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Commission permanente
de l'industrie et du commerce,
du tourisme, de la chasse et de la pêche
Etude des crédits du ministère de
l'Industrie et du Commerce
Séance du jeudi 8 mai 1975
(Dix heures dix minutes)
M. Houde, Limoilou (président de la commission permanente de
l'industrie et du commerce, du tourisme, de la chasse et de la pêche):
A l'ordre, messieurs!
Les membres de la commission, ce matin, sont les suivants: MM. Bellemare
(Johnson), Ca-dieux (Beauharnois), Côté (Matane), Denis
(Berthier), Dufour (Vanier), Lachance (Mille-Iles), Lapointe
(Laurentides-Labelle), Lessard (Saguenay), Malouin (Drummond), Marchand
(Laurier), Morin (Sauvé), Samson (Rouyn-Noranda), Saint-Pierre
(Chambly), et M. Caron remplace M. Déom (Laporte).
Le ministre.
Orientation et développement de l'industrie
secondaire (suite)
M. Saint-Pierre: M. le Président, hier, le chef de
l'Opposition a posé une question sur une mission à
l'extérieur qui toucherait les fonderies. C'est effectivement la mission
GIFA-74, qui s'est déplacée vers Dusseldorf et Liège, au
congrès international des fonderies, et à Londres pour certaines
visites industrielles. J'ai déposé ici une copie du rapport. On
remarquera que les participants, en plus de deux fonctionnaires du
ministère, étaient douze hommes d'affaires
québécois. Sans tous les nommer, il y avait M. Breton, de la
Fonderie Sorel; M. Marchand, de Ro-Ma Metal; M. Gagné, de la Fonderie
Dion; M. Boutet, de Lyster Die-Casting; M. Poitras, M. Biron, de la Fonderie
Sainte-Croix; M. Mazumdar, de la Fonderie de Magog et M. Trudelle, de la
Fonderie Saint-Romuald. Le document que je dépose est le rapport de
voyage. Il contient également en annexe des lettres transmises quelque
temps après la mission par les participants exprimant leurs commentaires
sur la mission. Une lettre que j'ai parcourue indique des commentaires
très favorables.
Je ne veux pas être méchant, M. le Président, mais
c'est une illustration de plus qu'on travaille pour les Québécois
avec les Québécois.
Alumineries
M. Morin: Bien, M. le Président. Nous allons prendre
connaissance du document, puis peut-être pourrions-nous y revenir,
lorsque nous étudierons les diverses missions commerciales
commanditées par le ministère.
Hier, M. le Président, j'avais abordé très
brièvement la question du projet d'aluminerie dans dans la région
de Québec. C'est un projet qui semble soulever beaucoup de
problèmes. Je les énumère rapidement pour donner au
ministre une idée des aspects que je compte traiter avec lui, ce
matin.
Tout d'abord, évidemment, il y a le problème de la
propriété et de la gérance de cette aluminerie, si tant
est que le projet soit toujours vivant. Deuxièmement, la question du
tarif préférentiel d'électricité de
l'arrêté en conseil, du décret pour parler
français qui a été adopté par le conseil des
ministres et de l'absence de consultation avec l'Hydro-Québec dont on a
fait état dans les journaux...
Troisièmement, j'aimerais que nous traitions de la
possibilité de transformer ici, dans la région de Québec
ou ailleurs au Québec, l'aluminium de première fusion, qui serait
produit par cette usine.
Quatrièmement, j'aimerais que nous parlions de
l'écoulement de la production. On a mentionné des chiffres allant
de 150,000 à 250,000 tonnes. J'aimerais que nous parlions des
possibilités d'écouler une telle production, surtout dans les
perspectives actuelles d'une baisse de la demande et à la lumière
des prévisions qu'on peut faire pour la demande d'ici quelques
années.
J'ai vu, là-dessus, des chiffres qui, souvent, sont
contradictoires. J'aimerais que nous examinions également si ce projet
n'entre pas, comme on vient encore de le soutenir avec vigueur hier, en
concurrence directe avec nos propres industries dans une autre région du
Québec, j'entends dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean.
J'en veux, pour preuve la réaction toute récente
elle est d'hier, je crois, et ce n'est pas la première fois que le
président de l'Alcan intervient dans le débat de M. Leman
à l'effet que des formules d'association auraient peut-être permis
au gouvernement québécois de devenir partenaire d'une
société canadienne, au lieu d'une société
américaine. M. Léman entendait sans doute par là,
partenaire soit de l'Alcan, soit de Reynolds, plutôt que de la National
South Wire.
Deuxièmement, je voudrais attirer l'attention du ministre sur la
toute dernière déclaration de M. Leman qui déclarait,
devant le Cercle de presse de Chicoutimi, ce qui suit: "Je m'oppose à ce
que M. Saint-Pierre se promène à travers le Québec
c'est beaucoup dire mais enfin en disant que l'implantation d'une
nouvelle aluminerie à Saint-Augustin ne nuira pas à l'Alcan."
C'est avec une vigueur croissante, comme le ministre a pu le remarquer sans
doute, que le président de l'Alcan s'en prend au projet
d'aluminerie.
Il ajoutait, d'ailleurs, hier: "La National South Wire est
déjà notre concurrente sur le marché
américain."
Voilà, M. le Président, les questions
préliminaires, le cadre de la discussion, que je souhaiterais suivre ce
matin.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Le ministre.
M. Saint-Pierre: C'est curieux, M. le Président, de voir
même pour les projets industriels les plus
valables, dans lesquels le gouvernement du Québec et les
Québécois trouvent beaucoup d'avantages, sous mille et une
façons, comment on peut très vite, soit au niveau des
régions, soit au niveai de l'intérêt de compagnies en
cause, même pour l'Opposition officielle, y trouver à redire et
tenter de nous entraîner dans une dialectique qui est empreinte de
beaucoup de négativisme sur le projet. Fondamentalement, il y a à
peine 48 heures, ici, on disait: C'est très bien de faire la
transformation de nos richesses naturelles, mais comment allez-vous vous y
prendre? Arrêtez d'être pour la vertu et donnez-nous des moyens
concrets.
Nous allons prendre un moyen concret. Nous allons prendre
l'électricité, les alumineries, les usines d'électrolyse,
dans le cas de l'Alcan, où environ 19% de la capacité est
transformée au Québec; au niveau de la compagnie Reynolds la
même chose. Nous disons que, face à une conjoncture, le
gouvernement a été assez éclairé pour tenter de
dégager un projet qui non seulement transforme au niveau de nos
partenaires 100% de ce qui sera produit par l'usine d'électrolyse, mais
qui nous rapporte au niveau de la propriété de l'usine
d'électrolyse, au niveau des possibilités de création
d'emplois immédiates, au niveau des investissements, au niveau du
développement régional également. En effet, si la
région de Québec a pu être privilégiée au
niveau de la croissance de l'emploi, on sait que cette croissance de l'emploi
s'est surtout faite dans le secteur tertiaire, à cause du gouvernement
provincial, de l'industrie du tourisme, à cause des universités,
du secteur de l'enseignement et de l'hospitalisation. Mais on sait que la
région de Québec souffre d'un déséquilibre dans
l'emploi secondaire qui est très faible en quantité, d'une part,
mais également en qualité, puisque, sans vouloir tracer une
caricature, dans la région de Québec, l'industrie secondaire,
c'est, dans une large mesure, les petites entreprises dans la chaussure, dans
le cuir, comme les entreprises de Saint-Emile. Dans la région
immédiate de Québec, il n'y a pas eu beaucoup d'activités
secondaires.
Tout cela pour dire que ce projet nous permet à la fois de
transformer les richesses naturelles, d'associer les Québécois
eux-mêmes, directement, dans un secteur de pointe, de combler des
déficiences sur le plan mondial au niveau de la production de
l'aluminium, nous permet également d'opérer un redressement
très intéressant dans une des régions qui, au niveau des
disparités régionales, avaient des problèmes, et je suis
un peu surpris de voir des réactions négatives. Prenons les sept
points que soulève le chef de l'Opposition...
M. Morin: M. le Président, je tiens seulement à
dire que je n'ai dit nulle part que nous étions contre le projet; nous
nous interrogeons simplement sur les conditions d'implantation, c'est tout.
M. Saint-Pierre: Vous ne voulez pas vous dissocier des
déclarations qui ont été faites publiquement il y a
à peine deux semaines par M. Jean
Taillon, le porte-parole de votre parti dans la région de
Québec?
M. Morin: Comment voulez-vous que nous nous dissociions de
quelque déclaration que ce soit avant d'avoir exploré le dossier
à fond? Comment voulez-vous, par exemple, que je me dissocie des
déclarations de M. Leman? Il a soulevé des problèmes
auxquels...
M. Saint-Pierre: Mais est-ce que l'inverse est vrai
également? Il est curieux que des gens fassent des déclarations
négatives sur un projet si on n'en est pas allé au fond.
M. Morin: II faut aller au fond du projet, c'est ce que
l'Opposition officielle compte faire ce matin.
M. Saint-Pierre: Vous passerez l'information à M. Taillon,
qui est contre le projet parce que, apparemment, on donne de
l'électricité. On va voir cette question-là.
M. Morin: Oui, nous allons la voir, justement.
M. Saint-Pierre: A la propriété, M. le
Président, ce n'était pas notre objectif au tout départ
d'avoir 100% de l'usine d'électrolyse. Nous avions envisagé, au
départ, d'avoir une participation minimale du gouvernement du
Québec d'environ 30% du capital-actions de l'entreprise. Dans les
négociations, j'en ai fait état dans la conférence de
presse du mois de février dernier, suite à un cheminement assez
long, nous nous retrouvons a la fin avec une proposition qui est
acceptée par nos partenaires et dans laquelle le gouvernement du
Québec obtient effectivement pour $1, si on peut employer l'expression,
100% du capital-actions de l'usine d'électrolyse. C'est un
investissement, quand même, à $1,600 la tonne, de $400
millions.
Pourquoi obtient-on la propriété d'une usine de $400
millions avec $1? C'est très simple, c'est que le financement de projets
semblables ne se fait pas à cause d'un rapport sain entre l'avoir des
actionnaires et une dette à long terme, mais se fait essentiellement par
des contrats fermes pour la durée de la période d'amortissement
de l'usine. Des contrats fermes, donc, sur une période de 20 ans, avec
des compagnies solvables de grande renommée qui acceptent de prendre le
métal chaud à son prix coûtant.
Je mentionne le prix coûtant, parce que là aussi, dans
certains milieux, on a voulu, à mon sens, tromper la population en
disant: Cela n'a pas de sens de ne pas faire de profits. On ne fait pas de
profits parce qu'on ne fait pas de capital-actions.
D'ailleurs, j'ai demandé de modifier le projet, justement pour
montrer qu'on va en faire, des profits. C'est bien sûr que si nous
acceptions de mettre $1 million au lieu de $1 dans le capital-actions, eh!
bien, nous ferions le profit le plus spectacu-
laire possible dans l'industrie manufacturière je ne sais
pas, de 20%, de 30% sur le capital-actions de $1 million. Je pense que
c'est une notion de comptabilité qui est facile à comprendre.
Lorsque le capital-actions d'une entreprise est $1, il est normal que les
coûts de transfert soient les coûts complets, incluant le
financement, incluant toutes les dettes, tous les amortissements, toutes les
taxes. Mais comme il y a eu $1 de capital-actions, il serait anormal de faire
$35 millions de profits par année.
Mais justement pour contrer l'objection que M. Parizeau nous a
donnée, on va peut-être changer quelque chose. On va mettre $1
million de capital-actions et on va peut-être faire un profit de $1
million par année, chiffre très respectable sur ce plan. C'est
mineur.
Sur le plan de la gérance, donc, la propriété est
à 100% à la Société générale de
financement. C'est pour l'usine d'électrolyse. Pour l'engagement, sur le
plan du financement et là, ce sont des choses qui restent
à compléter autant que 85% de l'investissement serait sous
la forme d'une dette à long terme garantie par les contrats
d'approvisionnement sur une période de 20 ans de tous les partenaires,
incluant les 30% à la Société générale de
financement. La différence de 85% à 100% de l'investissement
serait par des débentures convertibles qui paieraient un
intérêt, mais qui ne seraient pas garanties, qui seraient
assumées par chacun des groupes qui recevront le métal chaud en
proportion de la production qu'ils prendraient. De telle sorte que si nos
partenaires privés, là encore, prennent 70% du métal
chaud, ils devront mettre 70% de ces débentures non garanties et la SGF
mettra 30%.
Je pense que c'est assez clair sur le plan du financement, sur le plan
de l'équité, sur le plan de la garantie.
Sur le plan de la gérance, notre partenaire, la National South
Wire, a une expérience très particulière dans la direction
d'une usine. Elle a une très bonne réputation sur le plan
mondial. Nous envisageons donc de lui confier un contrat de gérance dont
tous les termes seront bien scrutés. Il nous semble que ceci est
préférable à d'autres formules, c'est-à-dire
à une formule qui voudrait que la Société
générale de financement fasse elle-même la gérance
de l'usine.
Maintenant, cela ne veut pas dire, en confiant le contrat de
gérance, qu'on n'est pas capable et c'est dans cet esprit,
d'ailleurs, que les négociations préliminaires se sont
engagées d'avoir toute la garantie possible en ce qui touche la
langue de travail, le pourcentage de francophones, le recrutement, enfin toutes
les mesures qui pourraient être prises.
Sur le tarif préférentiel, je me réserve, M. le
Président, au cours des prochains jours, de faire un historique non
seulement sur le gouvernement actuel mais sur d'autres gouvernements quant
à la question des tarifs. Je rappelle simplement que le tarif de
départ de l'usine d'électrolyse à 7.5 mils est le tarif le
plus élevé. Je m'excuse, il n'y a aucune compagnie actuellement,
au Québec, qui paye un tarif de cet ordre. Donc, parler de cadeau est
peut-être un terme qu'il faudrait modifier.
Je répète de nouveau qu'à 7.5 mils il n'y a aucun
complexe industriel dans le moment qui paye des tarifs aussi
élevés. Les tarifs sont beaucoup plus bas dans le secteur
industriel. D'ailleurs, la moyenne, je l'ai vu récemment, je pense qu'on
l'a dans le discours du budget de M. Garneau, est beaucoup moindre.
Deuxièmement, M. le Président, si on recule dans le temps,
on est un peu surpris que des gens, il y a à peine quelques
années, que ce soient des conseillers économiques du gouvernement
de l'Union Nationale et d'autres, étaient prêts à payer des
tarifs extrêmement bas, même 3 et 4 mils, pour tenter d'attirer ici
uniquement une usine d'électrolyse. On se rappelle le cas Pechiney sur
la Côte-Nord, dans la région de Sept-lles. On se rappelle nombre
d'autres démarches que le gouvernement de l'Union nationale,
conseillé en cela par M. Parizeau, avait faites pour avoir uniquement
ici une usine d'électrolyse, c'est-à-dire pour prendre de
l'électricité, l'exporter sous forme primaire avec très
peu de valeur ajoutée, très peu d'emplois.
Or, ce que nous avons dans le projet ici est très
différent de cela. Nous avons non seulement une usine
d'électrolyse, nous avons des transformations du métal chaud qui
lui donnent beaucoup en valeur ajoutée, beaucoup en salaires, beaucoup
en activités économiques intéressantes pour la
région de Québec. Je rappelle également, M. le
Président, qu'il y a bien des façons de regarder le
problème et il serait faux de dire qu'il n'y a eu aucune consultation
avec l'Hydro-Québec.
D'ailleurs, dans notre cheminement, des chiffres ont été
mentionnés, et on doit dire que le tarif officiel de
l'Hydro-Québec a changé presque tous les mois, non pas à
tous les mois mais très souvent. Dans un dossier que nous avions eu
antérieurement, le dossier ALCOA, l'Hydro a commencé avec des
tarifs officiels, de l'ordre de 5.5 mils, et cela c'était à peine
un an avant notre projet. Là encore, au ministère de l'Industrie
et du Commerce, nous avons, à toutes fins pratiques, refusé le
projet d'ALCOA qui voulait faire installer une usine d'électrolyse
à Valleyfield, parce que la compagnie refusait des activités de
transformation.
Mais le tarif officiel qu'Hydro-Québec, au départ, leur
offrait était quand même de l'ordre de 5.5 mils, avec des taux
d'escalation beaucoup plus faibles qui nous auraient donné un tarif de
beaucoup inférieur à ce que nous avions ici même. J'admets
que la psychose de l'inflation, dans l'intérim, a fait qu'à tous
les deux ou trois mois le tarif officieux de l'Hydro-Québec augmentait
et cela explique peut-être une partie du désenchantement de
l'Alcoa pour son projet. Il y a plusieurs façons d'examiner ces
questions de tarif. D'ailleurs, le comité que nous avons établi
par l'arrêté en conseil examine en détail tous ces points.
Il n'est pas impossible que nous apportions des modifications mineures, mais on
pourrait dire que l'électricité qui sera utilisée dans le
complexe d'aluminerie à Québec, qui demande 500 mégawatts,
ce
pourrait être 500 des 6,000 mégawatts que nous allons
obtenir des chutes Churchill. Cette électricité nous
coûtera, pendant les 66 prochaines années, un taux qui n'a
peut-être pas été rendu public mais qui est connu de
plusieurs personnes, de l'ordre d'environ 3 mils. Mais dans le cas de National
South Wire, non pas dans 66 ans d'ici, mais dans à peine 20 ans d'ici,
même avec le tarif que propose l'arrêté en conseil, nous
sommes dans l'ordre de grandeur de 27 mils ou 28 mils.
Donc, nous allons vendre 26 mils ce que nous avons payé 3 mils
à Churchill Falls. On ne fait de cadeau à personne dans cela et
on ne donne pas l'électricité, on la vend. J'ai fait calculer le
coût moyen, qui est de l'ordre de $26 millions par année, qui sera
payé par l'usine d'électrolyse à l'Hydro-Québec. Ce
ne sont pas des cadeaux; si ce sont des cadeaux, ce sont des cadeaux qui
coûtent assez cher. On pourrait prendre une autre possibilité. On
se rappelle que le contrat des chutes Churchill, l'un des conseillers
financiers de l'ancien gouvernement, qui est très près,
maintenant, du chef de l'Opposition, s'y était opposé. Et
à peine avec quelques mois de recul on voit quelle erreur tragique cela
aurait pu être pour le Québec de refuser ce qui,
littéralement aujourd'hui, est peut-être le meilleur marché
que les Québécois aient jamais fait de leur histoire.
Qu'on pense que pendant 66 ans nous allons avoir 6,000 mégawatts
à un taux de 3 mils. Actuellement, nous pourrions vendre, mais nous ne
sommes nullement interressés; nous cherchons à transformer ici
même, à nous servir de cet outil pour créer de
l'activité économique. Mais nous pourrions vendre à des
taux, actuellement, qui seraient de 15 mils, 16 mils, 18 mils, 24 mils; donc,
huit ou neuf fois ce que l'électricité nous coûte.
On pourrait prendre une autre approche, M. le Président, et dire
que l'électricité pour l'aluminerie ce sera, finalement, le
dernier barrage que l'Hydro-Québec aura mis en service,
c'est-à-dire Manic 3. De l'avis de plusieurs, incluant un amortissement
complet sur les lignes de transport d'énergie, les coûts de Manic
3 seront de l'ordre de 7.5 mils. Il faut peut-être rappeler l'argument
parce que, du côté de l'Opposition, c'est un point qui est
difficile à percer dans les oreilles de sourds que
l'énergie hydraulique est protégée de l'inflation. Lorsque
Manic 3 est terminé, c'est 98% des coûts pour l'ensemble du projet
qui sont complètement abrités de l'inflation. A ce que je sache,
le bon Dieu va continuer à nous envoyer de l'eau, et l'eau va continuer
à faire tourner les turbines. Et on sait que dans le cas de
l'hydraulique, différent du nucléaire ou du thermique, les
dépenses d'exploitation sont marginales, de l'ordre de 1% ou 2% des
coûts totaux.
Donc, le Manie 3, qui entre en service à peu près au
même moment où on a besoin d'électricité à
Québec, ne nous coûte et j'avais des confirmations des gens
de l'Hydro-Québec pas plus que 7.5 mils. Mais là, c'est
7.5 mils pour la vie de Manic 3, donc pendant 50 ans, alors que nous, dans
notre projet, il y a des clauses minima d'indexation, des taux
d'électricité pour l'usine d'élec- trolyse qui le
porteront, sur une période de vingt ans, à environ 26 mils,
$0.02.6 du kWh, ce qui nous coûtera sept dixièmes de sou ou 7 mils
du kWh. Alors on voit là que, simplement sur l'aspect de
l'électricité, on aura fait de l'argent.
Mais rappelez-vous, M. le Président, également qu'au bout
de vingt ans, non seulement l'Hydro-Québec, le gouvernement aura une
présence dans le secteur de l'aluminerie, mais après avoir mis $1
sur la table, nous serons propriétaires d'une usine qui vaut $400
millions et qui aura une capacité de production de 250,000 tonnes
d'aluminium. Plus que cela, on aura créé, dans une région
qui en a besoin, comme celle de Québec, pour un meilleur
équilibre économique, un minimum d'environ 3,000 emplois directs
dans des activités de transformation.
Dire qu'il n'y a pas eu de consultation avec l'Hydro-Québec,
c'est faux. Il faut se rappeler, d'ailleurs, que même la loi de
l'Hydro-Québec établit très clairement que celui qui
détermine des taux d'électricité pour cet ordre de
grandeur, c'est le lieutenant-gouverneur en conseil. Nous avons parlé
avec l'Hydro-Québec pendant très longtemps et nous allons
continuer à parler avec l'Hydro-Québec pendant très
longtemps. Mais pour mener à bien le projet, à un moment
donné, j'ai fait des recommandations au conseil des ministres, compte
tenu de toutes les discussions que nous avons eues, pour fixer, au moins dans
ce qui était un élément majeur du coût du projet, un
paramètre qui nous permettait de continuer les discussions. Sans cela,
on aurait parlé jusqu'à la fin des temps, sans savoir trop trop
où nous allions.
Les possibilités d'écouler cette production de 250,000
tonnes nous semblent excellentes. C'est vrai que, dans l'aluminerie, il y a une
conjoncture à très court terme qui est défavorable. Il y a
des surplus actuellement. Mais dans toutes les études que j'ai vues,
particulièrement en ce qui touche la révolution puisqu'il
n'y a pas d'autre mot dans la fabrication des voitures dans le monde
entier, on prévoit, au cours des prochaines années, et il y a eu
plusieurs déclarations à cet effet, des réductions
importantes du poids des voitures, à cause du problème de
l'énergie et du pétrole. Ces réductions vont impliquer un
accroissement substantiel de la quantité d'aluminium utilisé dans
les voitures. Toutes les études je confirmerai sûrement la
version d'un expert, M. Leman lui-même, à qui je parlais, il y a
deux jours sur le sujet.
Lorsque notre usine de Québec sera en production on parle
pour dans deux ans, dans trois ans ou dans quatre ans, ce n'est pas demain
matin; on sait que, dans le moment, il y a des surplus de capacité de
production toutes les analyses d'experts indiquent très
clairement qu'il y aura, sur le plan mondial, un déficit
évalué à au moins deux millions de tonnes. Nous, nous
allons apporter sur le marché 250,000 tonnes. C'est bien certain que, si
ces 250,000 tonnes ne sont pas faites dans la région de Québec,
elles vont être faites quelque part ailleurs dans le monde, que ce soit
au Brésil, sur l'Amazone, que ce soit en Australie,
que ce soit dans d'autres pays, que ce soit à Terre-Neuve, avec
l'aménagement du bassin inférieur de la rivière Churchill,
qui a aussi des capacités beaucoup plus grandes même que les 500
mégawatts que nous offrons.
Alors, nous disons: Vaut mieux profiter de cette conjoncture favorable.
Nous avons la conviction qu'il y a de la place sur le marché pour
250,000 tonnes, pour ne pas perturber le marché. Le commentaire qu'il
faudrait faire à la déclaration de M. Leman est le suivant: Je
n'ai jamais dit que nous n'entrerions jamais en concurrence. En fait, ce serait
penser que nous devons demander la permission à tout producteur
québécois ou canadien avant qu'il y ait un nouvel investissement.
Cela va être la stagnation complète sur le plan industriel. Chaque
fois qu'il y a quelque chose qui s'ajoute, chaque fois qu'il y a des
investissements Dieu sait, cette année, comment est la croissance
de nos investissements manufacturiers ce sont des capacités de
production additionnelles.
Nous, au ministère, ce dont on s'est assuré chaque fois,
c'est qu'il y avait de la place sur le marché pour absorber cette
capacité additionnelle. Dans le moment, si quelqu'un venait ici pour
construire des motoneiges, des tentes-roulottes et des maisons mobiles, on lui
dirait non. On le lui déconseillerait et on ferait tout notre possible
pour empêcher un investissement dans ces secteurs, parce qu'il n'y a pas
de place.
Mais, s'il y a quelqu'un, qui veut venir au Québec pour
construire des camions pour les mines, des camions de 75 tonnes, on va lui dire
oui, parce qu'on a la conviction qu'il y a de la place. C'est évident
que le président de Caterpillar dirait: Si je n'avais pas ce concurrent,
j'aimerais bien mieux ça. Mais nous, on n'est à la remorque ni de
Caterpillar, ni même, avec tout le respect que je porte à ces
gens, des compagnies canadiennes qui sont solidement implantées ici.
Donc, nos 250,000 tonnes; tout ce que prennent nos partenaires à
70% sera transformé complètement ici même, dès le
départ de l'usine d'électrolyse. Il faut se rappeler que National
South Wire n'est qu'un de ces partenaires; trois autres partenaires n'ont pas
été identifiés, et à dessein, jusqu'ici. Mais nous
avons la conviction que ce qui sera fait à Québec, dans la
région métropolitaine de Québec, correspond à des
marchés qui ne déplaceront pas des emplois d'Arvida à
Québec. Cela correspond à des marchés qui ne sont pas,
actuellement, desservis par l'Alcan et qui ne seraient pas,
éventuellement, desservis par l'Alcan. Il y a un vide sur le plan des
marchés que nous allons combler et qui nous revient, ici. Si ce vide
n'était pas comblé ici, il serait absorbé ailleurs.
Donc, aucun problème pour l'écoulement de 70% de la
production. La SGF va avoir 30% de la production, soit 80,000 tonnes.
Là, l'usine aura une capacité de production de 250,000 tonnes.
Nos partenaires prenant 70% de métal chaud même pas de
lingots, ce n'est même pas transformé en lingots sur la
production conti- nue, ici même dans la région de Québec,
au départ, la Société générale de
financement sera la seule des partenaires dans le projet à pouvoir
vendre le métal chaud sur le marché international.
Pourquoi? Parce que, à l'évidence même, la
Société générale de financement ne pourrait pas, la
première année, transformer, ce que nous exigeons de nos
partenaires financiers. Pourquoi? Parce qu'elle n'a pas, dans le moment, les
réseaux de distribution, les marchés. Mais, bien sûr, notre
intention n'est pas de vendre des lingots pendant 20 ans. Notre intention est
que, disposant de cette source d'approvisionnement à un prix que nous
croyons extrêmement compétitif, la SGF va pouvoir
intéresser des Québécois, premièrement, des
compagnies canadiennes ou, si ce n'est pas possible, aller en "joint venture"
avec des compagnies étrangères pour fabriquer ici et transformer
ici l'aluminium.
Alors, il y a mille et un projets auxquels on peut penser, des plus
petits projets, en partant du revêtement de murs extérieurs en
passant par la fabrication de "containers", la fabrication de l'arrière
des camions-remorques. On peut penser à mille et un projets possibles.
Alors, graduellement, la SGF va tenter de transformer, elle aussi, 100% de ce
qu'elle aura obtenu en métal chaud.
J'ai parlé de la concurrence directe de l'Alcan ou de Reynolds,
il est peut-être bon de faire un petit retour en arrière pour dire
qu'au ministère nous tentons d'avoir de bonnes liaisons avec le secteur
privé. Si mes journées et celles de mes fonctionnaires avaient 43
heures, nous visiterions plus de gens, mais dans les cas spécifiques
qu'on mentionne, particulièrement dans le cas de l'Alcan, je me sens
fort à l'aise. Je n'ai pas mon agenda devant moi, mais je pense que M.
Leman le confirmera, à l'été 1974, nous avons eu des
discussions au siège social de l'Alcan, avec M. Leman lui-même,
non pas dans le but de tordre le bras de l'Alcan, mais simplement dans le but
de connaître ses projets et ce que nous pouvions faire pour l'aider.
A l'époque, nous discutions du projet de l'AIcoa à
Valleyfield. J'avais spécifiquement posé la question à
l'Alcan. Est-ce que cela la dérangeait et pouvait perturber son
marché si une aluminerie s'installait à Valleyfield? On m'avait
répondu: Non, s'il y avait une aluminerie qui s'installait, il y avait
un accroissement de la demande et on aimait autant que cela se fasse dans la
province de Québec qu'aux Etats-Unis. On n'avait aucune objection. On
avait exprimé des réticences si l'Alcoa allait au niveau des
produits finis.
A l'époque, M. Leman, avec beaucoup de conviction, m'avait
convaincu que l'Alcan ne pouvait pas transformer davantage au Québec,
puisque la loi principale de la transformation de l'aluminium était
essentiellement dictée par les marchés. Comme les six millions de
Québécois ne formaient pas un marché pour l'aluminium
suffisamment important, on ne pouvait pas songer à avoir plus que ce que
nous avions au niveau des usines de transformation.
Je pense que les autorités de l'Alcan
m'avaient assuré de toute leur collaboration, pour tenter, le
plus possible, une transformation au Québec, mais elles m'avaient dit
que je ne pouvais pas songer à avoir 100% de transformation. J'avais
demandé si la fluctuation, au niveau des problèmes de
l'énergie et autres, pouvait modifier cela et il ne semblait pas.
D'ailleurs, cette position confirmait ce que l'Alcoa nous avait dit
elle-même, ce que d'autres compagnies d'aluminium nous ont dit, parce que
nous avions comme objectif de transformer nos richesses naturelles, d'y avoir
une plus grande valeur ajoutée. Nous avons donc parlé à
plus de producteurs d'aluminium possible, mais constamment avec cet objectif
que je vous donne, et que j'avais d'ailleurs mentionné dans ma
conférence de presse: assurer un degré de transformation
dépassant, de loin, celui accordé par cette industrie au
Québec présentement.
Le rôle moteur du gouvernement sera donc de fournir les normes
acceptables, afin d'assurer le maximum de valeur ajoutée au
Québec.
Nous avons parlé à bien des gens, incluant l'Alcan et
Reynolds, et après toutes ces discussions, il y a eu un projet. Il y a
bien des gens qui sont venus ici, des Japonais, des Allemands. Je ne mentionne
pas tous les projets, mais il y a eu un groupe à qui nous avons dit: Nos
exigences sont 100% de transformation. Un groupe a dit: Nous allons essayer de
vivre avec cela. Pendant un an, nous avons travaillé avec eux et le
projet était sérieux. Des premiers rapports nous ont
été donnés qui ne nous ont pas satisfaits et nous avons
dit: Non. Si vous voulez faire un projet de $400 millions, nous voulons savoir
exactement ce qui va se faire. Nous ne voulons pas de vagues promesses. Nous ne
voulons pas des engagements pour respecter la vertu, nous voulons un projet
concret.
De tout cela, nous avons eu une compagnie, avec des associés, qui
nous ont donné le projet que nous avons actuellement, qui implique une
transformation de 100%. Le moins qu'on puisse dire, si vous me permettez
l'expression, cela cloche toujours, c'est que nous avons amené bien des
chevaux près du ruisseau, mais il y en avait un seul qui voulait boire
l'eau que nous voulions qu'il boive. Les autres ne voulaient pas boire. On peut
amener des gens, mais ce n'est pas moi qui vais forcer l'Alcan à
transformer si elle trouve que ce n'est pas possible, à cause des
critères économiques.
Depuis ce temps, en toute honnêteté, je dois dire que M.
Leman m'a dit que des changements technologiques, en particulier le
procédé de coulée continue, changement technologique
relativement récent bien qu'il date de plus d'un an, permettront
sûrement au Québec d'avoir une plus grande valeur ajoutée
dans la transformation.
Je ne voudrais pas entrer en guerre avec l'Alcan. Je vais lui donner le
titre d'être sûrement la compagnie qui a fait depuis longtemps les
meilleurs efforts pour être intégrée à
l'économie québécoise, à la société
québécoise. C'est sûrement la compagnie au Québec
qui a peut-être le record le plus enviable du pourcentage de francophones
qui ont grandi dans ses rangs. La preuve en est qu'une compagnie mondiale de
cette taille a actuellement comme président un Québécois
francophone et qu'elle a eu, parmi ses vice-présidents et ses directeurs
d'usines, nombre de Québécois francophones.
Inutile pour moi de dire que je n'ai pas l'intention d'entrer en guerre
avec l'Alcan, mais il ne me paraît pas juste... Un instant, je veux bien
prendre le bon mot.
Je cite le Soleil d'aujourd'hui où on dit: "Selon M. Leman, si le
ministre Saint-Pierre avait discuté de ses projets avec les
administrateurs de l'Alcan, il y aurait peut-être eu des formules
d'association qui eussent permis au gouvernement québécois de
devenir partenaire d'une société canadienne au lieu d'une
société américaine."
M. Morin: C'est ce que je vous citais tout à l'heure.
M. Saint-Pierre: M. le Président, je dis qu'il y a eu des
discussions, mais que nous avions nos exigences. Nous sommes prêts
à nous associer surtout avec des Québécois, après
ça avec des Canadiens et après ça avec d'autres, mais nos
exigences étaient une transformation à 100%. Sans donner la date
exacte, je pense que c'était au mois de juillet ou d'août 1974, on
nous disait que ce n'était pas possible, que nous avions des exigences
irréalistes.
Nous avons trouvé, il me semble, une compagnie responsable qui
jouit d'une bonne réputation dans le secteur de l'aluminium et qui nous
a dit: Oui, nous sommes prêts à atteindre vos objectifs, et
ça fait un an que des discussions sérieuses se poursuivent.
Maintenant, on comprendra bien j'ai eu privément, non pas
de l'Alcan mais d'autres compagnies des reproches analogues qu'une fois
que nous travaillons sérieusement pour avoir un projet qui implique des
investissements de $500 millions et 3,000 emplois, pour atteindre, au niveau de
la transformation de la richesse naturelle, des sommets qui n'ont jamais
été atteints au Québec jusqu'ici, avant d'aller plus loin
dans le projet et de signer quelque chose, on ne peut pas se promener, nous,
à la Place Ville-Marie, à Montréal ou ailleurs, à
New York, pour demander des permissions a des compagnies privées qui
sont dans ce secteur. On peut, et je pense qu'on l'a fait, donner une place de
choix dans nos discussions aux compagnies québécoises et
canadiennes, mais lorsqu'on tente de négocier avec un partenaire qui
accepte nos objectifs, on n'a pas de permission à demander à
personne. De la même façon que l'Alcan n'a pas de permission
à demander au gouvernement du Québec avant de poser un geste, de
faire un investissement.
Ceci dit, M. le Président, je rappelle qu'avec 7.5 mils et 26
mils au bout de 20 ans, évidemment, la National South Wire va payer au
moins, au bas mot, peut-être dix fois plus cher son
électricité que l'Alcan la paie d'une rivière du
Québec, puisque le fond de la rivière lui appartient. Elle paie
environ 2 mils et la National South Wire... Donc, la concurrence ne sera
sûrement pas déloyale.
Deuxièmement, je voudrais vous assurer que si le marché
mondial n'avait eu aucune place pour une capacité accrue de production,
avec une marge très confortable, nous n'aurions pas marché dans
le projet. Je rappelle le premier facteur de notre stratégie
industrielle dans ce secteur: "Viser à protéger les emplois des
Québécois dans les alumineries existantes, ce qui implique la
recherche de nouveaux marchés présentement non desservis par les
alumineries du Québec."
Je maintiens que dans le projet actuel, c'est ce que nous avons fait. Je
n'ai malheureusement pas le rapport annuel de l'Alcan, mais pour toute personne
qui voudra examiner ce rapport annuel, on verra que l'achat de lingots par
l'Alcan a considérablement augmenté au cours des dernières
années. Actuellement cet achat représente, en termes de
capacité de production, des sommes importantes, ce qui veut dire que
l'Alcan, dans le moment, est obligé d'aller acheter des lingots
d'aluminium à l'extérieur. Il y a eu une croissance très
très forte au cours des dernières années.
Maintenant, ce que je peux dire à l'Alcan, c'est que si elle est
intéressée à faire de la transformation poussée,
nous serions bien intéressés à lui offrir tout au moins
les mêmes avantages, si avantages il y a eu, ou les mêmes
conditions, dis-je, que nous avons offertes à des Américains,
mais dans les mêmes perspectives, c'est-à-dire protéger ce
qui existe déjà et rechercher de nouveaux...
Pour toutes ces raisons, j'espérais que du côté
privé québécois on reconnaisse que nous n'avons pas agi
à la légère dans le dossier.
Je pense que nous avons un dossier étoffé qui apporte
beaucoup d'avantages à l'économie québécoise. Du
côté de l'Opposition, une déclaration récente de M.
Taillon, il me semble, s'ajoute à un dossier extrêmement faible,
sur le plan énergétique, que le Parti québécois a
toujours eu depuis six ou sept ans, sûrement largement influencé
par des idées fixes que pouvait avoir M. Parizeau mais des idées
fixes qui n'étaient pas conformes aux avantages des
Québécois. Je pense que si on ajoute l'opposition au contrat, je
le répète, extrêmement intéressant des chutes
Churchill que le gouvernement Johnson a fait et pour lequel je rends
témoignage à M. Boyd, si on y ajoute le refus de voir dans le
développement de la baie James quelque chose de fondamentalement sain
pour l'économie québécoise et qui aurait dû se faire
cinq ou six ans avant, en particulier après l'Expo où nous avons
eu un problème très grave d'investissements et d'emplois au
Québec, si on y ajoute des éléments récents dans le
dossier énergétique au sujet du pétrole, c'est un triste
bilan des perceptions que peut avoir le Parti québécois en
matière énergétique.
J'en ferai, un jour, le calcul, mais c'est dans les milliards qu'il
faudrait évaluer la perte que l'économie québécoise
aurait eue si elle avait suivi, depuis dix ans, les consignes et les mots
d'ordre de M. Parizeau ou des autres tenants plus ignares comme M. Taillon qui,
de l'aveu même du chef de l'Opposition, semble avoir pris parti dans la
région même de Québec. Lui-même, qui est
fonctionnaire, reconnaissait sûrement les déficiences de la
structure économique de la région de Québec en
matière d'emplois. Lorsque nous arrivons avec quelque chose de concret,
pas une déclaration en faveur de la vertu, un projet concret qui a tant
d'avantages pour les Québécois et qui va signifier une
présence des Québécois francophones dans ce secteur, une
présence de l'Etat à un prix extrêmement bas, eh bien!
avant même de connaître le dossier j'aimerais avoir devant
moi les coupures, vous devez les avoir dans vos notes il
s'élève contre ce projet et le rejette presque carrément
du revers de la main puisque nous donnons de l'électricité.
M. le Président, on ne donne pas de l'électricité;
la note est au moins de $26 mi iions par année, au tout départ,
lorsque le coût est à 7.5 mils; lorsque le coût sera
à 26 mils, soit près de quatre fois plus, on voit que la note
dépassera $100 millions par année pour
l'électricité. Et si elle vient des chutes Churchill, elle aura
coûté au Québec, incluant les lignes de transport, 3 miIs,
donc plus de cent fois moins. Et dans le cas de Manic 3, le prix qui est
demandé au départ, Manic 3 étant de l'hydraulique, est
protégé contre les augmentations des coûts.
Le Président (M. Houde, Limoilou): L'honorable chef de
l'Opposition.
M. Morin: M. le Président, plusieurs des
déclarations du ministre confirment certaines questions que nous nous
posons au sujet de ce projet. Et sa façon un peu cavalière,
à la fin, de mêler toutes les sauces, d'amener la baie James et le
pétrole dans le tableau, n'est pas pour nous rassurer non plus. Je
préférerais, pour ma part, juger...
M. Marchand: II n'a rien compris.
M. Morin: ...chaque projet à ses mérites, parce que
si nous devions juger de ce projet-ci à la lumière de la baie
James, je crois que ce serait un mauvais départ, étant
donné le coût de l'aventure.
Si vous le voulez bien, M. le Président, nous allons nous en
tenir à ce projet-ci. Je vais tenter de faire quelques remarques
préliminaires avant d'entrer dans les détails parce que ce sont
les détails qui sont importants dans cette affaire. Tout l'exercice, ce
matin, consiste à éclairer l'opinion publique sur ce projet; il
ne consiste pas au départ à être pour ou contre mais
à donner tous les renseignements qui sont nécessaires pour
l'évaluer et pour tenter de savoir si vraiment c'est à l'avantage
du Québec ou si c'est à l'avantage de National South Wire et de
ses autres partenaires.
Je me pose la question, à savoir: la SGF ne faisant pas de
profits, la SGF n'ayant pas la gérance du projet, si la
propriété ne devient pas tout à fait fictive,
entièrement fictive puisque, de toute façon, les
opérations sont entre les mains d'une société
étrangère. Bien sûr, on prendra peut-être quelques
garanties sur la langue de travail, mais ce n'est pas la prise de
décision qui est en cause lorsqu'on parle de langue de travail.
Je me pose la question de savoir si on ne va pas avoir une sorte de
coloration québécoise pour faire illusion, pour donner
l'impression aux Québécois qu'ils sont propriétaires de
quelque chose ou qu'ils vont l'être dans vingt ans, alors que la
machinerie peut-être sera désuète.
M. Saint-Pierre: La propriété...
M. Morin: ...une propriété qui soit une sorte de
hochet, mais qui ne corresponde pas à une propriété
certaine, à une propriété qui permet de prendre les
décisions. Quand on n'a pas la gérance d'une industrie, d'une
entreprise, dis-je, quand on n'en tire pas de profits, je me demande vraiment
ce que peut signifier la propriété.
C'est une première interrogation. La deuxième serait
celle-ci. Dans vingt ans, bien sûr, la SGF, si j'ai bien
interprété les propos du ministre, deviendrait vraiment
propriétaire...
M. Saint-Pierre: Dès le départ. Dès le
départ elle est propriétaire.
M. Morin: Mais ce n'est pas elle qui a la gérance du
projet, entendons-nous bien. Alors, dans vingt ans, si j'ai bien compris le
ministre, le SGF aurait la gérance, mais je me demande si, à ce
moment-là on l'a fait observer, il y a même des experts qui
ont souligné le fait l'équipement ne sera pas
entièrement désuet. Donc, on se retrouvera avec des installations
qui devront être renouvelées de fond en comble et sans doute
faudra-t-il songer, à ce moment-là, à de nouveaux
investissements.
Une autre question que je me pose et sur laquelle j'aimerais que nous
nous penchions ce matin, ce sont les perspectives de transformation sur place,
ici au Québec. J'ai cru voir, dans plusieurs interventions sur la
question, des doutes vraiment fondamentaux sur cette possibilité de
transformer l'aluminium, le métal chaud, comme le ministre le dit, ici
sur place. On a fait observer qu'il n'y a pas que le Québec qui voudrait
transformer une matière première comme l'aluminium de
première fusion sur son propre territoire.
Les experts l'ont fait remarquer, la tendance générale,
dans le cas de l'aluminium, parce que cela se transporte facilement, c'est de
l'acheter brut, là où il est fabriqué, au Québec
notamment, et de le transformer chez soi en tous les dérivés de
l'aluminium, des casseroles jusqu'aux poignées de porte.
M. Saint-Pierre: Avant. C'est ce qu'on essaye de changer, c'est
le cercle vicieux qu'on change.
M. Morin: Oui, bien sûr, c'est ce que vous dites que vous
allez faire et, en soi, nous ne pouvons pas être contre cela.
J'espère que le ministre comprend bien. Ce que nous, nous demandons,
c'est si c'est réaliste, si le ministre vraiment s'est interrogé
sérieusement puis a eu des consultations pour savoir dans quelle mesure
c'est possible de faire de la sorte, alors que tous les autres pays veulent le
transformer chez eux, encore davantage, y compris nos principaux partenaires
commerciaux.
M. le Président, je crains que, sur ce point , le ministre va
devoir aligner plus de faits que nous n'en avons eu jusqu'ici. Quel genre de
transformation, quelle société, quels sont les contacts qu'il a
eus, sur quoi se fonde-t-il pour affirmer que la transformation va se faire
ici?
Je pense qu'il faut plus que des affirmations générales,
parce qu'on peut bien affirmer n'importe quoi; qu'on va transformer le cuivre
ici, qu'on va transformer l'amiante ici, mais il faut voir quelles actions
concrètes ont été prises par le ministre pour qu'il en
soit ainsi. J'aimerais qu'il nous donne beaucoup plus de détails.
Vient ensuite une autre question qui est celle du coût de
l'électricité.
C'est peut-être le point le plus faible de toute l'argumentation
du ministre. Il nous a tenu un raisonnement un peu simpliste tout à
l'heure. Il nous a dit: L'électricité ne nous coûte pas
cher au moment où les installations qu'on a produites se sont
construites, donc on peut se permettre de donner à
perpétuité des tarifs très peu élevés ou, en
tout cas pour de longues périodes, de donner des tarifs très peu
élevés.
Mais il faut tenir compte non pas seulement du coût au moment
où le barrage est construit; il faut tenir compte du coût de
remplacement à l'époque où l'électricité est
utilisée. Cela, le ministre n'en a pas touché un mot. C'est cela
la question clé. Si, par exemple, chaque mégawatt, à
l'heure où l'usine va l'utiliser, c'est-à-dire mettons en 1980,
1985 ou en 1990, le coût de chaque mégawatt, le coût de
remplacement est plus élevé, autrement dit si les
Québécois, en 1980,1985 ou en 1990 doivent payer plus cher pour
acheter des mégawatts, c'est de ce coût qu'il faut tenir
compte.
C'est celui-là qui est déterminant pour l'économie
québécoise et pour les besoins des Québécois. Donc,
il faut tenir compte du coût de remplacement de chaque mégawatt
à l'heure où l'usine va l'utiliser. J'entends par là le
coût qu'il faudra payer en 1980 ou en 1985 pour remplacer, par exemple,
les 500 mégawatts manquants pour répondre aux autres demandes des
consommateurs québécois. C'est cela, le critère.
Je voudrais faire remarquer, toujours sur cette question du tarif qui
sera payé pour l'électricité, que l'Hydro-Québec a
rendue publique une grille de tarifs officiels. Selon cette grille, le prix de
150,000 kW, à 90% de facteur d'utilisation, compte tenu d'une hausse
annuelle de 11% des tarifs industriels, serait de 7.9 mils en 1977 et de 18.2
mils en 1985. Est-ce que le ministre peut nous expliquer comment il concilie ce
qu'il a dit avec cette grille rendue publique par l'Hydro-Québec? Est-ce
qu'il peut nous dire si le tarif qui va être consenti, à l'usine,
ne sera pas, de fait, une énorme subvention plus ou moins
déguisée?
Si la subvention s'étend sur dix ans, de 1977 à 1987,
puisque les hausses de 7.5% de 1982 à 1987 seront fixées par
rapport au prix de 1982, quel serait alors le coût d'une telle
subvention?
L'Hydro-Québec a demandé 26 mils pour une usine d'uranium
enrichi en I984, le ministre s'en souviendra. Non, ce n'est pas avec lui que je
m'en suis entretenu en Chambre; c'est avec le premier ministre, au sujet de
l'uranium enrichi. Donc, est-ce qu'il ne s'agit pas là d'un tarif
outrancièrement préférentiel? Lorsqu'on consulte
l'arrêté en conseil je n'en ai pas eu le texte exact sous
les yeux, est-ce que le ministre pourrait, soit dit en passant, nous donner le
texte de cet arrêté en conseil? est-ce que j'ai tort de
penser qu'un accord est intervenu entre l'Hydro-Québec et National South
Wire et non pas entre l'Hydro-Québec et la SGF? C'est une autre question
que je me pose. C'est à vérifier. Si l'accord est intervenu entre
l'Hydro-Québec et National South Wire, cela tendrait à prouver,
du moins à étendre nos doutes quant à la
propriété véritable du projet. Si c'est la National South
Wire qui négocie et non pas la SGF, cela nous donne à entendre
qui est le véritable patron de l'affaire.
Enfin, il y a un quatrième ordre de questions qu'on peut
soulever. Je ne crois pas que le ministre ait vraiment répondu à
l'inquiétude manifestée par l'Alcan. Il nous a dit, si j'ai bien
compris il voudra peut-être apporter des précisions
qu'il s'est entretenu avec M. Leman du projet Alcoa, à
l'été I974. La question que je pose au ministre, pour que ce soit
bien clair dans notre esprit, c'est: Est-ce qu'il y a eu des entretiens avec
les responsables de l'Alcan, portant spécifiquement sur le projet d'une
aluminerie dans la région de Québec? Est-ce qu'on a tenté
de les intéresser à ce projet? C'est une question bien
précise. Je ne lui demande pas s'il a discuté de la
possibilité générale d'établir d'autres usines
d'aluminium au Québec, dans la région de Beauharnois ou ailleurs.
Je lui demande: Ce projet-là, en a-t-il discuté avec M.
Léman?
L'affirmation de M. Leman, si je l'ai lue correctement, porte sur ce
projet-là en particulier et non pas sur d'autres. Vous voyez que les
questions demeurent nombreuses et que le ministre va avoir passez-moi
l'expression à pédaler un coup pour vraiment nous
rassurer, et rassurer les entreprises québécoises et l'ensemble
des Québécois sur la portée exacte de ce projet.
Mais je tiens à lui dire une chose: S'il peut nous convaincre
qu'il a vraiment trouvé là un moyen de développer le
Québec et la région de Québec, en particulier, sans faire
des concessions outrancières sur le plan de l'électricité,
sur le plan des subventions implicites dans les tarifs
d'électricité accordés, s'il peut nous convaincre que le
projet ne va pas entrer directement en concurrence avec les entreprises qui,
déjà, fabriquent de l'aluminium au Québec, de sorte
qu'elles seraient obligées de réduire leur production, nous
appuierons son projet, mais il faudra qu'il nous en convainque.
C'est notre tâche, comme Opposition officielle le ministre
en conviendra de nous persuader que ce projet est vraiment à
l'avantage de tous les Québécois.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Le ministre.
M. Saint-Pierre: Brièvement, M. le Président, la
propriété, c'est très clair, il n'y a aucun doute dans
cela, le premier jour, dès le démarrage, la Société
générale de financement est propriétaire à 100% de
l'usine d'électrolyse. Pour la gérance, je ne comprends pas les
appréhensions du chef de l'Opposition. Pour nous, ce qui est important,
ce n'est pas dire: La gérance, à cause d'une position doctrinaire
de notre parti, doit être assumée par la Société
générale de financement, ou bien dire que la gérance de
l'usine va être confiée à l'Alcan ou la Reynolds. Dans
notre préoccupation, il faut tenir compte de nos objectifs:
participation de Québécois francophones, expertises à
dégager et efficacité de l'usine. Cela aussi est important, on ne
peut pas confier la gérance à n'importe qui et se retrouver avec
une usine qui ne fonctionne pas rondement. Quant au management, les
administrateurs de la South Wire, compte tenu de leur expérience au
Kentucky, compte tenu de la réputation qu'ils se sont acquise, compte
tenu de ce que nous avons vu nous-mêmes, ce que nous avons
vérifié, nous paraissent dans le contexte un excellent groupe
pour assumer la gérance.
Maintenant, la gérance ne sera pas donnée d'une
façon indéfinie, elle pourrait être donnée par
période de cinq ans. Peut-être qu'après cinq ans la
Société générale de financement se sera fait la
main avec du personnel de la Société générale de
financement, parce que la gérance n'implique pas 100% de l'usine, cela
est un point très important. Lorsque la South Wire a pris la
gérance de l'usine du Kentucky avec la National Steel, elle n'a pas
importé son personnel pour tout contrôler; elle a tenté de
recruter, elle a amené quelques cadres spécialisés. Mais,
très graduellement, elle a tenté de prendre du personnel local.
Ici, nous aurons les mêmes exigences. Peut-être qu'après
cinq ans, finalement, l'usine étant parfaitement rodée, la SGF,
ayant un personnel de cadre, des contremaîtres, des ouvriers
spécialisés dans le secteur, aura elle-même la
gérance.
Chose certaine, en ce qui touche la propriété, dès
le premier jour, elle appartient à 100% à la SGF et, à la
fin de la période de 20 ans, ce sont des actifs d'au moins $400 millions
dont la SGF sera propriétaire à 100%, qui ne seront grevés
d'aucune dette à long terme et qui auront représenté une
bonification appréciable sur un capital-actions, qu'il soit de $1 ou de
$1 million. Cela mérite, je pense, d'être considéré
dans le dossier.
Le chef de l'Opposition dit: Est-ce possible que dans 20 ans
l'équipement soit désuet? Je ne le crois pas, M. le
Président, compte tenu des risques et des fluctuations dans un tel
projet. On tente généralement d'amortir les coûts sur une
période de 20 à 30 ans. Il y a certains projets qui sont à
30 ans, d'autres sont à 20. Nous avons fait amortir tous les
coûts, nous, à 20 ans pour être plus sévères,
mais je ne pense pas que l'équipement sera désuet. On n'a
qu'à constater ce qui se fait à
Arvida; Dieu sait que les immobilisations à Arvida n'ont pas
été réalisées en 1955il y a 20 ans mais
ont été réalisées...
M. Morin: Mais on veut les remplacer à l'heure
actuelle.
M. Saint-Pierre: Oui, mais je pense qu'on voit qu'après 20
ans on ne peut pas parler d'équipement désuet. Je pense que si on
prend toutes les usines de fabrication, toutes les usines d'électrolyse
actuellement, la plupart d'entre elles ont plus de 20 ans d'existence. La
plupart d'entre elles continuent à produire du métal chaud
à des prix qui semblent essentiellement concurrentiels.
Le chef de l'Opposition dit: Est-ce réaliste pour le ministre
d'aller contre le courant puis de réussir, avec un levier quelconque,
à forcer à modifier le cercle vicieux qui nous a toujours
empêchés d'avoir des transformations au Québec? Je dis au
chef de l'Opposition que ce projet, on ne l'a jamais considéré en
partie, mais dans son ensemble. Pour nous, cela a été très
clair que c'était un complexe, ce n'était pas une usine
d'électrolyse, et après cela des petits enfants qui
étaient pour naître à tous les trois ou quatre ans.
C'est un complexe d'une aluminerie au Québec, impliquant une
usine d'électrolyse mais impliquant également des unités
de transformation qui seraient construites immédiatement.
Lorsque des compagnies, qui ont des chiffres de vente qui
dépassent le milliard de dollars par année, qui ont des actifs,
bien sûr, extrêmement importantslà on parle de
compagnies, finalement, de taille mondiale, de compagnies extrêmement
importantes qui, par écrit, s'engagent à investir,
dès le départ, en même temps que l'usine
d'électrolyse est en construction, qu'elles commencent à
construire quelque chose dans la terre, ce qui représente un
investissement qui permet 100% de la transformation, je me dis que des
compagnies comme celles-là ne sont pas des enfants d'école.
S'ils mettent dans la terre, à Saint-Augustin, Québec, $35
millions ou $20 millions, parce qu'il va y avoir plusieurs usines... Prenons un
cas spécifique. Nous avons eu des études
détaillées. Si la National South Wire, qui possède une
usine, à Hawesville, de 200,000 tonnes par an, qui a quand même un
chiffre d'affaires qui approche les $800 millions ou les $900 millions par
année, aujourd'hui, si elle dit qu'elle prendra 75,000 tonnes de
métal chaud et qu'elle va investir $30 millions dans un moulin de tiges
et dans une tréfilerie ayant une capacité de 70,000 tonnes,
à proximité de l'usine d'électrolyse, je dois bien en
conclure qu'il va se faire du fil, qu'il va se faire toutes sortes de fil,
qu'il va se faire du fil pour les lignes à transmission et qu'il y a,
effectivement 100% de la transformation faite par ces gens.
Maintenant, les autres compagnies qui sont impliquées dans les
brames, dans d'autres types de production des compagnies qui n'ont pas
été dévoiléesce sont des compagnies
sérieuses et elles vont faire les investissements au même moment
que l'usine d'électrolyse.
Enfin, vous pouvez être sceptique mais j'ai le dossier et je suis
confiant que nous avons mené le dossier comme un tout et que
l'investissement, qui sera fait au niveau des usines de transformation, ce ne
sera sûrement pas des monuments à la technologie américaine
qu'on va implanter à Saint-Augustin, Québec. Cela va être
des usines de production qui vont employer des gens du Québec, et c'est
ça notre préoccupation.
Au sujet du coût de l'électricité, je critique
simplement la perception, la compréhension que le Parti
québécois se fait en matière énergétique. Il
me semble que les sophismes les plus vulgaires et les plus simplistes semblent
avoir foi d'hypothèses de base pour tout votre parti.
M. Morin: Allons, allons! Soyez très sérieux. M.
Saint-Pierre: Non! Quand vous me dites...
M. Morin: Je pourrais vous retourner la même accusation
pour votre façon simpliste de calculer.
M. Saint-Pierre: Bien, M. le Président, notre performance
des cinq dernières années, si vous voulez, on va la calculer. Les
Québécois, dans le moment, paient $6.25 le baril d'huile, et vous
savez qu'il y en a 355,000 qui arrivent chaque jour dans le Québec. Vous
leur direz honnêtement, aux Québécois, qu'est-ce que cela
aurait coûté si, en 1970, ils vous avaient écoutés,
au moins sur ce point-là. On ne parlera pas des autres points.
En tout cas, revenons à l'aluminerie. Il me paraît faux
je ne sais pas comment vous convaincre de dire que pour un
produit, que pour l'électricité où, au Québec,
à 95%, c'est venu d'usines hydroélectriques, dont certaines
d'entre elles ont plus qu'un demi-siècle d'existence et continuent de
produire, il me paraît éminemment faux que pour un produit, donc
où les investissements ont été faits, on dise à
tous les utilisateurs: Vous allez payer non pas ce que cela nous coûte,
mais vous allez payer le coût de remplacement si on avait à
remplacer ce qu'on vous donne.
Qui va bénéficier de l'excellent contrat que le
gouvernement a obtenu pour l'achat, pendant 66 ans, à 3 mils, des chutes
Churchill, malgré l'avis de M. Parizeau? M y a quelqu'un qui va
bénéficier de ça.
Alors, il me paraît plus juste de dire que ce que les
utilisateurs que ce soit les consommateurs québécois ou que
ce soit les milieux industriels ce que les consommateurs doivent payer,
c'est le coût moyen de l'électricité pour l'ensemble du
réseau. Personne ne peut avoir ce qu'on appelle en anglais un "free
lunch", un repas gratuit. Mais je pense qu'on peut demander à tout le
monde de bénéficier de ce que nous avons pu avoir dans le
passé.
Nous, ce qu'on vous dit, c'est que si la National South Wire n'avait
voulu que capter cette électricité pour l'exporter comme en
lingots, c'est-à-dire uniquement investir dans une usine
d'électrolyse, on aurait dit: Non, c'est une richesse trop
précieuse que l'on a pour vous permettre de faire ça.
Mais, ce qu'on leur a dit: Si vous êtes
prêtslà, le chef de l'Opposition mesure l'ampleur du
défi à briser, avec nous, le cercle vicieux qui nous
empêchait d'avoir une valeur ajoutée, une transformation des
richesses naturelles sur notre territoire, si vous êtes prêts
à faire ça avec nous, nous allons vous permettre de partager le
coût moyen que nous coûte l'électricité au
Québec.
Et cela me paraît éminemment sage.
Quand je dis cela, je ne pense pas à la facture annuelle de $26
millions que la National South Wire va payer lorsqu'elle sera à 7.5
mils, c'est-à-dire pendant les premières années, je ne
pense pas à la note annuelle de $100 millions qu'elle va payer à
Hydro-Québec quand, au bout de vingt ans, elle va payer
l'électricité qui, fondamentalement, coûte à
Hydro-Québec peut-être $10 millions tout au plus, puisque c'est
à peu près 3 mils par rapport aux 26 mils que l'autre paie.
Je pense aux 3,000 Québécois de la région de
Québec qui vont contribuer à changer notre structure
industrielle, qui vont avoir des salaires au-dessus de la moyenne, dans une
industrie de pointe où la croissance de la demande est plus forte. Mais,
même là, il ne faudrait pas penser que nous avons fait des calculs
primaires comme cela. Nous avons mis l'ensemble du dossier dans le
modèle économétrique québécois; nous avons
fait un modèle et nous avons mis dans ce dossier tous les
éléments, les entrants et les sortants.
Au bas mot, sur une base cumulative, si nous prenons l'hypothèse
que les taux d'Hydro-Québec vont augmenter de 10% par année
pendant les vingt prochaines années, je conteste personnellement cela
parce que l'histoire ne le montre pas. Je ne vois pas pourquoi la
poussée que nous avons eue récemment va se continuer, compte tenu
de l'importance du réseau hydraulique. Si on le projette à 10%
par année, on arrive à des coûts de 96 mils dans trente ans
d'ici. Je suis presque certain que nous n'aurons pas cela, compte tenu de
l'importance de notre réseau hydraulique, à l'époque, dans
le réseau québécois.
Mais même si nous prenons cela, nous calculons que le gouvernement
fédéral, je ne parle pas de la ville de Québec ni de la
ville de Saint-Augustin comme entité, sur une base cumulative,
d'après les études que nous avons faites dans un modèle
mathématique, va recevoir à chaque année au moins $175
millions de plus que, théoriquement, il pourrait perdre. Non pas par
rapport à des coûts de Churchill Falls, parce que le gain serait
extrêmement plus grand que cela. Mais si nous prenons ce que nous
appelons l'augmentation de tarif prévue de 10% par an pendant vingt ans,
même là, en impôt des corporations et en impôt sur le
revenu des gens qui vont travailler là, le gouvernement du Québec
non pas le gouvernement fédéralrecevra cumulativement $175
millions de plus que ce que théoriquement il pourrait perdre.
Je rappelle que dans tous les pays du monde, également...
L'Hydro-Québec l'a admis elle-même, d'ailleurs. Si vous lisez bien
tout l'article que vous avez devant vous, vous verrez que l'Hydro-Québec
admet même que, pour les grands clients, c'est-à-dire là
où il n'est pas nécessaire d'établir de réseau de
distribution où vous êtes obligé d'aller porter
l'électricié dans chaque maison unifamiliale, pour les grands
clients comme cela, il y a quand même des réductions de coût
appréciables. Il est normal, dans tous les pays du monde, de
négocier ces tarifs. On ne part pas d'un tarif qui est dans un petit
livre pour dire à quelqu'un qui achète de
l'électricité et qui va payer $100 millions par année:
Multipliez ce que vous utilisez par un prix moyen et ce sera votre tarif.
D'ailleurs, il faut bien voir que, là comme ailleurs, c'est une
partie de poker. C'est-à-dire que, là comme ailleurs, je pourrais
bien dire ce que sûrement des universitaires, à l'occasion, sont
portés à dire confortablement installés, avec une
sécurité d'emploi, dans une de nos universités, avec un
gros salaire, des vacances l'été et des missions du
gouvernementque le gouvernement devrait demander 10 mils et l'exiger. On
peut faire cela. Je vous dis que si nous demandons et si nous exigeons 10 mils
et une augmentation de 10% par année, l'usine d'aluminerie ne sera pas
au Québec. Elle va aller au Brésil, en Australie. Elle va
peut-être aller à Terre-Neuve, parce qu'on a de
l'électricité là. Nous avons calculé ce que cela
pouvait coûter là-bas. On a calculé ce que cela pouvait
coûter ailleurs dans le monde. On peut prendre cette attitude hautaine
lorsqu'on a personnellement cette sécurité complète et
qu'on ne se préoccupe pas de qui peut perdre là-dedans. On peut
faire cela et l'usine d'aluminerie ne viendra pas.
M. Morin: Ce sont des arguments ad hominem qui ne portent pas sur
une question objective.
M. Saint-Pierre: Non, il s'agit de savoir si nous pouvons prendre
une position telle que nous risquerions les emplois et le développement
économique que connaîtra la région administrative du
Québec métropolitain.
M. Morin: Si je comprends bien, il n'y a que le ministre qui
s'intéresse à l'avenir des Québécois et qui
défend leurs intérêts. Les autres sont tous de mauvaise
foi, au départ.
M. Saint-Pierre: Non. Je n'ai pas dit cela, M. le
Président. J'ai simplement dit que ceux qui... Non, je vais le dire.
Très bien. J'ai dit que ceux qui mangent du steak trois fois par jour
peuvent facilement, dans des grandes recherches, nous dire que le hamburger
n'est pas bon, mais que ceux qui tentent de donner à tous et chacun le
plus haut niveau de vie possible doivent avoir des préoccupations qui ne
sont pas aussi simplistes que ça.
Je vous le dis fondamentalement, c'est très facile; par exemple
pour l'Alcoa, on n'a exprimé aucun intérêt. Des gens bien
pensant m'ont dit: Ils reviendront. Alcoa n'est pas revenue; elle est rendue
aux Etats-Unis. Cela ne me fait rien, parce
que, fondamentalement, leur projet, même si mon adjoint
parlementaire aurait bien aimé avoir des investissements de $200
millions à Valleyfield, n'était pas intéressant pour
l'économie du Québec. Mais celui que nous avons ici, à
Québec, est extrêmement intéressant et ce serait
sûrement des intérêts mesquins financiers, de la part du
secteur privé, ou encore des intérêts mesquins partisans
qui pourraient porter des gens à s'y opposer.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Le député
de Beauharnois.
M. Cadieux: M. Le Président, c'est bien sûr que
ça m'a pris quelque temps avant d'être convaincu que le projet
d'Alcoa n'était pas aussi intéressant que l'autre projet. J'en ai
discuté à maintes reprises avec le ministre de l'Industrie et du
Commerce, avec ses hauts fonctionnaires, j'en ai même discuté avec
le président de la compagnie Alcoa.
Je comprends d'autant plus aujourd'hui, suite à cette
vulgarisation que vient de faire le ministre de l'Industrie et du Commerce d'un
projet qui doit, pour nous tous, nous tenir à coeur. Je pense que,
depuis qu'il a commencé à expliquer ce projet d'aluminerie,
à le vulgariser pour le faire comprendre à tous les membres de
cette commission, sauf peut-être un, nous devons le féliciter,
même si ce n'est pas tellement de mise de féliciter, à une
commission parlementaire, le ministre et ses principaux adjoints, pour en
être arrivé à de telles conclusions. Je ne
répéterai pas tous les chiffres qu'il nous a donnés. On
sait que, depuis X années, le Parti libéral, même dans les
années cinquante-six, avec son chef, M. Lapai me, disait: II faut voir
à ce que nos richesses naturelles soient transformées ici. Pour
une fois que le ministère de l'Industrie et du Commerce vient à
bout de convaincre des investisseurs de transformer ici à 100%, nos
richesses naturelles, je me dis qu'on est très mal venus de continuer
à critiquer ce projet et qu'on devrait plutôt embarquer avec le
gouvernement, le ministère. Pour une fois, peut-être que
l'Opposition serait très bien vue de dire: Je vous félicite et,
si vous avez besoin de nous dans la discussion, nous serons derrière
vous et vous ne serez pas les seuls à défendre ce point de vue
là.
Cela m'amène à poser une question au ministre. Il parle de
3,000 emplois. Je suppose que ce sont 3,000 emplois directs et que cela ne
tient pas compte des emplois indirects. Pourrait-il nous dire s'il y a une
étude des emplois indirects qui seront créés suite
à ces 3,000 nouveaux emplois directs?
M. Saint-Pierre: Les emplois que j'ai mentionnés sont, M.
le Président, des emplois directs. Au niveau des emplois indirects, il
faudrait, au minimum, y ajouter un montant équivalent, 3,100.
Maintenant, nous sommes actuellement à parachever l'étude de
rentabilité. Un mandat a été confié conjointement
à la firme Brown & Root et à la firme Lalonde, Valois,
Lamarre pour parachever l'étude de rentabilité, remettre dans un
seul volume tous les documents que nous avons. Nous- mêmes, du
côté du ministère nous le faisons actuellement
nous allons réexaminer, dans notre modèle
mathématique, les avantages directs que le Québec peut en
retirer, de même que tenter de préciser la nature des emplois
indirects et les retombées au niveau des emplois indirects.
M. Cadieux: M. le Président, si la question est
reposée par le chef de l'Opposition tantôt, vous pourrez tout de
même répondre qu'on y a déjà répondu,
même s'il ne s'occupait pas de la réponse.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Le chef de
l'Opposition.
M. Morin: M. le Président, je ne suis pas
entièrement rassuré par les réponses du ministre et
même, sur certains points, je crois qu'il a évité de me
répondre. Je vais être plus précis dans mes questions, si
vous le voulez.
La première observation, c'est qu'il est grand temps que le
dossier tout entier soit rendu public, avec le moins de points obscurs
possible. Le ministre peut bien faire des déclarations
générales, comme il en a faites à plusieurs reprises ce
matin, mais si ce n'est pas appuyé par des documents, par des
engagements certains, nous sommes dans le vague et, en fait, nous ne sommes pas
plus avancés qu'avant dans la connaissance du dossier.
M. Saint-Pierre: Vous me permettrez de commenter un peu sur
ça. Autant je suis bien prêt à ouvrir complètement
tout le dossier, autant je vous en supplie, laissez-moi le temps de me rendre
à des étapes avant de pouvoir vous le dire.
Je ne peux pas ouvrir un dossier et vous montrer des engagements
signés tant que je n'ai pas fini cette étape. Autant nous avons
tenté de renseigner la population le plus possible sur le dossier
on voit le 15 février I975; on voit que l'arrêté en conseil
a été rendu public 24 heures après avoir été
adopté au conseil des ministres autant laissez-moi franchir la
prochaine étape, la fin de l'étude, de rentabilité. Bien
sûr, il y a des choses qui sont plus précises actuellement qu'en
février mais, pour les présenter comme un tout, il y a encore des
éléments à compléter.
M. Morin: Mais quand pensez-vous que le dossier sera vraiment
complet et que vous pourrez le rendre public?
M. Saint-Pierre: Nous allons sûrement rendre le dossier
public avant la prise de décision. J'en ai discuté encore avec
mon sous-ministre adjoint spécifiquement chargé de ce dossier,
nous estimons que l'étude de rentabilité complète sera
terminée vers la fin de juin. Nous estimons qu'au niveau du financement
les discussions qui ont eu lieu pour avoir quelque chose de concret dans cela
pourraient se rendre jusqu'à la fin d'août. Contrairement à
ce qui a pu être mentionné, nous avions espéré
peut-être pouvoir faire de la construction à l'automne 1975; mais
il semble plutôt qu'à l'automne I975 ce sera la période de
décision.
Alors là, mutuellement, on peut peut-être se donner un
mois, deux mois, le temps qu'il faut pour prendre les décisions voulues,
mais là on aura un dossier complet. Il y aura la prise de
décision et si le projet démarrait, eh! bien, à l'hiver il
permettrait la préparation des plans d'ingénierie pour le projet.
Là le projet pourrait démarrer dans sa phase de construction au
printemps 1976.
M. Morin: Et le ministre peut s'engager, si j'ai bien compris,
à rendre le dossier public avant que les décisions
définitives soient prises?
M. Saint-Pierre: Oui, sûrement.
M. Morin: Pour qu'il y ait un débat public si...
M. Saint-Pierre: Sûrement.
M. Morin: ... le débat public est nécessaire.
M. Saint-Pierre: Oui, sûrement.
M. Morin: Bien. Parce que...
M. Saint-Pierre: Dans tout temps...
M. Morin: ... le ministre n'a pas vraiment répondu
à l'objection que je lui faisais, à la question que je lui posais
sur le caractère fictif de la propriété de la SGF. Il va
voir que cela peut avoir des conséquences. On nous dit: La SGF ne fera
pas de profits, n'est-ce pas?
M. Saint-Pierre: Non, non, j'ai corrigé cela.
Spécifiquement pour M. Parizeau, la SGF va faire des profits comme
aucune compagnie canadienne en fait dans le dossier. Mais il faut bien voir que
les profits sont reliés au capital investi.
M. Morin: Oui.
M. Saint-Pierre: Alors, ce que je vous assure, c'est que la SGF
va faire des profits comme aucune compagnie canadienne n'en fait.
M. Morin: Bien oui! mais cela, c'est une affirmation
générale.
M. Saint-Pierre: Non. non.
M. Morin: Pouvez-vous me donner un ordre de grandeur?
M. Saint-Pierre: Mais, c'est un pourcentage des profits, mon cher
monsieur.
M. Morin: Oui, bien sûr, bien sûr.
M. Saint-Pierre: Au départ, on devait mettre $1. Bien
sûr, quand on met $1 dans le capital-actions d'une entreprise les
$400 millions sont financés par des dettes à long terme et ces
dettes à long terme sont complètement absorbées dans la
détermination du prix coûtant. Si vous et moi lançons une
compagnie et mettons $1 de profit, il ne faut pas s'attendre qu'avec $1 de
profit...
M. Morin: D'investissement.
M. Saint-Pierre: $1 d'investissement, je m'excuse, il ne faut pas
s'attendre qu'on va faire $20 millions par année de profits avec $1. Si
c'était cela, le Québec serait riche demain matin avec votre
formule. Vous pouvez tenter de la vendre à la population mais je pense
qu'on ne vous croira pas.
M. Morin: II n'en est pas question.
M. Saint-Pierre: Ce que je dis, moi, c'est, spécifiquement
à cause du raisonnement assez méchant que vous avez fait, on va
changer notre formule; on ne mettra pas $1 dans le capital-actions, on va en
mettre plus, on va mettre disons $1 million, on va mettre un montant
très marginal par rapport aux investissements. Et là je vous
assure que, quand je rendrai le dossier public, nous allons faire des profits,
exprimés en pourcentage du capital investi, comme aucune compagnie
canadienne n'en fait.
M. Morin: De quel ordre encore? Pouvez-vous être un petit
peu plus précis?
M. Saint-Pierre: Vous le verrez dans le temps. Si je vous disais
qu'on va faire des profits de 25% par année sur le capital investi,
est-ce que cela vous satisfait? Vous allez être en faveur du projet?
M. Morin: Est-ce que c'est un chiffre que vous me donnez?
M. Saint-Pierre: Non, je ne m'engage pas, je veux...
M. Morin: Ah! oui.
M. Saint-Pierre: Un instant, M. le Président, je vous dis
qu'on va faire des profits comme aucune compagnie canadienne n'en fait.
M. Morin: Bon!
M. Cadieux: Etudiez cela et regardez, faites les comparaisons. Ce
sera plus que ça.
M. Morin: Maintenant, M. le Président, je dois me
contenter, à ce que je vois, dans ce domaine comme dans d'autres
questions que j'ai soulevés, de grandes affirmations. Depuis le
début, d'ailleurs, de ce dossier, nous sommes devant de grandes
affirmations, c'est vraiment le Pérou. Mais, lorsqu'on essaie d'avoir
des précisions, c'est beaucoup plus difficile. Je soulignais au ministre
tout à l'heure que l'idée de ne pas donner la gérance
à la SGF nous inquiète beaucoup parce que cela pourrait
très bien être une le ministre va l'avouer fort
belle combine pour la National South Wire. Si la propriété
était à la SGF, celle-ci ne paie pas de taxes, n'est-ce pas?
Donc, là encore une subvention déguisée. Non seulement
dans le tarif d'électricité mais dans le fait que la
SGF, propriétaire, soit entièrement fictif, soit
partiellement intéressé, ne paiera pas de taxes.
C'est une question en tout cas à laquelle le ministre voudra bien
me répondre.
M. Saint-Pierre: Vous parlez comme l'avocat du gouvernement
fédéral qui serait inquiet de voir qu'une activité
économique ne lui rapportera pas d'argent, puisqu'on sait que c'est le
gouvernement fédéral qui reçoit la très forte
proportion des taxes sur les profits des compagnies.
M. Morin: II y a également le Québec qui touche des
taxes là-dessus. J'aimerais demander au ministre s'il a fait le calcul
de ce que ça coûterait aux Québécois, en taxes, ce
projet, année après année. Est-ce que le calcul a
été fait?
M. Saint-Pierre: Je l'ai fait, et je vous l'ai dit, cela donne un
surplus, par rapport au tarif théorique que vous me lancez sur
l'Hydro-Québec, un surplus, à chaque année, d'au moins
$175 millions.
M. Morin: Je ne vous parle pas du tarif, je vous parle des
taxes.
M. Saint-Pierre: On a fait cela.
M. Morin: Non. Est-ce que vous pouvez rendre cela public?
M. Saint-Pierre: Si c'est approprié, je le rendrai public
quand le projet sera complètement terminé. Dans le moment, il y e
des études qui se poursuivent. Je ne suis pas comme M. Taillon, quand je
ne suis pas rendu au fond du sujet, je ne prends pas position, puis je n'essaie
pas de livrer comme complète une chose qui ne l'est pas. Je vous ai
dit...
M. Morin: Mais c'est que vous avez pris position sur le projet.
Vous l'avez annoncé.
M. Saint-Pierre: Non, M. le Président, je ne l'ai pas
annoncé. Lorsqu'on a voulu le lancer sur une voie d'évitement,
qu'il était très mal engagé, j'avais tellement à
coeur ce projet pour la région de Québec, les 3,000 personnes qui
vont y travailler, que j'ai tenté, avec la presse, d'apporter des
précisions. Maintenant, l'engagement que j'ai pris, l'engagement que moi
et que mes collègues, M. le Président, ont pris...
M. Morin: Est-ce que vous pourriez m'en fournir une copie, soit
dit en passant?
M. Saint-Pierre: Je vais vous en fournir une copie. Il y a un
changement à apporter c'est l'arrêté en conseil 475-75: que
tout engagement de nature permanente autre que l'étude de
praticabilité sus-mentionnée soit soumise pour approbation au
lieutenant-gouverneur en conseil. C'est la limite des engagements que j'ai
pris.
M. Morin: Est-ce que je pourrais? Merci beaucoup.
M. Saint-Pierre: C'est la seule que j'ai. Si la commission veut
tirer des copies.
M. Morin: Voilà, merci.
M. Saint-Pierre: Je mentionne que je pourrais en donner une
autre. On remarquera que le caractère du dactylo, en page 3, n'est pas
comme les autres, c'est là que le nom de National South Wire est
entré. A la dernière minute, au conseil des ministres, il y a eu
un changement fait par le personnel du secrétariat, et malheureusement
il s'est glissé une erreur, c'est-à-dire que..
M. Morin: A quelle page?
M. Saint-Pierre: La troisième page, vous voyez que le
caractère du dactylo n'est pas le même: que le gouvernement du
Québec accepte l'article 4.
M. Morin: Ah oui!
M. Saint-Pierre: Alors, vous voyez. Il s'est glissé une
erreur. Un arrêté en conseil subséquent devrait la
corriger, mais comme il n'y avait pas d'engagement permanent, cela devrait
être: que l'Hydro-Québec convienne, avec la Société
générale de financement, que pour le projet d'aluminerie dans la
région de Québec, les taux d'électricité soient les
suivants. Mais, comme on parlait depuis toujours du projet de la National South
Wire, le personnel du secrétariat exécutif a ajouté cela
pour corriger une autre erreur qui était là avant.
M. Morin: Est-ce que c'est une erreur? Est-que...
M. Saint-Pierre: Oui, c'est une erreur.
M. Morin:... l'Hydro-Québec va convenir effectivement avec
la SGF ou avec le National South Wire?
M. Saint-Pierre: Non, c'est cela, avec la SGF, puisqu'il est bien
sûr que l'Hydro-Québec convient avec celui qui est
propriétaire.
M. Morin: Oui, c'était un lapsus, si on peut dire.
M. Saint-Pierre: Non, c'est qu'on a parlé de projet,
voyons, M. le chef de l'Opposition.
M. Morin: Enfin je suis heureux que la correction ait
été faite. Mais une deuxième question qui paraît
soulevée par le projet, c'est la question de la transformation. Le
ministre nous fait de belles déclarations, nous dit qu'il y a trois noms
de compagnies qu'il ne peut pas dévoiler, qu'il a obtenu des promesses.
Le projet paraît fort intéressant, à première vue.
Le noeud du problème, c'est de savoir s'il va y avoir transformation ici
ou ailleurs.
Alors là, il ne peut pas s'attendre à ce que nous nous
contentions d'affirmations générales en disant: je sais que cela
va se faire. Est-ce que le ministre peut nous dire s'il a eu des engagements
formels, par écrit? Est-ce qu'il peut les rendre publics?
M. Saint-Pierre: M. le Président, tout le projet depuis un
an a évolué dans ce contexte. Je ne demande pas au chef de
l'Opposition, aveuglément, de me donner un chèque en blanc. Mais
le moins que je pourrais lui demander, c'est que si on obtient ces engagements
parce que j'ai dit que je les rendrais publics avant la prise de
décision du gouvernement du Québec, que si je les obtiens par
écrit, de compagnies responsables, que là le chef de l'Opposition
nous souhaite bonne chance dans nos tractations. Il va être
sûrement favorable au projet, si on atteint ce degré de
transformation qui est tellement supérieur à ce qu'on a pu
obtenir avant dans le Québec.
Je vais prendre un cas très hypothétique. On a
parlé du secteur de l'automobile. Prenons un cas hypothétique,
qui n'est pas vrai, juste pour être bien certain qu'on ne met personne
sur de fausses pistes.
Ce ne serait pas prudent de dire, par exemple aujourd'hui, que la
société General Motors va soumettre, la semaine prochaine,
à son conseil d'administration un projet d'investissement de $55
millions, compte tenu qu'elle obtienne 10% du métal chaud d'un complexe
d'aluminerie à Québec. Je risquerais de compromettre les
négociations de dire publiquement: Telle société va
soumettre un projet, la ssemaine prochaine, à son conseil
d'administration et tout semble réglé avec elle.
Ce que je vous dis, c'est que nous avons trois projets et ce ne
sont pas des projets en l'air avec des sociétés. Ces
sociétés, bien sûr, veulent savoir quel va être le
prix du métal chaud et, avant de le savoir, elles veulent avoir la
confirmation de l'étude de rentabilité qui est en cours. On sait
que l'étude de rentabilité ne fait, dans une large mesure, que
colliger des chiffres qui sont déjà terminés. Sachant que
l'aluminium se vend $0.39 aujourd'hui, elles ne veulent pas se faire dire que
l'aluminium de Saint-Augustin va coûter $0.84. C'est évident
qu'elles n'investiront pas $35 millions, si l'aluminium coûte deux fois
le prix international. Mais, s'il semble que le projet est sain et qu'il arrive
avec un prix compétitif, là je pense qu'on va avoir des
engagements fermes.
Ce que je veux vous dire, c'est qu'il n'y aura pas un sou de
dépensé dans la terre tant que l'ensemble du complexe pas
uniquement l'usine d'électrolyse n'aura pas été
réglé à notre satisfaction.
M. Morin: Je vais dire une chose au ministre. S'il peut, lorsque
le dossier sera rendu public, nous rassurer sur la transformation sur place de
l'aluminium de première fusion...
M. Saint-Pierre: Sauf pour la SGF, au départ. Sans cela,
c'est...
M. Morin: Encore là, il faudrait des détails. M.
Saint-Pierre: Oui.
M. Morin: S'il peut nous démontrer que nous ne perdrons
pas d'une main ce que nous avons donné de l'autre, autrement dit, s'il
peut nous démontrer que les pertes en taxes pour le Québec ou
encore...
M. Saint-Pierre: C'est un manque à gagner; ce ne sont pas
des pertes.
M. Morin: Un manque à gagner, si vous le
préférez. Je veux bien utiliser une expression plus exacte, mais
le ministre a compris ce que je voulais dire.
S'il peut nous démontrer aussi qu'il n'y a pas une subvention
outrancière dans les tarifs préférentiels accordés
par l'Hydro-Québec, s'il peut nous démontrer que ce grand
complexe ne viendra pas empêcher le développement des autres
entreprises d'aluminium au Québec, alors je pense qu'il aura notre appui
et, d'ailleurs, il aura l'appui de tous les Québécois. Mais nous
n'en sommes pas là. Il y a beaucoup de "si", de conditions dans ce que
je viens de dire et le ministre comprendra, comme il l'a dit lui-même, il
l'a admis à l'instant, qu'on ne peut pas lui donner un chèque en
blanc là-dessus. C'est notre tâche de nous assurer que les
conditions sont raisonnables et que l'ensemble s'inscrit dans une perspective
de développement du Québec par les Québécois.
M. Saint-Pierre: M. le Président, vous me permettrez de
dire que je suis extrêmement confiant d'être capable de vous donner
toutes les garanties sur les quatre points que vous avez soulevés.
M. Morin: Bon! Cela étant, le ministre ne conviendrait-il
pas qu'il serait utile qu'une commission parlementaire se penche sur le contrat
de gérance qui interviendra entre la SGF et National South Wire?
M. Saint-Pierre: On voit que nous, avec la SGF, on ne fait pas
uniquement des structures; on passe à l'action. Je pense qu'il est
normal, une fois par année, je l'ai dit et j'insiste... On n'a pas eu
besoin de demandes de l'Opposition pour le faire; cette année, ce sera
vers la fin de mai; je pense qu'on tente de fixer les dates avec l'Opposition.
Donc, nous allons avoir une commission parlementaire qui va faire venir
à la barre des témoins les cadres supérieurs de la SGF.
Là, on pose toutes les questions sur toutes les transactions de la SGF.
Je pense qu'il faut faire au moins confiance à la SGF.
Vous savez, je n'ai pas l'enthousiasme fou de certains des vôtres
pour les sociétés d'Etat, bien que je lui fasse très
confiance, mais le moins qu'on peut faire, c'est de leur faire confiance qu'ils
sont capables de justifier les gestes qu'ils posent. Une fois par année,
cela me paraît très convenable que les parlementaires posent
toutes les questions
qu'ils veulent sur tous les gestes que la Société
générale de financement aurait pu poser dans l'année. Si
la commission parlementaire veut exprimer publiquement qu'elle a des
réserves tellement fortes qu'elle retire la confiance qu'elle avait dans
ses dirigeants, nous prendrons les mesures appropriées.
M. Morin: Est-ce que le ministre, dans les documents qu'il rendra
publics, aurait l'obligeance de calculer, année par année, la
subvention que va comporter le tarif préférentiel
d'électricité qui sera accordé, soit à la SGF, soit
à la National South Wire? Est-ce que ce sera un élément du
dossier? Est-ce que ce sera chiffré?
M. Saint-Pierre: Oui.
M. Morin: Le ministre repond affirmativement?
M. Saint-Pierre: Oui.
M. Morin: Bien! Je voudrais une précision. Est-ce que dans
vos projets il s'agit de 150,000 ou de 250,000 tonnes de production, à
l'heure actuelle?
M. Saint-Pierre: 250,000 tonnes. M. Morin: Le projet n'a
pas changé M. Saint-Pierre: II n'a jamais changé.
M. Morin: Je voudrais aussi peut-être faire remarquer au
ministre que dans vingt ans, lorsqu'il faudra moderniser les entreprises, il se
posera certains problèmes. Par exemple, aujourd'hui, l'Alcan est aux
prises, vous le savez, avec un problème de modernisation de ses
entreprises, de ses "pot lines", et elle ne peut le faire qu'à
même ses profits accumulés. A moins qu'elle ne refinance à
nouveau, mais, normalement, elle ferait cela à même ses profits
accumulés. Ce qui nous inquiète dans le projet du ministre
je le lui signale en passant c'est que la SGF n'aura pas de profits
accumulés, à ce moment, ou si peu que les problèmes de
modernisation vont être considérables. Vous allez risquer de vous
trouver, dans vingt ans, avec une usine qui demandera à être
modernisée complètement, donc qui demandera de nouveaux
investissements. Je me pose la question de savoir si ce n'est pas un aspect qui
doit être fouillé plus avant.
M. Saint-Pierre: Non, M. le Président, parce qu'il y a une
autre façon de regarder cela. Oublions le petit million pour M.
Parizeau, mais la façon même que ces projets...
M. Morin: Si je comprends bien, c'est pour répondre
à la critique de Parizeau que vous avez décidé
d'investir.
M. Saint-Pierre: Non, c'est que je trouve l'argument simpliste
parce qu'on tente de faire croire aux Québécois que la SGF va
prendre une aluminerie, mais qu' elle ne fera pas de profit. Evidemment, elle
ne fait pas de profit parce qu'elle n'investit pas. Je vais la faire investir
puis elle va faire des profits supérieurs à toutes les
entreprises canadiennes.
Non, il y a une autre façon de regarder cela. Etant donné
la façon dont nous avons conçu les coûts de transfert, le
prix coûtant incluant toutes les charges financières et autres, si
on peut voir qu'il n'y a pas de profit, il faut voir aussi qu'il n'y a pas de
perte non plus. Donc, après vingt ans, sans avoir investi, on se
retrouve avec et je maintiens encore qu'une usine
d'électrolysaqui a vingt ans d'existence, on a à peine
touché peut-être à la moitié de sa vie utile, au
minimum. Une usine qui ne nous aura rien coûté et qui y aura une
valeur si je prenais votre argument de tantôt de
remplacement qui dépassera beaucoup $400 millions. Peut-être qu'il
faudra faire des modernisations, mais il faut se rappeler qu'on n'aura rien
investi, qu'on aura, dans l'avoir des actionnaires, au moins les $400 millions
que cela vaut là-bas. Là, peut-être qu'il sera
nécessaire pour la SGF, qui sera propriétaire à 100% de
l'affaire... Au bout de vingt ans, je vous rappelle qu'il n'y a aucune
obligation pour la SGF de continuer l'entente avec les partenaires.
C'est-à-dire qu'au bout de vingt ans, à supposer que notre prix
de transfert avec nos partenaires qui ont rendu possible le projet était
66% du prix international, le lendemain matin, on peut dire aux gens: Nous
regrettons, mais nous,... Parce que, vingt ans, ce n'est plus un prix de
transfert. C'est pour cela que nous avons réduit la période
d'amortissement de 30 à 20 ans. C'est-à-dire qu'après
vingt ans, c'est au prix international qu'on vend le métal chaud
à ceux qui sont établis là. La seule chose qu'on leur
donne, c'est un droit de premier refus sur les quantités et les prix.
C'est-à-dire qu'avant de vendre 100,000 tonnes à la France, en
lingots, théoriquement à un prix de $1 la livre, dans vingt ans
d'ici, nos partenaires cela me paraît très normal
auraient un droit de premier refus, au même prix, évidemment, puis
aux mêmes conditions que les autres.
M. Morin: M. le Président, le ministre n'a peut-être
pas touché à un point que j'ai soulevé qui est
celui...
M. Saint-Pierre: ...des entretiens.
M. Morin: Oui.
M. Saint-Pierre: Nous avons eu des entretiens, je le
répète, avec M. Leman et avec d'autres personnes, comme nous en
avons constamment, à tous les jours, avec bien des partenaires.
Ces entretiens visaient, d'une part, à ce que l'Alcan nous fasse
part de ses difficultés ou de ses problèmes, et, d'autre part,
pour nous, de nous permettre de voir jusqu'à quel point l'Alcan pourrait
réagir, d'une part, à une usine d'électrolyse mais,
d'autre part, à l'idée que nous avions d'une transformation
poussée.
Devant un non qui semblait bien justifié dans
le cas de l'Alcan, nous sommes allés voir d'autres points.
Maintenant, cela me paraît inconcevable qu'une fois le projet
terminé avec des partenaires j'aille demander la permission ou dire
à l'Alcan: Seriez-vous intéressés alors que vous ne
l'étiez pas il y a six mois? J'ai bien confiance à l'Alcan mais
mon expérience dans d'autres secteurs m'a appris qu'à l'occasion
des gens montrent de l'intérêt non pas pour réaliser le
projet mais pour s'assurer qu'il ne soit jamais réalisé.
Vous savez qu'il y a ça qu'il ne faut jamais perdre de vue. Il y
a des gens, aujourd'hui, qui expriment peut-être un intérêt
pour certains secteurs mais il faut bien juger des motifs qui les poussent
à exprimer un intérêt. Des fois, c'est pour s'assurer qu'il
ne se passe rien là-dedans.
M. Morin: Est-ce que vous croyez que c'est l'attitude de l'Alcan
que d'essayer d'empêcher...
M. Saint-Pierre: Non. Je ne crois pas...
M. Morin: ...qu'il se fasse tout autre développement?
M. Saint-Pierre: Non. Je n'ai pas dit que c'était
l'attitude de l'Alcan. Mais il me semble que ce ne serait pas normal pour le
gouvernement qu'à chaque fois qu'on a un projet d'investissement qui
implique le secteur privé on aille demander et montrer aux yeux de tous
les gens qui sont dans ce secteur nos intentions. De la même
façon, avec l'Alcan nous examinons ce que le gouvernement peut faire
pour l'aider parce qu'on voudrait aussi l'aider, dans la région du
Saguenay-Lac-Saint-Jean, dans ce processus de modernisation.
Nous avons signé, avec le gouvernement fédéral, des
ententes auxiliaires qui, au niveau du secteur manufacturier, nous permettent
de mettre la main sur des sommes importantes. Il va falloir le faire. On ne
peut pas le faire dans les nuages. Il va falloir le faire avec le secteur
manufacturier. Peut-être que là il y a des projets qu'on pourrait
faire avec l'Alcan. Bien sûr, quand on va être sur la fin de cela
avec l'Alcan, on ne prendra pas ça pour aller le montrer à tous
ceux qui sont dans le secteur de l'aluminium. Il y a une espèce de
confidentialité dans les dossiers qu'il nous paraît
nécessaire de respecter.
M. Morin: M. le Président, j'ai encore quelques questions
sur le projet d'aluminerie. Après ça, nous pourrons passer
à autre chose.
Pour ce qui est de l'emplacement, j'ai cru voir, à travers
diverses déclarations de ministres ou de députés, qu'il y
avait une certaine concurrence qui se faisait entre divers endroits de la
région de Québec, de la grande région de
Québec.
On a mentionné Beauport au départ, si ma mémoire
est bonne; ensuite, il a été question de Neuville et, ensuite, de
Saint-Augustin. Dans vos projets, tels qu'ils se trouvent actuellement, quel
est l'emplacement choisi? Est-ce le parc industriel de Saint-Augustin?
M. Saint-Pierre: M. le Président, l'annonce
prématurée de l'implantation possible d'une alu-minerie dans la
région de Québec aurait pu vraisemblablement, comme
conséquence, susciter une spéculation immobilière puisque
les espaces de terrains étaient de l'ordre de 1,500 acres.
Le terrain qui est contigu ou, enfin, très près du parc
industriel de Saint-Augustin étant un des terrains les plus favorables
pour un tel site, nous avons écrit une lettre que je transmettais au
président du Conseil des maires de la Communauté urbaine de
Québec, M. Gilles Lamontagne, le 24 mars dernier. Après avoir,
avec eux, examiné les possibilités, nous étions venus
à la conclusion qu'il serait souhaitable que des procédures en
expropriation soient amorcées dans les plus brefs délais, visant
les terrains qui ont déjà été identifiés.
Cette procédure devrait, par ailleurs, s'inscrire dans un projet
d'élargissement du parc industriel de la Communauté urbaine de
Québec.
Maintenant, encore une fois, vous me laisserez me rendre au
troisième but avant de vous dire ce qu'il a l'air, le troisième
but. Il n'y a pas de décision définitive, mais je dois admettre
que le site de la communauté urbaine paraît sûrement comme
un des plus favorables. Pour éviter de la spéculation, nous avons
demandé que, par expropriations, la communauté urbaine prenne
contrôle de ces sites ou en fige, en tout cas, la valeur
ajoutée.
M. Morin: Est-ce que le ministre pourrait déposer cette
lettre? Est-ce possible?
M. Saint-Pierre: Je n'y vois pas d'intérêt.
M. Morin: Je sais qu'il en a lu plusieurs extraits. Bien, je
pense que l'Opposition y voit de l'intérêt, si cela ne lui fait
rien. Est-ce que le ministre peut rendre la lettre publique?
M. Saint-Pierre: Moi, je peux, mais ce n'est pas d'un
intérêt public très grand. Je ne sais pas pourquoi vous
voulez l'avoir. J'ai lu à peu près toute la lettre, mais, si vous
voulez avoir du papier, on va vous en donner.
M. Morin: Nous voulons avoir un dossier le plus complet possible,
pour ne rien cacher au ministre.
M. Saint-Pierre: Et c'est d'après cela que M. Taillon va
prendre position.
Une Voix: II est peut-être intéressé au
terrain.
M. Morin: Ecoutez, j'ai dit au ministre que nous pouvons
difficilement nous laisser mener par la main tant que nous n'aurons pas tous
les détails, tant qu'il n'aura pas rendu tout le dossier public.
M. Malouin: Attendez avant de porter un jugement.
M. Morin: Or, il évoque devant nous des bribes du dossier;
il serait donc normal que nous en
ayons connaissance. Est-ce que vous pouvez nous en faire faire une copie
de cette lettre?
M. Saint-Pierre: Si vous voulez avoir des succès sur le
plan électoral plus importants que la dernière fois, il faudrait
que M. Taillon démontre plus d'intérêt pour la croissance
économique de la région de Québec.
M. Morin: M. le Président, laissons les questions
électorales de côté. Cela a peu à voir avec le
projet. Du moins, jusqu'ici j'ai tenu pour acquis que...
M. Saint-Pierre: Avec le projet, cela n'a rien à voir.
M. Morin: ... ce n'était pas un projet
électoral.
M. Saint-Pierre: Non, sûrement. Mais les
déclarations de M. Taillon ont beaucoup à voir avec l'aspect
électoral du dossier.
M. Morin: Je ne le pense pas.
M. Saint-Pierre: Là, comme ailleurs, il n'est pas sur la
bonne trace.
M. Morin: Je pense, au contraire, que M. Taillon fait preuve de
la plus grande objectivité possible, parce que, s'il prenait la pente
facile, il dirait: C'est excellent pour la région de Québec;
donc, pas de problèmes, on est en faveur.
M. Saint-Pierre: II prend l'autre pente; il dit que c'est mauvais
pour la région de Québec parce que l'on donne
l'électricité.
M. Morin: II dit qu'il s'interroge sur l'opportunité de
cet investissement dans la région de Québec, compte tenu de
l'ensemble de l'état de l'économie du Québec. C'est une
autre affaire. De toute façon, M. Taillon n'est pas là pour
interroger le ministre. S'il le veut, je peux l'inviter à venir cet
après-midi, mais je pense que les membres de la commission parlementaire
ne sont pas intéressés à ce qu'il vienne.
Des Voix: Non.
M. Morin: M. le Président, à moins que le ministre
ne consente à ce que M. Taillon vienne à la commission, nous
allons cesser d'évoquer ses prises de position et nous allons nous
concentrer sur le projet lui-même.
Si j'ai bien compris le ministre, et sans lui demander exactement
où se trouvent les terrains qui vont être expropriés
parce que je comprends très bien la discrétion qui est
nécessaire dans les circonstances puis-je simplement lui demander
si les terrains sont immédiatement contigus au parc industriel?
M. Saint-Pierre: Pas immédiatement, mais enfin très
près. Je pense que ce sont des terrains qui pouvaient être acquis,
qui semblaient, après des discussions avec M. Dufour, de la
communauté urbaine, et d'autres, les 1,500 acres les plus
favorables.
C'est très près. C'était inclus dans le projet
original du parc industriel et dans les études qui avaient
été faites pour identifier son emplacement dans la
communauté urbaine.
M. Morin: Et ça pourrait donc, sans entrer encore dans
tous les détails, si ce n'est pas contigu, se trouver à peu
près à quelle distance du parc industriel?
M. Saint-Pierre: En pieds ou en mètres?
M. Morin: En pieds ou en mètres, au choix du ministre.
Je ne demande pas une distance exacte; de quel ordre est-ce?
M. Saint-Pierre: L'ordre de grandeur, je ne le sais pas;
peut-être un demi-mille au plus,quelque chose comme ça.
M. Morin: Un demi-mille au plus.
M. Saint-Pierre: Un demi-mille, un mille au plus. Assez pour
être intégré à tous les services du parc.
M. Morin: Oui, je vois. Maintenant, je voudrais poser deux ou
trois questions au ministre sur les origines du projet. Il se souviendra qu'il
y a un an ou deux la Communauté urbaine de Québec avait
été mêlée à un projet semblable d'aluminerie.
J'aimerais lui demander ce qu'il y a de commun entre ce projet d'aluminerie de
la CUQ et celui dont il nous fait part maintenant?
M. Saint-Pierre: Evidemment, je pense bien que les 58
commissariats industriels du Québec ont peut-être parlé
à quelqu'un d'une compagnie d'aluminium, un jour ou l'autre dans leur
existence, mais le projet que nous avons devant nous a germé, a
été articulé comme concept essentiellement et presque
à 100% au ministère de l'Industrie et du Commerce, comme
idée. Il a été exploré avec des compagnies par le
ministère de l'Industrie et du Commerce exclusivement. Il s'est
précisé avec la compagnie National South Wire exclusivement par
le ministère de l'Industrie et du Commerce. Contrairement aux
affirmations qu'on retrouve dans les journaux du Québec, s'il n'en avait
été que de la compagnie, il est possible, chiffres à
l'appui, que d'autres sites du Québec auraient été
retenus, présentant certains avantages au niveau de l'alimentation
électrique. Le gouvernement du Québec, pour des
considérations de politique régionale, a demandé
expressément que le projet soit amené dans la région
immédiate du Québec métropolitain.
Alors, contrairement à ce que certains affirment, ce n'est pas
nous qui amenons des projets à
Bécancour. A l'occasion, et assez souvent, c'est nous qui sortons
des projets de Bécancour pour les amener dans des régions qui,
à notre avis, en ont plus besoin que Bécancour, dans une
conjoncture donnée, soit sur le plan sectoriel ou soit dans le
temps.
M. Morin: A vrai dire, Bécancour étant dans
l'état où il se trouve...
M. Saint-Pierre: II y a beaucoup d'activité à
Bécancour. Vous y êtes allé récemment?
M. Morin: Non, j'avoue que, depuis six mois, je n'ai pas
passé...
M. Saint-Pierre: II y a beaucoup d'activité. C'est un
véritable chantier de construction.
M. Morin: Nous allons justement en parler à un autre
moment de l'étude des crédits. Est-ce que je peux demander au
ministre, étant donné la réponse qu'il vient de me donner,
ce qu'il est advenu du projet de la CUQ qui, à ma connaissance,
était très avancé?
M. Saint-Pierre: Ce n'était pas un projet trop trop
sérieux. Il n'y a jamais eu de projet. Vous savez, un Japonais peut
aller voir M. Trottier et dire: Moi, j'aimerais avoir une aluminerie. Cela ne
veut pas dire que c'est un projet sérieux. Nous, des gens comme cela, si
on vous donnait cela dans les journaux, à tous les jours il y aurait
2,000 projets qu'on pourrait annoncer.
M. Morin: M. le ministre, je ne voudrais pas insister mais,
à ma connaissance, les prospects, comme on dit, les suspects comme
disait le sous-ministre tout à l'heure, étaient sérieux et
je pense même qu'on avait déjà choisi l'emplacement dans la
région de Québec. Est-ce que le ministre est au courant de
cela?
M. Saint-Pierre: Pas à notre connaissance. C'était
un projet tellement important puis... Pas à notre connaissance, on
n'était pas au courant de cela.
M. Morin: Vous n'êtes pas au courant des projets de la CUQ
dans le domaine de l'aluminerie au Québec?
M. Saint-Pierre: Non, je ne sais pas si elle a des secrets pour
nous, mais nous ne sommes pas au courant de ce projet. Au moment où nous
avons dit à la compagnie: Ce n'est pas telle région, cela va
être la région de Québec, là, bien sûr, nous
et pas elle, nous avons fait entrer dans le coup la Communauté urbaine
de Québec. C'est à ce seul moment. Je ne lui en fait pas de
reproche, mais autant nous avons eu une très bonne collaboration de la
Communauté urbaine pour cette expropriation des terrains, autant, je
pense bien, elle-même, avec modestie, doit admettre que sa contribution
pour définir le projet jusqu'ici, pour le rendre au stade où il
est actuellement, est assez marginale.
M. Morin: Une dernière question, je vois que le temps a
passé vite, M. le Président, et que vous voulez, d'après
ce que vous m'avez dit, ajourner à midi. Est-ce que le dossier complet
qui nous sera soumis par le ministre éventuellement comportera
également des calculs sur les taxes qui ne seront pas perçues par
le Québec, étant donné la structure qui a
été adoptée par le gouvernement pour ce projet?
M. Saint-Pierre: Vous m'avez déjà posé la
question, j'ai répondu oui.
M. Morin: Je n'étais pas sûr que le ministre ait
répondu à ma question.
M. Saint-Pierre: Ah! oui, j'ai répondu à la
question.
M. Morin: Donc, il y aura des calculs sur les taux
d'électricité, sur les taxes. Nous aurons un dossier complet.
M. Saint-Pierre: Les taxes dans les deux sens, le manque à
gagner possible à cause de la structure corporative
adoptée...
M. Morin: C'est cela.
M. Saint-Pierre: ... avec tous les avantages que ceci implique
pour le Québec.
Cependant, on se rappelle que l'impôt sur les
sociétés est perçu dans une très forte proportion
par le gouvernement fédéral. Mais il y aurait l'autre
côté de la médaille parce qu'il y a toujours deux
côtés à une médaille ce sont les taxes
qu'effectivement le gouvernement fédéral va percevoir tant des
compagnies que des individus qui vont travailler dans le projet. C'est cela que
je vous ai donné. C'est d'un ordre de grandeur de $100 millions par
année, cumulativement, pour chaque année du projet.
On a vérifié qu'à aucune année du projet on
ne sera, si vous voulez, déficitaire.
M. Morin: $100 millions c'est le total cumulatif de toute
l'affaire? Sur combien d'années cela?
M. Saint-Pierre: C'est cela. Sur la vie du projet, sur les 20
ans.
M. Morin: Les 20 ans.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Alors la commission suspend
ses travaux jusqu'à quatre heures cet après-midi, après la
période des questions.
M. Morin: Après l'Assemblée?
Le Président (M. Houde, Limoilou): Oui, après la
période des questions.
(Suspension de la séance à 11 h 59)
Reprise de la séance à 16 h 43
M. Houde, Limoilou (président de la commission permanente de
l'industrie et du commerce, du tourisme, de la chasse et de la pêche):
A l'ordre, messieurs!
Les membres de la commission cet après-midi sont les suivants: M.
Bellemare (Johnson); M. Cadieux (Beauharnois); M. Côté (Matane) M.
Denis (Berthier); M. Dufour (Vanier); M. Lachance (Mille-Iles); M. Lapointe
(Laurentides-Labelle); M. Bédard (Chicoutimi) remplace M. Lessard
(Saguenay); M. Déziel (Saint-François) remplace M. Malouin
(Drummond); M. Marchand (Laurier); M. Morin (Sauvé); M. Samson
(Rouyn-Noranda); M. Saint-Pierre (Chambly).
Le ministre de l'Industrie et du Commerce.
M. Saint-Pierre: Avant d'abandonner le dossier de l'aluminerie,
vous me permettrez peut-être une brève remarque pour
déplorer la guerre de mots qui semble s'annoncer entre les dirigeants de
la compagnie Alcan Aluminium et le gouvernement du Québec sur ce
projet.
J'ai pris con naissance, sur l'heure du dîner, des rapports
publiés dans le Soleil du jeudi 8 mai 1975, donnant suite à la
conférence que M. Leman donnait hier matin au Cercle de presse de
Chicoutimi, de même que d'une dépêche de la Presse
canadienne au sujet du même incident.
Je l'ai dit ce matin. Vous me permettrez de le répéter. La
compagnie Alcan Aluminium qui a son siège social à
Montréal est sûrement une des compagnies pour lesquelles nous
avons à la fois le plus de fierté et le plus d'attachement. C'est
une compagnie qui, traditionnellement, a montré beaucoup d'ouverture en
matière de relations de travail, en matière d'innovation et en
matière de dynamisme. C'est une compagnie dont la taille, sur le plan
international, apporte au Canada et au Québec, une très forte
réputation.
Durant toute l'année, j'ai parcouru le Québec pour
rechercher constamment un plus grand engagement des Québécois
dans le secteur économique, il est difficile de trouver des exemples
plus frappants à proposer aux jeunes Québécois que celui
de M. Leman lui-même qui, après une longue carrière au sein
de l'Alcan Aluminium a atteint le sommet qu'on peut atteindre dans le secteur
industriel, c'est-à-dire la présidence d'une compagnie aussi
complexe. Nul doute que la compétence, le dynamisme, le travail, la
motivation de M. Léman pourraient à juste titre être
donnés en exemple à l'ensemble des Québécois que
j'ai tenté d'intéresser au monde des affaires.
Bien sûr, mes connaissances de l'industrie de l'aluminium sont
fort modestes et fort limitées comparées à celles de M.
Leman. Elles sont peut-être de zéro comme il le disait
lui-même, je ne sais pas et je me soumets bien volontiers au jugement de
n'importe qui qui veut juger un homme public.
Le mandat et la longue carrière de M. Leman l'autorisent
sûrement à parler avec beaucoup d'autorité de tout ce qui
touche l'industrie de l'aluminerie.
Quant à moi et à mes collaborateurs dans le dossier, je
pense que nous avons, dès le départ, tenté de donner le
meilleur de nos connaissances, de nos énergies pour les seuls
intérêts que nous avons servis dans ce dossier, à savoir
les intérêts de la province de Québec. Vous me permettrez,
en terminant, deux ou trois brefs commentaires pour tenter d'éviter,
malgré quelques rencontres, une incompréhension qui semble aller
en s'élargissant. Au sujet de la concurrence entre les deux projets, je
n'ai pas dit que le projet québécois ne viendra, en aucune
façon, concurrencer l'Alcan ou la Reynolds dans les décennies
à venir. J'ai simplement dit que, face à des changements,
particulièrement au niveau de l'industrie de l'automobile, toutes les
études que nous avons pu consulter ont laissé voir très
clairement un manque de production, une insuffisance de production face
à l'évolution des marchés, que cette insuffisance des
moyens de production laissait place à la construction, exigeait la
construction d'aluminerie et que, personnellement, je préférais
voir ces alumineries installées au Québec, qu'installées
dans d'autres pays du monde.
Egalement, la dépêche de la Presse canadienne mentionne que
l'Alcan n'est pas prête à s'engager à transformer 150,000
tonnes d'aluminium brut en produits finis ou semi-finis au Québec. C'est
pour cette raison que je connaissais, que le projet définitif ne fut pas
soumis à l'Alcan et que le gouvernement n'a pas approché l'Alcan
de façon sérieuse. Mais je pense que nous avons donné
à l'Alcan et à d'autres compagnies la chance et le
privilège si on peut l'appeler ainsi de participer avec
nous dans les premières discussions qui tentaient de mettre sur pied, au
Québec, un complexe de l'aluminerie. Je pense qu'il serait,
également, extrêmement faux et je n'y vois aucune raison
moi-même de dire et je cite encore la Presse canadienne: "que le
gouvernement flirte aussi avec les Arabes pour financer ce projet." C'est
dénué de tout fondement. Il n'y a aucun rapprochement avec les
faits. Les démarches, qui ont pu êire prises jusqu'ici au sujet du
financement, touchent essentiellement le marché canadien,
québécois et le marché américain. Avec
sincérité, moi-même, je pense qu'on ne peut accepter la
prémisse que rien ne doit se faire pour ne pas déranger le statu
quo. Je pense que, lorsqu'il y a des marchés à explorer, la
preuve en est les investissements spectaculaires que nous avons faits au
Québec depuis trois ou quatre ans. C'est justement pour changer le statu
quo parce qu'il y a des occasions qui se présentent et doivent
être exploitées. Je maintiens de nouveau que le projet que nous
tentons de mettre en branle correspond et sert très bien les
intérêts du Québec.
Personnellement, je ne crois pas qu'il déplacera et j'en
ai la conviction profonde des emplois d'Arvida pour les emmener à
Québec. Ce n'est pas le jeu que nous voulons jouer. Pour s'en
convaincre, on n'aura qu'à lire le dernier rapport annuel de l'Alcan
où on voit que l'Alcan si j'avais le rapport, je vous donnerais
le chiffre précis est obligée d'acheter, dans le moment,
des
quantités très considérables de lingots sur les
marchés internationaux. On le voit en toutes couleurs dans un graphique
que j'ai à la mémoire, mais que je n'ai pas devant moi, dans son
dernier rapport annuel. Les quantités d'achats sont même
supérieures à la capacité de notre usine que nous voulons
installer dans trois ans à Québec.
Un autre point, c'est qu'il me semble peu conforme à la
vérité de tenter de tirer des conclusions d'une conjoncture
actuelle que nous vivons dans le secteur de l'aluminium, où il peut y
avoir pour une courte période de temps, une surcapacité de
production par rapport à une implantation qui n'aura des effets que dans
trois ou quatre ans, c'est-à-dire lorsque l'usine sera
complétée. Et là, où la situation, d'après
l'avis de plusieurs experts, indiquera clairement un manque à gagner qui
a été chiffré par plus de deux millions de tonnes.
Ces propos étant terminés, j'espère, non pas comme
le disait le journaliste M. Roger Leroux, savoir qu'il nous faudra enterrer la
hache de guerre mais qu'il sera possible de voir ce projet dans la perspective,
à la fois de servir les intérêts de l'ensemble du
Québec et de son projet complémentaire à la croissance de
l'Alcan au Québec que nous, du ministère de l'Industrie et du
Commerce, souhaitons et auquel nous serions heureux d'apporter toute notre
contribution, qu'elle soit financière ou humaine.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Le député
de Chicoutimi.
M. Bédard (Chicoutimi): M. le Président, je n'ai pu
être présent auparavant à la commission, puisque
j'étais à la commission des transports, pour l'étude des
crédits. Je savais qu'on discutait quand même d'un projet, en
parlant d'aluminerie, qui est extrêmement important, du moins sur le
point des interrogations que la population de la région du
Saguenay-Lac-Saint-Jean se pose.
Le ministre a tenu à faire une petite mise au point, il a sans
doute remarqué que j'avais en main le contenu de la conférence de
presse qui a été donnée hier par M. Leman dans la
région du Saguenay-Lac-Saint-Jean. Je crois au moins comprendre un
changement d'attitude de la part du ministre... vous me permettez de finir?
...qui a affirmé qu'il n'avait jamais dit que la nouvelle alu-minerie,
à Québec, pourrait entrer en concurrence avec l'Alcan.
A une question que je lui posais le 1er mai 1975, il n'y a pas tellement
longtemps, la semaine dernière, à l'Assemblée nationale,
le ministre avait affirmé ceci, et je le cite textuellement: "Ceci dit,
je puis confirmer au député de Chicoutimi, comme je l'ai fait
d'ailleurs aux représentants des travailleurs de l'Alcan qu'il a
sûrement pu consulter lui-même, après les discussions que
j'ai eues avec les dirigeants de l'Alcan, que le projet ne vise aucunement des
marchés qui sont actuellement détenus par l'Alcan,
particulièrement à son usine d'Arvida".
Je pense qu'il était clair, dans l'esprit du ministre qu'il n'y
avait pas d'idée de concurrence en- tre rétablissement de ce
projet d'une aluminerie à Québec et le marché
présentement détenu par l'Alcan.
M. Saint-Pierre: Pour éclairer le député de
Chicoutimi, je précise à nouveau, les mots sont très
importants.
M. Bédard (Chicoutimi): J'aimerais bien.
M. Saint-Pierre: C'est évident que, théoriquement,
on pourrait dire que tout avocat, dans la province de Québec, est en
concurrence avec un autre avocat qui peut exercer dans la province de
Québec.
Je pense qu'il est également vrai de dire qu'un avocat qui est
établi à Sept-lles ne dessert pas les mêmes marchés
qu'un avocat qui est établi à Val-leyfield.
C'est dans ce sens que, compte tenu de nos partenaires et des
marchés qui sont visés, je maintiens de nouveau que l'aluminerie
que nous projetons à Québec ne vise pas les marchés
actuellement détenus par l'Alcan.
Cela ne veut pas dire que dans dix ans, il n'y aura pas un
vendeur...
M. Morin: Le parallèle est boiteux.
M. Saint-Pierre: Non, le parallèle n'est pas boiteux.
C'est évident que tous ceux qui sont dans l'industrie de l'aluminium
sont en concurrence les uns avec les autres.
Mais ce que j'ai tenté de prouver, c'est qu'il y avait un manque
de production prévisible et que les marchés que nous visions avec
le projet n'étaient pas ceux actuellement détenus par l'Alcan.
Peut-être que la meilleure preuve de ce manque à gagner, au niveau
de l'usine de l'électrolyse, se trouve à la page 12 du rapport
1974 de l'Alcan et j'y trouve moi-même... Au dernier chiffre en haut,
à la page 12 dans le graphique, on voit que l'achat de métal de
l'Alcan, en 1974, a été d'au moins 500,000 tonnes, alors que
notre capacité de production, ici, est de 250,000 tonnes.
On pourrait être malin et dire: Le moins que l'Alcan pourrait
faire, c'est d'acheter au moins la moitié de ce qu'elle fait
actuellement de l'usine du Québec, au lieu de l'acheter de
l'extérieur; je ne sais pas où elle l'achète actuellement.
Mais ce n'est pas notre but, parce que notre but, c'est de transformer
complètement le métal chaud en des produits finis ou
semi-finis.
Je vois encore la dépêche de la Presse canadienne
d'aujourd'hui qui dit: L'Alcan n'est pas prête à faire cela. Je ne
suis sûrement pas pour forcer l'Alcan à faire des choses qu'elle
n'est pas prête à faire. Elle a peut-être d'excellentes
raisons de ne pas le faire, mais j'ai des gens responsable qui sont prêts
à le faire. Je pense que, ce qu'ils veulent faire, c'est dans
l'intérêt des Québécois. Je ne suis pas lié
à l'Alcan, je ne sers pas les intérêts des actionnaires de
l'Alcan, je sers les intérêts des 6 millions de
Québécois. Je pense que je les sers en faisant cela.
M. Bédard (Chicoutimi): Si cela n'entre pas en
concurrence, comme vous le dites, parce que vous faites une distinction qui ne
m'apparaît pas...
M. Saint-Pierre: De marché.
M. Bédard (Chicoutimi): Oui, une distinction de
marché, mais si c'est vrai, si vous permettez...
M. Saint-Pierre: Un instant! Mais, à ce titre, M. le
député, il n'y aura pas un investissement dans votre
région, parce que c'est évident que la prochaine entreprise qu'on
va essayer de faire, dans le Saguenay-Lac-Saint-Jean, à partir du projet
dont vous voulez me parler tantôt de Saint-Félicien, c'est
évident que Saint-Félicien va être en concurrence avec
Price, avec Domtar, avec CIP. Si j'acceptais cette théorie qui a
été mise de l'avant, il n'y aurait rien qui se passerait dans le
Québec, parce que ce serait en concurrence avec ce qui existe
déjà.
M. Bédard (Chicoutimi): Effectivement...
M. Saint-Pierre: Notre raisonnement, c'est qu'on ne doit pas
encourager l'investissement dans les moyens de production, là où
il n'y a pas de marché, là où un investissement
résulte simplement en une concurrence tellement indue qu'elle cause
l'affaiblissement des marchés, une insécurité dans
l'emploi, une insécurité chez les actionnaires. Mais, là
où il y a un déficit dans les moyens de production, comme c'est
le cas dans le papier-journal, dans une perspective à long terme, je
pense que, tantôt, vous allez dire qu'on est bien justifié de
pousser de l'avant le projet de Saint-Félicien dans votre
région.
M. Bédard (Chicoutimi): Je ne conteste pas qu'il y ait
concurrence, même si vous aviez dit, à un moment donné, en
faisant la distinction des marchés qui sont visés par la nouvelle
aluminerie, qu'ils ne seraient pas ceux, occupés par l'Alcan,
présentement; je ne nie pas qu'il y ait concurrence. Au contraire, je
crois qu'il y aura une concurrence. C'est dans ce sens que, à un moment
donné, à l'Assemblée nationale, puisque vous l'admettez
qu'il y a une concurrence qui va s'établir, je vous demandais quelle
conséquence cela pourrait avoir pour la région du
Saguenay-Lac-Saint-Jean.
Vous m'avez dit, à ce moment: II n'y a aucun danger, aucune
conséquence nuisible, concernant des projets d'expansion dans d'autres
régions où l'Alcan est installée et,
particulièrement, au Saguenay-Lac-Saint-Jean. Cependant, je dois
remarquer que, dans sa conférence de presse, hier, le président,
M. Leman, a quand même affirmé que si le projet de I'aluminerie,
à Québec, réussit... Remarquez que je ne suis pas contre
le projet de la construction d'une aluminerie, à Québec, mais il
a très bien spécifié que, si le projet réussit, il
est, normalement c'est M. Leman qui s'exprimait envisageable
qu'on songe en parlant de l'Alcan, à prendre de l'expansion.
Il spécifiait ceci: "Dans ce cas, ce sont les industries
existantes qui en subiront les contrecoups et les régions où
elles sont implantées". C'est dans ce sens que je me dis: A qui vais-je
faire confiance? Au ministre de l'Industrie, qui essaie de rassurer la
population du Saguenay-Lac-Saint-Jean, et c'est son droit et son devoir, ou
encore à M. Leman, qui prétend peut-être, à juste
titre, avoir quand même certaines des connaissances, non seulement
peut-être, mais sûrement des connaissances aussi
élaborées que celles du ministre de l'Industrie et du Commerce,
concernant l'aluminium. Or, M. Leman nous dit que cela peut avoir des
conséquences et pour les régions où Alcan est
implantée, qu'il peut y avoir un contrecoup.
C'est tellement vrai que le ministre est au courant que récemment
l'Alcan avait annoncé des projets d'expansion dans la région. Il
est évident que lorsque M. Leman est allé tout
dernièrement, soit hier en l'occurrence, dans la région, on s'est
informé pour savoir quel sort serait fait à ces projets
d'expansion. Ce dernier a très clairement exprimé qu'il y avait
une remise en question de ce côté. Vous allez me dire...
M. Saint-Pierre: Ce n'est pas un interrogatoire, mais la
vérité a ses droits quand même. Je pense que le
député savait, ce n'est pas un secret de polichinelle, l'automne
dernier, avant même l'automne 1974, que l'Alcan, avant même
d'être au courant de la possibilité d'une aluminerie dans la
région de Québec, avait déjà commencé
je pense qu'en reprenant les journaux de la région, on pourrait en avoir
la preuve à mettre le frein à des investissements qui
démarraient. Elle l'a fait pour des raisons qui n'avaient rien à
voir au projet d'aluminerie qui tenait à des perspectives de croissances
de la vente de ses produits, et peut-être à une difficulté
de trouver, comme M. Leman le mentionne, les montants d'argent ou l'emprunt,
compte tenu du ratio d'avoir de ses actionnaires et de dettes à long
terme. Cela n'avait rien à voir avec I'aluminerie et cela avait
déjà été annulé ou remis à plus
tard.
Il ne s'agit pas d'invoquer que c'est hier que M. Leman a dit aux gens
de Chicoutimi: Vous n'aurez pas votre expansion, à cause de ce que le
gouvernement a fait à Québec...
M. Bédard (Chicoutimi): Non, il l'a dit bien avant.
Dès que vous avez annoncé votre projet d'aluminerie, à ce
moment vous permettez que je finisse il l'avait très
clairement dit dans une conférence de presse.
M. Saint-Pierre: II l'avait fait avant.
M. Bédard (Chicoutimi): D'ailleurs, j'avais posé la
question au ministre le 1er mai 1975, pour savoir quelle était sa
réaction, face à cette assertion de M. Leman. Le ministre m'avait
répondu, le 1er mai 1975 toujours... Ma question était la
suivante: Le ministre est-il au courant de la déclaration du
président de l'Alcan, M. Leman, qui a dit
très clairement que l'installation de ce projet d'aluminerie dans
la région de Québec pourrait avoir des effets sur de nouveaux
projets d'expansion qui avaient été déjà
annoncés, pour la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, par l'Alcan?
La réponse du ministre est la suivante. En l'occurrence, c'est
vous-même: M. le Président, il y a bien des choses, dans la
région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, qui ont été
écrites sur ce projet. Je peux simplement dire qu'ayant rencontré
le président de l'Alcan quelques jours après les
déclarations qu'on mentionne, celui-ci m'avait dit que les journalistes
l'avaient mal cité. Comme le dit le ministre: La vérité a
ses droits. Il ne semble pas qu'on l'ait si mal...
M. Saint-Pierre: Continuez. M. Leman m'a dit... Parce que vous
aviez pris cela à partir des journaux. Dans mon bureau, à
Montréal, M. Leman m'a dit: Les journalistes m'ont cité. Je n'ai
jamais dit qu'on avait annulé les projets à cause de votre
annonce d'un projet.
M. Bédard (Chicoutimi): Si je peux continuer, j'ai fait
une remarque, à la suite de votre réponse, en disant: On va
demander à M. Léman si c'est vrai qu'il vous l'a dit. Comme vous
l'avez dit tout à l'heure, la vérité a ses droits.
Il reste quand même une chose. M. Leman est venu tout
dernièrement dans la région et le message qu'il a donné
aux gens de la région du Saguenay-Lac-St-Jean n'est pas différent
de celui qu'il a donné le lendemain de la conférence de presse
que vous aviez tenue sur le futur projet d'aluminerie. Je comprendrai qu'on
puisse se poser la question, à savoir jusqu'à quel point il est
vrai que M. Leman a dit au ministre, en privé, qu'il avait
été mal cité, lorsqu'on voit qu'il n'a pas changé
son message, lors de sa dernière visite dans la région du
Saguenay-Lac-Saint-ean. Si c'était vrai qu'il vous avait dit cela
privément, il me semble que le message qu'il est venu livrer à la
région du Saguenay-Lac-Saint-Jean aurait été
différent de celui qu'il a donné hier, qui est exactement le
même que celui qu'il a donné lorsque vous avez annoncé
votre projet d'aluminerie à Québec.
M. Marchand: M. le Président, le ministre me
permettrait-il un mot, s'il vous plaît?
Je trouve extraordinaire de voir le député de Chicoutimi
défendre une multinationale. Remarquez que je suis en faveur des
multinationales. Mais, un groupement politique séparatiste qui combat
toujours les multinationales...
M. Bédard (Chicoutimi): II ne comprendra jamais rien,
lui!
M. Marchand: ... vient aujourd'hui défendre une
multinationale pour se faire un peu de capital politique parce que le
Québec a décidé de faire quelque chose dans ce domaine. A
sa place, j'aurais un peu honte.
M. Bédard (Chicoutimi): Moi, j'aurais beau- coup plus
honte de ne comprendre absolument rien au débat que nous tenons à
l'heure actuelle et c'est ce qui semble ressortir des remarques que vient de
faire le député de Laurier...
M. Marchand: C'est votre jugement, mais c'est ce qui ressort de
votre débat.
M. Bédard (Chicoutimi): ... et je vais vous prouver que
vous ne comprenez rien. M. le Président, je n'ai jamais dit que
j'étais pour ou contre...
Le Président (M. Houde, Limoilou): Vous allez demeurer sur
le même ton, si vous voulez...
M. Bédard (Chicoutimi): D'accord.
Le Président (M. Houde, Limoilou):... et, à ce
moment, cela sera plus agréable, cela ira mieux.
M. Bédard (Chicoutimi): J'ai bien pris garde de dire au
départ que je n'étais pas systématiquement contre le fait
qu'il y ait une nouvelle aluminerie à Québec. Je n'ai pas dit que
j'étais contre l'Alcan. Rien de semblable. Simplement, et c'est dans ce
sens que se situe ma préoccupation, je pense qu'étant
donné qu'on annonce un projet d'une telle envergure dans le
Québec, il est normal et le député de Chicoutimi
n'est pas le seul qui se pose des questions là-dessus qu'on
achemine les préoccupations de l'ensemble de la population du
Saguenay-Lac-Saint-Jean, qui se pose des questions et veut savoir quelles
seront les retombées sur la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean.
Cela va-t-il amener des pertes d'emplois? Cela va-t-il bloquer des projets
d'expansion? On est d'autant plus en mesure et on est d'autant plus
justifié de se poser la question qu'on est en face des
déclarations d'une compagnie qui est installée depuis longtemps
dans la régionl'Alcan qui, par la voix de son
président, fait certaines affirmations qui ne peuvent faire autrement
qu'être inquiétantes pour l'ensemble de la région lorsque
l'on sait le nombre de travailleurs qui sont affectés à ses
usines.
C'est dans ce sens que j'ai posé mes questions au ministre de
l'Industrie et du Commerce. D'ailleurs, dans la conférence de presse
qu'il a donnée, annonçant le projet, le ministre avait bien
spécifié certaines conditions, entre autres, et je le cite
textuellement: "En étudiant ces propositions, nous avons tenu compte
constamment de cinq facteurs. Premièrement, d'abord viser à
protéger les emplois des Québécois dans les alumineries
existantes... "il me semble que c'est clair" ...ce qui implique la recherche de
nouveaux marchés présentement non desservis par les alumineries
du Québec."
Je pense que c'est tout à fait normal de demander au ministre,
à l'heure actuelle, étant donné les récentes
déclarations du président de l'Alcan, s'il peut nous assurer
et sur quoi il se base pour le faire, s'il veut le faire que ce
projet de construction d'aluminerie à Québec n'aura pas pour
effet de diminuer les emplois dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean
et n'aura pas pour ef-
fet de bloquer certains projets d'expansion déjà
annoncés.
Je pense bien que je ne fais pas de politique partisane lorsque je pose
ces questions au ministre. Si ce n'est pas moi qui les lui pose, et s'il a
l'occasion de venir, en fin de semaine, dans la région, elles vont lui
être posées par les média d'information de toute
façon.
M. Saint-Pierre: M. le Président, pour les raisons que
j'ai mentionnées, comme il y a un déficit... je lis dans le
rapport de Openheimer de New York, que d'ici 1977, la demande mondiale sera de
près de 18 millions de tonnes métriques, contre une
capacité de production totale de 16,362,000 tonnes métriques,
laissant un écart d'un peu plus de 1,600,000 tonnes métriques.
Dans ce contexte, voyant que l'Alcan déjà achète 500,000
tonnes de métal par année, il me semble qu'il y a de la place
pour avoir un nouveau producteur qui devrait permettre une croissance
régulière tant chez les producteurs actuels que dans le projet
qui nous intéresse.
A ce titre, encore une fois, l'étude Openheimer prévoit
une croissance moyenne de la demande estimée à 8.7% par
annéetl'ici 1980. Elle fait état également de la hausse
très forte des prix de l'aluminum qui sont passés de $0.22 au
début de 1972 à $0.39 la livre en fin d'année 1974. Elle
mentionne tous les facteurs qui vont tendre à favoriser les
régions qui sont dotées de sources d'énergie, dans ce
processus de transformation, puisque la plupart des autres pays, n'ayant pas de
projets comme la baie James ou des projets qui sont à base de ressources
hydrauliques, se voient acculés à des coûts
d'énergie extrêmement élevés, et ceci donne donc un
avantage au Québec, un avantage dont peuvent à la fois profiter
la nouvelle aluminerie de la région de Québec et l'Alcan.
Vous faisiez tantôt état de certains liens entre la
décision de l'Alcan... Je ne voudrais pas faire un chassé
croisé, mais je vous réfère au rapport annuel de l'Alcan
en page 2. Je cite: "II semble que les besoins en capitaux pour l'entretien et
ia modernisation des installations existantes et pour l'expansion future soient
hors de proportion par rapport aux capitaux qui seront vraisemblablement
disponibles, surtout en période de récession. Un peu plus loin,
on voit la capacité de financer et de maintenir en marche des
installations neuves afin d'entreprendre des travaux d'expansion, si
modérés soient-ils est fortement mis en doute." C'est dans le
rapport du 29 janvier 1975. Un peu plus loin: "Comme il est impossible de
prévoir la durée, l'envergure du ralentissement
économique, nous sommes en voie de réduire notre production ainsi
que notre programme d'immobilisation, certains projets,
considérés comme prioritaires, étant mis au ralenti
jusqu'à nouvel ordre. Le 29 janvier 1975 cela a été
publié. Vous vous rappelez que ma conférence de presse pour le
projet était quand même à la mi-février ou vers le
25 février.
M. Bédard (Chicoutimi): C'est évident que ce n'est
pas facile de prendre une décision et d'évaluer avec certitude
toutes les situations. Quand vous parlez de la situation actuelle du
marché, dans votre conférence de presse et vous venez de
le répéter je crois vous avez fondé vos espoirs sur
une étude qui a été faite par la firme Openheimer de New
York indiquant que la demande va croître jusqu'en 1980 au rythme minimum
de 8.7% par année. Cependant, c'est clair que ce sont des
spécialistes en la matière et je pense que M. Leman est
également un spécialiste en la matière.
M. Saint-Pierre: Je le reconnais volontiers.
M. Bédard (Chicoutimi): II prétend, il l'a dit,
dans sa conférence de presse hier, que la situation du marché va
croître, pour les six ou sept prochaines années, entre 4% et 5% au
lieu de 8.7% par année, tel que dit par la firme Openheimer. C'est
évident que ça peut changer la situation.
M. Saint-Pierre: Non, ça ne peut pas changer la situation,
parce que, même avec les chiffres et peut-être M. Leman a,
sûrement, de bonnes hypothèses pour retenir ces chiffres
même à cela, lundi dernier, il n'y a pas très longtemps,
à Montréal, de bouche à bouche je suis certain que
si vous lui demandiez, il vous confirmerait ça M. Leman a
confirmé avec moi...
M. Bédard (Chicoutimi): Je commence à avoir peur de
ce que vous dites, de bouche à bouche, parce que...
M. Saint-Pierre: N'ayez pas peur.
M. Bédard (Chicoutimi): Après la réponse que
vous m'avez faite en Chambre, selon laquelle M. Leman avait été
mal cité, je m'aperçois qu'il n'a pas été mal
cité...
M. Saint-Pierre: Devant témoins. Non, non je
m'excuse...
M. Bédard (Chicoutimi): Son message est le même.
M. Saint-Pierre: Non, attendez, on parle de bien des choses dans
une journée.
M. Bédard (Chicoutimi): D'accord.
M. Saint-Pierre: Lundi dernier, M. Leman a admis avec moi, devant
des gens qui sont ici alentour, que c'était vrai qu'à long terme,
le monde, globalement, avait besoin de capacités additionnelles de
production.
M. Bédard (Chicoutimi): Cela, c'est clair qu'il y a un
besoin, mais c'est important de savoir le pourcentage du besoin et les
différences dans ce
pourcentage peuventquand même changer la situation du
marché. Vous admettrez au moins ça avec moi.
M. Saint-Pierre: Je vous ai dit qu'en 1977, ce qui est
bientôt, on ne sera pas capable de combler ça avec 8%, il y a
presque un besoin de 1,600,000 tonnes. Ce qu'on va jeter dans ça, ce
sont 250,000 tonnes. C'est vrai qu'il y a peut-être d'autres projets,
mais de moins en moins, parce qu'il n'y a pas grands endroits au monde
vous connaissez votre géographie assez pour ça qui ont les
avantages qu'a le Québec, au plan de l'énergie hydraulique.
Le projet de la baie James, c'est valable. En fait, je l'avoue bien
candidement, c'est son droit le plus absolu si je peux retrouver le
document ce qui ne plaît pas à M. Leman, je vais vous le
dire, il l'a dit lui-même, je vais vous citer ses paroles...
M. Bédard (Chicoutimi): II y a plusieurs choses qu'il
n'aime pas.
M. Saint-Pierre: Un instant, M. le Président, je l'ai ici.
Je vous cite le Soleil du vendredi, 14 mars 1975, dans lequel M. Leman a
clairement indiqué que les administrateurs s'inquiétaient,
sérieusement, sur l'attitude du gouvernement: "Ce qui nous
inquiète surtout, c'est ce principe qui veut que le gouvernement entre
en concurrence avec un de ses contribuables."
M. Morin: M. le Président, est-ce qu'il me serait permis
de nous résumer, à la suite de ce long débat qui dure
depuis ce matin, au sujet du projet d'aluminerie dans la région de
Québec. J'ai eu l'occasion déjà de le dire deux ou trois
fois au ministre, mais je voudrais, au terme de la discussion, qu'il soit bien
clair que l'Opposition n'a pas d'objection à un tel projet, si un
certain nombre de conditions sont remplies.
La première condition, c'est que le dossier doit être, le
plus rapidement possible, rendu public et qu'il doit être limpide. Je
veux dire que l'Opposition soit en mesure, à la lecture du dossier, de
se faire une idée exacte des répercussions, de toutes les
répercussions du projet sur l'économie québécoise.
Nous n'aurons pas d'objection au projet, je tiens à la
répéter, si la transformation se fait sur place, sauf dans la
mesure où une partie de la production, qui irait à la SGF, au
départ, pourrait peut-être n'être pas transformée sur
place, encore qu'il faudrait voir les projets exacts de la SGF au cours des
années qui viennent, pour nous faire une idée précise
là dessus.
Nous n'aurons pas d'objection non plus si la propriété de
la SGF est réelle et non pas fictive et non pas simplement un truc pour
éviter les taxes.
Nous n'aurons pas d'objection si la gérance n'est pas
entièrement entre des mains étrangères et si
l'intervention des Québécois dans le projet est réelle.
Pour cela, il nous faudra avoir les détails du projet, pour pouvoir en
juger.
Nous n'aurons pas d'objection si les profits de la SGF sont
réels, s'ils sont tels que le ministre les a décrits ce matin. Il
nous a décrit littéralement le Pérou. Nous attendons de
voir et le ministre ne nous en voudra pas d'attendre.
M. Saint-Pierre: Si vous êtes encore là dans cinq
ans, vous verrez.
M. Morin: J'espère que, dès les premières
années d'exploitation de ce projet, s'il se concrétise, les
promesses passeront les fleurs, passeront les bourgeons. Parce que, si on
devait être devant une déception au départ, je pense qu'il
ne faudrait pas vous surprendre si l'Opposition vous pose des questions en
Chambre là-dessus.
Nous n'aurons pas d'objection non plus s'il n'y a pas de
répercussions défavorables qui soient insupportables pour les
régions, comme mon collègue de Chicoutimi vient de le laisser
entendre.
Nous n'aurons pas d'objection non plus si le tarif
préférentiel qui sera accordé par HydroQuébec ne
correspond pas ou n'entraîne pas une subvention tout à fait
déraisonnable de la part.de la collectivité à une
entreprise étrangère.
Cela fait beaucoup de si. Je voudrais assurer le ministre, au terme de
cette étude, que nous allons suivre le dossier de très
près, que nous allons le suivre dans tous ses aspects, pour
éviter que ce projet ne constitue un marché de dupes.
Donc, M. le Président, nous pouvons peut-être passer
à moins que mon collègue de Chicoutimi ait autre chose à
ajouter encore sur l'alurninerie à un autre secteur.
Je vais être obligé de m'absenter pour aller rencontrer les
représentants de la CSD qui présentent au premier ministre et au
chef de l'Opposition leur premier manifeste aujourd'hui. Je prie le ministre et
ses collègues de m'en excuser. Le député de Chicoutimi, je
suis sûr, pourra fouiller, avec toute la compétence voulue, le
dossier de Saint-Félicien avec le ministre.
M. Bédard (Chicoutimi): Vous allez peut-être me
permettre...
M. Saint-Pierre: Est-ce que cela termine l'aluminerie? M. le
Président, puis-je suggérer...
M. Bédard (Chicoutimi): Me permettez-vous juste une
dernière question?
M. Saint-Pierre: Oui.
M. Bédard (Chicoutimi): Peut-être qu'elle a
été posée auparavant. C'était pour savoir si le
gouvernement ou le ministre, avant l'annonce publique du projet, par voie de
conférence de presse qui a été faite par le ministre,
avait communiqué avec l'Alcan à propos de ce projet?
M. Saint-Pierre: Non, M. le Président, je ne sers pas les
intérêts de l'Alcan, je sers l'intérêt des
Québécois.
M. Bédard (Chicoutimi): Ecoutez, vous n'avez pas la bonne
réponse. Quand vous avez communiqué avec South Wire, vous aviez
l'impression de servir l'intérêt des Québécois. Je
ne vois pas en quoi, communiquant avec l'Alcan, vous auriez eu l'impression de
ne pas servir les intérêts des Québécois.
M. Saint-Pierre: Alors, je vais vous poser une question. Pour
Saint-Félicien, est-ce que je vais aller me "peddler" à New York
et avec toutes les compagnies de papiers pour savoir si je peux avoir la
permission, pour Donohue, de faire un projet dans votre région?
M. Bédard (Chicoutimi): Saint-Félicien, on va en
parler tout à l'heure. Je ne vois pas pourquoi vous vous énervez
quand je vous pose cette question.
M. Saint-Pierre: Je ne m'énerve pas, mais ne me posez pas
des questions comme celles-là.
M. Bédard (Chicoutimi): Justement, je vous la pose la
question, parce que votre réponse ne tient pas debout.
M. Saint-Pierre: D'après vous, j'aurais dû demander
la permission de l'Alcan?
M. Bédard (Chicoutimi): Pas nécessairement. Je ne
vous ai pas dit que vous auriez dû...
M. Saint-Pierre: Ce n'est pas moi, un instant! Ce n'est pas moi
qui l'ai rendu public.
M. Bédard (Chicoutimi): Ecoutez. Si vous écoutiez
plus les questions, vous monteriez moins dans les rideaux. Je ne vous ai pas
dit que vous auriez dû consulter l'Alcan, ma question était la
suivante: Est-ce que, avant votre conférence de presse que vous avez
faite, annonçant le projet possible, futur, vous aviez communiqué
avec l'Alcan? Est-ce que vous aviez eu des discussions avec l'Alcan? C'est tout
simplement ce que je vous ai demandé.
M. Saint-Pierre: Non, M. le Président, pour la simple
raison que la divulgation de ce dossier n'est pas venue du gouvernement, d'une
façon officielle. La conférence de presse a suivi, de 48 heures,
la divulgation par certains journaux, à la suite d'une indication, ici,
dans la région de Québec. Je n'ai pas eu le temps. J'ai
monté la conférence de presse. Je n'ai pas eu le temps de
rencontrer l'Alcan, mais je pense que la conférence de presse a eu lieu
le vendredi et, le lundi suivant, j'ai rencontré l'Alcan.
M. Bédard (Chicoutimi): Je vais vous dire pourquoi je vous
pose la question maintenant.
C'est parce que, dans la réponse que vous m'avez faite, en
Chambre, le 1er mai 1975, vous aviez spécifié ceci,
textuellement:"Ce sont les accords que nous aurions été
prêts à faire, avec d'autres compagnies canadiennes, mais comme,
à l'époque, celles-ci se refusaient d'envisager un complexe
basé sur l'aluminium, avec un si haut degré de transformation,
nous avons dû aller de l'avant avec un partenaire qui, lui, était
prêt ce qui peut laisser supposer que vous avez communiqué
avec d'autres partenaires qui, eux autres, n'étaient pas prêts;
c'est pour cela que je vous ai posé la question à vivre
avec les exigences que nous formulions, exigences qui nous paraissaient
normales, compte tenu de l'avantage que le Québec pouvait avoir face
à d'autres implantations."
M. Saint-Pierre: M. le Président, si le
député avait été ici, ce matin, on a
déjà tout couvert cette question. J'ai mentionné que,
durant l'été 1974, j'ai rencontré les dirigeants de
l'Alcan, comme je rencontre des dirigeants de nombre d'entreprises,
constamment, au cours de l'année, durant cette discussion, il fut
question, à savoir si l'Alcan pouvait voir des effets néfastes si
une nouvelle aluminerie venait s'implanter au Québec. Je
répète ce qu'on a dit, ce matin. Je pourrais vous inviter
à regarder...
M. Bédard (Chicoutimi): Ce n'est pas nécessaire de
le répéter. Je pourrai lire le journal des Débats.
M. Saint-Pierre: Non, je veux dire que l'Alcan n'avait pas
d'objection à de nouvelles alumineries. A l'époque, nous avions
le projet d'Alcoa dans la tête et, a l'époque, M. Leman, avec
conviction m'a dit: Nous, nous ne sommes pas prêts à transformer,
à nous engager à transformer une quantité
appréciable de tonnage d'aluminium brut en produits finis ou semi-finis.
Il m'a dit cela durant l'été. Je pense que c'est en juillet ou en
août 1974. Je pense qu'il n'y a aucune contradiction avec la
déclaration que je vous ai faite. C'est d'autant plus confirmé
que, par la dépêche de la Presse canadienne, il semble que, hier
matin, M. Leman disait ce que je vous ai donné tantôt: "De plus,
l'Alcan n'est pas prête à s'engager à transformer 150,000
tonnes d'aluminium brut en produits finis ou semi-finis, au Québec."
Je n'en veux pas à l'Alcan. Ce n'est pas moi qui fais la prise de
décision à l'intérieur de l'Alcan. Elle est parfaitement
libre. C'est cela la libre entreprise. Je vais la défendre jusqu'au
bout. Elle est parfaitement libre de refuser de transformer en produits finis
ou semi-finis. Quand je lis le programme de votre parti, je ne suis pas certain
jusqu'à quel point elle serait encore libre demain, mais c'est un
problème qui ne se posera pas.
M. Bédard (Chicoutimi): Si vous arrêtiez
d'être partisan, peut-être que vous seriez passablement plus
convaincant.
M. Marchand: C'est cela que vous êtes venus faire ici, cet
après-midi, de la partisanerie politique.
M. Bédard (Chicoutimi): Vous seriez passablement plus
convaincant.
M. Saint-Pierre: M. le Président, n'étant pas
prêt, j'ai trouvé un partenaire qui, lui, était prêt
à cela. C'est cela le projet dont on discute depuis deux heures.
M. Bédard (Chicoutimi): Vous admettrez avec moi que
c'était normal que je pose...
M. Saint-Pierre: Pourquoi posez-vous cette question?
M. Bédard (Chicoutimi): Pourquoi? Pour avoir une
réponse. Pourquoi pose-t-on des questions, vous pensez? Vous admettrez
que j'avais bien raison de vous demander, suite à votre réponse,
au mois de mai 1975...
M. Saint-Pierre: Vous admettez que je vous ai dit la
vérité?
M. Bédard (Chicoutimi): Vous me faites votre
réponse, mais je constate, par exemple, que cela a l'air de très
bien aller dans toutes vos petites conversations que vous avez personnellement
avec M. Leman, mais quand cela arrive, par exemple, au niveau des
déclarations officielles, cela ne semble pas aller si bien que cela. A
un moment donné, on va se faire une idée jusqu'à quel
point l'une ou l'autre des parties est honnête dans ses
déclarations...
M. Saint-Pierre: Vous avez des termes durs.
M. Bédard (Chicoutimi): ... jusqu'à quel point
elles sont conformes, par rapport au supposé entretien privé
qu'elles ont ensemble. C'est dans ce sens.
M. Marchand: C'est dans le manuel du 1er mai.
M. Bédard (Chicoutimi): Le député de Laurier
n'a jamais rien compris au débat qui se passe, soit en Chambre, soit en
commission parlementaire...
M. Saint-Pierre: Mais, le député...
M. Bédard (Chicoutimi): Si le député de
Laurier veut intervenir, M. le Président, je n'y ai aucune objection. Je
peux lui donner un quart d'heure, s'il veut le faire intelligemment et sur le
sujet dont on parle.
M. Marchand: Une chose certaine, c'est que je ne vous comprends
pas, parce que vous êtes incompréhensible.
Le Président (M. Houde, Limoilou): A l'ordre!
M. Bédard (Chicoutimi): Le député de
Laurier, on peut le lire dans le journal des Débats, il n'a fait qu'une
chose depuis qu'il est élu, soit de petites interventions
"niaiseuses".
Le Président (M. Houde, Limoilou): A l'ordre! A l'ordre! A
l'ordre! l'honorable ministre.
M. Saint-Pierre: M. le Président, sur le programme 3,
élément 0-2, expansion des marchés, services
internationaux, on voit une croissance de 44% du budget, une addition de
$409,000. Dans le document que je vous ai transmis, on retrouve toutes les
explications essentiellement une augmentation de $414,000 pour les
activités décrites, en particulier...
M. Bédard (Chicoutimi): On est encore au programme 3,
élément 0-1...
M. Saint-Pierre: Non, on a voté le programme 3,
élément 0-I hier. Le programme 3, élément 0-2,
était le début, je m'excuse. Voyons, faites sortir le journal des
Débats.
M. Bédard (Chicoutimi): Non, je veux simplement savoir une
chose de la part du ministre. Il m'a dit tout à l'heure qu'une fois la
question de l'aluminerie réglée, le débat est clos
là-dessus, on passerait au projet Donohue...
M. Saint-Pierre: Non, je n'ai pas dit cela.
M. Bédard (Chicoutimi): Vous venez de dire cela tout
à l'heure qu'on va avoir à discuter du projet...
M. Saint-Pierre: J'ai dit qu'à la fin des crédits,
il va arriver un moment où on pourrait en discuter en parlant de
l'industrie du bois. J'imagine que cela pourrait être
l'élément 0-4, on l'a dans les crédits encore. Au
programme 3, élément 0-4, on va parler du secteur industriel, on
en parle justement, à la direction générale de
l'industrie.
M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce qu'on pourrait savoir d'une
façon très claire si cet élément a
été adopté, parce qu'il me semble que la question ou le
sujet que je voulais traiter, à savoir l'implantation d'un projet
à Saint-Félicien, aurait pu très bien se situer dans le
même programme que l'implantation d'une aluminerie. Il me semble que
c'est une suite logique.
M. Saint-Pierre: M. le Président, cela prouve
jusqu'à quel point...
M. Bédard (Chicoutimi): Cela l'aiderait peut-être...
En tout cas, si le ministre ne veut pas, d'accord, mais nous sommes souvent
obligés d'aller à d'autres commissions, n'étant que
six...
M. Saint-Pierre: Vous vous obligez.
M. Bédard (Chicoutimi): C'est un projet que le
ministre sait que j'ai à coeur de discuter avec lui. S'il veut
nous accommoder, tant mieux. S'il ne veut pas, je trouverai le moyen
d'être présent.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Vous pourrez en
discuter un petit peu plus loin dans un autre programme.
M. Saint-Pierre: Vous êtes chanceux d'être six, parce
que... Allez-y. M. le Président, je le mentionne, parce que cela prouve
à quel point cela nous amène, lorsqu'on tolère un petit
peu qu'on dépasse une ligne très précise. On avait fait le
programme 0-3, 0-1. Il restait cinq minutes. Le chef de l'Opposition a dit:
J'ai une question à poser. On a vu que la question était sur
l'aluminerie. J'ai dit: Si c'est le cas, attendons à demain matin.
Même à cela, l'aluminerie n'est pas réellement à
l'expansion des marchés. Le chef de l'Opposition...
M. Bédard (Chicoutimi): Cela ne nous amènera pas
dans un terrain trop marécageux. Je suis convaincu que le
ministre...
M. Saint-Pierre: D'accord.
Projet de Donohue à St-Félicien
M. Bédard (Chicoutimi): ...a hâte de discuter du
projet de Saint-Félicien. Je n'ai pas l'intention de faire un discours
partisan ou une entrée en matière partisane concernant ce projet
et le ministre le sait. A plusieurs occasions, à l'Assemblée
nationale, je lui ai posé des questions concernant ce projet. Je sais
que le ministre y est attaché d'une façon tout à fait
particulière, du moins je le présume, de même que tous les
députés de la région. Lorsque je lui avais posé une
question sur ce projet en date du 28 décembre I974, le ministre m'avait
informé qu'une décision se prendrait normalement avant le mois de
mars ou, au plus tard, durant le mois de mars.
Le ministre sait très bien que le projet Donohue est un projet
que la région et que la population de Saint-Félicien attendent
depuis plus de dix années, qui a fait l'objet de promesses au niveau
d'au moins trois ou quatre campagnes électorales et qui se doit de
connaître un dénouement, qu'il soit heureux ou malheureux. Mais,
à un moment donné, je pense que la population a raison de
ressentir une certaine frustration devant les remises durant une si longue
période de temps, devant les remises de décisions de mois en
mois, d'année en année, concernant ce projet.
Je voudrais savoir du ministre si, à l'heure actuelle, il est en
mesure de nous faire le point sur ce projet de Donohue à
Saint-Félicien. S'il n'a pu nous donner une réponse en mars, tel
qu'il nous l'avait promis, j'imagine qu'il y a eu des raisons spéciales
qui se sont présentées, des éléments nouveaux qui
se sont ajoutés. J'aimerais que le ministre nous fasse état de la
situation.
M. Saint-Pierre: M. le Président, je souligne qu'il n'y a
pas de montants prévus au budget du ministère de l'Industrie et
du Commerce pour le projet de Saint-Félicien. Brièvement, je vais
quand même...
M. Bédard (Chicoutimi): Je voulais...
M. Saint-Pierre: ... tenter de fournir les explications qui sont
données. Le projet, comme celui de l'aluminerie, et peut-être
encore plus celui de l'aluminerie, est dans sa dernière phase et nous en
serons à la prise de décision assez rapidement. C'est toujours
difficile dans ces projets de dire quand on en est à la dernière
décision; il y a constamment des choix qui se font, des engagements qui
sont pris.
Depuis deux ou trois mois, nous avons tenté de régler
quelques problèmes et j'ai énuméré trois
problèmes. Un premier problème touchait l'exploitation
forestière et toutes les ententes pouvant relier les scieries à
la société Donohue pour approvisionner l'usine dans le contexte
d'un aménagement intégré. Le problème en
étant là, cela signifie que l'usine sera normalement
approvisionnée exclusivement de copeaux et que les cunits de pieds de
bois, après avoir été débités, seront
passés à des scieries dont une appartient à Donohue dans
le moment et les autres sont des scieries de la région. Il s'agissait
d'avoir un mécanisme d'entente qui permettait aux scieries de toucher
à la fois aux bois du sud et aux bois du nord, les concessions du nord,
et en même temps de donner à la société Donohue
quelques garanties d'approvisionnement en copeaux sur une longue période
de temps.
Un deuxième point qui a fait l'objet de discussions, c'est la
question des partenaires financiers dans le projet. C'est un projet de
pâtes chimiques. Un partenaire n'est pas encore identifié, mais
c'est une compagnie canadienne, qui avait accepté de participer au
projet sur une base minoritaire. Des discussions ont eu lieu avec ces gens
menant à une entente dont la signature n'est pas encore faite, mais on
en est à la phase presque terminale d'une entente entre actionnaires. Il
y aura deux actionnaires dans le projet.
Un troisième point touchait les discussions...
M. Bédard (Chicoutimi): Quels sont les deux
actionnaires?
M. Saint-Pierre: Je ne peux pas les les mentionner.
M. Bédard (Chicoutimi): Ah bon!
M. Saint-Pierre: II y a un actionnaire privé et une
compagnie canadienne privée qui n'a pas encore été
dévoilée.
Un troisième point touchait les subventions possibles dont
pouvait bénéficier la région du Saguenay selon les termes
des récentes ententes auxiliaires. Là aussi, des discussions ont
eu lieu avec le gouvernement fédéral. Ce sont ces trois points
qui sont passablement avancés et que nous tentons d'amener à
terme pour faire démarrer le pro-
jet par la suite. L'étude de rentabilité, en soi, est
complétée. Il nous reste également à mesurer avec
un peu plus de précision les coûts de construction, compte tenu
des fluctuations de productivité dans l'industrie
québécoise de la construction au cours de la dernière
année.
M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce exact que les promoteurs du
projet de Saint-Félicien exigigent $50,000 des gouvernements du
gouvernement à l'heure actuelle on parle des gouvernements, pour,
une fois pour toutes, concrétiser ce projet.
M. Saint-Pierre: Personne n'a posé d'exigences semblables.
Le seul problème est que, dans l'état actuel des choses et compte
tenu des études terminées touchant le coût d'exploitation,
il semble bien que, sans une subvention, le projet ne saurait intéresser
qui que ce soit, que ce soit le secteur privé ou le secteur
gouvernemental, bien qu'il sera fait à contrôle majoritaire par la
société Donohue qui, à l'occasion, par cette transaction,
appartiendrait à plus de 50% au gouvernement du Québec alors
qu'actuellement ce n'est qu'à 43% qu'une subvention est requise.
Il n'y a pas eu d'exigences. En parachevant ces dossiers, nous sommes
à déterminer le niveau de subvention raisonnable qui pourrait
donner un retour sur l'investissement raisonnable et à tenter de
protéger toutes les parties intéressées.
M. Bédard (Chicoutimi): Le ministre sait qu'à
maintes reprises les petites scieries établies dans la région ont
exprimé des inquiétudes concernant l'implantation de ce projet;
elles se sont posé des questions pour savoir quelles en seraient les
retombées financières sur leur propre commerce.
Le ministre croit-il que les nouvelles demandes de Donohue en vue
d'avoir une déchiqueteuse et d'avoir l'établissement d'une
scierie également auront pour conséquence de mettre en danger des
petites scieries déjà existantes qui ne seraient pas
incorporées au projet?
M. Saint-Pierre: Je ne le crois pas. J'ai rencontré les
représentants des scieries il y a déjà environ un mois, un
mois et demi, et, à l'époque, la présence de la
déchiqueteuse et la présence d'une usine de 100,000 cunits de
bois de sciage étaient connues et ce n'est pas ce point qui semblait
présenter les plus grandes difficultés, d'autant plus que les
scieries et Donohue ont également accepté Donohue
était peut-être, au départ, un peu réfractaire
l'idée d'une nouvelle société d'exploitation
forestière où les scieries seraient présentes et où
cela serait une société dont le contrôle majoritaire des
actions serait entre les mains de Donohue, mais qui implique une
présence de REXFOR et des scieries dans le projet.
Alors, les principales difficultés étaient la
sécurité d'approvisionnement de l'usine Donohue en copeaux, ce
qui est essentiel. Il n'y a pas une usine de pâtes qui peut fonctionner
si elle n'a pas la certitude d'avoir des copeaux de la forêt.
Deuxièmement, il y avait peut-être également le pro-
blème de l'écoulement certain des copeaux des scieries. Le
troisième problème était les frais de transfert d'un
partenaire à l'autre, c'est-à-dire à quel prix les copeaux
seraient achetés de Donohue et à quel prix Donohue vendrait les
arbres abattus aux scieries.
Les discussions portent actuellement sur une façon... Cela serait
plutôt en volume que l'échange se ferait, c'est-à-dire tant
de cunits de bois reçus par les scieries seraient payés X temps
après par des mêmes cunits ou un montant direct de cunits en
copeaux. Alors, les variations dans le prix des copeaux ou du bois d'oeuvre
n'auraient pas d'effet.
M. Bédard (Chicoutimi): Je sais qu'il y a tellement eu de
dates limites de données pour la réalisation de ce projet depuis
dix ans...
M. Saint-Pierre: N'en demandez pas d'autres!
M. Bédard (Chicoutimi): Je n'en demanderai certainement
pas une assurée parce que, même le ministre Drummond nous disait,
il n'y a pas tellement longtemps, qu'il avait son voyage de parler de dates
limites. Y a-t-il de bonnes chances, au moins, pour que ce projet se
concrétise dans l'année 1975?
M. Saint-Pierre: C'est assez difficile à dire. Je pense
que oui, mais, encore une fois, il n'y aura pas une grande
cérémonie pour annoncer le projet. On commence le plus rapidement
possible. Je vous ai mentionné les trois points, actuellement, qui sont
encore en suspens. Il est vrai de dire que, dans ces trois points,
l'exploitation forestière, les partenaires financiers et les
négociations avec le fédéral pour les ententes
auxiliaires, ces trois points, tous ceux qui oeuvrent dans le projet tentent de
les régler le plus rapidement possible.
D'ailleurs, récemment, nous avons constitué un groupe de
travail qui tente de réunir tous les ministères touchés
par cela et le coordonnateur de ce groupe de travail, M. Richard Lacasse du
ministère de l'Industrie et du Commerce, est à ma gauche,
ici.
M. Bédard (Chicoutimi): D'ailleurs, je serais tenté
de dire au ministre que cela serait presque indécent si, à grand
renfort de publicité, on faisait cette annonce parce que cela fait
tellement de fois que l'annonce en est faite que, peut-être, la
véritable annonce mérite d'être plus modeste et...
M. Saint-Pierre: Vous n'auriez pas d'objection. Mais vous ne nous
prêteriez pas de faux motifs si la première journée de
production coïncidait avec la prochaine élection provinciale.
M. Bédard (Chicoutimi): Ce qui est important est que les
gens de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean...
M. Saint-Pierre: C'est pour cela qu'on travaille.
M. Bédard (Chicoutimi): ... puissent avoir une
réponse qui soit favorable. Dans ce projet, on parle souvent
d'implications du fédéral. Le ministre pourrait-il me dire en
quoi le fédéral est impliqué dans ce projet? Doit-on
comprendre que la réalisation de ce projet peut faire l'objet d'une
entente auxiliaire?
M. Saint-Pierre: Oui, M. le Président, l'entente
auxiliaire prévoit des montants pour stimuler l'entreprise
manufacturière. Il y a toute la question des infrastructures,
également, les routes en territoire forestier, la voirie provinciale,
l'aide à l'infrastructure municipale qui sera requise à cause du
projet. Alors, bien sûr, cela fait l'objet... Mais on a une excellente
collaboration du gouvernement fédéral. Cela va très
bien.
M. Bédard (Chicoutimi): II va avoir à investir
directement dans le projet.
M. Saint-Pierre: Non. Ce sera simplement par le biais d'une
entente auxiliaire.
M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce que le ministre a pris
connaissance, dernièrement, de la position du comité populaire de
Saint-Félicien?
M. Saint-Pierre: Non. Saint-Félicien ou Chi-bougamau?
M. Bédard (Chicoutimi): Non, Saint-Félicien.
M. Saint-Pierre: Les gens de Chibougamau sont contre.
M. Bédard (Chicoutimi): Si vous voulez parler de
Chibougamau, je peux vous laisser cinq minutes.
M. Saint-Pierre: Non.
M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce que le ministre a pris
connaissance de la dernière position du comité populaire de
Saint-Félicien qui dénonçait ce qu'il appelait le grand
jeu politique qui visait, essentiellement, à défendre les
intérêts à courte vue de certains industriels locaux,
intérêts qui, selon eux, commandaient une attitude négative
vis-à-vis du projet de réalisation de Donohue.
M. Saint-Pierre: Je pense que cette prise de position visait
à tort ou à raison je ne veux pas me prononcer le
comportement des scieries de la région et ne visait pas le gouvernement.
Je n'ai pas le temps de...
M. Bédard (Chicoutimi): Avez-vous eu l'occasion d'en
prendre connaissance?
M. Saint-Pierre: Oui, j'en ai pris connaissance, M. le
Président, mais je n'ai pas le temps de commenter lorsqu'un groupe de
citoyens accuse un autre groupe de citoyens d'avoir des vues à court
terme.
M. Bédard (Chicoutimi): Mais j'espère que vous
considérez les vues de chacun des groupes qui s'expriment.
M. Saint-Pierre: Des citoyens sur le projet, oui, mais pas les
gens qui s'accusent l'un l'autre. Quand Chibougamau me dit qu'il est contre le
projet et Saint-Félicien est pour, cela...
M. Bédard (Chicoutimi): Le directeur du MEER pour le
Québec, M. Robert Montreuil, a déclaré, il n'y a pas
tellement longtemps c'était, textuellement, dans le Soleil
que le projet de Saint-Félicien était à l'étude
mais qu'il n'était pas plus avancé que cela. Il continuait en
disant: "II serait prématuré de dire que nous en sommes à
la phase finale des négociations. Nous connaissons le projet, nous en
parlons avec la province, mais il serait faux de dire qu'il y aura un consensus
à court terme." Etant donné que c'était...
M. Saint-Pierre: En quelle année?
M. Bédard (Chicoutimi): Le 8 janvier 1975.
M. Saint-Pierre: Tout dépend de la définition de
court terme. Le 8 janvier, je pense que je serais d'accord avec ce que M.
Montreuil disait, mais entre le 8 janvier et le 8 mai, nous avons fait du
chemin depuis ce temps avec M. Montreuil.
M. Bédard (Chicoutimi): Je m'aperçois qu'il s'en
est fait plus dans ces quelques mois qu'il s'en est fait durant les dix
années, depuis qu'on annonce le projet.
M. Saint-Pierre: C'est tout à l'honneur du
gouvernement.
M. Bédard (Chicoutimi): Quand vous faites quelque chose de
bien, je ne suis pas ici pour vous blâmer.
M. Saint-Pierre: J'en remercie le député.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Elément 2
adopté. Elément 3...
M. Bédard (Chicoutimi): On verra, on va attendre la
décision.
Le Président (M. Houde, Limoilou): ...Infrastructure
d'accueil à l'industrie.
M. Saint-Pierre: Dans l'infrastructure d'accueil...
Le Président (M. Houde, Limoilou): La commission suspend
ses travaux jusqu'à 20 heures à la demande de l'Opposition.
(Suspension de la séance à 14 h 44)
Reprise de la séance à 20 h 13
M. Houde, Limoilou (président de la commission permanente de
l'industrie et du commerce, du tourisme, de la chasse et de la pêche):
A l'ordre, messieurs!
Programme 3, Elément 3: Infrastructure d'accueil à
l'industrie.
Infrastructure d'accueil à l'industrie
M. Morin: Je m'excuse, M. le Président, il semble qu'il y
ait eu un débat alors que je ne me trouvais pas ici. Nous n'avons pas
encore adopté, que je sache, l'élément 1 ou
l'élément 2 et s'il y a une controverse, je demanderais qu'on se
réfère au procès-verbal. Nous avons adopté le
programme 1 et le programme 2 et, à propos de l'élément 1
du programme 3, nous avons abordé les questions que le ministre
connaît, c'est-à-dire l'aluminerie et Saint-Félicien, je ne
crois pas qu'on soit allé plus loin. Il faudrait que le ministre essaie
de nous faire des tours de passe-passe, parce que je peux l'assurer que ce
serait loin de hâter le déroulement de la procédure qui,
jusqu'ici, nous a quand même permis de faire du chemin, même si
c'est quelquefois un peu long, je pense qu'on peut espérer en sortir
dans des délais raisonnables. Mais si nous nous mettons à essayer
de nous faire des crocs-en-jambe, je pense que ça n'avancera
guère.
M. Côté: C'est à peu près comme votre
décision de vous en référer au président de la
Chambre concernant...
M. Morin: Le président de la Chambre, il n'y en a pas.
M. Côté: Et les vice-présidents, où
est-ce qu'ils sont?
M. Morin: Nous n'avons pas été capables de les
trouver. M. le Président, je suis allé aux renseignements
aujourd'hui et on m'a confirmé effectivement que j'avais raison.
M. Saint-Pierre: Pardon, monsieur.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Un instant, s'il vous
plaît. Pour que vous ayez raison, il faut que vous ayez le consentement
unanime de la commission et, à ce moment-là, le ministre n'a pas
donné son consentement, les autres membres de la commission non
plus.
M. Saint-Pierre: On peut faire vérifier le journal des
Débats, mais je suis positif qu'à 6 heures moins deux, nous avons
voté programme 3, élément 2. Si c'est nécessaire de
recommencer, je ne sais pas où on recommence.
M. Morin: Je sais qu'il y a eu une dispute pour savoir ce qui a
été adopté ou pas adopté. Est-ce qu'on peut se
référer au procès-verbal? De toute façon, il nous
reste un dossier dans l'élément 1, qui est la question des
investissements étrangers et, ensuite, on pourrait passer à
l'élément 2. De toute façon, beaucoup de ces programmes
chevauchent plusieurs éléments. Que vous vouliez nous
empêcher de procéder maintenant. On va procéder sous un
autre élément.
M. Saint-Pierre: On va faciliter le travail de la commission.
M. Morin: Je remercie le ministre.
M. Saint-Pierre: Qu'est-ce que vous avez à dire...
Investissements étrangers
M. Morin: M. le Président, si vous le voulez bien, nous
allons aborder les investissements étrangers et le mécanisme
d'examen desdits investissements, tel qu'élaboré par le
gouvernement fédéral et le problème de la participation du
Québec à ce mécanisme.
M. le Président, le ministre, depuis les derniers crédits
a fait adopter, par le cabinet, un document fort intéressant qui est
intitulé: Mémoire au conseil des ministres, de M. Guy
Saint-Pierre, en date du 13 novembre 1974.
Le sujet en est "Le Québec et le mécanisme
fédéral d'examen des investissements étrangers".
C'est un document intéressant, mais qui me paraît ambigu
par moments. D'abord, l'une des questions que je poserai au ministre dans le
cours de la discussion sera: Qui est étranger?
Le document joue sur deux plans, à deux niveaux. De temps
à autre, est étranger ce qui n'est pas québécois
et, dans les phrases suivantes, est étranger ce qui n'est pas canadien.
Il faudra peut-être que le ministre nous donne sa conception de
l'étrangeté.
De même, j'ai cru déceler dans le document un langage
subversif. Dès la première page, on nous parle de
l'érosion de la souveraineté politique du Québec. C'est
à croire que c'est tiré du programme du Parti
québécois. C'est, dans ce contexte, une expression
extrêmement ambiguë sur laquelle j'aimerais bien obtenir des
explications du ministre.
Mais cela, ce sont des questions de vocabulaire. Il y a des questions de
fond qui sont soulevées par ce document et par l'application qui en a
été faite depuis qu'il a été soumis au conseil des
ministres et qu'il y a été adopté, si je comprends
bien.
Je pourrais peut-être, comme toute première question,
demander au ministre qu'il nous dise, de façon générale,
quelle est sa conception du filtrage des investissements étrangers au
Québec et, nécessairement, au Canada, puisque nous sommes aux
prises avec ce mécanisme, et ce qu'il pense, en particulier, de la
façon dont va s'appliquer la deuxième partie de la loi
fédérale qui, je crois, doit entrer en vigueur sous peu, si je ne
m'abuse.
M. Saint-Pierre: Elle n'est pas promulguée, c'est la
décision du gouvernement fédéral.
M. Morin: Mais j'ai cru voir entre les lignes qu'elle allait
bientôt entrer en vigueur. J'aimerais, en somme, que le ministre nous
dise, de façon générale, son attitude à
l'égard des investissements étrangers et, après cela,
j'aurai des questions peut-être plus spécifiques à lui
poser sur certains passages du document qu'il nous a communiqué
M. Saint-Pierre: Les investissements étrangers, M. le
Président, je pense qu'il serait faux d'adopter une attitude qui soit
aux deux extrêmes, c'est-à-dire de considérer que les
investissements étrangers sont toujours une bonne source sur le plan des
investissements. Mais, de la même façon, il serait
également faux, quant à moi, de penser que nous pouvions nous
permettre de rejeter tous les investissements étrangers. C'est donc avec
beaucoup de jugement qu'il nous faut revoir cas par cas.
D'ailleurs, à la toute première page du document, en page
2, on disait, au milieu de la page: "Les avantages indéniables
découlant des investissements étrangers ont été
largement reconnus sur le plan de la croissance et de l'élévation
du niveau de vie." En ce qui touche le mécanisme avec le gouvernement
fédéral, nous avons eu une excellente collaboration. Je pense
que, après les problèmes de rodage des premiers mois qui ne
sauraient imputer une mauvaise foi du gouvernement fédéral, mais
plutôt, simplement, des problèmes de faire démarrer un
nouvel organisme qui touche un secteur très complexe, nous avons
toujours eu une très bonne collaboration.
Les principes qui nous guident, M. le Président, je
réfère, justement, au document que j'ai laissé, il y a 48
heures, qui donne, dans ses grandes lignes, quel est le cadre des
références dans lequel les décisions du Québec sont
prises.
M. Morin: M. le Président, je...
M. Saint-Pierre: M. le Président je veux...
M. Morin: ...vais passer, peut-être, à quelques
questions plus spécifiques.
M. Saint-Pierre: Sûrement.
M. Morin: A la page I du document, on nous dit que le
Québec devrait viser, par sa participation et dans l'application de la
loi... Il s'agit de l'application de la loi fédérale, le bill
C-I32 et de la participation au mécanisme créé par le
pouvoir fédéral. "Le Québec devrait viser à
restreindre le contrôle étranger sur son économie, en
limitant les nouveaux investissements étrangers et les prises de
propriété d'entreprises québécoises par des
non-Canadiens, en récupérant, chaque fois qu'il est possible, la
propriété d'entreprises, présentement, entre les mains
d'étrangers."
J'aimerais essayer de comprendre comment ces phrases qui sont, en soi,
louables, ont pu mener le ministre et le gouvernement à prendre les
décisions qu'ils ont prises à l'égard, par exemple, de la
société Price ou, encore, dans le cas plus récent, de
l'affaire Blue Bird-Corbeil. Dans le cas de la société Price, il
s'agissait d'une prise de propriété d'une entreprise
québécoise par une entreprise non-québécoise.
M. Saint-Pierre: M. le Président, ce n'est pas une
transaction qui est assujettie à la loi C-132, donc ce n'est pas une
transaction qui touche le mémoire que j'ai soumis ici.
M. Morin: Bon. Alors donc, dans ce cas, "étranger" voulait
dire non-canadien?
M. Saint-Pierre: C'est cela. On assujetti à la loi C-132,
puisqu'il y a certaines nuances d'entreprises qui peuvent se penser canadiennes
et qui sont quand même assujetties.
M. Morin: A la page 2, vous nous dites à la fin du
paragraphe: En somme, il faut favoriser la maîtrise par les
Québécois cette fois, on parle de Québécois
de certains secteurs d'activité vitaux tant au niveau
économique que socio-culturel. Est-ce que dans le cas de Price, il n'y
avait pas justement l'occasion d'affirmer, de favoriser la maîtrise par
des Québécois d'un secteur dans lequel ils ont accumulé un
savoir-faire, un "know how" technologique très poussé et
où il aurait été facile au gouvernement de faire en sorte
que la SGF, par exemple, puisse se porter acquéreur de Price?
M. Saint-Pierre: Ce sont peut-être des discussions
philosphiques, mais c'est toute une question de priorités. La
transaction Price était dans un secteur où le gouvernement du
Québec était déjà présent. Cela n'a rien
à voir avec la loi C-132, mais essayons de répondre à la
question. Le gouvernement du Québec était déjà
présent par la Société Donohue, avait déjà
des projets d'importance qui touchaient le développement de la
région du Lac-Saint-Jean et qui étaient plus intéressants
que les projets de l'acquisition de Price, puisque dans le cas de Donohue au
Lac-Saint-Jean, il s'agit d'une addition à l'activité
économique, alors que dans le cas de Price, les usines sont en place, il
s'agissait donc strictement du transfert de la propriété entre
une compagnie canadienne ou la SGF. Si notre collègue du Parti
créditiste était ici, on pourrait dire que si on pouvait se
fonder sur l'hypothèse qu'on peut imprimer de l'argent, sûrement
on aurait pu acheter tout ce qui se passe dans le monde. Comme on ne croit pas
à cela, donc il faut établir des priorités. Je pense qu'au
niveau de la capitalisation dans les sociétés d'Etat, les
performances des cinq dernières années sont plus impressionnantes
que la création de structures qui a pu caractériser d'autres
époques.
Dans ce déroulement, soit tenter d'établir une
priorité, il nous a semblé préférable de faire
porter l'argent sur d'autres projets, comme celui de l'aluminerie, comme celui
de Saint-Félicien.
M. Morin: M. le Président, néanmoins,
c'était quand même une occasion d'élargir la place,
l'emprise, la maîtrise pour parler comme le ministre dans son
document des Québésois sur leur économie, et de
passer d'une participation, quoi, de 5%? parce que la Donohue, à l'heure
actuelle, représente quoi, 5% du marché, cela aurait
été l'occasion, quand même, d'en contrôler à
peu près 20%.
M. Saint-Pierre: Cela coûtait $120 millions, qu'il faut
prendre à quelque part. Je ne sais pas si vous suggérez qu'on
devait les prendre à l'Agriculture? Est-ce qu'on les prenait à la
voirie? A moins de croire que deux plus deux peuvent égaler cinq,
et...
M. Morin: Je ne sais pas si le ministre a été
mêlé à cette affaire de près, mais il se souviendra
qu'en Chambre, lorsque nous avons parlé de cette affaire, il s'est
avéré, à un moment donné, que les gens de Price
étaient prêts à coopérer avec le gouvernement pour
que le montant de l'achat soit réduit de beaucoup, ou même, je
crois qu'ils auraient avancé l'argent. Mais le ministre a
été mêlé à l'affaire. Alors, peut-être
peut-il nous donner des éclaircissements là-dessus?
M. Saint-Pierre: Je pense que, fondamentalement, le gouvernement
avait pris la décision que ces $120 millions pouvaient être plus
utiles ailleurs dans les dépenses gouvernementales.
M. Morin: Le document doit donc être
interprété comme signifiant, en fait, non pas d'assurer aux
Québécois un meilleur contrôle de leur économie,
mais aux Canadiens. Si je comprends, vous jouez sur les mots dans ce document,
parce que vous y parlez de la maîtrise par les
Québécois...
M. Saint-Pierre: Non, M. le Président. Lorsqu'on parle de
la loi fédérale des mécanismes de contrôle sur les
investissements étrangers, il faut, bien sûr, s'en
référer au projet de loi fédéral, qui a une
définition propre des étrangers. Lorsqu'on parle de la
nécessité d'accroître le dynamisme du capital autochtone,
c'est un capital qui appartient essentiellement à des résidants
québécois, sans faire de distinction entre francophones ou
anglophones, mais des gens de la province de Québec. Je pense qu'on peut
facilement comprendre ce qui est perçu derrière chacun de ces
documents.
M. Morin: Je ne faisais pas, non plus, de distinction entre
francophones et anglophones québécois, mais j'employais les
termes qu'on trouve dans le document, où l'on voit apparaître le
mot "Québécois" de temps à autre, et ailleurs, le mot
"Canadiens". On joue sur deux niveaux.
M. Saint-Pierre: II y a deux niveaux de gouvernement aussi.
M. Morin: Bien sûr, mais il s'agit de savoir si vous
favorisez la maîtrise par les Québécois ou si vous
favorisez la maîtrise par les Canadiens. Ce n'est pas la même
chose.
Et le document, encore une fois, est ambigu. Dans le cas de Bluebird, on
en a déjà parlé en Chambre, il s'agissait là d'une
entreprise, je pense, authentiquement québécoise dont la
production était achetée entièrement au Québec. Il
s'agissait, si ma mémoire ne me fait pas défaut, d'autobus,
d'autobus scolaires notamment, donc c'est nous, ce sont les fonds publics, soit
par le truchement des commissions scolaires, soit par les municipalités
qui achetaient cette production.
N'y avait-il pas là une très belle occasion d'appliquer
votre politique d'empêcher la mainmise par des étrangers
parce que cette fois, il s'agit bien d'étrangers sur une
entreprise québécoise?
M. Saint-Pierre: Trois points à cela, M. le
Président. Premièrement, dans le passé, les
propriétaires de la compagnie Corbeil j'ai vérifié
au dossier du ministère n'ont jamais demandé d'aide au
ministère et même les approches que nous avions eues avec eux
n'avaient pas donné de résultats. En d'autres termes,
l'entreprise semblait être satisfaite de son taux de croissance, n'avait
pas de problème.
Deuxièmement, il faut peut-être démystifier
l'intérêt qu'il pouvait y avoir pour le Québec de garder au
Québec l'assemblage d'autobus parce que l'assemblage d'autobus n'a rien
à voir avec l'industrie de l'automobile. C'est comme un grand jeu de
mécano où toutes les pièces sont coulées à
l'extérieur et ici finalement, on met ensemble les pièces d'un
mécano avec une valeur ajoutée qui est loin d'être
intéressante, avec des salaires nettement inférieurs à la
moyenne industrielle, avec un taux de croissance très bas, et des
possibilités d'exportation extrêmement réduites.
Donc, il faut démystifier l'avantage. Ce n'est pas l'industrie de
l'automobile qui s'en allait. C'est un gros jeu de mécano dont ceux qui
en étaient propriétaires étaient pour changer.
Troisièmement, je pense, avec mes collaborateurs et avec M.
Saulnier de la SDI, à un certain moment, et c'est ce qui explique notre
premier refus à l'agence, nous avons tenté de
récupérer la compagnie, prêts à y mettre des fonds
publics, mais il s'est avéré que la compagnie ayant omis de
placer les commandes pour ses pièces pour la nouvelle production, nous
nous serions retrouvés, en décembre, incapables de faire de la
production et surtout, au bout d'un an, avec une compagnie qui avait perdu ses
cadres les plus intéressants, ses ressources humaines les plus
intéressantes et qui aurait plongé dans le chômage quand
même la ville de Saint-Lin, cette compagnie fournissant quand même
un travail.
Devant tous ces éléments, après discussion avec M.
Saulnier et les cadres du ministère, il fut convenu qu'il était
préférable de permettre la transaction pour sauver l'emploi
puisque, dans ce secteur, il ne semblait pas que c'était avec Corbeil
qu'on pouvait faire les choses les plus intéressantes possible. Depuis
ce temps, nous n'avons rejeté aucun effort pour tenter de faire des
choses intéressantes. Malheureusement je ne suis pas à
même de rendre public aujourd'hui le chemin que nous avons
parcouru.
M. Morin: Je saisis mal pourquoi cette entreprise, si ce que vous
me dites est exact, s'est sabordée littéralement.
M. Saint-Pierre: C'est parce que Blue Bird, l'entreprise,
achetait ses pièces de la compagnie Superior, compagnie
américaine; c'est là qu'était essentiellement
l'intérêt, valeur ajoutée; or Blue Bird est un concurrent,
aux Etats-Unis, de la compagnie Superior et traditionnellement, en
Amérique du Nord, il y a une espèce de rotation voulant que les
commissions de transport placent leurs commandes à telle date de
l'année, que les compagnies placent leurs commandes au début
d'août auprès des compagnies, et se voient donc assurées
d'un certain jeu de mécano, si je peux encore employer l'expression. Or,
au 1er août, la compagnie Corbeil, étant peut-être ignorante
de la Loi fédérale des investissements étrangers et
sachant qu'elle vendait à un concurrent de Superior, a indiqué
qu'elle ne voulait pas acheter de pièces. De la sorte, nous-mêmes,
si nous avions voulu empêcher la transaction, donner $1 million à
la compagnie Corbeil, nous nous serions trouvés dans
l'impossibilité, puisque Blue Bird et Superior sont les deux grandes
compagnies qui fournissent des pièces d'autobus, de continuer la
production. Il y aurait eu 80 familles à Saint-Lin qui auraient
été en chômage. Un an après, quand on aurait voulu
faire démarrer quelque chose, on risquait de se retrouver avec une
compagnie sur papier qui ne valait pas grand-chose. C'était dans des
installations où la productivité était très faible.
Il n'y avait pas d'intérêt. Fondamentalement, je reviens au
deuxième point que j'ai mentionné, ce n'est pas
particulièrement intéressant de sauvegarder la maîtrise
autochtone dans ce secteur. Quand vous regardez les salaires, la
productivité, les possibilités d'exportation, les taux de
croissance, la valeur ajoutée, ce n'est pas particulièrement
intéressant. C'est l'avis de tous mes fonctionnaires.
M. Morin: A ce compte-là, s'il s'agissait d'un jeu de
mécano, il y a bien d'autres entreprises québécoises qu'on
pourrait considérer comme des jeux de mécano. La compagnie qui me
vient à l'idée tout de suite, c'est SOMA. C'était aussi un
jeu de mécano à ce compte-là.
M. Saint-Pierre: Non. SOMA avait quand même une valeur
ajoutée beaucoup plus grande que l'autre et nous espérions des
perspectives de croissance puisque SOMA exportait aux Etats-Unis.
On comprendra bien que le permis que Corbeil avait de la compagnie
Superior était limité à la province de Québec.
Donc, il était impossible d'exporter simplement pour satisfaire un
marché local avec, encore une fois, une entreprise très marginale
au salaire minimum ou un peu plus, mais pas tellement plus. D'ailleurs, c'est
littéralement un jeu de mécano. Vous importez des pièces,
vous mettez ça ensemble.
M. Morin: Cela allait jusqu'où, cette importation de
pièces, c'était jusqu'au dernier boulon ou s'ils importaient
déjà des pièces montées?
M. Saint-Pierre: Intégral.
M. Morin: Des choses déjà montées.
M. Saint-Pierre: Les parties, le moteur, l'essieu, c'est sur une
boîte de camion. D'ailleurs, tout le secteur, il faut le
démystifier parce qu'autant il y a un intérêt dans les
autobus urbains, qui valent, par unité, peut-être $60,000, $65,000
ou $70,000, autant l'autobus scolaire, ça ne coûte pas cher au
consommateur, c'est $12,000 ou $13,000. C'est un châssis de camion qui
est une fin de production dans les grandes compagnies, Dodge, General Motors,
et des choses semblables, auquel on rajoute une boîte carrée, vous
les voyez, avec des sièges. Ce n'est pas particulièrement
intéressant comme entreprise à sauver.
M. Morin: Quel était approximativement, je ne veux qu'un
ordre de grandeur, parce que je ne veux pas...
M. Saint-Pierre: Le nombre d'employés...
M. Morin: Non, pas le nombre, vous pourriez me donner le nombre
d'employés aussi. Je voulais vous demander quelle était la valeur
ajoutée, par unité de production?
M. Saint-Pierre: Très faible, pas plus de $1,000, 160
hommes-heure, $1,000 par autobus qui se vendait à peu près
$12,000.
M. Morin: Je comprends mieux. M. le ministre...
M. Saint-Pierre: J'ai l'impression que cela a coûté
plus cher dans les journaux pour parler de ce cas que cela en valait la
peine.
M. Morin: Est-ce que Blue Bird va continuer la production, est-ce
que vous avez des assurances?
M. Saint-Pierre: Blue Bird a pris des engagements d'investir, de
moderniser la production. Blue Bird a maintenant une autre possibilité
intéressante. C'est qu'il peut, à partir de Saint-Lin, exporter
sa production sur le marché des Etats-Unis, de la Nouvelle-Angleterre,
des Maritimes et autres endroits, ce que Corbeil ne pouvait absolument pas
faire et que nous n'aurions pas pu faire.
Sans en dévoiler la nature, nous n'avons pas dit notre dernier
mot dans le domaine des autobus scolaires.
M. Morin: Cela peut vouloir dire bien des choses, M. le
ministre.
M. Saint-Pierre: L'an prochain.
M. Cadieux: N'ouvrez pas d'autres portes, M. le
député.
M. Morin: Si ce sont de bonnes nouvelles, il n'y a pas de raison
de les cacher, mais je n'insiste pas. Effectivement, le marché des
autobus scolaires est un marché prisonnier au Québec, en quelque
sorte, donc, il y aurait des choses à faire. Si le ministre songe
à faire des choses, ce n'est pas nous qui allons l'en
empêcher.
M. le Président, je voudrais me pencher sur quelques points plus
spécifiques mentionnés à la page 5. D'ores et
déjà, cependant, les principes suivants émergent. Le
Québec devrait adopter une attitude intransigeante dans le secteur
socioculturel pour des raisons évidentes. Quel type de compagnie ce
passage vise-t-il en particulier, M. le ministre?
M. Saint-Pierre: En fait, toutes les entreprises qui seraient
dans le secteur, comme le mot l'indique, socio-culturel: les livres,
l'édition, le marché du cinéma...
M. Morin: Le cinéma...
M. Saint-Pierre: ... je dois dire que, bien que responsables
auprès du gouvernement de toute la consultation en ce qui touche les
investissements étrangers, nous avons, comme vous l'avez vu dans les
documents, un mécanisme qui implique d'autres ministères.
Dans le cas du socio-culturel, bien sûr, mes collègues de
l'Education et des Affaires culturelles auraient une contribution importante
à faire dans la prise de position.
Je dois admettre que nous n'avons eu aucun cas de socio-culturel depuis
le début, aucune transaction.
M. Morin: Pas depuis que vous avez adopté ce
mémoire?
M. Saint-Pierre: Depuis le début de la loi
fédérale.
M. Morin: Oui, je comprends, parce que votre collègue des
Affaires culturelles aurait avantage à lire cela, notamment, au sujet de
l'affaire Hilton. Ce serait intéressant de voir, dans l'avenir, comment
ce paragraphe pourrait s'appliquer dans un cas comme celui-là.
Dans le domaine immobilier, les investissements pour fins commerciales
devraient être découragés. Est-ce que cela ne
requérait pas une législation spéciale et est-ce que le
ministère songe à une législation dans ce domaine?
M. Saint-Pierre: II y a eu des examens dans le cas du
ministère de l'Agriculture, des Affaires municipales; il y a quelques
concepts qui sont analysés. Je dois dire que, dans le secteur
immobilier, nous-mêmes, nous avons fait faire une nouvelle étude
pour être bien certains de la décision que nous prenions, de
l'attitude que nous avions prise jusqu'ici. Nous avions tendance à dire
non à des transactions immobilières, mais nous avons fait faire
une étude pour être bien certains de notre position. Souvent, il y
a des capitaux qui peuvent être dégagés, qui permettent
à des Québécois de réinvestir, de stimuler
l'habitation, stimuler la construction de logements et qui, là, se
trouvent un peu gênés. On a eu des cas que nous avons
refusé jusqu'ici et des cas qui ont été acceptés.
Cela a été assez...
Nous avions refusé, au tout début, la vente...
M. Morin: Est-ce qu'il existe une liste des cas où vous
avez appliqué ce mémoire, depuis l'entrée en vigueur de la
loi fédérale? Je vois que le sous-ministre a une liste devant
lui, cela simplifierait peut-être...
M. Saint-Pierre: On ne peut pas déposer cela, M. le
Président. Dans le processus d'une loi où nous avons accès
à plusieurs informations confidentielles, bien que nous avons la
liberté de dire ce que nous avons fait, la liste que nous avons inclut
les positions du gouvernement fédéral, également, des
dates et des informations que vous ne pouvez pas rendre publiques.
M. Morin: Est-ce qu'il serait possible de faire une liste
simplifiée, qui ne contiendrait pas les renseignements qui
relèvent du pouvoir fédéral?
M. Saint-Pierre: On pourrait donner seulement une liste avec la
décision finale qui aurait pu être prise.
M. Morin: Est-ce qu'il serait possible... M. Saint-Pierre:
Pour demain?
M. Morin: Oui, ou au cours des journées
subséquentes.
M. Saint-Pierre: II n'y a pas de problème.
M. Morin: Parce que demain, il n'V a qu'une séance
très courte, après l'assemblée, qui se terminera vers une
heure, je crois.
M. Saint-Pierre: On aura terminé nos dix heures demain.
C'est pour cela que je suggérais demain.
M. Morin: Dix heures demain, déjà?
M. Saint-Pierre: Oui, cela fait dix heures qu'on a...
M. Morin: Oui, mais la tradition veut qu'on passe au travers de
ce qu'il y a à faire.
M. Saint-Pierre: Je ne suis pas un traditionaliste.
M. Morin: Oui, j'ai vu cela, l'autre soir, quand vous avez,
délibérément, enfreint les traditions qu'on suit
d'habitude à l'étude des crédits. Mais ce serait quand
même navrant que le ministre se réfugie derrière une
histoire comme cela, pour nous empêcher d'étudier,
sérieusement et à fond, tous les dossiers qui intéressent
son ministère.
M.Cadieux: Dans un délai raisonnable, tout de même.
On parle de dix heures, on peut peut-être aller à...
M. Morin: Si vous participiez davantage, peut-être que cela
vous intéresserait davantage, plutôt que d'être là,
simplement, pour le quorum. Vous devriez participer, M. le
député.
M. Cadieux: On connaît les réponses à vos
questions.
M. Morin: Cela, je m'en doute, oui. M. le Président...
M. Cadieux: Vous vous pensez encore à l'université,
vous vous imaginez que vous parlez devant des étudiants.
M. Morin: Je ne sais pas ce que j'aurais fait, si j'avais eu le
député de Beauharnois comme étudiant. Mais, c'est une
autre affaire, on n'est plus à l'université, nous sommes en
commission parlementaire.
M. Cadieux: Je ne serais certainement pas ici, si je vous avais
eu comme professeur, en tout cas.
M. Morin: Non, peut-être pas.
M. Cadieux: Je serais chômeur, probablement.
M. Morin: Peut-être pas.
M. Cadieux: Je serais chômeur, je chercherais un
emploi.
M. Morin: J'aurais donné sans doute une meilleure
appréciation de vos capacités.
Une Voix: Le député a débloqué.
M. Morin: Cela suffit, cet échange, M. le
Président. On peut revenir aux choses sérieuses.
M. Saint-Pierre: C'est parce que le chef de l'Opposition en avait
beaucoup à apprendre du député de Beauharnois. Il est ici,
en Chambre, depuis combien d'années?
M. Cadieux: Cela fera seize ans à la fin de mon
mandat.
M. Saint-Pierre: C'est une performance que vous allez avoir
sûrement de la difficulté à atteindre.
M. Morin: Ah! C'est possible, c'est possible. Mais, j'imagine que
si le député avait été vraiment compétent,
il serait, aujourd'hui, peut-être à la place du ministre.
M. Cadieux: C'est que le ministre est plus compétent.
M. Morin: M. le Président, ces échanges de propos
aimables suffisent. On peut peut-être revenir au domaine immobilier. Je
voudrais comprendre la portée exacte de cela. Est-ce qu'il s'agit
d'investissements par des compagnies étrangères qui feraient
affaires dans l'immobilier ou s'il s'agit d'investissements d'achat de
terrains, simplement, pour des fins commerciales? Ce n'est pas clair
d'après le texte.
M. Saint-Pierre: Non, essentiellement et
généralement, les deux seraient, bien sûr, assujettis
à la loi. Jusqu'ici les seuls cas que nous avons eus touchent des
immeubles d'habitation, des compagnies étrangères qui veulent
acquérir des compagnies canadiennes qui font affaires dans l'immeuble.
Je vous donne un exemple que nous avons eu: Les Appartements Rock Hill qui
étaient la propriété... Ils étaient situés
à Montréal. La compagnie qui voulait les obtenir, les acheter
était Matignon Properties, d'Allemagne.
Le problème dans cela, bien sûr, c'est que l'emprunt
à long terme, sur le prêt hypothécaire, est
généralement versé par des entreprises canadiennes, des
compagnies d'assurance et autres, de telle sorte que, l'acquéreur n'a
qu'à verser que l'équivalent du dépôt de 10%, 15% ou
20% de l'achat, du montant qu'on verse comptant et, finalement, ce sont des
Canadiens qui paient pour l'édifice qui leur appartient en
totalité. C'est l'inverse de l'aluminerie, réellement, où
ce sont les Américains qui paient alors qu'on en est propriétaire
complètement.
Mais, dans le cas immobilier...
M. Morin: Le ministre aime les frictions.
M. Saint-Pierre: ... on serait porté à dire non.
Par contre, on se rend compte que, dans quelques cas... On fait une
étude, c'est tout ce que je pourrais dire, pour être bien certain
qu'on est dans la bonne voie; parce que, dans d'autres cas, on se rend compte
que, il est permis aux francophones qui sont dans le secteur de faire rouler
plus d'investissements, dans le secteur de l'habitation, dans le secteur des
appartements et que, en refusant un accès à un marché
quelconque, on peut geler les conditions du marché.
M. Morin: M. le Président, je saisis mal la portée
du quatrième paragraphe.
M. Saint-Pierre: A quelle page?
M. Morin: A la page 5, toujours. La politique du gouvernement du
Québec en matière d'investissements étrangers, dans le
domaine primaire, doit évidemment être compatible avec la
politique en matière de transformation des richesses naturelles. Quelle
est la portée exacte de ce passage?
M. Saint-Pierre: M. le Président, cela me semble assez
évident. Si on tente...
M. Morin: C'est parce que la politique du gou-
vernement en matière de transformation des richesses naturelles,
jusqu'ici, n'est pas très claire. Si vous vous référez
à la politique d'un autre ministère, j'imagine que c'est cela que
cela signifie.
M. Saint-Pierre: Non, mais ce qu'on dit... Prenons un cas
d'espèce. Si, au niveau des richesses naturelles, on vise une plus forte
transformation... Vous allez m'obliger à retomber dans le cas de
l'aluminerie...
M. Morin: Prenons l'amiante.
M. Saint-Pierre: Alors, prenons l'amiante. L'amiante est un
mauvais cas puisque les entreprises, comme vous le savez, sur le plan
constitutionnel, je n'ai pas à vous en montrer sur ce plan, ont quand
même des droits sur le terrain, qui ne sont pas les mêmes que ceux
existant dans d'autres secteurs des richesses naturelles.
M. Morin: Ce n'est pas sur le plan constitutionnel, c'est sur le
plan de la loi, de la législation...
M. Saint-Pierre: De la loi.
M. Morin: ... parce que, sur le plan constitutionnel, il n'y a
rien qui empêche le Québec de modifier cette loi. C'est parce
qu'il ne le veut pas.
M. Saint-Pierre: Non, je m'excuse. J'ai déjà vu des
avis juridiques à l'effet contraire.
M. Morin: Oui, c'est un beau débat.
M. Saint-Pierre: C'est un point de vue. C'est simplement que, sur
le plan de l'industrie primaire, si on recherche, en matière de
transformation des richesses, un certain type de politiques, bien sûr,
les investissements étrangers doivent un peu se conformer à cela,
on va les accepter. Exemple: Si on pense qu'il y a intérêt
à développer les mines de fer et si, pour le faire, on
reconnaît que, compte tenu des risques, des marchés ou de ce qu'on
voudra, il est intéressant je ne voudrais pas citer votre chef,
M. Lévesque finalement, d'avoir des compagnies américaines
qui ont été prêtes à transformer les mines de fer
sur la Côte-Nord du Québec, on serait mal vu, en matière
d'investissements étrangers, de refuser à des compagnies
étrangères d'acquérir ces mines de fer. Si, par contre,
dans d'autres secteurs comme celui de l'aluminerie, on tient plus à une
présence québécoise dans le secteur, il me semble qu'il
faudrait être logique et empêcher les étrangers
d'acquérir ce que nous avons déjà. Est-ce que c'est
clair?
M. Morin: C'est plus clair, oui. Ce qui me paraissait bizarre,
c'était que vous mentionniez le domaine primaire par rapport au domaine
secondaire, par rapport au domaine de la transformation. Si j'interprète
correctement la phrase, cela veut dire que la politique, en matière de
richesses naturelles, doit être conforme ou compatible avec la politique
dans le domaine de l'industrie secondaire, l'industrie de la transformation.
Comme cette dernière est loin d'être claire...
M. Saint-Pierre: II va falloir reprendre le texte.
M. Morin: Oui. Au paragraphe 5... Non, le ministre a
déjà répondu en partie aux questions que j'aurais pu
avoir. Il me reste à examiner le cas non plus du "take over", de la
prise de propriété, mais le cas où des investissements
nouveaux sont en cause. Quelle est la politique du ministère de
l'Industrie et du Commerce lorsqu'il s'agit de nouveaux investissements? En
particulier, quelle est l'attitude du ministère à l'égard
de la deuxième partie de la loi dont ce document nous dit qu'elle devait
être promulguée au début de 1975?
M. Saint-Pierre: Le Québec, à une récente
conférence fédérale-provinciale, je pense, a assumé
le leadership de convaincre les autres provinces de s'opposer à la
promulgation immédiate de cette loi. Devant le refus unanime de toutes
les provinces, incluant les provinces du Manitoba, de Colombie-Britannique,
enfin toutes les idéologies représentées dans le Canada,
devant ce refus unanime des provinces sur la promulgation de la loi, M.
Gillespie n'a pas encore promulgué la deuxième partie de la loi.
Notre refus se base, d'une part, sur la complexité que va
représenter l'administration de cette loi lorsqu'elle touche les
nouveaux investissements.
Deuxièmement, nous croyons, qu'en tentant d'établir un
système qui est fort complexe, d'après tous les documents que
nous avons eus, pour éliminer des investissements non désirables,
on puisse, à l'étranger comme au pays, créer quand
même une atmosphère qui ne nous permettra pas d'attirer les
investissements qui pourraient être désirables pour le Canada
même. Par ailleurs, nous déplorons une certaine surenchère
entre les provinces pour des projets donnés, alors qu'on sait qu'une
province tente d'offrir davantage que la province voisine pour attirer un
investisseur. On comprend que, là, il risque d'y avoir une
surenchère au niveau des déclarations de principe des nouveaux
investissements. C'est-à-dire que, dans la prise de possession d'une
compagnie comme Corbeil, on ne pouvait pas la mettre, si on pensait que le
Québec n'y était pas favorable, sur des roulettes et l'envoyer en
Ontario.
Mais dans le cas de nouveaux investissements, ceux-ci n'ont pas les deux
pieds sur terre dans une province donnée. On peut les faire passer d'une
province à l'autre. On comprend qu'il y a un risque de
surenchère, du fait qu'aucune province ne peut réellement se
permettre d'être perçue comme étant opposée aux
investissements étrangers, alors que sa voisine y est plus favorable. Et
là, il risque, au niveau des principes mêmes, d'y avoir une
espèce de surenchère.
M. Morin: Alors, la politique du Québec, telle
qu'entérinée par les autres provinces, si j'ai bien compris,
c'est qu'alors que vous croyez qu'il de-
vrait y avoir un tamisage lorsqu'il s'agit de "takeover", de prise de
possession,lorsqu'il s'agit de nouvelles entreprises, de nouveaux capitaux,
vous pratiqueriez beaucoup plus une politique de porte ouverte.
M. Saint-Pierre: C'est un peu cela, puisque les provinces
disposent déjà, sans avoir de loi, de plus d'un mécanisme
pour rejeter les cas indésirables. Je ne veux pas dire que c'est un cas
indésirable, mais on a donné ce matin, le cas d'Alcoa. On n'avait
pas de loi sur les investissements étrangers, mais l'investissement
d'Alcoa ne s'est pas fait, parce que les gens ont très vite compris
qu'il n'étaient pas les bienvenus. On a d'autres cas je ne
voudrais pas vous donner toute la liste mais plusieurs cas nous arrivent
où on laisse clairement voir aux gens qu'ils ne seront pas les
bienvenus, parce qu'on a l'impression que la province ne retire pas ce qu'elle
devrait recevoir ou retirer d'un investissement étranger.
M. Morin: Est-ce que vous croyez que ce mécanisme est
suffisant...
M. Saini-Pierre: Pour les nouveaux investissements?
M. Morin: ... pour les nouveaux investissements, pour les tamiser
sérieusement?
M. Saint-Pierre: Oui, parce qu'il n'y a pas un investissement
sérieux qui se fait sans avoir j'en ai l'expérience toutes
les semaines au moins, de la part de l'investisseur, un sentiment qu'il
est bienvenu par les autorités provinciales.
M. Morin: Votre collègue, le ministre des Finances semble,
lui, être en faveur d'une porte très largement ouverte, avec le
moins de contrôle possible sur les gros investissements.
M. Saint-Pierre: Dès que la porte est ouverte, le courant
d'air passe. Un peu plus ou un peu moins, cela ne change pas tellement. Je ne
comprends pas... Vous parlez de la...
M. Morin: Non, mais j'essaie de voir, de comprendre la position
du gouvernement. Je vois que le ministre essaie...
M. Saint-Pierre: II n'y a pas de divergence de vues, je
pense.
M. Morin: ... de contrôler, dans une certaine mesure, les
nouveaux investissements par des mécanismes existants, et j'avais
l'impression, à entendre certains propos de M. Garneau, que...
M. Saint-Pierre: Non, cela a dû être tiré hors
contexte, parce qu'il n'y a pas de divergence de vues.
M. Morin: Est-ce que vous allez continuer de vous opposer
à la mise en vigueur de la deuxième partie de la loi?
M. Saint-Pierre: Oui, M. le Président, bien que je doive
reconnaître non pas la faiblesse de notre position, mais une certaine
force du gouvernement fédéral, qui dit: Je dois un peu retarder
l'application de la loi devant ce front commun des provinces, mais, de la
même façon, il me faut admettre que tous les partis politiques
canadiens ont voté à la Chambre des communes pour l'adoption de
cette loi. Donc, j'ai un peu un ordre de tous les partis politiques, sur le
plan canadien, de promulguer la loi au temps opportun, et cela ne peut pas
être remis indéfiniment. Mais ça, c'est une loi
fédérale.
M. Morin: Quelle va être votre attitude le jour où
la deuxième partie va entrer en vigueur?
M. Saint-Pierre: La même que nous avons eue jusqu'ici dans
d'autres secteurs, c'est-à-dire d'exprimer toujours nos réserves
sur les difficultés d'application, mais, une fois que la loi est en
vigueur, tenter d'avoir une position qui favorise les intérêts du
Québec.
M. Morin: Je pense que, pour ce qui est des investissements
étrangers, M. le Président, cela nous éclaire
suffisamment.
On peut peut-être procéder à l'adoption de
l'élément 1.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Cela a
été fait.
M. Morin: S'il l'était, tant mieux. S'il ne l'était
pas, considérons-le comme adopté.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Elément
1.Adopté. Elément 2.
M. Cadieux: II a été adopté cet
après-midi. On avait convenu avec les représentants de
l'Opposition que l'élément était adopté.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Oui, d'accord.
M. Morin: Ce n'est pas ce que mon collègue m'a dit tout
à l'heure. Il m'a dit qu'il y a eu une controverse.
M. Cadieux: Votre collègue a dit que
l'élément 2,était accepté.
M. Saint-Pierre: C'était à propos de
l'élément 1 qu'il y avait une controverse. Pour
l'élément 2, j'ai compris moi-même à 5 heures 40...
C'étaient quelques secondes avant qu'il ne me supplie d'ajourner la
séance à cause de votre absence. Il ne savait plus quoi dire.
M. Morin: Je lui avais demandé de me remplacer au sujet du
dossier de Saint-Félicien, ce que, je pense, il a fait.
M. Saint-Pierre: Oui, mais on avait terminé à 5
heures 45.
M. Morin: Alors, on peut peut-être passer... De toute
façon, l'élément 3, infrastructure d'accueil à
l'industrie, permet, certainement, de parler de beaucoup de choses...
M. Saint-Pierre: Sûrement.
M. Morin:... et, notamment, du projet d'aciérie dans l'Est
du pays.
Le Président (M. Houde, Limoulou): Alors, élément
3.
M. Morin: Oui, considérons l'élément
2...
M. Saint-Pierre: Avant non pas de divaguer, mais de parler sur
l'aciérie, vous me permettrez, pour le bénéfice des
membres de la commission, d'expliquer ce qu'il y a dans le programme 3,
élément 3; Infrastructure d'accueil à l'industrie.
Cet élément regroupe notre direction de l'infrastructure,
le projet fort important PICA-TDM près de l'aéroport Mirabel, les
implications de l'ODEQ en matière d'infrastructure industrielle et la
société Inter-Port de Québec.
On y remarquera, cette année, une réduction du budget,
mais qui est essentiellement causée par une réduction importante
des dépenses de transfert, certaines des dépenses dans le
passé venant à terme.
A la page de droite, on voit une esquisse générale de la
façon dont les sommes que nous demandons, qui s'élèvent
à $9,706,100, seront dépensées. On y retrouve, en
particulier, le programme de stimulation aux commissariats industriels, qui
verra, au 31 mars 1976, 58 commissariats en activité. Nous sommes
à revoir notre programme de financement de ces commissariats, en
particulier, pour développer une formule qui tente à des
regroupements sur le plan régional ou sur des entités plus
grandes.
Le programme des ententes avec le gouvernement fédéral,
déjà signées, prévoit, pour PICA, des sommes fort
importantes que je vous ai indiquées en table de droite.
Il ne faudrait pas sous-estimer le travail que le ministère fait
dans l'approbation des transactions qui touchent les terrains des
municipalités en parcs industriels. On sait les abus auxquels ces ventes
de terrains ont pu donner lieu dans les années 1960 et il est
remarquable depuis quatre ou cinq ans qu'aucun cas de malhonnêteté
ou qu'aucun cas frauduleux n'ait été porté à notre
attention.
La direction a aussi complété 21 études de
développement des parcs industriels. Elle a aidé à
consolider la mise en place de nos commissariats industriels, à
négocier l'entente auxiliaire Canada-Québec.
Dans ses grands traits, en 1975/76, nous prévoyons traiter 360
dossiers dans le cadre de la Loi des fonds industriels, consacrer entre
$600,000 et $700,000 pour la préparation d'une vingtaine d'études
sur la planification des parcs industriels, porter le total des commissariats
industriels à 58, soit l'objectif que le ministère s'était
fixé il y a trois ans et, finalement, l'administration de l'entente
Canada-Québec sur les infrastructures industrielles.
Dans votre cahier, vous trouverez un état du dossier PICA en date
du 17 mars 1975 qui donne le plus de détails possible sur
l'évolution de ce dossier et sur les dépenses qui pourront y
être consenties.
On remarque, au sommaire, que le projet PICA dans Mirabel, touchant un
parc industriel très important, totalise en dollars 1975, une somme de
$33,500,000.
S'il y avait des questions sur le programme 3, élément 3,
cela me ferait plaisir d'y répondre.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Le chef de l'Opposition.
Projet d'aciérie
M. Morin: M. le Président, avant de passer à
l'examen des chiffres, sur lesquels, d'ailleurs, je n'aurai pas tellement de
questions, j'aimerais entretenir le ministre de la question du projet
d'aciérie.
Nous en avons parlé en Chambre à quelques reprises. Il
conviendrait peut-être de faire le point un peu plus à fond. Je
voudrais demander au ministre d'abord s'il a reçu une réponse
à sa lettre du 16 décembre 1974, lettre qu'il adressait à
M. Jamieson, ministre fédéral de l'Expansion économique
régionale. Et s'il a reçu une réponse à sa longue
lettre, pourrait-il nous la communiquer?
M. Saint-Pierre: II y a eu une réponse, M. le
Président. On va tenter de rechercher la lettre, il me fera plaisir de
la rendre publique. Essentiellement, M. Jamieson me disait: Nous n'avons pas
pris parti pour une province ou pour l'autre il me l'a confirmé
encore verbalement récemment nous avons fait un bout de chemin et
maintenant c'est aux provinces intéressées à tenter de
trouver des partenaires privés, ceux qui sont capables de prendre la
décision, d'investir l'équité nécessaire pour
développer le projet, de mettre tout cela ensemble. Comme je l'ai
indiqué en Chambre récemment, le fait qu'on ait vu dans les
journaux financiers la nomination d'un président de la
société en Nouvelle-Ecosse, M. Hinson, et que la charte de la
société ait été octroyée, cela ne veut pas
dire que la Nouvelle-Ecosse va réaliser ce projet quand même
évalué à près de $915 millions comme
investissement. La structure est très facile à faire, c'est une
loi, une charte, des gens qu'on nomme. Nous sommes déjà plus loin
que cela. Je pense qu'on tente de mettre ensemble des partenaires pour cela. Il
y a eu des discussions avec SIDBEC. Nous avons actuellement un groupe de
travail qui examine toutes les implications du pro-jet.
M. Morin: Ce qui a étonné l'Opposition dans ce
dossier, M. le Président, c'est la façon dont, pendant deux ans,
le ministère de l'Expansion économique régionale du
gouvernement fédéral a pu élaborer un projet
considérable de transforma-
tion du minerai de fer en Nouvelle-Ecosse et a certainement, en tout
cas, procédé à des études sérieuses...
M. Saint-Pierre: Dans l'est du Canada.
M. Morin:... de transformation, d'après ce que nous
pouvons savoir, en tout cas, en Nouvelle-Ecosse, de minerai de fer qui, en
définitive, va devoir venir, pour la majeure partie, du Québec.
Est-ce que le ministre ne trouve pas curieux que le gouvernement
fédéral ne soit pas au courant ou semble ne pas être au
courant de la politique de transformation des richesses naturelles du
Québec, au Québec même?
M. Saint-Pierre: II y a plusieurs nuances, M. le
Président, à apporter à ce qui vient d'être
déclaré. La partie principale des études qui ont pu
être faites ne touchait pas la Nouvelle-Ecosse, mais touchait
différents sites de l'est du Canada, deux de ces sites était au
Québec, Gros-Cacouna et Sept-Iles. En passant, rien de cela ne s'est
fait en secret, nous étions au courant du mandat qui avait
été donné aux consultants, nous savions qui faisait
l'étude et quelle était la nature du... Nous avons
été tenus au courant des développements dans ce secteur.
On mentionne le minerai de fer du Québec. Il est faux de dire que c'est
un minerai de fer qui vient exclusivement du Québec. C'est un minerai
qui vient du port de Sept-lles, mais une partie importante de ce minerai peut
venir de la province de Terre-Neuve. Une autre partie qu'on pourrait
mentionner, c'est que, pour mettre ensemble une aciérie, cela ne prend
pas juste du minerai de fer. Cela prend du charbon, qui ne vient pas de la
province de Québec. Il peut venir d'ailleurs.
M. Morin: Cela dépend du procédé.
M. Saint-Pierre: Cela prend du gaz naturel qui peut venir...
Enfin, il y a toute une gamme de produits, mais c'est évident que si le
minerai de fer québécois pouvait se prêter à cela,
si les autres sites... mais je pense que, fondamentalement, ce qui est le plus
important, c'est que la province pourrait mettre ensemble le groupe, le
consortium qui sera prêt à investir. On peut fort bien parler
d'aciérie, il faut trouver des gens qui sont prêts à
investir. A ce sujet, je ne peux m'empêcher d'exprimer ici quand
même, et peut-être qu'elles sont très fondées, les
réserves du président de SIDBEC sur l'opportunité pour la
province de Québec de se lancer dans ce projet. Il est peut-être
très motivé.
M. Gignac s'interroge sur le fait que possiblement nous n'ayons pas les
ressources humaines et les ressources financières après avoir
fait une expansion considérable à SIDBEC dans les mêmes
temps, d'envisager un projet de cette ampleur. D'ailleurs, lorsqu'on parle
à des compagnies comme la STELCO qui est la plus grande compagnie
canadienne, elle nous dira qu'elle ne peut s'enthousiasmer pour le projet, non
pas que le projet ne soit pas rentable en lui-même, mais parce qu'elle en
a elle-même déjà trop avec des projets qu'elle a
actuellement en cours et qu'elle n'a pas un peu la même
réponse que M. Gignac ni les ressources humaines, ni les
ressources financières pour envisager ce projet.
M. Morin: La Nouvelle-Ecosse ne semble pas douter que ce soit
possible de trouver les partenaires, les capitaux et de l'établir dans
la baie de Gabarus.
M. Saint-Pierre: II y a bien des gens qui confondent la
réalité avec les rêves ou qui prennent les rêves pour
des réalités.
M. Morin: Je ne voudrais pes que le ministre se moque...
M. Saint-Pierre: Je ne veux pas me moquer.
M. Morin: ... du gouvernement de la Nouvelle-Ecosse, parce
qu'il...
M. Saint-Pierre: Jamais de ma vie.
M. Morin: ... pourrait découvrir que demain le projet se
réalise effectivement et il serait obligé de ravaler ses
moqueries.
M. Saint-Pierre: Non, j'ai simplement voulu dire au chef de
l'Opposition que ce n'est pas parce qu'on fait des structures qu'on a
nécessairement résolu le problème. Nous ne croyons pas
nous-mêmes que la Nouvelle-Ecosse soit en position pour annoncer demain
matin le projet.
M. Morin: Oui.
M. Saint-Pierre: Cela prend des partenaires.
M. Morin: Je voudrais lire au ministre certains passages de la
lettre à M. Jamieson...
M. Saint-Pierre: C'est moi qui l'ai écrite, je la
connais.
M. Morin: Oui.
M. Saint-Pierre: Vous voulez la lire.
M. Morin: Je voudrais rappeler un ou deux passages au
ministre.
M. Marchand: ... en français.
M. Morin: Ce qui nous inquiète plus encore,
écrivait-il, c'est la quasi exclusivité apparente accordée
à la région de Sidney et l'omniprésence dans la toile de
fond de la compagnie Sisco. Nous ne pouvons nous empêcher de nous
demander ainsi comment le ministère de l'Expansion économique
régionale a pu choisir de façon aussi exclusive de poursuivre
l'étude pour la région de Sydney alors que le rapport sur la
sélection des sites conclut, comme vous le signalez vous-même
dans votre lettre, que les sites examinés arrivaient sur un pied
d'égalité.
Ce n'est donc pas moi qui dis qu'il y a eu nettement l'accent dans les
études faites par le pouvoir fédéral sur une région
de Nouvelle-Ecosse, c'est le ministre lui-même qui le dit dans sa
lettre.
Qu'est-ce qui en est exactement? Je veux dire, est-ce que vraiment le
Québec a été tenu au courant de toutes ces études
au fur et à mesure et est-ce qu'il a été consulté
ou s'il s'est trouvé devant un fait accompli ou quasi un fait accompli?
C'est ce qu'il semble indiquer dans sa lettre.
M. Saint-Pierre: Comme je l'ai mentionné, là
où c'est faux, c'est que vous avez donné l'impression, dans le
début de vos questions sur cela, que dès le départ, le
gouvernement fédéral avait misé sur la Nouvelle-Ecosse. Ce
que je vous avais mentionné, c'est que dans les études,
même celles rendues publiques en décembre I974, les six sites
avaient été menés de front. C'est la dernière
étude seulement où voyant qu'il y avait seulement six sites qui
semblaient comparables, on en a pris un qui était très
près du problème qu'on connaît bien en Nouvelle-Ecosse, la
compagnie Sisco qui accuse des déficits considérables avec un
taux de chômage très élevé et on a poussé
plus à fond les études de rentabilité sur ce site en se
disant que fondamentalement, les mêmes données pouvaient
s'appliquer à d'autres sites ou que si on voulait aller vite, il fallait
faire les mêmes types d'études. Il n'y en a pas plus que cela qui
a été fait.
M. Morin: C'est par hasard qu'on a étudié Sydney
plus avant, si je comprends bien. Mais c'est un hasard dont le ministre s'est
plaint assez amèrement dans cette lettre et nous dit: De fait, la
lecture du rapport donne manifestement l'impression que les jeux sont faits en
faveur de la région de Sydney.
Est-ce que le ministre a lieu de croire que la situation est
changée maintenant et que les jeux ne sont pas faits?
M. Saint-Pierre: En ce qui touche le gouvernement
fédéral, les jeux ne sont pas faits, j'ai eu des rencontres
récentes avec M. Jamieson et on a convenu que le gouvernement
fédéral estime avoir, quant à lui, déposé
une étude qui indique l'intérêt que le secteur privé
ou public pourrait avoir pour une aciérie orientée vers des
marchés d'exportation d'une capacité d'environ 2 millions de
tonnes. Il laisse maintenant au gouvernement du Québec et au
gouvernement de la Nouvelle-Ecosse qui sont les deux gouvernements qui ont
exprimé le plus d'intérêt sur le dossier, d'aller plus loin
dans leurs études. C'est ce que nous faisons actuellement.
Récemment, le gouvernement fédéral a confié
à une firme de Montréal une étude sur l'impact
socio-économique et les implications pour les politiques
gouvernementales d'une aciérie orientée vers des marchés
d'exportation dans l'est du Canada. Cette étude récente dont nous
avons le mandat ici touche tous les sites qui avaient été
identifiés, les six premiers sites. C'est en date du 8 avril I975.
M. Morin: Est-ce que, sur l'équipe de travail qui a fait
les recherches sur les sites, il y avait un ou des représentants du
Québec?
M. Saint-Pierre: Je connais des Québécois qui ont
participé à l'intérieur du mandat de Stelco à
l'élaboration de l'étude. Maintenant, du gouvernement du
Québec, il n'y avait personne, comme il n'y avait personne du
gouvernement fédéral.
Les consultants, Stelco, regardant l'est du Canada, dans un premier
temps, ont perçu six sites qui semblaient présenter des avantages
marqués. Il y avait quand même des critères minimaux qui
devaient être remplis. Par après, on a développé une
analyse des dépenses d'immobilisation et des dépenses
d'exploitation pour les six sites envisagés, compte tenu des distances,
des frais de...
M. Morin: Dans sa lettre, le ministre faisait observer que le
choix, en tout cas, l'idée pouvait se dégager du rapport que la
participation d'un représentant du bureau régional de la
Nouvelle-Ecosse à l'équipe qui a rédigé le rapport
avait contribué à donner au ministre l'impression que le rapport
était peut-être biaisé en faveur de la baie de Gabarus
plutôt que d'un site québécois.
M. Saint-Pierre: Je maintiens cela. Il nous a paru que M. Harper,
qui était du bureau fédéral de Halifax au ministère
de l'Expansion économique régionale, semblait, à notre
sens, plus près de l'étude que pouvait l'être M. Montreuil
du même ministère au Québec. Je n'ai pas porté
d'accusation.
M. Morin: Est-ce que la situation a été
corrigée depuis ou si elle demeure la même?
M. Saint-Pierre: Elle est corrigée en ce sens que c'est
maintenant les provinces, qui, finalement, manient le dossier, chacune d'entre
elles. Nous recherchons des partenaires, la Nouvelle-Ecosse doit en rechercher.
Nous tentons de mettre ensemble un consortium, nous tentons de pousser plus
loin l'étude. Ce n'est pas la peine de vous dire que je n'examine pas
des sites de Gabarus, j'examine Gros Cacouna et Sept-lles et j'imagine qu'en
Nouvelle-Ecosse, on fait la même chose.
M. Morin: Je m'en doute. Maintenant, vous avez tout de même
un atout majeur dans votre jeu. Je me demandais dans quelle mesure vous
utilisez cet atout. Il y a le minerai de fer, quand même, qui se trouve
au Québec. Il en viendra peut-être de Terre-Neuve. Mais je ne
pense pas qu'il en vienne dans les quantités industrielles dont on aura
besoin pour faire marcher une aciérie de cette importance.
Est-ce que le ministre a pleinement utilisé le poids que donne au
gouvernement du Québec la
présence du minerai d'acier en quantité importante au
Québec?
M. Saint-Pierre: Sûrement.
M. Morin: Tout à l'heure, nous avons parlé, en
passant, de la participation de SIDBEC-DOSCO au projet. Est-ce que le ministre
peut nous donner des précisions à la suite de ce qu'il affirmait
en janvier dernier? Il affirmait à ce moment-là qu'il y avait
moyen de réaliser cette participation, moyennant une diversification du
capital-actions de SIDBEC et la formation d'un nouveau "joint venture"
associant SIDBEC à l'industrie privée de l'acier. Est-ce que le
ministre pourrait nous dire ce qu'il en est aujourd'hui de cette
affirmation?
M. Saint-Pierre: Nous avons exploré la situation avec
SIDBEC. Cela revient à ce que nous avons discuté
antérieurement. Si j'étais créditiste et que je pouvais
penser une seconde que l'argent s'imprime, je ne m'inquiéterais pas
d'une capitalisation de $300 millions ou $400 millions qui pourrait être
requise pour le projet.
Mais comme je n'imprime pas l'argent et comme je sais que le
gouvernement a plusieurs priorités, non seulement sur le plan
économique, mais également sur le plan social, sur le plan
culturel et sur d'autres, il faut établir des priorités.
Une des façons de pouvoir avoir une aciérie d'importance,
sans pour autant être obligé de faire une sortie de fonds aussi
importante, aurait pu être de confier à SIDBEC ce nouveau projet
et de diluer quelque peu la part du capital-actions que le gouvernement
détenait dans SIDBEC.
Il n'y a rien de magique que nous soyons à 100% dans SIDBEC. On
pourrait, si on peut se trouver des partenaires appropriés et, si les
études montent, c'est avantageux. Je ne suis pas doctrinaire et je ne
vise pas 50%, parce que c'est inscrit dans mon volume de philosophie, mais, si
on y trouve des avantages, on peut diluer le capital de SIDBEC et, ainsi,
être majoritaire dans une aciérie beaucoup plus importante que
celle que nous avons dans le moment. Mais, si ce n'est pas à notre
avantage... Ce que je n'aurais pas voulu, c'est de ne pas me poser la question,
parce que, si on ne s'était pas posé la question, on risquait de
se retrouver propriétaire à 100% d'une aciérie d'une
capacité de combien, SIDBEC? De I.6 millions de tonnes à
Contrecoeur, après la deuxième phase et, en même temps,
avoir contribué poussé en cela par le chef de l'Opposition
à inviter des étrangers à établir une
aciérie à Sept-lles ou à Gros Ca-couna qui aurait
été en concurrence, dans certains cas rappelons-nous
l'aluminerie avec l'Alcan sûrement, avec SIDBEC.
Nous avons posé la question: N'y a-t-il pas avantage d'examiner
les solutions qui impliqueraient que nous vendions une partie de l'avoir des
actionnaires dans SIDBEC? Si c'était avec des étrangers, bien
sûr, par principe, on resterait majoritaire. Si c'était avec des
Québécois, on pourrait peut-être convenir que c'est 50/50
ou, je ne sais pas.
M. Morin: Oui, mais il y aurait moyen de faire en sorte que ce
"joint venture", SIDBEC, DOSCO et d'autres sociétés, ne
s'applique pas aux activités existantes de SIDBEC-DOSCO, mais s'applique
aux activités, aux nouveaux projets. Est-ce que c'est à cela que
vous songiez?
M. Saint-Pierre: Non, on pensait globalement, parce que je pense
qu'il y a plus de force d'avoir une forte aciérie qui a... Encore un
fois, cela demeure sujet à étude, parce que, de la façon
dont vous le décrivez, si on pense à un "joint venture" dans le
nouveau projet, indépendamment de l'autre, cela demande quand même
des sorties de fonds.
M. Morin: Oui.
M. Saint-Pierre: Si on est à 50%, cela va demander 50% de
$200 millions. Cela fait $100 millions. C'est à peu près...
M. Morin: M. le Président, sur l'aciérie, je pense
que c'est à peu près tout ce que j'ai à dire. Nous
pourrions peut-être passer à un autre dossier.
M. Saint-Pierre: A l'élément 4? Textiles
M. Morin: Non, toujours dans l'élément 3, se
rattachant à la question des textiles. Je pense que cela peut être
assez bref, parce qu'on en a déjà parlé, à
plusieurs reprises. Cet après-midi, je ne sais si le ministre
était à la rencontre entre le gouvernement et la CSD. J'ai eu
l'occasion moi-même de rencontrer les représentants de la CSD, par
la suite.
L'un des problèmes sur lequel ils ont insisté le plus
vivement, cela a été, justement, la question de l'état de
l'industrie du textile, où le chômage augmente à vue
d'oeil. Il était de 8,000, il y a quelques semaines, il approche
maintenant 10,000 personnes, d'après ce que j'ai pu savoir.
Je sais que le ministre a rencontré le ministre
fédéral de l'Industrie et du Commerce, à la suite du
télégramme d'urgence qu'il lui avait fait parvenir, le 2 avril.
J'aimerais demander au ministre s'il peut faire un bilan rapide avec les
conséquences, pour le Québec, des derniers accords signés
par le Canada, en avril et au début du mois de mai, avec le Japon, la
Corée et la Chine, en particulier avec Formose. Est-ce que le ministre a
pu obtenir des modifications aux accords proposés? Est-ce qu'il est
satisfait de ces accords?
M. Saint-Pierre: En fait, c'est dans le sens de ce que nous avons
demandé, bien que, fondamentalement, M. le Président, il ne
faudrait pas se leurrer et penser que, avec la déclaration du 5 mai
1975, de M. Gillespie, tout sera réglé, puisque, l'analyse des
statistiques nous montre que, les importations qui nous affectent
énormément sur le marché canadien, ne sont pas des
importations des pays à bas salaire, comme Hong Kong, T'Ai-Wan ou la
Corée.
C'est essentiellement un accroissement substantiel des importations
venant des pays industrialisés, en particulier les Etats-Unis,
l'Allemagne de l'Ouest, l'Autriche, les pays comme cela.
Ce que nous avons surtout réclamé de M. Gil-lespie,
c'était beaucoup plus des modifications au processus par lequel le
Canada contrôle à la fois les volumes, les quantités, la
qualité, les prix et les pays d'origine de tout ce qui touche le
textile. Il semble que le processus que nous avons au Canada est
extrêmement lent, même avec toute la compétence que les gens
peuvent y mettre. C'est un processus qui nous donne de l'information lorsque le
mal devient presque irréparable ou a été fait. C'est un
processus qui devrait, à notre sens, être substantiellement
modifié, peut-être adapté à des formules comme
celles des Etats-Unis ou avec des ordinateurs ou, enfin, avec des
quantités et des prix moyens des trois derniers mois. On voit
immédiatement lorsqu'il y a des changements subits dans la
situation.
Au problème des textiles, il y a aussi un autre point qu'il
faudrait mentionner. C'est que, vivant dans une économie de
marché, il faut bien savoir que, lorsque, partout dans le monde, les
gens, à cause d'une récession économique aux Etats-Unis,
décident subitement de changer la mode dans le vêtement, par
exemple, le "denim" a grande vigueur dans le moment, il était
très peu en demande il y a quatre ou cinq ans, cela cause des
perturbations au niveau primaire et au niveau secondaire. De la même
façon lorsqu'il y a un déclin de l'achat des consommateurs. Je ne
sais pas ce que le chef de l'Opposition ferait s'il était à la
place du gouvernement fédéral, parce que, fondamentalement, il ne
faut pas nier que c'est cela le problème. Je vais tenter de l'illustrer.
C'est un peu la même chose que si, au lieu de l'industrie du textile,
c'était l'industrie qui pourrait produire du Seven-Up. Tout à
coup, les gens ont décidé de ne plus acheter de Seven-Up.
Qu'est-ce que vous voulez faire? On ne peut pas l'entreposer et on ne peut pas
en faire, continuer d'en produire. C'est cela, les mécanismes
d'ajustement complexes dans une économie de marché. Je rappelle
aussi que, fondamentalement, le problème ne vient pas des pays de
l'Orient. Il vient des pays comme les Etats-Unis. Je pense que, compte tenu des
négociations avec le GATT, compte tenu des possibilités de
représailles dans le secteur du vêtement, le Canada a
peut-être une attitude trop conservatrice, ou pas assez libérale,
mais il préfère être prudent vis-à-vis de ses
transactions avec les Etats-Unis.
M. Morin: Ce qui m'étonne dans ce dossier, je vous
l'avoue, M. le ministre, c'est que l'industrie du textile constitue pour le
Québec un secteur très important. C'est probablement le plus gros
employeur dans le secteur secondaire au Québec. En fait, je pense que le
Québec compte pour 50% de la main-d'oeuvre de l'ensemble du Canada dans
le secteur. Je m'étonne de ce qu'on ait pu être témoin, je
ne veux pas anticiper trop sur les discussions que nous aurons sur te GATT,
mais je m'étonne que la situation ait pu devenir si dramatique. Est-ce
que le gouvernement n'aurait pas pu prévoir un peu que les marchandages
qui se faisaient au GATT pourraient avoir ce type de conséquences pour
l'industrie québécoise?
M. Saint-Pierre: Non, ce n'est pas dû, encore une fois, je
le répète, au marchandage du GATT. D'ailleurs, dans les textiles,
c'est aussi récent que septembre I974, tout allait pour le mieux dans le
meilleur des mondes. Les fabricants avaient de la difficulté à
trouver la main-d'oeuvre pour faire face à la demande. Tout à
coup, surtout alimentée par une mauvaise conjoncture aux Etats-Unis, la
situation s'est détériorée et il y a eu, sur le plan
mondial, une surcapacité de production qui a fait que tous les gens ont
commencé à couper les prix, à inonder les marchés.
Le Canada a dû absorber beaucoup de... Ce que je vous dis, c'est que les
mécanismes actuels au Canada pour l'industrie du textile et je
l'ai dans un télégramme que j'ai envoyé à M.
Gillespie, vous l'avez sans doute les changements brusques dans les prix
des produits, les difficultés pour arriver avec une compilation rapide
des données précisant les importations, la lenteur
caractérisant l'engagement des mesures défensives prévues
par les ententes en vigueur ainsi que la montée dramatique depuis
quelques mois des produits importés dans une période de
décroissance économique mondiale, imposent des conditions
très difficiles aux travailleurs et à l'industrie en
général.
Demain, M. le Président, je pourrai déposer
également une lettre que j'ai transmise au président de la CSD,
qui m'a demandé la position du gouvernement du Québec
vis-à-vis de l'industrie du textile, si on voulait la voir
disparaître?
M. Morin: Oui, j'aimerais beaucoup l'avoir, si le ministre avait
l'amabilité de la déposer.
M. Saint-Pierre: Avec plaisir...
M. Morin: Très bien!
Je crois avoir vu le télégramme du ministre, mais je ne
pense pas l'avoir dans mon dossier. Est-ce qu'il y en a une copie de reste?
M. Saint-Pierre: C'était avant la rencontre.
M, Morin: Oui, c'est le télégramme dont nous avons
parlé, déjà, à quelques reprises. Je remercie le
ministre.
Il reste que le ministre n'est pas sans savoir que le Canada est un des
plus gros importateurs de textiles au monde. Je pense que c'est probablement le
principal importateur. Donc, il me semble qu'on aurait pu...
M. Saint-Pierre: Per capita.
M. Morin: Per capita, c'est ce que je veux dire. Au Canada, c'est
de $28 par habitant, en moyenne; ensuite, on tombe à $16 en Angleterre;
$10 aux Etats-Unis, et, pour la Communauté économique
européenne, $7 par habitant. Donc, ce n'est pas comme s'il n'y
avait pas de la marge pour accorder une certaine protection à
l'entreprise canadienne, ou québécoise, en l'occurrence. Je
m'explique mal que le Québec soit si démuni devant des
événements comme ceux-là, et qu'il en soit réduit
à plaider de façon un peu piteuse devant le ministre
fédéral de l'industrie et du Commerce pour obtenir un semblant
d'intervention.
En fait, si j'ai bien compris le communiqué du ministre à
la suite de la rencontre, le gouvernement fédéral n'a pris aucun
engagement immédiat. C'est bien cela que le communiqué nous dit.
Donc, M. Gillespie ne s'est...
M. Saint-Pierre: L'essentiel de nos demandes portait beaucoup
plus sur une réforme à long terme des mécanismes
prévus pour contrôler les volumes et les prix. Sur ce point, il
s'est engagé à... Je pense que, cette semaine, il y a des
rencontres. Je vois des lettres du 30 avril I975. Il y a eu une rencontre en
avril. Il y en a une autre de prévue prochainement, et je vois ici les
principaux sujets que les représentants du Québec ont mis de
l'avant avec les homologues fédéraux, à long terme.
M. Morin: Oui, mais à long terme. Mais pendant ce
temps-là...
M. Saint-Pierre: Ecoutez! On ne peut pas changer le
mécanisme du jour au lendemain. Ce n'est pas vrai. Ne nous leurrons pas
et ne leurrons pas la population en particulier. Vous me parlez du gouvernement
fédéral, il faut reconnaître que, dans le moment, c'est
lui, et pour très longtemps, qui est responsable de toute la politique
d'importation...
M. Morin: Le ministre a failli glisser... C'est un fait que, dans
le moment, c'est lui, et c'est justement ce qui est triste, c'est que le
Québec...
M. Saint-Pierre: Non, ce n'est pas triste.
M. Morin:... ne peut pas agir, ne peut pas avoir sa propre
politique dans ce domaine.
M. Saint-Pierre: On ne peut pas avoir le gâteau et le
manger en même temps. On est bien content d'avoir le gouvernement
fédéral lorsqu'on reçoit des paiements de
péréquation. On est bien content de payer l'huile à $6.25
le baril, alors que les autres pays la paient $ll.
M. Morin: Voyons! Si le premier ministre préfère la
péréquation à la perception des taxes, par lui-même,
je le laisse à ses goûts, mais je dois constater qu'il se
satisfait de bien peu. Est-ce que, dans le cas du textile, tout de même,
le ministre ne croit pas qu'il y aurait eu lieu d'intervenir de façon
beaucoup plus draconienne, étant donné l'urgence qui se manifeste
dans toute la correspondance, dans les télégrammes qu'il envoie
au ministre, pour finalement revenir avec quoi, avec aucun engagement
précis? Le ministre fédéral lui a tout simplement dit
qu'il ferait ce qu'il pourrait pour obtenir que les pays exportateurs
s'imposent des restrictions volontaires. Si, à long terme, vous ne
comptez que sur les restrictions volontaires, je dois dire que ce n'est pas une
bien grosse protection, parce qu'il y a toutes sortes de façons de
tourner ces "accroires", comme le ministre le sait, d'abord. Il sait que, dans
plusieurs autres domaines où il y a des accords de restriction
volontaire, cela n'a guère fonctionné, parce qu'on fait transiter
les marchandises par d'autres pays souvent, pour envahir le marché de la
même façon.
M. Saint-Pierre: Non, sur ce plan, il y a des
améliorations qui ont été apportées, qui permettent
clairement d'identifier, lorsque le Japon envoie des marchandises en Pologne
pour les renvoyer au Canada; cela est maintenant couvert. On n'a plus de
problème sur cela.
Mais je pense que le chef de l'Opposition conçoit lui-même
que c'est très complexe. Ce n'est pas une chose qui se règle en
24 heures, et je pense que le moins qu'on puisse dire, j'en ai eu le
témoignage, vous pouvez demander à M. Dalpé, c'est que la
position énergique que le gouvernement du Québec a prise
vis-à-vis du gouvernement d'Ottawa, je pense, a réussi à
ébranler la certitude qu'Ottawa avait de bien dominer la situation.
Je pense que maintenant Ottawa est prêt à revoir plusieurs
de ces éléments en matière de politique du textile.
M. Morin: Ce n'est pas ce qui ressort du communiqué, mais
enfin, puisque le ministre nous dit qu'il a ce sentiment, je n'insisterai pas.
Si le ministre nous dit que vraiment il attend des résultats
bientôt... Quand il nous dit à long terme, cela veut dire quand?
Quand pourrait-on avoir un aperçu des mesures fermes que le gouvernement
fédéral compte prendre dans ce domaine?
M. Saint-Pierre: II y a des mesures qui peuvent être prises
la semaine prochaine.
M. Morin: L'inscription sur la liste, c'est déjà
fait.
M. Saint-Pierre: Non. Les surtaxes sur les filaments de
polyester, des choses semblables, sont des choses qui peuvent être prises
la semaine prochaine. La période, d'ailleurs, de 60 jours se termine
prochainement. Maintenant, à plus long terme, nous parlons dans une
perspective que dans douze ou treize mois, nous ayons un nouveau système
et déjà, comme je l'ai mentionné, les discussions sont en
cours.
M. Morin: Ce n'est pas comme si on était devant un
problème qui n'est pas aigu. C'est un problème qui est en train
de devenir dramatique et il n'est pas certain que cette industrie puisse se
remettre de ce qui lui arrive actuellement. C'est pour
cela que je me suis permis, à plusieurs reprises, d'interroger le
ministre en Chambre pour lui suggérer qu'il y avait peut-être lieu
d'adopter des politiques beaucoup plus draconiennes.
M. Saint-Pierre: Comme quoi?
M. Morin: Je pense au contingentement, par exemple.
M. Saint-Pierre: Et qu'arrive-t-il si le lendemain matin les
Etats-Unis décident d'imposer le contingentement pour les
vêtements où la valeur ajoutée est beaucoup plus grande,
où l'emploi est beaucoup plus substantiel et que nous nous voyons
coupés de pouvoir pénétrer...? Vous savez, dans la vie, il
faut accepter toutes les règles du jeu et une des règles, c'est
lorsqu'on touche à des pays comme les Etats-Unis, il faut s'attendre que
le lendemain matin, il y aura quelque chose. Ce ne sont pas des gens qui vont
nous regarder faire et qui ne nous diront rien.
M. Morin: Mais quand on parle de contingentement, on ne parle pas
de faire tomber un rideau et d'empêcher toute importation.
M. Saint-Pierre: Mais on parle de changer le statu quo.
M. Morin: Oui.
M. Saint-Pierre: Sans cela, ça ne veut rien dire. Quand on
change de statu quo et qu'on nous fait plaisir, qu'on protège notre
production, l'inverse est aussi vrai, savoir qu'on va faire du tort à
ceux qui nous font du tort dans le moment. Cela, ce sont les Etats-Unis
d'Amérique, d'autant plus qu'ils ont des mécanismes très
rapides pour réagir à cela. Le lendemain, les Etats-Unis
empêcheront l'exportation de vêtements. C'est quelque chose,
d'après les dernières statistiques je ne sais pas
à peu près $50 millions ou $60 millions par année avec une
valeur ajoutée beaucoup plus grande.
M. Morin: Le ministre parle comme si nous n'étions en face
que des Etats-Unis dans ce domaine.
M. Saint-Pierre: Ce sont essentiellement les Etats-Unis qui sont
responsables. Si j'avais mon spécialiste...
M. Morin: Y a-t-il moyen...
M. Saint-Pierre: Ce sont essentiellement les Etats-Unis qui sont
responsables pour la plupart des secteurs.
M. Morin: Si votre spécialiste n'est pas là ce
soir, on pourrait peut-être avoir une idée demain. Je ne veux pas
bousculer le ministre; mais y aurait-il moyen quand même de
connaître l'origine des textiles et des vêtements aussi, parce
qu'il y a la question du vêtement qui, à l'heure actuelle, cause
des problèmes sur le marché québécois. C'est
possible d'avoir cela?
M. Saint-Pierre: Oui.
M. Morin: Je ne demande pas des quantités...
M. Saint-Pierre: Pas pour demain, mais on peut vous...
pourquoi... Il y a à peu près 540 produits. Pour tous les
produits ou les principaux produits?
M. Morin: Non. Les principaux produits. Cela serait
déjà énorme, notamment les polyesters.
M. Saint-Pierre: En ce qui regarde les principaux produits, nous
vous les donnerons en volume, en livre, les importations au Canada que nous
avions en I973, en I974 et la période correspondante en I972, I973 et
I974 et on verra que, globalement je l'ai vu moi-même de mes
propres yeux il y a des pays comme le Japon, Hong Kong qui ont
essentiellement les mêmes niveaux d'importation en quantité que
nous avions auparavant, même à quelques reprises, c'est moindre,
mais que dans le cas des Etats-Unis, de l'Allemagne de l'Ouest, de l'Autriche,
de la Suisse, cela monte en flèche.
M. Morin: Les Etats-Unis ne sont pas les seuls en cause.
M. Saint-Pierre: Ecoutez, il faut parler...
M. Morin: En tout cas. Si vous pouvez nous donner des chiffres
avec les grandes catégories, cela nous donnera déjà une
idée plus juste, parce que c'est ce que le ministre me répondait
en Chambre encore l'autre jour...
M. Saint-Pierre: C'est la vérité.
M. Morin: Vous venez quand même d'ajouter quelques pays aux
Etats-Unis.
M. Saint-Pierre: Non. Je n'ai jamais dit que c'étaient
exclusivement les Etats-Unis. J'ai dit que ce sont les Etats-Unis qui sont
largement responsables des difficultés que nous avons.
M. Morin: Le ministre a-t-il fait des représentations au
pouvoir fédéral sur les techniques qu'il devrait utiliser? A-t-il
discuté de la possibilité de contingenter quand même? Cette
possibilité a-t-elle été invoquée parce que c'est
une technique dont on se sert lorsqu'une industrie est vraiment dans un
état grave? Je ferai remarquer au ministre que même dans le GATT,
il y a des clauses qui permettent, lorsqu'une industrie est vraiment
menacée...
M. Saint-Pierre: L'article 3.
M. Morin:... d'invoquer la situation de crise, je ne sais plus de
quel article exactement...
M. Saint-Pierre: Articles 3 et 4.
M. Morin: Evidemment, c'est sujet à un examen par les
autorités compétentes.
M. Saint-Pierre: C'est très lent.
M. Morin: Mais il y a moyen d'échapper. Les Etats-Unis
eux-mêmes l'ont fait à l'occasion. Ils n'ont pas
hésité à s'en servir de la clause d'urgence. Est-ce que
vous en avez discuté à tout le moins.
M. Saint-Pierre: Oui.
M. Morin: ...avec le pouvoir fédéral? Et vous avez
évoqué la possibilité de prendre des mesures plus
draconiennes, comme le contingentement, la taxe spéciale à
l'importation, par exemple?
M. Saint-Pierre: Oui.
M. Morin: Aussi. Est-ce que vous avez discuté de la
possibilité de la préinscription des commandes aussi?
M. Saint-Pierre: Oui et dans plusieurs des cas, elle a
été faite. Dans ce communiqué du 5 mai, le ministre
Gillespie a indiqué tous les articles qui étaient
dorénavant placés sur la liste. Dans certains cas il y a la
préinscription des commandes qui a été établie.
C'est dans le secteur du vêtement essentiellement.
M. Morin: Est-ce que vous avez aussi... Allez-y.
Est-ce qu'il a été question aussi, peut-être, d'un
contrôle plus sévère des importations dans le domaine du
textile par l'organisme antidumping, par le tribunal antidumping?
M. Saint-Pierre: Oui.
M. Morin: Est-ce qu'il s'en fait? Est-ce que vous avez pu
constater qu'il y a des cas de dumping?
M. Saint-Pierre: Non. Tout le mécanisme actuel est trop
lent, trop onéreux, il y en a eu quelques cas, mais la preuve doit
être apportée par le fabricant et elle est extrêmement
complexe. Les quelques cas qui ont pu être soumis dans la question des
chemises, dans la question des gants, c'est extrêmement long. Pour avoir
une décision, c'est un an, c'est seize mois, c'est dix-sept mois et
souvent, la conjoncture a changé complètement et le même
manufacturier qui s'était plaint des importations de tel pays, parce
qu'il n'est plus capable de satisfaire à la demande est obligé
d'importer lui-même. Je pense que la preuve est faite que c'est un
mécanisme trop lent. Quand je vous disais que nous réclamions des
mécanismes plus modernes, sensiblement ce/que j'ai cru voir qui existe
aux Etats-Unis où dès la frontière, le bureau des douanes
arrête le textile. L'importateur est obligé de remplir un
questionnaire de trois ou quatre pa- ges où il est obligé de
donner le pays de fabrication, le nom de l'usine où les choses ont
été fabriquées, le destinataire, c'est très
complexe et avant même de permettre l'entrée dans le pays, le
bureau des douanes, par Télex, envoie ces informations dans un
ordinateur qui les absorbe un peu comme les rapports d'impôt et qui
allume un feu rouge si le niveau des importations apparaît trop
élevé, si les prix dépassent de 10% la moyenne ou sont
inférieurs de 10% à la moyenne des trois derniers mois dans ce
produit. Les Etats-Unis ont quelque chose de très complexe. Les
Etats-Unis ne refusent pas, il n'y a pas un contingentement, mais on dit: Mon
cher monsieur, votre marchandise ne peut pas entrer, vous allez remplir une
autre formule et on va essayer de vous aider. Finalement cela prend tellement
de temps que l'importateur prend toutes ses affaires et les ramène dans
le pays d'origine.
M. Morin: Ils sont astucieux, les Etats-Unis... M.
Saint-Pierre: C'est cela.
M. Morin: ... parce qu'ils arrivent à contourner les
règles du GATT et à se protéger malgré le GATT.
M. Saint-Pierre: C'est cela. C'est ce que nous avons
recommandé.
M. Morin: Est-ce que vous avez suggéré au
gouvernement canadien d'agir de la même façon?
M. Saint-Pierre: C'est cela.
M. Morin: Sa réaction, si je comprends bien, a
été négative.
M. Saint-Pierre: C'est cela.
M. Morin: De sorte que l'industrie est dans l'état
où elle se trouve.
M. Saint-Pierre: C'est cela.
M. Morin: Cela ne nous avance pas beaucoup. Est-ce que vous
comptez relancer votre collègue fédéral? Quelles sont les
démarches que vous comptez faire, maintenant que la situation s'aggrave
quasiment de jour en jour.
M. Saint-Pierre: II ne faut pas dramatiser. Elle ne s'aggrave pas
de jour en jour. Nous rencontrerons prochainement les représentants de
l'industrie, des syndicats, de nouveau. Une rencontre est prévue dans
mes bureaux de Montréal et, par la suite, il n'est pas impossible, face
à de nouvelles statistiques, que nous relancions la balle à M.
Gillespie, quitte à tenter de s'adjoindre, cette fois-ci, d'autres
provinces qui peuvent être affectées, notamment l'Ontario.
M. Morin: Le ministre sait sûrement que la
quasi-totalité des quotas fédéraux, puisque c'est une
compétence fédérale, sur les chemises, a
été
levée au cours de I974 et, comme par hasard, le Québec
produit 66%, en gros des chemises fabriquées au Canada.
M. Saint-Pierre: C'est un point trop particulier, je ne le sais
pas.
M. Morin: Est-ce qu'il y aurait moyen que vous vous documentiez?
D'après ce que nous savons, en I974, les quotas, parce qu'il y avait des
quotas sur les chemises, ont été levés et le
résultat, c'est que c'est entré massivement et je suis pas mal
convaincu que c'est une des causes du marasme actuel dans le domaine de la
chemise québécoise.
M. Saint-Pierre: On va vérifier, mais je ne suis pas
certain de cela, parce qu'il me semblait que les chemises et les gants
étaient encore contrôlés très
sévèrement.
M. Morin: Je pense que le ministre pourrait consulter certains de
ses fonctionnaires derrière lui qui ont l'air au courant.
M. Saint-Pierre: Cela a été levé, mais ce
serait malhonnête de ma part de dire que c'est ce qui a causé le
problème.
M. Morin: Donc, il y avait des quotas. M. Saint-Pierre:
Dans les chemises, oui. M. Morin: Dans les chemises.
M. Saint-Pierre: A la suite des démarches entreprises il y
a deux ans et demie.
M. Morin: Maintenant que le ministre sait qu'il y avait des
quotas, qu'ils ont été levés en I974, est-ce qu'il n'y
aurait pas moyen de les... Etant donné qu'il y en avait, c'est qu'il
pourrait y en avoir encore. Est-ce que le ministre pourrait obtenir que ces
quotas soient réétudiés et peut-être
réappliqués?
M. Saint-Pierre: II faudrait avoir la preuve, mais je ne
penserais pas que les chemises causent un problème dans le moment.
M. Morin: Je pense que oui.
M. Saint-Pierre: Non, parce que les cinq points que les
représentants de l'industrie du syndicat avaient demandés au
gouvernement fédéral, en décembre I974, n'incluaient pas
les chemises. Cela incluait bien autre chose, cinq grands articles, mais, pas
les chemises.
Maintenant, on peut vérifier de nouveau, mais, encore là,
ce que je vous dis, c'est que, si on applique le même mécanisme
que celui qui a été appliqué en I972, ça va prendre
18 mois avant de ravoir les quotas. C'est un processus qui est trop lent. C'est
ce qu'on a, avec vigueur, énergie, courage, démontré
à M. Gillespie, mais on ne l'a pas convaincu.
M. Morin: Oui. Quand on n'est pas maître chez soi, c'est...
Passons...
M. Saint-Pierre: C'est vrai que vous n'avez pas convaincu la
population vous non plus.
M. Morin: C'est une question de temps, M. le ministre. Il faut
que les choses évoluent à leur rythme.
M. Marchand: Vous allez avoir la barbe blanche, blanche,
blanche.
M. Morin: Les peuples, c'est comme les individus, il faut
quelquefois mettre les choses en noir sur blanc et c'est ce qui est en train de
se faire tranquillement.
M. Saint-Pierre: Vous visez l'immortalité.
M. Morin: Non, pas l'immortalité, mais de vivre
normalement. M. le Président, à la suite de tout ce que nous
venons de dire, je m'interroge sur l'importance que le gouvernement accorde
vraiment à cette industrie qui est pourtant l'une des plus
considérables du Québec, et certainement, sur le plan de
l'emploi, elle concerne beaucoup de monde. Je voyais que la SDI, qui est tout
de même notre principal instrument d'intervention au niveau de
l'industrie manufacturière, n'a prêté...
M. Saint-Pierre: C'est dans le programme 6.
M. Morin: C'est au sujet du textile.
M. Saint-Pierre: La SDI, c'est le programme 6.
M. Morin: Je vous ai dit qu'il y avait...
M. Saint-Pierre: J'ai de la misère...
M. Morin: ... des sujets qui touchent à plusieurs
programmmes et, si vous voulez, on pourrait y revenir, mais ça touche au
textile. La SDI n'a prêté que $9 millions, depuis qu'elle est en
place, aux industries textiles au Québec sur des prêts totaux qui
excèdent $150 millions.
M. Saint-Pierre: Cela vous surprend?
M. Morin: Je trouve que c'est peu pour une industrie qui est si
importante au point de vue de l'emploi.
M. Saint-Pierre: D'après vous, quel était le
rôle de la SDI? Créer de l'emploi?
M. Morin: C'était certainement d'aider... M.
Saint-Pierre: A l'emploi.
M. Morin: ... à l'expansion d'un certain nombre
d'industries, dont, par exemple, le textile.
M. Saint-Pierre: Non, M. le Président, je suis
très déçu de la réponse et c'était la
grande différence...
M. Morin: Je sais qu'il y a d'autres buts à la SDI,
mais...
M. Saint-Pierre: Le gouvernement fédéral donnait de
l'argent pour créer n'importe quel type d'emploi au Québec. On a
toujours dit qu'on devait s'opposer à ça. Le programme premier de
la SDI n'est pas de créer n'importe quel type d'emploi. C'est de changer
la structure industrielle, c'est-à-dire de favoriser l'emploi dans des
secteurs à haute productivité, à salaire au-dessus de la
moyenne, à perspective de croissance, à perspective
d'exportation. Malheureusement, le textile ne tombe pas dans ça.
L'explication du montant très faible de la SDI, $7 millions sur les $147
millions dont vous m'avez parlé, c'est essentiellement pour ça.
C'est parce que le textile n'est pas capable de se classifier dans le programme
2-A.
Pourquoi? Parce qu'on a déjà trop de gens dans le secteur
des textiles. Par la SDI, on tente d'en avoir plus, dans les secteurs qui
paient de hauts salaires, qui paient de hautes productivités, qui ont
des capacités d'exportation.
M. Morin: Rassurez-vous! Si vous croyez en avoir trop dans le
secteur du textile, les faits sont en train d'en diminuer le nombre de
travailleurs qui peuvent oeuvrer dans ce domaine. Est-ce que le ministre a pris
connaissance des propos de M. Dalpé, selon lesquels, peut-être, il
conviendrait de recycler une partie de la main-d'oeuvre du textile, dans le
domaine de la transformation de l'amiante?
Est-ce que le ministre a une position là-dessus?
M. Saint-Pierre: J'ai répondu en Chambre, il y a à
peine deux jours, sur cette question.
M. Morin: Je sais, mais peut-être que là, on a le
loisir d'approfondir un petit peu. La Chambre n'est pas l'endroit où
l'on peut vraiment approfondir les questions.
M. Saint-Pierre: Vous voulez dire que je ne dois pas vous prendre
au sérieux quand vous posez des questions en Chambre?
M. Morin: Non, mais c'est que j'aimerais bien pouvoir prendre le
ministre au sérieux, quand il me répond.
M. Saint-Pierre: Vous avez posé exactement la même
question il y a deux jours à l'Assemblée nationale. Je vais
répéter si on peut avoir...
M. Cadieux: Relisez le Journal des débats.
M. Saint-Pierre: J'ai dit que, si jamais on pouvait
réussir dans le secteur de l'amiante et l'on fait des efforts
la preuve, lorsqu'on va regarder la SDI, on va voir que Amiante
Québec, à Sherbrooke, a quand même créé des
emplois; il y a eu des investissements.
Mais si on réussit davantage, il m'apparaît qu'il y a des
régions du Québec où une implantation d'une transformation
de l'amiante serait plus appropriée que dans la région que M.
Dalpé mentionne, celle de Victoriaville, que je connais très
bien.
Je pense qu'on est capable de trouver, dans des endroits comme Asbestos,
comme Thetford-Mines... Je pense que c'est là que devraient aller les
usines de transformation de l'amiante.
Je pense que dans une ville comme Victoria-ville, qui a connu quand
même un taux extrêmement fort de croissance de sa population au
cours des dernières années, il est possible de trouver d'autres
types d'industries qui puissent corriger les problèmes actuels qui sont
causés, en partie, par des grèves et, en partie, par la faiblesse
du secteur du vêtement.
M. Morin: M. le Président, c'est un domaine sur lequel on
va certainement devoir revenir assez souvent dans les mois qui viennent, si la
débandade actuelle dans cette industrie continue.
Le ministre, bien sûr, a fait des pressions au niveau
fédéral, mais on doit constater qu'elles ont été
à peu près sans résultat. Je le dis très
sincèrement au ministre, je considère que ce domaine n'est pas
celui où il puisse être le plus fier des performances de son
ministère.
M. Saint-Pierre: Ce n'est pas ce que M. Dalpé m'a dit
aujourd'hui. Il a apprécié énormément les positions
et l'aide que le gouvernement du Québec avait donnée et de
changer...
M. Morin: J'aimerais bien voir M. Dalpé, parce que ce
n'est pas le langage qu'il a tenu tout à l'heure, avec ses
collègues, lorsque je les ai rencontrés. Vraiment, ils sonnaient
la cloche d'alarme dans le domaine du textile. Comme vous le savez, la CSD est
fortement implantée dans ce domaine et elle a raison d'être
inquiète.
On peut peut-être passer à l'uranium enrichi. Nous sommes
toujours à l'infrastructure d'accueil à l'industrie.
M. Saint-Pierre: M. le Président, le ministère que
je dirige n'a eu aucune responsabilité dans le dossier de l'uranium
enrichi.
M. Morin: Est-ce que je pourrais néanmoins rappeler au
ministre qu'il a exprimé des vues sur la question. C'était le 9
décembre 1974. C'était dans la Gazette et on nous dit ceci:
"Saint-Pierre admitted Quebec's plans to sell enriched uranium might conflict
with Federal Government attempts to market its own Candu nuclear reactors which
use natural uranium".
Le ministre a, également, fait d'autres déclarations
portant sur l'uranium enrichi, dans le contexte de l'électricité
de la baie James. Est-ce que je pourrais demander au ministre, étant
donné
que tôt ou tard, ce programme va mettre son ministère en
cause je ne pense pas qu'il puisse admettre d'être laissé
en dehors de ce dossier indéfiniment de faire le point, du point
de vue de son ministère, sur la question de l'uranium enrichi?
M. Saint-Pierre: Du point de vue de mon ministère, M. le
Président, on n'a jamais dépensé un sou sur l'uranium
enrichi. On ne demande pas d'en dépenser cette année. On n'a eu
aucune responsabilité dans le dossier.
Ce n'est pas parce qu'on fait une déclaration un jour... Je pense
que c'est l'évidence même.
On peut me demander ce que je pense du dernier film qu'on peut montrer
à Montréal. Vous n'êtes pas pour me poser des questions sur
les producteurs et combien cela a coûté pour faire le film; ce
sont les crédits du ministère de l'Industrie et du Commerce qu'on
étudie. On n'a rien dans le dossier.
Si jamais le premier ministre décide de nous confier des
responsabilités, on les assumera dans ce secteur, mais on ne les a pas,
dans le moment. Je ne connais rien du dossier. Je ne serais pas capable de
faire le point, malgré toute ma bonne volonté.
M. Morin: Cela règle la question. M. Saint-Pierre:
Merci.
Industrie du meuble
M. Morin: Est-ce qu'on pourrait peut-être parler de
l'industrie du meuble? Puisque nous sommes toujours à l'accueil à
l'industrie, est-ce que le ministre pourrait faire le point sur les projets
d'investissements d'origine arabe dont on a parlé, à l'occasion,
en Chambre? Est-ce que ces projets se sont concrétisés? S'il
s'agit de rumeurs sans fondement, est-ce que le ministre peut nous dire comment
de telles rumeurs ont pu prendre naissance?
M. Saint-Pierre: J'en connais passablement sur le dossier, M. le
Président. Evidemment, c'était complètement faux, et
j'étais ébloui, abasourdi qu'on puisse avoir comme manchette,
dans un journal, quelque chose de tellement faux et qui aurait
été tellement facile à vérifier avant de la donner
en grande manchette. Je pense que si vous vérifiez avec le journaliste
de La Presse, M. Laurier Cloutier, il vous dira comment, à l'occasion,
un journaliste, en toute bonne foi, peut se faire rouler d'une façon
assez incroyable par des gens qui ont d'autres intérêts que le
bien du Québec.
M. Morin: C'était complètement farfelu?
M. Saint-Pierre: Complètement faux, complètement
farfelu. En fait, même en se creusant la tête et en regardant dans
tout le ministère, on a ruéssi à dénicher non pas
un Arabe, mais quelqu'un dont le père était arabe mais qui,
effectivement, est un Anglais. Il nous avait parlé, il y a à peu
près sept mois, pour voir s'il n'y avait pas une possibilité au
Québec, pour lui qui avait une invention dans le secteur de
l'électronique, d'avoir quelqu'un qui, possiblement, dans le domaine du
meuble, pouvait avoir une petite usine à vendre.
M. Morin: Je voudrais vous demander quand même, avant de
quitter le sujet de l'industrie du meuble je prends la réponse du
ministre au pied de la lettre et je n'insiste pas suite aux
allégations...
M. Marchand:... numéro 1...
M. Morin: Je m'excuse. Est-ce qu'il y a un collègue qui
demande la parole?
Le Président (M. Houde, Limoilou): Oui, le
député de Matane.
M. Côté: Posez votre question, je peux attendre.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Dites-la
immédiatement.
Cale sèche des Méchins
M. Côté: Parfait. M. le ministre, dans le programme
3, élément 3, on fait mention de l'entente Canada-Québec
en ce qui concerne l'est du Québec. Il y apparaît un montant de
$200,000 ocncer-nant l'éventuelle cale sèche des Méchins.
J'aurais aimé que le chef de l'Opposition nous parle un peu de cette
région, puisque, il n'y a pas tellement longtemps, il nous a fait le
plaisir de nous rendre visite et de nous décrire comme une région
de la Grèce antique. Je dois vous dire que, seulement son apparition
dans le paysage comme le dit si bien le député de Laurier... Pour
en revenir à la cale sèche des Méchins, j'aimerais savoir,
M. le ministre, où en est rendu le projet et quelles sont les chances
d'implantation au cours de l'année 1975 de ce projet de cale
sèche.
M. Saint-Pierre: Le projet est en bonne voie de
réalisation. C'est une cale sèche de 415 pieds, qui permettra
d'accueillir des navires de 400 pieds de longueur. Le coût de la cale
sèche, M. le Président, au total, sera de $1.195 million, soit
près de $1.2 million. Nous avions déjà une somme de
$80,000, l'an dernier, qui avait servi à faire démarrer des
études. L'OPDQ a fait un transfert de $915,000 de crédits
périmés dans le dernier budget. Nous avons, dans le budget que
nous discutons ce soir, un montant additionnel de $200,000.
M. Côté: L'origine du projet vient évidemment
des chantiers des maritimes qui sont implantés là. A ce que je
sache, la cale sèche elle-même, comme les plans sont
conçus, à l'heure actuelle, rendra-t-elle possible aux bateaux de
la traverse Matane-Godbout, par exemple, aussi bien qu'à
ceux de Rimouski d'aller dans cette cale sèche pour faire des
réparations?
Je me pose certaines questions parce qu'il me semble, de prime abord,
selon ce que j'ai vu, que la cale sèche ne serait pas suffisante.
M. Saint-Pierre: A l'origine, en fait, on a prévu de faire
des plans pour une cale sèche de 250 pieds avec des allonges possibles
de 50 pieds à 300 ou 350 pieds.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Voulez-vous rapprocher
le micro pour l'enregistrement?
M. Saint-Pierre: Excusez-moi. Jusqu'à 300 et
jusqu'à 415 pieds, maintenant, je ne connais pas la dimension du
traversier de Matane. Je pense qu'il était prévu qu'on puisse y
faire des réparations.
M. Côté: Le projet lui-même est de 250 pieds.
Ici, il est rendu à 400 pieds.
M. Saint-Pierre: C'est pour cela qu'on demande une augmentation
de crédits.
M. Côté: Les $200,000 serviraient aux trois sections
de 50 pieds qui compléteraient les 400 pieds. D'accord, à ce
moment...
M. Saint-Pierre: 415 pieds.
M. Côté: 415 pieds, oui, parce qu'il y a une section
de 65 pieds, je pense. A ce moment, cela permettrait au traversier de la
traverse Matane-Godbout, aussi bien que d'autres sur le Saint-Laurent, de faire
des travaux. Où en est-on rendu à l'heure actuelle? Est-ce qu'on
en est rendu dans la phase de demandes d'appels d'offres?
M. Saint-Pierre: On termine les plans d'ingénierie en ce
moment.
M. Côté: Bon, quand prévoyez-vous annoncer
les appels d'offres?
M. Saint-Pierre: Dans les prochaines 6,8,10 semaines selon
l'approbation des crédits.
M. Côté: Dans deux semaines?
M. Saint-Pierre: Les plans vont être finis.
M. Côté: D'accord. Y a-t-il une date de livraison de
la cale sèche ou si...
M. Saint-Pierre: On va déterminer cela avec
l'entrepreneur.
M. Côté: Avec l'entrepreneur.
M. Saint-Pierre: Cela va prendre un an environ...
M. Côté: Cela veut dire qu'à
l'été 1977, en principe, on pourrait s'attendre à ce que
la cale sèche fonctionne. Je dois rendre hommage aux gens de l'ODEQ qui
ont travaillé sur ce projet, parce que je pense que c'est une
infrastructure qui va aider grandement la région de Les
Méchins.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Le député
de Laurier.
M. Marchand: Est-ce que c'est un contrat par soumissions ou
négocié?
M. Saint-Pierre: Soumission en autant qu'on sache,
nécessairement, je pense.
M. Marchand: Nécessairement, aujourd'hui le contrat
négocié est aussi intéressant que le contrat par
soumissions. Il est surtout plus solide, les livraisons aussi.
M. Côté: Est-ce que le député de
Laurier est intéressé à soumissionner?
Le Président (M. Houde, Limoilou): Le chef de
l'Opposition.
M. Morin: M. le Président, j'aimerais poser encore
quelques questions dans ce programme. Après cela, je pense que cela
pourra aller relativement vite. Je pense qu'on pourrait probablement terminer
demain avec un peu de bonne volonté. J'espère que ce sont de
bonnes nouvelles, c'en seront certainement pour moi.
Le Président (M. Houde, Limoilou ): Pour votre
information, nous avons siégé 9 h 19 actuellement.
M. Saint-Pierre: On va collaborer.
M. Morin: C'est bien. L'information est utile, mais est-ce que
vous visiez quelque chose- en disant cela?
Le Président (M. Houde, Limoilou): Je ne vise absolument
rien. C'est pour mettre au courant les membres de la commission.
Société Inter-Port
M. Morin: Bon. Je voudrais entretenir le ministre de la
société Inter-Port. Le ministre se souviendra que nous avons eu
un débat prolongé en Chambre avant l'adoption de cette loi. Je
voudrais savoir un peu ce qu'il en découle depuis que nous l'avons
adoptée. Est-ce que le conseil d'administration de la nouvelle
société a été formé et de qui est-il
formé?
M. Saint-Pierre: Cela a paru dans les journaux d'une façon
assez...
M. Morin: Cela m'a échappé. Je sais qu'il y avait
13 membres...
M. Saint-Pierre: 13 membres.
M. Morin: ... si ma mémoire est bonne.
M. Saint-Pierre: Les 13 membres de la société ont
été nommés il y a quelques temps. Jeudi dernier, ils ont
tenu leur première réunion. Ils ont élu l'exécutif
de la société Inter-Port.
M. Morin: Qui est le président?
M. Saint-Pierre: Vous allez être heureux d'apprendre que
c'est M. Pierre Tremblay, de Québec, qui a été choisi
à l'unanimité à la présidence.
M. Morin: Tiens!
M. Côté: Un bon publicitaire.
Une Voix: II saura sûrement vendre la société
Inter-Port.
M. Morin: Remarquez, je ne savais pas qu'il était dans le
tableau.
M. Saint-Pierre: M. Pierre Côté en est le
vice-président. Le secrétaire, M. Dubé, le maire de
Saint-Romuald.
M. Morin: Bon. Est-ce que le ministre a une idée de la
date effective du début des opérations de la
société?
M. Saint-Pierre: ... oui...
M. Morin: Je veux dire que la paperasse est commencée, le
conseil est en place...
M. Saint-Pierre: II se met à l'oeuvre suivant les
dispositions de la loi votée par l'Assemblée nationale. Cette
année, nous avons prévu au budget pour la société
Inter-Port le montant de $75,000, mais il est prévu des montants
additionnels qui pourraient être disponibles par l'OPDQ, je pense.
M. Morin: Bon. Quand je parle du début des
opérations, je veux dire quels sont les projets? Est-ce que la
société s'est mise au travail pour identifier des projets?
M. Saint-Pierre: Je pense qu'ils commencent actuellement, ayant
tenu leur première réunion. Les responsables commencent dans tout
ceci... Maintenant sur des projets physiques, je ne sais pas si c'est à
cela que le chef...
M. Morin: Je pensais à des projets industriels, par
exemple. Est-ce que le ministre est au courant... Est-ce qu'ils se sont
déjà penchés là-dessus, ou bien si... Quand
vont-ils le faire?
M. Saint-Pierre: C'est un travail qu'ils font actuellement.
M. Morin: Quel est l'avenir du commissariat industriel de la CUQ,
par rapport à la nouvelle société? Parce que, comme on l'a
fait remarquer lors du débat, le ministre s'en souviendra, il y avait un
chevauchement de compétences entre les deux organismes, et l'avenir du
commissariat industriel de la CUQ nous paraissait, en tout cas, gravement
compromis? Est-ce que le ministre est au courant de cela?
M. Saint-Pierre: De l'avenir de la...
M. Morin: Non, du commissariat industriel de la CUQ.
M. Saint-Pierre: C'est évidemment la CUQ qui est
maître de son commissariat industriel, ce n'est pas moi qui va lui dicter
sa ligne de conduite. Je pense que je ne suis pas d'accord avec vous pour dire
qu'il y a opposition dans les deux fonctions ou affrontement. Je pense qu'au
contraire elles peuvent être complémentaires. La
société Inter-Port tente de miser essentiellement sur l'existence
du port pour développer ce complexe qui tiendrait compte des avantages
du port, et ayant un territoire qui touche non seulement la Communauté
urbaine de Québec, mais qui touche également sur la rive sud.
Mais je ne veux pas reprendre le débat. Dans ma lettre à M.
Tremblay, président de la société, j'ai
spécifiquement sollicité de sa part la plus grande collaboration
possible avec le commissariat industriel de la communauté urbaine.
M. Morin: Donc, dans votre esprit, M. le ministre, les deux
organismes peuvent coexister et être utiles chacun dans son domaine.
M. Saint-Pierre: Oui.
M. Morin: Est-ce que je vais beaucoup scandaliser le ministre en
lui apprenant que le maire de Québec estime, comme on l'avait
prévu d'ailleurs, que la société Inter-Port doit
intégrer le commissariat industriel de la CUQ?
M. Saint-Pierre: Cela ne me scandalisera pas. Je n'ai pas dit que
ça ne pouvait pas s'intégrer. J'ai dit que ça peut
coexister, ça peut être complémentaire. Maintenant, si la
société Inter-Port, d'un côté, est prête
à accepter un mandat de la Communauté urbaine pour absorber une
partie des activités du commissariat industriel de la CUQ, et si,
d'autre part, la Communauté urbaine, qui a son propre organisme, est
avec son président et son conseil d'administration, également
prête à faire ce geste, ce n'est pas moi qui vais les en
empêcher.
M. Morin: Vous estimez alors qu'au lieu de tenter d'obtenir une
coordination des deux organismes, cela revient au même qu'elle l'absorbe
ou ne l'absorbe pas. Au ministère de l'Industrie et du Commerce, c'est
kif-kif.
M. Saint-Pierre: Ce n'est pas kif-kif, mais disons que nous
croyons qu'il est possible que chacun puisse exercer ces rôles dans les
fonctions que vous avez mentionnées.
M. Morin: II a été rapporté que le maire de
Québec estime que la société Inter-Port devrait
intégrer complètement le commissariat industriel, ce qui comprend
le personnel, l'actif et le passif de l'organisme, c'est-à-dire
notamment le parc industriel Saint-Augustin, qui passerait à la
société Inter-Port.
Est-ce que ça entre dans les plans ou dans les prévisions
du ministère que les choses se passent comme ça?
M. Saint-Pierre: Enfin, ce n'est ni dans nos plans, ni dans nos
prévisions, ni dans nos désirs secrets, mais ce n'est pas
incompatible que la chose se fasse, et si, tant au niveau de la
société Inter-Port qu'au niveau de la communauté urbaine,
tous les gens sont d'accord sur cela, je n'userai certainement pas de mon
pouvoir d'actionnaire pour empêcher que cela se réalise.
M. Morin: Oui, mais le ministre se souviendra que, pendant le
débat, nous avons dit qu'une chose comme ça était fort
probable, étant donné que les compétences des deux
organismes se chevauchaient.
M. Saint-Pierre: Ce n'est pas ça que vous avez dit.
M. Morin: Le ministre nous rassurait, à ce moment, en nous
disant: mais non, mais non. Il n'y a pas de problèmes. Les deux
organismes peuvent coexister, ils peuvent coordonner leur action. Ce qui va se
passer dans les faits, c'est probablement que l'un des organismes, comme nous
l'avions prévu, va disparaître au profit de l'autre.
M. Saint-Pierre: Ce n'est pas cela que vous nous avez dit.
M. Morin: Va être absorbé, ce qui revient au
même.
M. Saint-Pierre: M. le Président, ce n'est pas cela que
vous nous avez dit dans le débat. Ce que vous nous avez dit dans le
débat, et à cela vous aviez repris les arguments de M. Armand
Trottier, le président de la Communauté urbaine de Québec,
vous nous avez dit que nous n'avions pas besoin de la société
Inter-Port, puisque nous avions déjà un organisme...
M. Morin: Nous avons dit ça aussi, et nous avons
dit...
M. Saint-Pierre: Vous n'aviez pas parlé d'absorber.
M. Morin: ... que nous craignions... M. Saint-Pierre:
Que...
M. Morin: ... que la société Inter-Port rende
inutile le commissariat industriel de la CUQ. Le ministre nous rassurait.
M. Saint-Pierre: Vous avez dit: Le bon travail de la
Communauté urbaine de Québec rend inutile la formation de la
société Interport. Ce n'est pas la même chose. Il y a une
nuance.
M. Morin: Vous pouvez toujours argumenter sur ce que nous avions
dit, mais la mémoire que j'en ai est que nous avions soutenu que,
effectivement, il y avait chevauchement des compétences et qu'il n'y
aurait pas de place pour deux organismes. Le ministre nous a dit: Oui, il y
aura de la place pour les deux organismes...
M. Saint-Pierre: Si les deux organismes veulent bien.
M. Morin: ...et on constate aujourd'hui que l'un va absorber
l'autre.
M. Saint-Pierre: Non. Il y a de la place pour les deux
organismes, si les deux organismes veulent bien occuper chacun le mandat qui
lui est confié par les chartes constitutives. Maintenant, si les deux
organismes trouvent leur intérêt à s'associer, à
confier à l'un, par rapport à l'autre, une partie du mandat, en
ce qui touche la communauté urbaine, je ne vois pas pourquoi on devrait
empêcher cela. J'empêcherais, cependant comme actionnaire, que la
société Inter-Port, qui doit s'occuper de l'ensemble du
Québec métropolitain incluant la rive sud, délègue
une partie trop grande, l'essentiel de son mandat à la communauté
urbaine. Ce n'était pas l'esprit de la loi. Mais l'inverse est cependant
admissible. L'esprit de la loi est qu'il y avait un degré de
collaboration, de coopération pouvant mener à des ententes devant
être signées entre la communauté urbaine et la
société Interport pour que cette dernière absorbe, en tout
ou en partie, certaines des activités.
M. Morin: C'était ce que la CUQ craignait. Le ministre
s'en souvient.
M. Saint-Pierre: Ce n'est pas la CUQ. M. Trottier n'est pas la
CUQ. Parce que si-, dans le moment, elle est prête à faire cela,
il ne faut sûrement pas dire qu'elle le craignait il y a six mois.
M. Morin: Effectivement, elle le craignait. Je sais que le
ministre, chaque fois que nous parlons de la CUQ, nous dit: Non, c'est M.
Trottier, et tous les maires sont d'avis que... En fait, nous savions que ce
n'était pas le cas. Il y a beaucoup de maires qui n'étaient pas
d'accord. Je l'ai signalé dans le débat, d'ailleurs.
M. Saint-Pierre: Je ne partage pas ce point de vue, mais...
M. Morin: Toujours dans le cadre de la société
Inter-Port ou plutôt dans un cadre un peu connexe, je voudrais demander
au ministre ce qu'il est advenu du projet Burroughs.
M. Saint-Pierre: Vous retournez dans l'histoire ancienne.
M. Morin: Burroughs?
M. Saint-Pierre: Les machines à ...?
M. Morin: II était question de l'implantation d'une usine.
Si ma mémoire est bonne, on avait le choix entre la région de
Québec et Winnipeg et je sais que le commissariat industriel de la
Communauté urbaine de Québec a fait des pieds et des mains pour
faire venir cette société dans la région de Québec.
Vous n'avez jamais eu ce dossier?
M. Saint-Pierre: C'est l'ancien gouvernement, je pense.
Depuis...
M. Morin: Non. C'est tout récent. Les dernières
nouvelles que j'en ai remontent à novembre 1974.
M. Saint-Pierre: Quel est le problème? Nous n'aurions pas
collaboré ou quoi?
M. Morin: Je ne sais pas. Je vous le demande. Je vous pose la
question.
M. Saint-Pierre: On a très bien collaboré. En fait,
cela s'est fait avec le conseil économique oui, c'est Burroughs
de la maison du Québec à Chicago et les gens du
commissariat industriel de la Communauté urbaine de Québec ont eu
deux ou trois rencontres avec les gens de Burroughs de même que les gens
de la Communauté urbaine de Montréal le conseil de
promotion économique de la Communauté urbaine de Montréal
de même qu'un troisième commissaire industriel d'une ville
du Québec qui ont frappé à la porte de Burroughs dans une
période de cinq à six mois. Mais Burroughs n'a pris aucune
décision en fait d'investissement, à ma connaissance, dans le
Québec, à ce moment-ci.
M. Morin: Et donc, l'état de ce dossier ne vous est pas
connu.
M. Saint-Pierre: C'est une possibilité comme on en a des
centaines et des centaines.
M. Morin: Très bien. Je pense qu'on peut peut-être
laisser ce domaine...
Le Président (M. Houde, Limoilou): Alors,
l'élément 3...
M. Morin: Un instant ! J'ai encore deux ou trois petites
questions avant l'adoption de l'élément 3. Il s'agit de
l'infrastructure d'accueil nous sommes toujours dans le bon
élément, je. pense pour Gros Cacouna. Serait-il possible
que le ministre dépose une étude dont on a beaucoup parlé,
dont on a même cité des bribes à l'occasion et qui est
l'étude Sintec SWC.
M. Saint-Pierre: SNC?
M. Morin: C'est possible que cela soit SNC.
M. Saint-Pierre: C'est SNC. Cela relève du mi-
nistère des Richesses naturelles. Il faudrait poser la question lors de
l'étude des crédits de ce ministère. Nous n'avons rien eu
à voir avec cette étude.
M. Morin: Est-ce que vous avez eu quoi que ce soit à voir
au projet de Gros Cacouna?
M. Saint-Pierre: Dans quel sens? Le port même, les
déclarations récentes du premier ministre?
M. Morin: Le port, l'infrastructure industrielle, la
possibilité d'un parc industriel adjoignant le port.
M. Saint-Pierre: Oui. Il y a divers comités qui touchent
plusieurs ministères. Nous sommes responsables d'un de ces
comités qui poursuit des études pour le port, pour le vrac solide
alors que le ministère des Richesses naturelles s'occupe du port pour
vrac liquide, qui, de toute évidence, ne sera pas au même endroit.
Enfin, nous sommes un peu le répondant du projet de Havre Champlain.
Nous avons des discussions avec le gouvernement fédéral sur ceci.
Je ne sais pas...
M. Morin: Pour ce qui est du vrac solide, où en sont les
choses? L'étude Sintec-SNC ne portait pas sur le...
M. Saint-Pierre: Non, elle portait sur le vrac liquide.
M. Morin: Bon d'accord. On se renseignera aux Richesses
naturelles à ce sujet. Pour ce qui est du vrac solide, où en sont
les choses?
M. Saint-Pierre: II y a eu l'analyse des documents qui a pu
être soumise depuis quelque temps par la société Havre
Champlain et la prise de position vis-à-vis du gouvernement
fédéral. Nous poursuivons avec le gouvernement
fédéral l'étude de quelques points sur ce dossier, mais je
ne vois pas de divergence de vues, c'est-à-dire la
complémentarité avec le port de Québec qui s'exprime
facilement sur des termes physiques suivant le tirant d'eau et
deuxièmement, la question de la navigabilité en face de Gros
Cacouna. Il y a des questions à préciser sur ce point, les
mouvements des glaces, les courants, les vents. Il y a des points à
parfaire. M. Marchand a esquissé le fait de la Côte-Nord
vis-à-vis de la Côte-Sud. Quant à nous, nous avons
opté pour la Côte-Sud, non pas parce que nous ne croyons pas qu'il
y ait des développements possibles à Sept-lles, mais parce que
nous croyons que le terrain, la géologie de la Côte-Nord,
l'absence d'infrastructure ne permettrait pas de relier un parc pour vrac
solide avec son propre parc industriel, ne nous permettrait pas de le relier
sur le plan logistique avec les voies ferrées, avec les routes du
Québec.
M. Morin: Si c'était sur la Côte-Nord?
M. Saint-Pierre: Si c'était sur la Côte-Nord,
oui. M. Marchand pense que cela vaudrait la peine d'être
examiné. Nous ne le pensons pas, nous.
M. Morin: C'était dans le contexte des bateaux-passeurs de
wagons?
M. Saint-Pierre: Non, c'était dans le contexte
d'établir un chemin de fer entre Sept-lles et Québec sur la
Côte-Nord. Cela nous semblait impratiquable. Il y a peut-être
quelqu'un qui... Le port de Sept-lles a des avantages par rapport au port de
Gros Cacouna, mais il a un désavantage sérieux, quant à
nous, c'est la difficulté de le relier sur le plan logistique avec
l'ensemble de l'infrastructure du Québec. Il y a des réunions
régulièrement. M. Ghislain Girard, directeur de nos bureaux
régionaux, préside ces différents comités qui
regroupent l'OPDQ, le ministère des Transports, le ministère de
l'environnement, le ministère des Affaires municipales, des Richesses
naturelles et des Affaires intergouvernementales.
M. Morin: Dois-je comprendre qu'en ce qui concerne le
gouvernement du Québec, vous avez donné le feu vert au projet de
Havre Champlain?
M. Saint-Pierre: Nous avons donné le feu vert au projet de
Havre Champlain, nous avons indiqué à la compagnie qu'il y a lieu
de préciser avec elle certains des aspects, mais, fondamentalement, nous
avons dit que, de tous les projets susceptibles de faire démarrer
l'activité industrielle dans la Gaspésie ou le Bas du fleuve,
c'est le projet qui offre le plus de chances de succès et qui
mérite notre appui. Je pense que la déclaration du premier
ministre est très claire. Cet appui doit se faire en donnant à ce
port une vocation complémentaire à celle des autres ports du
Saint-Laurent, en particulier Québec.
M. Morin: Ce qui manque maintenant, c'est tout simplement la
décision fédérale.
M. Saint-Pierre: Oui, et plus de parfaire certaines études
qui pourraient simplement confirmer des choses préliminaires qui ont pu
être faites sur la navigabilité...
M. Morin: Les parfaire au Québec ou les parfaire au niveau
fédéral?
M. Saint-Pierre: Non, les parfaire par nous.
M. Morin: Est-ce que ces études sont en route?
M. Saint-Pierre: Elles vont démarrer prochainement. Le 22
mai, il y aura la prochaine séance du comité, il semble qu'il y
aura des décisions prises.
M. Morin: Je m'excuse, quel comité?
M. Saint-Pierre: Le comité que je vous ai mentionné
tantôt dont nous avions la responsabilité, le comité sur le
port de transbordement de vrac solide. Il y a quatre comités, un pour le
vrac liquide, un pour le vrac solide, un pour le port de Québec et un
pour le port de Montréal.
M. Morin: Si je comprends bien, à la prochaine
réunion de ce comité, on va décider de la mise en marche
de ces études, courantologie, les vents, ce que vous avez
mentionné tout à l'heure.
M. Saint-Pierre: Plus d'autres études également
touchant... En fait, c'est une synthèse, il s'agit de sortir les
études qui ont déjà été faites il y a
quelques années, de sortir les données de base et d'ajouter ce
qui manque avec une nouvelle étude.
M. Morin: Vous pensez qu'il y en a pour combien de temps avant
que ces études aboutissent?
M. Saint-Pierre: De sept à huit mois pour les
problèmes de navigation; pour les autres, vous savez, ce sont des
études qui peuvent être assez longues puisqu'il va falloir
sûrement, si jamais le projet démarre avec Havre Champlain... Il y
a toute la question des sondages, la planification, l'aménagement du
territoire dans les terres intérieures, des choses semblables.
M. Morin: Avant que les décisions de mises en marche
interviennent, les décisions définitives de construire, on peut
prévoir quel délai? Approximativement?
M. Saint-Pierre: Fondamentalement... M. Morin: Un an
peut-être?
M. Saint-Pierre: Non, cela ne dépend pas de nous.
Finalement, pour le port lui-même, ce sont des intérêts
privés qui sont sujets à des négociations, ce qui pourrait
impliquer des participations gouvernementales, mais fondamentalement, ce sera
le secteur privé qui va investir les $160 millions o,u les $180 millions
mentionnés. Il y a également l'approbation du gouvernement
fédéral pour le permis d'exploiter un port. Je ne voudrais pas me
faire enfermer dans des dates; je pense que, si le projet est rentable, nous
allons, comme pour tous les projets, aller le plus rapidement possible.
M. Morin: C'est pour avoir une idée du moment où
ça pourrait abouttir.
M. Saint-Pierre: Rien avant un an, d'après moi.
M. Morin: II faut donc que les études que vous avez
entreprises aboutissent, que la décision fédérale soit
prise et qu'on trouve les capitaux nécessaires pour développer le
port en question.
M. Saint-Pierre: Vous allez me faire dire que le projet va
commencer seulement avant la prochaine campagne électorale.
M. Morin: Ce serait une tactique comme une autre. Elle serait
sans doute plus honnête que certaines autres, auxquelles j'ai pu me
heurter dans le passé.
M. Saint-Pierre: Vous vous êtes heurté. M.
Côté: ... visite à Gros Cacouna?
M. Morin: M. le Président, je voyais que le comité
de promotion du port de Gros Cacouna s'est amèrement plaint de l'absence
du leadership du Québec dans ce que le comité appelle le
marchandage politique à Ottawa.
M. Saint-Pierre: Vous parlez du gouvernement
fédéral.
M. Morin: II me parlait du manque de leadership.
M. Saint-Pierre: II y a certaines personnes dans ce comité
de promotion qui confondent des mots dans le dictionnaire. Je ne sais pas qui
écrit leur texte, mais il y a une différence entre prendre des
décisions réfléchies, aller le plus rapidement possible,
et une espèce de précipitation à dire oui à
n'importe quoi qui nous est soumis.
M. Morin: Cela fait pas mal d'années que ce projet existe
et qu'on les remet et qu'on les remet. Vous le savez, je ne sais pas combien il
y a d'années que le havre lui-même a été
aménagé.
M.Côté: Le port lui-même, c'est le
fédéral et pas le provincial.
M. Morin: En tout cas, les études sont en marche. Donc, on
peut s'attendre que tout cela aboutisse dans un délai de quelques
années, à tout le moins.
M. Saint-Pierre: C'est ça.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Le député
de Saint-François.
Région de Sherbrooke
M. Déziel: M. le Président, si vous me permettez,
j'aimerais vous entretenir de l'implantation à Sherbrooke de SW
Industries, Stowe Woodward Industries, qui se spécialisent dans le
recouvrement de rouleaux de machines à pâtes et papiers. M. le
ministre, on sait que, présentement, Uniroyal et BF Goodrich
s'apprêtent à fermer leur division dans ce secteur et, si cette
implantation s'effectuait à Sherbrooke, le ministère de
l'Expansion économique régional pourrait subventionner cette
implantation, même chez nous. Est-ce que le ministre a
présentement des détails à nous fournir sur cette
implantation?
M. Saint-Pierre: Je sais que, pour la région de
Sherbrooke, cette implantation qui semblait quasi certaine
représenterait un élément additionnel dans la croissance
de leur parc industriel au cours de la dernière année.
Cependant, je pense bien qu'il nous faut réfléchir sur le
point que la venue d'une entreprise, dans ce cas-ci, une entreprise
américaine étrangère qui serait aidée par des
subventions, ne viendrait pas tuer ce qui existe déjà et qui
appartient à des Québécois, c'est-à-dire, l'usine
de M. Morin à Farnham.
Au ministère, c'est le même problème que
l'aluminerie. Avant de donner une subvention ou quelque chose, nous voulons
bien nous assurer qu'on ne déplace pas des emplois de Farnham à
Sherbrooke, d'autant plus que, tout ce qu'on ferait, c'est de contribuer, par
une subvention, à tuer l'entreprise existante.
Ceci dit, bien sûr, il y a l'autre côté de la
médaille où il nous faut faire comprendre à M. Morin, de
Farnham, que parce qu'on a dit non au gouvernement fédéral,
l'entreprise ne vient pas à Sherbrooke, cela ne l'empêche pas
d'aller à Pembrooke ou d'aller à Cornwall et de desservir, avec
ses produits, le marché québécois.
C'est cela. Dans le moment, on tente à la fois de voir les
possibilités de croissance de l'entreprise québécoise qui
existe, est-ce qu'elle en est capable? Est-ce qu'elle est capable d'absorber
complètement le marché, au point qu'il n'y aurait pas de place
pour personne au Canada? Ce serait presqu'un monopole, parce que dans le
moment, elles sont trois compagnies et il y en a deux qui se retirent.
Il y a un danger et c'est la situation que nous étudions dans le
moment, que toutes les compagnies à l'est du Canada se sentent mal
à l'aise de n'avoir qu'un seul type qui est capable de les
approvisionner. On pense au cas de grève qui pourrait
complètement les débalancer.
On étudie tout cela et, bien sûr, au lieu d'avoir
l'entreprise établie à Pembroke, on aimerait bien mieux l'avoir
à Sherbrooke. Je pense que le député de
Saint-François est capable de faire comprendre aux gens de Sherbrooke,
qu'il serait malsain, pour le gouvernement du Québec, d'aller
prématurément dans ce dossier et de contribuer, par une
subvention à une entreprise étrangère, à plonger
dans le marasme une entreprise qui existe déjà et qui est capable
de croissance.
Par contre, le député de Saint-François peut
être assuré que si on en vient au point où il semble
inévitable que nous aurons une entreprise à Pembrooke, j'aimerais
mieux la voir à Sherbrooke que là, nous tenterons l'impossible,
avant de prendre la décision.
M. Déziel: Est-ce qu'on peut s'attendre à une
décision à court terme?
M. Saint-Pierre: Je pense que d'ici une semaine, au plus
tard,...
M. Déziel: D'accord.
Le Président (M. Houde, Limoilou): D'autres questions
à l'élément 3?
Projet Hercules
M. Morin: Oui, ce sont les toutes dernières. Je suis
particulièrement heureux de voir que le premier ministre est là,
justement, il pourrait être intéressé par cette
question.
J'allais demander au ministre de l'Industrie et du Commerce ce qu'il est
advenu du projet "Hercule" ou "Hercules"? Est-ce qu'il a été
abandonné définitivement?
M. Saint-Pierre: II n'a pas été abandonné,
M. le Président. Au moment où nous nous parlons, M. Saulnier, le
président de la SDI est avec les cadres supérieurs de la
compagnie à Montréal. La compagnie, à cause d'une
conjoncture d'une part, mais à cause également des
problèmes dans l'industrie de la construction, à cause du climat
très sévère que nous avons eu, avait suspendu la poursuite
des travaux, mais elle entend bien les poursuivre le plus rapidement
possible.
La compagnie également, à cause d'une mauvaise conjoncture
aux Etats-Unis, dans l'ensemble de ces secteurs, a connu, un peu comme les
textiles, elle aussi, les problèmes de liquidité et il y a eu
plusieurs rencontres, soit à New-York, soit au Delaware, soit à
Montréal, entre M. De Coster et d'autres types de mon ministère,
pour tenter d'apporter une correction, puisque l'investissement d'Hercules
représente un peu notre plaque tournante qui aiderait à la fois
d'autres compagnies, comme Union Carbide et Gulf Oil à accroître
leur capacité de production dans le secteur de la
pétrochimie.
Ils ont déjà $38 millions d'investis, c'est assez
difficile d'arrêter; mais le projet, au départ, qui
prévoyait des coûts de $35 millions est maintenant de l'ordre de
$56 millions. C'est toujours à la même capacité, une usine
de grandeur universelle, la première au Canada, 150,000 livres de
polypropylène.
Le Président (M. Houde, Limoilou): L'honorable
député de Beauharnois.
M. Cadieux: M. le ministre, dans un premier temps, il y a plus
d'un an, la compagnie Goodyear annonçait un premier investissement
d'environ $56 millions par dessus l'investissement qui avait déjà
été fait à Valleyfield et on parlait d'une deuxième
phase également.
Est-ce que la conjoncture, dans le domaine de la construction peut
retarder ou est-ce que la compagnie Goodyear a décidé d'aller
à la deuxième phase? Est-ce que les $56 millions, d'après
vous, sont déjà dépensés?
M. Saint-Pierre: Pour la première phase, il faut se
rappeler que c'est un projet qui, au départ, devait aller dans une autre
province que le Québec et qu'avec beaucoup de démarches,
près du 24 décembre de je ne sais pas quelle année, nous
avions réussi à ramener le projet dans la province de
Québec. A l'époque, les cadres supérieurs de la compagnie
avaient fait beaucoup confiance au Québec pour décider de
l'investissement.
Malheureusement, il faudrait dire qu'une ou deux personnes qui
étaient délégués de chantiers, dans les chantiers
de Goodyear ont donné un spectacle comme on n'en avait jamais vu sur le
plan mondial et nous ont fait une très mauvaise réputation.
La deuxième phase, qui aurait produit beaucoup d'emplois dans
votre région, dans des secteurs extrêmement intéressants, a
été, à toutes fins pratiques, annulée, compte tenu
de la très mauvaise expérience que la compagnie a eue dans sa
première phase.
La responsabilité, vous pouvez aller voir avec certains types de
la FTQ qui étaient dans votre région, ce sont ces gens qui nous
ont bloqué un investissement de $75 millions, la création de
2,000 emplois, dans la région de Valleyfield.
M. Cadieux: Vous dites que c'est peut-être
abandonné, mais, est-ce que vous espérez...
M. Saint-Pierre: C'est annulé.
M. Cadieux: Annulé? Est-ce que vous pensez qu'on peut
revenir avec le dossier, justement à cause des lois qui vont être
votées dans le domaine de la construction?
M. Saint-Pierre: Les prochains mois vont nous permettre de le
voir. On va redoubler de vigueur, mais cela montre jusqu'à quel point ce
qu'on a essayé d'obtenir en 1970 qui se caractérise par un mot,
la "confiance", comment c'est un ingrédient qui peut se perdre
rapidement et comment c'est un ingrédient qui est difficile à
obtenir. La confiance, ce sont les deux ou trois délégués
de la FTQ qui ont fait la pluie et le beau temps, qui ont fait du vandalisme,
qui ont fait de l'extorsion, qui ont fait de la violence, leur
responsabilité je suis certain que cela ne les empêche pas
de dormir, ce soir c'est d'avoir empêché Valleyfield
d'avoir $75 millions qui auraient donné du travail à d'autres
travailleurs de la construction, dans votre secteur, plus 2,000 emplois, sur
une base permanente, dans un secteur extrêmement intéressant,
où le Québec s'installait et qui avait des retombées,
puisque, lorsque vous avez une usine qui fabrique les pneus radiaux, bien
sûr, par après, vous avez d'autres usines qui approvisionnent ces
mêmes usines.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Autres questions,
à l'élément 3?
M. Morin: Une dernière, M. le Président, avant que
nous adoptions... A moins que le premier ministre ait des questions à
poser.
M. Bourassa: Non, je n'ai pas de questions, mais c'est pour
sensibiliser le chef de l'Opposition, de manière à
accélérer l'adoption des projets de loi. Le ministre de
l'Industrie et du Commerce vient de signaler deux cas où les
problèmes de la construction ont été déterminants
pour nuire aux investissements éventuels. Je demande au chef de
l'Opposition de tenir compte de cela, éventuellement, quand il
s'agira de voter les projets de loi.
M. Morin: Ce sera certainement un élément qui
entrera en ligne de compte. Ce ne sera peut-être pas le seul, mais ce
sera certainement un élément.
M. Bourassa: D'accord, merci, M. le Président.
M. Morin: Je vois que le ministre travaille déjà
sur les quelques points du rapport Cliche qu'il veut retenir.
M. Bourassa: Non, mais je veux dire ceux sur lesquels le chef de
l'Opposition est sûrement d'accord.
M. Morin: C'est ce que nous verrons. Quand on verra vos projets
de loi par le détail, on pourra en juger. Je ne pense pas que le premier
ministre s'attende de m'arracher des consentements prématurés,
sans que j'aie même vu les projets de loi. Ce serait pour le moins
enfantin de sa part.
M. Bourassa: Non, mais on voit deux cas pratiques de l'importance
pour le gouvernement d'agir d'une façon urgente. C'est qu'il y a
plusieurs milliers d'emplois qui dépendent du climat, dans le domaine de
la construction.
M. Morin: Bien sûr, cela, je pense que c'est
évident. Quand nous aurons, devant nous, les projets de loi, on pourra
voir s'ils répondent aux besoins.
M. Cadieux: Des emplois permanents, non pas des emplois
simplement sur la construction, ce sont des emplois permanents. C'est encore
plus important. Des emplois sur la construction, d'accord, c'est très
important. Il y en aurait peut-être 1,000 qui travailleraient à la
construction, mais ce sont 2,000 emplois permanents qu'on risque de perdre,
à cause du climat, seulement dans une région donnée.
M. Morin: Est-ce que je pourrais demander au ministre, comme
dernière question à l'intérieur de cet
élément 3, ce qu'il en est du parc industriel de Sherbrooke? Je
sais qu'on a fait allusion tout à l'heure à un projet.
M. Saint-Pierre: D'accord, cela va très bien. On peut
sortir la liste. Au parc industriel de Sherbrooke, il y a eu nettement un
déblocage sur le plan manufacturier. Le premier ministre peut
peut-être nous le dire. Il était dans la région, mais il y
a au moins quatorze implantations, depuis que le gouvernement avait
annoncé cette aide spéciale. Vous êtes rendus à 23.
Vous voyez, cela se vend comme des petits pains chauds.
M. Morin: Très bien. Est-ce que vous avez la liste? Est-ce
que c'est un document qui porte les noms?
M. Saint-Pierre: Non. On peut vous dresser la liste de toutes les
compagnies.
M. Morin: Est-ce que c'est possible. M. Saint-Pierre: Oui,
sûrement, avec plaisir. M. Morin: Oui. Pour demain matin, cela...
M. Saint-Pierre: Sûrement.
M. Morin: Est-ce qu'il est possible aussi d'avoir le montant de
l'investissement prévu, quand vous l'avez du moins?
M. Saint-Pierre: Vous voulez le nom de la compagnie, la nature du
projet et le montant de l'investissement?
M. Morin: C'est cela.
M. Saint-Pierre: Avec plaisir.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Elément 3,
adopté?
M. Morin: Elément 3, adopté.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Elément 4:
Conseil et aide au secteur industriel et aux entreprises.
Aide aux secteurs industriels et aux
entreprises
M. Saint-Pierre: M. le Président, voici, dans
l'élément 4, on voit avec des taux de croissance de 146%
où les dépenses passent près de $5 millions à plus
de $12 millions, jusqu'à quel point dans ce secteur très
important de l'aide aux secteurs industriels, nous allons tenter
d'améliorer la qualité de nos services. La page de droite vous
donne la répartition des sommes. On remarque qu'une part importante nous
viendra de l'entente-cadre sur le secteur manufacturier où plus de $6.7
millions sont prévus. Les points peut-être les plus importants, on
voit toute une série d'augmentations d'activités que nous avons
entreprises au cours des dernières années pour améliorer
nos relations avec les secteurs industriels, mieux cerner les problèmes
et mieux être en mesure d'assurer à la fois la relance de certains
secteurs et le dynamisme de certains autres.
Les pages suivantes vous donnent un détail très complet
des subventions qui ont été versées pour l'an dernier.
Elles indiquent un peu plus loin, interventions pour 1974/75, la direction des
services aux entreprises manufacturières, c'est notre ancien service des
PME. On voit que, l'an dernier, il y a plus de 2,321 cas répartis dans
la gestion financière, génie industriel, marketing, fusion et
divers. Ensuite, on voit toute une série de subventions accordées
par cette direction à des organismes sans but lucratif, allant de la
Chambre de commerce à l'aide aux entreprises, aux centres des dirigeants
d'entreprises, la faculté d'adminis-
tration. Ce sont essentiellement des colloques qui ont une portée
économique et où nous croyons que nous devons donner un appui
financier. Puis, on voit les entreprises qui ont bénéficié
d'aide dans différentes industries du Québec. Le chef de
l'Opposition, en consultant cette liste, verra que nous travaillons dans le
secteur économique avec les Québécois, pour les
Québécois et par les Québécois, et que les sommes
données ont servi souvent à faire des études d'expertises
au niveau du marketing, au niveau du génie industriel, au niveau du
coût de revient dans nombre de petites entreprises un peu partout au
Québec, on les mentionne.
M. le Président, dans les bureaux régionaux, plus de 512
dossiers ont été examinés au cours de la dernière
année. Plus de 10,000 interventions ont eu lieu. Ce sont essentiellement
nos gens qui, dans les régions, se dévouent pour faire le trait
d'union entre les entreprises québécoises et le ministère.
Nous avons, par la suite, en annexe, des prévisions, des
réalisations de certains documents d'investissements qui ont pu
être faits. On comprendra, lorsqu'on s'attarde aux dernières
listes, qu'on mentionne ici des montants de $240 millions au niveau des
nouvelles entreprises et $692 millions au niveau des expansions. On voit
d'ailleurs pourquoi, en regardant les statistiques officielles je suis
certain que le chef de l'Opposition a dû être frappé
le secteur manufacturier québécois, qui se voyait donner des
pronostics très sombres dans les années 1966/67, qui voyait
effectivement son nombre total d'employés diminuer année
après année, a connu une très vigoureuse reprise au cours
des dernières années, particulièrement l'an dernier
où globalement, je pense que c'est 30,000 nouveaux emplois que nous
avons eus seulement dans le secteur manufacturier.
S'il y avait des questions, cela me ferait plaisir d'y
répondre.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Le chef de
l'Opposition.
Société Tricofil
M. Morin: M. le Président, j'aurais une question portant
sur la subvention qui a été accordée il y a quelque temps
au syndicat des travailleurs du textile ou Tricofil pour la réouverture
de l'usine Regent Knitting. Je crois qu'il s'agissait ici, on indique un
montant global de $51,000 de deux subventions distinctes pour un total
de $51,000. Est-ce que je pourrais demander au ministre comment la suite du
financement de la société Tricofil va être
organisée? Est-ce que son ministère a reçu de nouvelles
demandes de la société Tricofil? Est-ce qu'il a été
en contact avec cette société pour le financement de ses
travaux?
M. Saint-Pierre: Le ministère de l'Industrie et du
Commerce a assisté, puisque c'était bien requis, les gens de
Tricofil, pour la préparation d'un dossier, et les gens de la FTQ, pour
un dossier un peu étoffé, puisque les premiers qu'on nous avait
donnés, je pense, n'étaient pas en mesure de satisfaire les
exigences de la SDI. Je pense que, dans Tricofil, M. le Président, on
voit que le gouvernement n'est pas doctrinaire. Il s'adapte à bien des
situations, et encore là, il tente de travailler. On ne veut pas leurrer
les gens. Dans l'expérience de Tricofil, si on reportait à plus
tard la mise à pied de tous les travailleurs, c'est une
expérience... Il ne faudrait pas faire vivre d'espérance les gens
pour après, les jeter dans la misère. Mais nous, tant que nous
verrons des espoirs de passer dans la période difficile, la
période de formation, nous allons donner tout notre appui, comme nous
l'avons fait, depuis septembre dernier, tant dans des études
préliminaires que dans les $51,000, geste très exceptionnel qu'on
ne fait jamais d'habitude, que nous avons payés pour le loyer des
entreprises. Non, c'est très sérieux. Je pense que, si on avait
appliqué nos programmes réguliers, Tricofil n'existerait pas,
aujourd'hui. C'est parce qu'on a fait un cas d'exception. Maintenant, la
SDI...
M. Morin: ... demande bien spéciale aussi, que le
ministre...
M. Saint-Pierre: Oui, auquel nous apportons notre
contribution...
M. Morin: ... je suis sûr, en apprécie toute la
portée.
M. Bourassa: Comme TEMBEC et Cabano.
M. Saint-Pierre: Mais on aime bien, comme mentionne le premier
ministre, dans ces projets, être assuré qu'on ne leurre personne,
en leur faisant croire que deux plus deux peuvent égaler cinq. Ce n'est
jamais notre cas. Je pense que Cabano a été un succès.
TEMBEC a été un succès. Nous allons, aussi longtemps que
c'est possible, travailler avec Tricofil, si nous avons des chances de
succès. D'ailleurs, la SDI a fait une offre tout à fait
exceptionnelle aux gens de Tricofil, c'est-à-dire, pour chaque montant
d'argent qui serait obtenu de la FTQ, des syndicats, de la population, de tout,
la SDI accepte de mettre un montant équivalent, qui n'est absolument pas
protégé, puisque la compagnie n'a pas d'actif, n'a rien. Je pense
que là...
M. Morin: Sous forme de prêt...
M. Saint-Pierre: Non, pas sous forme de prêt, mais sur
débentures, non garanties non convertibles. Non, rien, en fait.
M. Morin: Est-ce qu'il n'a pas été question que la
SGF entre dans le tableau?
M. Saint-Pierre: Non, la question a été
posée à l'assemblée annuelle de la SGF, et le
président
de Lasalle Tricot a clairement indiqué que c'est dans des champs
séparés, que Lasalle Tricot, qui fait des profits cette
année, n'a malheureusement pas l'expertise pour absorber une
difficulté additionnelle.
M. Morin: M. le Président, nous sommes prêts
à accepter l'élément 4.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Elément 4,
adopté. Programme 3, adopté. Programme 4: Centre de recherche
industrielle du Québec.
M. Saint-Pierre: Comme M. Rivest est ici, est-ce qu'on pourrait
peut-être passer à la division du commerce, parce que le CRIQ et
M. Saulnier de la SDI seront ici demain matin. On laisserait les programmes 4,
5, et 6 de côté...
M. Morin: Les programmes 4, 5, 6 de côté.
M. Saint-Pierre:... pour passer au programme 7, puisque les
personnes sont ici, alors que dans l'autre cas, ils seront...
Le Président (M. Houde, Limoilou): Programme 7: Services aux
établissements commerciaux.
M. Morin: Le programme 7, ça peut être très
expéditif, M. le Président. Nous n'avons pas de questions
particulières.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Programme 7 adopté.
M. Morin: Je regrette de décevoir le fonctionnaire qui se
préparait à renseigner le ministre sur ce qui se passe dans son
ministère, mais ce ne sera pas nécessaire.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Est-ce qu'on peut revenir au
programme 4?
M. Morin: La pêche maritime, M. le Président, s'il
était possible d'attendre à demain matin...
M. Saint-Pierre: On pourra le faire.
M. Morin: ... parce que le dossier de l'Opposition n'est pas tout
à fait prêt.
M. Saint-Pierre: Peut-être qu'on pourrait prendre, M. le
Président, sans trop bousculer les programmes 9 et 10.
...découragés un peu, parce qu'au rythme où cela allait,
les gens du bureau de la statistique étaient ici depuis deux jours. Mais
ils seront ici demain matin, malheureusement. Je ne sais pas, mais il y a
peut-être passablement de questions auxquelles je peux répondre,
si vous voulez.
Peut-être peut-on passer au programme 10. Si on a le temps, on
prendra le programme 9, M. le Président?
Le Président (M. Houde, Limoilou): Programme 10:
Normalisation et spécifications.
M. Morin: Un instant!
Normalisation et spécifications
M. Saint-Pierre: Le montant des coûts de croissance de
I4%... Nous avons donné un peu la production, un tableau comparatif de
la production, du bureau de la normalisation, essentiellement des normes
techniques, des copies expédiées. On voit quand même des
prévisions, alors qu'en 1970/71, il y a eu expédition de 73,000
normes par an, cette année, nous sommes à plus de 335,000 normes.
Ce sont des normes qui tentent d'aider les manufacturiers dans nombre de
secteurs.
M. Morin: Le ministre a-t-il mentionné le nombre de
nouvelles normes en 1974/75?
M. Saint-Pierre: II y a eu 47 nouvelles normes en 1974/75. C'est
un fléchissement par rapport à nos performances
antérieures. On m'informe que c'est dû à une période
de temps où il y avait des difficultés de recrutement de
spécialistes dans ce secteur, ce qui n'était quand même pas
facile. C'est M. Jacques Lapalme qui est directeur de ce service.
M. Morin: Y a-t-il des collègues qui veulent poser des
questions? Sinon, je voudrais demander au ministre quel sera le rôle de
ce service dans le cadre de la nouvelle politique d'achat?
M. Saint-Pierre: Puisqu'un des aspects de la politique d'achat...
Il y a un document. L'avez-vous?
M. Morin: Montrez pour voir. Non. Je ne crois pas l'avoir.
M. Saint-Pierre: On va vous le donner. M. Morin: C'est
possible?
M. Saint-Pierre: On n'a pas de secrets pour vous.
M. Morin: Je me réjouis de la confiance que le ministre me
témoigne.
M. Saint-Pierre: Mais, comme une partie de l'aspect de la
politique d'achat implique l'utilisation de normes pour favoriser l'achat de
produits québécois, le service pourrait avoir des implications
dans cela, bien qu'effectivement la plupart de ces tâches toucheront
d'autres ministères et, en particulier, d'autres... Peut-être que,
sur la politique d'achat, je pourrais demander à M. Jacques Plourde, qui
n'est pas du service de normalisation, mais qui est responsable du service aux
entreprises, de nous faire le point sur le dossier.
M. Morin: Volontiers, oui. Et s'il peut, en passant, nous parler
du rôle du service de normalisation.
M. Saint-Pierre: A la suite des documents qui ont
été déposés à l'Assemblée nationale,
qui constituaient le résultat de l'enquête ordonnée par
l'arrêté en conseil 342, au ministère, nous avons
préparé une proposition dite proposition pour une politique
d'achat du gouvernement du Québec, dans laquelle nous
énonçons quatre objectifs qui sont les suivants:
Le premier, c'est que le pouvoir d'achat dont disposent les instances
publiques et parapubli-ques soit accessible en tout temps à toutes les
entreprises manufacturières du Québec selon la gamme des produits
et de leur fabrication. Le deuxième objectif est que, sans compromettre
ni la sécurité publique, ni le bon fonctionnement des
équipements, tous plans et devis doivent être
rédigés de façon à rendre admissibles le ou les
produits manufacturés au Québec. Le troisième objectif est
que le fardeau de la preuve d'égalité ou de
supériorité d'un produit spécifié appartienne au
producteur non-québécois. Le quatrième est que, par
exception et à partir d'un dossier bien documenté, des mesures
puissent être prises pour encourager de nouvelles initiatives dans la
fabrication d'un produit en demande croissante ou d'un nouveau produit,
innovation, soit pour stimuler l'expansion d'une entreprise du Québec ou
en encourager le démarrage et que le tout soit rendu public.
Parmi les moyens, c'est là que nous verrons le rôle du
Bureau de normalisation du Québec, le premier concerne surtout les
amendements aux arrêtés en conseil 1042 et assimilés, afin
qu'ils permettent le respect intégral des objectifs déjà
mentionnés et ce par tous les ministères du gouvernement du
Québec et leurs instances décentralisées. Le
deuxième moyen, c'est la publication, par le ministère de
l'Industrie et du Commerce, en collaboration avec nos manufacturiers
québécois, d'un index de tous leurs produits. Le troisième
moyen est un appui à l'industrie du Québec,
particulièrement les petites et moyennes entreprises, par une aide
gouvernementale, aux frais de publication d'un catalogue commercial de leurs
produits ainsi que de leurs spécifications. Le quatrième, c'est
la compilation systématique et centralisée des besoins et la
publication périodique de l'information concernant les
approvisionnements. Le cinquième, c'est la création d'un
comité permanent pour l'étude de cas spécifiques, lequel
serait appuyé par une équipe d'experts tels que le Centre de
recherche industrielle du Québec et le Bureau de normalisation du
Québec. Le sixième, c'est l'émission de guides traitant de
systèmes de gestion des approvisionnements, de codification, de
spécification et de normalisation. Le BNQ apparaît
particulièrement aux moyens proposés à 5 et à 6,
tout en contribuant aux moyens 2, 3 et 4. Pour expliciter les mécanismes
que nous avons l'intention de mettre en oeuvre pour articuler cette politique
d'achat, nous avons ici l'esquisse d'un schéma, un cheminement
d'activités par lequel on indique que deux groupes de travail seront
formés, l'un interne au ministère pour évaluer les moyens
tels que définis dans notre politique, les moyens 2, 3, 4, 5, 6, en
particulier, définir les besoins que vont créer ces moyens et les
échéanciers pour les réaliser. Un autre groupe de travail,
qui sera interministériel, impliquera les principaux ministères
clients, les Affaires sociales, l'Education, les Affaires municipales, les
Travaux publics et Approvisionnement et le ministère des Finances pour
évaluer si les règlements actuels que sont les
arrêtés en conseil 1042 et assimilés peuvent être
amendés pour rejoindre non seulement les ministères et leurs
instances décentralisées, mais aussi les architectes et
ingénieurs-conseils qui travaillent pour ces instances ainsi que les
entrepreneurs généraux et sous-traitants et finalement le
manufacturier qui fournit le matériel.
Est-ce que vous arrêtez au ministère...
Non, nous allons jusqu'aux instances décentralisées.
Et si ces règlements ne peuvent pas lier tout ce monde, il faudra
peut-être penser à une loi-cadre et ce groupe de travail sera
chargé d'en définir le contenu.
M. Morin: Est-ce que ce schéma, nous pouvons en obtenir un
exemplaire, si possible?
M. Saint-Pierre: Sûrement, avec plaisir. M. Morin:
De même que ce document.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Cela ira à
demain matin, parce que le service des photocopies ne fonctionne pas à
cette heure.
M. Saint-Pierre: C'est juste, n'oubliez pas le premier mot.
M. Morin: Qui est...
M. Saint-Pierre: Proposition d'une politique d'achat.
M. Morin: Non, je vais en tenir compte. Est-ce que je pourrais
demander au ministre pour que nous ayons les idées claires sur cette
question, pourquoi le ministère a exclu la principale suggestion ou
recommandation du comité d'étude Pa-quin qui était la
création d'un ministère des services des approvisionnements?
M. Saint-Pierre: Au contraire, M. le Président, il y a eu
un projet de loi après le dépôt du rapport Paquin qui a
créé justement un ministère des services et de
l'approvisionnement et qui a impliqué la mutation du service complet, du
service général des achats du ministère de l'Industrie et
du Commerce à ce nouveau ministère. Nous sommes les premiers...
tout ce qui touche les structures qu'on retrouvait dans le rapport sur les
politiques d'achat, tout cela a déjà été fait,
c'est beaucoup plus facile de faire les structures que faire la politique.
M. Morin: Oui, bien sûr. Mais est-ce que le ministre peut
nous dire quand nous allons avoir ce projet de loi entre les mains? La
création de ce ministère?
M. Saint-Pierre: II est fait. Le ministère de
l'Approvisionnement actuellement, anciennement, c'était le
ministère des Travaux publics et si vous regardez la loi constitutive du
ministère, on a englobé le Service général des
achats et on a élargi la fonction de service des travaux publics pour
toucher l'approvisionnement et on s'est inspiré du rapport Paquin.
M. Morin: Vous avez donc suivi la recommandation sur ce plan?
M. Saint-Pierre: Oui.
M. Morin: Parce qu'il me semble avoir lu que ce n'était
pas l'intention du gouvernement de créer un tel ministère. C'est
encore tout récent, ça date du 27 mars 1975.
M. Saint-Pierre: Qui a dit ça?
M. Morin: C'était sous la signature de Gilles Lesage dans
le Devoir.
M. Saint-Pierre: Le ministère existe, il y a eu une loi de
l'Assemblée nationale qui a été adoptée avant que
vous soyez député, c'était M. Pinard qui l'a
pilotée et qui a créé le ministère de
l'Approvisionnement. L'ancien ministère des Travaux publics s'appelle
aujourd'hui Travaux publics et Approvisionnement. Justement, on a pris le
Service général des achats, on l'a déplacé
là et on a même inséré dans le mandat...
M. Morin: On a ajouté approvisionnement à travaux
publics.
M. Saint-Pierre: Oui, mais on a ajouté toute la fonction
qui était recommandée dans le rapport Paquin.
M. Morin: Je vais demander maintenant au ministre si la politique
d'achat vigoureuse et susceptible d'avoir des retombées
économiques significatives devait être appliquée par le
ministère de l'Industrie et du Commerce, s'il n'y aurait pas danger
qu'elle ne soit jamais véritablement appliquée puisque le
ministère sera forcément soumis à des pressions
divergentes?
Par exemple, il est bien certain qu'une telle politique ne fera
peut-être pas l'affaire de plusieurs intérêts dans
l'industrie, alors que le ministre doit forcément conserver des
relations de confiance avec l'industrie.
Est-ce qu'on ne risque pas de se retrouver avec un ministre de
l'Industrie inefficace et une politique d'achat également
inefficace?
M. Saint-Pierre: M. le Président, tout au long du
débat, on a montré que ceux que nous servons, ce sont les 6
millions de Québécois, peu importe si un secteur industriel ou un
lobby quelconque n'aime pas ce que nous faisons. Je ne vois aucun danger dans
ce que vous soulevez. J'ai les mains très libres.
M. Morin: Est-ce que les collègues ont des questions, M.
le Président?
M. Saint-Pierre: C'est plutôt au ministère de
l'Approvisionnement, maintenant. Sur le plan de la politique d'achat, elle sera
proposée au gouvernement par le ministère de l'Industrie et du
Commerce. Mais elle sera mise en application, en ce qui touche son aspect
d'approvisionnement, par le ministère des Travaux publics et de
l'Approvisionnement.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Programme 6,
adopté?
M. Morin: Un instant, M. le Président. Je voudrais
demander au ministre où en est le projet de GM, les autobus GM?
M. Saint-Pierre: Les autobus GM?
M. Morin: Oui.
M. Saint-Pierre: General Motors?
M. Morin: Bien sûr.
M. Saint-Pierre: A Saint-Laurent?
M. Morin: Oui, mais où en est ce projet?
M. Saint-Pierre: Ils font des autobus.
M. Morin: Par rapport à la politique d'achat du
gouvernement.
M. Saint-Pierre: Avant, il n'y avait pas de fabrication d'autobus
au Québec; maintenant, il y a des fabrications d'autobus.
M. Morin: II est en marche, mais où en est le projet?
Est-ce que la fabrication est commencée?
M.Saint-Pierre: Sûrement. Cela fait longtemps. Il y a eu
des livraisons d'autobus; il y a des produits finis qui sont sortis de
là.
M. Morin: Est-ce que le ministre a une idée du nombre
d'autobus qui ont déjà été produits par
l'usine?
M. Saint-Pierre: Non, mais c'est un chiffre facile à
savoir. Peut-être même qu'en donnant un coup de
téléphone, demain matin, on va vous donner cela.
M. Morin: Oui.
M. Saint-Pierre: C'est à la communauté ur-
baine de Montréal. Il y avait combien de personnes qui
travaillaient là, à peu près? A peu près 250,
quelque chose comme cela?
Il y avait 250 personnes, à Saint-Laurent.
M. Morin: C'étaient des autobus subventionnés. Je
ne sais pas si, tout à l'heure, nous avons passé, dans la liste,
la subvention qui a été versée...
M. Saint-Pierre: Elle est versée par le ministère
des Transports.
M. Morin: Par le ministère des Transports. M.
Saint-Pierre: Aux communautés urbaines.
M. Morin: M. le Président, je pense qu'on peut adopter le
programme 10.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Programme 10,
adopté.
M. Saint-Pierre: Pour ne pas nous mêler, M. le
Président, demain, il nous resterait les programmes 4, 5, 6. Est-ce que,
sur le plan des statistiques, vous avez beaucoup de questions?
M. Morin: Les programmes 4, 5, 6, 8 et 9. Pour les statistiques,
le programme 9, non, il n'y aura pas tellement de questions.
M. Saint-Pierre: On n'a pas le temps de les passer ce soir?
M. Morin: Non, je ne pense pas, ce n'est pas à ce
point-là, quand même.
Le Président (M. Houde, Limoilou): La commission ajourne
ses travaux à demain, 10 h 30 ou 10 h 45, immédiatement
après la période des questions.
(Fin de la séance à 22 h 56)