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Version finale

31e législature, 4e session
(6 mars 1979 au 18 juin 1980)

Le jeudi 26 avril 1979 - Vol. 21 N° 55

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude des crédits du ministère de l'Immigration


Journal des débats

 

Etude des crédits du ministère de l'Immigration

(Quinze heures cinquante-sept minutes)

Le Président (M. Boucher): A l'ordre, s'il vous plaît!

La commission permanente de l'immigration est réunie pour étudier les crédits du ministère de l'Immigration pour l'année 1979/80.

Les membres de la commission sont M. Alfred (Papineau), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Couture (Saint-Henri), M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Laplan-te (Bourassa), M. Lefebvre (Viau), M. Le Moignan (Gaspé), M. Marchand (Laurier), M. Martel (Richelieu).

Les intervenants sont M. Bellemare (Johnson), M. Blank (Saint-Louis), M. Boucher (Rivière-du-Loup, comme président); M. Caron (Verdun), M. Charron (Saint-Jacques), M. Lessard (Saguenay), M. Marcoux (Rimouski), M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Vaugeois (Trois-Rivières).

Comme rapporteur officiel, M. Lefebvre (Viau)?

M. le ministre, pour les remarques préliminaires à l'étude des crédits.

Remarques générales M. Jacques Couture

M. Couture: Merci, M. le Président, je souhaite la bienvenue à tout le monde. Je voudrais, au préalable, présenter les membres de l'équipe de l'Immigration qui sont ici présents. M. Florian Rompré est à un téléphone d'urgence, il va arriver d'une minute à l'autre, il sera ici, à ma droite; M. Yves Miron, chef de cabinet, Mme Nicole Geoffroy, attachée de presse, M. Luc Martin, sous-ministre adjoint, M. Marcel Cloutier, sous-ministre adjoint, M. Régis Vigneault, sous-ministre adjoint, M. Jean-Marie Roy, directeur à l'information — vous pouvez peut-être vous montrer un peu, cela peut être utile quand les gens ont affaire à vous — Me Michel Jarry, directeur des services juridiques, M. Michel Dagenais, directeur des services administratifs, M. Normand Lemay, chef du service financier, M. Paul Charbonneau, qui était chef du service financier, et Mme Claire Thivierge, à la direction des communications.

M. le Président, il est heureux que nous puissions chaque année, au printemps — parce que c'est toujours au printemps — profiter de cette commission permanente de l'immigration pour poursuivre notre réflexion commune sur les objectifs, les orientations et les actions menées dans la sélection et l'adaptation des nouveaux membres de notre société québécoise. J'ai d'autant plus de plaisir à être ici avec vous aujourd'hui que l'immigration a été au premier plan de l'actualité cette année, et presque toujours en fonction de bonnes nouvelles. Je vous en rappelle quelques-unes. Je vous annonçais, l'année derniè- re, que nous venions de signer avec le gouvernement du Canada une entente accordant des pouvoirs réels au Québec en matière d'immigration. Mais il restait à sanctionner cette entente par une loi et c'est maintenant chose faite, la loi 77 et ses règlements sont entrés en vigueur.

Ensuite, le gouvernement a réglé le problème des allocations versées à certaines catégories d'immigrants ainsi qu'aux stages dans les COFI, qui se voyaient soudain privés de cette allocation à cause des restrictions budgétaires du gouvernement fédéral. Ce règlement marquait le nouvel essor des COFI. Le ministère a aussi fait beaucoup parler de lui en menant une action vigoureuse en faveur des réfugiés, ceux du Hai-Hong en particulier. Ses actions sont telles qu'elles ont forcé le gouvernement du Canada à bouger. Pour marquer la prise en main des COFI et sensibiliser du même coup la population locale au sort des réfugiés récemment arrivés, les COFI, suite à ma demande, ont lancé l'opération de rapprochement, qui a connu beaucoup de retentissement dans les milieux concernés. (16 heures)

Mais il serait intéressant de connaître le cheminement de ces actions et je vais essayer de le faire brièvement. La loi 77 proclamée le 13 décembre dernier, donnait effet à l'entente Couture-Cullen, signée le 20 février 1978. Dorénavant, le Québec a le pouvoir de sélectionner les ressortissants étrangers désireux de s'établir sur son territoire de façon permanente ou temporaire. Les règlements qui établissent la grille de sélection des candidats à l'immigration ont également été adoptés. La grille est établie en fonction de critères, tels que la situation de l'emploi au Québec, l'âge, la formation professionnelle et les connaissances linguistiques des ressortissants. Dans les cas de détresse, dont les réfugiés, ces critères peuvent être assouplis.

La loi 77 prévoit également la création d'un conseil consultatif de l'immigration. Ce conseil a été effectivement mis sur pied en décembre dernier après une longue et fructueuse consultation auprès des diverses communautés ethniques. Les quinze membres qui le forment ont d'abord été choisis pour leur connaissance de l'immigration et du milieu québécois autant que pour leurs qualités personnelles et leur représentativité ethnique, sociale et professionnelle. Le président de ce comité, M. Mounir Rafla, est d'origine égyptienne, actuellement directeur général du CEGEP Ahuntsic; il est aussi le porte-parole officiel de la maison d'Egypte.

Travailleuse sociale dévouée, Mme Thérèse Benguerel est directrice — je nomme les membres et je dis un peu ce qu'ils font parce que cela peut être utile de les connaître davantage — du centre d'aide aux immigrants et elle possède une vaste expérience à l'accueil des immigrants. Bien connu dans la région de l'Estrie, M. Jean-Roch Bilodeau est professeur de géographie et membre du service d'aide aux Néo-Canadiens dans Sherbrooke.

Fort de l'expérience qu'il a acquise en Afrique, M. Laurier Bonhomme est conseiller au service d'accueil aux voyageurs immigrants et directeur fondateur du centre d'information et de recherche pour immigrants. M. Jules Nadeau, journaliste bien connu, a enseigné en Chine et agit comme interprète au ministère. Natif de l'Ukraine, M. Roman Serbyn est professeur d'histoire à l'Université du Québec, à Montréal. M. Paul Dejean, président de la communauté chrétienne des Haïtiens de Montréal, milite depuis de longues années pour la défense des droits de ses compatriotes. C'est à M. Amadeu DeMoura, Portugais d'origine, qu'on doit l'existence de radio centre-ville et de la télévision communautaire portugaise.

Pour sa part, Mme Irène Formaris est membre fondateur de l'Union des travailleurs grecs. Très engagé dans les organismes latino-américains du Québec, M. Anselmo Leonelli est né au Chili, il est membre de l'exécutif de la maison culturelle Québec-Amérique latine. M. Mayer Levy, qui vit au Québec depuis 1965, est le directeur du bulletin du cercle juif et le directeur des relations communautaires du Congrès juif canadien. Professeur à l'Université Laval M. Ngoc Dinh Nguyen est membre de l'exécutif de l'Association des Vietnamiens du Québec. Mme Sheila McLeod-Arnopoulos a signé plusieurs articles sur la situation des immigrants et s'intéresse en particulier au problème des femmes immigrantes. Avocat d'origine italienne, M. Giuseppe Sciortino connaît bien les problèmes des réfugiés politiques et de la main-d'oeuvre immigrante. Enfin, M. Gino Silicani est né en Italie, ancien directeur général de l'adaptation au ministère de l'Immigration, il est actuellement membre du comité interculturel et interconfessionnel du Conseil supérieur de l'éducation.

Cette équipe exceptionnelle me conseille déjà sur diverses questions reliées à l'immigration, à l'adaptation des immigrants, à leur nouveau milieu d'accueil, ainsi qu'à la conservation des coutumes ethniques. Je me félicite de ce choix. Un des règlements afférents à la loi 77 venait également, à point nommé, régler le problème soulevé dans les COFI par les restrictions budgétaires fédérales. Son règlement touchant les services d'adaptation et de formation linguistique articule les modalités qui permettent aux immigrants non admissibles, aux termes de la réglementation fédérale, de recevoir du gouvernement du Québec, les allocations qu'ils touchaient auparavant du gouvernement du Canada. En somme, la loi 77 reflète la préoccupation du ministère de l'Immigration du Québec de servir les objectifs et les besoins de la société québécoise tout en privilégiant le principe de la réunification des familles, d'une part, et, d'autre part, le souci de jouer un rôle humanitaire au plan international.

Il est encore trop tôt pour évaluer l'impact qu'a l'application de cette loi sur les activités courantes du ministère. Mais il est indiscutable que depuis le mois de janvier, le nombre des personnes accueillies à notre siège social du 355 rue McGill a facilement passé du simple au double, illustrant même, par le fait, la présence concrète du ministère auprès des immigrants. D'autre part, nous avons ouvert de nouveaux bureaux à l'étranger, à Hong Kong, à Caracas et à Lisbonne pour être mieux en mesure de répondre à la demande dans ces régions du globe.

Ceci dit, c'est sans aucun doute la question des réfugiés qui a le plus contribué à mettre le Québec, pendant plusieurs semaines, à l'avant-scène de l'actualité. Mais il est bon de rappeler ici que la décision de mon ministère d'accueillir les quelque 200 réfugiés du Hai Hong n'avait rien à voir avec un geste impromptu ou improvisé. Bien au contraire, la possibilité qu'a eue le Québec de se porter rapidement au secours de ces réfugiés est due au fait que nous nous préoccupons depuis les tout premiers jours de mon entrée au ministère, de cette question toute particulière des réfugiés. Pour ne nous en tenir qu'aux actions menées en leur faveur au cours des quinze derniers mois, mentionnons, entre autres, le colloque que tenait en mars 1978, le comité consultatif, et qui portait sur le thème "Les réfugiés et le Québec, une nouvelle responsabilité."

Quelques semaines plus tard, je demandais à quelques-uns de mes hauts fonctionnaires d'amorcer les travaux pouvant mener à l'élaboration d'une politique cohérente pour les réfugiés. Pendant que ces travaux s'effectuaient, je me rendais à Genève pour y rencontrer des représentants du Haut-Commissariat aux réfugiés. A mon retour, le 17 mai 1978, j'annonçais que le Québec était disposé à accueillir 50% des prisonniers politiques argentins admis au Canada. En juillet, le Québec recevait seize familles sud-vietnamiennes réfugiées de la mer qui nous arrivaient du Kenya où elles avaient été accueillies temporairement.

En octobre, je créais au sein du ministère le poste de secrétaire délégué auprès des réfugiés. Au cours du même mois, j'annonçais que le Québec était disposé à accueillir 200 réfugiés chiliens. Ces individus commencent à entrer régulièrement. Puis novembre et le drame du Hai Hong. Ce drame mobilise tous les esprits et tous les coeurs. Le Québec est en mesure d'agir rapidement. Je dépêche un conseiller de mon ministère à bord de ce cargo qui est amarré au large de la Malaisie. Son mandat: accélérer l'arrivée au Québec de 200 réfugiés vietnamiens qui vivent à bord dans des conditions indescriptibles.

Cette mission est la sixième effectuée au cours de l'année dans le sud-est asiatique en vue de venir en aide aux réfugiés de la mer. La célérité avec laquelle le Québec peut agir dans ces circonstances lui vaut d'assumer officiellement le leadership de l'opération canadienne et la population québécoise dans tout cela accueille avec chaleur les nouveaux arrivants. Des centaines de coups de téléphone sont reçus au ministère. On offre emplois, hébergement, mobilier, vêtements. Donc, ça mobilise beaucoup de monde.

Voilà pour nos actions passées. Mais au chapitre des réfugiés, que nous réserve la nouvelle année? Nous continuons de l'avant. Le secrétaire délégué aux réfugiés, je devrais dire la secrétaire déléguée aux réfugiés parce qu'elle est mainte-

nant nommée en poste à la suite du concours, c'est Mme Louise Gagné-Rebello, elle est entrée en fonction au début de ce mois. Mme Gagné nous vient de la Commission pour la protection de la jeunesse. Elle siège également au Comité international de l'enfant, où elle agit en tant que conseiller auprès des groupes d'immigrants dans le cadre de l'Année internationale de l'enfant. Membre du conseil d'administration de la Ligue des droits de la personne et de l'Association Québec-Chili, elle compte à son actif une vaste expérience de travail au sein de plusieurs organismes à vocation internationale.

Mme Gagné poursuivra les travaux déjà entrepris et préparera la toute nouvelle politique de parrainage et de compagnonnage des réfugiés dont j'annoncerai les détails ces jours-ci. En gros, cette politique, selon la formule de parrainage collectif: un groupe ou une société d'au moins cinq personnes s'engage légalement à assumer pendant un an la responsabilité du logement, de l'aide matérielle et l'établissement d'un ou de plusieurs réfugiés.

Pour sa part, le ministère s'engage à subventionner ce groupe ou cet organisme.

Quant à la formule compagnon, elle vise à inciter les organismes bénévoles québécois dévoués à des oeuvres d'entraide sociale à s'engager moralement à soutenir et à guider les réfugiés tout au long de leur première année de vie en terre québécoise. Ces deux programmes permettront de stimuler et de canaliser la générosité de la communauté québécoise à l'égard des réfugiés. D'autre part, mon ministère est également en train de préciser les contours d'une politique qu'on pourrait provisoirement intituler: Accueil des petites villes aux réfugiés. Cette nouvelle politique veut favoriser l'enracinement des réfugiés dans des villes de moindre dimension que les grands centres tels que Montréal, Sherbrooke, Hull, Trois-Rivières et Québec et repose sur le postulat que les municipalités de taille moyenne sont aussi bien sinon mieux préparées à l'accueil des réfugiés à cause de leur meilleure capacité d'intégration.

Les variables qui président au choix de ces villes sont: le logement, l'emploi, le transport, les ressources communautaires, les services d'éducation linguistique et autres structures scolaires et, bien sûr, l'attitude de la communauté.

Déjà des actions allant dans ce sens ont été menées à Granby et à Valleyfield et l'on peut d'ores et déjà prévoir le succès éclatant de cette initiative. Au total, le Québec a accueilli plus de 1500 réfugiés en 1978, soit 27% des réfugiés acceptés par le Canada et 11% du total de l'immigration québécoise pour cette année.

Nous nous sommes engagés à recevoir 3500 autres réfugiés en 1979, soit 7% du total de l'immigration.

Pour conclure ce chapitre ajoutons que nous serons bientôt en mesure d'annoncer officiellement notre participation, à l'occasion de l'Année internationale de l'enfant, à des projets touchant les enfants réfugiés dans le monde. Ces projets sont considérés comme prioritaires par le Haut- commissariat des Nations Unies pour réfugiés qui souhaite favoriser l'établissement d'enfants réfugiés dans leur continent en répondant à leurs besoins primaires et essentiels. Pour nous, c'est une belle occasion de manifester concrètement notre solidarité avec tous les réfugiés du monde. J'aurai le plaisir de proposer dès demain notre participation à ce programme et de lancer un appel à la population québécoise pour l'inciter à y contribuer.

J'ajouterai, en terminant sur ce chapitre, que notre préoccupation du sort des réfugiés dans le monde s'accompagne de nos efforts de participation à la défense des droits de la personne qui, souvent, sont si étroitement liés à la condition des réfugiés. Une collaboration particulière avec l'organisme Amnistie internationale nous permet de rester informés de ces problèmes et de faire à l'occasion les représentations nécessaires auprès des gouvernements ou d'organismes. Notre intention pour l'année en cours est de sensibiliser davantage notre population à cette dimension comme témoignage additionnel de notre ouverture sur le monde.

Abordons, si vous le voulez bien, un autre volet de notre action, celui de l'adaptation. L'année dernière, à pareille date, nous vous faisions part d'une nouvelle politique d'action concertée qui visait à inciter les organismes intéressés à l'immigration à travailler toujours plus étroitement avec le ministère, dans la poursuite de ses objectifs d'adaptation et d'intégration des immigrants à la communauté québécoise.

Cette politique visait également deux objectifs secondaires: Celui de dépolitiser l'octroi de subventions et celui de reconnaître, de facto, le rôle de partenaires privilégiés du ministère que jouent les groupes et associations ethniques préoccupés par les questions d'immigration.

Cette politique maintenant pratiquée depuis un an a donné des résultats plus que satisfaisants et nous nous proposons évidemment de la poursuivre tout en la raffinant. Bien sûr, les programmes d'aide financière sont l'aspect le plus voyant de cette politique. Ces programmes ne font pas de cadeaux. IIs ne visent qu 'à soutenir et à appuyer concrètement les groupements ou associations qui partagent les objectifs d'intégration et d'adaptation du ministère.

Tous les groupes sont admissibles pour peu qu'ils soient à but non lucratif, qu'ils soient représentatifs du milieu, qu'ils soient gérés efficacement, qu'ils puissent compter sur les ressources du milieu qu'ils représentent et, finalement, qu'ils évitent le chevauchement des services déjà offerts, notamment par les services gouvernementaux.

Les programmes d'aide financière sont au nombre de quatre. Le premier, le programme d'aide au fonctionnement des organismes, apporte une aide financière au fonctionnement d'organismes ou de groupes offrant des services pour les immigrants ou organisant des activités d'adaptation. Ce programme a distribué, au cours des douze derniers mois, une somme totale de $535 000 répartie entre 44 organismes. Vous trouverez la liste en annexe de votre cahier.

Le deuxième programme, l'aide aux activités d'adaptation, offre une aide financière ou technique à des organismes ou groupes qui veulent organiser des activités de rencontres entre Québécois d'origines diverses. Par le biais de ce programme, nous avons versé, au cours de I'exercice financier qui vient de s'écouler, une somme de $90 000 pour un total de 35 activités diverses qui contribuent à une plus grande intensité et variété d'échanges entre les participants.

Le troisième programme, intitulé "Programme d'activités ethniques, "offre une aide financière et/ou technique aux organismes et aux groupes ethniques qui souhaitent conserver, mettre en valeur ou faire connaître leur culture propre à la communauté québécoise. Nous y avons consacré, l'année dernière, une somme de $75 000 pour financer la réalisation de 65 projets.

Le dernier programme d'aide financière s'adres-se à tous les organismes qui offrent aux jeunes des communautés ethniques des cours de langue ou de culture d'origine. Cette année, le ministère a repris entièrement l'administration de ce programme qu'il partageait avant avec le Conseil des classes ethniques du Québec. Nous avons consacré $124 000 à l'enseignement de langues étrangères à plus de 15 000 étudiants. Vous trouverez au chapitre des subventions tous les détails concernant ces programmes.

Pour ce qui est de l'année en cours, nous prévoyons majorer de 14% les sommes affectées à nos quatre programmes d'aide, pour atteindre un total de $999 000.

Nous ne saurions parler d'adaptation sans évoquer les travaux importants qui se font dans les COFI. L'an dernier, à pareiIle date, nous vous disions notre volonté d'élargir I'influence des COFI, d'élargir leur mandat au-delà de l'enseignement du français, afin qu'ils deviennent des véritables centres d'intégration. Cela se fait, et de belle façon. Quantité de nouvelles activités et de nombreux services ont été mis à la disposition de la clientèle des COFI qui, elle-même, s'est élargie. Je pense que vous en avez entendu largement parler dans vos milieux.

Parmi ces activités, on retrouve les cours sur mesure qui tentent de répondre aux besoins spécifiques de chacune des communautés ethniques et de se rapprocher davantage de sa clientèle. En moins d'un an, ces cours ont connu un essor remarquable puisque, à Montréal seulement, près de 300 classes ont été formées. Dans trois COFI de province, on a déjà réuni 52 groupes d'étudiants. Nous pourrions bientôt être aussi en mesure d'offrir des services sociaux élargis et des services d'emplois dans certains COFI.

Toute cette effervescence qui anime notre réseau de COFI — j'annonce une nouvelle, vous aimez cela, des nouvelles — atteindra son point culminant cette année, alors que nous ouvrirons un nouveau COFI dans l'Est de Montréal.

Nous ne saurions laisser ce sujet sans mentionner au passage l'opération de rapprochement. L'automne dernier, mon ministère a voulu, à la fois promouvoir sa politique d'action concertée et la vocation élargie des COFI en organisant dans ceux- ci une opération dite de rapprochement. Cette opération qui visait à faire se mieux connaître et apprécier les COFI et les quartiers dans lesquels ils sont implantés a connu un succès inespéré, succès qui prouve hors de tout doute que les Québécois sont fort bien disposés à l'endroit de nos clientèles dans les COFI et qu'ils ne demandent pas mieux, les circonstances aidant, à apprendre à mieux connaître ces nouveaux Québécois.

Dans ce même ordre d'idées, j'aimerais vous annoncer une autre nouvelle. J'aimerais vous annoncer l'ouverture prochaine d'un bureau d'information, doublé d'un centre de rencontres et d'activités d'adaptation que mon ministère est actuellement à mettre sur pied. Ce centre, situé sur la rue Saint-Laurent, au nord de Laurier, donc au coeur d'un quartier — je ne sais pas si c'est dans le comté du député de Saint-Louis, je ne pense pas...

M. Blank: C'est dans le comté de Mercier. (16 h 15)

M. Couture: Donc au coeur d'un quartier où se côtoient quotidiennement des Québécois d'anciennes et de nouvelles origines ne sera pas un autre COFI mais plutôt un lieu où pourront fraterniser, de façon tout à fait informelle, les Québécois de toutes origines. Ce sera essentiellement aussi un lieu de communication, d'information et d'échanges de toutes sortes.

Si les faits et projets que je viens d'évoquer indiquent notre désir et notre volonté de voir se fixer de plus en plus de liens entre Québécois de toutes origines, je voudrais signaler que nous avons cette même volonté de multiplier les efforts de concertation entre tous les intervenants reliés à l'immigration en commençant évidemment par les différents ministères du gouvernement.

Au cours de l'année qui vient de s'écouler, nous avons fait des représentations auprès des ministères dans les champs d'activités qui atteignent les immigrants: les Affaires sociales qui se préoccupent d'adoptions internationales, l'Education qui touche les étudiants étrangers, les Communications qui s'adressent aux media ethniques ainsi que la Justice, les Affaires intergouvernementales, l'Agriculture, l'Industrie et le Commerce, le Travail et la Main-d'Oeuvre.

Récemment, je faisais une représentation auprès d'un comité de travail du ministère de la Fonction publique qui prépare, grâce peut-être à notre intervention, des recommandations au ministre sur les moyens à prendre pour faciliter l'accès des immigrants à la fonction publique. Je veux m'assurer que les immigrants seront dorénavant jugés selon les mêmes critères que les autres Québécois, qu'ils pourront participer à tous les concours de recrutement et qu'une fois établis dans leurs fonctions, ils pourront obtenir la permanence aussitôt qu'ils auront demandé ou obtenu leur citoyenneté canadienne.

C'est dans cette même perspective de concertation et de coopération que le ministère de l'Immigration participe avec le ministre d'Etat au développement culturel à la tenue d'une série de

colloques avec les communautés ethniques sur la politique culturelle du gouvernement.

Favoriser l'adaptation et l'intégration des nouveaux venus au Québec, cela se fait même bien avant que ceux-ci aient posé le pied dans leur nouvelle patrie. Nous en avons pour preuve les travaux que mène avec compétence et célérité notre direction du recrutement et de l'établissement. Au cours de l'année écoulée, cette direction a publié un guide des immigrants entrepreneurs-investisseurs, réalisé des enquêtes sur la situation de l'emploi au Québec, trouvé du travail à plus de 1000 immigrants et vu à faire confirmer un poste temporaire ou permanent pour plus de 5000 autres. Elle continue de développer des relations de travail fonctionnelles avec tous les ministères à vocation économique.

Par ailleurs, elle prépare actuellement des missions de recrutement et d'information en Europe et dans le sud-est asiatique dans le but de susciter l'intérêt des entrepreneurs qui seraient susceptibles de venir investir au Québec.

Notre tableau récupéré capitulatif des actions menées en faveur de l'adaptation des immigrants serait bien incomplet si je n'abordais pas les actions menées en faveur des travailleurs immigrants.

Dans le cadre du programme d'aide financière du ministère prévoyant des subventions pour les travailleurs immigrants, près de $200 000 ont été accordés au cours de la dernière année financière à divers organismes préoccupés de cette situation. Mais, il fallait faire davantage. Aussi, n'ai-je point hésité à créer un nouveau poste au sein de mon ministère, celui de secrétaire délégué au travail des immigrants. L'année dernière, je l'annonçais d'ailleurs. Le concours pour combler ce poste a été ouvert et, d'ici quelques mois, le candidat choisi sera connu.

Toutefois, comme il était important que notre programme d'aide aux travailleurs immigrants démarre rapidement, j'ai retenu les services d'une personne-ressource qui, en attendant que le poste soit comblé, est mon mandataire auprès des travailleurs immigrants. Son rôle s'apparente dans une certaine mesure à celui d'un ombudsman. Il agit comme intermédiaire entre les organismes concernés et le ministère et cherche à corriger des situations inadmissibles en présentant au ministère des recommandations. Le ministère peut, dès lors, intervenir et interviendra auprès des autres ministères pour apporter les correctifs nécessaires ou auprès d'autres organismes.

Je dois dire que ce secrétaire délégué a reçu partout un accueil exceptionnel depuis son entrée en fonction et que les milieux concernés n'ont cessé de manifester leur intérêt à son travail.

Déjà, la CSN et la FTQ travaillent à la mise sur pied d'un projet de services permanents aux travailleurs immigrants. En outre, elles affecteront chacune une personne-ressource chargée de répondre aux demandes des travailleurs immigrants au sein de leur centrale. Au cours de l'été, on prévoit aussi organiser une session intensive de rencontres entre des représentants des principales ethnies et des associations populaires intéressées à ce sujet dans le but d'établir un programme d'actions concertées et de créer une structure permanente habilitée à faire des représentations au nom des travailleurs immigrants, et tout cela grâce à l'animation de mon ministère.

Ce poste de secrétaire délégué est donc de toute première importance et je veux pouvoir atteindre les objectifs que je me suis fixés pour l'année 1979/80 qui sera, au ministère tout au moins, l'année des travailleurs immigrants. Mais le ministère seul ne peut faire des miracles évidemment. Heureusement, il compte des alliés. Il y a un mois à peine, la Fédération des travailleurs du Québec organisait, en collaboration avec mon ministère, un colloque important sur la situation des travailleurs immigrants. A cette occasion, je me suis engagé formellement à travailler en étroite collaboration avec les centrales syndicales en vue d'informer les travailleurs immigrants de leurs droits et à faire tout en mon pouvoir pour favoriser leur bonne intégration aux milieux de travail.

Je tiendrai promesse. A ce chapitre, j'ajoute que nous songeons à mettre sur pied un comité interethnique pour les travailleurs immigrants à l'instigation du secrétaire délégué et en collaboration avec le Conseil consultatif.

Ce colloque a été intéressant à plus d'un titre. Il nous est apparu, tout au long de ces assises, que les intervenants, quasi à l'unanimité — j'aimerais bien que mes amis de l'Opposition libérale écoutent, parce que c'est important — souhaitaient que le Québec récupère du gouvernement canadien — leurs amis — tout ce qui lui reste de contrôle sur son immigration et tout particulièrement les secteurs de l'accueil et de l'adaptation. C'est d'ailleurs dans cette perspective que je rencontrais récemment mon homologue canadien, M. Cullen — jusqu'à nouvel ordre — en vue d'amorcer ce processus de récupération. J'ose croire, comme par le passé, que ces négociations se feront avec l'appui unanime des membres de cette commission. Je peux même dire, presque en primeur — vous avez encore des nouvelles — que, grâce au dynamisme et à l'initiative que nous affichons en ces matières — là-dessus, nous sommes, une fois de plus, très différents des autres provinces du Canada; je pense que c'est un bon exemple de la différence entre le Québec et le reste du Canada — notre dossier se présente très bien. Le gouvernement fédéral semble disposé à donner suite à nos revendications sur la perspective de récupération de l'accueil et de l'adaptation. Toutes les actions entreprises ou amenées en faveur des travailleurs immigrants, des réfugiés, des immigrants tout court, que ce soit au plan de l'accueil, de l'adaptation ou de l'intégration, ne peuvent connaître d'aboutissement heureux sans que la population du Québec, dans son ensemble, ne soit sensibilisée aux questions reliées à l'immigration et à ses avantages. Je pense qu'on est tous unanimes là-dessus.

Depuis longtemps, la preuve est faite. L'insertion harmonieuse des nouveaux Québécois dans leur société d'accueil dépasse largement les ca-

dres gouvernementaux. Il faut, au contraire, utiliser tous les mécanismes existants, surtout ceux qui sont le plus près de la vie, des problèmes de chaque jour. C'est donc en toute connaissance de cause que nous avons eu l'année dernière et que nous aurons encore cette année, parmi nos priorités, les communications.

L'année dernière, en plus de vaquer à ses occupations courantes, notre direction des communications s'est employée à structurer son équipe de communicateurs et à élaborer une campagne de sensibilisation qui s'échelonnera sur une période de trois ans. Cette année, le premier volet de notre campagne touchera prioritairement les corps intermédiaires, les organismes gouvernementaux et paragouvernementaux. Les mass media seront utilisés, eux, dans le but d'informer la population québécoise du rôle que joue le ministère de l'Immigration au sein du gouvernement, ainsi que des grandes orientations de ses politiques. Tout cela en vue de préparer chaque Québécois à mieux remplir son rôle de participant actif à l'insertion des immigrants dans leur nouveau milieu d'accueil, car c'est une responsabilité commune que nous devons tous assumer.

Sur ce, je termine mon exposé. L'étude des crédits de mon ministère que nous allons maintenant entreprendre vous permettra de mieux cerner ce qui vient d'être dit et vous permettra de dégager aisément nos grandes priorités qui seront, en 1979/80: les travailleurs immigrants, la politique d'accueil dans les villes de moyenne envergure, l'épanouissement de nos COFI, nouvelle manière, notre programme de parrainage et de compagnonnage des réfugiés et, pour conclure, notre grande campagne de sensibilisation.

Croyez-le ou non, tout cela se fera sans augmenter tellement nos ressources humaines et financières. C'est dire que nos fonctionnaires méritent nos plus cordiaux remerciements pour l'énorme tâche qu'ils ont abattue, ainsi que pour celle qu'ils se proposent d'abattre. Je me félicite particulièrement de l'esprit dynamique qui anime mon ministère. Ce dynamisme est !e fruit évident des motivations profondes de nos fonctionnaires et c'est tout à leur honneur. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre. M. le député de Mont-Royal.

M. John Ciaccia

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. J'aimerais dire quelques mots d'introduction d'ordre généra! sur le bilan du gouvernement dans le domaine de l'immigration, avant d'aborder l'étude des crédits et de chaque programme des crédits. A la suite des politiques économiques et linguistiques un peu compliquées du gouvernement du Farti québécois, et maintenant par les nouvelles politiques d'immigration, à la suite de l'entente Cullen-Couture, il y a eu certains changements qui se sont produits dans notre société, dans notre économie, non seulement au niveau économique, mais aussi au niveau démographique, il y a eu un exode, un départ d'une certaine partie de la population, un départ de certains capitaux. Je pense que tout le monde est assez bien documenté. Je n'ai pas besoin de donner les chiffres au ministre à ce sujet. Ce qui rend les questions démographiques et la dépopulation encore plus graves, c'est que l'immigration, qui représente un certain espoir pour l'avenir, a subi une baisse très importante, beaucoup plus que celle de l'ensemble du Canada. Pour 1977, le Canada a connu une baisse dans son immigration de 23%, tandis que le Québec a connu une baisse vraiment sérieuse de 34%.

On peut constater par ces chiffres, par ce taux de croissance négatif, que le Québec est maintenant en déclin tant en termes démographiques qu'en termes même économiques. Il ne suffit pas de dire que ces chiffres désastreux représentent des tendances totalement hors du contrôle du gouvernement actuel, parce que, dans d'autres provinces canadiennes, on n'a pas l'évidence d'un tel déclin. Seul le Québec a la distinction d'avoir un taux de croissance négatif dans sa population.

Ce qui rend le tableau québécois de l'immigration encore pire, c'est que le nombre des immigrants investisseurs, c'est-à-dire les gens qui apportent un atout direct et concret à l'économie québécoise a diminué même beaucoup plus que la baisse globale du taux d'immigration, et, en effet, si on examine les chiffres, les données et les faits concernant l'immigration au Québec, on trouve beaucoup trop souvent que la réalité de ce qui se produit n'est pas tout à fait conforme aux déclarations du ministre. On trouve qu'il y a parfois beaucoup plus de publicité que de résultats concrets. Permettez-moi d'en donner quelques exemples.

Prenons d'abord le cas des immigrants investisseurs. Vous avez fait référence, M. le ministre, plusieurs fois, au fait que cette catégorie d'immigrants est la plus souhaitable et que vous feriez tout votre possible pour recruter telles personnes qui pourraient apporter des investissements au Québec. Il y a eu d'autres déclarations du ministre où il était en faveur de l'immigration en disant que les immigrants n'enlèvent pas les emplois, mais créent plutôt des emplois. Je suis entièrement d'accord avec lui. Mais, selon certains chiffres, en 1976, les capitaux créés par l'immigration au Québec étaient presque 26% du total pour l'ensemble du Canada. On voit que ces chiffres, en 1977, après une année de gouvernement du Parti québécois, accusent un pourcentage de seulement 16%.

L'année dernière, en 1978, après deux ans de gouvernement du Parti québécois, les capitaux créés par l'immigration n'étaient que 11% du total canadien. J'ai littéralement peur de savoir, je crains de savoir le pourcentage pour 1979. Pour un ministre, je pense, qui veut favoriser toute immigration par toutes les catégories de la population, je pense que c'est un échec et c'est un échec grave dans sa politique.

Continuons. Le ministre nous dit toujours que l'immigration est un atout pour tous les Québécois

et il va sans dire que, sur ce point, je suis 100% d'accord, même plus, si possible. Néanmoins, sous son gouvernement, le Québec a connu une baisse dans son taux d'immigration, c'est probablement la plus grave de toute son histoire. Je me demande donc ce qu'il faut croire, les déclarations du ministre ou la triste réalité des chiffres, qui sont quasi tragiques et qui ne correspondent pas du tout, je pense, aux intentions que le ministre nous donne dans son exposé et dans les déclarations qu'il fait à la population.

Un autre sujet que le ministre a abordé souvent, c'est qu'il veut effacer tout ordre de discrimination dans le domaine de l'immigration. Encore une fois, je me trouve en accord avec ses affirmations, mais, quand je vois les applications, on trouve que ce n'est pas tout à fait conforme encore aux réalisations et aux intentions du ministre. En effet, dans la grille de sélection, je crois qu'elle comporte une discrimination. Quand on a discuté le projet de loi no 77, nous avions tenté d'y faire inclure une clause qui était incluse dans l'entente Cullen-Couture, que vous avez signée, selon laquelle il n'y aurait pas de discrimination. Vous avez refusé catégoriquement d'inclure cette clause. (16 h 30)

Maintenant on voit ici, dans la grille de sélection, que vous êtes réceptif à une interprétation qui peut être discriminatoire. On voit que c'est presque impossible pour les immigrants non francophones, à moins que ce soient des catégories de réfugiés, soit qu'ils ne soient pas francophones ou qu'ils ne soient pas adaptables, d'après vos critères, et ça peut ouvrir la porte à une discrimination. Nous n'avons pas une politique d'immigration dont les critères de sélection donnent une occasion égale à tous les gens de n'importe quelle origine de venir s'établir au Québec. Si on veut une société ouverte, si on veut une société pluraliste, si on veut éliminer toute discrimination, je crois que votre grille de sélection devrait être changée parce que, question d'adaptation, question de politique linguistique, selon les lois des autres ministères, celles du gouvernement et même les dispositions dans votre loi d'immigration, c'est clair qu'une personne qui vient au Québec doit apprendre le français et il y a des mesures, des obligations à cet égard.

Une fois que cette obligation est là pour tous les immigrants qui viennent de n'importe quel pays, je crois que ça devrait satisfaire les exigences de notre société quant aux matières linguistiques et ne pas créer de discrimination à la source pour vraiment fermer la porte à une série de catégories d'immigrants de toutes les parties du monde.

Le ministre nous a souvent parlé de la solidarité à l'endroit des gens de pays en voie de développement. Encore une fois, ce sont de belles intentions, mais c'est son gouvernement qui a augmenté les frais de scolarité de ces personnes et ce geste risque de constituer un véritable blocus à l'endroit des pays sous-développés Je sais bien que le ministère de l'Education vient d'annoncer un nouveau programme pour subventionner des étudiants étrangers qui viennent faire leurs études au Québec. Si c'était une condition sans restriction, les gens de tous les pays pourraient venir étudier au Québec, sur le même plan que les Québécois et là encore sans discrimination. Ils doivent maintenant passer par fa sélection du ministère de l'Education.

Je ne doute pas que, comme résultat, nous allons avoir moins d'étudiants de certains pays et, certainement, connaissant les politiques du gouvernement, cela va affecter certaines institutions plutôt que d'autres au lieu d'avoir toutes ces institutions ouvertes à tout le monde. On a l'impression, en empêchant les gens de venir, en augmentant les frais de scolarité et, après cela, en donnant des subventions, que vous voulez introduire des matières politiques dans ce domaine. Si vous aviez éliminé complètement, vous pourriez dire: Le raisonnement, c'est que ce sont les contribuables du Québec qui paient l'instruction et on ne veut pas payer l'instruction des étrangers. A un certain niveau, je ne l'accepte pas, mais d'autres provinces l'ont fait, c'est peut-être justifiable.

Quand vous instituez cette politique de dire que les gens en dehors du Québec ne peuvent pas venir étudier ici aux frais des Québécois et, après cela, que vous faites des exceptions, vous ouvrez la porte à l'arbitraire, à la discrimination. Quel critère allez-vous utiliser pour déterminer qu'un tel va obtenir une subvention, et un autre n'en obtiendra pas? Vous laissez la porte ouverte à des accusations de discrimination et vous allez avoir beaucoup de gens et beaucoup d'institutions au Québec qui ne seront pas heureux des décisions que le ministre de l'Education prendra.

Vous avez parlé du cas des ouvriers immigrants exploités et le ministère y a fait référence pendant le récent colloque organisé par la FTQ sur le sort de ces immigrants. D'après les rapports des journaux, vous avez une liste. On a fait état d'un palmarès de compagnies qui sont les pires employeurs, d'après vos mots, les vrais exploiteurs.

Mais je crois que si vous avez cette liste, cela n'est pas assez de dire: Ces gens-là ne devraient pas exploiter les immigrants. Je suis d'accord avec vous, personne ne devrait être exploité dans notre société et surtout pas une classe qui ne peut pas se défendre. Ce sont de nouveaux arrivés, ils ne connaissent pas nos lois, ils ne savent pas comment se protéger et ils ont besoin d'une attention toute particulière de votre ministère. Je vous le dis: Cela n'est pas assez de dire: J'ai une liste. Si vous l'avez cette liste, au nom de ces immigrants, au nom de ces travailleurs immigrants, publiez-la afin que la lumière soit faite et que ces gens puissent être protégés suite à la publicité que vous pourriez faire dans ce domaine.

Une autre situation, c'est le cas des médecins immigrants. Si vous vous en souvenez, il y a plus d'un an, j'avais posé certaines questions à l'Assemblée nationale, en Chambre, soulevant les problèmes particuliers des médecins immigrants

et vous vous étiez montrés réceptifs, vous partagiez les mêmes soucis, les mêmes problèmes et inquiétudes que j'avais. Je vous dirais que c'est une politique certainement quasi-discriminatoire du ministère des Affaires sociales.

Depuis ce temps, la commission des droits de l'homme a recommandé ceci — et je cite la Presse du 10 juillet — au nom de l'équité et de la justice: La commission propose que tous ceux qui sont actuellement engagés dans l'engrenage bénéficient en effet d'une garantie selon laquelle ils pourront terminer leur internat ou leur résidence sous réserve, bien sûr, des exigences qualitatives. C'est d'après la Presse du 10 juillet 1978, c'était la recommandation de la commission des droits de la personne.

Avec ce jugement pour l'appuyer, est-ce que le ministre peut nous dire s'il a expédié... qu'est-ce qu'il a fait dans ce domaine? Est-ce qu'il a fait des représentations? Est-ce qu'il a insisté auprès du ministère des Affaires sociales pour que cette discrimination cesse et que ces gens ne subissent pas les problèmes qui leur ont été imposés par le ministère des Affaires sociales?

Un autre point, c'est que le ministre nous a promis de faciliter l'engagement des Québécois, des groupes ethniques dans la fonction publique. Je sais qu'il a parlé de certaines démarches qu'il a faites, mais je crois qu'en termes de pourcentage de la population par rapport au pourcentage de la fonction publique, cela n'a pas fait... d'après les informations, il n'y a encore eu aucun effet et il n'y en a pas eu un grand nombre. Je ne pense pas que le ministre va prendre la position de dire que ces gens ne sont pas qualifiés. Je connais trop le ministre, cela n'est pas son genre d'adopter une telle position. Mais il faudrait avoir des mesures plus concrètes pour appuyer un peu plus l'action du gouvernement et assurer que les déclarations du ministre se concrétisent et que le gouvernement agisse dans ce domaine qui est un domaine assez important, parce que cela concerne la représentativité, l'administration des programmes et souvent cela représente l'aide que ces gens pourraient avoir dans leurs relations avec le gouvernement.

Tout cela pour dire, quant à toutes les actions et déclarations du ministre, que ces groupes d'immigrants, ces groupes ethniques, les minorités ont besoin d'une action concrète. Ils ont besoin d'un ministre qui va agir, non seulement ils ont besoin d'un spécialiste dans le domaine des relations publiques... C'est cela les conclusions qu'on va tirer, soit que vous avez de bonnes relations publiques avec les groupes ethniques, vous leur dites toutes sortes de belle choses; ce qu'ils veulent entendre, vous le leur dites. Je suis persuadé que vous-mêmes croyez sincèrement à ce que vous dites. Mais je ne sais pas et je ne suis pas convaincu que votre gouvernement appuie les intentions que vous avez et je ne vois que très peu d'actions concrètes dans plusieurs de ces domaines qui donnent vraiment effet aux déclarations que vous faites.

Durant les débats sur le projet de loi 77 on vous avait demandé pourquoi ne pas avoir une vraie politique? Quelle est votre politique d'immigration? La position que vous avez prise: Cela va venir plus tard. Je crois que la population a le droit de savoir maintenant, le plus tôt possible, quelle est votre politique dans le domaine de l'immigration. Il n'y a aucune raison de retarder. Je pense que dans votre esprit vous connaissez les principes, les besoins, les critères, vous savez ce dont le Québec a besoin et je crois que ce serait important pour la population qu'elle le sache. Quelle est votre politique sur l'immigration? Pourquoi attendre à plus tard? Je trouve que c'est difficile de comprendre vos réticences à produire une vraie politique d'immigration. Est-ce parce que vous ne voulez pas créer des vagues de protestations avant le référendum? Peut-être la population n'accepterait pas votre politique? Je ne sais pas. C'est l'impression que vous nous donnez. Vous dites: Ecoutez, on va attendre après parce que si vraiment je dis à la population ce que je veux pour le Québec, elle va être tellement choquée de mes propos qu'elle ne les acceptera pas. On vous demande d'enlever cette inquiétude de la population, dites-nous quelle est votre vraie politique et je peux vous assurer que si elle est bonne, si elle est ouverte, on va l'appuyer.

Les mesures que vous avez introduites, l'entente Cullen-Couture, on l'a appuyée. Si nous ne sommes pas d'accord avec certaines mesures que nous croyons discriminatoires, que nous ne croyons pas dans l'intérêt du Québec, dans l'intérêt de notre société, alors on va les porter à votre attention et on va s'y opposer.

En terminant mes remarques générales, M. le Président, je voudrais que le ministre — je ne doute pas de ses bonnes intentions de vouloir vraiment prendre certaines mesures dans le domaine de l'immigration, mais je doute que le gouvernement ait la volonté politique de le faire — cesse de nous dire qu'il va récupérer plus et plus de pouvoirs du fédéral. Ce n'est pas le problème, ce n'est pas ça qui empêche les immigrants de venir au Québec. Ce n'est pas ce qui nous empêche d'avoir une vraie politique. Vous avez un droit de veto dans l'entente Cullen-Couture. Que voulez-vous de plus? Je voudrais que vous vous attaquiez aux vrais problèmes du ministère de l'Immigration, les vrais problèmes de la question des investisseurs immigrants, la question de la baisse de la population, et vous avez les pouvoirs d'après ladite entente pour résoudre ces problèmes. Ce sont mes remarques pour le moment.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le député de Mont-Royal. M. le député de Gaspé.

M. Michel Le Moignan

M. Le Moignan: Merci, M. le Président. En écoutant les remarques préliminaires du ministre et comme il s'annonçait comme un messager de la bonne nouvelle qui nous a confié beaucoup de

primeurs, dans un moment de distraction, je me croyais dans la nuit de Noël annuncio vobis caudio manum...

M. Blank: Qui va prêcher à l'autre?

M. Le Moignan: Le ministre nous annonce de grandes nouvelles et même des primeurs. Cela nous réjouit un peu à condition que cela se concrétise évidemment avec le temps. J'aurais simplement quelques brèves remarques, suite aux propos du ministre et aux remarques également du député de Mont-Royal.

On a mentionné le projet de loi 77 qui fait suite à l'entente Cullen-Couture. Il y a un point sur lequel j'espère que le ministre va nous éclairer — on l'a mentionné également assez souvent — c'est le pointage de la grille de sélection des immigrants. Il me semble que dans le passé cette question-là comportait des points encore obscurs et ce serait le temps, dans une commission parlementaire, de nous apporter un peu plus d'éclairage. (16 h 45)

On a également traité de l'intégration des immigrants, de leur adaptabilité dans notre milieu et si on distribue encore des points pour les qualités personnelles de ceux qui viennent, c'est bien normal qu'on fasse une très bonne sélection, la motivation des immigrants qui nous arrivent et, ensuite, leur connaissance du Québec. Grâce à vos missions à l'étranger, là où vous avez pour charge de recruter ces immigrants, j'imagine qu'ils sont déjà informés non seulement des dispositions de la loi 101 sur la langue officielle mais de toutes les autres conditions de climat, d'adaptation, de possibilités de travail et surtout, peut-être, de la sympathie qu'ils devront nécessairement trouver ici, en sol québécois.

J'aimerais bien savoir sur quoi on peut se baser pour évaluer et pour vérifier la connaissance du Québec de la part d'un immigrant, si tel est le cas.

Si on regarde aussi le domaine qui concerne la langue, il y a deux points, je pense, qui sont donnés pour la connaissance de l'anglais, tandis que dix points sont attribués pour la connaissance du français, français langue de la majorité, langue des Québécois. Ici encore, il y a peut-être un ajustement à faire — on sait qu'il y a beaucoup d'immigrants qui ne connaissent pas du tout le français — pour leur faciliter l'accès, l'implantation, l'adaptation au Québec. Il y a la question des enfants, qui devront normalement s'intégrer à l'école française, à l'école de la majorité. Mais, pendant ce temps-là, il y a les parents, qui ont peut-être quelques vagues notions de français, et encore, dans bien des cas, c'est très pauvre, c'est très rudimentaire. Je pense bien que le ministre, dans le processus d'intégration, prévoit certainement des clauses où ces enfants vont recevoir aussi des cours en langue anglaise, pour établir le contact normal entre l'école et la famille.

Et comme on a parlé tout à l'heure de l'année de l'enfant, je pense bien qu'à ce moment-là, si les immigrants entrent au Québec en nombre inférieur à celui des autres années, le désir, l'intention du gouvernement, c'est certes de les attirer chez nous. Pour cela, la question de langue, je me demande si ce n'est pas une des causes qui expliquent une diminution très marquée au cours de 1978. On a peut-être fait peur aux immigrants à l'étranger. Ce sont des points d'interrogation. Le ministre pourra peut-être confirmer ces choses-là dans sa réplique ou les rejeter. Quoi qu'il en soit, je pense que cela a été un élément très essentiel. Je ne parle pas des facteurs économiques, je ne parle pas des autres facteurs.

Pour cette évaluation de la connaissance des langues, ici encore, de façon claire et nette, sur quoi se base-t-on pour expliquer aux futurs immigrants la façon dont ils auront à s'implanter ici, en milieu québécois? On a parlé des COFI tout à l'heure. Je comprends que c'est très important. Il y en a déjà un certain nombre. Vous allez en installer d'autres, surtout dans les grands centres. C'est tout à fait normal et naturel. Il serait peut-être important de savoir aussi que, dans son intégration, l'immigrant est porté à se diriger vers Montréal, de préférence, ceux qui demeurent au Québec, j'entends. Est-ce qu'il y en a beaucoup qui viennent dans les villes de Québec, de Sherbrooke, de Hull, tous ces centres où on peut leur offrir de l'emploi et du travail?

Vous avez mentionné — et je crois que c'est un geste très humanitaire — le fait que le Québec ait reçu en 1978 environ 1500 immigrants venant de pays en difficulté, que ce soient les Chiliens, les Vietnamiens, ou d'autres. Est-ce qu'il y a un certain pourcentage qui a été attiré par les campagnes? Ou bien, est-ce que c'est toujours l'éternel et même problème, qu'on vienne dans les villes, et si la ville peut leur offrir de l'emploi, peut leur offrir des débouchés, c'est normal qu'on les garde dans les villes.

Je sais que, du côté des campagnes, c'est peut-être difficile mais, dans les régions agricoles, par exemple, vous avez peut-être des ouvriers agricoles qui viennent d'autres pays. Ce serait intéressant de connaître ce point-là.

Quant à l'apport économique, je n'insiste pas. Je voulais en parler, mais le député de Mont-Royal a insisté sur l'aspect négatif de l'apport économique. Je ne touche pas à cela du tout, mais je sais que les immigrants nous apportent non seulement leur argent dans bien des cas, mais nous recevons des techniciens, des spécialistes, des professionnels, des médecins, des ingénieurs ou des personnes de cette catégorie.

Du côté des étudiants, je sais très bien que le gouvernement a diminué le montant des bourses ou des subventions, mais, d'un autre côté, quand nous manquons de spécialistes au Québec, je crois que le ministère de l'Immigration, de concert avec le ministère de l'Education, devrait peut-être faire des études dans le moment pour garder ici au Québec beaucoup d'immigrants. On rencontre des fois des Vietnamiens, des Libanais ou d'autres qui étudient ici et qui tombent en amour avec le Québec ou avec le Canada et qui voudraient

demeurer ici. Je pense qu'un système, à ce moment-là, soit de bourses conventionnelles pourrait nous permettre de combler les effectifs, puisque souvent on fait appel à la main-d'oeuvre spécialisée dans beaucoup de secteurs de notre activité économique. C'est pour cela que des régions d'établissement des immigrants, grosso modo, de façon sommaire, seraient peut-être intéressantes, parce qu'il s'est fait un développement... il faut l'admettre, la xénophobie est en train de disparaître un peu au Québec. On sait qu'anciennement — ce n'est peut-être pas disparu entièrement — un immigrant était mal vu, très mal vu, était mal accepté, mais aujourd'hui, je pense qu'un immigrant se sent chez lui, s'adapte plus vite et devient Québécois aussi de façon plus rapide.

On a parlé de publicité, de publicité dans le sens de l'information. On pourrait peut-être utiliser des slogans, dire aux immigrants, par exemple: "On s'attache au Québec."

M. Couture: On leur dit.

M. Le Moignan: II est déjà usé dans le sens de l'automobile, mais si, au Québec, au lieu de dire qu'on se détache, qu'on s'attache au Québec, l'immigrant finirait par comprendre que le Québec est sa patrie, qu'il veut demeurer au Québec. Ce serait peut-être un bon genre de publicité.

J'aimerais que le ministre nous dise, peut-être tout à l'heure... Il y a eu une baisse. Nous admettons qu'elle n'a pas commencé avec le Parti québécois, admettons cela, mais je pense qu'elle est plus prononcée depuis deux ans, l'entrée des immigrants au pays.

J'aimerais savoir si, au cours des cinq ou dix dernières années... Vous avez des chiffres, il y en a dans votre... Ici, j'en ai vu des chiffres. Le Québec ou le Canada, c'est la porte d'entrée et, après que les immigrants ont obtenu souvent leur citoyenneté canadienne, ils traversent la frontière et ils deviennent citoyens américains. Je ne sais pas si on a réussi à mettre un frein à cet exode des immigrants. Je ne parle pas seulement d'eux, parce qu'il y a beaucoup de Canadiens aussi, de Québécois qui s'en vont en Floride, qui ouvrent des établissements, qui gardent leur statut de canadiens, mais qui, en somme, transportent leurs capitaux. J'en connais des dizaines, au moins dix ou douze de la Gaspésie même. Je ne parle pas des centaines qui viennent d'ailleurs. Cela devient inquiétant. Il faut donc remplacer ces gens-là par des immigrants.

J'aurais peut-être d'autres petits points. J'ai parlé de la réaction des milieux québécois face à l'arrivée des immigrants et j'aimerais que vous nous disiez un mot de votre programme d'enseignement des langues d'origine, le programme PELO, je crois, comme on l'appelle et, ensuite, les travailleurs, les étudiants. Je voudrais savoir combien d'immigrants sont entrés, en 1976, 1977, 1978, combien entrent et combien sortent. Je vais terminer là dans ces remarques générales, M. le Président.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le député de Gaspé.

M. le député de Saint-Louis.

M. Blank: M. le Président, peut-être avec la permission de la commission...

Le Président (M. Boucher): Comme intervenant, M. le député de Saint-Louis, vous avez le droit.

M. Harry Blank

M. Blank: O'accord, j'ai seulement trois choses à souligner. Une, en général, une chose tellement pratique... Comme vous le savez, dans mon autre métier, je suis très proche de la Loi de l'immigration. C'est la Loi de l'immigration fédérale et provinciale. Comme avocat, depuis le 15 avril, depuis l'entrée en vigueur de l'entente Cullen-Couture, je peux donner un chiffre, mais pas exact, près de 75% des gens qui se présentent au fédéral, doivent se présenter après ou avant à l'Immigration du Québec. On sait qu'à Montréal — je parle strictement de Montréal pour le moment — il y a deux grands bureaux d'immigration fédérale où, à mon avis, il y a environ 75 agents d'immigration qui s'occupent de ces gens. Comme je l'ai dit, 75% de ces cas sont référés à l'Immigration du Québec. En chiffres ronds, cela prend une soixantaine de fonctionnaires de l'Immigration québécoise pour faire le même travail que les autres. Je sais qu'à ce moment, le nombre des effectifs est loin de 60. Par hasard, je peux dire qu'en ce moment, il y en a peut-être une quinzaine qui occupent des emplois qui doivent être occupés par 60. Il y a deux choses que vous pouvez faire: Ou vous devez arrêter vos autres programmes et référer des agents d'immigration de toutes sortes de programmes à ces programmes où on a besoin de fonctionnaires de l'Immigration pour prendre soin de ces personnes, ou vous demanderez un budget supplémentaire pour engager d'autres effectifs, parce que maintenant, le côté pratique de l'affaire Cullen-Couture est ici.

Franchement, je vois qu'on aura un blocage terrible s'il n'y a pas quelque chose qui se fait immédiatement; il ne faut pas attendre le prochain budget, parce qu'actuellement, à mon avis, dans certaines sections de ce service, il y a des retards de six à sept semaines, et parfois, dans la vie humaine, parce que l'Immigration, ce n'est pas seulement une question de dollars. Ce sont des personnes, des vies humaines. Parfois, un retard de six ou sept semaines, c'est trop long. Je ne blâme pas le ministre, au contraire. Je veux appuyer le ministre et le ministère pour avoir plus de fonds ou un moyen de transférer des fonds d'une section à l'autre de façon à avoir une section où l'on puisse occuper ces gens, parce qu'en deux semaines environ, du 15 avril jusqu'à maintenant... Comme je l'ai dit, dans quelques sections, vous êtes six semaines en retard. D'ici un mois, ce sera pire.

Je ne sais pas ce que le ministre entend faire, mais j'espère que dans sa réponse, il va nous dire

que parce que c'est du côté pratique, il y a cette chose: Les certificats de sélection, l'approbation de demandes des visas d'étudiants, des visas d'emploi, la question financière du parrainage. Tout cela maintenant passe par l'immigration de Québec. Aussi, vous faites quelque chose que je trouve très bon. Les gens qui sont obligés d'aller à l'extérieur pour faire leur demande pour entrer au Canada, vous donnez, dans certains cas, des certificats de sélection avant qu'ils ne sortent du Canada pour aller là. Je trouve cela très intéressant. Cela peut aider des gens, comme mentionnait le député de Gaspé, qui sont ici, qui aiment le pays, qui veulent retourner, mais suivant les règlements fédéraux actuels, ils doivent quitter le pays, mais au lieu d'attendre des mois et des mois à l'extérieur où cela coûte très cher pour avoir ce certificat de sélection, s'ils tombent dans les critères — les critères, je laisse mes confrères en discuter, je parle seulement du côté pratique — je pense qu'au moins on devrait faire quelque chose immédiatement pour régler cette situation; sinon on va tomber dans une situation incroyable. Je pense qu'à un moment donné, votre établissement sur la rue McGill, dans le comté de Saint-Louis, ne sera pas assez grand pour prendre soin de tous ces gens. Peut-être qu'on devrait faire l'inverse de l'extérieur, peut-être un grand édifice provincial et des représentants fédéraux chez nous pour faire fonctionner cette affaire plus vite et d'une façon plus commode. Ce sont mes questions sur ce point. (17 heures)

La deuxième chose, quand on a discuté du projet de loi no 77, j'ai été heureux de trouver que, suivant l'entente Cullen-Couture, la définition du réfugié, au Québec, était plus large que celle du fédéral, parce que celle du fédéral tombe seulement dans la convention de Genève et c'est parfois très difficile pour des gens de tomber exactement et, pour entrer comme réfugié fédéral, c'est tout un processus incluant une enquête d'expression. On doit commencer avec une enquête d'expression avant de pouvoir demander le statut de réfugié. Il y a beaucoup de cas pitoyables, qui sont vraiment des réfugiés, mais qui ne tombent pas dans cette définition très stricte. J'ai pensé que le Québec, avec la largesse qu'on avait donnée à cette définition dans la loi, ferait quelque chose pour ces réfugiés et j'ai déjà envoyé des gens au bureau d'Immigration-Québec. On a dit: La question des réfugiés, à l'intérieur du Québec, ce n'est pas de nos affaires; vous devez aller au fédéral.

Je pense qu'on doit trouver un moyen pour que le Québec prenne le plein pouvoir sur les réfugiés, avec la définition qu'on a dans notre loi pour des gens qui sont au Québec. Je ne sais pas comment on doit le faire, peut-être que c'est très technique, mais il y a un problème.

La troisième chose, c'est un cas particulier; comme vous le savez, dans le comté de Saint-Louis et dans le comté de Mercier, il y a beaucoup de Portugais. Il y a des Portugais qui, à mon avis, sont des réfugiés d'une certaine classe. Le minis- tre, durant la visite ici, à Montréal, de la fille de l'ancien président Allende — c'était la fille ou la femme?

M. Couture: Sa fille.

M. Blank: Sa fille a mentionné qu'il donnait des instructions spéciales à ses agents en Argentine pour donner un appui à des réfugiés chiliens qui sont en Argentine à ce moment-ci.

Au Portugal, vous avez un grand nombre de gens qui viennent du Mozambique et de l'Angola, qui ne sont pas considérés comme réfugiés par le gouvernement canadien parce qu'ils portent tous des passeports portugais. Ils peuvent rester au Portugal, mais ces gens-là n'ont aucun lien direct avec le Portugal. Ils sont de deuxième, troisième et quatrième générations en Angola et au Mozambique. Le Mozambique et l'Angola étaient, jusqu'à récemment, des colonies portugaises et ces gens ont des passeports portugais. Mais ils sont vraiment des réfugiés. Ils sont partis de l'Angola et du Mozambique, ils ont été chassés, quelques-uns d'entre eux, du Mozambique et de l'Angola et ils se sont sauvés au Portugal où il n'y a absolument rien à faire. A mon avis, ils sont des réfugiés. Au moins, le ministre peut les considérer comme réfugiés ou, en deuxième lieu, donner les mêmes instructions à l'agent du Québec à Lisbonne de donner un appui spécial à ces gens du Mozambique et de l'Angola qui veulent immigrer au Québec. Comme le ministre le sait, la communauté portugaise n'a aucun problème d'intégration à la vie collective du Québec. S'il y a un groupement qui s'est acclimaté, qui a appris la langue, les coutumes et la culture, c'est le groupe portugais et ces gens sont des immigrants de première classe. Il y a tout un réservoir d'immigrants au Portugal qui viennent du Mozambique et de l'Angola qu'on peut facilement intégrer au Québec en répondant aux besoins de ces gens. J'espère que le ministre donnera les mêmes instructions aux agents du Québec à Lisbonne que celles qu'il a données aux agents du Québec en Argentine.

Merci.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le député de Saint-Louis. M. le ministre.

M. Couture: Oui, je vais faire quelques réponses, dans ma réplique, à certaines interrogations. Je remercie les membres de la commission, du côté de l'Opposition, de leur intérêt à ces questions.

Le député de Mont-Royal a parlé d'un exode de la population et des capitaux depuis que le Parti québécois est au pouvoir. Je pense que je ne reviendrai pas sur la question de l'exode des capitaux. Il me semble qu'à l'Assemblée nationale, c'est devenu presque un feuilleton et mes collègues, et surtout le ministre d'Etat au développement économique, apportent toujours des réponses extrêmement pertinentes auxquelles on pourra se référer.

Sur l'exode de la population — c'est vraiment une primeur intéressante, je pense — je veux dire ceci: Depuis plusieurs mois, depuis deux ans, on a dit que les sorties du Québec étaient considérables, qu'elles étaient plus importantes que partout au Canada. Je viens d'avoir les chiffres de 1978. En 1977, cela avait donné lieu à des questions de l'Opposition, parce que le nombre était quand même pas mal important, il y avait eu 72 029 sorties. C'était peut-être à cela que faisait allusion le député de Mont-Royal en parlant de l'exode de la population. C'était quand même moins qu'en 1970, alors qu'il y en avait eu 73 811, mais ce n'est pas pour nous réjouir d'autant.

Je dois dire que les derniers chiffres que nous avons pour 1978 — je suis certain que l'Opposition va se réjouir avec moi — prouvent que la performance s'améliore puisque nous sommes tombés à 59 656 sorties, c'est-à-dire que nous sommes en bas de la moyenne...

M. Ciaccia: II y en a moins qui sortent?

M. Couture:... du Québec depuis 1962, ce qui fait presque seize ans. En 1978, nous sommes en bas de la moyenne de ces seize dernières années, moyenne qui se situait à 9,7%. Nous en sommes à 9,5% pour 1978. Je pense que c'est de nature à nous réjouir d'autant plus que nous rejoignons à ce moment-là les chiffres qu'on avait dans les années passées. Il y a toujours eu un nombre de sorties assez important peut-être pour les raisons qu'a évoquées le député de Gaspé. C'est un fait qu'il n'y a pas seulement les immigrants qui sortent, il y a évidemment des Québécois de vieille souche qui s'en vont du Québec. Je pense que c'est surtout à eux que faisait allusion le député de Mont-Royal. J'ai les derniers chiffres et je pense qu'on doit tous s'en réjouir. L'année dernière, il y a une amélioration considérable et cela donne, je pense, une indication pour les années à venir.

Je vois dans ceci le fait que notre société québécoise, par toutes sortes de mesures apportées par le gouvernement actuel, est plus intéressante pour les gens qui sont ici. Cela maintient davantage notre population. De toute façon, il y a un redressement de la situation et je n'insiste pas.

M. Blank: Est-ce que le ministre peut nous donner une copie de ce tableau?

M. Couture: Oui, on va vous la donner avec plaisir.

M. Blank: II peut en faire faire des photocopies.

M. Couture: Oui, certainement. On a parlé de la baisse de l'immigration. C'est évident qu'il y a une baisse de l'immigration au Québec, surtout depuis les deux dernières années. Il y a eu une baisse dans tout le Canada. La même baisse au Québec se retrouve partout au Canada, c'est dans l'ensemble du Canada. Pour l'année 1977, le total au Canada était de 114 914; le total est tombé à 85 637 en 1978. Ce qui est important, pour répondre à la question, c'est que le pourcentage du Québec est tombé à 14 109 l'an passé, mais on est quand même à 16,5% de l'ensemble du Canada. Cela rejoint et c'est même supérieur aux pourcentages de quelques années passées. En 1972, c'était 14%; en 1973, c'était 14,5% pour l'immigration au Canada. En 1974, c'était 15,3%; en 1975, c'était 14,9%. En 1976, cela a été une grosse année, du moins par rapport aux autres provinces du Canada, cela a été 19,5%; en 1977, 16,7% et en 1978, 16,5%. On a baissé, mais cela a baissé partout.

Donc, la proportion, finalement, l'écart n'est pas tellement différent par rapport aux autres. Tout le monde sait pourquoi cela a baissé, c'est qu'en Amérique la conjoncture économique n'est pas tellement bonne dans l'ensemble. Il y a des situations économiques qui se redressent dans des pays européens qui étaient nos principales sources d'immigration. Je pense que tout le monde comprend cela.

Au sujet des immigrants investisseurs, là, le député de Mont-Royal a touché un point sensible, auquel nous sommes sensibles aussi. Je dirai quand même ceci: II y a eu une baisse trop importante des entrepreneurs investisseurs au Québec l'année dernière, mais cette baisse s'explique aussi par la baisse de la population. C'est évident que dans un volume X de population, si ce volume baisse, nécessairement la proportion des entrepreneurs investisseurs qu'on retrouve dans un certain groupe de gens en destination du Québec baisse proportionnellement. Ce qu'il faut retenir, c'est que la proportion des entrepreneurs investisseurs par rapport à la population qui entre au Québec d'une année à l'autre ne varie pas tellement.

Par ailleurs, suite à — c'est peut-être la réponse qu'attend le député de Mont-Royal — cette baisse qui est alarmante, le raisonnement qu'on doit faire est le suivant:

Vu qu'il y a cette baisse de l'immigration, essayons au moins d'avoir un peu plus d'entrepreneurs investisseurs parce que la conjoncture économique s'y prête moins, ayons un fort volume d'immigration, et je dois annoncer à cette commission parlementaire une nouvelle politique pour les entrepreneurs investisseurs qui nous permet d'escompter pour les prochaines années un redressement de la situation. Je veux évidemment vous faire grâce des détails de cette politique, mais je veux vous dire globalement qu'il y aura formation de conseillers en immigration à l'étranger qui recevront une préparation un peu plus précise par rapport au recrutement des entrepreneurs investisseurs. Il y aura une publicité accrue à l'étranger pour recruter ces entrepreneurs investisseurs. Nous avons déjà un guide de l'immigrant entrepreneur investisseur qui vient de paraître, il n'y a pas longtemps, qui est très bien fait et qui présente une série de données qui permettent quand même d'attirer ces entrepreneurs investisseurs.

Notre service d'entrepreneurs investisseurs prépare des missions dans le monde pour aller

recruter cette clientèle. Il y en a une qui va partir prochainement dans le sud-est asiatique. Nous allons organiser une concertation avec les autres ministères et les agences à vocation économique pour les sensibiliser aussi à cette approche et, finalement, nous allons assouplir — c'est peut-être cela qui est le plus intéressant — pour ces clients entrepreneurs investisseurs ce qu'on pourrait appeler la bureaucratie pour venir éventuellement au Québec. Il y a, par exemple, des voyages de prospection qui sont prévus, de préétablissement, des stages, ce qui est nouveau. Nous allons faciliter la possibilité de stages d'entrepreneurs investisseurs au Québec. C'est difficile de dire à quelqu'un à l'autre bout du monde: Venez avec $500 000, $50 000, $100 000 ou $200 000 vous installer. Parfois, on aime bien non seulement faire un voyage, mais aussi faire un stage dans une entreprise connexe à son métier ou à ce qu'on a comme capital pour se familiariser avec cela et prendre une décision.

Je crois que ces mesures actives vont redresser la situation. Je pense que c'est une réponse à la préoccupation que je partage avec le député de Mont-Royal là-dessus.' Ce n'est pas la baisse la plus grave de l'histoire de l'immigration. Je voudrais quand même rappeler ce qui a été dit par le député de Mont-Royal. C'est inexact de dire que c'est la baisse la plus grave de l'histoire de l'immigration au Québec cette année.

La baisse de l'immigration — tout le monde en conviendra — est presque une attitude raisonnable de la part de la société québécoise. Nous avons déploré, tout le monde ensemble, que dans les années passées — le fédéral, en changeant sa loi, a aussi répondu à certaines de ces questions — il y a eu beaucoup trop d'entrées d'immigrants en territoire canadien et québécois mal sélectionnés. Il y avait des gens qui ne restaient pas sur place — donc, il y avait des sorties; l'Etat, la collectivité assumait des sommes pour l'accueil d'immigrants qui ne restaient pas, donc c'était des pertes sèches — et il y avait aussi une mauvaise coïncidence des demandes des immigrants selon le marché du travail.

Je pense que notre taux de 14 000 de l'an dernier a été bas, mais cela a peut-être été une façon pour nous de rééquilibrer davantage l'entrée des immigrants selon les besoins du marché du travail et selon la capacité d'adaptation de la population québécoise. Pour l'année prochaine, nous avons fixé le chiffre à 18 000 et 20 000 si possible — je vais finir et vous pourrez prendre des notes — en étant beaucoup plus précis dans la sélection, beaucoup mieux préparés pour les accueillir et en ayant une série d'interventions qui vont davantage aider ces arrivées. Je pense qu'on va se stabiliser.

Pour enchaîner tout de suite sur la politique de l'immigration du Québec — je pense que c'était la question centrale — il est évident que je n'en ai pas parlé dans mon préambule parce que cette politique se prépare. Je l'ai dit lors de la présentation de la loi 77, nous avons déjà mis sur pied au ministère depuis deux mois, sous la direction du sous-ministre Luc Martin qui est ici, un groupe de travail pour préparer la problématique d'une politique de l'immigration du gouvernement du Québec. (17 h 15)

Nous aurons des étapes aussi à franchir, c'est-à-dire que ce groupe de travail, d'ici quelques semaines, avant juin, va me présenter un peu l'échéance, les chapitres à débattre, les questions qui sont soulevées par cette politique possible du gouvernement du Québec en matière d'immigration.

Nous voulons aussi — je veux — arriver au Conseil des ministres assez prochainement pour lui demander de donner à un comité interministériel de ministres un mandat de travail pour une politique de population. C'est mon intention aussi dans les prochains mois de demander au conseil consultatif — ils ont déjà cette commande-là, mais cela sera précisé après la problématique présentée par le sous-ministre Martin — de travailler à la cueillette de tout ce qu'on a comme politique d'immigration et de nous donner un avis sur l'élaboration plus articulée de cette politique.

Tel que je l'ai promis lors de la présentation du projet de loi 77, c'est mon intention d'ici deux ans d'élaborer et de préparer une véritable grande loi de l'immigration, une charte de l'immigration du Québec. Pour répondre plus directement à ce que le député de Mont-Royal demandait, il y a un groupe de travail en place, il y a des échéances prévues, il y a un mandat au Conseil des ministres qui sera donné là-dessus, il y aura d'autres ministres qui se pencheront sur la question, il y a le conseil consultatif et peut-être éventuellement il y aura une commission parlementaire, si nécessaire, à l'automne — on verra — pour proposer à l'Assemblée nationale un certain nombre de propositions là-dessus.

Je continue rapidement. Sur la discrimination, je ne retiens pas vraiment les remarques du député de Mont-Royal. Je pense, au contraire, que la pratique que nous avons à l'immigration depuis que l'entente est en vigueur et aussi de notre façon d'agir dans l'accueil ou l'adaptation des immigrants contredisent carrément et totalement toute insinuation de discrimination à l'immigration, au ministère de l'Immigration et au gouvernement du Québec.

On parlait de la solidarité au Tiers-Monde et on opposait cela à la politique sur les étudiants étrangers. Le député de Mont-Royal a presque donné la réponse en faisant état justement de cette nouvelle politique proposée par le ministre de l'Education. Je le réfère aux détails de cette politique où il verra que justement le volet qu'on attendait — évidemment, avec ce qu'on avait donné comme directive ou ce qu'on a imposé aux étudiants étrangers dernièrement, il y a quelques mois, en leur imposant les charges pour leurs études, etc., comme on fait en Ontario et dans d'autres provinces — pour équilibrer peut-être cette politique-là... parce que c'est évident qu'on était tous témoins que les portes grandes ouvertes sans aucune restriction aux étudiants étrangers

favorisaient nécessairement les étudiants riches des pays, surtout des Etats-Unis, et les étudiants riches des pays du Tiers Monde. Je crois que ce que le gouvernement a fait était sage, mais par ailleurs pour aider des étudiants étrangers qui en ont besoin, une politique a été élaborée. Je vois ici qu'on a déjà, en 1978/79,176 bourses de données, ce qui totalise $450 000. Il y a tout un système de bourses, de dépannage et d'aide. Il y aura aussi des ententes, selon le mandat confié au ministère de l'Education, avec des pays du Tiers Monde pour aider un certain nombre d'étudiants étrangers.

Je continue. On parlait des compagnies qui exploitent. Au lieu de dénoncer des compagnies qui exploitent, j'aime autant, avant — je pense qu'on conviendra que c'est plus prudent et que c'est plus honnête aussi — essayer de réparer sur place l'exploitation. C'est pour cela qu'on a un secrétaire délégué. C'est pour cela qu'on a des rencontres avec les centrales syndicales. C'est pour cela qu'on intervient auprès de la Commission des droits et libertés de la personne. Je ne suis pas certain, mais j'espère que le député de Mont-Royal est d'accord là-dessus.

Sur les médecins immigrants, il attendait une réponse; je peux lui en donner une aujourd'hui à ce propos. En effet, j'ai fait plusieurs représentations là-dessus à mon collègue des Affaires sociales et il m'a assuré — on l'a vu à l'usage — que chaque cas était étudié au mérite. Effectivement, grâce à notre intervention et grâce aux dossiers que nous avons acheminés au ministère des Affaires sociales — je dois dire aussi en collaboration avec le Collège des médecins praticiens — nous avons réglé un certain nombre de cas.

Il y a maintenant onze postes nouveaux autorisés pour les médecins immigrants qui étaient en instance, qui attendaient l'occupation de ces postes; des postes, évidemment, d'internes dans les hôpitaux. Je retiens quand même les remarques du député de Mont-Royal pour élargir davantage et, grâce à son soutien et au soutien de tous les membres de cette commission, je pense qu'on pourra sans doute faire davantage.

En ce qui a trait à la fonction publique, on a donné des réponses; il y a déjà les colloques qui vont être engagés prochainement un peu partout au Québec qui ont des ateliers sur les immigrants et la fonction publique. Je suis certain que cela va permettre un déblocage réel parce que je suis d'accord avec vous que dans l'ensemble du gouvernement, la proportion d'immigrants dans la fonction publique est, évidemment, beaucoup trop minuscule, sinon ridicule. Je dois quand même dire qu'à notre ministère, on a un bon rapport parce que dans nos COFI, on a presque 35% d'immigrants.

M. Giasson: Au moins.

M. Couture: II faut donner l'exemple. Je viens de nommer un directeur des communications qui est un Romain, d'origine italienne.

M. Giasson: Ce n'est pas un ghetto dans le gouvernement; tous les membres des groupes ethniques vont travailler pour le ministère de l'Immigration et il n'y en aura pas dans les autres ministères.

M. Couture: Ce qui se passe c'est qu'on en forme plusieurs et ils vont ensuite travailler dans d'autres ministères. Je pense que c'est une bonne stratégie.

Pour terminer les remarques en réponse au député de Mont-Royal...

M. Blank: II n'y en a pas dans la haute administration.

M. Couture: II va y en avoir. Je dois conclure pour le député de Mont-Royal que, contrairement à ce qu'il a dit, les faits illustrent les paroles dans bien des cas. Je crois qu'il n'y a pas seulement eu des paroles, il y a eu des créations de postes, il y a eu des programmes nouveaux, enfin, il y a eu, je pense, des interventions directes et j'ai répondu, à mon avis, de façon satisfaisante à ces interrogations.

Le député de Gaspé a semblé, à première vue, entériner assez bien l'ensemble du rapport et je me félicite d'ailleurs du soutien presque inconditionnel de l'Union Nationale depuis deux ans sur nos politiques d'immigration parce qu'ils ont confiance, avec raison.

M. Le Moignan: C'est vous autres.

M. Couture: Les remarques que le député de Gaspé a apportées sur la grille quand il dit qu'il y a des points obscurs, il n'y a rien d'obscur parce que tout est écrit, tout est public. S'il veut plus directement nous demander quelque chose là-dessus, je me ferai un plaisir de répondre mais, par rapport à la langue, je pense qu'il a insisté davantage sur les points accordés à la langue, il se demandait si les critères sur la langue auraient eu une incidence sur la baisse de l'immigration en 1978. Je dois dire que, justement, en 1978, notre grille ne s'appliquait pas. Elle a commencé à être opérationnelle seulement depuis le début de 1979, donc, elle n'a eu aucun effet. On n'a pas de chiffres dans les rapports que j'ai. J'ai demandé à nos conseillers de nos bureaux de Londres, entre autres, parce que c'est un bureau test: Est-ce que la nouvelle grille québécoise décourage les gens, est-ce que cela empêche de braves Anglais de venir au Québec? On m'a répondu tout à fait dans la négative; au contraire, je pense que les Anglais... En fait, on m'a raconté des cas d'Anglais de Londres qui voulaient venir au Québec étant bien informés, sachant quelle était la société québécoise, quelles étaient les règles du jeu. Cela n'a pas diminué du tout les demandes de ce côté.

M. Le Moignan: Je n'ai pas parlé du tout des Anglais.

M. Blank: Ce sont tous des séparatistes écossais?

M. Couture: Vous n'avez rien contre les Ecossais, j'espère, vous parlez des Anglais?

M. Ciaccia: Je n'ai pas parlé des Anglais moi, c'est vous qui parlez des Anglais, pas moi.

M. Couture: On a aussi parlé d'immigration ailleurs qu'à Montréal. Je peux dire, peut-être pour satisfaire le député de Gaspé, qu'à ce sujet j'ai les chiffres suivants... Je pense qu'il faisait surtout allusion aux mouvements de réfugiés qui sont venus dans les derniers mois qui venaient tous à Montréal et qui allaient peu ailleurs; il y en a 250 à Sherbrooke, 250 à Trois-Rivières, 350 à Hull, 400 à Québec et, par notre nouvelle politique des petites villes, je pense que cela nous permettra à ce moment-là — je vais employer un mot un peu barbare — de démétropoliser l'immigration, l'adaptation des immigrants et de les faire un peu vivre, rayonner en dehors des grandes villes.

Le député de Gaspé parlait aussi des étudiants. Est-ce qu'on peut en garder un certain nombre? Le député de Saint-Louis a rappelé justement que les gens qui n'avaient pas le statut d'immigrant, qui voulaient ou qui aimeraient rester au Québec avaient des facilités maintenant, avant de retourner dans leur pays, de se préparer et de passer leur examen.

Par ailleurs, faire des démarches pour garder ici les étudiants étrangers qui ont de bonnes connaissances, de bonnes compétences, je ne suis pas tout à fait d'accord avec cette politique parce que c'est une façon de vider, bien souvent, les pays du Tiers Monde des cerveaux dont ils ont besoin. Il faut être très prudent là-dessus.

Le député de Saint-Louis disait, et en effet je pense qu'il a touché un point concret dont nous-mêmes depuis quelque temps sommes bien conscients et nous prenons des mesures en conséquence, je pense qu'il attend aussi des réponses là-dessus... C'est un fait et on comprendra qu'on attendait l'application de l'entente pour vérifier quel sera le volume de demandes, quelle sera la circulation des candidats, etc., et comment nos bureaux pourront répondre à ces nouvelles demandes. On a attendu quelques semaines pour faire cette vérification et, à l'usage, on s'aperçoit que c'est engorgé. Il y a un engorgement inadmissible actuellement à nos services et nous allons prendre dans les plus brefs délais des mesures pour répondre à certains problèmes.

D'ailleurs, dès lundi prochain, au début de la semaine prochaine, nous avons convenu qu'on pourrait en bas même distribuer des formules, surtout aux garants des parrainés pour qui c'est purement une formalité, pour que cela se fasse rapidement. J'ai fait une demande précise à mon collègue, le ministre des Finances et président du Conseil du trésor, pour rapidement engager plusieurs occasionnels dans les plus brefs délais, parce que si on passe par la filière ordinaire cela prendra du temps, et je peux assurer le député de Saint-Louis que nous-mêmes sommes conscients que ce n'est pas possible de réclamer des pou- voirs et de prétendre offrir les services aux immigrants qui étaient donnés auparavant par le fédéral, si on ne peut pas donner la même qualité de services.

Je suis très préoccupé par cela et la seule explication que je peux vous donner, c'est qu'il fallait quand même avoir un certain rodage de l'entente et des demandes pour savoir à quoi s'en tenir.

On a parlé d'un réfugié sur le territoire québécois. Je suis très heureux de la remarque du député de Saint-Louis. C'est peut-être, dans l'histoire de notre gouvernement, la première fois qu'un député de l'Opposition libérale nous pousse dans le dos pour avoir un peu plus de pouvoir du gouvernement fédéral. J'ai noté l'heure et j'ai noté le jour. J'en suis ravi. En effet, je pense que ie gouvernement fédéral devrait nous donner ce pouvoir quant aux réfugiés sur le territoire québécois. Pour les cas d'identification de réfugiés sur le territoire québécois, que le gouvernement québécois puisse traiter ces cas.

Quant à nos amis Portugais, je pense que ce sont les amis du député de Saint-Louis, ce sont mes amis, ce sont les amis de bien des gens parce qu'ils s'adaptent d'une façon merveilleuse à la société québécoise. Le bureau de Lisbonne que nous avons ouvert est une bonne réponse à ce problème et je suis d'accord avec lui, nous avons peut-être un effort supplémentaire à faire là-dessus.

M. Blank: Un effort supplémentaire particulièrement pour les gens de la Mozambique et de l'Angola.

M. Couture: D'accord.

Le Président (M. Boucher): Est-ce qu'on est prêt à passer à l'adoption du programme 1 ?

M. Ciaccia: L'élément 1?

Etablissement des immigrants

Le Président (M. Boucher): L'élément 1, s'il y a des questions.

M. Ciaccia: On a des questions.

M. Le Moignan: J'aurais une question d'ordre général.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Gaspé.

M. Le Moignan: Quand on regarde les chiffres des entrées et des sorties depuis 1962, cela a commencé à 8% pour les sorties et cela s'est maintenu sensiblement jusqu'en 1970; en 1970, on sait que cela a été une année difficile, cela a augmenté un peu. Maintenant, les études que vous avez faites à ce jour, est-ce que c'est dû à l'instabilité politique du Québec vis-à-vis des immi-

grants, vis-à-vis des problèmes de souveraineté et de tout ce que vous voulez? Il y avait un pourcentage de sorties anciennement, mais depuis 1970 la perception que l'immigrant a, lui, de l'avenir du Québec, sa crainte de voir le Québec se séparer du Canada, est-ce que cela peut expliquer qu'il s'en va dans les autres provinces canadiennes ou est-ce qu'il y en a qui retournent dans leur pays d'origine? (17 h 30)

M. Couture: Est-ce que le député de Gaspé pourrait m'expliquer pourquoi en 1966, quand le parti de l'Union Nationale a pris le pouvoir, il y a eu un saut à 10,5?

M. Le Moignan: Ils ont eu peur de la publicité libérale à ce moment. Ensuite, ils se sont aperçus que Johnson avait de l'allure.

M. Couture: Je pense que c'est une excellente réponse à laquelle je souscris. Dans bien des cas, il y a des campagnes de peur qui, effectivement, n'ont pas chassé les immigrants qui étaient ici, mais ils ont chassé des Québécois de vieille souche aussi, surtout peut-être dans le milieu anglophone. De fait, on voit au cours de certaines périodes dans ce tableau que lors des changements de gouvernement, il y a une espèce de fluctuation. C'est à cause de quoi? C'est peut-être à la suite de campagnes électorales qui charriaient un peu trop drôlement et qui faisaient peut-être un peu trop appel aux peurs des gens qui ont sans doute engendré ce genre de départs. C'est difficile de faire une bonne évaluation des causes de ces départs.

Mais, je peux vous dire ceci, c'est que la proportion d'immigrants et de Québécois de vieille souche qui partent, on ne la connaît pas. On sait globalement à travers des statistiques canadiennes à tous les cinq ans par le rencensement, à un moment donné, qu'il y a tant d'immigrants qui sont encore au Québec. Sachant qu'il y en a tant qui sont entrés par les voies normales, d'une année à l'autre comme immigrants, et sachant le nombre de ceux qui étaient là avant, on peut plus précisément savoir le chiffre de ceux qui seraient arrivés et de ceux qui seraient partis. J'ai demandé justement ces jours-ci à mon ministère, à mes services, de raffiner notre évaluation là-dessus et de chercher les causes de cela, surtout en ce qui me concerne — je pense que c'est ma responsabilité immédiate — ce qui m'intéresse plus précisément c'est que les immigrants qui arrivent au Québec, avec les sommes d'argent qui sont dépensées par l'Etat, par la collectivité, les efforts que nous faisons pour qu'ils soient accueillis, enfin devraient rester au Québec, ne pas passer quelque temps et ensuite s'en aller ailleurs. C'est dans ce sens que je vais chercher peut-être à raffiner nos instruments pour, éventuellement, pouvoir davantage maintenir ces présences d'immigrants.

Mais, généralement, il ne faut quand même pas prendre panique. On est dans une époque de grande mobilité, je pense que tout le monde l'admettra, on n'est plus au XIXe siècle, c'est vraiment une ère de grande mobilité, même pas seulement interprovinciale, mais internationale. Il y a beaucoup de gens qui, pour des raisons purement humaines, veulent aller vivre ailleurs un bout de temps et ils s'en vont. Cela s'ajoute à ce nombre. Je pense que ce n'est pas, actuellement... Revenir à peu près à la moyenne des années qu'on a connues depuis 1962, c'est un bon signe, cela montre qu'on arrive à un rythme normal.

M. Ciaccia: Un instant, M. le Président, il ne faudrait pas que...

Le Président (M. Boucher): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Je suis heureux que le ministre nous ait fourni les chiffres, parce que je ne donne pas la même interprétation. C'est bien beau de parler d'une moyenne entre 1962 et 1978, mais regardons les faits. En 1962, il y avait un solde migratoire interprovincial de plus de 3159, alors on a bénéficié, on a eu 3000 personnes de plus qui se sont établies au Québec que celles qui sont parties. Si on examine — c'est la dernière colonne qui est importante — la moyenne, cela ne nous aide pas beaucoup. Sur vingt ans, la moyenne — on va tous être morts aussi — cela ne nous aidera pas. Regardez en 1962 le nombre d'entrées qui est de 46 000, le nombre de sorties 43 000; alors on a bénéficié de 3000 personnes. En 1962, c'était une administration libérale. Si vous voulez faire un peu de politique.

M. Couture: Qui venait de faire nationaliser l'électricité.

M. Ciaccia: II était député libéral, à ce moment. Regardez en 1978 la différence. Le nombre d'entrées a baissé de 46 000 à 25 000. Vous pouvez faire en seize ans la moyenne...

M. Couture: On est toujours interprovincial.

M. Ciaccia: Oui, interprovincial, ce sont les chiffres que vous nous avez fournis.

M. Couture: II y a une explication pourquoi les gens entrent moins.

M. Ciaccia: Je n'ai pas fini, laissez-moi finir. Il y a 25 000 qui sont entrés et 59 000 qui sont sortis. Cela veut dire qu'en plus du gain de 3000 de plus en 1962, nous avons une perte de 34 000. C'est sérieux cela. Si vous regardez 1962 à 1978, les seules années où ce chiffre de 34 000 était plus - élevé, c'était en 1970. C'est vous-même qui avez mentionné cette année, on le voit.

Je ne veux pas rappeler les événements de 1970 et les problèmes qu'on a connus. Je ne voudrais pas faire le parallèle entre la crise de 1970 qui a causé certains problèmes et dire que la venue du Parti québécois au pouvoir c'est la même chose qu'en 1970. J'espère que ce n'est pas ce que vous nous dites.

En 1977, il y a une perte encore, 46 000 de moins que l'autre année. C'est à la suite de la venue du Parti québécois au pouvoir.

M. Couture: On perd ce qui a été évoqué par le Parti libéral aussi.

M. Ciaccia: C'est bien beau de toujours blâmer les autres. En 1970, le Parti libéral était au pouvoir. Qui a fait les peurs? La population a réagi à la suite des événements.

M. Couture: Le Parti libéral a joué ces cartes-là en 1976.

M. Blank: Le Parti libéral... c'est cela?

M. Ciaccia: La seule raison pour laquelle vous ramenez ces chiffres pour les spécifier, c'est qu'il n'y a pas de moyenne. La moyenne de 18 000 que vous venez de citer, ce n'est pas pertinent du tout. Regardez la tendance, regardez... La moyenne ne nous aide pas.

M. Couture: Je suis d'accord sur cela. Ce n'est peut-être pas nécessaire d'aller...

M. Ciaccia: II ne faut pas créer l'impression que c'est normal, que tout le monde s'en va. Ce n'est pas normal que le monde s'en aille. Les gens s'en sont allés quand il y avait des problèmes. Il y en a eu en 1970 et il semble y en avoir maintenant.

M. Couture: II y en a eu en 1966 aussi. Il y en a eu en 1965 et il y en a eu en 1969.

M. Ciaccia: Pas de cet ordre-là, jamais! En 1966, pour votre information, cela a été une perte de 15 000. De 15 000 à 41 000 et à 46 000, il y a une "moses" de différence.

M. Couture: Je pense qu'il y a un point que vous n'avez pas du tout évoqué.

M. Ciaccia: Votre chef de cabinet vient de vous souffler quelque chose. Qu'est-ce qu'il vous a dit? Il est bien politisé, lui. Il fait de la politique quotidiennement.

M. Couture: Non, je l'avais depuis longtemps. Les entrées au Québec, c'est ce qui fait que le solde migratoire est si haut ou si bas. On regarde le chiffre des entrées et le chiffre des sorties et on fait la différence, l'écart. C'est un fait, je l'admets volontiers, qu'actuellement ce sont les gens des autres provinces du Canada qui auraient le goût de venir vivre au Québec... C'est cela la migration interprovinciale.

M. Ciaccia: Mais là ils n'en ont plus le goût.

M. Couture: Je vais vous dire ceci. Actuellement, c'est beaucoup plus important de regarder le chiffre des sorties que le chiffre des entrées pour la raison suivante: Dans notre société québécoise, par un certain nombre de mesures, par une volonté politique, c'est évident qu'en bâtissant une société francophone, en donnant un visage français au Québec, évidemment, pour nos amis anglophones des autres provinces du Canada, c'est plus difficile de venir vivre dans cette société. Cela demande plus d'efforts.

Je crois que c'est presque inévitable. C'est écrit dans le ciel que, dès que le Québec a manifesté cette volonté politique de créer une société francophone, les anglophones des autres provinces y ont vu moins d'attraits. Avant, les anglophones de Toronto venaient à Montréal, ils n'avaient aucun problème, ils étaient aussi chez eux à Montréal qu'ils l'étaient à Toronto; c'était la même chose pour les gens de Winnipeg.

Ce qui m'intéresse davantage, c'est qu'il y a eu quand même 26 000 entrées en 1977 et 25 000 en 1978; il y a quand même un nombre important de gens des autres provinces qui viennent encore au Québec. Ce qui m'apparaît plus important, c'est de regarder les sorties. Est-ce qu'on est capable de donner le goût aux gens de rester dans cette société-là, de vivre, de participer avec nous, de développer l'avenir du Québec avec nous? Cela s'améliore. Je ne sais pas si le député de Mont-Royal se réjouit ou non que cela s'améliore, mais moi je me réjouis que cela s'améliore.

M. Ciaccia: Cela s'améliore, oui, mais...

M. Couture: C'est un fait que si les entrées diminuent, notre solde migratoire interprovincial est plus important, mais c'est à nous de corriger cela par une politique d'immigration internationale en favorisant d'autres entrées d'autres types — je pense que c'est cela une politique de population — pour effectivement corriger les failles que nous pouvons corriger à ce titre-là et façonner la société québécoise dont on a besoin. Je pense qu'on ne doit vraiment pas dramatiser cela, c'est tout à fait normal.

M. Ciaccia: M. le Président, premièrement...

Le Président (M. Boucher): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia:... je n'accepte pas la déclaration, les remarques du ministre selon lesquelles les gens s'en vont parce qu'on veut créer une société francophone. C'est un mythe.

M. Couture: Non, ce que j'ai dit, je regrette-Question de privilège, si je peux en faire une.

M. Ciaccia: Un instant, laissez-moi finir! Non, il n'y a pas de question de privilège.

M. Couture: Ce n'est pas ce que j'ai dit, M. le Président.

Le Président (M. Boucher): S'il vous plaît! M. le ministre...

M. Ciaccia: D'accord, je vais vous laisser spécifier.

M. Couture: J'ai parlé au titre des entrées. Je n'ai pas parlé du tout des départs, en parlant d'une société francophone. J'ai dit que c'est normal, que c'est tout à fait normal et même il faut s'étonner qu'il y en ait tellement encore des — cela veut dire qu'on est intéressant — autres provinces du Canada, qui sachant que c'est plus forçant de venir ici au Québec, maintenant, quand on vient de l'Alberta...

M. Blank: M. le Président, vous êtes sûr de votre affaire...

M. Couture:... j'ai la parole... et du Manitoba... M. Blank: Vous avez interrompu...

M. Ciaccia: Oui, vous m'avez interrompu, c'est pour cela que vous avez la parole. Je suis trop poli pour vous.

Le Président (M. Boucher): Si vous me le permettez, M. le député de Mont-Royal, vous avez permis au ministre de s'expliquer. Est-ce que vous avez terminé, M. le ministre?

M. Couture: Enfin, vous me comprenez; je vous laisse aller. Je termine immédiatement, en disant que c'est plus difficile pour les personnes des autres provinces du Canada de rentrer au Québec. C'est très intéressant qu'il y en ait, quand même, un aussi grand nombre. Progressivement, je crois, justement, que ce type d'association que nous voulons faire avec le reste de Canada, ces bonnes relations que nous voulons garder avec le reste du Canada, nous allons les maintenir et en développer le volume.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Comme je vous le disais, M. le Président, c'est un mythe de dire que c'est parce qu'on veut le fait français au Québec que le gain ou la perte augmente. Si vous regardez les chiffres de 1966 à 1970, ils sont beaucoup plus élevés que 1962 à 1964. Après cela, il y a eu une baisse de pertes. Si vous regardez les chiffres de 1971 à 1975, la perte était moindre, très minime: $12 000, $14 000. Alors, elle a diminué et il y avait autant une volonté du Parti libéral de 1970-1976 — même dans ses actes — de faire une société francophone. Le fait français au Québec...

M. Couture: La société bilingue...

M. Ciaccia: ... un instant... c'est quelque chose qui a évolué depuis des années. Cela n'a pas commencé en 1976, novembre 1976. Mais la perte, par exemple, de la population — regardez les chiffres — où il n'y avait pas une administration libérale; c'est curieux... quand l'administration libérale était là, la perte est devenue moindre.

M. Blank: 1974 and 1975 there was bill 22.

M. Ciaccia: Exactement, regardez le projet de loi, la loi 22. C'était assez dramatique aussi pour les anglophones. Regardez ce qui est arrivé en 1974 et 1975; les pertes n'étaient pas là, elles ont baissé. Ce n'est pas cela, ce sont les autres politiques du gouvernement. Vous venez de mentionner: c'est le séparatisme du gouvernement, le chômage de plus de 300 000 personnes, le fait que vous fermez les écoles anglophones à la communauté anglophone. Il y a une série de politiques du gouvernement qui ont fait perdre la confiance et la certitude et les chiffres sont assez dramatiques. Je suis très heureux que vous nous ayez fourni ce tableau 2 — parce que je ne l'avais pas — mais je vous dis que la population devrait les regarder et venir à en tirer ses propres conclusions.

M. Couture: On va donner des explications là-dessus, mais justement, actuellement...

M. Blank: ... durant le régime libéral.

M. Couture:... cela devient rassurant et il faut regarder l'avenir avec confiance. Je n'insiste pas là-dessus parce que, au niveau des entrées...

M. Ciaccia: Vous êtes confiant... Votre gouvernement ne sera pas au pouvoir à l'avenir, c'est pour cela que vous les regardez avec confiance. Je suis d'accord avec vous; on va se rétablir normalement, la perte va baisser et on va accroître le gouvernement...

M. Couture: ... on se reverra dans 25 ans... vous allez redonner un Québec anglophone et ils vont tous revenir ici.

M. Ciaccia: Je n'accepte pas cette remarque. La langue qu'on emploie ici est française et même la communauté anglophone l'a acceptée; ce n'est pas correct de dire cela.

M. Couture: Je veux quand même insister sur le fait que... Je retire mes paroles, M. le Président.

M. Ciaccia: J'espère, oui, parce que ce n'est pas correct de dire cela.

M. Couture: Mais c'est un fait quand même que le gouvernement libéral était plus attrayant pour des anglophones de Toronto, de Winnipeg, de l'Alberta, et de Colombie-Britannique. Peut-être que pour nous, dans le sens suivant que cela demande plus d'effort maintenant de partir d'une province anglophone et venir dans un Québec qui affiche d'une façon aussi claire ses couleurs d'un Québec français. J'en reste là comme explication.

M. Ciaccia: Vous avez droit à vos opinions, mais j'ai droit aux miennes et j'ai une série d'autres politiques qui sont causes de cette perte.

Le Président (M. Boucher): Est-ce que l'élément no 1 est adopté?

M. Ciaccia: Non, s'il vous plaît; j'avais d'autres questions. Peut-être qu'on pourrait...

Le Président (M. Boucher): Est-ce que vous l'adoptez tout simplement en bloc...

M. Ciaccia: Oui, on posera les questions...

Le Président (M. Boucher): Alors, on l'adoptera en bloc une fois que les discussions auront lieu. D'accord.

M. Ciaccia: On parlait des grilles de sélection, des critères de sélection... dans un document comme vous avez fourni, des règlements sur la question d'adaptabilité. Vous avez: qualités personnelles: 15 points; motivation: 5 points; connaissances du Québec: 2 points. Vous référez — pour établir si un ressortissant étranger possède des qualités personnelles de motivation susceptible de faciliter son adaptation, un fonctionnaire à l'immigration pose des questions orales simples, à partir d'un document approuvé par le ministre, permettant d'évaluer les indicateurs; et vous donnez une liste d'indicateurs. Est-ce que vous avez une copie de ce document? (17 h 45)

M. Couture: Nous ne l'avons pas ici, mais en tout temps, on pourra vous le fournir.

M. Ciaccia: Est-ce que vous pourriez nous en...

M. Blank: Une copie à chacun.

M. Couture: Certainement. Je voudrais vous faire remarquer, à ce sujet-là, que c'est un document qui a été préparé par des spécialistes. Ce n'est pas nous qui avons politiquement dit: II faudrait demander telle ou telle chose. Ce sont des spécialistes de l'université qui nous ont suggéré un certain nombre de questions.

M. Ciaccia: On va l'étudier.

M. Blank: On va l'étudier et voir si les propos du ministre sont conformes au document.

M. Couture: Parfait.

M. Ciaccia: On parlait des investisseurs immigrants. J'ai certains chiffres ici et peut-être que le ministre pourrait donner quelques informations sur les propos qu'il a tenus quant à la politique pour attirer plus d'investisseurs immigrants. J'ai les chiffres de 1976, 1977, 1978 et ces chiffres sont compilés, ce sont des demandes pour accepter l'immigration. On voit qu'en 1976, il y avait eu 480 entrepreneurs; en 1977, cela avait baissé à 217 au Québec et en 1978, cela a baissé à 90. Les chiffres comparables totaux au Canada étaient en 1976 de 1980, en 1977 de 1047 et en 1978 de 436.

M. Couture: Dans tout le Canada.

M. Ciaccia: Oui.

M. Couture: II y a eu une baisse très notable.

M. Ciaccia: Oui, il y a eu une baisse au Canada aussi, une baisse notable, mais en pourcentage, en 1976, on avait pu attirer 25,2% en nombre. Je parle des nombres seulement. En 1977/78, 20,7% et 20,6%, mais dans les capitaux créés, on voit une baisse encore plus remarquable. Le pourcentage qu'on avait — je vais vous donner le chiffre que j'ai — au Québec, en 1976 $104 millions, en 1977 $33 millions, en 1978 $16 millions. Au Canada, pour les mêmes années, en 1976 $409 millions, en 1977 $205 millions et en 1978 $146 millions. Alors, il y a eu une baisse globale au Canada. Les pourcentages sont intéressants. En 1976, au Québec, on attirait 25,6% des capitaux créés qui se comparaient relativement au nombre d'entrepreneurs. Mais en 1977, ce chiffre est tombé à 16% et en 1978, il est tombé encore à 11%. Cela veut dire qu'à un moment donné, on pouvait attirer notre pourcentage qui est un peu l'équivalent de la population au Québec. Là, on est tombé à 11%. Le ministre a mentionné qu'il y avait des politiques qui pouvaient...

M. Couture: Des mesures.

M. Ciaccia: Des mesures. Est-ce que vous pourriez préciser un peu plus et dire quelles mesures vous entendez prendre pour essayer d'attirer plus d'investissements?

M. Couture: Je serais porté à vous demander de déposer votre... Je ne sais pas si vous voulez déposer votre document. J'ai l'impression qu'on n'a pas les mêmes chiffres. En 1977/78, quelle somme d'investissements avez-vous retenue?

M. Ciaccia: Les capitaux créés en 1977?

M. Couture: Oui.

M. Ciaccia: J'ai $33 millions.

M. Couture: Au Québec?

M. Ciaccia: Au Québec. Au Canada, $205 millions.

M. Couture: On n'a pas les mêmes chiffres, M. le Président. Je voudrais vous demander une directive. Quand on n'a pas les mêmes chiffres, qu'est-ce qu'on fait, M. le Président?

Le Président (M. Boucher): II n'y a pas de dépôt de document à la commission.

M. Couture: Je suis porté à faire confiance à nos services là-dessus. Vous avez dans votre cahier, le document qui vient de nos services, qui, à mon avis, est le plus exhaustif.

M. Ciaccia: Un instant.

M. Couture: En 1977-1978, il y a eu 194 cas, $69 487 000, 1116 emplois créés, 718 personnes de familles immigrantes établies. Il y a eu 187 cas en progrès, qui normalement rebondissent l'année suivante, pour $40 775 000 et 400 cas en prospection. Enfin, vous avez le détail dans ce tableau.

En 1978-1979, nous avons 140 cas pour $36 millions d'investissements. Donc, ce sont des chiffres pas mal plus importants que ceux que le député de Mont-Royal nous a apportés.

Pour justifier les chiffres du député de Mont-Royal, peut-être que vous avez les années civiles et que nous avons les années financières. C'est possible. Je retiens qu'il y a eu une baisse qu'on ne trouve pas tellement intéressante. Ce n'est pas une baisse dramatique par rapport au reste du Canada, mais c'est une baisse quand même qui fait mal un peu et c'est la raison pour laquelle on a des mesures... vous me demandez des détails. Bien, cela me fait plaisir de vous en apporter quelques-uns.

Dans les mesures prévues pour l'année à venir, les conseillers en immigration, en poste à l'étranger, évidemment, constituent le premier point de contact. Je répète un peu ce que j'ai dit en ajoutant certaines choses, sans doute. Nous proposons que ces conseillers de service à l'étranger et ceux du service aux entrepreneurs investisseurs soient appelés à participer à des séminaires tenus par le ministère de l'Industrie et du Commerce à l'étranger. Je pense que c'est lui qui a l'expertise concernant cette approche pour les entrepreneurs investisseurs. Il est également proposé que des agents d'immigration participent à ces colloques, conférences et sessions d'information visant à faire connaître davantage à l'étranger l'intérêt du Québec. Donc, par des séminaires, par de l'information, par de la publicité, effectivement, il devrait y avoir plus d'entrepreneurs investisseurs.

Avant de l'oublier, en 1976, on signalait que cela avait été assez important, je dois dire que les Libanais se sont exilés pour des raisons évidentes, la guerre civile qui a commencé au Liban. Il y a bon nombre de Libanais dans ces années, à partir de 1976, qui sont venus au Québec avec des capitaux. Cela a peut-être à ce point de vue-là haussé ces chiffres qui, maintenant, ne coïncident plus avec ce qu'on a comme entrées de ce type d'entrepreneurs investisseurs.

Deuxième mesure, la publicité. Nous disons que des outils publicitaires vont être réalisés rapidement pour créer un climat d'accueil positif. Il y a un guide de l'immigrant qui existe et il y aura un feuillet pour faire mieux connaître ce service à l'étranger, qui est en préparation. On veut amorcer un programme de publicité à l'étranger — j'espère que là-dessus on aura l'accord unanime de la commission, même s'il y en a qui sont réticents à la publicité — grâce à l'utilisation de revues et de publications spécialisées, etc.

Cn veut aussi — vous savez qu'il y a un programme fédéral de visites de journalistes étran- gers et le MIQ y participe régulièrement — nous-mêmes organiser, inviter des journalistes étrangers économiques pour dire un peu dans quel domaine les immigrants pourraient investir au Québec.

Troisième mesure, des missions. Il est recommandé de mettre sur pied des missions de conseillers du service aux immigrants entrepreneurs investisseurs visant à seconder, à appuyer ou à compléter le travail du conseiller en poste à l'étranger. Ces gens qui partent en mission, sur un certain nombre de candidats déjà connus... parce que nos conseillers à l'immigration, reçoivent des gens, des candidats à l'étranger qui arrivent dans les bureaux et qui disent: Je voudrais immigrer au Canada ou au Québec — j'ai un peu de capital — j'aimerais investir, etc. Qu'est-ce qu'on fait? Le conseiller à l'immigration, à ce moment, informe notre bureau de Montréal et il y a un certain nombre de candidats connus qui s'ajoutent et, après cela, on envoie quelqu'un en mission pour les rencontrer et les préparer à cette venue.

Une quatrième mesure, la concertation avec les ministères et agences à vocation économique. Là-dessus, cela a peut-être été un peu faible dans le passé. Nous voulons systématiquement avoir des relations suivies avec, entre autres, l'Agriculture, l'Industrie et le Commerce, les Richesses naturelles, le Tourisme, la Chasse et la Pêche et l'OPDQ.

Comme je vous l'ai dit, en terminant tout à l'heure, on veut assouplir notre façon d'accueillir les entrepreneurs investisseurs, par exemple, en organisant des stages ici, etc. Je crois que ce sont des mesures qui devraient faire sentir leurs effets dans les prochains mois.

M. Ciaccia: Je voudrais faire remarquer au ministre que les chiffres, même ses chiffres à lui de 1978/79, de $36 millions, c'est encore moins, c'est presque la moitié de l'année dernière. L'année dernière — je prends vos chiffres que vous avez fournis, $69 millions — il y a eu une chute assez considérable. Mais c'est encore moins que l'année 1976/77...

M. Couture: Bien sûr, mais il faut comprendre...

M. Ciaccia: Si on projette ces montants, on va arriver de moins en moins.

M. Couture: En 1975/76, c'était $26 millions. En 1974/75, c'était $10 millions.

M. Ciaccia: Je ne sais pas comment ces chiffres ont été compilés...

M. Couture: Ils ont été compilés comme tous les autres.

M. Ciaccia: Sur quelle base, mais il semble avoir une chute assez remarquable. Il y avait une tendance qui allait en montant, de 1974 à 1976 et là, cela s'en va à l'inverse.

M. Couture: Je vous dis que, quand même, il y a des années assez récentes, comme 1974-1975, il y a eu seulement $10 millions et en 1975/76, seulement $26 millions. En 1978/79, on a $36 millions. On m'apporte un chiffre que le fédéral, en 1976, avait pour $400 millions et ils sont tombés à $207 millions en 1977, une baisse de 50%.

M. le Président...

M. Ciaccia: Mais notre baisse à nous...

M. Couture: Je serais porté à dire qu'actuellement, cela reflète un peu cette tendance qui est inquiétante dans tout le Canada et c'est la raison pour laquelle nous avons des mesures pour corriger la situation.

M. Ciaccia: Cela a baissé dans tout le Canada, mais nous avons baissé de pourcentage encore plus. A un moment donné, on avait 25%...

M. Couture: Non, c'est de $36 millions à $69 millions...

M. Ciaccia:... des investissements et là, on est tombé à 11%.

M. Couture: Je voulais vous dire que par rapport au Canada, entre l'année 1977 et 1978, la baisse est du même ordre au Québec qu'elle l'est pour l'ensemble du Canada. Vous avez $69 millions à $36 millions, et eux, ils ont de $400 millions à $207 millions. A moins que mes connaissances en mathématiques soient nulles, je ne vois pas quelle différence il y a entre les deux types de chiffres.

M. Ciaccia: Je ne pense pas qu'on puisse finir avant 18 heures, M. le Président.

M. Couture: On peut prolonger un peu, si vous voulez.

M. Ciaccia: J'ai une question sur les...

Le Président (M. Boucher): Prolongez-vous après 18 heures pour pouvoir terminer ou est-ce que vous escomptez qu'on va revenir à 20 heures?

M. Ciaccia: Je ne voudrais pas passer à la hâte certains articles. Je ne sais pas si le...

M. Le Moignan: J'aurais quelques questions à poser également. Alors, il va falloir revenir à 20 heures.

M. Couture: On est à votre disposition.

Le Président (M. Boucher): Est-ce que nous ajournons?

M. Ciaccia: Juste une question avant d'ajourner. Vous avez mentionné que onze postes ont été...

M. Couture: ... supplémentaires, oui.

M. Ciaccia: D'après un article dans le journal La Presse assez récent, il y aurait 33 médecins étrangers réduits à vivre du chômage. Sur les onze postes, est-ce que vous allez faire d'autres représentations, qu'allez-vous faire pour les autres nombres? Il me semble que ce ne soit pas suffisant, ces onze postes.

M. Couture: II faut dire quand même ceci: on les traite cas par cas, parce que quand on dit 33 médecins en chômage, c'est possible, mais il y a des cas où les qualifications exigées ici au Québec — je pense bien qu'une société a le droit d'avoir un certain nombre d'exigences comme qualifications — pour certains cas, les candidats médecins ne remplissent pas ce genre d'exigences. Mais c'est notre attitude, actuellement, que quand un médecin immigrant fait appel à notre ministère pour ouvrir un dossier aux fins d'étude, pour faire certaines représentations auprès du ministère des Affaires sociales, nous le faisons volontiers et cela marche très bien à ce point de vue.

Le Président (M. Boucher): La commission suspend ses travaux jusqu'à 20 heures.

Suspension de la séance à 18 heures

Reprise de la séance à 20 h 5

Le Président (M. Boucher): A l'ordre, messieurs!

Lorsque nous avons suspendu nos travaux à 18 heures, nous en étions au programme 1 — il n'y en a qu'un — du ministère de l'Immigration. M. le député de Gaspé, vous aviez demandé la parole. Allez-y!

M. le député de Mont-Royal, est-ce que vous voulez continuer vos questions, parce que j'avais donné la parole au député de Gaspé?

M. Ciaccia: J'aurais d'autres questions, mais...

M. Le Moignan: Je préparerais les miennes pendant ce temps-là.

M. Ciaccia: Je pense que je vais en poser.

Le Président (M. Boucher): Allez-y!

M. Ciaccia: Pour revenir à une question qu'on a déjà soulevée. M. le ministre, vous avez parlé des effectifs dans la fonction publique. Vous avez dit que vous faites votre possible pour assurer que les membres des minorités soient représentés. Est-ce que vous vous êtes fixé des objectifs? Combien de personnes aimeriez-vous voir placées dans la fonction publique? La meilleure façon de voir s'il y a du progrès, c'est de se fixer certains objectifs avec un délai. Et ensuite, on peut juger.

M. Couture: Avez-vous terminé votre question?

M. Ciaccia: Oui, c'est ma question.

M. Couture: Premièrement, il y a un comité interministériel qui est en fonction actuellement, qui travaille sur les objectifs, la possibilité ou les moyens à prendre pour attirer les demandes des immigrants. C'est comme chez les anglophones. Il a été un temps où il n'y avait pas tellement de sollicitation de ces milieux pour entrer au service de la fonction publique.

D'une part, ce comité interministériel existe et doit faire rapport... Est-ce qu'ils ont un délai? Dans quelques semaines, disons à l'automne, il devrait donner un rapport là-dessus.

M. Ciaccia: Cela, c'est le comité interministériel.

M. Couture: C'est le comité interministériel.

M. Ciaccia: Mais vous-même, comme ministre de l'Immigration?

M. Couture: Quel est mon objectif?

M. Ciaccia: Oui, quel est votre objectif à vous?

M. Couture: Mon objectif, c'est d'arriver à un pourcentage qui puisse satisfaire les milieux ethniques. Là-dessus, une fois que le comité aura remis son rapport, je le proposerai au Conseil consultatif de l'immigration qui pourra me donner un avis, afin de savoir si c'est suffisant ou non. Je peux vous lire maintenant que je m'engage à entériner assez facilement les recommandations du conseil consultatif.

M. Ciaccia: Vous n'avez pas fixé de pourcentage vous-même?

M. Couture: Je n'ai pas de pourcentage de fixé, parce que je n'ai pas la connaissance suffisante des besoins et des pourcentages souhaitables. Je ne l'ai pas. Je ne suis pas suffisamment éclairé pour vous donner un chiffre.

M. Ciaccia: Par exemple, à Ottawa, il y a eu un programme pour rectifier le déséquilibre qu'il y avait dans la fonction publique. Les objectifs qui ont été fixés, c'était le pourcentage représenté dans la population. Je crois que c'est une façon de le faire.

M. Couture: Idéalement, cela peut être cela.

M. Ciaccia: Est-ce que ce serait le même objec:if que vous vous fixeriez? Autrement dit, si 12% de la population est composée de groupes ethniques, en excluant les Anglo-Saxons, allez-vous /ous fixer, comme objectif, dans la fonction publique, 12% des membres venant des groupes ethniques?

M. Couture: II faut faire attention à une chose, c'est qu'il y a beaucoup de Québécois de nouvelle souche, pour toutes sortes de raisons, qui ne veulent plus être identifiés comme venant de milieux ethniques, mais qui sont quand même dans la fonction publique ou qui veulent pénétrer dans la fonction publique. Etablir un pourcentage ou un niveau, cela peut être un peu faussé. C'est la raison pour laquelle je veux m'appuyer sur les recommandations des milieux concernés, en particulier sur mon instrument de consultation qu'est le Conseil consultatif de l'immigration.

C'est évident que, si c'est un pourcentage qui traduit un peu l'importance des milieux ethniques, ce serait le mieux.

M. Ciaccia: En commission, vous avez déjà dit: Je peux vous assurer qu'il y aura des corrections prochainement. C'était lors de la dernière commission parlementaire sur l'étude des crédits. Savez-vous, les années passent très rapidement.

M. Couture: II y a eu des corrections. J'ai commencé à mon ministère. J'imagine qu'une bonne façon de corriger des choses, c'est de faire le ménage dans sa propre maison.

M. Ciaccia: Oui, c'est un bon commencement.

M. Couture: On a des chiffres assez intéressants à ce point de vue là.

M. Ciaccia: Je ne veux pas m'éterniser là-dessus. Je voudrais procéder à d'autres éléments des crédits. Vous avez un élément pour des subventions dans votre cahier, dans les détails que vous avez donnés. Quels sont les critères que vous établissez pour ces subventions?

M. Couture: Je ne sais pas si votre question est terminée.

M. Ciaccia: Oui, M. le ministre.

M. Couture: Je ne sais pas si vous avez pris connaissance du document qui élabore en long et en large les critères et les conditions pour recevoir des subventions. C'est évident, et on est tous d'accord pour dire qu'on ne donne pas de l'argent à des contribuables comme cela dans certaines conditions et sans certaines balises. Cette politique d'action concertée que vous avez dans votre cahier, à l'onglet divers, vers la fin, vous donne tous les critères. Je vais vous donner les critères généraux d'admissibilité. Pour être admissible à l'un ou plusieurs de ces programmes, tout groupe qui demande une subvention doit répondre aux critères suivants: premièrement, être sans but lucratif; deuxièmement, ne pas être un parti politique — donc, le Parti libéral du Québec ne peut pas être subventionné — ou une association autorisée au sens de la section V de la Loi régissant le financement des partis politiques et modifiant la Loi électorale; troisièmement, être représentatif de son milieu; quatrièmement, être géré efficacement et être en mesure de démontrer sa capacité

d'assurer l'exécution de ses projets avec compétence; cinquièmement, accepter de divulguer éventuellement les autres sources de financement dont il dispose, évidemment, pour ne pas faire des chevauchements et pour qu'il n'y ait pas de surenchère; sixièmement, pouvoir compter sur les ressources du milieu qu'il représente; septièmement, éviter la duplication des services déjà offerts et, notamment, les services gouvernementaux. C'est un peu les critères généraux qui encadrent assez bien notre politique de subvention.

M. Ciaccia: On parle de critères pas mal généraux, comme vous dites. Parmi les demandes que vous obtenez, quel est le pourcentage à qui vous accordez des subventions? Autrement dit, quel est le montant global et quel est le montant des demandes?

M. Couture: Je dois vous dire que cela ne surprendra personne que les demandes excèdent énormément les réponses. (20 h 15)

M. Ciaccia: Oui, c'est normal.

M. Couture: De toutes les demandes qu'on reçoit, on a peut-être pour $1 500 000 de demandes et on répond à peu près à 50% du montant des demandes. C'est en général, comme moyenne.

M. Ciaccia: II n'y a jamais de critères politiques quand vous...

M. Couture: On s'en garde bien!

M. Ciaccia: Cela n'entre pas du tout dans les considérations?

M. Couture: Ce n'est jamais arrivé à ma connaissance. C'est tellement vrai que...

M. Ciaccia: Connaissant votre désir ardent et votre sincérité vraiment de poursuivre vos objectifs politiques séparatistes, et vous croyez au séparatisme...

M. Couture: Oui, on sépare tout ce qu'on a.

M. Ciaccia: Vous n'êtes pas comme certains de votre gouvernement qui sont séparatistes, indépendantistes, "associationnistes", on ne sait plus quel nom leur donner. Vous, je peux dire clairement que vous êtes séparatiste. Alors, connaissant votre sincérité, connaissant vos objectifs politiques, je me demande si vous êtes capable de séparer vos objectifs politiques de vos décisions d'accorder ces subventions.

M. Couture: M. le Président, je suis en effet séparatiste dans le sens suivant: Tout l'argent que j'ai pour les subventions, je le sépare entre tout le monde.

M. Ciaccia: Ah, c'est...

M. Couture: C'est tellement vrai... M. Ciaccia: C'est une réponse...

M. Couture:... qu'on cherche à dépolitiser les subventions que j'ai moi-même, comme ministre, qui a remplacé les prédécesseurs que vous connaissez... je pense qu'il en est passé plusieurs du gouvernement libéral précédent, d'ailleurs, qui ont fait, je pense, de bonnes "jobs". Ce sont eux qui, directement, envoyaient la lettre pour dire à tel organisme: Voici, moi, ministre de tel parti, etc., je vous donne tant d'argent pour faire tel travail.

Moi, j'ai trouvé que ce n'était pas bon, ça, pour des raisons bien simples — plutôt profondes que simples — soit que, à la longue, dans les milieux ethniques, si le pouvoir politique direct est l'instrument pour donner une série de subventions — dans notre ministère, on en donne beaucoup — il pourrait y avoir un lobbying dangereux. Il pourrait se passer ce que vous avez insinué et j'ai pris la décision de confier à mes services le soin d'administrer la politique. La politique, évidemment, je l'ai acceptée, je l'ai élaborée, etc. Une fois qu'elle a été fait, je l'ai envoyée aux services et je leur ai dit: Administrez ça. Vous avez vos critères. Vous avez des demandes. Servez-vous des critères et répondez oui ou non, selon les demandes. A ce point de vue-là, je pense que c'est un progrès considérable.

M. Ciaccia: Une fois que les critères que vous avez mentionnés sont admis et qu'un organisme répond à ces critères, comment décidez-vous du montant de la subvention, que se soit $10 000, $20 000...?

M. Couture: On a une enveloppe globale pour chaque programme. Le programme d'aide au fonctionnement des organismes totalise à peu près $536 000, je crois, — $535 000, je me suis trompé de $1000, — pour une série d'organismes. Nos fonctionnaires ont à tenir compte de toutes les demandes qu'ils reçoivent et de celles qui sont attendues, parce que nos services de relations avec les groupes ethniques connaissent bien les milieux et savent que tel milieu, éventuellement, pourra faire une demande. Alors, il y a ce souci d'un partage équitable de l'enveloppe budgétaire entre de nombreux organismes. Evidemment, ça diminue peut-être le montant demandé.

Il y a aussi, dans la subvention elle-même, ce souci de tenir compte de l'expérience de l'organisme et de son efficacité. Il y a peut-être une part qu'on pourrait qualifier de difficile à établir où il pourrait y avoir une partie qui semblerait arbitraire, mais je pense que ça arrive dans très peu de cas et c'est tellement vrai qu'à ce titre j'ai rarement de plaintes des groupes là-dessus. Je sais que, dans l'ensemble, les gens connaissent les règles du jeu, ils connaissent notre budget et ils sont largement satisfaits de ce que nous faisons.

M. Ciaccia: Avez-vous augmenté, depuis que vous avez assumé la responsabilité du ministère,

les montants de subventions qui étaient autrefois accordés à ces groupes minoritaires?

M. Couture: Le budget a été augmenté depuis que nous sommes en place, en effet.

M. Ciaccia: De combien?

M. Couture: II a été augmenté, réellement, de plusieurs centaines de milliers de dollars; il a été augmenté de $350 000. Je m'en réjouis parce que les demandes étaient tellement nombreuses et l'organisation des milieux ethniques est de plus en plus structurée. Quand on les considère comme des partenaires — parce qu'il y a une certaine philosophie qui s'est dégagée depuis que nous sommes au pouvoir, là-dessus — nous voulons que le gouvernement joue un certain rôle, mais nous reconnaissons et nous sommes ravis de considérer que les groupes et les associations ethniques ont un rôle important à jouer dans leur communauté et c'est à titre de partenaires que nous reconnaissons ce rôle. Une fois que les gens sont habitués à prendre conscience que nous-mêmes, au gouvernement, établissons ce genre de contrat de services, finalement, avec les communautés ethniques, il y a eu un accroissement de demandes, mais il faut s'en réjouir, parce que cela partage les responsabilités et du gouvernement et des milieux ethniques.

M. Ciaccia: Vous venez de dire que vous reconnaissiez que les différents groupes ethniques jouent un rôle important dans leur communauté; pas textuellement, mais grosso modo, c'est ce que vous avez dit. Quand vous avez nommé le Conseil consultatif de l'immigration, vous ne les avez pas consultées, ces associations.

M. Couture: M. le Président, excusez-moi, si je souris un peu, mais probablement que le député de Mont-Royal est très mal informé et ça me fait plaisir de l'informer ce soir, s'il ne le savait pas.

Dois-je rappeler que quand le premier comité consultatif a été mis en place, son premier mandat était celui-ci? C'est difficile de nommer des représentants des communautés ethniques, il y en a 650 à peu près, des associations dans les milieux ethniques.

M. Ciaccia: Vous ne les avez pas consultées quand vous avez nommé le conseil la première fois.

M. Couture: J'y arrive. Vous me donnez toujours la parole, M. le Président?

Le Président (M. Boucher): Oui, M. le ministre.

M. Couture: Dans la nomination du premier comité consultatif, en effet, il y avait eu une consultation qui avait été un peu rapide, mais je trouvais important de remettre sur pied ce comité consultatif qui avait été abandonné par le gouver- nement libéral précédent. Je ne sais pas si le gouvernement libéral précédent donnait peu d'importance à cet instrument de consultation, mais il avait été laissé en plan. J'ai dit: C'est important qu'il soit remis sur pied et j'ai nommé rapidement ses membres en leur donnant un premier mandat, surtout, évidemment, à la suite de critiques justifiées des milieux. Ils ont dit: On n'a pas été assez consulté. J'ai dit: Vous venez d'être nommés, d'ici un an, donnez-moi une stratégie, une technique, une approche, une façon de consulter les milieux ethniques pour qu'au prochain comité consultatif, qui est devenu le conseil consultatif, nous puissions avoir un mécanisme acceptable pour nommer les futurs membres. C'est ce qu'ils ont fait. Il y a eu à temps plein, pour l'information du député de Mont-Royal, un agent de relations extérieures engagé au ministère qui a fait pendant plusieurs mois, de juin à décembre, des consultations. Il est allé dans toutes les parties du Québec, il a rencontré tous les groupes ethniques, il a reçu au-delà d'une centaine de recommandations des milieux ethniques pour dire: Nous, on aimerait avoir telle personne sur ce conseil consultatif etc. C'est à la suite de ces consultations que j'ai nommé les membres actuels. Leur nomination a eu beaucoup d'effets heureux dans les milieux ethniques. J'ai reçu énormément de félicitations, d'expression de satisfaction face au choix de ces membres.

M. Ciaccia: II y a différentes manières de faire de la consultation. Cela aurait été plus crédible — je ne dirais pas plus "crédibile" — de consulter les différentes associations avant de nommer le premier conseil, parce que vous nommez le conseil d'après vos intentions, d'après vos critères et, après cela, c'est facile de dire: On a fait de la consultation. Vous êtes toujours ouvert à des critiques, à savoir que vous nommez sur le conseil des gens qui sont plutôt favorables au point de vue du ministre que représentatifs du point de vue des groupes immigrants. Quand vous dites que je suis mal informé, je suis très bien informé que vous faites des campagnes de publicité, des tournées dans tous ces milieux, votre chef de cabinet est très actif, cela je le sais.

Je me pose des questions à savoir si ces gens-là sont tous vraiment représentatifs du milieu immigrant. Cela, par exemple, on pourrait démontrer que ce n'est pas exactement représentatif, ce sont des gens pour lesquels c'est plus facile de dire qu'ils ont été nommés par le ministre, c'est vous qui avez la décision finale et je crois qu'en terme de crédibilité cela aurait été préférable si le conseil consultatif avait été originalement nommé après consultations.

M. Couture: M. le Président, me permettez-vous simplement d'ajouter un complément et d'insister sur le fait suivant: Tous les membres du conseil consultatif actuel, sauf le président, et je pense qu'on comprendra que pour la nomination d'un président, le ministre peut avoir un choix plus libre qui déborde les recommandations qui vien-

nent des milieux... Sauf le président, tous les membres du conseil consultatif...

M. Ciaccia: J'écoute!

M. Couture: Je veux que vous écoutiez parce que c'est important. Tous les membres du conseil consultatif actuel ont été choisis dans des listes proposées par les communautés ethniques, donc, c'est complètement faux, mais complètement faux, inexact, je ne trouve pas de vocabulaire...

M. Ciaccia: Le fait qu'ils ont composé des listes ne prouve rien. Enfin...

M. Couture: Ils ont été proposés par les communautés ethniques elles-mêmes, après plusieurs mois de consultations; donc, c'est faux.

M. Ciaccia: Dans un autre ordre d'idées, brièvement, avant que je ne cède la parole... Si mon collègue de l'Union Nationale me le permet, vous avez l'entente Cullen-Couture, et maintenant l'administration devrait retomber sur le ministère du Québec quant à son application, l'admission et une foule d'autres mesures. Quand je regarde — et je crois que le député de Saint-Louis a déjà soulevé cette question — les effectifs et le budget de votre ministère, par exemple: employés permanents, je vois qu'il y a moins d'employés permanents en 1979/80 qu'il y en avait l'année dernière. Supposément les fonctions de votre ministère augmentent et les effectifs baissent. Je vais citer un exemple d'une situation qui a été portée à mon attention. Vous pouvez corriger les faits s'ils ne sont pas tels qu'ils m'ont été rapportés, mais à Granby, par exemple, suite à la suggestion de l'année dernière du député de Saint-Louis d'admettre les réfugiés vietnamiens qui étaient sur la grande mer en bateau, vous avez posé un geste très humanitaire en les acceptant au Québec.

Mais, très récemment, il y a à peu près un mois, un groupe de ces réfugiés a été envoyé par votre ministère à Granby. Premièrement, il n'y avait pas de COFI à Granby, parce qu'il n'y avait pas d'immigrants à ce moment-là et peut-être qu'il n'y avait pas la nécessité d'en avoir. Mais l'accueil des réfugiés a été laissé entre les mains du ministère fédéral. Les déboursés pour tout le nécessaire pour les accommoder pendant la période de transition, jusqu'à ce que ces gens obtiennent des emplois, c'était à la charge et aux coûts du gouvernement fédéral. Le fonctionnaire du gouvernement fédéral l'a su le soir avant, ou la journée avant, seulement à quelques jours d'avis. Les fonctionnaires du ministère de l'Education ne connaissaient même pas le nombre de personnes qui devaient aller à Granby. Il y en a qui disaient que c'était 87, il y en a d'autres qui disaient que c'était 50. Le ministère de la Main-d'Oeuvre québécois n'était pas du tout au courant.

Est-ce que ces faits sont exacts? Est-ce que vous avez une planification pour recevoir ces gens? C'est beau de poser le geste de recevoir les réfugiés. Mais, par la suite, si on n'a pas les fonds nécessaires, si ce sont des budgets du gouvernement fédéral, si ce sont des fonctionnaires du gouvernement fédéral qui doivent les recevoir et les accommonder pendant la période de transition qui peut durer un an au moins, je me demande quel est le rôle du ministère de l'Immigration. Il aurait fallu qu'il institue un COFI immédiatement. Ces gens ont pris certains fonds et ont mis en place les mécanismes du COFI. (20 h 30)

Si ces renseignements ne sont pas exacts, cela me ferait plaisir de connaître les renseignements exacts du ministre.

M. Couture: L'opération de Granby était l'une de nos premières opérations d'accueil des réfugiés dans les petites villes. Je suis allé moi-même à Granby accueillir ces réfugiés qui étaient dans un motel de la place, en attendant de trouver des logements.

Le rôle du ministère de l'Immigration du Québec a été très intéressant dans ce cas-là. Evidemment, je serais porté à dire que vous avez raison sur certains points en disant que cela s'est fait vite. Cela s'est fait vite, parce que, par définition, l'arrivée des réfugiés, ce sont des gens qui sont dans des situations dramatiques et qui sont envoyés par le fédéral de l'extérieur. Même si notre conseiller en immigration renconre ou donne le feu vert sur les candidats qui viennent au Québec, c'est le fédérai qui organise les voyages à l'étranger de ces réfugiés vers le Québec. Parfois, il en arrive des nombres considérables et on est averti souvent très tard, à la dernière minute, qu'il en arrive 60, 150, 200, etc.

Dans le cas de Granby, en effet, il est arrivé un contingent, la semaine précédente, de 67, quelque chose comme cela. 188, mais on en a envoyé à Granby à peu près 70, oui. Il en était arrivé 190 la veille, non pas la veille, la semaine précédente ou la semaine courante, comme cela et, rapidement, nous avons été obligés d'organiser l'accueil de ces réfugiés-là, parce que, le Québec, même si au niveau des budgets, ce n'est pas lui qui dépense l'argent pour le vêtement, le logement, etc., nous avons quand même un rôle que je trouve intéressant et primordial. Nous organisons les services. C'est payé par le fédéral, mais c'est nous qui organisons un peu une série de services, qui mettons en place des choses, je pourrais dire le meilleur mot, qui animons les organismes, les ressources communautaires pour l'accueil de ces réfugiés.

A Granby, le maire lui-même a pris l'initiative, sachant qu'on voulait envoyer des réfugiés à Granby. Il était enthousiaste. Il a dit: On est organisé pour cela On a des industries ici. Cela nous fait plaisir de le faire. Il a mobilisé toute la population. Il m'a invité lui-même. Ce n'est pas moi qui me suis imposé à Granby. Il a dit: Je voudrais que vous veniez officiellement accueillir avec moi les réfugiés. Il y avait toute une ville qui était mobilisée, même si ce fut rapide, pour l'accueil de ces réfugiés.

Je crois en effet qu'il y a peut-être eu des problèmes logistiques au niveau des organismes comme les Centres de main-d'oeuvre, etc.

M. Ciaccia: Qui paie pour ces réfugiés, par exemple, avant qu'ils n'obtiennent des emplois?

M. Couture: Avant qu'ils obtiennent des emplois et avant qu'ils aient un logement, c'est le fédéral. Evidemment, c'est le fédéral.

M. Ciaccia: Ah!

M. Couture: Actuellement, nous négocions et je pense que cela s'annonce assez bien. Nous demandons au fédéral ceci. Lors de l'opération du Hai Hong, on a eu de M. Cullen et de toute son équipe, beaucoup d'hommages et de félicitations disant que notre équipe d'accueil à l'Immigration-Québec est vraiment très bien préparée à ce genre d'opération. Ils savent que, comme nous sommes plus proches de la population, nous sommes peut-être mieux préparés à faire ce genre d'accueil.

M. Ciaccia: Cela n'avait pas l'air d'être le cas à Granby, ce ne sont pas les nouvelles que nous avons eues.

M. Couture: A Granby, si vous me dites, à un moment donné...

M. Ciaccia: Les budgets fédéraux. Vous y êtes allés, je crois, mais le seul représentant que vous aviez était une personne qui faisait la traduction, un interprète. Tout le reste...

M. Couture: Non, les services d'accueil du ministère de l'Immigration ont organisé l'accueil à Granby. Nos services ont organisé cet accueil et ont coordonné les ressources communautaires. Au niveau du COFI, il n'y en a pas, mais quand il n'y a pas de COFI, nous faisons des contrats avec les commissions scolaires. A Granby, effectivement, nous avons fait un contrat avec la commission scolaire de la place — je ne sais pas comment elle s'appelle — pour dire: Vous allez donner des cours de français à ces réfugiés. Je retiens que, de fait, cela s'est fait vite. C'est comme en plein hiver, quand votre voisin, qui a une famille de six enfants, passe au feu, et qu'ils arrivent à trois heures de la nuit chez vous, vous n'êtes pas suffisamment informé pour bien les accueillir, mais ils viennent de passer au feu. Alors, c'est difficile de dire: On aurait aimé mieux être informé qu'il y aurait un feu à trois heures de la nuit chez mon voisin. L'arrivée des réfugiés...

M. Ciaccia: Non, ce n'est pas exactement la même situation. Vous aviez annoncé il y a trois mois que vous en acceptiez...

M. Couture: Non, c'est arrivé il y a une semaine.

M. Ciaccia:... un certain nombre. Il me semble que ce n'est pas quelque chose qui est arrivé à la dernière minute. Vous le saviez. C'est votre décision même d'accepter ces gens.

M. Couture: Oui, mais on ne sait jamais le nombre. C'est cela le problème, d'ailleurs, avec le fédéral actuellement. On ne sait jamais le volume prévu ou, du moins, retenu par le Québec. On dit: On en reçoit 3500 dans l'année qui vient, mais on ne le sait jamais du fédéral. Parfois, on le sait la veille par télex: Sur les 3500, on vous en envoie 150. On va en avoir 600 d'ici juin. C'est la raison pour laquelle je crois que ce serait peut-être intéressant que vous adressiez au fédéral ce genre de...

M. Ciaccia: Pour mettre en application et administrer l'entente Cullen-Couture...

M. Couture: Couture, c'est moi!

M. Ciaccia: Oui, c'est vous et je ne veux pas vous en enlever le mérite. Comment cela se fait-il que vous ayez moins d'effectif aujourd'hui et que vous obteniez plus de contrôle sur l'immigration? C'est difficile à comprendre.

M. Couture: Oui, c'est difficile à comprendre dans les chiffres globaux. Il faut dire une chose: II y en a trois de moins.

M. Ciaccia: Ils ne faisaient rien avant, ces gens?

M. Couture: On est là pour vous répondre, mon cher député, à travers le président. Il y en a trois de moins dans l'effectif du ministère, mais il y en a plus à l'accueil et il y en a plus dans les services afférents à l'entente. C'est ce qu'il faut retenir. Sans cela, ce serait évidemment incompréhensible. Je peux vous dire qu'il y en a sept de plus au service à l'étranger à l'extérieur; il y en a cinq de plus au recrutement, à l'établissement ici au Québec par rapport à l'entente, du personnel de plus; il y en a quatre de plus à l'adaptation. Il y en a un de plus à l'administration et à la recherche — mais cela, cela concerne moins l'entente — à l'accueil, on en a quatre de plus.

M. Ciaccia: Tous ces plus arrivent à moins deux!

M. Couture: A moins deux. C'est parce qu'il y a des transferts de personnel. Dans les COFI, à cause de la décision de vos amis...

M. Ciaccia: C'est comme le budget de votre ministre des Finances, il réduit les impôts et les taxes augmentent.

M. Couture: Je vais répondre en ce qui concerne mon ministère.

M. Ciaccia: Une sorte de logique ministérielle!

M. Couture: A cause de vos amis... Est-ce que j'ai la parole, M. le Président?

Le Président (M. Boucher): M. le ministre.

M. Couture: A cause de la décision de vos amis d'Ottawa, les libéraux fédéraux et le gouvernement libéral fédéral, qui ont coupé...

M. Ciaccia: C'est la faute du fédéral.

M. Couture: ... les subventions aux stagiaires de nos COFI, à un moment donné, nous avons dû prendre la relève, mais il y a eu une période où il y avait nécessairement moins d'étudiants qui venaient aux COFI et on prévoyait aussi qu'il y en aurait moins à cause de cette décision. Dans l'élément concernant la formation, il y a eu un certain nombre de postes qui ont été transférés à d'autres services.

M. Ciaccia: J'ai une autre question, si vous me permettez, avant que je cède la parole à mon collègue. Vous avez ouvert un bureau à Marseille, je crois.

M. Couture: Ah non! il n'est pas ouvert.

M. Ciaccia: Vous n'avez pas ouvert un bureau à Marseille?

M. Couture: II n'y en aura pas, non plus.

M. Ciaccia: Je vois dans la "direction des services à l'étranger, Marseille, deux postes".

M. Couture: Oui, c'est une prévision qui n'est pas encore réalisée.

M. Ciaccia: Ah! Est-ce que c'était votre intention d'en ouvrir un?

M. Couture: C'était notre intention de partager le personnel qui était à Paris, de prendre une partie du personnel qui était à Paris et de l'envoyer à Marseille.

M. Ciaccia: Est-ce qu'il y a un consulat canadien à Marseille?

M. Couture: Non, oui, il y a un consulat canadien. Je pensais que vous disiez un consulat québécois, non, il n'y en a pas. Pas encore.

M. Ciaccia: Vous prenez la même attitude avec les groupes ethniques? C'est ça qui me préoccupe. Dans votre esprit, vous l'avez déjà faite, la séparation.

M. Couture: Non, mais je pensais que vous faisiez des projections, sachant quel sera l'avenir du Québec.

M. Ciaccia: Non, parce que je prends les propos que vous aviez tenus à la dernière commission parlementaire. Vous disiez que c'était dans vos intentions d'utiliser les mêmes locaux ou les mêmes services que les consulats canadiens, parce que nous sommes encore un pays.

M. Couture: Ce sont des ententes...

M. Ciaccia: On est encore un pays...

M. Couture: De toute façon, c'est impossible...

M. Ciaccia: Oui, vous avez dit: C'est mon intention d'ouvrir des bureaux d'Immigration-Québec et de prendre avantage des ambassades canadiennes. A Marseille, je crois qu'il y a un consulat canadien. Avez-vous postulé auprès du gouvernement français pour avoir un bureau à part ou un bureau séparé?

M. Couture: En ce qui concerne Marseille, je dois vous dire que le dossier est en suspens, en négociation et, de toute façon, ce n'est pas possible pour nous, à l'étranger, d'ouvrir quelque bureau que ce soit sans une entente préalable avec le gouvernement fédéral pour les raisons que vous connaissez et ce genre d'entente ou de négociation se fait par le ministère des Affaires intergouvemementales.

M. Ciaccia: Mais, est-ce que vous avez essayé d'avoir un bureau séparé à Marseille et avez-vous demandé la permission au gouvernement français?

M. Couture: A Marseille, nous ne sommes même pas rendus là.

M. Ciaccia: Oui, mais, écoutez, vous n'êtes pas rendus là. Alors, comment puis-je interpréter dans votre cahier "direction des services à l'étranger, effectifs autorisés, 1978/79, Marseille, deux postes"? C'est autorisé.

M. Couture: Oui, mais c'est encore en négociation. C'est autorisé, mais ce n'est pas encore réalisé.

M. Ciaccia: Est-ce votre intention de partager les bureaux avec le consulat canadien?

M. Couture: Oui, c'est notre intention, et si Marseille ne réussit pas, on essaiera ailleurs.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le député de Mont-Royal. M. le député de Gaspé.

M. Le Moignan: M. le Président, j'aurais simplement quelques points à toucher.

Le ministre, cet après-midi, dans son introduction d'ouverture, a mentionné la préparation d'une politique de parrainage collectif pour les réfugiés. Etant donné cette préparation qui se dessine à l'horizon, je ne lui demande pas d'entrer dans tous les détails, mais est-ce qu'il pourrait nous donner, en général, quelques brides pour nous situer peut-être davantage?

M. Couture: Oui, je vais vous donner des brides. Dans nos règlements actuels, qui ont été publiés dans la Gazette officielle, il est prévu, d'ailleurs un peu à l'image des règlements fédéraux sur cette question, que des organismes sans but

lucratif ou cinq citoyens pourraient demander une accréditation pour parrainer des réfugiés. C'est public depuis la parution dans la Gazette officielle. C'est un parrainage qui rejoint un peu ce qui se passe au fédéral où, effectivement, des gens qui veulent prendre en charge pendant un an des réfugiés, peuvent, par une accréditation demandée au gouvernement fédéral, pour le moment, au gouvernement québécois, éventuellement, peuvent, dis-je, avec un accord avec le gouvernement fédéral demander eux-mêmes d'ajouter des réfugiés. C'est ça qui est intéressant. Cela déborde le volume prévu de réfugiés qu'on accepterait cette année, parce que les volumes d'immigration et les volumes de réfugiés sont décidés à l'avance, avant le commencement d'une année. (20 h 45)

En ce qui concerne 1979, pour le Québec, nous avons dit au fédéral, qui nous le demandait — c'est dans la loi fédérale, nous sommes obligés de leur donner un volume — que nous étions prêts à aller jusqu'à 20 000 immigrants et que nous étions prêts à accepter 3500 réfugiés. Le parrainage permettrait à des groupes, à des paroisses ou à des citoyens qui se réunissent de dire: Nous, on veut faire venir des réfugiés de tel et tel pays, on s'accrédite, on reçoit le feu vert du gouvernement et on prend en charge ces réfugiés pendant un an; on s'engage complètement, au niveau du logement, des dépenses, etc., à les prendre en charge.

M. Le Moignan: Parmi tous ces réfugiés, on a parlé tout à l'heure de l'accueil, on a mentionné Granby. Evidemment, le Québec défraie une partie et le fédéral en défraie une autre. Je crois qu'il y avait beaucoup d'orphelins là-dedans, si ma mémoire est bonne. Il n'y a pas d'orphelins qui sont venus au Québec, pas tellement?

M. Couture: Si vous voulez le savoir...

M. Le Moignan: Est-ce qu'il y avait des enfants orphelins?

M. Couture: Les cas d'orphelins parmi les réfugiés qui sont déjà arrivés ou qui devraient arriver sont assez peu nombreux. Quand ce sont des orphelins, il y a toujours la procédure d'adoption ou de prise en charge de certains Québécois avant qu'ils arrivent. Ce qui se passe bien souvent, c'est qu'il y a des mineurs qui n'ont plus leurs parents, mais qui ont leurs oncles, leurs tantes; ils ont encore le réseau familial qui les prend en charge. On pourrait dire qu'il y a environ une dizaine d'orphelins dans tous ceux qui sont arrivés.

M. Le Moignan: Parmi tous ces gens en détresse qui n'ont pas demandé à venir au Canada, qui auraient été prêts à aller n'importe où, là où un accueil leur serait réservé, vous avez constaté... Cela fait déjà quelques mois qu'ils sont ici, est-ce que leur moral est bon, est-ce que l'acclimatement... Est-ce qu'il y a des problèmes, est-ce qu'ils demandent à retourner chez eux?

Est-ce qu'ils sont placés, est-ce qu'ils ont trouvé des emplois?

M. Couture: Je dois dire que j'ai des contacts réguliers avec ces milieux, avec plusieurs groupes de réfugiés, et je suis assez surpris. Probablement par le fait — je pense que, humainement, cela se comprend — que ce sont des gens, surtout ceux du sud-est de l'Asie, qui ont tellement souffert, qui ont manqué de tellement de choses, l'arrivée dans un pays aussi libre où ils mangent trois fois par jour, où ils ont des vêtements, où ils ont un accueil du milieu, où ils sont pris en charge... Les gens sont vraiment impressionnés par cette nouvelle situation et ils s'adaptent très rapidement.

On dit même qu'à la première année de leur arrivée — ce sont les chiffres que j'ai — 70% d'entre eux trouvent un emploi. C'est quand même assez extraordinaire. Je pense que, humainement, cela se comprend et psychologiquement aussi; ce sont des gens qui ont été pendant des mois et des mois dans des camps de réfugiés, qui ont souffert beaucoup, ils ont acquis un entraînement physique et moral assez spécial, assez exceptionnel, ils ont beaucoup de détermination et de courage. Je pense que, facilement, ils sont prêts à faire beaucoup de sacrifices pour trouver une place au soleil et ils le font.

M. Le Moignan: Vous avez mentionné, dans vos prévisions pour l'année en cours, environ 20 000 immigrants et 3500 réfugiés. Ceci est fait d'après une étude parce qu'on sait qu'on peut en caser 20 000 et non pas 50 000. C'est un peu une question d'offre et de demande, dans un certain sens. Mais s'il arrivait une autre catastrophe — vous avez dit tout à l'heure que ce n'était pas limité — une invasion, les réfugiés pourraient aller à 5000, par exemple, à 7000 ou 8000, et cela se discute avec le fédéral, toujours.

M. Couture: C'est-à-dire que 20 000 immigrants, c'est le maximum, cela inclut les 3500. On prévoit à peu près 18 000 pour l'an prochain. On a dit au fédéral qu'on pourrait aller jusqu'à 20 000, selon les circonstances, mais que la capacité d'accueil du Québec, son absorption des immigrants et des réfugiés incluse, selon la conjoncture économique, permet d'affirmer que ça pourrait être acceptable, à cause de l'expérience passée.

Au fond, ce n'est pas un chiffre au hasard qu'on lance. Ce chiffre a été identifié à la suite de certaines études, de la connaissance de ces milieux, de l'expérience de gens qui ont vécu cette situation, de statistiques des années passées, de la capacité d'accueil des Québécois, de la possibilité d'intégration de certains groupes d'immigrants. C'est un peu une série de facteurs qui nous permettent de dire: Rendu à tel chiffre, c'est possible pour le Québec non seulement de les absorber facilement, mais aussi — c'est une chose que les Québécois méritent de connaître — que cela devienne un apport économique positif.

Par exemple l'année passée, je vais prendre l'année 1977-1978 — c'est très bref, mais je pense

que comme cela va être inscrit au journal des Débats pour les Québécois qui veulent s'informer là-dessus c'est intéressant — il y a eu 17 500 immigrants au Québec. Au point de vue de l'apport économique, cela a apporté $97 millions, une moyenne de $5400 par personne. Chez les investisseurs, cela a donné $39 millions; on pourrait ajouter $30 millions, parce que ces investisseurs ont emprunté $30 millions pour leurs investissements, donc cela totalise $70 millions. Il y a eu création de 1116 emplois et une création indirecte d'un demi-emploi par travailleur, en sachant qu'il y en a à peu près 70% qui trouvent un emploi.

Je pense que c'est intéressant de dire que sur une année où il y a eu 17 500 immigrants au Québec, il y a quand même pas mal de millions de dollars qui sont entrés par cette immigration. 17 500 consommateurs de plus, cela fait marcher davantage la machine économique, et, par le fait que 70% de ces immigrants se sont trouvé un emploi, à cause d'une bonne sélection, à cause d'une bonne connaissance du marché du travail, ils ont contribué largement, je pense que tout le monde est d'accord en commission pour le dire — ceux qui ont suivi un peu l'immigration — globalement, c'est toujours un facteur positif.

Il faut le répéter souvent: l'entrée des immigrants, des réfugiés, quand on regarde ce qu'ils deviennent une fois qu'ils sont entrés, n'est pas une charge à la collectivité. Au contraire, c'est un apport économique, c'est un apport humain et c'est un apport culturel.

M. Le Moignan: De tous ces immigrants, vous avez touché l'exploitation, comme on la faisait jadis, en leur donnant des salaires inférieurs. Est-ce qu'il y a des normes de surveillance pour que ces immigrants reçoivent au moins un salaire normal, décent, qui leur permette de vivre ou est-ce qu'on peut encore les exploiter en les payant sous la table?

M. Couture: Oui, on peut encore les exploiter. On peut exploiter tout le monde d'ailleurs, pas seulement les immigrants même les Québécois. Il y a la loi des normes du travail qui est heureusement passée par notre gouvernement, qui apporte des améliorations à ce titre. Il y a la nouvelle commission des normes du travail qui aura un personnel supplémentaire pour surveiller l'application de ces lois. Les immigrants qui arrivent au Québec sont soumis à toutes les lois du Québec, donc ils sont aussi fragiles que les autres Québécois et, plus fragiles, parce qu'ils sont moins bien équipés évidemment au niveau de la langue, au niveau des connaissances du milieu.

Mais c'est mon intention, surtout avec la création du poste de secrétaire délégué aux travailleurs immigrants et aux contacts qu'on a avec toutes les centrales et tous les organismes, de surveiller de très près afin que les travailleurs immigrants aient les mêmes conditions de travail que les autres Québécois et restent à l'écart des exploitations possibles. Il y en aura toujours. Là-dessus, quand même, on essaiera d'être vigilant.

M. Le Moignan: Pour en revenir aux statistiques, sur 20 000, par exemple, qui peuvent entrer au pays, votre sélection doit être assez rigoureuse, assez sévère. Est-ce que vous en refusez beaucoup parmi ceux qui demandent à entrer au pays? Avez-vous des statistiques ou bien si cela se fait de concert avec le fédéral ou c'est le provincial?

M. Couture: Dans ce qu'on pourrait appeler le volume de demandes d'immigrants pour le territoire québécois qui pouvait aller jusqu'à 100 000, évidemment on en refuse au delà de... il y a 50% qui ne passent pas la présélection, c'est-à-dire qui n'ont pas les points de base pour avoir droit à une entrevue. C'est probablement le tiers qui est accepté au Québec, de toutes les demandes.

M. Le Moignan: J'aurais encore deux questions. Quand vous parlez d'activités parapédagogi-ques, il y a un budget pour ça, ça comprend en même temps les activités sociales d'intégration, de COFI, d'adaptation, c'est une enveloppe globale qui résume un peu l'ensemble de leur vie.

M. Couture: C'est ça. Je ne sais pas à quel élément vous faites allusion directement, mais dans les activités d'adaptation, dans nos COFI on a de l'animation socio-culturelle. Il y a une série d'activités qui sont organisées à travers notre ministère pour favoriser les contacts entre nouveaux arrivants et québécois de vieille souche, ça se fait par les COFI. Il y a aussi une série de subventions qui sont données à des groupes qui font ces activités-là.

M. Le Moignan: Là où il n'y a pas de COFI par exemple.

M. Couture: Là où il n'y a pas de COFI évidemment.

M. Le Moignan: J'aurais une dernière question. Vous avez à peu près dix ou douze postes de services à l'étranger. J'ai cru comprendre que vous les logez dans des ambassades canadiennes la plupart du temps? Vous n'avez pas de maison du Québec à certains endroits où vous avez vos fonctionnaires?

M. Couture: Jusqu'à nouvel ordre, quand il y a une délégation générale du Québec, ils logent dans les délégations générales du Québec. Ailleurs, quand il n'y a pas de présence du gouvernement du Québec par une délégation générale, ces gens logent dans les ambassades canadiennes avec une identification québécoise. A l'avenir, nous sommes en train de trouver un protocole d'entente — ça va se faire dans certains cas — où l'Immigration-Québec sera à part de l'ambassade canadienne, mais identifiée comme telle, en collaboration étroite avec l'ambassade du Canada.

M. Le Moignan: Une dernière question. Vous avez fait un choix de pays. Pourquoi n'avez-vous pas choisi dix autres pays où vous auriez aimé

attirer des immigrants? Est-ce qu'il y a une raison spéciale pour laquelle on va dans tel et tel pays, alors qu'il y a peut-être un autre pays plus pauvre où les immigrants pourraient nous apporter beaucoup? Quels sont les critères qui déterminent...

M. Couture: II y a deux critères principaux. D'une part, le flux des demandes, c'est-à-dire qu'il faut quand même répondre aux demandes. Dans les pays occidentaux, les pays d'Europe, il y a beaucoup de demandes d'immigration et ne serait-ce que pour répondre à la demande, je pense que notre responsabilité est d'avoir une présence là.

Le deuxième critère, c'est le choix politique ou le choix culturel du Québec en matière d'immigration. C'est une façon aussi d'attirer les immigrants ou de recruter des immigrants en étant présent dans ces pays-là. C'est la raison pour laquelle, entre autres, j'ai décidé d'ouvrir à Lisbonne parce que l'immigration portugaise était bonne pour le Québec à mon avis. D'une part, il y a beaucoup de demandes et, d'autre part, ce sont des latins qui apprennent facilement le français, qui s'adaptent très bien à notre collectivité. Ces choix-là sont perçus comme ça. A Hong Kong, on a ouvert pour tout le sud-est asiatique, parce qu'il y a énormément de demandes, qu'il y a tout le problème des réfugiés actuellement et c'est toute l'Asie.

On a essayé d'être présent dans toutes les parties du monde, avec possibilité d'effectuer des missions là où on n'est pas présent rapidement et facilement.

M. Le Moignan: ... l'Allemagne, mais je pense qu'il y a tellement d'ouvrage chez eux qu'ils n'ont pas besoin de chercher des débouchés à l'étranger.

M. Couture: On a un bureau à Bruxelles qui couvre l'Allemagne.

M. Le Moignan: II couvre l'Allemagne. Merci.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le député de Gaspé. Est-ce qu'il y a d'autres questions? M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: M. le Président, l'année dernière, lors de la commission sur l'étude des crédits pour le ministère de l'Immigration, je crois que vous aviez dit qu'une étude sur l'exode des immigrants avait été commandée. Premièrement, je ne pense pas qu'il y ait un exode d'immigrants au Québec, quoique dans les 72 000, je ne dis pas qu'il n'y a pas d'immigrants, mais je n'ai pas l'impression qu'il y en a beaucoup, je n'aime pas même donner l'impression qu'il y a un exode d'immigrants ou que le gouvernement donne cette impression. Avez-vous complété cette étude et si oui, est-ce que vous pouvez la rendre publique?

M. Couture: Elle est sous presse actuellement. Ce sera connu rapidement.

M. Ciaccia: Vous n'êtes pas en mesure d'en dévoiler...

M. Couture: Non, je n'ai pas eu le contenu encore. (21 heures)

M. Ciaccia: Dans la campagne de rapprochement du Québec, vous avez annoncé un programme de rapprochement entre les groupes ethniques et la société québécoise. Est-ce que la plupart des montants que vous avez dans cette campagne sont dépensés parmi les groupes ethniques? Vous devez avoir certains fonds pour cette campagne de rapprochement. Est-ce que la majorité de ces fonds sont dépensés dans les communautés ethniques?

M. Couture: La campagne de rapprochement a été essentiellement faite à travers nos COFI. Par extension, évidemment, tous les groupes qui reçoivent des subventions du ministère — et il y en a beaucoup — font du rapprochement. Ils en font continuellement. On leur donne des subventions pour cela. Mais la campagne — qui a été bien identifiée comme opération rapprochement — du ministère du Québec, c'est fait par notre ministère et par les COFI.

M. Ciaccia: M me semblerait que les groupes ethniques, les groupes d'immigrants, veulent se rapprocher, il n'y a pas de problème. Je ne pense pas qu'il y ait de réticence de leur part à se rapprocher. Même les plaintes sont que, dans plusieurs cas, il n'y a pas d'égalité entre eux et les autres groupes de notre société. Ce ne sont pas eux qui ne veulent pas se rapprocher. Ils le voudraient bien. C'est le reste de la société, peut-être, qui ne comprend pas ce qui se passe dans ces groupes ethniques, dans ces groupes d'immigrants, et qui ne connaissent pas quelques-unes des données que vous venez de citer, à savoir que, sur 17 000 immigrants, le nombre d'emplois qui sont créés, le montant des investissements...

Ne croyez-vous pas que, pour que ce soit vraiment effectif, une campagne de recrutement, ce n'est pas au niveau des groupes ethniques qu'il faut dépenser cet argent, mais dans une campagne dans le reste de la société? Il faudrait que les montants soient dépensés pour sensibiliser notre société au rôle et à l'importance de tout ce que les groupes d'immigrants peuvent apporter au Québec. Par exemple, je me réfère à une annonce que vous avez placée dans le journal...

M. Couture: Très belle d'ailleurs.

M. Ciaccia: Luigi Veneziano, Comte, assisté de Pierre Simard. Je trouve que c'est très bien, parce que cela donne un message à la population. C'est la population qui a besoin de ce message. Ce ne sont pas les groupes ethniques. Est-ce que vous pourriez, dans vos budgets, au lieu de dépenser de l'argent pour ce programme de rapprochement parmi les groupes ethniques — je ne dis pas que les groupes ethniques n'ont pas

besoin de fonds, ce n'est pas cela que je dis — essayer de mettre plus l'accent sur la sensibilisation du reste de la société? Et, en plus, au lieu de les passer seulement dans les journaux — parce que, de moins en moins, il semble que les media électroniques ont pris plus d'importance dans la population que les journaux — est-ce que vous pourriez accentuer ces messages non seulement dans les journaux, mais également dans les media électroniques?

M. Couture: M. le Président, je suis très heureux d'entendre le député de Mont-Royal. Je viens d'avoir un appui exceptionnel du député de Mont-Royal à l'élément 3, pour l'année à venir, c'est-à-dire la grande campagne de publicité que nous allons organiser dans les media électroniques, justement pour rejoindre les objectifs bien énoncés par le député de Mont-Royal.

En effet, je pense qu'il faut aller un peu plus loin. Il faut sensibiliser les Québécois à l'importance de l'immigration, à son apport positif à la société québécoise. C'est l'objet de cette campagne de publicité qui sera nettement axée sur la sensibilisation de toute la population québécoise — et on sait à quel point les media électroniques ont de l'influence, parce que c'est vu par tout le monde — sur l'importance de l'immigration, de son apport parmi nous et de la contribution qu'elle apporte à la société québécoise.

Je remercie avec enthousiasme le député de Mont-Royal de ses commentaires, parce qu'il appuie... Je pense que l'élément 3 vient d'être accepté spontanément par le député de Mont-Royal. C'est un peu dans ce sens-là que ces montants sont affectés.

M. Ciaccia: Oui, je vous appuie sûrement pour des programmes que je crois franchement dans l'intérêt non seulement des immigrants et des groupes ethniques, mais aussi dans l'intérêt de la société en général, parce que, si on a des préjugés et si on n'a pas vraiment un aperçu de ce qui se passe... C'est une nécessité. On a vécu, on a grandi. Notre prospérité est due partiellement au fait qu'on a obtenu, qu'on a pu obtenir de l'immigration au Québec. Si on coupe cela, je pense que toute la société va en souffrir.

Malheureusement, ce ne sont pas tous les Québécois qui comprennent cela, parce que, pour une raison ou pour une autre, ils n'ont pas tous eu l'occasion d'avoir la vraie information sur l'immigration au Québec et ce que cela peut représenter. Je n'ai aucune hésitation à vous appuyer dans des programmes qui ont du bon sens. On fait opposition seulement quand on voit que vous allez trop ioin et que ce n'est vraiment pas dans l'intérêt de toute la population.

D'autre part, je pense qu'il y aurait moins de tendance... Je vais aussi être assez franc avec vous. Quand on dépense de l'argent, on a un peu de questions à se poser. Dans le contexte actuel, quand vous dépensez de l'argent dans les milieux ethniques, dans les milieux immigrants, on se pose toujours la question: Quand le faites-vous pour des fins politiques et quand le faites-vous vraiment... Je pense qu'honnêtement on peut se poser cette question-là. Je ne connais pas la réponse pour chaque dollar que vous dépensez; lequel sera politique et lequel sera vraiment pour faire bénéficier les groupes qui le reçoivent? Cette tentation-là sera diminuée en dépensant de l'argent pour sensibiliser la population en général et je pense qu'il y a un grand besoin de le faire.

M. Couture: Je pense que la meilleure réponse que je peux vous donner à cette préoccupation... Si vous étiez de ce côté-ci, moi de l'autre côté, je poserais peut-être le même genre de question. La meilleure réponse que je peux vous apporter, c'est celle-ci: C'est que, au ministère de l'Immigration, c'est tellement important pour nous de conserver la confiance des communautés ethniques, la crédibilité du ministère. On est le gouvernement de tout le monde et c'est le ministère de tout le monde, quel que soit le choix qui a été fait le 15 novembre 1976. Je pense qu'on est tous d'accord là-dessus. C'est tellement important pour nous, si on veut faire un travail efficace, de conserver...

M. Ciaccia: Je suis heureux d'entendre que vous êtes le ministère de tout le monde, parce que, parfois, j'ai l'impression que vous n'êtes pas le gouvernement de tout le monde. Je suis heureux de voir que vous voulez être le ministère de tout le monde.

M. Couture: C'est aussi le gouvernement de tout le monde. Regardez toutes les mesures sociales, les mesures à tous les niveaux qui ont été prises depuis le 15 novembre 1976 par ce gouvernement dans tous les ministères. Les Québécois le disent. C'est tellement vrai que, dans Jean-Talon et dans Argenteuil, il y a une grosse majorité de Québécois qui sont satisfaits du gouvernement, parce qu'ils s'identifient à ce gouvernement-là qui est leur instrument. Ils savent que c'est leur instrument de développement.

M. Ciaccia: On verra mardi, on verra lundi soir.

M. Le Moignan: 18 heures.

M. Couture: Pour nous, au ministère de l'Immigration, la façon d'être efficace et d'avoir de bons contacts avec les communautés ethniques, de faire un bon travail avec elles, c'est de garder cette confiance-là. Je pense que, jusqu'à nouvel ordre, les milieux, là-dessus, sont vigilants et peuvent... On n'a reçu aucun reproche à ce point de vue-là, à savoir que nous avions de sombres desseins partisans dans nos interventions.

M. Ciaccia: Excusez-moi, je n'ai pas exactement entendu votre dernière phrase.

M. Couture: De sombres desseins...

M. Ciaccia: Non, avant cela. Vous avez reçu très peu de...

M. Couture: Très peu de critiques. J'ai dit très peu. C'est un euphémisme, je n'en ai pas reçu du tout. On n'a pas eu...

M. Ciaccia: Vous ne les entendez pas, ne dites pas que vous ne les avez pas reçues.

M. Couture: Evidemment, si vous fréquentez seulement le Club de réforme, peut-être que...

M. Ciaccia: Non, je parle de Montréal, je ne parle pas du Club de réforme à Québec.

Sur un autre sujet, vous avez des quotas établis pour le nombre d'immigrants que vous allez admettre au Québec l'année prochaine. Pour déterminer ces quotas, je crois bien que vous devez étudier les besoins économiques, les besoins démographiques. Comment faites-vous exactement pour établir qu'on va avoir 20 000 personnes, qu'on va en avoir 17 000? Comment arrivez-vous à ce chiffre-là?

M. Couture: La question doit aussi se poser au niveau canadien, parce que le gouvernement canadien, depuis des années, établit des quotas. Il ne faut pas se le cacher. Il y a quand même une part un peu inconnue dans notre évaluation, c'est-à-dire qu'on se base beaucoup sur des statistiques. On se base sur la situation économique. On se base sur le marché du travail. On arrive à un chiffre qui est plus ou moins vrai, mais que l'usage nous permet de corriger, si nécessaire. C'est tellement vrai que, pour l'an prochain, j'ai dit 18 000 en espérant 20 000. C'est possible qu'en cours de route... Faisons l'hypothèse que la situation se dégrade tellement que je corrige mon chiffre, que je dise: Ce n'est pas possible d'aller jusque-là. Ou bien que la situation s'améliore tellement, comme je le prévois, qu'on puisse dire: Je pense qu'on pourrait en accepter plus, parce que le marché du travail s'élargit, etc. Selon les demandes qu'on a à l'étranger, cela coïncide avec les offres qu'on a ici. Un chiffre qui est donné un an d'avance est toujours éclairé par des situations passées, par une situation donnée à ce moment, qui peut être ajusté en cours de route.

M. Ciaccia: Sur un autre sujet, est-ce que la question des infirmières immigrantes est résolue?

M. Couture: Pourquoi? Est-ce qu'il y a un problème chez les infirmières immigrantes?

M. Ciaccia: Ne me dites pas qu'il va falloir vous mettre au courant de votre dossier. Il y avait un problème, et je veux savoir s'il y en a encore un. Il y avait un problème quant aux tests linguistiques, à l'assouplissement de l'Office de la langue française. On avait demandé la possibilité de faire des stages. L'autre problème, à partir de leur demande, elles devaient attendre 90 jours...

M. Couture: Oui, je sais ce à quoi vous faites allusion. Je pensais que vous parliez de celles qui arriveraient, qui étaient sélectionnées à l'étranger.

Pour répondre un peu à ce problème, nous avons mis sur pied des cours sur mesure pour les infirmières immigrantes en sachant — c'est peut-être ce problème que vous soulevez — que beaucoup d'entre elles échouaient à leurs examens et il fallait beaucoup de temps avant qu'elles ne soient acceptées par l'Office de la langue française. Nous avons organisé des cours sur mesure. Jusqu'à nouvel ordre, à moins qu'on me prouve le contraire, on dirait que la situation s'est améliorée considérablement. Semble-t-il que notre intervention dans ce domaine a aidé au moins à résoudre un certain nombre de problèmes. Il y a des cours sur mesure. Il n'y en avait pas avant. Là, on a vu que pour ce groupe de clientèle... On fait cela avec bien d'autres clientèles aussi.

Aux COFI, on prend un groupe de gens spécialisés et on leur prépare un cours sur mesure pour les aider, par un vocabulaire donné, par des mots techniques, à passer l'examen.

M. Ciaccia: Alors, il n'y a pas eu d'assouplissement de l'examen.

M. Couture: C'est...

M. Ciaccia: Vous essayez des rencontres...

M. Couture: On n'a pas besoin d'assouplir l'examen si elles sont mieux préparées à le passer.

M. Ciaccia: Cela dépend des intentions des parties. C'est une autre question sur la liste des entrepreneurs qui exploitent les travailleurs immigrants. Je peux comprendre par votre approche que vous ne voulez pas agir d'une façon irresponsable. Je peux comprendre cela, donner une liste...

M. Couture: Faire un show.

M. Ciaccia: Oui. Parfois, la liste est exacte ou non. Il faudrait toujours donner l'occasion de corriger la situation. Pour donner cette occasion de corriger la situation, est-ce que vous pouvez donner un délai et dire: Ecoutez, j'ai la liste? Si la situation n'est pas corrigée avant telle date, je vais publier la liste, parce qu'autrement, il n'y a pas de pression. Ces entrepreneurs peuvent croire que c'est de la publicité qui est faite maintenant et le ministre va oublier cela. Est-ce que vous avez l'intention de dire: Ecoutez, je veux que la situation soit rectifiée dans tant de jours ou de mois. Je vais faire une enquête à la fin. Je vais demander des renseignements. Si ce n'est pas rectifié, je vais publier cette liste. (21 h 15)

M. Couture: Je pense que la menace existe, c'est une épée de Damoclès sur certaines entreprises et il y a des entrepreneurs qui ont tendance à me croire sur parole, parce qu'ils ont constaté dans le passé que j'étais plutôt un homme de parole.

M. Ciaccia: Mais vous n'avez pas fixé de délai et dit: Ecoutez, si...

M. Couture: Non, ce n'est pas nécessaire. On leur donne la possibilité de se corriger avec une intervention qu'on met en place.

M. Ciaccia: M. le Président, je n'ai plus d'autres questions à poser au ministre. J'espère qu'il va prendre en considération et qu'il va prendre au sérieux les remarques que nous avons faites. J'avais dit au début de mon intervention qu'il faisait de bonnes "public relations", c'est un bon publiciste pour le ministère, mais vous allez être d'accord avec moi que les groupes d'immigrants, les groupes ethniques et les minorités ont besoin de plus qu'un publiciste au Québec. Ils ont besoin d'actions concrètes et j'espère que le gouvernement va appuyer cela et que vous allez pouvoir convaincre votre gouvernement d'agir dans tous les différents ministères, Fonction publique, concernant toutes les différentes mesures que vous proposez, parce que je crois que c'est très important pour les immigrants et pour toute notre société.

Le Président (M. Boucher): Merci. M. le ministre.

M. Couture: M. le Président, un dernier mot. Je voudrais remercier les membres de cette commission de leur participation active et positive à ces travaux et je me réjouis de cet apport. Je pense que, dans notre démocratie, il est essentiel, important d'écouter les avis de toutes les tendances, de tous les groupements, de tous les partis politiques, et ça nous aide, peut-être, d'une cer- taine façon à améliorer nos programmes.

M. le Président, je suis heureux de terminer cette étude des crédits en disant que c'est notre intention ferme de nous orienter pour l'année prochaine et les années suivantes à donner aux immigrants et aux milieux ethniques le maximum de services et la meilleure des qualités dans ces services.

M. Ciaccia: Ne faites pas de propagande dans ces milieux, parce qu'on va vous suivre, je vous l'assure. On va vous suivre de près.

M. Couture: Je sais que vous me suivez. Vous êtes toujours derrière moi dans les réunions.

Le Président (M. Boucher): Alors...

M. Couture: On est invité par les mêmes groupes, que voulez-vous?

Adoption du programme

Le Président (M. Boucher): Le programme 1, éléments 1, 2, 3, du ministère de l'Immigration est-il adopté?

Des Voix: Adopté.

Le Président (M. Boucher): Adopté. Les crédits du ministère de l'Immigration sont donc adoptés. Je prie le rapporteur d'en faire rapport au nom des membres de la commission.

La commission ajourne ses travaux sine die.

Fin de la séance à 21 h 18

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