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(Dix heures douze minutes)
Le Président (M. Rodrigue): À l'ordre!
La commission élue permanente de l'industrie, du commerce et du
tourisme se réunit pour entendre le président-directeur
général du Centre de recherche industrielle du Québec.
Avant de procéder à la discussion avec le
président-directeur général du CRIQ, auriez-vous une
proposition pour la nomination d'un rapporteur?
M. Dussault: M. Paré.
M. Biron: M. Paré.
Le Président (M. Rodrigue): M. Paré. Est-ce qu'il y
a d'autres propositions?
Une voix: Adopté à l'unanimité.
Le Président (M. Rodrigue): Cette proposition est
adoptée. M. Paré (Shefford) est nommé rapporteur de la
commission.
Les membres de cette commission sont les suivants: MM. Baril
(Rouyn-Noranda-Témiscamingue), Biron (Lotbinière), de Belleval
(Charlesbourg), Dussault
(Châteauguay), Fortier (Outremont), Johnson (Vaudreuil-Soulanges),
Lavigne (Beauharnois), Maciocia (Viger), Paré (Shefford), Payne
(Vachon), Scowen (Notre-Dame-de-Grâce).
Les intervenants à cette commission sont: MM. Beaumier (Nicolet),
Bélanger (Mégantic-Compton), Champagne (Mille-Îles), Dean
(Prévost), Dubois (Huntingdon), Grégoire (Frontenac), Rocheleau
(Hull), Vaillancourt (Orford).
M. le ministre.
Remarques préliminaires M. Rodrigue
Biron
M. Biron: M. le Président, je suis très heureux de
la tenue de cette commission avant la deuxième lecture de ce projet de
loi puisque cela permettra à tous les membres de la commission, et
à moi-même, de poser des questions au président-directeur
général, au secrétaire de même qu'à leurs
adjoints sur ce qui se passe au Centre de recherche industrielle du
Québec.
Je remercie l'Opposition de nous avoir fait cette suggestion.
Peut-être qu'à d'autres occasions il y aura lieu, surtout sur des
lois concernant des sociétés d'État, de recevoir les
responsables de ces sociétés afin que, tous ensemble, nous soyons
le mieux informé possible pour bonifier nos actions. Les actions
économiques, de ce temps-ci, il faut qu'elles soient cohérentes,
il faut qu'elles soient solidaires pour répondre à un besoin
pressant de la collectivité québécoise.
La recherche et le développement sont des priorités. C'est
là un des engagements électoraux du Parti québécois
au cours de la dernière élection et nous entendons tout mettre en
oeuvre afin de faciliter l'accès des entreprises
québécoises et, d'une façon particulière, des PME
québécoises au Centre de recherche industrielle du
Québec.
Déjà, il nous semble, à nous qui recevons les
commentaires des gens qui en profitent, que ce centre est à peu
près unique au monde. Il travaille pour un grand nombre de petites ou de
moyennes entreprises manufacturières. Habituellement, un centre de
recherche travaille pour quelques grandes entreprises ou pour une seule grande
entreprise. Dans le cas du Centre de recherche industrielle du Québec il
en est maintenant à sa onzième année d'existence. Il a
été fondé en 1969 par Jean-Paul Beaudry, un de mes
prédécesseurs au ministère de l'Industrie et du Commerce
sous le gouvernement de M. Bertrand. Le centre en est à sa
onzième année maintenant. Il a grandi comme tout être, il a
passé maintenant le stade de l'adolescence et est rendu adulte. Il veut
de plus en plus répondre aux besoins de la collectivité
québécoise, répondre aux besoins de nos 10 000 entreprises
manufacturières québécoises. C'est dans ce sens, M. le
Président, ce matin, que je conclus mes remarques avec
énormément d'ouverture à la réception de
suggestions qui pourraient nous venir de quelque côté de la table
que ce soit, de nos collègues de cette commission parlementaire, en vue
de continuer de faire du Centre de recherche industrielle du Québec ce
qu'il est présentement, un instrument dynamique de développement
industriel, de développement des entreprises, et même de
développement des produits québécois parce qu'il y a
déjà beaucoup de brevets au centre qu'on a aidé à
développer. Dans ce sens, je pense qu'il s'agit de se servir de cet
outil pour que tout le monde, tous les hommes, toutes les femmes du
Québec en profitent.
Le Président (M. Rodrigue): Avant de passer la parole au
député d'Outremont, M. Guy Bertrand, président du CRIQ,
est-ce que vous pourriez nous présenter les personnes qui vous
accompagnent pour les fins de l'enregistrement des débats?
M. Bertrand (Guy): M. le Président, à ma droite, M.
Simon Lupien, secrétaire général du Centre de recherche
industrielle du Québec, et, à ma gauche, M. Théo Wildi,
adjoint au vice-recteur à l'enseignement et à la recherche
à l'Université Laval, président du comité des
brevets et droits d'auteur à l'Université Laval également,
membre du conseil d'administration du Centre de recherche industrielle et aussi
membre du comité exécutif du Centre de recherche industrielle du
Québec.
Le Président (M. Rodrigue): Merci. M. le
député d'Outremont.
M. Pierre Fortier
M. Fortier: M. le Président, en tant que parlementaire et
membre de l'Opposition, et je devrais dire en tant qu'ingénieur qui a
oeuvré dans un domaine de haute technologie, cela me fait
extrêmement plaisir de pouvoir m'informer davantage sur le CRIQ pour
savoir quel est son plan de fonctionnement, quels sont ses plans d'avenir.
C'est la raison pour laquelle nous avons demandé au gouvernement, et
nous lui en savons gré, de pouvoir rencontrer les dirigeants du CRIQ
pour qu'on puisse s'informer davantage. Bien sûr, cela nous paraissait
une anomalie un peu extravagante que de nous demander d'approuver quelque 85
000 000 $ même si c'est dans un but louable. Mais, lorsqu'on constate que
la contribution du gouvernement l'an dernier a été de 7 000 000 $
et qu'on nous demande pour 1982-1983 de porter cette contribution à 13
000 000 $ au minimum, nous avons cru qu'il n'était pas tout à
fait raisonnable de demander aux parlementaires de procéder sans aucune
donnée qui nous permettrait de justifier cette dépense. J'aurais
cru qu'au moment où il se pose de sérieuses questions sur les
choix budgétaires qu'il doit faire le gouvernement aurait pensé
que l'Opposition et que les parlementaires des deux côtés de la
Chambre avaient besoin d'une information plus substantielle avant d'aborder et
d'approuver un budget aussi considérable. D'ailleurs, il me fait plaisir
de constater que M. Bertrand dans son rapport au conseil d'administration
disait justement que le CRIQ se devait également de se montrer
très sensible à la période d'austérité
réelle qui prévaut actuellement, ainsi qu'aux restrictions
sévères que s'est imposées le gouvernement dans
l'augmentation de ses effectifs et de ses dépenses courantes. Mais il me
semble, M. le Président qu'une augmentation qui va être
substantielle du moins pour l'année qui vient aurait dû porter le
ministre et le gouvernement à nous fournir toute information utile nous
permettant de porter un meilleur jugement. Ce matin, nous allons très
certainement collaborer, mais je dois vous dire que nous avons
été extrêmement déçus, en lisant le rapport
annuel de M. Bertrand pour l'année 1980-1981, de constater que le plan
quinquennal fut transmis au ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme
au début de février 1981. Et, j'imagine que ce plan quinquennal
nous aurait permis à tous et chacun d'entre nous ici de savoir davantage
quels sont les stratégies et les plans de fonctionnement que le CRIQ
voudrait bien poursuivre dans les années qui viennent.
M. le Président, comme on ne peut pas faire de motion de
dépôt de rapport en commission parlementaire, j'exprime le voeu
très sincère que dès maintenant le ministre permette le
dépôt de ce plan quinquennal ou, s'il y avait des parties à
l'intérieur de ce plan quinquennal que le ministre pourrait
considérer privilégiées, qu'il nous donne au moins une
information qui serait utile pour la compréhension du débat. Nous
allons poser des questions sur cette augmentation des ressources que le CRIQ
voudrait bien obtenir. Nous allons poser des questions sur l'importance de la
recherche, du développement et de l'innovation qui se font au CRIQ. Nous
allons poser des questions sur le place du CRIQ vis-à-vis de la
recherche et du développement qui doivent se faire dans le secteur
privé également, sur la place du CRIQ vis-à-vis du secteur
privé et vis-à-vis des autres centres de recherche qui sont du
secteur public également. Mais je dois vous avouer qu'avec l'information
que nous avons eue, uniquement les rapports annuels des dernières
années, en tant que parlementaires, nous avons très peu de
données pour pouvoir porter un jugement d'une certaine signification. Je
déplore que le gouvernement semble ne rien apprendre du tout. Je
déplore que le gouvernement demande toujours aux parlementaires
d'approuver des montants substantiels comme ceux-là, qu'il ne
dépose pas les rapports qui leur seraient utiles, qu'il ne croit pas que
les parlementaires doivent être informés davantage. Nous allons
quand même aborder la discussion en toute objectivité, en
espérant que le ministre acceptera de nous donner une copie du plan
quinquennal et que M. Bertrand pourra nous donner - non seulement verbalement,
j'ose espérer - une certaine documentation qui nous permettrait de juger
des vues, des objectifs, des plans d'activité à venir, des
réalisations passées et des stratégies de
développement du CRIQ. Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Rodrigue): Avez-vous des remarques
préliminaires, M. le ministre?
M. Biron: M. le Président, en réponse à
l'intervention du député d'Outremont, je vais vérifier les
données du plan quinquennal et probablement qu'au début de
l'après-midi je serai en position d'en déposer une copie.
Le Président (M. Rodrigue): M. le député de
Charlesbourg.
Plan quinquennal
M. de Belleval: J'avais juste une question à la suite des
remarques du député d'Outremont, quant au dépôt du
plan quinquennal. Est-ce que, entre autres par le moyen de questions, soit
écrites, soit orales, le député d'Outremont a
déjà demandé le dépôt du plan quinquennal de
la part du ministre? Est-ce qu'il peut répondre à cette
question?
M. Fortier: II y a deux jours, lorsque j'ai demandé que la
commission parlementaire siège pour entendre le CRIQ, j'ai
demandé au ministre qu'il nous envoie toute l'information utile qui
pourrait comprendre la raison pour laquelle le projet de loi doit approuver une
augmentation de 85 000 000 $. Je ne savais pas, à ce moment-là,
qu'il existait un plan quinquennal; je présumais qu'un document de ce
genre pouvait exister, mais nous ne l'avons pas eu.
M. de Belleval: D'accord. Je pense bien que ce n'est pas de la
mauvaise volonté de la part du ministre. De toute façon, il vient
de dire que le plan sera disponible. Effectivement, je suis d'accord qu'il faut
avoir toutes les informations disponibles, mais il ne faut pas tenir pour
acquis qu'on ne donne pas ces informations quand on les demande. Je pense que
c'est la première responsabilité d'un parlementaire, dans un
domaine donné, de faire lui-même les démarches correctes et
normales pour obtenir l'information. S'il n'obtient pas l'information,
effectivement, il a des questions à poser.
De toute façon, je pense que la suggestion de l'Opposition est
intéressante. D'ailleurs, le gouvernement l'a acceptée avec
beaucoup de bonne grâce. Pour ma part, comme parlementaire du
côté de la majorité, je suis certain que ce genre de
réunion sera tout aussi utile pour moi que pour l'Opposition. Au fond,
c'est un dossier qui, somme toute, est peu politique sur le plan partisan, mais
très politique sur le plan du développement économique du
Québec. Le CRIQ est une des belles réalisations des gouvernements
successifs. Il a été créé par l'Union Nationale,
poursuivi et développé par un gouvernement libéral,
repris, développé et lancé de nouveau - on le verra
d'ailleurs, en regardant les budgets - d'une façon extrêmement
dynamique aussi, par le gouvernement actuel.
Il est vrai que nous sommes dans une période de restrictions
budgétaires, mais au cours d'une telle période il faut faire
attention pour ne pas se couper des sources d'une croissance future, même
aussi des sources de la croissance présente en matière
économique.
S'il y a un secteur qui est prioritaire, au sein de l'appareil
gouvernemental, c'est bien celui dont s'occupe le CRIQ. Tous les parlementaires
devraient pousser très fort dans le même sens pour que le
gouvernement et le ministre des Finances placent, au plus haut niveau de leurs
priorités en matière budgétaire et en matière
financière, les ressources nécessaires pour le
développement normal et le plus accéléré possible
du CRIQ, développement compatible avec l'utilisation rationnelle des
ressources.
Dans ce sens-là, à mon avis, les demandes du gouvernement
pour l'augmentation du fonds du CRIQ ne sont pas excessives et immorales, loin
de là, au contraire. Cependant, ça ne nous empêche pas - je
suis d'accord avec le député d'Outremont - de bien examiner la
performance actuelle du CRIQ pour s'assurer que ces sommes, qui en principe,
comme je l'ai dit, m'apparaissent absolument nécessaires sont
utilisées de la façon la plus productive possible. En tout cas,
c'est dans cet esprit que j'assiste à cette commission.
Le Président (M. Rodrigue): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: M. le Président, pour ce qui concerne la
question du rapport quinquennal, il est vrai que nous avons la
responsabilité d'être mis au courant des données
disponibles, mais il faut rappeler que ce projet de loi a été
déposé seulement la semaine dernière. Ceux qui parmi vous
ont été à l'Opposition savent sans doute qu'avec les
ressources que nous avons nous ne sommes pas normalement préparés
pour les projets de loi qui ne sont pas prévus.
On a constaté, dans le rapport annuel, que ce plan quinquennal a
été déposé. Je veux simplement rappeler au ministre
que, quand il était dans l'Opposition, le ministre de l'Industrie et du
Commerce de l'époque, M. Tremblay, en consultation avec M. Coulombe, de
la SGF, avait pris l'habitude, pour les deux projets de loi de la SGF,
d'informer à l'avance, d'une façon complète et
responsable, tous les parlementaires -surtout les membres de la commission
parlementaire qui étaient touchés par le projet de loi - afin
qu'ils puissent avoir une période d'étude des documents, une
commission parlementaire avec M. Coulombe et ses associés, suivie d'un
temps nécessaire
pour préparer un débat. Le ministre lui-même
était de l'autre côté et je me rappelle très bien
que lui et moi avons félicité le gouvernement, M. Coulombe
surtout, pour cette façon organisée de faire les travaux, afin de
permettre à tout le monde de faire quelque chose d'intelligent dans le
débat. Je suis persuadé que, surtout dans le domaine de
l'industrie et du commerce, on doit être capable de faire la même
chose pour toutes les sociétés d'État. C'est le respect
même de l'Assemblée nationale que les choses soient
préparées de cette façon. En d'autres mots, l'Opposition,
après que le projet de loi est déposé, doit avoir
l'information nécessaire pour tenir le débat.
En ce qui concerne la situation actuelle, si je comprends, le ministre a
promis de nous donner le plan quinquennal tôt dans l'après-midi,
mais c'est aussi son intention que le projet de loi soit débattu en
Chambre tôt cet après-midi en deuxième lecture, et nous
sommes obligés de donner notre opinion sur le principe. Je propose que
le débat en deuxième lecture soit reporté à la
semaine prochaine si le ministre n'est pas capable de nous donner au moins le
plan quinquennal dans les 30 prochaines minutes pour qu'on puisse au moins
l'examiner pendant l'heure du lunch, l'un ou l'autre. Je pense que même
deux heures, entre midi et quatorze heures, ce n'est pas suffisant pour
apporter l'attention nécessaire à un projet de loi qui
entraîne des dépenses, des engagements de 85 000 000 $.
Ma question principale, c'est: Est-ce possible, devant un projet de loi
de cette envergure, avec un manque d'information que vous ne pouvez nous
reprocher, que nous pouvons vous reprocher - il y a quand même un manque
d'information - de vous demander de reporter le débat à la
semaine prochaine afin d'avoir l'occasion d'étudier, d'une façon
intelligente, le document que vous allez nous remettre cet
après-midi?
Le Président (M. Rodrigue): M. le ministre.
M. Biron: M. le Président, j'ai pris l'engagement d'avoir
le plan quinquennal ou des copies pour les membres de la commission le plus
rapidement possible. On est en train justement de se procurer ces copies.
Premièrement, on va commencer par entendre le président-directeur
général nous faire un rapide historique du centre et nous parler
un peu de ses objectifs d'avenir. On pourra échanger des propos avec
lui, l'interroger, comme je l'ai dit tout à l'heure, des deux
côtés de la table. Je crois bien que l'Opposition sera prête
à procéder dès cet après-midi une fois qu'on aura
en main toutes les informations nécessaires.
Je suggère qu'on commence par écouter M. Bertrand,
président-directeur général, d'abord, afin qu'on puisse le
questionner sur sa présentation. (10 h 30)
M. Scowen: La réponse à ma question sur la
possibilité de reporter le débat cet après-midi, c'est
non?
M. Biron: M. le député, c'est un ordre de la
Chambre et ce n'est pas moi qui dirige les travaux de la Chambre, mais je crois
qu'une fois qu'on aura pu discuter avec M. Bertrand vous allez probablement
vous sentir assez informé pour procéder.
M. Dussault: M. le Président...
Le Président (M. Rodrigue): M. le député de
Châteauguay.
M. Dussault: ... avec le consentement de l'Opposition, est-ce
qu'il serait possible de remplacer M. le député de Vachon, comme
membre, par le député de Mille-Îles, étant
donné que le député de Vachon...
Le Président (M. Rodrigue): Le député de
Mille-Îles est déjà intervenant à cette
commission.
M. Dussault: Alors, est-ce que M. le député de
Mille-Îles pourrait devenir membre de la commission à la place du
député de Vachon qui était membre?
Le Président (M. Rodrigue): Est-ce qu'il y a
consentement?
M. Fortier: Si c'est pour augmenter son salaire, je n'ai pas
d'objection.
Le Président (M. Rodrigue): M. Payne, député
de Vachon, membre de la commission, est remplacé par M. Champagne,
Mille-Îles.
M. Bertrand.
Témoignage du président-directeur
général du CRIQ
M. Bertrand (Guy): M. le Président, je veux vous donner un
historique assez rapide des activités du centre afin de situer les
membres de la commission. Le ministre mentionnait, il y a quelques instants,
que le centre a pris naissance en décembre 1969 à la suite d'une
loi du gouvernement du Québec, mais j'aimerais ajouter que la vie active
du centre relève de l'année financière 1975-1976. Dans les
cinq premières années, on a dû mettre en place des
structures, on a dû définir les modes de fonctionnement, on a
dû construire des bâtisses, on a dû équiper des
laboratoires et des ateliers.
Jusqu'à la période 1976-1977, je dirais que le Centre de
recherche industrielle du Québec était financé presque
à 100% par la dotation du gouvernement du Québec. Les
revenus propres du centre ont commencé à se faire sentir
durant la période 1975-1976 où on a reçu en revenu de
sources extérieures quelque 275 000 $. En 1980-1981 nous étions
rendus à 2 750 000 $. À la fin de l'année qui se termine
à la fin de mars 1982, nous serons un peu en haut de 4 000 000 $,
c'est-à-dire peut-être 4 200 000 $. Cela concerne les revenus
propres. Quant à la croissance du Centre de recherche industrielle, en
1978-1979, nous avons vendu ou signé avec des entreprises
extérieures des contrats pour 2 300 000 $. En 1979-1980, nous en
étions à 3 000 000 $. L'an passé, en 1980-1981, 5 000 000
$, c'est-à-dire une croissance de 70% par rapport à
l'année 1979-1980. Pour l'année qui se termine, nous en serons
aux environs de 7 500 000 $. Nous avons déjà
dépassé les 7 000 000 $ à la fin de février,
c'est-à-dire pour onze mois de fonctionnement, cela veut dire une
croissance de 50% pour l'année en cours.
Si on regarde tout cela, cela veut dire que, dans l'espace de deux ans,
on a triplé nos commandites extérieures, c'est-à-dire les
contrats signés avec les entreprises. J'aimerais ajouter qu'il y a 85%
de ces contrats qui viennent des entreprises et 15% qui viennent des
ministères.
J'aimerais aussi parler de la nécessité d'un centre de
recherche comme le Centre de recherche industrielle du Québec. Si on
regarde les statistiques, on se rend compte qu'au Québec il y a 5200
ingénieurs et techniciens en recherche et développement pour les
grandes entreprises. Si on fait le compte, on peut dire qu'il y en a à
peu près 525. Cela veut donc dire que, pour 525 grandes entreprises, on
trouve 5200 ingénieurs et techniciens en recherche et
développement, donc, un ratio de 10 contre 1.
Quant aux 10 000 petites et moyennes entreprises du Québec, il y
en a au-delà de 4000 qui ont une incidence manufacturière. Nous
calculons qu'il y a peut-être 3000 de ces entreprises qui ont
réellement besoin d'un effort supplémentaire. Si on regarde la
force de recherche et de développement pour desservir ces 3000 petites
et moyennes entreprises, on trouve 300 ingénieurs et techniciens. On les
trouve où? Au Centre de recherche industrielle du Québec et dans
les facultés de génie et de sciences pures des
universités. Si vous faites le ratio, vous vous rendez compte qu'il y a
un ingénieur ou technicien expérimenté en recherche et
développement par dix entreprises, tandis que dans les grandes
entreprises le ratio est à l'inverse, c'est-à-dire 10 contre 1.
Cela veut donc dire que, si vous faites le ratio total, vous allez en arriver
à un ratio de 1 contre 100.
Bien sûr, si vous regardez les petites et moyennes entreprises qui
constituent la clientèle cible du CRIQ, on se doit de faire des efforts
sérieux dans ce sens-là. C'est pour cela qu'on définit
toujours le Centre de recherche industrielle comme étant le centre de
recherche et de développement corporatif des entreprises, en fait, des
petites et moyennes entreprises. On considère les petites et moyennes
entreprises comme des filiales, si vous voulez, au point de vue du Centre de
recherche industrielle du Québec.
La mission du centre n'a pas changé. Évidemment, cela doit
évoluer dans le temps, mais la mission du centre est toujours la
même: aider l'entreprise manufacturière du Québec par la
recherche, le développement et l'information technologique. Vous savez
que, dans les entreprises, la première chose dont on a besoin, c'est de
l'information technologique. Donc, on doit informer ces entreprises, et ce
service est gratuit. On doit faire passer les entreprises à l'ère
1980. La clientèle cible du centre étant les PME, beaucoup de ces
entreprises sont encore à l'ère artisanale. Évidemment, il
y a toujours de la place pour l'artisanat, mais de moins en moins, dans le
monde moderne. On doit faire des efforts sérieux dans ce
sens-là.
Au point de vue global, dans les statistiques, vous allez vous rendre
compte que 53% des emplois au Québec sont précisément dans
les petites et moyennes entreprises qui réalisent, si on peut dire, 50%
des revenus et 50% du produit intérieur brut. C'est ce qu'on appelle la
loi du 50. 50% des employés contribuent pour 50% des revenus et 50% du
produit intérieur brut. Il n'y a pas de doute que le CRIQ est un levier
important dont l'État dispose pour assurer le développement
industriel du Québec.
Est-ce qu'on réalise, par exemple, que 80% des produits de
consommation qu'on trouve en 1980 ou 1981 seront complètement disparus
du marché en l'an 2000? Si on calcule qu'au Québec on a 10 000
entreprises manufacturières, ces entreprises doivent faire des
innovations rapidement. L'innovation, c'est un processus assez complexe parce
que l'innovation, ce n'est pas juste l'idée - l'idée, c'est le
brevet - c'est le développement, c'est la mise en marché. C'est
un processus complet. Très peu des petites et moyennes entreprises
peuvent réellement se lancer dans l'innovation et on parle de plus en
plus de l'innovation parce que c'est une nécessité des
années quatre-vingt. On se doit de fournir à ces entreprises le
moyen d'innover.
Si on fait le bilan des cinq dernières années, le Centre
de recherche industrielle a complété pour les entreprises 2000
projets de recherche et de développement. Si vous faites la moyenne pour
l'année, c'est 400 projets par année ou deux projets par jour
ouvrable ou à peu près. Il y a des projets de quelques centaines
de dollars et on en a jusqu'à 750 000 $. Vous voyez qu'on couvre
une gamme assez vaste d'intervention du côté de la
recherche et du développement.
Du côté de l'information technologique, je vous mentionnais
que c'est aussi la mission du Centre de recherche industrielle du
Québec. Le Centre de recherche industrielle du Québec est
très bien organisé au point de vue de l'information
technologique. C'est possiblement l'organisme par excellence au point de vue de
l'information technologique au Québec. Nous avons des employés,
à Ottawa, rémunérés par le centre de recherche, qui
travaillent à la Bibliothèque nationale, afin qu'on puisse avoir
des documents très rapidement.
Au cours des cinq dernières années, on a répondu
à 25 000 demandes d'information technique de toutes sortes aux
entreprises. On a fourni 65 000 documents techniques de toutes sortes aux
entreprises. On a desservi 1400 clients. Entre autres, on a publié un
nombre incalculable de documents, en particulier le Répertoire des
produits fabriqués au Québec, que vous connaissez certainement.
Il est employé par les entreprises gouvernementales, par le Service des
achats et aussi par les entreprises en général. Cela devient, ni
plus ni moins, le petit catéchisme ou la bible des acheteurs dans les
entreprises.
On a aussi pris des actions, au cours des dernières
années, pour avoir des effets multiplicateurs. On a, entre autres,
signé des ententes avec les universités,
précisément l'Université Laval, l'Université de
Sherbrooke, l'École polytechnique, l'INRS, l'Institut national de la
recherche scientifique, afin de créer ce que je vous mentionnais l'effet
multiplicateur.
Le Centre de recherche industrielle a eu une croissance de l'ordre de
70%, il y a deux ans, et de 50% cette année. Si vous regardez le
contexte économique actuel, c'est excellent, mais on fait surtout du
développement. Mais, dans tout développement sérieux, il y
a toujours une phase où on se doit de faire un peu plus de recherche
fondamentale. On ne multiplie pas à l'infini le personnel du Centre de
recherche, parce que la dotation du CRIQ, ce n'est pas pour créer des
emplois au centre de recherche, c'est pour créer des emplois dans les
entreprises.
Pour revenir à ce que je mentionnais -l'effet multiplicateur -
ces ententes avec les universités nous permettent d'avoir accès
à des spécialistes. On peut donc donner certains contrats de
sous-traitance - et on le fait régulièrement - de façon
qu'on puisse avancer rapidement les dossiers sans augmenter indéfiniment
la force de frappe ou le personnel du centre. C'est d'autant plus
nécessaire étant donné que la vocation du centre est
d'aider par tous les moyens possibles les petites et moyennes entreprises,
clientèle cible, mais cela n'exclut pas les ministères et les
grandes entreprises. Nous travaillons pour Reynolds. Nous travaillons pour
Alcan. Nous travaillons aussi pour CIL. Nous avons travaillé pour Union
Carbide. Ce sont de grandes entreprises qui ont des centres de recherche, mais,
par contre, nous avons des expertises particulières dans certains
domaines. Donc, on fait affaires avec le service du centre.
Ces effets multiplicateurs sont bénéfiques et cela nous
permet aussi une autre chose, c'est de faire la valorisation industrielle de la
recherche universitaire. On sait qu'il se passe des choses fort
intéressantes dans les universités. Le problème est de
trouver preneur au niveau des entreprises. Évidemment, les
universités ne sont pas mandatées, elles ne sont pas
équipées pour faire ce genre d'ouvrage. Nous prenons les
idées qu'on retrouve au niveau des universités et nous trouvons
preneurs. Nous l'avons fait avec le blé LAVAL-19, nous l'avons fait avec
l'orge SOPHIE - je vous donne des exemples à ce moment-ci. Nous venons
de signer une entente pour la fabrication sous licence d'un filament.
Malheureusement, on n'a pas pu localiser un fabricant au Québec. On a
signé une entente avec une entreprise de Boston qui distribue au niveau
mondial. Cette entreprise permet de produire des fonds au centre. Produire des
fonds, comme je l'ai dit à M. Wildi, cela permet au Centre de recherche
industrielle de financer des universités.
M. le député d'Outremont mentionnait tout à l'heure
7 000 000 $. Cela, était pour l'année 1980-1981. L'année
1981-1982 a été une année de réflexion à
cause des raisons que tous connaissent. Le gouvernement nous a donné 7
500 000 $ pour l'année qui vient de se terminer. Si vous regardez le
taux d'inflation de l'an dernier, à peu près 1% par mois, 12%,
effectivement, on aurait dû avoir un montant plus élevé que
7 500 000 $, seulement pour tenir compte de l'inflation. Malheureusement,
étant donné que le plan quinquennal a retardé, on nous a
donné ce qui avait été prévu aux crédits du
ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, 7 500 000 $. Avec
ces 7 500 000 $, nous avons dû absorber des dépenses
extraordinaires, c'est-à-dire que maintenant nous sommes responsables
des bâtisses. Nous avons à payer le chauffage, l'éclairage
et les taxes. Vous savez tous combien cela coûte par les temps qui
courent. Nous avons dû aussi absorber une partie de la publication du
répertoire qui nous a coûté 250 000 $. Le ministère
nous a donné 30 000 $. On a absorbé 220 000 $. On pourrait
continuer et vous donner bien d'autres chiffres. On a dû aussi absorber
les augmentations de salaire et vous savez que les augmentations de salaire
dans la fonction publique l'an dernier ont été de l'ordre de 19%
ou à peu près. Le centre de recherche, ayant donné une
augmentation moindre l'année précédente, a dû
accorder, à la demande du trésor, un forfaitaire de 3%. Si vous
prenez ce chiffre, on est à peu près à 19% d'augmentation
des salaires, parce que nos salaires étaient trop bas, tout cela avec
500 000 $. Finalement, nous avons pris des mesures draconiennes. Ce n'est pas
mauvais, à l'occasion, d'avoir une période de réflexion,
cela permet d'effectuer une restructuration, jusqu'à un certain point,
afin d'augmenter l'efficacité. (10 h 45)
Dans les centres de recherche, pour ceux qui ont déjà
travaillé dans le domaine, il y a de grands ratios, c'est-à-dire
le ratio de la masse salariale par rapport au budget de fonctionnement et le
ratio d'occupation du personnel. Étant donné que dans un centre
comme le nôtre nous sommes multidisciplinaires, ce n'est pas toujours
facile de distribuer le travail équitablement parmi les individus parce
que chacun a une spécialité assez particulière. Nous avons
réussi à augmenter le taux d'achalandage, nous sommes maintenant
rendus au niveau de 52,7%. Les taux dans les centres de recherche, quand on
parle de 45% à 50%, c'est un grand maximum. Il faut s'entendre, il
s'agit du taux d'achalandage sur des commandites, c'est-à-dire des
contrats où le centre retire de l'argent.
Évidemment, pour travailler pour les entreprises, surtout dans
les présentes années où la technologie avance rapidement -
par exemple en électronique, où il y a un renouveau tous les
trois ans - on se doit de faire beaucoup de travaux internes de façon
qu'on puisse aider les entreprises avec des méthodes modernes et des
technologies de pointe et non pas avec des choses de nature
désuète.
Tout cela nous amène à ce dont on parlait tout à
l'heure: 85 000 000 $ pour cinq ans, ce sont de gros sous, je vous le
concède. Notre demande originale était de 114 000 000 $.
Même à 114 000 000 $, nous avions été
"conservateurs". Évidemment, il faut toujours parler de l'indexation,
tout cela, et aussi des nouveaux mandats qui ont été
confiés au CRIQ. Par exemple, pour l'année 1982-1983, nous avons
l'intention de dépenser, pour les petites et moyennes entreprises, 5 500
000 $. Pour les grandes entreprises et les ministères, 900 000 $, disons
approximativement 1 000 000 $.
Le savoir-faire. Jusqu'à cette année, le gouvernement, de
par sa dotation, n'allouait pas au CRIQ un fonds pour le savoir-faire. Je viens
de mentionner il y a quelques instants que les produits de 1980, en l'an 2000,
on en retrouvera seulement 20% sur le marché. Donc, on se doit de
subventionner certains travaux de recherche interne afin de pouvoir avancer
l'affaire. On a 2 000 000 $ à cet effet. Je vous donne un exemple. Pour
la gazoline synthétique, le projet méthanol, dont vous êtes
au courant, les travaux de base ont été faits au CRIQ. Le rapport
présenté par M. Duhaime a aussi été
préparé par le CRIQ. Nous avons été les premiers au
Canada à préparer de la gazoline synthétique à
partir des résidus agricoles ou des résidus forestiers.
La recherche prioritaire. Nous avons une enveloppe de 9 800 000 $,
disons 10 000 000 $ pour cinq ans, 300 000 $ cette année en augmentant
jusqu'à 4 000 000 $ en 1986-1987. Vous êtes au courant du
programme du gouvernement en biotechnologie. Vous savez qu'il y a des choses
à faire en micro-électronique, il y a des choses à faire
en reboisement forestier ou en exploitation rationnelle de la forêt. Il y
a une enveloppe de recherche prioritaire, c'est-à-dire des recherches
à la fine pointe de la technologie, que nous ferons conjointement avec
les universités par le biais de nos ententes. Dans ce plan quinquennal,
nous allons sous-traiter avec les universités jusqu'à 50% de
cette enveloppe, c'est-à-dire 5 000 000 $ aux universités sur une
période de cinq ans. Évidemment, à ce moment-ci, nous
allons encore chercher un effet multiplicateur en travaillant conjointement
avec le Conseil national de la recherche et d'autres organismes
fédéraux et provinciaux afin de tenter de maximiser ces
dépenses.
Du côté de l'information gratuite, toutes les entreprises,
comme je le mentionnais, ont besoin d'information gratuite. C'est la
première chose dans une entreprise, vous devez vous informer.
Étant donné que la révolution technique s'accentue, c'est
de plus en plus difficile pour les entreprises de s'informer. Les informations
sont extrêmement difficiles à obtenir. Je mentionnais que le CRIQ
a certainement le centre d'information technique le mieux structuré au
Québec. Par notre dotation, on nous demande de rendre des services
gratuits pour un montant de 7 500 000 $ sur cinq ans. Cela comprend un service
de répondeurs téléphoniques dans tout le Québec,
service par lequel les entreprises peuvent appeler gratuitement au CRIQ et
grâce auquel on peut leur préparer des mini-dossiers gratuitement,
jusqu'à concurrence de 15 heures d'ouvrage.
On a les immobilisations courantes. Évidemment, la technologie
s'améliorant, on doit aussi avoir des méthodes un peu plus
modernes, donc on doit faire des immoblisations courantes. Par immobilisations
courantes, j'entends les nouveaux équipements, mais j'entends aussi le
remplacement de certains équipements qui sont désuets. Je
mentionnais que, dans l'électronique, il y avait un changement
technologique à toute les périodes de cinq ans, cette
période est maintenant rendue à trois ans. Quand vous avez des
équipements
qui datent de dix ou douze ans, c'est-à-dire dès le
début du centre de recherche, alors que le département
d'électronique était situé à Sherbrooke, vous
pouvez comprendre qu'on doit moderniser un peu notre équipement.
On a aussi un fonds de roulement qu'on doit reconstituer. Étant
donné que cette année a été une période de
vaches maigres, dans le fonds de roulement, cette année, on a
prévu 2 595 000 $, pour arriver à un total d'à peu
près 13 400 000 $. Au moment où vous aurez la copie du plan
quinquennal, vous pourrez voir tout cela en détail.
Pour les années à venir, nous conservons exactement la
même mission, parce que je pense que c'est une mission fort louable, qui
a résisté à trois gouvernements: unioniste, libéral
et péquiste. Je pense que nous devons encore oeuvrer dans le même
domaine, mais nous devons accentuer nos efforts dans certains domaines que
j'aimerais vous mentionner brièvement.
Pour les actes de développement, évidemment, on s'inspire
toujours des documents Bâtir le Québec et Projets collectifs; il y
a un autre tome du document Bâtir le Québec qui doit être
publié bientôt et sur lequel on a passablement travaillé;
il y a le document sur la biotechnologie auquel le CRIQ a contribué
largement. Je répète que ce qu'on se doit de faire, c'est le
développement et l'utilisation des technologies nouvelles, un
développement respectant les orientations des entreprises aussi bien que
celles du gouvernement. Donc, on ne peut pas ignorer les secteurs prioritaires
du gouvernement.
Deuxièmement, on veut élargir notre clientèle
cible. Actuellement, nous avons touché 1400 entreprises. Il y a 240 de
ces entreprises qui nous considèrent réellement comme leur centre
de recherche. Nous avons des contrats ouverts avec ces entreprises et elles
viennent chez nous comme si ça leur appartenait.
On veut aussi accroître la gamme des services offerts à la
clientèle, surtout du côté de l'information technologique.
Il y a actuellement une expérience pilote à Sherbrooke où
il y a un comptoir unique pour le ministère de l'Industrie, du Commerce
et du Tourisme. Nous participons à l'expérience, nous avons une
personne là en quasi-permanence, de façon à pouvoir
desservir la vaste région de l'Estrie.
Dans les technologies de pointe, évidemment, si on y regarde d'un
peu plus près, il y a le secteur agro-alimentaire pour lequel on doit
faire quelque chose. Il faut tenir compte des ressources naturelles du
Québec. Du côté de l'énergie, il y a des efforts
sérieux à faire, nous avons déjà commencé.
Vous avez probablement lu dans les journaux certaines expériences que le
CRIQ fait dans le domaine de l'emploi de la glace; j'ai parlé tout
à l'heure de la fabrication du méthanol, de la gazoline
synthétique, et j'en passe. Il y a tout le domaine du transport qui est
très important. Il y a les communications et l'électronique. Ce
sont des domaines où nous devons accentuer nos efforts. J'oubliais - et
je tiens à le mentionner - la biotechnologie, domaine où le CRIQ
devra être très actif, pas pour la biotechnologie pour
elle-même, mais afin de créer ce que j'appelle la bio-industrie,
parce qu'il n'y a pas de bio-industrie au Québec.
Évidemment, il faut commencer par avoir des experts en
biotechnologie. On en a déjà, le Québec possède une
bonne avance avec l'Institut Armand-Frappier; il y a des chercheurs
chevronnés à l'Université Laval, en particulier à
l'École de foresterie; l'Université McGill a une équipe
assez bien structurée et disciplinée. Nous devons mettre toutes
ces ressources ensemble, de façon à pouvoir former
réellement une bio-industrie au Québec. Je mentionne de plus,
à nouveau, que le CRIQ se montrera sensible aux priorités
sectorielles énoncées par le gouvernement et participera aux
efforts qui y seront consacrés selon l'évolution de la
conjoncture économique et politique. Tout cela s'inscrit dans la mission
du CRIQ de toute façon. On se doit d'aider les entreprises et
d'être à la fine pointe de la technologie.
Maintenant, la gestion de l'entreprise comme telle. Pour ceux qui
connaissent la petite et moyenne entreprise, il y a des problèmes
relatifs à la fabrication, au contrôle de la qualité et
aussi à la gestion. Si vous regardez l'aspect administratif, à ce
moment-ci, cela ne fait pas partie de la mission du centre de recherche, mais
on réalise souvent que les entreprises ont un problème concernant
la gestion administrative, si on veut faire la différence avec la
gestion technique ou technologique.
Nous nous devons aussi d'accroître la gamme des services à
la clientèle. On a l'intention et on a déjà
commencé à mettre en place un centre d'usinage des
matériaux et de technologie de la fabrication, ce qu'on appelle en
anglais CAT-CAM. En français, c'est le CAO-FAO, c'est-à-dire la
conception assistée par ordinateur et la fabrication assistée par
ordinateur. C'est employé dans les grandes industries. Cela a un cachet
particulier pour les petites entreprises, parce que cela permet une
diversité assez rare et une réaction assez rapide de façon
qu'on peut, pour des petites productions, employer cette technologie et
améliorer le contrôle de la qualité, par le fait
même, abaisser les coûts de production et permettre aux entreprises
de - permettez-moi l'expression -se tourner de bord assez rapidement dans un
monde où l'innovation est importante.
Pour ce qui est des énergies nouvelles, j'en ai parlé un
peu, on pourrait détailler.
On sait qu'au Québec on a l'hydraulique, l'eau. L'IREQ,
l'Institut de recherche en électricité du Québec, s'occupe
de cet aspect. Il y a tout le domaine des résidus forestiers, des
résidus de la ferme où il y a des choses extraordinaires à
faire avec le purin, le lisier, le fumier, des résidus de coupe de bois,
le reboisement. Ce sont tous des domaines dans lesquels on est
déjà actif et on veut accélérer le processus.
Vous avez beaucoup entendu parler de la technologie des robots. La
robotique industrielle, il faut vivre avec cette technique. C'est une
réalité de notre temps. Au Québec, il n'y en a presque
pas. La robotique industrielle est, à toutes fins pratiques,
inexistante. Alors, nous nous équipons aussi de système de robots
non pas dans le but de fabriquer des robots comme tels, mais de façon
à pouvoir appliquer la robotique à des industries pour des
applications particulières. On veut même pousser une pointe parce
que, quand on examine cela de plus près, on pense que la construction
des robots, c'est peut-être plus facile que de trouver des applications
pour les robots. On pourrait peut-être penser à spécialiser
une firme au Québec dans la fabrication des robots industriels.
Concernant les programmes de sensibilisation, je mentionnais tout
à l'heure, la publication des répertoires. Nous avons
publié, dernièrement, un répertoire sur les études
de marché qui ont été faites au Québec. Nous
publions annuellement un répertoire des entreprises privées. Nous
sommes en contact avec des firmes d'ingénieurs-conseils de façon
à faire front commun pour certains projets où des sommes d'argent
sont disponibles, à l'extérieur ou au gouvernement central, mais
que, malheureusement, les ingénieurs-conseils ne peuvent
réellement pas toucher pour la bonne et simple raison qu'ils ne sont pas
équipés de laboratoire pour réaliser la partie pratique
des travaux. Nous rencontrerons des ingénieurs-conseils, à la fin
de ce mois-ci, et on espère pouvoir mettre un programme en place
dès le début de l'année prochaine.
Quelque chose qui est intéressant aussi, c'est le transfert
technologique.
Personnellement, je dis que, dans les entreprises, la première
chose qu'on fait, c'est une copie intelligente. C'est ce que les Japonais ont
fait et on sait où ils sont rendus. Alors, les petites et moyennes
entreprises ont souvent comme idée - c'est peut-être une
idée fort louable - de réinventer parce qu'elles veulent
être uniques. Je me dis que la première chose qu'on fait, c'est
une copie intelligente, et on fait du "Reverse Engineering" - permettez-moi
l'expression anglaise - et on peut aussi faire l'acquisition de technologies de
l'étranger plutôt que réinventer. (11 heures)
On a un service qu'on appelle l'aide au développement
technologique aux entreprises. Nous nous occupons des inventeurs, de la prise
de brevet, de l'achat et de la vente du savoir-faire. On fait aussi - je l'ai
mentionné tout à l'heure - un certain nombre d'expériences
avec l'Université Laval dans la négociation et la conclusion
d'accord des licences. On veut accélérer au cours des
années qui viennent, parce qu'on en est encore à nos premiers
balbutiements dans ce domaine-là, même si cette année on a
marqué des points importants. Ce qu'on voudrait, finalement, c'est avoir
un portefeuille de licences et de brevets de telle façon qu'on puisse
créer des revenus pour le centre.
Le projet de loi no 50 qui est proposé mentionne aussi que nous
avons l'intention de donner plus de liberté au centre de recherche
industrielle de telle façon que le CRIQ puisse travailler sur certains
travaux de recherche et de développement payables par redevances, ou
royalties, sans nécessairement passer par décret. Jusqu'ici
chaque projet en participation ou chaque projet où les revenus venaient
de redevances éventuelles sur une production devait faire l'objet d'un
décret. C'est assez complexe parce que nous devons souvent saisir
l'occasion au moment où elle se présente. Évidemment, il
se passe toujours un certain temps avant qu'on présente un décret
parce qu'il doit passer par le conseil d'administration du centre de recherche,
il doit être envoyé au ministère de tutelle; finalement,
c'est un processus très long. Étant donné que nous avons
un comité de régie interne des cadres du centre, nous avons un
conseil d'administration dont les membres sont nommés par le
gouvernement et nous avons aussi un comité exécutif; nous sommes
donc assez bien structurés. Ces gens viennent du monde industriel, des
grandes et moyennes entreprises et le gouvernement est aussi
représenté par deux sous-ministres. Nous avons aussi le
Vérificateur général du Québec, étant
donné que nous sommes une société d'État; c'est une
société de services à but non lucratif et nous sommes
soumis à la loi.
Si vous regardez depuis le début du CRIQ, il n'y a jamais eu de
plainte ou de critique acerbe faite par le vérificateur à savoir
que le CRIQ aurait fait mauvais usage des sommes que le gouvernement lui a
fournies par le biais de sa dotation.
À ce moment-ci, messieurs, j'aimerais ajouter un petit
détail. Je mentionnais que le CRIQ était une
société de services à but non lucratif, mais ça ne
veut pas dire pour tout ça que nous ne devons pas faire d'efforts pour
nous autofinancer. Au début de mon introduction, je mentionnais qu'en
1976 100% des dépenses, à toutes fins utiles, sont venues du
CRIQ. Le seul revenu extérieur a
été de 275 000 $. Nous sommes maintenant rendus à
un taux d'autofinancement de 30% et on vise allègrement un minimum de
35%, c'est-à-dire une augmentation de 5%.
M. Biron mentionnait tout à l'heure que c'est un centre à
peu près unique et je suis parfaitement d'accord avec ça. Le
centre de recherche qui s'en approche le plus, c'est le TNO en Hollande qui a
plus de 50 ans d'existence. Il ne travaille pas pour les petites et moyennes
entreprises, il choisit ses entreprises de façon à maximiser ses
revenus et, malgré tout, il est en bas de 50% d'autosuffisance. Je pense
qu'avec une carrière comme celle qu'on a actuellement, étant
à 30% d'autosuffisance, c'est un signe du sérieux des troupes ou
des employés du CRIQ.
En terminant, j'aimerais ajouter que la province soeur, l'Alberta, a
demandé au CRIQ, au printemps dernier, de présenter un colloque
sur la recherche industrielle. Quand vous savez que le centre de recherche de
l'Alberta existe depuis 1921, qu'il a donc 60 ans d'existence, et qu'il demande
au CRIQ de lui préparer un colloque parce qu'il pense que c'est nous qui
avons la formule...
Hier, je parlais à un ministre du gouvernement de Terre-Neuve qui
m'appelait pour me dire: On veut faire quelque chose à Terre-Neuve pour
les entreprises. Est-ce que le CRIQ pourrait nous aider? Dans le contexte
actuel, ce n'est peut-être pas le temps, mais on pourra en reparler un
peu plus tard. Je le mentionne parce que ça prouve que le CRIQ est
reconnu par les provinces soeurs. J'ai eu l'occasion de présenter une
série de conférences en Belgique, la semaine dernière, sur
les sociétés d'État et, en particulier, la recherche
industrielle au Québec; nous avons été pressentis par des
pays africains, tout cela pour dire que peut-être on a une bonne
formule.
Nous demandons des sommes qui semblent astronomiques dans un budget
où il y a des compressions un peu partout, mais je ne pense pas que ce
que nous demandons est hors de proportion. C'est tout ce que j'avais à
dire à ce moment-ci, M. le Président.
Le Président (M. Rodrigue): Merci, M. Bertrand. M. le
député d'Outremont.
Questions et réponses
M. Fortier: J'aurais deux remarques, c'est-à-dire une
remarque et des questions qui vont porter, en premier lieu, sur les aspects
financiers, si vous n'avez pas d'objection. Ensuite, on pourra aborder d'autres
sujets.
Vous avez fait un bref rappel de tous les travaux dans lesquels vous
êtes engagés ou dans lesquels vous voudriez bien vous engager. Je
n'ai pas vu le plan quinquennal, mais il me semble que, lorsqu'on
prépare un tel plan, une des préoccupations - nous avons tous
été, chacun d'entre nous, impliqués dans une entreprise
à préparer de tels plans - est de déterminer les
priorités. Vous avez nommé tellement de priorités que je
me demande si vous en avez. Vous avez parlé de biotechnologie, de
reboisement, d'utilisation des résidus forestiers, de l'aide à la
PME manufacturière, de l'industrie du méthanol, de la gazoline
synthétique, de l'agro-alimentaire, de l'énergie nouvelle, de la
robotique, etc.
L'impression qui se dégage malheureusement de votre
présentation est que toutes les idées qui viennent de tous les
ministères se retrouvent au CRIQ et redeviennent autant de
priorités pour le CRIQ. Cela me semble extrêmement dangereux pour
un centre de recherche de vouloir répondre à toutes les
aspirations de tous les ministres parce que cela voudrait dire qu'en
définitive le CRIQ n'a pas de priorité à lui.
Si vous me le permettez, la question que j'aimerais vous poser a trait
aux finances. Je vais ensuite passer la parole à mes collègues
car je ne veux pas prendre tout le parquet. En examinant les états
financiers de 1979 à 1981, ce qui me frappe, c'est que, si on regarde
les dépenses totales de 1979 à 1981, elles ont augmenté de
4 000 000 $, une augmentation de 50% sur 1979. La direction
générale, elle, qui était de 483 000 $ en 1979, est
passée à 832 000 $ en 1980. C'est donc dire que, pour la
direction générale comme telle, c'est une augmentation de 100%.
Si vous le prenez différemment, de 1979 à 1980, si vous prenez
uniquement la direction scientifique, c'est-à-dire la section
mécanique, matériaux électroniques et ingénierie -
c'est la recherche et le développement, j'imagine -l'augmentation des
dépenses n'a été que de 17% alors que 1979 à 1980
la direction générale a augmenté de 50%. Si vous prenez
les mêmes chiffres pour 1980-1981, vous voyez que la recherche et le
développement n'ont augmenté que de 20%, alors que la direction
générale a augmenté de 33%.
Si, au moins, ceci avait donné une plus grande rigueur
d'administration, mais on s'aperçoit que vous avez un déficit de
fonctionnement pour 1980 de 8% sur les dépenses totales, sur les
budgets, et que vous avez, pour 1981, un excédent des dépenses
sur les revenus de 1 600 000 $, soit 16%. Pour une personne comme moi, qui
vient du secteur privé, je dois admettre que le budget de la direction
générale est un élément que je regarde constamment,
puisqu'il est toujours très difficile de se retrouver dans les autres
dépenses. Ceci est une norme de la rigueur de contrôle des
dépenses du CRIQ, à mon avis, et encore hier soir le premier
ministre faisait allusion au fait qu'il nous
fallait couper dans le gras. Je suis en train de me demander, à
la lumière des états financiers du CRIQ, si la direction
générale se préoccupe beaucoup de contrôle
administratif et de saine gestion financière, étant donné
que ses propres budgets augmentent considérablement, sans qu'on s'en
tienne aux budgets qui ont été votés. Ce qui est plus
grave, c'est qu'il semblerait, comme ceci se produit beaucoup dans des
organisations gouvernementales, que de plus en plus d'argent va à la
direction générale et de moins en moins dans des domaines
où on devrait faire remplir, justement, la mission propre au CRIQ,
c'est-à-dire la recherche et le développement. Autrement dit, il
y a une disproportion considérable, quoique les montants en jeu soient
moins importants, entre l'augmentation des budgets de la direction
générale et l'augmentation des budgets qui sont allés,
disons, à la recherche et au développement.
Les questions que je pose sont: Comment pouvez-vous justifier cette
augmentation de budget de la direction générale? Comment se
fait-il qu'avec une direction générale plus étoffée
et plus "fat cat", si vous me passez l'expression anglaise, vous n'avez pas pu
contrôler vos dépenses d'une façon plus stricte? Et comment
justifier ces augmentations extraordinaires par rapport, comme vous le dites,
aux autres dépenses que vous n'avez pas pu augmenter d'autant, puisque
vous avez des contraintes budgétaires comme tout le monde?
Le Président (M. Rodrigue): M.
Bertrand.
M. Bertrand (Guy): La première question. Quand je vous ai
parlé tout à l'heure de méthanol, de gazoline
synthétique, de résidus, tout ça c'étaient des
exemples que je donnais parce que cela s'inscrit dans la priorité
énergétique. On n'est pas à tous azimuts et on ne peut pas
courir 95 lièvres à la fois, parce qu'évidemment on doit
aller dans des choses particulières. Je donnais ça comme exemple
pour montrer le genre d'interventions que le CRIQ a faites dans le
passé.
Cela situe aussi le CRIQ au point de vue de sa capacité de rendre
service aux entreprises. Vous mentionnez l'entreprise manufacturière.
C'est évident que c'est une entreprise manufacturière. Je
mentionnais qu'il y a 10 000 entreprises au Québec. Il y en a 4000 qui
ont un aspect manufacturier et, d'après nos études, il y en a
3000 là-dedans qui ont réellement besoin d'une assistance
technique. L'assistance peut être dans tous les domaines. Cela peut
être en énergie. Cela peut être dans le contrôle de la
qualité. Cela peut être dans le coût de revient de la
production et différentes choses. Si j'ai donné l'impression
qu'on avait une gamme très large, il faut comprendre,
premièrement, que la mission nous dit que nous devons rendre service aux
entreprises, mais, à l'intérieur, on est très
sélectif parce qu'on est limité quant au personnel.
Maintenant, quant au budget, peut-être que M. Lupien peut dire
pourquoi les dépenses de la direction générale ont
augmenté. Moi-même, M. le député Fortier, je suis
issu du monde industriel, je suis parfaitement conscient que les
dépenses doivent être contrôlées. Depuis que je suis
au CRIQ, vous pouvez être assuré - peut-être qu'on pourra
fournir l'information - que j'ai diminué le nombre des cadres de 20%. Je
n'ai pas contribué à augmenter le nombre de cadres. Mais, par
contre, j'ai pris à la direction générale certaines
dépenses qui étaient ailleurs, de façon à pouvoir
les contrôler moi-même. Tout ce qui regarde les colloques, tout ce
qui regarde les grandes aventures, ça passe par mon bureau.
Forcément, l'argent qu'on a trouvé ailleurs, on le retrouve chez
nous. C'est simplement une procédure comptable de façon qu'il y
ait un meilleur contrôle sur la gestion.
J'ai l'expérience des grandes entreprises. J'ai
l'expérience des petites entreprises. J'ai l'expérience du monde
universitaire et des gouvernements fédéral et provincial, et vous
pouvez être sûr que, personnellement, je gère le centre de
recherche comme si c'était mon entreprise à moi. L'an
passé, mon impact était juste de cinq mois, disons, parce que je
n'étais pas directeur général avant, mais je peux vous
dire que j'ai mis des structures extrêmement sévères. Cette
année - évidemment, vous n'avez pas le rapport - l'augmentation
des dépenses d'administration est de 2,9%. Comme vous savez que le taux
d'inflation est de 13% ou à peu près, j'ai augmenté les
dépenses administratives de 2,9%, tout en acceptant des dépenses
que nous n'avions pas précédemment. Je vous mentionne, par
exemple, le RAMQ où M. Parizeau a augmenté. On doit payer pour le
RAMQ, le Régime d'assurance-maladie du Québec. Les taxes ont
augmenté. En dépit de tout ça, j'ai conservé un
taux d'augmentation de dépenses administratives de 2,9%.
Du côté du personnel, maintenant, l'an passé on
avait quelque 320 personnes. Nous sommes en bas de 300 personnes, même si
nous avons augmenté cette année notre chiffre d'affaires de 50%.
Au point de vue de l'efficacité, je pense qu'on a fait des efforts
sérieux. Je ne veux pas dire que mes prédécesseurs
n'avaient pas fait des efforts, mais il faut penser que c'est une entreprise
qui a dix ans d'existence en recherche. C'est encore une entreprise très
jeune. Il y a beaucoup de choses à mettre en place. Il y a beaucoup de
faux pas à corriger. Il y a beaucoup de mécanismes à
établir. Cela prend une certaine rigidité surtout quand on
gère des sommes d'argent qui ne nous appartiennent pas.
Je ne sais pas si M. Lupien a des renseignements. (11 h 15)
M. Lupien (Simon): Essentiellement, ce que M. Bertrand vient de
dire, c'est que les données qui ont été citées sont
celles de 1981 par rapport à 1980, ce qui correspondait à la
dernière année de la dernière période quinquennale.
La croissance des dépenses à la direction générale
comme dans les autres directions évoluait tel que prévu dans la
dernière période quinquennale.
En 1981, lorsque M. Bertrand est arrivé comme directeur
général, cela correspondait également à la fin de
la période quinquennale. On a eu aussi l'année de transition dont
M. Bertrand a fait état un peu plus tôt. Quant aux dépenses
de la direction générale cette année - pour
répondre précisément à la question de M. Fortier -
on vient juste de m'indiquer que les dernières données disent que
cela va être une augmentation de 3% à 5% par rapport à l'an
dernier, par rapport à ce chiffre. Comme l'indiquait M. Bertrand,
l'ensemble des dépenses dites administratives qui ne sont pas des
dépenses de la masse salariale, en 1982 par rapport à 1981, la
croissance a été de 2,5% seulement, malgré une inflation
d'environ 12% et des dépenses extraordinaires qu'on n'avait pas avant.
La réponse à cela, c'est que les croissances dont fait
état le rapport annuel de l'an dernier étaient telles que
prévues dans la dernière période quinquennale.
Il faut peut-être indiquer quant à la direction
générale - seulement pour renforcer ce que M. Bertrand a dit
tantôt - que beaucoup de gros postes budgétaires sont sous son
contrôle exclusif, mais la direction générale inclut aussi
la direction des communications, la publicité, etc., qui sont
imputées à la direction générale, mais qui
pourraient l'être dans une autre direction, exemple, la direction
commerciale, ce qui donne peut-être l'impression que les dépenses
de la direction générale sont élevées. Il y a aussi
les services juridiques et les services d'études économiques qui
sont sous la direction générale.
Je ne sais pas si cette réponse est satisfaisante.
M. Fortier: C'est tout à fait normal que les
dépenses de publicité soient là. Simplement,
d'après ma remarque, ces dépenses augmentent beaucoup plus
rapidement que les autres alors que les sommes d'argent devraient être
dépensées pour le but premier de l'existence du CRIQ.
Ma question supplémentaire indiquait que malgré le fait
que votre direction générale avait augmenté - donc, il y
aurait plus de substance - l'an dernier vous avez eu un déficit de 1 000
000 $ et je ne sais pas quel est votre déficit cette année, si
vous en avez un. Je parle de l'excédent des dépenses sur les
revenus. Autrement dit, j'imagine que le but de l'exercice est de ne pas
dépenser plus que les revenus qui vous sont alloués normalement.
Sinon on se leurre autour de la table en votant des budgets ici.
M. Lupien: II faut se replacer dans le contexte de la
dernière période quinquennale. Le centre avait de par sa loi une
dotation statutaire qui prévoyait un montant d'argent majoré de
500 000 $ chaque année. Il y était prévu à
l'époque, en 1976, que le centre se constituerait en début de
période un fonds de roulement ou une réserve assez
considérable. Ce n'est pas parce qu'on a de l'argent qu'on est
obligé de le dépenser. La croissance vient à un certain
rythme. On ne peut pas doubler à chaque année nos effectifs.
L'évolution de la dernière période quinquennale s'est
faite selon les prévisions de sorte qu'on avait des surplus
budgétaires importants la première, la deuxième et la
troisième année. Il était prévu qu'à la
quatrième et à la cinquième année il y avait des
déficits d'opération qui étaient compensés par une
présence de liquidités au fonds de roulement. Comme l'an dernier
aura été une année de transition et que le gouvernement a
versé au centre une dotation statutaire de 7 500 000 $, alors qu'une
dotation normale d'environ 9 000 000 $ aurait été
nécessaire pour maintenir le niveau d'activité, le CRIQ aura
cette année un déficit d'exploitation qui sera de l'ordre
d'environ 2 000 000 $ qui se traduira par un déficit de
liquidités - parce que la loi est retardée d'une année -
à la fin de la période, dans trois semaines, d'environ 1 200 000
$.
M. Fortier: Un déficit de 2 000 000 $ sur des revenus de
combien? D'environ 11 000 000 $?
M. Lupien: D'après les dernières données
préliminaires, les frais d'exploitation sont de 13 680 000 $. Les
revenus sont de 1 200 000 $ à 1 500 000 $ de moins, soit 12 424 000
$.
M. Fortier: C'est avec les immobilisations?
M. Lupien: Cela inclut les immobilisations.
M. Fortier: D'une façon générale, de quelle
façon faites-vous la computation des dépenses? Vous avez des
salaires. Est-ce que les salaires incluent seulement les avantages sociaux?
M. Lupien: La masse salariale, c'est...
M. Fortier: Je vois, par exemple, direction administrative.
Qu'est-ce que vous imputez là? Il y a certaines dépenses, mais,
si on prend les salaires, sont-ils majorés des avantages sociaux, des
fonds de retraite? Est-ce qu'en plus vous majorez ces dépenses d'un
facteur qui pourrait payer les pieds carrés? Est-ce que c'est
réparti dans toutes les dépenses comme telles?
M. Lupien: Oui, chaque direction, au prorata des pieds
carrés de plancher utilisés dans son budget, répartit le
coût de ces pieds carrés.
M. Fortier: Cela va être tout pour le moment.
Le Président (M. Rodrigue): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: J'aimerais, M. Bertrand, parler un peu de ce plan
quinquennal parce qu'on se retrouvera devant la nécessité de
faire le débat cet après-midi, semble-t-il. Au point de
départ, le projet de loi est décevant parce qu'on ne propose pas
de verser assez d'argent. Ces sommes sont insuffisantes tenant compte de
l'importance de l'exercice. On propose de verser 13 000 000 $ l'année
prochaine à une entreprise qui existe depuis dix ans. 13 000 000 $, ce
n'est pas beaucoup plus que ce qu'on gaspille pour l'office national, et c'est
la recherche industrielle au Québec qui est en jeu.
J'aurais été l'homme le plus heureux au monde si vous
aviez été obligé de venir ici, après dix ans
d'existence de cette entreprise, pour dire: MM. les députés, on
vous demande 50 000 000 $ ou 60 000 000 $ pour cette entreprise cette
année. Cela m'aurait démontré que pendant cette
période de dix ans on a accompli quelque chose de sérieux.
Autrement dit, je ne pense pas, dans la réalité, que le CRIQ soit
un levier important de l'économie du Québec. Si vous faites le
tour de la province et que vous parlez avec des hommes d'affaires de tous les
niveaux, je suis obligé de dire que le mot CRIQ ne vient pas aux
lèvres de tout le monde. C'est certainement quelque chose de positif,
une entreprise qui a accompli des choses intéressantes sur le plan
ponctuel, mais on ne peut pas dire qu'on a créé un autre Japon au
Québec sur la base de quelque chose qu'on a lancé il y a dix ans
avec beaucoup d'espoir, avec une somme, si ma mémoire est fidèle,
de 4 000 000 $ par année comme subvention du gouvernement.
Le Président (M. Rodrigue): M. le ministre.
M. Biron: Permettez-moi, M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce, de vous arrêter une seconde pour
déposer officiellement une copie du plan quinquennal qui vient
d'arriver.
M. Scowen: Je vais quand même continuer et on y
reviendra.
M. Biron: Continuez maintenant.
M. Scowen: On a commencé, en 1969, avec une subvention de
4 000 000 $. Si vous calculez ce montant en dollars réels, aujourd'hui,
j'ai l'impression que même la somme de 13 000 000 $ n'est pas beaucoup
plus élevée. D'après moi, le CRIQ n'a pas réussi si
on tient compte des espoirs de 1969 et de 1970, de l'importance de l'exercice
et de la nécessité de faire une concurrence mondiale dans le
domaine de la technologie et du développement des industries de pointe
au Québec pour que nos industries soient modernes et efficaces. Je suis
porté à dire que le CRIQ n'a pas marché. Le symbole de
cette faillite, c'est qu'on est obligé de siéger à cette
commission parlementaire aujourd'hui et de faire face à une demande de
seulement 13 000 000 $ pour l'année prochaine, alors que j'aurais
espéré que ce fût cinq, sept, huit ou dix fois plus
élevé, si on avait vraiment réussi. Je ne propose pas
qu'on approuve un budget dix fois plus élevé aujourd'hui parce
que c'est clair que nous n'avons trouvé ni le marché, ni les
structures nécessaires pour le verser. Vous avez mentionné
vous-même que jusqu'à récemment vous n'étiez
même pas capable de dépenser les sommes prévues dans la
loi.
Si je commence dans cette perspective, vous vous êtes certainement
posé cette question vous-même lors de la préparation du
plan quinquennal de développement. La question que je vous pose - je
n'ai pas encore eu l'occasion de lire ce rapport - est la suivante: Quels ont
été les problèmes, les erreurs qui ont été
faites par le CRIQ, pendant les cinq premières années de son
mandat, et qu'est-ce que vous avez proposé, dans le plan quinquennal,
pour les rectifier? En d'autres mots, parlez-moi un peu de l'avenir de la
recherche et du développement industriel au Québec, de son
importance, du rôle que le CRIQ doit y jouer. Donnez-nous quelque chose
de positif dans ce domaine. Que pouvez-vous nous dire pour nous convaincre que
le CRIQ peut jouer un rôle plus important, dans ce troisième plan
quinquennal, qu'il ne l'a fait dans les deux premiers?
M. Bertrand (Guy): Au départ, j'aimerais mentionner
à M. le député que, jusqu'en 1975-1976 - comme je l'ai dit
tout à l'heure - ce fut la mise en place de structures, la construction
de bâtisses, le recrutement de personnel-cadre et la définition de
notre mission. C'est en 1975-1976 que le centre a commencé a être
réellement actif; ce qui fait cinq ans et non
pas onze ans, premièrement.
En lisant le plan quinquennal, vous allez vous rendre compte que les
premières années ont été difficiles et c'est encore
difficile, parce que notre clientèle cible, c'est la petite et moyenne
entreprise, c'est-à-dire les entreprises qui, pour la plupart, n'ont pas
d'ingénieurs et pas de techniciens. Quand on parle de
développement, d'innovation industrielle, c'est du travail de
missionnaire qu'on fait, il faut les convaincre que c'est nécessaire
pour elles et ce n'est pas facile. Quand on a affaire aux grandes entreprises
-je mentionnais Reynolds, Alcan, CIL - il n'y a pas de problème, parce
qu'on parle avec des gens qui sont habitués à la recherche et au
développement, qui sont au courant du coût de la recherche et du
développement, qui sont au courant des échéanciers de la
recherche et du développement et qui sont aussi au courant des risques
de succès et d'insuccès de la recherche et du
développement. Mais, mettez-vous à notre place, vis-à-vis
d'un interlocuteur qui est une petite entreprise qui emploie quinze personnes
et à qui on parle de développement, de contrôle de
qualité, d'innovations, de design industriel, c'est réellement du
travail de missionnaire; ce n'est pas facile. Première des choses.
Mon deuxième commentaire est que, avec mon équipe, quand
j'ai préparé le plan quinquennal, évidemment nous nous
sommes posé bien des questions. Depuis 1976, nous avons un rythme de
croissance qui est assez rapide; on a eu un rythme rapide de croissance dans
les ventes, un rythme de croissance rapide dans les revenus propres de la vente
de nos services techniques et on a eu une croissance rapide dans la mise en
place de nos équipes, etc.
Je mentionnais tout à l'heure qu'il y a un centre de recherche de
l'Ouest qui vient nous voir; c'est cependant un centre qui existe depuis 1921.
Vous pourriez me dire: C'est peut-être parce qu'il a erré pendant
60 ans. Vous auriez peut-être raison, je ne veux pas critiquer ou en
discuter. Je peux vous dire qu'on pourrait me donner 200 000 000 $ ou 50 000
000 $ par année, je vous dirais que, à ce moment-ci, ce serait
une mauvaise dépense, parce que, à cause de notre taux de
croissance, on se doit d'asseoir nos structures, on se doit d'augmenter
l'efficacité, on se doit de faire des choses intéressantes. Je me
dis que, tenant compte de la capacité de payer de l'État et de
moi-même, comme contribuable, je me dois d'être raisonnable; si
j'avais beaucoup plus d'argent, je serais peut-être heureux, mais je le
dépenserais peut-être mal parce qu'il faut que j'assois mes
structures. On ne peut pas continuer avec un rythme de croissance de 20% ou 25%
par année, parce que ce n'est pas facile à l'intérieur de
la boîte.
Des erreurs? On a fait des erreurs, j'aimerais mieux vous mentionner mes
bons coups, mais je peux vous mentionner là où on a fait des
erreurs. Puisque vous me posez une question directe, je dois être franc.
On a fait des erreurs au moment où on a développé des
machines extrêmement sophistiquées pour des entreprises et on leur
a donné le droit exclusif de la machine, quand le but de la machine
était d'augmenter la productivité ou d'abaisser leur coût
de production. Mais, c'étaient des machines trop sophistiquées
pour que ça puisse être absorbé par la grosseur de
l'entreprise et par la qualification de son personnel. Par exemple,
développer une machine pour fabriquer des tiroirs d'une façon
complètement automatisée. Quand vous allez dans le secteur
manufacturier du meuble, que vous donnez cette machine unique à une
entreprise, le type presse le bouton, ça part, ça va bien, deux
heures après, il y a des pépins, parce qu'il s'agit toujours de
machines uniques, de prototypes. Ces gens, qui sont des artisans, des gens qui
sont habitués à faire des meubles en se servant de leurs mains
plutôt que de l'équipement sophistiqué, appellent le CRIQ
et disent: On a pesé sur un bouton; la planche est entrée dans la
machine et elle n'est pas sortie; qu'est-ce qu'on fait avec cela? Alors, il y a
de la programmation, de l'électronique, un peu toutes sortes de choses.
C'est cela des appareils sophistiqués. (11 h 30)
C'est une erreur de fabriquer une machine pour une entreprise où
le niveau de technologie est tel qu'on ne peut pas s'en servir d'une
manière efficace. Donc, formation de main-d'oeuvre, recyclage du
personnel. Ce n'est pas nécessairement notre rôle, mais on est
obligé de jouer ce rôle.
Par contre, on a déjà fait de la correction. On fabrique
des machines de productivité, mais pour des industries qui fabriqueront
ces machines pour être vendues aux entreprises susceptibles de s'en
servir pour la production, premièrement, sur le marché
québécois, mais cela n'empêche pas de vendre les machines
sur le marché extérieur. On a fabriqué, entre autres, une
machine pour le bois servant à la fabrication de fonds de chaise de
bois, que ce soit en érable, en pin, etc. Cette machine a
été vendue à une entreprise, que je nomme, Paul Sicotte,
dans le nord de Montréal. Ce dernier, à partir de notre
prototype, a fabriqué une machine, qui a été
exposée aux différentes expositions de meubles, et il a
présentement des commandes pour 45 machines. Alors, ces machines vont se
retrouver à Los Angeles, à Berlin, un peu partout. C'est le genre
de correction ou un palliatif, si vous voulez, à quelque chose qui
n'était peut-être pas bon. En fait, des machines uniques pour des
entreprises, comme je le mentionnais, c'est une erreur.
Deuxièmement, aller au-delà des mandats, c'est une erreur
qu'il n'est pas facile de corriger. Quand quelqu'un veut qu'on règle un
problème - c'est peut-être normal parce qu'il faut toujours
motiver nos ingénieurs chercheurs - on a toujours tendance à lui
donner une Cadillac quand il veut une Volkswagen. En d'autres termes, il faut
répondre à ses besoins, peut-être lui en donner un peu
plus, mais ne pas aller au-delà de sa capacité de payer et ne pas
aller au-delà de ses besoins réels. Il y a beaucoup de petites et
moyennes entreprises pour qui une machine semi-automatique est parfaitement
acceptable. Si on fait le calcul du coût de revient, on s'aperçoit
qu'une machine semi-automatique est beaucoup plus facile à faire
fonctionner. Si on oeuvre avec du personnel à prix moyen, cela nous
permet, au lieu d'avoir une machine complètement automatique, d'arriver
à un prix de revient qui est plus intéressant. Ce n'est pas de
fournir aux gens des choses dont, dans le fond, ils n'ont pas besoin.
M. Scowen: Laissez-moi vous poser une question très
spécifique. En 1975, j'étais membre du cabinet de Guy
Saint-Pierre, ministre à l'époque, et il était très
déçu du CRIQ. D'après lui, les projets du CRIQ
étaient conçus en fonction des intérêts ou des
rêves du personnel et ne tenaient pas compte de la réalité
industrielle. Alors, il a décidé d'envoyer M. Descôteaux au
CRIQ et de réorienter le centre vers l'industrie d'une façon
très directe, à presque devenir rentable. Il disait: Cherchez les
commandes pour des problèmes spécifiques au sein de l'industrie,
réglez ces problèmes et arrêtez de vous occuper de vos
rêves globaux qui ne mènent à rien, finalement. C'est clair
que ce changement de politique a eu un effet, selon les propos que vous tenez
ce matin.
Il est aussi possible que si on ne regarde que les problèmes
ponctuels, de jour en jour, de la compagnie Unetelle, de
Saint-Georges-de-Beauce ou d'ailleurs, on va perdre complètement le sens
de la perspective globale et on ne fera rien pour régler les
problèmes plus grands qui doivent nécessairement être
perçus dans un sens plus global que le problème spécifique
d'un homme d'affaires, sur une ligne de production spécifique.
Aujourd'hui, dans le plan quinquennal que vous avez soumis, est-ce que les
projets du CRIQ sont conçus plus ou moins exclusivement dans le sens de
régler les problèmes selon la politique de Saint-Pierre? Est-ce
que c'est en partie cela et en partie des programmes basés sur des
idées plus vastes comme, par exemple, la modernisation de l'industrie du
textile dans le sens global comme: Voici cinq ou six problèmes
généraux, dans le domaine du textile, sur lesquels il faut
travailler? Est-ce qu'il y a une combinaison des deux? Si oui, quel est le
pourcentage de l'un et l'autre?
M. Bertrand (Guy): Oui, M. le député, je suis
parfaitement au courant de ce qui s'est passé. En 1975, j'ai même
été consulté à plusieurs occasions par M. Guy
Saint-Pierre lui-même. J'étais à ce moment-là
vice-président de la recherche et du développement et directeur
général de la production à Bombardier. J'avais donc une
certaine expérience là-dedans. Je connaissais aussi le CRIQ parce
qu'un de mes directeurs était membre du conseil d'administration
à ce moment-là. Avant 1975, comme tout organisme naissant, on
cherchait de l'ouvrage. Parce qu'au départ vous n'avez pas de contrat et
vous avez du personnel. On s'est lancé dans certaines aventures ou
certains projets qui avaient pour origine les individus mêmes dans la
boîte. Quelqu'un disait: Si on veut aller dans le domaine du bois,
peut-être qu'on pourrait travailler dans tel domaine. Effectivement, les
projets ont pris naissance à l'intérieur. Mais si on veut
regarder le côté positif de l'affaire, c'est ça qui a
créé peut-être une certaine expertise au centre dans
certains domaines. Ce sont des projets nés à l'intérieur,
faute de commandites extérieures, parce qu'on commençait et on se
devait de solliciter une clientèle.
Vous avez mentionné tout à l'heure que vous vous promenez
encore au Québec et souvent on vous dit que l'on ne connaît pas le
CRIQ. C'est peut-être pour ça que vous voyez que le budget
d'administration est un peu plus gros. On a pris dans mon budget même le
contrôle de la communication, on se doit de communiquer. On fait partie
des associations de manufacturiers à peu près dans tous les
domaines au Québec. On essaie, autant que possible, d'être
présents aux conseils d'administration de façon qu'on puisse
influencer les entreprises dans certains domaines et qu'on puisse
peut-être régler des problèmes communs aux entreprises. Par
exemple: les scieries du Québec qui sont en difficulté. La
fabrication du bardeau au Québec qui est au point mort. On est au
courant parce qu'on siège au sein de ces associations.
Vous disiez que dans une perspective d'avenir on devrait s'attacher
à des problèmes à long terme. J'en suis parfaitement
conscient. C'est une de mes priorités. Je mentionnais que l'entreprise
au Québec est encore à l'ère artisanale et on se doit de
l'amener à l'ère moderne. Mais, pour l'amener à
l'ère moderne, il faut s'assurer qu'elle sera encore là dans
trois ou quatre ans. Donc, on se doit de régler les problèmes
ponctuels. Une entreprise qui a 25 ou 50 employés... Vous entrez
à votre bureau le matin, à 8 heures, le monsieur est là
qui attend et dit: Ma chaîne de production est paralysée, ce
matin, quelque chose ne
marche pas. Pouvez-vous m'aider? On ne peut pas lui dire simplement:
Ça ne s'inscrit pas dans les objectifs à long terme du CRIQ,
allez vous faire foutre et allez ailleurs. Il faut régler le
problème du monsieur. Même si on sait qu'à ce
moment-là c'est un cataplasme sur une jambe de bois, on lui permet tout
simplement de continuer sa production. Par contre, on réalise qu'il a un
problème plus profond que la solution immédiate qu'on essaie de
lui donner. On lui donne un remède, mais on ne règle pas sa
maladie. Alors on dit: II faudrait s'organiser pour travailler avec cette
entreprise-là pour régler son problème à moyen
terme, parce que, si on ne fait pas quelque chose, l'entreprise ne pourra pas
survivre.
Notre premier contact est souvent une action ponctuelle pour garder
l'entreprise vivante. On m'a reproché, à un moment donné,
d'avoir dit à un journaliste que dans toute société les
moribonds devront mourir de toute façon, alors laissons-les mourir.
Après l'avoir dit, c'est une autre chose.
C'est une source d'information, mais il faut, à moyen terme,
être capable d'offrir aux intéressés des solutions qui vont
leur permettre de concurrencer non pas sur le marché local, autour de
leur village, non pas autour de leur ville ou à l'intérieur de la
province, mais sur les marchés extérieurs. Je réalise que
les tarifs douaniers vont disparaître vers l'année 1987, alors le
marché des entreprises du Québec, ce n'est pas leur village,
c'est un marché international. On est parfaitement conscient de
cela.
M. Scowen: Juste une question très précise. Pour
les cinq prochaines années, quel pourcentage de vos ressources
prévoyez-vous consacrer pour résoudre des problèmes
ponctuels et quel pourcentage d'efforts pour régler les problèmes
plus conceptuels développés par votre propre personnel? C'est
l'équilibre que je voudrais comprendre.
M. Bertrand (Guy): D'accord, c'est la dernière partie de
votre question. Au cours des cinq prochaines années, quant au
savoir-faire, c'est-à-dire l'acquisition de technologies à
l'intérieur pour régler des problèmes à plus long
terme avec les entreprises, on a suggéré des cataplasmes pour
régler leur problème immédiat, on a 12 600 000 $
prévus pour ça. Dans la recherche prioritaire on a 9 800 000 $.
et 10 000 000 $ - c'est le chiffre que je vous avais donné tout à
l'heure - pour certains dossiers comme, par exemple, la bio-industrie au
Québec. Sur un budget de 85 000 000 $, on a 23 000 000 $ qui iront
à la technologie de pointe, si vous voulez.
M. Scowen: Qu'est-ce que vous prévoyez comme revenus
commandités pour les cinq prochaines années?
M. Lupien: 35 000 000 $. Le budget global qui sera
réajusté, compte tenu de ce que le gouvernement consent à
nous octroyer, prévoit des dépenses de l'ordre de 135 000 000 $.
Si vous mettez une dotation de 85 000 000 $ et peut-être 2 000 000 $ ou 3
000 000 $ qui est un fonds de roulement, la différence, ce sont des
revenus autonomes.
M. Scowen: Je vous remercie beaucoup, M. Bertrand.
Le Président (M. Rodrigue): M. le député de
Châteauguay... M. le député de Charlesbourg.
M. de Belleval: M. le Président, sur la dernière
remarque du député. J'essaie de comprendre et de vous suivre dans
tous vos chiffres. Je pense que c'est important, cela a trait aux remarques du
député de Notre-Dame-de-Grâce qui disait tantôt: Moi,
je suis déçu, je trouve que vous n'allez pas assez vite ou que
vous n'êtes pas allés assez vite durant les cinq ou dix
dernières années, si on veut.
Vous nous avez dit là-dessus: Les cinq premières
années ont été des années d'établissement,
de construction, de "trial and error", si on veut, d'essai et d'erreur, ce qui
est normal, je pense, d'une certaine façon dans une nouvelle entreprise
comme celle-là. Je n'en ferai pas reproche à l'ancien
gouvernement pour lui dire qu'il s'est trompé. Le député
de Notre-Dame-de-Grâce disait tantôt que Guy Saint-Pierre s'en
était rendu compte et qu'il avait essayé de remettre le bateau
sur les roues. Je pense que c'est normal quand on est une nouvelle
société et qu'on commence quelque chose de difficile.
Au bout de cinq ans, on a repris ni plus ni moins qu'un véritable
départ, compte tenu du fait qu'on vient de dire que les cinq
premières années ont été des années
d'établissement et de difficultés normales. Quelle a
été l'augmentation de vos dépenses durant ces cinq
dernières années, durant le dernier plan quinquennal? Je pense
qu'il y a eu quand même une espèce d'accélération
assez considérable durant les cinq dernières années. Je
regarde les chiffres que j'ai devant moi. Si on regarde le plan qu'on a devant
nous - on va essayer de se retrouver dans les chiffres - à l'annexe A,
prenons le dernier plan quinquennal, page A-9, tableau A-3, vous avez
dépensé quelque chose comme 43 000 000 $, si j'ai bien
compris.
M. Lupien: C'est cela.
M. de Belleval: Durant les cinq dernières années,
vous avez dépensé
43 000 000 $ et, si on regarde vos dépenses sur une base
annuelle, de 1976-1977 à 1980-1981, vos dépenses sont
passées de 5 700 000 $ à 12 000 000 $, c'est-à-dire une
augmentation d'environ 110%, si je comprends bien. C'est "tannant", on n'a pas
les pourcentages d'augmentation, on a juste des chiffres absolus. Nous, les
parlementaires, aimons bien fonctionner avec des pourcentages.
M. Lupien: Une croissance moyenne de 20% par année.
M. de Belleval: Bon. Vous avez une croissance moyenne de 20% par
année, ce qui est largement supérieur à l'inflation. Je
pense que cela démontre qu'il y a un effort important qui a
été fait durant les cinq dernières années. Est-ce
que, à votre avis -je vous pose la question et vous devez
répondre sans problème - vous auriez pu avoir un rythme
d'accélération plus grand, humainement parlant et productivement
parlant? Autrement dit, est-ce que le gouvernement a été un peu
chiche avec vous durant les cinq dernières années? Dites-le, si
c'est ce que vous pensez, il n'y a pas de problème. On va prendre notre
blâme là-dessus ou on va prendre votre avis, en tout cas.
M. Lupien: Très honnêtement, et un peu comme je le
disais à M. Fortier tantôt, le fait qu'on ait dû accumuler
un peu de liquidité en début d'année, c'est qu'on
n'était pas capable d'en prendre plus. Il ne suffit pas d'avoir un
paquet d'argent à dépenser. Déjà, une augmentation
d'effectifs et de dépenses d'une moyenne de 20% par année, cela
fait du monde à engager, du monde à entraîner, du monde
à loger et à faire travailler. Il faut comprendre que le tournant
que le CRIQ a pris en 1975-1976 est très important.
Indépendamment des cinq années précédentes, le CRIQ
a vraiment commencé du moins ce que vous connaissez aujourd'hui du CRIQ
- dans ces années-là. Il a fallu définir des
méthodes de travail, définir une clientèle, des
méthodes d'approche. Je pense que le CRIQ, au cours des six
dernières années, cinq en excluant la dernière, aurait
difficilement pu aller plus vite et je ne crois pas que le CRIQ pourrait
continuer à ce rythme indéfiniment. (11 h 45)
M. de Belleval: Le 20% par année, ce n'est pas
possible?
M. Lupien: Non, c'est pour cela que, quand vous aurez pris
connaissance du document, la proposition que l'on avait faite au gouvernement
en consultation avec le ministère de l'Industrie et du Commerce,
c'était une croissance qui se situait quelque part entre ce qu'on avait
connu et pas de croissance du tout. Il s'agit de modérer.
M. de Belleval: Cela m'amènerait au prochain plan
quinquennal, justement. J'aimerais bien aussi me retrouver dans les
chiffres.
M. Lupien: Si vous permettez, dans le document que M. Biron vous
a remis tantôt...
M. de Belleval: On a ce document-là. Le
développement quinquennal de 1981 à 1986.
M. Lupien: C'est ça. On vous a remis une feuille avec
cela. C'est que le budget a été révisé au mois de
juillet, compte tenu du décalage.
M. de Belleval: Vous avez fait une proposition, si j'ai bien
compris, au mois de février. C'est celle qu'on trouve dans le document
qu'on vient de nous distribuer.
M. Lupien: Oui.
M. de Belleval: À la page 29 de ce document, si je
comprends bien, encore une fois, et ceci comparé aux 43 000 000 $ de la
dernière période, vous proposiez, à ce moment, des
dépenses de 107 000 000 $ sur la prochaine période. C'est
ça?
M. Lupien: Le montant de 107 000 000 $ excluait sûrement
les immobilisations.
M. de Belleval: Non. Frais d'exploitation, immobilisation,
transferts industriels, 107 000 000 $. Disons que cela se compare aux 43 000
000 $ sauf, peut-être, transferts industriels. En tout cas. Pardon? Je le
sais bien, mais pour les fins de ma démonstration et pour reprendre
cela, parce qu'au fond on vient d'avoir une réponse claire, je pense,
compte tenu de l'étonnement légitime du député de
Notre-Dame-de-Grâce qui dit: Moi j'aurais bien aimé que ça
se développe plus vite. On a eu une réponse, à savoir que
cela aurait pu difficilement se développer plus vite.
M. Fortier: Est-ce que le député me permettrait une
question? Pour clarifier, j'aimerais poser une question au
député.
M. de Belleval: Allez-y.
M. Fortier: Je crois que le préambule du
député de Notre-Dame-de-Grâce est non partisan...
M. de Belleval: Le mien aussi.
M. Fortier: La question fondamentale n'était pas à
savoir si le gouvernement a été
chiche ou non. La question fondamentale était: Compte tenu des
besoins de développement industriel de la PME québécoise,
est-ce qu'on ne pourrait pas exprimer une certaine déception sur le
développement du CRIQ? Avec raison le CRIQ a dit: Si on avait eu plus
d'argent, on n'aurait pas pu le dépenser. La question fondamentale
était: Compte tenu des besoins d'industrialisation de la PME, qu'est-ce
qui fait que le développement du CRIQ n'est pas plus rapide? Je pense
que c'était ça, la question fondamentale.
M. de Belleval: Là-dessus, je suis tout à fait
d'accord avec le député de Notre-Dame-de-Grâce pour dire
que compte tenu des besoins, c'est évident que le CRIQ n'a pas pu
répondre à tous nos besoins, tous nos espoirs, peut-être,
de ce côté-là. Je voulais savoir si au-delà de la
théorie, au niveau pratique on avait pu aller plus vite. Je pense que
c'est important. Si cela avait été notre faute, si on avait
été chiche, s'il avait pu aller plus vite et qu'on n'avait pas
fourni l'argent, je pense qu'on aurait eu un certain blâme à
porter avec justice.
M. Bertrand (Guy); Avant que M. Lupien vous donne une
réponse sur votre question précise, j'aimerais ajouter quelque
chose sur la question, à savoir si on aurait pu aller plus vite. J'ai
mentionné dans mes remarques que si on avait essayé d'aller plus
vite, financièrement, on aurait fait une mauvaise dépense de
l'argent de l'État. Je m'explique. Dans la recherche - M. Fortier est
certainement au courant - et le développement au Québec, 70% des
gens sont des immigrants ou des anglophones. Il y a 30% des gens qui sont de
langue française dans la recherche et le développement. Ce sont
les dernières statistiques. On a de la difficulté à
engager du personnel. Je vois mal le CRIQ régler des problèmes
des petites entreprises francophones avec des gens qui ont des
difficultés à s'expliquer, à s'exprimer en
français. Je vous donne un exemple: un ingénieur
spécialisé en céramique. C'est très important parce
qu'au Québec il ne se fait pratiquement rien en céramique; on a
mis sur pied une couple d'usines, dont la Poterie d'art laurentien. On a
aidé les entreprises de Beauceville. Mais on vient d'engager quelqu'un,
cela nous a pris un an et demi à trouver un individu. Finalement, c'est
un Belge qui a enseigné à l'Université de Sherbrooke, qui
est complètement intégré au milieu.
Même si vous nous dites: Voici de l'argent, engagez 50 personnes,
je ne peux pas engager 50 personnes parce que ça prend des
compétences et des compétences, on ne les trouve pas dans le
chemin parce que pour aider les entreprises, on ne peut pas engager de jeunes
finissants de l'université. Cela prend des gens qui ont
déjà vécu dans l'entreprise. Les gens qui ont vécu
dans l'entreprise exigent un salaire, premièrement, c'est bien normal et
ce n'est pas facile à recruter. Donc, le recrutement est très
difficile. Si on veut engager quelqu'un, par exemple, je ne sais pas, moi,
comme agent commercial, à la dernière demande, on a eu 96
candidatures pour une personne. En énergie, par exemple, on ne trouve
personne. Quand on va chercher dans la biotechnologie, on n'en trouvera pas non
plus. Il va falloir qu'on les fasse former à l'université et
c'est tout un processus. On ne peut pas mettre la charrue en avant des boeufs.
C'est une évolution et on essaie d'accélérer le plus
possible. Je reviens à ce que je vous disais. J'avais demandé
plus d'argent. Je sais la capacité de payer de l'État, j'en suis
parfaitement conscient. Mais, d'un autre côté, je veux qu'il y ait
une bonne efficacité dans le centre de recherche, et ce n'est pas en
sortant de l'argent par les fenêtres qu'on va avoir une bonne
efficacité.
M. de Belleval: De toute façon, je suis d'accord avec vous
qu'il n'y a pas de raccourci, finalement, en matière de
développement scientifique et technologique et d'un appareil de
recherche pour une société donnée. Si on avait
commencé il y a 50 ans... Cela n'a pas été fait et on ne
peut pas aller plus vite que ce qui est possible techniquement et humainement.
Mais revenons au plan quinquennal qui s'en vient.
Si j'ai bien compris, votre demande, au 1er février 1981,
était de 107 000 000 $. C'est cela?
M. Lupien: Si vous me le permettez, M. de Belleval, ajoutez en
bas le petit carré qui parle de la recherche, incluant la recherche
industrielle. C'est le chiffre de 115 000 000 $ qu'il faut retenir, comme
dépenses, 115 953 000 $.
M. de Belleval: 115 000 000 $ un peu plus bas?
M. Lupien: C'est cela.
M. de Belleval: Ce sont les budgets d'exploitation, incluant la
recherche industrielle. Vous aviez demandé 115 000 000 $ et cela se
compare, par rapport aux 43 000 000 $ de la dernière
période...
M. Lupien: Sur 115 000 000 $, cela impliquait une dotation de 81
000 000 $.
M. de Belleval: Pour faire 115 000 000 $ de dépenses, vous
aviez besoin d'une dotation de 81 000 000 $?
M. Lupien: Et ceci excluait les
immobilisations extraordinaires.
M. de Belleval: D'accord, mais ceci étant dit, si je
regarde la période passée, 1976-1981, ce sont 43 000 000 $ qui
étaient votre budget, qui ont été vos dépenses au
total. Prenez le tableau A-9. C'est cela?
M. Lupien: Oui.
M. de Belleval: Donc, les 115 000 000 $ se comparent aux 43 000
000 $. C'est cela?
M. Lupien: Excluez, M. de Belleval, si vous voulez comparer, la
recherche industrielle, qui est une activité nouvelle.
M. de Belleval: Je veux bien croire, mais il reste qu'elle va se
faire quand même.
M. Lupien: Comparez-les à 107 000 000 $, dans ce cas, sur
une base comparable, grosso modo.
M. de Belleval: En tout cas, peu importe. D'accord, c'est cela.
Vous demandez donc plus que de doubler pendant cinq ans. Cela va faire un
rythme d'augmentation annuelle de plus de 20% par année.
M. Scowen: Je pense que c'est plutôt de l'ordre de 51 000
000 $ ou 52 000 000 $, parce que dans les chiffres des cinq dernières
années, vous n'avez pas inclus les immobilisations.
M. de Belleval: Oui, je les ai comptées. M. Scowen:
Oui?
M. de Belleval: Oui, les immobilisations courantes, 2 800 000 $,
à moins que vous vouliez dire les immobilisations extraordinaires,
c'est-à-dire la...
M. Scowen: Non, non, je parle des cinq dernières
années.
M. de Belleval: Non, elles y sont, les immobilisations. Regardez
à la page A-9.
M. Scowen: Quelle page?
M. de Belleval: La page A-9 du plan quinquennal qu'on vient de
nous donner.
Le Président (M. Rodrigue): M. Lupien.
M. Lupien: Pour maintenir la règle de trois simple, on
doit tenir compte du taux d'inflation. C'est ça, l'erreur. Nous avons
fait le calcul. Cela paraît astronomique, si on prend les 85 000 000 $
pour comparer, mais pour maintenir le CRIQ à son niveau
d'activités actuel...
M. de Belleval: Excusez-moi, M. Lupien. Je n'ai pas porté
de jugement de valeur. Je ne dis pas que c'est astronomique ou pas.
M. Lupien: Non, non, ce n'est pas une critique.
M. de Belleval: J'essaie d'avoir les chiffres. Est-ce correct de
dire que vous avez dépensé 43 000 000 $, en cinq ans, et que
maintenant vous voulez dépenser 115 000 000 $?
M. Lupien: C'est cela.
M. de Belleval: Bon, d'accord, ce qui fait une augmentation de
plus du double, plus accélérée, en fait, qu'au cours de la
période 1976-1981, si je prends les chiffres d'augmentation de
dépenses annuellement qui vont être plus de 20% par année.
C'était 20% durant les dernières années et maintenant,
cela va être quoi? 23% ou 24%? Avez-vous fait le calcul?
Une voix: Mettons 20%.
M. de Belleval: Environ 20%? Ce que vous proposiez au mois de
février, c'était de maintenir, à toutes fins utiles, le
rythme d'augmentation des dernières années, des cinq
dernières années.
M. Lupien: Oui, mais compte tenu d'un taux d'inflation
différent.
M. de Belleval: D'accord.
M. Lupien: La croissance sur les effectifs ne serait pas la
même. Les dépenses augmenteraient plus rapidement.
M. de Belleval: Si j'ai bien compris, ce plan n'a pas
été accepté par le gouvernement. Cette proposition n'a pas
été acceptée par le gouvernement.
M. Lupien: Elle a fait l'objet de nombreuses discussions et de
consultations et, finalement...
M. de Belleval: Cela n'a pas été accepté.
C'est cela, M. Bertrand?
M. Lupien: Non, je pense que ce plan a été
accepté dans ses grandes lignes.
M. de Belleval: Ce qui a été accepté, c'est
la feuille 2 qu'on vient d'avoir. C'est cela?
M. Bertrand (Guy): À ce moment-là, le plan
quinquennal qui avait été proposé au mois de
février l'an dernier était pour la
mise en place du nouveau plan qui aurait dû commencer l'an
dernier. On est à une période de transition où il n'y a
pas eu de plan quinquennal.
M. de Belleval: Pour 1981-1982?
M. Bertrand (Guy): Pour 1981-1982, on a eu les crédits du
ministère tout simplement...
M. de Belleval: C'est cela...
M. Bertrand (Guy): ... qui avaient été
proposés.
M. de Belleval: ... 13 688 000 $ et là, vous proposez pour
1982-1987, si j'ai bien compris, cette fois-là, 134 000 000 $?
M. Lupien: Le budget de dépenses. C'est cela.
M. de Belleval: 134 000 000 $ par rapport à ce qui
était, l'an dernier, à peu près de 115 000 000 $ plus les
13 000 000 $. Donc, au fond, vous aurez à peu près le même
montant.
M. Lupien: C'est la même chose. Ce budget contient tout
simplement les mêmes données que dans le document initial et on a
tout simplement indexé.
M. de Belleval: D'accord. Ce plan a été
accepté par le gouvernement?
M. Lupien: Avec modifications.
M. de Belleval: Cette feuille n'a pas été
acceptée. Quelles sont les modifications? Je pense que c'est important
qu'on les connaisse, sinon on ne discute pas de...
M. Biron: La contribution gouvernementale qu'on demandait sur
cette feuille était de 92 000 000 $ et ce qui est accepté, c'est
85 000 000 $ au maximum pour cinq ans.
M. de Belleval: C'est 85 000 000 $ au lieu de 92 000 000 $.
M. Biron: 85 000 000 $ sur une période maximale de cinq
ans.
M. de Belleval: Sur une période maximale de cinq ans. Mais
cela vous donne un budget total de dépenses à peu près
semblable?
M. Lupien: Comme le gouvernement nous donne 7 000 000 $ de moins
que ce qu'on avait demandé, on peut présumer que le budget de
dépenses global va être à peu près de 6 000 000 $ ou
7 000 000 $. Si la dotation gouvernementale constitue environ 65% des
dépenses du CRIQ, les dépenses totales vont peut-être
diminuer d'à peu près 10 000 000 $ sur la période.
M. de Belleval: D'accord. À votre avis, ce rythme
d'augmentation est-il raisonnable, est-il suffisant ou si vous aimeriez avoir
plus d'argent?
M. Lupien: Je vais laisser le ministre répondre.
M. de Belleval: Non, je ne parle pas au ministre, je parle
à M. Bertrand. Il a son opinion et vous avez droit à la
vôtre.
M. Bertrand (Guy): On parle de 20%, mais M. Beaudry tient compte
de la statistique qui prévoit l'inflation au cours des cinq prochaines
années, ce que ça vaut.
M. de Belleval: Quelle est votre prévision pour...
M. Bertrand (Guy): La croissance réelle, c'est 8%?
M. Beaudry (Richard): La croissance réelle est de 8% avec
un taux d'inflation moyen d'environ 11,5%.
M. de Belleval: 11,5% pour toute la période.
Le Président (M. Rodrigue): Pour les fins de
l'enregistrement des débats, si le monsieur qui est en arrière
veut répondre à une question, je vous demande de
répéter la réponse ou je demanderais au monsieur qui est
en arrière, qui vous accompagne, de donner sa réponse au micro.
Autrement, ce ne sera pas enregistré.
M. Bertrand (Guy): II s'agit de M. Richard Beaudry,
économiste au centre de recherche.
M. de Belleval: À votre avis, c'est raisonnable, c'est
correct, on ne pourrait pas aller plus vite?
M. Bertrand (Guy): On pourrait toujours aller plus vite, mais,
comme je vous le dis, on va forcément avoir des problèmes de
croissance. Si on avait plus d'argent, il y aurait toujours moyen
d'accélérer parce que les besoins sont là; ce n'est pas
parce que les besoins ne sont pas là. En allant plus vite, M. le
député, il faut réaliser qu'on a des problèmes
d'espace, de disponibilité de laboratoire et tout cela. Cela veut donc
dire des immobilisations extraordinaires qui n'ont pas été
prévues au budget parce qu'on avait demandé des immobilisations
extraordinaires d'à peu près 6 000 000 $. Ce que le
gouvernement nous accorde, par la loi proposée, c'est tout
simplement le financement de la dette. Si on agrandit ou qu'on fait quelque
chose, il faudra que quelqu'un se porte garant.
M. de Belleval: Ceci étant dit, je dirais que les
augmentations en termes réels de 8,5% par année, ce n'est pas
loin d'une croissance à la japonaise. Si on regarde le taux
d'accroissement réel, c'est fort. Àmon avis, c'est fort.
Le Président (M. Rodrigue): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: J'avais une question dans la même
lancée.
M. Dussault: M. le Président, vous m'aviez dit que
c'était mon tour de parole, mais pour une question additionnelle, je
suis d'accord.
Le Président (M. Rodrigue): C'est sur le même
sujet.
M. Fortier: C'est une question additionnelle.
Le Président (M. Rodrigue): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: C'est un sujet extrêmement important, toute la
question du développement du CRIQ. Ce qui nous intéresse, pour
être bien franc, c'est le développement du CRIQ, mais ce qui est
encore plus important, c'est le développement économique du
Québec. Je pense bien que c'est là qu'on s'en va. Sur ce plan,
j'aurais une question. Vous nous avez dit, bien sûr, et avec raison,
qu'avec les gens en place... Le député posait la question
à savoir si vous auriez pu faire mieux. J'imagine, connaissant ce genre
de bureau, avec des ingénieurs, avec des techniciens, c'est bien certain
qu'avec les gens qui étaient là, vous avez répondu que ce
n'aurait pas été possible de faire mieux. Je pense que c'est la
seule réponse qu'on pouvait donner.
Dans votre rapport annuel, vous dites que, parmi les 300 personnes, les
deux tiers sont des ingénieurs et des scientifiques. Étant
ingénieur moi-même - j'espère que le président, qui
est ingénieur, ne me contredira pas - je sais pertinemment que, pour
régler des problèmes de PME, très probablement des
techniciens feraient beaucoup mieux l'affaire que des ingénieurs. Comme
vous avez fait allusion tout à l'heure que des ingénieurs et des
scientifiques ont tendance à aller "high in the shy" et à
apporter des solutions beaucoup trop sophistiquées pour les besoins de
la PME, je me demande si vous êtes satisfait de ce ratio et si, dans
votre programme, vous avez des plans précis pour le modifier, pour aller
dans une direction où il y aurait peut-être moins de scientifiques
et d'ingénieurs, à moins que ce ne soient des programmes
extrêmement sophistiqués. Pour l'aide à la PME en
particulier, sachant que certaines PME se débrouillent très bien
et que souvent ce sont les gens dans, comme on dit, la "machine shop" qui font
de l'innovation, je me demande si le problème du CRIQ n'est pas
tellement un problème de budget, comme on vient d'y faire allusion, mais
si ça n'a pas été une prépondérance trop
grande à aller vers des ingénieurs et des scientifiques. (12
heures)
La seconde question que j'ai c'est à savoir si le CRIQ a
réellement un rythme de développement plutôt lent non pas
par rapport à ce qui se fait ou au budget, mais par rapport aux besoins
en développement industriel au Québec. Avez-vous fait des
propositions au ministre à savoir que ce serait
préférable, au lieu de vouloir développer le CRIQ à
tout prix - venant du secteur privé, vous comprenez ce que je veux dire;
j'imagine que vous n'avez pas tellement une attitude bureaucratique, vous aimez
bien que les choses se fassent - qu'on favorise des institutions comme celles
qui existent dans le domaine des pâtes et papiers ou même dans le
domaine de l'amiante, où il y a une contribution de l'industrie et une
contribution du gouvernement? Autrement dit, au lieu de vouloir absolument
développer le CRIQ à tout prix, est-ce que le gouvernement ne
devrait pas plutôt penser à des mini-centres de recherche, mais
qui seraient orientés vers des secteurs industriels très
spécifiques?
Ma première question avait donc trait surtout aux techniciens
vis-à-vis des ingénieurs.
M. Bertrand (Guy): Je suis content que vous posiez cette
question, parce que, moi, évidemment, je ne suis au CRIQ que depuis
1977, mais il y a une situation de fait que j'ai vécue alors que le
ratio techniciens-ingénieurs est de 123 ingénieurs ou
scientifiques et de 85 techniciens; parmi ces techniciens, évidemment,
on inclut les dessinateurs. J'ai demandé au directeur de la recherche et
du développement d'améliorer ce ratio dans son plan quinquennal,
parce que précisément nous avons maintenant des ingénieurs
chevronnés qui sont capables de diriger plusieurs équipes. Je
suis d'accord avec vous que, bien souvent, il n'y a rien de meilleur qu'un bon
technicien.
Donc, pour ce qui est de l'augmentation prévue du personnel, il y
a un taux de croissance de l'ordre de 6% par année, pour les cinq
prochaines années, mais ce sera surtout au niveau des techniciens,
pour
améliorer ce fameux ratio, parce qu'un ingénieur peut
s'occuper de plusieurs techniciens. Au début, avant mon temps, la
politique était que pour établir des structures de base solides,
ça prenait des ingénieurs chevronnés; maintenant nous
avons les ingénieurs chevronnés et on continue à prendre
de l'expérience avec les entreprises. Maintenant, pour agir plus vite au
niveau du pilotage, il n'y a rien comme des techniciens; pour aller
régler des problèmes sur place, il n'y a rien comme des
techniciens parce qu'ils travaillent régulièrement avec les
équipements. Cela a deux avantages, c'est que ça nous permet
d'employer les ingénieurs comme personnes-ressources et,
deuxièmement, ça nous permet d'améliorer notre ratio masse
salariale par rapport au budget total de fonctionnement. Cela coûte moins
cher.
Le Président (M. Rodrigue): M. le député de
Châteauguay.
M. Fortier: J'avais juste une deuxième question sur
la...
Le Président (M. Rodrigue): Je vais vous demander, parce
qu'il y a encore trois intervenants qui ont demandé à poser des
questions...
M. Fortier: Je m'excuse, je reviendrai tout à l'heure, je
l'espère.
Le Président (M. Rodrigue): Par la suite, si c'est
possible, je vous céderai la parole. M. le député de
Châteauguay.
M. Dussault: Merci, M. le Président. Je constate que
parfois on est bon pour l'Opposition, mais ça ne nous est pas
nécessairement rendu au centuple!
M. Fortier: Vous n'avez pas prouvé ça hier!
M. Dussault: J'y faisais un peu allusion, M. le
Président!
D'abord, je voudrais m'excuser auprès de nos invités du
CRIQ, j'ai dû m'absenter tout à l'heure, pour des raisons
indépendantes de ma volonté, et j'ai peut-être
manqué une partie de l'intervention que vous avez faite. Il se pourrait
donc que je retouche à une question que vous avez abordée et je
m'en excuse d'avance. Cela va aussi couper un peu avec ce qui vient
d'être traité, mais je pense que ce qu'a fait le
député de Charlesbourg est très appréciable, car je
pense que la question comme telle, qu'il a développée, n'avait
pas été touchée profondément et je pense que le
travail est fait maintenant.
Ce qui me préoccupe beaucoup, messieurs du CRIQ, c'est ce que le
CRIQ peut faire pour la PME. Vous avez fait allusion à la sous-traitance
tout à l'heure, je ne me rappelle pas si cela a été pour
des fins internes au CRIQ ou pour des besoins à couvrir, mais il me
paraît important que l'on se pose des questions relativement à la
sous-traitance. C'est un dossier dont le ministre de l'Industrie, du Commerce
et du Tourisme m'a rendu responsable, comme adjoint parlementaire à
l'Industrie, Commerce et Tourisme. Dans ce sens, je suis allé, au
début de janvier, pour quinze jours, en Europe de l'Ouest, en France, en
Belgique, en Hollande et en Allemagne; nous avions comme mission, d'une
façon exploratoire, de voir en quoi une bourse de sous-traitance pouvait
être un instrument intéressant à appliquer ici comme projet
pilote, sur la rive sud, comme cela avait été
suggéré, tel que cela avait été demandé par
le sommet économique de Montréal. Évidemment, nous avons
dû élargir notre mandat par la force des choses parce que la
sous-traitance ne se découpe pas comme cela en disant un
mécanisme, une bourse. Il fallait examiner l'ensemble de la question et
c'est ce que nous avons fait. Cela nous a amenés à examiner assez
en détail ce qu'est la sous-traitance et comment, là-bas, cela se
vit. Nous avons dû nous rendre compte, à plusieurs reprises,
qu'ils avaient dû, avec le temps, en arriver à la conclusion que
la petite et moyenne entreprise devait être guidée, suivie de
très près, soutenue par des structures. Évidemment, nos
structures et les leurs sont différentes. Alors, les comparaisons
étaient un peu difficiles à faire. Ici, il existe le CRIQ et,
à mon point de vue - je voudrais que vous me disiez si j'ai raison - il
me semble qu'il pourrait vraiment être d'un soutien très
précieux pour la petite et moyenne entreprise, particulièrement
celle qui fait de la sous-traitance. D'abord, les sous-traitants ne savent pas
nécessairement qu'ils sont des sous-traitants et il va falloir qu'ils en
prennent profondément conscience. On ne sait pas qui en fait. Il y a un
inventaire à faire. Le projet pilote sur la rive sud servira d'abord
à faire cette identification. Là-bas, on a constaté que le
soutien auquel elles ont droit amène rapidement, dans des moments de
conjoncture difficile sur le plan économique, les entreprises à
prendre conscience qu'elles doivent se poser des questions sur leur
transformation, sur leurs activités, particulièrement sur la
nécessité, tôt ou tard, de se convertir.
Est-ce que le CRIQ, à partir du moment où on aura
identifié, dans la région du sud - parce qu'on commence par
là -ceux qui font de la sous-traitance, pourra être d'un soutien
à l'égard de cette entité qui prendra naissance? On a
parlé d'un conseil régional de la sous-traitance. Dans quelle
mesure, le CRIQ pourra-t-il être utile
à cette réalité qui naîtra dès le
moment où on constatera que, sur le plan conjoncturel, par exemple, il
est nécessaire de poser des gestes très concrets de la part de la
petite et moyenne entreprise? C'est ma première question.
M. Bertrand (Guy): Je peux répondre. Le CRIQ, au point de
vue de la sous-traitance... Évidemment, on sous-traite nous-mêmes
pour certaines parties de nos activités, de façon à ne pas
augmenter inutilement nos ressources internes, d'une part. Deuxièmement,
les petites et moyennes entreprises - vous avez fait une tournée, vous
êtes parfaitement en mesure, peut-être mieux que moi, de le
réaliser - aiment à réaliser tout à
l'intérieur sans faire appel à des spécialistes de
l'extérieur. Alors, en se basant sur le principe que nul n'est mieux
servi que par soi-même, on ne va pas dans les endroits où on est
réellement spécialisé. Nous autres, on fait beaucoup
d'efforts là-dessus. Il y a des projets. Encore, dernièrement, on
a dit aux entreprises: Nous vous donnons un soutien, mais à une
condition bien expresse: vous ne ferez pas tout de l'intérieur; vous
allez aller à l'extérieur où il y a des
spécialisations, des expertises, et où vous allez avoir la
possibilité d'obtenir du travail de qualité à un prix pas
mal moindre que pour ce que vous faites chez vous. Si une entreprise fait tout
de l'intérieur, premièrement... Si on investit dans le
béton, on engage du personnel, on fait un contrat et, quand le contrat
est terminé, on est pris avec des bâtisses, des
hypothèques, des équipements et du personnel et pas de travail.
C'est très important que les petites et moyennes entreprises s'habituent
à travailler ensemble, de façon à constituer une bonne
banque de sous-traitance. On a déjà pas mal d'information dans ce
domaine, de façon qu'on puisse dire que c'est un projet fort
intéressant. Équipez-vous de telle partie; l'autre partie,
faites-la faire à tel endroit; vous pouvez vous occuper de la mise en
marché, de l'assemblage, etc., mais allez où les gens sont
spécialisés, de façon que vous ayez un produit de
qualité à un prix fort intéressant et que vous puissiez
concurrencer avec les marchés extérieurs. Cela nous
intéresse de participer à l'expérience.
M. Dussault: Donc, très concrètement, je voudrais
savoir si, par exemple, ce nouveau conseil, cet éventuel conseil de la
sous-traitance sur la rive sud, pourrait vous donner une commande et voir dans
quelle mesure la petite entreprise sous-traitante de la région fasse au
donneur d'ordre, comme Pratt & Whitney... Dans quelle mesure faudrait-il
penser conversion? Dans quelle mesure cette conversion est-elle possible dans
les entreprises existantes dans la région? On sait qu'il y a des
avantages à ce que le sous-traitant soit près du donneur d'ordre.
Concrètement, une telle commande pourrait-elle venir de la part de ce
conseil régional?
M. Lupien: Oui et on l'a fait déjà, de toute
façon. Souvent, on va aider une PME cliente à développer
ou à raffiner ses capacités de répondre à un besoin
de sous-traitance d'une grande entreprise. On pourrait nommer des cas, Poudrier
et Frères (nacelles) en est un, où on aide l'entreprise à
développer un produit pour être capable de faire une soumission
comme sous-traitant à une grosse entreprise comme Pratt & Whitney ou
n'importe quelle autre entreprise. On le fait déjà et ça
fait partie de la mission du centre et on va certainement continuer à le
faire.
Si vous faites une expérience pilote sur la rive sud de
Montréal, je pense - et M. Bertrand pourra le confirmer - qu'on est
absolument intéressé à participer à cette
expérience et à aider les entreprises à se conformer aux
normes et standards des grandes entreprises de façon qu'elles puissent
soumissionner sur des demandes de sous-traitance qui se ramassent toujours en
Ontario, ou ailleurs, parce que nos petites entreprises n'ont pas les moyens de
répondre ou de réagir rapidement.
M. Dussault: Je suis convaincu, messieurs du CRIQ, que vous allez
être mis à profit parce que c'est un besoin réel et que
cette prise de conscience, qui existe sur la rive sud particulièrement
et qui va s'élargir sur l'ensemble du Québec, va vous donner du
travail. Merci.
Le Président (M. Rodrigue): M. le député de
Mille-Îles.
M. Champagne: Merci, M. le Président. C'est avec beaucoup
d'intérêt que je viens entendre le président du Centre de
recherche industrielle du Québec, M. Bertrand. C'est avec beaucoup de
plaisir que j'ai entendu et lu votre rapport. Je voudrais faire certaines
observations. Si le CRIQ n'existait pas, je serais alarmé ce matin et je
pense que dans la situation actuelle, au point de vue économique, vous
êtes quand même un levier très important justement parce que
vous favorisez l'essor économique du Québec, vous soutenez et
vous stimulez le développement économique. C'est très
sécuritaire, au moment où on se parle, de voir un organisme qui
voit à défier les années 1980-1990 et, dans ce sens, je
pense qu'on arrivera à la concurrence pour autant qu'on soit aussi
innovateur. Plus on sera innovateur, plus on arrivera à concurrencer.
L'évolution, au point de vue technique, est très et trop rapide
et je pense que c'est une lutte, une marche qui
sera gagnée pour autant qu'on soit très innovateur.
Je veux donner un exemple. On a une faiblesse ici, au Québec,
dans le domaine du textile. Si le textile est faible aujourd'hui, on peut
considérer qu'au point de vue technique le vieillissement de la
machinerie, le vieillissement de nos techniques a été, je pense,
la principale raison de ces nombreuses mises à pied, de ce rythme
très lent dans le domaine du textile et de cette non-concurrence qu'on a
face à la concurrence internationale.
C'est pour ça que vous avez la justification de l'existence
même de votre centre dans ce sens-là. Je veux vous donner un
exemple pour faire ressortir... Je pense à M. Bombardier qui a eu le
génie créateur d'inventer un véhicule à chenilles,
d'inventer la motoneige. Qu'est-ce qui est arrivé avec cette industrie?
À cause d'une invention, cette entreprise a été des plus
dynamiques, a exporté ses produits et a aussi diversifié sa
production. Au moment où on se parle, on prévoit un contrat de 1
000 000 000 $ dans le domaine du transport en commun. On a l'exemple d'une
entreprise qui a fait preuve d'esprit d'initiative et voici ce que ça
donne. L'objectif de votre centre de recherche est celui-là, d'avoir de
l'initiative et le sens de l'innovation.
Si on regarde la région de la Beauce, c'est une région
où il y a beaucoup de dynamisme, où le taux de chômage est
le plus bas et on s'aperçoit que les Beaucerons sont ingénieux de
nature. C'est pour cela que c'est avec grand plaisir que je voyais la
présentation du projet de loi no 50, qui crée un plan quinquennal
et c'est pour cela que je vais y adhérer à 100%. (12 h 15)
Si on regarde aussi au Québec des entreprises comme Canadair,
c'est parce qu'il y a un prototype qui s'appelle Challenger, qui lui donne
quand même un essor, c'est aussi dans le domaine des moteurs que Pratt
& Whitney a connu aussi une grande expansion. Aujourd'hui, on doit exercer
le plus de concurrence possible pour arriver avec les autres pays
industrialisés, que ce soit le Japon ou les autres, en ayant recours
à un centre comme le vôtre, et c'est pour cela que, ce matin,
j'adhère fortement à la loi 50, qui sera discutée à
l'Assemblée. Merci beaucoup, M. le Président.
Le Président (M. Rodrigue): M. le député de
Shefford.
M. Champagne: M. le Président, je voudrais poser une
dernière question et il sera peut-être difficile d'y
répondre. Pourriez-vous nous donner une espèce de prospective, M.
Bertrand, dans le sens suivant? Comment votre Centre de recherche industrielle
du Québec pourrait-il, dans un avenir plus ou moins rapproché,
participer à la création d'emplois? Comment, vous, avec une
technique actuellement à l'étude, voyez-vous que cette technique,
avec son exploitation, puisse créer, dans telle industrie en particulier
- si vous avez un exemple, tant mieux - des emplois et donner un essor
économique soit à l'industrie ou à la région?
Pourriez-vous nous donner un exemple, s'il vous plaît, M. Bertrand? Vous
semblez avoir l'embarras du choix, cela me rassure.
M. Bertrand (Guy): M. Lupien mentionnait tout à l'heure
les nacelles aériennes, entre autres. Il ne se fabriquait,
jusqu'à récemment, aucune nacelle aérienne au
Québec. Or, on sait que des entreprises comme Bell Canada, Québec
Téléphone, Hydro-Québec et Hydro-Ontario en utilisent, de
même que tous les forestiers qui émondent les arbres. Ils ont
besoin de nacelles d'un type bien particulier, évidemment, à
cause de la présence des fils à haute tension. On parlait de
sous-traitance et cela rejoint à peu près le même ordre
d'idées. On a mis sur pied une entreprise à Victoriaville, on en
a fait le développement, on en a préparé tout le
système de gestion, tout le prix de revient, on s'est porté
garant de son premier contrat avec Hydro-Québec pour la fabrication de
38 nacelles. Bell Téléphone s'apprête à lui passer
un contrat. Cette nacelle est brevetée. Plusieurs aspects sont
brevetés. Entre autres, un aspect sécuritaire qui est
relié, disons, à l'angle en fonction du poids. Vous savez que
souvent ces véhicules basculent. Il y a un camion à incendie,
entre autres, qui est à peu près sur le même principe, qui
a basculé parce que les angles et les charges étaient trop
élevés. On a un système complètement
automatisé. On leur a montré comment préparer des
soumissions; en fait, on les a mis au monde. Ils ont eu à entrer en
compétition avec des entreprises américaines et ils ont
décroché des contrats. Les trois premiers prototypes ont
été livrés à Hydro-Québec, les tests ont
été faits, la réception a été enthousiaste
et dorénavant ce sera l'entreprise retenue par Hydro-Québec.
C'est un cas.
On pourrait vous donner le cas de Mentel qui est fort
intéressant, que vous avez dans votre revue ici. Mentel est une
compagnie située à Montmagny, qui était déjà
dans la fabrication de différents produits. On cherchait un produit
secondaire pour diversifier, en fait, la production. On a
développé des étagères mobiles qu'on emploie
aujourd'hui de plus en plus dans les bibliothèques afin de sauver de
l'espace. On a développé quelque chose qui est d'un type assez
particulier, qui est électromécanique, avec des contrôles,
de façon que vous ne puissiez pas rester coincé entre les
différentes étagères. M. Johnson est le président
de Mentel. Actuellement ce produit
est le premier produit de son entreprise. Elle le fabrique pour un
nombre incalculable d'entreprises dans le monde entier et ça marche
très bien dans la région très défavorisée
qu'est la région de Montmagny.
C'est précisément la même entreprise Mentel qui
voudrait se lancer, possiblement, dans la fabrication de robots industriels. Je
mentionnais que les robots industriels, on peut en trouver des applications,
mais on pourrait peut-être penser aussi à les fabriquer. M. Conrad
Johnson, qui est président de l'entreprise, est en discussion avec le
CRIQ actuellement pour voir s'il n'y aurait pas possibilité de se
lancer, étant donné qu'il a une bonne expertise et de
l'équipement hautement sophistiqué. Il pense qu'il y aurait
peut-être possibilité de se lancer dans la fabrication de robots
industriels. Un deuxième exemple. En regardant ici, vous allez
peut-être voir d'autres exemples, en consultant cette revue.
Le Président (M. Rodrigue): M. le député de
Shefford.
M. Paré: Merci, M. le Président. Je ne ferai pas
l'éloge du CRIQ, parce que cela a été suffisamment fait et
vous avez répondu en partie. Je vais vous poser trois questions rapides
qui demandent des réponses aussi simples, je pense. J'aimerais avoir des
précisions. Entre autres, on a dit tout à l'heure, c'est dans le
projet de loi, que cela vise à dispenser dorénavant le centre de
l'approbation du gouvernement. Vous avez parlé des étapes que
cela sauvait. J'ai pris en note les étapes, mais ce que j'aimerais
savoir, c'est le temps qu'on sauve maintenant.
Le Président (M. Rodrigue): M. Lupien.
M. Bertrand (Guy): Je vais demander à M. Lupien de
répondre. Il est plus au courant que moi du temps. Je crois qu'il a
mentionné le mot "frustration", mais on va parler du temps requis pour
obtenir des décrets.
M. Lupien: II n'y a pas seulement le temps. Un décret peut
être obtenu rapidement à l'occasion. Je dis à l'occasion,
parce qu'on ne peut pas toujours utiliser la procédure d'exception,
mettre la pression sur le sous-ministre, le ministre, tout le monde, pour avoir
un décret rapidement. C'est que l'obtention d'un décret
nécessite la préparation d'un document de support sur le projet
qu'il faut faire approuver par le conseil d'administration; il faut
préparer les documents pour le cabinet du ministre, que le ministre
aille expliquer cela à ses collègues. Finalement, le
décret revient. Tous les décrets qu'on a demandés on les a
toujours eus, mais il y a le facteur temps et le facteur énergie en
ressources humaines qu'il faut mettre de l'avant pour préparer toute la
paperasse qui va avec l'obtention d'un décret. Alors, comme le
mentionnait M. Bertrand au début de l'audience, à partir du
moment où on a un conseil d'administration qui est nommé par le
gouvernement, à l'intérieur de certaines limites ou à
l'intérieur d'un cadre de travail, le conseil d'administration peut
très bien autoriser la direction du centre à conclure tel type
d'accords qui sont essentiellement, comme vous le remarquerez dans le projet de
loi, des accords de type commercial, signer des contrats de licence, signer des
contrats en participation, etc. Les actions qui sont susceptibles d'engager
à long terme le centre et de l'engager financièrement demeurent
assujetties à l'approbation gouvernementale et nous croyons que c'est
tout à fait normal aussi.
M. Bertrand (Guy): Je pense que l'avantage vient plus
peut-être de notre côté à nous, parce que, quand le
décret est rendu sur le bureau du ministre, règle
générale, cela va assez vite, mais c'est la préparation
qui est nécessaire. Je mentionnais que, souvent, il y a des occasions
qui se présentent et on nous dit: Le CRIQ, voulez-vous embarquer, oui ou
non? Sinon, on va aller ailleurs. Si c'est un projet - cela ne veut pas dire
qu'il faut embarquer comme cela sans y penser - qui en vaut la peine, les
occasions, cela ne court pas les rues. Il faut savoir être opportunistes.
C'est dans ce sens que la loi va nous favoriser, évidemment, toujours
sous le contrôle de l'exécutif, du conseil d'administration et du
ministre de tutelle.
M. Paré: Donc, si je comprends bien, le temps, c'est vous
qui allez le monnayer, non pas en attendant qu'il revienne, mais par la
préparation des documents. La deuxième chose, vous êtes
évidemment au service de la petite et moyenne entreprise. On a
donné des chiffres tantôt. Vous avez travaillé beaucoup. Il
y a eu 1400 dossiers ou quelque chose comme cela, beaucoup de dossiers. Y
a-t-il eu une étude pour savoir à peu près, pour
évaluer... Les travaux que vous avez effectués, cela a
créé ou cela a sauvé combien d'emplois au
Québec?
M. Bertrand (Guy): M. Beaudry va répondre à cette
question.
M. Beaudry: Vous n'êtes pas sans savoir que le calcul d'un
impact économique de la technologie est quelque chose d'assez
particulier. Mesurer l'impact économique d'une machine qui peut
réduire le personnel d'une entreprise, en termes d'emplois, il est
évident que vous pouvez avoir des pertes immédiates dans
l'entreprise. Par contre, à l'opposé, vous pouvez aussi avoir
des
créations d'emplois dans d'autres entreprises par le fait qu'il y
a des effets d'entraînement, notamment en ce qui touche les
approvisionnements, la fabrication de produits et tout le reste.
Généralement, ce qu'on retient dans l'impact économique de
la technologie, ce sont des facteurs de rentabilité, soit
financière, soit sociale. Il est prouvé déjà que la
technologie a une rentabilité financière qui est de l'ordre de
25% pour les entreprises.
Ce qui est important - c'est ce qu'on retient surtout chez nous - c'est
la rentabilité sociale de la technologie et de tous les travaux de
recherche qui, celle-là, est évaluée à 50% au
moins. Cela veut dire que tout ce qui touche les aspects de la technologie se
traduit en termes soit d'accroissement de revenu, soit d'accroissement de
productivité, soit de baisse de prix, soit de mieux-être des
citoyens ou d'accroissement du PNB. Dans ce contexte, il est sûr que la
rentabilité sociale est acquise au départ.
Il reste qu'il y a certains projets qui, financièrement, ne sont
peut-être pas rentables, mais, socialement, ils conservent toujours leur
rentabilité. C'est dans ce contexte qu'il est surtout possible de
présenter l'impact économique ou les retombées sociales de
la technologie et des travaux qui se font généralement au
CRIQ.
M. Paré: Si je comprends bien, il n'y a pas
d'évaluation en chiffres qui a été faite.
M. Beaudry: II n'y a pas d'évaluation en chiffres qui a
été faite tant au niveau de l'emploi que des revenus comme tels
au Québec. Je pense qu'il est assez difficile de le faire. On a eu des
tentatives déjà avec certaines entreprises, notamment. Ce n'est
pas nous qui avons l'information, ce sont les entrepreneurs. Il est très
difficile d'avoir cette information de la part des entrepreneurs et les raisons
en sont bien simples. C'est pour des raisons syndicales, pour des raisons de
concurrence, pour ne pas divulguer de chiffres sur le marché, etc. Dans
ce contexte, même si on a de l'information, les industriels, souvent,
nous demandent de la conserver pour nous. Cela, c'est assez difficile en ce qui
nous concerne.
M. Bertrand (Guy): J'aimerais ajouter quelque chose sur ce que M.
Beaudry vient de mentionner. C'est quelque chose qui me passionne de voir ce
que nos interventions font en termes d'emplois ou de conservation d'emplois
dans certains cas. Ce n'est pas facile, comme on vient de le mentionner.
J'aimerais dire que, souvent, ce sont de petites interventions de quelques
centaines de dollars et, souvent, ce sont des interventions qu'on fait
gratuitement parce que ça ne vaut pas la peine de demander quelques
centaines de dollars, mais c'est très important pour les entreprises;
c'est aussi important que le développement d'une machine très
sophistiquée.
Je mentionnais aussi que les gens, souvent, arrivent chez nous le matin;
il y a un nombre incalculable d'individus qui ont des problèmes, qui ont
des pièces dans les mains et toutes sortes de choses. Ils nous disent:
Faites quelque chose, notre ligne est paralysée, ça nous
coûte 2500 $ l'heure et on ne sait pas quoi faire avec ça. Si on
ne peut pas régler le problème rapidement, est-ce qu'on pourrait
aller jusqu'à dire que cette entreprise pourrait faire faillite à
la limite? On peut juste poser la question, évidemment, étant
donné qu'on joue notre rôle et qu'on essaie de régler le
problème à la satisfaction de l'entreprise. Alors, le type part,
continue son travail. Mais est-ce qu'on peut dire, comme je le mentionnais,
qu'elle fera faillite à la limite? On ne peut pas le savoir, mais on
peut dire au moins qu'on aura contribué à conserver ces
emplois-là dans l'entreprise donnée.
Je sais qu'au ministère de l'Industrie, du Commerce et du
Tourisme, la direction générale de l'industrie a mandaté
une firme à Montréal pour essayer de voir l'impact
économique du programme OSE, de solidarité économique.
Alors, ils sont arrivés avec un genre de formule mathématique,
comme on en trouve souvent, où on a un nombre incalculable de facteurs
dont il faut tenir compte avec la pondération, et finalement vous pouvez
un peu tirer les conclusions que vous voulez. Alors, ce n'est pas
réellement facile, mais ce qui important, c'est l'impact peut-être
social. S'il y en a qui sont intéressés, il y a des rapports
américains qui existent; M. Beaudry pourra vous donner les
références.
M. Paré: Je vais vous poser une dernière question
rapide, parce qu'on me fait signe que l'heure avance. Bon, c'est sûr que
d'après le projet de loi le ministre est autorisé à vous
donner des directives, naturellement, sur l'orientation et les objectifs
gouvernementaux. En fonction de ce que vous avez dit tantôt, on
s'aperçoit que c'est exactement ça. Vous vous orientez vers cela
avec Bâtir le Québec, volet deux, et toutes ces choses-là.
Mais il y a un problème dont vous avez parlé tantôt, les
énergies nouvelles. C'est juste une question; je pense que vous pourrez
me répondre rapidement. Il y a un problème présentement
qui est le purin. Je veux en parler même si c'est un projet précis
parce qu'il va toucher tout le Québec. Il concerne en même temps
et le ministère de l'Agriculture, et le ministère de
l'Environnement, et le ministère de l'Energie et des Ressources. Vous
dites que vous avez déjà trouvé un moyen de fabriquer du
pétrole à partir des résidus, dont ceux-là.
Chez nous, il s'en fait des études aussi et des gens ont aussi
trouvé des machines qui sont déjà à l'essai et
utilisées. Tout ce que je voudrais savoir, c'est si ça se fait de
façon isolée ou si vous le faites en concertation et en
dialoguant avec ces gens-là, parce que j'ai l'impression que chez nous
chacun le fait de façon isolée. Je voudrais savoir si ça
se fait en concertation ou si vraiment dans tout le Québec chacun essaie
de trouver la solution au problème. (12 h 30)
M. Bertrand (Guy): Remarquez bien qu'il y a beaucoup d'individus
qui, faisant face au problème, essaient de le régler
eux-mêmes. On ne pourra jamais empêcher l'initiative des individus.
Mais nous, on a une concertation avec le ministère de l'Agriculture, une
concertation avec le ministère de l'Environnement, une concertation avec
la contrepartie fédérale. Il y a quelques spécialistes au
Conseil national de recherches qui ont travaillé une partie de leur vie
dans la digestion anaérobie qui permet de produire du méthane, du
gaz d'éclairage, des gaz de toutes sortes. En fait, ça vous
permet de produire du gaz pour remplacer le gaz naturel, si vous voulez, pour
faire brûler dans les chaudières, fabriquer des engrais. Tout
ça est fait selon une concertation pour autant qu'on est
concerné, mais on ne peut pas, évidemment, empêcher les
efforts individuels. Là, on a un projet conjoint qui est fait avec le
Conseil national de recherches, avec le CRIQ, avec les deux ministères
que je viens de vous mentionner et avec un producteur de porcs. Alors,
ça va être une expérience unique, laquelle est
subventionnée par les groupes que je viens de mentionner. Si ça
réussit, évidemment, cette technologie pourra servir
éventuellement. Maintenant, cette technologie-là n'est pas
développée en vase clos. On a regardé les
expériences qui ont été faites dans l'Ouest canadien, on a
regardé les expériences qui ont été faites dans les
Carolines et en Virginie où l'élevage de porcs est assez
élevé et on a aussi considéré l'expérience
hollandaise, entre autres. Tout cela s'inscrit dans un cadre ou il y a une
concertation.
Le Président (M. Rodrigue): Alors, étant
donné que nous en sommes au terme du temps qui nous est alloué,
je pense que le député d'Outremont m'avait signalé qu'il
avait...
M. Scowen: Si vous me le permettez, M. le Président, j'ai
une courte question très précise sur les faits.
Le Président (M. Rodrigue): Alors, M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce pour une courte question.
M. Scowen: C'est la qualité de vos revenus autonomes qui
m'intéresse, et j'aimerais que vous répondiez juste à deux
ou trois questions précises. Si je comprends bien, vous avez dit que le
pourcentage de ces revenus qui viennent des sources gouvernementales ou
paragouvernementales, c'est 15%, et du secteur privé, c'est 85%? C'est
quoi, le pourcentage des commandites prévues ici qui viennent du secteur
privé?
M. Bertrand (Guy): Je donnais tout à l'heure le
pourcentage de 85%. Il y a 85% de nos revenus, autre que notre revenu de
dotation, qui viennent de nos commandites. Ce sont des entreprises, et 15%
viennent des milieux gouvernementaux, des ministères.
M. Scowen: Par exemple, dans vos prévisions de 35 000 000
$ pour les 5 années de votre plan, vous prévoyez qu'à peu
près 15% de ce total de 35 000 000 $ vont venir de sources
gouvernementales et des sociétés d'État.
Une voix: C'est ça.
M. Beaudry: Non, les sociétés d'État sont
considérées comme des sociétés à
caractère commercial comme toute entreprise.
M. Scowen: Quel pourcentage prévoyez-vous du secteur
privé comme tel?
M. Beaudry: Incluant les sociétés d'État -
par exemple, Hydro-Québec est pour nous une société
d'État, mais à caractère commercial - 85% est un chiffre
que vous devriez retenir.
M. Scowen: Oui, je comprends, mais vous n'avez pas de chiffres
semblables, laissant les sociétés d'État dans le secteur
public, du secteur privé comme tel? C'est la question que je vous pose.
Avez-vous des chiffres ou des prévisions de vos revenus qui vont venir
du secteur privé?
M. Beaudry: Écoutez, les revenus provenant de
sociétés d'État sont très minces. Il y a
peut-être un projet ou deux qui nous sont venus d'Hydro-Québec ou
de la SIDBEC, ce qui veut dire 80% en règle générale;
ça devrait être cela.
M. Scowen: 80%, d'accord. Une deuxième question. Dans le
cas des 80% qui viennent, si vous le voulez, du secteur privé, quel
pourcentage à peu près de ces revenus sont effectivement des
subventions de la SDI ou d'un autre organisme gouvernemental?
M. Beaudry: II n'y a pas de subventions comme telles qui sont
accordées au CRIQ dans le cadre de ses commandites.
M. Scowen: Je le sais.
M. Beaudry: J'explique. Les entreprises qui font affaires avec
nous ont accès à des programmes d'aide, par exemple, le programme
d'expansion des entreprises, le programme pour le meuble et la chaussure et
divers types de programmes existants. Généralement, et c'est le
cas au cours de la dernière année, environ 60% à 65% des
sommes que les entreprises nous donnent proviennent de programmes d'aide, soit
fédéraux, soit provinciaux.
M. Scowen: À peu près 60% de ces 80% du secteur
privé seront probablement des subventions accordées, soit par le
fédéral, soit par le provincial, à des entreprises qui
feront....
M. Beaudry: À des entreprises qui feront affaires chez
nous.
M. Scowen: Parce qu'on entend de temps en temps les gens dire: On
va vous donner une subvention si vous allez faire de la recherche au CRIQ, je
pense que c'est une exagération. Je pense qu'il n'y a rien de mauvais
là-dedans en principe, quant à moi, si le projet est bon. Mais,
est-ce qu'il existe un lien direct ou indirect, informel entre le CRIQ et la
SDI, par exemple, et le MEER pour stimuler les projets? Ceci est ma
dernière question.
M. Bertrand (Guy): Pas la SDI sous la forme qu'on a connue.
Peut-être dans l'avenir; je sais que les structures vont peut-être
être changées. Mais, les gros projets pour les petites et moyennes
entreprises, étant donné le coût assez élevé
des travaux de recherche et de développement, sont souvent
subventionnés par, entre autres, le programme PEE ou EDP du
fédéral. Alors, on agit à l'interface et on prépare
les dossiers pour les entreprises, afin qu'elles puissent les soumettre au
gouvernement canadien.
On mentionnait tout à l'heure les sociétés
d'État. On a très peu de contacts avec elles, parce que les
sociétés d'État en règle générale ont
leurs propres facilités à l'intérieur; mais on tente une
expérience qui va être unique avec la Société
générale de financement où on forme des équipes
mixtes de recherche, de telle façon qu'on puisse avoir, ce dont je
parlais, le fameux effet multiplicateur. Au lieu de demander aux
sociétés d'État, entre autres, on peut nommer Tanguay au
Lac-Saint-Jean qui a une difficulté énorme à engager du
personnel de développement, parce qu'il est situé dans un petit
village, à Saint-Prime. Il a dépensé au-dessus de 40 000 $
pour engager du personnel et il n'a pas réussi à recruter une
personne; au moment où les gens cherchent de l'emploi, les gens ne
veulent pas s'éloigner des grands centres. Alors, une équipe
mixte travaille au CRIQ et ces gens ont engagé des ingénieurs
qui, éventuellement, au point de vue du transfert technologique... C'est
le meilleur transfert qu'on peut faire, le type part avec le bidule en question
qui a été développé et les plans il entre en
production et met le produit en production.
Étant donné que la SGF, du côté de
l'équipement forestier, de l'exploitation forestière, doit revoir
sa ligne complète, parce qu'il y a un peu de désuétude
dans tout cela, c'est avec l'expérience du CRIQ qu'on forme des
équipes mixtes; il y a déjà une équipe qui est en
place et on travaille chez nous à ce moment-ci.
Une voix: Est-ce que les prix pour le secteur public...
Le Président (M. Rodrigue): M. le député, je
m'excuse, mais on a déjà dépassé le temps qui nous
est alloué. Alors, je vais permettre au député d'Outremont
de faire des remarques terminales et au ministre de conclure.
M. Fortier: À cause de l'heure avancée et
étant donné qu'on doit reprendre la session à 2 heures, je
passe à ma remarque terminale; j'avais d'autres remarques, mais je vais
les abréger pour vous remercier tout simplement et peut-être que,
si on a d'autres questions, on pourra vous contacter directement. D'ailleurs,
le ministre m'indiquait que peut-être il nous offrait une visite du CRIQ.
Malheureusement, j'exprime le regret que cette l'encontre n'ait pas eu lieu
plus tôt ou que la discussion du projet de loi ne soit pas venue plus
tard, parce qu'une visite au CRIQ nous aurait permis de saisir davantage
l'orientation du CRIQ et les capacités de recherche et de
développement des orientations du CRIQ.
Je pense bien que, malgré tout, nous allons collaborer avec le
gouvernement, nous allons discuter du principe du projet de loi cet
après-midi. Nous n'aurons pas le temps, malheureusement, de lire toute
la documentation, étant donné l'heure. Mais on va tenter de
collaborer et d'exprimer nos opinions sur la question de principe, quitte
à approfondir le dossier avant d'arriver en troisième
lecture.
Le Président (M. Rodrigue): M. le ministre.
M. Bertrand (Guy): Je vous remercie beaucoup, M. Fortier. On m'a
remis une petite note disant que le mardi matin, 16 mars, il semblerait que la
plupart de vous pourraient avoir une certaine disponibilité. Alors, si
vous êtes intéressés à venir visiter
le CRIQ, on avait fixé la visite à 10 heures. Alors, si
vous voulez venir vers 10 heures, on pourrait à ce moment-là vous
montrer certains travaux qu'on fait et vous pourriez voir comment on est
structuré et organisé. Cela pourrait être fort
révélateur et, j'espère, fort intéressant.
M. Biron: M. le Président, justement, c'était pour
concrétiser mon invitation au moment de la commission parlementaire. On
me dit qu'on a déjà eu des contacts avec vous pour voir si
c'était disponible. Alors, on va d'abord ajuster la
disponibilité, si vous voulez, des membres de la commission
parlementaire en fonction des disponibilités qu'on peut avoir aussi chez
vous. Cela nous fera une autre source d'information avant de passer à
l'étude article par article du projet de loi no 50.
Je veux vous remercier, M. Bertrand, de même que vos
collaborateurs pour les informations importantes et précieuses que vous
nous avez données ce matin. De même, je remercie tous les membres
de la commission parlementaire d'avoir permis à cette Assemblée
nationale ou à cette commission parlementaire d'être
éclairée davantage sur le Centre de recherche industrielle du
Québec.
Le Président (M. Rodrigue): J'invite le rapporteur de
cette commission à informer l'Assemblée nationale du fait que la
commission élue permanente de l'industrie, du commerce et du tourisme a
accompli son mandat qui était d'entendre le président-directeur
général du Centre de recherche industrielle du Québec-La
commission élue permanente de l'industrie, du commerce et du tourisme
ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 12 h 41)