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Version finale

31e législature, 4e session
(6 mars 1979 au 18 juin 1980)

Le mercredi 6 juin 1979 - Vol. 21 N° 117

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude du programme de redressement industriel de Marine Industrie Ltée


Journal des débats

 

Etude du programme de redressement industriel

de Marine Industrie Ltée

(Onze heures cinquante minutes)

Le Président (M. Boucher): A l'ordre, messieurs!

La commission élue permanente de l'industrie et du commerce est réunie, ce matin, pour faire l'étude du programme de redressement industriel de Marine Industrie Ltée.

Les membres de la commission sont: MM. Dubois (Huntingdon), Gosselin (Sherbrooke), Grégoire (Frontenac), Martel (Richelieu) remplace Mme Leblanc-Bantey (Iles-de-la-Madeleine), Lefebvre (Viau), Ouellette (Beauce-Nord), Raynauld (Outremont), Scowen (Notre-Dame-de-Grâce), Shaw (Pointe-Claire), Tremblay (Gouin).

Les intervenants sont: MM. Gagnon (Champlain), Godin (Mercier), Biron (Lotbinière) remplace Goulet (Bellechasse), Landry (Fabre), Marchand (Laurier), Michaud (Laprairie), Perron (Duplessis), Samson (Rouyn-Noranda), Saint-Germain (Jacques-Cartier).

Dans l'ordre, les personnes convoquées sont M. Jean-Roch Brisson, président-directeur général de Marine Industrie, M. John Dinsrnore, vice-président du conseil d'administration de Marine Industrie, M. Richard Gagné, président de l'Union des employés de chantiers de Marine Industrie, M. Pierre DeCarufel, président du syndicat des employés de bureau de Marine Industrie, M. Guy Coulombe, président et chef de la direction de la SGF, M. Jacques Paquin, vice-président à l'exploitation et trésorier de la SGF, et Michel Plessis-Bélair, vice-président au développement de l'entreprise de la SGF. Est-ce que tous ces messieurs que je viens d'énumérer sont présents ce matin? Si vous voulez prendre place à la table centrale.

Nous allons commencer, M. le ministre, pour les... Est-ce qu'il y a une proposition pour le rapporteur de la commission? M. le député de Richelieu? M. Martel, rapporteur. Est-ce qu'il y a consentement?

M. Scowen: Consentement.

Le Président (M. Boucher): M. le ministre.

M. Scowen: M. le Président...

Le Président (M. Boucher): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: Je veux poser seulement une question au ministre, avant qu'il commence. Dans son préambule, je me demande si le ministre pourrait nous dire où ce rapport est rendu. Si je me rappelle bien, c'est un rapport qui a été demandé lors des débats sur le projet de loi, l'an passé, concernant la SGF. La compagnie avait accepté de faire ce plan de redressement et de le rendre public avant le mois de juin. Je veux simplement savoir s'il s'agit d'un rapport qui a été approuvé et par le "conseil des ministres" de Marine Industrie, et par le "conseil des ministres" de la SGF, et par le Conseil des ministres du gouvernement. A quel stade ce rapport en est-il actuellement, simplement pour nous renseigner?

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. M. le ministre.

M. Tremblay: Merci beaucoup, M. le Président. Je voudrais tout d'abord souhaiter la bienvenue aux dirigeants de la Société générale de financement, de même qu'à ceux de Marine Industrie, tout en souhaitant, en même temps, la plus cordiale bienvenue au président des employés horaires de Marine Industrie, M. Gagné, et au président du syndicat des employés de bureau, M. Pierre DeCarufel.

M. le Président, la raison pour laquelle la commission de l'industrie et du commerce se réunit ce matin, c'est afin de poursuivre, jusqu'à un certain point, les interrogations que nous avions entreprises au mois de décembre dernier, lorsque, à la suite du dépôt et de l'adoption d'un projet de loi, le projet de loi 108 qui modifiait la charte de la Société générale de financement, il a été nécessaire d'intervenir massivement au plan financier pour sauver Marine Industrie d'une faillite qui était imminente à l'époque, à cause principalement d'un désastre financier découlant de la non-vente d'une production de six bateaux que nous appelions bateaux panaméens.

L'article 6 de la loi 108 qui a été adoptée prévoyait, en plus de tous les montants votés par l'Assemblée nationale, que la Société générale de financement, en collaboration avec la société Marine Industrie, devait préparer un plan de conversion, un plan de redressement industriel et que ce plan devait être approuvé par le gouvernement et déposé à l'Assemblée nationale au plus tard le 1er juin 1979.

M. le Président, je voudrais manifester ma reconnaissance à l'endroit de la direction des deux sociétés, de même qu'au syndicat, qui ont contribué à la réflexion intérieure de ces entreprises pour avoir produit à temps un plan de relance de Marine Industrie qui est, à mon avis, extrêmement bien fait.

Nous sommes donc ici pour connaître, d'une part — du moins les membres de la commission et le public en général, parce que le document a été déposé à l'Assemblée nationale le 1er juin — plus en détail les grandes lignes de ce plan et quelles sont les répercussions de l'adoption et de l'application de ce plan de redressement au cours des cinq prochaines années, à l'intérieur de la société Marine Industrie. Si vous me permettez, j'aimerais m'adresser au président de la Société générale de financement, lui demander, compte tenu de la complexité de ce plan, d'en faire un résumé et de situer les grands paramètres du plan de redressement de Marine Industrie.

M. Scowen: M. le Président...

Le Président (M. Boucher): Le député de Notre-Dame-de-G race.

M. Scowen:... simplement pour confirmation, est-ce que je peux comprendre que le plan, comme écrit, a déjà été adopté par le Conseil des ministres?

M. Tremblay: M. le Président, j'ai mentionné que la loi prévoyait ceci: "Une fois approuvé par le gouvernement, le plan de conversion doit être déposé à l'Assemblée nationale au plus tard le 1er juin 1979." Ceci a été fait. La loi ne prévoyait pas de commission parlementaire, mais nous avons cru qu'il était d'intérêt public d'avoir cette commission parlementaire. C'est la raison pour laquelle nous sommes ici ce matin. C'est une commission parlementaire sur le plan de redressement de Marine Industrie, tel que prévu dans la loi.

M. Scowen: C'est approuvé?

M. Tremblay: Est-ce que je dois le répéter six ou sept fois? Il est évident que c'est un plan qui a été approuvé par le gouvernement et déposé à l'Assemblée nationale.

Le Président (M. Boucher): Merci. M. Coulombe, je vous cède la parole.

Résumé du plan de redressement industriel de Marine

M. Coulombe (Guy): Merci, M. le Président. En ce qui concerne le plan de redressement, il a été approuvé, présenté aux deux conseils d'administration de la SGF et de Marine Industrie, formellement approuvé et formellement recommandé au gouvernement.

Je crois que la meilleure façon de le résumer, ce serait peut-être le document...

Le Président (M. Boucher): Je m'excuse, M. Coulombe. Pourriez-vous approcher votre micro, s'il vous plaît?

M. Coulombe: Oui. Je crois que le meilleur moyen de résumer le plan de redressement, c'est de se situer, dans le texte qui a été déposé, aux alentours de la page 36, où on voit que les cinq volets principaux du plan de redressement supposent une expansion importante des activités hydro-électriques, une modernisation des installations de production de wagons, le maintien des activités de construction navale, la prospection de nouvelles séries de produits ainsi que la réorganisation de l'entreprise.

Il s'agit donc des cinq volets principaux du plan de redressement. Ce plan se divise essentiellement en deux phases: La première phase, s'é-tendant d'aujourd'hui jusqu'à la fin de 1980, suppose des investissements assez importants, de l'ordre de $5 millions à $7 millions, dans les divisions hydro-électriques et la division wagons.

La deuxième phase prévoit des investissements beaucoup plus considérables qui peuvent varier. Cette variation va dépendre essentiellement de ce qui va se passer au niveau de la construction navale durant la première phase. Est-ce qu'on va assister à une reprise du marché? Est-ce que l'activité va reprendre normalement, à un niveau souhaité? Selon cette orientation, les investissements pourront se faire dans la deuxième phase. C'est pour cela qu'on a mis des investissements qui peuvent varier. Cela va dépendre de ce qui va se passer dans la première phase.

Il y a aussi l'établissement par la SGF d'un budget spécial de recherche de nouveaux produits de $2 millions, qui va être mis à la disposition de Marine Industrie. (12 heures)

Ce plan de redressement suppose aussi qu'en ce qui concerne la main-d'oeuvre, il va y avoir certaines mises à pied qui devront être faites entre septembre 1979 et septembre 1980, ces mises à pied pouvant varier de 600 à 1000, selon les contrats dans la division wagons qui sont actuellement en négociation. Essentiellement, l'objectif fondamental de ce plan, c'est d'assurer la rentabilité et l'efficacité de Marine Industrie. Notre postulat de base, c'est que ce plan de redressement devra produire ses fruits de telle sorte que les investissements qui sont prévus puissent être produits par l'entreprise ou du moins dans le cadre du groupe SGF. C'est pour cette raison que les investissements qui sont prévus sont donc dépendants de certains facteurs qui restent à régler en 1979. Un des principaux facteurs, c'est évidemment la vente ou la disposition d'une façon ou de l'autre des six bateaux dont trois sont actuellement en contrat de gestion et trois autres pour lesquels on poursuit des négociations avec l'armateur avec qui on est lié par un contrat.

C'est absolument essentiel de comprendre que, si cette condition ne se réalise pas, le plan de redressement devra un peu glisser dans le temps, c'est-à-dire la réalisation du plan devra être remise en cause, si la situation financière à cause de l'existence de ces six bateaux ne se résorbe pas.

M. le Président, en résumé, c'est l'essentiel du plan. Je voudrais souligner aussi que ce plan a été fait avec la collaboration des cadres de la SGF et ceux de Marine. C'est le produit de plusieurs mois de travaux assez intenses. De plus, on a eu la collaboration des syndicats. Un comité consultatif a été mis sur pied depuis le mois de janvier. Il s'est réuni régulièrement et les syndicats ont été mis au courant des travaux de base qui sont quand même assez considérables et dont vous retrouvez la liste en annexe du document qu'on vous a soumis. Ces travaux-là sont essentiellement le fruit du travail interne à Marine Industrie. Evidemment, il y a eu quelques consultants extérieurs qui ont été engagés, mais, fondamentalement, c'est le travail des cadres de Marine Industrie qui a conduit à ce plan que nous déposons et à préciser son contenu.

Le Président (M. Boucher): M. le ministre. Merci, M. Coulombe.

M. Tremblay: M. le Président, j'aimerais demander au président de la SGF d'entrer un peu plus dans le détail sur les deux phases de mise en application du plan de redressement. Il y a deux phases. Il y a une phase à court terme qui va jusqu'à la fin de 1980 et une autre qui va jusqu'en 1984. J'aimerais qu'il nous dise combien de fonds Marine Industrie va investir à chacune de ces étapes et quelle sera l'impact sur chacune des divisions de Marine Industrie en termes de croissance et en termes d'emplois. Parce qu'il s'agit de paramètres qu'il nous faudrait, je pense, avoir en tête pour discuter intelligemment de toute la question.

M. Coulombe: Dans la première phase, si on s'en tient à la première phase, les investissements sont de l'ordre de $5 500 000 pour la division hydro-électrique et cela, essentiellement pour respecter les contrats en main à Marine Industrie. Il faut mentionner que Marine a au-delà de $325 millions ou $350 millions de contrats en carnet dans la section division hydro-électrique. Il y a des investissements qui sont absolument nécessaires pour respecter ces contrats. Ce sont des investissements à court terme.

Pour la division des wagons, il s'agit d'investissements d'environ $1 500 000 dans la première phase. Nous sommes actuellement — on pourra peut-être en discuter plus à fond tantôt — dans, je ne dirais pas un boom, mais dans une phase extrêmement intéressante concernant le marché des wagons. Marine doit moderniser son équipement pour faire face à ces commandes qui sont extrêmement intéressantes à l'heure actuelle. Marine entend bien profiter au maximum de cette demande énorme, qui est surtout une demande américaine, d'ailleurs. Pour le moment, elle entend moderniser son équipement pour vraiment profiter de cette phase extrêmement intéressante dans la construction de wagons.

En ce qui concerne la division navale, Marine a actuellement six bateaux en construction, quatre cargos polonais dont le premier doit être livré dans quelques semaines, à la fin d'août, et le dernier doit être livré vers le mois de juin 1980. En plus, il y a deux traversiers pour la Société des traversiers du Québec, qui doivent être terminés en février et mars. A part ces six bateaux, Marine n'a pas actuellement de contrat de construction de bateaux. Son carnet de commandes est vide, pour des raisons qui sont longuement expliquées dans le document qui a été déposé.

Premièrement, le marché international — je pense que c'est reconnu par tout le monde — s'est affaissé de façon tragique. Quant au marché national, il y a actuellement un semblant de reprise, parce que le gouvernement fédéral vient de demander des soumissions pour quelques bateaux, mais là, on travaille à moyen terme, c'est-à-dire que même si Marine soumissionne et même s'il y a des contrats, cela n'aura pas d'impact en termes de main-d'oeuvre à très court terme. Avant que les soumissions soient examinées, le contrat donné, les plans et devis faits, on se reporte, à moins d'un miracle, au milieu de 1980, en ce qui concerne le carnet de commandes de la construction navale, si jamais cela aboutit.

Donc, pour la première phase, des investissements de $5 500 000 plus $1 million pour la recherche sur des nouveaux produits et des recherches très précises sur des nouveaux produits dont on pourra dire quelques mots tantôt.

M. Tremblay: $5 millions d'investissement dans la première phase?

M. Coulombe: C'est ça. Il y a des investissements de $5 500 000, plus $1 500 000 et l'autre, en termes d'investissements de machinerie ou ainsi de suite, c'est un budget de recherche...

M. Tremblay: Recherche et développement...

M. Coulombe: ... de nouveaux produits. Cela pourrait même aller jusqu'à la mise en marche de certains prototypes ou ainsi de suite. C'est pour la première phase.

Pour la deuxième, les investissements peuvent varier de $40 millions à $45 millions. Si on reprend cela division par division, on prévoit, encore là, à la division hydro-électrique et industrielle, que les investissements pourraient être de l'ordre de $25 millions et, dans la division des wagons, de $9 millions à $15 millions. On dit de $9 millions à $15 millions tout simplement parce que, selon ce qui va se passer dans la construction navale dans la première phase, ça va déterminer l'utilisation de certains équipements qui sont actuellement à Marine, qui pourraient être utilisés pour des wagons ou qui devront rester à la construction navale, si le marché reprend. C'est ce qui explique la variation.

Il va y avoir aussi un deuxième million qui va être mis dans la recherche de nouveaux produits, à partir de 1981, et, si on regarde un peu plus loin, j'ai dit tantôt qu'il y avait $325 millions à $350 millions de commandes dans la division hydroélectrique, on a actuellement, dans le carnet de commandes aussi, dans la division des wagons, $110 millions de carnets de commandes dans cette division. Comme je vous l'ai dit tantôt, dans cette perspective, pour les prochaines années, quoiqu'on ne se fait pas d'illusion que ça va durer des décennies, on croit que le marché des wagons, pour quelques années, le marché américain et, dans deux ans, le marché canadien, va permettre à Marine de profiter à fond de ce marché.

M. Tremblay: Si je comprends bien, le plan de redressement est essentiellement un plan de spécialisation et de diversification des activités de Marine en capitalisant sur les secteurs forts et rentables de la société, la division des wagons et la division hydro-électrique, et en consolidant la section des chantiers maritimes pour deux raisons, une question de rentabilité, mais une question aussi de pénurie de commandes internationales.

Maintenant, est-ce que les deux autres divisions sauf la division navale sont rentables? L'an

passé, quelles ont été les pertes de Marine et à quelle division doit-on attribuer ces pertes, avec des chiffres précis?

M. Coulombe: Pendant qu'on va sortir les chiffres précis, les pertes de Marine, en 1978, étaient de l'ordre de $34 millions. Ces pertes ont été...

M. Tremblay: Sur des ventes de combien?

M. Coulombe: Sur un chiffre d'affaires de $75 millions, mais il faut se méfier, parce que ces $75 millions, en fait, signifient $160 millions d'activités réelles. C'est qu'au point de vue de la comptabilisation des revenus, tant que le matériel n'est pas livré, tant que les bateaux ne sont pas livrés...

M. Tremblay: Comme des bateaux en construction qui ne sont pas vendus?

M. Coulombe:... ils ne sont pas comptabilisés. M. Tremblay: D'accord.

M. Coulombe: Donc, il faut comparer cette perte à un niveau d'activités d'environ $160 millions de chiffre d'affaires.

Cette perte a été assumée en partie par la loi 108, c'est-à-dire $10 millions, ce qui a baissé le déficit à $24 millions. Une partie de ce déficit de $24 millions est causée par la construction des bateaux polonais, qui sont actuellement en chantier, pour une somme d'entre $17 800 000 et $18 millions, le reste étant les séquelles de ce qui a été longuement discuté ici, au mois de novembre, c'est-à-dire de l'aventure grecque, des questions de change étranger, etc.

Les deux autres divisions...

M. Tremblay: Un instant, s'il vous plaît, M. le Président!

M. Coulombe: Oui.

M. Tremblay: Pour bien se comprendre; les pertes de la division navale ont été de $34 millions. Maintenant, les gains nets des deux autres divisions ont été de combien?

M. Coulombe: M. Brisson.

M. Brisson (Jean-Rock): Pour en arriver aux $24 millions de pertes de Marine, la division navale a fait une perte de $28 millions; la division industrielle et hydro-électrique a fait un profit de $3 400 000; la division des wagons, un profit de $600 000 et diverses activités qui entrent dans l'une ou dans l'autre, $400 000 de profit, pour en arriver à un total de perte de $24 millions.

M. Tremblay: Donc, les investissements de $40 millions ou de $45 millions vont aller en priorité vers les secteurs dans lesquels il y a des carnets de commandes bien remplis. Vous avez dit, dans l'hydro-électrique, $325 millions.

M. Brisson: C'est ça et $110 millions dans les wagons.

M. Tremblay: $110 millions dans les wagons, sans compter ceux que vous anticipez solliciter?

M. Coulombe: Oui, ce sont les carnets de commandes en main, les contrats en main.

M. Tremblay: C'est ferme?

M. Coulombe: On ne comprend pas, dans ces chiffres, les contrats qui sont actuellement en négociation, surtout concernant les wagons.

M. Tremblay: Quels sont les carnets de commandes dans la division navale?

M. Coulombe: Les six bateaux, $120 millions, plus les deux traversiers.

M. Brisson: Mais, net, c'est $65 millions de travaux qu'il reste à faire.

M. Coulombe: C'est ça, les contrats totaux représentent $120 millions, mais il reste $65 millions de travaux à faire sur ces bateaux.

M. Tremblay: Maintenant, en termes d'emplois?

M. Biron: C'est pour un éclaircissement sur la question du ministre. Je vous remercie, on a eu la réponse sur le revenu net ou déficitaire dans chaque division. Avez-vous aussi les activités économiques réelles ou les ventes réelles de chaque division, que vous pouvez nous donner en même temps, pour comparer aux chiffres que vous avez donnés au ministre?

M. Brisson: Les ventes totales de Marine Industrie sont de $74 millions, à la division navale, nous avons $17 millions de vente; à la division industrielle de l'hydro-électrique, $31 millions; à la division des wagons, $21 millions et à notre filiale qui est incluse, environ $3 millions, à Foresteel.

Maintenant, je voudrais expliquer les $17 millions à la division navale, répéter ce que M. Coulombe a dit. Ce n'est pas le niveau d'activité de la division, mais bien la livraison de vaisseau, il n'y a eu qu'une livraison de bateau en 1978.

M. Tremblay: Est-ce que vous avez des chiffres sur le niveau d'activité? Vous avez dit $120 millions, tout à l'heure?

M. Brisson: Le niveau d'activité était de l'ordre de $175 millions en 1978.

M. Tremblay: $175 millions. Donc, les pertes de $28 millions...

M. Brisson: Les pertes totales de la compagnie de $24 millions sont sur un niveau d'activité de $175 millions.

M. Plessis-Bélair (Michel): Si vous permettez, M. le ministre, la différence se trouve essentiellement dans le bilan de la compagnie où on a mis

en inventaire les bateaux panaméens invendus. Au lieu de les voir dans l'état des pertes et profits, on les retrouve dans le bilan comme étant des contrats terminés. Tant que l'on n'en disposera pas, ils demeureront là.

M. Tremblay: Je reviendrai tout à l'heure sur la question de la rentabilité des projets d'investissement, mais j'aimerais avoir, pour le bénéfice des membres de la commission, des renseignements plus précis sur les répercussions d'emploi de l'application de chacune des phases du plan de redressement. (12 h 15)

Si je comprends bien, la division navale, qui est une division fortement intensive en main-d'oeuvre, avec des travailleurs spécialisés, d'ailleurs, a toujours eu des fluctuations dans le nombre d'employés. Historiquement, la crise internationale pose un problème de consolidation de cette division, la demande très forte pour les produits des deux autres divisions va amener un accroissement substantiel de la production, mais, si je comprends bien, l'intensité travail ou l'intensité main-d'oeuvre de ses activités est plus basse. Quel sera l'impact au niveau des effectifs que Marine va devoir garder à son emploi? Quels sont les effectifs aujourd'hui, quels seront-ils en 1980 et quels seront-ils en 1984?

M. Brisson: M. le Président, à Marine, il y a à peu près un mois, nous avions 3500 employés. De ces 3500 employés, il y en avait environ 1800 qui étaient affectés à la division navale. Avec la fin des contrats de la division navale en juin 1980, nous devions attendre une mise à pied des 1800 employés qui étaient à l'emploi de cette division s'il n'y avait pas eu d'autres activités. Cependant, il y a eu un changement dans l'orientation de certaines des divisions à cause de l'augmentation de travail et à la suite de la réaffection à d'autres contrats, les mises à pied seront diminuées à environ 1000.

De plus, nous sommes couramment à la recherche de contrats, il y a des contrats qui s'annoncent et nous aurons peut-être la possibilité de garder à l'emploi environ 400 autres personnes si nous avons un succès dans les recherches que nous faisons. Ce qui voudrait dire que la réduction de personnel, l'an prochain, pourrait n'être que de 600 personnes. Tout de même, avec les contrats en main actuellement, nous disons 1000 personnes.

Par la suite, l'augmentation des activités à la division des wagons et l'augmentation d'activités à la division hydro-électrique, la reprise, peut-être après 1980, avec certains contrats navals, nous prévoyons qu'en 1984, la société serait revenue à un niveau de 3000 ou 3100 employés. J'ai le détail ici par division et ça montre qu'après la baisse de 1980, il y a une remontée graduelle, à mesure que les autres activités entrent en place, de 200 à 300 employés par année, pour en venir en 1984 à 3100 et, par la suite, continuer à croître à la suite des investissements qui auront eu lieu à Marine.

M. Tremblay: Nous allons revenir davantage à ces points, je suis sûr que les membres de la commission vont avoir des questions à poser sur cela. J'aimerais quand même poursuivre et poser quelques questions avant de donner la parole à quelqu'un d'autre.

Dans votre programme de redressement, vous avez fait plusieurs scénarios d'investissement, en fonction de différentes hypothèses et de différents taux de rendement. Comment allez-vous procéder et quels ont été les critères qui vous ont guidés pour choisir le scénario définitif qui a été soumis au gouvernement?

M. Plessis-Bélair: On peut prendre deux minutes pour expliquer la façon, la procédure qu'on a suivie pour arriver à ce cheminement qui a duré au moins six mois. On a formé cinq groupes de travail, essentiellement; chaque groupe de travail avait un rôle bien précis, bien défini. Tout d'abord, il y avait trois groupes de travail qui s'intéressaient aux perspectives d'avenir quant au marché, quant aux occasions, quant aux opportunités pour chacune des divisions, soit la division navale, la division hydro-électrique et la division des wagons.

Ces groupes de travail ont été aidés à différents points par des gens de l'extérieur, lorsque l'expertise n'était pas disponible chez Marine Industrie. On a donc fait des prévisions dans la division des wagons, dans la division navale et, également, dans la division hydro-électrique, à partir de la gamme de produits qu'on a déjà, à partir des occasions qu'on est en mesure de déceler sur différents marchés. On est arrivé à projeter un certain niveau d'activité pour chacune des divisions.

A partir de ça, il y a un quatrième groupe de travail qui s'est intéressé à voir, à partir de l'agencement des ateliers qu'on a et à partir de l'équipement disponible, quelles étaient les possibilités et les choix qui s'offrent à Marine Industrie pour utiliser son équipement de la façon la plus efficace et la meilleure possible. Ce groupe s'est intéressé à regarder, à développer huit scénarios de réaménagement du chantier, qui comprenaient des changements de vocation de certaines usines qui sont utilisées, par exemple, pour le naval, à d'autres fins, soit la construction de nouvelles usines pour le naval dans une perspective d'un certain niveau d'activité dans le naval. Ce travail a été fait en collaboration avec les ingénieurs-conseils qui nous ont aidé à préciser les montants requis pour investir, soit dans l'équipement ou dans les usines, à partir des normes qui étaient fixées par l'expérience des gens de Marine Industrie.

Donc, on est arrivé à développer, d'une part, des marchés, des possibilités d'activités économiques, d'autre part, des coûts d'investissements pour réaliser cela. C'est comme cela que nous sommes arrivés à huit scénarios, huit chiffres d'affaires, si on veut, huit possibilités de rentabilité, en tenant compte des investissements.

C'est bien beau cela, mais la compagnie a quand même des contraintes. Et ces contraintes,

on les reprend brièvement dans le texte. Pour être en mesure de réaliser un programme d'investissements, pour être en mesure de réaliser ces scénarios, il faut être en mesure de voir quels sont les outils qu'on a en main et quelles sont les difficultés auxquelles on fait face.

Il y a différentes contraintes qu'on voit dans le plan de redressement, à la page 31, si ma mémoire est bonne. Ces contraintes sont tout d'abord la situation financière plus que difficile de Marine Industrie, je dirais même encore précaire malgré la loi 10,8. Marine Industrie ayant réalisé des pertes de $24 600 000 l'an dernier, après une subvention de $10 millions, et une perte, en 1977, de $3 millions, se retrouve avec un avoir des actionnaires qui a fondu au cours des deux dernières années, qui est maintenant à $16 millions, et également un fonds de roulement qui est déficitaire, de l'ordre de $11 millions.

Donc, c'est une situation financière très serrée et les gens qui sont familiers avec les entreprises industrielles savent que c'est très difficile de fonctionner avec un fonds de roulement bas, mais avec un fonds de roulement déficitaire, c'est encore plus difficile. C'est une première contrainte à laquelle on avait à faire face, et qui ne pouvait pas se résorber ou disparaître automatiquement.

Il y a un avantage, sur le plan financier, qu'il faut mentionner. Marine Industrie, présentement, pour des raisons historiques, n'a pas de dette à long terme. N'ayant pas de dette à long terme, si on peut augmenter le degré de certitude quant à l'avenir de Marine Industrie, il y a des capacités d'emprunt. Autrement dit, les actifs sont relativement libres pour que viennent des prêteurs à long terme, si on peut assurer une certitude quant à la rentabilité au cours des prochaines années. Il y a de la place pour emprunter des sommes assez importantes pour aider à financer des projets d'investissements. Donc, c'est un côté positif dans cette analyse.

M. Tremblay: J'allais justement le demander au président, puisqu'il a fait allusion tout à l'heure à la provenance des fonds, comme vous venez de le confirmer vous-même. La loi 108 prévoyait évidemment des dispositions pour couvrir certaines pertes rattachées au désastre des bateaux panaméens, mais ne prévoyait pas les pertes futures de Marine Industrie et ne prévoyait pas non plus les pertes rattachées au contrat des bateaux polonais.

Compte tenu du fait que, sur les bateaux polonais, il y aura des pertes substantielles et que votre plan d'investissements peut monter jusqu'à $45 millions, d'où vont venir les fonds pour cet investissement? Est-ce que cela va venir uniquement de l'emprunt ou des profits que vous prévoyez réaliser au cours des années à venir?

M. Plessis-Bélair: Une des contraintes qu'on s'est fixées, c'est qu'on veut que Marine Industrie puisse s'autofinancer. Cela ne veut pas dire générer de par ses propres moyens la totalité des sommes. Cela ne veut pas dire que cela. Cela veut dire également avoir des capacités d'emprunt. Une des contraintes qu'on s'est fixées dans le plan de redressement, c'est d'être en mesure de pouvoir assurer un autofinancement de la compagnie, cela veut donc dire d'assurer une rentabilité financière de la compagnie, dans un premier temps.

Comment peut-on faire cela? On peut faire cela — et c'est une des constatations qu'on fait à l'analyse des contraintes — c'est qu'il faut absolument que les déficits, qui sont essentiellement des déficits financiers présentement, qui sont causés par le fait que les bateaux panaméens sont encore la propriété de Marine Industrie, soient ramenés à des niveaux qui ne pèsent plus comme un boulet au pied de Marine Industrie et qu'ils ne créent plus l'incertitude que cette situation-là crée présentement, pour être en mesure d'attirer des capitaux de l'extérieur.

Une des façons d'en arriver à susciter des fonds, c'est de diminuer le niveau d'incertitude relié aux bateaux panaméens. Dans le plan de redressement, on fait l'hypothèse qu'à la fin de 1979, on aura trouvé une façon, soit que le marché... Le marché, présentement — on pourra en parler plus longuement plus tard — des taux d'affrètement semble à la hausse. Il aura tendance à diminuer les pertes que Marine Industrie devra supporter, mais, de toute façon, pour que le plan de redressement puisse devenir effectif, puisse être réalisable, il faut absolument qu'au niveau des bateaux panaméens, on puisse trouver une solution qui ne pèse plus comme un boulet et qui entraîne Marine Industrie vers une situation où elle aura beaucoup de difficulté à susciter des fonds et à attirer des fonds d'emprunteurs.

M. Coulombe: En fait, l'hypothèse de base, c'est que l'entreprise, avec un carnet de commandes d'au-delà de $450 millions... L'élimination de l'hypothèque des bateaux panaméens et une réorganisation nécessaire devraient être capables de produire des profits à court terme; deuxièmement, aller sur les marchés pour emprunter à long terme et, troisièmement, dans le cadre des disponibilités financières actuelles de la SGF, il y aura peut-être lieu de discuter, à un moment donné de la possibilité que la SGF investisse aussi. Mais ce sont les deux premières sources qui sont valorisées à l'heure actuelle. Notre hypothèse, c'est que Marine Industrie doit se sortir du pétrin dans lequel elle est à l'heure actuelle.

M. Tremblay: Vous dites qu'il y a des possibilités de rendre l'entreprise profitable à court terme. Qu'est-ce que cela veut dire?

M. Coulombe: Je n'oserais pas me prononcer sur le niveau de profit de 1979, parce qu'il y a certaines variables qui ne sont pas encore tout à fait contrôlées. On espère avoir du profit en 1979. Les probabilités sont très fortes qu'en 1980, il y ait un profit respectable. 1979 est encore en balance à l'heure actuelle, mais certainement qu'en 1980, nos prévisions sont pour des profits à Marine Industrie, à partir de 1980, sur une base continue

avec les carnets de commandes qu'on a en main actuellement.

M. Tremblay: Les dispositions de la loi 108 autorisent le gouvernement à verser à la SGF $10 millions annuellement pendant cinq ans pour de nouveaux projets, de nouveaux investissements. Avez-vous envisagé de vous servir d'une partie de ce capital-actions que le gouvernement va mettre à votre disposition pour investir dans les $45 millions ou est-ce que, dans votre plan, ce sont deux choses séparées?

M. Coulombe: Ce sont deux choses séparées. Nous pensons que, si 1979 et 1980 se passent bien, parce que ce sont des investissements qui sont quand même graduels, Marine Industrie va pouvoir s'en tirer. Ce n'est pas exclu à tout jamais que ce capital de la SGF, en partie, parce qu'on a quand même d'autres projets à l'étude à l'heure actuelle, ce n'est pas exclu définitivement qu'une partie de ce capital-actions puisse être investie dans Marine Industrie, mais, actuellement, on pense que, de façon interne, Marine Industrie doit avoir l'objectif de ne pas trop se fier là-dessus. S'il y a lieu, la SGF... Le conseil d'administration verra dans le temps, mais, à l'heure actuelle, on pense que Marine Industrie doit susciter elle-même les fonds.

M. Tremblay: J'aimerais revenir rapidement sur la question de l'avenir du chantier maritime ou de la division navale. En termes d'effectifs et en termes d'heures-homme, est-ce qu'à la fin du programme de redressement, en 1984, le chantier maritime va avoir autant d'importance absolue qu'il en a présentement ou moins?

M. Coulombe: Notre hypothèse actuelle, c'est que la réponse définitive à votre question, on pourra la fournir à la fin de 1980, à la fin de la première phase. On pense que, d'ici ce temps-là — il y a un scénario qui peut être négatif et il y a un scénario qui est positif — d'ici la fin de 1980, si l'environnement concernant les chantiers maritimes au Québec et au Canada, si les politiques gouvernementales restent ce qu'elles sont à l'heure actuelle — et ce n'est pas dans les pouvoirs de la SGF d'influencer ou de modifier cet environnement-là — deuxièmement, si le marché international reste ce qu'il est, c'est évident que l'avenir n'est pas rose pour la division navale. (12 h 30)

Si le marché, au niveau national, se comporte à peu près comme prévu, il va quand même rester une place pour la construction maritime, mais à quel niveau? C'est vers la fin de 1980 qu'on va pouvoir répondre à cette question précise. Les options actuellement restent ouvertes pendant cette année et demie. Marine va travailler à fond pour avoir des contrats de construction de bateaux, mais si les conditions que je viens d'énu-mérer ne se réalisent pas, Marine ne pourra pas faire de miracle là-dedans.

M. Plessls-Bélair: Peut-être que je pourrais ajouter ce que cela veut dire au point de vue physique de l'utilisation des ateliers. Les ateliers et les équipements qui sont présentement utilisés par la division navale vont garder encore pour un an leur vocation navale. Cela ne veut pas dire qu'on ne les utilisera pas temporairement pour essayer d'en tirer un bénéfice, mais il n'y aura pas de modification irrémédiable et complète de ces ateliers pour d'autres fins que les fins pour lesquelles elles sont utilisées historiquement, c'est-à-dire la construction de bateaux.

M. Coulombe: Dans cet environnement, d'une façon beaucoup plus précise en termes d'heures, si l'environnement reste ce qu'il est à l'heure actuelle, on prévoit qu'en 1984, il pourrait, si nos prévisions sont exactes, y avoir un niveau d'activités de l'ordre de deux millions d'heures dans la construction navale.

M. Tremblay: Présentement, vous en avez combien?

M. Plessls-Bélair: 2 600 000 heures cette année, et 3 500 000 heures l'an dernier.

M. Tremblay: Maintenant, je pose une question peut-être élémentaire. Etant donné que Marine a deux divisions qui ont le vent dans les voiles, qui sont rentables, qui sont en pleine croissance et qu'il y a une division qui fait face à une crise internationale la plus grande que nous ayons connue depuis un demi-siècle, est-ce que vous avez étudié la possibilité de scinder Marine entre la division maritime et les autres divisions et de mettre sur pied une société purement de chantier maritime?

M. Coulombe: Cette hypothèse a été examinée sérieusement. On l'a mise de côté pour le moment pour les raisons suivantes: Premièrement, pour ceux qui ont visité le chantier, on peut se rendre compte assez facilement que les installations physiques ne se prêtent pas à très court terme à une séparation claire et précise entre les trois divisions. Il y a beaucoup de services communs aux trois divisions, beaucoup d'édifices qui servent aux trois divisions, je pense au chauffage et ainsi de suite. Donc, sur le plan physique, des difficultés très considérables d'agir rapidement.

Deuxièmement, il y a des problèmes dans cette perspective, au niveau des relations humaines et de la convention collective. C'est une tâche extrêmement complexe que d'en arriver à ce type d'hypothèse. Cette hypothèse n'est pas rejetée, mais elle est mise de côté tout simplement pour le moment. A moyen terme, selon l'orientation, selon ce qui va se passer d'ici la fin de 1980, cette hypothèse pourrait être reprise, mais actuellement, elle a été mise de côté pour la raison que je viens de donner.

M. Tremblay: J'aimerais revenir rapidement sur les perspectives, parce que c'est quand même

la base de nos scénarios. Les perspectives sont positives du côté des wagons et du côté hydroélectrique, mais du côté naval, vous dites deux choses, si je comprends bien. Sur le plan international, les prix de fret, etc., laissent entendre que le creux de la vague est passé, mais que les nouvelles commandes de bateaux n'apparaîtront pas avant plusieurs années et que le marché international est un marché, comme on dit en anglais "cut-throat". Je pense que cela a été souligné par des articles de journaux récemment. La France a accepté de la Pologne des contrats avec des pertes de 50%. C'était décidé d'avance. L'avenir du chantier maritime pour les navires de grande dimension, comme Marine en fabriquait, sur le plan international, cela ne résout pas le problème à court terme. Il n'y a pas d'espoir tellement grand de ce côté.

Maintenant, du côté intérieur, au Canada, comment se présentent les perspectives de commandes? Quelle serait la participation de Marine dans ces commandes à venir, compte tenu de la spécialisation pour laquelle elle est connue et la spécialisation que vous pourriez lui donner dans les mois et les années à venir?

M. Brisson: Alors, du côté domestique, nous faisons face à un marché qui est relativement bien connu. Nos études ont révélé ce à quoi nous pourrions nous attendre dans les prochaines cinq années, au Canada, comme demandes de navires. Nous savons aussi quelles sont les capacités des chantiers maritimes canadiens qui vont, évidemment, concurrencer pour ce niveau. Nous savons aussi qu'un grand nombre de chantiers sont alliés à des compagnies de navigation et, à ce moment-là, il y a un marché captif qui fait que les demandes de ces compagnies ne seraient pas disponibles à Marine. Alors, lorsqu'on a étudié tous ces niveaux, il reste peu de commandes de navires probables du côté commercial et puis, il y a aussi le marché des gouvernements à travers le Canada.

C'est devant ce marché que Marine s'est efforcée de déterminer quelle part elle pourrait obtenir durant les prochains quatre ou cinq ans. Le marché, tout de même, reste assez limité. Les gouvernements ont des commandes annoncées de traversiers dans certains cas. Il y a des commandes pour des bateaux de guerre. Il y a des commandes pour des réparations, ou ce qu'on appelle "refit" de bateaux de guerre et aussi certaines commandes pour les compagnies maritimes qui ne sont pas, elles, liées à des chantiers maritimes et qui seraient, à ce moment-là, offertes en général.

M. Plessis-Bélair: Ce qu'on a fait aussi, si vous permettez, c'est une analyse et on a identifié 23 occasions de contrats dans le marché canadien. Chacune de ces occasions a été analysée pour voir si c'était un bateau pour l'Ouest, pour l'Est, pour les Maritimes. On a regardé qui seraient les concurrents les plus forts et on a essayé de déterminer quelles seraient nos chances de succès sur chacun de ces contrats. A partir de là, on est arrivé à déterminer quelle serait l'activité qu'on pourrait obtenir dans le chantier maritime et de là en arriver à un chiffre d'affaires.

Donc, ça s'est fait de façon aussi systématique qu'on pouvait le faire en prenant tout ce qui était connu sur les projets annoncés ou discutés au niveau de la construction de navires. Ce seront des traversiers Ro-Ro en tenant compte de ce qui se passe dans l'Arctique et de ce qu'on peut faire, etc., et cela a été fait, je pense, de la façon la plus systématique possible dans cette optique.

M. Tremblay: M. le Président, je reviendrai plus tard sur des points plus détaillés. Je vais céder la parole à d'autres membres de la commission.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre.

M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

Commentaires et questions de l'Opposition

M. Reed Scowen

M. Scowen: Merci, M. le Président. D'abord, je veux remercier sincèrement M. Coulombe et les autres membres de la compagnie de leur présence et, en plus, de leur invitation, la semaine passée, à visiter les chantiers. Pour moi, et je pense aussi pour mon collègue, c'était une excellente idée. On a beaucoup profité de cette occasion de voir vraiment la ville, les installations, les personnes qui y travaillent, les rencontrer. Je pense que c'était une initiative à laquelle vous devez donner suite, M. Coulombe, des visites régulières, et les autres sociétés d'Etat peuvent certainement nous aider à mieux comprendre les problèmes et les possibilités.

La situation des députés, en ce qui concerne ces commissions parlementaires et leurs droits et leurs responsabilités, vous savez, n'est pas encore parfaitement précisée et on se demandait un peu l'attitude qu'on devait prendre à ces commissions. Pour ma part au moins, je veux simplement agir aujourd'hui comme administrateur, si vous voulez, sur un conseil d'administration devant la direction d'une compagnie qui veut faire des choses, des changements importants et faire des investissements, tout en sachant qu'on n'a pas de pouvoirs. Il y a déjà deux ou trois conseils d'administration auxquels vous êtes obligés de répondre. Mais, pour ma part, c'est dans cet esprit que je vais vous parler.

De plus, je ne vais pas parler du tout d'une façon partisane, dans le sens politique; on est tous conscients qu'il y a certains de vos problèmes qui ont été créés à l'époque d'une administration libérale, d'autres qui sont survenus depuis l'arrivée au pouvoir du gouvernement actuel, et c'est même possible que la dernière partie de votre programme de redressement se réalise avec un gouvernement libéral. Il y a toutes sortes de possibilités qui peuvent arriver.

M. Perron: II me semblait que vous ne vouliez pas faire de politique!

M. Scowen: Je préfère, aujourd'hui, parler comme quelqu'un qui fait partie d'un groupe, avec le ministre et les autres députés, qui s'intéresse vraiment à parler d'affaires.

J'ai parcouru votre rapport, je dois dire que, pour moi, c'est un rapport sérieux, bien pondéré, organisé et structuré d'une façon qui n'est pas trop difficile à comprendre.

Il me semble qu'il y a quatre éléments clés dans cette affaire, quatre parties qu'on doit regarder d'un peu plus près, et il me semble que si, dans ces quatre éléments, vos objectifs se réalisent, vous n'aurez pas de problème. Je ne les prends pas nécessairement par ordre d'importance. Premièrement, il y a la question de votre avenir dans le domaine hydro-électrique. Je pense que je n'exagère pas quand je dis que, pour l'avenir, cette partie de la compagnie est l'élément clef; c'est là qu'on est le plus certain, le plus optimiste, en ce qui concerne l'hydro-électricité.

J'ai quelques questions à vous poser pour vérifier — dans mon esprit au moins — que les possibilités et que votre optimisme sont réalisables.

Le deuxième élément que je trouve important, c'est la question de la division navale. Je sais qu'il existe une incertitude dans le domaine naval; c'est le domaine où vous avez le plus d'expérience, c'est le domaine où vous avez le plus d'investissements, c'est un peu la question de savoir comment sortir de cette affaire d'une façon honorable, d'une façon aussi rentable que possible, tenant compte du fait que nous avons de vastes investissements et, ce qui est plus important encore, nous avons de grandes ressources humaines qui dépendent de ce domaine.

Un troisième élément que je veux aborder avec vous, c'est le domaine de la recherche pour les nouveaux produits. C'est vague dans votre rapport; vous proposez d'investir $1 million ou $2 millions dans la recherche et le développement. Quant à moi, je pense que c'est excellent comme principe, mais je pense qu'il faut être réaliste dans ces choses et il faut aussi se poser la question, se demander s'il est possible que, dans la recherche de nouveaux produits, nous nous trouvions, dans un an, deux ans ou trois ans, avec une société d'Etat dans un domaine qui n'est peut-être pas un domaine naturel, un domaine pratique pour une société d'Etat.

De l'autre côté de la médaille, comment allez-vous agir dans le domaine du développement de nouveaux produits?

Le quatrième élément — je pense qu'on est justifié de poser des questions — ce sont toutes les questions que vous avez soulevées dans un paragraphe, à la page 32, l'organisation: "Marine n'a pas actuellement toutes les ressources de gestion nécessaires et l'organisation interne requise pour être en mesure d'entreprendre, à court terme, un programme majeur de diversification et d'expansion de ses opérations." (12 h 45)

Ayant vécu une expérience industrielle pendant 17 ans, quand je lis ce paragraphe, je réalise combien c'est difficile de développer une équipe, de trouver les cadres, de les motiver, de développer des contrôles internes et je suis très conscient, tout comme vous, que, sans la réalisation, sans que cette question soit réglée, les trois autres seront ou difficiles ou impossibles.

Je pense qu'on n'a qu'à lire la triste histoire des bateaux polonais pour voir combien les problèmes de gestion et de contrôle, que vous avez admis avec une honnêteté qui dépasse l'honnêteté même... Je pense que nous sommes tous conscients que cette quatrième question est très importante.

Je suis aussi très conscient des contraintes du temps qui nous est alloué et du fait que d'autres députés veulent vous parler. Finalement, avant de partir, j'aimerais aussi poser quelques questions aux représentants des syndicats. J'ai lu le document qu'ils ont soumis sur les chantiers maritimes et cela soulève plusieurs questions, mais je pense que je vais mettre cela de côté pour plus tard. Je vais poser seulement une ou deux questions sur chacun des quatre sujets que j'ai mentionnés et peut-être que je reviendrai sur les autres après.

Prenons d'abord la question hydro-électrique. Vous êtes dans la fabrication de grosses turbines, il y a la partie "hydro" et la partie électrique, et surtout pour un client de chez nous, la Société de la baie James. Vous avez, pour le moment, un seul concurrent au Québec, si je comprends bien. J'entends des rumeurs selon lesquelles il y a de fortes possibilités que nous ayons une troisième industrie qui s'installe ici dans un proche avenir; je ne sais pas si c'est vrai, je n'ai pas tous les faits. J'imagine qu'il faut prévoir la concurrence.

Je veux vous poser deux ou trois questions. Premièrement, il y a la question du prix. Je vais poser les trois questions ensemble et, après, vous pourrez répondre. Les prix qu'on reçoit de la Société de la baie James ou de l'Hydro, j'imagine que ce sont des prix un peu plus élevés que ceux que ces compagnies pourraient obtenir si elles achetaient de l'extérieur, tenant compte de la politique d'achat, etc.

Je voudrais que vous précisiez cette politique d'achat, les prix que vous réalisez ici au Québec, parce que ce serait intéressant dans le sens où ça peut nous aider à voir jusqu'à quel point vous serez en mesure d'être rentable à l'extérieur du Québec. Je pense qu'on peut tenir pour acquis que si les Québécois sont prêts à payer un peu plus cher pour les turbines fabriquées au Québec, c'est probablement la même chose dans les autres provinces et les autres pays, c'est assez politisé ces choses-là, normalement.

L'Hydro-Québec donne-t-elle une préférence à Marine comme société d'Etat par rapport à Dominion Engineering qui est installée au Québec, mais qui n'est pas une société d'Etat? Quelle est votre politique, est-ce que c'est quelque chose de défini et est-ce quelque chose qui peut changer?

Une troisième question, les dessins; je vais en choisir une dernière dans le domaine de l'hydro. Si je comprends bien, vous fabriquez vos turbines

sur la base d'une licence, je pense que la partie de l'hydro, c'est une licence française et la partie électrique, suisse ou, le contraire, je ne me rappelle pas exactement. Il me semble que cette question du bon dessin est très importante, j'imagine que c'est un évolution continuelle, tout le monde essaie d'améliorer les dessins. J'imagine aussi que pour les turbines qui sont plus petites, qui seront probablement les turbines pour les installations, parce que la plupart des installations dans le monde ne sont pas aussi grandes que celles de la baie James, il y a des dessins qui sont différents, à cause des demandes qui sont différentes.

La première partie de la question, c'est le prix; la deuxième, dans le domaine du dessin, est-ce que vous êtes confiant que votre source de technologie, pour les grandes turbines que nous fabriquons maintenant et les petites ou les autres qui sont nécessaires à l'avenir pour le développement de nouveaux marchés à l'extérieur, ne sera pas dépassée par les autres? Donc, le prix et la technologie, j'aimerais que vous abordiez ces deux questions.

Le Président (M. Boucher): M. Brisson.

M. Brisson: Au point de vue de la compétition sur les turbines, nous avons ici au Canada deux manufacturiers de turbines de la grosseur de celles que nous fabriquons présentement. Il reste tout de même qu'à certains moments, ces deux compagnies ont été en compétition devant l'Hydro-Québec. A ce moment-là, la question de prix en a été une de compétition et la décision en a été une sur les prix et sur les avancés techniques. Ce n'est que le prix à ce moment-là. Du côté des alternateurs, nous avons aussi une compétition au Canada, il y a Canadian General Electric qui fabrique en Ontario des alternateurs du même type que ceux que nous fabriquons. A ce moment-là, nous avons été en compétition avec cette société. Par contre, devant l'immensité des programmes de la Société d'énergie de la baie James, il a fallu s'associer avec ces sociétés pour pouvoir livrer en temps les biens que la Société d'énergie de la baie James demandait.

A ce moment-là, nous sommes en consortium avec Dominion Engineering, qui est le concurrent dans les turbines, et General Electric, qui est l'autre concurrent, dans les alternateurs. Soit dit en passant, General Electric et Dominion Engineering sont affiliées. A certains moments, il a fallu travailler en consortium. A ce moment-là, la Société d'énergie de la baie James, elle, employait des méthodes différentes pour contrôler les prix avancés par ce consortium, pour juger de la validité des prix proposés et des valeurs proposées.

C'est donc dire que, lorsque nous ne sommes pas en concurrence, ce qui est normal pour que les prix se maintiennent, lorsque nous sommes en consortium, la société doit vérifier par d'autres moyens les niveaux de prix.

Si on se compare à l'international, cela devient excessivement difficile. Nous avons...

M. Scowen: Avant d'en venir à l'international, est-ce que je peux vous demander si la société énergétique donne une préférence, à ce moment-ci, à Marine Industrie, comme société d'Etat, par rapport à un autre fabricant québécois?

M. Brisson: Non.

M. Scowen: Non. Si une troisième compagnie s'installait au Québec et était dans la fabrication de ces mêmes produits, il est probable que cette troisième compagnie pourrait donner les mêmes avantages et désavantages qu'une autre.

M. Brisson: Je ne peux présumer de la politique de cette société, mais je prévois que oui.

M. Scowen: Est-ce que la société énergétique donne une préférence à Marine Industrie ou à Dominion Engineering, qui est aussi au Québec, par rapport aux autres fournisseurs étrangers?

M. Brisson: Dans ce cas-là, oui.

M. Scowen: Ils sont, à toutes fins utiles, exclus.

M. Brisson: Oui.

M. Scowen: Et en ce qui concerne votre partie, concernant les alternateurs qui sont fabriqués au Québec, et celle de General Electric, qui est installée à Peterborough, si je comprends bien, il n'y a aucune préférence donnée à vous autres, même si les alternateurs de General Electric sont fabriqués à l'extérieur du Québec?

M. Brisson: Je ne le crois pas, c'est le même prix. Evidemment, la décision a été plus technique très souvent, que monétaire.

M. Scowen: Si je comprends la politique de la Société d'énergie de la baie James, elle donne une préférence, même une exclusivité, aux fabricants canadiens, mais à l'intérieur du Canada; il n'y a aucune préférence donnée à une société d'Etat par rapport à une société privée, ou à une société québécoise par rapport à une société d'une autre province du Canada, en gros?

M. Brisson: Non. Ce sont les deux seuls manufacturiers.

M. Scowen: Ah bon!

M. Laplante: Me permettriez-vous une question additionnelle sur le même sujet, M. le Président?

Le Président (M. Boucher): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, est-ce que vous permettez une question?

M. Scowen: Oui.

M. Laplante: Ce n'est pas à vous ou au monsieur, cela reste toujours au président. C'est que

vous aviez parlé de fabrication de turbines. Vous avez parlé de la fabrication de turbines. Vous fabriquez la turbine traditionnelle à la verticale. Vous fabriquez aussi... Je ne sais pas jusqu'où vous fabriquez le type complet, le groupe bulbe. On emploie justement ces turbines en eau peu profonde à partir de peut-être un mégawatt à aller jusqu'à 120, je crois. Dans le marché que vous avez actuellement, qu'est-ce que vous faites dans ces groupes bulbes actuellement comme pièces, parce qu'on me dit que vous ne fabriquez pas complètement le bulbe?

M. Brlsson: Nous n'avons pas jusqu'à maintenant à Marine Industrie fabriqué de groupe bulbe. Cependant, nos ingénieurs surveillent la chose de très près. Notre bailleur de licences a la technologie. Nous avons d'ailleurs obtenu d'eux la technologie nécessaire pour fabriquer ces turbines. C'est un domaine que nous surveillons de très près et dans lequel nous voulons nous développer pour être prêts dès que le marché demandera ce genre de turbine dans notre région.

M. Laplante: Cela voudrait dire que vous n'avez jamais fabriqué de ce qui s'est fait sur les bulbes sur la Rance, en France, mais vous connaissez la technologie et vous seriez capables de le faire. Pensez-vous que cela peut être le marché de l'avenir actuellement?

M. Brlsson: Oui, il faudra encore quelques années, mais c'est un marché qui va suivre de très près la complétion des grosses turbines de type Francis qui sont présentement fabriquées.

M. Laplante: S'il se développait un marché ici au Québec ou un marché nord-américain, quand on sait qu'il y a environ 10 000 mégawatts à aller chercher justement par ce groupe bulbe et 135 000 mégawatts américains qui seraient un marché, sans compter les autres provinces du Canada, croyez-vous que Marine Industrie pourrait changer à ce moment son orientation, si elle pouvait percer ce marché?

M. Brlsson: Oui, assurément, cela fait partie de nos plans de poursuivre les développements...

M. Laplante: C'est dans le plan?

M. Brlsson:... et se soumissionner sur les turbines bulbes.

M. Laplante: Merci.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le député de Bourassa. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Il y a une question additionnelle. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, est-ce que vous permettez? C'est vous qui avez le droit de parole. M. le député de Richelieu.

M. Martel: Etant donné qu'on est dans... M. Scowen: Si c'est sur le même sujet.

Le Président (M. Boucher): Sur le même sujet.

M. Scowen: Je pense qu'on parle de la question du prix des turbines à l'intérieur du Canada. Si c'est sur ce sujet, allez-y. Sinon, peut-être que le président peut...

M. Martel: C'est sur ce point. Vous parliez tout à l'heure de rentabilité et de projection future s'il y avait un concurrent, pour voir si Marine serait toujours concurrentiel sur le marché des turbines. Dans le même sens, je voudrais demander aux dirigeants de la compagnie: Quelle est la proportion de wagons actuellement vendus en dehors du Québec et du Canada, pour voir si on est concurrentiel?

M. Scowen: Pour le moment, je pense que nous sommes dans l'hydro-électrique. Si vous me permettez, on peut revenir aux wagons après. En ce qui me concerne, c'est un autre sujet.

M. Martel: D'accord. Allez-y et on y reviendra après.

M. Coulombe: Je voudrais mentionner que, pour la question de l'hydro-électrique, sur le plan international, à l'heure actuelle, les études démontrent qu'il y a une surcapacité de production au niveau mondial dans ce domaine. La guerre se fait, non pas au niveau des technologies, mais la guerre se fait au niveau des financements. C'est là qu'est le problème de base, lorsque certains pays offrent des conditions extrêmement avantageuses de financement. C'est à ce niveau que les contrats se décident. Ce n'est pas tellement au niveau de la technologie, parce que la technologie est partagée par plusieurs grands groupes industriels au monde. C'est au niveau du financement que cela se joue. D'où l'intérêt immense que Marine doit avoir vis-à-vis de l'orientation de l'Hydro-Québec avec l'Hydro International; dans le cadre d'un contrat clé en main, il serait possible, grâce à un financement local ou national ou canadien, d'aller chercher des marchés qui autrement sont inaccessibles pour Marine. Ce serait la seule possibilité pour Marine, au niveau international, de faire partie d'un groupe qui offrirait un ensemble, un "package deal" à des pays, avec des financements intéressants. On est actuellement dans un tel groupe en Amérique centrale, au Guatemala pour être plus précis; on fait partie d'un consortium qui se partage le financement, 50% français et 50% canadien. On est en train de pouvoir se qualifier. On ne sait pas ce que cela va donner au bout, mais, actuellement, c'est exactement la technique qu'on a prise. (13 heures)

M. Scowen: C'est intéressant, M. Coulombe. Si je comprends bien, j'ai peut-être exagéré l'importance du dessin et de la technologie dans ces affaires. Ce n'est pas une évolution très rapide. Les distinctions entre les dessins d'une compagnie et ceux d'une autre ne sont pas une question normalement critique dans le choix d'une turbine.

M. Coulombe: Je vais laisser parler de meilleurs spécialistes que moi à ce niveau. J'ai insisté surtout sur l'importance de la variable clé qui était la variable financement dans les grands projets internationaux. Maintenant, au point de vue de la technologie, je ne sais pas si M. Perreault ou...

M. Scowen: Oui, je pense que M. Brisson était en train de commencer à parler un peu de la question des ventes sur le marché international et des prix internationaux. Est-ce que cette exclusion qu'on voit de la part de la société énergétique et des compagnies étrangères, c'est quelque chose qui se répète aux Etats-Unis ou dans les autres pays qui ont leurs propres installations? Quelles sont les possibilités par rapport à des prix profitables pour nous dans les autres pays?

Le Président (M. Boucher): Je m'excuse. Etant donné qu'il est 13 heures, est-ce qu'on pourrait permettre à M. Brisson de répondre à la question pour revenir à 15 heures, par la suite? Vous pouvez répondre tout de suite, si les membres désirent une réponse à cette dernière question du député de Notre-Dame-de-Grâce?

M. Brisson: Il y a deux points en question ici, la question de concurrence au point de vue de la technologie et au point de vue de prix du côté international. Comme mentionné, évidemment, je ne veux pas abaisser le niveau de technologie requis pour faire la conception de turbines et d'alternateurs, mais il reste tout de même que la technologie, pour avoir des turbines et des alternateurs qui donnent un rendement efficace est connue de plusieurs, est développée par plusieurs compagnies et par plusieurs pays. La technologie devient donc disponible et c'est le rendement final qui est le critère de jugement.

Au point de vue international, la grosse difficulté vient justement des types de financement et, très souvent, nous nous apercevons que le problème, c'est que le prix final et le financement final n'ont pas beaucoup de relations avec les coûts et nous avons même de la difficulté à déterminer quels sont les coûts que nous devons concurrencer. La plupart du temps, l'élément principal, c'est le financement. Nous avons même vu ici, au Canada, des turbines et des alternateurs de pays étrangers entrer au Canada à des prix tellement bas qu'ils ont donné évidemment effet à des enquêtes antidumping parce que justement on avait cette situation où il était impossible de relier le prix qui avait été soumissionné à un coût réel de cet équipement.

Sur le marché international, c'est beaucoup plus une question de projet global offert avec un financement par une société ou un consortium qui va contrôler notre possibilité d'aller à l'international que nos coûts ou notre compétitivité spécifique à Marine.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. Brisson. Alors, la commission...

M. Biron: M. le Président, juste avant d'ajourner...

Le Président (M. Boucher): M. le député de Lotbinière, oui.

M. Biron: ... je voudrais vous dire qu'à moins qu'on s'entende pendant l'ajournement sur le droit de parole, je soulèverai une question de règlement à cet égard, parce qu'il y a des gens autour de la table qui veulent parler et je pense bien qu'on devrait suivre la procédure normale de 20 minutes par député.

Le Président (M. Boucher): D'accord, de 20 minutes par intervenant. Evidemment, à venir jusqu'à maintenant, le temps a été partagé, depuis midi, entre deux intervenants, disons 30 minutes chacun.

M. Biron: 11 h 30.

Le Président (M. Boucher): Disons que je tiens compte quand même de la durée des interventions de chaque parti et je vais essayer de donner le même temps à chacun des partis.

M. Biron: Je ne veux pas qu'on attende à la fin de l'après-midi ou la fin de la soirée pour donner le droit de parole aux députés autour de la table. Je pense qu'on a l'habitude, à une commission parlementaire, de donner 20 minutes par intervenant, et, ensuite, on fait un deuxième tour et un troisième tour, afin qu'un intervenant ne prenne pas deux heures et que les autres n'aient pas le droit de parole finalement.

Le Président (M. Boucher): Alors, je tiendrai compte de votre intervention, M. le député de Lotbinière.

La commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures.

Suspension de la séance à 13 h 5

Reprise de la séance à 15 h 15

Le Président (M. Boucher): A l'ordre, messieurs!

Lors de la suspension, à 13 heures, nous en étions toujours à l'étude du programme de redressement industriel de Marine Industrie Ltée. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, vous aviez la parole.

Maintenant, je dois prévenir les membres de la commission que M. le ministre de l'Industrie et du Commerce m'informe qu'il devra s'absenter à 16h 30, pour entendre le mémoire de la Chambre de commerce, n'est-ce pas?

M. Tremblay: Oui.

Le Président (M. Boucher): Alors, de 16 h 30 à 17 heures, M. le ministre s'excuse à l'avance, mais il devra s'absenter.

M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, compte tenu de l'intervention de M. le député de Lotbinière et chef de l'Union Nationale, ce matin, concernant la distribution du temps et compte tenu du temps que vous aviez déjà pris ce matin, je crois que vous pourriez terminer votre question concernant l'hydro-électrique et, par la suite, je donnerai la parole au chef de l'Union Nationale.

M. Scowen: Parfait, merci, M. le Président. Comme vous le savez, j'avais quatre sujets généraux que je voulais aborder: l'hydro-électrique, le naval, les nouveaux produits et l'administration.

Je veux simplement terminer les questions qui touchent le premier, l'hydro-électrique, et on va faire le tour. Les autres questions seront probablement soulevées par les autres députés, sinon, je vais revenir plus tard.

Si je comprends bien — j'adresse la question à M. Brisson pour terminer — la concurrence, pour le marché québécois, sera faite parmi les compagnies canadiennes et vous êtes persuadés, pour le présent et pour l'avenir, que vos prix et vos coûts seront concurrentiels avec ceux des autres compagnies qui se trouvent à l'intérieur de la fédération canadienne.

Si je comprends bien, pour le marché à l'extérieur du Québec, les chiffres que vous nous donnez en page 6 indiquent qu'ailleurs au Canada, il pourrait être possible d'obtenir 10% des contrats qui ne seront cependant pas réalisés avant 1985, donc un volume de 10% de $300 millions. Les chiffres que vous prévoyez sur le marché international, soit $4 millions par année, sont des chiffres de ventes que vous prévoyez, basés sur une analyse de la compétitivité et de la concurrence qui existeront à l'intérieur de ces produits pour ces marchés? Vous êtes persuadés que vos précisions dans les deux cas, qui sont quand même importants, seront réalisables, tenant compte de la concurrence à laquelle vous serez obligés de faire face. C'est d'accord?

M. Brisson: Oui, c'est d'accord. Si vous remarquez, nous ne prévoyons pas des pourcentages exorbitants tant sur le marché canadien que sur l'autre. Il y a une chose à remarquer, c'est que les montants qui sont là ne veulent pas dire que nous aurons tous les ans $4 millions sur le marché international, mais le contrat que nous sommes à considérer, auquel nous participons présentement, peut représenter peut-être un projet de $30 millions et ensuite un autre projet dans trois ans, dans quatre ans ou dans cinq ans. Il ne faut donc pas prendre les $4 millions comme un montant annuel et régulier.

M. Scowen: Est-ce que vous avez entendu parler de la possibilité d'avoir un troisième concurrent ici au Québec ou au Canada?

M. Brisson: Un instant.

M. Scowen: C'est important...

M. Brisson: M. Perreault, de la division hydroélectrique, me dit que Brown-Boveri, dans les alternateurs, aurait manifesté un intérêt à venir s'installer ici.

M. Scowen: Bon! Avez-vous tenu compte de cette possibilité dans vos prévisions de ventes, dans la mesure du possible?

M. Brisson: Oui.

M. Scowen: Une dernière question sur l'hydraulique. Je parlais ce matin de dessin. Si je comprends bien, j'aurais dû parler de conception, parce que je parlais surtout de la technologie et de la conception générale. Si je comprends ce que M. Coulombe nous a dit, vous êtes satisfaits de vos propres connaissances dans le domaine de la technologie, ajoutées à celles des compagnies avec lesquelles vous avez des licences, soit dans l'électrique, soit dans l'hydraulique, qui sont assez solides et qui ont assez de potentiel pour vous permettre de réaliser les chiffres prévus ici, non seulement dans les turbines pour la SEBJ, mais aussi, pour les contrats qui seront peut-être donnés pour des turbines d'une grandeur ou d'un standard un peu différents. En effet, la base technologique, pour vous-mêmes et vos bailleurs de licences, est parfaitement adéquate d'après vous?

M. Brisson: Une légère correction. Nous croyons évidemment que nos bailleurs de licences ont la technologie voulue pour entrer en concurrence sur le marché national et international, mais, de notre côté, nous sommes à bâtir une équipe, à construire une équipe d'ingénierie, de jeunes techniciens ingénieurs que nous entraînons actuellement afin de nous rendre plus autonomes, à mesure que nous avancerons dans les années. Nous ne sommes pas totalement satisfaits de l'équipe que nous avons présentement; nous sommes satisfaits des gens qui sont là, quant à leur nombre et à leur expérience, mais nous avons un programme pour accroître dans ces deux domaines.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. M. le député de Lotbinière et chef de l'Union Nationale.

M. Rodrigue Biron

M. Biron: Merci, M. le Président. Je commencerai pas quelques remarques, en particulier. Je retournerai à décembre 1978, alors qu'on a adopté le projet de loi 108, avec beaucoup de difficulté, mais on a réussi à l'adopter. Je veux simplement lire l'article 3 du projet de loi qui dit: "La société a pour objet d'assumer la gestion d'un groupe industriel dans le but d'exploiter des entreprises de taille significative dans certains secteurs jugés prioritaires pour le développement économique du Québec, d'assurer la planification et la coordina-

tion des entreprises qu'elle contrôle et de favoriser, seule ou de préférence avec des partenaires, leur exploitation et leur développement, conformément à des conditions de rentabilité normale."

Rentabilité normale, on avait dit aussi à la Société de développement industriel, à Marine, qu'on voulait avoir un plan de redressement pour l'entreprise Marine. C'est essentiel, et je tiens à dire en passant que j'ai apprécié la lecture et les informations que j'ai reçues de la part des différents officiers de Marine et de la Société générale de financement, à propos de ce plan de redressement. On s'aperçoit qu'il y a une volonté ferme, de la part des dirigeants de cette société d'Etat, pour qu'on ait une entreprise qui soit gérée avec des conditions de rentabilité normale.

Je tiens à leur dire mon appréciation de cette décision, de cette volonté de la part de l'entreprise. Finalement, on s'aperçoit que les gens qui sont ici devant nous aujourd'hui réalisent qu'une entreprise d'Etat, ce n'est pas une Saint-Vincent-de-Paul ou ce n'est pas l'assistance sociale, le ministre des Affaires sociales; cette entreprise doit être gérée normalement pour avoir une rentabilité comme toute autre entreprise. Là-dessus, je pense que le plan de reconversion industrielle nous amène à quelques remarques spécifiques du côté de la rentabilité de l'entreprise. On a eu des questions tout à l'heure du côté de la rentabilité du secteur hydro-électrique. Moi aussi, je suis confiant qu'on pourrait faire des suggestions, qu'on pourrait l'améliorer davantage.

On peut dire qu'il y a peut-être quelque chose de dangereux: on a un seul gros client qui est l'Hydro-Québec pour la Société de développement de la baie James. On pourrait trouver des clients à l'extérieur du Québec; le président nous a dit que c'était difficile, que c'était un marché où on a une surproduction à l'heure actuelle, une surcapacité de production, mais on a besoin de financement à long terme pour faire affaires avec les entreprises internationales. On a l'Hydro-Québec International qui peut nous aider. Alors, on ne peut qu'encourager les dirigeants de cette société et essayer de trouver de nouveaux marchés à l'extérieur du Québec parce que au Québec il me semble qu'on a atteint à peu près le maximum de nos possibilités.

C'est la même chose dans le domaine des wagons. Je pense que là aussi, on peut être satisfait de ce qui s'est fait au cours des dernières années. Il semble que les deux divisions, les wagons et l'hydro-électricité, cela peut devenir véritablement rentable pour cette entreprise et pour les travailleurs, de même que pour les dirigeants. Ils seront fiers d'appartenir à une entreprise qui peut s'autofinancer et devenir une des entreprises les plus rentables au Québec. Spécialement dans le domaine hydro-électrique, lorsque je vois qu'on fait 11% de profit sur nos ventes je pense qu'il n'y a pas beaucoup d'entreprises qui peuvent se vanter de cela. Dans le domaine des wagons, c'est plus compétitif un peu. On s'aperçoit qu'on fait 3% ou 4%. Mais, c'est dans la normale des entreprises manufacturières.

Mais là où le problème commence, je l'ai vu aussi à la lecture du projet présenté par les dirigeants de Marine Industrie, c'est dans le domaine de la construction navale. Encore là, il faut se poser des questions sérieuses, peu importe les scénarios employés à travers tous vos moyens, même si c'est louable, avec les efforts que vous voulez faire de ce côté-là. Je me pose de sérieuses questions.

Est-ce que la Société Marine Industrie, est-ce que la SGF, ont l'obligation du gouvernement de faire en sorte d'agir comme le ministère des Affaires sociales, et dire: On va garder 500, 1000 ou 2000 travailleurs, même si ce n'est pas rentable, pendant un an, deux ans, cinq ans ou huit ans, on ne sait pas jusqu'où cela peut aller? Ou est-ce qu'il ne devrait pas y avoir une volonté du gouvernement de dire: Oui, il faut secourir des travailleurs et pour cela, il faut avoir un autre budget quelque part, qui va venir d'un autre ministère et on va comptabiliser cela à part?

C'est une question que je me pose, parce que, peu importent les efforts que vous allez faire du côté des wagons, du côté de l'hydro-électricité, si on ne réussit pas à rendre rentable le plus rapidement possible la division navale, je me demande si on ne se casse pas la tête tout le monde et si on ne se cogne pas la tête sur un mur en se disant: on ne va pas nulle part. Et finalement, tout le monde va critiquer toute la Société Marine Industrie et probablement aussi la Société générale de financement, parce qu'on a un département à l'intérieur d'une des sociétés filiales, la SGF, qui fonctionne mal, et qui mange les profits. En particulier, il y a le problème que vous avez noté ce matin, concernant les bateaux panaméens et des bateaux grecs. Je vais poser quelques questions sur ce que cela coûte. On a réussi à faire une entente avec une société hollandaise. Il y en a trois qui vont coûter un peu meilleur marché. Mais les trois autres, j'ai compté rapidement les frais d'entretien et d'intérêts, avec la meilleure volonté du monde, cela va vous coûter $5 millions ou $6 millions par année, et peut-être jusqu'à $8 millions par année, selon ce qu'on va pouvoir entrer là-dessus.

Vous allez faire cela à peu près $8 millions par année, en fonctionnant très bien du côté de l'hydro-électricité et celui des wagons. Et finalement, parce que vous fonctionnez très bien dans ces deux départements, on va prendre $8 millions que vous faites de profit et on va payer de l'intérêt et de l'entretien sur d'autres navires.

Est-ce que ce n'est pas mieux plutôt de crever l'abcès tout de suite et de dire, comme vous avez étudié d'ailleurs la possibilité de former une autre société à l'extérieur: On sort cela de là. C'est de valeur, on s'est fait fourrer de $30 millions ou de $50 millions, je ne le sais pas, sur les bateaux grecs, on prend notre pilule et c'est fini, on n'en reparle plus. C'était hier. C'est arrivé. C'est de valeur, on va pleurer tout le monde. Finalement, on ne devrait pas empêcher l'entreprise d'avoir un peu d'oxygène économique en coupant son profit, parce qu'elle va prendre soin d'erreurs du passé. C'est unequestion.

Je voudrais avoir des chiffres précis là-dessus. Qu'est-ce qu'on va perdre sur les trois navires de par l'entente qu'on a faite ou quel profit va-t-on faire sur les trois navires avec la société hollandaise? Qu'est-ce que cela va coûter de garder àquai les trois autres navires? Si vous me dites: On va les garder pendant trois mois ou six mois et, après cela, je pense bien qu'on aura une solution, cela va se régler, ce n'est pas encore si mal, mais ces six mois vont coûter encore $3 millions ou quelque chose comme cela. Vous allez devoir faire passablement de profit ailleurs pour pouvoir arriver. C'est une question que je voudrais poser au président.

En plus, je veux aussi poser une question, toujours dans le domaine naval, parce qu'il me semble que les deux autres domaines, les deux autres services fonctionnent bien. On pourrait questionner davantage, passer la journée à s'informer. Je pense que vous êtes très compétents dans ce domaine-là et les preuves sont faites, d'ailleurs, avec les chiffres que vous nous avez fournis. Bien sûr, on peut vous aider et on peut s'informer davantage, mais le cancer chez Marine Industrie, cela a été la division navale, c'est encore la division navale et si on n'opère pas carrément, je me demande si ce cancer-là ne nous atteindra pas et s'il ne tuera pas toute l'entreprise et même la société mère.

Il y a une question aussi que je veux poser à propos des bateaux polonais. Lorsqu'on s'est vu ici au mois de décembre, si je me souviens bien, il avait été question d'une perte possible de $5 millions. Le président nous a dit: Cela va dépasser $8 millions. Même si c'était $5 millions sur le rapport à l'époque, cela a dépassé $8 millions. Là, on est rendu à $18 millions. Ma question c'est: Est-ce que les $18 millions, c'est le maximum qu'on va perdre ou est-ce qu'il y a encore possibilité qu'on perde $2millions, $3 millions, $4 millions ou $5 millions additionnels, parce que cela a augmenté d'une façon considérable du mois de septembre jusqu'à aujourd'hui?

Or, je voudrais que le président de la SGF ou le président de Marine Industrie nous parle un peu justement du secteur naval, des bateaux polonais, de la perte qu'on a ou qu'on aura sur les bateaux grecs ou panaméens qui nous restent. Est-ce que ce n'est pas en vous faisant tordre les bras un peu, dans le fond, que vous avez consenti à garder le secteur naval ou est-cequ'au point de vue administratif, vous n'auriez pas suggéré qu'on coupe carrément là-dedans et c'est fini? C'est de valeur, on perd ces emplois-là, mais au moins à partirde là, on sauve tout le restant. (15 h 30)

M. Coulombe: II y a plusieurs points. Prenons d'abord la question des six bateaux panaméens ou grecs. Avant de passer la parole à M. Paquin ou à M. Dinsmore, concernant le contrat de gestion donné à Nedlloyd pour trois de ces bateaux, il ne faut pas oublier que, pour les trois autres, on est lié contractuellement avec M. Karageorgis, ce qui nous porte à croire qu'on respectera ce contrat. D'ailleurs, on a l'intention de faire respecter dans toute la mesure du possible ce contrat qui est signé avec lui. Le 6 septembre, M. Karageorgis doit prendre possession de ces bateaux, à un prix déterminé contractuellement. Si vous me demandez si cela va arriver, je répondrai que je souhaite que cela arrive et on va tout faire pour que le contrat soit respecté. C'est tout ce qu'on peut dire à l'heure actuelle. Les négociations sont commencées. Il y a eu des rencontres avec M. Karageorgis dernièrement. Ses inspecteurs viennent la semaine prochaine regarder de plus près les trois bateaux et cela se déroule selon les ententes contractuelles.

On va tout faire pour qu'en dépit du fait qu'il y a certains éléments du contrat qui peuvent permettre à M. Karageorgis de laisser traîner cela passablement, cela se règle. Il y a aussi la position de la SEE là-dedans, dans quelle mesure elle va vouloir financer M. Karageorgis. Il y a plusieurs questions qui restent à régler, mais le dossier est en marche, il fonctionne et il faut tenir pour acquis que le contrat va être respecté.

M. Blron: Vous avez dit à un prix contractuel, mais à quel prix?

M. Coulombe: C'est l'équivalent du prix qu'il y a dans la loi 108.

M. Blron: C'était $17 millions dans la loi 108. M. Coulombe: C'est cela.

M. Plessls-Bélair: Les contrats sont faits en dollars US. Les contrats varient entre $14 500 000 et $15 millions, ce qui donne...

M. Blron: Cela veut dire le prix de la loi. M. Plessls-Bélalr: A peu près.

M. Coulombe: Théoriquement, si ce contrat est respecté, au mois de septembre, ces trois bateaux voguent vers la Grèce ou je ne sais pas où, mais ils s'en vont.

M. Plessls-Bélalr: Le taux de change qu'on verra au mois de septembre va être important, à ce moment.

M. Coulombe: Maintenant, seulement pour préciser aussi certains chiffres, ces bateaux coûtent actuellementàMarine$18millionsparannée de frais d'intérêt, de gardiennage et ainsi de suite.

M. Blron: Les six bateaux?

M.Coulombe: Les six. Si on n'en a que trois, c'est $9 millions par année, au taux actuel. Cela tient compte des trois premiers, ce qui ne nous empêche pas, parallèlement aux discussions contractuelles avec M. Karageorgis, de continuer les efforts pour vendre ces bateaux, pour les vendre ailleurs, pour trouver d'autres clients, pour trouver des solutions de rechange, si jamais cela ne fonctionnait pas avec le contrat qu'on a en main. M. Paquin et M. Dinsmore, qui sont dans le dossier jusqu'au cou, pourront donner des détails là-dessus. Je vais leur laisser la parole au sujet des trois autres de Nedlloyd et de la structure du contrat qui nous lie avec Nedlloyd.

M. Plessis-Bélair: Je voudrais peut-être, juste avant, préciser quelques chiffres. Au début de l'année, quand on a fait le budget, on a pris certaines hypothèses de taux d'intérêt qui étaient les taux qu'on connaissait à ce moment-là. On a fait certaines hypothèses de gardiennage, d'assurance et de maintien au quai de ces bateaux et l'ensemble de ces coûts était de $18 millions.

Par la suite, il y a eu la renégociation avec Nedlloyd qui a fait que trois des navires sont maintenant sous contrat de gestion. Il y a eu une baisse des taux d'intérêt avec lesquels on vivait qui a eu un impact favorable. On en arrive à une situation où les coûts projetés à la fin de l'année, si rien ne change vont être de $14 millions. Comme on a $8 millions de subventions qui ont été accordés dans la loi 108, le coût net à Marine devrait se situer — parce qu'il y a des fluctuations possibles — aux alentours de $6 millions à $6 500 000 pour cette année. Donc, Marine devra supporter, à même les profits des autres divisions, $6 500 000 pour ces bateaux.

Maintenant, pour l'année qui s'en vient, pour l'année 1980, si rien n'était fait et si on fait l'hypothèse qu'on peut avoir un financement à long terme à 9%... Ce ne sont pas des taux utopiques. La SEE fait des financements à long terme à des taux variant entre 8 1/2%, 9%, 9 1/4%. Si on fait l'hypothèse qu'on peut avoir un taux d'intérêt de 9%, pendant une période de douze ans, avec un congé de repaiement sur la dette à long terme, et en faisant l'hypothèse, à ce moment-là, que les six navires seraient soumis à des contrats de gestion et nous rapporteraient les montants qu'on obtient aujourd'hui — donc, on ne fait pas une hypothèse utopique ou euphorique du marché — le coût pour Marine serait de l'ordre de $4 500 000 à $5 000 000, ce qui est encore un poids considérable qu'elle devrait supporter.

C'est pour ça que, dans le plan de redressement, on mentionnait qu'il faut faire en sorte d'alléger ce poids le plus possible pour que les bénéfices créés ou faits par les autres divisions ne servent pas qu'à supporter les coûts de financement et les coûts de ces navires.

M. Biron: Vous avez dit $4 millions à $5 millions. Ce sera pour les six navires si on fait des ententes comme on en a fait avec Nedlloyd.

M. Coulombe: C'est ça, au taux actuel d'affrètement.

M. Biron: Non, c'est pour les six navires. Cela veut dire $1 million par navire en chiffres ronds.

M. Plessis-Bélair: A peu près. Cela ne tient pas compte du repaiement... C'est le coût... Ce seraient les déboursés nets. Cela ne tient pas compte du repaiement de la dette qui devrait avoir lieu, la raison étant que le gouvernement nous a garanti un prix de vente de $17 350 000. Ce sont les coûts de charge, de support des navires.

M. Paquin (Jacques): Je pense que pour situer tout le problème du marché pour ces navires, il y a lieu de récapituler ce qui a été fait depuis la dernière commission parlementaire.

Je crois qu'il faut bien mentionner que, jusqu'à l'adoption de la loi 108, Marine avait très peu de moyens pour pouvoir disposer de ces navires, parce qu'elle n'avait pas les ressources financières pour pouvoir les offrir à un prix qui se rapprochait du prix du marché et encourir la perte sans faire faillite. Alors, on a juste à se rappeler que la valeur aux livres, après les subventions pour ces navires, était d'environ $21 millions par navire et qu'on les a abaissées, avec l'aide qui nous a été fournie, à environ $17 millions, ce qui signifiait une perte de $4 millions par navire; $4 millions multipliés par six, ça fait $24 millions. C'était à peu près l'avoir des actionnaires; Marine ne pouvait pas vraiment poursuivre des efforts de vente pour offrir les navires à un prix qui corresponde à la demande qui existait.

A la suite de l'adoption de la loi 108, les efforts ont été intensifiés pour essayer d'offrir les navires à un prix plus bas. Ces efforts se sont avérés quand même futiles pour la principale raison qu'actuellement encore, les taux d'affrètement pour exploiter un navire se situaient, au début de l'année, à environ $4500 ou $5000 par jour, alors que les frais d'exploitation, quand on s'en tient uniquement aux frais d'équipage, d'assurance, d'entretien, etc., étaient d'environ $3500 par jour. Ce qui laissait entre $3500 et $4500 ou $5000, une marge de $1000 à $1500 par jour.

C'est le "cash flow" qu'un opérateur est capable de gagner pour pouvoir justifier un achat. Or, on dit que pour amortir un prix de $15 millions, à 9% ou 9,25% sur une période d'environ douze ans, ça prend environ $6000 par jour.

Alors, il n'y a personne qui puisse exploiter les navires sans avoir la capacité financière de pouvoir subir un déficit de caisse, pour l'instant. Ce qui fait qu'il n'y a pas de demande qui provienne d'entreprises privées, il n'y a aucune entreprise privée, même la société Nedlloyd, qui se dit fort intéressée à administrer nos navires, a examiné et on a tenté de l'inciter à nous faire une offre d'achat. Son conseil d'administration a refusé parce que le niveau d'endettement qu'elle a actuellement est déjà suffisamment élevé. Augmenter ce niveau d'endettement sans pouvoir avoir suffisamment de revenus pour satisfaire le service de la dette, elle ne peut pas le faire.

Alors, dans le contexte présent, chez les armateurs du secteur privé, on ne peut pas avoir de demande, tant et aussi longtemps que les taux d'affrètement ou les taux de fret n'ont pas atteint un niveau qui est suffisant pour justifier le prix qu'on croit raisonnable pour la vente d'un navire.

S'il fallait les vendre, on n'a jamais vraiment eu de proposition sérieuse, jusqu'à maintenant, qui aurait offert un montant qu'on croit raisonnable, même passablement en dessous du prix garanti par le ministre des Finances, soit $17 750 000, ce qui est à peu près l'équivalent de $15 millions US.

M. Biron: C'est justement le but de ma question au Président tout à l'heure; avec la loi 108, on garantissait un montant de vente de $17 350 000.

M. Paquin: Oui.

M. Biron: Théoriquement, le lendemain matin, Marine Industrie aurait pu se tourner de bord, vendre les bateaux $5 millions chacun et dire au ministre des Finances: Donne-moi le reste et bonjour.

M. Paquin: Oui.

M. Biron: II y aurait eu une perte, tout le monde aurait critiqué la perte, mais Marine Industrie aurait au moins arrêté de perdre $4 millions, $5 millions, $9 millions ou $18 millions par année en entretenant des bateaux et en payant de l'intérêt dessus. Je voudrais savoir si — et cela a été le but de ma question sur la division navale — une fois qu'on aura freiné ce cancer-là des bateaux grecs ou panaméens, une fois qu'on s'en sera débarrassé et qu'on pourra dire: Cela ne coûte plus un cent à Marine Industrie, cette histoire-là, on s'en est débarrassé, on a perdu $50 millions, on a tout perdu, on recommence à zéro.

Est-ce que c'est rentable de garder la division navale? Dans votre rapport, j'ai vu qu'il y avait encore des probabilités là-dessus. Est-ce avec gaieté de coeur que vous l'avez gardée? Est-ce que vous êtes confiants qu'au cours des cinq prochaines années ou dans cinq ans d'ici, cela pourrait devenir rentable ou si on n'est pas mieux de couper ça tout de suite?

M. Coulombe: La question que vous posez, c'est la question qui a angoissé toute l'équipe depuis un an, à toutes fins utiles. Il faut prendre la question sous deux angles. Le premier, c'est que le marché n'attendra pas qu'on se fasse une idée nous-mêmes, c'est-à-dire que le marché a déjà pris une partie des décisions, en ce sens qu'on n'a pas de contrat à l'heure actuelle, après les six bateaux qui doivent être terminés. Donc, l'évolution du marché, les gens sont unanimes à dire: 1982-1983, donc, d'ici ce temps-là, c'est définitif que ce sera extrêmement difficile.

Deuxièmement, nous ne sommes pas convaincus, et je pense que cela a été assez fouillé, qu'on a toutes les données en main actuellement pour pouvoir dire de façon péremptoire qu'il n'y a rien à faire là-dedans, il faut fermer ça. Je fais abstraction des politiques gouvernementales, mais évidemment, s'il y avait des changements dans les politiques gouvernementales, le contexte général changerait. On n'aurait plus le même environnement et là, ce serait... Encore faudra-t-il les faire de façon rentable les bateaux. C'est beau d'avoir des contrats, mais encore faut-il les exécuter de la façon la plus efficace et la plus rentable possible.

On n'a pas encore abandonné l'idée — et c'est l'esprit de la première phase du rapport — que par des recherches un peu plus systématiques, il n'y aurait pas possibilité d'avoir certains types spécialisés de bateaux qui pourraient assurer une certaine rentabilité. En d'autres mots, on n'a pas assez de données pour pouvoir dire qu'on abandonne cette idée-là. C'est pour ça qu'on veut mettre un peu d'argent, en termes de recherche de produits un peu plus spécialisés, et si on pouvait — ce qui n'est pas impensable — développer un tel produit au niveau naval, on pense que ça pourrait donner un certain avantage comparatif à Marine Industrie et cela pourrait être intéressant. En d'autres mots, on n'a pas assez de données actuellement pour dire que l'on abandonne cette hypothèse-là. On veut continuer et on pense que si jamais ça produisait quelque chose, il pourrait y avoir des lueurs d'espoir.

Il y a aussi le contexte de la réparation navale qui demeure quand même une activité payante pour Marine Industrie et ceci conditionne certains équipements à Marine Industrie, certaines organisations, le maintien d'un certain niveau d'activité. Actuellement, on est à $5 millions de réparations navales, c'est une activité payante. Donc, cela entretient quand même de façon rentable une activité navale.

Ce matin, strictement en regardant le carnet de commandes potentielles, non pas à partir de projections théoriques mais à partir de projets annoncés, connus, pour la plupart, d'ailleurs, publics, on a identifié entre 20 et 25 projets précis sur lesquels Marine Industrie pourrait soumissionner de façon intéressante. On va avoir la confirmation ou la négation de cette hypothèse dans l'année qui vient, parce qu'on va avoir des soumissions à remettre et mêmes certaines prochainement. En d'autres mots, d'ici un an et demi — et c'est l'esprit du rapport — on s'est dit qu'on allait tout faire, dans le contexte des politiques actuelles, pour trouver une place à Marine Industrie dans ce domaine-là. Si le marché lui-même se conduit de telle sorte que la décision est prise quasiment en dehors de notre contrôle, les décisions seront différentes à la fin de 1980, mais on n'a pas abandonné l'idée. C'est le fond du rapport; on pense qu'on n'a. pas toutes les données encore pour nous permettre d'avoir une position aussi draconienne que de dire: Actuellement, on perd de l'argent, donc, il faut fermer. On pense qu'il y a beaucoup d'efforts qui devront être mis là-dessus, quitte, à la fin de 1980, à faire un réexamen de la situation à la lumière de ce qui se sera passé, des soumissions sur lesquelles on a coté, des contrats qu'on aura obtenus ou non, etc. (15 h 45)

M. Biron: Je voudrais poser ma dernière question avant de passer à un autre intervenant. J'ai posé des questions tout à l'heure sur les bateaux polonais en disant qu'on est rendu à $18 millions de pertes. Est-ce qu'il y aura des pertes additionnelles? C'est peut-être un contrat de $80 millions pour les quatre bateaux ou quelque chose comme ça, $90 millions: ça veut dire qu'on a 20% de pertes en partant. C'est peut-être une indication que c'est difficile, que ce sera difficile, à moins que vous me donniez les raisons pour dire qu'il y a telle et telle raison technique ou humaine qui est arrivée entre-temps. Je sais que tous ces chambardements à Marine ont dû causer beaucoup de casse-tête aux travailleurs et aux dirigeants de l'entreprise.

Est-ce que c'est possible de produire rentable-ment et est-ce qu'on va avoir d'autres pertes avec les navires polonais? Les pertes sur les navires polonais et grecs ne s'expliqueraient-elles pas, par hasard, par le graphique que vous avez donné dans votre présentation sur la comparaison entre le nombre de travailleurs et le nombre de cadres dans l'entreprise? On s'aperçoit que c'est peut-être un peu mieux, mais au milieu de 1978, il y avait autant de cadres que de travailleurs syndiqués ou à peu près. Est-ce que ce n'est pas une explication? Pas autant, 40 pour 2000, quelque chose comme ça. En tout cas, c'était beaucoup plus près qu'en temps normal.

Est-ce que cela ne serait pas une raison pour que ça coûte plus cher ou vous avez peut-être une autre raison? Mais je voudrais savoir pourquoi on a perdu $18 millions sur les navires polonais et si on va continuer d'en perdre encore.

M. Coulombe: Sur la question des bateaux polonais, je pense qu'on a distribué le rapport ce matin. Comme disait M. Scowen, on a été d'une honnêteté quasiment dangereuse, on a exposé clairement le problème des bateaux polonais; les causes réelles, les coûts réels sont expliqués dans ce document. Sur la question que vous nous posez, est-ce que les pertes sur les bateaux polonais vont se limiter aux chiffres qu'on mentionne à l'heure actuelle? En toute honnêteté, je ne prendrais pas la position de dire: Oui, ça va se limiter à ça. On fait tout en ce sens, à l'heure actuelle, les cadres, les gens font tout pour que ça se limite et même que ce soit moindre que ça. Il ne faut pas oublier que ce ne sont pas toutes des pertes encourues à l'heure actuelle. C'est une prévision de pertes jusqu'à la fin du contrat, c'est-à-dire jusqu'au milieu de 1980, juin ou juillet 1980. Donc, il peut se produire beaucoup d'événements d'ici ce moment-là, il peut arriver des perturbations quelconques qui vont modifier cette prévision.

Evidemment, les pertes encourues au moment où on se parle, on ne pourra pas les récupérer. Quant à la partie des pertes qui est prévue d'ici à la fin du contrat, trop d'événements peuvent se produire pour qu'on puisse affirmer de façon catégorique que ça va se limiter à ça. On le souhaite, on fait tout notre possible pour que ce soit ça, mais il y a des événements qui peuvent survenir, de tout ordre, qui n'ont rien à voir avec la construction des bateaux, qui peuvent modifier cette prévision.

On espère que non seulement ça va se limiter à ça, mais on espère même pouvoir la diminuer. Cela se peut que certains événements se produisent qui modifient ces chiffres.

M. Blron: Mais les...

Questions générales

M. Tremblay: Si le chef de l'Union Nationale le permet, j'aimerais poser une sous-question. Quand vous mentionnez les pertes qui pourraient être plus grandes, premièrement, c'est après la subvention de 20% du gouvernement fédéral, donc 20% de pertes, 20% de subvention, on est déjà rendu à 40%, cela se rapproche de la subvention de 50% du gouvernement français.

Dans le cas des navires polonais, vous avez les mêmes clauses de pénalité dans les retards de construction que vous aviez avec les bateaux grecs. Pouvez-vous nous donner les chiffres de pénalité que vous vous attendez de payer au moment où on se parle, à cause des délais?

M. Coulombe: $1 800 000 de pénalité.

M. Tremblay: Pour les quatre navires, vous avez $1 800 000 parce que vous êtes certain des délais. S'il y avait des délais additionnels, cela coûterait combien, en termes de pénalité?

M. Coulombe: C'est tant par jour. M. Tremblay: Combien payez-vous?

M. Brlsson: C'est $3500 par navire par jour de délai.

M. Tremblay: De délai.

M. Brlsson: Cependant, selon les causes du délai, il y a certaines des clauses de ce contrat qui font état de causes de force majeure. A ce moment-là, tout dépend de la cause du délai. Si la cause du délai n'est pas une cause acceptable, la pénalité est de $3500 par jour.

M. Coulombe: II y a non seulement la question de la pénalité par jour, mais aussi la question des conséquences sur le financement. Si la période de financement est plus longue, c'est évident que les coûts sont plus élevés.

M. Tremblay: Un autre coût qui s'ajoute. Vous dites que vous avez emprunté pour financer la construction des bateaux polonais et ces intérêts courent. Vous avez emprunté combien pour les bateaux polonais?

M. Plessls-Bélalr: On a une marge de crédit qui est ouverte jusqu'à $40 millions et qui varie selon les livraisons ou le niveau d'avancement des différents navires. Cela fonctionne par étapes. Mais cette marge de crédit a un plafond de $40 millions. A un certain moment, il est prévu qu'on se rende jusqu'à un emprunt de $40 millions, dans le programme de construction.

M. Tremblay: Est-ce qu'il est indiscret de vous demander quel taux d'intérêt vous payez? C'est le "prime"?

M. Brlason: Présentement, c'est 11 3/8%.

M. Scowen: Dans le contrat, est-ce qu'il y a une clause qui permettra à la compagnie polonaise de mettre fin au contrat, à cause des délais? Ils sont tenus de prendre le bateau, même si le délai n'est pas respecté.

M. Coulombe: II faut mentionner deux choses. Les Polonais, actuellement, sont parfaitement au courant de l'état du dossier. Les gens de Marine Industrie sont allés les rencontrer, ils ont accepté les choses, ils sont en négociation avec la SEE qui a accepte de prolonger le financernent. Il reste un point en suspens...

M. Plessis-Bélair: C'est le début des remboursements des emprunts de la Pologne au gouvernement canadien, ou à la SEE. La SEE a accepté de reporter la date ultime où elle va continuer à faire des prêts, mais la Pologne a également demandé que la date du premier remboursement de la Pologne à la SEE soit également reportée d'une période correspondante. Nous sommes dans l'attente de la décision finale de la SEE.

Ce qu'on nous dit, c'est que, comme le crédit a été consenti par le Conseil des ministres fédéral, dans la période qu'on vient de vivre, le Conseil des ministres ne s'est pas réuni pour approuver ou ratifier cette prolongation du début de la période de remboursement. Nous sommes en attente. Les gens de la SEE nous disent que ce n'est rien d'exceptionnel ou d'anormal. Mais il faut que le ministre fédéral de l'Industrie et du Commerce signe un document quelconque pour que ce soit présenté au Consei I des ministres.

M. Biron: Ce retard dans la livraison des navires polonais et l'amende qu'on aura à payer, cela ne peut pas être pire que l'amende. Est-ce que cela peut devenir comme les navires grecs, où les gens annulent leurs navires et nous sommes "poignés" avec quatre bateaux de plus?

M. Brisson : Dans le contrat polonais, il n'y a pas de clause qui permette à l'armateur d'annuler le contrat après un certain nombre de jours, tel que stipulé dans les autres contrats. Cette clause n'existe pas.

M. Plessis-Bélair: Pour les bateaux panaméens, si vous vous souvenez, la date ultime était de 180 jours après la date contractuelle. Dans le cas des contrats polonais, il n'y a pas de limite ultime.

M. Biron: D'accord.

Le Président (M. Boucher): Merci. M. le député de Richelieu.

M. Martel: M. le Président, je tiens à relever une affirmation qu'a faite le chef de l'Union Nationale tout à l'heure, en parlant de sociétés d'Etat, que ce ne doit être une Saint-Vincent-de-Paul. Je conçois qu'une société d'Etat, comme l'entreprise privée, doit être rentable financièrement. Je pense — et c'est une question que je vais poser tout à l'heure—qu'on doit, à ce moment-là, essayer de demander aux gens de la Société générale de financement quels moyens de conciliation ils font entre la notion de rentabilité financière de l'entreprise et la rentabilité sociale.

Marine Industrie, depuis dix ans, avec un chiffre d'affaire de $970 millions, a fait, je pense, des profits de six millièmes pour cent. Et cela a coûté à l'Etat, au point de vue des subventions par employé, par année, environ $1115, d'après les calculs que j'ai faits. Si ces mêmes gens-là, on les retourne à l'assurance-chômage ou au bien-être social, cela va coûter entre $4000 et $5000. Il faut aussi tenir compte de cette rentabilité sociale, dans des entreprises d'Etat; sinon, qu'est-ce qu'elles font là, les sociétés d'Etat?

Après avoir lu ce rapport...

M. Biron: Je ne veux pas commencer un débat, mais, sur ce point particulier, j'ai dit que, si l'Etat décide, de quelque façon que ce soit, d'intervenir pour l'aide sociale, on devrait le faire avec un budget spécial et l'oublier, et non pas pénaliser les administrateurs de nos sociétés d'Etat, parce qu'on leur demande d'agir comme le ministère des Affaires sociales. C'est juste cela.

M. Martel: Je pense que c'est important de concilier les deux notions, celle de rentabilité financière et celle de rentabilité sociale, dans le cas d'une société d'Etat. Jusqu'à maintenant, les chiffres que je vous ai donnés prouvent qu'à ce moment-là, cela coûte moins cher de subventionner que de payer des mesures sociales.

Après avoir lu ce document, comme député du comté de Richelieu, je constate que — et vous savez que l'économie de Richelieu, dans une proportion de 50%, repose sur Marine Industrie — nous ne sommes pas allés assez en profondeur dans ce plan de redressement industriel de Marine Industrie. Par exemple, dans le domaine naval, j'aurais beaucoup de questions à poser sur la division hydro-électrique, de même que celle des wagons. Mais, tout d'abord, je constate que l'on tient pour acquis que, dans le domaine de l'hydro-électricité, cela va bien ; à la suite de la baie James, on a des contrats de $350 millions jusqu'en 1985. Et on semble se limiter à cela, dans le rapport.. On ne pense pas à un marché plus grand, un marché international. On ne pense pas, par exemple, à développer ce qui peut être une réalité bientôt, ce qui va se passer à la baie de Fundy, c'est-à-dire cet investissement de plusieurs milliards de dollars qui va sans doute se concrétiser, qui va demander des machines marémotrices. A ce moment-là, si cela se réalise, est-ce qu'on a fait des prévisions, à Marine Industrie, dans le domaine hydro-électrique, pour essayer d'accaparer ce marché potentiel qui s'en vient?

Par exemple, dans le domaine naval, on dit que cela va mal à travers le monde, mais dans ce cahier-là, je n'ai pas trouvé ce qu'on cherche. On parle, à la page 17, d'une réduction. Comme relance de la construction navale, on parle de réduction de personnel. A ce moment-là, je pense qu'on devrait parler plutôt de diversification dans le domaine de la construction navale. Il n'y a pas de mot, il n'y a pas une page où j'ai vu qu'on parlait de possibilités d'exploiter un marché qui, en Europe, semble très rentable, du moins en Angleterre et en Union soviétique, celui des aéroglisseurs. Par exemple, il n'est pas question d'aller exploiter ces marchés-là. Il n'est pas question non plus dans le domaine des wagons de voir à de l'expansion,

comme par exemple le fait une entreprise privée. Bombardier fabriquait uniquement de la motoneige. A un moment donné le marché de la motoneige est devenu saturé. On afait une association avec MLWet on a envahi le marché du transport en commun.

Par exemple, dans le domaine du wagon, au lieu de se limiter à Marine Industrie que la situation, la conjoncture économique actuelle nord américaine fait que nous avons une proportion assez considérable de wagons à construire parce que le dollar canadien est inférieur au dollar américain — cela sera temporaire — on se limite dans des perspectives de redressement de Marine Industrie à cette conjoncture-là. On ne songe pas à faire une entreprise mixte dans le domaine de la navigation navale, par exemple, avec la Davie Shipbuilding Lauzon, on ne pense pas, dans le domaine des wagons, pour accaparer le marché du transport en commun, de s'associer à uneentreprise privée aussi ou bien àen faire un genre de "joint venture".

Les questions que j'aimerais poser, sont les suivantes. Quelle est la politique de Marine Industrie en termes de marketing, de recherche et de planification? Parce que je ne l'ai pas trouvée dans ce cahier d'une cinquantaine de pages. Ce serait une des premières questions.

Ensuite, j'aimerais, par exemple, demander quant à la construction navale, si on envisage justement d'autres marchés comme celui des aéroglisseurs, si on a tenu compte également, tout le monde le sait, de ce changement de gouvernement qu'on a eu à Ottawa, des changements de politiques de la part du gouvernement fédéral dans le sens de se donner une véritable politique maritime, de donner des dents à la politique de la loi du cabotage qui n'aurait pas une influencedirecte et immédiate sur le marché de la construction navale.

Voilà des questions auxquelles j'aimerais avoir des réponses. C'est pour cette raison que je trouve que, dans l'immédiat, même si ce rapport est bien fait, on ne va pas assez loin pour trouver des solutions. On ne se creuse pas suffisamment le cerveau pour trouver véritablement des solutions à court terme, mais aussi à long terme. Ce serait important de connaître justement cette politique qu'il est censé y avoir dans toute entreprise, quelle soit publique ou privée, de marketing, de recherche, de planification. Avez-vous fait également des représentations auprès du Conseil national des recherches à Ottawa qui est rendu à subventionner des entreprises américaines pour faire de la recherche dans le but de trouver de nouveaux produits? Avez-vous eu recours à cela?

Evidemment, je reviendrai tout à l'heure à d'autres questions dans le domaine des wagons, mais je pense que je vais me limiter à cela pour le moment en attendant des réponses.

M. Coulombe: Avant de prendre chacun des points que vous avez soulignés, je voudrais quand même vous mentionner qu'il y a un point que vous avez affirmé sur lequel personnellement je ne suis pas d'accord, c'est que dans le domaine du... D'abord, il faut bien spécifier qu'il s'agit d'un plan de redressement qui a un horizon précis dans le temps, c'est-à-dire on s'est arrêté en 1984.

Deuxièmement, dans le domaine de l'hydroélectricité, si on les prend un par un, tout ce que vous avez mentionné a fait l'objet d'études et de rapports précis tant sur le plan international que pour le problème des nouveaux produits. On a parlé, ce matin, des turbines bulbes, des stations pompées, etc. On les a mentionnées brièvement dans le rapport, mais on a des études précises là-dessus qui ont indiqué le marché potentiel et l'intérêt très précis que Marine Industrie va avoir là-dedans. Lorsqu'on parle dans la deuxième phase d'investissements dans l'hydro-électricité de l'ordre de $20 millions ou $25 millions, ce n'est pas strictement pour exécuter les contrats qu'on a en main. C'est dans la perspective... Ce que vous avez mentionné, c'est là-dessus qu'on travaille et qu'on va continuer à travailler. (16 heures)

M. Martel:Travaillez-vous en collaboration avec Hydro-Québec international, par exemple, pour avoir des marchés européens?

M. Coulombe: Les communications avec l'Hy-dro sont excellentes, dans ce domaine, non seulement avec l'Hydro-Québec, mais aussi avec nos partenaires français, avec la compagnie générale d'électricité de France. On a des contacts très étroits avec eux non seulement au point de vue technologique, mais aussi — on l'a mentionné ce matin — il y a la possibilité de consortium. On est actuellement partenaire dans un consortium international pour un contrat en Amérique centrale. C'est dans cette perspective. Sur l'hydro-électri-que, les points que vous avez mentionnés ne sont pas explicites dans la petite synthèse de 50 pages, mais dans les annexes dont vous avez la liste à la fin, vous allez voir, seulement en jetant un coup d'oeil sur ces annexes, que ces choses ont été traitées et on en tient compte.

Sur la question des wagons et des autres... On peut peut-être continuer là-dessus.

M. Brisson: J'aimerais mentionner tout de même que les investissements que vous avez notés dans l'hydro-électrique, qui vont aller jusqu'à $25 millions, ne peuvent avoir été justifiés sur une période de cinq ans. Or, ces investissements sont justifiés justement dans les études que nous avons faites des marchés futurs pour les prochains dix et quinze ans. Ces marchés comprennent tous les nouveaux types, ce ne sont pas des nouveaux types, mais des types qui vont devenir en demande après 1985, soit les types hélice, capelan et bulbe. En plus de cela, dans la progression que vous avez — vous avez simplement les premiers quatre ans de montrés — dans la division industrielle, on voit la croissance qui va de $1 million à $18 millions dans la période de quatre ans, au point de vue des nouveaux produits. Si on l'avait extrapolé pour dix ans plutôt que quatre, cela aurait démontré les résultats de cette étude de marché qui a été faite.

M. Martel: Est-ce que vous avez fait des études dans des marchés potentiels utilisant d'autres sortes d'énergie? Par exemple, j'ai mentionné tout à l'heure l'énergie marémotrice, parce que la

baie de Fundy, si cela arrive, cela va être un boom un peu comme la baie James.

M. Brisson: Dans les marémotrices, c'est le type bulbe qui est employé.

M. Martel: Est-ce qu'on est capable de faire cela à Marine?

M. Brisson: Oui.

M. Martel: Est-ce qu'on a étudié la possibilité d'accaparer ce marché?

M. Brisson: Oui. Actuellement, nous sommes...

M. Martel: Est-ce qu'on a étudié, par exemple, la possibilité d'autres formes d'énergie, l'énergie éolienne, par exemple?

M. Brisson: Nous avons déjà travaillé avec l'énergie éolienne avec l'IREQ, je crois. En ce qui concerne l'énergie nucléaire, il y a des éléments que nous avons dans nos projets d'avenir; nous voulons nous préparer pour faire certains éléments des centrales nucléaires. Nous projetons aussi des études sur les générateurs à haute vitesse, qui seront motorisés par autre chose que de l'eau, soit la vapeur, le gaz et ces choses.

Toutes ces formes de génération d'énergie ont été considérées.

M. Martel: D'accord. Dans le domaine hydro-électrique, jusqu'en 1985, cela va assez bien. Si vous avez des études de marché pour les nouvelles formes d'énergie — pas les nouvelles formes, parce que les machines marémotrices, cela existe depuis longtemps et l'énergie éolienne, évidemment, depuis encore plus longtemps. Dans le domaine qui va mal, c'est-à-dire celui de la navigation navale, je trouve — et, malheureusement, on a souligné tout à l'heure... En effet, quand on compare à Saint-Vincent-de-Paul, je n'aime pas bien cela, parce que quand on parle, à la page 17, de relance de l'industrie de la construction navale, et qu'on trouve un mot et que c'est réduction de personnel, je n'aime pas bien cela de voir 600, peut-être 1000 personnes mises à pied. Je vous ai posé la question tout à l'heure, à savoir si on avait envisagé d'autres possibilités de marché. On sait que dans le domaine de la construction navale, en général, il y a une saturation. Entre parenthèses, je pourrais vous poser une question sur le tonnage que vous mentionnez dans un paragraphe: Combien y a-t-il de bateaux de 20 000 tonnes et plus et combien y en a-t-il de 20 000 tonnes et moins, parce que c'est ce qu'on fabrique chez nous?

L'autre question: Est-ce qu'on a envisagé sérieusement la possibilité de pénétrer le marché des aéroglisseurs, sous brevet avec l'Angleterre peut-être, parce que c'est elle qui le détient actuellement? C'est très populaire en Angleterre, c'est très populaire dans les pays Scandinaves, en Russie. C'est un marché qui se développe énor- mément. En Amérique du Nord, on n'a pas développé ce marché. Est-ce que Marine a envisagé, pour maintenir justement ses "jobs" dans la division navale, explorer ce marché qui, éventuellement, va finir par se développer en Amérique du Nord? Est-ce qu'on a fait des études dans ce sens?

M. Brisson: Pour répondre, M. le Président, à la première question, au sujet de nouveaux produits ou de produits spécialisés pour la division navale, nous avons fait des recherches et nous avons déterminé certaines lignes de produits ou certaines modifications aux produits, parce que, dans la division navale, ce sont des bateaux, nous avons recherché certaines sections où nous pourrions peut-être obtenir, par voie de recherche et de développement, un avantage sur le marché.

A la page 20 de notre plan, on en mentionne quelques-uns, mais vous nous saurez gré de ne pas trop les publier, parce que nous sommes dans un marché très concurrentiel et qu'il est évident que le premier qui met la main sur le produit a l'avantage compétitif. Nous avons là certains termes très génériques de produits que nous recherchons et que nous voulons développer et développer justement à même l'argent que la Société générale de financement, dans un budget de recherche, veut mettre à la disposition de ses filiales.

Il y a quelques produits là où nous voulons développer une spécialité ou un avantage technologique spécial qui nous permettra de prendre avantage du marché.

M. Martel: Mais vous n'avez pas utilisé la possibilité d'exploiter les aéroglisseurs et de développer ce secteur dans la division navale?

M. Brisson: A la deuxième question, dans le cas des aéroglisseurs, nous avons regardé légèrement la question des aéroglisseurs. Nous ne l'avons pas rejetée a priori, mais dans le cas des aéroglisseurs, il y a une question de marché et il y a aussi une question de genre de technologie. Les aéroglisseurs, c'est presque de l'aérodynamique, plus que du naval. Il y a là le problème de faire une étude très approfondie de la possibilité de modifier nos installations et nos méthodes de travail pour y arriver. On l'a déjà fait. On a fait le "hydrofoil", il y a sept ou huit ans. On est encore capable de le faire, mais cette étude n'est pas à point et nous ne sommes pas à point là-dedans.

M. Martel: Est-ce que vous êtes en mesure d'affirmer que les ateliers qui servent actuellement à la construction navale, dans une période de temps immédiate et à moyen terme, ne seront pas fermés? Je me situe à la fin des contrats, du carnet de commandes qu'on possède, qui se termine avec les deux traversiers du Québec en mars 1980.

M. Coulombe: Ce qu'on peut vous garantir et vous affirmer, c'est que l'utilisation des équipe-

ments physiques de Marine va être faite dans la perspective de la meilleure rentabilité et de la plus grande efficacité possible.

M. Martel: A ce moment-là, vous ne répondez pas à ma question; vous la contournez. Autrement dit, Sorel, s'est fait une réputation grâce à sa main-d'oeuvre locale à travers le monde. Le marché est stagnant actuellement, à travers le monde, on sait ça. Par contre, on sait qu'il va reprendre. Est-ce que vous, qui êtes responsables de ce redressement industriel, faites spécialement à la division navale les efforts nécessaires pour être en mesure de soutenir la concurrence lorsque le marché reprendra probablement en 1981, 1982?

M. Coulombe: C'est affirmé clairement... C'est l'hypothèse de base du plan de redressement et durant l'année et demie qui s'en vient devant nous, la fin de 1980, le début de 1981, on va avoir des réponses beaucoup plus précises à fournir dans cette perspective, mais l'hypothèse du plan, c'est ce que vous venez d'affirmer, c'est-à-dire de tout faire pour redresser la situation. Je vous ai parlé de recherche tantôt. On va avoir un budget spécial de $2 millions, chose qui ne s'est jamais faite dans ce domaine. On va mettre un budget spécial non pas strictement pour la division navale, mais qui va être utilisé aussi par la division navale pour de nouveaux produits.

Quand on parle de recherche, on ne parle pas de recherche fondamentale. On parle de la recherche vraiment appliquée sur des choses qui existent ou qui peuvent, avec ces ingénieurs-conseils, être modifiées pour trouver de nouveaux types de produits. On va faire cela dès cet été. Les dépenses vont commencer à se faire dans ce domaine.

M. Martel: D'accord. Toujours dans ce domaine, il y a une chose que je vois très clairement dans ce cahier, c'est la répartition, par exemple, que vous faites entre la construction navale et la réparation navale.

J'aimerais savoir, par exemple, le chiffre d'affaires dé la construction navale et de la réparation navale, par exemple, les coûts, les profits, les pertes et les emplois, parce que ce n'est pas clairement établi dans votre cahier, de 1967 à 1969, pour les deux années d'exploitation.

M. Brlsson: Dans la réparation, M. le Président, est-ce que...

M. Martel: Oui, j'ai demandé de faire une distinction très nette, chose qui n'apparaît pas dans le rapport, entre la construction navale... On veut savoir, en quelque sorte... On accuse de lourdes pertes dans le domaine de la construction navale. Est-ce que la réparation navale est payante? Est-ce que la réparation navale va se maintenir?

M. Brisson: Oui, nos projections sont que la réparation navale va même croître durant cette période, pour passer d'environ $5 millions, cequ'elle est présentement, à environ $8 500 000 en 1984. Donc, une croissance réelle de 10% à 12% par année.

M. Martel: Si on tenait compte qu'Ottawa se décide à faire une véritable loi de cabotage, où on peut exiger que les bateaux qui viennent chercher nos matières premières soient des bateaux canadiens, qui soient réparés au Canada et au Québec, évidemment, ça pourrait augmenter l'ouvrage de nos chantiers, si on avait une politique maritime vraiment établie.

M. Brlsson: Ces chiffres sont tous basés sur les politiques existantes.

M. Martel: Avez-vous les chiffres d'affaires de la division navale, de la division construction et réparation?

M. Brlsson: Pour la division navale, au point de vue de la construction, les projections que nous avons, basées sur les données que vous avez dans votre brochure, vont de...

M. Martel: Non, moi, je parle des années antérieures pour voir la rentabilité des deux, la réparation et la construction.

M. Brlsson: Nous savons, historiquement, que la réparation a toujous été rentable et d'une bonne rentabilité, au-delà de 10%.

M. Martel: Combien de personnes sont employées à la réparation?

M. Brisson: Cela varie, évidemment, mais, en moyenne, nous comptons environ 150 personnes; ça peut aller jusqu'à 200, mais c'est le niveau moyen d'emplois à l'année.

M. Martel: Une question que j'ai posée tout à l'heure: C'est sûr qu'avec un profit de 0,006% sur un chiffre d'affaires de $970 millions, ce n'est pas le diable. Une société privée aurait peut-être des comptes plus sévères à rendre. Envisagez-vous, pour avoir un plus grand marché, de faire ce genre de "joint venture" avec une entreprise privée qui, je pense, contrairement à ce que peut affirmer un membre de l'Assemblée nationale, n'est pas en concurrence directe entre Marine et Lauzon? Je pense qu'on ne construit pas nécessairement le même tonnage de bateaux et que, à ce moment, il y aurait peut-être avantage, pouravoirun marché, d'envisager de faire un genre de "joint venture" — entreprise privée, entreprise mixte — dans le but justement de rentabiliser plus rapidement cette société d'Etat. Je reviendrai tout à l'heure avec la même idée concernant, par exemple, le domaine des wagons où, je pense, on est dans une situation assez stagnante.

M. Coulombe: Pour la possibilité d'entente avec d'autres compagnies, non seulement on ne l'élimine pas, mais on pense que ce serait une excellente chose. Selon les opportunités, c'est certainement

une direction et c'est d'ailleurs carrément inscrit dans la loi, dans la définition des objectifs de la SGF, de travailler, dans la mesure du possible, avec des partenaires. D'ailleurs, dans plusieurs filiales de la SGF, CEGELEC Industrie, CEGELEC Entreprise, on a des partenaires avec lesquels nous collaborons, tant au niveau du capital-actions que des activités réelles.

M. Martel: Mais vous n'excluez pas cette possibilité...

M. Coulombe: Non seulement on ne l'exclut pas, mais c'est une dimension qui nous intéresse énormément.

M. Martel: D'accord, mais vous n'avez pas répondu à ma première question, une question d'ordre général en termes de marketing, recherche, planification; qu'entendez-vous faire?

M. Brlsson: Du côté du marketing, nous devons avouer que cette activité n'était pas extrêmement développée au cours des dernières années. Il faut bien penser au cadre général, du côté hydroélectrique, le marketing était limité pratiquement au client que nous avions; on a remarqué que nous avions à peu près un seul client. L'activité au naval était tellement élevée que la fonction marketing proprement dite n 'avait pas sa place et enfin, du côté des wagons, nous étions plutôt limités au marché canadien et encore, c'était une activité limitée.

Cependant, dans ce que nous avons ici, ce plan nécessite la mise en place d'activités de marketing très bien orientées et bien pensées. Tous les plans d'action qui vont découler de la mise en oeuvre de ce plan n'ont pas été définis dans le document qu'on vous a remis, mais la nécessité d'organiser, dans chaque division, une force de marketing est reconnue et va être mise en place dès que nous passerons à l'action... (16 h 15)

M. Martel: II y a un petit point... Vous avez parlé tout à l'heure de cadres. Cela m'amène à parler de l'administration, des frais généraux, du personnel cadre. Je constate — encore là il n'y a que quelques lignes, c'est un résumé, vous allez me dire — à la gestion d'une entreprise, c'est tout de même capital, que cela se résume à peu près à cinq lignes dans le document. Il reste une chose, on parlait de cadres tout à l'heure. Sur 3500 employés de Marine Industrie, il y a 380 cadres pour 3120 employés non cadres. Est-ce une proportion que l'on retrouve dans une entreprise privée semblable? Par exemple, à Lauzon, l'entreprise privée, est-ce qu'on retrouve autant de chefs que d'Indiens?

M. Brlsson: De façon générale, évidemment là on parle d'un ratio de un à dix, ces chiffres sont difficiles à établir. Nous avons regardé dans plusieurs autres compagnies et il y a plusieurs compagnies où, par exemple, le rapport cadre à employé est même de un à quatre. On a relevé combien... A un moment donné on est arrivé à...

M. Martel: Est-ce que vous pourriez me donner des exemples de compagnies privées qui sont dans le même domaine de la construction navale, avec des ratios...

Une Voix: Je regrette, dans la construction navale, je ne peux pas donner de comparaison, je n'en ai pas.

M. Martel: Est-ce que vous connaissez le ratio de Lauzon?

Une Voix: Non, je ne connais pas. M. Martel: Pourtant ce n'est pas loin.

Une Voix: Oui, ce n'est pas loin, mais il y a des informations...

M. Coulombe: On ne lit pas leurs états financiers à tous les mois.

M. Martel: Non? Toujours dans le même domaine, les frais généraux, par exemple, c'est drôlement important, on constate qu'il y a 12,8% des frais généraux qui sont de 36... Vous avez une réponse au ratio?

M. Brlsaon: M. le Président, M. Bourdon, le directeur général de la division me parle d'un chantier naval aux Etats-Unis qui a de grands succès, Newport News et il me dit que le rapport est le même. C'est-à-dire que c'est un ratio de 1 à 10 cadres à employés.

M. Plessls-Bélalr: II y a quelqu'un qui me dit, M. Martel, qu'à Davie Shipbuilding il y a 380 cadres pour 1700 employés, alors... Ah bon, je m'excuse. C'est le président du syndicat.

M. Martel: D'accord. La même question...

M. Brlsson: Je voudrais mentionner aussi que si on veut obtenir les effets des programmes que nous mettons en place, il reste tout de même que nous avons besoin de cadres très bien placés et très bien expérimentés et bien entraînés pour pouvoir faire les recherches, mettre sur place les bases nécessaires pour faire l'expansion. Tous les nouveaux produits que nous recherchons sont des produits à plus haute technologie, qui demandent justement des techniciens et des ingénieurs additionnels et c'est une tendance qu'on devra même remarquer, à mesure qu'on veut augmenter le niveau de technologie de toute industrie, ce ratio va avoir tendance à diminuer si on dit que ça va passer de un à dix, de un à huit, et à ce moment-là, il y a des précautions à prendre, parce que les frais généraux sont dispendieux, mais tout de même, les nécessités d'avancer dans le domaine technologique sont telles que ce ratio va changer.

M. Martel: Ce qui arrive, chaque fois qu'il y a des réductions de personnel, on voit rarement les cadres mis à pied, ce sont surtout évidemment les

employés non cadres qui sont remerciés. Cela se fait de façon régulière.

M. Coulombe: Là-dessus, il faut dire que depuis un an à Marine Industrie il y a eu un effort réel fait exactement dans le sens de la question que vous posez. En août 1978, il y avait 425 postes de cadres à Marine Industrie. Au moment où l'on se parle, il y en a 381. Donc, le nombre de postes de cadres est passé de 425 à 381 au cours de l'année qui s'est écoulée. Je pense que c'est un effort réel pour couper vraiment dans les frais généraux. Cela n'a pas été facile, parce que cela a touché aussi des individus personnellement, non seulement des postes. C'était là l'effort de Marine Industrie pour assainir ses frais généraux. C'est un effort réel, c'est quand même 10% de coupure dans les frais généraux au niveau des cadres.

M. Martel: Une autre question, si mes collègues me le permettent encore, dans les frais généraux. Souvent je lis les rapports financiers de compagnies privées et je regarde les chiffres que vous avez omis de mettre, je pense, à la page 32, mais que j'ai calculés moi-même. Dans les frais généraux qui sont de $36,7 millions, vous avez un montant de $4 700 000 qui représente 12,8% consacré à la direction. Je trouve ça un peu élevé comparé à des entreprises privées dont je peux vérifier les bilans, à l'occasion.

M. Plessis-Bélair: La question porte sur les frais généraux corporatifs de $4 700 000?

M. Martel: C'est ça. Dans les frais généraux,il est question du naval, de l'hydro-électrique, des wagons divers, direction, ce qui donne $36 700 000, les frais de direction représentent 12,8% de ces $36 700 000, donc $4 700 000. Je trouve ça élevé pour une entreprise.

M. Plessis-Bélair: Ce sont les frais de financement, les frais pour les services de comptabilité, d'informatique, ce sont les frais de siège social ou du bureau de la direction, les frais du service du personnel, service de main-d'oeuvre. Il y a 150 centres de coût qui sont impliqués dans ce poste. C'est l'organisation corporative de la compagnie.

M. Martel: Vous ne trouvez pas que c'est élevé, 12,8%, alors qu'on voit des entreprises qui fonctionnent à 6% ou 7%?

M. Plessis-Bélair: Par rapport au chiffre d'affaires ou par rapport au total?

M. Martel: Oui, par rapport aux frais généraux.

M. Plessis-Bélair: Oui, mais vous me dites que c'est 12,7% des frais généraux.

M. Martel: Non, 12,7% du total de $36 700 000 qui représente les frais généraux.

M. Plessis-Bélair: C'est ça, c'est par rapport aux frais généraux. Je pense que les pourcentages auxquels vous faites référence, ce sont surtout des pourcentages qu'on voit en termes du chiffre d'affaires.

M. Martel: Non, non, qui se rattachent également aux frais généraux d'une entreprise privée.

M. Plessis-Bélair: Je ne trouve pas cela exorbitant.

M. Martel: Moi, je trouve ça un peu fort, ces chiffres.

M. Plessis-Bélair: Basé sur quoi, M. Martel?

M. Martel: Je ne sais pas, je me demande s'il n'y a pas un laisser-aller dans ce domaine, s'il n'y a pas un redressement à faire; vous avez diminué le nombre de cadres, je me demande s'il n'y aurait pas possibilité de faire la même chose au niveau de la direction.

M. Plessis-Bélair: II y a toujours moyen, la direction a changé quatre fois en cinq ans.

M. Martel: On fait du redressement ou on n'en fait pas.

Vous avez parlé aussi du siège social tout à l'heure, pourquoi le siège social est-il à Montréal au lieu d'être à Sorel ou Tracy?

M. Plessis-Bélair: Le siège social est à Sorel, le siège juridique est à Sorel.

M. Martel: Non, il est à Montréal.

M. Plessis-Bélair: II y a un bureau à Montréal. Le siège social est à Montréal.

M. Martel: Pourquoi est-il à Montréal au lieu d'être à Sorel ou Tracy?

M. Plessis-Bélair: II faudrait demander aux anciens présidents de Marine Industrie, M. Martel.

M. Martel: Je vous le demande à vous, vous êtes là, c'est à vous à redresser ces choses.

M. Plessis-Bélair: Présentement, la direction de Marine Industrie a ses bureaux à Sorel.

M. Coulombe: II faut vous dire que dans la dernière année, il y a une transformation, qui s'est faite là-dedans, on n'a pas cru bon d'entrer dans ces détails. Mais, d'une façon très claire, le bureau de Montréal, il y a une entente avec la SGF et il y a deux personnes de Marine dans les bureaux de Marine à Montréal.

M. Tremblay: II n'y a personne de Marine à la SGF?

M. Coulombe: Non, au bureau de Marine à Montréal.

M. Tremblay: Au bureau de Marine.

M. Coulombe: M. Martel parle des bureaux de Marine à Montréal.

M. Martel: Ce sont des bureaux qui coûtent tout de même assez cher d'entretien, avoir ce siège social à Montréal alors que l'action se passe à Sorel.

M. Coulombe: II y a une entente financière entre la SGF et Marine pour l'utilisation de ces bureaux.

M. Brlsson: C'est effectif cette année, alors cela ne paraît pas dans les chiffres de l'an passé que vous avez devant vous.

M. Martel: Je laisse la chance à mes collègues, je reviendrai tout à l'heure, sur une autre division.

Le Président (M. Boucher): M. le député d'Outremont.

Relations entre Marine et le gouvernement

M. Raynauld: Merci, M. le Président. Je voudrais poser quelques questions sur les aspects financiers qui impliquent les relations entre Marine et le gouvernement. Vous me corrigerez si je fais erreur, au mois de décembre, le gouvernement a fourni une garantie de $104 millions, garantie qui sera effective possiblement plus tard, lorsqu'on saura quel va être le prix que Marine obtiendra pour les bateaux panaméens. En plus, il y a eu $10 millions en subvention, c'est pour 1979, je pense, ou pour 1978?

M. Plessis-Bélair: Pour 1978.

M. Raynauld: $10 millions en subvention pour réduire le coût des bateaux panaméens, pour réduire cette dette à $104 miIIions. Ensuite, en vertu du même projet de loi, vous me préciserez ça, la SGF a reçu du capital-actions de $10 millions pour cinq ans; c'est la SGF, ce n'est pas Marine, c'est ça?

Et, en plus, il y a eu un prêt de $8 millions à Marine Industrie, pour compenser les intérêts à payer sur les pertes. Cela veut dire que, pour Marine Industrie en tant que telle, $122 millions, si je comprends bien la garantie ont été donnés à Marine Industrie, pour le problème des bateaux panaméens.

M. Coulombe: Vous supposez que les bateaux ne sont pas vendus, mais qu'ils sont donnés?

M. Raynauld: Oui, comme je l'ai dit tout à l'heure, je dis que ces $104 millions sont dans une catégorie à part.

Je veux clarifier ces choses pour ne pas faire d'erreur d'interprétation. L'objet de mes questions, ce n'est pas cela. L'objet de mes questions, ce sont les fonds supplémentaires qui seraient nécessaires à Marine Industrie. C'est cela qui m'intéresse à l'heure actuelle. Je veux savoir, dans quelle mesure, lorsque vous nous dites qu'il faut, dans un certains sens, effacer le problème des dettes relatives aux bateaux, il faudra des subventions ou des paiements supplémentaires, de la part du gouvernement. Je veux en arriver à cela, parce que là, on tourne un peu autour du pot. On dit: II faut que les finances se clarifient, il faut que Marine Industrie se débarrasse de ce poids qu'elle traîne à l'heure actuelle.

Si je comprends bien, de ce côté-là, il y a un fonds de roulement négatif, de $11 700 000, à la fin de 1978. C'est évidemment relié aussi aux bateaux. Mais il va falloir un financement de ces $11 700 000. Ensuite, vous vous attendez à avoir une perte supplémentaire d'environ $17 millions, à l'heure actuelle, pour les bateaux polonais.

A ce moment-ci, si on vous suit et qu'on essaie de tirer les conséquences de ce que vous avez dit jusqu'à maintenant, si vous voulez que le plan de redressement fonctionne, sans ce boulet, est-ce exact de penser qu'il faudrait $25 millions supplémentaires de la part du gouvernement? Oui ou non?

M. Plessis-Bélair: Le montant de $17 millions que vous mentionnez pour les bateaux polonais a déjà été pris en considération à la fin de l'année. Il ne doit pas être pris une seconde fois en considération. A la fin de 1978, on a pris les réserves et les provisions requises pour tenir compte des pertes, non seulement des pertes encourues à la fin de 1978, mais des pertes qu'on estime devoir encourir au cours des années 1979 et 1980. Donc, les bateaux polonais, dans la mesure où les pertes finales seront de $17 800 000, n'auront plus de conséquence financière ou comptable sur les états financiers de Marine Industrie.

M. Tremblay: J'aimerais demander la permission du président de m'absenter quelques minutes pour aller rencontrer la chambre de commerce et je reviens à l'instant même, après avoir rencontré cette délégation.

Le Président (M. Lefebvre): Vous êtes excusé.

M. Raynauld: Vous nous avez dit aussi qu'à ce moment-là, au mois de décembre, au mois de novembre, quand on parlait de cela, vos estimations n'étaient pas de $17 millions. Elles étaient bien inférieures à cela. Dans quelle mesure dites-vous que cela n'affecterait pas le montant que vous devriez recevoir pour assainir la situation financière de Marine Industrie? Si vous voulez, je peux bien poser la question plus générale: Combien faut-il pour que vous puissiez dire que le gouvernement a fait en sorte qu'il a effectivement éliminé le problème des bateaux, sur le plan financier?

M. Plessis-Bélair: II y a différentes façons d'aborder le problème. On a fait, à un moment donné, une analyse de projection pour être en mesure de savoir s'il serait plus rentable pour le gouvernement de vendre les bateaux $10 millions U.S. aujourd'hui, d'absorber la perte immédiatement, ou d'attendre, dans l'hypothèse d'une augmentation éventuelle des prix de vente des bateaux. (16 h 30)

La conclusion à laquelle on est arrivé, lorsqu'on a fait cette analyse, c'est que les chances indiquaient ou les projections indiquaient qu'à cause de l'augmentation des taux d'affrètement, il semblait préférable d'attendre et de supporter les charges financières présentement plutôt que de vendre au prix qu'on aurait pu obtenir il y a trois mois et demi ou quatre mois lorsqu'on a fait cette analyse.

Pour essayer de répondre le plus précisément possible à votre question, cette année, cela va coûter à Marine Industrie de $6 000 000 à $6 500 000 de ses propres ressources financières, de ses propres profits, pour supporter les navires panaméens. Si les conditions qu'on a décrites pour 1980 se réalisent, c'est-à-dire qu'on reste pris avec les six bateaux, qu'on a un financement de douze ans à 9% et qu'on obtient les mêmes résultats des contrats de gestion qu'on a en vigueur présentement, l'an prochain, pour ces six navires-là, le coût sera de l'ordre de $4 500 000 à $5 000 000. Là, la décision qui est à prendre par le bailleur de fonds, c'est de dire: Si on veut régler le problème de Marine Industrie, est-ce que c'est mieux d'essayer d'avoir un prix de vente aujourd'hui pour que Marine Industrie n'ait pas à encourir ces frais-là, parce que, si Marine Industrie ob-bient les $17 350 000 et qu'il n'y a plus de poids financier pour Marine Industrie... ou est-ce que c'est mieux d'attendre une conjoncture meilleure pour obtenir un meilleur prix de vente des navires? C'est la question qu'on pose. Malheureusement, je ne peux pas vous chiffrer la réponse mathématiquement, cela dépend de facteurs qui sont externes à Marine Industrie comme l'allure du marché, les taux d'affrètement, les taux d'intérêt, etc.

M. Raynauld: Je suis tout à fait disposé à vous laisser prendre cette décision-là. Je ne vous ferai pas de sermon. Vous êtes plus compétents que nous pour en décider. Je suppose que vous prendrez la meilleure décision. Il reste que, si vous posez le problème de cette manière-là, en 1979, cela va coûter de $6 millions à $6 500 000, suivant votre estimation actuelle. Elle est sujette à toutes les hypothèses habituelles. Cela va vous coûter $6 millions à $6 500 000. Est-ce qu'il faut, oui ou non, ajouter à ce montant-là les $11 700 000 de fonds de roulement qui est négatif pour vous permettre d'assainir votre situation financière?

M. Plessis-Bélair: Si on fait un "break even "... Disons que les dépenses de $6 500 000 sont couvertes par des bénéfices provenant d'autres sources et qu'on a une rentabilité zéro à la fin de l'année, on aurait donc un bilan qui ressemblerait à celui qu'on avait l'an dernier. Si on fait cette hypothèse et si on enlève l'incertitude des bateaux, on estime que Marine Industrie devra avoir $15 millions d'emprunts à long terme pour rétablir sa situation financière et fonctionner de façon raisonnable. Je pense que cela vous donne un ordre de grandeur. Nous autres, nous disons: Si l'incertitude quant aux bateaux panaméens peut être enle- vée, il y a de la place dans le bilan de Marine Industrie pour être en mesure de justifier cet emprunt de $15 millions, ce qui aurait pour effet de régler ou de passer d'un déficit de fonds de roulement de $11 millions à un surplus de fonds de roulement de $4 millions, ce qui est loin d'être une panacée, mais c'est certainement un point de départ qui permettrait plus de flexibilité que présentement.

M. Raynauld: Oui, mais cet emprunt de $15 millions, ce serait simplement pour rétablir la situation?

M. Plessis-Bélair: C'est cela.

M. Raynauld: Vous avez dit aussi que, pour commencer votre plan de redressement, il vous fallait des investissements à court terme...

M. Plessis-Bélair: C'est cela. M. Raynauld: ... de $7 millions. M. Plessis-Bélair: Oui.

M. Raynauld: C'est ce que vous nous avez dit tout à l'heure, plus un autre million pour la recherche et le développement. Cela fait donc $8 millions. Vous avez besoin de financer ce montant-là aussi. Ce seraient des emprunts, finalement, qui seraient plus élevés que $15 millions?

M. Plessis-Bélair: Oui, ou cela pourrait être aussi une rentabilité.

M. Raynauld: Accrue.

M. Plessis-Bélair: Si on enlève l'hypothèse qu'on a faite dans le plan de redressement, c'est qu'en 1980, il y a une rentabilité qui est à l'horizon, dans la mesure où il n'y a pas de bateaux panaméens qui nous pendent au bout du pied. Par cette rentabilité-là, on peut s'autofinancer par les profits qu'on va susciter et obtenir un financement additionnel. Les montants dont on parle de $7 000 000 à $8 000 000, sont des montants qui ne sont pas impossibles, selon notre évaluation.

M. Raynauld: Quand vous estimez — regardez votre bilan — que les bateaux panaméens vous posent des problèmes considérables, est-ce que c'est parce que les emprunteurs éventuels peuvent penser que $104 millions de la part du gouvernement, ce n'est pas suffisant?

M. Plessis-Bélair: Non, ce n'est pas cela. La raison pour laquelle il y a...

M. Raynauld: II y a une garantie que vous avez reçue de $104 millions. Il n'y a pas beaucoup d'entreprises qui pourraient se féliciter d'avoir une garantie sur des pertes de ce genre.

M. Plessis-Bélair: En effet.

M. Raynauld: Pourquoi est-ce si lourd à porter?

M. Plessis-Bélair: Le problème, c'est que c'est beau d'avoir une garantie, mais il va falloir qu'à un moment donné, cette garantie vienne à jouer. Si elle joue dans cinq ans, pendant ce temps, Marine aura dû payer les Intérêts sur ces $104 millions, ce qu'elle fait présentement et ce qui lui cause des problèmes. L'incertitude ne vient pas du fait qu'il y a une garantie. Elle vient du fait qu'au moment où cette garantie va permettre à Marine de régler la question panaméenne, cela pose une incertitude. Dans cette période, il y a des coûts qui sont une certitude, c'est-à-dire qu'il y a des coûts d'intérêts qui doivent être supportés.

M. Raynauld: Les coûts d'intérêts, vous nous en avez parlé tout à l'heure. Ils sont inclus dans les $6 millions.

M. Plessls-Bélair: C'est cela.

M. Raynauld: Les $6 500 000 pour le coût, pour supporter le poids des bateaux, sont déjà inclus là-dedans. A ce moment, on ne parle plus de $100 millions, on parle de $6 millions. Ces $6 millions, vous...

M. Plessls-Bélair: Oui, mais si cela dure cinq ans et que le prêteur se dit: Les bénéfices anticipés dans les autres divisions vont servir, non pas à faire des investissements et à être plus rentables, non pas à remettre la division navale sur pied, mais à payer des intérêts ou un manque à gagner à cause des six bateaux, il va être assez hésitant à avancer les fonds, parce qu'il va se dire: Je ne suis pas sûr d'être remboursé de mon capital. Il va peut-être y avoir $30 millions qui vont servir à supporter un déficit relatif aux bateaux panaméens.

M. Raynauld: Est-ce que vous avez déjà approché des prêteurs éventuels pour connaître leurs réactions, suivant le bilan, comme celui que vous avez?

M. Plessis-Bélair: L'an dernier...

M. Raynauld: Ce n'est pas un bilan qui est si mauvais que cela, une fois qu'on enlève les bateaux panaméens. Il y a encore les bateaux polonais qui me posent des problèmes, mais les autres...

M. Plessis-Bélair: Oui. On a approché effectivement des prêteurs à long terme. Ils sont en train d'analyser. On leur a fait une présentation. Le 12 juin, on va connaître les conditions qu'ils poseraient pour nous donner un financement de $15 millions, notre demande étant d'avoir un emprunt de ce montant à terme sur dix ans. Je ne peux pas vous dire exactement aujourd'hui quelles sont ces conditions, mais je suis sûr qu'il va y en avoir.

M. Raynauld: Oui. Quelqu'un d'entre vous a fait allusion à la possibilité que la SGF ait des placements ou vienne en aide à Marine. Je voudrais explorer cette possibilité. Le président de la SGF est là. Cela m'étonne un peu, parce que compte tenu des pertes que Marine a faites cette année la SGF n'a pas beaucoup de ressources additionnelles à disposer si je comprends bien, puisqu'au total, la SGF a également fait des pertes de $14 millions. Evidemment, on additionne les choses. Il y a quand même One perte nette globale de $14 millions pour la SGF. Comment la SGF pourrait-elle... Sous quelle forme la SGF pourrait envisager...

M. Coulombe: II ne faut pas oublier que la loi 108 a quand même donné $65 millions de capital à la SGF.

M. Raynauld: Oui, sur cinq ans. C'est cela, les $10 millions par année?

M. Coulombe: Oui, c'est cela. Vous avez raison de...

M. Plessis-Bélair: II reste que la question que vous posez est valable, parce que si vous regardez également les états financiers, la SGF a déjà Investi $33 millions, c'est-à-dire $31 335 000 plus $2 820 000 dans Marine Industrie. Comme il a été mentionné, le rendement financier a été inexistant au cours des dix dernières années. Avant de mettre des fonds additionnels, il y a des questions à se poser, comme tout investisseur prudent.

M. Coulombe: II faut ajouter aussi que ces investissements vont être en concurrence avec d'autres projets auxquels la SGF travaille à l'heure actuelle, où les rendements...

M. Raynauld: II y aurait des grosses chances qu'ils soient...

M. Coulombe: II va y avoir des...

M. Raynauld:... supérieurs à ceux qu'on pourrait anticiper dans Marine. C'est un peu cela que je voulais vous faire dire, parce qu'il me semblait qu'il n'y avait pas tellement d'espoir à fonder sur la SGF, dans les circonstances actuelles, pour trouver une solution au problème de financement de Marine.

Je voudrais mentionner aussi en passant l'intention de mon collègue de Richelieu qu'une subvention de $10 millions, comme celle qui a été versée en 1978, compte tenu des 1800 emplois qui existent dans la section navale, ça représente $5500 par employé. C'est un petit peu plus, je pense, que ce qu'il nous adonné comme impression tout à l'heure.

M. Martel: Le calcul que j'ai donné, j'ai diminué les pertes évidemment. C'est un calcul qui ne tenait pas compte des pertes de Marine et cela arrivait justement à des subventions de $1150 par employé, si on ne tient pas compte des pertes.

M. Raynauld: Evidemment, quand on élimine les pertes, ça paraît toujours mieux.

M. Martel: Mais, tout de même, on peut dire qu'en 1978, les chiffres ne sont pas de $5000 si on calcule tout, mais de $37 714 par employé, si on calcule les pertes avec les subventions du gouvernement. Lorsqu'on parle des subventions, de l'aide apportée à la Société générale de financement, je parle des subventions de $10 millions, des prêts de $18 millions, des garanties sur les bateaux de $17 350 000 pour les six navires panaméens, ce qui donne un total de $132 100 000. C'est là que je parle de subventions globales, compte tenu de quelque $37 000 par employé que ces subventions donnent. Mais si on enlève les pertes, ça arrive à un montant de $1115. C'est moins cher que de payer $5000 ou $6000 de bien-être social ou d'assurance-chômage.

M. Raynauld: Mais, ce que j'essaie de vous suggérer, c'est que vous ne pouvez pas enlever les pertes de l'entreprise pour calculer combien ça coûte pour maintenir les emplois. C'est justement à cause des pertes que ça coûte quelque chose pour maintenir les emplois. Quand il n'y a pas de pertes, ça ne coûte rien à la société pour maintenir les emplois, bien au contraire.

M. Martel: Vous, qui êtes économiste... M. Raynauld: C'est une bonne chose.

M. Martel: ...vous savez qu'on peut calculer avec pertes et sans pertes.

M. Raynauld: Ah, bien oui, je comprends bien et vous pouvez faire dire n'importe quoi aussi aux chiffres.

M. Martel: Cela ne vous arrive pas parfois de dire n'importe quoi?

M. Raynauld: Non, j'essaie de dire les choses aussi exactement que possible. Parfois, on peut se tromper, mais...

Une Voix: Dieu merci!

M. Raynauld: Pour revenir donc à ma question de base, si je puis me permettre d'essayer de résumer ce que vous nous dites, le poids des bateaux, finalement, ça se résume à $6 000 000, $6 500 000.

M. Plessls-Bélair: Cette année.

M. Raynauld: Cette année, 1979. L'année prochaine, on n'en sait rien, ça va dépendre des solutions qui seront apportées, c'est ça? Mais là, sur la base de ce qu 'on sait, c'est à peu près $6 000 000?

M. Plessis-Bélair: $6 000 000 à $6500 000. M. Raynauld: C'est ça qu'est le poids. M. Plessis-Bélair: C'est ça...

M. Raynauld: Bon!

M. Plessis-Bélair:... après une subvention de $8 millions.

M. Raynauld: Après une subvention de $8 millions, mais une subvention dont le renouvellement n'est pas promis à l'heure actuelle?

M. Plessis-Bélair: Non.

M. Raynauld: Bon! Cela clarifie, je pense, les choses pas mal. On parle là d'une somme d'environ $6 millions, compte tenu évidemment des subventions qui ont déjà été faites, qui ont déjà été versées, mais ça, c'est du passé. Je n'ai pas à tenir compte des pertes à venir sur les bateaux polonais quand je dis une chose comme ça, $6 millions.

M. Plessis-Bélair: Ce que je vous ai dit, c'est que dans la mesure où les pertes demeurent à $17 800 000, vous n'avez pas à tenir compte de ces pertes.

M. Raynauld: On n'a pas à tenir compte de ça.

M. Plessis-Bélair: Elles ont été "provisionnées" à la fin de l'année 1978. S'il s'avérait que les pertes étaient de $19 millions, il y aurait $1200 000 additionnels à ajouter.

M. Raynauld: Maintenant, sur un plan d'affaires, est-ce que c'est une bonne chose d'emprunter, par exemple, $15 millions à long terme pour reconstituer votre fonds de roulement?

M. Plessis-Bélair: Cela dépend des taux d'intérêt. Présentement le "prime" est à 12% et on peut emprunter à long terme à un taux inférieur à 12%.

M. Raynauld: Oui.

M. Plessis-Bélair: Je pense que vous avez certainement plus de raisons... Vous êtes capable d'expliquer ça certainement mieux que moi. Mais je pense que la compagnie n'a pas le choix, de toute façon...

M. Coulombe: Et, deuxièmement..

M. Plessis-Bélair:... elle doit se reconstituer un fonds de roulement.

M. Coulombe:... les investissements qui ont été faits à Marine depuis quelques années ont été faits à même le fonds de roulement. Alors, c'est de rétablir une situation saine. (16 h 45)

M. Raynauld: Parce que vous comprenez pourquoi je vous pose cette question. Pour ma part, ce que je veux savoir comme parlementaire, c'est si, dans six mois, vous allez revenir ici et dire: Ecoutez, il n'y a pas de solution. Pour lancer notre plan de redressement dont vous sembliez très fiers et très

satisfaits, pour le lancer, il faut que le gouvernement nous donne une subvention supplémentaire de $10 rnillions ou un prêt de $15 millions, etc. C'est ce que je veux savoir de vous, parce que, nous, nous sommes des parlementaires ici et c'est ce qui nous intéresse. Moi, les décisions administratives, je suis prêt à vous les laisser, parce que c'est vous qui êtes compétents pour en parler, mais j'essaie de regarder quelles sont les implications pour le gouvernement éventuellement.

M. Coulombe: Notre position, c'est qu'on veut tout faire pour ne pas en arriver à cette étape. Toutes nos hypothèses sont basées sur le fait qu'on ne reviendra pas pour demander ça. On admettra que c'est toujours dangereux de dire "jamais", mais tous nos efforts, toutes nos hypothèses de travail vont dans le sens qu'il faut que Marine se sorte de ce bourbier par ses propres moyens. On pense que les investissements qui ont été faits là-dedans, surtout avec la loi 108, donnent la base, une base fragile, mais, après avoir dit ça, je ne peux pas dire que jamais il n'y aura de demande. Mais toutes nos hypothèses vont dans le sens qu'il n'y en ait pas.

M. Martel: En passant, si le Parti libéral s'était vraiment occupé de la Société générale de financement, de 1970 à 1976, on ne serait peut-être pas ici en train de faire adopter des lois. S'il s'était occupé de l'administration de Marine et de la Société générale.

M. Raynauld: M. le Président...

Le Président (M. Boucher): S'il vous plaît!

M. Raynauld: ... quand le député dit ça, la seule solution à laquelle j'aurais pu penser, c'est qu'il soit nommé président de la SGF. Il avait les solutions tout à l'heure...

M. Martel: J'aurais certainement fait mieux que ceux qui sont passés là en 1972 et 1973...

M. Raynauld: Sûrement. Je n'en ai aucun doute!

M. Martel: Alors qu'on ne savait même pas où étaient les présidents.

Le Président (M. Boucher): A l'ordre, s'il vous plaît, messieurs, on s'éloigne!

M. Gagné (Richard): M. le Président.

Le Président (M. Boucher): Oui, monsieur?

M. Gagné: Pouvez-vous me dire à quelle heure les syndicats vont pouvoir intervenir? On remarque que M. Rodrigue Tremblay a quitté la salle. Sera-t-il de retour?

Le Président (M. Boucher): A 17 heures, m'a-t-on dit.

M. Gagné: A 17 heures?

Le Président (M. Boucher): Oui, je l'avais annoncé au début de la réunion, parce que...

M. Gagné: Peut-on tenir pour acquis qu'à 17 heures, quand M. Tremblay reviendra, nous aurons le droit de parole?

Le Président (M. Boucher): Vous pouvez l'avoir tout de suite, s'il y a des questions qui vous concernent, monsieur.

M. Gagné: On va attendre que M. Tremblay soit là et, à 17 heures, on interviendra.

Le Président (M. Boucher): D'accord.

M. Raynauld: M. le Président, j'avais terminé cette série de questions, je pense que je vais repasser la parole à mon collègue, qui voulait précisément poser des questions aux syndicats.

Le Président (M. Boucher): II y avait les députés de Huntingdon et de Duplessis qui avaient demandé la parole. Je vous ferai remarquer que je fais la rotation. M. le député de Huntindgon.

M. Dubois: Merci, M. le Président. J'ai bien l'impression qu'on tourne un peu en rond depuis le début de la commission, même si j'ai manqué quelques minutes. Je crois bien que le but ultime de cette commission est de trouver une solution à moyen et à long terme pour la survie de Marine. A court terme, on sait qu'il y a un problème majeur, qui implique peut-être pour le gouvernement d'investir des fonds immédiatement, afin que Marine puisse vivre dans un contexte financier plus viable.

M. Coulombe: Si je puis me permettre, M. le député, l'objectif précis, c'est que la loi 108 dit à Marine: Vous allez présenter, avant le 1er juin, un plan de redressement. Le plan est sur la table; ce plan ne demande, pour le moment, rien au gouvernement.

M. Dubois: D'accord.

M. Coulombe: II n'y a pas d'investissements qui sont demandés au gouvernement dans ce plan.

M. Dubois: II n'assure quand même pas la survie de Marine en ce qui a trait à la construction navale. J'enlève les autres secteurs, qui sont rentables, mais si je touche strictement à la construction navale, il n'y a pas de solution à moyen et à long terme, on ne peut pas s'assurer présentement, nous basant sur le document que vous avez présenté, que, dans cinq ans, on sera encore dans le marché de production de navires, ici, au Québec.

Si on regarde les interventions qui ont été faites par d'autres pays, — comme exemple, la France où on supporte financièrement l'inflation,

on supporte aussi les coûts de production à 50% — si on considère qu'un contrat qui prendrait environ deux ans, pourrait être supporté à presque 70% du coût du navire, est-ce que le Québec ou le Canada ou les deux ensemble peuvent se permettre d'intervenir jusqu'à ce point dans la construction navale, dans le contexte actuel? Je ne sais pas quel va être le contexte dans dix ans. Est-ce que le dumping va continuer? Parce qu'un c'est un vrai dumping à ce moment. Un armateur canadien peut acheter un bateau produit en France et il va lui coûter 30% du coût réel finalement, si on regarde le portrait?

M. Coulombe: Vous admettrez que, la réponse à votre question, seuls les gouvernements peuvent la donner.

M. Dubois: Oui, mais la réponse aux problèmes de construction navale, à moyen et long terme, n'est-ce pas une intervention gouvernementale ferme et précise, ou si on fait une intervention annuelle et qu'on dit: Peut-être va-t-on vous donner 5% d'aide, peut-être va-t-on vous donner une subvention additionnelle? Est-ce qu'on assure une survie de Marine par des interventions annuelles ou un programme...

Je comprends que la loi 108, c'est un programme sur cinq ans, mais ça n'assure pas la survie de Marine Industrie en ce qui a trait à la construction navale. Est-ce qu'il y a lieu de l'abandonner ou non? Le député de Richelieu a fait état tout à l'heure des problèmes sociaux qu'entraînerait la fermeture des chantiers de la construction navale plus particulièrement. Si, pour l'Etat, c'est primordial qu'on garde 100% des employés qu'on a présentement, il va falloir que bientôt le gouvernement prenne une décision avec le gouvernement canadien — parce que je pense que les deux gouvernements devraient intervenir là-dedans, ils sont en cause tous les deux — pour qu'on supporte cette industrie à 50% ou à 60% ou à 70%, si on veut être concurrentiel sur les marchés, ou qu'on lâche complètement. Je pense qu'il n'y a pas bien des options, il y en a deux. On lâche ou on met le paquet dedans, en ce qui a trait à la construction navale. Il ne semble pas quand même qu'à courte échéance, on puisse dire: Ce sera rentable dans cinq ans ou dans dix ans. Les perspectives d'avenir ne semblent pas plus brillantes qu'il ne le faut. Si on regarde le Brésil, qui a quand même augmenté de beaucoup sa participation dans la construction navale, la main-d'oeuvre est de beaucoup inférieure, ces gens ont les matériaux, l'acier nécessaire. Je ne pense pas que ce soit très brillant pour le Québec présentement. C'est une intervention gouvernementale massive qui peut régler le problème.

Il s'agit maintenant que le gouvernement actuel, comme c'était le cas pour le gouvernement précédent — je pense, sans accuser de formation politique — prenne une décision bientôt sur l'avenir de notre industrie navale au Québec. Si on met le paquet, il faut le mettre jusqu'au bout pour rendre Marine Industrie concurrentielle sur le marché mondial, ou on arrête toute la production.

Je voulais vous poser une autre question en ce qui a trait aux deux traversiers dont le contrat vous fut alloué dernièrement, il y a trois ou quatre mois, deux ou trois mois, je ne sais trop. Est-ce que cette construction sera rentable? Prétendez-vous faire des profits sur la construction de ces deux traversiers? Entrevoyez-vous...

M. Brlsson: Oui, sur les deux traversiers; oui, ils doivent être rentables.

M. Dubois: Quand vous dites "rentable", dans cette industrie-là, qu'est-ce que c'est? 5%, 10%?

M. Brlsson: Je vais expliquer. Durant l'année 1980, où une bonne partie des travaux vont se faire, le contrat lui-même et les coûts associés à ce contrat seront tels qu'ils seront moindres que le prix que nous allons en recevoir. Donc, le contrat lui-même est profitable. Cependant, l'activité à la division navale sera tellement réduite cette année-là qu'il n'y aura pas assez d'activités pour payer tous les frais de la division. Or, durant l'année 1980, nous prévoyons encore une perte à la division navale, une perte de fonctionnement, même si le contrat lui-même, qui se termine au mois de mars 1980, en soit, aura été un contrat qui aura été produit à un coût moins élevé que les coûts estimés.

M. Dubois: Je comprends très bien que ce n'est pas avec deux traversiers qu'on peut régler tous les problèmes financiers, mais, en ce qui a trait strictement à cette production-là, c'est rentable. C'est la question que je me posais. Etant donné qu'il y a eu d'autres soumissionnaires, d'autres constructeurs de navires ou de traversiers qui pouvaient quand même offrir les mêmes services que ceux de Marine Industrie, cela m'intriguait un peu de savoir s'il y aurait des profits réalisés dans cette construction.

Je reviendrai tout à l'heure, je n'ai pas d'autres questions pour le moment.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le député de Huntingdon. M. le député de Duplessis.

M. Perron: Merci, M. le Président. Je voudrais, en premier lieu, remercier Marine Industrie ainsi que les travailleurs de Marine Industrie qui nous ont permis, vendredi dernier, de regarder combien étaient efficaces les techniques de Marine Industrie. Premièrement, on sait qu'il y a des problèmes financiers, c'est sûr et certain. Je pense que c'est surtout à cause des contrats, on a regardé ça ensemble et on est tous d'accord sur cette question-là. Je remercie aussi la direction de Marine Industrie pour avoir présenté son plan de redressement. On a eu l'occasion d'en discuter quelque peu vendredi passé et, antérieurement à ça, le syndicat — que je remercie aussi — avait présenté certaines recommandations dans son document "Chantier maritime". A l'intérieur de ça, je pense qu'il y a lieu de penser que tout le monde fait son effort pour régler le problème dans les plus brefs délais et pour que ce problème soit réglé, sinon à long terme, du moins à moyen terme.

Mises à pied éventuelles

En rapport avec les questions que j'ai posées vendredi, considérant le fait que le syndicat n'était pas présent, dû à la réunion à Québec, je voudrais de nouveau poser une couple de questions que j'avais posées à la Société générale de financement, soit à M. Coulombe ou à M. Brisson. Le tout se rapporte aux mises à pied qui auraient eu lieu dans le plan de redressement, en rapport avec les personnes qui ont un certain nombre d'années de service, soit à la page 28 de votre plan de redressement, où on parle de 25 ans à 29 ans de service, de 30 ans et plus. On remarque qu'il y a un total de 353 travailleurs et 269 travailleurs dans le dernier cas, soit celui de 30 ans.

Compte tenu du fait que je vous avais posé la question, à savoir s'il y aurait possibilité à cause du nombre d'années, donc, ceux qui ont peut-être 55 ans et plus d'âge, est-ce que vous avez étudié, conjointement avec le syndicat ou tout seul, la question de mises à pied en regardant la possibilité de pension prématurée? C'est la première question que je vous avais posée, je pense que vous vous rappelez que je vous l'avais posée à la rencontre de vendredi dernier.

M. Brisson: Oui, M. le député, nous avons évidemment considéré la situation, cependant, je dois dire que les plans de pension de Marine sont très jeunes, c'est-à-dire qu'ils n'existent que depuis quelques années et à cause de ça, il y a très peu de personnes qui se sont bâti une pension suffisante pour réellement prendre une pension prématurée. Nous avons regardé quels pourraient être les coûts pour compléter cette pension pour en faire une rente raisonnable pour quelqu'un qui va à sa pension; ces coûts deviennent exorbitants.

L'autre point, les règlements que nous suivons, qui sont les conventions que nous avons signées avec le syndicat, respectent aussi les lois d'ancienneté. Le privilège d'ancienneté va s'appliquer totalement sur les mises à pied. Les gens qui sont là, la plupart de ceux qui ont de longs états de service, dans les plus hautes séries d'âge, vont vouloir, à cause de cette situation, demeurer à leur emploi et c'est leur droit selon la convention.

Nous avons cette difficulté qui rend les coûts exorbitants.

M. Perron: Merci. Est-ce qu'on me permettrait de poser la même question au syndicat? Quelle est son impression?

M. Gagné (Richard): Si j'ai bien compris la question, il s'agit de préretraite. M. Brisson vous mentionne que l'ancienneté existe à Marine et l'ancienneté prime, c'est exact. Concernant les préretraites, c'est lancé en l'air, on en a entendu parler il y a peut-être quatre ou cinq mois, par le premier ministre, d'après une déclaration qu'il aurait faite qu'à Marine Industrie, il y aurait possibilité d'avoir des préretraites. Cela a paru dans les journaux, je ne pourrais pas dire lesquels, mais le syndicat comme tel sera en mesure de regarder ça.

Comme M. Brisson vous a mentionné, c'est sûr que nos bonshommes s'en iraient à la retraite, avec un régime de pension qui a débuté en 1965, les gars y mettaient $0.60 par semaine, dans le temps, un paquet de cigarettes, aujourd'hui on met $6 par semaine, je pense que le gars s'en irait avec une maigre pension. Si on peut envisager avec la compagnie de regarder ça, à tête reposée, une pension assez valable pour que nos gars s'en aillent à la retraite, on embarquerait peut-être dans un programme de ce genre.

M. Perron: En rapport avec le document que vous avez remis à tous les députés, probablement ailleurs aussi, je présume que ce document, vous l'avez remis à la direction de Marine.

M. Gagné: Ce document a été déposé, comme M. Coulombe l'a mentionné, ce matin. On faisait partie du comité de redressement. On a déposé le document au comité de redressement et même à l'intérieur de la brique présentée par Marine, je crois qu'il y a une note qui en fait mention, je ne pourrais pas dire à quelle page exactement. Il y a une note...

Une Voix: Page 18. ( 17 heures)

M. Gagné: Je ne voudrais pas dire que vous n'avez pas lu le document au complet, mais ils en font mention dedans.

M. Perron: Effectivement, je l'ai lu, peut-être un peu en diagonale à certains endroits.

M. Gagné: Je ne voudrais pas vous mettre en boîte sur cela, mais ils en font mention.

M. Perron: D'accord. Merci. J'ai d'autres questions, mais, auparavant, il y a une couple de questions que je voudrais poser au ministre. Etant donné qu'il n'est pas ici, j'aimerais les poser plus tard, si on me le permettait.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le député de Duplessis. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: M. Gagné, qu'est-ce que vous pensez du plan de redressement?

M. Gagné: Si l'occasion nous est donnée, on aurait un mémoire à présenter concernant le plan de redressement; ce mémoire va être commenté, si la commission en dispose, par André L'Heureux, vice-président de la CSN.

M. Scowen: Voulez-vous attendre l'arrivée du ministre?

M. Gagné: Peut-être que j'attendrais M. Biron. C'est de cela qu'on avait convenu tantôt. Pas M. Biron, excusez, mais bien M. Tremblay. Une chan-

ce qu'il n'est pas ici, cela n'aurait pas bien été, là!

Pour répondre à votre question, sur le plan de redressement comme tel, on est en partie d'accord. Je peux répondre un peu. Nous sommes en partie d'accord. Dans le plan de redressement comme tel, Marine Industrie ou la Société générale de financement, si vous le préférez, met l'accent sur les wagons et les turbines. On est en partie d'accord avec cela. Cela va maintenir le statut des emplois.

Par contre, en ce qui concerne le naval, je pense qu'ils l'ont laissé aux oubliettes et cela nous fait un peu peur que, dans un avenir assez rapproché, ce soit un naufrage, si la Société générale de financement ne fait pas des pressions autant que les syndicats peuvent en faire à tous les paliers de gouvernement. Présentement, nous sommes au provincial; dans un avenir assez rapproché, on va aller au fédéral et on va faire les pressions possibles. Vous savez ce qu'on recherche, c'est la marine marchande. Mais il s'agirait que la compagnie, la Société générale de financement, fasse des pressions plus fortes.

Quand M. Coulombe mentionne qu'il n'y a pas de politique gouvernementale, c'est bien beau. Mais, depuis 30 ans, 40 ans — je ne suis pas tellement vieux — que je sache, à la CSN, ils ont toujours préconisé une marine marchande. Vers les années quarante-cinq, on avait une marine marchande canadienne qui a été abandonnée. Pourquoi? M. L'Heureux va compléter, il est un peu plus informé que moi à ce sujet. Je ne sais pas si cela répond à votre question?

M. Scowen: Je vais poser une question à votre grand penseur, à votre gauche.

M. Gagné: Le terme que vous employez, grand penseur, il ne faut pas mentionner cela. C'est un vice-président de la CSN.

M. Scowen: Je le dis avec beaucoup de respect, parce que je pense que le document est important.

M. Gagné: II ne faudrait peut-être pas faire de personnalités, parce qu'on ne s'entendra pas.

M. Scowen: Non, non. Je le dis avez sincérité à M. L'Heureux.

M. Gagné: Vous pouvez poser votre question, il va vous répondre.

M. Scowen: M. L'Heureux, j'ai été frappé, en lisant le document ici de voir jusqu'à quel point le marché naval, c'est un marché qui dépend des initiatives et des décisions canadiennes et internationales. C'est partout dans ce document. Je ne veux pas entrer dans la question de savoir si le Québec doit être un pays ou non. Mais il me semble que, dans un cas ou l'autre, une société d'Etat dans le domaine des chantiers navals, tenant compte de toutes les contraintes et toutes les contingences qui existent aujourd'hui dans cette industrie, doit finalement avoir le droit de faire des affaires sur la scène internationale.

A chaque page, je me disais: Si le Québec était indépendant, bien sûr, ce serait quelque chose qui devrait relever de l'Etat du Québec. Mais, si on reste à l'intérieur d'une fédération, à long terme, c'est très difficile, d'après moi. Je demande votre opinion: Pensez-vous que c'est une bonne idée, pour un Etat qui est une province dans une fédération, de s'occuper, à long terme, de cette affaire? Ce que je vois, idéalement, c'est que nous prenions notre industrie hydro-électrique et nos wagons et que nous construisions, dans les banlieues de Sorel, une nouvelle usine pour ces deux choses et qu'on laisse le fédéral s'occuper, avec une politique canadienne, de tous les chantiers navals.

Pour moi, c'est implicite dans le document que vous nous avez soumis.

M. L'Heureux (André): M. le Président, je m'excuse, je ne suis pas un penseur aussi brillant que vous peut-être.

M. Scowen: C'est mon opinion.

M. L'Heureux: Je n'ai peut-être pas trop compris le sens de la question, à savoir si, dans un Québec indépendant, il serait possible de transiger sur le plan international ou pas ou s'il s'agit d'une responsabilité exclusivement fédérale ou pas. Je préférerais que vous me donniez certaines précisions, si vous le permettez.

M. Scowen: C'est simplement, M. L'Heureux, que, dans le document, il me semblait que c'était inévitable, que la plupart des données, que la plupart des décisions qui étaient à prendre dans les chantiers navals relèvent des problèmes internationaux et des situations internationales, de la concurrence internationale, des subventions pour le cabotage, des politiques de cabotage, des politiques de marine marchande, des navires, de toutes ces choses qui sont plutôt de nature nationale dans un sens large. Est-ce possible? Est-ce que vous vous êtes penchés sur cette question, parce que je trouvais que c'était implicite, non pas explicite, dans ce document? Je ne veux pas aller trop loin là-dedans, je voulais simplement savoir si vous aviez une opinion à ce sujet.

M. L'Heureux: Oui, on en a une sûrement. Comme Richard Gagné, le président du syndicat de Marine Industrie l'a indiqué, cela fait une trentaine d'années au moins qu'on parle de cette question. Je devrais dire, au départ, qu'en fait, on est très heureux de constater qu'une commission parlementaire avec les partis de l'Opposition consacre des heures à ce problème, parce qu'on a eu l'impression, dans la longue campagne qu'on a menée sur la vocation maritime du Canada, parce que nous sommes encore au Canada, qui baigne autour de trois océans, au Québec, avec un des plus grands fleuves au monde, on a fortement l'impression... Comme Québécois, j'ajouterais ceci:

C'est qu'on a oublié dans notre histoire, je pense, que c'est un peuple effectivement... Si on avait une carte géographique qui indiquerait la densité de population... C'est remarquable. Moi, le premier, étant né à quelques pieds du fleuve, je ne me suis pas rendu compte, avant de travailler avec les travailleurs des chantiers maritimes, de l'importance de l'aspect fluvial, de l'eau, en fait, dans notre pays.

D'ailleurs, quand on regarde l'histoire industrielle du Québec — il faudrait peut-être la retracer et la regarder davantage — on constate qu'au XIXe siècle, par exemple, le long du fleuve et jusqu'en Gaspésie, il y avait des douzaines de chantiers qui longeaient en fait le fleuve. Cela a toujours eu une importance fondamentale dans l'économie du Québec.

Or, ce qu'on constate, par rapport à votre première question, à savoir que la concurrence internationale est primordiale, je dirais d'abord que le problème est le suivant ou que la question que l'on pose est la suivante: C'est que tout pays industrialisé ou en voie d'industrialisation, tout pays industrialisé en fait dans le monde a toujours estimé que les chantiers navals, la construction navale et le transport maritime étaient des éléments stratégiques dans toute politique économique. Le Brésil, par exemple, est moins avancé que nous, sauf qu'il va sûrement devenir très puissant. De même pour le Japon. Même la Suisse, qui n'a pas de mer autour d'elle, a une flotte plus importante que celle du Canada. Un pays comme les Etats-Unis, auquel on est très bien intégré, comme vous le savez, reconnaît, par exemple, par son Jones' Act, que tout le cabotage, puisqu'on a parlé de cabotage, que toute la navigation intérieure doit se faire sur des navires construits aux Etats-Unis et maniés par des équipages américains.

Or, au Canada, depuis les accords de Westminster de 1931, on a malheureusement abandonné le transport fluvial, la construction navale, notre construction maritime, en fait, à toutes sortes d'intérêts autres que ceux des Canadiens ou des Québécois.

Ce qu'il faut, c'est qu'il y ait... Quand je parlais, au départ, de la sorte de mur d'indifférence que... Ici, on a un comité exécutif du syndicat de Lévis-Lauzon avec nous, c'est celui de Marine... Entre nous, quand on se rencontre... Avant que j'en parle, il y a dix ans, c'était Ted Payne, qui est décédé maintenant, un vieux routier des chantiers maritimes de Vickers, parce que la CSN représente tous les principaux chantiers maritimes au Québec.

Je vous le dis très sincèrement, on a toujours senti un manque de conscience de l'importance de ce secteur sur le plan économique. Je ne veux pas me lancer, vous le savez... M. Scowen s'en doute autant que moi, quand on dit qu'un emploi dans les chantiers maritimes en crée au moins trois autres dans d'autres secteurs industriels. Il s'agit d'un secteur de l'industrie lourde où le Québec, entre autres, est très faible. C'est donc très important de le développer. Je ne veux pas me lancer tout de suite... Est-ce qu'on doit se lancer dans l'analyse du plan de redressement? Nos chantiers maritimes, si on les analysait, et on n'a sûrement pas le temps de le faire maintenant...

L'autre aspect que j'ai pu constater et qui m'a toujours renversé, c'est que ce sont des usines d'assemblage de pièces, surtout de fer, et parfois d'acier qu'on importe même parfois. Dans le cas des Polonais, cela m'a renversé de savoir que, dans le contrat, on importait l'acier utilisé. Quant au plan technologique, on est d'une faiblesse, on est dépendant d'un tas d'autres entreprises, surtout américaines ou d'ailleurs, pour alimenter nos chantiers. Je ne sais pas si je réponds à votre question.

Pour être concurrentiel sur le plan international, il faudrait d'abord... Je pense que cela a été mentionné par plusieurs députés ici, celui de Huntingdon, M. Martel et d'autres. Je sais que M. Coulombe et M. Brisson, parce qu'on a discuté franchement là-dessus... C'est pour cela que je vous dis qu'à la CSN, parfois, on est très brutal, très agressif, parce qu'on ne partage évidemment pas le point de vue de la direction sur bien des aspects, quand on met des gens à pied. Sur le plan plus général, ce qu'on espère et ce que je constate — je vous dis que je suis heureux de cela... Il n'y a pas eu seulement la loi 108. Aujourd'hui, vous êtes là. Le ministère de l'Industrie et du Commerce a produit un rapport que j'ai commencé à feuilleter — on ne partage sûrement pas... et j'attends de l'analyser avant de donner mon point de vue... On sent une prise de conscience inédite depuis très longtemps au pays. C'est heureux. Tant que des hommes politiques comme vous et d'autres ne seront pas convaincus... On a fortement l'impression — les faits sont là — et les autres syndicats canadiens des autres provinces partagent notre point de vue, y compris les syndicats de marins qu'on rencontre, c'est-à-dire que le Canada, depuis la fin de la guerre, a vraiment ignoré, négligé systématiquement ce secteur industriel. Je m'excuse de la longue réponse, mais...

M. Scowen: Non. Vous avez bien répondu. Je comprends bien le sens de votre intervention. En effet, vous reprochez au gouvernement fédéral, au gouvernement canadien, de ne pas avoir préparé une politique cohérente de développement de tous les aspects d'une politique navale et maritime. Le fait que cela n'existe pas aujourd'hui est en partie la cause de nos problèmes, si je comprends bien. Est-ce que vous n'avez jamais lu ou étudié les documents qui ont été écrits par le fédéral, par le ministre de l'Industrie et du Commerce fédéral à ce sujet?

M. L'Heureux: Oui. Non seulement cela, on a des contacts...

M. Scowen: La marine marchande, par exemple?

M. L'Heureux: Oui. Vous savez qu'il y a un comité d'étude qui a été formé il y a déjà quelque

temps au niveau fédéral. D'ailleurs, même à l'Association des constructeurs canadiens, on s'entend sur certains aspects des politiques élaborées. D'ailleurs, le président du syndicat de Davie, Clément Fleury, a participé à plusieurs sessions de ce comité. (17 h 15)

Cependant, je pourrais vous citer des passages d'un ex-ministre, qui ne voyait pas, par exemple, la nécessité... qui trouvait, plutôt, que les services de transport commerciaux, maritimes, disponibles présentement étaient adéquats pour l'économie canadienne. Là-dessus, on est en total désaccord, quand on sait que nos exportations et nos importations représentent un peu au-delà de $2 700 000 000 et qu'à peine 1% de ce qu'on importe et de ce qu'on exporte est transporté sur des navires construits au Canada avec des équipages canadiens. Je ne parlerai pas de la flotte du Canadien Pacifique. On mentionnera tantôt d'autres bateaux aussi utilisés sur le fleuve ici, par diverses compagnies, diverses entreprises qui sont installées au Québec et qui battent pavillon étranger avec des équipages étrangers. Il y a donc un effort extraordinaire et quand on analyse le plan de redressement qui veut répondre à un problème immédiat... Il fallait qu'il y ait une réponse et on est très heureux qu'il y en ait eu une aussi. Je comprends le dilemme aussi de la direction de Marine comme de la SGF quant aux politiques générales qui doivent venir de vous et d'Ottawa. Cependant, on aura à le dire tantôt peut-être, il va falloir une volongé exceptionnelle, à partir d'une prise de conscience nouvelle pour tous les Canadiens d'amorcer, de développer ce secteur. Ce sera très important sur le plan économique, technologique et stratégique.

Questions générales (suite)

M. Scowen: Merci, M. L'Heureux. En attendant le retour du ministre, peut-être me permettriez-vous de poser une ou deux questions, M. Gagné, aux dirigeants de l'entreprise ici. On va attendre l'arrivée du ministre. Est-ce qu'il me reste quelques minutes? Boni

Je voulais revenir sur la question de l'administration. Dans votre document, vous avez élaboré huit scénarios, surtout les scénarios d'aménagement de l'équipement et des bâtiments, et si je comprends bien, pour le moment, vous n'avez pas choisi l'un ou l'autre. Ils existent, ces huit et vous allez continuer de les étudier cette année et l'année prochaine.

Je voulais vous demander... C'est sûr que l'avenir est axé, à court terme, à moyen terme, au moins, sur la partie la plus certaine au moins, soit l'hydraulique, l'hydro-électrique et les wagons. Si on décidait d'abandonner la construction navale, est-ce que les bâtiments que vous avez et les facilités en général sont convenables? Est-ce qu'ils sont assez modernes pour que vous puissiez installer, sur les lieux, une ligne de production moderne et efficace et pour les wagons et pour les turbines ou s'il serait quand même nécessaire, à cause de la nature des bâtiments et l'organisation physique du chantier, afin d'être concurrentiel et moderne dans le meilleur sens du mot, de construire quelque chose à part et spécial pour ces deux parties de...

M. Brisson: On a préparé plusieurs scénarios, M. le député, et, dans ces scénarios, on fait différentes hypothèses. Les installations couramment employées par le naval, par exemple, quelques-uns de ces édifices sont polyvalents, ils pourraient servir à autre chose. D'autres sont plus difficilement aménageables. Par exemple, lorsqu'on a fait état, dans la division des wagons, d'investissements de capital pouvant aller de $9 millions à $13 millions, la différence n'est pas tout simplement un manque de précision dans l'estimation, mais c'est bien que selon la situation qui se développera à un moment donné, si les ateliers du naval sont disponibles parce que le marché n'existe pas et que nous n'avons pas eu de contrat, à ce moment-là, ces ateliers pourraient être transformés pour faire des wagons, ou être transformés pour prendre de l'industriel, ce qui diminuerait l'investissement nécessaire pour l'industriel ou les wagons. La décision concernant la façon de procéder est basée sur l'étude de rentabilité du projet lui-même, c'est-à-dire que c'est bien beau d'employer une usine, mais si en l'employant on devient tellement peu efficace que la rentabilité baisse, ce n'est pas la bonne décision à prendre.

La réponse n'est pas absolument claire. Dans nos scénarios, nous avons étudié différentes hypothèses d'emploi de différents ateliers par différentes divisions à différents temps, selon la disponibilité. Toujours là, la décision est basée sur la rentabilité même de l'opération vis-à-vis de l'investissement capital nécessaire ou non, selon cette disponibilité.

M. Scowen: Mais, pour le moment, la réponse est que vous ne savez pas, ça reste à étudier.

M. Brlsson: Je donne un exemple précis: si, en 1980, nous n'avons pas de construction navale, parce qu'il n'y a pas de contrats qui sont entrés, il y a un atelier où nous pourrons fabriquer des wagons. Si, par contre, nous sommes...

M. Scowen: Sur une base concurrentielle, efficace?

M. Brlsson: Peut-être pas aussi concurrentielle que si nous avions un atelier neuf conçu spécifiquement pour les wagons, mais certainement, au point de vue financier, plus rentable du fait que nous n'aurons pas investi une autre somme de $8 millions dans un édifice.

Par contre, si en 1980, nous sommes heureux dans une soumission pour construire un navire et que cette bâtisse est requise, la division des wagons aura besoin d'un investissement plus grand pour lui fournir les facilités pour prendre avantage du marché qu'elle a devant elle.

M. Scowen: Merci. Au début, dans une partie du rapport qui touche ces scénarios, vous dites que vous avez développé un bilan, un profit, un "cash flow" etc., pour chacun. Avez-vous les documents normaux — "cash flow", etc., — pour vos activités prévues pour 1979/80?

M. Brisson: Oui.

M. Scowen: Est-ce que ce sont des documents qu'on pourrait voir? Pour moi, dans ce programme de redressement, c'est la première chose que je cherchais dans le document, parce que c'est à partir de là qu'on développe, qu'on contrôle et qu'on surveille le développement. Est-il permis, pour les membres de la commission parlementaire, d'avoir... Il y a le désir de vérifier ce que vous ferez à l'avenir, mais, de plus, c'est une façon très efficace de comprendre les questions qui ont été posées par le député d'Outremont tantôt, à savoir quand et d'où viendront les fonds nécessaires, comment ils vont sortir?

M. Coulombe: Le problème que vous posez est très sérieux, parce que, au conseil d'administration de la Société générale de financement, ce problème a été discuté. Les administrateurs de la SGF — je partageais entièrement cette opinion — ont refusé justement que, dans le document synthèse, des chiffres au point de vue des bilans, au point de vue des marges de profits et au niveau des coûts réels, au niveau de la position concurrentielle de Marine, soient mis sur la table pour consommation générale. Cela semblait un exercice incompatible avec le domaine concurrentiel dans lequel on est, parce que, sans ça, la réaction du conseil d'administration serait de dire: Si c'est ça, le conseil d'administration, que la commission parlementaire devienne le conseil d'administration et elle verra tous les chiffres. Si un conseil a un rôle à jouer, c'est carrément de prendre des décisions qui soient jugées au résultat; je suis totalement d'accord avec ça, mais toute l'infrastructure des coûts, position concurrentielle, est-ce que nos wagons nous coûtent moins cher que ceux de la Hawker Siddeley ou est-ce que le bateau untel coûte moins cher à la Davie ou à la Marine, ce sont des décisions de nature interne. Je pense que ce serait fausser tout le sens d'un conseil d'administration que de commencer à distribuer ce genre de document, sauf dans un domaine où c'est vraiment un monopole absolu. Si on était dans une situation de monopole absolu, ces chiffres seraient de notoriété publique, mais dans le domaine concurrentiel, où vraiment — je pense que ça a été mentionné par M. Biron — les marges de profits sont souvent assez minces, commencer à donner tous ces documents ne nous semble pas compatible avec le statut de corporation de la SGF.

M. Scowen: Je n'insiste pas, c'est votre droit, mais il vous faut admettre que, pour nous, recevoir un tel document, c'est un peu un puzzle. Vous avez un chiffre de ventes ici, une marge de profit là, une prévision ici, un besoin de fonds là... Il y a tous les morceaux...

M. Coulombe: Je comprends parfaitement le dilemme. Il faut aussi mentionner que la loi nous demandait de déposer le plan au gouvernement pour approbation, ce qui a été fait. Le conseil d'administration a remis au gouvernement tous les documents dont je fais mention, c'est-à-dire que, pour la prise de décision, parce qu'il y a eu une prise de décision de la part du gouvernement concernant ce plan, tous les éléments y étaient, toutes les annexes que nous avons ici y étaient. Mais comme la décision était prise à ce niveau-là et non pas prise au niveau de la commission parlementaire, ça nous a semblé une autre problématique d'apporter toutes ces choses-là de façon publique.

M. Scowen: Une dernière question à propos de l'administration, de cette question de faiblesse que vous avez constatée dans les contrôles, surtout dans le contrôle des estimations et des soumissions, et, peut-être, dépassant cette question, les lacunes qui existent au sein de l'administration même, j'aimerais vous demander de nous dire plus en détail vos impressions un peu spécifiques là-dedans. Je vous demande surtout s'il n'existe pas un moyen de vous informer auprès des autres compagnies qui sont dans le même genre d'industries, qui sont obligées de faire les soumissions sur des projets à long terme, avec beaucoup d'immobilisations, en effet "capital goods" si vous voulez, comment on peut avoir un meilleur système de contrôle des estimations et du développement des soumissions. Pour moi, il est essentiel que l'expérience qu'on a vécue ne se reproduise pas.

M. Coulombe: Avant de demander à M. Bris-son de détailler un peu plus, je voudrais faire deux remarques générales. La première, c'est qu'il faut distinguer, à l'intérieur de Marine Industrie, les divisions. C'est évident que la construction navale, depuis quelques années, avec les chocs répétés qu'il y a eu à subir, à cause de ce que j'appelle les aventures internationales, les contrats internationaux, qui, pour la plupart, se sont soldés par des déficits, cet état de fait, dû à la crise plus profonde causée par les bateaux panaméens, avec les inspecteurs qui faisaient recommencer le travail à gauche et à droite, cela a eu un effet de démobilisation réel. Je ne mentionnerai pas aussi le fait que, pour beaucoup de cadres — je ne sais pas si les syndicats partagent cette opinion — à l'intérieur de cette division, de voir continuellement Marine Industrie aux prises avec des difficultés semblables, aux prises avec des lois spéciales, aux prises avec des commissions parlementaires répétées, cela a créé à un moment donné un climat qui n'est pas propice à du travail de réorganisation en profondeur.

Nous pensons que même si la crise n'est pas répétée, au moins l'aspect plus critique de la crise est passé, mais on doit vous avouer qu'au point de vue réorganisation, au point de vue du recrutement de nouveaux cadres à Marine Industrie, on a énormément de difficulté actuellement parce que les gens se disent simplement: Où est-ce que ça

va? On a de sérieux problèmes de recrutement qui sont causés tout simplement par l'état d'esprit qui règne autour de cette question.

On pense que, durant la prochaine année, on va s'en sortir, on pense qu'un aspect plus dynamique va se mettre là-dedans. Cela explique un peu le contexte des problèmes d'organisation qu'on peut vivre à Marine Industrie. Il y a là une infrastructure humaine qui est de qualité remarquable, mais, à un moment donné, se battre sur trop de fronts à la fois devient un peu insupportable pour plusieurs. C'est le problème du climat en général. (17 h 30)

Quant au problème plus particulier d'organisation, c'est évident qu'une de nos intentions, c'est de raffermir encore plus l'organisation interne en termes de centres de coûts et de centres de profits, pour que les divisions aient vraiment toute l'organisation interne leur permettant d'avoir leur propre organisation et leur propre système de contrôle, leur propre système de marketing, leur propre système d'organisation interne. C'est de cela que M. Brisson parlait tantôt, du plan d'action qui suivrait ce plan général d'orientation. On a l'intention de commencer à mettre en marche ces plans d'action dès cet été, sous cet angle. Peut-être que...

M. Brisson: Je pense qu'il est difficile de répondre mieux que M. Coulombe l'a fait.

M. Martel: M. le Président...

Le Président (M. Boucher): M. le député de Huntingdon, est-ce que vous avez des questions? Vous attendez le ministre. M. le député de Richelieu.

M. Martel: Je reviens à la division des wagons. Le marché canadien, depuis les dix dernières années, a commandé 5600 wagons. J'aimerais savoir, sur ces 5600, combien Marine Industrie en a obtenu, en moyenne, chaque année.

M. Coulombe: La part du marché de Marine, dans les wagons, est traditionnellement de 22%.

M. Martel: 22%. M. Coulombe: Oui.

M. Martel: Du marché canadien. Vous vendez aux Etats-Unis dans quelle proportion?

M. Coulombe: II faut distinguer; dans les années qu'on vit à l'heure actuelle, plus particulièrement 1979 et 1980, 80% de la production de wagons est pour le marché américain, au moment où on se parle.

M. Martel: Je ne vous apprends rien en vous disant qu'il y a un organisme fédéral qui s'appelle l'ACDI, qui est censé être un organisme qui permet l'exportation de tels wagons pour les pays sous-développés.

M. Coulombe: On a d'ailleurs des contrats qui nous sont fournis par l'ACDI.

M. Martel: J'aimerais justement savoir quelle est la répartition de l'ACDI entre Marine Industrie et les concurrents.

M. Coulombe: Oh, les concurrents.

M. Martel: Hawker Siddeley et, par exemple, le Steel...

M. Brisson: National Steel Car...

M. Coulombe: ... et Marine, la répartition.

M. Martel: Est-ce que vous avez les proportions?

M. Coulombe: M. Guèvremont, qui est vice-président aux wagons...

M. Guèvremont (Donald): Je n'ai pas les proportions exactes, mais je crois que...

Le Président (M. Boucher): M. Guèvremont, si vous voulez vous approcher du micro, étant donné que c'est retranscrit au journal des Débats.

M. Guèvremont: Je n'ai pas exactement les données, mais je crois qu'avec les deux commandes pour le Cameroun que nous avons eues il y a quelques mois, grâce à l'effort de l'ACDI, notre marché doit être aux alentours de 25% à 30%, comparé à nos concurrents canadiens. Par contre, il faut dire que, dans les autres sortes de wagons qui ont été donnés à nos concurrents, nous n'étions pas intéressés. Il y a beaucoup de quantités de 15, 20, 30 unités de wagons qui ne nous intéressent pas, non pas parce qu'on est indépendant, mais simplement parce que nous avons actuellement seulement une chaîne de production. Nos concurrents, qui ont deux ou trois chaînes, peuvent se permettre de prendre ces wagons et de les faire quand ils ont le temps.

M. Martel: Donc, avec une population de près de 28% du Québec par rapport au Canada, on a seulement 22%, d'un côté, du marché canadien et, d'un autre côté, avec l'ACDI, une aide d'environ 25%. D'accord. Un peu plus loin, à la page 10, il est question, toujours dans la section des wagons, "contrairement à Marine Industrie, ses concurrents fabriquent des pièces de fonte et ont des capacités d'usinage et de sous-assemblage. Marine doit même s'approvisionner auprès de ses concurrents dans certains cas." C'est à la page 10, à la fin.

Je ne comprends pas très bien. Etant donné que nous avons une société d'Etat à peu près à 15 milles de Sorel qui s'appelle SIDBEC, étant donné qu'à environ 300 ou 400 pieds de Marine, il y avait, et j'espère qu'il y aura encore parce que ça doit repartir, une industrie qui s'appelle les Fonderies de Sorel, qui se spécialise dans la fonte, je ne suis pas un expert, je ne suis pas un économiste, mais

j'ai fait un petit calcul. Avec les wagons qu'on construit à Sorel, avec la moyenne qu'on a, on pourrait donner aux Fonderies de Sorel, qui vont se trouver, j'espère, un acheteur et vont repartir, de l'ouvrage pour environ deux mois à 250 gars, annuellement. Je ne peux pas concevoir que vous n'ayez pas, dans le passé, songé d'abord à cette société d'Etat et aux Fonderies de Sorel qui ont l'outillage nécessaire actuellement, avec la nouvelle machinerie, pour faire ces roues que vous allez chercher chez des concurrents.

M. Plessis-Bélair: Là-dessus, il y a plusieurs points. Pour ce qui est des pièces de fonte, la fonderie de Sorel a effectivement une machine, qu'on appelle une machine "Herman", qui a une certaine capacité de moulage. La capacité du moulage de cette machine est malheureusement petite et elle peut faire certaines pièces qui pourraient être utilisées...

M. Martel: ... des roues. Des employés m'ont assuré qu'ils pouvaient sortir les roues avec facilité.

M. Plessis-Bélair: Non, pas de roues. Elle ferait ce qu'on appelle des "outlers"...

M. Martel: Pourtant, ce n'est pas loin. Cela ne demanderait pas de grandes recherches. C'est à peu près à 300 pieds, les fonderies de Sorel. Cela vaudrait la peine d'aller voir, parce que les ouvriers que j'ai rencontrés hier m'ont dit qu'ils pouvaient les sortir, les roues.

M. Plessis-Bélair: Je peux vous dire qu'on a même fait plus que cela. Comme on est conscient du problème et de notre dépendance, on a essayé d'intéresser une entreprise américaine qui est le plus gros fabricant de pièces de fonte aux Etats-Unis, qui s'appelle National Foundry, et qui est une division de Midland Ross, une compagnie qui fait à peu près $750 millions de chiffre d'affaires. De notre propre chef, du propre chef des gens de Marine Industrie, on a approché cette compagnie pour l'intéresser à venir regarder sur place et à investir dans la Fonderie de Sorel, pour que cette compagnie qui a l'expertise devienne une source d'approvisionnement privilégiée pour les chantiers et pour la division wagons de Marine Industrie et qu'elle nous empêche de continuer à être dépendants de nos concurrents qui, eux, ont l'avantage d'être intégrés depuis maintes années.

Cette fonderie a fait une analyse qui a duré un an. D'ailleurs, cette compagnie a obtenu, du syndic qui s'occupe de la liquidation, un délai dans sa décision pour lui permettre de faire son analyse. Malheureusement, l'analyse qu'elle a faite l'amène à conclure qu'elle n'est pas prête à investir dans les fonderies de Sorel pour en faire une fonderie spécialisée dans le domaine des wagons.

Traditionnellement, les fonderies de Sorel appartenaient à un holding d'une entreprise privée qui faisait des pièces principalement pour le domaine minier, mais ne s'est jamais intéressée au domaine des wagons parce que les pièces, la pièce importante, les "side frames", les fonderies de Sorel n'avaient pas la capacité de produire cette pièce et n'étaient pas prêtes à consentir les investissements requis pour transformer ses capacités de production.

M. Martel: On m'a assuré — cela vaudrait la peine de vérifier — que cette nouvelle machinerie, aux fonderies de Sorel, est capable de sortir ces roues que vous achetez présentement en dehors de la région. Il y a aussi Sidbec qui fait des pièces. Je pense qu'il y a toutes sortes d'autres pièces, à part des roues, qui peuvent être achetées dans la région.

Je termine, parce que le ministre est arrivé et qu'on va passer au syndicat. J'aimerais connaître, de la part du président de la Société générale...

M. Coulombe: Juste un petit détail. Sidbec — ce n'est pas compliqué à répondre — ne fait pas le type d'acier nécessaire pour faire des wagons.

M. Martel: D'accord. Mais les fonderies de Sorel ont déjà vendu à Marine Industrie des petites pièces et là, elles sont capables d'en vendre des grosses, si cela reprend.

M. Coulombe: Des "couplers" et des "yokes". Il faudrait qu'ils investissent $8 millions de pièces.

M. Martel: Ce que je voudrais vous demander, en terminant, c'est tout simplement les termes de l'entente qui est intervenue entre cette entreprise hollandaise et Marine Industrie, concernant les trois bateaux.

M. Paquin: II s'agit d'un contrat de gestion de trois ans, en fonction duquel la compagnie Nedloyd, qui est une entreprise hollandaise, va s'occuper de fournir l'équipage, défrayer toutes les dépenses, relativement à l'exploitation du navire, et voir à trouver des occupations pour le navire. Les revenus qui en découlent nous appartiennent et les dépenses également. A la compagnie Nedloyd, le gérant des navires est rémunéré en fonction d'un taux quotidien pour les frais d'administration que cela comporte ainsi qu'une rémunération qui est basée sur le bénéfice net qui peut être réalisé à même l'exploitation des navires.

Il existe, dans cette entente, des dispositions selon lesquelles on peut mettre fin au contrat, advenant que les navires puissent être vendus, ainsi que d'autres dispositions qui nous permettent d'y mettre fin, advenant que les résultats ne soient pas satisfaisants ou que la compagnie ne s'acquitte pas de ses droits à notre satisfaction.

M. Martel: Dans vos prévisions, est-ce que vous prévoyez des pertes ou des gains, à la suite de cette entente? Et de quel ordre, qu'il s'agisse de pertes ou de gains?

M. Gagné: Actuellement, je pense qu'on peut dire que les frais d'exploitation, en tenant compte

des coûts de l'équipage, les frais d'assurance, les frais d'entretien, enfin toute la nourriture, etc., on estime que les frais quotidiens sont de $350 000 en dollars américains par navire, par jour.

L'utilisation des navires. Nous avions estimé, au début de l'année, selon les taux d'affrètement qui étaient en vigueur pour ce type de navire, qu'ils devraient se situer autour de $4500 par jour, $4500 à $5000, par jour.

Or, les trois premiers contrats d'affrètement qui ont été négociés pour les trois premiers navires qui ont été mis en service, vont procurer un revenu global d'affrètement de l'ordre d'un peu plus que $6000 par jour, ce qui nous laisse à toutes fins utiles une marge d'environ $2000 par jour, peut-être légèrement plus que de $2000 par jour. $2000 par jour, je crois qu'on a mentionné plus tôt, ce matin, que, si on tenait compte que la valeur du navire peut être de l'ordre de $15 millions en dollars américains et qu'il fallait amortir ce montant-là sur une période d'une douzaine d'années avec un taux d'intérêt de l'ordre de 9%, 9,25%, cela entraîne des déboursés de l'ordre de $6000 par jour. Il y a donc un déficit actuellement, un déficit de caisse.

M. Martel: Vous dites $6000 par jour, à la suite de cette entente?

M. Gagné: Oui, un revenu. Il y a un revenu de l'ordre de $6000 par jour, et des frais d'exploitation de l'ordre de $3600 ou quelque chose comme tel, de sorte que la marge est légèrement plus que $2000 par jour.

M. Martel: De profit?

M. Gagné: De profit, avant amortissement et intérêt.

M. Martel: Revenu brut de $2000 par jour pour les trois bateaux?

M. Gagné: Oui.

M. Coulombe: M. Martel, plutôt que de faire des calculs compliqués par jour, le résultat net de l'opération, si les taux restent ce qu'ils sont aujourd'hui, cela va diminuer la perte qui était prévue pour ces bateaux-là.

M. Martel: Compte tenu des intérêts et de tout ce que vous payez.

M. Coulombe: Cela ne fera pas de bénéfices, cela va diminuer la perte. En d'autres mots, les laisser au quai, cela coûte $9 millions. Cette opération-là va permettre de baisser ces $9 millions-là. C'est cela, en fait.

M. Martel: Très bien, je vous remercie. Pour ce qui est des syndicats, je constate, par exemple, à la page d'introduction, et cela m'a fait plaisir, parce qu'à ma connaissance, cela fait tout de même quelques années que je vis avec Marine

Industrie, et c'est la première fois que les membres de l'exécutif des deux syndicats de l'entreprise ont pu suivre l'évolution de ces travaux au sein d'un comité consultatif spécifiquement mis sur pied à cette fin, en février 1979. Je vous remercie de cette initiative, parce que la consultation avec les syndicats n'était pas fréquente à Marine Industrie auparavant. J'aimerais demander par la même occasion si les deux syndicats concernés, soit ceux des employés de bureau et de chantiers, sont satisfaits de cette première expérience de consultation.

M. Gagné: Comme réponse concernant le syndicat à l'heure... Je ne sais pas si le syndicat de bureau... En tout cas, Pierre en discutera. C'est sûr que c'est une très bonne initiative de la part d'une industrie de donner des renseignements sur ce qu'elle veut faire, mais, par contre, au départ, ce comité, M. Coulombe l'a mentionne ce matin, est un comité consultatif. C'est sûr que les syndicats ont pris une petite part à cela, mais on n'a pas eu de marge de décision. Je pense qu'on n'a rien décidé dans cela. On agissait simplement comme consultants.

Comme dans le mémoire qu'on va vous présenter tantôt, c'est sûr qu'avec le comité que Marine présente aujourd'hui, on est en partie en désaccord. Il y a un petit bout sur lequel on est d'accord, mais il y a un autre bout sur lequel on n'est pas d'accord. On ne vous fera pas de cachette, c'est dans le domaine du naval. On est en train de sombrer avec le naval présentement. Justement, si j'ai la parole sur cela, je vais la passer à Pierre. (17 h 45)

II y a une autre petite mise au point que j'aimerais faire. Tantôt, il y a une question qui a été posée, je ne sais pas par quel ministre, à M. Coulombe, concernant le climat chez Marine Industrie. Je pense que vous n'êtes pas sans savoir qu'on est présentement en négociation. La négociation est présentement rendue au point final. On a eu les offres finales de la compagnie. En fin de semaine, on s'en va voir nos membres. J'ai bien l'impression — je me prononce peut-être à titre personnel — quitte à faire des erreurs, que les offres n'ont pas été volumineuses cette année. On était conscients qu'il y avait des problèmes à Marine Industrie, les syndicats étaient conscients qu'il y avait des problèmes. On a fait des demandes qui étaient raisonnables. Je pense que la compagnie n'a pas tenu compte de tout. Je ne sais pas si c'est un message que je passe ici, mais il faut le dire. Vas-y, Pierre, si tu veux répondre, sur le comité de redressement.

M. De Carufel (Pierre): M. le Président, pour ce qui est des employés de bureau, c'est comme M. Martel nous l'a dit tantôt. C'est une des premières fois dans l'histoire des syndicats, en tout cas, du chantier maritime, qu'on peut participer à des rencontres, même si elles ne sont pas formelles, entre la compagnie et les syndicats. C'est sûr que les documents sur lesquels

on a eu à se prononcer étaient déjà tout cuits quand ils nous arrivaient. Le comité en était vraiment un de consultation. C'est un bon départ pour le futur. Pour ce qui est de la négociation, c'est pas mal dans le même style que Richard vient de le dire. On n'a pas encore eu, nous, du syndicat des employés de bureau, les offres finales de la compagnie, mais elles devaient sans doute être dans le même style que celles faites aux employés à l'heure. Merci.

Le Président (M. Boucher): Merci. A ce stade, sachant qu'il y a un mémoire qui doit être présenté, et compte tenu de l'heure aussi, j'aimerais que les membres se prononcent à savoir si on entend immédiatement le mémoire. Par la suite, au retour à 20 heures, on pourra en discuter. Est-ce qu'il y a accord pour que le mémoire de la CSN soit présenté immédiatement?

M. Perron: Au complet, s'il vous plaît, M. le Président.

Le Président (M. Boucher): D'accord. M. Gagné.

M. Gagné: Si vous n'avez pas objection, je vais le faire commenter par le vice-président de la CSN, qui est André L'Heureux et Kémal Wassef, du service de la recherche de la CSN.

Le Président (M. Boucher): Est-ce que vous voulez le lire d'abord?

M. Gagné: D'accord. Je vais le faire lire par André L'Heureux.

Le Président (M. Boucher): D'accord. M. L'Heureux.

Mémoire des syndicats de Marine (CSN)

M. L'Heureux: Merci, M. le Président. Je pense que j'ai eu l'occasion de faire l'introduction tantôt sur l'aspect général du problème. Les syndicats de Davie sont ici aussi, parce que, quant à nous, les problèmes des chantiers maritimes dépassent ceux d'un seul chantier. On le verra tantôt. Les syndicats des chantiers navals CSN se sont présentés devant cette commission parlementaire le 8 décembre 1978 pour réclamer des mesures énergiques face à la dégradation marqués à Lauzon et à Vickers ou appréhendées à Sorel du niveau d'emploi dans les chantiers du Québec. A cette époque, les déclarations ministérielles québécoises ont souligné l'intérêt profond que portait le gouvernement à l'ensemble du dossier, et particulièrement celui de Marine Industrie, de Sorel, qui faisait face à une situation devenue nettement critique par la mévente de six cargos grecs. Nous nous retrouvons aujourd'hui pour étudier en commission le plan de redressement déposé par Marine Industrie, filiale de la SGF.

Les syndicats ont pris connaissance du plan de redressement déposé par Marine et la SGF depuis le 15 mai 1979. La réaction globale des membres du secteur des chantiers navals (CSN) est la suivante... Je veux quand même aussi souligner l'ouverture, le caractère très franc des échanges qu'il y a eu entre la SGF et la direction de Marine, à tout moment, depuis la formation du comité de Marine et l'essentiel de ce rapport, on a eu l'occasion, à notre point de vue, de l'exprimer verbalement il y a déjà quelques semaines.

Premièrement, le plan de redressement projeté par Marine et la SGF se situe dans le prolongement traditionnel de la politique industrielle poursuivie dans le secteur.

Deuxièmement, la conversion des activités de Marine vers les équipements reliés à l'hydroélectricité et les wagons de chemin de fer n'offre qu'une faible garantie d'emploi et une pauvre capacité d'engendrer des revenus adéquats pour les travailleurs engagés dans les chantiers navals.

Troisièmement, le secteur des chantiers navals (CSN) est d'avis qu'en entérinant le plan projeté par Marine Industrie et la SGF, c'est tout l'avenir des chantiers navals du Québec que le gouvernement québécois condamne. A ce moment-là, on n'avait pas lu — on n'a pas fini sa lecture non plus — le rapport du comité du MIC et des divers ministères économiques qui semble très intéressant à certains égards.

La loi 108 exigeait de la SGF et de sa filiale, Marine, de présenter au gouvernement, avant le 1er juin, un plan de redressement du chantier. Pareil exercice, quoique de nature à approfondir et à préciser les orientations des deux entreprises, confirme aujourd'hui les appréhensions déjà soulevées par les syndicats en décembre passé.

Le plan élaboré par la SGF et sa filiale a pour objet d'amorcer un mouvement qui pourrait aller, en fait, en pratique, advenant la disparition de la section navale, en maintenant la réparation, à environ 1600 mises à pied dans la section navale et justifie des investissements dits rentables dans les sections des équipements liés à l'hydroélectricité et des wagons de chemin de fer qui jouissent d'un conjoncture plus favorable.

En décembre dernier, le président de la SGF, M. Guy Coulombe, et le ministre de l'Industrie et du Commerce, M. Rodrigue Tremblay, en étaient déjà arrivés à ces conclusions. La CSN s'était opposée à de telles mesures, puisqu'elles ne suffisaient pas pour contrer la montée du chômage dans la section navale et qu'elles ne prévoyaient pas un plan de stabilisation de l'activité principale du chantier: la construction de navires neufs. Parce qu'il ne faut pas oublier la vocation essentielle; les deux tiers des activités, c'est un chantier maritime. C'est un chantier de construction navale que celui de Marine à Sorel.

C'est pour les mêmes raisons que les syndicats s'opposent aujourd'hui à l'entérinement du plan de redressement projeté par Marine et la SGF et recommandent au gouvernement de recevoir le programme tel que soumis, mais exigent un effort

additionnel de toutes les directions impliquées, gouvernement et sociétés d'Etat, pour la formulation d'un véritable programme de maintien et de relance de l'activité du chantier naval d'ici le mois de septembre 1979.

Pour les syndicats des chantiers navals (CSN), aucune mise à pied pour une période indéterminée ne devrait survenir dans la section navale de Marine sans qu'un véritable programme de redressement agréé de toutes les parties soit mis en vigueur. Le programme déposé par la SGF et sa filiale témoigne particulièrement bien de la conscience qu'ont les directions de ces entreprises des pertes financières encourues par la section navale, des difficultés financières présentes et de leur souci de rentabiliser leurs activités ou minimiser les pertes.

Toutefois, le plan projeté se place dans la continuation naturelle des expériences vécues par les travailleurs des chantiers. Le plan ne contient aucun détail sur les moyens de règlement de la crise que traverse le chantier, de même qu'il n'indique aucune voie dans l'orientation prochaine du chantier pour préparer l'après-crise — on en a parlé; en 1982, on prévoit une reprise — et les investissements nécessaires pour maintenir la capacité de production actuelle. Evidemment, quand on parle d'investissements, il s'agit du gouvernement aussi.

Significativement, le plan souligne et documente abondamment l'instabilité de l'emploi dans cette industrie, comme si une telle instabilité était une façon de vivre acceptable et acceptée par les travailleurs.

Evidemment, il ne saurait être question que Marine et que la SGF seules formulent les conditions pour le maintien et l'expansion de l'industrie navale du Québec, puisque la vie d'une telle industrie dépend nécessairement de l'activité maritime, des perspectives maritimes du Québec et du Canada et des politiques fédérales et provinciales en regard de cette activité.

C'est donc un programme dominé par l'instabilité des emplois et rentable à court terme que les dirigeants de Marine et de la SGF ont déposé au gouvernement. Le programme de conversion repose sur des commandes fermes et des possibilités réelles de commandes à court terme dans les sections de la production d'équipement liée à l'hydroélectricité et la production de wagons de chemin de fer.

L'orientation des activités à moyen et long terme de Marine est à peine effleurée et les véritables enjeux économiques et sociaux oubliés. Le plan projeté est un exercice de rentabilisation à court terme, sans aucune garantie pour l'après-court terme. En effet, la production d'équipement hydraulique est directement attribuable au vaste programme d'équipement de l'Hydro-Québec et de sa filiale qui, pour la période de 1980 à 1985, entreprennent la construction des centrales de la baie James. Après 1985, la stabilité des opérations et de l'emploi de cette section sera remise en cause, à moins que la division internationale de l'Hydro-Québec ne décroche des contrats associés à l'hydroélectricité et assure la production des équipements nécessaires au Québec.

La production de ces équipements se fait actuellement à Marine sous licence française, donc sujette à certaines limites à l'exportation et les experts soutiennent qu'il existe une situation de surcapacité de production mondiale pour ces équipements.

En ce qui concerne les wagons de chemin de fer, une telle ligne de production offre peu d'intérêt, en termes de développement industriel et se caractérise également par une forte instabilité puisque les commandes de transporteurs ferroviaires sont cycliques et dépendent des politiques de tarifs qu'ils poursuivent.

A l'heure actuelle, les perspectives pour cette section sont à la hausse.

Finalement, en termes de recherche et de développement pour des produits nouveaux, en raclant les fonds de tiroirs, le plan soumis par la SGF et sa filiale envisage d'investir $2 millions, d'ici 1982, pour assurer l'avenir de Marine à Sorel. La décision se passe de commentaire, surtout lorsqu'on n'ignore pas que toute la région sorel-loise dépend largement de Marine et de son niveau d'emploi pour engendrer les revenus nécessaires à l'épanouissement de cette communauté. Annuellement, Marine verse au-delà de $50 millions en salaires directement dans la région.

Si l'exercice imposé par le gouvernement, à la SGF et Marine, en était un de rentabiliser les opérations financières à n'importe quel prix, il est particulièrement bien réussi et le mandat est respecté à n'importe quel prix.

La Davie Shipbuilding, tristement célèbre par son expérience passée à Marine Industrie, le gang Rochette et compagnie, dirige aujourd'hui le chantier de Lauzon. Pour ces éperviers de la sous-traitance, pour ces rois de la marge de profit, il n'existe aucun plan de redressement.

Pour qualifier la situation de la Davie Shipbuilding, il faut quitter l'industrie et entrer de plein pied dans le domaine du lobbying, des contrats glanés à coup de millions aux intermédiaires, des contrats fumants rendus possibles par le montant des subventions versées, par l'exploitation des travailleurs et à partir des droits que confère la propriété du chantier naval de Lauzon: une transaction rapide entre Power Corporation et le gang illustre dont personne ne connaît bien les dessous. Sous la direction de Rochette et compagnie, les syndicats n'hésitent pas à affirmer qu'elle affaiblit la vocation industrielle du chantier naval et l'éloigne sûrement des possibilités maritimes sérieuses que possède le Québec d'entrer de plein pied dans la construction navale.

Déjà, le niveau d'emploi a connu une dégringolade marquée. Aujourd'hui, 1200 hommes travaillent au chantier, alors qu'ils étaient 3200 en 1976 et les possibilités de créer des emplois nouveaux sont attachées directement à la faculté des dirigeants d'attirer et de réaliser des contrats qui exigent très peu du chantier, à part les bras des travailleurs qui y oeuvrent et à la condition

que les salaires y soient particulièrement propices pour leur fin.

Le gang célèbre, les syndicats affirment qu'il n'a ni l'intention ni les possibilités de moderniser le chantier, ni les garanties suffisantes pour assurer la vie industrielle du chantier. Aussi, pour le secteur des chantiers navals (CSN), tout plan de redressement véritable de l'industrie passe également par l'examen du cas de la Davie Shipbuilding et l'établissement de nouveaux liens industriels entre Sorel et Lauzon.

Afin de faire le point sur la relance de l'industrie de la construction navale du Québec, les syndicats des chantiers réclament du gouvernement la constitution d'un groupe de travail — je note à nouveau que je suis très heureux d'avoir constaté le résultat d'un travail assez rapide de la part d'un certain nombre de fonctionnaires — sous la responsabilité du ministre de l'Industrie et du Commerce qui dégage, avec les principaux intéressés, les orientations futures de cette industrie et les investissements requis pour assurer véritablement sa stabilisation.

Le groupe de travail aurait pour mandat d'explorer l'ensemble des perspectives de l'industrie navale du Québec et formuler des recommandations non seulement en regard du fonctionnement des chantiers actuels, mais aussi et surtout en fonction de politiques gouvernementales inappropriées dans ce secteur, qui ont contribué à faire des chantiers navals une industrie désinves-tie qui sous-utilise une main-d'oeuvre hautement qualifiée et lui procure des emplois instables. Et le comité, si vous voulez noter, remarque tout ça.

Ce qui est important, je pense, ce sont les investissements. Comme je le disais au tout début, avant d'amorcer la lecture de ce texte-là, à la suite d'une question de M. Scowen, il va falloir prendre conscience — je sais qu'il y a des investissements importants qui ont été faits avec la loi 108, mais ce sont des investissements très importants que tant le fédéral et le provincial devront faire pour relancer vraiment l'industrie navale ici.

En septembre 1979, le groupe de travail publierait le résultat de ses travaux et les diverses parties intéressées feraient connaître leur point de vue respectif avant que le gouvernement du Québec ne décide des orientations et des moyens d'intervention propices dans le cas de Marine. Les Syndicats des chantiers navals CSN dénoncent l'absence et le laisser-faire des politiques gouvernementales vis-à-vis des industries de la construction et du transport maritime. Evidemment, c'est surtout fédéral.

Le 11 avril 1979, les syndicats ont lancé une campagne d'information et de sensibilisation aux problèmes et aux solutions pour ces industries.

Nous entendons poursuivre cet effort parce qu'il représente pour beaucoup de travailleurs l'occasion de maintenir un emploi et aussi de créer des emplois additionnels pour des chômeurs dans des secteurs d'activité économique intéressants. Le développement et la stabilisation des chantiers navals du Québec passent par l'élaboration d'une politique maritime qui encourage le transport maritime national et qui, en termes de construction de navires neufs, réparations et conversion, peut stabiliser l'activité des chantiers navals et accroître le contenu québécois dans la construction, et c'est drôlement important.

Par leurs commandes de navires neufs en propre, par le niveau des subventions, par leur pouvoir de réglementation sur les eaux, les installations portuaires, par leur pouvoir de financement, les gouvernements peuvent assurer rapidement un rôle important aux industries de la construction navale et du transport maritime. Le rôle est assuré, en grande partie, par des navires battant pavillon de complaisance enregistré dans des pays comme le Libéria, le Panama, les Bermudes, et armés d'équipages africains ou asiatiques surexploités. De plus, l'ensemble des transporteurs maritimes du Canada oeuvrent par l'intermédiaire de succursales et filiales étrangères, une imposante flotte de complaisance, de l'ordre de 6,8 millions de tonneaux.

Canadian Pacific, Papachristides, un ancien collectionneur de timbres, qui a fait une fortune en vendant des bateaux de guerre aux Canadiens, Federal Commerce & Navigation, Alcan, Reynold Metals exploitent à eux seuls une flotte de complaisance de 82 navires, construits au Japon principalement, et armés d'équipages surexploités, construits entre 1970 et 1978. (18 heures)

Depuis l'été dernier, le gouvernement fédéral a fait savoir qu'il consacrerait $1 500 000 000 pour la production de six frégates attachées à la défense navale. Ce contrat a été annoncé à grand renfort de publicité pour calmer la fureur des travailleurs des chantiers de tout le Canada, dont les emplois sont menacés, mais qu'en est-il réellement? Le montant de $1 500 000 000 est un coût global qui comprend la conception, la construction du navire, l'armement, la construction de quartiers-généraux, l'entretien pendant une période de dix ans des six frégates en commande. En réalité, le contrat de $1 500 000 000 ne représente que $200 millions pour les chantiers navals. Le reste est consacré particulièrement à des équipements électroniques et de l'armement sophistiqué que seules quelques grandes multinationales américains sont aujourd'hui capables de fabriquer.

Ainsi, ce contrat sera exécuté dans le respect complet des modes traditionnels d'allocation de contrats gouvernementaux. Il fera appel à la technologie, à la conception étrangère, américaine évidemment, et aux bras candiens. Il y a des travailleurs qui ont été choqués de cette phrase, parce qu'on est tannés de voir qu'on se sert strictement de nos bras et surtout de nos bras.

Il n'y aura pas de retombées sur le génie naval local ou très peu. Et cela n'a pas de bon sens, et je trouve cela insultant pour les dirigeants des chantiers maritimes — on le leur a dit, à ce moment-là — que ce soit une compagnie américaine, spécialisée en électronique, qui obtienne le principal contrat de construction de bateaux.

Que retireront les deux principaux chantiers navals du Québec et du Canada de ces contrats?

La politique maritime préconisée par le secteur des chantiers navals de la CSN est la suivante:

A court terme, accélérer, premièrement, les commandes de navires et surveiller ensuite l'extension de la zone de souveraineté nationale jusqu'à 200 milles des côtes.

Deuxièmement, moderniser et agrandir les cales sèches de la Davie et de Vickers.

Troisièmement, aménager une cale sèche à Sorel.

Quatrièmement, accélérer la construction d'une flotte de pêche hauturière pour profiter de l'extension de la zone. Je crois que le ministre a déjà annoncé des projets dans ce sens-là.

Cinquièmement, accélérer la reconversion et la mise à la ferraille de bâtiments enregistrés au Canada qui constituent une source de pollution non négligeable des eaux et qui ne répondent plus aux exigences de vie décente des équipages.

Sixièmement, imposer des quotas aux importations de navires neufs construits à l'étranger et alourdir les taxes d'importation frappant de tels navires.

Septièmement, interdire l'achat de navires usagés par les transporteurs locaux.

Huitièmement, restreindre le cabotage (incluant l'Arctique) aux seuls navires construits et enregistrés au Canada.

Neuvièmement, créer un fonds de développement des chantiers navals et du transport maritime.

A moyen terme: premièrement, interdire l'accès de nos ports et de nos eaux aux navires battant pavillon de complaisance.

Deuxièmement, négocier avec tous les partenaires commerciaux du Canada en vue de régir le trafic maritime de la même façon que le trafic aérien.

Troisièmement, constituer une société d'Etat à l'image d'Air Canada pour ce qui est du transport maritime de marchandises et de passagers. J'ai mentionné tantôt qu'on exportait et qu'on importait pour $2 700 000 000 de marchandises et que 1% à peine de ces marchandises étaient transportées sur des navires canadiens.

Quatrièmement, élaborer un plan de restructuration de l'ensemble de l'industrie à partir de regroupements de chantiers et de la spécialisation de la production navale. Un tel plan pourrait regrouper les deux principaux chantiers du Québec sous une seule administration. Mais je ne pense pas que ce soit l'entreprise mixte qui puisse faire l'affaire dans ce cas.

Cinquièmement, doter les chantiers du Québec d'investissements nécessaires pour la construction, la réparation et l'entretien des méthaniers et pétroliers nécessités par l'exploitation des ressources du pétrole et du gaz naturel de l'Arctique.

Sixièmement, le regroupement des services de génie et de conception navale des chantiers du Québec.

L'appel du secteur des chantiers navals (CSN) est sérieux. Il vise à relancer et développer des industries qui, depuis trente ans, ont été sabordées et que l'on a entretenues à coups de bonbons, parce que les travailleurs des chantiers navals et les marins se sont fortement opposés à leur disparition.

La relance et le développement des industries de la construction navale et du transport maritime visent le développement des ressources naturelles et humaines du Québec. C'est une activité complexe et industrielle qui requiert une immense détermination. Nos "businessmen" ont fait leur option loin du champ industriel et proche des gros sous faciles et des retombées que les développeurs étrangers éparpillent dans leur sillage ou que les gouvernements enduisent sur leurs contrats.

Voilà le point de vue des syndicats de la CSN des chantiers maritimes sur le plan de redressement. M. Clément Fleury, le président du syndicat de Lévis aimerait dire quelques mots...

Le Président (M. Boucher): M. L'Heureux, à ce moment-ci, je dois demander aux membres de la commission s'ils veulent prolonger après 18 heures ou si on peut revenir à 20 heures.

M. Scowen: M. le Président, malheureusement, je suis obligé de me rendre au caucus à 18 heures. C'était convenu.

Le Président (M. Boucher): On reprendra les travaux à 20 heures.

M. L'Heureux: Merci.

Le Président (M. Boucher): La commission suspend ses travaux jusqu'à 20 heures.

Suspension de la séance à 18 h 5

Reprise de la séance à 20 h 26

Le Président (M. Boucher): A l'ordre, s'il vous plaît!

A la suspension de 18 heures, nous avions pris connaissance du mémoire de la CSN, par l'intermédiaire de M. L'Heureux. Je crois que M. L'Heureux voulait faire intervenir quelqu'un.

M. L'Heureux: II n'est plus là. C'est Clément Fleury, le président du syndicat de Davie qui m'a demandé simplement de vous transmettre qu'il était lui aussi très heureux de constater qu'au Québec, même si ce n'est pas de responsabilité proprement québécoise, le transport maritime et la construction navale, il y avait une préoccupation et un intérêt de plus en plus grand pour ce secteur, avec tous les rapports qui sortent un peu partout sur cette question.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. L'Heureux. Je vais donner la parole à M. le ministre immédiatement pour les commentaires sur le mémoire. M. le ministre.

Commentaires sur le mémoire M. Rodrigue Tremblay

M. Tremblay: Merci beaucoup, M. le Président. J'ai écouté attentivement la lecture du mémoire de M. L'Heureux, mémoire de la CSN, qui, dans ses grandes lignes, est très constructif, je crois, parce que ce dont il faut se rendre compte, c'est que la SGF est régie par une charte approuvée par l'Assemblée nationale avec un mandat bien précis, un mandat qui a été renouvelé en décembre dernier, qui lui donne une responsabilité de rationaliser et de rentabiliser ses activités.

La SGF possède des filiales, dont Marine qui était, de facto, en faillite au mois de décembre dernier et qui été sauvée in extremis par une intervention gouvernementale. Elle devait, selon le mandat de la loi, le mandat de l'Assemblée nationale, proposer un plan de redressement dans le cadre de son mandat. Il est évident que la solution des chantiers maritimes en général, ceux de Marine, ceux de Davie et ceux de Vickers — je laisse de côté les quelque 23 petits chantiers maritimes que nous avons en Gaspésie et tout au long du fleuve qui, eux, auront des contrats au cours des cinq prochaines années en abondance, à cause de la politique du gouvernement du Québec concernant le plan quinquennal de renouvellement de la flotte de pêche, mais comme ces bateaux de bois ne sont pas construits par les grands chantiers maritimes, il ne s'agit pas d'une solution.

Une solution pour les problèmes des chantiers maritimes ne peut donc pas être demandée à une entreprise comme la SGF ou à sa filiale, qui est Marine. Je pense que la SGF a fait son devoir, a rempli son mandat et je crois que nous ne pouvions pas demander davantage à cette société.

Ceci ne veut pas dire que les remarques, les observations et les recommandations que le mémoire de la CSN reprend ne sont pas justes. Nous sommes ici en face d'un secteur qui ressemble étrangement à nos autres secteurs mous au plan industriel. C'est un secteur et, à juste titre, la CSN le souligne, qui n'a pas reçu, de la part des gouvernements, et les gouvernements ont des responsabilités qui sont autres que celles d'une entreprise, d'un holding comme la SGF ou d'une entreprise comme Marine, ce secteur, dis-je, n'a pas reçu, de la part des gouvernements une orientation articulée comme on aurait dû s'y attendre des gouvernements.

C'est pour cela qu'en décembre dernier, lorsque la CSN avait proposé son premier mémoire, je l'avais reçu avec énormément de sympathie, et c'est pour ça qu'aujourd'hui, je crois que le mémoire qu'a présenté M. L'Heureux doit être reçu avec énormément de sympathie, en vertu du principe que les gouvernements ne peuvent pas se laver les mains d'une détérioration conjoncturelle dans un secteur industriel en laissant le libre cours aux forces économiques de rationaliser ces secteurs.

Dans notre cas, évidemment, si nous nous étions lavé les mains, Marine serait présentement en faillite et les quelque 3000 employés seraient en chômage au moment où on se parle. Le gouvernement du Québec a donc décidé d'intervenir, parce que nous croyons que les difficultés conjoncturelles qui existaient dans une des divisions de Marine ne justifiaient pas, au plan industriel, ce sacrifice d'un demi-siècle, en quelque sorte, d'efforts dans la région de Sorel.

Je pense que la famille des Simard a rempli un rôle industriel important dans la région de Sorel. Evidemment, on peut toujours discuter de la justesse des choix du gouvernement libéral en 1965, lorsqu'on a décidé d'acheter une participation majoritaire dans Marine, surtout de la part d'un gouvernement provincial qui, n'ayant pas de prise sur les décisions d'armements, n'ayant pas de prise sur les commandes de grands bateaux, allait dans un secteur qui, pour un gouvernement provincial, est très vulnérable par définition.

Les faits sont que, quand même, nous avons ce secteur, qui est un secteur d'industrie lourde très touché par une conjoncture internationale des marchés qui, comme je l'ai dit, au cours du dernier demi-siècle a été le plus sérieux.

Je ne reprocherai pas à la SGF et certainement pas à Marine d'essayer de rationaliser leurs secteurs, de diversifier leur production de manière à préserver le plus grand nombre d'emplois tout en gardant leur autonomie et leur survie financière.

Mais la CSN touche juste lorsqu'elle dit que les gouvernements doivent élargir leurs perspectives et regarder ce problème, qui est celui de Marine, dans une perspective plus grande.

Au Québec, nous avons trois chantiers maritimes de grande envergure, celui de Vickers, qui maintenant se spécialise dans la réparation, évidemment, celui de Marine, qui est déjà passablement diversifié avec l'hydroélectrique et les wagons, mais il y a aussi Davie, comme le mémoire de la CSN le souligne justement, qui est passé de quelque 3000 employés à 1200 présentement et qui a dû se diversifier devant la pénurie de contrats de bateaux de grande dimension vers les plates-formes de forage de pétrole, qui lui permettent de maintenir sa rentabilité et une activité industrielle raisonnable que j'ai encouragé moi-même, comme ministre de l'Industrie, en accordant une subvention de $5 millions pour faire la promotion de l'exportation de ses produits.

Je pense que nous ne devons pas considérer le plan de reconversion de Marine comme un plan qui doive rester définitif en ce qui concerne les gouvernements. C'est pour cela que, comme l'a souligné M. L'Heureux, hier, j'ai déposé à l'Assemblée nationale une étude que je considère, même si elle n'est pas tellement volumineuse, très à point sur le diagnostic qu'il faut porter sur la crise qui sévit présentement dans les chantiers maritimes du Québec et du Canada, mais particulièrement dans le cas du Québec.

Il est évident que si les représentants des travailleurs et j'en déduis par le mémoire de la CSN que ceci est une approche positive, s'il y a cette volonté de créer premièrement un bureau

des chantiers maritimes pour le Québec, que nous pouvons faire un certain rnillage dans la rationalisation de nos opérations dans ce secteur entre les chantiers maritimes, au-delà donc, des responsabilités de Marine Industrie et de la SGF qui, comme je le répète, s'inscrivent dans le cadre d'un mandat confié par l'Assemblée nationale et il n'est pas question que nous révisions ce mandat aujourd'hui, mais dans un mandat de rationalisation entre les chantiers existants, je pense qu'il y a des opérations à réaliser.

De sorte que je ferai appel aux chantiers maritimes du Québec, aux associations des travailleurs, des syndicats de travailleurs, de même qu'aux autres propriétaires de chantiers maritimes, même s'ils sont de plus petite taille, comme l'Association des petits chantiers maritimes, pour former un bureau de construction navale au Québec, afin que les gouvernements puissent être saisis de recommandations faisant l'objet d'un front commun de la part des intérêts des agences économiques qui oeuvrent à l'intérieur de ce secteur industriel très important. Au cours des prochaines semaines, je vais donc désigner un fonctionnaire du ministère de l'Industrie et du Commerce afin de mettre sur pied un tel bureau de construction navale qui pourra analyser une partie des suggestions faites par la CSN et aller même plus loin. Je pense que même s'il y a des chantiers qui relèvent de l'entreprise privée et d'autres qui relèvent de la propriété publique, il y a place pour une rationalisation des activités, une consolidation des achats, par exemple, au niveau des chantiers maritimes afin d'accroître la productivité et la compétitivité et de coordonner les efforts d'exportation en vertu du principe que l'union fait la force.

Lorsqu'on est dans un état de crise, il est de la responsabilité de tous ceux qui peuvent contribuer à la solution, de s'unir pour trouver les solutions qui sont les moins coûteuses ou qui sont les plus productives. Je félicite les représentants des syndicats d'avoir fait leur cette suggestion.

En ce qui concerne le gouvernement du Québec, un gouvernement provincial, qui, jusqu'à un certain titre est une grosse municipalité dans le domaine maritime, n'ayant aucun contrôle sur les armements maritimes, n'ayant aucun contrôle sur la zone de 200 milles pour les pêches en ce qui concerne la réglementation, il y a quand même une approche positive qui peut être développée.

Au moment où nous nous parlons, j'ai demandé à tous les ministères du gouvernement du Québec qui peuvent avoir des contrats impliquant une construction navale d'accélérer ces contrats. Il y a le ministère des Transports, en ce qui concerne les traversiers, le ministère de l'Industrie et du Commerce, en ce qui concerne les navires de recherche, les chalutiers pour la pêche, dans le cadre du plan quinquennal des pêches, les $110 millions que nous avons annoncés, des sociétés d'Etat comme SOQUEM qui doivent faire construire des bateaux ou des barges pour transporter le sel des Iles-de-la-Madeleine, SOQUIP qui doit participer à des recherches pétrolières au large de la côte est du Labrador, du Canada.

Donc, au niveau du gouvernement du Québec, tous les efforts vont être déployés au cours des mois qui viennent, avant même le mois de septembre 1979, comme on le soulignait tout à l'heure, afin de hâter la construction de navires, considérant que le creux de la vague se trouve au moment où nous nous parlons et qu'il irait de l'intérêt de l'économie du Québec et du secteur des chantiers maritimes que nous hâtions ces commandes. Par contre, il est évident, comme le rapport interministériel des fonctionnaires le souligne, que nous devrons peut-être faire front commun, ici à l'Assemblée nationale, les représentants de la population du Québec de même que les représentants de l'industrie et les représentants du monde syndical, pour que nous puissions trouver des solutions plus permanentes à la crise que traversent les chantiers maritimes.

Dans tous les pays qui font face au même problème, les gouvernements nationaux ont pris une part de leadership, ont rempli un rôle de leadership dans la prise de décision fondamentale pour revaloriser ce secteur en péril. Dans le cas du Canada, nous devons constater que, malgré les recommandations du groupe de consultation, dans le cadre des études poursuivies par le ministère de l'Industrie et du Commerce au cours de l'an passé, il y a quand même eu relativement peu de choses.

Je pense que la CSN a parfaitement raison de souligner que dans le plan de construction de cales sèches et de réparation de chantiers maritimes annoncé par le gouvernement fédéral il y a deux mois, au montant de $35 millions, on avait par hasard oublié les plus grands chantiers maritimes du Canada qui se trouvent au Québec en l'occurrence Marine Industrie et Davie Shipbuilding, et Vickers étant relativement important.

Nous avons l'exemple, aux Etats-Unis, du Jones' Act. Le Jones' Act a permis aux Etats-Unis de traverser la crise mondiale qui sévit dans le domaine maritime, dans le domaine des chantiers maritimes, sans trop de perturbation. On a réservé aux chantiers maritimes américains un achalandage au niveau de la réparation des navires et de la construction de navires de cabotage, qui était garanti.

Il y a présentement devant la Chambre canadienne des communes, devant le Parlement canadien, une Loi du cabotage qui est extrêmement pusillanime, qui ne s'adresse pas du tout aux problèmes objectifs que traversent les chantiers maritimes, qui n'est pas du tout à la hauteur de la crise que nous traversons.

En ce qui nous concerne, la réflexion qui a été faite à l'intérieur du gouvernement, c'est que nous devrions nous servir du fleuve Saint-Laurent non seulement comme une voie navigable qui permet d'amener des marchandises jusqu'à Chicago par la Voie maritime du Saint-Laurent, en court-circuitant les ports de mer et en court-circuitant les chantiers maritimes du Québec, mais que nous devrions imiter les Américains pour une fois et appliquer une Loi du cabotage qui ait autant de retombées économiques que la loi américaine.

Si le bureau des chantiers maritimes que nous voulons créer et qui semble s'imposer arrivait à la même conclusion, nous pourrions créer une force cohérente de pression sur le gouvernement fédéral pour obtenir, premièrement, que les navires qui ont des permis de cabotage, non pas seulement à partir de Sept-lles, comme on a pensé le faire, mais à partir de Halifax jusqu'aux Grands Lacs, soient non seulement réparés dans les chantiers maritimes canadiens, mais y soient aussi construits, en ce qui concerne les nouveaux navires. Il ne s'agit pas de revenir en arrière, mais, pour les nouveaux navires, nous pourrions réserver un certain pourcentage, à déterminer, de construction dans les chantiers maritimes.

En ce qui concerne la porte ouverte qui est faite aux navires construits dans les pays du Commonwealth, qui ne sont pas assujettis à la taxe de 25% à l'importation lorsqu'ils sont importés au Canada, il s'agit vraiment d'une loi de l'inertie qui ne tient pas compte que la Grande-Bretagne a déjà joint le Marché commun européen, que nous avons perdu les préférences tarifaires pour nos produits dans leur accès en Grande-Bretagne et que, par conséquent, nous avons une démonstration que nous continuons à accorder des préférences à des pays du Commonwealth au détriment de nos chantiers maritimes et que ceci devrait être corrigé dans les plus brefs délais. (20 h 45)

Ceci serait de nature, si cette loi du cabotage était adoptée dans les meilleurs délais — je pense à l'automne, par exemple — à peut-être diminuer considérablement les prévisions qu'ont faites la SGF et Marine Industrie. Les prévisions de Marine Industrie et de la SGF vont de 1000 à 600 pertes d'emplois. Elles sont établies dans le cadre d'une rationalité purement interne de l'entreprise, mais, si les gouvernements font leur travail, il est possible que ceci soit complètement enrayé et que nous puissions avoir des chantiers maritimes qui soient prospères. Il est absolument illogique que des chantiers maritimes situés sur la plus grande voie navigable au monde, le Saint-Laurent, soient en difficultés. Je pense que ceci est absolument inacceptable et est simplement le reflet de l'absence de politique dans le domaine des chantiers maritimes.

Evidemment, le cas des chantiers maritimes du Québec est encore plus patent, parce que nous sommes un peu entre deux tenailles. Je pense que ceci est extrêmement bien étayé par le document qui a été rédigé par le comité interministériel des fonctionnaires qui s'appelle "Rapport du comité d'étude sur l'avenir des grands chantiers maritimes du Québec." D'une part, avec la voie maritime du Saint-Laurent, nous nous rendons compte que le port de Québec et le port de Montréal, qui étaient quand même des ports terminaux pour le cabotage, ont considérablement diminué dans leur importance, de sorte qu'une compagnie comme Canada Steamsphip Lines, possédée par Power Corporation, qui était le propriétaire de la Davie Shipbuilding, s'est maintenant désengagée de son chantier maritime privé qui était la Davie Shipbuilding pour aller développer le chantier de Collingwood en Ontario, parce que, maintenant, avec la voie maritime, il s'agit de faire réparer les navires tout près de la tête des Grands Lacs, tout près de Port Arthur et de cette région.

D'autre part — et ceci est un fait qu'il nous faut souligner — avec la loi fédérale du Maritime Freight Act, il en coûte moins pour expédier par chemin de fer des produits en provenance de Halifax jusqu'à Toronto que de Montréal jusqu'à Toronto, de sorte qu'on a diminué l'importance stratégique qu'occupaient les ports du Saint-Laurent et, par ricochet, on a diminué, évidemment l'achalandage que recevaient naturellement les chantiers maritimes qui réparaient les navires ou qui en construisaient. Donc, il s'agit ici d'une position fondamentale.

Si jamais le gouvernement fédéral refusait d'agir sur ce plan, je reprendrais la phrase de la CSN, c'est qu'il y a ici une volonté de laisser les chantiers maritimes du Québec aller à la dérive, ce qui n'est pas la volonté du gouvernement du Québec. Là, il faut reconnaître que le gouvernement du Québec ne peut pas à la fois être un gouvernement provincial et un gouvernement national, et qu'il va falloir que ceux qui ont les responsabilités, prennent les responsabilités que leur accordent les pouvoirs qu'ils détiennent. Cela doit être très clair. La position du gouvernement du Québec est très claire. Les ports du Saint-Laurent doivent être des ports prospères à cause de l'importance de cette voie navigable. Les chantiers maritimes qui y sont rattachés ne devraient pas être des secteurs mous, mais devraient être des secteurs prospères. C'est parce qu'on les laisse dépérir qu'ils sont en difficulté, évidemment, dans le grand contexte qu'en ce qui concerne les marchés internationaux, les chantiers maritimes du Canada font face aux mêmes problèmes que tous les chantiers maritimes du monde. Ce qui est inacceptable, c'est que la crise soit plus forte ici pour un pays maritime comme le Canada.

D'autre part, cette approche à court terme au niveau du cabotage qui peut se faire assez rapidement, à mon avis, et qui pourrait pallier ces difficultés qui sont annoncées, pourrait s'additionner d'une politique à moyen terme qui serait de nature à encourager l'industrie lourde des chantiers maritimes et l'industrie de l'acier qui lui est évidemment tributaire. La création d'une marine marchande canadienne, non pas dans l'orientation définitive que souligne la CSN, c'est-à-dire une société d'Etat canadienne, mais dans le cadre d'une politique fiscale et de subventions, de manière à rendre l'établissement d'une pareille flotte marchande possible, serait évidemment la solution définitive aux chantiers maritimes du Québec, comme à ceux du Canada.

Dans le document du gouvernement du Québec, nous soulignons le fait qu'en attendant cette décision cruciale qui nous apparaît logique, il y a la possibilité de faire pour les chantiers maritimes du Québec, de la part du gouvernement fédéral, ce qui a été fait pour les chantiers maritimes des

provinces maritimes, à savoir de négocier avec les flottes internationales de pêche, notamment les flottes russes et d'autres flottes d'autres pays qui ont accès à la zone de 200 milles en contrepartie de conditions posées par le gouvernement canadien, que ces conditions s'appliquent pour le fleuve Saint-Laurent, que certaines négociations exigeant des permis pour les flottes étrangères dans le golfe Saint-Laurent soient imposées à ces flottes pour qu'elles soient séparées, pour qu'elles soient attachées à des ports de mer et à des chantiers maritimes qui ne soient pas uniquement concentrés dans les Maritimes, de sorte que nous serions prêts nous-mêmes à encourager ce genre de solution. Donc, nous pourrions revenir sur cette perspective plus positive et plus définitive à ce problème.

Il n'en demeure pas moins qu'il y a une situation inéluctable à Marine, indépendamment de ce que pourront faire les gouvernements. Je répète que la responsabilité des gouvernements n'est pas celle de la SGF et de Marine. Il ne faudrait pas mélanger ici les responsabilités.

Mais il y a une réalité inéluctable, c'est que le chantier maritime de Marine, est assez diversifié par rapport à celui de Davie, parce qu'il faut reconnaître que Marine est passablement diversifiée du côté de l'hydro-électrique et du côté des wagons. Ce n'est donc pas l'ancienne société de chantiers maritimes qui existait du temps où le gouvernement fédéral lui-même possédait ce chantier en 1937.

La réalité inéluctable, c'est que, après les contrats polonais et les deux traversiers que le gouvernement du Québec a demandé de construire, il n'y a pas de commande internationale. N'ayant pas de commande, il est difficile de demander à la société de maintenir les milliers de travailleurs occupés à la construction de navires qui ne seront pas vendus. Je ne crois pas avoir compris, dans le mémoire de la CSN, qu'on suggérait que Marine construise d'autres navires semblables à ceux qui ont été vendus aux Grecs et qui n'ont pas été livrés, finalement, pour que nous ayons dans la rade de Sorel une série de navires invendus.

Le problème de Marine, c'est qu'elle n'a pas de navire à construire. Nous pourrions nous enfouir la tête sous le sable et dire qu'il n'y a pas de problèmes, mais c'est un problème auquel il faut faire face. Je ne crois pas que la solution soit de construire des navires s'il n'y a pas de commande. Je crois qu'une partie de la solution, c'est de créer des commandes et que les gouvernements et tous les agents qui sont impliqués fassent en sorte qu'il y ait une amélioration dans le carnet de commandes. S'il n'y a pas de commandes au plan international, nous ne pouvons pas demander à Marine de construire des navires qui ne seront pas vendus uniquement pour maintenir l'emploi et accumuler les déficits afin d'éviter un chômage dans la division navale qui, sans trop charrier, a toujours eu une fluctuation cyclique dans le passé.

Marine n'est pas un ministère, n'est pas une division d'un ministère qui peut se permettre de garder, assurer la permanence d'emploi. C'est en fonction de la production réalisée qu'elle peut justifier son emploi, de sorte qu'on se trouve ici avec les sujets très intéressants et les suggestions très positives qui ont été soulevées dans le mémoire de la CSN pour élargir considérablement le débat, comme il faut le faire.

Je ne crois pas, par contre, que nous puissions demander à Marine ou à la SGF de prendre sous sa responsabilité ces décisions de politique industrielle. Je pense que Marine doit faire ce que nous attendons d'elle, c'est-à-dire produire les navires qu'elle a en commande avec le minimum de pertes et on sait que les pertes vont devenir importantes, celles que nous considérons, et il ne serait pas dans l'intérêt des organisations syndicales d'augmenter ces pertes par des ralentissements additionnels. Je ne crois pas qu'il soit, dans la conjoncture actuelle, dans l'intérêt de quiconque de contribuer aux problèmes de Marine au moment où nous nous parlons. Je pense qu'il est dans l'intérêt de tout le monde de contribuer à la relance de Marine, pourvu que tous les autres intervenants amènent la même contribution que la SGF et Marine ont eu le courage d'amener dans le cadre de ce programme de redressement.

Je conclurais mes remarques, à la suite du mémoire de la CSN, en disant premièrement que je suis d'accord avec son orientation générale; deuxièmement, qu'il ne faudrait pas croire que le gouvernement du Québec va injecter de nouveaux fonds dans Marine, il n'y a pas de nouvelle loi prévue au cours des mois à venir ou dans la saison à venir, en ce qui concerne de nouvelles injections de fonds dans Marine; ce serait aller injecter des fonds dans un tonneau des Danaïdes si nous allions dans cette direction. Il faut qu'il y ait une rationalisation de ce secteur, mais il faut en même temps que les gouvernements renforcent l'importance économique de ces secteurs et débloquent des commandes, soit par réglementation, soit par décision politique, en ce qui concerne les frégates fédérales et en ce qui concerne des traversiers ou d'autres commandes découlant du gouvernement du Québec.

De sorte que je pense que le problème est bien posé, mais il ne faudrait pas que quiconque s'illusionne sur les façons de résoudre ce problème sans coût. Aussi longtemps que Marine n'aura pas de commandes, elle ne pourra pas garder la totalité des employés dans la division navale. Aussi longtemps qu'on ne fera pas face à ce problème, je pense qu'on passera à côté des solutions qui sont nécessaires.

M. le Président, je dirai que, dans les semaines qui vont venir, le gouvernement du Québec, en collaboration avec les syndicats et avec les dirigeants des deux ou trois chantiers maritimes du Québec, sera prêt à aborder la question d'une façon plus compréhensive et sur une base de front commun, mais je ne crois pas que nous puissions ce soir arriver à des consensus définitifs sur ces questions.

La raison pour laquelle la commission parlementaire a été convoquée aujourd'hui, ce n'est

pas de résoudre tous les problèmes, parce que nous avons des responsabilités qui sont diverses, mais je répète que la responsabilité de la SGF et la responsabilité de Marine s'inscrivent dans le cadre d'une loi, mais que nous pourrons, au cours des jours qui viennent, établir des coordonnées d'action face au gouvernement du Québec et face au gouvernement fédéral, qui pourront nous permettre de refaire, dans ce secteur mou, ce qui a été fait dans d'autres secteurs mous. Parce qu'on avait déjà condamné d'autres secteurs mous de l'économie, dans le passé, et cette cohésion entre les intérêts de tous les participants nous a permis de faire que le secteur de la chaussure, le secteur des meubles, le secteur du vêtement, le secteur du textile aujourd'hui, sont des secteurs qui ont passé à travers leur crise et qui sont en pleine relance. En ce qui me concerne, je crois que, dans un an ou deux, s'il y a de la bonne volonté de toutes parts, nous serons, au plan international quand même, au Québec, une puissance dans les chantiers maritimes.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre. M. L'Heureux.

M. L'Heureux: Merci, M. le Président. Le ministre était absent, à cause d'autres occupations pressantes qu'on connaît, au moment où on a parlé... Je vous répète, au départ, ce que j'avais dit à ce moment, c'est que j'ai participé aux premières sessions de la commission, lors du dépôt de la loi 108 et avant, et j'estime que l'attitude générale ou la prise de conscience générale au niveau des membres du gouvernement, comme des membres de l'Opposition, est fort différente, et nous réjouit beaucoup.

Je voudrais, au départ, faire un commentaire sur certains aspects que vous avez analysés. Je ne dirais pas, M. le Président, que la décision, en 1965, d'acquérir le chantier de Marine, par le gouvernement du Québec, ait été une erreur. Je sais fort bien dans quel contexte ou dans quel esprit vous le faites, à savoir la sorte de critique, parfois négative, qui provient de certains milieux, quant à la marche ou aux opérations d'une société d'Etat. Je ne m'étendrai pas là-dessus, mais je pense, j'estime que la décision du gouvernement du Québec, en 1965, d'acquérir Marine Industrie, quelles que soient les modalités qu'on pourrait analyser, est une excellente décision, comme celle de SIDBEC, etc. (21 heures)

Ce n'est pas parce qu'il y a des problèmes aujourd'hui qu'on doit regretter cette décision qui s'inscrit, quant à nous, si on regarde ce qui se passe dans la plupart des pays occidentaux, dans un grand nombre — pour être plus juste — de pays occidentaux capitalistes, dans une tendance à nationaliser les chantiers maritimes. Il en reste un en Suède — un chantier privé qui est en faillite — qui va être acheté par le gouvernement suédois qui n'est pas socialiste ou social-démocrate, mais qui est libéral.

M. Tremblay: Ce chantier n'est pas acheté par une province de la Suède.

M. L'Heureux: Non, sauf que je... Oui... Que ce soit une province ou une autre, un gouvernement du Québec; celui-ci, j'imagine, va prendre d'autres décisions très positives comme celles-là...

M. Tremblay: M. L'Heureux, on a parlé de $1 500 000 000 de frégates; si le gouvernement du Québec avait $300 millions ou $400 millions de frégates à commander, s'il avait tant de millions de dollars de méthaniers à commander, s'il avait toutes sortes de contrats semblables à commander, le plan de redressement de Marine Industrie aurait été résolu au départ. Nous nous trouvons ici dans une situation où, comme on l'a souligné justement, les gouvernements ont énormément d'importance dans la survie de ces chantiers maritimes puisque les commandes internationales étant à terre, ce sont les commandes intérieures qui peuvent amener la solution temporaire, à court et à moyen terme, aux chantiers maritimes.

Or, un gouvernement provincial ne peut pas commander des chaloupes Verchères. Il faut qu'il commande des bateaux d'acier, etc. Dans le domaine de la pêche maritime qui relève du gouvernement du Québec, nous avons mis $90 millions pour construire 232 navires de bois de 60 pieds et de 45 pieds. Donc, nos petits chantiers maritimes à nous vont fonctionner à plein, mais, pour les grands chantiers maritimes, il faudra avoir des commandes d'armement, des commandes comme des brise-glace, des commandes de cet ordre et c'est pour ça que je dis qu'un gouvernement provincial qui nationalise tous les chantiers maritimes sans avoir les commandes à leur passer, à mon avis, n'a pas la bonne approche. Un gouvernement national, je suis d'accord avec vous. Ou il subventionne fortement ou il passe des commandes.

M. L'Heureux: Tout ce que je voulais souligner, M. le Président, c'est que la décision du gouvernement du Québec, même si c'était une province libérale à l'époque, d'acheter un chantier naval collectivement était une bonne décision. Deuxièmement, j'estime... Je pense à l'aspect négatif; au départ, on fait toujours ça; parfois, on passe à l'inverse et on dit: ceci dit, et on se met à attaquer, mais j'inverse la méthode. Par ailleurs, je ne pense pas que, dans le même esprit et avec ce que j'ai dit tantôt de la tendance aux nationalisations dans certains pays occidentaux libéraux, les subventions et les exemptions fiscales soient vraiment, comme le ministre l'a dit, la solution. Au contraire, je pense que les éléments de nos analyses le démontrent. Quant à nous, il faut regrouper les chantiers et on ne peut pas, on ne pourrait pas imposer, j'imagine, à la direction actuelle de Marine Industrie, société d'Etat, de s'accointer — je m'excuse de dire ça — avec les ex-membres de la direction qui sont à la Davie Shipbuilding. Je passe là-dessus...

D'autre part, je voudrais corriger. Malgré la déclaration qui a été faite par le président du syndicat et qui correspond à la réalité, il n'y a pas de ralentissement additionnel parce qu'il n'y a pas de ralentissement comme tel. Il a pu y avoir hier des réunions de certains membres au chantier, mais on ne peut pas parler de ralentissement additionnel dans le chantier.

Quant à l'analyse générale que le ministre a faite, je pense que c'est le temps de la faire. D'ailleurs, le gouvernement l'a faite aussi, on le reconnaît, il l'a faite au niveau de la loi 108, il l'a faite par le ministère au niveau du comité qui a pondu un rapport que je n'ai pas lu encore, mais dont j'ai vu des éléments et qui nous réjouit beaucoup, quant à certaines grandes lignes qu'on a vues... L'attitude — et j'espère qu'elle est partagée, et je pense qu'elle l'est parce que j'ai entendu des représentants de l'Union Nationale et du Parti libéral — dans ses grandes lignes, quant aux transformations à apporter aux lois régissant le transport maritime, lois qui sont fondamentales si on veut transformer tout le secteur de la construction navale, je crois qu'il y a — et c'est étrange qu'on ait à dire ça, mais c'est la réalité — une unité de point de vue quant aux solutions générales et particulières à apporter au problème de la construction navale et du transport maritime au Québec et au Canada. Au Québec, notamment, puisque nous y sommes.

Cependant, vous nous avez posé une question — c'est-à-dire que nous vous avons demandé la création d'un comité — pour suspendre jusqu'en septembre, quant aux aspects concrets, l'application du plan de redressement, surtout quant à la section navale. Notre demande est quand même raisonnable, nous sommes déjà à la mi-juin, il s'agit de suspendre toute décision quant à ce projet. Vous nous demandez de participer à un bureau de la construction navale, des chantiers maritimes. Cette décision ne pourra être prise, quant à nous, que par les syndicats concernés. Cependant, à ce stade, est-ce qu'il serait possible, M. le Président, que le ministre envisage des rencontres dans le sens où nous l'avons fait dans notre mémoire, avec les sociétés d'Etat concernées, la SGF, Marine, le ministère et les auteurs du rapport ministériel publié hier, afin qu'on précise certains aspects — qui sont très complexes, qu'on ne peut pas élaborer ici — à la fois du rapport du ministère et des sociétés concernées, des attitudes aussi des syndicats intéressés.

Mais semble-t-il, dans un premier temps, ce serait important qu'on définisse, à partir de tous ces rapports et des sociétés concernées, certains aspects des politiques à envisager avant qu'une décision, parce que l'impression que j'ai, c'est que le plan de redressement comme tel serait adopté, en principe, je crois qu'il l'a été, au fond, par le Conseil des ministres peut-être ou par un groupe de ministres... On vous demande de suspendre la décision, si possible, jusqu'au 1er septembre ou au 15 septembre environ. Il me semble que c'est une demande assez raisonnable.

Il est vrai, quand vous nous dites: Qu'est-ce qu'on fait devant Marine? Qu'on ne s'attende pas qu'on construise des bateaux pour les laisser en rade à Sorel. M. le Président, je pourrais vous dire à ce moment-là, je pourrais citer des exemples d'autres pays qui ont stocké les bateaux. Je ne demande pas ça pour l'instant, ce n'est pas ce qui est en cause. Ce qu'on demande, avant tout, c'est d'avoir une assurance et on se l'est dit dès le départ, dès la première commission parlementaire qu'il y a eu, on ne l'a pas présentement, on l'a dit clairement, je comprends que ce n'est pas surtout le gouvernement du Québec qui est responsable là-dedans, sauf qu'à notre niveau et au moment où on se parle présentement, il me semble qu'on ne peut pas accepter le projet intitulé "Projet de redressement du chantier maritime de Sorel"; chantier maritime, il n'en serait plus, dans les conditions actuelles.

Je vais m'avancer un peu, mes camarades me regardent. Si nous avions l'assurance que certaines positions, certaines orientations qui vont dans le sens de celles qui sont contenues dans notre brochure bleue et dans le mémoire d'aujourd'hui, allaient être sérieusement épousées et adoptées par le gouvernement, nous serions prêts à envisager d'autres formules. Mais il faut cette volonté au départ.

C'est la question qu'à ce stade-ci on veut poser au ministre, parce qu'il ne s'agit pas seulement, quand il dit: II n'est pas question — Ah oui, ça aussi, ça m'a énervé, à la fin — d'ajouter des fonds à Marine.

M. le Président, si telle est l'intention du ministre, je ne sais pas s'il représente le point de vue du gouvernement, je crois que nous ne nous sommes pas fait comprendre suffisamment. L'analyse que l'on fait des problèmes de la construction navale, de la vocation maritime du Québec et du Canada signifie qu'il va falloir, et je n'ai pas de base pour chiffrer, mais j'estime, compte tenu du passé, compte tenu de ce qu'on sait qui s'est fait annuellement et depuis vingt ans en Suède ou ailleurs dans le monde, là où on a développé, malgré les problèmes qu'ils subissent maintenant, des centaines de millions de dollars pour transformer les chantiers maritimes du Québec, pour qu'ils deviennent de véritables chantiers maritimes, avec laboratoires de recherche, des cales sèches adéquates, de l'outillage adéquat.

Cette réponse du ministre, à ce stade-ci, ne nous satisfait pas, évidemment. J'espérerais donc — et ce n'est pas ici qu'on peut décider cela — de la part du gouvernement que notre proposition de rencontre — vous la souhaitez souvent, notre collaboration. On vous l'offre à ces conditions, ce ne sont pas de grosses conditions. Que les sociétés d'Etat concernées, les ministères concernés, ceux qui ont fait des études tentent ensemble d'élaborer, de préciser certains aspects qui ne l'ont pas été encore, entre nous, avant de procéder au bureau que vous souhaitez. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. L'Heureux. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. M. le ministre, voulez-vous répondre immédiatement?

M. Tremblay: M faut se rendre compte que nous sommes aujourd'hui le 6 juin et que nous avons discuté de la faillite imminente de Marine Industrie en décembre 1978. Il ne s'agit donc pas d'un problème récent.

En décembre, nous avons fait une intervention pour Marine Industrie que nous n'aurions peut-être pas faite, en tant que gouvernement provincial, pour Davie Shipbuilding ou pour Vickers. C'est à ce titre que je dis que la décision de 1965, pour un gouvernement provincial, de se lancer dans les chantiers maritimes, n'ayant pas de demandes, de commandes à donner à ces chantiers maritimes, créait une distorsion. Quand on donne des exemples de la Suède et de la France, il s'agit de gouvernements nationaux, qui ont des marines militaires et qui ont toutes les demandes qu'un gouvernement national a. Donc, il ne s'agit pas de rêver en couleur. Je ne suis pas moi-même habitué à rêver en couleur.

Il serait donc absolument irréaliste de croire qu'un gouvernement provincial puisse prendre le contrôle des chantiers maritimes avec un statut de gouvernement provincial, à moins qu'on ne soit prêt à demander aux contribuables de verser des fonds sans production, uniquement pour maintenir de l'aide sociale. Et même l'aide sociale, c'est payé à 50% par le fédéral et 50% par le provincial.

En vertu de quels principes demanderait-on aux contribuables du Québec de maintenir de l'emploi artificiel dans des chantiers maritimes, alors que le gouvernement provincial n'a pas de contrat à donner à ces chantiers maritimes? Il y a un illogisme évident!

Par la loi 108, on a un gouvernement provincial qui a quand même injecté $10 millions de subventions, $18 millions de prêts et une garantie de $17 500 000 pour six navires. Il s'agit, je pense, d'une intervention substantielle. J'aurais aimé voir un gouvernement de la Nouvelle-Ecosse ou de la Colombie-Britannique faire la même chose. Je suis bien prêt à croire que le gouvernement du Québec a un statut particulier, mais les contribuables, après un certain temps, en ont marre du statut particulier. Il va falloir que ceux qui ont les responsabilités et qui reçoivent les impôts s'occupent aussi de se servir de ces impôts pour assumer leurs responsabilités. Il n'est pas du tout dans l'intention du gouvernement du Québec de se substituer au gouvernement fédéral dans toutes ces responsabilités face aux chantiers maritimes. Que ceci soit très clair. C'est la position du gouvernement.

Ceci doit être très clair, parce qu'on a parfois cette tentation de dire que les impôts vont à Ottawa, mais que les problèmes sont solutionnés par le gouvernement du Québec. Tant que le référendum n'aura pas solutionné ce problème fondamental, je n'ai pas l'intention, comme ministre de l'Industrie et du Commerce et comme membre du gouvernement, de prendre sur mes épaules tous les problèmes économiques, surtout dans un domaine comme celui-là. Il y a certains domaines qui relèvent de nous, mais il y a certains autres domaines qui, par définition, comme la commande de frégates de guerre, ne relèvent pas de nous. Il est évident que les commandes de frégates, ce serait utile, présentement, pour Marine Industrie ou pour Davie Shipbuilding. On ne peut pas créer à partir de rien. (21 h 15)

II y a un dicton qui dit: Chacun son métier et les vaches seront bien gardées. L'Assemblée nationale a donné un mandat à la SGF, ce n'est pas le gouvernement tout seul, c'est l'Assemblée nationale. Il y a une Loi de la SGF et la SGF a un mandat de rationaliser ses opérations. Elle a un mandat de faire en sorte que ses filiales soient rationalisées. La SGF a rempli son mandat. Il n'est pas du tout question que nous retardions l'application de ce mandat. La SGF a proposé un plan de redressement. Ce plan a été adopté par le gouvernement et ce plan est en marche au moment où nous nous parlons. Nous regardons maintenant l'avenir. Nous pourrons noyer le poisson et essayer de retarder l'inéluctable, cela ne résoudra pas du tout le problème.

Je pense qu'au niveau de l'entreprise, les décisions ont été prises et elles sont entérinées par l'actionnaire, comme elles doivent être, en fonction du mandat de l'Assemblée nationale.

Maintenant, que peut faire le gouvernement du Québec, d'une part, dans la contribution qu'il peut apporter à ce secteur industriel? Le gouvernement du Québec peut apporter une contribution objective et une contribution de leadership. Le simple fait que nous soyons ici pour en discuter témoigne du leadership que le gouvernement du Québec prend dans ce dossier, parce que nous pourrions être à une commission parlementaire, à la Chambre des communes, à Ottawa, au moment où nous nous parlons, dans un domaine qui traite de chantiers maritimes, le domaine des ports, où Transports Canada a une très grande autorité. Nous parlons de la zone de 200 milles. Nous parlons de frégates militaires. Il est évident qu'en ce qui concerne le mémoire de la CSN du mois de décembre, vos six recommandations s'adressaient toutes au gouvernement fédéral. Le gouvernement du Québec use ici d'une prérogative de leadership, d'une prérogative de subventions dans la loi 108 et d'une prérogative de solutions à venir comme nous le mentionnons dans le document qui a été déposé à l'Assemblée nationale. La contribution du gouvernement du Québec, nous ne la limitons pas du tout, à l'exception de camoufler le problème. Je n'accepterai jamais que nous camouflions le problème, que nous nous mettions la tête dans le sable. Ce ne serait pas un service à rendre à l'industrie, ce ne serait pas un service à rendre aux travailleurs et ce ne serait certainement pas un service à rendre à la population du Québec.

Quelle est la contribution du gouvernement fédéral? Je pense qu'elle est de plus en plus étayée, cette contribution. Comme nous avons dans Marine Industrie, dans la Davie Shipbuilding et dans Vickers presque 50%, selon les années, un peu plus, de l'activité des chantiers maritimes, il est évident que nos représentants au

Parlement fédéral ont une responsabilité. Le nouveau gouvernement aura aussi une responsabilité face à nos chantiers maritimes. Le Bureau des chantiers maritimes que nous proposons, s'il est établi dans les jours ou dans les semaines qui viennent — et nous sommes prêts à bouger très rapidement sur cela — pourra proposer des recommandations fermes. Le gouvernement du Québec peut le faire tout seul, mais je pense qu'il serait dans l'ordre que tous le fassent.

Quelle est la contribution des entreprises, pour ce qui concerne Marine Industrie et la SGF? Je pense que nous sommes ici pour entendre leur contribution. Jusqu'à maintenant, je n'ai pas entendu de remarques dans le sens qu'elles n'ont pas fait leur travail, je pense qu'elles l'ont fait de façon extrêmement compétente et courageuse.

Quelle est la contribution des syndicats aux problèmes qui existent dans ces secteurs? Je pense que le député Martel a soulevé le fait qu'il y a eu des comités de consultation. Il est évident que ce ne sont pas des comités décisionnels, parce que ne peut décider à la toute fin que celui qui paie. Mais il est évident que, dans un problème semblable, il doit y avoir une contribution aux solutions plutôt qu'une contribution aux problèmes et que la situation qu'affronte Marine Industrie est une situation qui est sérieuse, du moins à court terme, une fois que les contrats polonais auront été complétés.

Je pense que la situation est claire. Il n'y a pas de solution facile autre que de mettre des millions, et des millions et des millions, mais mettre des millions et des millions, ce n'est pas une solution, ce ne serait que camoufler le problème.

Il y a des indications que nous pouvons relancer ces opérations sur une base plus solide. Il est normal que Marine Industrie veuille développer ses secteurs forts et minimiser ses secteurs faibles. D'ailleurs, toute société doit le faire, toute économie doit le faire. Ce problème que nous avons dans le secteur maritime, c'est un peu ce que nous avons dans les secteurs mous. Quand vous avez tous les pays en voie de développement, la Corée, le Brésil, Singapour qui se lancent dans la construction maritime, alors que les salaires ici sont dix fois, vingt fois plus élevés, il est évident qu'il ne faut pas croire que ces secteurs vont être des secteurs en très forte croissance dans les prochaines années. Il est évident que ce ne seront pas des secteurs en forte croissance. Ce sont des secteurs en consolidation. Nous devons faire en sorte que la spécialisation qui se produit permette de sauvegarder les salaires et les emplois.

Dans le cas de Davie, on a soulevé — je le répète encore — qu'il y a eu une diminution de l'emploi de 3200 à 1200. Malgré la reconversion, il n'y a pas eu de commission parlementaire, parce qu'elle n'était pas propriété d'Etat. Devant des faits inéluctables, il y a des ajustements qui sont aussi inévitables, quel que soit le pays. Au Japon, il y a eu des douzaines de chantiers maritimes qui ont fermé. En France, la moitié de l'industrie sidérurgique est fermée. Une grande partie des chantiers maritimes sont fermés. En Suède, une bonne partie des chantiers maritimes sont fermés, parce qu'on ne construit pas de navires qui ne sont demandés par personne. C'est un fait inéluctable.

S'il y a d'autres membres de la commission qui ont des questions à poser, je pense que nous pourrions continuer l'interrogatoire.

Le Président (M. Boucher): M. le député d'Outremont a quelques questions à poser.

Les chantiers navals

M. Raynauld: M. le Président, je pense que les gens de la Société générale de financement et surtout de Marine sont quand même des professionnels qui travaillent dans ce domaine. Je voudrais leur demander leur propre estimation, leur demander en même temps s'il y a eu des études de faites chez eux pour savoir quel serait l'impact, sur l'entreprise ou sur l'industrie dans son ensemble des chantiers navals, s'il y avait des changements dans les politiques. Par exemple, créer une marine marchande, pour des gens qui sont dans le milieu et qui connaissent ce domaine, est-ce que cela a un gros impact? Est-ce que c'est quelque chose, compte tenu des besoins de construction, compte tenu du fait qu'il existe déjà une certaine construction de navires canadiens pour les Grands Lacs, compte tenu, en tout cas, des facteurs pertinents, quelle serait l'estimation des impacts de changements de politiques? Après cela, je voudrais vous demander: Parmi les changements de politiques qu'on peut envisager, en particulier au niveau fédéral, quels sont les changements de politiques qui seraient les plus productifs, si je peux dire, en termes d'emplois ou en termes de production, dans le domaine des chantiers navals ou dans le domaine de la construction de bateaux? Il me semble qu'on devrait profiter de votre présence pour que vous nous disiez un peu ce que vous pensez qui pourrait être fait ou qui serait susceptible d'être fait et qui pourrait avoir un impact positif pour le développement de Marine dans le domaine des chantiers navals.

M. Brisson: J'ai participé moi-même au groupe de travail du ministère de l'Industrie du fédéral dans le secteur de la construction maritime. Les remarques que je vais faire viennent évidemment de travaux qui ont été faits à ce moment, parce que Marine en soi n'a pas fait une étude de marché pour déterminer quel impact cela pourrait avoir si certaines politiques maritimes changeaient.

Dans ces travaux qui ont été faits — évidemment, ils n'ont pas été aussi justes, aussi profonds que M. le député le propose — il y a eu tout de même certaines remarques de faites suivant lesquelles un changement de politique n'aurait pas un effet à très court terme. Par exemple, un changement de politique qui changerait les conditions présentes de la flotte hauturière aurait pour effet de rapatrier les flottes déjà existantes, parce qu'on sait que plusieurs compa-

gnies canadiennes ont des flottes qui sont déjà enregistrées sous des drapeaux qu'on dit de "convenience".

A ce moment-là, il faudrait faire une étude de ces flottes quant à leur âge, le taux de remplacement et le taux de croissance. On a estimé, a ce moment-là, que ça prendrait déjà peut-être trois à quatre ans avant que l'effet s'en fasse sentir. Or, à court terme, ça ne résout pas notre problème immédiat. La nécessité de transport au Canada n'augmentera pas du fait d'un changement de politique. Alors, il faut penser à une évolution, tout de même dans toute loi qui sera mise. Alors, ce que je voulais faire remarquer, n'ayant pas... Oui?

M. Tremblay: Là, vous parlez toujours de construction de nouveaux bateaux pour les flottes de Canadien Pacifique ou d'autres qui sont enregistrées aux Bermudes.

M. Brlsson: Oui.

M. Tremblay: Mais pour la réparation de navires?

M. Brlsson: Dans le cas de la réparation de navires, oui, cela aurait un impact immédiat. Mais la réparation de navires représente chez nous environ 10% de la capacité du chantier à l'heure actuelle. Tout de même, si on doublait la capacité, ça ne remplacerait pas l'activité de construction présente. C'est pour cette raison que je m'attaquais à tel autre problème.

Ce que je voulais faire remarquer, c'est que je ne peux pas vous donner de quantité à l'heure actuelle, mais seulement, ça ne solutionnait pas le problème à court terme. Les autres politiques, par exemple, la question de l'Arctique, est aussi quelque chose qui va, si la politique était en faveur des chantiers maritimes canadiens, favoriser substantiellement, mais, encore là, ce seraient des politiques qui nous permettraient de faire de la planification à long terme, mais qui ne solutionnerait pas le problème de 1979/80. C'est la remarque que je voulais faire, M. le Président.

M. Martel: Avec l'association... et la Loi du cabotage?

M. Brlsson: Même dans ce cas...

M. Martel: Si on oblige que ce soit, comme aux Etats-Unis, 50% des bateaux construits au Canada qui sillonnent nos eaux, il me semble que cela aurait des répercussions assez immédiates.

M. Brlsson: Oui, c'est susceptible d'affecter cette loi. Il faut tout de même qu'on... L'impression générale, c'est qu'il fallait tout de même avoir une période de transition entre une loi qui, présentement permet le cabotage et celle qui ne le permettrait pas. Cela pourrait avoir un effet, mais, tout de même, pas pour 1979 et très peu pour 1980, parce qu'avant que la loi soit adoptée et avant que les commandes prennent place, il faut bien penser que même entre la commande d'un bateau et le début des travaux, il y a au moins une période de six mois. C'est une question de temps que je voulais mentionner surtout.

Le Président (M. Lefebvre): M. L'Heureux, vous avez quelque chose à ajouter sur ce point?

M. L'Heureux: M. le Président, il est évident que c'est vrai, on le sait fort bien, que, compte tenu de la situation objective actuelle et la situation est très difficile, qu'il est impossible de prévoir des solutions magiques — il n'y en a pas — dans les mois qui viennent.

C'est un ensemble de mesures qui sont nécessaires. Certaines touchent les lois fédérales, certaines touchent les politiques générales de construction navale, d'autres, formelles, et c'est un peu dans ce sens-là que le plan de redressement et la réponse que j'ai eue tantôt du ministre sont insatisfaisants. D'accord, on est dans un cul-de-sac, au moment où on se parle. Les spécialistes nous disent qu'il va y avoir une reprise en 1982. Nous, dans notre mémoire, notre analyse de base, avons démontré que justement il fallait un ensemble de transformations des politiques canadiennes et qu'il fallait se tourner vers le marché intérieur canadien, selon les divers ordres de besoins, tant militaires qu'autres.

C'est sûr, donc, qu'il n'y a pas de solution magique pour les prochains mois. Cependant, nous disons: Compte tenu de la faiblesse relative de nos chantiers maritimes quant à leur capacité comme chantiers intégrés de compléter, de A à Z ce qui est requis pour construire un navire et le type de navire dont on aura besoin dans les années qui viennent, l'absence d'investissements massifs — suis-je clair? — pour corriger ce qui fait que nos chantiers ont toujours été à la merci d'un contrat et du chômage cyclique. (21 h 30)

Tant qu'il n'y aura pas d'investissements pour corriger cette situation, on va être constamment dans un cercle vicieux. En 1982, s'il y a à peine $2 millions d'investissements dans la section navale, pendant qu'on coupe un pourcentage de son aire de production pour la transformer pour la production de wagons, par exemple, et qu'on n'investit pas massivement et qu'on ne regroupe pas nos chantiers, où nous trouverons-nous, en tant que capacité de construction navale, quels que soient les changements apportés par des lois? Disons que le gouvernement fédéral décide finalement de canadianiser davantage les lois sur le transport maritime et la construction navale, où seront-ils, nos chantiers du Québec, s'il n'y a pas les investissements nécessaires maintenant, en sachant que ces investissements ne répondront pas nécessairement au problème de chômage qu'on subit présentement et qu'on aura peut-être à subir pour un an ou deux?

Vous comprenez évidemment, M. le Président, que c'est une situation héritée du passé et dont personne, ici, n'est responsable; c'est hérité de dizaines d'années d'incurie, mais pour sortir du

cercle vicieux, il y a des décisions qui doivent être prises maintenant. C'est dans ce sens qu'on dit que le plan de redressement abandonne effectivement en fonction des politiques traditionnelles. Je sais bien que ce ne sont pas M. Coulombe ou M. Brisson et les autres qui sont responsables, ils attendent des décisions politiques, une volonté politique. Il n'y a pas seulement le fédéral qui en soit responsable non plus. Je suis bien prêt à reconnaître que, au provincial, au Québec, malheureusement, le provincial ne s'est pas préoccupé de ça non plus, sauf en 1965 peut-être.

Ce qu'on dit, c'est que pour que Marine et Davie, les chantiers du Québec, soient concurrentiels, combien de temps cela va-t-il prendre? On le sait fort bien dans les chantiers maritimes. Avant de construire un nouveau bateau, il y a des dessins, ça prend beaucoup de temps. Avant de transformer un chantier naval, compte tenu de l'état dans lequel ils sont, leur capacité réelle de satisfaire tous les besoins de construction d'un navire, il va falloir aussi plusieurs années, donc beaucoup d'argent. C'est ce qu'on dit.

M. le Président, je regrette que le ministre ait repris le raisonnement du chef d'un autre parti cet après-midi, en réduisant ce qu'on fait dans les chantiers maritimes à de l'aide sociale. C'est malheureux! Peut-être était-ce un lapsus, parce que, économiste comme il est, il doit reconnaître, s'il partage un peu nos points de vue — je sais que la direction de Marine, de la SGF et bien des gens le font; les constructeurs maritimes aussi — que contribuer à bâtir ou à rebâtir une industrie de construction navale, ce n'est pas de l'aide sociale, c'est contribuer au développement économique du pays.

M. Tremblay: M. le Président, je pense que ce que soulève M. L'Heureux est fondamental et il faudrait peut-être l'éclairer.

Selon le postulat qui est établi, Marine aurait dû consacrer, dans son plan de redressement, les sommes qu'elle pouvait investir et, si possible, en ajouter, à moderniser ses installations de production maritime et à accroître sa capacité de production. J'ai demandé au président de la SGF si on aurait sauvegardé davantage d'emplois si on était allé dans cette direction.

Je vous avoue franchement que la perception que j'ai du problème, ce n'est pas que Marine ou Davie manque de capacité de production. Au contraire, les capacités de production sont modernes et bien établies, mais elles n'ont pas de bateau à construire; ce n'est pas plus compliqué que ça.

Si vous avez des sommes à investir, $45 millions à investir, allez-vous les investir dans des équipements et dans des activités maritimes, alors que vous n'avez pas de contrats? Est-ce qu'il y aura beaucoup d'emplois de créés de ce côté? Ne devriez-vous pas investir dans des secteurs où vous avez des demandes et des commandes en abondance, créant de l'emploi? Est-ce que c'était un de vos scénarios — je pose la question au président de la SGF — de mettre les $40 millions ou $45 millions davantage dans la section maritime, plutôt que dans la division des wagons ou la division hydro-électrique? Et, si c'était un des scénarios, quels auraient été les effets sur l'emploi?

M. Coulombe: Je pense que le problème posé de cette façon-là, la réponse est évidente et claire, c'est dans le cadre de notre mandat et de nos responsabilités. Avoir proposé une chose semblable, cela aurait été, à notre avis, complètement illogique, parce que les investissements faits dans la section des wagons sont fondamentaux pour éviter que cette section, en quelques années, ne devienne non compétitive avec les concurrents. Il faut absolument organiser cela sur une base un peu plus efficace pour pouvoir profiter au maximun du haut du cycle, mais indépendamment des cycles, d'être concurrentiels. Quant aux investissements qui sont faits dans l'hydro-électrique, une grande partie de ces investissements est fondamentalement nécessaire pour remplir les commandes. Si ce n'est pas fait, les commandes ne seront pas remplies et si elles ne le sont pas, on va avoir du chômage de plus, et d'autres corporations ou d'autres compagnies feront ces commandes-là.

Il y a deux points que j'ai cru percevoir dans les propositions de la CSN exprimées par M. L'Heureux: Que les gouvernements, dans une stratégie de développement des chantiers maritimes, investissent, c'est une décision de développement économique qui est à la portée des gouvernements, mais en termes d'entreprises, je pense que j'ai donné la réponse sur les investissements qui étaient possibles pour Marine Industrie.

Il y a une deuxième chose aussi extrêmement importante dans ce débat-là, c'est le degré de compétitivité de Marine Industrie. Même si les lois étaient changées, même si, comme M. Brisson disait tantôt, les effets se faisaient sentir dans quelques années, encore faut-il que les soumissions que fait Marine Industrie soient compétitives. Encore faut-il que le rythme de croissance des coûts de Marine Industrie, tant au point de vue des salaires qu'au point de vue de l'utilisation des "assets" physiques, soit compétitif, parce que s'il y a beaucoup de commandes et si on a des soumissions, on gagne des soumissions mais on perd de l'argent en faisant ça, on n'est pas plus avancés au bout de la ligne. Donc, c'est un aspect qui est aussi fondamental que le reste, c'est-à-dire la croissance des coûts à Marine Industrie. C'est un problème qui inquiète grandement les autorités de Marine Industrie et, évidemment, aussi les autorités de la SGF.

Je distinguerais bien le problème. Si on parle de politiques gouvernementales — je pense que c'est surtout à ce niveau-là que se situe M. L'Heureux — que le gouvernement concerné ou les gouvernements décident que ce secteur-là est un secteur plus prioritaire qu'il l'a été dans le passé, décide qu'il faut investir massivement pour telle ou telle raison d'économie globale, c'est un problème de gouvernement. En tant que gestionnaire des fonds — à toutes fins utiles publics — qui sont

mis à la disposition de la SGF, notre raisonnement n'est pas celui-là et notre mandat n'est pas celui-là. C'est pour ça que le plan de redressement favorise les secteurs forts à l'heure actuelle, tout en ne négligeant pas l'aspect naval, et cela n'a peut-être pas été souligné suffisamment. Les nouveaux produits dont on parlait aujourd'hui, il y a des recherches précises qui vont se faire là-dedans, on va tout essayer, à notre niveau, pour que cela se règle. Mais lorsqu'on discute de stratégie générale de gouvernement, c'est à ces niveaux qu'il faut en discuter, pas au niveau d'une entreprise qui a un mandat beaucoup plus précis.

M. L'Heureux: M. le Président...

Le Président (M. Boucher): M. L'Heureux.

M. L'Heureux: Merci. Quand le ministre dit: Oui, mais est-ce qu'on a des contrats pour construire des navires? Je parle d'investissement massif, d'équiper, en fait, nos chantiers maritimes, je me suis peut-être mal expliqué. Il faut se rendre compte... Ecoutez, ils sont ici, ils le savent plus que nous, plus que moi peut-être, quoique nos gars le savent. A l'heure actuelle, une seule des frégates prévues pour la marine militaire du Canada... Il n'y a aucun chantier maritime canadien... Ecoutez, quand on dit qu'un chantier maritime construit des bateaux, on s'imagine qu'il construit des bateaux. Ce que je veux dire, c'est qu'il n'y a aucun des chantiers qui est en mesure de construire une frégate canadienne. Je pose la question. Au contraire, c'est une faible partie qui peut construire même un gouvernail de bateau. Un gouvernail de bateau, je pensais que c'était construit dans nos chantiers, que c'était fondu quelque part dans un des ateliers du chantier.

Cela ne l'est pas. Peut-être que je me trompe, M. le Président, mais demandez-le. Demandez-le aux dirigeants de Marine, demandez le pourcentage. Parmi tous les produits requis pour construire un bateau, demandez combien on en importe, combien viennent de l'extérieur, sans tenir compte de certaines stipulations de contrats avec certains pays, selon certains accords. Mais, en général, c'est combien? C'est ça qu'on veut dire, nous autres, c'est ça qu'on dit depuis des années. Equiper, regrouper, organiser nos chantiers pour qu'ils puissent les construire, qu'ils soient organisés pour le faire.

Quand on parle d'investissement massif, c'est évidemment pour ça. Vous imaginez l'impact énorme que cela aura sur le plan économique, dans tous les secteurs. Demandez-leur ce qu'on a... C'est énorme ce que représente le chiffre d'affaires de Marine, par exemple, ou des chantiers maritimes. On parlait du transport maritime qui représente près de $3 milliards par année. Qu'est-ce qu'on a comme centre de recherche véritable ici? Evidemment, on se place sur une période plus longue. C'est dans ce sens-là, M. le Président, qu'est notre position. Pour nos bateaux, nous sommes des assembleurs de pièces, des soudeurs de morceaux de métal et l'essentiel est importé.

On est dépendant. Imaginez dans quelle position ça place la direction de nos chantiers, y compris celle de Marine, que d'être dépendant de tous ces sous-traitants partout, souvent des concurrents à part ça.

On ne pourrait pas tenter d'avoir une politique? Pas tout de suite, pas demain, pas en 1981 nécessairement, mais qu'on commence maintenant pour qu'en 1981, 1982, 1983, on ait vraiment un véritable chantier maritime au Québec.

M. Tremblay: Dans la foulée de ce que dit M. L'Heureux, j'aimerais poser une question aux gens de Marine. Est-ce que les deux plus grands chantiers maritimes du Canada, Davie et Marine — dans le cas de Marine, vous pourrez répondre à la question — ne sont pas mieux placés que les autres chantiers maritimes pour recevoir les commandes fédérales de frégates qui vont se monter à $1 500 000 000? Si vous étiez mieux placés et s'il y avait des investissements d'infrastructure pour élargir la cale sèche, pour accueillir ce genre de grandes constructions, est-ce qu'il ne serait pas logique que ce soit un de ces chantiers ou les deux qui reçoivent ces investissements d'infrastructure ou qui entreprennent ces investissements d'infrastructure?

M. Brisson: A l'heure actuelle, oui, les chantiers de Marine et de Davie sont très bien placés pour les contrats de frégate. Il y aurait évidemment des investissements d'infrastructure qui amélioreraient la situation, quoique les deux chantiers aient déjà construit des navires de guerre avec les installations qu'ils ont en main présentement. Ils pourraient encore le faire. De ce point de vue, je dois dire qu'il y a aussi un troisième chantier, Saint-John's Drydocks, en Nouvelle-Ecosse, qui est aussi en état de construire, avec les installations qu'il a en main présentement, les frégates de guerre.

M. Tremblay: Est-ce que ce dernier chantier n'a pas reçu récemment une subvention du gouvernement fédéral pour élargir sa cale sèche?

M. Brisson: Oui.

M. Tremblay: Combien? (21 h 45)

M. Brisson: J'ignore le montant exact, mais c'est une cale sèche qu'on va agrandir substantiellement. Il y a plusieurs millions de dollars. Cela ne leur donne pas un avantage accru dans le cas des frégates, parce qu'ils ont déjà toutes les facilités requises pour les frégates. De toute façon, nos chantiers sont des mieux placés pour recevoir les frégates et enfin, Marine Industrie est probablement le mieux placé de tous les chantiers, par sa configuration.

M. Tremblay: Donc, si je vous prends au mot, Marine Industrie serait bien placée pour obtenir ces contrats. Quelles démarches devraient être entreprises, et par qui, pour que vos avantages

comparatifs, si je comprends bien, donnent des résultats?

M. Brlsson: C'est à nous à faire ces démarches et ces démarches sont déjà en cours. Nous sommes en contact, régulièrement, avec le bureau de projets des frégates canadiennes à Ottawa, pour maintenir avec lui les relations, se tenir au courant des développements et être présents, et pour que ce dernier suive de très près nos propres développements.

Nous avons déjà déposé, au bureau des projets de frégates, à Ottawa, un document faisant état des compétences de Marine Industrie, tant dans ses installations physiques que dans ses ressources humaines et ses systèmes. Nous avons déposé ce document de compétence pour considération.

M. Tremblay: Une dernière sous-question, pour être bien clair. Quand vous parlez d'une possibilité de mise à pied de 600 à 1000 employés, parce que cela peut être 600 si vous ouvrez une deuxième chaîne de construction de wagons, et 1000 si vous n'en ouvrez pas, avez-vous tenu compte de la possibilité sérieuse dans laquelle vous vous trouveriez, d'avoir ces contrats de frégates?

M. Brlsson: Oui, nous en avons tenu compte et le scénario que nous avons en main prévoit que dès 1982, et surtout en 1983, il y ait de l'espace, des installations, et tout l'équipement pour la construction de frégates.

M. Tremblay: Donc, dans vos 3000 employés en 1984, cela suppose que vous ayez certains contrats de frégates?

M. Brlsson: Oui.

M. Tremblay: Donc, les contrats de frégates ne sont pas une façon d'empêcher les mises à pied prévues?

M. Brlsson: Non. Quant aux contrats de frégates — si on me permet, je fais souvent cette mise au point — le montant de $1 500 000 000 1978, que représente le contrat de frégates, de ce montant, il n'y a qu'environ $500 millions à $600 millions qui sont réellement des valeurs qui sont données au chantier maritime. Quant au reste, ce sont des compagnies d'électronique, des compagnies d'armement, qui reçoivent cette partie, de même que les fabricants des turbines motrices.

M. Martel: Vous rejoignez la déclaration que M. L'Heureux a faite lorsqu'il a épluché le montant de $1 500 000 000. Vous arrivez pratiquement aux mêmes chiffres, ce qui reste, en véritable construction navale.

M. Brlsson: Oui.

Le Président (M. Boucher): M. le député d'Outremont.

M. Raynauld: Cela va, M: le Président.

Le Président (M. Boucher): Cela va. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: Je vais faire quelques commentaires sur votre document et sur les commentaires du ministre. Je suis en effet pas mal d'accord avec certaines mises au point qui ont été faites et par vous et par le ministre.

En ce qui concerne le premier point, je pense qu'il faut rappeler que l'objectif de notre rencontre d'aujourd'hui n'était pas tout à fait de régler les problèmes à long terme des chantiers maritimes du Canada. En effet, les problèmes de Marine Industrie n'étaient pas liés au manque de commandes ou à la faiblesse du marché des navires. Ils sont liés au fait qu'il y a des commandes et qu'à cause de nous tous, probablement, la gestion, les gouvernements, même peut-être les travailleurs, on a subi des pertes dans la construction de ces bateaux, ce qui a rendu la compagnie en faillite.

Le plan de redressement — je pense que le ministre a eu raison de le dire — ce n'est pas un plan de redressement des chantiers maritimes du Canada, mais un plan de redressement d'une société qui est en faillite.

Tenant compte de ce point, je pense que le sujet a été élargi par votre mémoire, et avec une certaine justice, parce qu'on parle maintenant de l'avenir de cette industrie. Je suis loin d'être de ceux qui croient que tous les secteurs de l'économie canadienne doivent être planifiés. Je me méfie un peu de la possibilité de le faire et je pense qu'il y en a d'autres qui sont d'accord, mais s'il existe un secteur, selon moi, où on peut justifier une planification de la part du gouvernement dans une certaine mesure, c'est certainement celui qui concerne la question de la construction de navires. Il est clair que dans presque tous les pays du monde, comme vous l'avez dit, que les chantiers maritimes soient des sociétés d'Etat ou qu'ils ne le soient pas, ils sont subventionnés. Les politiques du gouvernement, pour ce qui concerne le cabotage, les politiques de marine marchande et surtout toute la question des bateaux de guerre, lient nettement ce secteur au gouvernement. Je suis d'accord que c'est un secteur, comme celui de l'énergie, où c'est essentiel que le gouvernement développe une politique intelligente pour la construction et l'usage de ces bateaux.

Je pense que les démarches que le ministre nous a dit vouloir faire ce soir, en disant qu'il voulait établir un bureau, cela m'est égal si c'est un bureau, une maison ou je ne sais trop quoi, l'important, c'est que les gens commencent à faire cette planification. Je suis persuadé que c'est une planification qui doit être entreprise en premier lieu par le gouvernement fédéral, pour toutes les raisons qu'il n'est pas nécessaire de répéter ici ce soir. Le gouvernement du Québec a une responsabilité de faire des pressions intelligentes auprès du fédéral. Le gouvernement du Québec a aussi la responsabilité de coopérer avec le gouvernement fédéral. C'est une combinaison. Je ne suis pas

assez naïf pour penser qu'une coopération avec Ottawa peut donner des résultats positifs sans certaines pressions, mais je suis persuadé que les pressions ne peuvent pas déboucher sur des gestes concrets et positifs sans que nous acceptions de coopérer d'une façon très positive.

Je ne sais pas si c'est possible dans le cadre de ce projet. Vous avez suggéré un comité dans votre mémoire. Le ministre a répondu en suggérant un bureau. Je préfère l'idée d'un comité, parce que, pour moi, un bureau c'est quelque chose qui est en soi un peu symbolique, mais ce n'est pas le bureau ou l'affiche sur la porte qui va nous donner des résultats. J'espère que le fédéral pourra être présent dès le début dans cette étude qui doit être faite par le gouvernement du Québec avec ces compagnies-ci et qu'une coopération pourra commencer tout de suite. J'espère aussi, entre parenthèses, que le ministre des Transports du Québec, le ministère au moins, pourra être impliqué là-dedans, parce que, semble-t-il, ce ministère a fait ses propres études et en est rendu à la conclusion qu'il n'y a place que pour un seul chantier maritime ici au Québec. C'est essentiel qu'à l'intérieur du gouvernement...

M. Martel: II n'y a pas eu des affirmations comme cela du ministère des Transports, ni du ministre d'ailleurs.

M. Scowen: Je m'excuse, je pensais que...

M. Raynauld: C'est qu'il y a eu une conférence du ministre qui a été rapportée dans le journal et qui n'a pas été démentie par le ministre.

M. Martel: II se posait des interrogations et il ne faisait pas d'affirmation là-dessus.

M. Scowen: II y a une différence. Ce sont des interrogations, des suggestions. Le point que je veux soulever, c'est simplement que j'espère que les ministères du gouvernement du Québec ont un intérêt dans l'affaire, à part le ministère de l'Industrie et du Commerce, et seront intégrés aussi dans ce comité pour que le gouvernement puisse développer une politique sûre.

Je pense que, finalement, ce que la politique sera, je ne sais pas. Vous avez soulevé ce soir plusieurs affirmations assez passionnées et assez convaincantes dans une certaine mesure pour une industrie navale forte ici au Québec. Je pense que c'est probable, mais ce n'est pas certain. Une chose que je sais déjà, c'est que c'est un marché mondial. Même si on accepte de pourvoir à tous nos propres besoins domestiques dans nos propres chantiers navals, il faut que nous acceptions que nous aurons toujours l'offre des autres chantiers pour nos besoins et que si nous acceptons de les construire ici au Canada, au Québec, à des prix plus élevés qu'on peut les acheter ailleurs, ce sera très bon pour les compagnies et pour ceux qui travaillent dans les chantiers. Le prix sera payé par les autres contribuables du Québec, qui sont souvent des syndiqués dans d'autres industries ou de simples citoyens. Il y a toujours pour ces choses un prix à payer.

Nous avons les compétences pour faire n'importe quoi ici. Nous pouvons envoyer quelqu'un à la lune, j'en suis certain, mais, pour réaliser toutes ces choses, il y a un prix à payer. C'est souvent là une question de coûts et de bénéfices dans chacun des achats, chaque décision de sous-traitance qu'on fait. Je pense que vous serez d'accord avec moi pour dire qu'il faut du jugement chaque fois, surtout quand on joue avec les impôts et les fonds publics, parce que, en fin de compte, quelqu'un est obligé de payer le prix.

Ce sont mes commentaires généraux. Le point que je veux discuter avec vous, le plus important de mes commentaires, c'est que, de mon côté, je suis complètement d'accord qu'on doit poursuivre une planification dans ce secteur. Cela doit se faire, non seulement ici avec les éléments suggérés par le ministre, mais avec une étroite collaboration, la coopération, et, bien sûr, une pression sur le fédéral.

Il y a quand même, M. L'Heureux, quelques questions que je veux vous poser sur votre mémoire et qui ne touchent pas du tout le naval. C'est quelque chose qui m'a inquiété un peu. Je ne suis pas certain si ce que vous avez dit, vous l'avez dit d'une façon approfondie, mais, au début de votre document, vous parlez du plan de redressement de la compagnie en ce qui concerne l'hydro-électrique et les wagons. Vous mettez de côté ces deux projets très vite, et, d'une façon assez négative; je ne me rappelle pas la page exacte, c'est la page 6, je crois. Je pense que c'est un point très important, vous avez décidé dans votre document de mettre l'effort sur les questions navales. Vous n'avez pas consacré beaucoup de temps et d'efforts à une étude des possibilités des deux autres secteurs, où vous êtes en contradiction fondamentale avec l'opinion des dirigeants de cette entreprise en ce qui concerne les possibilités, l'avenir des deux autres secteurs. Je vous cite, parce que, pour moi, c'est très important, car c'est dans ces deux domaines que nous avons décidé, en principe, si vous voulez, de faire la concentration de la recherche et des investissements. Si les deux ou trois premiers paragraphes de la page 6 sont le résultat d'études qui sont bien réfléchies et pondérées, cela doit nous donner matière à réflexion. Vous dites, en ce qui concerne l'hydro-électricité, que la production de ces équipements se fait sous licence française et est donc assujettie à certaines limites à l'exportation et que les experts soutiennent qu'il existe une situation de surcapacité de la production mondiale pour ces équipements. (22 heures)

Pour moi, ces objections ne vont pas directement à l'encontre du plan de Marine parce que, dans ce domaine, c'est bien clair, ces gens ont décidé de faire la concentration sur le marché domestique et ils croient que ce marché québécois, si vous voulez, et canadien va exister longtemps.

En ce qui concerne les wagons, vous dites que cette production a peu d'intérêt en termes de développement industriel, faute de stabilité. Vous êtes assez négatifs envers le deuxième volet de leur plan et, finalement... Là, je ne suis pas complètement d'accord avec vous — c'est une question d'opinion — au sujet de leur décision d'investir, comme ils ont dit, $2 millions dans la recherche. Vous avez dit: La décision se passe de commentaires. Je pense que vous n'avez pas surtout parlé du principe de la recherche, mais vous trouvez que les $2 millions n'étaient pas assez. Quant à moi, j'ai l'impression que, dans la recherche, à moins que vous n'ayez une vaste expérience là-dedans, ce n'est pas mauvais de commencer avec un programme responsable et limité, parce que c'est possible de verser des sommes énormes dans la recherche et le développement sans résultat. Mon opinion était d'abord que cette démarche en vue de faire quelque chose et de le faire d'une façon modeste... $2 millions sur une période de deux ans, c'est substantiel quand même.

J'avais une attitude assez positive envers cette démarche de la société et vous avez dit: La décision se passe de commentaires. Alors, je veux vous demander de parler un peu de ces trois aspects, l'hydro-électrique, les wagons et la recherche. Vous n'avez pas développé ces idées énormément. Vous avez consacré seulement un paragraphe à chacun de ces points, ce qui m'avait porté à croire que vous avez peut-être passé très vite là-dessus par rapport au naval. Mais, si vous pensez vraiment qu'ils sont dans une mauvaise direction dans ces trois éléments, j'aimerais que vous explicitiez vos opinions un peu.

Le Président (M. Boucher): M. L'Heureux.

M. L'Heureux: Merci, M. le Président. Si vous permettez, je vais aussi demander l'aide de Kémal Wassef, le directeur de la recherche, sur certains aspects et ça va apporter des éléments nouveaux, peut-être plus intéressants à certains égards.

Je voulais juste faire un commentaire au départ. Quand vous parlez du prix à payer à cause des investissements dans les chantiers maritimes, moi, j'estime que les travailleurs des chantiers maritimes ont payé très chèrement l'absence d'investissements, d'une part, et, deuxièmement, l'économie du Québec et du Canada, en Colombie comme partout ailleurs, l'économie canadienne a payé chèrement la pénurie, la pauvreté des investissements dans ce secteur.

M. Scowen: Excusez-moi, il y a eu, dans ce domaine... A moins que je ne me trompe, le naval, c'est la construction. Ce n'est pas la construction d'un bâtiment, dans le concept économique, c'est le domaine de la construction. C'est une chose qui est, en soi, un peu cyclique, qui est très difficile à stabiliser, qui est, en soi, quelque chose qui est très difficile à développer d'une façon régulière; c'est très difficile de justifier des investissements fixes d'une nature importante, parce que la nature du projet et le nombre de projets sont continuellement en train de changer. Cela fait partie du domaine de la construction. Est-ce que je me trompe?

M. L'Heureux: Pas au sens de la construction non planifiée, immobilière, dont vous parlez, non. Je pense aux expériences de plusieurs pays qui démontrent qu'au contraire, il y a eu une stabilité d'emploi — malgré les secousses, surtout celle qu'on traverse présentement — non seulement ça, une croissance d'emploi à un développement dans divers secteurs industriels connexes à partir d'une politique de planification, dont vous avez si bien parlé, au niveau maritime.

C'est parce qu'ici, au Canada, il n'y a pas eu de planification là-dessus. On a abandonné complètement les chantiers maritimes à leur sort. Nous sommes d'accord avec les deux premiers aspects du projet de Marine et de la SGF. Cependant, c'est sous-jacent — vous l'avez souligné vous-même — dans la trame de notre analyse. Cela découle de quoi? Cela découle du fait que, à cause du dollar canadien, du problème qu'on a avec le transport du blé au Canada, du problème qu'il y a aussi aux Etats-Unis, il y a une demande très forte, de telle sorte que, à l'heure actuelle, en fait toutes les capacités de production sont utilisées au maximum de ce point de vue.

Mais, même là, quand on parle des wagons; construire des wagons, du point de vue de l'emploi, c'est intéressant; mais par rapport à ce qu'il y ait un chantier maritime, ce que ça signifie? Ce n'est pas grand-chose, assembler des boîtes. Demandez au président de Marine; les aspects les plus techniques, la roue...

M. Raynauld: C'est mieux que rien.

M. L'Heureux: Oui, mais on n'a même pas la fonderie pour les faire.

M. Raynauld: Si on a les commandes.

M. L'Heureux: Non, mais si on n'a pas la fonderie pour les faire.

M. Raynauld: On ne va quand même pas se mettre à fabriquer des éviers, parce qu'il en faut dix dans un bateau.

M. L'Heureux: Pourquoi pas? On ne commencera pas par les éviers, si vous voulez.

M. Raynauld: Non, mais je prends cet exemple.

M. L'Heureux: On va commencer par des choses plus importantes. Alors, à court terme, on est d'accord avec le premier projet et on voit et on en sent le souci d'ailleurs, il y a eu des efforts très sérieux de la part de la direction de Marine pour tenter, à partir de ce que le marché offre, donc les wagons, les turbines, d'augmenter l'emploi. Cela a été très positif de leur part.

M. Scowen: Excusez-moi, mais la question que je vous posais n'était pas une question à court terme. Ces trois démarches, hydro-électricité, wagons et recherche de nouveaux produits, sont trois démarches qui sont annoncées ici, qu'on est en train de faire à long terme. Voici la question que je vous pose, parce que ça n'est pas clair dans votre mémoire. Est-ce que vous croyez que ces trois démarches, à long terme, sont des démarches positives, oui ou non?

M. L'Heureux: Comme je ne suis pas assez clair à ce stade-ci de la journée, si vous le permettez, je demande à M. Wassef de me remplacer.

M. Scowen: Vous avez fait votre part ce soir, certainement.

M. Wassef (Kémal): En ce qui concerne l'hydro-électricité ou l'hydraulique en général il faut se référer à l'énergie. Lorsqu'on parle d'un plan qui s'étend jusqu'en 1985, il faut donc se souvenir quels seront les prix de l'énergie à ce moment-là. Quels seront les possibilités de bâtir des turbines, des alternateurs, de l'hydraulique à ce moment? Cela n'apparaît nulle part, pour le moment, dans les textes que nous avons.

On peut dire une chose, c'est que l'hydraulique n'est plus une technologie de pointe, il y en a d'autres qui ont pris la relève. Alors on peut mettre des délais; disons que je ne me hasarderai pas à dire: C'est 1984,1983,1986 ou 1987, mais c'est sûr qu'il va y avoir, de plus en plus de producteurs d'hydraulique ou de turbines qui vont présenter une situation de surcapacité. Ce n'est plus de pointe, alors faire des investissements là-dedans, je sais que pour ce qui concerne le Québec, il y a encore de l'avenir, il y a encore des choses à faire mais quand on pense au domaine international, là, il y a des limites très rapides.

En ce qui concerne les wagons, je n'ai pas besoin de reprendre le sujet, M. L'Heureux a été très explicite là-dessus. Par exemple, comme les méthaniers, comme les pétroliers, comme tout le développement des transports de l'Arctique, on trouve que c'est échanger un domaine très spécialisé, qui pourrait être un domaine de pointe, contre un secteur qui, étrangement, ne constitue que de la fonte et de l'assemblage.

Pour l'instant, pour les syndicats, ça a l'air d'être, en tout cas à court terme, Ja solution. Mais est-ce que, à long terme, c'est la solution qu'on voudrait donner à Marine? On peut se poser des questions là-dessus.

Quant aux $2 millions consacrés à la recherche et au développement, quand on a un chiffre d'affaires de l'ordre de $200 millions ou plus, comme celui de Marine Industrie, 1%, c'est relativement peu. Il y a peut-être des efforts à faire de plus.

Le Président (M. Boucher): Merci. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: Je pense que j'ai fini. Je ne sais pas s'il y a d'autres intervenants... Oui, j'ai une autre question à poser à la fin au ministre.

Le Président (M. Boucher): Vous pouvez la poser tout de suite.

M. Scowen: Je sais très bien, M. le ministre, que c'est une commission parlementaire sur Marine Industrie, mais ce sujet plus large a été abordé et j'ai l'impression que votre décision — je pense que cela a été annoncé ce soir, c'est la première fois que j'entendais parler de créer un bureau des chantiers navals ici — était qualifiée au moins par le syndicat comme étant insuffisante. Ils ont certainement abordé d'autres possibilités plus larges et je pense que maintenant, ou à la fin de la soirée, je vais vous poser la question: Est-ce que vous êtes satisfait de cette décision, cette démarche que vous avez entreprise concernant le bureau? Pouvez-vous démontrer à M. L'Heureux et à ses collègues, et peut-être à moi-même, comment ce bureau pourrait répondre aux objections, aux problèmes et aux faiblesses qui ont été soulevés par le syndicat? C'est quelque chose qui peut se faire à la fin, si vous voulez, mais c'est la dernière question que je voulais poser.

M. Tremblay: Avant de passer la parole au député de Huntingdon, M. le Président, je devrais dire tout d'abord que cette suggestion de la création d'un bureau de constructions navales, qui est reprise dans le mémoire de la CSN, n'est pas une décision. Ce genre de bureau ne peut fonctionner que si toutes les parties en cause acceptent d'y participer. C'est une des suggestions dans le rapport du comité d'étude que je fais mienne, parce que c'est une démarche dans la bonne direction. Donc, il ne s'agit pas d'une décision, je le répète, il s'agit d'une proposition, et si elle reçoit l'assentiment des parties, comme elle semble le recevoir, cela pourra devenir un point de ralliement des agents économiques pour promouvoir une meilleure rationalisation dans le secteur de la construction navale et servir de pression, à la fois sur le gouvernement du Québec et sur le gouvernement fédéral, pour renforcer ce secteur, Dans les jours à venir, cet aspect du rapport, comme je l'ai dit, peut être mis en place très rapidement.

Maintenant, il y a d'autres aspects du rapport qui touchent aussi certains sujets soulevés ce soir, où on parle de plus grandes politiques plus définies, plus définitives pour renforcer les chantiers maritimes et, là encore, nous avons le diagnostic bien posé. Je pense qu'au cours des mois d'été, nous allons faire des progrès si tout le monde se donne la main pour collaborer.

M. Scowen: Est-ce que je peux vous demander une dernière question? Je voudrais savoir ce que vous pensez de l'idée d'essayer d'engager le fédéral là-dedans dès le début. Deuxièmement, que pensez-vous d'engager les autres ministères,

dont surtout celui des Transports qui semble avoir un intérêt dans ce problème, du moins d'après ce qu'on a lu dans les journaux.

M. Tremblay: M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, je dois vous répondre sur cette dernière partie de votre question, que c'est déjà fait, puisque le comité d'étude était composé de représentants du ministère de l'Industrie et du Commerce, mais, aussi, de représentants du ministère des Transports, de l'Office de planification du Québec et du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre. Donc, ceci est déjà en marche. (22 h 15)

En ce qui concerne la nécessité de mettre le fédéral dans le coup, il va de soi que, comme les principales grandes politiques, comme la loi sur la cabotage, qui ressemblerait au Jones' Act des Etats-Unis, comme une politique de marine marchande pour le Canada, ces politiques relèvent au premier titre du gouvernement fédéral et que, par conséquent, il est directement impliqué, au moment où nous parlons. Mais nous allons, au cours de l'été et dans les quelques semaines qui vont venir, le lui rappeler et ce sera sans doute une conclusion de notre rencontre d'aujourd'hui.

Nous allons lui rappeler que le diagnostic est compris de tous, et la CSN l'avait bien posé, ce diagnostic, au mois de décembre dernier. Dans le fond, le comité de travail est allé dans la même direction. Il va falloir qu'il y ait une vraie politique pour les chantiers maritimes et qui implique une politique des transports au Canada.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Huntingdon.

M. Dubois: Merci, M. le Président, M. L'Heureux, tout à l'heure, a mentionné qu'il serait heureux de ne pas voir le plan de redressement proposé par Marine entériné d'ici au mois de septembre. J'aimerais connaître les raisons précises qui le poussent à demander un retard pour entériner ce plan de redressement puisque, d'ici septembre, je me demande bien ce qui peut arriver de concret au niveau du développement de Marine qui pourrait amener un amendement au plan proposé. Est-ce que vous entrevoyez quelque chose de neuf d'ici trois ou quatre mois, puisque vous demandez de retarder jusqu'en septembre le fait d'entériner ce plan?

M. L'Heureux: C'est parce que, comme on l'a indiqué avec assez de force, il y a certains aspects du programme de redressement qui, quant à nous, menacent sérieusement le chantier, la vocation navale de Marine, à moyen et long terme. Compte tenu du souci du gouvernement et de tout le monde, en fait, d'assurer la participation des syndicats, je pense que c'est important, ce sont eux qui fabriquent et qui montent ces bateaux, compte tenu d'un nouveau rapport soumis hier, qui semble très élaboré, par des ministères dont un sous la direction du ministre, il me semblait assez important, parce qu'il y a encore certaines questions, compte tenu de notre position fondamentale quant à la vocation navale de Marine. On ne demande donc que quelques mois pour avoir l'occasion de discuter avec la SGF, Marine, les ministères concernés de ces divers rapports et des diverses orientations prévues à ce moment-là. C'est tout ce qu'on demande.

M. Dubois: D'accord. Vous avez indiqué le besoin pour le Québec de se doter d'un chantier naval intégré, sophistiqué, au point de pouvoir créer de toutes pièces ici, d'avancer dans la technologie au niveau de la construction navale. Supposons qu'on accepte cette demande, cette suggestion, disons que le gouvernement du Québec accède à ça, face aux problèmes mondiaux dans la construction de navires, supposons qu'on aurait un tel complexe ici, la situation mondiale existante serait la même. A présent, on s'aperçoit que la France subventionne — je l'ai mentionné cet après-midi — jusqu'à 50% de la construction navale chez elle et assure l'inflation aux constructeurs de navires, ce qui peut s'évaluer jusqu'à 70% de support financier par la France pour la construction navale. Est-ce que, chez nous, ici, le gouvernement canadien devrait accorder ce support, d'après vous, au même titre que la France le fait? Parce que, si on vit la même situation dans deux ans, trois ans, quatre ans, cinq ans, et c'est possible, parce que chacun tire la couverture de son bord, c'est une jungle présentement dans ce domaine, comment pourrait-on s'en sortir ici au Québec avec un complexe qui coûterait plusieurs centaines de millions, face à la situation mondiale, face à la compétitivité de ce secteur et face aux pays sous-développés qui s'en viennent dans le domaine?

Comment peut-on s'en sortir pour les années prévisibles, même si on a ici un complexe intégré et sophistiqué de construction navale? Je me pose la question, vous avez ouvert la porte sur des questions à ce sujet, je la pose directement. Cela va-t-il nous amener des contrats favorables, intéressants financièrement, sans être supportés majoritairement par l'Etat?

M. L'Heureux: Votre question est hypothétique, dans le sens que, dans un premier aspect, vous dites que, si on avait un complexe vraiment intégré de chantier maritime, capable de construire des bateaux adéquatement, tel qu'on le souhaite... Vous nous dites demandez, dans le contexte de la crise mondiale actuelle, qu'est-ce qu'on pourrait faire.

Evidemment, ma réponse est hypothétique aussi. Elle est aléatoire un peu, mais c'est ce qu'on a indiqué dans notre mémoire. Par exemple, il va falloir construire des méthaniers pour l'Arctique. Si on avait un complexe aujourd'hui — ce sont des besoins canadiens — on serait en mesure, et on serait sans doute concurrentiel, de construire ces bateaux. A l'heure actuelle, on ne l'est pas. La marine canadienne doit être transformée, rénovée. Il y a six frégates à construire. On serait en mesure vraiment d'assumer la construction de ces

bateaux. Comme c'est hypothétique, cela voudrait dire qu'on serait aussi en mesure de satisfaire aux besoins découlant de l'extension de la zone des eaux à 200 milles, etc. Mais c'est hypothétique. Je sais que ma réponse est aussi faible que la question.

Le second volet de notre question: Est-ce qu'on ne sera pas obligé, éventuellement, comme les pays qui ont développé des chantiers maritimes, de faire comme la France fait présentement? Je pense que ce que la France fait présentement, comme l'Allemagne de l'Ouest, par exemple, qui ne subventionnait pas, jusqu'à il y a quelques années, la construction des navires, comme la Suède a fait cette année, en mettant $500 millions pour colmater un déficit d'un de ses chantiers... Ce sont des réponses à la crise actuelle. Ce sont des réponses d'un gouvernement face au chômage massif qui découle de la crise, de la surcapacité mondiale dans la construction navale. Ce sont donc des mesures temporaires. Ce qu'on dit dans ce mémoire, c'est bien clair; on dit: Les autres pays, c'est vrai qu'ils ont des problèmes, mais ils s'en occupent par des mesures comme celles-là. Je suis convaincu que cela ne durera pas indéfiniment.

Ce qu'on dit essentiellement — je me répète peut-être — c'est que, si on investit — dans l'esprit où vous le dites, très clairement à part cela — et qu'on se donne un complexe de construction navale adéquat, quand la reprise va venir, en 1982 ou 1983, on sera en mesure de concurrencer les autres pays.

Le Président (M. Boucher): M. Coulombe.

M. Dubois: II faudrait peut-être avoir, à long terme, des prévisions assez précises pour pouvoir justifier des investissements massifs. Il n'y a pas seulement le secteur naval qui peut être privilégié de la part d'un gouvernement, afin de pallier les problèmes du chômage. Il peut y avoir d'autres secteurs d'activité, d'autres secteurs de production industrielle que la construction navale. C'est peut-être un point de vue du syndicat, parce que vous touchez particulièrement aux employés de Sorel présentement, ici aujourd'hui, de Sorel ou de Lauzon, mais il reste quand même que, dans les grandes vues d'un gouvernement, il y a des secteurs à privilégier et il y en a d'autres à moins privilégier.

Il s'agit quand même qu'un gouvernement dise: Je privilégie ce secteur en particulier. Le cas échéant, ce n'est peut-être pas au Québec de privilégier, c'est peut-être plus au Canada, au gouvernement fédéral de le faire. Les commandes reçues par cette entreprise viendront majoritairement du gouvernement fédéral. Je pense que cela devrait être une décision gouvernementale fédérale et non provinciale, jusqu'à un certain point.

Le Président (M. Boucher): M. Coulombe a demandé la parole.

M. Coulombe: Je voudrais juste faire une remarque. Je ne voudrais surtout pas que la commission parlementaire se termine sur la... Je ne voudrais pas que les membres de la commission parlementaire puissent accepter l'analyse un peu rapide qui a été faite tantôt des deux secteurs, surtout l'hydraulique et les wagons. Je dois vous dire que nous sommes en désaccord total là-dessus. Cela nous fera plaisir d'avoir des rencontres avec vous autres pour vous montrer les documents ou ceux qui auraient pu vous échapper dans le comité consultatif; on éclairera sa lanterne mutuellement là-dessus.

Je pense qu'il est important de noter quelques éléments, sans entrer dans la discussion de base, que l'hydro-électrique... Je demanderais peut-être à M. Brisson de citer quelques chiffres très précis et surtout le concept de la technologie de pointe qui a été apporté tantôt. On est en désaccord complet là-dessus.

M. Brisson: Pour ne citer que quelques chiffres, le projet de redressement que nous avons fourni n'a été que jusqu'en 1984. Il ne faudrait pas penser qu'après cela on fermerait. Dans l'hydroélectrique qui est un domaine noble et où la technologie continue de se développer, nous avons présentement des chiffres, des projets qui sont assez avancés, que nous appelons ici avant-projets pour avoir été chiffrés jusqu'en 1990.

Or, une société, par exemple, comme la société d'énergie et toutes les sociétés qui s'occupent d'énergie doivent prévoir au moins dix ans à l'avance. C'est normal, parce que c'est le temps que cela prend pour concevoir un projet, le préparer — l'ingénierie — et le réaliser. Dans ces projets-là, on dit souvent qu'avec la Société d'énergie de la baie James, c'est le dernier gros projet. En fait, c'est loin d'être le dernier gros projet. Il y a, à la suite de ce projet-là, plusieurs autres projets qui s'alignent avec des technologies différentes dans lesquelles Marine Industrie peut fonctionner et dans lesquelles Marine Industrie est en train de développer ses ressources humaines, ses contacts et aussi ses contacts avec des bailleurs de licences avec des gens qui ont déjà la technologie pour le faire.

On sait fort bien que les nouvelles générations jusqu'à 1990, par exemple, après les turbines Francis qui sont celles employées présentement, il va y avoir les turbines hélice, capan, il y aura les groupes bulbes et il y a toute une série de développements pour prendre en main tous les développements hydro-électriques qu'on peut faire et qui sont l'énergie du futur. Etant donné la crise du pétrole, les augmentations de coûts, les objections au nucléaire, ici au Québec surtout — et nous sommes bien placés pour le savoir et pour en profiter — nous avons énormément encore de développement hydraulique à faire, mais avec des technologies différentes et des technologies de pointe. Des stations pompées, il n'en existe pas au Canada présentement et nous avons participé, nous avons fait des démonstrations techniques, par exemple, à l'Hydro-Québec sur la façon de procéder et nous sommes à étudier des projets avec elle.

II ne faut pas dire que nous sommes en dehors de la technologie et que cette histoire dort. Ou côté de l'hydro-électrique, nous sommes à la pointe de la technologie et nous sommes à développer des ressources humaines, des groupes d'ingénierie qui se forment. Nous avons de jeunes ingénieurs qui poussent avec nous qui sont à la fine pointe de la technologie de ce côté-là.

M. Coulombe: Pour ce qui concerne les wagons, là on est un peu plus d'accord que ce n'est pas le même secteur que l'hydraulique ou que l'électromécanique, mais une chose est certaine, c'est que si dans les cinq prochaines années, on assiste à la montée du cycle des wagons dans une compagnie qui a perdu $30 millions ou $40 millions dans les deux ou trois dernières années, et si on peut faire du profit avec 10 000 ou 15 000 wagons, peu importe la façon dont la technologie sera qualifiée, on sera extrêmement heureux de faire des profits et de créer des emplois avec cette possibilité-là.

M. Brisson: Je voudrais...

Le Président (M. Boucher): Vous avez quelque chose à ajouter?

M. Brisson: J'aurais voulu ajouter aussi une remarque. Il est très rare que des industriels vont s'opposer à des suggestions de faire des investissements massifs. C'est toujours très intéressant, mais, par contre, il faut regarder aussi la rentabilité à long terme. Je pense au chantier Hyundai', en Corée, qui est à peu près le chantier le plus moderne qui a les dernières techniques, enfin qui a été complété vers 1974 et qui a accaparé une grande part du marché de construction maritime et qui, à l'heure actuelle, est aussi en difficulté. C'est un chantier qui fonctionne à moins de 50% de sa capacité. Voici qu'on y a investi des centaines de millions... Même si on les a investis, à l'heure actuelle, il n'y a pas d'utilisation.

M. Coulombe: Un dernier chiffre aussi sur les investissements pour ce qui concerne Marine Industrie: Dans les dix dernières années, il y a eu $25 millions d'immobilisation ou d'investissement et il y a eu $17 millions dans la division navale. Le manque d'investissement dans les wagons nous conduit aujourd'hui à être dans une situation qu'il faut redresser, si on veut profiter des bonnes années qui s'en viennent. $17 millions sur $25 millions ont été dans la construction navale, en termes d'investissement.

Le Président (M. Boucher): Merci.

M. Dubois: Est-ce qu'à courte échéance vous prévoyez des mises à pied chez Marine Industrie?

M. Coulombe: Elles commenceront en septembre.

M. Dubois: En septembre. A présent, vous êtes en train de produire des bateaux pour la

Pologne. Quel pourcentage au niveau des matériaux est fabriqué ici au Québec ou chez vous à l'usine? Est-ce que vous avez des indications de cela? (22 h 30)

M. Brisson: Oui. Je parle de très gros bateaux, des bateaux de la grosseur que nous produisons présentement. Environ 50% du coût du navire est du matériel ou de l'équipement et 75% de cette quantité est importée ici au Canada. C'est un fait que dans le type de navires que nous construisons — d'ailleurs, je crois que c'est assez général dans les navires de cette grosseur — 75% du matériel vient de l'étranger, est importé. C'est une des remarques, évidemment, que la centrale de la CSN faisait. C'est un fait que c'est une situation qui existe et qui n'aide évidemment pas à notre compétivité au point de vue international.

M. Dubois: Ce qui veut dire que sur un bateau, incluant la main-d'oeuvre, il y aurait 12,5% de la valeur du navire qui comprendrait des matériaux produits au Québec. Vous en avez 75% des 50%. Cela ne fait quand même pas un gros pourcentage. Est-ce qu'il y a...

M. Coulombe: C'est cela. C'est exact. Il faut bien penser que dans des contrats internationaux ou dans certains types de contrats, comme par exemple, en Pologne, les cargos polonais, si je ne me trompe, la fourniture d'acier était, sinon une condition... Est-ce que c'était une condition contractuelle? Si ce n'était pas dans le contrat, c'était un élément extrêmement important de la discussion.

M. Dubois: Est-ce que c'est fréquent d'avoir des conditions contractuelles, à savoir de prendre des matériaux dans le pays acheteur?

M. Coulombe: Chaque armateur veut avoir son type de moteur qui est fabriqué à telle place, parce qu'il aime mieux cela. Il est plus lent, il est plus...

M. Dubois: D'accord, je vous remercie.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Duplessis.

M. Perron: Merci, M. le Président. Si j'ai bien compris l'exposé du ministre, il y a un certain moment, il faisait allusion au fait que Marine Industrie ou la SGF, je pense que c'est plutôt Marine, doive aller chercher les commandes à l'extérieur, soit au Canada ou au Québec ou sur le marché international. C'est de la juridiction de Marine. En ce qui a trait au leadership du gouvernement lui-même — ma question s'adresse au ministre — est-ce que le ministre pourrait effectivement intervenir dans des cas précis, soit celui des commandes du fédéral, au moment où on se parle, à la suite de l'élection du nouveau gouvernement? Est-ce qu'il pourrait intervenir à ce niveau? C'est la première partie.

En ce qui a trait à la fameuse loi du cabotage, il semble qu'il serait possible de corriger la situation aberrante dans laquelle on vit actuellement, où on aurait une loi fédérale, effectivement, jusqu'à nouvel ordre, qui ressemblerait, dans son ensemble, à la Jones Act. Est-ce qu'il y a des pressions qui peuvent être faites à ce niveau auprès du gouvernement fédéral, concernant les deux aspects que je viens de mentionner?

M. Tremblay: En ce qui concerne la première interrogation du député de Duplessis, on se rappellera que j'ai déposé à l'Assemblée nationale copie des lettres qui avaient été envoyées au ministre Andras, au ministre Horner et au ministre Abbott, à la suite de l'annonce d'un programme de $35 millions d'aide aux chantiers maritimes pour la Nouvelle-Ecosse, le Nouveau-Brunswick et la Colombie-Britannique, demandant qu'il y ait une préférence accordée aux chantiers maritimes de Davie et de Marine pour ce qui concerne la construction de brise-glace et de navires. Le déclenchement des élections a fait que je n'ai pas reçu de réponse du gouvernement fédéral. Donc, il y a déjà eu ce genre de démarche.

D'autre part, en ce qui concerne les pressions qu'un gouvernement peut faire concernant la législation d'un autre Parlement, il y va de l'autonomie de chacun des Parlements. Tout comme dans notre cas nous n'accepterions pas, comme cela s'est produit pour la taxe de vente, qu'un autre gouvernement veuille nous dicter les mesures législatives que nous devrions prendre, je présume que le gouvernement fédéral n'accepterait pas que nous nous immiscions dans son processus législatif pour faire des amendements à une loi qui est déjà devant le Parlement fédéral. La loi du cabotage fédérale est déjà déposée. Evidemment, elle est déposée depuis longtemps. Elle a suscité des recommandations.

Plusieurs des recommandations avaient pour objet de diminuer son importance, par exemple, d'introduire une mesure d'urgence pour que les armateurs puissent faire appel à des bateaux étrangers et d'autres mesures semblables. Donc, de là l'idée de créer un Bureau de construction navale regroupant tous les agents économiques dans le secteur et non pas uniquement le gouvernement du Québec pour formuler ce genre de pression. Je pense que ceci serait plus normal et sera de nature à donner de meilleurs résultats.

M. Perron: Bon! Ma question s'adresse à M. Coulombe ou à M. Brisson et, bien entendu, j'émets ici l'hypothèse du cas où les contrats du fédéral seraient émis en faveur de Marine Industrie et où il y aurait effectivement modification dans la division des wagons, surtout celle-là, et la division hydro-électrique. Est-ce que vous pensez qu'à ce moment-là, il y aurait des mises à pied vers l'année 1980 ou vers la fin de 1980, si on obtenait ces contrats?

M. Brisson: M. le Président, évidemment, les mises à pied que nous prévoyons pour septembre de cette année, jusqu'au milieu de 1980, à la fin de la construction des bateaux polonais, ceci va descendre le niveau de la construction navale à peu près à son minimum; on va garder des gens à la réparation navale et le minimum que nous pouvons garder à ce moment-là. Toute commande qui arriverait à ce moment-là remonte le niveau d'emploi, et c'est cette remontée de niveau d'emploi que nous avons prévue lorsque nous disons que nous remonterons à 3100 vers 1984. Ceci présume que nous recevons, de la part du gouvernement fédéral, de toute façon, soit un traversier et certainement trois des frégates.

Cela prévoit que nous recevrons cette part des programmes du fédéral. A votre question, je dis que ça va créer justement cette relance de l'emploi dans le naval que nous avons prévue et qui remontera le niveau de l'emploi à 3100.

M. Perron: On a parlé tout à l'heure d'industries secondaires en rapport, par exemple, avec les roues qui étaient importées de l'extérieur du Québec, si ma mémoire est bonne, qui provenaient de l'extérieur du Québec.

M. Brisson: Pardon! Les roues sont fabriquées au Québec. Elles sont fabriquées tout près de chez nous.

M. Perron: Donc, certains matériaux sont faits à l'extérieur du Québec, mais pourraient éventuellement être faits au Québec. Est-ce que vous pourriez nous donner le pourcentage, dans le domaine de l'hydro-électrique, de matériaux qui sont compris et demandés par la Société d'énergie de la baie James et qui sont des matériaux provenant du Québec? Je voudrais avoir la même chose pour les wagons. Dans le naval, on l'a eu tout à l'heure.

M. Brisson: Je regrette, M. le Président. Je n'ai pas les chiffres exacts. L'acier qui entre dans ces équipements n'est pas disponible au Québec présentement. Pour ce qui est des autres équipements, il y en a de plus en plus qui sont fabriqués ici au Québec et il n'y a présentement, je crois, que les pivots qui sont importés à 50% de l'étranger. Du côté des turbines et des alternateurs, une plus grande partie de valeur ajoutée et de valeur d'équipements achetés est faite ici au Québec que pour les navires, mais je n'ai pas les chiffres exacts. Je regrette, mais l'acier, tout de même, on sait qu'il vient de l'extérieur du Québec.

M. Perron: Merci, M. le Président. D'ailleurs, c'est la raison pour laquelle j'ai posé les questions qui viennent d'être posées. Ma question s'adresse au ministre. N'est-il pas question, au moment où on se parle, dans le cadre des études qui sont faites quant au complexe intégré de SIDBEC-Normine qu'éventuellement on en vienne à l'industrie secondaire dans le sens des besoins de Marine Industrie ou d'autres industries au Québec qui fonctionnent au moment où on se parle?

M. Tremblay: Evidemment, la troisième phase du développement de SIDBEC portera avant tout sur les projets de développement en aval, qui touchent à la transformation de l'acier. On n'est évidemment pas en mesure de dévoiler les projets, puisqu'ils ne sont pas encore adoptés par le gouvernement, mais, en ce qui concerne les aciers d'un pouce d'épaisseur, ce qui est utilisé dans les bateaux ou dans les turbines, à ma connaissance, ce n'est pas dans les plans de SIDBEC, parce que la demande, au Québec, n'est pas assez importante pour justifier de gros investissements. A moins que les gens de Marine n'aient des indications contraires? C'est plutôt dans la tôle galvanisée, dans ce genre de petite tôle qui est utilisée partout au Québec, dans les PME, plutôt que dans quelques chantiers qui ne créent pas une demande suffisante pour avoir des installations de production à longueur d'année pour ce genre d'acier qui est quand même très spécialisé, si je comprends bien.

M. Brlsson: Si je peux ajouter, M. le ministre, même en Europe, on dit que, parmi les usines d'acier, aucune, même dans les plus grandes, ne peut fournir tout l'acier qui est nécessaire pour un bateau. On se fie à trois ou quatre usines différentes qui se sont spécialisées. Alors, malgré le volume qui existe là, on n'a pas pu avoir une usine ou une compagnie d'acier qui fasse tout; alors, ici, ce serait illusoire de penser qu'au Québec, on puisse tout faire.

M. Perron: Une dernière question, M. le Président — elle s'adresse toujours au ministre — en rapport avec la loi 108, qui fut adoptée en décembre 1978, on sait que le gouvernement du Québec a donné des garanties de $104 millions en rapport avec les six fameux bateaux de Karageor-gis. On sait aussi que Marine Industrie peut, n'importe quand, vendre les bateaux en question au prix le plus abordable et la différence serait payée par le gouvernement du Québec.

Ma question est celle-ci: Est-ce que, dans l'hypothèse où Marine vendrait un ou plusieurs de ces bateaux, le tout doit être sanctionné par le ministre des Finances ou vous-même? Je présume que Marine va discuter...

M. Tremblay: Exactement, une garantie de cet ordre, accordée par le ministre des Finances, entre dans les états financiers du gouvernement et il est évident que la position financière du gouvernement — même si ce n'est pas un gros montant pour le gouvernement — est mise en cause. De sorte que Marine doit avertir le ministre des Finances de ses intentions dans ce domaine. Il est évident que le ministre des Finances opposerait un veto si Marine décidait de vendre ses bateaux pour $1 et autres considérations et se retournait et demandait $17 499 000 au ministre des Finances.

M. Coulombe: Six fois! M. Tremblay: Pardon?

M. Coulombe: Multiplié par six, en plus!

M. Tremblay: Donc, il y a une présomption que Marine obtienne un prix raisonnable pour ses bateaux et que la perte soit minimisée.

M. Perron: Merci. Maintenant, ma question s'adresse au syndicat. Elle vise les emplois qui seraient perdus dans le cadre du plan de redressement. On sait qu'il y a des métiers qui sont difficilement recyclables, à court terme en tout cas, soit dans la division des wagons ou soit dans la division électrique, puisqu'on parle d'ébénistes et on parle de ferblantiers, on parle aussi d'électriciens qui perdraient leur emploi à la suite de ce remaniement, de l'application de ce plan de redressement par Marine Industrie. Peut-on savoir quel nombre représente ces employés qui, à court terme, ne seraient pas recyclables à cause de l'ancienneté ou à cause du manque de travail pour eux?

M. Gagné: M. le Président, on peut peut-être répondre approximativement. Si le plan de redressement était comme tel et s'il n'y avait plus de naval, ou du naval à court terme, ce vers quoi on se dirige présentement, pour la fin de l'année, c'est sûr qu'il y a des ferblantiers, des plombiers, des ébénistes, dans ce genre; ça pourrait représenter entre 250 et 300 travailleurs. Je ne sais pas si la compagnie peut confirmer exactement le même chiffre concernant les métiers de finition; ce serait entre 250 et 300.

M. Coulombe: Oui.

M. Gagné: C'est pas mal exact, n'est-ce pas? (22 h 45)

Si vous me le permettez, M. le Président, une petite allocution de rien, suite à tous ces débats. Je pense que les travailleurs des chantiers maritimes sont tannés qu'il n'y ait pas de politique. A ce stade-ci je vais demander au ministre Tremblay si ce serait possible de sa part d'organiser des rencontres avec le syndicat, la direction de Marine Industrie pour aller à Ottawa rencontrer les fameux responsables qui n'appliquent pas ces politiques et qui ne veulent rien entendre. Qu'à ce stade-ci, je demanderais une réponse du ministre si c'est possible.

M. Tremblay: Comme je l'ai dit tout à l'heure, s'il y a de la bonne volonté de la part des intervenants — et je crois qu'il y en a — la mise sur pied d'un bureau de construction navale, parce qu'il ne faut pas dissocier le problème de Marine Industrie de celui de Davie Shipbuilding et de celui de Vickers, peut se faire au cours des prochaines semaines. Il y aura une participation du ministère de l'Industrie et du Commerce, du ministère des Transports, des chantiers maritimes, des petits chantiers qui sont quand même intéressés par tout ce qui se passe dans les grands, il y aura certainement une participation de la direction de Marine Industrie, je présume, de la direc-

tion de Davie Shipbuilding et de la part des syndicats de ces deux chantiers, de sorte qu'il pourra y avoir une position commune sur quelques grands axes de politique au cours des prochaines semaines ou des prochains mois.

M. Gagné: Je vous remercie.

M. Scowen: Une dernière question, M. le ministre.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: On a vécu une expérience intéressante aujourd'hui, mais quand vous étiez absent j'ai demandé à M. Coulombe si c'était possible dans une telle commission parlementaire, d'avoir comme documentation au début d'un tel rapport une projection du "cash flow", un bilan pro forma pour l'année en cours 1979-1980. J'ai été obligé en étudiant cette affaire, et mon collègue avait le même problème, de remarquer qu'il y avait des chiffres un peu partout, mais c'était impossible de les mettre ensemble de façon cohérente. Il y avait un chiffre de vente de 1979 ici, un autre pour une moyenne de dix ans là et M. Coulombe a répondu que ce n'était pas possible, mais il parlait surtout de la question de ventilation par produit, mais je pense que tenant compte du fait que vous produisez pour le public à la fin de l'année un bilan complet, que ce ne doit pas être exclu pour rendre beaucoup plus utile ces rencontres et j'espère qu'on en aura une autre d'ici un an pour suivre vos résultats, le succès qu'on vous souhaite énormément, qu'on obtienne cette documentation. Les prévisions du "cash flow", "profit and loss" et bilan pour les années prochaines — pour deux ans au moins. Est-ce possible d'avoir ça, sans qu'on dévoile les détails par produits qui pourraient être utiles aux concurrents?

M. Tremblay: En ce qui concerne le dévoilement de renseignements financiers, j'ai déjà exprimé la position du gouvernement, nous souhaitons que toutes les sociétés d'Etat publient des états financiers trimestriels.

M. Scowen: Je parle des prévisions, des plans.

M. Tremblay: En ce qui concerne les plans, je pense que ceci doit découler de la discrétion du conseil d'administration de chacune des sociétés, mais pas de chacune des sociétés. Si la société estime qu'elle peut distribuer des bilans pro forma ou des prévisions de vente, etc., et que cela ne constitue pas un handicap dans ses opérations commerciales ou industrielles normales, je n'ai pas d'objection à mon niveau.

Si, au contraire, elle juge que ceci met en péril sa position par rapport à des concurrents ou d'autres, elle a pleine juridiction pour refuser ce genre de dévoilement. Je n'étais pas ici quand vous avez formulé votre demande. Je me demande quelle a été la réponse de la direction de la SGF?

M. Coulombe: M. le Président, là-dessus je pense qu'il faut être extrêmement clair. Je ne vois pas beaucoup de compagnies publiques qui ont des actionnaires et qui dévoilent à leurs actionnaires au début de l'année les prévisions financières, les bilans pro forma, et ceci et cela. Le rôle des actionnaires c'est de juger au résultat. S'il y a un conseil d'administration à une société d'Etat qui doit jouer un rôle, c'est bien le rôle justement de surveiller, d'étudier ces bilans pro forma, d'étudier les prévisions et de voir, à la fin de l'année, si ça se respecte ou non. Pour l'actionnaire, c'est de juger aux résultats. Sans ça, le conseil d'administration, enlevez-le, il est parfaitement inutile.

M. Scowen: Je ne suis pas du tout en désaccord avec vous que ce n'est pas habituel. Mais je pose la question. C'est quoi le rôle de ces commissions parlementaires? Surveiller vos plans, votre programme de redressement, qui est un programme de redressement rentable, sans que nous ayons les chiffres pour comprendre ce que cela veut dire, que c'est rentable, quand et comment? C'est plutôt une question...

M. Coulombe: Vous comprendrez que ce n'est pas à nous à définir à quoi sert la commission parlementaire. Ce que je veux dire, c'est que l'actionnaire a eu en main les documents de base pour prendre les décisions.

M. Scowen: Ce n'est pas une question à régler ce soir, mais je la pose au ministre, parce que je pense que ça met en cause ces commissions parlementaires et je sais très bien que nous sommes en train d'évaluer cette question de contrôle sur les sociétés d'Etat.

En terminant, je voudrais simplement vous remercier et vous souhaiter bonne chance dans votre projet.

Le Président (M. Boucher): Comme il n'y a plus d'intervenant, au nom... M. le ministre, vous voulez ajouter quelque chose?

M. Tremblay: Merci, M. le Président. Je voulais remercier les membres de cette commission qui ont accompli un travail sérieux et quelque peu aride sur un sujet très complexe comme celui d'un plan de redressement, dans une perspective de rentabilité d'une entreprise. Il est évident qu'une commission parlementaire comme la nôtre n'a pas pour fonction de diriger ou d'administrer une entreprise; ce n'est pas la fonction des parlementaires, pour répondre indirectement à la question que soulevait le député de Notre-Dame-de-Grâce. Notre rôle est de vérifier si, dans le cadre d'une loi, certaines orientations prévues par l'Assemblée nationale ont été réalisées.

Il s'agissait ici d'un article d'un projet de loi adopté par l'Assemblée nationale, qui prévoyait que la Société générale de financement, avec Marine, devait mettre sur pied un plan de redressement et le soumettre au gouvernement qui

devait le déposer avant le 1er juin. Présumément, nous devions en débattre et l'éclairer en commission parlementaire. Ce travail a été fait, je pense, et il va de soi que ceci ne clôt pas le débat, puisque, comme on l'a dit tout à l'heure, il ne s'agissait pas de résoudre tous les problèmes qui sont rattachés à la crise qui sévit dans les chantiers maritimes, tout particulièrement la crise que traverse Marine.

Je voudrais remercier les représentants des syndicats qui, encore une fois, ont apporté une contribution extraordinairement positive à la discussion, avec un mémoire bien structuré. Je les remercie pour la contribution apportée quant à des organismes et à des positions communes qui pourront se dégager des rencontres qui se poursuivront dans les semaines qui vont venir. Il est évident qu'il faut reconnaître que la direction de Marine, particulièrement la direction de la SGF, a fait diligence pour se conformer au délai que leur enjoignait la loi pour procéder à cette opération de redressement.

Il n'est pas facile de diriger une entreprise sous les réflecteurs et nous devons tous en être conscients, nous qui sommes du gouvernement ou de l'Assemblée nationale. Je pense que les dirigeants ont fait leur devoir, comme je l'ai dit tout à l'heure, il ont fait face à la situation, ils ont su prendre le taureau par les cornes et ils ont abouti à un plan qui, même s'il soulève des points d'interrogation, reçoit l'adhésion au niveau de son sérieux et de sa rationalité. Comme le disait le président de la SGF, à venir témoigner devant la commission parlementaire, on est amené à être d'une honnêteté quasi dangereuse. On sait que, dans un domaine compétitif, concurrentiel, dévoiler des plans, même si c'est utile pour la cohésion des actions, ceci complique la position de l'entreprise, au niveau de ses contrats, par rapport à des concurrents.

Je pense qu'en ce faisant, les dirigeants de Marine Industrie et de la SGF ont fait preuve d'un courage et d'une patience exceptionnels, à la fois par le travail qu'ils ont accompli mais aussi, aujourd'hui, en se prêtant de si bonne grâce à toutes nos questions. Souvent, comme nous ne sommes pas des experts, et ce n'est pas la fonction des parlementaires d'être des experts dans tous les domaines, il nous arrive de poser des questions qui peuvent paraître naïves et qui peuvent paraître incomplètes, jusqu'à un certain point — nous devons nous en excuser — à cause justement des circonstances.

Je remercie tous ceux qui ont participé à cette commission et je les encourage à continuer une ouverture quant à des cohésions et des concertations pour aboutir à des solutions qui soient au bénéfice de tous, principalement au bénéfice de ceux qui oeuvrent à l'intérieur des entreprises que sont les chantiers maritimes, et tout particulièrement à l'intérieur de Marine Industrie, pour le bien de la région de Sorel et pour le bien de l'ensemble du Québec. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre. Je crois que nous avons bien travaillé, compte tenu de l'heure.

En mon nom personnel et au nom de tous les membres de la commission, je remercie les représentants de la SGF, de Marine Industrie et des syndicats concernés, pour leur participation à cette commission. Je crois que vous m'avez facilité le travail avec votre collaboration et celle de tous les membres de cette assemblée et je vous en remercie.

La commission ajourne ses travaux sine die.

Fin de la séance à 22 h 57

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