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Version finale

30e législature, 3e session
(18 mars 1975 au 19 décembre 1975)

Le jeudi 8 mai 1975 - Vol. 16 N° 78

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude des crédits du ministère de l'Industrie et du Commerce


Journal des débats

 

Commission permanente

de l'industrie et du commerce,

du tourisme, de la chasse et de la pêche

Etude des crédits du ministère de l'Industrie et du Commerce

Séance du jeudi 8 mai 1975

(Dix heures dix minutes)

M. Houde, Limoilou (président de la commission permanente de l'industrie et du commerce, du tourisme, de la chasse et de la pêche): A l'ordre, messieurs!

Les membres de la commission, ce matin, sont les suivants: MM. Bellemare (Johnson), Ca-dieux (Beauharnois), Côté (Matane), Denis (Berthier), Dufour (Vanier), Lachance (Mille-Iles), Lapointe (Laurentides-Labelle), Lessard (Saguenay), Malouin (Drummond), Marchand (Laurier), Morin (Sauvé), Samson (Rouyn-Noranda), Saint-Pierre (Chambly), et M. Caron remplace M. Déom (Laporte).

Le ministre.

Orientation et développement de l'industrie secondaire (suite)

M. Saint-Pierre: M. le Président, hier, le chef de l'Opposition a posé une question sur une mission à l'extérieur qui toucherait les fonderies. C'est effectivement la mission GIFA-74, qui s'est déplacée vers Dusseldorf et Liège, au congrès international des fonderies, et à Londres pour certaines visites industrielles. J'ai déposé ici une copie du rapport. On remarquera que les participants, en plus de deux fonctionnaires du ministère, étaient douze hommes d'affaires québécois. Sans tous les nommer, il y avait M. Breton, de la Fonderie Sorel; M. Marchand, de Ro-Ma Metal; M. Gagné, de la Fonderie Dion; M. Boutet, de Lyster Die-Casting; M. Poitras, M. Biron, de la Fonderie Sainte-Croix; M. Mazumdar, de la Fonderie de Magog et M. Trudelle, de la Fonderie Saint-Romuald. Le document que je dépose est le rapport de voyage. Il contient également en annexe des lettres transmises quelque temps après la mission par les participants exprimant leurs commentaires sur la mission. Une lettre que j'ai parcourue indique des commentaires très favorables.

Je ne veux pas être méchant, M. le Président, mais c'est une illustration de plus qu'on travaille pour les Québécois avec les Québécois.

Alumineries

M. Morin: Bien, M. le Président. Nous allons prendre connaissance du document, puis peut-être pourrions-nous y revenir, lorsque nous étudierons les diverses missions commerciales commanditées par le ministère.

Hier, M. le Président, j'avais abordé très brièvement la question du projet d'aluminerie dans dans la région de Québec. C'est un projet qui semble soulever beaucoup de problèmes. Je les énumère rapidement pour donner au ministre une idée des aspects que je compte traiter avec lui, ce matin.

Tout d'abord, évidemment, il y a le problème de la propriété et de la gérance de cette aluminerie, si tant est que le projet soit toujours vivant. Deuxièmement, la question du tarif préférentiel d'électricité de l'arrêté en conseil, du décret— pour parler français — qui a été adopté par le conseil des ministres et de l'absence de consultation avec l'Hydro-Québec dont on a fait état dans les journaux...

Troisièmement, j'aimerais que nous traitions de la possibilité de transformer ici, dans la région de Québec ou ailleurs au Québec, l'aluminium de première fusion, qui serait produit par cette usine.

Quatrièmement, j'aimerais que nous parlions de l'écoulement de la production. On a mentionné des chiffres allant de 150,000 à 250,000 tonnes. J'aimerais que nous parlions des possibilités d'écouler une telle production, surtout dans les perspectives actuelles d'une baisse de la demande et à la lumière des prévisions qu'on peut faire pour la demande d'ici quelques années.

J'ai vu, là-dessus, des chiffres qui, souvent, sont contradictoires. J'aimerais que nous examinions également si ce projet n'entre pas, comme on vient encore de le soutenir avec vigueur hier, en concurrence directe avec nos propres industries dans une autre région du Québec, j'entends dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean.

J'en veux, pour preuve la réaction toute récente — elle est d'hier, je crois, et ce n'est pas la première fois que le président de l'Alcan intervient dans le débat — de M. Leman à l'effet que des formules d'association auraient peut-être permis au gouvernement québécois de devenir partenaire d'une société canadienne, au lieu d'une société américaine. M. Léman entendait sans doute par là, partenaire soit de l'Alcan, soit de Reynolds, plutôt que de la National South Wire.

Deuxièmement, je voudrais attirer l'attention du ministre sur la toute dernière déclaration de M. Leman qui déclarait, devant le Cercle de presse de Chicoutimi, ce qui suit: "Je m'oppose à ce que M. Saint-Pierre se promène à travers le Québec — c'est beaucoup dire mais enfin — en disant que l'implantation d'une nouvelle aluminerie à Saint-Augustin ne nuira pas à l'Alcan." C'est avec une vigueur croissante, comme le ministre a pu le remarquer sans doute, que le président de l'Alcan s'en prend au projet d'aluminerie.

Il ajoutait, d'ailleurs, hier: "La National South Wire est déjà notre concurrente sur le marché américain."

Voilà, M. le Président, les questions préliminaires, le cadre de la discussion, que je souhaiterais suivre ce matin.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Le ministre.

M. Saint-Pierre: C'est curieux, M. le Président, de voir même pour les projets industriels les plus

valables, dans lesquels le gouvernement du Québec et les Québécois trouvent beaucoup d'avantages, sous mille et une façons, comment on peut très vite, soit au niveau des régions, soit au niveai de l'intérêt de compagnies en cause, même pour l'Opposition officielle, y trouver à redire et tenter de nous entraîner dans une dialectique qui est empreinte de beaucoup de négativisme sur le projet. Fondamentalement, il y a à peine 48 heures, ici, on disait: C'est très bien de faire la transformation de nos richesses naturelles, mais comment allez-vous vous y prendre? Arrêtez d'être pour la vertu et donnez-nous des moyens concrets.

Nous allons prendre un moyen concret. Nous allons prendre l'électricité, les alumineries, les usines d'électrolyse, dans le cas de l'Alcan, où environ 19% de la capacité est transformée au Québec; au niveau de la compagnie Reynolds la même chose. Nous disons que, face à une conjoncture, le gouvernement a été assez éclairé pour tenter de dégager un projet qui non seulement transforme au niveau de nos partenaires 100% de ce qui sera produit par l'usine d'électrolyse, mais qui nous rapporte au niveau de la propriété de l'usine d'électrolyse, au niveau des possibilités de création d'emplois immédiates, au niveau des investissements, au niveau du développement régional également. En effet, si la région de Québec a pu être privilégiée au niveau de la croissance de l'emploi, on sait que cette croissance de l'emploi s'est surtout faite dans le secteur tertiaire, à cause du gouvernement provincial, de l'industrie du tourisme, à cause des universités, du secteur de l'enseignement et de l'hospitalisation. Mais on sait que la région de Québec souffre d'un déséquilibre dans l'emploi secondaire qui est très faible en quantité, d'une part, mais également en qualité, puisque, sans vouloir tracer une caricature, dans la région de Québec, l'industrie secondaire, c'est, dans une large mesure, les petites entreprises dans la chaussure, dans le cuir, comme les entreprises de Saint-Emile. Dans la région immédiate de Québec, il n'y a pas eu beaucoup d'activités secondaires.

Tout cela pour dire que ce projet nous permet à la fois de transformer les richesses naturelles, d'associer les Québécois eux-mêmes, directement, dans un secteur de pointe, de combler des déficiences sur le plan mondial au niveau de la production de l'aluminium, nous permet également d'opérer un redressement très intéressant dans une des régions qui, au niveau des disparités régionales, avaient des problèmes, et je suis un peu surpris de voir des réactions négatives. Prenons les sept points que soulève le chef de l'Opposition...

M. Morin: M. le Président, je tiens seulement à dire que je n'ai dit nulle part que nous étions contre le projet; nous nous interrogeons simplement sur les conditions d'implantation, c'est tout.

M. Saint-Pierre: Vous ne voulez pas vous dissocier des déclarations qui ont été faites publiquement il y a à peine deux semaines par M. Jean

Taillon, le porte-parole de votre parti dans la région de Québec?

M. Morin: Comment voulez-vous que nous nous dissociions de quelque déclaration que ce soit avant d'avoir exploré le dossier à fond? Comment voulez-vous, par exemple, que je me dissocie des déclarations de M. Leman? Il a soulevé des problèmes auxquels...

M. Saint-Pierre: Mais est-ce que l'inverse est vrai également? Il est curieux que des gens fassent des déclarations négatives sur un projet si on n'en est pas allé au fond.

M. Morin: II faut aller au fond du projet, c'est ce que l'Opposition officielle compte faire ce matin.

M. Saint-Pierre: Vous passerez l'information à M. Taillon, qui est contre le projet parce que, apparemment, on donne de l'électricité. On va voir cette question-là.

M. Morin: Oui, nous allons la voir, justement.

M. Saint-Pierre: A la propriété, M. le Président, ce n'était pas notre objectif au tout départ d'avoir 100% de l'usine d'électrolyse. Nous avions envisagé, au départ, d'avoir une participation minimale du gouvernement du Québec d'environ 30% du capital-actions de l'entreprise. Dans les négociations, j'en ai fait état dans la conférence de presse du mois de février dernier, suite à un cheminement assez long, nous nous retrouvons a la fin avec une proposition qui est acceptée par nos partenaires et dans laquelle le gouvernement du Québec obtient effectivement pour $1, si on peut employer l'expression, 100% du capital-actions de l'usine d'électrolyse. C'est un investissement, quand même, à $1,600 la tonne, de $400 millions.

Pourquoi obtient-on la propriété d'une usine de $400 millions avec $1? C'est très simple, c'est que le financement de projets semblables ne se fait pas à cause d'un rapport sain entre l'avoir des actionnaires et une dette à long terme, mais se fait essentiellement par des contrats fermes pour la durée de la période d'amortissement de l'usine. Des contrats fermes, donc, sur une période de 20 ans, avec des compagnies solvables de grande renommée qui acceptent de prendre le métal chaud à son prix coûtant.

Je mentionne le prix coûtant, parce que là aussi, dans certains milieux, on a voulu, à mon sens, tromper la population en disant: Cela n'a pas de sens de ne pas faire de profits. On ne fait pas de profits parce qu'on ne fait pas de capital-actions.

D'ailleurs, j'ai demandé de modifier le projet, justement pour montrer qu'on va en faire, des profits. C'est bien sûr que si nous acceptions de mettre $1 million au lieu de $1 dans le capital-actions, eh! bien, nous ferions le profit le plus spectacu-

laire possible dans l'industrie manufacturière — je ne sais pas, de 20%, de 30% — sur le capital-actions de $1 million. Je pense que c'est une notion de comptabilité qui est facile à comprendre. Lorsque le capital-actions d'une entreprise est $1, il est normal que les coûts de transfert soient les coûts complets, incluant le financement, incluant toutes les dettes, tous les amortissements, toutes les taxes. Mais comme il y a eu $1 de capital-actions, il serait anormal de faire $35 millions de profits par année.

Mais justement pour contrer l'objection que M. Parizeau nous a donnée, on va peut-être changer quelque chose. On va mettre $1 million de capital-actions et on va peut-être faire un profit de $1 million par année, chiffre très respectable sur ce plan. C'est mineur.

Sur le plan de la gérance, donc, la propriété est à 100% à la Société générale de financement. C'est pour l'usine d'électrolyse. Pour l'engagement, sur le plan du financement — et là, ce sont des choses qui restent à compléter — autant que 85% de l'investissement serait sous la forme d'une dette à long terme garantie par les contrats d'approvisionnement sur une période de 20 ans de tous les partenaires, incluant les 30% à la Société générale de financement. La différence de 85% à 100% de l'investissement serait par des débentures convertibles qui paieraient un intérêt, mais qui ne seraient pas garanties, qui seraient assumées par chacun des groupes qui recevront le métal chaud en proportion de la production qu'ils prendraient. De telle sorte que si nos partenaires privés, là encore, prennent 70% du métal chaud, ils devront mettre 70% de ces débentures non garanties et la SGF mettra 30%.

Je pense que c'est assez clair sur le plan du financement, sur le plan de l'équité, sur le plan de la garantie.

Sur le plan de la gérance, notre partenaire, la National South Wire, a une expérience très particulière dans la direction d'une usine. Elle a une très bonne réputation sur le plan mondial. Nous envisageons donc de lui confier un contrat de gérance dont tous les termes seront bien scrutés. Il nous semble que ceci est préférable à d'autres formules, c'est-à-dire à une formule qui voudrait que la Société générale de financement fasse elle-même la gérance de l'usine.

Maintenant, cela ne veut pas dire, en confiant le contrat de gérance, qu'on n'est pas capable — et c'est dans cet esprit, d'ailleurs, que les négociations préliminaires se sont engagées — d'avoir toute la garantie possible en ce qui touche la langue de travail, le pourcentage de francophones, le recrutement, enfin toutes les mesures qui pourraient être prises.

Sur le tarif préférentiel, je me réserve, M. le Président, au cours des prochains jours, de faire un historique non seulement sur le gouvernement actuel mais sur d'autres gouvernements quant à la question des tarifs. Je rappelle simplement que le tarif de départ de l'usine d'électrolyse à 7.5 mils est le tarif le plus élevé. Je m'excuse, il n'y a aucune compagnie actuellement, au Québec, qui paye un tarif de cet ordre. Donc, parler de cadeau est peut-être un terme qu'il faudrait modifier.

Je répète de nouveau qu'à 7.5 mils il n'y a aucun complexe industriel dans le moment qui paye des tarifs aussi élevés. Les tarifs sont beaucoup plus bas dans le secteur industriel. D'ailleurs, la moyenne, je l'ai vu récemment, je pense qu'on l'a dans le discours du budget de M. Garneau, est beaucoup moindre.

Deuxièmement, M. le Président, si on recule dans le temps, on est un peu surpris que des gens, il y a à peine quelques années, que ce soient des conseillers économiques du gouvernement de l'Union Nationale et d'autres, étaient prêts à payer des tarifs extrêmement bas, même 3 et 4 mils, pour tenter d'attirer ici uniquement une usine d'électrolyse. On se rappelle le cas Pechiney sur la Côte-Nord, dans la région de Sept-lles. On se rappelle nombre d'autres démarches que le gouvernement de l'Union nationale, conseillé en cela par M. Parizeau, avait faites pour avoir uniquement ici une usine d'électrolyse, c'est-à-dire pour prendre de l'électricité, l'exporter sous forme primaire avec très peu de valeur ajoutée, très peu d'emplois.

Or, ce que nous avons dans le projet ici est très différent de cela. Nous avons non seulement une usine d'électrolyse, nous avons des transformations du métal chaud qui lui donnent beaucoup en valeur ajoutée, beaucoup en salaires, beaucoup en activités économiques intéressantes pour la région de Québec. Je rappelle également, M. le Président, qu'il y a bien des façons de regarder le problème et il serait faux de dire qu'il n'y a eu aucune consultation avec l'Hydro-Québec.

D'ailleurs, dans notre cheminement, des chiffres ont été mentionnés, et on doit dire que le tarif officiel de l'Hydro-Québec a changé presque tous les mois, non pas à tous les mois mais très souvent. Dans un dossier que nous avions eu antérieurement, le dossier ALCOA, l'Hydro a commencé avec des tarifs officiels, de l'ordre de 5.5 mils, et cela c'était à peine un an avant notre projet. Là encore, au ministère de l'Industrie et du Commerce, nous avons, à toutes fins pratiques, refusé le projet d'ALCOA qui voulait faire installer une usine d'électrolyse à Valleyfield, parce que la compagnie refusait des activités de transformation.

Mais le tarif officiel qu'Hydro-Québec, au départ, leur offrait était quand même de l'ordre de 5.5 mils, avec des taux d'escalation beaucoup plus faibles qui nous auraient donné un tarif de beaucoup inférieur à ce que nous avions ici même. J'admets que la psychose de l'inflation, dans l'intérim, a fait qu'à tous les deux ou trois mois le tarif officieux de l'Hydro-Québec augmentait et cela explique peut-être une partie du désenchantement de l'Alcoa pour son projet. Il y a plusieurs façons d'examiner ces questions de tarif. D'ailleurs, le comité que nous avons établi par l'arrêté en conseil examine en détail tous ces points. Il n'est pas impossible que nous apportions des modifications mineures, mais on pourrait dire que l'électricité qui sera utilisée dans le complexe d'aluminerie à Québec, qui demande 500 mégawatts, ce

pourrait être 500 des 6,000 mégawatts que nous allons obtenir des chutes Churchill. Cette électricité nous coûtera, pendant les 66 prochaines années, un taux qui n'a peut-être pas été rendu public mais qui est connu de plusieurs personnes, de l'ordre d'environ 3 mils. Mais dans le cas de National South Wire, non pas dans 66 ans d'ici, mais dans à peine 20 ans d'ici, même avec le tarif que propose l'arrêté en conseil, nous sommes dans l'ordre de grandeur de 27 mils ou 28 mils.

Donc, nous allons vendre 26 mils ce que nous avons payé 3 mils à Churchill Falls. On ne fait de cadeau à personne dans cela et on ne donne pas l'électricité, on la vend. J'ai fait calculer le coût moyen, qui est de l'ordre de $26 millions par année, qui sera payé par l'usine d'électrolyse à l'Hydro-Québec. Ce ne sont pas des cadeaux; si ce sont des cadeaux, ce sont des cadeaux qui coûtent assez cher. On pourrait prendre une autre possibilité. On se rappelle que le contrat des chutes Churchill, l'un des conseillers financiers de l'ancien gouvernement, qui est très près, maintenant, du chef de l'Opposition, s'y était opposé. Et à peine avec quelques mois de recul on voit quelle erreur tragique cela aurait pu être pour le Québec de refuser ce qui, littéralement aujourd'hui, est peut-être le meilleur marché que les Québécois aient jamais fait de leur histoire.

Qu'on pense que pendant 66 ans nous allons avoir 6,000 mégawatts à un taux de 3 mils. Actuellement, nous pourrions vendre, mais nous ne sommes nullement interressés; nous cherchons à transformer ici même, à nous servir de cet outil pour créer de l'activité économique. Mais nous pourrions vendre à des taux, actuellement, qui seraient de 15 mils, 16 mils, 18 mils, 24 mils; donc, huit ou neuf fois ce que l'électricité nous coûte.

On pourrait prendre une autre approche, M. le Président, et dire que l'électricité pour l'aluminerie ce sera, finalement, le dernier barrage que l'Hydro-Québec aura mis en service, c'est-à-dire Manic 3. De l'avis de plusieurs, incluant un amortissement complet sur les lignes de transport d'énergie, les coûts de Manic 3 seront de l'ordre de 7.5 mils. Il faut peut-être rappeler l'argument — parce que, du côté de l'Opposition, c'est un point qui est difficile à percer dans les oreilles de sourds — que l'énergie hydraulique est protégée de l'inflation. Lorsque Manic 3 est terminé, c'est 98% des coûts pour l'ensemble du projet qui sont complètement abrités de l'inflation. A ce que je sache, le bon Dieu va continuer à nous envoyer de l'eau, et l'eau va continuer à faire tourner les turbines. Et on sait que dans le cas de l'hydraulique, différent du nucléaire ou du thermique, les dépenses d'exploitation sont marginales, de l'ordre de 1% ou 2% des coûts totaux.

Donc, le Manie 3, qui entre en service à peu près au même moment où on a besoin d'électricité à Québec, ne nous coûte — et j'avais des confirmations des gens de l'Hydro-Québec — pas plus que 7.5 mils. Mais là, c'est 7.5 mils pour la vie de Manic 3, donc pendant 50 ans, alors que nous, dans notre projet, il y a des clauses minima d'indexation, des taux d'électricité pour l'usine d'élec- trolyse qui le porteront, sur une période de vingt ans, à environ 26 mils, $0.02.6 du kWh, ce qui nous coûtera sept dixièmes de sou ou 7 mils du kWh. Alors on voit là que, simplement sur l'aspect de l'électricité, on aura fait de l'argent.

Mais rappelez-vous, M. le Président, également qu'au bout de vingt ans, non seulement l'Hydro-Québec, le gouvernement aura une présence dans le secteur de l'aluminerie, mais après avoir mis $1 sur la table, nous serons propriétaires d'une usine qui vaut $400 millions et qui aura une capacité de production de 250,000 tonnes d'aluminium. Plus que cela, on aura créé, dans une région qui en a besoin, comme celle de Québec, pour un meilleur équilibre économique, un minimum d'environ 3,000 emplois directs dans des activités de transformation.

Dire qu'il n'y a pas eu de consultation avec l'Hydro-Québec, c'est faux. Il faut se rappeler, d'ailleurs, que même la loi de l'Hydro-Québec établit très clairement que celui qui détermine des taux d'électricité pour cet ordre de grandeur, c'est le lieutenant-gouverneur en conseil. Nous avons parlé avec l'Hydro-Québec pendant très longtemps et nous allons continuer à parler avec l'Hydro-Québec pendant très longtemps. Mais pour mener à bien le projet, à un moment donné, j'ai fait des recommandations au conseil des ministres, compte tenu de toutes les discussions que nous avons eues, pour fixer, au moins dans ce qui était un élément majeur du coût du projet, un paramètre qui nous permettait de continuer les discussions. Sans cela, on aurait parlé jusqu'à la fin des temps, sans savoir trop trop où nous allions.

Les possibilités d'écouler cette production de 250,000 tonnes nous semblent excellentes. C'est vrai que, dans l'aluminerie, il y a une conjoncture à très court terme qui est défavorable. Il y a des surplus actuellement. Mais dans toutes les études que j'ai vues, particulièrement en ce qui touche la révolution —puisqu'il n'y a pas d'autre mot — dans la fabrication des voitures dans le monde entier, on prévoit, au cours des prochaines années, et il y a eu plusieurs déclarations à cet effet, des réductions importantes du poids des voitures, à cause du problème de l'énergie et du pétrole. Ces réductions vont impliquer un accroissement substantiel de la quantité d'aluminium utilisé dans les voitures. Toutes les études — je confirmerai sûrement la version d'un expert, M. Leman lui-même, à qui je parlais, il y a deux jours sur le sujet.

Lorsque notre usine de Québec sera en production — on parle pour dans deux ans, dans trois ans ou dans quatre ans, ce n'est pas demain matin; on sait que, dans le moment, il y a des surplus de capacité de production — toutes les analyses d'experts indiquent très clairement qu'il y aura, sur le plan mondial, un déficit évalué à au moins deux millions de tonnes. Nous, nous allons apporter sur le marché 250,000 tonnes. C'est bien certain que, si ces 250,000 tonnes ne sont pas faites dans la région de Québec, elles vont être faites quelque part ailleurs dans le monde, que ce soit au Brésil, sur l'Amazone, que ce soit en Australie,

que ce soit dans d'autres pays, que ce soit à Terre-Neuve, avec l'aménagement du bassin inférieur de la rivière Churchill, qui a aussi des capacités beaucoup plus grandes même que les 500 mégawatts que nous offrons.

Alors, nous disons: Vaut mieux profiter de cette conjoncture favorable. Nous avons la conviction qu'il y a de la place sur le marché pour 250,000 tonnes, pour ne pas perturber le marché. Le commentaire qu'il faudrait faire à la déclaration de M. Leman est le suivant: Je n'ai jamais dit que nous n'entrerions jamais en concurrence. En fait, ce serait penser que nous devons demander la permission à tout producteur québécois ou canadien avant qu'il y ait un nouvel investissement. Cela va être la stagnation complète sur le plan industriel. Chaque fois qu'il y a quelque chose qui s'ajoute, chaque fois qu'il y a des investissements — Dieu sait, cette année, comment est la croissance de nos investissements manufacturiers — ce sont des capacités de production additionnelles.

Nous, au ministère, ce dont on s'est assuré chaque fois, c'est qu'il y avait de la place sur le marché pour absorber cette capacité additionnelle. Dans le moment, si quelqu'un venait ici pour construire des motoneiges, des tentes-roulottes et des maisons mobiles, on lui dirait non. On le lui déconseillerait et on ferait tout notre possible pour empêcher un investissement dans ces secteurs, parce qu'il n'y a pas de place.

Mais, s'il y a quelqu'un, qui veut venir au Québec pour construire des camions pour les mines, des camions de 75 tonnes, on va lui dire oui, parce qu'on a la conviction qu'il y a de la place. C'est évident que le président de Caterpillar dirait: Si je n'avais pas ce concurrent, j'aimerais bien mieux ça. Mais nous, on n'est à la remorque ni de Caterpillar, ni même, avec tout le respect que je porte à ces gens, des compagnies canadiennes qui sont solidement implantées ici.

Donc, nos 250,000 tonnes; tout ce que prennent nos partenaires à 70% sera transformé complètement ici même, dès le départ de l'usine d'électrolyse. Il faut se rappeler que National South Wire n'est qu'un de ces partenaires; trois autres partenaires n'ont pas été identifiés, et à dessein, jusqu'ici. Mais nous avons la conviction que ce qui sera fait à Québec, dans la région métropolitaine de Québec, correspond à des marchés qui ne déplaceront pas des emplois d'Arvida à Québec. Cela correspond à des marchés qui ne sont pas, actuellement, desservis par l'Alcan et qui ne seraient pas, éventuellement, desservis par l'Alcan. Il y a un vide sur le plan des marchés que nous allons combler et qui nous revient, ici. Si ce vide n'était pas comblé ici, il serait absorbé ailleurs.

Donc, aucun problème pour l'écoulement de 70% de la production. La SGF va avoir 30% de la production, soit 80,000 tonnes. Là, l'usine aura une capacité de production de 250,000 tonnes. Nos partenaires prenant 70% de métal chaud — même pas de lingots, ce n'est même pas transformé en lingots — sur la production conti- nue, ici même dans la région de Québec, au départ, la Société générale de financement sera la seule des partenaires dans le projet à pouvoir vendre le métal chaud sur le marché international.

Pourquoi? Parce que, à l'évidence même, la Société générale de financement ne pourrait pas, la première année, transformer, ce que nous exigeons de nos partenaires financiers. Pourquoi? Parce qu'elle n'a pas, dans le moment, les réseaux de distribution, les marchés. Mais, bien sûr, notre intention n'est pas de vendre des lingots pendant 20 ans. Notre intention est que, disposant de cette source d'approvisionnement à un prix que nous croyons extrêmement compétitif, la SGF va pouvoir intéresser des Québécois, premièrement, des compagnies canadiennes ou, si ce n'est pas possible, aller en "joint venture" avec des compagnies étrangères pour fabriquer ici et transformer ici l'aluminium.

Alors, il y a mille et un projets auxquels on peut penser, des plus petits projets, en partant du revêtement de murs extérieurs en passant par la fabrication de "containers", la fabrication de l'arrière des camions-remorques. On peut penser à mille et un projets possibles. Alors, graduellement, la SGF va tenter de transformer, elle aussi, 100% de ce qu'elle aura obtenu en métal chaud.

J'ai parlé de la concurrence directe de l'Alcan ou de Reynolds, il est peut-être bon de faire un petit retour en arrière pour dire qu'au ministère nous tentons d'avoir de bonnes liaisons avec le secteur privé. Si mes journées et celles de mes fonctionnaires avaient 43 heures, nous visiterions plus de gens, mais dans les cas spécifiques qu'on mentionne, particulièrement dans le cas de l'Alcan, je me sens fort à l'aise. Je n'ai pas mon agenda devant moi, mais je pense que M. Leman le confirmera, à l'été 1974, nous avons eu des discussions au siège social de l'Alcan, avec M. Leman lui-même, non pas dans le but de tordre le bras de l'Alcan, mais simplement dans le but de connaître ses projets et ce que nous pouvions faire pour l'aider.

A l'époque, nous discutions du projet de l'AIcoa à Valleyfield. J'avais spécifiquement posé la question à l'Alcan. Est-ce que cela la dérangeait et pouvait perturber son marché si une aluminerie s'installait à Valleyfield? On m'avait répondu: Non, s'il y avait une aluminerie qui s'installait, il y avait un accroissement de la demande et on aimait autant que cela se fasse dans la province de Québec qu'aux Etats-Unis. On n'avait aucune objection. On avait exprimé des réticences si l'Alcoa allait au niveau des produits finis.

A l'époque, M. Leman, avec beaucoup de conviction, m'avait convaincu que l'Alcan ne pouvait pas transformer davantage au Québec, puisque la loi principale de la transformation de l'aluminium était essentiellement dictée par les marchés. Comme les six millions de Québécois ne formaient pas un marché pour l'aluminium suffisamment important, on ne pouvait pas songer à avoir plus que ce que nous avions au niveau des usines de transformation.

Je pense que les autorités de l'Alcan

m'avaient assuré de toute leur collaboration, pour tenter, le plus possible, une transformation au Québec, mais elles m'avaient dit que je ne pouvais pas songer à avoir 100% de transformation. J'avais demandé si la fluctuation, au niveau des problèmes de l'énergie et autres, pouvait modifier cela et il ne semblait pas. D'ailleurs, cette position confirmait ce que l'Alcoa nous avait dit elle-même, ce que d'autres compagnies d'aluminium nous ont dit, parce que nous avions comme objectif de transformer nos richesses naturelles, d'y avoir une plus grande valeur ajoutée. Nous avons donc parlé à plus de producteurs d'aluminium possible, mais constamment avec cet objectif que je vous donne, et que j'avais d'ailleurs mentionné dans ma conférence de presse: assurer un degré de transformation dépassant, de loin, celui accordé par cette industrie au Québec présentement.

Le rôle moteur du gouvernement sera donc de fournir les normes acceptables, afin d'assurer le maximum de valeur ajoutée au Québec.

Nous avons parlé à bien des gens, incluant l'Alcan et Reynolds, et après toutes ces discussions, il y a eu un projet. Il y a bien des gens qui sont venus ici, des Japonais, des Allemands. Je ne mentionne pas tous les projets, mais il y a eu un groupe à qui nous avons dit: Nos exigences sont 100% de transformation. Un groupe a dit: Nous allons essayer de vivre avec cela. Pendant un an, nous avons travaillé avec eux et le projet était sérieux. Des premiers rapports nous ont été donnés qui ne nous ont pas satisfaits et nous avons dit: Non. Si vous voulez faire un projet de $400 millions, nous voulons savoir exactement ce qui va se faire. Nous ne voulons pas de vagues promesses. Nous ne voulons pas des engagements pour respecter la vertu, nous voulons un projet concret.

De tout cela, nous avons eu une compagnie, avec des associés, qui nous ont donné le projet que nous avons actuellement, qui implique une transformation de 100%. Le moins qu'on puisse dire, si vous me permettez l'expression, cela cloche toujours, c'est que nous avons amené bien des chevaux près du ruisseau, mais il y en avait un seul qui voulait boire l'eau que nous voulions qu'il boive. Les autres ne voulaient pas boire. On peut amener des gens, mais ce n'est pas moi qui vais forcer l'Alcan à transformer si elle trouve que ce n'est pas possible, à cause des critères économiques.

Depuis ce temps, en toute honnêteté, je dois dire que M. Leman m'a dit que des changements technologiques, en particulier le procédé de coulée continue, changement technologique relativement récent bien qu'il date de plus d'un an, permettront sûrement au Québec d'avoir une plus grande valeur ajoutée dans la transformation.

Je ne voudrais pas entrer en guerre avec l'Alcan. Je vais lui donner le titre d'être sûrement la compagnie qui a fait depuis longtemps les meilleurs efforts pour être intégrée à l'économie québécoise, à la société québécoise. C'est sûrement la compagnie au Québec qui a peut-être le record le plus enviable du pourcentage de francophones qui ont grandi dans ses rangs. La preuve en est qu'une compagnie mondiale de cette taille a actuellement comme président un Québécois francophone et qu'elle a eu, parmi ses vice-présidents et ses directeurs d'usines, nombre de Québécois francophones.

Inutile pour moi de dire que je n'ai pas l'intention d'entrer en guerre avec l'Alcan, mais il ne me paraît pas juste... Un instant, je veux bien prendre le bon mot.

Je cite le Soleil d'aujourd'hui où on dit: "Selon M. Leman, si le ministre Saint-Pierre avait discuté de ses projets avec les administrateurs de l'Alcan, il y aurait peut-être eu des formules d'association qui eussent permis au gouvernement québécois de devenir partenaire d'une société canadienne au lieu d'une société américaine."

M. Morin: C'est ce que je vous citais tout à l'heure.

M. Saint-Pierre: M. le Président, je dis qu'il y a eu des discussions, mais que nous avions nos exigences. Nous sommes prêts à nous associer surtout avec des Québécois, après ça avec des Canadiens et après ça avec d'autres, mais nos exigences étaient une transformation à 100%. Sans donner la date exacte, je pense que c'était au mois de juillet ou d'août 1974, on nous disait que ce n'était pas possible, que nous avions des exigences irréalistes.

Nous avons trouvé, il me semble, une compagnie responsable qui jouit d'une bonne réputation dans le secteur de l'aluminium et qui nous a dit: Oui, nous sommes prêts à atteindre vos objectifs, et ça fait un an que des discussions sérieuses se poursuivent.

Maintenant, on comprendra bien — j'ai eu privément, non pas de l'Alcan mais d'autres compagnies des reproches analogues — qu'une fois que nous travaillons sérieusement pour avoir un projet qui implique des investissements de $500 millions et 3,000 emplois, pour atteindre, au niveau de la transformation de la richesse naturelle, des sommets qui n'ont jamais été atteints au Québec jusqu'ici, avant d'aller plus loin dans le projet et de signer quelque chose, on ne peut pas se promener, nous, à la Place Ville-Marie, à Montréal ou ailleurs, à New York, pour demander des permissions a des compagnies privées qui sont dans ce secteur. On peut, et je pense qu'on l'a fait, donner une place de choix dans nos discussions aux compagnies québécoises et canadiennes, mais lorsqu'on tente de négocier avec un partenaire qui accepte nos objectifs, on n'a pas de permission à demander à personne. De la même façon que l'Alcan n'a pas de permission à demander au gouvernement du Québec avant de poser un geste, de faire un investissement.

Ceci dit, M. le Président, je rappelle qu'avec 7.5 mils et 26 mils au bout de 20 ans, évidemment, la National South Wire va payer au moins, au bas mot, peut-être dix fois plus cher son électricité que l'Alcan la paie d'une rivière du Québec, puisque le fond de la rivière lui appartient. Elle paie environ 2 mils et la National South Wire... Donc, la concurrence ne sera sûrement pas déloyale.

Deuxièmement, je voudrais vous assurer que si le marché mondial n'avait eu aucune place pour une capacité accrue de production, avec une marge très confortable, nous n'aurions pas marché dans le projet. Je rappelle le premier facteur de notre stratégie industrielle dans ce secteur: "Viser à protéger les emplois des Québécois dans les alumineries existantes, ce qui implique la recherche de nouveaux marchés présentement non desservis par les alumineries du Québec."

Je maintiens que dans le projet actuel, c'est ce que nous avons fait. Je n'ai malheureusement pas le rapport annuel de l'Alcan, mais pour toute personne qui voudra examiner ce rapport annuel, on verra que l'achat de lingots par l'Alcan a considérablement augmenté au cours des dernières années. Actuellement cet achat représente, en termes de capacité de production, des sommes importantes, ce qui veut dire que l'Alcan, dans le moment, est obligé d'aller acheter des lingots d'aluminium à l'extérieur. Il y a eu une croissance très très forte au cours des dernières années.

Maintenant, ce que je peux dire à l'Alcan, c'est que si elle est intéressée à faire de la transformation poussée, nous serions bien intéressés à lui offrir tout au moins les mêmes avantages, si avantages il y a eu, ou les mêmes conditions, dis-je, que nous avons offertes à des Américains, mais dans les mêmes perspectives, c'est-à-dire protéger ce qui existe déjà et rechercher de nouveaux...

Pour toutes ces raisons, j'espérais que du côté privé québécois on reconnaisse que nous n'avons pas agi à la légère dans le dossier.

Je pense que nous avons un dossier étoffé qui apporte beaucoup d'avantages à l'économie québécoise. Du côté de l'Opposition, une déclaration récente de M. Taillon, il me semble, s'ajoute à un dossier extrêmement faible, sur le plan énergétique, que le Parti québécois a toujours eu depuis six ou sept ans, sûrement largement influencé par des idées fixes que pouvait avoir M. Parizeau mais des idées fixes qui n'étaient pas conformes aux avantages des Québécois. Je pense que si on ajoute l'opposition au contrat, je le répète, extrêmement intéressant des chutes Churchill que le gouvernement Johnson a fait et pour lequel je rends témoignage à M. Boyd, si on y ajoute le refus de voir dans le développement de la baie James quelque chose de fondamentalement sain pour l'économie québécoise et qui aurait dû se faire cinq ou six ans avant, en particulier après l'Expo où nous avons eu un problème très grave d'investissements et d'emplois au Québec, si on y ajoute des éléments récents dans le dossier énergétique au sujet du pétrole, c'est un triste bilan des perceptions que peut avoir le Parti québécois en matière énergétique.

J'en ferai, un jour, le calcul, mais c'est dans les milliards qu'il faudrait évaluer la perte que l'économie québécoise aurait eue si elle avait suivi, depuis dix ans, les consignes et les mots d'ordre de M. Parizeau ou des autres tenants plus ignares comme M. Taillon qui, de l'aveu même du chef de l'Opposition, semble avoir pris parti dans la région même de Québec. Lui-même, qui est fonctionnaire, reconnaissait sûrement les déficiences de la structure économique de la région de Québec en matière d'emplois. Lorsque nous arrivons avec quelque chose de concret, pas une déclaration en faveur de la vertu, un projet concret qui a tant d'avantages pour les Québécois et qui va signifier une présence des Québécois francophones dans ce secteur, une présence de l'Etat à un prix extrêmement bas, eh bien! avant même de connaître le dossier — j'aimerais avoir devant moi les coupures, vous devez les avoir dans vos notes— il s'élève contre ce projet et le rejette presque carrément du revers de la main puisque nous donnons de l'électricité.

M. le Président, on ne donne pas de l'électricité; la note est au moins de $26 mi iions par année, au tout départ, lorsque le coût est à 7.5 mils; lorsque le coût sera à 26 mils, soit près de quatre fois plus, on voit que la note dépassera $100 millions par année pour l'électricité. Et si elle vient des chutes Churchill, elle aura coûté au Québec, incluant les lignes de transport, 3 miIs, donc plus de cent fois moins. Et dans le cas de Manic 3, le prix qui est demandé au départ, Manic 3 étant de l'hydraulique, est protégé contre les augmentations des coûts.

Le Président (M. Houde, Limoilou): L'honorable chef de l'Opposition.

M. Morin: M. le Président, plusieurs des déclarations du ministre confirment certaines questions que nous nous posons au sujet de ce projet. Et sa façon un peu cavalière, à la fin, de mêler toutes les sauces, d'amener la baie James et le pétrole dans le tableau, n'est pas pour nous rassurer non plus. Je préférerais, pour ma part, juger...

M. Marchand: II n'a rien compris.

M. Morin: ...chaque projet à ses mérites, parce que si nous devions juger de ce projet-ci à la lumière de la baie James, je crois que ce serait un mauvais départ, étant donné le coût de l'aventure.

Si vous le voulez bien, M. le Président, nous allons nous en tenir à ce projet-ci. Je vais tenter de faire quelques remarques préliminaires avant d'entrer dans les détails parce que ce sont les détails qui sont importants dans cette affaire. Tout l'exercice, ce matin, consiste à éclairer l'opinion publique sur ce projet; il ne consiste pas au départ à être pour ou contre mais à donner tous les renseignements qui sont nécessaires pour l'évaluer et pour tenter de savoir si vraiment c'est à l'avantage du Québec ou si c'est à l'avantage de National South Wire et de ses autres partenaires.

Je me pose la question, à savoir: la SGF ne faisant pas de profits, la SGF n'ayant pas la gérance du projet, si la propriété ne devient pas tout à fait fictive, entièrement fictive puisque, de toute façon, les opérations sont entre les mains d'une société étrangère. Bien sûr, on prendra peut-être quelques garanties sur la langue de travail, mais ce n'est pas la prise de décision qui est en cause lorsqu'on parle de langue de travail.

Je me pose la question de savoir si on ne va pas avoir une sorte de coloration québécoise pour faire illusion, pour donner l'impression aux Québécois qu'ils sont propriétaires de quelque chose ou qu'ils vont l'être dans vingt ans, alors que la machinerie peut-être sera désuète.

M. Saint-Pierre: La propriété...

M. Morin: ...une propriété qui soit une sorte de hochet, mais qui ne corresponde pas à une propriété certaine, à une propriété qui permet de prendre les décisions. Quand on n'a pas la gérance d'une industrie, d'une entreprise, dis-je, quand on n'en tire pas de profits, je me demande vraiment ce que peut signifier la propriété.

C'est une première interrogation. La deuxième serait celle-ci. Dans vingt ans, bien sûr, la SGF, si j'ai bien interprété les propos du ministre, deviendrait vraiment propriétaire...

M. Saint-Pierre: Dès le départ. Dès le départ elle est propriétaire.

M. Morin: Mais ce n'est pas elle qui a la gérance du projet, entendons-nous bien. Alors, dans vingt ans, si j'ai bien compris le ministre, le SGF aurait la gérance, mais je me demande si, à ce moment-là — on l'a fait observer, il y a même des experts qui ont souligné le fait — l'équipement ne sera pas entièrement désuet. Donc, on se retrouvera avec des installations qui devront être renouvelées de fond en comble et sans doute faudra-t-il songer, à ce moment-là, à de nouveaux investissements.

Une autre question que je me pose et sur laquelle j'aimerais que nous nous penchions ce matin, ce sont les perspectives de transformation sur place, ici au Québec. J'ai cru voir, dans plusieurs interventions sur la question, des doutes vraiment fondamentaux sur cette possibilité de transformer l'aluminium, le métal chaud, comme le ministre le dit, ici sur place. On a fait observer qu'il n'y a pas que le Québec qui voudrait transformer une matière première comme l'aluminium de première fusion sur son propre territoire.

Les experts l'ont fait remarquer, la tendance générale, dans le cas de l'aluminium, parce que cela se transporte facilement, c'est de l'acheter brut, là où il est fabriqué, au Québec notamment, et de le transformer chez soi en tous les dérivés de l'aluminium, des casseroles jusqu'aux poignées de porte.

M. Saint-Pierre: Avant. C'est ce qu'on essaye de changer, c'est le cercle vicieux qu'on change.

M. Morin: Oui, bien sûr, c'est ce que vous dites que vous allez faire et, en soi, nous ne pouvons pas être contre cela. J'espère que le ministre comprend bien. Ce que nous, nous demandons, c'est si c'est réaliste, si le ministre vraiment s'est interrogé sérieusement puis a eu des consultations pour savoir dans quelle mesure c'est possible de faire de la sorte, alors que tous les autres pays veulent le transformer chez eux, encore davantage, y compris nos principaux partenaires commerciaux.

M. le Président, je crains que, sur ce point , le ministre va devoir aligner plus de faits que nous n'en avons eu jusqu'ici. Quel genre de transformation, quelle société, quels sont les contacts qu'il a eus, sur quoi se fonde-t-il pour affirmer que la transformation va se faire ici?

Je pense qu'il faut plus que des affirmations générales, parce qu'on peut bien affirmer n'importe quoi; qu'on va transformer le cuivre ici, qu'on va transformer l'amiante ici, mais il faut voir quelles actions concrètes ont été prises par le ministre pour qu'il en soit ainsi. J'aimerais qu'il nous donne beaucoup plus de détails.

Vient ensuite une autre question qui est celle du coût de l'électricité.

C'est peut-être le point le plus faible de toute l'argumentation du ministre. Il nous a tenu un raisonnement un peu simpliste tout à l'heure. Il nous a dit: L'électricité ne nous coûte pas cher au moment où les installations qu'on a produites se sont construites, donc on peut se permettre de donner à perpétuité des tarifs très peu élevés ou, en tout cas pour de longues périodes, de donner des tarifs très peu élevés.

Mais il faut tenir compte non pas seulement du coût au moment où le barrage est construit; il faut tenir compte du coût de remplacement à l'époque où l'électricité est utilisée. Cela, le ministre n'en a pas touché un mot. C'est cela la question clé. Si, par exemple, chaque mégawatt, à l'heure où l'usine va l'utiliser, c'est-à-dire mettons en 1980, 1985 ou en 1990, le coût de chaque mégawatt, le coût de remplacement est plus élevé, autrement dit si les Québécois, en 1980,1985 ou en 1990 doivent payer plus cher pour acheter des mégawatts, c'est de ce coût qu'il faut tenir compte.

C'est celui-là qui est déterminant pour l'économie québécoise et pour les besoins des Québécois. Donc, il faut tenir compte du coût de remplacement de chaque mégawatt à l'heure où l'usine va l'utiliser. J'entends par là le coût qu'il faudra payer en 1980 ou en 1985 pour remplacer, par exemple, les 500 mégawatts manquants pour répondre aux autres demandes des consommateurs québécois. C'est cela, le critère.

Je voudrais faire remarquer, toujours sur cette question du tarif qui sera payé pour l'électricité, que l'Hydro-Québec a rendue publique une grille de tarifs officiels. Selon cette grille, le prix de 150,000 kW, à 90% de facteur d'utilisation, compte tenu d'une hausse annuelle de 11% des tarifs industriels, serait de 7.9 mils en 1977 et de 18.2 mils en 1985. Est-ce que le ministre peut nous expliquer comment il concilie ce qu'il a dit avec cette grille rendue publique par l'Hydro-Québec? Est-ce qu'il peut nous dire si le tarif qui va être consenti, à l'usine, ne sera pas, de fait, une énorme subvention plus ou moins déguisée?

Si la subvention s'étend sur dix ans, de 1977 à 1987, puisque les hausses de 7.5% de 1982 à 1987 seront fixées par rapport au prix de 1982, quel serait alors le coût d'une telle subvention?

L'Hydro-Québec a demandé 26 mils pour une usine d'uranium enrichi en I984, le ministre s'en souviendra. Non, ce n'est pas avec lui que je m'en suis entretenu en Chambre; c'est avec le premier ministre, au sujet de l'uranium enrichi. Donc, est-ce qu'il ne s'agit pas là d'un tarif outrancièrement préférentiel? Lorsqu'on consulte l'arrêté en conseil — je n'en ai pas eu le texte exact sous les yeux, est-ce que le ministre pourrait, soit dit en passant, nous donner le texte de cet arrêté en conseil? — est-ce que j'ai tort de penser qu'un accord est intervenu entre l'Hydro-Québec et National South Wire et non pas entre l'Hydro-Québec et la SGF? C'est une autre question que je me pose. C'est à vérifier. Si l'accord est intervenu entre l'Hydro-Québec et National South Wire, cela tendrait à prouver, du moins à étendre nos doutes quant à la propriété véritable du projet. Si c'est la National South Wire qui négocie et non pas la SGF, cela nous donne à entendre qui est le véritable patron de l'affaire.

Enfin, il y a un quatrième ordre de questions qu'on peut soulever. Je ne crois pas que le ministre ait vraiment répondu à l'inquiétude manifestée par l'Alcan. Il nous a dit, si j'ai bien compris — il voudra peut-être apporter des précisions — qu'il s'est entretenu avec M. Leman du projet Alcoa, à l'été I974. La question que je pose au ministre, pour que ce soit bien clair dans notre esprit, c'est: Est-ce qu'il y a eu des entretiens avec les responsables de l'Alcan, portant spécifiquement sur le projet d'une aluminerie dans la région de Québec? Est-ce qu'on a tenté de les intéresser à ce projet? C'est une question bien précise. Je ne lui demande pas s'il a discuté de la possibilité générale d'établir d'autres usines d'aluminium au Québec, dans la région de Beauharnois ou ailleurs. Je lui demande: Ce projet-là, en a-t-il discuté avec M. Léman?

L'affirmation de M. Leman, si je l'ai lue correctement, porte sur ce projet-là en particulier et non pas sur d'autres. Vous voyez que les questions demeurent nombreuses et que le ministre va avoir — passez-moi l'expression — à pédaler un coup pour vraiment nous rassurer, et rassurer les entreprises québécoises et l'ensemble des Québécois sur la portée exacte de ce projet.

Mais je tiens à lui dire une chose: S'il peut nous convaincre qu'il a vraiment trouvé là un moyen de développer le Québec et la région de Québec, en particulier, sans faire des concessions outrancières sur le plan de l'électricité, sur le plan des subventions implicites dans les tarifs d'électricité accordés, s'il peut nous convaincre que le projet ne va pas entrer directement en concurrence avec les entreprises qui, déjà, fabriquent de l'aluminium au Québec, de sorte qu'elles seraient obligées de réduire leur production, nous appuierons son projet, mais il faudra qu'il nous en convainque.

C'est notre tâche, comme Opposition officielle — le ministre en conviendra — de nous persuader que ce projet est vraiment à l'avantage de tous les Québécois.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Le ministre.

M. Saint-Pierre: Brièvement, M. le Président, la propriété, c'est très clair, il n'y a aucun doute dans cela, le premier jour, dès le démarrage, la Société générale de financement est propriétaire à 100% de l'usine d'électrolyse. Pour la gérance, je ne comprends pas les appréhensions du chef de l'Opposition. Pour nous, ce qui est important, ce n'est pas dire: La gérance, à cause d'une position doctrinaire de notre parti, doit être assumée par la Société générale de financement, ou bien dire que la gérance de l'usine va être confiée à l'Alcan ou la Reynolds. Dans notre préoccupation, il faut tenir compte de nos objectifs: participation de Québécois francophones, expertises à dégager et efficacité de l'usine. Cela aussi est important, on ne peut pas confier la gérance à n'importe qui et se retrouver avec une usine qui ne fonctionne pas rondement. Quant au management, les administrateurs de la South Wire, compte tenu de leur expérience au Kentucky, compte tenu de la réputation qu'ils se sont acquise, compte tenu de ce que nous avons vu nous-mêmes, ce que nous avons vérifié, nous paraissent dans le contexte un excellent groupe pour assumer la gérance.

Maintenant, la gérance ne sera pas donnée d'une façon indéfinie, elle pourrait être donnée par période de cinq ans. Peut-être qu'après cinq ans la Société générale de financement se sera fait la main avec du personnel de la Société générale de financement, parce que la gérance n'implique pas 100% de l'usine, cela est un point très important. Lorsque la South Wire a pris la gérance de l'usine du Kentucky avec la National Steel, elle n'a pas importé son personnel pour tout contrôler; elle a tenté de recruter, elle a amené quelques cadres spécialisés. Mais, très graduellement, elle a tenté de prendre du personnel local. Ici, nous aurons les mêmes exigences. Peut-être qu'après cinq ans, finalement, l'usine étant parfaitement rodée, la SGF, ayant un personnel de cadre, des contremaîtres, des ouvriers spécialisés dans le secteur, aura elle-même la gérance.

Chose certaine, en ce qui touche la propriété, dès le premier jour, elle appartient à 100% à la SGF et, à la fin de la période de 20 ans, ce sont des actifs d'au moins $400 millions dont la SGF sera propriétaire à 100%, qui ne seront grevés d'aucune dette à long terme et qui auront représenté une bonification appréciable sur un capital-actions, qu'il soit de $1 ou de $1 million. Cela mérite, je pense, d'être considéré dans le dossier.

Le chef de l'Opposition dit: Est-ce possible que dans 20 ans l'équipement soit désuet? Je ne le crois pas, M. le Président, compte tenu des risques et des fluctuations dans un tel projet. On tente généralement d'amortir les coûts sur une période de 20 à 30 ans. Il y a certains projets qui sont à 30 ans, d'autres sont à 20. Nous avons fait amortir tous les coûts, nous, à 20 ans pour être plus sévères, mais je ne pense pas que l'équipement sera désuet. On n'a qu'à constater ce qui se fait à

Arvida; Dieu sait que les immobilisations à Arvida n'ont pas été réalisées en 1955—il y a 20 ans— mais ont été réalisées...

M. Morin: Mais on veut les remplacer à l'heure actuelle.

M. Saint-Pierre: Oui, mais je pense qu'on voit qu'après 20 ans on ne peut pas parler d'équipement désuet. Je pense que si on prend toutes les usines de fabrication, toutes les usines d'électrolyse actuellement, la plupart d'entre elles ont plus de 20 ans d'existence. La plupart d'entre elles continuent à produire du métal chaud à des prix qui semblent essentiellement concurrentiels.

Le chef de l'Opposition dit: Est-ce réaliste pour le ministre d'aller contre le courant puis de réussir, avec un levier quelconque, à forcer à modifier le cercle vicieux qui nous a toujours empêchés d'avoir des transformations au Québec? Je dis au chef de l'Opposition que ce projet, on ne l'a jamais considéré en partie, mais dans son ensemble. Pour nous, cela a été très clair que c'était un complexe, ce n'était pas une usine d'électrolyse, et après cela des petits enfants qui étaient pour naître à tous les trois ou quatre ans.

C'est un complexe d'une aluminerie au Québec, impliquant une usine d'électrolyse mais impliquant également des unités de transformation qui seraient construites immédiatement.

Lorsque des compagnies, qui ont des chiffres de vente qui dépassent le milliard de dollars par année, qui ont des actifs, bien sûr, extrêmement importants—là on parle de compagnies, finalement, de taille mondiale, de compagnies extrêmement importantes— qui, par écrit, s'engagent à investir, dès le départ, en même temps que l'usine d'électrolyse est en construction, qu'elles commencent à construire quelque chose dans la terre, ce qui représente un investissement qui permet 100% de la transformation, je me dis que des compagnies comme celles-là ne sont pas des enfants d'école.

S'ils mettent dans la terre, à Saint-Augustin, Québec, $35 millions ou $20 millions, parce qu'il va y avoir plusieurs usines... Prenons un cas spécifique. Nous avons eu des études détaillées. Si la National South Wire, qui possède une usine, à Hawesville, de 200,000 tonnes par an, qui a quand même un chiffre d'affaires qui approche les $800 millions ou les $900 millions par année, aujourd'hui, si elle dit qu'elle prendra 75,000 tonnes de métal chaud et qu'elle va investir $30 millions dans un moulin de tiges et dans une tréfilerie ayant une capacité de 70,000 tonnes, à proximité de l'usine d'électrolyse, je dois bien en conclure qu'il va se faire du fil, qu'il va se faire toutes sortes de fil, qu'il va se faire du fil pour les lignes à transmission et qu'il y a, effectivement 100% de la transformation faite par ces gens.

Maintenant, les autres compagnies qui sont impliquées dans les brames, dans d'autres types de production — des compagnies qui n'ont pas été dévoilées—ce sont des compagnies sérieuses et elles vont faire les investissements au même moment que l'usine d'électrolyse.

Enfin, vous pouvez être sceptique mais j'ai le dossier et je suis confiant que nous avons mené le dossier comme un tout et que l'investissement, qui sera fait au niveau des usines de transformation, ce ne sera sûrement pas des monuments à la technologie américaine qu'on va implanter à Saint-Augustin, Québec. Cela va être des usines de production qui vont employer des gens du Québec, et c'est ça notre préoccupation.

Au sujet du coût de l'électricité, je critique simplement la perception, la compréhension que le Parti québécois se fait en matière énergétique. Il me semble que les sophismes les plus vulgaires et les plus simplistes semblent avoir foi d'hypothèses de base pour tout votre parti.

M. Morin: Allons, allons! Soyez très sérieux. M. Saint-Pierre: Non! Quand vous me dites...

M. Morin: Je pourrais vous retourner la même accusation pour votre façon simpliste de calculer.

M. Saint-Pierre: Bien, M. le Président, notre performance des cinq dernières années, si vous voulez, on va la calculer. Les Québécois, dans le moment, paient $6.25 le baril d'huile, et vous savez qu'il y en a 355,000 qui arrivent chaque jour dans le Québec. Vous leur direz honnêtement, aux Québécois, qu'est-ce que cela aurait coûté si, en 1970, ils vous avaient écoutés, au moins sur ce point-là. On ne parlera pas des autres points.

En tout cas, revenons à l'aluminerie. Il me paraît faux — je ne sais pas comment vous convaincre— de dire que pour un produit, que pour l'électricité où, au Québec, à 95%, c'est venu d'usines hydroélectriques, dont certaines d'entre elles ont plus qu'un demi-siècle d'existence et continuent de produire, il me paraît éminemment faux que pour un produit, donc où les investissements ont été faits, on dise à tous les utilisateurs: Vous allez payer non pas ce que cela nous coûte, mais vous allez payer le coût de remplacement si on avait à remplacer ce qu'on vous donne.

Qui va bénéficier de l'excellent contrat que le gouvernement a obtenu pour l'achat, pendant 66 ans, à 3 mils, des chutes Churchill, malgré l'avis de M. Parizeau? M y a quelqu'un qui va bénéficier de ça.

Alors, il me paraît plus juste de dire que ce que les utilisateurs— que ce soit les consommateurs québécois ou que ce soit les milieux industriels— ce que les consommateurs doivent payer, c'est le coût moyen de l'électricité pour l'ensemble du réseau. Personne ne peut avoir ce qu'on appelle en anglais un "free lunch", un repas gratuit. Mais je pense qu'on peut demander à tout le monde de bénéficier de ce que nous avons pu avoir dans le passé.

Nous, ce qu'on vous dit, c'est que si la National South Wire n'avait voulu que capter cette électricité pour l'exporter comme en lingots, c'est-à-dire uniquement investir dans une usine d'électrolyse, on aurait dit: Non, c'est une richesse trop précieuse que l'on a pour vous permettre de faire ça.

Mais, ce qu'on leur a dit: Si vous êtes prêts—là, le chef de l'Opposition mesure l'ampleur du défi — à briser, avec nous, le cercle vicieux qui nous empêchait d'avoir une valeur ajoutée, une transformation des richesses naturelles sur notre territoire, si vous êtes prêts à faire ça avec nous, nous allons vous permettre de partager le coût moyen que nous coûte l'électricité au Québec.

Et cela me paraît éminemment sage.

Quand je dis cela, je ne pense pas à la facture annuelle de $26 millions que la National South Wire va payer lorsqu'elle sera à 7.5 mils, c'est-à-dire pendant les premières années, je ne pense pas à la note annuelle de $100 millions qu'elle va payer à Hydro-Québec quand, au bout de vingt ans, elle va payer l'électricité qui, fondamentalement, coûte à Hydro-Québec peut-être $10 millions tout au plus, puisque c'est à peu près 3 mils par rapport aux 26 mils que l'autre paie.

Je pense aux 3,000 Québécois de la région de Québec qui vont contribuer à changer notre structure industrielle, qui vont avoir des salaires au-dessus de la moyenne, dans une industrie de pointe où la croissance de la demande est plus forte. Mais, même là, il ne faudrait pas penser que nous avons fait des calculs primaires comme cela. Nous avons mis l'ensemble du dossier dans le modèle économétrique québécois; nous avons fait un modèle et nous avons mis dans ce dossier tous les éléments, les entrants et les sortants.

Au bas mot, sur une base cumulative, si nous prenons l'hypothèse que les taux d'Hydro-Québec vont augmenter de 10% par année pendant les vingt prochaines années, je conteste personnellement cela parce que l'histoire ne le montre pas. Je ne vois pas pourquoi la poussée que nous avons eue récemment va se continuer, compte tenu de l'importance du réseau hydraulique. Si on le projette à 10% par année, on arrive à des coûts de 96 mils dans trente ans d'ici. Je suis presque certain que nous n'aurons pas cela, compte tenu de l'importance de notre réseau hydraulique, à l'époque, dans le réseau québécois.

Mais même si nous prenons cela, nous calculons que le gouvernement fédéral, je ne parle pas de la ville de Québec ni de la ville de Saint-Augustin comme entité, sur une base cumulative, d'après les études que nous avons faites dans un modèle mathématique, va recevoir à chaque année au moins $175 millions de plus que, théoriquement, il pourrait perdre. Non pas par rapport à des coûts de Churchill Falls, parce que le gain serait extrêmement plus grand que cela. Mais si nous prenons ce que nous appelons l'augmentation de tarif prévue de 10% par an pendant vingt ans, même là, en impôt des corporations et en impôt sur le revenu des gens qui vont travailler là, le gouvernement du Québec non pas le gouvernement fédéral—recevra cumulativement $175 millions de plus que ce que théoriquement il pourrait perdre.

Je rappelle que dans tous les pays du monde, également... L'Hydro-Québec l'a admis elle-même, d'ailleurs. Si vous lisez bien tout l'article que vous avez devant vous, vous verrez que l'Hydro-Québec admet même que, pour les grands clients, c'est-à-dire là où il n'est pas nécessaire d'établir de réseau de distribution où vous êtes obligé d'aller porter l'électricié dans chaque maison unifamiliale, pour les grands clients comme cela, il y a quand même des réductions de coût appréciables. Il est normal, dans tous les pays du monde, de négocier ces tarifs. On ne part pas d'un tarif qui est dans un petit livre pour dire à quelqu'un qui achète de l'électricité et qui va payer $100 millions par année: Multipliez ce que vous utilisez par un prix moyen et ce sera votre tarif.

D'ailleurs, il faut bien voir que, là comme ailleurs, c'est une partie de poker. C'est-à-dire que, là comme ailleurs, je pourrais bien dire ce que sûrement des universitaires, à l'occasion, sont portés à dire— confortablement installés, avec une sécurité d'emploi, dans une de nos universités, avec un gros salaire, des vacances l'été et des missions du gouvernement—que le gouvernement devrait demander 10 mils et l'exiger. On peut faire cela. Je vous dis que si nous demandons et si nous exigeons 10 mils et une augmentation de 10% par année, l'usine d'aluminerie ne sera pas au Québec. Elle va aller au Brésil, en Australie. Elle va peut-être aller à Terre-Neuve, parce qu'on a de l'électricité là. Nous avons calculé ce que cela pouvait coûter là-bas. On a calculé ce que cela pouvait coûter ailleurs dans le monde. On peut prendre cette attitude hautaine lorsqu'on a personnellement cette sécurité complète et qu'on ne se préoccupe pas de qui peut perdre là-dedans. On peut faire cela et l'usine d'aluminerie ne viendra pas.

M. Morin: Ce sont des arguments ad hominem qui ne portent pas sur une question objective.

M. Saint-Pierre: Non, il s'agit de savoir si nous pouvons prendre une position telle que nous risquerions les emplois et le développement économique que connaîtra la région administrative du Québec métropolitain.

M. Morin: Si je comprends bien, il n'y a que le ministre qui s'intéresse à l'avenir des Québécois et qui défend leurs intérêts. Les autres sont tous de mauvaise foi, au départ.

M. Saint-Pierre: Non. Je n'ai pas dit cela, M. le Président. J'ai simplement dit que ceux qui... Non, je vais le dire. Très bien. J'ai dit que ceux qui mangent du steak trois fois par jour peuvent facilement, dans des grandes recherches, nous dire que le hamburger n'est pas bon, mais que ceux qui tentent de donner à tous et chacun le plus haut niveau de vie possible doivent avoir des préoccupations qui ne sont pas aussi simplistes que ça.

Je vous le dis fondamentalement, c'est très facile; par exemple pour l'Alcoa, on n'a exprimé aucun intérêt. Des gens bien pensant m'ont dit: Ils reviendront. Alcoa n'est pas revenue; elle est rendue aux Etats-Unis. Cela ne me fait rien, parce

que, fondamentalement, leur projet, même si mon adjoint parlementaire aurait bien aimé avoir des investissements de $200 millions à Valleyfield, n'était pas intéressant pour l'économie du Québec. Mais celui que nous avons ici, à Québec, est extrêmement intéressant et ce serait sûrement des intérêts mesquins financiers, de la part du secteur privé, ou encore des intérêts mesquins partisans qui pourraient porter des gens à s'y opposer.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Le député de Beauharnois.

M. Cadieux: M. Le Président, c'est bien sûr que ça m'a pris quelque temps avant d'être convaincu que le projet d'Alcoa n'était pas aussi intéressant que l'autre projet. J'en ai discuté à maintes reprises avec le ministre de l'Industrie et du Commerce, avec ses hauts fonctionnaires, j'en ai même discuté avec le président de la compagnie Alcoa.

Je comprends d'autant plus aujourd'hui, suite à cette vulgarisation que vient de faire le ministre de l'Industrie et du Commerce d'un projet qui doit, pour nous tous, nous tenir à coeur. Je pense que, depuis qu'il a commencé à expliquer ce projet d'aluminerie, à le vulgariser pour le faire comprendre à tous les membres de cette commission, sauf peut-être un, nous devons le féliciter, même si ce n'est pas tellement de mise de féliciter, à une commission parlementaire, le ministre et ses principaux adjoints, pour en être arrivé à de telles conclusions. Je ne répéterai pas tous les chiffres qu'il nous a donnés. On sait que, depuis X années, le Parti libéral, même dans les années cinquante-six, avec son chef, M. Lapai me, disait: II faut voir à ce que nos richesses naturelles soient transformées ici. Pour une fois que le ministère de l'Industrie et du Commerce vient à bout de convaincre des investisseurs de transformer ici à 100%, nos richesses naturelles, je me dis qu'on est très mal venus de continuer à critiquer ce projet et qu'on devrait plutôt embarquer avec le gouvernement, le ministère. Pour une fois, peut-être que l'Opposition serait très bien vue de dire: Je vous félicite et, si vous avez besoin de nous dans la discussion, nous serons derrière vous et vous ne serez pas les seuls à défendre ce point de vue là.

Cela m'amène à poser une question au ministre. Il parle de 3,000 emplois. Je suppose que ce sont 3,000 emplois directs et que cela ne tient pas compte des emplois indirects. Pourrait-il nous dire s'il y a une étude des emplois indirects qui seront créés suite à ces 3,000 nouveaux emplois directs?

M. Saint-Pierre: Les emplois que j'ai mentionnés sont, M. le Président, des emplois directs. Au niveau des emplois indirects, il faudrait, au minimum, y ajouter un montant équivalent, 3,100. Maintenant, nous sommes actuellement à parachever l'étude de rentabilité. Un mandat a été confié conjointement à la firme Brown & Root et à la firme Lalonde, Valois, Lamarre pour parachever l'étude de rentabilité, remettre dans un seul volume tous les documents que nous avons. Nous- mêmes, du côté du ministère — nous le faisons actuellement — nous allons réexaminer, dans notre modèle mathématique, les avantages directs que le Québec peut en retirer, de même que tenter de préciser la nature des emplois indirects et les retombées au niveau des emplois indirects.

M. Cadieux: M. le Président, si la question est reposée par le chef de l'Opposition tantôt, vous pourrez tout de même répondre qu'on y a déjà répondu, même s'il ne s'occupait pas de la réponse.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Le chef de l'Opposition.

M. Morin: M. le Président, je ne suis pas entièrement rassuré par les réponses du ministre et même, sur certains points, je crois qu'il a évité de me répondre. Je vais être plus précis dans mes questions, si vous le voulez.

La première observation, c'est qu'il est grand temps que le dossier tout entier soit rendu public, avec le moins de points obscurs possible. Le ministre peut bien faire des déclarations générales, comme il en a faites à plusieurs reprises ce matin, mais si ce n'est pas appuyé par des documents, par des engagements certains, nous sommes dans le vague et, en fait, nous ne sommes pas plus avancés qu'avant dans la connaissance du dossier.

M. Saint-Pierre: Vous me permettrez de commenter un peu sur ça. Autant je suis bien prêt à ouvrir complètement tout le dossier, autant je vous en supplie, laissez-moi le temps de me rendre à des étapes avant de pouvoir vous le dire.

Je ne peux pas ouvrir un dossier et vous montrer des engagements signés tant que je n'ai pas fini cette étape. Autant nous avons tenté de renseigner la population le plus possible sur le dossier — on voit le 15 février I975; on voit que l'arrêté en conseil a été rendu public 24 heures après avoir été adopté au conseil des ministres — autant laissez-moi franchir la prochaine étape, la fin de l'étude, de rentabilité. Bien sûr, il y a des choses qui sont plus précises actuellement qu'en février mais, pour les présenter comme un tout, il y a encore des éléments à compléter.

M. Morin: Mais quand pensez-vous que le dossier sera vraiment complet et que vous pourrez le rendre public?

M. Saint-Pierre: Nous allons sûrement rendre le dossier public avant la prise de décision. J'en ai discuté encore avec mon sous-ministre adjoint spécifiquement chargé de ce dossier, nous estimons que l'étude de rentabilité complète sera terminée vers la fin de juin. Nous estimons qu'au niveau du financement les discussions qui ont eu lieu pour avoir quelque chose de concret dans cela pourraient se rendre jusqu'à la fin d'août. Contrairement à ce qui a pu être mentionné, nous avions espéré peut-être pouvoir faire de la construction à l'automne 1975; mais il semble plutôt qu'à l'automne I975 ce sera la période de décision.

Alors là, mutuellement, on peut peut-être se donner un mois, deux mois, le temps qu'il faut pour prendre les décisions voulues, mais là on aura un dossier complet. Il y aura la prise de décision et si le projet démarrait, eh! bien, à l'hiver il permettrait la préparation des plans d'ingénierie pour le projet. Là le projet pourrait démarrer dans sa phase de construction au printemps 1976.

M. Morin: Et le ministre peut s'engager, si j'ai bien compris, à rendre le dossier public avant que les décisions définitives soient prises?

M. Saint-Pierre: Oui, sûrement.

M. Morin: Pour qu'il y ait un débat public si...

M. Saint-Pierre: Sûrement.

M. Morin: ... le débat public est nécessaire.

M. Saint-Pierre: Oui, sûrement.

M. Morin: Bien. Parce que...

M. Saint-Pierre: Dans tout temps...

M. Morin: ... le ministre n'a pas vraiment répondu à l'objection que je lui faisais, à la question que je lui posais sur le caractère fictif de la propriété de la SGF. Il va voir que cela peut avoir des conséquences. On nous dit: La SGF ne fera pas de profits, n'est-ce pas?

M. Saint-Pierre: Non, non, j'ai corrigé cela. Spécifiquement pour M. Parizeau, la SGF va faire des profits comme aucune compagnie canadienne en fait dans le dossier. Mais il faut bien voir que les profits sont reliés au capital investi.

M. Morin: Oui.

M. Saint-Pierre: Alors, ce que je vous assure, c'est que la SGF va faire des profits comme aucune compagnie canadienne n'en fait.

M. Morin: Bien oui! mais cela, c'est une affirmation générale.

M. Saint-Pierre: Non. non.

M. Morin: Pouvez-vous me donner un ordre de grandeur?

M. Saint-Pierre: Mais, c'est un pourcentage des profits, mon cher monsieur.

M. Morin: Oui, bien sûr, bien sûr.

M. Saint-Pierre: Au départ, on devait mettre $1. Bien sûr, quand on met $1 dans le capital-actions d'une entreprise — les $400 millions sont financés par des dettes à long terme et ces dettes à long terme sont complètement absorbées dans la détermination du prix coûtant. Si vous et moi lançons une compagnie et mettons $1 de profit, il ne faut pas s'attendre qu'avec $1 de profit...

M. Morin: D'investissement.

M. Saint-Pierre: $1 d'investissement, je m'excuse, il ne faut pas s'attendre qu'on va faire $20 millions par année de profits avec $1. Si c'était cela, le Québec serait riche demain matin avec votre formule. Vous pouvez tenter de la vendre à la population mais je pense qu'on ne vous croira pas.

M. Morin: II n'en est pas question.

M. Saint-Pierre: Ce que je dis, moi, c'est, spécifiquement à cause du raisonnement assez méchant que vous avez fait, on va changer notre formule; on ne mettra pas $1 dans le capital-actions, on va en mettre plus, on va mettre disons $1 million, on va mettre un montant très marginal par rapport aux investissements. Et là je vous assure que, quand je rendrai le dossier public, nous allons faire des profits, exprimés en pourcentage du capital investi, comme aucune compagnie canadienne n'en fait.

M. Morin: De quel ordre encore? Pouvez-vous être un petit peu plus précis?

M. Saint-Pierre: Vous le verrez dans le temps. Si je vous disais qu'on va faire des profits de 25% par année sur le capital investi, est-ce que cela vous satisfait? Vous allez être en faveur du projet?

M. Morin: Est-ce que c'est un chiffre que vous me donnez?

M. Saint-Pierre: Non, je ne m'engage pas, je veux...

M. Morin: Ah! oui.

M. Saint-Pierre: Un instant, M. le Président, je vous dis qu'on va faire des profits comme aucune compagnie canadienne n'en fait.

M. Morin: Bon!

M. Cadieux: Etudiez cela et regardez, faites les comparaisons. Ce sera plus que ça.

M. Morin: Maintenant, M. le Président, je dois me contenter, à ce que je vois, dans ce domaine comme dans d'autres questions que j'ai soulevés, de grandes affirmations. Depuis le début, d'ailleurs, de ce dossier, nous sommes devant de grandes affirmations, c'est vraiment le Pérou. Mais, lorsqu'on essaie d'avoir des précisions, c'est beaucoup plus difficile. Je soulignais au ministre tout à l'heure que l'idée de ne pas donner la gérance à la SGF nous inquiète beaucoup parce que cela pourrait très bien être une — le ministre va l'avouer — fort belle combine pour la National South Wire. Si la propriété était à la SGF, celle-ci ne paie pas de taxes, n'est-ce pas? Donc, là encore une subvention déguisée. Non seulement dans le tarif d'électricité mais dans le fait que la

SGF, propriétaire, soit entièrement fictif, soit partiellement intéressé, ne paiera pas de taxes.

C'est une question en tout cas à laquelle le ministre voudra bien me répondre.

M. Saint-Pierre: Vous parlez comme l'avocat du gouvernement fédéral qui serait inquiet de voir qu'une activité économique ne lui rapportera pas d'argent, puisqu'on sait que c'est le gouvernement fédéral qui reçoit la très forte proportion des taxes sur les profits des compagnies.

M. Morin: II y a également le Québec qui touche des taxes là-dessus. J'aimerais demander au ministre s'il a fait le calcul de ce que ça coûterait aux Québécois, en taxes, ce projet, année après année. Est-ce que le calcul a été fait?

M. Saint-Pierre: Je l'ai fait, et je vous l'ai dit, cela donne un surplus, par rapport au tarif théorique que vous me lancez sur l'Hydro-Québec, un surplus, à chaque année, d'au moins $175 millions.

M. Morin: Je ne vous parle pas du tarif, je vous parle des taxes.

M. Saint-Pierre: On a fait cela.

M. Morin: Non. Est-ce que vous pouvez rendre cela public?

M. Saint-Pierre: Si c'est approprié, je le rendrai public quand le projet sera complètement terminé. Dans le moment, il y e des études qui se poursuivent. Je ne suis pas comme M. Taillon, quand je ne suis pas rendu au fond du sujet, je ne prends pas position, puis je n'essaie pas de livrer comme complète une chose qui ne l'est pas. Je vous ai dit...

M. Morin: Mais c'est que vous avez pris position sur le projet. Vous l'avez annoncé.

M. Saint-Pierre: Non, M. le Président, je ne l'ai pas annoncé. Lorsqu'on a voulu le lancer sur une voie d'évitement, qu'il était très mal engagé, j'avais tellement à coeur ce projet pour la région de Québec, les 3,000 personnes qui vont y travailler, que j'ai tenté, avec la presse, d'apporter des précisions. Maintenant, l'engagement que j'ai pris, l'engagement que moi et que mes collègues, M. le Président, ont pris...

M. Morin: Est-ce que vous pourriez m'en fournir une copie, soit dit en passant?

M. Saint-Pierre: Je vais vous en fournir une copie. Il y a un changement à apporter c'est l'arrêté en conseil 475-75: que tout engagement de nature permanente autre que l'étude de praticabilité sus-mentionnée soit soumise pour approbation au lieutenant-gouverneur en conseil. C'est la limite des engagements que j'ai pris.

M. Morin: Est-ce que je pourrais? Merci beaucoup.

M. Saint-Pierre: C'est la seule que j'ai. Si la commission veut tirer des copies.

M. Morin: Voilà, merci.

M. Saint-Pierre: Je mentionne que je pourrais en donner une autre. On remarquera que le caractère du dactylo, en page 3, n'est pas comme les autres, c'est là que le nom de National South Wire est entré. A la dernière minute, au conseil des ministres, il y a eu un changement fait par le personnel du secrétariat, et malheureusement il s'est glissé une erreur, c'est-à-dire que..

M. Morin: A quelle page?

M. Saint-Pierre: La troisième page, vous voyez que le caractère du dactylo n'est pas le même: que le gouvernement du Québec accepte l'article 4.

M. Morin: Ah oui!

M. Saint-Pierre: Alors, vous voyez. Il s'est glissé une erreur. Un arrêté en conseil subséquent devrait la corriger, mais comme il n'y avait pas d'engagement permanent, cela devrait être: que l'Hydro-Québec convienne, avec la Société générale de financement, que pour le projet d'aluminerie dans la région de Québec, les taux d'électricité soient les suivants. Mais, comme on parlait depuis toujours du projet de la National South Wire, le personnel du secrétariat exécutif a ajouté cela pour corriger une autre erreur qui était là avant.

M. Morin: Est-ce que c'est une erreur? Est-que...

M. Saint-Pierre: Oui, c'est une erreur.

M. Morin:... l'Hydro-Québec va convenir effectivement avec la SGF ou avec le National South Wire?

M. Saint-Pierre: Non, c'est cela, avec la SGF, puisqu'il est bien sûr que l'Hydro-Québec convient avec celui qui est propriétaire.

M. Morin: Oui, c'était un lapsus, si on peut dire.

M. Saint-Pierre: Non, c'est qu'on a parlé de projet, voyons, M. le chef de l'Opposition.

M. Morin: Enfin je suis heureux que la correction ait été faite. Mais une deuxième question qui paraît soulevée par le projet, c'est la question de la transformation. Le ministre nous fait de belles déclarations, nous dit qu'il y a trois noms de compagnies qu'il ne peut pas dévoiler, qu'il a obtenu des promesses. Le projet paraît fort intéressant, à première vue. Le noeud du problème, c'est de savoir s'il va y avoir transformation ici ou ailleurs.

Alors là, il ne peut pas s'attendre à ce que nous nous contentions d'affirmations générales en disant: je sais que cela va se faire. Est-ce que le ministre peut nous dire s'il a eu des engagements formels, par écrit? Est-ce qu'il peut les rendre publics?

M. Saint-Pierre: M. le Président, tout le projet depuis un an a évolué dans ce contexte. Je ne demande pas au chef de l'Opposition, aveuglément, de me donner un chèque en blanc. Mais le moins que je pourrais lui demander, c'est que si on obtient ces engagements — parce que j'ai dit que je les rendrais publics — avant la prise de décision du gouvernement du Québec, que si je les obtiens par écrit, de compagnies responsables, que là le chef de l'Opposition nous souhaite bonne chance dans nos tractations. Il va être sûrement favorable au projet, si on atteint ce degré de transformation qui est tellement supérieur à ce qu'on a pu obtenir avant dans le Québec.

Je vais prendre un cas très hypothétique. On a parlé du secteur de l'automobile. Prenons un cas hypothétique, qui n'est pas vrai, juste pour être bien certain qu'on ne met personne sur de fausses pistes.

Ce ne serait pas prudent de dire, par exemple aujourd'hui, que la société General Motors va soumettre, la semaine prochaine, à son conseil d'administration un projet d'investissement de $55 millions, compte tenu qu'elle obtienne 10% du métal chaud d'un complexe d'aluminerie à Québec. Je risquerais de compromettre les négociations de dire publiquement: Telle société va soumettre un projet, la ssemaine prochaine, à son conseil d'administration et tout semble réglé avec elle.

Ce que je vous dis, c'est que nous avons trois projets — et ce ne sont pas des projets en l'air — avec des sociétés. Ces sociétés, bien sûr, veulent savoir quel va être le prix du métal chaud et, avant de le savoir, elles veulent avoir la confirmation de l'étude de rentabilité qui est en cours. On sait que l'étude de rentabilité ne fait, dans une large mesure, que colliger des chiffres qui sont déjà terminés. Sachant que l'aluminium se vend $0.39 aujourd'hui, elles ne veulent pas se faire dire que l'aluminium de Saint-Augustin va coûter $0.84. C'est évident qu'elles n'investiront pas $35 millions, si l'aluminium coûte deux fois le prix international. Mais, s'il semble que le projet est sain et qu'il arrive avec un prix compétitif, là je pense qu'on va avoir des engagements fermes.

Ce que je veux vous dire, c'est qu'il n'y aura pas un sou de dépensé dans la terre tant que l'ensemble du complexe — pas uniquement l'usine d'électrolyse — n'aura pas été réglé à notre satisfaction.

M. Morin: Je vais dire une chose au ministre. S'il peut, lorsque le dossier sera rendu public, nous rassurer sur la transformation sur place de l'aluminium de première fusion...

M. Saint-Pierre: Sauf pour la SGF, au départ. Sans cela, c'est...

M. Morin: Encore là, il faudrait des détails. M. Saint-Pierre: Oui.

M. Morin: S'il peut nous démontrer que nous ne perdrons pas d'une main ce que nous avons donné de l'autre, autrement dit, s'il peut nous démontrer que les pertes en taxes pour le Québec ou encore...

M. Saint-Pierre: C'est un manque à gagner; ce ne sont pas des pertes.

M. Morin: Un manque à gagner, si vous le préférez. Je veux bien utiliser une expression plus exacte, mais le ministre a compris ce que je voulais dire.

S'il peut nous démontrer aussi qu'il n'y a pas une subvention outrancière dans les tarifs préférentiels accordés par l'Hydro-Québec, s'il peut nous démontrer que ce grand complexe ne viendra pas empêcher le développement des autres entreprises d'aluminium au Québec, alors je pense qu'il aura notre appui et, d'ailleurs, il aura l'appui de tous les Québécois. Mais nous n'en sommes pas là. Il y a beaucoup de "si", de conditions dans ce que je viens de dire et le ministre comprendra, comme il l'a dit lui-même, il l'a admis à l'instant, qu'on ne peut pas lui donner un chèque en blanc là-dessus. C'est notre tâche de nous assurer que les conditions sont raisonnables et que l'ensemble s'inscrit dans une perspective de développement du Québec par les Québécois.

M. Saint-Pierre: M. le Président, vous me permettrez de dire que je suis extrêmement confiant d'être capable de vous donner toutes les garanties sur les quatre points que vous avez soulevés.

M. Morin: Bon! Cela étant, le ministre ne conviendrait-il pas qu'il serait utile qu'une commission parlementaire se penche sur le contrat de gérance qui interviendra entre la SGF et National South Wire?

M. Saint-Pierre: On voit que nous, avec la SGF, on ne fait pas uniquement des structures; on passe à l'action. Je pense qu'il est normal, une fois par année, je l'ai dit et j'insiste... On n'a pas eu besoin de demandes de l'Opposition pour le faire; cette année, ce sera vers la fin de mai; je pense qu'on tente de fixer les dates avec l'Opposition. Donc, nous allons avoir une commission parlementaire qui va faire venir à la barre des témoins les cadres supérieurs de la SGF. Là, on pose toutes les questions sur toutes les transactions de la SGF. Je pense qu'il faut faire au moins confiance à la SGF.

Vous savez, je n'ai pas l'enthousiasme fou de certains des vôtres pour les sociétés d'Etat, bien que je lui fasse très confiance, mais le moins qu'on peut faire, c'est de leur faire confiance qu'ils sont capables de justifier les gestes qu'ils posent. Une fois par année, cela me paraît très convenable que les parlementaires posent toutes les questions

qu'ils veulent sur tous les gestes que la Société générale de financement aurait pu poser dans l'année. Si la commission parlementaire veut exprimer publiquement qu'elle a des réserves tellement fortes qu'elle retire la confiance qu'elle avait dans ses dirigeants, nous prendrons les mesures appropriées.

M. Morin: Est-ce que le ministre, dans les documents qu'il rendra publics, aurait l'obligeance de calculer, année par année, la subvention que va comporter le tarif préférentiel d'électricité qui sera accordé, soit à la SGF, soit à la National South Wire? Est-ce que ce sera un élément du dossier? Est-ce que ce sera chiffré?

M. Saint-Pierre: Oui.

M. Morin: Le ministre repond affirmativement?

M. Saint-Pierre: Oui.

M. Morin: Bien! Je voudrais une précision. Est-ce que dans vos projets il s'agit de 150,000 ou de 250,000 tonnes de production, à l'heure actuelle?

M. Saint-Pierre: 250,000 tonnes. M. Morin: Le projet n'a pas changé M. Saint-Pierre: II n'a jamais changé.

M. Morin: Je voudrais aussi peut-être faire remarquer au ministre que dans vingt ans, lorsqu'il faudra moderniser les entreprises, il se posera certains problèmes. Par exemple, aujourd'hui, l'Alcan est aux prises, vous le savez, avec un problème de modernisation de ses entreprises, de ses "pot lines", et elle ne peut le faire qu'à même ses profits accumulés. A moins qu'elle ne refinance à nouveau, mais, normalement, elle ferait cela à même ses profits accumulés. Ce qui nous inquiète dans le projet du ministre — je le lui signale en passant — c'est que la SGF n'aura pas de profits accumulés, à ce moment, ou si peu que les problèmes de modernisation vont être considérables. Vous allez risquer de vous trouver, dans vingt ans, avec une usine qui demandera à être modernisée complètement, donc qui demandera de nouveaux investissements. Je me pose la question de savoir si ce n'est pas un aspect qui doit être fouillé plus avant.

M. Saint-Pierre: Non, M. le Président, parce qu'il y a une autre façon de regarder cela. Oublions le petit million pour M. Parizeau, mais la façon même que ces projets...

M. Morin: Si je comprends bien, c'est pour répondre à la critique de Parizeau que vous avez décidé d'investir.

M. Saint-Pierre: Non, c'est que je trouve l'argument simpliste parce qu'on tente de faire croire aux Québécois que la SGF va prendre une aluminerie, mais qu' elle ne fera pas de profit. Evidemment, elle ne fait pas de profit parce qu'elle n'investit pas. Je vais la faire investir puis elle va faire des profits supérieurs à toutes les entreprises canadiennes.

Non, il y a une autre façon de regarder cela. Etant donné la façon dont nous avons conçu les coûts de transfert, le prix coûtant incluant toutes les charges financières et autres, si on peut voir qu'il n'y a pas de profit, il faut voir aussi qu'il n'y a pas de perte non plus. Donc, après vingt ans, sans avoir investi, on se retrouve avec — et je maintiens encore qu'une usine d'électrolysaqui a vingt ans d'existence, on a à peine touché peut-être à la moitié de sa vie utile, au minimum. Une usine qui ne nous aura rien coûté et qui y aura une valeur — si je prenais votre argument de tantôt — de remplacement qui dépassera beaucoup $400 millions. Peut-être qu'il faudra faire des modernisations, mais il faut se rappeler qu'on n'aura rien investi, qu'on aura, dans l'avoir des actionnaires, au moins les $400 millions que cela vaut là-bas. Là, peut-être qu'il sera nécessaire pour la SGF, qui sera propriétaire à 100% de l'affaire... Au bout de vingt ans, je vous rappelle qu'il n'y a aucune obligation pour la SGF de continuer l'entente avec les partenaires. C'est-à-dire qu'au bout de vingt ans, à supposer que notre prix de transfert avec nos partenaires qui ont rendu possible le projet était 66% du prix international, le lendemain matin, on peut dire aux gens: Nous regrettons, mais nous,... Parce que, vingt ans, ce n'est plus un prix de transfert. C'est pour cela que nous avons réduit la période d'amortissement de 30 à 20 ans. C'est-à-dire qu'après vingt ans, c'est au prix international qu'on vend le métal chaud à ceux qui sont établis là. La seule chose qu'on leur donne, c'est un droit de premier refus sur les quantités et les prix. C'est-à-dire qu'avant de vendre 100,000 tonnes à la France, en lingots, théoriquement à un prix de $1 la livre, dans vingt ans d'ici, nos partenaires — cela me paraît très normal — auraient un droit de premier refus, au même prix, évidemment, puis aux mêmes conditions que les autres.

M. Morin: M. le Président, le ministre n'a peut-être pas touché à un point que j'ai soulevé qui est celui...

M. Saint-Pierre: ...des entretiens.

M. Morin: Oui.

M. Saint-Pierre: Nous avons eu des entretiens, je le répète, avec M. Leman et avec d'autres personnes, comme nous en avons constamment, à tous les jours, avec bien des partenaires.

Ces entretiens visaient, d'une part, à ce que l'Alcan nous fasse part de ses difficultés ou de ses problèmes, et, d'autre part, pour nous, de nous permettre de voir jusqu'à quel point l'Alcan pourrait réagir, d'une part, à une usine d'électrolyse mais, d'autre part, à l'idée que nous avions d'une transformation poussée.

Devant un non qui semblait bien justifié dans

le cas de l'Alcan, nous sommes allés voir d'autres points. Maintenant, cela me paraît inconcevable qu'une fois le projet terminé avec des partenaires j'aille demander la permission ou dire à l'Alcan: Seriez-vous intéressés alors que vous ne l'étiez pas il y a six mois? J'ai bien confiance à l'Alcan mais mon expérience dans d'autres secteurs m'a appris qu'à l'occasion des gens montrent de l'intérêt non pas pour réaliser le projet mais pour s'assurer qu'il ne soit jamais réalisé.

Vous savez qu'il y a ça qu'il ne faut jamais perdre de vue. Il y a des gens, aujourd'hui, qui expriment peut-être un intérêt pour certains secteurs mais il faut bien juger des motifs qui les poussent à exprimer un intérêt. Des fois, c'est pour s'assurer qu'il ne se passe rien là-dedans.

M. Morin: Est-ce que vous croyez que c'est l'attitude de l'Alcan que d'essayer d'empêcher...

M. Saint-Pierre: Non. Je ne crois pas...

M. Morin: ...qu'il se fasse tout autre développement?

M. Saint-Pierre: Non. Je n'ai pas dit que c'était l'attitude de l'Alcan. Mais il me semble que ce ne serait pas normal pour le gouvernement qu'à chaque fois qu'on a un projet d'investissement qui implique le secteur privé on aille demander et montrer aux yeux de tous les gens qui sont dans ce secteur nos intentions. De la même façon, avec l'Alcan nous examinons ce que le gouvernement peut faire pour l'aider parce qu'on voudrait aussi l'aider, dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, dans ce processus de modernisation.

Nous avons signé, avec le gouvernement fédéral, des ententes auxiliaires qui, au niveau du secteur manufacturier, nous permettent de mettre la main sur des sommes importantes. Il va falloir le faire. On ne peut pas le faire dans les nuages. Il va falloir le faire avec le secteur manufacturier. Peut-être que là il y a des projets qu'on pourrait faire avec l'Alcan. Bien sûr, quand on va être sur la fin de cela avec l'Alcan, on ne prendra pas ça pour aller le montrer à tous ceux qui sont dans le secteur de l'aluminium. Il y a une espèce de confidentialité dans les dossiers qu'il nous paraît nécessaire de respecter.

M. Morin: M. le Président, j'ai encore quelques questions sur le projet d'aluminerie. Après ça, nous pourrons passer à autre chose.

Pour ce qui est de l'emplacement, j'ai cru voir, à travers diverses déclarations de ministres ou de députés, qu'il y avait une certaine concurrence qui se faisait entre divers endroits de la région de Québec, de la grande région de Québec.

On a mentionné Beauport au départ, si ma mémoire est bonne; ensuite, il a été question de Neuville et, ensuite, de Saint-Augustin. Dans vos projets, tels qu'ils se trouvent actuellement, quel est l'emplacement choisi? Est-ce le parc industriel de Saint-Augustin?

M. Saint-Pierre: M. le Président, l'annonce prématurée de l'implantation possible d'une alu-minerie dans la région de Québec aurait pu vraisemblablement, comme conséquence, susciter une spéculation immobilière puisque les espaces de terrains étaient de l'ordre de 1,500 acres.

Le terrain qui est contigu ou, enfin, très près du parc industriel de Saint-Augustin étant un des terrains les plus favorables pour un tel site, nous avons écrit une lettre que je transmettais au président du Conseil des maires de la Communauté urbaine de Québec, M. Gilles Lamontagne, le 24 mars dernier. Après avoir, avec eux, examiné les possibilités, nous étions venus à la conclusion qu'il serait souhaitable que des procédures en expropriation soient amorcées dans les plus brefs délais, visant les terrains qui ont déjà été identifiés. Cette procédure devrait, par ailleurs, s'inscrire dans un projet d'élargissement du parc industriel de la Communauté urbaine de Québec.

Maintenant, encore une fois, vous me laisserez me rendre au troisième but avant de vous dire ce qu'il a l'air, le troisième but. Il n'y a pas de décision définitive, mais je dois admettre que le site de la communauté urbaine paraît sûrement comme un des plus favorables. Pour éviter de la spéculation, nous avons demandé que, par expropriations, la communauté urbaine prenne contrôle de ces sites ou en fige, en tout cas, la valeur ajoutée.

M. Morin: Est-ce que le ministre pourrait déposer cette lettre? Est-ce possible?

M. Saint-Pierre: Je n'y vois pas d'intérêt.

M. Morin: Je sais qu'il en a lu plusieurs extraits. Bien, je pense que l'Opposition y voit de l'intérêt, si cela ne lui fait rien. Est-ce que le ministre peut rendre la lettre publique?

M. Saint-Pierre: Moi, je peux, mais ce n'est pas d'un intérêt public très grand. Je ne sais pas pourquoi vous voulez l'avoir. J'ai lu à peu près toute la lettre, mais, si vous voulez avoir du papier, on va vous en donner.

M. Morin: Nous voulons avoir un dossier le plus complet possible, pour ne rien cacher au ministre.

M. Saint-Pierre: Et c'est d'après cela que M. Taillon va prendre position.

Une Voix: II est peut-être intéressé au terrain.

M. Morin: Ecoutez, j'ai dit au ministre que nous pouvons difficilement nous laisser mener par la main tant que nous n'aurons pas tous les détails, tant qu'il n'aura pas rendu tout le dossier public.

M. Malouin: Attendez avant de porter un jugement.

M. Morin: Or, il évoque devant nous des bribes du dossier; il serait donc normal que nous en

ayons connaissance. Est-ce que vous pouvez nous en faire faire une copie de cette lettre?

M. Saint-Pierre: Si vous voulez avoir des succès sur le plan électoral plus importants que la dernière fois, il faudrait que M. Taillon démontre plus d'intérêt pour la croissance économique de la région de Québec.

M. Morin: M. le Président, laissons les questions électorales de côté. Cela a peu à voir avec le projet. Du moins, jusqu'ici j'ai tenu pour acquis que...

M. Saint-Pierre: Avec le projet, cela n'a rien à voir.

M. Morin: ... ce n'était pas un projet électoral.

M. Saint-Pierre: Non, sûrement. Mais les déclarations de M. Taillon ont beaucoup à voir avec l'aspect électoral du dossier.

M. Morin: Je ne le pense pas.

M. Saint-Pierre: Là, comme ailleurs, il n'est pas sur la bonne trace.

M. Morin: Je pense, au contraire, que M. Taillon fait preuve de la plus grande objectivité possible, parce que, s'il prenait la pente facile, il dirait: C'est excellent pour la région de Québec; donc, pas de problèmes, on est en faveur.

M. Saint-Pierre: II prend l'autre pente; il dit que c'est mauvais pour la région de Québec parce que l'on donne l'électricité.

M. Morin: II dit qu'il s'interroge sur l'opportunité de cet investissement dans la région de Québec, compte tenu de l'ensemble de l'état de l'économie du Québec. C'est une autre affaire. De toute façon, M. Taillon n'est pas là pour interroger le ministre. S'il le veut, je peux l'inviter à venir cet après-midi, mais je pense que les membres de la commission parlementaire ne sont pas intéressés à ce qu'il vienne.

Des Voix: Non.

M. Morin: M. le Président, à moins que le ministre ne consente à ce que M. Taillon vienne à la commission, nous allons cesser d'évoquer ses prises de position et nous allons nous concentrer sur le projet lui-même.

Si j'ai bien compris le ministre, et sans lui demander exactement où se trouvent les terrains qui vont être expropriés — parce que je comprends très bien la discrétion qui est nécessaire dans les circonstances — puis-je simplement lui demander si les terrains sont immédiatement contigus au parc industriel?

M. Saint-Pierre: Pas immédiatement, mais enfin très près. Je pense que ce sont des terrains qui pouvaient être acquis, qui semblaient, après des discussions avec M. Dufour, de la communauté urbaine, et d'autres, les 1,500 acres les plus favorables.

C'est très près. C'était inclus dans le projet original du parc industriel et dans les études qui avaient été faites pour identifier son emplacement dans la communauté urbaine.

M. Morin: Et ça pourrait donc, sans entrer encore dans tous les détails, si ce n'est pas contigu, se trouver à peu près à quelle distance du parc industriel?

M. Saint-Pierre: En pieds ou en mètres?

M. Morin: En pieds ou en mètres, au choix du ministre.

Je ne demande pas une distance exacte; de quel ordre est-ce?

M. Saint-Pierre: L'ordre de grandeur, je ne le sais pas; peut-être un demi-mille au plus,quelque chose comme ça.

M. Morin: Un demi-mille au plus.

M. Saint-Pierre: Un demi-mille, un mille au plus. Assez pour être intégré à tous les services du parc.

M. Morin: Oui, je vois. Maintenant, je voudrais poser deux ou trois questions au ministre sur les origines du projet. Il se souviendra qu'il y a un an ou deux la Communauté urbaine de Québec avait été mêlée à un projet semblable d'aluminerie. J'aimerais lui demander ce qu'il y a de commun entre ce projet d'aluminerie de la CUQ et celui dont il nous fait part maintenant?

M. Saint-Pierre: Evidemment, je pense bien que les 58 commissariats industriels du Québec ont peut-être parlé à quelqu'un d'une compagnie d'aluminium, un jour ou l'autre dans leur existence, mais le projet que nous avons devant nous a germé, a été articulé comme concept essentiellement et presque à 100% au ministère de l'Industrie et du Commerce, comme idée. Il a été exploré avec des compagnies par le ministère de l'Industrie et du Commerce exclusivement. Il s'est précisé avec la compagnie National South Wire exclusivement par le ministère de l'Industrie et du Commerce. Contrairement aux affirmations qu'on retrouve dans les journaux du Québec, s'il n'en avait été que de la compagnie, il est possible, chiffres à l'appui, que d'autres sites du Québec auraient été retenus, présentant certains avantages au niveau de l'alimentation électrique. Le gouvernement du Québec, pour des considérations de politique régionale, a demandé expressément que le projet soit amené dans la région immédiate du Québec métropolitain.

Alors, contrairement à ce que certains affirment, ce n'est pas nous qui amenons des projets à

Bécancour. A l'occasion, et assez souvent, c'est nous qui sortons des projets de Bécancour pour les amener dans des régions qui, à notre avis, en ont plus besoin que Bécancour, dans une conjoncture donnée, soit sur le plan sectoriel ou soit dans le temps.

M. Morin: A vrai dire, Bécancour étant dans l'état où il se trouve...

M. Saint-Pierre: II y a beaucoup d'activité à Bécancour. Vous y êtes allé récemment?

M. Morin: Non, j'avoue que, depuis six mois, je n'ai pas passé...

M. Saint-Pierre: II y a beaucoup d'activité. C'est un véritable chantier de construction.

M. Morin: Nous allons justement en parler à un autre moment de l'étude des crédits. Est-ce que je peux demander au ministre, étant donné la réponse qu'il vient de me donner, ce qu'il est advenu du projet de la CUQ qui, à ma connaissance, était très avancé?

M. Saint-Pierre: Ce n'était pas un projet trop trop sérieux. Il n'y a jamais eu de projet. Vous savez, un Japonais peut aller voir M. Trottier et dire: Moi, j'aimerais avoir une aluminerie. Cela ne veut pas dire que c'est un projet sérieux. Nous, des gens comme cela, si on vous donnait cela dans les journaux, à tous les jours il y aurait 2,000 projets qu'on pourrait annoncer.

M. Morin: M. le ministre, je ne voudrais pas insister mais, à ma connaissance, les prospects, comme on dit, les suspects comme disait le sous-ministre tout à l'heure, étaient sérieux et je pense même qu'on avait déjà choisi l'emplacement dans la région de Québec. Est-ce que le ministre est au courant de cela?

M. Saint-Pierre: Pas à notre connaissance. C'était un projet tellement important puis... Pas à notre connaissance, on n'était pas au courant de cela.

M. Morin: Vous n'êtes pas au courant des projets de la CUQ dans le domaine de l'aluminerie au Québec?

M. Saint-Pierre: Non, je ne sais pas si elle a des secrets pour nous, mais nous ne sommes pas au courant de ce projet. Au moment où nous avons dit à la compagnie: Ce n'est pas telle région, cela va être la région de Québec, là, bien sûr, nous et pas elle, nous avons fait entrer dans le coup la Communauté urbaine de Québec. C'est à ce seul moment. Je ne lui en fait pas de reproche, mais autant nous avons eu une très bonne collaboration de la Communauté urbaine pour cette expropriation des terrains, autant, je pense bien, elle-même, avec modestie, doit admettre que sa contribution pour définir le projet jusqu'ici, pour le rendre au stade où il est actuellement, est assez marginale.

M. Morin: Une dernière question, je vois que le temps a passé vite, M. le Président, et que vous voulez, d'après ce que vous m'avez dit, ajourner à midi. Est-ce que le dossier complet qui nous sera soumis par le ministre éventuellement comportera également des calculs sur les taxes qui ne seront pas perçues par le Québec, étant donné la structure qui a été adoptée par le gouvernement pour ce projet?

M. Saint-Pierre: Vous m'avez déjà posé la question, j'ai répondu oui.

M. Morin: Je n'étais pas sûr que le ministre ait répondu à ma question.

M. Saint-Pierre: Ah! oui, j'ai répondu à la question.

M. Morin: Donc, il y aura des calculs sur les taux d'électricité, sur les taxes. Nous aurons un dossier complet.

M. Saint-Pierre: Les taxes dans les deux sens, le manque à gagner possible à cause de la structure corporative adoptée...

M. Morin: C'est cela.

M. Saint-Pierre: ... avec tous les avantages que ceci implique pour le Québec.

Cependant, on se rappelle que l'impôt sur les sociétés est perçu dans une très forte proportion par le gouvernement fédéral. Mais il y aurait l'autre côté de la médaille — parce qu'il y a toujours deux côtés à une médaille — ce sont les taxes qu'effectivement le gouvernement fédéral va percevoir tant des compagnies que des individus qui vont travailler dans le projet. C'est cela que je vous ai donné. C'est d'un ordre de grandeur de $100 millions par année, cumulativement, pour chaque année du projet.

On a vérifié qu'à aucune année du projet on ne sera, si vous voulez, déficitaire.

M. Morin: $100 millions c'est le total cumulatif de toute l'affaire? Sur combien d'années cela?

M. Saint-Pierre: C'est cela. Sur la vie du projet, sur les 20 ans.

M. Morin: Les 20 ans.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Alors la commission suspend ses travaux jusqu'à quatre heures cet après-midi, après la période des questions.

M. Morin: Après l'Assemblée?

Le Président (M. Houde, Limoilou): Oui, après la période des questions.

(Suspension de la séance à 11 h 59)

Reprise de la séance à 16 h 43

M. Houde, Limoilou (président de la commission permanente de l'industrie et du commerce, du tourisme, de la chasse et de la pêche): A l'ordre, messieurs!

Les membres de la commission cet après-midi sont les suivants: M. Bellemare (Johnson); M. Cadieux (Beauharnois); M. Côté (Matane) M. Denis (Berthier); M. Dufour (Vanier); M. Lachance (Mille-Iles); M. Lapointe (Laurentides-Labelle); M. Bédard (Chicoutimi) remplace M. Lessard (Saguenay); M. Déziel (Saint-François) remplace M. Malouin (Drummond); M. Marchand (Laurier); M. Morin (Sauvé); M. Samson (Rouyn-Noranda); M. Saint-Pierre (Chambly).

Le ministre de l'Industrie et du Commerce.

M. Saint-Pierre: Avant d'abandonner le dossier de l'aluminerie, vous me permettrez peut-être une brève remarque pour déplorer la guerre de mots qui semble s'annoncer entre les dirigeants de la compagnie Alcan Aluminium et le gouvernement du Québec sur ce projet.

J'ai pris con naissance, sur l'heure du dîner, des rapports publiés dans le Soleil du jeudi 8 mai 1975, donnant suite à la conférence que M. Leman donnait hier matin au Cercle de presse de Chicoutimi, de même que d'une dépêche de la Presse canadienne au sujet du même incident.

Je l'ai dit ce matin. Vous me permettrez de le répéter. La compagnie Alcan Aluminium qui a son siège social à Montréal est sûrement une des compagnies pour lesquelles nous avons à la fois le plus de fierté et le plus d'attachement. C'est une compagnie qui, traditionnellement, a montré beaucoup d'ouverture en matière de relations de travail, en matière d'innovation et en matière de dynamisme. C'est une compagnie dont la taille, sur le plan international, apporte au Canada et au Québec, une très forte réputation.

Durant toute l'année, j'ai parcouru le Québec pour rechercher constamment un plus grand engagement des Québécois dans le secteur économique, il est difficile de trouver des exemples plus frappants à proposer aux jeunes Québécois que celui de M. Leman lui-même qui, après une longue carrière au sein de l'Alcan Aluminium a atteint le sommet qu'on peut atteindre dans le secteur industriel, c'est-à-dire la présidence d'une compagnie aussi complexe. Nul doute que la compétence, le dynamisme, le travail, la motivation de M. Léman pourraient à juste titre être donnés en exemple à l'ensemble des Québécois que j'ai tenté d'intéresser au monde des affaires.

Bien sûr, mes connaissances de l'industrie de l'aluminium sont fort modestes et fort limitées comparées à celles de M. Leman. Elles sont peut-être de zéro comme il le disait lui-même, je ne sais pas et je me soumets bien volontiers au jugement de n'importe qui qui veut juger un homme public.

Le mandat et la longue carrière de M. Leman l'autorisent sûrement à parler avec beaucoup d'autorité de tout ce qui touche l'industrie de l'aluminerie.

Quant à moi et à mes collaborateurs dans le dossier, je pense que nous avons, dès le départ, tenté de donner le meilleur de nos connaissances, de nos énergies pour les seuls intérêts que nous avons servis dans ce dossier, à savoir les intérêts de la province de Québec. Vous me permettrez, en terminant, deux ou trois brefs commentaires pour tenter d'éviter, malgré quelques rencontres, une incompréhension qui semble aller en s'élargissant. Au sujet de la concurrence entre les deux projets, je n'ai pas dit que le projet québécois ne viendra, en aucune façon, concurrencer l'Alcan ou la Reynolds dans les décennies à venir. J'ai simplement dit que, face à des changements, particulièrement au niveau de l'industrie de l'automobile, toutes les études que nous avons pu consulter ont laissé voir très clairement un manque de production, une insuffisance de production face à l'évolution des marchés, que cette insuffisance des moyens de production laissait place à la construction, exigeait la construction d'aluminerie et que, personnellement, je préférais voir ces alumineries installées au Québec, qu'installées dans d'autres pays du monde.

Egalement, la dépêche de la Presse canadienne mentionne que l'Alcan n'est pas prête à s'engager à transformer 150,000 tonnes d'aluminium brut en produits finis ou semi-finis au Québec. C'est pour cette raison que je connaissais, que le projet définitif ne fut pas soumis à l'Alcan et que le gouvernement n'a pas approché l'Alcan de façon sérieuse. Mais je pense que nous avons donné à l'Alcan et à d'autres compagnies la chance et le privilège — si on peut l'appeler ainsi — de participer avec nous dans les premières discussions qui tentaient de mettre sur pied, au Québec, un complexe de l'aluminerie. Je pense qu'il serait, également, extrêmement faux — et je n'y vois aucune raison moi-même — de dire et je cite encore la Presse canadienne: "que le gouvernement flirte aussi avec les Arabes pour financer ce projet." C'est dénué de tout fondement. Il n'y a aucun rapprochement avec les faits. Les démarches, qui ont pu êire prises jusqu'ici au sujet du financement, touchent essentiellement le marché canadien, québécois et le marché américain. Avec sincérité, moi-même, je pense qu'on ne peut accepter la prémisse que rien ne doit se faire pour ne pas déranger le statu quo. Je pense que, lorsqu'il y a des marchés à explorer, la preuve en est les investissements spectaculaires que nous avons faits au Québec depuis trois ou quatre ans. C'est justement pour changer le statu quo parce qu'il y a des occasions qui se présentent et doivent être exploitées. Je maintiens de nouveau que le projet que nous tentons de mettre en branle correspond et sert très bien les intérêts du Québec.

Personnellement, je ne crois pas qu'il déplacera — et j'en ai la conviction profonde — des emplois d'Arvida pour les emmener à Québec. Ce n'est pas le jeu que nous voulons jouer. Pour s'en convaincre, on n'aura qu'à lire le dernier rapport annuel de l'Alcan où on voit que l'Alcan — si j'avais le rapport, je vous donnerais le chiffre précis — est obligée d'acheter, dans le moment, des

quantités très considérables de lingots sur les marchés internationaux. On le voit en toutes couleurs dans un graphique que j'ai à la mémoire, mais que je n'ai pas devant moi, dans son dernier rapport annuel. Les quantités d'achats sont même supérieures à la capacité de notre usine que nous voulons installer dans trois ans à Québec.

Un autre point, c'est qu'il me semble peu conforme à la vérité de tenter de tirer des conclusions d'une conjoncture actuelle que nous vivons dans le secteur de l'aluminium, où il peut y avoir pour une courte période de temps, une surcapacité de production par rapport à une implantation qui n'aura des effets que dans trois ou quatre ans, c'est-à-dire lorsque l'usine sera complétée. Et là, où la situation, d'après l'avis de plusieurs experts, indiquera clairement un manque à gagner qui a été chiffré par plus de deux millions de tonnes.

Ces propos étant terminés, j'espère, non pas comme le disait le journaliste M. Roger Leroux, savoir qu'il nous faudra enterrer la hache de guerre mais qu'il sera possible de voir ce projet dans la perspective, à la fois de servir les intérêts de l'ensemble du Québec et de son projet complémentaire à la croissance de l'Alcan au Québec que nous, du ministère de l'Industrie et du Commerce, souhaitons et auquel nous serions heureux d'apporter toute notre contribution, qu'elle soit financière ou humaine.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Le député de Chicoutimi.

M. Bédard (Chicoutimi): M. le Président, je n'ai pu être présent auparavant à la commission, puisque j'étais à la commission des transports, pour l'étude des crédits. Je savais qu'on discutait quand même d'un projet, en parlant d'aluminerie, qui est extrêmement important, du moins sur le point des interrogations que la population de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean se pose.

Le ministre a tenu à faire une petite mise au point, il a sans doute remarqué que j'avais en main le contenu de la conférence de presse qui a été donnée hier par M. Leman dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean. Je crois au moins comprendre un changement d'attitude de la part du ministre... vous me permettez de finir? ...qui a affirmé qu'il n'avait jamais dit que la nouvelle alu-minerie, à Québec, pourrait entrer en concurrence avec l'Alcan.

A une question que je lui posais le 1er mai 1975, il n'y a pas tellement longtemps, la semaine dernière, à l'Assemblée nationale, le ministre avait affirmé ceci, et je le cite textuellement: "Ceci dit, je puis confirmer au député de Chicoutimi, comme je l'ai fait d'ailleurs aux représentants des travailleurs de l'Alcan qu'il a sûrement pu consulter lui-même, après les discussions que j'ai eues avec les dirigeants de l'Alcan, que le projet ne vise aucunement des marchés qui sont actuellement détenus par l'Alcan, particulièrement à son usine d'Arvida".

Je pense qu'il était clair, dans l'esprit du ministre qu'il n'y avait pas d'idée de concurrence en- tre rétablissement de ce projet d'une aluminerie à Québec et le marché présentement détenu par l'Alcan.

M. Saint-Pierre: Pour éclairer le député de Chicoutimi, je précise à nouveau, les mots sont très importants.

M. Bédard (Chicoutimi): J'aimerais bien.

M. Saint-Pierre: C'est évident que, théoriquement, on pourrait dire que tout avocat, dans la province de Québec, est en concurrence avec un autre avocat qui peut exercer dans la province de Québec.

Je pense qu'il est également vrai de dire qu'un avocat qui est établi à Sept-lles ne dessert pas les mêmes marchés qu'un avocat qui est établi à Val-leyfield.

C'est dans ce sens que, compte tenu de nos partenaires et des marchés qui sont visés, je maintiens de nouveau que l'aluminerie que nous projetons à Québec ne vise pas les marchés actuellement détenus par l'Alcan.

Cela ne veut pas dire que dans dix ans, il n'y aura pas un vendeur...

M. Morin: Le parallèle est boiteux.

M. Saint-Pierre: Non, le parallèle n'est pas boiteux. C'est évident que tous ceux qui sont dans l'industrie de l'aluminium sont en concurrence les uns avec les autres.

Mais ce que j'ai tenté de prouver, c'est qu'il y avait un manque de production prévisible et que les marchés que nous visions avec le projet n'étaient pas ceux actuellement détenus par l'Alcan. Peut-être que la meilleure preuve de ce manque à gagner, au niveau de l'usine de l'électrolyse, se trouve à la page 12 du rapport 1974 de l'Alcan et j'y trouve moi-même... Au dernier chiffre en haut, à la page 12 dans le graphique, on voit que l'achat de métal de l'Alcan, en 1974, a été d'au moins 500,000 tonnes, alors que notre capacité de production, ici, est de 250,000 tonnes.

On pourrait être malin et dire: Le moins que l'Alcan pourrait faire, c'est d'acheter au moins la moitié de ce qu'elle fait actuellement de l'usine du Québec, au lieu de l'acheter de l'extérieur; je ne sais pas où elle l'achète actuellement. Mais ce n'est pas notre but, parce que notre but, c'est de transformer complètement le métal chaud en des produits finis ou semi-finis.

Je vois encore la dépêche de la Presse canadienne d'aujourd'hui qui dit: L'Alcan n'est pas prête à faire cela. Je ne suis sûrement pas pour forcer l'Alcan à faire des choses qu'elle n'est pas prête à faire. Elle a peut-être d'excellentes raisons de ne pas le faire, mais j'ai des gens responsable qui sont prêts à le faire. Je pense que, ce qu'ils veulent faire, c'est dans l'intérêt des Québécois. Je ne suis pas lié à l'Alcan, je ne sers pas les intérêts des actionnaires de l'Alcan, je sers les intérêts des 6 millions de Québécois. Je pense que je les sers en faisant cela.

M. Bédard (Chicoutimi): Si cela n'entre pas en concurrence, comme vous le dites, parce que vous faites une distinction qui ne m'apparaît pas...

M. Saint-Pierre: De marché.

M. Bédard (Chicoutimi): Oui, une distinction de marché, mais si c'est vrai, si vous permettez...

M. Saint-Pierre: Un instant! Mais, à ce titre, M. le député, il n'y aura pas un investissement dans votre région, parce que c'est évident que la prochaine entreprise qu'on va essayer de faire, dans le Saguenay-Lac-Saint-Jean, à partir du projet dont vous voulez me parler tantôt de Saint-Félicien, c'est évident que Saint-Félicien va être en concurrence avec Price, avec Domtar, avec CIP. Si j'acceptais cette théorie qui a été mise de l'avant, il n'y aurait rien qui se passerait dans le Québec, parce que ce serait en concurrence avec ce qui existe déjà.

M. Bédard (Chicoutimi): Effectivement...

M. Saint-Pierre: Notre raisonnement, c'est qu'on ne doit pas encourager l'investissement dans les moyens de production, là où il n'y a pas de marché, là où un investissement résulte simplement en une concurrence tellement indue qu'elle cause l'affaiblissement des marchés, une insécurité dans l'emploi, une insécurité chez les actionnaires. Mais, là où il y a un déficit dans les moyens de production, comme c'est le cas dans le papier-journal, dans une perspective à long terme, je pense que, tantôt, vous allez dire qu'on est bien justifié de pousser de l'avant le projet de Saint-Félicien dans votre région.

M. Bédard (Chicoutimi): Je ne conteste pas qu'il y ait concurrence, même si vous aviez dit, à un moment donné, en faisant la distinction des marchés qui sont visés par la nouvelle aluminerie, qu'ils ne seraient pas ceux, occupés par l'Alcan, présentement; je ne nie pas qu'il y ait concurrence. Au contraire, je crois qu'il y aura une concurrence. C'est dans ce sens que, à un moment donné, à l'Assemblée nationale, puisque vous l'admettez qu'il y a une concurrence qui va s'établir, je vous demandais quelle conséquence cela pourrait avoir pour la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean.

Vous m'avez dit, à ce moment: II n'y a aucun danger, aucune conséquence nuisible, concernant des projets d'expansion dans d'autres régions où l'Alcan est installée et, particulièrement, au Saguenay-Lac-Saint-Jean. Cependant, je dois remarquer que, dans sa conférence de presse, hier, le président, M. Leman, a quand même affirmé que si le projet de I'aluminerie, à Québec, réussit... Remarquez que je ne suis pas contre le projet de la construction d'une aluminerie, à Québec, mais il a très bien spécifié que, si le projet réussit, il est, normalement — c'est M. Leman qui s'exprimait — envisageable qu'on songe en parlant de l'Alcan, à prendre de l'expansion.

Il spécifiait ceci: "Dans ce cas, ce sont les industries existantes qui en subiront les contrecoups et les régions où elles sont implantées". C'est dans ce sens que je me dis: A qui vais-je faire confiance? Au ministre de l'Industrie, qui essaie de rassurer la population du Saguenay-Lac-Saint-Jean, et c'est son droit et son devoir, ou encore à M. Leman, qui prétend peut-être, à juste titre, avoir quand même certaines des connaissances, non seulement peut-être, mais sûrement des connaissances aussi élaborées que celles du ministre de l'Industrie et du Commerce, concernant l'aluminium. Or, M. Leman nous dit que cela peut avoir des conséquences et pour les régions où Alcan est implantée, qu'il peut y avoir un contrecoup.

C'est tellement vrai que le ministre est au courant que récemment l'Alcan avait annoncé des projets d'expansion dans la région. Il est évident que lorsque M. Leman est allé tout dernièrement, soit hier en l'occurrence, dans la région, on s'est informé pour savoir quel sort serait fait à ces projets d'expansion. Ce dernier a très clairement exprimé qu'il y avait une remise en question de ce côté. Vous allez me dire...

M. Saint-Pierre: Ce n'est pas un interrogatoire, mais la vérité a ses droits quand même. Je pense que le député savait, ce n'est pas un secret de polichinelle, l'automne dernier, avant même l'automne 1974, que l'Alcan, avant même d'être au courant de la possibilité d'une aluminerie dans la région de Québec, avait déjà commencé — je pense qu'en reprenant les journaux de la région, on pourrait en avoir la preuve — à mettre le frein à des investissements qui démarraient. Elle l'a fait pour des raisons qui n'avaient rien à voir au projet d'aluminerie qui tenait à des perspectives de croissances de la vente de ses produits, et peut-être à une difficulté de trouver, comme M. Leman le mentionne, les montants d'argent ou l'emprunt, compte tenu du ratio d'avoir de ses actionnaires et de dettes à long terme. Cela n'avait rien à voir avec I'aluminerie et cela avait déjà été annulé ou remis à plus tard.

Il ne s'agit pas d'invoquer que c'est hier que M. Leman a dit aux gens de Chicoutimi: Vous n'aurez pas votre expansion, à cause de ce que le gouvernement a fait à Québec...

M. Bédard (Chicoutimi): Non, il l'a dit bien avant. Dès que vous avez annoncé votre projet d'aluminerie, à ce moment — vous permettez que je finisse — il l'avait très clairement dit dans une conférence de presse.

M. Saint-Pierre: II l'avait fait avant.

M. Bédard (Chicoutimi): D'ailleurs, j'avais posé la question au ministre le 1er mai 1975, pour savoir quelle était sa réaction, face à cette assertion de M. Leman. Le ministre m'avait répondu, le 1er mai 1975 toujours... Ma question était la suivante: Le ministre est-il au courant de la déclaration du président de l'Alcan, M. Leman, qui a dit

très clairement que l'installation de ce projet d'aluminerie dans la région de Québec pourrait avoir des effets sur de nouveaux projets d'expansion qui avaient été déjà annoncés, pour la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, par l'Alcan? La réponse du ministre est la suivante. En l'occurrence, c'est vous-même: M. le Président, il y a bien des choses, dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, qui ont été écrites sur ce projet. Je peux simplement dire qu'ayant rencontré le président de l'Alcan quelques jours après les déclarations qu'on mentionne, celui-ci m'avait dit que les journalistes l'avaient mal cité. Comme le dit le ministre: La vérité a ses droits. Il ne semble pas qu'on l'ait si mal...

M. Saint-Pierre: Continuez. M. Leman m'a dit... Parce que vous aviez pris cela à partir des journaux. Dans mon bureau, à Montréal, M. Leman m'a dit: Les journalistes m'ont cité. Je n'ai jamais dit qu'on avait annulé les projets à cause de votre annonce d'un projet.

M. Bédard (Chicoutimi): Si je peux continuer, j'ai fait une remarque, à la suite de votre réponse, en disant: On va demander à M. Léman si c'est vrai qu'il vous l'a dit. Comme vous l'avez dit tout à l'heure, la vérité a ses droits.

Il reste quand même une chose. M. Leman est venu tout dernièrement dans la région et le message qu'il a donné aux gens de la région du Saguenay-Lac-St-Jean n'est pas différent de celui qu'il a donné le lendemain de la conférence de presse que vous aviez tenue sur le futur projet d'aluminerie. Je comprendrai qu'on puisse se poser la question, à savoir jusqu'à quel point il est vrai que M. Leman a dit au ministre, en privé, qu'il avait été mal cité, lorsqu'on voit qu'il n'a pas changé son message, lors de sa dernière visite dans la région du Saguenay-Lac-Saint-ean. Si c'était vrai qu'il vous avait dit cela privément, il me semble que le message qu'il est venu livrer à la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean aurait été différent de celui qu'il a donné hier, qui est exactement le même que celui qu'il a donné lorsque vous avez annoncé votre projet d'aluminerie à Québec.

M. Marchand: M. le Président, le ministre me permettrait-il un mot, s'il vous plaît?

Je trouve extraordinaire de voir le député de Chicoutimi défendre une multinationale. Remarquez que je suis en faveur des multinationales. Mais, un groupement politique séparatiste qui combat toujours les multinationales...

M. Bédard (Chicoutimi): II ne comprendra jamais rien, lui!

M. Marchand: ... vient aujourd'hui défendre une multinationale pour se faire un peu de capital politique parce que le Québec a décidé de faire quelque chose dans ce domaine. A sa place, j'aurais un peu honte.

M. Bédard (Chicoutimi): Moi, j'aurais beau- coup plus honte de ne comprendre absolument rien au débat que nous tenons à l'heure actuelle et c'est ce qui semble ressortir des remarques que vient de faire le député de Laurier...

M. Marchand: C'est votre jugement, mais c'est ce qui ressort de votre débat.

M. Bédard (Chicoutimi): ... et je vais vous prouver que vous ne comprenez rien. M. le Président, je n'ai jamais dit que j'étais pour ou contre...

Le Président (M. Houde, Limoilou): Vous allez demeurer sur le même ton, si vous voulez...

M. Bédard (Chicoutimi): D'accord.

Le Président (M. Houde, Limoilou):... et, à ce moment, cela sera plus agréable, cela ira mieux.

M. Bédard (Chicoutimi): J'ai bien pris garde de dire au départ que je n'étais pas systématiquement contre le fait qu'il y ait une nouvelle aluminerie à Québec. Je n'ai pas dit que j'étais contre l'Alcan. Rien de semblable. Simplement, et c'est dans ce sens que se situe ma préoccupation, je pense qu'étant donné qu'on annonce un projet d'une telle envergure dans le Québec, il est normal — et le député de Chicoutimi n'est pas le seul qui se pose des questions là-dessus — qu'on achemine les préoccupations de l'ensemble de la population du Saguenay-Lac-Saint-Jean, qui se pose des questions et veut savoir quelles seront les retombées sur la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean. Cela va-t-il amener des pertes d'emplois? Cela va-t-il bloquer des projets d'expansion? On est d'autant plus en mesure et on est d'autant plus justifié de se poser la question qu'on est en face des déclarations d'une compagnie qui est installée depuis longtemps dans la région—l'Alcan — qui, par la voix de son président, fait certaines affirmations qui ne peuvent faire autrement qu'être inquiétantes pour l'ensemble de la région lorsque l'on sait le nombre de travailleurs qui sont affectés à ses usines.

C'est dans ce sens que j'ai posé mes questions au ministre de l'Industrie et du Commerce. D'ailleurs, dans la conférence de presse qu'il a donnée, annonçant le projet, le ministre avait bien spécifié certaines conditions, entre autres, et je le cite textuellement: "En étudiant ces propositions, nous avons tenu compte constamment de cinq facteurs. Premièrement, d'abord viser à protéger les emplois des Québécois dans les alumineries existantes... "il me semble que c'est clair" ...ce qui implique la recherche de nouveaux marchés présentement non desservis par les alumineries du Québec."

Je pense que c'est tout à fait normal de demander au ministre, à l'heure actuelle, étant donné les récentes déclarations du président de l'Alcan, s'il peut nous assurer — et sur quoi il se base pour le faire, s'il veut le faire — que ce projet de construction d'aluminerie à Québec n'aura pas pour effet de diminuer les emplois dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean et n'aura pas pour ef-

fet de bloquer certains projets d'expansion déjà annoncés.

Je pense bien que je ne fais pas de politique partisane lorsque je pose ces questions au ministre. Si ce n'est pas moi qui les lui pose, et s'il a l'occasion de venir, en fin de semaine, dans la région, elles vont lui être posées par les média d'information de toute façon.

M. Saint-Pierre: M. le Président, pour les raisons que j'ai mentionnées, comme il y a un déficit... je lis dans le rapport de Openheimer de New York, que d'ici 1977, la demande mondiale sera de près de 18 millions de tonnes métriques, contre une capacité de production totale de 16,362,000 tonnes métriques, laissant un écart d'un peu plus de 1,600,000 tonnes métriques. Dans ce contexte, voyant que l'Alcan déjà achète 500,000 tonnes de métal par année, il me semble qu'il y a de la place pour avoir un nouveau producteur qui devrait permettre une croissance régulière tant chez les producteurs actuels que dans le projet qui nous intéresse.

A ce titre, encore une fois, l'étude Openheimer prévoit une croissance moyenne de la demande estimée à 8.7% par annéetl'ici 1980. Elle fait état également de la hausse très forte des prix de l'aluminum qui sont passés de $0.22 au début de 1972 à $0.39 la livre en fin d'année 1974. Elle mentionne tous les facteurs qui vont tendre à favoriser les régions qui sont dotées de sources d'énergie, dans ce processus de transformation, puisque la plupart des autres pays, n'ayant pas de projets comme la baie James ou des projets qui sont à base de ressources hydrauliques, se voient acculés à des coûts d'énergie extrêmement élevés, et ceci donne donc un avantage au Québec, un avantage dont peuvent à la fois profiter la nouvelle aluminerie de la région de Québec et l'Alcan.

Vous faisiez tantôt état de certains liens entre la décision de l'Alcan... Je ne voudrais pas faire un chassé croisé, mais je vous réfère au rapport annuel de l'Alcan en page 2. Je cite: "II semble que les besoins en capitaux pour l'entretien et ia modernisation des installations existantes et pour l'expansion future soient hors de proportion par rapport aux capitaux qui seront vraisemblablement disponibles, surtout en période de récession. Un peu plus loin, on voit la capacité de financer et de maintenir en marche des installations neuves afin d'entreprendre des travaux d'expansion, si modérés soient-ils est fortement mis en doute." C'est dans le rapport du 29 janvier 1975. Un peu plus loin: "Comme il est impossible de prévoir la durée, l'envergure du ralentissement économique, nous sommes en voie de réduire notre production ainsi que notre programme d'immobilisation, certains projets, considérés comme prioritaires, étant mis au ralenti jusqu'à nouvel ordre. Le 29 janvier 1975 cela a été publié. Vous vous rappelez que ma conférence de presse pour le projet était quand même à la mi-février ou vers le 25 février.

M. Bédard (Chicoutimi): C'est évident que ce n'est pas facile de prendre une décision et d'évaluer avec certitude toutes les situations. Quand vous parlez de la situation actuelle du marché, dans votre conférence de presse — et vous venez de le répéter je crois — vous avez fondé vos espoirs sur une étude qui a été faite par la firme Openheimer de New York indiquant que la demande va croître jusqu'en 1980 au rythme minimum de 8.7% par année. Cependant, c'est clair que ce sont des spécialistes en la matière et je pense que M. Leman est également un spécialiste en la matière.

M. Saint-Pierre: Je le reconnais volontiers.

M. Bédard (Chicoutimi): II prétend, il l'a dit, dans sa conférence de presse hier, que la situation du marché va croître, pour les six ou sept prochaines années, entre 4% et 5% au lieu de 8.7% par année, tel que dit par la firme Openheimer. C'est évident que ça peut changer la situation.

M. Saint-Pierre: Non, ça ne peut pas changer la situation, parce que, même avec les chiffres — et peut-être M. Leman a, sûrement, de bonnes hypothèses pour retenir ces chiffres — même à cela, lundi dernier, il n'y a pas très longtemps, à Montréal, de bouche à bouche — je suis certain que si vous lui demandiez, il vous confirmerait ça — M. Leman a confirmé avec moi...

M. Bédard (Chicoutimi): Je commence à avoir peur de ce que vous dites, de bouche à bouche, parce que...

M. Saint-Pierre: N'ayez pas peur.

M. Bédard (Chicoutimi): Après la réponse que vous m'avez faite en Chambre, selon laquelle M. Leman avait été mal cité, je m'aperçois qu'il n'a pas été mal cité...

M. Saint-Pierre: Devant témoins. Non, non je m'excuse...

M. Bédard (Chicoutimi): Son message est le même.

M. Saint-Pierre: Non, attendez, on parle de bien des choses dans une journée.

M. Bédard (Chicoutimi): D'accord.

M. Saint-Pierre: Lundi dernier, M. Leman a admis avec moi, devant des gens qui sont ici alentour, que c'était vrai qu'à long terme, le monde, globalement, avait besoin de capacités additionnelles de production.

M. Bédard (Chicoutimi): Cela, c'est clair qu'il y a un besoin, mais c'est important de savoir le pourcentage du besoin et les différences dans ce

pourcentage peuventquand même changer la situation du marché. Vous admettrez au moins ça avec moi.

M. Saint-Pierre: Je vous ai dit qu'en 1977, ce qui est bientôt, on ne sera pas capable de combler ça avec 8%, il y a presque un besoin de 1,600,000 tonnes. Ce qu'on va jeter dans ça, ce sont 250,000 tonnes. C'est vrai qu'il y a peut-être d'autres projets, mais de moins en moins, parce qu'il n'y a pas grands endroits au monde — vous connaissez votre géographie assez pour ça — qui ont les avantages qu'a le Québec, au plan de l'énergie hydraulique.

Le projet de la baie James, c'est valable. En fait, je l'avoue bien candidement, c'est son droit le plus absolu — si je peux retrouver le document — ce qui ne plaît pas à M. Leman, je vais vous le dire, il l'a dit lui-même, je vais vous citer ses paroles...

M. Bédard (Chicoutimi): II y a plusieurs choses qu'il n'aime pas.

M. Saint-Pierre: Un instant, M. le Président, je l'ai ici. Je vous cite le Soleil du vendredi, 14 mars 1975, dans lequel M. Leman a clairement indiqué que les administrateurs s'inquiétaient, sérieusement, sur l'attitude du gouvernement: "Ce qui nous inquiète surtout, c'est ce principe qui veut que le gouvernement entre en concurrence avec un de ses contribuables."

M. Morin: M. le Président, est-ce qu'il me serait permis de nous résumer, à la suite de ce long débat qui dure depuis ce matin, au sujet du projet d'aluminerie dans la région de Québec. J'ai eu l'occasion déjà de le dire deux ou trois fois au ministre, mais je voudrais, au terme de la discussion, qu'il soit bien clair que l'Opposition n'a pas d'objection à un tel projet, si un certain nombre de conditions sont remplies.

La première condition, c'est que le dossier doit être, le plus rapidement possible, rendu public et qu'il doit être limpide. Je veux dire que l'Opposition soit en mesure, à la lecture du dossier, de se faire une idée exacte des répercussions, de toutes les répercussions du projet sur l'économie québécoise. Nous n'aurons pas d'objection au projet, je tiens à la répéter, si la transformation se fait sur place, sauf dans la mesure où une partie de la production, qui irait à la SGF, au départ, pourrait peut-être n'être pas transformée sur place, encore qu'il faudrait voir les projets exacts de la SGF au cours des années qui viennent, pour nous faire une idée précise là dessus.

Nous n'aurons pas d'objection non plus si la propriété de la SGF est réelle et non pas fictive et non pas simplement un truc pour éviter les taxes.

Nous n'aurons pas d'objection si la gérance n'est pas entièrement entre des mains étrangères et si l'intervention des Québécois dans le projet est réelle. Pour cela, il nous faudra avoir les détails du projet, pour pouvoir en juger.

Nous n'aurons pas d'objection si les profits de la SGF sont réels, s'ils sont tels que le ministre les a décrits ce matin. Il nous a décrit littéralement le Pérou. Nous attendons de voir et le ministre ne nous en voudra pas d'attendre.

M. Saint-Pierre: Si vous êtes encore là dans cinq ans, vous verrez.

M. Morin: J'espère que, dès les premières années d'exploitation de ce projet, s'il se concrétise, les promesses passeront les fleurs, passeront les bourgeons. Parce que, si on devait être devant une déception au départ, je pense qu'il ne faudrait pas vous surprendre si l'Opposition vous pose des questions en Chambre là-dessus.

Nous n'aurons pas d'objection non plus s'il n'y a pas de répercussions défavorables qui soient insupportables pour les régions, comme mon collègue de Chicoutimi vient de le laisser entendre.

Nous n'aurons pas d'objection non plus si le tarif préférentiel qui sera accordé par HydroQuébec ne correspond pas ou n'entraîne pas une subvention tout à fait déraisonnable de la part.de la collectivité à une entreprise étrangère.

Cela fait beaucoup de si. Je voudrais assurer le ministre, au terme de cette étude, que nous allons suivre le dossier de très près, que nous allons le suivre dans tous ses aspects, pour éviter que ce projet ne constitue un marché de dupes.

Donc, M. le Président, nous pouvons peut-être passer — à moins que mon collègue de Chicoutimi ait autre chose à ajouter encore sur l'alurninerie — à un autre secteur.

Je vais être obligé de m'absenter pour aller rencontrer les représentants de la CSD qui présentent au premier ministre et au chef de l'Opposition leur premier manifeste aujourd'hui. Je prie le ministre et ses collègues de m'en excuser. Le député de Chicoutimi, je suis sûr, pourra fouiller, avec toute la compétence voulue, le dossier de Saint-Félicien avec le ministre.

M. Bédard (Chicoutimi): Vous allez peut-être me permettre...

M. Saint-Pierre: Est-ce que cela termine l'aluminerie? M. le Président, puis-je suggérer...

M. Bédard (Chicoutimi): Me permettez-vous juste une dernière question?

M. Saint-Pierre: Oui.

M. Bédard (Chicoutimi): Peut-être qu'elle a été posée auparavant. C'était pour savoir si le gouvernement ou le ministre, avant l'annonce publique du projet, par voie de conférence de presse qui a été faite par le ministre, avait communiqué avec l'Alcan à propos de ce projet?

M. Saint-Pierre: Non, M. le Président, je ne sers pas les intérêts de l'Alcan, je sers l'intérêt des Québécois.

M. Bédard (Chicoutimi): Ecoutez, vous n'avez pas la bonne réponse. Quand vous avez communiqué avec South Wire, vous aviez l'impression de servir l'intérêt des Québécois. Je ne vois pas en quoi, communiquant avec l'Alcan, vous auriez eu l'impression de ne pas servir les intérêts des Québécois.

M. Saint-Pierre: Alors, je vais vous poser une question. Pour Saint-Félicien, est-ce que je vais aller me "peddler" à New York et avec toutes les compagnies de papiers pour savoir si je peux avoir la permission, pour Donohue, de faire un projet dans votre région?

M. Bédard (Chicoutimi): Saint-Félicien, on va en parler tout à l'heure. Je ne vois pas pourquoi vous vous énervez quand je vous pose cette question.

M. Saint-Pierre: Je ne m'énerve pas, mais ne me posez pas des questions comme celles-là.

M. Bédard (Chicoutimi): Justement, je vous la pose la question, parce que votre réponse ne tient pas debout.

M. Saint-Pierre: D'après vous, j'aurais dû demander la permission de l'Alcan?

M. Bédard (Chicoutimi): Pas nécessairement. Je ne vous ai pas dit que vous auriez dû...

M. Saint-Pierre: Ce n'est pas moi, un instant! Ce n'est pas moi qui l'ai rendu public.

M. Bédard (Chicoutimi): Ecoutez. Si vous écoutiez plus les questions, vous monteriez moins dans les rideaux. Je ne vous ai pas dit que vous auriez dû consulter l'Alcan, ma question était la suivante: Est-ce que, avant votre conférence de presse que vous avez faite, annonçant le projet possible, futur, vous aviez communiqué avec l'Alcan? Est-ce que vous aviez eu des discussions avec l'Alcan? C'est tout simplement ce que je vous ai demandé.

M. Saint-Pierre: Non, M. le Président, pour la simple raison que la divulgation de ce dossier n'est pas venue du gouvernement, d'une façon officielle. La conférence de presse a suivi, de 48 heures, la divulgation par certains journaux, à la suite d'une indication, ici, dans la région de Québec. Je n'ai pas eu le temps. J'ai monté la conférence de presse. Je n'ai pas eu le temps de rencontrer l'Alcan, mais je pense que la conférence de presse a eu lieu le vendredi et, le lundi suivant, j'ai rencontré l'Alcan.

M. Bédard (Chicoutimi): Je vais vous dire pourquoi je vous pose la question maintenant.

C'est parce que, dans la réponse que vous m'avez faite, en Chambre, le 1er mai 1975, vous aviez spécifié ceci, textuellement:"Ce sont les accords que nous aurions été prêts à faire, avec d'autres compagnies canadiennes, mais comme, à l'époque, celles-ci se refusaient d'envisager un complexe basé sur l'aluminium, avec un si haut degré de transformation, nous avons dû aller de l'avant avec un partenaire qui, lui, était prêt — ce qui peut laisser supposer que vous avez communiqué avec d'autres partenaires qui, eux autres, n'étaient pas prêts; c'est pour cela que je vous ai posé la question — à vivre avec les exigences que nous formulions, exigences qui nous paraissaient normales, compte tenu de l'avantage que le Québec pouvait avoir face à d'autres implantations."

M. Saint-Pierre: M. le Président, si le député avait été ici, ce matin, on a déjà tout couvert cette question. J'ai mentionné que, durant l'été 1974, j'ai rencontré les dirigeants de l'Alcan, comme je rencontre des dirigeants de nombre d'entreprises, constamment, au cours de l'année, durant cette discussion, il fut question, à savoir si l'Alcan pouvait voir des effets néfastes si une nouvelle aluminerie venait s'implanter au Québec. Je répète ce qu'on a dit, ce matin. Je pourrais vous inviter à regarder...

M. Bédard (Chicoutimi): Ce n'est pas nécessaire de le répéter. Je pourrai lire le journal des Débats.

M. Saint-Pierre: Non, je veux dire que l'Alcan n'avait pas d'objection à de nouvelles alumineries. A l'époque, nous avions le projet d'Alcoa dans la tête et, a l'époque, M. Leman, avec conviction m'a dit: Nous, nous ne sommes pas prêts à transformer, à nous engager à transformer une quantité appréciable de tonnage d'aluminium brut en produits finis ou semi-finis. Il m'a dit cela durant l'été. Je pense que c'est en juillet ou en août 1974. Je pense qu'il n'y a aucune contradiction avec la déclaration que je vous ai faite. C'est d'autant plus confirmé que, par la dépêche de la Presse canadienne, il semble que, hier matin, M. Leman disait ce que je vous ai donné tantôt: "De plus, l'Alcan n'est pas prête à s'engager à transformer 150,000 tonnes d'aluminium brut en produits finis ou semi-finis, au Québec."

Je n'en veux pas à l'Alcan. Ce n'est pas moi qui fais la prise de décision à l'intérieur de l'Alcan. Elle est parfaitement libre. C'est cela la libre entreprise. Je vais la défendre jusqu'au bout. Elle est parfaitement libre de refuser de transformer en produits finis ou semi-finis. Quand je lis le programme de votre parti, je ne suis pas certain jusqu'à quel point elle serait encore libre demain, mais c'est un problème qui ne se posera pas.

M. Bédard (Chicoutimi): Si vous arrêtiez d'être partisan, peut-être que vous seriez passablement plus convaincant.

M. Marchand: C'est cela que vous êtes venus faire ici, cet après-midi, de la partisanerie politique.

M. Bédard (Chicoutimi): Vous seriez passablement plus convaincant.

M. Saint-Pierre: M. le Président, n'étant pas prêt, j'ai trouvé un partenaire qui, lui, était prêt à cela. C'est cela le projet dont on discute depuis deux heures.

M. Bédard (Chicoutimi): Vous admettrez avec moi que c'était normal que je pose...

M. Saint-Pierre: Pourquoi posez-vous cette question?

M. Bédard (Chicoutimi): Pourquoi? Pour avoir une réponse. Pourquoi pose-t-on des questions, vous pensez? Vous admettrez que j'avais bien raison de vous demander, suite à votre réponse, au mois de mai 1975...

M. Saint-Pierre: Vous admettez que je vous ai dit la vérité?

M. Bédard (Chicoutimi): Vous me faites votre réponse, mais je constate, par exemple, que cela a l'air de très bien aller dans toutes vos petites conversations que vous avez personnellement avec M. Leman, mais quand cela arrive, par exemple, au niveau des déclarations officielles, cela ne semble pas aller si bien que cela. A un moment donné, on va se faire une idée jusqu'à quel point l'une ou l'autre des parties est honnête dans ses déclarations...

M. Saint-Pierre: Vous avez des termes durs.

M. Bédard (Chicoutimi): ... jusqu'à quel point elles sont conformes, par rapport au supposé entretien privé qu'elles ont ensemble. C'est dans ce sens.

M. Marchand: C'est dans le manuel du 1er mai.

M. Bédard (Chicoutimi): Le député de Laurier n'a jamais rien compris au débat qui se passe, soit en Chambre, soit en commission parlementaire...

M. Saint-Pierre: Mais, le député...

M. Bédard (Chicoutimi): Si le député de Laurier veut intervenir, M. le Président, je n'y ai aucune objection. Je peux lui donner un quart d'heure, s'il veut le faire intelligemment et sur le sujet dont on parle.

M. Marchand: Une chose certaine, c'est que je ne vous comprends pas, parce que vous êtes incompréhensible.

Le Président (M. Houde, Limoilou): A l'ordre!

M. Bédard (Chicoutimi): Le député de Laurier, on peut le lire dans le journal des Débats, il n'a fait qu'une chose depuis qu'il est élu, soit de petites interventions "niaiseuses".

Le Président (M. Houde, Limoilou): A l'ordre! A l'ordre! A l'ordre! l'honorable ministre.

M. Saint-Pierre: M. le Président, sur le programme 3, élément 0-2, expansion des marchés, services internationaux, on voit une croissance de 44% du budget, une addition de $409,000. Dans le document que je vous ai transmis, on retrouve toutes les explications essentiellement une augmentation de $414,000 pour les activités décrites, en particulier...

M. Bédard (Chicoutimi): On est encore au programme 3, élément 0-1...

M. Saint-Pierre: Non, on a voté le programme 3, élément 0-I hier. Le programme 3, élément 0-2, était le début, je m'excuse. Voyons, faites sortir le journal des Débats.

M. Bédard (Chicoutimi): Non, je veux simplement savoir une chose de la part du ministre. Il m'a dit tout à l'heure qu'une fois la question de l'aluminerie réglée, le débat est clos là-dessus, on passerait au projet Donohue...

M. Saint-Pierre: Non, je n'ai pas dit cela.

M. Bédard (Chicoutimi): Vous venez de dire cela tout à l'heure qu'on va avoir à discuter du projet...

M. Saint-Pierre: J'ai dit qu'à la fin des crédits, il va arriver un moment où on pourrait en discuter en parlant de l'industrie du bois. J'imagine que cela pourrait être l'élément 0-4, on l'a dans les crédits encore. Au programme 3, élément 0-4, on va parler du secteur industriel, on en parle justement, à la direction générale de l'industrie.

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce qu'on pourrait savoir d'une façon très claire si cet élément a été adopté, parce qu'il me semble que la question ou le sujet que je voulais traiter, à savoir l'implantation d'un projet à Saint-Félicien, aurait pu très bien se situer dans le même programme que l'implantation d'une aluminerie. Il me semble que c'est une suite logique.

M. Saint-Pierre: M. le Président, cela prouve jusqu'à quel point...

M. Bédard (Chicoutimi): Cela l'aiderait peut-être... En tout cas, si le ministre ne veut pas, d'accord, mais nous sommes souvent obligés d'aller à d'autres commissions, n'étant que six...

M. Saint-Pierre: Vous vous obligez.

M. Bédard (Chicoutimi): C'est un projet que le

ministre sait que j'ai à coeur de discuter avec lui. S'il veut nous accommoder, tant mieux. S'il ne veut pas, je trouverai le moyen d'être présent.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Vous pourrez en discuter un petit peu plus loin dans un autre programme.

M. Saint-Pierre: Vous êtes chanceux d'être six, parce que... Allez-y. M. le Président, je le mentionne, parce que cela prouve à quel point cela nous amène, lorsqu'on tolère un petit peu qu'on dépasse une ligne très précise. On avait fait le programme 0-3, 0-1. Il restait cinq minutes. Le chef de l'Opposition a dit: J'ai une question à poser. On a vu que la question était sur l'aluminerie. J'ai dit: Si c'est le cas, attendons à demain matin. Même à cela, l'aluminerie n'est pas réellement à l'expansion des marchés. Le chef de l'Opposition...

M. Bédard (Chicoutimi): Cela ne nous amènera pas dans un terrain trop marécageux. Je suis convaincu que le ministre...

M. Saint-Pierre: D'accord.

Projet de Donohue à St-Félicien

M. Bédard (Chicoutimi): ...a hâte de discuter du projet de Saint-Félicien. Je n'ai pas l'intention de faire un discours partisan ou une entrée en matière partisane concernant ce projet et le ministre le sait. A plusieurs occasions, à l'Assemblée nationale, je lui ai posé des questions concernant ce projet. Je sais que le ministre y est attaché d'une façon tout à fait particulière, du moins je le présume, de même que tous les députés de la région. Lorsque je lui avais posé une question sur ce projet en date du 28 décembre I974, le ministre m'avait informé qu'une décision se prendrait normalement avant le mois de mars ou, au plus tard, durant le mois de mars.

Le ministre sait très bien que le projet Donohue est un projet que la région et que la population de Saint-Félicien attendent depuis plus de dix années, qui a fait l'objet de promesses au niveau d'au moins trois ou quatre campagnes électorales et qui se doit de connaître un dénouement, qu'il soit heureux ou malheureux. Mais, à un moment donné, je pense que la population a raison de ressentir une certaine frustration devant les remises durant une si longue période de temps, devant les remises de décisions de mois en mois, d'année en année, concernant ce projet.

Je voudrais savoir du ministre si, à l'heure actuelle, il est en mesure de nous faire le point sur ce projet de Donohue à Saint-Félicien. S'il n'a pu nous donner une réponse en mars, tel qu'il nous l'avait promis, j'imagine qu'il y a eu des raisons spéciales qui se sont présentées, des éléments nouveaux qui se sont ajoutés. J'aimerais que le ministre nous fasse état de la situation.

M. Saint-Pierre: M. le Président, je souligne qu'il n'y a pas de montants prévus au budget du ministère de l'Industrie et du Commerce pour le projet de Saint-Félicien. Brièvement, je vais quand même...

M. Bédard (Chicoutimi): Je voulais...

M. Saint-Pierre: ... tenter de fournir les explications qui sont données. Le projet, comme celui de l'aluminerie, et peut-être encore plus celui de l'aluminerie, est dans sa dernière phase et nous en serons à la prise de décision assez rapidement. C'est toujours difficile dans ces projets de dire quand on en est à la dernière décision; il y a constamment des choix qui se font, des engagements qui sont pris.

Depuis deux ou trois mois, nous avons tenté de régler quelques problèmes et j'ai énuméré trois problèmes. Un premier problème touchait l'exploitation forestière et toutes les ententes pouvant relier les scieries à la société Donohue pour approvisionner l'usine dans le contexte d'un aménagement intégré. Le problème en étant là, cela signifie que l'usine sera normalement approvisionnée exclusivement de copeaux et que les cunits de pieds de bois, après avoir été débités, seront passés à des scieries dont une appartient à Donohue dans le moment et les autres sont des scieries de la région. Il s'agissait d'avoir un mécanisme d'entente qui permettait aux scieries de toucher à la fois aux bois du sud et aux bois du nord, les concessions du nord, et en même temps de donner à la société Donohue quelques garanties d'approvisionnement en copeaux sur une longue période de temps.

Un deuxième point qui a fait l'objet de discussions, c'est la question des partenaires financiers dans le projet. C'est un projet de pâtes chimiques. Un partenaire n'est pas encore identifié, mais c'est une compagnie canadienne, qui avait accepté de participer au projet sur une base minoritaire. Des discussions ont eu lieu avec ces gens menant à une entente dont la signature n'est pas encore faite, mais on en est à la phase presque terminale d'une entente entre actionnaires. Il y aura deux actionnaires dans le projet.

Un troisième point touchait les discussions...

M. Bédard (Chicoutimi): Quels sont les deux actionnaires?

M. Saint-Pierre: Je ne peux pas les les mentionner.

M. Bédard (Chicoutimi): Ah bon!

M. Saint-Pierre: II y a un actionnaire privé et une compagnie canadienne privée qui n'a pas encore été dévoilée.

Un troisième point touchait les subventions possibles dont pouvait bénéficier la région du Saguenay selon les termes des récentes ententes auxiliaires. Là aussi, des discussions ont eu lieu avec le gouvernement fédéral. Ce sont ces trois points qui sont passablement avancés et que nous tentons d'amener à terme pour faire démarrer le pro-

jet par la suite. L'étude de rentabilité, en soi, est complétée. Il nous reste également à mesurer avec un peu plus de précision les coûts de construction, compte tenu des fluctuations de productivité dans l'industrie québécoise de la construction au cours de la dernière année.

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce exact que les promoteurs du projet de Saint-Félicien exigigent $50,000 des gouvernements — du gouvernement à l'heure actuelle — on parle des gouvernements, pour, une fois pour toutes, concrétiser ce projet.

M. Saint-Pierre: Personne n'a posé d'exigences semblables. Le seul problème est que, dans l'état actuel des choses et compte tenu des études terminées touchant le coût d'exploitation, il semble bien que, sans une subvention, le projet ne saurait intéresser qui que ce soit, que ce soit le secteur privé ou le secteur gouvernemental, bien qu'il sera fait à contrôle majoritaire par la société Donohue qui, à l'occasion, par cette transaction, appartiendrait à plus de 50% au gouvernement du Québec alors qu'actuellement ce n'est qu'à 43% qu'une subvention est requise.

Il n'y a pas eu d'exigences. En parachevant ces dossiers, nous sommes à déterminer le niveau de subvention raisonnable qui pourrait donner un retour sur l'investissement raisonnable et à tenter de protéger toutes les parties intéressées.

M. Bédard (Chicoutimi): Le ministre sait qu'à maintes reprises les petites scieries établies dans la région ont exprimé des inquiétudes concernant l'implantation de ce projet; elles se sont posé des questions pour savoir quelles en seraient les retombées financières sur leur propre commerce.

Le ministre croit-il que les nouvelles demandes de Donohue en vue d'avoir une déchiqueteuse et d'avoir l'établissement d'une scierie également auront pour conséquence de mettre en danger des petites scieries déjà existantes qui ne seraient pas incorporées au projet?

M. Saint-Pierre: Je ne le crois pas. J'ai rencontré les représentants des scieries il y a déjà environ un mois, un mois et demi, et, à l'époque, la présence de la déchiqueteuse et la présence d'une usine de 100,000 cunits de bois de sciage étaient connues et ce n'est pas ce point qui semblait présenter les plus grandes difficultés, d'autant plus que les scieries et Donohue ont également accepté — Donohue était peut-être, au départ, un peu réfractaire — l'idée d'une nouvelle société d'exploitation forestière où les scieries seraient présentes et où cela serait une société dont le contrôle majoritaire des actions serait entre les mains de Donohue, mais qui implique une présence de REXFOR et des scieries dans le projet.

Alors, les principales difficultés étaient la sécurité d'approvisionnement de l'usine Donohue en copeaux, ce qui est essentiel. Il n'y a pas une usine de pâtes qui peut fonctionner si elle n'a pas la certitude d'avoir des copeaux de la forêt. Deuxièmement, il y avait peut-être également le pro- blème de l'écoulement certain des copeaux des scieries. Le troisième problème était les frais de transfert d'un partenaire à l'autre, c'est-à-dire à quel prix les copeaux seraient achetés de Donohue et à quel prix Donohue vendrait les arbres abattus aux scieries.

Les discussions portent actuellement sur une façon... Cela serait plutôt en volume que l'échange se ferait, c'est-à-dire tant de cunits de bois reçus par les scieries seraient payés X temps après par des mêmes cunits ou un montant direct de cunits en copeaux. Alors, les variations dans le prix des copeaux ou du bois d'oeuvre n'auraient pas d'effet.

M. Bédard (Chicoutimi): Je sais qu'il y a tellement eu de dates limites de données pour la réalisation de ce projet depuis dix ans...

M. Saint-Pierre: N'en demandez pas d'autres!

M. Bédard (Chicoutimi): Je n'en demanderai certainement pas une assurée parce que, même le ministre Drummond nous disait, il n'y a pas tellement longtemps, qu'il avait son voyage de parler de dates limites. Y a-t-il de bonnes chances, au moins, pour que ce projet se concrétise dans l'année 1975?

M. Saint-Pierre: C'est assez difficile à dire. Je pense que oui, mais, encore une fois, il n'y aura pas une grande cérémonie pour annoncer le projet. On commence le plus rapidement possible. Je vous ai mentionné les trois points, actuellement, qui sont encore en suspens. Il est vrai de dire que, dans ces trois points, l'exploitation forestière, les partenaires financiers et les négociations avec le fédéral pour les ententes auxiliaires, ces trois points, tous ceux qui oeuvrent dans le projet tentent de les régler le plus rapidement possible.

D'ailleurs, récemment, nous avons constitué un groupe de travail qui tente de réunir tous les ministères touchés par cela et le coordonnateur de ce groupe de travail, M. Richard Lacasse du ministère de l'Industrie et du Commerce, est à ma gauche, ici.

M. Bédard (Chicoutimi): D'ailleurs, je serais tenté de dire au ministre que cela serait presque indécent si, à grand renfort de publicité, on faisait cette annonce parce que cela fait tellement de fois que l'annonce en est faite que, peut-être, la véritable annonce mérite d'être plus modeste et...

M. Saint-Pierre: Vous n'auriez pas d'objection. Mais vous ne nous prêteriez pas de faux motifs si la première journée de production coïncidait avec la prochaine élection provinciale.

M. Bédard (Chicoutimi): Ce qui est important est que les gens de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean...

M. Saint-Pierre: C'est pour cela qu'on travaille.

M. Bédard (Chicoutimi): ... puissent avoir une réponse qui soit favorable. Dans ce projet, on parle souvent d'implications du fédéral. Le ministre pourrait-il me dire en quoi le fédéral est impliqué dans ce projet? Doit-on comprendre que la réalisation de ce projet peut faire l'objet d'une entente auxiliaire?

M. Saint-Pierre: Oui, M. le Président, l'entente auxiliaire prévoit des montants pour stimuler l'entreprise manufacturière. Il y a toute la question des infrastructures, également, les routes en territoire forestier, la voirie provinciale, l'aide à l'infrastructure municipale qui sera requise à cause du projet. Alors, bien sûr, cela fait l'objet... Mais on a une excellente collaboration du gouvernement fédéral. Cela va très bien.

M. Bédard (Chicoutimi): II va avoir à investir directement dans le projet.

M. Saint-Pierre: Non. Ce sera simplement par le biais d'une entente auxiliaire.

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce que le ministre a pris connaissance, dernièrement, de la position du comité populaire de Saint-Félicien?

M. Saint-Pierre: Non. Saint-Félicien ou Chi-bougamau?

M. Bédard (Chicoutimi): Non, Saint-Félicien.

M. Saint-Pierre: Les gens de Chibougamau sont contre.

M. Bédard (Chicoutimi): Si vous voulez parler de Chibougamau, je peux vous laisser cinq minutes.

M. Saint-Pierre: Non.

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce que le ministre a pris connaissance de la dernière position du comité populaire de Saint-Félicien qui dénonçait ce qu'il appelait le grand jeu politique qui visait, essentiellement, à défendre les intérêts à courte vue de certains industriels locaux, intérêts qui, selon eux, commandaient une attitude négative vis-à-vis du projet de réalisation de Donohue.

M. Saint-Pierre: Je pense que cette prise de position visait à tort ou à raison — je ne veux pas me prononcer — le comportement des scieries de la région et ne visait pas le gouvernement. Je n'ai pas le temps de...

M. Bédard (Chicoutimi): Avez-vous eu l'occasion d'en prendre connaissance?

M. Saint-Pierre: Oui, j'en ai pris connaissance, M. le Président, mais je n'ai pas le temps de commenter lorsqu'un groupe de citoyens accuse un autre groupe de citoyens d'avoir des vues à court terme.

M. Bédard (Chicoutimi): Mais j'espère que vous considérez les vues de chacun des groupes qui s'expriment.

M. Saint-Pierre: Des citoyens sur le projet, oui, mais pas les gens qui s'accusent l'un l'autre. Quand Chibougamau me dit qu'il est contre le projet et Saint-Félicien est pour, cela...

M. Bédard (Chicoutimi): Le directeur du MEER pour le Québec, M. Robert Montreuil, a déclaré, il n'y a pas tellement longtemps — c'était, textuellement, dans le Soleil — que le projet de Saint-Félicien était à l'étude mais qu'il n'était pas plus avancé que cela. Il continuait en disant: "II serait prématuré de dire que nous en sommes à la phase finale des négociations. Nous connaissons le projet, nous en parlons avec la province, mais il serait faux de dire qu'il y aura un consensus à court terme." Etant donné que c'était...

M. Saint-Pierre: En quelle année?

M. Bédard (Chicoutimi): Le 8 janvier 1975.

M. Saint-Pierre: Tout dépend de la définition de court terme. Le 8 janvier, je pense que je serais d'accord avec ce que M. Montreuil disait, mais entre le 8 janvier et le 8 mai, nous avons fait du chemin depuis ce temps avec M. Montreuil.

M. Bédard (Chicoutimi): Je m'aperçois qu'il s'en est fait plus dans ces quelques mois qu'il s'en est fait durant les dix années, depuis qu'on annonce le projet.

M. Saint-Pierre: C'est tout à l'honneur du gouvernement.

M. Bédard (Chicoutimi): Quand vous faites quelque chose de bien, je ne suis pas ici pour vous blâmer.

M. Saint-Pierre: J'en remercie le député.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Elément 2 adopté. Elément 3...

M. Bédard (Chicoutimi): On verra, on va attendre la décision.

Le Président (M. Houde, Limoilou): ...Infrastructure d'accueil à l'industrie.

M. Saint-Pierre: Dans l'infrastructure d'accueil...

Le Président (M. Houde, Limoilou): La commission suspend ses travaux jusqu'à 20 heures à la demande de l'Opposition.

(Suspension de la séance à 14 h 44)

Reprise de la séance à 20 h 13

M. Houde, Limoilou (président de la commission permanente de l'industrie et du commerce, du tourisme, de la chasse et de la pêche): A l'ordre, messieurs!

Programme 3, Elément 3: Infrastructure d'accueil à l'industrie.

Infrastructure d'accueil à l'industrie

M. Morin: Je m'excuse, M. le Président, il semble qu'il y ait eu un débat alors que je ne me trouvais pas ici. Nous n'avons pas encore adopté, que je sache, l'élément 1 ou l'élément 2 et s'il y a une controverse, je demanderais qu'on se réfère au procès-verbal. Nous avons adopté le programme 1 et le programme 2 et, à propos de l'élément 1 du programme 3, nous avons abordé les questions que le ministre connaît, c'est-à-dire l'aluminerie et Saint-Félicien, je ne crois pas qu'on soit allé plus loin. Il faudrait que le ministre essaie de nous faire des tours de passe-passe, parce que je peux l'assurer que ce serait loin de hâter le déroulement de la procédure qui, jusqu'ici, nous a quand même permis de faire du chemin, même si c'est quelquefois un peu long, je pense qu'on peut espérer en sortir dans des délais raisonnables. Mais si nous nous mettons à essayer de nous faire des crocs-en-jambe, je pense que ça n'avancera guère.

M. Côté: C'est à peu près comme votre décision de vous en référer au président de la Chambre concernant...

M. Morin: Le président de la Chambre, il n'y en a pas.

M. Côté: Et les vice-présidents, où est-ce qu'ils sont?

M. Morin: Nous n'avons pas été capables de les trouver. M. le Président, je suis allé aux renseignements aujourd'hui et on m'a confirmé effectivement que j'avais raison.

M. Saint-Pierre: Pardon, monsieur.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Un instant, s'il vous plaît. Pour que vous ayez raison, il faut que vous ayez le consentement unanime de la commission et, à ce moment-là, le ministre n'a pas donné son consentement, les autres membres de la commission non plus.

M. Saint-Pierre: On peut faire vérifier le journal des Débats, mais je suis positif qu'à 6 heures moins deux, nous avons voté programme 3, élément 2. Si c'est nécessaire de recommencer, je ne sais pas où on recommence.

M. Morin: Je sais qu'il y a eu une dispute pour savoir ce qui a été adopté ou pas adopté. Est-ce qu'on peut se référer au procès-verbal? De toute façon, il nous reste un dossier dans l'élément 1, qui est la question des investissements étrangers et, ensuite, on pourrait passer à l'élément 2. De toute façon, beaucoup de ces programmes chevauchent plusieurs éléments. Que vous vouliez nous empêcher de procéder maintenant. On va procéder sous un autre élément.

M. Saint-Pierre: On va faciliter le travail de la commission.

M. Morin: Je remercie le ministre.

M. Saint-Pierre: Qu'est-ce que vous avez à dire...

Investissements étrangers

M. Morin: M. le Président, si vous le voulez bien, nous allons aborder les investissements étrangers et le mécanisme d'examen desdits investissements, tel qu'élaboré par le gouvernement fédéral et le problème de la participation du Québec à ce mécanisme.

M. le Président, le ministre, depuis les derniers crédits a fait adopter, par le cabinet, un document fort intéressant qui est intitulé: Mémoire au conseil des ministres, de M. Guy Saint-Pierre, en date du 13 novembre 1974.

Le sujet en est "Le Québec et le mécanisme fédéral d'examen des investissements étrangers".

C'est un document intéressant, mais qui me paraît ambigu par moments. D'abord, l'une des questions que je poserai au ministre dans le cours de la discussion sera: Qui est étranger?

Le document joue sur deux plans, à deux niveaux. De temps à autre, est étranger ce qui n'est pas québécois et, dans les phrases suivantes, est étranger ce qui n'est pas canadien. Il faudra peut-être que le ministre nous donne sa conception de l'étrangeté.

De même, j'ai cru déceler dans le document un langage subversif. Dès la première page, on nous parle de l'érosion de la souveraineté politique du Québec. C'est à croire que c'est tiré du programme du Parti québécois. C'est, dans ce contexte, une expression extrêmement ambiguë sur laquelle j'aimerais bien obtenir des explications du ministre.

Mais cela, ce sont des questions de vocabulaire. Il y a des questions de fond qui sont soulevées par ce document et par l'application qui en a été faite depuis qu'il a été soumis au conseil des ministres et qu'il y a été adopté, si je comprends bien.

Je pourrais peut-être, comme toute première question, demander au ministre qu'il nous dise, de façon générale, quelle est sa conception du filtrage des investissements étrangers au Québec et, nécessairement, au Canada, puisque nous sommes aux prises avec ce mécanisme, et ce qu'il pense, en particulier, de la façon dont va s'appliquer la deuxième partie de la loi fédérale qui, je crois, doit entrer en vigueur sous peu, si je ne m'abuse.

M. Saint-Pierre: Elle n'est pas promulguée, c'est la décision du gouvernement fédéral.

M. Morin: Mais j'ai cru voir entre les lignes qu'elle allait bientôt entrer en vigueur. J'aimerais, en somme, que le ministre nous dise, de façon générale, son attitude à l'égard des investissements étrangers et, après cela, j'aurai des questions peut-être plus spécifiques à lui poser sur certains passages du document qu'il nous a communiqué

M. Saint-Pierre: Les investissements étrangers, M. le Président, je pense qu'il serait faux d'adopter une attitude qui soit aux deux extrêmes, c'est-à-dire de considérer que les investissements étrangers sont toujours une bonne source sur le plan des investissements. Mais, de la même façon, il serait également faux, quant à moi, de penser que nous pouvions nous permettre de rejeter tous les investissements étrangers. C'est donc avec beaucoup de jugement qu'il nous faut revoir cas par cas.

D'ailleurs, à la toute première page du document, en page 2, on disait, au milieu de la page: "Les avantages indéniables découlant des investissements étrangers ont été largement reconnus sur le plan de la croissance et de l'élévation du niveau de vie." En ce qui touche le mécanisme avec le gouvernement fédéral, nous avons eu une excellente collaboration. Je pense que, après les problèmes de rodage des premiers mois qui ne sauraient imputer une mauvaise foi du gouvernement fédéral, mais plutôt, simplement, des problèmes de faire démarrer un nouvel organisme qui touche un secteur très complexe, nous avons toujours eu une très bonne collaboration.

Les principes qui nous guident, M. le Président, je réfère, justement, au document que j'ai laissé, il y a 48 heures, qui donne, dans ses grandes lignes, quel est le cadre des références dans lequel les décisions du Québec sont prises.

M. Morin: M. le Président, je...

M. Saint-Pierre: M. le Président je veux...

M. Morin: ...vais passer, peut-être, à quelques questions plus spécifiques.

M. Saint-Pierre: Sûrement.

M. Morin: A la page I du document, on nous dit que le Québec devrait viser, par sa participation et dans l'application de la loi... Il s'agit de l'application de la loi fédérale, le bill C-I32 et de la participation au mécanisme créé par le pouvoir fédéral. "Le Québec devrait viser à restreindre le contrôle étranger sur son économie, en limitant les nouveaux investissements étrangers et les prises de propriété d'entreprises québécoises par des non-Canadiens, en récupérant, chaque fois qu'il est possible, la propriété d'entreprises, présentement, entre les mains d'étrangers."

J'aimerais essayer de comprendre comment ces phrases qui sont, en soi, louables, ont pu mener le ministre et le gouvernement à prendre les décisions qu'ils ont prises à l'égard, par exemple, de la société Price ou, encore, dans le cas plus récent, de l'affaire Blue Bird-Corbeil. Dans le cas de la société Price, il s'agissait d'une prise de propriété d'une entreprise québécoise par une entreprise non-québécoise.

M. Saint-Pierre: M. le Président, ce n'est pas une transaction qui est assujettie à la loi C-132, donc ce n'est pas une transaction qui touche le mémoire que j'ai soumis ici.

M. Morin: Bon. Alors donc, dans ce cas, "étranger" voulait dire non-canadien?

M. Saint-Pierre: C'est cela. On assujetti à la loi C-132, puisqu'il y a certaines nuances d'entreprises qui peuvent se penser canadiennes et qui sont quand même assujetties.

M. Morin: A la page 2, vous nous dites à la fin du paragraphe: En somme, il faut favoriser la maîtrise par les Québécois — cette fois, on parle de Québécois — de certains secteurs d'activité vitaux tant au niveau économique que socio-culturel. Est-ce que dans le cas de Price, il n'y avait pas justement l'occasion d'affirmer, de favoriser la maîtrise par des Québécois d'un secteur dans lequel ils ont accumulé un savoir-faire, un "know how" technologique très poussé et où il aurait été facile au gouvernement de faire en sorte que la SGF, par exemple, puisse se porter acquéreur de Price?

M. Saint-Pierre: Ce sont peut-être des discussions philosphiques, mais c'est toute une question de priorités. La transaction Price était dans un secteur où le gouvernement du Québec était déjà présent. Cela n'a rien à voir avec la loi C-132, mais essayons de répondre à la question. Le gouvernement du Québec était déjà présent par la Société Donohue, avait déjà des projets d'importance qui touchaient le développement de la région du Lac-Saint-Jean et qui étaient plus intéressants que les projets de l'acquisition de Price, puisque dans le cas de Donohue au Lac-Saint-Jean, il s'agit d'une addition à l'activité économique, alors que dans le cas de Price, les usines sont en place, il s'agissait donc strictement du transfert de la propriété entre une compagnie canadienne ou la SGF. Si notre collègue du Parti créditiste était ici, on pourrait dire que si on pouvait se fonder sur l'hypothèse qu'on peut imprimer de l'argent, sûrement on aurait pu acheter tout ce qui se passe dans le monde. Comme on ne croit pas à cela, donc il faut établir des priorités. Je pense qu'au niveau de la capitalisation dans les sociétés d'Etat, les performances des cinq dernières années sont plus impressionnantes que la création de structures qui a pu caractériser d'autres époques.

Dans ce déroulement, soit tenter d'établir une priorité, il nous a semblé préférable de faire porter l'argent sur d'autres projets, comme celui de l'aluminerie, comme celui de Saint-Félicien.

M. Morin: M. le Président, néanmoins, c'était quand même une occasion d'élargir la place, l'emprise, la maîtrise — pour parler comme le ministre dans son document — des Québésois sur leur économie, et de passer d'une participation, quoi, de 5%? parce que la Donohue, à l'heure actuelle, représente quoi, 5% du marché, cela aurait été l'occasion, quand même, d'en contrôler à peu près 20%.

M. Saint-Pierre: Cela coûtait $120 millions, qu'il faut prendre à quelque part. Je ne sais pas si vous suggérez qu'on devait les prendre à l'Agriculture? Est-ce qu'on les prenait à la voirie? A moins de croire que deux plus deux peuvent égaler cinq, et...

M. Morin: Je ne sais pas si le ministre a été mêlé à cette affaire de près, mais il se souviendra qu'en Chambre, lorsque nous avons parlé de cette affaire, il s'est avéré, à un moment donné, que les gens de Price étaient prêts à coopérer avec le gouvernement pour que le montant de l'achat soit réduit de beaucoup, ou même, je crois qu'ils auraient avancé l'argent. Mais le ministre a été mêlé à l'affaire. Alors, peut-être peut-il nous donner des éclaircissements là-dessus?

M. Saint-Pierre: Je pense que, fondamentalement, le gouvernement avait pris la décision que ces $120 millions pouvaient être plus utiles ailleurs dans les dépenses gouvernementales.

M. Morin: Le document doit donc être interprété comme signifiant, en fait, non pas d'assurer aux Québécois un meilleur contrôle de leur économie, mais aux Canadiens. Si je comprends, vous jouez sur les mots dans ce document, parce que vous y parlez de la maîtrise par les Québécois...

M. Saint-Pierre: Non, M. le Président. Lorsqu'on parle de la loi fédérale des mécanismes de contrôle sur les investissements étrangers, il faut, bien sûr, s'en référer au projet de loi fédéral, qui a une définition propre des étrangers. Lorsqu'on parle de la nécessité d'accroître le dynamisme du capital autochtone, c'est un capital qui appartient essentiellement à des résidants québécois, sans faire de distinction entre francophones ou anglophones, mais des gens de la province de Québec. Je pense qu'on peut facilement comprendre ce qui est perçu derrière chacun de ces documents.

M. Morin: Je ne faisais pas, non plus, de distinction entre francophones et anglophones québécois, mais j'employais les termes qu'on trouve dans le document, où l'on voit apparaître le mot "Québécois" de temps à autre, et ailleurs, le mot "Canadiens". On joue sur deux niveaux.

M. Saint-Pierre: II y a deux niveaux de gouvernement aussi.

M. Morin: Bien sûr, mais il s'agit de savoir si vous favorisez la maîtrise par les Québécois ou si vous favorisez la maîtrise par les Canadiens. Ce n'est pas la même chose.

Et le document, encore une fois, est ambigu. Dans le cas de Bluebird, on en a déjà parlé en Chambre, il s'agissait là d'une entreprise, je pense, authentiquement québécoise dont la production était achetée entièrement au Québec. Il s'agissait, si ma mémoire ne me fait pas défaut, d'autobus, d'autobus scolaires notamment, donc c'est nous, ce sont les fonds publics, soit par le truchement des commissions scolaires, soit par les municipalités qui achetaient cette production.

N'y avait-il pas là une très belle occasion d'appliquer votre politique d'empêcher la mainmise par des étrangers — parce que cette fois, il s'agit bien d'étrangers — sur une entreprise québécoise?

M. Saint-Pierre: Trois points à cela, M. le Président. Premièrement, dans le passé, les propriétaires de la compagnie Corbeil — j'ai vérifié au dossier du ministère — n'ont jamais demandé d'aide au ministère et même les approches que nous avions eues avec eux n'avaient pas donné de résultats. En d'autres termes, l'entreprise semblait être satisfaite de son taux de croissance, n'avait pas de problème.

Deuxièmement, il faut peut-être démystifier l'intérêt qu'il pouvait y avoir pour le Québec de garder au Québec l'assemblage d'autobus parce que l'assemblage d'autobus n'a rien à voir avec l'industrie de l'automobile. C'est comme un grand jeu de mécano où toutes les pièces sont coulées à l'extérieur et ici finalement, on met ensemble les pièces d'un mécano avec une valeur ajoutée qui est loin d'être intéressante, avec des salaires nettement inférieurs à la moyenne industrielle, avec un taux de croissance très bas, et des possibilités d'exportation extrêmement réduites.

Donc, il faut démystifier l'avantage. Ce n'est pas l'industrie de l'automobile qui s'en allait. C'est un gros jeu de mécano dont ceux qui en étaient propriétaires étaient pour changer.

Troisièmement, je pense, avec mes collaborateurs et avec M. Saulnier de la SDI, à un certain moment, et c'est ce qui explique notre premier refus à l'agence, nous avons tenté de récupérer la compagnie, prêts à y mettre des fonds publics, mais il s'est avéré que la compagnie ayant omis de placer les commandes pour ses pièces pour la nouvelle production, nous nous serions retrouvés, en décembre, incapables de faire de la production et surtout, au bout d'un an, avec une compagnie qui avait perdu ses cadres les plus intéressants, ses ressources humaines les plus intéressantes et qui aurait plongé dans le chômage quand même la ville de Saint-Lin, cette compagnie fournissant quand même un travail.

Devant tous ces éléments, après discussion avec M. Saulnier et les cadres du ministère, il fut convenu qu'il était préférable de permettre la transaction pour sauver l'emploi puisque, dans ce secteur, il ne semblait pas que c'était avec Corbeil qu'on pouvait faire les choses les plus intéressantes possible. Depuis ce temps, nous n'avons rejeté aucun effort pour tenter de faire des choses intéressantes. Malheureusement je ne suis pas à

même de rendre public aujourd'hui le chemin que nous avons parcouru.

M. Morin: Je saisis mal pourquoi cette entreprise, si ce que vous me dites est exact, s'est sabordée littéralement.

M. Saint-Pierre: C'est parce que Blue Bird, l'entreprise, achetait ses pièces de la compagnie Superior, compagnie américaine; c'est là qu'était essentiellement l'intérêt, valeur ajoutée; or Blue Bird est un concurrent, aux Etats-Unis, de la compagnie Superior et traditionnellement, en Amérique du Nord, il y a une espèce de rotation voulant que les commissions de transport placent leurs commandes à telle date de l'année, que les compagnies placent leurs commandes au début d'août auprès des compagnies, et se voient donc assurées d'un certain jeu de mécano, si je peux encore employer l'expression. Or, au 1er août, la compagnie Corbeil, étant peut-être ignorante de la Loi fédérale des investissements étrangers et sachant qu'elle vendait à un concurrent de Superior, a indiqué qu'elle ne voulait pas acheter de pièces. De la sorte, nous-mêmes, si nous avions voulu empêcher la transaction, donner $1 million à la compagnie Corbeil, nous nous serions trouvés dans l'impossibilité, puisque Blue Bird et Superior sont les deux grandes compagnies qui fournissent des pièces d'autobus, de continuer la production. Il y aurait eu 80 familles à Saint-Lin qui auraient été en chômage. Un an après, quand on aurait voulu faire démarrer quelque chose, on risquait de se retrouver avec une compagnie sur papier qui ne valait pas grand-chose. C'était dans des installations où la productivité était très faible. Il n'y avait pas d'intérêt. Fondamentalement, je reviens au deuxième point que j'ai mentionné, ce n'est pas particulièrement intéressant de sauvegarder la maîtrise autochtone dans ce secteur. Quand vous regardez les salaires, la productivité, les possibilités d'exportation, les taux de croissance, la valeur ajoutée, ce n'est pas particulièrement intéressant. C'est l'avis de tous mes fonctionnaires.

M. Morin: A ce compte-là, s'il s'agissait d'un jeu de mécano, il y a bien d'autres entreprises québécoises qu'on pourrait considérer comme des jeux de mécano. La compagnie qui me vient à l'idée tout de suite, c'est SOMA. C'était aussi un jeu de mécano à ce compte-là.

M. Saint-Pierre: Non. SOMA avait quand même une valeur ajoutée beaucoup plus grande que l'autre et nous espérions des perspectives de croissance puisque SOMA exportait aux Etats-Unis.

On comprendra bien que le permis que Corbeil avait de la compagnie Superior était limité à la province de Québec. Donc, il était impossible d'exporter simplement pour satisfaire un marché local avec, encore une fois, une entreprise très marginale au salaire minimum ou un peu plus, mais pas tellement plus. D'ailleurs, c'est littéralement un jeu de mécano. Vous importez des pièces, vous mettez ça ensemble.

M. Morin: Cela allait jusqu'où, cette importation de pièces, c'était jusqu'au dernier boulon ou s'ils importaient déjà des pièces montées?

M. Saint-Pierre: Intégral.

M. Morin: Des choses déjà montées.

M. Saint-Pierre: Les parties, le moteur, l'essieu, c'est sur une boîte de camion. D'ailleurs, tout le secteur, il faut le démystifier parce qu'autant il y a un intérêt dans les autobus urbains, qui valent, par unité, peut-être $60,000, $65,000 ou $70,000, autant l'autobus scolaire, ça ne coûte pas cher au consommateur, c'est $12,000 ou $13,000. C'est un châssis de camion qui est une fin de production dans les grandes compagnies, Dodge, General Motors, et des choses semblables, auquel on rajoute une boîte carrée, vous les voyez, avec des sièges. Ce n'est pas particulièrement intéressant comme entreprise à sauver.

M. Morin: Quel était approximativement, je ne veux qu'un ordre de grandeur, parce que je ne veux pas...

M. Saint-Pierre: Le nombre d'employés...

M. Morin: Non, pas le nombre, vous pourriez me donner le nombre d'employés aussi. Je voulais vous demander quelle était la valeur ajoutée, par unité de production?

M. Saint-Pierre: Très faible, pas plus de $1,000, 160 hommes-heure, $1,000 par autobus qui se vendait à peu près $12,000.

M. Morin: Je comprends mieux. M. le ministre...

M. Saint-Pierre: J'ai l'impression que cela a coûté plus cher dans les journaux pour parler de ce cas que cela en valait la peine.

M. Morin: Est-ce que Blue Bird va continuer la production, est-ce que vous avez des assurances?

M. Saint-Pierre: Blue Bird a pris des engagements d'investir, de moderniser la production. Blue Bird a maintenant une autre possibilité intéressante. C'est qu'il peut, à partir de Saint-Lin, exporter sa production sur le marché des Etats-Unis, de la Nouvelle-Angleterre, des Maritimes et autres endroits, ce que Corbeil ne pouvait absolument pas faire et que nous n'aurions pas pu faire.

Sans en dévoiler la nature, nous n'avons pas dit notre dernier mot dans le domaine des autobus scolaires.

M. Morin: Cela peut vouloir dire bien des choses, M. le ministre.

M. Saint-Pierre: L'an prochain.

M. Cadieux: N'ouvrez pas d'autres portes, M. le député.

M. Morin: Si ce sont de bonnes nouvelles, il n'y a pas de raison de les cacher, mais je n'insiste pas. Effectivement, le marché des autobus scolaires est un marché prisonnier au Québec, en quelque sorte, donc, il y aurait des choses à faire. Si le ministre songe à faire des choses, ce n'est pas nous qui allons l'en empêcher.

M. le Président, je voudrais me pencher sur quelques points plus spécifiques mentionnés à la page 5. D'ores et déjà, cependant, les principes suivants émergent. Le Québec devrait adopter une attitude intransigeante dans le secteur socioculturel pour des raisons évidentes. Quel type de compagnie ce passage vise-t-il en particulier, M. le ministre?

M. Saint-Pierre: En fait, toutes les entreprises qui seraient dans le secteur, comme le mot l'indique, socio-culturel: les livres, l'édition, le marché du cinéma...

M. Morin: Le cinéma...

M. Saint-Pierre: ... je dois dire que, bien que responsables auprès du gouvernement de toute la consultation en ce qui touche les investissements étrangers, nous avons, comme vous l'avez vu dans les documents, un mécanisme qui implique d'autres ministères.

Dans le cas du socio-culturel, bien sûr, mes collègues de l'Education et des Affaires culturelles auraient une contribution importante à faire dans la prise de position.

Je dois admettre que nous n'avons eu aucun cas de socio-culturel depuis le début, aucune transaction.

M. Morin: Pas depuis que vous avez adopté ce mémoire?

M. Saint-Pierre: Depuis le début de la loi fédérale.

M. Morin: Oui, je comprends, parce que votre collègue des Affaires culturelles aurait avantage à lire cela, notamment, au sujet de l'affaire Hilton. Ce serait intéressant de voir, dans l'avenir, comment ce paragraphe pourrait s'appliquer dans un cas comme celui-là.

Dans le domaine immobilier, les investissements pour fins commerciales devraient être découragés. Est-ce que cela ne requérait pas une législation spéciale et est-ce que le ministère songe à une législation dans ce domaine?

M. Saint-Pierre: II y a eu des examens dans le cas du ministère de l'Agriculture, des Affaires municipales; il y a quelques concepts qui sont analysés. Je dois dire que, dans le secteur immobilier, nous-mêmes, nous avons fait faire une nouvelle étude pour être bien certains de la décision que nous prenions, de l'attitude que nous avions prise jusqu'ici. Nous avions tendance à dire non à des transactions immobilières, mais nous avons fait faire une étude pour être bien certains de notre position. Souvent, il y a des capitaux qui peuvent être dégagés, qui permettent à des Québécois de réinvestir, de stimuler l'habitation, stimuler la construction de logements et qui, là, se trouvent un peu gênés. On a eu des cas que nous avons refusé jusqu'ici et des cas qui ont été acceptés. Cela a été assez...

Nous avions refusé, au tout début, la vente...

M. Morin: Est-ce qu'il existe une liste des cas où vous avez appliqué ce mémoire, depuis l'entrée en vigueur de la loi fédérale? Je vois que le sous-ministre a une liste devant lui, cela simplifierait peut-être...

M. Saint-Pierre: On ne peut pas déposer cela, M. le Président. Dans le processus d'une loi où nous avons accès à plusieurs informations confidentielles, bien que nous avons la liberté de dire ce que nous avons fait, la liste que nous avons inclut les positions du gouvernement fédéral, également, des dates et des informations que vous ne pouvez pas rendre publiques.

M. Morin: Est-ce qu'il serait possible de faire une liste simplifiée, qui ne contiendrait pas les renseignements qui relèvent du pouvoir fédéral?

M. Saint-Pierre: On pourrait donner seulement une liste avec la décision finale qui aurait pu être prise.

M. Morin: Est-ce qu'il serait possible... M. Saint-Pierre: Pour demain?

M. Morin: Oui, ou au cours des journées subséquentes.

M. Saint-Pierre: II n'y a pas de problème.

M. Morin: Parce que demain, il n'V a qu'une séance très courte, après l'assemblée, qui se terminera vers une heure, je crois.

M. Saint-Pierre: On aura terminé nos dix heures demain. C'est pour cela que je suggérais demain.

M. Morin: Dix heures demain, déjà?

M. Saint-Pierre: Oui, cela fait dix heures qu'on a...

M. Morin: Oui, mais la tradition veut qu'on passe au travers de ce qu'il y a à faire.

M. Saint-Pierre: Je ne suis pas un traditionaliste.

M. Morin: Oui, j'ai vu cela, l'autre soir, quand vous avez, délibérément, enfreint les traditions qu'on suit d'habitude à l'étude des crédits. Mais ce serait quand même navrant que le ministre se réfugie derrière une histoire comme cela, pour nous empêcher d'étudier, sérieusement et à fond, tous les dossiers qui intéressent son ministère.

M.Cadieux: Dans un délai raisonnable, tout de même. On parle de dix heures, on peut peut-être aller à...

M. Morin: Si vous participiez davantage, peut-être que cela vous intéresserait davantage, plutôt que d'être là, simplement, pour le quorum. Vous devriez participer, M. le député.

M. Cadieux: On connaît les réponses à vos questions.

M. Morin: Cela, je m'en doute, oui. M. le Président...

M. Cadieux: Vous vous pensez encore à l'université, vous vous imaginez que vous parlez devant des étudiants.

M. Morin: Je ne sais pas ce que j'aurais fait, si j'avais eu le député de Beauharnois comme étudiant. Mais, c'est une autre affaire, on n'est plus à l'université, nous sommes en commission parlementaire.

M. Cadieux: Je ne serais certainement pas ici, si je vous avais eu comme professeur, en tout cas.

M. Morin: Non, peut-être pas.

M. Cadieux: Je serais chômeur, probablement.

M. Morin: Peut-être pas.

M. Cadieux: Je serais chômeur, je chercherais un emploi.

M. Morin: J'aurais donné sans doute une meilleure appréciation de vos capacités.

Une Voix: Le député a débloqué.

M. Morin: Cela suffit, cet échange, M. le Président. On peut revenir aux choses sérieuses.

M. Saint-Pierre: C'est parce que le chef de l'Opposition en avait beaucoup à apprendre du député de Beauharnois. Il est ici, en Chambre, depuis combien d'années?

M. Cadieux: Cela fera seize ans à la fin de mon mandat.

M. Saint-Pierre: C'est une performance que vous allez avoir sûrement de la difficulté à atteindre.

M. Morin: Ah! C'est possible, c'est possible. Mais, j'imagine que si le député avait été vraiment compétent, il serait, aujourd'hui, peut-être à la place du ministre.

M. Cadieux: C'est que le ministre est plus compétent.

M. Morin: M. le Président, ces échanges de propos aimables suffisent. On peut peut-être revenir au domaine immobilier. Je voudrais comprendre la portée exacte de cela. Est-ce qu'il s'agit d'investissements par des compagnies étrangères qui feraient affaires dans l'immobilier ou s'il s'agit d'investissements d'achat de terrains, simplement, pour des fins commerciales? Ce n'est pas clair d'après le texte.

M. Saint-Pierre: Non, essentiellement et généralement, les deux seraient, bien sûr, assujettis à la loi. Jusqu'ici les seuls cas que nous avons eus touchent des immeubles d'habitation, des compagnies étrangères qui veulent acquérir des compagnies canadiennes qui font affaires dans l'immeuble. Je vous donne un exemple que nous avons eu: Les Appartements Rock Hill qui étaient la propriété... Ils étaient situés à Montréal. La compagnie qui voulait les obtenir, les acheter était Matignon Properties, d'Allemagne.

Le problème dans cela, bien sûr, c'est que l'emprunt à long terme, sur le prêt hypothécaire, est généralement versé par des entreprises canadiennes, des compagnies d'assurance et autres, de telle sorte que, l'acquéreur n'a qu'à verser que l'équivalent du dépôt de 10%, 15% ou 20% de l'achat, du montant qu'on verse comptant et, finalement, ce sont des Canadiens qui paient pour l'édifice qui leur appartient en totalité. C'est l'inverse de l'aluminerie, réellement, où ce sont les Américains qui paient alors qu'on en est propriétaire complètement.

Mais, dans le cas immobilier...

M. Morin: Le ministre aime les frictions.

M. Saint-Pierre: ... on serait porté à dire non. Par contre, on se rend compte que, dans quelques cas... On fait une étude, c'est tout ce que je pourrais dire, pour être bien certain qu'on est dans la bonne voie; parce que, dans d'autres cas, on se rend compte que, il est permis aux francophones qui sont dans le secteur de faire rouler plus d'investissements, dans le secteur de l'habitation, dans le secteur des appartements et que, en refusant un accès à un marché quelconque, on peut geler les conditions du marché.

M. Morin: M. le Président, je saisis mal la portée du quatrième paragraphe.

M. Saint-Pierre: A quelle page?

M. Morin: A la page 5, toujours. La politique du gouvernement du Québec en matière d'investissements étrangers, dans le domaine primaire, doit évidemment être compatible avec la politique en matière de transformation des richesses naturelles. Quelle est la portée exacte de ce passage?

M. Saint-Pierre: M. le Président, cela me semble assez évident. Si on tente...

M. Morin: C'est parce que la politique du gou-

vernement en matière de transformation des richesses naturelles, jusqu'ici, n'est pas très claire. Si vous vous référez à la politique d'un autre ministère, j'imagine que c'est cela que cela signifie.

M. Saint-Pierre: Non, mais ce qu'on dit... Prenons un cas d'espèce. Si, au niveau des richesses naturelles, on vise une plus forte transformation... Vous allez m'obliger à retomber dans le cas de l'aluminerie...

M. Morin: Prenons l'amiante.

M. Saint-Pierre: Alors, prenons l'amiante. L'amiante est un mauvais cas puisque les entreprises, comme vous le savez, sur le plan constitutionnel, je n'ai pas à vous en montrer sur ce plan, ont quand même des droits sur le terrain, qui ne sont pas les mêmes que ceux existant dans d'autres secteurs des richesses naturelles.

M. Morin: Ce n'est pas sur le plan constitutionnel, c'est sur le plan de la loi, de la législation...

M. Saint-Pierre: De la loi.

M. Morin: ... parce que, sur le plan constitutionnel, il n'y a rien qui empêche le Québec de modifier cette loi. C'est parce qu'il ne le veut pas.

M. Saint-Pierre: Non, je m'excuse. J'ai déjà vu des avis juridiques à l'effet contraire.

M. Morin: Oui, c'est un beau débat.

M. Saint-Pierre: C'est un point de vue. C'est simplement que, sur le plan de l'industrie primaire, si on recherche, en matière de transformation des richesses, un certain type de politiques, bien sûr, les investissements étrangers doivent un peu se conformer à cela, on va les accepter. Exemple: Si on pense qu'il y a intérêt à développer les mines de fer et si, pour le faire, on reconnaît que, compte tenu des risques, des marchés ou de ce qu'on voudra, il est intéressant — je ne voudrais pas citer votre chef, M. Lévesque — finalement, d'avoir des compagnies américaines qui ont été prêtes à transformer les mines de fer sur la Côte-Nord du Québec, on serait mal vu, en matière d'investissements étrangers, de refuser à des compagnies étrangères d'acquérir ces mines de fer. Si, par contre, dans d'autres secteurs comme celui de l'aluminerie, on tient plus à une présence québécoise dans le secteur, il me semble qu'il faudrait être logique et empêcher les étrangers d'acquérir ce que nous avons déjà. Est-ce que c'est clair?

M. Morin: C'est plus clair, oui. Ce qui me paraissait bizarre, c'était que vous mentionniez le domaine primaire par rapport au domaine secondaire, par rapport au domaine de la transformation. Si j'interprète correctement la phrase, cela veut dire que la politique, en matière de richesses naturelles, doit être conforme ou compatible avec la politique dans le domaine de l'industrie secondaire, l'industrie de la transformation. Comme cette dernière est loin d'être claire...

M. Saint-Pierre: II va falloir reprendre le texte.

M. Morin: Oui. Au paragraphe 5... Non, le ministre a déjà répondu en partie aux questions que j'aurais pu avoir. Il me reste à examiner le cas non plus du "take over", de la prise de propriété, mais le cas où des investissements nouveaux sont en cause. Quelle est la politique du ministère de l'Industrie et du Commerce lorsqu'il s'agit de nouveaux investissements? En particulier, quelle est l'attitude du ministère à l'égard de la deuxième partie de la loi dont ce document nous dit qu'elle devait être promulguée au début de 1975?

M. Saint-Pierre: Le Québec, à une récente conférence fédérale-provinciale, je pense, a assumé le leadership de convaincre les autres provinces de s'opposer à la promulgation immédiate de cette loi. Devant le refus unanime de toutes les provinces, incluant les provinces du Manitoba, de Colombie-Britannique, enfin toutes les idéologies représentées dans le Canada, devant ce refus unanime des provinces sur la promulgation de la loi, M. Gillespie n'a pas encore promulgué la deuxième partie de la loi. Notre refus se base, d'une part, sur la complexité que va représenter l'administration de cette loi lorsqu'elle touche les nouveaux investissements.

Deuxièmement, nous croyons, qu'en tentant d'établir un système qui est fort complexe, d'après tous les documents que nous avons eus, pour éliminer des investissements non désirables, on puisse, à l'étranger comme au pays, créer quand même une atmosphère qui ne nous permettra pas d'attirer les investissements qui pourraient être désirables pour le Canada même. Par ailleurs, nous déplorons une certaine surenchère entre les provinces pour des projets donnés, alors qu'on sait qu'une province tente d'offrir davantage que la province voisine pour attirer un investisseur. On comprend que, là, il risque d'y avoir une surenchère au niveau des déclarations de principe des nouveaux investissements. C'est-à-dire que, dans la prise de possession d'une compagnie comme Corbeil, on ne pouvait pas la mettre, si on pensait que le Québec n'y était pas favorable, sur des roulettes et l'envoyer en Ontario.

Mais dans le cas de nouveaux investissements, ceux-ci n'ont pas les deux pieds sur terre dans une province donnée. On peut les faire passer d'une province à l'autre. On comprend qu'il y a un risque de surenchère, du fait qu'aucune province ne peut réellement se permettre d'être perçue comme étant opposée aux investissements étrangers, alors que sa voisine y est plus favorable. Et là, il risque, au niveau des principes mêmes, d'y avoir une espèce de surenchère.

M. Morin: Alors, la politique du Québec, telle qu'entérinée par les autres provinces, si j'ai bien compris, c'est qu'alors que vous croyez qu'il de-

vrait y avoir un tamisage lorsqu'il s'agit de "takeover", de prise de possession,lorsqu'il s'agit de nouvelles entreprises, de nouveaux capitaux, vous pratiqueriez beaucoup plus une politique de porte ouverte.

M. Saint-Pierre: C'est un peu cela, puisque les provinces disposent déjà, sans avoir de loi, de plus d'un mécanisme pour rejeter les cas indésirables. Je ne veux pas dire que c'est un cas indésirable, mais on a donné ce matin, le cas d'Alcoa. On n'avait pas de loi sur les investissements étrangers, mais l'investissement d'Alcoa ne s'est pas fait, parce que les gens ont très vite compris qu'il n'étaient pas les bienvenus. On a d'autres cas — je ne voudrais pas vous donner toute la liste — mais plusieurs cas nous arrivent où on laisse clairement voir aux gens qu'ils ne seront pas les bienvenus, parce qu'on a l'impression que la province ne retire pas ce qu'elle devrait recevoir ou retirer d'un investissement étranger.

M. Morin: Est-ce que vous croyez que ce mécanisme est suffisant...

M. Saini-Pierre: Pour les nouveaux investissements?

M. Morin: ... pour les nouveaux investissements, pour les tamiser sérieusement?

M. Saint-Pierre: Oui, parce qu'il n'y a pas un investissement sérieux qui se fait sans avoir — j'en ai l'expérience toutes les semaines — au moins, de la part de l'investisseur, un sentiment qu'il est bienvenu par les autorités provinciales.

M. Morin: Votre collègue, le ministre des Finances semble, lui, être en faveur d'une porte très largement ouverte, avec le moins de contrôle possible sur les gros investissements.

M. Saint-Pierre: Dès que la porte est ouverte, le courant d'air passe. Un peu plus ou un peu moins, cela ne change pas tellement. Je ne comprends pas... Vous parlez de la...

M. Morin: Non, mais j'essaie de voir, de comprendre la position du gouvernement. Je vois que le ministre essaie...

M. Saint-Pierre: II n'y a pas de divergence de vues, je pense.

M. Morin: ... de contrôler, dans une certaine mesure, les nouveaux investissements par des mécanismes existants, et j'avais l'impression, à entendre certains propos de M. Garneau, que...

M. Saint-Pierre: Non, cela a dû être tiré hors contexte, parce qu'il n'y a pas de divergence de vues.

M. Morin: Est-ce que vous allez continuer de vous opposer à la mise en vigueur de la deuxième partie de la loi?

M. Saint-Pierre: Oui, M. le Président, bien que je doive reconnaître non pas la faiblesse de notre position, mais une certaine force du gouvernement fédéral, qui dit: Je dois un peu retarder l'application de la loi devant ce front commun des provinces, mais, de la même façon, il me faut admettre que tous les partis politiques canadiens ont voté à la Chambre des communes pour l'adoption de cette loi. Donc, j'ai un peu un ordre de tous les partis politiques, sur le plan canadien, de promulguer la loi au temps opportun, et cela ne peut pas être remis indéfiniment. Mais ça, c'est une loi fédérale.

M. Morin: Quelle va être votre attitude le jour où la deuxième partie va entrer en vigueur?

M. Saint-Pierre: La même que nous avons eue jusqu'ici dans d'autres secteurs, c'est-à-dire d'exprimer toujours nos réserves sur les difficultés d'application, mais, une fois que la loi est en vigueur, tenter d'avoir une position qui favorise les intérêts du Québec.

M. Morin: Je pense que, pour ce qui est des investissements étrangers, M. le Président, cela nous éclaire suffisamment.

On peut peut-être procéder à l'adoption de l'élément 1.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Cela a été fait.

M. Morin: S'il l'était, tant mieux. S'il ne l'était pas, considérons-le comme adopté.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Elément 1.Adopté. Elément 2.

M. Cadieux: II a été adopté cet après-midi. On avait convenu avec les représentants de l'Opposition que l'élément était adopté.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Oui, d'accord.

M. Morin: Ce n'est pas ce que mon collègue m'a dit tout à l'heure. Il m'a dit qu'il y a eu une controverse.

M. Cadieux: Votre collègue a dit que l'élément 2,était accepté.

M. Saint-Pierre: C'était à propos de l'élément 1 qu'il y avait une controverse. Pour l'élément 2, j'ai compris moi-même à 5 heures 40... C'étaient quelques secondes avant qu'il ne me supplie d'ajourner la séance à cause de votre absence. Il ne savait plus quoi dire.

M. Morin: Je lui avais demandé de me remplacer au sujet du dossier de Saint-Félicien, ce que, je pense, il a fait.

M. Saint-Pierre: Oui, mais on avait terminé à 5 heures 45.

M. Morin: Alors, on peut peut-être passer... De toute façon, l'élément 3, infrastructure d'accueil à l'industrie, permet, certainement, de parler de beaucoup de choses...

M. Saint-Pierre: Sûrement.

M. Morin:... et, notamment, du projet d'aciérie dans l'Est du pays.

Le Président (M. Houde, Limoulou): Alors, élément 3.

M. Morin: Oui, considérons l'élément 2...

M. Saint-Pierre: Avant non pas de divaguer, mais de parler sur l'aciérie, vous me permettrez, pour le bénéfice des membres de la commission, d'expliquer ce qu'il y a dans le programme 3, élément 3; Infrastructure d'accueil à l'industrie.

Cet élément regroupe notre direction de l'infrastructure, le projet fort important PICA-TDM près de l'aéroport Mirabel, les implications de l'ODEQ en matière d'infrastructure industrielle et la société Inter-Port de Québec.

On y remarquera, cette année, une réduction du budget, mais qui est essentiellement causée par une réduction importante des dépenses de transfert, certaines des dépenses dans le passé venant à terme.

A la page de droite, on voit une esquisse générale de la façon dont les sommes que nous demandons, qui s'élèvent à $9,706,100, seront dépensées. On y retrouve, en particulier, le programme de stimulation aux commissariats industriels, qui verra, au 31 mars 1976, 58 commissariats en activité. Nous sommes à revoir notre programme de financement de ces commissariats, en particulier, pour développer une formule qui tente à des regroupements sur le plan régional ou sur des entités plus grandes.

Le programme des ententes avec le gouvernement fédéral, déjà signées, prévoit, pour PICA, des sommes fort importantes que je vous ai indiquées en table de droite.

Il ne faudrait pas sous-estimer le travail que le ministère fait dans l'approbation des transactions qui touchent les terrains des municipalités en parcs industriels. On sait les abus auxquels ces ventes de terrains ont pu donner lieu dans les années 1960 et il est remarquable depuis quatre ou cinq ans qu'aucun cas de malhonnêteté ou qu'aucun cas frauduleux n'ait été porté à notre attention.

La direction a aussi complété 21 études de développement des parcs industriels. Elle a aidé à consolider la mise en place de nos commissariats industriels, à négocier l'entente auxiliaire Canada-Québec.

Dans ses grands traits, en 1975/76, nous prévoyons traiter 360 dossiers dans le cadre de la Loi des fonds industriels, consacrer entre $600,000 et $700,000 pour la préparation d'une vingtaine d'études sur la planification des parcs industriels, porter le total des commissariats industriels à 58, soit l'objectif que le ministère s'était fixé il y a trois ans et, finalement, l'administration de l'entente Canada-Québec sur les infrastructures industrielles.

Dans votre cahier, vous trouverez un état du dossier PICA en date du 17 mars 1975 qui donne le plus de détails possible sur l'évolution de ce dossier et sur les dépenses qui pourront y être consenties.

On remarque, au sommaire, que le projet PICA dans Mirabel, touchant un parc industriel très important, totalise en dollars 1975, une somme de $33,500,000.

S'il y avait des questions sur le programme 3, élément 3, cela me ferait plaisir d'y répondre.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Le chef de l'Opposition.

Projet d'aciérie

M. Morin: M. le Président, avant de passer à l'examen des chiffres, sur lesquels, d'ailleurs, je n'aurai pas tellement de questions, j'aimerais entretenir le ministre de la question du projet d'aciérie.

Nous en avons parlé en Chambre à quelques reprises. Il conviendrait peut-être de faire le point un peu plus à fond. Je voudrais demander au ministre d'abord s'il a reçu une réponse à sa lettre du 16 décembre 1974, lettre qu'il adressait à M. Jamieson, ministre fédéral de l'Expansion économique régionale. Et s'il a reçu une réponse à sa longue lettre, pourrait-il nous la communiquer?

M. Saint-Pierre: II y a eu une réponse, M. le Président. On va tenter de rechercher la lettre, il me fera plaisir de la rendre publique. Essentiellement, M. Jamieson me disait: Nous n'avons pas pris parti pour une province ou pour l'autre — il me l'a confirmé encore verbalement récemment — nous avons fait un bout de chemin et maintenant c'est aux provinces intéressées à tenter de trouver des partenaires privés, ceux qui sont capables de prendre la décision, d'investir l'équité nécessaire pour développer le projet, de mettre tout cela ensemble. Comme je l'ai indiqué en Chambre récemment, le fait qu'on ait vu dans les journaux financiers la nomination d'un président de la société en Nouvelle-Ecosse, M. Hinson, et que la charte de la société ait été octroyée, cela ne veut pas dire que la Nouvelle-Ecosse va réaliser ce projet quand même évalué à près de $915 millions comme investissement. La structure est très facile à faire, c'est une loi, une charte, des gens qu'on nomme. Nous sommes déjà plus loin que cela. Je pense qu'on tente de mettre ensemble des partenaires pour cela. Il y a eu des discussions avec SIDBEC. Nous avons actuellement un groupe de travail qui examine toutes les implications du pro-jet.

M. Morin: Ce qui a étonné l'Opposition dans ce dossier, M. le Président, c'est la façon dont, pendant deux ans, le ministère de l'Expansion économique régionale du gouvernement fédéral a pu élaborer un projet considérable de transforma-

tion du minerai de fer en Nouvelle-Ecosse et a certainement, en tout cas, procédé à des études sérieuses...

M. Saint-Pierre: Dans l'est du Canada.

M. Morin:... de transformation, d'après ce que nous pouvons savoir, en tout cas, en Nouvelle-Ecosse, de minerai de fer qui, en définitive, va devoir venir, pour la majeure partie, du Québec. Est-ce que le ministre ne trouve pas curieux que le gouvernement fédéral ne soit pas au courant ou semble ne pas être au courant de la politique de transformation des richesses naturelles du Québec, au Québec même?

M. Saint-Pierre: II y a plusieurs nuances, M. le Président, à apporter à ce qui vient d'être déclaré. La partie principale des études qui ont pu être faites ne touchait pas la Nouvelle-Ecosse, mais touchait différents sites de l'est du Canada, deux de ces sites était au Québec, Gros-Cacouna et Sept-Iles. En passant, rien de cela ne s'est fait en secret, nous étions au courant du mandat qui avait été donné aux consultants, nous savions qui faisait l'étude et quelle était la nature du... Nous avons été tenus au courant des développements dans ce secteur. On mentionne le minerai de fer du Québec. Il est faux de dire que c'est un minerai de fer qui vient exclusivement du Québec. C'est un minerai qui vient du port de Sept-lles, mais une partie importante de ce minerai peut venir de la province de Terre-Neuve. Une autre partie qu'on pourrait mentionner, c'est que, pour mettre ensemble une aciérie, cela ne prend pas juste du minerai de fer. Cela prend du charbon, qui ne vient pas de la province de Québec. Il peut venir d'ailleurs.

M. Morin: Cela dépend du procédé.

M. Saint-Pierre: Cela prend du gaz naturel qui peut venir... Enfin, il y a toute une gamme de produits, mais c'est évident que si le minerai de fer québécois pouvait se prêter à cela, si les autres sites... mais je pense que, fondamentalement, ce qui est le plus important, c'est que la province pourrait mettre ensemble le groupe, le consortium qui sera prêt à investir. On peut fort bien parler d'aciérie, il faut trouver des gens qui sont prêts à investir. A ce sujet, je ne peux m'empêcher d'exprimer ici quand même, et peut-être qu'elles sont très fondées, les réserves du président de SIDBEC sur l'opportunité pour la province de Québec de se lancer dans ce projet. Il est peut-être très motivé.

M. Gignac s'interroge sur le fait que possiblement nous n'ayons pas les ressources humaines et les ressources financières après avoir fait une expansion considérable à SIDBEC dans les mêmes temps, d'envisager un projet de cette ampleur. D'ailleurs, lorsqu'on parle à des compagnies comme la STELCO qui est la plus grande compagnie canadienne, elle nous dira qu'elle ne peut s'enthousiasmer pour le projet, non pas que le projet ne soit pas rentable en lui-même, mais parce qu'elle en a elle-même déjà trop avec des projets qu'elle a actuellement en cours et qu'elle n'a pas — un peu la même réponse que M. Gignac — ni les ressources humaines, ni les ressources financières pour envisager ce projet.

M. Morin: La Nouvelle-Ecosse ne semble pas douter que ce soit possible de trouver les partenaires, les capitaux et de l'établir dans la baie de Gabarus.

M. Saint-Pierre: II y a bien des gens qui confondent la réalité avec les rêves ou qui prennent les rêves pour des réalités.

M. Morin: Je ne voudrais pes que le ministre se moque...

M. Saint-Pierre: Je ne veux pas me moquer.

M. Morin: ... du gouvernement de la Nouvelle-Ecosse, parce qu'il...

M. Saint-Pierre: Jamais de ma vie.

M. Morin: ... pourrait découvrir que demain le projet se réalise effectivement et il serait obligé de ravaler ses moqueries.

M. Saint-Pierre: Non, j'ai simplement voulu dire au chef de l'Opposition que ce n'est pas parce qu'on fait des structures qu'on a nécessairement résolu le problème. Nous ne croyons pas nous-mêmes que la Nouvelle-Ecosse soit en position pour annoncer demain matin le projet.

M. Morin: Oui.

M. Saint-Pierre: Cela prend des partenaires.

M. Morin: Je voudrais lire au ministre certains passages de la lettre à M. Jamieson...

M. Saint-Pierre: C'est moi qui l'ai écrite, je la connais.

M. Morin: Oui.

M. Saint-Pierre: Vous voulez la lire.

M. Morin: Je voudrais rappeler un ou deux passages au ministre.

M. Marchand: ... en français.

M. Morin: Ce qui nous inquiète plus encore, écrivait-il, c'est la quasi exclusivité apparente accordée à la région de Sidney et l'omniprésence dans la toile de fond de la compagnie Sisco. Nous ne pouvons nous empêcher de nous demander ainsi comment le ministère de l'Expansion économique régionale a pu choisir de façon aussi exclusive de poursuivre l'étude pour la région de Sydney alors que le rapport sur la sélection des sites conclut, comme vous le signalez vous-même

dans votre lettre, que les sites examinés arrivaient sur un pied d'égalité.

Ce n'est donc pas moi qui dis qu'il y a eu nettement l'accent dans les études faites par le pouvoir fédéral sur une région de Nouvelle-Ecosse, c'est le ministre lui-même qui le dit dans sa lettre.

Qu'est-ce qui en est exactement? Je veux dire, est-ce que vraiment le Québec a été tenu au courant de toutes ces études au fur et à mesure et est-ce qu'il a été consulté ou s'il s'est trouvé devant un fait accompli ou quasi un fait accompli? C'est ce qu'il semble indiquer dans sa lettre.

M. Saint-Pierre: Comme je l'ai mentionné, là où c'est faux, c'est que vous avez donné l'impression, dans le début de vos questions sur cela, que dès le départ, le gouvernement fédéral avait misé sur la Nouvelle-Ecosse. Ce que je vous avais mentionné, c'est que dans les études, même celles rendues publiques en décembre I974, les six sites avaient été menés de front. C'est la dernière étude seulement où voyant qu'il y avait seulement six sites qui semblaient comparables, on en a pris un qui était très près du problème qu'on connaît bien en Nouvelle-Ecosse, la compagnie Sisco qui accuse des déficits considérables avec un taux de chômage très élevé et on a poussé plus à fond les études de rentabilité sur ce site en se disant que fondamentalement, les mêmes données pouvaient s'appliquer à d'autres sites ou que si on voulait aller vite, il fallait faire les mêmes types d'études. Il n'y en a pas plus que cela qui a été fait.

M. Morin: C'est par hasard qu'on a étudié Sydney plus avant, si je comprends bien. Mais c'est un hasard dont le ministre s'est plaint assez amèrement dans cette lettre et nous dit: De fait, la lecture du rapport donne manifestement l'impression que les jeux sont faits en faveur de la région de Sydney.

Est-ce que le ministre a lieu de croire que la situation est changée maintenant et que les jeux ne sont pas faits?

M. Saint-Pierre: En ce qui touche le gouvernement fédéral, les jeux ne sont pas faits, j'ai eu des rencontres récentes avec M. Jamieson et on a convenu que le gouvernement fédéral estime avoir, quant à lui, déposé une étude qui indique l'intérêt que le secteur privé ou public pourrait avoir pour une aciérie orientée vers des marchés d'exportation d'une capacité d'environ 2 millions de tonnes. Il laisse maintenant au gouvernement du Québec et au gouvernement de la Nouvelle-Ecosse qui sont les deux gouvernements qui ont exprimé le plus d'intérêt sur le dossier, d'aller plus loin dans leurs études. C'est ce que nous faisons actuellement.

Récemment, le gouvernement fédéral a confié à une firme de Montréal une étude sur l'impact socio-économique et les implications pour les politiques gouvernementales d'une aciérie orientée vers des marchés d'exportation dans l'est du Canada. Cette étude récente dont nous avons le mandat ici touche tous les sites qui avaient été identifiés, les six premiers sites. C'est en date du 8 avril I975.

M. Morin: Est-ce que, sur l'équipe de travail qui a fait les recherches sur les sites, il y avait un ou des représentants du Québec?

M. Saint-Pierre: Je connais des Québécois qui ont participé à l'intérieur du mandat de Stelco à l'élaboration de l'étude. Maintenant, du gouvernement du Québec, il n'y avait personne, comme il n'y avait personne du gouvernement fédéral.

Les consultants, Stelco, regardant l'est du Canada, dans un premier temps, ont perçu six sites qui semblaient présenter des avantages marqués. Il y avait quand même des critères minimaux qui devaient être remplis. Par après, on a développé une analyse des dépenses d'immobilisation et des dépenses d'exploitation pour les six sites envisagés, compte tenu des distances, des frais de...

M. Morin: Dans sa lettre, le ministre faisait observer que le choix, en tout cas, l'idée pouvait se dégager du rapport que la participation d'un représentant du bureau régional de la Nouvelle-Ecosse à l'équipe qui a rédigé le rapport avait contribué à donner au ministre l'impression que le rapport était peut-être biaisé en faveur de la baie de Gabarus plutôt que d'un site québécois.

M. Saint-Pierre: Je maintiens cela. Il nous a paru que M. Harper, qui était du bureau fédéral de Halifax au ministère de l'Expansion économique régionale, semblait, à notre sens, plus près de l'étude que pouvait l'être M. Montreuil du même ministère au Québec. Je n'ai pas porté d'accusation.

M. Morin: Est-ce que la situation a été corrigée depuis ou si elle demeure la même?

M. Saint-Pierre: Elle est corrigée en ce sens que c'est maintenant les provinces, qui, finalement, manient le dossier, chacune d'entre elles. Nous recherchons des partenaires, la Nouvelle-Ecosse doit en rechercher. Nous tentons de mettre ensemble un consortium, nous tentons de pousser plus loin l'étude. Ce n'est pas la peine de vous dire que je n'examine pas des sites de Gabarus, j'examine Gros Cacouna et Sept-lles et j'imagine qu'en Nouvelle-Ecosse, on fait la même chose.

M. Morin: Je m'en doute. Maintenant, vous avez tout de même un atout majeur dans votre jeu. Je me demandais dans quelle mesure vous utilisez cet atout. Il y a le minerai de fer, quand même, qui se trouve au Québec. Il en viendra peut-être de Terre-Neuve. Mais je ne pense pas qu'il en vienne dans les quantités industrielles dont on aura besoin pour faire marcher une aciérie de cette importance.

Est-ce que le ministre a pleinement utilisé le poids que donne au gouvernement du Québec la

présence du minerai d'acier en quantité importante au Québec?

M. Saint-Pierre: Sûrement.

M. Morin: Tout à l'heure, nous avons parlé, en passant, de la participation de SIDBEC-DOSCO au projet. Est-ce que le ministre peut nous donner des précisions à la suite de ce qu'il affirmait en janvier dernier? Il affirmait à ce moment-là qu'il y avait moyen de réaliser cette participation, moyennant une diversification du capital-actions de SIDBEC et la formation d'un nouveau "joint venture" associant SIDBEC à l'industrie privée de l'acier. Est-ce que le ministre pourrait nous dire ce qu'il en est aujourd'hui de cette affirmation?

M. Saint-Pierre: Nous avons exploré la situation avec SIDBEC. Cela revient à ce que nous avons discuté antérieurement. Si j'étais créditiste et que je pouvais penser une seconde que l'argent s'imprime, je ne m'inquiéterais pas d'une capitalisation de $300 millions ou $400 millions qui pourrait être requise pour le projet.

Mais comme je n'imprime pas l'argent et comme je sais que le gouvernement a plusieurs priorités, non seulement sur le plan économique, mais également sur le plan social, sur le plan culturel et sur d'autres, il faut établir des priorités.

Une des façons de pouvoir avoir une aciérie d'importance, sans pour autant être obligé de faire une sortie de fonds aussi importante, aurait pu être de confier à SIDBEC ce nouveau projet et de diluer quelque peu la part du capital-actions que le gouvernement détenait dans SIDBEC.

Il n'y a rien de magique que nous soyons à 100% dans SIDBEC. On pourrait, si on peut se trouver des partenaires appropriés et, si les études montent, c'est avantageux. Je ne suis pas doctrinaire et je ne vise pas 50%, parce que c'est inscrit dans mon volume de philosophie, mais, si on y trouve des avantages, on peut diluer le capital de SIDBEC et, ainsi, être majoritaire dans une aciérie beaucoup plus importante que celle que nous avons dans le moment. Mais, si ce n'est pas à notre avantage... Ce que je n'aurais pas voulu, c'est de ne pas me poser la question, parce que, si on ne s'était pas posé la question, on risquait de se retrouver propriétaire à 100% d'une aciérie d'une capacité de combien, SIDBEC? De I.6 millions de tonnes à Contrecoeur, après la deuxième phase et, en même temps, avoir contribué — poussé en cela par le chef de l'Opposition — à inviter des étrangers à établir une aciérie à Sept-lles ou à Gros Ca-couna qui aurait été en concurrence, dans certains cas — rappelons-nous l'aluminerie avec l'Alcan — sûrement, avec SIDBEC.

Nous avons posé la question: N'y a-t-il pas avantage d'examiner les solutions qui impliqueraient que nous vendions une partie de l'avoir des actionnaires dans SIDBEC? Si c'était avec des étrangers, bien sûr, par principe, on resterait majoritaire. Si c'était avec des Québécois, on pourrait peut-être convenir que c'est 50/50 ou, je ne sais pas.

M. Morin: Oui, mais il y aurait moyen de faire en sorte que ce "joint venture", SIDBEC, DOSCO et d'autres sociétés, ne s'applique pas aux activités existantes de SIDBEC-DOSCO, mais s'applique aux activités, aux nouveaux projets. Est-ce que c'est à cela que vous songiez?

M. Saint-Pierre: Non, on pensait globalement, parce que je pense qu'il y a plus de force d'avoir une forte aciérie qui a... Encore un fois, cela demeure sujet à étude, parce que, de la façon dont vous le décrivez, si on pense à un "joint venture" dans le nouveau projet, indépendamment de l'autre, cela demande quand même des sorties de fonds.

M. Morin: Oui.

M. Saint-Pierre: Si on est à 50%, cela va demander 50% de $200 millions. Cela fait $100 millions. C'est à peu près...

M. Morin: M. le Président, sur l'aciérie, je pense que c'est à peu près tout ce que j'ai à dire. Nous pourrions peut-être passer à un autre dossier.

M. Saint-Pierre: A l'élément 4? Textiles

M. Morin: Non, toujours dans l'élément 3, se rattachant à la question des textiles. Je pense que cela peut être assez bref, parce qu'on en a déjà parlé, à plusieurs reprises. Cet après-midi, je ne sais si le ministre était à la rencontre entre le gouvernement et la CSD. J'ai eu l'occasion moi-même de rencontrer les représentants de la CSD, par la suite.

L'un des problèmes sur lequel ils ont insisté le plus vivement, cela a été, justement, la question de l'état de l'industrie du textile, où le chômage augmente à vue d'oeil. Il était de 8,000, il y a quelques semaines, il approche maintenant 10,000 personnes, d'après ce que j'ai pu savoir.

Je sais que le ministre a rencontré le ministre fédéral de l'Industrie et du Commerce, à la suite du télégramme d'urgence qu'il lui avait fait parvenir, le 2 avril. J'aimerais demander au ministre s'il peut faire un bilan rapide avec les conséquences, pour le Québec, des derniers accords signés par le Canada, en avril et au début du mois de mai, avec le Japon, la Corée et la Chine, en particulier avec Formose. Est-ce que le ministre a pu obtenir des modifications aux accords proposés? Est-ce qu'il est satisfait de ces accords?

M. Saint-Pierre: En fait, c'est dans le sens de ce que nous avons demandé, bien que, fondamentalement, M. le Président, il ne faudrait pas se leurrer et penser que, avec la déclaration du 5 mai 1975, de M. Gillespie, tout sera réglé, puisque, l'analyse des statistiques nous montre que, les importations qui nous affectent énormément sur le marché canadien, ne sont pas des importations des pays à bas salaire, comme Hong Kong, T'Ai-Wan ou la Corée.

C'est essentiellement un accroissement substantiel des importations venant des pays industrialisés, en particulier les Etats-Unis, l'Allemagne de l'Ouest, l'Autriche, les pays comme cela.

Ce que nous avons surtout réclamé de M. Gil-lespie, c'était beaucoup plus des modifications au processus par lequel le Canada contrôle à la fois les volumes, les quantités, la qualité, les prix et les pays d'origine de tout ce qui touche le textile. Il semble que le processus que nous avons au Canada est extrêmement lent, même avec toute la compétence que les gens peuvent y mettre. C'est un processus qui nous donne de l'information lorsque le mal devient presque irréparable ou a été fait. C'est un processus qui devrait, à notre sens, être substantiellement modifié, peut-être adapté à des formules comme celles des Etats-Unis ou avec des ordinateurs ou, enfin, avec des quantités et des prix moyens des trois derniers mois. On voit immédiatement lorsqu'il y a des changements subits dans la situation.

Au problème des textiles, il y a aussi un autre point qu'il faudrait mentionner. C'est que, vivant dans une économie de marché, il faut bien savoir que, lorsque, partout dans le monde, les gens, à cause d'une récession économique aux Etats-Unis, décident subitement de changer la mode dans le vêtement, par exemple, le "denim" a grande vigueur dans le moment, il était très peu en demande il y a quatre ou cinq ans, cela cause des perturbations au niveau primaire et au niveau secondaire. De la même façon lorsqu'il y a un déclin de l'achat des consommateurs. Je ne sais pas ce que le chef de l'Opposition ferait s'il était à la place du gouvernement fédéral, parce que, fondamentalement, il ne faut pas nier que c'est cela le problème. Je vais tenter de l'illustrer. C'est un peu la même chose que si, au lieu de l'industrie du textile, c'était l'industrie qui pourrait produire du Seven-Up. Tout à coup, les gens ont décidé de ne plus acheter de Seven-Up. Qu'est-ce que vous voulez faire? On ne peut pas l'entreposer et on ne peut pas en faire, continuer d'en produire. C'est cela, les mécanismes d'ajustement complexes dans une économie de marché. Je rappelle aussi que, fondamentalement, le problème ne vient pas des pays de l'Orient. Il vient des pays comme les Etats-Unis. Je pense que, compte tenu des négociations avec le GATT, compte tenu des possibilités de représailles dans le secteur du vêtement, le Canada a peut-être une attitude trop conservatrice, ou pas assez libérale, mais il préfère être prudent vis-à-vis de ses transactions avec les Etats-Unis.

M. Morin: Ce qui m'étonne dans ce dossier, je vous l'avoue, M. le ministre, c'est que l'industrie du textile constitue pour le Québec un secteur très important. C'est probablement le plus gros employeur dans le secteur secondaire au Québec. En fait, je pense que le Québec compte pour 50% de la main-d'oeuvre de l'ensemble du Canada dans le secteur. Je m'étonne de ce qu'on ait pu être témoin, je ne veux pas anticiper trop sur les discussions que nous aurons sur te GATT, mais je m'étonne que la situation ait pu devenir si dramatique. Est-ce que le gouvernement n'aurait pas pu prévoir un peu que les marchandages qui se faisaient au GATT pourraient avoir ce type de conséquences pour l'industrie québécoise?

M. Saint-Pierre: Non, ce n'est pas dû, encore une fois, je le répète, au marchandage du GATT. D'ailleurs, dans les textiles, c'est aussi récent que septembre I974, tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes. Les fabricants avaient de la difficulté à trouver la main-d'oeuvre pour faire face à la demande. Tout à coup, surtout alimentée par une mauvaise conjoncture aux Etats-Unis, la situation s'est détériorée et il y a eu, sur le plan mondial, une surcapacité de production qui a fait que tous les gens ont commencé à couper les prix, à inonder les marchés. Le Canada a dû absorber beaucoup de... Ce que je vous dis, c'est que les mécanismes actuels au Canada pour l'industrie du textile — et je l'ai dans un télégramme que j'ai envoyé à M. Gillespie, vous l'avez sans doute — les changements brusques dans les prix des produits, les difficultés pour arriver avec une compilation rapide des données précisant les importations, la lenteur caractérisant l'engagement des mesures défensives prévues par les ententes en vigueur ainsi que la montée dramatique depuis quelques mois des produits importés dans une période de décroissance économique mondiale, imposent des conditions très difficiles aux travailleurs et à l'industrie en général.

Demain, M. le Président, je pourrai déposer également une lettre que j'ai transmise au président de la CSD, qui m'a demandé la position du gouvernement du Québec vis-à-vis de l'industrie du textile, si on voulait la voir disparaître?

M. Morin: Oui, j'aimerais beaucoup l'avoir, si le ministre avait l'amabilité de la déposer.

M. Saint-Pierre: Avec plaisir...

M. Morin: Très bien!

Je crois avoir vu le télégramme du ministre, mais je ne pense pas l'avoir dans mon dossier. Est-ce qu'il y en a une copie de reste?

M. Saint-Pierre: C'était avant la rencontre.

M, Morin: Oui, c'est le télégramme dont nous avons parlé, déjà, à quelques reprises. Je remercie le ministre.

Il reste que le ministre n'est pas sans savoir que le Canada est un des plus gros importateurs de textiles au monde. Je pense que c'est probablement le principal importateur. Donc, il me semble qu'on aurait pu...

M. Saint-Pierre: Per capita.

M. Morin: Per capita, c'est ce que je veux dire. Au Canada, c'est de $28 par habitant, en moyenne; ensuite, on tombe à $16 en Angleterre; $10 aux Etats-Unis, et, pour la Communauté économique

européenne, $7 par habitant. Donc, ce n'est pas comme s'il n'y avait pas de la marge pour accorder une certaine protection à l'entreprise canadienne, ou québécoise, en l'occurrence. Je m'explique mal que le Québec soit si démuni devant des événements comme ceux-là, et qu'il en soit réduit à plaider de façon un peu piteuse devant le ministre fédéral de l'industrie et du Commerce pour obtenir un semblant d'intervention.

En fait, si j'ai bien compris le communiqué du ministre à la suite de la rencontre, le gouvernement fédéral n'a pris aucun engagement immédiat. C'est bien cela que le communiqué nous dit. Donc, M. Gillespie ne s'est...

M. Saint-Pierre: L'essentiel de nos demandes portait beaucoup plus sur une réforme à long terme des mécanismes prévus pour contrôler les volumes et les prix. Sur ce point, il s'est engagé à... Je pense que, cette semaine, il y a des rencontres. Je vois des lettres du 30 avril I975. Il y a eu une rencontre en avril. Il y en a une autre de prévue prochainement, et je vois ici les principaux sujets que les représentants du Québec ont mis de l'avant avec les homologues fédéraux, à long terme.

M. Morin: Oui, mais à long terme. Mais pendant ce temps-là...

M. Saint-Pierre: Ecoutez! On ne peut pas changer le mécanisme du jour au lendemain. Ce n'est pas vrai. Ne nous leurrons pas et ne leurrons pas la population en particulier. Vous me parlez du gouvernement fédéral, il faut reconnaître que, dans le moment, c'est lui, et pour très longtemps, qui est responsable de toute la politique d'importation...

M. Morin: Le ministre a failli glisser... C'est un fait que, dans le moment, c'est lui, et c'est justement ce qui est triste, c'est que le Québec...

M. Saint-Pierre: Non, ce n'est pas triste.

M. Morin:... ne peut pas agir, ne peut pas avoir sa propre politique dans ce domaine.

M. Saint-Pierre: On ne peut pas avoir le gâteau et le manger en même temps. On est bien content d'avoir le gouvernement fédéral lorsqu'on reçoit des paiements de péréquation. On est bien content de payer l'huile à $6.25 le baril, alors que les autres pays la paient $ll.

M. Morin: Voyons! Si le premier ministre préfère la péréquation à la perception des taxes, par lui-même, je le laisse à ses goûts, mais je dois constater qu'il se satisfait de bien peu. Est-ce que, dans le cas du textile, tout de même, le ministre ne croit pas qu'il y aurait eu lieu d'intervenir de façon beaucoup plus draconienne, étant donné l'urgence qui se manifeste dans toute la correspondance, dans les télégrammes qu'il envoie au ministre, pour finalement revenir avec quoi, avec aucun engagement précis? Le ministre fédéral lui a tout simplement dit qu'il ferait ce qu'il pourrait pour obtenir que les pays exportateurs s'imposent des restrictions volontaires. Si, à long terme, vous ne comptez que sur les restrictions volontaires, je dois dire que ce n'est pas une bien grosse protection, parce qu'il y a toutes sortes de façons de tourner ces "accroires", comme le ministre le sait, d'abord. Il sait que, dans plusieurs autres domaines où il y a des accords de restriction volontaire, cela n'a guère fonctionné, parce qu'on fait transiter les marchandises par d'autres pays souvent, pour envahir le marché de la même façon.

M. Saint-Pierre: Non, sur ce plan, il y a des améliorations qui ont été apportées, qui permettent clairement d'identifier, lorsque le Japon envoie des marchandises en Pologne pour les renvoyer au Canada; cela est maintenant couvert. On n'a plus de problème sur cela.

Mais je pense que le chef de l'Opposition conçoit lui-même que c'est très complexe. Ce n'est pas une chose qui se règle en 24 heures, et je pense que le moins qu'on puisse dire, j'en ai eu le témoignage, vous pouvez demander à M. Dalpé, c'est que la position énergique que le gouvernement du Québec a prise vis-à-vis du gouvernement d'Ottawa, je pense, a réussi à ébranler la certitude qu'Ottawa avait de bien dominer la situation.

Je pense que maintenant Ottawa est prêt à revoir plusieurs de ces éléments en matière de politique du textile.

M. Morin: Ce n'est pas ce qui ressort du communiqué, mais enfin, puisque le ministre nous dit qu'il a ce sentiment, je n'insisterai pas. Si le ministre nous dit que vraiment il attend des résultats bientôt... Quand il nous dit à long terme, cela veut dire quand? Quand pourrait-on avoir un aperçu des mesures fermes que le gouvernement fédéral compte prendre dans ce domaine?

M. Saint-Pierre: II y a des mesures qui peuvent être prises la semaine prochaine.

M. Morin: L'inscription sur la liste, c'est déjà fait.

M. Saint-Pierre: Non. Les surtaxes sur les filaments de polyester, des choses semblables, sont des choses qui peuvent être prises la semaine prochaine. La période, d'ailleurs, de 60 jours se termine prochainement. Maintenant, à plus long terme, nous parlons dans une perspective que dans douze ou treize mois, nous ayons un nouveau système et déjà, comme je l'ai mentionné, les discussions sont en cours.

M. Morin: Ce n'est pas comme si on était devant un problème qui n'est pas aigu. C'est un problème qui est en train de devenir dramatique et il n'est pas certain que cette industrie puisse se remettre de ce qui lui arrive actuellement. C'est pour

cela que je me suis permis, à plusieurs reprises, d'interroger le ministre en Chambre pour lui suggérer qu'il y avait peut-être lieu d'adopter des politiques beaucoup plus draconiennes.

M. Saint-Pierre: Comme quoi?

M. Morin: Je pense au contingentement, par exemple.

M. Saint-Pierre: Et qu'arrive-t-il si le lendemain matin les Etats-Unis décident d'imposer le contingentement pour les vêtements où la valeur ajoutée est beaucoup plus grande, où l'emploi est beaucoup plus substantiel et que nous nous voyons coupés de pouvoir pénétrer...? Vous savez, dans la vie, il faut accepter toutes les règles du jeu et une des règles, c'est lorsqu'on touche à des pays comme les Etats-Unis, il faut s'attendre que le lendemain matin, il y aura quelque chose. Ce ne sont pas des gens qui vont nous regarder faire et qui ne nous diront rien.

M. Morin: Mais quand on parle de contingentement, on ne parle pas de faire tomber un rideau et d'empêcher toute importation.

M. Saint-Pierre: Mais on parle de changer le statu quo.

M. Morin: Oui.

M. Saint-Pierre: Sans cela, ça ne veut rien dire. Quand on change de statu quo et qu'on nous fait plaisir, qu'on protège notre production, l'inverse est aussi vrai, savoir qu'on va faire du tort à ceux qui nous font du tort dans le moment. Cela, ce sont les Etats-Unis d'Amérique, d'autant plus qu'ils ont des mécanismes très rapides pour réagir à cela. Le lendemain, les Etats-Unis empêcheront l'exportation de vêtements. C'est quelque chose, d'après les dernières statistiques — je ne sais pas — à peu près $50 millions ou $60 millions par année avec une valeur ajoutée beaucoup plus grande.

M. Morin: Le ministre parle comme si nous n'étions en face que des Etats-Unis dans ce domaine.

M. Saint-Pierre: Ce sont essentiellement les Etats-Unis qui sont responsables. Si j'avais mon spécialiste...

M. Morin: Y a-t-il moyen...

M. Saint-Pierre: Ce sont essentiellement les Etats-Unis qui sont responsables pour la plupart des secteurs.

M. Morin: Si votre spécialiste n'est pas là ce soir, on pourrait peut-être avoir une idée demain. Je ne veux pas bousculer le ministre; mais y aurait-il moyen quand même de connaître l'origine des textiles et des vêtements aussi, parce qu'il y a la question du vêtement qui, à l'heure actuelle, cause des problèmes sur le marché québécois. C'est possible d'avoir cela?

M. Saint-Pierre: Oui.

M. Morin: Je ne demande pas des quantités...

M. Saint-Pierre: Pas pour demain, mais on peut vous... pourquoi... Il y a à peu près 540 produits. Pour tous les produits ou les principaux produits?

M. Morin: Non. Les principaux produits. Cela serait déjà énorme, notamment les polyesters.

M. Saint-Pierre: En ce qui regarde les principaux produits, nous vous les donnerons en volume, en livre, les importations au Canada que nous avions en I973, en I974 et la période correspondante en I972, I973 et I974 et on verra que, globalement — je l'ai vu moi-même de mes propres yeux — il y a des pays comme le Japon, Hong Kong qui ont essentiellement les mêmes niveaux d'importation en quantité que nous avions auparavant, même à quelques reprises, c'est moindre, mais que dans le cas des Etats-Unis, de l'Allemagne de l'Ouest, de l'Autriche, de la Suisse, cela monte en flèche.

M. Morin: Les Etats-Unis ne sont pas les seuls en cause.

M. Saint-Pierre: Ecoutez, il faut parler...

M. Morin: En tout cas. Si vous pouvez nous donner des chiffres avec les grandes catégories, cela nous donnera déjà une idée plus juste, parce que c'est ce que le ministre me répondait en Chambre encore l'autre jour...

M. Saint-Pierre: C'est la vérité.

M. Morin: Vous venez quand même d'ajouter quelques pays aux Etats-Unis.

M. Saint-Pierre: Non. Je n'ai jamais dit que c'étaient exclusivement les Etats-Unis. J'ai dit que ce sont les Etats-Unis qui sont largement responsables des difficultés que nous avons.

M. Morin: Le ministre a-t-il fait des représentations au pouvoir fédéral sur les techniques qu'il devrait utiliser? A-t-il discuté de la possibilité de contingenter quand même? Cette possibilité a-t-elle été invoquée parce que c'est une technique dont on se sert lorsqu'une industrie est vraiment dans un état grave? Je ferai remarquer au ministre que même dans le GATT, il y a des clauses qui permettent, lorsqu'une industrie est vraiment menacée...

M. Saint-Pierre: L'article 3.

M. Morin:... d'invoquer la situation de crise, je ne sais plus de quel article exactement...

M. Saint-Pierre: Articles 3 et 4.

M. Morin: Evidemment, c'est sujet à un examen par les autorités compétentes.

M. Saint-Pierre: C'est très lent.

M. Morin: Mais il y a moyen d'échapper. Les Etats-Unis eux-mêmes l'ont fait à l'occasion. Ils n'ont pas hésité à s'en servir de la clause d'urgence. Est-ce que vous en avez discuté à tout le moins.

M. Saint-Pierre: Oui.

M. Morin: ...avec le pouvoir fédéral? Et vous avez évoqué la possibilité de prendre des mesures plus draconiennes, comme le contingentement, la taxe spéciale à l'importation, par exemple?

M. Saint-Pierre: Oui.

M. Morin: Aussi. Est-ce que vous avez discuté de la possibilité de la préinscription des commandes aussi?

M. Saint-Pierre: Oui et dans plusieurs des cas, elle a été faite. Dans ce communiqué du 5 mai, le ministre Gillespie a indiqué tous les articles qui étaient dorénavant placés sur la liste. Dans certains cas il y a la préinscription des commandes qui a été établie. C'est dans le secteur du vêtement essentiellement.

M. Morin: Est-ce que vous avez aussi... Allez-y.

Est-ce qu'il a été question aussi, peut-être, d'un contrôle plus sévère des importations dans le domaine du textile par l'organisme antidumping, par le tribunal antidumping?

M. Saint-Pierre: Oui.

M. Morin: Est-ce qu'il s'en fait? Est-ce que vous avez pu constater qu'il y a des cas de dumping?

M. Saint-Pierre: Non. Tout le mécanisme actuel est trop lent, trop onéreux, il y en a eu quelques cas, mais la preuve doit être apportée par le fabricant et elle est extrêmement complexe. Les quelques cas qui ont pu être soumis dans la question des chemises, dans la question des gants, c'est extrêmement long. Pour avoir une décision, c'est un an, c'est seize mois, c'est dix-sept mois et souvent, la conjoncture a changé complètement et le même manufacturier qui s'était plaint des importations de tel pays, parce qu'il n'est plus capable de satisfaire à la demande est obligé d'importer lui-même. Je pense que la preuve est faite que c'est un mécanisme trop lent. Quand je vous disais que nous réclamions des mécanismes plus modernes, sensiblement ce/que j'ai cru voir qui existe aux Etats-Unis où dès la frontière, le bureau des douanes arrête le textile. L'importateur est obligé de remplir un questionnaire de trois ou quatre pa- ges où il est obligé de donner le pays de fabrication, le nom de l'usine où les choses ont été fabriquées, le destinataire, c'est très complexe et avant même de permettre l'entrée dans le pays, le bureau des douanes, par Télex, envoie ces informations dans un ordinateur qui les absorbe un peu comme les rapports d'impôt et qui allume un feu rouge si le niveau des importations apparaît trop élevé, si les prix dépassent de 10% la moyenne ou sont inférieurs de 10% à la moyenne des trois derniers mois dans ce produit. Les Etats-Unis ont quelque chose de très complexe. Les Etats-Unis ne refusent pas, il n'y a pas un contingentement, mais on dit: Mon cher monsieur, votre marchandise ne peut pas entrer, vous allez remplir une autre formule et on va essayer de vous aider. Finalement cela prend tellement de temps que l'importateur prend toutes ses affaires et les ramène dans le pays d'origine.

M. Morin: Ils sont astucieux, les Etats-Unis... M. Saint-Pierre: C'est cela.

M. Morin: ... parce qu'ils arrivent à contourner les règles du GATT et à se protéger malgré le GATT.

M. Saint-Pierre: C'est cela. C'est ce que nous avons recommandé.

M. Morin: Est-ce que vous avez suggéré au gouvernement canadien d'agir de la même façon?

M. Saint-Pierre: C'est cela.

M. Morin: Sa réaction, si je comprends bien, a été négative.

M. Saint-Pierre: C'est cela.

M. Morin: De sorte que l'industrie est dans l'état où elle se trouve.

M. Saint-Pierre: C'est cela.

M. Morin: Cela ne nous avance pas beaucoup. Est-ce que vous comptez relancer votre collègue fédéral? Quelles sont les démarches que vous comptez faire, maintenant que la situation s'aggrave quasiment de jour en jour.

M. Saint-Pierre: II ne faut pas dramatiser. Elle ne s'aggrave pas de jour en jour. Nous rencontrerons prochainement les représentants de l'industrie, des syndicats, de nouveau. Une rencontre est prévue dans mes bureaux de Montréal et, par la suite, il n'est pas impossible, face à de nouvelles statistiques, que nous relancions la balle à M. Gillespie, quitte à tenter de s'adjoindre, cette fois-ci, d'autres provinces qui peuvent être affectées, notamment l'Ontario.

M. Morin: Le ministre sait sûrement que la quasi-totalité des quotas fédéraux, puisque c'est une compétence fédérale, sur les chemises, a été

levée au cours de I974 et, comme par hasard, le Québec produit 66%, en gros des chemises fabriquées au Canada.

M. Saint-Pierre: C'est un point trop particulier, je ne le sais pas.

M. Morin: Est-ce qu'il y aurait moyen que vous vous documentiez? D'après ce que nous savons, en I974, les quotas, parce qu'il y avait des quotas sur les chemises, ont été levés et le résultat, c'est que c'est entré massivement et je suis pas mal convaincu que c'est une des causes du marasme actuel dans le domaine de la chemise québécoise.

M. Saint-Pierre: On va vérifier, mais je ne suis pas certain de cela, parce qu'il me semblait que les chemises et les gants étaient encore contrôlés très sévèrement.

M. Morin: Je pense que le ministre pourrait consulter certains de ses fonctionnaires derrière lui qui ont l'air au courant.

M. Saint-Pierre: Cela a été levé, mais ce serait malhonnête de ma part de dire que c'est ce qui a causé le problème.

M. Morin: Donc, il y avait des quotas. M. Saint-Pierre: Dans les chemises, oui. M. Morin: Dans les chemises.

M. Saint-Pierre: A la suite des démarches entreprises il y a deux ans et demie.

M. Morin: Maintenant que le ministre sait qu'il y avait des quotas, qu'ils ont été levés en I974, est-ce qu'il n'y aurait pas moyen de les... Etant donné qu'il y en avait, c'est qu'il pourrait y en avoir encore. Est-ce que le ministre pourrait obtenir que ces quotas soient réétudiés et peut-être réappliqués?

M. Saint-Pierre: II faudrait avoir la preuve, mais je ne penserais pas que les chemises causent un problème dans le moment.

M. Morin: Je pense que oui.

M. Saint-Pierre: Non, parce que les cinq points que les représentants de l'industrie du syndicat avaient demandés au gouvernement fédéral, en décembre I974, n'incluaient pas les chemises. Cela incluait bien autre chose, cinq grands articles, mais, pas les chemises.

Maintenant, on peut vérifier de nouveau, mais, encore là, ce que je vous dis, c'est que, si on applique le même mécanisme que celui qui a été appliqué en I972, ça va prendre 18 mois avant de ravoir les quotas. C'est un processus qui est trop lent. C'est ce qu'on a, avec vigueur, énergie, courage, démontré à M. Gillespie, mais on ne l'a pas convaincu.

M. Morin: Oui. Quand on n'est pas maître chez soi, c'est... Passons...

M. Saint-Pierre: C'est vrai que vous n'avez pas convaincu la population vous non plus.

M. Morin: C'est une question de temps, M. le ministre. Il faut que les choses évoluent à leur rythme.

M. Marchand: Vous allez avoir la barbe blanche, blanche, blanche.

M. Morin: Les peuples, c'est comme les individus, il faut quelquefois mettre les choses en noir sur blanc et c'est ce qui est en train de se faire tranquillement.

M. Saint-Pierre: Vous visez l'immortalité.

M. Morin: Non, pas l'immortalité, mais de vivre normalement. M. le Président, à la suite de tout ce que nous venons de dire, je m'interroge sur l'importance que le gouvernement accorde vraiment à cette industrie qui est pourtant l'une des plus considérables du Québec, et certainement, sur le plan de l'emploi, elle concerne beaucoup de monde. Je voyais que la SDI, qui est tout de même notre principal instrument d'intervention au niveau de l'industrie manufacturière, n'a prêté...

M. Saint-Pierre: C'est dans le programme 6.

M. Morin: C'est au sujet du textile.

M. Saint-Pierre: La SDI, c'est le programme 6.

M. Morin: Je vous ai dit qu'il y avait...

M. Saint-Pierre: J'ai de la misère...

M. Morin: ... des sujets qui touchent à plusieurs programmmes et, si vous voulez, on pourrait y revenir, mais ça touche au textile. La SDI n'a prêté que $9 millions, depuis qu'elle est en place, aux industries textiles au Québec sur des prêts totaux qui excèdent $150 millions.

M. Saint-Pierre: Cela vous surprend?

M. Morin: Je trouve que c'est peu pour une industrie qui est si importante au point de vue de l'emploi.

M. Saint-Pierre: D'après vous, quel était le rôle de la SDI? Créer de l'emploi?

M. Morin: C'était certainement d'aider... M. Saint-Pierre: A l'emploi.

M. Morin: ... à l'expansion d'un certain nombre d'industries, dont, par exemple, le textile.

M. Saint-Pierre: Non, M. le Président, je suis

très déçu de la réponse et c'était la grande différence...

M. Morin: Je sais qu'il y a d'autres buts à la SDI, mais...

M. Saint-Pierre: Le gouvernement fédéral donnait de l'argent pour créer n'importe quel type d'emploi au Québec. On a toujours dit qu'on devait s'opposer à ça. Le programme premier de la SDI n'est pas de créer n'importe quel type d'emploi. C'est de changer la structure industrielle, c'est-à-dire de favoriser l'emploi dans des secteurs à haute productivité, à salaire au-dessus de la moyenne, à perspective de croissance, à perspective d'exportation. Malheureusement, le textile ne tombe pas dans ça. L'explication du montant très faible de la SDI, $7 millions sur les $147 millions dont vous m'avez parlé, c'est essentiellement pour ça. C'est parce que le textile n'est pas capable de se classifier dans le programme 2-A.

Pourquoi? Parce qu'on a déjà trop de gens dans le secteur des textiles. Par la SDI, on tente d'en avoir plus, dans les secteurs qui paient de hauts salaires, qui paient de hautes productivités, qui ont des capacités d'exportation.

M. Morin: Rassurez-vous! Si vous croyez en avoir trop dans le secteur du textile, les faits sont en train d'en diminuer le nombre de travailleurs qui peuvent oeuvrer dans ce domaine. Est-ce que le ministre a pris connaissance des propos de M. Dalpé, selon lesquels, peut-être, il conviendrait de recycler une partie de la main-d'oeuvre du textile, dans le domaine de la transformation de l'amiante?

Est-ce que le ministre a une position là-dessus?

M. Saint-Pierre: J'ai répondu en Chambre, il y a à peine deux jours, sur cette question.

M. Morin: Je sais, mais peut-être que là, on a le loisir d'approfondir un petit peu. La Chambre n'est pas l'endroit où l'on peut vraiment approfondir les questions.

M. Saint-Pierre: Vous voulez dire que je ne dois pas vous prendre au sérieux quand vous posez des questions en Chambre?

M. Morin: Non, mais c'est que j'aimerais bien pouvoir prendre le ministre au sérieux, quand il me répond.

M. Saint-Pierre: Vous avez posé exactement la même question il y a deux jours à l'Assemblée nationale. Je vais répéter si on peut avoir...

M. Cadieux: Relisez le Journal des débats.

M. Saint-Pierre: J'ai dit que, si jamais on pouvait réussir dans le secteur de l'amiante — et l'on fait des efforts — la preuve, lorsqu'on va regarder la SDI, on va voir que Amiante Québec, à Sherbrooke, a quand même créé des emplois; il y a eu des investissements.

Mais si on réussit davantage, il m'apparaît qu'il y a des régions du Québec où une implantation d'une transformation de l'amiante serait plus appropriée que dans la région que M. Dalpé mentionne, celle de Victoriaville, que je connais très bien.

Je pense qu'on est capable de trouver, dans des endroits comme Asbestos, comme Thetford-Mines... Je pense que c'est là que devraient aller les usines de transformation de l'amiante.

Je pense que dans une ville comme Victoria-ville, qui a connu quand même un taux extrêmement fort de croissance de sa population au cours des dernières années, il est possible de trouver d'autres types d'industries qui puissent corriger les problèmes actuels qui sont causés, en partie, par des grèves et, en partie, par la faiblesse du secteur du vêtement.

M. Morin: M. le Président, c'est un domaine sur lequel on va certainement devoir revenir assez souvent dans les mois qui viennent, si la débandade actuelle dans cette industrie continue.

Le ministre, bien sûr, a fait des pressions au niveau fédéral, mais on doit constater qu'elles ont été à peu près sans résultat. Je le dis très sincèrement au ministre, je considère que ce domaine n'est pas celui où il puisse être le plus fier des performances de son ministère.

M. Saint-Pierre: Ce n'est pas ce que M. Dalpé m'a dit aujourd'hui. Il a apprécié énormément les positions et l'aide que le gouvernement du Québec avait donnée et de changer...

M. Morin: J'aimerais bien voir M. Dalpé, parce que ce n'est pas le langage qu'il a tenu tout à l'heure, avec ses collègues, lorsque je les ai rencontrés. Vraiment, ils sonnaient la cloche d'alarme dans le domaine du textile. Comme vous le savez, la CSD est fortement implantée dans ce domaine et elle a raison d'être inquiète.

On peut peut-être passer à l'uranium enrichi. Nous sommes toujours à l'infrastructure d'accueil à l'industrie.

M. Saint-Pierre: M. le Président, le ministère que je dirige n'a eu aucune responsabilité dans le dossier de l'uranium enrichi.

M. Morin: Est-ce que je pourrais néanmoins rappeler au ministre qu'il a exprimé des vues sur la question. C'était le 9 décembre 1974. C'était dans la Gazette et on nous dit ceci: "Saint-Pierre admitted Quebec's plans to sell enriched uranium might conflict with Federal Government attempts to market its own Candu nuclear reactors which use natural uranium".

Le ministre a, également, fait d'autres déclarations portant sur l'uranium enrichi, dans le contexte de l'électricité de la baie James. Est-ce que je pourrais demander au ministre, étant donné

que tôt ou tard, ce programme va mettre son ministère en cause — je ne pense pas qu'il puisse admettre d'être laissé en dehors de ce dossier indéfiniment — de faire le point, du point de vue de son ministère, sur la question de l'uranium enrichi?

M. Saint-Pierre: Du point de vue de mon ministère, M. le Président, on n'a jamais dépensé un sou sur l'uranium enrichi. On ne demande pas d'en dépenser cette année. On n'a eu aucune responsabilité dans le dossier.

Ce n'est pas parce qu'on fait une déclaration un jour... Je pense que c'est l'évidence même.

On peut me demander ce que je pense du dernier film qu'on peut montrer à Montréal. Vous n'êtes pas pour me poser des questions sur les producteurs et combien cela a coûté pour faire le film; ce sont les crédits du ministère de l'Industrie et du Commerce qu'on étudie. On n'a rien dans le dossier.

Si jamais le premier ministre décide de nous confier des responsabilités, on les assumera dans ce secteur, mais on ne les a pas, dans le moment. Je ne connais rien du dossier. Je ne serais pas capable de faire le point, malgré toute ma bonne volonté.

M. Morin: Cela règle la question. M. Saint-Pierre: Merci.

Industrie du meuble

M. Morin: Est-ce qu'on pourrait peut-être parler de l'industrie du meuble? Puisque nous sommes toujours à l'accueil à l'industrie, est-ce que le ministre pourrait faire le point sur les projets d'investissements d'origine arabe dont on a parlé, à l'occasion, en Chambre? Est-ce que ces projets se sont concrétisés? S'il s'agit de rumeurs sans fondement, est-ce que le ministre peut nous dire comment de telles rumeurs ont pu prendre naissance?

M. Saint-Pierre: J'en connais passablement sur le dossier, M. le Président. Evidemment, c'était complètement faux, et j'étais ébloui, abasourdi qu'on puisse avoir comme manchette, dans un journal, quelque chose de tellement faux et qui aurait été tellement facile à vérifier avant de la donner en grande manchette. Je pense que si vous vérifiez avec le journaliste de La Presse, M. Laurier Cloutier, il vous dira comment, à l'occasion, un journaliste, en toute bonne foi, peut se faire rouler d'une façon assez incroyable par des gens qui ont d'autres intérêts que le bien du Québec.

M. Morin: C'était complètement farfelu?

M. Saint-Pierre: Complètement faux, complètement farfelu. En fait, même en se creusant la tête et en regardant dans tout le ministère, on a ruéssi à dénicher non pas un Arabe, mais quelqu'un dont le père était arabe mais qui, effectivement, est un Anglais. Il nous avait parlé, il y a à peu près sept mois, pour voir s'il n'y avait pas une possibilité au Québec, pour lui qui avait une invention dans le secteur de l'électronique, d'avoir quelqu'un qui, possiblement, dans le domaine du meuble, pouvait avoir une petite usine à vendre.

M. Morin: Je voudrais vous demander quand même, avant de quitter le sujet de l'industrie du meuble — je prends la réponse du ministre au pied de la lettre et je n'insiste pas — suite aux allégations...

M. Marchand:... numéro 1...

M. Morin: Je m'excuse. Est-ce qu'il y a un collègue qui demande la parole?

Le Président (M. Houde, Limoilou): Oui, le député de Matane.

M. Côté: Posez votre question, je peux attendre.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Dites-la immédiatement.

Cale sèche des Méchins

M. Côté: Parfait. M. le ministre, dans le programme 3, élément 3, on fait mention de l'entente Canada-Québec en ce qui concerne l'est du Québec. Il y apparaît un montant de $200,000 ocncer-nant l'éventuelle cale sèche des Méchins. J'aurais aimé que le chef de l'Opposition nous parle un peu de cette région, puisque, il n'y a pas tellement longtemps, il nous a fait le plaisir de nous rendre visite et de nous décrire comme une région de la Grèce antique. Je dois vous dire que, seulement son apparition dans le paysage comme le dit si bien le député de Laurier... Pour en revenir à la cale sèche des Méchins, j'aimerais savoir, M. le ministre, où en est rendu le projet et quelles sont les chances d'implantation au cours de l'année 1975 de ce projet de cale sèche.

M. Saint-Pierre: Le projet est en bonne voie de réalisation. C'est une cale sèche de 415 pieds, qui permettra d'accueillir des navires de 400 pieds de longueur. Le coût de la cale sèche, M. le Président, au total, sera de $1.195 million, soit près de $1.2 million. Nous avions déjà une somme de $80,000, l'an dernier, qui avait servi à faire démarrer des études. L'OPDQ a fait un transfert de $915,000 de crédits périmés dans le dernier budget. Nous avons, dans le budget que nous discutons ce soir, un montant additionnel de $200,000.

M. Côté: L'origine du projet vient évidemment des chantiers des maritimes qui sont implantés là. A ce que je sache, la cale sèche elle-même, comme les plans sont conçus, à l'heure actuelle, rendra-t-elle possible aux bateaux de la traverse Matane-Godbout, par exemple, aussi bien qu'à

ceux de Rimouski d'aller dans cette cale sèche pour faire des réparations?

Je me pose certaines questions parce qu'il me semble, de prime abord, selon ce que j'ai vu, que la cale sèche ne serait pas suffisante.

M. Saint-Pierre: A l'origine, en fait, on a prévu de faire des plans pour une cale sèche de 250 pieds avec des allonges possibles de 50 pieds à 300 ou 350 pieds.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Voulez-vous rapprocher le micro pour l'enregistrement?

M. Saint-Pierre: Excusez-moi. Jusqu'à 300 et jusqu'à 415 pieds, maintenant, je ne connais pas la dimension du traversier de Matane. Je pense qu'il était prévu qu'on puisse y faire des réparations.

M. Côté: Le projet lui-même est de 250 pieds. Ici, il est rendu à 400 pieds.

M. Saint-Pierre: C'est pour cela qu'on demande une augmentation de crédits.

M. Côté: Les $200,000 serviraient aux trois sections de 50 pieds qui compléteraient les 400 pieds. D'accord, à ce moment...

M. Saint-Pierre: 415 pieds.

M. Côté: 415 pieds, oui, parce qu'il y a une section de 65 pieds, je pense. A ce moment, cela permettrait au traversier de la traverse Matane-Godbout, aussi bien que d'autres sur le Saint-Laurent, de faire des travaux. Où en est-on rendu à l'heure actuelle? Est-ce qu'on en est rendu dans la phase de demandes d'appels d'offres?

M. Saint-Pierre: On termine les plans d'ingénierie en ce moment.

M. Côté: Bon, quand prévoyez-vous annoncer les appels d'offres?

M. Saint-Pierre: Dans les prochaines 6,8,10 semaines selon l'approbation des crédits.

M. Côté: Dans deux semaines?

M. Saint-Pierre: Les plans vont être finis.

M. Côté: D'accord. Y a-t-il une date de livraison de la cale sèche ou si...

M. Saint-Pierre: On va déterminer cela avec l'entrepreneur.

M. Côté: Avec l'entrepreneur.

M. Saint-Pierre: Cela va prendre un an environ...

M. Côté: Cela veut dire qu'à l'été 1977, en principe, on pourrait s'attendre à ce que la cale sèche fonctionne. Je dois rendre hommage aux gens de l'ODEQ qui ont travaillé sur ce projet, parce que je pense que c'est une infrastructure qui va aider grandement la région de Les Méchins.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Le député de Laurier.

M. Marchand: Est-ce que c'est un contrat par soumissions ou négocié?

M. Saint-Pierre: Soumission en autant qu'on sache, nécessairement, je pense.

M. Marchand: Nécessairement, aujourd'hui le contrat négocié est aussi intéressant que le contrat par soumissions. Il est surtout plus solide, les livraisons aussi.

M. Côté: Est-ce que le député de Laurier est intéressé à soumissionner?

Le Président (M. Houde, Limoilou): Le chef de l'Opposition.

M. Morin: M. le Président, j'aimerais poser encore quelques questions dans ce programme. Après cela, je pense que cela pourra aller relativement vite. Je pense qu'on pourrait probablement terminer demain avec un peu de bonne volonté. J'espère que ce sont de bonnes nouvelles, c'en seront certainement pour moi.

Le Président (M. Houde, Limoilou ): Pour votre information, nous avons siégé 9 h 19 actuellement.

M. Saint-Pierre: On va collaborer.

M. Morin: C'est bien. L'information est utile, mais est-ce que vous visiez quelque chose- en disant cela?

Le Président (M. Houde, Limoilou): Je ne vise absolument rien. C'est pour mettre au courant les membres de la commission.

Société Inter-Port

M. Morin: Bon. Je voudrais entretenir le ministre de la société Inter-Port. Le ministre se souviendra que nous avons eu un débat prolongé en Chambre avant l'adoption de cette loi. Je voudrais savoir un peu ce qu'il en découle depuis que nous l'avons adoptée. Est-ce que le conseil d'administration de la nouvelle société a été formé et de qui est-il formé?

M. Saint-Pierre: Cela a paru dans les journaux d'une façon assez...

M. Morin: Cela m'a échappé. Je sais qu'il y avait 13 membres...

M. Saint-Pierre: 13 membres.

M. Morin: ... si ma mémoire est bonne.

M. Saint-Pierre: Les 13 membres de la société ont été nommés il y a quelques temps. Jeudi dernier, ils ont tenu leur première réunion. Ils ont élu l'exécutif de la société Inter-Port.

M. Morin: Qui est le président?

M. Saint-Pierre: Vous allez être heureux d'apprendre que c'est M. Pierre Tremblay, de Québec, qui a été choisi à l'unanimité à la présidence.

M. Morin: Tiens!

M. Côté: Un bon publicitaire.

Une Voix: II saura sûrement vendre la société Inter-Port.

M. Morin: Remarquez, je ne savais pas qu'il était dans le tableau.

M. Saint-Pierre: M. Pierre Côté en est le vice-président. Le secrétaire, M. Dubé, le maire de Saint-Romuald.

M. Morin: Bon. Est-ce que le ministre a une idée de la date effective du début des opérations de la société?

M. Saint-Pierre: ... oui...

M. Morin: Je veux dire que la paperasse est commencée, le conseil est en place...

M. Saint-Pierre: II se met à l'oeuvre suivant les dispositions de la loi votée par l'Assemblée nationale. Cette année, nous avons prévu au budget pour la société Inter-Port le montant de $75,000, mais il est prévu des montants additionnels qui pourraient être disponibles par l'OPDQ, je pense.

M. Morin: Bon. Quand je parle du début des opérations, je veux dire quels sont les projets? Est-ce que la société s'est mise au travail pour identifier des projets?

M. Saint-Pierre: Je pense qu'ils commencent actuellement, ayant tenu leur première réunion. Les responsables commencent dans tout ceci... Maintenant sur des projets physiques, je ne sais pas si c'est à cela que le chef...

M. Morin: Je pensais à des projets industriels, par exemple. Est-ce que le ministre est au courant... Est-ce qu'ils se sont déjà penchés là-dessus, ou bien si... Quand vont-ils le faire?

M. Saint-Pierre: C'est un travail qu'ils font actuellement.

M. Morin: Quel est l'avenir du commissariat industriel de la CUQ, par rapport à la nouvelle société? Parce que, comme on l'a fait remarquer lors du débat, le ministre s'en souviendra, il y avait un chevauchement de compétences entre les deux organismes, et l'avenir du commissariat industriel de la CUQ nous paraissait, en tout cas, gravement compromis? Est-ce que le ministre est au courant de cela?

M. Saint-Pierre: De l'avenir de la...

M. Morin: Non, du commissariat industriel de la CUQ.

M. Saint-Pierre: C'est évidemment la CUQ qui est maître de son commissariat industriel, ce n'est pas moi qui va lui dicter sa ligne de conduite. Je pense que je ne suis pas d'accord avec vous pour dire qu'il y a opposition dans les deux fonctions ou affrontement. Je pense qu'au contraire elles peuvent être complémentaires. La société Inter-Port tente de miser essentiellement sur l'existence du port pour développer ce complexe qui tiendrait compte des avantages du port, et ayant un territoire qui touche non seulement la Communauté urbaine de Québec, mais qui touche également sur la rive sud. Mais je ne veux pas reprendre le débat. Dans ma lettre à M. Tremblay, président de la société, j'ai spécifiquement sollicité de sa part la plus grande collaboration possible avec le commissariat industriel de la communauté urbaine.

M. Morin: Donc, dans votre esprit, M. le ministre, les deux organismes peuvent coexister et être utiles chacun dans son domaine.

M. Saint-Pierre: Oui.

M. Morin: Est-ce que je vais beaucoup scandaliser le ministre en lui apprenant que le maire de Québec estime, comme on l'avait prévu d'ailleurs, que la société Inter-Port doit intégrer le commissariat industriel de la CUQ?

M. Saint-Pierre: Cela ne me scandalisera pas. Je n'ai pas dit que ça ne pouvait pas s'intégrer. J'ai dit que ça peut coexister, ça peut être complémentaire. Maintenant, si la société Inter-Port, d'un côté, est prête à accepter un mandat de la Communauté urbaine pour absorber une partie des activités du commissariat industriel de la CUQ, et si, d'autre part, la Communauté urbaine, qui a son propre organisme, est avec son président et son conseil d'administration, également prête à faire ce geste, ce n'est pas moi qui vais les en empêcher.

M. Morin: Vous estimez alors qu'au lieu de tenter d'obtenir une coordination des deux organismes, cela revient au même qu'elle l'absorbe ou ne l'absorbe pas. Au ministère de l'Industrie et du Commerce, c'est kif-kif.

M. Saint-Pierre: Ce n'est pas kif-kif, mais disons que nous croyons qu'il est possible que chacun puisse exercer ces rôles dans les fonctions que vous avez mentionnées.

M. Morin: II a été rapporté que le maire de Québec estime que la société Inter-Port devrait intégrer complètement le commissariat industriel, ce qui comprend le personnel, l'actif et le passif de l'organisme, c'est-à-dire notamment le parc industriel Saint-Augustin, qui passerait à la société Inter-Port.

Est-ce que ça entre dans les plans ou dans les prévisions du ministère que les choses se passent comme ça?

M. Saint-Pierre: Enfin, ce n'est ni dans nos plans, ni dans nos prévisions, ni dans nos désirs secrets, mais ce n'est pas incompatible que la chose se fasse, et si, tant au niveau de la société Inter-Port qu'au niveau de la communauté urbaine, tous les gens sont d'accord sur cela, je n'userai certainement pas de mon pouvoir d'actionnaire pour empêcher que cela se réalise.

M. Morin: Oui, mais le ministre se souviendra que, pendant le débat, nous avons dit qu'une chose comme ça était fort probable, étant donné que les compétences des deux organismes se chevauchaient.

M. Saint-Pierre: Ce n'est pas ça que vous avez dit.

M. Morin: Le ministre nous rassurait, à ce moment, en nous disant: mais non, mais non. Il n'y a pas de problèmes. Les deux organismes peuvent coexister, ils peuvent coordonner leur action. Ce qui va se passer dans les faits, c'est probablement que l'un des organismes, comme nous l'avions prévu, va disparaître au profit de l'autre.

M. Saint-Pierre: Ce n'est pas cela que vous nous avez dit.

M. Morin: Va être absorbé, ce qui revient au même.

M. Saint-Pierre: M. le Président, ce n'est pas cela que vous nous avez dit dans le débat. Ce que vous nous avez dit dans le débat, et à cela vous aviez repris les arguments de M. Armand Trottier, le président de la Communauté urbaine de Québec, vous nous avez dit que nous n'avions pas besoin de la société Inter-Port, puisque nous avions déjà un organisme...

M. Morin: Nous avons dit ça aussi, et nous avons dit...

M. Saint-Pierre: Vous n'aviez pas parlé d'absorber.

M. Morin: ... que nous craignions... M. Saint-Pierre: Que...

M. Morin: ... que la société Inter-Port rende inutile le commissariat industriel de la CUQ. Le ministre nous rassurait.

M. Saint-Pierre: Vous avez dit: Le bon travail de la Communauté urbaine de Québec rend inutile la formation de la société Interport. Ce n'est pas la même chose. Il y a une nuance.

M. Morin: Vous pouvez toujours argumenter sur ce que nous avions dit, mais la mémoire que j'en ai est que nous avions soutenu que, effectivement, il y avait chevauchement des compétences et qu'il n'y aurait pas de place pour deux organismes. Le ministre nous a dit: Oui, il y aura de la place pour les deux organismes...

M. Saint-Pierre: Si les deux organismes veulent bien.

M. Morin: ...et on constate aujourd'hui que l'un va absorber l'autre.

M. Saint-Pierre: Non. Il y a de la place pour les deux organismes, si les deux organismes veulent bien occuper chacun le mandat qui lui est confié par les chartes constitutives. Maintenant, si les deux organismes trouvent leur intérêt à s'associer, à confier à l'un, par rapport à l'autre, une partie du mandat, en ce qui touche la communauté urbaine, je ne vois pas pourquoi on devrait empêcher cela. J'empêcherais, cependant comme actionnaire, que la société Inter-Port, qui doit s'occuper de l'ensemble du Québec métropolitain incluant la rive sud, délègue une partie trop grande, l'essentiel de son mandat à la communauté urbaine. Ce n'était pas l'esprit de la loi. Mais l'inverse est cependant admissible. L'esprit de la loi est qu'il y avait un degré de collaboration, de coopération pouvant mener à des ententes devant être signées entre la communauté urbaine et la société Interport pour que cette dernière absorbe, en tout ou en partie, certaines des activités.

M. Morin: C'était ce que la CUQ craignait. Le ministre s'en souvient.

M. Saint-Pierre: Ce n'est pas la CUQ. M. Trottier n'est pas la CUQ. Parce que si-, dans le moment, elle est prête à faire cela, il ne faut sûrement pas dire qu'elle le craignait il y a six mois.

M. Morin: Effectivement, elle le craignait. Je sais que le ministre, chaque fois que nous parlons de la CUQ, nous dit: Non, c'est M. Trottier, et tous les maires sont d'avis que... En fait, nous savions que ce n'était pas le cas. Il y a beaucoup de maires qui n'étaient pas d'accord. Je l'ai signalé dans le débat, d'ailleurs.

M. Saint-Pierre: Je ne partage pas ce point de vue, mais...

M. Morin: Toujours dans le cadre de la société Inter-Port ou plutôt dans un cadre un peu connexe, je voudrais demander au ministre ce qu'il est advenu du projet Burroughs.

M. Saint-Pierre: Vous retournez dans l'histoire ancienne.

M. Morin: Burroughs?

M. Saint-Pierre: Les machines à ...?

M. Morin: II était question de l'implantation d'une usine. Si ma mémoire est bonne, on avait le choix entre la région de Québec et Winnipeg et je sais que le commissariat industriel de la Communauté urbaine de Québec a fait des pieds et des mains pour faire venir cette société dans la région de Québec. Vous n'avez jamais eu ce dossier?

M. Saint-Pierre: C'est l'ancien gouvernement, je pense. Depuis...

M. Morin: Non. C'est tout récent. Les dernières nouvelles que j'en ai remontent à novembre 1974.

M. Saint-Pierre: Quel est le problème? Nous n'aurions pas collaboré ou quoi?

M. Morin: Je ne sais pas. Je vous le demande. Je vous pose la question.

M. Saint-Pierre: On a très bien collaboré. En fait, cela s'est fait avec le conseil économique — oui, c'est Burroughs — de la maison du Québec à Chicago et les gens du commissariat industriel de la Communauté urbaine de Québec ont eu deux ou trois rencontres avec les gens de Burroughs de même que les gens de la Communauté urbaine de Montréal — le conseil de promotion économique de la Communauté urbaine de Montréal — de même qu'un troisième commissaire industriel d'une ville du Québec qui ont frappé à la porte de Burroughs dans une période de cinq à six mois. Mais Burroughs n'a pris aucune décision en fait d'investissement, à ma connaissance, dans le Québec, à ce moment-ci.

M. Morin: Et donc, l'état de ce dossier ne vous est pas connu.

M. Saint-Pierre: C'est une possibilité comme on en a des centaines et des centaines.

M. Morin: Très bien. Je pense qu'on peut peut-être laisser ce domaine...

Le Président (M. Houde, Limoilou): Alors, l'élément 3...

M. Morin: Un instant ! J'ai encore deux ou trois petites questions avant l'adoption de l'élément 3. Il s'agit de l'infrastructure d'accueil — nous sommes toujours dans le bon élément, je. pense — pour Gros Cacouna. Serait-il possible que le ministre dépose une étude dont on a beaucoup parlé, dont on a même cité des bribes à l'occasion et qui est l'étude Sintec— SWC.

M. Saint-Pierre: SNC?

M. Morin: C'est possible que cela soit SNC.

M. Saint-Pierre: C'est SNC. Cela relève du mi- nistère des Richesses naturelles. Il faudrait poser la question lors de l'étude des crédits de ce ministère. Nous n'avons rien eu à voir avec cette étude.

M. Morin: Est-ce que vous avez eu quoi que ce soit à voir au projet de Gros Cacouna?

M. Saint-Pierre: Dans quel sens? Le port même, les déclarations récentes du premier ministre?

M. Morin: Le port, l'infrastructure industrielle, la possibilité d'un parc industriel adjoignant le port.

M. Saint-Pierre: Oui. Il y a divers comités qui touchent plusieurs ministères. Nous sommes responsables d'un de ces comités qui poursuit des études pour le port, pour le vrac solide alors que le ministère des Richesses naturelles s'occupe du port pour vrac liquide, qui, de toute évidence, ne sera pas au même endroit. Enfin, nous sommes un peu le répondant du projet de Havre Champlain. Nous avons des discussions avec le gouvernement fédéral sur ceci. Je ne sais pas...

M. Morin: Pour ce qui est du vrac solide, où en sont les choses? L'étude Sintec-SNC ne portait pas sur le...

M. Saint-Pierre: Non, elle portait sur le vrac liquide.

M. Morin: Bon d'accord. On se renseignera aux Richesses naturelles à ce sujet. Pour ce qui est du vrac solide, où en sont les choses?

M. Saint-Pierre: II y a eu l'analyse des documents qui a pu être soumise depuis quelque temps par la société Havre Champlain et la prise de position vis-à-vis du gouvernement fédéral. Nous poursuivons avec le gouvernement fédéral l'étude de quelques points sur ce dossier, mais je ne vois pas de divergence de vues, c'est-à-dire la complémentarité avec le port de Québec qui s'exprime facilement sur des termes physiques suivant le tirant d'eau et deuxièmement, la question de la navigabilité en face de Gros Cacouna. Il y a des questions à préciser sur ce point, les mouvements des glaces, les courants, les vents. Il y a des points à parfaire. M. Marchand a esquissé le fait de la Côte-Nord vis-à-vis de la Côte-Sud. Quant à nous, nous avons opté pour la Côte-Sud, non pas parce que nous ne croyons pas qu'il y ait des développements possibles à Sept-lles, mais parce que nous croyons que le terrain, la géologie de la Côte-Nord, l'absence d'infrastructure ne permettrait pas de relier un parc pour vrac solide avec son propre parc industriel, ne nous permettrait pas de le relier sur le plan logistique avec les voies ferrées, avec les routes du Québec.

M. Morin: Si c'était sur la Côte-Nord?

M. Saint-Pierre: Si c'était sur la Côte-Nord,

oui. M. Marchand pense que cela vaudrait la peine d'être examiné. Nous ne le pensons pas, nous.

M. Morin: C'était dans le contexte des bateaux-passeurs de wagons?

M. Saint-Pierre: Non, c'était dans le contexte d'établir un chemin de fer entre Sept-lles et Québec sur la Côte-Nord. Cela nous semblait impratiquable. Il y a peut-être quelqu'un qui... Le port de Sept-lles a des avantages par rapport au port de Gros Cacouna, mais il a un désavantage sérieux, quant à nous, c'est la difficulté de le relier sur le plan logistique avec l'ensemble de l'infrastructure du Québec. Il y a des réunions régulièrement. M. Ghislain Girard, directeur de nos bureaux régionaux, préside ces différents comités qui regroupent l'OPDQ, le ministère des Transports, le ministère de l'environnement, le ministère des Affaires municipales, des Richesses naturelles et des Affaires intergouvernementales.

M. Morin: Dois-je comprendre qu'en ce qui concerne le gouvernement du Québec, vous avez donné le feu vert au projet de Havre Champlain?

M. Saint-Pierre: Nous avons donné le feu vert au projet de Havre Champlain, nous avons indiqué à la compagnie qu'il y a lieu de préciser avec elle certains des aspects, mais, fondamentalement, nous avons dit que, de tous les projets susceptibles de faire démarrer l'activité industrielle dans la Gaspésie ou le Bas du fleuve, c'est le projet qui offre le plus de chances de succès et qui mérite notre appui. Je pense que la déclaration du premier ministre est très claire. Cet appui doit se faire en donnant à ce port une vocation complémentaire à celle des autres ports du Saint-Laurent, en particulier Québec.

M. Morin: Ce qui manque maintenant, c'est tout simplement la décision fédérale.

M. Saint-Pierre: Oui, et plus de parfaire certaines études qui pourraient simplement confirmer des choses préliminaires qui ont pu être faites sur la navigabilité...

M. Morin: Les parfaire au Québec ou les parfaire au niveau fédéral?

M. Saint-Pierre: Non, les parfaire par nous.

M. Morin: Est-ce que ces études sont en route?

M. Saint-Pierre: Elles vont démarrer prochainement. Le 22 mai, il y aura la prochaine séance du comité, il semble qu'il y aura des décisions prises.

M. Morin: Je m'excuse, quel comité?

M. Saint-Pierre: Le comité que je vous ai mentionné tantôt dont nous avions la responsabilité, le comité sur le port de transbordement de vrac solide. Il y a quatre comités, un pour le vrac liquide, un pour le vrac solide, un pour le port de Québec et un pour le port de Montréal.

M. Morin: Si je comprends bien, à la prochaine réunion de ce comité, on va décider de la mise en marche de ces études, courantologie, les vents, ce que vous avez mentionné tout à l'heure.

M. Saint-Pierre: Plus d'autres études également touchant... En fait, c'est une synthèse, il s'agit de sortir les études qui ont déjà été faites il y a quelques années, de sortir les données de base et d'ajouter ce qui manque avec une nouvelle étude.

M. Morin: Vous pensez qu'il y en a pour combien de temps avant que ces études aboutissent?

M. Saint-Pierre: De sept à huit mois pour les problèmes de navigation; pour les autres, vous savez, ce sont des études qui peuvent être assez longues puisqu'il va falloir sûrement, si jamais le projet démarre avec Havre Champlain... Il y a toute la question des sondages, la planification, l'aménagement du territoire dans les terres intérieures, des choses semblables.

M. Morin: Avant que les décisions de mises en marche interviennent, les décisions définitives de construire, on peut prévoir quel délai? Approximativement?

M. Saint-Pierre: Fondamentalement... M. Morin: Un an peut-être?

M. Saint-Pierre: Non, cela ne dépend pas de nous. Finalement, pour le port lui-même, ce sont des intérêts privés qui sont sujets à des négociations, ce qui pourrait impliquer des participations gouvernementales, mais fondamentalement, ce sera le secteur privé qui va investir les $160 millions o,u les $180 millions mentionnés. Il y a également l'approbation du gouvernement fédéral pour le permis d'exploiter un port. Je ne voudrais pas me faire enfermer dans des dates; je pense que, si le projet est rentable, nous allons, comme pour tous les projets, aller le plus rapidement possible.

M. Morin: C'est pour avoir une idée du moment où ça pourrait abouttir.

M. Saint-Pierre: Rien avant un an, d'après moi.

M. Morin: II faut donc que les études que vous avez entreprises aboutissent, que la décision fédérale soit prise et qu'on trouve les capitaux nécessaires pour développer le port en question.

M. Saint-Pierre: Vous allez me faire dire que le projet va commencer seulement avant la prochaine campagne électorale.

M. Morin: Ce serait une tactique comme une autre. Elle serait sans doute plus honnête que certaines autres, auxquelles j'ai pu me heurter dans le passé.

M. Saint-Pierre: Vous vous êtes heurté. M. Côté: ... visite à Gros Cacouna?

M. Morin: M. le Président, je voyais que le comité de promotion du port de Gros Cacouna s'est amèrement plaint de l'absence du leadership du Québec dans ce que le comité appelle le marchandage politique à Ottawa.

M. Saint-Pierre: Vous parlez du gouvernement fédéral.

M. Morin: II me parlait du manque de leadership.

M. Saint-Pierre: II y a certaines personnes dans ce comité de promotion qui confondent des mots dans le dictionnaire. Je ne sais pas qui écrit leur texte, mais il y a une différence entre prendre des décisions réfléchies, aller le plus rapidement possible, et une espèce de précipitation à dire oui à n'importe quoi qui nous est soumis.

M. Morin: Cela fait pas mal d'années que ce projet existe et qu'on les remet et qu'on les remet. Vous le savez, je ne sais pas combien il y a d'années que le havre lui-même a été aménagé.

M.Côté: Le port lui-même, c'est le fédéral et pas le provincial.

M. Morin: En tout cas, les études sont en marche. Donc, on peut s'attendre que tout cela aboutisse dans un délai de quelques années, à tout le moins.

M. Saint-Pierre: C'est ça.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Le député de Saint-François.

Région de Sherbrooke

M. Déziel: M. le Président, si vous me permettez, j'aimerais vous entretenir de l'implantation à Sherbrooke de SW Industries, Stowe Woodward Industries, qui se spécialisent dans le recouvrement de rouleaux de machines à pâtes et papiers. M. le ministre, on sait que, présentement, Uniroyal et BF Goodrich s'apprêtent à fermer leur division dans ce secteur et, si cette implantation s'effectuait à Sherbrooke, le ministère de l'Expansion économique régional pourrait subventionner cette implantation, même chez nous. Est-ce que le ministre a présentement des détails à nous fournir sur cette implantation?

M. Saint-Pierre: Je sais que, pour la région de Sherbrooke, cette implantation qui semblait quasi certaine représenterait un élément additionnel dans la croissance de leur parc industriel au cours de la dernière année.

Cependant, je pense bien qu'il nous faut réfléchir sur le point que la venue d'une entreprise, dans ce cas-ci, une entreprise américaine étrangère qui serait aidée par des subventions, ne viendrait pas tuer ce qui existe déjà et qui appartient à des Québécois, c'est-à-dire, l'usine de M. Morin à Farnham.

Au ministère, c'est le même problème que l'aluminerie. Avant de donner une subvention ou quelque chose, nous voulons bien nous assurer qu'on ne déplace pas des emplois de Farnham à Sherbrooke, d'autant plus que, tout ce qu'on ferait, c'est de contribuer, par une subvention, à tuer l'entreprise existante.

Ceci dit, bien sûr, il y a l'autre côté de la médaille où il nous faut faire comprendre à M. Morin, de Farnham, que parce qu'on a dit non au gouvernement fédéral, l'entreprise ne vient pas à Sherbrooke, cela ne l'empêche pas d'aller à Pembrooke ou d'aller à Cornwall et de desservir, avec ses produits, le marché québécois.

C'est cela. Dans le moment, on tente à la fois de voir les possibilités de croissance de l'entreprise québécoise qui existe, est-ce qu'elle en est capable? Est-ce qu'elle est capable d'absorber complètement le marché, au point qu'il n'y aurait pas de place pour personne au Canada? Ce serait presqu'un monopole, parce que dans le moment, elles sont trois compagnies et il y en a deux qui se retirent.

Il y a un danger et c'est la situation que nous étudions dans le moment, que toutes les compagnies à l'est du Canada se sentent mal à l'aise de n'avoir qu'un seul type qui est capable de les approvisionner. On pense au cas de grève qui pourrait complètement les débalancer.

On étudie tout cela et, bien sûr, au lieu d'avoir l'entreprise établie à Pembroke, on aimerait bien mieux l'avoir à Sherbrooke. Je pense que le député de Saint-François est capable de faire comprendre aux gens de Sherbrooke, qu'il serait malsain, pour le gouvernement du Québec, d'aller prématurément dans ce dossier et de contribuer, par une subvention à une entreprise étrangère, à plonger dans le marasme une entreprise qui existe déjà et qui est capable de croissance.

Par contre, le député de Saint-François peut être assuré que si on en vient au point où il semble inévitable que nous aurons une entreprise à Pembrooke, j'aimerais mieux la voir à Sherbrooke que là, nous tenterons l'impossible, avant de prendre la décision.

M. Déziel: Est-ce qu'on peut s'attendre à une décision à court terme?

M. Saint-Pierre: Je pense que d'ici une semaine, au plus tard,...

M. Déziel: D'accord.

Le Président (M. Houde, Limoilou): D'autres questions à l'élément 3?

Projet Hercules

M. Morin: Oui, ce sont les toutes dernières. Je suis particulièrement heureux de voir que le premier ministre est là, justement, il pourrait être intéressé par cette question.

J'allais demander au ministre de l'Industrie et du Commerce ce qu'il est advenu du projet "Hercule" ou "Hercules"? Est-ce qu'il a été abandonné définitivement?

M. Saint-Pierre: II n'a pas été abandonné, M. le Président. Au moment où nous nous parlons, M. Saulnier, le président de la SDI est avec les cadres supérieurs de la compagnie à Montréal. La compagnie, à cause d'une conjoncture d'une part, mais à cause également des problèmes dans l'industrie de la construction, à cause du climat très sévère que nous avons eu, avait suspendu la poursuite des travaux, mais elle entend bien les poursuivre le plus rapidement possible.

La compagnie également, à cause d'une mauvaise conjoncture aux Etats-Unis, dans l'ensemble de ces secteurs, a connu, un peu comme les textiles, elle aussi, les problèmes de liquidité et il y a eu plusieurs rencontres, soit à New-York, soit au Delaware, soit à Montréal, entre M. De Coster et d'autres types de mon ministère, pour tenter d'apporter une correction, puisque l'investissement d'Hercules représente un peu notre plaque tournante qui aiderait à la fois d'autres compagnies, comme Union Carbide et Gulf Oil à accroître leur capacité de production dans le secteur de la pétrochimie.

Ils ont déjà $38 millions d'investis, c'est assez difficile d'arrêter; mais le projet, au départ, qui prévoyait des coûts de $35 millions est maintenant de l'ordre de $56 millions. C'est toujours à la même capacité, une usine de grandeur universelle, la première au Canada, 150,000 livres de polypropylène.

Le Président (M. Houde, Limoilou): L'honorable député de Beauharnois.

M. Cadieux: M. le ministre, dans un premier temps, il y a plus d'un an, la compagnie Goodyear annonçait un premier investissement d'environ $56 millions par dessus l'investissement qui avait déjà été fait à Valleyfield et on parlait d'une deuxième phase également.

Est-ce que la conjoncture, dans le domaine de la construction peut retarder ou est-ce que la compagnie Goodyear a décidé d'aller à la deuxième phase? Est-ce que les $56 millions, d'après vous, sont déjà dépensés?

M. Saint-Pierre: Pour la première phase, il faut se rappeler que c'est un projet qui, au départ, devait aller dans une autre province que le Québec et qu'avec beaucoup de démarches, près du 24 décembre de je ne sais pas quelle année, nous avions réussi à ramener le projet dans la province de Québec. A l'époque, les cadres supérieurs de la compagnie avaient fait beaucoup confiance au Québec pour décider de l'investissement.

Malheureusement, il faudrait dire qu'une ou deux personnes qui étaient délégués de chantiers, dans les chantiers de Goodyear ont donné un spectacle comme on n'en avait jamais vu sur le plan mondial et nous ont fait une très mauvaise réputation.

La deuxième phase, qui aurait produit beaucoup d'emplois dans votre région, dans des secteurs extrêmement intéressants, a été, à toutes fins pratiques, annulée, compte tenu de la très mauvaise expérience que la compagnie a eue dans sa première phase.

La responsabilité, vous pouvez aller voir avec certains types de la FTQ qui étaient dans votre région, ce sont ces gens qui nous ont bloqué un investissement de $75 millions, la création de 2,000 emplois, dans la région de Valleyfield.

M. Cadieux: Vous dites que c'est peut-être abandonné, mais, est-ce que vous espérez...

M. Saint-Pierre: C'est annulé.

M. Cadieux: Annulé? Est-ce que vous pensez qu'on peut revenir avec le dossier, justement à cause des lois qui vont être votées dans le domaine de la construction?

M. Saint-Pierre: Les prochains mois vont nous permettre de le voir. On va redoubler de vigueur, mais cela montre jusqu'à quel point ce qu'on a essayé d'obtenir en 1970 qui se caractérise par un mot, la "confiance", comment c'est un ingrédient qui peut se perdre rapidement et comment c'est un ingrédient qui est difficile à obtenir. La confiance, ce sont les deux ou trois délégués de la FTQ qui ont fait la pluie et le beau temps, qui ont fait du vandalisme, qui ont fait de l'extorsion, qui ont fait de la violence, leur responsabilité — je suis certain que cela ne les empêche pas de dormir, ce soir — c'est d'avoir empêché Valleyfield d'avoir $75 millions qui auraient donné du travail à d'autres travailleurs de la construction, dans votre secteur, plus 2,000 emplois, sur une base permanente, dans un secteur extrêmement intéressant, où le Québec s'installait et qui avait des retombées, puisque, lorsque vous avez une usine qui fabrique les pneus radiaux, bien sûr, par après, vous avez d'autres usines qui approvisionnent ces mêmes usines.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Autres questions, à l'élément 3?

M. Morin: Une dernière, M. le Président, avant que nous adoptions... A moins que le premier ministre ait des questions à poser.

M. Bourassa: Non, je n'ai pas de questions, mais c'est pour sensibiliser le chef de l'Opposition, de manière à accélérer l'adoption des projets de loi. Le ministre de l'Industrie et du Commerce vient de signaler deux cas où les problèmes de la construction ont été déterminants pour nuire aux investissements éventuels. Je demande au chef de

l'Opposition de tenir compte de cela, éventuellement, quand il s'agira de voter les projets de loi.

M. Morin: Ce sera certainement un élément qui entrera en ligne de compte. Ce ne sera peut-être pas le seul, mais ce sera certainement un élément.

M. Bourassa: D'accord, merci, M. le Président.

M. Morin: Je vois que le ministre travaille déjà sur les quelques points du rapport Cliche qu'il veut retenir.

M. Bourassa: Non, mais je veux dire ceux sur lesquels le chef de l'Opposition est sûrement d'accord.

M. Morin: C'est ce que nous verrons. Quand on verra vos projets de loi par le détail, on pourra en juger. Je ne pense pas que le premier ministre s'attende de m'arracher des consentements prématurés, sans que j'aie même vu les projets de loi. Ce serait pour le moins enfantin de sa part.

M. Bourassa: Non, mais on voit deux cas pratiques de l'importance pour le gouvernement d'agir d'une façon urgente. C'est qu'il y a plusieurs milliers d'emplois qui dépendent du climat, dans le domaine de la construction.

M. Morin: Bien sûr, cela, je pense que c'est évident. Quand nous aurons, devant nous, les projets de loi, on pourra voir s'ils répondent aux besoins.

M. Cadieux: Des emplois permanents, non pas des emplois simplement sur la construction, ce sont des emplois permanents. C'est encore plus important. Des emplois sur la construction, d'accord, c'est très important. Il y en aurait peut-être 1,000 qui travailleraient à la construction, mais ce sont 2,000 emplois permanents qu'on risque de perdre, à cause du climat, seulement dans une région donnée.

M. Morin: Est-ce que je pourrais demander au ministre, comme dernière question à l'intérieur de cet élément 3, ce qu'il en est du parc industriel de Sherbrooke? Je sais qu'on a fait allusion tout à l'heure à un projet.

M. Saint-Pierre: D'accord, cela va très bien. On peut sortir la liste. Au parc industriel de Sherbrooke, il y a eu nettement un déblocage sur le plan manufacturier. Le premier ministre peut peut-être nous le dire. Il était dans la région, mais il y a au moins quatorze implantations, depuis que le gouvernement avait annoncé cette aide spéciale. Vous êtes rendus à 23. Vous voyez, cela se vend comme des petits pains chauds.

M. Morin: Très bien. Est-ce que vous avez la liste? Est-ce que c'est un document qui porte les noms?

M. Saint-Pierre: Non. On peut vous dresser la liste de toutes les compagnies.

M. Morin: Est-ce que c'est possible. M. Saint-Pierre: Oui, sûrement, avec plaisir. M. Morin: Oui. Pour demain matin, cela... M. Saint-Pierre: Sûrement.

M. Morin: Est-ce qu'il est possible aussi d'avoir le montant de l'investissement prévu, quand vous l'avez du moins?

M. Saint-Pierre: Vous voulez le nom de la compagnie, la nature du projet et le montant de l'investissement?

M. Morin: C'est cela.

M. Saint-Pierre: Avec plaisir.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Elément 3, adopté?

M. Morin: Elément 3, adopté.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Elément 4: Conseil et aide au secteur industriel et aux entreprises.

Aide aux secteurs industriels et aux entreprises

M. Saint-Pierre: M. le Président, voici, dans l'élément 4, on voit avec des taux de croissance de 146% où les dépenses passent près de $5 millions à plus de $12 millions, jusqu'à quel point dans ce secteur très important de l'aide aux secteurs industriels, nous allons tenter d'améliorer la qualité de nos services. La page de droite vous donne la répartition des sommes. On remarque qu'une part importante nous viendra de l'entente-cadre sur le secteur manufacturier où plus de $6.7 millions sont prévus. Les points peut-être les plus importants, on voit toute une série d'augmentations d'activités que nous avons entreprises au cours des dernières années pour améliorer nos relations avec les secteurs industriels, mieux cerner les problèmes et mieux être en mesure d'assurer à la fois la relance de certains secteurs et le dynamisme de certains autres.

Les pages suivantes vous donnent un détail très complet des subventions qui ont été versées pour l'an dernier. Elles indiquent un peu plus loin, interventions pour 1974/75, la direction des services aux entreprises manufacturières, c'est notre ancien service des PME. On voit que, l'an dernier, il y a plus de 2,321 cas répartis dans la gestion financière, génie industriel, marketing, fusion et divers. Ensuite, on voit toute une série de subventions accordées par cette direction à des organismes sans but lucratif, allant de la Chambre de commerce à l'aide aux entreprises, aux centres des dirigeants d'entreprises, la faculté d'adminis-

tration. Ce sont essentiellement des colloques qui ont une portée économique et où nous croyons que nous devons donner un appui financier. Puis, on voit les entreprises qui ont bénéficié d'aide dans différentes industries du Québec. Le chef de l'Opposition, en consultant cette liste, verra que nous travaillons dans le secteur économique avec les Québécois, pour les Québécois et par les Québécois, et que les sommes données ont servi souvent à faire des études d'expertises au niveau du marketing, au niveau du génie industriel, au niveau du coût de revient dans nombre de petites entreprises un peu partout au Québec, on les mentionne.

M. le Président, dans les bureaux régionaux, plus de 512 dossiers ont été examinés au cours de la dernière année. Plus de 10,000 interventions ont eu lieu. Ce sont essentiellement nos gens qui, dans les régions, se dévouent pour faire le trait d'union entre les entreprises québécoises et le ministère. Nous avons, par la suite, en annexe, des prévisions, des réalisations de certains documents d'investissements qui ont pu être faits. On comprendra, lorsqu'on s'attarde aux dernières listes, qu'on mentionne ici des montants de $240 millions au niveau des nouvelles entreprises et $692 millions au niveau des expansions. On voit d'ailleurs pourquoi, en regardant les statistiques officielles — je suis certain que le chef de l'Opposition a dû être frappé — le secteur manufacturier québécois, qui se voyait donner des pronostics très sombres dans les années 1966/67, qui voyait effectivement son nombre total d'employés diminuer année après année, a connu une très vigoureuse reprise au cours des dernières années, particulièrement l'an dernier où globalement, je pense que c'est 30,000 nouveaux emplois que nous avons eus seulement dans le secteur manufacturier.

S'il y avait des questions, cela me ferait plaisir d'y répondre.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Le chef de l'Opposition.

Société Tricofil

M. Morin: M. le Président, j'aurais une question portant sur la subvention qui a été accordée il y a quelque temps au syndicat des travailleurs du textile ou Tricofil pour la réouverture de l'usine Regent Knitting. Je crois qu'il s'agissait — ici, on indique un montant global de $51,000 — de deux subventions distinctes pour un total de $51,000. Est-ce que je pourrais demander au ministre comment la suite du financement de la société Tricofil va être organisée? Est-ce que son ministère a reçu de nouvelles demandes de la société Tricofil? Est-ce qu'il a été en contact avec cette société pour le financement de ses travaux?

M. Saint-Pierre: Le ministère de l'Industrie et du Commerce a assisté, puisque c'était bien requis, les gens de Tricofil, pour la préparation d'un dossier, et les gens de la FTQ, pour un dossier un peu étoffé, puisque les premiers qu'on nous avait donnés, je pense, n'étaient pas en mesure de satisfaire les exigences de la SDI. Je pense que, dans Tricofil, M. le Président, on voit que le gouvernement n'est pas doctrinaire. Il s'adapte à bien des situations, et encore là, il tente de travailler. On ne veut pas leurrer les gens. Dans l'expérience de Tricofil, si on reportait à plus tard la mise à pied de tous les travailleurs, c'est une expérience... Il ne faudrait pas faire vivre d'espérance les gens pour après, les jeter dans la misère. Mais nous, tant que nous verrons des espoirs de passer dans la période difficile, la période de formation, nous allons donner tout notre appui, comme nous l'avons fait, depuis septembre dernier, tant dans des études préliminaires que dans les $51,000, geste très exceptionnel qu'on ne fait jamais d'habitude, que nous avons payés pour le loyer des entreprises. Non, c'est très sérieux. Je pense que, si on avait appliqué nos programmes réguliers, Tricofil n'existerait pas, aujourd'hui. C'est parce qu'on a fait un cas d'exception. Maintenant, la SDI...

M. Morin: ... demande bien spéciale aussi, que le ministre...

M. Saint-Pierre: Oui, auquel nous apportons notre contribution...

M. Morin: ... je suis sûr, en apprécie toute la portée.

M. Bourassa: Comme TEMBEC et Cabano.

M. Saint-Pierre: Mais on aime bien, comme mentionne le premier ministre, dans ces projets, être assuré qu'on ne leurre personne, en leur faisant croire que deux plus deux peuvent égaler cinq. Ce n'est jamais notre cas. Je pense que Cabano a été un succès. TEMBEC a été un succès. Nous allons, aussi longtemps que c'est possible, travailler avec Tricofil, si nous avons des chances de succès. D'ailleurs, la SDI a fait une offre tout à fait exceptionnelle aux gens de Tricofil, c'est-à-dire, pour chaque montant d'argent qui serait obtenu de la FTQ, des syndicats, de la population, de tout, la SDI accepte de mettre un montant équivalent, qui n'est absolument pas protégé, puisque la compagnie n'a pas d'actif, n'a rien. Je pense que là...

M. Morin: Sous forme de prêt...

M. Saint-Pierre: Non, pas sous forme de prêt, mais sur débentures, non garanties non convertibles. Non, rien, en fait.

M. Morin: Est-ce qu'il n'a pas été question que la SGF entre dans le tableau?

M. Saint-Pierre: Non, la question a été posée à l'assemblée annuelle de la SGF, et le président

de Lasalle Tricot a clairement indiqué que c'est dans des champs séparés, que Lasalle Tricot, qui fait des profits cette année, n'a malheureusement pas l'expertise pour absorber une difficulté additionnelle.

M. Morin: M. le Président, nous sommes prêts à accepter l'élément 4.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Elément 4, adopté. Programme 3, adopté. Programme 4: Centre de recherche industrielle du Québec.

M. Saint-Pierre: Comme M. Rivest est ici, est-ce qu'on pourrait peut-être passer à la division du commerce, parce que le CRIQ et M. Saulnier de la SDI seront ici demain matin. On laisserait les programmes 4, 5, et 6 de côté...

M. Morin: Les programmes 4, 5, 6 de côté.

M. Saint-Pierre:... pour passer au programme 7, puisque les personnes sont ici, alors que dans l'autre cas, ils seront...

Le Président (M. Houde, Limoilou): Programme 7: Services aux établissements commerciaux.

M. Morin: Le programme 7, ça peut être très expéditif, M. le Président. Nous n'avons pas de questions particulières.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Programme 7 adopté.

M. Morin: Je regrette de décevoir le fonctionnaire qui se préparait à renseigner le ministre sur ce qui se passe dans son ministère, mais ce ne sera pas nécessaire.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Est-ce qu'on peut revenir au programme 4?

M. Morin: La pêche maritime, M. le Président, s'il était possible d'attendre à demain matin...

M. Saint-Pierre: On pourra le faire.

M. Morin: ... parce que le dossier de l'Opposition n'est pas tout à fait prêt.

M. Saint-Pierre: Peut-être qu'on pourrait prendre, M. le Président, sans trop bousculer les programmes 9 et 10. ...découragés un peu, parce qu'au rythme où cela allait, les gens du bureau de la statistique étaient ici depuis deux jours. Mais ils seront ici demain matin, malheureusement. Je ne sais pas, mais il y a peut-être passablement de questions auxquelles je peux répondre, si vous voulez.

Peut-être peut-on passer au programme 10. Si on a le temps, on prendra le programme 9, M. le Président?

Le Président (M. Houde, Limoilou): Programme 10: Normalisation et spécifications.

M. Morin: Un instant!

Normalisation et spécifications

M. Saint-Pierre: Le montant des coûts de croissance de I4%... Nous avons donné un peu la production, un tableau comparatif de la production, du bureau de la normalisation, essentiellement des normes techniques, des copies expédiées. On voit quand même des prévisions, alors qu'en 1970/71, il y a eu expédition de 73,000 normes par an, cette année, nous sommes à plus de 335,000 normes. Ce sont des normes qui tentent d'aider les manufacturiers dans nombre de secteurs.

M. Morin: Le ministre a-t-il mentionné le nombre de nouvelles normes en 1974/75?

M. Saint-Pierre: II y a eu 47 nouvelles normes en 1974/75. C'est un fléchissement par rapport à nos performances antérieures. On m'informe que c'est dû à une période de temps où il y avait des difficultés de recrutement de spécialistes dans ce secteur, ce qui n'était quand même pas facile. C'est M. Jacques Lapalme qui est directeur de ce service.

M. Morin: Y a-t-il des collègues qui veulent poser des questions? Sinon, je voudrais demander au ministre quel sera le rôle de ce service dans le cadre de la nouvelle politique d'achat?

M. Saint-Pierre: Puisqu'un des aspects de la politique d'achat... Il y a un document. L'avez-vous?

M. Morin: Montrez pour voir. Non. Je ne crois pas l'avoir.

M. Saint-Pierre: On va vous le donner. M. Morin: C'est possible?

M. Saint-Pierre: On n'a pas de secrets pour vous.

M. Morin: Je me réjouis de la confiance que le ministre me témoigne.

M. Saint-Pierre: Mais, comme une partie de l'aspect de la politique d'achat implique l'utilisation de normes pour favoriser l'achat de produits québécois, le service pourrait avoir des implications dans cela, bien qu'effectivement la plupart de ces tâches toucheront d'autres ministères et, en particulier, d'autres... Peut-être que, sur la politique d'achat, je pourrais demander à M. Jacques Plourde, qui n'est pas du service de normalisation, mais qui est responsable du service aux entreprises, de nous faire le point sur le dossier.

M. Morin: Volontiers, oui. Et s'il peut, en passant, nous parler du rôle du service de normalisation.

M. Saint-Pierre: A la suite des documents qui ont été déposés à l'Assemblée nationale, qui constituaient le résultat de l'enquête ordonnée par l'arrêté en conseil 342, au ministère, nous avons préparé une proposition dite proposition pour une politique d'achat du gouvernement du Québec, dans laquelle nous énonçons quatre objectifs qui sont les suivants:

Le premier, c'est que le pouvoir d'achat dont disposent les instances publiques et parapubli-ques soit accessible en tout temps à toutes les entreprises manufacturières du Québec selon la gamme des produits et de leur fabrication. Le deuxième objectif est que, sans compromettre ni la sécurité publique, ni le bon fonctionnement des équipements, tous plans et devis doivent être rédigés de façon à rendre admissibles le ou les produits manufacturés au Québec. Le troisième objectif est que le fardeau de la preuve d'égalité ou de supériorité d'un produit spécifié appartienne au producteur non-québécois. Le quatrième est que, par exception et à partir d'un dossier bien documenté, des mesures puissent être prises pour encourager de nouvelles initiatives dans la fabrication d'un produit en demande croissante ou d'un nouveau produit, innovation, soit pour stimuler l'expansion d'une entreprise du Québec ou en encourager le démarrage et que le tout soit rendu public.

Parmi les moyens, c'est là que nous verrons le rôle du Bureau de normalisation du Québec, le premier concerne surtout les amendements aux arrêtés en conseil 1042 et assimilés, afin qu'ils permettent le respect intégral des objectifs déjà mentionnés et ce par tous les ministères du gouvernement du Québec et leurs instances décentralisées. Le deuxième moyen, c'est la publication, par le ministère de l'Industrie et du Commerce, en collaboration avec nos manufacturiers québécois, d'un index de tous leurs produits. Le troisième moyen est un appui à l'industrie du Québec, particulièrement les petites et moyennes entreprises, par une aide gouvernementale, aux frais de publication d'un catalogue commercial de leurs produits ainsi que de leurs spécifications. Le quatrième, c'est la compilation systématique et centralisée des besoins et la publication périodique de l'information concernant les approvisionnements. Le cinquième, c'est la création d'un comité permanent pour l'étude de cas spécifiques, lequel serait appuyé par une équipe d'experts tels que le Centre de recherche industrielle du Québec et le Bureau de normalisation du Québec. Le sixième, c'est l'émission de guides traitant de systèmes de gestion des approvisionnements, de codification, de spécification et de normalisation. Le BNQ apparaît particulièrement aux moyens proposés à 5 et à 6, tout en contribuant aux moyens 2, 3 et 4. Pour expliciter les mécanismes que nous avons l'intention de mettre en oeuvre pour articuler cette politique d'achat, nous avons ici l'esquisse d'un schéma, un cheminement d'activités par lequel on indique que deux groupes de travail seront formés, l'un interne au ministère pour évaluer les moyens tels que définis dans notre politique, les moyens 2, 3, 4, 5, 6, en particulier, définir les besoins que vont créer ces moyens et les échéanciers pour les réaliser. Un autre groupe de travail, qui sera interministériel, impliquera les principaux ministères clients, les Affaires sociales, l'Education, les Affaires municipales, les Travaux publics et Approvisionnement et le ministère des Finances pour évaluer si les règlements actuels que sont les arrêtés en conseil 1042 et assimilés peuvent être amendés pour rejoindre non seulement les ministères et leurs instances décentralisées, mais aussi les architectes et ingénieurs-conseils qui travaillent pour ces instances ainsi que les entrepreneurs généraux et sous-traitants et finalement le manufacturier qui fournit le matériel.

Est-ce que vous arrêtez au ministère...

Non, nous allons jusqu'aux instances décentralisées.

Et si ces règlements ne peuvent pas lier tout ce monde, il faudra peut-être penser à une loi-cadre et ce groupe de travail sera chargé d'en définir le contenu.

M. Morin: Est-ce que ce schéma, nous pouvons en obtenir un exemplaire, si possible?

M. Saint-Pierre: Sûrement, avec plaisir. M. Morin: De même que ce document.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Cela ira à demain matin, parce que le service des photocopies ne fonctionne pas à cette heure.

M. Saint-Pierre: C'est juste, n'oubliez pas le premier mot.

M. Morin: Qui est...

M. Saint-Pierre: Proposition d'une politique d'achat.

M. Morin: Non, je vais en tenir compte. Est-ce que je pourrais demander au ministre pour que nous ayons les idées claires sur cette question, pourquoi le ministère a exclu la principale suggestion ou recommandation du comité d'étude Pa-quin qui était la création d'un ministère des services des approvisionnements?

M. Saint-Pierre: Au contraire, M. le Président, il y a eu un projet de loi après le dépôt du rapport Paquin qui a créé justement un ministère des services et de l'approvisionnement et qui a impliqué la mutation du service complet, du service général des achats du ministère de l'Industrie et du Commerce à ce nouveau ministère. Nous sommes les premiers... tout ce qui touche les structures qu'on retrouvait dans le rapport sur les politiques d'achat, tout cela a déjà été fait, c'est beaucoup plus facile de faire les structures que faire la politique.

M. Morin: Oui, bien sûr. Mais est-ce que le ministre peut nous dire quand nous allons avoir ce projet de loi entre les mains? La création de ce ministère?

M. Saint-Pierre: II est fait. Le ministère de l'Approvisionnement actuellement, anciennement, c'était le ministère des Travaux publics et si vous regardez la loi constitutive du ministère, on a englobé le Service général des achats et on a élargi la fonction de service des travaux publics pour toucher l'approvisionnement et on s'est inspiré du rapport Paquin.

M. Morin: Vous avez donc suivi la recommandation sur ce plan?

M. Saint-Pierre: Oui.

M. Morin: Parce qu'il me semble avoir lu que ce n'était pas l'intention du gouvernement de créer un tel ministère. C'est encore tout récent, ça date du 27 mars 1975.

M. Saint-Pierre: Qui a dit ça?

M. Morin: C'était sous la signature de Gilles Lesage dans le Devoir.

M. Saint-Pierre: Le ministère existe, il y a eu une loi de l'Assemblée nationale qui a été adoptée avant que vous soyez député, c'était M. Pinard qui l'a pilotée et qui a créé le ministère de l'Approvisionnement. L'ancien ministère des Travaux publics s'appelle aujourd'hui Travaux publics et Approvisionnement. Justement, on a pris le Service général des achats, on l'a déplacé là et on a même inséré dans le mandat...

M. Morin: On a ajouté approvisionnement à travaux publics.

M. Saint-Pierre: Oui, mais on a ajouté toute la fonction qui était recommandée dans le rapport Paquin.

M. Morin: Je vais demander maintenant au ministre si la politique d'achat vigoureuse et susceptible d'avoir des retombées économiques significatives devait être appliquée par le ministère de l'Industrie et du Commerce, s'il n'y aurait pas danger qu'elle ne soit jamais véritablement appliquée puisque le ministère sera forcément soumis à des pressions divergentes?

Par exemple, il est bien certain qu'une telle politique ne fera peut-être pas l'affaire de plusieurs intérêts dans l'industrie, alors que le ministre doit forcément conserver des relations de confiance avec l'industrie.

Est-ce qu'on ne risque pas de se retrouver avec un ministre de l'Industrie inefficace et une politique d'achat également inefficace?

M. Saint-Pierre: M. le Président, tout au long du débat, on a montré que ceux que nous servons, ce sont les 6 millions de Québécois, peu importe si un secteur industriel ou un lobby quelconque n'aime pas ce que nous faisons. Je ne vois aucun danger dans ce que vous soulevez. J'ai les mains très libres.

M. Morin: Est-ce que les collègues ont des questions, M. le Président?

M. Saint-Pierre: C'est plutôt au ministère de l'Approvisionnement, maintenant. Sur le plan de la politique d'achat, elle sera proposée au gouvernement par le ministère de l'Industrie et du Commerce. Mais elle sera mise en application, en ce qui touche son aspect d'approvisionnement, par le ministère des Travaux publics et de l'Approvisionnement.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Programme 6, adopté?

M. Morin: Un instant, M. le Président. Je voudrais demander au ministre où en est le projet de GM, les autobus GM?

M. Saint-Pierre: Les autobus GM?

M. Morin: Oui.

M. Saint-Pierre: General Motors?

M. Morin: Bien sûr.

M. Saint-Pierre: A Saint-Laurent?

M. Morin: Oui, mais où en est ce projet?

M. Saint-Pierre: Ils font des autobus.

M. Morin: Par rapport à la politique d'achat du gouvernement.

M. Saint-Pierre: Avant, il n'y avait pas de fabrication d'autobus au Québec; maintenant, il y a des fabrications d'autobus.

M. Morin: II est en marche, mais où en est le projet? Est-ce que la fabrication est commencée?

M.Saint-Pierre: Sûrement. Cela fait longtemps. Il y a eu des livraisons d'autobus; il y a des produits finis qui sont sortis de là.

M. Morin: Est-ce que le ministre a une idée du nombre d'autobus qui ont déjà été produits par l'usine?

M. Saint-Pierre: Non, mais c'est un chiffre facile à savoir. Peut-être même qu'en donnant un coup de téléphone, demain matin, on va vous donner cela.

M. Morin: Oui.

M. Saint-Pierre: C'est à la communauté ur-

baine de Montréal. Il y avait combien de personnes qui travaillaient là, à peu près? A peu près 250, quelque chose comme cela?

Il y avait 250 personnes, à Saint-Laurent.

M. Morin: C'étaient des autobus subventionnés. Je ne sais pas si, tout à l'heure, nous avons passé, dans la liste, la subvention qui a été versée...

M. Saint-Pierre: Elle est versée par le ministère des Transports.

M. Morin: Par le ministère des Transports. M. Saint-Pierre: Aux communautés urbaines.

M. Morin: M. le Président, je pense qu'on peut adopter le programme 10.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Programme 10, adopté.

M. Saint-Pierre: Pour ne pas nous mêler, M. le Président, demain, il nous resterait les programmes 4, 5, 6. Est-ce que, sur le plan des statistiques, vous avez beaucoup de questions?

M. Morin: Les programmes 4, 5, 6, 8 et 9. Pour les statistiques, le programme 9, non, il n'y aura pas tellement de questions.

M. Saint-Pierre: On n'a pas le temps de les passer ce soir?

M. Morin: Non, je ne pense pas, ce n'est pas à ce point-là, quand même.

Le Président (M. Houde, Limoilou): La commission ajourne ses travaux à demain, 10 h 30 ou 10 h 45, immédiatement après la période des questions.

(Fin de la séance à 22 h 56)

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