvre québécoise, avec aussi la main-d'oeuvre
fédérale. Nous nous sommes assurés, depuis plusieurs mois
que nous travaillons à cette donnée, d'une coordination
efficace.
Evidemment, par notre service de recherches et l'utilisation aussi des
services de recherches d'autres ministères et des universités,
nous pourrons à l'occasion étudier plus précisément
le comportement de certains groupes d'immigrants et leurs problèmes
particuliers dans ce domaine. Dans b), études et recherches sur les
besoins de l'immigration susceptibles de fournir au Québec des
immigrants et sur les moyens à mettre en oeuvre pour recruter et
sélectionner ces derniers. Je pense que cela saute aux yeux, pour la
planification de l'immigration dans les prochaines années au
Québec, cette espèce de rationalité que nous devons
introduire de plus en plus, je ne dirais pas dans le type, mais dans le volume
d'immigrants pour que vraiment cet instrument d'immigration soit de plus en
plus, je dirais, précis et adéquat.
Je pense que ce sont les études et les recherches qui vont nous
permettre éventuellement d'éclairer le ministre, de l'aider
à faire des recommandations pertinentes au gouvernement. Nous disons,
à c), de prendre les mesures nécessaires pour informer, recruter,
sélectionner et implanter ces personnes sur le territoire en fonction
des besoins démographiques, économiques et socioculturels du
Québec. Nous avons enlevé ce qu'il y avait dans la loi du
ministère, les diverses régions du Québec. Pour une raison
bien simple, M. le Président: C'est, dans la recherche de ces besoins et
dans les interventions que nous pourrions avoir au niveau de la
sélection, de l'implantation et du recrutement, pour ne pas être
paralysé par des aspects purement régionaux.
Je pense que la politique de l'immigration au Québec doit
chercher à s'étendre sur tout le territoire, mais cela peut
être paralysant si on inscrit trop directement dans la loi les diverses
régions. C'est une politique générale qui doit, selon les
besoins des régions, s'appliquer. Dans d) on dit: Etablir et maintenir
des services d'assistance aux immigrants chargés de les accueillir
dès leur arrivée au Québec, de leur prêter l'aide
requise, de rester en contact avec eux, de leur apporter l'appui dont ils ont
besoin. C'est ce que nous avions, c'est l'adaptation, c'est le besoin pour le
Québec de donner des instruments d'adaptation. Je suis heureux de dire
qu'au niveau du ministère il y a depuis plusieurs mois à ce point
de vue, je pense, des progrès assez intéressants. Il n'y a pas de
changement, d'ailleurs, c'est dans la loi du ministère.
Aussi dans la loi du ministère: e) prendre les dispositions
nécessaires pour que les personnes qui s'établissent au
Québec acquièrent dès leur arrivée ou avant
même qu'ils ne quittent leur pays d'origine la connaissance de la langue
française. J'aimerais quand même faire un commentaire
intéressant là-dessus, c'est que c'était dans la loi
initiale du ministère. A ce point de vue, dans le voyage que j'ai fait
en Europe au mois de mai dernier, j'ai eu un accord de principe. Nos
fonctionnaires, dans les prochains mois, vont chercher à
concrétiser cet accord de principe pour qu'entre autres, au Portugal et
en Italie, il y ait préparation des candidats qui désirent venir
au Québec, une préparation linguistique et une préparation
sur l'information des réalités québécoises au
niveau des institutions, etc., des ressources. Je pense que c'est
peut-être la première fois qu'on commence à appliquer cette
disposition qui était dans la loi du ministère. (11 h 45)
C'est absolument important. Nous reviendrons sans doute là-dessus
quand nous parlerons de la langue. Ce que nous voulons comme candidat
idéal, ce n'est pas nécessairement celui qui parle
français, mais celui qui est capable, qui veut venir au Québec,
et qui accepte de s'introduire dans une société à
majorité francophone et qui est tellement motivé de venir que
parfois, aussi, il cherche, avant d'arriver, avant de partir de son pays,
à commencer à apprendre le français et à
s'instruire sur la réalité québécoise. Je pense
qu'à ce point de vue il y a beaucoup d'immigrants qui même
en Asie, on voit cela demandent qu'on les aide, comme il y a toujours un
certain nombre de semaines de délai avant qu'ils arrivent, d'avance
à se préparer à venir au Québec. Si je
dérange le député de Saint-Louis, M. le Président,
vous me le direz.
M. Ciaccia: Je vais le rappeler à l'ordre.
M. Couture: Là-dessus, je crois que le critère de
la langue n'est pas lié à l'origine ethnique. Il est lié
au fait que ceux qui veulent faire cet effort les immigrants font
beaucoup d'efforts pour quitter leur pays, ce qui est déjà
énorme, et ils sont motivés à s'adapter à une
nouvelle société on les aide, on va les aider par cette
disposition, peut-être, dans leur pays d'origine à se
préparer à apprendre la langue et à s'intégrer plus
facilement au Québec. Les services d'adaptation et d'intégration
harmonieux aux immigrants, mentionnés dans la loi, c'est central pour
notre gouvernement. Tous les autres gouvernements qui nous ont
précédés ont eu eux aussi à coeur cet objectif. Au
paragraphe g) ce sont les services d'équivalences qui existent
déjà. Le paragraphe h) est nouveau. On a enlevé aussi les
diverses régions du Québec. "Définir les objectifs quant
au nombre de ressortissants étrangers admissibles au cours d'une
période donnée en tenant compte notamment des besoins
démographiques, économiques et socioculturels du Québec."
On a fait disparaître les diverses régions du Québec pour,
là aussi, ne pas être paralysés par ces objectifs, ces
données.
M. le Président, sur cet article, j'ai donné l'essentiel
des commentaires et je pense que le débat est bien engagé.
J'aimerais qu'on le poursuive.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: M. le Président, je suis heureux de voir que
le ministre a accepté les suggestions que nous avons faites en
deuxième lecture quant à la question d'établir des
objectifs dans la loi et d'y
inclure des critères de sélection. C'étaient deux
critiques que nous avions faites de la loi en deuxième lecture et
c'était l'objet de l'amendement que j'avais proposé à
l'article 1. Cependant, il y a certains principes que le ministre a encore omis
d'inclure dans les critères et dans les objectifs. Premièrement,
je vois qu'il n'y a pas encore de référence à l'entente.
Vous avez, je crois, reproduit dans le projet de loi certains des objectifs et
des critères qui sont inclus sous une forme différente dans le
projet de loi fédéral. Mais on ne se réfère pas
encore spécifiquement à l'entente. Je note que vous parlez de la
préparation des futurs immigrants, pour la question linguistique,
même avant qu'ils viennent au Québec. C'est peut-être une
des lacunes qui ont existé dans le passé, mais cela
soulève une autre question. Je pense que cela souligne le fait que les
critères de sélection, vraiment, ne devraient pas être
limités, être principalement basés sur l'origine ethnique.
Je crois que cela est accepté. Ce n'est pas l'origine ethnique qui va
déterminer les meilleures personnes qui pourront s'adapter de la
meilleure façon à notre société, à la
société du Québec.
Cela m'amène à ma prochaine remarque. On n'inclut pas la
question qu'il n'y ait pas de discrimination basée sur la race, la
nationalité, etc., pour les critères de sélection.
C'était un des amendements sur les objectifs et les critères de
sélection. C'était un des points que je voulais inclure. Je
remarque aussi que vous spécifiez au paragraphe c) que vous allez
prendre les mesures nécessaires pour informer, sélectionner et
implanter ces personnes dans différentes régions du
Québec.
Cela soulève une autre préoccupation quant à la
mobilité des gens qui sont acceptés supposons que
quelqu'un est accepté l'idée de diriger les populations
où elles doivent aller. On peut, dans les critères, encourager
certaines personnes, s'il y a des emplois dans certaines régions,
à aller dans ces différentes régions, mais non pas les
obliger ou les implanter dans ces endroits. Le langage que vous utilisez
soulève certaines inquiétudes. J'ai ces deux
inquiétudes.
Je remarque, par exemple, que vous avez accepté les critiques que
nous avions faites quant aux "besoins socioculturels des diverses
régions du Québec." Vous avez enlevé cela et nous en
sommes heureux parce que cela aurait suscité pas mal plus de questions
que cela n'en aurait résolu. Je remarque que vous avez enlevé
cette référence dans vos amendements, dans le nouvel article.
Nous sommes d'accord généralement avec le nouvel article que vous
avez introduit parce que vous spécifiez les objectifs. Vous donnez
certains critères de sélection et nous avions, dans nos
interventions, insisté beaucoup sur le lien de parenté, sur la
question de la réunification des familles comme étant un
critère absolument essentiel et un objectif à inclure dans le
projet de loi. Nous notons que vous avez inclus cet objectif et ce
critère.
Ce sont les remarques générales que j'ai à faire
sur votre nouvel article. Deux points m'in- quiètent: la mobilité
des gens une fois qu'ils sont acceptés au Québec et la question
de non-discrimination quant aux critères de sélection que je ne
vois pas inclus dans votre projet de loi ou dans vos amendements. Aussi je ne
vois pas encore de référence à l'entente. Il y a beaucoup
d'autres articles dans l'entente qui mériteraient soit d'être
inclus directement dans le projet ou bien par référence. Je sais
que l'entente existe, qu'elle a été signée, mais elle peut
être modifiée. Il peut être question de
l'interprétation de cette entente; cela enlèverait beaucoup
d'ambiguïté et je pense que cela renforcerait ces principes en les
incluant dans le projet de loi.
Pour le moment, M. le Président, je vais me limiter à ces
remarques générales. Je vais attendre les commentaires d'autres
membres de la commission. J'aurai peut-être quelques suggestions pour
améliorer, pour bonifier le nouvel article que vous nous avez
présenté ce matin.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Mont-Royal, le député de Papineau
manifeste le désir de vous poser une question. Acceptez-vous?
M. Ciaccia: Oui, je n'ai pas d'objection.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Très brièvement, M. le député de Papineau.
M. Alfred: Je me suis rendu compte que le député de
Mont-Royal est obsédé par l'entente Canada-Québec. S'il me
le permet, je lui demanderais...
M. Ciaccia: Si vous voulez poser une question, posez-la. Si vous
voulez dire que je suis obsédé par certaines choses, on pourra en
reparler dans le couloir.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Papineau.
M. Alfred: M. le député de Mont-Royal, est-ce que
le gouvernement canadien, lui, a modifié sa loi pour y inclure des
références à l'entente Canada-Québec après
la signature de cette entente?
M. Ciaccia: La réponse à votre question, M. le
député de Papineau, est que, dans la loi C-24, était
déjà incluse la possibilité de conclure cette entente. On
y fait référence; alors, ce n'était pas nécessaire.
Le député de Saint-Louis me réfère à
l'article 127. Etes-vous satisfait?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Richmond. Non? Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Ce sont à la fois des commentaires et des
questions sur le nouvel article que le ministre de l'Immigration vient de
déposer. J'étais fort heureuse de voir qu'on avait
au moins réfléchi à la question des travailleurs
temporaires. Apparemment, le comité consultatif de l'immigration a
signalé ce problème-là au ministre. Mais, le ministre nous
dit: Nous allons mettre des outils pour nous assurer que... Il reste que je
suis quand même un peu surprise que l'on ne prévoie, finalement,
dans la loi pour les travailleurs temporaires, aucune balise, à savoir
où on commence et où on finit.
Le problème des travailleurs temporaires, comme le ministre l'a
souligné, a différentes facettes. D'abord, il y a toute cette
question d'exploitation dont les travailleurs temporaires sont probablement
parmi les plus touchés. Il y a aussi que je me demande jusqu'à
quel point on devrait encourager ou favoriser les travailleurs temporaires.
Vous avez dit: II faut quand même qu'ils participent, comme citoyens du
monde, à la mobilité mondiale. On est tous d'accord avec un
principe comme celui-là. On veut bien que tout le monde se
promène à la grandeur de l'univers et on ne veut pas mettre
d'entrave à cela. Mais il y a aussi des inconvénients à
cette question d'exploitation. Je pense à un inconvénient assez
grand. Il y a aussi le fait que c'est un facteur au plan social qui joue
très souvent au détriment des familles. C'est une
séparation des familles pour une période plus ou moins longue,
qui souvent, finalement, peut peut-être aider une famille
économiquement pour un laps de temps relativement court ou long, selon
le cas, mais, à plus ou moins long terme, c'est loin d'être
sûr que ce soit au service des familles, vraiment, qu'on s'adresse, en
favorisant une politique de travailleurs temporaires.
J'aimerais savoir si le ministre de l'Immigration, qui nous parle
d'outils qu'on a ou qu'on va mettre en place, peut être un peu plus
précis quant à sa façon de contrer les
inconvénients quand même très graves de ce travail des
immigrants temporaires au Québec? D'ailleurs, la même question
pourrait se poser pour le fédéral, quant à cela, et je
suis tout à fait prête à le concéder. Mais cela
soulève des problèmes très sérieux au plan social
et au plan du respect de l'homme et de l'exploitation de l'homme. J'aimerais
quand même, qu'on ait en dehors de ces généralités
des outils et qu'on examine quels ont été finalement les
discussions et les échanges à l'intérieur du
ministère de l'Immigration, entre le ministre et ses fonctionnaires,
qui, finalement, le font opter, selon la loi, pour une ouverture telle qu'elle
a toujours existé. C'est ce qui m'inquiète beaucoup.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
ministre.
M. Couture: II n'y a pas d'autres interventions?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
C'était pour répondre à quelques questions.
Mme Lavoie-Roux: Oui, et je n'ai pas l'inten- tion de prendre 20
minutes, j'ai deux autres questions à poser au ministre,
après.
M. Couture: Si vous permettez, je voudrais revenir avant,
à ce qui a été dit par le député de
Mont-Royal. Comme référence à l'entente, quand le
député de Papineau demandait au député de
Mont-Royal si le gouvernement du Canada, lui, fait référence
à l'entente. Vous avez dit: II fait référence à des
ententes qu'il peut conclure avec les provinces. Donc, indirectement, il y a
une certaine référence à cette entente. Je dois lui dire
que la Loi du ministère de l'Immigration, à l'article 7, dit ceci
et c'est la même chose que la loi fédérale à
ce point de vue-là, donc, si la raison que vous donnez pour pardonner ou
justifier la position du fédéral est bonne pour le
fédéral, elle doit être bonne aussi pour nous autres
: "Le ministre peut, avec l'autorisation du lieutenant-gouverneur en conseil,
conclure tout accord avec le gouvernement du Canada et tout organisme de
celui-ci, ainsi qu'avec tout autre gouvernement ou organisme
conformément aux intérêts et aux droits du Québec
pour faciliter l'exécution de la présente loi." J'imagine que
l'on peut fermer le dossier là-dessus, parce que c'est le pendant de ce
que le fédéral dit dans sa loi. Donc, la loi de notre
ministère nous permet de faire des ententes, et dès qu'une
entente est signée... Quelqu'un a fait remarquer je pense que
c'est le député de Mont-Royal que les ententes ne sont pas
éternelles, elles changent. (12 heures)
Alors, il ne serait pas mauvais de bloquer dans la loi une entente
donnée avec les dispositions actuelles de l'entente. C'est beaucoup
mieux de laisser au niveau général cette espèce de
disposition globale qu'on conclut des ententes, et ces ententes peuvent
changer. D'accord? Bon. On n'insiste pas. Sur la mobilité sur le
territoire, je n'ai pas saisi beaucoup les préoccupations du
député de Mont-Royal, là-dessus, en pensant qu'on
obligerait que la loi par sa nouvelle disposition... Ce n'est pas une nouvelle
disposition, elle était là dans la loi, mais...
M. Blank: C'est ce que je veux empêcher. Dans le projet de
loi fédéral, le premier projet C-24, il y avait une disposition
où l'on peut faire venir une personne comme immigrant si elle passe tel
nombre de mois dans telle ou telle place. Après étude...
M. Couture: Etes-vous pour cela?
M. Blank: Laissez-moi finir. Après l'étude par la
commission parlementaire et les autres, on a oté cet article parce que
cela était contre les traditions britanniques, canadiennes,
québécoises de la liberté de mouvement. On ne veut pas
avec cet article général de, peut-être par
réglementation, créer une situation semblable. Quelque part dans
ce projet de loi, c'est dit expressément. Si on veut ces
généralités pour essayer de convaincre des gens par toutes
sortes de moyens de pression
ou des choses comme celles-là, oui! Mais, les forcer, on veut
éviter cela et on veut à quelque part dans cette loi qu'on dise
qu'on n'a pas le droit de faire cela. On peut les inciter à
déménager ou à aller travailler là, on peut leur
donner certains bénéfices, mais d'attacher l'immigration à
la condition que telle ou telle personne doit vivre à Trois-Pistoles
pour six ans, trois ans, ou deux ans, cela on veut l'éviter. C'est le
but de l'intervention du député de Mont-Royal.
M. Couture: C'est tellement vrai...
M. Ciaccia: Votre mot "implanter", cela a toujours cette
interprétation.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît! Pas tous ensemble. C'est à M. le ministre, la
parole.
M. Couture: Je suis très sensible à ce que vous
avez dit. La pratique dans le passé devenait un peu odieuse à
certains points de vue, c'est-à-dire qu'on disait: Vous venez dans ce
pays à condition que vous alliez dans notre Sibérie à
nous. Que vous alliez vivre dans le bout du pays ou de... Enfin, je n'ose pas
nommer de régions pour ne pas me mettre à dos certains...
Une Voix: ... pour un an.
M. Couture: Cela pouvait être un peu odieux. On peut le
faire au niveau des mesures incitatives.
Mme Lavoie-Roux: A la baie James.
M. Couture: Oui, là, on ne prend pas de risque. Cela
peut...
M. Lavoie-Roux: Pour l'argent cela va, mais pour le reste!
M. Couture: On est tous d'accord sur des mesures incitatives pour
stimuler l'enracinement des immigrants dans d'autres régions du
Québec, ne serait-ce que pour faire profiter les autres
Québécois de l'enrichissement culturel qu'apportent les
immigrants et aussi l'enrichissement économique éventuellement.
On doit le faire par nos politiques quotidiennes, par nos services, par la
persuasion, etc., et aider les gens à éventuellement faire le
choix de s'enraciner dans cette belle région du Saguenay-Lac-Saint-Jean.
Il y a des...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): II y en
a beaucoup à Jonquière et à Arvida.
M. Couture: Oui, je peux le dire avec joie, parce que ceux qu'on
a aidés à s'enraciner là-bas, ils sont bien contents, ils
sont bien adaptés et tout le monde en profite. Donc, c'est tellement
vrai ce que vous dites, et j'y suis sensible, qu'on a enlevé... C'est la
raison pour laquelle on a enlevé "les diverses régions",
c'est-à-dire pour ne pas bloquer et paralyser en disant qu'il va
falloir...
J'imagine que vous êtes d'accord avec moi. Si on laisse dans la
loi "implanter" en tenant compte des diverses régions du Québec,
comme ministre cela me force à forcer, quasiment, à prendre les
immigrants et à aller les implanter dans les diverses régions du
Québec selon les besoins démographiques, socioculturels, etc.
Imaginez, par exemple, que nos études nous disent que dans la
Côte-Nord, à l'autre bout de la Côte-Nord, il y a besoin
d'immigrants. Et, moi, comme ministre qui a fait serment d'administrer cette
loi, j'ai dans ma loi un article qui me dit qu'on doit "implanter" selon les
besoins des diverses régions. Cela m'oblige à le faire. Alors, je
l'ai enlevé. Je l'ai enlevé "les diverses régions de
Québec".
M. Ciaccia: Est-ce que vos juristes pourraient trouver un autre
mot qu"'implanter"?
M. Blank: Je trouve curieux ce que vous dites. Vous voulez
inciter les gens à aller là, par d'autres moyens; on ne discute
pas les règlements encore, mais dans le règlement
fédéral...
M. Couture: On ne les discutera pas d'ailleurs, on va...
M. Blank: Dans le règlement fédéral on donne
jusqu'à cinq unités pour la location des immigrants. Ici, dans
votre loi, vous ne donnez rien. Mais ce sont des moyens d'inciter les gens
à aller là; il y a quatre, cinq ou trois points de plus pour
ce...
M. Couture: C'est peut-être parce qu'on était plus
sensible à vos arguments.
M. Blank: Non, c'est l'incitation des gens qui ne peuvent pas
faire...
M. Couture: On n'est pas obligé de mettre l'ombre de
ce...
M. Blank: Oui, mais à part cela, ils ne sont pas
forcés de rester là toute leur vie.
M. Couture: Non, mais je pense que...
M. Blank: Ce n'est pas une condition pour qu'ils s'attachent ce
moyen d'incitation.
M. Couture: On a des exemples. Une Voix: C'est cela.
M. Couture: Depuis plusieurs mois, on fait des efforts pour aider
les gens à s'adapter dans d'autres régions que Montréal et
Québec. Cela réussit à certains points de vue, mais c'est
dans ce sens-là qu'on va travailler. Je pense que...
M. Blank: J'ai déjà eu connaissance qu'on donnait
trois unités pour s'implanter à Ottawa et aucune à Hull.
C'est quelque chose que je ne comprends pas.
M. Couture: Moi non plus, d'ailleurs.
M. Alfred: Je pense que, M. le Président...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): J'ai
reconnu M. le député de Bourassa avant vous.
M. Alfred: Excusez-moi, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Mais M.
le ministre répond...
M. Alfred: C'est sur le même sujet.
Mme Lavoie-Roux: J'avais posé des questions.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît!
M. Couture: Je voulais passer à travers les...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): C'est
cela. Il y a des questions que madame...
M. Couture: Sur la disposition quant à la discrimination,
je dois vous dire, au lieu d'engager un débat à n'en plus finir,
clairement là-dessus d'ailleurs cela fait des mois et des mois
qu'on réfléchit sur ce sujet que, pour nous, il n'est pas
question d'introduire une disposition de non-discrimination qui pourrait, d'une
certaine façon, atténuer ou minimiser la Charte des droits et
libertés de la personne. Si nous voulions introduire ce genre de
disposition, nous serions presque obligés de rester fidèles
à l'entente qui, elle, a cette disposition. L'article de
non-discrimination qu'on suggère dans l'entente, c'est plus
étroit que la Charte des droits et libertés de la personne.
M. Ciaccia: A la page 4.
Une Voix: 3a.1b.
M. Ciaccia: 3a. 1b.
M. Couture: Vous voulez dire dans l'entente?
M. Ciaccia: Dans l'entente, à "sélection".
M. Couture: Oui. Justement, je le lis pour le
bénéfice des membres. On dit qu'en établissant leurs
normes et leurs critères de sélection, les parties contractantes
n'établiront entre les requérants aucune discrimination
fondée sur la race, la nationalité, les origines ethniques, la
couleur, la religion ou le sexe. L'article 10 de la Charte des droits et
libertés de la personne va beaucoup plus loin. Sa disposition sur la
non-discrimination s'étend beaucoup plus largement. Pour nous, ce serait
une façon d'étriquer la notion de non-discrimination. Ce n'est
pas l'argument central que j'invoque là-dessus non plus. C'est que je
crois, en effet, que, par la Charte des droits et libertés de la
personne, qui dit que toute loi postérieure à sa promulgation
couvre toutes ces lois, elle atteint toutes les personnes qui peuvent
être soumises à cette disposition. Je pense que c'est absolument
essentiel de garder à la charte cette espèce de monument
prestigieux qui est au-dessus de toutes les lois du Québec, qui les
éclaire, qui les colore, qui les touche, qui les atteint. Pour ce qui
nous concerne, nous ne voulons pas introduire cette non-discrimination parce
qu'elle est dans la charte et cette dernière a pleine vigueur pour tout
ce que nous pourrions faire en matière d'immigration.
M. Blank: Un mot seulement sur ce sujet. Au gouvernement
fédéral, il y a une charte également et notre charte dit
la même chose, sauf que les tribunaux ne l'ont pas
interprétée dans le même sens. Le gouvernement
fédéral a pris soin de l'inclure dans la loi. Vous avez
copié tous les objectifs du fédéral. Vous changez des mots
ici et là, mais tous les objectifs de la loi fédérale, le
paragraphe 3, à l'exception de celui de la santé et celui de la
sécurité, se retrouvent dans vos objectifs, sauf celui sur la
non-discrimination.
M. Couture: Parce qu'elle est là.
M. Blank: Oui, le gouvernement fédéral en a une
aussi, mais les tribunaux ne l'interprètent pas de la même
façon. C'est le problème de la Cour suprême dans des
milliers de causes qui viennent devant elle, et elle ne s'est prononcée
favorablement que dans un cas, celui d'une Indienne...
M. Couture: On choisira de bons avocats.
M. Blank: C'est cela. Incluez-la dans notre loi de l'immigration
comme le gouvernement fédéral l'a fait et cela éviterait
le problème.
M. Couture: Là-dessus, M. le Président, notre
position est je dirais définitive. Nous voulons, à
la suite de toutes les consultations que nous avons eues, vraiment laisser
à la Charte des droits et libertés de la personne son
entière application pour notre loi.
M. Blank: Est-ce que je peux...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Pourriez-vous nous lire l'article pour le bénéfice de la
commission?
M. Couture: Je vais lire l'article 10 de la Charte.
Une Voix: M. le Président...
M. Ciaccia: C'est pour voir comment elle est plus large. Je ne
comprends pas...
M. Couture: "Toute personne a droit à la reconnaissance et
à l'exercice, en pleine égalité, des droits et
libertés de la personne, sans distinc-
tion, exclusion ou préférence fondée sur la race,
la couleur, le sexe, l'état civil, la religion, les convictions
politiques, la langue, l'origine ethnique ou nationale ou la condition
sociale". On a ajouté dernièrement, il y a quelques mois, je
pense, l'orientation sexuelle. "Il y a discrimination lorsqu'une telle
distinction, exclusion ou préférence a pour effet de
détruire ou de compromettre ce droit". C'est important, je pense, de
lire jusqu'au bout: "... de détruire ou de compromettre ce droit".
M. Laplante: Est-ce que je pourrais lire l'article 52, simplement
pour compléter, M. le ministre?
M. Couture: Oui, allez-y!
M. Laplante: "Les articles 9 à 38 prévalent sur
toute disposition d'une loi postérieure qui leur serait contraire,
à moins que cette loi n'énonce expressément s'appliquer
malgré la charte". Vous avez déjà un article qui couvre
encore davantage.
M. Blank: Oui, je comprends. J'attire l'attention du ministre sur
son argument et sur son objectif. Je suis d'accord. Il y a ici un objectif qui
tente de conserver la mosaïque québécoise,
c'est-à-dire la majorité francophone et, en faisant cela, dans
les critères de sélection, il donne plus de points pour le
français que pour l'anglais. Il donne 10 points pour le français
et 2 pour l'anglais. Le fédéral donne 5 et 5. D'accord?
M. Couture: Ce n'est pas la même réalité.
M. Blank: Ici, vous donnez 10 et 2. Ne trouvez-vous pas que cela
va à l'encontre de l'article 10 de la Charte des droits et
libertés de la personne qui dit: Aucune discrimination quant à la
langue?
Une Voix: C'est un problème national.
M. Couture: Vous voulez que je réponde à cela?
M. Blank: Oui. Répondre à cela? Politiquement et
logiquement, vous avez raison, mais, légalement, vous allez à
l'encontre de la Charte des droits et libertés de la personne.
M. Couture: Non. Là-dessus, nous avons eu une opinion. Vu
que c'est un domaine extrêmement délicat et extrêmement
important, il fallait prendre toutes nos garanties. Me René Hurtubise,
dans un avis qu'il nous a donné sur l'orientation que nous voulions
prendre dans la sélection des immigrants et les critères de
sélection, nous a dit ceci... C'est un débat qui déborde
largement le Québec; c'est un débat, on pourrait dire même,
au niveau des juristes internationaux. Il y a des droits là-dedans.
Est-ce qu'une société peut, d'une façon ou d'une autre,
protéger certains de ses droits collectifs? Elle doit le faire, mais
elle doit le faire jusqu'à un certain seuil, et c'est ce que Me
Hurtibise semble dire dans cet avis que je cite: "Compte tenu de la
réalité socioculturelle et de la légitimité des
objectifs démographiques, socioculturels et économiques
poursuivis par l'État québécois à travers sa
politique d'immigration, la reconnaissance de ce droit à
l'égalité entre tous les candidats à l'immigration
une espèce d'égalité des chances, dans le fond ne
devrait pas empêcher l'État du Québec de
privilégier, conformément à ses intérêts
légitimes, les candidats francophones ou ayant une certaine connaissance
du français". Si, en effet, dans notre grille, le nombre de points qu'on
accorde à la langue française était tellement
déterminant qu'il excluait les gens de notre territoire, parce qu'ils ne
connaîtraient pas cette langue, cela irait peut-être à l'en-
contre de cet article, mais, d'une façon, je dirais, raisonnable et
s'appuyant sur le sens commun, donner 10 points pour la connaissance de la
langue française pour ceux qui viennent sur 100 poins 104 avec
des points bonis au Québec, ce n'est pas déterminant, ce
n'est pas à ce point de vue un critère qui, d'une façon ou
d'une autre, empêche les gens de venir, parce qu'ils ont d'autres
critères où ils peuvent se reprendre.
D'autant plus que, comme on a dit tout à l'heure, j'ai
insisté dans l'explication de nos amendements, que le ressortissant
étranger, un Londonien, par exemple, qui veut venir au Québec,
qui est motivé pour venir au Québec, qui connaît le
Québec et va être informé, peut acquérir une
certaine connaissance du français. Ce n'est pas lié à
l'origine ethnique. C'est dû au fait qu'on va privilégier ceux qui
connaissent un peu de français, comme on va privilégier ceux qui
peuvent créer des emplois, on veut privilégier ceux qui ont de la
famille. Dans le fond, je me demande d'ailleurs si je ne parle pas un peu en
sachant que tout le monde est convaincu, qu'on est tous d'accord pour dire...
(12 h 15)
M. Blank: On est peut-être convaincu, mais ce n'est pas
cela du tout mon argument. Si vous voulez donner plus de points à
quelqu'un qui connaît le français, vous en avez le droit non
seulement légal, mais légitime, vu le contexte au Québec.
Mais je dis qu'à ce moment, à moins que vous mettiez cette
disposition dans la loi, que vous vouliez modifier la Charte des droits et
libertés de la personne vous n'avez pas le droit de le faire. L'opinion
de M. Hurtubise ne dit pas que ce que vous faites est en concordance avec la
Charte des droits et libertés de la personne. Il dit que vous avez le
droit de le faire. Oui, je dis que vous avez le droit de le faire, mais vous
devez mettre dans votre loi que vous faites une exception à la Charte
des droits et libertés de la personne.
M. Couture: Mon interprétation, c'est que... M. Blank:
C'est ce qu'il dit.
M. Couture:... son interprétation est que notre
orientation ne met d'aucune façon en cause l'article 10.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Saint-Louis.
M. Blank: Excusez-moi!
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît, un instant!
M. Blank: ... c'est ce qu'il dit, mais non pas que vous ayez
raison que cela suive la Charte des droits et libertés de la personne.
Ce n'est pas cela qu'il dit. Vous aurez des problèmes avec cela.
M. Couture: II y a encore une bataille de juristes, mais c'est
notre opinion à l'heure actuelle.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Saint-Louis, s'il vous plaît, vous empêchez
actuellement, je pense, le ministre de répondre même à des
questions du député de L'Acadie qui n'a elle-même pas fini
son intervention. Le député de Bourassa est sur ma liste. Le
député de Papineau est aussi sur ma liste. Le
député de Saint-Louis n'était pas sur la liste, mais il a
parlé. Je recède la parole au ministre, peut-être qu'il
pourrait répondre. Non, c'est parce qu'il y en a d'autres ici.
M. Couture: Je continue à répondre à
certaines interrogations. Mme le député de L'Acadie,
j'étais heureux de voir qu'elle rejoignait nos préoccupations
à propos des travailleurs temporaires, je pense qu'en effet c'est un
dossier difficile et qui peut, je crois, rester discutable dans le sens qu'on
peut carrément, pour de bonnes raisons d'un côté ou de
l'autre, être pour ou contre la venue ou l'encouragement de travailleurs
temporaires en politique d'immigration. Ce qu'on a toujours à l'esprit,
finalement, ce sont des exemples parfois très odieux où certains
pays occidentaux ont une façon, je pense, assez honteuse d'utiliser la
main-d'oeuvre étrangère comme on utilise des boîtes de
savon. On la faisait venir quand c'était bon et on l'envoyait, on la
refoulait quand ce n'était plus bon, etc. Je pense que, sans donner
d'exemple, on a tous à l'esprit ces milliers de travailleurs qui
laissaient leur famille pendant deux ou trois ans pour aller travailler dans
des mines, dans toutes sortes d'emplois en Europe...
Mme Lavoie-Roux: A condition de s'ouvrir les yeux, on n'a pas
besoin d'aller si loin.
M. Couture: En effet.
Mme Lavoie-Roux: Les travailleurs en Argentine.
M. Couture: On a tous à l'esprit ce genre de situation.
Cela nous choque au premier abord, sauf qu'il y a aussi un autre principe en
jeu qu'on doit aussi respecter, à mon avis. Quand on nous demande des
garanties suffisantes sur les outils pour protéger les conditions de
travail des travail- leurs temporaires, on a totalement raison
là-dessus. Mais je dis qu'il y a un autre principe en jeu; je pense
qu'une fois qu'on a assuré cette venue de travailleurs temporaires pour
des fins bien précises, pour des délais précis, une fois
que les emplois sont disponibles, à des citoyens dans le monde qui
veulent offrir leur main-d'oeuvre pour gagner éventuellement leur vie ou
même améliorer le sort de leur famille, au nom de quel droit
peut-on leur refuser de chercher leur chance ailleurs? Je pense bien que nous
sommes nous-mêmes des immigrants de 350 ans. Il y a probablement
quelques-uns de nos ancêtres qui, à un moment donné,
voulaient, dans des conditions très dures, quitter leur pays pour tenter
leur chance et gagner un peu d'argent. Parfois, ils revenaient après
quelque temps. Il y a, en fait, des travailleurs temporaires pour qui c'est
l'occasion de découvrir un pays, de découvrir une
société et, en retournant, ils font la demande comme immigrants.
Il y a plusieurs cas là-dedans. Je dis ceci: Le choix que nous avons,
c'est peut-être de respecter ce principe de mobilité des
personnes, de choix de citoyens d'autres parties du monde qui, quand il y a des
offres de travail, sont parfois dans des situations tellement précaires
qu'ils veulent utiliser ces offres. Nous avons fait le choix de l'accepter.
Par ailleurs, on doit, à mon avis vous avez raison
s'assurer, de toute façon, que leur présence parmi nous est
vraiment protégée au niveau des conditions de travail. On
m'apporte aussi une information qui dit que, pour nous, on n'a presque pas le
choix. C'est une catégorie qui est statuée par le
fédéral. Par l'entente, on est obligé d'entrer dans les
catégories du fédéral, même par la loi C-24, parce
qu'elle a préséance. Je pense qu'on n'a même pas le choix
de dire non. Même si le fédéral nous oblige à le
faire, comme choix, j'accepte la venue de ces travailleurs temporaires. Quand
on dit qu'on doit avoir de meilleures garanties sur leur présence ici,
je vous ai dit qu'on avait un nouveau poste créé au
ministère. Nous avons un comité consultatif qui deviendra un
conseil consultatif, qui est très vigilant. Etant eux-mêmes en
grande majorité issus de milieux ethniques et en lien avec tous ces
réseaux de personnes des autres pays du monde, ils permettent au moins
je dirais quasiment presque à chaque jour, à chaque
semaine de nous faire part des problèmes possibles que peuvent
vivre ces travailleurs temporaires.
Il y a aussi les syndicats. Nous avons, depuis quelques mois, fait un
effort de contact avec les syndicats pour qu'ils s'intéressent au sort
des travailleurs immigrants. Le ministère a d'ailleurs donné une
subvention assez importante à la FTQ pour un colloque, une étude,
une réflexion avec tous ses syndiqués sur le problème des
travailleurs immigrants. Eventuellement, non seulement pour les travailleurs
immigrants qui sont des immigrants reçus ou des citoyens canadiens, mais
pour ceux qui viennent temporairement chez nous, elle pourra nous recommander
de quelle façon l'Etat pourrait plus facilement et avec de
meilleures conditions assurer leur présence parmi nous.
Je ne peux pas, à ce stade-ci, vous donner plus de
précisions. Tout ce que je peux vous dire, c'est que je suis
moi-même extrêmement sensibilisé au problème et je ne
demande pas mieux que de partager vos idées ou vos suggestions à
ce niveau.
Mme Lavoie-Roux: J'aimerais que le ministre de l'Immigration nous
dise s'il a eu des recommandations précises sur ce sujet de la part de
son comité consultatif. S'il y en a eu, quelles sont-elles?
M. Couture: Nous avons eu, en effet, des recommandations
précises. Il y a eu un bon débat au comité consultatif qui
a été extrêmement éclairant, à mon avis. Ces
gens ont réussi, je ne dis pas à m'ébranler, mais ils ont
réussi à me rendre extrêmement pointilleux sur la
façon dont nous allons administrer cette disposition. Je pense que le
fait de rester en dialogue constant avec le comité consultatif nous
permet éventuellement d'améliorer nos interventions dans ce
domaine.
Les recommandations précises, je ne les ai pas devant moi. Je
n'ai pas d'objection à les produire. Je pense bien que tout le monde
accepte le fait qu'un comité consultatif, qui est un instrument
extrêmement précieux pour un ministre quant à tous les
problèmes qui ont trait à son ministère, fasse des
recommandations et le ministre lui-même doit faire des choix,
c'est-à-dire qu'il doit dire oui ou non à certaines de ces
recommandations.
Mme Lavoie-Roux: Je suis d'accord là-dessus; c'est
évident que cela demeure un comité consultatif. Sur un avis qui
est quand même très important, qui va toucher la vie d'un certain
nombre de travailleurs éventuels, comme d'ailleurs d'autres conseils le
font que ce soit le Conseil du statut de la femme, que ce soit le
Conseil supérieur de l'éducation ce serait
intéressant, pour faire avancer le débat non pas que vous
allez le modifier aujourd'hui, peut-être, mais surtout pour qu'on avance
qu'on puisse en prendre connaissance. Je ne vois vraiment pas, au niveau
des principes, qui s'opposerait à cela.
M. Couture: Je ne m'y oppose pas. Là-dessus, je voudrais
vraiment ne pas déborder ce qui a été dit. J'en profite
pour rendre hommage au président du comité consultatif qui est
parmi nous, qui nous écoute et qui nous suit. Tout le monde se
félicite de son travail assez extraordinaire au comité
consultatif. Dans un premier temps, le comité consultatif était
contre la disposition sur les travailleurs temporaires, il était contre
le fait que le Québec encourage ou accepte les travailleurs
temporaires.
Il y a eu par la suite, des discussions avec le comité
consultatif et les opinions ont été nuancées à
certains points de vue, mais, si vous me le permettez, dans une prochaine
séance, je pourrais faire le point là-dessus.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que vous allez nous donner les
recommandations?
M. Couture: Oui, je n'ai pas d'objection.
Mme Lavoie-Roux: Bon! Vous disiez, M. le ministre, qu'il y a une
personne, qui est engagée ou sur le point de l'être, qui jouera un
peu le rôle de Protecteur du citoyen dans le domaine du respect, par
exemple, de l'ordonnance du salaire minimum. Les effectifs en place
même le ministre du Travail est d'accord avec cela sont nettement
insuffisants. Le fait que vous ajoutiez une personne, je n'ai pas d'objection,
cela peut certainement permettre de faire une meilleure analyse des
problèmes généraux, mais cela me semble bien insuffisant
pour faire respecter au moins ces dispositions du salaire minimum.
M. Couture: La grande différence, c'est que ce
secrétaire délégué auprès des travailleurs
immigrants n'aura pas lui-même à intervenir dans tous les cas et
à être à l'affût des manquements à certaines
dispositions de la Loi du salaire minimum, mais il sera affecté à
plein temps et cela est très important auprès des groupes
ethniques et des milieux concernés pour être celui
celle ou celui, dépendamment de qui sera choisi qui reçoit
les plaintes et les recommandations des milieux concernés. Quand tout le
monde s'occupe de toutes les choses, souvent personne ne s'en occupe. Pour les
travailleurs immigrants, il me paraît essentiel qu'on identifie un poste
et une personne qui recevra, de tous ceux qui ont des problèmes dans ce
domaine-là, les doléances, les griefs, les recommandations.
Il y a à Montréal l'Union des travailleurs immigrants, il
y a des associations il y a, par exemple, des Grecs qui s'occupent
beaucoup des travailleurs immigrants, etc qui font des dossiers. J'ai
rencontré dernièrement, d'ailleurs, l'Association des
travailleurs grecs et ils ont une série de dossiers sur des cas concrets
de travailleurs qui ont été exploités dans telle ou telle
situation. Ce que le secrétaire délégué aux
travailleurs immigrants peut faire et fera, c'est recevoir un dossier complet
sur un certain nombre de situations. Il n'aura pas lui-même à
aller voir chaque personne. Je pense qu'on joue beaucoup, au ministère,
ce rôle de partenaire dans les milieux ethniques. On veut qu'ils nous
alimentent sur les interventions qu'on peut faire comme Etat.
Lui aura à recevoir ces recommandations, ces griefs et à
faire rapport au ministre. Il pourra dire, en analysant certains dossiers, que
dans tel domaine, dans telle usine, dans tel secteur d'activités, il se
passe telle et telle chose. Et le ministre, sachant cela et ayant quelqu'un qui
sera...
Il y a le soutien technique du ministère aussi. Le
secrétaire délégué auprès des travailleurs
immigrants, à un moment donné, peut, auprès du
sous-ministre, demander une étude sur tel et tel problème. Il
peut faire une recommandation au ministre de faire des interventions
auprès de son collègue du ministère du Travail pour
corriger telle situation. Il pourra lui-même aussi être avec
les
syndicats pour les aider à participer à ce travail de
sensibilisation de la défense des travailleurs immigrants, etc.
Je ne veux pas faire du triomphalisme. C'est évidemment
très insuffisant. Ce n'est pas magique comme tel, mais je pense qu'au
niveau psychologique cela peut avoir un effet d'entraînement, de
mobilisation des gens concernés, des syndicats, des milieux, des groupes
ethniques, etc.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je vais seulement finir
cela, parce que cela finirait ce petit bout.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui,
parce que nous ajournons à 12 h 30.
Mme Lavoie-Roux: Je reviendrai après.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
D'accord. Les travaux de la commission sont ajournés sine die, mais je
sais que nous allons reprendre après la période des questions. Je
vous reconnaîtrai.
Suspension de la séance à 12 h 29
Reprise de la séance à 16 h 40
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît!
Les membres de la commission, pour la présente séance,
sont MM. Alfred (Papineau), Brochu (Richmond), Ciaccia (Mont-Royal), Couture
(Saint-Henri), Lacoste (Sainte-Anne), Laplante (Bourassa), Lefebvre (Viau),
Marchand (Laurier) remplacé par Scowen (Notre-Dame-de-Grâce),
Martel (Richelieu) remplacé par Boucher (Rivière-du-Loup).
Les intervenants sont MM. Bellemare (Johnson), Blank (Saint-Louis),
Charron (Saint-Jacques), Lessard (Saguenay), Marcoux (Rimouski), Roy
(Beauce-Sud), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), MM. Samson (Rouyn-Noranda) et
Vaugeois (Trois-Rivières).
La parole est à Mme le député de L'Acadie.
M. Alfred: M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Qu'y
a-t-il?
M. Laplante: Pour ne pas se laisser prendre dans un guet-apens,
M. Marcoux remplace l'un des membres qui est là, M. Lacoste.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Marcoux à la place de M. Lacoste.
M. Alfred: M. le Président, j'ai une correction à
apporter. Me permettez-vous de...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Une
correction à apporter à quoi?
M. Alfred: Je voudrais remplacer le terme "obsession",
appliqué au député de...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Non,
quand vous aurez le droit de parole, tantôt, là vous ne l'avez
pas!
M. Alfred: C'était par préoccupation.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Papineau, on ne fera pas en commission ce qui s'est
passé à l'Assemblée nationale cet après-midi.
M. Alfred: Non, c'était ici!
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Vous
n'avez pas le droit de parole du tout. Mme le député de
L'Acadie.
Une Voix: C'est de la dictature!
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): C'est de
la dictature!
Mme Lavoie-Roux: Cela ne fait que commencer!
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): En
passant, il y a deux articles de loi qui ont été
préparés par le secrétariat des commissions, par Me
Dominique Lapointe, qui ont été remis à la
présidence; il y a deux articles, le premier dit ceci: "La
présidence a toujours raison." et l'article 2 dit ceci: "Si la
présidence a tort, c'est l'article premier qui s'applique."
Mme le député de L'Acadie.
M. Ciaccia: Si une question de privilège était
permise en commission, j'en soulèverais une à la défense
de mon collègue, mais puisqu'il n'y en a pas...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Or,
c'est presque de la dictature, comme vous le voyez!
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, quand nous nous sommes
quittés, ce matin, si ma mémoire est bonne, j'avais
demandé au ministre de l'Immigration s'il pouvait déposer les
recommandations de son comité consultatif; peut-être les
a-t-il...
M. Couture: Vous aviez précisé: Sur les
travailleurs temporaires.
Mme Lavoie-Roux: Oui, sur les travailleurs temporaires, mais,
s'il y en a d'autres, il n'est pas défendu de les déposer, M. le
Président, si cela peut éclairer nos travaux, je pense que ce
serait excellent.
II nous avait donné certaines explications quant à cette
personne qui serait utilisée moi, je l'avais qualifiée un
peu comme protecteur du citoyen, d'une certaine façon, je pense
que je lui demandais s'il y avait d'autres moyens très précis
qu'il pensait utiliser pour contrer les inconvénients dont on a
parlé assez longuement ce matin, des inconvénients qui se posent
dans le cas des travailleurs temporaires.
M. Couture: Je vais être franc, M. le Président,
j'ai traité un peu de ce nouveau rôle et de ce nouveau poste de
secrétaire délégué auprès des travailleurs
immigrants, en souhaitant et je pense qu'on donne beaucoup d'importance
à ce rôle qu'il soit lui-même un point de
mobilisation et de réflexion, sur la condition des travailleurs
temporaires surtout évidemment. Pour le moment, en plus de tout ce qu'on
a comme services au ministère: le secrétariat, qui reçoit
des plaintes, on a dans les services d'adaptation, dans les COFI, des gens qui
sont dans les milieux de vie et peuvent recevoir aussi un certain nombre
d'interventions à cet égard, j'ai aussi mentionné le
rôle du comité consultatif, etc.; je n'ai pas d'autres outils en
main, mais je peux dire à cette commission parlementaire que le
problème me préoccupe suffisamment et le fait qu'on y accorde
le député de L'Acadie en a assez longuement parlé
me commande, dans les prochaines semaines, sinon dans les prochains
mois, de travailler à améliorer nos outils pour protéger
ces travailleurs temporaires. Qu'on me permette, pour le moment, de simplement
dire que le poste de secrétaire délégué
auprès des travailleurs immigrants va nous permettre de déblayer
les problèmes et, peut-être, éventuellement, de faire au
ministre des recommandations pour la façon dont on pourrait organiser
cette protection des travailleurs temporaires. C'est tout ce que je peux dire
sur cela. (16 h 45)
Comme on m'a demandé de déposer la recommandation du CCI,
du Comité consultatif de l'immigration, non seulement je vais la
déposer, mais je vais la lire, si vous me le permettez. "Recommandation
du Comité consultatif de l'immigration concernant les travailleurs
temporaires. Que la politique d'immigration québécoise
procède, dans les plus brefs délais" remarquez que ces
gens acceptent quand même qu'il y ait réflexion, qu'il y ait une
possibilité d'élimination "à l'élimination
des statuts de travailleurs temporaires et travailleurs saisonniers. Le
Comité consultatif de l'immigration réitère sa
recommandation et considère la réaction des auteurs du texte
comme une fin de non-recevoir." C'est-à-dire que le ministre avait
répondu au comité consultatif avec une série de
recommandations et avait fait des commentaires et j'avais dit que, pour le
moment, je faisais le choix j'étais un peu lié par la
catégorie du fédéral de maintenir.
Les commentaires concernant cette recommandation sont assez
intéressants à lire, il est intéressant d'en prendre
connaissance; je les lis: "L'objet de notre recommandation n'est pas l'a-
mélioration de la condition des travailleurs étrangers au
Québec, question qui ne relève pas de la sélection. De
plus, le CCI sait pertinemment bien qu'il existe peu de situations
d'exploitation qui ne soient pas bénéfiques à exploiter."
Par exemple, l'esclave qui gagne son pain, ce n'est pas un mince
bénéfice, évidemment. "Ce que le CCI veut dire je
cite toujours c'est que la séparation de l'ouvrier de sa famille
n'est pas un bénéfice, travailler dans des conditions
précaires pour un chef de famille n'est pas un bénéfice,
être traité comme une marchandise qu'on importe et exporte
à sa guise n'est pas un bénéfice, et le reste. Le CCI
demande fortement que cette catégorie d'immigrants, telle qu'elle
existe, disparaisse à jamais, c'est-à-dire qu'au statut
temporaire et saisonnier de ces travailleurs soient attachés, à
terme, un avantage et un espoir d'un statut permanent."
Je pense que c'est peut-être dans cette direction que nous
pourrions travailler, c'est-à-dire, tout en acceptant
peut-être pas toujours de gaieté de coeur qu'il y ait des
gens qui viennent ici parce qu'ils en ont fait le choix, tout en créant
certaines balises pour les protéger au niveau des conditions de travail,
on pourrait davantage considérer le problème comme on le
suggère ici éventuellement en termes de préparer
les gens, au moins leur permettre d'avoir cet espoir d'un statut permanent.
C'est-à-dire cette orientation possible m'intéresse
beaucoup qu'éventuellement on pourrait prévoir, dans
l'acceptation de travailleurs temporaires, une possibilité d'un
transfert de statut en travailleurs permanents.
Je dépose cette recommandation et je dis bien sincèrement
que c'est une préoccupation très forte chez moi et, d'ici les
prochaines semaines, les prochains mois, nous allons travailler avec le
comité consultatif et avec d'autres groupes concernés pour
trouver une formule qui pourrait satisfaire les milieux.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je remercie M. le
ministre d'avoir déposé ceci. Je pense que c'est
intéressant comme considération générale, non
seulement pour les membres de la commission, mais pour la population en
général qui ne s'inquiète pas tellement, je pense, du
statut des travailleurs temporaires, pensant surtout qu'on les dépanne
pendant X mois, etc. Le second volet des recommandations du Comité
consultatif de l'immigration précède une question que je voulais
poser et à laquelle, je pense, le ministre vient de donner une
réponse, en partie, mais il y a quand même une question pratique,
c'est une question d'information que je ne connais pas. Pour quelqu'un qui est
venu travailler trois mois, six mois ou huit mois, peu importe, qui retourne
chez lui et qui, à ce moment-là, fait sa demande comme immigrant,
est-ce qu'il y a des points qui lui sont accordés? J'ai essayé de
regarder dans votre grille et je ne l'ai pas trouvé.
M. Couture: Dans notre grille, en effet. Le fait qu'il ait
passé quelques mois parmi nous lui a
permis de faire un certain nombre de connaissances et, dans notre grille
québécoise, on évalue cela et...
Mme Lavoie-Roux: A peu près trois points, ce n'est pas
beaucoup, je pense.
M. Couture: Dans les critères d'adaptabilité, la
capacité d'adaptation, la motivation pour le Québec, la
connaissance du Québec ajoutent des points. J'imagine aussi qu'il a
dû apprendre un peu de français; à mon avis, cela le
dispose facilement à passer la grille après avoir fait...
Mme Lavoie-Roux: Plus facilement. Ma deuxième question
touche cette préoccupation dont j'ai parlé ce matin et qui,
apparemment, se retrouve ici dans le premier commentaire du conseil
consultatif; c'est la situation qui est faite aux familles qui,
évidemment, sont séparées pour des périodes plus ou
moins longues.
Dans la recherche du ministre, M. le Président, je me demande si
ce n'est pas aussi un domaine qu'on pourrait explorer. Je comprends que
toujours amener les familles, cela devient très difficile mais il y
aurait peut-être des solutions, au moins, pour un certain nombre d'entre
elles, surtout si le séjour doit se prolonger comme on a vu dans le cas
des travailleurs, je pense toujours aux travailleurs de Louiseville, ceux qui
étaient venus d'Argentine; finalement, ils étaient restés
ici deux ans, si je ne m'abuse. Ceux qui viennent pour trois mois ramasser des
pommes ou couper le tabac, cela peut être différent, mais il
s'agit...
M. Couture: Oui, mais, évidemment, le problème de
la baie James aussi, ce n'est pas toujours heureux pour les familles. Mais, en
fait, il n'y a rien qui exclue que les membres de la famille viennent comme
visiteurs...
Mme Lavoie-Roux: Mais ils redescendent à toutes les trois
semaines ou à toutes les six semaines de la baie James.
M. Couture: Oui, on a trouvé une espèce de
solution, mais il y en a qui ne viennent pas du tout, non plus...
Mme Lavoie-Roux: Oui, mais cela, c'est leur choix.
M. Couture: pour des raisons économiques aussi,
à certains points de vue... Il n'y a rien qui exclue pour les membres de
la famille de venir comme visiteurs mais on comprend que c'est quand même
un fardeau économique...
Mme Lavoie-Roux: Ils peuvent venir comme visiteurs?
M. Couture: Oui, absolument, ils peuvent avoir un permis de
visiteur pour accompagner le travailleur temporaire.
Mme Lavoie-Roux: Bon, d'accord, c'est peut-être moins
facile; je vous remercie. La deuxième question me le
permettez-vous encore, M. le Président? touchant à la page
3, le paragraphe g), en haut: "Prendre avec les ministères
intéressés les mesures nécessaires pour établir des
normes pour la reconnaissance au Québec des diplômes obtenus
à l'étranger, des études...
M. Couture: Pouvez-vous me... la page 3 de quoi?
Mme Lavoie-Roux: Dans votre grand cahier là, M. le
ministre. Cela, ici, c'est la troisième page, en tout cas. Ce sont vos
amendements au projet de loi 77.
M. Couture: D'accord.
Mme Lavoie-Roux: Cela fait suite aux autres...
M. Couture: J'y suis, j'y suis.
Mme Lavoie-Roux: Alors: "Prendre avec les ministères
intéressés les mesures nécessaires établir les
normes de la reconnaissance au Québec des diplômes obtenus
à l'étranger." Je voudrais quand même avoir l'assurance du
ministre que, dans cette démarche ou cette façon de
procéder, on implique les institutions d'enseignement, les
universités, si tel est le cas, ou les CEGEP, si c'est de niveau
collégial parce que je voyais, hier soir et je ne veux pas qu'on
rentre dans un autre débat mais quand on a discuté de
toute la question des étudiants en réadaptation, il me semble
que, même si le ministre s'est appuyé sur le rapport
Opération Santé, finalement, c'est le ministère qui a eu
le dernier mot pour décider qu'il faut un internat ou non, alors que les
universités, elles, pensaient différemment. Mais, enfin, c'est
seulement en comparaison. Il reste que, présentement, les
étudiants étrangers qui viennent, ce sont les bureaux d'admission
ou les comités d'admission des universités qui établissent
les équivalences. Alors, je voudrais quand même m'assurer ici que
ceci ne deviendra pas une décision strictement même si elle
était en collaboration des ministères de l'Education et de
l'Immigration. Je voudrais qu'on ait cette garantie que les institutions
d'enseignement soient impliquées dans la définition des
critères d'équivalence.
M. Couture: Ce n'est pas un article nouveau; c'est dans la loi
depuis plusieurs années.
Mme Lavoie-Roux: Oui, mais on peut quand même s'informer
comment cela se passe.
M. Ciaccia: C'est l'occasion de l'améliorer. M. Couture:
Non, il n'y a pas de...
M. Ciaccia: L'opportunité du député de
L'Acadie...
M. Couture: Je veux tout simplement dire qu'il y a quand
même une expertise là-dessus que nous avons au ministère et
une pratique et cela se fait parallèlement avec le ministère et
les institutions concernées, les corporations professionnelles, entre
autres. Le service d'équivalence travaille en étroite
collaboration avec les milieux concernés. Il n'y a aucun problème
là-dessus.
Mme Lavoie-Roux: Maintenant, je retourne à la page
précédente, à la page 2, le paragraphe d), au milieu de la
page: "Etablir et maintenir des services d'assistance aux immigrants
chargés de les accueillir dès leur arrivée au
Québec et de leur prêter l'aide requise, de rester en contact avec
eux, leur apporter", etc. Je pense qu'on retrouve également ailleurs
que... en tout cas, faciliter leur adaptation... aux services d'adaptation, on
le retrouve dans le paragraphe f). En fait, c'est surtout au paragraphe f):
"Etablir et maintenir des services d'adaptation chargés de
l'intégration harmonieuse" etc.
Est-ce que le ministre d'Immigration pourrait nous dire quelle est sa
politique à cet égard? On sait que, historiquement je ne
sais pas si je peux les appeler les agences, mais en tout cas les
services privés d'aide et d'accueil aux immigrants, pendant de
nombreuses années, ont finalement assumé presque toute la
responsabilité de cet accueil et de ces services d'adaptation.
Je sais également que du côté du ministre et du
ministère de l'Immigration, on veut développer ces services
d'adaptation du côté des COFI, je pense que le ministre a
déjà commencé à y affecter des ressources.
Le ministre peut-il nous dire, à ce moment-ci, dans quel sens va
son orientation? Est-ce que ses efforts seront mis davantage sur les services
d'adaptation à l'intérieur des COFI ou si on continuera, non
seulement d'appuyer les institutions privées ou les services
privés qui existent ou qu'au contraire on encouragera le
développement de nouveaux dans le secteur privé?
Je ne sais pas si c'est politique ou non de dire ce que je vais dire,
mais je pense que le plus possible, ce qu'on peut garder de services à
caractère social, dans le secteur privé, il faut essayer de les
garder. Il y a là une gratuité il a pu y avoir des abus
dans certains cas, je ne le sais pas, mais cela pourrait arriver une
initiative et un pouvoir d'innovation qui, dans les services publics, parfois
s'étiolent et s'usent à l'habitude. Je pense qu'il faut
certainement garder un équilibre entre les deux, pour le moins. Je
voudrais connaître les politiques du ministre là-dessus.
M. Couture: Ce sont des dispositions que nous avons dans notre
loi depuis la loi originale du ministère. Je peux vraiment, M. le
Président, rassurer le député de L'Acadie; c'est une
philosophie que je partage assez facilement; c'est-à-dire qu'on l'a
même concrétisée dans nos politiques de subventions cette
année.
Je crois que l'État a un rôle à jouer, que les
citoyens ont un rôle à jouer, que les communautés d'accueil
naturelles les communautés ethniques ont un rôle
à jouer ainsi que les organismes privés. Il s'agit d'identifier
les partenaires du gouvernement, du ministère de l'Immigration dans ces
services d'adaptation et d'intégration à la société
québécoise, de les appuyer dans le soutien de leurs
responsabilités. En effet, je crois que cela serait dangereux, que ce ne
serait pas toujours efficace que le ministère, la Fonction publique ou
le gouvernement seul puisse prétendre assumer ce genre de
responsabilité même si c'est dans la loi. On dit bien:
Établir et maintenir les services d'adaptation chargés de
l'intégration harmonieuse des immigrants. Dans ce cas-là, quand
on parle de maintenir les services d'assistance, on ne dit pas, on ne force pas
ou on n'impose pas au ministre de le faire tout seul. La loi lui demande de
s'assurer que cela existe, que cela se développe.
Dans notre politique de subventions, comme je vous l'ai dit je
l'ai répété plusieurs fois cette année nous
avons donné des sommes assez considérables pour aider des
organismes privés, des communautés ethniques afin d'assurer ce
service-là. Si vous voulez on pourra peut-être, par le
ministère, vous donner un tableau de tous les organismes que nous avons
identifiés comme partenaires du ministère. Il y en a un nombre
considérable. Vous allez y voir les critères on les
déposera aussi attachés à la subvention des
organismes. On leur demande s'ils correspondent aux objectifs du gouvernement,
c'est-à-dire selon la loi, si eux-même font leur part pour assurer
cette intégration harmonieuse. On exige également qu'ils soient
équipés pour le faire, qu'ils aient le milieu, la
représentativité et, bien souvent, on les juge d'après
leurs travaux antérieurs. Il y a le Service aux immigrants, sur la rue
Maisonneuve; il y a le CIR; il y a un tas d'organsmes privés que je
pourrais nommer, qui font, comme nous, de l'accueil, du dépanage, et une
série d'interventions pour aider les immigrants à s'enraciner
dans la société québécoise.
Les COFI joueront aussi un rôle dans ce sens-là. Mais, les
COFI ne voudront pas remplacer ce qui existe dans un quartier; ils vont vouloir
compléter ce qui existe et aussi s'ajuster à certaines
interventions du milieu.
Donc, avec les documents qu'on pourra vous remettre à ce sujet,
je pense que je peux répondre vraiment à cette question en disant
que je suis d'accord avec vous. C'est dans ce sens-là qu'il faut
travailler et c'est ce que nous faisons. (17 heures)
Mme Lavoie-Roux: Merci, monsieur, une dernière question:
Un des objectifs du ministère et qu'on retrouve à l'article 2,
dans la partie nouvelle que vous avez ajoutée, "faciliter la
réunion au Québec des citoyens canadiens et résidents
permanents avec leurs proches parents de l'étranger ". En fait,
l'objectif, c'est la réunion des familles, ce à quoi on a fait
allusion ce matin. Je vois dans votre grille de sélection, du
côté de la langue, que vous calculez le français à
10 points, que vous calculez l'anglais à 2 points, et, un peu plus loin,
vous ajoutez 2 points pour le conjoint qui
parle le français, ce avec quoi je suis totalement d'accord. Mais
ma question précise est celle-ci: Compte tenu de l'expérience que
vous avez au ministère de l'Immigration, enfin, ceci constitue 12
points par rapport à deux pour l'anglais, on a quand même au
Québec un nombre assez important d'immigrants ou de citoyens qui sont
d'origine anglophone et qui peuvent désirer faire venir leur famille. Je
voulais simplement voir dans quelle mesure ceci pesait, sur l'ensemble de la
grille, qui, elle, vaut, 100 points ou 104 points. J'ai cru calculer 104, je
pense...
M. Couture: Le maximum de points bonis est 104 points.
Mme Lavoie-Roux: De quelle façon, fonction-nerez-vous
parce que cela demeure quand même en apparence une marge possible de 10
points, est-ce que ceci va éliminer presque systématiquement, ou
enfin, d'une façon assez importante, le cas des familles qui sont
déjà ici, qui sont d'expression anglaise et qui voudraient faire
venir leurs proches? Est-ce que cela va les éliminer ou est-ce que cela
ne joue pas tellement? C'est cela que je veux savoir.
M. Couture: Pour la famille immédiate, aucun
problème. C'est automatique, la famille immédiate, la
catégorie de ce qu'on définit ici, ce qui est défini par
les règlements. La famille immédiate, ses membres viennent
immédiatement, s'ils répondent aux conditions d'assistance
auxquelles les familles s'engagent.
Dans le cas d'une famille plus éloignée, il y a des points
forfaitaires, on donne jusqu'à vingt-cinq points, pour favoriser
l'entrée des membres de la famille plus éloignée.
Je crois que ces points forfaitaires, vraiment, à ce point de
vue, ne nuisent pas à la possibilité... je ne vois vraiment pas
de quelle façon on pourrait croire que cela pourrait nuire à
l'entrée des membres de la famille plus éloignée au
Québec. Evidemment, le fait de donner un certain nombre de points pour
le français, cela s'ajoute aux possibilités.
Mme Lavoie-Roux: Je ne m'inquiète pas pour les
indépendants, je ne m'inquiète pas pour les
réfugiés politiques.
M. Couture: Le cas que vous soulevez, c'est seulement le cas des
parents aidés, ce qu'on appelait avant les désignés, ceux
qui ne sont pas de la famille immédiate.
Mme Lavoie-Roux: II reste que là vous touchez aux
frères, vous touchez aux soeurs, vous touchez même aux enfants de
dix-huit ans et plus.
M. Couture: Non vingt et un ans.
Mme Lavoie-Roux: Les enfants de dix-huit ans et plus, et
même vingt et un ans, cela commence à être la famille pas
mal proche aussi.
M. Couture: Moi, je prends note de votre inquiétude, mais
je ne la partage pas. Je ne crois pas que cela soit vraiment
déterminant, à ce point de vue, que le fait de donner
possiblement 12 points nuise.
Mme Lavoie-Roux: Moi, je ne connais pas assez la situation pour
savoir dans quelle mesure cela joue, c'est pour cela que je vous pose la
question.
M. Couture: Mais, moi, je dirais quand même que les
parents, les anglophones du Québec, qui éventuellement font
venir... d'ailleurs je me réjouis que la plupart des anglophones de plus
en plus parlent français, et un excellent français, on a des
exemples devant nous. Ceux qui auront à utiliser...
Mme Lavoie-Roux: Et c'est arrivé avant le Parti
québécois, cela...
M. Couture: Tant mieux, réjouissons-nous aussi. Les
anglophones qui sont au Québec qui veulent profiter de ces points
forfaitaires pour faire venir des parents dits à aider, d'après
la loi, je crois qu'ils auront probablement le goût, ici, comme ce sont
des parents, de les stimuler ou de les motiver à apprendre
peut-être un peu le français. Il ne faut jamais exclure la
possibilité que des parents d'Angleterre ou d'Australie profitent aussi
de ces points.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Cela
fait au-delà de 20 minutes, que vous avez la parole.
Mme Lavoie-Roux: Bien oui, mais je ne poserai plus de question
jusqu'à 18 heures, M. le Président.
M. Couture: Je devrais dire aussi, M. le Président, qu'on
parle des règlements et qu'on a pas le mandat comme tel de parler des
règlements.
Mme Lavoie-Roux: II reste quand même que vous parlez...
M. Couture: Je ne veux pas être...
Mme Lavoie-Roux: Non, mais il reste quand même, M. le
ministre je ne suis pas en dehors du sujet, c'est le paragraphe b) de
l'article 2 je vois...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Vous
êtes en dehors de votre temps, mais pas du sujet.
Mme Lavoie-Roux: C'est cela, peut-être. Je vous remercie.
Je voudrais dire au ministre, M. le Président, que je ne
m'inquiète pas tellement peut-être que j'ai tort de
ceux qui viennent des Etats-Unis ou de l'Angleterre, ou de l'Australie, ou de
la Nouvelle-Zélande, mais je m'inquiète bien
davantage de ceux qui viennent, par exemple, des Antilles, des Indes ou
de...
Une Voix: Hong Kong.
Mme Lavoie-Roux: ... enfin, des Indes, je sais qu'on accueille
beaucoup d'Indiens, des Indes ou du Bangla Desh, dans ces endroits-là.
C'est davantage de ceux-là qui, justement, n'auraient pas cette
possibilité de stimuler même leurs propres enfants à
apprendre le français ailleurs.
M. Couture: Je prends...
Mme Lavoie-Roux: Alors, je voudrais seulement que vous examiniez
cela.
M. Couture: On l'examinera, d'accord.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Bourassa.
M. Laplante: Merci, M. le Président. Ce qui me chatouille
le plus dans ce projet de loi et dans l'entente qu'il y a eue avec le ministre
fédéral, c'est qu'on n'ait pas obtenu l'accueil exclusif de ces
immigrants au Québec. Je m'explique: Si on regarde les organismes qu'on
a actuellement qui s'occupent des immigrants lorsqu'ils viennent au
Québec, jusqu'où ne sont-ils pas sous la coupole
fédérale? Je ne le sais pas. On n'a pas de rapport
là-dessus. Mais ce dont on peut parler, par exemple, c'est de faits
vécus que Mme le député de L'Acadie pourrait commenter
longuement aussi parce qu'elle a dû intervenir à un moment
donné; ce sont les immigrants vietnamiens, à leur arrivée
ici, dans quel chaos ils sont venus ici. A ce moment-là, M. Attard, de
la Commission des écoles catholiques de Montréal, essayait de les
rejoindre d'un hôtel à un autre et on les
déménageait d'un hôtel à un autre pour qu'on soit
incapable de les rejoindre. Ils sont même allés jusqu'à un
incident qui n'a presque pas touché la presse, c'est l'histoire de
l'hôtel La Salle où il y avait des Chiliens qui étaient
logés; on a mis ces gens dehors comme cela pour placer des Vietnamiens
à ce moment-là.
Je m'aperçois que, quant à avoir une loi sur
l'immigration, si, sur notre territoire-, on n'a pas la possibilité de
les accueillir tel qu'on doit les accueillir comme Québécois, je
vois mal l'intégration de ces immigrants dans la société
québécoise. La plupart des organismes anglais sont bien
structurés, félicitations! Je ne voudrais pas détruire
leurs organismes. Il reste que nous, comme Québécois, comme
organismes francophones, on n'en a pas. On a constaté, à ce
moment-là, que ce n'était jamais nous qui pouvions être
là. Le véritable accueil se faisait justement par
l'élément anglophone québécois qui était
là.
Les lois, actuellement, ne nous permettent pas et ne vous permettent
pas, dans ce projet de loi, de dire que c'est nous qui avons cette charge. Je
me demande pourquoi, M. le ministre. Je vais vous laisser répondre:
Quelles sont les possibilités d'amender notre projet de loi afin d'avoir
l'exclusivité de cela?
J'aurai une deuxième remarque à faire sur un article.
M. Couture: Là-dessus, la loi nous permet d'accueillir et
de mettre en place un certain nombre d'interventions pour les recevoir, les
introduire dans la société québécoise et leur
faciliter l'adaptation. Cela, c'est certain.
Ce que le député de Bourassa veut dire, c'est que le fait
qu'il y ait deux gouvernements qui soient eux-mêmes dans ce style
d'intervention, dans l'accueil, apporte beaucoup de confusion. Je le
reconnais.
Je dois dire que, là comme ailleurs, on déplore un
chevauchement d'interventions de ces deux gouvernements; j'imagine que cela
devrait aussi être partagé par certains de nos collègues de
l'Opposition qui ont été témoins de cette espèce de
confusion. Je pense surtout aux réfugiés, quand ils arrivent au
Québec. Apparemment, les deux gouvernements s'arrachent ces
réfugiés ou ces immigrants et ce ne sont pas toujours des
spectacles intéressants. Cela va beaucoup mieux depuis que nous avons
signé une entente et que nous avons mis sur pied ce comité mixte
où on peut éventuellement faire des recommandations et essayer de
coordonner nos politiques.
Nous ne sommes pas seuls. Le fédéral paie pendant un an
pour les réfugiés, pour certaines catégories d'immigrants;
le Québec a son service d'accueil à Mirabel, il a ses services
sur la rue McGill et dans les COFI, les deux gouvernements, par
différents services, interviennent auprès des immigrants dans
l'accueil et l'adaptation. Je conclurais en disant que c'est une autre des
contraintes de notre loi et du fait que nous soyons encore dans ce
système, et je pourrais peut-être m'engager pour les prochains
mois, avec le soutien qui me semble assuré de la part des membres de
l'Assemblée nationale, à revendiquer du fédéral la
possibilité qu'on soit, comme gouvernement, les seuls maîtres
d'oeuvre des politiques d'accueil et d'adaptation. Je pense que ce serait dans
la cohérence de ce qu'on doit reconnaître à un gouvernement
comme le nôtre, qui est plus près des gens, qui exerce
lui-même ses pouvoirs dans la sélection, donc dans le choix des
immigrants, qui exerce aussi ses pouvoirs par ses COFI dans l'adaptation, la
préparation des immigrants à la société
québécoise. Je pense qu'il serait cohérent et logique que
le Québec retrouve l'ensemble des pouvoirs en matière d'accueil
et d'adaptation. Je me fais fort de rouvrir ce dossier avec mon homologue
fédéral dans les prochaines semaines.
M. Laplante: Pour moi, c'est actuellement une contrainte majeure
dans l'immigration. Lorsqu'on veut diriger les immigrants vers nos
écoles, vers les centres francophones, souventefois, ce sont d'autres
organismes anglophones qui sont là avant, qui font le boulot pour les
diriger vers leur propre milieu anglophone.
Il y a aussi l'article 2, paragraphe c). Je comprends très bien
ce que le député de Mont-Royal
disait sur l'article, il ne semblait pas tout à fait d'accord et,
à force de le lire, j'en arrive à penser comme lui, à ne
pas être d'accord. Lorsqu'on dit: "prendre les mesures nécessaires
pour informer, recruter, sélectionner et implanter je trouve que
ces mots sont durs ces personnes." Sans en faire une motion, si je ne
faisais qu'une suggestion à l'effet de dire: "favoriser l'implantation
de ces personnes sur le territoire", qu'en penseriez-vous?
M. Couture: Je n'y verrais certainement pas
d'inconvénient, si on pouvait améliorer des expressions pour en
enlever des ambiguïtés ou au moins des choses qui pourraient
paraître odieuses à première vue.
M. Laplante: Sans en faire une motion, mais une suggestion...
M. Ciaccia: Cela aiderait, mais quand j'aurai le droit de parole,
j'aurai autre chose à suggérer...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Vous
avez autre chose à ce sujet?
M. Ciaccia: ... pour cet article.
M. Laplante: C'est tout, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci.
M. le député de Papineau.
M. Alfred: M. le Président, je dois vous dire que j'aurais
posé les mêmes questions que le député de Bourassa;
je suis content qu'il les ait posées avant moi. La seule chose que je
voudrais faire maintenant, c'est que, ce matin, j'ai employé, à
l'endroit du député de Mont-Royal, le terme "obsession" et je
voudrais que ce terme soit rayé pour être remplacé par
"préoccupation ".
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci.
M. le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Je remercie le député de Papineau pour
sa gentillesse, il n'y avait pas d'offense, merci pour vos nouveaux termes de
ce matin.
M. le Président, j'avais informé le ministre que j'avais
deux préoccupations concernant les nouveaux articles qu'il nous a
soumis. Premièrement, la question de la mobilité des immigrants,
une fois qu'ils arrivaient au Québec. (17 h 15)
Je pense que le député de Bourassa a fait une certaine
suggestion quant au paragraphe c) et je crois que le ministre a indiqué
que ce n'était pas son intention d'essayer de forcer les gens, une fois
qu'ils étaient arrivés ici, à habiter ou à changer
de lieu pour un certain temps fixe; il pourrait y avoir des mesures incitatives
pour les encourager à aller dans certains endroits, mais pas de mesures
coercitives. Cela est une de mes préoccupations.
La deuxième, c'est encore la question de la non-discrimination.
Je voudrais faire une motion d'amendement qui se lirait comme suit: "Que le
troisième alinéa du paragraphe 3 de l'article 2 soit
modifié en ajoutant, après le sous-paragraphe e) ce serait
dans les amendements, en haut de la page 2, après le sous-paragraphe e)
les sous-paragraphes suivants: f) Respecter le droit de mobilité
de chaque individu à l'intérieur du territoire
québécois; g) S'assurer que l'élaboration des normes et
des critères utilisés dans la sélection des ressortissants
étrangers n'établisse entre les requérants aucune
discrimination fondée sur la race, pas la farce; c'est une erreur
de typographie la nationalité, l'origine ethnique, la couleur, la
religion ou le sexe."
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
D'accord, recevable. Discussion sur l'amendement.
M. Ciaccia: M. le Président, à l'appui de ma
motion, je ferai les remarques suivantes: Je crois que, au paragraphe f), le
droit de mobilité, il n'y a pas de discussion là-dessus, le
principe est accepté; si le principe est accepté, pour enlever
toute ambiguïté, disons-le, incluons-le dans le projet de loi;
comme cela, il n'y aura aucun doute quant au règlement futur, quant
à l'interprétation de la loi et on pourra vraiment dire: On
accepte ce principe. Je voudrais attirer l'attention même sur le fait
que, dans le projet de loi fédéral, on avait dit, ce matin, que
ce qui était bon dans ce projet de loi, on pouvait le prendre et que ce
qu'on trouvait inacceptable, on pouvait le critiquer... Attendez, je vais le
trouver...
Une Voix: M. le Président, est-ce qu'on peut parler sur la
motion?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Mais
est-ce que le député de Mont-Royal a terminé? Non?
M. Ciaccia: Non, je cherche un article ici, un instant, M. le
Président.
En tout cas, il y a un article, dans le projet de loi, qui se
réfère spécifiquement au fait qu'on ne peut pas obliger
une personne à demeurer dans une certaine région ou la forcer
à aller dans une certaine région.
Quant à la question de non-discrimination, j'ai
écouté les raisons que le ministre a données pour ne pas
l'inclure dans le projet de loi. Je trouve ces raisons un peu difficiles
à comprendre. Il dit que la Charte des droits et libertés de la
personne va plus loin. Le fait est que le ministre l'a inclus dans l'entente,
il a signé cette entente et je reproduis textuellement l'article 3-A1-B
de l'entente qui dit les paroles exactes que j'ai introduites dans ma
motion.
Il y a une autre raison pour laquelle cela devrait être inclus
dans le projet de loi, même si on a la Charte des droits et
libertés de la personne. La Charte des droits et libertés de la
personne s'applique aux immigrants une fois qu'ils sont ici; légalement,
cela ne vous empêcherait pas d'avoir des règlements pour ceux qui
ne sont pas au Québec...
M. Couture: Les règlements sont couverts aussi.
M. Ciaccia: Dans la pratique, les gens qui ne sont pas au
Québec n'ont pas cette protection. Si vous dites que c'est votre
intention réelle de ne pas avoir de pratiques discriminatoires dans la
sélection, je ne vois pas pourquoi, encore une fois, on ne pourrait pas
l'inclure dans le projet de loi. Comme cela, on pourrait vraiment
démontrer que vos paroles, vos bonnes intentions sont
concrétisées en blanc et noir dans le projet de loi et que,
vraiment, au niveau de la sélection, il n'y aura pas de discrimination
en ce qui concerne la race, la nationalité, les origines ethniques, la
couleur, la religion ou le sexe.
Je veux vous signaler aussi que, dans le projet de loi
fédéral, malgré qu'il y ait une charte des droits de la
personne un Bill of Rights fédéral ils l'ont inclus
dans leur projet de loi. Alors, cela concrétise un peu les intentions du
gouvernement et je pense que cela serait tout à fait logique qu'au
niveau des sélections, il n'y ait pas cette discrimination parce que je
trouve parfois un peu contradictoires certaines des mesures que vous discutez
quand vous dites: On ne fera pas de discrimination quant aux questions
d'origine ethnique, mais on va donner plus de pourcentage à la question
linguistique; cela peut être mal interprété parce qu'une
fois que vous acceptez... Par exemple, au paragraphe e), vous dites que vous
allez prendre les dispositions nécessaires pour que les personnes qui
s'établissent au Québec acquièrent, dès leur
arrivée ou même avant qu'elles ne quittent leur pays d'origine, la
connaissance de la langue française.
C'est une intention très claire et nous acceptons ce principe.
Une fois que vous avez cette clause, je pense que c'est nécessaire,
même, d'inclure la clause de non-discrimination parce que comme on
l'a dit avant l'admission au Québec ne dépendra pas
vraiment de la nationalité ou de l'origine ethnique, ou si une personne
parle ou ne parle pas une certaine langue parce que vous avez
créé une obligation ici, à savoir que quelle que soit leur
langue d'origine, ils doivent connaître et prendre les mesures
nécessaires pour avoir une connaissance de la langue française.
Alors, que ce soit un Portugais, Italien ou Anglophone, je crois que l'article
e) va s'appliquer à lui.
Pour cette raison, je pense que c'est absolument essentiel
d'établir que, au niveau de la sélection des immigrants, on n'ait
pas de discrimination et, si vous avez cru bon de l'inclure dans l'entente que
vous avez signée, je pense bien que cela devrait être
reflété dans votre projet de loi.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je ne me
souviens plus de votre... cela fait quatre mois que je n'ai pas
présidé. M. le député de Richmond.
M. Brochu: Merci, M. le Président. Simplement, avant que
le ministre prenne la parole sur cette motion d'amendement qui vient
d'être présentée, j'aimerais attirer son attention sur le
fait que le ministre, par les amendements qu'il nous a proposés aux
articles qui sont maintenant amendés à nouveau par cette
proposition, a voulu, je pense, établir clairement les objectifs qu'il
poursuivait dans son projet de loi et éviter, en somme, toute
espèce de confusion ou d'avoir à faire face en cours de route
à certains problèmes à cause d'une imprécision dans
la loi. Je pense que cela a d'abord été l'objectif du ministre
d'en arriver à un plus grande clarté.
Ici, maintenant, ce qui est proposé par l'amendement, c'est
simplement de respecter, non pas seulement l'esprit de l'entente qui est
survenue entre le ministre même et le ministre Cullen à ce
moment-là, en définitive, mais la lettre également. Ce
n'est donc pas, non seulement en esprit mais dans l'écrit quelque chose
qui va à l'encontre de ce qui a déjà été
décidé, mais simplement de rendre officiel, dans le cadre d'un
texte de loi provincial qui fait suite, lui, à une entente qui est
intervenue.
Je pense que non seulement cela ne va pas à l'encontre mais cela
m'apparaît comme une façon tout à fait normale maintenant
de procéder que de le reconnaître dans le cadre législatif
qui fait suite à l'entente. C'est en même temps, je pense, donner
une assurance plus grande, une forme de garantie si vous voulez
par rapport au mode de sélection des immigrants. Je pense que c'est le
rôle de cette commission parlementaire d'étudier le projet de loi
pour le rendre le meilleur possible, le rendre également le plus
facilement utilisable dans l'application courante qu'on veut en faire.
Je pense que la reconnaissance des principes qu'on émet ici, sous
forme d'amendement, sera simplement de nature à bonifier le projet de
loi et à fournir cette garantie, je pense, à laquelle on est en
droit de s'attendre. J'attire l'attention du ministre sur ce fait en lui
demandant de considérer le bien-fondé de cette motion qui nous
est présentée.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
ministre.
M. Couture: J'apporte beaucoup d'attention à cette
proposition d'amendement et je vais vous donner mon sentiment là-dessus.
Dans la première proposition, on nous demande d'introduire, à la
suite des objectifs: "f) respecter le droit de mobilité de chaque
individu à l'intérieur du territoire québécois". Je
suis tout à fait d'accord qu'il faut, en tout état de cause,
respecter cette mobilité et nous en faire une obligation. Je dois dire
que cet amendement précis, je vais demander qu'on le suspende; je suis
prêt à l'examiner de plus près, mais je voudrais quand
même signaler que, dans la charte internationale des droits de l'homme,
à laquelle adhère le gouvernement du Canada et nous sommes
aussi liés, évidemment, par cette adhésion à
l'article 13 de la déclaration universelle des droits de l'homme, la
fameuse charte de 1948 de San Francisco, on dit ceci: "Toute personne a le
droit de circuler librement et de choisir sa résidence à
l'intérieur d'un Etat. "
La discussion est là. Le Canada est lié par
cette charte et par ces dispositions et, nécessairement...
M. Ciaccia: Pas légalement.
M. Couture: ... politiquement, mais...
M. Ciaccia: ...
M. Couture: ... mais c'est quand même une obligation morale
extrêmement forte qui, j'imagine, éclaire tous nos
législateurs passés et futurs. Je ne veux pas en faire un long
débat et, si vous me permettez, je vais suspendre la décision sur
cet amendement et je vous apporterai ma...
M. Ciaccia: M. le Président, je voudrais attirer votre
attention sur le fait que, malgré la convention internationale à
laquelle vous vous êtes référé, pour donner effet
à cette entente internationale, la loi fédérale
prévoit l'article 115, paragraphe 4: "Aux fins de la présente loi
et des règlements, lorsqu'une personne obtient le droit
d'établissement à certaines conditions, aucune de ces
dernières ne peut indiquer dans quelle région cette personne doit
résider." Politiquement, vous avez l'engagement qui est traduit
légalement dans le projet de loi; on demande la même chose pour
votre projet de loi.
M. Couture: Remarquez que là, on n'intervient pas; le C-24
s'applique en matière d'immigration. Il y a une préséance
de C-24 selon l'article 95 de la constitution canadienne. J'accepte votre...
Cela vient d'un bon naturel, comme on dit, et parfois, il est mieux que ce soit
écrit plutôt que de ne pas l'être. J'y porte beaucoup
d'attention et, si vous permettez, dans une séance subséquente,
on pourra en disposer.
Quant à l'autre amendement, on vous a beaucoup entendu
là-dessus ce matin, amendement auquel vous tenez...
M. Brochu: M. le Président, j'aurais une question
supplémentaire à poser au ministre sur cette première
partie de l'amendement. Est-ce qu'on me permettrait, à ce moment-ci, de
le faire, pour revenir sur la question...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Une
question, pas un discours.
M. Brochu: Une question. Je ne pense pas que j'aie abusé;
cependant, si c'est une invitation de votre part...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Non,
c'est parce que j'ai reconnu le député de Notre-Dame-de-G
râce...
M. Scowen: Non, cela ne presse pas du tout...
M. Brochu: M. le Président, c'est sur la question que le
ministre a soulevée en terminant son exposé, relativement aux
droits internationaux de la personne. J'aimerais qu'il nous éclaire sur
ce point, avant sa réflexion. Il nous dit qu'il se fie sur le fait que
le Canada reconnaît les droits de la personne sur le plan international.
(17 h 30)
II reste quand même l'élément suivant. Lorsqu'on
parle de mobilité d'emploi et lorsqu'on parle d'assurer
l'élaboration des normes et des critères utilisés, on
parle de sélection. C'est donc avant que la personne ne vienne ici.
Cette nuance ne me semble pas mineure; la Charte des droits de la personne
s'applique une fois que la personne est en territoire canadien, ici. L'argument
vaut à ce moment-là. Mais lorsqu'on parle de sélection, on
ne peut pas s'en référer à la charte des droits de la
personne sur le plan international.
M. Couture: Ce que le député de Mont-Royal voulait,
par son amendement, c'est de garantir, une fois que la sélection est
faite, cette mobilité des ressortissants, des immigrants.
M. Brochu: C'est exact mais, par contre, on ne peut pas faire le
raisonnement inverse et dire: On va s'appuyer sur la charte des droits de la
personne pour ne pas inclure cette disposition.
M. Couture: Vous voulez parler de la charte internationale.
M. Brochu: Oui, oui, en disant que c'est déjà
compris là-dedans. A ce moment-là, la personne n'est pas
considérée comme vivant sur le territoire. C'est au moment de la
sélection que cette disposition s'applique.
M. Couture: Mais dans la loi, on a des dispositions pour la
sélection, c'est-à-dire avant que les gens n'arrivent...
M. Brochu: C'est cela.
M. Couture: ... et on a des dispositions une fois qu'ils sont
arrivés. Alors, le député de Mont-Royal, en
présentant son amendement, se référait à nos
dispositions ou à nos interventions: Une fois que les immigrants sont
arrivés en territoire québécois. Je pense que c'est ce que
vous n'avez pas distingué.
M. Brochu: D'accord.
M. Couture: Quant au deuxième amendement, c'était
dans l'entente et on l'a signée parce que, dans une entente, on essaie
autant que faire se peut de s'ajuster aux désirs quand c'est
possible de l'autre partie. Le gouvernement fédéral avait
fait le choix de l'introduire dans sa loi C-24. C'est son choix et, en signant
l'entente, évidemment, il voulait aussi qu'on participe à ce
choix par l'entente elle-même, par son libellé même.
Pour ce qui concerne la loi, là-dessus, même si je
comprends parfaitement votre préoccupation, l'insistance que vous
apportez à ce que ce soit dans la loi d'immigration, en reconnaissant
par
ailleurs que la charte y pourvoit et si elle s'applique à nos
interventions, vous ne m'avez pas convaincu. M. le Président, le
député de Mont-Royal n'a pas ajouté tellement
d'argumentation à ce qu'il apportait ce matin, d'autant plus que ce
dernier a invoqué le fait qu'à l'étranger, quand on fait
la sélection, on pourrait éventuellement, par hypothèse,
déroger à cette charte.
M. Ciaccia: Cela ne s'applique pas dans la question de
sélection.
M. Couture: Parmi les dispositions spéciales à
l'article 56.3 de la Charte des droits et libertés de la personne, on
lit cet énoncé-ci: Dans la charte, le mot "loi " inclut un
règlement, un décret, une ordonnance, ou un arrêté
en conseil adopté sous l'autorité d'une loi. Cela veut dire que
là-dessus, vraiment, ils ont tout prévu et ils couvrent tout. A
l'étranger, par hypothèse, comme vous l'avez
suggéré ou, du moins, évoqué, on pourrait
éventuellement faire de la discrimination, parce que c'est
l'étranger, on serait obligé, à ce moment-là,
d'appliquer des règlements. Nos fonctionnaires à
l'étranger seraient nécessairement liés par des
règlements qui auraient été préparés en
conséquence.
Or, c'est clair, la charte le dit, toute la réglementation que
nous allons produire par rapport à cette loi, en aucune façon il
nous sera possible de nous écarter de l'article 10 de la Charte des
droits et libertés de la personne. Je ne veux pas répéter
tout ce que j'ai dit ce matin, mais je dois refuser cet amendement, parce que
je pense que la charte est un grand document pour le Québec; nous sommes
liés par cette charte. Il est absolument impossible que nous puissions
nous déroger de nos obligations par rapport à la charte.
Finalement, l'inquiétude du député de Mont-Royal
je comprends son inquiétude et j'essaie de la dissiper le
pousse à dire: Si ce n'est pas dans la loi, peut-être qu'il
pourrait arriver que, dans une directive, un règlement, on essaie de
faire de la discrimination. C'est impossible de le faire.
Comme ministère, comme ministre, comme gouvernement, liés
par l'ensemble des loi québécoises et, au sommet la Charte des
droits et libertés de la personne, nous sommes dans
l'impossibilité, il n'y a aucune éventualité qui pourrait
nous permettre de croire qu'il serait possible de faire de la discrimination;
nous sommes liés par cette chatte. Il n'est pas nécessaire de
l'introduire et il y a des inconvénients à l'introduire, parce
que, si on commence à introduire une disposition de non-discrimination,
on est obligé de faire référence à l'entente et,
dans l'entente, la référence est plus minimisée par
rapport à l'article 10 de la charte; donc, il pourrait même y
avoir, à ce point de vue, un certain problème de concordance.
M. le Président, c'est tout ce que j'avais à dire pour
répéter que, pour le premier amendement, je suspends la
décision et j'y porterai beaucoup d'attention; quant au deuxième,
je ne peux pas le recevoir.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: M. le Président, comme je suis arrivé un
peu en retard, je présume qu'on parle, en général,
sur...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Non,
nous sommes à discuter des amendements du député de
Mont-Royal.
M. Scowen: Dans ce cas, comme je ne connais pas ces amendements,
je ne peux pas parler. Je m'excuse.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): On
pourra revenir. J'avais reconnu, au préalable, le député
de Richmond. Est-ce que vous voulez intervenir?
M. Brochu: Très brièvement...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Après quoi, ce sera le député de Saint-Louis, et ensuite,
le député de Rivière-du-Loup et le député de
Papineau.
M. Brochu: C'est simplement une remarque pour indiquer que, tout
à l'heure, on s'était peut-être un peu
mélangé dans les propos. L'argumentation que je donnais au
ministre, il y a quelques minutes, sur l'application des droits de la personne
sur le plan international s'applique ici à la deuxième partie de
l'amendement du député qui a été
présenté: "S'assurer que l'élaboration des normes et des
critères utilisés dans la sélection des ressortissants
étrangers n'établisse entre les requérants aucune
discrimination fondée sur la race, la nationalité, l'origine
ethnique, la couleur, la religion, le sexe".
Ce que je lui disais tout à l'heure, c'est que la charte,
à toutes fins utiles, c'est ici que cela s'applique, elle n'est en
vigueur que lorsque la personne est acceptée, est en sol
québécois ou en sol canadien. A mon sens, on ne peut pas invoquer
la protection.
M. Couture: M. le Président, quand on fait des
règlements, on les fait ici. Toute notre réglementation qui va
à l'étranger, qui permet l'administration de la loi,
c'est-à-dire qui permet à des fonctionnaires,
éventuellement, de faire la sélection, cette
réglementation est produite ici, au Québec, par les
Québécois, et elle ne peut d'aucune façon, à cause
de l'article 56.3 de la Charte des droits et libertés de la personne,
déroger à la disposition sur la non-discrimination.
A moins qu'un fonctionnaire cela peut arriver, j'espère
que non lui-même, par son intervention personnelle, fasse de la
discrimination; cela peut arriver dans tous les gouvernements du monde que, par
hasard, quelqu'un ne suive pas une loi ou un règlement, mais, en tant
que disposition législative, on est tout à fait couvert par la
charte dans les moindre recoins de la réglementation et des
directives.
M. Brochu: Si je comprends bien...
M. Couture: Donc, cela a un effet dans la sélection
à l'étranger. Pour administrer le règlement, pour faire la
sélection des candidats à l'étranger, on a à se
baser sur une réglementation qui est couverte par la charte.
Comprenez-vous?
M. Brochu: Si je comprends bien l'argumentation du ministre, il
ne veut pas avoir de redondance, répéter ce qui est
déjà couvert.
M. Couture: Exactement. Je veux laisser toute l'importance
nécessaire, tout le prestige nécessaire à la Charte des
droits et libertés de la personne qui, elle, est notre grand monument de
respect, de défendre des droits et libertés de la personne, qui
doit colorer, couvrir et éclairer toute notre législation et
à laquelle on doit se référer.
M. Brochu: Est-ce qu'on ne se retrouve pas, à ce
moment-là, un peu dans le débat qu'on avait vécu
vous vous en souviendrez, M. le Président au niveau, par exemple,
de l'appellation de la Société nationale de l'amiante où
on disait: C'est certain que c'est une société nationale, mais
enlevons le mot. C'est un amendement qui avait été apporté
à la table de la commission parlementaire, c'était clair. A ce
moment-là, le gouvernement avait dit: II faut quand même
reconnaître, dans les faits, il faut que ce soit dans le texte de loi, il
faut que ce soit noir sur blanc que c'est la Société nationale de
l'amiante. Est-ce que cela ne vaudrait pas, également, dans ce
cas-ci?
M. Boucher: Ce n'est pas la même chose. Prenez, par
exemple, la loi sur les handicapés, où on a
retranché...
M. Brochu: D'accord, c'est le choix du ministre. Merci.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je tiens
pour acquis que le premier amendement, f), est suspendu, avec consentement. Le
député de Saint-Louis, sur l'amendement g).
M. Blank: Je pense que le ministre, en s'appu-yant sur la Charte
des droits et libertés de la personne, créerait un
problème et c'est un danger. Je vais vous montrer le danger à
deux endroits. Nonobstant mais pas dans l'absence suivant
l'opinion juridique que vous avez de Me Hurtubise, vous avez le droit de
légiférer sur la question de la langue; ici, dans la charte, vous
dites que vous n'avez aucun droit de discrimination envers la langue et vous
avez déjà, comme le député de L'Acadie l'a dit, une
question de dix points contre deux points pour le français et l'anglais.
Dans le cas de la famille aidée ou des parents moins proches,
peut-être que cela ne fait pas une grande différence, mais quand
on deviendra des indépendants, vous aurez le droit après 30
unités de déclarer cette personne recevable au Québec sans
l'approbation d'Ottawa; c'est un tiers du pointage que vous donnerez pour la
langue française. Je trouve cela une discrimination envers la
communauté anglophone et même le premier ministre, M.
Lévesque et le ministre d'Etat au développement culturel on dit
qu'on doit préserver la communauté anglophone au Québec.
La communauté anglophone, comme la communauté francophone, ne
peut pas survivre sans l'immigration. Si vous faites des démarches
à l'encontre de la Charte des droits et libertés de la personne
où vous donnez une préséance à ceux qui parlent
français et non s'ils parlent anglais, à ce moment-là,
vous pratiquez une discrimination qui peut faire mourir et disparaître la
communauté anglophone du Québec, ce qui va à l'encontre
des intentions à ce qu'on dit de ce gouvernement. Cela est
un côté.
De l'autre côté, vous avez une autre chose qui est
très dangereuse dans la Charte des droits et libertés de la
personne. Vous dites qu'il n'y a aucune discrimination du côté des
convictions politiques. Je suis 100% d'accord. Si une personne, ici au Canada
ou au Québec, veut former un parti nazi, c'est son affaire; nous, pour
prendre soin de cela, on peut voter pour ou contre. C'est même
arrivé dans cette Chambre-ci, je pense qu'en 1968 ou 1969, il y avait un
groupement à Saint-Eustache qui a formé un parti nazi ici au
Canada et je pense que c'est moi ou quelqu'un d'autre qui a demandé la
question au premier ministre, M. Bertrand, à ce moment-là, qui a
dit: Le Québec est un pays libre; si on veut former n'importe quel
groupement politique sans violence on y a droit. Est-ce que vous êtes
prêts à laisser entrer au Québec des nazis de l'Allemagne
qui restent encore? Avec votre Charte des droits et libertés de la
personne, vous en avez l'obligation. C'est pour cela qu'on doit au moins
limiter à des choses qu'on veut. Nous, qui sommes ici, avons des droits
de base; mais est-ce qu'on a besoin de faire entrer des gens qui puissent nous
nuire avec des pensées politiques qui sont contre toutes nos
pensées de liberté et de démocratie? Vous avez cela dans
la Charte des droits et libertés de la personne.
C'est pour cela que je pense que la limitation dans la loi
fédérale, vous l'avez; la loi fédérale couvre dans
une autre section avec la sécurité, c'est la réponse que
le ministre a donnée, mais la sécurité, c'est très
louche; c'est pour cela qu'on veut l'avoir dans la loi ici. C'est très
important.
Le Président (M. Vaillancourt): M. le ministre.
M. Laplante: Qui a fait venir Quang?
M. Blank: Une minute! Une question...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre! Il n'y a pas eu de question, monsieur. Il n'avait pas le droit de
poser de questions?
M. Blank: Non, mais il y a eu une accusation et je veux y
répondre.
M. Laplante: II n'y a pas eu d'accusation. J'ai
demandé qui a fait venir Quang, qui a travaillé pour le
faire venir.
M. Blank: II m'a demandé qui a fait venir Quang? Le
général Quang n'a jamais été mon client ni de loin,
ni de près.
M. Laplante: Je n'ai pas dit que c'était votre client.
J'ai dit: Qui l'a fait venir?
M. Blank: Mais c'est une accusation que vous avez lancée
avec l'aide des fonctionnaires en arrière de vous.
M. Laplante: Non, c'est faux.
M. Blank: Je ne suis pas aveugle.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre! M. le député de Saint-Louis, à l'ordre, s'il vous
plaît! A l'ordre! M. le député de Saint-Louis! M. le
député de Bourassa, à l'ordre s'il vous plaît!
M. Blank: Je n'aime pas être insulté. Je suis un
avocat, je pratique ma profession et même avec ma profession, je n'ai
jamais touché au général Quang. Il n'a jamais
été mon client.
M. Laplante: Personne ne vous accuse de cela.
M. Blank: Oui, et c'est la deuxième fois. M. Laplante:
Ah non!
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Saint-Louis!
M. Blank: Vous avez peur de faire des accusations? Faites-les. Je
vais vous répondre. Faites-les en dehors de cette porte et je vais vous
poursuivre aussi.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Saint-Louis, à l'ordre!
M. Couture: M. le Président, je pense qu'on pourrait clore
l'incident. Je serais porté à dire qu'il y a eu malentendu sur
les paroles qui...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): De la
part de deux présidents de commission parlementaire, les
députés de Saint-Louis et de Bourassa, c'est réellement
glorifiant!
M. Laplante: J'ai seulement posé une question, M. le
Président, bien innocente.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Vous
avez provoqué le député de Saint-Louis; il n'aurait pas
dû succomber; il a succombé. Mais je voulais signaler que ce sont
deux présidents de commission parlementaire qui viennent de nous donner
ce spectacle.
M. Couture: Je voulais apporter cette question au débat
à propos de cet article et tout ce qu'on soulève comme
problème possible de discrimination, surtout en faisant
référence à nos points accordés à la langue.
(17 h 75)
Quand même, l'avis de la Commission des droits de la personne sur
les possibilités pour un gouvernement de légiférer sur la
langue, évidemment on l'a dit à propos de la loi 101
et en ce qui concerne d'une façon plus précise les
critères qu'on introduirait dans une loi d'immigration, dans la
réglementation d'une loi d'immigration pour la sélection des
immigrants, c'est important de les redire, M. le Président, parce que je
crois qu'il y a toute une philosophie là-dedans à laquelle on
peut adhérer ou non.
C'est-à-dire qu'il n'y a jamais de discrimination parce qu'on
fait des choix, qu'on privilégie certaines catégories, par
exemple, des entrepreneurs investisseurs qui apportent des capitaux, qui ont
une certaine... qui, avec eux, ont des chances réelles de succès,
qui veulent créer de l'emploi; on les privilégie. Ce n'est pas de
la discrimination pour ceux qui n'ont pas de capitaux. C'est qu'on aide les
gens qui ont certaines choses de plus que d'autres selon les besoins d'une
société à rentrer dans ce territoire.
M. Hurtubise dans son rapport, qui a été
adopté par son conseil d'administration de la Commission des droits de
la personne du Québec, cela a quand même pas mal d'importance,
c'est rendu public dit ceci: "La Commission des droits de la personne
s'est déjà prononcée plusieurs fois de façon
générale et à propos de cas particuliers sur la
disposition prévue à l'article 10 de la Charte des droits et
libertés de la personne relativement à la langue."
Cette interprétation dont la principale argumentation est
exposée dans le mémoire de la commission concernant le projet de
loi dans ce temps-là, c'était le no 1 sur la langue
française au Québec énonce que: "Une
législation en matière linguistique" donc, des
critères en matière linguistique aussi "qui est
justifiée par les intérêts légitimes de la
majorité n'est pas contraire aux droits fondamentaux de la personne si
elle ne va pas au-delà de ce qui est requis pour la réalisation
de ses intérêts légitimes et si elle s'assure que les
droits et intérêts de tous sont respectés." Dans le fond,
l'immigration, enfin, dans le droit international, ce n'est pas un droit en
tant que tel, cela reste encore un privilège. Moi, je pense que, dans
certains cas, a un quasi-droit, par exemple, quelqu'un qui fuit un pays,
quelqu'un qui est persécuté, quelqu'un qui doit absolument
trouver une terre d'asile. J'aimerais, peut-être, à un moment
donné, qu'on en fasse un grand débat. Mais, dans l'état
actuel des lois occidentales, ou, du moins, ce qu'on connaît en
matière d'immigration, on ne reconnaît pas le... c'est un droit;
on pourrait invoquer cela.
Les intérêts légitimes de la majorité doivent
être affirmés et respectés mais il est tout aussi
important, dans un régime démocratique où on est
respectueux des droits et libertés de la personne, de ne pas aller
au-delà de ce qui est requis pour assurer ce respect. Tout excès
et ici, j'insiste sur le mot "excès" est une atteinte
sinon technique, aux droits et libertés garantis par un texte, du moins,
à l'esprit de ceux-ci, à la qualité démocratique
d'un état donné. Alors, la commission dit, que dans notre cas, il
n'y a pas d'excès. "Cependant" je vais un peu plus loin
"compte tenu de la réalité socio-culturelle et de la
légitimité des habitudes démographiques, socioculturelles
et économiques poursuivies par l'Etat québécois à
travers sa politique d'immigration, la reconnaissance de ce droit et
l'égalité entre tous les candidats d'immigration, ne devraient
pas empêcher l'Etat du Québec de privilégier
conformément à ses intérêts légitimes, les
candidats francophones ou ayant une certaine connaissance du français,
ainsi que le prévoit la réglementation canadienne, qui attribue
dix points sur un maximum de 100 au requérant qui lit, écrit et
parle couramment le français et l'anglais. Là, personne ne s'est
opposé, personne n'a dit que c'était de la discrimination; tous
ceux qui parlent ni anglais, ni français, pourraient invoquer ce fait
votre argumentation est renversée, à ce moment-là
la réglementation québécoise ne contreviendrait pas
à l'égalité proclamée par l'article 10 de la
Charte, si elle privilégiait par son système de points les
candidats francophones. Il ne faudrait pas, cependant ce qui là,
risquerait de devenir discriminatoire que la valeur relative de
l'article 1 du chapitre III de l'entente, attribuée aux critères
linguistiques, soit exagérée ou disproportionnée par
rapport à celle qui était accordée aux autres
critères. Alors, là-dessus, quand on donne dix points sur 100
points, personne ne peut dire que c'est excessif et que c'est
disproportionné.
M. Blank: Mais un tiers?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Rivière-du-Loup et, après, le
député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Boucher: M. le Président, simplement une remarque, avec
ma courte expérience parlementaire, pour avoir assisté à
la discussion qui a eu lieu sur la Loi 9 sur les handicapés, alors que
c'était l'inverse qu'on discutait, on voulait exclure de la loi 9 des
droits pour les handicapés qui était inclus dans la Charte des
droits et libertés de la personne, parce qu'on disait que c'était
quand même discriminatoire d'inclure cela dans la loi, parce qu'on
faisait une catégorie de gens à part les autres, de personnes
à part les autres, en l'incluant spécifiquement dans une loi qui
concernait un groupe de gens.
Je considère qu'en incluant cet amendement dans la loi, on en
fait un groupe de personnes à part des autres, parce que,
déjà, c'est contenu dans la Charte des droits et libertés
de la personne. Je ne voulais faire que cette remarque. Je ne sais pas si le
député de Saint-Louis a quelque chose à ajouter à
cela, mais je me rappelle que l'Opposition avait argumenté
là-dessus lorsqu'on avait discuté de la loi sur les
handicapés.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Sur cette deuxième...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
D'accord! On est encore sur l'amendement. Y a-t-il... Sur l'amendement,
d'accord, allez-y...
M. Scowen: Sur la deuxième partie de l'amendement...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui,
c'est cela.
M. Scowen: Si je comprends bien, M. le ministre, la raison pour
laquelle vous ne voulez pas l'insérer, c'est que ce sera, en effet, une
espèce de chevauchement de ce qui existe déjà et ce n'est
pas nécessaire. C'est le point essentiel, si je comprends bien.
M. Couture: En moins, c'est-à-dire que cela va moins loin
que la charte.
M. Scowen: Cela va moins loin. Il me semble avoir entendu deux
arguments. Le premier est sur cette question dont vous avez déjà
discuté, la question du fait. Est-ce applicable à
l'extérieur du pays avant que les gens n'arrivent? Et le
deuxième, c'est comme vous l'avez dit qu'on peut avoir
soit des fonctionnaires dans les postes à l'extérieur du pays,
soit des fonctionnaires ici qui sont en train de développer des normes,
qui auront toujours la loi et la réglementation devant eux, mais pour
lesquels la charte sera mise de côté.
M. Couture: Excusez-moi, je voudrais rectifier quelque chose.
Pour les fonctionnaires qui auront la réglementation et la charte, ce
sera une réglementation qui aura été adoptée sous
la charte, c'est-à-dire qu'on est obligé, par la
réglementation dans la loi, de se conformer aux dispositions de la
Charte des droits et libertés de la personne. Donc, c'est impossible de
concevoir une réglementation qui ne serait pas conforme, ce serait
illégal. On ne pourrait pas l'utiliser. Cela ne pourrait même pas
passer.
M. Scowen: Je vous pose la question d'une façon
très simple. J'accepte votre assurance, mais n'y a-t-il pas moyen,
simplement, d'essayer, d'une façon très simple, de lier les deux
afin de dire quelque chose, soit ce que le député de Mont-Royal a
suggéré, soit simplement une clause qui dise: La loi doit se
conformer à la charte des droits de l'homme? Enfin, quelque chose pour
que tout le monde puisse voir, d'une façon très claire et nette,
soit les immigrants, soit les fonctionnaires, que c'est le cas.
Je ne doute pas du tout de votre bonne volonté, mais il me semble
que l'on parle maintenant, depuis quelque temps, d'une question... Il suffit de
rendre claire, nette et visible votre intention.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Bourassa.
M. Scowen: Est-ce possible ou non? C'est tout ce que je
demande.
M. Couture: On peut toujours répéter, dans chaque
loi que le Québec pourrait adopter, la loi sur le transport, la loi sur
l'amiante: N'oubliez pas que cette loi relève aussi de la Charte des
droits et libertés de la personne. Cela me paraît une
redondance.
M. Scowen: Excusez-moi, M. le ministre. Je pense que c'est
quelque chose qui ne doit pas se faire, normalement. Mais on parle ici d'une
loi sur l'immigration et je pense que c'est une loi qui n'est pas comme les
autres, dans le sens que cela touche de très près les droits
fondamentaux de l'homme. C'est très lié à la constitution,
vous le savez autant que moi. Pour moi, il s'agit simplement d'une exception
dans ce cas-ci. Je suis complètement d'accord avec vous pour dire que ce
n'est pas nécessaire de répéter cela dans toutes les lois
du Québec.
Je ne veux pas vous bousculer, mais il s'agit d'être clair. Y
a-t-il moyen de rassurer tout le monde et de le faire d'une façon
claire?
M. Couture: On aura beaucoup de déclarations pour rassurer
les gens.
M. Blank: Le type qui a une copie de notre loi n'a pas une copie
de la Charte des droits et libertés de la personne.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Bon! Y
a-t-il d'autres interventions?
M. Ciaccia: Je vais essayer de convaincre le ministre d'inclure
dans le projet de loi une référence au principe de la
non-discrimination. Premièrement, c'est un principe fondamental et il ne
faudrait pas se fier à d'autres lois et dire: La loi s'applique ou elle
ne s'applique pas. Vous venez de me donner un avis juridique qui dit: Voici une
interprétation suivant laquelle ce n'est pas contre la Charte des droits
et libertés de la personne.
Je ne voudrais pas avoir la même sorte de problème dans
l'avenir, vis-à-vis de ce projet de loi, de se faire donner une autre
opinion d'un autre avocat, qui pourrait vous dire que l'intention,
évidement, du projet de loi, ce n'était pas d'inclure l'article
3-1, a), b), parce qu'il n'a pas été inclus. On peut faire cet
argument. On regarde à l'intention du législateur. Quand on a une
entente et qu'on voit le projet de loi qui est différent de l'entente,
on dit: Evidemment, c'était l'intention de faire des changements
à l'entente. Premièrement, on ne s'y réfère pas
à l'entente et, deuxièmement, on n'inclut pas toutes les clauses
de l'entente.
Alors, vous pourrez me produire une opinion, d'un autre avocat, à
l'avenir, qui dira: Ce n'était pas l'intention d'avoir le principe de
non-discrimination quant à la sélection. C'est un argument qui
pourrait être donné.
L'autre argument et, je crois que celui-ci est encore un peu plus grave,
à mon point de vue, c'est que si vous lisez l'article 52, du chapitre VI
de la Charte des droits et libertés de la personne, cet article 52 se
lit comme suit: "Les articles 9 à 38 prévalent sur toutes
dispositions d'une loi postérieure qui leur serait contraire, à
moins que cette loi n'énonce expressément s'appliquer,
malgré la charte.
Alors, un autre argument qui pourrait être fait, c'est que vous
amendez la loi 68, la loi 68 a été adoptée avant la Charte
des droits et libertés de la personne. L'amendement, ce n'est pas la
loi, c'est un amendement à la loi. Un argument pourrait être
avancé, à savoir que le bill 50, la Charte des droits et
libertés de la personne, ne s'applique pas aux amendements, parce que,
clairement, ce n'est pas une loi postérieure, car quand vous allez
regarder vos amendements, vous allez vous référer, comme vous le
faites maintenant, à la loi 68.
Alors, vraiment, on se réfère toujours à l'article
de la Loi du ministère de l'Immigration 1968, chapitre 68, c'est cela
qui va nous guider, c'est cela qui va...
M. Blank: Pas nécessairement. M. Ciaccia: Non, non,
non!
M. Blank: Cela, c'est une loi, c'est un projet de loi, cela!
M. Ciaccia: Non! non! vous l'appelez projet de loi, mais c'est un
amendement à une loi.
M. Blank: Cela devient une loi.
M. Ciaccia: Non, cela ne devient pas une nouvelle loi.
M. Blank: On va bien voir...
M. Ciaccia: Je ne veux pas faire un grand débat juridique
avec vous, mais je vous donne mon opinion, et je pense que j'ai raison.
M. Blank: Le juge Pigeon n'est pas d'accord avec vous. Je vais
essayer de m'en trouver un autre, parce qu'il est fort.
M. Ciaccia: Un livre intitulé: "Rédaction et
interprétation des lois", par Me Louis-Philippe Pigeon, juge de la Cour
suprême, dit que, dans la loi d'amendement là où une
difficulté survient, c'est lorsqu'on est en présence d'une loi
d'amendement. Alors, il faut distinguer soigneusement entre les dispositions de
la loi modificatrice et les
dispositions qui sont décrétées pour faire partie
de la loi que l'on modifie. Si, dans la loi modificatrice, vous ajoutez un
article qui se lit comme suit: "La présente loi ne porte pas atteinte
aux droits constitués avant son entrée en vigueur", il n'y a
aucun problème, il s'agit évidemment de l'entrée en
vigueur de la nouvelle loi. Mais, très souvent, ce que l'on fait, c'est
que l'on modifie l'ancienne loi, et l'on décrète, par exemple,
que l'article 15 remplaçait, etc., etc..
Alors, vous n'avez pas une nouvelle loi, vous avez une loi
antérieure et l'argument pourrait être fait, et je continue je
cite ici:
M. Couture: On pourrait donner la source.
M. Ciaccia: La source, c'est "Rédaction et
interprétation des lois", par Me Louis-Philippe Pigeon, page 16. Je
continue la citation que j'ai commencée qui se lit comme suit: "Mais,
très souvent, ce que l'on fait, c'est que l'on modifie l'ancienne loi et
on décrète, par exemple, que l'article 15 est remplacé par
le suivant et, dans ce nouvel article, on dira: "Rien dans la présente
loi ne doit porter atteinte aux pouvoirs que possédait une personne lors
de l'entrée en vigueur de la présente loi".
Alors, très souvent, on oublie que, lorsqu'on fait mention de
l'entrée en vigueur, non plus dans le texte d'un nouvel article, mais
dans le texte d'un article que l'on introduit dans la loi ancienne,
l'entrée en vigueur ne signifie pas l'entrée en vigueur de la
nouvelle loi, mais l'entrée en vigueur de la loi qu'on modifie.
Cela veut dire, d'après cette interprétation, et je pense
que c'est un auteur qui est assez...
M. Couture: J'ai beaucoup de respect pour lui.
M. Ciaccia: Cela voudrait dire que les droits de la Charte des
droits et libertés de la personne ne s'appliqueront pas à votre
Loi sur l'immigration.
M. Couture: Remarquez qu'il y a des juristes qui ne disent pas la
même chose. (18 heures)
M. Ciaccia: Bien, pourquoi laisser un doute? Pourquoi laisser la
possibilité qu'on va recevoir demain une opinion contraire? Si vous
êtes vraiment sincère je ne doute pas de votre
sincérité et si vous voulez appliquer la
non-discrimination, si vous dites que l'article 3,1a, b, ne va pas assez loin,
si vous êtes d'accord pour inclure l'article 10 de la Charte des droits
et libertés de la personne dans votre loi pour qu'il n'y ait pas de
doute, pour qu'il n'y ait pas d'ambiguïté, je ne veux pas aller
plus loin que l'entente que vous avez signée, mais je ne veux pas aller
moins loin non plus.
Si je m'en tiens à l'interprétation de la Charte des
droits et libertés de la personne, avec l'opinion que je partage, que
j'ai soulevée quand je l'ai soulevée, je ne savais
même pas, on m'a apporté cette opinion plus tard je crois
qu'on est dans une zone grise et que la Charte des droits et libertés de
la personne ne s'appliquera pas.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Les
travaux de la commission sont ajournés sine die.
Fin de la séance à 18 h 1